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Version finale

29e législature, 3e session
(7 mars 1972 au 14 mars 1973)

Le jeudi 18 janvier 1973 - Vol. 12 N° 133

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du règlement no 6 sur le transport par véhicule-taxi


Journal des débats

 

Commission permanente des Transports,

des Travaux publics et de

l'Approvisionnement

Etude du règlement no 6 sur le transport par véhicule-taxi

Séance du jeudi 18 janvier 1973

(Dix heures dix-neuf minutes)

M. SEGUIN (président de la commission permanente des transports, des travaux publics et de l'approvisionnement): A l'ordre, messieurs!

Les représentants de l'Organisation des chauffeurs de taxi de Montréal sont-ils présents?

UNE VOIX: Non. Ils seront ici au cours de la journée.

LE PRESIDENT (M. Séguin): L'Association métropolitaine des petits propriétaires de taxis de Montréal. Est-ce que les représentants sont ici?

Me Antoine Geoffrion, qui représenterait l'Association des propriétaires de flottes de taxis de Montréal, n'est pas ici, à ce que je vois. Alors, nous allons entendre M. Edmonston.

Voulez-vous vous identifier, M. Edmonston?

Association pour la protection des automobilistes

M. EDMONSTON: Oui, merci, M. le Président. Mon nom est Philip Edmonston. Je suis président d'une association de consommateurs qui s'appelle l'Association pour la protection des automobilistes. Je vais faire mon possible pour m'exprimer en français. Normalement, quand je suis en face du ministre des Transports, je n'ai pas tellement de problèmes. Je vais faire tout mon possible aujourd'hui. De temps en temps, j'ai des difficultés, mais, si vous ne me comprenez pas, s'il vous plait, arrêtez-moi.

LE PRESIDENT (M. Séguin): I would like you to feel very free, Sir, to express yourself in the language of your choice.

M. EDMONSTON: En ce moment, c'est le français qui est la langue de mon choix.

LE PRESIDENT (M. Séguin): C'est ça!

UNE VOIX: II est meilleur en français, M. le Président.

M. EDMONSTON: J'ai un rapport de trois pages ici qui est une synthèse d'une synthèse et qui montre le point de vue des consommateurs. J'ai consulté nos membres et l'exécutif de notre association qui fonctionne sur le plan national. Nous avons des groupements à Montréal, à Valleyfield, dans la ville de Québec, à Vancou- ver, à Toronto et à Ottawa. C'est justement une association pour la protection des citoyens automobilistes face aux compagnies pétrolières, aux garagistes malhonnêtes, aux concessionnaires malhonnêtes et aux chauffeurs de taxi malhonnêtes ou incompétents. Depuis les deux ou trois dernières années, nous avons eu plusieurs plaintes par semaine venant de citoyen et même aussi des chauffeurs de taxi.

On se plaint à nous autres. Cela a commencé avec l'affaire Dorval. Cela a continué avec des consommateurs mécontents du service reçu des chauffeurs de taxi. Ce n'est peut-être pas plus d'une centaine de plaintes, depuis les deux ou trois dernières années. Ce n'est pas notre rôle, normalement, d'accepter les plaintes des gens qui reçoivent des services des chauffeurs de taxi ou des compagnies de taxi. Mais nous étions tellement surpris de leur gravité et du mécontentement des gens qui utilisent ce service que nous avons commencé à établir un dossier sur le taxi, justement pour le présenter à cette commission. Alors si c'est un peu hors de notre rôle, strictement pour la protection des automobilistes, c'est notre rôle pour la protection des citoyens en général, au Québec.

Je ferai juste quelques commentaires. Je suis ici depuis les trois derniers jours. J'ai entendu beaucoup d'associations de taxi et beaucoup d'avocats de ces associations qui ont dit: Nous donnons le meilleur service au monde. D'accord, le consommateur est content du service reçu. Je ne veux pas dire que des déclarations sont des mensonges mais elles ne sont pas exactes. Il y a beaucoup de gens qui ont parlé sur le dos des consommateurs, depuis les trois jours que nous sommes ici. Mais, croyez-moi, les consommateurs en général, surtout à Montréal, sont fortement mécontents du service reçu.

J'ai entendu, juste en passant, parler du problème à Dorval. Le problème à Dorval, vous savez, c'était cela. C'est de la fraude, de la malhonnêteté, du mauvais service. Pour vous démontrer cela, nous avons une question primordiale: le groupement forcé des associations et le groupement volontaire. Prenez, par exemple, le problème de la fraude, à Dorval. Il a été question d'un groupement volontaire et d'un groupement forcé. Presque durant deux ans, les groupements volontaires de chauffeurs de taxi et les associations de taxis ont essayé de nettoyer cela. Ce fut un échec monumental, parce que personne ne croyait à la bonne volonté de cette association, de cette autre association et de cette autre association. C'est toujours la chicane. A cause de cela, le gouvernement fédéral a dû s'en mêler pour nettoyer la situation. Je ne sais pas si cela a amélioré la situation mais, si ç'avait été nettoyé par le groupement volontaire des associations de taxis, ce le serait depuis longtemps. Mais ce n'est pas le cas.

Alors, je ne sais pas ce qui va arriver sur le plan provincial avec le regroupement volontaire

des associations de taxis, mais je peux dire une chose, c'est que je crois qu'on doit se méfier des gens qui disent que c'était mauvais avant, que maintenant ça va être bon, que le gouvernement s'occunant peu de notre vie, nous allons changer. Si on a des réformes qui vont se produire, elles vont se produire ici dans cette Chambre.

La bonne volonté, c'est bien gentil, mais vous avez entendu hier les quelques menaces, les huées, les problèmes avec les gens qui voulaient montrer l'autre côté de la médaille. Je suis ici depuis trois jours et j'ai vu la plupart des gens des associations de taxis qui parlaient de consommateurs bien servis, à l'exception de Sherbrooke. Il semble qu'ils ont raison, mais les autres qui ont parlé, disant qu'ils faisaient ça, ça et ça, ce n'est pas complètement vrai. Par exemple, on a parlé de la liberté. La liberté, c'est un mot dont on abuse souvent. On parle souvent de la liberté d'avoir la voiture de son choix, la liberté, par exemple, d'avoir une voiture non sécuritaire, la liberté d'avoir une voiture dangereuse à n'importe quelle vitesse, la liberté d'avoir un chauffeur qui ne parle même pas français, la liberté d'avoir un chauffeur qui va vous voler. Ce n'est pas ça, la liberté. Je crois qu'on a vraiment abusé du mot "liberté" ici.

Le service des taxis est plus qu'un service élémentaire où vous pouvez prendre un autre moyen de transport. C'est essentiel dans notre province parce qu'un service de taxis efficace, honnête, sûr, aide les consommateurs mais aide la vie en général. Surtout que maintenant, avec la question de pollution, on va bientôt, au Parlement, avoir besoin de limiter le nombre de véhicules dans la ville. On va dépendre beaucoup plus d'un bon système de taxis. C'est dans l'avenir, ça. Surtout avec notre climat, les gens dépendent beaucoup du taxi. En plus de ça, il y a des milliers de travailleurs qui dépendent d'un bon système de taxis pour aller travailler quotidiennement. Je ne sais pas si on peut appeler ça un service essentiel mais, à notre point de vue, c'est un service essentiel. C'est un service qui doit avoir des règlements forts et sévères du ministère des Transports.

Quand le gouvernement veut faire une réforme de base comme telle et entend les associations, les trois premiers jours, qui disent: C'est du communisme, c'est du socialisme, c'est une chose qui va nous frapper dans notre portefeuille, je dis qu'ils rêvent en couleur, ces gens-là, parce que cela me surprend, le projet de réforme qui a été proposé par le gouvernement provincial. Je ne suis sûrement pas un ami du ministère des Transports, il me semble. Souvent, nous sommes de l'autre côté de la table. Cette fois-ci — c'est peut-être une position que je ne suis pas habitué de tenir — je dois appuyer ce projet de règlement no 6 parce que c'est une bonne chose pour le consommateur.

Voyons en détail la question. Qu'est-ce qu'un consommateur, qu'est-ce qu'il veut? Le consommateur québécois, avec le système de taxis, peu importe celui qui le dirige, que ce soit l'association, que ce soit le gouvernement ou les coopératives, veut avoir la sécurité, il veut avoir des services. Ce sont deux choses essentielles. Pour savoir si les réformes du gouvernement sont nécessaires, il faut que nous demandions: Qu'est-ce que c'est l'état de sécurité de ces véhicules et quels sont les services qui sont offerts par les compagnies ou les chauffeurs de taxi?

Sur la question de sécurité, ce qui m'intéresse surtout, c'est la ceinture de sécurité. Je sais, selon les dernières statistiques qu'en Australie le taux de mortalité annuel a été coupé de 23 p.c. avec la loi obligeant les gens à utiliser des ceintures de sécurité. Je sais aussi que les ceintures de sécurité, on les demande dans les avions; bientôt, on les demandera dans les autobus scolaires. Pourquoi? Parce que cela sauve la vie. A Saint-Jean, lors de l'accident qui a eu lieu avec un autobus scolaire, les enfants qui ont été tués ont été projetés dehors, en bas du camion, mais ils auraient pu être sauvés si on avait eu des ceintures de sécurité. Ce n'est pas pour faire des blagues; il ne s'agit pas de dire: C'est du communisme, du socialisme; c'est un outil pour sauver la vie. La chose qui m'étonne le plus, c'est de voir les lettres de la compagnie Diamond, par exemple: sécurité, safety, service. Je ne comprends pas pourquoi ils peuvent utiliser ces lettres. Ils sont bien bilingues: sécurité, safety, service. Essayez de trouver un taxi Diamond avec les ceintures de sécurité.

Le taxi arrive équipé avec ses ceintures, mais elles sont enlevées ou cachées derrière les banquettes pour empêcher les passagers de les utiliser. Selon les dernières statistiques au Canada, 20 p.c. des passagers veulent utiliser les ceintures de sécurité. Alors seulement par une action de la compagnie de taxis, on enlève ce droit aux clients de se servir des ceintures de sécurité. Ce ne sont pas des blagues, les bureaux d'assurances du Canada ont montré qu'un des endroits les plus dangereux sur la route dans le Québec, c'est dans une voiture-taxi. Selon les derniers chiffres des bureaux d'assurances du Canada, le taux des accidents impliquant les taxis dans le Québec est très haut, mais on utilise beaucoup moins le taxi, presque 1 p.c, du montant qui apparaît ici au Québec. C'est très dangereux d'être passager dans un taxi aujourd'hui dans la province de Québec.

Jusqu'à présent, notre association n'a vu aucune action définie prise pour les compagnies de taxis, non seulement Diamond ou Lasalle, mais combien de taxis ou de dirigeants de ces compagnies veulent améliorer la situation? Au contraire, ils parlent de servir leur public. C'est le public que nous voulons servir, c'est le public qui nous fait vivre, mais qu'est-ce qu'ils font? Ce n'est pas un chemin à sens unique, il faut offrir une autre chose aussi, il faut offrir la sécurité. Ils n'offrent pas cela maintenant. Je pense seulement à la compagnie Lasalle parce que j'ai entendu, à plusieurs reprises, le direc-

teur de cette compagnie qui disait: Nous avons le meilleur service au monde. Cela n'est pas vrai J'ai été dans les autres villes, souvent je dois voyager partout dans le Canada et aux Etats-Unis et j'ai vu que ce n'était pas le meilleur service au monde. Je ne sais pas de quel monde viennent ces dirigeants du taxi, mais certainement pas du monde réel.

Nous avons des problèmes ici au Québec. On ne tue pas un agent de sécurité, comme il est arrivé dernièrement, pour rien. On a des problèmes en profondeur graves.

Ces problèmes graves ont été révélés par les gens qui sont venus ici, surtout mardi, pour faire la manifestation devant le parlement. Par exemple, seulement pour vous montrer la sécurité routière de quelques voitures, on a présentement en service, à la compagnie Diamond, une voiture no 3038 — je le sais parce que je suis monté dans cette voiture avant de venir ici mardi, par hasard — et cette voiture 3038 était tellement défectueuse que je suis sûr que même Jacques Duval ne pourrait pas la conduire. J'ai pris seulement quelques notes sur la question de sécurité. D'abord, elle n'avait pas de cligno-teurs, ce qui est contre la loi. Elle n'avait pas de serrure au coffre arrière, c'était une sorte de corde. C'est incroyable. La transmission était presque finie, elle cognait. La suspension était très mauvaise. En plus de cela, le chauffeur de ce taxi 3038 n'avait même pas sa photo à l'intérieur. Je lui ai demandé: En avez-vous une? Il a répondu: Ah oui ! C'est par hasard que j'ai eu le plaisir d'être conduit dans une voiture de Diamond qui était défectueuse. Suis-je tombé par hasard sur une voiture semblable parmi des milliers d'autres? Je me le demande. Je ne crois pas, parce que nous avons eu beaucoup de plaintes, pas seulement au sujet de la compagnie Diamond, mais des autres compagnies de taxis qui pensent d'abord au profit, et après, aux gens. C'est la question essentielle. C'est un service essentiel et le gouvernement doit forcer les compagnies à penser au service qu'elles offrent avant de penser aux profits qu'elles veulent obtenir.

Sur la question de compétence des chauffeurs, tout le monde a dit, nous avons des "bums" dans l'exercice de cette profession. Nous avons des "bums" dans le taxi. Nous avons les remplaçants, nous avons des gars qui ne sont pas professionnels. Ce n'est pas moi, ce n'est pas toi, ce n'est pas nous. C'est quelqu'un, mais nous ne savons pas qui. Nous avons des "bums", justement, parce que nous n'avons pas un esprit professionnel. Qui est chauffeur de taxi? La plupart des gens pensent qu'un chauffeur de taxi, c'est un gars qui a raté un autre mode de travail dans sa vie. Mais je connais des chauffeurs de taxi qui essaient de faire leur travail d'une façon professionnelle.

Je suis certain que, si on a des associations qui donnent une accréditation, mais une accréditation professionnelle, avec un esprit professionnel, si c'est une association de l'Etat ou une association privée, cela va améliorer beaucoup parce que le chauffeur de taxi va avoir la fierté d'être un chauffeur de taxi.

Je suis certain que pour être un chauffeur de taxi, cela ne demande pas beaucoup. Parce qu'on a vu plusieurs chauffeurs de taxi qui ne sont pas contents. C'est un service. Prenez-le ou ne le prenez pas. Cela ne m'intéresse pas tellement.

On a des bons gars dans l'industrie du taxi. Nous voulons encourager un esprit professionnel. Avec le système du gouvernement provincial, nous croyons que cet esprit professionnel peut être établi.

Finalement, au sujet du service à la clientèle, j'ai déjà parlé de Dorval. Il y a plusieurs points, dans le service à la clientèle, sur lesquels j'aimerais parler. C'est que l'on a eu beaucoup de plaintes sur la question de Dorval. C'est connu. C'est seulement maintenant que le gouvernement fédéral s'en est mêlé. Je ne sais pas si c'est réglé, mais jusqu'à ce que ce le soit, il y a toujours eu de la chicane là-bas. Quand je dis de la chicane, je dis de la fraude, le problème en général vis-à-vis du service aux consommateurs.

Aussi, nous avons eu des plaintes de gens qui ont pris l'autobus ou le métro jusqu'au boulevard Henri-Bourassa et qui ont demandé un taxi de Diamond, une grosse compagnie, pour aller à Laval. On a refusé à beaucoup de monde, carrément, de traverser le pont pour aller à Laval, parce qu'on n'avait pas eu le droit de prendre des gens de Laval pour revenir à Henri-Bourassa. Alors, on n'a pas voulu prendre des consommateurs au terminus à Henri-Bourassa et leur rendre service de les transporter à Laval.

Si on a un moyen de transport qui doit servir tout le monde, on doit accepter tout le monde: les petites courses et les grandes courses, les courses payantes et aussi les courses qui ne sont pas payantes. Maintenant, si un chauffeur de taxi croit qu'il ne peut pas gagner aussi d'argent avec vous, il peut vous refuser. S'il neige et s'il fait froid, ce n'est pas une chose qui vous plait tellement. C'est arrivé avec plusieurs consommateurs.

Une autre question sur le service. C'est que nous avons eu des plaintes aussi de gens qui ont dit qu'ils ont pris des chauffeurs de taxi qui ne parlent même pas le français. Peut-être que c'est drôle d'entendre cela venant de moi, parce que je ne suis pas Français. Le français ce n'est pas ma langue maternelle.

Je sais une chose, c'est qu'avoir une personne francophone dans le taxi alors que le chauffeur ne parle même pas français, ce n'est pas drôle. Ce n'est pas un cadeau, pour utiliser une expression québécoise. Si vous voulez vous rendre à destination de la façon la plus efficace et que vous ne pouvez pas vous faire comprendre du chauffeur, cela peut causer des problèmes. Je trouve ça drôle qu'on ne soit pas assez sévère et qu'on n'exige pas que le gars parle

français. Je suis heureux de voir qu'on a mis ça dans le règlement, car c'est primordial ici. Il doit parler le français d'abord.

Finalement, comme groupement de consommateurs, il est entendu que plusieurs compromis se feront à cause de pressions politiques intenses faites par différentes associations de taxis et par différents chauffeurs. On sait que le gouvernement va reculer sur quelques points et aller plus loin avec les autres points. Nous sommes d'accord sur ça. C'est ça, la démocratie que le gouvernement attend de nous. Il fera des compromis. La seule chose que nous demandons, c'est qu'avec le compromis que vous allez faire vous n'oubliiez pas deux choses concernant les consommateurs. N'oubliez pas que votre tâche est d'assurer les meilleurs services et aussi des services de toute sécurité aux consommateurs québécois. Par exemple, il y a un message commercial à la télévision —je ne veux pas vous montrer que je regarde la télévision trop souvent — qui dit, pour une marque de bière: Tu l'as ou tu l'as pas! Pour la sécurité et les services, à Montréal surtout: Tu l'as pas! Merci.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le ministre des Transports.

M. PINARD: M. Edmonston, merci pour votre présentation. Félicitations pour le bon français que vous avez utilisé pour faire votre présentation. Je pense que cela prenait, quand même, un certain courage pour vous exprimer en français, ce matin, dans les circonstances que l'on connaît, alors qu'il faut parfois des précisions techniques et le mot juste pour décrire les idées qu'on a. Je pense que vous avez réussi ce tour de force fantastique.

Vous représentez une association de consommateurs qui regroupe combien de membres?

M. EDMONSTON: Environ, 1,200 membres.

M. PINARD: Au Québec?

M. EDMONSTON: Au Québec.

M. PINARD: Et au Canada?

M. EDMONSTON: Mais nous avons beaucoup de volontaires. Environ 2,000 au Canada.

M. PINARD: D'après vous, est-ce qu'il y a trop ou pas assez de voitures-taxis dans l'agglomération de Montréal, pour en arriver à une bonne qualité de services?

M. EDMONSTON: En ce moment, nous croyons qu'il y en a trop.

M. PINARD: Qu'il y a trop de voitures-taxis. M. EDMONSTON: Exactement!

M. PINARD: Pour corriger la situation, quelle est votre proposition pour avoir une bonne qualité de services?

M. EDMONSTON: Nous croyons que, selon les recommandations du rapport Bossé, 700 à 800 taxis, ce serait une bonne moyenne. A Toronto, le chiffre est plus élevé et les gens sont très bien servis. Je crois que c'est un taxi par 965 personnes dans la ville de Toronto. J'ai été souvent à Toronto et je parlais toujours avec le chauffeur de taxi, comme avec les gens en général. Notre bureau n'a reçu aucune plainte encore depuis six mois. Nous croyons que c'est une bonne moyenne. Nous savons que les dirigeants des associations de taxis vont être mécontents de ça.

On a beaucoup de taxis, à Montréal, mais le climat est froid, parfois il y a de la neige. Parfois, la personne prend un taxi pour s'en retourner à la maison. Il est très difficile d'avoir un taxi, à ce moment-là. C'est vrai. La plupart des gars disent: Pourquoi travailler, mon Dieu? Il neige. Nous ne pouvons pas faire de longs voyages. Nous serons embêtés, nous serons pris dans la neige. Alors même avec tous ces taxis que nous avons à Montréal, il n'y a pas un esprit humanitaire, un esprit de service au consommateur. Quand la neige commence à tomber, le taxi file à la maison. C'est incroyable, mais cela arrive souvent.

Nous avons assez de taxis, à Montréal. Nous en avons plus qu'assez, nous en avons même trop, à Montréal, à notre avis. De plus, quand on a de la neige, des temps où il est difficile de conduire, nous n'en avons pas assez.

M. PINARD: Avez-vous étudié la réforme du taxi qui a été faite dans le Toronto métropolitain?

M. EDMONSTON: Je l'ai vue.

M. PINARD: Pourquoi cette réforme, à Toronto, a-t-elle été faite? A qui a-t-elle été demandée? Pensez-vous qu'elle a été bénéfique?

M. EDMONSTON: Pour répondre à la première partie de votre question, je ne suis pas assez au courant de la réforme, à Toronto, à savoir qui l'a faite et à la demande de qui. Je crois que vous êtes mieux renseigné que moi là-dessus.

Question de bénéfices, je puis vous démontrer que les bénéfices aux consommateurs sont extraordinaires à Toronto. Nous avons même fait une petite enquête, pour savoir si les gens sont contents. Ils sont contents. A Toronto, j'ai demandé à plusieurs chauffeurs de taxi: Combien gagnez-vous? Le chauffeur me répondit: Je dois travailler, monsieur. J'ai dit: D'accord. Mais combien d'heures travaillez-vous par jour? Je travaille 12 heures par jour. Pendant combien de jours? Six, parfois sept jours. Combien

gagnez-vous? Environ $300, $350. C'est à Toronto.

M. PINARD: Par semaine?

M. EDMONSTON: Oui. J'étais surpris.

M. PINARD: Oui, un instant.

LE PRESIDENT (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous plait!

M. PINARD: Est-ce brut ou net? M. EDMONSTON: Brut.

M. PINARD: Ses dépenses comptées, combien peut-il fait de salaire?

M. EDMONSTON : Je ne sais pas de combien sont ses dépenses.

M. PINARD: Lui avez-vous posé la question?

M. EDMONSTON: Je ne sais pas exactement.

M. PINARD: A New York, y a-t-il eu une réforme du taxi?

M. EDMONSTON: Oui.

M. PINARD: Avez-vous étudié cette réforme? Etes-vous allé à New York récemment?

M. EDMONSTON: Non, pas en profondeur. Nous avons seulement demandé, encore, aux chauffeurs de taxi s'ils en étaient contents. Il y a le gel des permis de taxi.

M. PINARD: Oui.

M. EDMONSTON : II y a aussi des questions de sécurité, des inspections très sévères des taxis. Il y a la question de la ceinture de sécurité qu'on doit avoir. Il y a aussi la question de protéger le chauffeur lui-même contre des voleurs. Ils ont trouvé cela intéressant. On parlait de liberté, ici. Peut-être une liberté que le chauffeur de taxi veut avoir, c'est la liberté d'être volé par quelqu'un. Mais, à New York, on ne reconnaît pas cette liberté. On a essayé le plus possible de protéger le chauffeur aussi. C'est un peu une perte de liberté parce que le chauffeur ne peut pas parler avec le passager, derrière, à cause du mur de plastique d'une substance très solide qui protège le chauffeur de taxi.

Alors, au sujet de votre question sur New York, je ne suis pas assez renseigné, au sujet des bénéfices. Cela semble beaucoup plus dur là-bas qu'à Québec et qu'à Toronto. C'est plus dur. On a eu le problème, à New York aussi, au sujet des taxis.

On a toujours eu des problèmes parce qu'ils s'entêtent à lutter contre le règlement concernant l'inspection des taxis, qui a lieu, je crois, plus que deux fois par année.

M. PINARD: Quel est le nombre de rapport voitures-taxis par rapport à la population à New York?

M. EDMONSTON: Je ne suis pas au courant.

M. PINARD: Sur le problème de l'association, est-ce que vous avez quelque chose à dire à la commission parlementaire?

M. EDMONSTON: Nous sommes heureux de voir, sur la petite feuille que vous nous avez passée ce matin, que cette association devra avoir un comité d'éthique professionnelle. Nous croyons que c'est très important, un comité d'éthique professionnelle. Même les représentations des gens de Sherbrooke ont montré qu'un tel comité discipline ses propres membres. Nous sommes d'accord sur ça. Nous croyons que c'est nécessaire. On a un proverbe français qui dit que la peur est le commencement de la sagesse. Si cela marche avec les hommes politiques, je suis certain que ça marchera avec les chauffeurs de taxi. S'ils ont peur, je ne suis pas certain s'ils ont la sagesse dans cette industrie. Je sais que le comité d'éthique professionnelle est très nécessaire. La seule chose que nous voulons ajouter, c'est que le comité d'éthique professionnelle doit comporter des représentants des consommateurs. Justement, nous avons des associations de consommateurs ou des consommateurs choisis par le gouvernement qui sont représentatifs de la population de certains endroits. Nous croyons qu'on va avoir le "feed-back" de Lasalle et de Diamond et non pas le "feedback" des consommateurs disant qu'ils ne sont pas contents. Votre service n'est pas aussi bon que vous le croyez. Il faut avoir ces dialogues. Jusqu'à maintenant, au parlement, au salon rouge, on n'a pas eu ce dialogue. C'est commencé aujourd'hui. Pour terminer, je suis certain que ce comité d'éthique professionnelle est bon et très nécessaire. Il faut que ce soit dans l'association des détenteurs de permis, que ce soit prévu dans le règlement no 6 aussi, comme dans l'entreprise privée du taxi. C'est une chose essentielle parce que c'est un contrôle, non pas sur le prix, non pas sur le nombre de permis, mais sur la qualité des services. A notre avis, le taxi est un service essentiel. On doit avoir le contrôle de la qualité.

M. PINARD: Justement, en parlant d'un service essentiel au public, le fait que le règlement dise qu'il faudrait que la voiture-taxi soit en service au moins 60 heures par semaine, est-ce que ça vous parait exagéré ou si ça vous parait réaliste et nécessaire?

M. EDMONSTON: Pour nous, c'est très réa-

liste. Nous croyons que le taxi est un service essentiel. Si vous détenez un permis du gouvernement municipal ou provincial, vous avez le privilège de faire — ce n'est pas un droit, c'est un privilège — un certain genre de travail pour le public. Nous croyons que c'est primordial que ce privilège apporte avec lui des obligations. Une des obligations, c'est que vous soyez à la disposition du public un certain nombre d'heures par semaine. Nous croyons que 60 heures par semaine n'est pas irréaliste, que ce n'est pas de la foutaise. C'est très important d'être à la disposition du public. Nous croyons que c'est une bonne affaire.

M. PINARD: Quand vous parlez du service de taxi comme d'un service essentiel au public, êtes-vous capable d'aller un peu plus loin et de nous dire quelles seraient les conséquences d'un arrêt de ce service de taxi pour la population, compte tenu des besoins de la population d'être servie par ce moyen de transport, selon la formule qui est prévue au règlement no 6 pour le regroupement des propriétaires, gros, moyens et petits, et des chauffeurs de taxi dans une association?

M. EDMONSTON: Nous croyons que, si ce n'est pas laissé à leur discrétion et si c'est l'association des gens d'un même service, c'est toujours bon parce qu'on a la force de frappe, on a la force de pouvoir acheter certains produits. Je connais les compagnies pétrolières, ce ne sont pas des gens qui sont chrétiens, humanitaires; ils croient d'abord aux choses économiques. Si vous n'avez pas la force de frappe en face de ces compagnies, elles vont vous vendre les choses le plus cher possible. Cela se transmet dans le prix au consommateur et on demande beaucoup plus cher au consommateur pour ces voyages en taxi parce que cela coûte plus cher.

Qu'est-ce qu'un arrêt de travail des chauffeurs de taxi donnerait? On a eu un petit arrêt de services de taxi justement mardi soir, ici, à Québec, sur le pont Laporte et mardi toute la journée on n'a pu trouver de taxi parce qu'ils étaient tous ici. C'était terrible. C'était presque Un service essentiel. Tout le monde qu'il y avait dans l'autobus que j'ai pris a dû marcher de là-bas jusqu'ici. Ce n'était pas drôle parce qu'on n'a pas eu d'autobus supplémentaires pour venir de la gare d'autobus au parlement. Ce n'est pas drôle de marcher de là à ici. Peut-être que c'est bon pour le physique, mais vraiment c'est un service essentiel. Nous croyons qu'avec une association comme l'association proposée par le gouvernement provincial, il y a des avantages pour le consommateur, il y a des avantages pour le chauffeur qui lui-même est un consommateur. Le pouvoir d'achat d'un consommateur est beaucoup plus grand quand on est réuni dans un groupement de consommateurs, un groupement de taxis. Je sais que, pour le pouvoir d'achat des pneus, même des radios quand on achète tous ensemble, cela baisse le prix considérablement et peut avoir de l'effet dans la poche du consommateur qui peut peut-être payer moins cher à l'avenir pour le taxi, malgré les augmentations prévues, les augmentations normales du prix de l'essence qui va toujours augmenter. Cela ne se traduira pas tellement dans la poche du consommateur par une augmentation si on a le pouvoir d'achat d'un groupement de taxis. Je ne parle pas seulement du groupement de Lasalle et de Diamond. Je crois que le groupement de Lasalle et de Diamond, selon les statistiques que j'ai vues, contrôle seulement 56 p.c. ou 52 p.c. des taxis à Montréal. Je ne sais pas si c'est exact ou non, j'ai lu cela dans un journal, Le Devoir, qui a déjà fait un rapport sur les taxis. Mais je crois qu'une association comme celle qui est proposée ici peut avoir une force de frappe dans l'industrie, la force de frappe de ses propres membres, une force de frappe pour l'éthique, pour l'honnêteté, pour le meilleur service et pour la sécurité. Nous croyons aussi que cela peut beaucoup aider, en général, le consommateur.

Et c'est lui maintenant qui entre dans toute cette affaire. Quels services seront donnés par cette association aux consommateurs? Nous croyons que ce serait un service mieux orchestré, si on peut penser à une symphonie, mieux dirigé parce que c'est tout ensemble.

M. PINARD: M. Edmonston, vous avez probablement lu la loi 23, la Loi des transports, parce que j'ai remarqué que vous avez été présent presque tous les jours aux séances de la commission parlementaire au cours de l'année 1972. Si pour conserver au public la meilleure qualité de transport possible, pour le transport des marchandises et le transport des personnes, est-ce qu'on peut garder un régime de liberté totale ou partielle comme on l'a exprimé devant cette commission, depuis trois jours, et arriver à cette qualité de services nécessaire, à cette efficacité et à cette rentabilité dans le transport des personnes et des marchandises? Comment pourrions-nous concilier ce besoin de liberté affirmé par les propriétaires de grandes associations, par les propriétaires, petits, gros et moyens, par les petits chauffeurs et le fait de permettre au gouvernement en même temps d'en arriver à une politique équilibrée du transport des personnes et des marchandises au Québec?

M. EDMONSTON: D'abord, il faut définir si l'industrie du taxi est un droit ou un privilège. Je crois que le service de taxis, c'est un privilège, ce n'est pas un droit. Le permis peut être retiré par le gouvernement selon sa volonté. Si c'est un privilège, ce privilège suppose les obligations que j'ai déjà mentionnées. Les obligations sont parfois violées. Les obligations du gouvernement concernant ce permis, c'est de dire: Vous avez ce permis, le privilège de gagner

votre vie, voulez-vous donner un service au public consistant et de haute qualité? Si on abuse de ce privilège, on le retire. On fait ça avec les cabarets et autres endroits où on donne un permis. Selon la gravité de l'abus de ce privilège, le gouvernement doit agir.

Je suis ici aujourd'hui pour vous montrer la gravité des abus de ce privilège. Les actions abusives des compagnies de taxis sont graves. Les grosses compagnies comme LaSalle, dont je peux parler, n'ont même pas de ceintures de sécurité dans les véhicules et je trouve cela incroyable. On enlève ça, parce que ce n'est pas de l'intérêt public. Je ne crois pas qu'on doive retirer un permis seulement pour ça, mais ça montre en général l'arrogance des compagnies, des corporations. On enlève de la protection au public en donnant un service essentiel au public. Ce privilège que vous donnez à ces gens, on en abuse et je crois que le gouvernement doit agir. Il doit dire: Vous avez un privilège mais aussi une obligation précise. Vous l'avez fait dans le règlement no 6. C'est une obligation pour vous de garder ce privilège de gagner votre vie. Tout ce que je peux dire, c'est que l'obligation a été violée souvent. Dans l'industrie privée comme telle, on n'a peut-être pas de concurrence. Pour le service, la qualité et la sécurité je n'ai pas vu tellement de concurrence. J'ai vu des voitures vraiment en très mauvais état.

Je crois que c'est à cet égard que le gouvernement doit agir. Quant aux chiffres des compagnies d'assurances du Canada, je m'y fie beaucoup, croyez-moi. J'ai vérifié cela auprès de la ville de Montréal. Nous avons beaucoup d'accidents impliquant les taxis.

M. PINARD: Est-ce que je comprends bien si je dis que, selon votre point de vue, si ceux qui sont dans l'industrie du taxi se font concurrence pour aller chercher des profits, il faudrait que le gouvernement trouve un moyen de les mettre en concurrence pour assurer une meilleure qualité des services au public?

M. EDMONSTON: C'est exactement cela. Nous croyons que c'est le profit qui est la première préoccupation dans le monde de ces compagnies, parce qu'elles ont des actionnaires. Selon le terme légal, une compagnie a-t-elle des obligations envers le public ou envers ses actionnaires? Ses actionnaires doivent faire un profit. Nous allons avoir des gens qui vont dire: Si nous n'avons pas de bonnes voitures et un bon service, le public ne prendra pas nos taxis. C'est faux. Vous pouvez donner un mauvais service avec des voitures non sûres et faire toujours un profit et peut-être même faire plus de profits, parce que vous ne dépenserez pas d'argent pour rendre vos véhicules sûrs ou pour embaucher des chauffeurs de bonne qualité. Vous pouvez embaucher un étranger, ou un individu qui n'est pas Québécois, qui ne parle pas la langue et qui va travailler peut-être pour presque rien, parce qu'il a besoin de travailler, c'est le seul emploi qu'il peut avoir. Vous pouvez mettre n'importe quel "bazou" ou "minoune" sur la rue pour frauder véritablement le client. Vous ne lui volez pas l'argent de sa poche, mais vous le fraudez, parce que vous ne lui donnez pas une voiture qui offre plus de sécurité ni un service adéquat. Et il n'est peut-être même pas au courant de cela. Cela arrive souvent.

Quant à moi, il faut que le gouvernement intervienne pour assurer que le profit ne soit pas la principale priorité du service de taxis à Montréal, au Québec, en général. Le service à la population devrait être la principale priorité. Ici, les tarifs de taxi sont tellement mal faits, son tellement bas que les compagnies de taxis ne peuvent pas exister, il serait plus rentable que les compagnies donnent un bon service avec des voitures sûres.

Je veux dire maintenant que cette industrie est très malade. Est-ce qu'il serait plus rentable d'offrir des voitures sûres et un service de haute qualité? Est-ce que cela mettrait les compagnies en faillite? J'en serais surpris d'ailleurs. Cette industrie est vraiment malade.

M. PINARD: Si je comprends bien, vous dites que si l'industrie, telle que nous la connaissons aujourd'hui, avec la qualité de services que nous connaissons, se prétend incapable de faire des profits, elle est vraiment malade.

M. EDMONSTON: Exactement. Si elle ne peut pas faire de profits en donnant un service de haute qualité, un service sûr au consommateur, il y a vraiment quelque chose qui ne marche pas. A mon avis, le gouvernement doit agir pour protéger le public. C'est son premier intérêt, le public en général. Je dis maintenant que le public n'est pas protégé et que vous devez agir dans cette optique, pour le consommateur, pour le public en général et non pas en faveur de quelques associations de taxis, non pas pour quelques chauffeurs de taxi ou propriétaires de taxis, mais toujours avoir cette optique, à savoir ce que cela va donner au public québécois en général. Où en sont-ils, en ce moment, sur la question de services et de sécurité? Où voulons-nous les mener? En quel état est le travail sur ce point? Comme vous avez fait avec le règlement no 6, cela va faire, je crois, l'affaire du gouvernement parce qu'il doit nous protéger tous ensemble, non pas seulement une petite entreprise ici, une grosse là. Il fait des lois différentes pour celui-ci et pour celui-là. Il faut avoir une législation pour tous, pour protéger les intérêts de tous.

M. PINARD: M. Edmonston, comme président d'une association dont l'objectif est la protection du consommateur, vous avez donné votre point de vue. Nous vous en remercions. Cependant, pouvez-vous aller un peu plus loin et

nous dire si, dans l'industrie du taxi, indépendamment de l'exploitation qui peut être faite du consommateur client.

Est-ce que, d'après vous, il y a un régime d'exploitation qui se situe ailleurs, c'est-à-dire qui rend victime le chauffeur de taxi ou le petit propriétaire de taxis? A votre connaissance, est-ce que cela existe à Québec, à Montréal ou ailleurs?

M. EDMONSTON: Nous avons dans notre association, je crois, pas plus de dix membres qui sont des chauffeurs de taxi. Nous avons beaucoup de volontaires qui sont des chauffeurs de taxi parce que nous avons à les aider au sujet des marchands d'automobiles, etc. Certainement qu'on a l'exploitation des chauffeurs de taxi.

Très tard, hier soir, peut-être que les journalistes n'étaient pas ici, on a parlé de menaces. Quelques chauffeurs de taxi courageux ont été intimidés. Ce ne sont pas des présidents de groupements de consommateurs, ce sont de simples chauffeurs qui ont voulu témoigner sur des menaces, sur de l'intimidation, sur l'attitude malsaine qui règne dans cette industrie. J'ai parlé avec ces chauffeurs de taxi. Croyez-moi, ils ont peur. Ils ont peur parce qu'ils croient que les menaces et l'intimidation vont continuer. Si le gouvernement recule en ce moment, tout le travail fait, tout la collaboration donnée à M. Bossé et au gouvernement seront réduits à zéro. Ils sont des gens marqués. Si le gouvernement n'agit pas, ces gens marqués vont avoir un temps difficile, pas seulement pour trouver du travail mais aussi dans les relations qu'ils auront avec les travailleurs de l'industrie du taxi. Je sympathise beaucoup avec ces gens. Je les admire beaucoup pour leur courage. Ils ont beaucoup plus de courage que moi. Ce sont de simples chauffeurs de taxi qui sont venus ici pour témoigner à leurs propres frais.

Les dix chauffeurs de taxi qui font partie de notre association et les volontaires, presque la totalité, en privé, m'ont dit que cette industrie était pourrie. C'est terrible. Nous croyons que le rapport Bossé est basé sur le bon sens. Il a une bonne base, c'est vrai. Nous n'aurions jamais cru que le gouvernement irait aussi loin pour réformer cette industrie dans la base. C'est la première fois que nous voyons cela. Cela nous fait peur, mais nous croyons que c'est la seule chose à faire. Ce n'est pas représentatif de tous les chauffeurs. Je parle seulement d'une dizaine. Je peux vous dire, selon leurs pouvoirs et leurs convictions, quand ils en ont parlé avec moi, que je n'ai pas cru que c'était une chose truquée. Je n'ai pas cru qu'ils voulaient démolir une association ou une autre. Je croirais que ce sont les convictions de chauffeurs de taxi qui ont vécu dans l'industrie du taxi depuis longtemps.

M. PINARD: Vous parlez de la connaissance que vous avez d'un régime d'exploitation au niveau des chauffeurs. Vous en avez dix qui se regroupent dans votre association et à qui vous avez parlé personnellement. Est-ce qu'ils vous ont donné suffisamment d'informations pour que vous soyez capable de dire à la commission parlementaire, ce matin, quelle est cette forme d'exploitation? Par quel moyen se fait-elle? Vraiment, cela constitue-t-il à vos yeux des menaces sérieuses qui doivent absolument requérir l'intervention du gouvernement dans les circonstances?

M. EDMONSTON: Nous avons spécifiquement donné dans un mémoire des plaintes écrites par quelques chauffeurs de taxi qui donnent le nom des compagnies, le nom des garages et le nom de gens là-dedans qui ont truqué la sécurité des voitures, etc. pour violer, sans punition, la loi. On a deux chauffeurs de taxi qui ont voulu mettre les noms sur une plainte signée. C'est pour vous montrer comment la situation est délicate. Dans le mémoire de trois pages que je vous ai donné, je n'ai pas affiché les plaintes signées et le nombre. Je vais vous donner ces plaintes personnellement et confidentiellement, parce que je ne veux pas être responsable de choses qui pourraient arriver à ces gens.

C'est justement pourquoi la vérité est difficile dans cette industrie. Les gens qui gagnent leur vie dans cette industrie ont une tâche très difficile pour dire la vérité en public, parce qu'ils vont être marqués.

Je vais vous donner, M. le ministre, les plaintes précises, avec le nombre de garagistes et le nombre de grosses compagnies qui violaient la loi et qui sont demeurés impunis jusqu'à maintenant, et les chauffeurs qui ont été exploités, qui ont été forcés de conduire leurs voitures en mauvais état. Nous avons des preuves de ces choses. Malheureusement, je n'ai pas eu le temps de prendre le nom de chacun, mais des dispositions sont prises. Je crois qu'aujourd'hui, avec le témoignage qui suivra, vous serez convaincu que ces gens ne mentent pas. Les gens qui vont parler avec vous sur les associations de propriétaires, les chauffeurs surtout, individuellement, vont dire les choses telles qu'elles sont.

M. PERREAULT: M. le Président, est-ce que je pourrais poser une question sur ce sujet? Une très brève question pour essayer d'éclaircir ce point.

M. Edmonston, est-ce que les menaces que ces gens peuvent recevoir sont essentiellement différentes dans leur sérieux ou leur gravité de celles que vous pourriez vous-même recevoir en tant que président d'une association comme la vôtre ou de celles que nous pouvons recevoir, nous, comme députés, d'une façon peut-être pas régulière mais occasionnelle, sous la forme de pressions? J'explique ce que je veux dire: appels téléphoniques anonymes, lettres anonymes ou ce genre de choses. Ou est-ce que ce

sont des menaces plus graves et plus sérieuses, des menaces plus directes, identifiables? Sans nommer de cas précis, est-ce que vous pouvez nous dire le degré de sérieux par rapport à ce genre de menaces?

M. EDMONSTON: Je n'ai pas reçu de menaces sur la question des taxis. Je reçois souvent des menaces,...

M. PERREAULT: Non, non, monsieur.

M. EDMONSTON: ... c'est la différence, qui ne viennent pas du milieu des consommateurs, surtout pas, mais du milieu des garagistes et des concessionnaires d'automobiles surtout, oui. C'est une chose à laquelle je m'habitue. Les menaces que reçoivent les gens du domaine du taxi avec qui je parle viennent de leur propre industrie. C'est le problème. Cela vient de leur milieu. Dans mon milieu, celui des consommateurs, je n'en reçois pas. J'en reçois d'hommes d'affaires, souvent, de garagistes. J'ai même été attaqué, mais c'était par un vendeur de voitures usagées où nous avions fait du piquetage. En tout cas, c'est une provocation directe d'un homme d'affaires. Avec nous, cela arrive souvent. Mais les menaces que j'ai entendues, les menaces morales que j'ai entendues — ils ont parlé avec moi de menaces morales — je suis convaincu que cela existe aussi. Ce sont des menaces directes avec des appels téléphoniques anonymes. C'est toujours un bon moyen pour faire peur à une famille, vous le savez très bien: On va t'arranger, mon vieux! Je crois que les chauffeurs de taxis ont peur. C'est presque inévitable. Vous avez donné l'autre côté de la médaille et le côté de la médaille qui est opposé est représentée pour un groupe de gens qui ont manifesté mardi avec beaucoup d'enthousiasme. Vous avez certainement peur qu'on vous appelle. Deux chauffeurs de taxi hier soir m'ont raconté que leur femme avait reçu des appels en pleine nuit où on leur disait: On va arranger ça! Où est ton mari? C'est très grave pour une famille. Cela arrive souvent. Cela m'est arrivé. Je m'y suis habitué.

M. BERTHIAUME: Est-ce que vous avez des mécanismes à suggérer pour enrayer ce genre de choses?

M. EDMONSTON: Nous n'avons aucun mécanisme. On ne peut rien faire parce que c'est juste le porte-parole des gens. On n'a pas de mécanisme pour protéger personne ici. Je peux sortir d'ici et être tué comme n'importe quelle personne. La protection des gens n'est pas complète. On ne peut rien faire. C'est une chose à laquelle on doit s'habituer ou on est fini, on ne peut plus faire de contestation pour les gens défavorisés.

M. PINARD: Je vous remercie, M. Edmonston.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Maskinongé.

M. PAUL: M. Edmonston, je ne suis pas surpris de vous voir ici ce matin, considérant l'intérêt soutenu, comme le signalait tout à l'heure le ministre, que vous avez apporté aux travaux parlementaires chargés de l'étude de la loi 23.

Vous vous rappelez sans doute avec quelle ouverture d'esprit l'honorable ministre des Transports a procédé à l'étude de cette loi. Je ne sais si vous vous rappelez qu'au-delà de 100 articles furent amendés à la commission parlementaire.

Je vous félicite de votre français. Je crois que vous pouvez servir d'exemple à beaucoup de citoyens québécois.

Vous avez mentionné, tout à l'heure, que vous aviez, dans l'Association pour la protection automobile, 1,200 membres canadiens. Combien en avez-vous qui sont québécois?

M. EDMONSTON: Presque 1,000, maintenant.

M. PAUL: Presque 1,000, au Québec.

M. EDMONSTON: Parce que c'est une association qui a commencé, il y a presque cinq ans, ici, à Montréal. J'ai été surpris de voir que cela peut être même un tort, quand j'ai été à Toronto. Mais c'était une association vraiment québécoise, qui est maintenant canadienne. Cela présente des difficultés. Nous avons 1,000 membres québécois.

M. PAUL: Depuis que vous avez en main une copie du règlement no 6, avez-vous tenu une réunion d'information et de consultation auprès de vos membres?

M. EDMONSTON: Oui. Nous avons un bulletin chaque mois. Dans le bulletin de décembre, nous avons demandé à tous les membres qui voulaient parler du règlement no 6, avec nous, de venir à une assemblée.

M. PAUL: A quelle date a été publié ce bulletin?

M. EDMONSTON: Le 15 décembre. Nous avons un bulletin chaque mois.

M. PAUL: Aviez-vous été informé que le règlement devait sortir dans les quelques jours suivants?

M. EDMONSTON: Non. Nous avons seulement su qu'on en viendrait à discuter de la question des taxis et nous avons voulu, justement, parler de cette question, pour savoir ce que les consommateurs voulaient avoir. Nous n'avons pas eu le règlement no 6 sur le taxi. Nous avons eu le rapport Bossé, qui était déjà

publié. A cause des plaintes que nous avons eues, nous avons voulu consulter nos membres pour savoir ce qu'ils voulaient avoir.

M. PAUL: Quand votre réunion a-t-elle eu lieu?

M. EDMONSTON: Je crois qu'il n'y a que sept membres qui sont venus.

M. PAUL: Sept membres sur 1,000.

M. EDMONSTON: Oui, sept membres sur presque 1,000 membres, à Québec, qui sont venus après les Fêtes.

M.PAUL: Vous avez mentionné, tout à l'heure, que le règlement no 6 — j'ai pris le mot à mot de votre témoignage — est excellent pour le consommateur. Dois-je comprendre que c'est l'opinion qui s'est dégagée de la réunion de vos sept membres?

M. EDMONSTON: C'est le consensus établi à partir des appels téléphoniques. Nous avons essayé de parler avec la plupart de nos membres. Je n'ai pas le chiffre exact de ceux avec qui nous avons communiqué par téléphone. Je ne sais pas si le nombre de membres qui nous ont appuyé ou le nombre de gens qui ont porté des plaintes serait aussi important que la gravité des plaintes qu'ils ont apportées.

Les gens avec qui nous avons parlé n'étaient que sept. Nous ne pouvons pas forcer les gens à venir parce que vraiment, l'affaire du taxi, c'est un peu hors de nos préoccupations quotidiennes. Nous avons, avec des petits moyens, à Québec, essayé de rejoindre les gens, avec diverses opinions. Malheureusement, peut-être, nous n'avons qu'une seule opinion des gens. C'est que le taxi, selon mon expérience, n'est pas aussi sécuritaire, n'est pas d'aussi haute qualité qu'il le faudrait.

Justement, lorsque j'ai préfacé mes remarques, j'ai donné l'opinion que nous avons, selon l'avis des gens avec qui nous avons parlé quotidiennement, depuis deux ans que nous faisons un dossier là-dessus. Nous n'avons pas fait un vote de condamnation ou d'approbation. Nous avons voulu juste montrer les faits qui nous ont été rapportés.

Le témoignage le plus important sera celui des chauffeurs de taxi indépendants qui iront, je l'espère, en substance, répondre à nos contestations, à savoir que, dans le taxi, on doit faire beaucoup de réformes, sur la scène gouvernementale, pour améliorer le service.

M. PAUL: Dans le cours de vos remarques, vous avez mentionné que, depuis environ deux ans, votre association aurait reçu environ 100 plaintes.

M. EDMONSTON: C'est tout.

M. PAUL: Pourriez-vous nous dire quelle était, en général, la nature de ces plaintes?

M. EDMONSTON: Au commencement, ces plaintes étaient surtout données au téléphone. Nous n'avons pas fait de dossiers sur les plaintes, comme nous le faisons pour les garages, les stations d'essence, etc. Nous avons juste classifié ce genre de plaintes, par groupes.

De ces centaines de plaintes, il y en a beaucoup de gens refusés par les chauffeurs de taxi, refusés pour les courts voyages.

M. PAUL: C'était surtout des plaintes de refus de services que vous avez reçues.

M. EDMONSTON: Oui, exactement.

M.PAUL: Est-ce que vous en aviez reçu quant à la qualité de services dispensés par les chauffeurs de taxi?

M. EDMONSTON: Oui, nous avons eu à Montréal plusieurs plaintes. Je n'ai pas le pourcentage parce que je croyais que le point n'était pas représentatif, mais je voulais vous dire tout ça. Beaucoup de gens étaient mécontents pour que les chauffeurs de taxi ne parlaient pas français, deuxièmement. Premièrement, c'était la question de Dorval, cela a paru dans les journaux, chaque fois qu'on a eu des tempêtes ou autres problèmes, à Dorval, on a une augmentation comme ça. Ce n'est pas logique. Des gens nous ont dit, peut-être cinq ou dix: J'ai été encore refusé parce que j'ai voulu aller à Dorval, ou le gars m'a demandé $12, $14. Nous étions surpris au début, nous avons pensé: Ce sont seulement les gens mécontents. Nous avons pris quelques chiffres. Ensuite j'ai demandé à la réceptionniste de répondre à ceux qui avaient à se plaindre des taxis, de se plaindre au ministère des Transports. Je ne sais pas combien de plaintes il a reçu, j'ai demandé à ces gens de se plaindre au ministère des Transports.

Premièrement, c'est le refus de service, la qualité du service, la surcharge surtout. Finalement, c'est très important, la condition mécanique de ces voitures. C'est une des principales raisons pour lesquelles je suis ici aujourd'hui: l'état mécanique de ces voitures. Vraiment, nous n'avons pas pensé avoir besoin de consulter chacun de nos membres pour leur demander s'ils avaient été fraudés par un chauffeur de taxi. Le problème est grave et nous avons pensé que vous deviez en être averti. C'est assez grave, sans dire que sur 1,000 membres, plus de 500 veulent ça. Nous croyons que les problèmes sont assez graves et on peut voir ce que le consommateur veut.

M. PAUL: Est-ce que c'est une présomption que vous nous signalez ou si c'est le résultat d'une consultation directe par téléphone, qui

aurait été faite par des employés de votre association?

M. EDMONSTON: M. Paul, il faut dire qu'avec les preuves que nous avons, ce n'est pas une conclusion qui sera légalement admise par un tribunal. C'est une présomption de qualité de travail, présomption de service qui est appuyée par des documents qui sont assez concluants. Nous allons, dans cette représentation, vous démontrer, les faits avec les documents que nous avons, nommer les taxis, plutôt que de dire seulement que nous sommes convaincus de ça, ça, ça. Nous allons vous montrer le document où nous avons le nom des chauffeurs, etc. Les faits parlent par eux-mêmes.

M. PAUL : Dans un autre domaine, vous avez signalé que le taux d'accidents impliquant des voitures-taxis était des plus hauts. Pourriez-vous nous dire si, dans vos études de comparaison, vous avez tenu compte des deux critères suivants: premièrement, le nombre de véhicules et en second lieu, le nombre de milles parcourus par ces véhicules-taxis dans une année, pour comparer avec un autre secteur de l'économie?

M. EDMONSTON: C'est justement ce que je demandais à M. Charles Moreau, le directeur, pour le Québec du Département des assurances du Canada pour me donner le taux ajusté selon, comme vous avez dit, le millage parcouru et le nombre de véhicules en service.

C'est ce que j'ai dit. Si cela est ajusté, c'est le Québec qui a le plus d'accidents au Canada. Si ce n'est pas ajusté pour le millage et pour le nombre de véhicules, ce sera l'Alberta. Parce qu'avec moins de population et moins de véhicules-taxis, on a plus d'accidents. Mais, lorsque c'est ajusté, c'est le Québec qui est en tête. Il faut toujours prendre les chiffres des compagnies d'assurance avec un grain de sel. Mais, elles ont dit que, selon leur "green book value", le bureau d'assurances du Canada, la perte des trois dernières années était, environ, de 107 p.c. à 110 p.c. de leurs primes. Je crois que cela veut dire...

M.PAUL: Les primes reçues des véhicules automobiles taxis.

M. EDMONSTON: C'est cela, ajusté. Cela veut dire que si elles ont eu 100 p.c, il n'y a rien de gagné, rien de perdu; c'est égal. Mais 107 p.c. et, à un certain moment, 120 p.c, cela veut dire qu'elles ont eu 7 p.c. ou 20 p.c. de pertes avec l'assurance des taxis, à Québec.

M. PAUL: Merci, nous avons eu le témoignage de Me Gabriel Lapointe qui nous signalait que la compagnie d'assurance Bélair payait plus que les primes perçues de ses membres, de ses assurés, qui sont des propriétaires de taxis, artisans ou propriétaires de flottes. On a dit que le pourcentage des primes perçues était de l'ordre de 30 p.c chez cette clientèle et que le montant des dommages payés était supérieur à 30 p.c. Est-ce que vous êtes en mesure de commenter ces chiffres, si vous étiez présent au témoignage de M. Lapointe?

M. EDMONSTON: J'ai un conseil à donner à la compagnie Diamond, justement. S'ils ont autant d'actions, ils doivent regarder de près leur système d'embauchage pour obtenir des chauffeurs compétents. Parce qu'on a raison sur la question des chauffeurs, la question des véhicules et la question des routes. Je suis certain que s'ils mettent cette voiture Diamond 3038 hors service, ils vont peut-être avoir un meilleur chiffre d'assurance automobile.

M. PAUL: Pour revenir, M. Edmonston, à ce véhicule 3038 dont nous avons parlé, pourriez-vous nous dire combien de fois vous prenez de taxis, en moyenne, par semaine, vous, à Montréal?

M. EDMONSTON: Dix à quinze fois.

M. PAUL: Combien de fois vous est-il arrivé de trouver des véhicules que l'on peut qualifier de "minounes", en état de service, et dans un état comparable à celui dont vous nous avez parlé tout à l'heure, avec certaines statistiques, à la suite de votre voyage de lundi dernier?

M. EDMONSTON: Selon mon expérience personnelle, la première chose que je cherche d'abord, dans le cadre des voitures, ce sont les propriétés. Après cela, je vérifie le système de freinage, de suspension — on peut sentir cela — la question des lumières et tout cela. Plus de la moitié des voitures que j'ai utilisées ont eu des problèmes. On dit qu'une voiture accidentée, un taxi qui a été accidenté, doit être réparé aussi vite que possible. J'ai vu des voitures, vraiment accidentées, avec des déficiences, des défauts. Je suis peut-être plus dur parce que je sais comment une voiture doit être, parce que je fais pour des compagnies d'automobiles, des essais de voitures qui me sont prêtées de temps en temps. Par exemple, la dernière voiture qu'on m'a prêtée, c'était une Datsun 247, pour la compagnie Datsun. Nous sommes au courant des déficiences des taxis. S'il y a un taxi qui est déficient, un conducteur peut peut-être dire: C'est juste un petit jeu du volant. Mais ce petit jeu peut tuer quelqu'un.

