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(Onze heures huit minutes)
Le Président (M. Blouin): La commission élue
permanente du travail reprend ses travaux. Je vous rappelle le mandat de cette
commission, qui est d'examiner l'administration et le fonctionnement de la
Commission de la santé et de la sécurité du travail.
Les membres de cette commission sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie), M.
Cusano (Viau), M. Dean (Prévost), M. Fréchette (Sherbrooke), Mme
Harel (Maisonneuve), M. Lafrenière (Ungava), M. Lavigne
(Beauharnois), M. Pagé (Portneuf), M. Baril (Arthabaska), M.
Maltais (Saguenay), M. Champagne (Saint-Jacques) et M. Champagne
(Mille-Îles).
Les intervenants sont: M. Sirros (Laurier), M. Côté
(Charlesbourg), M. Leduc (Fabre), M. LeMay (Gaspé), M. Polak
(Sainte-Anne), Mme LeBlanc-Bantey (Îles-de-la-Madeleine) et M. Vaugeois
(Trois-Rivières).
Nous allons maintenant inviter les représentants de l'Association
des entrepreneurs en construction du Québec à venir s'asseoir
à la table des invités. Alors, j'invite les représentants
de l'association à s'identifier, pour les fins du journal des
Débats, et ensuite à nous livrer le contenu de leur
mémoire.
Auditions AECQ
M. Dion (Michel): M. le Président, madame et messieurs les
membres de la commission, on doit vous aviser que le président de
l'association est actuellement en Italie; cela n'a aucune relation avec les
derniers événements qu'on connaît. À cause de la
température et de certains événements, il n'a pu revenir
à temps. Notre mémoire sera donc présenté par le
vice-président, M. Claude Daoust, qui est à ma gauche.
Également, si vous voulez comprendre notre situation, une partie du
mémoire sera présentée par M. Claude Girard qui fait
partie d'un comité qu'on vous expliquera au cours de la
présentation de notre mémoire, soit le comité de
surveillance des finances de la CSST.
On a tenté de donner suite à votre voeu d'hier soir,
c'est-à-dire de résumer une partie de notre mémoire. Vous
allez comprendre quand même que, dans la nuit, il était difficile
d'y arriver totalement. Je pense qu'on a réussi à diminuer, dans
une bonne proportion, le temps de l'exposé. On a gardé les
parties essentielles. Alors, effectivement, vous pourrez, à toutes fins
utiles - on vous a distribué le texte -consulter les parties qu'on
n'aura pas lues et on demanderait que le contenu total de notre mémoire
fasse partie du journal des Débats, même si des parties n'auront
pas été exposées devant la commission.
Le Président (M. Blouin): Cela va. Vous vous identifiez,
s'il vous plaît?
M. Dion: Mon nom est Michel Dion, directeur général
de l'AECQ.
Le Président (M. Blouin): Et ceux qui vous
accompagnent?
M. Dion: M. Daoust, à ma gauche, vice-président de
l'AECQ; M. Claude Girard, qui siège au comité de surveillance des
finances et membre de l'AECQ; M. Alfred Régnier, du personnel de l'AECQ,
responsable du dossier santé et sécurité.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Dion.
M. Daoust (Claude): J'aimerais vous donner, peut-être, un
petit aperçu, un petit historique de l'AECQ et de son mandat en
santé et sécurité. L'association que je représente
ici, aujourd'hui, a effectivement vu le jour en février 1976. Une loi
adoptée en 1975, à la suite de la commission Cliche, a en effet
regroupé tous les employeurs de l'industrie de la construction pour les
fins des relations du travail.
Bien qu'il ait tendance à diminuer officiellement depuis deux ans
naturellement, il y a beaucoup de faillites depuis deux ans - notre
"membership" représente encore, aujourd'hui, près de 13 000
entreprises. Alors que notre mandat principal est la négociation du
décret, il est par essence également celui de voir à
l'application de toutes les conditions du travail.
La santé et la sécurité, quoique nullement
négociables, sont, à toutes fins utiles, des conditions du
travail. Pour les plus susceptibles, disons que, directement ou indirectement,
la santé et la sécurité et, par le fait même, la
prévention des accidents à
la source, affectent journalièrement l'activité d'un
employeur et des salariés sur un chantier. Nos membres ont, en 1978,
saisi l'ampleur et l'importance de la question et ont dès lors
accordé librement des fonds à l'association pour s'occuper du
mandat de la sécurité et de la santé.
J'aimerais établir le cadre de notre intervention à ce
sujet. Nous soulignons peut-être de façon brutale, dans notre
mémoire, qu'il nous est apparu inconcevable de ne pas être
invités à exposer nos commentaires devant cette commission
parlementaire. C'est tout de même très frustrant, vous
l'admettrez, de contribuer à plus de 15% du budget de fonctionnement -
en effet, cela est 17%, 126 000 000 $ - sans avoir droit de parole.
Évidemment, nous remercions M. le ministre, ou encore M. le
président de la commission, de nous avoir au moins accordé ce
droit fondamental.
C'est sûrement à vol d'oiseau, vous le constaterez, soit
par manque de temps ou de ressources, que nous tenterons d'illustrer nos
difficultés, nos inquiétudes - comme quelqu'un le disait si bien
chez nous - face à ce deuxième stade olympique qu'est la
CSST.
Plusieurs points n'apparaissent pas au dossier car, à notre avis,
ils cadreront mieux lors de l'étude du projet de loi 42, non pas parce
que nous espérons que ledit projet soit passé, tout au
contraire'. Nous sommes convaincus que le gouvernement sera, après cette
commission parlementaire, très conscient des trop graves malaises
à la CSST et qu'il surseoira sans hésitation, en administrateur
prudent, audit projet, sauf en ce qui concerne les implications du 38.4.
Pour nous, cette commission parlementaire est un peu comme une
bouée de sauvetage dans une mer déchaînée qu'est
l'administration de la CSST. Serons-nous rescapés ou victimes? L'avenir
le dira et, jusqu'à un certain point, l'avenir est entre vos mains.
C'est une autre commission parlementaire où les employeurs se vident le
coeur, diront certains individus. Mais ces gens ont tendance à oublier
que nous faisons partie de l'entreprise privée où la
législation, la réglementation restrictive et négative de
nos droits sont monnaie courante de telle sorte qu'il est devenu très
difficile d'exercer un commerce profitable.
Nous soulignons dans notre mémoire les difficultés de
notre marché concurrentiel. Si dans les autres provinces, avouons-le, il
y a la concurrence ouverte des non-syndiqués, ici, c'est pire, nous
avons celle du marché noir, des illégaux du système. La
surréglementation qui nous affecte devient alors, vous le comprendrez,
intenable, car les autres s'en foutent. Ils passent outre à la Loi sur
les relations du travail dans l'industrie de la construction, au
règlement de placement, à la régie, à la
qualification, aux ratios d'apprentis compagnons, aux impôts et j'en
passe.
Nous sommes de toutes parts surveillés, inspectés,
contraints. On nous poursuit. On appose des scellés et, par-dessus tout,
on veut même nous dire, sinon nous montrer comment gérer notre
entreprise. C'est pour cela qu'il fallait qu'on vienne vous dire et vous
montrer humblement comment, entre autres, la CSST est devenue un ennemi du
patronat de la construction qu'elle envoie promener après l'avoir
courtisé à tour de bras.
J'aimerais parler du rôle de la construction au conseil
d'administration de la CSST. Savez-vous, MM. les membres de la commission
parlementaire, que sur un budget de cotisations de 756 000 000 $, en 1982,
l'industrie de la construction a versé 125 800 000 $, soit 17%? Compte
tenu de l'importance de notre industrie, nous étions très
satisfaits d'être représentés au conseil d'administration
de la CSST par M. Jean-Claude Murray lequel, soit dit en passant, s'acquittait
de ce mandat avec brio, sans compter ses efforts. C'était le
problème, il en faisait trop, il en voyait trop et, surtout il en
soulevait trop. Par surcroît, il mettait le doigt sur des "fatiguantes",
comme on le dit souvent. Il parlait un peu trop, il était un peu trop
honnête.
Nous n'étions pas dans le secret des dieux, mais la
première chose que nous avons sue, c'est que, malgré la
recommandation unanime du CPQ et de la chambre de commerce - du moins, on nous
dit qu'ils étaient unanimes - le ministre du temps a
évincé M. Murray. Était-ce un motif de sang nouveau? Non,
la plupart des autres membres ont été renommés.
Était-ce un motif de degré d'importance de l'industrie de la
construction? À vous d'y répondre, surtout si on considère
que, du côté syndical, il y a au moins un gars de la construction,
de la FTQ. Était-ce le désir de donner un siège à
un autre secteur tout aussi important? À vous également de juger
de la logique de M. Marois quand il affirmait que Mme Grimard était de
la construction. Une petite remarque en passant, j'ai remarqué qu'hier,
lorsque certaines paroles ont été dites par M. Lavallée,
il n'y a pas tellement de gens du côté patronal qui ont
donné la réplique pour la construction.
Pourquoi donc nous expulser? Peut-on croire que le
président-directeur général de la CSST n'avait rien
à dire ou à faire dans cela, comme il l'a laissé entendre?
C'était une façon élégante de s'en sauver, mais
celle-là, messieurs de la commission, nous ne l'avons pas avalée
et nous ne l'avons pas acceptée non plus.
M. Fréchette: Pour notre bonne compréhension, M.
Dion nous a informés que vous avez remanié un tant soit peu le
document.
M. Daoust: C'est cela.
M. Fréchette: On a un peu de difficulté, en tout
cas, moi, j'ai un peu de difficulté à vous retrouver dans les
pages que vous êtes à lire. Est-ce que vous pourriez nous indiquer
où vous en êtes actuellement?
M. Dion: M. le ministre, concernant votre voeu d'hier, ce qu'on a
fait, en théorie, c'est un résumé. Il suit l'ordre des
sujets qui sont dans le mémoire. On est actuellement à
l'industrie de la construction et sa non-présence au conseil
d'administration. On a passé l'AECQ et son mandat. On a passé le
deuxième sujet, le cadre de notre intervention. On est au
troisième sujet du mémoire. Cela vous donne une idée du
nombre de pages qu'on a pu couvrir déjà en le
résumant.
Le Président (M. Blouin): MM. Dion et Daoust, ce que je
vous suggère et ce que font les organismes habituellement, lorsqu'ils
résument des mémoires comme vous le faites, c'est qu'au moment
où ils abordent un nouveau sujet ils nous indiquent la page à
laquelle ils en sont rendus.
M. Daoust: Vous devriez être aux pages 6 et 7, parce que ce
sont les deux pages qui couvrent le sujet...
Le Président (M. Blouin): Cela va.
M. Daoust: Mais les mots ne sont pas textuels.
Le Président (M. Blouin): Oui, oui. Cela va.
M. Daoust: Comme vous le savez, on s'est efforcé hier soir
de mettre cela de façon un peu plus concise.
Je vous disais, messieurs de la commission, que ce geste d'être
expulsé, on ne l'a pas avalé. On ne l'a pas accepté et on
n'est pas près de l'accepter. Le ministre actuel le sait. Il le comprend
et nous sommes convaincus qu'il corrigera cet affront fait à l'industrie
de la construction. Nous voulons un membre votant au conseil d'administration
de la CSST, un membre que nous nommerons nous-mêmes. Finies la politique
et les nominations par les intermédiaires. Hier - un petit
à-côté ici -M. Sauvé vous a indiqué -
c'était peut-être, justement, le fait qu'on n'était pas
là - qu'il y avait 26 comités ad hoc à la CSST. Nous vous
rappelons qu'un comité ad hoc, ce n'est pas décisionnel et en
plus, on participe à trois de ces comités. Il ne faudrait pas que
quelqu'un prétende ou laisse entendre qu'on est présent autant
que si on était au conseil d'administration. Ce n'est pas vrai.
Nous allons passer à la loi et son objectif, tel qu'on le voit.
Dans cette partie de notre exposé, nous voulons rappeler que la loi
devait impliquer les intervenants, non pas les ignorer ni les maltraiter. Je
m'excuse, M. le Président, vous m'aviez demandé... Je vous situe.
C'est aux pages 7 et 8. Donc, la loi devrait impliquer les intervenants, non
pas les ignorer, ni les maltraiter. C'est une demi-réussite car 50% des
gens du monde syndical sont impliqués ou plutôt, certains chefs
syndicaux sont très impliqués, mais nous, du monde patronal de la
construction, on n'est pas là.
Nous voulons ici vous informer des principes que l'AECQ prône en
santé et en sécurité. Vous trouverez cela en annexe dans
votre livre bleu. La CSST est un organisme qui administre le fonds d'assurance
collective que les employeurs ont établi pour dédommager les
travailleurs en cas d'accidents du travail.
L'AECQ estime que le patronat est apte à assumer ses
responsabilités en matière de prévention, formation,
inspection, indemnisation et réadaptation, à l'intérieur
d'un cadre législatif définissant ces besoins.
C'est pourquoi la CSST devrait être dirigée par un conseil
d'administration exclusivement patronal. Le ministre du Travail pourrait y
déléguer un observateur. Ainsi, les mêmes objectifs
généraux seraient atteints, mais à un coût
inférieur, l'organisme étant administré selon des
critères plus sévères, propres à l'entreprise
privée.
Quant au rôle des travailleurs et de leurs syndicats dans ce
domaine, il devrait se jouer au niveau du lobbying politique dans la confection
du cadre législatif et au niveau de l'entreprise dans la participation
aux comités de prévention.
Comme alternative à la CSST et compte tenu du cadre
législatif mentionné, l'entreprise devrait pouvoir s'assurer
contre les accidents du travail auprès des assureurs privés. Si
cette alternative était refusée et si le paritarisme continuait
d'exister à la direction de la CSST, l'AECQ prônerait alors le
paritarisme au niveau des contributions de la commission.
L'AECQ considère comme inacceptable la philosophie qui
prévaut actuellement à la CSST et considère M. Robert
Sauvé comme inapte à remplir sa fonction à cause de son
attitude antipatronale. La CSST agit comme un organisme à vocation
sociale et démontre un préjugé favorable envers les
travailleurs et leurs syndicats.
La CSST dilapide sans gêne les cotisations des employeurs en
utilisant le conseil d'administration paritaire comme couvert, les
représentants patronaux étant constamment bousculés par
des fonctionnaires favorables à la partie syndicale.
L'AECQ n'écarte pas la possibilité de
recourir à la retenue des cotisations pour obtenir les
améliorations souhaitées et compte que les autres secteurs
industriels se montrent plus critiques envers la CSST.
L'AECQ dénonce la philosophie qui anime les dirigeants de la CSST
et la considère comme antipatronale. L'AECQ estime que le conseil
d'administration de la CSST devrait être formé exclusivement de
représentants patronaux. L'AECQ considère la CSST comme un
organisme à qui les patrons confient un fonds d'assurance collective
établi pour les cas d'accidents du travail. L'AECQ souhaite que la loi
soit modifiée pour permettre à l'entreprise privée de
concurrencer la CSST.
La réglementation à outrance que présageait le
projet de loi 17 n'a pas manqué de se réaliser.
Une voix: Quelle page?
M. Daoust: Vous devriez être dans la section de la loi et
son objectif, probablement à la page 8.
Une vraie usine à faire des règlements et Dieu sait que,
dans certains cas, ils sont à forte tendance prosyndicale. Le malheur de
tout cela est que les bénéficiaires, les rentiers disent ne pas
en avoir assez; c'est insuffisant. Nous, nous crions parce que cela coûte
trop cher. Eux crient parce que les services et les bénéfices
sont inadéquats. Le problème serait-il causé par une
tierce partie, soit l'administration?
Passons, si vous le vouiez, à l'étude de certaines
données que nous avons ramassées pour illustrer nos positions. Je
vous passe M. Claude Girard qui est membre du comité de surveillance des
finances.
M. Girard (Claude): M. le Président, vous pouvez suivre
une partie de notre texte à compter de la page 9 du mémoire
complet qui vous a été remis, le document bleu.
Dans ce contexte plus que difficile, où la notion de profit est
carrément écartée, notion pourtant qui fonctionne
honnêtement dans plus d'une entreprise privée et même dans
quelques-unes des nombreuses sociétés d'État du
gouvernement du Québec, nos membres ont vu naître, avec le
début des années quatre-vingt, un monstre bureaucratique; et je
ne caricature pas en le qualifiant de structure de l'homme d'un milliard, qui
grandit démesurément en se nourrissant de leur argent, notre
argent. Ce monstre, aux pouvoirs sans précédent, leur donne des
directives, souvent sous la forme d'avis d'infraction, sur la gestion de leurs
chantiers et les inonde d'obligations incompatibles avec une saine
administration.
Peu de gens savent exactement ce qu'il en coûte pour administrer
ce cirque. Peu d'entreprises ont les moyens de se payer,
particulièrement dans les périodes économiques difficiles
que nous vivons, une armée de recherchistes, de statisticiens, de
professionnels de tout acabit pour préparer des montagnes de documents,
tableaux, graphiques, etc., qui permettent d'aveugler même le plus
attentif des yeux inquisiteurs. Vous-mêmes, messieurs et mesdames de la
commission parlementaire, aurez probablement droit à ce traitement.
Peu d'entre nous connaissent les sommes d'argent mis en fiducie par la
CSST. Les chiffres font rêver, de quoi amoindrir un déficit
gouvernemental; mais le rêve se traduit souvent par un cauchemar pour
ceux qui doivent payer la note au bout de la ligne. En l'espace de quatre
exercices financiers, la CSST a accru ses revenus de 65%, passant de 579 000
000 $ en 1979 à 958 000 000 $ en 1982. Ces revenus totaliseront environ
1 055 000 000 $ en 1983, ce qui donnera, pour la période de cinq ans,
une augmentation d'environ 82%, tel que cela est décrit au tableau du
milieu de la page 11.
Il y a des fois, messieurs les membres de la commission parlementaire,
où nous ne pouvons plus contrôler notre réaction, pour ne
pas dire notre colère, devant certains agissements de la CSST. À
titre d'exemple, prenons deux minutes pour regarder de plus près la
capitalisation. (11 h 30)
Certains peuvent se surprendre que, dans le contexte économique
qui a prévalu il y a si peu de temps, la CSST n'ait pas tiré un
plus gros avantage de cette conjoncture favorable, laquelle a fait grimper les
taux d'intérêt à des sommets jamais atteints de
mémoire d'homme. En effet, la CSST, riche de ses nombreux milliards, a
effectivement fait de bons placements et réalisé des revenus peu
prévisibles. Mais pour la majorité des cotisants au
régime, cette augmentation extraordinaire des revenus a surtout permis
aux dirigeants de la CSST de faire miroiter des images de saine gestion de la
capitalisation sans apporter aux fournisseurs de fonds une réduction de
leur fardeau financier.
La CSST réalisait des revenus supérieurs à ceux
jamais espérés ou projetés lorsque le placement initial,
relatif à une dépense future, a été effectué
à la Caisse de dépôt et placement du Québec, ce qui
lui permettait d'imputer des revenus d'intérêt
supplémentaires à son fonds capital. La CSST n'aurait-elle pas pu
imputer à la cotisation ces revenus inespérés, ce qui
aurait diminué le fardeau des employeurs? Notons également que
les facteurs de projection utilisés par les actuaires pour
établir le coût d'une rente n'ont jamais, semble-t-il, atteint en
pourcentage le taux d'intérêt inflationnaire. Raison additionnelle
pour ne pas imputer lesdits surplus au fonds capital.
Mais voilà le punch: la CSST s'est
prévalue de cet apport inespéré de fonds pour
établir une nouvelle norme de financement, réalisant qu'il serait
pour le moins immoral de continuer un système de pleine capitalisation,
le fonds en capital rapportant déjà annuellement, à lui
seul, près d'un quart de milliard en intérêts - c'est
inscrit "million", mais c'est une erreur de frappe, c'est effectivement
"milliard"; 200 000 000 $, 250 000 000 $.
On a voulu nous vendre cela, c'est-à-dire la réforme du
mode de financement comme étant un cadeau du projet de loi 42. Nous
considérons comme inacceptables de telles présentations, car il
aurait fallu plutôt dire la vérité sur la provenance entre
guillemets, de la réduction, et surtout avouer honnêtement que
cette réduction était moindre que prévu parce que le
projet de loi 42 en absorbera quelques millions.
La progression de la cotisation des patrons a été non
moins impressionnante et inquiétante. De 480 000 000 $ en 1979, cette
cotisation se trouve, en 1983, à 822 000 000 $, soit une augmentation de
71%. Selon les informations que nous détenons, l'industrie de la
construction a eu droit à un traitement privilégié, soit
une augmentation de 93% pour la même période, soit 64 000 000 $ de
cotisations en 1979 et 123 000 000 $ ou 125 000 000 $ - dans cet ordre de
grandeur - pour 1983. Le tableau de la page 15 vous donne en détail la
progression de la cotisation tant au niveau général que pour le
secteur de la construction. Ce qu'on y remarque ou la principale conclusion de
ce tableau est que jamais la contribution du secteur construction depuis 1978
n'a été inférieure à au moins 15% des revenus de
cotisation de la commission, ce qui, à notre avis, justifie largement un
siège au conseil d'administration.
Pourquoi la construction a-t-elle droit à ce traitement
spécial? Les secteurs à haut indice de risques sont
pénalisés par la restructuration des services financiers, les
différents modes de financement et les nouveaux critères de base
retenus pour établir la tarification depuis 1979 ou l'avènement
de la CSST. La restructuration au plan régional a fait grimper les
coûts administratifs pour lesquels l'industrie de la construction est
cotisée à partir du coût de de ses propres accidents. Les
critères de base retenus pour les fins de tarification ont
éliminé toute relation avec le principe de la mutualité
pour restreindre celui-ci à l'intérieur d'un groupe réduit
d'entreprises réunies dans une unité. Une unité, je parle
de la classification de la CSST qui reconnaît environ 680 unités.
Ajoutons à cela que notre confusion est encore plus grande lorsqu'on
constate une diminution constante du nombre d'accidents dans le secteur de la
construction, diminution qui s'observe depuis 1977 par rapport à la
progression du coût global des accidents. Sans aller jusqu'à
prévoir une diminution des coûts, nous aurions pu espérer
à tout le moins une certaine stabilisation de ceux-ci. Ce fut le
contraire, nous observons une progression constante moyenne de 11,6% par
année, pour la période 1979 à 1982.
De 1971 à 1982, soit une période d'environ douze ans, la
cotisation des employeurs a été augmentée de 578% au
Québec, alors qu'en Ontario pour la même période la
cotisation ne progressait que de 364%. Si nous tenons compte des stricts
coûts d'administration directs - ne pas confondre avec ce que la CSST
appelle les frais de chargements - nous réalisons que ceux-ci sont
passés de 44 000 000 $ en 1979 à 116 000 000 $ en 1983 pour une
augmentation de 162%. Sont inclus dans les frais d'administration le traitement
des fonctionnaires de la CSST, les dépenses de fonctionnement:
téléphone, frais d'ordinateurs, etc., les dépenses en
capital et les dépenses de transfert. Vous avez également la
distribution au bas de la page 17 du montant de 110 000 000 $ des frais directs
d'administration tel qu'il appert au rapport annuel de la CSST,
vérifié par le Vérificateur général. Cela
totalisait, pour l'année 1982, 110 000 000 $.
Déjà en 1978, alors que la commission établissait
de nouvelles normes de fonctionnement en introduisant dans un premier temps la
régionalisation, les coûts d'administration devaient
connaître en l'espace d'un an une augmentation de plus de 18%. La mise en
place de la deuxième phase de la restructuration, associée
à l'impact de la loi 17 et la création de la CSST, provoquait une
autre augmentation moyenne de plus de 30% par année pour les
années subséquentes à 1978, avec un bon spectaculaire de
65% en 1981, alors que la CSST amorçait au cours de cette année
1981 le processus qui l'amènerait en trois ans à doubler au moins
son personnel. Ce qu'il y a de plus aberrant dans les quelques chiffres
cités c'est que les coûts d'accident, qui sont à l'origine
les causes de toutes ces dépenses, n'ont, eux, progressé que de
52% pour l'ensemble de l'industrie, passant de 386 000 000 $, en 1979, à
585 000 000 $ pour 1982.
Ces chiffres sont encore plus significatifs dans l'industrie de la
construction où les coûts sont passés de 52 600 000 $, en
1979, à 71 200 000 $, en 1982, pour une augmentation totale de 35% pour
quatre exercices financiers, soit moins de 10%, même 9% par année
ou que l'inflation courante.
Le tableau du milieu de la page 19 illustre la progression du coût
des accidents, lequel est passé en 1979 de 385 000 000 $ à 585
000 000 $ avec les pourcentages
correspondants à la dernière ligne.
Nous n'hésitons pas à qualifier de scandaleux et
d'injustifiable le fait que la CSST ait connu une telle progression de ses
dépenses alors que le reste du monde normal se serrait la ceinture et se
contentait du strict nécessaire. Le gouvernement est sans doute au
courant que, dans notre industrie plus que dans toute autre, la crise a
frappé très durement et elle n'est pas finie. Ce n'est
certainement pas avec surprise que vous constaterez dans un document en annexe
que, selon les données statistiques, non pas de l'AECQ, mais bien de
l'Office de la construction du Québec, OCQ, plus de 3000 employeurs en
construction ont disparu en trois ans, que les heures travaillées
déclarées atteignent à peine 50% de celles qui
s'exécutaient il y a environ cinq ans.
Pour nous permettre peut-être de situer le tout dans une
perspective un peu plus globale, disons que le maximum d'heures
travaillées dans le secteur de la construction s'est situé vers
1975-1976 à environ 150 millions d'heures et que, selon les plus
récentes compilations préliminaires de l'office de la
construction, on estime pour 1983 que cela ne devrait pas excéder 70
millions à 75 millions d'heures. Notre industrie vivote, agonise et,
pendant ce temps, la CSST grossit, cotise, réglemente, pénalise,
abuse de ses droits, nous charrie et, finalement, nous met dehors parce que
nous nous plaignons. La CSST n'a pas fini de nous faire avaler la pilule que,
déjà, elle veut nous purger avec de nouveaux champs
d'indemnisation qui sont prévus dans le projet de loi no 42, qui a
été déposé à l'Assembée
nationale.
Nous nous en voudrions de ne pas ouvrir une parenthèse sur les
taux de cotisation, le calcul du maximum assurable et, évidemment, le
système mérite-démérite, car on ne peut de fait
dissocier ces trois éléments. Bien sûr, le sujet à
lui seul vaudrait une commission parlementaire. Vous m'excuserez, mais il y a
une partie du texte qu'on a ajouté pour vous dispenser de certaines
annexes du mémoire.
En ce qui concerne le maximum assurable, plusieurs interventions ont
été faites par l'AECQ concernant le calcul de ce maximum
assurable. Ces interventions ont été faites simultanément
tant auprès de la CSST qu'auprès du ministre avec des
résultats, avouons-le, peu tangibles. Il faut se rappeler que le
système établi au Québec permet, pour ce maximum
assurable, de stabiliser artificiellement la cotisation des employeurs. Nous
considérons que le maximum assurable, porté à 29 000 $ en
1982 et à 31 500 $ en 1983, s'il permet de maintenir une cotisation dans
des limites qui semblent raisonnables, permet tout autant à la CSST de
payer des prestations qui sont en relation avec ce même maximum
assurable.
Il faut comprendre que ces prestations se paieront pendant de nombreuses
années, qu'elles seront indexées annuellement et qu'elles vont
grever tout particulièrement les réserves actuarielles.
Quant au système mérite-démérite, la CSST le
modifie périodiquement malgré les récriminations des
employeurs. La CSST n'a pas tenu compte de l'inéquité du
système vis-à-vis des employeurs qui ne peuvent démontrer
dans leur unité une masse salariale crédible. Ce facteur est
d'autant plus inéquitable que les frais de chargements qui viennent
grever les cotisations sont calculés à partir du coût des
accidents et non pas de la masse salariale. Aux argumentations du comité
de surveillance des finances, la CSST fait la sourde oreille et ne
prétend pas vouloir rendre le système plus équitable pour
le secteur de la construction en calculant les frais de chargements à
partir de la masse salariale. (11 h 45)
Je reviens au mémoire à la page 21. La façon de la
CSST d'imputer les frais de chargements provoque, pour les secteurs lourdement
cotisables, une injustice flagrante. Nous sommes d'avis que l'industrie de la
construction doit supporter sa part, mais il nous apparaît contraire
à toute logique que nous payions deux ou trois fois plus que d'autres,
sur la base des frais de chargements inclus dans le taux de cotisation.
Nous avons fait réaliser, à même les cotisations de
nos membres, une étude sur ce point et nous avons tenté d'en
discuter le contenu avec la CSST. Nous vous laissons le soin de vous
enquérir des résultats de ce travail de collaboration.
Il est cependant, un énoncé que nous nous faisons souvent
servir en guise de réponse: "Le taux de cotisation d'une unité
est relativement stable sur une certaine période." Attention, encore
là, on ne se gêne pas pour nous lancer des chiffres
triturés ou pour le moins favorablement présentés.
