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(Dix heures quarante minutes)
Le Président (M. Lafrance): Bonjour à tous. Je
constate que nous avons le quorum et j'aimerais donc déclarer cette 28e
séance de travail ouverte en rappelant le mandat de notre commission,
qui est de procéder à l'étude détaillée du
projet de loi 125, Code civil du Québec. Mme la secrétaire,
est-ce que nous avons des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président, nous avons
deux remplacements: Mme Bleau (Groulx) est remplacée par Mme Oionne
(Kamouraska-Témiscouata) et M. Hamel . (Sherbrooke) est remplacé
par M. Tremblay (Rimouski).
Le Président (M. Lafrance): Merci. Je vous rappelle
l'horaire pour ce matin. Nous avons convenu de siéger jusqu'à 12
h 30. Je pense que nous avons convenu ce matin de nous référer au
livre cinquième, Des obligations.
M. Rémillard: Voulez-vous, M. le Président, appeler
chaque article en suspens, et on va vous dire si on peut les discuter ou les
laisser encore suspendus pour quelque temps.
Articles en suspens Des obligations
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Le
premier article qui avait été laissé en suspens dans ce
livre cinquième, au chapitre premier, Dispositions
générales, aucun. Au chapitre deuxième, Du contrat,
l'article 1376. J'appelle l'article 1376.
M. Rémillard: On le laisse en suspens, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): Vous le laissez en suspens.
L'article suivant...
Mme Harel: M. le Président...
Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: À moins que je le fasse venir de mon bureau,
comme je n'avais pas prévu qu'on commençait par les obligations,
je n'ai pas le livre des commentaires. Est-ce qu'il y aurait un livre des
commentaires sur les obligations?
Le Président (M. Lafrance): Oui, certainement.
Mme Harel: Merci.
Le Président (M. Lafrance): L'article suivant qui avait
été laissé en suspens est le 1381.
M. Rémillard: II est encore en suspens, M. le
Président.
M. Masse (Claude): M. le Président...
Le Président (M. Lafrance): Dans ce même
chapitre...
M. Masse: ...je crois comprendre qu'on maintient en suspens
l'article 3076.
Le Président (M. Lafrance): C'est exact, oui, de
même que l'article 1381 est laissé en suspens. L'article suivant
qui avait été laissé en suspens est le 1455.
M. Rémillard: Non. M. le Président, est-ce que vous
pouvez vérifier si on n'a pas aussi l'article 1402.1 sur lequel on
devrait revenir?
Le Président (M. Lafrance): Oui.
M. Rémillard: II n'aurait pas été
présenté.
Le Président (M. Lafrance): J'ai soulevé ce point,
justement, au secrétariat ce matin avant que nous reprenions nos
travaux, et j'avais une note: 1402.1 est laissé en suspens, mais c'est
un article qui n'a jamais été présenté, un nouvel
article.
M. Rémillard: Alors, je suis très content, M. le
Président, de vous présenter une nouveauté.
Le Président (M. Lafrance): Ha, ha, ha!
Alors, on vous écoute, M. le ministre.
Du contrat
M. Rémillard: II est ajouté, après l'article
1402, l'article suivant: "1402.1 La lésion résulte de
l'exploitation de l'une des parties par l'autre, qui entraîne une
disproportion importante entre les prestations des parties; le fait même
qu'il y ait disproportion importante fait présumer l'exploitation. "Elle
peut résulter aussi, lorsqu'un mineur ou un majeur protégé
est en cause, d'une obligation estimée excessive eu égard
à la situation patrimoniale de la personne, aux avantages qu'elle retire
du contrat et à l'ensemble des circonstances."
M. le Président, cet amendement vise à
circonscrire clairement la notion de lésion de manière
à dissiper toute ambiguïté qui pouvait subsister quant aux
conditions d'existence de ce vice de consentement. Le premier alinéa
introduit ainsi, sur la base des propositions de l'Office de révision du
Code civil à l'article 37, livre cinq, et des dispositions de la
première partie de l'article 8 de la Loi sur la protection du
consommateur, un concept de lésion d'application générale
axé sur le déséquilibre des prestations et l'idée
d'exploitation.
Quant au second alinéa, il instaure une notion de lésion
d'application particulière aux mineurs et aux majeurs
protégés. Le besoin accru de protection qui caractérise
ces personnes a paru justifier que l'on maintienne à leur égard
la notion plus large et plus souple de la lésion qu'ont reconnue la
jurisprudence et la doctrine à propos des mineurs. En raison de cet
amendement, le nouvel article 1402. 1 se lirait comme suit: "La lésion
résulte de l'exploitation de l'une des parties par l'autre, qui
entraîne une disproportion importante entre les prestations des parties;
le fait même qu'il y ait disproportion importante fait présumer
l'exploitation. "Elle peut résulter aussi, lorsqu'un mineur ou un majeur
protégé est en cause, d'une obligation estimée excessive
eu égard à la situation patrimoniale de la personne, aux
avantages qu'elle retire du contrat et à l'ensemble des circonstances.
"
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y aurait des commentaires concernant ce nouvel article 1402. 1?
M. Masse: M. le Président, il s'agit probablement...
Le Président (M. Lafrance): Oui, Me Masse.
M. Masse:... de l'une des cinq dispositions les plus
discutées depuis trois ou quatre ans en matière d'obligation.
D'une part, je pense que tout le monde s'est rendu compte du fait qu'il fallait
définir, compte tenu de son importance, la lésion. Même si
elle a, dans le nouveau Code civil, une application plus restrictive que nous
l'avait proposé l'avant-projet ou même l'Office de révision
du Code civil, notamment pour les personnes auxquelles elle s'applique, la
notion de lésion est extrêmement importante. Il s'agissait de
savoir si les codificateurs, les légistes et le ministère s'en
remettaient à une définition strictement objective, à une
définition strictement subjective - si une telle chose est possible - ou
à la proposition faite en 1977 par l'Office de révision du Code
civil.
L'alinéa 1 de l'article 1402. 1 est, à toutes fins
pratiques, la proposition faite en 1977 par l'Office de révision du Code
civil. Le problème que cette définition pose, c'est le fait que
l'on définit la lésion par une disproportion importante -
ça, bien sûr, c'est le fondement même de la notion de
lésion - mais qu'on parle également d'exploitation. Bien
sûr, dans la proposition, tel que l'article serait adopté, la
notion d'exploitation serait présumée, mais ça ne
règle pas tous les problèmes puisque, lorsqu'il y a dol, fausse
représentation ou, dans certains cas, erreur, on peut croire qu'il
s'agit là de cas d'exploitation. On a exploité, par exemple, la
naïveté d'un contractant ou son inexpérience. De sorte que
la notion de lésion se rapproche, à certains égards, de la
notion d'erreur ou même de dol, certainement plus de la notion de dol.
Cependant, après une longue série de conversations avec les
légistes, nous en sommes arrivés à la conclusion que
c'était la définition de la lésion qui ralliait le plus de
consensus au Québec, actuellement, et que, vu l'excellence des travaux
de l'Office de révision du Code civil, il fallait s'y rallier. Nous nous
y rallions, je pense, avec plaisir.
Le deuxième élément, qui ne s'applique, je dois le
dire, qu'au mineur et au majeur protégé, parle d'obligation
excessive. Il s'agit là, comme le signale le commentaire, d'un article
inspiré de la Loi sur la protection du consommateur. Alors, il est clair
que l'on ferait bénéficier, en termes de légitimité
et compte tenu du caractère assez restrictif du champ d'application de
cette notion, les mineurs et les majeurs protégés des mêmes
règles que celles qui leur sont reconnues en matière de contrat
de consommation par l'article 8. Je pense que c'est absolument une innovation
intéressante.
De façon générale, M. le Président, et je
termine là-dessus, notre préoccupation a été, dans
le cadre du nouveau Code civil, de limiter la notion de lésion entre
majeurs à des besoins vraiment précis, vraiment ciblés. Et
autant il était important de définir la notion de lésion,
autant il était important de ne pas trop élargir le champ
d'application de cette notion. Compte tenu de l'existence dans le nouveau Code
de la notion de bonne foi, compte tenu du pouvoir des tribunaux de
réviser certains contrats en équité, il était clair
que la notion de lésion entre majeurs, si elle était trop large,
risquait d'ins-tabiliser profondément les contrats dans notre
société, avec une notion qui, bien sûr, part d'un bon
principe général, mais qui, dans la pratique des choses, dans
l'application des choses, pourrait être extrêmement difficile,
notamment en matière commerciale.
Donc, je pense qu'avec la nouvelle proposition on est en face d'un
équilibre, probablement du juste équilibre dont parlait le
ministre de la Justice depuis plusieurs semaines, et que l'on a réussi,
je pense, avec cette proposition-là, à avoir un véhicule
qui pourrait nous transporter relativement loin comme société. Je
vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): Alors, merci,
Me Masse, pour ces précisions. M. le ministre.
M. Rémillard: Oui, M. le Président. Je veux
insister aussi, évidemment, sur l'importance de cet article que nous
apportons et qui établit, je crois, les choses plus clairement par une
définition de ce concept de lésion qui a suscité beaucoup
beaucoup de discussions à bien des égards et qui nous
amène, je pense, à une solution fort acceptable, dans un juste
équilibre.
Dans ce contexte-là, M. le Président, vous me permettrez
de demander à Me Pineau de faire des commentaires.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
Me Pineau.
M. Pineau (Jean): Merci, M. le Président. Cette notion de
lésion, en effet, est discutée depuis fort longtemps; des
thèses de doctorat et des ouvrages ont été
consacrés à cette notion sans toujours réussir à
aboutir à quelque chose de clair. On a beaucoup parlé des
conceptions objectives, des conceptions subjectives, mais enfin, en fait, on a
beaucoup théorisé et le résultat pratique laisse
néanmoins à désirer. C'est pourquoi la proposition qui est
suggérée me paraît susceptible d'aboutir à quelque
chose d'équilibré en faisant appel précisément
à la notion d'exploitation. Dès lors qu'une personne commet une
erreur sur la valeur, il faut se demander pour quelle raison elle a fait cette
erreur et, vraisemblablement, elle a fait cette erreur parce que les parties en
présence étaient en position de force ou de faiblesse l'une
relativement à l'autre, de sorte que l'on présume, dès
lors qu'il y a une disproportion importante, qu'il y a eu probablement
exploitation. Cela ne signifie pas qu'il y ait eu nécessairement
exploitation. C'est pourquoi on permet à la personne qui profite du
déséquilibre de démontrer que, éventuellement, elle
n'a pas exploité son cocon-tractant.
Cependant, dans la mesure où la lésion n'est
sanctionnée que dans des cas particuliers ou lorsqu'un mineur ou un
majeur protégé est en cause, il fallait atténuer cette
notion de disproportion et ajouter un élément - je dis bien eu
égard à la situation du mineur et du majeur protégé
- d'où le deuxième alinéa. Il y aura lésion lorsque
l'obligation de ce mineur ou de ce majeur protégé sera
estimée excessive eu égard à la situation patrimoniale de
cette personne ou aux avantages qu'elle retire du contrat et à
l'ensemble des circonstances. Alors, effectivement, on se montre plus
généreux à l'égard du mineur et à
l'égard du majeur protégé parce que, par
définition, ils sont faibles et, s'ils ont subi, effectivement, un
préjudice, c'est probablement parce que, vu leur situation, vu leur
état, ils étaient plus en mesure de subir l'exploitation du
cocontractant majeur et sain d'esprit.
Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Pineau, pour ces
précisions. Oui, Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Oui, M. le Président. Je me posais la question
en lisant le deuxième alinéa, à savoir pourquoi avoir
utilisé le concept de "protégé" plutôt que
d'"inapte", parce qu'on retrouve, habituellement, dans les dispositions, le
concept d'"inapte", de "majeur inapte".
M. Rémillard: Je vais demander à Me Pineau pourquoi
nous avons choisi ce terme de "protégé".
Le Président (M. Lafrance): Me Pineau.
M. Pineau: Le majeur inapte a toujours la possibilité de
demander la nullité du contrat sur la base de l'absence de consentement.
Donc, il n'a pas besoin d'invoquer la notion de lésion. Du seul fait
qu'il démontre qu'au moment où il a contracté il n'avait
pas une volonté claire et consciente son contrat est annulable.
Mme Harel: Alors, à qui faisons-nous
référence quand nous parions de majeur protégé?
M. Pineau: Le majeur protégé, c'est le majeur qui
est sous curatelle ou sous tutelle, ou à qui a été
attribué un conseiller.
Mme Harel: Et le majeur inapte?
M. Pineau: Le majeur inapte, qui n'a pas fait l'objet de cette
mesure de protection, en tant que tel, n'est pas protégé. Il est
un particulier, mais qui peut demander et obtenir la nullité du contrat
qu'il a passé dès lors qu'il prouve qu'au moment où il a
contracté il n'avait pas une volonté claire et consciente. C'est
toute la différence entre l'incapacité juridique et ce que
certains appellent l'incapacité naturelle qui, en vérité,
n'est pas une véritable incapacité au sens juridique du terme,
mais qui peut s'appuyer sur l'absence de consentement pour faire
anéantir ce contrat.
Mme Harel: Donc, le majeur inapte, c'est la personne qui est
inapte, oui, vous et moi?
M. Pineau: Nous pouvons l'être un jour ou l'autre.
Mme Harel: Ah bon! Très bien. M. Rémillard:
La potentialité.
M. Pineau: La potentialité, ou à un moment
déterminé.
Mme Harel: Peut-être le sommes-nous, même
aujourd'hui. Ha, ha, ha! Très bien. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): Alors, merci pour ces
précisions.
M. Holden: M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): Oui, M. le
député de Westmount.
M. Holden: Le ministre a dit que c'était fort acceptable
et j'aimerais savoir acceptable par qui? Parce que je sais que depuis 10 ans le
côté commercial du Barreau s'est objecté à la notion
de lésion du majeur. Je sais que les légistes se sont
rencontrés, mais quelles autres consultations avez-vous faites, M. le
ministre, pour que ce soit, comme vous l'avez dit, fort acceptable?
M. Rémillard: M. le Président, tout d'abord, j'ai
eu l'occasion d'en parler beaucoup avec des membres du Barreau, avec des gens
aussi de la Chambre des notaires, et on est arrivés à cette
conclusion parce que tout le monde s'entendait sur le fait qu'il fallait
définir la lésion. On voulait aussi que cette question soit
soulevée entre majeurs. Donc, on se retrouve ici avec un concept de
lésion qui est situé dans des cas, soit de personnes qui sont des
mineurs ou un majeur protégé, soit le concept du premier
alinéa qui est aussi fort clair. Or, dans ce contexte-là, nous
suivons les recommandations du Barreau, nous suivons les recommandations de la
très grande majorité des intervenants à ce sujet.
M. Holden: Ça fait partie encore de votre juste
milieu?
M. Rémillard: Mon objectif, c'est d'avoir un Code civil
qui reflète le consensus d'une société. C'est pour
ça que, jusqu'à présent, on fait des travaux dans ce
contexte-là. Avec beaucoup d'attention, tous les intervenants viennent
nous apporter des commentaires, des recommandations. Je crois qu'il n'y aura
pas de gens qui pourront dire qu'ils n'ont pas été entendus. Nous
avons entendu tout le monde et porté attention à tout le monde,
et ça, c'en est une preuve.
M. Holden: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la
députée de Terrebonne.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Je pense que la
définition de lésion est extrêmement claire et
intéressante. J'espère que la définition qu'on retrouve au
premier alinéa, qui nous parle d'exploitation de l'une des parties par
l'autre, qui nous parle de disproportion importante entre les prestations des
parties, va inspirer la réflexion du ministre et lui permettre
d'apporter un correctif à la loi 162, et de nous apporter bientôt
une législation pour l'abolition de la vente itinérante des
préarrangements funéraires.
M. Rémillard: J'en prends bonne note, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): Alors, le nouvel article
1402.1 est donc adopté tel que proposé. Les prochains articles
qui ont été laissés en suspens sont les articles 1455,
1456 et 1457 qui sont contenus au chapitre troisième. De la
responsabilité civile, et en particulier à la section I, Des
conditions de la responsabilité, et qui touche aussi la question du fart
ou de la faute d'autrui. J'appelle donc ces trois articles 1455, 1456 et
1457.
De la responsabilité civile
M. Rémillard: M. le Président, nous avons deux
amendements. L'article 1456 est modifié: 1° par la suppression, aux
deuxième et troisième lignes du premier alinéa, des mots
"mais d'une manière qui ne soit pas purement accidentelle"; 2° par
la suppression, aux première et deuxième lignes du second
alinéa, des mots "ou contre une rémunération modique".
M. le Président, le premier amendement vise à combler un
vide quant à la responsabilité de la personne qui se voit confier
accidentellement la garde d'un mineur. Ainsi, la personne qui se trouve dans
pareille situation, parce qu'elle agit nécessairement gratuitement, sera
dès lors régie par la règle du second alinéa,
conformément au but recherché à l'origine;
deuxièmement, M. le Président, quant au second amendement, il
supprime une condition dont l'application risquait d'être une source
inutile de litige en raison des difficultés qu'elle soulève quant
à la détermination de ce qui, dans une situation donnée,
peut constituer une rémunération modique. En raison de ces
amendements, l'article 1456 se lirait comme suit: "La personne qui, sans
être titulaire de l'autorité parentale, se voit confier, par
délégation ou autrement, la garde, la surveillance ou
l'éducation d'un mineur est tenue, de la même manière que
le titulaire de l'autorité parentale, de réparer le
préjudice causé par le fait ou la faute du mineur. 'Toutefois,
elle n'y est tenue, lorsqu'elle agit gratuitement, que s'il est prouvé
qu'elle a commis une faute."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre.
M. Rémillard: J'ai un autre amendement, M. le
Président. (11 heures)
Le Président (M. Lafrance): Oui, je pense
qu'il y avait eu un amendement de déposé à 1457.
Alors, nous allons retirer cet amendement qui avait été
déposé pour le remplacer, si je comprends bien, par celui que
vous allez nous lire.
M. Rémillard: Si vous me permettez, je vais faire une
vérification. Alors, c'est le même amendement, M. le
Président. Donc, je n'ai pas à le redéposer.
Le Président (M. Lafrance): D'accord.
M. Rémillard: Est-ce que vous croyez bon que je le relise,
M. le Président, simplement relire l'amendement?
Le Président (M. Lafrance): C'est à votre
convenance. Ce serait peut-être préférable, étant
donné qu'on va en discuter.
M. Rémillard: Alors je vais tout simplement relire
l'article tel qu'amendé. L'article, tel qu'amendé, serait le
suivant: "La personne qui, agissant comme tuteur, curateur ou autrement, assume
la garde d'un majeur non doué de raison n'est pas tenue de
réparer le préjudice causé par le fait de ce majeur,
à moins qu'elle n'ait elle-même commis une faute intentionnelle ou
lourde dans l'exercice de la garde."
Le Président (M. Lafrance): Alors, merci M. le ministre.
Est-ce qu'il y aurait, donc, des commentaires touchant ces trois articles? Oui,
Me Masse.
M. Masse: M. le Président, l'article 1054 actuel qui
traite de ces questions a subi au cours des années une très
longue évolution. Je rappelle que la responsabilité des parents,
à l'origine, n'était confiée qu'au titulaire de
l'autorité parentale de l'époque, qui était le mari. Et,
uniquement en cas de disparition du mari ou d'absence prolongée,
c'était son épouse qui assumait cette autorité, donc cette
responsabilité. On a évolué législativement depuis
quelques années pour mettre les mères sur le même pied que
les époux, et le problème que pose notre régime de
l'article 1054 actuel a surtout trait à ceux qui sont
considérés comme étant des titulaires
délégués de l'autorité parentale, notamment les
instituteurs, les professeurs. Et le problème s'est longtemps
posé en jurisprudence de savoir si, par exemple, un camp de vacances
assume une autorité, donc une responsabilité par
délégation. La proposition règle cette question. On a,
à l'article 1456 qui est présenté, une notion large. On
parle de la personne qui, sans être titulaire de l'autorité
parentale, se voit confier par délégation de la part des parents
cette autorité parentale. Donc, on a une vision beaucoup plus large que
celle que l'on avait dans le cadre du Code civil actuel et, quant à
nous, on croit que c'est une excellente chose.
Mme Ouellette et moi, nous nous sommes inquiétés depuis
quelques semaines de la cohérence, cependant, entre les articles 1455,
1456 et 1457. Il s'agissait de savoir si on n'imposait pas aux parents plus de
responsabilités de façon illégitime que celles que l'on
peut imposer notamment au tuteur ou au curateur d'une personne qui a besoin de
protection. Les arguments qui ont été présentés ont
trait au fait que les personnes qui ont besoin de protection, les majeurs sous
tutelle, dans certains cas, ou les personnes qui sont des aliénés
mentaux entraînent un régime différent que celui qui est
imposé aux parents à l'égard d'enfants mineurs; et nous
nous sommes ralliés à cet argument.
Pour ce qui est de l'article 1456, et je suis certain qu'il est encore
débattable à plusieurs égards, nous avons tenté de
clarifier la notion de "purement accidentel". Et comme le dit le commentaire de
l'article qui est déposé, ces situations-là se retrouvent
bien traitées au deuxième alinéa. Le deuxième
alinéa de l'article 1456 est de nature à susciter encore beaucoup
de discussions. On dit dans cette disposition, on disait à l'origine
'Toutefois, elle n'y est tenue, - donc, la personne qui exerce
l'autorité parentale par délégation - lorsqu'elle agit
gratuitement ou contre une rémunération modique, que s'il est
prouvé qu'elle a commis une faute." La distinction ici, c'est le fait
que les parents et les personnes qui sont titulaires d'une autorité
parentale par délégation sont présumés fautifs,
règle générale, à moins de démontrer qu'ils
ne sont pas fautifs. Dans le cas des personnes qui agiraient à titre
gratuit ou contre rémunération modique, on devrait prouver
qu'elles ont commis une faute. Le caractère extrêmement
imprécis de la rémunération modique et, je dirais d'une
façon un petit peu ironique, l'absence de politique gouvernementale
très claire en matière de politique de garderie feraient en sorte
que certaines garderies, par exemple, pourraient alléguer, puisqu'elles
sont avec ou sans but lucratif ou qu'elles sont rémunérées
un peu, moyennement ou pas beaucoup, qu'elles tombent ou ne tombent pas dans
cette exclusion.
Alors, compte tenu des problèmes considérables qui sont
causés, et du fait qu'une gardienne d'enfants, par exemple, d'un
âge raisonnable, pourrait de toute façon prouver son absence de
faute, nous avons cru - et c'est là où en est la discussion pour
le moment - qu'on devrait accepter de supprimer la notion de
rémunération modique.
M. Rémillard: M. le Président, je ne
relèverai pas certains points que Me Masse vient de faire valoir sur les
garderies, mais je vais demander à Me Pineau de faire des
commentaires.
Le Président (M. Lafrance): Me Pineau.
M. Pineau: Merci, M. le Président. Les titulaires de
l'autorité parentale, M. le Président, en vertu de 1455, sont
donc responsables du fait ou de la faute du mineur et ne peuvent se soustraire
à cette responsabilité que s'ils prouvent qu'ils n'ont pas commis
de faute. Donc, il y a une présomption de faute à leur charge.
1456 vient nous dire que, lorsque l'exercice de l'autorité parentale,
lorsque la garde, les éléments, les attributs de
l'autorité parentale, garde, surveillance, éducation, sont
confiés à une personne déterminée qui n'est pas
titulaire de l'autorité parentale, ces personnes-là sont tenues
de la même façon que le titulaire de l'autorité parentale
et, donc, pèse sur eux une présomption de faute. Toutefois -
c'est ce que vient nous dire l'alinéa 2 de l'article 1456 - lorsque ces
personnes effectuent cette garde, cette surveillance ou cette éducation
à titre gratuit, il appartiendra alors à ceux qui
prétendent qu'il y a eu faute dans la garde, la surveillance ou
l'éducation, il appartiendra, dis-je, à ces personnes de prouver
que la personne en question a commis une faute.
Quant à l'article 1457, M. le Président, il concerne, il
vise la personne qui agit comme tuteur, curateur ou autrement à
l'égard d'un majeur qui n'est pas doué de raison. Un majeur qui
n'est pas doué de raison, c'est donc non seulement le majeur qui a fait
l'objet d'une mesure de protection mais aussi ce majeur qui n'a pas fait
l'objet d'une mesure de protection. Et, dans ce cas-là, la personne qui
agit à ce titre ne sera pas responsable des faits fautifs - je mets
fautifs entre guillemets puisque ces personnes, par définition,
étant inaptes, n'étant pas douées de raison, ne peuvent
pas commettre une faute, mais il n'empêche que, s'ils avaient
été aptes, ces faits auraient été fautifs - cette
personne, dis-je, ne sera pas responsable, à moins que l'on prouve que
la faute dans la surveillance est une faute intentionnelle ou une faute lourde
dans l'exercice de cette garde.
Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Pineau. Oui, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, il faut donc comprendre,
à 1457, que la personne qui agit comme gardien pour un majeur non
doué de raison peut commettre une faute simple et, à ce
moment-là, elle n'aura pas, du moment que la faute qu'elle commet n'est
pas lourde ou intentionnelle, elle n'aura pas... elle ne sera pas tenue de
réparer le préjudice, n'est-ce pas? Qui va réparer? Bon,
à 1457, l'amendement me convient, mais qui va réparer?
M. Rémillard: Écoutez, s'il n'y a pas de
responsabilité et que la personne qui a commis la faute est un majeur
inapte, à ce moment-là, soit que vous tombiez sur le fonds
d'indemnisation ou...
Mme Harel: C'est là où je voulais en arriver. Dans
les cas où c'est un criminel, où il y a eu un fait qui... le
fonds d'indemnisation, je pense, ne vaut que pour un acte criminel, n'est-ce
pas? Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, dans la loi d'application, d'ajuster le
fonds de manière telle que, si des cas semblables se produisent, la
personne qui est la victime puisse avoir réparation? Si la
société conçoit qu'elle ne doit pas faire porter sur les
épaules du gardien le fardeau de réparer, même s'il y a eu
faute simple, est-ce qu'il n'y a pas, finalement, pour la victime, une
réparation à envisager?
M. Rémillard: Je pense que le principe, dans ça,
c'est que quelqu'un ne doit pas subir les conséquences d'un geste d'une
personne inapte. Alors, on dit que le gardien ne doit pas en subir les
conséquences parce qu'il n'est pas responsable, et la victime ne doit
pas en subir les conséquences non plus. Alors, c'est certainement une
suggestion que... Je vais prendre très bonne note d'une telle suggestion
et voir comment on peut, dans la loi d'application... Lorsqu'on reverra, parce
que c'est à revoir, la loi sur le fonds d'indemnisation, on pourra voir
ce qu'on peut faire.
Le Président (M. Lafrance): Merci Me Masse. Pardon! M. le
député de Westmount.
M. Holden: C'est un cas assez exceptionnel, je crois. Ajouter
ça au fonds d'indemnisation, ça ne coûterait pas une
fortune.
M. Rémillard: Ça ne coûterait peut-être
pas une fortune. Il faudrait voir les cas, comment ça peut se produire.
Je pense que ce sont des circonstances qui peuvent très très
bien... Je me demande si c'est si rare que ça. Il faudrait le
vérifier.
M. Holden: Ce n'est pas si rare que ça? Ah oui? Les feux,
etc., des affaires comme ça.
M. Rémillard: II met le feu à la maison, à
ce moment-là, il y a des assurances, il est question d'assurances.
Lorsqu'il n'y a pas d'assu-i rances... Il faut penser qu'il y a toute la
question des assurances là-dedans. Mais, au-delà de la question
des assurances, quelqu'un ne peut pas, je crois, subir un préjudice
à la suite d'un ' acte fait par une personne inapte, alors que le i
gardien de cette personne inapte peut, lui, se disculper et n'en subit pas de
préjudice. Il faudrait faire une étude de la situation,
certainement. i Le Président (M. Lafrance): Me Masse.
M. Masse: Juste pour situer le débat dans son contexte, M.
le Président, la situation actuelle est une situation où l'inapte
est irresponsable. Dans l'avant-projet déposé en décembre
1987, à l'article 1519, il avait été proposé que
l'inapte ou l'aliéné mental soit, dans certains cas, responsable,
même s'il n'avait pas la capacité de discernement. On disait,
à l'alinéa 2: "II peut, néanmoins, en être tenu si
la victime ne peut obtenir réparation du titulaire de l'autorité
parentale ou de la personne à qui avait été confiée
sa garde, sa surveillance ou son éducation..." Cette proposition a
causé, dans le milieu juridique, parmi un certain nombre de justiciables
également, un tollé de protestations. On a jugé qu'il
n'était pas acceptable socialement de soumettre une personne incapable
de discernement à quelque responsabilité que ce soit. De sorte
qu'on revient actuellement à la situation où, pour pouvoir
encourager la garde de ces personnes, on décrète une
responsabilité uniquement en cas de faute lourde et intentionnelle et
où on maintient les responsabilités de la personne. Comme le
disaient tantôt les intervenants, je pense personnellement que la seule
façon d'en sortir, c'est vraiment de permettre un accès au fonds
d'indemnisation des victimes d'actes criminels ou d'actes dommageables - on
pourrait le renommer - dans ces cas-là. Je pense que toute
révolution des quatre dernières années démontre que
cette voie de sortie est la seule qui est admissible si on veut vraiment faire
en sorte que les victimes ne soient pas pires ou dans une situation plus mal
placée que ceux qui lui ont causé un dommage.
M. Rémillard: M. le Président, je pense qu'il faut
partir du principe, on est tous d'accord, qu'il faut que la victime puisse
être indemnisée, ne pas laisser la victime comme ça,
qu'elle ne soit pas indemnisée. Il y a deux possibilités. Ou bien
c'est par l'inapte, et ça, on trouve que, si elle n'est pas capable de
discernement, comment se fait-il qu'on la rendrait responsable du geste qu'elle
a commis? Ça ne peut pas être la personne qui en a la garde. Donc,
ça ne peut être qu'un fonds, ou une autre possibilité.
Maintenant, il faut faire attention, aussi. Il y a toute la question des
assurances qui le prévoit. Il y a une question aussi d'autres sources de
financement dans le secteur privé. Mais je crois que, pour faire
référence à ce que Mme la députée de
Ho-chelaga-Maisonneuve disait tout à l'heure, ce serait quelque chose
à regarder dans la loi d'application et, ensuite, lorsqu'on reverra les
autres dispositions.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Oui,
Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. (11 h 15)
Mme Harel: À 1456, M. le Président, je me pose la
question à savoir ce qui se passerait si la personne qui se voit confier
la garde est elle-même mineure. Qu'est-ce qui se passerait? Comment se
fait l'application de 1456?
M. Rémillard: Je suppose que vous avez en tête le
gardien ou la gardienne d'un enfant, qui a 15 ans ou 16 ans...
Mme Harel: 14 ans.
M. Rémillard: ...ou 14 ans, à qui on donne une
rémunération.
Mme Harel: Qu'est-ce qui se passe dans un cas comme
celui-là?
M. Rémillard: C'est ce cas-là. C'est ça que
vous avez en tête, je pense. Alors, je vais demander à Me Pineau
de vous expliquer.
M. Pineau: M. le Président, un mineur est responsable de
ses fautes dès lors qu'il a une volonté claire et consciente.
