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Aménagement de la colline parlementaire
(Dix-sept heures vingt minutes)
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, messieurs!
La commission parlementaire des transports, des travaux publics et de
l'approvisionnement est réunie pour entendre des mémoires
concernant l'aménagement de la colline parlementaire.
Les membres de la commission sont les suivants: M. Boucher
(Rivière-du-Loup) remplacé par M. Bertrand (Vanier); M. Brassard
(Lac-Saint-Jean); M. Caron (Verdun) remplacé par M. Verreault
(Shefford); M. Dussault (Châteauguay); M. Gratton (Gatineau)
remplacé par M. Marchand (Laurier); M. Grenier
(Mégantic-Compton), M. Guay (Taschereau); M. Lefebvre (Viau)
remplacé par M. de Belleval (Charlesbourg); M. Lessard (Saguenay), M.
Lévesque (Kamouraska-Témiscouata) remplacé par M.
Léonard (Laurentides-Labelle); M. Mailloux (Charlevoix), M. Michaud
(Laprairie), M. Ouellette (Beauce-Nord) remplacé par M. Tardif
(Crémazie); M. Perron (Duplessis), M. Rancourt (Saint-François),
M. Russell (Brome-Missisquoi), M. Samson (Rouyn-Noranda) et M. Vaillancourt
(Orford).
Aujourd'hui, nous entendrons les mémoires du Barreau de
Québec, de la Chambre de commerce et d'industrie du Québec
métropolitain, de la Garderie coopérative Saint-Jean-Baptiste, du
Conseil des monuments et sites du Québec Inc., et du Comité des
citoyens du Vieux-Québec.
J'inviterais M. Bernard Lesage, du Barreau de Québec, à
nous présenter son mémoire et à nous présenter
d'abord les personnes qui l'accompagnent.
Travaux de la commission
M. Bertrand: M. le Président, avant qu'on entende les
représentants du Barreau, y a-t-il moyen de vous demander une directive
concernant les travaux de cette commission? On sent bien qu'au rythme où
on est parti, on ne terminera certainement pas pour jeudi soir, avec tous les
mémoires qu'on doit encore recevoir. De deux choses l'une, ou bien cette
commission a l'intention, M. le Président, par votre
intermédiaire, de demander qu'elle puisse siéger la semaine
prochaine, par exemple, ou bien vous insistez pour émettre des
directives très sévères sur l'allocation maximum de temps,
et les députés doivent s'y plier, sinon, nous n'arriverons pas
à remplir notre horaire.
Le Président (M. Marcoux): Concernant cette question, je
pense qu'on serait mieux placé pour prendre une décision
définitive à la fin de cette journée. D'après la
liste des mémoires qui doivent être présentés,
probablement qu'il nous faudra ajouter deux heures, environ, à nos
séances. Il y a différentes possibilités. On peut le
faire, soit le matin, du consentement de la Chambre, ou vendredi,
peut-être, après les affaires courantes. Nous pour- rions retenir
cette question pour la fin de nos délibérations d'aujourd'hui, si
les membres de la commission sont d'accord.
M. Mailloux: M. le Président, à la suite de
l'intervention faite par le député de Vanier, je dois dire que,
quant à l'Opposition officielle, les questions posées à
l'avenir seront très courtes, étant donné que ce seront
simplement des questions qui se répéteront.
Quant à nous, c'est indiscutable que cela ne retardera pas.
M. Bertrand: Dans un premier temps, M. le Président,
peut-être avez-vous raison. Nous pourrions attendre que la séance
de ce soir se termine, et peut-être que, dans un premier temps, vous
pourriez être d'une sévérité extrême, pour
retenir les députés dans leurs elaborations, et cela s'applique
autant au député de Vanier, qu'à tout autre
député. Je me plierai à vos directives.
Le Président (M. Marcoux): Avant de céder la parole
à d'autres membres de la commission, je voudrais indiquer que j'ai
procédé de la façon suivante: Les premiers
mémoires, qui étaient quand même des mémoires
très importants, qui nous faisaient entrer dans le sujet, ont
provoqué nécessairement beaucoup plus de questions et de
commentaires de la part des membres de cette commission qui voulaient
définir leur attitude, par rapport à la commission et par rapport
au sujet. J'ai considéré qu'il était normal que ces propos
soient plus longs et que les questions soient plus longues. Vous avez dû
certainement remarquer que, lors des derniers mémoires, les propos ont
été plus courts et également les questions. J'ai
essayé d'être plus strict sur le temps accordé à
chaque mémoire.
Je pense qu'avec cette nouvelle attitude, nous pourrions entendre
facilement chaque mémoire environ dans trois quarts d'heure, une heure
au maximum, et terminer notre travail cette semaine.
M. Lessard: M. le Président, très
brièvement, je voudrais quand même vous soumettre la
possibilité de siéger jeudi matin, à dix heures. Demain
après-midi, à trois heures, ou à quatre heures,
après les affaires du jour, nous pourrons probablement demander au
leader parlementaire du gouvernement de nous faire siéger jeudi, s'il y
a lieu. Nous verrons demain, je n'en suis pas informé.
Le Président (M. Marcoux): Etes-vous d'accord pour revenir
sur le sujet, à la fin de la rencontre d'aujourd'hui?
M. Mailloux: D'accord.
Présentation de mémoires Barreau de
Québec
Le Président (M. Marcoux): Après ce
préambule, je prierais M. Lesage de nous présenter les personnes
qui l'accompagnent. Disons que nous
nous entendons pour que, de 5 h 20 à 5 h 40, vous nous fassiez
une présentation pendant environ 20 minutes de votre mémoire pour
donner environ 20 à 25 minutes aux membres de la commission pour vous
poser des questions.
M. Lesage (Bernard): Oui, ce ne sera pas plus long, M. le
Président; d'ailleurs, nous avons déjà un mémoire
succinct, qui ramasse nos idées, qui sont assez simples
elles-mêmes sur le sujet. Je vous présente d'abord ceux qui
m'accompagnent. A ma droite Me Yvan Gagnon, premier conseiller au Barreau de
Québec, et, à ma gauche, Me Paul Vézina,, qui est le
membre de notre conseil spécialement versé dans les questions
d'administration du palais de justice. Ceux-ci nous ont aidé dans la
préparation du mémoire que nous avons soumis, un peu trop
laconiquement, parce que nous avons eu peu de temps, nous n'avons pas au
Barreau de Québec un personnel considérable et nous avons
dû faire un sondage auprès des intéressés,
réunir le plus d'opinions possible. Nous avons réuni ces opinions
dans les quelques pages que nous avons soumises. Notre intervention de cet
après-midi diffère un peu de celles qui ont été
présentées ici, si j'en juge d'après les rapports que nous
avons pu avoir des media d'information et des journaux. C'est que notre
préoccupation ne porte pas au premier chef sur l'aménagement
comme tel de la colline parlementaire. Ce n'est pas que ce sujet ne nous
intéresse pas beaucoup comme citoyens de Québec, comme
résidants de la région ayant tous un local près d'ici,
mais comme, encore une fois, citoyens de la province et de la capitale, nous
sommes très intéressés à ce que
l'aménagement de la colline soit fait de la façon la plus
rationnelle, la plus humaine, la plus logique possible, en préservant
tout ce qu'il est possible de conserver de cachet et de l'atmosphère que
nous aimons bien et qui permet aux gens de vivre d'une façon correcte
à Québec. Cependant, si nous intervenons ici, ce n'est pas comme
experts, nous n'avons pas de voix autorisée sur le plan de l'urbanisme,
de l'écologie ou du développement urbain. Bien sûr, nous
avons glissé dans notre mémoire quelques mots sur l'impression
que nous avions, par exemple, de l'ancien couvent du Bon-Pasteur, mais ce qui
en est, devant ce projet d'aménagement étudié ici, qui
fait l'objet de cette commission parlementaire pour laquelle nous sommes ici,
et dont nous félicitons ceux qui en ont pris l'initiative, car nous
sommes très heureux de cette consultation, c'est que, par un concours de
circonstances, il arrive qu'au premier chef soit visé un projet que nous
estimons capital, qui avait mûri au cours des années
antérieures, celui d'un nouveau palais de justice à
Québec. A telle enseigne qu'il arrive maintenant qu'on risque, en
voulant régler un problème, d'en créer un nouveau, s'il
était jamais décidé de suspendre pour une période
de temps, voire de reléguer aux oubliettes le projet d'un nouveau palais
de justice. Ce serait une conséquence extrêmement malheureuse du
souci que les administrateurs auraient de vouloir préserver la colline
parlementaire et la région avoisinante. Notre préoccupation est
un peu plus aiguisée du fait que nous lisons dans la Presse de vendredi
dernier, et nous espérons que c'est un titre qui ne rapportait pas
correctement la réalité: "Mort du projet d'une Place de la
Justice". L'on y voyait que le ministre d'Etat à l'aménagement
aurait déclaré vendredi ou jeudi que, à ce moment, il
entrait dans les vues du gouvernement de préserver l'actuel couvent du
Bon-Pasteur.
Encore une fois nous n'avons pas de querelle à ce sujet, en
aucune façon, mais on ajoutait, je pense que c'était une addition
qui n'était pas justifiée par les propos du ministre, du moins je
l'espère, que le palais de justice demeurera dans le
Vieux-Québec, parce que cela ne peut pas avoir beaucoup de signification
que le palais de justice demeure dans le Vieux-Québec.
En effet, nous n'avons plus de palais de justice dans le
Vieux-Québec présentement. Nous avons un immeuble au 12 rue
Saint-Louis qui donne l'apparence de recevoir certains justiciables pour
régler certains problèmes, mais qui n'est pas du tout ce qui doit
être considéré comme un palais de justice. Nous avons sorti
de cet immeuble, depuis les 20 dernières années, les
éléments essentiels, les composantes absolument
nécessaires pour fonctionner efficacement. On a sorti le bureau
d'enregistrement et toutes les régies, on a mis dans d'autres immeubles
des juges, des cours de droit familial, des cours qui traitent des convictions
sommaires et on a éparpillé au 39 rue Saint-Louis
particulièrement, et dans d'autres locaux, des organismes, des fonctions
très importantes de la justice.
Ce n'est pas tout ce qui fait que nous n'avons vraiment pas de palais de
justice présentement. Les locaux qui demeurent sont tout à fait
non fonctionnels, ne correspondent plus du tout à ce qu'on peut attendre
de services judiciaires valables. Or, je vais le dire peut-être encore
une fois, et je tiens à le dire immédiatement, si nous
intervenons ici, cet après-midi, ce n'est pas parce que les avocats,
comme tels, sont impliqués vitalement dans ce problème. Les
avocats que je représente, ici, comme bâtonnier, vont au palais de
justice dans une faible mesure, comparé à l'ensemble et à
la moyenne des justiciables, comparé au personnel qui est là,
à tous les services de soutien qui sont au palais de justice et,
évidemment, aux juges et aux magistrats. Je ne prétends pas
parler pour ces derniers non plus, encore que je sais, par une missive qui m'a
été donnée par le juge en chef Vallée, qu'on appuie
la position que nous prenons présentement. C'est donc comme promoteur de
l'intérêt public strictement, comme soucieux de
l'intérêt des justiciables et d'une justice qui fonctionne et qui
est efficace, que nous voulons faire des observations.
Il faut savoir que le palais actuel, tout harmonieux et joli qu'il soit,
qui paraît conserver une vie un peu latine à notre quartier que
nous aimons bien, la Place d'Armes et tout ce qui tourne autour, c'est un peu
avec un certain esthétisme que nous l'évoquons comme étant
la basoche, comme on dit dans d'autres pays, le secteur où les hom-
mes de robe vont pour échanger la justice, mais il reste qu'il
n'en est rien. Il faut être conscient des impératifs que les
justiciables et les citoyens de Québec ont du local où la justice
doit être rendue. L'édifice a été construit il y a
plus de 50 ans, il est tout à fait inapproprié sur le plan de la
dimension des locaux, de leur nombre restreint, du dédale de labyrinthes
qui existe maintenant pour se rendre d'un endroit à un autre, parce
qu'au moment où on l'a créé il n'y avait que quelques
salles de cour, c'était facile et le reste servait à remiser et
aux services accessoires. Maintenant on a expulsé tous les services
accessoires du palais de justice et on a fait des salles de cour un peu partout
jusque sous les combles, dans la tour de l'armoire, dont on se sert pour faire
des rencontres pour tenter de rendre justice et à des endroits où
il est impossible à quiconque n'est pas un initié fondamental de
se retrouver. Les justiciables qui vont là n'ont aucunement l'impression
que c'est un édifice qui leur présente la moindre
sécurité à divers égards, sécurité
humaine, psychologique et physique. Il faut voir les gens se presser pour les
réunions de jurés lorsqu'on fait les appels de jurés pour
les causes criminelles, c'est devenu un danger public que de réunir ces
gens dans des corridors exigus où il n'y a absolument aucun moyen de les
parquer décemment, de s'occuper d'eux.
Il n'y a, encore une fois, aucune espèce de service accessoire
valable pour fonctionner efficacement. J'ai décrit dans le
mémoire, avec l'appui de mes collègues, toutes sortes de
phénomènes qui font que c'est un endroit où règne
l'inefficacité, où les gens, véritablement, ont le
sentiment d'être oppressés, opprimés et qui, encore une
fois, ne peut donner un service normal à la population de Québec,
alors qu'on a réussi dans d'autres villes. Et, je ne veux pas donner
l'exemple de Montréal où on se plaint aujourd'hui que les
ascenseurs ne fonctionnent pas; les nôtres non plus ne fonctionnent pas,
mais à ce sujet c'est une difficulté temporaire parce que nous
n'avons pas d'étages à monter au palais de justice de
Québec, ou à peu près. Il reste que je ne suggère
pas que nous ayons 17 ou 20 étages dans un nouveau palais de justice,
cela pourrait être fait d'une autre façon, mais il n'est pas
question aujourd'hui de se plaindre de cet aspect tout à fait
temporaire. Ce qu'on doit souligner, c'est qu'il faut intégrer dans un
immeuble tous les services judiciaires pour arriver à une fin normale,
pour arriver à donner aux justiciables le service auquel ils ont
droit.
Il faut savoir qu'une cause n'est pas simplement, pour un juge, le fait
d'entendre un justiciable n'importe où. Une cause implique toutes sortes
de situations où interviennent toutes sortes de gens. Il y a des gens
pour les diriger, en premier lieu. Il y a le service des subpoenas, il faut que
les subpoenas soient émis, payés. Il faut le service de
sténographie. Il faut que le service du rôle fonctionne lorsque
des problèmes sont soulevés. Il faut que le service de la
sécurité, des policiers, soit là. Les services des greffes
sont absolument essentiels et il faut référer à la
bibliothèque pour avoir des éléments valables qui
surgissent à l'occasion d'une cause.
Si vous éparpillez cela à travers toutes sortes
d'immeubles, qu'ils soient réunis ou non par des tunnels, encore que ce
soit tout à fait illusoire de penser qu'on peut, à partir de
l'édifice actuel répartir des tunnels jusqu'à la rue
Chauveau ou jusqu'au 39 Saint-Louis ou jusqu'au vieil immeuble des Postes sur
la rue du Fort... Je pense que cela est tout à fait illusoire. Nous
n'arriverons à aucun résultat efficace. Nous aurons une justice
divisée, éparpillée, qui sera totalement enrayée
dans son fonctionnement. Et c'est pourquoi il est apparu, depuis de nombreuses
années, à tous ceux qui se sont penchés sur le
problème, qu'il fallait avoir un nouveau palais de justice
intégrant toutes les cours avec, si possible, le bureau
d'enregistrement, tous les services de sténographie, de police, les
services pour le personnel, les services de restauration. Nous envisageons pour
les cours d'avoir du personnel professionnel dans les causes matrimoniales. Il
faudra aménager des locaux pour ces gens, les psychologues. Il faut
prévoir pour l'avenir la possibilité d'expansion. Il faut que ces
locaux soient organisés sur le plan de la circulation, de la
sécurité, de la communication, du fonctionnement
général et cela nécessite la rationalisation, à
partir de la base, d'un nouvel édifice auquel ceux qui
s'intéressent à la chose doivent participer, tout le monde, mais
pas exclusivement les gens de robe comme on appelle les juges et les avocats
qui sont au service du public; et ce n'est pas pour eux qu'est demandé
cet édifice. Nous pensons que c'est évident.
Pour ce qui est de la situation du nouveau palais, c'est le
problème auquel cette commission est tout particulièrement
sensible, à supposer qu'elle est acquise, et nous aimerions bien que ce
soit déclaré que nous avons besoin au Québec comme nos
gouvernements antérieurs et je ne veux pas invoquer leur
autorité plus qu'il ne faut ont dit, mais ils l'ont dit sans
passer aux actes ou si ce n'est qu'un moment donné, on nous a appris
et nous n'avions rien à voir là-dedans que
l'emplacement du couvent du Bon-Pasteur était choisi.
En toute honnêteté, nous n'avons pas protesté. Ce
qui nous importait, c'était d'avoir un nouveau palais de justice et de
penser qu'à un moment donné, nous l'aurions, ne serait-ce que
dans deux ou trois ans ou même cinq. On a pris un emplacement, des plans,
des architectes, cela a commencé à bouger. Qu'on nous dise que
c'est aux coins de Saint-Amable et de Berthelot, on a accepté cela. On
nous aurait dit un autre local qui avait une certaine allure, qui avait autant
d'allure, on aurait également accepté.
C'est donc dire que nous ne nous en prenons pas au site qui est
reconsidéré et qui donne lieu à cette commission
parlementaire sur l'aménagement de la colline. Mais nous espérons
que cela ne va pas résulter en une relégation aux oubliettes, en
un report aux calendes grecques d'un projet essentiel, qui était sur le
point de mûrir. Je pense d'ailleurs que le ministre actuel des Travaux
publics a déclaré au mois de janvier que c'était une de
ses priorités. J'espère que cela voulait dire
une priorité pour passer à l'action et le construire, ce
nouveau palais de justice.
Nous suggérons qu'il soit, bien sûr, dans un endroit que
nous appelons le centre-ville, c'est-à-dire l'endroit de
l'activité économique de Québec. Cela est normal, car,
dans toutes les villes, c'est là que se trouvent les palais de justice,
pour des raisons évidentes; c'est que les activités de la justice
impliquent une quantité de gens qui doivent circuler, qui doivent se
rendre le plus commodément possible à un endroit. Cela implique
une quantité de services accessoires aussi que l'on trouve dans les
centre-ville. Cela implique des bureaux en grande quantité. Ce n'est pas
pour rien, c'est une espèce de sagesse que l'on trouve dans le code, qui
peut être repensée, bien sûr, qui oblige les avocats et les
huissiers à avoir leur bureau à proximité du palais de
justice, dans un rayon extrêmement près.
Il faut penser qu'il y a un tas de gens qui viennent de
l'extérieur de Québec pour avoir leur cause entendue au palais de
justice. Dans le climat que nous avons, on ne circule pas aisément le
matin même. On vient la veille, il faut s'installer à des endroits
convenables. Il est certain que la proximité des lieux
d'hébergement est un facteur à considérer pour un palais
de justice.
Nous croyons également que la proximité du gouvernement,
à Québec, est un élément extrêmement valable.
Nous aimons être près du gouvernement, pas trop près,
parfois, parce qu'il y a une possibilité de liens trop étroits et
peut-être qui feraient mal interpréter la situation si
l'exécutif était dans le même immeuble que le judiciaire.
Remarquez que ce n'est pas une impossibilité théorique, mais il
reste que cela pourrait être interprété aux yeux de
plusieurs, comme risquant de créer des collusions ou des
complicités ou enfin, peut-être, des apparences que la justice qui
est tellement décriée pourrait éviter favorablement.
Nous avons soumis dans notre mémoire qu'il est également
aussi impérieux que ce nouveau palais soit près du centre
économique de Québec. Nous n'insistons pas sur un local en
particulier. Il y a plusieurs possibilités, mais pas beaucoup, nous le
constatons.
Nous avons dit finalement que le site qui avait été
envisagé, le couvent du Bon-Pasteur, ne nous répugnait pas. Je
dois vous dire en toute honnêteté que nous avons fait un sondage
auprès des avocats. Nous avons réuni 400 réponses, ce qui
est un bon nombre pour les gens qui s'intéressent à
répondre à des sondages à Québec, sur le nombre
d'avocats qui vont au palais. Il y avait passablement de réponses de
gens qui manifestaient leur attachement à l'ex-couvent du Bon-Pasteur,
mais c'était la minorité.
Il faut dire que la majorité disait: Ecoutez, l'essentiel, c'est
un nouveau palais intégrant les services pour les justiciables. Il faut
que ce soit au centre-ville. Le site projeté antérieurement ne
nous déplaît pas. Nous pensons qu'il conviendrait, en raison de
différents éléments, aux buts que nous recherchons, mais,
encore une fois, pourvu qu'il soit situé au centre-ville, dans le centre
éco- nomique des affaires, nous croyons que c'est acceptable.
Le Président (M. Marcoux): M. Lesage, pour conclure, vous
pouvez ajouter quelques mots si vous voulez, avant de passer à la
période des questions.
M. Lesage: Je pense que je commencerais peut-être à
me répéter, M. le Président. Je vous donne les armes et la
parole.
Le Président (M. Marcoux): Ne vous accusez pas
injustement. M. le ministre.
M. Lessard: M. le Président, je tiens à remercier
les membres du Barreau de Québec de nous avoir présenté ce
mémoire et d'avoir laissé, quand même, une certaine
ouverture d'esprit concernant le site du palais de justice.
Je voudrais, pour être bien clair, reprendre ce qui avait
été affirmé par le ministre responsable de
l'aménagement, M. Léonard, à la dernière
séance de la commission parlementaire. Il disait: Je ne peux
présumer des décisions du ministre des Travaux publics et des
décisions de la commission, mais il semble se dégager, ici
à cette table, une unanimité en ce qui concerne votre projet,
c'est-à-dire la sauvegarde du couvent du Bon-Pasteur. Cela augure
très bien, je pense, en ce sens, mais je ne pense pas que cette
décision, si elle était prise en relation avec les
mémoires qui avaient été alors présentés,
ait pour but de mettre au rancart la construction de Place de la Justice.
Je pense bien que nous devrons, comme membres de la commission
parlementaire, concilier la préoccupation d'un aménagement
rationnel de la colline parlementaire avec des besoins bien légitimes
qui viennent des membres du Barreau, mais particulièrement, des besoins
qui proviennent de la population. Soyez convaincus que le ministre de la
Justice, M. Marc-André Bédard, est bien conscient de la
nécessité d'avoir une place de la Justice qui soit plus conforme
aux intérêts des justiciables du Québec.
Cependant, comme je le disais, il faut concilier un certain nombre
d'intérêts. Nous devrons le faire, et c'est l'objectif de la
commission parlementaire de le faire. C'est pourquoi nous avons voulu consulter
la population. Quant à moi, responsable du ministère des Travaux
publics, le jour où j'aurai, en collaboration avec mes collègues,
à prendre une décision concernant la sauvegarde du couvent du Bon
Pasteur, je devrai, nous devrons même, dis-je, par la même
occasion, essayer de trouver des moyens de satisfaire les justiciables, et en
même temps, de prévoir la construction de Place de la Justice.
Il ne s'agit donc pas, en terminant, de mettre au rancart la
construction du palais de justice, mais il s'agit d'analyser différentes
alternatives qui nous permettraient de concilier, à la fois les
intérêts de la population, et aussi, les intérêts de
l'aménagement de la colline parlementaire qu'on a, bien souvent,
sacrifié aux grands immeubles qui
ne sont pas conformes au rôle que devrait jouer la colline
parlementaire. C'était simplement la remarque que j'avais à faire
sur votre mémoire. Je pense que la description que vous faites de la
situation déplorable actuelle tant au niveau de la
sécurité que des services que vous devez accorder en utilisant le
palais de justice actuel, correspond un peu à ce que nous transmet le
ministre de la Justice.
Par exemple, il faudrait se dire une chose, c'est qu'il y a aussi
certaines marges entre, d'une part, l'idéal et, d'autre part, les
deniers publics qui sont mis entre les mains du ministère des Travaux
publics pour donner, en fait, ces services et essayer d'améliorer les
constructions existantes, parce qu'on a des besoins du côté de la
justice, mais on a aussi d'autres besoins, comme vous avez pu le constater,
suite à des articles de journaux, dans le Soleil, en fin de semaine,
concernant justement la construction d'un entrepôt pour les oeuvres
d'art. Il y a donc des besoins qui doivent être conciliés entre
les sommes d'argent mises à notre disposition. Cependant, je pense bien
qu'il n'y a pas nécessairement une objection ou une contradiction, d'une
part, entre essayer de conserver le couvent du Bon-Pasteur et, d'autre part,
Place de la Justice.
Merci!
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Charlevoix.
M. Mailloux: M. le Président, comme nous avons promis
d'être très brefs tantôt, je vais tâcher de
m'exécuter.
En prenant connaissance du mémoire du Barreau, je constate
quelques traits dominants du mémoire, à savoir que les espaces
physiques accordés pour l'administration de la justice dans le
Québec métropolitain sont dans un état absolument
déplorable. Je pense qu'il n'y a personne qui doute de cette
affirmation.
Vous avez également fait valoir la situation.du nouveau palais de
justice, qui devrait être rattaché quand même au
centre-ville de Québec en raison de toute l'affinité qu'il y a
avec la plupart des bureaux qui doivent avoir accès à la Place de
la Justice.
J'ai été quand même assez heureux d'apprendre,
tantôt, que le Barreau favorisait la séparation du pouvoir
judiciaire et du pouvoir exécutif. Je pense que, sans m'étendre
davantage sur ce qu'a dit tantôt celui qui représente le Barreau,
c'est également l'opinion du parti que je représente ici.
Je n'ai pas d'autres commentaires à ajouter, sauf qu'il y a
peut-être eu un manque de disponibilité budgétaire, mais
quand il avait été fait mention de l'achat des terrains dont on a
parlé pour la Place de la Justice, le gouvernement
précédent avait quand même également compris la
situation déplorable de tous ceux qui doivent s'occuper de justice dans
la province de Québec et avait reconnu qu'ils avaient à faire
face à un problème extrêmement difficile. Je veux
espérer, en regardant les crédits budgétaires qu'on vient
de nous donner en Chambre, que si le ministre des Travaux publics a obtenu des
crédits supplémentaires d'une vingtaine de millions sur ceux de
l'an passé, grâce à ces crédits il sera
peut-être possible sur un terrain ou l'autre, en respectant un peu
l'espoir que manifeste le mémoire du Barreau, que le ministre des
Travaux publics réponde aux voeux exprimés par ceux qui viennent
de nous parler du mémoire du Barreau.
M. le Président, si vous le permettez, avant de céder la
parole à un autre, je voudrais, non pas soulever une question de
privilège, mais simplement faire référence à un
article dont vient de parler le ministre des Transports, relativement à
un autre mémoire qui a précédé, Atlific, dans
lequel je lis ceci: "Appuyé par le porte-parole de l'Opposition
officielle, M. Mailloux, le projet Atlific a suscité de sérieuses
interrogations chez les membres de la majorité péquiste qui y
voient la poursuite pure et simple du type d'aménagement qu'a connu le
centre-ville de Québec."
Si une de mes paroles a pu laisser entrevoir que j'appuyais le projet
Atlific, comme je n'en ai pris connaissance qu'à la lecture du
mémoire, je voudrais dire que cela n'était pas l'opinion de
l'Opposition officielle, en aucune façon.
Alors, je ne dis pas que le journaliste a erré en traduisant mes
propos, mais de toute façon, ce n'était pas ce que j'ai voulu
exprimer, en aucune façon.
Le Président (M. Marcoux): J'informe ceux qui
présentent le mémoire que même s'il n'y a pas de questions,
si vous avez des commentaires à apporter aux remarques des membres de la
commission, il vous est loisible de le faire.
M. Lesage: Pour le moment, nous sommes heureux des
précisions apportées par les participants.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: Je voudrais vous féliciter pour le
mémoire que vous venez de présenter. Je n'habite pas
Québec, bien sûr. Je suis dans une région assez
éloignée. Mais notre parti a toujours favorisé cette
façon de procéder. On sait, depuis assez longtemps, qu'il y a
peut-être des secteurs où c'est difficile d'apporter des
changements ou de légiférer, on en sait quelque chose, le secteur
de la langue, le secteur de la foi et le secteur des moeurs. Ce sont des choses
sur lesquelles on peut difficilement apporter de gros changements. Comme c'est
connu du Barreau de Québec, ici, que ce milieu est
fréquenté depuis si longtemps par les gens du milieu de la
justice, je pense que vous avez raison de dire qu'il ne faudrait pas trop
l'éloigner de son site actuel.
Je voudrais bien vous faire savoir que si le gouvernement le
ministre a été prudent dans ses propos tout à l'heure
tient compte de ce que disait tout à l'heure l'ex-ministre, M.
Mailloux, relativement à ces crédits qui peuvent être
donnés au
ministère de la Justice, s'il y avait lieu de ne pas apporter de
chicane de site pour qu'on ne fasse pas comme on a fait à la ville de
Sherbrooke, par exemple, faire s'éterniser le projet pendant de trop
longues années à cause d'une chicane de terrain, cela serait
peut-être bien agréable de voir à Québec
s'ériger cet édifice qui est certainement devenu une
nécessité pour vous aussi, les gens du Barreau.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Vanier.
M. Bertrand: Une seule question seulement à M. Lesage, en
commençant, si vous me permettez, M. le Président. Est-il exact
que, dans les règlements du Barreau, les bureaux des avocats doivent
être situés dans un périmètre d'environ trois
milles?
M. Lesage: L'article 64 du Code de procédure civile. C'est
la loi. Ce ne sont pas les règlements du Barreau.
M. Bertrand: C'est la loi. Quel est le
périmètre?