Tel que mentionné tantôt, j'ouvre une parenthèse
ici: "On ne peut pas, à notre avis, dissocier le taux de cotisation du
maximum assurable". Je vous explique un peu ou je veux en venir. Le taux de
cotisation peut être maintenu plus ou moins artificiellement sans pour
autant stabiliser la cotisation. La méthode est simple, car la
cotisation peut se jouer, sur plus d'un facteur, un peu comme dans le cas des
taxes municipales: ou bien on ajuste le taux, ou bien on augmente la valeur de
l'évaluation. À la CSST, on ajuste le taux ou le maximum
assurable et parfois les deux. Le tableau suivant illustre ce système.
Je voudrais attirer l'attention des membres de la commission sur les chiffres
suivants. Pour 1981, à titre de référence sur le taux pour
un employé, j'ouvre une parenthèse ici pour
signaler que, dans le domaine de la construction, les plombiers ainsi
que les électriciens sont les deux corps de métier les plus
nombreux, donc, pour un plombier, en 1981, avec un maximum assurable de 23 500
$ et un taux de cotisation de 5,51 $, la cotisation d'un employeur à la
CSST pour ce salarié atteignait 1294 $, En 1984, toujours pour la
même unité, on constate que le taux est sensiblement le même
qu'il était en 1981, soit 5,52 $, une variation de 0,01 $ les 100 $, ce
qui est quand même négligeable mais, en raison du jeu du maximum
assurable, de fait, la cotisation de l'employeur, pour un plombier, passe, en
1981, de 1294 $ à 1738 $ pour 1984.
Plusieurs provinces ont fait un usage calculé de l'état
des salaires cotisables pour stabiliser ou éviter l'augmentation du taux
de cotisation. C'est particulièrement le cas au Québec, alors que
l'augmentation de la masse salariale cotisable a été
modifiée à la hausse, chaque année, alors que la plupart
des provinces ont tendance, à quelques exceptions près, à
maintenir le maximum assurable cotisable stable pour une période de deux
ou trois ans.
J'ouvre ici, une autre parenthèse. Ainsi, pour 1984, la CSST a
projeté une masse salariale cotisable, pour la construction, de 1 881
000 000 $, pour une cotisation de l'ordre de 125 000 000 $ ou 128 000 000 $,
soit une augmentation de 28% de la masse salariale assurable. En chiffres
absolus, une augmentation de 404 000 000 $. Alors, l'augmentation de la masse
salariale assurable, de fait, se traduit par une augmentation en chiffres
absolus de 404 000 000 $, c'est-à-dire que, en 1983, la masse salariale
assurable était aux alentours de 1 400 000 000 $ pour la construction et
ce sera 1 880 000 000 $ en 1984.
Cette augmentation de l'estimation de la masse salariale se traduit dans
les faits par une augmentation estimée des heures travaillées,
environ 26 000 000 à 28 000 000. Or, les dernières compilations
de l'Office de la construction démontrent qu'au contraire, le nombre
d'heures travaillées en 1983 ne pourra excéder le nombre d'heures
travaillées en 1982. On doit donc s'attendre à un autre
déficit pour 1984. Lorsqu'un organisme calcule le taux de cotisation
à partir d'une masse salariale qui n'évolue qu'à partir du
taux d'inflation et d'accroissement de l'activité économique, il
se doit d'augmenter le taux de cotisation pour compenser l'écart du
coût de ces dépenses qui ne sont pas couvertes par le produit de
l'accroissement de la masse salariale.
Dans le cas de la CSST, la masse salariale à partir de laquelle
on calcule le taux de cotisation n'augmente pas seulement par le fait de
l'accroissement du revenu ou de l'activité économique, mais
s'accroît surtout parce qu'elle est plus ou moins indexée au
salaire moyen des travailleurs qui sert d'indice de base. Pour comprendre ce
qui se passe lors de l'application d'un tel système, c'est que
l'augmentation est constante et finit par créer un taux supérieur
à quelque système que ce soit.
Dans le tableau qui suit, à la page 25, nous avons choisi trois
genres d'activités reliées et représentatives du secteur
de la construction, trois taux de cotisation que l'on peut qualifier de moyens
afin de ne pas tenir compte des extrêmes qui varient de 1,80 $ à
plus de 25 $ des 100 $ assurables pour certaines unités. Le tableau est
très significatif et prouve hors de tout doute que la CSST impose un
fardeau anormal à l'industrie de la construction. La cotisation moyenne
au Québec, démontrée dans le tableau de la page 25, est de
7,32 $ pour les trois secteurs utilisés en référence,
alors que la moyenne pour l'ensemble des provinces est de 3,33 $, soit un ratio
de 2.2 à 1. Ceci est obtenu en tenant compte du maximum assurable propre
à chaque province. Si nous pondérons le taux des trois autres
provinces, en ramenant le maximum assurable, identique pour chaque province, le
ratio est très peu modifié, le taux moyen pour l'ensemble est
alors de 3,38 $ au lieu de 3,33 $, et le ratio devient alors de 2.17 à 1
au lieu de 2.20 à 1.
Vous avez, à la page 25, pour les dix provinces canadiennes, le
taux de cotisation moyen basé pour les trois secteurs de la
construction, soit le bâtiment, le secteur des routes et des grands
travaux et les ouvriers en électricité. Vous avez ensuite la
moyenne, le taux moyen pour chacun de ces trois secteurs. Il faudrait corriger
l'en-tête de la cinquième colonne où une erreur s'est
glissée. On y lit: Masse salariale de base. De fait, c'est inexact,
c'est: Maximum assurable. À la cinquième colonne, les mots "masse
salariale" doivent être remplacés par "maximum assurable". Ce
n'est pas en milliards, c'est en dollars.
Dans la quatrième colonne, on remarque, pour situer l'origine des
chiffres qu'on vous a cités précédemment, sur la ligne
Québec un taux moyen pour le bâtiment de 7,59 $, pour les
constructeurs de routes 8,57 $ les 100 $, pour les ouvriers en
électricité, 5,81 $ les 100 $, ce qui fait un taux moyen de 7,32
$ qui a été mentionné précédemment à
la page 24. Cette même façon de procéder a
été retenue pour l'ensemble des provinces et nous donne le ratio
de 3,33 $ par rapport à 7,32 $, ce qui se traduit par le ratio de 2.2
à 1. La dernière colonne, finalement, tient compte d'un maximum
assurable uniformisé pour l'ensemble des provinces afin
d'éliminer toute disparité, même si on a jugé bon de
faire l'exercice pour assurer l'exactitude des chiffres qu'on vous avance. De
fait, on
constate que le taux moyen pondéré ne change que de 0,05 $
les 100 $, ce qui est quand même assez négligeable.
Le Président (M. Blouin): Messieurs, je vous signale que
votre présentation a déjà pris 45 minutes.
M. Girard: J'ai presque fini. Une voix: Pas de
problème.
Le Président (M. Blouin): Vous deviez résumer
certains des aspects que vous aviez traités.
M. Pagé: Cela aurait pris normalement trois heures, ils
sont en train de résumer.
M. Dion: M. le Président, si vous me le permettez, je
voudrais souligner deux points. Premièrement, on a tenté de
résumer les chiffres par bien des moyens; on a essayé de trouver
des solutions.
Le Président (M. Blouin): Je ne parle pas des chiffres, M.
Dion, je parle du texte lui-même.
M. Dion: II était très difficile de résumer
la section où on traite des chiffres; sinon, vous pourriez confondre les
chiffres.
Le Président (M. Blouin): Très bien, je
comprends.
M. Dion: Cette partie n'est pas résumée, on s'en
tient au mémoire.
Le Président (M. Blouin): Parfait, cela va.
M. Dion: La deuxième chose que je voudrais bien vous faire
comprendre, c'est qu'effectivement on n'a plus de place au conseil
d'administration de la CSST et c'est le seul endroit où on peut dire ce
qu'on a à vous dire.
M. Girard: On a pratiquement fini, d'ailleurs.
Le Président (M. Blouin): II suffit de le dire
succinctement.
Une voix: II reste à peu près cinq pages.
Le Président (M. Blouin): Cela va.
M. Girard: Des points peu importants, diront certains, mais pour
nous, de l'industrie de la construction, qui payons dans certaines
unités de trois à quatre fois et plus le taux moyen au
Québec, et souvent aussi, pour le même travailleur, deux ou trois
fois le taux de l'Ontario, c'est plus que des détails. Signalons
également que cette façon de faire progresser la cotisation par
l'ajustement à la hausse du maximum assurable nous est
particulièrement préjudiciable dans la construction parce que,
encore là, la CSST a trouvé moyen de nous pénaliser
davantage. Il faut comprendre que les prestations aux accidentés sont en
relation avec le maximum assurable retenu et non pas le salaire réel
gagné. Pour illustrer ceci, un travailleur de la construction a un
salaire moyen d'environ 11 000 $. Ce sont des chiffres confirmés par
l'Office de la construction. Quand on prend le maximum assurable, on fait des
calculs en fonction d'un montant de 29 000 $ et de 31 500 $. Nous sommes
également pénalisés par le système de calcul en
fonction du salaire projeté selon le décret au lieu de prendre en
considération le salaire moyen ou réel de l'accidenté. Un
document en annexe illustre ce point.
Quelques réflexions sur l'état général des
revenus et dépenses de la CSST. Nous sommes bien limités dans nos
moyens pour discuter à fond de ce sujet. Il est évident que nos
ressources en personnel ne peuvent rivaliser avec celles de la CSST. D'autre
part, l'engagement d'une firme habile à mieux nous éclairer est
dispendieux mais, plus encore, il faut ajouter que l'information, souvent
filtrée et incomplète de la CSST, spécialement depuis
l'expulsion de notre représentant, nous rend le tout très
complexe.
Le tableau qui suit, et qui va terminer notre exposé en ce qui
concerne la partie financière, nous permet cependant, sous toute
réserve, de réaliser la progression des revenus et
dépenses de la CSST et de constater qu'un déficit de
fonctionnement a commencé à s'installer dès l'exercice
financier de 1980 alors que depuis 1975 la CSST avait réussi, tant bien
que mal, par le biais d'un nouveau système de financement, à
équilibrer ses budgets.
Pour 1984, un nouveau système de financement a été
adopté qui permettra à la CSST de réduire, dans une
certaine mesure, le fardeau de certains cotisants au régime. Par contre,
par ce nouveau système, la CSST risque d'augmenter son déficit
à long terme car il sera pratiquement impossible à celle-ci de
garder un taux de cotisation stabilisé pour cinq ans dans les limites du
raisonnable, avec les dépenses projetées, en tenant compte
strictement de la décroissance du coût des accidents. Pour ne
citer qu'un exemple, nous croyons que la CSST projette de dépenser, au
seul chapitre de la prévention, 94 000 000 $ en 1984, 122 000 000 $ en
1985, 155 000 000 $ en 1986, 200 000 000 $ en 1987 et 342 000 000 $ en 1990. Il
va sans dire que ces projections sont données en dollars courants. (12
heures)
Si on transpose ces dépenses en dollars, ayant comme base de
valeur l'année 1982, ceci donnerait quand même une progression de
79 579 000 $ en 1984 pour atteindre environ 170 000 000 $ en 1990. On devrait
aussi tenir compte de l'évolution des structures de la CSST, qui n'ont
cessé de croître depuis 1980 et qui ne pourront se stabiliser
qu'à moyen terme, nous l'espérons, si l'on considère que
cet organisme compte un effectif de 2600 employés alors qu'il
était d'un peu plus de 1500 en 1979; que l'effectif autorisé est
de 2800 employés pour 1984 et que cette force d'employés semble
déjà requise, alors que la plupart des programmes proposés
par la CSST n'en sont encore qu'à l'état d'embryon.
Enfin, un autre sujet dont il faudra tenir compte dans le futur est
celui de l'impact sur la cotisation que pourrait avoir le projet de loi 42.
Mais nous en reparlerons en temps et lieux.
Simplement un bref commentaire pour expliquer le tableau de la page 30.
Je vous fais grâce... Les chiffres qui sont là proviennent des
rapports annuels de la CSST. Le point qu'on a signalé au
préalable est que, d'une part en 1980 la CSST a réalisé un
excédent budgétaire de 43 000 000 $; en 1981, il y a eu un
premier déficit de l'ordre de 11 000 000 $; en 1982 de 57 000 000 $ et,
sur la base des chiffres estimés que nous avons pu obtenir, il devient
évident que la CSST se dirige pour 1983 vers un déficit qui
pourrait excéder les 100 000 000 $. Merci.
M. Daoust: M. le Président, je vais aller très
rapidement dans les quelques pages qui suivent afin de répondre à
vos désirs. Je retourne à l'attitude antipatronale à
laquelle j'ai fais référence précédemment en vous
disant que tout ce qui précède, j'en suis à la page 31,
pourrait être un préambule à ce qui suit.
Déjà les mesures prévues par la loi sur la
santé et la sécurité du travail laissaient présager
l'instauration d'un système chromé de protection des
travailleurs, sans égard aux coûts et surtout bien encadré
dans la petite bourgeoisie syndicale du Québec.
L'administration du système a été confiée
à une armée de fonctionnaires surprotégés par un
contrat de travail que seuls nos fonctionnaires possèdent. Le tout est
dirigé par un homme qui n'a aucune gêne à démontrer
son attitude arrogante et antipatronale. Lui demander de rendre compte de
l'utilisation de notre argent nous vaut une réponse négative,
évasive pour le moins. Soit dit sans malice: il est surprenant que le
président-directeur général ne soit pas devenu imberbe de
la gauche à force de recevoir l'accolade de ce même
côté.
Les employeurs de la construction sont épuisés de payer
pour se faire assommer par le système. On les étouffe sous la
réglementation, les formulaires, les inspections et les exigences
impossibles à rencontrer. Le gouvernement a déjà entendu
ce discours, nous direz-vous. Bien sûr'. Nous vous référons
à tous les mémoires, les lettres, et les interventions du secteur
de la construction. Ce cri de détresse a déjà
été lancé lors d'une précédente commission
parlementaire. Vous pouvez en voir un extrait en annexe.
Il est de plus en plus pressant que vous y prêtiez l'oreille et
que vous preniez les mesures pour ramener les gens sur terre.
On tente par tous les moyens de faire porter au patron de la
construction le chapeau de maître-d'oeuvre. C'est plus facile. On le rend
responsable sans tenir compte de l'échéancier serré
fixé par le client ou encore des changements en cours d'exécution
exigés par les donneurs d'ouvrage sur lesquels l'entrepreneur n'a aucun
contrôle.
L'employeur est là seul et toute la structure de la CSST lui
tombe dessus. On le pénalise même pour les négligences de
ses propres salariés. Contrairement au principe du droit criminel, il
est préjugé coupable. Nous voudrions, sur ce dernier point, vous
souligner que l'un de vos confrères, devenu juge depuis, Me Robert
Burns, ne se gênait pas, dans un de ses jugements fort à point
d'ailleurs, pour fortement suggérer à la CSST de changer
d'attitude face à l'employeur et aux salariés. Le jugement
intervenait dans une poursuite contre l'entreprise BCF Erectors Ltd pour
infraction relative au port de la ceinture de sécurité. Le juge
Burns a dénoncé l'attitude de la CSST et suggéré
à celle-ci de poursuivre la partie fautive à l'avenir. Et je vous
donne un extrait: "C'est peut-être dans la politique de la CSST de ne pas
poursuivre les individus, mais peut-être que le monde se
réveillerait et s'apercevrait que ce n'est pas seulement les employeurs
qui ont à passer au "cash" dans ces affaires-là".
Même au niveau des cadres sauf, heureusement, dans quelques
exceptions, nous notons une philosophie défavorable au patronat et
nettement favorable, non pas aux travailleurs, mais aux syndicats. Le
récent règlement sur les comités de la santé et de
la sécurité en est une illustration nette. Nous ne
prévoyons pas, en effet, que le salarié syndiqué d'un
établissement possède, à de tels comités, la
majorité des sièges syndicaux et un droit de vote, même
s'ils ne sont qu'une infime minorité dans l'établissement, la
majorité n'étant pas syndiquée. Que peut penser une
personne qui imagine un tel règlement? Comment un homme d'affaires
peut-il espérer être traité avec justice et
compréhension par des gens qui conçoivent de telles
règles?
Le fonctionnaire de la CSST, sans commentaires sur sa provenance, semble
endoctriné et convaincu que, dans chaque
patron, il y a un criminel en puissance et que, dans chaque
représentant syndical, il y a un homme magnanime et voué corps et
âme au bien-être des travailleurs syndiqués, naturellement,
et, finalement, il est convaincu qu'en chaque salarié non
syndiqué, il y a un syndiqué en puissance et il fait tout pour y
arriver. Mais que fait-on des écervelés qui travaillent sans
vouloir porter le casque, la ceinture de sécurité, les lunettes
protectrices, etc.? On les récompense et on envoie la facture à
l'employeur. Les apôtres syndicaux qui sont aujourd'hui glorifiés,
qu'ont-ils fait avant l'ère des subventions? Bien sûr, il y a
toujours eu quelques ténors, entre autres, à la CSN qui se sont
fait entendre pour dérider plus souvent qu'autrement le public, mais le
refrain a toujours été le même sur un ton que vous
connaissez: Mon cher patron, c'est à ton tour de payer.
Ce sont les fonctionnaires ci-haut décrits qui, à la CSST,
interprètent et appliquent la réglementation. Leur intervention
biaisée, souvent inopportune et maladroite, a causé la rupture
d'un équilibre existant depuis nombre d'années dans l'application
du code de sécurité de la construction quant à la
fourniture de l'équipement pour la protection individuelle. En effet,
avec le temps, les travailleurs et les employeurs ont développé
un modus vivendi basé sur le bon sens et l'efficacité. Le
travailleur fournissait ainsi lui-même les pièces de protection
comme les bottes et les gants de sécurité. En contrepartie,
l'employeur fournissait le casque de sécurité, certains appareils
pour la protection de l'ouïe, etc. Tous les intervenants de la
construction ont interprété leur code ainsi jusqu'à ce que
la CSST décide que les employeurs devraient dorénavant se
transformer en magasin de bottes, casques, lunettes, chemises, boléros,
etc.
Parlons un peu du service d'inspection. Nous ne saurions parler des abus
administratifs de la CSST sans vous relater l'histoire du service d'inspection.
Au niveau du service d'inspection, la patience des employeurs a
été mise à contribution pendant trois ans avant qu'un
reflet de discipline semble vouloir s'installer dans ce service. Alors que la
CSST tentait de créer des surhommes polyvalents dans tous les champs
d'activité reliés au travail, les employeurs devaient subir les
décisions arbitraires et souvent coûteuses de la part des
inspecteurs. Nous vous référons aux notes en annexe. Se rendant
compte enfin que la CSST voyait trop grand dans ses illusions, le
vice-président du service d'inspection acceptait de former un
comité ad hoc pour étudier les politiques et procédures
administratives de son service. Ce comité paritaire devait se pencher
sur un manuel de politique d'inspection, sur un manuel d'opération et
enfin, ce comité recevait les statistiques périodiques en
matière d'accidents et il était informé de façon
assez concrète des activités du service d'inspection. Alors
qu'une certaine collaboration semblait s'installer au niveau des intervenants,
inspecteurs, représentants patronaux et syndicaux, la CSST a
décidé de repartir à zéro, à nouveau. Le
vice-président à l'inspection a été
écarté du conseil d'administration et n'a jamais
été remplacé. Le service de l'inspection a
été absorbé par le service de la prévention et
toute la politique ainsi que les procédures mises de l'avant par les
services d'inspection ont été, à toutes fins utiles,
éliminés pour être remplacés par d'autres sur
lesquels les intervenants sont très peu informés.
La guerre interne pour la prise du pouvoir qui s'est jouée entre
les services de prévention et ceux de l'inspection a été
faite sur le dos des employeurs et au détriment de ceux-ci qui ont eu
à subir un arbitraire décisionnel qui n'avait jamais
été atteint, même durant les pires années de l'OCQ.
Les entreprises, particulièrement celles du secteur de la construction,
ont été obligées de défendre leurs droits les plus
légitimes de gérance par des brefs d'évocation, des
actions en nullité, etc., devant le pouvoir judiciaire.
Certaines entreprises ont même dû prendre des poursuites
contre les intervenants représentant la CSST en recours de dommages et
intérêts pour excès de juridiction et abus de droits et
pouvoirs de la part des fonctionnaires. De plus, le système de
statistiques qui permettait à notre association de faire un travail de
prévention planifié n'est plus disponible depuis la prise du
pouvoir par les services de prévention. Nous nous abstiendrons de mettre
en évidence ce que cette querelle interne a détruit au niveau des
fonctionnaires chargés d'appliquer la loi, vous laissant le soin de
juger l'imbroglio que la fusion des services a pu créer.
Parlons du service de prévention. Contrairement à ce que
pouvait nous faire luire le livre blanc sur la santé et la
sécurité, spécialement à l'égard de la prise
en charge par le milieu de travail et de la mission de prévenir à
la source les accidents du travail et ce, dans un esprit de justice sociale, le
service de prévention a tôt fait de manifester, lui aussi, un fort
penchant pour le monde syndical. Nous avons déjà parlé
plus tôt de l'action de la CSST à l'égard des
équipements de sécurité. À notre connaissance, il
n'y a pas de règlement qui ait été proposé, qui ne
modifiait pas les règles établies entre les anciens
partenaires.
Nous tirons notre exemple du programme de prévention. Tel
qu'appliqué par le service de prévention, il devient un
règlement contraignant qui décourage l'employeur le mieux
intentionné. À l'AECQ,
nous avons dû mettre rapidement sur pied un service pour aider nos
membres qui, déjà, se voyaient bousculés par l'obligation
de fournir un programme de prévention. Le guide préparé
par les fonctionnaires de la CSST dépassait les limites normales. Nous
n'avons pas dit la loi parce que, encore là, elle avait
été écrite en accordant un pouvoir presque
illimité, du moins selon les prétentions des fonctionnaires. Il
n'est pas surprenant que les fonctionnaires de la CSST se plaignent que les
employeurs ne fournissent pas le programme de prévention. Les motifs
sont de deux ordres: d'abord, les fonctionnaires élargissent le sens de
la loi quant à l'obligation de fournir le programme et,
deuxièmement, ils exigent de la part de l'employeur qu'il y inclue des
informations ou des méthodes d'opération qui n'ont, entre autres,
rien à faire avec l'objectif du programme. C'est de
l'ingérence.
Si la CSST s'en tenait aux termes de la loi et du règlement, il
serait fort possible pour l'employeur de se conformer à cette nouvelle
exigence, mais les penseurs de la CSST ont pondu un questionnaire qui va
jusqu'à exiger de l'employeur des renseignements sur son administration,
ses droits de gérance, bref une cueillette d'informations qui n'est pas
en relation avec la santé et la sécurité. (12 h 15)
II faut comprendre que les employeurs sont de plus en plus
réticents à fonctionner dans le système interrogatoire qui
permet ensuite à la CSST d'élaborer de nouveaux contrôles.
Dans le même sujet, il faut ajouter que le programme de prévention
pour établissement et les comités de santé et de
sécurité sont pour nos membres de nouvelles sources
d'irritation.
Même si la loi exclut, et pour cause, les chantiers de
construction de la définition d'établissement et même si
les chantiers de construction sont déjà couverts par leurs
propres règlements sur ces deux sujets, la CSST a décidé
de compter les salariés sur le chantier comme partie à
l'établissement qu'est l'entreprise de construction.
M. le Président, je termine. Puisque les obligations varient
selon le nombre d'employés qu'a l'établissement et puisque, par
leur nature, les équipes de chantiers occupent et diminuent sans cesse,
l'employeur ne sait plus à quelle sainte réglementation se
vouer.
Quand il veut contester les décisions étranges de ces
fonctionnaires, la loi prévoit qu'il doit s'adresser à un bureau
de révision formé également de fonctionnaires de la CSST.
Vous trouverez en annexe quelques exemples de tels abus.
Je vais sauter quelques pages et je vais vous laisser le loisir de les
lire un peu plus tard.
En ce qui concerne le service de réparation je voulais faire
simplement un à-côté et amener quelque chose à votre
connaissance. Cela a été mentionné un peu plus tôt.
À la fin du cahier, vous avez un tableau qui vous donne une comparaison
de revenus estimés d'un salarié de la construction s'il travaille
ou s'il participe au système de réparation. Je crois que c'est
important de le comprendre. Un employé qui travaille 960 heures dans la
construction c'est une des annexes à la fin, il n'y a pas de page...
M. Dion: C'est une annexe qui est sur le biais dans votre cahier.
Si vous suivez les pages bleus, c'est la troisième ou la
quatrième annexe.
M. Daoust: Si j'avais lu toute la chose, cela se serait
enchaîné, mais j'essaie de vous faire grâce pour
réduire le temps qu'on prend.
Un employé de construction qui travaillerait 960 heures -
d'après le syndicat, ce sont les heures moyennes de la construction -
gagnerait un revenu total net, incluant ses prestations
d'assurance-chômage, de 16 258 $. Avec la CSST, il gagne 21 000 $. C'est
plus payant d'être malade que de travailler. Après cela, vous
allez essayer de me faire croire que l'employé a avantage à
revenir travailler plus vite qu'autrement. C'est un peu dur à
avaler.
Je vais tout de suite aux conclusions. Je vous fais grâce de
quelques pages. Je suis rendu à la page 46.
Les exemples d'anomalies administratives et de fonctionnement qui auront
été donnés par nous et par d'autres au cours de ces quatre
jours ne seront toujours que la pointe de l'iceberg. Nous ne serions pas
surpris que le président-directeur général et son
équipe démontrent, dans leur témoignage, que la gestion de
la CSST est sans reproche.
La hausse effrénée des dépenses, l'augmentation en
flèche du personnel, la distribution de subventions aux syndicats pour
des causes qui n'existent pas, le gaspillage de l'Institut de recherche en
santé et sécurité et à la CSST dont la principale
recherche jusqu'ici a été consacrée à se trouver
une vocation, les millions échappés en direction des
départements de santé communautaire, les DSC, qui permettent de
dissimuler 700 à 800 fonctionnaires sans mandat précis, le
dédoublement d'équipement de recherche de luxe aux DSC et
à l'IRSST, tout cela n'est probablement que le fruit de l'imagination.
Pourtant, les 128 000 000 $ qui doivent être expédiés en
1984 à la CSST par les entreprises que nous représentons
pourraient bien devenir également le fruit de l'imagination, si des
actions radicales ne sont pas prises sans délai pour corriger la
situation.
Déjà, au début de 1983, 1708 entreprises de
construction nous ont déclaré, par écrit, être
prêtes à ne pas payer leur cotisation à la CSST si on
n'obtenait pas justice. Ces entreprises avaient déclaré 27 000
000 d'heures travaillées, soit 31% du total, et elles savaient ce
qu'elles faisaient; ce ne sont pas des entreprises de broche à foin, ce
sont des entreprises responsables. Nous croyons que le gouvernement n'a plus le
choix. Ce n'est pas à la SAQ que le mouvement de privatisation doit
commencer, mais bien à la CSST. Là aussi, la modération
aurait meilleur goût.
Le système d'indemnisation des victimes d'accidents du travail
doit être confié à l'entreprise privée et les
mesures de luxe qu'on y a assorties avec le temps doivent être
interrompues, au moins jusqu'à ce que les citoyens et les entreprises du
Québec aient vraiment les moyens de se les payer. Nous demandons
finalement que la prise en main transitoire de la CSST soit assurée par
un comité de gestion formé exclusivement de chefs d'entreprises
qui prendraient la charge complète de l'administration de la CSST avec
une direction technique quotidienne assurée par une équipe de
spécialistes prêtés par l'entreprise privée. C'est
là notre recommandation. Le remède peut paraître
d'importance, mais il n'est qu'à la dimension du mal qu'il faut
guérir.
Je voudrais ajouter ici un paragraphe: avant de vous quitter, je m'en
voudrais de ne pas donner la réplique à M. Lavallée, qui
nous critiquait hier pour le retard à former l'Association sectorielle
paritaire. Cela avait l'air de vous intéresser. Peut-être que si
la loi n'obligeait pas la formation de cette association, les demandes
syndicales seraient un peu plus réalistes. Une chose est drôle,
c'est que tandis que les patrons refusent d'accepter la structure
proposée par le syndicat - parce que celui-ci nous réserve en
quelque sorte un rôle d'observateur - la CSST, une fois de plus,
s'ingère dans nos affaires et s'efforce de nous faire avaler une
structure qui ressemble drôlement aux demandes syndicales. La CSST
démontre une fois de plus son penchant prosyndical. Je vous remercie au
nom de mes confrères de nous avoir écoutés aussi
patiemment.
Le Président (M. Blouin): Merci, messieurs. M. le
ministre.
M. Fréchette: Oui, M. le Président. Dans mes
remarques préliminaires, je voudrais remercier les représentants
de l'AECQ de nous avoir soumis leurs observations, qu'on retrouve d'ailleurs
dans un document passablement étoffé, qui est long, et qui va
au-delà des observations qui ont été faites depuis plus
d'une heure maintenant.
Ce n'est pas mon intention d'entrer dans des questions d'ordre
particulier, parce qu'il y a tellement de sujets qui ont été
touchés que l'exercice en serait trop long et, deuxièmement, il y
aurait sans doute des risques sérieux à ce que nous entreprenions
une discussion serrée à bien des égards. Je vais donc
m'abstenir, encore une fois, de poser des questions sur des sujets d'ordre
particulier. Je ferai quelques remarques d'ordre général et
poserai une ou deux questions également d'ordre
général.
