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(Neuf heures quarante-six minutes)
Le Président (M. Lafrance): Si vous voulez prendre place,
s'il vous plaît. Je constate que nous avons le quorum. Alors, j'aimerais
déclarer cette 14e séance de travail ouverte, en rappelant
à tous et à toutes le mandat de notre commission qui est de
poursuivre l'étude détaillée du projet de loi 125, Code
civil du Québec. Mme la secrétaire, est-ce que qu'il y a des
remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président, il y a un
remplacement: Mme Bleau (Groulx) est remplacée par M. Tremblay
(Rimouski).
Le Président (M. Lafrance): Merci. Alors, nous avons
convenu d'une séance de travail, ce matin, jusqu'à 12 h 30 et,
sujet à confirmation en Chambre cet après-midi, une séance
de travail également ce soir, de 20 heures à 22 heures. Est-ce
qu'il y a des remarques d'ouverture?
M. Kehoe: M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): Oui, M. le
député de Chapleau.
M. Kehoe: Le ministre de la Justice est absent. Comme vous voyez,
il n'est pas ici. Mais il sera ici d'ici 10 à 15 minutes. Je l'ai
confirmé avec lui et je pense qu'il y a deux articles qui ont
été laissés en suspens hier, les articles 2027 et 2028; il
y a plusieurs articles, dans cette section-là avec lesquels on peut
procéder; il y a des amendements. Mais, spécifiquement, les
articles 2027 et 2028 ont été laissés en suspens. On peut
procéder à l'amendement à l'article 2027, et l'article
2028 reste tel quel. Je vais lire l'amendement à l'article 2027...
Le Président (M. Lafrance): Oui. Juste un instant, s'il
vous plaît! Est-ce qu'il y a d'autres commentaires d'ouverture avant
qu'on commence dans le spécifique?
M. Kehoe: D'accord.
Le Président (M. Lafrance): D'accord. Alors,
effectivement, les articles 2027 et 2028 avaient été
laissés en suspens. J'appelle donc l'article 2027.
Des contrats nommés
Du transport (suite) M. Kehoe: L'amendement proposé
à l'article 2027, au deuxième alinéa, remplacer, dans la
deuxième phrase, les mots "Même en cas de force majeure, le
transporteur demeure néammoins tenu" par ceci: "II est aussi tenu".
Le texte proposé voulait éviter que l'on associe
l'état de santé du transporteur à la force majeure, pour
permettre qu'il ne soit pas exonéré. Or, cette précision
paraît à la réflexion inutile et même plutôt
susceptible de porter à confusion. En raison de cet amendement,
l'article 2027 se lirait comme suit: "Le transporteur est tenu de mener le
passager, sain et sauf, à destination. "Il est tenu de réparer le
préjudice subi par le passager, à moins qu'il n'établisse
que ce préjudice résulte d'une force majeure, de l'état de
santé du passager ou de la faute de celui-ci. Il est aussi tenu à
réparation lorsque le préjudice résulte de son état
de santé ou de celui d'un de ses préposés, ou encore de
l'état ou du fonctionnement du véhicule."
Le Président (M. Lafrance): Alors, merci, M. le
député. Est-ce qu'il y a des commentaires concernant cet article
2027 tel qu'amendé?
M. Kehoe: À l'article 2028, comme je l'ai
mentionné, M. le Président, il n'y a pas d'amendement; il reste
tel quel. Je pense que les spécialistes des deux côtés ont
vérifié, et il n'y aura pas d'amendement.
Le Président (M. Lafrance): Merci.
M. Kehoe: Maintenant, il y a un amendement, par contre, à
l'article 2029.
Le Président (M. Lafrance): Oui. L'article 2029 a
déjà été adopté tel qu'amendé. Est-ce
que vous désirez le rouvrir?
M. Kehoe: Non, non. Je m'excuse.
Le Président (M. Lafrance): Alors, s'il n'y a pas de
commentaire sur les articles 2027 et 2028, l'article 2027 est en
conséquence adopté tel qu'amendé et l'article 2028 est
adopte tel quel.
J'aimerais maintenant appeler les articles qui traitent du transport de
biens, soit les articles 2030 à 2048 inclusivement.
M. Kehoe: M. le Président, il y aurait six amendements. On
demande que les articles 2034, 2035 et 2047 soient suspendus. M. le
Président, il y a un amendement à l'article 2036. L'article
2036est remplacé par le suivant: "Le transporteur est tenu d'informer le
destinataire de l'arrivée du bien et du délai
imparti pour l'enlèvement, à moins que la
délivrance du bien ne s'effectue à la résidence ou
à l'établissement du destinataire. "
Commentaire: L'amendement proposé répond mieux à
l'objectif visé par cet article. Ce qu'il importe de considérer
pour déterminer si le transporteur doit informer le destinataire de
l'arrivée du bien, c'est si la délivrance a lieu ou non à
la résidence ou à l'établissement du destinataire. En
effet, même si la délivrance a lieu à l'endroit
indiqué au contrat, il peut être important d'informer le
destinataire de l'arrivée du bien lorsque ce dernier n'est
généralement pas présent a cet endroit. En raison de cet
amendement, l'article 2036 se lirait comme suit: "Le transporteur est tenu
d'informer le destinataire de l'arrivée du bien et du délai
imparti pour l'enlèvement, à moins que la délivrance du
bien ne s'effectue à la résidence ou à
l'établissement du destinataire. "
Le Président (M. Lafrance): Merci. Alors, vous avez
également un amendement, je crois...
M. Kehoe: Un amendement à l'article 2039.
Le Président (M. Lafrance): À l'article 2039,
oui.
M. Kehoe: Qui se lit comme suit: L'article 2039 est
modifié par l'ajout, à la fin du 2e alinéa, du mot
"normale". L'amendement proposé propose une précision quant
à la freinte qui ne peut donner ouverture à la réparation
de ta part du transporteur. En raison de cet amendement, l'article 2039 se
lirait comme suit: "Le transporteur est tenu de transporter le bien à
destination. "Il est tenu de réparer le préjudice
résultant du transport, à moins qu'il ne prouve que la perte
résulte d'une force majeure, du vice propre du bien ou d'une freinte
normale. "
Mme Harel: M. le Président. Le Président (M.
Lafrance): Oui.
Mme Harel: J'aimerais simplement faire écho au commentaire
que la Commission des services juridiques nous faisait parvenir sur l'article
2039, à l'effet, comme le disait la Commission des services juridiques,
de revenir à la suggestion qui était prônée par
l'Office de révision du Code civil. La Commission des services
juridiques invoque que l'ORCC prévoyait que le transporteur
répondait du vol de la chose, en mentionnant que cette exception avait
pour but d'uniformiser le droit canadien en la matière, puisque la
notion d'"act of God" de la "common law" a une portée plus restreinte
que les notions de cas fortuit, force majeure et fait d'un tiers. Alors,
j'aimerais connaître le commentaire des légistes sur cette
recommandation de la Commission des services juridiques qui était
à l'effet d'ajouter un troisième alinéa à l'article
2039, qui se lirait comme ceci: "II répond toutefois du vol de la chose,
même à main armée. "
M. Kehoe: En partant, je devrais remarquer: Le transporteur
répondra du vol toutes les fois qu'il ne parviendra pas à prouver
que le vol constitue un vol de force majeure, tel que défini à
l'article 1466, alinéa 2, du projet. Cette précision est conforme
au droit actuel, tel qu'interprété par la Cour d'appel. Donc,
c'est l'Union des producteurs agricoles qui a demandé cet
amendement-là... Ah, je m'excuse, ce n'est pas tout à fait la
même chose. Je demanderais au professeur Pineau de commenter sur
ça.
Mme Harel: D'accord.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le
député de Chapleau. Me Pineau.
M. Pineau (Jean): M. le Président, la Commission des
services juridiques réfère au droit d'aujourd'hui et plus
précisément à l'article 1815 du Code civil du Bas Canada,
parce que les articles relatifs aux obligations du voiturier renvoient aux
articles relatifs au dépôt et, dans les articles relatifs au
dépôt, notamment l'article 1815, il est prévu que
l'hôtelier, l'aubergiste, auquel s'appliquent également les
mêmes règles, est responsable du vol, mais il n'est pas
responsable du vol à main armée. La question a été
posée devant les tribunaux de savoir si le seul fait qu'il y ait eu vol
à main armée pouvait libérer ou non l'aubergiste ou le
transporteur. Certains juges ont prétendu qu'il suffisait qu'il y ait
vol à main armée - certains juges dissidents. La majorité
a décidé que, a priori, le vol à main armée
était un cas de force majeure, mais, lorsque ce vol à main
armée a été précédé d'une faute du
transporteur, ce n'est plus un cas de force majeure. C'est l'affaire BASTOS -
les cigarettes - contre Quinn Freight. Le transporteur avait laissé,
avant la délivrance des marchandises, le camion rempli de cigarettes
dans ses garages ou ses entrepôts et n'avait pris aucune autre
précaution. Alors que ce transporteur avait fait l'objet de vols
à main armée à trois ou quatre reprises
antérieurement, malgré cela, il n'avait pris aucune
précaution particulière, aucune mesure de sécurité.
C'est pourquoi la Cour d'appel a dit: Bien qu'il y ait eu vol à main
armée, il y a eu, antérieurement à ce vol à main
année, une faute qui a probablement eu pour conséquence le vol
à main année. Le transporteur n'avait pas pris les mesures qu'il
aurait dû prendre pour éviter le vol à main armée.
Donc, ce vol à main armée était prévisible puisque
ça avait déjà eu lieu. Il n'était pas
irrésistible non plus. Il s'agissait de prendre des mesures de
précaution. Alors, dès lors que l'on
dit "force majeure", que l'on ne réfère plus à
l'article 1815, on n'a plus besoin de prévoir le cas du vol, qu'il soit
à main armée ou à main nue.
Le Président (M. Lafrance): Merci.
Mme Harel: Le vol à main armée n'efface pas la
négligence, en fait.
M. Pineau: Pardon?
Mme Harel: Le vol à main armée n'efface pas la
négligence...
M. Pineau: Non, c'est ça.
Mme Harel: ...si tant est qu'elle est prouvée.
M. Pineau: C'est ça.
Le Président (M. Lafrance): Je pense que vous avez un
amendement aussi à 2040.
M. Kehoe: Oui, M. le Président. L'amendement
proposé se lit comme suit: L'article 2040 est modifié: 1° par
la suppression, aux 3e et 4e lignes du 2e alinéa, des mots "ou dans les
neuf mois à compter de la date à laquelle il aurait dû
être délivré"; 2° par l'ajout dans la 5e ligne du 2e
alinéa, après les mots "apparente ou non", de ce qui suit: ", ou,
s'il n'est pas délivré, dans les neuf mois à compter de la
date de son expédition".
Commentaire: Les amendements proposés modifient le point de
départ du calcul du délai de neuf mois, afin que celui-ci soit
conforme avec la réglementation actuelle (art. 12, annexe I du
Règlement sur le camionnage); ce délai de neuf mois, lequel
s'applique en cas de non-délivrance du bien, se calculera donc à
partir de la date d'expédition du bien. Les amendements visent aussi
à rattacher clairement la mention concernant la perte du bien au cas de
réclamation consécutive à la délivrance du bien. En
raison de ces amendements, l'article 2040 se lirait comme suit: "2040. Le
délai de prescription de l'action en dommages-intérêts
contre un transporteur court à compter de la délivrance du bien
ou de la date à laquelle il aurait dû être
délivré. "L'action n'est pas recevable à moins qu'un avis
écrit de réclamation n'ait été préalablement
donné au transporteur, dans les soixante jours à compter de la
délivrance du bien, que la perte survenue au bien soit apparente ou non,
ou, s'il n'est pas délivré, dans les neuf mois à compter
de la date de son expédition. Aucun avis n'est nécessaire si
l'action est intentée dans ce délai."
Mme Harel: Je pense que c'est la première fois qu'on voit
un délai de neuf mois dans le
Code. C'est un délai qui ne correspond pas à ceux qu'on a
voulu harmoniser, je crois.
M. Kehoe: Professeur Pineau. (10 heures)
M. Pineau: M. le Président, ce délai-Une voix:
...la naissance.
Mme Harel: Oui, c'est vrai que la naissance...
M. Pineau: Un délai de grossesse, oui.
M. Kehoe: La naissance après la délivrance.
M. Pineau: C'est un délai, M. le Président, que
l'on trouve dans les ordonnances des 5T43 dans le cas du transport
ferroviaire.
Mme Harel: On le retrouve donc dans un autre...
M. Pineau: Dans le transport ferroviaire... Mme Harel:
Dans le transport ferroviaire.
M. Pineau: ...une législation fédérale. Les
ordonnances de la Commission.
M. Holden: Est-ce qu'il y a une explication historique aux neuf
mois ou...
M. Pineau: Je ne sais pas.
M. Holden: Le blé ou je ne sais pas quoi.
M. Pineau: Je ne suis pas sûr, M. le Président,
qu'elle soit historique parce que ce délai a été
modifié à quatre ou cinq reprises en 12 mois ou en 24 mois. Il a
été extrêmement difficile à la Commission des
transports fédérale, qui est devenue l'Office des Transports, de
fixer un délai qui ne bougerait pas. Il pourrait être
changé ultérieurement...
Mme Harel: Alors, c'est donc pour rendre le délai
compatible...
M. Pineau: C'est cela.
Mme Harel: ...avec des législations
fédérales...
M. Pineau: Déjà existantes.
Mme Harel: ...actuellement en vigueur.
Le Président (M. Lafrance): Alors, merci.
M. Kehoe: II y a un autre amendement à l'article 2041.
L'article 2041 est remplacé par le suivant:
"En cas de transport successif ou combiné de biens, l'action en
responsabilité peut être exercée contre le transporteur
avec qui le contrat a été conclu ou le dernier transporteur."
Le commentaire: L'amendement vise à clarifier la portée de
la disposition, laquelle tend à indiquer contre qui sont
intentées les poursuites en cas de transport successif ou
combiné. Le second alinéa est également retiré afin
d'éviter de limiter les recours de l'expéditeur, car, quoique
celui-ci ait choisi le transporteur, il n'est pas nécessairement
maître des choix que peut faire le transporteur pour assurer le
déplacement du bien. En raison de cet amendement, l'article 2041 se
lirait comme suit: "En cas de transport successif ou combiné de biens,
l'action en responsabilité peut être exercée contre le
transporteur avec qui le contrat a été conclu ou le dernier
transporteur."
Le Président (M. Lafrance): Alors, merci, M. le
député de Chapleau.
Mme Harel: Ça, ça vaut simplement pour le transport
intraprovincial. Qu'en est-il en matière de transport interprovincial?
Est-ce que c'est la même règle qui prévaut?
Le Président (M. Lafrance): Alors, Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, en matière de
camionnage, il y a, effectivement, des règles qui vont dans ce
sens-là et qui ont été unifiées vis-à-vis
des autres provinces canadiennes.
Le Président (M. Lafrance): Merci.
M. Kehoe: M. le Président, il y a un amendement à
l'article 2042. L'article 2042 est modifié par la suppression, à
la 2e ligne du 1er aliniéa, des mots ", telle que". Il s'agit d'une
modification terminologique. En raison de cet amendement, l'article 2042 se
lirait comme suit: "La responsabilité du transporteur, en cas de perte,
ne peut excéder la valeur du bien déclaré par
l'expéditeur. "À défaut de déclaration, la valeur
du bien est établie suivant sa valeur au lieu et au moment de
l'expédition."
Le Président (M. Lafrance): Commentaires? On peut y
revenir, de toute façon. Tous les articles sont laissés ouverts
à discussion. Vous pouvez peut-être nous proposer l'amendement
suivant qui est 2045, je pense.
M. Kehoe: L'article 2045, c'est le dernier amendement dans ce
secteur. L'article 2045 est modifié par l'ajout d'un 2e alinéa,
lequel se lirait comme suit:
Toutefois le transporteur demeure responsable envers les tiers qui
subissent un préjudice en raison de l'un de ces faits, sous
réserve de son recours contre l'expéditeur."
Commentaire: L'amendement a pour but de préciser que le
transporteur, quant aux tiers, engage sa responsabilité de par la nature
même de son entreprise. En conséquence, tout dommage causé
à des tiers dans le cadre de cette entreprise devrait être
compensé par le transporteur, sous réserve toutefois de son
recours contre l'expéditeur. En raison de cet amendement, l'article 2045
se lirait comme suit: "L'expéditeur est tenu de réparer le
préjudice subi par le transporteur lorsque ce préjudice
résulte du vice propre du bien ou de l'omission, de l'insuffisance ou de
l'inexactitude de ses déclarations relativement au bien
transporté.
Toutefois, le transporteur demeure responsable envers les tiers qui
subissent un préjudice en raison de l'un de ces faits, sous
réserve de son recours contre l'expéditeur."
C'est une demande d'amendement par la Commission des services
juridiques, M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le
député de Chapleau. Alors, s'il n'y a pas de commentaire
additionnel sur ces articles, donc, les articles 2030 à 2033
inclusivement sont adoptés tels quels. Les articles 2034 et 2035 sont
laissés en suspens. L'article 2036 est adopté tel
qu'amendé. Les articles 2037 et 2038 sont adoptés tels quels. Les
articles 2039. 2040, 2041 et 2042 sont adoptés tels qu'amendés.
Les articles 2043 et 2044 sont adoptés tels quels. L'article 2045 est
adopté tel qu'amendé. L'article 2046 est adopté tel quel.
L'article 2047 est laissé en suspens et l'article 2048 est adopté
tel quel.
Nous en arrivons maintenant à la section II qui traite des
règles particulières au transport maritime de biens. Je remarque
qu'il y a un texte d'introduction à cette section. Je me
réfère à la page 431 de notre livre de commentaires
détaillés sur les dispositions du projet de loi. Permettez-moi de
lire ces commentaires d'introduction.
L'Office proposait de reproduire quasi intégralement les
dispositions de la Convention de Bruxelles de 1924 qui régit à
l'échelon international les relations contractuelles entre les
expéditeurs et les transporteurs maritimes de marchandises. Il concluait
que l'uniformité des lois en matière de transport maritime
était souhaitable vu le caractère international du commerce.
Toutefois, en reprenant les textes de la Convention et de la loi
fédérale sur cette matière, le projet de l'Office ne
tenait pas compte des problèmes constitutionnels.
Pour pallier cette difficulté, un article qui énonce le
champ d'application de la section réservée au transport maritime
est d'abord introduit. Le droit français est par ailleurs une source
d'inspiration, vu l'harmonisation qui existe en France entre le transport
international et le
transport national.
Les dispositions de cette section s'éloignent donc sous plusieurs
aspects des règles proposées par l'Office, afin de les adapter
à un transport plus simple et moins réglementé.
Enfin, dans le but de contrer les problèmes actuels quant
à la responsabilité des parties dans le cadre de la manutention
des marchandises, la proposition de réforme complète le projet de
l'Office et introduit en droit québécois des dispositions
spécifiques à cet effet. Elle puise ces principes dans le droit
français, lequel est clair et équitable pour toutes les parties
contractantes.
Alors, j'aimerais appeler deux articles contenus à la
sous-section qui traite des dispositions générales, soit les
articles 2049 et 2050.
M. Rémillard: II n'y a pas d'amendement.
Le Président (M. Lafrance): Aucun amendement. Merci, M. le
ministre. Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Oui, j'aimerais soulever les commentaires qui ont
été apportés par la Chambre des notaires,
particulièrement en regard de l'article 2049. La Chambre note que
l'article diffère complètement de celui qui était
énoncé dans l'avant-projet de loi, à l'article 2118. Donc,
il y a eu un changement important de la part du législateur. J'aimerais
que le ministre nous indique ce qui a motivé cette volte-face, d'abord.
Et j'aimerais revenir ensuite sur l'argumentation qui est
développée par la Chambre des notaires, notamment à
l'effet que "tel que libellé - je le cite, M. le Président,
à la page 132 du mémoire de la Chambre - cet article 2049 aura
comme conséquence que les règles prévues dans le Code,
relatives au transport maritime de biens, ne s'appliqueront jamais." Alors, ce
n'est pas un jugement nuancé, c'est dit comme tel. Alors, j'aimerais
savoir pourquoi le ministre nous propose d'adopter des règles qui,
vraisemblablement, ne trouveront pas matière à être
appliquées.
Le Président (M. Lafrance): M. le ministre.
M. Rémillard: Oui, M. le Président, nous avons eu
l'occasion, hier soir, d'aborder brièvement cet article 2049, dans le
cadre des dis-cusions que nous avons eues sur la portée
constitutionnelle de certains articles. Et on s'est référé
alors au mémoire que la Chambre des notaires nous a fait parvenir. Et,
de fait, dans son mémoire, la Chambre des notaires apporte un soin
particulier à soulever tous ces problèmes constitutionnels. Je ne
sais si c'est M. Talpis, qui a été conseillé à ce
niveau-là ou d'autres conseillers... mais il y a manifestement, de la
part de la Chambre des notaires, une sensibilité à toutes ces
questions constitutionnelles - et c'est une bonne chose - pour qu'on puisse
cerner, dans sa juste dimension, l'application du Code civil.
M. le Président, je répète tout d'abord ce que j'ai
dit hier. Le Code civil se réfère à l'article 92 (13) de
la Constitution de 1867. Et, par conséquent, il s'agit d'une
compétence exclusive de la province et du Québec, en particulier,
en ce qui regarde le Code civil.
Par ce Code civil, nous légiférons sur les contrats. C'est
ce qui est en cause ici. Et, par conséquent, pour nous, le domaine de
juridiction québécoise est exclusif, il ne fait pas de doute. On
nous a fait part que, dans la précédente rédaction, il
pouvait y avoir quelques ambiguïtés quant à l'étendue
de l'application de l'article. Nous avons voulu être plus clairs. Et
l'article, tel que rédigé, reflète cette intention du
législateur d'exprimer très clairement l'intention
législative et aussi la direction - je pourrais dire -
constitutionnelle. Je cite l'article: "À moins que les parties n'en
conviennent autrement, la présente section s'applique au transport de
biens par voie d'eau, lorsque les ports de départ et de destination sont
situés au Québec." Donc, c'est exactement ce que nous avons
discuté hier. Lorsque le départ et la destination sont à
l'intérieur du territoire québécois, ça ne fait pas
de doute qu'il s'agit d'une juridiction québécoise par les
contrats, et, par conséquent, nous en arrivons donc à une
rédaction qui est beaucoup plus claire que celle que nous avions
précédemment.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Oui,
Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, le ministre fait
référence à la notion de contrat. Mais, en fait, ce qu'il
faut comprendre ici, à l'article 2049, c'est que dans la disposition
telle que stipulée il limite volontairement la portée et
l'étendue de la juridiction qu'il entend voir adopter par le
Québec, puisque, à l'article 2118 de l'avant-projet de loi, on
pouvait lire que la section sur le transport maritime de biens s'appliquait au
transport de biens ou de marchandises par eau effectué au départ
ou à destination d'un port situé au Québec. C'est donc
dire qu'il faudrait qu'à l'article 2049 on puisse retrouver une
rédaction qui permettrait justement à cette section de
s'appliquer au transport de biens par voie d'eau lorsque les ports de
départ ou de destination sont situés au Québec. Là,
on nous dit: Lorsque les ports de départ et de destination sont
situés au Québec. Alors il faut comprendre qu'il faut quasiment
être un traversier ou un caboteur, en fait, mais il faut... Donc, le
ministre a jugé bon de limiter lui-même la portée et
l'étendue finalement de la section. (10 h 15)
Et la législation fédérale qui a déjà
été
confirmée par la Cour suprême dans la Loi sur le transport
de marchandises par eau, la loi fédérale, ne fait pas de
distinction entre le transport maritime intraprovincial et extraprovincial.