M. Lesage: C'est trois milles.
M. Bertrand: Pardon?
M. Lesage: Ah bon! Une précision.
M. Vézina: Si vous me permettez, on doit élire
domicile en dedans de trois milles du palais de justice. La raison en est qu'on
a à se signifier mutuellement tous les jours des actes de
procédure. C'est cela. Alors, le tarif est prévu comme
étant de $1 ou $2, et chaque avocat doit avoir une place à
l'intérieur des trois milles autour du palais de justice, où on
peut lui remettre, lui livrer ces procédures.
M. Bertrand: De quand date cette loi?
M. Lesage: Cette obligation a toujours existé dans le Code
de procédure civile; elle était d'un mille avant, mais c'est
maintenant trois milles. Remarquez que ce n'est pas fondamental, que ce soit au
centre-ville que doive être situé le palais de justice; c'est tout
simplement un exemple; c'est un centre de circulation que le palais de justice,
impliquant toute sorte de gens, de services, de bureaux; encore une fois, la
proximité du gouvernement est impliquée, en plus de devoir
être accessible par les meilleurs moyens possibles, les gens doivent y
avoir des services secondaires valables, lorsqu'ils ne sont pas au palais de
justice, tant les justiciables que les membres du personnel. Cette obligation
est tout simplement une manière de rendre plus rapide la communication
des procédures entre avocats.
M. Bertrand: M. le Président, une simple remarque, pour
dire que, moi aussi, je suis très sen- sible aux demandes du Barreau,
pour peu qu'on connaisse l'actuel palais de justice et, effectivement, les
problèmes presque insurmontables qu'il y a pour devenir fonctionnel au
bout de la ligne et servir les justiciables. Je suis convaincu que le Barreau,
dans le fond, a soumis un mémoire qui s'inspire d'une volonté que
les justiciables soient mieux traités. Mais quand on fait de
l'aménagement, c'est comme une partie de billard, si on déplace
le palais de justice du Vieux-Québec, on va se retrouver tantôt
avec l'édifice du palais de justice et l'édifice Chauveau, parce
que le ministère du Revenu doit être
déménagé; alors, il y a deux édifices dont il
faudra décider de l'aménagement au cours des prochaines
années, si jamais cela arrivait.
Deuxièmement, il est bien clair qu'il ressortait de la commission
la semaine dernière et c'est à l'unanimité chez les
députés que le couvent des Soeurs du Bon-Pasteur devrait
être sauvegardé. Cela veut sans doute dire que cela aura une
influence directe sur la place où serait aménagé un futur
palais de justice, si jamais il devait y avoir un tel projet.
Troisièmement, je m'interroge sur le principe selon lequel il
faudrait nécessairement tout concentrer sur la colline parlementaire. Je
pense à Delta, à Sainte-Foy, entre autre choses. Je ne sais pas
si on a réfléchi à l'hypothèse que le palais de
justice y soit installé. Je pense aussi, mais je ne voudrais pas
m'embarquer trop vite, à l'actuelle situation de la Sûreté
du Québec. C'est une autre hypothèse. En d'autres mots, je pense
à plusieurs hypothèses qu'on peut envisager, et si les gens,
à un moment donné, font l'accord sur le principe d'un palais de
justice, les options sont nombreuses et il ne faudrait fermer la porte à
rien.
M. Lesage: Si on me permet de dire un petit mot. Evidemment, nous
pensons que le palais actuel, enfin, ce qu'il est convenu d'appeler le palais
de justice étant donné l'exiguïté de ses locaux,
pourrait être utilisé à des fins véritables qui en
conserveraient le cachet et la vie, ce pourrait être un service
judiciaire quelconque, mais on pourrait certainement l'utiliser à bon
escient et très facilement.
Quant à Delta, ça rejoint nos préoccupations. On a
tenté de nous installer dans des nouveaux locaux, dans des locaux qui
n'étaient pas conçus pour faire un palais de justice.
L'expérience du 39 Saint-Louis, de l'autre côté de la rue,
nous porte à croire qu'il faut à peu près reconstruire
complètement, sauf les quatre murs, pour arriver à faire quelque
chose de fonctionnel, qui convienne à la justice et à utiliser
logiquement les locaux dont il s'agit.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Taschereau.
M. Guay: M. le Président, les commentaires du
bâtonnier, M. Lesage, et le texte du mémoire utilisent des termes
dramatiques lorsque vient le temps d'évoquer l'hypothèse de deux
locaux. On
parle de cataplasme sur une jambe de bois, d'une justice divisée,
éparpillée, enrayée; donc, tout cela en faveur d'un
plaidoyer pour la centralisation de l'administration de la justice à
Québec dans un seul local. C'est ce qui s'est fait à
Montréal et, d'après ce que j'en sais, au ministère de la
Justice, on s'en mord maintenant les pouces, parce qu'on a trop
concentré en un seul endroit, apparemment, et on souhaiterait maintenant
pouvoir déconcentrer dans toute l'étendue du territoire
métropolitain. Si bien que, dans les circonstances, je me demande qui
s'oppose. Outre les termes que vous avez utilisés, vous dites pourquoi
vous affirmez cela, mais je demande encore que vous en fassiez la
démonstration. Qui est-ce qui s'oppose à ce qu'on utilise le
palais de justice actuel dans des limites normales, selon ce qui a
été prévu à l'origine, et l'édifice de la
rue Chauveau du ministère du Revenu qui, comme vous le savez, est un
édifice immense, en termes d'espace de plancher, qui devra servir
à quelque chose puisque le Revenu s'en va de là. Il est à
deux pas du palais de justice actuel et il n'a pas l'inconvénient de
vider le Vieux-Québec de la vocation judiciaire qui fait quand
même vivre un certain nombre de commerces dans ce quartier.
J'aimerais bien que vous me fassiez une démonstration, plus que
simplement affirmer qu'il faut que ce soit centralisé. Pourquoi ne
peut-on pas utiliser deux édifices complémentairement?
M. Lesage: Nous ne voulons pas, évidemment, faire souffrir
le Vieux-Québec d'une perte de revenu et nous ne pensons pas que cela
aura cet impact, c'est-à-dire de faire en sorte que les avocats aillent
prendre leur lunch à l'extérieur. Je ne veux pas
m'étendre, mais je pense qu'il y aurait moyen de trouver une utilisation
des locaux actuels qui compenserait, sur le plan économique, assez
facilement, pour ce qui en est des restaurants et des commerces du
Vieux-Québec.
Mais ce n'est pas l'essentiel de la question. La démonstration
doit être faite sur le plan de l'efficacité. La justice ne peut
pas être rendue dans une seule salle où un juge entend des
justiciables. Il y a un ensemble de services, des greffes, des bureaux de
sténographes, des huissiers, le maître des rôles, un tas de
services. Le personnel doit avoir accès à des vestiaires, les
justiciables à des salles de conférence, les services
professionnels à toutes sortes de locaux.
Si vous mettez une cour au 39, l'autre sur la rue Chauveau, la
troisième sur Place du Fort, à l'édifice des postes,
où allez-vous mettre la bibliothèque?
M. Guay: Vous évoquez un éparpillement... M.
Lesage: Oui.
M. Guay: Je n'y ai pas fait allusion. Je vous parle de deux
édifices bien précis: le palais de justice actuel et
l'édifice de la rue Chauveau, dans lequel on pourrait rapatrier un
certain nombre de cours qui, actuellement, ne sont pas dans le palais de
justice, faute de place.
M. Lesage: A l'heure actuelle, le fait que le palais soit trop
exigu n'est pas sa seule lacune. Il n'est pas fonctionnel avec
l'immensité des besoins et la quantité de gens qui doivent y
circuler présentement. Si vous décidez que la Cour criminelle est
bien logée au palais de justice et que vous ne la logez pas sur la rue
Chauveau, vous faites une grave erreur, parce que la Cour criminelle, c'est
intolérable qu'elle soit au palais de justice, avec les locaux qu'on a
présentement, quand vient le moment d'assigner des jurés, quand
vient le moment de faire comparaître les gens en Cour des sessions, il
faut voir la Cour des sessions de la paix tous les matins. C'est vraiment
très dangereux, incroyable et déshumanisant pour les gens qui y
circulent.
Qu'est-ce qu'on va en faire? On va la mettre sur la rue Chauveau? Mais
la rue Chauveau, il va falloir la reconstruire complètement. Evidemment,
j'exagère; mais on a vu le 39 Saint-Louis, qu'est-ce qu'on a
tenté d'en faire? Cela n'a donné aucun résultat valable de
prendre un immeuble et d'essayer d'y mettre certains bancs et certaines
tribunes et d'essayer de prétendre que c'était une cour. Je ne
sais pas si mon collègue...
M. Guay: C'est un aménagement qui, si je ne m'abuse, est
temporaire. D'autre part, vous savez qu'avec les coûts de construction
cette année, contemporains, on cite généralement comme
chiffres qu'il ne coûte que 80% du coût de construction pour
rénover un édifice; si bien que même si on devait
rénover complètement l'édifice de la rue Chauveau, on peut
penser qu'on entrerait dans les normes, soit qu'il nous en coûterait 80%
moins cher que de construire carrément un nouvel édifice et
d'avoir deux édifices dont on se demande un peu ce qu'on ferait
notamment, le palais de justice actuel qui peut difficilement servir à
d'autres fonctions.
M. Vézina: J'aimerais peut-être vous donner un
exemple: Autrefois, le bureau d'enregistrement était au palais de
justice. Il a été déménagé sur la rue
Chauveau, sous l'ancienne académie, et il est maintenant sur la rue
Saint-Pierre. Voici un des effets, mais c'est assez typique. La loi
prévoit, quand il y a une vente en justice d'un immeuble, dans les cinq
jours qui suivent, que le régistrateur du bureau d'enregistrement envoie
un rapport au protonotaire, qui est le patron de la Cour supérieure.
Cela prend maintenant un mois et demi, deux mois, deux mois et demi à
l'avoir.
Evidemment, autrefois, ils se connaissaient, ils vivaient l'un à
côté de l'autre, ils collaboraient, cela marchait. Aujourd'hui,
ils sont loin, cela prend tout ce temps-là. Autre exemple: On a
parlé aux gens...
M. Guay: Vous n'allez quand même pas nous dire que parce
qu'il y a un problème bureaucratique, il faudrait construire un palais
de justice.
M. Vézina: Seulement un autre exemple. Aux Sessions de la
paix, on a dit: Peut-être qu'on pourrait sortir les Sessions de la paix
du palais de jus-
tice, garder la Cour d'appel, la Cour provinciale, la Cour
supérieure, faire une division comme celle-là. Ceux qui font du
droit criminel ont dit: Cela ne se peut pas. Continuellement, on va en Cour
supérieure en appel pour les cautionnements. Si vous nous sortez cela
à deux places, c'est fini, nos gens vont passer trois jours en
dedans.
Cela prend tout, actuellement, pour arriver à avoir le dossier,
le greffier, l'avocat de la couronne, un juge en haut de disponible pour
réussir à avoir notre cautionnement dans la journée ou le
lendemain. Si vous mettez cela dans une autre bâtisse... Ne nous
séparez pas cela, cela ne marchera pas.
On a essayé de mettre certaines salles de la Cour
supérieure au 39 Saint-Louis qui est à côté. Avec un
peu d'organisation, cela va fonctionner. C'est la pagaille complète. On
arrive un matin, on est assigné à la salle au palais de justice.
On nous dit: II y a une cause qui ne s'est pas terminée hier, elle se
continue ce matin. On vous a trouvé une autre salle au 39 Saint-Louis.
Il faut courir le juge, le greffier, le sténographe, les six
témoins qui arrivent en retard, parce qu'ils n'ont pas de place pour
stationner dans le quartier. Vous courez d'un bord et de l'autre et vous ne
rejoignez pas votre monde. Il est rendu 11 h 30. Le juge crie, parce que ce
n'est pas commencé, etc. La cause est remise. Tout le monde est
insatisfait de la justice. Pourtant c'est voisin, presque deux portes, l'une
à côté de l'autre. C'est ainsi d'un point à
l'autre.
M. Guay: Les conséquences du fait qu'une cause ne s'est
pas terminée dans les délais prévus, que ce soit dans un
palais de justice unique, comme à Montréal, ou que ce soit dans
deux palais de justice situés à environ 1000 pieds l'un de
l'autre, dont l'un, sur la rue Chauveau, serait pourvu d'un immense
stationnement, je ne vois pas très bien en quoi cela viendrait justifier
la construction d'un édifice tout autre.
M. Vézina: Ce qui arrive actuellement, c'est que toutes
les salles...
M. Guay: Les conséquences seront les mêmes.
M. Vézina: Je pense que non. Je respecte votre opinion,
mais je pense que non, parce que, actuellement, au palais de justice, tout est
occupé, tous les recoins; la salle de délibération des
jurés sert aussi de cour à l'occasion, l'autre salle qui
était à telle fin sert également pour une cour.
M. Guay: L'autre édifice en plus.
M. Vézina: Oui, mais si c'était plus grand.
M. Guay: II est beaucoup plus grand.
M. Vézina: Si c'était plus grand, à un
moment donné, on pourrait peut-être s'organiser, mais si vous
séparez en deux, qu'est-ce qu'on va laisser au palais et qu'est-ce qu'on
va mettre ailleurs? On a de la difficulté actuellement, avec un
édifice à côté, à faire fonctionner tout cela
de façon cohérente. On a de la difficulté à avoir
les dossiers parce qu'ils sont en train de déménager les
archives. Vous voulez faire quelque chose qui est urgent, le dossier n'est pas
là, etc. Je pense que les cours qui sont au palais de justice
actuellement et celles qui sont au 39 Saint-Louis, c'est un tout qui fonctionne
ensemble. Si vous les divisez en deux édifices, vous divisez par dix,
vous divisez par vingt l'efficacité, le bon fonctionnement qui est
déjà si difficile pour les justiciables. Ce sont des retards qui
s'accumulent, ce sont des procédures qui se perdent. Ce sont des
dossiers qu'on ne peut plus retrouver. Actuellement, on demande à la
Cour d'appel un dossier, quelque chose qui est assez simple, et on nous dit: II
est dans l'horloge, parce que, dans la tour de l'horloge, on a bourré
cela de dossiers conjoints, on n'a plus de place. On vous ouvre la porte et on
dit: II est là. Alors, vous pilez sur les dossiers et vous grimpez et
vous finissez par en trouver un.
M. Guay: Oui, mais il y en aurait, de l'espace. Votre
problème, c'est une question d'espace. Il y en a de l'espace ailleurs,
pas bien loin.
M. Vézina: C'est une question d'espace, mais ce serait
mieux alors de mettre tout au Chauveau et rien au palais de justice. Si vous
séparez, les problèmes se multiplient par dix.
Déjà, à 39 Saint-Louis, on en a mis un petit bout du
palais de justice et, déjà, on a beaucoup de difficultés.
Si on divise ce qu'il y a au palais de justice en deux, ou enfin, en en
envoyant une grande partie sur la rue Chauveau, ce qu'on peut voir, c'est que
les problèmes vont beaucoup se multiplier. Ce que je vous dis là,
c'est mon expérience. Quand on a demandé aux avocats, aux quatre
cents, ce qu'ils pensaient de la villa Manrèse comme site de la
banlieue, de l'ancienne académie, c'est l'unanimité, plus de 90%
qui disent: Pas de rapiéçage, pas de solution partielle, cela n'a
pas de bon sens. Déjà, on en a trop.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Charlevoix.
M. Mailloux: M. Lesage, sur un site bien particulier, advenant
que le gouvernement décide que le terrain dont on parlait pour la Place
de la Justice soit donné à d'autres fins et que le gouvernement
veuille aller vers l'ancienne académie commerciale, est-ce que vous me
diriez que, dans l'esprit du Barreau c'est un peu ce que j'ai compris
il faudrait que la bâtisse soit jetée par terre et qu'elle
soit complètement neuve pour répondre à une construction
qui rejoint toutes les fins de la justice? Est-ce que, dans votre esprit, cela
prendrait un édifice neuf qui rejoindrait tous les services?
M. Lesage: Je ne pense pas que ce serait permis de faire cela
avec l'édifice de la rue Chauveau, étant donné les
exigences, étant donné les
règles qui s'appliquent au Vieux-Québec, de jeter
l'édifice par terre. En fait, notre perception bien nette, c'est qu'il
nous faut centraliser. Le mot est peut-être choquant, mais il nous faut
réunir, intégrer tout ce qui est essentiel pour faire fonctionner
la justice et prévoir pour l'avenir des locaux qui vont permettre aux
services accessoires de se joindre, notre expérience, et les
commentaires que nous avons de Montréal ne sont pas défavorables
au fait qu'on a un édifice où on a pu centraliser.
Tout le monde n'est pas d'accord avec la manière dont le palais
de justice a été fait à Montréal, avec sa stature,
sa dimension, mais le fait que l'on retrouve en un seul endroit tout ce qui est
nécessaire, où, enfin, on aurait la possibilité de loger
le bureau d'enregistrement et tout cela, est absolument à la base de
notre argumentation.
Si, rue Chauveau, on pouvait reconstruire à l'intérieur
des murs en en conservant le cachet, un immeuble, en quelque sorte,
fonctionnel, au point de vue des communications, de la sécurité,
qui comprendrait tout et où il y aurait de la place, je dis: Bien, c'est
parfait! C'est ce que nous recherchons. Mais je suis convaincu que ce n'est pas
possible de le faire rue Chauveau, au point de vue du cubage.
M. Mailloux: M. le Président, ayant visité à
quelques reprises l'édifice Chauveau, je pense que c'est un
édifice qui serait des plus dispendieux à réparer aux fins
d'un palais de justice. Dans les années précédentes, c'est
ce qu'on avait constaté. J'ajoute ceci: advenant que le gouvernement
entende favoriser une restauration ou une construction à
l'édifice Chauveau, cela ne satisferait pas aux exigences de la justice,
s'il y a urgence, puisque les fonctionnaires du ministère du Revenu ne
pourront être déplacés vers la pointe de Sainte-Foy avant
l'échéance, je pense, de 1979. S'il y a restauration ou
construction, cela nous reporterait à 1981 ou 1982 avant que la justice
puisse obtenir des locaux restaurés ou neufs à Place
Chauveau.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre de la
Justice.
M. Lessard: Non, j'en ai assez!
Le Président (M. Marcoux): Pardon! Il était loin du
sujet.
M. le ministre.
M. Lessard: M. le Président, ce que j'entends de la part
de M. Lesage ou des représentants du Barreau du Québec, je
l'entends depuis plusieurs mois de la part de différents
ministères; tous les ministères veulent se centraliser et
affirment qu'il est essentiel, pour tous les ministères, pour bien
fonctionner, d'avoir un seul édifice et de regrouper tous les services
essentiels, etc. C'est toujours ce qu'on entend, mais vous avez dit tout
à l'heure qu'il fallait, pour avoir un bon fonctionnement de la justice,
regrouper tous les services essentiels dans un édifice.
J'aimerais bien, par exemple, que vous me précisiez ce que vous
entendez par tous les servi- ces essentiels. Le bureau d'enregistrement, pour
vous, c'est un service essentiel? La Commission des transports, par exemple, ne
devrait-elle pas aller au palais de justice ou aller dans un autre
édifice? Parce que, dans le plan qui a été
présenté au ministère de la Justice, les services
essentiels sont devenus très larges.
J'aimerais bien qu'on nous précise ce que vous entendez pas
services essentiels.
M. Lesage: Naturellement, c'est un peu un idéal que de
regrouper tout ce qui peut être utile et l'utilité se distingue du
nécessaire et de l'essentiel. Mais, ce que l'on sait, c'est qu'à
l'heure actuelle, dans l'édifice que nous avons, nous n'arrivons pas
à toucher l'essentiel.
On a rejeté les juges à l'extérieur des cours. On a
rejeté des greffes à l'extérieur et on continue ainsi.
Encore une fois, on est étouffé par le service qu'on ne donne pas
aux justiciables, des gens qui circulent dans le palais, qui viennent le matin;
on n'est pas capable d'arriver.
C'est pourquoi nous disons qu'il est peut-être possible de vivre
sans le bureau d'enregistrement, mais il n'est pas possible d'avoir quelque
chose de considérablement plus grand que ce que nous avons
présentement et de bien organisé et qui permette de ne pas
rejeter à l'extérieur des cours, des greffes, des services de
sténographie, de telles choses.
S'il s'agit de savoir si le bureau d'enregistrement doit venir ou ne pas
venir, cela serait idéal qu'il vienne, mais cela ne serait
peut-être pas essentiel qu'il vienne. Mais je ne pense pas que cela
changerait grand-chose au fait qu'on a besoin d'un nouvel édifice
où il faut prévoir pas mal d'autres services auxiliaires que
l'amélioration de la justice de demain va requérir au point de
vue de la population et des services professionnels qui devront s'ajouter.
Le Président (M. Marcoux): Un bref commentaire pour
terminer.
M. Vézina: Vous avez des choses qui se sont
développées. Ce sont des interrogatoires hors cour. Au lieu
d'aller toujours devant le juge, on pose des questions aux témoins ou
aux parties hors cour. On fait de la discussion en dehors du tribunal. Il n'y a
à peu près pas de salle pour cela. Cela se fait sur le coin des
bureaux, debout, etc., alors que, plus on fera cela, plus les juges seront
débarrassés d'une partie de travail, plus il sera facile pour
tout le monde de fonctionner. Il n'y a rien de cela dans le palais, ou à
peu près.
M. Lessard: Je suis bien d'accord. Dans la situation actuelle, il
est certain que vous n'avez pas les services qui correspondent à vos
besoins, mais il me semble qu'on devrait définir tout ce qui est
essentiel pour rendre justice à la population. C'est à partir de
ces critères, de ces normes que nous, du ministère des Travaux
publics et de l'Approvisionnement, devrons répondre à vos
demandes et, si ces dernières deviennent exagérées, dans
le sens que vous identifiez la justice à des services
qui ne sont pas nécessairement essentiels à la justice, il
faudra vous limiter parce que les deniers publics ne sont pas
illimités.
Le Président (M. Marcoux): Je remercie les
représentants du Barreau de Québec de la présentation de
leur mémoire. J'espère que vous aurez à nouveau l'occasion
de présenter vos idées aux membres de cette commission.
Je rappelle aux membres de la commission que celle-ci suspend ses
travaux jusqu'à 20 heures et qu'elle les reprendra au Salon rouge.
(Suspension de la séance à 18 h 16)
Reprise de la séance à 20 h 7
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, messieurs!
J'inviterais les représentants de la Chambre de commerce et
d'industrie du Québec métropolitain à nous
présenter leur mémoire et je dis bonsoir à M. Louis
Boudreau. Je l'inviterais à nous présenter ses collègues
et ensuite à procéder à la présentation de son
mémoire. Disons que je souhaiterais que vous présentiez votre
mémoire en une vingtaine de minutes, en nous en donnant les grandes
lignes, pour permettre aux membres de la commission de vous poser des
questions, au maximum, pendant une demi-heure, pour que nous ayons
complété l'audition de votre mémoire à 9
heures.
M. Bertrand: M. le Président, est-ce que je peux faire une
proposition pour que la durée d'audition de chacun des groupes, ce soir,
soit de 40 minutes, c'est-à-dire 20 minutes pour l'exposé et 20
minutes pour la période des questions, 40 minutes au total, et qu'ainsi,
nous puissions entendre les trois groupes qui étaient prévus pour
ce soir ainsi que celui que nous n'avons pas entendu cet après-midi, et
que votre guillotine soit sans appel?
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que les membres de la
commission sont d'accord avec ce mode de fonctionnement?
M. Mailloux: Pas d'objection.
Le Président (M. Marcoux): Alors, nous allons
procéder immédiatement.
M. Russell: Que l'Opposition ait quinze minutes et le
gouvernement, cinq minutes.
Le Président (M. Marcoux): Nous accordons toujours
priorité aux interventions de l'Opposition, selon le principe que c'est
l'Opposition qui est reine à l'Assemblée nationale.
M. Guay: C'est elle qui a le plus besoin d'être
éclairée.
Le Président (M. Marcoux): M. Boudreau, vous avez la
parole.
Chambre de commerce et d'industrie du Québec
métropolitain
M. Boudreau (Louis): M. le Président, messieurs les
membres de cette commission, je voudrais d'abord vous présenter M.
Gaston Brown, qui est le vice-président de la Chambre de commerce et
d'industrie du Québec métropolitain, et M. Pierre Talbot, qui est
le directeur général de la chambre.
Je voudrais vous remercier de nous avoir donné l'occasion de
participer à cette réflexion sur l'aménagement de la
colline parlementaire. Nous trouvons, nous de la chambre, que c'est une
initiative des plus heureuses qui démontre une prise de
conscience des autorités gouvernementales sur la nécessité
d'introduire des mécanismes de réflexion, de critique, de
prudence et des contrôles plus rigoureux sur le développement et
l'aménagement de la colline parlementaire.
M. le Président, la lecture des comptes rendus des séances
de votre commission ainsi que l'essentiel des mémoires qui vous ont
déjà été soumis nous a permis de constater que nos
remarques se situent dans une ligne de pensée à peu près
générale quant à l'opportunité, entre autres, de
mieux coordonner l'aménagement de la colline parlementaire.
Je voudrais aussi vous dire que notre mémoire est le
résultat des travaux de notre comité des affaires urbaines et
qu'il a reçu l'assentiment de l'exécutif et du conseil
d'administration de la chambre qui l'ont étudié en
profondeur.
De plus, nos remarques et nos suggestions se situent dans la logique des
actions de la chambre sur le plan de ses interventions dans le passé et
de ses études en cours sur la ville et la région.
Je voudrais vous signaler les éléments les plus importants
de notre mémoire. Tout d'abord, dans une première phase, en
rétrospective, nous rappelons qu'au tournant des années soixante,
il y avait un exode de la population, des commerces et des services vers les
banlieues, un exode qui devait être arrêté.
Il y avait également une détérioration des services
municipaux, particulièrement le transport en commun et la circulation au
centre-ville. La chambre concluait, à l'époque, qu'il
était urgent de réhabiliter Québec comme ville centre et
d'adopter des politiques en conséquence. En ce qui concerne le
réaménagement de la colline parlementaire, il est
intéressant de constater que certaines des recommandations de la chambre
revêtent encore aujourd'hui un caractère d'actualité
indéniable. Par exemple, nous recommandions d'apporter une solution au
problème du logement, une solution au problème de circulation, de
stationnement et de transport en commun.
Nous recommandions une utilisation meilleure et plus rationnelle du
territoire et enfin, nous voulions voir fleurir le souci d'embellir la
capitale.
Dans une deuxième phase, nous faisons un constat de l'état
actuel où nous disons que malgré un succès ou un
échec relatif, selon le point de vue où on se place, nous
constatons que les objectifs et critères d'aménagement, quant
à la diversité, la densité, la mixité,
l'intégration à l'environnement et la priorité au
mouvement piétonnier n'ont pas été respectés et
nous déplorons l'effacement progressif de la fonction
résidentielle, la faiblesse remarquable au plan du design urbain des
projets, autant du secteur privé que du secteur public.
Enfin, nous déplorons l'absence d'un programme
d'aménagement pour humaniser la colline parlementaire, notamment par
l'introduction d'un cheminement piétonnier.
Dans une troisième partie, nous nous tournons résolument
vers l'avenir et nous recommandons, particulièrement en
commençant à la page 7 de notre mémoire, la
création d'un comité de direction bona fide
coprésidé par le ministre des Travaux publics, responsable devant
l'Assemblée nationale et devant la commission parlementaire des travaux
publics, et par le maire de Québec qui, lui, doit répondre devant
le comité exécutif et le conseil de ville de Québec.
A ce palier décisionnel s'adjoindrait un palier
d'exécution, composé d'une équipe multidisciplinaire,
comme des urbanistes, des architectes-paysagistes et des ingénieurs,
choisis parmi le personnel-cadre de la province et de la ville. Nous appuyons
cette recommandation sur le principe que la concertation et le dialogue entre
les deux principaux intervenants sur la colline parlementaire sont devenus et
ont toujours été nécessaires.
Nous appuyons également notre recommandation sur le fait que la
ville de Québec doit être responsable de l'aménagement de
son territoire, et, enfin, que le gouvernement provincial doit aussi assumer
ses responsabilités en tant qu'agent développeur
déterminant sur la colline parlementaire.
En deuxième lieu, nous recommandons l'élaboration et la
mise en oeuvre d'un programme d'amélioration du mobilier urbain et du
design urbain. Il nous apparaît qu'il devrait être possible
d'atténuer, parfois même corriger, les erreurs commises, sans
avoir à y engager des ressources financières
considérables.
C'est ainsi qu'on devrait examiner la possibilité de mettre
à exécution la proposition du rapport LaHaye visant à
humaniser et à transformer en prestigieux boulevard la large
trouée de Saint-Cyrille par la plantation d'une double rangée
d'arbres de chacun de ses côtés.
C'est ainsi que la large trouée de l'autoroute Dufferin, entre
Saint-Cyrille et Saint-Jean, pourrait être elle-même
humanisée et rétrécie par l'aménagement de
trottoirs paysages et qu'enfin, un passage piétonnier pourrait
être construit, passerelle ou souterrain. Il faut avoir essayé de
traverser ces intersections, à peu près à tout moment de
la journée, pour constater le véritable défi qui est
posé aux piétons.
Nous recommandons que l'on réserve les secteurs nos 1 et 5 pour
les fins résidentielles; je vous prie de vous référer
à la carte que nous vous avons soumise avec notre mémoire. Le
secteur no 1 est essentiellement celui entre Grande-Allée et boulevard
Laurier allant des Plaines jusqu'à la limite ouest et le secteur no 5
est situé en bas de d'Aiguillon jusqu'au haut de la falaise. Que l'on
cherche à préserver c'est important le gabarit actuel
du secteur no 1 mais, par contre, que l'on facilite la rénovation du
secteur no 5.