Mme Harel: Donc, ça signifie que le mineur pourrait
être tenu responsable et, à ce moment-là, ce seraient les
parents de cet enfant mineur, qui est gardien, qui seraient appelés
à réparer?
M. Pineau: Éventuellement, oui.
Mme Harel: Moi, je ne me sens pas très à l'aise
avec ça, je dois vous dire. Je vois bien que c'est difficile de
définir "rémunération modique", mais il y a dans la vie,
parfois, des choses qui sont des clairs-obscurs. Ce n'est pas évident.
C'est la quadrature du cercle, mais ça m'apparaît pouvoir avoir
des effets pervers, tout ça, parce que si les parents décident de
confier la garde d'un enfant a un mineur et que ce mineur, par
étourderie, par exemple, laisse commettre un préjudice par
l'enfant dont le parent lui a confié la garde...
M. Rémillard: Écoutez, votre raisonnement
était le mien lorsqu'on a mis "contre une rémunération
modique". C'était comme ça que... On est arrivés et on a
dit: Écoutez, quelqu'un... C'est un renversement de preuve qu'on voulait
faire à ce moment-là, et c'est pour ça qu'on a
présenté l'article avec "contre une rémunération
modique". Le problème est: Qu'est-ce qu'une rémunération
modique? Alors, le choix qu'on a à faire, c'est de dire: Ou bien on
enlève complètement "contre une rémunération
modique", mais à ce moment-là, comme Me Pineau vient de
l'expliquer, en droit, ça signifie que le gardien ou la gardienne mineur
est responsable, à la suite d'une de ses fautes et, par
conséquent, les parents de ces enfants gardiens ont leurs
responsabilités. Là, il y a une chaîne de
responsabilité qu'on peut certainement questionner.
De l'autre côté, ce que nous avons comme
choix... Donc, dans ce cas-là, ou bien on le laisse comme
l'amendement le propose, en laissant simplement qu'il faut que ce soit gratuit
- si c'est gratuit, il faut, à ce moment-là, qu'on prouve la
faute - mais si c'est contre une rémunération modique, si on
ajoute la contribution ou la rémunération modique, ça
voudrait dire que, quand même, ce gardien ou cette gardienne peuvent
être poursuivis. Il ne faut pas croire qu'il n'y a pas
responsabilité. Il y a toujours responsabilité. C'est juste le
fardeau de la preuve qui varie. C'est que dans un cas vous dites que, parce
qu'elle n'a pas été rémunérée, il va falloir
que, nous, on démontre qu'elle a fait une faute, alors que les parents
de l'enfant qui était gardé démontrent que cette gardienne
ou ce gardien a fait une faute; à l'inverse, on mettrait, donc, le
fardeau de l'autre côté. Alors, c'est pour ça que dans les
discussions on est arrivés, la dernière fois, en disant: Bien,
écoutez, peut-être bien que le consensus serait d'enlever "contre
une rémunération modique". Moi, je vous avoue que, finalement, je
me suis rallié à ça.
Mme Harel: II y a une balance des inconvénients d'un
côté comme de l'autre.
M. Rémillard: Oui.
Mme Harel: Alors, peut-être qu'on peut se laisser un peu de
temps pour y réfléchir avant de l'adopter?
M. Rémillard: Oui. M. le Président, permettez-vous
à Me Pineau de faire un commentaire? Je pense qu'il serait
intéressant qu'il fasse un commentaire.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, la question que vient de poser
Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve pose le problème
de savoir qui doit réparer le préjudice, car il y a une victime,
par hypothèse. Or, si le mineur qui garde l'enfant n'est pas
responsable, si les parents de ce mineur ne sont pas responsables, c'est la
victime qui va devoir assumer son préjudice, c'est-à-dire
l'enfant qui a été mal gardé ou les parents de l'enfant
mal gardé.
Mme Harel: Moi, je pense que c'est le titulaire de
l'autorité parentale qui a confié la garde, pour une
rémunération modique, à une personne, non? Il y a une
chaîne, finalement.
M. Rémillard: Faisons...
Mme Harel: La victime, là, si elle ne peut pas faire la
preuve d'une faute, du fait que la personne était une gardienne qui
venait comme ça, à l'occasion, pour une
rémunération vraiment modeste, si c'est le cas, la victime va
pouvoir tenter de prouver que le titulaire de l'autorité parentale a une
responsabilité.
M. Pineau: On en revient à l'idée suivante.
C'est qu'à ce moment-là le titulaire de l'autorité
parentale devra répondre des fautes du gardien mineur.
Mme Harel: Pas nécessairement du gardien mineur mais de...
Si c'est ça... Moi, j'aimerais bien que ce soit ça. Mais, tel que
libellé, 1456 ne le dit pas comme ça.
M. Pineau: Non.
Mme Harel: Elle va être tenue de la responsabilité
des fautes de toute personne, si elle agit contre une
rémunération modique, et dans ce sens-là Me Masse a
raison. C'est très très très large, ça. Ça
peut être toute personne, quel que soit l'âge. Ça peut
être même une gardienne professionnelle qui demande une
rémunération que certains peuvent évaluer modique ou
d'autre pas. Mais, dans le fond, c'est ce que je disais tantôt, parce
qu'il a raison. Et en même temps, quand on parie des gardiens mineurs, je
crois que c'est aux parents qui confient la garde à un gardien mineur
d'avoir cette responsabilité. On serait peut-être mieux de
circonscrire.
M. Rémillard: Écoutez. Savez-vous, j'ai de la
difficulté. On va juste voir la ligne.
Mme Harel: Oui.
M. Rémillard: Prenons l'exemple, donc, d'une jeune fille
de 15 ans qui va garder...
Mme Harel: Chez son voisin.
M. Rémillard: ...chez son voisin un jeune enfant de quatre
ou cinq ans et elle laisse l'enfant près d'un paquet de cigarettes -
elle a fumé, ou quoi que ce soit - l'enfant a pris les allumettes et mis
le feu.
Mme Harel: Peut-être pas chez lui. Il est peut-être
dans un restaurant, ou enfin.
M. Rémillard: À l'extérieur? Mme Harel:
À l'extérieur. M. Rémillard: Bon, parfait. Mme
Harel: Où il y a des tiers.
M. Rémillard: Alors, chez des tiers. Alors, prenons le cas
chez des tiers. Alors, il commet donc une faute, à ce moment-là.
Ou il est dans un parc et elle le laisse jouer avec un instru-
ment dangereux et il blesse un autre enfant. Mme Harel: Un autre
enfant.
M. Rémillard: II blesse un autre enfant en jouant dans un
parc. Je pense que l'exemple est plus intéressant.
Mme Harel: Oui.
M. Rémillard: À partir de...
Mme Harel: Non, c'est vrai?
M. Rémillard: Plus intéressant, on s'entend,
là.
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: Plus complexe.
M. Rémillard: Je m'excuse. Comme les médecins
devant un cadavre, tu sais, c'est plus intéressant.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Holden: Est-ce que cet enfant est gardé aussi par un
enfant de 15 ans?
M. Rémillard: Bien, là, ne compliquez pas trop les
choses. Attendez, on va faire un scénario et, après ça,
vous arriverez avec vos autres scénarios. C'est comme ça que
ça se passe à Westmount, mais...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Holden: Les gardiennes se battent. Ha, ha, ha!
M. Rémillard: Bon, alors, continuons notre exemple.
À partir de là, donc, on dit: II y a une faute de la part de la
jeune gardienne. Ce que nous disons dans 1456, à ce moment-là,
c'est que, si cette gardienne agissait sans rémunération, il va
falloir qu'on démontre, que les parents de l'enfant blessé
démontrent que cette gardienne a commis une faute. Si elle a une
rémunération, à ce moment-là, c'est elle, la
gardienne, qui est présumée fautive, qui doit démontrer
qu'elle n'a pas commis de faute. Or, dans ce scénario-là...
Mme Harel: Ce sont ses parents qui vont devoir démontrer
ça.
M. Rémillard: C'est ça. C'est là que
j'arrive à l'étape: Quelle est la responsabilité de ses
parents à elle, à la gardienne? Dans un cas ou dans l'autre,
c'est juste une question de présomption. Dans un cas, c'est la personne
qui a reçu le dommage, donc les parents de l'enfant qui a
été blessé, qui doivent démontrer que la gardienne
a fait une faute. Dans l'autre cas, s'il y a rémunération, c'est
la gardienne qui doit démontrer qu'elle n'a pas fait de faute. Mais, peu
importe, il y a eu un dommage de causé et il va falloir indemniser en
fonction de ce dommage.
Donc, la ligne pour indemniser, il va falloir démontrer qui a la
responsabilité. Cette responsabilité-là va être
démontrée selon les deux possibilités de
présomption, mais, à un moment donné, on va monter
à la ligne de l'autorité parentale, ou du gardien, ou du tuteur
du mineur. La question, c'est, à ce moment-là, bien sûr:
Qui va réparer les dommages?
Je crois comprendre par les interventions de Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve qu'elle nous dit qu'à ce
moment-là il faudrait que les parents de l'enfant gardé aient une
part de responsabilité, puisqu'ils ont accepté que ce soit une
mineure qui vienne garder chez eux, au lieu que cette
responsabilité-là soit assumée entièrement par les
parents de la gardienne. Est-ce que je comprends bien son argumentation?
Mme Harel: Absolument.
M. Rémillard: Alors qu'actuellement...
Mme Harel: Parce que c'est trop large. Je suis bien d'accord avec
Me Masse, "rémunération modique", c'est très large, parce
que ça peut porter à controverse, même dans un service de
garde. Mais c'est autre chose dont on parle, c'est vraiment... Finalement, si
les parents confient la garde à un mineur, il faut qu'ils aient des
assurances en conséquence, il faut qu'ils soient responsables, il faut
qu'ils soient conséquents.
M. Rémillard: Je pense bien que la remarque est
très intéressante et elle mérite, M. le Président,
qu'on suspende encore cet article et qu'on demande à nos experts et
légistes de s'y pencher.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Oui, Me
Masse?
M. Masse: Je voudrais attirer votre attention sur l'article 2459
du projet en matière d'assurance. Cet article traite des recours de
l'assureur, recours subrogatoires, contre l'auteur de dommages. Il est dit dans
le projet, à l'alinéa 2, ce qui était substantiellement
l'état du droit existant: "L'assureur ne peut jamais être
subrogé contre les personnes qui font partie de la maison de
l'assuré." Donc, dans l'exemple que l'on mentionne, l'assureur pourrait
être amené rapidement, à cause de sa couverture des
responsabilités familiales de la maison - ça fait partie de
l'ensemble des risques couverts dans la plupart des contrats d'assurance de ce
type-là - à payer la réclamation des parents et de la
victime. Et la question est de savoir s'il peut se retourner contre la
petite gardienne de 14 ou 15 ans ou contre ses parents. Actuellement, et je
pense que dans nos discussions sur cet article 2459 il a été
très clair que l'intention de toutes les parties, c'était de
continuer à couvrir, par le concept de maison de l'assuré,
l'employé de ménage, les gardiens occasionnels, comme l'exemple
nous le démontre... Ça pourrait être une des voies de
solution. En gardant une conception large de la maison de l'assuré,
donc, l'assureur qui paierait les dommages, à ce moment-là, ne
pourrait pas se retourner contre la gardienne de 14 ou 15 ans. Compte tenu de
l'extension considérable de ces contrats d'assurance, je pense que la
plupart des problèmes pourraient, en pratique, trouver une solution.
M. Rémillard: Me Masse, est-ce que ça couvre
l'exemple dans le parc9
Mme Harel: Si les parents sont assurés.
M. Masse: Si les parents sont assurés, oui.
M. Rémillard: Moi, je pense qu'il y a quand même un
danger à régler nos problèmes juridiques en se
référant à l'assurance. Je crois que c'est vrai que
l'assurance fait partie de notre vie, on est tous assurés, tout
ça, mais attention quand même de ne pas aborder le problème
juridique en disant: Les gens sont assurés, ou ça va se
régler par l'assurance. Je suis d'accord. Votre argument est
intéressant et...
Mme Harel: Pour une partie.
M. Rémillard: ...c'est une bonne chose de le souligner,
mais...
M. Masse: C'est le cas du droit existant, M. le ministre. (11 h
30)
M. Rémillard: Je comprends que c'est le droit existant,
mais moi, je me méfierais d'en arriver à une solution en prenant
comme prémisse qu'il y a des assurances. Les assurances ne sont pas
obligatoires dans notre société, elles sont facultatives; elles
sont généralisées, mais elles sont toujours facultatives.
Donc, par conséquent, je trouve qu'il faut trouver une solution qui, par
elle-même, se tient en droit dans le Code. Par conséquent... Oui,
c'est vrai qu'il y a l'assurance automobile qui est obligatoire. Donc, par
conséquent, peut-être, M. le Président, qu'il vaudrait
mieux suspendre.
Mme Harel: Dans une période comme celle... Oui.
Le Président (M. Lafrance): Oui, M. le
député de Westmount.
M. Holden: Mais vos légistes peuvent rédiger un
article qui couvre le cas de gardiens en dehors de... Pour éviter le
problème des garderies, on pourrait quand même faire un article.
Ça serait un peu trop spécialisé et moins
général, mais ça pourrait se faire.
M. Rémillard: Bien, moi, le problème que j'ai
l'impression qu'on a isolé, c'est, en es qui regarde le mineur, que le
gardien, la gardienne mineure est la responsabilité des parents,
gardiens ou tuteurs de cette personne. La question qu'on se pose, c'est: Est-ce
que les parents de ce gardien, de cette gardienne doivent seuls supporter les
conséquences d'une faute commise par le gardien, la gardienne, peu
importent les éléments de présomption, ou si la personne,
le parent ou le propriétaire d'un bien qui a suscité, donc, qui a
demandé à un gardien mineur., est-ce qu'il ne doit pas supporter
aussi la responsabilité? C'est ça, si je comprends bien, la
situation?
Mme Harel: J'entendais...
Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Ce matin, à la radio, j'entendais que depuis un
an il y a eu au Canada, mais en proportion - le Québec avait aussi une
part de tout cela - 2 000 000 000 $ de moins d'épargnes dans les
régimes d'épargne-retraite. Puis c'était très
lié à la situation économique. Hier, des personnes, qui
sont des spécialistes de l'assurance, me disaient qu'en période
de récession ou de perte d'emploi il y a bon nombre de gens qui annulent
leur police parce que c'est une... Ce n'est pas de gaieté de coeur, mais
c'est une des dépenses qui n'est pas incontournable. Il faut payer son
loyer, il faut manger. Alors, je serais curieuse de voir quel est le niveau
d'assurance dans une période comme celle qu'on vit maintenant.
M. Rémillard: Alors, est-ce qu'on suspend? C'est ça
qu'on fait. On suspend. Alors, on suspend seulement l'article 1456, si je
comprends bien.
Mme Harel: Oui.
Le Président (M. Lafrance): Alors, l'article 1455 est donc
adopté tel quel. L'article 1456 est laissé en suspens tel
qu'amendé et l'article 1457 est donc adopté tel qu'amendé.
Le prochain article qui avait été en suspens est l'article 1521,
qui est contenu au chapitre cinquième, qui traite des modalités
de l'obligation, section II, De l'obligation à modalité complexe,
de la question de l'obligation solidaire et de la solidarité entre les
débiteurs. J'appelle donc l'article 1521
Des modalités de l'obligation
M. Rémillard: Oui, M. le Président, nous avons un
amendement. L'article 1521 est modifié par l'ajout, après le
second alinéa, de l'alinéa qui suit: "Constitue l'exploitation
d'une entreprise l'exercice, par une ou plusieurs personnes, d'une
activité économique organisée, qu'elle soit ou non
à caractère commercial, consistant dans la production ou la
réalisation de biens, leur administration ou leur alinéation, ou
dans la prestation de services."
M. le Président, cet amendement vise à introduire au Code
civil une définition de la notion d'entreprise, qui a remplacé au
fil des dispositions du Code la notion de commerce et autres notions voisines
liées à l'exercice d'activités commerciales. La
définition proposée rejoint celle que l'on retrouve
généralement dans fa doctrine et la jurisprudence, notamment en
droit français, à propos de cette notion. Elle devrait dissiper
les incertitudes sur la portée de la notion d'entreprise tout en
permettant, par la généralité des termes employés,
l'évolution du droit en cette matière. En raison de cet
amendement, l'article 1521 se lirait comme suit: "La solidarité entre
les débiteurs ne se présume pas; elle n'existe que lorsqu'elle
est expressément stipulée par les parties ou prévue par la
loi. "Elle est, au contraire, présumée entre les débiteurs
d'une obligation contractée pour le service ou l'exploitation d'une
entreprise. "Constitue l'exploitation d'une entreprise l'exercice, par une ou
plusieurs personnes, d'une activité économique organisée,
qu'elle soit ou non à caractère commercial, consistant dans la
production ou la réalisation de biens, leur administration ou leur
aliénation, ou dans la prestation de services."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y aurait donc des commentaires touchant cet article 1521 tel
qu'amendé?
Mme Harel: C'est là, M. le Président...
Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: C'est, je crois, une disposition, une
définition d'entreprise que l'on introduit qui va être
extrêmement stratégique, d'une certaine façon. Alors, je
souhaiterais qu'on puisse nous en indiquer toute la portée.
M. Rémillard: Oui. Me Pineau, M. le Président, va
faire les commentaires.
Le Président (M. Lafrance): Oui, Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, tout d'abord, cet
alinéa a été ajouté à l'article 1521 qui est
relatif à la solidarité parce que, dans son deuxième
alinéa, cet article nous indique que la solidarité est
présumée entre les débiteurs d'une obligation
contractée entre commerçants, dit l'article du Code civil du Bas
Canada, et c'est cette notion qui est aujourd'hui élargie et
remplacée par la notion d'entreprise, notion d'entreprise qui est
peut-être quelque peu nouvelle au Québec, mais qui a
été très développée dans certains autres
droits, notamment en droit français, et c'est dans le droit
français que l'on a puisé les éléments composant
l'entreprise.
On insiste, tout d'abord, sur la notion d'activité
économique organisée. Je pense que le qualificatif
"organisée" est extrêmement important, et activité
économique, qui ne se limite pas au commerce, mais qui est beaucoup plus
large et qui englobe donc tout ce qui concerne la production ou la
réalisation de biens, l'administration ou l'aliénation de ces
biens et, de la même façon, la prestation de services. Donc, nous
devrons vivre désormais non plus avec la notion de commerce, mais avec
cette notion d'activité économique organisée, telle
qu'elle est définie ici et qui est définie dans des termes qui ne
bloquent pas une évolution possible du droit dans cette
matière.
Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Pineau, pour ces
précisions. Alors, l'article 1521 est donc adopté tel
qu'amendé.
Le prochain article qui avait été laissé en suspens
est le 1608, qui est contenu à la page 275 de notre manuel du projet de
loi. Cet article apparaît au chapitre sixième, De
l'exécution de l'obligation, à la section II qui touche à
la mise en oeuvre du droit à l'exécution de l'obligation et, de
façon plus spécifique, à l'exécution par
équivalent. J'appelle donc l'article 1608.
De l'exécution de l'obligation
M. Rémillard: Oui, M. le Président. C'est un
amendement que nous voulons proposer à l'article 1608. L'article 1608
est remplacé par le suivant: "Le droit du créancier à des
dommages-intérêts, même punitifs, est cessible et
transmissible. "Il est fait exception à cette règle lorsque le
droit du créancier résulte de la violation d'un droit de la
personnalité; en ce cas, son droit à des
dommanges-intérêts est incessible, et il n'est transmissible
qu'à ses héritiers."
M. le Président, cet amendement apporte deux correctifs à
la règle de l'article. En premier lieu, il vise à faire la
concordance avec les règles des articles 3 et 625 du projet. D'une part,
l'article 3 déclare incessibles les droits de la personnalité
dont toute personne est titulaire. Il paraissait, dès lors, opportun de
prévoir que le droit aux dommages-intérêts résultant
d'une atteinte à ces droits soit lui-même incessible, compte tenu
de son caractère tout aussi person-
nel. D'autre part, l'article 625 prévoit déjà que
les héritiers d'une personne sont, à son décès,
saisis de ses droits d'action contre l'auteur de toute violation d'un droit de
la personnalité. Il convenait donc de nuancer le caractère
incessible du droit aux dommages-intérêts visé pour tenir
compte de cette règle du livre des successions.
En second lieu, l'amendement vise à assujettir le droit à
des dommages-intérêts punitifs lorsque la loi prévoit leur
attribution aux mêmes règles que celles qui seront applicables aux
dommages-intérêts compensatoires. Ainsi, s'agis-sant d'un droit
résultant d'un préjudice matériel, ce droit serait
cessible et transmissible. S'agis-sant, par contre, d'un droit résultant
d'une atteinte au droit de la personnalité, y compris, donc, pour le
préjudice corporel ou moral subi, le droit à des
dommages-intérêts punitifs serait incessible, mais pourra
être transmis aux héritiers du créancier. En raison de cet
amendement, l'article 1608 se lirait comme suit: "Le droit du créancier
à des dommages-intérêts, même punitifs, est cessible
et transmissible. "Il est fait exception à cette règle lorsque le
droit du créancier résulte de la violation d'un droit de la
personnalité; en ce cas, son droit à des
dommages-intérêts est incessible, et il n'est transmissible
qu'à ses héritiers."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant cet article 1608 tel
qu'amendé? Donc, l'article 1608 est adopté tel
qu'amendé.
De la transmission et des mutations de
l'obligation
Le prochain article qui avait été laissé en suspens
est l'article 1651, qu'on retrouve à la page 282 de notre manuel du
projet de loi. Cet article est contenu au chapitre septième, qui touche
la question de la transmission et des mutations de l'obligation, à la
section II, qui traite de la subrogation. J'appelle donc l'article 1651.
M. Rémillard: II n'y a pas d'amendement, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): Est-ce qu'il y aurait des
commentaires donc touchant cet article 1651?
M. Masse: M. le Président...
Le Président (M. Lafrance): Oui, Me Masse.
M. Masse: Nous avions des hésitations à
l'égard du caractère d'ordre public de l'article. En effet, le
projet de loi, à l'article 1651, se termine en disant: "Elle
s'opère - la subrogation - sans le consentement du débiteur,
malgré toute stipulation contraire." Les discussions qu'on a eues nous
permettent d'écarter ces craintes que nous avions.
Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Masse, pour ces
précisions. Alors, l'article 1651 est donc adopté tel quel. Le
prochain article qui avait été laissé en suspens est
l'article 1669, contenu à la page 285, qu'on retrouve au chapitre
huitième, De l'extinction de l'obligation, à la section II, qui
touche la question de la compensation. J'appelle donc l'article 1669 sur
lequel, je pense, on avait déposé un amendement.
M. Rémillard: Oui, M. le Président. J'aimerais
continuer à suspendre cet article parce qu'il y a encore des
vérifications qu'on n'a pu faire au niveau du ministère des
Finances. Pas le ministère des Finances, excusez-moi, le
ministère du Revenu.
Mme Harel: Le Revenu.
M. Rémillard: Remarquez que c'est en relation directe.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
l'article 1669 est donc laissé en suspens. Le prochain article qui avait
été laissé en suspens est l'article 1699, qu'on retrouve
à la page 290. Cet article est contenu au chapitre neuvième et
touchait la question de la restitution des prestations.
De la restitution des prestations
M. Rémillard: Alors, M. le Président, nous avons un
amendement à l'article 1699. L'article 1699 est modifié par le
remplacement, dans les deux dernières lignes du second alinéa,
des mots "par leur fait et que celui-ci équivaut à une faute
lourde" par les mots "par leur faute intentionnelle ou lourde".
M. le Président, cet amendement vise à soustraire
clairement les personnes non douées de raison de l'application de la
règle, ce que ne permettait pas le mot "fait". En raison de cet
amendement, l'article 1699 se lirait comme suit: "Les personnes
protégées ne sont tenues à la restitution des prestations
que jusqu'à concurrence de l'enrichissement qu'elles en conservent; la
preuve de cet enrichissement incombe à celui qui exige la restitution.
"Elles peuvent, toutefois, être tenues à la restitution
intégrale lorsqu'elles ont rendu impossible la restitution par leur
faute intentionnelle ou lourde."
Le Président (M. Lafrance): Alors, merci, M. le ministre.
Il s'agit donc de la confirmation du i même amendement qui avait
déjà été déposé.
Alors, est-ce qu'il y aurait des commentaires i touchant cet article
1699? Donc, l'article 1699
est adopté tel qu'amendé.
Le prochain article qui avait été laissé en suspens
est l'article 1721, que l'on retrouve à la page 294. Cet article
apparaissait au chapitre premier du titre deuxième, Des contrats
nommés. Le chapitre premier touche la vente et l'article en question
touche la question de la garantie de qualité.
M. Rémillard: M. le Président, est-ce que je
pourrais me permettre? Je crois qu'il pourrait être intéressant
pour nous dans le livre cinquième, Des obligations, de terminer le titre
premier, Des obligations en général. Il y a quatre autres
articles qui avaient été laissés en suspens. C'est des
amendements techniques. J'aurais quatre amendements techniques à
déposer...
Le Président (M. Lafrance): D'accord.
M. Rémillard: ...donc, à faire la lecture en ce qui
regarde le titre premier, Des obligations en général, aux
articles 1439, 1469, 1491 et 1537. Est-ce que vous me permettez de les lire, M.
le Président?
Le Président (M. Lafrance): Certainement, M. le
ministre.
M. Rémillard: Alors, les amendements suivants, de nature
technique, terminologique ou de concordance, sont apportés aux articles
suivants du titre premier du livre cinquième du projet de loi. Article
1439: Cet article, tel qu'amendé, est à nouveau modifié
par le remplacement, à la deuxième ligne, des mots "d'autre" par
les mots "d'autres" au pluriel. L'article 1469: Cet article est modifié
par le remplacement, à la fin, des mots "ou que le préjudice
était prévisible pour elle" par les mots "ou qu'elle pouvait
prévoir le préjudice". L'article 1491: Cet article, tel
qu'amendé, est à nouveau modifié par l'ajout, au
deuxième alinéa, d'une virgule "," après les mots
"l'enrichi". L'article 1537: Cet article, tel qu'amendé, est à
nouveau modifié par l'insertion du mot "à" entre les mots
"personnels à l'un ou" et les mots "plusieurs des autres
codébiteurs".
Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, M. le
ministre. Alors, ces quatre articles sont donc ouverts pour insérer ces
amendements techniques, tels que lus et proposés. Ces articles sont donc
adoptés tels qu'amendés, incluant ces amendements techniques.
M. Rémillard: M. le Président, est-ce que je
pourrais demander une suspension de quelques instants à ce moment-ci?
J'aimerais suggérer peut-être une rencontre entre experts et
légistes sur un point précis.
Le Président (M. Lafrance): Certainement, M. le
ministre.
M. Masse: Sur les amendements?
Le Président (M. Lafrance): Oui, Me Masse.
M. Rémillard: Peut-être, à ce
moment-là, qu'on pourrait tout simplement suspendre nos travaux ici,
jusqu'à 16 heures cet après-midi. On va se rencontrer
probablement jusqu'à midi trente et on reviendrait donc, nous, en
séance à 16 heures.
Le Président (M. Lafrance): D'accord. Merci, M. le
ministre.
Mme Harel: Attendez.
Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Si je comprends bien, on n'entrepend pas les contrats
nommés là.
M. Rémillard: Pas tout de suite.
Mme Harel: M. Masse ne sera peut-être pas ici ce soir. Ah
oui!
M. Rémillard: On pourrait faire ça ce soir. On
ferait les contrats nommés ce soir. Puis, cet après-midi, on
continuerait les livres de la personne, de la famille, avec les discussions que
nous avons eues tout à l'heure.
Mme Harel: D'accord.
Le Président (M. Lafrance): Alors, nous allons donc
suspendre nos travaux jusqu'à 16 heures cet après-midi, sujet
évidemment à confirmation en Chambre par le leader, et on
m'informe que, probablement, on se réunirait dans la salle Papineau, au
rez-de-chaussée. Alors, s'il n'y a pas de commentaires
supplémentaires, je suspends nos travaux jusqu'à cet
après-midi, 16 heures.
(Suspension de la séance à 11 h 50)
(Reprise à 16 h 19)
Le Président (M. Lafrance): Alors, si vous voulez s'il
vous plaît prendre place, nous allons reprendre nos travaux. Je constate
que nous avons le quorum et j'aimerais donc déclarer cette séance
de travail ouverte, en vous rappelant que nous avons convenu de travailler
jusqu'à 18 h 30 ce soir.
Mme Harel: Je dois comprendre que l'ordre de la Chambre est de
reprendre à 20 h 30?
Le Président (M. Lafrance): C'est exact, oui. 20 h 30
à 24 heures.
Mme Harel: Y a-t-il une raison particulière?
Le Président (M. Lafrance): C'est comme on a convenu ce
matin.
Mme Harel: D'accord. Très bien.
Le Président (M. Lafrance): On va avoir un petit peu plus
de temps de consultation.
Des personnes
Alors, on m'informe qu'on désire revenir au livre premier. C'est
bien ça? Oui? Alors, j'aimerais donc appeler les articles qui ont
été laissés en suspens à ce livre premier, soit les
articles 17 et 18, qui touchent le chapitre premier, De
l'intégrité de la personne, et, en particulier, la question des
soins.
De l'intégrité de la personne
M. Rémillard: Alors, les articles 17 et 18, oui. Voici, M.
le Président, nous avons deux amendements.
L'article 17 du projet est remplacé par le suivant: "Le mineur de
quatorze ans et plus peut consentir seul aux soins non requis par l'état
de santé; le consentement du titulaire de l'autorité parentale ou
du tuteur est cependant nécessaire si les soins présentent un
risque sérieux pour la santé du mineur et peuvent lui causer des
effets graves et permanents."
Ces modifications, M. le Président, visent à respecter
davantage l'autonomie du mineur de quatorze ans et plus en limitant la
nécessité du consentement du titulaire de l'autorité
parentale ou du tuteur aux cas où les soins présentent un risque
sérieux par la santé du mineur et peuvent causer des effets
graves et permanents. La mention des soins bénins devient inutile.
M. le Président, je crois qu'il y a ici une petite erreur de
frappe. Je vais relire le commentaire, si vous me permettez.
Ces modifications, M. le Président, visent à respecter
davantage l'autonomie du mineur de quatorze ans et plus en limitant la
nécessité du consentement du titulaire de l'autorité
parentale ou du tuteur aux cas où les soins présentent un risque
sérieux pour la santé du mineur et peuvent causer des effets
graves et permanents. La mention des soins bénins devient inutile. En
raison de cet amendement, l'article 17 se lirait comme suit: "Le mineur de
quatorze ans et plus peut consentir seul aux soins non requis par l'état
de santé; le consentement du titulaire de l'autorité parentale ou
du tuteur est cependant nécessaire si les soins présentent un
risque sérieux pour la santé du mineur et peuvent lui causer des
effets graves et permanents."
Le Président (M. Lafrance): Oui. Est-ce que vous
désirez nous lire tout de suite l'amendement touchant l'article suivant,
l'article 18?
M. Rémillard: Oui, excusez-moi, M. le Président,
oui. Alors, l'article 18 est modifié: 1° par le remplacement,
à la fin du premier alinéa, du mot "requise" par ce qui suit:
"nécessaire si les soins présentent un risque sérieux pour
la santé ou s'ils peuvent causer des effets graves et permanents";
2° par la suppression du deuxième alinéa.