Alors, la loi fédérale, elle, prétend s'appliquer,
indépendamment que ce soit un transport de biens par voie d'eau
intraprovinciale ou extraprovinciale. Et là il faut bien comprendre,
évidemment, qu'il s'agit donc de dispositions supplétives, parce
que les parties peuvent en convenir autrement. L'article, d'ailleurs, commence
comme ceci: "À moins que les parties n'en conviennent autrement". Alors
les parties peuvent donc, en ces matières, en convenir autrement dans un
contrat, malgré, je pense, qu'elles soient régies par la
Convention de La Haye. Alors elles ne peuvent pas, je crois, s'éloigner
de ce qui est déjà prévu dans la Convention de La Haye,
malgré que le Canada n'a pas adhéré, je pense, à la
Convention de La Haye encore.
Alors, à partir du moment où le Canada y
adhérerait, ça pourrait avoir évidemment un impact sur les
dispositions du Code civil. Mais, je crois comprendre qu'il y a eu inspiration
de la Convention de La Haye en regard des dispositions qui vont être
soumises dans le projet de réforme. Mais je pense que l'argumentation de
la Chambre des notaires vaut, quand ils nous disent "II est bien évident
- et je les cite - qu'en pratique, lorsque les parties elles-mêmes
écarteront l'application des règles de La Haye en matière
de cabotage, comme le leur permet la législation fédérale,
ce ne sera certes pas pour se voir appliquer éventuellement un
régime similaire prévu dans le Code civil du Québec."
Et la Chambre ajoute, "La Chambre des notaires considère que le
législateur doit affirmer sans équivoque sa compétence en
la matière. Le législateur pourrait rendre ce régime
obligatoire au transport maritime - en fait c'est là, je pense, leur
proposition - intraprovincial tout en adoptant des exemptions d'application
déjà prévues dans la législation
fédérale et dans les règles de La Haye. Contrairement - et
l'argumentation qui est développée est la suivante, - au contrat
d'affrètement, le régime obligatoire de responsabilité du
transporteur maritime repose quant à lui sur un motif
d'intérêt public.11
Alors, je ne sais quel est le point de vue du ministre sur ces questions
qui sont soulevées par la Chambre des notaires, mais je crois qu'on ne
peut pas passer outre, en fait, à un débat là-dessus.
M. Rémillard: Tout d'abord, M. le Président, ce qui
pouvait poser des problèmes dans lavant-projet dans cet article 2118,
c'était cette partie de phrase qui disait "effectué au
départ ou à destination d'un port situé au Québec".
Alors le "ou" causait problème. Alors là...
Mme Harel: Expliquez-nous quelle sorte de problèmes
étaient causés.
M. Rémillard: II y avait une série de
problèmes. Je laisserai tout à l'heure le professeur Pineau
élaborer plus avant sur l'ambiguïté que
l'interprétation de ce "ou" pouvait faire ressortir.
Pour que les choses soient plus claires, sans limiter la portée
de l'article, on a donc décidé de mettre le "et".
Mme Harel: On limite, c'est ça.
M. Rémillard: Et, en plus, de débuter l'article par
"À moins que les parties n'en conviennent autrement", pour justement
stipuler qu'il y a là discrétion, partie de discrétion,
tout au moins, qui est laissée aux parties. Alors, M. le
Président, je vais laisser le professeur Pineau compléter mes
remarques.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, le Canada n'a pas
ratifié la Convention internationale de Bruxelles de 1924, mais le
Canada a adopté comme loi interne les règles de La Haye,
c'est-à-dire le texte international qui a précédé
la Convention de Bruxelles, qui a été à l'origine de la
Convention de Bruxelles. Le Parlement fédéral a donc
adopté ces règles de La Haye comme législation interne.
Mais cette loi fédérale de 1936 ne s'applique que lorsque le
point de départ du transport est situé dans un port du Canada
à destination d'un autre port du Canada, ou bien lorsque le point de
départ est situé dans un port du Canada à destination d'un
port étranger. Cela signifie que la loi fédérale ne
s'applique pas lorsque le transport a pour point de départ un port
étranger à destination du Canada. Ça, c'est un premier
point.
Alors, l'article 2118 laissait entendre qu'il suffisait qu'il y ait un
point de départ ou un point de destination au Québec pour que le
texte québécois s'applique. Or, il est clair que, si le point de
départ est situé au Québec et que le point de destination
n'est pas situé au Québec, c'est le fédéral qui a
compétence. Alors, éclaircissement dans 2049 qui vient dire:
désormais, la loi québécoise s'applique lorsque le port de
départ est situé au Québec et lorsque le port de
destination est situé au Québec. Donc, cela est tout à
fait conforme à la répartition des pouvoirs tels
qu'édictés par la Constitution.
Maintenant, ceci n'empêche pas les parties à un contrat de
transport maritime dont le port de départ est situé à
l'étranger - pensons à un transport New York-Montréal -
rien n'empêche les parties de décider qu'elles entendent se
soumettre à telle ou telle loi, car nous sommes alors en présence
d'un problème de droit international privé, étant
donné que le
Canada n'a pas ratifié la Convention de Bruxelles et que la
Convention de Bruxelles ne peut s'appliquer que dans l'hypothèse
où les deux pays ont ratifié cette convention. Si les
États-Unis avaient adopté les règles de Visby qui ont
modifié en 1968 la Convention de Bruxelles, la situation serait
différente. Mais ce n'est pas le cas. Donc, des parties,
québécoises, américaines, pourraient convenir que leur
contrat est soumis à telle loi, dont, par exemple, la loi
québécoise. Et les tribunaux devraient appliquer cette loi, car,
selon les règles du droit international privé, c'est la loi dite
d'autonomie, c'est la loi choisie par les parties qui est alors applicable.
Mme Harel: C'est donc dire qu'à moins que le point de
destination soit à l'étranger, auquel cas c'est la loi
fédérale qui s'applique, si le point de départ est au
Canada, mais dans les cas, par exemple, où le point de départ est
au Canada et le point de destination au Canada, c'est à la fois la Loi
fédérale sur le transport de marchandises par eau qui peut
s'appliquer, ou le Code civil, puisque la loi fédérale ne
distingue pas entre le transport intraprovincial et extraprovincial. Alors,
c'est dont dire que cette Loi sur le transport de marchandises par eau trouve
application si les parties n'en ont pas convenu autrement. Ou les parties
pourraient toujours choisir les dispositions contenues au Code civil sur le
transport maritime des biens. C'est donc dire qu'il y a, finalement, deux corps
de lois qui s'appliquent lorsque le point de départ et de destination
est au Québec.
M. Pineau: M. le Président, si vous le permettez, c'est
exact, selon que le point de départ et le point de destination sont
situés...
Mme Harel: Au Québec.
M. Pineau: ...exclusivement au Québec ou selon que le
point de départ et le point de destination sont situés dans un
port du Québec et dans un port d'une province voisine.
Mme Harel: II faut donc comprendre qu'il nous est proposé,
à la section II, des règles particulières au transport
maritime des biens qui trouveraient application dans une même
matière où il y a déjà une loi
fédérale de transport de marchandises par eau. Tant que le
Québec est dans le Canada, là, et tant que la loi
fédérale réglemente le transport maritime par eau d'un
point de départ du Canada à un point de destination au Canada
également, c'est donc dire qu'il y a aussi une législation
fédérale au même effet qui est de nature intraprovinciale,
qui trouve matière à application en matière de transport
maritime intraprovincial.
M. Pineau: Pas nécessairement. Lorsque la loi
fédérale de 1936 dit: d'un port du Canada à un autre port
du Canada, elle dit simplement transport interne, transport, disons, canadien.
Mais, à l'intérieur du transport canadien, il faut se fier
à la Constitution et à la répartition des
compétences et nous devons à ce moment-là faire une
différence entre le transport interprovincial et le transport
intraprovincial. Donc...
Mme Harel: Excusez-moi, professeur Pineau, mais cette
différence, on la fait pour des fins, si vous voulez, doctorales parce
que la Cour suprême n'a pas fait cette distinction. La législation
fédérale, elle, ne distingue pas entre le transport intra et
extra. Si je comprends bien, elle trouve application, mon Dieu, sans cette
distinction.
M. Pineau: M. le Président, la Cour suprême a
déjà analysé ce que signifiait "navigation and shipping".
Et elle dit: "navigation", ça, c'est exclusivement fédéral
tandis qu'en ce qui concerne le "shipping", il faut distinguer le "shipping"
interprovincial et international du "shipping" intraprovincial. Le "shipping"
intraprovincial est de compétence provinciale et c'est pourquoi...
M. Rémillard: Si vous me permettez, M. le
Président, quant à la Cour suprême, de faire la relation
avec l'affaire Parson où le comité judiciaire du Conseil
privé avait confirmé pour fa première fois d'une
façon si claire la distinction entre le commerce international, le
commerce interprovincial et le commerce intraprovincial. Et, en fonction, donc,
de ces aspects de commerce, on a fait la distinction entre le "shipping" et la
navigation et entre une compétence interprovinciale
fédérale et une compétence intraprovinciale qui, à
ce moment-là, relève de la compétence exclusive de la
province.
Mme Harel: Oui, mais à ce moment-là, M. le
ministre, comment alors expliquer que les parties peuvent convenir autrement?
C'est-à-dire que, si elles n'en conviennent pas autrement, elles peuvent
préférer finalement l'application de la loi
fédérale même en matière de "shipping"
intraprovincial. S'il n'y a pas de contrat, qu'est-ce qui s'applique?
M. Pineau: II y a nécessairement un contrat implicite,
n'est-ce pas?
Mme Harel: Oui, mais s'il n'y a pas de contrat explicite entre
les parties?
M. Pineau: Si nous sommes dans un contexte de transport
intraprovincial d'un port du Québec à un port du Québec,
ça sera le Code civil. C'est le Code civil qui devrait s'appliquer.
Mme Harel: Qui devrait s'appliquer. Est-ce qu'il a trouvé
jusqu'à maintenant matière à application?
M. Pineau: Jusqu'à présent, on ne s'est
guère référé aux règles du Code civil car
les règles du Code civil datent de 1866 et même on peut dire qu'en
1866 ces règles étaient déjà désuètes
car ce que nous avons dans le Code civil du Bas Canada actuellement ce sont des
règles issues de l'ordonnance de Colbert.
M. Holden: M. le Président.
Le Président (M. La trance): Oui, M. le
député de Westmount.
M. Rémillard: Colbert fait réagir le
député de Westmount. (10 h 30)
M. Holden: J'ai été marié avec une fille
d'un armateur grec, alors, j'en ai fait pas mal de droit maritime et je vois
que le Barreau, sous l'égide de Me Beaudry, qui est un grand expert en
droit maritime, a fait des commentaires sur ces articles. Mais pour nous mettre
dans la bonne voie, comme le dit l'introduction à cette section, c'est
les règles internationales qui mènent dans le "shipping". Je ne
sais pas comment vous appelez ça, le "bill of lading". Un connaissement?
Oui, le connaissement. Dans 90,10 % du temps, c'est un connaissement qui
reconnaît, comme vous l'avez signalé, les règles de La
Haye. Moi, en tant qu'avocat de droit maritime, je trouvais que normalement les
avocats de droit maritime se servaient de "carriage of goods by water" ou les
droits de La Haye mais, les rares fois qu'il s'agissait d'un cabotage
intraprovincial, on avait le choix entre deux. Je ne l'ai pas tout à
fait étudié, mais j'espère qu'on va faire en sorte que nos
règles ne soient pas en contradiction avec les règles du droit
fédéral. Ça ajoute aux recours de celui qui a eu une
réclamation. Au lieu de diminuer le droit des Québécois,
on ajoute aux droits des Québécois. Alors, j'espère que la
députée de Hochelaga-Maisonneuve réalise que ce qu'on fait
là aide les Québécois; on ne leur nuit pas, aux
réclamants québécois. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le
député de Westmount.
M. Rémillard: M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): Oui, M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, est-ce que je peux
souligner que, pour la rédaction de cette partie, nous avons
bénéficié de l'apport d'un eminent spécialiste
québécois dans la matière, soit M. le professeur William
Tetley, qui nous a apporté ses lumières pour rédiger ces
articles.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
s'il n'y a pas d'autres commentaires, les articles 2049 et 2050...
Mme Harel: Alors, M. le Président...
Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: ...je partage l'opinion du député de
Westmount, dont je salue, d'ailleurs, la présence parmi nous ce
matin.
M. Holden: Ma présence continue. Mme Harel:
Voilà. J'aurais dû la qualifier.
Une voix: II a dit qu'il était indépendant.
M. Holden: Oui.
Mme Harel: Et je sais que le partage constitutionnel en 1867 a
fait en sorte que le droit maritime, à 91 (10), soit, finalement, de
compétence fédérale. M. le Président, même si
nous comprenons les motifs qui ont présidé à la
modification de toute cette section pour la moderniser et la rendre compatible
au transport et aux intérêts des personnes, vous comprendrez que
nous allons voter contre cette disposition parce que nous manifestons ainsi
notre désaccord, sur cette distinction, avec cette Loi constitutionnelle
de 1867 qui est malheureusement encore en usage dans notre
société.
M. Rémillard: M. le Président, je dois dire
brièvement que je comprends fort bien cette décision de
l'Opposition qui est logique et conforme à sa position
constitutionnelle.
Le Président (M. Lafrance): Merci. M. le ministre. Donc,
l'article 2049 est adopté sur division et l'article...
M. Holden: M. le Président, je note que je vote-Le
Président (M. Lafrance): Oui.
M. Holden: ...avec le gouvernement dans cette situation.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. La trance): L'article...
Mme Harel: Vous ne voulez pas avoir un deuxième
procès, là, vous?
M. Holden: Ha, ha, ha! Non. Un par année, ça
suffit.
Mme Harel: Un suffit.
Le Président (M. Lafrance): L'article 2050 est donc
adopté tel quel. J'appelle maintenant les articles qui traitent des
obligations des parties, soit les articles 2051 à 2069
inclusivement.
M. Rémillard: Nous avons un amendement, M. le
Président. L'article 2066 est modifié par la suppression,
à la 2e ligne du 1er alinéa, des mots "inflammables, explosifs
ou". M. le Président, l'amendement proposé a pour but
d'éviter que le mot "dangereux" reçoive une interprétation
trop restrictive. Les biens inflammables de même que les biens explosifs
sont des biens dangereux. L'amendement est aussi de concordance avec l'article
2067. En raison de cet amendement, l'article 2066 se lirait donc comme suit:
"Le transporteur peut débarquer, détruire ou rendre inoffensifs
les biens dangereux à l'embarquement desquels il n'aurait pas consenti
s'il avait connu leur nature ou leur caractère. "Le chargeur de ces
biens est responsable du préjudice qui résulte de leur
embarquement et des dépenses faites par le transporteur pour se
départir de ces biens ou les rendre inoffensifs."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Aucun
commentaire. Donc, les articles 2051 à 2065 inclusivement sont
adoptés tels quels. L'article 2066 est adopté tel
qu'amendé; les articles 2067, 2068 et 2069 sont adoptés tels
quels. J'aimerais maintenant appeler les articles contenus à la
sous-section qui traite de la manutention des biens, soit les articles 2070
à 2074 inclusivement.
M. Rémillard: II y a un amendement, M. le
Président, à l'article 2070, qui est modifié par la
supression... Excusez-moi, M. le Président, c'est parce qu'il y a un
courant d'air épouvantable qui nous tombe dessus comme la misère
sur le pauvre monde, exactement ici. Je vais vous dire, M. le Président,
pour tout le monde qui travaille de ce côté-ci... je ne sais pas
si l'Opposition est plus chanceuse que nous, mais il y a manifestement un
problème.
Une voix: C'est affreux. Ils ont le même problème
dans la salle à côté.
M. Rémillard: Ah, c'est vous qui l'avez. Bon, c'est
inversé. Alors très bien. Alors, M. le Président, c'est
une parenthèse que je referme. Donc, M. le Président, l'article
2070 - je recommence - est modifié par la supression, à la 2e
ligne du 1er alinéa, après les mots "opérations de", du
mot "la". Il s'agit, M. le Président, d'une modification de
terminologie. En raison de cet amendement, l'article 2070 se lirait comme suit:
"L'entrepreneur de manutention est chargé de toutes les
opérations de mise à bord et de débarquement des biens, y
compris les opérations qui en sont le préalable ou la suite
nécessaire. "Il est présumé, dans ses activités,
avoir reçu le bien tel qu'il a été déclaré
par le déposant."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. On
m'informe qu'un technicien va vérifier si on peut améliorer la
situation. Alors, s'il n'y a aucun commentaire sur ces articles, l'article 2070
est donc adopté tel qu'amendé et les articles 2071 à 2074
inclusivement sont adoptés tels quels. Nous en arrivons maintenant au
chapitre septième, qui parle du contrat de travail, et j'aimerais
peut-être faire appel à la participation de M. le
député de Rimouski afin de nous lire les propos d'introduction,
s'il vous plaît.
Du contrat de travail
M. Tremblay (Rimouski): Oui, M. le Président. Alors,
l'introduction du chapitre septième se lit comme suit: Certaines
règles particulières au contrat de travail se retrouvaient au
Code civil du Bas Canada. Ces règles ayant été
élaborées au siècle dernier, il convient de les revoir, de
redéfinir le contrat de travail et de préciser son
mécanisme juridique.
Parallèlement aux règles actuelles du Code, il s'est
développé un droit particulier, mieux adapté aux besoins
actuels en ce domaine. Or, les lois et règlements qui en
découlent rendent ces dispositions désuètes. D'où
l'importance de revaloriser le régime de droit commun, qui s'applique
à nombre de contrats et qui constitue le fondement de toute relation
d'emploi, et d'y substituer des principes généraux modernes
pouvant mieux servir de base aux dispositions particulières.
La définition qui a été retenue met en relief les
trois éléments caractéristiques de ce contrat: le travail
pour autrui, la rémunération et le lien de subordination entre le
salarié et l'employeur, tout en consacrant le caractère
essentiellement temporaire de ce contrat.
De plus, ce chapitre réglemente les stipulations de
non-concurrence, la tacite reconduction et l'avis de congé.
On a donc simplifié les règles du droit actuel et
codifié certaines solutions jurispruden-tielles. Il est à noter
que, même si le champ d'application de la Loi sur les normes du travail
permet de régir la majorité des employés, il ne les
régit pas tous et que les règles prévues au présent
chapitre trouveront dès lors application.
Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, M. le
député. J'aimerais appeler les articles contenus à ce
chapitre septième, soit les articles 2075 à 2086
inclusivement.
M. Rémillard: M. le Président, nous avons huit
amendements. Le premier amendement, c'est à l'article 2075 du projet,
qui est modifié par l'ajout, à la 2e ligne, après les mots
"s'oblige,"
des mots "pour un temps limité et". M. le Président, on
reprend ici l'idée exprimée à l'article 2076 qui veut
qu'un salarié ne puisse s'engager sa vie durant. Ce déplacement
est fait dans un but de clarification de l'article 2076. En raison de cet
amendement, l'article 2075 se lirait comme suit: "Le contrat de travail est
celui par lequel une personne, le salarié, s'oblige, pour un temps
limité et moyennant rémunération, à effectuer un
travail sous la direction ou le contrôle d'une autre personne,
l'employeur."
Le Président (M. Lafrance): Alors, merci, M. le
ministre.
M. Rémillard: Un autre amendement, M. le
Président.
Mme Harel: M. le Président, bon, évidemment,
l'intention louable derrière cet amendement, c'est d'écarter
toute possibilité d'esclavage. On s'oblige, pour un temps qui est
déterminé, mais pourquoi dire "un temps limité"? Pourquoi
pas "pour un temps déterminé"? Je peux avoir tort,
évidemment, mais "pour un temps limité" suppose qu'il y ait eu
une entente tacite pour que la durée ait été convenue. Le
mot "limité" suppose une durée convenue.
M. Rémillard: II y a une distinction à faire entre
ce qui est indéterminé et ce qui est limité. Alors, le
contrat lui-même peut être de durée
indéterminée, mais le temps de l'emploi peut être
limité.
Mme Harel: Et là, ce n'est pas "peut être", c'est
nécessairement.
M. Rémillard: Nécessairement, oui, je m'excuse. Mon
"peut" signifie un "doit".
Mme Harel: Oui.
M. Rémillard: Comme en technique législative.
Mme Harel: Oui.
M. Rémillard: Donc, il doit être limité,
obligatoirement. Mais, si vous me permettez, je pourrais demander à Mme
Longtin de compléter mes commentaires. Je me demande, M. le
Président, si ça n'aurait pas été bon qu'on lise
aussi l'amendement à 2076.
Mme Harel: Ah! D'accord.
M. Rémillard: Les deux articles se comprennent
peut-être un peu ensemble, avec les amendements qu'on y apporte. Si vous
me le permettez, M. le Président, je pourrais lire l'amendement à
2076 et, ensuite, Mme Longtin pourrait nous faire part de certains
commentaires.
Le Président (M. Lafrance): II y a consentement. Allez-y,
M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Rémillard: Oui. Alors, l'article 2076 du projet est
modifié par la suppression de l'expression suivante: ", mais
l'engagement du salarié ne peut être que pour un temps
limité". M. le Président, l'amendement est de concordance avec
celui apporté à l'article 2075. En raison de cet amendement,
l'article 2076 se lirait comme suit: "Le contrat de travail est à
durée déterminée ou indéterminée."