Que l'on cherche à introduire des projets d'appartements
multiples dans le secteur 3 et le secteur 4, comme cela était
recommandé initialement dans le rapport LaHaie. Le secteur 3 comprend
l'espace entre Saint-Gabriel et Saint-Cyrille, partant de Dufferin
jusqu'à Turnbull. Le secteur 4 est l'autre secteur entre d'Aiguillon et
Saint-Jean, des limites de Turnbull jusqu'au vieux mur. Nous sommes cependant
conscients qu'il s'agit là d'un défi vraiment difficile à
relever dans
ce secteur en raison du prix élevé des terrains et,
conséquemment, de l'évaluation et du coût des taxes
municipales. Il y aura lieu de faire l'inventaire des lots vacants qui
pourraient être utilisés à cette fin. Il existe encore
quelques îlots qui pourraient être acquis à cette fin et,
par bail emphytéotique, destinés à l'habitation, de
manière ainsi à réduire les coûts.
Cinquièmement, que l'on cherche à introduire dans le
secteur no 2, qui est le secteur où est situé l'Hôtel du
gouvernement qui va de la rue Dufferin jusqu'à la rue Turnbull entre
Saint-Cyrille et Grande-Allée, des projets d'habitation collective de
façon à éviter que ce secteur soit unifonction-nel,
c'est-à-dire réservé exclusivement à des
édifices gouvernementaux. Il nous apparaît que l'Ilot, entre
autres, des soeurs Franciscaines serait particulièrement
approprié à cette fonction.
Sixièmement, qu'on abandonne, sinon qu'on gèle, le projet
d'élargissement de la rue Saint-Gabriel. Il faut éviter de
créer là, de construire là, une voie importante qui en
fait ne mène nulle part et qui deviendrait, sans doute, une autre varice
dans le secteur.
Septièmement, qu'on recherche et mette en oeuvre
systématiquement les voies et moyens d'améliorer le transport et
la circulation sans pour cela s'engager dans des infrastructures
coûteuses. Nous faisons quelques recommandations:
Premièrement, en adoptant des normes de stationnement
restrictives, notamment dans le cas des fonctionnaires. La norme d'allocation
de un stationnement par quatre postes de travail est sûrement l'une des
plus élevées au Canada. A Ottawa, selon les renseignements que
nous avons obtenus, cette norme serait maintenant de un stationnement par 22
postes de travail. Dans les documents qu'on vous a soumis, il y a, entre
autres, un document qui précise les politiques de stationnement en ce
qui concerne les fonctionnaires fédéraux. On y voit que dans ces
documents, la norme est de un stationnement par vingt. On nous dit que c'est
maintenant de un fonctionnaire par 22 emplacements.
Deuxièmement, en procédant au relèvement du
coût du prix du stationnement au mois pour les fonctionnaires, en
l'approchant graduellement du prix payé par le secteur privé, tel
que recommandé explicitement par le rapport Castonguay sur l'urbanisme.
Nous attirons votre attention sur le fait que le prix payé par les
fonctionnaires qui est de $15 pour un stationnement à l'intérieur
et de $10 à l'extérieur, coûte moins cher que l'utilisation
des transports en commun, et par là, constitue une prime d'incitation
à l'utilisation de la voiture privée.
Il s'agit là, sans doute, d'une situation d'autant plus
paradoxale que les salaires et bénéfices de la fonction publique
dépassent actuellement ceux du secteur privé qui, eux, doivent
payer les prix normaux du marché pour le stationnement, ce qui a
justement pour effet d'introduire une contrainte économique de nature
à freiner la demande du secteur privé du stationnement à
longueur de journée. c) En privilégiant et en encourageant les
transports semi-collectifs, "car pooling", "van pooling", les taxis
communautaires, les transports coopératifs encore là, dans
le dossier qu'on vous a remis, il y a une documentation importante et surtout
très intéressante sur les transports semi-collectifs, incluant,
évidemment, le "car pooling". On y voit des expériences qui sont
faites et on y voit également les tendances dans des grandes villes
nord-américainestels que recommandés explicitement par le
rapport Castonguay sur l'urbanisation et à la lumière des
expériences concluantes réalisées ailleurs. d) En
sélectionnant des terrains de stationnement de dissuasion, en
périphérie du centre-ville, où les travailleurs de la
colline parlementaire pourraient y stationner leur voiture. Ces terrains de
stationnement de dissuasion devraient être situés en bordure des
circuits réguliers d'autobus et, aux heures de pointe, le matin et le
soir, pourraient être reliés par des autobus express. Il existe
plusieurs terrains du domaine public qui pourraient être utilisés
à cette fin.
Nous citons, entre autres, les terrains de l'Exposition provinciale, les
terrains de centres d'achats dont la majorité sont vacants le jour, les
terrains du boulevard de l'Entente, et on pense particulièrement
à des terrains immenses à cet endroit qui sont vraiment trop
grands pour les services qui y sont installés.
Ce nouveau service d'autobus express pourrait être organisé
et devrait être organisé en même temps que seraient
repensés les normes et prix du stationnement à longueur de
journée.
Ensuite, en introduisant le régime des horaires flexibles pour
les employés de la fonction publique et du secteur privé. Les
horaires flexibles, sans doute, vous le savez, c'est le choix à
l'employé, dans un cadre déterminé, de travailler pendant
ses heures, contrairement à un horaire étalé qui, je
pense, est appliqué présentement à certains
ministères, mais qui s'en tient quand même à des heures
fixes. On pense que les horaires flexibles permettraient sans doute, et le
terme le dit, beaucoup plus de flexibilité, particulièrement en
ce qui a trait à cette question des heures de pointe.
Voilà, messieurs, autant de mesures qui, en atténuant la
demande de pointe du matin et celle du soir, devraient permettre de poursuivre
une plus grande densification de la colline parlementaire, sans risquer
d'entraîner la congestion des transports. En dehors de ces heures de
pointe, d'ailleurs, les rues sont presque désertes. Il nous faut
souligner aussi que ces mesures, notamment l'encouragement au transport
semi-collectif, pourraient permettre, comme l'expérience le confirme
ailleurs, de réduire ainsi la demande de pointe pour le transport en
commun et devraient ainsi contribuer à freiner quelque peu le rythme
d'accroissement des déficits de la CTCUQ, dont une bonne partie des
équipements et du personnel chôment, à un coût
économique énorme, en dehors de ces heures de pointe.
Huitièmement, que, en ce qui concerne le cas du palais de
justice, cette question soit réexaminée à la
lumière des principes directeurs suivants:
a)Eviter, le plus possible, de déplacer un
générateur d'activités urbaines aussi important que le
palais de justice, en raison de la vie qui s'est greffée et
adaptée à cette activité et qui risque d'être
perturbée (résidences des travailleurs, commerces, restaurants,
etc.) Il ne faut pas oublier que la fonction de la justice a toujours
été exercée dans le Vieux-Québec. b)Examiner
d'abord la possibilité, avant d'opter pour le déplacement, que la
fonction de la justice soit regroupée dans le Vieux-Québec en
utilisant à cette fin l'édifice Chauveau l'ancienne
académie, où est présentement le ministère du
Revenu et possiblement l'édifice du bureau de poste actuel que le
gouvernement fédéral songe à rénover pour d'autres
fins. c)S'il fallait opter pour le déplacement en dehors du
Vieux-Québec, notamment pour les raisons que l'accroissement de la
fonction de la justice risquerait finalement d'écraser le
Vieux-Québec, comme ce fut malheureusement le cas pour l'ancienne
université.
Il nous apparaît alors que le site actuellement envisagé
entre le Grand Théâtre et le complexe G est le mieux
approprié, le moins susceptible de perturber la vie urbaine et
économique qui accompagne le palais de justice. Il va sans dire qu'il
s'agit précisément d'une fonction centre-ville, qui ne devrait
pas être déplacée en périphérie de
Québec sans créer un profond remous.
Quant à la conservation et au recyclage de l'ancien couvent des
soeurs, à l'exception de la chapelle, il nous apparaît que ces
édifices n'ont en soi, aucune valeur architecturale ou historique,
qu'ils n'ajoutent sûrement pas à l'esthétique de la
cité parlementaire et que, conséquemment, ils ne devraient
être retenus pour transformation ou recyclage que dans la mesure
où l'opération pourrait s'avérer économiquement
rentable pour le gouvernement. Si nous sommes sympathiques à une
garderie, il y a sûrement d'autres endroits pour la placer, qui tiennent
compte encore avec plus de rigueur des coûts et des normes de
sécurité publique normalement requises pour tout édifice
à caractère public, particulièrement quand il s'agit
d'enfants ou de personnes âgées.
Neuvièmement, que soit délimitée de façon
restrictive, l'aire de réaménagement, réaménagement
par rapport à rénovation, par exemple.
Dixièmement, que l'on donne priorité à
rétablir les lots vacants, avant d'entreprendre d'autres
démolitions.
Onzièmement, que l'édifice principal de la
Sûreté du Québec, en front du boulevard Saint-Cyrille,
autrefois connu sous le nom d'hôpital Jef-fery Haie, soit conservé
comme un élément intéressant dans la trame urbaine. Les
dépendances pourraient être démolies et les terrains ainsi
libérés, de même que le vaste terrain à
l'arrière de l'édifice principal, pourraient être
affectés à de l'habitation.
En conclusion, nous recommandons que se poursuive l'objectif de
densification de la colline parlementaire, tout en cherchant à y
introduire une plus grande diversification. Cette densifica- tion et cette
diversification nous paraissent répondre à l'objectif de
renforcement du centre-ville proposé par le projet de schéma
d'aménagement déposé par la commission
d'aménagement de la Communauté urbaine de Québec.
Nous soulignons que la qualité de l'aménagement de la
colline parlementaire dépendra largement de la qualité du
mobilier urbain, de la qualité du design urbain et de l'humanisation des
projets en hauteur par leur intégration, au plan des structures de base,
au cheminement piétonnier. Il va sans dire que la poursuite de ces
objectifs demandera une plus grande discipline de la part des
développeurs, privés ou publics. Au-delà des règles
et des critères d'aménagement qui peuvent être
adoptés, cette qualité ne peut être assurée
uniquement par un certain automatisme, mais découlera plutôt et
aussi de la créativité de l'imagination et du goût.
Il y aura toujours en définitive, au-delà des
règles strictes de l'aménagement, un acte de jugement à
poser. Il nous apparaît souhaitable d'introduire des mécanismes de
prudence, de discussion de chaque projet, en faisant notamment appel aux
ressources d'une équipe pluridisciplinaire.
Une chose est certaine, une ville qui ne saurait s'adapter à
l'évolution urbaine, une ville qui ne chercherait méthodiquement
à se reconstruire, en pensant aux besoins de l'homme d'aujourd'hui et de
demain, tout en préservant le patrimoine ayant une valeur
intrinsèque, serait condamnée au dépérissement.
Cette évolution urbaine motivée constamment par la quête de
l'homme du mieux-être constitue un défi à relever, aussi
complexe et délicat qu'il peut être inéluctable.
Avec une pointe d'humour, nous terminons en disant que nous comprenons
pourquoi Dieu le Père, dans son infinie prudence et sagesse, s'est
contenté de créer la campagne, laissant le défi des villes
aux hommes, sachant bien qu'ils demeureraient ainsi constamment à la
recherche du paradis.
Le Président (M. Marcoux): Je dois vous féliciter
pour avoir présenté aussi rapidement un mémoire aussi
dense. M. le ministre.
M. Lessard: M. le Président, des fois, quand je vois
arriver les chambres de commerce, j'ai une certaine crainte, parce que je
pensais que vous aviez opté pour le développement de la colline
parlementaire en vous basant sur l'aspect commercial exclusivement.
Je tiens à vous féliciter, parce que vous avez d'abord un
mémoire très bien préparé, et surtout, très
concret. Nous savons au moins ce que vous voulez. Même si sur certains
points, nous pouvons ne pas être d'accord, nous connaissons au moins vos
propositions, c'est clair, c'est net, c'est franc; c'est ce qu'on voulait par
cette commission parlementaire, on voulait justement que les différents
groupes viennent nous dire ce qu'ils pensaient de l'aménagement de la
colline parlementaire.
Je ne voudrais pas souligner chacun des points, parce que mes
collègues auront à poser
des questions, d'autant plus que nous voulons nous limiter, mais en
particulier, par exemple, vous avez posé un diagnostic qui nous
apparaît assez clair concernant les problèmes que nous vivons
actuellement à la colline parlementaire, soit le délaissement de
la fonction résidentielle, la faiblesse remarquable sur le plan urbain,
je pense que c'est le député de Vanier qui disait l'autre jour,
que c'était véritablement des monuments à la bêtise
dans certains cas.
En ce qui concerne les recommandations, recommandations
constituées à un comité de direction, dont une section au
palier décisionnel et une autre au palier d'exécution, c'est
là, je pense, une recommandation dont il faudrait tenir compte, par
rapport aussi à une autre recommandation qui est assez proche de
celle-là, soit la formation d'une commission d'aménagement de la
capitale nationale.
Mais je suis particulièrement heureux d'abord sur les
recommandations concernant l'aménagement comme tel. Je vais laisser
à mes collègues, puisqu'ils connaissent beaucoup mieux que moi,
la ville de Québec, le soin de poser leurs questions. Mais,
particulièrement, en ce qui concerne les recommandations sur
l'amélioration du transport et la décongestion de la colline
parlementaire en établissant des zones de stationnement à la
périphérie de la ville, je pense que si nous voulons, pour autant
que nous avons des transports en commun bien organisés,
véritablement éviter de favoriser continuellement le transport
par automobile, nous devrons envisager de telles solutions.
Aussi, il y a le problème que vous soulevez, qui
m'inquiète depuis que j'occupe la fonction de ministre des Travaux
publics, à savoir le prix du stationnement pour les fonctionnaires.
Actuellement, nous sommes rendus à payer à certains endroits $80,
$100, $110 alors que nous sous-louons à $15, ce qui, comme vous dites,
favorise l'utilisation de l'automobile à un coût moindre que
l'utilisation des transports en commun. C'est là une des
préoccupations que nous avons puisque, comme nous l'avons
souligné à la Commission de transport de la Communauté
urbaine de Québec, les prochaines années devront être les
années où nous aurons à développer le transport en
commun plutôt que de mettre continuellement l'accent sur le transport par
l'automobile.
Je vous remercie. Je pense que c'est un mémoire que nous allons
étudier à la loupe, parce que vous avez des recommandations qui
sont concrètes; même si nous ne sommes pas entièrement
d'accord avec toutes ces recommandations, au moins, nous savons ce que vous
voulez.
M. Boudreau: M. le ministre, vous me permettrez un commentaire,
s'il vous plaît. D'abord, nous apprécions vos remarques à
l'endroit de ce mémoire et votre attention; la préparation en a
nécessité des efforts assez considérables, étant
donné le peu de temps qui nous était accordé. Je voudrais
relever une chose que vous avez soulignée en ce qui concerne le
comité de direction. Je voudrais bien qu'on comprenne que, dans notre
esprit, nous voyons la nécessité d'un comité comme
celui-là, mais nous le voyons d'abord au palier municipal et
régional, c'est-à-dire en laissant à la ville de
Québec l'autorité sur l'aménagement de son territoire.
Les objections, s'il y en avait, à la création d'une
commission nationale, se poseraient surtout à savoir à quel
palier de gouvernement cette commission serait responsable. Nous acceptons
sûrement notre mémoire sur les réformes à la
communauté urbaine le mentionnait la création d'une
commission d'aménagement de la communauté urbaine pour mettre en
oeuvre, contrôler et appliquer le schéma d'aménagement qui
a été déposé il y a déjà quelque
temps.
Dans notre esprit, un comité de direction de la colline
parlementaire devrait, bien sûr, s'intégrer par des
recommandations à l'intérieur du schéma
d'aménagement régional, c'est-à-dire qu'il serait
indirectement soumis à l'autorité de la commission
d'aménagement de la communauté urbaine.
Comme nous croyons que l'aménagement d'un secteur donné,
dans une ville donnée, doit être la responsabilité de
l'autorité municipale concernée, c'est ce qui nous a amené
à faire cette recommandation de la création d'un comité de
direction qui, comme je le répète, est coprésidé
par le ministre des Travaux publics, parce que c'est le principal intervenant,
le principal développeur sur la colline parlementaire et le maire de
Québec, qui a l'autorité et la responsabilité devant son
conseil et son exécutif.
M. Lessard: Le maire de la ville de Québec ne nous a pas
laissé la même impression puisqu'il nous a dit: Décidez,
établissez votre schéma, et, ensuite, nous l'appliquerons. Mais
je pense que vous avez raison, dans une collaboration, la ville de
Québec doit avoir une part importante dans la planification de
l'aménagement de son territoire.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Charlevoix.
M. Mailloux: A l'instar du ministre qui vient de me
précéder, je voudrais féliciter la Chambre de commerce du
Québec métropolitain du travail qu'elle a dû faire dans le
but de présenter un mémoire qui se tient valablement, qui
respecte, je pense, une certaine école de pensée que ne
partageront peut-être pas tous les intervenants. Je pense qu'il y a quand
même un travail assez soigné qui a présidé à
la présentation de ce mémoire.
Je voudrais relever quelques points du mémoire dans les minutes
très brèves qui vont suivre. Vous parlez d'une structure
administrative dans laquelle le ministère des Travaux publics et la
ville de Québec, de même que des experts-conseils seraient
attachés. Je pense qu'il est indiscutable que la ville de Québec
fasse partie, en raison des problèmes de fiscalité, de
l'aménagement d'une zone où elle doit retirer certains revenus,
si l'on pense également que le gouvernement veuille aller vers des fins
de construction qui seraient moins rentables pour elle.
Vous parlez dans votre mémoire des erreurs que l'on constate sur
les deux artères conduisant à la colline parlementaire, soit le
boulevard Saint-Cyrille de même que l'autoroute Dufferin-Montmorency. Je
pense qu'il faut quand même faire son mea culpa de certaines erreurs qui
ont été commises à ce moment-là. Si cela respectait
certaines contraintes, cela n'a pas respecté toutes les exigences qu'on
devait apporter à de telles mises en place.
Je pense que même s'il y a eu des erreurs, si on met un peu
d'imagination, on est capable d'améliorer et d'éliminer des
contraintes telles celles dont vous parliez, lorsqu'on circule sur
Saint-Cyrille où, pendant des distances trop considérables, il
est difficile de passer d'un côté à l'autre.
Je voudrais dire au ministre des Travaux publics que possiblement, s'il
veut faire une recherche très sommaire au ministère des
Transports, il constatera quand même que dans les dernières
années, quant à l'autoroute Dufferin-Montmorency, il y a des
maquettes et des plans qui sont prêts, de pistes cyclabes qui vont du
centre-ville de Québec jusqu'à l'île d'Orléans, qui
pourraient être aménagées je pense que des
urbanistes ont été rattachés à ce problème
à des coûts très réduits, tenant compte des
infrastructures déjà en place. Je pense que ces maquettes, de
même que les plans qui sont prêts méritent l'attention de
l'actuel gouvernement, pour permettre et aux piétons et à ceux
qui se servent de véhicules qui ne polluent pas l'atmosphère
d'aller vers des zones de verdure, telle celle de l'île
d'Orléans.
J'ai aimé la façon dont vous avez traité des
différentes zones de la colline parlementaire et de sa
périphérie. Cela ne rejoindra peut-être pas la
préoccupation et les visées de tous et chacun, mais quand je
constate que pour les zones 1 et 5, vous allez vers des fins d'habitation, je
pense que cela rejoint passablement l'esprit d'un peu tous les
mémoires.
Vous mentionnez, quant aux autres îlots... Vous parlez d'abord,
quant à la rue Saint-Gabriel, d'un projet d'élargissement qui est
peut-être un projet de la ville de Québec vous pourrez me
répondre tantôt que je n'ai jamais entrevu. Je me demande
ce que cela viendrait faire avec les voies de communication qui sont
déjà en place. Je m'excuse si j'y vais à bâtons
rompus.
Quant à la construction des soeurs, vous semblez mettre en doute
la valeur architecturale de la construction. Il faudrait peut-être que
vous me le disiez tantôt, je ne pense pas que vous mettiez en doute la
valeur de la chapelle. C'est plutôt la valeur des autres constructions
dont vous parlez.
Probablement que vous ne mettez pas en doute la valeur de la chapelle,
dans l'architecture et l'histoire québécoises.
M. Boudreau: Non, évidemment, on ne met pas en doute la
valeur architecturale de la chapelle.
M. Mailloux: Ce sont certaines parties des édifices qu'on
y retrouve. Vous parlez également des normes de stationnement qui ont
atteint 1,4% pour le Québec alors que c'est 1,22% pour Ottawa? Quand
vous discutez des possibilités de restreindre la venue aux heures de
pointe sur la colline parlementaire, je pense qu'il ne faudrait pas oublier,
dans toutes ces discussions, le désir qu'on a à l'esprit de
décaler les heures de travail, d'alléger un peu les heures de
pointe.
Je me rappelle que, devant les discussions avec les syndicats de la
fonction publique et para-publique, malgré qu'on veuille et qu'on ait
déjà voulu augmenter les terrains de stationnement et faire du
décalage, quel que soit le type qu'on veut apporter, il y a des
problèmes extrêmement complexes. Or, la discussion n'est jamais
facile avec toutes les forces des syndicats, et j'espère qu'un dialogue
sera ouvert où chacune des parties comprendra davantage ce qu'on
recherche en voulant éliminer une partie de la concentration aux heures
de pointe. Je pense que c'est souhaitable qu'on aille dans ce sens.
Quant à la localisation du palais de justice, vous vous
référez encore à l'édifice Chauveau dont on a
parlé plus tôt. Je ne voudrais pas revenir sur ce point, parce
qu'on en a discuté avant le souper. De toute façon, je voudrais
laisser aux autres membres de la commission le soin de poser les questions
qu'ils jugent à propos de poser. Je tiens à vous féliciter
quand même, parce que, dans l'ensemble du mémoire, on retrace
quand même une volonté que soit mieux ordonné
l'aménagement futur de la colline parlementaire et que les erreurs qui
ont pu se glisser, on tâche ensemble de trouver de quelle façon,
avec tous les experts que le gouvernement peut avoir à sa disposition,
on peut y remédier, pour que cela puisse être une place davantage
humanisée et qui respecte différentes contraintes.
M. Boudreau: Je voudrais seulement, M. le Président, faire
deux commentaires. Il est bien évident que, quand nous faisons la
recommandation d'augmenter le prix de stationnement pour les employés du
gouvernement et quand nous demandons aussi de réduire le nombre de
places disponibles, on comprend fort bien les contraintes que peuvent imposer
les conventions collectives, même si on ne l'a pas signalé dans
notre mémoire, nous, du monde de l'industrie et du commerce.
Je voudrais aussi signaler, en ce qui concerne la rue Saint-Cyrille, un
élément que nous n'avons pas mentionné et que,
jusqu'à un certain point, nous déplorons aussi, c'est que, de par
son envergure, c'est devenu aussi une voie où les automobilistes
circulent beaucoup trop rapidement. Peut-être que c'est un
élément qui devrait nous inciter davantage à prendre les
mesures nécessaires pour faire en sorte que cette rue redevienne une
voie à circulation normale et non pas une voie rapide de
circulation.
M. Mailloux: II y a seulement une question supplémentaire
que j'ai à l'esprit. Il avait été question qu'un
édifice dont on ne parle pas dans l'ensemble des mémoires soit
rétrocédé au gouvernement du Québec, soit celui qui
est à l'ouest, le
manège militaire, un édifice, je pense, assez vieillot. Il
faudra peut-être que, dans le cours des discussions, le ministre des
Transports nous dise si la discussion s'est continuée pour la
rétrocession d'un tel édifice et, si oui, à quelle
fonction il pourrait être affecté.
M. Lessard: Un édifice qui appartient au
fédéral?
M. Mailloux: Oui. Il a déjà été
offert au gouvernement du Québec, il y a un an ou deux.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Brome-Missisquoi.
M. Russell: M. le Président, brièvement quelques
remarques. Je veux simplement, comme ceux qui ont parlé, le ministre et
le député de Charlevoix, féliciter la Chambre de commerce
pour son mémoire, qui semble nourri de l'expérience du
passé, conscient du travail qui a été fait sur la colline
parlementaire et rempli d'objectivité pour l'avenir. Nourris de
l'expérience passée, je pense qu'on voit que les membres de la
Chambre de commerce ont connu, durant les années cinquante et soixante,
la situation qui existait au Québec dans le temps et peut-être la
raison pour laquelle les travaux se sont faits de la façon qu'ils furent
faits.
Je crois que vous comprenez aussi la nécessité que,
quoiqu'il y ait eu un effort considérable qui s'est fait, il y a aussi
beaucoup à faire. Vous vous apprêtez peut-être à
vouloir partager le fardeau, la difficulté de le compléter aussi
objectivement que possible. Je pense bien que vous offrez, par votre
mémoire, votre coopération au gouvernement actuel avec des
suggestions bien concrètes, bien objectives, sans parti pris. Lorsqu'on
parle de vouloir corriger la situation du stationnement, je ne voudrais pas
rappeler les débuts de ces charges, lorsque le gouvernement en est venu
à tenter cette première expérience pour tâcher de
freiner un peu l'utilisation de l'automobile dans le temps. Mais on voit que
cela a été un pas en avant. Aujourd'hui, vous voulez simplement
continuer à avancer dans cette voie, ce qui est une suggestion
concrète et objective. Je ne voudrais quand même pas voir ici,
à Québec, les prix qu'on en est rendu à payer dans la
ville de Montréal. Quand on veut stationner pour une
demi-journée, pour $4 ou $5, ce serait un petit peu périlleux
pour les fonctionnaires, mais qu'on paie un peu plus pour éviter
d'utiliser abusivement les stationnements mis à la disposition du
travailleur quand c'est nécessaire.
Maintenant, je pourrais faire beaucoup d'autres remarques. Je sais que
le député de Charlevoix et le ministre l'ont fait pour plusieurs
des travaux où vous désirez supporter le gouvernement. Je veux
simplement vous encourager à continuer à faire des suggestions
constructives pour tâcher d'aider à guider les autorités en
place. Je suis d'accord avec votre suggestion lorsque vous suggérez que
le développement de la ville de Québec doit être fait par
les autorités municipales avec la coopération des
autorités gouvernementales, excepté que, si la ville de
Québec a malheureusement un conseil qui ne bouge pas, les
autorités provinciales seront obligées de prendre leurs
responsabilités et de bouger si c'est nécessaire. Ce sont des
circonstances qu'il faut analyser au fur et à mesure que la situation se
présente. Je termine là-dessus. Je sais qu'il y a d'autres
mémoires qui seront présentés, mais de la discussion des
faits surgit la lumière. Je pense que la chambre de commerce a
présenté un mémoire très valable, très
recommandable. Je terminerai là-dessus en félicitant ses membres
et en les encourageant à continuer à travailler dans la
même voie.
M. Boudreau: Merci.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Vanier.
M. Bertrand: J'aurais l'impression de faire des redites en vous
félicitant pour votre mémoire. J'ai pris le risque de le lire ce
soir...
Le Président (M. Marcoux): C'est pourquoi je vous prierais
de les éviter.
M. Bertrand: J'ai pris le risque de le lire pendant mon souper,
ce soir, mais je ne suis pas déçu. Il y a une visée
profondément humaniste qui est sous-jacente à l'ensemble de votre
rapport. Je tiens à vous en féliciter. Une seule question, c'est
sur l'opposition catégorique entre votre mémoire et celui du
mouvement de la sauvegarde du couvent des soeurs du Bon-Pasteur, quand vous
dites: II nous apparaît que ces édifices n'ont en soi aucune
valeur architecturale ou historique et n'ajoutent sûrement pas à
l'esthétique de la cité parlementaire et que,
conséquemment, si ce n'est pas rentable, le gouvernement ne devrait pas
s'engager dans leur rénovation. Je voudrais que vous expliquiez
le député de Charlevoix vous avait un peu posé la question
pourquoi vous affirmez cela, alors qu'un mouvement qui s'est
occupé de le sauvegarder, lui, prétend exactement le contraire.
J'aimerais avoir vos arguments.
M. Boudreau: Ecoutez, expliquer ou vouloir justifier une opinion,
c'est généralement assez difficile, mais les consultations que
nous avons faites, et particulièrement à notre comité des
affaires urbaines où siègent des urbanistes et des architectes...
L'évaluation qui a été faite de ces bâtisses est
que, strictement sur le plan architectural, elles ne présentent pas
d'aspect intéressant au point où on doive les conserver, si ce
n'est pas vraiment économique de les conserver. Encore une fois, c'est
une opinion de la chambre, ce n'est peut-être pas une opinion
définitive, mais c'est une opinion sur la vocation que nous voyons de
ces édifices, opinion qui est sans doute discutable. Mais on pourrait
difficilement, en vous citant les opinions de ceux qui ont collaboré
à la rédaction de ce mémoire, vous dire autre chose que:
Strictement, pour nous, cela ne présente pas la valeur que d'autres
organismes voudraient y attacher.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Taschereau.
M. Guay: J'aimerais savoir de vous, brièvement, si c'est
possible... Vous dites, de façon fort éloquente, à la page
13 de votre mémoire, qu'il faut conserver le patrimoine. Vous en faites
une... C'est assez euphorique même comme conclusion. Pour vous, le
patrimoine, c'est quoi, au juste?
M. Talbot: Pour nous, le patrimoine, il y a une évidence,
à Québec, c'est le Vieux-Québec, et la chambre a
plaidé, pendant des années, la restauration, la rénovation
du Vieux-Québec, et on a même donné l'exemple en restaurant
la première propriété dans le Vieux-Québec pour
inciter les autres à le faire. On constate que, dans le
Vieux-Québec, il y a encore une fortune à engloutir dans la
rénovation. On se dit que cela a toujours été la politique
de la chambre, à savoir qu'avant d'aller sauver des édifices
ailleurs, si administrer, c'est choisir entre des moyens, on est mieux de
consacrer ça au Vieux-Québec. On pense notamment à des
entrepôts que le ministère des Affaires culturelles a
déjà envisagé de démolir, Place Royale et autres
endroits, et on considère que ces entrepôts, par leur situation,
ont plus de valeur au plan de la conservation et du patrimoine.