M. le Président, il s'agit de modifications formelles et de
concordance avec les modifications apportées à l'article 17. En
raison de cet amendement, l'article 18 se lirait comme suit: "Lorsque la
personne est âgée de moins de quatorze ans ou qu'elle est inapte
à consentir, le consentement aux soins qui ne sont pas requis par son
état de santé est donné par le titulaire de
l'autorité parentale, le mandataire, le tuteur ou le curateur;
l'autorisation du tribunal est en outre nécessaire si les soins
présentent un risque sérieux pour la santé ou s'ils
peuvent causer des effets graves et permanents."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Oui,
Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Alors, M. le Président, d'abord, vous indiquez
que... Je suis personnellement satisfaite et je pense que mes compagnes de
Terrebonne et de Marie-Victorin sont également satisfaites de cet
amendement qui nous est présenté. Notre objectif était
connu depuis l'ouverture de nos travaux. Nous souhaitions que la pratique
actuelle qui est en vigueur depuis le début des années
soixante-dix et qui prévoit qu'un mineur peut consentir seul aux soins
requis par son état de santé demeure, que nous n'introduisions
pas d'instabilité sur cette question. Je pense, M. le Président,
que ce sera le cas avec l'amendement que le ministre a
déposé.
Je rappelle à certains d'entre vous, je pense, en particulier
à Me Pineau et à Me Longtin, cet examen très approfondi
que nous avions fait de cette question dans le cadre du projet de loi 20. Nous
avions consacré, je dois le dire, des heures, si ma mémoire est
bonne, pour ne pas dire quasiment des semaines à cette question, non pas
parce que nous ne nous entendions pas, le critique de l'Opposition de
l'époque, M. Marx, et moi-même, mais parce qu'en fait il fallait
convaincre d'autres parlementaires de l'à-propos d'une disposition comme
celle-là qui, en matière de santé publique, je crois,
s'impose. Je n'ai pas à citer tous ces chiffres qui sont maintenant
connus sur l'état de santé de certains adolescents, les
problèmes qui sont rencontrés du fait d'une sexualité qui
est plus précoce. Je crois que le fart qu'un mineur de 14 ans puisse
requérir tes soins qui sont appropriés à son état
de santé, dans les cir-
constances actuelles, est certainement très souhaitable.
Alors, M. le Président, j'apprécie que nous ayons fait
toutes ces consultations. J'apprécie que nous ayons pris le temps de
mener ces consultations à terme, notamment auprès du Conseil du
statut de la femme. Je crois comprendre que nous sommes arrivés à
une formulation qui va, finalement, vraiment bien satisfaire l'objectif que
nous poursuivons.
M. Rémillard: Voyons, M. le Président, notre
objectif a toujours été de respecter la pratique actuelle.
Cependant, M. le Président, il fallait trouver, juridiquement, les
termes pour qu'on puisse cerner, dans sa juste perspective, cette pratique. Je
sais qu'il y a eu beaucoup de discussions à ce niveau-là
lorsqu'on a discute du projet de loi 20. Je sais à quel point ces
discussions ont été difficiles. Pour ma part, je me suis
efforcé de pouvoir consulter le plus d'intervenants possible pour en
arriver à un consensus et je crois que nous avons un consensus social
qui se dégage de notre société et qui se reflète
dans cet article.
Le jeune de 14 ans est une jeune personne, un jeune qui n'est pas encore
pleinement en possession de tous ses droits juridiques, qui va avoir 18 ans,
mais en ce qui regarde sa santé, une situation particulièrement
importante pour tout être humain, si on se réfère au
premier principe de toute charte sur les droits et libertés, qui est la
dignité humaine et la possibilité pour l'être humain de
faire en sorte que son corps, sa personnalité soient intouchés,
soient intacts et soient de sa responsabilité, alors, à partir de
14 ans, il peut prendre des décisions. Nous sommes ici dans des soins
qui sont non requis et, par conséquent, nous apportons donc cette
possibilité pour ce jeune d'avoir des soins non requis dans la mesure
où il exprime sa volonté et dans la mesure où, par contre,
ce n'est pas aussi sans présenter un risque sérieux pour sa
santé ou que ça ne peut pas causer des effets graves et
permanents. Or, je crois, M. le Président, qu'avec cet article nous
consacrons une pratique et nous le faisons avec les termes juridiques qui
établissent vraiment un consensus.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. S'il
n'y a pas d'autres commentaires...
Mme Harel: Alors...
Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Peut-être, M. le Président, puis-je
demander au ministre de nous présenter la portée de l'amendement
introduit à l'article 18.
Le Président (M. Lafrance): M. le ministre.
M. Rémillard: Comme je l'ai présenté tout
à l'heure, M. le Président, il s'agit simplement d'une
modification qui est formelle et en concordance avec ce que nous avons
apporté de modifications à l'article 17. Lorsqu'on lit l'article
18 maintenant, M. le Président, on voit que lorsque la personne est
âgée de moins de 14 ans... c'est toujours le cas d'un mineur, mais
cette fois-ci qui n'a pas l'âge de 14 ans. On a établi tout
à l'heure l'âge de 14 ans comme l'âge que je pourrais
appeler du mineur émancipé en ce qui regarde sa santé, si
vous voulez.
Alors, là, nous sommes dans le cas d'un mineur de moins de 14 ans
ou bien dans le cas de personnes qui sont inaptes à consentir; ce sont
des gens qui ne peuvent pas consentir. Le consentement aux soins qui ne sont
pas requis par son état de santé, c'est toujours dans le
même domaine, comme on parlait tout à l'heure de soins qui ne sont
pas requis. Le consentement est donc donné par le titulaire de
l'autorité parentale, le mandataire, le tuteur ou le curateur. Alors,
des soins qui ne sont pas requis par l'état de santé, on ne peut
pas les donner à un jeune de moins de 14 ans ou bien à une
person-nne inapte sans avoir le consentement de l'autorité parentale ou
du tuteur, curateur chargé de cette personne. (16 h 30)
Nous ajoutons avec l'amendement ceci: L'autorisation du tribunal est en
outre nécessaire si les soins présentent un risque sérieux
pour la santé - c'est la première condition - ou s'ils peuvent
causer des effets graves et permanents. Alors, c'est deux critères,
donc. J'insiste sur le fait qu'il s'agit de soins non requis pour la
santé au départ et nous en sommes donc avec des enfants de moins
de 14 ans ou des inaptes.
Alors, ce que nous disons: Ce n'est pas requis pour leur santé.
Ils ne sont pas en âge ou n'ont pas le discernement nécessaire
pour donner eux-mêmes leur consentement. Le tuteur, le curateur,
l'autorité parentale doit donner son consentement, mais en plus il y a
le tribunal, s'il y a un risque sérieux pour leur santé ou si les
soins peuvent causer des effets graves et permanents.
Mme Harel: Vous savez, M. le Président, quand j'ai
posé la question au ministre, c'est que le commentaire parle de
concordance avec les modifications apportées à l'article 17 et je
ne suis pas tout à fait certaine que c'est de concordance dont il
s'agit, parce qu'à la différence de l'article 17, qui
prévoit que ces soins non requis par l'état de santé
peuvent être consentis par le mineur, par son seul consentement, si les
soins présentent un risque sérieux pour la santé du mineur
et peuvent lui causer des effets graves et permanents... c'est-à-dire si
ces soins ne présentent pas, plutôt, un risque sérieux pour
la santé du mineur et ne causent pas des effets graves et permanents.
Donc, pour dire les choses
clairement, à l'article 17, les deux conditions doivent
être réunies, tandis qu'à l'article 18 une ou l'autre des
conditions suffit. Alors, je ne sais pas si on peut parler de concordance.
M. Rémillard: Si vous me permettez, je vais demander
à Me Longtin de faire un commentaire là-dessus.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
Me Longtin.
Mme Longtin (Marie-José): M. le Président, je pense
que le commentaire s'explique par ceci: c'est que, fondamentalement, par
rapport au texte qui avait déjà été débattu
et discuté à l'article 18, il n'y a pas vraiment eu de changement
de fond. C'est qu'on a repris un peu de la même manière la
présentation des concepts, sauf évidemment ce qui accentue le
"et" et le "ou" qui diffèrent dans les deux cas. C'est dans ce
sens-là, donc, que le commentaire parlait de concordance, parce que
c'est une reformulation plus qu'un changement substantiel.
Mme Harel: C'est simplement pour signifier, signaler plutôt
que ce n'est pas, finalement, le même dispositif. Dans un cas, quand on
parle de concordance, on peut laisser l'interprétation que ce sera le
même dispositif. En fait, ça ne l'est pas. Dans un cas, il y a
juste un test tandis que, dans l'autre cas, il faut passer à travers les
deux tests.
M. Rémillard: Moi, je vous avoue que j'aurais
peut-être un peu de réticence à dire strictement que c'est
une modification formelle de concordance. Peut-être qu'il faut revenir
à tous les commentaires. Or, II faudrait revoir ces
commentaires-là.
Mme Harel: Oui. De toute façon. C'est ça.
D'accord.
Le Président (M. Lafrance): Alors, s'il n'y a pas d'autres
précisions, les articles 17 et 18 sont donc adoptés tels
qu'amendés. J'appelle maintenant les articles 21 et 21.1.
M. Rémillard: M. le Président, nous avons un
amendement à l'article 21 et 21.1 est retiré,
M. le Président. Je vais vous l'expliquer en l'intégrant
dans 21.
Le Président (M. Lafrance): D'accord.
M. Rémillard: Si vous permettez, je vais donc lire
l'article 21, tel que modifié.
Donc, l'article 21 est modifié par: 1° le remplacement,
à la cinquième ligne du premier alinéa, du mot "requis"
par le mot "nécessaire"; 2° le remplacement du deuxième
alinéa par les suivants: "L'expérimentation qui ne vise qu'une
personne ne peut avoir lieu que si l'on peut s'attendre à un
bénéfice pour la santé de la personne qui y est soumise et
l'autorisation du tribunal est nécessaire. "Lorsqu'elle vise un groupe
de personnes mineures ou majeures inaptes, l'expérimentation doit
être effectuée dans le cadre d'un projet de recherche
approuvé par le ministre de la Santé et des Services sociaux, sur
avis d'un comité d'éthique du centre hospitalier
désigné par le ministre ou d'un comité d'éthique
créé par lui à cette fin; il faut de plus qu'on puisse
s'attendre à un bénéfice pour la santé des
personnes présentant les mêmes caractéristiques
d'âge, de maladie ou de handicap que les personnes soumises à
l'expérimentation." 3° par le remplacement du troisième
alinéa par le suivant: "Ne constituent pas une expérimentation
les soins que le comité d'éthique du centre hospitalier
concerné considère comme des soins innovateurs qui sont requis
par l'état de santé de la personne qui s'y soumet."
M. le Président, la première modification est de
concordance et la seconde vise à distinguer les règles relatives
à l'expérimentation sur une personne de celles qui concernent
l'expérimentation sur un groupe. Elle introduit l'examen du projet de
recherche par un comité d'éthique, avant qu'il ne soit soumis
à l'approbation du ministre, afin d'éclairer ce dernier et de
faciliter sa décision. La troisième modification a pour but
d'assurer la protection des personnes mineures et majeures inaptes en confiant
au comité la responsabilité de déterminer ce qui constitue
des soins innovateurs plutôt qu'une expérimentation. En raison de
cet amendement, l'article 21 se lirait comme suit: "Un mineur ou un majeur
inapte ne peut être soumis à une expérimentation qu'en
l'absence de risque sérieux pour sa santé et d'opposition de sa
part s'il comprend la nature et les conséquences de l'acte; le
consentement du titulaire de l'autorité parentale ou du mandataire,
tuteur ou curateur est nécessaire. "L'expérimentation qui ne vise
qu'une personne ne peut avoir lieu que si l'on peut s'attendre à un
bénifice pour la santé de la personne qui y est soumise et
l'autorisation du tribunal est nécessaire. "Lorsqu'elle vise un groupe
de personnes mineures ou majeures inaptes, l'expérimentation doit
être effectuée dans le cadre d'un projet de recherche
approuvé par le ministre de la Santé et des Services sociaux, sur
avis d'un comité d'éthique du centre hospitalier
désigné par le ministre ou d'un comité d'éthique
créé par lui à cette fin; il faut de plus qu'on puisse
s'attendre à un bénéfice pour la santé des
personnes présentant les mêmes caractéristiques
d'âge, de maladie ou de handicap que les personnes soumi-
ses à l'expérimentation. "Ne constituent pas une
expérimentation les soins que le comité d'éthique du
centre hospitalier concerné considère comme des soins innovateurs
qui sont requis par l'état de santé de la personne qui s'y
soumet."
Le Président (M. Lafrance): Alors merci, M. le ministre.
L'article 21.1 est donc supprimé et la discussion est ouverte sur cet
article 21 tel qu'amendé.
Mme Harel: Alors, M. le Président, nous avions beaucoup de
réticences, vous vous rap-pelerez sans doute, au moment où nous
avons examiné l'article 21, sur le fait de confier au ministre de la
Santé et des Services sociaux l'approbation de projets de recherche
plutôt qu'au tribunal. Puis, M. le Président, en entendant
l'argumentation développée par les légistes et le ministre
sur les inconvénients d'une autre façon de faire, compte tenu de
la multiplication de ces projets de recherche - on nous parie de 150 projets de
la nature de ceux qui pourraient être couverts par l'article 21 pour le
seul hôpital Sainte-Justine - alors, compte tenu de cette
réalité incontournable, en tenant compte évidemment de la
balance des inconvénients, parce qu'il n'y avait pas de solution qui
s'imposait d'elle-même, nous avons tenté de formuler une
disposition qui nous permette d'avoir des balises de protection, en fait, que
sont ces comités d'éthique.
Alors, dans les circonstances, compte tenu de l'effort que nous avons
fait de part et d'autre, je crois que c'est ce que nous pouvons réussir
de mieux, à ce moment-ci. Rien ne nous dit qu'au cours des prochains
mois il pourrait y avoir peut-être une formulation qui nous vienne je ne
sais trop d'où, n'est-ce pas? Mais pour tout de suite, compte tenu de
l'évolution du droit en cette matière, on nous a fait valoir
qu'il y avait des zones d'ombre entre les soins connus et reconnus par toute la
profession médicale et l'expérimentation. Il y a entre les deux
une sorte de clair-obscur que l'état de la médecine ne permet
pas, au fur et à mesure de l'évolution des choses, de finaliser.
Alors, dans ces circonstances-là, M. le Président, je pense que
cet amendement était ce qu'on pouvait obtenir de mieux.
Le Président (M. Lafrance): Alors, merci, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve. M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, nous avons beaucoup
consulté... on a beaucoup réfléchi à cet
article-là, comme à tous les articles. Mais, à cet
article-là, c'est particulièrement difficile parce qu'on veut
protéger pleinement la personne et aussi permettre à nos
médecins, au système hospitalier, à l'évolution de
la médecine, que tout le monde puisse faire son travail correctement
pour le mieux-être des malades. Ici, on parie de mineurs ou même de
majeurs inaptes; on parie d'expérimentation et on parie aussi d'une
notion de soins innovateurs. Dans ce cas-là, M. le Président, je
crois que nous avons une formule qui va nous permettre d'établir,
là encore, un consensus social, tel qu'il se dégage.
Nous avions, au début, pensé à un processus qui
aurait été plus formel comme, par exemple, aller devant les
tribunaux, mais on s'était rendu compte, finalement, de par les
consultations qu'on avait faites et les représentations que nous avions
eues des hôpitaux, qu'un tel processus serait beaucoup trop lourd, trop
difficile. Alors, maintenant, avec les comités d'éthique qui sont
en place, nous savons qu'il y a déjà une tradition de ces
comités d'éthique qui existe dans les hôpitaux, et le
ministre reçoit donc fa possibilité, la discrétion de
pouvoir en créer un autre.
Il y a donc là, pour nous, un mécanisme qui est
institué et qui va garantir une pleine sécurité pour la
personne, pour ces mineurs et majeurs inaptes, tout en permettant à la
science d'évoluer et de permettre les traitements de la meilleure
qualité possible pour que la médecine soit la plus efficace
possible.
Alors, voilà, M. le Président, le consensus auquel nous
sommes arrivés.
Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, M. le
ministre, pour ces précisions. Oui, Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve?
Mme Harel: Oui, M. le Président, je constatais, là,
qu'il était fait mention, au deuxième alinéa, d'un
comité d'éthique du centre hospitalier désigné par
le ministre, plutôt qu'un comité d'éthique d'un centre
hospitalier désigné par le ministre. Alors, il faut donc
comprendre qu'if va s'agir d'un comité...
M. Rémillard: De. C'est de?
Le Président (M. Lafrance): Alors, M. le ministre, est-ce
que vous voulez apporter une précision?
M. Rémillard: Oui. Bien, après consultation, parce
qu'on avait beaucoup discuté cet élément-là, M. le
Président, on m'informe qu'il aurait fallu dire "d'un comité
d'éthique d'un centre hospitalier désigné", mais, au point
de vue langue, on dit "du centre hospitalier". Mais comme il y a le mot
"désigné" qui est là, ça demeure à la
discrétion du ministre et, par conséquent, le ministre pourra
décider s'il s'agit du comité d'éthique de
l'hôpital...
Mme Harel: Ou d'un autre hôpital.
M. Rémillard: ...ou bien d'un autre hôpital.
Mme Harel: Et alors, dans le commentaire,
ce sera clairement expliqué...
M. Rémillard: Oui, ce sera clairement expliqué.
Mme Harel: ...qu'il ne s'agit pas du centre hospitalier
d'où provient le projet de recherche?
M. Rémillard: Non.
Mme Harel: Ça pourrait, mais ça ne vient pas
nécessairement...
M. Rémillard: Ça se peut.
Mme Harel: C'est ça. (16 h 45)
M. Rémillard: Non. Parce qu'il y a la discrétion du
ministre par le mot "désigné" par le ministre.
Le Président (M. Lafrance): Merci pour ces
précisions. Donc, l'article 21 est adopté tel qu'amendé.
J'appelle maintenant, toujours dans la même question des soins, l'article
suivant, qui avait été laissé en suspens, soit l'article
25.
M. Rémillard: M. le Président, nous avons un
amendement. L'article 25 est modifié par l'ajout, à la fin, de
l'alinéa suivant: "L'expérimentation ne peut donner lieu à
aucune contrepartie financière hormis le versement d'une
indemnité en compensation des pertes et des contraintes subies."
M. le Président, cet amendement vise à étendre le
principe de gratuité des aliénations de parties ou de produits du
corps aux expérimentations. Il précise cependant qu'en
matière d'expérimentation l'indemnisation des pertes et
contraintes subies n'est pas prohibée. Cette précision est
conforme à la pratique. En raison de l'amendement, l'article 25 se
lirait comme suit: "L'aliénation que fait une personne d'une partie ou
de produits de son corps doit être gratuite; elle ne peut être
répétée si elle présente un risque pour la
santé. "L'expérimentation ne peut donner lieu à aucune
contrepartie financière hormis le versement d'une indemnité en
compensation des pertes et des contraintes subies."
Le Président (M. Lafrance): Je remercie M. le ministre.
Est-ce qu'il y aurait des membres qui aimeraient apporter des précisions
concernant cet article 25 tel qu'amendé?
Mme Harel: M. le Président, je crois comprendre que ce
deuxième alinéa est en partie inspiré du droit
français, un droit français assez récent. J'aimerais que
l'on puisse nous en donner la portée.
M. Rémillard: Mme Longtin, est-ce que vous pouvez nous
donner cette précision?
Le Président (M. Lafrance): Alors, Me Longtin.
Mme Longtin: Oui, M. le Président, effectivement, la
disposition s'inspire d'un article de la loi, dite 881138, relative à la
protection des personnes qui se prêtent à des recherches
biomédicales, qui a été adoptée en France, à
la fin décembre 1988, et qui encadre, dirais-je, le versement
d'indemnités dans le cadre de recherches biomédicales qui n'ont
pas un objectif thérapeutique, donc, une expérimentation.
C'est de là, donc, que s'inspire cette disposition et, entre
autres, la notion de contrainte, qui se trouve à référer
à la nécessité dans laquelle se retrouvent les personnes
qui acceptent souvent de se prêter à une expérimentation de
devoir, assez régulièrement, soit se soumettre à un test
ou faire certains actes ou gestes qui ne sont pas toujours courants dans la vie
quotidienne.
Le Président (M. Lafrance): Je remercie Me Longtin pour
ces précisions. L'article 25 est donc adopté tel
qu'amendé. Le prochain article qui avait été laissé
en suspens est, en fait, la série d'articles 38, 39 et 40, contenus au
chapitre troisième, Du respect de la réputation et de la vie
privée. J'appelle donc les articles 38, 39 et 40.
M. Kehoe: M. le Président, nous demandons encore la
suspension de ces trois articles. Les légistes n'ont pas encore eu le
temps de les étudier en profondeur.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le
député de Chapleau. Alors, les trois articles 38, 39 et 40 sont
donc laissés en suspens.
De la tutelle au mineur
Le prochain article qui avait été laissé en suspens
est l'article 200, qu'on retrouve à la page 46, et qui touche la
question de la tutelle au mineur, contenue au chapitre deuxième, qui
avait été amendé et qui avait été
laissé tel quel
M. Kehoe: C'est tel quel. Il n'y a pas d'amendement à
l'article 200.
Le Président (M. Lafrance): II n'y a pas de nouvel
amendement? O.K. Alors, est-ce qu'il y a des commentaires touchant cet article
200 tel qu'amendé?
Mme Harel: M. le Président, je crois comprendre que
l'article 200 n'est pas modifié, mais que...
Le Président (M. Lafrance): II a été
modifié
déjà.
Mme Harel: II y avait déjà un amendement. Le
Président (M. Lafrance): Oui.
Mme Harel: Excusez-moi. Il ne serait pas rouvert maintenant, mais
il y aurait un amendement qui serait présenté à l'article
566 et qui viendrait en partie satisfaire l'inquiétude qui
s'était exprimée à l'article 200. On peut peut-être
voir l'article 566 immédiatement.
M. Kehoe: Si vous voulez...
Le Président (M. Lafrance): Oui, M. le
député de Chapleau.
M. Kehoe: ...juste 30 secondes pour vérification, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): Alors, si j'ai bien compris,
vous désirez retirer l'amendement à cet article 200 de
façon qu'on puisse l'adopter tel quel.
M. Kehoe: Voilà.
Le Président (M. Lafrance): Et vous désirez qu'on
soulève tout de suite quel article?
Mme Harel: L'article 566.
Le Président (M. Lafrance): L'article 566.
Mme Harel: ...et l'article 563.
Le Président (M. Lafrance): Alors, l'article 200 est donc
adopté. L'amendement est retiré et l'article est adopté
tel quel. Là, vous nous référez à l'article 566 qui
avait été adopté.
Mme Harel: Sur lequel il y aurait un amendement qui serait
déposé.
Le Président (M. Lafrance): Oui. M. Kehoe:
L'article 566.
Le Président (M. Lafrance): Alors, on désire
rouvrir cet article 566?
Mme Harel: On est peut-être mieux de le faire, à
moins de discuter de l'article 200, d'expliquer pourquoi on a retiré
l'amendement et pourquoi on adopterait tel quel l'article 200 parce qu'on
l'adopte tel quel étant donné que l'amendement sera à
l'article 566.
M. Rémillard: Mais là vous n'avez pas 566.
Mme Harel: Vous l'avez dans les mains, mais non pas eux
autres.
M. Rémillard: Oui, oui. Moi, je vois que je l'ai dans les
mains. Alors, il faudrait distribuer 566.
Le Président (M. Lafrance): O.K. Alors, l'article 566, qui
avait été adopté tel quel, est donc rouvert et on
dépose un amendement. Alors, cet amendement étant
déposé, est-ce que quelqu'un est en mesure de nous lire cet
amendement?
M. Rémillard: Oui, M. le Président. Alors,
l'article 566 est modifié par l'ajout à la fin, après le
mot "enfant", de ce qui suit: "; le directeur de la protection de la jeunesse
qui exerçait la tutelle antérieurement à l'ordre de
placement l'exerce à nouveau". M. le Président, cette
modification vise à assurer la continuité dans la protection de
l'enfant en faisant revivre dans la cessation des effets de l'ordonnance de
placement la tutelle légale exercée antérieurement par le
directeur de la protection de la jeunesse en vertu de l'article 200. En raison
de cet amendement, l'article 566 se lirait comme suit: "Lorsque les effets de
l'ordonnance de placement cessent sans qu'il y ait eu adoption, le tribunal
désigne, même d'office, la personne qui exercera l'autorité
parentale à l'égard de l'enfant; le directeur de la protection de
la jeunesse qui exerçait la tutelle antérieurement à
l'ordonnance de placement l'exerce à nouveau."
Or, M. le Président, il y avait deux erreurs que j'aimerais
corriger et je devrais, à ce moment-là, recommencer, je pense, la
lecture de l'amendement proposé au début, tout ce que j'ai dit au
début. L'article 566 est modifié par l'ajout à la fin,
après le mot "enfant", de ce qui suit: "; le directeur de la protection
de la jeunesse qui exerçait la tutelle antérieurement à
l'ordonnance de placement l'exerce à nouveau."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y a des membres qui aimeraient soulever un commentaire touchant cet
article 566 tel qu'amendé? Oui, Me Ouellette.
Mme Ouellette (Monique): Cet amendement, je pense, résulte
d'une crainte que l'on avait en termes de cohérence entre l'article 200,
l'article 563 et l'article 566, dans le sens suivant. C'est que l'ordonnance de
placement accorde aux adoptants l'exercice de l'autorité parentale et si
le DPJ, le directeur de la protection de la jeunesse, était tuteur
jusqu'à l'adoption, il y avait un risque que l'on s'interroge pour
savoir lequel des futurs adoptants et du DPJ allait prendre les
décisions ayant trait à l'enfant placé en vue de
l'adoption. Je pense qu'il y avait... En voulant régler cette
difficulté, on risquait d'en créer une autre qui est
corrigée, semble-t-il, vraisemblablement par l'amendement de 566.
C'était l'hypothèse où, l'enfant étant placé
en vue de l'adop-
tion, les adoptants, pour toutes sortes de raisons, ne poursuivent pas
leur projet d'adoption et remettent l'enfant. Il fallait qu'il y ait quelqu'un
qui exerce l'autorité parentale et l'amendement à l'article 566
vient nous dire que le DPJ, qui l'exerçait avant, l'exercera de
nouveau.
Alors, je pense que c'est ça, la démarche qui a
été suivie pour mener à l'amendement de 566 et c'est la
raison pour laquelle on voulait en traiter à l'occasion de l'article
200.
Le Président (M. Lafrance): Alors, merci pour ces
précisions. Oui?
M. Rémillard: Mme Longtin, M. le Président. Le
Président (M. Lafrance): Me Longtin?
Mme Longtin: Oui, M. le Président. Effectivement, comme on
vient de le souligner, l'objectif à la base de l'amendement qui avait
été proposé à l'article 200 était de
permettre une continuité chez une personne par rapport à la
responsabilité qu'elle a à l'égard d'un enfant. Donc, le
directeur de la protection de la jeunesse étant, à ce
moment-là, tuteur légal, il voulait qu'il le demeure
jusqu'à ce que soit complété le processus. Cependant, on
nous a fait valoir que le risque de conflit entre l'exercice de
l'autorité parentale et, par ailleurs, la responsabilité de la
tutelle qui, à certains égards, recoupe la notion
d'autorité parentale sans s'y confondre faisait que les parents adoptifs
pourraient se sentir dans un état d'insécurité par rapport
à l'exercice de cette autorité parentale sur l'enfant. Cependant,
compte tenu que, dans certains cas, l'adoption n'est pas poursuivie jusqu'au
jugement et que, donc, les effets de l'ordonnance de placement cessent, on
souhaitait faire renaître cette tutelle légale sans, par ailleurs,
obliger les directeurs de la protection de la jeunesse à introduire une
procédure devant les tribunaux.
Le Président (M. Lafrance): Alors, merci, Me Longtin. S'il
n'y a pas d'autres commentaires, l'article 566 est donc adopté tel
qu'amendé.
Des dispositions applicables à certaines
personnes morales
Alors, j'aimerais donc revenir au livre premier et, en particulier,
à l'article suivant qui avait été laissé en
suspens, soit l'article 336, à la page 68, qui est contenu au chapitre
deuxième qui touche les questions des dispositions applicables à
certaines personnes morales. Cet article n'avait pas été
amendé.
M. Rémillard: L'article 336? Est-ce que vous avez
appelé l'article 336, M. le Président?
Le Président (M. Lafrance): Oui, M. le ministre.
M. Rémillard: Oui. J'ai une modification... Le
Président (M. Lafrance): À déposer?
M. Rémillard: ...à apporter, mais je crois que
ça n'a pas encore été distribué. Si vous me
permettez quelques instants, je vais attendre que ce soit distribué.
Alors, M. le Président, l'article 336 est remplacé par le
suivant:
Tout administrateur est responsable, avec ses coadministrateurs, des
décisions du conseil d'administration, à moins qu'il n'ait fait
consigner sa dissidence au procès-verbal des délibérations
ou à ce qui en tient lieu.
Toutefois, un administrateur absent à une réunion du
conseil est présumé ne pas avoir approuvé les
décisions prises lors de cette réunion."
M. le Président, cette modification a pour but de s'assurer qu'un
administrateur ne puisse être tenu responsable d'une décision
à laquelle il n'a pas souscrit. Ainsi, l'administrateur est
présumé ne pas avoir approuvé les décisions prises
par le conseil d'administration en son absence, comme c'est le cas en droit
actuel. En raison de cet amendement, l'article 336 se lirait comme suit:
Tout administrateur est responsable, avec ses coadministrateurs, des
décisions du conseil d'administration, à moins qu'il n'ait fait
consigner sa dissidence au procès-verbal des délibérations
ou à ce qui en tient lieu.
Toutefois, un administrateur absent à une réunion du
conseil est présumé ne pas avoir approuvé les
décisions prises lors de cette réunion."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y aurait des commentaires touchant cet article 336 tel qu'amendé?
Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, c'est une question qui me
venait suite à l'échange que nous avions eu
précédemment. Je me demandais quelle était la durée
du mandat des administrateurs. À 338, il est prévu que la
durée est d'un an. Je me demandais quelle était la
procédure que les administrateurs présents pouvaient utiliser en
cas d'absences répétées d'administrateurs. On me fait
valoir que la réponse se retrouverait dans la loi des compagnies pour
les compagnies et dans les dispositions du Code sur les sociétés.
Mais je ne sais pas quelle est la réponse pour les
sociétés.
M. Rémillard: Ici, en ce qui regarde, d'une façon
générale, le principe général, c'est à 338:
"La durée du mandat des administrateurs est d'un an; à
l'expiration de ce temps, leur mandat
se continue s'il n'est pas dénoncé." Ce qui veut dire que,
si un administrateur s'absente trop souvent pendant son mandat, il reste
toujours la possibilité à la fin de son mandat, après un
an, de dire: Vous n'êtes pas venu aux réunions, vous ne venez pas
aux réunions, donc on ne vous renouvelle pas dans votre mandat. Mais le
mandat est d'un an.
Mme Harel: On convenait que la sanction, finalement, de ne pas
vouloir prendre part aux décisions, ça pouvait être tout
simplement la non-réélection, mais est-ce que ça peut
être une éviction? Si c'est le cas, est-ce qu'il est prévu,
dans le Code, une disposition qui le permette en cas d'absences
répétées?