M. PAUL: Vous me corrigerez, M. Edmonston, si j'ai mal compris votre témoignage qui, d'après moi, serait le suivant. Environ 50 p.c. des véhicules automobiles taxis ne satisfont pas aux critères de bon état d'entretien et de réparation.

DES VOIX: Bravo! c'est vrai.

M. EDMONSTON: Exactement, M. Paul.

LE PRESIDENT (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous plait! Excusez, M. Edmonston. Je demanderais la coopération qu'on a obtenue depuis deux jours. Veuillez restreindre vos applaudissements et vos démonstrations, que ce soit pour ou contre. Procédons, c'est très intéressant. Nous entendrons les commentaires de ceux qui veulent être pour ou contre.

M. EDMONSTON: M. le Président, je suis ferme dans mes convictions: Tout ce qui est marqué de ces voitures était défectueux. J'ai voulu le savoir, parce que la première chose qui m'a choqué, c'est que j'ai été privé de la ceinture de sécurité. Après ça, sur l'état mécanique des voitures, j'ai entendu parler de problèmes de différentiels, de suspension, de volant. Je suis certain que, s'il y avait eu une inspection plus sévère des voitures-taxis menée par le gouvernement, la moitié de ces taxis, comme la moitié des autobus scolaires d'ailleurs, seraient trouvés inacceptables, défectueux. Je crois que la conditions mécanique des taxis à Montréal est aussi mauvaise que celle des autobus scolaires qui ont été trouvés défectueux l'année dernière — presque 5,000 sur un total de 9,000 — avec les enquêtes assez approfondies du ministère des Transports.

M. PAUL: Est-ce que vous avez signalé ces faits au ministère des Transports?

M. EDMONSTON: Oui.

M. PAUL: Une autre question qui a trait aux associations de services. Avec l'expérience que vous avez, êtes-vous en mesure de nous dire si les associations de services sont utiles pour les gens de la profession ou du métier, les chauffeurs de taxi, les propriétaires artisans? En second lieu, est-ce que ces associations apportent une qualité de services aux consommateurs?

M. EDMONSTON: Votre première question implique directement la deuxième. Vous demandez si ce sont des associations de services utiles aux consommateurs. Je suis certain qu'on a des associations qui sont utiles dans la majorité, comme n'importe quelle association peut être utile aux consommateurs. La deuxième question porte sur la qualité?

M. PAUL: Est-ce qu'elles sont nécessaires pour la qualité du service en général?

M. EDMONSTON: Je ne suis pas convaincu qu'elles sont nécessaires, parce que je crois qu'il y a un conflit d'intérêts très grave entre les différentes associations. N'étant pas des associations coopératives, mais des associations privées, les corporations sont responsables d'abord aux actionnaires, deuxièmement, peut-être aux chauffeurs et, troisièmement, au public en général. Je ne suis pas convaincu qu'elles sont utiles pour la protection du consommateur, pour donner des services sécuritaires aux consommateurs. Est-ce que la qualité est bonne? Je crois que la qualité des services est dirigée par l'association. L'association a la main là-dessus. Elle est responsable.

M. PAUL: Pour la profession ou le métier de chauffeur de taxi, est-ce que ces associations de services sont très utiles?

M. EDMONSTON: Je crois que les associations de services sont utiles sur un petit plan. Cela veut dire que, si vous êtes à une association de services comme peut-être LaSalle et Diamond, vous avez le droit de faire affaires avec une certaine compagnie d'assurance. Comme je l'ai entendu, vous êtes forcé de prendre cette compagnie d'assurance.

Je ne sais pas si on est forcé ou non, mais sur le petit plan, M. le Président, il peut donc être utile pour le chauffeur et les associations de taxis.

M. PAUL: Est-ce que ces associations sont avantageuses pour les membres?

M. EDMONSTON: Ce plan sera peut-être avantageux. C'est la question de la charte, en gros, de certains produits pétroliers. Encore là, je veux faire une clarification. Si on a eu toutes ces compagnies ensemble dans une grosse coopérative, il peut être beaucoup plus utile, beaucoup plus fort et beaucoup plus avantageux. Cela veut dire que si quelqu'un est atteint d'une balle, est-ce qu'un docteur sera nécessaire? Oui mais une opération chirurgicale complète sera beaucoup plus avantageuse. C'est dans cette optique que je dis oui, ils sont avantageux peut-être, ils donnent ce temps à un chauffeur de taxi car il est un membre de ces associations. Nous pourrons être rendus à ce point-là avec une force de frappe avec les compagnies qui vont vendre ce produit pétrolier, les compagnies d'assurance. On a beaucoup de différence, j'en suis certain parce que cela peut amener beaucoup plus de chauffeurs de taxi avec une force, un pouvoir de la charte,... beaucoup plus fort.

M. PAUL: Est-ce que ces associations n'entraînent pas une meilleure éthique professionnelle chez les membres artisans ou chez les chauffeurs?

M. EDMONSTON: C'est justement cela, M. le Président, que nous voulons souligner. Nous aimerions, si l'association est déteneur de permis aussi des associations parallèles, nous croyons que le comité d'éthique professionnelle ne doit jamais être enlevé. C'est une bonne affaire, une bonne idée, comme les représentants de Sherbrooke ont déjà dit. C'est une bonne chose, le "self discipline". C'est très bon. Nous aimerions avoir un code d'éthique admi-

nistré par le chauffeur en consultation avec le groupement des consommateurs qui leur adresseront des critiques, qu'ils siègent à côté si cela est possible. C'est cela un comité d'éthique professionnelle avec les groupements privés et les groupements coopératifs, si vous voulez, les groupements proposés dans le règlement no 6. Nous croyons que cette idée est primordiale pour le meilleur service et la meilleure qualité de service, le meilleur service de sécurité. C'est ce que nous voulons souligner qui est très important. Je vous remercie de me l'avoir rappelé car c'est très important et nous sommes complètement d'accord sur cette idée. C'est le gouvernement qui a établi cela sur le plan provincial et local, c'est très important pour le consommateur.

M. PAUL: II me reste deux autres questions, M. Edmonston. Dans vos propos, vous avez mentionné que notre tâche était, premièrement, de voir à un meilleur service pour le consommateur. En deuxième lieu, que nous devions apporter un meilleur service pour la sécurité. Est-ce que ce n'est pas également une des tâches des membres de cette commission parlementaire de travailler à assainir, si possible, le commerce du taxi au Québec, en même temps que c'est notre devoir de veiller à ce que les propriétaires artisans, les chauffeurs de taxi aient la sécurité d'emploi, qu'ils aient la liberté d'exercice de leur profession et qu'il y ait d'excellentes relations entre les propriétaires des flottes ou les propriétaires d'automobiles possédées par les artisans et les chauffeurs de taxi?

M. EDMONSTON: Oui, M. le Président, je suis au courant que le gouvernement a une tâche difficile parce qu'il doit réunir des commentaires divers, contradictoires. Il doit réunir les espoirs de plusieurs secteurs dans cette industrie: Le secteur patronal, si je peux dire, le secteur des employés de chauffeurs indépendants, et tout cela. Votre tâche est une tâche difficile. Je n'envie pas le travail que vous devrez mener bientôt.

M. PAUL: Dans le cadre de ces objectifs à atteindre, est-ce que vous croyez que le règlement no 6, tel qu'il nous est proposé comme instrument de travail est excellent ou si certaines lacunes doivent être corrigées et quels seront à votre point de vue, les principaux points qui devraient être retenus?

M. EDMONSTON: Il faut se souvenir toujours de cette optique des consommateurs. Nous avons vu, dans l'ensemble, le consommateur qui a recours au service du taxi. C'est excellent. En entendant les représentations des chauffeurs, la question des structures, savoir si elles sont parallèles, si on devrait avoir le double emploi, etc., la question des chauffeurs de taxi, parce qu'ils sont des consommateurs aussi, n'est pas aussi claire. On n'a pas une question à laquelle il est aussi facile de répondre sur le plan des chauffeurs consommateurs. Justement, nous avons pris l'optique des consommateurs qui ne sont pas chauffeurs de taxi et qui reçoivent le service. C'est un excellent projet de travail, à notre avis.

Pour les chauffeurs de taxi, nous n'avons pas posé la question du double emploi, de la structuration parallèle des associations privées, de la structuration des associations coopératives, parce que nous avons su qu'on avait de gros fusils dans les compagnies et des chauffeurs vont essayer de discuter de cela. Ils sont mieux renseignés que nous sur le plan de la structuration, des meilleurs moyens d'avoir une structure pour les chauffeurs de taxi, afin de répondre à tous les points de vue.

Il faut que je l'avoue, j'ai un parti pris au sujet des consommateurs, des questions intéressant les consommateurs dans cette affaire qui est très compliquée et qui concerne plusieurs intérêts. Pour nous, c'est le point de vue des consommateurs, non des chauffeurs de taxi que nous avons voulu apporter.

M. PAUL: Hier soir, à la toute fin de notre séance, nous avons entendu un témoignage franc, osé, clair, dynamique qui était celui de M. Dickey. Il nous a invités à nous pencher sur la nécessité de protéger ce qu'il a appelé la quatrième classe de l'économie du taxi, soit celle des chauffeurs. Croyez-vous que la syndi-calisation est nécessaire pour la protection des chauffeurs et surtout pour assurer une meilleure qualité des services pour la clientèle que vous représentez ici, le consommateur?

M. EDMONSTON: Oui, nous en sommes convaincus. En principe, un chauffeur qui est syndiqué peut avoir un pouvoir, pas parralèle, pas plus fort, mais un pouvoir pour négocier avec la partie patronale, si on veut avoir des associations privées. Ce serait dans l'intérêt du public. Avec la syndicalisation, par exemple, le chauffeur de taxi peut refuser de conduire des taxis qui sont en mauvais état. Il peut refuser de faire du temps supplémentaire. C'est une chose qui pourrait être contre l'intérêt des consommateurs. Nous croyons qu'une bonne syndicalisation dans le secteur de notre économie est dans l'intérêt des consommateurs, sauf en temps de grève, où nous demandons au gouvernement d'agir. Mais en dehors des grèves, c'est dans l'intérêt des consommateurs, parce qu'ils peuvent négocier directement avec le syndicat et ce dernier peut négocier directement avec la partie patronale. Cela donne une influence aux plaintes des consommateurs et aux besoins des consommateurs qui peuvent apporter ces plaintes au syndicat. Ce n'est pas pour rien que nous avons des groupements de consommateurs, ici à Québec, qui sont appuyés par les syndicats. Je parle des groupements comme l'ACEF qui font un bon travail. Je crois que la syndicalisation des taxis est nécessaire parce que les chauffeurs de taxi vont avoir une certaine fierté et sauront

qu'ils comptent pour quelque chose. Ils sauront qu'ils sont entendus par les propriétaires des associations. Et les propriétaires des associations auront la tâche de satisfaire les actionnaires mais aussi de satisfaire les syndiqués, les chauffeurs.

Comme les chauffeurs sont éparpillés et que ce secteur n'est pas réuni dans un syndicat, ils n'ont pas de force de frappe. Dans notre monde, si vous n'avez pas de force de frappe économique et que vous n'avez que le plan moral pour convaincre votre patron, c'est très difficile, croyez-moi.

M. PAUL: Une dernière question, M. Ed-monston. Depuis la sanction de la loi 23, du 8 juillet, avez-vous été consulté par les officiers du ministère des Transports quant à la rédaction du règlement no 6?

M. EDMONSTON: Nous avons parlé brièvement avec M. Bossé au comité qui s'occupe de l'assurance-automobile au Parti libéral. J'ai été invité une fois et j'ai parlé brièvement du cas des taxis. J'ai dit que le consommateur semblait...

M. PAUL: Dans les cadres d'une activité politique d'un parti.

M. BOSSE: J'aimerais que l'on ajoute aussi qui était présent à ce comité, afin de rassurer le député de Maskinongé, pour que ce ne soit pas politique.

M. PAUL: Qui vous a dit que j'étais inquiet? M. BOSSE: Au cas où.

M. PAUL: Absolument pas, surtout quand vous êtes quelque part, vous pouvez être assuré que, moi, je ne crains rien, mais il y a des gens qui font affaires avec vous qui craignent.

M. BOSSE: Ajoutez qui était présent, quand même.

M. EDMONSTON: Je me trouve dans une position un peu drôle parce que c'est, je crois, la première fois que nous appuyons le gouvernement comme tel dans un projet de loi. Comme vous le savez, nous avons fortement critiqué le projet de loi no 23. A notre bureau, depuis cinq ans, on fait des blagues. On a dit: Dans un syndicat, on a les trois D: Dalpé, Daigle, Dion et, dans le ministère des Transports, il y a les trois P: Pinard, patronage, patinage.

LE PRESIDENT (M. Séguin): A l'ordre!

M. PINARD: Je pense que M. Edmonston pourrait qualifier cette farce dont il vient de nous faire part...

M. EDMONSTON: C'est une blague.

M. PINARD: ... et nous expliquer ce qui l'a amené à dire ça. Pense-t-il encore la même chose aujourd'hui?

M. EDMONSTON: Vous savez, je compte sur mon indépendance pour pouvoir critiquer le ministère quand il a tort, mais j'ai aussi la tâche de dire les choses qui sont bonnes quand elles sont bonnes. Je ne veux pas être révolutionnaire juste pour être révolutionnaire, ni contestataire pour le simple plaisir de contester, ce ne serait pas bien fondé.

J'ai été invité à une assemblée sur l'assuran-ce-automobile, comme plusieurs personnes, dont des témoins-ressource. J'ai proposé l'étatisation de l'assurance-automobile, bien sûr. Je n'étais pas invité comme membre du Parti libéral; je ne suis membre d'aucun parti politique. J'ai parlé de la question des taxis avec M. Bossé pour lui demander ce qu'il avait fait, pour le mettre au courant, parce que nous étions mécontents et que nous voulions savoir ce qu'il ferait. C'était avant de faire d'autres réunions et de parler avec nos membres en décembre.

Justement pour vous montrer comment ça arrive, j'étais comme témoin-ressource à une réunion du Parti libéral sur la question des congrès à Montréal; on m'a demandé de payer $15 d'entrée et j'ai carrément refusé. Ils m'avaient invité pour leur donner des renseignements et ils voulaient me faire payer. Je leur ai dit: On n'invite pas quelqu'un chez soi pour dfner pour lui demander après $15.

M. PAUL: En un mot, vous n'avez pas voulu enrichir la caisse?

M. BOSSE: Un point d'ordre, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Dorion sur un point d'ordre.

M. BOSSE : Je voudrais ici rectifier certains faits et M. Edmonston me contredira si j'ai tort. Lors de cette réunion, il faut aussi dire que le président de l'organisation des garagistes, qui n'a rien à voir avec la politique, était présent, qu'un représentant des ACEF, qui n'a rien non plus de très relié avec le Parti libéral nécessairement, était présent.

M. PAUL: M. le Président, un point d'ordre.

M. BOSSE: C'était un comité objectif qui réunissait beaucoup de gens. J'aurais voulu que M. Edmonston parle en ce sens, pour éviter de laisser entendre dans l'esprit de certaines personnes que c'était là un comité d'ordre politique.

M. EDMONSTON: Non, non.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Je crois, M. Edmonston, que nous avons compris ce qui s'est passé.

M.PAUL: Alors, M. Edmonston, je vous remercie très sincèrement pour l'objectivité des remarques, des propos et des réponses que vous nous avez données ce matin.

M. EDMONSTON: Merci.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Je voudrais vous interrompre un instant. Sur le point d'ordre, vous avez été invité à faire une mise au point. Pourriez-vous, pendant dix secondes, faire la mise au point nécessaire?

M. EDMONSTON: Dix secondes?

LE PRESIDENT (M. Séguin): Disons quinze secondes.

M. EDMONSTON: Depuis la fondation de l'association, nous étions invités, souvent, pour donner des renseignements par plusieurs partis politiques. Nous avons utilisé surtout le Parti québécois. Nous avons utilisé le Ralliement créditiste et l'Union Nationale, ainsi que le Parti libéral. C'est notre rôle. Nous devons participer à tous les colloques. Nous n'avons aucun parti politique, sur la scène provinciale ou fédérale, qui ait un monopole sur les affaires des consommateurs. Justement, je veux faire attention à ce que cela ne devienne pas des ballons politiques. Nous ne faisons pas de capital politique sur le dos des consommateurs, ni sur le dos des chauffeurs de taxi.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Lotbinière.

M. BELAND: M. le Président, j'aurais également quelques questions à poser à M. Edmonston. En premier, je voudrais vous féliciter pour votre affirmation, au tout début, et pour l'énoncé que vous avez fait entièrement en français. J'apprécie également le fait que vous ayez dit, justement, que les chauffeurs de taxi, au Québec, devaient d'abord parler français. Je vous félicite de cela. C'est d'une grande logique, comme d'ailleurs la logique est qu'à Toronto les chauffeurs de taxi parlent l'anglais d'abord. C'est de toute première importance.

M. le Président, ma première question serait celle-ci. Vous avez beaucoup parlé de sécurité, entre autres de ceintures de sécurité. Avez-vous, au cours de vos périples, visité des provinces ou d'autres pays ou des sections de pays où, justement, on utilise la ceinture de sécurité de façon obligatoire ou quasi obligatoire, pour les clients, dans les taxis?

M. EDMONSTON: Oui. En Australie, depuis deux ans, on oblige tout le monde à boucler les ceintures de sécurité. Cela a diminué les accidents mortels de 23 p.c. J'ai entendu un député dire: C'est le pays des kangourous. Vous savez, nous avons des kangourous automobilistes, peut-être, mais on a des kangourous députés aussi. La question de la sécurité automobile est très importante parce qu'ici, au Québec, 1,730 personnes ont été tuées. Je dis tuées, parce qu'elles l'ont été par l'automobile. Il y en a un certain pourcentage de morts dû à des défauts de l'automobile, un à la route, un pour la négligence, un à l'ivresse au volant aussi. En Australie, cela a diminué de 23 p.c. On a une amende de $24 si vous êtes sans votre ceinture de sécurité, en Australie. En Nouvelle-Zélande, c'est la même chose.

Aux Etats-Unis, dans les aéroports, on a des systèmes de taxi qui sont dirigés par le gouvernement fédéral. Le transport de l'aéroport à la ville est dirigé par le gouvernement dans tous les aéroports fédéraux, je crois. Il y a une loi à l'effet que le chauffeur et les passagers doivent boucler les ceintures de sécurité. En plus de cela, le secrétaire des transports, aux Etats-Unis, a proposé une loi, cette année, pour obliger les automobilistes à boucler leurs ceintures de sécurité. C'est le secrétaire des transports américain, M. Volpe, qui l'a demandé. Il n'est plus là. Nous en avons un autre, cette année, avec la nouvelle élection de Nixon. Mais je suis certain que remettre la responsabilité entre les mains des automobilistes pour la ceinture de sécurité, c'est très bon, parce que c'est notre responsabilité à nous-mêmes. La ceinture de sécurité, vraiment, cela diminue les blessures, selon l'Insurance Institute for Highway Safety, de 80 p.c.

Selon les statistiques, non pas hypothétiques, mais réelles, 23 p.c, en Australie. Comprenez-vous mon inquiétude quand je monte dans un taxi et qu'il n'y a pas de ceintures de sécurité? Je défie un chauffeur, ou une association comme Lasalle ou Diamond qui l'enlève. La voiture est munie de ceintures de sécurité, elles pendent, et on les enlève. C'est ce que je ne comprends pas. En même temps, on proclame: sécurité et service. Je vois ici une vraie contradiction.

M. BELAND: Comme question suivante, étant donné que vous représentez les consommateurs, vous semblez avoir une assez vaste expérience dans ce domaine, vous devez être parfaitement ou passablement au point sur ce que peuvent exiger les consommateurs vis-à-vis des chauffeurs de taxi ou les propriétaires de taxis. Parce que ça peut être deux choses très différentes, il peut y avoir des normes de sécurité, vous nous en avez nommé. Est-ce que, par exemple, vous iriez jusqu'à suggérer qu'il y ait un genre de commandement du taxi pour satisfaire le consommateur et quelles seraient, à l'intérieur, les principales exigences que vous agenceriez?

M. EDMONSTON: Les principales exigences touchent les chauffeurs et les taxis. Nous sommes d'accord sur les inspections de taxis aux quatre mois. Nous croyons que, selon les chauffeurs de taxi qui nous ont parlé, on peut

avoir un millage de 35,000 ou 40,000 milles en quatre mois. C'est beaucoup de millage. La voiture est équipé comme un taxi non pas parce que c'est un luxe, mais parce que c'est nécessaire à cause du travail que le chauffeur est forcé de faire. Si vous avez connu un consommateur qui a acheté un vieux taxi d'un concessionnaire, comme nous avons plusieurs plaintes, ce n'est pas un cadeau. C'est le meilleur citron du monde. Nous avons eu plusieurs plaintes là-dessus.

Nous exigeons donc l'inspection tous les quatre mois, surtout sur le plan de la mécanique, de la sécurité, du système de freinage, de l'électricité, etc. Ces inspections périodiques doivent vérifier le taximètre aussi. Donc l'inspection sur le plan de la sécurité. En plus de ça, chaque taxi doit être traité sévèrement, mais pas comme maintenant. C'est la faute aussi du ministère des Transports et de l'association des taxis. Il y a une lacune de la part des deux. On doit être très sévère. Chaque voiture-taxi impliquée dans un accident ne doit avoir aucun délai, elle doit être réparée tout de suite. Parce qu'on ne joue pas avec cela. Car une collision à cinq ou dix milles à l'heure peut tordre la suspension, ou endommager les choses essentielles pour la sécurité de ce taxi. Il ne faut pas dire: Ce n'est qu'un accident à 5 ou 10 milles à l'heure. Encore selon 1'Insurance Institute for Highway Safety aux Etats-Unis, on a montré que plusieurs dommages se produisent à basse vitesse, qui ne sont pas manifestés aussitôt après l'accident.

Voilà ce que nous demandons au gouvernement d'exiger des chauffeurs. Avec le ministère des Transports, nous avons plutôt parlé des questions de permis aux automobilistes. M. Pinard est au courant de notre opinion. Nous croyons qu'il n'est pas assez sévère pour les automobilistes dans l'émission des permis de conduire. Nous croyons que pour les automobilistes et les chauffeurs de taxi, surtout pour le règlement, il y en a qui ne sont pas pour les chauffeurs de taxi, c'est une humiliation de répondre aux questions lors de l'émission d'un permis. Au moins, ils ont dit qu'ils doivent parler français, d'accord.

Nous exigeons, pas seulement pour les chauffeurs de taxi mais pour les automobilistes en général sur nos routes, un meilleur contrôle des permis. Le ministre sait que j'ai un permis portant son nom et j'ai déjà ouvert un compte à son nom. Les permis sont tellement faciles à obtenir ici au Québec, on peut presque faire une commande chez Simpson's et l'avoir le lendemain.

M. PINARD: Si vous permettez, je vais faire une mise au point là-dessus. Vous m'avez déjà affirmé que vous pouviez obtenir un permis de conduire à mon nom sans que je le sache ou que quelqu'un l'avait fait et l'avait obtenu. Alors, j'ai fait personnellement une enquête là-dessus auprès du directeur du Bureau des véhicules automobiles, M. Ghislsin Laflamme, que vous connaissez bien.

M. EDMONSTON: Très bien.

M. PINARD: Je lui ai demandé si c'était possible qu'une personne obtienne un permis de conduire à mon nom, alors qu'il ne porte pas mon nom de famille ou qu'il ne porte pas mon prénom, qu'il ne réside pas à l'adresse où je réside, etc. Il m'a dit: C'est peut-être possible, seulement je vais faire une vérification personnelle. Il a fait une vérification personnelle et effectivement il y a peut-être cinq ou six Pinard qui auraient obtenu un permis de conduire, mais toutes les adresses diffèrent de celle que je possède. L'enquête a révélé qu'il n'y avait pas eu de tricherie lors de l'émission et lors de la demande de ces permis. Il arrive que ces personnes ont vraiment mon nom de famille, il y a même une de ces personnes qui s'appelle Pinard qui a mon prénom également. Alors, M. Edmonston, avant d'affirmer des choses dont vous ne seriez pas sûr je voudrais que vous y songiez sérieusement. Si votre enquête révèle que vraiment quelqu'un qui ne porte pas mon nom, ni mon prénom, qui n'est pas résident à l'adresse où je suis résident a vraiment obtenu un permis de conduire, je voudrais que vous mettiez votre preuve sur la table et que vous nous en fassiez part.

M. EDMONSTON: M. le Président, je pourrais raconter cette histoire où le nom de M. Pinard est mêlé. Le permis que j'ai eu et que j'ai payé $5 est en blanc. Moi-même j'ai mis le nom de M. Pinard dessus et moi-même j'ai mis l'adresse de l'APA. Je suis allé à la banque pour savoir si je pouvais ouvrir un compte au nom de Bernard Pinard et j'ai été capable d'ouvrir un compte à la banque. Ce cas a été donné à M. Pierre Ouimet, journaliste à la Presse, qui va faire une série de reportages là-dessus, M. le Président. Je ne sais pas si j'ai contrevenu à la loi par cette pratique, j'espère que non parce que je n'ai jamais utilisé ce permis pour acheter ou pour ouvrir un compte Chargex au nom de M. Pinard.

M. PINARD: Je vous remercie de m'avertir, je vais prendre mes précautions.

M. EDMONSTON: Je voulais seulement montrer que le ministre Pinard a essayé de faire de bonnes choses, peut-être. Surtout au sujet de la sécurité au Québec, nous avons beaucoup à faire encore et nous aimerions être entendus plus souvent. Nous sommes heureux qu'il ait fait des déclarations au sujet des inspections obligatoires sur les automobiles. Nous en sommes heureux et nous espérons que ce sera une réalité en 1973 et en 1974. Mais il y a d'autres choses, des stupidités, dans le ministère des Transports, qui ne doivent pas être là, surtout avec les écoles de conduite. Il y a des choses qui

ne doivent pas exister. C'est pour cela que je vous fais la promesse que je vais continuer la lutte parce que c'est cela mon mandat, la protection des consommateurs québécois et canadiens. Si cela plaît ou ne plait pas au ministère des Transports ou aux partis d'Opposition ou aux politiciens, ce n'est pas mon affaire, je ne suis pas ici pour vous plaire. Je suis ici seulement pour représenter les consommateurs qui souvent non seulement sont mal servis par les chauffeurs de taxi mais sont souvent mal servis même par les députés au Parlement qui sont très peu renseignés sur les questions qui touchent les consommateurs. C'est ma tâche de renseigner tous les députés sur les questions des consommateurs et des affaires des consommateurs. Je ne veux pas faire de discours, je m'en excuse, c'est seulement une mise au point.

M. BELAND: M. le Président, comme question suivante, suite à ce que vous avez énuméré, les quelques points pouvant aboutir à un lexique du taxi, est-ce que vous pensez que, si ces choses étaient mises en application de façon obligatoire, cela pourrait augmenter les tarifs pour le consommateur?

M. EDMONSTON: Nous ne savons pas quelle augmentation il y aurait si les exigences, envers les chauffeurs de taxi étaient plus grandes. Nous ne serions pas contre une hausse de tarifs si on a également une hausse de qualité, une hausse de compétence, une hausse de qualité des services. Les consommateurs se plaignent d'une hausse de prix quand on n'a pas de hausse de qualité ou de services. C'est la raison pour laquelle nous étions contre la hausse des primes d'assurance et contre la hausse des produits pétroliers, parce que nous n'avons pas eu la preuve de la nécessité de l'augmentation des prix de l'essence et de l'huile à chauffage. S'il y a seulement une hausse de tarifs, cela va toucher le consommateur; mais s'il y a une hausse de qualité et de sécurité, c'est une bonne chose. Nous acceptons cela. Mais nous n'accepterons jamais une hausse de tarifs sans une hausse de qualité et de compétence des chauffeurs de taxi. Nous demandons au ministère des Transports, en plus de la compétence des chauffeurs de taxi, une meilleure coordination avec ces autres services. M. Paul — je ne sais pas si M. Loubier y était — M. Berthiaume étaient présents à une séance de la commission parlementaire sur le bill 23. Le ministère était surpris de voir qu'il y a six automobilistes, au Québec, qui reçoivent la pension des aveugles. C'est assez fort.

M. PAUL : On vous avait promis un rapport à ce sujet. Est-ce que vous l'avez reçu?

M. EDMONSTON: Oui. C'est incroyable. Nous voulons avoir une meilleur coordination. Ce n'est pas seulement le règlement no 6, qui peut dire que tous les hommes de taxi doivent avoir ça et ça... Si on ne fait pas de coordination dans le ministère, on peut toujours avoir des abus assez graves. Nous sommes d'accord sur l'augmentation des tarifs si on a une augmentation égale de la qualité. Nous croyons que nous pouvons avoir une augmentation égale des services et des qualités des voitures. Nous ne serons pas contre une augmentation modérée.

M. BELAND: Maintenant, dans un autre ordre d'idée, est-ce que le règlement no 6, par la création d'une association de détenteurs de permis unique, diminuerait ou aurait tendance à court, moyen ou long terme à diminuer les services aux consommateurs?

M. EDMONSTON: A court terme, il y aura une diminution des quantités de services. Il y a deux choses. On peut avoir une diminution de qualité et une diminution de quantité. Si le règlement no 6 est adopté, on va probablement avoir, à Montréal, une diminution de la quantité de taxis disponibles. Parce que j'ai déjà dit qu'il y avait trop de taxis à Montréal. Mais on pourra facilement avoir une augmentation de qualité des hommes qui sont là. Ce n'est pas seulement une question de quantité. Si vous avez 6,000 bazous sur la route, disponibles pour les consommateurs, il faudra voir le service que ces 6,000 voitures donnent. Vous pourriez en avoir 3,000, qui travaillent 60 heures par semaine, et qui donnent un service qualitativement meilleur. Je crois que ce serait une bonne chose. Il ne faut pas seulement regarder l'article disant qu'on va diminuer la disponibilité de 6,000 taxis. Comme je l'ai déjà dit, on ne pourrait en avoir que 3,000, s'il y a de la neige, parce que les 3,000 autres s'en vont.

Vous savez, ce sont des questions qualitatives et aussi quantitatives.

M. PINARD: Sur le même point, est-ce que vous savez qu'à cause d'une réforme très efficace et d'un nouveau formulaire qui est en vigueur maintenant au Bureau des véhicules-automobiles du ministère des Transports, nous avons été en mesure, grâce à ce formulaire, grâce aussi à une enquête qui a été faite, de faire disparaître 500 voitures fantômes qui réussissaient à obtenir des plaques d'immatriculation de taxi, sans que ceux qui en faisaient la demande ne soient détenteurs véritables de permis d'exploitation de taxi? Etiez-vous au courant de cette chose-là?

M. EDMONSTON: Oui.

M. PINARD: II y a eu des réformes très efficaces qui ont été faites.

M. EDMONSTON: Je crois que c'est une réforme. Je ne suis pas ici pour faire l'apologie du gouvernement ni de l'Opposition.

M. PINARD: Non, mais il faut dire aussi que

des réformes se font â votre demande et à la demande d'autres qui nous demandent de faire des enquêtes. Des enquêtes prennent toujours un peu de temps parce qu'il faut obtenir des renseignements. Dès qu'ils nous sont connus et que c'est probant, nous agissons, dans l'intérêt du public, c'est évident.

M. EDMONSTON: M. le Président, je crois que le fait de retirer certains permis qui sont exploités par des gens qui ne sont pas chauffeurs de taxi est une bonne chose. Je crois que la diminution du nombre de taxis disponibles aux gens, 500 ou 1,000, n'affecterait pas tellement le service à ce moment.

A Toronto, comme je l'ai dit, où il y a un taxi pour 900 habitants, cela marche très bien. Si l'on revient à cette façon, ici, à un pour 600, 700 ou 800, comme c'est prévu dans le rapport Bossé, nous ne voyons pas de problèmes pour les consommateurs à Montréal. On a des associations de taxi qui vont dire: Edmonston s'est basé seulement sur Montréal et peut-être un peu sur Québec. Je ne suis pas allé à Chibougamau, en Abitibi ou ailleurs, peut-être aurait-on des réalités différentes. A Montréal, la réalité est que maintenant on a beaucoup de taxis et qu'une diminution n'affecterait pas tellement les consommateurs.

M. BELAND: Supposons qu'il y aurait justement diminution du nombre de taxis, pensez-vous, compte tenu de la mentalité des Québécois, compte tenu des tendances diverses selon les régions, que la population, à long terme, se dirigerait vers d'autres modes de transport?

M. EDMONSTON: C'est possible, mais vous voyez, on a...

M. BELAND : Excusez-moi, mais il y a eu une allusion, comme si je parlais de spoutnik, selon le député de Sainte-Marie, mais je parlais du transport en commun et non pas des idées illusionnaires qu'il peut avoir. Voulez-vous continuer, M. Edmonston?

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Bien répondu.

M. EDMONSTON: M. le Président, il est possible que si on a moins de taxis disponibles les citoyens utilisent d'autres modes de transport. Cela est possible mais je ne crois pas que cela aurait un effet tellement nocif ou un mauvais effet sur les chauffeurs de taxi parce qu'à Toronto on a d'autres modes de transport, le métro, par exemple. Quand on a diminué le nombre de taxis, je n'ai pas vu tout le monde prendre le métro et laisser les chauffeurs de taxi crever de faim.

C'est une bonne affaire à Toronto. On a quelque chose de semblable. La seule différence, c'est qu'à Toronto, on a un taxi pour 965 personnes. Ici, on a un taxi pour environ 400 personnes. Je crois qu'on peut arriver à la même chose qu'à Toronto. De plus, le ministre Davis a dit qu'il voulait créer un système de "rapid transit". Dans l'avenir, ce sera très important un tel système. Je ne sais pas comment on dit cela en français...

DES VOIX: Transport par voie rapide.

M. EDMONSTON: ... un système de transport rapide en ville. C'est très important, à cause des embouteillages, de la circulation et de la pollution. C'est l'avenir. Un bon service de taxi a sa place dans la mosaïque du transport en ville au point de vue économique. Le taxi a une place très importante, mais il faut un taxi efficace et sûr. Je crois vraiment que le règlement no 6 est bon, pas seulement pour maintenant, mais pour l'avenir. Un bon service de taxi pourrait réduire le nombre de véhicules en ville et toute la pollution qui est causée par les voitures, dans une proportion de 50 p.c. Nous avons déjà le problème à Montréal.

M. BELAND: Vous avez fait certaines allusions en ce qui concerne les chauffeurs de taxi, le public consommateur de ce service, etc? Mais est-ce qu'à Montréal ou dans d'autres villes, provinces, pays, etc., les clients ont le droit de choisir le chauffeur dans un poste de taxi ou dans une compagnie de taxis?

M. EDMONSTON: Je ne suis pas certain. Je n'aimerais pas répondre sans savoir exactement quelle est la situation. Je crois que le consommateur a toujours le choix du taxi qu'il veut prendre. On appelle cela la concurrence. Mais si la moitié des taxis sont en mauvais état, ou si un fort pourcentage de chauffeurs de taxi ne sont pas compétents ou sont employés à temps partiel ou ont un double emploi, si vous devez passer par dix chauffeurs pour en avoir un bon, cela devient difficile pour le consommateur. Le consommateur a un choix, mais quel choix? C'est vraiment un travail.

M. BELAND: Maintenant, si on revient plus directement au règlement no 6, est-ce qu'il garantit suffisamment aux clients la sécurité qui est suggérée dans ce règlement?

M. EDMONSTON: Pour les normes de sécurité, sur papier on garantit toujours la sécurité des automobiles. Mais il faut se méfier de ces papiers. Notre mandat et notre travail, si le règlement no 6 est adopté, c'est de toujours demander au ministère de l'appliquer. Il y a une différence entre la réalité, au ministère des transports, et ce qui est écrit sur le papier. Il y a une grande différence surtout dans la question de la sécurité routière.

Nous avons, avec l'adoption du règlement no 6, l'intention de toujours remplir notre rôle, si c'est possible, et de demander au ministère des Transports de justifier telle action ou telle

action pour être sûrs que les principes que nous croyons bons dans le règlement no 6 seront traduits dans la réalité.

Nous ne sommes par certains maintenant que ce sera une chose excellente. Cela peut être de la foutaise. Si c'était de la foutaise, si, après l'adoption du règlement no 6, tous les règlements sont mal dirigés, appliqués de la mauvaise façon ou avec un manque de sérieux, c'est nous qu'il faudra blâmer parce que nous n'aurons pas assez insisté auprès du ministère concernant ce manque de surveillance de ces règlements ou ce manque de compétence pour la mise en vigueur de ces règlements. Je ne peux pas dire que cela va être une excellente chose. C'est une hypothèse. Le principe est très bon pour la réforme du taxi, pour les consommateurs. Savoir si cela va être traduit dans la réalité, c'est toujours difficile.

M. BELAND: Comme représentant des consommateurs, que pensez-vous de l'énumération faite à l'intérieur du règlement no 6 qui dit: "Quatre passagers, maximum"?

M. EDMONSTON: Nous ne connaissons pas la raison d'être de ce règlement de "quatre passagers, maximum". Je suis certain qu'il y a déjà eu des représentations de la part d'autres associations; par exemple, Mme Fontaine, a parlé de la base rationnelle de tous ces règlements. "Quatre passagers" veut dire pas plus que trois en arrière et un à côté du conducteur. C'est tout. J'aimerais voir ce que cela ferait si c'était "six passagers" ou "cinq passagers". Je crois que cela peut affecter beaucoup le travail du conducteur d'une voiture parce qu'elle sera surchargée. Surtout avec la compagnie Ford, il a été démontré que les pneus seraient facilement surchargés si vous avez plus que quatre passagers et une personne comme conducteur. Les pneus ne sont pas faits pour une voiture vraiment pleine avec tous les bagages. Sur le plan de la sécurité, nous ne sommes pas contre la limite de quatre. Nous croyons qu'avec quatre personnes la voiture serait assez chargée. Si on a les meilleurs pneus? Je ne sais pas ce qu'on appelle les meilleurs pneus, mais je sais qu'avec les bagages et avec cinq personnes dans une voiture celle-ci est vraiment chargée. S'il y en a plus que ça, six passagers, on ne peut pas conduire la voiture et avoir la même sécurité pour voir la route et circuler qu'avec quatre passagers. Je n'ai pas de chiffres là-dessus. Je n'ai pas fait d'étude sur la question de quatre passagers, cinq ou six ou même huit dans un taxi. Avec ce règlement de quatre passagers, plus le conducteur, ce qui fait cinq personnes, j'y vois une implication sécuritaire. C'est beaucoup, surtout pour une voiture-taxi.

M. BELAND: Comme dernière question, les normes à être appliquées ou à être agencées dans le domaine du taxi, disons dans toute la province, pensez-vous qu'elles devraient être différentes selon les régions de la province?

Par exemple, Montréal tient pour une part et une autre région, une autre part, dans le milieu rural, je ne sais trop. Devrait-il y avoir une différence marquée?

M. EDMONSTON : Non. Je serais contre les différences. Il ne faut pas de différences pour l'état des routes, pour la sécurité des voitures. Pour le chauffeur, c'est toujours nécessaire d'être compétent. La mécanique doit toujours être bonne. Je serais pour une même loi partout. On peut avoir une meilleure façon de mettre en vigueur cette loi. Si vous avez une différence pour cette petite ville, une autre différence pour celle-ci et une autre pour Montréal, les normes de sécurité exigées seront différentes. C'est incroyable. C'est très difficile de mettre en vigueur ces règlements.

Quant à la sécurité d'une voiture, ici comme en Australie, comme aux Etats-Unis, comme à Toronto, certaines normes doivent rester les mêmes. Il faut ajouter certaines choses au Canada, par exemple des chaufferettes plus fortes, des batteries plus fortes, à cause de notre climat spécial, bien sûr, la protection antirouille, le dégivreur arrière. Ce sont des choses très importantes. Mais c'est selon les régions climatiques qu'il faut avoir certaines choses.

M. BELAND: Je vous remercie beaucoup.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, je pense qu'on a pas mal posé toutes les questions qu'on avait à poser à M. Edmonston. J'ai juste deux questions d'ordre général.

Premièrement, une remarque très brève sur votre exposé. Lorsque vous dites que vous avez pu, à la banque, ouvrir un compte avec une carte au nom de M. Pinard...

M. EDMONSTON: Que j'ai faite moi-même.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ... je peux vous rassurer. Si vous avez fait un dépôt de $5, les gens de la banque étaient convaincus que ce n'était pas le ministre des Transports.

M. PINARD: A quelle banque?

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne le sais pas.

M. PAUL: Apparemment, il a fait cela à 20 banques, à Montréal!

M. PINARD: Je fais affaires avec des banques canadiennes-françaises, si cela vous intéresse.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Trêve de plaisanteries. Pour en revenir aux choses sérieuses, vous parliez de la syndicalisation des chauffeurs de taxi; il y a eu plusieurs tentatives

de faites, à Montréal. On en entend parler depuis des années. Cela ne s'est jamais concrétisé. Pensez-vous que cela pourrait se faire seulement sous l'égide, ou épaulé par le ministère du Travail, soit par une loi spéciale, genre syndicalisme agricole, peu importe.

Est-ce votre avis que les chauffeurs seuls ne pourront jamais se syndicaliser dans une ville comme Montréal s'ils n'ont pas l'aide du ministère? Brièvement.

M. EDMONSTON: Je crois que c'est nécessaire d'avoir l'aide du ministère du Travail et même l'aide du ministère des Transports. C'est une place où ils peuvent aider; c'est nécessaire. Je parlais d'un climat malsain dans cette industrie. Je suis certain qu'on va entendre des gens qui ne veulent pas avoir la syndicalisation des chauffeurs de taxi. Je suis certain qu'on va voir ça. Je suis aussi certain qu'il peut y avoir seulement des bénéfices à la syndicalisation. Le ministère de la Main-d'Oeuvre doit reconnaître ces bénéfices et faire son possible pour aider les chauffeurs de taxi à se syndicaliser. Je ne vois pas de désavantages pour les consommateurs avec la syndicalisation des taxis, aucun. Dans cette optique, je crois que le ministère du Travail et le ministère des Transports doivent chercher des endroits où ils peuvent aider.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Merci. Une dernière question et j'ai fini. Alors, on aura fini à 12 h 30. Hier soir, autour de minuit, on a entendu, ici, un chauffeur, M. Dickey, qui nous a fait part de menaces qu'il aurait reçues quand certaines gens ont su qu'il venait témoigner à la commission parlementaire. Vous nous en avez parlé aussi. Vous nous avez même dit que vous pouviez déposer des documents confidentiels au ministre. Croyez-vous que ces menaces sont allées assez loin pour empêcher ceux qui viennent s'exprimer comme chauffeurs de dire librement ce qu'ils veulent dire devant la commission parlementaire et, par le fait même, empêcher la commission parlementaire d'être renseignée véritablement sur les problèmes des chauffeurs de taxi? Il y en a 2,500 à 3,000 à Montréal. Est-ce que vous pensez que ces menaces empêchent ces gens de s'exprimer?

M. EDMONSTON: La première question sur la syndicalisation, j'y ai répondu. A la deuxième question, c'est que les menaces sont réelles. On n'a pas eu jusqu'ici l'idée des chauffeurs indépendants qui veulent se syndicaliser; il y a seulement un M. Dickey, hier soir. Je sais qu'après mon témoignage on va entendre ces gens.

J'espère qu'ils parleront librement, je crois que oui. Je crois que les menaces n'ont pas réussi à faire taire ces gens courageux. Je ne peux pas faire d'hypothèse et dire qu'ils vont changer leur histoire après que je serai parti, je crois vraiment que ces gens vont dire la vérité. Quand M. Dickey a dit la vérité hier soir il a été hué par tout le monde derrière moi.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je le félicite aussi. Il a eu du courage. Merci.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député d'Abitibi-Ouest.

M. AUDET: M. Edmonston, vous avez dit tout à l'heure que la syndicalisation était une mesure nécessaire pour la protection des chauffeurs de taxi de Montréal. Nous connaissons des associations de services de Montréal, de Sherbrooke qui ont pris le tour d'intégrer des propriétaires de taxi artisans au sein de leur association ou au sein de leur compagnie en les rendant copropriétaires, en leur vendant des actions de leur compagnie. Il serait peut être possible de faire la même chose avec les chauffeurs. Je ne sais pas par quelle formule on pourrait y arriver mais, au lieu de syndicalisation, on pourrait faire une intégration des chauffeurs dans les associations ou dans les compagnies existantes. Ils participeraient par l'achat d'actions des compagnies. Ainsi ils seraient protégés réellement et intéressés à faire partie de l'industrie du taxi. Croyez-vous que cela serait supérieur à la syndicalisation, qui est difficile à faire?

M. EDMONSTON: M. le Président, la coopérative de Sherbrooke, je l'ai déjà dit, c'est un moyen qui a protégé les chauffeurs, protégé les consommateurs, c'est une bonne affaire. Je suis certain que le ministère des Transports et M. Bossé sont d'accord. C'est presqu'un modèle à Sherbrooke, toutes les associations qu'ils ont eues et tous les services qu'ils offrent au consommateur. Mais combien ont réussi cette tâche? Un seul. Vous voulez vous baser sur un seul, c'est presque un miracle, dans notre situation, le cas de Sherbrooke. On ne peut dire: On va laisser les gens de Montréal faire la même chose. Ce n'est pas la même chose. A Montréal c'est une réalité différente. Pour dire qu'on établit les mêmes modalités ou la même chose qu'à Sherbrooke, volontairement établir un moyen pour protéger...

Nous avons deux moyens pour protéger les chauffeurs et les consommateurs; la syndicalisation et les coopératives que propose le gouvernement. Mais le troisième moyen, les coopératives libres faites par les chauffeurs de taxi et les associations sans le règlement no 6, est-ce que cela peut se produire à Montréal? J'en doute fortement. Parce qu'on a vraiment beaucoup de chicane à Montréal; on n'a pas les mêmes réalités à Montréal qu'à Sherbrooke.

M. AUDET: Je sais que ce serait un tour de force d'arriver à concrétiser cette intégration, mais je crois qu'à Montréal déjà il y a des associations qui ont fait un pas vers les chauffeurs artisans pour les intégrer, les faire devenir actionnaires des compagnies. Cela s'est déjà fait. On en parlait à des chauffeurs de taxi hier qui ont acheté des actions dans les associations de services et qui en sont devenus co-propriétaires.

Maintenant, quel tour de force faudra-t-il pour faire la même chose pour les chauffeurs de taxi? Je crois que si on réussisait ce tour de force, la préservation des droits des chauffeurs de taxi serait supérieure à celle qu'on obtiendrait par la syndicalisation.

M.EDMONSTON: Vous savez, pour parler syndicalisation versus coopératives il y a des gens plus qualifiés que moi qui comparaîtront devant vous plus tard, j'en suis certain. Il y a trois moyens de syndicalisation. Il y a le système coopératif que le gouvernement veut établir avec le règlement no 6. Je ne peux pas vous dire lequel sera le meilleur dans l'intérêt des chauffeurs. Je ne suis pas chauffeur de taxi, je suis simple consommateur. Je crois que cette question recevra une réponse par les autres qui me suivront.

M. AUDET: Un dernier mot, M. le Président. Au point de vue du code d'éthique ou de la possibilité de rendre les chauffeurs plus motivés, pour empêcher que ce soit des mercenaires qui vont chercher une paye, pour les rendre plus humains, plus aptes à donner de bons services, je crois que ça ferait toute la différence, ne croyez-vous pas?

LE PRESIDENT: M. Edmonston, nous vous remercions de votre présentation et de vos commentaires. Nous nous excusons de vous avoir gardé aussi longtemps à la barre.

M. EDMONSTON: Merci beaucoup.

UNE VOIX: M. le Président, je m'excuse de cette intervention inhabituelle dans le cadre de la commission parlementaire, mais il y a des chauffeurs de Montréal qui sont présents ici, qui ont travaillé toute la nuit, qui sont rendus ici, ce matin, pour donner leur opinion. Ils attendent depuis deux jours. Tous les financiers du taxi, les investisseurs du taxi ont été entendus et là, on en a assez, messieurs, on veut que les chauffeurs de taxi qui sont, en fin de compte, l'industrie du taxi, soient entendus. On les a invités, alors qu'on les entende prioritairement après la période du repas, parce que ces gars-là ne peuvent pas se déplacer comme cela continuellement et ils veulent être entendus.

La priorité doit leur être donnée parce que c'est pour eux qu'on a convoqué cette commission. Merci, messieurs.

LE PRESIDENT (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous plaît! Je comprends le bien-fondé de l'intervention. Mais j'ai un ordre du jour à suivre. Je comprends aussi qu'il y a beaucoup de personnes dans la salle dans une situation semblable. Je comprends que c'est très long d'attendre, mais il faut quand même procéder avec un certain ordre. L'enquête a été faite pour l'industrie du taxi et la réglementation s'appliquera à l'industrie du taxi, si je comprends bien.

Un instant, s'il vous plait. Il y a un groupe qui demande la parole. Vous vous êtes nommé, mais je ne me souviens pas du nom. Quelle est la personne qui s'est nommée tout à l'heure? M. Blondin.

UNE VOIX: M. le Président, si vous me le permettez...

LE PRESIDENT (M. Séguin): Un problème à la fois. Si vous en avez un autre, vous viendrez tout de suite après. M. Blondin a dit qu'il y avait un groupe de chauffeurs et on m'a présenté une liste. S'agit-il de M. Piton, M. Dumont, M. Landreville, M. Côté, M. Lévesque? Est-ce de ce groupe qu'on veut faire mention? Y en a-t-il un qui représenterait les cinq, qui voudrait parler?

Un instant, je pose une question à M. Blondin qui a été le porte-parole du groupe, en autant que je le sache.

M. Blondin, est-ce qu'il y en aura un qui voudrait parler pour représenter le groupe ou si vous demandez la parole, tout le groupe, chacun individuellement, à tour de rôle?

M. BLONDIN: Pour chacun, individuellement. Il y a des personnes qui désirent se faire entendre.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Est-ce que vous accepteriez l'offre de cinq minutes chacun?

M. BLONDIN: Non.

DES VOIX : Non, nous ne l'acceptons pas.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Vous n'acceptez pas cela.

A l'ordre! Je ne veux pas faire de distinction ni de discrimination. Au moins, vous allez admettre, depuis le début de ces séances, que j'ai fait preuve d'une tolérance extraordinaire. Vous admettrez cela. Qu'on ne me prête pas surtout, s'il vous plaît, d'intention autre que celle-là, soit cette tolérance que j'ai voulu démontrer.

A 14 h 45, nous allons appeler M. Blondin. Selon la longueur de son intervention, M. Blondin déterminera le temps qui sera permis à ses confrères par la suite. Si M. Blondin prend une demi-heure, naturellement, les autres en auront beaucoup moins.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. Blondin est déjà venu ici. H peut revenir encore.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Oui, je comprends tout cela. Que ma proposition soit bien claire pour M. Blondin et ses collègues. Si vous pouvez, entre vous, à l'heure du lunch, décider d'une période de temps de cinq ou six minutes pour chacun et vous répartir les différents problèmes individuellement, et non pas vous répéter l'un après l'autre. Si vous pouvez vous

grouper et me suggérer, à 14 h 45, que M. Untel sera le premier, qui suivra, etc. Vous pourriez me dire que vous avez l'intention de parler pendant cinq ou six minutes, en précisant: Vous m'arrêterez, M. le Président! Mon collègue continuera sur un autre sujet.

Et votre propos devra être toujours représentatif de vos opinions collectives.

Vous m'avertirez avant la reprise de la séance et je verrai s'il est possible de faire une espèce d'entente pour vous entendre. Mais il faut reconnaître aussi qu'il y en a d'autres qui veulent s'exprimer. Il y a M. Lecompte qui attend, entre autres.

M. BLONDIN: Etant donné que j'ai déjà passé, je ne voudrais brimer personne et tomber dans la procédure. Je veux respecter tout le monde. Je voudrais que mon nom soit rayé.

Je voudrais que l'on commence avec M. Lecompte parce qu'eux n'ont pas passé. Moi, j'ai passé déjà.

LE PRESIDENT (M. Séguin): M. Lecompte est-il avec votre groupe?

M. BLONDIN: Oui.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Je voulais commencer à trois heures moins quart avec M. Lecompte. Alors, vous me reverrez avant la reprise, j'allais dire des hostilités, mais de notre séance de l'après-midi.

M. PRONOVOST: Je me nomme Paul Pro-novost. On nous a appelé à deux reprises. Malheureusement, je ne sais pas si ce sont des tactiques pour nous prendre les culottes baissées, mais nous n'étions pas là. Cela fait déjà trois jours que nous patientons; nous n'avons pas les mêmes moyens que les pontifes du taxi.

Nous aimerions donc être entendus immédiatement après M. Lecompte après le groupe des quatre ou cinq. Mais nous voulons être certains que ce sera aujourd'hui et non dans quinze jours.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Mon ordre du jour, M. Pronovost, pour votre information est inscrit ici. C'est l'ordre que je devais suivre ce matin et que je devrai nécessairement respecter cet après-midi. Le premier à passer, M. Lecompte. Le deuxième, Taxis Lasalle 64 Inc., M. Brunet. Le troisième, Association métropolitaine des petits propriétaires, M. Pronovost. Vous êtes inscrit à l'ordre du jour. Mais encore là...

M. PINARD: Soyez présents, nous vous avons appelé deux fois et vous n'étiez pas présents. Je regrette.

LE PRESIDENT (M. Séguin): En plus, il y a des gens qui sont dans la même position que vous. Ils doivent passer aujourd'hui parce qu'ils sont ici depuis deux jours et ils sont revenus encore aujourd'hui pour se faire entendre. J'ai l'Organisation des chauffeurs de taxi de Montréal, j'ai l'Association des propriétaires de flottes de taxis de Montréal, Metropole Radio Taxi, 1959, et l'Union des propriétaires de taxis de Granby. Ce sont tous des gens inscrits pour aujourd'hui. C'est pour ça que je vous demande, de grâce, dans vos interventions comme dans vos réponses aux questions d'être aussi brefs que possible et clairs en même temps, afin de permettre que d'autres soient entendus. C'est la seule raison de mon insistance dans ce domaine. Je vous souhaite bon appétit et, à trois heures moins quart, nous reprendrons la séance.

(Suspension de la séance à 12 h 43)

Reprise de la séance à 15 h 8

M. SEGUIN (président de la commission permanente du travail, de la main-d'oeuvre et des communications): A l'ordre, messieurs! Le député de Verdun, sur un point de règlement.

M. CARON: M. le Président, vu qu'il y a encore beaucoup de gens dans la salle et qu'il est déjà trois heures huit minutes...

LE PRESIDENT (M. Séguin): J'avais demandé que la commission reprenne ses travaux à trois heures mois quart, M. le député.

M. CARON: Nous devons entendre beaucoup de monde encore. Pour ma part, je serais prêt à ce qu'on travaille jusqu'à minuit, pour écouter le plus de monde possible ce soir.

Je vous remercie des applaudissements. Ce n'est pas nécessaire. Une fois pour toutes, il faut savoir où on s'en va. Nous sommes ici, à Québec. Je suis ici, vous autres aussi. Alors, nous sommes aussi bien de travailler jusqu'à minuit, cela fera quatre ou cinq heures de plus, pour connaître vos problèmes.

J'aimerais savoir des autres membres, M. le Président, si on est prêt à aller jusqu'à minuit.

M. PINARD: M. le Président, si vous me le permettez, je pense qu'on avait dit clairement qu'on pouvait aller jusqu'à six heures ce soir mais si c'est le désir de la majorité, en bon démocrate, je vais accepter la proposition qui est faite et je vais travailler jusqu'à minuit, indépendamment de toutes les autres tâches que j'ai à accomplir.

M. CARON: Dans les circonstances, je pense que votre temps est plus précieux à la commission parlementaire, pour le taxi. Merci.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, je suis entièrement d'accord. Je suis prêt à siéger jusqu'à minuit. Mais serait-il possible de suspendre, ce soir, pour le souper, à six heures au lieu de six heures et demie. C'est que j'aurais à sortir.

M. PINARD: Avec l'entente, cependant, que demain, vendredi, nous ne siégerons pas.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ah non! Cela, c'est une autre affaire.

M. PINARD: Nous procéderons par convocation de ce que nous appellerons, pour les circonstances, les véritables représentants des groupes qui veulent se faire entendre. J'ai cru comprendre — à moins que je me sois trompé lourdement — qu'il n'y a pas tellement de groupes nombreux qui veulent se faire entendre. Il y a les groupes d'associations de services, groupes bien organisés, bien structurés, comme

Diamond, Lasalle, Beaubien et autres, il y a les propriétaires de permis de taxi, qui les utilisent personnellement ou qui les font exploiter par d'autres personnes à leur emploi, sous forme de salaires ou de commissions, il y a les petits propriétaires, il y a les locataires, il y a les chauffeurs.