D'abord, je voudrais, aussi sereinement que possible, remettre un
certain nombre de choses dans leur vraie perspective, quant à
l'invitation qui a été faite à l'association que nous
venons d'entendre. Ses représentants disent regretter qu'ils n'aient pas
été invités, il me semble qu'il est important de vous
donner l'interprétation que nous nous faisons de ce à quoi on
s'est référé.
La motion qui a permis la convocation de cette commission a
été adoptée par l'Assemblée nationale le 17
novembre dernier. Pour mémoire, autant pour les membres de la commission
que pour ceux qui sont témoins, je vous lis très rapidement le
texte de la motion qui a été adoptée par
l'Assemblée nationale et à l'unanimité après un
amendement présenté par le ministre du Travail à la motion
principale qu'avait soumise le député de Viau. La motion
amendée se lisait ainsi: Que la commission permanente du travail se
réunisse les 12, 13, 14 et 15 décembre pour examiner
l'administration et le fonctionnement de la Commission de la santé et de
la sécurité du travail et qu'à cette fin soient entendus
le président de la CSST, son conseil d'administration ainsi que tout
organisme que la commission jugera utile d'entendre.
M. le Président, je ne veux pas en faire un plat, mais il me
semble qu'il y a certaines choses qui doivent être placées dans
leur vraie perspective. Je voudrais faire référence, pour ceux
qui ont le goût d'en faire l'exercice, au journal des Débats.
Lorsque le député de Viau, porte-parole officiel de l'Opposition
en matière de santé et de sécurité, a soumis sa
motion, son argumentation, il a fait l'énumération d'une dizaine
d'organismes, neuf à mon souvenir -cela peut être
revérifié, mais il me semble que c'était neuf - qu'eux de
l'Opposition souhaitaient voir entendre par cette commission. Nous avons, de
consentement, après avoir regardé la liste, accepté
d'entendre tous les organismes que nous avait suggérés
l'Opposition. Depuis ce temps, une couple d'entre eux se sont
désistés. Quelques jours après l'adoption de la motion,
des représentations nous ont été faites par le
représentant de l'Opposition dans le sens que l'Association des
entrepreneurs en construction du Québec désirait être
entendue et nous avons acquiescé à la demande dès lors
qu'elle nous a été soumise.
C'est comme cela que le processus s'est fait. Je voulais simplement que
ce soit clarifié par rapport au reproche qui a été fait
à la commission.
M. le Président, l'Association des entrepreneurs en construction
du Québec a réclamé, avec l'insistance que vous savez, de
pouvoir être représentée au conseil d'administration de la
Commission de la santé et de la sécurité du travail.
Compte tenu de la situation qui existait, compte tenu de sa
représentativité dans ce secteur de l'économie et dans
l'ensemble de l'économie du Québec, il me semble qu'il s'agit
là d'une requête qui est tout à fait bien fondée.
J'ai déjà eu l'occasion, d'ailleurs, et je pense que les
témoins qui sont à la table le savent, de leur dire à une,
deux ou trois reprises qu'effectivement leur requête m'apparaissait bien
fondée et jusqu'à ce matin je continue de prétendre que
c'est toujours bien fondé sous réserve, cependant, de la question
que je poserai à nos témoins qu'ils pourront noter ou à
laquelle ils pourront me répondre tout de suite, mais il va nous falloir
clarifier une situation. (12 h 30)
J'ai cru comprendre, autant par votre argumentation écrite que
par les conclusions de votre mémoire écrit, que votre souhait,
sinon votre désir, ou alors votre objectif, c'est que cette commission,
à toutes fins utiles, devrait disparaître et être
remplacée, nous avez-vous dit, par - aussi à toutes fins utiles -
l'entreprise privée. J'ai cru comprendre aussi - je voudrais que vous
soyez assurés de l'occasion que vous aurez pour répondre à
ces questions - que vous souhaitiez que l'État se retire purement et
simplement de ce genre de champ d'action. Cela ne me fait pas de doute quant
à la participation des travailleurs. Vous avez été fort
clairs à cet égard. Vous nous avez même dit - on doit
retrouver cette observation dans le mémoire - que le rôle des
travailleurs devrait être réduit au lobbying politique. Remarquez
que je ne conteste d'aucune espèce de façon les objectifs que
vous poursuivez mais je vous signale également en toute
déférence que l'argumentation que j'ai entendue ce matin ne m'a
pas encore convaincu qu'il fallait aller jusque là. Cependant, voici la
question que je veux vous poser par rapport à votre participation au
conseil d'administration. Est-ce que vous allez vous sentir à l'aise d'y
être? Est-ce que vous allez accepter d'y participer suivant les
règles du jeu si, à toutes fins utiles, l'objectif ultime que
vous recherchez est la disparition pure et simple de l'organisme
lui-même? Ce sont mes premières questions.
M. Daoust: M. le ministre, il est vrai que, dans notre
exposé, nous mentionnons que nous aimerions remplacer le système
actuel par un système d'entreprise privée parce que nous sommes
persuadés que cela serait beaucoup plus efficace, que cela donnerait de
meilleurs services aux travailleurs pour un montant d'argent beaucoup plus
minime.
Quant à la question d'être confortable au conseil
d'administration, je peux vous dire que, dans le passé, on était
là. On n'était peut-être pas confortable ou peut-être
qu'on n'aimait pas ce qui s'y passait, mais au moins on y était. Au
moins, il y avait quelqu'un qui pouvait, à l'occasion, être assez
honnête ou être assez franc pour sortir la crasse, pour parler des
choses qui s'y passaient, des chiffres qui étaient cachés ou
dissimulés et les rapporter au public ou au moins au ministère.
Vous me direz que cela n'a pas été très efficace parce
qu'on l'a mis dehors. Mais quand même, on espère que
c'était un cas spécifique et que cela ne se reproduira pas.
Ma réponse est simple. Il est bien évident que ce n'est
peut-être pas la première option que nous prônons mais nous
serions très satisfaits, pendant que le système existe,
d'être au moins présents dans ce système.
M. Fréchette: Votre réponse elle-même, M.
Daoust, m'oblige à réfléchir davantage. Vous dites:
Pendant que le système existe. Est-ce à croire, donc, que
l'objectif que vous poursuivriez en y étant serait effectivement
d'essayer de faire disparaître le système?
M. Daoust: M. le ministre, on espérerait, en étant
présent et en ayant à notre disposition les informations que nous
n'avons pas dans le moment et en assumant ou en tenant pour acquis qu'on nous
permettra d'être honnêtes dans nos gestes et de divulguer les
choses qu'on veut divulguer, que vous en viendrez à la même
conclusion que nous.
M. Fréchette: Bon. Alors...
M. Dion: M. le ministre, me permettriez-vous de faire une
intervention?
Le Président (M. Blouin): Oui. Allez-y.
M. Dion: D'abord, il y a deux points sur lesquels j'aimerais
revenir. Quant au résumé que vous avez fait tantôt sur la
façon dont on a été invité devant la commission, je
pense qu'il est exact et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle on s'est
adressé à vous, M. le ministre, par télégramme pour
se faire inviter devant la commission. On avait porté à notre
connaissance la liste des invités qui devaient se présenter
devant la commission et on trouvait aberrant et inacceptable que l'industrie de
la construction ou du moins la partie patronale n'y soit pas. D'ailleurs,
je
pense qu'on souligne dans notre texte que vous êtes intervenu,
vous ou le président de la commission - c'est probablement vous qui
êtes intervenu - à la suite de notre télégramme pour
qu'on puisse se présenter devant la commission et nous
l'apprécions.
Effectivement, la deuxième chose concerne notre présence
au conseil d'administration. Il faut vous dire que par notre présence au
conseil d'administration, dans le cadre actuel de la boîte, c'est
sûr qu'on fait une proposition de remplacer cette boîte. Des gens
pourraient nous dire: Ce n'est pas en changeant une structure qu'on
règle un problème. Actuellement, on voit la structure dans un
état tel qu'on se dit: II n'y a pas d'autre moyen, il faut changer la
structure. Si au CA on est présents et qu'on ne nous met pas un
bâillon, qu'on n'empêche pas les gens de parler sous la menace
d'être expulsés, de ne plus se voir représenté au
conseil, si on nous laisse la liberté d'oeuvrer, d'agir et de
défendre les intérêts des gens de la construction, je pense
qu'on peut entrer dans cette structure et chercher à la rendre
meilleure, chercher à la modifier. C'est sûr que la structure,
telle qu'elle existe actuellement, on veut la voir changer pour une autre
structure; elle ne nous satisfait pas.
Mais, dans notre texte, on vous dit une chose. On ne vous dit pas
carrément de mettre la structure à terre. On peut déduire
cela, oui, à la limite. On vous dit: Donnez une compétition, par
l'entreprise privée, à la CSST. On vous dit dans le texte, assez
clairement - j'espère que cela est clair: Si on pouvait
compétitionner la CSST par l'entreprise privée.
Si vous me permettez, une légère parenthèse.
Actuellement, on a des employeurs qui ont à envoyer des gens en dehors
du Québec - par exemple, en Algérie, ou quelque chose de ce genre
- et ils doivent assurer leurs salariés parce qu'ils ne sont pas
couverts par le système. Ils font affaires avec l'entreprise
privée, les compagnies d'assurances. Je ne veux pas me faire dire: Ce
n'est pas tout à fait la même affaire. Toutes proportions
gardées, les coûts d'assurances ne sont d'aucune proportion avec
ceux de la CSST. Il ne faut pas nous apporter l'argument que c'est à
cause des coûts des programmes de prévention, les coûts de
l'IRSST. Oui, c'est probablement à cause de tout cela. C'est que le
système, à l'heure actuelle, est tellement
développé que le coût moyen est rendu, comme vous le voyez,
à 7,32 $ au Québec par rapport à 3,30 $. Le
vice-président est un employeur de la section structure, il fait
affaires au Québec, il paie un taux au-dessus de 25 $. Il s'en va en
Ontario et il paie un taux, je pense, qui est au alentour de 7 $ ou 8 $ ou
quelque chose comme cela.
C'est cela, M. le Président, M. le ministre, madame de la
commission, qu'on dénonce à l'heure actuelle. On dit que le
système est inacceptable comme tel. Dans notre texte, on le dit, M. le
ministre, vous êtes un des deux ministres qui avez dit: Oui, vous allez
être à la commission un jour. Le jour, on voudrait savoir
exactement lequel. Si ce n'était pas trop pousser, on aimerait savoir
quand. On sait qu'on va y être, vous l'avez dit; le ministre Tardif, je
crois, l'a dit également au congrès de l'APCHQ. On est satisfait
de se faire dire cela, on a hâte que cela arrive, on est prêt
à y aller, on est prêt à essayer de collaborer, à
travailler dedans.
Mais si la condition pour y aller est une condition qui peut ressembler
à celle de M. Murray, c'est-à-dire si tu parles trop fort tu vas
sortir, là on n'est pas d'accord pour accepter le système. Cela
est clair.
M. Fréchette: Je vous remercie, M. Dion, cela replace les
choses dans le sens que je l'avais toujours compris d'ailleurs. C'est comme
cela que je l'avais toujours compris.
Une voix: II est beaucoup plus éloquent que moi.
M. Dion: C'est parce qu'on ne se parle pas assez souvent, M. le
ministre. C'est peut-être pour cela.
M. Fréchette: Peut-être. Une autre observation et
une dernière question quant à moi. Vous avez entendu, hier, le
conseil d'administration et plus particulièrement un représentant
de la partie syndicale, un représentant de la partie patronale qui, l'un
et l'autre, ont souligné les difficultés qu'un organisme comme
celui-là pouvait représenter au niveau de son fonctionnement
à cause, très précisément, de la parité
qu'on y retrouve. Cela a été dans ce sens que l'observation de M.
Laberge a été faite; M. Dufour, également, il me semble.
J'essaie de ne pas déformer ce qu'ils ont dit, ni leur pensée.
Ils ont convenu, tous les deux, encore une fois, que cela n'était pas
toujours simple, pas toujours facile mais que, par ailleurs, ils acceptaient le
principe même de la parité qu'on retrouve autant au conseil
d'administration que dans l'ensemble des organismes ou des structures
prévus par la loi.
M. Laberge a ajouté - il me semble que c'est lui en tout
cas: Oui, c'est dur de fonctionner en paritarisme comme cela, c'est
difficile. Il y a parfois des discussions qui sont ardues, sauf que cela serait
peut-être davantage laborieux pour toutes les parties si ce
n'était pas le système de la parité qui existait. À
ce moment-là, chacun élaborerait ses propres structures et ses
propres moyens d'action. Il n'est écrit nulle part que cela
ferait l'affaire de l'autre partie. M. Laberge a ajouté: Si cela
devait procéder par voie de décrets gouvernementaux, par exemple,
on demanderait, chaque fois qu'un décret est adopté ou qu'il est
prépublié dans la Gazette officielle, d'être entendu en
commission parlementaire, alors que cette parité que l'on connaît
nous permet de procéder à des discussions de fond à
l'intérieur même de l'organisme. Cela rejoint encore le fond de
votre argumentation, M. Daoust ou M. Dion. Est-ce que vous remettez
fondamentalement en cause le principe de la parité de la
représentation?
M. Daoust: M. le ministre, jusqu'à maintenant on n'a pas
vraiment eu la chance d'essayer le système de parité. On n'est
même pas là. Si on avait la chance de l'essayer librement, sans
aucune contrainte, peut-être qu'après on pourrait rendre un
jugement; mais dans le moment, il est impossible de rendre un jugement, je veux
dire avec le système tel qu'il est là. On ne participe pas. Si on
participait, dans un an peut-être que je pourrais vous dire: oui, le
système fonctionne, non, il ne fonctionne pas. Mais dans le
moment...
M. Fréchette: Vous y avez été un petit
moment.
M. Dion: Encore là, M. le ministre, je pense qu'il faut
comprendre la position du monde patronal. On paie des sommes d'argent qui s'en
vont à la CSST. Il y a des gens qui nous rétorquent:
Bâdrez-nous pas, vous ne faites que payer vos dus. L'employeur est
d'accord pour payer ou pour indemniser ses salariés qui ont des
accidents, les vrais. On est tous d'accord avec cela. Il n'y a pas un employeur
dont vous entendrez dire qu'il est un tueur volontaire. On disait à un
moment donné: On serait des fous, ce serait de la folie furieuse de
mieux blesser nos gens pour payer plus à la fin. On serait
réellement des caves. C'est sûr et certain que ce que nous pensons
à la CSST, c'est à l'administration de l'argent, qui est notre
argent; on pense que c'est nous qui devrions l'administrer. On n'a pas
objection à du paritarisme pour discuter des choses qui devraient
être faites. Par exemple, si à un moment donné on veut s'en
aller pour dire qu'on doit faire de la prévention, c'est évident
qu'on devrait s'asseoir avec la partie syndicale et éviter les
problèmes en en discutant au préalable. D'accord, mais quand il
s'agit d'administrer les sommes d'argent -c'est ce qu'on veut lancer comme
message -c'est notre argent qu'on veut administrer et on veut qu'il soit bien
administré. C'est là qu'on veut garder un contrôle.
J'ouvre une parenthèse sur l'association sectorielle. D'ailleurs,
je vais lancer un compliment à Jean Lavallée ou à
Louis
Laberge. Cela va leur faire plaisir. Je pense qu'il a dit hier... C'est
intelligent, il parle intelligemment habituellement et il l'a dit
intelligemment hier: Ne nous bourrez pas l'association sectorielle de force. Je
pense que c'est le message, dans le fond, qu'on pouvait... En tout cas, nous,
c'est ce que nous avons compris. Parfois, on comprend ce qu'on veut. Ne la
mettez pas de force dans la gorge des gens de l'industrie de la construction,
l'association sectorielle. Vous ne ferez jamais marcher une organisation en
l'imposant, en la forçant avec un vote de président qui se sacre
de ce que les patrons pensent de l'association sectorielle. Vous n'arriverez
nulle part avec cela. Cela prend la collaboration des deux. Ce qu'on a dit,
nous: dans l'association sectorielle, il y aura des sommes d'argent à
administrer, on veut contrôler les sommes d'argent, ce sont nos sommes
d'argent. On pense de cette façon, nous. Quand on va discuter de ce
qu'on fait avec ces sommes, comment on les dépense, comment on les
utilise, comment on fait nos programmes, c'est évident qu'on est
d'accord pour parler avec la partie syndicale, pour discuter avec elle. On l'a
fait. Ce n'est pas d'aujourd'hui. On a déjà parlé avec
Lavallée et Laberge. On a même déjà parlé
avec Michel Chartrand. On parlait, nous, avec Michel Chartrand. Il m'a mis mon
manteau hier; je ne suis pas en chicane avec lui. On est capable de se parler.
On a discuté des équipements de sécurité. On a fait
cela. On est capable de le faire.
Mais quand on arrive aux sommes d'argent et qu'une tierce partie se met
à les gaspiller à coups de millions d'un bord et de l'autre, on
ne veut pas cela. On n'est pas d'accord avec cela et c'est là-dessus
qu'on veut, comme patrons, avoir le contrôle. Quant au reste, oui,
d'accord, on est prêt à accepter le paritarisme. On n'est pas
contre cela, loin de là. Si vous lisez nos déclarations de
principe, c'est cela, notre position. Dans l'association sectorielle - la
parenthèse que j'ai ouverte - c'est la même position qu'on a: on
est prêt à faire une association sectorielle; que les gens ne
s'inquiètent pas. On n'est pas des bornés. On sait que cela peut
être utile et que cela peut rendre des services. Mais on veut la
contrôler. On ne veut pas que cela devienne une organisation ou un
éléphant où l'argent entre là-dedans et s'en va
n'importe où et n'importe comment. C'est notre argent. On veut le
contrôler. On va s'asseoir avec la partie syndicale et on va
définir les choses à faire dans l'association sectorielle. Mais
on n'ira pas se faire dire par le gars qui ne paie pas: Cela va être 50
000 000 $ cette affaire-là. Non! C'est notre argent et on ne veut pas
que les gens disent: C'est 50 000 000 $ là-dedans. Nous, on va dire:
Nous sommes prêts à investir 5 000 000 $ et, là, on va
discuter avec les autres sur la
meilleure façon de dépenser dans l'intérêt
des vrais travailleurs et des vrais patrons. C'est cela notre position. (12 h
45)
M. Fréchette: M. le Président, j'ai une
dernière observation. C'est M. Girard, je pense, qui a parlé en
votre nom quant à un aspect très important de l'ensemble de la
situation qui nous préoccupe, c'est-à-dire le financement, ses
méthodes et, enfin, les conséquences que cela a chez vous. Je
voudrais vous signaler que, évidemment, lorsque nous tiendrons la
commission parlementaire sur la loi 42, ce sera le forum tout à fait
choisi pour revenir à cet égard. M. Dion, afin qu'il n'y ait pas
de quiproquo ni d'ambiguïté nulle part, je vous invite dès
maintenant à participer à la commission parlementaire sur la loi
42. Nous allons annoncer les dates très bientôt.
M. Dion: M. le ministre, on va venir et je vous garantis, tenant
compte de la compréhension habituelle que vous manifestez, que vous
allez comprendre que cette affaire-là n'a pas de sens. Cela a de
l'allure quant au 3804, mais cela n'a pas de sens de créer de nouveaux
champs d'indemnisation qui vont ajouter encore un autre 100 000 000 $ dans
quelque temps. Cela n'a pas de sens.
M. le ministre, vous allez atteindre, vous aussi, le même
âge que j'ai. Vous êtes plus jeune que moi et, un jour, vous allez
devenir sourd naturellement. C'est naturel de devenir sourd et vous
n'accepterez pas que la CSST indemnise des gens qui deviennent sourds de
façon naturelle en prétendant que c'est à la suite
d'accidents du travail. On n'acceptera pas cela nous non plus. Ce sont de
nouveaux champs d'indemnité.
Le Président (M. Blouin): Merci M. Dion. M. le
député de Viau.
M. Cusano: Merci M. le Président. Vous dites dans votre
mémoire - et les faits nous le font constater - que vous n'êtes
pas représenté au conseil d'administration. Vous dites aussi
qu'à la suite de sorties, par votre représentant, sur des abus
administratifs qui ont été commis, à l'époque, on
l'aurait mis à la porte. Pouvez-vous nous dire quelles sont ces
anomalies administratives que votre représentant avait
soulignées?
Le Président (M. Blouin): M. Dion.
M. Dion: Si vous me le permettez, effectivement, je pense que la
personne qui était la plus apte à répondre à cette
question était M. Murray. On a tenté d'amener M. Murray à
la commission. Pour des circonstances incontrôlables, M. Murray n'a pu
venir, mais je pense que M. Girard est assez au courant des faits qui sont
survenus à ce moment; je parle de ce qu'il avait souligné.
Le Président (M. Blouin): M. Girard.
M. Girard: Merci M. le Président. M. Murray a
alimenté, à l'époque où il siégeait au
conseil d'administration, du mieux possible le comité de surveillance
des finances créé par l'AECQ. Un certain nombre d'anomalies dont
la principale est, sans aucun doute, le déficit budgétaire,
mentionné hier, déficit de l'ordre de 48 000 000 $ ou 50 000 000
$. Il y un certain nombre d'autres choses qui sont également
mentionnées dans l'une des annexes du mémoire et qui font
état des principales anomalies administratives. D'une part, il y a une
chose importante qui est la récupération de la
non-récupération, si vous voulez, des dépenses faites par
la CSST relativement à des accidents causés par une tierce
partie, assurés par la Régie de l'assurance automobile. Ce que je
veux dire par cela, c'est qu'un travailleur victime d'un accident d'automobile
dans le cadre de son travail était, jusqu'en 1983, indemnisé par
la CSST et la CSST ne prenait aucune action pour aller récupérer
à la Régie de l'assurance automobile les sommes qui auraient
dû être payées par cet autre régime financé
directement par chacun des utilisateurs.
On a estimé qu'il y a eu, en 1982, environ 205 accidents mortels
au Québec et que 25% de ces accidents mettaient en cause un
véhicule automobile assuré par la RARQ. Et là,
évidemmment, nous n'avons aucune statistique sur les accidents non
mortels qui mettaient également en cause ce même genre de
véhicule. Je ne pourrais pas estimer ou vous donner un ordre de grandeur
des chiffres, mais il y a suffisamment d'argent dans cela, je pense... Tout le
monde sait que, lorsqu'une mort survient en milieu de travail, les montants
payés sont très substantiels.
On a également parlé dans le cadre des actions du
comité du maximum assurable dont je vous ai entretenus tantôt. On
a aussi constaté que la CSST a mis au point un manuel des politiques
administratives du service de la réparation. Il y a un comité ad
hoc qui avait été formé pour étudier ces
différentes politiques. Le comité ad hoc en question n'a jamais
pu terminer ses travaux. Notre comité a essayé, à
plusieurs reprises, de faire modifier certaines politiques du service,
particulièrement celle voulant que, pour déterminer la prestation
d'un accidenté, il serait dorénavant tenu compte des salaires
effectifs d'un contrat de travail. Quant à la période retenue, on
ne tiendrait plus compte des quatre semaines précédant
l'accident, mais plutôt des quatorze jours. Cette façon d'agir du
service de la réparation au milieu d'un exercice financier a permis que
deux systèmes se chevauchent, ce qui a créé des
problèmes au niveau des entreprises. À la demande
répétée des membres du comité qui voulaient
rencontrer les responsables du service de la réparation, la CSST a
toujours accusé une fin de non recevoir.
Un autre article sur lequel on s'est attardé, c'est celui des
excédents budgétaires de l'IRSST où on s'est rendu compte
que, pour la première année de fonctionnement, 1981, sur un
budget de 13 000 000 $, à la fin de l'année 1981, il y avait un
excédent budgétaire de 3 000 000 $; alors 3 000 000 $ sur 13 000
000 $, cela fait un ratio qui est quand même assez impressionnant. Cela
fait pas loin de 25% des sommes qui n'ont pas été
dépensées. On s'est également rendu compte qu'il n'y avait
aucun rapport d'étape qui était produit par les gens qui
bénéficiaient des subventions accordées par l'IRSST. On
s'est également rendu compte que, au niveau des équipements dont
l'institut s'était doté, on se promenait en Cadillac au
Québec.
M. Dion: Si vous me permettez, M. le Président... Si je
suis trop long, ne vous gênez pas pour me le dire. Je ne dirais pas que
j'ai la parole facile, mais je parle facilement.
Dans le fond, M. Murray était dans la délégation
patronale. Je ne veux pas lui donner un titre, mais il semblait que
c'était plutôt celui qui était attaché aux questions
financières à la CSST. Pour ce qui est de mettre le point
exactement sur ce qui a fait que M. Murray "a sorti ou n'a pas
été renommé" - mettons tout cela entre guillemets, sans
malice - je ne peux pas vous dire carrément: c'est sur tel point. Je
peux vous dire que l'une des actions finales de M. Murray était une
lettre qui avait été adressée au ministre du temps, M.
Marois, et qui semble avoir fait déborder le verre. Mais il faut retenir
une chose, c'est que M. Murray étant le bonhomme qui était
impliqué au niveau des questions financières - j'espère ne
pas dire de choses fausses à l'heure actuelle, c'est du moins
l'information qu'on avait - c'est évident qu'il touchait le point
sensible de l'organisation, il touchait ce qui est le point sensible du
patronat, nos sous. Quand M. Murray posait des questions, c'était pour
savoir pourquoi, alors que dans un budget, on avait accepté 2000 postes
pour du personnel on se retrouvait à la fin de l'année avec un
rapport sur lequel on en voyait apparaître 2500 et 2600; il voulait
savoir comment il se faisait qu'il y avait encore 200, 500, 600 personnes de
trop. Qu'est-ce qui est arrivé? M. Murray était tannant. Vous le
constatez et on n'a pas le choix, on est obligés de vous avouer que oui,
c'est vrai, nous, de la construction, sommes tannants, non pas seulement pour
l'être, c'est naturel. La construction n'est pas comme d'autres; on ne
peut pas être considérés comme les autres; vous ne nous
considérez pas à nulle part comme les autres. Vous avez
adopté une Loi sur les relations du travail pour la construction; il y a
un petit paragraphe dans cette loi, la Loi sur la CSST, spécialement
pour la construction. On forme obligatoirement une association sectorielle. La
construction a des problèmes différents. Si vous nous parlez des
cinq jours indemnisables dans la construction, cela n'est pas viable, ce n'est
pas pensable; cela a augmenté les accidents. Si vous pensez que le
problème des maux de dos dans l'industrie de la construction, ce n'est
rien... Peut-être que ce n'est rien ailleurs, chez nous, c'est quelque
chose. Les quatorze jours de la loi 42 qui s'en vient, ce sera énorme
chez nous. Le système de calcul du salaire du maximum assurable chez
nous, c'est une façon de prendre le décret pour compter cela.
Nous avons des statistiques dans l'industrie de la construction qui
démontrent un taux de salaire - je lance un chiffre comme cela, mettons
10 000 $ - si on prend le décret pour déterminer le maximum
assurable d'un travailleur de la construction, on dit: c'est un employé
qui devrait gagner 15,00 $ l'heure, 40 heures par semaine, 50 semaines, si on
est gentil, au lieu de 52. On fait le total et on se dit que son salaire est de
tant et il est au maximum. C'est cela qui fait qu'on a une situation
spéciale et que M. Murray s'est ramassé dehors, du moins c'est ce
qu'on pense.
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Viau.
M. Dion: Vous avez mis en application ce que je vous avais
suggéré.
M. Cusano: Sur ces menaces d'expulsion, on comprend parfois que,
lorsque des personnes cherchent à savoir ce qui se passe à
l'intérieur d'une boîte, cela en offusque certaines autres. Ma
question précise - c'est dommage que M. Murray n'ait pas pu être
ici aujourd'hui - à votre connaissance, ces menaces d'expulsion et
l'expulsion même étaient recommandées et faites par
qui?
M. Dion: M. le Président, je voudrais tout de suite...
J'espère que ce n'est pas nous qui induisons la commission en erreur. Il
n'y a pas eu d'expulsion; il n'y a pas eu de menaces d'expulsion. Ce n'est pas
la réalité, M. Cusano.
M. Cusano: On s'est servi...
M. Dion: Au moment du renouvellement des mandats, des
nominations, le nom de M. Murray apparaissait sur les recommandations du
Conseil du patronat, selon ce qu'on dit dans notre mémoire et dans celui
de la
chambre de commerce et M. Murray n'a pas été
renommé. Je ne voudrais pas qu'on nous fasse dire des choses qu'on n'a
pas dites. Je ne veux pas accuser le ministre du temps de l'avoir
expulsé, ce n'est pas le cas. Il ne l'a pas renommé, il l'a
oublié.
M. Cusano: Merci.
M. Dion: Je pense que M. Fréchette sait qu'il nous a
oubliés.
M. Cusano: Le fait est que vous n'êtes plus là. Le
fait est que vous contribuez énormément. Cela m'amène
à une autre question. Présentement, quelles voies employez-vous,
autres que les conférences de presse, pour faire valoir vos
préoccupations auprès de la CSST, auprès du conseil
d'administration?
M. Dion: M. le Président, si j'étais
haïssable, il y en a qui diraient parfois le gouvernement, parfois
l'Opposition, parfois les commissions parlementaires. Je dois vous dire que
normalement l'information doit nous venir de la délégation
patronale qui siège à la CSST. Évidemment, on n'est pas
présent; on ne peut pas enregistrer notre voix. Je pense que ces
gens-là font le maximum pour traduire la pensée de l'industrie de
la construction mais ce n'est pas comme être assis là, ce n'est
pas voter, ce n'est pas donner notre point de vue. C'est évident.
