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Commission permanente des Transports,
des Travaux publics et de
l'Approvisionnement
Etude du règlement no 6 sur le transport par
véhicule-taxi
Séance du jeudi 18 janvier 1973
(Dix heures dix-neuf minutes)
M. SEGUIN (président de la commission permanente des transports,
des travaux publics et de l'approvisionnement): A l'ordre, messieurs!
Les représentants de l'Organisation des chauffeurs de taxi de
Montréal sont-ils présents?
UNE VOIX: Non. Ils seront ici au cours de la journée.
LE PRESIDENT (M. Séguin): L'Association métropolitaine des
petits propriétaires de taxis de Montréal. Est-ce que les
représentants sont ici?
Me Antoine Geoffrion, qui représenterait l'Association des
propriétaires de flottes de taxis de Montréal, n'est pas ici,
à ce que je vois. Alors, nous allons entendre M. Edmonston.
Voulez-vous vous identifier, M. Edmonston?
Association pour la protection des
automobilistes
M. EDMONSTON: Oui, merci, M. le Président. Mon nom est Philip
Edmonston. Je suis président d'une association de consommateurs qui
s'appelle l'Association pour la protection des automobilistes. Je vais faire
mon possible pour m'exprimer en français. Normalement, quand je suis en
face du ministre des Transports, je n'ai pas tellement de problèmes. Je
vais faire tout mon possible aujourd'hui. De temps en temps, j'ai des
difficultés, mais, si vous ne me comprenez pas, s'il vous plait,
arrêtez-moi.
LE PRESIDENT (M. Séguin): I would like you to feel very free,
Sir, to express yourself in the language of your choice.
M. EDMONSTON: En ce moment, c'est le français qui est la langue
de mon choix.
LE PRESIDENT (M. Séguin): C'est ça!
UNE VOIX: II est meilleur en français, M. le
Président.
M. EDMONSTON: J'ai un rapport de trois pages ici qui est une
synthèse d'une synthèse et qui montre le point de vue des
consommateurs. J'ai consulté nos membres et l'exécutif de notre
association qui fonctionne sur le plan national. Nous avons des groupements
à Montréal, à Valleyfield, dans la ville de Québec,
à Vancou- ver, à Toronto et à Ottawa. C'est justement une
association pour la protection des citoyens automobilistes face aux compagnies
pétrolières, aux garagistes malhonnêtes, aux
concessionnaires malhonnêtes et aux chauffeurs de taxi malhonnêtes
ou incompétents. Depuis les deux ou trois dernières
années, nous avons eu plusieurs plaintes par semaine venant de citoyen
et même aussi des chauffeurs de taxi.
On se plaint à nous autres. Cela a commencé avec l'affaire
Dorval. Cela a continué avec des consommateurs mécontents du
service reçu des chauffeurs de taxi. Ce n'est peut-être pas plus
d'une centaine de plaintes, depuis les deux ou trois dernières
années. Ce n'est pas notre rôle, normalement, d'accepter les
plaintes des gens qui reçoivent des services des chauffeurs de taxi ou
des compagnies de taxi. Mais nous étions tellement surpris de leur
gravité et du mécontentement des gens qui utilisent ce service
que nous avons commencé à établir un dossier sur le taxi,
justement pour le présenter à cette commission. Alors si c'est un
peu hors de notre rôle, strictement pour la protection des
automobilistes, c'est notre rôle pour la protection des citoyens en
général, au Québec.
Je ferai juste quelques commentaires. Je suis ici depuis les trois
derniers jours. J'ai entendu beaucoup d'associations de taxi et beaucoup
d'avocats de ces associations qui ont dit: Nous donnons le meilleur service au
monde. D'accord, le consommateur est content du service reçu. Je ne veux
pas dire que des déclarations sont des mensonges mais elles ne sont pas
exactes. Il y a beaucoup de gens qui ont parlé sur le dos des
consommateurs, depuis les trois jours que nous sommes ici. Mais, croyez-moi,
les consommateurs en général, surtout à Montréal,
sont fortement mécontents du service reçu.
J'ai entendu, juste en passant, parler du problème à
Dorval. Le problème à Dorval, vous savez, c'était cela.
C'est de la fraude, de la malhonnêteté, du mauvais service. Pour
vous démontrer cela, nous avons une question primordiale: le groupement
forcé des associations et le groupement volontaire. Prenez, par exemple,
le problème de la fraude, à Dorval. Il a été
question d'un groupement volontaire et d'un groupement forcé. Presque
durant deux ans, les groupements volontaires de chauffeurs de taxi et les
associations de taxis ont essayé de nettoyer cela. Ce fut un
échec monumental, parce que personne ne croyait à la bonne
volonté de cette association, de cette autre association et de cette
autre association. C'est toujours la chicane. A cause de cela, le gouvernement
fédéral a dû s'en mêler pour nettoyer la situation.
Je ne sais pas si cela a amélioré la situation mais, si
ç'avait été nettoyé par le groupement volontaire
des associations de taxis, ce le serait depuis longtemps. Mais ce n'est pas le
cas.
Alors, je ne sais pas ce qui va arriver sur le plan provincial avec le
regroupement volontaire
des associations de taxis, mais je peux dire une chose, c'est que je
crois qu'on doit se méfier des gens qui disent que c'était
mauvais avant, que maintenant ça va être bon, que le gouvernement
s'occunant peu de notre vie, nous allons changer. Si on a des réformes
qui vont se produire, elles vont se produire ici dans cette Chambre.
La bonne volonté, c'est bien gentil, mais vous avez entendu hier
les quelques menaces, les huées, les problèmes avec les gens qui
voulaient montrer l'autre côté de la médaille. Je suis ici
depuis trois jours et j'ai vu la plupart des gens des associations de taxis qui
parlaient de consommateurs bien servis, à l'exception de Sherbrooke. Il
semble qu'ils ont raison, mais les autres qui ont parlé, disant qu'ils
faisaient ça, ça et ça, ce n'est pas complètement
vrai. Par exemple, on a parlé de la liberté. La liberté,
c'est un mot dont on abuse souvent. On parle souvent de la liberté
d'avoir la voiture de son choix, la liberté, par exemple, d'avoir une
voiture non sécuritaire, la liberté d'avoir une voiture
dangereuse à n'importe quelle vitesse, la liberté d'avoir un
chauffeur qui ne parle même pas français, la liberté
d'avoir un chauffeur qui va vous voler. Ce n'est pas ça, la
liberté. Je crois qu'on a vraiment abusé du mot "liberté"
ici.
Le service des taxis est plus qu'un service élémentaire
où vous pouvez prendre un autre moyen de transport. C'est essentiel dans
notre province parce qu'un service de taxis efficace, honnête, sûr,
aide les consommateurs mais aide la vie en général. Surtout que
maintenant, avec la question de pollution, on va bientôt, au Parlement,
avoir besoin de limiter le nombre de véhicules dans la ville. On va
dépendre beaucoup plus d'un bon système de taxis. C'est dans
l'avenir, ça. Surtout avec notre climat, les gens dépendent
beaucoup du taxi. En plus de ça, il y a des milliers de travailleurs qui
dépendent d'un bon système de taxis pour aller travailler
quotidiennement. Je ne sais pas si on peut appeler ça un service
essentiel mais, à notre point de vue, c'est un service essentiel. C'est
un service qui doit avoir des règlements forts et sévères
du ministère des Transports.
Quand le gouvernement veut faire une réforme de base comme telle
et entend les associations, les trois premiers jours, qui disent: C'est du
communisme, c'est du socialisme, c'est une chose qui va nous frapper dans notre
portefeuille, je dis qu'ils rêvent en couleur, ces gens-là, parce
que cela me surprend, le projet de réforme qui a été
proposé par le gouvernement provincial. Je ne suis sûrement pas un
ami du ministère des Transports, il me semble. Souvent, nous sommes de
l'autre côté de la table. Cette fois-ci c'est
peut-être une position que je ne suis pas habitué de tenir
je dois appuyer ce projet de règlement no 6 parce que c'est une bonne
chose pour le consommateur.
Voyons en détail la question. Qu'est-ce qu'un consommateur,
qu'est-ce qu'il veut? Le consommateur québécois, avec le
système de taxis, peu importe celui qui le dirige, que ce soit
l'association, que ce soit le gouvernement ou les coopératives, veut
avoir la sécurité, il veut avoir des services. Ce sont deux
choses essentielles. Pour savoir si les réformes du gouvernement sont
nécessaires, il faut que nous demandions: Qu'est-ce que c'est
l'état de sécurité de ces véhicules et quels sont
les services qui sont offerts par les compagnies ou les chauffeurs de taxi?
Sur la question de sécurité, ce qui m'intéresse
surtout, c'est la ceinture de sécurité. Je sais, selon les
dernières statistiques qu'en Australie le taux de mortalité
annuel a été coupé de 23 p.c. avec la loi obligeant les
gens à utiliser des ceintures de sécurité. Je sais aussi
que les ceintures de sécurité, on les demande dans les avions;
bientôt, on les demandera dans les autobus scolaires. Pourquoi? Parce que
cela sauve la vie. A Saint-Jean, lors de l'accident qui a eu lieu avec un
autobus scolaire, les enfants qui ont été tués ont
été projetés dehors, en bas du camion, mais ils auraient
pu être sauvés si on avait eu des ceintures de
sécurité. Ce n'est pas pour faire des blagues; il ne s'agit pas
de dire: C'est du communisme, du socialisme; c'est un outil pour sauver la vie.
La chose qui m'étonne le plus, c'est de voir les lettres de la compagnie
Diamond, par exemple: sécurité, safety, service. Je ne comprends
pas pourquoi ils peuvent utiliser ces lettres. Ils sont bien bilingues:
sécurité, safety, service. Essayez de trouver un taxi Diamond
avec les ceintures de sécurité.
Le taxi arrive équipé avec ses ceintures, mais elles sont
enlevées ou cachées derrière les banquettes pour
empêcher les passagers de les utiliser. Selon les dernières
statistiques au Canada, 20 p.c. des passagers veulent utiliser les ceintures de
sécurité. Alors seulement par une action de la compagnie de
taxis, on enlève ce droit aux clients de se servir des ceintures de
sécurité. Ce ne sont pas des blagues, les bureaux d'assurances du
Canada ont montré qu'un des endroits les plus dangereux sur la route
dans le Québec, c'est dans une voiture-taxi. Selon les derniers chiffres
des bureaux d'assurances du Canada, le taux des accidents impliquant les taxis
dans le Québec est très haut, mais on utilise beaucoup moins le
taxi, presque 1 p.c, du montant qui apparaît ici au Québec. C'est
très dangereux d'être passager dans un taxi aujourd'hui dans la
province de Québec.
Jusqu'à présent, notre association n'a vu aucune action
définie prise pour les compagnies de taxis, non seulement Diamond ou
Lasalle, mais combien de taxis ou de dirigeants de ces compagnies veulent
améliorer la situation? Au contraire, ils parlent de servir leur public.
C'est le public que nous voulons servir, c'est le public qui nous fait vivre,
mais qu'est-ce qu'ils font? Ce n'est pas un chemin à sens unique, il
faut offrir une autre chose aussi, il faut offrir la sécurité.
Ils n'offrent pas cela maintenant. Je pense seulement à la compagnie
Lasalle parce que j'ai entendu, à plusieurs reprises, le direc-
teur de cette compagnie qui disait: Nous avons le meilleur service au
monde. Cela n'est pas vrai J'ai été dans les autres villes,
souvent je dois voyager partout dans le Canada et aux Etats-Unis et j'ai vu que
ce n'était pas le meilleur service au monde. Je ne sais pas de quel
monde viennent ces dirigeants du taxi, mais certainement pas du monde
réel.
Nous avons des problèmes ici au Québec. On ne tue pas un
agent de sécurité, comme il est arrivé
dernièrement, pour rien. On a des problèmes en profondeur
graves.
Ces problèmes graves ont été
révélés par les gens qui sont venus ici, surtout mardi,
pour faire la manifestation devant le parlement. Par exemple, seulement pour
vous montrer la sécurité routière de quelques voitures, on
a présentement en service, à la compagnie Diamond, une voiture no
3038 je le sais parce que je suis monté dans cette voiture avant
de venir ici mardi, par hasard et cette voiture 3038 était
tellement défectueuse que je suis sûr que même Jacques Duval
ne pourrait pas la conduire. J'ai pris seulement quelques notes sur la question
de sécurité. D'abord, elle n'avait pas de cligno-teurs, ce qui
est contre la loi. Elle n'avait pas de serrure au coffre arrière,
c'était une sorte de corde. C'est incroyable. La transmission
était presque finie, elle cognait. La suspension était
très mauvaise. En plus de cela, le chauffeur de ce taxi 3038 n'avait
même pas sa photo à l'intérieur. Je lui ai demandé:
En avez-vous une? Il a répondu: Ah oui ! C'est par hasard que j'ai eu le
plaisir d'être conduit dans une voiture de Diamond qui était
défectueuse. Suis-je tombé par hasard sur une voiture semblable
parmi des milliers d'autres? Je me le demande. Je ne crois pas, parce que nous
avons eu beaucoup de plaintes, pas seulement au sujet de la compagnie Diamond,
mais des autres compagnies de taxis qui pensent d'abord au profit, et
après, aux gens. C'est la question essentielle. C'est un service
essentiel et le gouvernement doit forcer les compagnies à penser au
service qu'elles offrent avant de penser aux profits qu'elles veulent
obtenir.
Sur la question de compétence des chauffeurs, tout le monde a
dit, nous avons des "bums" dans l'exercice de cette profession. Nous avons des
"bums" dans le taxi. Nous avons les remplaçants, nous avons des gars qui
ne sont pas professionnels. Ce n'est pas moi, ce n'est pas toi, ce n'est pas
nous. C'est quelqu'un, mais nous ne savons pas qui. Nous avons des "bums",
justement, parce que nous n'avons pas un esprit professionnel. Qui est
chauffeur de taxi? La plupart des gens pensent qu'un chauffeur de taxi, c'est
un gars qui a raté un autre mode de travail dans sa vie. Mais je connais
des chauffeurs de taxi qui essaient de faire leur travail d'une façon
professionnelle.
Je suis certain que, si on a des associations qui donnent une
accréditation, mais une accréditation professionnelle, avec un
esprit professionnel, si c'est une association de l'Etat ou une association
privée, cela va améliorer beaucoup parce que le chauffeur de taxi
va avoir la fierté d'être un chauffeur de taxi.
Je suis certain que pour être un chauffeur de taxi, cela ne
demande pas beaucoup. Parce qu'on a vu plusieurs chauffeurs de taxi qui ne sont
pas contents. C'est un service. Prenez-le ou ne le prenez pas. Cela ne
m'intéresse pas tellement.
On a des bons gars dans l'industrie du taxi. Nous voulons encourager un
esprit professionnel. Avec le système du gouvernement provincial, nous
croyons que cet esprit professionnel peut être établi.
Finalement, au sujet du service à la clientèle, j'ai
déjà parlé de Dorval. Il y a plusieurs points, dans le
service à la clientèle, sur lesquels j'aimerais parler. C'est que
l'on a eu beaucoup de plaintes sur la question de Dorval. C'est connu. C'est
seulement maintenant que le gouvernement fédéral s'en est
mêlé. Je ne sais pas si c'est réglé, mais
jusqu'à ce que ce le soit, il y a toujours eu de la chicane
là-bas. Quand je dis de la chicane, je dis de la fraude, le
problème en général vis-à-vis du service aux
consommateurs.
Aussi, nous avons eu des plaintes de gens qui ont pris l'autobus ou le
métro jusqu'au boulevard Henri-Bourassa et qui ont demandé un
taxi de Diamond, une grosse compagnie, pour aller à Laval. On a
refusé à beaucoup de monde, carrément, de traverser le
pont pour aller à Laval, parce qu'on n'avait pas eu le droit de prendre
des gens de Laval pour revenir à Henri-Bourassa. Alors, on n'a pas voulu
prendre des consommateurs au terminus à Henri-Bourassa et leur rendre
service de les transporter à Laval.
Si on a un moyen de transport qui doit servir tout le monde, on doit
accepter tout le monde: les petites courses et les grandes courses, les courses
payantes et aussi les courses qui ne sont pas payantes. Maintenant, si un
chauffeur de taxi croit qu'il ne peut pas gagner aussi d'argent avec vous, il
peut vous refuser. S'il neige et s'il fait froid, ce n'est pas une chose qui
vous plait tellement. C'est arrivé avec plusieurs consommateurs.
Une autre question sur le service. C'est que nous avons eu des plaintes
aussi de gens qui ont dit qu'ils ont pris des chauffeurs de taxi qui ne parlent
même pas le français. Peut-être que c'est drôle
d'entendre cela venant de moi, parce que je ne suis pas Français. Le
français ce n'est pas ma langue maternelle.
Je sais une chose, c'est qu'avoir une personne francophone dans le taxi
alors que le chauffeur ne parle même pas français, ce n'est pas
drôle. Ce n'est pas un cadeau, pour utiliser une expression
québécoise. Si vous voulez vous rendre à destination de la
façon la plus efficace et que vous ne pouvez pas vous faire comprendre
du chauffeur, cela peut causer des problèmes. Je trouve ça
drôle qu'on ne soit pas assez sévère et qu'on n'exige pas
que le gars parle
français. Je suis heureux de voir qu'on a mis ça dans le
règlement, car c'est primordial ici. Il doit parler le français
d'abord.
Finalement, comme groupement de consommateurs, il est entendu que
plusieurs compromis se feront à cause de pressions politiques intenses
faites par différentes associations de taxis et par différents
chauffeurs. On sait que le gouvernement va reculer sur quelques points et aller
plus loin avec les autres points. Nous sommes d'accord sur ça. C'est
ça, la démocratie que le gouvernement attend de nous. Il fera des
compromis. La seule chose que nous demandons, c'est qu'avec le compromis que
vous allez faire vous n'oubliiez pas deux choses concernant les consommateurs.
N'oubliez pas que votre tâche est d'assurer les meilleurs services et
aussi des services de toute sécurité aux consommateurs
québécois. Par exemple, il y a un message commercial à la
télévision je ne veux pas vous montrer que je regarde la
télévision trop souvent qui dit, pour une marque de
bière: Tu l'as ou tu l'as pas! Pour la sécurité et les
services, à Montréal surtout: Tu l'as pas! Merci.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le ministre des Transports.
M. PINARD: M. Edmonston, merci pour votre présentation.
Félicitations pour le bon français que vous avez utilisé
pour faire votre présentation. Je pense que cela prenait, quand
même, un certain courage pour vous exprimer en français, ce matin,
dans les circonstances que l'on connaît, alors qu'il faut parfois des
précisions techniques et le mot juste pour décrire les
idées qu'on a. Je pense que vous avez réussi ce tour de force
fantastique.
Vous représentez une association de consommateurs qui regroupe
combien de membres?
M. EDMONSTON: Environ, 1,200 membres.
M. PINARD: Au Québec?
M. EDMONSTON: Au Québec.
M. PINARD: Et au Canada?
M. EDMONSTON: Mais nous avons beaucoup de volontaires. Environ 2,000 au
Canada.
M. PINARD: D'après vous, est-ce qu'il y a trop ou pas assez de
voitures-taxis dans l'agglomération de Montréal, pour en arriver
à une bonne qualité de services?
M. EDMONSTON: En ce moment, nous croyons qu'il y en a trop.
M. PINARD: Qu'il y a trop de voitures-taxis. M. EDMONSTON:
Exactement!
M. PINARD: Pour corriger la situation, quelle est votre proposition pour
avoir une bonne qualité de services?
M. EDMONSTON: Nous croyons que, selon les recommandations du rapport
Bossé, 700 à 800 taxis, ce serait une bonne moyenne. A Toronto,
le chiffre est plus élevé et les gens sont très bien
servis. Je crois que c'est un taxi par 965 personnes dans la ville de Toronto.
J'ai été souvent à Toronto et je parlais toujours avec le
chauffeur de taxi, comme avec les gens en général. Notre bureau
n'a reçu aucune plainte encore depuis six mois. Nous croyons que c'est
une bonne moyenne. Nous savons que les dirigeants des associations de taxis
vont être mécontents de ça.
On a beaucoup de taxis, à Montréal, mais le climat est
froid, parfois il y a de la neige. Parfois, la personne prend un taxi pour s'en
retourner à la maison. Il est très difficile d'avoir un taxi,
à ce moment-là. C'est vrai. La plupart des gars disent: Pourquoi
travailler, mon Dieu? Il neige. Nous ne pouvons pas faire de longs voyages.
Nous serons embêtés, nous serons pris dans la neige. Alors
même avec tous ces taxis que nous avons à Montréal, il n'y
a pas un esprit humanitaire, un esprit de service au consommateur. Quand la
neige commence à tomber, le taxi file à la maison. C'est
incroyable, mais cela arrive souvent.
Nous avons assez de taxis, à Montréal. Nous en avons plus
qu'assez, nous en avons même trop, à Montréal, à
notre avis. De plus, quand on a de la neige, des temps où il est
difficile de conduire, nous n'en avons pas assez.
M. PINARD: Avez-vous étudié la réforme du taxi qui
a été faite dans le Toronto métropolitain?
M. EDMONSTON: Je l'ai vue.
M. PINARD: Pourquoi cette réforme, à Toronto, a-t-elle
été faite? A qui a-t-elle été demandée?
Pensez-vous qu'elle a été bénéfique?
M. EDMONSTON: Pour répondre à la première partie de
votre question, je ne suis pas assez au courant de la réforme, à
Toronto, à savoir qui l'a faite et à la demande de qui. Je crois
que vous êtes mieux renseigné que moi là-dessus.
Question de bénéfices, je puis vous démontrer que
les bénéfices aux consommateurs sont extraordinaires à
Toronto. Nous avons même fait une petite enquête, pour savoir si
les gens sont contents. Ils sont contents. A Toronto, j'ai demandé
à plusieurs chauffeurs de taxi: Combien gagnez-vous? Le chauffeur me
répondit: Je dois travailler, monsieur. J'ai dit: D'accord. Mais combien
d'heures travaillez-vous par jour? Je travaille 12 heures par jour. Pendant
combien de jours? Six, parfois sept jours. Combien
gagnez-vous? Environ $300, $350. C'est à Toronto.
M. PINARD: Par semaine?
M. EDMONSTON: Oui. J'étais surpris.
M. PINARD: Oui, un instant.
LE PRESIDENT (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous plait!
M. PINARD: Est-ce brut ou net? M. EDMONSTON: Brut.
M. PINARD: Ses dépenses comptées, combien peut-il fait de
salaire?
M. EDMONSTON : Je ne sais pas de combien sont ses dépenses.
M. PINARD: Lui avez-vous posé la question?
M. EDMONSTON: Je ne sais pas exactement.
M. PINARD: A New York, y a-t-il eu une réforme du taxi?
M. EDMONSTON: Oui.
M. PINARD: Avez-vous étudié cette réforme?
Etes-vous allé à New York récemment?
M. EDMONSTON: Non, pas en profondeur. Nous avons seulement
demandé, encore, aux chauffeurs de taxi s'ils en étaient
contents. Il y a le gel des permis de taxi.
M. PINARD: Oui.
M. EDMONSTON : II y a aussi des questions de sécurité, des
inspections très sévères des taxis. Il y a la question de
la ceinture de sécurité qu'on doit avoir. Il y a aussi la
question de protéger le chauffeur lui-même contre des voleurs. Ils
ont trouvé cela intéressant. On parlait de liberté, ici.
Peut-être une liberté que le chauffeur de taxi veut avoir, c'est
la liberté d'être volé par quelqu'un. Mais, à New
York, on ne reconnaît pas cette liberté. On a essayé le
plus possible de protéger le chauffeur aussi. C'est un peu une perte de
liberté parce que le chauffeur ne peut pas parler avec le passager,
derrière, à cause du mur de plastique d'une substance très
solide qui protège le chauffeur de taxi.
Alors, au sujet de votre question sur New York, je ne suis pas assez
renseigné, au sujet des bénéfices. Cela semble beaucoup
plus dur là-bas qu'à Québec et qu'à Toronto. C'est
plus dur. On a eu le problème, à New York aussi, au sujet des
taxis.
On a toujours eu des problèmes parce qu'ils s'entêtent
à lutter contre le règlement concernant l'inspection des taxis,
qui a lieu, je crois, plus que deux fois par année.
M. PINARD: Quel est le nombre de rapport voitures-taxis par rapport
à la population à New York?
M. EDMONSTON: Je ne suis pas au courant.
M. PINARD: Sur le problème de l'association, est-ce que vous avez
quelque chose à dire à la commission parlementaire?
M. EDMONSTON: Nous sommes heureux de voir, sur la petite feuille que
vous nous avez passée ce matin, que cette association devra avoir un
comité d'éthique professionnelle. Nous croyons que c'est
très important, un comité d'éthique professionnelle.
Même les représentations des gens de Sherbrooke ont montré
qu'un tel comité discipline ses propres membres. Nous sommes d'accord
sur ça. Nous croyons que c'est nécessaire. On a un proverbe
français qui dit que la peur est le commencement de la sagesse. Si cela
marche avec les hommes politiques, je suis certain que ça marchera avec
les chauffeurs de taxi. S'ils ont peur, je ne suis pas certain s'ils ont la
sagesse dans cette industrie. Je sais que le comité d'éthique
professionnelle est très nécessaire. La seule chose que nous
voulons ajouter, c'est que le comité d'éthique professionnelle
doit comporter des représentants des consommateurs. Justement, nous
avons des associations de consommateurs ou des consommateurs choisis par le
gouvernement qui sont représentatifs de la population de certains
endroits. Nous croyons qu'on va avoir le "feed-back" de Lasalle et de Diamond
et non pas le "feedback" des consommateurs disant qu'ils ne sont pas contents.
Votre service n'est pas aussi bon que vous le croyez. Il faut avoir ces
dialogues. Jusqu'à maintenant, au parlement, au salon rouge, on n'a pas
eu ce dialogue. C'est commencé aujourd'hui. Pour terminer, je suis
certain que ce comité d'éthique professionnelle est bon et
très nécessaire. Il faut que ce soit dans l'association des
détenteurs de permis, que ce soit prévu dans le règlement
no 6 aussi, comme dans l'entreprise privée du taxi. C'est une chose
essentielle parce que c'est un contrôle, non pas sur le prix, non pas sur
le nombre de permis, mais sur la qualité des services. A notre avis, le
taxi est un service essentiel. On doit avoir le contrôle de la
qualité.
M. PINARD: Justement, en parlant d'un service essentiel au public, le
fait que le règlement dise qu'il faudrait que la voiture-taxi soit en
service au moins 60 heures par semaine, est-ce que ça vous parait
exagéré ou si ça vous parait réaliste et
nécessaire?
M. EDMONSTON: Pour nous, c'est très réa-
liste. Nous croyons que le taxi est un service essentiel. Si vous
détenez un permis du gouvernement municipal ou provincial, vous avez le
privilège de faire ce n'est pas un droit, c'est un
privilège un certain genre de travail pour le public. Nous
croyons que c'est primordial que ce privilège apporte avec lui des
obligations. Une des obligations, c'est que vous soyez à la disposition
du public un certain nombre d'heures par semaine. Nous croyons que 60 heures
par semaine n'est pas irréaliste, que ce n'est pas de la foutaise. C'est
très important d'être à la disposition du public. Nous
croyons que c'est une bonne affaire.
M. PINARD: Quand vous parlez du service de taxi comme d'un service
essentiel au public, êtes-vous capable d'aller un peu plus loin et de
nous dire quelles seraient les conséquences d'un arrêt de ce
service de taxi pour la population, compte tenu des besoins de la population
d'être servie par ce moyen de transport, selon la formule qui est
prévue au règlement no 6 pour le regroupement des
propriétaires, gros, moyens et petits, et des chauffeurs de taxi dans
une association?
M. EDMONSTON: Nous croyons que, si ce n'est pas laissé à
leur discrétion et si c'est l'association des gens d'un même
service, c'est toujours bon parce qu'on a la force de frappe, on a la force de
pouvoir acheter certains produits. Je connais les compagnies
pétrolières, ce ne sont pas des gens qui sont chrétiens,
humanitaires; ils croient d'abord aux choses économiques. Si vous n'avez
pas la force de frappe en face de ces compagnies, elles vont vous vendre les
choses le plus cher possible. Cela se transmet dans le prix au consommateur et
on demande beaucoup plus cher au consommateur pour ces voyages en taxi parce
que cela coûte plus cher.
Qu'est-ce qu'un arrêt de travail des chauffeurs de taxi donnerait?
On a eu un petit arrêt de services de taxi justement mardi soir, ici,
à Québec, sur le pont Laporte et mardi toute la journée on
n'a pu trouver de taxi parce qu'ils étaient tous ici. C'était
terrible. C'était presque Un service essentiel. Tout le monde qu'il y
avait dans l'autobus que j'ai pris a dû marcher de là-bas
jusqu'ici. Ce n'était pas drôle parce qu'on n'a pas eu d'autobus
supplémentaires pour venir de la gare d'autobus au parlement. Ce n'est
pas drôle de marcher de là à ici. Peut-être que c'est
bon pour le physique, mais vraiment c'est un service essentiel. Nous croyons
qu'avec une association comme l'association proposée par le gouvernement
provincial, il y a des avantages pour le consommateur, il y a des avantages
pour le chauffeur qui lui-même est un consommateur. Le pouvoir d'achat
d'un consommateur est beaucoup plus grand quand on est réuni dans un
groupement de consommateurs, un groupement de taxis. Je sais que, pour le
pouvoir d'achat des pneus, même des radios quand on achète tous
ensemble, cela baisse le prix considérablement et peut avoir de l'effet
dans la poche du consommateur qui peut peut-être payer moins cher
à l'avenir pour le taxi, malgré les augmentations prévues,
les augmentations normales du prix de l'essence qui va toujours augmenter. Cela
ne se traduira pas tellement dans la poche du consommateur par une augmentation
si on a le pouvoir d'achat d'un groupement de taxis. Je ne parle pas seulement
du groupement de Lasalle et de Diamond. Je crois que le groupement de Lasalle
et de Diamond, selon les statistiques que j'ai vues, contrôle seulement
56 p.c. ou 52 p.c. des taxis à Montréal. Je ne sais pas si c'est
exact ou non, j'ai lu cela dans un journal, Le Devoir, qui a déjà
fait un rapport sur les taxis. Mais je crois qu'une association comme celle qui
est proposée ici peut avoir une force de frappe dans l'industrie, la
force de frappe de ses propres membres, une force de frappe pour
l'éthique, pour l'honnêteté, pour le meilleur service et
pour la sécurité. Nous croyons aussi que cela peut beaucoup
aider, en général, le consommateur.
Et c'est lui maintenant qui entre dans toute cette affaire. Quels
services seront donnés par cette association aux consommateurs? Nous
croyons que ce serait un service mieux orchestré, si on peut penser
à une symphonie, mieux dirigé parce que c'est tout ensemble.
M. PINARD: M. Edmonston, vous avez probablement lu la loi 23, la Loi des
transports, parce que j'ai remarqué que vous avez été
présent presque tous les jours aux séances de la commission
parlementaire au cours de l'année 1972. Si pour conserver au public la
meilleure qualité de transport possible, pour le transport des
marchandises et le transport des personnes, est-ce qu'on peut garder un
régime de liberté totale ou partielle comme on l'a exprimé
devant cette commission, depuis trois jours, et arriver à cette
qualité de services nécessaire, à cette efficacité
et à cette rentabilité dans le transport des personnes et des
marchandises? Comment pourrions-nous concilier ce besoin de liberté
affirmé par les propriétaires de grandes associations, par les
propriétaires, petits, gros et moyens, par les petits chauffeurs et le
fait de permettre au gouvernement en même temps d'en arriver à une
politique équilibrée du transport des personnes et des
marchandises au Québec?
M. EDMONSTON: D'abord, il faut définir si l'industrie du taxi est
un droit ou un privilège. Je crois que le service de taxis, c'est un
privilège, ce n'est pas un droit. Le permis peut être
retiré par le gouvernement selon sa volonté. Si c'est un
privilège, ce privilège suppose les obligations que j'ai
déjà mentionnées. Les obligations sont parfois
violées. Les obligations du gouvernement concernant ce permis, c'est de
dire: Vous avez ce permis, le privilège de gagner
votre vie, voulez-vous donner un service au public consistant et de
haute qualité? Si on abuse de ce privilège, on le retire. On fait
ça avec les cabarets et autres endroits où on donne un permis.
Selon la gravité de l'abus de ce privilège, le gouvernement doit
agir.
Je suis ici aujourd'hui pour vous montrer la gravité des abus de
ce privilège. Les actions abusives des compagnies de taxis sont graves.
Les grosses compagnies comme LaSalle, dont je peux parler, n'ont même pas
de ceintures de sécurité dans les véhicules et je trouve
cela incroyable. On enlève ça, parce que ce n'est pas de
l'intérêt public. Je ne crois pas qu'on doive retirer un permis
seulement pour ça, mais ça montre en général
l'arrogance des compagnies, des corporations. On enlève de la protection
au public en donnant un service essentiel au public. Ce privilège que
vous donnez à ces gens, on en abuse et je crois que le gouvernement doit
agir. Il doit dire: Vous avez un privilège mais aussi une obligation
précise. Vous l'avez fait dans le règlement no 6. C'est une
obligation pour vous de garder ce privilège de gagner votre vie. Tout ce
que je peux dire, c'est que l'obligation a été violée
souvent. Dans l'industrie privée comme telle, on n'a peut-être pas
de concurrence. Pour le service, la qualité et la sécurité
je n'ai pas vu tellement de concurrence. J'ai vu des voitures vraiment en
très mauvais état.
Je crois que c'est à cet égard que le gouvernement doit
agir. Quant aux chiffres des compagnies d'assurances du Canada, je m'y fie
beaucoup, croyez-moi. J'ai vérifié cela auprès de la ville
de Montréal. Nous avons beaucoup d'accidents impliquant les taxis.
M. PINARD: Est-ce que je comprends bien si je dis que, selon votre point
de vue, si ceux qui sont dans l'industrie du taxi se font concurrence pour
aller chercher des profits, il faudrait que le gouvernement trouve un moyen de
les mettre en concurrence pour assurer une meilleure qualité des
services au public?
M. EDMONSTON: C'est exactement cela. Nous croyons que c'est le profit
qui est la première préoccupation dans le monde de ces
compagnies, parce qu'elles ont des actionnaires. Selon le terme légal,
une compagnie a-t-elle des obligations envers le public ou envers ses
actionnaires? Ses actionnaires doivent faire un profit. Nous allons avoir des
gens qui vont dire: Si nous n'avons pas de bonnes voitures et un bon service,
le public ne prendra pas nos taxis. C'est faux. Vous pouvez donner un mauvais
service avec des voitures non sûres et faire toujours un profit et
peut-être même faire plus de profits, parce que vous ne
dépenserez pas d'argent pour rendre vos véhicules sûrs ou
pour embaucher des chauffeurs de bonne qualité. Vous pouvez embaucher un
étranger, ou un individu qui n'est pas Québécois, qui ne
parle pas la langue et qui va travailler peut-être pour presque rien,
parce qu'il a besoin de travailler, c'est le seul emploi qu'il peut avoir. Vous
pouvez mettre n'importe quel "bazou" ou "minoune" sur la rue pour frauder
véritablement le client. Vous ne lui volez pas l'argent de sa poche,
mais vous le fraudez, parce que vous ne lui donnez pas une voiture qui offre
plus de sécurité ni un service adéquat. Et il n'est
peut-être même pas au courant de cela. Cela arrive souvent.
Quant à moi, il faut que le gouvernement intervienne pour assurer
que le profit ne soit pas la principale priorité du service de taxis
à Montréal, au Québec, en général. Le
service à la population devrait être la principale
priorité. Ici, les tarifs de taxi sont tellement mal faits, son
tellement bas que les compagnies de taxis ne peuvent pas exister, il serait
plus rentable que les compagnies donnent un bon service avec des voitures
sûres.
Je veux dire maintenant que cette industrie est très malade.
Est-ce qu'il serait plus rentable d'offrir des voitures sûres et un
service de haute qualité? Est-ce que cela mettrait les compagnies en
faillite? J'en serais surpris d'ailleurs. Cette industrie est vraiment
malade.
M. PINARD: Si je comprends bien, vous dites que si l'industrie, telle
que nous la connaissons aujourd'hui, avec la qualité de services que
nous connaissons, se prétend incapable de faire des profits, elle est
vraiment malade.
M. EDMONSTON: Exactement. Si elle ne peut pas faire de profits en
donnant un service de haute qualité, un service sûr au
consommateur, il y a vraiment quelque chose qui ne marche pas. A mon avis, le
gouvernement doit agir pour protéger le public. C'est son premier
intérêt, le public en général. Je dis maintenant que
le public n'est pas protégé et que vous devez agir dans cette
optique, pour le consommateur, pour le public en général et non
pas en faveur de quelques associations de taxis, non pas pour quelques
chauffeurs de taxi ou propriétaires de taxis, mais toujours avoir cette
optique, à savoir ce que cela va donner au public
québécois en général. Où en sont-ils, en ce
moment, sur la question de services et de sécurité? Où
voulons-nous les mener? En quel état est le travail sur ce point? Comme
vous avez fait avec le règlement no 6, cela va faire, je crois,
l'affaire du gouvernement parce qu'il doit nous protéger tous ensemble,
non pas seulement une petite entreprise ici, une grosse là. Il fait des
lois différentes pour celui-ci et pour celui-là. Il faut avoir
une législation pour tous, pour protéger les
intérêts de tous.
M. PINARD: M. Edmonston, comme président d'une association dont
l'objectif est la protection du consommateur, vous avez donné votre
point de vue. Nous vous en remercions. Cependant, pouvez-vous aller un peu plus
loin et
nous dire si, dans l'industrie du taxi, indépendamment de
l'exploitation qui peut être faite du consommateur client.
Est-ce que, d'après vous, il y a un régime d'exploitation
qui se situe ailleurs, c'est-à-dire qui rend victime le chauffeur de
taxi ou le petit propriétaire de taxis? A votre connaissance, est-ce que
cela existe à Québec, à Montréal ou ailleurs?
M. EDMONSTON: Nous avons dans notre association, je crois, pas plus de
dix membres qui sont des chauffeurs de taxi. Nous avons beaucoup de volontaires
qui sont des chauffeurs de taxi parce que nous avons à les aider au
sujet des marchands d'automobiles, etc. Certainement qu'on a l'exploitation des
chauffeurs de taxi.
Très tard, hier soir, peut-être que les journalistes
n'étaient pas ici, on a parlé de menaces. Quelques chauffeurs de
taxi courageux ont été intimidés. Ce ne sont pas des
présidents de groupements de consommateurs, ce sont de simples
chauffeurs qui ont voulu témoigner sur des menaces, sur de
l'intimidation, sur l'attitude malsaine qui règne dans cette industrie.
J'ai parlé avec ces chauffeurs de taxi. Croyez-moi, ils ont peur. Ils
ont peur parce qu'ils croient que les menaces et l'intimidation vont continuer.
Si le gouvernement recule en ce moment, tout le travail fait, tout la
collaboration donnée à M. Bossé et au gouvernement seront
réduits à zéro. Ils sont des gens marqués. Si le
gouvernement n'agit pas, ces gens marqués vont avoir un temps difficile,
pas seulement pour trouver du travail mais aussi dans les relations qu'ils
auront avec les travailleurs de l'industrie du taxi. Je sympathise beaucoup
avec ces gens. Je les admire beaucoup pour leur courage. Ils ont beaucoup plus
de courage que moi. Ce sont de simples chauffeurs de taxi qui sont venus ici
pour témoigner à leurs propres frais.
Les dix chauffeurs de taxi qui font partie de notre association et les
volontaires, presque la totalité, en privé, m'ont dit que cette
industrie était pourrie. C'est terrible. Nous croyons que le rapport
Bossé est basé sur le bon sens. Il a une bonne base, c'est vrai.
Nous n'aurions jamais cru que le gouvernement irait aussi loin pour
réformer cette industrie dans la base. C'est la première fois que
nous voyons cela. Cela nous fait peur, mais nous croyons que c'est la seule
chose à faire. Ce n'est pas représentatif de tous les chauffeurs.
Je parle seulement d'une dizaine. Je peux vous dire, selon leurs pouvoirs et
leurs convictions, quand ils en ont parlé avec moi, que je n'ai pas cru
que c'était une chose truquée. Je n'ai pas cru qu'ils voulaient
démolir une association ou une autre. Je croirais que ce sont les
convictions de chauffeurs de taxi qui ont vécu dans l'industrie du taxi
depuis longtemps.
M. PINARD: Vous parlez de la connaissance que vous avez d'un
régime d'exploitation au niveau des chauffeurs. Vous en avez dix qui se
regroupent dans votre association et à qui vous avez parlé
personnellement. Est-ce qu'ils vous ont donné suffisamment
d'informations pour que vous soyez capable de dire à la commission
parlementaire, ce matin, quelle est cette forme d'exploitation? Par quel moyen
se fait-elle? Vraiment, cela constitue-t-il à vos yeux des menaces
sérieuses qui doivent absolument requérir l'intervention du
gouvernement dans les circonstances?
M. EDMONSTON: Nous avons spécifiquement donné dans un
mémoire des plaintes écrites par quelques chauffeurs de taxi qui
donnent le nom des compagnies, le nom des garages et le nom de gens
là-dedans qui ont truqué la sécurité des voitures,
etc. pour violer, sans punition, la loi. On a deux chauffeurs de taxi qui ont
voulu mettre les noms sur une plainte signée. C'est pour vous montrer
comment la situation est délicate. Dans le mémoire de trois pages
que je vous ai donné, je n'ai pas affiché les plaintes
signées et le nombre. Je vais vous donner ces plaintes personnellement
et confidentiellement, parce que je ne veux pas être responsable de
choses qui pourraient arriver à ces gens.
C'est justement pourquoi la vérité est difficile dans
cette industrie. Les gens qui gagnent leur vie dans cette industrie ont une
tâche très difficile pour dire la vérité en public,
parce qu'ils vont être marqués.
Je vais vous donner, M. le ministre, les plaintes précises, avec
le nombre de garagistes et le nombre de grosses compagnies qui violaient la loi
et qui sont demeurés impunis jusqu'à maintenant, et les
chauffeurs qui ont été exploités, qui ont
été forcés de conduire leurs voitures en mauvais
état. Nous avons des preuves de ces choses. Malheureusement, je n'ai pas
eu le temps de prendre le nom de chacun, mais des dispositions sont prises. Je
crois qu'aujourd'hui, avec le témoignage qui suivra, vous serez
convaincu que ces gens ne mentent pas. Les gens qui vont parler avec vous sur
les associations de propriétaires, les chauffeurs surtout,
individuellement, vont dire les choses telles qu'elles sont.
M. PERREAULT: M. le Président, est-ce que je pourrais poser une
question sur ce sujet? Une très brève question pour essayer
d'éclaircir ce point.
M. Edmonston, est-ce que les menaces que ces gens peuvent recevoir sont
essentiellement différentes dans leur sérieux ou leur
gravité de celles que vous pourriez vous-même recevoir en tant que
président d'une association comme la vôtre ou de celles que nous
pouvons recevoir, nous, comme députés, d'une façon
peut-être pas régulière mais occasionnelle, sous la forme
de pressions? J'explique ce que je veux dire: appels
téléphoniques anonymes, lettres anonymes ou ce genre de choses.
Ou est-ce que ce
sont des menaces plus graves et plus sérieuses, des menaces plus
directes, identifiables? Sans nommer de cas précis, est-ce que vous
pouvez nous dire le degré de sérieux par rapport à ce
genre de menaces?
M. EDMONSTON: Je n'ai pas reçu de menaces sur la question des
taxis. Je reçois souvent des menaces,...
M. PERREAULT: Non, non, monsieur.
M. EDMONSTON: ... c'est la différence, qui ne viennent pas du
milieu des consommateurs, surtout pas, mais du milieu des garagistes et des
concessionnaires d'automobiles surtout, oui. C'est une chose à laquelle
je m'habitue. Les menaces que reçoivent les gens du domaine du taxi avec
qui je parle viennent de leur propre industrie. C'est le problème. Cela
vient de leur milieu. Dans mon milieu, celui des consommateurs, je n'en
reçois pas. J'en reçois d'hommes d'affaires, souvent, de
garagistes. J'ai même été attaqué, mais
c'était par un vendeur de voitures usagées où nous avions
fait du piquetage. En tout cas, c'est une provocation directe d'un homme
d'affaires. Avec nous, cela arrive souvent. Mais les menaces que j'ai
entendues, les menaces morales que j'ai entendues ils ont parlé
avec moi de menaces morales je suis convaincu que cela existe aussi. Ce
sont des menaces directes avec des appels téléphoniques anonymes.
C'est toujours un bon moyen pour faire peur à une famille, vous le savez
très bien: On va t'arranger, mon vieux! Je crois que les chauffeurs de
taxis ont peur. C'est presque inévitable. Vous avez donné l'autre
côté de la médaille et le côté de la
médaille qui est opposé est représentée pour un
groupe de gens qui ont manifesté mardi avec beaucoup d'enthousiasme.
Vous avez certainement peur qu'on vous appelle. Deux chauffeurs de taxi hier
soir m'ont raconté que leur femme avait reçu des appels en pleine
nuit où on leur disait: On va arranger ça! Où est ton
mari? C'est très grave pour une famille. Cela arrive souvent. Cela m'est
arrivé. Je m'y suis habitué.
M. BERTHIAUME: Est-ce que vous avez des mécanismes à
suggérer pour enrayer ce genre de choses?
M. EDMONSTON: Nous n'avons aucun mécanisme. On ne peut rien faire
parce que c'est juste le porte-parole des gens. On n'a pas de mécanisme
pour protéger personne ici. Je peux sortir d'ici et être
tué comme n'importe quelle personne. La protection des gens n'est pas
complète. On ne peut rien faire. C'est une chose à laquelle on
doit s'habituer ou on est fini, on ne peut plus faire de contestation pour les
gens défavorisés.
M. PINARD: Je vous remercie, M. Edmonston.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de
Maskinongé.
M. PAUL: M. Edmonston, je ne suis pas surpris de vous voir ici ce matin,
considérant l'intérêt soutenu, comme le signalait tout
à l'heure le ministre, que vous avez apporté aux travaux
parlementaires chargés de l'étude de la loi 23.
Vous vous rappelez sans doute avec quelle ouverture d'esprit l'honorable
ministre des Transports a procédé à l'étude de
cette loi. Je ne sais si vous vous rappelez qu'au-delà de 100 articles
furent amendés à la commission parlementaire.
Je vous félicite de votre français. Je crois que vous
pouvez servir d'exemple à beaucoup de citoyens
québécois.
Vous avez mentionné, tout à l'heure, que vous aviez, dans
l'Association pour la protection automobile, 1,200 membres canadiens. Combien
en avez-vous qui sont québécois?
M. EDMONSTON: Presque 1,000, maintenant.
M. PAUL: Presque 1,000, au Québec.
M. EDMONSTON: Parce que c'est une association qui a commencé, il
y a presque cinq ans, ici, à Montréal. J'ai été
surpris de voir que cela peut être même un tort, quand j'ai
été à Toronto. Mais c'était une association
vraiment québécoise, qui est maintenant canadienne. Cela
présente des difficultés. Nous avons 1,000 membres
québécois.
M. PAUL: Depuis que vous avez en main une copie du règlement no
6, avez-vous tenu une réunion d'information et de consultation
auprès de vos membres?
M. EDMONSTON: Oui. Nous avons un bulletin chaque mois. Dans le bulletin
de décembre, nous avons demandé à tous les membres qui
voulaient parler du règlement no 6, avec nous, de venir à une
assemblée.
M. PAUL: A quelle date a été publié ce
bulletin?
M. EDMONSTON: Le 15 décembre. Nous avons un bulletin chaque
mois.
M. PAUL: Aviez-vous été informé que le
règlement devait sortir dans les quelques jours suivants?
M. EDMONSTON: Non. Nous avons seulement su qu'on en viendrait à
discuter de la question des taxis et nous avons voulu, justement, parler de
cette question, pour savoir ce que les consommateurs voulaient avoir. Nous
n'avons pas eu le règlement no 6 sur le taxi. Nous avons eu le rapport
Bossé, qui était déjà
publié. A cause des plaintes que nous avons eues, nous avons
voulu consulter nos membres pour savoir ce qu'ils voulaient avoir.
M. PAUL: Quand votre réunion a-t-elle eu lieu?
M. EDMONSTON: Je crois qu'il n'y a que sept membres qui sont venus.
M. PAUL: Sept membres sur 1,000.
M. EDMONSTON: Oui, sept membres sur presque 1,000 membres, à
Québec, qui sont venus après les Fêtes.
M.PAUL: Vous avez mentionné, tout à l'heure, que le
règlement no 6 j'ai pris le mot à mot de votre
témoignage est excellent pour le consommateur. Dois-je comprendre
que c'est l'opinion qui s'est dégagée de la réunion de vos
sept membres?
M. EDMONSTON: C'est le consensus établi à partir des
appels téléphoniques. Nous avons essayé de parler avec la
plupart de nos membres. Je n'ai pas le chiffre exact de ceux avec qui nous
avons communiqué par téléphone. Je ne sais pas si le
nombre de membres qui nous ont appuyé ou le nombre de gens qui ont
porté des plaintes serait aussi important que la gravité des
plaintes qu'ils ont apportées.
Les gens avec qui nous avons parlé n'étaient que sept.
Nous ne pouvons pas forcer les gens à venir parce que vraiment,
l'affaire du taxi, c'est un peu hors de nos préoccupations quotidiennes.
Nous avons, avec des petits moyens, à Québec, essayé de
rejoindre les gens, avec diverses opinions. Malheureusement, peut-être,
nous n'avons qu'une seule opinion des gens. C'est que le taxi, selon mon
expérience, n'est pas aussi sécuritaire, n'est pas d'aussi haute
qualité qu'il le faudrait.
Justement, lorsque j'ai préfacé mes remarques, j'ai
donné l'opinion que nous avons, selon l'avis des gens avec qui nous
avons parlé quotidiennement, depuis deux ans que nous faisons un dossier
là-dessus. Nous n'avons pas fait un vote de condamnation ou
d'approbation. Nous avons voulu juste montrer les faits qui nous ont
été rapportés.
Le témoignage le plus important sera celui des chauffeurs de taxi
indépendants qui iront, je l'espère, en substance,
répondre à nos contestations, à savoir que, dans le taxi,
on doit faire beaucoup de réformes, sur la scène gouvernementale,
pour améliorer le service.
M. PAUL: Dans le cours de vos remarques, vous avez mentionné que,
depuis environ deux ans, votre association aurait reçu environ 100
plaintes.
M. EDMONSTON: C'est tout.
M. PAUL: Pourriez-vous nous dire quelle était, en
général, la nature de ces plaintes?
M. EDMONSTON: Au commencement, ces plaintes étaient surtout
données au téléphone. Nous n'avons pas fait de dossiers
sur les plaintes, comme nous le faisons pour les garages, les stations
d'essence, etc. Nous avons juste classifié ce genre de plaintes, par
groupes.
De ces centaines de plaintes, il y en a beaucoup de gens refusés
par les chauffeurs de taxi, refusés pour les courts voyages.
M. PAUL: C'était surtout des plaintes de refus de services que
vous avez reçues.
M. EDMONSTON: Oui, exactement.
M.PAUL: Est-ce que vous en aviez reçu quant à la
qualité de services dispensés par les chauffeurs de taxi?
M. EDMONSTON: Oui, nous avons eu à Montréal plusieurs
plaintes. Je n'ai pas le pourcentage parce que je croyais que le point
n'était pas représentatif, mais je voulais vous dire tout
ça. Beaucoup de gens étaient mécontents pour que les
chauffeurs de taxi ne parlaient pas français, deuxièmement.
Premièrement, c'était la question de Dorval, cela a paru dans les
journaux, chaque fois qu'on a eu des tempêtes ou autres problèmes,
à Dorval, on a une augmentation comme ça. Ce n'est pas logique.
Des gens nous ont dit, peut-être cinq ou dix: J'ai été
encore refusé parce que j'ai voulu aller à Dorval, ou le gars m'a
demandé $12, $14. Nous étions surpris au début, nous avons
pensé: Ce sont seulement les gens mécontents. Nous avons pris
quelques chiffres. Ensuite j'ai demandé à la
réceptionniste de répondre à ceux qui avaient à se
plaindre des taxis, de se plaindre au ministère des Transports. Je ne
sais pas combien de plaintes il a reçu, j'ai demandé à ces
gens de se plaindre au ministère des Transports.
Premièrement, c'est le refus de service, la qualité du
service, la surcharge surtout. Finalement, c'est très important, la
condition mécanique de ces voitures. C'est une des principales raisons
pour lesquelles je suis ici aujourd'hui: l'état mécanique de ces
voitures. Vraiment, nous n'avons pas pensé avoir besoin de consulter
chacun de nos membres pour leur demander s'ils avaient été
fraudés par un chauffeur de taxi. Le problème est grave et nous
avons pensé que vous deviez en être averti. C'est assez grave,
sans dire que sur 1,000 membres, plus de 500 veulent ça. Nous croyons
que les problèmes sont assez graves et on peut voir ce que le
consommateur veut.
M. PAUL: Est-ce que c'est une présomption que vous nous signalez
ou si c'est le résultat d'une consultation directe par
téléphone, qui
aurait été faite par des employés de votre
association?
M. EDMONSTON: M. Paul, il faut dire qu'avec les preuves que nous avons,
ce n'est pas une conclusion qui sera légalement admise par un tribunal.
C'est une présomption de qualité de travail, présomption
de service qui est appuyée par des documents qui sont assez concluants.
Nous allons, dans cette représentation, vous démontrer, les faits
avec les documents que nous avons, nommer les taxis, plutôt que de dire
seulement que nous sommes convaincus de ça, ça, ça. Nous
allons vous montrer le document où nous avons le nom des chauffeurs,
etc. Les faits parlent par eux-mêmes.
M. PAUL : Dans un autre domaine, vous avez signalé que le taux
d'accidents impliquant des voitures-taxis était des plus hauts.
Pourriez-vous nous dire si, dans vos études de comparaison, vous avez
tenu compte des deux critères suivants: premièrement, le nombre
de véhicules et en second lieu, le nombre de milles parcourus par ces
véhicules-taxis dans une année, pour comparer avec un autre
secteur de l'économie?
M. EDMONSTON: C'est justement ce que je demandais à M. Charles
Moreau, le directeur, pour le Québec du Département des
assurances du Canada pour me donner le taux ajusté selon, comme vous
avez dit, le millage parcouru et le nombre de véhicules en service.
C'est ce que j'ai dit. Si cela est ajusté, c'est le Québec
qui a le plus d'accidents au Canada. Si ce n'est pas ajusté pour le
millage et pour le nombre de véhicules, ce sera l'Alberta. Parce qu'avec
moins de population et moins de véhicules-taxis, on a plus d'accidents.
Mais, lorsque c'est ajusté, c'est le Québec qui est en
tête. Il faut toujours prendre les chiffres des compagnies d'assurance
avec un grain de sel. Mais, elles ont dit que, selon leur "green book value",
le bureau d'assurances du Canada, la perte des trois dernières
années était, environ, de 107 p.c. à 110 p.c. de leurs
primes. Je crois que cela veut dire...
M.PAUL: Les primes reçues des véhicules automobiles
taxis.
M. EDMONSTON: C'est cela, ajusté. Cela veut dire que si elles ont
eu 100 p.c, il n'y a rien de gagné, rien de perdu; c'est égal.
Mais 107 p.c. et, à un certain moment, 120 p.c, cela veut dire qu'elles
ont eu 7 p.c. ou 20 p.c. de pertes avec l'assurance des taxis, à
Québec.
M. PAUL: Merci, nous avons eu le témoignage de Me Gabriel
Lapointe qui nous signalait que la compagnie d'assurance Bélair payait
plus que les primes perçues de ses membres, de ses assurés, qui
sont des propriétaires de taxis, artisans ou propriétaires de
flottes. On a dit que le pourcentage des primes perçues était de
l'ordre de 30 p.c chez cette clientèle et que le montant des dommages
payés était supérieur à 30 p.c. Est-ce que vous
êtes en mesure de commenter ces chiffres, si vous étiez
présent au témoignage de M. Lapointe?
M. EDMONSTON: J'ai un conseil à donner à la compagnie
Diamond, justement. S'ils ont autant d'actions, ils doivent regarder de
près leur système d'embauchage pour obtenir des chauffeurs
compétents. Parce qu'on a raison sur la question des chauffeurs, la
question des véhicules et la question des routes. Je suis certain que
s'ils mettent cette voiture Diamond 3038 hors service, ils vont peut-être
avoir un meilleur chiffre d'assurance automobile.
M. PAUL: Pour revenir, M. Edmonston, à ce véhicule 3038
dont nous avons parlé, pourriez-vous nous dire combien de fois vous
prenez de taxis, en moyenne, par semaine, vous, à Montréal?
M. EDMONSTON: Dix à quinze fois.
M. PAUL: Combien de fois vous est-il arrivé de trouver des
véhicules que l'on peut qualifier de "minounes", en état de
service, et dans un état comparable à celui dont vous nous avez
parlé tout à l'heure, avec certaines statistiques, à la
suite de votre voyage de lundi dernier?
M. EDMONSTON: Selon mon expérience personnelle, la
première chose que je cherche d'abord, dans le cadre des voitures, ce
sont les propriétés. Après cela, je vérifie le
système de freinage, de suspension on peut sentir cela la
question des lumières et tout cela. Plus de la moitié des
voitures que j'ai utilisées ont eu des problèmes. On dit qu'une
voiture accidentée, un taxi qui a été accidenté,
doit être réparé aussi vite que possible. J'ai vu des
voitures, vraiment accidentées, avec des déficiences, des
défauts. Je suis peut-être plus dur parce que je sais comment une
voiture doit être, parce que je fais pour des compagnies d'automobiles,
des essais de voitures qui me sont prêtées de temps en temps. Par
exemple, la dernière voiture qu'on m'a prêtée,
c'était une Datsun 247, pour la compagnie Datsun. Nous sommes au courant
des déficiences des taxis. S'il y a un taxi qui est déficient, un
conducteur peut peut-être dire: C'est juste un petit jeu du volant. Mais
ce petit jeu peut tuer quelqu'un.