Alors, M. le Président, on voit donc là la relation entre
le contrat de travail en relation avec ce concept de détermination,
déterminé ou indéterminé, alors que l'emploi est
pour un temps limité. Je vais demander à Mme Longtin de
compléter par ses commentaires.
Le Président (M. Lafrance): Me Longtin.
Mme Longtin (Marie-José): Oui, M. le Président.
Comme on l'a fait remarquer précédemment, c'est certainement...
La notion de temps limité reproduit, à cet égard, le droit
actuel qui est, au fond, une espèce de déclaration de principe
à l'effet qu'un contrat de travail est toujours pour un temps
limité par rapport à une notion de perpétuité.
Mais, indépendamment... Une fois qu'on a dit ça, ce
contrat-là peut être à durée
déterminée, donc on peut avoir un contrat de six mois, un an,
cinq ans, ou il peut être à durée
indéterminée. On s'engage chez un employeur et, tant qu'il y a de
l'emploi ou tant qu'on décide d'y rester ou qu'il n'y a pas de mises
à pied ou de licenciements, on a un emploi. Donc, c'est une
durée, à ce moment-là, qui est indéterminée.
Ce que ça provoque, c'est évidemment que les règles pour
mettre fin à ces contrats-là peuvent varier et avoir des effets
différents, suivant que la durée a été
précisée au moment de l'engagement ou pas.
Mme Harel: C'est aussi la distinction entre la durée et le
temps, à ce moment-là.
Mme Longtin: Oui.
Mme Harel: Alors, la durée est déterminée ou
indéterminée et le temps est limité. Parce que ça
peut être à perpétuité, d'une certaine
façon.
Mme Longtin: Enfin, la vie humaine... (10 h 45)
Mme Harel: Jusqu'à la mort, évidemment. Il y a une
fin implacable. Alors, c'est en se référant à cette fin
qu'on introduit cette limite et non pas à la convention entre les
parties, parce que les parties peuvent ne pas... les parties, tacitement, ne
conviennent pas d'un temps limité?
Mme Longtin: Non, les parties conviennent d'une durée de
leur contrat, ou non, auquel cas il est déterminé ou
indéterminé, mais ce que l'on signifie par là, je pense
que c'est tout simplement qu'on ne pourra jamais se prévaloir du fait
qu'il y a un contrat pour exiger, d'une façon illimitée, une
prestation de travail. Je pense que c'est vraiment un énoncé plus
de principe qu'autre chose qui...
Mme Harel: C'est parce que, de ce temps-ci, les gens voudraient
plutôt pouvoir, justement, se prévaloir d'un contrat
illimité.
M. Rémillard: Oui, M. le Président, je comprends
très bien la dernière remarque de Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve. C'est vrai que les gens voudraient... On peut bien
comprendre qu'ils aimeraient bien avoir des contrats, avec un emploi...
Mme Harel: À la japonaise.
M. Rémillard: ...oui, à la japonaise. Cependant,
comme la députée de Hochelaga-Maisonneuve le disait au tout
début de ses remarques, le but dans tout ça, c'est que
l'esclavage n'existe plus. Alors, le contrat lui-même peut être
indéterminé, mais l'emploi ne peut jamais, lui, être
considéré comme indéterminé, c'est-à-dire
qu'il est obligatoirement limité. Souvenons-nous que Einstein a obtenu
son prix Nobel en démontrant que le temps était relatif, et c'est
particulièrement vrai lorsqu'on parle d'emploi. Malheureusement, dans un
certain sens, c'est déplorable. Mais, dans le sens du principe que nous
étudions ici, qui est le fondement contractuel entre l'employeur et
l'employé, c'est la volonté de l'employé, comme de
l'employeur, évidemment, mais de l'employé comme on s'y
réfère ici, de continuer un travail et non pas d'être
obligé à un travail pendant une longueur
indéterminée de temps... illimitée, je devrais dire.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. S'il
n'y a pas d'autres commentaires, ces articles 2075 et 2076 sont donc
adoptés tels qu'amendés. Je pense qu'il y a une proposition
d'amendement aussi à l'article 2077.
M. Rémillard: L'article 2077 est modifié par la
suppression, à la dernière ligne, des mots ", ainsi qu'à
son intégrité". Cet amendement, M. le Président, supprime
la notion d'intégrité, laquelle, dans le contexte, est
déjà couverte par les notions de santé,
sécurité et dignité. En raison de cet amendement,
l'article 2077 se lirait comme suit: "L'employeur, outre qu'il est tenu de
permettre l'exécution de la prestation de travail convenue et de payer
la rémunération fixée, doit prendre les mesures
appropriées à la nature du travail, en vue de protéger la
santé, la sécurité et la dignité du
salarié."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre.
Mme Harel: Alors, je comprends qu'il s'agit d'un article de droit
nouveau.
M. Rémillard: Oui.
Mme Harel: Est-ce qu'en vertu de cet article, on pourrait
invoquer que sa dignité a été atteinte par du
harcèlement, par exemple, du harcèlement sexuel?
M. Rémillard: Dans le Code civil, on sait qu'on retrouve
toujours les principes. Ensuite, des lois particulières viennent
préciser, dans des contextes particuliers, l'application de ces
principes. Dans ce cas-ci, je crois qu'on a un bel exemple. Lorsqu'on parle de
la santé au travail, on sait tous les organismes qui existent, et les
lois, les dispositions réglementaires et législatives qui
existent et qui viennent préciser cette obligation pour l'employeur de
protéger la santé de ses employés. C'est la même
chose en matière de sécurité. Lorsqu'on parle de la
dignité du salarié, cette dignité, pour moi, est le
principe peut-être le plus fondamental, parce que, lorsqu'on parle de
l'être humain, on parle avant tout de sa dignité d'être
humain comprenant... Pour moi, la dignité comprend la santé et la
sécurité. Mais mieux vaut l'exprimer comme il l'est
présentement dans le principe.
Mais il demeure que cette dignité du salarié peut
comprendre, certainement, des éléments concernant le respect des
droits et des libertés qu'on retrouve dans la Charte des droits et des
libertés, et qu'on retrouve en application par un tribunal des droits
qui, comme vous le savez maintenant, est actif et fait respecter ces droits et
ces libertés. Alors, dans ce contexte-là, M. le Président,
ce qu'il est important de retenir, c'est que les principes que nous retrouvons
dans le Code civil sont ensuite en application dans des situations
particulières par des lois, par une réglementation qui est
particulière dans chaque cas.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. S'il
n'y a pas d'autres commentaires, l'article 2067 est donc adopté tel
qu'amendé.
M. Rémillard: M. le Président, l'article 2078 du
projet est modifié par la suppression, aux 2e et 3e lignes du premier
alinéa, de ce qui suit: ", d'une manière qui soit
préjudiciable à l'employeur,". L'amendement vise à
éviter que les obligations de loyauté et de discrétion du
salarié ne soient interprétées comme ne valant
qu'occasionnellement. En raison de cet amendement, l'article 2078 se lirait
comme suit:
"Le salarié, outre qu'il est tenu d'exécuter sort travail
avec prudence et diligence, doit agir avec loyauté et ne pas faire usage
de l'information à caractère confidentiel qu'il obtient dans
l'exécution ou à l'occasion de son travail. "Ces obligations
survivent pendant un délai raisonnable après la cessation du
contrat."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Vous
pouvez peut-être nous lire l'amendement à l'article 2079, M. le
ministre?
M. Rémillard: M. le Président, je vais vous
demander juste une petite minute. Je voudrais éclaircir juste une petite
chose.
M. le Président, c'est parce que je m'interrogeais. J'avoue que
je m'étais déjà interrogé sur cet article que je
trouve très important parce qu'il est question de vie privée, de
différents éléments. Je m'interrogeais sur le sens du
deuxième alinéa, sa portée. Lorsqu'on dit: "Ces
obligations survivent pendant un délai raisonnable après la
cessation du contrat." J'imaginais différents scénarios, comme,
par exemple, le ou la secrétaire qui travaille dans un bureau
médical et qui est en contact avec des dossiers médicaux. Si elle
cesse son emploi à cet endroit-là, est-ce que, en
interprétant ce deuxième alinéa, ça lui donne
possibilité de ne plus être liée par un secret? Elle n'est
pas de la profession, donc elle n'a pas la confidentialité du secret
professionnel - elle ou lui. Bien sûr, on va me dire qu'il y a le respect
de la vie privée qui est garanti par la Charte et qu'elle est
obligée au respect de la vie privée. Mais je me demande quelle
peut être la portée de ce deuxième alinéa. Je vous
avoue, M. le Président, que je m'interroge un petit peu.
Le Président (M. Lafrance): Oui. Me Masse, ou Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Oui, justement, je me demandais comment appliquer, par
exemple, cette disposition à des cas précis. J'avais en
tête M. Jean Deschamps, l'ex-président-directeur
général de la RIO qui était allé témoigner
en faveur de la compagnie Laval in dans le différend qui oppose cette
compagnie actuellement à la RIO à l'égard du contrat du
toit du Stade. Il est bien évident que c'étaient là des
informations qui avaient été recueillies à l'occasion, ou
dans l'exécution du travail. Étaient-ce là des
informations à caractère confidentiel? Bon, il y a toute une
appréciation à faire.
Mais, il faut, j'imagine, comprendre 2078 dans le contexte, par exemple,
où ces informations... Dans la mesure où ces informations
révéleraient une atteinte aux droits de la personne, est-ce qu'on
pourrait reprocher aux salariés d'en faire usage ou de les rendre
publiques? Pensons, par exemple, à un salarié qui est
informé, dans le cadre de son travail, qu'il y a systématiquement
une politique de l'entreprise pour éviter d'embaucher des Noirs, ou pour
éviter d'embaucher des homosexuels, ce qui irait à rencontre de
la Charte. Ce sont des motifs interdits de discrimination dans la Charte.
Alors, j'imagine que ça a beau être une information à
caractère confidentiel obtenue dans l'exécution ou à
l'occasion du travail, mais, à ce moment-là, pourrait être
invoqué le motif de l'intérêt public pour que ces
informations aient été communiquées, par exemple, aux
médias.
M. Rémillard: Dans un cas pareil, j'ai l'impression quand
même, M. le Président, pour me référer au cas que
vient de citer Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve, que
l'employé qui est conscient d'une politique qui est illégale a le
devoir de dénoncer cette illégalité. C'est son devoir le
plus fondamental de citoyen, s'il considère... Et il n'y a pas de secret
professionnel, ou quelque obligation que ce soit qui peut l'empêcher de
faire part de l'illégalité comme telle.
Mme Harel: Mais ça peut être aussi, simplement, sans
que ce soit l'illégalité, ce qui peut facilement, à ce
moment-là, se justifier, mais ça peut être tout simplement
révéler un état de situation.
M. Rémillard: Un élément
d'enquête.
Mme Harel: Un état d'une situation, par exemple,
systémique, c'est-à-dire qui n'est pas nécessairement
voulue par une politique de l'entreprise, mais qui est obtenue par une
combinaison de facteurs.
M. Rémillard: Est-ce qu'on peut demander à Mme
Longtin de nous faire part de ses commentaires, si elle peut nous rassurer?
Le Président (M. Lafrance): Oui, Me Longtin.
Mme Longtin: M. le Président, d'une part, je pense que la
question est très importante, et il est peut-être difficile d'y
répondre globalement, à brûle-pourpoint. Je dirais
cependant, en ce qui concerne l'aspect de la confidentialité, lorsqu'il
y a une personne qui est en cause - et dans l'exemple que vous avez
mentionné, M. le ministre, l'infirmière - je crois qu'il ne faut
pas...
M. Rémillard: Excusez-moi, pas l'infirmière.
Mme Longtin: C'est-à-dire la secrétaire qui a
accès au dossier.
M. Rémillard: Parce que, pour l'infirmière, il y a
un secret professionnel, il y a tout le Code des professions, il y a quelque
chose de par-
ticulier.
Mme Longtin: Oui, sauf que je pense qu'il ne faut pas non plus
négliger la nouvelle formulation de l'article 9 de la Charte des droits
et libertés de la personne par rapport à ce qu'est le secret
professionnel dans les corporations professionnelles, puisque l'article 9
l'exprime comme un droit de la personne qui fait la confidence, et non pas
strictement comme une obligation du professionnel de maintenir le secret sur la
confidence qui lui est faite.
Et donc, de ce fait-là, ce droit et l'obligation qui en
résulte pour l'autre partie s'étendent aussi à
l'employé puisque, de toute façon, l'employeur serait responsable
si son employé divulguait quelque chose que lui-même ne peut pas
divulguer. Il y aurait une faute. Et, au-delà de la fin de l'emploi,
c'est certainement... ça subsiste, et ça subsistera aussi, je
pense, en raison des obligations qui sont faites par la Charte de respecter la
réputation, la vie privée, la sécurité,
l'intégrité, etc. (11 heures)
M. Rémillard: Ça va, vos explications valent
très bien dans la mesure où il y a le contrat et que le contrat
s'applique, mais ici on fait référence au contrat qui se termine
après l'emploi. Moi, M. le Président, je ne sais pas si les
autres membres de cette commission seraient d'accord, mais je trouve qu'il y a
une question qui est là, et qu'il vaudrait mieux suspendre cet article,
et qu'on le regarde plus à fond. J'avoue que ça mérite
plus de réflexion, cet article-là, sur sa réelle
portée pour le respect de la vie privée, et pour d'autres
considérations aussi.
Le Président (M. Lafrance): Oui, M. le
député de Chapleau.
M. Kehoe: Bien, vu que l'article est suspendu... J'allais
mentionner le cas des fonctionnaires fédéraux qui sont maintenant
en conflit de travail avec leur employeur, et qui ont juré de lui faire
la vie dure de toutes les façons, de tous côtés. Je me
demande si c'est couvert par l'article? Est-ce que, s'il y a un contrat,
ça ne serait pas couvert, à ce moment-là? Oui... c'est
plutôt après que le contrat est terminé que-Actuellement,
les fuites qu'il pourrait y avoir, ça ne serait pas couvert par cet
article-là.
Mme Harel: Premier alinéa.
M. Holden: Si on sait qui a fait la fuite, il va terminer son
contrat bien vite.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Lafrance): Me Masse.
M. Masse (Claude): Juste une parenthèse, M. Kehoe. Les
relations de travail entre le gouver- nement du Canada et ses fonctionnaires,
de même que les contrats de travail, sont sous la juridiction unique du
gouvernement du Canada.
M. Kehoe: Non, mais, j'allais dire si la même chose se
produisait ici, au Québec; mettons que, par un conflit de travail,
ça deviendrait une situation similaire ici, dans la province, avec
des...
M. Masse: On appliquerait le Code civil et la Loi sur la fonction
publique. Mais ça pourrait être vu comme une atteinte à la
loyauté que doit l'employé à son employeur et, dans ce
cas-là, il y a, en plus, une dimension d'intérêt public,
dans la plupart des cas. Mais je voulais simplement dire, au sujet de l'article
2078, que nous avons travaillé, depuis maintenant quelques jours, sur
cette disposition-là, dans le cadre où les informations que
détiendrait le salarié portent sur l'employeur. Et je dois dire
que la discussion de ce matin, qui m'apparatt extrêmement
intéressante, éclaire une perspective d'information sur des
clients, par exemple, ou sur des dossiers confidentiels de tiers. Je pense,
effectivement, qu'on devrait suspendre pour pouvoir arrimer un peu mieux cette
disposition. Mais, essentiellement, il faut bien comprendre qu'on est en
matière de contrat de travail, donc dans les relations entre un
employeur et un ou des salariés et, effectivement, les perspectives
impliquant des tiers sont des éléments nouveaux et je pense qu'on
devrait suspendre.
Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Masse. Alors,
l'article 2078 est donc laissé en suspens. J'aimerais appeler l'article
2079.
M. Kehoe: M. le Président, il y a un amendement
proposé à l'article 2079. L'article 2079 du projet est
modifié: 1° par la suppression, au premier alinéa, de ceci:
", en son propre nom,"; 2° par la suppression, au deuxième
alinéa, de ce qui suit: "sans pour autant porter atteinte à la
capacité de gain du salarié"; 3° par la suppression du
troisième alinéa.
Commentaire: Le premier amendement vise à clarifier la
portée de la règle car, quel que soit le nom sous lequel il agit,
le salarié peut être tenu de ne pas faire concurrence. Le
deuxième amendement supprime la notion d'atteinte à la
capacité de gain. Par nature, la stipulation porte atteinte à la
capacité; son caractère légitime devrait naturellement
découler des autres critères indiqués. Le troisième
amendement supprime l'expression d'une règle qui paraît inutile,
vu les règles usuelles quant à la charge de la preuve. En raison
de ces amendements, l'article 2079 se lirait comme suit: "Les parties peuvent,
par écrit et en termes exprès, stipuler que, même
après la fin du contrat, le salarié ne pourra faire concurrence
à l'employeur ni participer à quelque titre que ce
soit à une entreprise qui lui ferait concurrence.
Toutefois, cette stipulation doit être limitée, quant au
temps, au lieu et au genre de travail, à ce qui est nécessaire
pour protéger les intérêts légitimes de
l'employeur."
Le Président (M. Lafrance): Alors merci, M. le
député de Chapleau. Oui, M. le député de
Westmount.
M. Holden: Est-ce qu'on peut savoir pourquoi on a supprimé
le troisième alinéa? Je trouve que ça avait bien du bon
sens, cet alinéa-là. Je sais que ça cause des
problèmes aux employeurs, mais c'est quand même plus juste pour
l'employé.
M. Kehoe: C'est parce que c'est strictement une question de
preuve.
M. Holden: Le fardeau de la preuve.
M. Kehoe: Oui, le fardeau de la preuve était sur
l'employeur, et là on a supprimé ça; c'est une question,
pour les deux parties, de faire la preuve.
M. Holden: Mais j'aurais préféré voir le
fardeau de la preuve sur l'employeur plutôt que sur l'employé;
c'est beaucoup plus juste.
M. Kehoe: De toute façon, dans les faits, M. le
député, ça va être l'employeur qui va poursuivre et
c'est lui qui aura le fardeau de prouver.
M. Holden: Oui, mais établir la justification en temps et
en distance, et tout, avant même que le défendeur doive faire sa
preuve, ça serait, pour moi, un fardeau plus lourd sur l'employeur et je
trouve... Parce que j'en ai plaidé, des causes de ce genre, et c'est
beaucoup plus difficile pour le défendeur de prouver que le contrat est
injuste du point de vue temps, etc.
M. Kehoe: Je comprends votre point de vue, mais dans les faits il
reste quand même que, si l'employeur allègue des faits, il faut
qu'il les prouve. C'est dans ce sens-là que...
M. Holden: Non, mais c'est la justification du contrat. Si j'ai
bien compris, le troisième alinéa, ça veut dire que, quand
l'employeur vient avec son injonction, il doit prouver d'abord que les
questions de temps et de distance sont raisonnables, avant même de
prouver que l'employé a enfreint le contrat. C'est ça que j'ai
compris. Est-ce que c'est à cause des pressions des employeurs qu'on a
supprimé le troisième alinéa?
M. Kehoe: Absolument. C'était la discussion entre les
experts des deux côtés. Ils ont jugé que, vu que
l'employeur a le fardeau de prouver ce qu'il allègue dans sa poursuite,
que ce soit une injonction ou d'autres procédures judiciaires, ça
incombe à l'employeur de faire la preuve de ce qu'il allègue et,
à ce moment-là, on a trouvé que ce n'était pas
nécessaire.
M. Holden: Mais ça serait quand même un petit
élément qui favoriserait un peu l'employé, qui est presque
toujours la partie faible dans une situation pareille. Je suis d'accord avec
vous, M. le député de Chapleau, qu'on doit prouver les faits.
M. Kehoe: Oui.
M. Holden: Mais là il y a une espèce de
présomption contre l'employeur quant à la validité de
cette clause-Jà qu'il faut surmonter avant même d'aller devant le
tribunal pour dire: Bon, il a enfreint les règles. Moi, j'ai
plaidé une cause l'autre jour, où on avait dit: Dans le monde,
pendant 25 ans, le gars ne peut pas vendre de la papeterie. Je trouve que
c'était une affaire incroyable comme contrat, mais il a signé le
contrat et là c'est à lui de prouver que ça n'a pas de bon
sens. Ça se fait, mais j'aurais préféré voir le
troisième alinéa tel quel.
Le Président (M. Lafrance): Merci. Mme Harel: M. le
ministre.
M. Holden: Ça me surprend que la députée de
Hochelaga-Maisonneuve ait été d'accord pour le supprimer.
Le Président (M. Lafrance): Non, mais il y a Mme la
députée de Terrebonne, aussi, qui a signifié qu'elle
aimerait apporter un commentaire.
Mme Caron: Oui, M. le Président. Moi aussi, j'ai beaucoup
d'interrogations sur cet article-là parce que, même s'il incombe
à l'employeur de prouver, dans la plupart des cas, le problème se
situe au moment où le contrat est signé. Parce que, quand on
signe le contrat, on empêche l'employé d'opérer dans une
entreprise concurrente ou de partir sa propre entreprise dans une limite -
souvent, on parie de 50 kilomètres; ça peut même être
plus étendu - et on donne souvent des temps excessifs. Vous pariez de 25
ans, mais c'est rare qu'on ait un contrat en bas de cinq ans. Avec la
mobilité de personnel qu'on a maintenant, je trouve que c'est
très long. Moi aussi, je pense que la situation... L'employé est
vraiment en situation de faiblesse par rapport à l'employeur et il est
prêt, à ce moment-là, à signer pour avoir le
contrat. Mais il doit vivre avec après et, pour l'employeur, c'est
très facile de dire que l'employé avait signé en toute
connaissance de cause.
Le Président (M. Lafrance): M. le ministre,
désirez-vous commenter tout de suite?
M. Rémillard: Non, après.
Le Président (M. Lafrance): Vous aimez mieux attendre.
Oui. Mme la députée de Hochela-ga-Maisonneuve.
Mme Harel: Écoutez, M. le Président, je pense qu'il
faut remercier le député de Westmount de nous inviter à
peut-être plus de réflexion sur cette disposition.
Évidemment, on comprend que c'est celui qui fait la réclamation
à qui incombe le fardeau de la prouver, mais il y a peut-être lieu
d'examiner ça de plus près. Et puis, moi, je souhaiterais qu'on
puisse suspendre pour un examen plus approfondi, compte tenu, là, de
l'intervention des députés membres de cette commission.
Le Président (M. Lafrance): Merci.
M. Holden: II faudrait dire ça au député de
D'Arcy-McGee, eh!
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Lafrance): M. le ministre.