L'édifice du Bon-Pasteur, cela ne nous frappe pas comme
architecture, mais, honnêtement on dit que c'est une opinion. On
évite d'avoir des opinions absolues, parce que ce n'est pas avec des
opinions absolues qu'on va développer une ville. Une ville, ça se
discute. Nous, que vous le conserviez ou non, cela nous laisse
indifférents.
Par contre encore là, c'est une question de goût
on aime Jeffery Haie, qui, dans la trame urbaine, fait un certain
équilibre.
M. Guay: Vous parlez donc de la valeur intrinsèque de
l'immeuble. Qu'est-ce qu'il faudrait, par exemple, débourser, en 1977,
pour construire un édifice aussi solide, indépendamment de toute
autre considération, que le couvent du Bon-Pasteur? Pour vous, ça
ne fait pas partie du patrimoine? Le patrimoine, c'est architectural,
historique, mais ce n'est pas la valeur même de l'immeuble. Cela n'est
pas non plus, si je comprends bien votre mémoire, un espace vert avec
des arbres adultes? Parce que vous...
M. Talbot: Oui, ça peut être un espace vert. On en a
de beaux à conserver. Les Champs de bataille...
M. Guay: Mais alors, pourquoi proposez-vous, à ce
moment-là, qu'on utilise l'espace vert des soeurs Franciscaines
missionnaires de Marie à des fins domiciliaires, puisqu'il s'agit
là d'un espace vert avec une vingtaine d'arbres adultes?
M. Talbot: On pourrait peut-être le conserver, mais on ne
peut pas mettre indéfiniment des espaces verts, parce qu'on
développe une ville. Une ville, c'est beau quand c'est dense, quand il y
a des places publiques. On prend la beauté du Vieux-Québec. Ce
sont les quelques places publiques et une trame urbaine capricieuse, etc. Ce ne
sont pas nécessairement des espaces verts.
C'est une question de perception. On peut sauver les arbres des soeurs
Franciscaines, mais on dit: II y a du beau terrain, là, pour faire de
l'habitation et on songeait même, nous, pendant des années,
à y avoir un centre pour personnes âgées, qui aurait
complété ce que les soeurs étaient en train
d'aménager, à l'époque, parce que, déjà,
elles accueillent des personnes âgées, tout en s'in-tégrant
dans le secteur. Actuellement, c'est un mur de béton.
M. Guay: Oui, mais ça s'abolit, un mur de béton. Le
béton, ça peut se démolir.
M. Talbot: Oui.
M. Guay: Tandis que faire pousser des arbres adultes, ça
prend beaucoup de temps.
Il y a une autre question que j'aimerais vous poser. Vous dites, et je
suis bien d'accord avec vous qu'on abandonne le projet
d'élargissement de Saint-Gabriel. Vous dites: Parce que ça
n'aboutit nulle part. Moi, pour des raisons que je trouve
préférables, c'est qu'il y a des gens qui y habitent, et je ne
vois pas pourquoi on les délogerait.
Au même moment, si on regarde un peu plus haut, vous dites que
dans les secteurs 3 et 4, qui sont précisément la partie de
Saint-Jean-Baptiste, grosso modo, contenue entre le boulevard Saint-Cyrille et
la rue Saint-Jean, on devrait introduire des projets d'appartements
multiples.
Comment pouvez-vous concilier le fait de ne pas étargir la rue
Saint-Gabriel, donc de ne pas démolir, si je comprends bien, avec le
fait d'introduire dans ce secteur des projets d'appartements multiples? Il
faudrait bien démolir en quelque part et, à ce moment-là,
déloger la population qui y habite et faire une pression
spéculative sur le nord de Saint-Jean-Baptiste, au nord de la rue
Saint-Jean?
M. Talbot: II y a déjà des terrains vacants,
c'est-à-dire des terrains derrière Jefferey Haie, qui sont
immenses.
Si je me souviens, c'est 300 000 pieds carrés, et il y a une
possibilité d'introduire dans le secteur no 3, derrière l'ancien
édifice de la Sûreté du Québec, plusieurs centaines
de logements.
On a fait des calculs rapides. On pourrait facilement construire 500 ou
600 logements en demeurant à une échelle, à un gabarit qui
se compare à l'autre rue. Il y a même des développeurs
privés qui sont ouverts à la discussion, qui ont des parcelles de
terrains; si on trouvait le moyen de résoudre le problème de la
taxation municipale, soit par bail emphytéotique ou autrement, ces gens
nous disent: On irait pour de l'habitation multiple... compléter nos
complexes par de l'habitation. Mais ces gens paient actuellement des taxes sur
des terrains évalués à $30 et $40 le
pied. Alors, il faudrait, par un moyen quelconque, rétrocession
à un prix nominal et après cela, quand c'est
rétrocédé par bail emphytéotique, le
développeur développe une fonction habitation et le fardeau des
taxes tient compte de la destination du terrain; mais avec la charge fiscale
actuelle, il est certain qu'on arrive avec des logements qui coûteraient
$600 ou $700.
Alors, il y a peu de personnes à Québec qui pourraient se
payer ces logements.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Laprairie.
M. Michaud: Merci. Je me demande si vous avez parlé tout
à l'heure de la vocation du secteur 6 sur votre carte.
M. Talbot: Non. En termes généraux, on a dit qu'il
fallait éviter d'étendre l'aire de réaménagement et
on entend par réaménagement le grand bistouri, le regroupement
des lots, mais ce n'était pas, je pense, dans le mandat
spécifique de votre commission. Alors, on parle de
rénovation.
M. Michaud: Vous mettez de la rénovation dans le secteur 6
de votre carte?
M. Talbot: Oui.
M. Michaud: Vous avez terminé? J'aimerais faire un petit
commentaire. Tout à l'heure, vous sembliez dire qu'il y a une valeur
architecturale ou historique, si c'est rentable. Si ce n'est pas rentable, la
valeur disparaît.
M. Talbot: Ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit qu'il y a des
choses qu'il faut conserver à tout prix, même si ce n'est pas
rentable, par exemple, le vieux séminaire. Même si cela
était dispendieux, il faut restaurer le vieux séminaire parce
qu'au plan de l'architecture, au plan historique, cela a une valeur, comme on a
dépensé $150 000 pour restaurer la maison Mailloux, qui datait de
1736. Evidemment, au plan comptable, c'est un bien mauvais placement, mais,
à d'autres plans, c'était important. Alors, c'est dans ce sens
qu'on le dit.
M. Mailloux: Ce n'est pas la maison que j'habite.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie au nom de tous
les membres de la commission qui, par leurs commentaires, ont
témoigné d'une grande compréhension face à votre
mémoire.
M. Boudreau: Merci.
Garderie coopérative
Saint-Jean-Baptiste
Le Président (M. Marcoux): J'inviterais maintenant la
Garderie coopérative Saint-Jean-Baptiste à venir nous
présenter son mémoire, en la personne de M. Réjean
Tessier.
Comme aux précédents intervenants, je vous demanderais de
prendre au plus vingt minutes pour nous présenter les
éléments importants de votre mémoire que tous les membres
de la commission ont dû lire avant la séance et pour leur
permettre de poser le plus de questions possible.
Je vous demanderais également de présenter votre
collègue.
M. Tessier (Réjean): Je suis Réjean Tessier. C'est
Alain Richard, le secrétaire de la coopérative, qui fera lecture
du rapport, suite auquel nous serons tous les deux disponibles pour
répondre à vos questions.
M. Richard (Alain): Dans l'ensemble, je vais faire une lecture
assez complète du rapport. Il y a quelques points que je pourrai sauter
et qui touchent moins l'assemblée ici.
Le Président (M. Marcoux): Faites-en une lecture
très rapide.
M. Richard (Alain): D'accord, le début sera...
M. le Président, messieurs les ministres et
députés, la possibilité qui nous est enfin donnée
pour la garderie de nous adresser directement aux personnes dont dépend
notre existence, c'est une première satisfaction pour la garderie
Saint-Jean-Baptiste.
Que cette adresse soit d'autre part émise dans les cadres d'une
discussion ouverte et libre constitue cependant une première dans
l'histoire si courte et déjà si chargée de notre
garderie.
A une époque encore récente, il nous fallait lutter ferme
et employer des formes de pression absolues pour obtenir un bref entretien,
toujours à sens unique et sans jamais aucun résultat positif. Il
est significatif que ce soit une commission sur la colline parlementaire qui
nous ait convoqués. Ceci démontre bien que nous sommes
profondément implantés dans notre milieu. Il va de soi que notre
objectif premier n'est pas de sauver un vaste secteur urbain en péril,
mais bien de garantir l'existence de la Garderie coopérative
Saint-Jean-Baptiste. Notre fonction n'est donc pas l'urbanisme comme tel, mais
le social et la qualité de la vie dans notre quartier.
Il est évident que ces deux aspects sont intimement
"interreliés" et que la qualité de l'un ne peut se
réaliser sans la qualité de l'autre. La garderie ne peut vivre
sans le quartier Saint-Jean-Baptiste. Notre vie dépend de celle du
quartier. Pour nous garantir une existence prolongée, il faut nous
assurer de la viabilité de ce quartier. C'est la raison pour laquelle
nous avons accepté de participer aux travaux de cette commission.
En outre, cet éclaircissement relatif à notre optique nous
paraît important puisqu'il justifie certaines parties du mémoire,
qui peut-être vous sembleront relever plutôt du ministère
des Affaires sociales que de celui des Travaux publics.
La deuxième raison qui nous a amenés à participer
aux travaux de la commission, c'est notre
absolue croyance qu'il ne s'agit pas d'une consultation oiseuse et
protocolaire d'un type courant sous l'administration municipale, mais bien
d'une consultation réelle qui sera considérée avec toute
la sincérité et l'intégrité qui présuppose
une véritable étude du milieu.
Enfin, la troisième raison que nous soulignerons, c'est notre
ferme conviction que seront tenus et les promesses et engagements des candidats
péquistes avant leur accession au pouvoir et les énoncés
du Parti québécois dans son programme.
Nous vous présentons donc dans ce mémoire l'essentiel de
nos considérations relatives à l'implantation et j'insiste
à l'implantation à long terme de la Garderie
coopérative Saint-Jean-Baptiste dans ses locaux actuels. Après un
court historique, on pourra retrouver les aspects pédagogiques, sociaux
et physiques de la garderie ou de ce que la garderie serait si, enfin, on lui
accordait des possibilités saines de fonctionnement. En dernière
partie, on retrouvera des ouvertures éventuelles, des suggestions, des
projets que la garderie nourrit depuis longtemps, mais qu'elle n'a jamais pu
réaliser faute de stabilité physique.
Alors, je vais passer un peu vite sur l'historique. Qu'il suffise de
mentionner que c'est un projet né d'une volonté populaire dans le
quartier; il y a un groupe de parents qui se sont réunis, ils avaient
demandé un projet P.I.L. à l'époque, lequel projet a
été refusé d'abord, puis accordé ensuite. Il y a eu
beaucoup de déboires, on a été obligé de
déménager à trois reprises, on a été souvent
menacé de disparition, jusqu'à ce qu'on se retrouve dans le
couvent des Soeurs du Bon-Pasteur et, ici, nous devions normalement quitter le
local à l'automne 1975; nous sommes présentement au 550
Saint-Amable.
Entre le printemps et l'automne, un comité a été
mis sur pied pour trouver un local et nous trouvons alors beaucoup de portes
fermées, il n'y a aucun local de disponible à cette
époque. Alors, nous entrons dans une période très
difficile, c'est-à-dire notre première période de lutte.
En octobre, on demande un sursis au ministère, qui nous l'accorde,
jusqu'au 1er décembre. Nous poursuivons vraiment nos recherches, et ce
1er décembre nous décidons d'occuper les locaux. Le lendemain, un
député du Parti québécois fait une intervention au
Parlement et quelques heures plus tard nous apprenons, par les media
d'information, que le ministère des Travaux publics nous accorde une
prolongation qui prendra fin avec le départ des Soeurs du Bon-Pasteur
qui habitent encore tout le bâtiment principal qui est situé sur
la rue de la Chevrotière.
Donc, le départ était prévu pour septembre 1976;
entre-temps, il est toujours impossible de trouver des locaux et il nous
restait comme possibilité la maison Kriegoff qui, pour nous,
était plus ou moins intéressante parce qu'elle était
à l'extérieur du quartier comme tel.
De toute façon, la maison Kriegoff, cela ne fonctionne pas non
plus. Nous devons quitter le local où nous sommes présentement,
mais entre- temps, arrivent les élections, branle-bas de combat,
revirement. M. O'Neill avait déclaré peu avant les
élections qu'il faudrait et je cite: "II faudrait même songer
à établir la garderie sur une base permanente dans les lieux
qu'elle occupe depuis un an, compte tenu de la qualité du cadre de vie
et du grand espace vert qu'ils offrent aux enfants des comtés Jean-Talon
et Taschereau". Ce même article se terminait sur un extrait d'une lettre
du Parti québécois de la région de Québec qui a
été remise à M. Claude Forget à l'époque,
où on pouvait lire: "II nous semble que la colline parlementaire est
déjà trop défigurée et que la construction d'un
palais de justice dans le secteur ne ferait qu'accroître la circulation
automobile et le dépeuplement du quartier au point d'en faire un endroit
désert après dix-sept heures".
M. Guay, dans un article paru dans le Soleil du 18 novembre 1976 insiste
aussi sur le fait que, selon lui, le palais de justice peut fort bien
être construit plus loin. Mais, finalement, ce qui nous a le plus
rassurés c'est une lettre que M. Guay a fait parvenir au ministre des
Travaux publics, M. Lucien Lessard, où l'on pouvait lire: "II me semble
que le temps est venu pour un gouvernement dont les orientations sont plus
sociales de prendre une première initiative et de faire en sorte que le
couvent des religieuses du Bon-Pasteur soit sauvegardé, que la garderie
coopérative puisse continuer à y être logée et que
le reste des immeubles soit transformé en résidence pour
personnes âgées ou pour personnes ne bénéficiant que
de revenus modiques".
Nous en sommes maintenant à une période décisive de
notre histoire. Face à la pénurie actuelle de locaux
provoquée par l'administration précédente, secondée
en cela par la politique abusivement permissive de l'administration municipale,
la garderie Saint-Jean-Baptiste devra, advenant une démolition
malheureuse du couvent du Bon-Pasteur, se procurer quelques maisons mobiles,
peut-être de type Bellevue, et transformer son service en une
halte-garderie itinérante pour ces enfants au royaume du
béton.
Réalités sociales pédagogiques et physiques. Il
nous semble aberrant de devoir répéter ces propos sur
l'indispensabilité d'une garderie en milieu populaire. Mais, et quoique
ces aspects soient apparemment de peu d'importance pour la défense de la
colline, nous ne pouvons passer outre à ces aspects pédagogiques
et sociaux puisqu'ils constituent l'essentiel de notre démarche en tant
qu'organisme d'utilité publique.
Comme l'arbre qui a besoin pour croître de bonne terre, nos
enfants aussi ont besoin de bons espaces et, dans ce cas-ci, la colline
parlementaire constitue la pire menace qui soit pour toute la population du
secteur Saint-Jean-Baptiste. On ne peut traiter d'urbanisme sans
considérer les êtres qui peuplent cette "cité". C'est
pourquoi nous insistons sur l'importance pédagogique et sociale des
garderies et sur l'importance d'insérer cette démarche dans un
espace physique qui corresponde au besoin d'un mieux-être pour nos
enfants.
Réalités sociales. Il ne sera sans doute pas difficile de
convaincre la commission de l'importance sociale que représentent les
garderies. L'article concernant ces services dans le programme du Parti
québécois est suffisamment explicite pour nous assurer que nos
propos ne tomberont pas dans l'oreille d'un sourd et je me dispenserai de citer
l'article puisque chacun le connaît sûrement très bien.
A toutes fins utiles, mentionnons que, lors d'une enquête du
gouvernement fédéral, en 1973, 40% des 371 000 femmes qui ont
affirmé qu'elles préféreraient travailler hors du foyer ne
le font pas à cause de l'impossibilité de faire garder leurs
enfants de façon satisfaisante. Ces chiffres sont très
éloquents et, si on se réfère aussi à un cadre
provincial, une étude a été faite au ministère des
Affaires sociales en janvier 1975 qui stipule que 72,6% des femmes
interrogées affirment qu'il est difficile de s'organiser pour faire
garder un enfant régulièrement. On peut également y voir
que 68% des femmes questionnées sont en faveur d'une augmentation du
nombre de garderies.
Bien d'autres raisons motivent également le besoin d'avoir des
garderies; la maladie, le besoin de détente, etc. Mais insistons
particulièrement sur la vie sociale de l'enfant. Dans notre monde de
plus en plus peuplé, où la vie sociale et le travail de groupe
s'intensifient constamment, il faut préparer les enfants très
tôt à acquérir une saine sociabilité. Cette
acquisition est d'autant plus difficile à la maison que les familles
sont beaucoup moins nombreuses qu'autrefois.
D'autre part, et ceci devient très important pour nous, l'enfant
s'identifie au milieu où il vit et évolue. Il est donc
indispensable que les lieux qu'il fréquente soient dans son quartier.
Toutefois, le quartier dont il est ici fait mention n'en est plus un. Il a
été saccagé et ramené à sa plus simple
expression, c'est-à-dire des maisons bordant des rues. Il est donc
urgent que nous redonnions à cet aspect social de la vie de l'enfant un
meilleur cadre physique que celui où on tend à le confiner depuis
trop d'années.
Ce que nous offrons présentement, c'est la fréquentation
quotidienne d'un espace sain et bien aménagé pour nos enfants.
L'enfant ressent cet espace comme faisant partie de son univers. La verdure,
l'espace aéré, les arbres sont devenus pour lui partie
intégrante de sa vie et non pas seulement le miroir d'une
réalité inatteignable. Ce développement social dans son
milieu nous reviendrons plus loin sur la qualité de ce milieu
et dans un cadre sain est de la plus haute importance pour l'enfant et
se situe au coeur de nos préoccupations. Cet aspect déterminant
quant à l'existence de notre garderie ne saurait faire l'objet d'aucune
reconsidération ou concession de notre part.
Je sauterai un peu sur les réalités pédagogiques et
je mentionnerai toutefois que le milieu de vie dans lequel la garderie
évolue est tout de même extrêmement important afin de
fournir le meilleur cadre pour réaliser pleinement les activités
pédagogiques pour l'épanouissement de nos enfants.
Je terminerai en disant qu'on ne peut demander au photographe de tirer
des épreuves dans un parc ensoleillé. De même, on ne peut
demander aux enfants de s'épanouir dans une chambre noire.
Les réalités physiques. La garderie donne actuellement des
services à 34 enfants, dont la majorité demeure dans le quartier
ou dans la périphérie. Nous utilisons une surface de 3500 pieds
carrés au rez-de-chaussée du 550 Saint-Amable. A
l'extérieur, nous utilisons la cour qui est bordée du
côté sud par l'arrière de l'édifice, du
côté est, par la rue Berthelot, du côté nord, par la
rue Bon-Pasteur et, du côté ouest, par le stationnement qui longe
la rue Scott.
Dans notre conception d'une garderie, la cour est aussi importante que
le local lui-même et en est le prolongement naturel. Ce,
particulièrement dans le contexte du quartier Saint-Jean-Baptiste. Les
enfants qui viennent à la garderie ont entre 2 et 6 ans et beaucoup
d'entre eux vivent dans des logements qui n'ont même pas accès
à une cour décente. Plusieurs vivent dans un logement près
duquel la circulation automobile est souvent très intense. Plusieurs
d'entre eux vivent dans un endroit où la pente des trottoirs est si
raide qu'ils peuvent difficilement sortir un jouet sans risque d'un accident ou
d'une perte toute simple.
Nous croyons que nos enfants ne devraient pas être
pénalisés pour être nés dans ce quartier et qu'ils
ont droit d'accéder à un endroit où les conditions
physiques de vie sont excellentes.
En défendant à tout prix le local pour la garderie du
quartier, nous défendons le droit de nos enfants à un espace
moins pollué par l'air et par le bruit, le droit de nos enfants à
différencier un arbre d'une colonne de béton, le droit de nos
enfants à courir et à s'amuser librement, le droit de nos enfants
à reconnaître qu'une fleur peut aussi pousser à
l'extérieur, car ce ne sont point eux qui ont bâti leur
environnement, mais nos derniers administrateurs municipaux et provinciaux,
amants de la bétonnière.
Nous estimons donc que c'est dans ce site actuel que nous avons le plus
de chances de donner à nos enfants ce à quoi ils ont droit.
Il nous reste toujours l'argument, si on veut se référer
à Gilles Lamontagne, maire, que la rue Saint-Amable est située
"pratiquement en dehors du quartier" et que l'on n'a pas pensé cet
endroit pour des fins résidentielles.
Nous sommes d'accord pour dire que la rue est maintenant isolée
géographiquement du reste du quartier, mais il faut se dire que ce n'est
pas accidentel. D'ailleurs, si tous les plans étaient
réalisés, la rue en serait encore plus loin, si on se
réfère au projet Saint-Gabriel dont la chambre de commerce a fait
mention tantôt.
En réalité, la rue Saint-Amable n'est pas plus
éloignée du quartier qu'elle ne l'était. On a tout
simplement refoulé les gens dans l'autre extrémité. On
peut dire que c'est le quartier qui a été reculé
derrière les grands boulevards.
D'autre part, même si on a forcé les gens du quartier
à s'éloigner de leurs espaces verts, ce n'est pas une preuve
qu'ils n'en ont plus besoin,
bien au contraire. Nous en avons déjà cherché entre
la côte Salaberry et le boulevard Dufferin, entre la falaise et le
boulevard Saint-Cyrille et nous n'en avons trouvé aucun. Nous savons que
les gens sont prêts à faire quelques pas de plus pour donner
à leurs enfants un accès à la cour de la rue
Saint-Amable.
En résumé, la garderie est sise dans un endroit
idéal et offre des possibilités physiques maximales pour combler
les besoins des enfants du quartier.
Visions d'avenir.
Depuis plusieurs années, on songe à améliorer et
à élargir l'éventail de nos services. Une garantie de
fonctionnement dans les locaux actuels nous permettrait, dans un premier temps,
de parachever nos installations matérielles et ce, après trois
ans, et de déborder sur des programmes de développement à
court ou à moyen terme qui comprennent l'organisation spatiale interne,
l'organisation de la cour avec jeux architecturaux, etc.
De plus, nous estimons qu'une halte-garderie dans le quartier serait
nécessaire et sûrement bienvenue. Notre expérience au salon
des artisans a été concluante en ce sens.
Par ailleurs, l'édifice où nous sommes situés
actuellement serait idéal de par sa dimension et sa localisation pour
ouvrir une autre garderie pour les employés du gouvernement qui
travaillent à proximité. Cela fait suite à un désir
qui avait déjà été manifesté par des
fonctionnaires du complexe G, à l'époque.
Ces locaux sont également tout indiqués pour une
série de services communautaires. On y verrait bien une école
à aire ouverte qui n'attend qu'un local pour se concrétiser, un
ou des ateliers de type artisanal, menuiserie, jouets, réparation, etc.,
des locaux pour des troupes de théâtre, des salles de
répétition pour des musiciens, un centre communautaire. Les
suggestions ne manqueraient pas.
Nous ne déborderons pas ici sur la vocation strictement
résidentielle que pourrait avoir ces édifices. Le rapport du
groupe de sauvegarde de la maison des soeurs du Bon-Pasteur qui avait
été remis et qui a été refait ici, pour la
commission parlementaire, en fait largement état.
Pour peu que ces édifices soient conservés et
employés à toute autre fin que bureaucratique, nous saurons enfin
que la menace de mort qui pèse sur le quartier a été
retirée. Nous serions alors disposés à travailler à
un comité de gestion des édifices du Bon-Pasteur, tel que
mentionné dans le rapport du comité de sauvegarde. il
apparaît donc clairement dans ce dossier que tout converge vers un
même point: le complexe architectural des soeurs du Bon-Pasteur doit
être sauvé et investi de fonctions résidentielles ou
communautaires. Il en va non seulement de notre survie mais de la survie du
quartier Saint-Jean-Baptiste.
Qu'il nous suffise de mentionner à nouveau le projet d'amener un
boulevard sur l'actuelle rue Saint-Gabriel pour réaliser les
conséquences ca- tastrophiques d'une telle réalisation. Or, ce
boulevard devra être construit, advenant le gonflement de la colline
parlementaire, que ce soit par un palais de justice ou tout autre
édifice administratif.
Le quartier passera ainsi de trois paroisses à une seule et sera
confiné au seul espace délimité par la falaise et de la
rue Saint-Jean d'une part, et par la rue Salaberry et l'autoroute Dufferin,
d'autre part.
De plus, la décision de démolir la maison des soeurs du
Bon-Pasteur éliminerait automatiquement la garderie Saint-Jean-Baptiste
et le dernier espace vert important de ce quartier. Cette vision de l'avenir ne
peut et ne doit être envisagée en aucune façon. Nous sommes
attachés à ce quartier, nous y vivons et voulons en faire un lieu
de vie de qualité pour nos enfants.
Ainsi donc, il faut sauver les édifices des soeurs du
Bon-Pasteur, les réaménager et les moderniser. Il faut
considérer que la colline parlementaire a atteint son quota. Il faut
réhabiliter ce secteur dans des fins résidentielles. Il faut
relier les parties nord et sud du quartier Saint-Jean-Baptiste situées
de part et d'autre du boulevard; utiliser au maximum les édifices du
Bon-Pasteur à des fins communautaires.
Ceci aurait pour effet de garantir une stabilité à la
garderie coopérative et lui permettre d'offrir un meilleur service et
surtout un éventail plus étendu de services, de réanimer
ce secteur et par à-coup, tout le quartier Saint-Jean-Baptiste, le
sauvant in extremis d'une détérioration irréversible.
Il en va non seulement d'un organisme à but non lucratif et d'une
coopérative, mais bien plus de ce que ce type de fonctionnement
représente pour un gouvernement à orientation franchement
sociale.
Il en va non seulement d'un secteur déjà très
défiguré, mais bien de tout un quartier.
Il en va non seulement d'un espace à rendre rentable et
fonctionnel, mais bien d'une qualité de vie qu'il faut à tout
prix acquérir et développer pour les citoyens de ce quartier.
En ceci, nos revendications sont tout à fait conformes au
programme mis de l'avant par le Parti québécois et s'inscrit de
plein fouet dans les politiques de l'habitation où l'on peut lire qu'il
faut préserver l'environnement humain et naturel du milieu
concerné.
M. le Président, M. le ministre et MM. les députés,
nous vous remercions.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Lessard: J'aurais quelques brèves questions. Si je
comprends bien, si on vous assurait une permanence à l'ancien couvent du
Bon-Pasteur, vous auriez des projets pour utiliser tout l'espace de ce
couvent?
M. Tessier (Réjean): C'est-à-dire que, si,
actuellement, on nous offrait la possibilité de demeurer là, on
pourrait avoir certains projets d'expansion de la garderie comme telle. Ce
qu'on
mentionne dans le rapport, c'est qu'au cours des luttes qu'on a
menées depuis les deux dernières années, il y a beaucoup
de gens ou d'organismes du quartier, du milieu, qui nous ont mentionné
qu'ils seraient intéressés à occuper certaines parties de
l'édifice que nous occupons actuellement. Autrement dit, on voit que,
déjà, des gens du milieu ou des environs du quartier pourraient
utiliser ce local pour des fins communautaires, de récréation ou
de création tout simplement, ou d'éducation sous un autre type,
puisque le lieu physique répond bien à ces fins.
M. Lessard: Est-ce que les lieux physiques dont nous parlons sont
à l'épreuve du feu?
M. Richard (Alain): La structure, où nous sommes
présentement, est en béton; l'aile où nous sommes est
assez récente d'ailleurs. Je ne sais pas précisément la
date de construction, mais c'est en 1920 ou 1930 et plus, c'est en
béton, c'est à l'épreuve du feu.
M. Tessier: Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion, M. le
ministre, de visiter déjà l'intérieur de l'édifice
qu'on occupe actuellement ou enfin, suite au rapport qu'a
présenté récemment...
M. Lessard: J'ai lu le rapport. J'ai envoyé certaines
personnes visiter, j'ai pris connaissance du rapport.
M. Tessier: Oui, c'est cela. Pour nous actuellement qui occupons
les locaux depuis presque deux ans, en fait depuis un an et demi, les locaux
sont extrêmement sains en termes de qualité, tout cela, de
résistance des matériaux. Ils ont été dits à
l'épreuve du feu de par le type de construction. Pour nous autres, le
local occupé actuellement est au rez-de-chaussée, avec plein de
fenêtres et plein de lumière; c'est un endroit, si on veut, un peu
idéal pour y faire vivre des enfants, pour donner aux enfants
accès à la lumière et accès à l'espace
psychologique dont chacun peut avoir besoin à un moment
donné.
M. Lessard: Vous parlez de 37 enfants, c'est le maximum que vous
avez?
M. Tessier: Actuellement, le ministère des Affaires
sociales nous autorise, dans les locaux qu'on occupe, à garder 45
enfants. Notre permis va jusqu'à 45 enfants. Pour des fins pratiques et
aussi parce que c'était difficile de s'engager avec un aussi grand
nombre d'enfants et parce qu'il faudrait faire certaines divisions à
l'intérieur des locaux pour pouvoir les rendre aussi rentables, si on
veut, et qu'on n'a pas eu d'argent encore du ministère des Affaires
sociales, parce qu'on n'a jamais pu avoir de bail dans le local qu'on occupe
actuellement, le local ne nous permet pas d'avoir plus que 35 enfants,
physiquement, comme tels. Avec certaines rénovations, on pourrait
élever un peu le nombre d'enfants qui occupent présentement le
local. Jusqu'ici cela ne nous a pas été permis, on n'avait pas
droit aux subventions, parce qu'on n'avait pas de bail qui nous promettait d'y
pouvoir rester pendant assez longtemps.