M. PAUL: Vous me corrigerez, M. Edmonston, si j'ai mal compris votre
témoignage qui, d'après moi, serait le suivant. Environ 50 p.c.
des véhicules automobiles taxis ne satisfont pas aux critères de
bon état d'entretien et de réparation.
DES VOIX: Bravo! c'est vrai.
M. EDMONSTON: Exactement, M. Paul.
LE PRESIDENT (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous plait! Excusez, M.
Edmonston. Je demanderais la coopération qu'on a obtenue depuis deux
jours. Veuillez restreindre vos applaudissements et vos démonstrations,
que ce soit pour ou contre. Procédons, c'est très
intéressant. Nous entendrons les commentaires de ceux qui veulent
être pour ou contre.
M. EDMONSTON: M. le Président, je suis ferme dans mes
convictions: Tout ce qui est marqué de ces voitures était
défectueux. J'ai voulu le savoir, parce que la première chose qui
m'a choqué, c'est que j'ai été privé de la ceinture
de sécurité. Après ça, sur l'état
mécanique des voitures, j'ai entendu parler de problèmes de
différentiels, de suspension, de volant. Je suis certain que, s'il y
avait eu une inspection plus sévère des voitures-taxis
menée par le gouvernement, la moitié de ces taxis, comme la
moitié des autobus scolaires d'ailleurs, seraient trouvés
inacceptables, défectueux. Je crois que la conditions mécanique
des taxis à Montréal est aussi mauvaise que celle des autobus
scolaires qui ont été trouvés défectueux
l'année dernière presque 5,000 sur un total de 9,000
avec les enquêtes assez approfondies du ministère des
Transports.
M. PAUL: Est-ce que vous avez signalé ces faits au
ministère des Transports?
M. EDMONSTON: Oui.
M. PAUL: Une autre question qui a trait aux associations de services.
Avec l'expérience que vous avez, êtes-vous en mesure de nous dire
si les associations de services sont utiles pour les gens de la profession ou
du métier, les chauffeurs de taxi, les propriétaires artisans? En
second lieu, est-ce que ces associations apportent une qualité de
services aux consommateurs?
M. EDMONSTON: Votre première question implique directement la
deuxième. Vous demandez si ce sont des associations de services utiles
aux consommateurs. Je suis certain qu'on a des associations qui sont utiles
dans la majorité, comme n'importe quelle association peut être
utile aux consommateurs. La deuxième question porte sur la
qualité?
M. PAUL: Est-ce qu'elles sont nécessaires pour la qualité
du service en général?
M. EDMONSTON: Je ne suis pas convaincu qu'elles sont nécessaires,
parce que je crois qu'il y a un conflit d'intérêts très
grave entre les différentes associations. N'étant pas des
associations coopératives, mais des associations privées, les
corporations sont responsables d'abord aux actionnaires, deuxièmement,
peut-être aux chauffeurs et, troisièmement, au public en
général. Je ne suis pas convaincu qu'elles sont utiles pour la
protection du consommateur, pour donner des services sécuritaires aux
consommateurs. Est-ce que la qualité est bonne? Je crois que la
qualité des services est dirigée par l'association. L'association
a la main là-dessus. Elle est responsable.
M. PAUL: Pour la profession ou le métier de chauffeur de taxi,
est-ce que ces associations de services sont très utiles?
M. EDMONSTON: Je crois que les associations de services sont utiles sur
un petit plan. Cela veut dire que, si vous êtes à une association
de services comme peut-être LaSalle et Diamond, vous avez le droit de
faire affaires avec une certaine compagnie d'assurance. Comme je l'ai entendu,
vous êtes forcé de prendre cette compagnie d'assurance.
Je ne sais pas si on est forcé ou non, mais sur le petit plan, M.
le Président, il peut donc être utile pour le chauffeur et les
associations de taxis.
M. PAUL: Est-ce que ces associations sont avantageuses pour les
membres?
M. EDMONSTON: Ce plan sera peut-être avantageux. C'est la question
de la charte, en gros, de certains produits pétroliers. Encore
là, je veux faire une clarification. Si on a eu toutes ces compagnies
ensemble dans une grosse coopérative, il peut être beaucoup plus
utile, beaucoup plus fort et beaucoup plus avantageux. Cela veut dire que si
quelqu'un est atteint d'une balle, est-ce qu'un docteur sera nécessaire?
Oui mais une opération chirurgicale complète sera beaucoup plus
avantageuse. C'est dans cette optique que je dis oui, ils sont avantageux
peut-être, ils donnent ce temps à un chauffeur de taxi car il est
un membre de ces associations. Nous pourrons être rendus à ce
point-là avec une force de frappe avec les compagnies qui vont vendre ce
produit pétrolier, les compagnies d'assurance. On a beaucoup de
différence, j'en suis certain parce que cela peut amener beaucoup plus
de chauffeurs de taxi avec une force, un pouvoir de la charte,... beaucoup plus
fort.
M. PAUL: Est-ce que ces associations n'entraînent pas une
meilleure éthique professionnelle chez les membres artisans ou chez les
chauffeurs?
M. EDMONSTON: C'est justement cela, M. le Président, que nous
voulons souligner. Nous aimerions, si l'association est déteneur de
permis aussi des associations parallèles, nous croyons que le
comité d'éthique professionnelle ne doit jamais être
enlevé. C'est une bonne affaire, une bonne idée, comme les
représentants de Sherbrooke ont déjà dit. C'est une bonne
chose, le "self discipline". C'est très bon. Nous aimerions avoir un
code d'éthique admi-
nistré par le chauffeur en consultation avec le groupement des
consommateurs qui leur adresseront des critiques, qu'ils siègent
à côté si cela est possible. C'est cela un comité
d'éthique professionnelle avec les groupements privés et les
groupements coopératifs, si vous voulez, les groupements proposés
dans le règlement no 6. Nous croyons que cette idée est
primordiale pour le meilleur service et la meilleure qualité de service,
le meilleur service de sécurité. C'est ce que nous voulons
souligner qui est très important. Je vous remercie de me l'avoir
rappelé car c'est très important et nous sommes
complètement d'accord sur cette idée. C'est le gouvernement qui a
établi cela sur le plan provincial et local, c'est très important
pour le consommateur.
M. PAUL: II me reste deux autres questions, M. Edmonston. Dans vos
propos, vous avez mentionné que notre tâche était,
premièrement, de voir à un meilleur service pour le consommateur.
En deuxième lieu, que nous devions apporter un meilleur service pour la
sécurité. Est-ce que ce n'est pas également une des
tâches des membres de cette commission parlementaire de travailler
à assainir, si possible, le commerce du taxi au Québec, en
même temps que c'est notre devoir de veiller à ce que les
propriétaires artisans, les chauffeurs de taxi aient la
sécurité d'emploi, qu'ils aient la liberté d'exercice de
leur profession et qu'il y ait d'excellentes relations entre les
propriétaires des flottes ou les propriétaires d'automobiles
possédées par les artisans et les chauffeurs de taxi?
M. EDMONSTON: Oui, M. le Président, je suis au courant que le
gouvernement a une tâche difficile parce qu'il doit réunir des
commentaires divers, contradictoires. Il doit réunir les espoirs de
plusieurs secteurs dans cette industrie: Le secteur patronal, si je peux dire,
le secteur des employés de chauffeurs indépendants, et tout cela.
Votre tâche est une tâche difficile. Je n'envie pas le travail que
vous devrez mener bientôt.
M. PAUL: Dans le cadre de ces objectifs à atteindre, est-ce que
vous croyez que le règlement no 6, tel qu'il nous est proposé
comme instrument de travail est excellent ou si certaines lacunes doivent
être corrigées et quels seront à votre point de vue, les
principaux points qui devraient être retenus?
M. EDMONSTON: Il faut se souvenir toujours de cette optique des
consommateurs. Nous avons vu, dans l'ensemble, le consommateur qui a recours au
service du taxi. C'est excellent. En entendant les représentations des
chauffeurs, la question des structures, savoir si elles sont parallèles,
si on devrait avoir le double emploi, etc., la question des chauffeurs de taxi,
parce qu'ils sont des consommateurs aussi, n'est pas aussi claire. On n'a pas
une question à laquelle il est aussi facile de répondre sur le
plan des chauffeurs consommateurs. Justement, nous avons pris l'optique des
consommateurs qui ne sont pas chauffeurs de taxi et qui reçoivent le
service. C'est un excellent projet de travail, à notre avis.
Pour les chauffeurs de taxi, nous n'avons pas posé la question du
double emploi, de la structuration parallèle des associations
privées, de la structuration des associations coopératives, parce
que nous avons su qu'on avait de gros fusils dans les compagnies et des
chauffeurs vont essayer de discuter de cela. Ils sont mieux renseignés
que nous sur le plan de la structuration, des meilleurs moyens d'avoir une
structure pour les chauffeurs de taxi, afin de répondre à tous
les points de vue.
Il faut que je l'avoue, j'ai un parti pris au sujet des consommateurs,
des questions intéressant les consommateurs dans cette affaire qui est
très compliquée et qui concerne plusieurs intérêts.
Pour nous, c'est le point de vue des consommateurs, non des chauffeurs de taxi
que nous avons voulu apporter.
M. PAUL: Hier soir, à la toute fin de notre séance, nous
avons entendu un témoignage franc, osé, clair, dynamique qui
était celui de M. Dickey. Il nous a invités à nous pencher
sur la nécessité de protéger ce qu'il a appelé la
quatrième classe de l'économie du taxi, soit celle des
chauffeurs. Croyez-vous que la syndi-calisation est nécessaire pour la
protection des chauffeurs et surtout pour assurer une meilleure qualité
des services pour la clientèle que vous représentez ici, le
consommateur?
M. EDMONSTON: Oui, nous en sommes convaincus. En principe, un chauffeur
qui est syndiqué peut avoir un pouvoir, pas parralèle, pas plus
fort, mais un pouvoir pour négocier avec la partie patronale, si on veut
avoir des associations privées. Ce serait dans l'intérêt du
public. Avec la syndicalisation, par exemple, le chauffeur de taxi peut refuser
de conduire des taxis qui sont en mauvais état. Il peut refuser de faire
du temps supplémentaire. C'est une chose qui pourrait être contre
l'intérêt des consommateurs. Nous croyons qu'une bonne
syndicalisation dans le secteur de notre économie est dans
l'intérêt des consommateurs, sauf en temps de grève,
où nous demandons au gouvernement d'agir. Mais en dehors des
grèves, c'est dans l'intérêt des consommateurs, parce
qu'ils peuvent négocier directement avec le syndicat et ce dernier peut
négocier directement avec la partie patronale. Cela donne une influence
aux plaintes des consommateurs et aux besoins des consommateurs qui peuvent
apporter ces plaintes au syndicat. Ce n'est pas pour rien que nous avons des
groupements de consommateurs, ici à Québec, qui sont
appuyés par les syndicats. Je parle des groupements comme l'ACEF qui
font un bon travail. Je crois que la syndicalisation des taxis est
nécessaire parce que les chauffeurs de taxi vont avoir une certaine
fierté et sauront
qu'ils comptent pour quelque chose. Ils sauront qu'ils sont entendus par
les propriétaires des associations. Et les propriétaires des
associations auront la tâche de satisfaire les actionnaires mais aussi de
satisfaire les syndiqués, les chauffeurs.
Comme les chauffeurs sont éparpillés et que ce secteur
n'est pas réuni dans un syndicat, ils n'ont pas de force de frappe. Dans
notre monde, si vous n'avez pas de force de frappe économique et que
vous n'avez que le plan moral pour convaincre votre patron, c'est très
difficile, croyez-moi.
M. PAUL: Une dernière question, M. Ed-monston. Depuis la sanction
de la loi 23, du 8 juillet, avez-vous été consulté par les
officiers du ministère des Transports quant à la rédaction
du règlement no 6?
M. EDMONSTON: Nous avons parlé brièvement avec M.
Bossé au comité qui s'occupe de l'assurance-automobile au Parti
libéral. J'ai été invité une fois et j'ai
parlé brièvement du cas des taxis. J'ai dit que le consommateur
semblait...
M. PAUL: Dans les cadres d'une activité politique d'un parti.
M. BOSSE: J'aimerais que l'on ajoute aussi qui était
présent à ce comité, afin de rassurer le
député de Maskinongé, pour que ce ne soit pas
politique.
M. PAUL: Qui vous a dit que j'étais inquiet? M. BOSSE: Au cas
où.
M. PAUL: Absolument pas, surtout quand vous êtes quelque part,
vous pouvez être assuré que, moi, je ne crains rien, mais il y a
des gens qui font affaires avec vous qui craignent.
M. BOSSE: Ajoutez qui était présent, quand même.
M. EDMONSTON: Je me trouve dans une position un peu drôle parce
que c'est, je crois, la première fois que nous appuyons le gouvernement
comme tel dans un projet de loi. Comme vous le savez, nous avons fortement
critiqué le projet de loi no 23. A notre bureau, depuis cinq ans, on
fait des blagues. On a dit: Dans un syndicat, on a les trois D: Dalpé,
Daigle, Dion et, dans le ministère des Transports, il y a les trois P:
Pinard, patronage, patinage.
LE PRESIDENT (M. Séguin): A l'ordre!
M. PINARD: Je pense que M. Edmonston pourrait qualifier cette farce dont
il vient de nous faire part...
M. EDMONSTON: C'est une blague.
M. PINARD: ... et nous expliquer ce qui l'a amené à dire
ça. Pense-t-il encore la même chose aujourd'hui?
M. EDMONSTON: Vous savez, je compte sur mon indépendance pour
pouvoir critiquer le ministère quand il a tort, mais j'ai aussi la
tâche de dire les choses qui sont bonnes quand elles sont bonnes. Je ne
veux pas être révolutionnaire juste pour être
révolutionnaire, ni contestataire pour le simple plaisir de contester,
ce ne serait pas bien fondé.
J'ai été invité à une assemblée sur
l'assuran-ce-automobile, comme plusieurs personnes, dont des
témoins-ressource. J'ai proposé l'étatisation de
l'assurance-automobile, bien sûr. Je n'étais pas invité
comme membre du Parti libéral; je ne suis membre d'aucun parti
politique. J'ai parlé de la question des taxis avec M. Bossé pour
lui demander ce qu'il avait fait, pour le mettre au courant, parce que nous
étions mécontents et que nous voulions savoir ce qu'il ferait.
C'était avant de faire d'autres réunions et de parler avec nos
membres en décembre.
Justement pour vous montrer comment ça arrive, j'étais
comme témoin-ressource à une réunion du Parti
libéral sur la question des congrès à Montréal; on
m'a demandé de payer $15 d'entrée et j'ai carrément
refusé. Ils m'avaient invité pour leur donner des renseignements
et ils voulaient me faire payer. Je leur ai dit: On n'invite pas quelqu'un chez
soi pour dfner pour lui demander après $15.
M. PAUL: En un mot, vous n'avez pas voulu enrichir la caisse?
M. BOSSE: Un point d'ordre, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Dorion sur
un point d'ordre.
M. BOSSE : Je voudrais ici rectifier certains faits et M. Edmonston me
contredira si j'ai tort. Lors de cette réunion, il faut aussi dire que
le président de l'organisation des garagistes, qui n'a rien à
voir avec la politique, était présent, qu'un représentant
des ACEF, qui n'a rien non plus de très relié avec le Parti
libéral nécessairement, était présent.
M. PAUL: M. le Président, un point d'ordre.
M. BOSSE: C'était un comité objectif qui réunissait
beaucoup de gens. J'aurais voulu que M. Edmonston parle en ce sens, pour
éviter de laisser entendre dans l'esprit de certaines personnes que
c'était là un comité d'ordre politique.
M. EDMONSTON: Non, non.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Je crois, M. Edmonston, que nous avons
compris ce qui s'est passé.
M.PAUL: Alors, M. Edmonston, je vous remercie très
sincèrement pour l'objectivité des remarques, des propos et des
réponses que vous nous avez données ce matin.
M. EDMONSTON: Merci.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Je voudrais vous interrompre un
instant. Sur le point d'ordre, vous avez été invité
à faire une mise au point. Pourriez-vous, pendant dix secondes, faire la
mise au point nécessaire?
M. EDMONSTON: Dix secondes?
LE PRESIDENT (M. Séguin): Disons quinze secondes.
M. EDMONSTON: Depuis la fondation de l'association, nous étions
invités, souvent, pour donner des renseignements par plusieurs partis
politiques. Nous avons utilisé surtout le Parti québécois.
Nous avons utilisé le Ralliement créditiste et l'Union Nationale,
ainsi que le Parti libéral. C'est notre rôle. Nous devons
participer à tous les colloques. Nous n'avons aucun parti politique, sur
la scène provinciale ou fédérale, qui ait un monopole sur
les affaires des consommateurs. Justement, je veux faire attention à ce
que cela ne devienne pas des ballons politiques. Nous ne faisons pas de capital
politique sur le dos des consommateurs, ni sur le dos des chauffeurs de
taxi.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de
Lotbinière.
M. BELAND: M. le Président, j'aurais également quelques
questions à poser à M. Edmonston. En premier, je voudrais vous
féliciter pour votre affirmation, au tout début, et pour
l'énoncé que vous avez fait entièrement en
français. J'apprécie également le fait que vous ayez dit,
justement, que les chauffeurs de taxi, au Québec, devaient d'abord
parler français. Je vous félicite de cela. C'est d'une grande
logique, comme d'ailleurs la logique est qu'à Toronto les chauffeurs de
taxi parlent l'anglais d'abord. C'est de toute première importance.
M. le Président, ma première question serait celle-ci.
Vous avez beaucoup parlé de sécurité, entre autres de
ceintures de sécurité. Avez-vous, au cours de vos
périples, visité des provinces ou d'autres pays ou des sections
de pays où, justement, on utilise la ceinture de sécurité
de façon obligatoire ou quasi obligatoire, pour les clients, dans les
taxis?
M. EDMONSTON: Oui. En Australie, depuis deux ans, on oblige tout le
monde à boucler les ceintures de sécurité. Cela a
diminué les accidents mortels de 23 p.c. J'ai entendu un
député dire: C'est le pays des kangourous. Vous savez, nous avons
des kangourous automobilistes, peut-être, mais on a des kangourous
députés aussi. La question de la sécurité
automobile est très importante parce qu'ici, au Québec, 1,730
personnes ont été tuées. Je dis tuées, parce
qu'elles l'ont été par l'automobile. Il y en a un certain
pourcentage de morts dû à des défauts de l'automobile, un
à la route, un pour la négligence, un à l'ivresse au
volant aussi. En Australie, cela a diminué de 23 p.c. On a une amende de
$24 si vous êtes sans votre ceinture de sécurité, en
Australie. En Nouvelle-Zélande, c'est la même chose.
Aux Etats-Unis, dans les aéroports, on a des systèmes de
taxi qui sont dirigés par le gouvernement fédéral. Le
transport de l'aéroport à la ville est dirigé par le
gouvernement dans tous les aéroports fédéraux, je crois.
Il y a une loi à l'effet que le chauffeur et les passagers doivent
boucler les ceintures de sécurité. En plus de cela, le
secrétaire des transports, aux Etats-Unis, a proposé une loi,
cette année, pour obliger les automobilistes à boucler leurs
ceintures de sécurité. C'est le secrétaire des transports
américain, M. Volpe, qui l'a demandé. Il n'est plus là.
Nous en avons un autre, cette année, avec la nouvelle élection de
Nixon. Mais je suis certain que remettre la responsabilité entre les
mains des automobilistes pour la ceinture de sécurité, c'est
très bon, parce que c'est notre responsabilité à
nous-mêmes. La ceinture de sécurité, vraiment, cela diminue
les blessures, selon l'Insurance Institute for Highway Safety, de 80 p.c.
Selon les statistiques, non pas hypothétiques, mais
réelles, 23 p.c, en Australie. Comprenez-vous mon inquiétude
quand je monte dans un taxi et qu'il n'y a pas de ceintures de
sécurité? Je défie un chauffeur, ou une association comme
Lasalle ou Diamond qui l'enlève. La voiture est munie de ceintures de
sécurité, elles pendent, et on les enlève. C'est ce que je
ne comprends pas. En même temps, on proclame: sécurité et
service. Je vois ici une vraie contradiction.
M. BELAND: Comme question suivante, étant donné que vous
représentez les consommateurs, vous semblez avoir une assez vaste
expérience dans ce domaine, vous devez être parfaitement ou
passablement au point sur ce que peuvent exiger les consommateurs
vis-à-vis des chauffeurs de taxi ou les propriétaires de taxis.
Parce que ça peut être deux choses très différentes,
il peut y avoir des normes de sécurité, vous nous en avez
nommé. Est-ce que, par exemple, vous iriez jusqu'à
suggérer qu'il y ait un genre de commandement du taxi pour satisfaire le
consommateur et quelles seraient, à l'intérieur, les principales
exigences que vous agenceriez?
M. EDMONSTON: Les principales exigences touchent les chauffeurs et les
taxis. Nous sommes d'accord sur les inspections de taxis aux quatre mois. Nous
croyons que, selon les chauffeurs de taxi qui nous ont parlé, on
peut
avoir un millage de 35,000 ou 40,000 milles en quatre mois. C'est
beaucoup de millage. La voiture est équipé comme un taxi non pas
parce que c'est un luxe, mais parce que c'est nécessaire à cause
du travail que le chauffeur est forcé de faire. Si vous avez connu un
consommateur qui a acheté un vieux taxi d'un concessionnaire, comme nous
avons plusieurs plaintes, ce n'est pas un cadeau. C'est le meilleur citron du
monde. Nous avons eu plusieurs plaintes là-dessus.
Nous exigeons donc l'inspection tous les quatre mois, surtout sur le
plan de la mécanique, de la sécurité, du système de
freinage, de l'électricité, etc. Ces inspections
périodiques doivent vérifier le taximètre aussi. Donc
l'inspection sur le plan de la sécurité. En plus de ça,
chaque taxi doit être traité sévèrement, mais pas
comme maintenant. C'est la faute aussi du ministère des Transports et de
l'association des taxis. Il y a une lacune de la part des deux. On doit
être très sévère. Chaque voiture-taxi
impliquée dans un accident ne doit avoir aucun délai, elle doit
être réparée tout de suite. Parce qu'on ne joue pas avec
cela. Car une collision à cinq ou dix milles à l'heure peut
tordre la suspension, ou endommager les choses essentielles pour la
sécurité de ce taxi. Il ne faut pas dire: Ce n'est qu'un accident
à 5 ou 10 milles à l'heure. Encore selon 1'Insurance Institute
for Highway Safety aux Etats-Unis, on a montré que plusieurs dommages se
produisent à basse vitesse, qui ne sont pas manifestés
aussitôt après l'accident.
Voilà ce que nous demandons au gouvernement d'exiger des
chauffeurs. Avec le ministère des Transports, nous avons plutôt
parlé des questions de permis aux automobilistes. M. Pinard est au
courant de notre opinion. Nous croyons qu'il n'est pas assez
sévère pour les automobilistes dans l'émission des permis
de conduire. Nous croyons que pour les automobilistes et les chauffeurs de
taxi, surtout pour le règlement, il y en a qui ne sont pas pour les
chauffeurs de taxi, c'est une humiliation de répondre aux questions lors
de l'émission d'un permis. Au moins, ils ont dit qu'ils doivent parler
français, d'accord.
Nous exigeons, pas seulement pour les chauffeurs de taxi mais pour les
automobilistes en général sur nos routes, un meilleur
contrôle des permis. Le ministre sait que j'ai un permis portant son nom
et j'ai déjà ouvert un compte à son nom. Les permis sont
tellement faciles à obtenir ici au Québec, on peut presque faire
une commande chez Simpson's et l'avoir le lendemain.
M. PINARD: Si vous permettez, je vais faire une mise au point
là-dessus. Vous m'avez déjà affirmé que vous
pouviez obtenir un permis de conduire à mon nom sans que je le sache ou
que quelqu'un l'avait fait et l'avait obtenu. Alors, j'ai fait personnellement
une enquête là-dessus auprès du directeur du Bureau des
véhicules automobiles, M. Ghislsin Laflamme, que vous connaissez
bien.
M. EDMONSTON: Très bien.
M. PINARD: Je lui ai demandé si c'était possible qu'une
personne obtienne un permis de conduire à mon nom, alors qu'il ne porte
pas mon nom de famille ou qu'il ne porte pas mon prénom, qu'il ne
réside pas à l'adresse où je réside, etc. Il m'a
dit: C'est peut-être possible, seulement je vais faire une
vérification personnelle. Il a fait une vérification personnelle
et effectivement il y a peut-être cinq ou six Pinard qui auraient obtenu
un permis de conduire, mais toutes les adresses diffèrent de celle que
je possède. L'enquête a révélé qu'il n'y
avait pas eu de tricherie lors de l'émission et lors de la demande de
ces permis. Il arrive que ces personnes ont vraiment mon nom de famille, il y a
même une de ces personnes qui s'appelle Pinard qui a mon prénom
également. Alors, M. Edmonston, avant d'affirmer des choses dont vous ne
seriez pas sûr je voudrais que vous y songiez sérieusement. Si
votre enquête révèle que vraiment quelqu'un qui ne porte
pas mon nom, ni mon prénom, qui n'est pas résident à
l'adresse où je suis résident a vraiment obtenu un permis de
conduire, je voudrais que vous mettiez votre preuve sur la table et que vous
nous en fassiez part.
M. EDMONSTON: M. le Président, je pourrais raconter cette
histoire où le nom de M. Pinard est mêlé. Le permis que
j'ai eu et que j'ai payé $5 est en blanc. Moi-même j'ai mis le nom
de M. Pinard dessus et moi-même j'ai mis l'adresse de l'APA. Je suis
allé à la banque pour savoir si je pouvais ouvrir un compte au
nom de Bernard Pinard et j'ai été capable d'ouvrir un compte
à la banque. Ce cas a été donné à M. Pierre
Ouimet, journaliste à la Presse, qui va faire une série de
reportages là-dessus, M. le Président. Je ne sais pas si j'ai
contrevenu à la loi par cette pratique, j'espère que non parce
que je n'ai jamais utilisé ce permis pour acheter ou pour ouvrir un
compte Chargex au nom de M. Pinard.
M. PINARD: Je vous remercie de m'avertir, je vais prendre mes
précautions.
M. EDMONSTON: Je voulais seulement montrer que le ministre Pinard a
essayé de faire de bonnes choses, peut-être. Surtout au sujet de
la sécurité au Québec, nous avons beaucoup à faire
encore et nous aimerions être entendus plus souvent. Nous sommes heureux
qu'il ait fait des déclarations au sujet des inspections obligatoires
sur les automobiles. Nous en sommes heureux et nous espérons que ce sera
une réalité en 1973 et en 1974. Mais il y a d'autres choses, des
stupidités, dans le ministère des Transports, qui ne doivent pas
être là, surtout avec les écoles de conduite. Il y a des
choses qui
ne doivent pas exister. C'est pour cela que je vous fais la promesse que
je vais continuer la lutte parce que c'est cela mon mandat, la protection des
consommateurs québécois et canadiens. Si cela plaît ou ne
plait pas au ministère des Transports ou aux partis d'Opposition ou aux
politiciens, ce n'est pas mon affaire, je ne suis pas ici pour vous plaire. Je
suis ici seulement pour représenter les consommateurs qui souvent non
seulement sont mal servis par les chauffeurs de taxi mais sont souvent mal
servis même par les députés au Parlement qui sont
très peu renseignés sur les questions qui touchent les
consommateurs. C'est ma tâche de renseigner tous les
députés sur les questions des consommateurs et des affaires des
consommateurs. Je ne veux pas faire de discours, je m'en excuse, c'est
seulement une mise au point.
M. BELAND: M. le Président, comme question suivante, suite
à ce que vous avez énuméré, les quelques points
pouvant aboutir à un lexique du taxi, est-ce que vous pensez que, si ces
choses étaient mises en application de façon obligatoire, cela
pourrait augmenter les tarifs pour le consommateur?
M. EDMONSTON: Nous ne savons pas quelle augmentation il y aurait si les
exigences, envers les chauffeurs de taxi étaient plus grandes. Nous ne
serions pas contre une hausse de tarifs si on a également une hausse de
qualité, une hausse de compétence, une hausse de qualité
des services. Les consommateurs se plaignent d'une hausse de prix quand on n'a
pas de hausse de qualité ou de services. C'est la raison pour laquelle
nous étions contre la hausse des primes d'assurance et contre la hausse
des produits pétroliers, parce que nous n'avons pas eu la preuve de la
nécessité de l'augmentation des prix de l'essence et de l'huile
à chauffage. S'il y a seulement une hausse de tarifs, cela va toucher le
consommateur; mais s'il y a une hausse de qualité et de
sécurité, c'est une bonne chose. Nous acceptons cela. Mais nous
n'accepterons jamais une hausse de tarifs sans une hausse de qualité et
de compétence des chauffeurs de taxi. Nous demandons au ministère
des Transports, en plus de la compétence des chauffeurs de taxi, une
meilleure coordination avec ces autres services. M. Paul je ne sais pas
si M. Loubier y était M. Berthiaume étaient
présents à une séance de la commission parlementaire sur
le bill 23. Le ministère était surpris de voir qu'il y a six
automobilistes, au Québec, qui reçoivent la pension des aveugles.
C'est assez fort.
M. PAUL : On vous avait promis un rapport à ce sujet. Est-ce que
vous l'avez reçu?
M. EDMONSTON: Oui. C'est incroyable. Nous voulons avoir une meilleur
coordination. Ce n'est pas seulement le règlement no 6, qui peut dire
que tous les hommes de taxi doivent avoir ça et ça... Si on ne
fait pas de coordination dans le ministère, on peut toujours avoir des
abus assez graves. Nous sommes d'accord sur l'augmentation des tarifs si on a
une augmentation égale de la qualité. Nous croyons que nous
pouvons avoir une augmentation égale des services et des qualités
des voitures. Nous ne serons pas contre une augmentation
modérée.
M. BELAND: Maintenant, dans un autre ordre d'idée, est-ce que le
règlement no 6, par la création d'une association de
détenteurs de permis unique, diminuerait ou aurait tendance à
court, moyen ou long terme à diminuer les services aux
consommateurs?
M. EDMONSTON: A court terme, il y aura une diminution des
quantités de services. Il y a deux choses. On peut avoir une diminution
de qualité et une diminution de quantité. Si le règlement
no 6 est adopté, on va probablement avoir, à Montréal, une
diminution de la quantité de taxis disponibles. Parce que j'ai
déjà dit qu'il y avait trop de taxis à Montréal.
Mais on pourra facilement avoir une augmentation de qualité des hommes
qui sont là. Ce n'est pas seulement une question de quantité. Si
vous avez 6,000 bazous sur la route, disponibles pour les consommateurs, il
faudra voir le service que ces 6,000 voitures donnent. Vous pourriez en avoir
3,000, qui travaillent 60 heures par semaine, et qui donnent un service
qualitativement meilleur. Je crois que ce serait une bonne chose. Il ne faut
pas seulement regarder l'article disant qu'on va diminuer la
disponibilité de 6,000 taxis. Comme je l'ai déjà dit, on
ne pourrait en avoir que 3,000, s'il y a de la neige, parce que les 3,000
autres s'en vont.
Vous savez, ce sont des questions qualitatives et aussi
quantitatives.
M. PINARD: Sur le même point, est-ce que vous savez qu'à
cause d'une réforme très efficace et d'un nouveau formulaire qui
est en vigueur maintenant au Bureau des véhicules-automobiles du
ministère des Transports, nous avons été en mesure,
grâce à ce formulaire, grâce aussi à une
enquête qui a été faite, de faire disparaître 500
voitures fantômes qui réussissaient à obtenir des plaques
d'immatriculation de taxi, sans que ceux qui en faisaient la demande ne soient
détenteurs véritables de permis d'exploitation de taxi?
Etiez-vous au courant de cette chose-là?
M. EDMONSTON: Oui.
M. PINARD: II y a eu des réformes très efficaces qui ont
été faites.
M. EDMONSTON: Je crois que c'est une réforme. Je ne suis pas ici
pour faire l'apologie du gouvernement ni de l'Opposition.
M. PINARD: Non, mais il faut dire aussi que
des réformes se font â votre demande et à la demande
d'autres qui nous demandent de faire des enquêtes. Des enquêtes
prennent toujours un peu de temps parce qu'il faut obtenir des renseignements.
Dès qu'ils nous sont connus et que c'est probant, nous agissons, dans
l'intérêt du public, c'est évident.
M. EDMONSTON: M. le Président, je crois que le fait de retirer
certains permis qui sont exploités par des gens qui ne sont pas
chauffeurs de taxi est une bonne chose. Je crois que la diminution du nombre de
taxis disponibles aux gens, 500 ou 1,000, n'affecterait pas tellement le
service à ce moment.
A Toronto, comme je l'ai dit, où il y a un taxi pour 900
habitants, cela marche très bien. Si l'on revient à cette
façon, ici, à un pour 600, 700 ou 800, comme c'est prévu
dans le rapport Bossé, nous ne voyons pas de problèmes pour les
consommateurs à Montréal. On a des associations de taxi qui vont
dire: Edmonston s'est basé seulement sur Montréal et
peut-être un peu sur Québec. Je ne suis pas allé à
Chibougamau, en Abitibi ou ailleurs, peut-être aurait-on des
réalités différentes. A Montréal, la
réalité est que maintenant on a beaucoup de taxis et qu'une
diminution n'affecterait pas tellement les consommateurs.
M. BELAND: Supposons qu'il y aurait justement diminution du nombre de
taxis, pensez-vous, compte tenu de la mentalité des
Québécois, compte tenu des tendances diverses selon les
régions, que la population, à long terme, se dirigerait vers
d'autres modes de transport?
M. EDMONSTON: C'est possible, mais vous voyez, on a...
M. BELAND : Excusez-moi, mais il y a eu une allusion, comme si je
parlais de spoutnik, selon le député de Sainte-Marie, mais je
parlais du transport en commun et non pas des idées illusionnaires qu'il
peut avoir. Voulez-vous continuer, M. Edmonston?
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Bien répondu.
M. EDMONSTON: M. le Président, il est possible que si on a moins
de taxis disponibles les citoyens utilisent d'autres modes de transport. Cela
est possible mais je ne crois pas que cela aurait un effet tellement nocif ou
un mauvais effet sur les chauffeurs de taxi parce qu'à Toronto on a
d'autres modes de transport, le métro, par exemple. Quand on a
diminué le nombre de taxis, je n'ai pas vu tout le monde prendre le
métro et laisser les chauffeurs de taxi crever de faim.
C'est une bonne affaire à Toronto. On a quelque chose de
semblable. La seule différence, c'est qu'à Toronto, on a un taxi
pour 965 personnes. Ici, on a un taxi pour environ 400 personnes. Je crois
qu'on peut arriver à la même chose qu'à Toronto. De plus,
le ministre Davis a dit qu'il voulait créer un système de "rapid
transit". Dans l'avenir, ce sera très important un tel système.
Je ne sais pas comment on dit cela en français...
DES VOIX: Transport par voie rapide.
M. EDMONSTON: ... un système de transport rapide en ville. C'est
très important, à cause des embouteillages, de la circulation et
de la pollution. C'est l'avenir. Un bon service de taxi a sa place dans la
mosaïque du transport en ville au point de vue économique. Le taxi
a une place très importante, mais il faut un taxi efficace et sûr.
Je crois vraiment que le règlement no 6 est bon, pas seulement pour
maintenant, mais pour l'avenir. Un bon service de taxi pourrait réduire
le nombre de véhicules en ville et toute la pollution qui est
causée par les voitures, dans une proportion de 50 p.c. Nous avons
déjà le problème à Montréal.
M. BELAND: Vous avez fait certaines allusions en ce qui concerne les
chauffeurs de taxi, le public consommateur de ce service, etc? Mais est-ce
qu'à Montréal ou dans d'autres villes, provinces, pays, etc., les
clients ont le droit de choisir le chauffeur dans un poste de taxi ou dans une
compagnie de taxis?
M. EDMONSTON: Je ne suis pas certain. Je n'aimerais pas répondre
sans savoir exactement quelle est la situation. Je crois que le consommateur a
toujours le choix du taxi qu'il veut prendre. On appelle cela la concurrence.
Mais si la moitié des taxis sont en mauvais état, ou si un fort
pourcentage de chauffeurs de taxi ne sont pas compétents ou sont
employés à temps partiel ou ont un double emploi, si vous devez
passer par dix chauffeurs pour en avoir un bon, cela devient difficile pour le
consommateur. Le consommateur a un choix, mais quel choix? C'est vraiment un
travail.
M. BELAND: Maintenant, si on revient plus directement au
règlement no 6, est-ce qu'il garantit suffisamment aux clients la
sécurité qui est suggérée dans ce
règlement?
M. EDMONSTON: Pour les normes de sécurité, sur papier on
garantit toujours la sécurité des automobiles. Mais il faut se
méfier de ces papiers. Notre mandat et notre travail, si le
règlement no 6 est adopté, c'est de toujours demander au
ministère de l'appliquer. Il y a une différence entre la
réalité, au ministère des transports, et ce qui est
écrit sur le papier. Il y a une grande différence surtout dans la
question de la sécurité routière.
Nous avons, avec l'adoption du règlement no 6, l'intention de
toujours remplir notre rôle, si c'est possible, et de demander au
ministère des Transports de justifier telle action ou telle
action pour être sûrs que les principes que nous croyons
bons dans le règlement no 6 seront traduits dans la
réalité.
Nous ne sommes par certains maintenant que ce sera une chose excellente.
Cela peut être de la foutaise. Si c'était de la foutaise, si,
après l'adoption du règlement no 6, tous les règlements
sont mal dirigés, appliqués de la mauvaise façon ou avec
un manque de sérieux, c'est nous qu'il faudra blâmer parce que
nous n'aurons pas assez insisté auprès du ministère
concernant ce manque de surveillance de ces règlements ou ce manque de
compétence pour la mise en vigueur de ces règlements. Je ne peux
pas dire que cela va être une excellente chose. C'est une
hypothèse. Le principe est très bon pour la réforme du
taxi, pour les consommateurs. Savoir si cela va être traduit dans la
réalité, c'est toujours difficile.
M. BELAND: Comme représentant des consommateurs, que pensez-vous
de l'énumération faite à l'intérieur du
règlement no 6 qui dit: "Quatre passagers, maximum"?
M. EDMONSTON: Nous ne connaissons pas la raison d'être de ce
règlement de "quatre passagers, maximum". Je suis certain qu'il y a
déjà eu des représentations de la part d'autres
associations; par exemple, Mme Fontaine, a parlé de la base rationnelle
de tous ces règlements. "Quatre passagers" veut dire pas plus que trois
en arrière et un à côté du conducteur. C'est tout.
J'aimerais voir ce que cela ferait si c'était "six passagers" ou "cinq
passagers". Je crois que cela peut affecter beaucoup le travail du conducteur
d'une voiture parce qu'elle sera surchargée. Surtout avec la compagnie
Ford, il a été démontré que les pneus seraient
facilement surchargés si vous avez plus que quatre passagers et une
personne comme conducteur. Les pneus ne sont pas faits pour une voiture
vraiment pleine avec tous les bagages. Sur le plan de la
sécurité, nous ne sommes pas contre la limite de quatre. Nous
croyons qu'avec quatre personnes la voiture serait assez chargée. Si on
a les meilleurs pneus? Je ne sais pas ce qu'on appelle les meilleurs pneus,
mais je sais qu'avec les bagages et avec cinq personnes dans une voiture
celle-ci est vraiment chargée. S'il y en a plus que ça, six
passagers, on ne peut pas conduire la voiture et avoir la même
sécurité pour voir la route et circuler qu'avec quatre passagers.
Je n'ai pas de chiffres là-dessus. Je n'ai pas fait d'étude sur
la question de quatre passagers, cinq ou six ou même huit dans un taxi.
Avec ce règlement de quatre passagers, plus le conducteur, ce qui fait
cinq personnes, j'y vois une implication sécuritaire. C'est beaucoup,
surtout pour une voiture-taxi.
M. BELAND: Comme dernière question, les normes à
être appliquées ou à être agencées dans le
domaine du taxi, disons dans toute la province, pensez-vous qu'elles devraient
être différentes selon les régions de la province?
Par exemple, Montréal tient pour une part et une autre
région, une autre part, dans le milieu rural, je ne sais trop.
Devrait-il y avoir une différence marquée?
M. EDMONSTON : Non. Je serais contre les différences. Il ne faut
pas de différences pour l'état des routes, pour la
sécurité des voitures. Pour le chauffeur, c'est toujours
nécessaire d'être compétent. La mécanique doit
toujours être bonne. Je serais pour une même loi partout. On peut
avoir une meilleure façon de mettre en vigueur cette loi. Si vous avez
une différence pour cette petite ville, une autre différence pour
celle-ci et une autre pour Montréal, les normes de
sécurité exigées seront différentes. C'est
incroyable. C'est très difficile de mettre en vigueur ces
règlements.
Quant à la sécurité d'une voiture, ici comme en
Australie, comme aux Etats-Unis, comme à Toronto, certaines normes
doivent rester les mêmes. Il faut ajouter certaines choses au Canada, par
exemple des chaufferettes plus fortes, des batteries plus fortes, à
cause de notre climat spécial, bien sûr, la protection
antirouille, le dégivreur arrière. Ce sont des choses très
importantes. Mais c'est selon les régions climatiques qu'il faut avoir
certaines choses.
M. BELAND: Je vous remercie beaucoup.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de
Sainte-Marie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, je pense qu'on a pas
mal posé toutes les questions qu'on avait à poser à M.
Edmonston. J'ai juste deux questions d'ordre général.
Premièrement, une remarque très brève sur votre
exposé. Lorsque vous dites que vous avez pu, à la banque, ouvrir
un compte avec une carte au nom de M. Pinard...
M. EDMONSTON: Que j'ai faite moi-même.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ... je peux vous rassurer. Si vous avez fait
un dépôt de $5, les gens de la banque étaient convaincus
que ce n'était pas le ministre des Transports.
M. PINARD: A quelle banque?
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne le sais pas.
M. PAUL: Apparemment, il a fait cela à 20 banques, à
Montréal!
M. PINARD: Je fais affaires avec des banques
canadiennes-françaises, si cela vous intéresse.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Trêve de plaisanteries. Pour en
revenir aux choses sérieuses, vous parliez de la syndicalisation des
chauffeurs de taxi; il y a eu plusieurs tentatives
de faites, à Montréal. On en entend parler depuis des
années. Cela ne s'est jamais concrétisé. Pensez-vous que
cela pourrait se faire seulement sous l'égide, ou épaulé
par le ministère du Travail, soit par une loi spéciale, genre
syndicalisme agricole, peu importe.
Est-ce votre avis que les chauffeurs seuls ne pourront jamais se
syndicaliser dans une ville comme Montréal s'ils n'ont pas l'aide du
ministère? Brièvement.
M. EDMONSTON: Je crois que c'est nécessaire d'avoir l'aide du
ministère du Travail et même l'aide du ministère des
Transports. C'est une place où ils peuvent aider; c'est
nécessaire. Je parlais d'un climat malsain dans cette industrie. Je suis
certain qu'on va entendre des gens qui ne veulent pas avoir la syndicalisation
des chauffeurs de taxi. Je suis certain qu'on va voir ça. Je suis aussi
certain qu'il peut y avoir seulement des bénéfices à la
syndicalisation. Le ministère de la Main-d'Oeuvre doit reconnaître
ces bénéfices et faire son possible pour aider les chauffeurs de
taxi à se syndicaliser. Je ne vois pas de désavantages pour les
consommateurs avec la syndicalisation des taxis, aucun. Dans cette optique, je
crois que le ministère du Travail et le ministère des Transports
doivent chercher des endroits où ils peuvent aider.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Merci. Une dernière question et j'ai
fini. Alors, on aura fini à 12 h 30. Hier soir, autour de minuit, on a
entendu, ici, un chauffeur, M. Dickey, qui nous a fait part de menaces qu'il
aurait reçues quand certaines gens ont su qu'il venait témoigner
à la commission parlementaire. Vous nous en avez parlé aussi.
Vous nous avez même dit que vous pouviez déposer des documents
confidentiels au ministre. Croyez-vous que ces menaces sont allées assez
loin pour empêcher ceux qui viennent s'exprimer comme chauffeurs de dire
librement ce qu'ils veulent dire devant la commission parlementaire et, par le
fait même, empêcher la commission parlementaire d'être
renseignée véritablement sur les problèmes des chauffeurs
de taxi? Il y en a 2,500 à 3,000 à Montréal. Est-ce que
vous pensez que ces menaces empêchent ces gens de s'exprimer?
M. EDMONSTON: La première question sur la syndicalisation, j'y ai
répondu. A la deuxième question, c'est que les menaces sont
réelles. On n'a pas eu jusqu'ici l'idée des chauffeurs
indépendants qui veulent se syndicaliser; il y a seulement un M. Dickey,
hier soir. Je sais qu'après mon témoignage on va entendre ces
gens.
J'espère qu'ils parleront librement, je crois que oui. Je crois
que les menaces n'ont pas réussi à faire taire ces gens
courageux. Je ne peux pas faire d'hypothèse et dire qu'ils vont changer
leur histoire après que je serai parti, je crois vraiment que ces gens
vont dire la vérité. Quand M. Dickey a dit la
vérité hier soir il a été hué par tout le
monde derrière moi.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je le félicite aussi. Il a eu du
courage. Merci.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député
d'Abitibi-Ouest.
M. AUDET: M. Edmonston, vous avez dit tout à l'heure que la
syndicalisation était une mesure nécessaire pour la protection
des chauffeurs de taxi de Montréal. Nous connaissons des associations de
services de Montréal, de Sherbrooke qui ont pris le tour
d'intégrer des propriétaires de taxi artisans au sein de leur
association ou au sein de leur compagnie en les rendant copropriétaires,
en leur vendant des actions de leur compagnie. Il serait peut être
possible de faire la même chose avec les chauffeurs. Je ne sais pas par
quelle formule on pourrait y arriver mais, au lieu de syndicalisation, on
pourrait faire une intégration des chauffeurs dans les associations ou
dans les compagnies existantes. Ils participeraient par l'achat d'actions des
compagnies. Ainsi ils seraient protégés réellement et
intéressés à faire partie de l'industrie du taxi.
Croyez-vous que cela serait supérieur à la syndicalisation, qui
est difficile à faire?
M. EDMONSTON: M. le Président, la coopérative de
Sherbrooke, je l'ai déjà dit, c'est un moyen qui a
protégé les chauffeurs, protégé les consommateurs,
c'est une bonne affaire. Je suis certain que le ministère des Transports
et M. Bossé sont d'accord. C'est presqu'un modèle à
Sherbrooke, toutes les associations qu'ils ont eues et tous les services qu'ils
offrent au consommateur. Mais combien ont réussi cette tâche? Un
seul. Vous voulez vous baser sur un seul, c'est presque un miracle, dans notre
situation, le cas de Sherbrooke. On ne peut dire: On va laisser les gens de
Montréal faire la même chose. Ce n'est pas la même chose. A
Montréal c'est une réalité différente. Pour dire
qu'on établit les mêmes modalités ou la même chose
qu'à Sherbrooke, volontairement établir un moyen pour
protéger...
Nous avons deux moyens pour protéger les chauffeurs et les
consommateurs; la syndicalisation et les coopératives que propose le
gouvernement. Mais le troisième moyen, les coopératives libres
faites par les chauffeurs de taxi et les associations sans le règlement
no 6, est-ce que cela peut se produire à Montréal? J'en doute
fortement. Parce qu'on a vraiment beaucoup de chicane à Montréal;
on n'a pas les mêmes réalités à Montréal
qu'à Sherbrooke.
M. AUDET: Je sais que ce serait un tour de force d'arriver à
concrétiser cette intégration, mais je crois qu'à
Montréal déjà il y a des associations qui ont fait un pas
vers les chauffeurs artisans pour les intégrer, les faire devenir
actionnaires des compagnies. Cela s'est déjà fait. On en parlait
à des chauffeurs de taxi hier qui ont acheté des actions dans les
associations de services et qui en sont devenus co-propriétaires.
Maintenant, quel tour de force faudra-t-il pour faire la même
chose pour les chauffeurs de taxi? Je crois que si on réussisait ce tour
de force, la préservation des droits des chauffeurs de taxi serait
supérieure à celle qu'on obtiendrait par la syndicalisation.
M.EDMONSTON: Vous savez, pour parler syndicalisation versus
coopératives il y a des gens plus qualifiés que moi qui
comparaîtront devant vous plus tard, j'en suis certain. Il y a trois
moyens de syndicalisation. Il y a le système coopératif que le
gouvernement veut établir avec le règlement no 6. Je ne peux pas
vous dire lequel sera le meilleur dans l'intérêt des chauffeurs.
Je ne suis pas chauffeur de taxi, je suis simple consommateur. Je crois que
cette question recevra une réponse par les autres qui me suivront.
M. AUDET: Un dernier mot, M. le Président. Au point de vue du
code d'éthique ou de la possibilité de rendre les chauffeurs plus
motivés, pour empêcher que ce soit des mercenaires qui vont
chercher une paye, pour les rendre plus humains, plus aptes à donner de
bons services, je crois que ça ferait toute la différence, ne
croyez-vous pas?
LE PRESIDENT: M. Edmonston, nous vous remercions de votre
présentation et de vos commentaires. Nous nous excusons de vous avoir
gardé aussi longtemps à la barre.
M. EDMONSTON: Merci beaucoup.
UNE VOIX: M. le Président, je m'excuse de cette intervention
inhabituelle dans le cadre de la commission parlementaire, mais il y a des
chauffeurs de Montréal qui sont présents ici, qui ont
travaillé toute la nuit, qui sont rendus ici, ce matin, pour donner leur
opinion. Ils attendent depuis deux jours. Tous les financiers du taxi, les
investisseurs du taxi ont été entendus et là, on en a
assez, messieurs, on veut que les chauffeurs de taxi qui sont, en fin de
compte, l'industrie du taxi, soient entendus. On les a invités, alors
qu'on les entende prioritairement après la période du repas,
parce que ces gars-là ne peuvent pas se déplacer comme cela
continuellement et ils veulent être entendus.
La priorité doit leur être donnée parce que c'est
pour eux qu'on a convoqué cette commission. Merci, messieurs.
LE PRESIDENT (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous plaît! Je
comprends le bien-fondé de l'intervention. Mais j'ai un ordre du jour
à suivre. Je comprends aussi qu'il y a beaucoup de personnes dans la
salle dans une situation semblable. Je comprends que c'est très long
d'attendre, mais il faut quand même procéder avec un certain
ordre. L'enquête a été faite pour l'industrie du taxi et la
réglementation s'appliquera à l'industrie du taxi, si je
comprends bien.
Un instant, s'il vous plait. Il y a un groupe qui demande la parole.
Vous vous êtes nommé, mais je ne me souviens pas du nom. Quelle
est la personne qui s'est nommée tout à l'heure? M. Blondin.
UNE VOIX: M. le Président, si vous me le permettez...
LE PRESIDENT (M. Séguin): Un problème à la fois. Si
vous en avez un autre, vous viendrez tout de suite après. M. Blondin a
dit qu'il y avait un groupe de chauffeurs et on m'a présenté une
liste. S'agit-il de M. Piton, M. Dumont, M. Landreville, M. Côté,
M. Lévesque? Est-ce de ce groupe qu'on veut faire mention? Y en a-t-il
un qui représenterait les cinq, qui voudrait parler?
Un instant, je pose une question à M. Blondin qui a
été le porte-parole du groupe, en autant que je le sache.
M. Blondin, est-ce qu'il y en aura un qui voudrait parler pour
représenter le groupe ou si vous demandez la parole, tout le groupe,
chacun individuellement, à tour de rôle?
M. BLONDIN: Pour chacun, individuellement. Il y a des personnes qui
désirent se faire entendre.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Est-ce que vous accepteriez l'offre de
cinq minutes chacun?
M. BLONDIN: Non.
DES VOIX : Non, nous ne l'acceptons pas.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Vous n'acceptez pas cela.
A l'ordre! Je ne veux pas faire de distinction ni de discrimination. Au
moins, vous allez admettre, depuis le début de ces séances, que
j'ai fait preuve d'une tolérance extraordinaire. Vous admettrez cela.
Qu'on ne me prête pas surtout, s'il vous plaît, d'intention autre
que celle-là, soit cette tolérance que j'ai voulu
démontrer.
A 14 h 45, nous allons appeler M. Blondin. Selon la longueur de son
intervention, M. Blondin déterminera le temps qui sera permis à
ses confrères par la suite. Si M. Blondin prend une demi-heure,
naturellement, les autres en auront beaucoup moins.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. Blondin est déjà venu ici.
H peut revenir encore.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Oui, je comprends tout cela. Que ma
proposition soit bien claire pour M. Blondin et ses collègues. Si vous
pouvez, entre vous, à l'heure du lunch, décider d'une
période de temps de cinq ou six minutes pour chacun et vous
répartir les différents problèmes individuellement, et non
pas vous répéter l'un après l'autre. Si vous pouvez
vous
grouper et me suggérer, à 14 h 45, que M. Untel sera le
premier, qui suivra, etc. Vous pourriez me dire que vous avez l'intention de
parler pendant cinq ou six minutes, en précisant: Vous
m'arrêterez, M. le Président! Mon collègue continuera sur
un autre sujet.
Et votre propos devra être toujours représentatif de vos
opinions collectives.
Vous m'avertirez avant la reprise de la séance et je verrai s'il
est possible de faire une espèce d'entente pour vous entendre. Mais il
faut reconnaître aussi qu'il y en a d'autres qui veulent s'exprimer. Il y
a M. Lecompte qui attend, entre autres.
M. BLONDIN: Etant donné que j'ai déjà passé,
je ne voudrais brimer personne et tomber dans la procédure. Je veux
respecter tout le monde. Je voudrais que mon nom soit rayé.
Je voudrais que l'on commence avec M. Lecompte parce qu'eux n'ont pas
passé. Moi, j'ai passé déjà.
LE PRESIDENT (M. Séguin): M. Lecompte est-il avec votre
groupe?
M. BLONDIN: Oui.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Je voulais commencer à trois
heures moins quart avec M. Lecompte. Alors, vous me reverrez avant la reprise,
j'allais dire des hostilités, mais de notre séance de
l'après-midi.
M. PRONOVOST: Je me nomme Paul Pro-novost. On nous a appelé
à deux reprises. Malheureusement, je ne sais pas si ce sont des
tactiques pour nous prendre les culottes baissées, mais nous
n'étions pas là. Cela fait déjà trois jours que
nous patientons; nous n'avons pas les mêmes moyens que les pontifes du
taxi.
Nous aimerions donc être entendus immédiatement
après M. Lecompte après le groupe des quatre ou cinq. Mais nous
voulons être certains que ce sera aujourd'hui et non dans quinze
jours.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Mon ordre du jour, M. Pronovost, pour
votre information est inscrit ici. C'est l'ordre que je devais suivre ce matin
et que je devrai nécessairement respecter cet après-midi. Le
premier à passer, M. Lecompte. Le deuxième, Taxis Lasalle 64
Inc., M. Brunet. Le troisième, Association métropolitaine des
petits propriétaires, M. Pronovost. Vous êtes inscrit à
l'ordre du jour. Mais encore là...
M. PINARD: Soyez présents, nous vous avons appelé deux
fois et vous n'étiez pas présents. Je regrette.
LE PRESIDENT (M. Séguin): En plus, il y a des gens qui sont dans
la même position que vous. Ils doivent passer aujourd'hui parce qu'ils
sont ici depuis deux jours et ils sont revenus encore aujourd'hui pour se faire
entendre. J'ai l'Organisation des chauffeurs de taxi de Montréal, j'ai
l'Association des propriétaires de flottes de taxis de Montréal,
Metropole Radio Taxi, 1959, et l'Union des propriétaires de taxis de
Granby. Ce sont tous des gens inscrits pour aujourd'hui. C'est pour ça
que je vous demande, de grâce, dans vos interventions comme dans vos
réponses aux questions d'être aussi brefs que possible et clairs
en même temps, afin de permettre que d'autres soient entendus. C'est la
seule raison de mon insistance dans ce domaine. Je vous souhaite bon
appétit et, à trois heures moins quart, nous reprendrons la
séance.
(Suspension de la séance à 12 h 43)
Reprise de la séance à 15 h 8
M. SEGUIN (président de la commission permanente du travail, de
la main-d'oeuvre et des communications): A l'ordre, messieurs! Le
député de Verdun, sur un point de règlement.
M. CARON: M. le Président, vu qu'il y a encore beaucoup de gens
dans la salle et qu'il est déjà trois heures huit minutes...
LE PRESIDENT (M. Séguin): J'avais demandé que la
commission reprenne ses travaux à trois heures mois quart, M. le
député.
M. CARON: Nous devons entendre beaucoup de monde encore. Pour ma part,
je serais prêt à ce qu'on travaille jusqu'à minuit, pour
écouter le plus de monde possible ce soir.
Je vous remercie des applaudissements. Ce n'est pas nécessaire.
Une fois pour toutes, il faut savoir où on s'en va. Nous sommes ici,
à Québec. Je suis ici, vous autres aussi. Alors, nous sommes
aussi bien de travailler jusqu'à minuit, cela fera quatre ou cinq heures
de plus, pour connaître vos problèmes.
J'aimerais savoir des autres membres, M. le Président, si on est
prêt à aller jusqu'à minuit.
M. PINARD: M. le Président, si vous me le permettez, je pense
qu'on avait dit clairement qu'on pouvait aller jusqu'à six heures ce
soir mais si c'est le désir de la majorité, en bon
démocrate, je vais accepter la proposition qui est faite et je vais
travailler jusqu'à minuit, indépendamment de toutes les autres
tâches que j'ai à accomplir.
M. CARON: Dans les circonstances, je pense que votre temps est plus
précieux à la commission parlementaire, pour le taxi. Merci.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, je suis
entièrement d'accord. Je suis prêt à siéger
jusqu'à minuit. Mais serait-il possible de suspendre, ce soir, pour le
souper, à six heures au lieu de six heures et demie. C'est que j'aurais
à sortir.
M. PINARD: Avec l'entente, cependant, que demain, vendredi, nous ne
siégerons pas.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ah non! Cela, c'est une autre affaire.