Il peut se trouver - je dois vous le dire honnêtement - des
situations où nous, de la construction, on pourrait avoir des exigences.
Par exemple, quand on demande de réviser notre taux de cotisation, c'est
évident que notre position peut être préjudiciable aux
autres personnes de l'industrie parce que si mon taux baisse et que la CSST a
besoin d'une certaine somme, il faudra que le taux des autres soit
augmenté. C'est peut-être vrai. Cela peut créer des
conflits.
M. Cusano: À la page 42 de votre mémoire, vous
dites que la CSST a pondu un questionnaire qui va jusqu'à exiger de
l'employeur des renseignements sur son administration, ses droits de
gérance, bref une cueillette d'informations qui n'est pas en relation
avec la santé et la sécurité. Pouvez-vous nous en donner
des exemples?
Le Président (M. Blouin): C'est pour expliciter le
paragraphe de la page 42.
M. Dion: C'est quand même un énoncé
général. Je pense que si vous désirez des
précisions, j'en ai quelques-unes. Dans l'ensemble du guide fait par la
CSST pour préparer un programme de prévention - il faudrait
effectivement avoir le texte et le regarder - vous allez vous rendre compte
qu'il y a une série de questions qui nous apparaissent -
évidemment, vous allez dire: C'est votre jugement, d'accord - non
pertinentes à la mise en place d'un programme de prévention. Je
peux vous donner une idée. On pense qu'il est non pertinent de demander
à un entrepreneur comment il fera sa coulée de béton.
L'employeur peut décider, parce qu'il y a un ensemble sur son chantier
et qu'il voit son chantier, que la méthode la plus pratique pour faire
sa coulée de béton serait à l'aide d'un petit
véhicule motorisé avec une grue qui circulera et il montera son
ciment de cette façon-là, avec des "buckets". Le jour où
il doit le faire, il s'aperçoit que le moyen le plus pratique est
l'utilisation d'une pompe à béton. Or, si on a obligé
l'employeur à décrire son moyen d'exécution - c'est
à titre d'exemple que je vous le donne, ce qu'on n'acceptera jamais
d'ailleurs - et qu'au moment de l'exécution, ce moyen est un moyen
différent utilisé, on a en définitive mal rempli notre
programme de prévention, on n'a pas répondu. Je voudrais que vous
preniez cela sous réserve, on m'a dit que certains ont même eu le
front d'aller demander à des entrepreneurs de montrer leur soumission,
de montrer les contrats qu'ils ont eus. C'est quand même aberrant, je ne
vois pas ce que cela vient faire dans la santé et la
sécurité. Si c'est pour savoir si l'entreprise est en
santé ou pour voir si le contrat est sécuritaire, je ne sais
trop, pour l'entrepreneur... Il y a des choses - vous allez voir, il y a une
couple d'exemples qu'on vous a donnés - abusives. Nous, quand on pense
à un programme de prévention, entre autres, c'est un programme
où l'employeur doit dire quels sont les risques et comment il va faire
pour les contrer, sans plus. Ils ne viennent pas nous dire comment on va faire
de la construction, ils ne viennent pas nous dire quelle méthode on va
utiliser pour faire de la construction. Ils n'ont pas d'affaire à savoir
certaines affaires, cela ne les regarde pas.
M. Daoust: Je pourrais vous donner un exemple, peut-être
personnel, une des choses qu'ils demandent...
Le Président (M. Blouin): M. Daoust, nous devons
maintenant suspendre nos travaux. Nous reprendrons notre échange avec
votre organisme à 15 h 15 et non à 15 heures puisqu'il y a une
cérémonie au salon rouge. Donc, la commission suspend ses travaux
jusqu'à 15 h 15.
(Suspension de la séance à 13 h 2)
(Reprise de la séance à 15 h 20)
Le Président (M. Blouin): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission élue permanente du travail reprend ses travaux. Au
moment où nous nous sommes quittés, la parole était au
député de Viau. M. le député.
M. Cusano: Merci. Vous avez mentionné dans votre
mémoire que certains travailleurs refuseraient de porter
l'équipement de sécurité nécessaire. Puis-je vous
demander de votre côté, du côté patronal, quelles ont
été les mesures incitatrices pour faire comprendre les dangers
qui peuvent exister et la nécessité de porter une ceinture de
sécurité, des bottines de sécurité, des casques ou
autres choses? Avez-vous pris certaines mesures?
M. Daoust: Je vous disais ce matin que les patrons avaient, il y
a quelques années, volontairement investi de l'argent dans un fonds pour
faire de la prévention et de l'éducation en
sécurité. Je crois que c'est quelque chose comme 1 500 000 $. Je
vous cite ce chiffre de mémoire, c'est environ 1 500 000 $. On n'a pas
demandé de subvention. On est très conscient du fait que la
sécurité, ça paie, mais à la condition,
naturellement, que l'employé soit conscient qu'il doit être
sécuritaire, que c'est pour son bien-être. Contrairement à
certains syndicats - je pense surtout au Syndicat des métallos, qui a
reçu environ 1 300 000 $ de subvention et on se demande encore ce qu'il
a fait avec - nous n'avons pas demandé d'argent, nous l'avons pris dans
notre poche.
Je suis très heureux que vous ayez remarqué que, dans
notre mémoire, on a justement fait le point. On est conscient de la
sécurité, on est prêt à payer pour et il ne faudrait
pas confondre nos commentaires de ce matin. Nous sommes conscients des
coûts et nous sommes conscients aussi de l'administration des
coûts; nous admettons qu'il faut dépenser de l'argent pour en
faire. On a donné des cours de sécurité à tous les
employeurs et travailleurs qui le demandaient, on les donnait gratuitement.
M. Cusano: Merci, c'était ma dernière question.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. le
député de Viau.
M. le député de Prévost.
M. Dean: Merci, M. le Président. Je sais que la
subtilité et les nuances de langage ne sont pas nécessairement
caractéristiques des gens de la construction, tant du côté
syndical que du côté patronal. Si un éditorialiste a
reproché à certains défenseurs des accidents du travail
leur ton parfois agressif et leur vocabulaire peut-être radical, je
constate également que le radicaliste de droite emploie parfois des
paroles aussi dures que le radicaliste de gauche; un tend à donner
raison à l'autre.
J'aurais à poser un certain nombre de questions à
l'association. Ce que je trouve déplorable, c'est que, même s'il y
a de réels problèmes à régler, je ne suis pas
sûr que le ton de votre mémoire vous aide. À la page 5,
vous faites référence, sans le dire expressément, au
travail au noir dans l'industrie de la construction. Je voudrais savoir si
votre association favorise le travail au noir et en fait la promotion.
Deuxièmement, vous faites une affirmation très gratuite,
à mon avis, en vous référant, à la page 46,
à des cours de santé et de sécurité syndicaux qui
n'existent pas. J'aimerais bien que vous précisiez et que vous prouviez
ce que vous alléguez, car je sais que des cours syndicaux en
santé et en sécurité se donnent par centaines, par
milliers et qu'il y a une comptabilité assez rigide des subventions qui
viennent de la CSST.
J'essaie de comprendre ce qui est écrit à la page 47
où vous dites qu'au début de 1983 1700 entreprises ont
déclaré, par écrit, être prêtes à ne
pas payer leur cotisation. Vous ajoutez: "Ces entreprises avaient
déclaré 27 000 000 d'heures travaillées, soit 31% du total
et elles savaient ce qu'elles faisaient." Est-ce que je dois comprendre de
cette remarque que vous favorisez, en plus, la fraude fiscale? Ce que je
comprends de cette phrase, c'est que les employeurs ne déclarent pas les
heures travaillées ni pour la CSST, ni peut-être pour autre chose.
Comme on dit, les paroles s'envolent et les écrits restent. Je lis ce
que vous avez écrit.
Finalement, votre association est-elle affiliée ou non au Conseil
du patronat? Si oui, ètes-vous d'accord avec les politiques
véhiculées en santé et sécurité par le
Conseil du patronat? Sinon, allez-vous vous retirer du Conseil du patronat, de
la même façon que vous êtes prêts à vous
retirer de la Loi sur la santé et la sécurité du
travail?
Dernière chose. Votre recommandation globale, au fond, c'est que
vous voulez que la CSST soit abolie en faveur d'un régime privé
d'assurance dirigé par les patrons. Je vous demande simplement si vous
savez que, dans les neuf autres provinces canadiennes auxquelles vous vous
comparez assez souvent, il n'existe aucun système semblable, que je
sache. Dans toutes les provinces sans exception, il y a une régie
gouvernementale quelconque, il y a un fonds d'accidents du travail qui est
régi par l'État et où, d'une façon ou d'une autre,
le monde patronal et syndical a son mot à dire. Je veux savoir si vous
savez cela, parce que cela semble être le "punch" de votre
mémoire.
M. Daoust: Si vous le permettez, M. le Président, on va
peut-être se diviser...
Le Président (M. Blouin): M. Daoust,
oui.
M. Daoust: ...les questions, parce qu'il y en a plusieurs.
Le Président (M. Blouin): II y a quatre volets à la
question.
M. Daoust: II y en a dont je suis plus au courant que mes
confrères...
Le Président (M. Blouin): Très bien.
M. Daoust: ...mais, d'un autre côté, il y en a dont
ils sont certainement plus au courant que moi.
À votre question à propos de la page 5 concernant le
travail au noir, on a dit à maintes reprises dans les journaux et
à la commission parlementaire qu'on était contre le travail au
noir. On a, d'ailleurs, eu des rencontres avec le ministre pour le mettre au
courant du phénomène que cela enlevait des impôts, cela
coûtait de l'argent à tout le monde. On a même mis une
clause dans le décret qui a été négociée
avec le syndicat la dernière fois qui, à toutes fins utiles,
éliminait la possibilité de faire du travail au noir. Le
gouvernement a décidé de ne pas la retenir. Je pense que c'est la
réponse à votre première question.
Je vais en sauter une concernant les cours de sécurité
syndicale. On y répondra à la fin de ma riposte. En ce qui
concerne les pages 46 et 47, où on dit que "1708 entreprises de
construction nous ont déclaré par écrit être
prêtes à ne pas payer leurs cotisations à la CSST", vous
vous demandez si c'est de la fraude, si elles rapportent les heures, si elles
ne les rapportent pas. Je croyais que c'était assez clair, mais je veux
quand même l'expliciter davantage. Depuis plusieurs mois, plusieurs
années, nos membres se plaignent du traitement qu'on reçoit
à la CSST, du type d'administration, de la qualité de
l'administration, des taux qui, d'après nous, sont injustes, enfin, un
paquet de choses. Ils nous ont demandé de prendre des mesures - c'est
logique - pour essayer de corriger la situation. Ils se sont aperçus que
même avec toutes les représentations qu'on faisait, apparemment,
les oreilles n'étaient pas aussi sympathiques qu'ils l'auraient
espéré.
Ils ont fait beaucoup de pressions pour savoir quels gestes concrets
nous allions poser. On leur a demandé ce qu'ils étaient
prêts à faire pour gagner leur cause. On l'a demandé
à tous les entrepreneurs. Il faut quand même comprendre qu'on ne
peut pas obliger nos membres à répondre à un
questionnaire, pas plus que le syndicat ne peut le faire avec les siens. Mais,
parmi celles qui ont répondu - je crois que 1708 entreprises
représentent quelque chose comme 96%; je ne suis pas sûr du
chiffre, mais c'est plus de 90% - 1708 entreprises ont déclaré:
Si on n'est pas capables d'avoir satisfaction, pourquoi paie-t-on?
Peut-être qu'on devrait retenir nos cotisations à la CSST. Ce
n'est pas qu'elles ne déclarent pas leurs heures, mais elles disent:
Qu'est-ce que cela nous donne? On paie pour cela et il n'y a personne qui nous
écoute.
Le point qu'on essayait de soulever, c'est que ces 1708 entreprises
représentent 27 000 000 d'heures, 31% du total. Ce ne sont donc pas de
petites compagnies. Je ne veux pas qu'on prenne mes mots et qu'on les revire
à l'envers, mais ce ne sont pas des compagnies de broche à foin;
ce sont des compagnies sérieuses qui ont pesé leurs paroles,
leurs gestes et qui se posent de drôles de questions. Est-ce que,
moralement, elles sont obligées de verser de l'argent dans un fonds
alors qu'elles n'ont rien à dire sur son administration et qu'elles se
font taper sur la tête constamment? C'est cela que le paragraphe voulait
dire, c'est ce que je croyais que cela disait.
En ce qui concerne notre affiliation au Conseil du patronat, disons que
nous sommes membres du Conseil du patronat. C'était et c'est encore une
façon de se tenir au courant de certains dossiers. Est-ce que nous
sommes d'accord avec ses positions en ce qui concerne la loi de la CSST? C'est
bien apparent que, dans les grandes lignes, c'est oui. Nous aussi, nous sommes
d'accord que la loi 17 devrait exister. Nous ne sommes simplement pas d'accord,
comme lui, le conseil, ne l'est pas non plus, sur sa composition
complète. Nous aimerions y voir certaines modifications, tout comme il
le désire.
J'essaie de voir les dernières autres choses.
Le Président (M. Blouin): La CSST...
M. Daoust: Vous parlez des recommandations que nous faisons: pour
éliminer le système et le remplacer par un système
privé. Vous faites allusion aux neuf autres provinces. Il ne nous est
jamais venu à l'esprit...
Le Président (M. Blouin): J'espère que vous allez
répondre à toutes les questions.
M. Daoust: Oui, oui, il y en a seulement une pour laquelle je
n'ai pas les chiffres.
Le Président (M. Blouin): Cela va.
M. Daoust: Dans la dernière question, si je me rappelle
bien, on demandait de mettre le système dans les mains d'une entreprise
privée. M. Dean nous faisait la comparaison avec les neuf autres
provinces. Je vous ferai remarquer qu'il ne nous est jamais venu à
l'idée d'essayer d'aller chercher dans chaque province ce qu'il y
avait de mieux ou ce qu'il y avait de pire et d'essayer d'en faire une sorte de
chameau censé représenter un cheval ou quelque chose comme cela.
Ce n'était pas notre idée. Indépendamment des gestes ou
des actions qui sont posés dans d'autres provinces, nous avons fait une
étude de ce qui d'après nous devrait être en vigueur ici et
nous en venons à la conclusion que cela devrait être soit le
système que nous avons tel quel, mais avec des modifications, un vrai
paritarisme ou, à défaut de cela, l'entreprise privée.
Le Président (M. Blouin): Très bien.
M. Daoust: En ce qui concerne la dernière question, sur
les cours de sécurité, je vais demander à mon
confrère d'y répondre.
Le Président (M. Blouin): Pour ce qui est des cours de
sécurité, c'était un commentaire du député
de Prévost. Je ne pense pas qu'il y avait une question.
M. Dion: M. le Président, j'allais dire, en peu de mots -
je pense que les syndicats se chargeraient de nous le dire et peut-être
de vous le dire - que notre vocation, c'est de servir nos membres,
c'est-à-dire les employeurs. Nous avons tout fait, nous avons mis en
branle des cours de sécurité, nous avons donné des cours
à 3000, 4000 ou 5000 employeurs. Ce n'était pas notre fonction de
donner des cours aux travailleurs de la construction. Nous avons tout de
même constaté que, du côté syndical, le
mécanisme de mise en place pour offrir des cours a été
très lent. Il a attendu le moment où des subventions ont
été accordées. Je dois vous dire qu'il y a des employeurs
qui se permettent régulièrement, par l'entremise de
contremaîtres ou de leurs gérants de projets, de demander à
leurs travailleurs d'utiliser les équipements et les méthodes de
sécurité. C'est courant.
Le Président (M. Blouin): Cela va. Merci, M. Dion. Cela
va, M. le député de Prévost?
M. Dean: Sauf que je voudrais faire un commentaire et dire que
cela n'aide pas la cause de l'association de faire des affirmations qui ne sont
carrément pas vraies.
Le Président (M. Blouin): M. Dion.
M. Dion: M. le Président, je ne pense pas que M. Dean ait
fait la démonstration qu'on a dit des choses qui n'étaient pas
exactes. Quand il me dit: Est-ce que vous allez rester dans le Conseil du
patronat...
Le Président (M. Blouin): M. Dion, il s'agit d'une
expression d'opinion. Nous connaissons la vôtre, nous connaissons celle
du député de Prévost et je ne voudrais pas qu'on entame un
débat sur cela.
M. Dion: Je m'excuse d'avoir parlé en même temps que
vous. Le son n'est pas tellement fort et on a de la misère à vous
entendre.
Le Président (M. Blouin): D'accord. M. le
député de Sainte-Anne.
M. Polak: Merci, M. le Président. D'abord, j'ai une
question d'ordre général. Je suis ici depuis le début de
cette commission. J'essaie vraiment d'être objectif dans cela. Nous avons
entendu les mémoires des travailleurs ou des représentants des
travailleurs qui ont parlé, par exemple, de l'examen médical, des
délais énormes, de l'administration, de la paperasse, etc. Ce
sont vraiment des exemples où il est impossible d'inventer. Il y en a
trop. Il y a en avec des statistiques, avec des noms, avec des dossiers, avec
des numéros. Cela m'a vraiment touché et cela m'a frappé.
Ce n'est pas seulement une association, c'est une fédération qui
en représente huit ou neuf. Il y en a plusieurs qui sont venues et on
retrouvait un peu le même thème. Évidemment, la conclusion
n'est pas seulement qu'on critiquait le fonctionnement de la CSST, mais presque
le système, la manière dont cela marche.
J'ai écouté votre mémoire ce matin. J'ai
noté qu'il y a au moins une chose que vous partagez avec les
travailleurs, c'est que vous vous plaignez aussi des délais. Cela semble
être un élément auquel vous souscrivez, à savoir que
les délais nuisent à tout le monde. Pourriez-vous me donner un
rapide commentaire sur ce que les accidentés ont dit? Je comprends que
ces gens luttent pour leur affaire, tout comme vous travaillez pour votre
affaire. Quel est votre commentaire là-dessus? Moi, je trouve cela
scandaleux, la manière dont cela fonctionne apparemment.
Le Président (M. Blouin): En somme, vous nous demandez un
commentaire sur les délais à la CSST.
M. Polak: Je demande un commentaire sur ce qui a
été dit depuis deux jours par différents
représentants des travailleurs et des travailleuses. Peut-être
diront-ils que c'est exagéré ou que ce n'est pas vrai ou encore
peut-être le confirmeront-ils. C'est le commentaire que je demande.
Le Président (M. Blouin): Si les délais sont trop
longs, d'accord. M. Dion.
M. Dion: Je pense que vous venez de faire le point. Je pense
qu'il ne nous appartient pas de faire des commentaires sur les gens qui se sont
présentés devant la commission. Par contre, je vous souligne que,
dans notre mémoire, on a, à certains endroits dans nos annexes,
fait état des nombreux délais, spécialement les
délais lors des auditions. Ce que vous dites est véridique, M. le
député. Pour la partie patronale, les délais - je ne veux
pas parler pour la partie syndicale - sont extrêmement onéreux.
Quand cela prend au-dessus de six mois - on ne ménage pas nos mots en
disant cela et je dois vous dire qu'on est modérés -pour avoir
une décision et que les paiements s'exécutent durant cette
période, je dois vous dire qu'il y a des sommes énormes
impliquées dans les cas de règlements d'indemnités et
toutes ces choses-là. Mais c'est encore pis quand il s'agit de
l'arrêt d'un chantier, par exemple, pour une raison décelée
par un inspecteur et que, effectivement, il peut s'avérer ensuite que
c'est une erreur de jugement de la part de l'inspecteur. On cite quelques cas;
évidemment, on n'a pas fait un catalogue des cas là-dedans. On ne
voulait pas que le document soit comme une espèce d'index de tous les
embêtements qu'on a eus, mais on en a souligné quelques-uns. Par
exemple, quand un bonhomme décide, seulement à l'oeil comme cela,
que l'échafaudage mesure 18 mètres, que cela prend un plan, qu'il
arrête le chantier pendant deux ou trois jours et que l'employeur aussi
est arrêté dans ses travaux, cela coûte de l'argent à
l'industrie de la construction. Par les temps qui courent, je ne pense pas
qu'il y ait beaucoup d'entrepreneurs qui aient bien du "loose" sur les
soumissions pour y arriver. Ce sont des sommes énormes que l'industrie
paie dans ces cas-là.
Le Président (M. Blouin): Cela va. Merci.
M. Polak: D'accord. Aux pages 9 et 10 de votre mémoire,
vous parlez d'un monstre bureaucratique, vous parlez d'un cirque, des
recherchistes, statisticiens, professionnels. Enfin, vous donnez vraiment une
description d'un paradis de la paperasse avec tous ces fonctionnaires de la
CSST. On a entendu parler souvent de cela. Quand vous parlez avec les
travailleurs de la construction, trouvent-ils en général que cela
va mieux maintenant qu'auparavant quand on avait, disons, quatre ou d'autres
organismes impliqués dans votre industrie? Est-ce que cela va mieux?
Est-ce qu'il y a un meilleur résultat au point de vue de la
prévention? Est-ce qu'il y a moins d'accidents graves? On peut
être prêt à payer un certain prix pour les frais
administratifs, si on sait qu'il y a des résultats. Est-ce que les
résultats sont moins bons ou aussi mauvais qu'auparavant? Est-ce que
c'est seulement un alourdissement de l'appareil?
M. Daoust: D'après mon expérience personnelle, je
peux vous répondre qu'à un programme de télévision
qui s'appelle Droit de parole, environ 90% des syndiqués qui ont pris la
parole ont exprimé...
Le Président (M. Blouin): M. Daoust, je voulais justement
rectifier un peu le tir. Je demanderais au député de Sainte-Anne
de ne pas vous demander des avis sur ce que les autres peuvent penser, mais
bien de donner votre avis à vous là-dessus.
M. Polak: M. le Président...
Le Président (M. Blouin): Oui, M. le député
de Sainte-Anne.
M. Polak: ...question de règlement. Nous sommes ici pour
un débat ouvert.
Le Président (M. Blouin): Oui.
M. Polak: II ne faut pas être stériles. On a un
groupe qui donne son point de vue et un autre le sien. Je voudrais seulement
mettre les deux ensemble. Il y a peut-être une connexion à faire.
Pourquoi ne pourrait-il pas faire de commentaire sur le mémoire des
autres, par exemple, comme les autres vont le faire sur son mémoire? Le
député de Prévost vient de les accuser d'être des
gens de droite, etc. Moi, je voudrais vraiment en toute
objectivité...
Le Président (M. Blouin): Cela n'a aucun rapport, M. le
député de Sainte-Anne. Vous savez très bien que nous avons
commencé à entendre l'Association des entrepreneurs en
construction du Québec et que ces gens ont eu une période de
temps généreuse pour s'exprimer. Maintenant, il est normal que
nous devions resserrer un peu la procédure pour que nous puissions
ensuite entendre l'autre organisme qui est prévu. C'est dans cette
perspective que je vous demande de leur adresser des questions qui les
concernent directement et non pas de commencer à leur demander des avis
sur d'autres groupes qui, d'autre part, se sont fait entendre à notre
commission, pour la plupart d'entre eux, parce qu'on ne s'en sortira pas.
M. Polak: M. le Président, vous êtes le "boss", mais
je vous dirai que c'est une drôle de manière d'essayer de trouver
un consensus. À tout événement, je vais sauter cela et je
vais aller à la page 11 où on parle de la progression des
revenus. Vous avez indiqué qu'en 1979 les revenus de la CSST
étaient de 579 000 000 $, et c'est
rendu maintenant à 1 000 000 000 $. Je pourrais vous dire: Mais
oui, c'est évident parce qu'il y a le facteur de l'inflation; le gars
qui gagnait, en 1979, 1000 $ gagnait, en 1983, peut-être 1500 $, je ne
sais pas. Avez-vous comparé cette augmentation énorme de 182%
avec le taux de l'inflation?
Le Président (M. Blouin): M. Dion.
M. Dion: Écoutez, je ne veux pas que cela devienne une
guerre de chiffres. La projection qu'on fait là, qui démontre une
augmentation de 182%, c'est évident qu'elle est énorme et que
nous, on la considère énorme. C'est évident qu'il y a une
partie de cela qui est implicable à des taux d'inflation. On va nous
dire que les médecins coûtent plus cher que les hôpitaux
coûtent plus cher, mais nous on va aussi vous dire qu'il n'y a moins
d'accidents qu'il y en avait. On l'a démontré. On a un tableau
qui le démontre. Il y a moins d'accidents. Si on a mis une machine en
place qui est supposée être plus efficace, ou qui devrait en
théorie l'être, il me semble qu'on devrait avoir des
résultats meilleurs que 182% d'augmentation. Il faut vous dire qu'il y
avait 1500 employés, il n'y a pas tellement longtemps, à la CAT
ou au début de la CSST. Aujourd'hui, on se retrouve avec 2800 personnes.
On peut se poser des questions. Est-ce que tout cela est nécessaire,
à l'heure actuelle, pour y arriver?
Ils vont nous dire qu'ils font des programmes de prévention.
C'est évident qu'il se fait des programmes de prévention. Il y a
l'exemple d'ici et il y a l'exemple d'ailleurs. On regarde la nôtre aller
et on regarde les autres aller et on vous dit que nos cotisations sont
montées de tout près de 600%, alors que dans d'autres endroits
les cotisations ont à peine monté de quelque 300%. On se pose des
questions sur le système, sur la façon d'administrer. Soit dit en
passant, on peut avoir l'air, avec nos arguments et la façon de les
défendre, des gens de droite. Je peux vous dire qu'on ne s'excusera pas
d'avoir l'air des gens de droite, au contraire.
À toutes fins utiles, on s'est rendu compte que nous, on n'est
pas contents de payer ce montant. On considère que c'est trop payer. On
doit dire que vous vous êtes rendu compte - et on peut s'en rendre
compte, nous aussi, sur nos chantiers - que ceux qui en
bénéficient ou qui devraient en bénéficier ne
semblent pas être contents, non plus. À un bout, on n'est pas
content et, à l'autre bout, on n'est pas content. Il se passe quelque
chose entre les deux.
Le Président (M. Blouin): Cela va.
M. Polak: À la page 16 de votre mémoire, vous
parlez de tarification. Est-ce que j'ai bien compris que vous trouvez que, dans
votre secteur de la construction, la tarification n'a pas été
établie d'une manière objective? Aurait-elle dû être
établie sur une autre base? Quelle est cette autre base? Au point de vue
de la tarification, je ne m'y connais pas beaucoup. Est-ce qu'on n'a pas pris
l'industrie de la construction comme une unité, évidemment avec
des subdivisions, des sous-classes? Comment cela fonctionne-t-il? Si vous aviez
le droit de dire à M. Sauvé, à la CSST de faire un
changement, qu'est-ce que vous lui suggéreriez de faire au point de vue
de la tarification dans votre secteur?
M. Dion: On pourrait le faire de deux façons, M. le
Président. Je peux demander à M. Girard d'aller dans les
détails pour l'expliquer. On a fait faire une étude. D'ailleurs,
là-dessus on a engagé des gens parce que cela nous paraissait
aberrant, le taux où on en était rendu. On peut, très
superficiellement, vous expliquer ceci. Vous arrivez à un taux moyen
à la CSST que je dirais, fictivement, de 3 $. Dans ce taux moyen, il y a
un montant qui est pour des frais de chargement, des frais
généraux que j'appellerai en langage vulgaire, pour moi, des
frais d'administration. Si le taux moyen de l'industrie de la construction est
9 $, ces frais de chargement, dans le taux de 9 $, sont trois fois. Autrement
dit, c'est trois fois 3 $. Je vous le donne peut-être d'une façon
très simpliste et je sens qu'il y aurait peut-être des gens qui
voudraient me dire, à la CSST, que c'est très simpliste,
l'explication.
Effectivement, dans un taux de base de 3 $, il y a des frais de
chargement. Si je paie dans l'industrie de la construction trois fois le taux
de base, je paie trois fois les frais de chargement. C'est grossi, mais c'est
cela. Cela donne à peu près cela. Si vous voulez plus de
détails, M. Girard peut vous en parler pendant une autre demi-heure.
M. Polak: Non. Je comprends la critique, mais disons que, si vous
aviez le droit de dire: On suggère une autre formule ou une approche
différente pour notre industrie de la construction, qu'est-ce que vous
suggéreriez? (15 h 45)
M. Dion: Encore là, c'est très complexe.
Évidemment, il y a d'autres façons de faire le calcul, il y a
d'autres façons de le faire que celle dont ils se servent, eux. Je vous
le dis comme ça; cela ne donne pas plus de détails. Au lieu de
nous servir du coût, nous nous servons de la masse salariale. Ceux qui
ont fait cette étude ont aussi fait des projections. C'est cela qui nous
a frustrés. Si vous me le permettez, M. le Président, je prendrai
peut-être une minute là-dessus.
Les gens que nous avons engagés pour cela sont des experts, des
connaisseurs, ils
ont, d'ailleurs, fait ce genre d'études pour d'autres provinces.