M. Rémillard: Oui, M. le Président, le
député de Westmount a, en effet, soulevé un
élément qui peut être important et ça mérite
qu'on se penche de nouveau sur cette question pour trouver un juste
équilibre. La solution qu'on nous propose, c'est qu'il y ait
possibilité d'ouvrir le contrat. Donc, celui qui rouvre le contrat a le
fardeau de la preuve à démontrer. Et le concept
d'intérêt légitime de l'employeur, normalement, pourrait
nous amener à croire que c'est l'employeur qui a le fardeau de la
preuve, d'une façon implicite, pour démontrer que ce n'est pas
légitime, ou que c'est légitime si c'est lui qui l'ouvre.
Cependant, à ce fardeau de la preuve, dans les faits et d'une
façon implicite... Parce qu'il faut bien le réaliser; regardons
comment ça se passerait. On dit: II vaudrait peut-être mieux
mentionner expressément que le fardeau de la preuve appartient à
l'employeur, directement. Moi, je dis, M. le Président, que le texte
qu'on nous propose en arrive à ce résultat-là. Maintenant,
je comprends les interrogations de cette commission et je suis prêt
à suspendre cet article, et à proposer que nous suspendions nos
travaux pour une pause santé, en même temps.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
l'article 2079 est donc laissé en suspens. Et, sur cette recommandation,
j'aimerais suspendre nos travaux pour 10 minutes, en vous demandant de revenir
effectivement, dans 10 minutes, puisqu'il nous reste seulement, grosso modo,
une heure et quinze minutes de travail. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 13)
(Reprise à 11 h 43)
Le Président (M. Lafrance): Nous allons reprendre nos
travaux en demandant, peut-être, à M. le député de
Chapleau de nous lire les trois amendements qui suivent, à 2082, 2083 et
2084.
M. Kehoe: Oui, M. le Président. L'amendement
proposé à l'article 2082 se lit comme suit: Le projet est
modifié: 1° par le remplacement, à la 1re ligne du 1er
alinéa, des mots "a droit à" par les mots "ne peut renoncer aux
droits qu'il a d'obtenir"; 2° par la suppression, au 1er alinéa, des
mots "; l'indemnité est calculée en tenant compte, entre autres,
de la durée de la prestation de travail"; 3° par la suppression du
2e alinéa.
Les amendements proposés visent à éviter de donner
l'impression que le droit énoncé n'existe que pour le
salarié; l'article amendé énonce clairement que la
protection octroyée au salarié vise la renonciation au droit
d'obtenir une indemnité. En raison de ces amendements, l'article 2082 se
lirait comme suit: "Le salarié ne peut renoncer au droit qu'il a
d'obtenir une indemnité en réparation du préjudice qu'il
subit, lorsque le délai de congé est insuffisant ou que la
résiliation est faite de manière abusive."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le
député. Est-ce que vous êtes en mesure de nous lire
l'amendement proposé à 2083?
M. Kehoe: Oui, à l'article 2083, l'amendement
proposé: Le projet est modifié par le remplacement du 2e
alinéa de l'article 2083 par le suivant: "Le décès de
l'employeur peut aussi, suivant les circonstances, y mettre fin."
Commentaire: Devant l'ambiguïté soulevée par cet
article et aussi par la difficulté d'évaluer le degré
d'inaptitude de l'une ou de l'autre des parties, cette question d'inaptitude
est laissée au régime général de la
résiliation instauré par les articles 2081 et 2084. En raison de
cet amendement, l'article 2083 se lirait comme suit: "Le décès du
salarié met fin au contrat de travail. "Le décès de
l'employeur peut aussi, suivant les circonstances, y mettre fin."
Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la
députée de Terrebonne.
Mme Caron: Oui, M. le Président. Est-ce que ce serait
possible d'avoir certaines précisions, dans le deuxième
alinéa, "suivant les
circonstances"? À quelles circonstances fait-on allusion?
M. HoWen: Si tu meurs, ton attaché politique va
perdre...
Des voix: Ha, ha, ha! Mme Caron: Au
fédéral...
M. Kehoe: II est très difficile de donner des exemples
précis, mais, comme on dit, ça dépend des circonstances.
Admettons que vous êtes employeur d'un cuisinier et que l'employeur
meurt. Qu'est-ce que vous voulez? À ce moment-là, c'est assez
difficile de préciser exactement. C'est dans des termes assez
généraux, mais ça dépend des circonstances.
Mme Caron: Ce serait surtout lorsque le lien est direct entre
l'employeur et l'employé, finalement, un lien personnel.
M. Kehoe: Mais c'est justement. C'est un lien personnel entre
l'employeur et l'employé lorsque ça arrive, à ce
moment-là.
Mme Caron: Merci.
Le Président (M. Lafrance): Merci. Est-ce que vous
êtes en mesure de nous lire l'amendement proposé à
2084?
M. Kehoe: Oui. L'article 2084 du projet est modifié par le
remplacement du mot "avis" par "préavis*. Le commentaire: Par souci de
cohérence terminologique, le terme "avis" est remplacé par
"préavis", qui signifie "délai de congé". En raison de cet
amendement, l'article 2084 se lirait comme suit: "Une partie peut, pour un
motif sérieux, résilier unilatéralement et sans
préavis le contrat de travail."
Le Président (M. Lafrance): Alors, merci, M. le
député de Chapleau.
M. Kehoe: C'est un autre exemple qu'il y a du travail à
faire sur le texte anglais.
M. Holden: ...était déjà là.
Le President (M. Lafrance): Alors, est-ce qu'il y a des
commentaires sur les articles 2080 à 2086 inclusivement, incluant 2082,
2083 et 2084 tels qu'amendés? Oui, Me Masse.
M. Masse: Nous attendons Mme Harel, M. le Président. Nous
avons un amendement à suggérer, l'ajout d'un nouvel article qui
serait l'article 2086.1. On peut très bien adopter ce que nous avons
devant nous pour le moment, mais sous réserve de l'amendement que nous
allons déposer tantôt.
Le Président (M. Lafrance): Alors, l'article 2080 est
adopté tel quel, de même que l'article 2081. Les articles 2082,
2083 et 2084 sont adoptés tels qu'amendés. Les articles 2085 et
2086 sont adoptés tels quels, avec la réserve qu'on veut proposer
l'addition, si j'ai bien compris, d'un nouvel article 2086.1.
M. Kehoe: M. le Président, je tiens à souligner que
les articles 2078 et 2079 sont suspendus, n'est-ce pas?
Le Président (M. Lafrance): Exact. M. Kehoe: C'est
ça.
Le Président (M. Lafrance): Tels qu'amendés.
M. Kehoe: D'accord.
Le Président (M. Lafrance): Les amendements avaient
été lus.
M. Kehoe: Puis, si je comprends, il y a un ajout à 2086,
2086.1, c'est ça?
Le Président (M. Lafrance): Oui, l'Opposition a
signifié qu'elle aimerait proposer l'ajout de 2086.1.
Mme Caron: Mme Harel désire déposer un amendement.
Alors, il va falloir attendre son retour...
Le Président (M. Lafrance): Je pense qu'on peut quand
même continuer...
Mme Caron: ...pour déposer cet amendement.
Le Président (M. Lafrance): ...et permettez-moi,
étant donné qu'on approche du chapitre huitième, de vous
lire le texte d'introduction à ce chapitre qui traite du contrat
d'entreprise ou de service.
Du contrat d'entreprise ou de service
Le contrat d'entreprise, ou tel que désigné par le Code
civil du Bas Canada "de l'ouvrage par devis et marché", comportait des
limites étroites et envisageait principalement la construction de
structures ou d'immeubles. Or, les progrès techniques et la
spécialisation ont fait naître plusieurs nouveaux types
d'entreprises. Il fallait donc compléter ces dispositions pour
refléter la réalité industrielle et scientifique
actuelle.
Aussi, le contrat de travail et le contrat d'entreprise dont nombre
d'éléments sont déjà codifiés en droit
actuel ne couvrent pas tout le
travail humain. Ils ne couvrent pas non plus tout le travail pour
autrui, notamment celui des travailleurs autonomes ou indépendants,
professionnels, techniciens ou artisans oeuvrant dans le secteur des services.
Ce contrat, qui lie une partie à celle qui procure un service,
n'était pas réglementé par le Code et il était
souvent difficile de déterminer, dans nombre de cas, la nature du
contrat. Cependant, dans un monde où le secteur des services croît
de façon constante, il est apparu impérieux de réglementer
ce nouveau type de contrat.
Ainsi, la principale nouveauté consiste à regrouper en un
seul chapitre les contrats d'entreprise et de service. Désormais, le
projet réfère à l'entrepreneur pour la partie qui
réalise un ouvrage et au prestataire de services pour la partie qui
procure un service. Le projet englobe autant l'activité intellectuelle
que l'activité matérielle, et il donne un cadre plus
général aux dispositions du Code civil du Bas Canada qui ne
visait nommément que les ouvriers, domestiques, bijoutiers et
voituriers.
Le projet maintient, sous réserve de la disponibilité
qu'ils ont de se libérer, le principe de la responsabilité
solidaire de l'entrepreneur, de l'architecte et de l'ingénieur
participant à l'ouvrage, pour la perte de celui-ci. Ce maintien vise
à assurer une certaine protection au client, puisque celui-ci n'est
généralement pas en mesure d'établir le lien de
causalité entre la perte et l'acte de l'un ou l'autre des
intervenants.
Ce chapitre réunit donc les articles qui réglementent le
contrat d'entreprise et le contrat de service, en raison des nombreuses
dispositions qui s'appliquent à ces deux espèces de contrats. Le
projet a cependant conservé des règles particulières pour
les ouvrages et établi des dispositions plus spécifiques pour les
ouvrages immobiliers ou mobiliers complexes.
Mme Harel: Alors, M. le Président...
Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Oui. Alors, avant que nous nous engagions dans
l'étude de l'article 2087, je voudrais présenter un projet
d'amendement qui se lirait comme suit: Introduire le nouvel article suivant
à 2086.1.
M. Kehoe: Mme la députée, je me demande si vous
pouvez attendre l'arrivée du ministre; il s'en vient tout de suite, il
est juste parti pour quelques minutes. Tout de suite à son
arrivée, on pourra discuter de l'amendement.
Le Président (M. Lafrance): Mme la députée
de Hochelaga-Maisonneuve, est-ce que vous avez un texte écrit de cette
proposition d'amendement?
Mme Harel: Certainement, oui.
Le Président (M. Lafrance): On pourrait peut-être le
distribuer en attendant.
Mme Harel: Certainement. Je ne sais pas si j'en ai des copies; je
vais m'en garder une.
Le Président (M. Lafrance): Alors, pour les fins du
procès-verbal de nos délibérations, est-ce que vous
êtes en mesure de nous lire cette proposition de texte?
Mme Harel: On va peut-être attendre la venue du
ministre.
M. Kehoe: Attendre l'arrivée du ministre.
Le Président (M. Lafrance): Certainement. Alors,
j'aimerais, en conséquence, proposer peut-être...
Mme Harel: À moins que...
Le Président (M. Lafrance): ...de continuer nos travaux en
appelant les articles suivants, les articles, donc, de la section I du chapitre
huitième qui traite de la nature et de l'étendue du contrat, soit
les articles 2087, 2088 et 2089.
M. Kehoe: II y a un amendement à l'article 2089. Le projet
est modifié par le remplacement de l'article 2089 par le suivant:
"L'entrepreneur et le prestataire de services sont tenus d'agir au mieux des
intérêts de leur client, avec prudence et diligence. Ils sont
aussi tenus, suivant la nature de l'ouvrage à réaliser ou du
service à fournir, d'agir conformément aux usages et
règles de leur art et de s'assurer, le cas échéant, que
l'ouvrage réalisé ou le service fourni est conforme au contrat.
"Lorsqu'ils sont tenus du résultat, ils ne peuvent se dégager de
leur responsabilité qu'en prouvant la force majeure."
Commentaire: L'amendement a pour but d'assouplir la règle qui
exprimait l'intensité de l'obligation des entrepreneurs et prestataires
de services, car il est certains contrats d'entreprise dans lesquels les
aléas sont tels que l'obligation de l'entrepreneur est plutôt une
obligation de moyens, et il existe des services qui sont si simples et si
sûrs que la conclusion s'imposerait que l'obligation du prestataire est
une obligation de résultat. En raison de cet amendement, l'article 2089
se lirait comme suit: "L'entrepreneur et le prestataire de services sont tenus
d'agir au mieux des intérêts de leur client, avec prudence et
diligence. Ils sont aussi tenus, suivant la nature de l'ouvrage à
réaliser ou du service à fournir, d'agir conformément aux
usages et règles de leur art et de s'assurer, le cas
échéant, que l'ouvrage réalisé ou le service fourni
est conforme au contrat.
"Lorsqu'ils sont tenus du résultat, ils ne peuvent se
dégager de leur responsabilité qu'en prouvant la force
majeure."
Le Président (M. Lafrance): Alors, merci, M. le
député de Chapleau. Est-ce qu'il y a des commentaires sur ces
articles 2087, 2088 et 2089 tel qu'amendé?
Mme Harel: Juste une seconde, M. le Président.
M. Rémillard: M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): Oui, M. le ministre.
M. Rémillard: Excusez-moi.
Le Président (M. Lafrance): Oui, nous en sommes
présentement à 2087, 2088 et 2089 tel qu'amendé, et on
avait convenu de revenir sur cette proposition d'article 2086.1.
Mme Harel: M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve. (12 heures)
Mme Harel: Mon Dieu, je m'interroge sur le deuxième
alinéa de l'amendement qui nous est présenté à
2089, et je m'intéresse aux circonstances lors desquelles l'entrepreneur
et le prestataire de services sont tenus du résultat. Alors, je
souhaiterais que ce soit enregistré dans nos débats. Peut-on
expliciter les cas où ils seront tenus du résultat et où
Hs ne pourront se dégager de leurs responsabilités qu'en prouvant
la force majeure?
M. Rémillard: Je vais demander à Me Pineau de nous
faire part de ses commentaires.
Le Président (M. Lafrance): Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, il s'agirait de
l'hypothèse où l'entrepreneur est appelé à
s'engager à construire un immeuble, par exemple. On s'attend à un
résultat, la construction de tel immeuble prévu, et on s'attend
aussi de l'architecte qu'9 fournisse des plans qui permettent à
l'entrepreneur de réaliser l'ouvrage en question. Et, effectivement, la
fourniture de ces plans, c'est un résultat et c'est cela que vise
l'article 2089. Il en est de même de l'ingénieur qui fournit ses
propres plans.
Mme Harel: Ce serait donc au tribunal à apprécier
à ce moment-là.
M. Pineau: C'est cela. La classification: obligation de
résultat, obligation de moyens est une classification qui,
théoriquement, est extrê- mement utle, qui, théoriquement,
paraît simple, mais qui, dans les faits, n'est pas nécessairement
simple car il est bien souvent, il est parfois difficile de dire si on s'engage
à un résultat ou si on s'engage seulement à prendre des
moyens. Si je m'engage à donner un cours sur la théorie des
obligations, le résultat, c'est le cours sur la théorie des
obligations. Mais je ne m'engage pas à autre chose, à un autre
résultat que celui-là. Je dois prendre tous les moyens qu'un
professeur normalement prudent et avisé doit prendre pour essayer
d'aboutir à faire comprendre aux étudiants ce qu'est la
théorie générale des obligations. Donc, c'est un moyen
dans ce cas-là.
Mme Harel: Tandis que dans la rédaction initiale de
l'article 2089, au premier alinéa, on y retrouvait une obligation de
résultat qui était plus explicitement, donc, prescrite. Alors,
là, si je comprends bien, avec l'amendement, maintenant, l'entrepreneur
et le prestataire sont tenus d'agir au mieux des intérêts de leur
client, avec prudence et diligence. La garantie, c'est tout simplement que
l'ouvrage soit conforme au contrat. Et la rédaction fait en sorte que
l'appréciation de l'obligation de résultat ou de moyens sera
laissée au tribunal. Est-ce que c'est ça qu'il faut
comprendre?
M. Pineau: M. le Président, dans le premier alinéa
de l'article 2089, tel qu'il était rédigé, il était
dit que l'entrepreneur était tenu de réaliser l'ouvrage et de
garantir que l'ouvrage était conforme au contrat. L'expression "il est
tenu de garantir* pouvait prêter à confusion en ce sens qu'on
aurait pu penser à l'existence d'une obligation de garantie qui ne
supposait aucun moyen de libération, pas même la preuve de force
majeure. Alors, l'article 2089, tel que proposé dans son
amendement...
Mme Harel: II s'assure.
M. Pineau: ...se veut plus clair et on vise l'obligation de
moyens lorsqu'il est dit que l'entrepreneur et le prestataire de services sont
tenus de fournir, d'agir conformément aux usages et règles de
leur art - c'est la référence à l'obligation de moyens -
et de s'assurer, le cas échéant, que l'ouvrage
réalisé ou le service fourni est conforme au contrat. Cela fait
référence au résultat attendu compte tenu de ce qui est
prévu au contrat. Quant au deuxième alinéa, il
précise que, lorsque l'entrepreneur ou le prestataire de services se
sont engagés à une obligation de résultat, ils doivent
prouver force majeure pour pouvoir être exonérés de
responsabilités.
Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Pineau. Me Masse,
est-ce que vous désirez apporter un commentaire
supplémentaire?
M. Masse: Je dois signaler, M. le Président, que la
nouvelle version telle que modifiée, telle qu'amendée de
l'article 2089 serait, si les députés l'adoptent ainsi, une
très nette amélioration par rapport au projet de loi 125 et
surtout par rapport à l'avant-projet de loi. Depuis trois ans, les
légistes ont essayé de rendre l'entrepreneur responsable d'une
obligation de résultat alors que le prestataire de services serait
responsable d'une obligation de moyens seulement. À l'expérience
et suite aux réflexions essentiellement du Barreau du Québec et
de la Chambre des notaires, il s'est avéré que cette distinction,
pour les motifs signalés par M. le professeur Pineau, est impraticable.
Certains entrepreneurs sont tenus à une obligation de résultat ou
ils sont en général tenus à une obligation de
résultat, mais on peut voir un grand nombre de situations où ils
seraient tenus à une obligation de moyens. Et ce qui se passe, c'est
qu'actuellement la doctrine québécoise permet de distinguer entre
les situations complexes de l'obligation de résultat et de l'obligation
de moyens, de sorte que la seule façon d'en sortir, c'était de ne
pas couler dans le béton à l'avance le fait que l'entrepreneur a
une obligation de résultat et que le prestataire de services a une
obligation de moyens, mais de permettre aux tribunaux de distinguer selon les
règles actuelles. Je dois signaler de ce côté-là
qu'après trois ans d'évolution les légistes du
ministère ont fait une évolution significative dans un sens qui
nous apparaît régler l'ensemble des inquiétudes du Barreau
du Québec, inquiétudes justifiées, et de la Chambre des
notaires.
Le Président (M. Lafrance): Merci. M. Rémillard:
M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): Oui, M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, on a là un
exemple, comme nous en avons eu depuis le début de nos travaux, de
situations qui ne sont pas faciles, de situations qui sont, par contre,
très importantes dans l'évolution d'une société.
Nous avons fait beaucoup de consultations, de réflexions sur cet article
qui, depuis plusieurs années, pas simplement les trois dernières
années, depuis plusieurs années, était en discussion, en
gestation, et, finalement, l'obligation de résultat, l'obligation de
moyens, le juste équilibre, puisque c'est toujours le principe qui nous
guide, nous le trouvons dans cette rédaction que nous proposons
aujourd'hui, M. le Président, en donnant la possibilité à
nos tribunaux d'apprécier la situation. Et, là encore, je trouve
qu'on se réfère à un principe qui doit nous guider dans la
réforme du Code civil; plutôt que d'essayer de tout
prévoir, d'établir des règles tellement rigides que,
finalement, on risque de dénaturer la réalité, on laisse
la possibilité au tribunal d'apprécier la situation. Ce que nous
proposons donc aujourd'hui est conforme en fonction des commentaires qu'on nous
a faits à différents égards et, je crois aussi, en
fonction de la recherche de ce juste équilibre qui est notre
première préoccupation dans la réforme de ce Code
civil.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
les articles 2087 et 2088 sont donc adoptés tels quels et l'article 2089
est adopté tel qu'amendé.
J'aimerais maintenant vous proposer de revenir à l'article 2086.1
que nous avions momentanément laissé en suspens en demandant
à Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve de bien vouloir
nous lire l'amendement tel que proposé.
Mme Harel: Alors, l'amendement se lit comme suit à
l'article 2086.1 : "L'aliénation, la concession ou la transmission de
tout ou partie de l'entreprise ou la modification de sa structure juridique par
fusion ou autrement ne met pas fin au contrat de travail. Ce contrat lie
l'ayant cause de l'employeur."
Il faut comprendre, M. le Président, que cet amendement vient
réintroduire dans le projet de loi une disposition qu'on retrouvait -
oui, c'est ça - à l'avant-projet de loi, à l'article 2156.
Alors, cet avant-projet, qui a été déposé par le
prédécesseur du ministre, en 1987, à l'article 2156,
contenait une disposition similaire à celle de l'amendement. Et, M. le
Président, pour avoir été responsable de la
révision de la Loi sur les normes du travail pour l'Opposition l'an
dernier, je dois vous dire que j'ai été, finalement,
sensibilisée à ces bouleversements que connaît
présentement le monde économique, une concentration
d'entreprises, des fusions d'entreprises, des bouleversements très,
très, très considérables; nous en sommes au coeur
présentement. Je relisais les dispositions 96 et 97 qui sont contenues
dans la Loi sur les normes du travail et ces dispositions restent malgré
tout assez restrictives. Je souhaitais que notre droit commun puisse contenir
une disposition de cette nature qui, avait déjà
été, d'ailleurs, envisagée par le législateur.
Le Président (M. Lafrance): Merci, Mme la
députée. M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, de fait, il
était de mon intention de soulever, à un moment donné,
cette question pour que nous puissions en discuter ici en commission
parlementaire. On nous présente un amendement. M. le Président,
je pense qu'on pourrait suspendre cet article. Nous en sommes toujours à
des consultations, j'ai d'autres consultations à faire, et on pourrait
suspendre et revenir plus tard sur cet article,
après mûre réflexion et consultation. Mais je ne
suis pas du tout contre un tel article au départ et je ne suis pas pour,
M. le Président. Bien au contraire, nous allons y
réfléchir.
Le Président (M. La trance): Merci, M. le ministre. Oui,
M. le député de Westmount.
M. Holden: Merci, M. le Président. Est-ce que le ministre
peut nous dire si la consultation, ça va être avec les mêmes
personnes, les mêmes organisations ou...