M. PINARD: Nous procéderons par convocation de ce que nous
appellerons, pour les circonstances, les véritables représentants
des groupes qui veulent se faire entendre. J'ai cru comprendre à
moins que je me sois trompé lourdement qu'il n'y a pas tellement
de groupes nombreux qui veulent se faire entendre. Il y a les groupes
d'associations de services, groupes bien organisés, bien
structurés, comme
Diamond, Lasalle, Beaubien et autres, il y a les propriétaires de
permis de taxi, qui les utilisent personnellement ou qui les font exploiter par
d'autres personnes à leur emploi, sous forme de salaires ou de
commissions, il y a les petits propriétaires, il y a les locataires, il
y a les chauffeurs.
S'il y en a d'autres qui veulent se faire entendre, comme M. Edmonston
qui représentait le consommateur, ils nous le diront. Je pense que nous
pouvons déterminer déjà quels représentants du
monde du taxi, par voie de représentation, nous pouvons entendre. Je
demanderais si c'est possible et si on admet mon point de vue, de ne pas faire
défiler 5,000 personnes devant la commission parlementaire. Vous allez
en avoir pour un an, peut-être pour un an et demi, et votre
problème du taxi ne sera pas réglé.
Essayons d'être raisonnables, d'être réalistes tous
ensemble. Faites-vous représenter pour que quelqu'un vienne dire le
point de vue de 100, 150, 200 ou 300 personnes, de façon que 200
personnes ne viennent pas dire nécessairement le point de vue
présenté par une autre personne avant.
Je pense que c'est raisonnable. Si c'est une formule de travail qui vous
parait réaliste et efficace, nous allons nous entendre là-dessus.
Mais avant que je décide qu'il y aura convocation de la commission
parlementaire la semaine prochaine en tout cas, mes autres
collègues vont peut-être être d'accord nous allons
déterminer une façon de travailler de façon
ordonnée, efficace et rentable, pas pour nous, pour vous. Mais
donnez-nous la chance de vous aider, s'il vous plaît.
M. BERTHIAUME: Sur le même sujet, j'aurais une petite question de
procédure.
M. PAUL: Je pense bien que vous me permettrez, au nom de mes
collègues de l'Union Nationale, de vous informer que, s'il y a des
députés qui sont prêts à siéger à
cette commission, nous, nous acceptons avec plaisir de siéger
jusqu'à minuit ce soir.
M. AUDET: Nous l'acceptons aussi, mais pourriez-vous nous dire s'il y
aura reprise de la commission la semaine prochaine?
M. PINARD : Nous le verrons après. Je viens de toucher à
ce point, M. le député: J'espère que vous avez compris.
Nous établirons un consensus là-dessus dans le courant de la
journée ou un peu plus tard ce soir, selon ce qu'on aura fait.
M. AUDET: Nous le saurons ce soir.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): D'accord.
M. BERTHIAUME: Très brièvement. Me serait-il permis par la
commission de déposer un
document qui m'a été présenté par un
chauffeur de taxi de Granby, qui doit partir cet après-midi et qui a
écrit à la main ses commentaires?
LE PRESIDENT (M. Séguin): Je demanderais au député
de Napierville-Laprairie d'attendre un instant. Je recevrai sa question sur la
procédure immédiatement après. Puisqu'il y a
unanimité chez les membres de la commission et que, déjà,
on a exprimé le désir de siéger plus tard ce soir, je n'ai
pas d'hésitation du tout à dire que nous siégerons
jusqu'à minuit. C'est le désir de la commission et du public
présent.
Dans ces conditions, nous siégerons jusqu'à minuit. Mais
ce soir, à six heures, nous arrêterons. Un membre de la commission
a déjà demandé à cause d'autres engagements
d'arrêter à l'heure du diner. Nous arrêterons à six
heures, même au milieu d'une phrase, aussi raide que ça.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Quand même ça varierait de cinq
minutes.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Non, je ne la ferai pas varier. Je vais
suivre l'horloge, parce que je vois que je suis conduit par l'horloge. Donc, 6
heures, ce soir.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Pour l'heure du souper.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Pour l'heure du souper, et nous
reprendrons... Ce sera annoncé à 6 heures; ce sera probablement 8
h 15.
M. PINARD: Là-dessus, M. le Président, me permettez-vous?
Est-ce qu'on pourrait permettre au président de garder le
contrôle, en tout temps, des travaux de la commission parlementaire?
C'est lui qui a la lourde responsabilité de bien conduire les travaux de
cette commission parlementaire. Ce n'est pas une question de partisanerie
politique; même mes collègues de l'autre côté de la
Chambre, mes honorables adversaires, vont admettre que c'est absolument
nécessaire, pour une assemblée délibérante, d'avoir
un président qui a les mains libres et qui va établir la
discipline. Je suis prêt à me conformer à cela et j'imagine
que la majorité d'entre vous est prête à s'y conformer.
Mais ce n'est pas aux députés à mener ça, c'est au
président à mener les travaux.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de
Napierville-Laprairie, sur une question de procédure.
M. Gérard Daigneault
M. BERTHIAUME: II s'agit simplement de faire valoir ou de
présenter le document de M. Gérard Daignault, de Granby, qui doit
repartir.
C'est un chauffeur de taxi qui voulait prendre la parole en son nom. Il
ne représente personne d'autre que lui-même. Etant donné
qu'il devait partir, il m'a demandé si on pouvait accepter le document
qu'il a rédigé et qui résume sa pensée. C'est
écrit à la main. A moins, tout simplement, de déposer ce
document.
LE PRESIDENT (M. Séguin): A moins qu'il y ait objection d'un
membre de la commission, je n'ai aucune opposition à recevoir ce
document et à le faire déposer ou inscrire en annexe au journal
des Débats.
M. PAUL : Adopté, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Adopté et accepté. (voir
annexe)
M. BERTHIAUME: Merci, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Séguin): A l'heure du lunch, il y a eu une
demande de la part d'un membre de l'industrie du taxi, M. Blondin, m'avisant
qu'il y avait un groupe, venu de Montréal, qui désirait se faire
entendre. J'avais une liste qui, en plus de son nom, contenait cinq ou six noms
de chauffeurs, je présume. Il m'a demandé s'ils pouvaient
être entendus, lui et les membres de ce groupe, et malgré que
ça faisait déjà un accroc à l'ordre du jour
déjà préparé et à la routine normale de
pouvoir entendre tout le monde, j'ai convenu, avant le lunch, d'entendre M.
Blondin ou d'autres de ce groupe.
Au retour, M. Blondin m'a rencontré, c'est-à-dire il y a
quelques minutes déjà, et la liste avait été
augmentée d'autres personnes.
J'ai offert à M. Blondin, et à son groupe, une
période de 45 minutes excluant le temps pour des questions
éventuelles et lui donnant entière liberté de faire la
répartition du temps employé par ces messieurs. Il faudrait dire,
pour autant que je le sache, que ce sont des personnes qui ont demandé
de comparaître devant la commission, qui ont le droit de se faire
entendre mais à la condition qu'elles soient inscrites pour que nous
puissions suivre un certain ordre. On me dit qu'elles ne se sont pas toutes
inscrites.
Ne voulant pas brimer des droits, ni faire preuve de discrimination
envers qui que ce soit, et puisque déjà, individus, associations,
enfin, d'autres parmi l'assistance ici qui se sont déjà inscrits
paraissent maintenant à notre ordre du jour, je trouve qu'il serait
très injuste, devant ce refus, d'accorder un temps supplémentaire
et d'utiliser à ce moment-ci un temps ou une période plus longue
pour entendre les revendications du groupe dont parlait M. Blondin.
Je voudrais quand même indiquer que chacun des individus du groupe
représenté par M. Blondin, avant le lunch, a la
prérogative, le droit, le privilège et le devoir peut-être
de s'inscrire. Au fur et à mesure que les jours et les semaines
suivront, ils seront convoqués ici, à la
commission, à une date fixe afin qu'il n'y ait pas abus quant au
temps utilisé ici. Devant le refus de M. Blondin d'accepter la
période offerte, je me vois obligé de suivre mon ordre du jour.
J'appelle à la table, ci-avant tel que convenu avant le lunch et
avant l'intervention de M. Blondin M. Claude Lecompte.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de
Lotbinière.
M. BELAND: M. le Président, avant que M. Lecompte ne
débute, j'aimerais avoir une information. Avez-vous
déterminé un temps maximum d'inscription pour les autres qui
voudraient parler? Avez-vous fixé une limite?
LE PRESIDENT (M. Séguin): Non, je n'ai pas fixé de limite.
Nous avons été très larges là-dessus. S'il y a des
gens qui ne sont pas inscrits qui seraient ici dans le moment, ils peuvent
s'inscrire mais pas nécessairement pour s'adresser à la
commission aujourd'hui. L'inscription ne veut pas dire parution
immédiate à la table, il ne faudrait pas se méprendre.
Cela leur permettra d'être appelés, à une date fixe, dans
les jours à venir. Est-ce que cela répond à votre
question?
M. BELAND: Cela répond.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Merci. M. Lecompte.
M. LECOMPTE: M. le Président...
LE PRESIDENT (M. Séguin): Voulez-vous vous identifier?
M. Claude Lecompte
M. LECOMPTE: Claude Lecompte, chauffeur de taxi appartenant au no 4 tel
que décrit par des chauffeurs qui m'ont précédé. Un
no 4 est un gars qui ne détient qu'un "pocket number" et qui est
à la solde de gens qui détiennent des permis. Je remercie le
président de toute la tolérance qu'il a démontrée
à l'égard des personnages qui sont passés dans cette
salle, aussi bien les intelligents que les imbéciles.
Je remercie le premier ministre de la province de Québec de
s'être penché sur le sort du chauffeur de taxi qui est, en
réalité, le noeud de l'industrie du taxi dans la région
métropolitaine de Montréal. A ce moment-ci, je ne veux pas parler
des chauffeurs de taxi des régions comme Sept-Iles, que je ne connais
pas du tout. Je remercie M. Alfred Bossé du travail ardu qu'il a fourni
pour permettre cette commission qui ouvrira maintenant les yeux de la
population du Québec et de nos hommes politiques sur le statut
particulier d'un chauffeur de taxi de la ville de Montréal.
Je remercie l'Opposition, qui fait un travail formidable, en faisant
découvrir par ses ques- tions la vérité afin que le petit
continue à être protégé au sein de cette
société au détriment de ceux qui continuent.
Il y en aura peut-être encore d'autres, dans différents
domaines, pour profiter du manque d'instruction du chauffeur de taxi pour lui
faire un lessivage de perveau, pour le maintenir à sa solde comme un
esclave au temps du premier président des Etats-Unis. M. Lincoln a dit,
il y a 100 ans, que l'esclavage était terminé en Amérique
du Nord.
A ce point-ci, je veux décrire la situation actuelle du chauffeur
de taxi. Je pense que tous les députés ont le mémoire que
j'ai présenté contenant deux feuilles et trois paragraphes. Cela
a été distribué à tous les députés,
peut-être que quelques-uns ne l'ont pas eu parce qu'il en manquait.
M. PAUL: M. Lecompte, est-ce que c'est ce document-là? J'en ai un
ici...
M. LECOMPTE: Pour l'identifier, le titre est: Mémoire à
l'intention des membres de la commission parlementaire sur l'industrie du taxi,
règlement no 6, situation actuelle.
M. PAUL: Merci, très bien.
M. PINARD: M. Lecompte, le secrétaire de la commission
parlementaire, M. Jacques Pouliot, dit qu'il n'a pas reçu votre
mémoire. Avez-vous un exemplaire additionnel pour que ce soit entre les
mains...
M. LECOMPTE: Je pourrais peut-être lui remettre le mien.
M. PINARD: Vous n'en avez pas d'autres? M. LECOMPTE: Non.
M. PINARD: Est-ce que quelqu'un pourrait donner un mémoire
à M. Pouliot afin qu'il puisse l'enregistrer, comme secrétaire
général de la commission parlementaire?
M. LECOMPTE: Alors, ce mémoire comprend trois paragraphes. Le
premier, je lui ai donné comme titre: Insécurité d'emploi.
La situation actuelle au sein de l'industrie du taxi ne donne aucune
sécurité d'emploi aux chauffeurs. Je veux dire que le chauffeur
à temps plein subit la concurrence du chauffeur de passage. Et par
chauffeur de passage il faut entendre celui qui bénéficie d'un
revenu additionnel et s'improvise chauffeur de taxi pendant les temps morts de
son occupation régulière et pendant les fins de semaines.
Là, messieurs, j'aimerais ouvrir une parenthèse sur la formation
d'un syndicat.
Je retire ces paroles et j'ouvre une parenthèse pour demander au
ministère des Transports de reconsidérer une question qui a
déjà été posée afin de geler de
reconnaître le droit des
"pocket number" aux personnes qui l'ont déjà mais
de geler les autres, de façon qu'on agisse, par exemple, comme au bord
de l'eau quand on gèle l'entrée d'un ouvrier. Et là, seul
le syndicat pourrait émettre de nouveaux "pocket number", si c'est
nécessaire.
Je demande au ministère des Transports de geler les "pocket
number", que nos droits soient reconnus enfin, que cette chose cesse.
Je continue: Ceci donne toute latitude au propriétaire de
véhicule de renvoyer, pour des raisons futiles, un chauffeur, puisqu'il
y en a dix autres à sa disposition. C'est ce qui arrive. C'est là
qu'on voit le racket des fameuses veilles de Noël pour un chauffeur au
service d'un propriétaire pendant presque onze mois. Le
propriétaire, pour faire des revenus additionnels, exige de son
employé régulier qu'il lui donne un montant additionnel qui est
ajouté, en comparaison des prix demandés durant l'année.
Si Noël tombe un lundi et si, durant l'année, le lundi, un
chauffeur paye, pour travailler le soir, $12.50 quand il loue la voiture,
à la veille de Noël, on exige peut-être de lui $18. En
certains endroits, on a exigé jusqu'à $21. Et on dit: Si tu n'es
pas content, va-t-en chez vous. Tu reviendras, car je sais que tu vas crever.
Cela a été dit par des entreprises, des hommes qui opèrent
des flottes de taxis.
De plus, les propriétaires à qui le chauffeur n'a pas
réglé je change un peu de propos le prix de
location d'un ou de plusieurs jours, pour des raisons qui peuvent rester
personnelles, empêchent celui-ci de travailler pour un autre
propriétaire à l'intérieur de l'association à
laquelle il appartient.
Je demande qu'on gèle "pocket number" afin que les individus qui
ont un emploi régulier n'aient pas à s'infiltrer pour saboter une
reconnaissance de travail qui a été mise au service d'un
chauffeur par son employeur.
Messieurs, l'association à laquelle le propriétaire
adhère se fait donc complice de ce propriétaire en refusant au
chauffeur débiteur le droit de travailler à l'intérieur de
son association. Je pense qu'il y a déjà un chauffeur de taxi ou
peut-être deux qui ont tenté d'expliquer comment une association,
par l'entremise du propriétaire, c'est-à-dire de celui qui
détient le permis, empêche un détenteur de "pocket number"
de travailler pour un autre propriétaire qui est affilié à
cette association-là. Je pense qu'il y a eu des preuves
d'apportées, ici, hier ou avant-hier.
Je passe maintenant à l'article b), deuxième paragraphe,
auquel j'ai donné le titre "Travail sous tension". Le chauffeur de taxi
est soumis à une tension qui pourrait presque se qualifier d'inhumaine.
Que l'on songe seulement qu'il y a, à l'intérieur d'une
association, un appel environ toutes les quatre minutes, et cela d'un coin
à l'autre de la ville. Les chauffeurs sont aux aguets et, pour le
même appel, quatre ou cinq chauffeurs se battent pour obtenir le client,
quand l'un ne le vole pas à l'autre, tout simplement. C'est de là
que vient l'impossibilité de réunir les chauffeurs de taxi. Ils
ont tenté, antérieurement, de dire aux autorités qu'ils
étaient une force, qu'ils étaient là pour faire des
recommandations, qu'ils avaient besoin de ceci ou de cela. On avait
déjà prévu que ces gens, moralement, se haïssent et
se détruisent entre eux.
Les heures pendant lesquelles un chauffeur doit ainsi se battre pour
gagner son maigre salaire sont longues. Ces horaires, imposés par
l'obligation de pourvoir à ses besoins, agissent inévitablement
sur le système nerveux du chauffeur et ralentissent ses réflexes
au volant, ce qui est souvent la cause d'accidents. Avec toute cette chicane
entre chauffeurs de taxi pour un appel, les gars se haïssent. Le
système nerveux se met en ébullition. Cela crée une
opposition entre eux, qui les empêche, par le fait même de penser
à leurs problèmes qui sont réellement le noeud de
l'industrie.
Ajoutez à ça que le chauffeur de taxi, on l'appelle
à toutes les quatre minutes. Le gars conduit avec la main gauche et
tient dans sa main droite le micro pour être capable de répondre
le premier. Des fois ils sont quatre ou cinq à tenter d'obtenir le
fameux appel.
A ce moment leur esprit est concentré. C'est un chauffeur qui a
l'appel ou non, et c'est à ce moment qu'il y a une possibilité
d'accident.
Je m'en vais au troisième paragraphe, auquel j'ai donné le
titre de protection sociale. Des associations qui existent depuis 50 ans
tentent de démontrer qu'ils rendent des services à leurs membres.
Et on va tenter peut-être de démontrer sous d'autres formes qu'il
y a des services possibles, mais il y a un manque d'organisation efficace.
Sous le régime actuel aucune protection de quelque nature que ce
soit n'est accordée aux chauffeurs de taxi; on peut se
référer à ce que je viens de dire. Je me pose la question,
ce qui m'a porté à regarder le règlement no 6: Qu'est-ce
que les associations, par l'entremise de leurs membres qui sont
propriétaires et détenteurs de permis, ont fait sur le plan de
sécurité sociale pour moi le gars qui est assis en arrière
du volant et dont les heures varient entre 12 et 18? Et je me suis
aperçu par le règlement no 6 qu'il y a là une
possibilité, si les propriétaires s'organisaient, de
détruire ceux qui les exploitent. Ils pourraient mettre des profits
additionnels dans leurs poches et me donner à moi la protection
sociale.
Je m'explique. Le véhicule est-il en panne? Le chauffeur doit se
rendre au garage et attendre plusieurs heures avant que la panne soit
réparée. Il n'est pas rémunéré pour ces
heures.
Si, par exemple, la transmission tombe dans la rue cela n'arrive
pas tellement souvent; j'explique une chose qui peut arriver une fois tous les
six mois et j'expliquerai tout à l'heure des choses qui arrivent
à peu près à tous les deux jours le gars appelle au
garage et dit:
Viens chercher l'automobile avec la dépanneuse. Il a
commencé à 5 heures du matin, il est midi, il a fait $14 et il
doit faire le plein, ce qui peut varier entre $2, $2.50. A ce moment-là
de la journée il ne faut pas dire que tous les patrons sont des
écoeurants, mais il y en a qui exigent le montant total de la location,
par ce fameux système de l'association qui protège le
propriétaire, donc qui exploite la liberté et c'est là que
tout ça entre en ligne de compte le gars a travaillé de 5
heures du matin à midi, il s'en va chez lui dans l'après-midi
avec $2.50 et il a travaillé six heures c'est fort
intéressant parce que la transmission est tombée dans la
rue.
Ce sont les sécurités sociales qu'on nous donne. S'il
s'agit d'un trouble majeur et que le véhicule est hors de service pour
plusieurs jours, il est alors en chômage pendant cette période et
aucun revenu ne lui est assuré. Le chauffeur a-t-il une mauvaise grippe
ou doit-il être hospitalisé? Rien ne lui assure un revenu, aussi
modeste soit-il, pendant sa période d'inactivité forcée.
Imaginez un gars qui a huit enfants, qui reste à Saint-Henri. A-t-il
l'air intelligent de ne pouvoir nourrir sa famille? Une chance que le
gouvernement a pensé à former le bien-être social.
UNE VOIX: II ne paie pas d'assurance-chômage?
M. LECOMPTE: Tout dépend de l'endroit où il travaille. Les
jours fériés: veille de la fête de Noël, Noël, la
Pentecôte, l'Epiphanie, la fête des anciens combattants n'existent
pas pour le chauffeur de taxi. Tous les travailleurs du Québec ont droit
à des congés payés avec des négociations syndicales
sauf le chauffeur de taxi qui, lui, n'a pas droit à toutes ces
choses-là. Aucune période de vacances n'est prévue pour
lui. Il est certain qu'un chauffeur peut s'absenter de son travail pendant une
semaine ou plus mais où prendra-t-il l'argent pour vivre pendant cette
période de repos?
Sûrement pas dans ses économies, il n'en a pas puisqu'il
n'arrive même pas à gagner un salaire suffisant pour pourvoir
à ses besoins quotidiens. Aucun propriétaire ne paye à son
chauffeur le 4 p.c. qui sont versés annuellement à tous les
travailleurs du Québec. A ce stade-ci, je fais des recommandations:
l'adoption du règlement no 6 par l'Assemblée nationale permettra
aux chauffeurs de réclamer un traitement décent. Cependant, il
faut qu'il y ait, à l'intérieur de cette réglementation la
garantie de reconnaître un seul syndicat à l'intérieur
d'une association unique. Je souhaite donc que cette recommandation
reçoive l'accord du gouvernement et ainsi mette fin aux conditions
inhumaines dans lesquelles travaillent les chauffeurs de taxi
d'aujourd'hui.
LE PRESIDENT (M. Séguin): M. Lecompte, il n'y a pas eu entente
générale mais depuis le début il y a eu des questions.
Vous avez présenté votre mémoire, il est
déjà enregistré, les membres de la commission l'ont
entendu avec beaucoup d'intérêt, j'en suis sûr. Maintenant
est-ce que vous acceptez des questions? Vous êtes libre d'accepter ou de
refuser les questions des membres de la commission.
Je laisse une petite porte ouverte, M. Lecompte, à ce moment-ci
afin de ne pas abuser du temps, au cas où peut-être de vos
collègues...
M. LECOMPTE: M. le Président, les chauffeurs de taxi qui vont me
suivre donneront sûrement des réponses. Si vous voulez vous baser
sur ce dossier, ces gens pourront répondre, si cela peut aider la
commission à accepter le règlement no 6.
LE PRESIDENT (M. Séguin): II semble y avoir entente entre
l'interlocuteur et le président de la commission. Je dois maintenant
demander aux membres de la commission s'ils acceptent qu'on entende quelques
chauffeurs. Une fois que nous aurons entendu les chauffeurs, il y en a un qui
sera mis au blanc pour répondre aux questions. Je ne voudrais pas, par
exemple, recommencer une parade pour tous les mémoires.
M. LECOMPTE: Au sujet des chauffeurs de taxi de Montréal, il y en
a qui nous ont dit qu'ils étaient allés à
l'université, je vais démentir la chose. Ce sont des
diplômés de la première année A à la
sixième C.
Il faut comprendre mes propres termes, mes propres paroles, et ce que
j'ai tenté de dire ici aujourd'hui.
M. PINARD: Oui, d'accord.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Je vous remercie. Est-ce que j'ai le
consentement de la commission?
DES VOIX: Oui.
LE PRESIDENT (M. Séguin): M. Blondin.
M. BLONDIN: M. le Président, puis-je vous demander la permission
quitte, s'il reste du temps après, à entendre d'autres
chauffeurs que M. Gilles Piton, gérant de flotte de la compagnie
Diamond Taxi, soit entendu immédiatement? Je voudrais m'excuser de ne
pas l'avoir fait avant mais je voudrais vous remercier, au nom des chauffeurs,
de ce que vous avez proposé au commencement. Ils l'acceptent et vous en
remercient, moi de même.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Vous me placez joliment dans
l'embarras, M. Blondin, vous le comprendrez. Tout à l'heure, ce
n'était pas acceptable, je l'ai annoncé à
l'assemblée. Vous me revenez maintenant et vous me dites que c'est
acceptable. S'il faut que j'allume ma
pipe, allez-vous me dire: Non, ce n'est pas acceptable. Je suis encore
dans le pétrin.
M. BLONDIN: M. le Président, je vous ferai remarquer que c'est le
propre des hommes intelligents de changer d'idée. On voit les
politiciens faire cela couramment. Merci, M. le Président, vous m'avez
donné une occasion inespérée.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Dans une situation comme celle dont
vous parlez, j'ai toujours laissé cette prérogative à mon
épouse et j'ai toujours essayé de maintenir mes
décisions.
M. Lecompte, nous vous remercions de votre intervention. Je sais que
depuis deux jours, comme tant d'autres, vous avez attendu avec
énormément de patience. Je vous ai vu à plusieurs
reprises. Nous vous remercions.
M. LECOMPTE: Merci et longue vie au règlement no 6.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Nous avions, avant le lunch,
déterminé que les travaux se termineraient, pour cette semaine,
à six heures ce soir. Depuis ce temps-là, une décision
nouvelle a été prise et à la suite du consentement
unanime, pour autant que je sache, nous siégerons jusqu'à minuit.
Je proposerais à ce moment-ci, puisque nous avons entendu M. Lecompte,
ses observations, son mémoire, de retourner à mon ordre du jour.
Durant la soirée, nous aurons l'occasion d'entendre soit M. Blondin ou
d'autres parmi les chauffeurs qui l'accompagnent.
Je ne vous promets pas que ce sera à huit heures et quart ou
à neuf heures et quart, mais avec la coopération de tous et
chacun ici, nous pourrons certainement les entendre.
M. BLONDIN: M. le Président, c'est ma dernière
intervention. Ce sont les chauffeurs qui me l'ont demandée, je n'ai rien
proposé. Si la commission veut les entendre, ils veulent être
entendus et ils ne pourront pas revenir; sinon, là, je leur demande leur
avis, s'ils n'acceptent votre proposition, vous êtes le président
ici, s'ils ne respectent pas votre autorité en tant que président
de la commission parlementaire, qu'ils quittent l'enceinte pour
préjudice à l'endroit des chauffeurs de taxi.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Non, vous vous méprenez sur mes
commentaires.
M. BLONDIN: Je me fais le porte-parole des gens qui m'ont demandé
de faire cette intervention.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Je comprends, mais il y a tout de
même un certain ordre à suivre, il y a une certaine
sérénité qu'il faut observer. Je déplorerais qu'une
ou vingt-cinq personnes quittent la salle en claquant les portes ou en accusant
la commission d'être préjudiciable à ces gens. Il n'en est
pas question. Je vous ai dit tout à l'heure que nous siégerons
jusqu'à minuit. Je vous ai dit que nous vous entendrions, mais vous
comprendrez que vous ne pouvez pas dicter la procédure à chaque
fois qu'une idée nouvelle passe devant la lampe d'un individu et dire au
président: Changez cela, nous avons changé d'idée et nous
voulons passer tout de suite, l'autre passera après! Non, on va suivre
l'ordre établi, si vous voulez bien. Si vous ne voulez pas attendre, mon
Dieu! c'est regrettable, parce que non seulement la commission et ses membres
seront privés de la lumière avec laquelle vous vouliez nous
éclairer ...
UNE VOIX: La lumière de nos fanaux.
LE PRESIDENT (M. Séguin): ... mais en plus, vous manqueriez une
chance unique de faire valoir ou de faire reconnaître vos idées.
Vous serez entendus certainement ce soir, je vous en donne l'assurance.
M. BLONDIN: M. le Président, je pense qu'il y a aussi une chose
qu'on doit comprendre. Pour les chauffeurs je vais dire ceci. Depuis trois
jours nous avons vu des gens venir s'attabler à deux ou trois en avant
et ces gens-là sont représentés par des procureurs
compétents en la matière, je l'admets bien. Ils sont venus en
avant je ne vous demande pas de l'admettre nous faire de belles
phrases. C'est très impressionnant pour ceux qui n'en ont jamais
entendu, je m'excuse j'en ai déjà entendu. Moi, je n'ai pas fini
en sixième année A ni B. A un moment donné la table
était occupée par des gens qui ont ralenti le débat. Je ne
suis pas un spécialiste en la matière, mais à mon humble
avis, et à celui de beaucoup de gens ici, il y en a qui se sont
amusés à s'écouter parler. Je ne veux pas faire la
même chose. Je remets la chose entre les mains des chauffeurs parce que
cela va devenir un débat et je vais être situé au milieu.
On va dire que j'en interprète d'autres. C'est ce que j'ai
proposé aux chauffeurs, et maintenant ils prendront leurs
décisions, ce n'est pas la mienne. En ce qui me concerne, j'ai dit ce
que j'avais à dire devant cette commission.
LE PRESIDENT (M. Séguin): M. Blondin, vous allez comprendre qu'il
est facile de s'entendre avec moi et les membres de la commission. S'il y a une
leçon que vous devez tirer, c'est la suivante et je ne fais pas de
morale. Probablement, dès mardi, on avait préjugé de ce
que c'était qu'une commission parlementaire sur le taxi ou sur d'autres
problèmes. On a pensé qu'il s'agissait de faire venir des gens en
foule, contester, protester devant le parlement. On dirait ce qu'on pense et on
s'en retournerait chacun heureux mais avec absolument aucun résultat
tangible ou valable. Je ne moralise pas
et je ne fais pas de discours réellement. Peu importent les
opinions que chacun a individuellement ou collectivement. Diverses observations
ont été faites par les différents interlocuteurs devant la
commission. Mais vous avez dû sans doute vous rendre compte que vous
faisiez face à une commission de parlementaires très
sérieux, désireux avant tout de venir en aide à
l'industrie. C'est pour cette raison qu'on insiste pour vous entendre, qu'on
veut vous entendre. Mais n'accusez donc pas, d'aucune façon, ceux qui
sont ici et qui veulent, heure après heure, jours après jour et
à l'avenir vous aider. C'est là le message que je veux passer.
S'il y a eu une leçon de démocratie valable, c'est
peut-être durant les deux derniers jours que vous l'avez eue, non pas que
vous en aviez besoin, mais au moins cela a peut-être changé
l'opinion que beaucoup pouvaient avoir du gouvernement du Québec, du
législateur ou du parlementaire. M. Blondin, avez-vous trois individus
avec vous-même si vous voulez vous inclure parmi les trois
qui pourraient prendre place et qu'on entendrait immédiatement?
M. BLONDIN: Oui, M. le Président. Mais vous avez dit que des gens
s'étaient présentés ici en manifestant. Je le regrette.
Ces gens-là, je n'en suis pas responsable, et je veux bien le
préciser. Cela nous fait encore la réputation de sauvages qu'on
avait dans le passé. On a vu ce qui s'est passé devant le
parlement mardi matin. Les gens se sont rendus ici avec un esprit destructif
alors que le gouvernement, pour la première fois, nous donnait
l'occasion de nous exprimer librement, avoir un esprit constructif. Ensuite, on
vient devant la commission et on vous dit qu'on ne veut rien détruire,
qu'on veut construire mais on arrive ici avec des marteaux de
démolition. Je ne crois pas à ce genre de gens de taxi, qu'ils
soient de n'importe quel niveau. C'est une mise au point que je voulais
faire.
Je peux amener trois personnes ici en avant, trois chauffeurs de
taxi.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Trois. Si la commission accepte cet
arrangement, nous allons en entendre trois. Nous entendrons les autres de votre
groupe et disons que nous les passerons entre-temps. Peut-être que nous
les entendrons ce soir. Alors, c'est 50 p.c. de vin, 50 p.c. d'eau, on va
s'arranger.
M. BLONDIN: Cela fait un "drink" buvable. Merci.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Je vous demanderais de vous identifier
individuellement au fur et à mesure que vous prendrez la parole. Je vois
que vous n'avez pas de mémoire, alors vous allez parler...
UNE VOIX: Facilement.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Avec l'élo- quence qu'on
reconnaît au personnel du taxi, nous vous demandons d'être aussi
concis et aussi clair que possible dans vos énoncés.
M. Gilles Piton
M. PITON: Bonjour, messieurs. Mon nom est Gilles Piton. J'ai dix ans
d'expérience dans le taxi et je suis maintenant gérant d'une
flotte de taxis pour la compagnie Diamond à Montréal. Nous avons
20 permis de taxi. A ma droite, vous avez un de mes chauffeurs, M. Roger
Beauchamp, 20 ans d'expérience dans le taxi.
A ma gauche, vous avez un chauffeur de Métropole qui doit avoir
trois ans d'expérience dans le taxi, tous de Montréal.
Je vais essayer de vous expliquer, en quelques mots, ce qu'est un
chauffeur de taxi vis-à-vis de son propriétaire, la flotte
Diamond en particulier, et mes responsabilités.
Mes responsabilités sont, premièrement, devoir à ce
que mes vingt voitures soient sur le chemin. Chacune a deux hommes autant que
possible pour faire plus d'argent, c'est normal. Deuxièmement, ça
consiste à faire réparer les voitures pour qu'elles soient en
bonne condition. Le temps manque quelquefois, mais passons.
Troisièmement, ce qui est primordial, c'est de voir à la bonne
entente entre les chauffeurs, les patrons et la compagnie Diamond.
Au début, je dirais que, pour être chauffeur de taxi,
ça prend un "pocket number". Il y en a un en face de moi actuellement
qui a déjà vu ça, il y a bien des années, mais la
formule n'a pas changé. Il doit être enregistré,
premièrement, par la police de Montréal au nom du
propriétaire pour qui il travaille, ensuite, pour la compagnie
d'assurance, l'association dans mon cas, c'est la compagnie Diamond
doit être enregistrée. Enfin, il doit avoir un permis de
conduire, c'est logique.
En partant de là, le chauffeur entre chez moi. Il me
présente ces trois articles et me dit: Je fais du taxi. Je ne lui fais
pas suivre un cours de conduite, il a son permis. Nous lui donnons un "booking"
et nous lui disons: Va te faire "booker" à la police; nous allons te
fournir une voiture. Ce type-là, c'est la première fois de ma vie
que je le vois. Il revient le lendemain. Nous lui donnons un numéro,
nous enregistrons son nom dans un livre, soit qu'il travaille de jour ou de
nuit. Le type part à quatre heures et demie, si c'est possible, va sur
le chemin gagner son argent, à la sueur de son front, il faut le
dire.
Que se produit-il? M. Piton est parti, ses heures de travail se
terminent à six heures normalement. Il entre chez lui à sept
heures et demie parce qu'il a neuf milles et demi à faire. Ce sont les
petits inconvénients de la vie, la circulation. Que se produit-il? Ma
femme me dit: Untel a appelé, appelle au garage, voiture cassée.
Je discute avec le chauffeur; le mécanicien commence à sept
heures et il y en a trois avant moi. Le chauffeur part à neuf heures
et
demie, le matin, parce que je fais des quarts coupés; deux fois
par jour, changement de quart. J'entre le matin au garage. Le chauffeur est en
maudit. Il me dit: J'ai perdu trois heures et demie, c'est ceci, c'est cela;
comment vas-tu me demander pour la voiture? C'est toujours $12.50 en semaine,
$14.50 les fins de semaine. Je n'ai rien compris là-dedans, mais c'est
comme cela que ça se produit. Là, nous discutons. Nous louons la
voiture en général $1 l'heure. Le gars a perdu quatre ou cinq
heures. Il peut en avoir perdu 15 ou 20; cela dépend du moment où
il les a perdues, mais je ne peux pas lui enlever plus que $4.
On discute, mais, en fin de compte, une journée ou deux passent
et ça va. C'est le service que nous donnons aux chauffeurs.
Maintenant, vis-à-vis de la compagnie Diamond, on l'a
expliqué mardi. Hier, je suis retourné à Montréal,
mais, ce matin, on m'a demandé de revenir ici. Après ma nuit de
travail, j'ai fait 160 milles et je suis venu ici. Mardi, l'avocat de la
compagnie Diamond a dit: Les services que nous donnons, le système de
radio est parfait; il n'y en a pas de meilleur. Cette radio on a dit qu'elle
coûtait $810, c'est vrai. Ce que l'on ne vous a pas dit, cependant, c'est
que, lorsqu'on a mis ce système en fonction, on a forcé les
propriétaires à prendre cette radio. On n'avait pas le choix
parce qu'on avait mis une date limite. Si je me rappelle bien, je crois que
c'est au mois d'octobre que les vieilles radios n'étaient plus
acceptées.
Alors, le propriétaire qui a vingt voitures, si on sait
multiplier par 20, $810, ça doit faire, avec la taxe, pas loin de
$20,000. On n'avait pas le choix, parce que si on ne la prenait pas, on ne
pouvait pas travailler pour Diamond.
On faisait une espèce de petit racket pour forcer la vente. Sur
dix appels reçus, huit étaient donnés à ceux qui
avaient les nouvelles radios et deux à ceux qui possédaient
encore les vieilles.
Alors le matin, quand le chauffeur arrivait au garage, il disait: Si je
n'ai pas la nouvelle radio demain, je ne travaille plus. Je m'en vais.
Là, tu discutes avec le patron. Mais pour le patron, $20,000, cela fait
mal. Il n'aime pas cela. Gilles, il faut que tu gagnes ton salaire. C'est
normal. Mais moi, j'ai un principe dans la vie. J'ai fait du taxi pendant dix
ans. Il y en a beaucoup, dans la salle, qui me connaissent. Si cela avait
été à Montréal, ce serait encore pire. Je n'ai
jamais travaillé avec une voiture toute croche. Je n'aime pas que mes
chauffeurs travaillent avec une voiture toute croche. Je suis un gérant
dispendieux, je le sais. Mais j'ai l'appui de mon patron. Cela aide. Mais la
compagnie Diamond ne m'aime pas. Pourquoi? Parce que j'ai toujours dit que la
vie, c'était une promenade. Savez-vous cela, vous autres? Une promenade.
On se couche le soir, on ne sait pas si on se lèvera le lendemain matin.
Moi, la mort, je n'ai pas peur de cela. Je risque ma position, aujourd'hui, pas
à cause de mes patrons, non, mais si le règlement no 6 n'est pas
adopté, on forcera mon patron à dire: Ton gérant, mets-le
dehors ou sacre ton camp. L'homme est malade. Si je ne suis pas là, il
vend. C'est ce qu'on va faire.
Mais moi, je suis ici, messieurs, pour vous expliquer. Je vous ai
expliqué ce qu'était le chauffeur, ce qu'était le service
de radio. Maintenant, je vais vous dire à quoi sert la petite carte
rose. Cela fait 16 mois que j'administre une flotte de taxis. La compagnie
Diamond, qui a dit qu'elle donnait des services de chauffeurs, savez-vous
combien de chauffeurs on m'a envoyé dans 16 mois? Deux. Pourquoi deux?
Le premier est venu travailler, il est parti quatre jours avec la voiture. Je
l'ai envoyé remorquer à Drummondville. Cela m'a
coûté $65. La voiture n'est pas cassée. Le deuxième
a travaillé un avant-midi et je ne l'ai plus jamais revu de ma vie.
Mais il y a des bons chauffeurs de taxi. Il y en a aussi des mauvais.
Les bons paient pour les méchants. C'est normal. Tu appelles le
gérant des chauffeurs et du dit : J'ai quatre voitures au mur, le jour,
envoie-moi des chauffeurs de jour. Il dit: Je n'en ai pas. C'est normal qu'il
n'en ait pas. M. Latreille, directeur du Diamond, a pas mal de voitures. M.
Kanter, un autre directeur, a pas mal de voitures. Alors où vont les
chauffeurs? De ce côté-là. S'il en reste, vous les prendrez
!
Alors, juillet et août, l'affaire est assez tranquille. On n'en a
pas. C'est normal. Si on crie trop fort, on nous envoie une voiture mais elle
est toute croche. Personne ne veut l'avoir. Gilles, arrange-toi avec cela, toi!
Comprenez-vous l'affaire? Tout va bien, il n'y a pas de problème. Alors,
en fin de compte, c'est un beau service, cela. Et là, quand on a des
bons chauffeurs... Hier, vous avez entendu un chauffeur. J'ai attendu son nom
pas mal longtemps. C'est M. Dickey. Je regrette, je n'étais pas ici.
Mais j'ai une idée de ce qu'il peut vous avoir dit, parce que cela fait
longtemps que je le connais. Il a cela à coeur. Il va mourir dans le
taxi. Il y en a peut-être, ici, qui ne l'aiment pas, mais quand ils
auront fait ce que M. Dickey a fait pour le taxi, ils seront morts. Il est
encore debout, lui, et il sera debout longtemps, je vous le promets.
Je vais vous dire une autre affaire. Moi, pour lui donner à
manger, M. Bob Dickey, je lui ai donné une voiture qui valait $6,000,
sur le chemin, pas d'assurance, au risque de perdre mon emploi. Tu va
travailler, Dickey. Mais là, les requins de la compagnie Diamond ont su
cela. Ils m'ont appelé et m'ont dit: M. Dickey a travaillé pour
vous. Cela ne marche pas. J'ai arrangé cela.
Qu'est-ce qui se produit, dans cette industrie du taxi? Deux poids, deux
mesures. C'est bon pour un, pas bon pour l'autre. Il n'y a pas très
longtemps, un de mes chauffeurs a tué une personne, dans la rue. C'est
normal, le chauffeur travaille 72 heures par semaine. Vous conduisez dans la
ville de Montréal, messieurs, je vous ai
déjà promenés. Pour gagner sa vie, un chauffeur,
avant minuit, roule à 45 et 55 milles à l'heure. C'est sa vitesse
normale, s'il ne veut pas crever de faim, s'il veut avoir du lait le lendemain
matin. Après minuit, le gars s'en va à 75 milles à
l'heure. Il est chanceux, les policiers ne sont pas là. Il n'y a pas de
circulation. Le gars est chanceux. Mais les billets, nous les payons. Nous
avons un budget pour cela. C'est normal. Un gars qui est douze heures par jour
sur la route, il commet des infractions. On en ferait une à la minute.
Nous sommes chanceux, ils nous tolèrent.
Mais ce qui se produit, pour résumer, c'est que les chauffeurs
travaillent 72 heures. Il y a un de mes chauffeurs qui a tué une
demoiselle, sur la rue de la Montagne. Cela fait quatre ans qu'il travaille
pour moi. Je reçois un téléphone de M. Murphey. On me dit:
Le chauffeur est barré. C'est normal. C'est un risque pour les
assurances. Mais là, on ne prend pas la version. L'enquête du
coroner, on ne l'attend pas.
Au lieu de suspendre indéfiniment jusqu'à l'enquête
du coroner, le type paie bien. Pas d'affaire. Barré. Là, j'essaie
de discuter avec M. Murphy. Rien à faire. Je vais au bureau. Il ne veut
même pas me parler. Là, je trouve une auto au gars; il faut qu'il
mange. Je l'envoie au SOS. Ce n'est pas mes oignons, mais je l'envoie là
pareil.
Un incident semblable s'est produit, le type exonéré de
tout blâme. Il travaille pour SOS, mais est barré à vie au
Diamond. Il y a une autre affaire qui s'est passée au Diamond, sur la
Côte de Liesse. J'ai essayé d'expliquer ça à M.
Murphy et j'avais les documents. Vous savez que la compagnie Diamond a des
taxis à ville Saint-Laurent. Ils portent un dôme jaume. Ceux de
Montréal n'ont pas le droit de prendre des passagers là. C'est
normal que les gars de Saint-Laurent puissent les prendre les premiers.
Qu'est-ce qui s'est produit? Le taxi de Montréal fait descendre son
client, mais, à un gros hôtel comme le Holiday Inn, il sort du
monde à toutes les minutes. Le client sort, va pour monter dans la
voiture, mais, là, arrive un taxi de ville Saint-Laurent. La chicane
prend. C'est normal dans le milieu, nous voyons ça tous les jours.
Le client est dans la voiture. Le gars dit : Tu ne prendras pas mon
client, etc. Qu'est-ce qu'il fait, le chauffeur de Montréal? Il dit au
gars: Si tu ne t'enlèves pas de là, je te passe sur le corps. Il
y a des chauffeurs de taxi qui ont pas mal de nerfs; le gars reste là.
L'autre aussi en a des nerfs, il rentre dedans et l'envoie à
l'hôpital pour deux mois et demi.
C'est joli, ça. Le gars fait une réclamation à la
compagnie Bélair. Savez-vous ce que dit la lettre? Nous avons
envoyé une lettre au propriétaire de la voiture, lui disant que,
dans son cas, nous ne pouvions pas le défendre, que c'était rendu
au criminel et au civil en même temps, une action de $25,000 pour frais
médicaux, perte de temps, etc. Le gars s'est pris un avocat.
Mais le gars qui a fait ça même si c'est la
négligence criminelle et que ça devrait être dix ans au
pénitencier, fait encore du taxi à la compagnie Diamond. Il n'est
pas barré. Pourquoi? Expliquez-moi ça. Quand vous aurez
trouvé la raison, vous me le direz. Moi, je ne l'ai pas
trouvée.
C'est la gang que vous avez vue mardi ici, avec leurs grands gars qui
vous ont dit qu'ils ne faisaient pas d'argent. Moi, je vais vous dire une
affaire: Je gagne $10,000 par année. Je mets de l'argent à la
banque. La compagnie Diamond vient nous bourrer ici. Ils investissent des
millions et disent qu'ils font 2 p.c. par année pour nos beaux yeux.
C'est bien beau.
M. Latreille, en premier, s'est mis riche. Où? J'aimerais bien
ça l'avoir devant moi pour que nous fassions un petit party. Nous en
dirions de belles affaires. Mais il se cache.
D'autres petits détails, en passant, que nous pourrions vous
citer. La petite carte rose dont on a parlé tout à l'heure,
agence de collection. Si un chauffeur entre chez moi et si sa carte n'est pas
signée d'un autre propriétaire, je ne veux pas l'engager parce
que sa carte n'est pas signée.
Si c'est écrit, disons, M. Kanter, je vais appeler à la
compagnie Diamond et leur demander si je peux engager le monsieur en question.
On me dit: Tu veux l'engager, il faut que tu lui demandes $50 ou $75. Cela
dépend du cas, mais, normalement, ça ne dépasse pas $75.
C'est M. Blondin qui a gagné ce point, quand on a actionné
Diamond pour la petite carte rose. Nous ne l'avons pas fait abolir
complètement, mais nous avons fait baisser les taux.
Avant, il fallait payer la dette au complet. Nous avons gagné une
couple de points. M. Blondin a travaillé pour moi aussi. Il est dans la
salle aujourd'hui parce que la compagnie Diamond a pris une injonction, puis
bonjour, M. Blondin. Il payait sa voiture très bien. Un chauffeur
très vite, peut-être un peu dur sur une voiture, mais en
général, sur la paie, il était bon. Et ça dans le
taxi, je ne sais pas si vous le savez, mais, pour un gérant de flotte,
c'est très important quelqu'un qui entre le matin. Si vous n'êtes
pas là, qu'il vous manque sept ou huit enveloppes, ce n'est pas
drôle. Les chauffeurs savent l'heure à laquelle vous arrivez. Un
chauffeur peut se dire: Gilles va arriver à trois heures et demie; je
vais arriver à deux heures et demie, je n'ai pas d'argent pour payer ma
voiture; je suis allé à Blue Bonnet et j'ai perdu le "waybill".
Je donnerai les explications demain après-midi; il va être plus de
bonne humeur, il va avoir la tête reposée. Alors, je
vérifie les comptes, il m'en manque sept. Le lendemain
après-midi, le gars commence à travailler. Tu lui dis: Où
est ton enveloppe? Il répond: J'ai été aux courses hier,
Gilles, cela a mal été. Tu acceptes ça, mais tu lui dis:
Ce soir, essaye de m'arranger ça. Je vais te donner un acompte de
$5.
Nous essayons d'arranger ça, parce que j'ai un bon groupe de
chauffeurs. J'ai connu le
milieu un peu. Je ne suis pas un ange, j'ai joué aux courses
aussi. Mais un autre patron dirait: Tu n'as pas d'argent, tu ne travailles pas.
C'est comme ça que ça marche. En général, nous ne
pouvons pas blâmer certains patrons, parce que certains chauffeurs ont
abusé. J'ai vu mon patron, avant que j'entre là, perdre $12,000
dans la même année; les chauffeurs ne payaient pas. Mais, si
l'homme est malade, il n'est pas capable de le faire payer.
La seule chose qu'il peut faire, c'est de le renvoyer. Quand vous avez
20 voitures, ça coûte assez cher sur le chemin.
Qu'est-ce qui se produit? On prend des risques, on laisse monter une
petite facture en espérant que le chauffeur va nous aider et va nous
payer. Alors, des fois ça va trop haut et quand ça va trop haut,
on est obligé de l'envoyer.
Cela termine à peu près ce que j'avais à dire. Je
voudrais bien laisser une chance à mes chauffeurs d'essayer de vous
convaincre que le règlement no 6, dans l'ensemble... Je dirai que je
l'ai lu parce que j'ai eu beaucoup de temps. Je ne suis peut-être pas
intelligent mais j'ai pu comprendre bien des choses là-dedans.
Premièrement, sécurité du chauffeur; deuxièmement,
chose très très importante, il y a bien des chauffeurs qui
n'aiment pas ça la liberté. On n'entend parler que de
ça dans la vie du taxi, la liberté; mais on ne peut pas tout
avoir. On ôte un peu de liberté mais on donne un peu de
sécurité sociale. C'est un peu plus rassurant parce que le gars
qui travaille onze mois par année et qui arrive au mois de juillet,
août, il fait chaud, 95 degrés, madame qui est dans la maison
toute l'année à attendre son mari lui dit: J'aimerais bien
ça, aller faire un petit tour à la campagne. Où est-ce que
je vais prendre l'argent pour y aller? Je travaille, pas de vacances, rien.
Dans le rapport Bossé, je crois qu'on pourrait avoir ça.
Je dirais que le rapport Bossé, tel que je l'ai lu, devrait être
bon au moins à 65 p.c. Pour 20 p.c, ce sont des peccadilles qui n'ont
pas d'affaire là et l'autre 15 p.c. amendé, je serais d'accord
sur cela. M. Bossé, après tout, doit avoir suivi des cours, et
toutes les informations qu'il a prises depuis deux ans, il ne les a pas prises
dans les champs. Il y a des chauffeurs ici qui discutent. J'ai entendu des
chauffeurs qui font du taxi depui deux ans; le gars qui viendra me dire qu'il
n'arrive pas du côté monétaire, dans le taxi, je vais lui
dire qu'il est un menteur parce que le gars qui n'est pas sans-coeur fait son
argent. Mais le gars, par exemple, qui ne va pas travailler, il crève de
faim. Si on parle de sécurité sociale, je vais dire: Tu as
raison, pas à 100 p.c, mais à 200 p.c. Le chauffeur de nuit qui
commence à 4 h 30 l'après-midi, s'il a de la chance, finit
à 4 h 30 le matin, arrive chez lui à 6 h 30, 7 heures moins le
quart et se couche. Il va normalement se lever vers 2 h 30, 3 heures; quand il
se sera lavé, qu'il aura mangé, il sera temps de retourner
travail- ler. Il a vu sa femme quinze minutes, ses enfants, s'ils finissent
l'école à 3 h 30, il les a vus peut-être cinq minutes.
Le chauffeur de jour, c'est la même chose. Si le gars commence
à 5 heures du matin, à 9 h 30 il faut qu'il se couche s'il veut
se lever à 4 heures le lendemain. Alors, si vous appelez ça une
vie sociale! Moi-même, aujourd'hui, je suis sorti de l'industrie du taxi
comme chauffeur et je n'en ai même pas, de vie sociale. Je travaille sept
jours par semaine et on me dérange la nuit, le jour, tout le temps. Ce
n'est pas une sinécure. Je voudrais que le règlement no 6 ait
longue vie, mais amendé, c'est ça. Je vous remercie.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Nous vous remercions. Le ministre des
Transports.
M. PINARD: M. Gilles Piton, vous vous déclarez bien gérant
actuel, au moment où nous parlons, de Diamond Taxi?
M. PITON: Pardon, j'administre une flotte qui fait partie de la
compagnie Diamond; mon employeur actuellement est Joseph Kaufman qui fait
partie de l'association Diamond. On vous a bien dit que Diamond n'a pas de
permis, si je ne me trompe.
M. PINARD: Vous êtes administrateur de ceux qui ont des
voitures-taxis sous permis appartenant à d'autres personnes qui sont des
administrateurs de la compagnie Diamond?
M. PITON: Non. Je travaille pour une personne qui a vingt permis et qui
fait partie de l'association Diamond.
M. PINARD: L'association de services Diamond?
M. PITON: C'est ça.
M. PINARD: Qu'est-ce que vous avez à dire au sujet des autres
filiales de la compagnie Diamond qui s'appellent Belair Insurance Company,
Gazoline Station Limited, National Transportation Management and Investment
Corporation?
M. PITON: Côté assurances, je dirais que c'est trop cher
à la base. Moi qui suis classé B dans la flotte, je dois payer en
moyenne à peu près $120.25 ce qui comprend assurances et
association par voiture par mois, ce qui équivaut à peu
près à $1,450 par année pour chaque voiture. Si vous
divisez ça, je trouve que c'est pas mal trop dispendieux pour les
services qu'on me donne.
Il y a une chose dont je n'ai pas parlé tout à l'heure
mais M. Blondin vous en a dit un mot. L'avocat a dit les jetons, j'appelle
ça des "charges"; ces "charges" sont mises à la disposition de
tous les clients. C'est un système de crédit comme Chargex. Au
chauffeur de taxi
qui se promène la nuit, la personne embarque et dit:
Amène-moi à Gouin et Lacordaire. Le gars arrive au bout de la
course, le client sort son calepin et fait une "charge" de $6; c'est de
l'argent pour le chauffeur. Quand j'entre le lendemain matin, si le gars m'a
payé son automobile avec ça, pour moi c'est de l'argent. On
m'alloue, à la compagnie Diamond, $50 par voiture par mois pour deux
chauffeurs, ce qui fait un excédent de $1,000. Tout l'excédent de
ça, si j'en ai 1,700 ou 1,800, ce qui est à peu près le
nombre que j'ai, parce que j'ai des chauffeurs qui travaillent au Bell
Telephone, où on paye beaucoup de frais d'administration. I.B.M., on me
demande 15 p.c. J'ai appelé le gérant général de la
compagnie et je lui ai dit ça. Il a dit: Si tu ne veux pas payer
ça envoie tes chauffeurs les changer. Donc j'ai demandé ça
à mes chauffeurs. Le bureau ferme à 4 heures 30 à Diamond;
donc le chauffeur qui arrive à 4 heures 15 ou 4 heures 20 et à
qui tu dis: Veux-tu me rendre un service, Pierre, veux-tu prendre une voiture
et aller au bureau me changer ça, répond: Ecoute, moi j'ai ma
journée à faire, je n'ai pas de temps à perdre,
débrouille-toi avec tes problèmes. Alors ça nous
coûte en moyenne $75 ou $80 par mois, ce qui fait un excédent de
près de $1,000 à $1,200 par mois. Avec tous les frais de la
compagnie, le système de crédit est payant.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de...
M. PINARD : Avez-vous terminé M. Piton? M. PITON: Pour moi c'est
terminé.
M. PINARD : J'ai posé des questions concernant les autres
filiales de Diamond. Vous avez parlé de l'assurance, vous avez
parlé des services, Gasoline Stations Ltd.
M. PITON: L'essence, cela a été ouvert, on donne un
escompte aux chauffeurs mais qu'est-ce qu'il se produit? M. Latreille a des
voitures, mais en partie ce sont ses chauffeurs. On est tous attachés
à un certain garage. Moi je suis attaché au garage Champlain au
coin de Saint-Denis et Saint-Joseph, c'est naturel, c'est là où
je suis actuellement; on me donne un bureau où j'ai seulement à
payer le téléphone. En retour, le garage, c'est normal, me
demande de prendre l'essence à cet endroit, plus les réparations
autant que possible. Alors les chauffeurs doivent faire le plein au garage
Champlain autant que possible. Là aussi on paye l'essence $0.52 le
gallon et les chauffeurs ont une ristourne de 15 p.c. sur leur facture. Dans
mon cas, les propriétaires exigeaient la facture des chauffeurs, mais
moi je lui ai dit: Le chauffeur, c'est lui qui paye l'essence, il garde sa
facture. Cela se produit à bien des endroits. Le chauffeur paye, donne
la facture au patron, et le patron se paye deux voitures neuves avec
ça.
M. PINARD: Est-ce que l'économie dont vous parlez est
sensiblement la même que celle qui serait faite si le chauffeur allait
prendre son essence dans la filiale de Diamond Taxi?
M. PITON : Du côté pourcentage? M. PINARD: Oui.
M. PITON: Cela varie; il va peut-être avoir 1 p.c, mais en
général ça varie.
M. PINARD: Qu'est-ce que vous avez à dire de National
Transportation Management & Investment Corporation? Cela sert à
quoi, cette compagnie filiale pour le compte de Diamond Taxi?
M. PITON: Cela fait exactement onze ans que je suis avec la compagnie
Diamond et c'était la première fois que j'entendais ce nom, ici
à l'Assemblée nationale.
M. PINARD: Pardon?
M. BOSSE: Voulez-vous répéter s'il vous plaît?
M. PINARD: D'accord, merci. Je n'ai pas d'autres questions à vous
poser.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de
Maskinongé. Ensuite ce sera le député d'Abitibi-Ouest
suivi du député de Sainte-Marie.
M. PAUL: M. Piton, pourriez-vous nous dire s'il est à votre
connaissance personnelle que vos chauffeurs sont ou ne sont pas en faveur d'un
double emploi dans le taxi?
M. PITON: Moi quand j'ai pris la "job", j'ai fait acheter vingt voitures
1972, j'ai mis les radio à musique, une chose qu'on n'avait jamais eue
dans la flotte, j'ai mis des "rear defrosters". J'ai essayé de faire une
rotation des chauffeurs de taxi pour qu'il y ait autant que possible deux
chauffeurs réguliers sur chaque voiture. C'est une chose
extrêmement difficile, parce qu'un chauffeur de taxi, comme je l'ai dit
tout à l'heure aime beaucoup sa liberté. Certains chauffeurs
viennent travailler cinq jours par semaine, d'autres sept, d'autres six,
d'autres quatre. Dans mon cas à moi je dis qu'un chauffeur
régulier pour moi c'est cinq jours. Si un jour un chauffeur ne veut pas
travailler, c'est son affaire et je ne le blâme pas. Un métier de
fou, cinq jours c'est assez. Alors le samedi matin, si vous avez 17 chauffeurs
réguliers sur 20 qui sont "off", pour le patron il faut que l'argent
rentre, alors je suis obligé de prendre des "spares". C'est très
difficile pour les chauffeurs de taxi d'opérer sans "spare". Moi, je ne
vois pas ça, à moins d'une grosse coopération des
chauffeurs...
M. PINARD: Me permettez-vous une question additionnelle? On a
parlé assez longuement du "pocket number"; peut-être que certains
membres de la commission parlementaire et certaines autres personnes, moi le
premier, aimeraient être mieux renseigné là-dessus. Il y en
a combien de "pocket numbers" émis par le service des permis de la ville
de Montréal?