Si vous avez lu un peu ou vu un peu l'histoire de notre garderie depuis
les dernières années, on voit qu'on a été
constamment en situation de devoir déménager, ce qui ne nous a
pas permis de mettre toutes les énergies pour aménager finalement
comme on l'aurait souhaité chez nous.
On a un local d'un potentiel excellent, qui n'est pas
complètement aménagé, faute de conditions physiques qu'on
espère trouver maintenant suite aux conclusions de la commission
parlementaire présente.
M. Lessard: Merci!
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Charlevoix.
M. Mailloux: M. le Président, en écoutant la
lecture du mémoire, il m'a été assez facile de comprendre
les difficultés qu'a affrontées la Garderie coopérative
Saint-Jean-Baptiste avant le 15 novembre, le jugement assez
sévère qu'on porte sur ces discussions, de même que
l'espoir qu'a fait naître, semble-t-il, le 15 novembre dernier.
J'avais cru comprendre dans le passé, que la Garderie
coopérative Saint-Jean-Baptiste, avant d'occuper les locaux des soeurs
du Bon-Pasteur, si elle avait pu trouver des locaux susceptibles de convenir
dans un bassin donné, des locaux convenables, c'était la
recherche qu'elle faisait. Mais, en écoutant le mémoire, je
constate que là, on est situé dans un local donné et qu'on
demande au gouvernement de respecter ses promesses électorales et
d'aménager le couvent du Bon-Pasteur de la façon
multidisciplinaire dont on parle.
Je pense bien, M. le Président, que mes collègues qui sont
à la droite, quand on lit les deux déclarations du
député de Chauveau et du député de Taschereau, sont
pris pour livrer une marchandise. Il leur appartient, forcément, comme
gouvernement, de dire quelle est la réponse que ce gouvernement... vu la
philosophie dont on parle, d'un mémoire qui rejoindrait davantage la
philosophie de la garderie coopérative, on est sur un terrain d'entente,
semble-t-il.
M. le Président, je n'ai pas de question à poser. On fait
référence à la page 13, à la série de
suggestions qu'a faites la Garderie coopérative Saint-Jean-Baptiste,
à l'endroit des Travaux publics et sur la réaffectation qu'on
verrait pour la bâtisse. Il y a une question que je me pose depuis le
début de cette commission parlementaire. Presque tous les
mémoires ont fait état de l'architecture spéciale de la
chapelle, de même que de certaines constructions de l'histoire qui y est
rattachée, Quand la commission parlementaire pourra-t-elle entendre le
mémoire des fonctionnaires des Travaux publics qui ont fait
l'étude de la construction dont on entend parler dans tous les
mémoires? On s'adresse à tous les urbanistes qui viennent des
différents mouvements, tout le
monde. Je sais qu'il y a eu également une étude des
propres fonctionnaires de l'actuel ministre. Il serait peut-être bon
qu'avant la fin, l'on sache exactement ce qu'ils en pensent également.
Cela ne rejoindra peut-être pas la philosophie qu'on recherche, mais il
demeure que, sur la structure de la bâtisse, sur son état de
conservation, sur les modifications qui pourraient être apportées,
sur les coûts que cela entraînerait, la commission devrait
être éclairée par des fonctionnaires
spécialisés qui ont dû, depuis que le gouvernement s'en est
porté acquéreur, faire cette étude. Je n'ai pas d'autre
commentaire à apporter sur l'actuel mémoire qui s'adresse,
semble-t-il, à des gens qui ont fait des promesses catégoriques
en période électorale. Quand on est gouvernement, il appartient
de livrer la marchandise.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Brome-Missisquoi.
M. Russell: M. le Président, simplement quelques
questions. Il semble que si vous demeurez dans cet édifice depuis un an,
vous avez obtenu la coopération du gouvernement précédent.
Le 15 novembre, la lumière s'est allumée. Vous n'avez pas d'autre
problème maintenant que d'aménager les locaux qui conviennent
à la situation ou aux besoins de cette coopérative. J'aurais
quand même quelques questions. Est-ce que cette coopérative paie
pour ces locaux quelque somme que ce soit, l'entretien ou...
M. Tessier: Je peux répondre? M. Russell: Oui.
M. Tessier: Quand nous nous sommes installés dans ces
locaux, on payait pour les dépenses, c'est-à-dire qu'on
s'était entendu avec les soeurs du Bon-Pasteur, qui occupaient les
locaux, pour payer notre partie des dépenses sur le cubage,
d'après des calculs qui avaient été faits sur le cubage
des locaux qu'on occupait. Lorsque les soeurs sont parties, le gouvernement
précédent, le ministère des Travaux publics, dont vous
dites qu'il nous a offert un bon support, nous a coupé des services
essentiels, comme par exemple, le chauffage au mois de novembre, des trucs
comme cela. Je ne sais pas, si vous demeuriez dans un appartement et qu'on vous
coupait le chauffage, à un moment donné, si vous auriez envie de
continuer encore à payer un bail. Donc...
M. Russell: Vous avez trouvé de l'énergie quelque
part.
M. Tessier: Pardon? C'est exactement ce qu'on a fait. On a
trouvé plein d'énergie dans le quartier, ce qui nous a un peu
réchauffés, parce qu'on a trouvé des chaufferettes, on a
trouvé une façon de s'organiser par nous-mêmes. Il ne faut
pas dire que c'est le gouvernement antérieur qui nous a aidés
dans ce sens. Au contraire, M. Gar-neau avait déclaré à la
télévision lui-même il était
député et est encore député de Jean-Talon
qu'il n'était pas un agent immobilier et que ce n'était pas son
problème, que les garderies se référaient à
d'autres services que le sien. C'est toute la collaboration qui nous a
été offerte par les gouvernements précédents. Je ne
sais pas si vous voyez autre chose... Enfin, on a dû se
débrouiller jusqu'ici pour maintenir les locaux. Il faut bien se rendre
compte que si on discute présentement des édifices des soeurs du
Bon-Pasteur, c'est parce qu'il y a deux ans, la Garderie coopérative
Saint-Jean-Baptiste et les gens du quartier Saint-Jean-Baptiste qui se sont
regroupés autour ont décidé d'entreprendre des luttes pour
maintenir des espaces qui étaient vitaux pour le quartier.
Les gens ont commencé à se rendre compte qu'autour d'eux,
il n'y avait plus que du béton que le maire de la ville avait construit,
de concert avec le gouvernement du temps, et qu'il fallait absolument se
réveiller pour maintenir quelque chose de vivant dans le quartier.
La Garderie coopérative Saint-Jean-Baptiste, qui occupait, un peu
par hasard, cet endroit, est devenu comme le tenon qui a permis aux
édifices de subsister jusqu'à maintenant et qui donne lieu
à la présente commission. Sinon, si on avait fait ce qu'on nous a
dit il y a un an et demi exactement, et s'en aller, s'il n'y avait pas eu
d'intervention, à un moment donné, pour nous permettre de rester
où on est actuellement... On nous avait dit, il y a un an et demi, que
les contrats de démolition étaient déjà
donnés ou presque donnés. Cela fait un an et demi de ça.
On nous l'a répété il y a six mois, jusqu'aux
dernières élections.
Il ne faut pas se leurrer, on peut se raconter toutes sortes de belles
histoires, mais, si l'édifice actuel demeure, c'est en partie à
cause des enfants et des gens du quartier qui ont cru, à un moment
donné, qu'il était possible de vivre dans un quartier et que,
même s'il y avait déjà énormément de
promesses de toutes sortes qui avaient été faites par rapport
à ça, peut-être l'énergie de gens pouvait avoir une
chance de réussir. C'est comme ça que...
M. Russell: Est-ce que votre garderie fait ses frais actuellement
ou est-ce qu'elle vit de subventions, de contributions?
M. Tessier: La garderie fait ses frais actuellement,
c'est-à-dire que les parents, pour une part, paient et le
ministère des Affaires sociales, selon le système de prestations
prévu, donne des subventions à certains parents, comme à
n'importe quelle garderie de la province de Québec.
M. Russell: Maintenant, l'autre question: Si cet édifice
dont on parle tant depuis quelques jours vous était remis pour $1,
est-ce que vous pourriez trouver des fonctions pour cet édifice? S'il
vous était loué pour $1, non pas vendu, pour $1 par
année.
M. Tessier: Vous parlez de l'ensemble de l'édifice?
M. Russell: L'ensemble de l'édifice.
M. Richard (Alain): C'est sûr que ça nous donnerait
un choc, mais je pense qu'il y a suffisamment d'énergies qui se sont
manifestées ici même à cette commission. Il y en a encore
qui attendent dans le quartier, qui attendent des trucs comme ceux-là
pour agir. Je pense qu'effectivement, il y aurait à considérer
une offre de ce type. Je ne peux pas vous dire qu'il y aurait des projets ou
des plans qui seraient forgés dès demain matin; sûrement
pas. Mais je pense que ce qu'on propose et ce qui est derrière nous dans
le quartier se mettraient en route.
M. Russell: Vous dites que ce serait un choc, mais il faut aussi
comprendre le choc de l'autre côté, lorsqu'on a ces
édifices qui, souvent, ont été achetés à des
prix assez imposants du gouvernement, qui ont été
réaménagés souvent et dont on ne trouve aucune
utilité. C'est aussi un choc pour l'ensemble des contribuables de la
province. C'est la raison de ma question. Je comprends que cela vous donnerait
un choc si vous cherchiez des locaux et si on vous tombait...
M. Richard (Alain): Si, en l'occurrence, cela avait
été acheté au coût de $4 millions et on trouvait
ça aberrant, à l'époque, d'acheter un truc de $4 millions
pour le démolir, effectivement.
M. Russell: Ce serait encore pire de dépenser $4 millions
ou $5 millions en plus et de ne pas s'en servir.
M. Richard (Alain): II faudrait voir ce que coûteraient,
à ce moment-là, des édifices totalement nouveaux
là-dessus. Je pense qu'il faut faire la balance entre les deux.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Taschereau.
M. Guay: M. le Président, le député de
Charlevoix a évoqué que le gouvernement devait maintenant livrer
la marchandise, mais comme il a, jeudi dernier, affirmé qu'il pensait
effectivement que le gouvernement ne démolirait pas le couvent des
soeurs du Bon-Pasteur, il a bien précisé qu'il ne voudrait pas
nous reprocher ce geste que nous allons poser. C'est donc forts de la
solidarité du député de Charlevoix qu'effectivement, nous
envisageons de sauver le couvent des religieuses du Bon-Pasteur et, par le fait
même, l'emplacement de la Garderie Saint-Jean-Baptiste.
Je voudrais féliciter, M. le Président, les auteurs de ce
mémoire, que je trouve particulièrement bien fait, parce qu'il
évoque, d'une part, la dimension de la garderie, les problèmes de
la garderie et aussi il évoque, en même temps, tout un quartier
qui, très souvent, dans les mémoires qui sont
présentés à cette commission, fait un peu figure de parent
pauvre ou figure d'oublié. On parle de toutes sortes de projets, de
maquettes, de trucs à démolir ou à construire ou
d'habitations. Même quand on parle d'habitations, de ramener la vocation
domiciliaire, très souvent, on oublie qu'il y a une vocation
domiciliaire qui existe à l'heure actuelle, qui est celle de tout un
quartier, le quartier Saint-Jean-Baptiste, et qui doit, à mon avis,
être la priorité de cette commission, en ce sens que ce quartier
et sa vocation, pour la population qui y habite, non pas pour une autre
population, doivent donc être sauvés et l'aménagement de la
colline parlementaire, il me semble, doit s'intégrer dans ce respect que
nous devons avoir pour le quartier tel quel ou tel qu'il pourrait être
rénové, mais pour et, jusqu'à un certain point, dans la
mesure du possible, par la population même du quartier
Saint-Jean-Baptiste.
En ce sens, la garderie Saint-Jean-Baptiste est en quelque sorte le
symbole de tout ce quartier et sa lutte est aussi le symbole de tout un
quartier en pleine renaissance qui lutte pour survivre et qui devrait, je
crois, recevoir, en cela, l'appui du gouvernement.
On a souvent invoqué qu'il s'agissait d'un problème de
garderie et uniquement de garderie. C'est absolument faux. La garderie est le
symbole de tout ce quartier. Il demeure que la garderie, comme vous l'avez
évoqué, est séparée du reste du quartier par
l'autoroute parce que c'en est une, Saint-Cyrille, c'est en ces termes
que la Chambre de commerce l'a qualifiée tantôt et je me
demandais, de votre côté, si vous aviez des idées ou des
suggestions quant à la façon dont nous pourrions ramener les axes
de communication nord-sud entre la partie nord de Saint-Jean-Baptiste au nord
de Saint-Cyrille et la partie sud où est située la garderie.
M. Tessier: Je pourrais vous dire un peu, en boutade, ce qu'on
nous avait répondu à un certain moment, c'est-à-dire des
projets dont on avait eu conscience à un certain moment; on nous disait
alors qu'on allait relier, par exemple, le gros édifice qui se construit
tout près de chez nous au Grand Théâtre par un souterrain.
On pourrait dire, en boutade, de la même façon, qu'on pourrait
relier la garderie, ou ce qui pourrait devenir un nouveau complexe d'habitation
du quartier Saint-Jean-Baptiste, par un souterrain ou par une passerelle, tout
simplement comme il se fait dans plusieurs quartiers où on trace un
boulevard qui, par malheur, sépare des édifices, sépare
des quartiers en deux; comme on le fait souvent également pour relier
une école à un quartier, lorsqu'il y a un grand boulevard qui
sépare, pour des fins de sécurité.
Il s'agit simplement de traverser environ 300 pieds de béton.
Cela peut physiquement se concevoir en termes architecturaux, je pense, un lien
entre ces deux milieux, pour autant qu'on donne à cette partie du
quartier des fins qui le justifie.
Il est évident que si on démolissait partout autour et
qu'on conservait seulement un ilôt qui serait la garderie
Saint-Jean-Baptiste, cela pourrait paraître ridicule administrativement
et peu rentable de construire des liens qui pourraient relier cet ilôt au
quartier.
Notre mémoire s'inclut dans tout un ensemble de données
que, je pense, vous avez reçues jusqu'ici, dont certaines vont dans le
sens de la conservation des présents édifices, de
l'amélioration structurale de ces édifices et qui
débouchent sur certains projets d'habitation ou d'organisation de vie
communautaire. Pour autant que la vie de cette partie du quartier devient une
préoccupation, je pense qu'il est assez facile architecturalement
parlant de concevoir un lien entre le bas du quartier, entre l'endroit
où les gens vivent et l'endroit où les gens pourraient venir
vivre un peu de façon moins polluante.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie d'être
venus nous présenter votre mémoire.
J'inviterais maintenant le Conseil des monuments et sites du
Québec Incorporé, en la personne de M. André Robitaille,
à venir nous présenter son mémoire.
Conseil des monuments
et sites du Québec et l'Ordre des architectes
du Québec
M. Robitaille (André): M. le Président, je voudrais
vous présenter deux représentants de l'Ordre des architectes du
Québec. A ma gauche, M. Benoît Demontigny qui est en même
temps président de la Société des architectes de la
région de Québec, et M. Gilles Chabot, qui est le
secrétaire du même organisme. A ma droite, Serge Viau qui est le
vice-président du Conseil des monuments et sites du Québec.
Si vous le permettez, quant à l'Ordre des architectes du
Québec, tout le monde connaît très bien cet organisme
depuis longtemps, mais sur le Conseil des monuments et sites, seulement
quelques mots, pour vous dire rapidement le but du mouvement.
Le Conseil des monuments et sites date à peine de deux ans et a
pour but la protection et la mise en valeur des sites et des monuments du
Québec et la recherche d'un milieu de vie toujours
amélioré, d'une qualité de vie meilleure.
Le conseil, à ce jour, compte à peu près trois cent
membres, spécialistes et personnes qui sont intéressées
à la sauvegarde de leur milieu, et des édifices et, en même
temps aussi, de la protection des ensembles architecturaux, autant les villes
que les villages. En plus, nous avons, une douzaine de groupes régionaux
qui sont en formation et qui, chacun dans son coin, travaillent à
améliorer, à sauvegarder et à mettre en valeur nos
monuments anciens, en particulier, et l'ensemble du milieu architectural dans
lequel nous vivons. Alors, M. le Président, je vais demander à
mon vice-président de bien vouloir lire notre rapport.
M. Viau (Serge): C'est-à-dire que je vais m'at-tarder sur
la première partie du mémoire, quitte à résumer
très rapidement la deuxième partie du mémoire qui traite
surtout de cas particuliers.
Le Président (M. Marcoux): Je vous demanderais, comme aux
autres déposants, de prendre au maximum 20 minutes pour la
présentation des éléments essentiels du mémoire,
que les membres de la Commission ont eu le temps de lire avant la séance
présente, et pour qu'en même temps, nous puissions avoir le
maximum de temps pour la période de questions.
M. Viau: D'accord. Depuis quelques années
déjà, nous avons abouti à une impasse sur la colline
parlementaire. Aux plans originaux, beaucoup de changements ont
été apportés, plusieurs des objectifs de départ
n'ont pas été respectés ou, du moins, l'état
d'avancement des travaux nous laisse sceptiques quant à leur
possibilité de réalisation. Alors, nous faisons deux
hypothèses; nous disons qu'arrêter les travaux
d'aménagement actuellement nous laisserait dans un non-sens total,
c'est-à-dire que la circulation des piétons n'est pas
organisée, l'agencement fonctionnel est incohérent et il existe
des barrières et séparations brutales comme le boulevard
Saint-Cyrille et l'autoroute Dufferin. Le transport en commun n'est pas
intégré, l'échelle des constructions et des espaces nous
incite à les fuir plutôt que de s'y sentir à l'aise.
D'un autre côté, poursuivre les travaux tels
qu'amorcés dans la même ligne de pensée, selon les
mêmes guides d'aménagement, ne ferait que grossir les
problèmes presque jusqu'à leur caricature. Le plan guide du
départ n'existe plus, les principaux intervenants, le gouvernement
provincial et la ville de Québec, agissent indépendamment sur des
secteurs contigus, au nord et au sud du boulevard Saint-Cyrille, comme cela a
déjà été mentionné, les développeurs
privés agissent aussi de façon individuelle et les pressions
qu'ils exercent contraignent les décisions.
Le prix des terrains monte et personne ne sait comment réaliser
l'intégration résidentielle tant souhaitée qui fait
pourtant partie des plans originaux.
La densité et la concentration augmentera encore et on accusera
des tiers de ne pas régler les problèmes connexes et essentiels
de la circulation, du stationnement et du transport en commun. Comme si on
voulait se décharger des responsabilités: Ah non, ce n'est pas
moi, c'est la Commission de transport, ah non, ce n'est pas moi, c'est Parc
Canada ou le ministère des Affaires culturelles.
Alors, c'est l'esprit de notre mémoire, nous voulons provoquer
une réflexion de base sur les objectifs premiers qui ont
présidé à l'aménagement de la colline
parlementaire. Alors, il faut quand même terminer cet aménagement
de la colline parlementaire, mais il nous faut aussi constituer un plan guide
sur la base d'objectifs renouvelés, pour palier le désemparement
actuel des planificateurs ou des preneurs de décisions, il faut
retourner en arrière, pour réévaluer les principes de
base, pour en élaborer de nouveaux, qui correspondent mieux à nos
préoccupations actuelles. La science de l'aménagement a beaucoup
évolué au cours des dix dernières années, et cette
évolution nous a souventefois obligés à modifier
humblement nos optiques. Il y a un des professeurs que
j'avais, c'est peut-être le meilleur conseil que j'aie
reçu, qui, à un moment donné me disait: Quand tu es rendu
dans une impasse, quand c'est impossible d'avancer, retourne ton plan à
l'envers et recommence, dans le sens de te libérer un peu du cadre dans
lequel tu t'es enfermé.
Essayons de revoir rapidement certains des principes. Bien sûr,
notre rélexion ne sera pas complète, tout au plus
indiquera-t-elle la direction que nous voudrions qu'elle prenne.
Cité parlementaire, ensemble symbolique? La création d'une
cité, qu'elle soit parlementaire, administrative, universitaire,
artistique ou même militaire, à l'intérieur d'une autre
cité, la vraie, celle-là, la cité politique, a de tout
temps procédé de sentiments de fierté, d'ostentation, de
prestige auxquels on accrochait une énorme valeur de symbole, un peu et
peut-être même beaucoup à la manière de
Versailles.
Ces valeurs, autrefois classiquement importantes, ont aujourd'hui perdu
toute connotation humaine et sociale au moment où l'on veut rapprocher
la base du sommet. Contraindre les fonctions dans des environnements
hermétiques, clos, matériellement ou symboliquement, nous
éloigne de la richesse des interdépendances. Les valeurs
d'identification des sociétés adultes sont beaucoup mieux
protégées par le développement de la culture dont la
protection des environnements humains est une des composantes extrêmement
importantes que par l'édification d'une cité parlementaire avec
un grand C et un grand P, faite au détriment de ces environnements
humains.
Le mythe de la concentration: Principe abondamment discuté, sinon
controversé, la concentration non contrôlée crée
souvent un mouvement irréversible qui amène une surconsommation
d'espace et une surexploitation de fonctions presque en formes de spirales,
éliminant ainsi d'autres fonctions non moins essentielles, mais qui ne
peuvent en supporter le prix. L'excellent principe à la base du
phénomène de la concentration, qui est le gros groupement des
forces, est complètement annihilé lorsque celle-ci est
surdéveloppée. Ainsi, par exemple, l'accumulation de la fonction
administrative des édifices à bureaux finit par exclure les
services qui lui sont essentiels. Le phénomène a
été constaté à New York à propos des
restaurants et commerces de toutes sortes qui ont été
éliminés des secteurs administratifs et des mesures draconiennes
ont dû être prises pour corriger la situation.
De même pour la fonction résidentielle qui s'accommode mal
de la congestion ainsi créée et des coûts
élevés des terrains.
Par ailleurs, les problèmes qui se juxtaposent, principalement en
termes de transport et de stationnement des biens et des personnes,
s'accroissent vertigineusement à des coûts publics et sociaux
difficilement supportables, autoroute Duffe-rin, stationnements souterrains,
etc.
Plus que de quantité des activités qu'on veut concentrer,
il faut maintenant parler de qualité et surtout de
variété. Le niveau et la qualité d'échange, base de
l'animation des villes, s'en trouvent augmentés et étalés
dans le temps et l'espace; l'échelle s'amenuise et l'humain y trouve sa
place. Le prétexte de l'efficacité fonctionnelle du regroupement
est de moins en moins valable maintenant que les moyens de communication
principalement électroniques sont parfaitement développés,
flexibles, adaptables et très souvent inexploités.
Déjà, le gouvernement a transporté plusieurs
services et des sections complètes de certains ministères
à Montréal; combien de sièges sociaux de grandes
compagnies, aux Etats-Unis, se sont établis en pleine campagne,
préférant cette qualité de vie au stress traditionnel des
grands centres.
Pour trouver l'équilibre, il faudra briser certaines tendances,
relevant principalement de l'économie des sols, en mettant un frein
à la spéculation, en limitant les possibilités
d'exploitation, de zonage par exemple, et en obligeant les intervenants, qu'ils
soient publics ou privés, à penser et surtout à
réaliser des projets plus "intégraux" (dans le sens de
"comprehensive", le mot anglais.)
Conscience plus aiguë de l'environnement. Le rêve du
planificateur traditionnel de construire des ensembles monumentaux et
"architecturés" a aujourd'hui succombé à la volonté
d'un accord paisible avec l'environnement naturel, ou humain, ou construit. Cet
objectif nouveau d'intégration subtile, sobre et sans traumatisme
s'attache à deux aspects fondamentaux: le site naturel et
l'environnement construit. La géographie même du site, la
qualité même du promontoire de Québec, la difficulté
des pentes qu'on y trouve appellent un énorme respect. On ne doit pas
s'opposer à ce site, on doit composer avec lui. En ce sens, à
notre avis, il est incompatible avec des édifices en hauteur; les tours
élevées ont toujours eu énormément de
difficulté à s'intégrer les unes aux autres, et encore
davantage sur un site élevé. Quelqu'un a-t-il déjà
imaginé le promotoire de Chartres, de Carcassonne ou la Citadelle de
Calvi avec des édifices en hauteur? C'est à peu près
impensable.
Il s'agit de ce type de territoire géographique dont le respect
s'impose. D'ailleurs, des densités d'utilisation presque aussi
élevées auraient pu être atteintes avec un concept bas.
Nous ne mentionnerons même pas les problèmes climatiques que cette
situation peut causer; d'autant plus qu'aucune étude approfondie n'a
été effectuée sur le sujet alors que les techniques
d'analyse sont parfaitement au point depuis très longtemps.
Par ailleurs, l'aménagement quasi monofonctionnel de la colline a
créé une rupture totale entre les quartiers
périphériques. La continuité et
l'homogénéité architecturale et fonctionnelle avec le
Vieux-Québec et les quartiers résidentiels
périphériques ont disparu complètement. Il y a une
discordance totale avec leur facture basse et dense; le contraste trop
frappant, accentué par les pentes, loin de mettre en valeur, comme la
théorie le voulait, cette fameuse théorie de la plate-bande de
roses entourée d'un hémicycle d'épinettes bleues,
soulève un très fort sentiment d'inconfort.
Ces ruptures et discordances brusques, tant architecturales
qu'économiques et sociales, doivent s'atténuer car on assiste
à une destructura-
tion lente et progressive des quartiers périphériques. Les
quartiers Saint-Jean-Baptiste et Montcalm ont complètement perdu leur
vitalité résidentielle et les citoyens qui y résident
encore subissent malgré eux, et de manière sournoise, presque
machiavélique, des pressions indues pour s'en éloigner.
Il faudra désormais se pencher sur les conséquences, sur
ces quartiers, de toute politique d'aménagement de la colline et prendre
des mesures efficaces pour enrayer cette destructuration sans fin. Il incombe
éthiquement à tout planificateur cette responsabilité de
juger des retombées même externes de ces décisions.
La compartimentation des ensembles dans une ville est en partie
responsable de cette situation. La ville, étant un tissu inextricable de
fonctions et d'activités, ne peut pas être découpée
à la manière d'un casse-tête, comme les techniques du
zonage ont eu tendance à le faire.
Sauf pour certains usages industriels nuisibles, les ensembles et
parties d'une ville doivent s'interpénétrer, les transitions
doivent s'adoucir.
La colline parlementaire ne devrait pas être exempte de ce
principe, c'est pourquoi d'ailleurs il est impossible d'en préciser des
limites.
Ainsi, que se passe-t-il après les vingt étages de la
Place de la Capitale, derrière l'épinette bleue dont on parlait
tantôt? Et qu'arrive-t-il en descendant la côte, derrière la
tour de Place Haute-Ville? Encore une disproportion énorme
accentuée par les pentes.
Sur la base de ces discussions précédentes, le Conseil des
monuments et sites et l'Ordre des architectes du Québec recommandent:
Premièrement, d'abandonner le concept d'une cité parlementaire
avec ce qu'il pouvait contenir de symbolisme naïf, de culte de l'image et
de conséquence néfastes sur les environnements physiques tant
pour ceux que la cité côtoie que pour ceux qu'elle a
détruits.
De concevoir ce secteur comme une partie intégrante de la trame
urbaine existante, d'attacher une plus grande importance au secteur
périphérique et d'adoucir considérablement les
transitions. Un très grand respect de la qualité du site
géographique et des environnements humains devrait être une
condition essentielle de toute planification nouvelle.
De poursuivre ou d'adapter la politique de déconcentration des
édifices administratifs gouvernementaux déjà
amorcée sur laquelle les schémas d'aménagement
régionaux, métropolitains et urbains élaborés dans
le cadre des planifications de l'OPDQ, de la CUQ et de la ville de
Québec ont établi un consensus, à savoir la
création de trois pôles régionaux d'équilibre,
quatre si on inclut la rive sud, à Sainte-Foy, Le Bourgneuf et
Beauport.
De limiter le plus possible ou même d'interdire l'implantation de
nouveaux édifices à bureaux sur la colline, du moins pas tant
qu'on n'aura pas défini des mécanismes qui permettront non plus
de souhaiter, mais de réaliser cette intégration
multifonctionnelle tant discutée.
De ne plus permettre la construction sur la colline d'édifices en
hauteur, afin de mieux res- pecter la géographie du site et le gabarit
des quartiers environnants. Revenir à une trame plus serrée et
moins haute. Eliminer les nombreux "no man's land".
De décréter un moratoire d'un an sur toute construction
dans ce secteur pour permettre de préparer un plan d'ensemble sans
pression et avec sérénité. Entre-temps, la politique de
déconcentration suggérée plus haut servira de tampon. Un
an, ce n'est pas très long.
D'amorcer la préparation d'un plan d'ensemble
détaillé en mettant en place, soit un groupe de travail, soit une
commission spéciale, soit un organisme de planification à
caractère permanent, indépendant ou à travers des
organismes régionaux renouvelés. Ce groupe, commission ou
organisme, devra avoir des pouvoirs exécutoires qui rendront le plan
obligatoire pour tout intervenant, et devrait aussi obtenir les pouvoirs de
contrôler le développement. Tout autre organisme de nature
consultative serait inefficace. Ce groupe devra établir un processus
complet de consultation et ce, de façon soutenue, tout au cours de la
planification afin que le plan ainsi élaboré obtienne
l'assentiment de tous les groupes concernés.
Abordons maintenant quelques cas particuliers, de façon assez
résumée. Ces cas particuliers pourraient servir de base à
la préparation du plan détaillé que nous suggérons.
Nous insistons particulièrement sur les deux premiers points qui sont:
D'abord, l'intégration d'une trame d'habitation. Nous considérons
l'habitation comme la seule fonction qui puisse redonner à la colline,
tant fonctionnellement que volumétriquement, la cohésion
souhaitée. C'est elle qui animera la colline autrement que de neuf
à cinq, qui lui donnera son âme.