M. Rémillard: Dans les cas des personnes morales,
l'article 333 nous dit que, si ma mémoire est bonne - je n'ai pas mon
Code - par les statuts, elles peuvent déroger. La corporation peut avoir
ses propres directives. Est-ce que la directive... Je ne voudrais pas dire une
fausseté, mais est-ce que la corporation pourrait dire dans ses
règlements: Si vous êtes absent de deux ou trois réunions,
vous n'êtes plus... Il doit donner sa démission, des choses comme
ça?
Mme Harel: II me semble qu'il y ait une autre disposition.
M. Rémillard: 340. Mme Harel: 340.
M. Rémillard: Ils peuvent aller devant le tribunal, avec
340. Je pense qu'ils ont en main toutes les possibilités.
Mme Harel: Du moment qu'ils ont des moyens à leur
disposition.
M. Rémillard: Ils ont tous les moyens pour faire en sorte
que ça marche.
Mme Harel: D'accord.
Le Président (M. Lafrance): Alors, l'article 336 est
adopté tel qu'amendé. Ceci termine le livre premier. Alors, si on
laissait en suspens ce livre premier, il n'y aurait que les articles 38, 39 et
40 sur lesquels nous reviendrions, si j'ai bien compris. Est-ce que vous
aimeriez aborder les articles du livre deuxième?
M. Rémillard: Attendez, M. le Président, si vous
permettez, une petite seconde, une petite vérification... Le livre
deuxième, en ce qui regarde la famille.
De la famille Le Président (M. Lafrance): J'ai l'article
414 qui était laissé en suspens.
M. Rémillard: C'est ça. Alors, on est prêt
à discuter l'article 414, M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): J'appelle donc cet article 414
qui touche la question du patrimoine familial et en particulier la constitution
du patrimoine. C'est un article, je pense, qui n'a pas été
amendé. S'il n'y a pas de commentaires, cet article 414 est donc
adopté tel quel.
Le prochain article qui avait été laissé en suspens
est l'article 577, lequel avait été amendé.
M. Rémillard: J'aimerais suspendre pour une couple de
minutes, M. le Président, si possible.
Le Président (M. Lafrance): Suspendre les travaux?
M. Rémillard: Oui, juste pour quelques minutes.
Le Président (M. Lafrance): D'accord. Alors, nous allons
suspendre nos travaux cinq minutes.
(Suspension de la séance à 17 h 7)
(Reprise à 17 h 13)
De l'adoption
Le Président (M. Lafrance): Alors, je vous demanderais,
s'il vous plaît, de reprendre vos sièges. Nous allons reprendre
nos travaux. Nous avions donc appelé l'article 577 et je pense qu'il y a
un amendement qui a été déposé. C'est là,
j'assume, un nouvel amendement? Non, c'est le même?
M. Rémillard: C'est le même amendement, M. le
Président, qui a été déposé et suspendu,
mais je préfère le faire distribuer pour que tout le monde l'ait
en main.
Le Président (M. Lafrance): Très bien, M. le
ministre. Alors, est-ce qu'il y a des membres qui auraient des commentaires
à apporter sur cet article 577 tel qu'amendé?
M. Rémillard: On va attendre qu'il soit distribué,
si vous voulez, M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): Cet article touche la question
du caractère confidentiel des dossiers d'adoption.
M. Rémillard: M. le Président, si vous me
permettez...
Le Président (M. Lafrance): Oui, M. le
ministre.
M. Rémillard: ...je pourrais peut-être le relire et
ensuite suivront les commentaires.
Le Président (M. Lafrance): D'accord, M. le ministre. Il y
a aussi, je pense, Mme la députée de Marie-Victorin qui aimerait
intervenir. J'assume qu'il y a consentement ici?
M. Rémillard: Oui.
Le Président (M. Lafrance): Merci. Alors, M. le
ministre.
Caractère confidentiel des dossiers
d'adoption
M. Rémillard: Oui. Alors, M. le Président, au
troisième alinéa de l'article 577, nous devons remplacer le mot
"sollicitation1' par ce qui suit: "; un adopté mineur ne peut
cependant être informé de la demande de renseignements de son
parent."
M. le Président, l'article 577 est modifié de
manière à ce qu'un mineur ne puisse être informé de
la demande de renseignements faite par son parent biologique pour le retrouver.
Une telle modification vise à mieux protéger
l'intérêt de l'enfant. En raison de cet amendement, l'article 577
se lirait comme suit: "L'adopté majeur a le droit d'obtenir les
renseignements lui permettant de retrouver ses parents, si ces derniers y ont
préalablement consenti. Il en va de même des parents d'un enfant
adopté, si ce dernier, devenu majeur, y a préalablement consenti.
"L'adopté mineur a également le droit d'obtenir les
renseignements lui permettant de retrouver ses parents, si ces derniers, ainsi
que ses parents adopttfs, y ont préalablement consenti. "Ces
consentements ne doivent faire l'objet d'aucune sollicitation; un adopté
mineur ne peut cependant être informé de la demande de
renseignements de son parent."
Mme Harel: ...mineur de plus de 14 ans. Nous en avions
parlé, d'ailleurs...
M. Rémillard: Oui.
Mme Harel: ...au moment où nous avions examiné cet
amendement...
M. Rémillard: Oui.
Mme Harel: ...et j'ai l'impression que ça a
échappé, mais l'intention est là. Si le mineur de plus de
14 ans peut consentir à des soins non requis par son état de
santé, il m'apparaft qu'il pourrait être informé de la
demande de renseignements de son parent.
M. Rémillard: Oui. M. le Président, à ce
niveau-là, nous en avons discuté, il est vrai, et il est vrai
aussi que, si on considère le mineur de 14 ans et plus comme
émancipé en ce qui regarde sa santé, il faut donc faire
une relation. On peut faire une relation avec le sujet, ici, qui est
particulièrement important pour un enfant, connaître ses parents,
ses parents biologiques. Donc, par conséquent, c'est un
élément de discussion que nous pouvons avoir. Je pense qu'on
s'entend, M. le Président, pour dire que nous représentons cet
amendement que nous avons présenté il y a déjà
quelque temps. Nous allons le commenter, quitte, ensuite, à refaire le
point et à trouver un consensus.
Le Président (M. Lafrance): Mme la députée
de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Oui, M. le Président. J'aimerais, en fait,
plaider en ce qui concerne les enfants adoptés qui ont droit à
leurs origines. Je me base sur la charte des droits de l'enfant, qui
reconnaît ce droit à ses origines et qui semblerait être
adoptée prochainement, en décembre. En fait, la
déclaration des droits de l'enfant devrait être adoptée. Je
pense que c'est un droit fondamental, le droit a ses origines. On ne peut pas
brimer ce droit-là pour satisfaire un autre droit, celui des parents par
rapport aux enfants.
Moi, pour m'être occupée du dossier sur l'adoption
internationale... Il faut se rendre compte qu'à l'heure actuelle, au
Québec, il n'y a pratiquement plus d'enfants qu'on peut adopter et je
trouve qu'une telle chose, ici, ne tient pas compte de la réalité
à l'heure actuelle où de moins en moins il y a d'adoptions au
Québec, parce qu'il n'y a plus d'enfants. Comme les parents sont
obligés d'aller sur le plan international pour adopter un enfant, pour
avoir un projet, à ce moment-là, il est évident que les
enfants qui sont adoptés, qu'ils viennent de la Chine, du Chili, du
Japon ou de la Corée - ce sont les endroits où, actuellement, on
pratique le plus l'adoption... On ne peut pas cacher les origines à cet
enfant, on ne peut pas lui cacher ses origines.
Donc, on serait en train de faire deux classes d'enfants adoptés.
Il y aurait les enfants, parce qu'ils sont adoptés par le biais de
l'adoption internationale, auxquels on ne peut pas cacher leurs origines, mais,
parce qu'on les adopte ici au Québec, ils deviendraient, eux,
lésés, du fait que la ressemblance, au niveau de la couleur de la
peau ou des traits, ferait en sorte qu'on ne pourrait cacher leur statut. Moi,
je trouve ça tout à fait...
Depuis ce matin que je vous écoutais... Quand vous essayez de
faire un consensus à partir de ce qui existe à l'heure actuelle,
ce qui existe à l'heure actuelle, c'est cette situation-là. Bien
sûr, si on veut protéger... En fait, la situation du début
du siècle, au tout début de
1900... À partir des années soixante il y a eu,
effectivement, l'adoption massive, il y a 300 000 enfants qui ont
été adoptés, donc il y a eu... Mais là ce sont des
adultes aujourd'hui et, pour répondre aux conditions qui sont inscrites
dans la loi, il faut au point de départ savoir qu'on est adopté
pour vouloir faire une recherche. Si on n'a jamais su qu'on était
adopté, c'est très difficile de vouloir entreprendre une
recherche ou de pouvoir obtenir ses origines.
C'est dans ce sens que je dis, fondamentalement... Quant à moi,
je considère que le droit à ses origines est un droit fondamental
et que même le jeune de 14 ans et plus... Il y a un article qui a
été apporté par le mouvement Retrouvailles que je
trouve... en tout cas, qui tient sa place. Il est peut-être mal
formulé sur le plan légal. Il pourrait être repensé,
en tout cas, à mon avis. Mais ils disent que - et ça aussi,
ça fait partie de la charte des droits de l'enfant - que tu as le droit
de connaître tes véritables origines au même titre que
l'adopté majeur si un praticien en service social, un thérapeute
ou un médecin juge que cela est nécessaire à ton
équilibre et à ta santé physique, mentale ou
psychologique.
Moi, je pense que ces considérations-là, ça fart
partie aussi des droits fondamentaux pour un enfant de 14 ans et plus d'avoir
droit à ses origines indépendamment du consentement du parent.
C'est un droit fondamental. Je pense que cet article, en tout cas, pourrait
être repensé - je vous le dis bien honnêtement - sur le plan
juridique et réécrit pour que ce soit concordant avec le jargon
juridique. Mais je pense qu'il faut retenir, en fait, cette
idée-là qui, à mon avis, est fondamentale. Ça fait
partie des droits fondamentaux pour un enfant d'avoir droit à ses
origines en ce qui concerne son équilibre physiologique, moral et
social.
En ce qui concerne aussi... Il y avait le troisième
alinéa: "Un adopté mineur de 14 ans et plus a le droit
d'être informé de la demande de renseignements de son parent
biologique sans que ses parents adoptifs y aient consenti. Cependant, si cet
enfant désire connaître sa véritable identité et
s'il désire rencontrer son parent biologique sans que cela soit
recommandé par un praticien en service social..." Alors, on pourrait
faire l'inverse. Si vraiment on voit que ça peut causer
préjudice, à ce moment-là, eh bien, que ce soit des gens
d'instances compétentes qui apportent un jugement et non pas le parent
adoptant parce qu'il pourrait y avoir, à ce moment-là, des motifs
tout à fait égoïstes de la part du parent adoptant de ne pas
vouloir révéler les origines de l'enfant. Ce serait tout à
fait à l'encontre d'un droit, à mon avis, essentiel, le droit
à ses origines.
Donc, M. le Président, j'aimerais qu'on puisse regarder... Il y
avait aussi un autre aspect qui est très important, à savoir si,
bon, advenant le cas... Vous êtes un adulte. Vous avez com- mencé
à entreprendre des recherches pour connaître votre parent et, en
cours de route, vous mourrez. Vos descendants pourraient connaître leur
grand-mère et ils pourraient vouloir aussi aller retrouver leurs
origines pour des raisons biologiques héréditaires. On sait
très bien qu'à l'heure actuelle il y a beaucoup de maladies
héréditaires, il y a beaucoup de maladies biologiques. On a vu
des mariages consanguins. On est arrivé, à un moment
donné, à des problèmes au niveau de certains enfants.
Quand on a fait l'analyse de sang, on s'est aperçu que c'était
frère et soeur et même, dans certains cas, c'étaient des
jumeaux.
Alors, on peut arriver à toutes sortes de situations. Moi, je
pense qu'il faut qu'on se mette dans l'esprit dans lequel nous vivons à
l'heure actuelle. Vous savez, la vie privée, c'est vrai, mais il n'en
reste plus tellement. Quand on parie d'un droit aussi fondamental que celui de
ses origines, je pense qu'à ce moment-là, si on admet qu'un
enfant de 14 ans peut décider en ce qui concerne certains soins de
santé, je pense qu'on pourrait peut-être aussi décider,
à ce moment-là, qu'il a droit aussi à ses origines et de
connaître ses origines en tenant compte de certaines balises. Mais, en
tout cas, je pense que ça deviendrait... Moi, à mon avis, il faut
faire preuve actuellement de vivre à notre époque et de
considérer exactement la situation telle qu'elle est à l'heure
actuelle.
Le Président (M. Lafrance): M. le ministre.
M. Rémillard: Oui. Alors, M. le Président, il
s'agit ici d'un sujet particulièrement difficile, sujet qui, je pense,
nous touche tous, qui me touche, en tout cas, beaucoup comme ministre de la
Justice et comme humain, pas seulement comme ministre, mais comme humain parce
que c'est un sujet difficile. La députée de Marie-Victorin vient
de soulever certaines difficultés qu'on a. Ce n'est pas facile de
pouvoir trouver la perspective qu'on doit suivre en fonction des principes qui
sont en cause.
Pour moi, le premier principe, c'est toujours la dignité de
l'être humain et de cette dignité-là découle
certainement le droit de connaître tes origines. Pour moi, c'est un
premier principe. À ce principe vient se greffer aussi le principe du
respect de la vie privée, le principe du respect de la vie familiale, de
la sécurité psychologique que peut apporter une vie familiale, le
respect d'un consensus social qui peut être établi dans une
société.
Si on prend tous ces principes-là, qu'on essaie de dire
maintenant quelle pourrait être la situation pour un homme, une femme, un
enfant, un majeur - prenons aussi le majeur parce que, pour comprendre la
situation de l'enfant, il faut prendre la situation du majeur aussi - qui veut
connaître ses parents biologiques? Ce que nous disons, c'est qu'il y a
possibilité de connaître ses
parents dans la mesure où ce parent, c'est-à-dire la
mère biologique, accepte de dévoiler son identité. On veut
protéger, donc - premier principe - l'identité. Même si
c'est un majeur, c'est un principe qu'on garantit. Si c'est un mineur, par le
fait même, il y a une autre dimension, c'est-à-dire
l'autorité des parents adoptifs qui sont en cause. Là, on ajoute
un autre consentement. Au consentement de la mère biologique, on ajoute
aussi le consentement des parents adoptifs.
Il faut donc que les deux soient consentants pour que l'enfant, le
mineur, puisse avoir le droit de connaître l'identité. Ce qui veut
dire que dans une situation, par exemple, où fa mère biologique
serait d'accord pour dire qu'elle est la mère de cet enfant, mais les
parents adoptifs diraient non, il ne pourrait pas la connaître. Les
parents adoptifs diraient: Oui, tu pourrais connaître ta mère
biologique, mais la mère biologique dirait: Non, je ne veux pas faire
connaître mon identité, il ne pourrait pas la connaître non
plus. Actuellement, c'est la situation. Je ne me trompe pas jusqu'à
présent, c'est ça?
Une voix: Oui.
M. Rémillard: C'est comme ça, la situation.
Il y a aussi l'article 578. Si l'enfant est tellement perturbé
psychologiquement, ça lui cause tellement une situation difficile -
ça peut arriver - qu'il se retrouve dans un genre de dépression
nerveuse ou qu'il est perturbé à un point que le médecin
considère que sa santé est en cause - la santé, ce n'est
pas simplement la santé physique, c'est la santé mentale aussi,
psychologique - par conséquent, s'il y a un médecin qui le
constate, l'enfant peut s'adresser au tribunal. Le tribunal, lui, peut exiger
que l'enfant connaisse ses origines, même si les parents adoptifs sont
contre, même si la mère biologique est contre; même si les
deux sont contre, il peut le faire.
Alors, dans cette perspective, jusqu'où on peut aller? Est-ce
qu'on peut ajouter une autre dimension qui dirait, par exemple, que le mineur
de 14 ans et plus n'a pas besoin du consentement de ses parents adoptifs? C'est
une chose qui peut être considérée, oui. Ça, je suis
prêt à regarder ça de très très près.
Est-ce qu'on peut aller plus loin que ça? Est-ce qu'on peut aller plus
loin que ça, respectant la famille, respectant la vie privée et
respectant fondamentalement le droit à la dignité humaine, donc
au respect de ses origines? Il me semble que là ça devient plus
délicat. Mais je crois certainement qu'on peut regarder de près
que, pour un enfant de 14 ans et plus, on pourrait, à ce
moment-là - il faudrait le regarder de près et consulter encore -
dire: sans la permission des parents adoptifs. C'est une possibilité
qu'il faudrait regarder de près et consulter.
Mme Vermette: M. le Président...
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Oui,
Mme la députée de Marie-Victorin. (17 h 30)
Mme Vermette: ...je voudrais poser une question au ministre
à savoir que, lorsqu'on parle du consentement des deux parties, il faut
que l'adoptant soit au courant, d'une part, qu'il a été
adopté pour faire une demande et, deuxièmement,
évidemment, la mère biologique peut faire une demande aussi, mais
ça, ça va de soi, elle est au courant qu'elle a mis au monde un
enfant. C'est beaucoup plus facile de la part de la mère que de
l'enfant, évidemment.
Par contre, vous le savez, il y a quelques années, c'était
très mal vu, en fait, d'adopter un enfant... pas d'adopter un enfant,
mais de savoir que l'enfant aurait pu être adopté, etc. Il y avait
plein de préjugés. Et ça, j'en conviens très bien.
On peut voir qu'il y a eu une très grande évolution et,
même aujourd'hui, ça évolue très rapidement en fait.
On a même vu des contrats où les parents négociaient des
contrats pour avoir un bébé et... Bon, en fait, il y a toutes les
formules possibles et impossibles aujourd'hui en ce qui concerne les
méthodes de reproduction.
Donc, évidemment, l'évolution a changé et ça
n'a plus la même signification. On ne peut plus lui apporter la
même signification. Quand vous parliez de protéger la famille ou
la vie privée... Quand les gens sont obligés d'aller en centre
hospitalier se faire inséminer pour avoir un enfant, dans les cliniques
de fertilité, bon, il y a le dossier, évidemment, mais en fart
c'est encore relatif tout ça.
Moi, je pense qu'à l'heure actuelle on est en train de faire
fausse route, parce que c'est un acte d'amour que l'adoption. C'est un acte
comme donner naissance à un enfant. Il y a une gratuité
là-dedans aussi. On va chercher un enfant parce qu'on veut créer
une famille, parce qu'on veut partager de l'amour. Et c'est des principes
très importants. Je trouve ça, moi... Je me reporte à
aujourd'hui. Aujourd'hui, à l'heure actuelle, je pense que les gens
parlent très aisément s'ils ont l'intention d'aller adopter un
enfant. Écoutez, je me suis occupée beaucoup du dossier sur
l'adoption internationale et j'en ai vu des parents qui en parlaient de leur
projet. Vous en avez vu a la télévision, c'est allé
partout ces choses-là. Les gens ont étalé sur la place
publique leur désir de vouloir un bébé et d'aller
même partout à travers le monde pour avoir un
bébé.
Donc, nécessairement on ne cache plus cet état de fait de
vouloir un bébé ou d'adopter un bébé. C'est bien
vu, même socialement, aujourd'hui. C'est qu'il y a tellement de parents
qui ne veulent plus d'enfants que quand tu en adoptes un c'est même
socialement très bien vu. Les enfants qui restent au Québec ce
sont des enfants plutôt âgés que jeunes, justement
à
cause du lien qu'on maintient toujours avec la mère le plus
longtemps possible. Donc, quand on peut adopter un enfant, on a très peu
de bébés en bas âge. Ce sont des enfants beaucoup plus
vieux et même très souvent hypothéqués parce qu'ils
ont fait des familles d'accueil avant de pouvoir être adoptés.
Donc, le contexte est excessivement changé à l'heure
actuelle et on veut faire ça pour aujourd'hui, au moment où on se
parle et non pas pour protéger des gens à l'époque
antérieure. Là, vous me dites qu'il faut répondre,
évidemment, à l'opinion publique. Il y a eu des sondages qui ont
été faits de l'opinion publique. Il y en a eu un le 19 mai
à Radio-Québec. Et, à ce moment-là, sur ce
sondage-là, il y a eu 2600 répondants qui ont répondu
qu'ils étaient en faveur des retrouvailles et là-dessus il y en
avait seulement 50 qui étaient contre.
Or, il faut croire que dans l'opinion publique on a déjà
fait un pas considérable. Quand on a l'occasion de le dire, on est en
accord avec ce mouvement-là, les gens sont favorables. Bien sûr
que pour certains parents adoptifs, s'ils n'ont pas suivi l'évolution,
je peux considérer que pour eux c'est difficile d'admettre ça
parce que c'est remettre en cause les valeurs de l'époque et remettre en
cause un passé qu'ils ne veulent pas remettre sur la place publique. Et
ça, je peux le comprendre très bien. Mais est-ce qu'on peut
punir, en fait, une génération à venir et des gens
maintenant rendus dans l'âge mature pour, en tout cas, certains
individus? C'est la question que moi je me pose à l'heure actuelle.
Il y a des gens qui sont pris avec cela. Vous savez qu'il y a des gens
qui se suicident, même chez des adultes, à l'heure actuelle. Cette
semaine il y a encore quelqu'un qui cherchait ses parents et, parce qu'on lui a
refusé cette possibilité-là, s'est suicidé. C'est
des cas qui peuvent arriver aussi. C'est des cas extrêmes, j'en conviens,
mais c'est des choses qui sont possibles.
M. Rémillard: II y a 578, mais je m'excuse, allez-y.
Mme Vermette: Oui. 578 pourrait maintenant... qui pourrait y
aller. Mais ce que je pense, en tout cas... Pourquoi ne pas, M. le ministre,
remettre tout ça? Il y a peut-être des choses qu'on peut aller...
aujourd'hui, ou repenser en tout cas, pour d'ici la fin du débat en
commission parlementaire, sur le projet de loi 125, sur la réforme du
Code, pour apporter certaines modifications notamment au niveau des jeunes.
Moi, j'aimerais qu'on aille beaucoup plus loin et peut-être qu'on
transfère toute cette question du projet Retrouvailles à votre
Institut québécois de réforme du droit. Ça pourrait
être l'un des volets importants à étudier, à ce
moment-là, parce qu'on est dans une société en mutation,
une société où on ne peut plus considérer les
mentalités comme il y a 20, 30 ou 40 ans. Il faut en tenir compte et
surtout dans ce volet-là, qui est un volet, quant à moi, parmi
les plus fondamentaux et qui touche les fibres les plus sensibles pour un
être humain, ses origines. Vous avez tout l'aspect des maladies
héréditaires, à part ça. C'est incroyable le nombre
de maladies héréditaires. Il y a des gens qui entrent dans les
hôpitaux et qu'on a de la difficulté... Peu importe
l'âge.
Le Président (M. Lafrance): Merci, Mme la
députée de Marie-Victorin. Avant, si vous le permettez, M. le
ministre, il y a Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve qui
aimerait apporter un commentaire sur...
Mme Harel: J'irai après M. le ministre. Le
Président (M. Lafrance): Oui? Bon.
M. Rémillard: Est-ce que je peux répondre? Oui?
Le Président (M. Lafrance): Alors, M. le ministre.
M. Rémillard: Tout simplement pour dire, M. le
Président, qu'il n'y a personne ici comme membres de cette commission
qui n'est pas sensible et touché par les propos de Mme la
députée de Marie-Victorin. Elle plaide très bien. Je pense
que ce sont des sujets qu'on a tous à coeur. Quand vous dites que
l'adoption est un geste d'amour, c'est un geste extraordinaire. Tantôt,
on va étudier toute la question des mères porteuses. Bon Dieu! Au
lieu de prendre tous ces moyens que, pour ma part en tout cas, je trouve
très questionnables, pourquoi pas adopter un enfant?
Il y a le problème, évidemment, qu'il n'y a plus d'enfants
a adopter ici et le problème de l'adoption internationale, j'en suis.
Mais, d'un côté, il y a les droits des enfants et, d'un
côté aussi, il y a le droit d'une femme qui a mis cet enfant au
monde, qui a droit à une vie privée aussi. Il y a aussi les
droits des parents adoptifs qui ont fait ce geste d'amour, qui ont construit
une famille, qui donnent une sécurité familiale à cet
enfant et puis qui veulent aussi protéger cette entité familiale
et qui ont une perception, ils ont leur propre perception de la famille.
Vous me dites: C'est un geste d'amour, on ne se cache plus ça
maintenant. Dire à un enfant: Je t'ai adopté, c'est de lui dire:
Je t'aime. C'est facile, oui. Mais ce n'est pas comme ça pour tout le
monde peut-être encore. J'essaie de trouver le moyen de dire...
Peut-être qu'il y a des gens qui ne veulent pas ça, qui aiment
mieux que ça ne se sache pas à ce niveau-là.
Peut-être bien. Moi, je me dis: Pourquoi ne pas essayer de
protéger aussi une cellule familiale qui reçoit cet
enfant adopté, qui lui crée un milieu dans lequel il peut
vivre? Cet enfant-là a le droit à ses origines biologiques et la
mère doit pouvoir donner son consentement, c'est ça.
Maintenant, qu'est-ce qu'on pourrait apporter de plus, si on ne touche
pas a des droits, à ce moment-là, qui peuvent nous causer des
problèmes? Moi, je retiens la suggestion de Mme la députée
qui nous dit: Ça devrait être un sujet étudié
à l'Institut. Je dis oui. C'est un sujet certainement d'évolution
de société qui devrait être étudié en
priorité avec quelques sujets qu'on a identifiés par l'Institut
québécois de réforme du droit.
L'autre aspect, c'est en ce qui regarde les jeunes de 14 ans et moins et
de 14 ans et plus. Si on pouvait aborder cette question-là et trouver
peut-être un moyen à ce niveau-là. Je pense que c'est une
question qu'on pourrait, à ce moment-là, regarder. Moi, ce que je
proposerais à cette commission, M. le Président... Nous apportons
des éléments nouveaux.
Je vais terminer simplement en disant que, présentement, on
élargit. Il faut bien comprendre que, présentement, tout ce qui
existe c'est pour le majeur. Là, on permet quand même au mineur,
mais on le permet sous condition d'avoir le consentement des parents.
Là, on irait encore un petit peu plus loin, et on dirait: Oui, mais le
mineur de 14 ans et plus serait émancipé, d'une certaine
façon. C'est une question qu'on peut discuter. Alors, je suis prêt
à proposer à cette commission, M. le Président, de
suspendre encore cette question, de continuer nos consultations et d'en
discuter le plus tôt possible après qu'on aura pu prendre contact
avec les principaux intervenants.
Le Président (M. Lafrance): Oui, merci, M. le ministre.
Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve m'avait demandé la
parole et, ensuite, on reviendra vers vous, Mme la députée de
Marie-Victorin.
Mme Harel: Je vous remercie, M. le Président. Le fait est
qu'au chapitre deuxième, à la section qui porte sur le
caractère confidentiel des dossiers d'adoption, il y a un
élargissement. Moi, depuis 11 ans que je suis dans ce Parlement, j'ai
vécu à une vitesse absolument vertigineuse révolution des
esprits sur cette question. Je me rappelle les débats que nous avions
eus en 1984 au moment de l'examen du projet de loi 20. Cette question m'a
passionnée à l'époque et maintenant encore,
évidemment. Je me rappelle avoir tenté d'obtenir l'état de
la législation dans des pays qui ont un niveau de vie qui se compare au
nôtre, une culture qui se compare à la nôtre, notamment les
pays nordiques et l'Angleterre et la France. D'ailleurs, l'Institut pourrait
s'en inspirer, il faut voir qu'il y a là une législation qui est
extrêmement ouverte.
Moi, dans toute cette question-là, par rapport à toute
cette question-là, je crois qu'il y a un élément qui n'est
pas clairement exprimé et autour duquel les difficultés se
génèrent, si vous me permettez cette expression, c'est le droit
de savoir que l'on est adopté. Même si on convient... Ce à
quoi je souscris, moi, c'est qu'il faut qu'il y ait un consentement pour qu'il
y ait retrouvailles. Je souscris à ça, mais encore faut-il que
l'on sache que l'on est adopté. Le droit aux retrouvailles ne doit pas
être confondu avec le droit de savoir que l'on est adopté. Il y a
eu une sorte de confusion dans l'opinion puis notre Code ne clarifie pas cette
question. Alors, on ne dit pas clairement qu'il y a un droit à savoir
que l'on est adopté. À partir de ce moment-là, on
introduit des droits. Par exemple, à l'article 578, il y a un
élargissement très réel s'il y a un préjudice grave
qui risque d'être causé à la santé de
l'adopté, mais encore faut-il que l'adopté sache qu'il l'est pour
pouvoir faire valoir ce droit, tout autant pour ses descendants majeurs ou
mineurs qui peuvent aussi se prévaloir, en allant devant le tribunal, du
droit de connaître leur origine si un préjudice grave risque
d'être posé à leur santé.
Mais tout ça... Vous voyez, on y arrive à tâtons
d'une certaine façon, mais la prémisse, elle, n'est pas
là. Est-ce qu'il y a ou pas un droit de savoir que l'on est
adopté? Il ne faut pas confondre, là. Ce droit de savoir que l'on
est adopté n'emporte pas pour autant le droit aux retrouvailles sans une
condition préalable qui est le consentement. Ça c'est une autre
chose.
Moi, cette idée-là m'est venue en prenant connaissance
notamment d'une décision de la Cour d'appel récente, 27 mai 1991,
suite à un jugement qui est intervenu, je pense que c'est dans le
district de Baie-Comeau et c'est la personne... Je suis bien à l'aise
pour en parler, parce que c'est la personne qui avait fait cette demande qui me
l'a fait parvenir. Finalement, ce que la Cour d'appel dit c'est: L'article 632
du Code civil du Québec établit le droit aux retrouvailles, mais
ce droit demeure assujetti au consentement préalable, soit de l'enfant
adopté devenu majeur - là, on pourra voir en échangeant
à nouveau si le mineur de plus de 14 ans pourrait aussi donner ce
consentement - soit des parents biologiques, selon le cas. La Cour d'appel
refuse de se prononcer sur une opinion émise par le premier juge
à l'effet que l'article 632 de notre Code actuel comporterait
l'obligation implicite pour les parents adoptrfs de faire connaître
à l'enfant son statut. (17 h 45)
Bon, le premier juge avait longuement disserté là-dessus
en signalant que l'enfant ignorant son statut ne pouvait pas donner de
consentement. Pour consentir, ça suppose une connaissance. L'intention
du législateur semblait claire à l'effet que la
possibilité des retrouvailles ne s'adresse qu'à ceux qui
connaissent leur statut d'adopté, car personne ne peut donner un
consentement à ce qu'il ne connaît pas. Le premier juge
ajoutait: Si le législateur veut permettre les retrouvailles pour les
enfants majeurs qui ne connaissent pas leur statut et ainsi provoquer le
dévoilement de l'adoption, il n'a qu'à le dire clairement. En
d'autres termes, une fois qu'on a dit clairement qu'il faut un consentement
préalable pour qu'il y ait des retrouvailles, on n'a pas clarifié
une question qui, dans les législations des autres pays, l'est, à
savoir: Est-ce qu'on a le droit de connaître son statut d'enfant
adopté? On pourrait élargir comme ça, à l'infini,
tous les droits, mais ces droits-là vont rester caducs d'une certaine
façon si la personne n'a pas le droit de savoir qu'elle peut les
utiliser. Bon. Cela dit, le consentement, moi, oui, j'y souscris au
consentement, dans un comme dans l'autre. Ça peut être aussi
l'enfant majeur qui refuse. On n'a pas à juger des motifs des personnes,
mais ça, à mon point de vue, ça fait partie de la
liberté humaine.