M. PITON: Je vais vous l'expliquer. Au dernier sondage que j'ai fait
quand j'étais chauffeur de taxi avec M. Blond in on a
lutté pour savoir ce qui se passait dans cette maudite
industrie-là, il faut dire le mot parce que ça rend son homme fou
on en émettait à peu près 20,000 par année.
Si vous vous rendez au service des permis de la ville de Montréal,
à tous les jours vous voyez peut-être quinze à vingt
personnes qui attendent pour avoir leur "pocket number". Ils passent des tests
à tous les jours.
En moyenne, dans la ville de Montréal même, il doit y
avoir, si je ne me trompe pas, 4,200 permis ou un peu plus.
M. PINARD: C'est 4,290 exactement; j'ai vérifié
auprès de la ville de Montréal hier soir.
M. PITON: Pardon?
M. PINARD: II y en a 4,290 en vigueur.
M. PITON: Pour répondre à votre question
précédente, si on met deux chauffeurs par voiture, ça fait
à peu près 8,400 "pocket numbers"; si, à cela, on ajoute
les jours de congé des hommes, ça nous en prendrait à peu
près encore 4,000. Je dis que 12,000 "pocket numbers" par année
d'émis, ça devrait être tout.
On a déjà fait un autre sondage. Sur à peu
près 20,000 "pocket numbers" émis dans la ville de
Montréal, en moyenne, à peu près 7,000 chauffeurs font du
taxi onze mois par année, peut-être moins que cela. Les autres, ce
sont des personnes qui travaillent dans la construction. Quelqu'un a
peut-être son permis depuis dix ans. On lui envoie son papier à la
fin de l'année. Avant, ça lui coûtait $5.40 et on nous a
fait un cadeau de $0.40. Il se dit: Je vais envoyer $5 et je vais avoir mon
permis; si je tombe en grève, pas de problème. Je vais retirer de
l'assurance-chômage et je vais faire du taxi deux jours par semaine; je
ferai le même salaire. C'est ce qui se produit.
M. PINARD: Le "pocket number" émis par le service des permis de
la ville de Montréal donne droit à celui qui le détient,
moyennant le paiement dont vous parlez, $5.41,...
M. PITON: C'est $5 exactement.
M. PINARD: ... de conduire une voiture-taxi.
M. PITON: Oui, après avoir passé son examen. S'il passe
son examen, il a un "pocket number". Naturellement, il lui faut sont permis
pour avoir un "pocket number", parce qu'on l'exige là-bas. Il se
présente à vous avec son "pocket number" et, si vous avez une
voiture de disponible, vous lui donnez un "booking", il se fait enregistrer
pour vous et il travaille.
M. PINARD: Lui, il s'adresse à qui pour avoir de l'emploi sur une
voiture-taxi?
M. PITON: A n'importe quel propriétaire de flotte ou
propriétaire artisan qui veut bien l'engager.
M. PINARD: S'il y a 4,290 permis actuellement en vigueur dans la ville
de Montréal, si vous prenez pour acquis qu'il y a 20,000 "pocket
numbers" d'émis, ça fait cinq chauffeurs disponibles pour une
voiture-taxi.
M. PITON: C'est cela.
M. PINARD: Comment cela fonctionne-t-il?
M. PITON: J'ai essayé de vous expliquer cela, tout à
l'heure. La personne qui travaille sur le taxi, qui ne fait que cela, elle a
son "pocket number", c'est normal. Supposons que moi ou un de mes chauffeurs
est fatigué du taxi et décide d'aller conduire un camion. Le mois
de mai arrive et il reçoit son papier par la poste. Il fait un
mandat-poste ou il va le payer à la banque et il a son "pocket number".
Il peut être cinq ans chauffeur de camion mais il a son "pocket number"
dans sa poche et il ne fait pas de taxi. Cela se continue de cette
façon, de A à Z.
Il y a des gars que ça fait dix ans qu'ils n'en ont pas fait.
Durant la grève des autobus, il y avait des chauffeurs qui en avaient.
Juste pour vous donner un exemple, un professionnel est venu me voir la semaine
passée. Il ne gagne pas un gros salaire, $12,000 par année! Il
voulait avoir un véhicule-taxi les fins de semaine. Il ne gagne pas
cher, $12,000 par année, et il voulait faire du taxi. Le monsieur n'en
avait pas assez, il voulait un "side-line". Il a besoin d'argent, il s'est
acheté une maison et les paiements coûtent cher. J'ai un plombier
qui ne gagne pas cher de l'heure, je pense qu'ils sont rendus à $6. Le
gars s'est acheté une voiture neuve et, pour faire les paiements, il
fait du taxi le samedi et le dimanche. Sa femme ne voulait pas, mais il lui a
dit: Je fais du taxi le samedi et le dimanche pour faire mes paiements;
laisse-moi faire, je te donne ma paie. C'est ce qui se produit, tout le monde
s'en vient dans l'industrie du taxi.
Actuellement, ceux qui font du gros argent dans le taxi, ce sont les
personnes qui ne connaissent rien du tout, qui investissent $150,000. Au bout
de l'année, leur comptable leur dit: Dans cette compagnie, tu as
investi
$150,000 et ça te rapporte tant. Il demande: Qu'est-ce que c'est,
cette industrie-là? Il répond: Le taxi. Il dit: $25,000 de
profits, c'est bon, on va investir encore. Si le comptable lui dit qu'il n'a
fait que $4,000, il se fait répondre: Vends-moi ça au plus vite.
Le gars en question, qu'est-ce qu'il connaît du taxi? Il va rencontrer
ses chauffeurs et il ne les connaît pas, c'est un investisseur dans le
taxi.
Moi, j'ai des patrons depuis quatorze ans, ils sont rendus à 60
ans et ils sont à la corde. J'en ai un qui prend seize pilules par jour
pour le coeur. Il a failli mourir l'an passé, il n'a pas besoin de cela.
Savez-vous ce qui l'a tenu dans le taxi? Je vais vous le dire :
Premièrement, si je ne prenais pas la "job" il vendait et,
deuxièmement, pour payer mon salaire il a acheté deux permis.
C'est le profit. Qu'est-ce qu'il a eu à coeur, parce qu'il ne faut pas
insulter la société juive, ce sont des hommes assez
intelligents... Le rapport Bossé, quand il est sorti en 1970,
j'étais là, M. Bossé se rappelle de moi, dans ce
temps-là j'étais chauffeur, je faisais la sécurité
au centre de la police. Alors, il s'est dit: Les permis vont monter en
flèche, si on enlève, comme on dit, 1,800 permis dans deux ans,
mon permis va valoir $10,000 comme à New York et un peu partout. Alors,
si j'en ai 20, moi je ne perds rien, si les permis je décide de les
vendre $125,000, est-ce que cela vaut la peine, pour deux ans? Si je
n'étais pas là... Sa propre femme a arraché trois lignes
téléphoniques dans la maison pour ne pas être
dérangée. Ce n'est pas un cadeau à 2 heures du matin quand
vous dormez et que le chauffeur vous appelle. Vous ne savez pas ce qu'il y a au
bout de la ligne, il peut dire: Je viens de défoncer la banque de
Montréal au coin de Guy et Sainte-Catherine avec l'auto. Ce n'est pas
toujours un cadeau de se faire réveiller à deux heures du matin.
Il y a des hommes malades, il y a encore des bonnes personnes dans le taxi, ce
ne sont pas tous des requins. Ce qui se produit, comme je l'ai dit tout
à l'heure, c'est que ce sont les bons qui paient pour les
méchants.
Alors, dans une association comme la compagnie Diamond, où il n'y
a pas de comparaisons, où le chauffeur n'a aucun droit de parole, le
patron est pris à la gorge. Qu'est-ce qu'il doit faire? Il doit se
venger sur le chauffeur. C'est la seule solution qu'il a.
M. PINARD: M. Piton, vous connaissez le métier du taxi.
Pourrais-je vous poser une question additionnelle en terminant? Il y a un
règlement du taxi en vigueur dans la ville de Montréal. J'imagine
que ce règlement concerne aussi bien les conditions d'émission,
les coûts de l'émission du permis de taxi, que l'émission
du "pocket number".
M. PITON: Oui.
M. PINARD: Vous connaissez bien ce règlement du taxi en vigueur
dans la ville de Montréal?
M. PITON: Oui.
M. PINARD: Alors, quelles sont les conditions qui sont exigées
pour celui qui se présente au service d'émission des permis de
"pocket number" et qui fait la demande? Quelles sont les conditions qui sont
exigées avant qu'on lui accorde ce permis moyennant
rémunération, moyennant paiement?
M. PITON: On parle pour le chauffeur là?
M. PINARD: Le "pocket number" pour le moment.
M. PITON: Le "pocket number" stipule que, premièrement, vous
devez parler deux langues. Si vous êtes Canadien français, vous
devez parler français et anglais, si vous êtes juif, vous devez
parler juif et anglais. Les deux langues, c'est le canadien et l'anglais, tout
le monde le sait, dans la province de Québec. Ensuite, il doit avoir son
permis de conduire comme chauffeur, il doit passer un examen pour la ville, les
rues, les hôpitaux, les hôtels. Ce sont des questions par
écrit. On me dit que maintenant c'est oral. Moi, cela fait 11 ans que je
l'ai passé, peut-être que depuis ce temps-là les tests sont
changés. Là on me dit que c'est encore par écrit. Vous
avez une limite de temps. Alors, si vous passez cela, au bout de quinze jours
le comité exécutif vous envoie une lettre comme quoi vous
êtes accepté, vous allez là, vous payez votre permis et on
vous donne votre "pocket number".
M. PINARD: Vous n'avez pas le règlement qui est actuellement en
vigueur à Montréal dans votre poche pour le déposer
à la commission parlementaire?
M. PITON: Je regrette, mais je n'ai pas cela.
M. PINARD: Alors, vous permettez que nous vérifions vos
affirmations?
M. PITON: Ah, vous pouvez vérifier cela.
M. PINARD: Parce qu'il peut y avoir des petites inexactitudes.
M. PITON: Vous pouvez vérifier. C'est en toutes lettres...
M. PINARD: Nous ferons venir le règlement concernant
l'émission des permis de taxi et concernant l'émission du "pocket
number" au ministère des Transports et nous en ferons part à la
commission parlementaire.
M. PITON: C'est cela. C'est la même chose que si j'achetais un
permis, il entre beaucoup de choses en ligne de compte. On vous demande
où vous avez pris l'argent, il faut que ce soit payé
comptant.
M. PAUL: Le permis, vous ne l'achetez pas
de la ville de Montréal? C'est du détenteur, de celui qui
veut s'en départir.
M. PITON: C'est cela. Mais là il faut que vous alliez à la
ville de Montréal avec un chèque certifié pour la valeur
marchande. On vous demande à quelle place vous avez pris votre argent et
ainsi de suite.
M. PAUL: Mais est-ce que vous allez montrer votre chèque à
la ville de Montréal?
M. PITON: Certainement, monsieur. Il faut le montrer et il faut qu'il
soit certifié.
M. PAUL: Mais est-ce que ce chèque doit comporter une note
quelconque à l'effet que la ville...
M. PITON: Pour achat de permis de taxi.
M. PAUL: Mais qu'est-ce que la ville fait, après l'avoir vu?
M. PITON: La ville confirme l'achat et elle fait le transfert. Elle
l'étampe en arrière et elle fait le transfert de personne.
M. PINARD: La valeur marchande, qu'est-ce que c'est?
M. PITON: Actuellement, je dirais que M. Serra parce qu'il a eu
peur du bill Bossé, du règlement no 6 a vendu 16 permis,
avec des voitures 1970, en août et septembre, en moyenne, avec les
voitures, $6,000 ou $6,500.
M. PINARD: Permis et voitures compris?
M. PITON: Oui. Pour une voiture 1970, si on la vend, on peut recevoir
$500. Moi, j'ai acheté 20 voitures qu'on m'a vendues $3,955, des Dodge
Polara 8. Pour mes 1970 on a fait un prix, $500, ce qui revenait à
$3,455. Ceci qui veut dire que le permis en ville actuellement se vend
$6,000.
M. PINARD: Cela veut dire qu'après deux ans une voiture-taxi est
dépréciée à 100 p.c. ou est
considérée comme très peu valable sur le
marché.
M. PITON: Oui et en terminant, quand je suis arrivé ce matin, un
type a parlé, je n'ai pu saisir son nom.
M. PAUL: Est-ce que ce serait M. Edmonston?
M. PITON: Oui. Il vous parlait de sécurité des voitures.
Moi je vous dirai qu'actuellement j'ai 20 taxis. S'il fallait qu'on prenne les
20 voitures et qu'on les envoie au comité pour vérification,
comment appelez-vous ça?
DES VOIX : Sécurité routière.
M. PITON: Bien, je dirais qu'on en refuserait 18. Là, on va
peut-être me dire. Vous ne faites pas votre travail. Mais vous avez des
chauffeurs qui sont très consciencieux et qui s'occupent de votre
affaire, mais il y en a d'autres qui arrivent à la dernière
minute et ils disent: J'ai ceci. Le mécanicien est parti, on essaie de
faire notre possible, mais le gars dit: II faut que je travaille, c'est
vendredi soir, essaie de m'arranger ça un petit peu. Le patron, si on
lui dit que la transmission glisse, il va dire: Attends, qu'elle glisse; quand
elle sera brisée on la changera.
Il y a eu l'affaire des taxis de Dorval. Il y avait bien des amis qui
travaillaient pour moi, mais ils faisaient bien de l'argent à Dorval. M.
Bossé a arrangé l'affaire, il a mis une ligne. Mais les gars de
taxi de Dorval, ils avaient un beau petit "racket", ils faisaient de l'argent
comme de l'eau. Mais le gouvernement je ne sais pas si c'est le
gouvernement ou la municipalité a mis un terme à
ça. Le salaire des gars a bien baissé. Les gars m'ont
appelé et m'ont dit: On revient en ville. La première
journée que le gars commence est lundi. Il m'avait appelé jeudi
dernier et m'avait dit: Gilles, il me faut une voiture de jour. Parfait. J'ai
une voiture, ce n'est pas ma faute. Le gars commence à cinq heures. A
dix heures moins dix du matin, en montant la rue Frontenac, le "driving-shaft"
tombe dans la rue. Le remorqueur est allé le chercher et au garage les
gars sont allés diner. Il ne peut pas avoir la voiture avant trois
heures et demie. Qu'est-ce que le gars a fait? Il est allé chez lui. Il
n'a pas fait un cent, $1.10 ou $1.25. Il m'a appelé et m'a
demandé: Combien me charges-tu? Je lui ai dit: Que veux-tu que je te
charge? Absolument rien. Il m'a dit: Je pense que je vais essayer encore
à Dorval.
Il y a un chauffeur à côté de moi, M.
Beauchamp...
M. BOSSE: M. le Président...
LE PRESIDENT (M. Caron): Le député de Dorion.
M. BOSSE: ... c'est une sous-question concernant les transactions qui
ont lieu à l'hôtel de ville. Lorsque le chèque est
montré à l'hôtel de ville, à votre connaissance et
sans donner de nom, êtes-vous au courant que déjà des
sommes d'argent sont déposées à la banque par quelqu'un?
Le chèque émis au nom de M. Untel, pour montrer à
l'hôtel de ville, est-il ensuite retourné à un
prêteur à taux usuraire?
M. PITON: Monsieur, cela se fait à l'année. Il y aurait un
type, aujourd'hui il n'en fait peut-être plus...
M. BOSSE: Ce qu'on appelle le "shylock-ing".
M. PITON: Bien ça, je n'appellerais pas ça du
"shylocking". J'appellerais ça "poigner des poissons", car le
"shylocking" ne marche pas
comme ça. Ce n'est pas du "shylocking", c'est plutôt un
attrappe-nigaud, il ne faut pas se mêler, le "shylocking" est
peut-être de prêter à des taux usuraires, comme les gars
disent, mais je ne trouve pas ça plus cher que la compagnie de finance
quand on respecte ses paiements. Mais ce que j'appelle des moineaux, comme vous
l'avez dit, c'est le gars à qui on met ça bien beau l'affaire. Je
peux vous dire, M. Bossé: Bien là, ça fait longtemps que
tu loues un "single" de moi et je te loue ça $105 par semaine;
aimerais-tu ça devenir propriétaire? Bien oui, ce n'est pas un
fou, il travaille pour moi. Bien là, je vais te vendre un permis, tu vas
me donner $90 par semaine et je vais te charger 10 p.c. d'intérêt.
Le gars dit que ce n'est pas exagéré l'affaire. Alors, le gars
avance l'argent et prend la voiture, un contrat chez le notaire, l'affaire se
passe. Mais $90 par semaine, c'est beau, il en payait $105; ça fait $15
par semaine. Cela va bien, deux mois, trois mois, la voiture casse, accident
responsable, il manque un paiement. Bien on a le droit de reprendre la voiture,
c'est écrit noir sur blanc. Cela fait deux ans que vous payez $90 par
semaine et on vous l'enlève au bout de deux ans parce que vous avez
manqué un paiement. Il y a un autre poisson. Cela n'est pas du
"shylocking". C'est un homme d'affaires. Il y en a un homme d'affaires qui a
fait ça bien des années, il en fait peut-être un peu moins,
il ne faudrait pas le nommer, il fait pitié. Il était ici mardi,
il fait partie de la compagnie Diamond, peut-être que vous le connaissez,
M. Bossé?
Vous avez fouillé un peu plus loin que les autres, ici.
M. BOSSE: Sans vous demander de noms, entre nous, la tolérance
est bien connue, par exemple, vis-à-vis des délais de paiements.
On sait, dans les périodes mortes, les difficultés qu'ont
certains chauffeurs, certains nouveaux propriétaires à
exécuter leurs paiements. Est-ce que certains faits ont
été portés à votre connaissance, comme, par
exemple, aller chercher avec une remorqueuse la voiture sans permission ou sans
utiliser d'autres moyens légaux?
M. PITON: J'ai vu cela de mes propres yeux. Ici, je voudrais faire une
mention honorable. N'oubliez pas que mardi, j'étais ici, moi, à
la commission parlementaire. J'ai dîné avec un chauffeur de la
compagnie Lasalle, qui a travaillé en même temps que moi sur le
taxi, pour le même patron, pour la compagnie Diamond. Nous discutions des
deux associations. Je dois féliciter M. Brunet, sur un certain point,
parce qu'il m'a dit qu'il avait "financé" sa voiture et avait
répondu pour lui, à la banque, de $5,000. Il m'a dit qu'il avait
répondu au moins pour 200 chauffeurs semblables. A ce moment-là,
si c'est vrai je crois le type en question, je le connais intimement
c'est une manière d'ôter les requins qui abusent du
chauffeur.
M. BOSSE: Je vous remercie de cette préci- sion, parce que je
croyais avoir rêvé en entendant parler certaines gens qui sont
venus avant vous.
M. PITON: Non, non. Vous n'avez pas rêvé.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Maintenant, la parole est à
l'honorable député d'Abitibi-Ouest.
M. AUDET: M. Piton, vous avez admis, tout à l'heure, qu'il y a de
bons chauffeurs et qu'il y en a de moins bons.
M. PITON: C'est cela.
M. AUDET: Vous avez aussi dit que les bons payaient pour les mauvais.
D'après vous, pour-riez-vous me dire quel est le pourcentage des
chauffeurs qui doivent de l'argent aux propriétaires?
M. PITON: Personnellement, j'ai fait du taxi. Je ne suis pas un ange,
mais j'avais un devoir sacré. C'était de payer mon patron. Quand
je n'avais pas d'argent pour le payer, je payais ma voiture mais j'allais par
en arrière et j'en empruntais, personnellement. Ce n'était pas
pareil. Mais je dirais qu'en général, pour un chauffeur qui
travaille depuis nombre d'années pour un patron, en moyenne, la
catégorie de bons chauffeurs se situerait à peu près
à 65 p.c, 70 p.c. Ceux-là doivent peut-être devoir $100 au
patron mais $100 pour l'année, en réalité, c'est sa
semaine de vacances. Ce n'est pas devoir de l'argent.
M. AUDET: Mais cela ne veut pas dire que les chauffeurs qui doivent de
l'argent à leur patron sont de mauvais chauffeurs.
M. PITON: Non, il y en a qui doivent de l'argent parce qu'ils ont
été malchanceux. J'ai un type, à ma droite, ici, qui,
avant que j'entre là, devait pas mal d'argent à mon patron. Il
paie à toutes les semaines, mais il a eu un accident, à la
colonne vertébrale. Cela l'a attaqué un peu. Comme d'autres
choses, il a eu de la misère à avoir de l'argent. A ce
moment-là, il payait le loyer, il prenait l'argent de la voiture qu'il
gagnait et au lieu de payer la voiture, il faisait vivre sa femme et son
enfant. Ce sont des choses très normales. Mais le type en question
travaille encore pour moi et il paie sa dette. Cela va très bien.
Ce que j'appelle un méchant chauffeur, moi, c'est le gars...
Parce qu'il y a plusieurs genres de chauffeurs de taxi. En
réalité, je ne devrais pas dire chauffeur de taxi mais je devrais
dire que c'est une profession. Parce que c'est une profession. Pour être
chauffeur de taxi, faire de l'argent, cela prend trois choses: II faut aimer
conduire, il faut être patient et il faut aimer le public. Ce n'est pas
un cadeau, être dans la ville dix ou douze heures par jour, sans savoir
qui monte derrière soi. Parce qu'il y a bien de petites affaires que le
monde ne connaît
pas. Le maudit chauffeur de taxi! Regarde cela: II est à droite
et il s'en va à gauche. Il ne sait pas ce qui se passe dans la voiture.
Nous pourrions vous en conter d'autres.
Moi, j'ai fait une petite expérience. Une bonne journée,
nous ferons un petit "party" et nous vous conterons cela. J'avais un petit
"tape-recorder" portatif. Nous faisons un "party", dans le temps des
fêtes, comme tout le monde. Une journée, j'en ai mis un dans une
voiture. J'ai fait enregistrer toutes les conversations de la journée,
parce que là, j'avais des belles-soeurs et des beaux-frères qui
ne croyaient pas ce qui se passait dans les taxis. Je leur ai fait un cadeau,
il y a une couple d'années de cela. A Noël, je leur ai fait
écouter cela. J'aurais pu faire un film avec cela. Si on
réunissait les chauffeurs de taxi et qu'on prenait toutes leurs
histoires on parle des gens sérieux, un peu, dans le taxi
on aurait un scénario pour faire un film. Ce serait un aussi gros
succès que Le Parrain.
LE PRESIDENT (M. Séguin): La parole est au ministre.
M. PINARD: M. Piton, pourriez-vous nous dire quel est le pourcentage des
voitures mises en service par ce qu'on appelle les exploitants de flottes de
voitures de taxis qui, d'après vous, offriraient une
sécurité?
M. PITON: Sur une flotte, personnellement, je dirais que s'il y en a 20
p.c. je ne parle pas des voitures neuves qui viennent de sortir
après un an d'usure, ii n'y en a pas 25 p.c. qui sont en bonne
condition.
Il ne faut pas toujours mettre cela sur le dos du propriétaire.
N'oubliez pas qu'il y a beaucoup de choses qui entrent en ligne de compte.
Après tout, depuis cinq ou six ans, vous avez pu remarquer que le
prix de vente des voitures a augmenté. Moi, j'avais un patron qui
changeait ses voitures à tous les ans, et depuis les trois ou quatre
dernières années, il n'est plus capable, parce que c'est trop
dispendieux. Je dirais que le coût d'achat des voitures a augmenté
d'au moins $1,000 à $1,200 depuis quatre ans.
C'est la même chose pour une crevaison. Le gars enlevait la roue,
la chambre à air, il vérifiait ça et nous prenait $0.50
à notre garage. Aujourd'hui, c'est $1 ou $1.25. Si vous allez dans un
garage étranger, c'est $2.50. Cela devient bien dispendieux. Il faut
aller, autant que possible jusqu'à la corde.
Moi, je vais vous dire que des "enligne-ments" et des "balancements" de
roue dans le taxi, je n'en connais pas beaucoup. Il faut être pris en
maudit pour faire faire ça. Quand les pneus usent en dedans, on
enlève les pneus, on en mets deux, parce que nous les achetons au lot,
ça nous coûte $20. Les pneus d'hiver nous coûtent $16.75, ce
n'est pas trop mal.
M. PINARD: Mais d'après les règlements actuels, l'examen
obligatoire du véhicule-taxi pour fins de sécurité, c'est
toutes les semaines, tous les mois? C'est quoi?
M. PITON: Je vais vous dire une chose. Personnellement, dans l'emploi
que j'ai, avec tout l'ouvrage que j'ai, d'abord l'huile doit être
changée à toutes les semaines, et la semaine suivante c'est
l'huile et le filtre.
Si mes voitures sont toutes placées, j'ai beaucoup plus de temps
pour aller dans le garage quand je mets la voiture sur le "lift" et regarder
j'ai dit tout à l'heure que j'étais un gérant assez
dispendieux, parce que je n'aimais pas conduire une voiture toute croche
et ce que je vois, je le répare.
Mais il y a des chauffeurs qui n'aiment pas travailler au garage. Le
chauffeur de jour qui prend sa voiture à cinq heures le matin, elle est
croche un peu, les freins sont finis, quand il arrive à quatre heures et
demie, il dit: Mes freins sont au fer. Le chauffeur de nuit regarde dans le
garage et dit: Gilles, je vais les faire ajuster, vas-tu me le faire demain
matin? Le garage est plein, je vais partir d'ici six heures, si tu n'a pas le
temps de le faire avant six heures, l'autre ne commence qu'à sept
heures, je vais aller à l'autre coin, ça va coûter $0.75 et
je vais les faire ajuster.
Il prend une chance, s'en va avec, fait ajuster les freins. Le gars
arrive dans la veillée, ça crie, ça se "garroche" à
droite et à gauche, il est en maudit. Cela va à la limite. Parce
que normalement à deux chauffeurs, des freins avant, quand ça a
fait entre 12,000 et 14,000 milles nous en faisons un peu plus en hiver,
parce que c'est moins dur, mais je parle pour l'été c'est
raisonnable. Pour l'arrière, c'est 25,000 ou 30,000 milles.
J'en connais qui ne changent qu'un morceau.
M. PINARD: Si l'examen obligatoire, imposé par le
règlement no 6, est fixé à tous les quatre mois, est-ce
que ça vous parait outrancier ou irréaliste, ou discriminatoire
à l'endroit soit du propriétaire de la voiture ou du chauffeur
qui, lui, pourrait être pénalisé par une perte de
revenu?
M. PITON: Mais là, il faut dire une chose. Le règlement no
6, il y a bien des choses là-dedans. On met ça obligatoire au
bout de quatre mois, mais si la chose est appliquée, comme je l'ai dit
tout à l'heure, à 65 p.c, il y a beaucoup de racaille qui va
être sortie du taxi et nous allons avoir des chauffeurs beaucoup plus
consciencieux qui vont faire plus attention à leur voiture. La voiture
sera en meilleure condition.
LE PRESIDENT (M. Caron): La parole est au député de
Sainte-Marie.
Vous n'avez pas fini? Excusez-moi.
M. AUDET: Est-ce que ça arrive de temps en temps que des
chauffeurs rapportent leurs
véhicules au Bureau des véhicules-automobiles pour
inspection?
M. PITON: A ma connaissance à moi, ça ne s'est pas
produit. Parfois, on dit des choses semblables dans la colère. Dans ma
flotte, depuis que je suis dans l'industrie du taxi, je n'ai pas vu
ça.
M. AUDET: Ce n'est pas dans leur intérêt non plus, parce
qu'ils perdraient du temps.
M. PITON: Pas nécessairement, mais vous savez, dans le taxi
comme je l'ai dit tout à l'heure quand vous perdez votre
nom, c'est très dur de le refaire.
M. AUDET: Est-ce qu'il y a des propriétaires de taxi qui paient
une semaine de vacances?
M. PITON: Oui, à mon garage, ça existe. Mais il faut
s'entendre. Nous ne donnons pas d'argent liquide. Nous disons: Nous te donnons
la voiture une semaine gratuitement. Moi, je n'appelle pas ça des
vacances. Le gars qui a passé onze mois et demi sur ce carrosse dans la
ville, il est fatigué, il veut aller en vacances et il a encore la
"minoune" à la porte. Madame arrive à la maison et il dit: Nous
allons aller faire un petit tour à la campagne voir ma tante. Ce n'est
pas des vacances, il recommence encore dans la même affaire.
M. AUDET: Une dernière question.
Croyez-vous qu'il serait possible pour les chauffeurs de taxi de devenir
acquéreurs d'actions ou copropriétaires avec les
propriétaires de taxis?
M. PITON: A ce moment-là, ça prendrait de l'aide quelque
part. Je ne sais pas â quelle place ils pourraient la prendre, parce que
je ne pense pas que les propriétaires seraient consentants. A moins que
nous ayons une aide quelconque du gouvernement, une coopérative ou
quelque chose de semblable ou une caisse d'économie où le
chauffeur de taxi pourrait emprunter de l'argent.
M. AUDET: Si, par exemple, lorsque le chauffeur achète une part,
le gouvernement lui en payait une, est-ce que ça n'inciterait pas les
chauffeurs à devenir copropriétaires?
M. PITON: Je vais vous dire une chose: Celui qui a trois ou quatre ans
d'expérience dans le taxi commence à s'apercevoir que ça
coûte cher et, s'il avait l'opportunité d'acheter son propre
permis, il aimerait bien l'acheter. Ce qui arrive, c'est qu'il n'a pas le
capital et ça ne se trouve pas du jour au lendemain, $6,000. Il peut
aller à une banque, mais n'oubliez pas une chose; c'est bien difficile
si vous n'avez jamais acheté à crédit, si votre nom n'est
pas fait ou si vous n'êtes pas marié et que vous n'avez pas de
maison. Si je vais m'acheter une télévision couleur, le gars dit:
Qu'est-ce que tu fais? Je suis chauffeur de taxi. Je ne te vends
pas; je ne veux pas savoir ce que tu fais là.
M. AUDET: Ne croyez-vous pas, M. Piton, qu'il y aurait
possibilité pour le propriétaire de taxis de favoriser ses
chauffeurs par un financement assez long pour leur permettre d'acheter des
actions dans la compagnie? Avec l'aide du gouvernement, peut-être.
M. PITON: Ce serait peut-être possible, mais pas avec tout le
monde. Je vais vous dire une chose: J'achève d'être dans cette
industrie. J'attends que le règlement no 6 soit adopté. J'ai des
nouvelles pour mes chauffeurs, parce que j'ai l'appui de mon patron, je l'ai
dit. J'ai de vieux chauffeurs qui veulent des permis. Devant vous, je
l'affirme: Mes chauffeurs auront la préférence d'acheter les
permis de Joseph Kaufman avec un intérêt minime, pas de comptant,
s'il vous plait. On les leur vendra et ça va me faire très
plaisir. C'est spécifié dans mon contrat que j'ai signé et
qui finit le 10 février.
M. AUDET: Je vous remercie.
LE PRESIDENT (M. Séguin): La parole est au député
de Sainte-Marie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous disiez tantôt que vous êtes
gérant d'une flotte de vingt voitures et cette flotte fait partie de
Diamond Taxi. Vous parliez du taux d'assurance, vous êtes classé
B.
M. PITON: Oui.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): L'assurance, en somme, c'est la compagnie
Bélair?
M. PITON: C'est ça.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Pour assurer une voiture, ça vous
coûte combien par année dans la classe B?
M. PITON: Si on enlève le coût de l'association, ça
doit revenir à $950 ou $1,000 à peu près.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Voici pourquoi je vous demande cela: Dans le
rapport de Diamond Taxi, on a les classes d'assurance de la compagnie
Bélair. Si vous regardez à B, c'est par système de points,
ça coûte $45 par mois, ce qui veut dire $540 par année,
d'après ce rapport.
M. PITON: C'est faux.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Et vous dites que ça
coûte...
M. PITON: Cela me coûte exactement $120.25, y compris
l'association et l'assurance.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Et si vous l'enlevez?
M. PITON: L'association, si je ne me trompe, c'est rendu à $42.
Si on enlève $42 de ça, ça fait $78.20 à peu
près par mois pour chaque voiture.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela veut dire une affaire d'au-dessus de
$800 dans la classe B.
M. PITON: C'est ça. Dans la classe C, ça coûte
$139.40, je crois.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Comment expliquez-vous que ce soit
différent dans le rapport, ici?
M. PITON: Ce qu'il y a là et ce qu'ils ont dit, je m'en moque. Je
ne suis pas un spécialiste des chiffres, mais on ne me fera pas croire
cela et je suis sûr qu'on ne vous l'a pas fait gober à vous.
Même vous avez dit hier: A 2 p.c, sortez-moi de la compagnie. On est
là pour faire de l'argent et non pour crever de faim.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Lorsque vous dites ce que ça vous
coûte, je vous crois, mais je vous dis que ça ne correspond pas du
tout avec ce qui est mentionné ici.
M. PITON: Il n'y a rien qui correspond là-dedans. Vous l'avez vu,
à genoux dans le coin, pour dicter à l'avocat quoi faire parce
que c'est un spécialiste; il n'a pas beaucoup de cheveux. Il m'en manque
encore, mais...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je vous remercie.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Merci. Le député de
Dorion a une petite question.
M. BOSSE: M. Piton, pourriez-vous me dire s'il y a une différence
entre l'état sécuritaire des voitures des flottes et celui des
voitures des artisans ou des détenteurs d'un ou deux permis?
M. PITON: C'est très facile. Un artisan peut avoir un chauffeur,
peut-être un autre qui va travailler les fins de semaine. Même s'il
y avait un autre chauffeur là-dessus, ils s'entendent entre eux. Moi,
dans une semaine, parfois, sur une voiture seulement, je peux avoir dix hommes.
Je crois bien qu'aucun chauffeur ne conduit de la même manière.
Pour l'autre qui ne travaille qu'une journée, ce n'est pas sa voiture
régulière. Admettons qu'il y a une voiture brisée et que
je lui prête celle-là ce soir.
Si elle va tout croche, bien le lendemain je la reprends. Pour le
débossage je ne veux rien savoir pour le faire réparer et perdre
mon temps.
M. BOSSE: Etes-vous d'accord sur la modalité qui est dans le
règlement no 6 au sujet des émissions? Parce que dans un bref
délai on va peut-être retirer les permis mais dans un bref
délai on aura à en émettre. Dans le règlement il
est prévu que les trois premiers permis seront émis à des
chauffeurs de taxi qui ont oeuvré dans l'industrie du taxi d'abord et
avant n'importe qui.
M. PITON: Je suis d'accord s'il n'y a pas de favoristisme, si on suit la
ligne de A à Z, premier arrivé en descendant.
M. BOSSE: C'est ça.
M. PITON: Si le gars n'a pas d'argent, que le gouvernement l'aide et
qu'on lui dise: Si t'étais capable de payer ton patron, tu dois
être capable de payer ça. Prêter de l'argent à un
autre ou à un chauffeur de taxi, je pense que ce serait bien
placé.
M. BOSSE: En troisième lieu, dernière question. En ce qui
a trait au coût élevé des assurances vous avez dû
songer à la question puisqu'elle a été souvent
soulevée ici devant la commission. Auriez-vous une suggestion à
faire à la commission?
M. PITON: Je dirais que dans le rapport on stipule qu'il y aurait
peut-être moyen de faire une régie d'assurance dans la province de
Québec, quelque chose de semblable, où tous les taxis devraient
être assurés. On a eu l'exemple, je crois, d'un chauffeur de taxi
Lasalle qui avait été voir la compagnie Diamond. Si je ne me
trompe pas, l'avocat avait dit: Si on fait partie de Diamond, ça
coûte $631, ça dépend de la classe. On lui a demandé
je ne sais pas lequel de vous autres lui avait demandé ça
: Si le gars en question fait partie d'une autre association puis il est
classé dans la même classe est-ce qu'il paye le même prix?
L'avocat avait répondu oui. Mais le gars en question il nous est
arrivé avec un chiffre de quelque $900 pour aller dans le Beaubien et
être assuré à Bélair. S'il est dans la même
classe, je ne comprends rien à l'affaire. C'est pour ça que
ça mélange un peu vos papiers vous autres, là.
LE PRESIDENT (M. Caron): La parole est au député de
Lotbinière.
M. BELAND: Etant donné que vous avez élaboré sur
une foule de choses, j'aimerais connaître votre opinion aussi sur
l'obligation, selon le règlement no 6, de remplir des feuilles de
route.
M. PITON: La feuille de route en question, je ne la situe pas du tout.
Le chauffeur de taxi commence à travaille sur les nerfs en partant. Ici
à Québec c'est seulement des sens uniques, mais la ville de
Montréal est assez grande. Le gars commence à travailler, prend
son premier client et on lui dit: Peel et Sainte-Catherine. Je ne vois pas
l'affaire. Le gars arrive là, le client descend, il prend sa feuille et
marque $1.85, l'heure et tout ça. Le gars est arrêté pour
faire descendre le client et puis il est là avec son calepin et il
écrit. Le temps que tu écris sur la formule, t'as un billet en
double, $10; c'est payant cette affaire-là. Je ne vois rien dans
l'affaire.
Une autre chose, une Mme Fontaine criait pour sa transmission. Dans le
taxi on dit que le "meter" est "sealé". M. Bossé avait une raison
pour mettre ça l'affaire de la transmission, parce que je ne sais pas si
vous savez comment ça marche un "meter" vous autres. Vous avez
peut-être une idée, c'est scellé. Le gars dit: Je ne peux
pas vous voler, c'est scellé. Le "seal" est là, je ne peux pas
vous voler. Un gars regarde ça et c'est vrai que le gars ne peut pas
fouiller là-dedans. Le chauffeur de taxi ce n'est pas un fou. Il ne faut
pas les prendre tous pour des fous. Il y a des gars assez intelligents, plus
que vous pensez vous autres. Le gars arrive et dit: Moi, mon
propriétaire me vole. C'est arrivé quand Diamond a sorti la radio
et on a augmenté les voitures de $1 par chiffre; ça fait $2 par
jour sur 365 jours. La radio est payée à la fin de l'année
mais on continue à payer on n'ôtera pas le dollar quand la radio
va être payée. Le gars dit: ça ne marche pas mon affaire.
Il y a beaucoup d'autos en ville, des Américains, toute sorte de monde
en ville, la grande métropole du Canada. La ville est fermée mais
ils viennent pareil. Le chauffeur de taxi, n'oubliez pas que c'est
l'ambassadeur je dirais, puis on dit de ne pas parler aux clients. Si tu ne
parles pas aux clients, ils ne donnent pas de pourboires. Vous autres quand
vous voyagez dans une autre ville, je ne sais pas si vous le savez on
est seulement des hommes, il n'y a pas de femmes ici en tout cas l'homme
qui s'en va en convention, quand il n'y a que des hommes, après avoir
fini de travailler qu'est-ce qu'il cherche? Vous le savez, je n'ai pas besoin
de le dire. A qui s'adresse-t-on? Aux chauffeurs de taxi.
Pour finir la conversation, on parlait tout à l'heure de la
transmission. Il y en a peut-être parmi vous qui ne comprennent pas cela,
mais il y a des "gears" là-dedans. Plus la "gear" est haute, plus le
"meter" est "slow"; plus la "gear" est basse, plus le "meter" va vite.
Normalement, au taux de la ville maintenant, ça prend une "gear" no 29.
Si je mets une no 27, ça prend cinq minutes. Je m'en vais au Plateau,
j'en achète une à $2.25. Je ne le dis pas au gérant; il
n'est pas censé le savoir, il se ferme les yeux. Le gars entre dans le
garage, donne $1 au mécanicien pour qu'il enlève la "gear" et
pose la nouvelle. Le voyage qui coûte normalement $1.10, à ce
moment-là, coûte $1.20, $1.30, ça dépend de la
course.
UNE VOIX: C'est quoi, une "gear"?
M. PITON: Une "gear", ça va dans la transmission, monsieur. Je ne
sais pas si vous êtes chauffeur de taxi, mais en tout cas. Cela fait
fonctionner le "speedometer". Si le gars fait 25 ou 30 voyages, s'il va
chercher $5 ou $6 par jour, à la fin de la semaine, ça fait $25
ou $30. Le coût de la radio, sa petite perte de temps, il la paie
là. Si le client crie trop fort, il répond: Mon "meter" est un
peu trop vite? et il n'a qu'à faire la réduction, s'il prend un
régulier.
Il y en a d'autres qui ont sorti un autre truc à l'arrivée
du "meter". Vous ne l'avez peut-être pas vu, celui-là; c'est pour
les Américains. Comprenez-vous l'affaire? C'est une poignée. Vous
avez déjà vu un "meter". Quand on l'ouvre à la
première coche, vous entendez un petit bruit, à la
deuxième coche aussi et, tout à coup, on l'arrête. On
appelle cela le "waiting time". Eux, ils ont sorti un truc. Ils ne sont pas
fous, ces chauffeurs de taxi. Ils font payer le gars. Ils mettent la
poignée sur ce cran-là, ils regardent le visage du gars
parce qu'on connaît cela, d'où vient le gars, on peut juger cela
assez vite si on a de l'expérience et si on travaille dans le
centre-ville et hop! en haut. Cela ne prend que deux ou trois minutes.
C'est pour cela que c'est important de parler avec le client pour savoir ce
qu'il fait.
Donc, le gars tourne la poignée à gauche au lieu de la
tourner à droite. Le client vient de New York, il est habitué de
se faire voler et à "garrocher" à New York. Montréal,
c'est une belle ville, une ville propre, M. Drapeau l'a dit. Au lieu de partir
à $0.50, le chauffeur part à $0.60 et il travaille à $0.50
le mille, comme à Dorval. Les clients, au bout de la course, paient.
Il y a autre chose que je n'ai jamais compris dans le taxi, en
terminant, M. Pinard, comme vous êtes ministre des Transports,
peut-être pourrez-vous répondre à cela. La métropole
du Canada, c'est Montréal, on est tous d'accord. Je ne peux pas
concevoir qu'on doive travailler à $0.50 la "drop" à
Montréal, à $0.40 le mille, quand, à Dorval, on travail
à $0.50- $0.50. Moi, je demeure à Montréal-Nord et on
travaille $0.50-$0.50 aussi.
De chez nous jusqu'au garage, c'est $5.75 avec un taxi de
Montréal-Nord. Je repars du même endroit avec un taxi de la ville
et ça me coûte $4.40. Cela est assez dispendieux.
UNE VOIX: Avec une "gear"?
M. PITON: Non pas de "gear"; eux, ils l'ont, l'affaire. Je voudrais bien
que vous me disiez pourquoi c'est permis, dans une municipalité, de
travailler à un certain tarif et, dans une ville comme Montréal
où il y a plus de taxis et où c'est plus dur, à un tarif
moindre. Je voudrais bien savoir qui a décidé cela.
M. PINARD: M. Piton, je n'ai pas de réponse magique. Vous
comprendrez que je ne suis pas un technicien, je ne suis pas un
spécialiste; c'est pour cela qu'on vous laisse parler librement. On a
parlé d'en arriver peut-être à un autre système de
taximètre c'est à titre expérimental en ce moment
qui pourrait garantir l'honnêteté autant vis-à-vis
du propriétaire de la voiture que vis-à-vis du chauffeur et du
client qui aurait à payer la note et qui pourrait garantir
également qu'il n'y aurait pas de tricherie de la part de personne soit
en modifiant la "gear" dont vous avez parlé ou en employant d'autres
pièces faisant partie du système d'engrenage et connectées
directement au "meter".
Vous opposeriez-vous à ce qu'on trouve un nouveau
système?
M. PITON: Non, je ne m'y opposerais pas. Ma question n'était pas
là.
M. PINARD: Je comprends, je vous pose cette question. Pour
répondre à la question principale, nous avons fait faire une
étude par des spécialistes, des analystes en système de
transport pour en arriver à l'uniformisation des taux afin qu'il n'y ait
pas de discrimination, pour qu'il n'y ait pas de tarifs trop bon marché
comme vous l'avez expliqué par rapport à des tarifs trop
élevés pour le service demandé ou donné.
M. PITON: Actuellement, à Dorval, on travaille comme cela et
aussi chez moi, à Montréal-Nord. A Montréal, on dit que la
demande est forte, mais il y a beaucoup plus de taxis.
M. PINARD: Là, il y a un problème d'autorité
municipale que je dois respecter, pour le moment.
M. PITON: Je voudrais savoir si la municipalité de
Montréal-Nord ou de Dorval a fait une demande au gouvernement de la
province de Québec pour augmenter ses tarifs et si la ville de
Montréal en a fait une et que vous l'avez refusée. C'est ce que
je veux savoir.
M. PINARD: Pour le moment, comme la Commission des transports n'est pas
formée de façon officielle et qu'elle n'a pas commencé
à siéger parce que tous les membres n'ont pas été
nommés, il faudrait que je m'informe auprès de la Régie
des transports du Québec, au président, le juge Roger, pour
savoir s'il y a eu demande de modification de taux et si...
M. PITON: C'est cela actuellement...
M. PINARD: ... la régie a accrédité cette demande
d'augmentation de taux ou si la régie les a gelés, compte tenu
des territoires donnés. Plus tard, quand la Commission des transports du
Québec sera formée, ce sera sa responsabilité de
procéder à des enquêtes minutieuses, après des
analyses de coûts-bénéfices, pour savoir quel taux doit
être accrédité, quel taux doit être normalisé
et quel taux doit être en vigueur dans telles municipalités de la
province, y compris à Montréal et dans d'autres villes de
banlieue.
M. PITON: Une autre question, en terminant, c'est un chauffeur ici qui
m'a demandé de vous la poser. Je ne sais pas qui exige cela, mais un
chauffeur de taxi qui prend un client dans le centre de la ville,
l'emmène à l'aéroport de Dorval à un tarif fixe
tout le monde a compris ce que c'est, le compteur ne marche pas, je
crois qu'on est rendu à $7 ou $8 cela dépend de l'endroit
où on prend le client rendu là-bas on force le gars
à mettre son compteur en marche pour revenir en ville, cela me
dépasse. Je voudrais savoir pourquoi.
M. BOSSE : Si vous permettez, je vais ajouter un peu à la
première question que vous avez posée pour revenir à la
deuxième ensuite. En ce qui a trait à l'uniformisation des taux
sur l'ensemble du territoire de la Communauté urbaine, je dois vous dire
qu'à la suite de la demande de nombreux individus venant de diverses
villes et particulièrement de Montréal et aussi de l'Association
métropolitaine où il y a eu effectivement demande, au mois de
décembre, la Régie des transports avait, à la suite de
rencontres que nous avions eues, des représentations que nous avions
faites, effectivement uniformisé les taux sur l'ensemble du territoire
de la Communauté urbaine et révisé sa position parce que,
dans certaines villes, comme Montréal-Nord et Dorval, il y avait des
taux supérieurs. Au lieu d'uniformiser à la hausse, on a
uniformisé pour l'ensemble du territoire, à l'exception des deux
qu'on a tenu en haut si je ne fais pas erreur.
Quant à la deuxième question, en ce qui a trait au taux
fixe, dans le règlement actuel, c'est prévu dans certaines
conditions bien particulières. Cependant, pour sauvegarder le public,
d'une part, et assurer un revenu, d'autre part, aux chauffeurs, la règle
générale c'est de toujours marcher au compteur.
M. PITON: Oui, mais là où j'ai posé ma question...
Je vais vous dire l'expérience que j'ai vécue. Je suis
allé voir des copains à l'aéroport pour discuter, devant
l'entrée. Là il sort une demoiselle, très jolie. Elle dit:
Moi, je vais au coin Henri-Bourassa et Lacordaire, mais je veux y aller avec le
taximètre. Devant la porte, ce sont les taxis de Montréal qui
sont là. Le gars a dit: Moi, je n'y vais pas en bas de $7. Elle dit: Si
vous ne mettez pas votre compteur, je n'y vais pas. Le gars de Dorval, ce n'est
pas un fou, il a deviné cela tout de suite. Il dit: Je vais y aller,
avec le compteur. D prend les valises les met dans l'auto. Une fois
arrivé là, cela ne coûte plus $7 mais $8.50, alors que
l'autre gars demandait $7. Qu'est-ce qui arrive, il vole le
voyage au gars et fait $1.50 de plus, plus le pourboire, cela fait
$9.
M. BOSSE: Alors, précisément, dans le règlement, ce
serait une agglomération. Ces histoires de distinction entre diverses
municipalités, cela semble répondre à un besoin
général, du moins quand j'ai rencontré diverses
municipalités. Chacun tire la couverture de son bord. Vous allez parler
aux gars de Lachine, ils vont dire: On aime mieux rester dans notre coin. Vous
allez parler à d'autres types d'autres villes, ils vont dire: On veut
rester dans notre coin. Les gars de Montréal veulent avoir le droit
d'aller à l'aéroport. Cependant ils préféreraient
ne pas voir des étrangers venir dans Montréal. Alors, vous voyez
un peu la pagaille. Je pense qu'unanimement il y a eu une décision, il y
a eu une sorte de consensus qui s'est fait à l'effet qu'on a un permis
métropolitain, comme on l'appelle. Un permis métropolitain, c'est
l'agglomération de la Communauté urbaine, et là on va
uniformiser aussi certaines conditions dans le règlement, c'est que tout
le monde marche avec le compteur.
M. PITON: En terminant, j'ai fait une autre petite expérience, on
vous a vanté la radio de la compagnie Diamond. Quand on a sorti cette
radio-là, les chauffeurs étaient tous contents, naturellement,
parce qu'il n'y en avait pas beaucoup. Alors, à cause de la pression
pour la vente, on en donnait plus aux neufs, alors les gars avaient plus
d'ouvrage. On a dit que cela avait amélioré le service au client.
Alors j'ai fait une expérience, j'ai pris ma voiture un soir, je me suis
en allé chez moi, là j'ai dit à ma femme: Tu vas appeler
à la compagnie Diamond et tu vas demander une voiture.
Je vais m'asseoir dans ma voiture en bas pour voir combien ça va
prendre de temps pour donner l'appel. C'était durant une période
tranquille, c'était exactement un mardi soir, à 8 heures, il n'y
a pas trop d'ouvrage. J'ai attendu 17 minutes avant que l'appel passe par
radio. C'est ça le système formidable de la compagnie Diamond.
Sur ce point, j'aime encore mieux le vieux système de Lasalle.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Je vois que l'heure avance, il est cinq
heures dix. Je pense que tous les membres de la commission ont
apprécié vos commentaires. Dois-je comprendre, selon la largeur
d'esprit que j'ai manifestée au début, que nous devons entendre
vos deux autres collègues, ou si vous avez résumé leur
pensée?
M. PITON: Je crois qu'en général j'ai dû
résumer la pensée de ceux qui étaient avec moi. Celui qui
est à ma gauche, qui représente une autre association, aimerait
peut-être parler durant quelques minutes pour dire comment ça se
passe à Métropole. Parce que, personnellement, je suis avec
Diamond depuis onze ans et je ne peux pas vous donner la version d'une autre
compagnie.
Peut-être que lui, en quelques minutes, pourrait vous faire
entendre un autre son de cloche.
Mais moi, en attendant, j'aimerais vous remercier de m'avoir permis de
vous expliquer...
LE PRESIDENT (M. Séguin): Avant que vous ne terminiez, M. Piton,
le député de Laviolette aurait une question.
M. CARPENTIER: M. Piton, vous avez parlé d'inspection d'autos
tout à l'heure. Par qui sont faites ces inspections?
M. PITON: Actuellement, c'est fait par moi.
M. CARPENTIER: Je parle des inspections pour la
sécurité.
M. PITON: II n'y en n'a pas, monsieur, si la voiture ne se fait pas
prendre... La seule inspection que nous avons actuellement a lieu lors d'un
accident avec rapport de police. On donne 30 jours pour la faire
réparer, on envoie une lettre et on doit faire vérifier la
voiture, c'est tout.
M. CARPENTIER: Vous n'êtes aucunement tenus par un
règlement municipal à faire faire une inspection dans une
certaine période de temps au point de vue entretien de voiture.
M. PITON: Seulement le taximètre, deux fois par année,
tous les six mois. Si durant l'année le taximètre n'a pas
cassé, il n'a pas été vérifié. Au bout de
six mois, nous sommes tenus de nous rendre au service de la police.
L'inspecteur brise le scellé et nous roulons un mille. S'il est en bon
état, l'agent scelle de nouveau le taximètre.
M. CARPENTIER: Quelle est la façon de procéder?
M. PITON: Nous nous rendons là, on examine les lumières,
si l'odomètre fonctionne, si la photo est à la vue, on demande
les papiers d'identification, on vérifie la lumière des plaques,
on fait faire un mille qui est évalué par les
vérificateurs, ils ont des endroits spéciaux, et si le millage
tombe au bon endroit, on scelle le taximètre et c'est tout.
UNE VOIX: ...$2...
M. PITON: Je crois bien qu'ils le savent.
M. CARPENTIER : On ne vous a jamais signalé aucune espèce
d'anomalie dans ce genre d'inspection.
M. PITON: Qu'entendez-vous par anomalie?
M. CARPENTIER: Quelque chose comme...
M. PITON: On l'a dit et je crois que vous êtes au courant que
partout les fonctionnaires mineurs ne reçoivent pas des salaires
énormes. Si vous arrivez là et que le gars dit: Ecoute Paul, ton
"compteur" fonctionne un peu vite! C'est vendredi soir, tu fouilles dans ta
poche, en ressors $2, les mets sur le banc. Le gars va se décider et tu
vas t'en aller.
C'est la même chose pour les permis en bas. Tu arrives-là,
avec des papiers à faire compléter et il y en a 18 en avant de
toi. Si tu les connais un peu, si tu as un peu d'influence, tu tournes un bleu
autour de ton doigt, tu mets ça là; le gars va prendre tes
papiers: Bonjour monsieur! ça va comme ça.
M. CARPENTIER: Seulement une autre très courte question.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Je voudrais tout simplement dire qu'il
ne faudrait pas tirer des conclusions nécessairement parce qu'on a
mentionné le mot "fonctionnaire". Aussitôt qu'on dit
fonctionnaire, et salaire, il ne faudrait pas présumer
qu'automatiquement il est question de pourboires. Je voudrais préciser
cela.
Le député de Laviolette.
UNE VOIX: A Québec, ça ne se fait pas...
M. CARPENTIER: Vous représentez ou vous êtes directeur
d'une compagnie. Avez-vous eu l'autorisation de votre patron de venir ici
à Québec?
M. PITON: Tout à l'heure je vous ai dit que, si je n'étais
pas là, mon patron vendrait ses taxis, alors je fais ce qui me plait.
Point. Si ce soir je ne suis pas à mon poste, j'ai donné mes
ordres avant de partir et le patron va prendre mes ordres. C'est rare que l'on
voie un patron prendre des ordres de son employé, mais chez moi
ça se passe comme ça. Car j'ai un contrat qui stipule ce que je
dois faire. Ici, je représente en premier ma personne. Comme je l'ai
dit, je risquais mon emploi, non pas vis-à-vis de mes patrons, parce que
demain matin, j'arriverais devant mon patron et je dirais: Diamond, je n'en
veux plus et j'espère que M. Bossé en formera une autre. Je serai
le premier à lui emmener 20 voitures dans son association.
M. CARPENTIER: Je vous remercie. M. PITON: Merci.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Merci beaucoup. Votre collègue
de gauche a-t-il des commentaires?
M. PITON: Non, il vous remercie. Moi aussi, je vous remercie
beaucoup.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Alors, nous vous remercions.
M. PITON: Je vous en prie.
LE PRESIDENT (M. Séguin): L'Association métropolitaine des
petits propriétaires, M. Pro-novost. Un instant, excusez-moi. Je croyais
que les trois s'étaient levés ensemble. En avez-vous pour
longtemps?
M. Roger Beauchamp
M. BEAUCHAMP: Je ne sais pas. Quand j'aurai fini...
LE PRESIDENT (M. Séguin): Bien oui. Non, non.
M. BEAUCHAMP: Je suis ici depuis mardi matin. Il y en a qui ont
parlé pendant trois heures. Quand même je prendrais quinze
minutes.
LE PRESIDENT (M. Séguin): C'est cela. Allez-y.
M. BEAUCHAMP: Parfait. Moi, je suis un chauffeur. Je ne suis pas un
propriétaire. Je suis un fromage, comme on dit à
Montréal.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Voulez-vous donner votre nom, s'il vous
plaît, pour le journal des Débats?
M. BEAUCHAMP: Roger Beauchamp.
LE PRESIDENT (M. Séguin): M. Beauchamp. Et vous êtes
chauffeur.
M. BEAUCHAMP: Chauffeur pour la compagnie Diamond, que je n'aime pas
trop trop.
LE PRESIDENT (M. Séguin): D'accord.
M. BEAUCHAMP: Mais cela fait 19 ans que je travaille pour eux. C'est
comme un chez nous. Quand on n'est pas habitué ailleurs...
C'est que je ne trouve pas cela normal, pour un gars comme moi. Je
commence à vieillir. Je vais avoir 40 ans. Je n'ai de
sécurité dans rien. Cela fait 19 ans que je travaille pour la
compagnie Diamond et cela fait 19 ans que je me fais "crosser".
LE PRESIDENT (M. Séguin): II y a un langage qu'il faut maintenir.
Je ne voudrais pas interpréter vos paroles, mais disons, tout
simplement, que vous n'êtes pas heureux de la situation.
M. BEAUCHAMP: Non, je ne suis pas heureux. Je peux vous apporter des
faits réels. Il n'y a pas d'honnêteté. Ma soeur
travaillait
justement au "Diamond Dispatcher". Moi, je pouvais aller souper chez moi
et avoir un appel, m'en aller à la campagne. Je n'avais qu'à
appeler ma soeur, elle me donnait un voyage à la campagne. Mais moi, je
suis honnête. Je ne faisais pas cela. Je gagne ma vie honorablement,
comme tous les chauffeurs de taxi la gagnent. Il y en a qui ont fait des
affaires chez Diamond. Je ne donnerai pas de noms. Ils ont commencé
comme moi, avec une médaille et tout cela. Au bout de deux ans, il se
sont acheté deux ou trois permis. Des affaires de grève, La
Presse, je ne veux pas mentionner de noms, mais ce sont tous les mêmes
qui avaient la patente. Trouvez-vous cela honnête, pour un chauffeur de
taxi?