M. Rémillard: Dans ce domaine-là, M. le
Président, tout d'abord, j'ai certainement mes collègues qui sont
directement touchés, par les ministères dont ils ont la
responsabilité, et aussi les intervenants juridiques premiers.
Déjà, la Chambre des notaires nous a fait part de ses
commentaires, mais je ne vois pas de commentaires, je n'ai pas reçu, je
crois, sur ce point spécifique, des commentaires du Barreau. Ensuite,
consulter aussi peut-être d'une façon un petit peu...
M. Holden: La Chambre de commerce. M. Rémillard:
...plus large... M. Holden: Oui.
M. Rémillard: ...une consultation un petit peu plus large.
Nous sommes à voir à cette consultation-là, à
procéder à cette consultation.
M. Holden: Le Conseil du patronat et d'autres.
M. Rémillard: Tous ces gens...
M. Holden: Je crois que c'est important.
M. Rémillard: ...de bonne volonté, les syndicats,
le patronat. En fait, tous ces gens de bonne volonté qui veulent, comme
nous, un juste équilibre de notre société.
M. Holden: Je vois dans l'amendement un paquet de
problèmes du point de vue employeur. Alors, j'aimerais bien que ce soit
une consultation avec les syndicats, mais aussi avec le Conseil du
patronat.
M. Rémillard: Oui, M. le Président, bien
sûr. Parce que, d'une part, l'employé ne doit pas être
à la merci de l'employeur quand cet employeur change ou pas, mais,
d'autre part, on doit prendre en considération aussi l'employeur
nouveau, c'est-à-dire celui qui achète une nouvelle entreprise et
qui aimerait mettre en place son équipe de gestion pour pouvoir donner
un souffle nouveau ou procéder autrement parce qu'il se rend compte que
cette entreprise ne peut pas fonctionner. Alors, il y a différentes
considérations, M. le Président. Je pense qu'il vaut mieux
suspendre et revenir plus tard sur ce principe.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Mme la
députée de Hochelaga-Maison-neuve.
Mme Harel: Oui. Là, M. le Président, il faut bien
comprendre qu'un employeur a des droits de gérance et il peut toujours
mettre fin à un contrat de travail. Mais l'amendement qui est introduit
est à l'effet qu'il ne pourrait pas invoquer l'aliénation ou la
fusion pour motiver cette cessation d'emploi. D'autres motifs pourraient
intervenir, mais non pas ceux, justement, qui consistent à
prétendre faire cesser l'emploi de quelqu'un suite à la vente
d'une entreprise. Ce ne serait pas la vente de l'entreprise qui pourrait
être invoquée comme motif.
M. Holden: Je sais que, comme Steinberg qui a
décidé de transférer l'opération de chaque magasin
aux concessionnaires et ça a coûté des travaux, je
comprends que la situation existe, mais il ne faut pas lier, non plus, les
mains des commerçants.
Mme Harel: M. le Président, je pense qu'il faut insister
sur le fait qu'en introduisant un amendement comme celui-là qui
viendrait, dans le fond, combler une lacune importante, puisque l'acheteur se
verrait transmettre le contrat de travail conclu avec l'employeur, l'acheteur
se trouve, à ce moment-là, dans l'obligation, si tant est qu'il
met fin à un tel contrat de travail, éventuellement de donner des
préavis, de garantir à ce moment-là, peut-être, les
réclamations. Déjà, les réclamations sont couvertes
par la Loi sur les normes du travail. Mais l'employeur serait
nécessairement tenu, à ce moment-là, s'il met fin à
la cessation de l'emploi, ce qu'fl pourrait faire, il y aurait quand même
là une obligation qui viendrait assurer une protection plus grande
à l'employé. (12 h 15)
Le Président (M. Lafrance): Merci pour ces
précisions. Donc, l'article 2086.1 est laissé en suspens.
J'aimerais appeler les articles contenus dans la section II qui traitent des
droits et obligations des parties, en particulier des dispositions
générales applicables tant aux services > qu'aux ouvrages.
J'appelle les articles 2090 à 2097 inclusivement.
M. Rémillard: Nous avons trois amendements, M. le
Président. Tout d'abord, l'article 2090.1. Le projet est modifié
par l'insertion, après l'article 2090 du suivant: "2090.1 L'entrepreneur
ou le prestataire de services est tenu, avant la conclusion du contrat, de
fournir au client, dans la mesure où les
circonstances le permettent, toute information utile relativement
à la nature de la tâche qu'il s'engage à effectuer ainsi
qu'aux biens et au temps nécessaires à cette fin."
M. le Président, même si l'obligation d'information peut se
déduire des règles générales relatives à la
nécessité que le consentement au contrat soit
éclairé et que celui-ci soit exécuté de bonne foi,
il paraît utile, vu la nature des contrats d'entreprise et de service, de
rappeler le contenu principal de cette obligation en relation avec ces
contrats. En raison de cet amendement, le texte se lirait comme suit:
"L'entrepreneur ou le prestataire de services est tenu, avant la conclusion du
contrat, de fournir au client, dans la mesure où les circonstances le
permettent, toute information utile relativement à la nature de la
tâche qu'il s'engage à effectuer ainsi qu'aux biens et au temps
nécessaires à cette fin."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
que vous êtes en mesure de nous préciser les autres amendements
à cette section?
M. Rémillard: Oui, M. le Président.
L'article 2091. Le projet est modifié par l'ajout d'un troisième
alinéa à l'article 2091, qui se lit comme suit: "II y a contrat
de vente, et non contrat d'entreprise ou de service, lorsque l'ouvrage ou le
service n'est qu'un accessoire par rapport à la valeur des biens
fournis."
M. le Président, la source est l'article 2164 de l'avant-projet
de loi. Comme commentaire, cette règle, qui était présente
dans l'avant-projet, visait à régler un problème
réel pratique lié à la qualification des contrats. Elle
avait été omise en considération du fait que les
règles habituelles de qualification des contrats devaient suffire, mais,
dans la mesure où il y a controverse, il paraît utile de la
codifier. En raison de cet amendement, l'article 2091 se lirait comme suit:
"L'entrepreneur ou le prestataire de services fournit les biens
nécessaires à l'exécution du contrat, à moins que
les parties n'aient stipulé qu'il ne fournirait que son travail. "Les
biens qu'il fournit doivent être de bonne qualité; il est tenu,
quant à ces biens, des même garanties que le vendeur. "Il y a
contrat de vente, et non contrat d'entreprise ou de service, lorsque l'ouvrage
ou le service n'est qu'un accessoire par rapport à la valeur des biens
fournis."
M. le Président, l'article 2092. Cet article est modifié:
1° par le remplacement, à la troisième ligne, des mots
"s'ils" par "si les biens"; 2° par le remplacement, à la
cinquième ligne, des mots "d'un vice, il est tenu" par les mots "d'un
vice apparent ou d'un vice caché qu'il devait connaître,
l'entrepreneur ou le prestataire de services est tenu"; 3° par le
remplacement, à la fin, des mots "leur utilisation" par les mots "de
l'utilisation des biens".
L'article proposé pouvait permettre de tenir responsable
l'entrepreneur ou le prestataire pour les vices cachés des biens fournis
par le client. Il paraît préférable de limiter cette
obligation aux seuls vices qu'il devait, en raison de son art, connaître.
Les deux autres amendements sont de nature formelle. En raison de ces
amendements, l'article 2092 se lirait comme suit: "Lorsque les biens sont
fournis par le client, l'entrepreneur ou le prestataire de services est tenu
d'en user avec soin et de rendre compte de cette utilisation; si les biens sont
manifestement impropres à l'utilisation à laquelle ils sont
destinés ou s'ils sont affectés d'un vice apparent ou d'un vice
caché qu'il devait connaître, l'entrepreneur ou le prestataire de
services est tenu d'en informer immédiatement le client, à
défaut de quoi il est responsable du préjudice qui peut
résulter de l'utlisation des biens."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
l'article 2090 est donc adopté tel quel. Le nouvel article 2090.1 est
adopté. Les articles 2091 et 2092 sont adoptés tels
qu'amendés. Est-ce qu'il y a des commentaires sur les articles suivants,
c'est-à-dire 2093 à 2097 inclusivement? Sinon, les articles 2093
à 2097 inclusivement sont adoptés tels quels. J'aimerais
maintenant appeler les articles qui traitent des dispositions
particulières aux ouvrages et, en particulier, des dispositions
générales, soit les articles 2098 à 2104
inclusivement.
M. Kehoe: II y a cinq amendements. Le premier amendement est
à l'article 2098. L'article 2098 du projet est modifié: 1°
par l'ajout, à la première ligne, après les mots
"l'ouvrage", des mots "à la fin des travaux;"; 2° par le
remplacement du mot "substantiellement" par les mots "celle-ci a lieu lorsque
l'ouvrage est".
Commentaire. Afin de faire disparaître une ambiguïté
relative au sens "d'exécution substantielle", on a
préféré introduire la notion du droit actuel de "fin des
travaux" et la définir; cette notion a été largement
interprétée par les tribunaux. En raison de ces amendements,
l'article 2098 se lirait comme suit: "Le client est tenu de recevoir l'ouvrage
à la fin des travaux; celle-ci a lieu lorsque l'ouvrage est
exécuté et en état de servir conformément à
l'usage auquel on le destine. "La réception de l'ouvrage est l'acte par
lequel le client déclare l'accepter, avec ou sans réserve."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le
député de Chapleau. Vous pouvez peut-être nous
préciser les autres amendements, quitte à revenir après
s'il y a des commentaires.
M. Kehoe: L'amendement à l'article 2099 du projet est
modifié: 1° par le remplacement, au premier alinéa, du mot
"défauts" par les mots "vices ou malfaçons"; 2° par la
suppression, à la fin du deuxième alinéa de l'article
2099, de la phrase suivante: "II doit déposer la somme ainsi retenue en
fidéicommis."; 3° par le remplacement, au troisième
alinéa, du mot "caution" par "sûreté".
Commentaire. On a préféré remplacer
"défauts" par "vices ou malfaçons", ces termes étant plus
spécifiques. L'exigence du dépôt, qui était en
concordance avec les dispositions sur la constitution de fiducie que comportait
l'avant-projet, paraît, dans le texte proposé, inutilement
exorbitante par rapport aux règles générales (article
1588) et aux autres règles du contrat (articles 2110 et 2102). Quant au
troisième amendement, il y est question plutôt d'une
"sûreté" que d'une "caution".
Une voix: Je voudrais juste que vous souligniez qu'il y a une
erreur. Ce n'était pas le remplacement au premier alinéa, mais au
deuxième alinéa.
M. Kehoe: O.K. Dans le premier amendement, M. le
Président, je veux signaler qu'il y a une erreur dans le 1°.
Ça devrait se lire "par le remplacement, au deuxième
alinéa", au lieu de "au premier alinéa".
En raison de ces amendements, l'article 2099 se lirait comme suit: "Le
client n'est pas tenu de payer le prix avant la réception de l'ouvrage.
"Lors du paiement, il peut retenir sur le prix, jusqu'à ce que les
réparations ou les corrections soient faites à l'ouvrage, une
somme suffisante pour satisfaire aux réserves faites quant aux vices ou
malfaçons apparents qui existaient lors de la réception de
l'ouvrage. "Le client ne peut exercer ce droit si l'entrepreneur lui fournit
une sûreté suffisante garantissant l'exécution de ses
obligations."
Il y a un autre amendement, M. le Président, à l'article
2101. L'article 2101 du projet est modifié par le remplacement du mot
"défauts" par les mots "vices ou malfaçons".
Cet amendement assure la concordance avec l'article 2099. En raison de
cet amendement, l'article 2101 se lirait comme suit: "Le client qui accepte
sans réserve, conserve, néanmoins, ses recours contre
l'entrepreneur aux cas de vices ou malfaçons non apparents."
Un autre amendement à l'article 2103 se lit comme suit. L'article
2103 du projet est modifié: 1° par l'ajout, au deuxième
alinéa, après les mots "sa faute", des mots "ou à un autre
manquement de sa part"; 2° par l'ajout, au deuxième alinéa,
après les mots "vice propre des biens fournis", des mots "ou d'un vice
du bien qu'il ne pouvait déceler"; 3° par l'ajout, au
deuxième alinéa, après le mot "ou", des mots "encore si la
perte".
Cet amendement est de concordance avec l'article 2092. En raison de ces
amendements, l'article 2103 se lirait comme suit: "L'entrepreneur est tenu de
la perte de l'ouvrage qui survient avant sa délivrance, à moins
qu'elle ne soit due à la faute du client ou que celui-ci ne soit en
demeure de recevoir l'ouvrage.
Toutefois, si les biens sont fournis par le client, l'entrepreneur n'est
pas tenu de la perte de l'ouvrage, à moins qu'elle ne soit due à
sa faute ou à un autre manquement de sa part. Il ne peut réclamer
ie prix de son travail que si la perte de l'ouvrage résulte du vice
propre des biens fournis ou d'un vice du bien qu'il ne pouvait déceler
ou encore si la perte est due à la faute du client."
Un dernier amendement dans cette section, M. le Président,
à l'article 2104. À l'article 2104, remplacer tout ce qui suit
les mots "à courir" par ce qui suit: "qu'à compter de la fin des
travaux, y compris ceux ayant fait l'objet de réserves lors de la
réception de l'ouvrage".
Commentaire: L'amendement vise à clarifier le point de
départ de la prescription et opère une concordance avec
l'amendement apporté à l'article 2098. En raison de cet
amendement, l'article 2104 se lirait comme suit: "La prescription des recours
entre les parties ne commence à courir qu'à compter de la fin des
travaux, y compris ceux ayant fait l'objet de réserves lors de la
réception de l'ouvrage."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le
député. Je ferai remarquer à tous les membres de la
commission que nous approchons de l'heure de la fin de nos travaux. Alors,
est-ce qu'il y a des commentaires sur ces articles?
Mme Harel: À l'article 2098, M. le Président, je
prenais connaissance du commentaire qui est publié dans le livre Des
contrats nommés, à l'effet qu'il était apparu... et je
cite le commentaire à la page 488: "II est toutefois apparu
nécessaire de définir ce qu'était la réception de
l'ouvrage, cette expression étant susceptible d'être comprise de
diverses manières. Le Code civil du Bas Canada est muet à cet
égard et ne contient que des dispositions relatives aux risques de
l'ouvrage avant la réception." Donc, à l'article 2098, le
législateur, au deuxième alinéa, a cru bon de
définir ce qu'était la réception de l'ouvrage et on nous
dit que la réception de l'ouvrage est l'acte par lequel le client
déclare l'accepter, avec ou sans réserve. C'est donc dire que
ça ne pourrait pas être une réception tacite entre les
parties puisque, si on exige que le client déclare, c'est donc qu'il
doit y avoir un procédé explicite.
M. Kehoe: M. le professeur.
Le Président (M. Lafrance): Oui, Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, je pense que cela signifie que
l'acte par lequel le client déclare l'accepter soit manifeste et qu'il
n'y ait aucune contestation possible sur le désir du client, sur
l'intention, pardon, du client.
Le Président (M. Lafrance): Merci.
Mme Harel: Et si le client ne se manifeste pas à ce
moment-là, que se passe-t-il? Il n'y a pas eu la réception de
l'ouvrage?
M. Pineau: M. le Président, je crois que l'on peut
répondre à cela que le silence, contrairement au dicton
populaire, ne vaut pas consentement et qu'en conséquence, si le client
ne bouge pas, il n'accepte pas l'ouvrage, à moins que son comportement
soit si explicite que ça signifie, en définitive, acceptation et,
s'il ne dit rien d'autre, ce sera une acceptation sans réserve.
Le Président (M. Lafrance): Merci. Alors, s'il n'y a pas
d'autres commentaires, les articles 2098 et 2099 sont donc adoptés tels
qu'amendés, l'article 2100 est adopté tel quel, l'article 2101
est adopté tel qu'amendé, l'article 2102 est adopté tel
quel et les articles 2103 et 2104 sont donc adoptés tels
qu'amendés.
Alors, à ce stade-ci, j'aimerais suspendre nos travaux en vous
rappelant qu'on devrait avoir confirmation cet après-midi, en Chambre,
pour notre réunion prévue ce soir à 20 heures. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 32)
(Reprise à 20 h 16)
Le Président (M. Lafrance): Si vous me permettez,
étant donné qu'on m'a confié la responsabilité
d'aider à diriger les travaux, j'aimerais avoir votre consentement pour
commencer nos travaux ce soir, en dépit du fait que nous n'avons pas le
quorum présentement. Alors, s'il y a consentement, je vais
déclarer cette séance de travail ouverte. Avec votre consentement
aussi, j'aimerais annoncer un remplacement. Mme la secrétaire.
La Secrétaire: Oui, Mme Bleau (Groulx) serait
remplacée par Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata).
Le Président (M. Lafrance): Merci, Mme la
secrétaire. Est-ce qu'il y aurait des membres qui aimeraient faire des
remarques d'ouverture avant que nous reprenions nos travaux? Sinon j'aimerais
appeler les articles contenus à la sous-section qui traite des ouvrages
immobiliers ou mobiliers complexes, soit les articles 2105 à 2111
inclusivement.
M. Rémillard: Avec le titre, M. le Président, nous
avons sept amendements. Tout d'abord, M. le Président, le projet est
modifié par la suppression à l'intitulé II, qui
précède l'article 2105, des mots "ou mobiliers complexes". Or, M.
le Président, l'amendement assure la concordance avec celui
proposé à l'article 2105. En raison de cet amendement,
l'intitulé se lirait comme suit: "II - Des ouvrages immobiliers".
M. le Président, le projet est modifié par la suppression,
à la deuxième ligne de l'article 2105, des mots "ou de la
fabrication ou de la réalisation d'un bien meuble complexe,".
L'amendement vise à éviter les difficultés
d'interprétation liées à l'expression "bien meuble
complexe"; cette notion, qu'il aurait été difficile de cerner
correctement sans procéder par enumeration, elle-même susceptible
de soulever des difficultés, est supprimée. En raison de cet
amendement, l'article 2105 se lirait comme suit: "À tout moment de la
construction ou de la rénovation d'un immeuble, le client peut, mais de
manière à ne pas nuire au déroulement des travaux,
vérifier leur état d'avancement, la qualité des
matériaux utilisés et celle du travail effectué, ainsi que
l'état des dépenses faites."
Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, M. le
ministre.
M. Rémillard: M. le Président, j'aimerais dire que
cette dernière modification nous vient de l'Ordre des ingénieurs
du Québec et de l'Association des ingénieurs-conseils qui nous
avaient fait cette suggestion qui était justifiée. L'article 2106
du projet est modifie-Le Président (M. Lafrance): Allez-y, M. le
ministre.
M. Rémillard: L'article 2106 est modifié,
premièrement, par l'ajout, à la deuxième ligne,
après les mots "ont dirigé"' du mot ", conçu"; et,
deuxièmement, par le remplacement, à la troisième ligne,
des mots "sont solidairement tenus" par ce qui suit: "et le sous-entrepreneur
pour les travaux qu'il a exécutés sont, comme s'ils
étaient tous partie au contrat, solidairement tenus".
Bon, M. le Président on m'informe que cet article 2106 ainsi que
les articles 2107 et 2108, nous aimerions, si cette commission est d'accord,
les suspendre pour plus de discussions et de consultations.
L'article 2109, donc, M. le Président, est modifié par le
remplacement, à la troisième ligne, des mots "incorporés
à l'ouvrage" par les mots "nécessaires à la
réalisation de l'ouvrage". Étant donné le caractère
restrictif de l'expression "matériaux incorporés", il a
été jugé préférable
de la remplacer par celle de "nécessaires à la
réalisation de l'ouvrage". En raison de cet amendement, l'article 2109
se lirait comme suit: "Pendant la durée des travaux, l'entrepreneur
peut, si la convention le prévoit, exiger des acomptes sur le prix du
contrat pour la valeur des travaux exécutés et des
matériaux nécessaires à la réalisation de
l'ouvrage; il est tenu, préalablement, de fournir au client un
état des sommes payées aux sous-entrepreneurs, à ceux qui
ont fourni ces matériaux et aux autres personnes qui ont
participé à ces travaux, et des sommes qu'il leur doit encore
pour terminer les travaux."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, l'article 2110 du
projet est modifié, premièrement, par l'ajout, à la
deuxième ligne du premier alinéa...
Mme Harel: M. le Président M. Rémillard:
Oui.
Mme Harel: Si vous me le permettez, je proposerais au ministre de
suspendre 2110. L'article 2110 fait référence, évidemment,
au fait que le client peut retenir des sommes en paiement pour acquitter une
hypothèque légale. Comme on va revenir sur cette question des
hypothèques légales au moment où on examinera les
sûretés, je souhaiterais qu'on puisse à ce moment-là
peut-être en faire un exemen plus exhaustif.
M. Rémillard: Très bien, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, M. le
ministre. Je pense que l'article 2111 n'est pas amendé, n'est-ce
pas?
M. Rémillard: Non, il n'est pas amendé.
Le Président (M. Lafrance): D'accord, alors, les articles
2106, 2107, 2108 et 2110 sont donc laissés en suspens. Est-ce qu'il y a
des commentaires sur les autres articles de cette sous-section? Sinon, le
nouveau titre est donc adopté tel qu'amendé. L'article 2105 est
adopté tel qu'amendé. L'article 2109 est adopté tel
qu'amendé et l'article 2111 est adopté tel quel.
J'aimerais maintenant appeler les articles contenus à la section
III qui traite de la résiliation du contrat, soit les articles 2112
à 2116 inclusivement.
M. Rémillard: II n'y a pas de modifications, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y a des commentaires touchant ces articles? Aucun. Donc, les articles
2112 à 2116 inclusivement sont adoptés. Nous en arrivons au
chapitre neuvième qui traite du mandat.
M. Rémillard: Alors, M. le Président, quant au
chapitre neuvième et au chapitre dixième, le chapitre
neuvième concernant le mandat et le chapitre dixième concernant
le contrat de société et d'association, il faudrait les
suspendre, M. le Président, parce que l'un de nos experts, qui est
madame le professeur Ouellette, qui n'est pas avec nous... Donc, nous devons
encore faire du travail d'expertise sur ces articles.
C'est donc dire, M. le Président, que je suggérerais
à cette commission d'aborder le chapitre onzième, soit l'article
2268 du chapitre, qui nous permet de travailler avec l'ensemble de nos experts
qui sont avec nous, qui sont présents ce soir.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y a des commentaires concernant cette proposition? Sinon, permettez-moi
de lire les propos d'introduction au chapitre onzième qui traite du
dépôt.