Ce n'est pas une cachette, ils sont connus des gens de la CSST, ceux qui ont
travaillé pour nous. On s'est assis avec les gens de la CSST et on leur
a dit: On a fait un projet et on voudrait faire une simulation pour la
construction. On espérait, à ce moment-là, pouvoir obtenir
de la CSST une espèce de coopération pour arriver à faire
quelque chose. Finalement, on n'est arrivé nulle part. Cela peut
n'être que des graines, mais, au moins, on aurait eu une certaine
satisfaction s'il y avait eu une simulation de notre projection ou de la
philosophie qu'on présentait. Ce n'était pas une affaire
inventée ou pigée en l'air; cela s'était vu ailleurs, cela
pouvait se faire ailleurs. C'était quelque chose qui était vendu
par des actuaires; ce n'étaient pas des inventions d'avocats, de
droitistes ou de gauchistes, si vous voulez. À toutes fins utiles, il
n'y a pas eu d'expérience de faite, ils n'ont pas voulu la faire. Je
pense qu'il aurait été honnête de la faire.
Par contre, il y a une conséquence à tout cela: si, demain
matin, moi, du secteur de la construction, je réussissais à
établir que mes taux sont trop élevés et qu'ils devraient
être réduits, il est évident qu'il faudrait que la charge
soit répartie ailleurs. Là, j'aurais peut-être un paquet de
monde, même du côté patronal, qui vont me dire:
Écoutez, vous autres de la construction, vous vous déchargez pour
nous charger. C'est sûr.
M. Dean nous a demandé comment on se sentait dans le Conseil du
patronat; je pourrais lui retourner la question et lui demander comment il se
sent dans la confédération. On se sent comme on se senti On n'est
pas toujours d'accord avec tout, mais on essaie de travailler quand même.
C'est un peu la même chose. On sait que, si on fait un ajustement, on va
peut-être gagner quelque chose, mais il se peut que cela touche les
autres, tout simplement.
M. Polak: D'accord, une dernière question, M. le
Président. À la page 25, vous avez un tableau. Je pense que le
député de Prévost y a référé un peu.
En conclusion, on peut voir qu'à Québec on paie le double du
niveau national; je viens de le calculer et c'est presque le double de
l'Ontario. C'est toujours difficile de comparer le Québec et l'Ontario,
mais est-ce qu'on peut dire qu'à Québec on donne le double en
bénéfices? Sans connaître exactement le système
ontarien, je voudrais savoir quels sont les bénéfices qui sont
payés là, le système qui existe là-bas du
côté prévention, inspection et tout le reste. Comment cela
peut-il se comparer avec le Québec? On paie le double. Je n'aurais
peut-être pas d'objection à payer le double si je recevais le
double des bénéfices, mais si les bénéfices sont
presque les mêmes, il y a peut-être un autre problème dans
la forteresse administrative. Pourriez-vous faire un commentaire
là-dessus?
M. Dion: Je ne voudrais pas aller dans les détails et
faire, point par point, la comparaison entre les régimes de l'Ontario et
du Québec. Je dois quand même vous dire que notre statistique a
été généreuse parce qu'en faisant la moyenne on a
additionné le Québec. Si on avait exclu le Québec,
l'écart aurait été plus grand. Effectivement, au
Québec, nous avons un système qui est très
généreux; l'Ontario, comparativement au Québec, a un
système aussi généreux. Les deux systèmes peuvent
avantageusement se comparer.
M. Polak: Merci.
Le Président (M. Blouin): Merci beaucoup. Merci, M. le
député de Sainte-Anne. Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Vous concluez votre
mémoire, en disant: "Le remède peut paraître d'importance,
mais il n'est qu'à la dimension du mal qu'il faut guérir." Cela
m'a fait penser un peu à un médecin qui, parce que son patient
était malade et qu'il ne réussissait pas à le soigner, se
décidait, en désespoir de cause, à le tuer. Cela, au sens
où vos recommandations ne portent pas sur des griefs fondés sur
le fonctionnement de la CSST, mais sur son existence elle-même.
Je voulais vous demander, M. Dion, si j'ai bien compris en
résumant comme ceci: Vous avez dit: On est prêt à
s'asseoir, mais j'ai cru comprendre que vous étiez prêt à
vous asseoir avec vos vis-à-vis syndicaux du milieu de la construction
après avoir établi vous-mêmes le niveau d'indemnisation et
votre niveau de cotisation. Vous avez fait allusion au fait que la construction
est un monde bien particulier, avec des règles du jeu bien
particulières, j'imagine.
Je voulais vous demander si vous ne pensiez pas que, tôt ou tard,
vous vous relèveriez pour vous traverser mutuellement parce qu'il y a
quelqu'un qui, tôt ou tard, va essayer d'augmenter le niveau
d'indemnisation et la conclusion est que, s'ils réussissent à
nous traverser, à ce moment, tant pis pour nous et tant mieux pour eux;
ou bien c'est le contraire et on va les traverser. Je me demandais si
c'était cela le monde particulier, si c'était cela les
règles particulières, si c'était cela les rapports de
force dans votre secteur.
Vous savez, on peut simplifier bien des choses en disant: D'un
côté, il y en a qui veulent des hausses d'indemnisation et, d'un
autre côté, il y en a qui veulent des baisses de cotisation. Cela
me semble un peu
simplifier les choses, évidemment, mais, dans la mesure, par
exemple, où vous nous dites: Nous aussi, nous voulons diminuer nos
cotisations en diminuant les accidents, c'est une manière d'y arriver.
Vous pouvez aussi demander à vos propres membres de choisir -parce qu'il
y aura un choix à faire, cela se pose toujours dans la vie réelle
en termes de choix - entre augmenter la productivité, le rendement ou la
cadence au risque même d'augmenter la fréquence des accidents.
Mais entre baisser la cotisation ou augmenter la productivité, vous
pouvez comprendre qu'on peut penser raisonnablement que les choix ne sont pas
dans l'absolu et qu'il y a, là aussi, des intérêts en
cause.
Pour ceux qui veulent hausser les indemnités ou, en fait,
même couvrir un champ plus vaste que ce qui est couvert en termes
d'indemnisation - c'est là qu'il y a, je pense, un préjugé
favorable - on peut penser qu'entre être indemnisé et ne pas
être blessé, ne pas être tué, la plupart choisiraient
de ne pas perdre un oeil, une jambe, un bras ou un genou. C'est là que
vient le préjugé favorable à ceux qui sont susceptibles
d'être victimes de ces accidents.
Le Président (M. Blouin): Mme la députée de
Maisonneuve, est-ce qu'il y avait des questions précises?
Mme Harel: Bien, vous allez voir, je pense que M. Dion va me
répondre.
M. Dion: On en a compris une couple.
Le Président (M. Blouin): Oui, je sais que M. Dion peut
nous répondre, mais ce n'est pas cela qui me préoccupe. Si vous
avez de brefs commentaires à l'exposé de Mme la
députée, d'accord.
M. Dion: Je pense que votre problème, c'est mes longueurs.
Ce n'est pas le fait que je ne répond pas. J'ai compris Mme Harel. Je
pense qu'on se comprend bien. Je vais essayer de répondre sans prendre
tous les points dans l'ordre. D'abord, je vous ferai un premier commentaire.
Quant à nous, il n'y a pas de contradiction entre productivité et
sécurité. Il n'y a aucune contradiction là. Je pense que
les deux vont exactement de pair. Nous travaillons afin de faire comprendre
à l'employeur qu'il va obtenir une plus grande productivité en
promouvant la sécurité. C'est un fait indéniable. Un petit
détail bien facile. Prenez deux chambres exactement pareilles, placez
des deux par quatre partout à terre dans une pièce et videz
complètement l'autre chambre. Faites-y travailler deux peintres de
même capacité. Vous allez vous apercevoir que celui qui n'a rien
qui l'embarrasse, s'il ne court aucun danger de s'accrocher les pieds dans
quelque chose, va finir sa chambre avant l'autre.
C'est clair et net parce qu'il va pouvoir travailler d'une façon
sécuritaire et produire davantage. Donc, si sa position est
sécuritaire, sa production sera nettement rentable pour l'employeur.
Donc, l'employeur est d'accord sur la santé et sur la
sécurité parce que cela accroît la productivité. Il
n'y a là aucun problème.
Vous dites - je ne les prends pas dans l'ordre - blessés et
indemnisés. C'est évident qu'on est pas nonos au point de penser
qu'un gars s'arrache un bras pour recourir à la CSST. C'est sûr et
certain. On conçoit bien cela. D'ailleurs, ce n'est pas de ces cas qu'on
parle; on parle peut-être des 37% de maux de dos. Vous savez, un doigt
arraché, c'est un doigt arraché. C'est malheureux, cela fait mal.
Une personne morte, c'est une personne morte; c'est malheureux et il n'y a pas
un employeur qui tue son monde seulement pour le plaisir de le tuer. Or
quelqu'un qui est réellement blessé, il est évident que
c'est un problème. Je pense que personne ne le fait exprès pour
se blesser. J'espère, du moins, que nous n'en sommes pas rendus
là dans la paresse afin de ne pas vouloir travailler. Cela n'existe pas.
Nous n'en connaissons pas et nous ne le prétendons pas.
On parle de ce qui n'est pas la vraie blessure, de la fausse blessure.
Ce sont les choses qui nous apparaissent comme un abus du système; un
système qui fait que, à toutes fins utiles, une personne
blessée, même réellement blessée, peut aussi
profiter du système. Au lieu de prendre quinze jours pour régler
le problème, elle peut, s'il y a avantage, rester sur le système
pendant deux mois. Ce sont les abus que peut donner le système.
Même dans le cas d'une réelle situation, il peut y avoir un abus
du système parce que le système est rentable.
M. Daoust vous disait ce matin: C'est favorable, au point de vue
des gains, de recevoir des prestations de la CSST. On a donné l'exemple
du bonhomme qui fait 900 heures par année. Mais si on vous donnait
l'exemple de quelqu'un qui n'en fait que 500, vous verriez qu'à toutes
fins utiles, avec le système, il peut peut-être aller se chercher
4000 $, 5000 $, 7000 $ ou 8000 $ par année. Il a - peut-être
été vraiment blessé, mais il peut tirer des
bénéfices du système.
Vous avez parlé de s'asseoir. Je pense que vous vouliez savoir,
au fond, si on veut réellement s'asseoir et travailler dans le
système, si on est réellement prêts à travailler
dans le système, à faire l'échange pour faire marcher le
système. Bien sûr qu'on est prêts à s'asseoir et
à essayer de faire marcher le système de la CSST. De toute
façon, je pense qu'on l'a démontré. Chez nous, on investit
de l'argent pour faire de la sécurité. Chez nous, on n'a jamais
dit à nos employeurs: II faut que vous soyez contre la CSST. Il faut que
vous fassiez ceci
et il faut que vous fassiez cela. Ce n'est pas ce qu'on a dit. On est
d'accord avec un système raisonnable. C'est ce qu'on a dit et on pense
qu'il y a des choses, actuellement, qui ne sont pas raisonnables.
Notre mémoire vous surprend. Je sais qu'il vous surprend, le
mémoire. L'industrie de la construction est peut-être celle qui va
le plus vous surprendre si vous regardez comme il faut les chiffres. C'est
évident. Regardez les autres industries. Si on avait un taux, je ne sais
pas, de 2,25 $ l'heure dans l'industrie de la construction, on ne japperait
pas. On ne crierait pas, on ne ferait pas, de scènes aussi fortes que
cela, on se dirait: Peut-être que le système ne va pas trop mal,
etc. Mais on n'est pas à des taux de 2,25 $ et, dans la construction, ce
ne sont pas des crayons qu'on manipule. On manipule des outils. Les gens se
parlent comme ils se parlent sur les chantiers de construction et ils se
"garrochent" des briques quand ils ont quelque chose à se "garrocher".
Ce ne sont pas des crayons qu'ils ont dans les mains. Quand ils
échappent quelque chose, c'est une brique qu'ils échappent. C'est
un outil qu'ils échappent. Ce n'est pas une gomme à effacer
qu'ils vont échapper. Les accidents dans la construction, c'est plus
dangereux. Je ne dis pas qu'il est naturel d'avoir des accidents dans la
construction. C'est dommageable. Ce n'est pas naturel, mais maudit, on est dans
une industrie qui est faite ainsi. Cela nous coûte cher et nous disons:
C'est peut-être normal qu'on soit là. On a demandé au
ministre d'être présent à la CSST. Il nous a dit qu'on
serait là. Je peux vous dire que déjà, si cela avait
été le cas avant la commission, notre conclusion aurait
été différente. On aurait dit: M. le ministre, on est
content d'aller s'asseoir là et on est prêt à faire l'essai
du système pendant un an, deux ans ou six mois et on va se battre
dedans. Peut-être qu'on aurait dit quelque chose de différent dans
notre conclusion.
Le Président (M. Blouin): D'accord. Cela va, M. Dion?
M. Dion: Ah! Arrêtez-moi.
Le Président (M. Blouin): Cela va, Mme la
députée de Maisonneuve?
M. Dion: Je n'ai pas tout couvert. Je sais qu'il y en avait une
autre.
Mme Harel: Cela fait plusieurs années que cela se
poursuit, finalement, cette discussion. On a, d'une certaine façon, un
certain malaise. On se dit devant cette commission depuis le début: S'il
y a bien des choses qui ont changé au Québec, on peut être
rassuré; il y a des choses qui ne le sont pas et c'est l'attitude des
uns et des autres. Mais en tout cas! Cela va, M. le Président.
Le Président (M. Blouin): Merci. M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. J'aurai un bref
commentaire, une question générale et quelques questions
précises en souhaitant qu'on puisse le faire dans les meilleurs
délais. Messieurs de l'AECQ, vous nous avez présenté votre
mémoire et on constate que vous n'y êtes pas allés avec le
dos de la cuillère. Vous y êtes allés avec la
cuillère, la cuillère à soupe, probablement, et la pelle.
C'est probablement ce pourquoi vous êtes le seul groupe à qui le
ministre n'a pas dit au début que vos remarques étaient
pertinentes. Je suis bien heureux de vous rencontrer aujourd'hui, parce qu'on
sait que le secteur de la construction est important au Québec. On sait
que vous avez fait l'objet de commentaires. Le secteur de la construction, en
général, a fait l'objet d'inquiétudes et de critiques en
regard des accidents de travail qui s'y produisent.
Il faut convenir qu'après quelques jours d'échange dans le
cadre du mandat de notre commission la loi 17 a créé une certaine
ambiguïté. Je m'explique et j'aimerais avoir vos
commentaires, M. Dion ou M. Daoust -ou vos autres représentants - sur le
sujet. L'objectif de la loi 17 était de procéder par
l'implantation de systèmes paritaires à différents niveaux
jusqu'au conseil d'administration pour tenter de dégager des moyens, des
systèmes ou des méthodes pour éliminer à la source
les risques d'accidents. Le conseil d'administration, vous y avez fait
allusion, on l'a entendu hier. Devons-nous conclure qu'il y a une certaine
ambiguïté à l'égard de l'appartenance ou du
rôle joué par chacune des personnes présentes à ce
conseil? Compte tenu que c'est assez surprenant de voir des travailleurs et des
travailleuses qui viennent ici nous faire part d'inquiétudes, de
récriminations et de demandes bien précises, c'est à se
demander si ces travailleurs et ces travailleuses ne se retrouvent pas dans les
gens qui sont supposés les représenter au conseil
d'administration. (16 heures)
On peut se poser la même question en voyant votre association, qui
est une association patronale du monde de la construction, apporter des
commentaires, des propositions, des commentaires très durs, très
sévères - je pourrai y revenir plus spécifiquement
tantôt - sur un organisme qui est administré par un conseil
d'administration paritaire où des partenaires du monde patronal
siègent. Abstraction faite du problème que vous avez vécu
avec le non-renouvellement du mandat de M. Murray, devons-nous comprendre de la
position que vous adoptez et aussi des situations qu'on a vécues assez
éloquemment hier entre deux personnes qui ont consacré leur vie
au monde
syndical que ce ne sont pas tous les groupes qui se retrouvent dans la
représentation existant au conseil d'administration?
M. Daoust: Vous faites référence à nos
partenaires patronaux au conseil d'administration, vous parlez certainement du
CPQ. On a aussi dit tantôt qu'on est membre du Conseil du patronat du
Québec; on n'est pas les seuls membres, c'est bien évident.
Toutes les industries sont membres à certains niveaux du Conseil du
patronat du Québec. On n'a sûrement pas tous les mêmes
objectifs ou les mêmes demandes. Ce n'est certainement pas une critique
que je fais ici du Conseil du patronat du Québec; c'est une position
logique. S'il représente plusieurs parties - on va simplement parler du
taux de cotisation - qu'il y a des parties qui payent peut-être 0,50% ou
0,75% et nous qui payons 0,25%, c'est difficile - je le comprends -pour le
Conseil du patronat de présenter une politique au conseil
d'administration qui favoriserait une redistribution des taux ou un nouveau
calcul. Pour nous faire plaisir, il pénaliserait la majorité des
autres membres. Comme je vous l'ai dit, ce n'est pas une critique contre le
CPQ, je le comprends et je ferais la même chose, c'est logique il
représente tout le monde. Mais, à ce moment-là, on ne
considère pas que c'est une représentation par un partenaire. On
est membre de cette association au même titre qu'un autre membre.
Le Président (M. Blouin): M. Dion.
M. Dion: II faut, quand même, reconnaître que sur les
points majeurs - on a soulevé certains points majeurs, par exemple,
l'association sectorielle, le comité de santé et de
sécurité; on a parlé généralement des
coûts de la CSST donc, des budgets - le Conseil du patronat - je ne veux
pas faire allusion et répéter les paroles de M. Dufour - s'est
effectivement prononcé à l'occasion et très
régulièrement contre les choses qui se faisaient au niveau de la
CSST. En tant que membre du conseil d'administration, la
délégation patronale, à notre connaissance, n'a pas
toujours tout adopté et accepté au conseil d'administration de la
CSST. Il y a plusieurs des points sur lesquels on n'est pas d'accord, par
exemple, notre association sectorielle. Je sais que la délégation
patronale a la même position que nous et elle nous a appuyés. Sur
la question du budget qui a été discutée hier, les 48 000
000 $, on est loin d'avoir des divergences de vues. Sur la question des
comités de santé et de sécurité, on est loin
d'avoir des divergences de vues, loin de là. Si vous me soulevez le
point de la tarification, il y a peut-être celui-là, mais cela ne
veut pas nécessairement dire qu'on est en conflit avec le Conseil du
patronat en ce qui a trait à la tarification. On a une vision
différente ou qui est peut-être la même que celle du Conseil
du patronat, mais on sait que cela aura des conséquences.
Le Président (M. Blouin): Merci. M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: J'ai des questions précises dont la
première s'adresse à M. Daoust. Vous avez formulé ce matin
- c'est, d'ailleurs, rédigé dans votre mémoire - des
accusations qui sont graves à l'endroit de la personne du
président-directeur général de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail. On sait qu'il a des
responsabilités importantes. On sait qu'il a un pouvoir certain, qui est
même visible. Je vais citer vos paroles parce que vous avez dit et je
l'ai bien noté: "M. Sauvé n'est pas apte à remplir les
fonctions qu'il occupe." Dans votre document à la page 31, vous dites:
"Le tout est dirigé par un homme qui n'a aucune gêne à
démontrer son attitude arrogante et antipatronale."
Le terme qui m'a surpris c'est "arrogant" parce qu'à moins que je
ne me trompe, lorsqu'on a à juger ou à apprécier si une
personne est arrogante, on s'appuie sur des attitudes; l'arrogance se manifeste
par des attitudes, lesquelles s'appuient sur des faits. Le but de la commission
n'est, évidemment, pas de faire le procès de quiconque. Il va de
soi qu'on ne peut demeurer indifférent à une expression d'opinion
par un groupe comme le vôtre qui porte autant à conséquence
pour une personne qui joue un rôle de premier plan, finalement, dans la
commission. Sur quoi, sur quels faits précis vous appuyez-vous pour en
arriver à porter un jugement aussi sévère à
l'égard du président?
Le Président (M. Blouin): M. Daoust.
M. Daoust: À maintes reprises, par différents
comités qui existent ou qu'on a tenté de former, on a
demandé certaines informations de différentes natures. Bien
souvent, on ne nous a même pas répondu ou bien on a refusé
de nous donner les informations en prétendant que ce n'était pas
notre droit, qu'on n'avait pas d'affaire à savoir cela. C'est nous qui
payons; j'appelle cela de l'arrogance. Quand je paie la note, j'ai le droit de
poser des questions; il me semble que c'est logique. Si vous allez au
restaurant, vous commandez un repas, cela vous coûte 10 $, quand le
garçon vous apporte votre repas, si vous n'êtes pas content, vous
posez des questions ou vous faites des remarques.
Le Président (M. Blouin): C'est principalement sur le
refus de vous fournir des informations.
M. Daoust: II y a parfois des refus catégoriques, parfois
des lenteurs lamentables dans les délais.
Le Président (M. Blouin): Cela va.
M. Pagé: Si je comprends bien, c'est à partir
d'expériences vécues, des contacts que votre association ou
vous-même avez avec le directeur que vous en venez à une telle
conclusion.
M. Daoust: De la correspondance, enfin, tout cela.
M. Pagé: D'accord.
M. Daoust: Vous me demandez des faits concrets, je ne peux pas
vous sortir une lettre de ma poche. Je ne suis pas venu ici pour faire le
procès de M. Sauvé non plus, mais on en vient à une
conclusion parce qu'on est exposés à certaines choses.
Le Président (M. Blouin): Cela va.
M. Pagé: À la page 20 de votre document, vous vous
référez au nombre d'heures travaillées, vous vous
référez au taux d'accidents, etc. On sait que ce soir et demain
soir, probablement jusqu'à minuit, M. Sauvé aura l'occasion de
répondre à nos questions, comme il a eu, d'ailleurs, l'occasion
de répondre à certaines questions, tant lors de l'étude
des crédits du ministère du Travail que lors d'une question avec
débat qu'on a soulevée ici à la fin du mois de mai
dernier. On se rappellera que le président-directeur
général nous avait indiqué que, à preuve que les
mandats exercés par la Commission de la santé et de la
sécurité du travail et que la réforme engendrée par
la loi 17 commençaient à porter fruit, il suffisait de regarder
une diminution du nombre d'accidentés dans le monde de la construction.
Cela a été un élément qu'il a apporté dans
un échange qu'on a eu ici déjà.
Pour ceux qui nous écoutent, pour ceux qui nous liront dans le
journal des Débats, pourriez-vous faire une rétrospective des
chiffres qui sont éloquents et qui peuvent expliquer largement la
diminution du nombre d'accidents dans le domaine de la construction? Cela est,
évidemment, relié à la diminution du nombre d'heures
effectivement travaillées au Québec. On se rappellera qu'il y a
quelques années seulement c'était 110 000 000 ou 112 000 000
d'heures, si ma mémoire est fidèle. Cela sera ou cela a
été 72 000 000 ou 75 000 000 l'année dernière et,
d'ailleurs, c'est probablement ce qui explique le règlement de placement
dans l'industrie de la construction adopté par le gouvernement, par un
arrêté en conseil, à la suite d'une proposition de l'OCQ,
en 1978. C'est probablement ce qui explique aussi des modifications
éventuelles qui seront apportées.
En fouillant dans le rapport annuel de l'OCQ, en communiquant avec vous
ou encore en communiquant avec les syndicats, on peut le savoir, mais je
voudrais que vous puissiez bien clairement le confirmer devant cette
commission-ci. Je vais, évidemment, par incidence, vous poser la
question: Est-ce que vous voyez une relation entre la diminution du nombre
d'accidents et la diminution du nombre d'heures effectivement
travaillées?
Le Président (M. Blouin): M. Dion.
M. Dion: Cela peut être compliqué comme
réponse. D'abord, je dois vous dire honnêtement - on l'a
mentionné dans notre mémoire - qu'il est sûr et certain
qu'on travaille avec les chiffres et les données qu'on peut obtenir ou
qu'on a.
Effectivement, on peut être restreint dans nos moyens, c'est
sûr. Nous prétendons que, possiblement, la CSST n'est pas
étrangère à ce que l'industrie de la construction, comme
toutes les autres industries à l'heure actuelle, connaisse une
diminution de la fréquence des accidents et des taux d'accidents, ce qui
est fort possible. Mais je dois vous dire que nous avons constaté - et
on est sûr de notre affaire de ce côté - que, depuis que
l'AECQ a investi des sommes d'argent, qu'elle a mis en place un personnel en
matière de santé et de sécurité, qu'elle a
dispensé aux employeurs des cours, depuis que, dans une certaine mesure,
des cours ont pu être donnés à des travailleurs de la
construction - ce n'était pas nécessairement avec la CSST - il y
a nettement une différence dans l'industrie de la construction. Il y a
une différence vers le mieux dans l'industrie de la construction. Je ne
suis pas assez nigaud pour dire que la CSST y est étrangère.
C'est sûr et certain qu'il y a une amélioration dans l'industrie
de la construction.
Par contre, je dois vous dire qu'il y a une diminution des heures dans
l'industrie de la construction. C'est vrai, on travaille à peu
près à un rythme de 50% des heures actuellement. Peut-être
en allant un peu plus loin, en travaillant les événements, si la
relance dans l'habitation actuellement fait qu'il y a 38 000
unités qui ont été bâties et que cela est
censé rapporter environ 800 000 ou 900 000 heures par unité, on
peut presque prétendre qu'un bon pourcentage des heures de l'industrie
de la construction viennent de l'industrie de l'habitation. Est-ce que je suis
nigaud en disant qu'un chantier d'habitation c'est moins dangereux qu'un
viaduc, qu'un pont, qu'un tunnel, qu'un métro etc? C'est
peut-être vrai, c'est peut-être possible. Autrement dit, c'est
peut-être que l'activité de l'industrie, actuellement, est
moins
grande. C'est peut-être dû au fait que l'activité est
différente dans l'industrie de la construction qu'il y a une certaine
différence à la baisse des accidents dans cette industrie. C'est
possible. Dieu sait que depuis au moins cinq ans que nous nous activons en
matière de santé et de sécurité, que nous donnons
des cours à nos employeurs, que nous envoyons des bulletins, que nous
donnons de la formation, que nous avons des conseillers sur le chantier et que
nous aidons nos employeurs à faire leur travail en santé et
sécurité, nous aimons croire, à l'heure actuelle, qu'il y
a des résultantes de cela, et nous sommes convaincus qu'il y en a. Nous
avons des échos de nos membres dans des assemblées à
savoir que cela a donné des résultats. Cela est positif de ce
côté.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Dion.
M. le député de Portneuf.
M. Pagé: Toujours à cet égard, vous avez
référé à quelques reprises aux services
d'inspection. Pour nous ici qui ne sommes pas sur le terrain, comme pour les
gens de la commission qui ne sont pas sur le terrain, eux non plus, bien
souvent c'est bien beau sur papier; les modèles sont parfaits quand on
les voit sur papier. Mais, dans les faits, les services d'inspection de la
Commission de la santé et de la sécurité du travail sont
le résultat de l'intégration de quatre services d'inspection au
lendemain de la loi 17. Vous avez référé aux services
d'inspection qui vous sont propres dans votre milieu. D'autres groupes, dont la
FATA, si ma mémoire est fidèle, ont référé
aux services d'inspection dans la construction. C'est quoi, le problème
des services d'inspection de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail spécifiques au monde de la
construction, premièrement? Un deuxième volet: est-ce que vous
étiez mieux servis lorsque les services d'inspection relevaient de
l'Office de la construction du Québec? Un troisième volet:
qu'est-ce que vous répondez à l'argument voulant que les
inspecteurs soient aujourd'hui moins formés ou moins au courant de ce
qu'est la construction qu'ils ne l'étaient avant?
Le Président (M. Blouin): Cela va. M. Dion ou M. Daoust.
L'un des deux ou les deux à la fois.
M. Daoust: Non, pas en même temps. Quels sont les
problèmes? Vous demandez aussi dans la troisième
étape...
M. Pagé: D'un aspect particulier, l'OCQ.
M. Daoust: ...si les inspecteurs sont qualifiés. Vous
savez, quand on ne participe pas à la composition d'un programme et
qu'il n'y a pas de consultations sur ce programme, sur la rédaction de
ce programme ou ces choses, c'est très difficile d'arriver avec un
programme logique. Je vais vous donner un exemple d'inspection très
ridicule qui m'est arrivé il y a deux semaines. Un inspecteur vient sur
mon chantier de construction, va dans la roulotte. La porte est ouverte, la
fenêtre est ouverte, la fournaise est fermée. Mes hommes sont
là en train de prendre le café, à 10 heures. Il me donne
une infraction parce qu'il ne fait pas 21° Celsius dans la roulotte. C'est
contre la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Ce
sont mes hommes qui ouvrent la porte et qui éteignent la fournaise. Le
gaz est là, le réservoir est plein. (16 h 15)
En faisant ce règlement, on a pensé peut-être
à un électricien assis à l'intérieur, qui travaille
au chaud et qui, lorsqu'il dîne, doit être au chaud. Le monteur
d'acier qui travaille dehors avec une chenille, qui a trois chemises et toute
la patente, une motoneige, lorsqu'il prend son café à 10 heures,
ne va pas se déshabiller tout nu pour être confortable. S'il a
trop chaud, ses lèvres deviennent toutes gercées. Il pose donc
des gestes qui le rendent confortable. C'est le travailleur. Je lui donne tout
ce qu'il veut en fait de chaleur et il fait ce qu'il veut avec cela. C'est lui
qui décide de la chaleur. L'inpecteur passe. Je trouve que cela n'a
aucune logique. Peut-être que si on participait à la
préparation des programmes, des normes, ces choses n'arriveraient pas.