M. PAUL: Qu'est-ce que vous entendez par: Ce sont tous les mêmes
qui avaient la patente?
M. BEAUCHAMP: A La Presse, ils étaient en grève. Il y
avait des appels comme cela! Moi, j'étais chez Diamond. Je n'ai jamais
eu un appel. C'étaient toujours les mêmes numéros de
voiture qui les avaient. Eux, ils faisaient à peu près $100 par
jour et nous, nous faisions la "main street".
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'aurais une question, là-dessus.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de
Sainte-Marie, si M. Beauchamp consent.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Me permettez-vous une question?
M. BEAUCHAMP: Certainement.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Voulez-vous dire par là qu'à
l'intérieur de Diamond il y a un système de favoritisme pour
certains chauffeurs?
M. BEAUCHAMP: Certainement, je vous l'ai dit. Ma soeur travaillait
là, à la centrale téléphonique. Je n'avais
qu'à dire à ma soeur: Je suis en train de souper. Elle pouvait me
donner un voyage à la campagne, si elle l'avait. Si elle n'en avait pas,
elle me le donnait où elle pouvait. Je ne voulais pas de cela.
C'était toujours "la même gang", comprenez-vous?
Supposons qu'il y en avait huit. Ceux-là étaient
occupés, toujours à la même place. Les appels, ce sont eux
qui les avaient. Nous autres, les cadets... Cela fait 19 ans que je travaille
pour Diamond. M. Brunet est ici. C'était mon propriétaire de
maison. Il m'a demandé d'aller travailler pour lui. J'ai
été travaillé trois jours pour lui. Je n'ai pas
gardé la place parce que j'étais habitué ailleurs. Chez
Diamond, si tu ne voles pas, tu ne fais pas d'argent. C'est tout. Ce ne sont
que des vols de voyages. Sans cela, tu crèves de faim. Là-dessus,
il y en a qui sont encore plus haut placés. Ils avaient toute la
crème, comme on dit, dans le taxi. Je peux affirmer: Je peux apporter la
preuve. Voilà trois mois, nous nous sommes groupés, cinq
chauffeurs. Nous nous sommes même enregistrés à la nouvelle
radio qui se prête moins au "racket" qu'avant, mais moi, je trouve
qu'elle est pire qu'avant. Nous nous sommes enregistrés et là,
nous avons fait les bouffons.
Nous avons fait appeler une femme pour un voyage en dehors. Tous les
"stands" étaient couverts par nous, par un groupe de gorilles, si vous
voulez. Là, ils ont envoyé une voiture, même pas de la
compagnie Diamond, mais de la compagnie Veterans. Tous les "stands" de taxi
étaient couverts par nous. Ce n'est pas nous qui avons eu l'appel. C'est
un gars, je ne sais pas s'il payait le poulet ou autre chose, mais c'est lui
qui a eu l'appel. Même pas de notre compagnie, de la compagnie Veterans.
Trouvez-vous ça honnête?
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Le gars qui n'est pas favorisé paie
la même cotisation.
M. BEAUCHAMP: Je paie la même chose que les autres. Je paie ma
voiture à part ça. Quand ils ont mis une nouvelle radio dans la
voiture, ils nous ont augmenté de $1 par jour.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela répond à ma question.
M. BEAUCHAMP: Ils ne consultent jamais les chauffeurs. Ils ne demandent
pas la permission de Pierre, Jean, Jacques. C'est ça.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Est-ce que le député de
Sainte-Marie avait terminé? Le député de
Maskinongé.
M.PAUL: M. Beauchamp, vous avez mentionné que, depuis 19 ans,
vous travaillez pour la compagnie Diamond dans des conditions qui vous
déplaisent totalement.
M. BEAUCHAMP: Oui.
M. PAUL: Vous avez dit également que vous aviez reçu une
offre de M. Brunet, de Lasalle.
M. BEAUCHAMP: Oui.
M. PAUL: Pourriez-vous nous donner, si vous le voulez bien, les raisons
pour lesquelles vous auriez refusé de quitter un emploi que vous
n'aimiez pas?
M. BEAUCHAMP: Je n'ai pas compris votre question.
M.PAUL: Vous nous avez mentionné que, depuis 19 ans, vous
travaillez pour Diamond et que vous n'aimez pas les conditions de travail.
M. BEAUCHAMP: Je suis habitué à Diamond. Quand je suis
allé à la compagnie Lasalle,
c'était un autre système. Du moment que tu volais un
voyage, tu te faisais barrer pour une semaine. Au Diamond, il n'y en a pas de
ça; tu peux en voler des voyages à l'année. Il n'y en a
pas de système, tandis qu'à Lasalle il y en a un système.
C'est ça que je veux dire.
M. PAUL: Etes-vous allé effectivement travailler chez
Lasalle?
M. BEAUCHAMP: Je vous ai dit, tout à l'heure, que j'avais
travaillé trois jours, mais que je ne pouvais pas faire d'argent parce
que je ne pouvais pas voler. C'est clair? Pas voler le monde, voler un voyage.
Si je volais un voyage, on me suspendait. Tandis qu'au Diamond il n'y en a pas
de système: plus tu voles, plus tu fais d'argent.
M. PAUL: Alors, la discipline de Lasalle à l'endroit de ses
chauffeurs ne vous convenait pas?
M. BEAUCHAMP: Non. Vous ne me comprenez pas. Il y avait trop de
discipline pour moi, parce que j'étais habitué depuis trop
longtemps à Diamond. Que voulez-vous que je vous dise?
LE PRESIDENT (M. Séguin): Continuez, monsieur.
M. BEAUCHAMP: Autrement dit, Lasalle a un système. Au Diamond,
quand même tu irais faire un rapport: Le gars m'a volé un voyage.
C'est un de ses "chums" qui me l'a volé. Cela n'arrange rien. Il y a une
grève qui a duré peut-être 18 mois. Ce sont tous les
mêmes qui ont eu la crème. J'en connais qui n'avaient rien
je ne dirais pas leur nom mais, quand la grève a fini, ils
avaient trois permis de taxi.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Avec ce que vous dites là, vous
n'avez pas peur que Diamond vous mette dehors?
M. BEAUCHAMP: Quand même M. Diamond me mettrait dehors, je vais
aller travailler pour M. Blondin, fantôme. Il a une voiture, je vais
travailler de nuit et lui, de jour. C'est tout. Mon argent, je le fais sur la
rue, je ne me fie pas à Diamond.
Même si ma soeur était au téléphone, je n'en
voulais pas de ses appels.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Avez-vous d'autres observations, M.
Beauchamp?
M. BEAUCHAMP: Si quelqu'un me pose des questions, je vais
répondre.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Est-ce qu'il y a des questions?
M. BEAUCHAMP: C'est clair et net? Merci beaucoup de m'avoir entendu.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Je pense qu'on a compris. J'ai voulu en
passer trois, ce soir j'en passerai trois autres, si vous voulez. Si vous
voulez coopérer, messieurs! Je pense qu'on a eu une période, il
faut en entendre d'autres selon l'ordre du jour. Je ne vous refuse pas, quel
est votre nom pour que je m'en souvienne ce soir au cas où vous
changeriez de chandail?
M. LIPPE: J'ai parlé à M. Bossé...
UNE VOIX: Ce n'est pas M. Bossé qui mène ça.
UNE VOIX: Ce n'est pas M. Bossé qui mène, c'est le
président.
UNE VOIX: Si vous voulez donner votre nom au président pour ce
soir.
M. LIPPE: Mon nom est donné...
LE PRESIDENT (M. Séguin): Voulez-vous répéter votre
nom, s'il vous plaît?
M. LIPPE: M. Lippé.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Comme je vous disais tout à
l'heure, si vous voulez patienter, on va essayer de...
M. LIPPE: J'ai laissé mon auto...
LE PRESIDENT (M. Séguin): Vous allez en gagner $1,000 du fait que
nous allons avoir une meilleure loi. Cela vous vaudra peut-être $1,000.
J'ai fait erreur tout à l'heure et je voudrais revenir en
arrière. J'avais d'abord appelé M. Lecompte, ensuite on a eu
l'intervention de trois représentants chauffeurs qui se sont très
bien exprimés; je pense qu'on a bénéficié de leur
interprétation. J'ai fait erreur en disant l'Association
métropolitaine des petits propriétaires quand sur ma liste
tel que je l'avais annoncé avant le lunch c'est Taxi Lasalle
(1964) Inc. Nous allons entendre immédiatement M. Brunet.
Puisque les applaudissements se sont fait entendre, je vous demanderais,
au cours de l'exposé de M. Brunet, qu'on s'asseoie sur ses mains.
Taxi Lasalle (1964) Inc.
M. BRUNET: M. le Président, je vous remercie. MM. les membres de
la commission, j'aimerais changer mon mémoire et faire application pour
l'association unique. Il semble que mes concurrents sont tous d'accord que
ça va bien chez nous. J'aimerais entendre plutôt des gars de
Lasalle et je ne voudrais pas que vous pensiez que j'ai payé ces
gars-là pour venir vous dire qu'il semble que c'est bon vivre chez
Lasalle.
Je suis fier d'être à la barre de Taxi Lasalle surtout
aujourd'hui quand je vois de braves
concurrents chauffeurs qui me font un tel éloge. Mais, je
voudrais être le plus objectif, je voudrais prendre le moins de temps
possible. Mais, encore là, messieurs, le règlement no 6, tel
qu'émis, nous prouve, après tous les énoncés faits,
qu'il n'est pas acceptable tel quel.
Vous allez comprendre qu'à travers le Québec nous n'avons
pas tous les mêmes problèmes dans l'industrie du taxi. Les
problèmes à Montréal ne sont pas ceux de Québec, ne
sont pas ceux de la rive nord de Montréal, ne sont pas ceux de la rive
sud de Montréal ou d'autres régions. Il est normal qu'il faille
faire certains changements dans l'industrie du taxi. A ce moment-ci, je
voudrais vraiment être honnête et dire qu'à Montréal
il y a certaines modifications qui s'imposent. Par contre, au lieu d'employer
des solutions draconiennes, ça peut s'imposer par des manières
souples.
Je suis fier de Taxi Lasalle, messieurs; d'ailleurs, chez nous, nos
membres ont le droit de s'exprimer. Quant à vos questions, aucune ne
peut m'être pertinente. Chez nous, nous avons un petit comité
consultatif qui semble peut-être pour certains formé de types
comme ci, comme ça et comme ça. Mais, pour nous, ce sont tous des
gars intelligents à partir du premier chauffeur jusqu'à
l'employé qui représente Lasalle.
Le comité consultatif chez nous est formé de quatre
chauffeurs, quatre petits propriétaires d'une à quatre
automobiles, deux propriétaires de flotte de cinq automobiles en montant
et un représentant de la compagnie Lasalle dont la seule dictature est
l'imposition de cet employé parce qu'il assume quasiment toujours la
fameuse affaire du secrétariat, et cela prend du temps pour leur
éviter de perdre du temps. En plus de cela, cedit comité
consultatif a formé des sous-comités: sous-comité des
sports, sous-comité d'entraide, sous-comité des visites
industrielles, sous-comité, également, des visites aux malades.
Ce sont toutes des petites choses qui font que dans une compagnie on puisse
vraiment garder une harmonie et être sain. C'est normal, vous allez
peut-être m'accuser, comme vous avez accusé mes
compétiteurs, et j'espère que je ne les perdrai pas, parce
qu'à ce moment-là je vais perdre l'ambition de combattre, chose
que tout Canadien devrait conserver.
Si, en 1964, Brunet et sa famille, mon fils et mon épouse ont
acheté une coopérative avec 800 automobiles, coopérative
qui perdait de $25,000 à $30,000 par année sans avoir aucune
dette hypothécaire et que moi, ayant acheté ça en 1964,
j'ai formé une compagnie limitée, en vertu de la première
partie de la Loi des compagnies de la province de Québec, avec
énormément d'hypothèques sur le dos, je n'ai jamais connu
une année déficitaire, cela vous prouve je ne voudrais pas
vous faire croire que je suis bon administrateur parce que le jour où je
le croirai, ce sera probablement ma fin que du moins, j'y ai mis du
coeur, j'y ai mis du tigre, et chez nous tout le monde est égal. Que ce
soit un chauffeur ou un propriétaire de flotte, ils ont tous le
même droit de parole et le même égard. Mon bureau est ouvert
à tout le monde, en tout temps.
Messieurs, c'est vrai ce que les chauffeurs de taxi vous disent. C'est
vrai qu'ils travaillent fort, c'est vrai que ce sont eux qui doivent être
aidés dans le moment. Il faudrait se pencher sur le petit chauffeur.
Quand je vois votre tableau en avant, il y a une construction à faire
avec ça. Mais, par contre, on a oublié un carreau pour mettre
association de chauffeurs à côté. Mettez-le n'importe
où le carreau, pour autant qu'il puisse y avoir une liaison entre les
deux.
M. PINARD: Sur le tableau de gauche.
M. BRUNET: Le gros carreau rouge en haut, là.
Avant de passer à mon mémoire, j'aimerais peut-être
vous expliquer mon idée sur ça. On m'a reproché de ne pas
avoir fait d'intervention avant pour passer plus rapidement. Peut-être,
je ne sais pas, que certaines gens auraient aimé mieux cela,
connaître ma drôle de mentalité, quoi.
Je voudrais simplement que les associations demeurent telles qu'elles
pour la simple raison qu'on commence à reconnaître que tout le
monde veut rester comme on est là, mais ça prend une
réforme dans l'industrie du taxi. Vrai ou faux. Par le fait même,
qu'on ait une association de détenteurs de véhicules-taxis,
association qui devrait avoir un code d'éthique professionnelle. Sa
fonction serait de représenter les propriétaires auprès
des autorités supérieures ainsi que de négocier des
conditions de travail avec les chauffeurs.
Sur l'autre carré, association des chauffeurs ou syndicat de ci
ou de ça, mais il va falloir arriver à une solution. Je ne suis
pas un syndicaliste, je ne connais absolument rien dans les lois syndicales. De
l'autre côté, ce seraient les chauffeurs et à ce
moment-là c'est normal, des conventions collectives entre les deux et
puis, par le fait même, que l'association de propriétaires fasse
des revendications au gouvernement pour avoir des augmentations de taux quand
c'est le temps. A Montréal, nous avons eu une augmentation en 1966 et
remarquez bien, M. le ministre, qu'en 1969 des requérants, des membres
de Taxi Lasalle, propriétaires et chauffeurs ont fait une demande
à M. Saulnier et M. Saulnier nous a dit: Ecoutez un peu, on vient
d'augmenter les taxes municipales, faites donc la demande vous-mêmes
à la Régie des transports.
Nous avons fait notre demande directement à la Régie des
transports et cette dernière nous a répondu que c'était la
première fois qu'elle était saisie d'une demande faite sans
être approuvée au préalable par un conseil municipal. Donc,
c'est pour cela que ça a pris six ans avant d'avoir une augmentation. Si
on avait une association comme celle-là, on guérirait
énormément de bobos.
Je suis pour qu'on puisse être contrôlé par une
régie provinciale, oui, monsieur. Sherbrooke, qui est passé hier,
est formidable, mais ça leur a pris 25 ans. Encore là, c'est une
ville de 84,000 habitants. Il faut absolument comprendre qu'avec les
années on va se diriger vers cela, mais il ne faut pas brusquer les
choses. Je crois qu'on devrait commencer par l'agglomération la plus
difficile, la plus controversée, la plus mal nourrie. C'est vrai, ce que
les chauffeurs vous disent. Je n'endosse pas tout, mais il y a beaucoup de
vrai.
Nous ne pouvons pas répondre pour d'autres compagnies parce que
nous, de Lasalle, nous n'avons pas trop de flotte. Nous avons environ 1,265
automobiles et c'est réparti entre 1,015 propriétaires,
aujourd'hui. Notre gros pourcentage, c'est le petit propriétaire
artisan. Comme on n'a pas trop de flotte, on n'a pas les mêmes
problèmes que d'autres concurrents. C'est pour cela que je ne peux pas
me prononcer sur les autres.
Avant d'aller plus loin, M. le Président, j'aurais une question
pertinente à poser au ministre. Je suis sûr qu'il est assez homme
pour répondre. M. le ministre, êtes-vous pour une association
vraiment unique, telle que proposée dans le règlement no 6, oui
ou non?
M. PINARD: Je pense avoir été très honnête
envers tous les membres de la commission parlementaire dès l'ouverture,
mardi, en disant que le règlement no 6 était un projet de
règlement qui offrait des solutions à l'industrie du taxi pour en
arriver à mieux la rentabiliser, à mieux assurer la
qualité du service offert au public, à mieux humaniser les
conditions de travail de ceux qui vivent du taxi. Je pense qu'il y avait une
quatrième condition.
M. BRUNET: Y croyez-vous?
M. PINARD: J'ai un peu d'expérience, j'ai été
administrateur, comme homme public, d'un ministère. Je sais faire la
part des choses entre des recommandations qui sont faites, qui sont même
couchées dans des règlements ou dans des projets de
règlement, et ce qui devrait être finalement accepté comme
solution réaliste et efficace. Tenons pour acquis que le
règlement no 6 pose quand même des principes fondamentaux pour en
arriver à une réforme en profondeur dans l'industrie du taxi,
réforme demandée vous le savez mieux que moi, M. Brunet
à cor et à cri depuis plusieurs années. Vous avez
admis vous-même honnêtement qu'il fallait une réforme.
Il y a des principes fondamentaux pour lesquels je dois me battre comme
responsable du ministère des Transports et comme membre d'un
gouvernement, à moins qu'on ne me prouve que c'est à ce point
irréaliste, inefficace ou tellement en avant de son temps que ça
puisse être complètement inacceptable pour ceux mêmes
à qui je demanderai d'être des partenaires loyaux et efficaces
pour entreprendre cette réforme du taxi. Tout de suite je vous dis qu'il
me parait bien impossible de mettre en vigueur cette réforme du taxi
à même les conditions ou le contenu du règlement no 6 si je
n'ai pas, d'abord, cette loyauté et cette efficacité dans le
travail que devront donner ceux qui sont dans l'industrie du taxi, qu'ils
soient propriétaires d'associations de services, propriétaires de
flottes, locataires, propriétaires artisans ou chauffeurs.
S'ils sont pour boycotter cette réforme que le gouvernement
voudrait entreprendre, même si le gouvernement voudrait la pousser,
l'imposer au monde du taxi, alors que cela vous parait inacceptable,
pensez-vous que je serais un homme politique réaliste en recommandant au
conseil des ministres d'accréditer un règlement comme
celui-là? C'est pourquoi j'ai pris la précaution de dire: Nous
allons le déposer en commission parlementaire, à titre de projet
de règlement; nous allons défendre les principes fondamentaux qui
nous paraissent réalistes et qui sont à la base de la
réforme du taxi telle qu'elle nous a été demandée
et comme l'enquête Bossé l'a révélé.
Après que nous aurons entendu les parties
intéressées, nous pourrons juger le pour et le contre. Nous
serons peut-être en mesure de proposer d'autres hypothèses de
travail, comme nous l'avons fait mercredi matin. Je serai plus en mesure aussi
de juger il faudra mettre le temps qu'il faudra mettre, M. Brunet
et de ne pas être injuste envers qui que ce soit. Il faudra tirer la
ligne quelque part, il faudra que le gouvernement prenne ses
responsabilités. Il faudra que le ministre des Transports ait aussi le
courage de faire les recommandations qui s'imposent au conseil des
ministres.
Alors, si c'est sur cela qu'on peut s'entendre, moi, je suis prêt
à dialoguer avec vous, n'importe quand, et avec tous les autres.
M. BRUNET: Merci. Merci, M. le Président. J'aurais aimé
qu'il dise tout de suite: Je n'y crois pas. Cela aurait fini rapidement. Votre
réponse est très bien acceptée.
M. PINARD: Non, monsieur. Je n'ai pas dit que je n'y croyais pas. Parce
que ce serait vraiment trahir ce que je viens de dire, si vous me faites dire,
et si c'est répété, que je ne crois pas aux principes
fondamentaux de la réforme du taxi contenus dans le règlement no
6.
M. BRUNET: Pour revenir à notre mémoire, c'est normal que
tous ceux qui ont défilé ici veuillent demeurer tels qu'ils sont,
à titre d'associations privées. Par le fait même, on veut
garder nos identifications. C'est normal que nous ayons une marque de commerce,
nous, à Taxi Lasalle, qui est connue du public, qui est familière
au public depuis 1916, sous le nom Lasalle Taxi Stand, incorporée, en
1936, en association coopérative, et en formation de
compagnie limitée, en 1964. C'est normal que nous tenions
à conserver ce gros et ce beau nom.
L'article 627, appareils de télécommunication. Encore
là, messieurs, nous croyons que c'est insensé d'imposer...
Remarquez qu'on se répète constamment, mais nous avons tous
travaillé au même rapport et nous n'avons pas travaillé
à ce que nous avons entendu ici. Dans la région de
Montréal, je suis persuadé que, le moins des moins, sans abuser,
1,500 autos-taxis ne travaillent pas avec un système de
télécommunication. Chez nous, à Lasalle, j'en ai environ
350 qui n'ont pas de radio. Actuellement, vous avez au moins 200 taxis qui ne
font pas partie d'une association, qui sont sur la route. Quel serait, pour
eux, l'avantage d'avoir une radio? Ils n'en ont pas. On leur en imposerait une.
Cela ne tient pas debout. Je parle seulement de Lasalle et des types qui se
tiennent dans la rue. Dans les autres associations, comme Métropole et
tout cela il y en a 49 à Montréal c'est normal
qu'il y en ait un minimum de 1,500.
Le dispositif de contrôle. Encore là, messieurs,
l'idée est probablement bonne, d'enlever le système de doublage,
mais pourquoi ne pas laisser la chance aux chauffeurs de choisir vraiment leur
mode de travail? Si vous enlevez le doublage, commencez par en faire l'essai
l'été seulement, et laissez travailler les types de la
manière qu'ils l'entendent. Il y a des types qui sont passés ici
ce matin. Il y a trop de taxis. Il n'y a pas trop de taxis. Il y a trop de
chauffeurs. Il n'y a pas assez de chauffeurs. Donc le doublage, qu'on analyse
cela seulement l'été. Si ce n'est pas assez fonctionnel, je n'ai
aucune objection à rendre le règlement le plus fonctionnel
possible.
L'article 634, c'est normal. Il y a une date, et il dit le 9 juillet
1972. J'aimerais que, dans le règlement no 6, ce soit réellement
compris qu'on oublie l'affaire du 9 juillet 1972, l'acceptation du bill 23, et
qu'il soit dit la date de l'acceptation dudit règlement en vigueur pour
que les types puissent conserver leurs droits acquis, à partir de ce que
M. Dickey a dit hier soir, et en continuant constamment. Naturellement, il y a
un système à bâtir autour de tout cela.
L'établissement d'une centrale de contrôle, je crois qu'on n'a
plus besoin d'en discuter. Tous les gens en ont parlé. On va passer
par-dessus.
Les concessions. Les concessions, messieurs, cela ne nous fait ni chaud
ni froid. Cela vous surprend peut-être. Mais il y a un paragraphe, dans
le règlement no 6 de M. Bossé, que j'admire, qui a bien
pensé à cela, parce qu'il ne voulait pas de concurrence.
Article 6.270, il fallait que tout le monde appartienne à la
centrale, à l'association de services. Donc, messieurs, c'est une offre
de "give and take". On devrait imposer à tout propriétaire
d'appartenir à une association de son choix et, par le fait même,
abolir les concessions. Je peux même vous dire que dans certains cas,
ça va être pénible le service, mais il y a une classe de
gens dans l'industrie du taxi qui désirent voir les concessions, les
gros abolis et tout cela.
Qu'on les enlève les concessions, vous allez nous les remettre
à bras ouverts. C'est ce que je pense. J'espère 'me tromper.
Naturellement, M. Bossé, dans son rapport qui date du mois de
novembre 1970, nous avait dit: Un permis par 800 personnes. A ce moment, cela
nous a un peu choqués. S'il avait fallu compter vraiment, que donnait le
retrait de permis, un par 800 personnes? Il fallait en enlever, sur l'île
de Montréal, 3,187; une affaire de rien. Non, non, comptez, M.
Bossé.
M. BOSSE: On en a tenu compte aussi.
M. BRUNET: Vous en avez tenu compte, parfait. Donc, quand je vous ai
rencontré dans un débat télévisé, je vous ai
dit, M. Bossé: J'ai vu dans le journal La Presse le retrait de 1,500
permis. Vous m'avez dit: Jamais de la vie. Vrai? On parle de 300 ou 400. C'est
ça?
M. BOSSE: Quatre cent huit.
M. BRUNET: Parfait. Mais pour quelle raison, selon votre article 183,
groupe 2, dans l'agglomération de Montréal, allez-vous laisser
les nombres maximaux et minimaux à 600 et 700? Pouvons-nous le
corriger?
M. BOSSE: Je pense que dans le rapport Bossé tel qu'il a
été publié originalement il était écrit
textuellement que la situation idéale, recommandable, tenant compte des
diverses villes que nous avions visitées ou consultées,
était 1 par 800. C'était une norme raisonnable afin d'atteindre
la rentabilité.
Cependant, il est aussi dit, dans le rapport Bossé, que nous ne
devrions pas procéder radicalement. Autrement ce serait risquer de
chambarder l'industrie du taxi, ce que nous ne voulions pas.
Observez que dans le règlement il est question de 1 par 600 pour
l'ensemble du territoire de l'agglomération de la communauté
urbaine.
M. BRUNET: M. le Président, donc ce n'est pas normal qu'on fasse
un règlement et qu'on nous dise qu'on en enlève seulement 400 et
qu'on laisse la latitude d'en enlever plus.
Qu'on l'écrive tout de suite afin que l'on soit devant les faits
immédiatement pour savoir où l'on va.
Un type vous a dit hier que ce sont des écrits qu'ils veulent. Ce
sont des écrits que nous voulons.
En ce qui concerne une association par agglomération, vous
connaissez notre idée là-dessus, ce serait néfaste. Je me
joins à ceux qui sont passés ici pour vous dire que le service ne
pourrait pas être amélioré, au contraire.
II est vrai qu'il y a énormément de critiques qui se
dirigent vers les centrales téléphoniques, mais par contre ce
sont des compagnies comme toutes les autres. Nous nous efforçons
constamment d'apporter des améliorations et, quand quelqu'un essaie
d'apporter des améliorations, on ne peut pas lui demander plus.
Il y a un autre point, dans votre rapport, M. Bossé, article
6.280: cotisations annuelles. Imaginez-vous donc! D'ailleurs, ils en ont
discuté encore. J'arrive le dernier, pour discuter et ramasser seulement
les poussières, peut-être. Cotisations annuelles. Ce n'est pas
déterminé, rien. Là, on arrive, M. Bossé, avec des
contributions annuelles, certainement un minimum de $300 ou $400. Radio:
minimum, encore, de X centaines de dollars. M. Bossé, il faut penser
qu'il y a des petits propriétaires. Vous nous arrivez après avec
un cautionnement, $500.
Il y a un député, hier, qui a posé la question, il
est ici. Il a dit: Le cautionnement, ce n'est rien. C'est pour le nom
seulement. Non, non. C'est pour le nombre de voitures. C'est $500 par permis.
Le petit chauffeur, c'est $100. On est rendu avec un achat de radio, un
cautionnement, une contribution annuelle. Imaginez-vous. Et là, la
question de peinture noire, et ainsi de suite, ce sont des peccadilles. Mais
encore là, je peux assurer que l'entretien d'une voiture noire est plus
dispendieux. C'est un fait. Il faut l'avouer.
M.PAUL: M. Brunet, est-ce que vous oubliez le dôme et,
possiblement, le taximètre?
M. BRUNET: Pour le taximètre, je crois que, dans le
règlement, il n'y a absolument rien de marqué en ce qui concerne
le taximètre. Je pense qu'on s'est engueulé un petit peu pour
rien sur cela.
M. PAUL: N'y a-t-il pas un article, l'article 3.6, qui parle du
taximètre?
M. PINARD : C'est au sujet de la norme, qui porterait tel numéro.
Mais cela ne change pas...
M. BRUNET: On a dit que le règlement avait été
changé et qu'il était pire que cela avant.
M. BOSSE: Non, non. C'est la norme actuelle qui est prévue, tout
simplement, par le ministère de l'Industrie et du Commerce.
M. BRUNET: Donc, ce sont les mêmes taximètres qui sont
censés continuer. Est-ce cela?
M. PINARD: Absolument. A moins qu'on trouve quelque chose de meilleur et
qu'il soit prouvé que c'est meilleur, et pas plus cher.
M. BRUNET: Pour autant que ce soit accepté par les gars du
taxi.
M. PINARD: Vous serez consultés.
M. BRUNET: Naturellement, le gros problème de tout cela...
M. BOSSE: Sur la cotisation, M. Brunet, me permettriez-vous un mot? Vous
avez posé d'abord la question des cotisations. Si on retient
l'hypothèse, évidemment, de l'association unique, la cotisation,
si on n'en fixe pas le prix, c'est que l'assemblée
générale, tel que le règlement le prévoit, fixera
cette cotisation comme telle. Quant à l'achat de radios dont vous avez
parlé, d'autre part, c'est là une question sur laquelle les
techniciens se penchent. Les principes qui avaient été mis de
l'avant sont ceux-ci: vous savez que ce règlement ne s'appliquera
qu'à compter de novembre 1973, il n'est pas question de faire faire des
dépenses extraordinaires, comme certains l'ont laissé entendre,
déjà, à savoir un coût de $2,000, pour tenter
d'effrayer les gens quant au règlement.
Quant à la troisième partie de votre question, celle du
cautionnement, il est évident que nous avons pris bonne note des
diverses remarques qui ont été faites ici. Les opinions
diffèrent là-dessus. Mais je pense que c'est là le but de
la commission, d'entendre justement des remarques positives, même si
elles ont pour but de modifier le règlement.
M. BRUNET: Remarquez bien, M. Bossé, quand je parle de
cautionnement, dans le moment...
M. BOSSE: Les $500, là.
M. BRUNET: Nous allons continuer la compensation d'un permis,
d'ailleurs. Dans le moment, un permis coûte $6,000. C'était
jusqu'au 23 décembre, parce qu'aussitôt que le règlement no
6 est sorti, il y en a eu des permis à vendre. Là, cela commence
à descendre. On suggérait que le prix du permis, à
Montréal, soit déterminé d'après les ventes des
trois derniers mois, pour tirer une moyenne de cela. Tout le monde serait
satisfait. Je suis persuadé que ce serait équitable pour tout le
monde.
On parle également de l'abolition de la location, des 40 p.c, de
$1.65. Tout le monde est mélangé. Mais qui travaille dans
l'industrie du taxi? C'est vraiment le chauffeur. On devrait absolument lui
donner la latitude de choisir son mode de travail. S'il veut travailler
à 40 p.c., qu'il le puisse. S'il veut travailler à des conditions
supérieures à $1.65 l'heure, qu'il en fasse la demande encore.
S'il veut travailler à location, encore là, vous pouvez avoir le
même contrôle que le gouvernement fédéral vient
d'imposer concernant l'assurance-chômage.
Il y a une question de salaire de base et ces gars sont prêts
à faire des heures. On nous a dit, ce matin, qu'à Toronto le
permis vaut X milliers de dollars de plus qu'à Montréal, et les
gars font 12 heures par jour, six ou sept jours par semaine. Je ne pense pas
que nous soyons plus déprimés à Montréal, et notre
permis vaut
moins cher que ça. Nous en faisons, des heures. C'est un fait que
nos gars sont travaillants pour gagner leur vie.
M. BOSSE: Sur la question de location, me permettriez-vous d'intervenir
ou préféreriez-vous continuer?
M. BRUENT: Je préférerais continuer et vous me poseriez
des questions après. Parce que là, vous me faites perdre ma
verve.
M. BOSSE: Comme je vous sais "verveux"... M. BRUNET: Pas nerveux,
cependant. M. BOSSE: Non, "verveux".
M. BRUNET: II y a une question, le permis métropolitain. A
travers l'île de Montréal, il y a énormément de
municipalités, comme Verdun, qui désirent le permis
métropolitain. D'autres municipalités ne l'acceptent pas.
Encore là, il faudrait que les municipalités de
l'agglomération s'entendent pour pouvoir faire une chose
concrète, acceptable pour tous et logique. En dernier ressort, si on
adopte tout le règlement comme il est là, les associations n'ont
plus un mot à dire. Nous serions prêts à prendre notre
chapeau et à nous en aller, même si, nous savons que nos membres
seraient mécontents de nous voir partir et qu'ils sont heureux avec
nous.
Nous partirions moyennant le rachat de nos biens. Mais, encore
là, nous n'en voulons pas, nous ne voulons pas vendre nos affaires. Si
nous sommes entres dans cette entreprise, c'est que c'est un "challenge", c'est
la libre concurrence et c'est un commerce comme un autre.
M. PINARD: II est payant?
M. BRUNET: Je n'ai jamais eu à déclarer de
déficit.
UNE VOIX: N'en dites pas trop.
M. BRUNET: Le ministre, tantôt, va me demander mon bilan. Je ne
veux pas passer pour un menteur. En revenant à mes droits acquis, un
permis par personne, ce n'est pas logique. Qu'on donne le privilège
à une personne d'en avoir plus pour que cela puisse devenir une
flotte.
Une flotte de vingt voitures, c'est normal.
Les gars qui ont acheté les flottes petit à petit et qui
sont rendus, comme Brunet aujourd'hui je vais me faire critiquer tout
à l'heure à 54... Je ne les ai pas volées mais par
contre je les vendrai quand je voudrai. Mes chauffeurs sont des gars heureux.
J'en suis fier pour eux et je n'ai pas honte de mes chauffeurs.
A l'avenir, il serait logique, M. le Président, qu'on mette des
normes. Mais à ce moment-là on sait dans quel jeu on se lance.
Les flottes sont limitées à 20; à ce moment-là on
sait où on va. C'est comme pour le double emploi. Comme je vous l'ai dit
tantôt, il faudrait arriver à cela.
En ce qui concerne également l'article 157, je crois que vous
avez été assez humain sur ce point pour le comprendre. C'est
normal que la succession de la personne qui détient un permis puisse en
disposer de la manière qu'elle l'entend. Surtout je voudrais
revenir sur un sujet sans s'incorporer. Je crois que M. Bossé
nous a laissé l'impression que ce serait facile. Je comprends que ce
serait facile, mais il ne faudrait pas imposer à un petit
propriétaire d'être obligé de s'incorporer, dépenser
$350 de frais d'avocat et ainsi de suite pour pouvoir s'incorporer. Qu'on
accorde les droits acquis actuels dans l'industrie du taxi, c'est ce que nous
voulons. On ne veut pas grand-chose, c'est ça qu'on veut.
Pour que les associations puissent être régies, pour que ne
se passe pas ce que vous avez entendu ici, rectifiez les choses tout de suite.
Pourquoi ne pas en parler, de Lasalle? Pourquoi est-ce qu'on ne crie pas
à l'injustice à Lasalle? Il y a quelque chose et je ne sais pas
quoi. Je suis chez Lasalle et je ne sais pas pourquoi on ne crie pas. C'est
parce qu'on travaille et qu'on n'arrête pas de travailler. Qu'on soit
tous pareils. Quand un type n'écoute pas chez nous, nous ne sommes pas
des dictateurs mais par contre il suit nos règles de discipline. C'est
comme le monsieur a dit tantôt: Je n'ai pas été capable de
m'habituer à Lasalle, c'est trop sévère.
Un minimum de 60 heures par semaine. Encore là, je vois
très mal un tel règlement vu que dans Montréal je
parle pour Montréal, je ne voudrais pas généraliser
à travers la province, ce n'est pas mon boulot je peux vous dire
que nous avons énormément de propriétaires d'un certain
âge qui travaillent et qui sont fiers de leur boulot; ils ne font pas 60
heures par semaine, c'est vrai.
Vu qu'ils ne font pas 60 heures par semaine, ils ne sont pas
néfastes à l'entreprise du taxi. Leur voiture reste chez eux.
Pourquoi leur imposer de les faire travailler davantage, si on en enlève
seulement 400? Donc, c'est un droit acquis comme les autres. C'est comme le
type qui a un double emploi, Je peux vous montrer des affidavits que ces
pauvres gars ont acheté vraiment un taxi, un permis d'auto-taxi dans un
but futur, dans le but de faire du taxi supplémentaire après
leurs heures ordinaires de travail pour subvenir aux besoins de leur famille.
Si on adopte un règlement, il faudrait mentionner: A l'avenir, et garder
les droits acquis de ces gens.
En concluant, messieurs...
M. PINARD: M. le Président, seulement pour une rectification, M.
Brunet. Je pense qu'il n'est pas exact de dire que le règlement stipule
un minimum de 60 heures de travail, pour un homme.
M. BRUNET: L'automobile.
M. PINARD: Le minimum de 60 heures, c'est pour la mise en service du
véhicule-taxi.
M. BRUNET: C'est exactement ce que j'ai dit, M. le ministre. Par contre,
vous avez...
M. PINARD: Pour une meilleure qualité de service au public.
M. BRUNET: Chez nous j'ai énormément d'hommes d'un certain
âge qui ne vous prêteraient même pas leur auto à vous.
Ils ne veulent pas le prêter, ils ne veulent pas qu'un autre s'en serve.
Que voulez-vous? Remarquez bien, M. le ministre, que ce serait un honneur de
vous passer l'auto. Mais ces gars, leur mentalité risque...
M. PINARD: Je pense que vous me comprenez, M. Brunet. Il faut quand
même établir une norme quelque part sous forme de moyenne
annuelle, mais où tirer la ligne? Vous-même, vous dites que c'est
nécessaire d'avoir des normes pour avoir une industrie efficace et bien
dirigée. Alors où est-elle la ligne?
M. BRUNET: On pourrait mentionner: A l'avenir, dans les droits acquis.
Quand un gars se lancera dans l'industrie du taxi et viendra s'acheter un
permis on lui dira: Là, mon gars, tu t'achètes un permis
d'auto-taxi et puis il faut que ton véhicule fasse 60 heures d'ouvrage
par semaine au minimum. On le lui dira. Mais on ne peut pas leur imposer cela
à eux aujourd'hui. Il y a une affaire qui est bonne dans votre
règlement, protéger les petits chauffeurs. Les trois premiers
choix, c'est formidable. M. Bossé, je ne fais pas seulement critiquer.
En conclusion...
LE PRESIDENT (M. Séguin): En avez-vous long avant de conclure? Je
voudrais vous réinviter à huit heures et quart pour les
questions.
M. BRUNET: Je pourrais continuer plus tard.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Si vous concluez votre intervention,
nous pourrons passer aux questions à huit heures et quart.
M. BRUNET: J'aimerais mieux conclure avant les questions...
LE PRESIDENT (M. Séguin): D'accord.
M. BRUNET: ... afin d'avoir les idées en tête.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Vous en avez pour combien de temps,
deux minutes?
M. BRUNET: Tantôt, ça va prendre à peu près
dix minutes.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Non, mais pour conclure.
M. BRUNET: Pour conclure, dix minutes.
LE PRESIDENT (M. Séguin): La séance suspend ses travaux
jusqu'à huit heures et quart.
M. BRUNET: Merci, M. le Président. (Suspension de la
séance à 18 h 1)
Reprise de la séance à 20 h 30
M. SEGUIN (président de la commission permanente des transports,
des travaux publics et de l'approvisionnement): A l'ordre, messieurs !
Ajournement au 23 janvier
LE PRESIDENT (M. Séguin): Un instant, M. Brunet, avant de vous
repasser le micro. Pour l'information des membres de la commission et aussi
pour l'information du public, nous ajournerons ce soir jusqu'à mardi,
à 2 h 30.
Mardi, à 2 h 30, le secrétariat des commissions se
chargera d'inviter ou de convoquer cinq associations qui n'auront pas
été entendues jusqu'à maintenant, et une personne, ou un
chauffeur, parlant comme individu et non pas au nom d'une association. C'est
pour mardi de la semaine prochaine. C'est entendu que ces commissions sont
ouvertes au public. N'importe qui peut y assister, mais les seuls que nous
entendrons seront ceux qui auront été convoqués selon nos
listes sur lesquelles les associations et les individus sont
enregistrés. C'est sur cette liste-là qu'on choisira les
personnes. Mardi, nous commencerons à 2 h 30 et nous ajournerons quand
nous aurons entendu les cinq associations et l'individu convoqués. Pas
d'autres. C'est clair. Ne me dites pas, si vous arrivez mardi: J'arrive de
Montréal et il faut que j'y retourne ce soir. 11 faudrait que je sois
entendu aujourd'hui. Non. Si vous avez votre télégramme de
convocation, on vous entendra. C'est bien clair.
Nous ajournerons mardi, quand nous aurons terminé avec ce groupe,
à mercredi, le lendemain, à 10 heures. Et encore là, pour
le mercredi, il y aura des télégrammes qui seront envoyés
à cinq associations qui n'ont pas encore été entendues,
plus trois individus.
Jeudi, il n'y aura pas de séances de cette commission. Et
mercredi, nous annoncerons l'itinéraire ou le programme de la semaine
suivante. Et ainsi de suite.
Vous pouvez venir à Québec pour assister aux
délibérations, mardi et mercredi, mardi, à 2 h 30,
mercredi, à 10 heures, mais vous ne serez entendus que si vous avez
été convoqués par télégramme.
J'espère que c'est compris. Il n'y aura pas d'autres excuses. Il n'y
aura pas d'autres raisons, ni un voyage en Floride, ni un voyage en Californie,
ni un voyage d'urgence en Europe qui doit avoir lieu le lendemain. Non. On
trouvera des représentants dans ce cas pour être ici à
d'autres séances, au fur et à mesure qu'on convoquera les membres
ou les personnes impliquées dans l'industrie. Nous continuerons nos
séances publiques jusqu'à ce que nous ayons épuisé
la liste déjà enregistrée.
Un autre point que je voudrais souligner. Je reviendrai la semaine
prochaine là-dessus. Nous avons quelque 250 noms d'individus qui, au
cours des deux derniers jours, ont demandé à être entendus
par la commission. Je vous demanderais, à vous, comme individus, de tout
faire pour vous regrouper, c'est-à-dire que, si dans une région,
il y a cinq, six ou huit chauffeurs ou propriétaires de flotte ou
directeurs d'association ou propriétaires de taxis ou simples
chauffeurs, qui avez des problèmes communs, essayez de vous entendre
pour nommer un porte-parole pour les cinq et vous ferez part de cette entente
au secrétariat de la commission, à M. Jacques Pouliot,
secrétaire des commissions permanentes.
La convocation irait par la suite à la personne que vous aurez,
comme groupe d'individus, reconnue comme votre porte-parole. Il ne s'agit pas
d'entendre toutes les personnes qui ont un mot à dire sur le service du
taxi dans la province. Vous comprenez bien comme moi que cela devient quasi
impossible et cela devient une série de répétitions. Nous
voulons entendre tout le monde. Les individus auront leur représentant,
la personne pourra venir ici devant le Parlement et dire: Je représente
cinq, huit ou vingt chauffeurs de telle section et de telle région.
C'est bien compris, mardi deux heures trente. Les convocations seront
envoyées aux associations et individus qui seront entendus. Le mercredi
24 janvier à dix heures, le jour suivant; les convocations seront encore
envoyées pour ce jour-là. Si vous voulez arriver mardi vous ne
serez pas entendus mardi si vous êtes convoqués pour le mercredi.
Ce sera le mercredi que vous passerez. J'ajournerai, même si nous
terminons avant six heures de l'après-midi, au lendemain, même
s'il y en avait pour le lendemain qui seraient déjà
présents. Je ne les entendrai pas. Alors ne prenez pas la chance
d'être entendus au cas où. Cela ne marchera pas.
Taxi Lasalle (1964) Inc. (suite)
M. BRUNET: Merci, M. le Président. Tout ça pour vous dire
que nous administrons notre compagnie dans des cadres vraiment
socio-économiques, ce qui veut dire que nous savons...
LE PRESIDENT (M. Séguin): Un instant, je m'excuse encore. Je
voudrais, avant de terminer mes propos, faire la demande suivante, bien
gentiment. Après cet exposé que j'ai fait aux membres de la
commission, cet ordre du jour tel que proposé est-il acceptable? Je
voudrais que la commission l'accepte. S'il y a des commentaires contraires
qu'on m'en fasse part.
M. DEMERS: On a eu l'impression qu'on était mieux de
l'accepter.
M. BRUNET: Merci, M. le Président. Tout ça pour vous dire
qu'à Lasalle, nous administrons une compagnie en vertu de la
première partie de la Loi des compagnies et vraiment dans des cadres
socio-économiques, ce qui veut dire que nous savons vraiment partager,
diviser. C'est
vrai ce que vous avez entendu cet après-midi; M. Bossé
semblait surpris de ça. Il est vrai que Taxi Lasalle ou Gérard
Brunet a vraiment aidé un minimum de quelque 200 chauffeurs à
devenir propriétaires. Encore là, laissez-moi vous dire que c'est
ma plus grande fierté, j'en suis fier. Ils ne m'ont pas trahi, je n'ai
perdu pratiquement rien pour en avoir aidé environ quelque 200. Cette
transaction de centaines de milliers de dollars m'a peut-être
coûté, dans l'espace de neuf ans, environ $15,000 de perte. Donc,
il faut donner aux gars du taxi la chance de réussir, et j'en suis
très fier.
En terminant, messieurs, j'aimerais vous expliquer ce qui s'est
passé l'an dernier à Montréal et franchement on a
déjà senti une amélioration. L'an passé la
disparition, comme d'autres l'ont mentionné plus tôt,
d'autos-taxis sans permis, des spoutniks comme on les appelle, nous a
aidés énormément à travers toute l'île de
Montréal et même la rive nord et la rive sud. En plus de
l'augmentation que nous avons eue au mois de mai, cela a stabilisé un
peu. On n'est pas ici pour rejeter le règlement no 6, mais on veut qu'il
donne quelque chose à l'industrie du taxi. Ce qui presse le plus, je
crois, c'est d'être régis par un organisme provincial pour enlever
aux municipalités leurs propres manières d'agir et ainsi de
suite. Je suis persuadé que de cette manière toute l'industrie du
taxi à travers la province de Québec sera protégée.
Ce sera un genre de règlement uniforme.
Nous sommes absolument d'accord sur cela. Par contre, nous demandons
quelque chose. L'article 270 du règlement no 6 dit qu'il faut appartenir
à l'association. Nous tenons à ce que tout détenteur de
permis appartienne à une association de services de son choix. 2) Une
réglementation sévère pour contrôler les
associations de services et surtout pour éviter ce qui se produit dans
le moment, faire des genres de normes dans cet organisme qui sera probablement
une association en haut, pour créer une nouvelle association de
services. D'abord, tous les membres pourront en fonder une, s'ils en veulent,
mais qu'on mette des normes assez rigides pour qu'ils ne manquent pas leur
coup. Un minimum de 150 membres, par exemple, peuvent fonder une
coopérative ou n'importe quoi, compagnie ou coopérative ce qu'ils
veulent. De cette manière, ce sera de la libre concurrence et on
demeurerait quand même dans la libre entreprise.
Le permis métropolitain. Je vous l'ai demandé
tantôt. Quant aux types qui sont dans la région de
Montréal, toutes les municipalités, nous n'avons pas d'objection.
Il y a probablement certaines petites villes qui en ont, mais encore là,
il faudrait négocier avec chacune de ces municipalités. On sait
que la mode est aux agglomérations, aux communautés urbaines,
etc.
L'abolition des concessions, on vous l'a dit, cela ne nous fait rien
pour autant que vous nous accordez vous avez lu mon mémoire
la rubrique no 1. C'est donc dire que ce sera bénéfique
pour tout le monde. Je voudrais souligner un point en passant. Dorval est rendu
vraiment en commun. Dans le moment, on a énormément de plaintes
parce qu'il n'y a pas de contrôle à Dorval. Il faudrait voir
à mettre un contrôle à Dorval. 6) La formation des
mécanismes, dont la contribution serait assurée conjointement par
les propriétaires, les associations et les chauffeurs, pour leur trouver
des avantages sociaux. Je crois que cela s'impose et je crois qu'une telle
innovation sera éventuellement une des charges de l'association.
Une autre chose très importante: l'uniformisation des tarifs
d'autos-taxis à travers la région métropolitaine. Dans le
règlement no 6, je crois que c'est fait. Avec ces quelques suggestions,
en débutant par cela, on peut vraiment donner à toutes les
parties en cause, aux quatre catégories, aux chauffeurs, aux petits
propriétaires, aux propriétaires de flotte et aux associations,
tout ce qu'ils demandent, pour débuter et, entre-temps, mettre le
système d'association en marche.
J'aimerais revenir, avant de terminer, si vous le permettez, M. le
Président, sur la question de la fameuse association. Naturellement, je
verrais cela comme ceci: dans un carreau, le gouvernement; un autre carreau,
l'association des propriétaires, l'association des chauffeurs et plus
bas, tout relié à cela, l'association de services. Naturellement,
pour négocier des conventions collectives dans l'association des
propriétaires, ça prendrait un comité d'employeurs, des
gars qui engagent des chauffeurs. Pour négocier avec le gouvernement et
les associations, à ce niveau-là, il faudrait que le petit
propriétaire artisan soit quand même représenté.
D'ailleurs, rien n'empêche le comité de faire
énormément, à travers l'un ou l'autre. Je vous
remercie.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Je vous remercie, M. Brunet. Le
député de Dorion.
M. BOSSE: M. le Président, M. Brunet, nos divergences d'opinions
causées par les circonstances ne font pas de nous nécessairement
des adversaires. Je pense que nous avons eu l'occasion, à plusieurs
reprises, d'avoir des échanges là-dessus. Je vais essayer de
répondre aux principaux points que vous avez soulevés en les
réexpliquant parce qu'entre nous je pense qu'on connaît
déjà nos opinions.
Je voudrais dire auparavant qu'il y a une chose qui aurait
été fort souhaitable: que l'enquête ou le rapport
Bossé n'ait jamais eu lieu, ce qui signifie que ce qui aurait
été souhaitable, c'est qu'il n'y ait pas eu d'enquête ou de
rapport Bossé.
M. BRUNET: Au contraire.
M. BOSSE: C'est-à-dire que, si tout avait
bien été dans l'industrie, il n'y aurait pas eu
d'enquête comme telle.
Le gouvernement ne se retrouverait pas aujourd'hui avec une situation
qui je pense que tous les membres de la commission l'ont constaté
n'est quand même pas facile, comme vous l'avez admis
vous-même. Je vous remercie, pour le bénéfice que vous avez
donné à l'endroit de l'action gouvernementale et sans plus de
commentaire, je vais reprendre point par point les sujets que vous avez
soulevés.
D'abord, le système de location. Je vais expliquer ici pourquoi
abolir le système de location. Si l'on tient compte, par exemple, de
l'expérience qui a été faite avec les "Teamsters", dans le
domaine de l'organisation syndicale à Montréal, il y a eu une
décision du tribunal du travail pour un certain nombre de travailleurs
qui voulaient se syndiquer, des chauffeurs appartenant à une flotte
donnée. Etant donné que le caractère de salarié
n'était pas reconnu comme tel, en abolissant le système de
location, vous accordez le statut de salarié au chauffeur de taxi et
vous le soumettez à la Loi du salaire minimum. Et ici, je voudrais
être clair, quand on parle de la Loi du salaire minimum, il est
évident que c'est le minimum. C'est-à-dire que, dans une certaine
mesure, on répond un peu à votre demande dans vos explications
voulant que vous soyez en mesure de négocier avec un groupe donné
qui soit bien structuré, bien organisé.
M. BRUNET: Ce n'est pas la question, M. Bossé. Nous disons dans
notre mémoire de laisser le privilège aux chauffeurs de choisir
leur mode de travail. Encore là, s'ils veulent abolir la location, c'est
à eux de choisir. Ce sont eux qui oeuvrent dans l'industrie du taxi.
M. BOSSE: Je pense qu'il y a une certaine responsabilité qui
incombe quand même à un gouvernement responsable. Une
expérience a été faite, elle a été
tentée antérieurement. Une des difficultés majeures, je
voudrais bien qu'on me comprenne, je ne veux pas prendre une position
pro-syndicale en soi, c'est uniquement sur l'aspect de la structuration, afin
de permettre à des groupes, au lieu d'avoir des individus comme
chauffeurs de taxi, qui se trouvent non organisés, qui se trouvent pris
individuellement avec un problème vis-à-vis d'une contrepartie
qui, elle, a des moyens susceptibles de créer des conditions difficiles,
en abolissant la location, nous donnons des statuts de salarié et nous
permettons au gars, s'il le désire, au chauffeur de taxi, de
s'organiser. Ce n'est pas le rôle du gouvernement cependant, je pense
bien, de faire ce travail, de les organiser.
M. BRUNET: M. Bossé, sur cela, j'aimerais faire une mise au
point. Si c'est le rôle du gouvernement de faire quelque chose pour le
propriétaire de taxi, c'est son rôle de faire quelque chose pour
le chauffeur aussi. C'est cela qu'on veut dire.
M. BOSSE: Vous seriez donc d'accord que, par exemple, le gouvernement
impose une forme d'organisation afin de permettre... Je vous remercie, c'est ma
réponse sur la question de la location.
Quant au permis métropolitain, vous étiez d'accord, comme
vous l'avez dit. Vous étiez d'ailleurs présent à la
réunion du 18 novembre où bon nombre de représentants de
la région de Montréal avaient semblé faire
l'unanimité là-dessus.
En ce qui a trait à la compensation, je pense que vous avez
déjà entendu les commentaires du ministre là-dessus,
compensation en ce qui a trait aux possibilités de négociation
concernant l'équipement, les associations existantes, etc. L'intention
gouvernementale, exprimée antérieurement par le ministre, n'a
jamais été de telle nature qu'elle soit injuste à
l'égard des parties qui se sentiraient lésées ou se
croiraient lésées. En ce qui a trait aux permis, un par
personne... vous êtes d'accord...
M. BRUNET: Excusez-moi un instant. En ce qui concerne la
rémunération, la compensation, il faudrait être
précis.
M. BOSSE: Je ne peux engager personne.
M. BRUNET: II faudrait vraiment trouver un mécanisme pour pouvoir
atteindre le juste milieu du prix du permis des trois derniers mois, sortir une
moyenne.
De ce fait, si vous faites cela, sans reconnaître que c'est
négociable, vous trouvez un marché négociable et les
chauffeurs vont pouvoir s'acheter un permis comme ils vont vouloir parce que ce
prix va être garanti. Là, vous allez faire quelque chose pour le
petit chauffeur. Cela va être facile de le faire financer avec des
intérêts bancaires.
M. BOSSE: En ce qui a trait à l'autre question du double emploi,
nous avons retenu et nous l'avons déjà exprimé
antérieurement l'une de vos recommandations personnelles à
l'effet de procéder, s'il y a lieu, au retrait des permis par le
volontariat en tenant compte des statistiques que vous aviez
établies...
M. BRUNET: Un instant, ne mélangez pas la question. Le double
emploi, c'est simplement pour le type qui a un permis. Dans le
règlement, il est dit qu'on rachète son permis. Il a jusqu'en
1974 pour choisir. Est-ce vrai?
M. BOSSE: Là, on a retenu...
M. BRUNET: Oui, je comprends bien que vous avez retenu...
M. BOSSE: Le ministre a déjà fait une déclaration
dans ce sens, que, préférentiellement, au lieu de procéder
selon la modalité exprimée...
M. BRUNET: Je ne veux pas que vous reteniez seulement.
M. BOSSE: ... dans le règlement, c'est que votre propre
recommandation, qui est de procéder d'abord par le volontariat,
c'est-à-dire le retrait volontaire, vous-mêmes, vous aviez
exprimé antérieurement qu'il se faisait, par exemple, à
Montréal, quelque 600 transferts par année.
M. BRUNET: Disons que, l'an passé, c'était le chiffre,
c'était au-delà de 600.
M. BOSSE: On a tenu compte de cela. On a retenu très
fortement...
M. BRUNET: Donc, on a six mois, on en a 400 de moins.
M. BOSSE: Ne m'en faites pas dire plus. Disons qu'on a retenu cela.
En ce qui a trait aux droits acquis, c'est clair dans la
déclaration ministérielle et dans la déclaration
antérieure du ministre qu'il y aura indexation et que le prix du permis,
pour l'ensemble de ceux qui voudront se départir du permis, sera
à la valeur marchande des 8 ou 9 juillet 1972.
M. BRUNET: M. le Président, si vous me permettez, j'ai
noté cela hier soir, quand M. Dickey a parlé, concernant les
droits acquis pour le fameux "pocket number", je crois que c'est censé.
Mais il faudrait ajouter aussi à cela que les anciens chauffeurs, si on
les a endurés sans cautionnement, on continue à les endurer,
c'est aussi un droit acquis. Les nouveaux, ils sauront qu'il faut
déposer $100. Mais ils n'ont pas d'affaire à déposer $100
parce que, lorsqu'ils sont entrés dans l'industrie du taxi, on ne leur a
pas imposé $100 de dépôt.
M. BOSSE: Quant aux 60 heures minimales de service, un problème
que vous avez soulevé, j'aimerais que vous fassiez une proposition
concrète, M. Brunet, là-dessus, en tenant compte du service au
public et de l'obligation qu'a un transporteur public, qui détient un
permis exclusivement parce que c'est exclusif à ceux qui sont
détenteurs.
M. BRUNET: Exactement. M. Bossé, il faudrait recommencer. Cela
peut être un peu long mais cela me fait plaisir.
M. BOSSE: Non, mais sans être trop long, voulez-vous faire une
proposition concrète?
M. BRUNET: Non, cela m'a pris trois jours pour m'asseoir à cette
chaise; j'espère que, lorsque je la quitterai, j'aurai répondu
à toutes les questions.
Mais en ce qui concerne les permis, quelle question me posiez-vous? Aux
60 heures! Parfait.
M. BOSSE: J'ai dit en ce qui a trait à l'utilisation de la
voiture,...
M. BRUNET: Disons que c'est normal.
M. BOSSE: ... il y a un minimum de 60 heures par semaine.
M. BRUNET: Je crois que le règlement no 6 a vraiment
été basé sur le mot "privilège". A l'article 159,
je crois, on explique ce qu'est le privilège. Vu que c'est un
privilège, il n'y a pas de droit acquis, de fling-flang, etc. Cela part
de là. Mais parmi nos gars qui ont oeuvré dans l'industrie du
taxi j'aimerais bien mieux ne pas être obligé de dire cela
au micro, vous comprendriez plus facilement nous avons des personnes
âgées qui ont vraiment fait du taxi leur vie. Ces gars ne font
plus 60 heures par semaine.