S'il y en a d'autres qui veulent se faire entendre, comme M. Edmonston qui représentait le consommateur, ils nous le diront. Je pense que nous pouvons déterminer déjà quels représentants du monde du taxi, par voie de représentation, nous pouvons entendre. Je demanderais si c'est possible et si on admet mon point de vue, de ne pas faire défiler 5,000 personnes devant la commission parlementaire. Vous allez en avoir pour un an, peut-être pour un an et demi, et votre problème du taxi ne sera pas réglé.

Essayons d'être raisonnables, d'être réalistes tous ensemble. Faites-vous représenter pour que quelqu'un vienne dire le point de vue de 100, 150, 200 ou 300 personnes, de façon que 200 personnes ne viennent pas dire nécessairement le point de vue présenté par une autre personne avant.

Je pense que c'est raisonnable. Si c'est une formule de travail qui vous parait réaliste et efficace, nous allons nous entendre là-dessus. Mais avant que je décide qu'il y aura convocation de la commission parlementaire la semaine prochaine — en tout cas, mes autres collègues vont peut-être être d'accord — nous allons déterminer une façon de travailler de façon ordonnée, efficace et rentable, pas pour nous, pour vous. Mais donnez-nous la chance de vous aider, s'il vous plaît.

M. BERTHIAUME: Sur le même sujet, j'aurais une petite question de procédure.

M. PAUL: Je pense bien que vous me permettrez, au nom de mes collègues de l'Union Nationale, de vous informer que, s'il y a des députés qui sont prêts à siéger à cette commission, nous, nous acceptons avec plaisir de siéger jusqu'à minuit ce soir.

M. AUDET: Nous l'acceptons aussi, mais pourriez-vous nous dire s'il y aura reprise de la commission la semaine prochaine?

M. PINARD : Nous le verrons après. Je viens de toucher à ce point, M. le député: J'espère que vous avez compris. Nous établirons un consensus là-dessus dans le courant de la journée ou un peu plus tard ce soir, selon ce qu'on aura fait.

M. AUDET: Nous le saurons ce soir.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): D'accord.

M. BERTHIAUME: Très brièvement. Me serait-il permis par la commission de déposer un

document qui m'a été présenté par un chauffeur de taxi de Granby, qui doit partir cet après-midi et qui a écrit à la main ses commentaires?

LE PRESIDENT (M. Séguin): Je demanderais au député de Napierville-Laprairie d'attendre un instant. Je recevrai sa question sur la procédure immédiatement après. Puisqu'il y a unanimité chez les membres de la commission et que, déjà, on a exprimé le désir de siéger plus tard ce soir, je n'ai pas d'hésitation du tout à dire que nous siégerons jusqu'à minuit. C'est le désir de la commission et du public présent.

Dans ces conditions, nous siégerons jusqu'à minuit. Mais ce soir, à six heures, nous arrêterons. Un membre de la commission a déjà demandé à cause d'autres engagements d'arrêter à l'heure du diner. Nous arrêterons à six heures, même au milieu d'une phrase, aussi raide que ça.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Quand même ça varierait de cinq minutes.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Non, je ne la ferai pas varier. Je vais suivre l'horloge, parce que je vois que je suis conduit par l'horloge. Donc, 6 heures, ce soir.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Pour l'heure du souper.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Pour l'heure du souper, et nous reprendrons... Ce sera annoncé à 6 heures; ce sera probablement 8 h 15.

M. PINARD: Là-dessus, M. le Président, me permettez-vous? Est-ce qu'on pourrait permettre au président de garder le contrôle, en tout temps, des travaux de la commission parlementaire? C'est lui qui a la lourde responsabilité de bien conduire les travaux de cette commission parlementaire. Ce n'est pas une question de partisanerie politique; même mes collègues de l'autre côté de la Chambre, mes honorables adversaires, vont admettre que c'est absolument nécessaire, pour une assemblée délibérante, d'avoir un président qui a les mains libres et qui va établir la discipline. Je suis prêt à me conformer à cela et j'imagine que la majorité d'entre vous est prête à s'y conformer. Mais ce n'est pas aux députés à mener ça, c'est au président à mener les travaux.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Napierville-Laprairie, sur une question de procédure.

M. Gérard Daigneault

M. BERTHIAUME: II s'agit simplement de faire valoir ou de présenter le document de M. Gérard Daignault, de Granby, qui doit repartir.

C'est un chauffeur de taxi qui voulait prendre la parole en son nom. Il ne représente personne d'autre que lui-même. Etant donné qu'il devait partir, il m'a demandé si on pouvait accepter le document qu'il a rédigé et qui résume sa pensée. C'est écrit à la main. A moins, tout simplement, de déposer ce document.

LE PRESIDENT (M. Séguin): A moins qu'il y ait objection d'un membre de la commission, je n'ai aucune opposition à recevoir ce document et à le faire déposer ou inscrire en annexe au journal des Débats.

M. PAUL : Adopté, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Adopté et accepté. (voir annexe)

M. BERTHIAUME: Merci, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Séguin): A l'heure du lunch, il y a eu une demande de la part d'un membre de l'industrie du taxi, M. Blondin, m'avisant qu'il y avait un groupe, venu de Montréal, qui désirait se faire entendre. J'avais une liste qui, en plus de son nom, contenait cinq ou six noms de chauffeurs, je présume. Il m'a demandé s'ils pouvaient être entendus, lui et les membres de ce groupe, et malgré que ça faisait déjà un accroc à l'ordre du jour déjà préparé et à la routine normale de pouvoir entendre tout le monde, j'ai convenu, avant le lunch, d'entendre M. Blondin ou d'autres de ce groupe.

Au retour, M. Blondin m'a rencontré, c'est-à-dire il y a quelques minutes déjà, et la liste avait été augmentée d'autres personnes.

J'ai offert à M. Blondin, et à son groupe, une période de 45 minutes excluant le temps pour des questions éventuelles et lui donnant entière liberté de faire la répartition du temps employé par ces messieurs. Il faudrait dire, pour autant que je le sache, que ce sont des personnes qui ont demandé de comparaître devant la commission, qui ont le droit de se faire entendre mais à la condition qu'elles soient inscrites pour que nous puissions suivre un certain ordre. On me dit qu'elles ne se sont pas toutes inscrites.

Ne voulant pas brimer des droits, ni faire preuve de discrimination envers qui que ce soit, et puisque déjà, individus, associations, enfin, d'autres parmi l'assistance ici qui se sont déjà inscrits paraissent maintenant à notre ordre du jour, je trouve qu'il serait très injuste, devant ce refus, d'accorder un temps supplémentaire et d'utiliser à ce moment-ci un temps ou une période plus longue pour entendre les revendications du groupe dont parlait M. Blondin.

Je voudrais quand même indiquer que chacun des individus du groupe représenté par M. Blondin, avant le lunch, a la prérogative, le droit, le privilège et le devoir peut-être de s'inscrire. Au fur et à mesure que les jours et les semaines suivront, ils seront convoqués ici, à la

commission, à une date fixe afin qu'il n'y ait pas abus quant au temps utilisé ici. Devant le refus de M. Blondin d'accepter la période offerte, je me vois obligé de suivre mon ordre du jour. J'appelle à la table, ci-avant — tel que convenu avant le lunch et avant l'intervention de M. Blondin — M. Claude Lecompte.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Lotbinière.

M. BELAND: M. le Président, avant que M. Lecompte ne débute, j'aimerais avoir une information. Avez-vous déterminé un temps maximum d'inscription pour les autres qui voudraient parler? Avez-vous fixé une limite?

LE PRESIDENT (M. Séguin): Non, je n'ai pas fixé de limite. Nous avons été très larges là-dessus. S'il y a des gens qui ne sont pas inscrits qui seraient ici dans le moment, ils peuvent s'inscrire mais pas nécessairement pour s'adresser à la commission aujourd'hui. L'inscription ne veut pas dire parution immédiate à la table, il ne faudrait pas se méprendre. Cela leur permettra d'être appelés, à une date fixe, dans les jours à venir. Est-ce que cela répond à votre question?

M. BELAND: Cela répond.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Merci. M. Lecompte.

M. LECOMPTE: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Séguin): Voulez-vous vous identifier?

M. Claude Lecompte

M. LECOMPTE: Claude Lecompte, chauffeur de taxi appartenant au no 4 tel que décrit par des chauffeurs qui m'ont précédé. Un no 4 est un gars qui ne détient qu'un "pocket number" et qui est à la solde de gens qui détiennent des permis. Je remercie le président de toute la tolérance qu'il a démontrée à l'égard des personnages qui sont passés dans cette salle, aussi bien les intelligents que les imbéciles.

Je remercie le premier ministre de la province de Québec de s'être penché sur le sort du chauffeur de taxi qui est, en réalité, le noeud de l'industrie du taxi dans la région métropolitaine de Montréal. A ce moment-ci, je ne veux pas parler des chauffeurs de taxi des régions comme Sept-Iles, que je ne connais pas du tout. Je remercie M. Alfred Bossé du travail ardu qu'il a fourni pour permettre cette commission qui ouvrira maintenant les yeux de la population du Québec et de nos hommes politiques sur le statut particulier d'un chauffeur de taxi de la ville de Montréal.

Je remercie l'Opposition, qui fait un travail formidable, en faisant découvrir par ses ques- tions la vérité afin que le petit continue à être protégé au sein de cette société au détriment de ceux qui continuent.

Il y en aura peut-être encore d'autres, dans différents domaines, pour profiter du manque d'instruction du chauffeur de taxi pour lui faire un lessivage de perveau, pour le maintenir à sa solde comme un esclave au temps du premier président des Etats-Unis. M. Lincoln a dit, il y a 100 ans, que l'esclavage était terminé en Amérique du Nord.

A ce point-ci, je veux décrire la situation actuelle du chauffeur de taxi. Je pense que tous les députés ont le mémoire que j'ai présenté contenant deux feuilles et trois paragraphes. Cela a été distribué à tous les députés, peut-être que quelques-uns ne l'ont pas eu parce qu'il en manquait.

M. PAUL: M. Lecompte, est-ce que c'est ce document-là? J'en ai un ici...

M. LECOMPTE: Pour l'identifier, le titre est: Mémoire à l'intention des membres de la commission parlementaire sur l'industrie du taxi, règlement no 6, situation actuelle.

M. PAUL: Merci, très bien.

M. PINARD: M. Lecompte, le secrétaire de la commission parlementaire, M. Jacques Pouliot, dit qu'il n'a pas reçu votre mémoire. Avez-vous un exemplaire additionnel pour que ce soit entre les mains...

M. LECOMPTE: Je pourrais peut-être lui remettre le mien.

M. PINARD: Vous n'en avez pas d'autres? M. LECOMPTE: Non.

M. PINARD: Est-ce que quelqu'un pourrait donner un mémoire à M. Pouliot afin qu'il puisse l'enregistrer, comme secrétaire général de la commission parlementaire?

M. LECOMPTE: Alors, ce mémoire comprend trois paragraphes. Le premier, je lui ai donné comme titre: Insécurité d'emploi. La situation actuelle au sein de l'industrie du taxi ne donne aucune sécurité d'emploi aux chauffeurs. Je veux dire que le chauffeur à temps plein subit la concurrence du chauffeur de passage. Et par chauffeur de passage il faut entendre celui qui bénéficie d'un revenu additionnel et s'improvise chauffeur de taxi pendant les temps morts de son occupation régulière et pendant les fins de semaines. Là, messieurs, j'aimerais ouvrir une parenthèse sur la formation d'un syndicat.

Je retire ces paroles et j'ouvre une parenthèse pour demander au ministère des Transports de reconsidérer une question qui a déjà été posée afin de geler — de reconnaître le droit des

"pocket number" aux personnes qui l'ont déjà — mais de geler les autres, de façon qu'on agisse, par exemple, comme au bord de l'eau quand on gèle l'entrée d'un ouvrier. Et là, seul le syndicat pourrait émettre de nouveaux "pocket number", si c'est nécessaire.

Je demande au ministère des Transports de geler les "pocket number", que nos droits soient reconnus enfin, que cette chose cesse.

Je continue: Ceci donne toute latitude au propriétaire de véhicule de renvoyer, pour des raisons futiles, un chauffeur, puisqu'il y en a dix autres à sa disposition. C'est ce qui arrive. C'est là qu'on voit le racket des fameuses veilles de Noël pour un chauffeur au service d'un propriétaire pendant presque onze mois. Le propriétaire, pour faire des revenus additionnels, exige de son employé régulier qu'il lui donne un montant additionnel qui est ajouté, en comparaison des prix demandés durant l'année. Si Noël tombe un lundi et si, durant l'année, le lundi, un chauffeur paye, pour travailler le soir, $12.50 quand il loue la voiture, à la veille de Noël, on exige peut-être de lui $18. En certains endroits, on a exigé jusqu'à $21. Et on dit: Si tu n'es pas content, va-t-en chez vous. Tu reviendras, car je sais que tu vas crever. Cela a été dit par des entreprises, des hommes qui opèrent des flottes de taxis.

De plus, les propriétaires à qui le chauffeur n'a pas réglé — je change un peu de propos — le prix de location d'un ou de plusieurs jours, pour des raisons qui peuvent rester personnelles, empêchent celui-ci de travailler pour un autre propriétaire à l'intérieur de l'association à laquelle il appartient.

Je demande qu'on gèle "pocket number" afin que les individus qui ont un emploi régulier n'aient pas à s'infiltrer pour saboter une reconnaissance de travail qui a été mise au service d'un chauffeur par son employeur.

Messieurs, l'association à laquelle le propriétaire adhère se fait donc complice de ce propriétaire en refusant au chauffeur débiteur le droit de travailler à l'intérieur de son association. Je pense qu'il y a déjà un chauffeur de taxi ou peut-être deux qui ont tenté d'expliquer comment une association, par l'entremise du propriétaire, c'est-à-dire de celui qui détient le permis, empêche un détenteur de "pocket number" de travailler pour un autre propriétaire qui est affilié à cette association-là. Je pense qu'il y a eu des preuves d'apportées, ici, hier ou avant-hier.

Je passe maintenant à l'article b), deuxième paragraphe, auquel j'ai donné le titre "Travail sous tension". Le chauffeur de taxi est soumis à une tension qui pourrait presque se qualifier d'inhumaine. Que l'on songe seulement qu'il y a, à l'intérieur d'une association, un appel environ toutes les quatre minutes, et cela d'un coin à l'autre de la ville. Les chauffeurs sont aux aguets et, pour le même appel, quatre ou cinq chauffeurs se battent pour obtenir le client, quand l'un ne le vole pas à l'autre, tout simplement. C'est de là que vient l'impossibilité de réunir les chauffeurs de taxi. Ils ont tenté, antérieurement, de dire aux autorités qu'ils étaient une force, qu'ils étaient là pour faire des recommandations, qu'ils avaient besoin de ceci ou de cela. On avait déjà prévu que ces gens, moralement, se haïssent et se détruisent entre eux.

Les heures pendant lesquelles un chauffeur doit ainsi se battre pour gagner son maigre salaire sont longues. Ces horaires, imposés par l'obligation de pourvoir à ses besoins, agissent inévitablement sur le système nerveux du chauffeur et ralentissent ses réflexes au volant, ce qui est souvent la cause d'accidents. Avec toute cette chicane entre chauffeurs de taxi pour un appel, les gars se haïssent. Le système nerveux se met en ébullition. Cela crée une opposition entre eux, qui les empêche, par le fait même de penser à leurs problèmes qui sont réellement le noeud de l'industrie.

Ajoutez à ça que le chauffeur de taxi, on l'appelle à toutes les quatre minutes. Le gars conduit avec la main gauche et tient dans sa main droite le micro pour être capable de répondre le premier. Des fois ils sont quatre ou cinq à tenter d'obtenir le fameux appel.

A ce moment leur esprit est concentré. C'est un chauffeur qui a l'appel ou non, et c'est à ce moment qu'il y a une possibilité d'accident.

Je m'en vais au troisième paragraphe, auquel j'ai donné le titre de protection sociale. Des associations qui existent depuis 50 ans tentent de démontrer qu'ils rendent des services à leurs membres. Et on va tenter peut-être de démontrer sous d'autres formes qu'il y a des services possibles, mais il y a un manque d'organisation efficace.

Sous le régime actuel aucune protection de quelque nature que ce soit n'est accordée aux chauffeurs de taxi; on peut se référer à ce que je viens de dire. Je me pose la question, ce qui m'a porté à regarder le règlement no 6: Qu'est-ce que les associations, par l'entremise de leurs membres qui sont propriétaires et détenteurs de permis, ont fait sur le plan de sécurité sociale pour moi le gars qui est assis en arrière du volant et dont les heures varient entre 12 et 18? Et je me suis aperçu par le règlement no 6 qu'il y a là une possibilité, si les propriétaires s'organisaient, de détruire ceux qui les exploitent. Ils pourraient mettre des profits additionnels dans leurs poches et me donner à moi la protection sociale.

Je m'explique. Le véhicule est-il en panne? Le chauffeur doit se rendre au garage et attendre plusieurs heures avant que la panne soit réparée. Il n'est pas rémunéré pour ces heures.

Si, par exemple, la transmission tombe dans la rue — cela n'arrive pas tellement souvent; j'explique une chose qui peut arriver une fois tous les six mois et j'expliquerai tout à l'heure des choses qui arrivent à peu près à tous les deux jours — le gars appelle au garage et dit:

Viens chercher l'automobile avec la dépanneuse. Il a commencé à 5 heures du matin, il est midi, il a fait $14 et il doit faire le plein, ce qui peut varier entre $2, $2.50. A ce moment-là de la journée — il ne faut pas dire que tous les patrons sont des écoeurants, mais il y en a qui exigent le montant total de la location, par ce fameux système de l'association qui protège le propriétaire, donc qui exploite la liberté et c'est là que tout ça entre en ligne de compte — le gars a travaillé de 5 heures du matin à midi, il s'en va chez lui dans l'après-midi avec $2.50 et il a travaillé six heures — c'est fort intéressant — parce que la transmission est tombée dans la rue.

Ce sont les sécurités sociales qu'on nous donne. S'il s'agit d'un trouble majeur et que le véhicule est hors de service pour plusieurs jours, il est alors en chômage pendant cette période et aucun revenu ne lui est assuré. Le chauffeur a-t-il une mauvaise grippe ou doit-il être hospitalisé? Rien ne lui assure un revenu, aussi modeste soit-il, pendant sa période d'inactivité forcée. Imaginez un gars qui a huit enfants, qui reste à Saint-Henri. A-t-il l'air intelligent de ne pouvoir nourrir sa famille? Une chance que le gouvernement a pensé à former le bien-être social.

UNE VOIX: II ne paie pas d'assurance-chômage?

M. LECOMPTE: Tout dépend de l'endroit où il travaille. Les jours fériés: veille de la fête de Noël, Noël, la Pentecôte, l'Epiphanie, la fête des anciens combattants n'existent pas pour le chauffeur de taxi. Tous les travailleurs du Québec ont droit à des congés payés avec des négociations syndicales sauf le chauffeur de taxi qui, lui, n'a pas droit à toutes ces choses-là. Aucune période de vacances n'est prévue pour lui. Il est certain qu'un chauffeur peut s'absenter de son travail pendant une semaine ou plus mais où prendra-t-il l'argent pour vivre pendant cette période de repos?

Sûrement pas dans ses économies, il n'en a pas puisqu'il n'arrive même pas à gagner un salaire suffisant pour pourvoir à ses besoins quotidiens. Aucun propriétaire ne paye à son chauffeur le 4 p.c. qui sont versés annuellement à tous les travailleurs du Québec. A ce stade-ci, je fais des recommandations: l'adoption du règlement no 6 par l'Assemblée nationale permettra aux chauffeurs de réclamer un traitement décent. Cependant, il faut qu'il y ait, à l'intérieur de cette réglementation la garantie de reconnaître un seul syndicat à l'intérieur d'une association unique. Je souhaite donc que cette recommandation reçoive l'accord du gouvernement et ainsi mette fin aux conditions inhumaines dans lesquelles travaillent les chauffeurs de taxi d'aujourd'hui.

LE PRESIDENT (M. Séguin): M. Lecompte, il n'y a pas eu entente générale mais depuis le début il y a eu des questions. Vous avez présenté votre mémoire, il est déjà enregistré, les membres de la commission l'ont entendu avec beaucoup d'intérêt, j'en suis sûr. Maintenant est-ce que vous acceptez des questions? Vous êtes libre d'accepter ou de refuser les questions des membres de la commission.

Je laisse une petite porte ouverte, M. Lecompte, à ce moment-ci afin de ne pas abuser du temps, au cas où peut-être de vos collègues...

M. LECOMPTE: M. le Président, les chauffeurs de taxi qui vont me suivre donneront sûrement des réponses. Si vous voulez vous baser sur ce dossier, ces gens pourront répondre, si cela peut aider la commission à accepter le règlement no 6.

LE PRESIDENT (M. Séguin): II semble y avoir entente entre l'interlocuteur et le président de la commission. Je dois maintenant demander aux membres de la commission s'ils acceptent qu'on entende quelques chauffeurs. Une fois que nous aurons entendu les chauffeurs, il y en a un qui sera mis au blanc pour répondre aux questions. Je ne voudrais pas, par exemple, recommencer une parade pour tous les mémoires.

M. LECOMPTE: Au sujet des chauffeurs de taxi de Montréal, il y en a qui nous ont dit qu'ils étaient allés à l'université, je vais démentir la chose. Ce sont des diplômés de la première année A à la sixième C.

Il faut comprendre mes propres termes, mes propres paroles, et ce que j'ai tenté de dire ici aujourd'hui.

M. PINARD: Oui, d'accord.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Je vous remercie. Est-ce que j'ai le consentement de la commission?

DES VOIX: Oui.

LE PRESIDENT (M. Séguin): M. Blondin.

M. BLONDIN: M. le Président, puis-je vous demander la permission — quitte, s'il reste du temps après, à entendre d'autres chauffeurs — que M. Gilles Piton, gérant de flotte de la compagnie Diamond Taxi, soit entendu immédiatement? Je voudrais m'excuser de ne pas l'avoir fait avant mais je voudrais vous remercier, au nom des chauffeurs, de ce que vous avez proposé au commencement. Ils l'acceptent et vous en remercient, moi de même.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Vous me placez joliment dans l'embarras, M. Blondin, vous le comprendrez. Tout à l'heure, ce n'était pas acceptable, je l'ai annoncé à l'assemblée. Vous me revenez maintenant et vous me dites que c'est acceptable. S'il faut que j'allume ma

pipe, allez-vous me dire: Non, ce n'est pas acceptable. Je suis encore dans le pétrin.

M. BLONDIN: M. le Président, je vous ferai remarquer que c'est le propre des hommes intelligents de changer d'idée. On voit les politiciens faire cela couramment. Merci, M. le Président, vous m'avez donné une occasion inespérée.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Dans une situation comme celle dont vous parlez, j'ai toujours laissé cette prérogative à mon épouse et j'ai toujours essayé de maintenir mes décisions.

M. Lecompte, nous vous remercions de votre intervention. Je sais que depuis deux jours, comme tant d'autres, vous avez attendu avec énormément de patience. Je vous ai vu à plusieurs reprises. Nous vous remercions.

M. LECOMPTE: Merci et longue vie au règlement no 6.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Nous avions, avant le lunch, déterminé que les travaux se termineraient, pour cette semaine, à six heures ce soir. Depuis ce temps-là, une décision nouvelle a été prise et à la suite du consentement unanime, pour autant que je sache, nous siégerons jusqu'à minuit. Je proposerais à ce moment-ci, puisque nous avons entendu M. Lecompte, ses observations, son mémoire, de retourner à mon ordre du jour. Durant la soirée, nous aurons l'occasion d'entendre soit M. Blondin ou d'autres parmi les chauffeurs qui l'accompagnent.

Je ne vous promets pas que ce sera à huit heures et quart ou à neuf heures et quart, mais avec la coopération de tous et chacun ici, nous pourrons certainement les entendre.

M. BLONDIN: M. le Président, c'est ma dernière intervention. Ce sont les chauffeurs qui me l'ont demandée, je n'ai rien proposé. Si la commission veut les entendre, ils veulent être entendus et ils ne pourront pas revenir; sinon, là, je leur demande leur avis, s'ils n'acceptent votre proposition, vous êtes le président ici, s'ils ne respectent pas votre autorité en tant que président de la commission parlementaire, qu'ils quittent l'enceinte pour préjudice à l'endroit des chauffeurs de taxi.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Non, vous vous méprenez sur mes commentaires.

M. BLONDIN: Je me fais le porte-parole des gens qui m'ont demandé de faire cette intervention.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Je comprends, mais il y a tout de même un certain ordre à suivre, il y a une certaine sérénité qu'il faut observer. Je déplorerais qu'une ou vingt-cinq personnes quittent la salle en claquant les portes ou en accusant la commission d'être préjudiciable à ces gens. Il n'en est pas question. Je vous ai dit tout à l'heure que nous siégerons jusqu'à minuit. Je vous ai dit que nous vous entendrions, mais vous comprendrez que vous ne pouvez pas dicter la procédure à chaque fois qu'une idée nouvelle passe devant la lampe d'un individu et dire au président: Changez cela, nous avons changé d'idée et nous voulons passer tout de suite, l'autre passera après! Non, on va suivre l'ordre établi, si vous voulez bien. Si vous ne voulez pas attendre, mon Dieu! c'est regrettable, parce que non seulement la commission et ses membres seront privés de la lumière avec laquelle vous vouliez nous éclairer ...

UNE VOIX: La lumière de nos fanaux.

LE PRESIDENT (M. Séguin): ... mais en plus, vous manqueriez une chance unique de faire valoir ou de faire reconnaître vos idées. Vous serez entendus certainement ce soir, je vous en donne l'assurance.

M. BLONDIN: M. le Président, je pense qu'il y a aussi une chose qu'on doit comprendre. Pour les chauffeurs je vais dire ceci. Depuis trois jours nous avons vu des gens venir s'attabler à deux ou trois en avant et ces gens-là sont représentés par des procureurs compétents en la matière, je l'admets bien. Ils sont venus en avant — je ne vous demande pas de l'admettre — nous faire de belles phrases. C'est très impressionnant pour ceux qui n'en ont jamais entendu, je m'excuse j'en ai déjà entendu. Moi, je n'ai pas fini en sixième année A ni B. A un moment donné la table était occupée par des gens qui ont ralenti le débat. Je ne suis pas un spécialiste en la matière, mais à mon humble avis, et à celui de beaucoup de gens ici, il y en a qui se sont amusés à s'écouter parler. Je ne veux pas faire la même chose. Je remets la chose entre les mains des chauffeurs parce que cela va devenir un débat et je vais être situé au milieu. On va dire que j'en interprète d'autres. C'est ce que j'ai proposé aux chauffeurs, et maintenant ils prendront leurs décisions, ce n'est pas la mienne. En ce qui me concerne, j'ai dit ce que j'avais à dire devant cette commission.

LE PRESIDENT (M. Séguin): M. Blondin, vous allez comprendre qu'il est facile de s'entendre avec moi et les membres de la commission. S'il y a une leçon que vous devez tirer, c'est la suivante et je ne fais pas de morale. Probablement, dès mardi, on avait préjugé de ce que c'était qu'une commission parlementaire sur le taxi ou sur d'autres problèmes. On a pensé qu'il s'agissait de faire venir des gens en foule, contester, protester devant le parlement. On dirait ce qu'on pense et on s'en retournerait chacun heureux mais avec absolument aucun résultat tangible ou valable. Je ne moralise pas

et je ne fais pas de discours réellement. Peu importent les opinions que chacun a individuellement ou collectivement. Diverses observations ont été faites par les différents interlocuteurs devant la commission. Mais vous avez dû sans doute vous rendre compte que vous faisiez face à une commission de parlementaires très sérieux, désireux avant tout de venir en aide à l'industrie. C'est pour cette raison qu'on insiste pour vous entendre, qu'on veut vous entendre. Mais n'accusez donc pas, d'aucune façon, ceux qui sont ici et qui veulent, heure après heure, jours après jour et à l'avenir vous aider. C'est là le message que je veux passer. S'il y a eu une leçon de démocratie valable, c'est peut-être durant les deux derniers jours que vous l'avez eue, non pas que vous en aviez besoin, mais au moins cela a peut-être changé l'opinion que beaucoup pouvaient avoir du gouvernement du Québec, du législateur ou du parlementaire. M. Blondin, avez-vous trois individus — avec vous-même si vous voulez vous inclure parmi les trois — qui pourraient prendre place et qu'on entendrait immédiatement?

M. BLONDIN: Oui, M. le Président. Mais vous avez dit que des gens s'étaient présentés ici en manifestant. Je le regrette. Ces gens-là, je n'en suis pas responsable, et je veux bien le préciser. Cela nous fait encore la réputation de sauvages qu'on avait dans le passé. On a vu ce qui s'est passé devant le parlement mardi matin. Les gens se sont rendus ici avec un esprit destructif alors que le gouvernement, pour la première fois, nous donnait l'occasion de nous exprimer librement, avoir un esprit constructif. Ensuite, on vient devant la commission et on vous dit qu'on ne veut rien détruire, qu'on veut construire mais on arrive ici avec des marteaux de démolition. Je ne crois pas à ce genre de gens de taxi, qu'ils soient de n'importe quel niveau. C'est une mise au point que je voulais faire.

Je peux amener trois personnes ici en avant, trois chauffeurs de taxi.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Trois. Si la commission accepte cet arrangement, nous allons en entendre trois. Nous entendrons les autres de votre groupe et disons que nous les passerons entre-temps. Peut-être que nous les entendrons ce soir. Alors, c'est 50 p.c. de vin, 50 p.c. d'eau, on va s'arranger.

M. BLONDIN: Cela fait un "drink" buvable. Merci.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Je vous demanderais de vous identifier individuellement au fur et à mesure que vous prendrez la parole. Je vois que vous n'avez pas de mémoire, alors vous allez parler...

UNE VOIX: Facilement.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Avec l'élo- quence qu'on reconnaît au personnel du taxi, nous vous demandons d'être aussi concis et aussi clair que possible dans vos énoncés.

M. Gilles Piton

M. PITON: Bonjour, messieurs. Mon nom est Gilles Piton. J'ai dix ans d'expérience dans le taxi et je suis maintenant gérant d'une flotte de taxis pour la compagnie Diamond à Montréal. Nous avons 20 permis de taxi. A ma droite, vous avez un de mes chauffeurs, M. Roger Beauchamp, 20 ans d'expérience dans le taxi.

A ma gauche, vous avez un chauffeur de Métropole qui doit avoir trois ans d'expérience dans le taxi, tous de Montréal.

Je vais essayer de vous expliquer, en quelques mots, ce qu'est un chauffeur de taxi vis-à-vis de son propriétaire, la flotte Diamond en particulier, et mes responsabilités.

Mes responsabilités sont, premièrement, devoir à ce que mes vingt voitures soient sur le chemin. Chacune a deux hommes autant que possible pour faire plus d'argent, c'est normal. Deuxièmement, ça consiste à faire réparer les voitures pour qu'elles soient en bonne condition. Le temps manque quelquefois, mais passons. Troisièmement, ce qui est primordial, c'est de voir à la bonne entente entre les chauffeurs, les patrons et la compagnie Diamond.

Au début, je dirais que, pour être chauffeur de taxi, ça prend un "pocket number". Il y en a un en face de moi actuellement qui a déjà vu ça, il y a bien des années, mais la formule n'a pas changé. Il doit être enregistré, premièrement, par la police de Montréal au nom du propriétaire pour qui il travaille, ensuite, pour la compagnie d'assurance, l'association — dans mon cas, c'est la compagnie Diamond — doit être enregistrée. Enfin, il doit avoir un permis de conduire, c'est logique.

En partant de là, le chauffeur entre chez moi. Il me présente ces trois articles et me dit: Je fais du taxi. Je ne lui fais pas suivre un cours de conduite, il a son permis. Nous lui donnons un "booking" et nous lui disons: Va te faire "booker" à la police; nous allons te fournir une voiture. Ce type-là, c'est la première fois de ma vie que je le vois. Il revient le lendemain. Nous lui donnons un numéro, nous enregistrons son nom dans un livre, soit qu'il travaille de jour ou de nuit. Le type part à quatre heures et demie, si c'est possible, va sur le chemin gagner son argent, à la sueur de son front, il faut le dire.

Que se produit-il? M. Piton est parti, ses heures de travail se terminent à six heures normalement. Il entre chez lui à sept heures et demie parce qu'il a neuf milles et demi à faire. Ce sont les petits inconvénients de la vie, la circulation. Que se produit-il? Ma femme me dit: Untel a appelé, appelle au garage, voiture cassée. Je discute avec le chauffeur; le mécanicien commence à sept heures et il y en a trois avant moi. Le chauffeur part à neuf heures et

demie, le matin, parce que je fais des quarts coupés; deux fois par jour, changement de quart. J'entre le matin au garage. Le chauffeur est en maudit. Il me dit: J'ai perdu trois heures et demie, c'est ceci, c'est cela; comment vas-tu me demander pour la voiture? C'est toujours $12.50 en semaine, $14.50 les fins de semaine. Je n'ai rien compris là-dedans, mais c'est comme cela que ça se produit. Là, nous discutons. Nous louons la voiture en général $1 l'heure. Le gars a perdu quatre ou cinq heures. Il peut en avoir perdu 15 ou 20; cela dépend du moment où il les a perdues, mais je ne peux pas lui enlever plus que $4.

On discute, mais, en fin de compte, une journée ou deux passent et ça va. C'est le service que nous donnons aux chauffeurs.

Maintenant, vis-à-vis de la compagnie Diamond, on l'a expliqué mardi. Hier, je suis retourné à Montréal, mais, ce matin, on m'a demandé de revenir ici. Après ma nuit de travail, j'ai fait 160 milles et je suis venu ici. Mardi, l'avocat de la compagnie Diamond a dit: Les services que nous donnons, le système de radio est parfait; il n'y en a pas de meilleur. Cette radio on a dit qu'elle coûtait $810, c'est vrai. Ce que l'on ne vous a pas dit, cependant, c'est que, lorsqu'on a mis ce système en fonction, on a forcé les propriétaires à prendre cette radio. On n'avait pas le choix parce qu'on avait mis une date limite. Si je me rappelle bien, je crois que c'est au mois d'octobre que les vieilles radios n'étaient plus acceptées.

Alors, le propriétaire qui a vingt voitures, si on sait multiplier par 20, $810, ça doit faire, avec la taxe, pas loin de $20,000. On n'avait pas le choix, parce que si on ne la prenait pas, on ne pouvait pas travailler pour Diamond.

On faisait une espèce de petit racket pour forcer la vente. Sur dix appels reçus, huit étaient donnés à ceux qui avaient les nouvelles radios et deux à ceux qui possédaient encore les vieilles.

Alors le matin, quand le chauffeur arrivait au garage, il disait: Si je n'ai pas la nouvelle radio demain, je ne travaille plus. Je m'en vais. Là, tu discutes avec le patron. Mais pour le patron, $20,000, cela fait mal. Il n'aime pas cela. Gilles, il faut que tu gagnes ton salaire. C'est normal. Mais moi, j'ai un principe dans la vie. J'ai fait du taxi pendant dix ans. Il y en a beaucoup, dans la salle, qui me connaissent. Si cela avait été à Montréal, ce serait encore pire. Je n'ai jamais travaillé avec une voiture toute croche. Je n'aime pas que mes chauffeurs travaillent avec une voiture toute croche. Je suis un gérant dispendieux, je le sais. Mais j'ai l'appui de mon patron. Cela aide. Mais la compagnie Diamond ne m'aime pas. Pourquoi? Parce que j'ai toujours dit que la vie, c'était une promenade. Savez-vous cela, vous autres? Une promenade. On se couche le soir, on ne sait pas si on se lèvera le lendemain matin. Moi, la mort, je n'ai pas peur de cela. Je risque ma position, aujourd'hui, pas à cause de mes patrons, non, mais si le règlement no 6 n'est pas adopté, on forcera mon patron à dire: Ton gérant, mets-le dehors ou sacre ton camp. L'homme est malade. Si je ne suis pas là, il vend. C'est ce qu'on va faire.

Mais moi, je suis ici, messieurs, pour vous expliquer. Je vous ai expliqué ce qu'était le chauffeur, ce qu'était le service de radio. Maintenant, je vais vous dire à quoi sert la petite carte rose. Cela fait 16 mois que j'administre une flotte de taxis. La compagnie Diamond, qui a dit qu'elle donnait des services de chauffeurs, savez-vous combien de chauffeurs on m'a envoyé dans 16 mois? Deux. Pourquoi deux? Le premier est venu travailler, il est parti quatre jours avec la voiture. Je l'ai envoyé remorquer à Drummondville. Cela m'a coûté $65. La voiture n'est pas cassée. Le deuxième a travaillé un avant-midi et je ne l'ai plus jamais revu de ma vie.

Mais il y a des bons chauffeurs de taxi. Il y en a aussi des mauvais. Les bons paient pour les méchants. C'est normal. Tu appelles le gérant des chauffeurs et du dit : J'ai quatre voitures au mur, le jour, envoie-moi des chauffeurs de jour. Il dit: Je n'en ai pas. C'est normal qu'il n'en ait pas. M. Latreille, directeur du Diamond, a pas mal de voitures. M. Kanter, un autre directeur, a pas mal de voitures. Alors où vont les chauffeurs? De ce côté-là. S'il en reste, vous les prendrez !

Alors, juillet et août, l'affaire est assez tranquille. On n'en a pas. C'est normal. Si on crie trop fort, on nous envoie une voiture mais elle est toute croche. Personne ne veut l'avoir. Gilles, arrange-toi avec cela, toi! Comprenez-vous l'affaire? Tout va bien, il n'y a pas de problème. Alors, en fin de compte, c'est un beau service, cela. Et là, quand on a des bons chauffeurs... Hier, vous avez entendu un chauffeur. J'ai attendu son nom pas mal longtemps. C'est M. Dickey. Je regrette, je n'étais pas ici. Mais j'ai une idée de ce qu'il peut vous avoir dit, parce que cela fait longtemps que je le connais. Il a cela à coeur. Il va mourir dans le taxi. Il y en a peut-être, ici, qui ne l'aiment pas, mais quand ils auront fait ce que M. Dickey a fait pour le taxi, ils seront morts. Il est encore debout, lui, et il sera debout longtemps, je vous le promets.

Je vais vous dire une autre affaire. Moi, pour lui donner à manger, M. Bob Dickey, je lui ai donné une voiture qui valait $6,000, sur le chemin, pas d'assurance, au risque de perdre mon emploi. Tu va travailler, Dickey. Mais là, les requins de la compagnie Diamond ont su cela. Ils m'ont appelé et m'ont dit: M. Dickey a travaillé pour vous. Cela ne marche pas. J'ai arrangé cela.

Qu'est-ce qui se produit, dans cette industrie du taxi? Deux poids, deux mesures. C'est bon pour un, pas bon pour l'autre. Il n'y a pas très longtemps, un de mes chauffeurs a tué une personne, dans la rue. C'est normal, le chauffeur travaille 72 heures par semaine. Vous conduisez dans la ville de Montréal, messieurs, je vous ai

déjà promenés. Pour gagner sa vie, un chauffeur, avant minuit, roule à 45 et 55 milles à l'heure. C'est sa vitesse normale, s'il ne veut pas crever de faim, s'il veut avoir du lait le lendemain matin. Après minuit, le gars s'en va à 75 milles à l'heure. Il est chanceux, les policiers ne sont pas là. Il n'y a pas de circulation. Le gars est chanceux. Mais les billets, nous les payons. Nous avons un budget pour cela. C'est normal. Un gars qui est douze heures par jour sur la route, il commet des infractions. On en ferait une à la minute. Nous sommes chanceux, ils nous tolèrent.

Mais ce qui se produit, pour résumer, c'est que les chauffeurs travaillent 72 heures. Il y a un de mes chauffeurs qui a tué une demoiselle, sur la rue de la Montagne. Cela fait quatre ans qu'il travaille pour moi. Je reçois un téléphone de M. Murphey. On me dit: Le chauffeur est barré. C'est normal. C'est un risque pour les assurances. Mais là, on ne prend pas la version. L'enquête du coroner, on ne l'attend pas.

Au lieu de suspendre indéfiniment jusqu'à l'enquête du coroner, le type paie bien. Pas d'affaire. Barré. Là, j'essaie de discuter avec M. Murphy. Rien à faire. Je vais au bureau. Il ne veut même pas me parler. Là, je trouve une auto au gars; il faut qu'il mange. Je l'envoie au SOS. Ce n'est pas mes oignons, mais je l'envoie là pareil.

Un incident semblable s'est produit, le type exonéré de tout blâme. Il travaille pour SOS, mais est barré à vie au Diamond. Il y a une autre affaire qui s'est passée au Diamond, sur la Côte de Liesse. J'ai essayé d'expliquer ça à M. Murphy et j'avais les documents. Vous savez que la compagnie Diamond a des taxis à ville Saint-Laurent. Ils portent un dôme jaume. Ceux de Montréal n'ont pas le droit de prendre des passagers là. C'est normal que les gars de Saint-Laurent puissent les prendre les premiers. Qu'est-ce qui s'est produit? Le taxi de Montréal fait descendre son client, mais, à un gros hôtel comme le Holiday Inn, il sort du monde à toutes les minutes. Le client sort, va pour monter dans la voiture, mais, là, arrive un taxi de ville Saint-Laurent. La chicane prend. C'est normal dans le milieu, nous voyons ça tous les jours.

Le client est dans la voiture. Le gars dit : Tu ne prendras pas mon client, etc. Qu'est-ce qu'il fait, le chauffeur de Montréal? Il dit au gars: Si tu ne t'enlèves pas de là, je te passe sur le corps. Il y a des chauffeurs de taxi qui ont pas mal de nerfs; le gars reste là. L'autre aussi en a des nerfs, il rentre dedans et l'envoie à l'hôpital pour deux mois et demi.

C'est joli, ça. Le gars fait une réclamation à la compagnie Bélair. Savez-vous ce que dit la lettre? Nous avons envoyé une lettre au propriétaire de la voiture, lui disant que, dans son cas, nous ne pouvions pas le défendre, que c'était rendu au criminel et au civil en même temps, une action de $25,000 pour frais médicaux, perte de temps, etc. Le gars s'est pris un avocat.

Mais le gars qui a fait ça même si c'est la négligence criminelle et que ça devrait être dix ans au pénitencier, fait encore du taxi à la compagnie Diamond. Il n'est pas barré. Pourquoi? Expliquez-moi ça. Quand vous aurez trouvé la raison, vous me le direz. Moi, je ne l'ai pas trouvée.

C'est la gang que vous avez vue mardi ici, avec leurs grands gars qui vous ont dit qu'ils ne faisaient pas d'argent. Moi, je vais vous dire une affaire: Je gagne $10,000 par année. Je mets de l'argent à la banque. La compagnie Diamond vient nous bourrer ici. Ils investissent des millions et disent qu'ils font 2 p.c. par année pour nos beaux yeux. C'est bien beau.

M. Latreille, en premier, s'est mis riche. Où? J'aimerais bien ça l'avoir devant moi pour que nous fassions un petit party. Nous en dirions de belles affaires. Mais il se cache.

D'autres petits détails, en passant, que nous pourrions vous citer. La petite carte rose dont on a parlé tout à l'heure, agence de collection. Si un chauffeur entre chez moi et si sa carte n'est pas signée d'un autre propriétaire, je ne veux pas l'engager parce que sa carte n'est pas signée.

Si c'est écrit, disons, M. Kanter, je vais appeler à la compagnie Diamond et leur demander si je peux engager le monsieur en question. On me dit: Tu veux l'engager, il faut que tu lui demandes $50 ou $75. Cela dépend du cas, mais, normalement, ça ne dépasse pas $75. C'est M. Blondin qui a gagné ce point, quand on a actionné Diamond pour la petite carte rose. Nous ne l'avons pas fait abolir complètement, mais nous avons fait baisser les taux.

Avant, il fallait payer la dette au complet. Nous avons gagné une couple de points. M. Blondin a travaillé pour moi aussi. Il est dans la salle aujourd'hui parce que la compagnie Diamond a pris une injonction, puis bonjour, M. Blondin. Il payait sa voiture très bien. Un chauffeur très vite, peut-être un peu dur sur une voiture, mais en général, sur la paie, il était bon. Et ça dans le taxi, je ne sais pas si vous le savez, mais, pour un gérant de flotte, c'est très important quelqu'un qui entre le matin. Si vous n'êtes pas là, qu'il vous manque sept ou huit enveloppes, ce n'est pas drôle. Les chauffeurs savent l'heure à laquelle vous arrivez. Un chauffeur peut se dire: Gilles va arriver à trois heures et demie; je vais arriver à deux heures et demie, je n'ai pas d'argent pour payer ma voiture; je suis allé à Blue Bonnet et j'ai perdu le "waybill". Je donnerai les explications demain après-midi; il va être plus de bonne humeur, il va avoir la tête reposée. Alors, je vérifie les comptes, il m'en manque sept. Le lendemain après-midi, le gars commence à travailler. Tu lui dis: Où est ton enveloppe? Il répond: J'ai été aux courses hier, Gilles, cela a mal été. Tu acceptes ça, mais tu lui dis: Ce soir, essaye de m'arranger ça. Je vais te donner un acompte de $5.

Nous essayons d'arranger ça, parce que j'ai un bon groupe de chauffeurs. J'ai connu le

milieu un peu. Je ne suis pas un ange, j'ai joué aux courses aussi. Mais un autre patron dirait: Tu n'as pas d'argent, tu ne travailles pas. C'est comme ça que ça marche. En général, nous ne pouvons pas blâmer certains patrons, parce que certains chauffeurs ont abusé. J'ai vu mon patron, avant que j'entre là, perdre $12,000 dans la même année; les chauffeurs ne payaient pas. Mais, si l'homme est malade, il n'est pas capable de le faire payer.

La seule chose qu'il peut faire, c'est de le renvoyer. Quand vous avez 20 voitures, ça coûte assez cher sur le chemin.

Qu'est-ce qui se produit? On prend des risques, on laisse monter une petite facture en espérant que le chauffeur va nous aider et va nous payer. Alors, des fois ça va trop haut et quand ça va trop haut, on est obligé de l'envoyer.

Cela termine à peu près ce que j'avais à dire. Je voudrais bien laisser une chance à mes chauffeurs d'essayer de vous convaincre que le règlement no 6, dans l'ensemble... Je dirai que je l'ai lu parce que j'ai eu beaucoup de temps. Je ne suis peut-être pas intelligent mais j'ai pu comprendre bien des choses là-dedans. Premièrement, sécurité du chauffeur; deuxièmement, — chose très très importante, il y a bien des chauffeurs qui n'aiment pas ça — la liberté. On n'entend parler que de ça dans la vie du taxi, la liberté; mais on ne peut pas tout avoir. On ôte un peu de liberté mais on donne un peu de sécurité sociale. C'est un peu plus rassurant parce que le gars qui travaille onze mois par année et qui arrive au mois de juillet, août, il fait chaud, 95 degrés, madame qui est dans la maison toute l'année à attendre son mari lui dit: J'aimerais bien ça, aller faire un petit tour à la campagne. Où est-ce que je vais prendre l'argent pour y aller? Je travaille, pas de vacances, rien.

Dans le rapport Bossé, je crois qu'on pourrait avoir ça. Je dirais que le rapport Bossé, tel que je l'ai lu, devrait être bon au moins à 65 p.c. Pour 20 p.c, ce sont des peccadilles qui n'ont pas d'affaire là et l'autre 15 p.c. amendé, je serais d'accord sur cela. M. Bossé, après tout, doit avoir suivi des cours, et toutes les informations qu'il a prises depuis deux ans, il ne les a pas prises dans les champs. Il y a des chauffeurs ici qui discutent. J'ai entendu des chauffeurs qui font du taxi depui deux ans; le gars qui viendra me dire qu'il n'arrive pas du côté monétaire, dans le taxi, je vais lui dire qu'il est un menteur parce que le gars qui n'est pas sans-coeur fait son argent. Mais le gars, par exemple, qui ne va pas travailler, il crève de faim. Si on parle de sécurité sociale, je vais dire: Tu as raison, pas à 100 p.c, mais à 200 p.c. Le chauffeur de nuit qui commence à 4 h 30 l'après-midi, s'il a de la chance, finit à 4 h 30 le matin, arrive chez lui à 6 h 30, 7 heures moins le quart et se couche. Il va normalement se lever vers 2 h 30, 3 heures; quand il se sera lavé, qu'il aura mangé, il sera temps de retourner travail- ler. Il a vu sa femme quinze minutes, ses enfants, s'ils finissent l'école à 3 h 30, il les a vus peut-être cinq minutes.

Le chauffeur de jour, c'est la même chose. Si le gars commence à 5 heures du matin, à 9 h 30 il faut qu'il se couche s'il veut se lever à 4 heures le lendemain. Alors, si vous appelez ça une vie sociale! Moi-même, aujourd'hui, je suis sorti de l'industrie du taxi comme chauffeur et je n'en ai même pas, de vie sociale. Je travaille sept jours par semaine et on me dérange la nuit, le jour, tout le temps. Ce n'est pas une sinécure. Je voudrais que le règlement no 6 ait longue vie, mais amendé, c'est ça. Je vous remercie.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Nous vous remercions. Le ministre des Transports.

M. PINARD: M. Gilles Piton, vous vous déclarez bien gérant actuel, au moment où nous parlons, de Diamond Taxi?

M. PITON: Pardon, j'administre une flotte qui fait partie de la compagnie Diamond; mon employeur actuellement est Joseph Kaufman qui fait partie de l'association Diamond. On vous a bien dit que Diamond n'a pas de permis, si je ne me trompe.

M. PINARD: Vous êtes administrateur de ceux qui ont des voitures-taxis sous permis appartenant à d'autres personnes qui sont des administrateurs de la compagnie Diamond?

M. PITON: Non. Je travaille pour une personne qui a vingt permis et qui fait partie de l'association Diamond.

M. PINARD: L'association de services Diamond?

M. PITON: C'est ça.

M. PINARD: Qu'est-ce que vous avez à dire au sujet des autres filiales de la compagnie Diamond qui s'appellent Belair Insurance Company, Gazoline Station Limited, National Transportation Management and Investment Corporation?

M. PITON: Côté assurances, je dirais que c'est trop cher à la base. Moi qui suis classé B dans la flotte, je dois payer en moyenne à peu près $120.25 ce qui comprend assurances et association par voiture par mois, ce qui équivaut à peu près à $1,450 par année pour chaque voiture. Si vous divisez ça, je trouve que c'est pas mal trop dispendieux pour les services qu'on me donne.

Il y a une chose dont je n'ai pas parlé tout à l'heure mais M. Blondin vous en a dit un mot. L'avocat a dit les jetons, j'appelle ça des "charges"; ces "charges" sont mises à la disposition de tous les clients. C'est un système de crédit comme Chargex. Au chauffeur de taxi

qui se promène la nuit, la personne embarque et dit: Amène-moi à Gouin et Lacordaire. Le gars arrive au bout de la course, le client sort son calepin et fait une "charge" de $6; c'est de l'argent pour le chauffeur. Quand j'entre le lendemain matin, si le gars m'a payé son automobile avec ça, pour moi c'est de l'argent. On m'alloue, à la compagnie Diamond, $50 par voiture par mois pour deux chauffeurs, ce qui fait un excédent de $1,000. Tout l'excédent de ça, si j'en ai 1,700 ou 1,800, ce qui est à peu près le nombre que j'ai, parce que j'ai des chauffeurs qui travaillent au Bell Telephone, où on paye beaucoup de frais d'administration. I.B.M., on me demande 15 p.c. J'ai appelé le gérant général de la compagnie et je lui ai dit ça. Il a dit: Si tu ne veux pas payer ça envoie tes chauffeurs les changer. Donc j'ai demandé ça à mes chauffeurs. Le bureau ferme à 4 heures 30 à Diamond; donc le chauffeur qui arrive à 4 heures 15 ou 4 heures 20 et à qui tu dis: Veux-tu me rendre un service, Pierre, veux-tu prendre une voiture et aller au bureau me changer ça, répond: Ecoute, moi j'ai ma journée à faire, je n'ai pas de temps à perdre, débrouille-toi avec tes problèmes. Alors ça nous coûte en moyenne $75 ou $80 par mois, ce qui fait un excédent de près de $1,000 à $1,200 par mois. Avec tous les frais de la compagnie, le système de crédit est payant.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de...

M. PINARD : Avez-vous terminé M. Piton? M. PITON: Pour moi c'est terminé.

M. PINARD : J'ai posé des questions concernant les autres filiales de Diamond. Vous avez parlé de l'assurance, vous avez parlé des services, Gasoline Stations Ltd.

M. PITON: L'essence, cela a été ouvert, on donne un escompte aux chauffeurs mais qu'est-ce qu'il se produit? M. Latreille a des voitures, mais en partie ce sont ses chauffeurs. On est tous attachés à un certain garage. Moi je suis attaché au garage Champlain au coin de Saint-Denis et Saint-Joseph, c'est naturel, c'est là où je suis actuellement; on me donne un bureau où j'ai seulement à payer le téléphone. En retour, le garage, c'est normal, me demande de prendre l'essence à cet endroit, plus les réparations autant que possible. Alors les chauffeurs doivent faire le plein au garage Champlain autant que possible. Là aussi on paye l'essence $0.52 le gallon et les chauffeurs ont une ristourne de 15 p.c. sur leur facture. Dans mon cas, les propriétaires exigeaient la facture des chauffeurs, mais moi je lui ai dit: Le chauffeur, c'est lui qui paye l'essence, il garde sa facture. Cela se produit à bien des endroits. Le chauffeur paye, donne la facture au patron, et le patron se paye deux voitures neuves avec ça.

M. PINARD: Est-ce que l'économie dont vous parlez est sensiblement la même que celle qui serait faite si le chauffeur allait prendre son essence dans la filiale de Diamond Taxi?

M. PITON : Du côté pourcentage? M. PINARD: Oui.

M. PITON: Cela varie; il va peut-être avoir 1 p.c, mais en général ça varie.

M. PINARD: Qu'est-ce que vous avez à dire de National Transportation Management & Investment Corporation? Cela sert à quoi, cette compagnie filiale pour le compte de Diamond Taxi?

M. PITON: Cela fait exactement onze ans que je suis avec la compagnie Diamond et c'était la première fois que j'entendais ce nom, ici à l'Assemblée nationale.

M. PINARD: Pardon?

M. BOSSE: Voulez-vous répéter s'il vous plaît?

M. PINARD: D'accord, merci. Je n'ai pas d'autres questions à vous poser.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Maskinongé. Ensuite ce sera le député d'Abitibi-Ouest suivi du député de Sainte-Marie.

M. PAUL: M. Piton, pourriez-vous nous dire s'il est à votre connaissance personnelle que vos chauffeurs sont ou ne sont pas en faveur d'un double emploi dans le taxi?

M. PITON: Moi quand j'ai pris la "job", j'ai fait acheter vingt voitures 1972, j'ai mis les radio à musique, une chose qu'on n'avait jamais eue dans la flotte, j'ai mis des "rear defrosters". J'ai essayé de faire une rotation des chauffeurs de taxi pour qu'il y ait autant que possible deux chauffeurs réguliers sur chaque voiture. C'est une chose extrêmement difficile, parce qu'un chauffeur de taxi, comme je l'ai dit tout à l'heure aime beaucoup sa liberté. Certains chauffeurs viennent travailler cinq jours par semaine, d'autres sept, d'autres six, d'autres quatre. Dans mon cas à moi je dis qu'un chauffeur régulier pour moi c'est cinq jours. Si un jour un chauffeur ne veut pas travailler, c'est son affaire et je ne le blâme pas. Un métier de fou, cinq jours c'est assez. Alors le samedi matin, si vous avez 17 chauffeurs réguliers sur 20 qui sont "off", pour le patron il faut que l'argent rentre, alors je suis obligé de prendre des "spares". C'est très difficile pour les chauffeurs de taxi d'opérer sans "spare". Moi, je ne vois pas ça, à moins d'une grosse coopération des chauffeurs...

M. PINARD: Me permettez-vous une question additionnelle? On a parlé assez longuement du "pocket number"; peut-être que certains membres de la commission parlementaire et certaines autres personnes, moi le premier, aimeraient être mieux renseigné là-dessus. Il y en a combien de "pocket numbers" émis par le service des permis de la ville de Montréal?