Mais, au-delà de toutes choses, il y a une seule valeur qui me
tient à coeur, au-delà de la réputation et au-delà
de la vie privée, c'est l'intégrité des personnes.
À mon point de vue, dans l'intégrité des personnes, il y a
cette question de la connaissance de ses origines. J'en avais parlé au
ministre. Quand je pense qu'il y a des gens sains d'esprit, de notre âge,
qui s'installent sur des divans pendant des années pour se raconter leur
petite enfance, j'imagine que ça a une certaine importance de savoir...
C'est une question d'identité et on est de plus en plus sensibles
à cette question d'identité des êtres.
Je crois qu'on a beaucoup évolué sur cette
question-là. Autant je suis partisane d'une protection à tous
crins de la vie privée, autant on a fait lever les écrous de la
vie privée qui faisaient qu'on avait le couvercle sur la violence
conjugale, sur la violence familiale, sur les abus, sur le harcèlement.
Moi, par exemple, je me suis posé la question: Si, dans ma famille
élargie, j'apprenais, par exemple, qu'un enfant était l'objet
d'un harcèlement, qu'est-ce que serait ma réaction? Ma
réaction serait de dire: C'est inacceptable. Que ce soit connu, que ce
soit... La réputation des familles ne vaut pas l'intégrité
d'un enfant. C'est une question d'échelle de valeurs. Je ne demande pas
de la faire partager. Je ne veux pas la faire voter. Ha, ha, ha!
Mais cela dit, à ce moment-ci de nos travaux, ce qu'on peut faire
de mieux, c'est d'adopter, peut-être avec, comme le disait le ministre,
une sorte de possibilité de consentement pour le mineur de 14 ans et
plus, comme il l'a mentionné, et puis peut-être...
Une voix: La possibilité de poursuivre...
Mme Harel: Moi, ce que je souhaiterais, c'est que l'Institut
étudie surtout cette question du droit de savoir que l'on est
adopté. Il serait possible aussi que l'on décide que ce
droit-là n'est pas rétroactif. Le droit de savoir que l'on est
adopté pourrait commencer à partir du moment où la
législation est adoptée.
Une voix: C'est ça.
Mme Harel: Donc, dorénavant, ce droit-là devrait,
si vous voulez, être appliqué.
M. Rémillard: Oui.
Le Président (M. Lafrance): Merci. Alors, M. le
ministre.
M. Rémillard: Oui, alors, M. le Président, on en
arrive à des conclusions en ce qui regarde l'Institut. Je pense qu'on
est tous d'accord pour confier un mandat à l'Institut et je confirme ce
que je disais tout à l'heure.
Maintenant, je voudrais simplement ajouter... Lorsque Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve nous dit qu'il y a une
évolution des mentalités, c'est évident. Il y a une
très grande évolution des mentalités depuis les 10
dernières années. Lorsqu'on adopte un enfant maintenant, ce n'est
plus un enfant illégitime.
Mme Harel: Oui.
M. Rémillard: Bon. Alors, tout le concept d'enfant
illégitime... C'est la même chose lorsqu'on parle de
concubin...
Mme Harel: Adultérin.
M. Rémillard: ...d'adultérin. On parle de concubin,
maintenant. Concubin... Il n'y a pas tellement longtemps, c'était sa
concubine, et c'était épouvantable. Un concubin, ce
n'était pas si mal, mais la concubine, attention! c'était
terrible.
Mme Harel: Ah oui! Dans ma famille, à Noël, on ne
recevait pas les gens qui n'étaient pas mariés.
M. Rémillard: Ah oui? Bon. Alors, écoutez, il y a
eu une évolution. Ça s'est passé très rapidement.
Mais je me dis, cette évolution... Est-ce que c'est le rôle du
législateur d'imposer une règle et de dire aux parents adoptifs:
Vous devez, vous avez l'obligation de dire à l'enfant que vous avez
adopté qu'il est un enfant adopté? Est-ce qu'on doit dire
ça ou bien si on ne doit pas, étant donné qu'il y a
l'évolution des mentalités, laisser ça aux parents? Les
parents, ils ont une discrétion, eux autres aussi. Les parents qui ont
fait le geste d'amour - pour prendre les paroles de la députée de
Marie-Victorin - ils vont juger en fonction du contexte de l'évolution
de la société. Ils vont juger aussi en fonction de cet être
qu'ils ont adopté et qui vit avec eux.
Donc, moi, je pense que c'est là-dessus que l'Institut doit se
pencher. Personnellement, je vais vous dire que ça demande des
réflexions, des consultations, et je pense que l'Institut serait
prêt.
Alors, si je comprends bien nos discussions, je les résume en
disant ceci, et on me corrigera si ce n'est pas ça. On s'entend, et on
dit: L'Institut devrait revoir cette question et entre autres, en particulier,
ce qui regarde la possibilité d'obliger les parents adoptifs d'informer
l'enfant adopté qu'il est adopté.
Mme Harel: C'est ça.
M. Rémillard: C'est une question qui serait
étudiée par l'Institut. Pour le moment, nous, on suspend cet
article-là et on regarde la possibilité de l'ouvrir encore un peu
plus en disant que l'enfant de 14 ans et plus pourrait se passer du
consentement des parents adoptifs pour connaître l'origine de sa
mère biologique. Ça va?
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Mme la
députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: II y avait une autre situation, aussi, la situation
où la mère biologique ou l'adopté... Dans le cas du
décès d'une des deux parties et que les enfants de
l'adopté décident de continuer la recherche de la mère,
que ce soit aussi reconnu comme étant possible. Ça, ce n'est pas
évident, à l'heure actuelle.
M. Rémillard: Je peux regarder ça.
Mme Vermette: Qu'il y ait cette possibilité-là; que
ça se fasse dans les deux sens.
Le Président (M. Lafrance): Merci, Mme la
députée de Marie-Victorin. Donc, l'article 577 est laissé
en suspens tel qu'amendé. J'aimerais maintenant appeler une série
d'articles, 579 à 583, qui touchent la question de la procréation
médicalement assistée. Je vous rappelle que ce bloc d'articles
avait été reporté après l'article 536, mais les
articles, comme tels, n'avaient pas été adoptés. Certains,
oui. Certains articles avaient été amendés. Les articles
581 et 583 avaient été amendés.
De la filiation par le sang De la procréation
médicalement assistée
M. Rémillard: On va donc, M. le Président,
redistribuer ces changements, ces modifications au cas où nous aurions
quelques changements sur les papiers que nous avons en main, pour être
bien sûrs qu'on parle de la même chose. Il s'agit, donc, de
l'article 536. Il y a le titre du chapitre. Ensuite, il y a 536.3, 536.4 et
536.5. Alors, j'y vais. J'aborde tout d'abord le premier amendement.
Le chapitre troisième, De la procréation
médicalement assistée, du titre deuxième, De la filiation,
du livre deuxième, comprenant les articles 579 à 583, est
déplacé après l'article 536.
Deuxièmement, le projet est modifié par l'insertion,
après cet article 536, d'une section IV intitulée De la
procréation médicalement assistée, et les articles 579
à 583 qui constituaient ce chapitre sont renumérotés 536.1
à 536.5.
M. le Président, les articles de ce chapitre sont
déplacés après l'article 536 à l'intérieur
d'une nouvelle section, la section IV, intitulée De la
procréation médicalement assistée. Cet amendement vise
à faire clairement ressortir l'application des règles
édictées, au chapitre De la filiation par le sang aux enfants
dont la procréation a été médicalement
assistée.
En raison de cet amendement, immédiatement après l'article
536, le titre de la section se lirait comme suit: De la procréation
médicalement assistée.
M. le Président, à la dernière ligne de l'article
536.3, qui est l'ancien 581, les mots "la mère de l'enfant" sont
remplacés par les mots "cet enfant et la mère de ce dernier".
M. le Président, à la dernière ligne de l'article
536.3, les mots "la mère de l'enfant" ont été
remplacés par les mots "cet enfant et la mère de ce dernier" pour
accroître la protection de l'enfant dont la procréation a
été médicalement assistée. En raison de cet
amendement, l'article 536.3 se lirait comme suit: "Celui qui, après
avoir consenti à la procréation médicalement
assistée, ne reconnaît pas l'enfant qui en est issu engage sa
responsabilité envers cet enfant et la mère de ce dernier."
M. le Président, à la fin de l'article 536.4, l'ancien
582, après le mot "nulles" sont ajoutés les mots "de
nullité absolue".
M. le Président, cet amendement a pour but d'apporter certaines
précisions quant au type de nullité visée. En raison de
cet amendement, le texte se lirait comme suit: "Les conventions de
procréation ou de gestation pour le compte d'autrui sont nulles de
nullité absolue."
M. le Président, le deuxième alinéa de l'article
536.5, l'ancien 583, est remplacé par le suivant:
Toutefois, lorsqu'un préjudice grave risque d'être
causé à la santé d'une personne ainsi
procréée ou de ses descendants si elle est privée des
renseignements qu'elle requiert, le tribunal peut permettre leur transmission,
confidentiellement, aux autorités médicales concernées.
L'un des descendants de cette personne peut également se
prévaloir de ce droit si le fait d'être privé des
renseignements qu'il requiert risque de causer un préjudice grave
à sa santé ou à celle de l'un de ses proches."
M. le Président, le deuxième alinéa de
l'article 536.5, ancien 583, a été modifié pour
permettre que les descendants d'une personne issue de la procréation
médicalement assistée puissent bénéficier des
renseignements nominatifs relatifs à la procréation
médicalement assistée de leur ascendant, si le fait d'être
privé de tels renseignements risque d'être la cause d'un
préjudice grave à leur santé ou à celle de l'un de
leurs proches. En outre, il a paru utile d'indiquer expressément que le
tribunal qui accueillera une telle demande permettra la transmission
confidentielle des renseignements requis aux autorités médicales
concernées. En raison de cet amendement, l'article 536.5 se lirait comme
suit: "Les renseignements nominatifs relatifs à la procréation
médicalement assistée d'un enfant sont confidentiels. 'Toutefois,
lorsqu'un préjudice grave risque d'être causé à la
santé d'une personne ainsi procréée ou de ses descendants
si elle est privée des renseignements qu'elle requiert, le tribunal peut
permettre leur transmission, confidentiellement, aux autorités
médicales concernées. L'un des descendants de cette personne peut
également se prévaloir de ce droit si le fait d'être
privé des renseignements qu'il requiert risque de causer un
préjudice grave à sa santé ou à celle de l'un de
ses proches."
Alors, voilà les amendements que nous avons à discuter, M.
le Président.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
le renumérotage est donc adopté. L'article 579 devient 536.1.
L'article 580 devient 536.2. L'article 581 devient 536.3 et a été
amendé. L'article 582 devient 536.4 et a été
amendé. L'article 583 devient 536.5 et a été
amendé. Est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant ces nouveaux
articles 536.1 à 536.5? Oui, Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve. (18 heures)
Mme Harel: Dois-je comprendre qu'avec l'amendement, contrairement
à l'article 583, deuxième alinéa, les renseignements ainsi
obtenus dans le contexte où il y a un préjudice grave qui risque
d'être causé à la santé de la personne ainsi
procréée médicalement, faut-il comprendre que ces
renseignements vont être transmis aux autorités médicales
et non à la personne?
M. Rémillard: Oui. Ce que nous avions discuté la
dernière fois, c'est de protéger l'identité de la
personne. Alors, on avait soulevé ce problème-là. On avait
dit: Oui, il faut que cette personne puisse avoir le droit de savoir qui est le
père ou la mère pour qu'on puisse relever la ligne "ascendants"
pour des questions médicales. Mais il faut quand même toujours
protéger la confidentialité. Alors, c'est ce à quoi on est
arrivé. Mais je pourrais demander au professeur Pineau, M. le
Président, de commenter plus avant.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Me
Pineau.
M. Pineau: Merci, M. le Président. Comme le ministre vient
de le dire, ces renseignements demeurent confidentiels et il sont remis aux
autorités médicales, effectivement, qui sont amenées
à donner des soins, pour conserver la confidentialité. Il est
certain que si ces renseignements étaient transmis, non point aux
autorités médicales, mais à la personne
intéressée elle-même, les règles sur la
confidentialité ne seraient plus respectées.
Mme Harel: M. le Président, je comprends que la personne
qui subit un préjudice grave ne pourrait pas avoir le renseignement,
mais les autorités médicales concernées
l'obtiendraient.
M. Rémillard: Enfin, le but que nous recherchons... Voyons
d'abord la raison qui motive tout l'article. C'est que la personne est donc en
danger; il y a une maladie, une maladie grave. C'est ça le
départ. Il y a quelqu'un qui a besoin d'un renseignement parce que c'est
son état de santé qui est le problème.
Mme Harel: Mais comment va-t-elle savoir, d'abord, qu'elle a
été médicalement procréée? Il n'y a pas de
droit à le savoir. Cette personne-là peut être en danger
grave sans avoir eu connaissance... Ses parents sont morts, puis cette
information...
M. Rémillard: II se peut bien qu'elle n'ait pas
l'information.
Mme Harel: Donc, elle ne pourra pas ainsi procéder de
façon à obtenir l'information qui lui permettrait...
M. Rémillard: Je ne vois pas comment on pourrait avoir une
règle qui permettrait que tout le monde puisse le savoir. À un
moment donné...
Mme Harel: Non, non, la personne qui est concernée, qui
est procréée de cette façon.
M. Rémillard: Oui, la personne qui a été
procréée comme ça, puis, tout à coup, elle est
malade - alors, elle est malade sérieusement - et pour trouver un moyen
de la guérir, par un groupe sanguin ou je ne sais pas trop quoi, pour
avoir du plasma ou quoi que ce soit, il faut suivre la ligne des ascendants.
Donc, il faut connaître ses ascendants. Par le fait même, elle
s'adresse donc au centre social. L'hôpital fait les recherches et on en
arrive à la mère et, éventuellement, au père, et
c'est là... Le principe de la confidentialité, par exemple, du
donneur de gamètes est toujours là; pour le don d'embryon, c'est
toujours là aussi. Mais ce que nous disons,
c'est que, parce que la santé est en cause, sans que ce secret
soit dévoilé, parce que ce n'est pas l'identité
personnelle, des personnes qui va guérir celle qui est malade, c'est la
connaissance de ces personnes par le système médical qui va
pouvoir, à ce moment-là, faire les recherches et
l'activité médicales nécessaires pour trouver un
remède pour la personne malade... Alors, y a-t-il besoin que la personne
malade connaisse son père et sa mère ou son grand-père ou
sa grand-mère? Pas nécessairement. Ce n'est pas une question de
connaissance pour elle, mais c'est une question de connaissance pour les gens
qui la soignent et qui ont besoin de suivre la ligne pour trouver la
solution.
Le Président (M. La trance): Oui, Mme la
députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: J'écoute ça et j'ai de la
difficulté à accepter... Je comprends très bien le
ministre et je ne veux rien juger, mais j'ai vraiment de la difficulté.
C'est d'abord de savoir si on va avoir de gros problèmes
d'éthique de plus en plus...
Mme Harel: Ah oui!
Mme Vermette: ...avec toutes ces nouvelles techniques de
reproduction, ça n'a plus d'allure. Au nom de quoi va-t-on refuser ses
origines à quelqu'un? Qu'est-ce qu'on a tant à cacher à ce
moment-là? On veut absolument des enfants, mais on veut en même
temps renoncer au droit à leurs origines; là, je ne comprends
plus rien. Ce n'est pas de même qu'on va faire une société.
Qu'est-ce qu'on a à vouloir cacher à ce point ses origines? Je
pense qu'à ce moment-là on va envers et contre tous. Faire des
enfants en laboratoire, par insémination, de quelque façon que ce
soit, je n'ai rien contre ces principes-là et, encore là, il
faudrait se questionner. Tantôt, on va être pris avec des
manipulations génétiques épouvantables et on aura encore
à décider des choses. Les gens n'auront même pas le droit
de savoir. Il y a quelque chose, à mon avis, qui me semble tout à
fait incohérent dans nos discussions. En tout cas, pour moi, c'est mon
opinion à moi, personnelle. Je suis profondément... En tout cas,
ça me cause vraiment un problème fondamental. Le droit à
la personne... Ce n'est pas parce que le hasard a voulu qu'on naisse d'un
père et d'une mère qu'on peut connaître ses origines et
parce que le hasard a voulu qu'on soit né différemment qu'on
n'ait pas droit à ses origines. Parce que la naissance, c'est
pratiquement le fruft d'un hasard, dans un cas comme dans l'autre. A ce
moment-là, on n'a pas le droit de connaître ses origines, dans un
cas, parce qu'on a été adopté et, dans l'autre cas, parce
que, finalement, on est arrivé et on est reconnu socialement par un
contrat de mariage, et de plus en plus il n'y en a plus de contrat de mariage
de toute façon, ce sont des conjoints de fait. Puis il y a des familles
élargies, des familles de tout ce que vous voudrez,
éclatées et reconstituées, etc.
Je pense qu'à quelque part ii faut suivre l'évolution
telle quelle, mais il faut arrêter de voir la société et
protéger... Je ne sais pas, protéger quoi? Protéger des
individus, un homme et une femme qui ont décidé de cacher qu'ils
ne peuvent pas avoir d'enfants, et on va brimer un autre droit fondamental
à un autre être humain pour ça. Moi, je ne suis pas capable
d'accepter ça.
Le Président (M. Lafrance): M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, je suis bien
sensible aux remarques de Mme la députée de Marie-Victorin. Je me
permettrais très simplement de lui dire que nous travaillons sur ce Code
depuis déjà trois mois et qu'il y a beaucoup d'articles qui sont
interreliés. Il n'y a pas juste cet article-là, il y beaucoup
d'articles interreliés. Par exemple, il a fallu discuter, à un
moment donné, en ce qui regarde les donneurs de gamètes.
L'étudiant d'université, c'est l'étudiant en
médecine - c'est l'exemple qu'on donne souvent parce que,
paraît-il, ils le font - qui va donner son sperme; c'est dans une
ampoule, c'est réfrigéré et c'est là pour
inséminer. Est-ce que vous seriez d'accord pour que ce donneur de
gamètes n'ait pas le droit à l'anonymat et que ce soit, à
ce moment-là, une obligation pour lui... Il donne le sperme, donc, par
conséquent, il devra mettre son nom sur la gamète! Ça veut
dire que, là, vous avez tout un raisonnement qui s'ensuit. Le
superétalon...
Mme Harel: C'est le cas dans plusieurs législations,
hein?
Mme Vermette: Oui, mais... M. Rémillard: Oui,
mais...
Mme Harel: Ah oui! Mme la députée de
Marie-Victorin...
Le Président (M. Lafrance): On va laisser M. le ministre
terminer, s'il vous plaît.
Mme Harel: ...ne dit pas quelque chose d'insensé
là.
M. Rémillard: Non.
Mme Harel: II y a des législations qui ont adopté
cette façon de voir.
M. Rémillard: Je ne dis pas que quelqu'un a dit quelque
chose d'insensé. Nous sommes dans un domaine extrêmement
difficile. Ce que je dis, c'est qu'il faut voir tous les aspects dans leur
ensemble et le danger, c'est peut-être d'en isoler un. Il faut
voir aussi les autres éléments. Que ce soit le donneur de sperme
qui fait don de son sperme, est-ce qu'à ce moment-là on va, pour
lui aussi, exiger qu'il soit identifié? Il donne du sperme et, par le
fait même... Quand vous donnez du sperme, ça veut dire que
l'enfant qui sera procréé avec votre sperme, vous aurez toute une
série de relations juridiques, de filiation, vous aurez une
responsabilité comme père? Actuellement, ce n'est pas ça
qu'on a décidé. À ce moment-là, il y a l'anonymat
au niveau du donneur de gamètes. Mais il y a tout un ensemble de
décisions. Je pense que l'Institut, comme vous avez dit tout à
l'heure, devra se prononcer là-dessus éventuellement, c'est
évident. Mais, à un moment donné, il faut trouver un
consensus quelque part et surtout, ce que je dis, c'est de bien pouvoir
analyser l'ensemble de toutes ces données que nous avons en fonction
d'une nouvelle technologie qui pose des problèmes, j'en conviens.
Le Président (M. Lafrance): Mme la députée
de Terrebonne.
Mme Caron: Oui, M. le Président. J'aimerais maintenant
revenir à l'amendement à l'article 536.5 lorsqu'on dit, dans le
deuxième alinéa: "Toutefois, lorsqu'un préjudice grave
risque d'être causé à la santé d'une personne..." On
s'est toujours entendus depuis le début pour dire que, lorsqu'on parlait
de préjudice à la santé, ça pouvait être
santé physique, mais que ça pouvait être aussi santé
psychologique. Donc, on maintient que ça peut être un
problème au niveau psychologique. À ce moment-là, le reste
de l'amendement nous dit que ce sera transmis confidentiellement aux
autorités médicales concernées. Or, si le problème
est psychologique, est-ce qu'on va informer aussi l'enfant concerné ou
ses descendants?
M. Rémillard: Oui, si la façon de le
guérir... Si c'est un problème de dépression nerveuse, si
la façon de le guérir, c'est de lui faire connaître, c'est
ça qui est la solution, le médecin va dire: Voici le nom de votre
père, voici le nom de votre mère.
Mme Caron: Je trouvais ça important d'essayer de le
repréciser dans le contexte.
M. Rémillard: Oui.
Le Président (M. Lafrance): Mme la députée
de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Non, je ne crois pas, M. le Président. Je crois
que, dans l'exemple que nous donne Mme la députée de
Terrebonne...
M. Rémillard: Non?
Mme Harel: ...la transmission ne peut être faite qu'aux
autorités médicales.
M. Rémillard: Oui.
Mme Harel: Moi, je pense qu'il y a une chose qu'il faut dire
clairement: II n'y a aucun lien juridique entre le donneur de sperme et
l'enfant. Ça, il faut que ce soit clairement dit, puis ne pas être
confondu avec d'autres choses. Mais, à partir du moment où on dit
qu'il n'y a aucun lien juridique, aucun, on le dit clairement dans le Code.
Là où on peut se préparer à notre propre insu - on
n'y sera plus - des lendemains difficiles pour ceux qui vont nous suivre, c'est
qu'il peut arriver, dans quelques années, pour ces personnes
procréées médicalement, des problèmes similaires
à ceux qu'on rencontre présentement avec les personnes
adoptées il y a 20 ans ou 30 ans. Je ne sais pas dans quelle mesure
elles seront assez nombreuses pour obtenir à une grande heure
d'écoute, le dimanche soir, une émission, comme à
Télé-Métropole, de deux heures, comme ce fut le cas pour
les personnes qui sont à la recherche de leurs parents, etc. Je ne dis
pas que c'est prophétique, mais il n'est pas impensable que, finalement,
on ne se prépare pas un peu les mêmes genres de
difficultés, parce que le ministre disait tantôt - je le prends au
mot là, et il y a un choix de valeurs derrière ça - que
l'adoption était préférable à la procréation
médicalement assistée. Moi, je partage cette vue-là, cette
façon-là de voir les choses, mais ce n'est pas
nécessairement, n'est-ce pas? le cas dans la société. Mais
que les donneurs de gamètes sèment sans conséquence, comme
s'il n'y avait aucune aucune conséquence, ça ne m'appa-rait pas
évident que ça va dans le sens d'une responsabilisation de la
société. Il y a une époque pas très lointaine
où il y avait même des pratiques d'insémination
artificielle qui mélangeaient les gamètes de donneurs multiples.
Alors, comme ça, ça brouillait complètement toutes les
origines. Moi, je ne suis pas très connaisseure dans tout ce dossier de
la procréation médicalement assistée, mais je sais que le
Conseil du statut de la femme a fait des recherches, à l'époque
surtout de Mme McKenzie au moment où elle en était
présidente, qui ont quand même duré des années, ces
recherches, qui ont conduit à un grand congrès au Palais des
congrès...
Une voix:...
(18 h 15)
Mme Harel: Oui, c'est ça, je pense, un symposium
international, etc., sur tout ça. Puis, ce que j'en ai lu,
c'était avant qu'on débute nos travaux l'été
passé. Et les principes qui étaient énoncés dans
leur mémoire me semblaient raisonnables, mais les principes étant
que... Dans son avis synthèse sur les nouvelles technologies de la
reproduction, le Conseil rappelait ses propositions sur le sujet. Il recommande
que les modifications
législatives soient adoptées afin, premièrement,
que les enfants conçus artificiellement aient, à la
majorité, le droit de connaître leurs origines;
deuxièmement, que dès l'âge de 14 ans ces enfants puissent,
sur demande, obtenir un sommaire de leurs antécédents
biologiques, que les parents puissent avoir une copie de ce sommaire dès
la naissance; troisièmement, qu'en dehors de ces circonstances
particulières tous les documents demeurent confidentiels;
quatrièmement, qu'enfin des modifications n'aient pas d'effet
rétroactif et qu'aucun lien juridique ne soit créé entre
le donneur de sperme et l'enfant.
Là, on n'en est pas là, évidemment, avec
l'amendement. Moi, j'avais pris connaissance de tout ça et de bien
d'autres choses qu'ajoute le Conseil, parce qu'eux souhaitent une loi. Je ne
sais pas d'où elle viendra, quel ministre s'en portera responsable, si
c'est la ministre déléguée à la Condition
féminine ou si c'est le ministre de la Justice, mais je pense qu'il y a
un comité au Québec. On connaît l'état de paralysie
du comité canadien là-dessus, mais, éventuellement, il y
aura une législation. Donc, moi, j'acceptais qu'on ne puisse pas
régler tous les problèmes dans le Code civil, mais qu'il fallait
une législation. Là, avec l'amendement, par exemple, on vient
vraiment verrouiller, verrouiller, parce que ce qu'on dit, c'est que ce sont
les autorités médicales concernées qui vont avoir le droit
à l'information lorsqu'un préjudice grave risque d'être
causé.
M. Rémillard: Oui.
Mme Harel: Ce n'est pas ça que disait l'article 583.
Mme Caron: Non, c'était: Peut lui permettre de les
obtenir.
Mme Harel: Oui, c'est ça, peut permettre à la
personne médicalement procréée d'obtenir ces
renseignements. Là, il y a comme un recul. Alors, moi, je n'en
étais pas à vouloir faire le saut tout de suite dans ce que
proposait le Conseil, mais je me disais: Bien, faisons au moins le bout qui est
proposé, c'est-à-dire lorsqu'il y a un préjudice grave, et
restons-en là pour ce qui en résultera dans une
législation. Mais là, je ne sais pas.
Le Président (M. Lafrance): M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, moi, je suis bien
prêt à le regarder sous une forme de recul. Je ne le vois pas
nécessairement comme ça, il faudrait le regarder avec les experts
légistes. Je suis bien prêt à le regarder. Je dois
simplement dire ceci. Quand on dit: Les donneurs de gamètes - prenons
toujours cet exemple-là, parce que ça peut se relever à
ça... Il va falloir, à un moment donné, savoir si l'enfant
qui a été conçu médicalement assisté, puis
qu'on a pris des gamètes, quelqu'un qui a donné les
gamètes, alors, sur l'ampoule, ce n'est pas marqué le nom, mais,
à quelque part, il faut qu'on marque qui a donné.
Mme Harel: Une banque de données. M. Rémillard:
Une banque de données. Mme Harel: Qui n'existe pas
présentement.
M. Rémillard: Bon. Parce que le problème, si on
n'assure pas la confidentialité du donneur de gamètes et qu'on
permet la procréation assistée...
Mme Harel: II va y en avoir moins.
M. Rémillard: Oui, il va y en avoir moins, mais il y a une
autre chose aussi. Imaginez-vous les superétalons. C'est strictement
ça. À un moment donné, vous allez avoir une ampoule et
ça va être marqué: M. Untel; six pieds et un pouce -
maintenant, en mètres, ou quoi...
Mme Harel: il n'y a aucun lien juridique entre l'enfant et
lui.
M. Rémillard: Oui, mais, écoutez, c'est ça
qui va être épouvantable. On va dire l'année qu'il a
donné son sperme, peut-être qu'il y a des bonnes années,
peut-être qu'il y a des moins bonnes années...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Rémillard: Ça n'a pas de bon sens.
Mme Vermette: ...déjà des prix Nobel qui sont
congelés.
M. Rémillard: Oui. Bien oui! Alors, là, on va dire:
Bien, écoute, t'es-tu fait inséminer par un tel, telle bonne
année...
Une voix: Comme le vin. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Rémillard: ...plutôt que telle autre bonne
année? là, tu vas avoir un bon produit... Écoutez!
c'est..
Une voix: ...en vieillissant, ça va
s'améliorer.
Mme Harel: II y a Kundera. Je ne sais pas si vous avez lu...
Une voix: Oui. Moi, je l'ai lu.
Mme Harel: ...Kundera, un roman là-dessus, un roman
extraordinaire.
M. Rémillard: Bien oui, mais on parle... Des gens qui
peuvent nous écouter vont dire: Mais c'est aberrant! Mais c'est
ça, le problème. Ça peut aller jusque-là.
Présentement, au moment où on se parle, il faut faire attention,
c'est que toute cette histoire-là soulève tellement de
problèmes d'éthique.
Je voudrais terminer, M. le Président, en disant qu'il ne faut
pas penser que dans le Code civil, comme vient de le dire la
députée de Hochelaga-Maisonneuve, on règle tous les cas
d'éthique qui se passent. Ça ne se peut pas. Il faut une loi,
c'est évident. Maintenant, on établit les grand principes et si,
sur cet article-là, il y a un problème, moi, je suis bien
prêt à dire: Suspendons-le, regardons-le; il n'y a pas de chance
à prendre. Il n'y a pas de chance à prendre là-dessus; je
ne veux pas prendre de chance là-dessus.
Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la
députée de Terrebonne.
Mme Caron: Oui, M. le Président, je ne peux pas passer
l'occasion de citer à la commission un écrivain africain - je
trouve que le sujet convient très bien - Hampate-Bâ, qui nous
rappelait: "L'homme, dit-on chez nous, n'est qu'un semeur distrait, alors que
la mère est considérée comme l'atelier divin où le
créateur travaille."
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: On perpétue. On perpétue l'idée,
hein?
Mme Harel: C'est parce que Mme la députée de
Terrebonne est allée... Où est-ce que vous étiez? En
mission?
Mme Caron: En mission parlementaire en Afrique.
Mme Harel: Où?
Mme Caron: En avril, en République centrafricaine.
Mme Harel: En République centrafricaine.
M. Rémillard: Écoutez, c'est très joli, j'en
conviens. C'est discriminatoire, mais joli.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Harel: Alors, on va réfléchir.
Le Président (M. Lafrance): Si j'ai bien compris, ce
dernier article 536.5 va être laissé en suspens. C'est
ça?
M. Rémillard: Oui, il va demeurer en suspens, mais les
autres sont adoptés. M. le Président, il y a une erreur. On vient
de me dire que dans les changements, le premier amendement que j'ai
proposé, on parle d'une section IV et c'est la section III.
Le Président (M. Lafrance): Exactement.