Ils le font quand il s'entendent, mais, au retrait de ces permis, quand
ils voudront les vendre, les nouveaux pourront le faire et vous pourrez
l'imposer. C'est un autre droit acquis. C'est logique.
M. PINARD: Une précision, M. Brunet, là-dessus. Vous avez
répondu, cet après-midi, à une question de même
nature, qu'il s'agissait de personnes âgées...
M. BRUNET: Oui.
M. PINARD: ... mais qu'elles ne voulaient pas laisser conduire leur
voiture par d'autres chauffeurs.
M. BRUNET: Exactement.
M. PINARD: Bon. Est-ce que, par hasard, il y aurait quand même des
personnes âgées qui seraient prêtes à faire conduire
leur voiture par d'autres chauffeurs pour ne pas subir une perte de revenus
plus ou moins considérable?
M. BRUNET: Actuellement, vous en avez certainement qui utilisent des
chauffeurs, qui donnent de l'emploi à des chauffeurs, oui. Par contre,
la plupart du temps, je crois que ce type qui a oeuvré pendant des
années et des années, lui, travaille seul sur sa voiture et c'est
vrai qu'il ne sort pas quand il fait mauvais.
M. PINARD: II s'agit d'un artisan, dans ce cas-là.
M. BRUNET: Oui.
M. PINARD: Quel est le nombre d'artisans parmi les chauffeurs de taxi
à Montréal? Avez-vous une statistique?
M. BRUNET: Moi, je peux répondre pour mon association. Disons que
chez nous, il doit y avoir 800 artisans.
M. PINARD: Sur un total de?
M. BRUNET: Sur un total d'environ 1,265 automobiles, il y a 800
artisans. Cela comprend environ 1,015 propriétaires. Je peux vous donner
des chiffres au 30 juin dernier, ça va être plus précis;
c'est 1,001 propriétaires et 1,253 voitures. Cela a été
inscrit dans une brochure.
M. BOSSE: Mais vous comprendrez la difficulté d'essayer dans un
règlement de faire un consensus. Si, d'une part, on a mis un minimum de
60 heures, évidemment, il faut tenir compte du service au public.
D'autre part, il y a des gens qui avaient interprété que l'on
voulait les obliger à faire moins de 60 heures, alors que c'est
l'inverse. Alors, ce n'est pas la personne, c'est la voiture. Vous avez compris
cela, vous, très vite.
M. BRUNET: On l'a compris.
M. BOSSE: J'espère que tous vos membres ont compris ça
aussi parce que j'ai recueilli certains feuillets qui ont été
distribués lors de la réunion au Plateau et ce n'est pas du tout
ce qu'on disait sur le feuillet. Je ne connais pas l'auteur et vous savez que
je ne suis pas le genre de type à porter des accusations contre qui que
ce soit sans en être bien sûr.
Cependant, il y avait des circulaires.
DES VOIX: Oh!
LE PRESIDENT (M. Séguin): A l'ordre, messieurs! Pouvons-nous
continuer sur le ton que nous avions il y a 25 secondes? Je demanderais au
public de restreindre son appréciation ou ses dénonciations.
M. BRUNET: M. le Président, j'aimerais répondre à
M. Bossé qui contourne l'affaire, mais qui dit vraiment que j'en suis
responsable.
M. BOSSE: Non, non, pas du tout, au contraire. Je dis que je ne peux pas
affirmer cela.
M. BRUNET: M. Bossé, je n'ai absolument rien à faire dans
ça.
M. BOSSE: Je sais, M. Brunet, que vous n'avez rien à voir
personnellement avec cela. Ceci étant dit, en ce qui a trait au
contrôle à Dorval, si vous avez bien lu le règlement, vous
avez bien compris aussi qu'il y a là une agglomération à
l'aéroport qui comporte aussi un "affectateur", donc un "dispatcher" qui
réglerait le problème.
Evidemment, il y aura l'autre partie du problème à
régler. Nous avons eu l'occasion aussi au niveau du ministère de
rencontrer les représentants du ministère des Transports
fédéral sur la question des $0.50 et des $0.25. Bon.
En ce qui a trait à un autre point, c'est le dernier que j'ai
retenu, l'uniformisation des tarifs, je voudrais vous rappeler ici que, sans en
avoir l'air, c'est bien évident aussi que nous avons participé de
très près à essayer de régler aussi ce
problème sans faire de bruit et sans faire de manchettes. Si, par les
jours qui courent, il y a des manchettes, soyez sûrs que ce ne sont pas
toujours les mêmes. Je n'ai jamais vu quelqu'un se promener avec une
pancarte, disant "Bossé nous a aidé à uniformiser les
tarifs".
Cela étant dit, M. Brunet, je tiens à vous
remercier...
M. BRUNET: Peut-être que ce serait à faire. Vous
mériteriez, si vous nous donniez tous nos droits acquis, qu'on
l'écrive en gros dans les journaux.
M. BOSSE: M. Brunet, je tiens à vous rassurer, cependant, sur la
question de quatre passagers dans la voiture. Dans le règlement, cela a
peut-être été inscrit comme ça, mais c'est
précisément pour ça que nous vous avons consulté.
Quant à moi et au comité avec lequel je travaille, c'est certain
que quatre passagers, ça nous paraît aussi une autre
banalité. Par exemple, en ce qui a trait aux ceintures de
sécurité, il n'a jamais été question de forcer le
passager à s'attacher. Il n'est pas en avion.
Peut-être qu'un jour ou l'autre ça viendra. Là, il
s'agit uniquement de l'inviter. M. Ed-monston, ce matin, nous a
démontré que nous avons quand même une certaine
responsabilité, du point de vue gouvernemental, d'essayer d'assurer la
sécurité du passager.
M. BRUNET: II avait certaines raisons.
M. BOSSE: Pour moi, je tiens à vous remercier de votre
collaboration et de votre bel esprit de coopération. Vous nous avez
laissé entendre, dans votre mémoire et dans des rencontres
antérieures, que vous étiez prêt à collaborer avec
le gouvernement dans la mesure du possible pour améliorer les conditions
des travailleurs du taxi, des employés et de ceux qui oeuvrent dans le
taxi.
Je pense que vous n'êtes pas le principal responsable des choses
qui se sont produites antérieurement.
M. BRUNET: Pas le principal, mais j'en suis un.
M. BOSSE: Non, au contraire, je pense que vous êtes un de ceux qui
ont essayé de corriger la situation. Je dois quand même,
jusqu'à un certain point, vous donner le crédit de cette partie.
Le problème reste, quand même, assez entier, à
Montréal en particulier.
Je vous remercie et je m'excuse d'avoir été un peu long,
M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de
Maskinongé.
M.PAUL: M. Brunet, pourriez-vous nous dire si les propriétaires
de taxis, qui sont membres de votre compagnie, sont également
détenteurs d'actions de la compagnie?
M. BRUNET: II me fait plaisir de répondre à ça.
J'aurais dû vous dire plus tôt que, nous aussi, à la
compagnie Lasalle, nous avons subi un regroupement. Au mois de novembre
dernier, nous avons formé une corporation qui s'appelle Brunet-Lasalle
Corp., en vertu de la première partie de la Loi des compagnies, qui
englobe Taxi Lasalle, Garage Rockland, Amore Entreprises, Lasalle Auto Park,
Sterling Insurance Co. of Canada, et Station de service Lasalle.
M. PAUL: Est-ce que ces garages sont seulement pour le
bénéfice et avantage des membres de votre association ou s'ils
desservent également le grand public?
M. BRUNET: Ces garages desservent le grand public, mais ceux qui ont la
priorité de service, ce sont les taxis.
M. PAUL: Pourriez-vous me dire, M. Brunet, quelle est la
procédure à suivre pour celui qui veut entrer chez vous et quelle
est la procédure pour en sortir comme membre?
M. BRUNET: Pour entrer chez nous, il faut qu'il signe un contrat
d'adhésion, c'est normal.
M. PAUL: Pour une période de?
M. BRUNET: Aucune période, il peut laisser le lendemain. Nous lui
remettons l'argent au prorata versé. Même sur ses assurances.
M. PAUL: Quel est le montant de la cotisation mensuelle que vous exigez
de vos membres?
M. BRUNET: Chez nous, nous avons cinq catégories. Nous avons,
dans la première catégorie, celui qui a beaucoup d'accidents; il
paie $86 par mois, moins $3 s'il paie avant le 10 du mois, ce qui fait $83. Et
sur ça, il y a $46.50 d'assurances, qui, au bout d'un an, coûtent
seulement $558 pour $500,000 d'assurance, et puis, pour l'assurance-feu et vol,
$50 déductibles.
M. PAUL: La contribution vous me corrigerez serait
à peu près de $30 par mois.
M. BRUNET: De $36.50 par mois.
M. PAUL: J'ai très apprécié l'exposé que
vous avez fait. Ce qui me frappe, c'est que vous ne semblez pas craindre, vous
non plus, la concurrence dans le service.
M. BRUNET: Pauvre monsieur, c'est normal! S'il n'y avait pas de
concurrence, nous n'aurions plus le droit de vivre.
M. PAUL: Mais vous vous opposez énergi-quement, et pour cause,
à une association unique?
M. BRUNET: C'est normal. Est-ce qu'on peut se permettre de nous
étatiser de la sorte? Je ne veux pas employer le mot, mais ça
veut dire ça. Personnellement, s'il faut il y a des types fiers
chez nous qu'on me paie d'après le bilan et avec un "good will",
je ne pourrai pas m'y opposer, mais ça me ferait quelque chose pour mes
chauffeurs qui veulent avoir cette fameuse lumière de toit. Ils sont
fiers; le nom Lasalle Taxi n'appartient pas qu'à Gégard Bru-net.
C'est pour ça qu'à Brunet-Lasalle Corporation on donne des parts
gratuitement à nos chauffeurs, propriétaires et employés
qui ont fait au moins trois ans, du portefeuille de la famille Brunet.
M. DEMERS: C'est plus fort que le gouvernement.
M. PAUL: M. Brunet, si j'ai bien compris le résumé de
votre mémoire, vous ne vous opposez pas au principe d'une
réglementation dans l'industrie du taxi?
M. BRUNET: Aucunement.
M.PAUL: Sauf que vous tenez, et avec raison, à ce que les droits
acquis soient sauvegardés pour vos membres et pour tous ceux qui
oeuvrent dans le taxi, à Montréal surtout?
M. BRUNET: Sur toute la ligne, monsieur.
M. PAUL: Sur toute la ligne. Par contre, pour ceux qui entreront dans
cette profession à l'avenir, vous ne mettriez pas d'objection à
ce que certaines clauses que l'on retrouve actuellement dans le
règlement s'appliquent à eux?
M. BRUNET: Personnellement, non.
M. PAUL: Est-ce que c'est l'opinion de vos membres?
M. BRUNET: Je crois que nos membres seraient pour cela.
M. PAUL: M. Brunet, si la commission en venait à un consentement
unanime ou majoritaire pour qu'un comité soit créé,
à la fin de nos délibérations, pour analyser de plus
près toutes les hypothèses ou les recommandations qui ont
été émises et pour voir jusqu'à quel point le
règlement aurait besoin d'être modifié, seriez-vous
prêt à agir comme conseiller ou à être membre d'un
tel comité pour le succès de la réglementation de
l'industrie du taxi spécialement à Montréal?
M. BRUNET: J'accepterais volontiers, pour autant que tous les
éléments de l'industrie du taxi soient représentés;
les chauffeurs, les petits
propriétaires, les propriétaires de flottes. J'accepterai
pour autant qu'on me déléguera et que les types auront confiance
en moi pour les représenter.
M. PAUL: Est-ce que vous verriez un avantage, M. Brunet, à ce
qu'un tel comité soit créé?
M. BRUNET: Assurément monsieur.
M. PAUL: Je vous remercie, vous et les membres de votre association.
M. BRUNET: Merci, M. le député.
LE PRESIDENT (M. Séguin): M. le ministre. Le député
de Napierville-Laprairie.
M. BERTHIAUME: M. Brunet, vous oeuvrez dans le taxi depuis 1964,
à ce que vous nous avez dit; vous avez sûrement une
expérience assez considérable. On a entendu parler, depuis
quelques jours, d'une chose qui inquiète plusieurs
députés, cette fameuse question des menaces. Avec votre
expérience, est-ce qu'il y a quelque chose que vous pouvez ajouter
à ce que vous avez entendu vous-même là-dessus, des
explications?
Je vous pose cette question parce que, dans des conversations
privées, vous comme d'autres d'ailleurs, avez été
personnellement accusé.
M. BRUNET: Je suis persuadé que certaines personnes ont
reçu des menaces. Je crois M. Pronovost quand il a dit cela à la
télévision. Je crois M. Dickey qui l'a dit également.
D'ailleurs, je pense que le type le plus frappé par les menaces, c'est
moi. On a menacé mon comptable, je ne sais pas quel appel
téléphonique. J'ai perdu un employé qui n'a pas
été capable de faire face à la musique et qui a
laissé son emploi, lundi. C'est fort !
M. BERTHIAUME: Croyez-vous que ces menaces ont été si
graves qu'un nombre substantiel de chauffeurs je pense à eux en
particulier ont pu hésiter à venir témoigner devant
la commission parlementaire?
M. BRUNET: Non, je ne crois pas que ce soit à ce niveau. Mais
encore là, il faut avoir assez de nerf pour ne pas s'occuper de menaces
faites par téléphone. Le type qui veut tirer sur vous ne vous
téléphonera pas. Mais je n'aime pas, par exemple, que l'on ennuie
mon épouse; je ne veux pas que l'on s'en prenne à mon
garçon. Je peux être aussi violent que les autres parce que je
suis un être humain et un Québécois.
M. BERTHIAUME: Merci.
M. BRUNET: Hier soir, j'ai eu une discussion avec M. Bossé
à ce sujet et je crois qu'il avait été mal informé.
Mais je pense qu'il m'a compris.
M. BOSSE: L'intention, je pense bien, était claire,
c'était d'éviter qu'on retrouve ce climat de violence morale.
C'est tout.
M. BRUNET: Mais, est-ce que, pour votre intervention chez Brunet, hier
soir, cela a ramené un climat?
M. BOSSE: Je le souhaite.
M. BRUNET: Non, mais est-ce que le fait d'avoir parlé à
Brunet, hier soir, a ramené un climat de sérénité,
et ainsi de suite?
M. BOSSE: Je le souhaite. En fait, nous nous sommes souvent
parlé. Et M. Brunet peut dire que, depuis le début de
l'enquête jusqu'à aujourd'hui, nous avons eu des rencontres
très très fréquentes.
M. DEMERS: Le bill omnibus.
LE PRESIDENT (M. Séguin): II ne faudrait pas sauter aux
conclusions, dire qu'il y a une société d'admiration
mutuelle.
Le député de Lotbinière.
M. BELAND: M. Brunet, d'abord je vous félicite pour votre
rapport, et j'aurais une question à vous poser. J'ai
écouté attentivement, au fur et à mesure, et cela s'est
passé dans un climat tel, que je ne poserai pas tellement de
questions.
Demain matin, parmi tous les chauffeurs sous votre égide, si la
moitié devenaient des salariés, les services à la
population auraient-ils tendance à se détériorer ou s'ils
demeureraient les mêmes?
M. BRUNET: Franchement, c'est une bonne question à laquelle je ne
pourrais par répondre. Si tout le monde devait travailler de la sorte...
Je suis contre l'imposition d'une chose. Il faut la faire accepter par le
groupe en question, par les chauffeurs. S'ils acceptent ce mode de travail, si
c'est plus avantageux de travailler avec un minimum de $1.65 l'heure et que les
chauffeurs travailleront de la manière qu'ils désirent.
Ou s'ils choisissent un autre mode de travail, 40 p.c, l'allocation.
Encore là, je comprends que ça prend des normes pour pouvoir les
suivre. Il faut se mettre une chose dans la tête. Tous les chauffeurs de
taxi ont vraiment hâte de faire partie, à parts égales, des
citoyens canadiens, surtout québécois, sur le plan des taxes et
ainsi de suite. Ils veulent être reconnus comme citoyens à part
entière.
M. BELAND: Mais, compte tenu de la situation qui aurait existé
dans d'autres domaines c'est ce qui m'a porté à vous poser
cette question dans d'autres domaines, la motivation a eu tendance
à diminuer lorsqu'il y a eu un transfert de cet ordre. C'était
pour ça que je vous posais la question.
M. BRUNET: Si cette imposition venait brimer la logique, je suis
persuadé que le service s'en ferait sentir.
M. BELAND: Merci .
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de
Sainte-Marie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. Brunet, vous avez un beau rapport,
très intéressant. En vous écoutant, il ne semble y avoir
aucun problème à Montréal, chez vous, du moins. Je
voudrais vous demander une chose.
Est-ce que tous vos chauffeurs travaillent sur une base de location ou
s'il y en a qui travaillent au pourcentage?
M. BRUNET: Non, c'est le choix du propriétaire de faire
travailler son chauffeur comme il l'entend. Nous avons de la location et du
pourcentage. Je crois que, dans le moment, et c'est normal, il y a plus de
location que de pourcentage, mais nous avons encore quelques petites flottes
qui ont conservé le système de pourcentage. Elles
perçoivent les rentes, elles perçoivent tout.
Et pour l'allocation, nous sommes seulement obligés de nous
conformer aux exigences de la loi de l'assurance-chômage.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous semblez avoir beaucoup
d'expérience. Vous pouvez probablement me dire ce qui est plus
avantageux pour un chauffeur. Le chauffeur, chez vous, qui marche par
système de location ou au pourcentage, d'après vous, qu'est-ce
qui est plus avantageux pour lui?
M. BRUNET: Avec le "spirit" d'un travailleur comme ceux que vous avez
vus ici, c'est normal que le gars qui fait douze heures, il va lui rester plus
en louant son automobile. Je le crois vraiment. D'ailleurs, j'ai eu un
chauffeur qui me donnait 40 p.c. et il m'en restait bien plus, à 40 p.c.
pour le patron, qu'il n'en restait au chauffeur.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne veux pas vous mettre en contradiction.
Un homme a toujours le droit de changer d'idée, mais je me souviens que
chaque fois que vous êtes passé à la
télévision je vous ai toujours considéré comme un
type qui connaît le problème du taxi, vous êtes dedans. Vous
êtes probablement un de ceux qui connaissent à peu près le
plus tous les problèmes du taxi dans la ville de Montréal. Je
vous ai déjà entendu dire que pour le chauffeur qui marchait
à 40 p.c. c'était plus avantageux, parce qu'il était
certain de retourner chez lui avec au moins quelques piastres dans ses poches.
Peut-être que vous avez changé d'idée depuis.
M. BRUNET: Je n'ai jamais changé d'idée.
Disons que le nouveau chauffeur qui s'en vient dans l'industrie du taxi,
soyons d'affaires le moindrement, pour lui, à ce moment-là, il
vaut mieux apprendre le métier de chauffeur de taxi au détriment
du patron que de louer une automobile et de perdre de l'argent. Mais
aussitôt qu'il sait faire du taxi, il s'en va à la location.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Alors, à 40 p.c. au début,
lorsqu'il apprend le métier, c'est plus payant pour le chauffeur et
c'est moins payant pour le patron. C'est cela que vous avez dit?
M. BRUNET: C'est normal.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Maintenant, on parlait tantôt des
membres qui peuvent acheter des actions chez vous. C'est cela que vous avez
dit. Est-ce que je peux vous demander combien il y a de membres qui ont des
actions chez vous?
M. BRUNET: Données ou achetées?
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous disiez que vous donnez des actions
aussi.
M. BRUNET: Nous en donnons et ils ont le privilège d'en acheter
également.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Combien y a-t-il de membres qui sont
détenteurs d'actions chez vous, achetées ou données?
M. BRUNET: Aussitôt l'émission terminée, nous
calculons que ce que nous offrons à nos membres va nous coûter
100,000 parts.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela va vous coûter 100,000 parts.
M. BRUNET: D'un portefeuille, qui appartient à la famille Brunet,
de 1,692,000 parts.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ce seront des actions vendues en partie.
M. BRUNET: Données.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Données.
M. BRUNET: Nous avons déjà 75,000 actions vendues aux
membres.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je lisais tout l'organisme des taxis
Lasalle, où vous mentionnez un comité consultatif formé
comme suit: quatre chauffeurs, quatre propriétaires. Plus bas, vous
ajoutez: Les comités mentionnés ci-haut, régies, autres
sous-comités: comité des sports, comité d'entraide,
comité de visites industrielles, comité de visites aux malades et
aux défunts. J'aurais aimé que vous expliquiez
cela davantage. Qu'est-ce que ces comités apportent aux membres?
Est-ce que ce sont des comités, clubs sociaux de rencontres?
M. BRUNET: Ce sont davantage des comités sociaux. En plus de
cela, quand on fait le tour d'horizon de tous ces comités, cela
intéresse environ 250 à 300 propriétaires ou chauffeurs de
Lasalle. Nous avons notre propre ligue de hockey, qui forme quatre
équipes. Naturellement...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous ne trouvez pas qu'il y en a
déjà assez des ligues de hockey?
M. BRUNET: Oui, les ligues de la ville. Nous avons notre ligue de
quilles. Nous avons notre ligue de balle molle. Nous avons notre pique-nique
annuel. Nous avons eu un dépouillement d'arbre de Noël cette
année. C'est tout le domaine des sports.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Par contre, il n'y a aucun chauffeur chez
vous qui a droit à des jours de maladie quand il est malade, qui paie un
fonds de pension, qui a de l'assurance-chômage ou qui paie la rente du
Québec. Ils n'ont rien de cela.
M. BRUNET: Dans le moment, avec l'assurance-chômage, le gars qui
loue, naturellement, est protégé en cas de maladie, mais encore
là, c'est minime. C'est la raison pour laquelle nous disons qu'il
faudrait former des organismes. Que l'association paie sa part, le
propriétaire, sa part, et le chauffeur sa part. Mais M. le
député, je peux vous dire quelque chose.
J'ai envoyé environ 20,000 lettres demandant aux membres
d'accepter un plan d'assurance pour les chauffeurs, de leur imposer la
chose.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Une assurance-vie?
M. BRUNET: Assurance-vie, maladie, quelque chose de concret. Sur 20,000
lettres j'ai reçu treize réponses. C'est pour ça que je
vous demande de l'imposer, ils seront obligés de payer. Je ne veux pas
que ce soit le chauffeur qui paye, mais les trois parties d'une manière
pensée sainement.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): A l'article 4, c'est marqué: Tous nos
chauffeurs sont également protégés contre les blessures et
le décès, pour autant que cela se produise en devoir; quelle
protection voulez-vous dire?
M. BRUNET: II n'y a aucune compagnie d'assurance actuellement qui peut
assurer un groupe soit comme Taxi Lasalle, parce que le chauffeur, c'est
normal, est dans une association une journée et le lendemain nous laisse
sans le dire, ou bien le propriétaire ne nous le dit pas, quoique nous
ayons des dossiers très précis, mais pas assez quant au nombre de
chauffeurs, et quant à celui qui est en devoir constamment pour le
même propriétaire. La seule chose que nous ayons pu conclure,
c'était de donner à un chauffeur qui est blessé en devoir
$35 qui sont puisés dans les fonds de Taxi Lasalle. Ce sont les membres
qui paient pour cela, c'est normal. Au décès, on lui donne
$1,000. Tous les propriétaires, dans la contribution de $36.50, sont
assurés pour $1,000 et $2,000. C'est chose du passé mais cela
n'existe dans aucune autre entreprise chez nous.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est $1,000 pour mort naturelle et double
indemnité en cas d'accident et de mutilation.
M. BRUNET: Exactement, en cas d'accident.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne sais pas si vous pouvez me
répondre, naturellement, chaque compagnie ou chaque organisme a son
administration, il y a des choses qu'on n'aime pas dévoiler, mais est-ce
qu'actuellement c'est vrai qu'à Taxi Lasalle, votre organisme, vous
êtes en train de fonder votre propre compagnie d'assurance?
M. BRUNET: Oui, monsieur.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que cela semble vouloir se
concrétiser?
M. BRUNET: Le but de...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Excusez, en fondant votre propre compagnie
d'assurance, vous demandez aux membres de souscrire des parts, d'investir dans
ça? Corrigez-moi, si ce n'est pas exact.
M. BRUNET: Oui, c'est une compagnie publique. D'ailleurs, le but est
d'avoir notre compagnie d'assurance, vu que c'est difficile de s'assurer.
Actuellement, nous avons travaillé à un système depuis
1964; toutes les pertes sont enregistrées, toutes les réserves
sont enregistrées, c'est sûr que nous sommes difficiles à
Lasalle, c'est dur, nous sommes obligés de rayer des types qui ont des
mauvaises expériences d'accidents, mais nous avons bâti quelque
chose et aujourd'hui nous évoluons vers une rentabilité, mais si
toutes les associations font comme ça, je crois qu'elles ne seront plus
dans le taxi tantôt. Mais votre règlement no 6, avec vos points de
mérite, va nous aider énormément à mettre un peu de
sérieux chez ceux qui ne sont pas sérieux.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Avant l'heure du souper, vous avez fait une
remarque et j'aimerais avoir vos commentaires là-dessus. Vous parliez de
l'organigramme qui est ici, vous
disiez que pour l'association des détenteurs de permis vous
étiez d'accord, c'est-à-dire une association de détenteurs
de permis par région. Maintenant, vous disiez: Ce qui manque, en vertu
du bill 23...
M. BRUNET: C'est exact, le carreau rouge.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous disiez: Ce qui manque à
côté, c'est un carreau où ce serait écrit:
Association des chauffeurs.
M. BRUNET: Exactement.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Lorsque vous parlez, dans votre idée
à vous, d'une association de chauffeurs, est-ce que vous parlez d'un
syndicat de chauffeurs? Est-ce que vous voulez dire que les chauffeurs
devraient être syndiqués, non pas dans un syndicat qui est ce
qu'on appelle communément un syndicat de boutique, mais un syndicat
fort, qui soit affilié à la FTQ, à la CSN, à la CSD
ou à toute autre centrale pour faire des revendications auprès du
gouvernement, en somme, faire valoir leurs revendications, faire valoir ce
à quoi ils ont droit? Est-ce que c'est ça que vous avez voulu
dire?
M. BRUNET: Je veux que ce soient les chauffeurs qui choisissent, s'ils
veulent être syndiqués, mais personnellement, je ne favoriserai
pas un syndicat ou un autre. Quant à moi, personnellement, on peut
inscrire une association de chauffeurs et le faire fonctionner
immédiatement, que ce soit n'importe quel syndicat.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne vous demande pas de dire si vous
préférez la FTQ ou la CSN, mais lorsque vous parlez d'un syndicat
chez vous, vous voulez dire un véritable syndicat.
M. BRUNET: Une véritable association.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Association indépendante ou syndicat
affilié qui a une puissance économique, qui a une force de
négociation; c'est ça un syndicat.
M. BRUNET: Exactement.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne parle pas de la FCAI, je ne parle pas
du syndicat de boutique qu'avait l'Hydro-Québec en 1960. Je parle d'un
syndicat qui est accrédité, qui est membre d'une centrale.
Lorsqu'on viendra demander quelque chose, que ce soit à la Commission
des transports, que ce soit à vous, vos chauffeurs pourront dire: M.
Brunet, on veut avoir ça ou ça, négocier. Ils auront une
centrale en arrière et des membres qui les appuieront. C'est ça
un syndicat.
M. BRUNET: Exactement. Par contre, le groupe qui se réunira
choisira le mode de syndicat ou le mode d'association qu'il veut.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je suis d'accord avec vous quand vous dites
qu'il faut que ce soient les membres. C'est entendu que si vous faites signer
des cartes et qu'il n'y a que 20 p.c. qui signent, ils ne seront pas
accrédités. Je vois les chauffeurs dans un syndicat
accrédité auprès du ministère du Travail et
affilié je le dis pour moi, je ne vous demande pas si vous pensez
cela à une centrale, peu importe le nom. Ce serait un
véritable syndicat.
Il s'agit là de Lasalle, on pourrait parler de Diamond. Je vous
dis franchement que je suis contre un syndicat qui serait créé
à l'intérieur de votre organisme avec des membres qui
appartiennent à Lasalle seulement, des chauffeurs, et qui
négocieraient avec vous. Ce serait un syndicat de boutique.
M. BRUNET: Ce n'est pas ça, un instant. Ce sont les chauffeurs de
la région métropolitaine.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Moi, c'est comme ça que je le
conçois. Nous avons entendu la version de plusieurs chauffeurs. La
syndicalisation des chauffeurs à Montréal, ça fait
longtemps que ça a été essayé. Cela fait longtemps
qu'il y en a qui sont venus à la télévision et qui ont
dit: On représente presque tous les chauffeurs, et on s'apercevait
qu'ils représentaient à peu près rien. Vous savez
peut-être à quel organisme je fais allusion.
Je ne parle pas du chauffeur artisan, il peut se syndiquer aussi,
quoique au sens du code du travail ce n'est pas un employé. Le chauffeur
qui est chez vous, qui a sa voiture, n'est pas un véritable
employé salarié. Mais du syndicalisme, par des lois, on en
créé de toutes sortes. On a adopté une loi pour le
syndicalisme agricole; ce ne sont pas, en somme, des employés, ce sont
des propriétaires de ferme.
Le seul moyen d'avoir un groupe vraiment représentatif en face de
votre organisme, en face de la Commission des transports, du ministre ou du
gouvernement, c'est que tous les chauffeurs soient dans un syndicat
affilié à une centrale, un syndicat fort. Ici, vous voyez trois
ou quatre petits chauffeurs de taxi qui parlent à titre individuel,
tandis qu'à ce moment-là il y aurait des directeurs élus
qui viendraient ici et parleraient en leur nom. Et ils iraient chez vous aussi
et diraient: M. Brunet, à présent, nous les chauffeurs voulons
ça, ça et ça.
M. BRUNET: Avec notre système, ils n'auront pas d'affaire
à faire ça pour la simple raison qu'il n'y aurait aucun
propriétaire dans leur groupement, aucun propriétaire même
artisan. Et ils vont faire le "deal" avec qui? Ils vont négocier les
conventions collectives avec l'association des propriétaires. A ce
moment-là, ce ne sont pas les associations qui vont dicter aux
chauffeurs quoi faire. Nous allons garder nos normes de discipline, c'est
normal.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui, c'est entendu mais les
propriétaires ou dirigeants ou présidents d'associations comme
Lasalle, Diamond ou une autre seront obligés de négocier avec les
chauffeurs.
M. BRUNET: Par le truchement de l'association?
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui, c'est ça.
M. BRUNET: Par le truchement de l'association.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Tout ce que je veux vous dire, c'est que je
suis entièrement d'accord avec vous sur une Association des chauffeurs,
ce serait une véritable association syndicale, pas une association de
boutique et pas une association contrôlée par quelqu'un, un
employeur ou n'importe.
M. BRUNET: C'est ça. M. Tremblay...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est tel que je le vois. Je suis un
syndicaliste et j'essaie de parler comme un législateur. Mais il y a
toujours un petit fond de syndicaliste quand même; c'est parce que je m'y
connais un peu là-dedans. J'ai trop vu de syndicats de boutique et j'ai
trop vu de syndicats créés à l'intérieur d'un
organisme de connivence avec un patron. En somme, ce n'était pas du
syndicalisme. Si les chauffeurs font cela, ils ne réussiront rien.
M. BRUNET: M. Tremblay,...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je voudrais que vous me laissiez finir. Le
gars, le chauffeur artisan... Le gouvernement a de la réglementation
à faire. Les propriétaires de flotte, les dirigeants d'entreprise
comme vous... Mais le gars le plus massacré, le plus bafoué, dans
l'industrie du taxi, à mon sens il y a un an, je n'étais
pas un personnage officiel comme M. Bossé; je n'étais pas
nommé par le gouvernement, mais j'ai fait une enquête au nom de
mon parti c'est le petit chauffeur, qui loue son véhicule $12. Il
n'a rien, lui, il n'a aucune force devant vous, devant personne; il n'a pas
d'assurance, de jours de maladie, de fonds de pension. C'est pour ça que
vous voyez aujourd'hui vous avez dit que vous étiez d'accord
des gens qui ont 65 ans, qui sont malades et qui ne peuvent pas laisser
le taxi car, s'ils le laissent, ils n'ont plus rien, pas même les rentes
du Québec.
Je vous félicite d'avoir des comités qui organisent des
visites aux défunts dans les cimetières...
M. BRUNET: Non, un instant. Il y a assez de gens qui peuvent rire d'un
comité consultatif, mais, chez nous, il est vraiment fonctionnel.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Les visites aux malades et aux
défunts. Vous allez le voir quand il est malade et après, quand
il est mort.
M. BRUNET: Non, pas nécessairement. Nous l'entretenons.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous l'entretenez une fois qu'il est
mort.
M. BRUNET: De son vivant.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Trève de plaisanteries. C'est bien ce
comité, mais il reste que le chauffeur n'a rien.
M. BRUNET: La seule chose, dans le moment, que nous donnons aux
chauffeurs, dans la mesure du possible, et que nous avons pu faire pour eux,
c'est d'essayer d'aider nos bons chauffeurs en les rendant
propriétaires. Je crois que ce fut le plus beau système collectif
chez nous et, en plus, les petits $35 par semaine. Que voulez-vous, c'est
minime, mais c'est tout ce que nous pouvions leur offrir. Et $1,000 à la
mort.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Une dernière question.
Demain matin je ne suis pas député vous
apprenez que, parmi tous vos chauffeurs artisans, Charles Tremblay fait une
campagne, fait signer des cartes pour un syndicat, que ce soit la CSN ou la
FTQ. Me mettriez-vous des bois dans les roues ou si vous diriez: Si les gars
veulent se syndiquer, je les laisse faire?
M. BRUNET: Monsieur, je crois qu'aucune association ne s'y
opposerait.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Pas vous?
M. BRUNET: Du tout. Mais, par contre, encore là, je vous l'ai dit
tantôt, si vous vous souvenez bien, je ne suis pas une compétence
en syndicalisme, mais je voudrais que ce soit une affaire très
fonctionnelle. Cela fait assez longtemps que nous jouons. Il faut que ce soit
quelque chose de fonctionnel, pour tous les niveaux de toute l'industrie du
taxi.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous êtes d'accord que, si l'on veut
syndiquer les chauffeurs, ce n'est pas le rôle du gouvernement
d'organiser des syndicats, mais il faut que ce soit épaulé par le
ministère du Travail ou par le gouvernement. C'est-à-dire que
seuls, eux-mêmes, ils ne peuvent pas. Parce que cela fait combien
d'années qu'ils essaient de se syndiquer, les chauffeurs? Vous le savez,
souvent, à la télévision, nous entendons dire: J'ai tant
de membres, je ne donnerai pas de nom, mais, à la fin du compte, le gars
déclarait qu'il n'avait pas de membres.
Alors, il faut absolument que ces gens soient aidés si nous
voulons qu'un jour ils fassent partie d'un syndicat.
M. BRUNET: M. Tremblay, je crois, sur ça, que ça prend une
imposition. Il faut une accréditation qui est de 50 p.c. plus 1, je
suppose.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui.
M. BRUNET: Mais, encore là, il faut absolument réunir les
chauffeurs avant. J'aime la démocratie, moi. J'aime vivre dans un pays
comme le nôtre, parce que la liberté n'a pas de borne. Ces gars,
qu'ils choisissent le genre de syndicat ou d'association qu'ils veulent et que
ce soient eux qui s'expriment. Et les vendeurs de ci et de ça, ils
courront.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui.
Lorsque le gouvernement a institué la loi du syndicalisme
agricole, il s'est servi d'un référendum, et les gens ont
dû se prononcer en faveur, en majorité, sinon la loi serait
tombée dans les tiroirs. Il est entendu que nous ne pouvons pas dire:
Nous vous formons en syndicat, s'il n'y a que 20 p.c. qui le veulent. Il faut
50 p.c. plus 1. Je suis d'accord avec vous. C'est démocratique.
M. BRUNET: Il faudrait absolument que ça existe, sans cela, si
nous n'avons pas un autre moyen d'association, vous aurez travaillé tout
ce temps pour rien.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Une dernière question. Est-ce que
vous voyez le tableau? Une association, ici, des détenteurs de permis,
mais une association sous forme de coopérative qui donnerait les
services d'achat, les bénéfices marginaux, la réparation,
des assurances, pour autant que ce serait une concurrence loyale. On ne dirait
pas: C'est la seule, les gens sont obligés d'aller là et Lasalle
disparaît. Pour autant qu'ils vous laissent vivre, cette concurrence
loyale, vous seriez prêt à l'accepter?
M. BRUNET: A n'importe quel temps, monsieur, mais il faut s'entendre. Au
niveau de l'association, en haut sur le tableau, qu'on appelle ici
l'Association des propriétaires...
M. PINARD: L'Association des détenteurs de permis.
M. BRUNET: Elle aurait un code d'éthique professionnelle.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ce n'est pas le règlement no 6.
M. BRUNET: Ces normes sont restreintes. C'est pour représenter
quoi? Représenter les chauffeurs pour négocier une augmentation
des tarifs avec le gouvernement. Il y aurait peut-être un genre de groupe
pour établir une régie de surveillance, peut-être sur les
associations; par contre, cela se limite là. Tous les
propriétaires feraient partie de cette affaire-là qui va
coûter peut-être seulement $5 par année. Mais si un groupe
veut lancer une association ou une coopérative, il n'y a aucune loi qui
l'en empêche mais pas avec ce nom-là, parce que cela va être
une affaire vraiment représentative au gouvernement.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Non, il y a l'Association des
détenteurs de permis, il peut y avoir une association de services et
tout ce qui descend en bas, achat d'équipement, réparation,
assurance et tout.
M. BRUNET: On ne parle plus de la même chose. Là on essaie
de faire quelque chose de fonctionnel pour tous les cadres. Si on arrive avec
une association dont tous les détenteurs de permis vont faire partie, ce
n'est pas normal que cela reste comme cela est en bas.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Non, ça c'est une autre chose. En bas,
appelez cela une coopérative.
M. BRUNET: Non. Ils auront le droit de le faire pour autant...
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Mais ils n'obligent pas un gars qui est dans
Lasalle à entrer là-dedans; il y va s'il veut.
M. BRUNET: S'ils veulent lancer une association, qu'ils l'appellent la
coopérative XZ.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Même sans que ce soit un organisme de
l'Etat comme l'Hydro, la Régie des rentes du Québec ou peu
importe. Mais que ce soit un organisme qui est épaulé par l'Etat
pour être mis sur pied et structuré, vous êtes d'accord.
Cela pour vous, c'est une concurrence très loyale?
M. BRUNET: Concurrence très loyale pour autant que cela ne
devient pas l'association qui va nous représenter au gouvernement.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Très bien, merci.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le ministre des Transports.
M. PINARD: M. Brunet, pourriez-vous nous expliquer quelle est la formule
corporative de Taxi Lasalle Inc. et nous dire si c'est sensiblement la
même formule que celle de Diamond, par exemple?
M. BRUNET: Je crois que je ne connais pas la formule de Diamond.
M. PINARD: Vous étiez ici.
M. BRUNET: J'étais ici quand ils ont parlé de cela. Disons
que c'est un "holding compa-
gny", c'est une compagnie de gestion, je suppose, comme Brunet-Lasalle
devient une compagnie de gestion.
M. PINARD: Alors, je ne vous demanderai pas de faire de comparaisons
avec la compagnie Diamond, je vais m'en tenir à votre situation à
vous.
M. BRUNET: Parfait.
M. PINARD: Vous avez déclaré tantôt devant la
commission que Taxi Lasalle est une association de services.
M. BRUNET: Taxi Lasalle (1964) Inc. est une association de services.
M. PINARD: Est-ce qu'il y a une autre association de taxis Lasalle
antérieure à celle de 1964 et qui est encore en existence?
M. BRUNET: Non.
M. PINARD: Alors, la seule qui a une entité juridique est Taxi
Lasalle (1964) Inc.
M. BRUNET: Exactement, avec une lumière de toit brevetée,
même la couleur est enregistrée.
M. PINARD: C'est une compagnie avec ou sans but lucratif?
M. BRUNET: En vertu de la première partie de la Loi des
compagnies.
M. PINARD: Avec but lucratif. M. BRUNET: Oui, monsieur.
M. PINARD: Qui en est le propriétaire majoritaire?
M. BRUNET: Gérard Brunet.
M. PINARD: Je ne veux pas vous faire dévoiler des choses.
L'impôt connait votre situation, quel pourcentage?
M. BRUNET: Disons qu'avant que la compagnie soit publique Brunet
détenait 100 p.c. des parts de Taxi Lasalle. Mais aujourd'hui le
propriétaire de Taxi Lasalle (1964) Inc. devient vraiment Brunet-Lasalle
Corporation.
M. PINARD: Vous avez également une compagnie de portefeuille.
M. BRUNET: Exactement.
M. PINARD: Est-ce qu'elle porte un nom, cette compagnie-là?
M. BRUNET: La compagnie de portefeuille, on peut appeler cela
plutôt une compagnie d'assurances. Les placements sont faits par le
truchement de Sterling, qui va fonctionner bientôt.
Les placements, les investissements, c'est dans Sterling Insurance
Company of Canada. Pour avoir notre charte, ça prend tant
d'investissements. Le mot "Sterling" change et ce sera La Concorde, vu qu'au
Québec on aime le français.
M. PINARD: C'est la même organisation sauf qu'elle a changé
de raison sociale.
M. BRUNET: Exactement. La Concorde va devenir la propriété
de Brunet-Lasalle Corporation.
M. PINARD: A part cette compagnie d'assurances qui porte le nom de La
Concorde, avez-vous d'autres compagnies qui dispensent des services aux membres
de l'Association de taxis Lasalle Inc.?
M. BRUNET: Nous avons des garages, comme la Station de service Lasalle,
qui reçoivent les clients, pas nécessairement de Taxi Lasalle,
tout genre de clients, à titre de clients.
M. PINARD: Vous avez dit tantôt que vous donnez des actions
gratuitement à des membres de votre organisation; quelle sorte d'actions
donnez-vous aux membres de votre organisation?
M. BRUNET: Des actions de Brunet-Lasalle Corporation.
M. PINARD: Qui est la compagnie de portefeuille?
M. BRUNET: Pardon?
M. PINARD: Ce sont des actions ordinaires de...
M. BRUNET: Des actions ordinaires.
M. PINARD: ... la compagnie de portefeuille.
M. BRUNET: Exactement.
M. PINARD: Vous dites que vous en donnez et vous dites que vous en
vendez.
M. BRUNET: C'est sûr.
M. PINARD: Les actions que vous donnez, elles ont une valeur de
combien?
M. BRUNET: La valeur aux livres actuellement est de $1.95;
naturellement, dans le prospectus, la vente se fait à $2 plus 10 p.c.
aux courtiers.
M. PINARD: Quelles sont les conditions de ce don d'actions avec les
ventes?
M. BRUNET: La seule condition qui existe chez nous, pour celui qui en
fait la demande, est d'avoir oeuvré au moins trois ans au sein de Taxi
Lasalle. Celui qui a trois ans de travail chez nous obtient quinze parts pour
les trois premières années et je crois que nous ajoutons trois
parts tous les ans.
M. PINARD: S'il quitte la compagnie?
M. BRUNET: Ses parts sont à lui, monsieur.
M. PINARD: Est-ce qu'elles sont négociables,
transférables?
M. BRUNET: Espérons qu'ils vont reprendre la
spéculation.
M. PINARD: Ce sont des parts qui viendront éventuellement sur le
marché.
M. BRUNET: Exactement.
M. PINARD: Elles seront participantes, évidemment.
M. BRUNET: Participantes.
M. PINARD: Même les profits. Pourquoi cette distinction entre ceux
qui peuvent avoir des actions gratuitements et ceux qui doivent les acheter?
Vous avez dit également que vous vendiez des actions.
M. BRUNET: Exactement.
M. PINARD: Est-ce que ce sont des actions de même nature?
M. BRUNET: Oui, la même nature. Par contre, avec la
première émission d'actions, au nombre de 400,000, nous avons
droit de vendre ces 400,000 et les parts que nous donnons, nous les donnons du
portefeuille de la famille Brunet; ce sont des parts qui appartiennent en
propre à la famille Brunet.
M. PINARD: Quel avantage a celui qui achète des actions chez vous
plutôt que celui qui demande d'en recevoir gratuitement?
M. BRUNET: Naturellement, nous ne donnons pas des actions à la
poche, chez nous.
M. PINARD: Je comprends.
M. BRUNET: C'est normal que le type qui a oeuvré au sein de Taxi
Lasalle durant quinze ans reçoive soixante parts; s'il veut se rendre
à cent, il va en acheter quarante, soit directement du promoteur ou
directement de son courtier. Elles ont la même valeur.
M. PINARD: La seule valeur des actions données ou vendues n'est
relative qu'aux va- leurs générales, globales de la compagnie de
portefeuille, de la "holding company" comme on l'appelle.
M. BRUNET: Exactement.
M. PINARD: Est-ce qu'elles sont également participantes dans
d'autres compagnies filiales?
M. BRUNET: Comme c'est une compagnie de gestion, ce sont des parts de
Brunet-Lasalle Corporation. Par le fait même, chacune des compagnies,
comme moi, qui détenais la majorité des parts dans Taxi Lasalle
(1964) Inc., j'ai transporté ou j'ai vendu toutes mes parts à
Brunet-Lasalle Corporation. Nous avons seulement des parts nominatives, trois
parts, pour garder un président, un vice-président et un
secrétaire pour former les cadres. Dans chacune de nos compagnies, c'est
pareil.
M. PINARD: Quels sont les actifs de la compagnie de portefeuille? Je ne
veux pas être indiscret. Je vous laisse libre de répondre.
M. BRUNET: Non, ça me fait plaisir; ça en a fait rire
plusieurs. C'est public, vous pouvez voir les prospectus. Disons que c'est
d'environ $7 millions.
M. PINARD: Et le compte de surplus est indiqué également
dans le document?
M. BRUNET: Le compte de surplus est d'environ $3 millions.
M. PINARD: Hier, nous avons entendu un M. Houde qui a prétendu
avoir été autrefois au service de votre compagnie.
M. BRUNET: Non, il est encore au service de notre compagnie.
M. PINARD: Je ne veux pas vous mettre en brouille avec lui, mais c'est
pour avoir certaines précisions. Vous l'avez écouté faire
sa déclaration hier. Il a semblé faire des reproches à
votre organisation au plan du coût assez exorbitant des assurances.
M. BRUNET: Mais tantôt je vous ai expliqué que chez nous,
nous avons cinq classes différentes. Pour la première classe,
nous arrivons à $558. Si M. Houde était dans la deuxième
classe, vous pouvez ajouter $72 à $558, ce qui ferait $620.
Si nous essayons d'avoir tout dans la même compagnie d'assurances,
c'est pour avoir de meilleurs prix, et c'est normal. Mais nous n'avons pas le
droit dans le moment de prendre des assurés de l'extérieur, il
faut absolument qu'ils soient membres de la compagnie de Taxi Lasalle, qu'ils
en fassent partie.
Il y en a énormément, même qui sont peut-être
ici ce soir. Nous, quand une assurance
demande le "less ratio" nous sommes obligés de lui donner le
"less ratio". Et c'est rare qu'ils puissent se placer à meilleur prix.
Nous avons entendu des types hier déclarer des $1,200, $1,300 ou $1,500
d'assurance.
M. PAUL: Quel est le maximum chez vous?
M. BRUNET: C'est $125 par mois, moins les $36.50. Environ $1,000.
Franchement, $1,000, c'est parce que le type nous coûte plus que $1,000
par année. C'est pour les trois dernières années,
ça.
M. PAUL: Parce qu'il a un mauvais dossier.
M. BRUNET: Oui. Mais remarquez bien que les mauvais risques en accident,
on dirait que ce sont toujours les mêmes qui les ont.
M. PAUL: Ou souvent c'est seulement une malchance, mais qui est
dispendieuse.
M. BRUNET: Par contre, il ne faudrait pas juger le type qui va
occasionner un accident dans dix ans, qui va coûter $25,000, et le mettre
dans la cinquième classe. Cela se fait conjointement avec la compagnie
d'assurance et la direction de Lasalle. Il va monter de classe mais d'une
manière souple.
LE PRESIDENT (M. Caron): M. le ministre.
M. PINARD : Est-ce que le membre de votre association est obligé
de s'assurer chez la compagnie d'assurances Concorde ou chez Sterling?
M. BRUNET: Dans le moment, la Concorde n'est pas en vigueur. Nous
faisons présentement affaires avec United Canada, qui appartient
à des intérêts américains, mais il est obligé
d'appartenir à notre système, sauf en quelques occasions. Le type
peut nous arriver cela peut arriver une fois par année et
dire: J'ai une assurance qui expire dans deux mois. Mais encore là,
c'est très difficile qu'il entre dans la première classe quand il
entre à Lasalle.
La première chose que nous lui demandons, c'est un "less ratio"
d'où il travaillait et une lettre de recommandation. C'est pour
ça que nous n'acceptons pratiquement pas de flotte chez Lasalle.
M. PINARD: Est-ce qu'il est libre ou non de s'approvisionner en services
chez vous pour l'huile, les pièces, etc.?
M. BRUNET: S'il fallait que tous nos taxis nous fassent vivre, nous
encouragent, ce serait formidable. Disons qu'il fait ce qu'il veut. Par contre,
c'est à nous de lui trouver des avantages pour l'amener chez vous. Je
défie n'importe qui en ville de vendre l'essence à un meilleur
prix que Lasalle.
Nous avons un système de points, à raison de deux points
par mois. Le type qui vient acheter l'essence dans un de nos cinq garages, a
une carte et nous lui donnons un poinçon sur sa carte. Et s'il y en a 20
par mois, c'est facile, 20 marques par mois nous ne comptons même
pas le nombre de gallons, c'est qu'il a visité 20 fois nos garages pour
de l'essence cela lui donne $2, deux points par mois.
S'il fait ses réparations dans nos garages, un minimum de $40 par
mois, disons, dans le débossage, un travail de $200 par année,
$50 ou $60, c'est capitalisé naturellement, $2 de plus par mois; s'il
arrive dans ses assurances avec un "less ratio" de moins de 15 p.c,
c'est-à-dire que ça n'a pas coûté à la
compagnie moins de 15 p.c, il obtient encore deux autres points. Donc, il y a
une possibilité de huit points par mois; multipliez cela par douze, cela
fait 96 points, $96 par auto. Nous envoyons un chèque une fois par
année.
Nous avons commencé ça au mois de juin, c'est drôle
que ça fonctionne à merveille. Cela nous a coûté des
milliers de dollars.
LE PRESIDENT (M. Caron): M. Brunet, je m'excuse, il y a une personne
dans la salle qui semblerait faire une remarque et le député de
Maskinongé aimerait que cette personne pose sa question.
M. PAUL: Ce n'est pas ça. Je vous ai signalé que quelqu'un
dans la salle semblait manifester le désir de poser une question. Il ne
m'appartient pas de décider si ce monsieur doit oui ou non poser sa
question. Il appartient à la commission de décider.
LE PRESIDENT (M. Caron): Est-ce que les membres sont consentants? Une
question seulement.
Veuillez vous identifier.
M. HOUDE (Donald): On a mentionné mon nom, c'est la raison pour
laquelle je me suis approché. Je ne voudrais pas être en brouille
avec M. Brunet. Je pense qu'il va le prendre en bonne part de toute
façon. Si cela ne faisait pas mon affaire d'être chez Lasalle, je
serais parti. Je suis encore chez Lasalle. Quand je me suis informé
auprès d'autres compagnies pour avoir des taux d'assurance, j'ai eu
l'information que j'ai eue! Et si j'ai fait une déclaration mardi qui a
pu m'entrainer des problèmes, c'est parce que j'ai sursauté d'une
fausseté qui avait été dite par Bélair Insurance
Company. Ce n'est pas le système chez Lasalle que j'ai
dénoncé. Chez Lasalle, on n'assure pas d'autres
propriétaires que ceux de Lasalle.
Mon intervention visait à dire que c'est tout le système
au complet. M. Brunet assure les taxis Lasalle et seulement ceux-là.
Mais il y aurait peut-être d'autres moyens d'assurer les voitures-taxis
et je pense que M. Brunet est prêt à voir s'il y a d'autres moyens
d'assurer les voitures-taxis.
Moi, je ne lui dirai pas quoi faire, mais je sais qu'il y a d'autres
moyens. Si ce n'est pas payant d'assurer des voitures-taxis, il y a
peut-être d'autres moyens pour que ce soit plus à votre avantage
et je pense que lui et nous, les petits propriétaires artisans, allons
être satisfaits. C'est ça que je voulais rectifier.
M. PINARD: M. Houde, est-ce vous qui avez suggéré la
création d'une régie d'assurances pour le taxi?
M. HOUDE (Donald): Ce n'est pas moi qui l'ai suggéré, il y
en a beaucoup qui l'ont suggéré avant moi. Ce n'est pas une
idée nouvelle. J'irais même jusqu'à suggérer que
cette société assure plus que les taxis. Je vous donne comme
exemple la Commission de transport de la communauté urbaine de
Montréal. Elle n'a pas d'assurance-commission et je vous mets au
défi de trouver un automobiliste à Montréal qui va aller
"niaiser" un autobus parce qu'il sait très bien que ça va lui
prendre un "sacré" bout de temps avant de collecter quelque chose, il
sait qu'il a affaire à des gars "tough" pour se faire payer. Pourquoi ne
serions-nous pas dans cette position? On arrêterait de se faire "niaiser"
dans les rues.
LE PRESIDENT (M. Caron): Merci, M. Houde. La parole est au
député de Lotbinière.
M. BELAND: M. le Président, étant donné que M.
Brunet a fait allusion tout à l'heure au fameux règlement
concernant les points de démérite, est-ce qu'il pourrait aller un
peu plus loin à l'intérieur de ce à quoi il faisait
allusion ou encore, peut-être sous un autre angle? Est-ce que, dans le
futur règlement no 6, après qu'il sera réimprimé
autrement, supposons-le, vous pensez qu'il serait nécessaire d'adopter
une formule quelconque pour les taxis relativement aux points de
démérite parce que vous savez que c'est douze points maximum?
Supposons que le type, après avoir oublié de signaler à un
coin de rue cinq fois consécutives, il est cuit, il perd son permis.
Alors, étant donné la grande quantité de milles que chaque
chauffeur fait par année, pensez-vous qu'il serait nécessaire
à l'intérieur du règlement no 6 d'essayer de trouver une
procédure pour adoucir ce règlement pour les chauffeurs de
taxi?
M. BRUNET: Les cas minimes pourraient vraiment être aidés,
peut-être moins de points de démérite, mais il y a des cas
graves sur lesquels il faut se pencher. La boisson et des choses du genre, il
faut se pencher sur cela.
M. BELAND: D'accord.
LE PRESIDENT (M. Caron): La parole est au député de
Sainte-Marie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je veux tout simplement revenir sur une
chose. Lorsque vous parliez tantôt des parts données à vos
membres et que vous disiez que ça coûte tant à la famille
Brunet, c'est vous...
M. BRUNET: Mon épouse, mon fils et moi.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous dites votre fils. C'est votre fils?
M. BRUNET: C'est cela.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne le savais pas. Lorsque vous parlez de
parts que vous donnez je ne parle pas de celles que vous vendez
volontairement à vos membres vous avez mentionné un
chiffre combien cela vous coûte-t-il?
M. BRUNET: J'ai mentionné un chiffre, je n'ai pas dit combien
ça me coûtait. J'ai dit qu'on se départissait de 100,000
parts.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): De 100,000 parts.
M. BRUNET: De notre portefeuille.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela peut représenter quel
montant?
M. BRUNET: On a dit qu'elles valaient $1.95.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela veut dire un montant autour de
$200,000...
M. BRUNET: Environ.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): ... que la famille Brunet donne aux membres
de Lasalle.
M. BRUNET: Exactement.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous donnez cela sans obligation.
M. BRUNET: Je ne voudrais pas employer le mot "donner". Si on fait cela,
c'est parce que les gars ont tellement travaillé pour ce fameux nom,
c'est un genre de remerciement. C'est cela, ce n'est pas un don.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que c'était dans le
dépouillement de l'arbre de Noël?
M. BRUNET: Non, monsieur. C'est un rêve qu'on réalise.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si ç'avait été le cas,
j'y serais allé. Qu'un homme, qu'une famille donne $200,000 à ses
membres comme cela, c'est la première fois que je l'entends dire. Je
vous avoue franchement je suis bien honnête avec vous que
je suis bien sceptique
et je me demande pour quelle raison vous le faites.
M. BRUNET: Pas seulement les membres, les employés, les
chauffeurs et tous à part égale. Même si le gars a 20
véhicules chez nous, c'est le nombre d'années qui compte. On va
semer quoi, avec cela? On va faire participer nos membres à une
collectivité, c'est formidable. Ce sera formidable, tantôt, ce
seront des types ancrés .qui seront chez nous. Cela en vaut la peine. On
a vu une autre compagnie qui a dernièrement octroyé des parts
gratuitement à ses employés avec le privilège d'en
acheter. Je ne me souviens pas exactement de la compagnie mais cela a
existé. Le rêve que je réalise là est un rêve
que j'avais fait en 1964. Les étapes ont été
brûlées peu à peu jusqu'en 1972.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous pensez à cela depuis 1964,
à donner $200,000.
M. BRUNET: Non, un instant! Il n'a pas été question de
cela. J'ai pensé à former ce que nous avons formé. Par
contre, on ne pensait pas prendre autant de temps à former une
gestion.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si un bon jour, en 1964, vous aviez
rêvé d'être obligé de donner, en 1972, $200,000, ce
devait être un cauchemar, en 1964.
M. BRUNET: En 1964, si j'avais simplement travaillé pour de
l'argent, je n'aurais pas réussi. Ce sont les heures, c'est l'ouvrage,
c'est le temps passé.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): D'accord.
M. PAUL: Vous réalisez que votre succès personnel est le
résultat de la solidarité, de l'honnêteté, de la
collaboration et de la confiance de tous vos employés et
associés.
M. BRUNET: Absolument.
LE PRESIDENT (M. Caron): Sur le même sujet, le ministre des
Transports.