M. PITON: Je vais vous l'expliquer. Au dernier sondage que j'ai fait quand j'étais chauffeur de taxi avec M. Blond in — on a lutté pour savoir ce qui se passait dans cette maudite industrie-là, il faut dire le mot parce que ça rend son homme fou — on en émettait à peu près 20,000 par année. Si vous vous rendez au service des permis de la ville de Montréal, à tous les jours vous voyez peut-être quinze à vingt personnes qui attendent pour avoir leur "pocket number". Ils passent des tests à tous les jours.

En moyenne, dans la ville de Montréal même, il doit y avoir, si je ne me trompe pas, 4,200 permis ou un peu plus.

M. PINARD: C'est 4,290 exactement; j'ai vérifié auprès de la ville de Montréal hier soir.

M. PITON: Pardon?

M. PINARD: II y en a 4,290 en vigueur.

M. PITON: Pour répondre à votre question précédente, si on met deux chauffeurs par voiture, ça fait à peu près 8,400 "pocket numbers"; si, à cela, on ajoute les jours de congé des hommes, ça nous en prendrait à peu près encore 4,000. Je dis que 12,000 "pocket numbers" par année d'émis, ça devrait être tout.

On a déjà fait un autre sondage. Sur à peu près 20,000 "pocket numbers" émis dans la ville de Montréal, en moyenne, à peu près 7,000 chauffeurs font du taxi onze mois par année, peut-être moins que cela. Les autres, ce sont des personnes qui travaillent dans la construction. Quelqu'un a peut-être son permis depuis dix ans. On lui envoie son papier à la fin de l'année. Avant, ça lui coûtait $5.40 et on nous a fait un cadeau de $0.40. Il se dit: Je vais envoyer $5 et je vais avoir mon permis; si je tombe en grève, pas de problème. Je vais retirer de l'assurance-chômage et je vais faire du taxi deux jours par semaine; je ferai le même salaire. C'est ce qui se produit.

M. PINARD: Le "pocket number" émis par le service des permis de la ville de Montréal donne droit à celui qui le détient, moyennant le paiement dont vous parlez, $5.41,...

M. PITON: C'est $5 exactement.

M. PINARD: ... de conduire une voiture-taxi.

M. PITON: Oui, après avoir passé son examen. S'il passe son examen, il a un "pocket number". Naturellement, il lui faut sont permis pour avoir un "pocket number", parce qu'on l'exige là-bas. Il se présente à vous avec son "pocket number" et, si vous avez une voiture de disponible, vous lui donnez un "booking", il se fait enregistrer pour vous et il travaille.

M. PINARD: Lui, il s'adresse à qui pour avoir de l'emploi sur une voiture-taxi?

M. PITON: A n'importe quel propriétaire de flotte ou propriétaire artisan qui veut bien l'engager.

M. PINARD: S'il y a 4,290 permis actuellement en vigueur dans la ville de Montréal, si vous prenez pour acquis qu'il y a 20,000 "pocket numbers" d'émis, ça fait cinq chauffeurs disponibles pour une voiture-taxi.

M. PITON: C'est cela.

M. PINARD: Comment cela fonctionne-t-il?

M. PITON: J'ai essayé de vous expliquer cela, tout à l'heure. La personne qui travaille sur le taxi, qui ne fait que cela, elle a son "pocket number", c'est normal. Supposons que moi ou un de mes chauffeurs est fatigué du taxi et décide d'aller conduire un camion. Le mois de mai arrive et il reçoit son papier par la poste. Il fait un mandat-poste ou il va le payer à la banque et il a son "pocket number". Il peut être cinq ans chauffeur de camion mais il a son "pocket number" dans sa poche et il ne fait pas de taxi. Cela se continue de cette façon, de A à Z.

Il y a des gars que ça fait dix ans qu'ils n'en ont pas fait. Durant la grève des autobus, il y avait des chauffeurs qui en avaient. Juste pour vous donner un exemple, un professionnel est venu me voir la semaine passée. Il ne gagne pas un gros salaire, $12,000 par année! Il voulait avoir un véhicule-taxi les fins de semaine. Il ne gagne pas cher, $12,000 par année, et il voulait faire du taxi. Le monsieur n'en avait pas assez, il voulait un "side-line". Il a besoin d'argent, il s'est acheté une maison et les paiements coûtent cher. J'ai un plombier qui ne gagne pas cher de l'heure, je pense qu'ils sont rendus à $6. Le gars s'est acheté une voiture neuve et, pour faire les paiements, il fait du taxi le samedi et le dimanche. Sa femme ne voulait pas, mais il lui a dit: Je fais du taxi le samedi et le dimanche pour faire mes paiements; laisse-moi faire, je te donne ma paie. C'est ce qui se produit, tout le monde s'en vient dans l'industrie du taxi.

Actuellement, ceux qui font du gros argent dans le taxi, ce sont les personnes qui ne connaissent rien du tout, qui investissent $150,000. Au bout de l'année, leur comptable leur dit: Dans cette compagnie, tu as investi

$150,000 et ça te rapporte tant. Il demande: Qu'est-ce que c'est, cette industrie-là? Il répond: Le taxi. Il dit: $25,000 de profits, c'est bon, on va investir encore. Si le comptable lui dit qu'il n'a fait que $4,000, il se fait répondre: Vends-moi ça au plus vite. Le gars en question, qu'est-ce qu'il connaît du taxi? Il va rencontrer ses chauffeurs et il ne les connaît pas, c'est un investisseur dans le taxi.

Moi, j'ai des patrons depuis quatorze ans, ils sont rendus à 60 ans et ils sont à la corde. J'en ai un qui prend seize pilules par jour pour le coeur. Il a failli mourir l'an passé, il n'a pas besoin de cela. Savez-vous ce qui l'a tenu dans le taxi? Je vais vous le dire :

Premièrement, si je ne prenais pas la "job" il vendait et, deuxièmement, pour payer mon salaire il a acheté deux permis. C'est le profit. Qu'est-ce qu'il a eu à coeur, parce qu'il ne faut pas insulter la société juive, ce sont des hommes assez intelligents... Le rapport Bossé, quand il est sorti en 1970, j'étais là, M. Bossé se rappelle de moi, dans ce temps-là j'étais chauffeur, je faisais la sécurité au centre de la police. Alors, il s'est dit: Les permis vont monter en flèche, si on enlève, comme on dit, 1,800 permis dans deux ans, mon permis va valoir $10,000 comme à New York et un peu partout. Alors, si j'en ai 20, moi je ne perds rien, si les permis je décide de les vendre $125,000, est-ce que cela vaut la peine, pour deux ans? Si je n'étais pas là... Sa propre femme a arraché trois lignes téléphoniques dans la maison pour ne pas être dérangée. Ce n'est pas un cadeau à 2 heures du matin quand vous dormez et que le chauffeur vous appelle. Vous ne savez pas ce qu'il y a au bout de la ligne, il peut dire: Je viens de défoncer la banque de Montréal au coin de Guy et Sainte-Catherine avec l'auto. Ce n'est pas toujours un cadeau de se faire réveiller à deux heures du matin. Il y a des hommes malades, il y a encore des bonnes personnes dans le taxi, ce ne sont pas tous des requins. Ce qui se produit, comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est que ce sont les bons qui paient pour les méchants.

Alors, dans une association comme la compagnie Diamond, où il n'y a pas de comparaisons, où le chauffeur n'a aucun droit de parole, le patron est pris à la gorge. Qu'est-ce qu'il doit faire? Il doit se venger sur le chauffeur. C'est la seule solution qu'il a.

M. PINARD: M. Piton, vous connaissez le métier du taxi. Pourrais-je vous poser une question additionnelle en terminant? Il y a un règlement du taxi en vigueur dans la ville de Montréal. J'imagine que ce règlement concerne aussi bien les conditions d'émission, les coûts de l'émission du permis de taxi, que l'émission du "pocket number".

M. PITON: Oui.

M. PINARD: Vous connaissez bien ce règlement du taxi en vigueur dans la ville de Montréal?

M. PITON: Oui.

M. PINARD: Alors, quelles sont les conditions qui sont exigées pour celui qui se présente au service d'émission des permis de "pocket number" et qui fait la demande? Quelles sont les conditions qui sont exigées avant qu'on lui accorde ce permis moyennant rémunération, moyennant paiement?

M. PITON: On parle pour le chauffeur là?

M. PINARD: Le "pocket number" pour le moment.

M. PITON: Le "pocket number" stipule que, premièrement, vous devez parler deux langues. Si vous êtes Canadien français, vous devez parler français et anglais, si vous êtes juif, vous devez parler juif et anglais. Les deux langues, c'est le canadien et l'anglais, tout le monde le sait, dans la province de Québec. Ensuite, il doit avoir son permis de conduire comme chauffeur, il doit passer un examen pour la ville, les rues, les hôpitaux, les hôtels. Ce sont des questions par écrit. On me dit que maintenant c'est oral. Moi, cela fait 11 ans que je l'ai passé, peut-être que depuis ce temps-là les tests sont changés. Là on me dit que c'est encore par écrit. Vous avez une limite de temps. Alors, si vous passez cela, au bout de quinze jours le comité exécutif vous envoie une lettre comme quoi vous êtes accepté, vous allez là, vous payez votre permis et on vous donne votre "pocket number".

M. PINARD: Vous n'avez pas le règlement qui est actuellement en vigueur à Montréal dans votre poche pour le déposer à la commission parlementaire?

M. PITON: Je regrette, mais je n'ai pas cela.

M. PINARD: Alors, vous permettez que nous vérifions vos affirmations?

M. PITON: Ah, vous pouvez vérifier cela.

M. PINARD: Parce qu'il peut y avoir des petites inexactitudes.

M. PITON: Vous pouvez vérifier. C'est en toutes lettres...

M. PINARD: Nous ferons venir le règlement concernant l'émission des permis de taxi et concernant l'émission du "pocket number" au ministère des Transports et nous en ferons part à la commission parlementaire.

M. PITON: C'est cela. C'est la même chose que si j'achetais un permis, il entre beaucoup de choses en ligne de compte. On vous demande où vous avez pris l'argent, il faut que ce soit payé comptant.

M. PAUL: Le permis, vous ne l'achetez pas

de la ville de Montréal? C'est du détenteur, de celui qui veut s'en départir.

M. PITON: C'est cela. Mais là il faut que vous alliez à la ville de Montréal avec un chèque certifié pour la valeur marchande. On vous demande à quelle place vous avez pris votre argent et ainsi de suite.

M. PAUL: Mais est-ce que vous allez montrer votre chèque à la ville de Montréal?

M. PITON: Certainement, monsieur. Il faut le montrer et il faut qu'il soit certifié.

M. PAUL: Mais est-ce que ce chèque doit comporter une note quelconque à l'effet que la ville...

M. PITON: Pour achat de permis de taxi.

M. PAUL: Mais qu'est-ce que la ville fait, après l'avoir vu?

M. PITON: La ville confirme l'achat et elle fait le transfert. Elle l'étampe en arrière et elle fait le transfert de personne.

M. PINARD: La valeur marchande, qu'est-ce que c'est?

M. PITON: Actuellement, je dirais que M. Serra — parce qu'il a eu peur du bill Bossé, du règlement no 6 — a vendu 16 permis, avec des voitures 1970, en août et septembre, en moyenne, avec les voitures, $6,000 ou $6,500.

M. PINARD: Permis et voitures compris?

M. PITON: Oui. Pour une voiture 1970, si on la vend, on peut recevoir $500. Moi, j'ai acheté 20 voitures qu'on m'a vendues $3,955, des Dodge Polara 8. Pour mes 1970 on a fait un prix, $500, ce qui revenait à $3,455. Ceci qui veut dire que le permis en ville actuellement se vend $6,000.

M. PINARD: Cela veut dire qu'après deux ans une voiture-taxi est dépréciée à 100 p.c. ou est considérée comme très peu valable sur le marché.

M. PITON: Oui et en terminant, quand je suis arrivé ce matin, un type a parlé, je n'ai pu saisir son nom.

M. PAUL: Est-ce que ce serait M. Edmonston?

M. PITON: Oui. Il vous parlait de sécurité des voitures. Moi je vous dirai qu'actuellement j'ai 20 taxis. S'il fallait qu'on prenne les 20 voitures et qu'on les envoie au comité pour vérification, comment appelez-vous ça?

DES VOIX : Sécurité routière.

M. PITON: Bien, je dirais qu'on en refuserait 18. Là, on va peut-être me dire. Vous ne faites pas votre travail. Mais vous avez des chauffeurs qui sont très consciencieux et qui s'occupent de votre affaire, mais il y en a d'autres qui arrivent à la dernière minute et ils disent: J'ai ceci. Le mécanicien est parti, on essaie de faire notre possible, mais le gars dit: II faut que je travaille, c'est vendredi soir, essaie de m'arranger ça un petit peu. Le patron, si on lui dit que la transmission glisse, il va dire: Attends, qu'elle glisse; quand elle sera brisée on la changera.

Il y a eu l'affaire des taxis de Dorval. Il y avait bien des amis qui travaillaient pour moi, mais ils faisaient bien de l'argent à Dorval. M. Bossé a arrangé l'affaire, il a mis une ligne. Mais les gars de taxi de Dorval, ils avaient un beau petit "racket", ils faisaient de l'argent comme de l'eau. Mais le gouvernement — je ne sais pas si c'est le gouvernement ou la municipalité — a mis un terme à ça. Le salaire des gars a bien baissé. Les gars m'ont appelé et m'ont dit: On revient en ville. La première journée que le gars commence est lundi. Il m'avait appelé jeudi dernier et m'avait dit: Gilles, il me faut une voiture de jour. Parfait. J'ai une voiture, ce n'est pas ma faute. Le gars commence à cinq heures. A dix heures moins dix du matin, en montant la rue Frontenac, le "driving-shaft" tombe dans la rue. Le remorqueur est allé le chercher et au garage les gars sont allés diner. Il ne peut pas avoir la voiture avant trois heures et demie. Qu'est-ce que le gars a fait? Il est allé chez lui. Il n'a pas fait un cent, $1.10 ou $1.25. Il m'a appelé et m'a demandé: Combien me charges-tu? Je lui ai dit: Que veux-tu que je te charge? Absolument rien. Il m'a dit: Je pense que je vais essayer encore à Dorval.

Il y a un chauffeur à côté de moi, M. Beauchamp...

M. BOSSE: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Caron): Le député de Dorion.

M. BOSSE: ... c'est une sous-question concernant les transactions qui ont lieu à l'hôtel de ville. Lorsque le chèque est montré à l'hôtel de ville, à votre connaissance et sans donner de nom, êtes-vous au courant que déjà des sommes d'argent sont déposées à la banque par quelqu'un? Le chèque émis au nom de M. Untel, pour montrer à l'hôtel de ville, est-il ensuite retourné à un prêteur à taux usuraire?

M. PITON: Monsieur, cela se fait à l'année. Il y aurait un type, aujourd'hui il n'en fait peut-être plus...

M. BOSSE: Ce qu'on appelle le "shylock-ing".

M. PITON: Bien ça, je n'appellerais pas ça du "shylocking". J'appellerais ça "poigner des poissons", car le "shylocking" ne marche pas

comme ça. Ce n'est pas du "shylocking", c'est plutôt un attrappe-nigaud, il ne faut pas se mêler, le "shylocking" est peut-être de prêter à des taux usuraires, comme les gars disent, mais je ne trouve pas ça plus cher que la compagnie de finance quand on respecte ses paiements. Mais ce que j'appelle des moineaux, comme vous l'avez dit, c'est le gars à qui on met ça bien beau l'affaire. Je peux vous dire, M. Bossé: Bien là, ça fait longtemps que tu loues un "single" de moi et je te loue ça $105 par semaine; aimerais-tu ça devenir propriétaire? Bien oui, ce n'est pas un fou, il travaille pour moi. Bien là, je vais te vendre un permis, tu vas me donner $90 par semaine et je vais te charger 10 p.c. d'intérêt. Le gars dit que ce n'est pas exagéré l'affaire. Alors, le gars avance l'argent et prend la voiture, un contrat chez le notaire, l'affaire se passe. Mais $90 par semaine, c'est beau, il en payait $105; ça fait $15 par semaine. Cela va bien, deux mois, trois mois, la voiture casse, accident responsable, il manque un paiement. Bien on a le droit de reprendre la voiture, c'est écrit noir sur blanc. Cela fait deux ans que vous payez $90 par semaine et on vous l'enlève au bout de deux ans parce que vous avez manqué un paiement. Il y a un autre poisson. Cela n'est pas du "shylocking". C'est un homme d'affaires. Il y en a un homme d'affaires qui a fait ça bien des années, il en fait peut-être un peu moins, il ne faudrait pas le nommer, il fait pitié. Il était ici mardi, il fait partie de la compagnie Diamond, peut-être que vous le connaissez, M. Bossé?

Vous avez fouillé un peu plus loin que les autres, ici.

M. BOSSE: Sans vous demander de noms, entre nous, la tolérance est bien connue, par exemple, vis-à-vis des délais de paiements. On sait, dans les périodes mortes, les difficultés qu'ont certains chauffeurs, certains nouveaux propriétaires à exécuter leurs paiements. Est-ce que certains faits ont été portés à votre connaissance, comme, par exemple, aller chercher avec une remorqueuse la voiture sans permission ou sans utiliser d'autres moyens légaux?

M. PITON: J'ai vu cela de mes propres yeux. Ici, je voudrais faire une mention honorable. N'oubliez pas que mardi, j'étais ici, moi, à la commission parlementaire. J'ai dîné avec un chauffeur de la compagnie Lasalle, qui a travaillé en même temps que moi sur le taxi, pour le même patron, pour la compagnie Diamond. Nous discutions des deux associations. Je dois féliciter M. Brunet, sur un certain point, parce qu'il m'a dit qu'il avait "financé" sa voiture et avait répondu pour lui, à la banque, de $5,000. Il m'a dit qu'il avait répondu au moins pour 200 chauffeurs semblables. A ce moment-là, si c'est vrai — je crois le type en question, je le connais intimement — c'est une manière d'ôter les requins qui abusent du chauffeur.

M. BOSSE: Je vous remercie de cette préci- sion, parce que je croyais avoir rêvé en entendant parler certaines gens qui sont venus avant vous.

M. PITON: Non, non. Vous n'avez pas rêvé.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Maintenant, la parole est à l'honorable député d'Abitibi-Ouest.

M. AUDET: M. Piton, vous avez admis, tout à l'heure, qu'il y a de bons chauffeurs et qu'il y en a de moins bons.

M. PITON: C'est cela.

M. AUDET: Vous avez aussi dit que les bons payaient pour les mauvais. D'après vous, pour-riez-vous me dire quel est le pourcentage des chauffeurs qui doivent de l'argent aux propriétaires?

M. PITON: Personnellement, j'ai fait du taxi. Je ne suis pas un ange, mais j'avais un devoir sacré. C'était de payer mon patron. Quand je n'avais pas d'argent pour le payer, je payais ma voiture mais j'allais par en arrière et j'en empruntais, personnellement. Ce n'était pas pareil. Mais je dirais qu'en général, pour un chauffeur qui travaille depuis nombre d'années pour un patron, en moyenne, la catégorie de bons chauffeurs se situerait à peu près à 65 p.c, 70 p.c. Ceux-là doivent peut-être devoir $100 au patron mais $100 pour l'année, en réalité, c'est sa semaine de vacances. Ce n'est pas devoir de l'argent.

M. AUDET: Mais cela ne veut pas dire que les chauffeurs qui doivent de l'argent à leur patron sont de mauvais chauffeurs.

M. PITON: Non, il y en a qui doivent de l'argent parce qu'ils ont été malchanceux. J'ai un type, à ma droite, ici, qui, avant que j'entre là, devait pas mal d'argent à mon patron. Il paie à toutes les semaines, mais il a eu un accident, à la colonne vertébrale. Cela l'a attaqué un peu. Comme d'autres choses, il a eu de la misère à avoir de l'argent. A ce moment-là, il payait le loyer, il prenait l'argent de la voiture qu'il gagnait et au lieu de payer la voiture, il faisait vivre sa femme et son enfant. Ce sont des choses très normales. Mais le type en question travaille encore pour moi et il paie sa dette. Cela va très bien.

Ce que j'appelle un méchant chauffeur, moi, c'est le gars... Parce qu'il y a plusieurs genres de chauffeurs de taxi. En réalité, je ne devrais pas dire chauffeur de taxi mais je devrais dire que c'est une profession. Parce que c'est une profession. Pour être chauffeur de taxi, faire de l'argent, cela prend trois choses: II faut aimer conduire, il faut être patient et il faut aimer le public. Ce n'est pas un cadeau, être dans la ville dix ou douze heures par jour, sans savoir qui monte derrière soi. Parce qu'il y a bien de petites affaires que le monde ne connaît

pas. Le maudit chauffeur de taxi! Regarde cela: II est à droite et il s'en va à gauche. Il ne sait pas ce qui se passe dans la voiture. Nous pourrions vous en conter d'autres.

Moi, j'ai fait une petite expérience. Une bonne journée, nous ferons un petit "party" et nous vous conterons cela. J'avais un petit "tape-recorder" portatif. Nous faisons un "party", dans le temps des fêtes, comme tout le monde. Une journée, j'en ai mis un dans une voiture. J'ai fait enregistrer toutes les conversations de la journée, parce que là, j'avais des belles-soeurs et des beaux-frères qui ne croyaient pas ce qui se passait dans les taxis. Je leur ai fait un cadeau, il y a une couple d'années de cela. A Noël, je leur ai fait écouter cela. J'aurais pu faire un film avec cela. Si on réunissait les chauffeurs de taxi et qu'on prenait toutes leurs histoires — on parle des gens sérieux, un peu, dans le taxi — on aurait un scénario pour faire un film. Ce serait un aussi gros succès que Le Parrain.

LE PRESIDENT (M. Séguin): La parole est au ministre.

M. PINARD: M. Piton, pourriez-vous nous dire quel est le pourcentage des voitures mises en service par ce qu'on appelle les exploitants de flottes de voitures de taxis qui, d'après vous, offriraient une sécurité?

M. PITON: Sur une flotte, personnellement, je dirais que s'il y en a 20 p.c. — je ne parle pas des voitures neuves qui viennent de sortir — après un an d'usure, ii n'y en a pas 25 p.c. qui sont en bonne condition.

Il ne faut pas toujours mettre cela sur le dos du propriétaire. N'oubliez pas qu'il y a beaucoup de choses qui entrent en ligne de compte.

Après tout, depuis cinq ou six ans, vous avez pu remarquer que le prix de vente des voitures a augmenté. Moi, j'avais un patron qui changeait ses voitures à tous les ans, et depuis les trois ou quatre dernières années, il n'est plus capable, parce que c'est trop dispendieux. Je dirais que le coût d'achat des voitures a augmenté d'au moins $1,000 à $1,200 depuis quatre ans.

C'est la même chose pour une crevaison. Le gars enlevait la roue, la chambre à air, il vérifiait ça et nous prenait $0.50 à notre garage. Aujourd'hui, c'est $1 ou $1.25. Si vous allez dans un garage étranger, c'est $2.50. Cela devient bien dispendieux. Il faut aller, autant que possible jusqu'à la corde.

Moi, je vais vous dire que des "enligne-ments" et des "balancements" de roue dans le taxi, je n'en connais pas beaucoup. Il faut être pris en maudit pour faire faire ça. Quand les pneus usent en dedans, on enlève les pneus, on en mets deux, parce que nous les achetons au lot, ça nous coûte $20. Les pneus d'hiver nous coûtent $16.75, ce n'est pas trop mal.

M. PINARD: Mais d'après les règlements actuels, l'examen obligatoire du véhicule-taxi pour fins de sécurité, c'est toutes les semaines, tous les mois? C'est quoi?

M. PITON: Je vais vous dire une chose. Personnellement, dans l'emploi que j'ai, avec tout l'ouvrage que j'ai, d'abord l'huile doit être changée à toutes les semaines, et la semaine suivante c'est l'huile et le filtre.

Si mes voitures sont toutes placées, j'ai beaucoup plus de temps pour aller dans le garage quand je mets la voiture sur le "lift" et regarder — j'ai dit tout à l'heure que j'étais un gérant assez dispendieux, parce que je n'aimais pas conduire une voiture toute croche — et ce que je vois, je le répare.

Mais il y a des chauffeurs qui n'aiment pas travailler au garage. Le chauffeur de jour qui prend sa voiture à cinq heures le matin, elle est croche un peu, les freins sont finis, quand il arrive à quatre heures et demie, il dit: Mes freins sont au fer. Le chauffeur de nuit regarde dans le garage et dit: Gilles, je vais les faire ajuster, vas-tu me le faire demain matin? Le garage est plein, je vais partir d'ici six heures, si tu n'a pas le temps de le faire avant six heures, l'autre ne commence qu'à sept heures, je vais aller à l'autre coin, ça va coûter $0.75 et je vais les faire ajuster.

Il prend une chance, s'en va avec, fait ajuster les freins. Le gars arrive dans la veillée, ça crie, ça se "garroche" à droite et à gauche, il est en maudit. Cela va à la limite. Parce que normalement à deux chauffeurs, des freins avant, quand ça a fait entre 12,000 et 14,000 milles —nous en faisons un peu plus en hiver, parce que c'est moins dur, mais je parle pour l'été — c'est raisonnable. Pour l'arrière, c'est 25,000 ou 30,000 milles.

J'en connais qui ne changent qu'un morceau.

M. PINARD: Si l'examen obligatoire, imposé par le règlement no 6, est fixé à tous les quatre mois, est-ce que ça vous parait outrancier ou irréaliste, ou discriminatoire à l'endroit soit du propriétaire de la voiture ou du chauffeur qui, lui, pourrait être pénalisé par une perte de revenu?

M. PITON: Mais là, il faut dire une chose. Le règlement no 6, il y a bien des choses là-dedans. On met ça obligatoire au bout de quatre mois, mais si la chose est appliquée, comme je l'ai dit tout à l'heure, à 65 p.c, il y a beaucoup de racaille qui va être sortie du taxi et nous allons avoir des chauffeurs beaucoup plus consciencieux qui vont faire plus attention à leur voiture. La voiture sera en meilleure condition.

LE PRESIDENT (M. Caron): La parole est au député de Sainte-Marie.

Vous n'avez pas fini? Excusez-moi.

M. AUDET: Est-ce que ça arrive de temps en temps que des chauffeurs rapportent leurs

véhicules au Bureau des véhicules-automobiles pour inspection?

M. PITON: A ma connaissance à moi, ça ne s'est pas produit. Parfois, on dit des choses semblables dans la colère. Dans ma flotte, depuis que je suis dans l'industrie du taxi, je n'ai pas vu ça.

M. AUDET: Ce n'est pas dans leur intérêt non plus, parce qu'ils perdraient du temps.

M. PITON: Pas nécessairement, mais vous savez, dans le taxi — comme je l'ai dit tout à l'heure — quand vous perdez votre nom, c'est très dur de le refaire.

M. AUDET: Est-ce qu'il y a des propriétaires de taxi qui paient une semaine de vacances?

M. PITON: Oui, à mon garage, ça existe. Mais il faut s'entendre. Nous ne donnons pas d'argent liquide. Nous disons: Nous te donnons la voiture une semaine gratuitement. Moi, je n'appelle pas ça des vacances. Le gars qui a passé onze mois et demi sur ce carrosse dans la ville, il est fatigué, il veut aller en vacances et il a encore la "minoune" à la porte. Madame arrive à la maison et il dit: Nous allons aller faire un petit tour à la campagne voir ma tante. Ce n'est pas des vacances, il recommence encore dans la même affaire.

M. AUDET: Une dernière question.

Croyez-vous qu'il serait possible pour les chauffeurs de taxi de devenir acquéreurs d'actions ou copropriétaires avec les propriétaires de taxis?

M. PITON: A ce moment-là, ça prendrait de l'aide quelque part. Je ne sais pas â quelle place ils pourraient la prendre, parce que je ne pense pas que les propriétaires seraient consentants. A moins que nous ayons une aide quelconque du gouvernement, une coopérative ou quelque chose de semblable ou une caisse d'économie où le chauffeur de taxi pourrait emprunter de l'argent.

M. AUDET: Si, par exemple, lorsque le chauffeur achète une part, le gouvernement lui en payait une, est-ce que ça n'inciterait pas les chauffeurs à devenir copropriétaires?

M. PITON: Je vais vous dire une chose: Celui qui a trois ou quatre ans d'expérience dans le taxi commence à s'apercevoir que ça coûte cher et, s'il avait l'opportunité d'acheter son propre permis, il aimerait bien l'acheter. Ce qui arrive, c'est qu'il n'a pas le capital et ça ne se trouve pas du jour au lendemain, $6,000. Il peut aller à une banque, mais n'oubliez pas une chose; c'est bien difficile si vous n'avez jamais acheté à crédit, si votre nom n'est pas fait ou si vous n'êtes pas marié et que vous n'avez pas de maison. Si je vais m'acheter une télévision couleur, le gars dit: Qu'est-ce que tu fais? — Je suis chauffeur de taxi. — Je ne te vends pas; je ne veux pas savoir ce que tu fais là.

M. AUDET: Ne croyez-vous pas, M. Piton, qu'il y aurait possibilité pour le propriétaire de taxis de favoriser ses chauffeurs par un financement assez long pour leur permettre d'acheter des actions dans la compagnie? Avec l'aide du gouvernement, peut-être.

M. PITON: Ce serait peut-être possible, mais pas avec tout le monde. Je vais vous dire une chose: J'achève d'être dans cette industrie. J'attends que le règlement no 6 soit adopté. J'ai des nouvelles pour mes chauffeurs, parce que j'ai l'appui de mon patron, je l'ai dit. J'ai de vieux chauffeurs qui veulent des permis. Devant vous, je l'affirme: Mes chauffeurs auront la préférence d'acheter les permis de Joseph Kaufman avec un intérêt minime, pas de comptant, s'il vous plait. On les leur vendra et ça va me faire très plaisir. C'est spécifié dans mon contrat que j'ai signé et qui finit le 10 février.

M. AUDET: Je vous remercie.

LE PRESIDENT (M. Séguin): La parole est au député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous disiez tantôt que vous êtes gérant d'une flotte de vingt voitures et cette flotte fait partie de Diamond Taxi. Vous parliez du taux d'assurance, vous êtes classé B.

M. PITON: Oui.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): L'assurance, en somme, c'est la compagnie Bélair?

M. PITON: C'est ça.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Pour assurer une voiture, ça vous coûte combien par année dans la classe B?

M. PITON: Si on enlève le coût de l'association, ça doit revenir à $950 ou $1,000 à peu près.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Voici pourquoi je vous demande cela: Dans le rapport de Diamond Taxi, on a les classes d'assurance de la compagnie Bélair. Si vous regardez à B, c'est par système de points, ça coûte $45 par mois, ce qui veut dire $540 par année, d'après ce rapport.

M. PITON: C'est faux.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Et vous dites que ça coûte...

M. PITON: Cela me coûte exactement $120.25, y compris l'association et l'assurance.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Et si vous l'enlevez?

M. PITON: L'association, si je ne me trompe, c'est rendu à $42. Si on enlève $42 de ça, ça fait $78.20 à peu près par mois pour chaque voiture.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela veut dire une affaire d'au-dessus de $800 dans la classe B.

M. PITON: C'est ça. Dans la classe C, ça coûte $139.40, je crois.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Comment expliquez-vous que ce soit différent dans le rapport, ici?

M. PITON: Ce qu'il y a là et ce qu'ils ont dit, je m'en moque. Je ne suis pas un spécialiste des chiffres, mais on ne me fera pas croire cela et je suis sûr qu'on ne vous l'a pas fait gober à vous. Même vous avez dit hier: A 2 p.c, sortez-moi de la compagnie. On est là pour faire de l'argent et non pour crever de faim.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Lorsque vous dites ce que ça vous coûte, je vous crois, mais je vous dis que ça ne correspond pas du tout avec ce qui est mentionné ici.

M. PITON: Il n'y a rien qui correspond là-dedans. Vous l'avez vu, à genoux dans le coin, pour dicter à l'avocat quoi faire parce que c'est un spécialiste; il n'a pas beaucoup de cheveux. Il m'en manque encore, mais...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je vous remercie.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Merci. Le député de Dorion a une petite question.

M. BOSSE: M. Piton, pourriez-vous me dire s'il y a une différence entre l'état sécuritaire des voitures des flottes et celui des voitures des artisans ou des détenteurs d'un ou deux permis?

M. PITON: C'est très facile. Un artisan peut avoir un chauffeur, peut-être un autre qui va travailler les fins de semaine. Même s'il y avait un autre chauffeur là-dessus, ils s'entendent entre eux. Moi, dans une semaine, parfois, sur une voiture seulement, je peux avoir dix hommes. Je crois bien qu'aucun chauffeur ne conduit de la même manière. Pour l'autre qui ne travaille qu'une journée, ce n'est pas sa voiture régulière. Admettons qu'il y a une voiture brisée et que je lui prête celle-là ce soir.

Si elle va tout croche, bien le lendemain je la reprends. Pour le débossage je ne veux rien savoir pour le faire réparer et perdre mon temps.

M. BOSSE: Etes-vous d'accord sur la modalité qui est dans le règlement no 6 au sujet des émissions? Parce que dans un bref délai on va peut-être retirer les permis mais dans un bref délai on aura à en émettre. Dans le règlement il est prévu que les trois premiers permis seront émis à des chauffeurs de taxi qui ont oeuvré dans l'industrie du taxi d'abord et avant n'importe qui.

M. PITON: Je suis d'accord s'il n'y a pas de favoristisme, si on suit la ligne de A à Z, premier arrivé en descendant.

M. BOSSE: C'est ça.

M. PITON: Si le gars n'a pas d'argent, que le gouvernement l'aide et qu'on lui dise: Si t'étais capable de payer ton patron, tu dois être capable de payer ça. Prêter de l'argent à un autre ou à un chauffeur de taxi, je pense que ce serait bien placé.

M. BOSSE: En troisième lieu, dernière question. En ce qui a trait au coût élevé des assurances vous avez dû songer à la question puisqu'elle a été souvent soulevée ici devant la commission. Auriez-vous une suggestion à faire à la commission?

M. PITON: Je dirais que dans le rapport on stipule qu'il y aurait peut-être moyen de faire une régie d'assurance dans la province de Québec, quelque chose de semblable, où tous les taxis devraient être assurés. On a eu l'exemple, je crois, d'un chauffeur de taxi Lasalle qui avait été voir la compagnie Diamond. Si je ne me trompe pas, l'avocat avait dit: Si on fait partie de Diamond, ça coûte $631, ça dépend de la classe. On lui a demandé — je ne sais pas lequel de vous autres lui avait demandé ça : Si le gars en question fait partie d'une autre association puis il est classé dans la même classe est-ce qu'il paye le même prix? L'avocat avait répondu oui. Mais le gars en question il nous est arrivé avec un chiffre de quelque $900 pour aller dans le Beaubien et être assuré à Bélair. S'il est dans la même classe, je ne comprends rien à l'affaire. C'est pour ça que ça mélange un peu vos papiers vous autres, là.

LE PRESIDENT (M. Caron): La parole est au député de Lotbinière.

M. BELAND: Etant donné que vous avez élaboré sur une foule de choses, j'aimerais connaître votre opinion aussi sur l'obligation, selon le règlement no 6, de remplir des feuilles de route.

M. PITON: La feuille de route en question, je ne la situe pas du tout. Le chauffeur de taxi commence à travaille sur les nerfs en partant. Ici à Québec c'est seulement des sens uniques, mais la ville de Montréal est assez grande. Le gars commence à travailler, prend son premier client et on lui dit: Peel et Sainte-Catherine. Je ne vois pas l'affaire. Le gars arrive là, le client descend, il prend sa feuille et marque $1.85, l'heure et tout ça. Le gars est arrêté pour faire descendre le client et puis il est là avec son calepin et il écrit. Le temps que tu écris sur la formule, t'as un billet en double, $10; c'est payant cette affaire-là. Je ne vois rien dans l'affaire.

Une autre chose, une Mme Fontaine criait pour sa transmission. Dans le taxi on dit que le "meter" est "sealé". M. Bossé avait une raison pour mettre ça l'affaire de la transmission, parce que je ne sais pas si vous savez comment ça marche un "meter" vous autres. Vous avez peut-être une idée, c'est scellé. Le gars dit: Je ne peux pas vous voler, c'est scellé. Le "seal" est là, je ne peux pas vous voler. Un gars regarde ça et c'est vrai que le gars ne peut pas fouiller là-dedans. Le chauffeur de taxi ce n'est pas un fou. Il ne faut pas les prendre tous pour des fous. Il y a des gars assez intelligents, plus que vous pensez vous autres. Le gars arrive et dit: Moi, mon propriétaire me vole. C'est arrivé quand Diamond a sorti la radio et on a augmenté les voitures de $1 par chiffre; ça fait $2 par jour sur 365 jours. La radio est payée à la fin de l'année mais on continue à payer on n'ôtera pas le dollar quand la radio va être payée. Le gars dit: ça ne marche pas mon affaire. Il y a beaucoup d'autos en ville, des Américains, toute sorte de monde en ville, la grande métropole du Canada. La ville est fermée mais ils viennent pareil. Le chauffeur de taxi, n'oubliez pas que c'est l'ambassadeur je dirais, puis on dit de ne pas parler aux clients. Si tu ne parles pas aux clients, ils ne donnent pas de pourboires. Vous autres quand vous voyagez dans une autre ville, je ne sais pas si vous le savez — on est seulement des hommes, il n'y a pas de femmes ici — en tout cas l'homme qui s'en va en convention, quand il n'y a que des hommes, après avoir fini de travailler qu'est-ce qu'il cherche? Vous le savez, je n'ai pas besoin de le dire. A qui s'adresse-t-on? Aux chauffeurs de taxi.

Pour finir la conversation, on parlait tout à l'heure de la transmission. Il y en a peut-être parmi vous qui ne comprennent pas cela, mais il y a des "gears" là-dedans. Plus la "gear" est haute, plus le "meter" est "slow"; plus la "gear" est basse, plus le "meter" va vite. Normalement, au taux de la ville maintenant, ça prend une "gear" no 29. Si je mets une no 27, ça prend cinq minutes. Je m'en vais au Plateau, j'en achète une à $2.25. Je ne le dis pas au gérant; il n'est pas censé le savoir, il se ferme les yeux. Le gars entre dans le garage, donne $1 au mécanicien pour qu'il enlève la "gear" et pose la nouvelle. Le voyage qui coûte normalement $1.10, à ce moment-là, coûte $1.20, $1.30, ça dépend de la course.

UNE VOIX: C'est quoi, une "gear"?

M. PITON: Une "gear", ça va dans la transmission, monsieur. Je ne sais pas si vous êtes chauffeur de taxi, mais en tout cas. Cela fait fonctionner le "speedometer". Si le gars fait 25 ou 30 voyages, s'il va chercher $5 ou $6 par jour, à la fin de la semaine, ça fait $25 ou $30. Le coût de la radio, sa petite perte de temps, il la paie là. Si le client crie trop fort, il répond: Mon "meter" est un peu trop vite? et il n'a qu'à faire la réduction, s'il prend un régulier.

Il y en a d'autres qui ont sorti un autre truc à l'arrivée du "meter". Vous ne l'avez peut-être pas vu, celui-là; c'est pour les Américains. Comprenez-vous l'affaire? C'est une poignée. Vous avez déjà vu un "meter". Quand on l'ouvre à la première coche, vous entendez un petit bruit, à la deuxième coche aussi et, tout à coup, on l'arrête. On appelle cela le "waiting time". Eux, ils ont sorti un truc. Ils ne sont pas fous, ces chauffeurs de taxi. Ils font payer le gars. Ils mettent la poignée sur ce cran-là, ils regardent le visage du gars — parce qu'on connaît cela, d'où vient le gars, on peut juger cela assez vite si on a de l'expérience et si on travaille dans le centre-ville — et hop! en haut. Cela ne prend que deux ou trois minutes. C'est pour cela que c'est important de parler avec le client pour savoir ce qu'il fait.

Donc, le gars tourne la poignée à gauche au lieu de la tourner à droite. Le client vient de New York, il est habitué de se faire voler et à "garrocher" à New York. Montréal, c'est une belle ville, une ville propre, M. Drapeau l'a dit. Au lieu de partir à $0.50, le chauffeur part à $0.60 et il travaille à $0.50 le mille, comme à Dorval. Les clients, au bout de la course, paient.

Il y a autre chose que je n'ai jamais compris dans le taxi, en terminant, M. Pinard, comme vous êtes ministre des Transports, peut-être pourrez-vous répondre à cela. La métropole du Canada, c'est Montréal, on est tous d'accord. Je ne peux pas concevoir qu'on doive travailler à $0.50 la "drop" à Montréal, à $0.40 le mille, quand, à Dorval, on travail à $0.50- $0.50. Moi, je demeure à Montréal-Nord et on travaille $0.50-$0.50 aussi.

De chez nous jusqu'au garage, c'est $5.75 avec un taxi de Montréal-Nord. Je repars du même endroit avec un taxi de la ville et ça me coûte $4.40. Cela est assez dispendieux.

UNE VOIX: Avec une "gear"?

M. PITON: Non pas de "gear"; eux, ils l'ont, l'affaire. Je voudrais bien que vous me disiez pourquoi c'est permis, dans une municipalité, de travailler à un certain tarif et, dans une ville comme Montréal où il y a plus de taxis et où c'est plus dur, à un tarif moindre. Je voudrais bien savoir qui a décidé cela.

M. PINARD: M. Piton, je n'ai pas de réponse magique. Vous comprendrez que je ne suis pas un technicien, je ne suis pas un spécialiste; c'est pour cela qu'on vous laisse parler librement. On a parlé d'en arriver peut-être à un autre système de taximètre — c'est à titre expérimental en ce moment — qui pourrait garantir l'honnêteté autant vis-à-vis du propriétaire de la voiture que vis-à-vis du chauffeur et du client qui aurait à payer la note et qui pourrait garantir également qu'il n'y aurait pas de tricherie de la part de personne soit en modifiant la "gear" dont vous avez parlé ou en employant d'autres pièces faisant partie du système d'engrenage et connectées directement au "meter".

Vous opposeriez-vous à ce qu'on trouve un nouveau système?

M. PITON: Non, je ne m'y opposerais pas. Ma question n'était pas là.

M. PINARD: Je comprends, je vous pose cette question. Pour répondre à la question principale, nous avons fait faire une étude par des spécialistes, des analystes en système de transport pour en arriver à l'uniformisation des taux afin qu'il n'y ait pas de discrimination, pour qu'il n'y ait pas de tarifs trop bon marché comme vous l'avez expliqué par rapport à des tarifs trop élevés pour le service demandé ou donné.

M. PITON: Actuellement, à Dorval, on travaille comme cela et aussi chez moi, à Montréal-Nord. A Montréal, on dit que la demande est forte, mais il y a beaucoup plus de taxis.

M. PINARD: Là, il y a un problème d'autorité municipale que je dois respecter, pour le moment.

M. PITON: Je voudrais savoir si la municipalité de Montréal-Nord ou de Dorval a fait une demande au gouvernement de la province de Québec pour augmenter ses tarifs et si la ville de Montréal en a fait une et que vous l'avez refusée. C'est ce que je veux savoir.

M. PINARD: Pour le moment, comme la Commission des transports n'est pas formée de façon officielle et qu'elle n'a pas commencé à siéger parce que tous les membres n'ont pas été nommés, il faudrait que je m'informe auprès de la Régie des transports du Québec, au président, le juge Roger, pour savoir s'il y a eu demande de modification de taux et si...

M. PITON: C'est cela actuellement...

M. PINARD: ... la régie a accrédité cette demande d'augmentation de taux ou si la régie les a gelés, compte tenu des territoires donnés. Plus tard, quand la Commission des transports du Québec sera formée, ce sera sa responsabilité de procéder à des enquêtes minutieuses, après des analyses de coûts-bénéfices, pour savoir quel taux doit être accrédité, quel taux doit être normalisé et quel taux doit être en vigueur dans telles municipalités de la province, y compris à Montréal et dans d'autres villes de banlieue.

M. PITON: Une autre question, en terminant, c'est un chauffeur ici qui m'a demandé de vous la poser. Je ne sais pas qui exige cela, mais un chauffeur de taxi qui prend un client dans le centre de la ville, l'emmène à l'aéroport de Dorval à un tarif fixe — tout le monde a compris ce que c'est, le compteur ne marche pas, je crois qu'on est rendu à $7 ou $8 cela dépend de l'endroit où on prend le client — rendu là-bas on force le gars à mettre son compteur en marche pour revenir en ville, cela me dépasse. Je voudrais savoir pourquoi.

M. BOSSE : Si vous permettez, je vais ajouter un peu à la première question que vous avez posée pour revenir à la deuxième ensuite. En ce qui a trait à l'uniformisation des taux sur l'ensemble du territoire de la Communauté urbaine, je dois vous dire qu'à la suite de la demande de nombreux individus venant de diverses villes et particulièrement de Montréal et aussi de l'Association métropolitaine où il y a eu effectivement demande, au mois de décembre, la Régie des transports avait, à la suite de rencontres que nous avions eues, des représentations que nous avions faites, effectivement uniformisé les taux sur l'ensemble du territoire de la Communauté urbaine et révisé sa position parce que, dans certaines villes, comme Montréal-Nord et Dorval, il y avait des taux supérieurs. Au lieu d'uniformiser à la hausse, on a uniformisé pour l'ensemble du territoire, à l'exception des deux qu'on a tenu en haut si je ne fais pas erreur.

Quant à la deuxième question, en ce qui a trait au taux fixe, dans le règlement actuel, c'est prévu dans certaines conditions bien particulières. Cependant, pour sauvegarder le public, d'une part, et assurer un revenu, d'autre part, aux chauffeurs, la règle générale c'est de toujours marcher au compteur.

M. PITON: Oui, mais là où j'ai posé ma question... Je vais vous dire l'expérience que j'ai vécue. Je suis allé voir des copains à l'aéroport pour discuter, devant l'entrée. Là il sort une demoiselle, très jolie. Elle dit: Moi, je vais au coin Henri-Bourassa et Lacordaire, mais je veux y aller avec le taximètre. Devant la porte, ce sont les taxis de Montréal qui sont là. Le gars a dit: Moi, je n'y vais pas en bas de $7. Elle dit: Si vous ne mettez pas votre compteur, je n'y vais pas. Le gars de Dorval, ce n'est pas un fou, il a deviné cela tout de suite. Il dit: Je vais y aller, avec le compteur. D prend les valises les met dans l'auto. Une fois arrivé là, cela ne coûte plus $7 mais $8.50, alors que l'autre gars demandait $7. Qu'est-ce qui arrive, il vole le

voyage au gars et fait $1.50 de plus, plus le pourboire, cela fait $9.

M. BOSSE: Alors, précisément, dans le règlement, ce serait une agglomération. Ces histoires de distinction entre diverses municipalités, cela semble répondre à un besoin général, du moins quand j'ai rencontré diverses municipalités. Chacun tire la couverture de son bord. Vous allez parler aux gars de Lachine, ils vont dire: On aime mieux rester dans notre coin. Vous allez parler à d'autres types d'autres villes, ils vont dire: On veut rester dans notre coin. Les gars de Montréal veulent avoir le droit d'aller à l'aéroport. Cependant ils préféreraient ne pas voir des étrangers venir dans Montréal. Alors, vous voyez un peu la pagaille. Je pense qu'unanimement il y a eu une décision, il y a eu une sorte de consensus qui s'est fait à l'effet qu'on a un permis métropolitain, comme on l'appelle. Un permis métropolitain, c'est l'agglomération de la Communauté urbaine, et là on va uniformiser aussi certaines conditions dans le règlement, c'est que tout le monde marche avec le compteur.

M. PITON: En terminant, j'ai fait une autre petite expérience, on vous a vanté la radio de la compagnie Diamond. Quand on a sorti cette radio-là, les chauffeurs étaient tous contents, naturellement, parce qu'il n'y en avait pas beaucoup. Alors, à cause de la pression pour la vente, on en donnait plus aux neufs, alors les gars avaient plus d'ouvrage. On a dit que cela avait amélioré le service au client. Alors j'ai fait une expérience, j'ai pris ma voiture un soir, je me suis en allé chez moi, là j'ai dit à ma femme: Tu vas appeler à la compagnie Diamond et tu vas demander une voiture.

Je vais m'asseoir dans ma voiture en bas pour voir combien ça va prendre de temps pour donner l'appel. C'était durant une période tranquille, c'était exactement un mardi soir, à 8 heures, il n'y a pas trop d'ouvrage. J'ai attendu 17 minutes avant que l'appel passe par radio. C'est ça le système formidable de la compagnie Diamond. Sur ce point, j'aime encore mieux le vieux système de Lasalle.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Je vois que l'heure avance, il est cinq heures dix. Je pense que tous les membres de la commission ont apprécié vos commentaires. Dois-je comprendre, selon la largeur d'esprit que j'ai manifestée au début, que nous devons entendre vos deux autres collègues, ou si vous avez résumé leur pensée?

M. PITON: Je crois qu'en général j'ai dû résumer la pensée de ceux qui étaient avec moi. Celui qui est à ma gauche, qui représente une autre association, aimerait peut-être parler durant quelques minutes pour dire comment ça se passe à Métropole. Parce que, personnellement, je suis avec Diamond depuis onze ans et je ne peux pas vous donner la version d'une autre compagnie.

Peut-être que lui, en quelques minutes, pourrait vous faire entendre un autre son de cloche.

Mais moi, en attendant, j'aimerais vous remercier de m'avoir permis de vous expliquer...

LE PRESIDENT (M. Séguin): Avant que vous ne terminiez, M. Piton, le député de Laviolette aurait une question.

M. CARPENTIER: M. Piton, vous avez parlé d'inspection d'autos tout à l'heure. Par qui sont faites ces inspections?

M. PITON: Actuellement, c'est fait par moi.

M. CARPENTIER: Je parle des inspections pour la sécurité.

M. PITON: II n'y en n'a pas, monsieur, si la voiture ne se fait pas prendre... La seule inspection que nous avons actuellement a lieu lors d'un accident avec rapport de police. On donne 30 jours pour la faire réparer, on envoie une lettre et on doit faire vérifier la voiture, c'est tout.

M. CARPENTIER: Vous n'êtes aucunement tenus par un règlement municipal à faire faire une inspection dans une certaine période de temps au point de vue entretien de voiture.

M. PITON: Seulement le taximètre, deux fois par année, tous les six mois. Si durant l'année le taximètre n'a pas cassé, il n'a pas été vérifié. Au bout de six mois, nous sommes tenus de nous rendre au service de la police. L'inspecteur brise le scellé et nous roulons un mille. S'il est en bon état, l'agent scelle de nouveau le taximètre.

M. CARPENTIER: Quelle est la façon de procéder?

M. PITON: Nous nous rendons là, on examine les lumières, si l'odomètre fonctionne, si la photo est à la vue, on demande les papiers d'identification, on vérifie la lumière des plaques, on fait faire un mille qui est évalué par les vérificateurs, ils ont des endroits spéciaux, et si le millage tombe au bon endroit, on scelle le taximètre et c'est tout.

UNE VOIX: ...$2...

M. PITON: Je crois bien qu'ils le savent.

M. CARPENTIER : On ne vous a jamais signalé aucune espèce d'anomalie dans ce genre d'inspection.

M. PITON: Qu'entendez-vous par anomalie?

M. CARPENTIER: Quelque chose comme...

M. PITON: On l'a dit et je crois que vous êtes au courant que partout les fonctionnaires mineurs ne reçoivent pas des salaires énormes. Si vous arrivez là et que le gars dit: Ecoute Paul, ton "compteur" fonctionne un peu vite! C'est vendredi soir, tu fouilles dans ta poche, en ressors $2, les mets sur le banc. Le gars va se décider et tu vas t'en aller.

C'est la même chose pour les permis en bas. Tu arrives-là, avec des papiers à faire compléter et il y en a 18 en avant de toi. Si tu les connais un peu, si tu as un peu d'influence, tu tournes un bleu autour de ton doigt, tu mets ça là; le gars va prendre tes papiers: Bonjour monsieur! ça va comme ça.

M. CARPENTIER: Seulement une autre très courte question.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Je voudrais tout simplement dire qu'il ne faudrait pas tirer des conclusions nécessairement parce qu'on a mentionné le mot "fonctionnaire". Aussitôt qu'on dit fonctionnaire, et salaire, il ne faudrait pas présumer qu'automatiquement il est question de pourboires. Je voudrais préciser cela.

Le député de Laviolette.

UNE VOIX: A Québec, ça ne se fait pas...

M. CARPENTIER: Vous représentez ou vous êtes directeur d'une compagnie. Avez-vous eu l'autorisation de votre patron de venir ici à Québec?

M. PITON: Tout à l'heure je vous ai dit que, si je n'étais pas là, mon patron vendrait ses taxis, alors je fais ce qui me plait. Point. Si ce soir je ne suis pas à mon poste, j'ai donné mes ordres avant de partir et le patron va prendre mes ordres. C'est rare que l'on voie un patron prendre des ordres de son employé, mais chez moi ça se passe comme ça. Car j'ai un contrat qui stipule ce que je dois faire. Ici, je représente en premier ma personne. Comme je l'ai dit, je risquais mon emploi, non pas vis-à-vis de mes patrons, parce que demain matin, j'arriverais devant mon patron et je dirais: Diamond, je n'en veux plus et j'espère que M. Bossé en formera une autre. Je serai le premier à lui emmener 20 voitures dans son association.

M. CARPENTIER: Je vous remercie. M. PITON: Merci.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Merci beaucoup. Votre collègue de gauche a-t-il des commentaires?

M. PITON: Non, il vous remercie. Moi aussi, je vous remercie beaucoup.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Alors, nous vous remercions.

M. PITON: Je vous en prie.

LE PRESIDENT (M. Séguin): L'Association métropolitaine des petits propriétaires, M. Pro-novost. Un instant, excusez-moi. Je croyais que les trois s'étaient levés ensemble. En avez-vous pour longtemps?

M. Roger Beauchamp

M. BEAUCHAMP: Je ne sais pas. Quand j'aurai fini...

LE PRESIDENT (M. Séguin): Bien oui. Non, non.

M. BEAUCHAMP: Je suis ici depuis mardi matin. Il y en a qui ont parlé pendant trois heures. Quand même je prendrais quinze minutes.

LE PRESIDENT (M. Séguin): C'est cela. Allez-y.

M. BEAUCHAMP: Parfait. Moi, je suis un chauffeur. Je ne suis pas un propriétaire. Je suis un fromage, comme on dit à Montréal.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Voulez-vous donner votre nom, s'il vous plaît, pour le journal des Débats?

M. BEAUCHAMP: Roger Beauchamp.

LE PRESIDENT (M. Séguin): M. Beauchamp. Et vous êtes chauffeur.

M. BEAUCHAMP: Chauffeur pour la compagnie Diamond, que je n'aime pas trop trop.

LE PRESIDENT (M. Séguin): D'accord.

M. BEAUCHAMP: Mais cela fait 19 ans que je travaille pour eux. C'est comme un chez nous. Quand on n'est pas habitué ailleurs...

C'est que je ne trouve pas cela normal, pour un gars comme moi. Je commence à vieillir. Je vais avoir 40 ans. Je n'ai de sécurité dans rien. Cela fait 19 ans que je travaille pour la compagnie Diamond et cela fait 19 ans que je me fais "crosser".

LE PRESIDENT (M. Séguin): II y a un langage qu'il faut maintenir. Je ne voudrais pas interpréter vos paroles, mais disons, tout simplement, que vous n'êtes pas heureux de la situation.

M. BEAUCHAMP: Non, je ne suis pas heureux. Je peux vous apporter des faits réels. Il n'y a pas d'honnêteté. Ma soeur travaillait

justement au "Diamond Dispatcher". Moi, je pouvais aller souper chez moi et avoir un appel, m'en aller à la campagne. Je n'avais qu'à appeler ma soeur, elle me donnait un voyage à la campagne. Mais moi, je suis honnête. Je ne faisais pas cela. Je gagne ma vie honorablement, comme tous les chauffeurs de taxi la gagnent. Il y en a qui ont fait des affaires chez Diamond. Je ne donnerai pas de noms. Ils ont commencé comme moi, avec une médaille et tout cela. Au bout de deux ans, il se sont acheté deux ou trois permis. Des affaires de grève, La Presse, je ne veux pas mentionner de noms, mais ce sont tous les mêmes qui avaient la patente. Trouvez-vous cela honnête, pour un chauffeur de taxi?