Un programme complet d'habitation devra être
élaboré. Ce sont les autorités publiques qui devront
être les promoteurs des divers projets, à l'aide de moyens
incitatifs, tels les baux emphytéotiques ou des primes au
développement. On utilisera, pour ce faire, les espaces interstitiels
actuellement vacants ou à fonction incompatible, on réhabilitera
certains bâtiments existants propices.
On répliquera peut-être que les coûts des terrains
sont exorbitants et ne peuvent inciter au développement d'une habitation
compatible avec la structure sociale de la région. On rétorquera
surtout que tous les moyens pour combattre cette contrainte n'ont pas
été utilisés ou étudiés, que des techniques
telles le transfert des droits de développement pourraient y arriver
avec succès.
De toute façon, quel prix peut-on payer? Les prix
élevés des terrains ou les coûts plus cachés et plus
difficilement évaluables des conséquences de la concentration
outrancière, transports, criminalité, décrépitude
des quartiers, autoroutes, etc.
La trame piétonnière. C'est le plus grand facteur de
structuration, celui qui, en mettant les éléments
diversifiés ensemble, redonnera un sens à l'aménagement et
permettra de faire jaillir l'animation propre aux villes humaines.
Le grand défaut de certaines planifications, c'est qu'elles sont
conçues de l'extérieur, en plan, à vol d'oiseau, à
très grande échelle, de sorte
qu'on perd effectivement l'échelle humaine, l'échelle du
piéton. C'est ainsi que la structure routière ou la perspective
monumentale prend de l'importance. Il faudra qu'on planifie désormais,
de l'intérieur, volumétriquement, comme à notre
échelle, pour que chaque espace devienne un lieu agréable et
vivable.
La trame piétonnière devrait être à l'origine
de la structure d'ensemble de la colline et non sa conséquence. Il
existe, au complexe G, par exemple, un mail piétonnier qui est
extrêmement intéressant mais qui ne part de nulle part et qui
n'aboutit nulle part et qui pourrait servir d'élément très
intéressant et très intégrateur. Il n'y a pas de
communication piétonnière, par exemple, entre le stationnement
d'Youville et Place Québec, alors qu'elle serait indispensable
climatiquement. Le réseau de transport n'a jamais été
planifié adéquatement.
Ces aberrations, qu'elles aient été commises par manque de
pouvoir ou de concertation ou par une obsession de sécurité ou de
moralité publique, sont des fautes contre la logique et le bon sens
qu'une planification adulte ne se permettrait pas.
Nous souhaitons aussi une très grande polyvalence des
équipements et services. Je pense que, par exemple, au complexe G, on a
commencé à se servir de l'amphithéâtre à
d'autres fins. C'est une excellente orientation. Il serait important
d'établir des protocoles d'entente entre les divers développeurs,
soit privés, soit publics, de façon que les équipements
qui sont là et qui, souvent, dorment très longtemps, soient
accessibles à toute la population.
Le palais de justice est un problème épineux et
discuté. Nous disons qu'il s'agit d'abord d'une fonction
traditionnellement installée dans le Vieux-Québec, utile à
son image et nécessaire à son animation. Perdre cette fonction
serait pour le Vieux-Québec un peu comme l'a été le
départ de l'université, perdre une partie de son âme.
Les locaux sont exigus, bien sûr, et, par certains
côtés, inadéquats, mais certains des services du palais de
justice ne pourraient-ils pas être séparés? Le
ministère du Revenu quitte l'édifice Chauveau. Il y a, je pense,
suffisamment d'espace dans cet édifice pour loger amplement le palais de
justice, d'autant plus que l'édifice Chauveau comporte de vastes salles
qui seraient conformes à la fonction.
D'ailleurs, il faudrait faire confiance un peu plus aux
possibilités de réaménagement des vieux édifices
institutionnels ou de vieux entrepôts. On en fait des choses
extraordinaires, principalement aux Etats-Unis.
Nous sommes préoccupés par la vitalité du
Vieux-Québec et nous souhaitons ardemment que les fonctions du palais de
justice demeurent dans le Vieux-Québec.
Le couvent des soeurs du Bon-Pasteur, nous disons qu'il ne s'agit pas
là d'un bâtiment de grande valeur historique, ni
particulièrement élégant.
Cependant, il existe suffisamment d'autres espaces vacants sur la
colline pour satisfaire tous les besoins de construction et, d'autre part, le
couvent actuel, récupéré, transformé, pourrait
être un des maillons essentiels du réseau d'habitation si
indispensable.
Nous sommes fermement convaincus qu'il y a là une économie
de moyens, d'argent et d'énergie, si on prend en compte
l'économie actuelle des sols sur la colline et la difficulté
réelle d'y intégrer des usages d'habitation, surtout pour les
classes défavorisées.
Aujourd'hui, il nous faut recycler nos ressources, surtout si on
considère le prix qu'il faut maintenant payer pour construire à
neuf.
Le boulevard Saint-Cyrille, l'autoroute Duffe-rin et le carré
d'Youville, le boulevard Saint-Cyrille et l'autoroute Dufferin,
évidemment, sont de très larges ruptures dans le tissu urbain. Du
point de vue climatique, ils sont des désastres. Ils semblent d'une
largeur excessive, d'autant plus qu'ils forment des goulots
d'étranglement au sortir de la colline parlementaire.
Des aménagements imaginatifs devront être
élaborés pour leur redonner une échelle plus humaine et
diminuer les effets de barrière. Peut-être est-il possible de
fermer certaines sections du boulevard Saint-Cyrille ou même de les
fermer temporairement, ou même de céder ou de vendre certains
droits aériens de manière à rétablir la
cohésion volumétrique de la colline et, par le fait même,
peut-être les liens piétonniers entre les diverses sections.
Le carré d'Youville a toujours été une
espèce de plaque tournante, la porte d'entrée principale du
Vieux-Québec, un lieu d'activités commerciales et
récréatives de toutes sortes. Pourquoi ne redeviendrait-il pas ce
qu'il a déjà été? En tout cas, elle doit être
pensée comme une partie intégrante de la colline parlementaire et
non pas laisser cela à part.
Nous demandons aussi d'inventorier, le plus en profondeur possible
toutes les techniques nouvelles d'aménagement urbain, d'incitation,
comme le transfert des droits de développement ou les politiques de
planification qui sont appliquées avec succès dans plusieurs
villes américaines et qui nous sembleraient des méthodes ou des
moyens intéressants pour faire participer les développeurs ou les
agents de développement, en fait, quels qu'ils soient, privés ou
publics, à l'élaboration ou à l'implantation de services
communautaires.
Ce que nous avons voulu, c'est jeter les bases d'une réflexion en
profondeur et nous souhaitons ardemment que tous ceux qui se pencheront
à nouveau sur le développement et l'aménagement de cette
partie importante de la région de Québec, soient capables d'une
telle réflexion. Il faut, à notre avis, repartir à
zéro, sans préjugé, revoir les objectifs et les principes
de base avec un esprit à la fois imaginatif et respectueux des valeurs
présentes.
Il nous faut surtout élaborer des moyens efficaces de mise en
oeuvre qui nous permettent de conserver un contrôle constant sur
l'ensemble et sur chacune des parties composantes. Il nous faut profiter des
expériences antérieures et extérieures susceptibles de
nous apporter grande aide. Il nous
faut aussi prévoir des mécanismes de consultation et de
concertation, souvent longs et onéreux, mais combien nécessaires
et fructueux.
Il nous faut enfin savoir évaluer les coûts et les
conséquences de notre option de développement, non seulement les
plus faciles, les plus directs, tels les coûts de construction, mais les
plus indirects, souvent ceux qui sont les plus élevés et qui ont
le plus d'incidences sociales. Il nous faut savoir partager ces coûts
équitablement chez ceux qui les occasionnent et qui en retirent souvent
les plus grands avantages et bénéfices.
Nous avons joint aussi quelques extraits du concept
général de réaménagement de la colline
parlementaire, comme effet de démonstration surtout, parce que les
concepts qui sont énoncés dans ce concept général
sont des concepts tellement généraux qu'ils font l'accord ou le
consensus de tous, mais la réalisation est toujours extrêmement
difficile.
Le Président (M. Marcoux): Monsieur le ministre.
M. Lessard: M. le Président, je tiens à remercier
M. Robitaille qui, je pense, nous amène justement à une
réflexion en profondeur sur l'aménagement de la colline
parlementaire. C'est un peu à partir des problèmes qu'il
soulève que nous en sommes, au niveau du ministère des Travaux
publics, arrivés à envisager cette commission parlementaire. En
effet, il y avait le problème du couvent du Bon-Pasteur, mais il y avait
aussi des problèmes qui nous obligeaient à nous poser un certain
nombre de questions, à savoir et vous le soulignez très
bien dans votre mémoire le mythe de la concentration. Vous
parlez, en fait, d'une certaine déconcentration en se basant sur trois
zones de la région de Québec. On peut envisager aussi une
déconcentration à l'extérieur de la région de
Québec. On a décidé, par exemple, de louer ou de faire une
construction dans Sainte-Foy pour loger le ministère du Revenu, mais
est-ce que le ministère du Revenu doit nécessairement être
à Québec? C'est une question, justement, que nous nous sommes
posée, si on parle de déconcentration. Pourquoi, par exemple, le
ministère du Revenu ne serait-il pas réparti dans
différentes régions du Québec? Avec les différents
systèmes qu'on a actuellement, avec les différents
systèmes qu'on a pour prendre contact avec des gens, il me semble qu'il
est important qu'on régionalise. Alors, c'est un peu à partir de
cela que nous avons envisagé cette commission parlementaire, mais aussi
à partir des problèmes que pose la concentration des
ministères. Si nous devons envisager, chaque fois que nous voulons loger
un ministère, la construction de grands édifices administratifs,
on est obligé de laisser de plus en plus de zones tampons qui sont
inutilisables. Si la direction des mines ne peut pas être logée
dans un édifice au ministère des Richesses naturelles, ou si le
Bureau des véhicules automobiles doit être nécessairement
logé au ministère des Transports, ou si, par exemple, telle
direction au ministère des Affaires culturelles doit être aussi
logée là, on n'est plus capable d'utiliser rationnellement les
édifices administratifs du gouvernement. C'est à partir de
là qu'on s'est posé des questions. C'est un peu sur cela que nous
avons décidé de constituer cette commission. C'est sur ces points
que le gouvernement, comme gouvernement, devra s'interroger pour l'avenir.
Vous dites au paragraphe 2.3 de votre mémoire que
l'aménagement, que les tours élevées ont toujours eu
énormément de difficultés à s'intégrer sur
un cap, si vous voulez, sur un site élevé. Vous dites que ces
sites élevés étaient à peu près
incompatibles avec des édifices en hauteur. Vous dites au
deuxième paragraphe, parce qu'il y a un problème, je pense bien,
d'utilisation maximale du sol: D'ailleurs, des densités d'utilisation
presque aussi élevées auraient pu être atteintes avec un
concept bas. J'aimerais que vous m'expliquiez.
M. Viau: Si vous vous souvenez du premier concept, le fameux
rapport Fiset qui avait préconisé une structure basse de
développement sur la colline parlementaire. Quand j'entends "basse", on
n'a pas spécifié le nombre d'étages, parce que tout
dépend du contexte dans lequel les édifices se situent. Plus on
fait des édifices en hauteur, plus, comme vous l'avez mentionné
tantôt, il faut des dégagements au sol pour tenir compte de
l'ensoleillement et des problèmes climatiques que cela pose. Il y a
énormément d'études qui ont été
réalisées par divers groupes, principalement en Ontario,
concernant les possibilités de développement de certains
secteurs, avec des édifices bas, qui rencontraient des densités
peut-être pas aussi importantes ou aussi élevées que celles
qu'on peut retrouver à New York, par exemple, mais qui rencontraient des
densités assez élevées pour répondre aux
critères économiques de développement. Il y a eu des
études, des concepts très intéressants
élaborés pour la ville de New York par les architectes Diamond
and Myers, par exemple, qui ont démontré ce
phénomène.
M. Lessard: Vous dites que, et cela rejoint la
préoccupation que je soulignais tout à l'heure, maintenant, aux
Etats-Unis, certaines entreprises commencent à envisager de se
construire non pas nécessairement dans des édifices en hauteur
dans les grandes villes de béton, mais commencent à envisager la
possibilité de se construire dans des campagnes.
M. Viau: Le phénomène est commencé depuis au
moins une dizaine d'années. Il y a énormément de
sièges sociaux de très grandes compagnies qui se sont
établis dans les campagnes justement, et cela a eu des effets
très bénéfiques sur la productivité et le
comportement des employés et des cadres. La pression de conduire deux
heures dans la circulation ou des choses comme celles-là a disparu
complètement. Les résultats se sont avérés
extrêmement intéressants, d'autant plus que la mode, à
l'heure actuelle, ou, du moins, la tendance, à l'heure actuelle, aux
Etats-Unis, est très marquée dans ce sens.
M. Lessard: C'est dans ce sens qu'on pourrait envisager aussi,
pour le gouvernement, de décentraliser ou de déconcentrer
certains ministères.
Le palais de justice, je comprends que vous dites: Bon! On n'a pas de
choix, mais, quand même, vous êtes architecte, je pense, et, en
tenant compte de la nécessité de le situer à une place ou
l'autre, vous favorisez, en fait, que le palais de justice et tout ce qui
serait justice reste dans le Vieux-Québec. Quand vous parlez de
l'utilisation du site de l'ancien hôtel Saint-Louis, qui a
été détruit...
M. Viau: Oui, c'est-à-dire qu'il y a déjà eu
un projet de construction d'une annexe au palais de justice, qui était
intéressant, à notre avis. Cela est disparu de la circulation. On
se demande tout simplement ce que cela est devenu. Est-ce qu'il n'y avait pas
là un moyen d'agrandir le palais de justice et d'améliorer la
fonction de la justice à cet endroit? Par contre, je ne sais pas les
superficies que ça donnait. André, peut-être pourrais-tu
nous donner... C'était très grand. L'annexe, telle que
proposée, était relativement grande, je pense.
M. Lessard: Vous ne savez pas à peu près quels
chiffres?
M. Robitaille (André): On ne peut pas vous donner les prix
exacts, mais je sais que le projet avait été étudié
à fond et comprenait la reconstruction du petit parc existant
actuellement, plus les autres édifices qui servent actuellement,
d'ailleurs, pour le palais de justice. Cela doublait probablement les surfaces
actuelles.
M. Lessard: Quand on nous parle du palais de justice, tel que
décrit ou selon les besoins qu'on nous précise, on nous parle
presque d'un édifice "G", presque la superficie d'un tel édifice,
700 000 pieds carrés.
M. Viau: Ecoutez!...
M. Lessard: Cela veut dire à peu près les 30
étages de Trizec.
M. Chabot (Gilles): II ne s'agit pas d'un projet de cette
envergure. Effectivement, c'est un projet qui avait cinq niveaux, si ma
mémoire est bonne, incluant les combles. Cela a été fait
vers 1969 et présenté au ministère des Travaux publics
à ce moment-là. C'était loin d'avoir l'envergure du
complexe G, heureusement.
M. Lessard: Ce qu'on nous demande, c'est de l'envergure à
peu près du complexe G.
M. Chabot: Moi, je voudrais ajouter un commentaire sur la
fonction de la présence du palais de justice dans le
Vieux-Québec. Nous sommes d'accord avec cette fonction. Mais, par
contre, il ne faudrait pas oublier quand même un certain contrôle
sur la prolifération de la transformation de résidences en
bureaux pour des servi- ces juridiques, c'est-à-dire qu'on en sera
bientôt rendu à un Vieux-Québec où il n'y aura que
des avocats et on aura quand même un Vieux-Québec à
édifices à bureaux, dans ce cas.
Il faudrait quand même qu'il y ait un contrôle sur la
transformation des bâtiments dans le Vieux-Québec.
M. Lessard: Comme architecte, je vous poserais deux
dernières questions. Vous dites que le Bon-Pasteur n'a pas une valeur
historique. Il faudrait quand même souhaiter qu'il soit conservé
étant donné qu'il serait difficile de le remplacer ou que cela
coûterait extrêmement cher pour le remplacer et construire un
édifice semblable.
Pourriez-vous m'indiquer si le Jefferey Hale a une valeur
historique?
M. Chabot: Je vous répondrais ainsi. Ce sont des
édifices que je placerais dans une catégorie semblable. Il y a
différentes façons d'évaluer un édifice. Si on
regarde le complexe G et le couvent du Bon-Pasteur, le choix, en ce qui
concerne l'esthétique est très facile à faire.
Le Bon-Pasteur y gagne sûrement à la comparaison. C'est
peut-être un peu malheureux, mais ce complexe G n'aurait jamais dû
être érigé sur la colline parlementaire. L'édifice
du Bon-Pasteur et l'ancien Jefferey Hale sont sûrement mieux
intégrés à l'ensemble de la haute ville que ne le sera
n'importe quel autre complexe G à venir ou palais de justice et on doit
aussi ne pas se presser, c'est-à-dire qu'il ne faut pas créer un
autre trou il faut l'identifier trou Racine au carré
d'Youville durant dix ans.
Si on démolit un édifice comme le couvent du Bon-Pasteur
pour hériter d'une excavation ou d'un terrain non exploitable ou non
fréquentable, ce n'est pas une valeur positive. Je pense que la valeur
de ces édifices doit être prise par comparaison avec ce qu'on peut
y mettre et ce que l'on y trouve présentement.
M. Lessard: Je vous remercie. Mes collègues vous poseront
d'autres questions. Je retiens en particulier la recommandation
générale numéro 6, savoir décréter un
moratoire d'un an sur toute construction dans ce secteur en vue d'avoir le
temps de préparer un programme qui soit assez humain et qui ne soit pas
fait sous pression. Nous verrons. Merci.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Charlevoix.
M. Mailloux: M. le Président, je vous avouerai qu'au fur
et à mesure qu'avancent les travaux de la commission, au fur et à
mesure qu'on nous envoie davantage des spécialistes à la table,
cela devient pour un profane assez difficile de faire certaines
interventions.
De toute façon, au nom de l'Opposition officielle, j'ai pris
quelques notes durant la lecture du mémoire par les intervenants et on
constate que le mémoire, comme d'autres, fait état des erreurs
de
parcours que les dernières années nous ont fait voir. On
signale également différents intervenants, villes, gouvernement,
etc., dédoublement qui a apporté des situations contradictoires
dont on réalise les effets actuellement.
Dans votre recommandation numéro 2, vous indiquez de quelle
façon devrait s'effectuer le mariage avec la trame urbaine existante sur
la colline parlementaire ou dans la périphérie et vous appuyez la
décentralisation déjà commencée de la colline
parlementaire.
Vous rejoignez également d'autres intervenants quant aux
édifices en hauteur dont tous se plaignent et pour de nombreuses
raisons. Votre suggestion de geler pour un certain temps toute construction
dans ce secteur permettrait au gouvernement de faire le point sur les
idées avancées devant la commission et permettrait aussi sans
doute aux spécialistes de conseiller le gouvernement et de soumettre
à la population, parce que je pense que cette fois il faudra que la
population soit consultée avant que le gouvernement ne prenne des
décisions...
J'imagine que le Conseil des monuments et sites est un interlocuteur
plus que valable et, au nom de l'Opposition officielle, je vous remercie des
suggestions apportées.
Je voudrais faire, si on me le permet, une mise au point parce qu'on
parle beaucoup d'erreurs et on charge passablement les politiciens devant cette
commission. Je suis passé moi-même et au ministère des
Transports et au ministère des Travaux publics. Je dois confesser, non
pas pour charger d'autres politiciens, qu'en ce qui concerne le boulevard
Saint-Cyrille ou Dufferin-Montmorency, je n'ai fait que terminer des travaux
déjà amorcés.
Quant aux édifices sur la colline parlementaire, le seul geste
que je pourrais me reprocher, c'est l'accord que j'ai donné avant de
laisser la fonction de ministre des Travaux publics. Il s'agit du projet de La
Laurentienne sur la colline parlementaire. L'intention gouvernementale se
situait à de l'aide à apporter à une mutuelle
canadienne-française qui disposait de terrains et qui voulait offrir
certains espaces au gouvernement. J'ai également commencé la
décentralisation de la colline parlementaire par la décision que
j'avais rendue quant au projet de L'Industrielle dans la pointe ouest de
Sainte-Foy. Je ne sache pas, malgré que je ne sois pas architecte ni
spécialiste dans la matière, que le projet tel qu'on me l'a
montré, qui n'est pas tellement en hauteur, qui respecte le cachet de
verdure de la pointe ouest de Sainte-Foy dont la trame n'est pas tellement, je
pense, brisée... Il y a un mariage assez facile avec la nature de la
pointe ouest de Sainte-Foy et cela respecte également les artères
de communication déjà en place.
Je disais tantôt qu'on charge beaucoup, devant cette commission
parlementaire, les politiciens municipaux ou provinciaux. Je voudrais faire
remarquer à mon collègue qui, aujourd'hui, est titulaire du
ministère des Travaux publics, que les politiciens ne sont que des
employés occasionnels et non syndiqués.
M. de Belleval: Non syndiqués.
M. Mailloux: Les fonctionnaires... On dit qu'à Ottawa, les
technocrates et les fonctionnaires sont devenus omnipuissants. Je pense qu'au
fur et à mesure que le ministre des Travaux publics avancera dans
l'étude des dossiers, il s'apercevra que les fonctionnaires, à
certains niveaux, deviennent omnipuissants également à
Québec et que toutes les études qui sont faites et les
mémoires qui sont présentés par les différents
intervenants, aussi spécialistes soient-ils... Le politicien, à
un moment donné, avant qu'il n'ait pu prendre une décision, il
est déjà parti et le fonctionnaire demeure en poste et il y a une
école de pensée. Je me rappelle qu'au ministère des
Transports, on a parlé beaucoup du je ne sais pas si c'est un mot
français gigantisme de la construction du boulevard
Dufferin-Montmorency ou de Saint-Cyrille. Je dirai au ministre des Transports
que je me suis battu, comme profane, pendant des années avec mes propres
fonctionnaires, qui étaient spécialistes en la matière. Je
voyais, comme profane, briser des cachets de verdure dans tout le
Québec. Mais, il constatera lui-même qu'il devra faire des rappels
très souvent et je vois le ministre de la Fonction publique, qui
était également comme fonctionnaire, à ce
moment-là, et qui doit, je pense, avouer que ces rappels, malgré
les différents intervalles... Ce sont les politiciens qui, par la suite,
mangent le contrecoup de toutes les bêtises qu'on rapporte dans les media
d'information ou ailleurs.
Et, comme dernière réflexion, parce que je n'ai pas de
question à poser, le ministre des Travaux publics s'est tantôt
demandé pourquoi il n'y avait pas de décentralisation plus
accentuée à travers le Québec. Je lui réponds ceci,
après avoir été quelques années dans
l'administration de la chose publique provinciale, c'est que, plus vous
décentralisez, plus, quand il s'agit de prendre une décision
finale, ces choses reviennent sur votre bureau, ici même à
Québec.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Brome-Missisquoi.
M. Russell: M. le Président, d'une façon
très sommaire, je voudrais féliciter ceux qui ont bien voulu
venir nous présenter ce mémoire ce soir. Personne ne met en doute
leurs qualifications. Je pense que c'est un groupe bien qualifié pour
exprimer un jugement sur l'aménagement de cette colline parlementaire,
qui est en discussion depuis nombre d'années. Cela fait une vingtaine
d'années qu'on en entend parler. Il y a certainement des gouvernements
qui ont bougé et ont créé un mécontentement
d'aménagement. Ceci, peut-être, a porté les gens
compétents à agir plus rapidement et à bâtir leurs
critiques de façon plus forte. Je me rappelle un peu, lorsqu'on parle du
palais de justice, avoir vécu ces aménagements qu'on a
présentés dans le temps et, encore là, la contradiction a
commencé encore, et la chicane interne qu'on connaît, qui est
toujours à se répéter. Il y a eu un moratoire d'un an qui
a été déclaré et, comme vous le savez, il y a eu
des changements et
le moratoire est encore en cours. Cela fait déjà huit ans,
sept ans du moins, la huitième année s'en vient, et la
bâtisse n'est pas encore faite. Ce qui veut dire ceci: Ce n'était
pas si nécessaire ou si urgent qu'on voulait le laisser croire dans le
temps. Mais, aujourd'hui, on nous présente, le ministre actuel nous
laisse croire que le monument que ces gens veulent avoir est énorme.
Donc, je crois qu'il n'y a pas de possibilité de l'aménager dans
le Vieux-Québec. Il faudrait faire d'autre chose, peut-être suivre
les suggestions qui ont été faites par des administrateurs
précédents.
Je me rappelle dans les années 60, on voyait la colline
parlementaire avec des édifices simplement parlementaires et des bureaux
administratifs déménager dans la métropole de la province.
On se disait à ce moment-là qu'avec l'électronique
d'aujourd'hui, il n'y avait plus de problème. On peut faire
l'administration de la métropole et les parlementaires pourront
siéger ici à Québec. C'est de là qu'a jailli la
lumière pour qu'on puisse agir de façon assez rapide pour
répondre à un besoin de centralisation de l'administration qui a
commencé l'aménagement de la colline parlementaire.
Entre autres je ne veux pas m'étendre là-dessus, je
sais qu'il y a d'autres mémoires à présenter c'est
simplement quelques remarques pour vous dire que je sais que vous avez
vécu ces moments. Je reconnais certaines des figures que j'ai
déjà vues. Je sais que vous connaissez les discussions qui ont eu
lieu dans le temps et c'est à la lumière de ces discussions que
vous avez bâti votre mémoire qui est très bien fait; vos
critiques sont constructives. J'espère que cela fera jaillir la
lumière pour éclairer le présent gouvernement ou ses
successeurs, pour continuer à aménager la colline parlementaire
de la façon la plus accueillante possible afin que la population du
Québec soit f ière de sa capitale.
Le Président (M. Marcoux): Sur ces propos
circonstanciés des différents représentants de partis, je
demanderais aux autres députés qui désirent prendre la
parole de se limiter à des questions. Le député de
Laprairie.
M. Michaud: M. le Président, messieurs, je vous remercie
de votre mémoire. Vous mentionnez dans ce mémoire le
prétexte de l'efficacité fonctionnelle du regroupement qui est de
moins en moins valable. J'aimerais que plusieurs personnes prennent avis de
votre énoncé parce qu'il est malheureusement trop vrai
maintenant.
J'aimerais vous poser une petite question. A la page 14, vous
mentionnez: "Ces aberrations, qu'elles aient été commises par
manque de pouvoir ou de concertation ou par une obsession de
sécurité ou de moralité..." Qu'est-ce que vous voulez dire
par sécurité ou moralité?
M. Viau: On faisait un peu une cocasserie, on faisait
référence à l'époque de la construction du tunnel
sous le boulevard Saint-Cyrille qui devait relier Place-Saint-Cyrille ou Place
Québec au complexe G. C'était au moment des
événements d'octobre 1970. La décision a été
prise à ce moment-là et tout le monde était empreint d'un
très fort sentiment de sécurité, de sorte que le tunnel a
finalement abouti à l'extérieur du complexe G, pour que le
complexe G puisse être fermé à toute population en dehors
des heures de travail.
Autrefois, on fermait les parcs publics avec de grandes clôtures
et de grandes barrières pour empêcher que les gens y aillent le
soir. Aujourd'hui, on a abandonné un peu cette pratique, heureusement
d'ailleurs. Les parcs publics sont accessibles à peu près
à tout le monde, un peu n'importe quand. C'est la même chose quand
on essaie de construire un centre-ville le moindrement cohérent; on
devrait prévoir l'utilisation continue des réseaux
piétonniers qui sont, à notre avis, l'élément le
plus intégrateur de tout un aménagement urbain.
M. Michaud: Pour la sécurité, je trouve ça
aberrant, mais pour la moralité?
M. Viau: Cela faisait référence aux parcs publics
qu'on fermait pour empêcher qu'on y aille le soir, si vous voulez; c'est
encore plus fort.
M. Michaud: ... à cause des dangers.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Taschereau.
M. Guay: M. le Président, je voudrais souligner, en
félicitant les auteurs de cet excellent document, sa qualité
exceptionnelle et aussi le ton serein qui est employé, qui est
dépourvu de toute hargne, comme d'ailleurs les mémoires que nous
avons entendus jusqu'à maintenant. C'est fort agréable à
lire et à entendre. Cela rend les recommandations d'autant plus claires
et pertinentes.
J'aimerais souligner aussi ce qui m'apparaît être la
principale recommandation d'ensemble qui est l'abandon de la notion de la
cité dans la cité, la cité artificielle, ce que vous
comparez à Versailles et, effectivement, ça nous rappelle, quand
on parle de construire un pays qui soit le nôtre, le pays du
Québec, que c'est d'abord pour les Québécois qu'on le
construit, et non pas pour des fonctionnaires dans la ville de Québec,
et notamment pour des Québécois qui vivent actuellement aux
abords de la colline parlementaire et qu'il faut garder cela à l'esprit,
même en priorité, lorsqu'il sera question de
délibérer une fois tous les mémoires entendus.
Lorsque vous proposez un moratoire d'un an sur toute construction,
est-ce l'histoire de planifier plus en détail, au fond, les divers
éléments de votre document, si je comprends bien, de rentrer un
peu plus dans le schéma même d'aménagement ou le plan
directeur d'aménagement de ce que vous proposez.
Est-ce que cela, dans votre esprit, exclut le fait que
parallèlement, le couvent des religieuses du Bon-Pasteur puisse faire
l'objet d'une étude sépa-
rée quant à ce qu'on pourrait faire avec lui et même
commencer dès maintenant, ou enfin, le plus tôt possible, à
être utilisé à ces fins, qui pourraient notamment
être résidentielles? Est-ce que l'un peut se faire
parallèlement avec l'autre ou si ce moratoire s'applique
également à toute utilisation possible du couvent d'ici un
an?