Ce sont des irritants. Je suis obligé de téléphoner,
d'appeler quelqu'un au bureau d'inspection et de lui dire: Cela n'a pas de
sens, ce que tu viens de faire, jusqu'au moment où je peux trouver
quelqu'un d'assez logique pour me dire: C'est vrai, cela n'a pas de sens.
Le Président (M. Blouin): Oui, cela va.
M. Daoust: Vous avez demandé si on était mieux
servi avec l'OCQ. C'est avant mon temps. Je vais laisser parler M. Dion.
Le Président (M. Blouin): M. Dion.
M. Dion: Effectivement, je dois vous dire qu'on peut remarquer
qu'il y a deux problèmes concernant l'inspection. Je fais des
suppositions, je ne veux pas porter d'accusations. Si la personne est
compétente, cela dépend comment elle applique sa
compétence, comment elle exerce son jugement. Effectivement,
là-dessus, on vous a cité le cas du bonhomme qui arrive sur un
chantier, qui est probablement un bonhomme compétent. Il connaît
un chantier de construction. Il sait ce que c'est, un échafaudage. Il
regarde cela. Il décide à
l'oeil, parce qu'il connaît son code. Il sait qu'à 18
mètres il doit y avoir un dépôt de plan pour
l'échafaudage, mais il décide à l'oeil qu'il a 18
mètres. Là, il arrête le chantier. Cela peut être un
bonhomme compétent qui sait ce qu'est l'industrie de la construction,
mais qui applique mal ces choses, qui abuse dans leur application. Dieu sait
qu'à un moment donné, quand ils commencent à travailler
dans un service comme cela, il y a des gens qui aiment se faire valoir et
montrer qu'ils en savent, qu'ils y vont, qu'ils sont bons, envoie donc, ils
sont compétents dans "la job" qu'ils font.
On a entendu des murmures à l'occasion. Des gens ont dit: Ils
sont venus dire que nous étions tous des fous. Ce n'est pas vrai, on
n'est pas venu dire ici que les gens de la CSST étaient tous des fous,
loin de là. Il y a une note dans notre document, et c'est très
clair, Dieu sait qu'il y a des gens qui peuvent être compétents
à la CSST. On ne les nomme pas. À toutes fins utiles, je pense
qu'on n'est pas ici pour donner des noms.
Il y a l'autre problème du bonhomme qui n'est réellement
pas compétent. M. Pagé a noté avec justesse qu'il y avait
un amalgame de quatre services d'inspection à un moment donné.
Cela a amené des inspecteurs d'autres champs d'activité que ceux
de la construction. Très vulgairement, vous allez dire: II pousse
à l'extrême. Cela n'a pas d'allure, M. Dion est malade. Il aurait
pu y avoir un inspecteur en boucherie qui serait arrivé sur un chantier.
Vous allez me dire: Cela ne se peut pas. D'accord, cela ne se peut pas, mais
cela aurait pu arriver.
Je dois vous dire que vous avez le droit, vous en avez la
possibilité, de vous informer de ce qui est arrivé des deux morts
sur le chantier d'Habitat. J'espère qu'il n'y a pas de danger à
parler de cela. Je ne veux pas me retrouver avec une poursuite ici. Sur le
chantier d'Habitat, il y a eu deux morts. Un inspecteur de la CSST y
était passé environ deux heures avant, mais il n'avait rien vu,
absolument rien. Les travaux étaient en cours, pas depuis une
demi-heure, ils étaient en cours depuis un bon bout de temps. Je ne veux
pas accuser le bonhomme, je ne veux rien dire contre le bonhomme, en tout cas,
je veux mettre toute la protection de mon côté à l'heure
actuelle, mais, selon ses compétences, il ne pouvait pas le voir, parce
que je pense que c'était un bonhomme qui n'était pas de
l'industrie de la construction et c'était peut-être difficile pour
lui de s'apervoir si la méthode qui était utilisée
était correcte ou non. Je ne le sais pas, je ne porte pas de jugement,
mais il n'a rien vu et l'accident est arrivé deux heures après.
Dans le fond, c'est cela que nos employeurs ont eu à subir à un
moment donné. On s'est souvent retrouvé dans les systèmes
d'inspection - s'il y a eu des modifications, ce n'est toujours pas parce qu'on
avait complètement tort et qu'on avait imaginé des choses - avec
des employeurs qui appelaient nos conseillers et qui disaient: Cela n'a pas
d'allure, le gars ne connaît même pas la construction et il vient
nous dire des affaires.
Le Président (M. Blouin): M. Dion, je pense qu'on comprend
bien le message que vous voulez nous livrer.
M. Dion: Vous avez de la misère avec moi.
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Très brièvement...
M. Dion: Je ne suis pas capable!
M. Pagé: Je vais essayer, M. Dion. Ici, on peut recevoir
un commentaire qui nous est fait par les gens du milieu qui disent: II y a de
bons services d'inspection. D'autres vont soutenir que les gens qui font les
services d'inspection ne font pas leur job, ne sont pas compétents. Vous
feriez peut-être un bon diplomate. Vous avez dit: Ils sont bons. Il y en
a de bons, mais il y en a d'autres qui sont moins bons. Vous avez fait
référence aux normes et à leur interprétation,
à la façon dont les normes sont interprétées. Vous
êtes sur le terrain. Êtes-vous plus satisfait des services
d'inspection actuellement que dans le temps de l'OCQ? C'est cela, ma
question.
M. Dion: Disons que cela s'améliore, honnêtement;
autrement, ce serait mentir. Je serais un bon diplomate et probablement aussi
un bon politicien. À toutes fins utiles, je pense que cela
s'améliore; honnêtement, avec le temps, c'est normal que les
choses s'améliorent. Je dois revenir et vous donner un exemple. Quant le
gars arrive et dit: Pour faire ta coulée de ciment, cela te prend des
bottes de construction, alors que des bottes de caoutchouc avec des caps
d'acier vont bien, c'est parce qu'il y a quelque chose que le gars ne
connaît pas et cela a coûté de l'argent à l'employeur
d'arrêter une coulée de béton. Ces "bebelles"-là, je
pense qu'elles disparaissent de plus en plus. En tout cas, il y a au moins des
gens, à un certain niveau, un petit peu plus haut, qui sont capables de
les arrêter. Maintenant, tranquillement, ces choses cessent. Cela
s'améliore.
M. Pagé: Si je comprends bien, vous aviez un bon service
à l'OCQ; vous aviez des inquiétudes à l'égard du
service de la Commission de la santé et de la sécurité du
travail au début, mais cela s'améliore. C'est
cela?
M. Dion: On va se donner cinquante, cinquante en bons
diplomates.
M. Pagé: Ça marche.
M. Dion: Les services qu'on avait à l'OCQ étaient
faits, quand même, par des gens de la construction. Si c'est une
conclusion pour vous, c'en est une.
Le Président (M. Blouin): Cela va.
M. Pagé: Une dernière petite question sur le
service d'inspection. À la page 38, vous vous inquiétez que le
vice-président à l'inspection ait été
écarté du conseil d'administration au profit du
vice-président à la prévention. Il y a eu une
intégration d'inspection et prévention.
M. Dion: On ne s'inquiète pas du départ de la
personne. On s'inquiète du geste, de l'ensemble.
M. Pagé: D'accord. Voulez-vous dire par là que
cette intégration des deux aspects combien importants de l'action de la
commission a donné lieu depuis à un effort plus accentué
sur la définition de moyens, de documents, de réglementation en
regard de la prévention, au détriment de l'inspection?
M. Dion: Je ne veux pas répondre pour eux, mais
peut-être qu'ils pourront vous dire oui. Quant à nous...
M. Pagé: Mais j'aime bien avoir les deux
côtés.
M. Dion: ...je dois vous dire que les vannes se sont
fermées; l'information est moins... En tout cas, on a plus de
difficulté. Encore là, ma réponse est mitigée,
parce qu'il y a des gens de ce service de qui, je pense, on a une excellente
collaboration et il y a des gens de qui on n'a pas de collaboration. Ce que
l'on vous dit, c'est qu'on commençait à polir l'autre
système quand il a sauté. On recommence à zéro avec
un nouveau système auquel on a de la difficulté à avoir
accès. Aujourd'hui, on n'a plus la possibilité d'avoir certaines
informations qui nous permettaient d'améliorer le secteur de la
construction, d'améliorer auprès de nos employeurs la
prévention des accidents. On déplore cela. C'est une goutte dans
le verre parmi tant d'autres, mais c'en est une.
Le Président (M. Blouin): Cela va.
M. Pagé: Mais les vannes se sont fermées, selon ce
que vous dites.
M. Dion: Oui, en partie.
M. Pagé: Oui, d'accord. Une dernière question, M.
le Président. Je n'ai pas abusé, j'ai pris 17 minutes
jusqu'à maintenant. À la page 46, vous faites une affirmation
qui, elle aussi, est grave, parce que, si elle est fondée, cela
indiquerait que la Commission de la santé et de la
sécurité du travail n'a pas de contrôle sur les sommes, les
subventions qui sont versées. Vous dites: "La distribution de
subventions aux syndicats pour des cours qui n'existent pas". C'est grave.
C'est quoi?
M. Dion: Des subventions aux syndicats pour des cours qui
n'existent pas. Vous aurez le loisir de leur poser des questions, à
savoir s'ils ont donné des subventions et à quoi elles ont servi.
Nous, on prétend qu'elles n'ont pas servi à donner des cours ou,
du moins, pas totalement servi à donner des cours.
M. Pagé: Oui, mais j'aimerais que vous précisiez un
peu, parce que, si on pose la question à l'honorable juge et qu'il dit
que les subventions ont servi, on ne sera pas plus avancés.
M. Regnier (Alfred): M. le Président, lorsqu'on affirme
que des cours sont inexistants, on pourrait difficilement en faire la preuve,
parce que nous n'avons pas un contrôle absolu sur les finances des
syndicats. Mais il reste qu'ils reçoivent des subventions et que nous
n'avons jamais été informés quant à la distribution
de l'argent, nous n'avons jamais été informés sur
l'utilisation que les syndicats en font. Toutefois, nous sommes conscients
d'une chose: c'est que certains syndicats ont tenté de mettre sur pied
des programmes, des cours de sécurité. Effectivement, il s'en
donne au Conseil des métiers de la construction, il s'en donne à
la FTQ, il s'en donne à la CSN certainement, mais on a lieu de croire
que ce sont très souvent des cours bidon.
Le Président (M. Blouin): Des cours?
M. Regnier: Des cours bidon. Des cours qui ne riment à
rien. En ce moment, il y a un cours de délégué syndical
à la prévention. Certains locaux peuvent tordre le bras de leurs
membres pour essayer de constituer un groupe de 20 ou 25 personnes et terminent
avec seulement une personne ou deux. Si on nous dit que les syndicats
dispensent de la formation et vont chercher des subventions à la CSST,
on voudrait être certain que ces sommes d'argent servent effectivement
à donner des cours, mais des cours complets, comme il s'en donne dans
les centres de formation professionnelle, comme il s'en
donnera éventuellement dans les commissions scolaires sous
l'égide du ministère de l'Éducation et de la CSST. On
comprend mal qu'il y ait tout un réseau de formation qui existe et qu'on
ne s'en serve pas, alors qu'on a un réseau parallèle où la
CSST n'a aucun contrôle. Il y a des cours de 24 heures qui se donnent sur
8 heures. Il y a aussi des cours qui ont une certaine relation avec la
sécurité, mais, comme je vous le dis, cela ne peut pas être
un cours qui puisse aller dans le sens de faire de la sécurité
sur les chantiers, si ce n'est pour former des délégués
pour des futurs règlements qui s'en viennent.
Le Président (M. Blouin): Cela va. Merci, M. Regnier.
M. Pagé: M. le Président, c'était ma
dernière question. Je voudrais faire un commentaire à M. Dion. On
a constaté que, même si cette commission a le mandat
d'étudier l'administration de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, plusieurs des intervenants en ont
profité -c'est légitime et on est d'accord avec cela -pour nous
présenter des demandes bien précises, bien particulières,
auxquelles ils tenaient. Je retiens la question du retrait préventif qui
a fait l'objet de plusieurs représentations et demandes ici. Je retiens
aussi que vous aviez une demande particulière à formuler avec
beaucoup d'insistance et même avec beaucoup de chaleur, c'était la
possibilité qu'un de vos délégués puisse
siéger au conseil d'administration. Bonne chancel J'espère que le
ministre pourra vous donner une réponse favorable dans des délais
qu'on espère les meilleurs.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. le
député de Portneuf. M. le député de Viau, vous
aviez une question supplémentaire.
M. Cusano: Oui. Vous avez dit que le nombre d'accidents a
diminué. Il y a une question que je me pose. Je ne sais pas si vous avez
des statistiques ou même s'il est possible d'avoir certaines
statistiques. Si l'on pouvait faire un graphique des accidents, est-ce qu'on
pourrait faire la distinction entre les accidents graves et les accidents
mineurs? Par le graphique de ces chiffres, est-ce que les deux lignes en
question, c'est-à-dire celle qui représenterait les accidents
graves et celle qui représenterait les accidents mineurs, seraient
parallèles ou si vous n'êtes pas capables de nous le dire?
Le Président (M. Blouin): Cela va? M. Girard.
M. Cusano: En d'autres mots...
Le Président (M. Blouin): C'est cela.
M. Cusano: ...est-ce que les accidents graves ont diminué?
La gravité des accidents a-t-elle diminué et les accidents moins
graves ont-ils diminué proportionnellement, de la même
façon?
Le Président (M. Blouin): M. Girard.
M. Girard: II y a environ deux ans, on a fait une étude
à l'association des entrepreneurs pour essayer d'étudier
justement ce problème. On s'est rendu compte que - évidemment, je
vous cite des chiffres de mémoire, car on partait de l'étude de
1971 et je pense qu'on avait des estimations pour l'année 1982 à
ce moment-là - avant 1976, c'est-à-dire avant qu'on introduise la
notion des cinq premiers jours payables directement par l'employeur, il y avait
un ratio de l'ordre de 45% pour les accidents de moins de cinq jours - donc,
des accidents mineurs - et de 55% pour des accidents de plus de cinq jours. Ils
peuvent être également mineurs, mais la période
d'indemnité est prolongée.
Or, avec l'avènement de la notion des fameux cinq jours dont on a
parlé en 1976, cela a pris un an, je pense, et le ratio est devenu
exactement l'inverse, c'est-à-dire qu'il y a eu 55% des accidents qui
étaient de moins de cinq jours et 45% qui étaient de plus de cinq
jours.
Le Président (M. Blouin): Cela va. (16 h 30)
M. Daoust: Dans la même optique, il serait peut-être
bon de noter que le pourcentage d'accidents mineurs, si on veut, pourrait
certainement être réduit en statistique si on pense que le taux de
rejet des réclamations au Québec est de 0,6% alors qu'en Ontario
il est de 6,4%. Je tiens pour acquis que, dans les réclamations de 6,4%
rejetées en Ontario, ce sont principalement des accidents mineurs,
j'imagine. Je fais un raisonnement et je me dis: S'ils les ont rejetées,
ce ne sont probablement pas des accidents majeurs; c'était douteux si
c'était un accident ou non, une maladie. Mais quand je fais la
comparaison, 6,4% contre 0,6%, je me pose de drôles de questions.
Le Président (M. Blouin): Cela va? M. le ministre, une
dernière question.
M. Fréchette: Oui, M. le Président, une
dernière question. C'est plutôt dans le but de préciser une
réponse qui a déjà été donnée
à une question. Le député de Portneuf et moi, on n'est pas
souvent d'accord. Il y a des choses sur lesquelles on s'entend, et c'est la
question qu'il vous a posée et sur laquelle il a insisté, me
semble-t-il, avec beaucoup de
pertinence. C'est une question importante. Vous faites une affirmation
qui est sérieuse et, à la question qu'il vous a posée,
j'ai entendu des explications. Vous comprenez que je fais allusion à
l'affirmation que vous faites en vertu de laquelle des subventions seraient
accordées sans que, par ailleurs, des cours soient donnés. C'est
sérieux comme affirmation et cela peut même, si on prend les
choses au pied de la lettre, prendre l'allure d'une accusation formelle. Par
ailleurs, en réponse à la question qui était posée,
on a expliqué que les cours qui se donnaient n'en étaient pas
vraiment. Ce n'est pas le genre de cours qui doivent être donnés.
Ma question très précise est la suivante: Affirmez-vous
qu'effectivement il se donne des sommes d'argent sans que des cours soient
donnés ou, alors, les sommes d'argent qui sont données ne servent
pas aux fins auxquelles vous souhaiteriez qu'elles servent? Il y a toute la
différence du monde entre les deux affirmations.
M. Dion: Je pense que vous allez comprendre, M. le ministre. Je
suis avocat comme vous et, pour être prudent et pour ne pas me retrouver
en situation difficile comme organisation, disons que notre
interprétation est que les sommes d'argent ne servent pas juste... C'est
tout simplement pour être très prudent à l'heure actuelle.
Cependant, il y a une chose que je suis prêt à regarder, c'est
qu'on va vérifier notre affirmation et, si elle devait être plus
que celle que je viens de limiter là, on vous en informera.
Le Président (M. Blouin): Au nom des membres de la
commission, je remercie donc les représentants de l'Association des
entrepreneurs en construction du Québec d'avoir bien voulu nous livrer
leur intervention et aussi de s'être prêtés de bonne
grâce aux échanges avec les membres de cette commission. Merci
beaucoup.
Sur ce, j'invite maintenant les représentants de l'Association
des mines de métaux du Québec Inc., à bien vouloir venir
prendre place à la table des invités.
M. Dion: On n'a pas eu l'occasion de vous remercier de votre
patience. Surtout à mon égard, vous avez été
très patients.
Une voix: On accuse le mouvement syndical au niveau des
subventions...
Le Président (M. Blouin): Non, non, monsieur, je m'excuse,
mais ce n'est pas le moment de rétorquer. Nous ne sommes pas dans un
débat ici. Nous rencontrons des organismes qui nous livrent leur opinion
et ce sont les membres de la commission qui jugent du contenu des opinions qui
nous sont livrées.
L'Association des mines de métaux du Québec Inc., s'il
vous plaît. Aux fins du journal des Débats, si vous voulez bien
vous identifier, s'il vous plaît, et ensuite nous livrer le contenu de
votre mémoire.
Association des mines de métaux du
Québec Inc.
M. Langlois (Gonzague): M. le Président, MM. les membres
de la commission, mon nom est Gonzague Langlois. Je suis le directeur
général de l'Association des mines de métaux du
Québec. J'ai, à mon extrême gauche, Claude Drouin, qui est
notre directeur technique; M. Camil Marcoux, qui est vice-président de
Noranda; M. Michel Lefebvre, qui est directeur général des mines
Gaspé et en même temps président de l'association; à
ma droite, M. Daniel Goffaux qui est assistant directeur des mines Northgate
Patino à Chibougamau et M. Michel Rodrigue, qui est
vice-président de l'association et directeur des mines Niobec à
Chicoutimi.
La Commission de la santé et de la sécurité du
travail, établie en vertu de la Loi sur la santé et la
sécurité du travail, existe maintenant depuis trois ans.
Étant donné le caractère novateur et souvent
expérimental des mesures de la loi 17, nous considérons que le
gouvernement a été sage d'accepter de convoquer cette commission
parlementaire pour évaluer l'administration et le fonctionnement de
l'organisme chargé de l'application de cette loi, soit la CSST.
Même si l'organisme en est encore à ses débuts, il
occupe déjà et occupera de plus en plus une place
considérable dans les entreprises. Aussi, nous aurions aimé
bénéficier de beaucoup plus de temps pour préparer un
mémoire plus étoffé que celui-ci. Malheureusement, lors de
l'annonce de la commission parlementaire, le 17 novembre dernier, tous les
groupes patronaux ont cru, d'après les déclarations faites,
qu'ils étaient tout simplement exclus de la discussion. Ce n'est
qu'après quinze jours et à la suite de pressions que nous avons
obtenu la permission de nous faire entendre et c'est, selon nous, la seule et
unique raison qui explique la présence d'un nombre aussi restreint de
groupes patronaux à cette commission. Pourtant, à titre de
payeurs, les groupes patronaux auraient dû être les premiers
invités à se présenter. Nous avons donc l'impression,
ainsi que l'AECQ qui vient de faire la présentation de son
mémoire, que sans l'avoir voulu nous sommes en train d'assumer le
rôle de porte-parole de la partie patronale. J'ai très bien
compris, M. le ministre, vos explications de tout à l'heure et je pense
que vous n'aurez pas besoin de revenir là-dessus, mais on tenait
à souligner tout simplement que, selon nous, nous n'étions pas
invités au début, jusqu'à ce
que la situation se clarifie.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, il est bon, nous croyons, de se
rappeler quels étaient les objectifs poursuivis par le
législateur lors de l'approbation de la loi et de l'établissement
de l'organisme qui devait l'administrer. Dans la préface du livre blanc
sur la santé et la sécurité du travail publié en
octobre 1978, l'honorable Pierre Marois, qui devait par la suite parrainer la
loi, affirmait ce qui suit: "La définition de ce nouveau régime
est fondée sur la conviction que seule une participation active et
volontaire du milieu de travail lui-même va permettre de faire face aux
problèmes sérieusement. Aucun pouvoir constitutionnel ne peut
suppléer à la connaissance du milieu et de ses
caractéristiques que peuvent développer les hommes et les femmes
qui y travaillent et y vivent." Jusqu'ici, nous sommes absolument d'accord.
M. Marois continuait: "L'État ne voit pas pour autant ses
responsabilités et ses tâches diminuer. Son intervention sera
cependant orientée dans un sens bien particulier. Plutôt que de
prétendre régler les problèmes à la place des
citoyens impliqués, il s'emploiera à mettre à la
disposition de ces derniers les outils et les moyens leur permettant de trouver
eux-mêmes les solutions. Il faudra, bien sûr, fixer et ajuster au
besoin les règles du jeu, assurer la reconnaissance des droits et des
devoirs de chacun et établir des normes. Il faudra aussi quelquefois
animer le jeu, mettre de l'huile dans le système, stimuler la prise en
charge. Mais, à cette fin, il n'est aucunement besoin de faire surgir
quelque supermachine bureaucratique investie du pouvoir tout-puissant de
décider à la place des gens."
Voyons maintenant, après ces paroles rassurantes, de quelle
façon on a ajusté le système, on a mis de l'huile dans le
système plutôt, et de quelle sorte de modeste machine
bureaucratique on a accouché. Six mois à peine après la
publication du livre blanc, on présentait, en première lecture,
le projet de loi 17 qui contenait 335 articles. Nous n'avons pas à vous
redire en détail ce que contient la loi. Permettez-nous cependant de
mentionner que l'article 223 permet à la commission qui administre la
loi de faire des règlements dans 41 champs d'activité industriels
et, en plus, dans un 42e qui lui permet de "prescrire toute autre mesure utile
à la mise en application de la présente loi."
Il est important d'ajouter ici que, malgré les très
nombreuses représentations des employeurs au moment du
dépôt de la loi, le gouvernement n'a pas daigné retenir une
seule recommandation de la partie patronale, si ce n'est peut-être le
retrait préventif qu'il a appliqué pour la travailleuse enceinte
en rendant l'employeur financièrement responsable d'une situation qui ne
relève en rien - nous l'espérons - de sa responsabilité.
En 1984, cette mesure sociale coûtera au-delà de 16 000 000 $ aux
employeurs.
Cette loi met l'accent sur le paritarisme obligatoire. Nous avons
toujours dit que la participation des travailleurs et des syndicats, pour
être efficace, doit être volontaire. D'ailleurs, l'ex-ministre de
la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, M. Marois, l'a
lui-même reconnu dans la préface du livre blanc: "II est vrai,
comme on se plaît à le répéter dans divers milieux,
que la santé et la sécurité, pour l'essentiel, ne se
négocient pas." À constater la difficulté qu'a la CSST de
mettre en place les organismes paritaires, on s'aperçoit que forcer le
paritarisme relève beaucoup plus d'une vue de l'esprit que d'un sain
réalisme.
Jusqu'à l'annonce de la loi 17, des organismes volontaires ont
fonctionné et accompli des choses intéressantes dans le secteur
minier. Chose étrange, cependant, cette loi, qui se voulait le promoteur
de la prise en prise en charge par les parties, a stoppé ces initiatives
paritaires, lesquelles ont beaucoup de mal à redémarrer dans le
nouveau contexte. J'aimerais ajouter ici et citer M. Laberge qui a dit, hier,
que, pour faire de la prévention comme pour faire du paritarisme, il
faut changer les mentalités. Or, on change difficilement les
mentalités avec des lois et des règlements et il faut un certain
temps pour le faire.
La loi 17 entend nationaliser la médecine industrielle en la
confiant entièrement aux départements de santé
communautaire, lesquels ne sont certainement pas équipés pour
remplacer les services dont le secteur minier s'est doté au cours des
années. Pour notre secteur, cette disposition de la loi ne peut que
diminuer considérablement la qualité des services à la
disposition des travailleurs. C'est pour cela, d'ailleurs, que la
totalité des entreprises minières n'ont pas fait
reconnaître leurs services médicaux par les DSC. Ces entreprises
essaieront donc de continuer à fournir leurs propres services de
santé industrielle aux travailleurs, tout en étant conscientes
qu'elles seront dorénavant soumises à des tracasseries
très embarrasantes au nom, par exemple, de la confidentialité des
dossiers médicaux et qu'elles devront assumer les coûts
additionnels des services confiés aux DSC.
Pour administrer la loi 17, le gouvernement a créé la
Commission de la santé et de la sécurité du travail,
immense superstructure avec ses 2600 employés - on l'a
répété à plusieurs reprises aujourd'hui
-répartis dans onze régions pour administrer les services de
réparation des accidents et des maladies industrielles et dont une
partie importante des effectifs intervient
directement dans l'administration des entreprises par ses services de
prévention et d'inspection, cette même supermachine bureaucratique
que se défendait d'instituer l'ex-ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, M. Marois, dans la préface de son
livre blanc.
Ce livre blanc mentionnait, d'ailleurs, que le budget annuel
dévolu aux services de formation, d'information et de recherche,
c'est-à-dire de prévention, devrait être, tout au plus, de
16 000 000 $. En dollars de 1983, cela équivaudrait à environ 27
000 000 $. Or, dans les dernières propositions budgétaires, la
CSST alloue à l'article des programmes de prévention et de
recherche environ 80 000 000 $ et ceci, à une époque où il
n'y a que dix catégories d'entreprises couvertes par la loi et que
l'application de la loi n'en est, en fait, qu'à ses débuts. Vers
quels coûts se dirige-t-on et, surtout, quels succès peut-on en
attendre?
Le secteur minier a, depuis 1948, établi sur des bases solides
son propre système de prévention, lequel a été
rodé et amélioré au cours des 35 années
subséquentes. Ce système tient compte de trois principes
fondamentaux en prévention d'accidents, soit la responsabilisation de
tous les intervenants, le contrôle à la source et la supervision
des méthodes de travail. (16 h 45)
La CSST met de l'avant, comme base de prévention, le
contrôle à la source et les activités paritaires. Nous
aussi nous croyons que les activités paritaires sont nécessaires,
pour autant qu'elles soient volontaires.
Convaincus de la supériorité de leurs méthodes et
tout en respectant la loi, les employeurs miniers ont cru nécessaire de
conserver leur propre approche en sécurité, malgré les
difficultés et le travail additionnel que leur causent les interventions
de la CSST. Nous y sommes, d'ailleurs, habitués puisque, depuis 1975,
nous avons relevé dans le secteur minier pas moins de quatorze
enquêtes qui, selon nous, n'ont rien ajouté de nouveau à la
connaissance du milieu, tout en ayant coûté bien au-delà de
10 000 000 $. Une seule, toutefois, si on exclut les descentes faites dans
certaines mines, a été effectuée par la CSST, celle des
Mines Gaspé qui a duré deux ans et a coûté plus de 1
000 000 $.
Le programme de prévention requis par règlement a
nécessité plusieurs mois de travail aux employés de
l'association pour créer un modèle à l'intention de ses
membres et ce scénario a été répété
dans chacune de nos entreprises afin de pouvoir satisfaire aux exigences de la
CSST avant la date limite. Je dois ajouter ici que 100% des entreprises se sont
conformées à cette mesure. Ce n'est qu'un début, car ni
les nouveaux comités de sécurité avec pouvoirs
décisionnels, ni le futur représentant à la
prévention, ni les services de santé de l'État n'ont
encore fait sentir leur présence sur le plancher des entreprises. Tous
ces intervenants ont des pouvoirs décisionnels et, en cas de conflit, il
est prévu que c'est la CSST-Prévention qui sera l'arbitre
décisionnel.
Jusqu'à présent, la CSST administre 33 règlements
en vertu de la loi 17, en plus de 19 autres en vertu de la Loi sur les
accidents du travail, dont trois en vertu de la Loi sur l'indemnisation des
victimes d'amiantose ou de silicose dans les mines et les carrières.
Les employeurs en général sont donc présentement
soumis, de la part de la CSST, à pas moins de 52 règlements
différents qui leur causent plus ou moins d'embêtements. Ce n'est
pas fini, puisque la direction de la CSST continue de proposer à vive
allure des règlements pour couvrir de nouveaux champs
d'activités.