M. PAUL: Qu'est-ce que vous entendez par: Ce sont tous les mêmes qui avaient la patente?

M. BEAUCHAMP: A La Presse, ils étaient en grève. Il y avait des appels comme cela! Moi, j'étais chez Diamond. Je n'ai jamais eu un appel. C'étaient toujours les mêmes numéros de voiture qui les avaient. Eux, ils faisaient à peu près $100 par jour et nous, nous faisions la "main street".

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'aurais une question, là-dessus.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Sainte-Marie, si M. Beauchamp consent.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Me permettez-vous une question?

M. BEAUCHAMP: Certainement.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Voulez-vous dire par là qu'à l'intérieur de Diamond il y a un système de favoritisme pour certains chauffeurs?

M. BEAUCHAMP: Certainement, je vous l'ai dit. Ma soeur travaillait là, à la centrale téléphonique. Je n'avais qu'à dire à ma soeur: Je suis en train de souper. Elle pouvait me donner un voyage à la campagne, si elle l'avait. Si elle n'en avait pas, elle me le donnait où elle pouvait. Je ne voulais pas de cela. C'était toujours "la même gang", comprenez-vous?

Supposons qu'il y en avait huit. Ceux-là étaient occupés, toujours à la même place. Les appels, ce sont eux qui les avaient. Nous autres, les cadets... Cela fait 19 ans que je travaille pour Diamond. M. Brunet est ici. C'était mon propriétaire de maison. Il m'a demandé d'aller travailler pour lui. J'ai été travaillé trois jours pour lui. Je n'ai pas gardé la place parce que j'étais habitué ailleurs. Chez Diamond, si tu ne voles pas, tu ne fais pas d'argent. C'est tout. Ce ne sont que des vols de voyages. Sans cela, tu crèves de faim. Là-dessus, il y en a qui sont encore plus haut placés. Ils avaient toute la crème, comme on dit, dans le taxi. Je peux affirmer: Je peux apporter la preuve. Voilà trois mois, nous nous sommes groupés, cinq chauffeurs. Nous nous sommes même enregistrés à la nouvelle radio qui se prête moins au "racket" qu'avant, mais moi, je trouve qu'elle est pire qu'avant. Nous nous sommes enregistrés et là, nous avons fait les bouffons.

Nous avons fait appeler une femme pour un voyage en dehors. Tous les "stands" étaient couverts par nous, par un groupe de gorilles, si vous voulez. Là, ils ont envoyé une voiture, même pas de la compagnie Diamond, mais de la compagnie Veterans. Tous les "stands" de taxi étaient couverts par nous. Ce n'est pas nous qui avons eu l'appel. C'est un gars, je ne sais pas s'il payait le poulet ou autre chose, mais c'est lui qui a eu l'appel. Même pas de notre compagnie, de la compagnie Veterans. Trouvez-vous ça honnête?

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Le gars qui n'est pas favorisé paie la même cotisation.

M. BEAUCHAMP: Je paie la même chose que les autres. Je paie ma voiture à part ça. Quand ils ont mis une nouvelle radio dans la voiture, ils nous ont augmenté de $1 par jour.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela répond à ma question.

M. BEAUCHAMP: Ils ne consultent jamais les chauffeurs. Ils ne demandent pas la permission de Pierre, Jean, Jacques. C'est ça.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Est-ce que le député de Sainte-Marie avait terminé? Le député de Maskinongé.

M.PAUL: M. Beauchamp, vous avez mentionné que, depuis 19 ans, vous travaillez pour la compagnie Diamond dans des conditions qui vous déplaisent totalement.

M. BEAUCHAMP: Oui.

M. PAUL: Vous avez dit également que vous aviez reçu une offre de M. Brunet, de Lasalle.

M. BEAUCHAMP: Oui.

M. PAUL: Pourriez-vous nous donner, si vous le voulez bien, les raisons pour lesquelles vous auriez refusé de quitter un emploi que vous n'aimiez pas?

M. BEAUCHAMP: Je n'ai pas compris votre question.

M.PAUL: Vous nous avez mentionné que, depuis 19 ans, vous travaillez pour Diamond et que vous n'aimez pas les conditions de travail.

M. BEAUCHAMP: Je suis habitué à Diamond. Quand je suis allé à la compagnie Lasalle,

c'était un autre système. Du moment que tu volais un voyage, tu te faisais barrer pour une semaine. Au Diamond, il n'y en a pas de ça; tu peux en voler des voyages à l'année. Il n'y en a pas de système, tandis qu'à Lasalle il y en a un système. C'est ça que je veux dire.

M. PAUL: Etes-vous allé effectivement travailler chez Lasalle?

M. BEAUCHAMP: Je vous ai dit, tout à l'heure, que j'avais travaillé trois jours, mais que je ne pouvais pas faire d'argent parce que je ne pouvais pas voler. C'est clair? Pas voler le monde, voler un voyage. Si je volais un voyage, on me suspendait. Tandis qu'au Diamond il n'y en a pas de système: plus tu voles, plus tu fais d'argent.

M. PAUL: Alors, la discipline de Lasalle à l'endroit de ses chauffeurs ne vous convenait pas?

M. BEAUCHAMP: Non. Vous ne me comprenez pas. Il y avait trop de discipline pour moi, parce que j'étais habitué depuis trop longtemps à Diamond. Que voulez-vous que je vous dise?

LE PRESIDENT (M. Séguin): Continuez, monsieur.

M. BEAUCHAMP: Autrement dit, Lasalle a un système. Au Diamond, quand même tu irais faire un rapport: Le gars m'a volé un voyage. C'est un de ses "chums" qui me l'a volé. Cela n'arrange rien. Il y a une grève qui a duré peut-être 18 mois. Ce sont tous les mêmes qui ont eu la crème. J'en connais qui n'avaient rien — je ne dirais pas leur nom — mais, quand la grève a fini, ils avaient trois permis de taxi.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Avec ce que vous dites là, vous n'avez pas peur que Diamond vous mette dehors?

M. BEAUCHAMP: Quand même M. Diamond me mettrait dehors, je vais aller travailler pour M. Blondin, fantôme. Il a une voiture, je vais travailler de nuit et lui, de jour. C'est tout. Mon argent, je le fais sur la rue, je ne me fie pas à Diamond.

Même si ma soeur était au téléphone, je n'en voulais pas de ses appels.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Avez-vous d'autres observations, M. Beauchamp?

M. BEAUCHAMP: Si quelqu'un me pose des questions, je vais répondre.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Est-ce qu'il y a des questions?

M. BEAUCHAMP: C'est clair et net? Merci beaucoup de m'avoir entendu.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Je pense qu'on a compris. J'ai voulu en passer trois, ce soir j'en passerai trois autres, si vous voulez. Si vous voulez coopérer, messieurs! Je pense qu'on a eu une période, il faut en entendre d'autres selon l'ordre du jour. Je ne vous refuse pas, quel est votre nom pour que je m'en souvienne ce soir au cas où vous changeriez de chandail?

M. LIPPE: J'ai parlé à M. Bossé...

UNE VOIX: Ce n'est pas M. Bossé qui mène ça.

UNE VOIX: Ce n'est pas M. Bossé qui mène, c'est le président.

UNE VOIX: Si vous voulez donner votre nom au président pour ce soir.

M. LIPPE: Mon nom est donné...

LE PRESIDENT (M. Séguin): Voulez-vous répéter votre nom, s'il vous plaît?

M. LIPPE: M. Lippé.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Comme je vous disais tout à l'heure, si vous voulez patienter, on va essayer de...

M. LIPPE: J'ai laissé mon auto...

LE PRESIDENT (M. Séguin): Vous allez en gagner $1,000 du fait que nous allons avoir une meilleure loi. Cela vous vaudra peut-être $1,000. J'ai fait erreur tout à l'heure et je voudrais revenir en arrière. J'avais d'abord appelé M. Lecompte, ensuite on a eu l'intervention de trois représentants chauffeurs qui se sont très bien exprimés; je pense qu'on a bénéficié de leur interprétation. J'ai fait erreur en disant l'Association métropolitaine des petits propriétaires quand sur ma liste — tel que je l'avais annoncé avant le lunch — c'est Taxi Lasalle (1964) Inc. Nous allons entendre immédiatement M. Brunet.

Puisque les applaudissements se sont fait entendre, je vous demanderais, au cours de l'exposé de M. Brunet, qu'on s'asseoie sur ses mains.

Taxi Lasalle (1964) Inc.

M. BRUNET: M. le Président, je vous remercie. MM. les membres de la commission, j'aimerais changer mon mémoire et faire application pour l'association unique. Il semble que mes concurrents sont tous d'accord que ça va bien chez nous. J'aimerais entendre plutôt des gars de Lasalle et je ne voudrais pas que vous pensiez que j'ai payé ces gars-là pour venir vous dire qu'il semble que c'est bon vivre chez Lasalle.

Je suis fier d'être à la barre de Taxi Lasalle surtout aujourd'hui quand je vois de braves

concurrents chauffeurs qui me font un tel éloge. Mais, je voudrais être le plus objectif, je voudrais prendre le moins de temps possible. Mais, encore là, messieurs, le règlement no 6, tel qu'émis, nous prouve, après tous les énoncés faits, qu'il n'est pas acceptable tel quel.

Vous allez comprendre qu'à travers le Québec nous n'avons pas tous les mêmes problèmes dans l'industrie du taxi. Les problèmes à Montréal ne sont pas ceux de Québec, ne sont pas ceux de la rive nord de Montréal, ne sont pas ceux de la rive sud de Montréal ou d'autres régions. Il est normal qu'il faille faire certains changements dans l'industrie du taxi. A ce moment-ci, je voudrais vraiment être honnête et dire qu'à Montréal il y a certaines modifications qui s'imposent. Par contre, au lieu d'employer des solutions draconiennes, ça peut s'imposer par des manières souples.

Je suis fier de Taxi Lasalle, messieurs; d'ailleurs, chez nous, nos membres ont le droit de s'exprimer. Quant à vos questions, aucune ne peut m'être pertinente. Chez nous, nous avons un petit comité consultatif qui semble peut-être pour certains formé de types comme ci, comme ça et comme ça. Mais, pour nous, ce sont tous des gars intelligents à partir du premier chauffeur jusqu'à l'employé qui représente Lasalle.

Le comité consultatif chez nous est formé de quatre chauffeurs, quatre petits propriétaires d'une à quatre automobiles, deux propriétaires de flotte de cinq automobiles en montant et un représentant de la compagnie Lasalle dont la seule dictature est l'imposition de cet employé parce qu'il assume quasiment toujours la fameuse affaire du secrétariat, et cela prend du temps pour leur éviter de perdre du temps. En plus de cela, cedit comité consultatif a formé des sous-comités: sous-comité des sports, sous-comité d'entraide, sous-comité des visites industrielles, sous-comité, également, des visites aux malades. Ce sont toutes des petites choses qui font que dans une compagnie on puisse vraiment garder une harmonie et être sain. C'est normal, vous allez peut-être m'accuser, comme vous avez accusé mes compétiteurs, et j'espère que je ne les perdrai pas, parce qu'à ce moment-là je vais perdre l'ambition de combattre, chose que tout Canadien devrait conserver.

Si, en 1964, Brunet et sa famille, mon fils et mon épouse ont acheté une coopérative avec 800 automobiles, coopérative qui perdait de $25,000 à $30,000 par année sans avoir aucune dette hypothécaire et que moi, ayant acheté ça en 1964, j'ai formé une compagnie limitée, en vertu de la première partie de la Loi des compagnies de la province de Québec, avec énormément d'hypothèques sur le dos, je n'ai jamais connu une année déficitaire, cela vous prouve — je ne voudrais pas vous faire croire que je suis bon administrateur parce que le jour où je le croirai, ce sera probablement ma fin — que du moins, j'y ai mis du coeur, j'y ai mis du tigre, et chez nous tout le monde est égal. Que ce soit un chauffeur ou un propriétaire de flotte, ils ont tous le même droit de parole et le même égard. Mon bureau est ouvert à tout le monde, en tout temps.

Messieurs, c'est vrai ce que les chauffeurs de taxi vous disent. C'est vrai qu'ils travaillent fort, c'est vrai que ce sont eux qui doivent être aidés dans le moment. Il faudrait se pencher sur le petit chauffeur. Quand je vois votre tableau en avant, il y a une construction à faire avec ça. Mais, par contre, on a oublié un carreau pour mettre association de chauffeurs à côté. Mettez-le n'importe où le carreau, pour autant qu'il puisse y avoir une liaison entre les deux.

M. PINARD: Sur le tableau de gauche.

M. BRUNET: Le gros carreau rouge en haut, là.

Avant de passer à mon mémoire, j'aimerais peut-être vous expliquer mon idée sur ça. On m'a reproché de ne pas avoir fait d'intervention avant pour passer plus rapidement. Peut-être, je ne sais pas, que certaines gens auraient aimé mieux cela, connaître ma drôle de mentalité, quoi.

Je voudrais simplement que les associations demeurent telles qu'elles pour la simple raison qu'on commence à reconnaître que tout le monde veut rester comme on est là, mais ça prend une réforme dans l'industrie du taxi. Vrai ou faux. Par le fait même, qu'on ait une association de détenteurs de véhicules-taxis, association qui devrait avoir un code d'éthique professionnelle. Sa fonction serait de représenter les propriétaires auprès des autorités supérieures ainsi que de négocier des conditions de travail avec les chauffeurs.

Sur l'autre carré, association des chauffeurs ou syndicat de ci ou de ça, mais il va falloir arriver à une solution. Je ne suis pas un syndicaliste, je ne connais absolument rien dans les lois syndicales. De l'autre côté, ce seraient les chauffeurs et à ce moment-là c'est normal, des conventions collectives entre les deux et puis, par le fait même, que l'association de propriétaires fasse des revendications au gouvernement pour avoir des augmentations de taux quand c'est le temps. A Montréal, nous avons eu une augmentation en 1966 et remarquez bien, M. le ministre, qu'en 1969 des requérants, des membres de Taxi Lasalle, propriétaires et chauffeurs ont fait une demande à M. Saulnier et M. Saulnier nous a dit: Ecoutez un peu, on vient d'augmenter les taxes municipales, faites donc la demande vous-mêmes à la Régie des transports.

Nous avons fait notre demande directement à la Régie des transports et cette dernière nous a répondu que c'était la première fois qu'elle était saisie d'une demande faite sans être approuvée au préalable par un conseil municipal. Donc, c'est pour cela que ça a pris six ans avant d'avoir une augmentation. Si on avait une association comme celle-là, on guérirait énormément de bobos.

Je suis pour qu'on puisse être contrôlé par une régie provinciale, oui, monsieur. Sherbrooke, qui est passé hier, est formidable, mais ça leur a pris 25 ans. Encore là, c'est une ville de 84,000 habitants. Il faut absolument comprendre qu'avec les années on va se diriger vers cela, mais il ne faut pas brusquer les choses. Je crois qu'on devrait commencer par l'agglomération la plus difficile, la plus controversée, la plus mal nourrie. C'est vrai, ce que les chauffeurs vous disent. Je n'endosse pas tout, mais il y a beaucoup de vrai.

Nous ne pouvons pas répondre pour d'autres compagnies parce que nous, de Lasalle, nous n'avons pas trop de flotte. Nous avons environ 1,265 automobiles et c'est réparti entre 1,015 propriétaires, aujourd'hui. Notre gros pourcentage, c'est le petit propriétaire artisan. Comme on n'a pas trop de flotte, on n'a pas les mêmes problèmes que d'autres concurrents. C'est pour cela que je ne peux pas me prononcer sur les autres.

Avant d'aller plus loin, M. le Président, j'aurais une question pertinente à poser au ministre. Je suis sûr qu'il est assez homme pour répondre. M. le ministre, êtes-vous pour une association vraiment unique, telle que proposée dans le règlement no 6, oui ou non?

M. PINARD: Je pense avoir été très honnête envers tous les membres de la commission parlementaire dès l'ouverture, mardi, en disant que le règlement no 6 était un projet de règlement qui offrait des solutions à l'industrie du taxi pour en arriver à mieux la rentabiliser, à mieux assurer la qualité du service offert au public, à mieux humaniser les conditions de travail de ceux qui vivent du taxi. Je pense qu'il y avait une quatrième condition.

M. BRUNET: Y croyez-vous?

M. PINARD: J'ai un peu d'expérience, j'ai été administrateur, comme homme public, d'un ministère. Je sais faire la part des choses entre des recommandations qui sont faites, qui sont même couchées dans des règlements ou dans des projets de règlement, et ce qui devrait être finalement accepté comme solution réaliste et efficace. Tenons pour acquis que le règlement no 6 pose quand même des principes fondamentaux pour en arriver à une réforme en profondeur dans l'industrie du taxi, réforme demandée — vous le savez mieux que moi, M. Brunet — à cor et à cri depuis plusieurs années. Vous avez admis vous-même honnêtement qu'il fallait une réforme.

Il y a des principes fondamentaux pour lesquels je dois me battre comme responsable du ministère des Transports et comme membre d'un gouvernement, à moins qu'on ne me prouve que c'est à ce point irréaliste, inefficace ou tellement en avant de son temps que ça puisse être complètement inacceptable pour ceux mêmes à qui je demanderai d'être des partenaires loyaux et efficaces pour entreprendre cette réforme du taxi. Tout de suite je vous dis qu'il me parait bien impossible de mettre en vigueur cette réforme du taxi à même les conditions ou le contenu du règlement no 6 si je n'ai pas, d'abord, cette loyauté et cette efficacité dans le travail que devront donner ceux qui sont dans l'industrie du taxi, qu'ils soient propriétaires d'associations de services, propriétaires de flottes, locataires, propriétaires artisans ou chauffeurs.

S'ils sont pour boycotter cette réforme que le gouvernement voudrait entreprendre, même si le gouvernement voudrait la pousser, l'imposer au monde du taxi, alors que cela vous parait inacceptable, pensez-vous que je serais un homme politique réaliste en recommandant au conseil des ministres d'accréditer un règlement comme celui-là? C'est pourquoi j'ai pris la précaution de dire: Nous allons le déposer en commission parlementaire, à titre de projet de règlement; nous allons défendre les principes fondamentaux qui nous paraissent réalistes et qui sont à la base de la réforme du taxi telle qu'elle nous a été demandée et comme l'enquête Bossé l'a révélé.

Après que nous aurons entendu les parties intéressées, nous pourrons juger le pour et le contre. Nous serons peut-être en mesure de proposer d'autres hypothèses de travail, comme nous l'avons fait mercredi matin. Je serai plus en mesure aussi de juger — il faudra mettre le temps qu'il faudra mettre, M. Brunet — et de ne pas être injuste envers qui que ce soit. Il faudra tirer la ligne quelque part, il faudra que le gouvernement prenne ses responsabilités. Il faudra que le ministre des Transports ait aussi le courage de faire les recommandations qui s'imposent au conseil des ministres.

Alors, si c'est sur cela qu'on peut s'entendre, moi, je suis prêt à dialoguer avec vous, n'importe quand, et avec tous les autres.

M. BRUNET: Merci. Merci, M. le Président. J'aurais aimé qu'il dise tout de suite: Je n'y crois pas. Cela aurait fini rapidement. Votre réponse est très bien acceptée.

M. PINARD: Non, monsieur. Je n'ai pas dit que je n'y croyais pas. Parce que ce serait vraiment trahir ce que je viens de dire, si vous me faites dire, et si c'est répété, que je ne crois pas aux principes fondamentaux de la réforme du taxi contenus dans le règlement no 6.

M. BRUNET: Pour revenir à notre mémoire, c'est normal que tous ceux qui ont défilé ici veuillent demeurer tels qu'ils sont, à titre d'associations privées. Par le fait même, on veut garder nos identifications. C'est normal que nous ayons une marque de commerce, nous, à Taxi Lasalle, qui est connue du public, qui est familière au public depuis 1916, sous le nom Lasalle Taxi Stand, incorporée, en 1936, en association coopérative, et en formation de

compagnie limitée, en 1964. C'est normal que nous tenions à conserver ce gros et ce beau nom.

L'article 627, appareils de télécommunication. Encore là, messieurs, nous croyons que c'est insensé d'imposer... Remarquez qu'on se répète constamment, mais nous avons tous travaillé au même rapport et nous n'avons pas travaillé à ce que nous avons entendu ici. Dans la région de Montréal, je suis persuadé que, le moins des moins, sans abuser, 1,500 autos-taxis ne travaillent pas avec un système de télécommunication. Chez nous, à Lasalle, j'en ai environ 350 qui n'ont pas de radio. Actuellement, vous avez au moins 200 taxis qui ne font pas partie d'une association, qui sont sur la route. Quel serait, pour eux, l'avantage d'avoir une radio? Ils n'en ont pas. On leur en imposerait une. Cela ne tient pas debout. Je parle seulement de Lasalle et des types qui se tiennent dans la rue. Dans les autres associations, comme Métropole et tout cela — il y en a 49 à Montréal — c'est normal qu'il y en ait un minimum de 1,500.

Le dispositif de contrôle. Encore là, messieurs, l'idée est probablement bonne, d'enlever le système de doublage, mais pourquoi ne pas laisser la chance aux chauffeurs de choisir vraiment leur mode de travail? Si vous enlevez le doublage, commencez par en faire l'essai l'été seulement, et laissez travailler les types de la manière qu'ils l'entendent. Il y a des types qui sont passés ici ce matin. Il y a trop de taxis. Il n'y a pas trop de taxis. Il y a trop de chauffeurs. Il n'y a pas assez de chauffeurs. Donc le doublage, qu'on analyse cela seulement l'été. Si ce n'est pas assez fonctionnel, je n'ai aucune objection à rendre le règlement le plus fonctionnel possible.

L'article 634, c'est normal. Il y a une date, et il dit le 9 juillet 1972. J'aimerais que, dans le règlement no 6, ce soit réellement compris qu'on oublie l'affaire du 9 juillet 1972, l'acceptation du bill 23, et qu'il soit dit la date de l'acceptation dudit règlement en vigueur pour que les types puissent conserver leurs droits acquis, à partir de ce que M. Dickey a dit hier soir, et en continuant constamment. Naturellement, il y a un système à bâtir autour de tout cela. L'établissement d'une centrale de contrôle, je crois qu'on n'a plus besoin d'en discuter. Tous les gens en ont parlé. On va passer par-dessus.

Les concessions. Les concessions, messieurs, cela ne nous fait ni chaud ni froid. Cela vous surprend peut-être. Mais il y a un paragraphe, dans le règlement no 6 de M. Bossé, que j'admire, qui a bien pensé à cela, parce qu'il ne voulait pas de concurrence.

Article 6.270, il fallait que tout le monde appartienne à la centrale, à l'association de services. Donc, messieurs, c'est une offre de "give and take". On devrait imposer à tout propriétaire d'appartenir à une association de son choix et, par le fait même, abolir les concessions. Je peux même vous dire que dans certains cas, ça va être pénible le service, mais il y a une classe de gens dans l'industrie du taxi qui désirent voir les concessions, les gros abolis et tout cela.

Qu'on les enlève les concessions, vous allez nous les remettre à bras ouverts. C'est ce que je pense. J'espère 'me tromper.

Naturellement, M. Bossé, dans son rapport qui date du mois de novembre 1970, nous avait dit: Un permis par 800 personnes. A ce moment, cela nous a un peu choqués. S'il avait fallu compter vraiment, que donnait le retrait de permis, un par 800 personnes? Il fallait en enlever, sur l'île de Montréal, 3,187; une affaire de rien. Non, non, comptez, M. Bossé.

M. BOSSE: On en a tenu compte aussi.

M. BRUNET: Vous en avez tenu compte, parfait. Donc, quand je vous ai rencontré dans un débat télévisé, je vous ai dit, M. Bossé: J'ai vu dans le journal La Presse le retrait de 1,500 permis. Vous m'avez dit: Jamais de la vie. Vrai? On parle de 300 ou 400. C'est ça?

M. BOSSE: Quatre cent huit.

M. BRUNET: Parfait. Mais pour quelle raison, selon votre article 183, groupe 2, dans l'agglomération de Montréal, allez-vous laisser les nombres maximaux et minimaux à 600 et 700? Pouvons-nous le corriger?

M. BOSSE: Je pense que dans le rapport Bossé tel qu'il a été publié originalement il était écrit textuellement que la situation idéale, recommandable, tenant compte des diverses villes que nous avions visitées ou consultées, était 1 par 800. C'était une norme raisonnable afin d'atteindre la rentabilité.

Cependant, il est aussi dit, dans le rapport Bossé, que nous ne devrions pas procéder radicalement. Autrement ce serait risquer de chambarder l'industrie du taxi, ce que nous ne voulions pas.

Observez que dans le règlement il est question de 1 par 600 pour l'ensemble du territoire de l'agglomération de la communauté urbaine.

M. BRUNET: M. le Président, donc ce n'est pas normal qu'on fasse un règlement et qu'on nous dise qu'on en enlève seulement 400 et qu'on laisse la latitude d'en enlever plus.

Qu'on l'écrive tout de suite afin que l'on soit devant les faits immédiatement pour savoir où l'on va.

Un type vous a dit hier que ce sont des écrits qu'ils veulent. Ce sont des écrits que nous voulons.

En ce qui concerne une association par agglomération, vous connaissez notre idée là-dessus, ce serait néfaste. Je me joins à ceux qui sont passés ici pour vous dire que le service ne pourrait pas être amélioré, au contraire.

II est vrai qu'il y a énormément de critiques qui se dirigent vers les centrales téléphoniques, mais par contre ce sont des compagnies comme toutes les autres. Nous nous efforçons constamment d'apporter des améliorations et, quand quelqu'un essaie d'apporter des améliorations, on ne peut pas lui demander plus.

Il y a un autre point, dans votre rapport, M. Bossé, article 6.280: cotisations annuelles. Imaginez-vous donc! D'ailleurs, ils en ont discuté encore. J'arrive le dernier, pour discuter et ramasser seulement les poussières, peut-être. Cotisations annuelles. Ce n'est pas déterminé, rien. Là, on arrive, M. Bossé, avec des contributions annuelles, certainement un minimum de $300 ou $400. Radio: minimum, encore, de X centaines de dollars. M. Bossé, il faut penser qu'il y a des petits propriétaires. Vous nous arrivez après avec un cautionnement, $500.

Il y a un député, hier, qui a posé la question, il est ici. Il a dit: Le cautionnement, ce n'est rien. C'est pour le nom seulement. Non, non. C'est pour le nombre de voitures. C'est $500 par permis. Le petit chauffeur, c'est $100. On est rendu avec un achat de radio, un cautionnement, une contribution annuelle. Imaginez-vous. Et là, la question de peinture noire, et ainsi de suite, ce sont des peccadilles. Mais encore là, je peux assurer que l'entretien d'une voiture noire est plus dispendieux. C'est un fait. Il faut l'avouer.

M.PAUL: M. Brunet, est-ce que vous oubliez le dôme et, possiblement, le taximètre?

M. BRUNET: Pour le taximètre, je crois que, dans le règlement, il n'y a absolument rien de marqué en ce qui concerne le taximètre. Je pense qu'on s'est engueulé un petit peu pour rien sur cela.

M. PAUL: N'y a-t-il pas un article, l'article 3.6, qui parle du taximètre?

M. PINARD : C'est au sujet de la norme, qui porterait tel numéro. Mais cela ne change pas...

M. BRUNET: On a dit que le règlement avait été changé et qu'il était pire que cela avant.

M. BOSSE: Non, non. C'est la norme actuelle qui est prévue, tout simplement, par le ministère de l'Industrie et du Commerce.

M. BRUNET: Donc, ce sont les mêmes taximètres qui sont censés continuer. Est-ce cela?

M. PINARD: Absolument. A moins qu'on trouve quelque chose de meilleur et qu'il soit prouvé que c'est meilleur, et pas plus cher.

M. BRUNET: Pour autant que ce soit accepté par les gars du taxi.

M. PINARD: Vous serez consultés.

M. BRUNET: Naturellement, le gros problème de tout cela...

M. BOSSE: Sur la cotisation, M. Brunet, me permettriez-vous un mot? Vous avez posé d'abord la question des cotisations. Si on retient l'hypothèse, évidemment, de l'association unique, la cotisation, si on n'en fixe pas le prix, c'est que l'assemblée générale, tel que le règlement le prévoit, fixera cette cotisation comme telle. Quant à l'achat de radios dont vous avez parlé, d'autre part, c'est là une question sur laquelle les techniciens se penchent. Les principes qui avaient été mis de l'avant sont ceux-ci: vous savez que ce règlement ne s'appliquera qu'à compter de novembre 1973, il n'est pas question de faire faire des dépenses extraordinaires, comme certains l'ont laissé entendre, déjà, à savoir un coût de $2,000, pour tenter d'effrayer les gens quant au règlement.

Quant à la troisième partie de votre question, celle du cautionnement, il est évident que nous avons pris bonne note des diverses remarques qui ont été faites ici. Les opinions diffèrent là-dessus. Mais je pense que c'est là le but de la commission, d'entendre justement des remarques positives, même si elles ont pour but de modifier le règlement.

M. BRUNET: Remarquez bien, M. Bossé, quand je parle de cautionnement, dans le moment...

M. BOSSE: Les $500, là.

M. BRUNET: Nous allons continuer la compensation d'un permis, d'ailleurs. Dans le moment, un permis coûte $6,000. C'était jusqu'au 23 décembre, parce qu'aussitôt que le règlement no 6 est sorti, il y en a eu des permis à vendre. Là, cela commence à descendre. On suggérait que le prix du permis, à Montréal, soit déterminé d'après les ventes des trois derniers mois, pour tirer une moyenne de cela. Tout le monde serait satisfait. Je suis persuadé que ce serait équitable pour tout le monde.

On parle également de l'abolition de la location, des 40 p.c, de $1.65. Tout le monde est mélangé. Mais qui travaille dans l'industrie du taxi? C'est vraiment le chauffeur. On devrait absolument lui donner la latitude de choisir son mode de travail. S'il veut travailler à 40 p.c., qu'il le puisse. S'il veut travailler à des conditions supérieures à $1.65 l'heure, qu'il en fasse la demande encore. S'il veut travailler à location, encore là, vous pouvez avoir le même contrôle que le gouvernement fédéral vient d'imposer concernant l'assurance-chômage.

Il y a une question de salaire de base et ces gars sont prêts à faire des heures. On nous a dit, ce matin, qu'à Toronto le permis vaut X milliers de dollars de plus qu'à Montréal, et les gars font 12 heures par jour, six ou sept jours par semaine. Je ne pense pas que nous soyons plus déprimés à Montréal, et notre permis vaut

moins cher que ça. Nous en faisons, des heures. C'est un fait que nos gars sont travaillants pour gagner leur vie.

M. BOSSE: Sur la question de location, me permettriez-vous d'intervenir ou préféreriez-vous continuer?

M. BRUENT: Je préférerais continuer et vous me poseriez des questions après. Parce que là, vous me faites perdre ma verve.

M. BOSSE: Comme je vous sais "verveux"... M. BRUNET: Pas nerveux, cependant. M. BOSSE: Non, "verveux".

M. BRUNET: II y a une question, le permis métropolitain. A travers l'île de Montréal, il y a énormément de municipalités, comme Verdun, qui désirent le permis métropolitain. D'autres municipalités ne l'acceptent pas.

Encore là, il faudrait que les municipalités de l'agglomération s'entendent pour pouvoir faire une chose concrète, acceptable pour tous et logique. En dernier ressort, si on adopte tout le règlement comme il est là, les associations n'ont plus un mot à dire. Nous serions prêts à prendre notre chapeau et à nous en aller, même si, nous savons que nos membres seraient mécontents de nous voir partir et qu'ils sont heureux avec nous.

Nous partirions moyennant le rachat de nos biens. Mais, encore là, nous n'en voulons pas, nous ne voulons pas vendre nos affaires. Si nous sommes entres dans cette entreprise, c'est que c'est un "challenge", c'est la libre concurrence et c'est un commerce comme un autre.

M. PINARD: II est payant?

M. BRUNET: Je n'ai jamais eu à déclarer de déficit.

UNE VOIX: N'en dites pas trop.

M. BRUNET: Le ministre, tantôt, va me demander mon bilan. Je ne veux pas passer pour un menteur. En revenant à mes droits acquis, un permis par personne, ce n'est pas logique. Qu'on donne le privilège à une personne d'en avoir plus pour que cela puisse devenir une flotte.

Une flotte de vingt voitures, c'est normal.

Les gars qui ont acheté les flottes petit à petit et qui sont rendus, comme Brunet aujourd'hui — je vais me faire critiquer tout à l'heure — à 54... Je ne les ai pas volées mais par contre je les vendrai quand je voudrai. Mes chauffeurs sont des gars heureux. J'en suis fier pour eux et je n'ai pas honte de mes chauffeurs.

A l'avenir, il serait logique, M. le Président, qu'on mette des normes. Mais à ce moment-là on sait dans quel jeu on se lance. Les flottes sont limitées à 20; à ce moment-là on sait où on va. C'est comme pour le double emploi. Comme je vous l'ai dit tantôt, il faudrait arriver à cela.

En ce qui concerne également l'article 157, je crois que vous avez été assez humain sur ce point pour le comprendre. C'est normal que la succession de la personne qui détient un permis puisse en disposer de la manière qu'elle l'entend. Surtout — je voudrais revenir sur un sujet — sans s'incorporer. Je crois que M. Bossé nous a laissé l'impression que ce serait facile. Je comprends que ce serait facile, mais il ne faudrait pas imposer à un petit propriétaire d'être obligé de s'incorporer, dépenser $350 de frais d'avocat et ainsi de suite pour pouvoir s'incorporer. Qu'on accorde les droits acquis actuels dans l'industrie du taxi, c'est ce que nous voulons. On ne veut pas grand-chose, c'est ça qu'on veut.

Pour que les associations puissent être régies, pour que ne se passe pas ce que vous avez entendu ici, rectifiez les choses tout de suite. Pourquoi ne pas en parler, de Lasalle? Pourquoi est-ce qu'on ne crie pas à l'injustice à Lasalle? Il y a quelque chose et je ne sais pas quoi. Je suis chez Lasalle et je ne sais pas pourquoi on ne crie pas. C'est parce qu'on travaille et qu'on n'arrête pas de travailler. Qu'on soit tous pareils. Quand un type n'écoute pas chez nous, nous ne sommes pas des dictateurs mais par contre il suit nos règles de discipline. C'est comme le monsieur a dit tantôt: Je n'ai pas été capable de m'habituer à Lasalle, c'est trop sévère.

Un minimum de 60 heures par semaine. Encore là, je vois très mal un tel règlement vu que dans Montréal — je parle pour Montréal, je ne voudrais pas généraliser à travers la province, ce n'est pas mon boulot — je peux vous dire que nous avons énormément de propriétaires d'un certain âge qui travaillent et qui sont fiers de leur boulot; ils ne font pas 60 heures par semaine, c'est vrai.

Vu qu'ils ne font pas 60 heures par semaine, ils ne sont pas néfastes à l'entreprise du taxi. Leur voiture reste chez eux. Pourquoi leur imposer de les faire travailler davantage, si on en enlève seulement 400? Donc, c'est un droit acquis comme les autres. C'est comme le type qui a un double emploi, Je peux vous montrer des affidavits que ces pauvres gars ont acheté vraiment un taxi, un permis d'auto-taxi dans un but futur, dans le but de faire du taxi supplémentaire après leurs heures ordinaires de travail pour subvenir aux besoins de leur famille. Si on adopte un règlement, il faudrait mentionner: A l'avenir, et garder les droits acquis de ces gens.

En concluant, messieurs...

M. PINARD: M. le Président, seulement pour une rectification, M. Brunet. Je pense qu'il n'est pas exact de dire que le règlement stipule un minimum de 60 heures de travail, pour un homme.

M. BRUNET: L'automobile.

M. PINARD: Le minimum de 60 heures, c'est pour la mise en service du véhicule-taxi.

M. BRUNET: C'est exactement ce que j'ai dit, M. le ministre. Par contre, vous avez...

M. PINARD: Pour une meilleure qualité de service au public.

M. BRUNET: Chez nous j'ai énormément d'hommes d'un certain âge qui ne vous prêteraient même pas leur auto à vous. Ils ne veulent pas le prêter, ils ne veulent pas qu'un autre s'en serve. Que voulez-vous? Remarquez bien, M. le ministre, que ce serait un honneur de vous passer l'auto. Mais ces gars, leur mentalité risque...

M. PINARD: Je pense que vous me comprenez, M. Brunet. Il faut quand même établir une norme quelque part sous forme de moyenne annuelle, mais où tirer la ligne? Vous-même, vous dites que c'est nécessaire d'avoir des normes pour avoir une industrie efficace et bien dirigée. Alors où est-elle la ligne?

M. BRUNET: On pourrait mentionner: A l'avenir, dans les droits acquis. Quand un gars se lancera dans l'industrie du taxi et viendra s'acheter un permis on lui dira: Là, mon gars, tu t'achètes un permis d'auto-taxi et puis il faut que ton véhicule fasse 60 heures d'ouvrage par semaine au minimum. On le lui dira. Mais on ne peut pas leur imposer cela à eux aujourd'hui. Il y a une affaire qui est bonne dans votre règlement, protéger les petits chauffeurs. Les trois premiers choix, c'est formidable. M. Bossé, je ne fais pas seulement critiquer. En conclusion...

LE PRESIDENT (M. Séguin): En avez-vous long avant de conclure? Je voudrais vous réinviter à huit heures et quart pour les questions.

M. BRUNET: Je pourrais continuer plus tard.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Si vous concluez votre intervention, nous pourrons passer aux questions à huit heures et quart.

M. BRUNET: J'aimerais mieux conclure avant les questions...

LE PRESIDENT (M. Séguin): D'accord.

M. BRUNET: ... afin d'avoir les idées en tête.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Vous en avez pour combien de temps, deux minutes?

M. BRUNET: Tantôt, ça va prendre à peu près dix minutes.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Non, mais pour conclure.

M. BRUNET: Pour conclure, dix minutes.

LE PRESIDENT (M. Séguin): La séance suspend ses travaux jusqu'à huit heures et quart.

M. BRUNET: Merci, M. le Président. (Suspension de la séance à 18 h 1)

Reprise de la séance à 20 h 30

M. SEGUIN (président de la commission permanente des transports, des travaux publics et de l'approvisionnement): A l'ordre, messieurs !

Ajournement au 23 janvier

LE PRESIDENT (M. Séguin): Un instant, M. Brunet, avant de vous repasser le micro. Pour l'information des membres de la commission et aussi pour l'information du public, nous ajournerons ce soir jusqu'à mardi, à 2 h 30.

Mardi, à 2 h 30, le secrétariat des commissions se chargera d'inviter ou de convoquer cinq associations qui n'auront pas été entendues jusqu'à maintenant, et une personne, ou un chauffeur, parlant comme individu et non pas au nom d'une association. C'est pour mardi de la semaine prochaine. C'est entendu que ces commissions sont ouvertes au public. N'importe qui peut y assister, mais les seuls que nous entendrons seront ceux qui auront été convoqués selon nos listes sur lesquelles les associations et les individus sont enregistrés. C'est sur cette liste-là qu'on choisira les personnes. Mardi, nous commencerons à 2 h 30 et nous ajournerons quand nous aurons entendu les cinq associations et l'individu convoqués. Pas d'autres. C'est clair. Ne me dites pas, si vous arrivez mardi: J'arrive de Montréal et il faut que j'y retourne ce soir. 11 faudrait que je sois entendu aujourd'hui. Non. Si vous avez votre télégramme de convocation, on vous entendra. C'est bien clair.

Nous ajournerons mardi, quand nous aurons terminé avec ce groupe, à mercredi, le lendemain, à 10 heures. Et encore là, pour le mercredi, il y aura des télégrammes qui seront envoyés à cinq associations qui n'ont pas encore été entendues, plus trois individus.

Jeudi, il n'y aura pas de séances de cette commission. Et mercredi, nous annoncerons l'itinéraire ou le programme de la semaine suivante. Et ainsi de suite.

Vous pouvez venir à Québec pour assister aux délibérations, mardi et mercredi, mardi, à 2 h 30, mercredi, à 10 heures, mais vous ne serez entendus que si vous avez été convoqués par télégramme. J'espère que c'est compris. Il n'y aura pas d'autres excuses. Il n'y aura pas d'autres raisons, ni un voyage en Floride, ni un voyage en Californie, ni un voyage d'urgence en Europe qui doit avoir lieu le lendemain. Non. On trouvera des représentants dans ce cas pour être ici à d'autres séances, au fur et à mesure qu'on convoquera les membres ou les personnes impliquées dans l'industrie. Nous continuerons nos séances publiques jusqu'à ce que nous ayons épuisé la liste déjà enregistrée.

Un autre point que je voudrais souligner. Je reviendrai la semaine prochaine là-dessus. Nous avons quelque 250 noms d'individus qui, au cours des deux derniers jours, ont demandé à être entendus par la commission. Je vous demanderais, à vous, comme individus, de tout faire pour vous regrouper, c'est-à-dire que, si dans une région, il y a cinq, six ou huit chauffeurs ou propriétaires de flotte ou directeurs d'association ou propriétaires de taxis ou simples chauffeurs, qui avez des problèmes communs, essayez de vous entendre pour nommer un porte-parole pour les cinq et vous ferez part de cette entente au secrétariat de la commission, à M. Jacques Pouliot, secrétaire des commissions permanentes.

La convocation irait par la suite à la personne que vous aurez, comme groupe d'individus, reconnue comme votre porte-parole. Il ne s'agit pas d'entendre toutes les personnes qui ont un mot à dire sur le service du taxi dans la province. Vous comprenez bien comme moi que cela devient quasi impossible et cela devient une série de répétitions. Nous voulons entendre tout le monde. Les individus auront leur représentant, la personne pourra venir ici devant le Parlement et dire: Je représente cinq, huit ou vingt chauffeurs de telle section et de telle région. C'est bien compris, mardi deux heures trente. Les convocations seront envoyées aux associations et individus qui seront entendus. Le mercredi 24 janvier à dix heures, le jour suivant; les convocations seront encore envoyées pour ce jour-là. Si vous voulez arriver mardi vous ne serez pas entendus mardi si vous êtes convoqués pour le mercredi. Ce sera le mercredi que vous passerez. J'ajournerai, même si nous terminons avant six heures de l'après-midi, au lendemain, même s'il y en avait pour le lendemain qui seraient déjà présents. Je ne les entendrai pas. Alors ne prenez pas la chance d'être entendus au cas où. Cela ne marchera pas.

Taxi Lasalle (1964) Inc. (suite)

M. BRUNET: Merci, M. le Président. Tout ça pour vous dire que nous administrons notre compagnie dans des cadres vraiment socio-économiques, ce qui veut dire que nous savons...

LE PRESIDENT (M. Séguin): Un instant, je m'excuse encore. Je voudrais, avant de terminer mes propos, faire la demande suivante, bien gentiment. Après cet exposé que j'ai fait aux membres de la commission, cet ordre du jour tel que proposé est-il acceptable? Je voudrais que la commission l'accepte. S'il y a des commentaires contraires qu'on m'en fasse part.

M. DEMERS: On a eu l'impression qu'on était mieux de l'accepter.

M. BRUNET: Merci, M. le Président. Tout ça pour vous dire qu'à Lasalle, nous administrons une compagnie en vertu de la première partie de la Loi des compagnies et vraiment dans des cadres socio-économiques, ce qui veut dire que nous savons vraiment partager, diviser. C'est

vrai ce que vous avez entendu cet après-midi; M. Bossé semblait surpris de ça. Il est vrai que Taxi Lasalle ou Gérard Brunet a vraiment aidé un minimum de quelque 200 chauffeurs à devenir propriétaires. Encore là, laissez-moi vous dire que c'est ma plus grande fierté, j'en suis fier. Ils ne m'ont pas trahi, je n'ai perdu pratiquement rien pour en avoir aidé environ quelque 200. Cette transaction de centaines de milliers de dollars m'a peut-être coûté, dans l'espace de neuf ans, environ $15,000 de perte. Donc, il faut donner aux gars du taxi la chance de réussir, et j'en suis très fier.

En terminant, messieurs, j'aimerais vous expliquer ce qui s'est passé l'an dernier à Montréal et franchement on a déjà senti une amélioration. L'an passé la disparition, comme d'autres l'ont mentionné plus tôt, d'autos-taxis sans permis, des spoutniks comme on les appelle, nous a aidés énormément à travers toute l'île de Montréal et même la rive nord et la rive sud. En plus de l'augmentation que nous avons eue au mois de mai, cela a stabilisé un peu. On n'est pas ici pour rejeter le règlement no 6, mais on veut qu'il donne quelque chose à l'industrie du taxi. Ce qui presse le plus, je crois, c'est d'être régis par un organisme provincial pour enlever aux municipalités leurs propres manières d'agir et ainsi de suite. Je suis persuadé que de cette manière toute l'industrie du taxi à travers la province de Québec sera protégée. Ce sera un genre de règlement uniforme.

Nous sommes absolument d'accord sur cela. Par contre, nous demandons quelque chose. L'article 270 du règlement no 6 dit qu'il faut appartenir à l'association. Nous tenons à ce que tout détenteur de permis appartienne à une association de services de son choix. 2) Une réglementation sévère pour contrôler les associations de services et surtout pour éviter ce qui se produit dans le moment, faire des genres de normes dans cet organisme qui sera probablement une association en haut, pour créer une nouvelle association de services. D'abord, tous les membres pourront en fonder une, s'ils en veulent, mais qu'on mette des normes assez rigides pour qu'ils ne manquent pas leur coup. Un minimum de 150 membres, par exemple, peuvent fonder une coopérative ou n'importe quoi, compagnie ou coopérative ce qu'ils veulent. De cette manière, ce sera de la libre concurrence et on demeurerait quand même dans la libre entreprise.

Le permis métropolitain. Je vous l'ai demandé tantôt. Quant aux types qui sont dans la région de Montréal, toutes les municipalités, nous n'avons pas d'objection. Il y a probablement certaines petites villes qui en ont, mais encore là, il faudrait négocier avec chacune de ces municipalités. On sait que la mode est aux agglomérations, aux communautés urbaines, etc.

L'abolition des concessions, on vous l'a dit, cela ne nous fait rien pour autant que vous nous accordez — vous avez lu mon mémoire — la rubrique no 1. C'est donc dire que ce sera bénéfique pour tout le monde. Je voudrais souligner un point en passant. Dorval est rendu vraiment en commun. Dans le moment, on a énormément de plaintes parce qu'il n'y a pas de contrôle à Dorval. Il faudrait voir à mettre un contrôle à Dorval. 6) La formation des mécanismes, dont la contribution serait assurée conjointement par les propriétaires, les associations et les chauffeurs, pour leur trouver des avantages sociaux. Je crois que cela s'impose et je crois qu'une telle innovation sera éventuellement une des charges de l'association.

Une autre chose très importante: l'uniformisation des tarifs d'autos-taxis à travers la région métropolitaine. Dans le règlement no 6, je crois que c'est fait. Avec ces quelques suggestions, en débutant par cela, on peut vraiment donner à toutes les parties en cause, aux quatre catégories, aux chauffeurs, aux petits propriétaires, aux propriétaires de flotte et aux associations, tout ce qu'ils demandent, pour débuter et, entre-temps, mettre le système d'association en marche.

J'aimerais revenir, avant de terminer, si vous le permettez, M. le Président, sur la question de la fameuse association. Naturellement, je verrais cela comme ceci: dans un carreau, le gouvernement; un autre carreau, l'association des propriétaires, l'association des chauffeurs et plus bas, tout relié à cela, l'association de services. Naturellement, pour négocier des conventions collectives dans l'association des propriétaires, ça prendrait un comité d'employeurs, des gars qui engagent des chauffeurs. Pour négocier avec le gouvernement et les associations, à ce niveau-là, il faudrait que le petit propriétaire artisan soit quand même représenté.

D'ailleurs, rien n'empêche le comité de faire énormément, à travers l'un ou l'autre. Je vous remercie.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Je vous remercie, M. Brunet. Le député de Dorion.

M. BOSSE: M. le Président, M. Brunet, nos divergences d'opinions causées par les circonstances ne font pas de nous nécessairement des adversaires. Je pense que nous avons eu l'occasion, à plusieurs reprises, d'avoir des échanges là-dessus. Je vais essayer de répondre aux principaux points que vous avez soulevés en les réexpliquant parce qu'entre nous je pense qu'on connaît déjà nos opinions.

Je voudrais dire auparavant qu'il y a une chose qui aurait été fort souhaitable: que l'enquête ou le rapport Bossé n'ait jamais eu lieu, ce qui signifie que ce qui aurait été souhaitable, c'est qu'il n'y ait pas eu d'enquête ou de rapport Bossé.

M. BRUNET: Au contraire.

M. BOSSE: C'est-à-dire que, si tout avait

bien été dans l'industrie, il n'y aurait pas eu d'enquête comme telle.

Le gouvernement ne se retrouverait pas aujourd'hui avec une situation qui — je pense que tous les membres de la commission l'ont constaté — n'est quand même pas facile, comme vous l'avez admis vous-même. Je vous remercie, pour le bénéfice que vous avez donné à l'endroit de l'action gouvernementale et sans plus de commentaire, je vais reprendre point par point les sujets que vous avez soulevés.

D'abord, le système de location. Je vais expliquer ici pourquoi abolir le système de location. Si l'on tient compte, par exemple, de l'expérience qui a été faite avec les "Teamsters", dans le domaine de l'organisation syndicale à Montréal, il y a eu une décision du tribunal du travail pour un certain nombre de travailleurs qui voulaient se syndiquer, des chauffeurs appartenant à une flotte donnée. Etant donné que le caractère de salarié n'était pas reconnu comme tel, en abolissant le système de location, vous accordez le statut de salarié au chauffeur de taxi et vous le soumettez à la Loi du salaire minimum. Et ici, je voudrais être clair, quand on parle de la Loi du salaire minimum, il est évident que c'est le minimum. C'est-à-dire que, dans une certaine mesure, on répond un peu à votre demande dans vos explications voulant que vous soyez en mesure de négocier avec un groupe donné qui soit bien structuré, bien organisé.

M. BRUNET: Ce n'est pas la question, M. Bossé. Nous disons dans notre mémoire de laisser le privilège aux chauffeurs de choisir leur mode de travail. Encore là, s'ils veulent abolir la location, c'est à eux de choisir. Ce sont eux qui oeuvrent dans l'industrie du taxi.

M. BOSSE: Je pense qu'il y a une certaine responsabilité qui incombe quand même à un gouvernement responsable. Une expérience a été faite, elle a été tentée antérieurement. Une des difficultés majeures, je voudrais bien qu'on me comprenne, je ne veux pas prendre une position pro-syndicale en soi, c'est uniquement sur l'aspect de la structuration, afin de permettre à des groupes, au lieu d'avoir des individus comme chauffeurs de taxi, qui se trouvent non organisés, qui se trouvent pris individuellement avec un problème vis-à-vis d'une contrepartie qui, elle, a des moyens susceptibles de créer des conditions difficiles, en abolissant la location, nous donnons des statuts de salarié et nous permettons au gars, s'il le désire, au chauffeur de taxi, de s'organiser. Ce n'est pas le rôle du gouvernement cependant, je pense bien, de faire ce travail, de les organiser.

M. BRUNET: M. Bossé, sur cela, j'aimerais faire une mise au point. Si c'est le rôle du gouvernement de faire quelque chose pour le propriétaire de taxi, c'est son rôle de faire quelque chose pour le chauffeur aussi. C'est cela qu'on veut dire.

M. BOSSE: Vous seriez donc d'accord que, par exemple, le gouvernement impose une forme d'organisation afin de permettre... Je vous remercie, c'est ma réponse sur la question de la location.

Quant au permis métropolitain, vous étiez d'accord, comme vous l'avez dit. Vous étiez d'ailleurs présent à la réunion du 18 novembre où bon nombre de représentants de la région de Montréal avaient semblé faire l'unanimité là-dessus.

En ce qui a trait à la compensation, je pense que vous avez déjà entendu les commentaires du ministre là-dessus, compensation en ce qui a trait aux possibilités de négociation concernant l'équipement, les associations existantes, etc. L'intention gouvernementale, exprimée antérieurement par le ministre, n'a jamais été de telle nature qu'elle soit injuste à l'égard des parties qui se sentiraient lésées ou se croiraient lésées. En ce qui a trait aux permis, un par personne... vous êtes d'accord...

M. BRUNET: Excusez-moi un instant. En ce qui concerne la rémunération, la compensation, il faudrait être précis.

M. BOSSE: Je ne peux engager personne.

M. BRUNET: II faudrait vraiment trouver un mécanisme pour pouvoir atteindre le juste milieu du prix du permis des trois derniers mois, sortir une moyenne.

De ce fait, si vous faites cela, sans reconnaître que c'est négociable, vous trouvez un marché négociable et les chauffeurs vont pouvoir s'acheter un permis comme ils vont vouloir parce que ce prix va être garanti. Là, vous allez faire quelque chose pour le petit chauffeur. Cela va être facile de le faire financer avec des intérêts bancaires.

M. BOSSE: En ce qui a trait à l'autre question du double emploi, nous avons retenu — et nous l'avons déjà exprimé antérieurement — l'une de vos recommandations personnelles à l'effet de procéder, s'il y a lieu, au retrait des permis par le volontariat en tenant compte des statistiques que vous aviez établies...

M. BRUNET: Un instant, ne mélangez pas la question. Le double emploi, c'est simplement pour le type qui a un permis. Dans le règlement, il est dit qu'on rachète son permis. Il a jusqu'en 1974 pour choisir. Est-ce vrai?

M. BOSSE: Là, on a retenu...

M. BRUNET: Oui, je comprends bien que vous avez retenu...

M. BOSSE: Le ministre a déjà fait une déclaration dans ce sens, que, préférentiellement, au lieu de procéder selon la modalité exprimée...

M. BRUNET: Je ne veux pas que vous reteniez seulement.

M. BOSSE: ... dans le règlement, c'est que votre propre recommandation, qui est de procéder d'abord par le volontariat, c'est-à-dire le retrait volontaire, vous-mêmes, vous aviez exprimé antérieurement qu'il se faisait, par exemple, à Montréal, quelque 600 transferts par année.

M. BRUNET: Disons que, l'an passé, c'était le chiffre, c'était au-delà de 600.

M. BOSSE: On a tenu compte de cela. On a retenu très fortement...

M. BRUNET: Donc, on a six mois, on en a 400 de moins.

M. BOSSE: Ne m'en faites pas dire plus. Disons qu'on a retenu cela.

En ce qui a trait aux droits acquis, c'est clair dans la déclaration ministérielle et dans la déclaration antérieure du ministre qu'il y aura indexation et que le prix du permis, pour l'ensemble de ceux qui voudront se départir du permis, sera à la valeur marchande des 8 ou 9 juillet 1972.

M. BRUNET: M. le Président, si vous me permettez, j'ai noté cela hier soir, quand M. Dickey a parlé, concernant les droits acquis pour le fameux "pocket number", je crois que c'est censé. Mais il faudrait ajouter aussi à cela que les anciens chauffeurs, si on les a endurés sans cautionnement, on continue à les endurer, c'est aussi un droit acquis. Les nouveaux, ils sauront qu'il faut déposer $100. Mais ils n'ont pas d'affaire à déposer $100 parce que, lorsqu'ils sont entrés dans l'industrie du taxi, on ne leur a pas imposé $100 de dépôt.

M. BOSSE: Quant aux 60 heures minimales de service, un problème que vous avez soulevé, j'aimerais que vous fassiez une proposition concrète, M. Brunet, là-dessus, en tenant compte du service au public et de l'obligation qu'a un transporteur public, qui détient un permis exclusivement parce que c'est exclusif à ceux qui sont détenteurs.

M. BRUNET: Exactement. M. Bossé, il faudrait recommencer. Cela peut être un peu long mais cela me fait plaisir.

M. BOSSE: Non, mais sans être trop long, voulez-vous faire une proposition concrète?

M. BRUNET: Non, cela m'a pris trois jours pour m'asseoir à cette chaise; j'espère que, lorsque je la quitterai, j'aurai répondu à toutes les questions.

Mais en ce qui concerne les permis, quelle question me posiez-vous? Aux 60 heures! Parfait.

M. BOSSE: J'ai dit en ce qui a trait à l'utilisation de la voiture,...

M. BRUNET: Disons que c'est normal.

M. BOSSE: ... il y a un minimum de 60 heures par semaine.

M. BRUNET: Je crois que le règlement no 6 a vraiment été basé sur le mot "privilège". A l'article 159, je crois, on explique ce qu'est le privilège. Vu que c'est un privilège, il n'y a pas de droit acquis, de fling-flang, etc. Cela part de là. Mais parmi nos gars qui ont oeuvré dans l'industrie du taxi — j'aimerais bien mieux ne pas être obligé de dire cela au micro, vous comprendriez plus facilement — nous avons des personnes âgées qui ont vraiment fait du taxi leur vie. Ces gars ne font plus 60 heures par semaine.