Du dépôt
Les dispositions du Code civil du Bas Canada sur les dépôts
ne soulèvent pas de difficultés majeures dans leur application.
La proposition de réforme en cette matière se limite donc
à apporter certains ajustements devenus nécessaires en fonction
du contexte économique actuel et de la modernisation de la
société.
Les principales modifications apportées par la proposition de la
réforme sont donc la reconnaissance expresse du dépôt
rémunéré, lequel a déjà été
reconnu par la jurisprudence québécoise, et une
réglementation plus complète du dépôt
hôtelier, en s'inspirant du projet de convention internationale sur le
contrat d'hôtellerie élaboré par l'Institut international
pour l'unification du droit privé.
Quant aux dispositions spécifiques au séquestre, elles
reprennent la plupart des dispositions actuelles du séquestre
conventionnel, tout en y apportant certains ajouts. Contrairement à la
proposition de l'Office, le droit actuel est donc conservé et le
séquestre est traité comme un contrat de dépôt et
non comme un contrat distinct, en raison des similitudes qui existent entre ces
deux contrats, notamment en ce qui concerne les obligations des parties. De
plus, certaines règles de droit substantif qui se retrouvent au Code de
procédure civile et qui s'appliquent actuellement au séquestre
judiciaire sont rapatriées au Code civil; elles s'appliqueront alors
aussi au séquestre conventionnel et, du même coup, on
évitera des répétitions inutiles. On pense notamment
à la règle concernant les pouvoirs de simple administration du
séquestre et
à celle relative à la décharge du
séquestre.
J'aimerais appeler les articles contenus à la section I qui
traite des dispositions générales du dépôt en
général, soit les articles 2268, 2269 et 2270.
M. Rémillard: II n'y a pas de modifications, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y a des commentaires touchant ces trois articles, 2268, 2269 et 2270?
Mme Harel: Dans le mémoire de la Chambre des notaires, M.
le Président, on peut lire ceci: "Le deuxième alinéa de
l'article 2268 est inutile puisque le législateur supprime le
caractère essentiel de gratuité du dépôt simple que
l'on retrouve actuellement à l'article 1795." Est-ce que le ministre a
pris connaissance, en fait, de ce commentaire? Je dois donc comprendre que
l'article 2268 est maintenu tel quel.
M. Rémillard: Après étude, M. le
Président, nous en arrivons à la conclusion qu'il faut garder ce
deuxième alinéa parce que, quand on lit l'article dans son
ensemble, le dépôt est le contrat par lequel une personne, le
déposant, remet un bien meuble à une autre personne, le
dépositaire, qui s'oblige à garder le bien pendant un certain
temps et à le restituer. Or, le dépôt est à titre
gratuit. ' II peut cependant être à titre onéreux lorsque
l'usage ou la convention le prévoit.
Alors, c'est la stipulation expresse. Il vaut mieux le dire, l'exprimer
pour qu'ensuite les règles qui vont s'ensuivre puissent se
référer... soit que c'est onéreux, soit que c'est à
titre gratuit. Alors, on a voulu que la règle soit explicite et non pas
implicite. Peut-être qu'on aurait pu la mettre implicite, puisque les
deux sont possibles. Mais mieux vaut la mettre explicite pour que l'ensemble
des règles qui suivent soient les plus claires possible.
Mme Harel: C'est ce que suggérait d'ailleurs le
député de Westmount cet après-midi, quand il nous
demandait de rendre explicite la question de la validité, je crois,
là, des dispositions concernant la protection ou concernant
plutôt...
M. Rémillard: Qu'est-ce que c'était, donc?
Mme Harel: Attendez. En fait, on y reviendra, de toute
façon.
M. Rémillard: En tout cas, il voulait qu'on protège
quelqu'un ou quelque chose explicitement. De non-concurrence.
Mme Harel: De non-concurrence, c'est ça. M.
Rémillard: Oui.
Mme Harel: C'est ça. Très bien.
Le Président (M. Lafrance): Merci, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve. Alors, s'il n'y a pas d'autres
commentaires, donc, les articles 2268, 2269 et 2270 sont adoptés tels
quels. (20 h 30)
J'aimerais maintenant appeler les articles contenus à la
sous-section qui traite des obligations du dépositaire, soit les
articles 2271 à 2279 inclusivement.
M. Rémillard: M. le Président, nous avons trois
amendements. L'article 2277 est modifié par le remplacement, à la
troisième ligne, des mots "onéreux, il" par ce qui suit:
"onéreux ou s'il a été exigé par le
dépositaire, celui-ci".
M. le Président, il paraît souhaitable, lorsque le
dépôt d'un bien est exigé par celui qui le reçoit,
notamment comme condition d'entrée dans un lieu, que le
dépositaire soit tenu comme s'il demandait paiement pour ce
dépôt. En raison de cet amendement, l'article 2277 se lirait comme
suit: "Le dépositaire est tenu, si le dépôt est à
titre gratuit, de la perte du bien déposé qui survient par sa
faute; si le dépôt est à titre onéreux ou s'il a
été exigé par le dépositaire, celui-ci est tenu de
la perte du bien, à moins qu'il ne prouve la force majeure."
M. le Président, l'article 2278 est modifié par la
suppression, à la dernière ligne, entre les mots
"déposant" et "ait déclaré", du V". Il s'agit, M. le
Président, d'une modification terminologique. En raison de cet
amendement, l'article 2278 se lirait comme suit: "Le tribunal peut
réduire les dommages-intérêts dus par le
dépositaire, lorsque le dépôt est à titre gratuit ou
que le dépositaire a reçu en dépôt des documents,
espèces ou autres biens de valeur, sans que le déposant ait
déclaré leur nature ou leur valeur."
Il y a aussi, M. le Président, un amendement par l'ajout,
après l'article 2278, du suivant: "2278.1 La restitution du bien se fait
au lieu où le bien a été remis en dépôt,
à moins que les parties n'aient convenu d'un autre lieu."
M. le Président, l'amendement vise à préciser la
règle applicable quant au lieu de la restitution. En raison de cet
amendement, l'article 2278.1 se lirait comme suit: "La restitution du bien se
fait au lieu où le bien a été remis en dépôt,
à moins que les parties n'aient convenu d'un autre lieu."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y a des commentaires sur ces articles 2271 à 2279 inclusivement,
incluant le nouvel article 2278.1? S'il n'y a pas de commentaires, les articles
2271 à 2276 inclusivement sont donc adoptés tels quels. Les
articles 2277 et 2278 sont adoptés tels qu'amendés. L'article
2278.1, le nouvel article, est adopté et
l'article 2279 est adopté tel quel.
J'aimerais maintenant appeler les articles contenus à la
sous-section qui traite des obligations du déposant, soit les articles
2280 et 2281.
M. Rémillard: II n'y a pas d'amendements, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
les articles 2280 et 2281 sont donc adoptés tels quels. J'aimerais
appeler les articles qui sont contenus dans la section II, qui traite du
dépôt nécessaire, les articles 2282, 2283 et 2284.
M. Rémillard: M. le Président, il n'y a pas
d'amendements non plus dans ces articles.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
les articles 2282, 2283 et 2284 sont donc adoptés tels quels. Oui, Mme
la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Donc, 2282 et 2283 seraient du droit actuel et,
à 2284, on y ferait du droit nouveau. 2284 se lit comme suit: "Le
dépôt d'un bien dans un établissement de santé ou de
services sociaux est présumé être un dépôt
nécessaire. "
Alors, j'imagine qu'on veut couvrir des situations d'urgence dans les
salles d'urgence lorsque les personnes arrivent en état de choc ou tout
simplement en perte de conscience. C'est ça qu'on veut couvrir à
2284?
M. Rémillard: C'est essentiellement ça, M. le
Président. Lorsqu'on n'a pas le choix, il faut laisser ces choses.
Mme Harel: L'article 2283, c'est donc du droit nouveau quand on y
dit: "Le dépositaire ne peut refuser de recevoir le bien, à moins
qu'il n'ait un motif sérieux de le faire. "Il est tenu de la perte du
bien, de la même façon qu'un dépositaire à titre
gratuit. "
Là, c'est vraiment la règle du bon samaritain qui se
trouve à être extensionnée. Il n'est pas simplement
maintenant tenu de porter secours; il est tenu de recevoir un bien. C'est
ça?
M. Rémillard: Pas dans n'importe quelle circonstance.
Mme Harel: Pour un motif sérieux. M. Rémillard:
C'est ça.
Mme Harel: Ah! C'est ça qui est inspiré du Code
civil éthiopien.
M. Rémillard: Ah oui!
Mme Harel: Le président du Parti québécois
me demandait encore ce soir si on avait conservé l'inspiration
éthiopienne. Alors...
M. Rémillard: Je ne sais pas d'où vient... Moi
aussi, j'ai eu des commentaires disant qu'on suivait le Code civil
d'Éthiopie.
Mme Harel: Mais c'est dans le commentaire, M. le ministre,
dé 2283.
M. Rémillard: Oh! Alors, on m'explique et je viens de
comprendre. Je ne sais pas si vous savez d'où ça vient, la
comparaison avec l'Éthio-pie. C'est que ce Code civil d'Éthiopie
a été fait par un très grand juriste, qui est René
David, et qui a certainement inspiré nos légistes. De là
à dire que nous copions le Code civil d'Éthiopie...
Mme Harel: Écoutez, M. le ministre...
M. Rémillard:... c'est peut-être plus difficile.
Mme Harel:... dans le livre des commentaires, le livre V des
commentaires, vous retrouvez, à la page 700, la proposition, la source,
et, à la source, on cite le Code civil éthiopien, article
2801.
M. Rémillard: Ha, ha, ha! Mme Harel: C'est de
là.
M. Rémillard: Ah bon! Alors, c'est certainement le
professeur Pineau qui a tenu à ce qu'on se réfère au Code
éthiopien.
Mme Harel: Mais c'est bien.
M. Rémillard: Le Code civil éthiopien! Et à
2282 aussi.
Mme Harel: On me dit que c'est dans le Code civil du Bas Canada,
à 1813. A beau mentir qui vient de loin, enfin... Ça semble une
source plus proche. En fait, à 1813, on retrouve une formulation quelque
peu différente de 2283 parce qu'à 1813 on dit: "Le
dépôt nécessaire est celui qui a lieu par une
nécessité imprévue et pressante provenant d'un accident ou
de force majeure, comme dans le cas d'incendie, naufrage, pillage ou autre
calamité soudaine. Il est d'ailleurs sujet aux mêmes règles
que le dépôt volontaire, sauf quant au mode de le prouver. "
Tandis que là on fait obligation, en fait, au dépositaire
à recevoir.
M. Rémillard: Peut-être que Me Pineau, M. le
Président, pourrait nous faire des commentaires.
Le Président (M. Lafrance): Certainement,
M. le ministre. Me Pineau.
M. Pineau: Ah non! Ce n'est pas évident que c'est la
formulation du Code civil éthiopien, mais en substance, c'est le concept
actuel qu'on retrouve dans l'article 1813, Bas Canada.
Le Président (M. Lafrance): Alors, s'il n'y a pas d'autres
commentaires...
Mme Harel: Juste une question.
Le Président (M. Lafrance): Oui, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Le motif sérieux de le faire va donc
au-delà d'un embarras. Le motif sérieux qui est invoqué
à 2283 pour refuser de recevoir le bien, motif sérieux que le
dépositaire doit invoquer pour refuser de recevoir le bien, va donc
au-delà, par exemple, simplement de l'embarras, des troubles, etc., que
ça peut causer. Le motif sérieux, c'est... Oui, c'est ça.
Dépendant des circonstances, ça peut être le danger ou des
choses comme ça. C'est une obligation à recevoir le bien qui est
faite, en fait. C'est une obligation de civisme, ça.
M. Pineau: M. le Président, il y a là une
obligation dont on ne peut se dégager qu'en ayant un juste motif qui,
comme le projet le dit, est un motif sérieux.
Mme Harel: Par exemple, un locataire qui doit quitter
précipitamment parce qu'il y a une urgence médicale et qui laisse
un bien - ça peut être un meuble, ça peut être des
meubles - à un voisin, le voisin est tenu de le conserver, à
moins qu'il y ait un motif sérieux de le faire. C'est ça qu'il
faut comprendre?
M. Pineau: Le voisin?
M. Rémillard: La question est intéressante. Je ne
sais pas si... M. Pineau, est-ce que vous avez...
M. Pineau: Je ne suis pas sûr, M. le Président, que
le voisin soit tenu à l'obligation de le conserver. Mais peut-être
que le locateur pourrait être obligé de le conserver pendant un
certain temps, pendant que le locataire puisse trouver quelque endroit pour le
loger, sous réserve d'un refus possible, en invoquant un motif
sérieux: un objet trop embarrassant, un objet dangereux, etc., selon les
circonstances, en l'espèce.
M. Rémillard: Mais je comprends, M. le Président,
que dans le Code civil du Bas Canada, à l'article 1813, on dit: "Le
dépôt nécessaire est celui qui a lieu par une
nécessité imprévue et pressante provenant d'un accident ou
de force majeure, comme dans le cas d'incendie, naufrage, pillage ou autre
calamité soudaine. Il est d'ailleurs sujet aux mêmes règles
que le dépôt volontaire, sauf quant aux modes de le prouver."
C'est assez circonscrit et assez bien... Ce n'est pas défini, au
moins, je dirais situé par les exemples qui sont là, alors qu'ici
c'est beaucoup plus large. Si je reprends l'exemple donné par Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve, si je suis à mon
appartement, bien tranquillement, et que tout à coup on cogne à
ma porte et on dit: Je dois m'absenter parce que je dois aller absolument voir
mon fils jouer au basketball ou voir mon fils qui a un problème, qui est
à l'hôpital ou quelque chose comme ça, voulez-vous garder
mon appartement...
Mme Harel: Je dois aller surveiller un parent
âgé...
M. Rémillard: Un parent âgé.
Mme Harel: ...à l'extérieur de la ville pour une
semaine.
M. Rémillard: Voilà. Ici, on n'a pas tellement de
balises pour déterminer si ce serait un cas de nécessité,
alors que, si on se réfère au Code civil du Bas Canada, les
balises étaient beaucoup plus restrictives.
Mme Harel: Oui.
M. Rémillard: Mais pourquoi en êtes-vous
arrivé à choisir cette formulation plus large?
Mme Harel: Oui.
M. Pineau: M. le Président, je pense qu'on a voulu
élargir le concept de dépôt nécessaire. Il y a
dépôt nécessaire parfois... Le dépôt qui
était fait chez l'aubergiste, par exemple, c'était
considéré comme un dépôt nécessaire, le
dépôt chez l'hôtelier. Il n'en était pas question
dans le Code civil, mais c'était ces règles-là, les
règles sur le dépôt qui étaient appliquées
à ce genre de chose.
Mme Harel: Mais il y a toujours eu, je pense, des dispositions
particulières pour les aubergistes, les hôteliers. Ça,
c'est autre chose. Mais, à la section II, on traite du
dépôt nécessaire en général. Par exemple, je
reprends l'exemple de tantôt, le locateur, voyant son logement
abandonné par le locataire pour des motifs de nécessité
pressante - la personne a pu être hospitalisée - pourra, dans un
délai raisonnable, sans doute déplacer les objets qui s'y
trouvent, pourra prendre possession, compte tenu de toute façon des
règles de loi, mais devrait avoir, à ce moment-là,
l'obligation de déposer les biens dans un lieu adéquat. C'est
ça qu'il faut comprendre?
M. Pineau: M. le Président, je ne pense pas que ça
puisse couvrir ce cas-là parce que 2283 dit: "Le dépositaire ne
peut refuser de recevoir le bien..." C'est un bien qui vient de
l'extérieur, n'est-ce pas? Donc, il ne se trouve pas là où
se trouve celui que vous qualifieriez de dépositaire. Donc, ça
couvre, me semble-t-il, le cas où une personne vient vous demander de
recevoir en dépôt une chose. (20 h 45)
Alors, c'est dans l'hypothèse où il y a
véritablement nécessité, car l'appellation, la
qualification "dépôt nécessaire des biens" dit bien ce que
cela veut dire, qu'il faut que ça soit dans un cas effectivement
d'urgence. Mais peut-être que l'article 2283 n'est pas suffisamment
resserré. Ça, c'est une question d'appréciation.
M. Rémillard: II me semble, M. le Président, qu'il
faudrait suspendre et regarder ça de plus près.
Une voix: Les trois.
M. Rémillard: Bien, les trois! Il faut revoir 2282...
Mme Harel: L'article 2283.
M. Rémillard: ...pour essayer de cerner de plus
près, à mon sens, "nécessité pressante". Je veux
bien qu'on se réfère au Code d'Ethiopie, mais il reste quand
même qu'on va se référer à ce qui se passe ici et,
si on regarde dans le Code civil du Bas Canada, il me semble que ça
m'apparaît plus cerné, il me semble, et plus applicable dans une
juste perspective d'équilibre.
Alors, si cette commission est d'accord, je pense qu'on devrait
suspendre pour revoir, réfléchir sur cet aspect-là.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Si je
comprends bien, il y a quand même consentement pour adopter 2283 et
2284.
M. Rémillard: Oui, II n'y a pas de problème. On n'a
pas de problème à ce niveau-là. Là, c'est pour
2282, déterminer ce qu'est une nécessité pressante.
Le Président (M. Lafrance): D'accord. Alors, 2282 est donc
laissé en suspens. Les articles 2283 et 2284 sont donc adoptés
tels quels.
J'aimerais maintenant appeler les articles contenus à la section
III, qui traite du dépôt hôtelier, soit les articles 2285
à 2290 inclusivement.
M. Rémillard: M. le Président, nous avons trois
amendements. Tout d'abord, le projet est modifié par l'ajout,
après l'article 2286, du suivant: "2286.1 L'hôtelier qui met
à fa disposition de ses clients un coffre-fort dans la chambre
même, n'est pas réputé avoir accepté en
dépôt les biens qui y sont déposés par les
clients."
M. le Président, l'amendement a pour but d'éviter toute
ambiguïté quant à la responsabilité de
l'hôtelier pour les biens déposés par un client dans un
coffre-fort mis à sa disposition dans sa chambre même. Dans un tel
cas, l'hôtelier ne devrait pas être considéré comme
ayant accepté ces biens en dépôt, vu l'absence de
contrôle qu'il a sur de tels coffres-forts. En raison de cet amendement,
l'article 2286.1 se lirait comme suit: "L'hôtelier qui met à la
disposition de ses clients un coffre-fort dans la chambre même, n'est pas
réputé avoir accepté en dépôt les biens qui y
sont déposés par les clients."
C'est l'association des hôteliers, M. le Président, qui
nous avait fait ces commentaires.
Mme Harel: Est-ce qu'il est fréquent que l'on retrouve des
coffres-forts dans les chambres d'hôtel?
M. Rémillard: Oui, et de plus en plus, surtout à
l'extérieur. Les hôtels, de plus en plus.
C'est la façon que les hôteliers trouvent la plus commode
pour offrir sécurité et aussi discrétion.
Mme Harel: Est-ce qu'on peut revenir à 2285, M. le
Président? Là, c'est un amendement à 2286.
Le Président (M. Lafrance): Je pense qu'il y a un
amendement aussi. Alors, 2285, oui. Tous les articles, en fait, de la section
III sont ouverts à discussion ou à proposition d'amendements.
Mme Harel: C'est donc dire que la personne qui offre au public
des services d'hébergement, l'hôtelier, en fait, est tenu
jusqu'à 10 fois le prix quotidien du logement, s'il y a perte des effets
personnels et des bagages, et jusqu'à 50 fois le prix quotidien du
logement, s'il y a eu dépôt.
Alors, je comprends, dans les commentaires du livre V, que le
légiste a préféré cette façon de faire
plutôt qu'un montant forfaitaire, ce qui se comprend parfaitement. On
m'indique qu'actuellement il s'agit d'un montant de 40 $, ce qui est absolument
insignifiant, et qu'une telle formulation est conforme à celle
proposée au projet de convention internationale sur le contrat
d'hôtellerie élaboré par l'Institut international pour
l'unification du droit privé, ce qui est une façon
intéressante de faire.
Alors, ça vient donc remplacer, ça, la
responsabilité de l'hôtelier que l'on retrouvait dans le Code.
Oui, effectivement, dans la convention internationale, il est prévu,
là, justement un montant de responsabilité qui puisse
équivaloir jusqu'à 100 fois le prix quotidien du loge-
ment. Voyez, c'est donc dire que ça, c'était compris dans
cette convention internationale. Je crois comprendre que l'association des
hôteliers souhaitait limiter sa responsabilité. C'est ce qui a
amené le législateur à réduire 10 fois le prix
quotidien du logement, 50 fois lorsqu'il y a dépôt. C'est bien le
cas? Par exemple, une chambre qui coûte 100 $, alors, 50 fois le prix du
dépôt, c'est évidemment 5000 $.
M. Rémillard: Non, voici ce qui s'est passé. C'est
qu'au niveau de la convention internationale, oui, on parle de 100 fois. Mais
nous, on a regardé ici même sur le continent nord-américain
ce qui se passait, les règles en application. On a regardé en
Europe aussi, actuellement, les règles en application et on est
arrivés à la conclusion que 50 fois était la norme qu'on
retrouvait normalement dans tous ces établissements hôteliers.
Alors, c'est un juste équilibre qu'on pouvait trouver, là encore,
100 fois étant peut-être un petit peu élevé.
Maintenant, on m'apporte un amendement à 2285, une petite
précision, je pense, qui a son importance, là.
Mme Harel: En matière de preuve, n'est-ce pas, c'est
ça?
M. Rémillard: Oui, c'est ça. C'est que l'article
2285 est modifié par l'ajout, à la cinquième ligne,
après le mot "logement" des mots "qui est affiché". Alors,
l'amendement a pour but de clarifier la notion de prix quotidien du logement en
précisant qu'il s'agit du prix affiché. Il a paru
préférable de retenir la notion de prix affiché
plutôt que celle du prix payé pour plusieurs raisons. Notamment,
il peut être difficile de connaître le prix réellement
payé lorsque le client a contracté un forfait. Par ailleurs, le
prix affiché reflète la qualité de rétablissement
et de ses services eu égard aux attentes légitimes du client, peu
importe le prix réellement payé. En raison de cet amendement,
l'article 2285 se lirait comme suit: "La personne qui offre au public des
services d'hébergement, appelée l'hôtelier, est tenue de la
perte des effets personnels et des bagages apportés par ceux qui logent
chez elle, de la même manière qu'un dépositaire à
titre onéreux, Jusqu'à concurrence de 10 fois le prix quotidien
du logement qui est affiché ou, s'il s'agit de biens qu'elle a
acceptés en dépôt, jusqu'à concurrence de 50 fois ce
prix."