De nombreux règlements ont fait l'objet de sérieuses
contestations et ont donné lieu à d'interminables discussions
comme, par exemple, le comité de santé et de
sécurité, le représentant à la prévention,
les premiers secours, etc. Mais, en plus, la CSST interprète les
règlements existants suivant des formules qui lui sont propres et il y a
des conflits. C'est le cas du fameux problème du paiement des bottes de
sécurité par l'employeur, même si les employeurs avaient
déjà des prévisions relatives aux équipements de
protection personnelle dans les conventions collectives. Présentement,
les mines déboursent annuellement, après entente avec leurs
travailleurs, au-delà de 5 000 000 $ pour les équipements de
sécurité et elles ne voient pas le besoin d'augmenter cette
somme. La résistance des employeurs et les actions en cours retardent
avec raison l'application de cette directive.
Ce qu'on a appelé l'histoire des bottes de sécurité
a aussi mis à jour une procédure de révision absolument
aberrante qui force l'employeur à contester en dernière instance
devant celui qui a émis la directive. Cette procédure est aussi
présentement contestée devant la Cour supérieure.
D'autre part, on est surpris de voir que les articles 245 et 250 du
nouveau projet de loi sur les lésions professionnelles vont encore plus
loin que la pratique actuelle de la CSST, car la loi accorde le droit à
la direction de la CSST de renverser pratiquement à sa guise ses propres
décisions et même celles de la Commission des affaires
sociales.
La direction de la CSST a proposé un programme sur les premiers
soins, lequel empêcherait l'employeur de traiter une blessure mineure sur
le site de l'entreprise. Pour les mines qui sont, la plupart du temps, loin des
services hospitaliers, mais qui, en
général, sont très bien organisées sur place
avec une infirmière ou un infirmier, une telle réglementation
signifierait des coûts additionnels aussi élevés
qu'inutiles, en plus de forcer le travailleur à subir des délais
pour son traitement.
Les Mines Selbaie, par exemple, situées à 135 milles
d'Amos - après information, j'ai corrigé mon texte -
évaluent à plusieurs centaines de milliers de dollars par
année le coût additionnel d'une telle réglementation,
étant donné que chaque sortie est susceptible de leur
coûter une somme d'environ 500 $.
La direction de la CSST a aussi tenté d'imposer aux employeurs
une réglementation universelle sur les campements, y compris les
campements temporaires, en spécifiant dans le détail les
exigences nécessaires à un bon environnement. Ces exigences vont
de la surface vitale à accorder par employé avec tout
l'équipement nécessaire, au menu balancé des repas et
à un système d'alimentation en eau chaude et en eau froide dans
les tentes-dortoirs. Après bien des discussions, il semble que le
secteur de la construction sera le seul à jouir de tels standards.
Enfin, la CSST a commencé à produire des projets de
règlements pour certaines susbtances qui pourraient causer des dommages
à la santé des travailleurs. On a déjà émis
un projet sur la silice, un autre sur le plomb. Il pourra y en avoir plusieurs
centaines d'autres si on tient compte du fait que plus de 6000 substances
susceptibles de comporter des dangers ont été
repérées dans les diverses activités industrielles.
Cette présente tendance à vouloir tout réglementer,
jusque dans les moindres détails, nous incite à penser que
l'objectif de la CSST semble être de vouloir résoudre tous les
problèmes de prévention d'accidents et de maladies
professionnelles par un réseau de règlements précis et
détaillés, appliqués par des inspecteurs
généralistes, avec le moins d'interprétation possible,
puisque souvent ceux-ci ne peuvent avoir qu'une connaissance superficielle des
secteurs industriels inspectés. C'est, en somme, la robotisation de la
prévention et, dans un tel système, tout spécialiste,
qu'il soit médecin ou autre, n'est plus guère nécessaire
ou, du moins, est utilisé inefficacement.
Consciente de cette lacune dans le système, la CSST s'emploie,
depuis plusieurs mois, à intégrer ses services de
prévention et d'inspection. Cette intégration ne peut aboutir,
comme nous l'avons toujours craint, qu'à un vaste réseau
d'inspection, étant donné qu'il est toujours beaucoup plus facile
de faire respecter des règlements que de motiver des personnes.
Avec l'aide des membres patronaux et quelquefois syndicaux du conseil
d'administration de la CSST, ainsi que par des contestations devant les
tribunaux, les employeurs ont pu jusqu'à présent résister
à cette manie de la direction de la CSST de vouloir réglementer
les moindres activités des entreprises ou, du moins, ramener ces
règlements à des contenus plus réalistes. On peut se
demander pour combien de temps, cependant, puisque le nouveau projet de loi 42
accorde à la CSST une latitude encore plus grande dans son pouvoir
d'intervention. Parmi beaucoup d'autres, l'article 35 stipule que la commission
décide elle-même si le travailleur est atteint d'amiantose ou de
silicose; par l'article 250, la commission s'arroge le droit de renverser les
décisions de la Commission des affaires sociales ou encore l'article 282
permet de poursuivre l'employeur ou son représentant sans être
obligé de lui signifier un avis d'infraction. La commission a un faible
pour la théorie "je viendrai comme un voleur".
Au centre de cette toile d'araignée qu'on est en train de tisser
autour de lui, avec tous ces règlements, ces comités, ces
inspecteurs et ces monceaux de paperasse, l'employeur doit continuer à
produire à des prix compétitifs et, lorsqu'il faillit à la
tâche, on le traite de mauvais administrateur.
Parlons maintenant des services de réparation des accidents et
maladies industrielles découlant de la Loi sur les accidents du travail.
Les anciennes administrations de la CAT ont toujours accordé un certain
bénéfice du doute aux travailleurs. Disons tout de suite que les
employeurs miniers sont d'accord pour traiter aussi généreusement
que possible les vrais accidentés et les véritables victimes de
maladies industrielles. C'est pour cela, d'ailleurs, qu'ils ne se sont pas
opposés à la formule de l'indexation annuelle du salaire de base
et à la formule des 90% du salaire net. Ils veulent, cependant, limiter
les abus et ils ne veulent surtout pas que leurs fonds servent à payer
des pensions à des profiteurs du système. À cause de la
tendance de la commission à accepter la grande majorité des
réclamations douteuses, semble-t-il, sans au moins une enquête
sommaire, le nombre des profiteurs augmente et la fréquence de leurs
réclamations se multiplie.
Bien qu'il soit difficile d'évaluer le pourcentage exact de ces
réclamants, nous croyons que, dans le secteur minier, leur nombre ne
dépasse guère 15% du total, étant donné que la
grande majorité de nos travailleurs sont, selon nous, consciencieux et
honnêtes. Nous en déduisons donc que la libéralité
de la commission à accepter des réclamations et à les
compenser sert surtout à ceux qui abusent du système, exemple, le
fait de ne plus exiger la signature de l'employeur sur la formule de
réclamation, mesure présentement pratiquée, mais que le
nouveau projet de loi 42 veut légaliser par ses articles 37, 42 et
surtout 173.
À titre d'exemple, j'aimerais vous lire une lettre envoyée
par le surintendant à la prévention d'une mine du Nord-Ouest
québécois à un agent de la CSST en rapport avec
l'affluence des réclamations pendant la période de chasse
à l'orignal. Nous avons omis les noms pour ne pas causer de
préjudice. "Cher monsieur, lors d'une rencontre informelle dans le
bureau de M. X, de la CSST, il y a quelque temps, nous avions mentionné
que les problèmes sociaux, familiaux ou de relations de travail peuvent
engendrer facilement des pertes de temps compensables. Nous vivons actuellement
un tel phénomène avec la saison de la chasse. Environ 50% de nos
employés s'absentent durant cette période. "Considérant ce
désir des employés, d'une part, et les contraintes de la
production, d'autre part, on accorde au moins une semaine de vacances aux
employés qui en font la demande. Malheureusement, 90% de ceux-ci
demandent la première semaine. On laisse partir le nombre maximum la
première semaine et le reste la deuxième. Ce choix est fait selon
la demande et l'ancienneté des travailleurs. "Les employés
suivants ont démontré à la direction leur très
grande déception pour la période de vacances offerte parce qu'ils
étaient déjà organisés avec des amis pour la
première semaine de chasse. (Ici, on nomme les sept travailleurs). Parmi
ces sept personnes, quatre ont déjà rapporté un accident
(les documents sont annexés). Ceux-ci ont des faits accidentels dont on
ne peut prouver l'inexistence et ont reçu des soins médicaux dont
on ne peut démontrer la non-pertinence. "Actuellement, on attend que les
trois autres se manifestent. Les contremaîtres sont avisés de
porter une attention particulière à la prévention des
accidents face à ces derniers. "Nous vous informons de ces faits pour
démontrer l'accessibilité facile pour tout travailleur aux
prestations de votre commission."
Et il y a un nota bene qui dit: "M. Untel nous avertit ce midi que le Dr
Untel l'arrête de travailler jusqu'au 19 octobre." Cette lettre
était datée du 10 octobre.
Au cours des dernières années, de nombreux cas de ce genre
se sont accumulés dans les dossiers des mines.
Il faut ajouter ici que la politique des cinq jours payables directement
par l'employeur à l'accidenté facilite énormément
cette tendance puisque le réclamant peut recevoir instantanément
son émolument et que, à notre connaissance, la commission ne
réclame jamais les sommes consenties, même dans les cas où
elle n'accepte pas la réclamation. Tout au plus, au lieu de facturer ces
sommes à l'employeur impliqué, elle les transfère au fonds
général, lequel -il faut le rappeler - est aussi
défrayé par les employeurs.
C'est une pratique connue de la commission de ne réclamer que
très rarement les fonds consentis à celui qui en profite,
même dans les cas d'erreur et même si elle y est tenue par la loi.
Le nouveau projet de loi 42 vient, d'ailleurs, légaliser cette pratique
par l'article 117, entre autres. La loi 42 prolonge à quatorze jours la
période à être défrayée par l'employeur. Les
abus et le fardeau financier seront donc multipliés par trois. Ce
système est, d'ailleurs, unique en Amérique du Nord et, selon
nous, il n'a pas sa raison d'être, surtout depuis que la commission s'est
dotée d'un système de communication et d'ordinateurs au
coût de plusieurs dizaines de millions de dollars.
Les employeurs et les travailleurs sont tenus de par la loi de rapporter
à la commission tous les accidents survenus à l'intérieur
d'un très court délai, soit dans les deux jours ouvrables qui
suivent le supposé accident. La commission pourrait donc facilement
établir, comme elle le propose, d'ailleurs, dans la loi 42 pour d'autres
motifs, des paiements de dépannage aux bénéficiaires avant
l'acceptation finale de la réclamation et même avant la
réception du rapport médical qui est, apparemment, le principal
responsable des retards.
Le fait d'étendre à quatorze jours la période
à être défrayée directement par l'employeur non
seulement ouvre la porte toute grande aux abus des profiteurs du
système, mais nous apparaît comme une preuve supplémentaire
d'incompétence administrative d'autant plus sérieuse que la
commission a présentement accès aux meilleurs moyens de
communication sur le marché, ce dont elle ne profitait pas il y a
plusieurs années. (17 heures)
Depuis quelques années, la commission a accordé beaucoup
d'importance à la réhabilitation des anciens accidentés.
Nous ne pouvons, évidemment, qu'être en faveur d'une telle
attitude, surtout lorsqu'il s'agit de réhabilitation physique.
Cependant, la commission s'occupe aussi de réadaptation sociale de ces
travailleurs, comme le stipule l'article 56 de la Loi sur les accidents du
travail. La portée de cet article est tellement étendue que la
commission peut prendre toutes les initiatives qu'elle désire au niveau
de la distribution des fonds, rôle dans lequel elle excelle. Cela peut
aller des pensions temporaires à l'achat d'équipement ou à
des subventions au futur employeur, comme on l'a constaté de nombreuses
fois. Ces gratifications s'appellent recherche d'emploi, stabilisation
économique ou réintégration sociale. On a l'impression
que, pour la CSST, la réhabilitation signifie
principalement de verser des prestations.
Les employeurs ne refusent pas de jouer un certain rôle social
à l'endroit de ces personnes, mais il nous semble qu'on a largement
dépassé les limites de la responsabilité de l'entreprise
et que, souvent, par l'intermédiaire de la CSST, on lui fait faire
office d'assurance-chômage et de bien-être social.
Permettez-nous de citer un exemple qui se répète à
plusieurs dizaines d'exemplaires dans le secteur minier. Nous nous
référons ici à un travailleur d'une mine qui, après
avoir été embauché en mars 1980, subissait, en novembre
1980, un accident dont la description est la suivante, selon le rapport de
l'accident: "En descendant d'un échafaud, le genou s'est barré de
lui-même; depuis, difficulté et douleur au mouvement." Ce
travailleur, après plusieurs visites au médecin et un retour au
travail de courte durée, a reçu, à toutes fins utiles,
pleine compensation jusqu'au 30 août 1982, soit durant 22 mois, d'abord,
pour incapacité de retour au travail et, ensuite, pour recherche
d'emploi.
En décembre 1981, ce travailleur avait été mis
à pied pour raison de surplus de personnel. Il avait été
engagé durant la période de construction. Depuis septembre 1982,
ce travailleur, même s'il a trouvé de l'emploi, continue de
recevoir environ 900 $ mensuellement à titre d'aide financière en
stabilisation économique. Bien plus, la coopérative des services
agricoles qui l'emploie a reçu, jusqu'à maintenant, 8600 $ de
subventions de la CSST dans le cadre d'un programme de formation pour cet
employé, lequel, apparemment, n'est pas encore satisfait puisqu'il a
fait une demande à la compagnie d'assurances de la mine en question pour
obtenir des prestations supplémentaires.
Dans le domaine de la santé industrielle, les abus sont encore
beaucoup plus flagrants. Le secteur minier a été affecté
par deux problèmes particuliers, celui de la surdité et celui des
pneumoconioses. Au niveau de la surdité, les réclamants
obtiennent des pensions lorsqu'il y a une diminution réelle de
l'ouïe. Les employeurs miniers ont dû, depuis quelques
années, verser annuellement plusieurs millions de dollars pour compenser
les cas de surdité même si, dans la très grande
majorité des cas, il n'y a pas perte d'emploi.
Depuis quelques années, cependant, la CSST accorde aussi des
pensions plantureuses pour surdité à des retraités, en
invoquant la perte d'intégrité physique et, surtout, leur
incapacité de retour au travail. Un des derniers exemples dont on nous a
informés concerne un travailleur de 64 ans, à la retraite, qui
s'est vu accorder une généreuse pension indexée lui
rapportant mensuellement 1471,61 $ pour une incapacité de retour au
travail évaluée à 70% à cause de sa surdité.
Ce cas a été capitalisé à 222 737 $, somme qui
évidemment sera facturée à l'employeur.
Cet exemple est loin d'être unique. Nous savons que des pensions
ont été accordées, pour surdité, à des
retraités de plus de 70 ans et même de 80 ans. Jusqu'à
maintenant, le record concerne une personne compensée pour
surdité lorsqu'elle avait dépassé les 90 ans. D'ailleurs,
il n'y a pas que les travailleurs manuels qui sont tentés de profiter du
système. Nous avons dans nos dossiers le cas d'un ancien directeur de
mine qui, même s'il a été peu exposé au bruit
pendant toute sa carrière, a obtenu, à 71 ans, une pension de 10%
pour surdité à titre d'incapacité de retour au travail et
qui, par la suite, a voulu la faire augmenter à 15%. Pour ce faire, on
mentionnait dans le rapport d'évaluation: "II possède une
formation de base; il sait lire et écrire." Or, on sait qu'il a un
diplôme du MIT comme ingénieur et, deuxièmement, on
ajoutait qu'il était manoeuvre au traitement de minerai pendant les dix
dernières années de sa vie. En ce qui concerne les pneumoconiose
(silicose et amiantose), le système établi par la direction de la
CSST coûte encore beaucoup plus cher au secteur minier, puisque le
travailleur ne peut occuper un emploi sur le site minier lorsqu'on
décèle un début d'altération attribuable à
la silicose ou à l'amiantose, même s'il n'y a aucune
incapacité de travail, ce qui lui permet de recevoir pleine compensation
à partir d'une condition évaluée à un DAP de 5% qui
ne correspond nullement à une incapacité réelle.
Le travailleur qui perd son emploi reçoit donc jusqu'à sa
retraite une pension équivalant à 90% de son salaire net. La
plupart de ces cas sont capitalisés à plus de 200 000 $
chacun.
Les experts médicaux nous affirment que l'incapacité
physique n'apparaît que lorsque le DAP dépasse 15%. Or, il y a
présentement, selon les rapports de la CSST quelque 380 cas, que vous
pourrez voir à l'annexe III, qui ont été compensés
avec un DAP plus bas que 15%. Cela inclut, bien sûr, le cas de ceux qu'on
a appelés les miraculés, parce que, après un examen de
contrôle, toute trace de pneumoconiose avait disparu. On en avait
repéré 48 en septembre 1983, et, lorsque tous les cas auront
été réexaminés, ils pourraient bien se retrouver
une centaine. Nous évaluons à une somme de 75 000 000 $ ces
pensions accordées sans justification depuis 1975, montant que les
employeurs défraient et devront défrayer dans l'avenir.
Les mines d'amiante seulement évaluent à plus de 40 000
000 $ le montant global des pensions inutiles qu'elles ont payées en
vertu de ce programme depuis la fin de 1975 et elles contestent devant les
tribunaux la légalité de ces paiements par la commission.
Si elles obtiennent gain de cause, elles seront en droit d'exiger un
remboursement total, ce qu'elles feront sans doute.
Cependant, si la CSST rembourse les mines d'amiante sans forcer les
pensionnés à rembourser la commission, ce qui nous
paraîtrait inhumain, ce sont tous les autres employeurs qui seront
appelés à payer la note pour couvrir une administration pour le
moins discutable de la loi 52 sur l'indemnisation des pneumoconioses.
Nous sommes donc en face d'un beau gâchis que les employeurs
miniers essaieront d'empêcher de se perpétuer par tous les moyens
possibles. La partie patronale tient absolument à faire table rase de
l'ancien programme et à repartir sur des bases raisonnables,
c'est-à-dire permettre la réassignation des travailleurs dans les
endroits du site minier qui, selon le médecin désigné,
seraient compatibles avec l'état de santé du travailleur. Les
syndicats nous semblent prêts à accepter cette formule.
Or, on retrouve dans le nouveau projet de loi 42 plusieurs articles sur
l'amiantose et la silicose qui non seulement légalisent globalement
l'administration de la commission dans ce domaine depuis 1975, mais qui, comme
les articles 358, 359 et 360, empêchent toute révision en appel
des décisions de la commission en ces matières et stipulent que,
nonobstant l'obtention du gain de cause devant les tribunaux d'appel, le
pensionné conserve quand même sa rente.
Ici, je ne peux pas résister à vous lire une partie de
l'article qui est paru dans le Devoir de ce matin, dont le titre est
"Amiantose: la Cour supérieure donne raison à la
société Asbestos." Je pense que je peux le citer, parce que c'est
public présentement. L'article débute en citant le juge Roland
Durand, qui disait: "II est trop facile pour la Commission de la santé
et de la sécurité du travail d'être généreuse
avec l'argent des autres." Un peu plus loin, on dit: "La CSST
interprétait la loi de 1975 à la lumière d'un
règlement datant de la même époque et suivant lequel il
suffisait que les médecins établissent un diagnostic d'amiantose
pour que le travailleur perde son certificat de santé. Il était
dès lors considéré par la CSST comme ayant perdu son
emploi à cause d'une incapacité permanente. Le travailleur
pouvait dans ces conditions retirer 90% de son salaire net à titre
d'indemnisé. Bref, la CSST interdisait, dans ses directives
administratives aux comités de pneumoconiose, aux comités
d'experts comme à ses bureaux de révision des décisions,
de considérer les possibilités que l'ouvrier occupe un autre
emploi dans l'établissement minier avant de lui accorder une
indemnité." Le journaliste cite le juge, encore une fois: "Le tribunal
ne peut croire, écrit le juge, que ce soit l'intention de la loi qu'on
accorde une indemnité de 90% de son revenu net disponible à un
ouvrier atteint de déficit anatomophysiologique nominal de 5% un jour
pour, le lendemain, réduire cette indemnité de la moitié
parce qu'il est apte à occuper un autre poste pour le même
employeur." Le juge blâme également la Commission des affaires
sociales de se défiler devant ses responsabilités.
Il y a un autre paragraphe qui peut être intéressant. Le
magistrat note que "bien des employés ont perdu leur emploi à
cause d'une décision administrative de la CSST qui, en leur retirant
automatiquement leur certificat médical, ne tenait pas compte de la
capacité réelle du travailleur d'occuper le même emploi ou
un autre ailleurs dans l'établissement de son employeur". Fin de la
citation.
Tout cela coûte énormément cher aux entreprises
minières québécoises et, malgré les récentes
déclarations sur la baisse du taux moyen de cotisation, en faisant jouer
la réserve accumulée, il faut bien constater que les
déboursés des employeurs miniers pour la CAT, d'abord, et pour la
CSST, ensuite, ont considérablement augmenté depuis 1975.
D'ailleurs, selon les rapports officiels, les dépenses totales de la CAT
et de la CSST sont passées, comme vous le savez, de 280 000 000 $
à 946 000 000 $ en 1982.
On pourra voir à l'annexe 4 que dans les mines de métaux
non ferreux les déboursés de la CSST sont passés de 720 $
par employé en 1975 à 2502 $ en 1982. Dans le cas des mines de
fer, qui font partie d'un groupe différent, ce coût est
passé de 192 $ par employé en 1975 à 1085 $ en 1982. La
différence de coût entre ces deux groupes de mines s'explique par
le fait que les mines de métaux non ferreux doivent, selon la loi,
absorber le coût des pensions payées aux anciens accidentés
et aux victimes de maladies professionnelles attribuées aux mines
fermées. Depuis 1925, il y a au-delà de 50 industries
minières qui ont fermé leurs portes. Il y a ainsi plusieurs
millions de dollars par année qui sont absorbés par les mines de
métaux non ferreux actuellement en fonctionnement. Les dossiers des
réclamants attribuables aux mines fermées sont pour nous un
énorme problème parce qu'il n'est pas possible d'avoir une
information sur leur véracité ou leur validité.
D'ailleurs, la CSST refusait, il y a quelques mois, la demande de l'association
de recevoir, au nom de ses membres, les informations nécessaires
à la compréhension des dossiers attribuables aux mines
fermées.
Une telle augmentation de coût peut facilement être
interprétée comme une augmentation importante des accidents dans
les mines. En apparence, cela est vrai puisque la fréquence des
lésions professionnelles compensées a considérablement
augmenté depuis les trois dernières années pour revenir,
comme nous l'avions dit au début, au cours des
représentations sur la loi 17, presque au même niveau qu'en
1947, c'est-à-dire juste avant l'établissement d'un programme de
prévention dans le secteur minier. Le tableau de l'annexe 6 vous en
donne l'explication.
La sévérité des accidents a cependant fortement
baissé. Par exemple, alors qu'en 1975 les réclamations pour
douleurs sans fait accidentel précis et les blessures mineures ne
totalisaient qu'environ 15% du total des accidents compensés pour le
secteur minier, en 1982, ce pourcentage atteignait 40%. Il y a dix ans -
là, je parle pour les employeurs en général - il y avait
60 lésions professionnelles avec perte de temps dans les entreprises
québécoises pour 100 accidents sans perte de temps. En 1982, ce
chiffre était inversé et, pour 100 accidents sans perte de temps,
il y a maintenant 135 autres accidents avec perte de temps.
D'autre part, les statistiques sur les accidents dans le secteur minier
nous indiquent qu'en 1977 les blessures majeures, incluant les fractures,
représentaient 55% du total des accidents, alors qu'en 1982 ce
pourcentage avait diminué à 16%. Vous pouvez vous
référer à l'annexe 8 pour ce faire.
De plus, une étude détaillée des accidents du
travail dans deux mines en particulier, sur une période de deux ans,
nous démontre que seulement 10% des accidentés dans ces deux
mines ont eu, au cours de cette période, plus de deux accidents chacun;
certains parmi ces 10% en ont eu jusqu'à six au cours des deux ans. Pour
nous, c'est une indication claire que beaucoup d'accidents mineurs sont
compensés et servent à augmenter la fréquence alors qu'un
faible pourcentage des travailleurs miniers abusent du système. (17 h
15)
Quant aux accidents mortels, le rapport annuel de la CSST en rapporte un
seul dans les mines et carrières en 1982, alors que le livre blanc sur
la santé et la sécurité du travail en rapportait 21 en
1975 et 19 en 1976, pour les mêmes secteurs. Je dois ajouter ici qu'on
n'était pas d'accord avec les chiffres de 21 et 19; on croyait
plutôt que c'était la moitié de ces chiffres-là.
Mais je ferai remarquer à la commission que ces chiffres venaient de la
même source que ceux de 1982.
Tout cet ensemble de données statistiques sur les accidents,
illustrées dans les annexes VI à X, indique que, pendant que la
fréquence totale des accidents compensés augmente, il y a une
réduction très marquée des accidents sérieux, tels
les fractures, blessures majeures et accidents mortels. Ceci est une indication
très claire qu'il y a un grand nombre de réclamations pour
malaises mineurs, lesquels font souvent l'objet d'indemnisation sans raison
valable. C'est la raison qui nous amène à être convaincus
du fait qu'il n'y a pas de contrôle adéquat à la CSST sur
la validité et la pertinence des réclamations qui lui sont
adressées.
En somme, ce long plaidoyer démontre, selon nous, que le
législateur, pour résoudre les problèmes de
prévention des lésions professionnelles, a misé sur des
objectifs non encore expérimentés en Amérique du Nord,
soit le paritarisme forcé et le contrôle des accidents à la
source, à l'aide d'une très nombreuse réglementation.
C'est ce que nous avons appelé la robotisation de la prévention.
Pour implanter un tel système, la loi a prévu la création
d'un organisme que l'on nous avait promis modeste et qui est vite devenu la
supermachine bureaucratique que l'on connaît. La direction de cet
organisme pousse souvent jusqu'à l'absurde la réalisation des
objectifs proposés par la loi à l'aide de directives et de
règlements dont certains sont fort irréalistes et par des
interventions de plus en plus nombreuses à l'intérieur des
entreprises, réduisant ainsi considérablement la marge de
manoeuvre de ceux qui doivent produire.
L'employeur, qui en défraie entièrement le coût sans
aucun droit de regard, se sent étouffé par une
réglementation nombreuse, souvent irréaliste, par des
interventions au sein des entreprises, non seulement inopportunes mais aussi
très coûteuses, enfin par une libéralité telle
à l'endroit de la réparation et de la réadaptation qu'il
se sent souvent obligé de contester de nombreux cas devant les
tribunaux. Tout cela coûte extrêmement cher aux entreprises, en
temps aussi bien qu'en argent. Malgré cela, les employeurs miniers ont
pu, comme on l'a démontré précédemment,
réduire de façon importante les accidents sérieux dans
leurs entreprises, même si la fréquence d'accidents dans les mines
est revenue au niveau de 1947. Cette augmentation de fréquence
s'explique par la libéralité du système de
réparation et de réadaptation mis en place par la CSST au cours
des dernières années. Ce système a été
l'occasion de nombreux abus de la part des profiteurs sans mieux
protéger les véritables victimes des lésions
professionnelles.
Quant aux employeurs miniers, ils continuent leurs réelles
activités de prévention des accidents et des maladies
industrielles chez leurs travailleurs en utilisant et en améliorant les
approches et les méthodes qu'ils ont expérimentées au
cours des dernières décennies. La santé et la
sécurité leur semblent trop importantes pour qu'ils abandonnent
un système en l'efficacité duquel ils croient fermement et qui a
le support, ils en sont convaincus, de la très grande majorité
des travailleurs eux-mêmes.
Pour les aider à remplir adéquatement leur rôle en
prévention d'accidents en même temps que de réduire autant
que possible les coûts inutiles en ces temps de récession, les
employeurs miniers aimeraient faire, au sujet de l'administration de la
CSST, trois recommandations principales qui découlent d'ailleurs du
contenu de ce mémoire: Premièrement, diminuer le plus possible la
réglementation présente et future dans le domaine de la
prévention et rendre celle qui existe plus réaliste afin de
laisser une marge de manoeuvre suffisante aux employeurs, lesquels ont, qu'on
le veuille ou non, le principal rôle à jouer dans la
prévention des lésions professionnelles.
Deuxièmement, afin d'éliminer les coûts inutiles qui
surchargent les entreprises, les employeurs miniers recommandent d'abord, pour
les cas de pneumoconiose, la réassignation des travailleurs qui n'ont
pas d'incapacité physique dans des endroits de travail qui, selon les
médecins, sont compatibles à leur état de santé.
Des dizaines de millions de dollars seront ainsi épargnés et les
employeurs impliqués ne deviendront pas des assistés sociaux de
luxe au crochet des employeurs. Il est clair, cependant, que la norme
"zéro" exigée présentement par la CSST pour la
qualité de l'environnement ne règle pas le problème.