Ils le font quand il s'entendent, mais, au retrait de ces permis, quand ils voudront les vendre, les nouveaux pourront le faire et vous pourrez l'imposer. C'est un autre droit acquis. C'est logique.

M. PINARD: Une précision, M. Brunet, là-dessus. Vous avez répondu, cet après-midi, à une question de même nature, qu'il s'agissait de personnes âgées...

M. BRUNET: Oui.

M. PINARD: ... mais qu'elles ne voulaient pas laisser conduire leur voiture par d'autres chauffeurs.

M. BRUNET: Exactement.

M. PINARD: Bon. Est-ce que, par hasard, il y aurait quand même des personnes âgées qui seraient prêtes à faire conduire leur voiture par d'autres chauffeurs pour ne pas subir une perte de revenus plus ou moins considérable?

M. BRUNET: Actuellement, vous en avez certainement qui utilisent des chauffeurs, qui donnent de l'emploi à des chauffeurs, oui. Par contre, la plupart du temps, je crois que ce type qui a oeuvré pendant des années et des années, lui, travaille seul sur sa voiture et c'est vrai qu'il ne sort pas quand il fait mauvais.

M. PINARD: II s'agit d'un artisan, dans ce cas-là.

M. BRUNET: Oui.

M. PINARD: Quel est le nombre d'artisans parmi les chauffeurs de taxi à Montréal? Avez-vous une statistique?

M. BRUNET: Moi, je peux répondre pour mon association. Disons que chez nous, il doit y avoir 800 artisans.

M. PINARD: Sur un total de?

M. BRUNET: Sur un total d'environ 1,265 automobiles, il y a 800 artisans. Cela comprend environ 1,015 propriétaires. Je peux vous donner des chiffres au 30 juin dernier, ça va être plus précis; c'est 1,001 propriétaires et 1,253 voitures. Cela a été inscrit dans une brochure.

M. BOSSE: Mais vous comprendrez la difficulté d'essayer dans un règlement de faire un consensus. Si, d'une part, on a mis un minimum de 60 heures, évidemment, il faut tenir compte du service au public. D'autre part, il y a des gens qui avaient interprété que l'on voulait les obliger à faire moins de 60 heures, alors que c'est l'inverse. Alors, ce n'est pas la personne, c'est la voiture. Vous avez compris cela, vous, très vite.

M. BRUNET: On l'a compris.

M. BOSSE: J'espère que tous vos membres ont compris ça aussi parce que j'ai recueilli certains feuillets qui ont été distribués lors de la réunion au Plateau et ce n'est pas du tout ce qu'on disait sur le feuillet. Je ne connais pas l'auteur et vous savez que je ne suis pas le genre de type à porter des accusations contre qui que ce soit sans en être bien sûr.

Cependant, il y avait des circulaires.

DES VOIX: Oh!

LE PRESIDENT (M. Séguin): A l'ordre, messieurs! Pouvons-nous continuer sur le ton que nous avions il y a 25 secondes? Je demanderais au public de restreindre son appréciation ou ses dénonciations.

M. BRUNET: M. le Président, j'aimerais répondre à M. Bossé qui contourne l'affaire, mais qui dit vraiment que j'en suis responsable.

M. BOSSE: Non, non, pas du tout, au contraire. Je dis que je ne peux pas affirmer cela.

M. BRUNET: M. Bossé, je n'ai absolument rien à faire dans ça.

M. BOSSE: Je sais, M. Brunet, que vous n'avez rien à voir personnellement avec cela. Ceci étant dit, en ce qui a trait au contrôle à Dorval, si vous avez bien lu le règlement, vous avez bien compris aussi qu'il y a là une agglomération à l'aéroport qui comporte aussi un "affectateur", donc un "dispatcher" qui réglerait le problème.

Evidemment, il y aura l'autre partie du problème à régler. Nous avons eu l'occasion aussi au niveau du ministère de rencontrer les représentants du ministère des Transports fédéral sur la question des $0.50 et des $0.25. Bon.

En ce qui a trait à un autre point, c'est le dernier que j'ai retenu, l'uniformisation des tarifs, je voudrais vous rappeler ici que, sans en avoir l'air, c'est bien évident aussi que nous avons participé de très près à essayer de régler aussi ce problème sans faire de bruit et sans faire de manchettes. Si, par les jours qui courent, il y a des manchettes, soyez sûrs que ce ne sont pas toujours les mêmes. Je n'ai jamais vu quelqu'un se promener avec une pancarte, disant "Bossé nous a aidé à uniformiser les tarifs".

Cela étant dit, M. Brunet, je tiens à vous remercier...

M. BRUNET: Peut-être que ce serait à faire. Vous mériteriez, si vous nous donniez tous nos droits acquis, qu'on l'écrive en gros dans les journaux.

M. BOSSE: M. Brunet, je tiens à vous rassurer, cependant, sur la question de quatre passagers dans la voiture. Dans le règlement, cela a peut-être été inscrit comme ça, mais c'est précisément pour ça que nous vous avons consulté. Quant à moi et au comité avec lequel je travaille, c'est certain que quatre passagers, ça nous paraît aussi une autre banalité. Par exemple, en ce qui a trait aux ceintures de sécurité, il n'a jamais été question de forcer le passager à s'attacher. Il n'est pas en avion.

Peut-être qu'un jour ou l'autre ça viendra. Là, il s'agit uniquement de l'inviter. M. Ed-monston, ce matin, nous a démontré que nous avons quand même une certaine responsabilité, du point de vue gouvernemental, d'essayer d'assurer la sécurité du passager.

M. BRUNET: II avait certaines raisons.

M. BOSSE: Pour moi, je tiens à vous remercier de votre collaboration et de votre bel esprit de coopération. Vous nous avez laissé entendre, dans votre mémoire et dans des rencontres antérieures, que vous étiez prêt à collaborer avec le gouvernement dans la mesure du possible pour améliorer les conditions des travailleurs du taxi, des employés et de ceux qui oeuvrent dans le taxi.

Je pense que vous n'êtes pas le principal responsable des choses qui se sont produites antérieurement.

M. BRUNET: Pas le principal, mais j'en suis un.

M. BOSSE: Non, au contraire, je pense que vous êtes un de ceux qui ont essayé de corriger la situation. Je dois quand même, jusqu'à un certain point, vous donner le crédit de cette partie. Le problème reste, quand même, assez entier, à Montréal en particulier.

Je vous remercie et je m'excuse d'avoir été un peu long, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Maskinongé.

M.PAUL: M. Brunet, pourriez-vous nous dire si les propriétaires de taxis, qui sont membres de votre compagnie, sont également détenteurs d'actions de la compagnie?

M. BRUNET: II me fait plaisir de répondre à ça. J'aurais dû vous dire plus tôt que, nous aussi, à la compagnie Lasalle, nous avons subi un regroupement. Au mois de novembre dernier, nous avons formé une corporation qui s'appelle Brunet-Lasalle Corp., en vertu de la première partie de la Loi des compagnies, qui englobe Taxi Lasalle, Garage Rockland, Amore Entreprises, Lasalle Auto Park, Sterling Insurance Co. of Canada, et Station de service Lasalle.

M. PAUL: Est-ce que ces garages sont seulement pour le bénéfice et avantage des membres de votre association ou s'ils desservent également le grand public?

M. BRUNET: Ces garages desservent le grand public, mais ceux qui ont la priorité de service, ce sont les taxis.

M. PAUL: Pourriez-vous me dire, M. Brunet, quelle est la procédure à suivre pour celui qui veut entrer chez vous et quelle est la procédure pour en sortir comme membre?

M. BRUNET: Pour entrer chez nous, il faut qu'il signe un contrat d'adhésion, c'est normal.

M. PAUL: Pour une période de?

M. BRUNET: Aucune période, il peut laisser le lendemain. Nous lui remettons l'argent au prorata versé. Même sur ses assurances.

M. PAUL: Quel est le montant de la cotisation mensuelle que vous exigez de vos membres?

M. BRUNET: Chez nous, nous avons cinq catégories. Nous avons, dans la première catégorie, celui qui a beaucoup d'accidents; il paie $86 par mois, moins $3 s'il paie avant le 10 du mois, ce qui fait $83. Et sur ça, il y a $46.50 d'assurances, qui, au bout d'un an, coûtent seulement $558 pour $500,000 d'assurance, et puis, pour l'assurance-feu et vol, $50 déductibles.

M. PAUL: La contribution — vous me corrigerez — serait à peu près de $30 par mois.

M. BRUNET: De $36.50 par mois.

M. PAUL: J'ai très apprécié l'exposé que vous avez fait. Ce qui me frappe, c'est que vous ne semblez pas craindre, vous non plus, la concurrence dans le service.

M. BRUNET: Pauvre monsieur, c'est normal! S'il n'y avait pas de concurrence, nous n'aurions plus le droit de vivre.

M. PAUL: Mais vous vous opposez énergi-quement, et pour cause, à une association unique?

M. BRUNET: C'est normal. Est-ce qu'on peut se permettre de nous étatiser de la sorte? Je ne veux pas employer le mot, mais ça veut dire ça. Personnellement, s'il faut — il y a des types fiers chez nous — qu'on me paie d'après le bilan et avec un "good will", je ne pourrai pas m'y opposer, mais ça me ferait quelque chose pour mes chauffeurs qui veulent avoir cette fameuse lumière de toit. Ils sont fiers; le nom Lasalle Taxi n'appartient pas qu'à Gégard Bru-net. C'est pour ça qu'à Brunet-Lasalle Corporation on donne des parts gratuitement à nos chauffeurs, propriétaires et employés qui ont fait au moins trois ans, du portefeuille de la famille Brunet.

M. DEMERS: C'est plus fort que le gouvernement.

M. PAUL: M. Brunet, si j'ai bien compris le résumé de votre mémoire, vous ne vous opposez pas au principe d'une réglementation dans l'industrie du taxi?

M. BRUNET: Aucunement.

M.PAUL: Sauf que vous tenez, et avec raison, à ce que les droits acquis soient sauvegardés pour vos membres et pour tous ceux qui oeuvrent dans le taxi, à Montréal surtout?

M. BRUNET: Sur toute la ligne, monsieur.

M. PAUL: Sur toute la ligne. Par contre, pour ceux qui entreront dans cette profession à l'avenir, vous ne mettriez pas d'objection à ce que certaines clauses que l'on retrouve actuellement dans le règlement s'appliquent à eux?

M. BRUNET: Personnellement, non.

M. PAUL: Est-ce que c'est l'opinion de vos membres?

M. BRUNET: Je crois que nos membres seraient pour cela.

M. PAUL: M. Brunet, si la commission en venait à un consentement unanime ou majoritaire pour qu'un comité soit créé, à la fin de nos délibérations, pour analyser de plus près toutes les hypothèses ou les recommandations qui ont été émises et pour voir jusqu'à quel point le règlement aurait besoin d'être modifié, seriez-vous prêt à agir comme conseiller ou à être membre d'un tel comité pour le succès de la réglementation de l'industrie du taxi spécialement à Montréal?

M. BRUNET: J'accepterais volontiers, pour autant que tous les éléments de l'industrie du taxi soient représentés; les chauffeurs, les petits

propriétaires, les propriétaires de flottes. J'accepterai pour autant qu'on me déléguera et que les types auront confiance en moi pour les représenter.

M. PAUL: Est-ce que vous verriez un avantage, M. Brunet, à ce qu'un tel comité soit créé?

M. BRUNET: Assurément monsieur.

M. PAUL: Je vous remercie, vous et les membres de votre association.

M. BRUNET: Merci, M. le député.

LE PRESIDENT (M. Séguin): M. le ministre. Le député de Napierville-Laprairie.

M. BERTHIAUME: M. Brunet, vous oeuvrez dans le taxi depuis 1964, à ce que vous nous avez dit; vous avez sûrement une expérience assez considérable. On a entendu parler, depuis quelques jours, d'une chose qui inquiète plusieurs députés, cette fameuse question des menaces. Avec votre expérience, est-ce qu'il y a quelque chose que vous pouvez ajouter à ce que vous avez entendu vous-même là-dessus, des explications?

Je vous pose cette question parce que, dans des conversations privées, vous comme d'autres d'ailleurs, avez été personnellement accusé.

M. BRUNET: Je suis persuadé que certaines personnes ont reçu des menaces. Je crois M. Pronovost quand il a dit cela à la télévision. Je crois M. Dickey qui l'a dit également. D'ailleurs, je pense que le type le plus frappé par les menaces, c'est moi. On a menacé mon comptable, je ne sais pas quel appel téléphonique. J'ai perdu un employé qui n'a pas été capable de faire face à la musique et qui a laissé son emploi, lundi. C'est fort !

M. BERTHIAUME: Croyez-vous que ces menaces ont été si graves qu'un nombre substantiel de chauffeurs — je pense à eux en particulier — ont pu hésiter à venir témoigner devant la commission parlementaire?

M. BRUNET: Non, je ne crois pas que ce soit à ce niveau. Mais encore là, il faut avoir assez de nerf pour ne pas s'occuper de menaces faites par téléphone. Le type qui veut tirer sur vous ne vous téléphonera pas. Mais je n'aime pas, par exemple, que l'on ennuie mon épouse; je ne veux pas que l'on s'en prenne à mon garçon. Je peux être aussi violent que les autres parce que je suis un être humain et un Québécois.

M. BERTHIAUME: Merci.

M. BRUNET: Hier soir, j'ai eu une discussion avec M. Bossé à ce sujet et je crois qu'il avait été mal informé. Mais je pense qu'il m'a compris.

M. BOSSE: L'intention, je pense bien, était claire, c'était d'éviter qu'on retrouve ce climat de violence morale. C'est tout.

M. BRUNET: Mais, est-ce que, pour votre intervention chez Brunet, hier soir, cela a ramené un climat?

M. BOSSE: Je le souhaite.

M. BRUNET: Non, mais est-ce que le fait d'avoir parlé à Brunet, hier soir, a ramené un climat de sérénité, et ainsi de suite?

M. BOSSE: Je le souhaite. En fait, nous nous sommes souvent parlé. Et M. Brunet peut dire que, depuis le début de l'enquête jusqu'à aujourd'hui, nous avons eu des rencontres très très fréquentes.

M. DEMERS: Le bill omnibus.

LE PRESIDENT (M. Séguin): II ne faudrait pas sauter aux conclusions, dire qu'il y a une société d'admiration mutuelle.

Le député de Lotbinière.

M. BELAND: M. Brunet, d'abord je vous félicite pour votre rapport, et j'aurais une question à vous poser. J'ai écouté attentivement, au fur et à mesure, et cela s'est passé dans un climat tel, que je ne poserai pas tellement de questions.

Demain matin, parmi tous les chauffeurs sous votre égide, si la moitié devenaient des salariés, les services à la population auraient-ils tendance à se détériorer ou s'ils demeureraient les mêmes?

M. BRUNET: Franchement, c'est une bonne question à laquelle je ne pourrais par répondre. Si tout le monde devait travailler de la sorte... Je suis contre l'imposition d'une chose. Il faut la faire accepter par le groupe en question, par les chauffeurs. S'ils acceptent ce mode de travail, si c'est plus avantageux de travailler avec un minimum de $1.65 l'heure et que les chauffeurs travailleront de la manière qu'ils désirent.

Ou s'ils choisissent un autre mode de travail, 40 p.c, l'allocation. Encore là, je comprends que ça prend des normes pour pouvoir les suivre. Il faut se mettre une chose dans la tête. Tous les chauffeurs de taxi ont vraiment hâte de faire partie, à parts égales, des citoyens canadiens, surtout québécois, sur le plan des taxes et ainsi de suite. Ils veulent être reconnus comme citoyens à part entière.

M. BELAND: Mais, compte tenu de la situation qui aurait existé dans d'autres domaines — c'est ce qui m'a porté à vous poser cette question — dans d'autres domaines, la motivation a eu tendance à diminuer lorsqu'il y a eu un transfert de cet ordre. C'était pour ça que je vous posais la question.

M. BRUNET: Si cette imposition venait brimer la logique, je suis persuadé que le service s'en ferait sentir.

M. BELAND: Merci .

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. Brunet, vous avez un beau rapport, très intéressant. En vous écoutant, il ne semble y avoir aucun problème à Montréal, chez vous, du moins. Je voudrais vous demander une chose.

Est-ce que tous vos chauffeurs travaillent sur une base de location ou s'il y en a qui travaillent au pourcentage?

M. BRUNET: Non, c'est le choix du propriétaire de faire travailler son chauffeur comme il l'entend. Nous avons de la location et du pourcentage. Je crois que, dans le moment, et c'est normal, il y a plus de location que de pourcentage, mais nous avons encore quelques petites flottes qui ont conservé le système de pourcentage. Elles perçoivent les rentes, elles perçoivent tout.

Et pour l'allocation, nous sommes seulement obligés de nous conformer aux exigences de la loi de l'assurance-chômage.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous semblez avoir beaucoup d'expérience. Vous pouvez probablement me dire ce qui est plus avantageux pour un chauffeur. Le chauffeur, chez vous, qui marche par système de location ou au pourcentage, d'après vous, qu'est-ce qui est plus avantageux pour lui?

M. BRUNET: Avec le "spirit" d'un travailleur comme ceux que vous avez vus ici, c'est normal que le gars qui fait douze heures, il va lui rester plus en louant son automobile. Je le crois vraiment. D'ailleurs, j'ai eu un chauffeur qui me donnait 40 p.c. et il m'en restait bien plus, à 40 p.c. pour le patron, qu'il n'en restait au chauffeur.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne veux pas vous mettre en contradiction. Un homme a toujours le droit de changer d'idée, mais je me souviens que chaque fois que vous êtes passé à la télévision je vous ai toujours considéré comme un type qui connaît le problème du taxi, vous êtes dedans. Vous êtes probablement un de ceux qui connaissent à peu près le plus tous les problèmes du taxi dans la ville de Montréal. Je vous ai déjà entendu dire que pour le chauffeur qui marchait à 40 p.c. c'était plus avantageux, parce qu'il était certain de retourner chez lui avec au moins quelques piastres dans ses poches. Peut-être que vous avez changé d'idée depuis.

M. BRUNET: Je n'ai jamais changé d'idée.

Disons que le nouveau chauffeur qui s'en vient dans l'industrie du taxi, soyons d'affaires le moindrement, pour lui, à ce moment-là, il vaut mieux apprendre le métier de chauffeur de taxi au détriment du patron que de louer une automobile et de perdre de l'argent. Mais aussitôt qu'il sait faire du taxi, il s'en va à la location.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Alors, à 40 p.c. au début, lorsqu'il apprend le métier, c'est plus payant pour le chauffeur et c'est moins payant pour le patron. C'est cela que vous avez dit?

M. BRUNET: C'est normal.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Maintenant, on parlait tantôt des membres qui peuvent acheter des actions chez vous. C'est cela que vous avez dit. Est-ce que je peux vous demander combien il y a de membres qui ont des actions chez vous?

M. BRUNET: Données ou achetées?

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous disiez que vous donnez des actions aussi.

M. BRUNET: Nous en donnons et ils ont le privilège d'en acheter également.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Combien y a-t-il de membres qui sont détenteurs d'actions chez vous, achetées ou données?

M. BRUNET: Aussitôt l'émission terminée, nous calculons que ce que nous offrons à nos membres va nous coûter 100,000 parts.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela va vous coûter 100,000 parts.

M. BRUNET: D'un portefeuille, qui appartient à la famille Brunet, de 1,692,000 parts.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ce seront des actions vendues en partie.

M. BRUNET: Données.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Données.

M. BRUNET: Nous avons déjà 75,000 actions vendues aux membres.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je lisais tout l'organisme des taxis Lasalle, où vous mentionnez un comité consultatif formé comme suit: quatre chauffeurs, quatre propriétaires. Plus bas, vous ajoutez: Les comités mentionnés ci-haut, régies, autres sous-comités: comité des sports, comité d'entraide, comité de visites industrielles, comité de visites aux malades et aux défunts. J'aurais aimé que vous expliquiez

cela davantage. Qu'est-ce que ces comités apportent aux membres? Est-ce que ce sont des comités, clubs sociaux de rencontres?

M. BRUNET: Ce sont davantage des comités sociaux. En plus de cela, quand on fait le tour d'horizon de tous ces comités, cela intéresse environ 250 à 300 propriétaires ou chauffeurs de Lasalle. Nous avons notre propre ligue de hockey, qui forme quatre équipes. Naturellement...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous ne trouvez pas qu'il y en a déjà assez des ligues de hockey?

M. BRUNET: Oui, les ligues de la ville. Nous avons notre ligue de quilles. Nous avons notre ligue de balle molle. Nous avons notre pique-nique annuel. Nous avons eu un dépouillement d'arbre de Noël cette année. C'est tout le domaine des sports.

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Par contre, il n'y a aucun chauffeur chez vous qui a droit à des jours de maladie quand il est malade, qui paie un fonds de pension, qui a de l'assurance-chômage ou qui paie la rente du Québec. Ils n'ont rien de cela.

M. BRUNET: Dans le moment, avec l'assurance-chômage, le gars qui loue, naturellement, est protégé en cas de maladie, mais encore là, c'est minime. C'est la raison pour laquelle nous disons qu'il faudrait former des organismes. Que l'association paie sa part, le propriétaire, sa part, et le chauffeur sa part. Mais M. le député, je peux vous dire quelque chose.

J'ai envoyé environ 20,000 lettres demandant aux membres d'accepter un plan d'assurance pour les chauffeurs, de leur imposer la chose.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Une assurance-vie?

M. BRUNET: Assurance-vie, maladie, quelque chose de concret. Sur 20,000 lettres j'ai reçu treize réponses. C'est pour ça que je vous demande de l'imposer, ils seront obligés de payer. Je ne veux pas que ce soit le chauffeur qui paye, mais les trois parties d'une manière pensée sainement.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): A l'article 4, c'est marqué: Tous nos chauffeurs sont également protégés contre les blessures et le décès, pour autant que cela se produise en devoir; quelle protection voulez-vous dire?

M. BRUNET: II n'y a aucune compagnie d'assurance actuellement qui peut assurer un groupe soit comme Taxi Lasalle, parce que le chauffeur, c'est normal, est dans une association une journée et le lendemain nous laisse sans le dire, ou bien le propriétaire ne nous le dit pas, quoique nous ayons des dossiers très précis, mais pas assez quant au nombre de chauffeurs, et quant à celui qui est en devoir constamment pour le même propriétaire. La seule chose que nous ayons pu conclure, c'était de donner à un chauffeur qui est blessé en devoir $35 qui sont puisés dans les fonds de Taxi Lasalle. Ce sont les membres qui paient pour cela, c'est normal. Au décès, on lui donne $1,000. Tous les propriétaires, dans la contribution de $36.50, sont assurés pour $1,000 et $2,000. C'est chose du passé mais cela n'existe dans aucune autre entreprise chez nous.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est $1,000 pour mort naturelle et double indemnité en cas d'accident et de mutilation.

M. BRUNET: Exactement, en cas d'accident.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne sais pas si vous pouvez me répondre, naturellement, chaque compagnie ou chaque organisme a son administration, il y a des choses qu'on n'aime pas dévoiler, mais est-ce qu'actuellement c'est vrai qu'à Taxi Lasalle, votre organisme, vous êtes en train de fonder votre propre compagnie d'assurance?

M. BRUNET: Oui, monsieur.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que cela semble vouloir se concrétiser?

M. BRUNET: Le but de...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Excusez, en fondant votre propre compagnie d'assurance, vous demandez aux membres de souscrire des parts, d'investir dans ça? Corrigez-moi, si ce n'est pas exact.

M. BRUNET: Oui, c'est une compagnie publique. D'ailleurs, le but est d'avoir notre compagnie d'assurance, vu que c'est difficile de s'assurer. Actuellement, nous avons travaillé à un système depuis 1964; toutes les pertes sont enregistrées, toutes les réserves sont enregistrées, c'est sûr que nous sommes difficiles à Lasalle, c'est dur, nous sommes obligés de rayer des types qui ont des mauvaises expériences d'accidents, mais nous avons bâti quelque chose et aujourd'hui nous évoluons vers une rentabilité, mais si toutes les associations font comme ça, je crois qu'elles ne seront plus dans le taxi tantôt. Mais votre règlement no 6, avec vos points de mérite, va nous aider énormément à mettre un peu de sérieux chez ceux qui ne sont pas sérieux.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Avant l'heure du souper, vous avez fait une remarque et j'aimerais avoir vos commentaires là-dessus. Vous parliez de l'organigramme qui est ici, vous

disiez que pour l'association des détenteurs de permis vous étiez d'accord, c'est-à-dire une association de détenteurs de permis par région. Maintenant, vous disiez: Ce qui manque, en vertu du bill 23...

M. BRUNET: C'est exact, le carreau rouge.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous disiez: Ce qui manque à côté, c'est un carreau où ce serait écrit: Association des chauffeurs.

M. BRUNET: Exactement.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Lorsque vous parlez, dans votre idée à vous, d'une association de chauffeurs, est-ce que vous parlez d'un syndicat de chauffeurs? Est-ce que vous voulez dire que les chauffeurs devraient être syndiqués, non pas dans un syndicat qui est ce qu'on appelle communément un syndicat de boutique, mais un syndicat fort, qui soit affilié à la FTQ, à la CSN, à la CSD ou à toute autre centrale pour faire des revendications auprès du gouvernement, en somme, faire valoir leurs revendications, faire valoir ce à quoi ils ont droit? Est-ce que c'est ça que vous avez voulu dire?

M. BRUNET: Je veux que ce soient les chauffeurs qui choisissent, s'ils veulent être syndiqués, mais personnellement, je ne favoriserai pas un syndicat ou un autre. Quant à moi, personnellement, on peut inscrire une association de chauffeurs et le faire fonctionner immédiatement, que ce soit n'importe quel syndicat.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne vous demande pas de dire si vous préférez la FTQ ou la CSN, mais lorsque vous parlez d'un syndicat chez vous, vous voulez dire un véritable syndicat.

M. BRUNET: Une véritable association.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Association indépendante ou syndicat affilié qui a une puissance économique, qui a une force de négociation; c'est ça un syndicat.

M. BRUNET: Exactement.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne parle pas de la FCAI, je ne parle pas du syndicat de boutique qu'avait l'Hydro-Québec en 1960. Je parle d'un syndicat qui est accrédité, qui est membre d'une centrale. Lorsqu'on viendra demander quelque chose, que ce soit à la Commission des transports, que ce soit à vous, vos chauffeurs pourront dire: M. Brunet, on veut avoir ça ou ça, négocier. Ils auront une centrale en arrière et des membres qui les appuieront. C'est ça un syndicat.

M. BRUNET: Exactement. Par contre, le groupe qui se réunira choisira le mode de syndicat ou le mode d'association qu'il veut.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je suis d'accord avec vous quand vous dites qu'il faut que ce soient les membres. C'est entendu que si vous faites signer des cartes et qu'il n'y a que 20 p.c. qui signent, ils ne seront pas accrédités. Je vois les chauffeurs dans un syndicat accrédité auprès du ministère du Travail et affilié — je le dis pour moi, je ne vous demande pas si vous pensez cela — à une centrale, peu importe le nom. Ce serait un véritable syndicat.

Il s'agit là de Lasalle, on pourrait parler de Diamond. Je vous dis franchement que je suis contre un syndicat qui serait créé à l'intérieur de votre organisme avec des membres qui appartiennent à Lasalle seulement, des chauffeurs, et qui négocieraient avec vous. Ce serait un syndicat de boutique.

M. BRUNET: Ce n'est pas ça, un instant. Ce sont les chauffeurs de la région métropolitaine.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Moi, c'est comme ça que je le conçois. Nous avons entendu la version de plusieurs chauffeurs. La syndicalisation des chauffeurs à Montréal, ça fait longtemps que ça a été essayé. Cela fait longtemps qu'il y en a qui sont venus à la télévision et qui ont dit: On représente presque tous les chauffeurs, et on s'apercevait qu'ils représentaient à peu près rien. Vous savez peut-être à quel organisme je fais allusion.

Je ne parle pas du chauffeur artisan, il peut se syndiquer aussi, quoique au sens du code du travail ce n'est pas un employé. Le chauffeur qui est chez vous, qui a sa voiture, n'est pas un véritable employé salarié. Mais du syndicalisme, par des lois, on en créé de toutes sortes. On a adopté une loi pour le syndicalisme agricole; ce ne sont pas, en somme, des employés, ce sont des propriétaires de ferme.

Le seul moyen d'avoir un groupe vraiment représentatif en face de votre organisme, en face de la Commission des transports, du ministre ou du gouvernement, c'est que tous les chauffeurs soient dans un syndicat affilié à une centrale, un syndicat fort. Ici, vous voyez trois ou quatre petits chauffeurs de taxi qui parlent à titre individuel, tandis qu'à ce moment-là il y aurait des directeurs élus qui viendraient ici et parleraient en leur nom. Et ils iraient chez vous aussi et diraient: M. Brunet, à présent, nous les chauffeurs voulons ça, ça et ça.

M. BRUNET: Avec notre système, ils n'auront pas d'affaire à faire ça pour la simple raison qu'il n'y aurait aucun propriétaire dans leur groupement, aucun propriétaire même artisan. Et ils vont faire le "deal" avec qui? Ils vont négocier les conventions collectives avec l'association des propriétaires. A ce moment-là, ce ne sont pas les associations qui vont dicter aux chauffeurs quoi faire. Nous allons garder nos normes de discipline, c'est normal.

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui, c'est entendu mais les propriétaires ou dirigeants ou présidents d'associations comme Lasalle, Diamond ou une autre seront obligés de négocier avec les chauffeurs.

M. BRUNET: Par le truchement de l'association?

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui, c'est ça.

M. BRUNET: Par le truchement de l'association.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Tout ce que je veux vous dire, c'est que je suis entièrement d'accord avec vous sur une Association des chauffeurs, ce serait une véritable association syndicale, pas une association de boutique et pas une association contrôlée par quelqu'un, un employeur ou n'importe.

M. BRUNET: C'est ça. M. Tremblay...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est tel que je le vois. Je suis un syndicaliste et j'essaie de parler comme un législateur. Mais il y a toujours un petit fond de syndicaliste quand même; c'est parce que je m'y connais un peu là-dedans. J'ai trop vu de syndicats de boutique et j'ai trop vu de syndicats créés à l'intérieur d'un organisme de connivence avec un patron. En somme, ce n'était pas du syndicalisme. Si les chauffeurs font cela, ils ne réussiront rien.

M. BRUNET: M. Tremblay,...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je voudrais que vous me laissiez finir. Le gars, le chauffeur artisan... Le gouvernement a de la réglementation à faire. Les propriétaires de flotte, les dirigeants d'entreprise comme vous... Mais le gars le plus massacré, le plus bafoué, dans l'industrie du taxi, à mon sens — il y a un an, je n'étais pas un personnage officiel comme M. Bossé; je n'étais pas nommé par le gouvernement, mais j'ai fait une enquête au nom de mon parti — c'est le petit chauffeur, qui loue son véhicule $12. Il n'a rien, lui, il n'a aucune force devant vous, devant personne; il n'a pas d'assurance, de jours de maladie, de fonds de pension. C'est pour ça que vous voyez aujourd'hui — vous avez dit que vous étiez d'accord — des gens qui ont 65 ans, qui sont malades et qui ne peuvent pas laisser le taxi car, s'ils le laissent, ils n'ont plus rien, pas même les rentes du Québec.

Je vous félicite d'avoir des comités qui organisent des visites aux défunts dans les cimetières...

M. BRUNET: Non, un instant. Il y a assez de gens qui peuvent rire d'un comité consultatif, mais, chez nous, il est vraiment fonctionnel.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Les visites aux malades et aux défunts. Vous allez le voir quand il est malade et après, quand il est mort.

M. BRUNET: Non, pas nécessairement. Nous l'entretenons.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous l'entretenez une fois qu'il est mort.

M. BRUNET: De son vivant.

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Trève de plaisanteries. C'est bien ce comité, mais il reste que le chauffeur n'a rien.

M. BRUNET: La seule chose, dans le moment, que nous donnons aux chauffeurs, dans la mesure du possible, et que nous avons pu faire pour eux, c'est d'essayer d'aider nos bons chauffeurs en les rendant propriétaires. Je crois que ce fut le plus beau système collectif chez nous et, en plus, les petits $35 par semaine. Que voulez-vous, c'est minime, mais c'est tout ce que nous pouvions leur offrir. Et $1,000 à la mort.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Une dernière question.

Demain matin — je ne suis pas député — vous apprenez que, parmi tous vos chauffeurs artisans, Charles Tremblay fait une campagne, fait signer des cartes pour un syndicat, que ce soit la CSN ou la FTQ. Me mettriez-vous des bois dans les roues ou si vous diriez: Si les gars veulent se syndiquer, je les laisse faire?

M. BRUNET: Monsieur, je crois qu'aucune association ne s'y opposerait.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Pas vous?

M. BRUNET: Du tout. Mais, par contre, encore là, je vous l'ai dit tantôt, si vous vous souvenez bien, je ne suis pas une compétence en syndicalisme, mais je voudrais que ce soit une affaire très fonctionnelle. Cela fait assez longtemps que nous jouons. Il faut que ce soit quelque chose de fonctionnel, pour tous les niveaux de toute l'industrie du taxi.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous êtes d'accord que, si l'on veut syndiquer les chauffeurs, ce n'est pas le rôle du gouvernement d'organiser des syndicats, mais il faut que ce soit épaulé par le ministère du Travail ou par le gouvernement. C'est-à-dire que seuls, eux-mêmes, ils ne peuvent pas. Parce que cela fait combien d'années qu'ils essaient de se syndiquer, les chauffeurs? Vous le savez, souvent, à la télévision, nous entendons dire: J'ai tant de membres, je ne donnerai pas de nom, mais, à la fin du compte, le gars déclarait qu'il n'avait pas de membres.

Alors, il faut absolument que ces gens soient aidés si nous voulons qu'un jour ils fassent partie d'un syndicat.

M. BRUNET: M. Tremblay, je crois, sur ça, que ça prend une imposition. Il faut une accréditation qui est de 50 p.c. plus 1, je suppose.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui.

M. BRUNET: Mais, encore là, il faut absolument réunir les chauffeurs avant. J'aime la démocratie, moi. J'aime vivre dans un pays comme le nôtre, parce que la liberté n'a pas de borne. Ces gars, qu'ils choisissent le genre de syndicat ou d'association qu'ils veulent et que ce soient eux qui s'expriment. Et les vendeurs de ci et de ça, ils courront.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui.

Lorsque le gouvernement a institué la loi du syndicalisme agricole, il s'est servi d'un référendum, et les gens ont dû se prononcer en faveur, en majorité, sinon la loi serait tombée dans les tiroirs. Il est entendu que nous ne pouvons pas dire: Nous vous formons en syndicat, s'il n'y a que 20 p.c. qui le veulent. Il faut 50 p.c. plus 1. Je suis d'accord avec vous. C'est démocratique.

M. BRUNET: Il faudrait absolument que ça existe, sans cela, si nous n'avons pas un autre moyen d'association, vous aurez travaillé tout ce temps pour rien.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Une dernière question. Est-ce que vous voyez le tableau? Une association, ici, des détenteurs de permis, mais une association sous forme de coopérative qui donnerait les services d'achat, les bénéfices marginaux, la réparation, des assurances, pour autant que ce serait une concurrence loyale. On ne dirait pas: C'est la seule, les gens sont obligés d'aller là et Lasalle disparaît. Pour autant qu'ils vous laissent vivre, cette concurrence loyale, vous seriez prêt à l'accepter?

M. BRUNET: A n'importe quel temps, monsieur, mais il faut s'entendre. Au niveau de l'association, en haut sur le tableau, qu'on appelle ici l'Association des propriétaires...

M. PINARD: L'Association des détenteurs de permis.

M. BRUNET: Elle aurait un code d'éthique professionnelle.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ce n'est pas le règlement no 6.

M. BRUNET: Ces normes sont restreintes. C'est pour représenter quoi? Représenter les chauffeurs pour négocier une augmentation des tarifs avec le gouvernement. Il y aurait peut-être un genre de groupe pour établir une régie de surveillance, peut-être sur les associations; par contre, cela se limite là. Tous les propriétaires feraient partie de cette affaire-là qui va coûter peut-être seulement $5 par année. Mais si un groupe veut lancer une association ou une coopérative, il n'y a aucune loi qui l'en empêche mais pas avec ce nom-là, parce que cela va être une affaire vraiment représentative au gouvernement.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Non, il y a l'Association des détenteurs de permis, il peut y avoir une association de services et tout ce qui descend en bas, achat d'équipement, réparation, assurance et tout.

M. BRUNET: On ne parle plus de la même chose. Là on essaie de faire quelque chose de fonctionnel pour tous les cadres. Si on arrive avec une association dont tous les détenteurs de permis vont faire partie, ce n'est pas normal que cela reste comme cela est en bas.

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Non, ça c'est une autre chose. En bas, appelez cela une coopérative.

M. BRUNET: Non. Ils auront le droit de le faire pour autant...

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Mais ils n'obligent pas un gars qui est dans Lasalle à entrer là-dedans; il y va s'il veut.

M. BRUNET: S'ils veulent lancer une association, qu'ils l'appellent la coopérative XZ.

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Même sans que ce soit un organisme de l'Etat comme l'Hydro, la Régie des rentes du Québec ou peu importe. Mais que ce soit un organisme qui est épaulé par l'Etat pour être mis sur pied et structuré, vous êtes d'accord. Cela pour vous, c'est une concurrence très loyale?

M. BRUNET: Concurrence très loyale pour autant que cela ne devient pas l'association qui va nous représenter au gouvernement.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Très bien, merci.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le ministre des Transports.

M. PINARD: M. Brunet, pourriez-vous nous expliquer quelle est la formule corporative de Taxi Lasalle Inc. et nous dire si c'est sensiblement la même formule que celle de Diamond, par exemple?

M. BRUNET: Je crois que je ne connais pas la formule de Diamond.

M. PINARD: Vous étiez ici.

M. BRUNET: J'étais ici quand ils ont parlé de cela. Disons que c'est un "holding compa-

gny", c'est une compagnie de gestion, je suppose, comme Brunet-Lasalle devient une compagnie de gestion.

M. PINARD: Alors, je ne vous demanderai pas de faire de comparaisons avec la compagnie Diamond, je vais m'en tenir à votre situation à vous.

M. BRUNET: Parfait.

M. PINARD: Vous avez déclaré tantôt devant la commission que Taxi Lasalle est une association de services.

M. BRUNET: Taxi Lasalle (1964) Inc. est une association de services.

M. PINARD: Est-ce qu'il y a une autre association de taxis Lasalle antérieure à celle de 1964 et qui est encore en existence?

M. BRUNET: Non.

M. PINARD: Alors, la seule qui a une entité juridique est Taxi Lasalle (1964) Inc.

M. BRUNET: Exactement, avec une lumière de toit brevetée, même la couleur est enregistrée.

M. PINARD: C'est une compagnie avec ou sans but lucratif?

M. BRUNET: En vertu de la première partie de la Loi des compagnies.

M. PINARD: Avec but lucratif. M. BRUNET: Oui, monsieur.

M. PINARD: Qui en est le propriétaire majoritaire?

M. BRUNET: Gérard Brunet.

M. PINARD: Je ne veux pas vous faire dévoiler des choses. L'impôt connait votre situation, quel pourcentage?

M. BRUNET: Disons qu'avant que la compagnie soit publique Brunet détenait 100 p.c. des parts de Taxi Lasalle. Mais aujourd'hui le propriétaire de Taxi Lasalle (1964) Inc. devient vraiment Brunet-Lasalle Corporation.

M. PINARD: Vous avez également une compagnie de portefeuille.

M. BRUNET: Exactement.

M. PINARD: Est-ce qu'elle porte un nom, cette compagnie-là?

M. BRUNET: La compagnie de portefeuille, on peut appeler cela plutôt une compagnie d'assurances. Les placements sont faits par le truchement de Sterling, qui va fonctionner bientôt.

Les placements, les investissements, c'est dans Sterling Insurance Company of Canada. Pour avoir notre charte, ça prend tant d'investissements. Le mot "Sterling" change et ce sera La Concorde, vu qu'au Québec on aime le français.

M. PINARD: C'est la même organisation sauf qu'elle a changé de raison sociale.

M. BRUNET: Exactement. La Concorde va devenir la propriété de Brunet-Lasalle Corporation.

M. PINARD: A part cette compagnie d'assurances qui porte le nom de La Concorde, avez-vous d'autres compagnies qui dispensent des services aux membres de l'Association de taxis Lasalle Inc.?

M. BRUNET: Nous avons des garages, comme la Station de service Lasalle, qui reçoivent les clients, pas nécessairement de Taxi Lasalle, tout genre de clients, à titre de clients.

M. PINARD: Vous avez dit tantôt que vous donnez des actions gratuitement à des membres de votre organisation; quelle sorte d'actions donnez-vous aux membres de votre organisation?

M. BRUNET: Des actions de Brunet-Lasalle Corporation.

M. PINARD: Qui est la compagnie de portefeuille?

M. BRUNET: Pardon?

M. PINARD: Ce sont des actions ordinaires de...

M. BRUNET: Des actions ordinaires.

M. PINARD: ... la compagnie de portefeuille.

M. BRUNET: Exactement.

M. PINARD: Vous dites que vous en donnez et vous dites que vous en vendez.

M. BRUNET: C'est sûr.

M. PINARD: Les actions que vous donnez, elles ont une valeur de combien?

M. BRUNET: La valeur aux livres actuellement est de $1.95; naturellement, dans le prospectus, la vente se fait à $2 plus 10 p.c. aux courtiers.

M. PINARD: Quelles sont les conditions de ce don d'actions avec les ventes?

M. BRUNET: La seule condition qui existe chez nous, pour celui qui en fait la demande, est d'avoir oeuvré au moins trois ans au sein de Taxi Lasalle. Celui qui a trois ans de travail chez nous obtient quinze parts pour les trois premières années et je crois que nous ajoutons trois parts tous les ans.

M. PINARD: S'il quitte la compagnie?

M. BRUNET: Ses parts sont à lui, monsieur.

M. PINARD: Est-ce qu'elles sont négociables, transférables?

M. BRUNET: Espérons qu'ils vont reprendre la spéculation.

M. PINARD: Ce sont des parts qui viendront éventuellement sur le marché.

M. BRUNET: Exactement.

M. PINARD: Elles seront participantes, évidemment.

M. BRUNET: Participantes.

M. PINARD: Même les profits. Pourquoi cette distinction entre ceux qui peuvent avoir des actions gratuitements et ceux qui doivent les acheter? Vous avez dit également que vous vendiez des actions.

M. BRUNET: Exactement.

M. PINARD: Est-ce que ce sont des actions de même nature?

M. BRUNET: Oui, la même nature. Par contre, avec la première émission d'actions, au nombre de 400,000, nous avons droit de vendre ces 400,000 et les parts que nous donnons, nous les donnons du portefeuille de la famille Brunet; ce sont des parts qui appartiennent en propre à la famille Brunet.

M. PINARD: Quel avantage a celui qui achète des actions chez vous plutôt que celui qui demande d'en recevoir gratuitement?

M. BRUNET: Naturellement, nous ne donnons pas des actions à la poche, chez nous.

M. PINARD: Je comprends.

M. BRUNET: C'est normal que le type qui a oeuvré au sein de Taxi Lasalle durant quinze ans reçoive soixante parts; s'il veut se rendre à cent, il va en acheter quarante, soit directement du promoteur ou directement de son courtier. Elles ont la même valeur.

M. PINARD: La seule valeur des actions données ou vendues n'est relative qu'aux va- leurs générales, globales de la compagnie de portefeuille, de la "holding company" comme on l'appelle.

M. BRUNET: Exactement.

M. PINARD: Est-ce qu'elles sont également participantes dans d'autres compagnies filiales?

M. BRUNET: Comme c'est une compagnie de gestion, ce sont des parts de Brunet-Lasalle Corporation. Par le fait même, chacune des compagnies, comme moi, qui détenais la majorité des parts dans Taxi Lasalle (1964) Inc., j'ai transporté ou j'ai vendu toutes mes parts à Brunet-Lasalle Corporation. Nous avons seulement des parts nominatives, trois parts, pour garder un président, un vice-président et un secrétaire pour former les cadres. Dans chacune de nos compagnies, c'est pareil.

M. PINARD: Quels sont les actifs de la compagnie de portefeuille? Je ne veux pas être indiscret. Je vous laisse libre de répondre.

M. BRUNET: Non, ça me fait plaisir; ça en a fait rire plusieurs. C'est public, vous pouvez voir les prospectus. Disons que c'est d'environ $7 millions.

M. PINARD: Et le compte de surplus est indiqué également dans le document?

M. BRUNET: Le compte de surplus est d'environ $3 millions.

M. PINARD: Hier, nous avons entendu un M. Houde qui a prétendu avoir été autrefois au service de votre compagnie.

M. BRUNET: Non, il est encore au service de notre compagnie.

M. PINARD: Je ne veux pas vous mettre en brouille avec lui, mais c'est pour avoir certaines précisions. Vous l'avez écouté faire sa déclaration hier. Il a semblé faire des reproches à votre organisation au plan du coût assez exorbitant des assurances.

M. BRUNET: Mais tantôt je vous ai expliqué que chez nous, nous avons cinq classes différentes. Pour la première classe, nous arrivons à $558. Si M. Houde était dans la deuxième classe, vous pouvez ajouter $72 à $558, ce qui ferait $620.

Si nous essayons d'avoir tout dans la même compagnie d'assurances, c'est pour avoir de meilleurs prix, et c'est normal. Mais nous n'avons pas le droit dans le moment de prendre des assurés de l'extérieur, il faut absolument qu'ils soient membres de la compagnie de Taxi Lasalle, qu'ils en fassent partie.

Il y en a énormément, même qui sont peut-être ici ce soir. Nous, quand une assurance

demande le "less ratio" nous sommes obligés de lui donner le "less ratio". Et c'est rare qu'ils puissent se placer à meilleur prix. Nous avons entendu des types hier déclarer des $1,200, $1,300 ou $1,500 d'assurance.

M. PAUL: Quel est le maximum chez vous?

M. BRUNET: C'est $125 par mois, moins les $36.50. Environ $1,000. Franchement, $1,000, c'est parce que le type nous coûte plus que $1,000 par année. C'est pour les trois dernières années, ça.

M. PAUL: Parce qu'il a un mauvais dossier.

M. BRUNET: Oui. Mais remarquez bien que les mauvais risques en accident, on dirait que ce sont toujours les mêmes qui les ont.

M. PAUL: Ou souvent c'est seulement une malchance, mais qui est dispendieuse.

M. BRUNET: Par contre, il ne faudrait pas juger le type qui va occasionner un accident dans dix ans, qui va coûter $25,000, et le mettre dans la cinquième classe. Cela se fait conjointement avec la compagnie d'assurance et la direction de Lasalle. Il va monter de classe mais d'une manière souple.

LE PRESIDENT (M. Caron): M. le ministre.

M. PINARD : Est-ce que le membre de votre association est obligé de s'assurer chez la compagnie d'assurances Concorde ou chez Sterling?

M. BRUNET: Dans le moment, la Concorde n'est pas en vigueur. Nous faisons présentement affaires avec United Canada, qui appartient à des intérêts américains, mais il est obligé d'appartenir à notre système, sauf en quelques occasions. Le type peut nous arriver — cela peut arriver une fois par année — et dire: J'ai une assurance qui expire dans deux mois. Mais encore là, c'est très difficile qu'il entre dans la première classe quand il entre à Lasalle.

La première chose que nous lui demandons, c'est un "less ratio" d'où il travaillait et une lettre de recommandation. C'est pour ça que nous n'acceptons pratiquement pas de flotte chez Lasalle.

M. PINARD: Est-ce qu'il est libre ou non de s'approvisionner en services chez vous pour l'huile, les pièces, etc.?

M. BRUNET: S'il fallait que tous nos taxis nous fassent vivre, nous encouragent, ce serait formidable. Disons qu'il fait ce qu'il veut. Par contre, c'est à nous de lui trouver des avantages pour l'amener chez vous. Je défie n'importe qui en ville de vendre l'essence à un meilleur prix que Lasalle.

Nous avons un système de points, à raison de deux points par mois. Le type qui vient acheter l'essence dans un de nos cinq garages, a une carte et nous lui donnons un poinçon sur sa carte. Et s'il y en a 20 par mois, c'est facile, 20 marques par mois — nous ne comptons même pas le nombre de gallons, c'est qu'il a visité 20 fois nos garages pour de l'essence — cela lui donne $2, deux points par mois.

S'il fait ses réparations dans nos garages, un minimum de $40 par mois, disons, dans le débossage, un travail de $200 par année, $50 ou $60, c'est capitalisé naturellement, $2 de plus par mois; s'il arrive dans ses assurances avec un "less ratio" de moins de 15 p.c, c'est-à-dire que ça n'a pas coûté à la compagnie moins de 15 p.c, il obtient encore deux autres points. Donc, il y a une possibilité de huit points par mois; multipliez cela par douze, cela fait 96 points, $96 par auto. Nous envoyons un chèque une fois par année.

Nous avons commencé ça au mois de juin, c'est drôle que ça fonctionne à merveille. Cela nous a coûté des milliers de dollars.

LE PRESIDENT (M. Caron): M. Brunet, je m'excuse, il y a une personne dans la salle qui semblerait faire une remarque et le député de Maskinongé aimerait que cette personne pose sa question.

M. PAUL: Ce n'est pas ça. Je vous ai signalé que quelqu'un dans la salle semblait manifester le désir de poser une question. Il ne m'appartient pas de décider si ce monsieur doit oui ou non poser sa question. Il appartient à la commission de décider.

LE PRESIDENT (M. Caron): Est-ce que les membres sont consentants? Une question seulement.

Veuillez vous identifier.

M. HOUDE (Donald): On a mentionné mon nom, c'est la raison pour laquelle je me suis approché. Je ne voudrais pas être en brouille avec M. Brunet. Je pense qu'il va le prendre en bonne part de toute façon. Si cela ne faisait pas mon affaire d'être chez Lasalle, je serais parti. Je suis encore chez Lasalle. Quand je me suis informé auprès d'autres compagnies pour avoir des taux d'assurance, j'ai eu l'information que j'ai eue! Et si j'ai fait une déclaration mardi qui a pu m'entrainer des problèmes, c'est parce que j'ai sursauté d'une fausseté qui avait été dite par Bélair Insurance Company. Ce n'est pas le système chez Lasalle que j'ai dénoncé. Chez Lasalle, on n'assure pas d'autres propriétaires que ceux de Lasalle.

Mon intervention visait à dire que c'est tout le système au complet. M. Brunet assure les taxis Lasalle et seulement ceux-là. Mais il y aurait peut-être d'autres moyens d'assurer les voitures-taxis et je pense que M. Brunet est prêt à voir s'il y a d'autres moyens d'assurer les voitures-taxis.

Moi, je ne lui dirai pas quoi faire, mais je sais qu'il y a d'autres moyens. Si ce n'est pas payant d'assurer des voitures-taxis, il y a peut-être d'autres moyens pour que ce soit plus à votre avantage et je pense que lui et nous, les petits propriétaires artisans, allons être satisfaits. C'est ça que je voulais rectifier.

M. PINARD: M. Houde, est-ce vous qui avez suggéré la création d'une régie d'assurances pour le taxi?

M. HOUDE (Donald): Ce n'est pas moi qui l'ai suggéré, il y en a beaucoup qui l'ont suggéré avant moi. Ce n'est pas une idée nouvelle. J'irais même jusqu'à suggérer que cette société assure plus que les taxis. Je vous donne comme exemple la Commission de transport de la communauté urbaine de Montréal. Elle n'a pas d'assurance-commission et je vous mets au défi de trouver un automobiliste à Montréal qui va aller "niaiser" un autobus parce qu'il sait très bien que ça va lui prendre un "sacré" bout de temps avant de collecter quelque chose, il sait qu'il a affaire à des gars "tough" pour se faire payer. Pourquoi ne serions-nous pas dans cette position? On arrêterait de se faire "niaiser" dans les rues.

LE PRESIDENT (M. Caron): Merci, M. Houde. La parole est au député de Lotbinière.

M. BELAND: M. le Président, étant donné que M. Brunet a fait allusion tout à l'heure au fameux règlement concernant les points de démérite, est-ce qu'il pourrait aller un peu plus loin à l'intérieur de ce à quoi il faisait allusion ou encore, peut-être sous un autre angle? Est-ce que, dans le futur règlement no 6, après qu'il sera réimprimé autrement, supposons-le, vous pensez qu'il serait nécessaire d'adopter une formule quelconque pour les taxis relativement aux points de démérite parce que vous savez que c'est douze points maximum? Supposons que le type, après avoir oublié de signaler à un coin de rue cinq fois consécutives, il est cuit, il perd son permis. Alors, étant donné la grande quantité de milles que chaque chauffeur fait par année, pensez-vous qu'il serait nécessaire à l'intérieur du règlement no 6 d'essayer de trouver une procédure pour adoucir ce règlement pour les chauffeurs de taxi?

M. BRUNET: Les cas minimes pourraient vraiment être aidés, peut-être moins de points de démérite, mais il y a des cas graves sur lesquels il faut se pencher. La boisson et des choses du genre, il faut se pencher sur cela.

M. BELAND: D'accord.

LE PRESIDENT (M. Caron): La parole est au député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je veux tout simplement revenir sur une chose. Lorsque vous parliez tantôt des parts données à vos membres et que vous disiez que ça coûte tant à la famille Brunet, c'est vous...

M. BRUNET: Mon épouse, mon fils et moi.

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous dites votre fils. C'est votre fils?

M. BRUNET: C'est cela.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne le savais pas. Lorsque vous parlez de parts que vous donnez — je ne parle pas de celles que vous vendez — volontairement à vos membres — vous avez mentionné un chiffre — combien cela vous coûte-t-il?

M. BRUNET: J'ai mentionné un chiffre, je n'ai pas dit combien ça me coûtait. J'ai dit qu'on se départissait de 100,000 parts.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): De 100,000 parts.

M. BRUNET: De notre portefeuille.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela peut représenter quel montant?

M. BRUNET: On a dit qu'elles valaient $1.95.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cela veut dire un montant autour de $200,000...

M. BRUNET: Environ.

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): ... que la famille Brunet donne aux membres de Lasalle.

M. BRUNET: Exactement.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous donnez cela sans obligation.

M. BRUNET: Je ne voudrais pas employer le mot "donner". Si on fait cela, c'est parce que les gars ont tellement travaillé pour ce fameux nom, c'est un genre de remerciement. C'est cela, ce n'est pas un don.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que c'était dans le dépouillement de l'arbre de Noël?

M. BRUNET: Non, monsieur. C'est un rêve qu'on réalise.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si ç'avait été le cas, j'y serais allé. Qu'un homme, qu'une famille donne $200,000 à ses membres comme cela, c'est la première fois que je l'entends dire. Je vous avoue franchement — je suis bien honnête avec vous — que je suis bien sceptique

et je me demande pour quelle raison vous le faites.

M. BRUNET: Pas seulement les membres, les employés, les chauffeurs et tous à part égale. Même si le gars a 20 véhicules chez nous, c'est le nombre d'années qui compte. On va semer quoi, avec cela? On va faire participer nos membres à une collectivité, c'est formidable. Ce sera formidable, tantôt, ce seront des types ancrés .qui seront chez nous. Cela en vaut la peine. On a vu une autre compagnie qui a dernièrement octroyé des parts gratuitement à ses employés avec le privilège d'en acheter. Je ne me souviens pas exactement de la compagnie mais cela a existé. Le rêve que je réalise là est un rêve que j'avais fait en 1964. Les étapes ont été brûlées peu à peu jusqu'en 1972.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous pensez à cela depuis 1964, à donner $200,000.

M. BRUNET: Non, un instant! Il n'a pas été question de cela. J'ai pensé à former ce que nous avons formé. Par contre, on ne pensait pas prendre autant de temps à former une gestion.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si un bon jour, en 1964, vous aviez rêvé d'être obligé de donner, en 1972, $200,000, ce devait être un cauchemar, en 1964.

M. BRUNET: En 1964, si j'avais simplement travaillé pour de l'argent, je n'aurais pas réussi. Ce sont les heures, c'est l'ouvrage, c'est le temps passé.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): D'accord.

M. PAUL: Vous réalisez que votre succès personnel est le résultat de la solidarité, de l'honnêteté, de la collaboration et de la confiance de tous vos employés et associés.

M. BRUNET: Absolument.

LE PRESIDENT (M. Caron): Sur le même sujet, le ministre des Transports.