M. Robitaille (André): Dans notre idée, le couvent
du Bon-Pasteur doit être utilisé avec les fins actuelles et on
peut peut-être en additionner d'autres. C'est une étude qui peut
se faire immédiatement, parallèlement. Mais notre proposition
globale d'aménagement de la colline parlementaire est tellement une
remise en question de tout ce qui a été fait avant... Le but de
notre mémoire n'est pas de critiquer ou de trouver des coupables, mais
tous ensemble, après bien des discussions qui ont duré bien des
années, on s'est rendu compte que les résultats auxquels on
s'attendait, on ne les a pas. On a créé une ville où
beaucoup de gens travaillent et qui est inhumaine. C'est le but principal de
notre proposition, de réhumaniser le coeur de Québec qui est, en
même temps, par hasard, la cité parlementaire.
Cette reprise de conscience, cette réorientation de ramener de
l'habitation autour de la cité parlementaire et de
réintégrer la vie de tous les jours et de toutes les heures d'une
journée dans ce centre-ville, cela demande de la réflexion et de
réétudier à fond les fonctions en partant de ce qu'on a
actuellement, et de faire certaines transformations aux édifices
actuels.
M. Guay: On peut en conclure que les rédacteurs du
mémoire seraient éventuellement disponibles pour préciser
leur point de vue et peut-être même faire partie d'une telle
étude.
M. Robitaille: C'est possible.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Charlesbourg.
M. de Belleval: M. le Président, j'ai écouté
avec amusement les propos du député de Charlevoix sur la
surpuissance des fonctionnaires. C'est une légende tenace, parce que je
me demande pourquoi, si les fonctionnaires sont si puissants, tellement d'entre
eux désirent devenir député ou ministre. Il me semble que
c'est un témoignage...
M. Mailloux: C'est votre droit de revenir comme fonctionnaire,
j'imagine?
Le Président (M. Marcoux): Je vais demander aux
députés de s'en tenir autant que possible à des questions,
pour abréger cette période.
M. de Belleval: Je dois lui rappeler qu'au ministère, il a
bien raison, le lobby des ingénieurs était très fort.
D'ailleurs, j'étais une espèce de mouton noir là-dedans,
avec lui, d'ailleurs, avec le ministre, où nous essayions très
fort de ramener à de plus justes proportions les projets de nos
constructeurs, sans toujours y réussir.
Je voudrais attirer l'attention sur deux points et poser une question.
L'idée de remettre à jour le projet de l'annexe du palais de
justice, cela soulève seulement un point. Il existe, dans le
Vieux-Québec, certains coins, certains édifices, sans
intérêt, au fond, qui auraient avantage à être
détruits ou être reconstruits. Entre autres, je crois que le site
qui avait été prévu pour l'annexe du palais de justice est
un site où les bâtiments actuels sont vraiment sans
intérêt, où on aurait effectivement tout
intérêt à reconstruire autre chose. Cela pourrait
être de l'habitation bien sûr, mais cela pourrait aussi, en
particulier, être une annexe du palais de justice. On voit très
bien qu'avec l'édifice Chauveau, cette annexe possible, et le palais de
justice existant rénové, il y a plein de possibilités pour
relocaliser la justice à l'intérieur du Vieux-Québec.
Deuxièmement, vous avez indiqué l'importance de refaire,
à toutes fins pratiques, un nouveau concept, puisque les concepts
anciens n'ont pas été suivis et qu'ils ont été
tellement modifiés qu'il faut reprendre le problème à
zéro. Et, il faut refaire une nouvelle maquette à partir des
anciens principes, mais en les appliquant cette fois-là, anciens
principes qui étaient eux-mêmes multifonc-tionnels comme plusieurs
intervenants nous l'ont fait remarquer.
J'aurais une question. Vous parlez, bien sûr, d'essayer de mieux
réintégrer, dans la trame urbaine actuelle, ces édifices
qui sont trop hauts, mais qu'il faut essayer de replacer, d'une certaine
façon, avec des édifices qui vont faire la transition, ni plus ni
moins, entre ces édifices démesurés et le reste du
Quartier Saint-Jean-Baptiste et celui de Montcalm. Cela veut dire, dans un
sens, que, si on prend simplement l'exemple de la Banque provinciale de Place
Québec, ou les autres sur la rue Saint-Cyrille, il faudra donc
procéder à des démolitions, jusqu'à un certain
point, d'édifices périphériques pour essayer de
rétablir cette transition ou, si vous croyez qu'on peut, tout
bêtement, faire la transition entre les édifices actuels et le
reste de la ville dont les fonctions actuelles sont largement des fonctions
résidentielles ou de petits commerces qui devraient être
préservés.
M. Viau: Je ne voudrais pas qu'on interprète notre
mémoire sur les transitions plus douces qu'on devrait donner à la
colline parlementaire, dans le sens d'une démolition encore plus grande
de certains édifices pour créer cette gradation des hauteurs. Je
pense qu'un édifice comme Place de la Capitale qui est
complètement à un bout de la colline parlementaire, il est
là, malheureusement, et il ne faudrait pas essayer de démolir
tout autour pour essayer de l'intégrer. Un tel édifice a une vie
de peut-être de 50 ou 90 ans. On verra, dans 90 ans, si on ne peut pas
reconstruire un édifice plus bas. C'est la même chose pour le
Concorde, finalement. Il est là. Supportons-le pendant 70 ans et, au
bout de 70 ans, c'est dommage, sur cet édifice, on se reposera la
question.
M. de Belleval: Autrement dit, votre partie, ce serait
plutôt d'essayer autant que possible de faire cette transition, mais sans
déborder nécessaire-
ment pour la faire, sur un plan idéal, sur les rues adjacentes
qui sont disproportionnées par rapport à ces édifices. Ou,
c'est l'édifice qui est disproportionné par rapport à ces
édifices.
M. Viau: Le plus possible. Il y a des problèmes, par
exemple, derrière Place Haute Ville, bien sûr. Il y a des
arrangements qu'il va falloir faire pour essayer de rattraper un peu le gabarit
urbain, à cause de la pente qui est énorme.
M. de Belleval: Parfait.
M. Viau: Tout cela se prépare dans une nouvelle maquette,
avec plusieurs essais.
M. de Belleval: D'accord.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Duplessis.
M. Viau: On peut permettre...
Le Président (M. Marcoux): Vous pouvez compléter,
oui, rapidement.
M. Demontigny: J'aimerais compléter. On peut n'avoir que
des regrets de voir ce qu'il y a de fait à l'heure actuelle. Je crois
que cela ne nous empêche pas de penser à pouvoir évoluer,
dans le sens qu'on a des erreurs, qu'on peut essayer de vivre avec elles, mais
tout simplement en essayant d'amener des correctifs pour adoucir ces erreurs et
de garder au moins un centre-ville humain, ne pas encourager l'entonnoir vers
le centre-ville ou la colline parlementaire.
M. de Belleval: Saint-Cyrille est là. Comment peut-on
l'amoindrir, comme vous dites?
M. Demontigny: On n'a pas les solutions, ce soir. C'est pourquoi
on demande un moratoire, pour être capable d'arriver à des
solutions, d'apporter des solutions possibles.
M. de Belleval: II y a des solutions possibles.
Le Président (M. Marcoux): Le moratoire des questions du
député de Charlesbourg également. Le député
de Duplessis.
M. Perron: Merci, M. le Président. A la page 11, à
la recommandation no 7, vous dites d'amorcer la préparation d'un plan
d'ensemble détaillé en mettant en place, soit un groupe de
travail, soit une commission spéciale, ou encore un organisme de
planification à caractère permanent. Je voudrais savoir d'un des
messieurs qui ont présenté le mémoire, pour lequel de ces
trois articles, de ces trois groupes vous opteriez, pour qu'il devienne
fonctionnel.
M. Viau: On n'a pas beaucoup développé ce point,
parce que, effectivement, on n'a pas particulièrement
considéré le problème. Il y a une chose qu'on peut dire,
par exemple, c'est que, dans toute cette nouvelle structure qu'on devra mettre
en place, il faudrait consacrer quand même le rôle important d'un
organisme, comme la ville de Québec ou la communauté urbaine,
parce que, de plus en plus, c'est à ce niveau de juridiction qu'on
délègue les pouvoirs d'aménagement.
Ces organismes ont des rôles extrêmement importants à
jouer. Ils ne peuvent pas se libérer du dossier, si vous voulez, et
remettre tout cela au gouvernement de la province. Je pense que c'est un
organisme multipartite qu'il faut, où tous les niveaux de gouvernement
ou d'administration sont représentés, que ce soit en formant une
commission de la capitale québécoise, ou que ce soit la
commission d'aménagement de la Communauté urbaine de
Québec qui prenne plus de pouvoirs, devienne un organisme
exécutoire, nous n'avons pas de préférence
vis-à-vis de l'un ou l'autre, surtout parce qu'on ne s'est pas
nécessairement penché sur ce problème.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Vanier.
M. Bertrand: Seulement une question, monsieur. Il n'y a aucun
mémoire jusqu'à maintenant qui nous a été
présenté, et c'est à vous que je pose la question, parce
que vous embrassez tout le problème de l'aménagement de
façon très globale. C'est la question des équipements
sportifs dans la haute-ville. Est-ce que c'est un élément auquel
vous vous êtes arrêtés, vous autres? Je vous la pose comme
cela. Cela peut paraître un peu en dehors de la question, mais l'ensemble
de la haute-ville de Québec souffre d'un manque d'équipements de
ce côté. Cela n'est pas simplement pour les quartiers les plus
valorisés sur le plan des revenus de la ville de Québec, mais il
y a aussi là-dedans tous les gens qui habitent le quartier
Saint-Jean-Baptiste, les gens qui habitent le Vieux-Québec et une bonne
partie des gens qui habitent le quartier Montcalm. Est-ce que c'est un des
éléments auxquels vous vous seriez arrêtés dans vos
réflexions?
M. Viau: En fait, vous savez qu'on a un point qui traite de la
polyvalente des équipements. Je pense que c'est un des
équipements qui serait des mieux utilisés sur la colline
parlementaire, parce qu'il pourrait aussi être utilisé par
l'ensemble des travailleurs et des fonctionnaires qui travaillent sur la
colline. Cela devient un élément important, un équipement
très intéressant...
M. Bertrand: Vous n'avez jamais pensé où cela
pourrait être constitué, un type de projet de cet ordre? Vous
n'êtes pas allés plus loin que de dire que cela serait bon
peut-être en principe, ou si vous êtes allés plus loin?
M. Robitaille: Cela a déjà été
analysé dans certaines études, en particulier à l'Ecole
d'architecture de Québec où il y a des études qui se font
régulièrement. Est-ce que tu veux...
M. Demontigny: J'aimerais ajouter quelque chose, au niveau des
équipements sportifs. Je crois qu'il ne faudrait pas implanter des
équipements sportifs qui soient utilisés encore uniquement de 9
heures à 5 heures. Là, on touche encore le problème
d'avoir du résidentiel, de l'habitation, on veut avoir une vie continue.
Je crois que cela deviendrait essentiel d'avoir du résidentiel et
d'avoir des habitants et de rendre cela vivable. Si on veut rendre cela
vivable, éventuellement, il faudra absolument implanter des
équipements sportifs. Cela fera partie de l'ensemble de la composition
d'un élément qui soit humain et vivable.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Brome-Missisquoi.
M. Russell: M. le Président, une simple question. Vous
semblez déplorer l'aménagement qui a été fait de la
colline parlementaire. Est-ce que je dois comprendre que vous auriez
favorisé le statu quo sur la colline parlementaire, c'est-à-dire
des édifices qui étaient là avant, avec une
rénovation de ces édifices?
M. Viau: Non, pour nous, on a bien précisé dans la
première partie qu'on ne peut pas arrêter les travaux ou
l'aménagement tel qu'ils se font à l'heure actuelle. Il faut
vraiment poursuivre ces travaux, mais les poursuivre en fonction d'objectifs
qui sont tout à fait nouveaux, qui sont repensés. Si,
effectivement, il faut faire un certain nombre de démolitions, il faudra
les faire, mais les faire en toute connaissance de cause, et surtout, en
fonction d'objectifs extrêmement bien définis et bien
précis, et uniquement à la limite des options possibles,
uniquement s'il n'y a vraiment pas d'autre solution pour régler le
problème. Alors, il n'est pas question pour nous de dire: On
arrête tout cela là. L'aménagement, tel qu'il est
là, n'a pas de sens comme tel. Il n'est pas intégré, il
n'est pas cohérent. Il faut vraiment le poursuivre, mais avec des
objectifs nouveaux.
M. Russell: Si je comprends bien, vous acceptez ce qui a
été fait, même si cela ne vous plaît pas tellement,
mais c'est à le compléter que vous vous opposez.
M. Viau: II faut vivre avec. Donc, il faut... M. Russell:
Là-dessus, on est tous d'accord.
M. Viau: ...même tirer partie de certaines choses qui sont
là et qui ne plaisent pas nécessairement, pour les
intégrer dans le nouvel aménagement.
Le Président (M. Marcoux): Une dernière question.
Le député de Charlesbourg, très brièvement, s'il
vous plaît!
M. de Belleval: II y a un secteur dont on n'a pas beaucoup
parlé jusqu'à maintenant. C'est l'ancien carré d'Youville,
où on se retrouve, à la suite des constructions, avec un
carré qui est très dévalué, une place publique qui
est très dévaluée actuellement sur le plan de la
capacité des piétons de s'y promener, etc., quand on pense
à l'ancienne place qui était plus humaine, très humaine
même.
Par contre, il y a le projet aussi de dégager les vieux murs. Il
reste deux ou trois îlots de bâtiments anciens qui sont perdus au
milieu du reste, le vieux palais Montcalm. Est-ce que vous avez
réfléchi sur la meilleure utilisation à faire de cette
place pour l'avenir? Est-ce qu'on dégage les fortifications, par
exemple, en détruisant les quelques îlots qui restent ou quoi?
Qu'est-ce qu'on fait avec ça?
M. Robitaille: Oui, je me rappelle qu'au moment où le
garage d'Youville a été fait, la ville de Québec avait
préparé un réaménagement de la Place d'Youville
avec des passerelles, qui se raccordaient au garage. Mais, pour le palais
Montcalm et le Capitol, de l'autre côté, il y avait deux
écoles de pensée, celle de faire disparaître les
édifices pour dégager les murs et l'autre voulait les
réintégrer ou les garder.
Actuellement, si je donnais mon opinion, ce serait une opinion
personnelle et un autre pourrait dire l'inverse. Mais je crois que, au moins du
côté du théâtre, il y a du curetage à faire
pour dégager les murs, certainement. Quant au palais Montcalm, il va
peut-être durer encore 25 ans, après ça, l'édifice
sera fini, il sera à démolir. Il aura fait sa vie, lui aussi.
Déjà, la fin approche, je crois.
M. de Belleval: Mais il reste que le carré d'Youville est
à peu près le seul élément valable qui puisse
réunir l'ancienne rue Saint-Jean avec le Vieux-Québec.
Actuellement, c'est vide, à toutes fins pratiques. C'est en train de se
dégrader.
M. Viau: Comme on dit, c'est une des principales portes
d'entrée du Vieux-Québec. Cela a toujours été la
plaque tournante, historiquement, de toute la haute ville, si vous voulez,
l'espèce d'endroit où convergent tous les réseaux de
communications, de tramways, d'autobus maintenant. A l'heure actuelle, il est
parfaitement démembré. Il faudrait qu'il redevienne, je pense, la
plaque tournante qu'il a été. C'est pour ça qu'on disait:
II faut absolument l'intégrer dans l'aménagement de la colline
parlementaire. On l'a toujours négligé. On l'a toujours
laissé à part, disant: Cela fait partie de l'arrondissement
historique. Cela fera partie du plan du Vieux-Québec. Ce sont les
Affaires culturelles qui s'occupent de ça, etc., et, finalement, on ne
s'est jamais tellement penché sur l'aménagement. Il y a bien eu
des propositions de passerelles surélevées, des choses un peu
farfelues, mais, vraiment, dans un schéma en profondeur, on n'a jamais
réfléchi beaucoup là-dessus.
Le Président (M. Marcoux): Merci... M. Chabot: ...
Je voudrais ajouter...
Le Président (M. Marcoux): Disons que le
député a demandé le droit de la parole, parce que...
M. de Belleval: Une dernière remarque, M. le
Président.
Le Président (M. Marcoux): Très brièvement,
parce que...
M. Chabot: C'est bien simple. Il faut arrêter de penser en
termes de démolition pure et simple. Les questions qui se posent sont
toujours à savoir si on va démolir ou non? Le carré
d'Youville, est-ce qu'on lui redonne une fonction humaine ou non? Si le palais
Montcalm contribue à la vie du carré d'Youville, gardons-le le
temps qu'on en aura besoin.
Le Président (M. Marcoux): Vous avez le mot de la fin et
un bon mot.
M. Chabot: Merci.
Le Président (M. Marcoux): Je remercie M. Robitaille et
ses collègues...
M. Guay: C'est un mémoire exceptionnel, M. le
Président. Je pense qu'il faut le souligner de nouveau. Je pense que
c'est peut-être le meilleur qu'on ait entendu jusqu'à
maintenant.
Le Président (M. Marcoux): Oui, je suis heureux que vous
le souligniez. J'allais dire que le nombre d'interventions et de questions
prouve l'intérêt que les membres de la commission ont porté
à votre mémoire. Je pense que c'est déjà une
première consolation, peut-être, pour le travail que vous avez
sûrement fait.
Maintenant, j'inviterais le Comité des citoyens du
Vieux-Québec, en la personne de M. André Si-rois, à
s'approcher et à nous présenter son mémoire.
M. Robitaille: Nous vous remercions, monsieur.
M. Demontigny: Merci, monsieur.
Le Président (M. Marcoux): Cela nous a fait plaisir.
J'inviterais M. Sirois à nous présenter ses
collègues. Comme quelques membres de la commission me l'ont fait
remarquer, votre mémoire reprend cela vient à propos
plusieurs éléments du mémoire
précédent, dans une bonne partie. Peut-être, compte tenu de
l'heure tardive, si vous pouviez insister, dans la présentation de votre
mémoire, sur les points nouveaux, qui ne sont pas une
répétition du mémoire précédent, que cela
donnera le plus de temps possible pour les questions des membres de la
commission.
Comité des citoyens du
Vieux-Québec
M. Sirois: Certainement, M. le Président. J'ai à
gauche, Mme Winnie Villeneuve, M. Paul Daoust et M. André Trudeau qui
sont membres du conseil d'administration du comité de citoyens. Si nous
avons repris des parties...
Le Président (M. Marcoux): Je ne vous fais pas de
reproche...
M. Sirois: Je vais vous expliquer que c'est fait
intentionnellement. C'est fait après concertation. C'est parce que nous
aussi trouvons que le rapport du Conseil des monuments et sites est d'une
qualité exceptionnelle et, d'autre part, nous sommes membres
affiliés du Conseil des monuments et sites, et plusieurs d'entre nous
sont membres aussi à titre individuel. Encore une fois, cela s'est fait
par concertation. Donc, on n'a pas besoin de reprendre tout cela. On savait
aussi qu'on passerait en même temps. Alors, on peut très bien
commencer tout de suite.
Le Président (M. Marcoux): Alors, poussez la concertation
en nous précisant ce qu'il y a de plus dans votre mémoire qui
n'est pas souligné dans le...
M. Sirois: Je saute aussi finalement la présentation du
comité de citoyens que tous pourront lire. En gros, c'est la
préservation de la qualité de la vie dans le
Vieux-Québec.
Depuis un an et demi environ, le comité a axé son action
sur la sauvegarde ou plutôt sur le rétablissement d'un
équilibre entre les fonctions résidentielles, commerciales et
administratives dans le Vieux-Québec et dans le centre-ville, ainsi que
sur la préservation d'un visage humain au centre-ville de
Québec.
Il va donc sans dire que nous nous devions d'être ici aujourd'hui.
Pour tous ceux qui aiment Québec et nous sommes nombreux
les dix ou quinze dernières années ont été un
cauchemar qui semble ne jamais devoir prendre fin. Sous prétexte de
progrès, les administrations municipales et québécoises y
ont commis projet après projet, l'un des pires massacres urbains que
l'on connaisse.
Les dégâts y sont plus graves que ceux causés dans
beaucoup de villes européennes pendant la guerre et ce n'est pas un
hasard si on a choisi de faire un film montrant, en contraste, Varsovie comme
exemple de résurrection et de réanimation d'une ville
anéantie et Québec comme exemple de politique de destruction et
de dépopulation d'une ville jadis habitée, humaine et
chaleureuse.
Progrès, disait-on, alors qu'on ne faisait que copier avec vingt
ans de retard les pires erreurs américaines. En fait, pour des
Québécois de plus en plus nombreux, ce phénomène
trahissait une économie malsaine et une administration douteuse. On a
sacrifié tout un milieu de vie d'une qualité rare au patronage,
à la spéculation et à une activité
économique factice.
Mesure-t-on le progrès en termes de contrats de béton
accordés dans une année? Mesure-t-on l'amélioration de la
qualité de la vie urbaine en milles d'autoroutes? Mesure-t-on la
santé d'une économie en fonction du nombre d'ouvriers
employés à détruire leur milieu de vie?
Or, c'est le développement de la cité parlementaire,
là où nous sommes, qui a servi de prétexte à la
plus grande partie de ce massacre. C'est pour la cité parlementaire,
pour ses tours de béton, pour ses stationnements et pour ses autoroutes
que l'on a chassé environ 6000 citoyens de leur quartier,
exproprié et démoli près de 2000 logements dont plusieurs
étaient encore bons.
C'est aussi pour la cité parlementaire que l'on a remplacé
les quartiers vivants, équilibrés et chaleureux du centre-ville
par le désert urbain que nous connaissons maintenant. C'est encore en
grande partie pour la cité parlementaire que l'on a tranché dans
le coeur de Québec pour y faire passer des autoroutes qui accentuent la
détérioration et la déshumanisation de ce milieu et
ravagent encore davantage le caractère exceptionnel de
Québec.
Ce n'est pas tout. On pourrait ajouter à ces dégâts
le massacre de monuments et de sites historiques et les ravages
écologiques causés au cap Diamant et au fleuve Saint-Laurent par
la construction de réseaux d'autoroutes jugés nécessaires
à la colline parlementaire.
Pour avoir un tableau encore plus complet, il faudrait aussi parler de
la détérioration des transports en commun et de l'absence de
politique pour remédier à cette situation. Il faudrait aussi
parler de tous ces éléments qui font qu'une ville est
agréable, habitable ou ne l'est pas.
Or, en 10 ans, Québec est devenu un modèle de ce qu'il ne
faut pas faire en administration urbaine, on n'en finirait plus de citer des
experts qui s'alarment de cette situation. Qu'il suffise de mentionner Barbara
Ward, la célèbre économiste anglaise, présidente de
Habitat 76, qui a choisi de tourner un film, le printemps dernier, en utilisant
Québec comme exemple de ville en voie de détérioration
rapide et irrémédiable.
Bref, Québec est en train de devenir une ville invivable et c'est
ce qui va lui arriver si l'on ne met pas un frein, immédiatement, au
type de développement anarchique que nous avons connu. Et cela
s'applique en tout premier lieu à la cité parlementaire.
Il faut cesser de soumettre les décisions affectant nos quartiers
et notre ville aux seuls intérêts des spéculateurs et des
marchands de béton. Il faut aussi cesser d'élaborer l'avenir de
la colline parlementaire sans tenir compte de l'impact de ces projets sur les
quartiers avoisinants et surtout le centre-ville de Québec. C'est
pourquoi nous avons accueilli avec beaucoup d'intérêt et d'espoir
l'idée de cette commission parlementaire sur l'avenir de la colline
parlementaire.
Le développement de la colline parlementaire, comme nous l'avons
connu, est un cancer urbain que l'on doit enrayer au plus tôt.
On ne rétablira jamais, hélas, les quartiers que l'on a
dynamités et anéantis pour faire cette Brasilia douteuse. On ne
pourra pas vraiment réparer ce terrible accroc dans le tissu urbain de
Québec et, pour ne donner qu'un exemple, nous, du Vieux-Québec,
nous nous trouvons condamnés à vivre isolés du reste de la
ville par une tranchée aussi infranchissable qu'inutile.
Ne parlons plus de ce qui est disparu. Ne parlons plus même du
charme de Québec que nul ne saurait recréer, si ce n'est Gilles
Vigneault par ses chansons.
Les responsables sont partis ou s'en iront et nous, nous resterons
là, obligés de vivre dans les dégâts qu'ils nous
auront imposés. On serait tenté de leur appliquer une phrase de
F. Scott Fitzgerald: "C'étaient des gens insouciants. Ils
détruisaient les êtres et les objets, puis se retiraient dans leur
argent ou dans leur grandiose insouciance ou bien dans ce qui pouvait les tenir
ensemble. Puis ils laissaient les autres réparer les dégâts
qu'ils avaient faits." C'est notre cas. Il faut donc que l'aménagement
de la colline parlementaire et de tout le centre-ville de Québec ne se
fasse qu'après consultation avec des citoyens. C'est pourquoi
l'initiative de cette commission nous paraît très heureuse, parce
que c'est une première étape de consultation, après douze
ans, il n'est peut-être pas trop tôt.
Cependant, il faut faire encore davantage. Pour éviter que de
telles erreurs se propagent et se répètent, il nous semble
impérieux de redonner aux citoyens de Québec des processus et des
mécanismes d'administration démocratique. Québec est en
train de devenir une ville inhumaine parce que les citoyens n'ont pas un mot
à dire sur la transformation de leur propre milieu. L'appareil
administratif est conçu de façon à dissuader et
empêcher les citoyens de participer. Commission d'urbanisme
siégeant à huis clos, absence de processus de
référendum, centralisation du pouvoir de décision entre
les mains du comité exécutif qui se réunit à huis
clos une fois par semaine et exerce tout le contrôle effectif de la
ville, assemblée du conseil de ville l'après-midi, en semaine,
avec un minimum de publicité, etc... Il faut corriger cette situation et
le plus tôt possible.
Le ministère des Affaires municipales doit intervenir pour nous
assurer le rétablissement de processus démocratiques, en
s'inspirant des recommandations de la commission sur l'urbanisation. Une
première étape urgente est la réforme de la carte
électorale municipale de Québec. Et c'est avec grand plaisir, que
nous avons appris par les journaux que le député
Jean-François Bertrand avait déclaré que cette
réforme serait faite à temps pour les prochaines élections
municipales et qu'elle garantirait une représentation plus juste.
Accepter le principe de la participation des citoyens, c'est redonner à
ceux-ci un contrôle sur leur environnement et les impliquer dans la
protection de celui-ci. C'est aussi désamorcer les conflits
coûteux et inutiles qui naissent de la confrontation permanente entre les
citoyens et une administration qui est sensée les représenter et
être à leur service. C'est aussi une promesse d'un environnement
meilleur pour tout le monde.
Donc, au plan général, nous souhaitons que la commission
recommande l'implantation de mécanismes de concertation entre les
différents intervenants, y compris les citoyens, dans l'avenir de la
colline parlementaire, l'établissement de modes de consultation et de
participation véritable, le rétablissement immédiat de
vrais processus démocra-
tiques dans l'administration municipale de Québec.
Après avoir lu avec beaucoup d'intérêt le
mémoire du Conseil des monuments et sites, nous avons
décidé de le faire nôtre et de reprendre des propositions
que je me permets de sauter maintenant, étant donné qu'on vient
de vous les présenter.
J'aimerais souligner quelques cas particuliers. A notre avis, il est
impérieux de faire un inventaire de l'occupation d'espaces dans le
centre-ville selon les différentes fonctions, de déterminer les
points d'équilibre entre ces différentes fonctions et de prendre
les mesures pour y arriver. Il est aussi impérieux de prendre tous les
moyens possibles pour mettre fin à la spéculation foncière
dans le centre-ville et d'y maintenir un stock de logements à coût
abordable. Le gouvernement est le grand responsable de la spéculation
qui s'est faite sur la colline parlementaire et autour de celle-ci et il doit
prendre tous les moyens nécessaires pour que ce ne soient pas les
citoyens ordinaires qui en subissent les conséquences par des hausses de
taxes ou de loyer.
Il faut tout mettre en oeuvre pour décourager les fonctionnaires
d'utiliser leur automobile pour venir au travail et retourner à la
maison en constituant et en encourageant les pools d'automobiles. Il faut aussi
établir, et de toute urgence, un service de transport en commun de la
meilleure qualité possible et encourager les fonctionnaires et toute la
population à l'utiliser. L'idée de rétablir des tramways,
par exemple, que M. de Belleval a déjà mentionnée,
correspond précisément à ce qu'on peut souhaiter de mieux,
je pense bien.
D'autre part, un exemple de ce qu'on trouve une erreur monumentale,
catastrophique au point de vue du transport en commun, c'est de faire
disparaître complètement les rails dans le bas de la ville et
d'enlever sa fonction à la gare du Palais. A notre avis, il aurait fallu
trouver une autre solution au problème que les rails
présentaient, c'est une aberration qu'on doive se rendre à
Sainte-Foy pour utiliser les trains qui sont un moyen de transport à la
fois économique et rapide et qui ne causent pas la pollution que l'on
connaît par l'automobile. C'est-à-dire qu'on a voulu
résoudre un problème et on a apporté la pire solution.
Il faut prendre les mesures nécessaires pour que des
représentants de groupes communautaires puissent siéger au
conseil d'administration de la Société parc-auto du Québec
métropolitain afin d'assurer à ces stationnements la meilleure
utilisation possible pour les citoyens de Québec et non seulement pour
quelques marchands et quelques fonctionnaires.
Il faut conserver le couvent du Bon-Pasteur et garder l'administration
de la justice dans le palais de justice actuel en lui annexant l'édifice
du Revenu, rue Chauveau, afin de conserver cette fonction administrative dans
le Vieux-Québec et éviter que ce quartier ne devienne un
musée. On a été certainement parmi les premiers à
parler de la nécessité de garder le palais de justice dans le
Vieux-Québec, on a fait beaucoup de démarches à ce sujet.