M. PINARD: M. Brunet, avec l'exemple que vous venez de fournir,
évidemment, tout le monde est libre de vous croire ou pas, mais
ça me rappelle des études que j'ai faites sur la coparticipation
dans les entreprises de même que sur la cogestion qui pouvait être
faite dans les entreprises. Est-ce cela que vous avez essayé
d'expérimenter et de réaliser chez vous?
M. BRUNET: Disons que j'ai essayé de semer la
collectivité, de semer un bloc solide de gens fiers d'appartenir
à leur entreprise; éventuellement, ils vont détenir de
plus en plus de parts. Vous n'avez pas besoin de contrôler à 51
p.c. une compagnie comme la nôtre pour en garder franchement le
contrôle. Eventuelle- ment, on se dirige vers de nouvelles acquisitions
et ainsi de suite. Le pourcentage de la famille Brunet va descendre, c'est
normal, ça ne peut pas rester là. Il va descendre en achetant nos
parts.
LE PRESIDENT (M. Caron): Le député de
Napierville-Laprairie.
M. BERTHIAUME: Commençons au début. Etes-vous
cotés, à l'heure actuelle?
M. BRUNET: Nous sommes cotés depuis que la première
émission a été vendue.
M. BERTHIAUME: A quelle Bourse? M. BRUNET: Canadienne.
M. BERTHIAUME: Vous avez parlé de votre prospectus; est-ce que
votre prospectus fait mention des acquisitions éventuelles, autrement
dit de vos besoins futurs en capital? Vous avez mentionné
tantôt...
M. BRUNET: Le but de la formation de la corporation est l'acquisition de
Sterling et le produit des ventes de ces actions va servir à
l'acquisition de Sterling.
D'ailleurs, Sterling, dans le moment, m'appartient personnellement et il
faut que Brunet-Lasalle remette à Gérard Brunet l'argent de
Sterling, aux mêmes conditions que je l'ai acheté sans faire un
sou dessus.
M. BERTHIAUME: D'accord pour l'acquisition de Sterling, j'ai compris
ça. Je ne veux pas dévoiler de secret ou de stratégie
éventuelle, c'est pour ça que je vous parle de votre prospectus.
Fait-il mention de besoins, à court ou à moyen terme, dans le
même domaine ou dans d'autres domaines? Le "holding", ça peut
être bien des affaires.
M. BRUNET: Le prospectus montre tout le portrait de l'affaire.
D'ailleurs, nous avons le droit de fermer l'émission à 250,000
actions vendues; nous n'avons pas besoin d'aller à 400,000. Si nous nous
rendions jusqu'à 400,000, naturellement, notre capital de travail serait
encore plus intéressant.
M. BERTHIAUME: Je pose la question de façon différente.
Vous dites qu'il y a 250,000 actions qui seraient disponibles?
M. BRUNET: Dans le moment, il y en a 400,000 de disponibles, mais nous
avons le droit...
M. BERTHIAUME: Cela représente quel pourcentage au total, 13 p.c.
ou 14 p.c?
M. BRUNET: A 400,000, c'est 17 p.c.
M. BERTHIAUME: A 250,000, cela fait un peu plus que 13 p.c.
M. BRUNET: Cela fait 13 p.c.
M. BERTHIAUME: La moitié de cela. Le but de ma question est de
savoir ce qui vous inciterait à passer de 250,000 à 400,000 si la
Commission des valeurs mobilières vous en donnait le droit.
M. BRUNET: Naturellement, c'est toujours d'après les lois du
ministère des Institutions financières. On nous donne six mois
pour vendre une émission, mais j'ai simplement voulu être prudent,
avoir le droit de fermer mon émission sans qu'elle puisse être
renvoyée. Donc, à 250,000, j'ai demandé de pouvoir la
clore.
M. BERTHIAUME: Vous avez également parlé d'une
participation à votre entreprise par la vente d'actions à vos
employés. Avez-vous un programme qui permet à vos chauffeurs,
détenteurs de permis, d'acquérir ces actions par déduction
à la source d'une façon quelconque et avec un escompte ou si
c'est au prix du marché?
M. BRUNET: C'est le seul moyen que nous avons pu trouver pour pouvoir en
vendre aux employés. Nous le faisons seulement pour les employés
attachés directement à Lasalle. Nous les faisons passer à
la banque et Brunet personnellement garantit le prêt. Mais la compagnie
n'a pas le droit de garantir les prêts pour l'achat de ces parts.
M. BERTHIAUME: II n'y a pas de prix préférentiel par
rapport au marché?
M. BRUNET: Non, aucunement.
LE PRESIDENT (M. Caron): Si le député de Sainte-Marie le
permet, nous allons donner une chance au député de L'Assomption
et vous reviendrez après, s'il vous plaît.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Avez-vous déjà
écouté le monologue d'Yvon Deschamps, lorsqu'il parle de son
"boss"?
M. BRUNET: Non.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous l'écouterez.
LE PRESIDENT (M. Caron): Le député de L'Assomption.
M. PERREAULT : Vous avez mentionné que vous auriez votre propre
compagnie d'assurance, sous le nom de Concorde. Cette compagnie d'assurance
sera ouverte au public et aussi, je le suppose, aux autres détenteurs de
permis qui ne feront pas partie de Lasalle, après.
M. BRUNET: Disons que Concorde fonctionnera dans la province de
Québec. Nous avons une charte qui est valide en Ontario
également, mais nous allons commencer avec le Québec. Au
début, nous allons assurer strictement taxi Lasalle, en ce qui concerne
le taxi, mais nous ouvrirons l'horizon au fur et à mesure que nous
avancerons. Il nous faut aller chercher des profits dans le public, ce sont nos
espérances.
M. PERREAULT: Je voudrais vous poser une autre question. Vous avez
mentionné tout à l'heure, dans votre exposé, que vos
assurances avec United Canada prévoyaient une
assurance-responsabilité de $500,000, dans le moment. Dans le
règlement no 6, on mentionne $100,000 comme
assurance-responsabilité. Croyez-vous que c'est trop bas, $100,000?
M. BRUNET: Dans le moment, la loi dans la province de Québec
exige $35,000. Alors, $100,000, c'est beaucoup mieux. Je n'ai jamais vu de
poursuite de $500,000, mais, pour peut-être $3 ou $4 par année,
cela en vaut la chandelle.
M. PERREAULT: Alors vous croyez que, pour le taxi...
M. BRUNET: Pour protéger l'individu.
M. PERREAULT: Pour protéger l'individu,
l'assurance-responsabilité, dans le taxi, pourrait aller au-delà
de $100,000.
M. BRUNET: Je crois que $100,000, c'est bas, mais qu'il soit permis
à ceux qui le veulent d'aller plus haut.
M. PERREAULT: Mais, chez vous, $500,000, c'est obligatoire?.
M. BRUNET: Nous voulons le conserver. M. PERREAULT: Merci.
LE PRESIDENT (M. Caron): Est-ce que d'autres membres désirent
poser des questions? M. Brunet, s'il n'y a pas d'autres questions, on vous
remercie.
M. BRUNET: Merci, M. le Président, merci, messieurs, de m'avoir
entendu.
LE PRESIDENT (M. Caron): Est-ce qu'il y a un M. Lippé dans la
salle?
M. Lippé
M. LIPPE: M. le Président, MM. les ministres, M. Bossé,
MM. les députés, j'espère que vous m'entendez, je ne suis
pas habitué à un micro, surtout un micro parlementaire. Cela
gèle. J'aimerais que vous ayez un permis de chauffeur de taxi pour voir
comme je suis gelé.
La raison principale pour laquelle je suis venu ici, la raison
essentielle, c'est pour remercier M. Bossé d'avoir eu le courage de
faire l'enquête qu'il a faite. Je n'étais pas d'accord avec lui,
la première fois, je lui ai parlé à la Fraternité
des policiers, je lui ai parlé quand il est venu, vous avez parlé
sur une chaise, le micro ne marchait pas au Centre Paul-Sauvé. Je
n'étais pas d'accord parce que, à la Fraternité des
policiers, vous nous aviez dit que vous aviez fait un pas vers Dorval. Vous
aviez fait le pas. Vous nous avez dit : Donnez-moi trois semaines et je vais
faire l'autre pas. Mais cela faisait au-delà d'un an, je vous l'ai fait
remarquer d'ailleurs. Aujourd'hui, je comprends que ce n'est pas un cadeau,
l'industrie du taxi. Je ne parle pas comme propriétaire, je ne parle pas
comme président de l'association, je parle comme chauffeur de taxi, un
petit chauffeur, comme disait M. le député Tremblay, qui n'a pas
de défense et qui a peur, qui ne sait pas où aller, qui est
harcelé d'un côté et de l'autre, et il y en a beaucoup
comme moi. Il ne sait pas où aller, il veut faire quelque chose, mais il
n'est pas capable. Je suis certain que sans l'appui du gouvernement, si le
règlement no 6 ne passe pas, nous sommes foutus. Je suis un gars de 51
ans. Cela fait longtemps que je fais du taxi. Depuis 1943. Je suis parti
quelques années, cela fait seulement 30 ans que je fais du taxi. Je ne
parle pas comme propriétaire, je parle comme chauffeur. J'ai tout
passé dans le taxi, j'aimerais vivre. Je ne veux pas vivre du
bien-être social, je veux travailler encore, pour ce que je vaux
toujours. Si je ne suis pas capable de travailler 12 heures, je vais travailler
10 heures, mais je serai payé pour 10 heures, ou j'en travaillerai 9 et
je serai payé pour 9 heures. Ce que je veux avoir, c'est un salaire au
bout de la semaine et vivre comme un ouvrier normal. On a parlé cet
après-midi à quelques reprises d'acheter des parts. Je ne sais
pas votre nom, monsieur, mais je vous ai remarqué, vous demandiez ou
vous avez suggéré à un chauffeur d'acheter des parts. Je
serais d'accord pour acheter des parts, je suis dans les Taxis Lasalle, mais
avant d'acheter des parts, il faut que j'aie un salaire. Il faut que je vous
parle un peu de l'association parce que j'ai travaillé pendant plusieurs
années dans les Taxis Diamond. Je ne veux pas entendre parler de
Diamond. Ce n'est pas pour couvrir M. Brunet. Je ne connais même pas M.
Brunet, je l'ai vu pour la première fois aujourd'hui. J'ai
travaillé chez Lasalle pour René Maranda à Pointe-Claire
et Sainte-Catherine en 1943 et 1944, c'est avant lui, je pense. Ce que j'ai eu
de Lasalle, c'est que, lorsque ma femme est décédée au
mois d'août, j'ai eu une surprise, les Taxis Lasalle ont envoyé
une couronne. Ce n'était pas grand-chose, mais c'est une couronne. Je
n'ai jamais eu cela, je ne connais pas cela avoir un paquet de cigarettes de
personne, d'aucun propriétaire, une semaine de vacances, rien. Si je
suis malade, ce sont mes tracas. Si je suis venu ici aujourd'hui, mon auto est
restée là parce que des confrères m'ont dit:
Cela ne te coûtera rien pour venir ici. D'accord. Je ne sais
même pas si je vais m'en aller en autobus ou si je vais rester ici.
Cela me coûte $12 pour mon automobile, elle est restée
là. Ce n'est pas la faute de M. Brunet. C'est un propriétaire.
C'est mon propriétaire. Je ne l'ai pas payé aujourd'hui. Mon
automobile est restée là. Je vais la reprendre demain matin,
après m'être couché. J'ai attendu toute la journée
ici, spécialement pour remercier M. Bossé et pour vous supplier,
vous tous, les membres du gouvernement. Il n'y a pas beaucoup de chauffeurs de
taxis qui vont vous parler comme moi. Il y en a plusieurs qui aimeraient vous
parler. Il faudrait que vous fassiez le tour de toutes les flottes. C'est
impossible pour vous autres d'aller voir le petit chauffeur, comme M. Tremblay
le disait, le gars qui est pris de tout bord et de tout côté, sans
défense. Il faut qu'il fasse attention à ce qu'il dit, à
part cela. Le monsieur qui a parlé ce matin, M. Edmonston du
Nouveau-Brunswick ou Edmonton de l'Alberta, je ne le sais pas, mais je connais
mes provinces un peu. Nous ne sommes pas tous des chauffeurs mal
éduqués. Il y en a qui perdent la boule de temps en temps, mais
ce n'est pas la majorité. Il vous a suggéré, lui aussi, la
même chose. Je l'ai compris. Je ne connais même pas ce gars
là. J'ai même eu de la misère à savoir son nom.
Sans le gouvernement, sans vous tous, messieurs les
députés... Que vous soyez du parti que vous voudrez, s'il vous
plait, une fois pour toutes, le problème du taxi, êtes-vous
capables de faire un départ là-dessus? Commencez par une
structure ou n'importe quoi. C'est vous autres qui allez le faire; ce n'est pas
nous, ici. J'ai vu défiler beaucoup de gens ici, aujourd'hui, à
la table du supplice où je suis. J'ai remarqué que c'était
plutôt par intérêt. J'en ai de l'intérêt. Mon
intérêt, c'est ma paie au bout de la semaine. C'est cela que je
veux, pour les heures où j'ai travaillé. On parle beaucoup du
chauffeur, on nous amène et on nous dit: Venez-vous en. Mais, une fois
qu'on a fait le "front", on se retrouve au même point.
Il y a une chose que j'aimerais demander aussi. Si jamais vous adoptez
et je l'espère le règlement no 6, est-ce que nous
allons contrôler, nous, avec qui nous allons nous syndiquer ou si nous
allons être pris à la gorge ou poussés encore dans le coin
des murs? Pour le moment, j'en ai assez. Je ne suis pas un orateur. J'aimerais
que vous me posiez des questions.
LE PRESIDENT (M. Caron): Le ministre des Transports va être le
premier à vous poser une question.
M. PINARD: M. Lippé, vous êtes chauffeur de taxi?
M. LIPPE: Je suis exclusivement chauffeur de taxi. Je n'ai pas d'autre
métier.
M. PINARD: Sans être détenteur de permis. M. LIPPE: Sans
être détenteur de permis.
M. PINARD: De quelle façon travaillez-vous? A commission ou
à salaire pour la compagnie Lasalle?
M. LIPPE: Je loue ma voiture $12 par jour. Je paie l'essence avec
l'argent que j'ai gagné. La ristourne, M. Piton vous en a parlé
cet après-midi. D'accord, lui, il donne la ristourne aux chauffeurs;
heureusement qu'ils ont M. Piton.
M. PINARD: C'est chez Diamond.
M. LIPPE: Oui. Diamond, mais je suis juste à côté.
C'est un autre propriétaire, le garage Saint-Denis, la même chose,
mais moi, c'est dans Lasalle. Cela ne regarde pas la compagnie de taxi Lasalle,
cela regarde le propriétaire.
M. PINARD: Mais qui est votre propriétaire de taxi?
M. LIPPE: Mon propriétaire, c'est Albert Sévigny.
M. PINARD: Alors, ce n'est pas la compagnie Lasalle et ce n'est pas M.
Brunet, non plus.
M. LIPPE: Non, mais j'ai fait partie de l'Association Lasalle.
M. PINARD: De l'Association de services.
M. LIPPE: De l'Association de services Lasalle. Je paie $12 par jour.
Ils gardent mes factures d'essence. Je paie mes lavages d'auto. Je dois
séparer avec le gars qui travaille la nuit,mais je ne le vois jamais! A
part cela, je fournis l'antigel qu'on met dans l'essuie-glace aussi. Je ne vous
raconte pas de menteries. Je travaille cinq jours par semaine.
M. PINARD: Combien d'heures par jour, en moyenne?
M. LIPPE: Je vous ferai remarquer que je n'ai pas 25 ans. Je travail
neuf heures et, rendu à dix heures, j'en ai jusque-là! Je ne suis
pas capable. Je suis à Montréal-Ouest et je m'en viens dans le
centre. Je m'oriente vers 3 h 30 ou 4 heures et je m'en vais. Je commence
à 5 heures le matin, ou 5 h 30 et, de temps en temps, à 6 heures.
En moyenne, à 5h 30. Je ne suis pas capable de faire mes heures. Je vais
vous le dire franchement, ce que je fais c'est $15 en moyenne.
Je peux faire $20 ou $22 une journée, et le lendemain, je vais en
faire $12. C'est $75 dans cinq jours, pour ma capacité et pour mon
âge. Je ne parle pas d'un gars qui va travailler quinze ou seize heures
par jour. Je fais $75 par semaine.
M. PINARD: Net?
M. LIPPE: Oui, pas d'impôt, pas de taxes, pas
d'assurance-chômage. Je n'ai jamais payé ça.
M. PINARD: D'accord.
M. LIPPE: Je ne m'en cache pas. J'aimerais ça en payer et vivre
comme un autre. J'ai 51 ans. Qu'est-ce que j'ai en face de moi? Le
bien-être social, je n'en veux pas. Je veux travailler.
UNE VOIX: As-tu des parts dans Lasalle?
M. LIPPE: J'aimerais ça en avoir des parts, n'importe où,
si j'avais de l'argent. Je n'ai pas d'argent. Ce qui m'intéresse, ce ne
sont pas des parts, c'est d'avoir un départ.
M. PINARD: Avez-vous des charges familiales?
M. LIPPE: Je suis veuf depuis le mois d'août.
M. PINARD: M. Lippé, votre témoignage est très
intéressant et très sympathique aussi. Vous pouvez croire que
nous vous prenons au sérieux. Etes-vous capable de formuler des
propositions dans votre langage à vous, qui pourraient nous aider
à trouver une formule qui va aider les chauffeurs qui sont dans la
même situation que vous, sans brimer les droits des autres, mais en
sauvegardant les vôtres un peu plus? Etes-vous capable de nous dire
ça, dans vos termes à vous?
M. LIPPE: Je ne veux brimer les droits de personne. Peut-être que,
si j'étais dans les patins de Diamond Taxi, que j'aimerais ça
faire la piastre, moi aussi. Je ne dis pas le contraire. Mais je n'en suis pas
un. Tout ce que je veux, ce que je demande... Je suis certain qu'il y a
beaucoup de chauffeurs dans la ville de Montréal. Je ne peux pas parler
des autres municipalités. Je ne suis pas au courant des autres
municipalités. Mais, dans l'île de Montréal, je m'y
connais. J'ai même suivi un cours de guide. Je la connais, ma ville.
Je suis un gars habillé assez proprement. Je m'excuse de ma tenue
vestimentaire. Si j'avais su que je venais ici, je ne serais pas habillé
comme ça.
Je ne peux rien suggérer. C'est vous, qui l'avez dans les mains.
C'est M. Bossé, avec son rapport, qui l'a dans les mains. Donnez-nous un
point de départ, donnez-nous la chance de nous structurer, toujours sous
votre surveillance, c'est ça que je demande. C'est mon opinion à
moi.
M. PINARD : Votre propriétaire détient combien de permis
de taxi?
M. LIPPE: Sept ou huit, peut-être neuf. M. Brunet pourrait vous le
dire.
M. PINARD: Je ne vous demanderai pas son nom.
M. LIPPE: Vous me l'avez demandé tout à l'heure.
M. PINARD: Excusez-moi. Cela indique que je n'ai pas de procès
à lui faire. C'est à vous que je m'intéresse ce soir. Mais
avez-vous le sentiment qu'il vous exploite? C'est ça que nous voulons
savoir, ici, à la commission.
M. LIPPE: Là, vous m'accotez au pied du mur.
M. PINARD: C'est important pour nous de le savoir.
M. LIPPE: Avez-vous le sentiment que je suis exploité, vous? Je
paie un char $12 par jour; je dépense $4 ou $5 d'essence, parce que ce
sont des huit cylindres. H faut que je fasse combien avant de faire $1 pour
moi? Avez-vous une idée de ce que c'est, $12.? Et $1 de liquide pour
mettre dans l'essuie-glace? Et à part de la journée où il
a besoin d'un lavage. De ce temps-ci, il n'a pas besoin de lavage. Il est
toujours crotté. Je n'aime pas ça me promener avec un char comme
ça. Quand même qu'il est crotté, je vais le faire
laver.
M. PINARD: Vous n'avez aucun bénéfice social, de vacances
payées?
M. LIPPE: Rien, moins que rien. Zéro. Cela ne peut pas être
plus zéro. J'ai eu une chose dans 30 ans de taxi. J'ai eu une couronne
de fleurs quand ma femme est morte, et c'est M. Brunet qui me l'a
envoyée. H ne me connaît pas, M. Brunet.
J'ai travaillé à Diamond et j'accorde à M. Brunet
ce qui lui appartient. En fait de dirigeant d'association... J'ai
travaillé à Diamond, et je ne veux rien savoir d'eux. Ce sont des
voleurs. Je me rétracte. Je suis tellement habitué de parler dans
le langage des chauffeurs! Je vais essayer de me rétracter.
Il n'y a pas d'ordre dans Diamond, tandis que dans Lasalle, nous en
avons.
Je n'ai aucun intérêt à parler de M. Brunet, je ne
le connais pas. Ce n'est pas parce qu'il est ici non plus. Si j'ai
été à Lasalle, c'est parce que ça faisait mon
affaire.
Mais le propriétaire pour qui je travaille, demain je n'aurai
peut-être pas d'emploi, il va peut-être le savoir. Où
vais-je aller? Sur le bien-être social. J'ai pris la chance de venir
m'expliquer ici. Je vais en avoir le coeur net. Ce n'est pas tous les jours que
je viens aux réunions. Je veux faire quelque chose pour moi. Mais qui va
nous appuyer?
M. PINARD: Pour empêcher cette exploitation, pour corriger votre
situation pour le mieux, est-ce que vous suggérez l'abolition du
système de location?
M. LIPPE: Je n'ai pas besoin de toi pour le dire.
Moi, je parle comme chauffeur. Je ne veux pas parler pour un petit
propriétaire ou pour un autre. Je parle comme petit chauffeur, ce qu'on
appelle un zéro, celui qu'ils égorgent. Le taux de location, il
est bon sous contrôle du gouvernement; pour celui qui veut travailler il
est bon. Il y a celui qui ne veut pas travailler, c'est ce que je pense. Celui
qui veut encaisser un petit "way bill", de ce temps-ci je ne dis pas que
ce sera comme ça quand votre règlement va être
adopté, je ne sais pas ce qui va arriver, personne ne peut le dire
ordinairement celui qui travaille à "way bill" c'est parce qu'il
ne veut pas travailler. Mais celui qui loue un taux raisonnable, il peut gagner
sa vie.
Si je loue ma voiture $12 par jour et si je ne travaille que huit ou
neuf heures par jour, qu'ils me la louent $10 et qu'ils me laissent ma
ristourne, l'essence pour laquelle je paie. Vous savez combien ça va me
faire de plus par semaine? Ça va payer mon loyer.
M. PINARD: Mais ils ne vous la laissent pas cette ristourne?
M. LIPPE: II y a des propriétaires qui la donnent, mais d'autres
ne la donnent pas. Il faudrait que je change de propriétaire encore. Et
dans Lasalle, comme M. Brunet le dit, en partie ce sont des petits
propriétaires, tandis que dans le Diamond ce sont des flottes.
Il y en a des flottes. Je vais m'en aller encore chez Diamond dans les
flottes? Je suis tanné de changer. Je veux rester dans la même
association, parce que je vois qu'il y a plus d'ordre que dans l'autre.
LE PRESIDENT (M. Caron): Le ministre a encore une autre question. Le
suivant sera le député de Lotbinière.
M. BOSSE : Est-ce que vous permettez?
LE PRESIDENT (M. Caron): C'est le ministre qui a la parole.
M. PINARD: M. Lippé, je vous remercie pour vos explications et
nous allons essayer de trouver la meilleure formule pour vous aider dans la
situation que vous nous décrivez ce soir. Peut-être qu'il nous
faudrait avoir plus d'explications pour en arriver à cerner une formule
qui va vous aider vraiment.
M. LIPPE: Plus d'explications? Qu'est-ce que vous voulez que je vous
dise de plus? Je n'ai pas de défense, je n'ai rien. Je n'ai personne
pour me représenter. Je suis venu ici avec des chauffeurs. Il y en a qui
ont d'autres points de vue. Moi je parle comme le gars qui n'a rien, pas de
défense. Je n'ai demandé à personne de me
représenter. Je suis venu seul, et il y en a des centaines comme
ça à Montréal, M. Bossé le sait. Vous le savez, M.
Bossé?
Je ne suis pas venu ici parce que j'ai de l'argent d'investi. Je suis
venu ici pour vous demander, à vous les gouvernants, de nous lancer au
moins et de nous surveiller, les petits chauffeurs. Je ne parle pas des autres,
je parle pour le petit chauffeur. C'est lui qui va chercher l'argent pour tous
les autres.
LE PRESIDENT (M. Caron): Le député de
Lotbinière.
M. BELAND: M. Lippé, je constate chez vous beaucoup de
sincérité, de détermination. Vous qui travaillez dans le
domaine depuis les années quarante, je trouve ça formidable de
vous voir ici ce soir et y aller avec autant de facilité. Ce ne sont pas
des louanges pour vous envoyer le pot par après.
M. LIPPE : C'est à ça que je m'attends.
M. BELAND: Ne craignez rien, nous du Ralliement créditiste nous
voyons la base.
M. LIPPE: Vous êtes du Ralliement créditiste? Je ne le
savais pas. Cela fait plaisir de vous rencontrer, monsieur.
M. BELAND: Moi, je suis très heureux d'entendre des gars comme
vous qui avez de l'expérience, qui êtes sans défense, qui
le dites bien sincèrement.
Et si nous sommes autour de cette table, peu importe ce que vous disiez
dans n'importe quel langage, c'est heureux que nous le sachions, dasn vos
termes. N'oubliez pas que tout est noté mot à mot et
qu'après que tout le monde aura été entendu, des
chauffeurs, des propriétaires, des locataires, des associations, nous
allons tout reprendre pour sortir tous les bons éléments. Si le
gouvernement oublie des choses importantes, c'est entendu que nous allons
essayer de les trouver pour tâcher de les leur suggérer.
Ce n'est pas de l'électoralisme ce que je fais là, mais je
tenais à ce que vous sachiez que j'aime énormément que
vous vous exprimiez bien clairement sur tout ce que vous avez à dire et
que d'autres également viennent. C'est rare que nous pouvons entendre
à la barre des gens de la base. J'entends par les gens de la base, les
gens qui il faudrait peut-être leur donner un autre nom
sont sans défense comme cela. Etant donné la vaste
expérience que vous avez, vous avez certainement des choses à
dire, qui peuvent vous paraître banales, mais en nous soulignant les
choses que vous avez pu observer, qui vous affectent, qui vous cassent les bras
continuellement, cela pourrait nous donner la solution ou nous apporter des
éléments en vue de trouver la solution au problème, choses
qui vous paraissent peut-être banales, mais n'ayez pas peur, dites-le
dans vos termes.
M. LIPPE: Je l'ai dit. Je suis d'accord qu'on laisse le chauffeur
déterminer s'il doit travailler à location ou au pourcentage mais
contrôlé par le gouvernement.
M. BELAND: Le genre d'association qui a été...
M. LIPPE: Pour moi, un gars qui loue son auto, qui travaille à 40
p.c, c'est parce qu'il ne veut pas travailler. Parce qu'il a peur. Il veut
être certain de son salaire. D'un autre côté, si la location
est plus basse, si elle est acceptable, il peut gagner sa vie quand même.
S'il ne travaille pas, tant pis pour lui, s'il travaille il va faire son
argent. Les locations à $12 par jour pour tout payer, ... Je vous ai dit
tout à l'heure que je faisais $15 par jour, cinq jours par semaine, cela
fait $75. Cela ne comprend pas les fois où je vais au garage. Je
n'exagère pas. Je vous le dis, je peux faire une journée de $20
ou $25 clair et le lendemain j'en ferai $10. Ma moyenne est comptée,
c'est cinq fois $15, $75, c'est cela que cela fait. S'il faut que je paie de
l'impôt et de la taxe là-dessus, je n'en paierai jamais, vous
allez me mettre en prison.
M. BELAND: Les possibilités d'associations telles que
stipulées par d'autres, pensez-vous qu'en créant une association
de tous les chauffeurs cela pourrait améliorer votre sort?
M. LIPPE: Ne me demandez pas de créer une association. Je suis
venu ici parce que j'étais écoeuré, cela fait tellement
d'années que je suis cela, le problème du taxi. Cela fait des
années. Il me demande de demander à d'autres chauffeurs de former
une association ou quelque chose comme cela.
UNE VOIX: Non, si vous faisiez partie d'une association.
M. LIPPE: C'est cela que vous m'avez demandé?
M. BELAND: Si, justement, il y avait une association de
créée et que vous y entriez à l'intérieur de cette
association-là, comme membre.
M. LIPPE: Créée par qui?
M. BELAND: Par les chauffeurs.
M. LIPPE: Je ne peux pas avoir confiance en rien à part le
gouvernement. Je vous le dis franchement.
LE PRESIDENT (M. Caron): La parole est au député de
Sainte-Marie.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Juste quelques questions. Je pense que vous
allez pouvoir me répondre par un oui ou par un non. M. Lippé,
demain, si vous êtes malade, vous n'avez
aucun revenu. Si vous êtes quinze jours sans pouvoir travailler,
vous n'avez aucun revenu.
M. LIPPE: Absolument pas.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si vous tombez sans travail, vous n'avez pas
d'assurance-chômage.
M. LIPPE: Absolument pas.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si demain vous' êtes invalide, que
vous êtes obligé de prendre votre retraite, vous n'avez aucune
pension, pas même la rente du Québec, vous n'avez rien.
M. LIPPE: Voulez-vous que je vous dise quelque chose, M. Tremblay? J'ai
subi cinq opérations...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est cela et vous avez toujours perdu.
M. LIPPE: Je n'en veux pas du bien-être social, je veux travailler
parce que si je suis sur le bien-être social, je vais mourir. Là
je suis pris pour mourir sur le taxi ou sur le bien-être social,
qu'est-ce que je vais faire? J'aime autant mourir sur le taxi.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est tout simplement une remarque. Je n'ai
pas d'autres questions à vous poser. C'est pour vous dire que, lorsqu'on
a des témoignages comme le vôtre, je pense que le gouvernement le
constate et j'espère qu'il va continuer à travailler pour
régler le problème de l'industrie du taxi qui est
réellement malade. En 1972...
M. LIPPE : II faut que vous soyez réellement chauffeur de
taxi.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): D'accord.
M. LIPPE: Chauffeur, je ne veux attaquer personne d'autre. Celui qui est
bien, est bien. Comme il a été question, cet après-midi,
de 40,000 milles par quatre mois, c'est impossible. Tout le monde s'est mis
à rire. J'ai commencé à penser que 40,000 milles par
quatre mois, c'était fort un peu, mais ça se fait, parce que j'en
ai fait des 250 milles par soir, par nuit. Et mon homme de jour, 150 milles.
Comptez ça, ça fait 400 milles par jour, 2,100 milles par semaine
ou 2,000 milles, si vous voulez. Cela se fait. Cela ne se fait pas tout le
temps, parce que le gars se ramasse à l'hôpital, comme moi.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'ai juste une autre question à vous
poser: Lorsque le député de Lotbinière vous parlait d'une
association... Je vous parle d'une association, un syndicat
accrédité, mais...
M. LIPPE : Je suis d'accord sur cela.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ... que vous auriez aidé à
former. Vous auriez l'aide du gouvernement, que ce soit du ministère des
Transports ou du Travail...
M. LIPPE: C'est ça que je vous demande, en autant que c'est sous
la surveillance du gouvernement...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous aidez à le former.
M. LIPPE: ... je ne peux pas vous demander autre chose. Je ne suis pas
avocat, je suis chauffeur de taxi.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'en prends note. Très bien.
Merci.
M. PINARD: M. Lippé, me permettez-vous une question?
M. LIPPE: Certainement, M. le ministre.
M. PINARD: Ce que vous avez dit ce soir, est-ce que ça va vous
valoir des menaces de votre propriétaire demain? Est-ce que vous
avez...
M. LIPPE: Si j'ai des meances, je viendrai vous voir.
M. PINARD : On va s'occuper de vous.
M. LIPPE : Je ne le pense pas. Je vais voir M. Brunet tout à
l'heure. Je n'ai absolument rien contre M. Brunet, mais contre le patron qui
m'exploite, j'en ai. Je n'ai absolument rien contre Taxi Lasalle... De Diamond,
je ne veux rien savoir. Je suis content de travailler pour Taxi Lasalle je ne
suis pas pour lui baiser le derrière. C'est parce que c'est la meilleure
association. Je les ai toutes essayées, Métropole... On m'en a
volé des voyages. Je comprends, je n'ai pas les réflexes d'un
jeune de 22 ou 23 ans. Je ne suis pas assez vite sur la patente. Je suis
obligé de jouer les poteaux. Connaissez-vous ça, les poteaux? Les
poteaux, ce sont les téléphones. Ou bien creuser; creuser
là...
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de
Maskinongé.
M. PAUL: M. Lippé, vous nous avez exposé ce soir les
conditions qui semblent à peu près courantes dans la location des
véhicules automobiles par les propriétaires.
M. LIPPE: J'ai exposé ma position, à moi. Je ne
représente absolument personne; il y en a qui louent beaucoup meilleur
marché que moi et qui...
M. PAUL: Est-ce qu'il y en a qui louent plus cher?
M. LIPPE: ... ont de meilleurs avantages.
M. PAUL: Est-ce qu'il y en a qui louent également plus cher que
vous?
M. LIPPE : Non, je n'en connais pas. Plus que $12 pour une équipe
de jour?
M. PAUL: Oui?
M. LIPPE: Je n'en connais pas. Je suis dans les champions.
M. PAUL: Bon. Est-ce qu'il y en a beaucoup qui paient le même prix
que vous?
M. LIPPE: Tous les chauffeurs où je travaille, c'est le
même prix.
M. PAUL: Je me demande pourquoi vous auriez à craindre des
représailles de la part de votre patron, parce que je pense bien que
c'était votre droit...
M. LIPPE: Tout ce que je demande,... Je ne dois rien à mon
patron. Je lui dois la journée parce que je suis venu ici. Demain matin,
il va demander $12 et la voiture est restée là. Tout ce que je
demande à M. Brunet, c'est qu'il ne me barre pas. C'est tout. Parce que
je peux aller travailler ailleurs. J'ai un bon dossier de chauffeur et je n'ai
jamais eu d'accidents dont j'étais responsable.
M. PAUL: M. Lippé, vous conviendrez que c'était un droit
pour vous de venir ici, c'était une...
M. LIPPE: C'était plus qu'un droit, j'en fais une maladie.
M. PAUL: ... et c'était peut-être un devoir aussi pour
ceux...
M. LIPPE: Oui.
M. PAUL: ... qui, comme vous, ne semblent pas avoir un traitement
équitable dans l'exercice de votre profession.
M. LIPPE: Vous exposer un peu comment j'étais en danger.
M. PAUL: On vous félicite d'avoir eu le courage de le faire.
M. LIPPE: C'est un devoir ou... Appelez ça comme vous voudrez. Je
suis venu ici pour donner mon opinion. J'espère qu'on va la respecter.
J'espère que vous allez faire quelque chose. Je vais insister encore,
c'est le gouvernement qui a tout dans les mains. Tous ceux qui ne sont pas
capables de parler... Moi-même, je n'ai jamais eu la chance de parler,
jamais; aujourd'hui...
M. PAUL: Vous avez appelé, tout à l'heure, votre fauteuil
ou votre chaise comme étant la table du supplice. Vous allez admettre
que ce n'est pas trop difficile.
M. LIPPE: C'est la première fois que je passe là. Je vais
m'en rappeler longtemps.
M. PAUL: M. Lippé, l'automobile qu'on vous loue quotidiennement,
est-ce toujours la même automobile?
M. LIPPE: Oui.
M. PAUL: Dans quel état d'entretien se trouve cette
automobile?
M. LIPPE: Je vais vous dire franchement, l'automobile que je conduis est
à peu près comme les minounes dont on parlait tout à
l'heure. Là, vous m'acculez au mur; là, je viens de perdre ma
"job", c'est vrai.
M. PAUL: Tout ce qu'on peut dire, c'est une automobile qui n'est pas un
modèle 1972.
M. LIPPE: C'est une voiture de 1970 avec à peu près trois
fois le tour du moteur. Il en reste encore dans le moteur mais le reste ne vaut
pas grand-chose.
M. PAUL: M. Lippé, vous avez mentionné que vous travaillez
cinq jours par semaine. Travaillez-vous le samedi et le dimanche?
M. LIPPE: Cinq jours par semaine. Quand je veux un congé, je le
dis. Ce matin, je ne le lui ai pas dit, il n'était pas là.
M. PAUL: Habituellement, avez-vous toujours les deux mêmes jours
de la semaine de congé?
M. LIPPE: Non, c'est à notre discrétion, du moment qu'on
lui dit quand on prend congé.
M. PAUL: A votre discrétion.
M. LIPPE: Même si je le lui dis et que je suis malade le lendemain
matin, je vais payer pareil.
M. PAUL: Que vous travailliez ou non, vous devez payer $12 par jour pour
cinq jours.
M. LIPPE: S'il est averti, non, mais il n'est jamais là. Il vient
juste vers quatre heures l'après-midi chercher l'argent et il s'en va.
SU est là le matin pour que je l'avertisse, d'accord, mais s'il n'est
pas là, c'est mon problème. Il répond: Vous auriez
dû me le dire la veille.
M.PAUL: Est-ce que toutes les clauses que l'on retrouve dans le
règlement no 6 sont acceptables à votre point de vue pour ceux
que l'on a décrits hier c'est M. Dickey qui a employé le
terme comme étant de la classe 4.
M. Dickey, hier soir, vous a classé ou s'est classé
lui-même et ses confrères du métier, c'est-à-dire la
classe des chauffeurs, comme étant de la classe 4. Est-ce que toutes les
clauses du règlement no 6, à votre point de vue, sont
acceptables?
M. LIPPE: J'aimerais bien répondre à cela, mais je ne suis
pas un avocat. Tout ce que je peux vous dire, c'est que je ne l'ai pas lu en
entier. Pour moi, c'est du chinois. Je ne comprends rien dans cela. Cela
regarde plutôt les propriétaires, mais chez les chauffeurs, on
n'en parle pas trop. Celui qui va chercher l'argent et va faire vivre toute la
balance de l'industrie, on dit donc qu'on veut l'aider mais qu'est-ce qu'on
fait pour lui? Sans le gouvernement, vous aurez toujours des problèmes
avec le taxi; c'est vous qui pouvez mettre de l'ordre là-dedans, il n'y
a personne d'autre.
M. PAUL: Hier soir, M. Dickey a été le premier à
parler de la nécessité d'un syndicat chez les chauffeurs ou en
faveur des chauffeurs de taxi. M. Edmonston, ce matin, a abondé dans le
même sens. Il y en a d'autres aujourd'hui qui ont invoqué la
nécessité d'un tel syndicat pour la protection des chauffeurs. A
votre point de vue, est-ce l'organisme essentiel pour, comme vous le disiez
tout à l'heure, que vous ayez un départ dans la protection et la
sécurité?
M. LIPPE: Je connais M. Dickey mais pas depuis très longtemps. Je
connais plutôt M. Blondin, je l'ai rencontré dans les
réunions. J'ai confiance en ces gars-là. Je ne peux pas vous dire
plus, j'ai confiance en ces gars-là. S'ils ont des arrières
pensées, je ne peux pas vous le dire. C'est pour cela que je vous dis
que tout ce qui va être fait, ça doit être sous votre
contrôle, c'est ce que je vous demande; sans cela, il y aura quelque
chose qui va clocher.
M. PAUL: Pour retenir votre témoignage, vous me corrigerez, M.
Lippé si...
M. LIPPE: Nous sommes ce que vous appelez le petit chauffeur et nous
dépendons de vous; sans cela, vous allez toujours avoir des
problèmes avec le taxi. Nous n'avons pas d'aide, nous. Il y a bien des
fois qu'on ne peut même pas parler dans un garage. Notre opinion n'est
pas bonne, il y en a qui sont plus forts que nous.
M. PAUL: Vous allez admettre, M. Lippé, devant la commission
parlementaire, que tous les membres de la commission ont beaucoup de respect
pour ceux qui, comme vous, viennent s'exprimer à la barre.
M. LIPPE: Je l'espère. J'espère que vous allez tous
coopérer aussi pour adopter le fameux règlement no 6 et que nous
soyons débarrassés de nos problèmes.
M. PAUL: M. Lippé, une dernière question. Est-ce que vous
vous sentiriez protégé si dans le règlement no 6 il
était prévu que les chauffeurs de taxi auront l'appui, le
concours du ministère des Transports pour se syndiquer? Est-ce que vous
vous sentiriez un peu protégé?
M. LIPPE: Certainement.
M. PAUL: Je vous remercie, M. Lippé.
M. LIPPE : Merci.
M. BOSSE: Un instant.
LE PRESIDENT (M. Séguin): M. Lippé, s'il vous plait on va
vous soumettre à l'inquisition.
M. BOSSE: Ce ne sera pas une inquisition. M. le Président, si
vous me permettez...
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Dorion
aurait une question. Il y en a peut-être d'autres, je ne le sais pas.
M. BOSSE: Ce ne sera pas trop long, je serai bref, M. le
Président.
M.TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, sur la façon
de procéder, j'aimerais que vous fassiez mention à tous ceux qui
viennent ici qu'ils ont toujours le droit de refuser de répondre
à une question. Il y en a qui ne le savent pas.
LE PRESIDENT (M. Séguin): C'est entendu. M. BOSSE: M. le
Président...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Pour un individu, des fois ça peut
être assez embêtant.
M. BOSSE: Je ne poserai probablement pas de question à M.
Lippé. Je voudrais simplement dire que M. Lippé, que je ne
connaissais pas, que je n'avais pas reconnu, lui m'avait reconnu parce qu'il
s'était opposé probablement au tout début...
M. LIPPE: C'est parce que vous n'étiez pas assez vite, c'est pour
ça.
M. BOSSE: Bon, je n'étais pas assez vite. Ceci étant dit,
il est peut-être l'élément le plus représentatif de
la majorité, dans le domaine du taxi, qui a perdu totalement confiance
dans les autorités. C'est clair, c'est net, c'est ce que j'ai
perçu lorsque j'ai rencontré des groupes. Je veux m'élever
au-dessus des questions de parti pour dire que M. Lippé est
peut-être celui qui représente l'élément qui ne sait
plus où donner de la tête. Mais il veut faire confiance aux
gouvernants, il demande quasi qu'on impose des conditions afin de lui assurer
ce que j'ai toujours dit: Un minimum raisonnable pour lui
permettre de vivre une vie plus humaine. On a entendu ici M.
Lippé et vous aussi...
M. LIPPE: Nous enlever la tension aussi, toujours la tension, toujours
la tension.
M. BOSSE: Justement, je vais revenir sur ce point très
brièvement. On a entendu ici des gens représentatifs de toutes
sortes d'associations et qui ont toutes sortes d'intérêts.
Evidemment, vous représentez la majorité, vous représentez
les chauffeurs.
M. LIPPE: Je ne représente personne, M. Bossé. Je donne
mon opinion personnelle.
M. BOSSE: Je veux dire que les chauffeurs représentent la
majorité dans l'industrie du taxi. Ils sont pourtant ceux qui ont le
plus besoin et ceux qui sont les moins organisés, ou ils ne sont pas du
tout organisés. On a entendu d'autres porte-parole très bien
organisés qui sont venus nous dire que tout allait pour le mieux dans le
meilleur des mondes. Moi, très sincèrement et très
honnêtement, au-dessus des questions politiques, depuis deux ans et demi
j'étudie le taxi, et on a souvent mis en doute ma parole. J'ai
essayé de prouver à de multiples reprises que je voulais
sincèrement aider les gars du taxi. Il y a quelqu'un à quelque
part qui ne nous dit pas la vérité quand des gens comme vous
venez dire: J'ai de la misère à vivre, je n'en blâme pas
mon "boss" immédiat, ce n'est pas un mauvais gars peut-être, je ne
blâme pas le "boss" de l'association non plus, ce n'est pas un mauvais
gars. Pourtant j'ai un maudit problème, je ne suis pas capable de vivre.
Je voudrais vivre et je voudrais que le gouvernement adopte des mesures et nous
donne cela, pas dans les termes qu'on retrouve ici, mais dans des termes que
vous comprenez. Vous voulez avoir l'occasion de vous sentir comme le citoyen
ordinaire. Sinon, vous comme d'autres, comme un grand nombre de gens, vous
allez retourner chez vous. Vous ne direz peut-être pas un mot si le
gouvernement n'allait pas vous donner ces conditions raisonnables.
Vous allez peut-être vous fermer pendant quelques mois et dans six
mois, dans un an, peut-être, dans le taxi, à nouveau, tout d'un
coup, surgiront d'autres mouvements et là des gens seront surpris et
diront: Comment, le problème du taxi, il me semble que c'était
réglé ça. J'allais dire, si le règlement
n'était pas adopté, le modifier pour permettre
l'amélioration des conditions de travail des gens comme vous.
Je tiens à vous remercier de ce que vous avez dit en ma faveur.
Je sais qu'au départ vous n'étiez même pas d'accord avec
moi. J'en tiens d'autant plus compte.
M. LIPPE: C'est minime, c'est parce que je vous l'ai dit, l'histoire du
premier pas à l'aéroport et donnez-moi trois semaines, c'est
exacte- ment ce que vous avez dit. J'en ai profité, comme vous l'avez vu
au centre Paul-Sauvé.
Mais, il y a une chose que j'aimerais savoir, au centre
Paul-Sauvé, qui a organisé cette réunion-là?
M. BOSSE: Je vais vous dire ce que j'en sais. Je n'étais pas
invité et j'y suis allé. Je n'en suis pas sûr, mais je
crois que c'est M. Tourigny, que je ne connais pas, qui l'a
organisée.
M. LIPPE: Je ne sais pas, moi non plus, et ça ne
m'intéresse pas. Ce qui m'intéresse c'est une paie au bout de la
semaine.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Je ne voudrais pas là... Un
instant, M. Lippé, le député de Napierville a-t-il un
commentaire à faire?
M. BERTHIAUME: S'il vous plaît, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Allez-y!
M. BERTHIAUME: M. Lippé, je comprends la situation que vous avez
décrite. Comme l'a dit le ministre tantôt, je pense qu'il faut
essayer de trouver la solution à ce problème. J'aimerais vous
poser une question sous ce rapport. Si vous étiez détenteur d'un
permis, propriétaire artisan, avez-vous l'impression que votre situation
serait de beaucoup meilleure?
M. LIPPE: Si j'étais propriétaire? C'est assez difficile
à dire.
M. BERTHIAUME: Sans penser à ce que ça pourrait
coûter.
M. LIPPE: Ce serait rêver en couleurs, je n'ai jamais
été propriétaire.
M. BERTHIAUME: Mais vous en connaissez des artisans quand même,
quand vous êtes à une station, vous parlez aux autres.
M. LIPPE: Oui mais je n'en connais pas un qui fait de l'argent.
M. BERTHIAUME: Ils ne font pas d'argent. M. LIPPE: Non, à les
entendre parler.
M. BERTHIAUME: Ah bien, oui!
M. LIPPE: C'est pour ça que je vous dis que je ne peux pas parler
comme un artisan, moi. J'aime autant ne pas répondre à cette
question.
M. BERTHIAUME: D'accord. Mais moi j'ai l'impression que, d'une
façon générale, pour autant que le gars soit aussi
travaillant.
M. LIPPE: Réellement, sincèrement, je crois que celui qui
n'a qu'un véhicule doit travailler autant qu'un chauffeur.
M. BERTHIAUME: Oui, travailler autant.
M. LIPPE: D'après le peu de chauffeurs que j'ai eu l'occasion de
connaître qui n'avaient qu'un véhicule, qui m'ont parlé
sincèrement, ils doivent travailler autant qu'un chauffeur de taxi;
l'avantage, c'est qu'ils sont propriétaires du véhicule.
M. BERTHIAUME: Ce que je veux dire, c'est que vous devez payer $12 par
jour de location plus l'essence. C'est sûr que si vous étiez
artisan vous auriez quand même...
M. LIPPE: Ce n'est pas en moyenne, c'est $12 par jour.
M. BERTHIAUME: ... à payer l'essence, c'est la même chose
mais peut-être qu'au lieu de vous coûter $12 par jour ça
vous coûterait $10 parce que d'après d'autres témoignages,
ça coûte à peu près cela.
Si vous voulez me laisser terminer, je cherche une solution.
Une première possibilité, c'est que si le règlement
permettait la location il ne le permet pas à l'heure actuelle
et que le taux de location était contrôlé par
l'éventuelle commission des transports, ce serait une première
étape pour s'assurer que le taux de location serait raisonnable par
rapport aux profits que le gars est en droit de faire.
Deuxième étape, si par la suite, les taux indiqués
au taximètre étaient augmentés en autant...
M. LIPPE: Je ne serais certainement pas contre.
M. BERTHIAUME: ... que la clientèle serait capable de le payer,
parce qu'il faut tenir compte de cela, c'est quand même
hypothétique mais s'il était augmenté...
M. LIPPE: Mais si vous augmentez les taux, à chaque fois que vous
avez augmenté les taux, on a augmenté le taux de location des
voitures. Aucun locataire dans la salle ne peut dire le contraire. Nous avons
été augmentés de $1 par jour.
M. BERTHIAUME: C'est pour ça que je parlais d'un contrôle
par la commission. Mais s'il y avait cette augmentation de taux, cela veut dire
que dans le pourcentage que vous recueillez à la fin de la
journée, vous auriez peut-être un peu plus d'argent. Avec ce
montant-là, vous pourriez faire l'une des deux choses, soit vivre un peu
mieux pour le nombre d'heures que vous travaillez, ou bien
peut-être...
M. LIPPE: Que voulez-vous dire par mon pourcentage? Je suis à
location. Vous voulez dire mes pourboires?
M. BERTHIAUME: Non, non!
M. LIPPE: Vous dites mon pourcentage à la fin de la
journée.
M. BERTHIAUME: Excusez-moi. Je me suis fourvoyé, ce n'est pas
pourcentage que je voulais dire; c'est votre revenu brut à la fin de la
journée qui serait plus élevé et votre revenu net aussi,
étant donné que la location sera la même. Supposons que
vous faites $40 aujourd'hui ou demain, disons $30, si vous voulez.
M. LIPPE: II y en a qui font $75. Vous allez chez eux et ils n'ont
même pas de grille-pain.
M. BERTHIAUME: J'aimerais que l'on puisse suivre mon idée. Je ne
sais pas si elle est bonne, mais je voudrais connaître votre opinion.
Supposons que c'est $30 que vous faites en moyenne. Si le taux augmente,
ça peut être $35 ou $32, ça dépend du taux. Disons
que c'est $35; ça fait $5 de plus dans vos poches à la fin de la
journée. Vrai ou faux?
M. LIPPE: Oui. Savez-vous...
M. BERTHIAUME: Un instant. Laissez-moi finir. Vous pouvez faire deux
choses avec ces $5. Vous pouvez mieux manger ou avoir un meilleur logement,
n'importe quoi. Vous pouvez faire ce que vous voulez, mais ce que j'essaie
d'examiner, c'est la possibilité que ces $5, ces $25 à la fin de
la semaine puissent être utilisés pour financer l'achat d'un
permis. Quand le permis sera acheté, au lieu de $35, ce sera $37, si
ça coûte $10 parce qu'il y a une réduction de $2. Au lieu
de payer $12 de location, vous allez payer $10 d'entretien ou de
dépréciation et le reste. Cela vous parait-il quelque chose de
possible? C'est ça mon idée.
M. LIPPE: Remarquez bien que je respecte beaucoup votre opinion et ce
que vous suggérez...
M. BERTHIAUME: Ce n'est même pas une opinion, je vous pose la
question.
M. LIPPE: Pour moi, c'est impossible. Devenir propriétaire? Cela
fait trop longtemps que je suis locataire. Il me semble que c'est impossible,
mais je respecte beaucoup cela et je suis d'accord pour que vous reteniez tant.
Mais j'ai 51 ans; ça va me prendre combien de temps avant d'être
propriétaire de taxi?
M. BERTHIAUME: Bien, je ne sais pas. Supposons que ça coûte
$5,000, à $25 par semaine, ça fait...
M. LIPPE: $5,000?
M. BERTHIAUME: Supposons $5,000 ou $6,000.
M. LIPPE: On a une "minoune" à $5,000.
M. BERTHIAUME: $6,000 à Montréal.
M. LIPPE: Oui, le permis, mais l'automobile?
M. BERTHIAUME: D'accord, plus l'automobile.
M. LIPPE: Cela fait combien? $10,000. Cela va en prendre des $5 et des
$10 pour ramasser cela avec les intérêts et tout.
M. BERTHIAUME : Très bien. Dans votre cas, ce n'est
peut-être pas pratique; vous avez 51 ans, vous l'avez dit tantôt.
Mais, en 1943, quand vous aviez 25 ans, peut-être qu'au bout de dix
ans...
M. LIPPE: Oui, mais ce ne sera pas plus vite pour un gars de 25 ans ou
30 ans. Cela va lui prendre dix ou quinze ans et il va encore être petit
vieux comme moi. Non, je ne vois rien dans ça. Votre idée est
bonne, mais il faudrait qu'il y en ait plus qui revienne par semaine.
M. BERTHIAUME: Vous ne pensez pas... Ah, d'accord.
LE PRESIDENT (M. Séguin): M. Lippé, nous vous
remercions.
M. LIPPE: Je vous remercie, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Un instant, s'il vous plaît. Le
député de Laviolette.
UNE VOIX: Je suis avec quinze autres personnes, j'aurais une
question.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Laviolette.
Je reviendrai à vous ensuite, la parole a été
demandée avant vous. Je m'excuse.
M. CARPENTIER: Juste une question, M. Lippé, pour réfuter
l'allégation du député de Lotbinière, M.
Béland. Je crois que le ministre responsable a fait certaines
déclarations, cet après-midi, qui couvrent le sujet. Lorsqu'on
parle d'association, en fin de compte, je crois qu'il faudrait au moins cesser
de charrier et de faire de la politique à tous les niveaux concernant le
mémoire de M. Lippé et ce que le député de
Lotbinière a dit à propos de la déclaration que le
ministre des Transports a bien voulu faire cet après-midi, lorsque M.
Brunet a lu son mémoire.
J'ai terminé, M. le Président.
M. BELAND: H a trop pris de cognac, celui-là.
LE PRESIDENT (M. Séguin): A l'ordre!
M. CARPENTIER: Pardon, M. le Président. L'accusation du
député ne m'atteint pas du tout, pour la simple et bonne raison
que je suis lacordaire depuis dix ans. D'accord? Pensez ce que vous voudrez, M.
le député de Lotbinière, c'est votre opinion, mais je
pense qu'il y a une limite à charrrier de la façon dont vous
l'avez fait tantôt. Je crois qu'il est temps que l'on fasse le point,
considérant précisément la déclaration du ministre
cet après-midi.
Pensez ce que vous voudrez, c'est votre affaire. Mais je peux vous
fournir les preuves en conséquence.
M. LIPPE: Si j'ai bien compris, vous avez dit que le
député de Lotbinière avait une question à me poser.
Mais je n'ai rien compris.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Non, il a fait des commentaires tout
simplement sur des commentaires que le ministre avait tenus. M. Lippé,
je vous remercie.
M. LIPPE: C'est moi qui vous remercie.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Considérant les commentaires que
nous avons entendus, je pense, en ce qui concerne le député de
Lotbinière et ses commentaires, que peut-être ses paroles ont
dépassé un peu sa pensée. Je voudrais bien qu'on
reconnaisse le fait, puisque déjà le député de
Laviolette a fait la rectification d'usage et nécessaire en l'occurence.
J'aimerais bien qu'on ne passe pas d'insinuations semblables, peu importe la
pensée qu'on puisse avoir. Qu'on garde ça pour soi.
Un commentaire? Oui. Parce que je passe immédiatement à la
prochaine association. Ne prenez pas le temps de vous asseoir, parce que vous
aviez un commentaire bref à faire.
UNE VOIX: Je suis arrivé en retard ce matin. Mon nom n'est pas
à votre ordre du jour. Je retarde quinze de mes confrères d'une
demi-heure parce que j'aurais quelque chose à dire.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Non, je dois suivre l'ordre du jour; je
ne permettrai pas à ce moment-ci que qui que ce soit intervienne
à l'intérieur de l'ordre du jour.
UNE VOIX: Je pourrais éclairer la commission parlementaire par ma
question, parce que je suis sûr qu'elle est pertinente à la
cause.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Je comprends, et je pense que tous les
commentaires qui se font devant la commission le sont. Si c'est une question,
posez-la.
UNE VOIX: Je demanderais, selon le rapport Bossé, de plafonner le
taux de location des voitures de taxi à $100 par semaine, et pas plus.
Et je vais vous donner des chiffres à l'appui. Mon propriétaire
loue ses voitures $18.50, ça fait $130 par semaine, c'est du vol.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Je dois intervenir, je m'excuse. Vous
avez fait un commentaire. C'est déjà enregistré. Nous ne
pouvons pas vous l'enlever. Mais je dois suivre l'ordre, et je vais vous
suggérer, afin d'entrer dans l'esprit et le rôle de la commission,
si vous avez des commentaires plus détaillés à faire sur
le même sujet, ou si vous voulez faire part à la commission de
commentaires au nom de dix, quinze ou peu importe le nombre des
collègues que vous avez, d'enregistrer votre nom dès ce soir en
vous adressant au secrétaire, M. Jacques Pouliot. Un peu plus tard,
puisque déjà l'ordre du jour est chargé pour la semaine
prochaine, il y aura aussi la semaine suivante sans doute, nous pourrions vous
entendre.
Nous vous aviserons à ce moment que vous serez entendu tel jour,
et vous pourrez faire la représentation que vous voulez faire.
Malheureusement, je dois suivre mon ordre de comparution en ce qui concerne les
personnes qui sont ici, et je voudrais en toute justice entendre tout le monde,
mais à tour de rôle. Ne prenez pas mon commentaire comme
étant démagogique, mais plutôt comme un commentaire que je
voudrais faire pour vous aider.
UNE VOIX: Je pensais qu'on était assez humain pour laisser un
homme s'expliquer librement dans la démocratie, mais ç'a l'air
que ce n'est pas le cas. Je vous tire ma révérence, je m'en vais
à Montréal, et arrangez-vous avec votre commission.