M. PINARD: M. Brunet, avec l'exemple que vous venez de fournir, évidemment, tout le monde est libre de vous croire ou pas, mais ça me rappelle des études que j'ai faites sur la coparticipation dans les entreprises de même que sur la cogestion qui pouvait être faite dans les entreprises. Est-ce cela que vous avez essayé d'expérimenter et de réaliser chez vous?

M. BRUNET: Disons que j'ai essayé de semer la collectivité, de semer un bloc solide de gens fiers d'appartenir à leur entreprise; éventuellement, ils vont détenir de plus en plus de parts. Vous n'avez pas besoin de contrôler à 51 p.c. une compagnie comme la nôtre pour en garder franchement le contrôle. Eventuelle- ment, on se dirige vers de nouvelles acquisitions et ainsi de suite. Le pourcentage de la famille Brunet va descendre, c'est normal, ça ne peut pas rester là. Il va descendre en achetant nos parts.

LE PRESIDENT (M. Caron): Le député de Napierville-Laprairie.

M. BERTHIAUME: Commençons au début. Etes-vous cotés, à l'heure actuelle?

M. BRUNET: Nous sommes cotés depuis que la première émission a été vendue.

M. BERTHIAUME: A quelle Bourse? M. BRUNET: Canadienne.

M. BERTHIAUME: Vous avez parlé de votre prospectus; est-ce que votre prospectus fait mention des acquisitions éventuelles, autrement dit de vos besoins futurs en capital? Vous avez mentionné tantôt...

M. BRUNET: Le but de la formation de la corporation est l'acquisition de Sterling et le produit des ventes de ces actions va servir à l'acquisition de Sterling.

D'ailleurs, Sterling, dans le moment, m'appartient personnellement et il faut que Brunet-Lasalle remette à Gérard Brunet l'argent de Sterling, aux mêmes conditions que je l'ai acheté sans faire un sou dessus.

M. BERTHIAUME: D'accord pour l'acquisition de Sterling, j'ai compris ça. Je ne veux pas dévoiler de secret ou de stratégie éventuelle, c'est pour ça que je vous parle de votre prospectus. Fait-il mention de besoins, à court ou à moyen terme, dans le même domaine ou dans d'autres domaines? Le "holding", ça peut être bien des affaires.

M. BRUNET: Le prospectus montre tout le portrait de l'affaire. D'ailleurs, nous avons le droit de fermer l'émission à 250,000 actions vendues; nous n'avons pas besoin d'aller à 400,000. Si nous nous rendions jusqu'à 400,000, naturellement, notre capital de travail serait encore plus intéressant.

M. BERTHIAUME: Je pose la question de façon différente. Vous dites qu'il y a 250,000 actions qui seraient disponibles?

M. BRUNET: Dans le moment, il y en a 400,000 de disponibles, mais nous avons le droit...

M. BERTHIAUME: Cela représente quel pourcentage au total, 13 p.c. ou 14 p.c?

M. BRUNET: A 400,000, c'est 17 p.c.

M. BERTHIAUME: A 250,000, cela fait un peu plus que 13 p.c.

M. BRUNET: Cela fait 13 p.c.

M. BERTHIAUME: La moitié de cela. Le but de ma question est de savoir ce qui vous inciterait à passer de 250,000 à 400,000 si la Commission des valeurs mobilières vous en donnait le droit.

M. BRUNET: Naturellement, c'est toujours d'après les lois du ministère des Institutions financières. On nous donne six mois pour vendre une émission, mais j'ai simplement voulu être prudent, avoir le droit de fermer mon émission sans qu'elle puisse être renvoyée. Donc, à 250,000, j'ai demandé de pouvoir la clore.

M. BERTHIAUME: Vous avez également parlé d'une participation à votre entreprise par la vente d'actions à vos employés. Avez-vous un programme qui permet à vos chauffeurs, détenteurs de permis, d'acquérir ces actions par déduction à la source d'une façon quelconque et avec un escompte ou si c'est au prix du marché?

M. BRUNET: C'est le seul moyen que nous avons pu trouver pour pouvoir en vendre aux employés. Nous le faisons seulement pour les employés attachés directement à Lasalle. Nous les faisons passer à la banque et Brunet personnellement garantit le prêt. Mais la compagnie n'a pas le droit de garantir les prêts pour l'achat de ces parts.

M. BERTHIAUME: II n'y a pas de prix préférentiel par rapport au marché?

M. BRUNET: Non, aucunement.

LE PRESIDENT (M. Caron): Si le député de Sainte-Marie le permet, nous allons donner une chance au député de L'Assomption et vous reviendrez après, s'il vous plaît.

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Avez-vous déjà écouté le monologue d'Yvon Deschamps, lorsqu'il parle de son "boss"?

M. BRUNET: Non.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous l'écouterez.

LE PRESIDENT (M. Caron): Le député de L'Assomption.

M. PERREAULT : Vous avez mentionné que vous auriez votre propre compagnie d'assurance, sous le nom de Concorde. Cette compagnie d'assurance sera ouverte au public et aussi, je le suppose, aux autres détenteurs de permis qui ne feront pas partie de Lasalle, après.

M. BRUNET: Disons que Concorde fonctionnera dans la province de Québec. Nous avons une charte qui est valide en Ontario également, mais nous allons commencer avec le Québec. Au début, nous allons assurer strictement taxi Lasalle, en ce qui concerne le taxi, mais nous ouvrirons l'horizon au fur et à mesure que nous avancerons. Il nous faut aller chercher des profits dans le public, ce sont nos espérances.

M. PERREAULT: Je voudrais vous poser une autre question. Vous avez mentionné tout à l'heure, dans votre exposé, que vos assurances avec United Canada prévoyaient une assurance-responsabilité de $500,000, dans le moment. Dans le règlement no 6, on mentionne $100,000 comme assurance-responsabilité. Croyez-vous que c'est trop bas, $100,000?

M. BRUNET: Dans le moment, la loi dans la province de Québec exige $35,000. Alors, $100,000, c'est beaucoup mieux. Je n'ai jamais vu de poursuite de $500,000, mais, pour peut-être $3 ou $4 par année, cela en vaut la chandelle.

M. PERREAULT: Alors vous croyez que, pour le taxi...

M. BRUNET: Pour protéger l'individu.

M. PERREAULT: Pour protéger l'individu, l'assurance-responsabilité, dans le taxi, pourrait aller au-delà de $100,000.

M. BRUNET: Je crois que $100,000, c'est bas, mais qu'il soit permis à ceux qui le veulent d'aller plus haut.

M. PERREAULT: Mais, chez vous, $500,000, c'est obligatoire?.

M. BRUNET: Nous voulons le conserver. M. PERREAULT: Merci.

LE PRESIDENT (M. Caron): Est-ce que d'autres membres désirent poser des questions? M. Brunet, s'il n'y a pas d'autres questions, on vous remercie.

M. BRUNET: Merci, M. le Président, merci, messieurs, de m'avoir entendu.

LE PRESIDENT (M. Caron): Est-ce qu'il y a un M. Lippé dans la salle?

M. Lippé

M. LIPPE: M. le Président, MM. les ministres, M. Bossé, MM. les députés, j'espère que vous m'entendez, je ne suis pas habitué à un micro, surtout un micro parlementaire. Cela gèle. J'aimerais que vous ayez un permis de chauffeur de taxi pour voir comme je suis gelé.

La raison principale pour laquelle je suis venu ici, la raison essentielle, c'est pour remercier M. Bossé d'avoir eu le courage de faire l'enquête qu'il a faite. Je n'étais pas d'accord avec lui, la première fois, je lui ai parlé à la Fraternité des policiers, je lui ai parlé quand il est venu, vous avez parlé sur une chaise, le micro ne marchait pas au Centre Paul-Sauvé. Je n'étais pas d'accord parce que, à la Fraternité des policiers, vous nous aviez dit que vous aviez fait un pas vers Dorval. Vous aviez fait le pas. Vous nous avez dit : Donnez-moi trois semaines et je vais faire l'autre pas. Mais cela faisait au-delà d'un an, je vous l'ai fait remarquer d'ailleurs. Aujourd'hui, je comprends que ce n'est pas un cadeau, l'industrie du taxi. Je ne parle pas comme propriétaire, je ne parle pas comme président de l'association, je parle comme chauffeur de taxi, un petit chauffeur, comme disait M. le député Tremblay, qui n'a pas de défense et qui a peur, qui ne sait pas où aller, qui est harcelé d'un côté et de l'autre, et il y en a beaucoup comme moi. Il ne sait pas où aller, il veut faire quelque chose, mais il n'est pas capable. Je suis certain que sans l'appui du gouvernement, si le règlement no 6 ne passe pas, nous sommes foutus. Je suis un gars de 51 ans. Cela fait longtemps que je fais du taxi. Depuis 1943. Je suis parti quelques années, cela fait seulement 30 ans que je fais du taxi. Je ne parle pas comme propriétaire, je parle comme chauffeur. J'ai tout passé dans le taxi, j'aimerais vivre. Je ne veux pas vivre du bien-être social, je veux travailler encore, pour ce que je vaux toujours. Si je ne suis pas capable de travailler 12 heures, je vais travailler 10 heures, mais je serai payé pour 10 heures, ou j'en travaillerai 9 et je serai payé pour 9 heures. Ce que je veux avoir, c'est un salaire au bout de la semaine et vivre comme un ouvrier normal. On a parlé cet après-midi à quelques reprises d'acheter des parts. Je ne sais pas votre nom, monsieur, mais je vous ai remarqué, vous demandiez ou vous avez suggéré à un chauffeur d'acheter des parts. Je serais d'accord pour acheter des parts, je suis dans les Taxis Lasalle, mais avant d'acheter des parts, il faut que j'aie un salaire. Il faut que je vous parle un peu de l'association parce que j'ai travaillé pendant plusieurs années dans les Taxis Diamond. Je ne veux pas entendre parler de Diamond. Ce n'est pas pour couvrir M. Brunet. Je ne connais même pas M. Brunet, je l'ai vu pour la première fois aujourd'hui. J'ai travaillé chez Lasalle pour René Maranda à Pointe-Claire et Sainte-Catherine en 1943 et 1944, c'est avant lui, je pense. Ce que j'ai eu de Lasalle, c'est que, lorsque ma femme est décédée au mois d'août, j'ai eu une surprise, les Taxis Lasalle ont envoyé une couronne. Ce n'était pas grand-chose, mais c'est une couronne. Je n'ai jamais eu cela, je ne connais pas cela avoir un paquet de cigarettes de personne, d'aucun propriétaire, une semaine de vacances, rien. Si je suis malade, ce sont mes tracas. Si je suis venu ici aujourd'hui, mon auto est restée là parce que des confrères m'ont dit:

Cela ne te coûtera rien pour venir ici. D'accord. Je ne sais même pas si je vais m'en aller en autobus ou si je vais rester ici.

Cela me coûte $12 pour mon automobile, elle est restée là. Ce n'est pas la faute de M. Brunet. C'est un propriétaire. C'est mon propriétaire. Je ne l'ai pas payé aujourd'hui. Mon automobile est restée là. Je vais la reprendre demain matin, après m'être couché. J'ai attendu toute la journée ici, spécialement pour remercier M. Bossé et pour vous supplier, vous tous, les membres du gouvernement. Il n'y a pas beaucoup de chauffeurs de taxis qui vont vous parler comme moi. Il y en a plusieurs qui aimeraient vous parler. Il faudrait que vous fassiez le tour de toutes les flottes. C'est impossible pour vous autres d'aller voir le petit chauffeur, comme M. Tremblay le disait, le gars qui est pris de tout bord et de tout côté, sans défense. Il faut qu'il fasse attention à ce qu'il dit, à part cela. Le monsieur qui a parlé ce matin, M. Edmonston du Nouveau-Brunswick ou Edmonton de l'Alberta, je ne le sais pas, mais je connais mes provinces un peu. Nous ne sommes pas tous des chauffeurs mal éduqués. Il y en a qui perdent la boule de temps en temps, mais ce n'est pas la majorité. Il vous a suggéré, lui aussi, la même chose. Je l'ai compris. Je ne connais même pas ce gars là. J'ai même eu de la misère à savoir son nom.

Sans le gouvernement, sans vous tous, messieurs les députés... Que vous soyez du parti que vous voudrez, s'il vous plait, une fois pour toutes, le problème du taxi, êtes-vous capables de faire un départ là-dessus? Commencez par une structure ou n'importe quoi. C'est vous autres qui allez le faire; ce n'est pas nous, ici. J'ai vu défiler beaucoup de gens ici, aujourd'hui, à la table du supplice où je suis. J'ai remarqué que c'était plutôt par intérêt. J'en ai de l'intérêt. Mon intérêt, c'est ma paie au bout de la semaine. C'est cela que je veux, pour les heures où j'ai travaillé. On parle beaucoup du chauffeur, on nous amène et on nous dit: Venez-vous en. Mais, une fois qu'on a fait le "front", on se retrouve au même point.

Il y a une chose que j'aimerais demander aussi. Si jamais vous adoptez — et je l'espère — le règlement no 6, est-ce que nous allons contrôler, nous, avec qui nous allons nous syndiquer ou si nous allons être pris à la gorge ou poussés encore dans le coin des murs? Pour le moment, j'en ai assez. Je ne suis pas un orateur. J'aimerais que vous me posiez des questions.

LE PRESIDENT (M. Caron): Le ministre des Transports va être le premier à vous poser une question.

M. PINARD: M. Lippé, vous êtes chauffeur de taxi?

M. LIPPE: Je suis exclusivement chauffeur de taxi. Je n'ai pas d'autre métier.

M. PINARD: Sans être détenteur de permis. M. LIPPE: Sans être détenteur de permis.

M. PINARD: De quelle façon travaillez-vous? A commission ou à salaire pour la compagnie Lasalle?

M. LIPPE: Je loue ma voiture $12 par jour. Je paie l'essence avec l'argent que j'ai gagné. La ristourne, M. Piton vous en a parlé cet après-midi. D'accord, lui, il donne la ristourne aux chauffeurs; heureusement qu'ils ont M. Piton.

M. PINARD: C'est chez Diamond.

M. LIPPE: Oui. Diamond, mais je suis juste à côté. C'est un autre propriétaire, le garage Saint-Denis, la même chose, mais moi, c'est dans Lasalle. Cela ne regarde pas la compagnie de taxi Lasalle, cela regarde le propriétaire.

M. PINARD: Mais qui est votre propriétaire de taxi?

M. LIPPE: Mon propriétaire, c'est Albert Sévigny.

M. PINARD: Alors, ce n'est pas la compagnie Lasalle et ce n'est pas M. Brunet, non plus.

M. LIPPE: Non, mais j'ai fait partie de l'Association Lasalle.

M. PINARD: De l'Association de services.

M. LIPPE: De l'Association de services Lasalle. Je paie $12 par jour. Ils gardent mes factures d'essence. Je paie mes lavages d'auto. Je dois séparer avec le gars qui travaille la nuit,mais je ne le vois jamais! A part cela, je fournis l'antigel qu'on met dans l'essuie-glace aussi. Je ne vous raconte pas de menteries. Je travaille cinq jours par semaine.

M. PINARD: Combien d'heures par jour, en moyenne?

M. LIPPE: Je vous ferai remarquer que je n'ai pas 25 ans. Je travail neuf heures et, rendu à dix heures, j'en ai jusque-là! Je ne suis pas capable. Je suis à Montréal-Ouest et je m'en viens dans le centre. Je m'oriente vers 3 h 30 ou 4 heures et je m'en vais. Je commence à 5 heures le matin, ou 5 h 30 et, de temps en temps, à 6 heures. En moyenne, à 5h 30. Je ne suis pas capable de faire mes heures. Je vais vous le dire franchement, ce que je fais c'est $15 en moyenne.

Je peux faire $20 ou $22 une journée, et le lendemain, je vais en faire $12. C'est $75 dans cinq jours, pour ma capacité et pour mon âge. Je ne parle pas d'un gars qui va travailler quinze ou seize heures par jour. Je fais $75 par semaine.

M. PINARD: Net?

M. LIPPE: Oui, pas d'impôt, pas de taxes, pas d'assurance-chômage. Je n'ai jamais payé ça.

M. PINARD: D'accord.

M. LIPPE: Je ne m'en cache pas. J'aimerais ça en payer et vivre comme un autre. J'ai 51 ans. Qu'est-ce que j'ai en face de moi? Le bien-être social, je n'en veux pas. Je veux travailler.

UNE VOIX: As-tu des parts dans Lasalle?

M. LIPPE: J'aimerais ça en avoir des parts, n'importe où, si j'avais de l'argent. Je n'ai pas d'argent. Ce qui m'intéresse, ce ne sont pas des parts, c'est d'avoir un départ.

M. PINARD: Avez-vous des charges familiales?

M. LIPPE: Je suis veuf depuis le mois d'août.

M. PINARD: M. Lippé, votre témoignage est très intéressant et très sympathique aussi. Vous pouvez croire que nous vous prenons au sérieux. Etes-vous capable de formuler des propositions dans votre langage à vous, qui pourraient nous aider à trouver une formule qui va aider les chauffeurs qui sont dans la même situation que vous, sans brimer les droits des autres, mais en sauvegardant les vôtres un peu plus? Etes-vous capable de nous dire ça, dans vos termes à vous?

M. LIPPE: Je ne veux brimer les droits de personne. Peut-être que, si j'étais dans les patins de Diamond Taxi, que j'aimerais ça faire la piastre, moi aussi. Je ne dis pas le contraire. Mais je n'en suis pas un. Tout ce que je veux, ce que je demande... Je suis certain qu'il y a beaucoup de chauffeurs dans la ville de Montréal. Je ne peux pas parler des autres municipalités. Je ne suis pas au courant des autres municipalités. Mais, dans l'île de Montréal, je m'y connais. J'ai même suivi un cours de guide. Je la connais, ma ville.

Je suis un gars habillé assez proprement. Je m'excuse de ma tenue vestimentaire. Si j'avais su que je venais ici, je ne serais pas habillé comme ça.

Je ne peux rien suggérer. C'est vous, qui l'avez dans les mains. C'est M. Bossé, avec son rapport, qui l'a dans les mains. Donnez-nous un point de départ, donnez-nous la chance de nous structurer, toujours sous votre surveillance, c'est ça que je demande. C'est mon opinion à moi.

M. PINARD : Votre propriétaire détient combien de permis de taxi?

M. LIPPE: Sept ou huit, peut-être neuf. M. Brunet pourrait vous le dire.

M. PINARD: Je ne vous demanderai pas son nom.

M. LIPPE: Vous me l'avez demandé tout à l'heure.

M. PINARD: Excusez-moi. Cela indique que je n'ai pas de procès à lui faire. C'est à vous que je m'intéresse ce soir. Mais avez-vous le sentiment qu'il vous exploite? C'est ça que nous voulons savoir, ici, à la commission.

M. LIPPE: Là, vous m'accotez au pied du mur.

M. PINARD: C'est important pour nous de le savoir.

M. LIPPE: Avez-vous le sentiment que je suis exploité, vous? Je paie un char $12 par jour; je dépense $4 ou $5 d'essence, parce que ce sont des huit cylindres. H faut que je fasse combien avant de faire $1 pour moi? Avez-vous une idée de ce que c'est, $12.? Et $1 de liquide pour mettre dans l'essuie-glace? Et à part de la journée où il a besoin d'un lavage. De ce temps-ci, il n'a pas besoin de lavage. Il est toujours crotté. Je n'aime pas ça me promener avec un char comme ça. Quand même qu'il est crotté, je vais le faire laver.

M. PINARD: Vous n'avez aucun bénéfice social, de vacances payées?

M. LIPPE: Rien, moins que rien. Zéro. Cela ne peut pas être plus zéro. J'ai eu une chose dans 30 ans de taxi. J'ai eu une couronne de fleurs quand ma femme est morte, et c'est M. Brunet qui me l'a envoyée. H ne me connaît pas, M. Brunet.

J'ai travaillé à Diamond et j'accorde à M. Brunet ce qui lui appartient. En fait de dirigeant d'association... J'ai travaillé à Diamond, et je ne veux rien savoir d'eux. Ce sont des voleurs. Je me rétracte. Je suis tellement habitué de parler dans le langage des chauffeurs! Je vais essayer de me rétracter.

Il n'y a pas d'ordre dans Diamond, tandis que dans Lasalle, nous en avons.

Je n'ai aucun intérêt à parler de M. Brunet, je ne le connais pas. Ce n'est pas parce qu'il est ici non plus. Si j'ai été à Lasalle, c'est parce que ça faisait mon affaire.

Mais le propriétaire pour qui je travaille, demain je n'aurai peut-être pas d'emploi, il va peut-être le savoir. Où vais-je aller? Sur le bien-être social. J'ai pris la chance de venir m'expliquer ici. Je vais en avoir le coeur net. Ce n'est pas tous les jours que je viens aux réunions. Je veux faire quelque chose pour moi. Mais qui va nous appuyer?

M. PINARD: Pour empêcher cette exploitation, pour corriger votre situation pour le mieux, est-ce que vous suggérez l'abolition du système de location?

M. LIPPE: Je n'ai pas besoin de toi pour le dire.

Moi, je parle comme chauffeur. Je ne veux pas parler pour un petit propriétaire ou pour un autre. Je parle comme petit chauffeur, ce qu'on appelle un zéro, celui qu'ils égorgent. Le taux de location, il est bon sous contrôle du gouvernement; pour celui qui veut travailler il est bon. Il y a celui qui ne veut pas travailler, c'est ce que je pense. Celui qui veut encaisser un petit "way bill", de ce temps-ci — je ne dis pas que ce sera comme ça quand votre règlement va être adopté, je ne sais pas ce qui va arriver, personne ne peut le dire — ordinairement celui qui travaille à "way bill" c'est parce qu'il ne veut pas travailler. Mais celui qui loue un taux raisonnable, il peut gagner sa vie.

Si je loue ma voiture $12 par jour et si je ne travaille que huit ou neuf heures par jour, qu'ils me la louent $10 et qu'ils me laissent ma ristourne, l'essence pour laquelle je paie. Vous savez combien ça va me faire de plus par semaine? Ça va payer mon loyer.

M. PINARD: Mais ils ne vous la laissent pas cette ristourne?

M. LIPPE: II y a des propriétaires qui la donnent, mais d'autres ne la donnent pas. Il faudrait que je change de propriétaire encore. Et dans Lasalle, comme M. Brunet le dit, en partie ce sont des petits propriétaires, tandis que dans le Diamond ce sont des flottes.

Il y en a des flottes. Je vais m'en aller encore chez Diamond dans les flottes? Je suis tanné de changer. Je veux rester dans la même association, parce que je vois qu'il y a plus d'ordre que dans l'autre.

LE PRESIDENT (M. Caron): Le ministre a encore une autre question. Le suivant sera le député de Lotbinière.

M. BOSSE : Est-ce que vous permettez?

LE PRESIDENT (M. Caron): C'est le ministre qui a la parole.

M. PINARD: M. Lippé, je vous remercie pour vos explications et nous allons essayer de trouver la meilleure formule pour vous aider dans la situation que vous nous décrivez ce soir. Peut-être qu'il nous faudrait avoir plus d'explications pour en arriver à cerner une formule qui va vous aider vraiment.

M. LIPPE: Plus d'explications? Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise de plus? Je n'ai pas de défense, je n'ai rien. Je n'ai personne pour me représenter. Je suis venu ici avec des chauffeurs. Il y en a qui ont d'autres points de vue. Moi je parle comme le gars qui n'a rien, pas de défense. Je n'ai demandé à personne de me représenter. Je suis venu seul, et il y en a des centaines comme ça à Montréal, M. Bossé le sait. Vous le savez, M. Bossé?

Je ne suis pas venu ici parce que j'ai de l'argent d'investi. Je suis venu ici pour vous demander, à vous les gouvernants, de nous lancer au moins et de nous surveiller, les petits chauffeurs. Je ne parle pas des autres, je parle pour le petit chauffeur. C'est lui qui va chercher l'argent pour tous les autres.

LE PRESIDENT (M. Caron): Le député de Lotbinière.

M. BELAND: M. Lippé, je constate chez vous beaucoup de sincérité, de détermination. Vous qui travaillez dans le domaine depuis les années quarante, je trouve ça formidable de vous voir ici ce soir et y aller avec autant de facilité. Ce ne sont pas des louanges pour vous envoyer le pot par après.

M. LIPPE : C'est à ça que je m'attends.

M. BELAND: Ne craignez rien, nous du Ralliement créditiste nous voyons la base.

M. LIPPE: Vous êtes du Ralliement créditiste? Je ne le savais pas. Cela fait plaisir de vous rencontrer, monsieur.

M. BELAND: Moi, je suis très heureux d'entendre des gars comme vous qui avez de l'expérience, qui êtes sans défense, qui le dites bien sincèrement.

Et si nous sommes autour de cette table, peu importe ce que vous disiez dans n'importe quel langage, c'est heureux que nous le sachions, dasn vos termes. N'oubliez pas que tout est noté mot à mot et qu'après que tout le monde aura été entendu, des chauffeurs, des propriétaires, des locataires, des associations, nous allons tout reprendre pour sortir tous les bons éléments. Si le gouvernement oublie des choses importantes, c'est entendu que nous allons essayer de les trouver pour tâcher de les leur suggérer.

Ce n'est pas de l'électoralisme ce que je fais là, mais je tenais à ce que vous sachiez que j'aime énormément que vous vous exprimiez bien clairement sur tout ce que vous avez à dire et que d'autres également viennent. C'est rare que nous pouvons entendre à la barre des gens de la base. J'entends par les gens de la base, les gens qui — il faudrait peut-être leur donner un autre nom — sont sans défense comme cela. Etant donné la vaste expérience que vous avez, vous avez certainement des choses à dire, qui peuvent vous paraître banales, mais en nous soulignant les choses que vous avez pu observer, qui vous affectent, qui vous cassent les bras continuellement, cela pourrait nous donner la solution ou nous apporter des éléments en vue de trouver la solution au problème, choses qui vous paraissent peut-être banales, mais n'ayez pas peur, dites-le dans vos termes.

M. LIPPE: Je l'ai dit. Je suis d'accord qu'on laisse le chauffeur déterminer s'il doit travailler à location ou au pourcentage mais contrôlé par le gouvernement.

M. BELAND: Le genre d'association qui a été...

M. LIPPE: Pour moi, un gars qui loue son auto, qui travaille à 40 p.c, c'est parce qu'il ne veut pas travailler. Parce qu'il a peur. Il veut être certain de son salaire. D'un autre côté, si la location est plus basse, si elle est acceptable, il peut gagner sa vie quand même. S'il ne travaille pas, tant pis pour lui, s'il travaille il va faire son argent. Les locations à $12 par jour pour tout payer, ... Je vous ai dit tout à l'heure que je faisais $15 par jour, cinq jours par semaine, cela fait $75. Cela ne comprend pas les fois où je vais au garage. Je n'exagère pas. Je vous le dis, je peux faire une journée de $20 ou $25 clair et le lendemain j'en ferai $10. Ma moyenne est comptée, c'est cinq fois $15, $75, c'est cela que cela fait. S'il faut que je paie de l'impôt et de la taxe là-dessus, je n'en paierai jamais, vous allez me mettre en prison.

M. BELAND: Les possibilités d'associations telles que stipulées par d'autres, pensez-vous qu'en créant une association de tous les chauffeurs cela pourrait améliorer votre sort?

M. LIPPE: Ne me demandez pas de créer une association. Je suis venu ici parce que j'étais écoeuré, cela fait tellement d'années que je suis cela, le problème du taxi. Cela fait des années. Il me demande de demander à d'autres chauffeurs de former une association ou quelque chose comme cela.

UNE VOIX: Non, si vous faisiez partie d'une association.

M. LIPPE: C'est cela que vous m'avez demandé?

M. BELAND: Si, justement, il y avait une association de créée et que vous y entriez à l'intérieur de cette association-là, comme membre.

M. LIPPE: Créée par qui?

M. BELAND: Par les chauffeurs.

M. LIPPE: Je ne peux pas avoir confiance en rien à part le gouvernement. Je vous le dis franchement.

LE PRESIDENT (M. Caron): La parole est au député de Sainte-Marie.

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): Juste quelques questions. Je pense que vous allez pouvoir me répondre par un oui ou par un non. M. Lippé, demain, si vous êtes malade, vous n'avez

aucun revenu. Si vous êtes quinze jours sans pouvoir travailler, vous n'avez aucun revenu.

M. LIPPE: Absolument pas.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si vous tombez sans travail, vous n'avez pas d'assurance-chômage.

M. LIPPE: Absolument pas.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si demain vous' êtes invalide, que vous êtes obligé de prendre votre retraite, vous n'avez aucune pension, pas même la rente du Québec, vous n'avez rien.

M. LIPPE: Voulez-vous que je vous dise quelque chose, M. Tremblay? J'ai subi cinq opérations...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est cela et vous avez toujours perdu.

M. LIPPE: Je n'en veux pas du bien-être social, je veux travailler parce que si je suis sur le bien-être social, je vais mourir. Là je suis pris pour mourir sur le taxi ou sur le bien-être social, qu'est-ce que je vais faire? J'aime autant mourir sur le taxi.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est tout simplement une remarque. Je n'ai pas d'autres questions à vous poser. C'est pour vous dire que, lorsqu'on a des témoignages comme le vôtre, je pense que le gouvernement le constate et j'espère qu'il va continuer à travailler pour régler le problème de l'industrie du taxi qui est réellement malade. En 1972...

M. LIPPE : II faut que vous soyez réellement chauffeur de taxi.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): D'accord.

M. LIPPE: Chauffeur, je ne veux attaquer personne d'autre. Celui qui est bien, est bien. Comme il a été question, cet après-midi, de 40,000 milles par quatre mois, c'est impossible. Tout le monde s'est mis à rire. J'ai commencé à penser que 40,000 milles par quatre mois, c'était fort un peu, mais ça se fait, parce que j'en ai fait des 250 milles par soir, par nuit. Et mon homme de jour, 150 milles. Comptez ça, ça fait 400 milles par jour, 2,100 milles par semaine ou 2,000 milles, si vous voulez. Cela se fait. Cela ne se fait pas tout le temps, parce que le gars se ramasse à l'hôpital, comme moi.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'ai juste une autre question à vous poser: Lorsque le député de Lotbinière vous parlait d'une association... Je vous parle d'une association, un syndicat accrédité, mais...

M. LIPPE : Je suis d'accord sur cela.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ... que vous auriez aidé à former. Vous auriez l'aide du gouvernement, que ce soit du ministère des Transports ou du Travail...

M. LIPPE: C'est ça que je vous demande, en autant que c'est sous la surveillance du gouvernement...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Vous aidez à le former.

M. LIPPE: ... je ne peux pas vous demander autre chose. Je ne suis pas avocat, je suis chauffeur de taxi.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'en prends note. Très bien. Merci.

M. PINARD: M. Lippé, me permettez-vous une question?

M. LIPPE: Certainement, M. le ministre.

M. PINARD: Ce que vous avez dit ce soir, est-ce que ça va vous valoir des menaces de votre propriétaire demain? Est-ce que vous avez...

M. LIPPE: Si j'ai des meances, je viendrai vous voir.

M. PINARD : On va s'occuper de vous.

M. LIPPE : Je ne le pense pas. Je vais voir M. Brunet tout à l'heure. Je n'ai absolument rien contre M. Brunet, mais contre le patron qui m'exploite, j'en ai. Je n'ai absolument rien contre Taxi Lasalle... De Diamond, je ne veux rien savoir. Je suis content de travailler pour Taxi Lasalle je ne suis pas pour lui baiser le derrière. C'est parce que c'est la meilleure association. Je les ai toutes essayées, Métropole... On m'en a volé des voyages. Je comprends, je n'ai pas les réflexes d'un jeune de 22 ou 23 ans. Je ne suis pas assez vite sur la patente. Je suis obligé de jouer les poteaux. Connaissez-vous ça, les poteaux? Les poteaux, ce sont les téléphones. Ou bien creuser; creuser là...

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Maskinongé.

M. PAUL: M. Lippé, vous nous avez exposé ce soir les conditions qui semblent à peu près courantes dans la location des véhicules automobiles par les propriétaires.

M. LIPPE: J'ai exposé ma position, à moi. Je ne représente absolument personne; il y en a qui louent beaucoup meilleur marché que moi et qui...

M. PAUL: Est-ce qu'il y en a qui louent plus cher?

M. LIPPE: ... ont de meilleurs avantages.

M. PAUL: Est-ce qu'il y en a qui louent également plus cher que vous?

M. LIPPE : Non, je n'en connais pas. Plus que $12 pour une équipe de jour?

M. PAUL: Oui?

M. LIPPE: Je n'en connais pas. Je suis dans les champions.

M. PAUL: Bon. Est-ce qu'il y en a beaucoup qui paient le même prix que vous?

M. LIPPE: Tous les chauffeurs où je travaille, c'est le même prix.

M. PAUL: Je me demande pourquoi vous auriez à craindre des représailles de la part de votre patron, parce que je pense bien que c'était votre droit...

M. LIPPE: Tout ce que je demande,... Je ne dois rien à mon patron. Je lui dois la journée parce que je suis venu ici. Demain matin, il va demander $12 et la voiture est restée là. Tout ce que je demande à M. Brunet, c'est qu'il ne me barre pas. C'est tout. Parce que je peux aller travailler ailleurs. J'ai un bon dossier de chauffeur et je n'ai jamais eu d'accidents dont j'étais responsable.

M. PAUL: M. Lippé, vous conviendrez que c'était un droit pour vous de venir ici, c'était une...

M. LIPPE: C'était plus qu'un droit, j'en fais une maladie.

M. PAUL: ... et c'était peut-être un devoir aussi pour ceux...

M. LIPPE: Oui.

M. PAUL: ... qui, comme vous, ne semblent pas avoir un traitement équitable dans l'exercice de votre profession.

M. LIPPE: Vous exposer un peu comment j'étais en danger.

M. PAUL: On vous félicite d'avoir eu le courage de le faire.

M. LIPPE: C'est un devoir ou... Appelez ça comme vous voudrez. Je suis venu ici pour donner mon opinion. J'espère qu'on va la respecter. J'espère que vous allez faire quelque chose. Je vais insister encore, c'est le gouvernement qui a tout dans les mains. Tous ceux qui ne sont pas capables de parler... Moi-même, je n'ai jamais eu la chance de parler, jamais; aujourd'hui...

M. PAUL: Vous avez appelé, tout à l'heure, votre fauteuil ou votre chaise comme étant la table du supplice. Vous allez admettre que ce n'est pas trop difficile.

M. LIPPE: C'est la première fois que je passe là. Je vais m'en rappeler longtemps.

M. PAUL: M. Lippé, l'automobile qu'on vous loue quotidiennement, est-ce toujours la même automobile?

M. LIPPE: Oui.

M. PAUL: Dans quel état d'entretien se trouve cette automobile?

M. LIPPE: Je vais vous dire franchement, l'automobile que je conduis est à peu près comme les minounes dont on parlait tout à l'heure. Là, vous m'acculez au mur; là, je viens de perdre ma "job", c'est vrai.

M. PAUL: Tout ce qu'on peut dire, c'est une automobile qui n'est pas un modèle 1972.

M. LIPPE: C'est une voiture de 1970 avec à peu près trois fois le tour du moteur. Il en reste encore dans le moteur mais le reste ne vaut pas grand-chose.

M. PAUL: M. Lippé, vous avez mentionné que vous travaillez cinq jours par semaine. Travaillez-vous le samedi et le dimanche?

M. LIPPE: Cinq jours par semaine. Quand je veux un congé, je le dis. Ce matin, je ne le lui ai pas dit, il n'était pas là.

M. PAUL: Habituellement, avez-vous toujours les deux mêmes jours de la semaine de congé?

M. LIPPE: Non, c'est à notre discrétion, du moment qu'on lui dit quand on prend congé.

M. PAUL: A votre discrétion.

M. LIPPE: Même si je le lui dis et que je suis malade le lendemain matin, je vais payer pareil.

M. PAUL: Que vous travailliez ou non, vous devez payer $12 par jour pour cinq jours.

M. LIPPE: S'il est averti, non, mais il n'est jamais là. Il vient juste vers quatre heures l'après-midi chercher l'argent et il s'en va. SU est là le matin pour que je l'avertisse, d'accord, mais s'il n'est pas là, c'est mon problème. Il répond: Vous auriez dû me le dire la veille.

M.PAUL: Est-ce que toutes les clauses que l'on retrouve dans le règlement no 6 sont acceptables à votre point de vue pour ceux que l'on a décrits hier — c'est M. Dickey qui a employé le terme — comme étant de la classe 4.

M. Dickey, hier soir, vous a classé ou s'est classé lui-même et ses confrères du métier, c'est-à-dire la classe des chauffeurs, comme étant de la classe 4. Est-ce que toutes les clauses du règlement no 6, à votre point de vue, sont acceptables?

M. LIPPE: J'aimerais bien répondre à cela, mais je ne suis pas un avocat. Tout ce que je peux vous dire, c'est que je ne l'ai pas lu en entier. Pour moi, c'est du chinois. Je ne comprends rien dans cela. Cela regarde plutôt les propriétaires, mais chez les chauffeurs, on n'en parle pas trop. Celui qui va chercher l'argent et va faire vivre toute la balance de l'industrie, on dit donc qu'on veut l'aider mais qu'est-ce qu'on fait pour lui? Sans le gouvernement, vous aurez toujours des problèmes avec le taxi; c'est vous qui pouvez mettre de l'ordre là-dedans, il n'y a personne d'autre.

M. PAUL: Hier soir, M. Dickey a été le premier à parler de la nécessité d'un syndicat chez les chauffeurs ou en faveur des chauffeurs de taxi. M. Edmonston, ce matin, a abondé dans le même sens. Il y en a d'autres aujourd'hui qui ont invoqué la nécessité d'un tel syndicat pour la protection des chauffeurs. A votre point de vue, est-ce l'organisme essentiel pour, comme vous le disiez tout à l'heure, que vous ayez un départ dans la protection et la sécurité?

M. LIPPE: Je connais M. Dickey mais pas depuis très longtemps. Je connais plutôt M. Blondin, je l'ai rencontré dans les réunions. J'ai confiance en ces gars-là. Je ne peux pas vous dire plus, j'ai confiance en ces gars-là. S'ils ont des arrières pensées, je ne peux pas vous le dire. C'est pour cela que je vous dis que tout ce qui va être fait, ça doit être sous votre contrôle, c'est ce que je vous demande; sans cela, il y aura quelque chose qui va clocher.

M. PAUL: Pour retenir votre témoignage, vous me corrigerez, M. Lippé si...

M. LIPPE: Nous sommes ce que vous appelez le petit chauffeur et nous dépendons de vous; sans cela, vous allez toujours avoir des problèmes avec le taxi. Nous n'avons pas d'aide, nous. Il y a bien des fois qu'on ne peut même pas parler dans un garage. Notre opinion n'est pas bonne, il y en a qui sont plus forts que nous.

M. PAUL: Vous allez admettre, M. Lippé, devant la commission parlementaire, que tous les membres de la commission ont beaucoup de respect pour ceux qui, comme vous, viennent s'exprimer à la barre.

M. LIPPE: Je l'espère. J'espère que vous allez tous coopérer aussi pour adopter le fameux règlement no 6 et que nous soyons débarrassés de nos problèmes.

M. PAUL: M. Lippé, une dernière question. Est-ce que vous vous sentiriez protégé si dans le règlement no 6 il était prévu que les chauffeurs de taxi auront l'appui, le concours du ministère des Transports pour se syndiquer? Est-ce que vous vous sentiriez un peu protégé?

M. LIPPE: Certainement.

M. PAUL: Je vous remercie, M. Lippé.

M. LIPPE : Merci.

M. BOSSE: Un instant.

LE PRESIDENT (M. Séguin): M. Lippé, s'il vous plait on va vous soumettre à l'inquisition.

M. BOSSE: Ce ne sera pas une inquisition. M. le Président, si vous me permettez...

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Dorion aurait une question. Il y en a peut-être d'autres, je ne le sais pas.

M. BOSSE: Ce ne sera pas trop long, je serai bref, M. le Président.

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, sur la façon de procéder, j'aimerais que vous fassiez mention à tous ceux qui viennent ici qu'ils ont toujours le droit de refuser de répondre à une question. Il y en a qui ne le savent pas.

LE PRESIDENT (M. Séguin): C'est entendu. M. BOSSE: M. le Président...

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Pour un individu, des fois ça peut être assez embêtant.

M. BOSSE: Je ne poserai probablement pas de question à M. Lippé. Je voudrais simplement dire que M. Lippé, que je ne connaissais pas, que je n'avais pas reconnu, lui m'avait reconnu parce qu'il s'était opposé probablement au tout début...

M. LIPPE: C'est parce que vous n'étiez pas assez vite, c'est pour ça.

M. BOSSE: Bon, je n'étais pas assez vite. Ceci étant dit, il est peut-être l'élément le plus représentatif de la majorité, dans le domaine du taxi, qui a perdu totalement confiance dans les autorités. C'est clair, c'est net, c'est ce que j'ai perçu lorsque j'ai rencontré des groupes. Je veux m'élever au-dessus des questions de parti pour dire que M. Lippé est peut-être celui qui représente l'élément qui ne sait plus où donner de la tête. Mais il veut faire confiance aux gouvernants, il demande quasi qu'on impose des conditions afin de lui assurer ce que j'ai toujours dit: Un minimum raisonnable pour lui

permettre de vivre une vie plus humaine. On a entendu ici M. Lippé et vous aussi...

M. LIPPE: Nous enlever la tension aussi, toujours la tension, toujours la tension.

M. BOSSE: Justement, je vais revenir sur ce point très brièvement. On a entendu ici des gens représentatifs de toutes sortes d'associations et qui ont toutes sortes d'intérêts. Evidemment, vous représentez la majorité, vous représentez les chauffeurs.

M. LIPPE: Je ne représente personne, M. Bossé. Je donne mon opinion personnelle.

M. BOSSE: Je veux dire que les chauffeurs représentent la majorité dans l'industrie du taxi. Ils sont pourtant ceux qui ont le plus besoin et ceux qui sont les moins organisés, ou ils ne sont pas du tout organisés. On a entendu d'autres porte-parole très bien organisés qui sont venus nous dire que tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Moi, très sincèrement et très honnêtement, au-dessus des questions politiques, depuis deux ans et demi j'étudie le taxi, et on a souvent mis en doute ma parole. J'ai essayé de prouver à de multiples reprises que je voulais sincèrement aider les gars du taxi. Il y a quelqu'un à quelque part qui ne nous dit pas la vérité quand des gens comme vous venez dire: J'ai de la misère à vivre, je n'en blâme pas mon "boss" immédiat, ce n'est pas un mauvais gars peut-être, je ne blâme pas le "boss" de l'association non plus, ce n'est pas un mauvais gars. Pourtant j'ai un maudit problème, je ne suis pas capable de vivre. Je voudrais vivre et je voudrais que le gouvernement adopte des mesures et nous donne cela, pas dans les termes qu'on retrouve ici, mais dans des termes que vous comprenez. Vous voulez avoir l'occasion de vous sentir comme le citoyen ordinaire. Sinon, vous comme d'autres, comme un grand nombre de gens, vous allez retourner chez vous. Vous ne direz peut-être pas un mot si le gouvernement n'allait pas vous donner ces conditions raisonnables.

Vous allez peut-être vous fermer pendant quelques mois et dans six mois, dans un an, peut-être, dans le taxi, à nouveau, tout d'un coup, surgiront d'autres mouvements et là des gens seront surpris et diront: Comment, le problème du taxi, il me semble que c'était réglé ça. J'allais dire, si le règlement n'était pas adopté, le modifier pour permettre l'amélioration des conditions de travail des gens comme vous.

Je tiens à vous remercier de ce que vous avez dit en ma faveur. Je sais qu'au départ vous n'étiez même pas d'accord avec moi. J'en tiens d'autant plus compte.

M. LIPPE: C'est minime, c'est parce que je vous l'ai dit, l'histoire du premier pas à l'aéroport et donnez-moi trois semaines, c'est exacte- ment ce que vous avez dit. J'en ai profité, comme vous l'avez vu au centre Paul-Sauvé.

Mais, il y a une chose que j'aimerais savoir, au centre Paul-Sauvé, qui a organisé cette réunion-là?

M. BOSSE: Je vais vous dire ce que j'en sais. Je n'étais pas invité et j'y suis allé. Je n'en suis pas sûr, mais je crois que c'est M. Tourigny, que je ne connais pas, qui l'a organisée.

M. LIPPE: Je ne sais pas, moi non plus, et ça ne m'intéresse pas. Ce qui m'intéresse c'est une paie au bout de la semaine.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Je ne voudrais pas là... Un instant, M. Lippé, le député de Napierville a-t-il un commentaire à faire?

M. BERTHIAUME: S'il vous plaît, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Allez-y!

M. BERTHIAUME: M. Lippé, je comprends la situation que vous avez décrite. Comme l'a dit le ministre tantôt, je pense qu'il faut essayer de trouver la solution à ce problème. J'aimerais vous poser une question sous ce rapport. Si vous étiez détenteur d'un permis, propriétaire artisan, avez-vous l'impression que votre situation serait de beaucoup meilleure?

M. LIPPE: Si j'étais propriétaire? C'est assez difficile à dire.

M. BERTHIAUME: Sans penser à ce que ça pourrait coûter.

M. LIPPE: Ce serait rêver en couleurs, je n'ai jamais été propriétaire.

M. BERTHIAUME: Mais vous en connaissez des artisans quand même, quand vous êtes à une station, vous parlez aux autres.

M. LIPPE: Oui mais je n'en connais pas un qui fait de l'argent.

M. BERTHIAUME: Ils ne font pas d'argent. M. LIPPE: Non, à les entendre parler.

M. BERTHIAUME: Ah bien, oui!

M. LIPPE: C'est pour ça que je vous dis que je ne peux pas parler comme un artisan, moi. J'aime autant ne pas répondre à cette question.

M. BERTHIAUME: D'accord. Mais moi j'ai l'impression que, d'une façon générale, pour autant que le gars soit aussi travaillant.

M. LIPPE: Réellement, sincèrement, je crois que celui qui n'a qu'un véhicule doit travailler autant qu'un chauffeur.

M. BERTHIAUME: Oui, travailler autant.

M. LIPPE: D'après le peu de chauffeurs que j'ai eu l'occasion de connaître qui n'avaient qu'un véhicule, qui m'ont parlé sincèrement, ils doivent travailler autant qu'un chauffeur de taxi; l'avantage, c'est qu'ils sont propriétaires du véhicule.

M. BERTHIAUME: Ce que je veux dire, c'est que vous devez payer $12 par jour de location plus l'essence. C'est sûr que si vous étiez artisan vous auriez quand même...

M. LIPPE: Ce n'est pas en moyenne, c'est $12 par jour.

M. BERTHIAUME: ... à payer l'essence, c'est la même chose mais peut-être qu'au lieu de vous coûter $12 par jour ça vous coûterait $10 parce que d'après d'autres témoignages, ça coûte à peu près cela.

Si vous voulez me laisser terminer, je cherche une solution.

Une première possibilité, c'est que si le règlement permettait la location — il ne le permet pas à l'heure actuelle — et que le taux de location était contrôlé par l'éventuelle commission des transports, ce serait une première étape pour s'assurer que le taux de location serait raisonnable par rapport aux profits que le gars est en droit de faire.

Deuxième étape, si par la suite, les taux indiqués au taximètre étaient augmentés en autant...

M. LIPPE: Je ne serais certainement pas contre.

M. BERTHIAUME: ... que la clientèle serait capable de le payer, parce qu'il faut tenir compte de cela, c'est quand même hypothétique mais s'il était augmenté...

M. LIPPE: Mais si vous augmentez les taux, à chaque fois que vous avez augmenté les taux, on a augmenté le taux de location des voitures. Aucun locataire dans la salle ne peut dire le contraire. Nous avons été augmentés de $1 par jour.

M. BERTHIAUME: C'est pour ça que je parlais d'un contrôle par la commission. Mais s'il y avait cette augmentation de taux, cela veut dire que dans le pourcentage que vous recueillez à la fin de la journée, vous auriez peut-être un peu plus d'argent. Avec ce montant-là, vous pourriez faire l'une des deux choses, soit vivre un peu mieux pour le nombre d'heures que vous travaillez, ou bien peut-être...

M. LIPPE: Que voulez-vous dire par mon pourcentage? Je suis à location. Vous voulez dire mes pourboires?

M. BERTHIAUME: Non, non!

M. LIPPE: Vous dites mon pourcentage à la fin de la journée.

M. BERTHIAUME: Excusez-moi. Je me suis fourvoyé, ce n'est pas pourcentage que je voulais dire; c'est votre revenu brut à la fin de la journée qui serait plus élevé et votre revenu net aussi, étant donné que la location sera la même. Supposons que vous faites $40 aujourd'hui ou demain, disons $30, si vous voulez.

M. LIPPE: II y en a qui font $75. Vous allez chez eux et ils n'ont même pas de grille-pain.

M. BERTHIAUME: J'aimerais que l'on puisse suivre mon idée. Je ne sais pas si elle est bonne, mais je voudrais connaître votre opinion.

Supposons que c'est $30 que vous faites en moyenne. Si le taux augmente, ça peut être $35 ou $32, ça dépend du taux. Disons que c'est $35; ça fait $5 de plus dans vos poches à la fin de la journée. Vrai ou faux?

M. LIPPE: Oui. Savez-vous...

M. BERTHIAUME: Un instant. Laissez-moi finir. Vous pouvez faire deux choses avec ces $5. Vous pouvez mieux manger ou avoir un meilleur logement, n'importe quoi. Vous pouvez faire ce que vous voulez, mais ce que j'essaie d'examiner, c'est la possibilité que ces $5, ces $25 à la fin de la semaine puissent être utilisés pour financer l'achat d'un permis. Quand le permis sera acheté, au lieu de $35, ce sera $37, si ça coûte $10 parce qu'il y a une réduction de $2. Au lieu de payer $12 de location, vous allez payer $10 d'entretien ou de dépréciation et le reste. Cela vous parait-il quelque chose de possible? C'est ça mon idée.

M. LIPPE: Remarquez bien que je respecte beaucoup votre opinion et ce que vous suggérez...

M. BERTHIAUME: Ce n'est même pas une opinion, je vous pose la question.

M. LIPPE: Pour moi, c'est impossible. Devenir propriétaire? Cela fait trop longtemps que je suis locataire. Il me semble que c'est impossible, mais je respecte beaucoup cela et je suis d'accord pour que vous reteniez tant. Mais j'ai 51 ans; ça va me prendre combien de temps avant d'être propriétaire de taxi?

M. BERTHIAUME: Bien, je ne sais pas. Supposons que ça coûte $5,000, à $25 par semaine, ça fait...

M. LIPPE: $5,000?

M. BERTHIAUME: Supposons $5,000 ou $6,000.

M. LIPPE: On a une "minoune" à $5,000.

M. BERTHIAUME: $6,000 à Montréal.

M. LIPPE: Oui, le permis, mais l'automobile?

M. BERTHIAUME: D'accord, plus l'automobile.

M. LIPPE: Cela fait combien? $10,000. Cela va en prendre des $5 et des $10 pour ramasser cela avec les intérêts et tout.

M. BERTHIAUME : Très bien. Dans votre cas, ce n'est peut-être pas pratique; vous avez 51 ans, vous l'avez dit tantôt. Mais, en 1943, quand vous aviez 25 ans, peut-être qu'au bout de dix ans...

M. LIPPE: Oui, mais ce ne sera pas plus vite pour un gars de 25 ans ou 30 ans. Cela va lui prendre dix ou quinze ans et il va encore être petit vieux comme moi. Non, je ne vois rien dans ça. Votre idée est bonne, mais il faudrait qu'il y en ait plus qui revienne par semaine.

M. BERTHIAUME: Vous ne pensez pas... Ah, d'accord.

LE PRESIDENT (M. Séguin): M. Lippé, nous vous remercions.

M. LIPPE: Je vous remercie, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Un instant, s'il vous plaît. Le député de Laviolette.

UNE VOIX: Je suis avec quinze autres personnes, j'aurais une question.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Laviolette. Je reviendrai à vous ensuite, la parole a été demandée avant vous. Je m'excuse.

M. CARPENTIER: Juste une question, M. Lippé, pour réfuter l'allégation du député de Lotbinière, M. Béland. Je crois que le ministre responsable a fait certaines déclarations, cet après-midi, qui couvrent le sujet. Lorsqu'on parle d'association, en fin de compte, je crois qu'il faudrait au moins cesser de charrier et de faire de la politique à tous les niveaux concernant le mémoire de M. Lippé et ce que le député de Lotbinière a dit à propos de la déclaration que le ministre des Transports a bien voulu faire cet après-midi, lorsque M. Brunet a lu son mémoire.

J'ai terminé, M. le Président.

M. BELAND: H a trop pris de cognac, celui-là.

LE PRESIDENT (M. Séguin): A l'ordre!

M. CARPENTIER: Pardon, M. le Président. L'accusation du député ne m'atteint pas du tout, pour la simple et bonne raison que je suis lacordaire depuis dix ans. D'accord? Pensez ce que vous voudrez, M. le député de Lotbinière, c'est votre opinion, mais je pense qu'il y a une limite à charrrier de la façon dont vous l'avez fait tantôt. Je crois qu'il est temps que l'on fasse le point, considérant précisément la déclaration du ministre cet après-midi.

Pensez ce que vous voudrez, c'est votre affaire. Mais je peux vous fournir les preuves en conséquence.

M. LIPPE: Si j'ai bien compris, vous avez dit que le député de Lotbinière avait une question à me poser. Mais je n'ai rien compris.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Non, il a fait des commentaires tout simplement sur des commentaires que le ministre avait tenus. M. Lippé, je vous remercie.

M. LIPPE: C'est moi qui vous remercie.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Considérant les commentaires que nous avons entendus, je pense, en ce qui concerne le député de Lotbinière et ses commentaires, que peut-être ses paroles ont dépassé un peu sa pensée. Je voudrais bien qu'on reconnaisse le fait, puisque déjà le député de Laviolette a fait la rectification d'usage et nécessaire en l'occurence. J'aimerais bien qu'on ne passe pas d'insinuations semblables, peu importe la pensée qu'on puisse avoir. Qu'on garde ça pour soi.

Un commentaire? Oui. Parce que je passe immédiatement à la prochaine association. Ne prenez pas le temps de vous asseoir, parce que vous aviez un commentaire bref à faire.

UNE VOIX: Je suis arrivé en retard ce matin. Mon nom n'est pas à votre ordre du jour. Je retarde quinze de mes confrères d'une demi-heure parce que j'aurais quelque chose à dire.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Non, je dois suivre l'ordre du jour; je ne permettrai pas à ce moment-ci que qui que ce soit intervienne à l'intérieur de l'ordre du jour.

UNE VOIX: Je pourrais éclairer la commission parlementaire par ma question, parce que je suis sûr qu'elle est pertinente à la cause.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Je comprends, et je pense que tous les commentaires qui se font devant la commission le sont. Si c'est une question, posez-la.

UNE VOIX: Je demanderais, selon le rapport Bossé, de plafonner le taux de location des voitures de taxi à $100 par semaine, et pas plus. Et je vais vous donner des chiffres à l'appui. Mon propriétaire loue ses voitures $18.50, ça fait $130 par semaine, c'est du vol.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Je dois intervenir, je m'excuse. Vous avez fait un commentaire. C'est déjà enregistré. Nous ne pouvons pas vous l'enlever. Mais je dois suivre l'ordre, et je vais vous suggérer, afin d'entrer dans l'esprit et le rôle de la commission, si vous avez des commentaires plus détaillés à faire sur le même sujet, ou si vous voulez faire part à la commission de commentaires au nom de dix, quinze ou peu importe le nombre des collègues que vous avez, d'enregistrer votre nom dès ce soir en vous adressant au secrétaire, M. Jacques Pouliot. Un peu plus tard, puisque déjà l'ordre du jour est chargé pour la semaine prochaine, il y aura aussi la semaine suivante sans doute, nous pourrions vous entendre.

Nous vous aviserons à ce moment que vous serez entendu tel jour, et vous pourrez faire la représentation que vous voulez faire. Malheureusement, je dois suivre mon ordre de comparution en ce qui concerne les personnes qui sont ici, et je voudrais en toute justice entendre tout le monde, mais à tour de rôle. Ne prenez pas mon commentaire comme étant démagogique, mais plutôt comme un commentaire que je voudrais faire pour vous aider.

UNE VOIX: Je pensais qu'on était assez humain pour laisser un homme s'expliquer librement dans la démocratie, mais ç'a l'air que ce n'est pas le cas. Je vous tire ma révérence, je m'en vais à Montréal, et arrangez-vous avec votre commission.