M. Rémillard: Très bien. Je pense qu'il est
corrigé.
Le Président (M. Lafrance): Alors, ça aussi, c'est
adopté, le fait qu'on renumérote et qu'on forme une nouvelle
section qui... Ces nouveaux articles 536.1 et 536.2 sont donc adoptés
tels quels, les articles 536.3 et 536.4 sont adoptés tels
qu'amendés et l'article 536.5 est donc laissé en suspens. Le
prochain article qui avait été laissé en suspens est
l'article 602.
M. Rémillard: M. le Président, l'article 602 est
abrogé. M. le Président, il est apparu peu utile de maintenir cet
article. En effet, de l'ensemble des droits et obligations du titulaire de
l'autorité parentale, notamment de son obligation d'éducation
édictée à l'article 598, l'on peut déduire qu'il
possède un droit de correction sur cet enfant, droit qu'il devra exercer
de façon modérée et raisonnable, dans le meilleur
intérêt de l'enfant.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. S'il
n'y a pas de commentaires, cet article est supprimé. Le prochain article
qui avait été laissé en suspens est l'article 644.
Une voix: Les successions.
M. Rémillard: Oui. Alors, là, M. le
Président, nous abordons donc les successions. Me Frenette n'est pas
avec nous, c'est donc dire qu'on pourrait reprendre comme prévu,
à 20 h 30, ce soir.
Mme Harel: ...avec Me Frenette ce soir ou est-ce que... On
reprend avec Me Frenette ou on poursuit avec...
M. Rémillard: Excusez-moi. J'ai fait erreur.
Mme Harel: D'accord. On reprend avec le professeur Masse.
M. Rémillard: Alors, c'est vraiment avec Me Ouellette ou
Me Masse, qu'on me dit.
Mme Harel: Non, parce que Mme Ouellette quitte pour
Montréal où elle enseigne demain.
M. Rémillard: Ah! Excusez-moi. Donc, c'est Me Masse.
Voilà.
Mme Harel: Alors, on va reprendre avec Me
Masse. Est-ce que la séance de travail peut avoir lieu avec le
professeur Frenette? Parce que, demain, on va poursuivre avec Claude Masse?
M. Rémillard: On m'informe qu'avec Me Frenette le travail
est assez avancé que, demain matin... On a du travail pour demain
avant-midi. Il y aura une rencontre, comme prévu, à l'heure du
déjeuner et un petit peu dans l'après-midi pour que, dans
l'après-midi, on puisse continuer. Est-ce que Me Masse est avec nous
demain aussi?
Mme Harel: Non.
M. Rémillard: Non, pas demain. C'est ça. Alors, on
se retrouve, M. le Président, à 20 h 30.
Le Président (M. Lafrance): Oui. D'accord. Alors, nous
allons suspendre nos travaux jusqu'à 20 h 30 ce soir.
(Suspension de la séance à 18 h 24)
(Reprise à 20 h 43)
Le Président (M. Lafrance): Je vous demanderais, s'il vous
plaît, de bien vouloir prendre place. Je constate que nous avons le
quorum et je déclare cette séance de travail ouverte en vous
rappelant que nous avons convenu de nous réunir ce soir jusqu'à
minuit. Nous avions terminé en laissant en suspens l'article 536.5.
Des obligations (suite)
M. Rémillard: M. le Président, nous allons aux
obligations, livre cinquième, l'article, je crois, 1700 et quelque
chose... Alors, nous allons au titre deuxième Des contrats
nommés.
Le Président (M. Lafrance): Je pense qu'il s'agit de
l'article 1721 qui touche les questions des contrats nommés et de la
vente en particulier. Le chapitre 1, c'est ça qui touche la vente.
J'appelle donc l'article 1721 qui avait été laissé en
suspens.
De la vente
M. Rémillard: M. le Président, nous avons un
amendement à l'article 1721. L'article 1721 est remplacé par le
suivant: "En cas de vente par un vendeur professionnel, l'existence d'un vice
au moment de la vente est présumée, lorsque le mauvais
fonctionnement du bien ou sa détérioration survient
prématurément par rapport à des biens identiques ou de
même espèce; cette présomption est repoussée si le
défaut est dû à une mauvaise utilisation du bien par
l'acheteur."
M. le Président, l'article 1721, tel qu'amendé, vient
compléter les règles relatives à la garantie de
qualité, en introduisant une présomption d'existence du vice du
bien lorsque le mauvais fonctionnement du bien ou sa
détérioration survient prématurément. Le texte
proposé, en introduisant une garantie de bon fonctionnement,
créait en fait une présomption de cette nature. En raison de cet
amendement, l'article 1721 se lirait comme suit: "En cas de vente par un
vendeur professionnel, l'existence d'un vice au moment de la vente est
présumée, lorsque le mauvais fonctionnement du bien ou sa
détérioration survient prématurément par rapport
à des biens identiques ou de même espèce; cette
présomption est repoussée si le défaut est dû a une
mauvaise utilisation du bien par l'acheteur."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y aurait des commentaires touchant cet article 1721 tel qu'amendé,
qui traite de la garantie de qualité? Oui, Me Masse.
M. Masse: M. le Président, l'article 1721, tel que
modifié, constitue la pierre, la touche finale à l'ensemble des
réformes que l'on a proposées et que vous ave2 effectuées
sur les notions de vice caché et de garantie de qualité.
L'article 1721, tel que proposé dans le projet de loi 125, et surtout
les dispositions relatives à ce concept de défectuosité ou
de mauvais fonctionnement dans l'avant-projet posaient le problème de la
notion de vice caché. Que l'on parle de mauvais fonctionnement survenu
de façon prématurée ou que l'on parle de vice caché
postérieur à la vente, il s'agissait là de confusion
conceptuelle parce que le mauvais fonctionnement ou la mauvaise
durabilité d'un bien est toujours une question de vice caché d'un
bien qui est antérieur à la vente. Compte tenu du fait que le
ministère voulait reconnaître à l'article 1721 un principe
comme celui que l'on reconnaît aux articles 37 et 38 de la Loi sur la
protection du consommateur qui a passé l'épreuve du temps, la
nouvelle formulation garantit que ce dont il est question, c'est que le mauvais
fonctionnement hâtif ou prématuré d'un bien présume
que le vice était antérieur à la vente, de sorte qu'au
plan conceptuel on se retrouve devant une notion qui est encore bien
conservée, qui est la notion de vice caché, autrement, on
risquait de porter atteinte à une notion qui a passé
l'épreuve du temps, elle aussi. Donc, je pense que cette nouvelle
version de l'article 1721 est de nature à faciliter le recours de
l'acheteur dans un cas où la détérioration apparaît
prématurément, mais est de nature également à ne
pas porter atteinte à la conception, très ancrée dans
notre droit, de vice caché.
Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Masse. M. le
ministre.
M. Rémillard: Oui, M. le Président. C'est un
article qui a son importance puisqu'il favorise la situation que bien des
consommateurs peuvent vivre quelquefois lorsqu'ils achètent un produit
et qu'ils s'aperçoivent que ce produit se détériore
beaucoup trop rapidement. Dans ce cas-là, on établit avec cet
article, comme comparaison pour déterminer s'il se
détériore trop rapidement, on fait une comparaison avec un bien
de même espèce, dans les mêmes circonstances, si ce bien se
serait détérioré aussi rapidement. Ce qui est
intéressant dans l'article 1721, c'est que, lorsqu'il y a, donc, un tel
vieillissement ou détérioration prématurément, le
consommateur peut à ce moment-là se retourner contre le
fabricant, le vendeur, et le vendeur a le fardeau de démontrer que, non,
. il n'y avait pas détérioration survenue
prématurément. Donc, il y a un fardeau de la preuve et, en
matière de consommation, c'est extrêmement important parce que le
consommateur n'a pas les mêmes moyens, on le sait, que le vendeur,
très souvent, ou le fabricant. Alors, c'est un article qui a son
importance.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre, pour
ces précisions. Donc, l'article 1721 est adopté tel
qu'amendé. Les prochains articles qui avaient été
laissés en suspens sont les articles 1733 et 1734 qui touchent la
question des droits du vendeur.
M. Rémillard: M. le Président, ce sont des articles
qui se rapportent, ont un lien avec l'hypothèque mobilière. Or,
c'est un des sujets que nous aurons à discuter dans les prochaines
heures. Donc, il faudrait suspendre ces articles jusqu'au moment où nous
aurons cette discussion sur l'hypothèque mobilière.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Donc,
les articles 1733 et 1734 sont laissés en suspens. Les prochains
articles qui avaient été laissés en suspens sont 1765 et
1768. Alors, j'appelle l'article 1765, cet article avait été
amendé.
M. Rémillard: M. le Président, je voudrais laisser
tomber le précédent amendement; j'ai un autre amendement ici. Et,
à l'article 1768, il n'y a pas d'amendement. En ce qui regarde l'article
1765, il est modifié: 1° par le remplacement, à la
première ligne du premier aliéna, du mot "requises" par le mot
"prescrites"; 2° par le remplacement, à la troisième ligne du
deuxième alinéa, du mot "leurs" par le mot "les"; 3° par le
remplacement, à la quatrième ligne du deuxième
alinéa, de tout ce qui suit les mots "droits et recours" par les mots
"que la loi leur accorde".
M. le Président, le premier amendement est de concordance avec la
formulation des articles 1766 et 1767. Les deux autres amendements visent
à éliminer la référence au droit de suite, puisque
les créanciers prioritaires ne bénéficient pas d'un tel
droit. En raison de ces amendements, l'article 1765 se lirait comme suit:
"Lorsque l'acheteur a suivi les formalités prescrites, les
créanciers du vendeur ne peuvent exercer leurs droits et recours contre
lui ou contre les biens qui ont été vendus, mais ils conservent
leurs recours contre le vendeur. "S'ils ont qualité de créanciers
prioritaires ou hypothécaires et n'ont pas participé à la
distribution ou n'y ont participé que partiellement, ils conservent,
néanmoins, le droit d'exercer les droits et recours que la loi leur
accorde."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y aurait des commentaires touchant cet article 1765 tel qu'amendé?
Me Masse.
M. Masse: Non, M. le Président, pas de commentaires.
Le Président (M. Lafrance): Aucun commentaire. Donc, cet
article 1765 est adopté tel qu'amendé. J'appelle maintenant
l'article 1768 qui reste, comme l'a dit M. le ministre, tel quel. Est-ce qu'il
y a des membres qui aimeraient commenter cet article 1768?
M. Masse: L'article avait été suspendu pour des
questions de lien éventuel avec le droit des sûretés. Cette
préoccupation est réglée.
Le Président (M. Lafrance): D'accord. L'article 1768 est
donc adopté tel quel. Le prochain article est l'article 1777 contenu
à la section II, Des règles particulières à la
vente d'immeubles à usage d'habitation.
M. Rémillard: M. le Président, à l'article
1777, nous n'avons pas d'amendement. La question qui peut soulever des
interrogations... Je m'excuse, M. le Président, les interrogations que
nous pouvons avoir concernent la référence que nous faisons
à dix unités de logement. Nous avions prévu originalement
cinq unités de logement et, finalement, à la suite de
consultations, d'interventions... Dans l'avant-projet, c'était cinq et
on se retrouve maintenant avec dix unités de logement. Si nous avons des
questions à nous poser, M. le Président, c'est là qu'est
la question concernant cet article.
Mme Harel: Je cherchais ces dispositions, j'étais
convaincue qu'elles étaient suspendues la semaine passée, j'ai
demandé à certaines personnes qui travaillaient avec moi, puis
ça a l'air étrange à dire, M. le Président, mais je
n'arrivais plus à me rappeler où elles se retrouvaient...
M. Rémillard: ...ce n'est pas étrange.
Mme Harel: Je voudrais pouvoir, sur 1767 et sur 1782 aussi, qui
est suspendu, je veux faire une consultation auprès d'une personne de
bonne foi, raisonnable, dans mon entourage, qui s'occupe d'immeubles à
usage d'habitation. Alors, on peut peut-être suspendre, le temps que
cette vérification soit faite, parce qu'on n'avait pas eu le temps de
s'en reparler depuis.
M. Rémillard: Voulez-vous dire suspendre pour quelques
minutes...
Mme Harel: Non.
M. Rémillard: ...ou suspendre jusqu'à demain?
Mme Harel: Je pourrais faire ça seulement durant la fin de
semaine. Il faudrait que ce soit lundi au retour.
M. Rémillard: On peut facilement là, il n'y a
pas... On peut l'adopter lundi, mais on sait que c'est sur ce
critère-là. Nous, ça va nous permettre, nous aussi, de
refaire des consultations là-dessus.
Le Président (M. Lafrance): Mors, l'article 1777 demeure
donc suspendu, de même, si j'ai bien compris, que l'article suivant,
1782.
M. Rémillard: Oui. Mais, M. le Président, en plus,
moi, je continue à m'interroger - je voudrais le souligner aux membres
de cette commission - je continue à m'interroger sur le deuxième
alinéa de 1782. 1762, il faut bien en comprendre la signification. Si on
lit d'abord 1782 dans l'ensemble, si vous me permettez, M. le Président:
"La vente d'une fraction de copropriété est résolue de
plein droit lorsque la déclaration de copropriété n'est
pas inscrite dans un délai de trente jours, à compter de la date
où elle peut l'être suivant le livre De la publicité des
droits. "Il en est de même de la vente d'une part indivise d'une
copropriété, si la convention d'indivision n'est pas inscrite
dans un délai de trente jours, à compter de la signature du
contrat préliminaire."
Je dois dire, M. le Président, que je n'aurais même pas
été prêt ce soir, j'ai encore des inquiétudes sur...
C'est quand même assez dur et je veux bien vérifier, faire des
consultations sur ce deuxième alinéa. Alors, peut-être que
les autres membres de la commission, s'ils veulent en faire aussi pour que nous
puissions, lundi, aborder ces deux aspects.
Le Président (M. Lafrance): Je remarque, M. le ministre,
que vous avez lu l'article directement dans le projet de loi...
M. Rémillard: Oui.
Le Président (M. Lafrance): ...et je pense qu'il y avait
eu un amendement de déposé a cet article.
M. Rémillard: C'est ça. Mais ça ne change
pas...
Le Président (M. Lafrance): La signification.
M. Rémillard: ...la difficulté; le fond de la
question demeure la même chose.
Le Président (M. Lafrance): Très bien. Merci.
Alors, l'article 1782 est également laissé en suspens. Les
prochains articles qui avaient été laissés en suspens sont
les articles 1859 et un nouvel article 1859.1. L'article 1859 avait fait
l'objet d'un amendement.
M. Rémillard: M. le Président, comme Mme le
professeur Oueilette n'est pas avec nous ce soir et que nous avons M. Masse
avec nous, il faudrait aller, à ce moment-là, au chapitre
sixième Ou transport.
Le Président (M. Lafrance): Les articles 1859 et 1859.1
sont donc laissés en suspens.
M. Rémillard: Quelqu'un qui aura présidé
cette commission, M. le Président, pourra présider n'importe
quelle autre commission.
Le Président (M. Lafrance): Ha, ha, ha! Vous me
rassurez.
M. Rémillard: Ce n'est pas possible d'avoir quelque chose
de plus compliqué, de plus difficile
Mme Harel: ...très très bien.
M. Rémillard: Ah! de façon extraordinaire.
Le Président (M. Lafrance): Le premier article qui avait
été laissé en suspens est l'article 2653 qui est contenu
au chapitre premier Dispositions générales et qui traite de
l'objet et de l'étendue de l'hypothèque.
Une voix: Non, c'est l'article 2034, Du transport.
M. Rémillard: Mais on commence au transport, M. le
Président, c'est l'article 2020.
Le Président (M. Lafrance): De quel livre?
M. Rémillard: C'est toujours dans le même livre,
mais le chapitre sixième.
Le Président (M. Lafrance): Ah! j'avais
entendu le livre sixième.
M. Rémillard: Excusez-moi, c'est probablement moi qui me
suis mal exprimé, M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): Ou j'ai mal compris. Donc,
à ce chapitre sixième Du transport, le premier article qui avait
été suspendu est l'article 2034 et également l'article
2035, deux articles qui se suivent et qui traitent du transport de biens.
Du transport
M. Rémillard: M. le Président, l'article 2035
demeure tel quel et, à l'article 2034, nous avons un amendement.
L'article 2034 est modifié... Excusez-moi, il n'est pas encore
distribué. Je vais attendre, si vous permettez, qu'il soit
distribué. L'article 2034, M. le Président, est modifié:
1° par la suppression, à la fin du premier alinéa, de ce qui
suit: ", si celui-ci est négociable"; 2° par la suppression,
à la première ligne du second alinéa, du mot
"négociable".
M. le Président, il n'a plus paru opportun, à la
réflexion, de limiter la portée de la règle au seul cas du
connaissement négociable, la règle étant également
valable dans le cas de tout autre connaissement. En raison de ces amendements,
l'article 2034 se lirait comme suit: "Le transporteur est tenu de
délivrer le bien transporté au destinataire ou au
détenteur du connaissement. "Le détenteur d'un connaissement est
tenu de le remettre au transporteur lorsqu'il exige la délivrance du
bien transporté."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Donc,
la discussion est ouverte touchant cet article 2034 tel qu'amendé et,
également, l'article 2035, qui demeure tel quel.
Alors, s'il n'y a pas de commentaires touchant ces deux articles... Oui,
Me Masse.
M. Masse: On est à 2035, M. le Président?
Le Président (M. Lafrance): C'est exact. 2034 tel
qu'amendé et, également, 2035, qui touchent la question du
transport de biens.
M. Masse: Pas de commentaires. Ça va.
Le Président (M. Lafrance): Ça va. Alors, l'article
2034 est donc adopté tel qu'amendé et l'article 2035 est
adopté tel quel. Le prochain article qui avait été
laissé en suspens est l'article 2047, sur le même sujet.
M. Rémillard: Oui, M. le Président, nous avons un
amendement. L'article 2047 est modifié par le remplacement du
deuxième alinéa par le suivant: "À moins que
l'expéditeur ne donne des instructions contraires sur le connaissement,
les frais sont à sa charge."
M. le Président, l'amendement a pour but d'inverser la
règle énoncée au projet afin de prévoir que les
frais de la délivrance sont à la charge de l'expéditeur,
à moins d'instructions contraires de sa part. En raison de cet
amendement, l'article 2047 se lirait comme suit: "Lorsque le prix du bien
transporté est payable lors de la délivrance, le transporteur ne
doit le délivrer qu'après avoir reçu le paiement.
"À moins que l'expéditeur ne donne des instructions contraires
sur le connaissement, les frais sont à sa charge."
Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, M. le
ministre. Est-ce qu'il y aurait des membres qui aimeraient soulever des
commentaires sur cet article 2047 tel qu'amendé? Sinon, l'article 2047
est donc adopté tel qu'amendé.
Du contrat de travail
Le prochain article qui avait été laissé en suspens
est l'article 2078, qui avait été amendé, et,
également, l'article 2079, qui avait été amendé
également, contenus au chapitre septième Du contrat de
travail.
M. Rémillard: Je pense, M. le Président, si vous me
permettez, que ça prendrait une suspension de cinq minutes juste parce
qu'il y a deux amendements qu'on aimerait quand même pouvoir
déposer, 2078 et 2079. Quelques minutes.
Le Président (M. Lafrance): D'accord. Alors, nos travaux
sont donc suspendus pour cinq minutes.
(Suspension de la séance à 21 h 6)
(Reprise à 21 h 19)
Le Président (M. Lafrance): Alors, j'aimerais vous
demander de reprendre vos sièges. Nous allons reprendre nos travaux et
je déclare cette séance rouverte. J'appelle donc l'article 2078
qui avait été amendé, mais je pense que vous voulez
déposer un nouvel amendement.
M. Rémillard: Alors, on m'informe qu'à 2078 il y a
une petite correction technique qui est en train de se faire pour la
reformulation. Donc, si vous voulez, on peut aborder l'article 2079, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): Certainement. Alors, l'article
2078 est laissé en suspens. J'appelle donc l'article 2079, qui avait
été
amendé déjà. AJors, on retire, si je comprends
bien...
M. Rémillard: Oui.
Le Président (M. Lafrance): ...l'amendement...
M. Rémillard: C'est ça.
Le Président (M. Lafrance): ...pour en proposer un
nouveau.
M. Rémillard: Pour en proposer un nouveau. L'article 2079
du projet est modifié: 1° par la suppression, au premier
alinéa, de ceci: ", en son propre nom,"; 2° par la suppression, au
deuxième alinéa, de ce qui suit: "sans pour autant porter
atteinte à la capacité de gain du salarié".
M. le Président, le premier amendement vise à clarifier la
portée de la règle, car, quel que soit le nom sous lequel il
agit, le salarié peut être tenu de ne pas faire concurrence. Le
deuxième amendement supprime la notion d'atteinte à la
capacité de gain. Par nature, la stipulation porte atteinte à la
capacité; son caractère légitime devrait naturellement
découler des autres critères indiqués. Le troisième
amendement supprime l'expression d'une règle qui paraît inutile,
vu les règles usuelles quant à la charge de la preuve. En raison
de ces amendements, l'article 2079 se lirait comme suit: "Les parties peuvent,
par écrit et en termes exprès, stipuler que, même
après la fin du contrat, le salarié ne pourra faire concurrence
à l'employeur ni participer à quelque titre que ce soit à
une entreprise qui lui ferait concurrence. "Toutefois, cette stipulation doit
être limitée, quant au temps, au lieu et au genre de travail, a ce
qui est nécessaire pour protéger les intérêts
légitimes de l'employeur. "Il incombe à l'employeur de prouver
que cette stipulation est valide."
Mme Caron: M. le Président, il y a un problème
là.
M. Rémillard: II y a une faute là.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Mme la
députée de Terrebonne.
Mme Caron: Oui. Dans le commentaire, vous parlez du
troisième amendement, mais nous n'avons plus le troisième
amendement qui faisait partie de la proposition, il y a quelques mois. Il n'est
plus là.
M. Rémillard: M. le Président, Mme la
députée de Terrebonne a souligné, de fait, un
problème, là. Il faudrait supprimer, donc... Je pense qu'il
faudrait que je relise, à ce moment- là, pour que ce soit bien
clair pour les notes.
Alors, le premier amendement vise à clarifier la portée de
la règle, car, quel que soit le nom sous lequel il agit, le
salarié peut être tenu de ne pas faire concurrence. Le
deuxième amendement supprime la notion d'atteinte à la
capacité de gain. Par nature, la stipulation porte atteinte à la
capacité; son caractère légitime devrait naturellement
découler des autres critères indiqués. En raison de ces
amendements, l'article 2079 se lirait comme suit: "Les parties peuvent, par
écrit et en termes exprès, stipuler que, même après
la fin du contrat, le salarié ne pourra faire concurrence à
l'employeur ni participer à quelque titre que ce soit à une
entreprise qui lui ferait concurrence.
Toutefois, cette stipulation doit être limitée, quant au
temps, au lieu et au genre de travail, à ce qui est nécessaire
pour protéger les intérêts légitimes de l'employeur.
"Il incombe à l'employeur de prouver que cette stipulation est
valide."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y aurait des commentaires touchant cet article 2079 tel qu'amendé?
L'article 2079 est donc adopté tel qu'amendé. Est-ce qu'on est
prêt, M. le ministre, à revenir a 2078?
M. Rémillard: À 2078, il manque encore
l'amendement, M. le Président. C'est une question de rédaction,
que nous sommes à finaliser. Mais nous pourrions peut-être
continuer, si vous permettez, M. le Président, quitte à revenir
à 2078 dès qu'il va nous parvenir.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
l'article suivant, je pense, c'est l'article 2086.1 qui nous avait
été proposé par l'Opposition officielle. C'est un nouvel
article.
Mme Harel: C'est un nouvel article? C'est une façon de
parler. C'était un ancien article de l'avant-projet.
Le Président (M. Lafrance): On est en train de distribuer
les copies du texte de cet article 20861.
Mme Harel: M. le Président, si vous me permettez pendant
que c'est distribué, j'ai une question au ministre sur cette question du
contrat de travail. Je ne sais pas s'il a eu les mêmes
représentations que moi de la part des contentieux de centrales
syndicales à l'effet de clarifier toute la question de l'application des
rapports collectifs de travail en regard du Code du travail plutôt que du
Code civil. Alors, préférez-vous qu'on attende pour parler de
ça, qu'on règle la question de 2086.1?
M. Rémillard: On m'informe qu'on n'a pas été
informés de ça, du tout.
Mme Harel: Non?
M. Rémillard: On ne nous a pas informés de
ça. Maintenant, il faut comprendre qu'en ce qui regarde le domaine du
travail, comme dans tous les autres domaines, dans le Code civil nous avons des
règles générales et ces règles
générales ont leur application par des lois particulières
que nous retrouvons dans tous les domaines. Il y a une Loi sur la protection du
consommateur; on ne retrouve pas tous les principes ici nécessairement,
mais on trouve les grands principes qui nous guident ensuite pour avoir les
dispositions législatives. On peut prendre d'autres exemples. C'est la
même chose dans le domaine du travail. C'est tout à fait normal,
lorsqu'on fait un Code civil qui régit les rapports juridiques entre les
citoyens, qu'on parle de travail. Donc, on établit les principes, puis
le Code du travail est là et les autres lois sont là pour
établir les modalités.
Mme Harel: Leur prétention, je ne pense pas qu'elle soit
à l'effet de retirer le chapitre VII du Code civil. Ce n'est pas de
ça qu'il s'agit. Moi, je leur ai demandé de mettre ça par
écrit de manière à pouvoir le transmettre aux membres de
la commission. Mais je crois que leur prétention est plus fondée
sur des décisions du Tribunal du travail qui, à l'occasion, a
considéré que les rapports collectifs nécessitaient une
approche différente de celle qu'on retrouvait, par exemple, dans la
théorie générale des obligations ou du contrat. Si j'ai
bien compris, leur prétention ne porte pas sur le chapitre
septième; leur prétention est à l'effet que, pour
l'interprétation des rapports collectifs de travail, il faudrait
s'inspirer des lois du travail plutôt que du Code civil. Il semble
qu'à maintes reprises en droit du travail - je souhaiterais
peut-être qu'on aille plus à fond sur cette question, mais je
pense qu'ils ont raison - le droit des obligations s'est
révélé inadéquat pour traiter des rapports
collectifs.
M. Rémillard: M. le Président, je vous avoue que
moi, je n'ai pas été saisi de ce problème-là. Chez
nous, on n'a pas été saisis de ce problème-là.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
est-ce qu'on est en mesure... Oui, Me Masse.
M. Masse: J'ai eu le grand privilège et le plaisir
d'enseigner, pendant quelques années, les conventions collectives
même si je ne suis pas un praticien en droit du travail. Ce qu'il faut
comprendre, c'est qu'en matière de conventions collectives, à
toutes fins pratiques, le droit des conventions échappe
complètement au Code civil, sauf certains très grands principes
généraux qui sont applicables à tous les citoyens et qui
n'interfèrent pas avec les conventions collectives.
Pour ce qui est des simples salariés non syndiqués qui
échappent à toute convention collective, il y a la Loi sur les
normes du travail qui s'applique, comme on le sait, mais cette loi-là ne
peut pas exister sans des principes fondamentaux qu'on retrouve au Code civil.
Ce qu'il est important de noter, c'est qu'un grand nombre de salariés
importants, et en nombre et en qualité, comme les cadres, sont des gens
qui ne seront probablement jamais visés par la plupart des conventions
collectives, mais auxquels on doit reconnaître une application des
règles fondamentales du Code civil. Peut-être que je réagis
comme civiliste d'abord, mais, quant à moi, je serais extrêmement
surpris qu'un groupe de citoyens alléguant une situation contractuelle
spéciale échappent complètement au Code civil du
Québec. Notre travail, depuis 20 ans, est justement d'établir par
ce Code civil des bases fondamentales aux règles du jeu. Je soumets que
vous pourriez entendre les revendications de ces gens-là, probablement
qu'ils ont des inquiétudes particulières, peut-être qu'on
pourrait corriger des choses en particulier, mais, de là à faire
en sorte que le contrat de travail sorte complètement du Code civil,
ça m'apparaît inutile et échapper à la philosophie
de travail qui nous habite, je pense, depuis de nombreuses années. (21 h
30)
Le Président (M. Lafrance): Alors, avant de nous
référer à l'article 2086 et aussi à l'article 2078,
j'aimerais souligner la présence parmi nous d'un groupe d'agriculteurs
et d'agricultrices du comté d'Iberville qui sont ici dans le cadre de
leur réunion au sein de l'UPA. Bienvenue parmi nous.
M. Rémillard: M. le Président, est-ce qu'on peut se
joindre à vous pour leur souhaiter la bienvenue? Vous pouvez venir voir
votre député agir comme président de probablement la
commission parlementaire la plus difficile qu'il puisse y avoir et l'une des
plus importantes, qu'on puisse dire aussi, qui réforme le Code civil.
Alors, soyez les bienvenus.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre.
Mme Harel: Est-ce qu'on peut aussi vous suggérer,
peut-être, de faire le tour des commissions? Il y a peut-être la
commission de l'agriculture qui siège présentement, je crois
qu'elle était convoquée cet après-midi, vous pourriez
peut-être y entendre les échanges qui se font sur la question des
jeunes agriculteurs.
Le Président (M. Lafrance): Je ne suis pas certain s'ils
siègent ce soir, mais vous pourriez vérifier à
l'entrée, c'est possible, en effet. De toute façon, il nous fait
plaisir de vous recevoir dans notre milieu de travail ici, moi qui vais souvent
vous visiter dans le vôtre. Bienvenue
parmi nous.
J'aimerais donc nous référer à l'article 2086.1.
Est-ce qu'il y a quelqu'un qui peut nous lire cette proposition d'article?
Alors, on va laisser l'Opposition officielle nous lire cette proposition de
l'article.
Mme Harel: Comme suit, M. le Président. "2086.1
L'aliénation, la concession ou la transmission de tout ou partie de
l'entreprise ou la modification de sa structure juridique par fusion ou
autrement ne met pas fin au contrat de travail. Ce contrat lie l'ayant cause de
remployeur."
Le Président (M. Lafrance): Merci, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve. Est-ce qu'il y aurait des
commentaires touchant cet article 2086.1 tel que proposé? M. le
ministre.
M. Rémillard: Oui, M. le Président. J'aimerais
qu'on puisse nous situer la portée de cet amendement.
Le Président (M. Lafrance): Mme la députée
de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Oui, certainement, M. le Président.
C'était d'ailleurs une disposition que l'on retrouvait à
l'article 2156 de l'avant-projet de loi portant réforme au Code civil du
Québec du droit des obligations qui avait été
déposé, en 1987, par le prédécesseur du ministre
actuel, l'actuel juge Marx. M. le Président, j'ai fait faire une
recherche sur les dispositions des normes minimales du travail en regard de
cette question. Je n'ai malheureusement peut-être pas ça ici au
moment où on se parle. Un instant.
Le fait est, M. le Président, qu'une telle disposition n'a pas
été introduite... Oui, voilà, merci, très bien.
Alors, il y a des protections qui ont été introduites au moment
de la révision des normes minimales l'an dernier. Je vais vous en faire
lecture, M. le Président. À l'article 96 de la loi sur les
normes, on y retrouve ceci: "96. L'aliénation ou la concession totale ou
partielle d'une entreprise autrement que par vente en justice n'invalide aucune
réclamation civile qui découle de l'application de la
présente loi ou d'un règlement et qui n'est pas payée au
moment de cette aliénation ou concession. L'ancien employeur et le
nouveau sont liés conjointement et solidairement à l'égard
d'une telle réclamation."