Même chose, on a fait beaucoup de démarches pour appuyer les gens
qui voulaient sauver le couvent du Bon-Pasteur, on a fait partie du groupe qui
a tenté de le sauver et on n'a pas changé d'idée à
ce sujet.
Il faut faire déplacer la Place Carnaval des abords du parlement,
où elle se trouve actuellement, vers les terrains de
l'Expo-Québec. Il n'est pas normal que les abords du parlement des
Québécois soient transformés en champ de foire pendant
quinze jours et en dépotoir pendant six mois. Vous n'avez qu'à
sortir, regarder l'état actuel de l'escalade ouest et vous n'aurez pas
besoin de plus d'explications. Il y a des citoyens du comité qui nous
avaient proposé de faire un prélèvement sur place, de
prendre un pied carré de terrain et de vous apporter ce qu'on y trouve
pour illustrer notre proposition, mais on a jugé que ce n'était
pas nécessaire, étant donné qu'on préférait
vous demander de traverser la rue.
Il faut aussi, par tous les moyens possibles, empêcher la
construction de la tour phase 3 de Place Québec, en refusant d'y louer
des bureaux pour le gouvernement du Québec. Il faut aussi que le
gouvernement du Québec prenne clairement position contre le projet du
tunnel qui devait se faire sous le cap Diamant et qui servirait deux heures par
jour environ. Pour nous, c'est encore un pas de plus vers
l'anéantissement total du Vieux-Québec. On va être au
centre du plus grand échangeur d'autoroutes au monde.
Finalement, il serait bon que le gouvernement envisage la
possibilité d'établir un système d'étalement
horaire pour les fonctionnaires on vous en a parlé plus
tôt, je crois bien ce qui aurait l'avantage de
décongestionner le centre-ville aux heures de pointe.
Finalement, il faut que le gouvernement prenne les mesures
nécessaires pour faire remplacer les arbres abattus sur la colline
parlementaire et dans les environs par des arbres adultes et aussi adultes que
possible. Depuis des années, on abat des arbres sur la colline
parlementaire et on ne les remplace pas, ou bien on les remplace par des
acacias qui ne deviendront jamais plus gros que cela.
En résumé, continuer le développement de la colline
parlementaire ne fera que provoquer plus de démolition, un plus grand
exode de la population, une plus grande circulation automobile, un plus grand
besoin de stationnements et d'autoroutes. Où prendra-t-on l'espace
nécessaire? Là où nous vivons présentement.
Continuer ce développement créerait, sur tout le
centre-ville et sur le Vieux-Québec en particulier, une pression
à laquelle rien ne pourrait résister. Ce serait la mort pure et
simple d'un centre-ville reconnu comme l'un des plus vivants et des plus
chaleureux d'Amérique. Pour le centre-ville de Québec, c'est la
dernière chance.
J'aimerais dire aussi que, pour nous, il n'est plus question de
démolir une seule maison dans le centre-ville, dans l'état actuel
des choses, ni de chasser un seul citoyen du centre-ville. Pour nous, les gens
de la rue Saint-Gabriel, ce sont des ci-
toyens, et les maisons de la rue Saint-Gabriel, ce sont des maisons. Je
pense que je m'exprime assez clairement.
J'aimerais souligner aussi un point qui se trouve dans le rapport du
Conseil des monuments et sites et qui nous touche directement. On dit, à
la page 9: "La compartimentation des ensembles, dans une ville, est en partie
responsable de cette situation. La ville, étant un tissu inextricable de
fonctions et d'activités, ne peut pas être découpée
à la manière d'un casse-tête, comme les techniques du
zonage ont eu tendance à le faire.
On est entièrement d'accord. On ne veut pas que, par exemple,
cette section-ci devienne une section de bureaux, de fonctionnaires, de tours
de béton, et que le Vieux-Québec devienne le bar de cette
section. C'est ce qui risque de se produire en ce moment.
C'est pourquoi aussi on parle de la nécessité de
préserver les fonctions actuelles et même de pousser vers le
résidentiel, dans le secteur du centre-ville. On a donné, en
annexe, plusieurs documents que vous pourrez lire. J'aimerais cependant lire
celui de Barbara Ward parce qu'il appuie bien et clairement ce qu'on vise par
notre mémoire.
Elle dit, dans "Les établissements humains, crise et survie":
"Trop souvent, la planification n'est que paternalisme. Les "sages" d'en haut
disent au "petit monde" d'en bas ce qu'il faut faire. Mais la sagesse n'est pas
toujours là où l'on pense et rien ne vaut l'expérience de
la vie dans ces établissements pour trouver les idées les plus
stimulantes et appropriées sur leur organisation et leur transformation.
La consultation avant l'étape de la préparation des plans, la
recherche de la contribution locale, l'accessibilité des conseils
techniques pour les citoyens en cause et la recherche de la participation
effective des gens à la réalisation des plans qu'ils ont
eux-mêmes approuvés démocratiquement, voilà les
composantes essentielles d'une véritable planification populaire."
Autant vous dire que cela, c'est complètement inexistant à
Québec, voilà qui peut transformer les relations entre les
citoyens et leurs chefs et instaurer enfin des établissements où
les échanges seront harmonieux et où il fera bon vivre. Par la
même occasion, on verra diminuer considérablement les coûts
sociaux, car l'éveil des citoyens est le meilleur garant du milieu.
Violence, apathie destructions absurdes, gonflement des forces
policières, surpeuplement des institutions pénales, autant de
charges réduites ou même envolées, si les citoyens et leurs
familles sentent vraiment qu'ils sont chez eux". C'est ce qu'on avait à
dire.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie beaucoup. Je
cède maintenant la parole à M. le ministre.
M. Lessard: M. le Président, je remercie d'abord M. Sirois
de nous avoir présenté ce mémoire. S'il n'avait pas
terminé par la citation de Barbara Ward, j'aurais commencé par
cette citation, parce que je la trouvais d'ailleurs excellente.
Je pense que c'est vrai que, assez souvent, la planification a
été faite par les autres et non pas par les citoyens, par la
population, mais tout cela nécessite bien souvent une opinion publique
bien éclairée et il faut créer des structures pour qu'elle
le soit. Je pense, par exemple, si ce n'avait été de la pression
populaire qui est venue de la région de Québec pour éviter
que l'Hydro-Québec détruise ou encore utilise la Jacques-Cartier
pour en faire de l'énergie de pointe, probablement que ce site ne serait
plus ce qu'il est actuellement.
L'Hydro-Québec viendra encore sûrement ou demandera encore
probablement au gouvernement la possibilité et le droit d'utiliser ce
site, mais ce sera l'opinion publique qui pourra intervenir.
Dans l'ensemble, vous revenez avec des propositions dont on a
discuté. En ce qui concerne les cas particuliers, je voudrais vous dire
qu'en ce qui concerne la recommandation 8, où vous dites qu'il faudrait
faire déplacer la Place Carnaval des abords du parlement, je pense que
le député de Taschereau me soulignait tout à l'heure qu'il
y avait déjà des communications avec le comité du carnaval
pour que ceci puisse être fait.
En ce qui concerne le point 9, à savoir qu'il faut aussi, par
tous les moyens possibles, empêcher la construction de la tour phase III
de Place Québec, en refusant d'y louer des bureaux pour le gouvernement
du Québec, je pense que, de ce côté, une décision
est prise.
Nous n'avons pas, en tout cas, pour le moment, l'intention de donner le
permis de construction ou de louer des endroits, des édifices à
bureaux à cet endroit et nous n'avons pas non plus l'intention de donner
l'autorisation à ce projet.
En ce qui concerne le projet de tunnel qui devait se faire dans le cap
Diamant, c'est aux calendes grecques, il n'y a aucun problème, cela ne
reviendra plus. Je pense, d'ailleurs, que l'ancien ministre en avait
décidé dans le même sens.
Vous dites qu'il n'est pas question de déménager des
citoyens dans le centre-ville. C'est notre préoccupation actuellement.
C'est l'objectif que nous poursuivons. A la suite de cette commission
parlementaire, je pense que ce que nous devrons rechercher, ce n'est pas tant
de déménager des citoyens que de ramener des citoyens dans le
centre-ville. C'est un peu, je pense, l'objectif de cette commission
parlementaire.
Je n'ai pas de question à vous poser. Je vous remercie donc du
mémoire. Nous espérons justement que cette première
tentative de consultation je dis bien première tentative puisque
nous devrons, je pense bien, si nous voulons établir une certaine
concertation avec les citoyens, nous devrons le faire d'une forme ou de l'autre
nous espérons qu'elle pourra porter fruit et que nous n'aurons
plus, dans cinq ans ou dans dix ans, à déplorer les massacres que
nous avons connus dans le passé concernant la colline parlementaire.
M. Sirois: M. le Président...
Le Président (M. Marcoux): Oui.
M. Sirois: Je m'excuse, mais il manquait des pages dans mon
texte, parce qu'on a préparé cela à la hâte. C'est
une des choses, d'ailleurs, que je voulais mentionner à la fin. On a eu,
en principe, quatre jours pour préparer notre document. M. Pouliot a
bien voulu être patient et nous attendre, mais on voulait souligner quand
même que c'est très difficile pour un organisme populaire ou pour
un individu de préparer, dans un délai aussi court, un document
et, en plus, de vous en apporter cent exemplaires. Les coûts sont
astronomiques quand on n'a pas de budget, quand on n'a pas de subvention. On
voulait simplement soumettre cela à la commission, parce que c'est une
observation qui peut valoir pour d'autres et qui concerne directement
l'accessibilité des citoyens ordinaires et des groupements populaires,
finalement, à leur Parlement. Je crois qu'il faudrait peut-être
examiner la possibilité de trouver une solution à cela.
J'aurais aimé, parce que cela a été fait vite et
qu'il manquait des pages dans mon texte, reprendre quand même un point
qui me semble très important. C'est tout l'aspect de consultation. Je
voudrais simplement lire un des paragraphes, si vous permettez. La cause
profonde du massacre qui a été fait sur la colline parlementaire,
c'est le mépris dans lequel on a tenu les citoyens de cette ville. Et je
pense que c'est très important parce que c'est vraiment la cause
profonde. On n'a jamais voulu considérer qu'on planifiait dans un milieu
habité. On a planifié comme s'il s'agissait d'un désert,
comme s'il s'agissait d'une jungle. Or il y a des gens qui habitaient
là, il y en a qui ont été déplacés. Je sais
que le maire Lamontagne vous a dit que les gens qui habitaient ici
étaient très heureux d'habiter à Charlesbourg. On a
même invité un membre sympathisant du comité de citoyens
qui a été chassé par les projets qu'on connaît
maintenant à venir ici; si vous voulez l'entendre, il va vous dire ce
qu'il pense du fait qu'il a été chassé du lieu qu'il
habitait. Le magma de béton est en somme une gigantesque
déclaration de mépris pour nous tous. Ce n'est pas sans raison
qu'on a toujours refusé obstinément de nous consulter au sujet de
notre milieu de vie. Il est bien évident que les citoyens qui
résidaient là où les bulldozers sont passés, ou
bien dans les environs, se seraient opposés à ces projets. La
preuve c'est les résultats de la consultation récente à
Sainte-Foy où des citoyens comme nous ont fait clairement savoir
à leurs administrateurs qu'ils ne voulaient pas que leur centre-ville
devienne comme Québec, je cite. Pour nous c'est le point le plus
important. Vous allez retrouver en annexe d'ailleurs des documents qui appuient
cela: La déclaration de la Fédération mondiale des villes
jumelées, la déclaration du secrétaire d'Etat à
l'environnement de Grande-Bretagne à Habitat 76 et d'autres documents
qui appuient la nécessité de gérer un milieu de vie avec
les citoyens qui habitent ce milieu de vie. Qu'on fasse un autre organisme de
plus où des citoyens vont être renvoyés par les
fonctionnaires d'autres paliers administratifs, on ne sera pas plus
avancé. Il faut qu on soit impliqué dans la gestion de notre
milieu de vie et que cela débouche sur quelque chose. Il est inutile de
faire un organisme de plus si ce n'est pas dans ce sens. On a appuyé la
proposition du Conseil des monuments et sites en précisant bien qu'on
souhaite être impliqué dans la gestion de notre milieu de vie. On
vit là. On ne veut pas partir. Que ce soit pour un projet de
fonctionnaires ou un projet de ministres de quelque palier du gouvernement que
ce soit, on vit là et on ne veut pas partir.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Charlevoix.
M. Guay: M. le Président, une petite précision. Sur
la question des mémoires à 100 ou à 150 copies, de
nombreux groupes se sont, à juste titre, plaints de cette situation qui,
évidemment, les empêche ou pourrait les empêcher de
comparaître devant les commissions parlementaires.
A ce sujet, j'ai écrit aujourd'hui au ministre d'Etat à la
réforme parlementaire et au président de l'Assemblée pour
faire en sorte que dorénavant l'Assemblée nationale assume les
coûts d'impression, dans la mesure du possible, de ces cent copies qui
peuvent quand même, dans certains cas, coûter $200 ou $300.
M. de Belleval: M. le Président, une précision
là-dessus. Je regrette beaucoup. Il a dû y avoir un imbroglio
parce que la commission de régie interne de l'Assemblée nationale
où je siège a décidé il y a quinze jours d'abolir
cette pratique de demander cent exemplaires. Votre suggestion est
déjà périmée dans le sens qu'on a
déjà décidé de ne plus demander cela.
M. Guay: La communication interne...
M. de Belleval: La décision a dû se perdre dans les
dédales administratifs.
Le Président (M. Marcoux): Un commentaire de la
présidence au nom des gens qui viennent présenter des
mémoires! Maintenant, les décisions précèdent les
demandes.
M. Lessard: ... le gouvernement est déjà devenu un
labyrinthe!
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Charlevoix.
M. Mailloux: J'ai écouté attentivement le
mémoire qui vient d'être présenté et pour la
première fois dans tous les mémoires qui ont été
présentés, le jugement que porte le Comité des citoyens du
Vieux-Québec sur toutes les administrations municipales ou provinciales
précédentes est tellement lapidaire que je cède mon droit
de parole. Je n'ai aucune observation ni question à poser.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Brome-Missisquoi.
M. Russell: M. le Président, il est onze heures. Je pense
bien que tout a été dit. Les citoyens ont émis leur
opinion. C'est leur privilège et le ministre leur a répondu, a
commenté. Je suis satisfait des commentaires du ministre. Il va tout
régler pour eux. Il n'y a pas de problème.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Charlesbourg.
M. Lessard: On ne veut pas tout régler pour eux. On veut
régler avec eux. C'est là qu'est la différence.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Charlesbourg.
M. de Belleval: II y a une phrase à la fin de votre
mémoire où vous avez exprimé d'une façon
peut-être un peu draconienne une conviction que je partage cependant
largement avec vous, celle qu'il faut prendre le parti de ne plus
démolir. Ceci étant dit, je suppose que c'est peut-être une
formulation draconienne d'une réalité qui ne peut pas toujours
être respectée, à savoir qu'il existe quand même,
actuellement, dans le Vieux Québec ou sur la colline parlementaire, des
édifices qu'on aurait, au fond, intérêt à
démolir pour les réaffecter, pour refaire des bâtiments
d'une meilleure venue, mieux intégrés ou affectés à
de nouvelles fins.
Je pense que pour donner un seul exemple, il y a quelques
édifices en brique américaine construits devant le complexe G
juste ici, à côté, qui n'ont aucune valeur architecturale,
qui sont désuets comme bâtiments ou, par exemple, les Terres et
Forêts et je ne sais plus trop qui, je pense que c'est l'ENAP, qui est
juste à côté.
Je mentionnais tantôt le projet d'annexe au vieux palais de
justice où, là encore, on retrouve un édifice en brique
américaine, qui a été construit il y a une dizaine
d'années, où sont situés quelques bureaux du palais de
justice. Je veux dire, quand même, je suppose, qu'il ne faut pas prendre
votre conviction et, comme je dis, la mienne à l'effet qu'il ne faut
plus rien démolir. Il reste que, malgré tout, on aura toujours
avantage à démolir certains édifices pour
améliorer, bien sûr, le paysage urbain et pour donner des
logements, entre autres, quand il s'agit de démolir des édifices
administratifs sans valeur, etc. Ou bien, est-ce que je dois prendre au pied de
la lettre votre énoncé?
M. Sirois: En parlant d'habitation, M. de Belle-val, on pourrait,
tout au moins, souhaiter qu'on ne fasse pas de démolitions pendant le
moratoire demandé par le Conseil des monuments et sites, ce qui pourrait
peut-être nous permettre de réfléchir à la
situation. J'aurais aimé, M. le Président, qu'on permette aux
personnes qui m'accompagnent, qui avaient peut-être quelque chose
à ajouter, de parler maintenant après qu'on aura fait un tour de
table.
Le Président (M. Marcoux): Elles peuvent le faire
immédiatement.
M. Trudeau: On a mentionné, tout à l'heure, que la
concentration de fonctionnaires sur la colline parlementaire risquait de
transformer le Vieux-Québec en un immense bar. Je crois que c'est un
processus qui est déjà engagé d'une certaine façon.
Ce qui arrive, c'est que la fréquentation du Vieux-Québec par les
fonctionnaires ne se produit finalement que sur une très courte
période. C'est un peu comme l'utilisation des autoroutes, finalement,
qui ne servent qu'aux heures de pointe, si bien que les commerces qu'on serait
tenté d'ouvrir ou de laisser proliférer à
l'intérieur du Vieux-Québec ne serviraient peut-être,
à toutes fins pratiques, qu'à l'heure du midi et risqueraient
d'augmenter le nombre d'établissements plus ou moins vacants le soir.
Cela donnerait, de plus en plus au Vieux-Québec l'allure de tout
centre-ville nord-américain où il y a des gens de neuf heures
à cinq heures, mais où il n'y a plus un rat le soir, dès
que les bureaux sont fermés.
Je voudrais souligner aussi que, jusqu'à maintenant, les
administrateurs de la colline parlementaire l'ont conçue comme un
carrefour d'automobilistes. Il est plus difficile de venir sur la colline
parlementaire à pied qu'en voiture. Je suis piéton, j'habite le
Vieux-Québec et je suis fonctionnaire. J'estime que je suis bien
placé pour en parler. Il faut quelquefois enjamber des voitures pour
être capable de se rendre jusqu'à la Place de la Capitale
où j'ai le plaisir de travailler.
La colline parlementaire est percée de larges avenues où
les stops ne sont jamais respectés par les piétons, où les
trottoirs sont profilés dans la même courbe que l'autoroute qui
l'accompagne, si bien que quand vous êtes un piéton, vous risquez
de vous envoler dès qu'il y a un peu de vent parce qu'on a conçu
les trottoirs comme s'ils étaient le prolongement d'une autoroute et non
pas pour être utilisés par un être humain.
La colline parlementaire est rendue déjà bien
éloignée de ses plus proches voisins, du fait qu'elle a fait
démolir tous ceux qui étaient là avant elle et qu'elle se
proposait même d'y faire passer le couvent du Bon-Pasteur qui,
heureusement, a été sauvé des extrémistes de la
démolition et du béton par quelques fervents. On construit
actuellement, et ça vous donne un exemple de conception en urbanisme, au
bout de la terrasse Dufferin, pour la relier à la Côte de la
Montagne, un escalier qui aurait pu se glisser très discrètement
entre le kiosque du bout de la terrasse et le bureau de poste. Mais non, il va
déboucher sur la Côte de la Montagne comme une véritable
bretelle d'autoroute en deux fois plus gros que la côte qui le relie
à la terrasse.
Jusqu'à maintenant, on pourrait dire que l'aménagement de
la colline parlementaire a été fait par ceux-là
mêmes qui sont arrivés à la conclusion que le
progrès social de la ville de Québec passait par la
transformation de sa gare de trains en un marché. Il faut dire que
normalement, les trains, dans toutes les villes du monde, se rendent dans les
centre-ville, Québec fera exception de toutes les villes du monde. Elle
sera la seule à avoir sa gare en banlieue à $7.50 de taxi et au
bout d'un service de transport en commun.
Je voudrais souligner aussi que la colline parlementaire est
actuellement tellement habitable que même les pigeons qu'on a voulu y
loger dans un colombier de béton, qui a été
aménagé sûrement à coup de dizaines de milliers de
dollars, n'a jamais été habité ni par les pigeons ni par
les autres oiseaux qu'on voulait y attirer.
Il y a deux facteurs actuellement qui influencent grandement le
Vieux-Québec. Il s'agit des fonctionnaires et des touristes. Je voudrais
souligner que le Comité des citoyens du Vieux-Québec
présentera au conseil du tourisme, en mai, un rapport sur
l'évolution de l'industrie touristique à l'intérieur du
Vieux-Québec.
Merci.
M. Daoust: Une seule remarque que je voudrais faire. J'ai
été content d'entendre le ministre des Travaux publics parler du
réaménagement de la colline parlementaire, peut-être en
fonction des citoyens. Deux brèves observations, je pense qu'il serait
quand même presque impossible de réaménager un quartier
vivant. On pourrait faire du logement, mais reconstruire un quartier, un milieu
de vie, ce serait peut-être très difficile, parce que beaucoup
d'édifices modernes sont des édifices à logements
où habitent des gens, mais on a beaucoup de difficultés à
créer un milieu humain.
Deuxièmement, est-ce que ces citoyens qui reviendront pourront se
permettre, auront les moyens d'habiter le centre-ville?
Même ceux qui l'habitent encore dans des maisons ont beaucoup de
difficulté à cause de la spéculation qui s'exerce sur les
quartiers avoisi-nant la colline parlementaire. On a eu des cas très
concrets ici, à la commission parlementaire. On a parlé, à
un moment donné, du problème de l'alimentation. Prenez la
question du Dominion sur la rue Saint-Jean pour laquelle on s'est battu. Il n'y
a presque pas de solution à cela. Dominion a accepté, pendant
quelques années, de continuer. Les gens ont essayé de dire: On va
prendre la relève, on va l'acheter, ce magasin-là. Mais la
compagnie n'est pas intéressée parce que le terrain ayant une
valeur telle de $30 ou $40 le pied carré, il est impossible de maintenir
un service alimentaire avec un terrain qui vaut aussi cher. Même dans le
Vieux-Québec, au cours des dernières années, j'ai vu le
prix de mon logement doubler. Pour quelles raisons? C'est la loi de l'offre et
de la demande. A ce moment-là, ceux qui restent, c'est ceux qui
réussissent à avoir des revenus assez élevés pour
demeurer.
Le risque, c'est d'avoir des gens d'une classe sociale qui pourrait se
payer le logement en raison du coût du terrain. Je pense que c'est
évident. Vous comprenez?
M. Lessard: Cela me surprend, ce que vous dites. Je suis
propriétaire dans le Vieux-Québec, sur la rue Hébert, et
je vous avoue bien honnêtement que quand j'ai acheté cette maison,
elle m'a coûté un prix minime, par rapport à une maison que
j'aurais pu acheter sur la Côte-Nord. C'est pour cela que cela me
surprend. Je suis resté bien surpris, d'ailleurs. C'est une maison qui
doit avoir quatre-vingts, quatre-vingts-dix ans.
M. de Belleval: Vous l'avez achetée en quelle
année?
M. Lessard: L'an dernier.
M. de Belleval: Oui?
M. Lessard: II y a quatre logements.
M. Sirois: ... ce sont des choses qui arrivent.
M. Daoust: Moi aussi, je suis propriétaire et j'ai
acheté récemment. Je vais vous dire une chose: les gens
habitaient la maison depuis sa construction, au début du siècle.
La vieille madame avait 85 ans et elle est partie en pleurant. La raison
était qu'elle n'arrivait plus, avec les loyers de la maison, à
payer les taxes, et... On lui faisait quotidiennement des offres de $100 000
comptant sur la table, pour utilisation en "bachelors", etc., pour cette
maison. L'offre qui lui a été faite de $100 000 l'an dernier,
elle préférait la prendre et, finalement, s'en aller en banlieue
ou dans un appartement quelconque. Je l'ai achetée au prix du
marché, qui a doublé au cours des dernières années.
Les taxes municipales sont en fonction de la valeur marchande de la maison et
non pas de la valeur réelle. A ce moment-là, cette maison,
surtout avec le plan de zonage du Vieux-Québec, qui zone beaucoup de
quartiers comme commerciaux en fonction de la colline parlementaire, il
ne faudrait pas oublier cela, même si c'est le Vieux-Québec
prend une plus-value que le nouvel acheteur doit assumer. Les taxes sont en
fonction du prix payé. Je peux donner des cas concrets.
Le Président (M. Marcoux): Deux brèves questions au
député de Laprairie.
M. Michaud: J'habite, moi aussi, dans le Vieux-Québec. La
semaine dernière, j'ai reçu la proposition de zonage de la ville.
Je me demande s'il y a beaucoup de changement sur l'ancien zonage ou si c'est
surtout simplement un zonage nouveau qui n'avait jamais été
fait.
M. Sirois: Je peux vous dire que ce zonage a été
préparé en secret, malgré toutes les démarches
qu'on a faites depuis l'annonce de cela au début de mai et qu'on a
reçu cela à peu près en même temps que vous, enfin
à une semaine près. On a demandé à des gens de
l'Ecole d'architecture de l'examiner pour nous.
En apparence, le plan de zonage, pour ce qui est du Vieux-Québec,
c'est-à-dire des murs à la haute ville, en ce qui nous concerne,
c'est à peu près la même chose. Ce qu'il faut voir, c'est
la perspective dans laquelle on place le Vieux-Québec, là vers
quoi on tend. On parle de dominance. On utilise un nouveau vocabulaire et on
parle de dominance. On fait des secteurs à dominance rési-
dentielle et des secteurs à dominance commerciale. Cela veut dire
que vous avez du commerce partout, que vous avez des résidences partout,
mais où situez-vous le seuil de dominance? Le règlement nous le
dira peut-être. En ce moment, on ne le sait pas.
Ce qu'on voit, c'est qu'il va y avoir du commerce permis là
où il n'y en a pas en ce moment. Il y a un tout petit coin qui est
encore protégé en ce moment et il y a du commerce qui va
être permis là. La pression économique, la pression
spéculative va être tellement forte qu'il n'y aura plus
d'habitations. Le seul type d'habitation qui va rester, ça va être
des maisons de chambres et des auberges pour touristes et des maisons que
quelques privilégiés auront refaites qui deviendront des maisons
de très grand luxe. Il n'y aura plus d'habitation de façon
traditionnelle dans le Vieux-Québec, si on adopte le plan de zonage tel
qu'il est en ce moment. C'est une chose que j'ai soulignée dans le texte
et que je n'ai pas pu vous lire tantôt. Ce qui nous inquiète
aussi, c'est l'absence de concertation et on trouve un peu incongru le fait
qu'on vienne se présenter devant vous, ici en commission parlementaire,
pour parler de la cité parlementaire, de la colline parlementaire, alors
qu'en même temps la ville de Québec est à préparer
un plan de zonage pour tout le centre-ville et, d'autre part, un projet
d'animation pour le centre-ville. Tous les deux sont tenus secrets, alors que
tous les deux sont prêts dans le cas de Sai nt-Jean- Bapt iste.
Pour ce qui est du Vieux-Québec, il y a le plan de zonage et il y
a le plan de sauvegarde. Il n'y a aucune concertation. C'est le simple citoyen
qui va devoir faire la synthèse de cela et payer pour naturellement.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Laprairie, une dernière question.
M. Michaud: Exactement, la dominance où je demeure va
devenir pas publique, mais commerciale. C'est sur la rue Saint-Louis, tout
près d'Au-teuil.
M. Daoust: Même dans la prédominance habitation, il
y a plusieurs types d'habitation qui sont prévus. Alors, toute maison
d'habitation peut être une maison de chambres.
Mme Villeneuve: C'est cela. Partout où il y a des
résidences, on peut avoir des maisons de chambres. Donc, il y aura des
maisons de chambres.
M. Michaud: Un dernier commentaire. Pour le commun des mortels,
ce n'est pas trop facile de s'y reconnaître dans un document de la
sorte.
M. Sirois: II faut dire qu'on aimerait beaucoup avoir votre appui
pour convaincre la ville de ne pas bulldozer ce projet. On a besoin d'avoir le
temps de l'étudier et on a besoin d'avoir des renseignements, et on ne
l'a pas eu. Malgré tout ce qu'on a pu dire au sujet de la consultation
qu'on nous donnait, on fait une opération de marketing pour nous faire
accepter cela.
Le Président (M. Marcoux): Alors, je remercie les
participants d'être venus nous rencontrer...
Mme Villeneuve: Je m'excuse, je n'ai pas eu la chance de parler.
Est-ce que je peux...
Le Président (M. Marcoux): Non, je m'excuse, parce que les
membres de la commission semblent fatigués. Nous avons commencé
notre journée de bonne heure...
M. de Belleval: M. le Président, une dernière
intervention...
M. Guay: On n'est pas venu pour rien.
M. de Belleval: Je n'ai pas l'âme aussi basse que cela,
jamais je ne croirai.
Le Président (M. Marcoux): Alors, allez-y, madame.
Mme Villeneuve: Je pense que le plan de zonage, c'est à
peu près le même problème ici. Nous autres, on ne vous dit
pas nécessairement ce qu'on veut, les choses, comme un édifice ou
quoi que ce soit. Ce qu'on demande, c'est précisément une
consultation. Le problème, avec le plan de zonage, c'est que nous
autres, on n'a pas été consultés. Si vous décidez
quelque chose, vous autres, cela ne va pas être nous qui allons
décider, cela va être vous. Ce qu'on demande, c'est que nous ayons
notre mot à dire là-dedans.
Le Président (M. Marcoux): Alors, on vous remercie
d'être venus nous rencontrer, de nous avoir présenté votre
mémoire. Je pense que le nombre de questions, encore là, des
membres de la commission, a démontré leur intérêt
face à votre mémoire.
Lors de la prochaine séance de la commission, nous entendrons le
mémoire de Trizec Corporation Limited, mémoire 7 M, et le groupe
du Faubourg, mémoire 18 M. Alors, la commission ajourne ses travaux sine
die. Merci.
(Fin de la séance à 23 h 23)