LE PRESIDENT (M. Séguin): J'appelle l'Association
métropolitaine des petits propriétaires de taxi de
Montréal, M. Pronovost.
Le député de Laviolette.
M. CARPENTIER: J'aimerais que vous fassiez retirer les paroles du
député de Lotbinière, qui m'a accusé tantôt
d'avoir pris du cognac, lorsque je n'en ai jamais pris depuis dix ans. C'est un
fait.
UNE VOIX: C'était une farce. M. CARPENTIER: Un instant.
M. PAUL: M. le Président, en vertu de notre règlement, je
crois que la déclaration que vient de nous faire le député
de Laviolette doit être respectée par tous les collègues,
et personne n'a le droit de contester une telle déclaration de sa
part.
Je me demande si, en fait, nous progresserions s'il nous fallait
entreprendre, à ce moment-ci, un débat de procédure, et
considérant que l'atmosphère en a toujours été une
de collaboration autour de la table, je suis certain que le
député de Laviolette conviendra que l'incident pourrait
être considéré comme clos, à la suite de sa
déclaration.
M. CARPENTIER: Je suis entièrement d'ac- cord. Mais je
n'accepterai jamais une déclaration d'un député
créditiste à cet effet.
LE PRESIDENT (M. Séguin): J'avais cru l'incident clos il y a
quelques instants. Nous allons ententre M. Pronovost.
Association métropolitaine des
propriétaires de taxis
M. PRONOVOST: Merci, M. le Président. M. le ministre, MM. les
membres de la commission parlementaire, en premier lieu, je tiens à
préciser que nous parlons strictement de l'Association
métropolitaine des propriétaires de taxis, qui a tenu une
assemblée d'information à la salle du Plateau. A la suite de
cette assemblée d'information pour tous les propriétaires de
taxis de l'île de Montréal, nous avons reçu une foule de
menaces, ce qui nous a empêchés de produire un mémoire
à cette commission, et nous demandons à la commission de bien
vouloir juste entendre certaines revendications que nous aimerions faire
à ce point-ci.
En premier lieu, je tiens à vous présenter le
vice-président de notre association, M. Jean-Marie Vanier, qui est
à ma droite, et M. Henri Paquet, qui est l'adjoint au président
et le directeur des relations extérieures de notre association.
L'Association métropolitaine des propriétaires de taxis
oeuvre dans l'industrie du taxi depuis le 11 février 1971 et est
enregistrée auprès du ministère des Institutions
financières, Compagnies et Coopératives. L'Association
métropolitaine des propriétaires de taxis a commencé son
travail avec le bill 23, chose que tous les pontifes du taxi de Montréal
n'ont pas faite. Si réellement ces gens avaient voulu prendre les
intérêts des petits propriétaires de taxis et des petits
chauffeurs de taxis qu'on essaie de charrier dans une foule d'assemblées
en faisant toutes sortes d'intimidations, je crois que si ces gens avaient eu
au moins l'honnêteté d'appuyer les gens qui ont voulu oeuvrer
honnêtement dans l'industrie du taxi, une foule de problèmes que
nous connaissons aujourd'hui ne seraient pas là.
Si les journaux ont rapporté que l'industrie du taxi est malade
depuis 64 ans, ils ont, pour la première fois au moins, rapporté
quelque chose d'assez fidèle. Il faut comprendre que l'Association des
propriétaires qu'on réclame actuellement existe en fait, mais
s'il n'y avait pas eu, à l'intérieur des associations de service,
l'infiltration parmi nos membres, l'intimidation et le chantage que nous avons
dénoncés lors de notre comparution à la commission
parlementaire sur le bill 23, je crois que ces gens auraient dû au moins
avoir l'honnêteté d'essayer de comprendre et d'essayer de se
pencher sur tous les problèmes du taxi.
Trop occupés à faire de l'argent à gauche et
à droite et à nous retourner du revers de la main, ces gens n'ont
regardé que leur intérêt et non
l'intérêt des propriétaires de taxis. Il est
malheureux que nous passions ce soir à 11 h 5, parce que j'aurais
aimé partager mon temps, et je vais le faire tout de même, avec
une autre organisation qui est en arrière, et nous allons limiter notre
temps. Vous nous arrêterez au bout d'une demi-heure. Il y a des gens qui
se sont arrogé la gloire d'avoir fait l'élimination des spoutniks
à Montréal. Je peux dire qu'il y a une seule association de
service à Montréal qui n'a pas encouragé les spoutniks.
Mais il y a une foule d'autres associations de service, des grosses, qui n'ont
pas eu l'honnêteté de supporter leurs membres. Nous combattions
quelque chose qui était enraciné depuis trente ou quarante ans,
que les autorités municipales n'avaient pas le courage de
détruire.
Nous nous sommes adressés à l'auteur du rapport
Bossé plusieurs fois. Si des gens ont le droit d'être contre le
rapport Bossé, tout comme le conseil des ministres l'Opposition
l'a accepté en principe nous avions le droit de nous
présenter en public, au nom strictement du comité
exécutif, pour énoncer ce principe.
Il est malheureux que certaines associations de services, que je ne peux
pas identifier actuellement nous allons remettre à la
Sûreté du Québec des documents à cet effet
aient tout fait pour saborder des associations honnêtes comme la
nôtre qui essaient de survivre dans l'industrie du taxi. Nous n'avons pas
d'accusations précises à porter actuellement, mais ces gens se
sont toujours infiltrés dans nos organisations. Qu'on se
réfère à certaines déclarations que j'ai faites en
public. Des avocats, travaillant à la solde des associations de
services, n'ont pas eu le courage de leurs convictions et n'ont pas
fouillé les lois que vous avez votées, le bill 23 entre autres,
qui pouvaient apporter une foule de solutions.
Maintenant, nous disons au gouvernement qu'il ne peut pas reculer parce
qu'à l'article 29 du bill 23 on constitue une association. Nous allons
nous borner, ce soir, à montrer les avantages d'une telle association.
Nous aurions aimé produire une foule de documents que mon adjoint a ici,
avec la permission de la commission.
LE PRESIDENT (M. Séguin): M. Pronovost, s'il y a une
documentation supplémentaire que vous voulez faire parvenir à la
commission, vous êtes libre de le faire. Ne vous sentez pas restreint
à cause de l'heure. Procédez.
M. PRONOVOST: Très bien, merci. Nous croyons à la formule
de l'association unique et à tout ce qui est dans la colonne de gauche.
Je m'explique. Pour les petits propriétaires de taxis, qui paient des
cotisations dans toutes les associations de services, voici ce que nous
pensons. C'est une suggestion que nous avons à faire au gouvernement.
Vous avez entendu les propriétaires d'associations de services dire
qu'ils cotisaient leurs membres pour une moyenne de $36 par mois. Juste pour
les besoins de ce que nous voulons démontrer, nous réduirons la
cotisation des propriétaires, réunis à l'intérieur
de l'association unique, à $30 par mois.
Avec les conclusions du règlement no 6, si vous arrivez à
réduire le nombre de détenteurs de flottes et de permis à
vingt, nous disons qu'il resterait environ, juste pour les besoins de la cause,
5,000 détenteurs de permis de taxi. L'association unique aurait
là un revenu de $1 million et demi. Si vous reprenez la page 6-187 du
règlement no 6, vous verrez qu'il y a une foule d'avantages qui sont
passés par-dessus la tête de tous ceux qui l'ont lu: "Promouvoir
l'instauration d'un régime de rentes", par exemple. Depuis l'ouverture
de cette commission, vous avez entendu une foule de gens se plaindre les
petits chauffeurs, les petits propriétaires de n'avoir aucun
avantage social.
Dans cette page, on voit tous les bénéfices marginaux
qu'on pourrait offrir à un travailleur régulier et reconnu qui
pourraient être dispensés par l'association unique.
Je m'explique. Etablir, avec la participation d'un assureur
autorisé à faire affaires au Québec, un régime
d'assurance permettant d'assurer la vie, l'invalidité, le revenu, la
responsabilité civile et, généralement, la personne. Pour
ceux parmi vous qui connaissez le "mass merchandising" en assurance, c'est
exactement ce que nous pourrions faire. Nous demanderions l'aide du
gouvernement pour faire une telle chose. On parle aussi de la transformation
des radios. Imaginez, continuons l'hypothèse que nous avons des revenus
de $1,500,000. Pour la transformation des radios, pour la centrale unique,
arrêtez-vous à penser, si les propriétaires de taxis sont
réunis ensemble, 5,000 propriétaires de taxis, la force de
négociation auprès des compagnies pétrolières,
auprès des compagnies de voitures et des marchands de pneus, des
manufacturiers de pneus, tous les avantages que nous pourrions en retirer. De
plus, nous aurons des suggestions à faire au gouvernement, à
l'intérieur toujours de l'association unique, pour que tous ces postes
soient strictement observés. La subvention dont on parlait dans les
journaux, qu'elle soit transmise aux détenteurs de permis de taxis. Si
le gouvernement est prêt à investir pour essayer de
remédier aux maux de l'industrie du taxi, nous serions heureux de voir
un organisme gouvernemental mettre sur pied l'association unique et tout ce qui
en découle. Mais il ne faudrait pas laisser un article hors de
ça, parce qu'à la base, à notre sens, ce sont tous des
avantages sociaux qu'on pourrait en retirer.
Nous avons également témoigné à la
commission d'enquête sur les accidents, le 18 avril 1972. Pour ceux qui
ne sont pas intéressés, nous étions encore les seuls.
L'Association métropolitaine des propriétaires de taxis, depuis
sa fondation, a pris sa responsabilité malgré tous les
bois dans les roues qu'on a essayé de
nous imposer et nous avons réussi à aller partout.
On nous a même accusés de coucher avec M. Bossé, mais
peut-être qu'on pourrait nous accuser, depuis trois ou quatre mois, de
coucher avec M. Pinard, et de coucher peut-être avec M. Loubier, que nous
avons rencontré également. Nous avons rencontré M.
Tremblay, le parti du Ralliement créditiste, lors de notre
témoignage à la commission parlementaire sur le bill 23. On a
voulu faire de la personnalité autour du règlement no 6, parce
que ces gens, au lieu de prendre l'intérêt de leurs membres,
pensaient strictement à eux.
Avant de terminer, M. le Président, nous avons des documents qui
sont véridiques, que nous aimerions vous livrer. On a attaqué
Diamond continuellement. J'aimerais qu'on continue, parce qu'il y a quelque
chose qui est fort important. Au sujet de l'intimidation, et tout ce que vous
voudrez, M. Paquet a le contrat de Diamond et il vous en fera la lecture. M.
Paquet.
M. PAQUET: Si on regarde dans le contrat de Diamond, il y a trois
articles qui stipulent que l'Association Diamond peut ou ne peut pas. Comme
elle peut ou ne peut pas, elle ne peut jamais. L'impôt des restrictions
de prêts obligatoires d'argent. Lorsque le membre a fini de payer sa
part, l'association garde la part, elle l'attache à la copie du contrat
qu'elle garde dans ses bureaux. Cette même part, je l'ai payée
dans le temps que j'appartenais à l'Association Diamond. Je suis
resté chez Diamond deux ans. J'ai retiré $1 par année,
c'est-à-dire 1 p.c. d'intérêt. Cela fait treize ans que
j'ai laissé Diamond. Ma part est restée entre les mains de
Diamond sans qu'on me paie aucun intérêt.
Cette part-là, quand on nous l'a vendue, elle était
obligatoire. Nous étions obligés d'y souscrire et si vous n'y
souscriviez pas on vous expulsait ipso facto. Alors, voici une politique de
Diamond.
On se rappelle en 1956, l'intimidation de Diamond vis-à-vis du
syndicalisme. On se plaint tout le temps que l'industrie n'est pas
organisée, elle a des raisons. L'Association Diamond faisait signer un
document à ses membres pour consentir à l'addition à ses
contrats de services une clause particulière en vertu de laquelle
Diamond Taxi Cab Association Ltd serait le seul agent dans toute
démarche concernant l'industrie du taxi à Montréal. Cette
clause comporte également une déclaration que le membre de Taxi
Diamond Association Ltd n'est membre d'aucune autre association de
propriétaires de taxis et qu'il ne s'intéresse, ni deviendra
membre d'une telle association sans le consentement de Diamond Taxi Cab
Association.
Alors, en 1956, dix membres ont refusé de signer ce document qui
les empêchait de rejoindre la Fraternité des propriétaires
de taxis. Ils ont été expulsés. Alors, ne demandez pas
pourquoi l'organisation des taxis ne peut pas se faire.
M. PINARD: Est-ce que je peux demander une précision? Là,
vous racontez une situation qui a prévalu en 1956. Est-ce que les
mêmes contrats avec les mêmes conditions dans l'Association Diamond
prévalent encore en 1973?
M. PAQUET: Un membre me dit que tout récemment il fallait signer
encore le même document à Diamond.
M. PINARD: Est-ce que vous êtes en mesure de déposer,
devant la commission parlementaire, le document dont vous venez de nous faire
lecture partielle?
M. PAQUET: Je vous ferai parvenir une photocopie du document.
M. PINARD: Vous ferez parvenir votre document à M. Jacques
Pouliot.
M. Pouliot me dit que si vous nous le laissez entre les mains, nous
pouvons le faire photocopier ce soir et vous n'aurez pas la peine de nous
l'envoyer. Parce que c'est un document que nous aimerions avoir à la
commission pour fins d'étude.
M. PRONOVOST: S'il vous plait, lorsque vous questionnez mon ami Paquet,
auriez-vous l'obligeance de hausser le ton parce qu'il porte un appareil
auditif.
M. PINARD: Très bien.
M. PAQUET: II y a un autre document. En 1962, Diamond envoyait une
lettre à ses membres qui se lisait comme suit: Votre comité
consultatif vient de prendre deux décisions d'importance majeure pour
promouvoir les intérêts des membres de l'association. Afin
d'obtenir un plus gros pourcentage de clients pour nos taxis, pour mieux nous
faire connaître du public, nous lançons une campagne de
publicité et de relations extérieures. Ce projet serait mis
à l'essai dans un an. Un fonds spécial a été
créé à cette fin et la contribution mensuelle est de $2
par voiture, soit $24 par année. Le comité consultatif a aussi
approuvé notre adhésion aux Propriétaires unis du taxi de
Montréal. La cotisation est de $0.50 par mois, par voiture, plus $1
d'inscription. Alors, ce syndicat était patroné par le Lasalle.
Je m'excuse, M. Brunet ne faisait pas partie de Lasalle, c'était en
1964. Alors il était subventionné par Lasalle et Diamond qui
fournissaient l'argent nécessaire à cette association-là
et on parle de $0.50 par mois par voiture. Je ne pense pas que dans la Loi des
syndicats professionnels une cotisation semblable ait existé. Diamond
patronait le comité exécutif et suivait les directives de
l'Association Diamond. Alors, le syndicalisme, c'est cela dans le taxi.
M. PINARD: M. Paquet, est-ce que ce sont encore les mêmes
conditions qui prévalent en 1973?
M. PAQUET: Non.
M. PINARD: Cela a changé?
M. PAQUET: Cela a été abandonné. Mais c'est pour
vous prouver ce qui se passait auparavant.
UNE VOIX: Est-ce que je pourrais ajouter à ceci...
LE PRESIDENT (M. Séguin): Est-ce qu'on pourrait avoir les noms,
s'il vous plaît.
M. VANIER (Jean-Marie): Je m'excuse. Jean-Marie Vanier, je suis
propriétaire d'une flotte de deux voitures. Je m'excuse de relater des
choses qui remontent à près de 20 ans.
C'est pour les inexactitudes qui ont été dites et c'est
beaucoup plus que des inexactitudes. C'est tout à fait erroné. Le
représentant de Diamond est venu dire, au sujet de la compagnie
d'assurances Bélair, qu'elle avait injecté disons $200,000
à $300,000 pour lancer la compagnie, et un autre montant, un peu plus
tard. Au tout début, parlons de l'association de taxis Diamond, je
parlerai de Bélair dans quelques secondes.
Quand je suis entré chez Diamond, c'était comme
propriétaire; j'ai été chauffeur avant aussi, je pense que
c'est vers 1955. On exigeait de prendre des parts dans la compagnie au montant
de $500. Ces parts, naturellement, personne ne pouvait les payer comptant, on
les payait j'ai déposé le document, d'ailleurs, je l'ai
laissé à M. Bossé, hier $15 par mois, je pense. Je
n'ai jamais retiré $0.05 d'intérêt de ces parts, je les
possède encore, ça ne rapporte absolument rien, je ne sais pas ce
que ça vaut, si c'est en bourse ou non. Diamond vient dire et
puis Bélair qu'on est presque des assistés sociaux pour
eux, à les entendre parler. Je suis simplement un petit
propriétaire et c'est Diamond qui est assisté social, pour moi,
parce que je lui ai fourni, en tant qu'individu, $500 de parts pour y
entrer.
Je vais essayer d'expliquer brièvement pourquoi j'ai payé
ça. Il y a vingt ans disons, Diamond possédait les meilleurs
postes de taxi sur rues, partout, mais dans ce temps-là, ce
n'étaient pas des postes en commun. A ce moment-là vous allez me
dire que j'étais libre de ne pas faire partie de Diamond. Oui,
j'étais libre mais, par contre, Diamond avait les plus beaux postes de
taxi sur l'île de Montréal vu qu'elle était la
première association de taxis en service. J'avais le choix de ne pas
payer les $500, faire partie d'une autre association de services qui avait de
moins bons postes, ou bien payer les $500, tant par mois, et faire partie d'une
association qui avait les meilleurs postes. J'étais libre,
réellement, c'est la liberté que j'avais.
J'ai pris la liberté de payer quand même ces $500 de parts.
Après ça, très peu de temps après, peut-être
un an ou deux, ils ont formé la
Bélair. On n'a pas eu le choix; chaque propriétaire a
payé $100. Dans le temps je ne peux pat vous dire combien il y avait de
voitures chez Diamond, c'était peut-être 1,300, 1,500, c'est un
chiffre hypothétique mais je sais qu'il y avait un très grand
nombre de voitures. On a fourni chacun, c'était obligatoire, $100 quand
la compagnie Bélair s'est formée.
Je ne veux pas que vous preniez les chiffres comme étant exacts,
faites une supposition de 1,500 voitures à $100 chacune. Capitalisez ce
montant depuis vingt ans, mes mêmes $500 depuis vingt ans en parts que
j'ai fournis, vous allez voir que ça représente un joli montant.
Je suis sorti de Diamond, j'ai gardé mes parts qui ne valent absolument
rien. Quant à mon assurance de la compagnie Bélair, elle m'a
été offerte, par un des directeurs qui doit avoir un joli
portefeuille aujourd'hui dans les assurances Bélair, $35 pour ma part.
J'ai reçu quelques fois des intérêts de $1, $2, $3; je n'en
ai plus entendu parler depuis quelques années. Ce même monsieur
fait partie des neuf que vous connaissez très bien, M. Latreille pour ne
pas le nommer. Je sais qu'il a acheté une quantité de parts
à des prix très réduits; c'est facile à prouver
d'ailleurs, vous pouvez le lui demander. II dit qu'il a injecté
plusieurs milliers de dollars, des montants fantastiques dans la compangie; il
arrive avec des chiffres mais ce sont des parts de $100 qu'on avait prises
depuis plusieurs années. Et quand un type laissait le taxi, il disait:
Ma part de Bélair, qu'est-ce que tu veux que je fasse avec ça,
qui veut l'acheter? Il y avait un nommé Latreille qui était
toujours prêt à les acheter à un prix fort avantageux.
C'est pas mal tout, en ce qui concerne ce point. Je n'avais pas
l'idée d'en parler mais j'ai sursauté sur mon siège quand
on est arrivé et qu'on disait qu'on nous subventionnait. Je ne voulais
pas passer pour un assisté social tout de même, à comparer
avec la Diamond; je crois que c'est le contraire, c'est la Diamond qui
était l'assistée sociale.
J'ajouterais un mot, le président va probablement le dire, mais
je pense qu'au sujet de l'association, je vais être très bref, je
suis pour une association unique. Je conviens que vous savez quoi faire avec
les autres associations, indemnité et tout ça, ce n'est pas
à moi de parler de ces choses, mais si on tente de régler le
problème avec l'association parallèle, selon moi, ça va
être une réformette qui ne réglera jamais le
problème en profondeur.
Le petit chauffeur, pour être bien honnête, est mauditement
plus mal poigné que nous, il n'y a pas d'erreur, j'en conviens. On dit
qu'il nous faut travailler autant d'heures, je ne fais presque plus de taxi,
j'ai des chauffeurs. Il est vrai que l'artisan va travailler autant d'heures
mais pour être sincère, si le propriétaire fait $1,000 avec
le véhicule, s'il est propriétaire il aura $1,000 de plus. Il
reste tout de même qu'il lui faut payer le véhicule avant et il en
arrache en maudit durant cinq ans. On peut dire au
chauffeur: On va augmenter un peu la rentabilité en enlevant 400
ou 500 véhicules et toi on va t'augmenter ton salaire de $25 par
semaine. Mais il paie de l'impôt, toutes les assurances que vous voulez,
un plan de pension. Mais vous ne pouvez pas élever son niveau de vie
d'une façon convenable si vous ne réglez pas en profondeur le
problème du propriétaire. C'est un tout, on ne peut pas
régler une partie du problème ou faire des réformettes,
cela n'avancera à rien.
D'ailleurs, ne vous en faites pas, ça va chiâler. Faites
une réformette, n'en faites pas, il est certain qu'il y en aura une
partie qui va chiâler. Ce qui devrait vous rester dans l'esprit c'est
quelle sera, selon vous, la méthode la plus efficace et au point de vue
de la rentabilité. Il faut régler le problème en
profondeur, avoir une association unique, comme l'a expliqué M.
Pronovost, avec des revenus colossaux, pour régler nos problèmes
au point de vue de l'association, qui va sûrement baisser. Ce n'est pas
possible autrement. De plus, que les assurances en fassent partie avec un
groupe de 5,000. Nous ne voulons pas une réformette qui grouperait 1,000
ou 1,500 taxis. Il faut augmenter la rentabilité du taxi en
général et c'est pour ça que je dis qu'il faut commencer
par le propriétaire. Ce n'est pas le problème du chauffeur, je
parlais surtout du propriétaire, mais il faut convenir qu'il ne faut pas
oublier le chauffeur. C'est lui le plus mal pris mais nous ne pouvons pas
régler le problème du chauffeur sans avoir un plan
d'ensemble.
Alors, vous touchez un peu à tout. Il faut améliorer le
prix de l'association, le prix des assurances, réduire tous les
coûts de services en général, que ce soit les pneus,
l'essence, l'huile, l'achat du véhicule par lui-même. Je m'exprime
assez rapidement, j'aurais voulu le faire beaucoup plus lentement mais j'essaie
de dire beaucoup en très peu de mots. Cela représente le gros de
mon exposé.
J'ajouterais simplement à ceci que nous tenons beaucoup à
la valeur des permis et il est très facile de chasser les
spéculateurs. Vous pouvez voir par vous-mêmes les
municipalités où il y a un bon règlement. A Sherbrooke ou
Saint-Léonard, on permet la vente, mais, si quelqu'un vend un permis, on
ne lui permet pas d'en racheter un autre avant deux, trois ou cinq ans.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le ministre des Transports.
M. PINARD: Je ne voudrais pas vous interrompre, je pense que vous avez
demandé que nous vous posions des questions seulement après votre
intervention; alors je suis prêt à attendre.
M. VANIER: J'ai terminé. Je ne voudrais pas enlever la parole au
président. C'est complet.
M. PINARD : Alors, M. le Président, me permettrez-vous une
question?
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le ministre des Transports.
M. PINARD: M. Vanier, vous êtes vous-même
propriétaire de deux voitures-taxis.
M. VANIER: C'est ça.
M. PINARD: Vous n'exploitez pas vous-même ces deux
véhicules.
M.VANIER: Dans le moment, non. Cet hiver, je me propose d'en faire mais
actuellement je ne m'occupe que du taxi et je ne crois pas avoir le temps.
M. PINARD: Donc, vous avez des chauffeurs à votre service.
M. VANIER: Oui, deux chauffeurs réguliers.
M. PINARD : Est-ce qu'il y a un chauffeur de jour et un chauffeur de
nuit?
M. VANIER: Non, un chauffeur par véhicule.
M. PINARD: Un chauffeur par véhicule qui travaille le jour et la
nuit ou seulement le jour?
M. VANIER: Je n'ai aucune idée des heures qu'ils font mais comme
tout bon chauffeur de taxi ça doit être environ dix ou douze
heures par jour.
M. PINARD: Quelles conditions exigez-vous comme propriétaire de
ces véhicules, de la part de vos chauffeurs?
M. VANIER: Ils sont à location.
M. PINARD: Quel est le taux de location que vous chargez?
M.VANIER: Le taux est de $105 par semaine.
M. PINARD: Combien de jours travaillent-ils par semaine?
M.VANIER: Ils ont la voiture toute la semaine, durant sept jours. C'est
comme si les véhicules leur appartenaient.
M. PINARD: En réalité, votre location est basée sur
24 heures.
M. VANIER : Absolument.
M. PINARD: Alors cela fait $15 par jour.
M.VANIER: Je puis vous le dire tout de suite, vous pourrez le
vérifier auprès de mes chauffeurs; ils sont libres de travailler
à pourcentage ou à location.
Il n'y a aucune pression.
M. PINARD: Est-ce que d'autres bénéfices leur sont
accordés sous forme d'escompte dans l'achat de l'essence, des
pièces de rechange?
M. VANIER: Je ne m'occupe absolument pas de ça. Le type prend son
essence où il veut, il a son escompte lui-même. La seule chose que
je lui demande, ce n'est pas une obligation. S'il y a une réparation
mineure, il va au garage où il veut, mais je lui demande d'aller
à un garage où j'ai un compte ouvert. C'est la seule chose que je
demande. Pour le reste, l'essence, il la prend où il veut, il farde ses
escomptes, je n'ai aucun contrôle, je le vois une fois par semaine, c'est
tout.
M. PINARD: Comment conciliez-vous le fait que vous prenez $15 par jour
à ces chauffeurs avec la déclaration faite
précédemment par M. Lippé et par d'autres aussi qui sont
venus avant lui nous dire que $15 est un prix exorbitant de location? Pour lui,
$12 était même exorbitant.
M. VANIER: Mais $12, c'était pour 12 heures. Moi, c'est pour 24
heures.
M. PINARD: Bon, je comprends. Il est vrai que si les chauffeurs à
qui vous louez vos voitures...
M. VANIER: II est libre de travailler à 40 p.c.
M. PINARD: ... travaillent des heures plus longues... Par
hypothèse ils peuvent travailler 24 heures par jour...
M. VANIER: Le chauffeur a un autre avantage, il a sa voiture
privée. Il n'est pas obligé d'avoir de voiture.
M. PINARD: ... et augmentent leur revenu d'autant.
M. VANIER: C'est leur choix. Je ne les force pas.
M. PINARD: Je ne vous force pas à nous le dire.
M. VANIER: Je n'ai pas de cachette.
M. PINARD: Est-ce que ce sont des taux exorbitant, $12 ou $15 par
jour?
M. VANIER: II ne faut pas que vous fassiez la comparaison, $12 par jour
c'est pour 12 heures. Si vous multipliez par deux, c'est 24 heures, si vous
voulez comparez.
M. PINARD: On demande au gouvernement d'intervenir, de geler les taux de
location et d'aller les faire accréditer par la Commission des
transports.
M. VANIER: Je n'y vois pas d'inconvénient.
M. PINARD: II va falloir quand même se baser sur l'étude
des coûts-bénéfices.
M. VANIER: Personnellement, je crois que je préférerais le
pourcentage, mais c'est à votre discrétion. Le chauffeur, comme
je vous dis, est complètement libre de travailler à 40 p.c. Notre
association est à Saint-Léonard et le seuil de la
rentabilité est atteint. Il y a un taxi pour environ 725 ou 750
personnes. Le chauffeur préfère louer parce que c'est rentable.
Il n'est pas à Montréal.
M. PINARD: Avez-vous le droit de mettre un deuxième chauffeur sur
votre voiture?
M. VANIER: Ah oui! Il y en a qui ont deux chauffeurs à
Saint-Léonard. Moi, je n'y tiens pas. J'ai moins de problèmes
comme ça. Ma voiture est toujours... j'ai de bons chauffeurs.
M. PINARD: D'après vous, M. Vanier, pour régler le
problème du petit chauffeur qui est véritablement "poigné"
dans le système des taxis, est-il souhaitable et même
nécessaire de mettre fin au régime des locations?
M. VANIER: Je ne sais pas, je le penserais. Voyez-vous...
M. PINARD: C'est peut-être un des éléments de la
réforme que nous devrions envisager. J'aimerais vous entendre de
façon plus spécifique là-dessus.
M. VANIER: Je crois que oui. Je vais vous donner ma raison. Si le
chauffeur commence avec une location de $12 plus l'essence, il faut qu'il fasse
$18 ou $20 avant de commencer à travailler pour lui-même. Il ne
peut pas faire autrement que travailler sous tension et chercher à aller
plus vite, donc il y a plus de risque d'accident. C'est entendu que le
chauffeur qui travaille à pourcentage devrait travailler d'une
façon beaucoup plus détendue, j'imagine. C'est mon impression.
Personnellement, quand j'ai travaillé dans le taxi il y a 20 ans,
à salaire, avant que je m'achète une voiture, j'étais
à 40 p.c.
M. PRONOVOST: M. le Président, avant de devenir
propriétaire j'étais également chauffeur. J'ai
expérimenté les deux systèmes et les deux ont un avantage.
Disons que la tension est plus forte pour celui qui se voit déjà
imposer une location. Le fait de garder la voiture, le système de
location a dégradé le taxi. Cela s'est institué ou a
commencé à être toléré en 1954. Allez voir la
différence. Les gars vivent aussi bien et ils peuvent vivre tout aussi
bien à 40 p.c. qu'à location. A 40 p.c. il y a l'avantage qu'ils
ne sont pas attachés continuellement à la voiture tandis que les
gars qui veulent conserver leur voiture à location surtout ceux
qui travaillent "single", pour employer le langage du métier sont
obligés de travailler presque sept jours par
semaine. Celui qui travaille à 40 p.c. peut être
syndiqué tandis que celui qui travaille à location ne peut pas
être syndiqué. Ce serait là un des débouchés
vers la syndicalisation d'abolir la location, comme nous l'avions
recommandé antérieurement dans des mémoires que nous
avions soumis.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le ministre des Transports.
M. PINARD: M. le Président, me permettez-vous une autre question
à M. Vanier pour que ce soit bien clair dans mon esprit et dans l'esprit
des membres de la commission?
M. VANIER: Oui.
M. PINARD: Vous avez deux voitures, vous ne les exploitez pas
vous-même.
Vous les louez à des chauffeurs et vous leur demandez $15 par
jour, $105 par semaine. S'ils veulent faire 24 heures par jour d'exploitation
de leur voiture, c'est à eux de le décider. Est-ce que le
locataire de l'une ou l'autre de vos voitures peut sous-louer la voiture
à un autre chauffeur?
M. VANIER: Non.
M. PINARD: Disons que votre premier locataire veut exploiter le jour,
peut-il, pour retirer une location, tout comme vous le faites, faire travailler
cette voiture la nuit, avec un chauffeur à qui il va la louer?
M.VANIER: C'est une entente. A ce moment-là, on peut avoir une
entente.
M. PINARD: Oui. Mais à votre connaissance, est-ce que cela se
fait, de la part de vos deux chauffeurs? A ce moment-là, s'il loue de
vous sur une base de 24 heures, à raison de $105 par semaine, et qu'il
veuille travailler seulement 10 heures par jour, il peut louer la voiture pour
le reste de la journée, à un taux X. A ce moment-là, il
peut faire de l'argent avec la voiture, comme vous, probablement, vous en
faites avec le chauffeur à qui vous louez votre voiture.
M.PRONOVOST: Ce ne serait pas permis. Cela s'est produit
déjà, mais...
M. PINARD: Je demande cela à M. Vanier. C'est lui qui a le
problème
M.VANIER: Pourriez-vous répéter votre question?
M. PINARD: Avez-vous bien compris ma question? Peut-être ne
l'ai-je pas posée clairement. Je vous prie de me croire, je ne vous pose
pas ces questions pour vous embêter. C'est pour mieux nous
éclairer sur la situation du chauf- feur, pour savoir quelles solutions
nous pourrions trouver, pour le placer dans une meilleure situation
économique et financière, pour lui permettre de faire des revenus
décents, capable de le faire vivre, avec des heures normales de
travail.
M. VANIER: A ce sujet-là, disons, si vous voulez, que je
préfère les 40 p.c, mais ce n'est pas moi qui décide.
M. PINARD: Mais est-il possible que le type à qui vous louez
votre voiture $105 par semaine, et qui ne l'exploite que dix heures par jour,
puisse la louer à un autre chauffeur?
M. VANIER: Oui, c'est possible, pour autant que le gars sera "pocket
number", c'est possible. Oui, c'est possible.
M. PINARD: A ce moment-là, allez-vous admettre avec moi qu'il
peut se faire un revenu additionnel de cette façon?
M. VANIER : II y a une possibilité, oui.
M. PINARD: Bon. Si vous, vous faites de l'argent en louant votre voiture
à un chauffeur...
M.VANIER: Pour quelqu'un qui a une vérification, qui est
là tous les jours, ce n'est pas possible, mais pour quelqu'un qui a la
voiture à longueur de semaine, c'est une possibilité.
M. PINARD: Mais là, on en reste toujours au système
d'exploitation du chauffeur, avec ce que vous nous expliquez devant la
commission parlementaire. C'est pour cela que je pose souvent la question
à ceux qui se présentent devant nous.
M. VANIER: Oui, c'est possible.
M. PINARD: Est-il nécessaire d'abolir le système de
location pour empêcher l'exploitation du chauffeur de taxi?
M. VANIER: J'y croirais et je reviendrais, comme M. Pronovost le disait,
à ce moment-là, au sujet de la syndicalisation et comme le petit
chauffeur, également, le disait tantôt, il faudrait que le
gouvernement nous y oblige tous. Autrement, si on attend que les chauffeurs se
réunissent par eux-mêmes pour former un syndicat, n'y comptez pas.
Cela ne se réunit pas, des chauffeurs de taxi. Si le gouvernement ne
s'en mêle pas, les chauffeurs de taxi ne s'uniront pas dans un
syndicat.
M. PINARD : Vous comprenez mon point de vue, n'est-ce pas?
M. VANIER: Oui, très bien. C'est une possibilité.
M. PINARD: Enfin, je ne sais pas si je raisonne justement.
M. VANIER: C'est une possibilité.
M. PINARD: Je me dis que s'il y a exploitation, de la part des gros,
contre les chauffeurs de taxi, il ne faut pas permettre l'exploitation des plus
petits chauffeurs, des plus petits détenteurs de permis à
l'égard des chauffeurs de taxi.
M. VANIER : C'est une possibilité.
M. PINARD: L'exploitation n'est bonne pour personne.
M. VANIER: D'accord, c'est une possibilité.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de
Saint-Maurice.
M. DEMERS: M. le Président, je voudrais poser une question
à M. Vanier. Les deux chauffeurs qui travaillent pour vous font un
salaire de combien par semaine?
M.VANIER: Je ne peux pas répondre, là-dessus, et
eux-mêmes ne vous répondraient probablement pas. J'en ai un, entre
autres, qui est bien travaillant, mais il y met les heures, j'en conviens. Je
pense que lui-même ne vous répondrait pas. Je n'en ai aucune
idée.
M. DEMERS: Vous n'en avez aucune idée?
M. VANIER: J'ai sûrement une idée. Je vous ai parlé
tout à l'heure du seuil de rentabilité à
Saint-Léonard. Je pense que vous pouvez imaginer qu'il se fait tout de
même un salaire convenable.
M. DEMERS: Est-ce que vos voitures sont neuves de l'année ou
usagées?
M. VANIER: J'ai une voiture de l'année 1972 avec un chauffeur.
Cela veut dire que le mi liage doit représenter actuellement....
UNE VOIX: Trente mille milles.
M. VANIER: Plus que cela.
UNE VOIX: Quarante cinq mille milles?
M. VANIER: Probablement.
M. DEMERS: Et l'autre?
M. VANIER: L'autre est de l'année 1971 et elle devrait avoir
100,000 milles, pas loin.
M. DEMERS: Les deux voitures, comme capital investi, qu'est-ce que cela
représente?
M. VANIER: C'est $3,500 en moyenne par voiture, plus 8 p.c. de taxe, les
permis, le compteur, c'est comme toutes les autres.
M. DEMERS: Ainsi, vous n'êtes pas au courant du tout des revenus
de vos chauffeurs?
M. VANIER: Comment voulez-vous que je le sois? Ils ont la voiture sept
jours par semaine, ils ne me disent pas ce qu'ils font. Cependant, on le sait
par la moyenne des chauffeurs.
M. DEMERS: Si vous n'avez aucune plainte, ils sont très
satisfaits.
M. VANIER: Ecoutez, je n'ai pas cette hypocrisie. Ils sont comme tous
les autres. Comme le disait le monsieur tantôt, au lieu d'une semaine, je
leur donne deux semaines et disons que deux semaines avec la voiture... Je suis
comme tous les autres propriétaires, quand on m'obligera à faire
certaines choses et qu'on fixera le seuil de rentabilité, je serai
d'accord. Je ne suis pas un modèle. Je ne veux pas me faire passer pour
un modèle. Je ne suis pas hypocrite.
M. DEMERS: Vous êtes un homme assez franc.
M. VANIER: Assez, oui. M. DEMERS: Merci.
LE PRESIDENT (M. Séguin): J'aurais une petite question à
poser à M. Paquet. M. Paquet, la commission vous a demandé tout
à l'heure si vous pouviez déposer certains documents.
M. PAQUET: Oui, monsieur.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Voici le petit problème qui se
pose. En ce qui concerne les mémoires, il n'y a aucun problème si
ces documents sont distribués aux journalistes. Dans le cas des
documents que vous avez déposés et qui semblaient être
propriété privée, avez-vous objection...
M. PAQUET: Je veux les rendre publics.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Vous voulez les rendre publics. Je vous
remercie. Le député de Maskinongé.
M. PAUL: M. Pronovost, pourriez-vous nous dire combien vous avez de
membres dans votre association?
M. PRONOVOST: Nous avions au dernier compte, 475 membres qui
détenaient entre 1,600 et 1,700 voitures, mais à la suite des
menaces que nous avons reçues, de l'intimidation et de tout le chantage
qui s'est fait lors de notre assemblée au Plateau, il y a eu
beaucoup
de division à cause de notre prise de position en faveur de
l'adoption en principe par le comité exécutif de la
réglementation no 6.
M. PAUL: Sans vouloir entrer dans les détails, est-ce que vous
pourriez nous donner une idée des menaces, de l'intimidation dont vous
auriez été victime personnellement?
M. PRONOVOST: C'étaient des appels téléphoniques
anonymes, ainsi que pour M. Paquet, au bureau, parce que le bureau de
l'association est dans le sous-sol chez moi. M. Paquet a reçu des
menaces et personnellement j'en ai reçu par téléphone. On
a fait également des menaces à un de mes chauffeurs.
M. PAUL: Des menaces qui consistaient en quoi?
M. PRONOVOST: C'était de l'intimidation plus que n'importe quoi.
On m'a dit: Toi, le chien, tu ne feras pas la semaine. Tu ne te rendras pas en
commission parlementaire.
Mais le chien a encore deux pattes et sa voix, et il est capable de
parler.
M. PAUL: Je pense que M. Paquet a quelque chose à ajouter.
M. PAQUET: J'ai reçu un appel téléphonique au
bureau et un type m'a dit: Mon petit cela comment par un "c" je
connais la couleur de ta voiture, je sais où tu restes, n'aie pas peur,
je te rejoindrai quelque part. Cela vient inquiétant.
M. PAUL: Pourriez-vous nous dire, M. Pro-novost, si, depuis la
publication du rapport Bossé, vous avez tenu une réunion de vos
membres?
M. PRONOVOST: Non, malheureusement c'est pour cela. A chaque fois, j'ai
fait bien attention et j'ai fait faire une correction dans la Presse, parce que
certains de nos membres ont appelé chez nous pour nous dire: Vous ne
pouvez pas vous engager, vous ne pouvez pas aller à la commission
parlementaire et parler au nom de nos membres. Nous nous proposons, si le
climat s'assainit, de réunir nos membres le plus tôt possible.
Nous allons demander la protection de la police. Ne froncez pas les sourcils,
on a une bonne idée de ceux qui ont voulu faire de l'intimidation et du
chantage. Nous avions eu le courage d'inviter M. Bossé, et, je crois, Me
Choquette qui a participé à la rédaction du
règlement no 6.
Si vous aviez vu les gens qui étaient dans la salle, je pense que
vous croiriez que les menaces sont sérieuses. Il y en a qui les ont
prises au sérieux.
M. PAUL: Si j'ai froncé les sourcils, M. Pronovost, ce n'est pas
parce que je ne vous ai pas cru, c'est parce que cela me surprend. Cela me
surprend que les membres d'une même association ne puissent pas ou ne
veuillent pas répondre à une invitation de leur exécutif.
C'est cela qui me surprend. Quand avez-vous tenté de tenir une
réunion de vos membres?
M. PRONOVOST: A la suite de la réunion que nous avions tenue
à la salle le Plateau, il nous a été
déconseillé par des agents spéciaux de la
Sûreté du Québec de tenir l'assemblée que nous
avions prévue pour le dimanche suivant. J'ajoute que même si on
nous a suggéré de ne pas faire d'assemblée, nous avons
tout de même tenté d'avoir une salle. Nous avons reçu de
nombreux coups de téléphone de certains de nos membres,
au-delà de 150, nous encourageant à continuer notre travail. Il y
en a plusieurs qui auraient aimé venir ici. Ils sont venus la
première journée de la commission parlementaire, mais eux aussi
ont subi toutes sortes d'intimidations.
M. PAUL: Si vous avez à peu près 400 membres dans votre
association, c'est donc dire que vous êtes moralement certain, à
la suite de l'encouragement que vous auriez reçu de 150 membres, que
vous exprimez ce soir à peu près l'opinion de la majorité
de vos membres?
M. PRONOVOST: Je vais répondre à cette question. Mais je
réponds, encore une fois, que seul le comité exécutif de
l'AMPT a reçu un vote à l'unanimité des membres du
comité exécutif pour venir parler au nom de l'association, mais
strictement, cela n'engage pas l'association comme telle, cela engage
strictement le comité exécutif.
M. PAUL: Très bien, il se compose de combien de membres?
M. PRONOVOST: De sept membres.
M. PAUL: Je vous remercie, M. Pronovost.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de
Lotbinière.
M. BELAND: M. le Président, dans le même ordre
d'idées, est-ce que le reste de vos membres se disent prêts
à continuer à vous épauler?
M. PRONOVOST: Nous le saurons lors de la consultation que nous allons
faire dans le plus bref délai possible, mais je suis sûr qu'une
fois le climat un peu apaisé, un peu assaini, plusieurs vont revenir au
bercail.
M. BELAND: Etant donné que vous êtes quand même une
association, pour situer le point, est-ce que vos membres retirent quelques
avantages bien particuliers?
M. PRONOVOST: Actuellement, nous n'of-
frons aucun avantage particulier à nos membres. Lors d'une
assemblée, le 19 janvier 1972, nous avons tenté, à la
suite d'une résolution d'un de nos membres, d'avoir un "package deal" en
ce qui concerne l'assurance-invalidité, l'assurance-vie et
l'assurance-accidents-maladie. J'ai encore le nom de l'agent de la Crown Life
que nous avions pressenti pour pouvoir offrir à tous nos membres,
à prix réduit, ces avantages, et sept compagnies d'assurance ont
refusé de nous assurer.
M. BELAND: Je vous remercie. Maintenant, en terminant, M. le
Président, je veux rassurer l'honorable député de
Laviolette à la suite des paroles fougueuses qu'il a dites à mon
endroit sous prétexte que j'aurais prononcé à son sujet
une parole plus ou moins aimable dans cette Chambre, j'accepte de retirer cette
parole. S'il est vraiment lacordaire, je le félicite. Par contre, je ne
comprends toujours pas la raison de sa fougue du début.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Ce sujet est clos. Le
député de Dorion.
M. BOSSE: M. Pronovost et MM. les membres de l'exécutif, c'est
peut-être assez cruel comme question et c'est peut-être
compromettant à la fois, mais est-ce qu'il vous serait possible
d'identifier ces menaces une fois pour toutes? Je sais que c'est beaucoup
demander. Mais afin qu'il n'y ait plus d'équivoque dans l'esprit des
gens, est-ce possible de donner des noms pour que, une fois pour toutes, le
public, le monde du taxi et les membres de la commission parlementaire sachent
à quoi s'en tenir, quitte, par la suite, à ce que vous soyez
assurés d'avoir une forme de protection? Vous n'êtes pas
obligés de répondre à cette question.
M. PRONOVOST: Je vais répondre par une autre question.
M. PAUL: Je le fais, non pas parce que je ne trouve pas la question du
député de Dorion très à point, mais je me permets
de vous donner gratuitement un conseil, si vous répondez, vous vous
exposez peut-être à certains ennuis et à une obligation de
prouver par la suite la réponse que vous donneriez. Je ne le fais pas
dans le but de vous empêcher de répondre, mais c'est
peut-être prudent de ma part de vous signaler ce fait. Quant à
moi, je serais heureux que vous puissiez donner une réponse.
M. PRONOVOST: Je ne donnerai pas...
LE PRESIDENT (M. Séguin): M. Pronovost, il faudrait que je
précise que le député de Maskinongé parle sans
doute en sa qualité d'avocat lorsqu'il vous donne ce conseil.
M. PRONOVOST: Très bien. C'est excellent. Nous vous remercions.
Je ne répondrai pas...
M. DEMERS: Consultation gratuite.
M. PAUL: Cela, c'est lui qui le dit, on se verra après.
M. PRONOVOST: Mais suite à vos excellentes suggestions, j'en
aurais une autre à faire et je crois que nous allons la faire au cours
de la semaine prochaine. Nous allons aviser le ministère de la Justice
de tous les doutes que nous avons et nous avons une foule de documents à
remettre au ministère de la Justice pour qu'il fasse enquête sur
l'origine de ces publications.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de
Sainte-Marie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je pense qu'obligatoirement nous devons
ajourner à minuit.
LE PRESIDENT (M. Séguin): C'est cela.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'ai seulement une question à poser
à M. Pronovost. J'aimerais avoir votre opinion là-dessus. Nous
nous sommes parlé souvent, et je pense que vous connaissez pas mal le
problème du taxi. Je n'ai pas à vous l'expliquer, ça fait
deux jours que vous en entendez parler, que pensez-vous de la suggestion qui
vient du gouvernement, du tableau qui est là et de l'organigramme qu'on
a suggéré?
M. PRONOVOST: Disons que nous croyons à l'association unique,
mais que cette association unique et tout ce qui en découle sous forme
de coopératives, nous le verrions, mais nous suggérons fortement
au gouvernement, s'il veut faire une association parallèle, qu'il devra
nécessairement, comme je le demandais tout à l'heure, verser la
fameuse subvention de $3 millions à $5 millions. Si nous voulons avoir
une concurrence réelle, si vous voulez conserver certaines associations
de services, et si vous voulez permettre et donner tous les
bénéfices marginaux qui sont inclus dans l'association unique et
tous les services qui en découlent, tels que le service des achats, le
système des rentes, l'assurance-vie et tout le "mass merchandising" en
assurance qui est décrit là, si vous nous donnez notre propre
compagnie d'assurance, tel que je l'avais suggéré au premier
ministre lors d'une entrevue particulière, je crois que nous
pourrons...
Le gros problème à l'intérieur du taxi pour ceux
qui veulent sortir des maudites associations de services, c'est l'assurance.
Alors, si on n'a pas d'assurance, on ne peut pas y penser. En tant que
gouvernement, si vous voulez faire une réforme, nous allons, par la
concurrence, éliminer ceux qui, actuellement, se disent fiers
compétiteurs. Mais nous soutenons d'avance que nous devrions avoir un
système avec lequel nous pourrons les concurrencer et nous voir
garantir un certain nombre de membres, mais pas 150 membres, parce
qu'à 150 membres, ils vont nous manger. Mais donnez-nous un chiffre
approximatif égal à certaines grosses associations et je crois
qu'il y a une foule de talents à l'intérieur qui seront capables
d'administrer tout cela aussi bien que les gars de Diamond à 2 p.c. ou 3
p.c.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'aurais une autre question, une petite
courte, parce que ça achève. Est-ce que vous verriez aussi
à côté du carré rouge une association des chauffeurs
on parle ici d'une association des détenteurs de permis en vertu
du bill 23 mais un véritable syndicat des chauffeurs?
M. PRONOVOST: Je l'ai affirmé à la
télévision et je le répète, il est illusoire de
vouloir réformer le taxi sans passer par la base, c'est-à-dire
les chauffeurs de taxi.
Nous avons donné un accord de principe à l'effet que s'il
y avait un syndicat unique à travers l'île de Montréal ou
à travers la province chose qui serait peut-être
souhaitable à travers la province épaulé par le
gouvernement, nous négocierions de bonne foi avec ces gens.
Merci.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de
l'Assomption.
M. PERREAULT: Vous avez le mot "Métropolitain" dans votre nom.
Est-ce que vous avez des chauffeurs de partout dans l'île?
M. PRONOVOST: Nous avons sollicité des propriétaires de
Montréal et de différentes banlieues.
M. PERREAULT: Mais, effectivement, est-ce que vous en avez de partout
dans l'île?
M. PRONOVOST: Oui. Nous en avons à Saint-Léonard, à
Montréal-Nord, à Dorval, à Pointe-Claire, à la
ville de LaSalle. Sauf à Verdun. Je pense que nous avons quelques
nouvelles adhésions à la suite de notre prise de position
épaulant la réglementation no 6. Il y a des gens de Verdun. M.
Paquet me signale...
M. PERREAULT: Théoriquement, si on laisse le système
indépendant d'association, vous pourriez être l'association qui
deviendrait une coopérative de services, pour faire face aux autres.
M. PRONOVOST: Pardon? Cela serait à nos membres à
décider, nécessairement.
M. PERREAULT: Ce n'est pas le gouvernement qui va la faire. Si les
chauffeurs de taxi la font, si les détenteurs de permis se
bâtissent une coopérative de services...
M. PRONOVOST: Nous serions heureux de collaborer à la fondation
de l'association unique, parce que nous sommes la seule...
M. PERREAULT: Je ne parle pas de l'association unique.
M. PRONOVOST : Non. M. PERREAULT: Je parle...
M. PRONOVOST: ... de l'association des propriétaires.
M. PERREAULT: ... de l'association parallèle des services des
détenteurs indépendants.
M. PRONOVOST: Oui.
M. PERREAULT: Je dis que si vous oeuvrez à l'échelle de
l'ile, vous pourriez être pour l'ile de Montréal l'association qui
créerait cette coopérative de services pour les taxis
indépendants.
M. PRONOVOST: Nous serions heureux de collaborer.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Je constate qu'il est minuit. M.
Pronovost, j'ai négligé de suivre une suggestion que vous m'aviez
faite au début. C'était de vous interrompre au bout d'une
demi-heure. A cause des questions qui ont été posées au
fur et à mesure et avec la contribution de M. Vanier et de M. Paquet,
j'ai cru bon de laisser continuer. Aviez-vous terminé, ou à peu
près?
M. PRONOVOST : A peu près pour ce soir. Mais nous avons une foule
de recommandations. Une fois que nous aurons consulté nos membres, il
nous fera plaisir de vous détailler un mémoire...
LE PRESIDENT (M. Séguin): C'est cela.
M. PRONOVOST: ... sur toutes les recommandations que nous ferons
à nos membres.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Pourriez-vous faire parvenir ce
mémoire au secrétaire de la commission?
M. PRONOVOST: Avec plaisir. M. Paquet correspond assez
régulièrement avec le gouvernement.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Et vous connaissez la coutume de
fournir les copies voulues, le nombre voulu?
M. PRONOVOST : Est-ce que c'est 25 ou 33, cette fois?
LE PRESIDENT (M. Séguin): Disons 25. Je pense que nous nous en
tirerons avec cela.
M. PRONOVOST: Très bien. Je vous remercie.
M. PINARD: M. le Président, me permettez-vous une remarque?
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le ministre des Transports.
Tenue d'une enquête
M. PINARD: Je ne la fais pas seulement mienne sauf que, comme ministre
des Transports, je me sens quand même la responsabilité de dire
publiquement que les membres de la commission parlementaire ont
été témoins de déclarations assez fracassantes au
sujet de menaces et intimidations de toute nature qui ont pu être faites
aux personnes qui, librement, ont voulu venir témoigner devant cette
commission parlementaire. Je ne veux faire de procès à personne.
Je ne fais pas de procès d'intentions. Je veux me limiter à
constater des faits qui nous ont été démontrés de
façon claire et précise.
Cette situation étant ce qu'elle est, je me demande si les
membres de la commission seraient d'accord avec moi pour que nous fassions
rapport, en tant que membres d'une commission parlementaire, au ministre de la
Justice pour qu'il ordonne une enquête sur toute cette situation de
façon que la commission parlementaire ne soit pas entravée dans
ses travaux de recherche de la vérité et des solutions pour
régler le problème de l'industrie du taxi à
Montréal ou ailleurs dans la province, et de façon que tous ceux
qui demanderont au président de se faire entendre puissent venir
à Québec librement sans aucune entrave nous dire pour une fois la
vérité que nous voulons connaître.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de
Sainte-Marie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que vous ajouteriez que si quelqu'un
veut se faire entendre par la commission parlementaire et qu'il est
empêché de venir par des menaces, il aurait le droit de demander
la protection de la police? Je connais quelqu'un qui m'a dit qu'il ne voulait
pas venir à la commission parlementaire justement parce qu'il a
peur.
M. PINARD: Non, en répondant à votre question, je vais
être très clair. Je ne parle pas de menaces
présumées ou de menaces d'intimidation qui sont invoquées
par certaines personnes pour faire une espèce d'écran et essayer
de monter un stratagème qui pourrait nous empêcher de savoir la
vérité. Je parle des menaces réelles qui ont
été faites. L'enquête déterminera ce qu'elle devra
déterminer. A ce moment, c'est au ministère de la Justice
qu'incombe cette responsabilité de déterminer le sérieux
de ces affirmations et de ces menaces d'intimidation.
Il ne faudra pas simplement l'affirmer, il faudra aussi donner des faits
précis. Moi, je ne me sens pas cette capacité de pouvoir faire
cette détermination du sérieux ou du non-sérieux de ces
menaces. Il y a un ministère de la Justice, il y a des policiers, cela
existe pour ça, ils feront leur devoir.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cette suggestion que je faisais,
c'était par l'intermédiaire du ministère de la Justice que
cela serait fait.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de
Maskinongé.
M. PAUL: Je verrais également d'un bon oeil la tenue d'une telle
enquête de la part du ministère de la Justice pour autant que la
commission parlementaire des Transports puisse continuer son travail pour
connaître au plus tôt toutes les implications du règlement
no 6 et pour que tous aient l'avantage de se faire entendre le plus tôt
possible.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Je remercie le député de
Maskinongé. Si jt dois conclure que cette commission consent, à
l'unanimité, à la suggestion des membres de la commission,
à la recommandation qui a été faite par le ministre des
Transports, je me chargerai de transmettre cette demande au ministre de la
Justice.
M. PRONOVOST: Je vous remercie, M. le Président, vous allez faire
une foule d'heureux.
UNE VOIX: M. le Président, est-ce que je pourrais avoir la
garantie, au nom de l'OCTM, de pouvoir se faire entendre mardi en
priorité?
LE PRESIDENT (M. Séguin): J'ai remis...
UNE VOIX: Nous étions les suivants sur la liste.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Oui, un instant. Voici l'ordre. Nous
avons déterminé, d'après l'allure des travaux de la
commission, qu'il faudrait nécessairement, en convoquant, limiter le
nombre d'associations ou d'individus convoqués. Ce soir, nous ajournons
nos travaux à mardi, le 23 janvier 1973 à 2 h 30 de
l'après-midi. A ce moment, par l'entremise du secrétariat, nous
aurions convoqué pour mardi l'Organisation des chauffeurs de taxis de
Montréal, l'Association des propriétaires de flottes de taxis de
Montréal, l'Association des propriétaires de taxis de
Saint-Jérôme, Lasalle Taxis Inc., l'Union des chauffeurs de taxis,
local 48, de l'Union internationale des teamsters.
En ce qui concerne les individus, nous aurions convoqué pour
mardi, M. Armand Douganiari, de Montréal. Si nous avons terminé
ce groupe mardi, nous ajournerons nos travaux à mercredi, le lendemain,
à dix heures. A ce moment, nous continuerons d'entendre mais
ces gens seront convoqués pour la journée, comme je l'ai
expliqué tout à l'heure Boisjoli Radio Taxi, Taxi
Escoumins, Métropole Radio Taxi, l'Union des propriétaires de
taxis de Granby, West Island Transportation Ltd.
Je disais que nous aurions pour la deuxième journée cinq
associations, que je viens de nommer et trois individus: M. Tony Viola, de
Montréal, M. William O'Connell, de Verdun et M. Ronald Bernard, de
Montréal. Ce sont les instructions que j'ai données au
secrétaire et il aura la liberté, si une des associations ne
pouvait répondre à l'appel à la date convoquée, de
prendre une autre association, à la suite, sur la liste
déjà établie. Cette association sera contactée.
Vous avez le programme pour la semaine prochaine. Nous siégerons mardi
et mercredi, mais ni jeudi ni vendredi. Le député de
Napierreville-Laprairie.
M. BERTHIAUME: Un éclaircissement sur la journée de mardi.
Est-ce qu'on devra réentendre Lasalle?
LE PRESIDENT (M. Séguin): Non, c'est un autre.
M. BERTHIAUME: Est-ce qu'on peut dire qui c'est? J'ai mal compris.
LE PRESIDENT (M. Séguin): Pour Lasalle, je suivais la liste tout
simplement, il y a Taxis Lasalle Inc. et il y a un autre Lasalle.
M. BERTHIAUME: J'ai compris.
LE PRESIDENT (M. Séguin): On l'a passé ce soir avec M.
Brunet. La commission ajourne à mardi, 2h 30.
(Fin de la séance à 0 h 7)
ANNEXE Référer à la version PDF page B-8555