Le Président (M. Lafrance): M. le ministre, on m'informe
que le secrétariat n'a pas reçu copie de...
M. Rémillard: Oui, malheureusement, M. le
Président, on a été un petit peu pris de court et, dans
quelques instants, l'amendement va être distribué aux membres de
la commission. Je m'en excuse.
Mme Harel: Alors, on peut l'adopter tel que lu, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): D'accord. Alors, l'article
2285 est donc adopté tel qu'amendé. Est-ce que l'article 2286...
J'ai ici une proposition d'amendement.
M. Rémillard: Ce que j'ai lu tout à l'heure, M. le
Président, c'est enregistré. J'en serais maintenant à
l'amendement à 2287.
Le Président (M. Lafrance): Je pense que vous avez lu
2286.1, le nouvel article.
M. Rémillard: Oh, excusez-moi. On voit à quel point
vous êtes diligent et attentif.
Le Président (M. Lafrance): Non, je peux me tromper aussi,
mais je ne suis pas certain, là. Je me souviens que vous avez lu 2286.1,
mais 2286, est-ce que quelqu'un peut confirmer?
M. Masse: Oui, je confirme que c'est le point 1 qui a
été lu.
Le Président (M. Lafrance): Oui?
M. Rémillard: Oui, ça n'a pas été lu.
Très bien. Alors, je m'en excuse, M. le Président. L'article 2286
est modifié, premièrement, par le remplacement, à la
deuxième ligne du premier alinéa, des mots "qui appartiennent
à ses clients" par les mots "apportés par ses clients" et,
deuxièmement, par le remplacement de la troisième ligne du
premier alinéa par celle-ci: "il ne peut les refuser que si, compte tenu
de l'importance ou des conditions d'exploitation de l'hôtel, les biens
paraissent d'une valeur excessive ou sont encombrants, ou encore s'ils sont
dangereux."
M. le Président, le premier amendement est de concordance avec
l'article 2285 et évite de se prononcer sur la propriété
des biens. Le second amendement a d'abord pour but de permettre à
l'hôtelier de refuser en dépôt des biens de valeur
excessive. Cette valeur excessive s'évaluera selon l'importance ou les
conditions d'exploitation de l'hôtel. On tient ainsi compte de la
catégorie de l'hôtel en cause et des attentes légitimes du
client. Selon le type d'hôtel, les coffrets ne sont pas toujours
conçus pour le dépôt d'objets de valeur. Le client qui se
voit ainsi refuser un dépôt peut toujours confier son bien
à une banque, par exemple. Le même critère d'importance et
de conditions d'exploitation s'appliquera aussi pour les biens encombrants ou
non. En effet, il semble opportun d'introduire ce même critère
subjectif afin de déterminer si un bien est encombrant ou non. En raison
de ces amendements, l'article 2286 se lirait comme suit: "L'hôtelier est
tenu d'accepter en dépôt les documents, les espèces et les
autres biens de
valeur apportés par ses clients; il ne peut les refuser que si,
compte tenu de l'importance ou des conditions d'exploitation de l'hôtel,
les biens paraissent d'une valeur excessive ou sont encombrants, ou encore
s'ils sont dangereux. "Il peut examiner les biens qui lui sont remis en
dépôt et exiger qu'ils soient placés dans un
réceptacle fermé ou scellé."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
s'il n'y a pas de commentaires, l'article 2286 est adopté tel
qu'amendé et le nouvel article 2286.1 est adopté.
M. Rémillard: M. le Président, l'article 2287 est
modifié, premièrement, par le remçiac&ment, au premier
alinéa, des mots "qui appartient à" par les mots "apporté
par" et, deuxièmement, par le remplacement, au deuxième
alinéa, du mot "aviser" par le mot "informer".
M. le Président, le premier amendement est de concordance avec
l'article 2285 et avec l'amendement proposé à l'article 2286. Le
second amendement est d'ordre terminologique. En raison de cet amendement,
l'article 2287 se lirait comme suit: "Malgré ce qui
précède, la responsabilité de l'hôtelier est
illimitée lorsque la perte d'un bien apporté par un client
provient de la faute intentionnelle ou lourde de l'hôtelier ou d'une
personne dont celui-ci est responsable. "La responsabilité de
l'hôtelier est encore illimitée lorsqu'il refuse le
dépôt de biens qu'il est tenu d'accepter, ou lorsqu'il n'a pas
pris les moyens nécessaires pour informer le client des limites de sa
responsabilité."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre.
M. Rémillard: Et c'est le Barreau du Québec, M. le
Président, qui nous a fait part de ces commentaires qui nous ont
amenés à cette modification.
Mme Harel: Je ne sais pas si M. le ministre a été
informé de cette cause qui est survenue, à la fin de cet
été, et qui mettait en cause une cliente fortunée d'un
grand hôtel de Montréal, qui invoquait la responsabilité de
l'hôtelier suite à un vol qui était survenu dans la chambre
qu'elle occupait, vol, donc, de ses effets personnels, y compris de sa bourse
et de ce qui s'y trouvait, y compris ses anovulants, et qui poursuivait
l'hôtelier pour responsabilité, pour la grossesse qui était
survenue. Je ne sais pas si vous êtes au courant de ça.
M. Rémillard: J'ai vu dans les journaux. (21 heures)
Mme Harel: C'est ça. Elle a perdu parce que,
évidemment, il a été décidé qu'il n'y avait
pas de lien de causalité, mais ça s'est quand même
retrouvé devant les tribunaux. Il y a quand même eu des frais
considérables pour qu'une telle action soit intentée, de la part
de tous les justiciables, finalement.
M. Rémillard: Ce serait difficile, pour moi, de commenter
une telle situation.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Lafrance): Alors, s'il n'y a pas d'autres
commentaires, l'article 2287 est adopté tel qu'amendé, ainsi que
les articles 2288, 2289 et 2290 qui sont adoptés tels quels. J'aimerais
maintenant appeler les articles contenus dans la section IV, qui traite du
séquestre, soit les articles 2291 à 2297 inclusivement.
M. Rémillard: Oui, M. le Président. Il y a deux
amendements à apporter à cette section. L'article 2292 est
modifié par l'ajout, au deuxième alinéa, avant le mot
"séquestre" des mots "dépositaire chargé d'agir à
titre de".
Le séquestre, M. le Président, est à la fois la
forme du dépôt et la personne qui en est chargée.
L'amendement vise à mettre en relief le fait que la personne qui accepte
d'agir à titre de séquestre est aussi dépositaire. Il
permet aussi d'assurer le lien entre les deux sens du mot "séquestre".
En raison de cet amendement, l'article 2292 se lirait comme suit: "Le
séquestre peut porter tant sur un bien immeuble que sur un bien meuble.
"La remise de l'immeuble s'effectue par l'abandon de la détention de
l'immeuble au dépositaire chargé d'agir à titre de
séquestre."
M. le Président, il y a un amendement à l'article 2294,
qui est modifié par la suppression, à la deuxième ligne du
premier alinéa, après les mots "autre que" du mot "ceux". Il
s'agit d'une modification terminologique, l'utilisation du mot "ceux"
n'étant justifiée par aucun antécédent pluriel. En
raison de cet amendement, l'article 2294 se lirait comme suit: "Le
séquestre ne peut faire, relativement au bien sous séquestre, ni
impense ni aucun acte autre que de simple administration, à moins de
stipulation contraire ou d'autorisation du tribunal. "Il peut cependant, avec
le consentement des parties ou, à défaut, avec l'autorisation du
tribunal, aliéner, sans délai ni formalités, les biens
dont la garde ou l'entretien entraîne des frais disproportionnés
par rapport à leur valeur."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
l'article 2291 est donc adopté tel quel. L'article 2292 est
adopté tel qu'amendé. L'article 2293 est adopté tel quel.
L'article 2294 est adopté tel qu'amendé et les articles 2295,
2296 et 2297 sont adoptés tels quels. Nous arrivons au chapitre
douzième qui traite du prêt. J'aimerais vous référer
au texte d'introduction,
en demandant peut-être à M. le député de
Sherbrooke de bien vouloir nous lire, s'il le veut bien, le texte
d'introduction contenu à la page 717.
Du prêt
M. Hamel: Très bien, M. le Président. Chapitre
douzième, Du prêt, articles 2298 à 2318. Ce chapitre,
consacré au contrat de prêt, propose une structure nouvelle des
règles. Alors que le Code actuel comporte un chapitre sur le prêt
à usage, un autre sur le prêt de consommation et, enfin, un
troisième sur le prêt à intérêt, le chapitre
douzième ne conserve que deux sections, outre celle
générale concernant les espèces de prêts et leur
nature.
C'est ainsi que, conformément à la doctrine et à
quelques codes civils étrangers, le prêt à
intérêt, ou prêt d'argent, est régi
généralement par les dispositions du "simple prêt",
appellation qui remplace l'actuelle: "prêt de consommation."
Bon nombre des dispositions du chapitre Du prêt reprennent des
règles du droit actuel, parfois en en modifiant la rédaction afin
de mieux en préciser le sens. D'autres dispositions consacrent une
interprétation doctrinale ou jurisprudentielle et permettent ainsi de
résoudre certaines controverses, dont l'effet de la promesse de
prêter, la possibilité pour le prêteur à usage de
réclamer le bien avant l'échéance lorsque l'emprunteur
décède, le droit pour le prêteur et l'emprunteur de
poursuivre l'auteur de dommages au bien.
Enfin, des règles nouvelles sont également
proposées au chapitre Du prêt. C'est ainsi que le prêt d'une
somme d'argent porte intérêt de plein droit, que le tribunal peut,
en cas de lésion, réviser les modalités du contrat,
même pour une autre cause qu'un taux d'intérêt usuraire, et
que le recours au tribunal n'est plus nécessaire pour permettre au
prêteur de réclamer le bien avant l'échéance. Et
voilà.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le
député de Sherbrooke. J'aimerais maintenant appeler les articles
contenus à la section I, qui traite des espèces de prêt et
de leur nature, soit les articles 2298 à 2302 inclusivement.
M. Rémillard: II n'y a pas de modifications, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Oui,
Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: À 2302, M. le Président, je crois
comprendre que le Barreau aurait souhaité pouvoir obtenir une
modification, tout en conservant la formulation du contenu au Code civil actuel
à 2384. Non, l'avant-projet plutôt. Excusez-moi. Alors, le Barreau
souhaitait donc plutôt un retour à l'avant-projet, à
l'article 2384 modifié, qui pouvait se lire comme suit: "La remise du
bien prêté n'est pas nécessaire à la formation du
contrat de prêt." C'est donc l'article 2384 de l'avant-projet. Et l'ajout
serait le suivant: "à moins qu'il ne le soit à titre gratuit." Je
comprends donc que l'article 2302 a été retenu dans sa
formulation actuelle, alors je souhaiterais que l'on puisse entendre les motifs
qui ont amené les légistes à proposer le maintien de la
formulation actuelle.
M. Rémillard: M. le professeur Pineau, M. le
Président, pourrait nous faire des commentaires à ce
sujet-là.
Le Président (M. Lafrance): Me Pineau.
M. Pineau: M. le Président, dans le droit d'aujourd'hui,
le contrat de prêt est un contrat réel, c'est-à-dire qu'il
se forme par la remise de la chose, quelle que soit cette chose. Donc, le
consentement ne suffit pas. Il faut que le bien en question, le bien
prêté, soit remis par le prêteur à l'emprunteur pour
que le contrat soit formé valablement. Dans l'avant-projet, l'article
2384 avait enlevé le caractère réel au prêt pour
faire de ce contrat un contrat consensuel comme tous les autres contrats. Le
projet de loi 125 revient au droit actuel et présente le prêt
comme étant un contrat réel, que ce prêt porte sur un bien
déterminé, un corps certain, ou sur de l'argent, peu importe.
Voilà pourquoi 2302 prévoit le cas de promesse de
prêter qui, comme toute promesse, ne confère au
bénéficiaire que le droit de réclamer des dommages et
intérêts de la part de ce dernier.
Je crois comprendre que le Barreau souhaiterait que ce contrat de
prêt soit consensuel pour régler ce qu'il pense être un
problème dans le cadre des prêts d'argent dont le montant est
versé par périodes échelonnées dans le temps. Mais,
je crois que cette forme de prêt ne présente pas de
problèmes particuliers. L'avantage de faire du contrat de prêt un
contrat réel réside en ceci: Actuellement, les institutions
financières qui prêtent de l'argent font des promesses de
prêt. Lorsque tout est prêt, les institutions financières
remettent l'argent à l'emprunteur. Dans l'hypothèse où le
prêteur ne verserait pas l'argent - il n'y a pas de contrat de prêt
- donc, dans ce contexte-là, l'emprunteur peut aller chercher un
prêt ailleurs et exercer contre le promettant une action en dommages et
intérêts, une action en responsabilité pour le
préjudice subi du fait de l'inexécution de cette promesse. Si
nous faisons du prêt un contrat consensuel, lorsque le prêteur
refusera de remettre l'argent, il n'exécutera donc pas l'obligation
résultant de son contrat de prêt. Cela signifie qu'à ce
moment-là l'emprunteur devra exercer une action pour forcer
l'exécution
de ce prêt, mais il ne pourra pas nécessairement aller
chercher un prêteur ailleurs. Donc, nous ne pensons pas qu'en
définitive ie fait de faire du contrat de prêt un contrat
consensuel facilite, ajoute quelque chose de favorable à la position de
l'emprunteur.
Quant au prêt d'une somme d'argent échelonné dans le
temps, nous pensons que cela ne pose pas de problème car, dès
lors que l'institution financière a fait son premier versement, sur un
emprunt de 3 000 000 $, par exemple, lorsque le premier million est
posé, le contrat de prêt est alors formé et
exécuté en partie. Il n'y a pas une succession de contrats de
prêt, il y a simplement l'exécution finale du contrat qui s'est
déjà formé lors de la remise du premier million, si j'ose
ainsi m'exprimer.
Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Pineau. S'il n'y a
pas d'autres commentaires, les articles 2298 à 2302 inclusivement sont
donc adoptés tels quels. J'aimerais maintenant appeler les articles
contenus à la section II, qui traite du prêt à usage. Les
articles 2303 à 2312 inclusivement.
M. Rémillard: M. le Président, nous avons trois
amendements. D'abord, l'article 2306 est modifié par le remplacement de
tout ce qui suit, dans la première ligne du premier alinéa, le
mot "dépenses", par les mots "nécessaires et urgentes faites pour
la conservation du bien." M. le Président, cet amendement est conforme
à l'opinion de la doctrine, tant québécoise que
française, qui considère que l'obligation de prévenir le
prêteur ne doit pas être un obstacle au remboursement des
dépenses. L'amendement assure également la concordance avec
l'article 2310 qui confère à l'emprunteur un droit de
rétention pour les dépenses nécessaires et urgentes faites
pour la conservation du bien. En raison de cet amendement, l'article 2306 se
lirait comme suit: "L'emprunteur a le droit d'être remboursé des
dépenses nécessaires et urgentes faites pour la conservation du
bien. "Il supporte seul les dépenses qu'il a dû faire pour
utiliser le bien."
L'article 2307, M. le Président, est modifié par la
suppression, dans la première ligne, des mots "les défauts de
sécurité ou". M. le Président, cet amendement est de
concordance avec celui apporté à l'article 1454 qui n'applique
qu'au domaine extracontractuel la notion de défaut de
sécurité. En raison de cet amendement, l'article 2307 se lirait
comme suit: "Le prêteur qui connaissait les vices cachés du bien
prêté et n'en a pas averti l'emprunteur est tenu de réparer
le préjudice qui en résulte pour ce dernier."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Je
pense que vous avez un troisième amendement. (21 h 15)
M. Rémillard: Oui, M. le Président, à
l'article 2308, qui est modifié par le remplacement, dans la
dernière ligne du second alinéa, des mots "à moins que
celle-ci résulte d'une force majeure" par les mots "même si
celle-ci résulte d'une force majeure, sauf si la perte s'était,
de toute façon, produite en raison de cette force majeure."
M. le Président, cet amendement vise à rétablir en
partie la règle du droit actuel selon laquelle l'emprunteur est tenu de
la perte, même si celle-ci résulte d'une force majeure, mais en y
apportant, pour des motifs d'équité, un important
tempérament. Si la perte s'était produite en raison de la force
majeure, même si l'emprunteur avait utilisé le bien pour l'usage
auquel il est destiné ou l'avait rendu à temps, l'emprunteur
n'est alors pas tenu de la perte. En raison de cet amendement, l'article 2308
se lirait comme suit: "L'emprunteur n'est pas tenu de la perte du bien qui
résulte de l'usage pour lequel il est prêté. "Cependant,
s'il emploie le bien à un usage autre que celui auquel il est
destiné ou pour un temps plus long qu'il ne le devait, il est tenu de la
perte, même si celle-ci résulte d'une force majeure, sauf si la
perte s'était, de toute façon, produite en raison de cette force
majeure."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Un
commentaire? Oui, Me Masse.
M. Masse: M. le Président, nous avons
vérifié certaines formulations au vu des propositions de l'Office
de la langue française, et je me demande si, à la dernière
ligne de l'article 2308 suggéré, il n'y a pas une faute. Je me
demande si la version finale, ce ne serait pas: "...sauf si la perte se serait
de toute façon produite en raison de cette force majeure." C'est bien
"s'était"?
M. Rémillard: C'est le Barreau du Québec, M. le
Président, qui nous avait fait valoir ses commentaires sur cet
article.
Le Président (M. Lafrance): Si je comprends bien, le terme
"s'était" est...
M. Rémillard: C'est ce qui a été
recommandé par l'Office de la langue française. Mais je peux
assurer cette commission qu'on va faire une autre vérification.
Le Président (M. Lafrance): Oui. On peut certainement
vérifier, quitte à revenir, si besoin il y avait. Est-ce qu'il y
a d'autres commentaires - Me Masse? - sur cet article ou sur les autres
contenus à la section II? Sinon, les articles 2303, 2304 et 2305 sont
donc adoptés
tels quels. Les articles 2306, 2307 et 2308 sont adoptés tel
qu'amendés. Les article 2309, 2310, 2311 et 2312 sont adoptés
tels quels.
J'aimerais maintenant appeler les articles contenus dans la section III,
qui traite du simple prêt, soit les articles 2313 à 2318
inclusivement.
M. Rémillard: M. le Président, d'un commun accord,
les membres de cette commission aimeraient suspendre l'article 2318.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y a d'autres commentaires concernant ces articles? Oui, Me Masse.
M. Masse: M. le Président, c'est sur 2318. Même s'il
est suspendu, je crois qu'il serait important d'en signaler le sens pour la
suite de la discussion. L'article 2318 est l'équivalent de l'article
1040c actuel, qui date de 1964 et qui a été adopté au
Québec, suite à un arrêt de la Cour suprême dans
l'affaire Barfried. Il est important, je pense, de suspendre 2318 pour nous
permettre de discuter encore de la définition de la lésion entre
majeurs, à l'article 1402. 1.
Deuxièmement, il est clair également, pour nous, que nous
ne voulons pas perdre les avantages qu'accorde actuellement l'article 1040c,
mais nous ne voulons pas non plus aller trop loin. On sait l'importance des
contrats de prêt d'argent dans notre société. Il y a
là, vraiment, un équilibrage à faire et qui dépend
de la structure d'ensemble que l'on tiendra ou de la politique que l'on
adoptera sur la notion de lésion entre majeurs.
Le Président (M. Lafrance): Merci, Me Masse. Alors, les
articles 2313, 2314, 2315, 2316 et 2317 sont donc adoptés tels quels.
L'article 2318est laissé en suspens.
Nous en arrivons au chapitre treizième, qui traite du
cautionnement, et j'aimerais faire appel à Mme la députée
de Kamouraska-Témiscouata afin de nous lire, s'il vous plaît, les
propos d'introduction contenus à la page 741.
Du cautionnement
Mme Dionne: Oui, M. le Président. Le chapitre
treizième, Du cautionnement, articles 2319 à 2351. Le chapitre
XIII du livre Des obligations consacré au contrat de cautionnement
propose plusieurs modifications aux règles du Code actuel qui n'avaient
subi aucune intervention législative depuis la codification de 1866. Or,
la stabilité des règles régissant le cautionnement ne
signifie aucunement qu'il s'agit là d'une institution où les
litiges ont été peu nombreux. Bien au contraire, de très
sérieuses controverses ont surgi dans la détermination du
régime juridique de cautionnement.
Les règles du chapitre XIII viennent donc résoudre ces
controverses en consacrant des solutions dégagées par la doctrine
et la jurisprudence québécoise, et parfois française, ou
en proposant des solutions nouvelles. Elles visent ainsi à assurer une
protection accrue des cautions et à restreindre les abus souvent
dénoncés.
C'est ainsi que le chapitre XIII résout, notamment, les
difficultés que posent des questions comme la transmissibilité,
aux héritiers de la caution des dettes contractées par le
débiteur principal après le décès de celle-ci,
l'incidence de la solidarité entre le débiteur et la caution,
l'existence d'un recours personnel entre cautions, l'obligation de
renseignement à la charge du créancier, l'effet de
déchéance du terme encourue par le débiteur principal, la
renonciation au bénéfice de subrogation, la révocation du
cautionnement continu et celle du cautionnement attaché à
l'exercice de fonctions particulières. M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): Merci, Mme la
députée. J'aimerais appeler les articles contenus dans la section
I de ce chapitre treizième, qui traite de la nature, de l'objet et de
l'étendue du cautionnement, soit les articles 2319 à 2330
inclusivement.
M. Rémillard: Nous avons quatre amendements, M. le
Président. L'article 2320 est modifié par le remplacement, dans
la dernière ligne, du mot "établi" par le mot "imposé". M.
le Président, il est plus exact de dire que la loi impose un
cautionnement. En raison de cet amendement, l'article 2320 se lirait comme
suit: "Outre qu'il puisse résulter d'une convention, le cautionnement
peut être imposé par la loi ou ordonné par jugement. "
C'est le Barreau qui nous avait suggéré cette modification.