C'est donc dire que, là où il y a déjà des
réclamations civiles qui sont introduites, l'aliénation de
l'entreprise ne les interrompt pas. Mais il n'est dit nulle part, dans la loi
sur les normes, que l'aliénation ne met pas fin au contrat. On retrouve,
à l'article 97, une autre disposition qui porte sur l'aliénation
d'entreprise et qui se lit comme suit: "L'aliénation ou la concession
totale ou partielle de l'entreprise, la modification de sa structure juridique,
notamment, par fusion, division ou autrement n'affecte pas la continuité
de l'application des normes du travail."
Il faut donc comprendre qu'il peut y avoir, évidemment, une
terminaison du contrat de travail, mais pour d'autres raisons que celles qui
sont dues à l'aliénation, la concession ou la transmission de
tout ou d'une partie de l'entreprise. Ça, je crois que c'est le but que
je recherche avec cet amendement qui est présenté. On
connaît présentement une phase de bouleversements, de turbulences,
et je crois, M. le Président, qu'une disposition comme celle-là
peut amener peut-être plus de stabilité. Évidemment,
ça n'empêche pas l'exercice des droits de gérance, il va de
soi; mais, au moment de cet exercice des droits de gérance, l'employeur
ne pourra pas invoquer simplement la vente de l'entreprise pour justifier de
mettre fin au contrat de travail. Il devra y avoir... Parce que, tantôt,
vous savez, quand je vous faisais part des dispositions de la Loi sur les
normes du travail, il est certain qu'elles sont incomplètes, ces
dispositions, parce qu'elles ne touchent, finalement, que la reconduction des
normes. Donc, ce que ça dit, en termes pratiques, c'est que
l'aliénation d'une entreprise, ça ne vient pas interrompre, par
exemple, le calcul aux fins de l'ancienneté, etc.
Mais il n'y a pas de raison raisonnable pour que la vente d'une
entreprise soit le motif invoqué pour mettre fin à un contrat de
travail. Il n'y a pas de raison. Si l'entreprise poursuit son activité,
sa production, à moins que ce soit pour des motifs de rationalisation ou
autres, mais ça, ça ne fait pas partie de l'amendement tel que
présenté.
M. Rémillard: M. le Président...
Le Président (M. Lafrance): M. le ministre.
M. Rémillard: ...de fait, cet article se retrouvait dans
l'avant-projet. Il faut dire que c'est un article qui repose sur des principes
qu'on peut considérer comme des plus intéressants. Lorsqu'il y a
un contrat de travail qui se fait entre un employeur et un employé, ce
contrat se fart donc en fonction d'un travail à faire qui se situe dans
un cadre et ce cadre, c'est l'usine, la manufacture, le bureau, peu Importe. Le
fait de vendre le commerce, la fabrique, l'usine, on dit ici que ça ne
veut pas mettre fin au contrat qui lie l'employeur et l'employé. Mais il
y a aussi peut-être une autre façon de voir cette
situation-là, c'est qu'en grande partie vous avez les syndicats qui...
Et, dans le droit du travail, on le sait qu'il y a une protection à ce
niveau-là, c'est-à-dire que, lorsque l'usine est vendue, il reste
quand même que la convention collective continue à s'appliquer.
Ça, c'est fait. Alors, au niveau des travailleurs syndiqués,
c'est couvert.
Là, nous sommes dans le domaine des travailleurs non
syndiqués. Les travailleurs non syndiqués, ça comprend
aussi souvent les cadres. Quelqu'un achète une entreprise et il veut la
gérer en fonction de son monde à lui. Il veut avoir son monde
pour gérer cette entreprise qui peut être en difficulté ou
qui est gérée d'une façon, et il veut avoir une autre
façon. On a connu de ces situations, dernièrement, lorsque des
gens ont acheté des entreprises de grande envergure et ont
décidé de changer les cadres de la haute direction. Vous allez me
dire: Oui, mais il peut toujours le faire, il a juste à acheter le
contrat. C'est-à-dire que, ou bien il attend que le contrat avec ses
cadres soit terminé, ou bien, tout simplement, il leur donne une prime
de séparation. En fait, il agit selon le contrat ou ils se
séparent. C'est une réponse qu'on peut faire. Mais il demeure
que, lorsqu'on donne cette sécurité, on rend plus difficile
l'achat de l'usine ou de l'entreprise, puisque l'acheteur doit respecter, donc,
les contrats qui sont là. Vous allez me dire: Bien oui, mais, quand tu
achètes, tu regardes les contrats des gens qui sont en place, et tu
achètes ou tu n'achètes pas. Mais, si tu achètes, tu
achètes les contrats qui sont là, en même temps, et tu vis
avec ces gens-là. C'est une façon de voir les choses. Une autre
façon, c'est de dire: Ceux qui achètent une usine, une fabrique
doivent avoir la possibilité d'amener leur gérant. Maintenant, il
y a aussi l'argument que... Là, je parle de cadres, mais ça ne
touche pas juste les cadres. Il ne faut pas penser que tout le monde est
syndiqué. Il y a bien des gens qui ne sont pas syndiqués et, par
une simple vente de l'entreprise, ils peuvent se retrouver, finalement, sans
contrat de travail. Moi, je suis toujours en discussion sur ce point-là
avec mon collègue, le ministre du Travail. Je dois dire que je ne suis
pas sans être sensible aux arguments qui militent en fonction de cet
article qui était dans l'avant-projet. Je suis toujours en discussion
avec mon collègue du Travail. Je demanderais donc qu'il soit encore
suspendu, M. le Président, jusqu'à la semaine prochaine.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
l'article 2086...
Mme Harel: M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: La fois précédente où nous en
avons parlé, je ne sais si c'est vous-même ou un légiste
qui a fait mention d'une représentation du ministère du Travail.
Il me semble, de mémoire, me rappeler qu'on parlait d'un avis de 10
à 12 pages sur cette question-là. Il serait peut-être utile
que Me Masse puisse en prendre connaissance.
Une voix:...
M. Rémillard: Oui, oui, on va voir. Je vais demander aux
collègues, je vais en discuter avec mes collègues pour qu'on ait
toutes les informations. C'est un point important à décider. Il
ne faut pas décider ça à la légère. Je suis
parfaitement d'accord.
Mme Harel: En fait, ça viendrait un peu compléter
tout le dispositif de la protection lors d'une aliénation de
l'entreprise. Déjà, on a une disposition qui prévoit que,
s'il y a une réclamation civile, l'acheteur est lié, en fait, par
l'ancien employeur pour une réclamation civile qui était due au
moment de l'aliénation. Il y a donc déjà cette
disposition-là dans les normes, à l'article 96 qui lie, dans le
fond, le nouvel employeur à l'ancien. Ensuite, il y a le fait que, pour
l'application des normes, il y a maintien, finalement, du lien entre l'ancien
et le nouvel employeur. Mais il faut presque attendre, à ce
moment-là, qu'il y ait... La question de fond reste: Les changements que
le nouvel employeur veut opérer, ces changements qui peuvent être
tout à fait légitimes, est-ce qu'il peut y procéder sans
avoir à compenser, par exemple, ou à envoyer les préavis?
Il n'y a même pas d'indemnités de licenciement, dans notre
société, mais au moins il y a un préavis qui est d'une
semaine par année de service. Je ne suis même pas certaine,
d'ailleurs. Pas tout à fait. Alors, au moins le préavis... (21 h
45)
M. Rémillard: Mais...
Mme Harel:... serait obligatoirement envoyé.
M. Rémillard:... est-ce que vous nous dites, pour
comprendre, qu'il pourrait y avoir un système de préavis?
Mme Harel: C'est-à-dire que s'il veut mettre fin au
contrat...
M. Rémillard: Oui, donner un préavis ou quelque
chose comme ça.
Mme Harel: II pourra le faire. Vous savez, il a ses droits de
gérance. Il pourra le faire, mais ce n'est pas à cause de
l'aliénation d'entreprise. Si l'ancien employeur était
resté en exercice, il aurait pu, aussi, faire des mises à pied,
mais il aurait été tenu de le faire en conformité, si vous
voulez, avec le contrat de travail. Il y a, dans le secteur privé, nous
dit-on, à peine 20 % des travailleurs qui seraient syndiqués,
actuellement. C'est autour de 40 % de l'ensemble de la main-d'oeuvre qui est
syndiqué et c'est trompeur parce que ce 40 % recouvre au-delà de
78 % des secteurs public et parapublic et à peine 19 % du secteur
privé.
M. Rémillard: C'est vrai ça. Par contre, on peut
dire que des gens qui sont syndiqués ont certains droits que ceux qui ne
sont pas syndiqués n'ont pas. En fait, si on se syndique, c'est parce
qu'on veut avoir des droits que l'aspect collectif donne parce qu'on est
ensemble dans un syndicat. Donc, on est plus forts et, par conséquent,
c'est une option qu'on prend à un moment donné. On se syndique ou
bien on ne se syndique pas.
Mme Harel: Ce n'est pas exactement comme ça dans la
société. Parce qu'il n'y a pas d'accréditation
multipatronale. Alors, on peut vouloir se syndiquer et avoir devant soi des
obstacles...
M. Rémillard: Oui, c'est vrai.
Mme Harel: ...juridiques qui sont presque intraversables...
M. Rémillard: Ou sociaux aussi.
Mme Harel: Oui, mais des obstacles qui consistent à
obtenir une accréditation.
M. Rémillard: Oui, je peux comprendre, des obstacles
sociaux. Il reste quand même qu'il y a une différence entre un
travailleur qui n'est pas syndiqué et un travailleur syndiqué.
Une de ces différences-là, on sait actuellement que le
travailleur syndiqué, la convention est garantie même s'il y a
achat. Donc, au départ...
Mme Harel: L'article 45.
M. Rémillard: Oui, l'article 45 qui est là.
Ça, c'est garanti. Là, vous avez des travailleurs qui ne sont pas
syndiqués. Ça peut être par choix comme ça peut
être aussi par incapacité. Je suis d'accord là-dessus. Je
ne sais pas dans quelle proportion. Mais il y a quand même une
différence, dans notre société, entre les droits d'un
syndiqué et celui qui ne l'est pas. Celui qui ne l'est pas peut avoir
d'autres avantages, d'autres possibilités, mais il a moins de
sécurité. C'est connu. C'est comme ça. Une de ces
sécurités qu'il n'a pas c'est que lorsque l'entreprise est vendue
- et ce que je disais tout à l'heure, donc, c'est en fonction des cadres
et ça peut aussi être en fonction des travailleurs. Quelqu'un veut
arriver avec sa propre équipe de techniciens spécialisés
ou je ne sais pas trop. On peut penser à bien des possibilités.
Et puis surtout au niveau des cadres. Le Barreau n'est pas d'accord, comme vous
le savez. Je pense que vous avez reçu l'avis du Barreau qui dit qu'ils
ne sont pas d'accord avec une telle garantie qui apparaîtrait comme
à l'article 2086.1. Et d'autres intervenants aussi ont fait valoir qu'on
doit garder cette différence entre le non-syndiqué et le
syndiqué. Mais je suis d'accord qu'on peut en discuter, continuer la
discussion, le suspendre et continuer la discussion pour plus amples
consultations.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Me
Masse.
M. Masse: M. le Président, je veux simplement apporter
à votre attention une chose qui a été dite tantôt.
Il n'est pas question d'empêcher le nouvel employeur de mettre à
pied. Mais un cadre qui travaille pour un employeur pendant 10 ans a le droit,
en vertu des règles actuelles, à un délai de
préavis. Et, par le fait de la vente d'entreprise, il le perdrait. Je
m'interroge là-dessus. Il perdrait son droit au préavis parce
qu'un nouvel employeur achète l'entreprise. Que le nouvel employeur
achète l'entreprise et donne le préavis. Je veux dire, c'est
simplement la conservation d'un droit fondamental.
M. Rémillard: Prenons un scénario, par exemple, un
cadre qui travaille... Vous avez un vice-président d'une entreprise qui
a un contrat de cinq ans. Il en est à sa troisième année
et l'entreprise est vendue...
Mme Harel: Est-ce que c'est fréquent, les contrats de cinq
ans?
M. Rémillard: Ah bien oui.
Mme Harel: Je lisais, dernièrement, que ça l'est de
moins en moins. C'est la norme, ça, trois ans.
M. Rémillard: Mettons trois ans. Mettons trois ans, pas
cinq ans.
Mme Harel: Oui. Les sous-ministres qui sont contractuels le sont
pour trois ans, m'a-t-on dit.
M. Rémillard: Alors, prenons trois ans, si vous voulez, et
il en est rendu à un an, un an et demi, il reste encore un an à
faire, mettons, et puis l'entreprise est vendue à...
Mme Harel: On change de gouvernement, mettons.
M. Rémillard: Ah! Vous voulez parler des sous-ministres.
Là vous avez de vilaines idées en tête.
Mme Harel: Oh non!
M. Rémillard: Vous faites tellement bien votre travail
que...
Mme Harel: Pas par rapport au vôtre.
M. Rémillard: ...je pense que vous avez beaucoup de
possibilités. Oh! Vous êtes dans l'Opposition, c'est vrai.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Harel: Alors, on reprend votre exemple. Il lui reste
un...
M. Rémillard: Vous voulez que je reprenne mon argument,
mais là vous m'avez fait tout perdre...
Le Président (M. Lafrance): On oublie ça, c'est
hors du sujet.
M. Rémillard: ...là j'étais dans un exemple.
Mme Harel: II lui reste un an à courir.
M. Rémillard: Ah! Il lui reste un an à courir. Bon,
d'accord. Alors, il reste un an à courir, l'entreprise est vendue. Selon
l'article 2086.1, ça ne changerait rien, il continuerait, il aurait son
contrat qui continuerait pour l'année. Si on laissait comme c'est dans
le projet, à ce moment-là, le nouvel acquéreur pourrait
dire: C'est terminé, sans préavis, rien.
Mme Harel: Au moment même où...
M. Rémillard: Mais ça signifierait ça. C'est
ça, Me Masse? Oui?
M. Masse: Oui.
Mme Harel: Sauf que l'employeur qui a vendu aurait pu lui aussi
vouloir mettre fin au contrat de son vice-président pour cause.
M. Rémillard: Oui.
Mme Harel: Et, à ce moment-là, il y a la
possibilité, même pour les cadres... Il y a une distinction
maintenant dans la loi des normes entre les cadres supérieurs et ceux
qui ne le sont pas.
M. Rémillard: On me dit que pour un contrat
déterminé le cadre aurait un recours contre celui avec qui il a
signé le contrat à durée indéterminée... En
tout cas, ça soulève assez de problèmes, certainement.
Moi, je suis en consultation avec mon collègue et je vais continuer
ça.
Mme Harel: Oui, quitte à peut-être mieux comprendre
l'avis du ministère du Travail en ayant copie...
M. Rémillard: Oui.
Mme Harel: ...ou peut-être pas copie mais, au moins, en
pouvant en prendre connaissance.
M. Rémillard: Non, il faut essayer d'avoir tous les
documents pour qu'on se fasse une idée.
On va regarder aussi la position du Barreau et si on a d'autres
intervenants...
Mme Harel: Est-ce qu'elle est écrite, la position du
Barreau?
M. Rémillard: Oui, oui. Je pense que vous l'avez
reçue.
Une voix: ...sur cet article-là.
M. Rémillard: Oui, oui, sur cet article-là.
M. Masse: Sans doute qu'elle l'était sur l'avant-projet
mais compte tenu du fait que la disposition a disparu du...
M. Rémillard: Non, non. Je pense que... Est-ce qu'on se
trompe? Est-ce qu'elle est là, madame-Une voix: Elle vient juste
de partir.
M. Masse: Non. Il y a un mémoire du Barreau, M. le
ministre, sur le contrat de travail; ça, ça va.
M. Rémillard: Non, mais sur cet article-là.
M. Masse: Mais sur l'article en question, sur l'amendement
à 2086.1, non.
M. Rémillard: Non?
M. Masse: Mais il se peut que sur l'avant-projet ils aient eu une
opinion là-dessus.
M. Rémillard: Je croyais que... On va le vérifier.
Il y avait d'autres...
Mme Harel: Ça ne nous a pas été
communiqué.
M. Rémillard: On va le vérifier. Disons, M. le
Président, que nous allons nous échanger toute la documentation
pertinente pour qu'on puisse prendre la décision la plus
éclairée. Je ne pense pas que là-dessus il y ait de
grandes divergences d'objectifs à poursuivre.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
que nous sommes disposés... L'article 2086.1, le nouvel article tel que
proposé, est laissé en suspens. Est-ce qu'on est disposé
à revenir sur l'article 2078?
M. Rémillard: Oui. M. le Président, voici, j'ai
l'article 2078.
Le Président (M. Lafrance): L'amendement initial est donc
retiré. Je pense qu'on a un nouvel amendement à proposer.
M. Rémillard: L'article 2078 du projet est modifié,
M. le Président: 1° par la suppression, aux deuxième et
troisième lignes du premier alinéa, de ce qui suit: ", d'une
manière qui soit préjudiciable à l'employeur,";
T par l'ajout, à la fin du deuxième alinéa, de ce
qui suit: ", et survivent en tout temps lorsque l'Information
réfère à la réputation et à la vie
privée d'autrui".
M. le Président, l'amendement vise à éviter que les
obligations de loyauté et de discrétion du salarié ne
soient interprétées comme ne valant qu'occasionnellement. En
raison de cet amendement, l'article 2078 se lirait comme suit: "Le
salarié, outre qu'il est tenu d'exécuter son travail avec
prudence et diligence, dort agir avec loyauté et ne pas faire usage de
l'information à caractère confidentiel qu'il obtient dans
l'exécution ou à l'occasion de son travail. "Ces obligations
survivent pendant un délai raisonnable après la cessation du
contrat, et survivent en tout temps lorsque l'information réfère
à la réputation et à la vie privée d'autrui."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y aurait des commentaires touchant cet article 2078 tel qu'amendé?
Alors, l'article 2078 est donc adopté tel qu'amendé.
Les prochains articles qui avaient été laissés en
suspens sont une série d'articles 2106, 2107 et 2108 qui touchent la
question du contrat d'entreprise ou de service au chapitre huitième.
Du contrat d'entreprise ou de service
M. Rémillard: M. le Président, nous avons un
amendement à l'article 2106. L'article 2106 du projet de loi est
modifié: 1° par l'ajout, à la deuxième ligne,
après les mots "qui ont" des mots ", selon le cas,"; 2° par le
remplacement, à la troisième ligne, des mots "sont solidairement
tenus" par ce qui suit: ", et le sous-entrepreneur pour les travaux qu'il a
exécutés, sont solidairement tenus"; 3° par le remplacement,
à la quatrième ligne, des mots "réception, lorsque" par
les mots "fin des travaux, que"; 4° par le remplacement, à la
dernière ligne, du mot "fabrication" par "réalisation".
M. le Président, le premier amendement apporte une
précision. Le deuxième amendement vise à affirmer la
responsabilité solidaire du sous-entrepreneur pour les travaux qu'il a
exécutés et à mieux affirmer le caractère
impératif de la règle. Le troisième amendement vise
à déterminer le point de départ de la prescription et est
de concordance avec l'article 2098. Le quatrième amendement assure la
concordance avec l'article 2089. En raison de ces amendements, l'article 2106
se lirait comme suit: "À moins qu'ils ne puissent se dégager de
leur responsabilité, l'entrepreneur, l'architecte et l'ingénieur
qui ont, selon le cas, dirigé ou surveillé les travaux, et le
sous-entrepreneur pour les travaux qu'il a exécutés, sont
solidairement tenus de la perte de l'ouvrage qui survient dans les cinq ans qui
suivent la fin des travaux, que la perte résulte d'un vice de
conception, de construction ou de réalisation de l'ouvrage, ou, encore,
d'un vice du sol."
L'article 2107, M. le Président, est modifié: 1° par
la suppression de toutes les occurrences des mots "ou malfaçons"; 2°
par la suppression, à la fin du premier alinéa, des mots
"d'exécution"; 3° par l'ajout, à la fin du deuxième
alinéa, de la phrase suivante. "Le sous-entrepreneur n'en sera
dégagé qu'en prouvant que ces vices résultent des
décisions de l'entrepreneur ou des expertises ou plans de l'architecte
ou de l'ingénieur."
M. le Président, il s'agit de modifications de concordance, vu
l'amendement proposé à l'article 2106. En raison de ces
amendements, l'article 2107 se lirait comme suit: "L'architecte ou
l'ingénieur ne sera dégagé de sa responsabilité
qu'en prouvant que les vices de l'ouvrage ou de la partie qu'il a
réalisée ne résultent ni d'une erreur ou d'un
défaut dans les expertises ou les plans qu'il a pu fournir, ni d'un
manquement dans la direction ou dans la surveillance des travaux.
"L'entrepreneur n'en sera dégagé qu'en prouvant que ces vices
résultent d'une erreur ou d'un défaut dans les expertises ou les
plans de l'architecte ou de l'ingénieur choisi par le client. Le
sous-entrepreneur n'en sera dégagé qu'en prouvant que ces vices
résultent des décisions de l'entrepreneur ou des expertises ou
plans de l'architecte ou de l'ingénieur. (22 heures) "Chacun pourra
encore se dégager de sa responsabilité en prouvant que ces vices
résultent de décisions imposées par le client dans le
choix du sol et des matériaux, ou dans le choix des sous-entrepreneurs,
des experts ou des méthodes de construction."
M. le Président, l'article 2108 du projet est modifié:
1° par l'ajout, à la première ligne, après les mots
"l'ingénieur" des mots "pour les travaux qu'ils ont dirigés ou
surveillés et, le cas échéant, le sous-entrepreneur pour
les travaux qu'il a exécutés,"; 2° par le remplacement,
à la deuxième ligne, des mots "également tenus" par "tenus
solidairement"; 3° par la supression des mots ", indépendamment de
toute responsabilité,"; 4° par le remplacement, à la
dernière ligne, du mot "cette" par "la".
M. le Président, le premier amendement assouplit la règle
de l'égard des architectes et
ingénieurs... Excusez-moi, M. le Président, je vais
recommencer la lecture. Le premier amendement assouplit la règle
à l'égard des architectes et ingénieurs. Il apporte aussi
une modification de concordance avec les articles 2106 et 2107 relatifs
à l'inclusion des "sous-entrepreneurs". Le deuxième amendement
assure aussi la concordance. Le troisième amendement fait
disparaître une expression qui pouvait être source de
difficultés dans l'interprétation. Le quatrième amendement
est d'ordre terminologique. En raison de ces amendements, l'article 2108 se
lirait comme suit: "L'entrepreneur, l'architecte et l'ingénieur pour les
travaux qu'ils ont dirigés ou surveillés et, le cas
échéant, le sous-entrepreneur pour les travaux qu'il a
exécutés, sont tenus solidairement pendant un an de garantir
l'ouvrage contre les malfaçons existantes au moment de la
réception, ou découvertes dans l'année qui suit la
réception."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre.
M. Rémillard: Un instant, M. le Président, si vous
me le permettez. Il y a un ajout maintenant. Il est ajouté, après
l'article 2108, le suivant: "2108.1 L'architecte et l'ingénieur qui ne
dirigent pas ou ne surveillent pas les travaux, ne sont responsables que de la
perte qui résulte d'un défaut ou d'une erreur dans les plans ou
les expertises qu'ils ont fournis."
M. le Président, l'amendement réintroduit dans le projet
de Code civil la règle de l'article 1689 du Code actuel, de
manière à enlever toute ambiguïté sur la
responsabilité des architectes et ingénieurs. En raison de cet
amendement, l'article 2108.1 se lirait comme suit: "L'architecte et
l'ingénieur qui ne dirigent pas ou ne surveillent pas les travaux, ne
sont responsables que de la perte qui résulte d'un défaut ou
d'une erreur dans les plans ou les expertises qu'ils ont fournis."
Alors, M. le Président, dans l'amendement écrit, il y a
des "s" à mettre aux mots "fourni" qui terminent les deux
rédactions des articles 2108.1.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant...
M. Rémillard: M. le Président...
Le Président (M. Lafrance): ...ces quatre articles?
Oui?
M. Rémillard: ...l'article 2110 doit demeurer suspendu
étant donné l'hypothèque mobilière.
Le Président (M. Lafrance): D'accord. Alors, est-ce qu'il
y aurait des commentaires touchant ces articles 2106, 2107 et 2108 tels
qu'amendés ainsi que le nouvel article 2108.1 tel que
proposé?
Mme Harel: Alors, M. le Président, peut-on demander au
ministre de nous indiquer la portée de ces nouvelles dispositions compte
tenu de leur caractère vraiment capital et, en regard du droit actuel,
ce qui est introduit de nouveau?
M. Rémillard: Oui, M. le Président. Il s'agit
d'articles qui sont importants quant à la responsabilité des
intervenants dans le domaine de la construction, qu'on parle du contracteur, du
sous-contracteur, de l'ingénieur ou de l'architecte. Nous introduisons
donc des règles de responsabilité qui, je crois, se
réfèrent à la réalité telle qu'elle se passe
dans les chantiers de construction. Ça amène certains
éclaircissements par rapport au droit actuel et aussi certains
changements. Je vais demander au professeur Pineau de nous faire le point sur
la portée de ces articles en comparaison avec le droit actuel.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
Me Pineau.
M. Pineau: Merci, M. le Président. En vertu de l'article
2106 qui est proposé, l'entrepreneur qui a dirigé les travaux,
l'architecte et l'ingénieur qui auront éventuellement
surveillé les travaux, le sous-entrepreneur qui aura
exécuté certains travaux, sont tenus solidairement de la perte de
l'ouvrage. Et cela, ils en sont tenus dans les cinq ans qui suivent la fin des
travaux dans la mesure où cette perte résulte d'un vice de
conception, de construction, de réalisation de l'ouvrage ou d'un vice du
sol, selon, évidemment, que l'on est entrepreneur, architecte,
ingénieur ou sous-entrepreneur. C'est ce que nous indique l'article
2106.
L'article 2107 vient nous dire de quelle façon l'architecte et
l'ingénieur pourront dégager leur responsabilité, 2107
alinéa premier. L'article 2107, alinéa premier, nous dit en effet
qu'ils devront prouver que les vices de cet ouvrage ou de la partie
réalisée ne résultent pas d'une erreur de leur part ou
d'un défaut dans les expertises ou les plans fournis, ou encore d'un
manquement dans la direction ou la surveillance des travaux dans la mesure
où, bien sûr, ils ont été chargés de la
direction et la surveillance de ces travaux.
Par la suite, l'alinéa deux de l'article 2107 précise que
l'entrepreneur, quant à lui, se dégagera, se libérera de
sa responsabilité en prouvant que les vices en question résultent
d'une erreur ou d'un défaut dans les expertises de l'architecte ou de
l'ingénieur. En prouvant cette erreur ou ce défaut dans les
expertises ou les plans de l'architecte ou de l'ingénieur qui a
été choisi par le client, en effet l'entrepreneur prouve,
de ce fait, qu'il n'a pas commis de faute. Donc, il est normal que sa
responsabilité soit dégagée. Quant au sous-entrepreneur,
lui, il pourra se dégager de cette responsabilité solidaire, dont
a parlé l'article 2106, en prouvant que les vices qui lui sont
reprochés résultent, comme le dit l'article, des décisions
de l'entrepreneur ou des expertises ou plans de l'architecte ou de
l'ingénieur. En prouvant cela, il prouve effectivement qu'il n'a pas
commis de faute. Il est donc normal que sa responsabilité soit
dégagée.
Et, enfin, le dernier alinéa de 2107 ajoute que chacune de ces
parties au contrat pourront se libérer de leur responsabilité en
prouvant que ces défauts, que ces vices résultent de
décisions qui ont été prises et imposées par le
client dans le choix du sol ou des matériaux. Là encore, en
prouvant cela, ils démontrent qu'ils n'ont commis aucune faute dans
leurs activités respectives.
Quant à l'article 2108, il traite des malfaçons. Dans ce
contexte-là, lorsque, effectivement, l'ouvrage en question
présente quelques malfaçons, il est prévu qu'entrepreneur,
architecte, ingénieur, pour les travaux qu'ils ont soit dirigés,
soit surveillés et, éventuellement, le sous-entrepreneur, s'il y
a un sous-entrepreneur effectivement, pour les travaux qu'il a
exécutés, ils sont, eux aussi, tenus solidairement, mais pendant
un an cette fois-ci et non point pendant cinq ans, de garantir l'ouvrage contre
ces malfaçons et cela, dans l'année... Les malfaçons
existantes, on précise "au moment de la réception, ou qui sont
découvertes dans l'année qui suit la réception."
Enfin, quant à l'article 2108.1, il est précisé que
ne seront pas responsables l'architecte et l'ingénieur qui ne dirigent
pas ou ne surveillent pas les travaux; on ne peut pas leur reprocher, quant
à cela, un défaut dans la direction ou dans - la surveillance
puisque, par définition, ils ne dirigent pas et ne surveillent pas, mais
ils seront responsables, éventuellement, de la perte qui résulte
d'un défaut ou d'une erreur dans les plans que l'architecte a soumis ou
les expertises qui ont été fournies, éventuellement, par
l'architecte ou l'ingénieur. Voilà le...
Mme Harel: Et en regard du droit actuel? M. Pineau: En
regard du droit actuel? M. Rémillard: C'est ça qu'on
attendait tous. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Pineau: Non. Le Code civil du Bas Canada était
là, derrière.
M. Rémillard: On croyait que c'était votre
introduction.
M. Pineau: Oui, mais c'était pour surpren- dre. Si
l'édifice périt en tout ou en partie dans les cinq ans par le
vice de la construction ou même par le vice du sol, l'architecte qui
surveille l'ouvrage et l'entrepreneur sont responsables de la perte
conjointement et solidairement, c'est-à-dire solidairement. Donc, ici,
sont en présence l'architecte et l'entrepreneur. L'article 1689
précise que, si l'architecte ne surveille pas l'ouvrage, il n'est
responsable que de la perte occasionnée par les défauts et
erreurs du plan. C'est ce qui est repris dans le projet.
M. Rémillard: Mais est-ce que... Si vous me permettez,
moi, je voudrais préciser un point, là. Prenons l'architecte.
S'il ne surveille pas les travaux, pour nous, il n'est pas solidairement
responsable. C'est ce que nous mettons dans nos articles maintenant. Dans le
droit actuel, est-il solidairement responsable? Même si... Est-ce qu'il
doit surveiller pour être solidairement responsable?
M. Pineau: Oui. L'article 1688 nous dit: Si l'édifice
périt par le vice de la construction ou par le vice du sol, l'architecte
qui surveille l'ouvrage et l'entrepreneur sont responsables solidairement.
L'article 1688.
M. Rémillard: Donc, on prend la même
règle.
M. Pineau: C'est la même règle. Et 1689 nous dit: Si
l'architecte ne surveille pas, il n'est responsable que de sa faute dans les
erreurs du plan qu'il a fourni.
M. Rémillard: Alors, nous, on l'étend au
sous-entrepreneur et on ajoute l'ingénieur.
M. Pineau: C'est cela.
M. Rémillard: Par rapport au droit actuel, c'est ce que
nous faisons.
M. Pineau: C'est ça. Mais il faut ajouter, M. le
Président, que l'ingénieur, selon la jurisprudence, est
assimilé à l'architecte.