LE PRESIDENT (M. Séguin): J'appelle l'Association métropolitaine des petits propriétaires de taxi de Montréal, M. Pronovost.

Le député de Laviolette.

M. CARPENTIER: J'aimerais que vous fassiez retirer les paroles du député de Lotbinière, qui m'a accusé tantôt d'avoir pris du cognac, lorsque je n'en ai jamais pris depuis dix ans. C'est un fait.

UNE VOIX: C'était une farce. M. CARPENTIER: Un instant.

M. PAUL: M. le Président, en vertu de notre règlement, je crois que la déclaration que vient de nous faire le député de Laviolette doit être respectée par tous les collègues, et personne n'a le droit de contester une telle déclaration de sa part.

Je me demande si, en fait, nous progresserions s'il nous fallait entreprendre, à ce moment-ci, un débat de procédure, et considérant que l'atmosphère en a toujours été une de collaboration autour de la table, je suis certain que le député de Laviolette conviendra que l'incident pourrait être considéré comme clos, à la suite de sa déclaration.

M. CARPENTIER: Je suis entièrement d'ac- cord. Mais je n'accepterai jamais une déclaration d'un député créditiste à cet effet.

LE PRESIDENT (M. Séguin): J'avais cru l'incident clos il y a quelques instants. Nous allons ententre M. Pronovost.

Association métropolitaine des propriétaires de taxis

M. PRONOVOST: Merci, M. le Président. M. le ministre, MM. les membres de la commission parlementaire, en premier lieu, je tiens à préciser que nous parlons strictement de l'Association métropolitaine des propriétaires de taxis, qui a tenu une assemblée d'information à la salle du Plateau. A la suite de cette assemblée d'information pour tous les propriétaires de taxis de l'île de Montréal, nous avons reçu une foule de menaces, ce qui nous a empêchés de produire un mémoire à cette commission, et nous demandons à la commission de bien vouloir juste entendre certaines revendications que nous aimerions faire à ce point-ci.

En premier lieu, je tiens à vous présenter le vice-président de notre association, M. Jean-Marie Vanier, qui est à ma droite, et M. Henri Paquet, qui est l'adjoint au président et le directeur des relations extérieures de notre association.

L'Association métropolitaine des propriétaires de taxis oeuvre dans l'industrie du taxi depuis le 11 février 1971 et est enregistrée auprès du ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives. L'Association métropolitaine des propriétaires de taxis a commencé son travail avec le bill 23, chose que tous les pontifes du taxi de Montréal n'ont pas faite. Si réellement ces gens avaient voulu prendre les intérêts des petits propriétaires de taxis et des petits chauffeurs de taxis qu'on essaie de charrier dans une foule d'assemblées en faisant toutes sortes d'intimidations, je crois que si ces gens avaient eu au moins l'honnêteté d'appuyer les gens qui ont voulu oeuvrer honnêtement dans l'industrie du taxi, une foule de problèmes que nous connaissons aujourd'hui ne seraient pas là.

Si les journaux ont rapporté que l'industrie du taxi est malade depuis 64 ans, ils ont, pour la première fois au moins, rapporté quelque chose d'assez fidèle. Il faut comprendre que l'Association des propriétaires qu'on réclame actuellement existe en fait, mais s'il n'y avait pas eu, à l'intérieur des associations de service, l'infiltration parmi nos membres, l'intimidation et le chantage que nous avons dénoncés lors de notre comparution à la commission parlementaire sur le bill 23, je crois que ces gens auraient dû au moins avoir l'honnêteté d'essayer de comprendre et d'essayer de se pencher sur tous les problèmes du taxi.

Trop occupés à faire de l'argent à gauche et à droite et à nous retourner du revers de la main, ces gens n'ont regardé que leur intérêt et non

l'intérêt des propriétaires de taxis. Il est malheureux que nous passions ce soir à 11 h 5, parce que j'aurais aimé partager mon temps, et je vais le faire tout de même, avec une autre organisation qui est en arrière, et nous allons limiter notre temps. Vous nous arrêterez au bout d'une demi-heure. Il y a des gens qui se sont arrogé la gloire d'avoir fait l'élimination des spoutniks à Montréal. Je peux dire qu'il y a une seule association de service à Montréal qui n'a pas encouragé les spoutniks. Mais il y a une foule d'autres associations de service, des grosses, qui n'ont pas eu l'honnêteté de supporter leurs membres. Nous combattions quelque chose qui était enraciné depuis trente ou quarante ans, que les autorités municipales n'avaient pas le courage de détruire.

Nous nous sommes adressés à l'auteur du rapport Bossé plusieurs fois. Si des gens ont le droit d'être contre le rapport Bossé, tout comme le conseil des ministres — l'Opposition l'a accepté en principe — nous avions le droit de nous présenter en public, au nom strictement du comité exécutif, pour énoncer ce principe.

Il est malheureux que certaines associations de services, que je ne peux pas identifier actuellement — nous allons remettre à la Sûreté du Québec des documents à cet effet — aient tout fait pour saborder des associations honnêtes comme la nôtre qui essaient de survivre dans l'industrie du taxi. Nous n'avons pas d'accusations précises à porter actuellement, mais ces gens se sont toujours infiltrés dans nos organisations. Qu'on se réfère à certaines déclarations que j'ai faites en public. Des avocats, travaillant à la solde des associations de services, n'ont pas eu le courage de leurs convictions et n'ont pas fouillé les lois que vous avez votées, le bill 23 entre autres, qui pouvaient apporter une foule de solutions.

Maintenant, nous disons au gouvernement qu'il ne peut pas reculer parce qu'à l'article 29 du bill 23 on constitue une association. Nous allons nous borner, ce soir, à montrer les avantages d'une telle association. Nous aurions aimé produire une foule de documents que mon adjoint a ici, avec la permission de la commission.

LE PRESIDENT (M. Séguin): M. Pronovost, s'il y a une documentation supplémentaire que vous voulez faire parvenir à la commission, vous êtes libre de le faire. Ne vous sentez pas restreint à cause de l'heure. Procédez.

M. PRONOVOST: Très bien, merci. Nous croyons à la formule de l'association unique et à tout ce qui est dans la colonne de gauche. Je m'explique. Pour les petits propriétaires de taxis, qui paient des cotisations dans toutes les associations de services, voici ce que nous pensons. C'est une suggestion que nous avons à faire au gouvernement. Vous avez entendu les propriétaires d'associations de services dire qu'ils cotisaient leurs membres pour une moyenne de $36 par mois. Juste pour les besoins de ce que nous voulons démontrer, nous réduirons la cotisation des propriétaires, réunis à l'intérieur de l'association unique, à $30 par mois.

Avec les conclusions du règlement no 6, si vous arrivez à réduire le nombre de détenteurs de flottes et de permis à vingt, nous disons qu'il resterait environ, juste pour les besoins de la cause, 5,000 détenteurs de permis de taxi. L'association unique aurait là un revenu de $1 million et demi. Si vous reprenez la page 6-187 du règlement no 6, vous verrez qu'il y a une foule d'avantages qui sont passés par-dessus la tête de tous ceux qui l'ont lu: "Promouvoir l'instauration d'un régime de rentes", par exemple. Depuis l'ouverture de cette commission, vous avez entendu une foule de gens se plaindre — les petits chauffeurs, les petits propriétaires — de n'avoir aucun avantage social.

Dans cette page, on voit tous les bénéfices marginaux qu'on pourrait offrir à un travailleur régulier et reconnu qui pourraient être dispensés par l'association unique.

Je m'explique. Etablir, avec la participation d'un assureur autorisé à faire affaires au Québec, un régime d'assurance permettant d'assurer la vie, l'invalidité, le revenu, la responsabilité civile et, généralement, la personne. Pour ceux parmi vous qui connaissez le "mass merchandising" en assurance, c'est exactement ce que nous pourrions faire. Nous demanderions l'aide du gouvernement pour faire une telle chose. On parle aussi de la transformation des radios. Imaginez, continuons l'hypothèse que nous avons des revenus de $1,500,000. Pour la transformation des radios, pour la centrale unique, arrêtez-vous à penser, si les propriétaires de taxis sont réunis ensemble, 5,000 propriétaires de taxis, la force de négociation auprès des compagnies pétrolières, auprès des compagnies de voitures et des marchands de pneus, des manufacturiers de pneus, tous les avantages que nous pourrions en retirer. De plus, nous aurons des suggestions à faire au gouvernement, à l'intérieur toujours de l'association unique, pour que tous ces postes soient strictement observés. La subvention dont on parlait dans les journaux, qu'elle soit transmise aux détenteurs de permis de taxis. Si le gouvernement est prêt à investir pour essayer de remédier aux maux de l'industrie du taxi, nous serions heureux de voir un organisme gouvernemental mettre sur pied l'association unique et tout ce qui en découle. Mais il ne faudrait pas laisser un article hors de ça, parce qu'à la base, à notre sens, ce sont tous des avantages sociaux qu'on pourrait en retirer.

Nous avons également témoigné à la commission d'enquête sur les accidents, le 18 avril 1972. Pour ceux qui ne sont pas intéressés, nous étions encore les seuls. L'Association métropolitaine des propriétaires de taxis, depuis sa fondation, a pris sa responsabilité — malgré tous les bois dans les roues qu'on a essayé de

nous imposer — et nous avons réussi à aller partout. On nous a même accusés de coucher avec M. Bossé, mais peut-être qu'on pourrait nous accuser, depuis trois ou quatre mois, de coucher avec M. Pinard, et de coucher peut-être avec M. Loubier, que nous avons rencontré également. Nous avons rencontré M. Tremblay, le parti du Ralliement créditiste, lors de notre témoignage à la commission parlementaire sur le bill 23. On a voulu faire de la personnalité autour du règlement no 6, parce que ces gens, au lieu de prendre l'intérêt de leurs membres, pensaient strictement à eux.

Avant de terminer, M. le Président, nous avons des documents qui sont véridiques, que nous aimerions vous livrer. On a attaqué Diamond continuellement. J'aimerais qu'on continue, parce qu'il y a quelque chose qui est fort important. Au sujet de l'intimidation, et tout ce que vous voudrez, M. Paquet a le contrat de Diamond et il vous en fera la lecture. M. Paquet.

M. PAQUET: Si on regarde dans le contrat de Diamond, il y a trois articles qui stipulent que l'Association Diamond peut ou ne peut pas. Comme elle peut ou ne peut pas, elle ne peut jamais. L'impôt des restrictions de prêts obligatoires d'argent. Lorsque le membre a fini de payer sa part, l'association garde la part, elle l'attache à la copie du contrat qu'elle garde dans ses bureaux. Cette même part, je l'ai payée dans le temps que j'appartenais à l'Association Diamond. Je suis resté chez Diamond deux ans. J'ai retiré $1 par année, c'est-à-dire 1 p.c. d'intérêt. Cela fait treize ans que j'ai laissé Diamond. Ma part est restée entre les mains de Diamond sans qu'on me paie aucun intérêt.

Cette part-là, quand on nous l'a vendue, elle était obligatoire. Nous étions obligés d'y souscrire et si vous n'y souscriviez pas on vous expulsait ipso facto. Alors, voici une politique de Diamond.

On se rappelle en 1956, l'intimidation de Diamond vis-à-vis du syndicalisme. On se plaint tout le temps que l'industrie n'est pas organisée, elle a des raisons. L'Association Diamond faisait signer un document à ses membres pour consentir à l'addition à ses contrats de services une clause particulière en vertu de laquelle Diamond Taxi Cab Association Ltd serait le seul agent dans toute démarche concernant l'industrie du taxi à Montréal. Cette clause comporte également une déclaration que le membre de Taxi Diamond Association Ltd n'est membre d'aucune autre association de propriétaires de taxis et qu'il ne s'intéresse, ni deviendra membre d'une telle association sans le consentement de Diamond Taxi Cab Association.

Alors, en 1956, dix membres ont refusé de signer ce document qui les empêchait de rejoindre la Fraternité des propriétaires de taxis. Ils ont été expulsés. Alors, ne demandez pas pourquoi l'organisation des taxis ne peut pas se faire.

M. PINARD: Est-ce que je peux demander une précision? Là, vous racontez une situation qui a prévalu en 1956. Est-ce que les mêmes contrats avec les mêmes conditions dans l'Association Diamond prévalent encore en 1973?

M. PAQUET: Un membre me dit que tout récemment il fallait signer encore le même document à Diamond.

M. PINARD: Est-ce que vous êtes en mesure de déposer, devant la commission parlementaire, le document dont vous venez de nous faire lecture partielle?

M. PAQUET: Je vous ferai parvenir une photocopie du document.

M. PINARD: Vous ferez parvenir votre document à M. Jacques Pouliot.

M. Pouliot me dit que si vous nous le laissez entre les mains, nous pouvons le faire photocopier ce soir et vous n'aurez pas la peine de nous l'envoyer. Parce que c'est un document que nous aimerions avoir à la commission pour fins d'étude.

M. PRONOVOST: S'il vous plait, lorsque vous questionnez mon ami Paquet, auriez-vous l'obligeance de hausser le ton parce qu'il porte un appareil auditif.

M. PINARD: Très bien.

M. PAQUET: II y a un autre document. En 1962, Diamond envoyait une lettre à ses membres qui se lisait comme suit: Votre comité consultatif vient de prendre deux décisions d'importance majeure pour promouvoir les intérêts des membres de l'association. Afin d'obtenir un plus gros pourcentage de clients pour nos taxis, pour mieux nous faire connaître du public, nous lançons une campagne de publicité et de relations extérieures. Ce projet serait mis à l'essai dans un an. Un fonds spécial a été créé à cette fin et la contribution mensuelle est de $2 par voiture, soit $24 par année. Le comité consultatif a aussi approuvé notre adhésion aux Propriétaires unis du taxi de Montréal. La cotisation est de $0.50 par mois, par voiture, plus $1 d'inscription. Alors, ce syndicat était patroné par le Lasalle. Je m'excuse, M. Brunet ne faisait pas partie de Lasalle, c'était en 1964. Alors il était subventionné par Lasalle et Diamond qui fournissaient l'argent nécessaire à cette association-là et on parle de $0.50 par mois par voiture. Je ne pense pas que dans la Loi des syndicats professionnels une cotisation semblable ait existé. Diamond patronait le comité exécutif et suivait les directives de l'Association Diamond. Alors, le syndicalisme, c'est cela dans le taxi.

M. PINARD: M. Paquet, est-ce que ce sont encore les mêmes conditions qui prévalent en 1973?

M. PAQUET: Non.

M. PINARD: Cela a changé?

M. PAQUET: Cela a été abandonné. Mais c'est pour vous prouver ce qui se passait auparavant.

UNE VOIX: Est-ce que je pourrais ajouter à ceci...

LE PRESIDENT (M. Séguin): Est-ce qu'on pourrait avoir les noms, s'il vous plaît.

M. VANIER (Jean-Marie): Je m'excuse. Jean-Marie Vanier, je suis propriétaire d'une flotte de deux voitures. Je m'excuse de relater des choses qui remontent à près de 20 ans.

C'est pour les inexactitudes qui ont été dites et c'est beaucoup plus que des inexactitudes. C'est tout à fait erroné. Le représentant de Diamond est venu dire, au sujet de la compagnie d'assurances Bélair, qu'elle avait injecté disons $200,000 à $300,000 pour lancer la compagnie, et un autre montant, un peu plus tard. Au tout début, parlons de l'association de taxis Diamond, je parlerai de Bélair dans quelques secondes.

Quand je suis entré chez Diamond, c'était comme propriétaire; j'ai été chauffeur avant aussi, je pense que c'est vers 1955. On exigeait de prendre des parts dans la compagnie au montant de $500. Ces parts, naturellement, personne ne pouvait les payer comptant, on les payait — j'ai déposé le document, d'ailleurs, je l'ai laissé à M. Bossé, hier — $15 par mois, je pense. Je n'ai jamais retiré $0.05 d'intérêt de ces parts, je les possède encore, ça ne rapporte absolument rien, je ne sais pas ce que ça vaut, si c'est en bourse ou non. Diamond vient dire — et puis Bélair — qu'on est presque des assistés sociaux pour eux, à les entendre parler. Je suis simplement un petit propriétaire et c'est Diamond qui est assisté social, pour moi, parce que je lui ai fourni, en tant qu'individu, $500 de parts pour y entrer.

Je vais essayer d'expliquer brièvement pourquoi j'ai payé ça. Il y a vingt ans disons, Diamond possédait les meilleurs postes de taxi sur rues, partout, mais dans ce temps-là, ce n'étaient pas des postes en commun. A ce moment-là vous allez me dire que j'étais libre de ne pas faire partie de Diamond. Oui, j'étais libre mais, par contre, Diamond avait les plus beaux postes de taxi sur l'île de Montréal vu qu'elle était la première association de taxis en service. J'avais le choix de ne pas payer les $500, faire partie d'une autre association de services qui avait de moins bons postes, ou bien payer les $500, tant par mois, et faire partie d'une association qui avait les meilleurs postes. J'étais libre, réellement, c'est la liberté que j'avais.

J'ai pris la liberté de payer quand même ces $500 de parts. Après ça, très peu de temps après, peut-être un an ou deux, ils ont formé la

Bélair. On n'a pas eu le choix; chaque propriétaire a payé $100. Dans le temps je ne peux pat vous dire combien il y avait de voitures chez Diamond, c'était peut-être 1,300, 1,500, c'est un chiffre hypothétique mais je sais qu'il y avait un très grand nombre de voitures. On a fourni chacun, c'était obligatoire, $100 quand la compagnie Bélair s'est formée.

Je ne veux pas que vous preniez les chiffres comme étant exacts, faites une supposition de 1,500 voitures à $100 chacune. Capitalisez ce montant depuis vingt ans, mes mêmes $500 depuis vingt ans en parts que j'ai fournis, vous allez voir que ça représente un joli montant. Je suis sorti de Diamond, j'ai gardé mes parts qui ne valent absolument rien. Quant à mon assurance de la compagnie Bélair, elle m'a été offerte, par un des directeurs qui doit avoir un joli portefeuille aujourd'hui dans les assurances Bélair, $35 pour ma part. J'ai reçu quelques fois des intérêts de $1, $2, $3; je n'en ai plus entendu parler depuis quelques années. Ce même monsieur fait partie des neuf que vous connaissez très bien, M. Latreille pour ne pas le nommer. Je sais qu'il a acheté une quantité de parts à des prix très réduits; c'est facile à prouver d'ailleurs, vous pouvez le lui demander. II dit qu'il a injecté plusieurs milliers de dollars, des montants fantastiques dans la compangie; il arrive avec des chiffres mais ce sont des parts de $100 qu'on avait prises depuis plusieurs années. Et quand un type laissait le taxi, il disait: Ma part de Bélair, qu'est-ce que tu veux que je fasse avec ça, qui veut l'acheter? Il y avait un nommé Latreille qui était toujours prêt à les acheter à un prix fort avantageux.

C'est pas mal tout, en ce qui concerne ce point. Je n'avais pas l'idée d'en parler mais j'ai sursauté sur mon siège quand on est arrivé et qu'on disait qu'on nous subventionnait. Je ne voulais pas passer pour un assisté social tout de même, à comparer avec la Diamond; je crois que c'est le contraire, c'est la Diamond qui était l'assistée sociale.

J'ajouterais un mot, le président va probablement le dire, mais je pense qu'au sujet de l'association, je vais être très bref, je suis pour une association unique. Je conviens que vous savez quoi faire avec les autres associations, indemnité et tout ça, ce n'est pas à moi de parler de ces choses, mais si on tente de régler le problème avec l'association parallèle, selon moi, ça va être une réformette qui ne réglera jamais le problème en profondeur.

Le petit chauffeur, pour être bien honnête, est mauditement plus mal poigné que nous, il n'y a pas d'erreur, j'en conviens. On dit qu'il nous faut travailler autant d'heures, je ne fais presque plus de taxi, j'ai des chauffeurs. Il est vrai que l'artisan va travailler autant d'heures mais pour être sincère, si le propriétaire fait $1,000 avec le véhicule, s'il est propriétaire il aura $1,000 de plus. Il reste tout de même qu'il lui faut payer le véhicule avant et il en arrache en maudit durant cinq ans. On peut dire au

chauffeur: On va augmenter un peu la rentabilité en enlevant 400 ou 500 véhicules et toi on va t'augmenter ton salaire de $25 par semaine. Mais il paie de l'impôt, toutes les assurances que vous voulez, un plan de pension. Mais vous ne pouvez pas élever son niveau de vie d'une façon convenable si vous ne réglez pas en profondeur le problème du propriétaire. C'est un tout, on ne peut pas régler une partie du problème ou faire des réformettes, cela n'avancera à rien.

D'ailleurs, ne vous en faites pas, ça va chiâler. Faites une réformette, n'en faites pas, il est certain qu'il y en aura une partie qui va chiâler. Ce qui devrait vous rester dans l'esprit c'est quelle sera, selon vous, la méthode la plus efficace et au point de vue de la rentabilité. Il faut régler le problème en profondeur, avoir une association unique, comme l'a expliqué M. Pronovost, avec des revenus colossaux, pour régler nos problèmes au point de vue de l'association, qui va sûrement baisser. Ce n'est pas possible autrement. De plus, que les assurances en fassent partie avec un groupe de 5,000. Nous ne voulons pas une réformette qui grouperait 1,000 ou 1,500 taxis. Il faut augmenter la rentabilité du taxi en général et c'est pour ça que je dis qu'il faut commencer par le propriétaire. Ce n'est pas le problème du chauffeur, je parlais surtout du propriétaire, mais il faut convenir qu'il ne faut pas oublier le chauffeur. C'est lui le plus mal pris mais nous ne pouvons pas régler le problème du chauffeur sans avoir un plan d'ensemble.

Alors, vous touchez un peu à tout. Il faut améliorer le prix de l'association, le prix des assurances, réduire tous les coûts de services en général, que ce soit les pneus, l'essence, l'huile, l'achat du véhicule par lui-même. Je m'exprime assez rapidement, j'aurais voulu le faire beaucoup plus lentement mais j'essaie de dire beaucoup en très peu de mots. Cela représente le gros de mon exposé.

J'ajouterais simplement à ceci que nous tenons beaucoup à la valeur des permis et il est très facile de chasser les spéculateurs. Vous pouvez voir par vous-mêmes les municipalités où il y a un bon règlement. A Sherbrooke ou Saint-Léonard, on permet la vente, mais, si quelqu'un vend un permis, on ne lui permet pas d'en racheter un autre avant deux, trois ou cinq ans.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le ministre des Transports.

M. PINARD: Je ne voudrais pas vous interrompre, je pense que vous avez demandé que nous vous posions des questions seulement après votre intervention; alors je suis prêt à attendre.

M. VANIER: J'ai terminé. Je ne voudrais pas enlever la parole au président. C'est complet.

M. PINARD : Alors, M. le Président, me permettrez-vous une question?

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le ministre des Transports.

M. PINARD: M. Vanier, vous êtes vous-même propriétaire de deux voitures-taxis.

M. VANIER: C'est ça.

M. PINARD: Vous n'exploitez pas vous-même ces deux véhicules.

M.VANIER: Dans le moment, non. Cet hiver, je me propose d'en faire mais actuellement je ne m'occupe que du taxi et je ne crois pas avoir le temps.

M. PINARD: Donc, vous avez des chauffeurs à votre service.

M. VANIER: Oui, deux chauffeurs réguliers.

M. PINARD : Est-ce qu'il y a un chauffeur de jour et un chauffeur de nuit?

M. VANIER: Non, un chauffeur par véhicule.

M. PINARD: Un chauffeur par véhicule qui travaille le jour et la nuit ou seulement le jour?

M. VANIER: Je n'ai aucune idée des heures qu'ils font mais comme tout bon chauffeur de taxi ça doit être environ dix ou douze heures par jour.

M. PINARD: Quelles conditions exigez-vous comme propriétaire de ces véhicules, de la part de vos chauffeurs?

M. VANIER: Ils sont à location.

M. PINARD: Quel est le taux de location que vous chargez?

M.VANIER: Le taux est de $105 par semaine.

M. PINARD: Combien de jours travaillent-ils par semaine?

M.VANIER: Ils ont la voiture toute la semaine, durant sept jours. C'est comme si les véhicules leur appartenaient.

M. PINARD: En réalité, votre location est basée sur 24 heures.

M. VANIER : Absolument.

M. PINARD: Alors cela fait $15 par jour.

M.VANIER: Je puis vous le dire tout de suite, vous pourrez le vérifier auprès de mes chauffeurs; ils sont libres de travailler à pourcentage ou à location.

Il n'y a aucune pression.

M. PINARD: Est-ce que d'autres bénéfices leur sont accordés sous forme d'escompte dans l'achat de l'essence, des pièces de rechange?

M. VANIER: Je ne m'occupe absolument pas de ça. Le type prend son essence où il veut, il a son escompte lui-même. La seule chose que je lui demande, ce n'est pas une obligation. S'il y a une réparation mineure, il va au garage où il veut, mais je lui demande d'aller à un garage où j'ai un compte ouvert. C'est la seule chose que je demande. Pour le reste, l'essence, il la prend où il veut, il farde ses escomptes, je n'ai aucun contrôle, je le vois une fois par semaine, c'est tout.

M. PINARD: Comment conciliez-vous le fait que vous prenez $15 par jour à ces chauffeurs avec la déclaration faite précédemment par M. Lippé et par d'autres aussi qui sont venus avant lui nous dire que $15 est un prix exorbitant de location? Pour lui, $12 était même exorbitant.

M. VANIER: Mais $12, c'était pour 12 heures. Moi, c'est pour 24 heures.

M. PINARD: Bon, je comprends. Il est vrai que si les chauffeurs à qui vous louez vos voitures...

M. VANIER: II est libre de travailler à 40 p.c.

M. PINARD: ... travaillent des heures plus longues... Par hypothèse ils peuvent travailler 24 heures par jour...

M. VANIER: Le chauffeur a un autre avantage, il a sa voiture privée. Il n'est pas obligé d'avoir de voiture.

M. PINARD: ... et augmentent leur revenu d'autant.

M. VANIER: C'est leur choix. Je ne les force pas.

M. PINARD: Je ne vous force pas à nous le dire.

M. VANIER: Je n'ai pas de cachette.

M. PINARD: Est-ce que ce sont des taux exorbitant, $12 ou $15 par jour?

M. VANIER: II ne faut pas que vous fassiez la comparaison, $12 par jour c'est pour 12 heures. Si vous multipliez par deux, c'est 24 heures, si vous voulez comparez.

M. PINARD: On demande au gouvernement d'intervenir, de geler les taux de location et d'aller les faire accréditer par la Commission des transports.

M. VANIER: Je n'y vois pas d'inconvénient.

M. PINARD: II va falloir quand même se baser sur l'étude des coûts-bénéfices.

M. VANIER: Personnellement, je crois que je préférerais le pourcentage, mais c'est à votre discrétion. Le chauffeur, comme je vous dis, est complètement libre de travailler à 40 p.c. Notre association est à Saint-Léonard et le seuil de la rentabilité est atteint. Il y a un taxi pour environ 725 ou 750 personnes. Le chauffeur préfère louer parce que c'est rentable. Il n'est pas à Montréal.

M. PINARD: Avez-vous le droit de mettre un deuxième chauffeur sur votre voiture?

M. VANIER: Ah oui! Il y en a qui ont deux chauffeurs à Saint-Léonard. Moi, je n'y tiens pas. J'ai moins de problèmes comme ça. Ma voiture est toujours... j'ai de bons chauffeurs.

M. PINARD: D'après vous, M. Vanier, pour régler le problème du petit chauffeur qui est véritablement "poigné" dans le système des taxis, est-il souhaitable et même nécessaire de mettre fin au régime des locations?

M. VANIER: Je ne sais pas, je le penserais. Voyez-vous...

M. PINARD: C'est peut-être un des éléments de la réforme que nous devrions envisager. J'aimerais vous entendre de façon plus spécifique là-dessus.

M. VANIER: Je crois que oui. Je vais vous donner ma raison. Si le chauffeur commence avec une location de $12 plus l'essence, il faut qu'il fasse $18 ou $20 avant de commencer à travailler pour lui-même. Il ne peut pas faire autrement que travailler sous tension et chercher à aller plus vite, donc il y a plus de risque d'accident. C'est entendu que le chauffeur qui travaille à pourcentage devrait travailler d'une façon beaucoup plus détendue, j'imagine. C'est mon impression. Personnellement, quand j'ai travaillé dans le taxi il y a 20 ans, à salaire, avant que je m'achète une voiture, j'étais à 40 p.c.

M. PRONOVOST: M. le Président, avant de devenir propriétaire j'étais également chauffeur. J'ai expérimenté les deux systèmes et les deux ont un avantage. Disons que la tension est plus forte pour celui qui se voit déjà imposer une location. Le fait de garder la voiture, le système de location a dégradé le taxi. Cela s'est institué ou a commencé à être toléré en 1954. Allez voir la différence. Les gars vivent aussi bien et ils peuvent vivre tout aussi bien à 40 p.c. qu'à location. A 40 p.c. il y a l'avantage qu'ils ne sont pas attachés continuellement à la voiture tandis que les gars qui veulent conserver leur voiture à location — surtout ceux qui travaillent "single", pour employer le langage du métier — sont obligés de travailler presque sept jours par

semaine. Celui qui travaille à 40 p.c. peut être syndiqué tandis que celui qui travaille à location ne peut pas être syndiqué. Ce serait là un des débouchés vers la syndicalisation d'abolir la location, comme nous l'avions recommandé antérieurement dans des mémoires que nous avions soumis.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le ministre des Transports.

M. PINARD: M. le Président, me permettez-vous une autre question à M. Vanier pour que ce soit bien clair dans mon esprit et dans l'esprit des membres de la commission?

M. VANIER: Oui.

M. PINARD: Vous avez deux voitures, vous ne les exploitez pas vous-même.

Vous les louez à des chauffeurs et vous leur demandez $15 par jour, $105 par semaine. S'ils veulent faire 24 heures par jour d'exploitation de leur voiture, c'est à eux de le décider. Est-ce que le locataire de l'une ou l'autre de vos voitures peut sous-louer la voiture à un autre chauffeur?

M. VANIER: Non.

M. PINARD: Disons que votre premier locataire veut exploiter le jour, peut-il, pour retirer une location, tout comme vous le faites, faire travailler cette voiture la nuit, avec un chauffeur à qui il va la louer?

M.VANIER: C'est une entente. A ce moment-là, on peut avoir une entente.

M. PINARD: Oui. Mais à votre connaissance, est-ce que cela se fait, de la part de vos deux chauffeurs? A ce moment-là, s'il loue de vous sur une base de 24 heures, à raison de $105 par semaine, et qu'il veuille travailler seulement 10 heures par jour, il peut louer la voiture pour le reste de la journée, à un taux X. A ce moment-là, il peut faire de l'argent avec la voiture, comme vous, probablement, vous en faites avec le chauffeur à qui vous louez votre voiture.

M.PRONOVOST: Ce ne serait pas permis. Cela s'est produit déjà, mais...

M. PINARD: Je demande cela à M. Vanier. C'est lui qui a le problème

M.VANIER: Pourriez-vous répéter votre question?

M. PINARD: Avez-vous bien compris ma question? Peut-être ne l'ai-je pas posée clairement. Je vous prie de me croire, je ne vous pose pas ces questions pour vous embêter. C'est pour mieux nous éclairer sur la situation du chauf- feur, pour savoir quelles solutions nous pourrions trouver, pour le placer dans une meilleure situation économique et financière, pour lui permettre de faire des revenus décents, capable de le faire vivre, avec des heures normales de travail.

M. VANIER: A ce sujet-là, disons, si vous voulez, que je préfère les 40 p.c, mais ce n'est pas moi qui décide.

M. PINARD: Mais est-il possible que le type à qui vous louez votre voiture $105 par semaine, et qui ne l'exploite que dix heures par jour, puisse la louer à un autre chauffeur?

M. VANIER: Oui, c'est possible, pour autant que le gars sera "pocket number", c'est possible. Oui, c'est possible.

M. PINARD: A ce moment-là, allez-vous admettre avec moi qu'il peut se faire un revenu additionnel de cette façon?

M. VANIER : II y a une possibilité, oui.

M. PINARD: Bon. Si vous, vous faites de l'argent en louant votre voiture à un chauffeur...

M.VANIER: Pour quelqu'un qui a une vérification, qui est là tous les jours, ce n'est pas possible, mais pour quelqu'un qui a la voiture à longueur de semaine, c'est une possibilité.

M. PINARD: Mais là, on en reste toujours au système d'exploitation du chauffeur, avec ce que vous nous expliquez devant la commission parlementaire. C'est pour cela que je pose souvent la question à ceux qui se présentent devant nous.

M. VANIER: Oui, c'est possible.

M. PINARD: Est-il nécessaire d'abolir le système de location pour empêcher l'exploitation du chauffeur de taxi?

M. VANIER: J'y croirais et je reviendrais, comme M. Pronovost le disait, à ce moment-là, au sujet de la syndicalisation et comme le petit chauffeur, également, le disait tantôt, il faudrait que le gouvernement nous y oblige tous. Autrement, si on attend que les chauffeurs se réunissent par eux-mêmes pour former un syndicat, n'y comptez pas. Cela ne se réunit pas, des chauffeurs de taxi. Si le gouvernement ne s'en mêle pas, les chauffeurs de taxi ne s'uniront pas dans un syndicat.

M. PINARD : Vous comprenez mon point de vue, n'est-ce pas?

M. VANIER: Oui, très bien. C'est une possibilité.

M. PINARD: Enfin, je ne sais pas si je raisonne justement.

M. VANIER: C'est une possibilité.

M. PINARD: Je me dis que s'il y a exploitation, de la part des gros, contre les chauffeurs de taxi, il ne faut pas permettre l'exploitation des plus petits chauffeurs, des plus petits détenteurs de permis à l'égard des chauffeurs de taxi.

M. VANIER : C'est une possibilité.

M. PINARD: L'exploitation n'est bonne pour personne.

M. VANIER: D'accord, c'est une possibilité.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Saint-Maurice.

M. DEMERS: M. le Président, je voudrais poser une question à M. Vanier. Les deux chauffeurs qui travaillent pour vous font un salaire de combien par semaine?

M.VANIER: Je ne peux pas répondre, là-dessus, et eux-mêmes ne vous répondraient probablement pas. J'en ai un, entre autres, qui est bien travaillant, mais il y met les heures, j'en conviens. Je pense que lui-même ne vous répondrait pas. Je n'en ai aucune idée.

M. DEMERS: Vous n'en avez aucune idée?

M. VANIER: J'ai sûrement une idée. Je vous ai parlé tout à l'heure du seuil de rentabilité à Saint-Léonard. Je pense que vous pouvez imaginer qu'il se fait tout de même un salaire convenable.

M. DEMERS: Est-ce que vos voitures sont neuves de l'année ou usagées?

M. VANIER: J'ai une voiture de l'année 1972 avec un chauffeur. Cela veut dire que le mi liage doit représenter actuellement....

UNE VOIX: Trente mille milles.

M. VANIER: Plus que cela.

UNE VOIX: Quarante cinq mille milles?

M. VANIER: Probablement.

M. DEMERS: Et l'autre?

M. VANIER: L'autre est de l'année 1971 et elle devrait avoir 100,000 milles, pas loin.

M. DEMERS: Les deux voitures, comme capital investi, qu'est-ce que cela représente?

M. VANIER: C'est $3,500 en moyenne par voiture, plus 8 p.c. de taxe, les permis, le compteur, c'est comme toutes les autres.

M. DEMERS: Ainsi, vous n'êtes pas au courant du tout des revenus de vos chauffeurs?

M. VANIER: Comment voulez-vous que je le sois? Ils ont la voiture sept jours par semaine, ils ne me disent pas ce qu'ils font. Cependant, on le sait par la moyenne des chauffeurs.

M. DEMERS: Si vous n'avez aucune plainte, ils sont très satisfaits.

M. VANIER: Ecoutez, je n'ai pas cette hypocrisie. Ils sont comme tous les autres. Comme le disait le monsieur tantôt, au lieu d'une semaine, je leur donne deux semaines et disons que deux semaines avec la voiture... Je suis comme tous les autres propriétaires, quand on m'obligera à faire certaines choses et qu'on fixera le seuil de rentabilité, je serai d'accord. Je ne suis pas un modèle. Je ne veux pas me faire passer pour un modèle. Je ne suis pas hypocrite.

M. DEMERS: Vous êtes un homme assez franc.

M. VANIER: Assez, oui. M. DEMERS: Merci.

LE PRESIDENT (M. Séguin): J'aurais une petite question à poser à M. Paquet. M. Paquet, la commission vous a demandé tout à l'heure si vous pouviez déposer certains documents.

M. PAQUET: Oui, monsieur.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Voici le petit problème qui se pose. En ce qui concerne les mémoires, il n'y a aucun problème si ces documents sont distribués aux journalistes. Dans le cas des documents que vous avez déposés et qui semblaient être propriété privée, avez-vous objection...

M. PAQUET: Je veux les rendre publics.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Vous voulez les rendre publics. Je vous remercie. Le député de Maskinongé.

M. PAUL: M. Pronovost, pourriez-vous nous dire combien vous avez de membres dans votre association?

M. PRONOVOST: Nous avions au dernier compte, 475 membres qui détenaient entre 1,600 et 1,700 voitures, mais à la suite des menaces que nous avons reçues, de l'intimidation et de tout le chantage qui s'est fait lors de notre assemblée au Plateau, il y a eu beaucoup

de division à cause de notre prise de position en faveur de l'adoption en principe par le comité exécutif de la réglementation no 6.

M. PAUL: Sans vouloir entrer dans les détails, est-ce que vous pourriez nous donner une idée des menaces, de l'intimidation dont vous auriez été victime personnellement?

M. PRONOVOST: C'étaient des appels téléphoniques anonymes, ainsi que pour M. Paquet, au bureau, parce que le bureau de l'association est dans le sous-sol chez moi. M. Paquet a reçu des menaces et personnellement j'en ai reçu par téléphone. On a fait également des menaces à un de mes chauffeurs.

M. PAUL: Des menaces qui consistaient en quoi?

M. PRONOVOST: C'était de l'intimidation plus que n'importe quoi. On m'a dit: Toi, le chien, tu ne feras pas la semaine. Tu ne te rendras pas en commission parlementaire.

Mais le chien a encore deux pattes et sa voix, et il est capable de parler.

M. PAUL: Je pense que M. Paquet a quelque chose à ajouter.

M. PAQUET: J'ai reçu un appel téléphonique au bureau et un type m'a dit: Mon petit — cela comment par un "c" — je connais la couleur de ta voiture, je sais où tu restes, n'aie pas peur, je te rejoindrai quelque part. Cela vient inquiétant.

M. PAUL: Pourriez-vous nous dire, M. Pro-novost, si, depuis la publication du rapport Bossé, vous avez tenu une réunion de vos membres?

M. PRONOVOST: Non, malheureusement c'est pour cela. A chaque fois, j'ai fait bien attention et j'ai fait faire une correction dans la Presse, parce que certains de nos membres ont appelé chez nous pour nous dire: Vous ne pouvez pas vous engager, vous ne pouvez pas aller à la commission parlementaire et parler au nom de nos membres. Nous nous proposons, si le climat s'assainit, de réunir nos membres le plus tôt possible. Nous allons demander la protection de la police. Ne froncez pas les sourcils, on a une bonne idée de ceux qui ont voulu faire de l'intimidation et du chantage. Nous avions eu le courage d'inviter M. Bossé, et, je crois, Me Choquette qui a participé à la rédaction du règlement no 6.

Si vous aviez vu les gens qui étaient dans la salle, je pense que vous croiriez que les menaces sont sérieuses. Il y en a qui les ont prises au sérieux.

M. PAUL: Si j'ai froncé les sourcils, M. Pronovost, ce n'est pas parce que je ne vous ai pas cru, c'est parce que cela me surprend. Cela me surprend que les membres d'une même association ne puissent pas ou ne veuillent pas répondre à une invitation de leur exécutif. C'est cela qui me surprend. Quand avez-vous tenté de tenir une réunion de vos membres?

M. PRONOVOST: A la suite de la réunion que nous avions tenue à la salle le Plateau, il nous a été déconseillé par des agents spéciaux de la Sûreté du Québec de tenir l'assemblée que nous avions prévue pour le dimanche suivant. J'ajoute que même si on nous a suggéré de ne pas faire d'assemblée, nous avons tout de même tenté d'avoir une salle. Nous avons reçu de nombreux coups de téléphone de certains de nos membres, au-delà de 150, nous encourageant à continuer notre travail. Il y en a plusieurs qui auraient aimé venir ici. Ils sont venus la première journée de la commission parlementaire, mais eux aussi ont subi toutes sortes d'intimidations.

M. PAUL: Si vous avez à peu près 400 membres dans votre association, c'est donc dire que vous êtes moralement certain, à la suite de l'encouragement que vous auriez reçu de 150 membres, que vous exprimez ce soir à peu près l'opinion de la majorité de vos membres?

M. PRONOVOST: Je vais répondre à cette question. Mais je réponds, encore une fois, que seul le comité exécutif de l'AMPT a reçu un vote à l'unanimité des membres du comité exécutif pour venir parler au nom de l'association, mais strictement, cela n'engage pas l'association comme telle, cela engage strictement le comité exécutif.

M. PAUL: Très bien, il se compose de combien de membres?

M. PRONOVOST: De sept membres.

M. PAUL: Je vous remercie, M. Pronovost.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Lotbinière.

M. BELAND: M. le Président, dans le même ordre d'idées, est-ce que le reste de vos membres se disent prêts à continuer à vous épauler?

M. PRONOVOST: Nous le saurons lors de la consultation que nous allons faire dans le plus bref délai possible, mais je suis sûr qu'une fois le climat un peu apaisé, un peu assaini, plusieurs vont revenir au bercail.

M. BELAND: Etant donné que vous êtes quand même une association, pour situer le point, est-ce que vos membres retirent quelques avantages bien particuliers?

M. PRONOVOST: Actuellement, nous n'of-

frons aucun avantage particulier à nos membres. Lors d'une assemblée, le 19 janvier 1972, nous avons tenté, à la suite d'une résolution d'un de nos membres, d'avoir un "package deal" en ce qui concerne l'assurance-invalidité, l'assurance-vie et l'assurance-accidents-maladie. J'ai encore le nom de l'agent de la Crown Life que nous avions pressenti pour pouvoir offrir à tous nos membres, à prix réduit, ces avantages, et sept compagnies d'assurance ont refusé de nous assurer.

M. BELAND: Je vous remercie. Maintenant, en terminant, M. le Président, je veux rassurer l'honorable député de Laviolette à la suite des paroles fougueuses qu'il a dites à mon endroit sous prétexte que j'aurais prononcé à son sujet une parole plus ou moins aimable dans cette Chambre, j'accepte de retirer cette parole. S'il est vraiment lacordaire, je le félicite. Par contre, je ne comprends toujours pas la raison de sa fougue du début.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Ce sujet est clos. Le député de Dorion.

M. BOSSE: M. Pronovost et MM. les membres de l'exécutif, c'est peut-être assez cruel comme question et c'est peut-être compromettant à la fois, mais est-ce qu'il vous serait possible d'identifier ces menaces une fois pour toutes? Je sais que c'est beaucoup demander. Mais afin qu'il n'y ait plus d'équivoque dans l'esprit des gens, est-ce possible de donner des noms pour que, une fois pour toutes, le public, le monde du taxi et les membres de la commission parlementaire sachent à quoi s'en tenir, quitte, par la suite, à ce que vous soyez assurés d'avoir une forme de protection? Vous n'êtes pas obligés de répondre à cette question.

M. PRONOVOST: Je vais répondre par une autre question.

M. PAUL: Je le fais, non pas parce que je ne trouve pas la question du député de Dorion très à point, mais je me permets de vous donner gratuitement un conseil, si vous répondez, vous vous exposez peut-être à certains ennuis et à une obligation de prouver par la suite la réponse que vous donneriez. Je ne le fais pas dans le but de vous empêcher de répondre, mais c'est peut-être prudent de ma part de vous signaler ce fait. Quant à moi, je serais heureux que vous puissiez donner une réponse.

M. PRONOVOST: Je ne donnerai pas...

LE PRESIDENT (M. Séguin): M. Pronovost, il faudrait que je précise que le député de Maskinongé parle sans doute en sa qualité d'avocat lorsqu'il vous donne ce conseil.

M. PRONOVOST: Très bien. C'est excellent. Nous vous remercions. Je ne répondrai pas...

M. DEMERS: Consultation gratuite.

M. PAUL: Cela, c'est lui qui le dit, on se verra après.

M. PRONOVOST: Mais suite à vos excellentes suggestions, j'en aurais une autre à faire et je crois que nous allons la faire au cours de la semaine prochaine. Nous allons aviser le ministère de la Justice de tous les doutes que nous avons et nous avons une foule de documents à remettre au ministère de la Justice pour qu'il fasse enquête sur l'origine de ces publications.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je pense qu'obligatoirement nous devons ajourner à minuit.

LE PRESIDENT (M. Séguin): C'est cela.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'ai seulement une question à poser à M. Pronovost. J'aimerais avoir votre opinion là-dessus. Nous nous sommes parlé souvent, et je pense que vous connaissez pas mal le problème du taxi. Je n'ai pas à vous l'expliquer, ça fait deux jours que vous en entendez parler, que pensez-vous de la suggestion qui vient du gouvernement, du tableau qui est là et de l'organigramme qu'on a suggéré?

M. PRONOVOST: Disons que nous croyons à l'association unique, mais que cette association unique et tout ce qui en découle sous forme de coopératives, nous le verrions, mais nous suggérons fortement au gouvernement, s'il veut faire une association parallèle, qu'il devra nécessairement, comme je le demandais tout à l'heure, verser la fameuse subvention de $3 millions à $5 millions. Si nous voulons avoir une concurrence réelle, si vous voulez conserver certaines associations de services, et si vous voulez permettre et donner tous les bénéfices marginaux qui sont inclus dans l'association unique et tous les services qui en découlent, tels que le service des achats, le système des rentes, l'assurance-vie et tout le "mass merchandising" en assurance qui est décrit là, si vous nous donnez notre propre compagnie d'assurance, tel que je l'avais suggéré au premier ministre lors d'une entrevue particulière, je crois que nous pourrons...

Le gros problème à l'intérieur du taxi pour ceux qui veulent sortir des maudites associations de services, c'est l'assurance. Alors, si on n'a pas d'assurance, on ne peut pas y penser. En tant que gouvernement, si vous voulez faire une réforme, nous allons, par la concurrence, éliminer ceux qui, actuellement, se disent fiers compétiteurs. Mais nous soutenons d'avance que nous devrions avoir un système avec lequel nous pourrons les concurrencer et nous voir

garantir un certain nombre de membres, mais pas 150 membres, parce qu'à 150 membres, ils vont nous manger. Mais donnez-nous un chiffre approximatif égal à certaines grosses associations et je crois qu'il y a une foule de talents à l'intérieur qui seront capables d'administrer tout cela aussi bien que les gars de Diamond à 2 p.c. ou 3 p.c.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'aurais une autre question, une petite courte, parce que ça achève. Est-ce que vous verriez aussi à côté du carré rouge une association des chauffeurs — on parle ici d'une association des détenteurs de permis en vertu du bill 23 — mais un véritable syndicat des chauffeurs?

M. PRONOVOST: Je l'ai affirmé à la télévision et je le répète, il est illusoire de vouloir réformer le taxi sans passer par la base, c'est-à-dire les chauffeurs de taxi.

Nous avons donné un accord de principe à l'effet que s'il y avait un syndicat unique à travers l'île de Montréal ou à travers la province — chose qui serait peut-être souhaitable à travers la province — épaulé par le gouvernement, nous négocierions de bonne foi avec ces gens.

Merci.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de l'Assomption.

M. PERREAULT: Vous avez le mot "Métropolitain" dans votre nom. Est-ce que vous avez des chauffeurs de partout dans l'île?

M. PRONOVOST: Nous avons sollicité des propriétaires de Montréal et de différentes banlieues.

M. PERREAULT: Mais, effectivement, est-ce que vous en avez de partout dans l'île?

M. PRONOVOST: Oui. Nous en avons à Saint-Léonard, à Montréal-Nord, à Dorval, à Pointe-Claire, à la ville de LaSalle. Sauf à Verdun. Je pense que nous avons quelques nouvelles adhésions à la suite de notre prise de position épaulant la réglementation no 6. Il y a des gens de Verdun. M. Paquet me signale...

M. PERREAULT: Théoriquement, si on laisse le système indépendant d'association, vous pourriez être l'association qui deviendrait une coopérative de services, pour faire face aux autres.

M. PRONOVOST: Pardon? Cela serait à nos membres à décider, nécessairement.

M. PERREAULT: Ce n'est pas le gouvernement qui va la faire. Si les chauffeurs de taxi la font, si les détenteurs de permis se bâtissent une coopérative de services...

M. PRONOVOST: Nous serions heureux de collaborer à la fondation de l'association unique, parce que nous sommes la seule...

M. PERREAULT: Je ne parle pas de l'association unique.

M. PRONOVOST : Non. M. PERREAULT: Je parle...

M. PRONOVOST: ... de l'association des propriétaires.

M. PERREAULT: ... de l'association parallèle des services des détenteurs indépendants.

M. PRONOVOST: Oui.

M. PERREAULT: Je dis que si vous oeuvrez à l'échelle de l'ile, vous pourriez être pour l'ile de Montréal l'association qui créerait cette coopérative de services pour les taxis indépendants.

M. PRONOVOST: Nous serions heureux de collaborer.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Je constate qu'il est minuit. M. Pronovost, j'ai négligé de suivre une suggestion que vous m'aviez faite au début. C'était de vous interrompre au bout d'une demi-heure. A cause des questions qui ont été posées au fur et à mesure et avec la contribution de M. Vanier et de M. Paquet, j'ai cru bon de laisser continuer. Aviez-vous terminé, ou à peu près?

M. PRONOVOST : A peu près pour ce soir. Mais nous avons une foule de recommandations. Une fois que nous aurons consulté nos membres, il nous fera plaisir de vous détailler un mémoire...

LE PRESIDENT (M. Séguin): C'est cela.

M. PRONOVOST: ... sur toutes les recommandations que nous ferons à nos membres.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Pourriez-vous faire parvenir ce mémoire au secrétaire de la commission?

M. PRONOVOST: Avec plaisir. M. Paquet correspond assez régulièrement avec le gouvernement.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Et vous connaissez la coutume de fournir les copies voulues, le nombre voulu?

M. PRONOVOST : Est-ce que c'est 25 ou 33, cette fois?

LE PRESIDENT (M. Séguin): Disons 25. Je pense que nous nous en tirerons avec cela.

M. PRONOVOST: Très bien. Je vous remercie.

M. PINARD: M. le Président, me permettez-vous une remarque?

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le ministre des Transports.

Tenue d'une enquête

M. PINARD: Je ne la fais pas seulement mienne sauf que, comme ministre des Transports, je me sens quand même la responsabilité de dire publiquement que les membres de la commission parlementaire ont été témoins de déclarations assez fracassantes au sujet de menaces et intimidations de toute nature qui ont pu être faites aux personnes qui, librement, ont voulu venir témoigner devant cette commission parlementaire. Je ne veux faire de procès à personne. Je ne fais pas de procès d'intentions. Je veux me limiter à constater des faits qui nous ont été démontrés de façon claire et précise.

Cette situation étant ce qu'elle est, je me demande si les membres de la commission seraient d'accord avec moi pour que nous fassions rapport, en tant que membres d'une commission parlementaire, au ministre de la Justice pour qu'il ordonne une enquête sur toute cette situation de façon que la commission parlementaire ne soit pas entravée dans ses travaux de recherche de la vérité et des solutions pour régler le problème de l'industrie du taxi à Montréal ou ailleurs dans la province, et de façon que tous ceux qui demanderont au président de se faire entendre puissent venir à Québec librement sans aucune entrave nous dire pour une fois la vérité que nous voulons connaître.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que vous ajouteriez que si quelqu'un veut se faire entendre par la commission parlementaire et qu'il est empêché de venir par des menaces, il aurait le droit de demander la protection de la police? Je connais quelqu'un qui m'a dit qu'il ne voulait pas venir à la commission parlementaire justement parce qu'il a peur.

M. PINARD: Non, en répondant à votre question, je vais être très clair. Je ne parle pas de menaces présumées ou de menaces d'intimidation qui sont invoquées par certaines personnes pour faire une espèce d'écran et essayer de monter un stratagème qui pourrait nous empêcher de savoir la vérité. Je parle des menaces réelles qui ont été faites. L'enquête déterminera ce qu'elle devra déterminer. A ce moment, c'est au ministère de la Justice qu'incombe cette responsabilité de déterminer le sérieux de ces affirmations et de ces menaces d'intimidation.

Il ne faudra pas simplement l'affirmer, il faudra aussi donner des faits précis. Moi, je ne me sens pas cette capacité de pouvoir faire cette détermination du sérieux ou du non-sérieux de ces menaces. Il y a un ministère de la Justice, il y a des policiers, cela existe pour ça, ils feront leur devoir.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Cette suggestion que je faisais, c'était par l'intermédiaire du ministère de la Justice que cela serait fait.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de Maskinongé.

M. PAUL: Je verrais également d'un bon oeil la tenue d'une telle enquête de la part du ministère de la Justice pour autant que la commission parlementaire des Transports puisse continuer son travail pour connaître au plus tôt toutes les implications du règlement no 6 et pour que tous aient l'avantage de se faire entendre le plus tôt possible.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Je remercie le député de Maskinongé. Si jt dois conclure que cette commission consent, à l'unanimité, à la suggestion des membres de la commission, à la recommandation qui a été faite par le ministre des Transports, je me chargerai de transmettre cette demande au ministre de la Justice.

M. PRONOVOST: Je vous remercie, M. le Président, vous allez faire une foule d'heureux.

UNE VOIX: M. le Président, est-ce que je pourrais avoir la garantie, au nom de l'OCTM, de pouvoir se faire entendre mardi en priorité?

LE PRESIDENT (M. Séguin): J'ai remis...

UNE VOIX: Nous étions les suivants sur la liste.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Oui, un instant. Voici l'ordre. Nous avons déterminé, d'après l'allure des travaux de la commission, qu'il faudrait nécessairement, en convoquant, limiter le nombre d'associations ou d'individus convoqués. Ce soir, nous ajournons nos travaux à mardi, le 23 janvier 1973 à 2 h 30 de l'après-midi. A ce moment, par l'entremise du secrétariat, nous aurions convoqué pour mardi l'Organisation des chauffeurs de taxis de Montréal, l'Association des propriétaires de flottes de taxis de Montréal, l'Association des propriétaires de taxis de Saint-Jérôme, Lasalle Taxis Inc., l'Union des chauffeurs de taxis, local 48, de l'Union internationale des teamsters.

En ce qui concerne les individus, nous aurions convoqué pour mardi, M. Armand Douganiari, de Montréal. Si nous avons terminé ce groupe mardi, nous ajournerons nos travaux à mercredi, le lendemain, à dix heures. A ce moment, nous continuerons d'entendre — mais

ces gens seront convoqués pour la journée, comme je l'ai expliqué tout à l'heure — Boisjoli Radio Taxi, Taxi Escoumins, Métropole Radio Taxi, l'Union des propriétaires de taxis de Granby, West Island Transportation Ltd.

Je disais que nous aurions pour la deuxième journée cinq associations, que je viens de nommer et trois individus: M. Tony Viola, de Montréal, M. William O'Connell, de Verdun et M. Ronald Bernard, de Montréal. Ce sont les instructions que j'ai données au secrétaire et il aura la liberté, si une des associations ne pouvait répondre à l'appel à la date convoquée, de prendre une autre association, à la suite, sur la liste déjà établie. Cette association sera contactée. Vous avez le programme pour la semaine prochaine. Nous siégerons mardi et mercredi, mais ni jeudi ni vendredi. Le député de Napierreville-Laprairie.

M. BERTHIAUME: Un éclaircissement sur la journée de mardi. Est-ce qu'on devra réentendre Lasalle?

LE PRESIDENT (M. Séguin): Non, c'est un autre.

M. BERTHIAUME: Est-ce qu'on peut dire qui c'est? J'ai mal compris.

LE PRESIDENT (M. Séguin): Pour Lasalle, je suivais la liste tout simplement, il y a Taxis Lasalle Inc. et il y a un autre Lasalle.

M. BERTHIAUME: J'ai compris.

LE PRESIDENT (M. Séguin): On l'a passé ce soir avec M. Brunet. La commission ajourne à mardi, 2h 30.

(Fin de la séance à 0 h 7)

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