L'article 2323 est modifié par le remplacement, dans la
deuxième ligne du premier alinéa, des mots "ait et maintienne"
par les mots "a et maintient". M. le Président, cet amendement est
d'ordre linguistique. En raison de cet amendement, l'article 2323 se lirait
comme suit: "Le débiteur tenu de fournir une caution doit en
présenter une qui a et maintient au Québec des biens suffisants
pour répondre de l'objet de l'obligation et qui a son domicile au
Canada; à défaut de quoi, il doit en donner une autre. "Cette
règle ne s'applique pas lorsque le créancier a exigé pour
caution une personne déterminée. "
M. le Président, l'article 2326 est modifié par le
remplacement du second alinéa par le suivant: "On peut cautionner
l'obligation dont le débiteur principal peut se faire décharger
en invoquant son incapacité, à la condition d'en avoir
connaissance, ainsi que l'obligation naturelle. "
M. le Président, cet amendement apporte une précision
conforme au droit des obligations. En effet, la nullité du contrat
pourrait être
obtenue en invoquant l'erreur. Il a semblé
préférable de prévoir clairement la règle selon
laquelle le cautionnement est valable si ta caution avait connaissance de la
nature particulière de l'obligation. C'est cette connaissance qui rend
le cautionnement valable, puisque la caution se porte fort, en quelque sorte,
que le débiteur confirmera son engagement et elle cautionne
éventuellement cet engagement. L'amendement opère
également une inversion afin de mieux dégager la règle. En
raison de cet amendement, l'article 2326 se lirait comme suit: "Le
cautionnement ne peut exister que pour une obligation valable. "On peut
cautionner l'obligation dont le débiteur principal peut se faire
décharger en invoquant son incapacité, à la condition d'en
avoir connaissance, ainsi que l'obligation naturelle."
La Chambre des notaires, M. le Président, nous avait fait valoir
le bien-fondé d'un tel amendement.
L'article 2330, M. le Président, est modifié par l'ajout,
à la dernière ligne, entre les mots "ceux" et
"postérieurs", des mots "qui sont". M. le Président, cet
amendement est d'ordre linguistique. En raison de cet amendement, l'article
2330se lirait comme suit: "Le cautionnement d'une obligation principale
s'étend à tous les accessoires de la dette, même aux frais
de la première demande et à tous ceux qui sont postérieurs
à la dénonciation qui en est faite à la caution."
Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, M. le
ministre. S'il n'y a aucun commentaire concernant ces articles, l'article 2319
est adopté tel quel, l'article 2320 est adopté tel
qu'amendé, les articles 2321 et 2322 sont adoptés tels quels,
l'article 2323 est adopté tel qu'amendé, les articles 2324 et
2325 sont adoptés tels quels, l'article 2326 est adopté tel
qu'amendé, les articles 2327, 2328 et 2329 sont adoptés tels
quels et l'article 2330 est adopté tel qu'amendé.
J'aimerais maintenant appeler les articles contenus à la section
II, qui touche aux effets du cautionnement, et en particulier les effets entre
le créancier et la caution, soit les articles 2331 à 2341
inclusivement.
M. Rémillard: Oui, M. le Président. Nous
avons quatre amendements. L'article 2333 est modifié par l'ajout du
second alinéa suivant: "Celui qui a cautionné la caution
judiciaire ne peut demander la discussion du débiteur principal, ni de
la caution."
M. le Président, cet amendement reprend la règle de
l'article 1965 du Code civil du Bas Canada. En l'absence de cette règle
et compte tenu de l'article 2333, on aurait pu prétendre que la caution
conventionnelle de la caution judiciaire peut discuter les biens de la caution
judiciaire ou du débiteur principal, alors que la caution judiciaire,
conformément au 1er alinéa de l'article 2333, ne jouit pas du
bénéfice de discussion. En raison de cet amendement, l'article
2333 se lirait comme suit: "La caution conventionnelle ou légale jouit
du bénéfice de discussion, à moins qu'elle n'y renonce
expressément. "Celui qui a cautionné la caution judiciaire ne
peut demander la discussion du débiteur principal, ni de la
caution."
M. le Président, l'article 2334 est modifié par le
remplacement, dans la dernière ligne du premier alinéa, des mots
"et lui avancer" par les mots "en lui avançant".
M. le Président, cet amendement vise à rétablir la
règle du droit actuel selon laquelle le créancier est tenu de
l'insolvabilité survenue après le défaut de poursuite,
c'est-à-dire après que le créancier soit tenu de
procéder à la discussion, donc après que la caution ait
non seulement indiqué les biens saisissables du débiteur, mais
qu'elle ait aussi avancé les sommes nécessaires à la
discussion. En raison de cet amendement, l'article 2334 se lirait comme suit:
"La caution qui se prévaut du bénéfice de discussion doit
l'invoquer dans l'action intentée contre elle, indiquer au
créancier les biens saisissables du débiteur principal en lui
avançant les sommes nécessaires pour la discussion. "Le
créancier qui néglige de procéder à la discussion
est tenu, à l'égard de la caution et jusqu'à concurrence
de la valeur des biens indiqués, de l'insolvabilité du
débiteur principal survenue après l'indication, par la caution,
des biens saisissables du débiteur principal."
M. le Président, l'article 2338 est modifié par l'ajout,
dans la deuxième ligne, après le mot "solidaire," des mots "elle
ne peut plus invoquer les bénéfices de discussion et de
division;". Cet amendement vise à prévoir expressément
quel est l'effet de la solidarité sur les bénéfices de
discussion et de division. En raison de cet amendement, l'article 2338 se
lirait comme suit: (21 h 30) "Lorsque la caution s'oblige, avec le
débiteur principal, en prenant la qualification de caution solidaire ou
de codébiteur solidaire, elle ne peut plus invoquer les
bénéfices de discussion et de division; les effets de son
engagement se règlent par les principes établis pour les dettes
solidaires, dans la mesure où Hs sont compatibles avec la nature du
cautionnement."
Le Ban-eau du Québec nous avait fait valoir le bien-fondé
d'un tel amendement.
L'article 2340, M. le Président, est modifié par le
remplacement des deux premières lignes par ce qui suit: "La caution
n'est point déchargée par la simple prorogation du terme
accordée par le créancier au débiteur principal; de
même, la déchéance."
Cet amendement vise à clarifier la règle. Le mot "mais"
laisse croire que la règle qui suit est à l'effet que la
déchéance du terme décharge la
caution, alors qu'au contraire elle subit la déchéance du
terme et doit remplir son obligation. En raison de cet amendement, l'article
2340 se lirait comme suit: "La caution n'est point déchargée par
la simple prorogation du terme accordée par le créancier au
débiteur principal; de même, la déchéance du terme
encouru par le débiteur principal produit ses effets à
l'égard de la caution."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
les articles 2331 et 2332 sont donc adoptés tels quels, les articles
2333 et 2334 sont adoptés tels qu'amendés, les articles 2335,
2336 et 2337 sont adoptés tels quels, l'article 2338 est adopté
tel qu'amendé, l'article 2339 est adopté tel quel, l'article 2340
est adopté tel qu'amendé et l'article 2341 est adopté tel
quel.
J'aimerais appeler les articles qui traitent des effets entre le
débiteur et la caution, soit les articles 2342 à 2345
inclusivement.
M. Rémillard: II n'y a pas d'amendements, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): S'il n'y a aucun commentaire,
les articles 2342 à 2345 inclusivement sont donc adoptés tels
quels. J'aimerais maintenant appeler l'article 2346 qui traite des effets entre
les cautions.
M. Rémillard: II n'y a pas d'amendements, M. le
Président.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
l'article 2346 est adopté tel quel. J'aimerais maintenant appeler les
articles contenus à la section III, qui traite de la fin du
cautionnement, soit les articles 2347 à 2351 inclusivement.
M. Rémillard: II y a trois amendements, M. le
Président. L'article 2347 est modifié par la suppression du
second alinéa. Cet amendement vise à faire de la règle
énoncée au second alinéa une règle
générale, laquelle est reportée à l'article 2349.1,
telle que proposée, puisqu'elle vaut dans toutes les hypothèses
où prend fin le cautionnement. En raison de cet amendement, l'article
2347 se lirait comme suit: "Le décès de la caution met fin au
cautionnement, malgré toute stipulation contraire."
L'article 2348 est modifié: 1° par le remplacement, dans les
première et deuxième lignes du premier alinéa, des mots
"pour une période ou une somme" par les mots "en vue de couvrir des
dettes futures ou pour une période"; 2° par le remplacement, dans le
deuxième alinéa, des mots "lorsque le" par les mots "dans le cas
d'un"; 3° par la suppression, dans le deuxième alinéa, du mot
"est".
M. le Président, le premier amendement vise à
préciser la règle. Ce qui est visé à l'article
2348, ce sont les dettes à venir, ou ce que l'on appelle en doctrine le
cautionnement continu. L'expression "dettes futures" est plus claire que celle
de "somme indéterminée", laquelle n'implique pas forcément
que l'obligation est aussi indéterminée.
Les autres amendements sont d'ordre linguistique. En raison de cet
amendement, l'article 2348 se lirait comme suit: "Le cautionnement consenti en
vue de couvrir des dettes futures ou pour une période
indéterminée comporte, après trois ans et tant que la
dette n'est pas devenue exigible, la faculté pour la caution d'y mettre
fin en donnant un préavis suffisant au débiteur, au
créancier et aux autres cautions. "Cette règle ne s'applique pas
dans le cas d'un cautionnement judiciaire."
Alors, 2348, M. le Président, que je viens de lire dans son
amendement devrait être suspendu pour qu'on puisse procéder
à une étude plus approfondie. L'article 2349.1... Excusez-moi, M.
le Président, le projet est modifié par l'insertion, après
l'article 2351, du suivant... M. le Président, je reprends la lecture de
cet amendement: Le projet est modifié par l'insertion, après
l'article 2349, du suivant: "2349.1 Lorsque le cautionnement prend fin, la
caution demeure tenue des dettes existantes à ce moment, même si
elles sont soumises à une condition ou à un terme."
M. le Président, cet amendement s'inspire de la règle du
second alinéa de l'article 2347, qui a été étendue
à l'ensemble des situations où prend fin le cautionnement, afin
de préciser ce qu'il advient du cautionnement sur les dettes à ce
moment. En raison de cet amendement, l'article 2349.1 se lirait comme suit:
"Lorsque le cautionnement prend fin, la caution demeure tenue des dettes
existantes à ce moment, même si elles sont soumises à une
condition ou à un terme."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
l'article 2347 est donc adopté tel qu'amendé, l'article 2348 est
laissé en suspens, l'article 2349 est adopté tel quel, le nouvel
article 2349.1 est adopté tel que proposé et les articles 2350 et
2351 sont adoptés tels quels. J'aimerais maintenant vous
référer au chapitre quatorzième, qui traite de la rente,
et permettez-moi de vous lire les propos d'introduction.
De la rente
Instrument à caractère économique, la rente,
principalement celle qui est d'origine contractuelle, évolue parmi
d'autres instruments financiers. Elle se distingue par sa fonction d'apport
complémentaire aux ressources financières d'une personne,
à une époque correspondant généralement à
celle où cette personne cesse d'accomplir un travail
rémunérateur.
Le Code civil du Québec, au chapitre De ta rente, vient surtout
simplifier et uniformiser les règles actuelles ou accorder le droit
à la réalité et aux pratiques usuelles. Il opère
aussi un regroupement des dispositions du Code actuel en la matière, que
l'on retrouvait principalement, tantôt et assez curieusement au livre
deuxième de ce Code à propos de la distinction des biens,
tantôt au sein du titre relatif au prêt pour la constitution de
rente, tantôt encore dans un titre distinct réservé aux
rentes viagères.
Concernant la nature du contrat de rente et la portée des
règles qui le régissent, les nouvelles dispositions se
caractérisent, entre autres, par l'introduction d'une définition
claire de ce type de contrat qui soit valable pour toute espèce de
rente, y compris celle constituée par bail à rente dont traite
exceptionnellement le chapitre De la vente; elles se caractérisent aussi
par l'assujettissement, aux règles applicables à la rente
contractuelle, des rentes constituées par testament, par jugement ou par
la loi.
Pour ce qui est de l'étendue, en termes de durée, du
contrat de rente, les principaux changements apportés par les nouvelles
dispositions ont trait, d'une part, à l'abolition des rentes
perpétuelles, dont le capital était essentiellement remboursable
et qui ne répondent plus vraiment aux besoins de notre
société vu l'existence du prêt à
intérêt et, d'autre part, à la suppression des distinctions
subtiles entre la rente foncière, la rente constituée et la rente
viagère et les autres rentes temporaires à terme.
Désormais, ne sont donc retenues que les rentes viagères
et les autres rentes temporaires qualifiées de rentes non
viagères, et la durée du service de toute rente est, dans tous
les cas, limitée ou réduite à 100 ans depuis sa
constitution, peu importent les stipulations contraires du contrat ou le fait
qu'elles constituent une rente successive.
Quant aux effets du contrat de rente, les nouveautés
apportées sont nombreuses. Parmi les principales se démarquent,
d'abord, l'ajustement des règles relatives aux stipulations
d'insaisis-sabilité et d'inaliénabilité des rentes ou
l'introduction d'une règle décrétant
l'insaisissabilité du capital en cas de rente successive, et la
limitation du caractère d'insaisissabilité à ce qui est
nécessaire à titre d'aliments seulement.
Des règles de désignation ou de révocation de
certains crédirentiers, renvoyant tantôt au régime de la
stipulation pour autrui, tantôt au régime du droit des assurances,
sont introduites, de même que des règles sur la
réversibilité des rentes constituées au profit de
plusieurs personnes conjointement, y compris une présomption de
réversibilité à l'égard des époux.
La faculté unilatérale de rachat qu'accorde le droit
actuel au débirentier est, par ailleurs, abolie, le débirentier
bénéficiant plutôt, désormais, de la seule
faculté de se faire remplacer par un assureur autorisé. Cette
faculté de substitution, qui se justifie pour la protection du
crédirentier et qui s'entoure de mesures protectrices de ses droits, est
également accordée au propriétaire d'un immeuble
grevé d'une sûreté pour la garantie du service de la rente,
afin de favoriser la libre circulation des immeubles.
Enfin, les droits du crédirentier, en cas d'inexécution
des obligations du débirentier ou de survenance de situations
susceptibles de mettre en péril l'exécution de ses obligations,
sont clairement précisées, comme le sont également ses
droits en cas de vente forcée d'un immeuble sur lequel il détient
une hypothèque garantissant le service de la rente, et une règle
d'évaluation de la rente, en capital, est introduite pour toutes les
situations où une telle évaluation est requise en application des
dispositions du chapitre.
J'aimerais appeler les articles contenus à la section I, qui
traite de la nature du contrat et de la portée des règles qui le
régissent, soit les articles 2352 à 2355 inclusivement.
M. Rémillard: Nous avons un amendement, M. le
Président. C'est l'article 2353 qui est modifié par la
suppression, à la troisième ligne, dans l'expression "est dit un
bail à rente", du mot "un".
M. le Président, cet amendement est d'ordre formel seulement. En
raison de cet amendement, l'article 2353 se lirait comme suit: "Lorsque le
débirentier s'oblige au service de la rente moyennant le transfert,
à son profit, de la propriété d'un immeuble, le contrat
est dit bail à rente et est principalement régi par les
règles du contrat de vente auquel il s'apparente." (21 h 45)
Le Président (M. La trance): Merci, M. le ministre. Je
pense que vous avez un autre amendement aussi... non, pas dans cette section.
Alors, la discussion est donc ouverte pour les articles 2352 à 2355
inclusivement.
S'il n'y a aucun commentaire, l'article 2352 est donc adopté tel
quel.
Mme Harel:...
Le Président (M. Lafrance): Pardon? Oui. L'article 2353
est adopté tel qu'amendé, les articles 2354 et 2355 sont
adoptés tels quels. J'aimerais maintenant appeler les articles contenus
à la section II, qui traite de l'étendue du contrat, soit les
articles 2356 à 2361 inclusivement.
M. Rémillard: II y a un amendement, M. le
Président. L'article 2361 est modifié par le remplacement, aux
deuxième et troisième lignes, des mots "sa constitution" par les
mots "la
constitution de la rente". Cet amendement vise à supprimer toute
difficulté d'interprétation pouvant naître entre le texte
du présent article et celui du deuxième alinéa de
l'article 2359. Dans les deux cas, la limite est fixée à 100 ans
depuis la constitution de la rente même et non depuis le début du
service de celle-ci. En raison de cet amendement, l'article 2361 se lirait
comme suit: "La durée du service de toute rente, qu'elle soit
viagère ou non, est dans tous les cas limitée ou réduite
à 100 ans depuis la constitution de la rente, même si le contrat
prévoit une durée plus longue ou constitue une rente
successive."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
s'il n'y a aucun commentaire, les articles 2356 à 2360 inclusivement
sont adoptés tels quels, l'article 2361 est adopté tel
qu'amendé. J'appelle maintenant les articles contenus à la
section III, qui traite de certains effets du contrat, soit les articles 2362
à 2373 inclusivement.
M. Rémillard: Alors, M. le Président, nous
aimerions suspendre les articles 2362 et 2363 pour de plus amples consultations
et vérifications techniques. Il y a aussi deux amendements, M. le
Président. Tout d'abord, à l'article 2367, qui est modifié
par le remplacement, à la première ligne, des mots "à la
fin de chaque mois et" par ce qui suit: "à la fin de chaque
période prévue, laquelle ne peut excéder un an;".
M. le Président, cet amendement apporte des précisions
destinées à mieux refléter la pratique dans le domaine des
rentes, où les périodes de paiement des redevances sont
essentiellement variables, pouvant être tantôt mensuelles,
tantôt trimestrielles ou même, bien souvent, semestrielles ou
annuelles. Il paraissait cependant important, malgré le souci de
refléter la pratique actuelle et de favoriser la liberté des
parties dans la conclusion de leur entente, de ne pas perdre de vue les droits
du crédirentier et, à cette fin, il a semblé souhaitable
de limiter, dans tous les cas, à un an au maximum la
périodicité du paiement des redevances. En raison de cet
amendement, l'article 2367 se lirait comme suit: "Les redevances se paient
à la fin de chaque période prévue, laquelle ne peut
excéder un an; elles sont comptées à partir du jour
où le débirentier doit commencer à servir la rente."
L'autre amendement, M. le Président, est à l'article 2369,
qui est modifié par le remplacement, à la dernière ligne
du second alinéa, des mots "celle offerte" par les mots "celle qui est
offerte". Cet amendement est d'ordre formel seulement. En raison de cet
amendement, l'article 2369 se lirait comme suit: "Le débirentier a la
faculté de se faire remplacer par un assureur autorisé en lui
versant la valeur de la rente qu'il doit. "De même, le
propriétaire d'un immeuble grevé d'une sûreté pour
la garantie du service de la rente a la faculté de substituer la
sûreté attachée à cette rente par celle qui est
offerte par un assureur autorisé. "Le crédirentier ne peut
s'opposer à la substitution, mais il peut demander que l'achat de la
rente se fasse auprès d'un autre assureur ou contester la valeur du
capital arrêté ou celle de la rente en découlant."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Alors,
les articles 2362 et 2363 sont laissés en suspens, l'article 2364 de
même que les articles 2365 et 2366 sont adoptés tels quels,
l'article 2367 est adopté tel qu'amendé, l'article 2368 est
adopté tel quel, l'article 2369 est adopté tel qu'amendé
et les articles 2370 à 2373 sont adoptés tels quels.
M. Rémillard: M. le Président, on termine donc
là; c'est jusqu'où nous pouvons faire ce soir, étant
donné que, pour le reste... On me dit qu'il resterait deux articles sur
le jeu et les paris. Oui. C'est ce que j'avais compris. Alors, il ne reste pas
deux petits articles. Je reprends. Alors, on termine là, M. le
Président, mais j'aimerais pouvoir rouvrir l'article 2104 du chapitre
huitième, contrat d'entreprise ou de service. Nous aurions un amendement
à proposer à l'article 2104.
Le Président (M. Lafrance): L'article 2104, oui. L'article
2104 est un article qui avait été adopté avec amendement.
Là, vous désirez, si je comprends bien, rouvrir l'article et
retirer l'amendement qui avait été...
M. Rémillard: Oui, j'aimerais proposer un autre
amendement, M. le Président. Voici, à l'article 2104, remplacer
tout ce qui suit les mots "à courir" par ce qui suit: "qu'à
compter de la fin des travaux, même à l'égard de ceux qui
ont fait l'objet de réserves lors de la réception de
l'ouvrage."
M. le Président, cet amendement vise à clarifier le point
de départ de la prescription et assure la concordance avec l'amendement
apporté à l'article 2098. En raison de cet amendement, l'article
2104 se lirait comme suit: "La prescription des recours entre les parties ne
commence à courir qu'à compter de la fin des travaux, même
à l'égard de ceux qui ont fait l'objet de réserves lors de
la réception de l'ouvrage."
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Est-ce
qu'il y a des commentaires? L'article 2104 est donc adopté avec ce
nouvel amendement qui est contenu et imprimé en date du 23 octobre
1991.
Mme Harel: Est-ce que je dois comprendre que c'est là une
suggestion qui nous est venue du Barreau?
M. Rémillard: C'est ça, oui. Mme Harel:
C'est bien ça.
Le Président (M. Lafrance): Est-ce qu'il y a des
commentaires de fin de séance?
M. Rémillard: M. le Président.
Le Président (M. Lafrance): Oui, M. le ministre.
M. Rémillard: Si vous me permettez, je ne serai pas avec
vous la semaine prochaine, mais je sais que, de toute façon, nos experts
ont besoin de ce temps pour se réunir et procéder aussi à
des consultations, ce que nous allons faire. Nous serons donc de retour dans
une semaine.
Le Président (M. Lafrance): Merci, M. le ministre. Oui,
Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Alors, M. le Président, je pense bien que je
peux, en mon nom et, j'imagine, au nom de tous les membres de cette commission
ainsi que des personnes qui participent de près à nos travaux,
souhaiter une bonne mission au ministre en Europe. Je profiterai de l'occasion
qui nous est offerte pour féliciter le président pour la
façon avec laquelle il s'acquitte de sa tâche. M. le
Président, je l'ai déjà dit, mais je crois qu'il est
nécessaire de vous le répéter. Vous introduisez dans nos
travaux un formalisme tout en maintenant une simplicité de bon aloi qui
est un agrément, finalement, dont je vous suis bien redevable.
Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie, Mme la
députée.
M. Rémillard: M. le Président, je connais votre
modestie, mais je me permets quand même de m'associer à la
députée de Hochelaga-Maison-neuve pour souligner aussi la
qualité de votre travail de président. Je vous en remercie.
Le Président (M. Lafrance): Je vous remercie beaucoup et
j'aimerais vous remercier, en retour, pour votre collaboration. J'inclus non
seulement les membres, mais aussi nos experts. Alors, sur ces propos
très agréables, j'aimerais ajourner nos travaux sine die.
(Fin de la séance à 21 h 55)