Mme Harel: Par ailleurs, dans le droit actuel, là,
l'architecte qui surveille l'ouvrage est tenu... Mais, avec les amendements qui
sont introduits, il va pouvoir démontrer qu'il n'est pas fautif, ce
qu'il ne pouvait pas faire actuellement
M. Pineau: Exact.
Mme Harel: C'est ce qu'il faut comprendre? C'est peut-être
là, finalement, que se situe la nouveauté du droit.
M. Rémillard: Excusez-moi, voulez-vous
répéter?
Mme Harel: C'est que je comprends que dans le droit actuel,
lorsque l'architecte surveillait l'ouvrage, il était tenu solidairement
et conjointement.
M. Rémillard: Oui.
Mme Harel: Et, dorénavant, il sera aussi tenu, mais il
pourra démontrer qu'il n'était pas fautif. L'architecte pourra le
faire et il pourra se dégager de sa responsabilité même
s'il a surveillé les travaux. Il pourra le faire en prouvant que les
vices de l'ouvrage ou de la partie qu'il a réalisée ne
résultent ni d'une erreur ou d'un défaut dans les expertises ou
les plans. Il va pouvoir donc démontrer qu'il n'est pas fautif, se
dégager de sa propre responsabilité.
M. Rémillard: Oui. Probablement que c'est plus clair. On
me dit que ça existait dans l'article mais d'une façon
peut-être moins claire. Là, on vient préciser vraiment ce
droit-là.
Le Président (M. Lafrance): Ça va? Oui? Alors,
merci, Me Pineau. Et s'il n'y a pas d'autres commentaires, l'article 2106 est
adopté tel qu'amendé, de même que les articles 2107 et 2108
sont adoptés également tels qu'amendés et l'article 2108.1
- le nouvel article - est adopté tel que proposé.
À ce stade-ci, j'aimerais proposer de suspendre nos travaux pour
10 minutes. Merci.
(Suspension de la séance à 22 h 15)
(Reprise à 22 h 35)
Le Président (M. Lafrance): Reprenez vos places afin que
nous puissions reprendre nos travaux. Je déclare donc cette
séance de travail rouverte.
Les articles suivants qui avaient été laissés en
suspens sont les articles 2160 et 2161 qui touchent...
M. Rémillard: M. le Président, est-ce que je peux
vous demander, étant donné l'absence de Mme Ouellette...
Le Président (M. Lafrance): Oui.
M. Rémillard: ...de passer au chapitre onzième Du
dépôt?
Le Président (M. Lafrance): Chapitre onzième.
Mme Caron: Je voudrais poser une question. J'avais pris une note
à l'article 2224. J'avais mis une petite note qu'il devait y avoir une
nouvelle formulation. L'article 2224.
Le Président (M. Lafrance): L'article 2224, c'est dans le
chapitre dixième, ça?
M. Rémillard: C'est dans les questions techniques.
Mme Caron: C'est dans les questions techniques?
M. Rémillard: Oui. Mme Caron: Merci.
M. Rémillard: C'était une petite question de
reformulation.
Le Président (M. Lafrance): Moi aussi, j'avais...
M. Rémillard: II y en a deux ou trois. Mme Caron:
Oui.
Le Président (M. Lafrance): Vous m'avez bien dit au
chapitre onzième, M. le ministre? Chapitre onzième Du
dépôt?
M. Rémillard: Excusez-moi, M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): J'ai demandé: Vous avez
bien dit chapitre onzième Du dépôt.
M. Rémillard: Chapitre onzième Du
dépôt. Du dépôt
Le Président (M. Lafrance): Alors, le premier article de
ce chapitre onzième qui avait été laissé en suspens
est l'article 2282 qui touche la question du dépôt
nécessaire.
M. Rémillard: Oui, M. le Président, l'article 2282
est modifié par le remplacement, à la deuxième ligne, du
mot "pressante" par les mots "imprévue et pressante provenant d'un
accident ou d'une force majeure". M. le Président, l'amendement
proposé vise à mieux définir la notion de
"nécessité pressante" et reprend pour ce...
Mme Harel: Excusez. Personne ne l'a distribué.
M. Rémillard: Ah! Excusez-moi, M. le Président. Il
semble y avoir un problème. L'amendement n'a pas été
distribué. Un instant! Je vais donc...
Mme Harel: ...sur la gâchette.
Mme Caron: Un maillon dans la chaîne qui manque.
Le Président (M. Lafrance): Merci.
M. Rémillard: Alors, c'est le notaire Cos-sette
lui-même qui fait la distribution, M. le Président.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Rémillard: Je pense que ça mérite
d'être souligné. Probalement que c'est son séjour en Chine
qui lui a montré des manières...
Dés voix: Ha, ha, ha!
M. Rémillard: Alors, voilà, M. le Président.
Vous me permettrez de reprendre la lecture. L'article 2282 est modifié
par le remplacement, à la deuxième ligne, du mot "pressante" par
les mots "imprévue et pressante provenant d'un accident ou d'une force
majeure". L'amendement proposé vise à mieux définir la
notion de "nécessité pressante" et reprend pour ce faire le droit
actuel tel qu'énoncé à l'article 1813 du Code civil du Bas
Canada. En raison de cet amendement, l'article 2282 se lirait comme surt: "II y
a dépôt nécessaire lorsqu'une personne est contrainte par
une nécessité imprévue et pressante provenant d'un
accident ou d'une force majeure de remettre à une autre la garde d'un
bien."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant cet article 2282 tel
qu'amendé?
Mme Harel: On revient au droit actuel, si je comprends bien?
C'est bien ça?
M. Rémillard: C'est ce que ça signifie, oui.
Mme Harel: D'accord.
Le Président (M. Lafrance): Merci. Alors l'article 2282
est donc adopté tel qu'amendé. Est-ce que vous désirez, M.
le ministre, passer au chapitre douzième?
M. Rémillard: Excusez-moi, M. le Président. Alors,
l'article 2318 demeurerait suspendu.
Le Président (M. Lafrance): D'accord.
M. Rémillard: C'est une question de formulation. Nous
sommes toujours à finaliser la formulation.
Le Président (M. Lafrance): Le prochain article qui avait
été laissé en suspens dans ce chapitre...
M. Rémillard: Non, on aborde ensuite le chapitre
treizième Du cautionnement.
Du cautionnement
Le Président (M. Lafrance): Oui, le chapitre
treizième. Nous changeons de chapitre. Du cautionnement. L'article 2348
avait été amendé et laissé en suspens.
M. Rémillard: Oui, M. le Président. Je reprends
l'amendement si vous me le permettez. L'article 2348 est modifié: 1°
par le remplacement, dans les première et deuxième lignes du
premier alinéa, des mots "pour une période ou une somme
indéterminée" par les mots "en vue de couvrir des dettes futures
ou indéterminées, ou encore pour une période
indéterminée"; 2° par le remplacement, dans le
deuxième alinéa, des mots "lorsque le" par les mots "dans le cas
d'un"; 3° par la suppression, dans le deuxième alinéa, du mot
"est".
M. le Président, le premier amendement vise à
préciser la règle. Ce qui est visé par l'article 2348 ce
sont les dettes a venir ou ce que l'on appelle, en doctrine, le cautionnement
continu. L'expression "dettes futures" est plus claire que celle de "somme
indéterminée", laquelle n'implique pas forcément que
l'obligation est aussi indéterminée. L'amendement permet donc de
couvrir les diverses hypothèses où, que la période soit ou
non déterminée, la dette future est, elle-même, soit
déterminée ou indéterminée. Les autres amendements
sont d'ordre linguistique. En raison de cet amendement, l'article 2348 se
lirait comme suit: "Le cautionnement consenti en vue de couvrir des dettes
futures ou indéterminées, ou encore pour une période
indéterminée, comporte, après trois ans et tant que la
dette n'est pas devenue exigible, la faculté pour la caution d'y mettre
fin en donnant un préavis suffisant au débiteur, au
créancier et aux autres cautions. "Cette règle ne s'applique pas
dans le cas d'un cautionnement judiciaire."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
l'amendement qui avait été déposé initialement est
donc retiré et remplacé par celui-ci. Est-ce qu'il y a des
commentaires touchant cet article 2348 tel qu'amendé? Alors, l'article
2348 est donc adopté tel qu'amendé.
M. Rémillard: Nous passons au chapitre quatorzième,
M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): C'est exact, qui touche les
questions de la rente.
M. Rémillard: Oui.
Le Président (M. Lafrance): II y a deux articles ici
consécutifs qui avaient été laissés en suspens,
soit 2362 et 2363.
De la rente
M. Rémillard: Oui, alors, à 2362, nous n'avons pas
d'amendement. Nous avons un amendement pour 2363. L'article 2363 est
modifié par la suppression, à la dernière ligne du second
alinéa, des mots "et de sa famille". M. le Président, cet
amendement vise à assurer une meilleure cohérence entre la
règle du présent article et celle de l'article 2362, qui ne
comporte pas la mention des membres de la famille du crédirentier. Dans
le cas des deux articles, il va de soi que la mention des besoins alimentaires
du crédirentier permet de couvrir ceux que dictent ses propres
obligations alimentaires à l'égard des membres de sa famille. Les
mots "de sa famille" étaient donc inutiles et ils risquaient en outre de
nuire à l'interprétation de l'article 2362. En raison de cet
amendement, l'article 2363 se lirait comme suit: "Le capital accumulé
pour le service de la rente est insaisissable, lorsque la rente doit être
servie à un crédirentier et à celui qui lui est
substitué, tant que ce capital demeure affecté au service d'une
rente. "Il ne l'est, cependant, que pour cette partie du capital qui, suivant
l'appréciation du créancier saisissant, du débirentier ou
du crédirentier ou, s'ils ne s'entendent pas, du tribunal serait
nécessaire pour servir, pendant la durée prévue au
contrat, une rente qui satisferait les besoins alimentaires du
crédirentier."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y aurait des commentaires touchant ces deux articles, 2362 et 2363, tels
qu'amendés? Alors, l'article 2362 est donc adopté tel quel;
l'article 2363 est adopté tel qu'amendé.
M. Rémillard: Nous abordons maintenant, M. le
Président, le chapitre quinzième Des assurances.
Le Président (M. Lafrance): J'appelle donc l'article 2376
qui avait été laissé en suspens.
Des assurances
M. Rémillard: Oui, M. le Président. Nous avons un
amendement. L'article 2376 est modifié par la suppression du
deuxième alinéa. Cet amendement vise à retirer du projet
l'assurance collective de dommages et à ne prévoir, comme en
droit actuel, que l'assurance collective de personnes. Cette modification
entraîne un deuxième amendement à l'article 2377, pour
permettre expressément et de façon exclusive l'assurance
collective de personnes et un troisième amendement, de simple
concordance, à l'article 2469. En raison de cet amendement, l'article
2376 se lirait comme suit: "L'assurance terrestre comprend l'assurance de
personnes et l'assurance de dommages."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il a des commentaires touchant cet article 2376 tel qu'amendé? (22 h
45)
M. Rémillard: Oui, il y a 2377, M. le Président,
dont je pourrais lire l'amendement.
Le Président (M. Lafrance): Tout de suite? J'appelle donc
l'article 2377.
M. Rémillard: Oui. L'article 2377 est modifié par
l'ajout, à la fin de l'article, des deux alinéas suivants:
"L'assurance de personnes est individuelle ou collective. "L'assurance
collective de personnes couvre, en vertu d'un contrat-cadre, les personnes
adhérant à un groupe déterminé et, dans certains
cas, leur famille ou les personnes à leur charge."
Cet amendement, M. le Président, vise à permettre
l'assurance collective des personnes et reprend ainsi le droit actuel et la
proposition de l'Office de révision du Code civil. Cet amendement fait
suite à la modification proposée à l'article
précédent visant à retirer du projet l'assurance
collective de dommages. En raison de cet amendement, l'article 2377 se lirait
comme suit: "L'assurance de personnes porte sur la vie,
l'intégrité physique ou la santé de l'assuré.
"L'assurance de personnes est individuelle ou collective. "L'assurance
collective de personnes couvre, en vertu d'un contrat-cadre, les personnes
adhérant à un groupe déterminé et, dans certains
cas, leur famille ou les personnes à leur charge."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
est-ce qu'il y a des commentaires touchant ces deux articles, 2376 et 2377,
tels qu'amendés?
Mme Harel: II faudrait peut-être tout de suite
étudier l'amendement à 2469 qui est au même effet.
M. Rémillard: Oui. Alors, M. le Président, Mme la
députée Hochelaga-Maisonneuve a raison. Il faudrait que je lise
l'amendement proposé à 2469, étant donné les
relations entre ces articles.
Le Président (M. Lafrance): M. le ministre. Alors, je
rappelle donc l'article 2469.
M. Rémillard: L'article 2469 du projet est modifié
par la suppression des mots "ou l'adhérent". Alors, cet amendement, M.
le Président, est nécessaire pour faire suite à la
modification proposée à l'article 2376 qui retire du projet
l'assurance collective de dommages. En raison de cet amendement, l'article 2469
se lirait comme suit: "L'assurance d'un bien dans lequel l'assuré
n'a aucun intérêt d'assurance est nulle". Mme Harel:
Alors, M. le Président...
Le Président (M. Lafrance): Est-ce qu'on a
distribué 2469?
Mme Harel: ...je comprends donc que le ministre a
déjà clairement indiqué son intention de confier à
l'Institut permanent, l'Institut québécois - Quel lapsus! Je ne
sais pas pourquoi j'ajoute toujours le qualificatif "permanent" -donc, de
confier à l'Institut québécois de réforme du droit
toute cette question de l'assurance collective des personnes en matière
de dommages. On a des points de vue... Moi, ça m'est très
difficile d'apprécier les points de vue à ce moment-ci, mais il
reste aussi de connaître les conséquences des législations
qui vont être mises en vigueur et permettre aux banques à charte
fédérale de faire aussi de l'assurance.
M. Rémillard: Oui, M. le Président, il y a
tellement de points de vue différents qui nous ont été
communiqués et je dois aussi dire que tous les intervenants sont
d'accord pour dire que c'est très complexe et qu'ils n'ont pas la
prétention de nous donner l'entière situation. C'est là de
fait, je le confirme, un mandat qui sera donné, en priorité,
à l'office québécois de révision du droit pour
qu'on puisse faire le point. Alors, il serait bon que ce soit un organisme
indépendant qui puisse faire le point et proposer au législateur
les actions qui devront être prises selon les conclusions auxquelles ils
pourront arriver.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. S'il
n'y a pas d'autres commentaires, les articles 2376 et 2377 sont donc
adoptés tels qu'amendés. Et l'article 2469 est également
adopté tel qu'amendé. Le prochain article qui avait
été laissé en suspens est l'article 2385 qui touche la
question de la formation et du contenu du contrat.
M. Rémillard: Oui, M. le Président, l'article 2385
est modifié par le remplacement, au second alinéa, des mots "les
divergences" par les mots "les éléments sur lesquels il y a
divergence".
La modification précise l'obligation pour l'assureur d'indiquer
clairement à l'assuré les points précis de la couverture
qui constituent une divergence. De cette façon, l'assureur ne pourrait
s'acquitter de son obligation en reproduisant simplement le contenu de la
police dans un document séparé, sans autre indication. En raison
de cet amendement, l'article 2385 se lirait comme suit: "En matière
d'assurance terrestre, l'assureur est tenu de remettre la police au preneur,
ainsi qu'une copie de toute proposition écrite faite par ce dernier ou
pour lui. "En cas de divergence entre la police et la proposition, cette
dernière fait foi du contrat, à moins que l'assureur n'ait, dans
un document séparé, indiqué par écrit au preneur
les éléments sur lesquels il y a divergence."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
est-ce qu'il y a des commentaires sur cet article 2385 tel qu'amendé?
Oui, Me Masse.
M. Masse: M. le Président, cette préoccupation de
la divergence entre la proposition et le contrat a trouvé son point
culminant dans une décision toute récente de la Cour
suprême concernant une situation où un aubergiste avait fait une
demande ou une proposition d'assurance et où l'assureur, dans le
contrat, lui avait répondu, mais sans l'avertir de façon
spécifique, par une condition concernant l'inspection du système
de gicleurs. La Cour suprême a déclaré qu'on devait donner
priorité à la proposition.
D'un autre côté, les assureurs, devant cette
décision, ont manifesté l'inquiétude sur la notion de
divergence. Leur inquiétude, c'est que, puisque la proposition est un
document relativement sommaire, souvent accompagné d'un questionnaire,
et que le contrat est un document relativement long et détaillé,
si on interprète la notion de divergence dans un sens littéral,
à toutes fins pratiques, l'assureur sort obligé de retourner tout
le contrat d'assurance pour manifester les divergences. Bien sûr que,
quand on explique, dans le contrat, en quatre paragraphes, ce qui est
désigné par une ligne dans la proposition, il y a divergence. Je
pense que ce qui est important de noter, notamment à partir du
commentaire et de la formulation sur laquelle on a travaillé à
l'article 2385, c'est ce que l'on veut obliger l'assureur à faire ou, du
moins, la collaboration qu'on veut obtenir de lui, c'est d'indiquer à
son assuré les éléments substantiels qui sont vraiment des
conditions de couverture ou des conditions d'assurance qui sont
différentes de la proposition. Donc, il ne s'agit pas de remettre
l'entièreté du texte à l'assuré, mais bien de lui
indiquer les éléments sur lesquels il y a divergence. J'insiste
sur la notion d'éléments, c'est vraiment les points particuliers
ou les problèmes particuliers qui pourraient être
causés.
Je pense qu'on ne doit pas ignorer le fait que les assureurs sont
placés, par ce fait-là, dans une certaine bureaucratie qui nous
semble quand même relativement acceptable et qu'à l'usage on
pourra voir si la nouvelle formulation de 2385 pose des problèmes. Mais
il est clair qu'une situation comme celle qui a été
présentée en Cour suprême dans l'affaire dont je vous
parlais tantôt ne doit plus se produire et que s'il y a divergence entre
la proposition et la police, très clairement, l'assureur doit aviser son
assuré des règles du jeu.
M. Rémillard: M. le Président, le principe qui nous
guide dans cet article est celui du contrat, de la théorie du contrat,
c'est-à-dire un échange de volonté entre deux parties.
Dans ce cas-ci,. la proposition est un contrat. L'assuré prend contact
avec son assureur et convient donc d'une proposition des principaux
éléments de contrat qui s'établissent entre les deux, donc
assureur et assuré. Par conséquent, si cet échange de
volonté est modifié substantiellement, il est, à mon avis,
bien normal que ces changements, ces modifications soient signifiés
à l'assuré pour qu'il en soit informé. C'est une simple
conséquence de la théorie des contrats en fonction des
éléments substantiels et, par conséquent, ce que nous
demandons dans cet article, c'est que l'assureur fasse parvenir une police avec
un document qui établit précisément les
éléments substantiels sur lesquels il y a divergence entre la
proposition et la police. Pour nous, c'est une conséquence directe de fa
notion de contrat, d'un échange de volonté et d'une protection
qu'on doit assurer à l'assuré parce qu'il a, lui, une
connaissance de sa couverture d'assurance en fonction de la proposition du
contrat qu'il a établi avec l'assureur. Donc, c'est un article qui
découle directement du principe de la théorie des contrats.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
s'il n'y a pas d'autres commentaires, l'article 2385 est donc adopté tel
qu'amendé.
M. Rémillard: L'article 2390 demeure en suspens, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): L'article 2390 demeure en
suspens. Merci, M. le ministre. Alors, le prochain article, je pense, est
l'article 2394 qui touche la question des déclarations et engagements du
preneur en assurance terreste.
M. Rémillard: Nous avons un amendement, M. le
Président. L'article 2394 est modifié: 1° par le
remplacement, à la troisième ligne, du mot "avisé" par les
mots "normalement prévoyant"; 2° par le remplacement, à la
troisième ligne, des mots "le sont" par les mots "ont été
faites".
M. le Président, cet amendement clarifie le nouveau
critère introduit par la réforme pour évaluer le
caractère suffisant des déclarations faites par l'assuré
lors de la proposition du risque. Les déclarations faites doivent
être comparables à celles qu'aurait faite une personne prudente
dans les mêmes circonstances. Les autres modifications sont formelles. En
raison de cet amendement, l'article 2394 se lirait comme suit: "L'obligation
relative aux déclarations est réputée correctement
exécutée lorsque les décla- rations faites sont celles
d'un assuré normalement prévoyant, qu'elles ont été
faites sans qu'il y ait de réticence importante et que les circonstances
en cause sont, en substance, conformes à la déclaration qui en
est faite."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y a des commentaires touchant cet article 2394 tel qu'amendé?
Alors, l'article 2394 est donc adopté tel qu'amendé. Les
prochains articles qui avaient été laissés en suspens sont
les articles 2446 et 2447.
M. Rémillard: Oui, M. le Président, il faut garder
ces articles suspendus puisqu'ils sont reliés, d'une certaine
façon, à l'hypothèque mobilière que nous allons
discuter un peu plus tard.
Le Président (M. Lafrance): Le prochain article qui avait
été laissé en suspens est l'article 2457 qui traite du
paiement de la prime, pardon, de la déclaration de sinistre et du
paiement de l'indemnité. L'article 2457.
M. Rémillard: Oui, alors, il est toujours suspendu. Nous
sommes toujours en consultation et vérification technique, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
que c'est le cas aussi de l'article 2459?
M. Rémillard: Non, M. le Président. Nous pouvons
aborder l'article 2459. Il n'y a pas d'amendement.
Le Président (M. Lafrance): Aucun amendement. Merci, M. le
ministre. Alors, est-ce qu'il y aurait des commentaires touchant cet article
2459?
M. Masse: On a eu l'occasion, M. le Président, de parler
de cette question ce matin, vous vous souvenez, à l'occasion de la
possibilité de poursuite de la gardienne d'enfants a la maison. La
notion de la maison de l'assuré a pour but d'éviter que quelqu'un
s'assure et voit son assureur se retourner contre les membres de sa famille.
Par exemple, un enfant qui aurait commis une faute et qui aurait
provoqué l'incendie de la maison ou des enfants qui viendraient visiter
occasionnellement. La maison de l'assuré est un concept en droit des
assurances relativement large. Je pense qu'on peut tous déplorer que la
Cour suprême, dans une décision, soit allée jusqu'à
inclure dans la maison de l'assuré le voisin qui vient donner un coup de
main et qui, pour dégeler des tuyaux avec une torche
acétylène, met le feu à la maison. Mais je pense que cette
décision reste une décision d'espèce et que, à
vouloir trop resteindre la notion de maison de l'assuré, on risquerait
de causer, par ailleurs,
d'autres injustices, par exemple, des fautes commises par une femme de
ménage, par, encore une fois, la gardienne d'enfants. Après avoir
longuement discuté de la question et mûrement
réfléchi, comme c'est possible, nous en sommes, je pense, tous
arrivés à la conclusion qu'on devait garder la règle telle
qu'elle est là. (23 heures)
M. Rémillard: M. le Président, il est vrai que le
concept de maison de l'assuré peut être interprété
d'une façon peut-être large, mais il est vrai aussi que nous
devons laisser l'appréciation du tribunal presque cas par cas,
étant donné les circonstances qui peuvent se produire. Nous
savons pourquoi nous avons donc amené ce concept de maison de
l'assuré, pour que, justement, il n'y ait pas, à un moment
donné, une poursuite de l'assureur contre quelqu'un faisant partie de la
famille, ou même pas de la famille, mais qui est proche ou qui vit dans
la maison, le terme a été utilisé, "maison de
l'assuré". Alors, ces personnes qui sont reliées à
l'assuré doivent être situées en fonction de
différentes circonstances. Il serait, je pense, très mal venu que
nous limitions ce concept de maison de l'assuré. Il vaut mieux laisser
aux tribunaux le soin d'apprécier les circonstances pour définir
cette notion.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre, pour
ces précisions. Alors, l'article 2459 est donc adopté tel quel.
Le prochain article qui avait été laissé en suspens est
l'article 2463, qui touchait la question de la résiliation du
contrat.
M. Rémillard: M. le Président, on va le laisser en
suspens parce que, là aussi, c'est en relation avec l'hypothèque
mobilière.
Le Président (M. Lafrance): Le prochain qui a
été laissé en suspens est l'article 2471, qui touche la
question de l'étendue de la garantie.
M. Rémillard: Nous avons un amendement. L'article 2471 est
remplacé par le suivant: "L'assureur qui assure un bien contre
l'incendie n'est pas garant du préjudice causé par les incendies
ou les explosions résultant d'une guerre étrangère ou
civile, d'une émeute ou d'un mouvement populaire, d'une explosion
nucléaire, d'une éruption volcanique, d'un tremblement de terre
ou d'autres cataclysmes."
Cet amendement reprend le droit actuel, lequel limite
spécifiquement l'étendue de la garantie de l'assureur à
l'assurance contre l'incendie seulement. En raison de cet amendement, l'article
2471 se lirait comme suit: "L'assureur qui assure un bien contre l'incendie
n'est pas garant du préjudice causé par les incendies ou les
explosions résultant d'une guerre étrangère ou civile,
d'une émeute ou d'un mouvement populaire, d'une explosion
nucléaire, d'une éruption volcanique, d'un tremblement de terre
ou d'autres cataclysmes."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y aurait des commentaires touchant cet article 2471 tel qu'amendé?
Oui, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Est-ce qu'il faut comprendre que, dans les autres cas
qui sont énumérés ici, par exemple, les explosions
résultant d'une guerre étrangère ou civile, une
émeute, un mouvement populaire, une explosion nucléaire, une
éruption volcanique, un tremblement de terre, en fait, tous les autres
cas de cataclysmes, c'est la loi émanant de la sécurité
publique, c'est le remboursement...
M. Rémillard: Oui, déclarés "zone
sinistrée".
Mme Harel: Zone sinistrée. C'est ce qui devrait, à
ce moment-là, permettre aux victimes d'être
indemnisées.
M. Rémillard: C'est ça. D'être
indemnisées. Dès qu'il y a un cataclysme, il y a, par le fait
même, processus. Ça va au Conseil des ministres et c'est
déclaré par décret zone sinistrée et c'est cas par
cas que l'évaluation se fait et qu'on donne les indemnités.
Mme Harel: Comme, par exemple, la tornade de
Maskinongé.
M. Rémillard: Oui. Et puis il y a eu aussi...
Mme Harel: Est-ce que les compagnies d'assurances sont... Les
assureurs ont-Us couvert les dommages causés par la tornade?
M. Rémillard: Non, non. Quand c'est un "act of God"...
Mme Harel: "Act of God".
M. Rémillard: ..c'est-à-dire un cas de force
majeure... Si c'est prévu dans la police... Hormis que ce soit
prévu dans la police. Normalement c'est exclu dans une police mais il
peut y avoir des polices qui le prévoient. On peut même se
protéger contre des tremblements de terre, qu'on me dit. Selon les zones
où vous êtes situé au Québec, ça peut
coûter plus ou moins cher selon que c'est sensible aux tremblements de
terre.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
l'article 2471 est donc adopté tel qu'amendé. Le prochain article
qui a été laissé en suspens est le 2488 qui touche les
questions des assurances de responsabilité.
M. Rémillard: Est-ce que vous avez appelé 2488, M.
le Président?
Le Président (M. Lafrance): Oui.
M. Rémillard: Je m'excuse. On va le laisser suspendu. Nous
avons encore des discussions et consultations à faire.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
le prochain article serait au chapitre dix-huitième, qui traite de la
convention d'arbitrage.
Mme Harel: C'est Me Ouellette qui est...
M. Rémillard: C'est ça. Alors, nous avons
terminé, à ce stade-ci, avec...
Mme Harel: Combien reste-t-il d'articles dans les livres ou
chapitres qui concernent Me Masse?
M. Masse: À ma connaissance, 24. Mme Harel: 24? Au
total.
M. Rémillard: C'est parce que ça comprend aussi des
articles reliés aux hypothèques mobilières.
Mme Harel: Oui, c'est ça.
M. Rémillard: II y en a cinq ou six.
Mme Harel: Qui seront peut-être examinés à ce
moment-là en même temps que les hypothèques
mobilières.
M. Rémillard: Mobilières. Ça serait compris
en même temps.
Mme Harel: D'accord. Alors, nous aurons donc à nous
revoir. Avant de souhaiter un joyeux Noël à Me Masse, on va
attendre encore quelques heures.
M. Rémillard: Oui. Est-ce que c'est mardi que Me Masse
doit être avec nous?
M. Masse: J'aimerais bien, si possible. M. Rémillard:
Mardi.
M. Masse: Nous avons, M. le ministre, le jugement de la MIUF
vendredi après-midi à 14 heures, après 11 ans de
travail.
M. Rémillard: Vendredi qui s'en vient?
Mme Harel: Le 13.
M. Masse: Vendredi, le 13.
Mme Harel: Un vendredi 13.
M. Masse: Et j'ai besoin de préparer le terrain
moi-même.
M. Rémillard: On n'a pas le choix, il faut que vous soyez
de nouveau ici, mardi, là.
M. Masse: Mardi, absolument, oui. Le jugement est vendredi,
donc...
M. Rémillard: Ça va, ça va. Alors, on vous
voit...
Mme Harel: Mais le ministre pense que vendredi ça va
déjà être fini.
M. Masse: Mais ça concerne également le ministre
puisqu'il est défendeur dans ce dossier.
M. Rémillard: Oui, oui. On va avoir à regarder
ça de près aussi.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Rémillard: Maintenant que je suis un civiliste, je vais
aborder ça avec beaucoup, beaucoup d'intérêt. Vous allez
voir, ça va être mon livre de chevet pour tout le temps des
fêtes. Parce que ça va avoir combien de pages, ce jugement?
M. Masse: On s'attend à un jugement de 1000, 1200
pages.
M. Rémillard: 1000, 1200 pages, donc j'en ai pour au moins
10 jours. Ça va être ça, mes vacances. Parfait. Donc,
mardi, vous prévoyez être avec nous.
M. Masse: Mardi, je suis à votre disposition, pas de
problème.
M. Rémillard: Est-ce qu'il y a une réuion de
travail de prévue, monsieur-Une voix: Mardi matin.
M. Rémillard: Oui, là, il va falloir avoir une
réunion de travail avant de...
M. Masse: Oui, absolument.
M. Rémillard: Oui. Alors, mardi matin, il faudrait
prévoir une...
M. Masse: Je suis tout à fait d'accord.
M. Rémillard: Donc, je laisse la communication se faire
pour que mardi matin...
M. Masse: II faut que je voie également Mme la
députée Harel...
M. Rémillard: Oui
M. Masse:... et Mme Caron... M. Rémillard:
D'accord.
M. Masse:... pour qu'on puisse s'entendre sur le...
M. Rémillard: Et nous, lundi après-midi, donc...
Lundi matin. Non, ce n'est pas jamais le lundi matin. Lundi après-midi,
c'est ça?
Mme Harel: Mais vous pouvez faire une séance de travail
lundi matin, si vous le voulez.
M. Rémillard: Oui. Alors, très bien, M. le
Président, je vous demande d'ajourner à demain matin.
Le Président (M. Lafrance): Merci. Sur ce, nos travaux
sont ajournés pour ce soir...
Mme Harel: Avec Me Frenette.
M. Rémillard: Avec Me Frenette oui.
Le Président (M. Lafrance):... à demain, 6
décembre, à compter de 10 heures, ici dans cette même
salle. Merci, bonsoir.
(Fin de la séance à 23 h 10)