Enfin, les employeurs déplorent amèrement que la CSST,
ayant à sa disposition des équipements de communication et des
ordinateurs hautement sophistiqués, n'ait pas jugé bon
d'établir des mécanismes de contrôle sévères
pour éliminer autant que possible les profiteurs du système. Ces
mêmes employeurs déplorent aussi que la présente Loi sur
les accidents du travail accorde à la CSST une latitude presque
illimitée au niveau de la réadaptation sociale. Une telle
libéralité de la loi et de son administration sert surtout la
cause des gens qui en abusent. Malheureusement, le projet de loi 42 va encore
plus loin puisque non seulement il ratifie les actions passées, mais
accorde beaucoup plus de pouvoirs à la commission. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Blouin): Merci beaucoup, M. Langlois. M.
le ministre.
M. Fréchette: Oui, M. le Président, très
brièvement. Je vous signale immédiatement que, quant à moi
en tout cas, je n'aurai pas de question à poser à M. Langlois. Je
voudrais simplement prendre 30 secondes pour les remercier d'être venus
nos livrer leurs préoccupations. C'est, à mon sens, si clairement
exprimé dans le mémoire que je ne sens pas l'utilité de
poser des questions, d'autant plus qu'une bonne partie du mémoire, sinon
l'essentiel, est en relation directe avec la loi 42 et, bien sûr, nous
aurons l'occasion de rediscuter plus à fond tout ce dont l'Association
des mines de métaux se préoccupe dans son mémoire.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. le ministre. M. le
député de Viau.
M. Cusano: Excusez; si le député...
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Saguenay.
M. Maltais: Merci, M. le Président. D'abord, un petit
préambule très court et des questions très courtes aussi.
J'aimerais vous remercier, M. Langlois, ainsi que les membres de votre
association, pour votre mémoire.
Tout d'abord, vous avez fait un portrait très visible de ce qui
se passe chez vous, dans vos entreprises. Votre mémoire nous
démontre aussi beaucoup d'absurdités dans l'application, somme
toute, des directives et des règlements de la CSST et nous
démontre aussi des coûts tout à fait prohibitifs auxquels
vous devez faire face, surtout lorsqu'on voit que le secteur minier n'est
peut-être pas le plus progressif, actuellement, à cause de la
crise économique au Québec.
Dans votre mémoire, vous soulignez à plusieurs reprises
l'ingérence de la CSST dans l'application de ses règlements. Au
tout début, j'aimerais souligner d'une façon particulière
votre ténacité à vous faire entendre ici en commission
parlementaire. Il semblerait que cela n'a pas été facile. Je
pense que c'était une tribune pour vous et que vous deviez venir. Au
début de votre mémoire également, vous soulignez que
l'objectif de la loi 17, loi sur la CSST, a été raté.
J'aimerais avoir une précision sur ce que vous dites, à savoir
que la CSST, par ses inspecteurs et ses fonctionnaires, connaît
très mal le milieu minier. Pourriez-vous expliciter un peu
là-dessus?
Le Président (M. Blouin): M. Langlois.
M. Langlois: Ce n'est pas un reproche qu'on peut faire à
la CSST de ne pas connaître le milieu minier. Le milieu minier, comme
vous le savez, est un milieu très spécifique qui regroupe un
nombre assez faible de travailleurs, environ 30 000, et, au niveau des cadres,
c'est encore plus restreint. Ce n'est pas le reproche qu'on peut faire. Nous
voudrions dire qu'auparavant le service d'inspection était sous la
juridiction du ministère des Richesses naturelles. La condition pour
devenir inspecteur de ce service dans le secteur minier, c'était
d'être ingénieur de mine avec cinq ans d'expérience dans
les mines. Lorsqu'on a transféré les services d'inspection
à la CSST, on l'a fait selon un tout autre barème et je pense que
d'autres l'ont dit avant moi à cette commission. Au lieu d'avoir des
spécialistes pour inspecter le secteur, on s'est servi de
généralistes. Nous nous sommes complètement opposés
à ce
nouveau système et nous n'avons pas réussi à faire
entendre notre voix. Il n'est pas étonnant que les nouveaux inspecteurs
surtout au début et surtout ceux qui n'étaient pas inspecteurs
miniers, parce qu'il y en avait quelques-uns qui étaient aussi
ingénieurs - n'aient pas eu la môme connaissance du secteur que
lorsque le service d'inspection était sous la juridiction du
ministère des Mines. C'était donc un service d'inspecteurs qui
faisaient respecter strictement les règlements. Depuis un an ou deux,
avec les années, on s'aperçoit qu'on ne peut pas inspecter un
secteur minier sans avoir des spécialistes du secteur. On revient, petit
à petit, au système des ingénieurs miniers pour
l'inspection des services.
Il y a autre chose dont j'aimerais parler au niveau du service
d'inspection. Lorsqu'il était sous la juridiction du ministère
des Richesses naturelles, ce n'était pas seulement un service de police
qui inspectait et donnait des amendes, c'était un service aux
employeurs, une sorte de service de consultants offerts aux employeurs,
étant donné que ces gens étaient capables de le faire. Il
s'est établi un vide dans le secteur à tel point qu'au niveau de
notre association, on sent le besoin de faire une restructuration afin de
pouvoir fournir des services plus poussés à nos membres. On n'a
plus les services qu'on avait auparavant. Ce sont des lacunes très
difficiles à corriger avec le système central d'inspection
régionale, au lieu de l'inspection sectorielle qu'on avait
auparavant.
M. Maltais: M. Langlois, dans votre mémoire, vous dites
être un peu effaré par le nombre de règlements que la
commission a créés; vous parlez de 41. Vous parlez surtout du
dernier pouvoir accordé au P.-D.G. de la CSST; celui-là vous fait
mal, il peut en créer d'autres et permet de prescrire toute autre mesure
à la mise en application de la présente loi. Vous
appréhendez cette situation et cela semble causer des
inconvénients pratiques chez vous. Quels sont-ils dans l'application
régulière?
M. Langlois: Je vais commencer à répondre et je
passerai peut-être la parole à mon ami Claude Drouin, tout
à l'heure.
M. Maltais: Oui, allez-y, pas de problème.
M. Langlois: Les inconvénients, en fait, c'est que plus il
y a de règlements à respecter, plus la marge de manoeuvre des
employeurs diminue, plus cela coûte cher aux entreprises. C'est cela, les
inconvénients. On parle de déréglementation; si on s'est
montré responsable envers nos travailleurs auparavant, je ne vois pas
pourquoi on ne serait pas aussi responsable dans l'avenir. Je pense qu'on l'a
prouvé pendant les trente dernières années. La
réduction de la marge de manoeuvre fait qu'on se sent
étouffé par les règlements, on se sent
étouffé par diverses pressions autour de nous qui nous
empêchent de travailler, finalement. Quant à la
réglementation elle-même, j'aimerais demander à M. Drouin
de faire des commentaires.
Le Président (M. Blouin): M. Drouin.
M. Drouin (Claude): Je n'ai pas énormément de
commentaires supplémentaires à ajouter, sauf que plus il y a de
règlements à respecter, plus on fait face à des normes
très spécifiques sur lesquelles il faut agir. Quand je pense
à un règlement, je pense à une intervention ponctuelle,
à des choses qui se situent à une dimension, sur un
élément mesurable ou quelque chose du genre. La mesure
d'éléments ponctuels se fait à l'expérience de la
réglementation dans le passé; je me réfère en
particulier à l'étude d'un nommé Jones, à une
étude qui a été faite au Wisconsin. On y déclare
que par l'inspection, on ne peut réellement dépister au maximum
que 29% d'éléments susceptibles d'être responsables
d'accidents. Dans ces 29%, il n'y en a qu'un très petit nombre qu'on va
dépister au moment de l'observation elle-même. (17 h 30)
C'est que l'inspection et le respect des normes, tout en étant
des éléments extrêmement importants, n'ajoutent pas
beaucoup à la possibilité de réduire la fréquence
des accidents dans un milieu. Le respect des normes et des règlements
est extrêmement important, par exemple, pour la réduction des
accidents subséquents à une dégradation graduelle d'un
certain milieu. Je pense, par exemple, aux treuils ou encore aux camions,
choses dont on est plus facilement conscient; les pneus d'une automobile; un
pneu va se dégrader graduellement, tous les jours. On ne le voit pas se
dégrader, mais par un système d'inspection ponctuelle variant
entre quinze jours et un mois, on est capable de le constater. Alors, pour
prévenir les accidents sérieux comme cela, l'inspection est
extrêmement importante et nous la souhaitons. L'inspection est aussi
importante au point de vue des normes de l'environnement, de l'hygiène
du travail, parce que, justement, quand on voit un milieu se dégrader
à cause de concentration de poussière ou d'un polluant
quelconque, l'observation visuelle est insuffisante. Il faut alors recourir
à des mesures réglementaires et des normes. On croit beaucoup
à ces choses, mais de là à avoir recours à la
réglementation pour toujours aller dans des détails et des
affaires, finalement, qui occasionnent des pertes de temps beaucoup
plus que ces sources d'efficacité en prévention, nous n'y
croyons pas. Nous préférons des formules ouvertes qui donnent la
chance aux parties, quand elles se rencontrent en milieu de travail, de se
prendre en main et de s'autoréglementer par un programme de formation,
un programme de motivation des parties.
Je ne suis pas contre la réglementation, mais, à un moment
donné, ce n'est pas un outil de prévention, c'est un outil de
nuisance.
M. Langlois: Quelques commentaires à ce sujet-là.
La foule de règlements qu'on nous présente depuis un certain
temps, cela veut dire énormément de travail, surtout quand ces
règlements-là sont passablement farfelus. Il y a des fois
où il faut discuter très longtemps pour les faire
disparaître ou les amener à une base un peu plus réaliste.
Je vous en ai mentionné deux ou trois au niveau des campements
temporaires, par exemple, ou des choses comme cela. On perd
énormément de temps alors que ce temps peut être
employé ailleurs.
Le Président (M. Blouin): Cela va?
M. Maltais: Au niveau de la prévention, M, le
Président - et peut-être que pour la bonne marche, M. Langlois, je
vais m'adresser à vous et vous pourrez...
M. Langlois: D'accord.
M. Maltais: ...répartir les... - vous affirmez dans votre
mémoire que ce qui se faisait avant était aussi bon et
peut-être moins astreignant que ce qui se passe aujourd'hui. Il y a une
chose qui me frappe, c'est que, semble-t-il, la loi 17 a stoppé les
initiatives paritaires au niveau de l'employeur et du syndicat. Et je pense
que, surtout dans le domaine minier, cela demande quand même une grande
concertation de la part des deux parties parce que les patrons sont à
l'extérieur et que les mineurs sont sous la terre. Alors, je pense que
si cet esprit d'initiative est coupé entre les deux parties, cela doit
présenter quand même des problèmes réels chez vous.
Peut-être un petit mot d'explication là-dessus.
M. Drouin: Je pense qu'on nous interprète mal quand on dit
cela.
M. Maltais: Oui, d'accord.
M. Drouin: La prévention comporte trois
éléments: les conditions de travail, les méthodes de
travail et les comportements des personnes en place. Les conditions de travail,
ce sont les sources, par exemple, comme on parle dans la loi; la loi parle du
contrôle à la source. On est d'accord avec cela à 100%,
excepté que le contrôle à la source, en 1950, était
beaucoup plus facile à faire qu'il ne l'est en 1980. Parce qu'il y a une
loi qui s'applique en économie et qui est applicable en
prévention aussi, c'est la loi qu'on pourrait appeler loi sur le
rendement décroissant. En 1950, quand on faisait face à des
conditions de travail - où c'était la mode de 1950 - corriger la
source était facile. Tout était trou. Alors, boucher les trous,
ce n'était pas compliqué, cela allait bien. Alors, c'était
à l'état... De 1945 à 1950, c'était le début
de la prévention systématique dans l'industrie minière. On
a fait beaucoup de contrôle à la source, mais à mesure
qu'on se raffine, le contrôle à la source devient aussi beaucoup
plus raffiné et beaucoup plus exigeant. Il faut passer de la phase
ordinaire, de bloquer par une barricade, ou quelque chose comme ça, de
passer à des méthodes sophistiquées, mais la technologie
n'est pas toujours là pour les corriger. Le meilleur problème
qu'on peut connaître, c'est le bruit. On n'a pas les outils
technologiques pour être efficace en protection contre le bruit. Mais
pour protéger le milieu contre le bruit, cela prend beaucoup d'argent.
Et ce n'est pas seulement une question d'argent, c'est que ce n'est pas
nécessairement efficace. Je ne connais pas de chiffres précis,
mais je connais très bien des sources ponctuelles qu'on a
corrigées. Pour une seule source, on est rendu à 35 000 $. Quand
il faut multiplier cela par le nombre de postes de travail, à un moment
donné, cela devient une fortune.
Prévenir à la source, on est d'accord à ce que ce
soit dans la loi. Le projet de loi parle de prévenir à la source.
C'est le premier principe de la loi. Elle parle un peu des méthodes,
mais elle n'est pas précise au sujet des méthodes de travail,
parce que les méthodes de travail, c'est quelque chose qui relève
de l'acte de production. On ne peut pas dissocier l'acte de production de
l'acte de prévention. Il n'y a pas une activité qui ne comporte
pas de risques. Il n'y en a pas une seule. Cela veut dire que, quand un homme
fait une action en même temps qu'il travaille, il s'expose à
quelque chose. L'exposition peut venir soit à partir du milieu, à
partir de l'équipement avec lequel il travaille. Elle peut venir aussi
à partir de la supervision de la conception de l'individu
lui-même. L'acte de travail lui-même est indissociable.
La philosophie que nous avons développée concernant les
mines, depuis 1942, appliquée depuis 1948 chez nous, fait qu'on a dit:
On ne peut pas vivre autrement qu'en faisant de la prévention à
travers la supervision. C'est pour cela que notre travail se fait par le
truchement d'une association d'employeurs et non pas par une association
sectorielle; pas encore. Je vais revenir à l'association sectorielle
dans un instant, par
exemple. Permettez-moi de finir, vous n'avez pas le clou de la vraie
réponse encore. Quand vous parlez de prévention par la
supervision comme cela, c'est dire qu'on ne dissocie pas la production de la
sécurité et il faut continuer en ce sens.
La loi n'a pas renié la prévention par la production. Elle
n'en a simplement pas parlé, sauf indirectement à l'article 51 de
la loi 17 où elle décrit l'obligation de l'employeur de donner de
la supervision adéquate à ses gens et toutes ces
choses-là. Mais, dans la loi, on a décidé que le principal
outil d'intervention de la loi ne serait pas l'employeur. On dit plutôt
tout au long que les parties vont se prendre en charge. Elle a mis l'accent sur
le paritarisme. On n'est pas contre le paritarisme, on y croit. Pour notre
part, l'Association des mines a pressenti la partie syndicale pour de l'action
non paritaire. On n'est pas allé aussi loin que là. Le mois
dernier, on n'en était pas encore rendu là.
L'action conjointe, à partir de 1975, on y a cru et on y croit
encore. Cependant, il y a une différence entre se fier à un
groupe de gens à l'extérieur de l'acte de production. Dans mon
cas, concernant l'association de prévention, je ne me considère
pas comme faisant partie de l'équipe de production. Je fais partie d'une
équipe d'appui. Selon moi, le paritarisme, ce n'est pas une
activité clef, c'est une activité d'appui. La loi dit que cela
sera une activité clef tandis qu'on dit qu'il y a inversion dans la loi.
Elle a pris une activité d'aide et elle en a fait le maître
d'oeuvre. Nous ne croyons pas à cela. Nous disons que la loi va faire du
bien éventuellement. M. Laberge, par exemple, disait hier que les
parties vont changer d'attitude, d'accord, mais cela ne changera pas
nécessairement au jour le jour l'action quotidienne qui doit être
faite sur les lieux de travail. C'est là le but de l'intervention. On ne
conteste rien, on dit que ce n'est pas la formule idéale.
Le Président (M. Blouin): Cela va, merci. M. le
député de Saguenay.
M. Maltais: M. Langlois, dans le domaine de la médecine
industrielle, vous ne semblez absolument pas d'accord avec ce qui se passe
présentement, surtout que la CSST a confié ce domaine aux DSC.
Vous déplorez le manque d'équipement. Vous déplorez
finalement que ce soit le travailleur qui souffre de cette cause. Vous pourriez
peut-être nous donner des petites explications là-dessus.
M. Langlois: Remarquez qu'on parle pour le secteur minier.
M. Maltais: Oui, toujours.
M. Langlois: On ne parle pas pour les autres secteurs. C'est une
autre histoire. En ce qui concerne le secteur minier, on est passablement bien
organisé. En fait, c'est en 1942 qu'on commence à s'occuper non
pas de médecine industrielle comme telle, mais de silicose. On a
formé le premier comité de silicose. On a fait des efforts pour
obtenir, au début, un arrêté en conseil pour l'examen
médical annuel, l'examen pulmonaire annuel à partir de 1946. On
est venu à bout d'obtenir du gouvernement, en 1952, cet
arrêté en conseil. En 1956, on a eu un médecin à
l'association pour s'occuper plus particulièrement de la silicose. On
s'est toujours occupé de cela et on a structuré nos services au
niveau de l'association. À partir de 1956, on a pratiqué le
retrait préventif à l'intérieur de l'entreprise,
basé sur l'examen médical et basé sur l'analyse du milieu
en fonction des poussières et tout cela. Donc, on a reclassé, on
a fait de la réassignation au sein de nos entreprises à partir de
1956, ce qui nous a été enlevé par la loi 52 en 1975 parce
que dès qu'on excluait le site minier, il n'y avait plus moyen de faire
du retrait préventif à l'intérieur des entreprises. Ceux
qui avaient perdu leur certificat médical étaient tout simplement
compensés. On a continué, on a eu un autre médecin
spécialiste pour l'ouïe en 1974 ou 1975, à temps partiel.
Finalement, on a plusieurs médecins qui travaillent, cela coûte de
l'argent, c'est évident. Cela coûte beaucoup plus cher que le
système qu'on propose, mais c'est évident que ce n'est pas un
système qui peut être étendu à tous les secteurs. Je
comprends très bien la CSST de ne pas vouloir le faire.
Finalement, on arrive avec un système en confiant cela au DSC,
des gens qui ne sont pas au courant de la médecine industrielle, qui ne
sont pas des spécialistes en médecine industrielle et qui ont une
population énorme à voir. Je pense que M. Drouin pourrait nous
donner des chiffres à ce sujet. Dans le Nord-Ouest, il y a un ou deux
médecins, par exemple, pour toute la population, pour tous les
employés alors qu'on doit en avoir cinq ou six seulement pour le secteur
minier. À ce point de vue, on dit que ce n'est pas intéressant
pour nous autres de faire reconnaître nos services, même si on sait
très bien qu'on va payer pour les services qui sont fournis par la DSC
à travers la CSST.
Le Président (M. Blouin): Cela va? M. Maltais: Non,
je n'ai pas fini.
Le Président (M. Blouin): D'accord, allez-y.
M. Maltais: M. Langlois, au niveau des
budgets, lorsque vous parlez ici dans votre mémoire en page 8 que
tout au plus il devrait y avoir un budget de 16 000 000 $ consacré
à la prévention et qu'en 1983 on se dirige vers 80 000 000 $,
vous avez peur que cela s'accentue encore beaucoup plus. Au niveau de
l'efficacité, cela représente quoi cette augmentation? Est-ce que
véritablement le travailleur profite de ces millions qui sont
consacrés à la prévention?
M. Langlois: Écoutez, je réponds encore pour le
secteur minier. Je ne nie pas que certains secteurs aient négligé
la prévention et que ce système peut être utile pour eux.
Dans le secteur minier - c'est peut-être un peu cela qui nous choque - on
pense qu'on n'a pas besoin de ce système et que le système qu'on
a établi d'ailleurs va un peu à l'encontre de nos principes de
base en prévention d'accidents. En fait, c'est une remise en question de
ce qu'on a fait depuis 30 ou 35 ans et on pense qu'on a encore la vraie
solution. On ne peut pas imaginer que le nouveau système basé
strictement sur le contrôle à la source et le paritarisme va
amener des résultats supérieurs à ce qu'on a. C'est pour
cela qu'on dit dans notre mémoire qu'on continue à garder notre
système même si c'est embarrassant.
À ce point de vue, le système de prévention qui a
été instauré par la loi 17 et la CSST ne nous rapporte
rien. Je ne sais pas si M. Drouin veut continuer à commenter à ce
sujet, mais de toute façon, pour ma part...
Le Président (M. Blouin): Votre position est très
claire. M. le député de Saguenay.
M. Maltais: Écoutez, en tout cas, il se reprendra tout
à l'heure... Il y a une chose qu'on remarque, c'est que vous avez une
peur bleue de l'ingérence continue de la CSST dans l'application des
règlements chez vous. Est-ce bien cela que j'ai saisi aux pages 9
à 12? Ce qui ressort de cela, finalement, c'est que vous êtes en
conflit continuellement dans l'application de ces règlements par rapport
à la CSST?
M. Langlois: On ne peut pas dire qu'on a une peur bleue, mais on
dit que la plupart de ces règlements sont inutiles, sont embarrassants
et qu'ils réduisent la marge de manoeuvre des employeurs. On s'est
conformé au règlement du programme de prévention. Cela a
coûté énormément de temps et d'argent d'abord
à l'association et après cela aux entreprises aussi sans que,
d'après moi, cela rapporte grand-chose, du moins, pas pour le temps
qu'on a consacré à cela et l'argent qu'on a investi pour
préparer un programme de prévention, le déposer avant la
date limite. On l'a fait avant la date limite. Je pense que les 100%
d'entreprises minières concernées qui dépendent de
l'association se sont conformées à la loi. On est un des seuls
secteurs qui l'ait fait. On le fait, mais on n'est pas sûr du tout que
cela rapporte pour l'argent et le temps qu'on met là-dedans. (17 h
45)
Le Président (M. Blouin): Merci. M. le
député.
M. Maltais: M. Langlois, vous parlez beaucoup dans votre
mémoire, particulièrement à la page 15, de pouvoirs
arbitraires de la commission. Je cite: "Parmi beaucoup d'autres, l'article 35,
par exemple, stipule que la commission décide d'elle-même si le
travailleur est atteint d'amiantose ou de silicose; par l'article 250..."
M. Langlois: C'est la prochaine loi 42. M. Maltais: C'est
la prochaine loi.
M. Langlois: Mais, en fait, on le pratique
déjà.
M. Maltais: Vous le pratiquez déjà.
M. Langlois: C'est déjà pratiqué par la
commission dans les cas de pneumoconiose, d'amiantose et de silicose. Certains
jugements ont été rendus par des tribunaux de révision de
la CSST dans lesquels, après un réexamen de l'employé qui
avait 15% de déficit anatomophysiologique, après un examen de
contrôle, on s'apercevait qu'il n'y avait plus rien. Autrement dit, des
supposés miraculés. Il y a des déclarations des
médecins qui disent: Nous, on a des directives, et étant
donné que c'est une maladie qui est non régressive, on ne peut
pas baisser le pourcentage.
M. Maltais: Au sujet des indemnités versées aux
accidentés, vous n'y allez pas non plus de main morte. Vous avez des
exemples bien concrets. Vous nous dites qu'il y a ni plus ni moins que des
parasites des indemnités. Vous déplorez aussi - je suis
très surpris de lire cela, je croyais que c'était plus
sérieux - des critères d'admissibilité aux
indemnités. Il semblerait que cela aurait une drôle d'influence
sur vos coûts de production parce que vous avez une partie des cinq
premiers jours que vous payez maintenant. Il semblerait aussi que les exigences
de la CSST au niveau de l'admissibilité de ces critères...
Finalement, tout le monde a un petit rhume et tout le monde vous coûte
cinq jours. Est-ce fréquent et est-ce que cela vous cause des
problèmes réels?
M. Langlois: Auparavant, au temps de la CAT, même si cet
organisme n'était pas parfait, on avait certains inspecteurs.
Premièrement, la déclaration d'accident
devait être paraphée par l'employeur et par
l'accidenté. Maintenant, bien souvent, on ne s'occupe plus de la
signature de l'employeur. Je ne sais pas si c'est dans la loi ou pas mais, de
toute façon, on l'a mis dans la loi 42. En pratique, il arrive
très souvent qu'un supposé accidenté va faire un rapport
d'accident, va le signer lui-même, va l'envoyer à la CSST et
l'employeur reçoit simplement le compte. Il est averti quand il
reçoit la facture. C'est de cette manière que le système
est très libéral. Nous, de toute façon, nous ne voyons
aucun contrôle au niveau de ces cas.
En fait d'enquête, par exemple, à ma connaissance, il n'y a
plus d'inspecteurs qui se promènent pour voir si les cas sont
véridiques ou pas. Il y a toute une série de choses comme cela
qui ont libéré le système. En libérant le
système, c'est comme toute autre chose, il y en a qui en abusent. Il y a
trois catégories: les professionnels, qui sont, à notre avis, un
très petit nombre de gens qui essaient de passer leur vie avec les
pensions de la CSST; il y en a d'autres... j'allais pour dire les accidents de
chasse. Il y a la lettre qui parle des gens qui voulaient aller à la
chasse. Je pense que les gens voulaient simplement aller à la chasse,
c'était occasionnel. Étant donné que c'est facile de faire
des réclamations à la CSST et d'avoir des pensions, en trichant
un peu le système, on abuse. Moins il y aura de contrôle, plus on
va abuser.
Je suis venu ici hier et avant-hier, un peu, et j'ai entendu des
associations d'accidentés qui trouvent qu'ils n'en ont pas assez. Ils
auraient probablement dit la même chose il y a dix ans, alors que le
système était beaucoup plus fermé; il y avait tout de
même certains inspecteurs qui contrôlaient les cas d'accident, ceux
qui paraissaient louches. On libéralise encore plus et on se
représente à la commission parlementaire pour dire qu'on n'en a
pas encore assez. Évidemment, il n'y a pas de limite à cela.
Tout ce qu'on veut, c'est un certain contrôle; on veut pouvoir
compenser les accidentés, mais les vrais accidentés. Ceux qui
abusent du système, on veut pouvoir les contrôler jusqu'à
un certain point. C'est simplement ce qu'on demande.
M. Maltais: M. Langlois, à un moment donné dans
votre mémoire, aux pages 21 et 23, vous accusez somme toute la CSST de
ne pas faire la récupération d'argent à laquelle elle a
droit dans certains cas. Un peu plus loin, vous dites ni plus ni moins qu'elle
dilapide les fonds, ce qui augmente vos cotisations qui sont, d'après
vous, un peu trop élevées.
M. Langlois: Je n'ai pas utilisé l'expression "dilapider
les fonds".
Le Président (M. Blouin): Un instant, M. Langlois, s'il
vous plaît! M. le député va compléter sa
question.
M. Maltais: Non, c'est mon interprétation de ce que j'ai
compris, M. Langlois. Ce n'est pas vous qui le dites dans votre mémoire.
Je comprends très mal cette façon, parce que si on ne
récupère pas là où on doit récupérer
et, finalement, si on... Vous dites que, dans la distribution des fonds, c'est
un rôle dans lequel elle excelle. C'est une manière un peu cynique
de le dire, mais il semblerait que ce soit la vérité. C'est quoi,
au juste, cette histoire-là?
Le Président (M. Blouin): M. le député de
Saguenay, désirez-vous obtenir des... Il me semble que l'exposé
dans le mémoire est assez clair. Avez-vous une question relativement au
contenu du mémoire?
M. Maltais: Pour moi, cela est une antithèse, M. le
Président. D'une part, on dit que c'est une pratique connue de la
commission de ne réclamer que très rarement ces fonds. Pour moi,
c'est un préambule. Plus loin, on dit que la commission peut prendre
toute initiative qu'elle désire au niveau de la distribution des fonds.
Pour moi, c'est une question. Elle ne récupère pas les fonds.
C'est une pratique courante et c'est plus facile pour elle de donner des fonds
que de les récupérer. C'est un peu ce que vous nous dites.
Le Président (M. Blouin): D'accord. C'est une question. M.
Langlois.
M. Maltais: C'est aux pages 21 et 23. C'est ce que je voudrais
savoir.
M. Langlois: Évidemment, ce n'est pas tellement facile
d'aller chercher des fonds qu'on a accordés, même par erreur,
à des gens lorsqu'ils sont dépensés. Il est possible... On
ne veut pas être absolu là-dedans, mais l'impression qu'on a...
Moi, de toute façon, je n'ai jamais eu connaissance qu'on ait obtenu des
fonds pour un employé ou un soi-disant accidenté, même par
erreur, s'il n'y avait pas droit. Dans le cas des cinq jours, c'est patent.
Même si le cas n'est pas accepté, l'employeur a payé les
cinq jours et ce n'est pas l'employé qui rembourse l'argent à la
commission. Évidemment, la commission le donne à l'employeur. Ce
que l'employeur a donné est remboursé par la CSST - les cinq
jours - par la suite, mais ce que la commission fait, elle transporte cet
argent au fonds général, qui est aussi le fonds des
employeurs.
M. Maltais: Vous parlez aussi, M. Langlois - toujours dans votre
mémoire -d'un très généreux système de
pension à des
retraités, et vous nous donnez des exemples. Il y en a même
pour qui c'est plus payant de recevoir les prestations d'accident du travail
que de travailler, avec ces pensions. J'imagine que ce sont quand même
des cas particuliers et que je dois comprendre que ce n'est pas
généralisé dans votre domaine, particulièrement aux
mines, ou est-ce que ce sont des cas généralisés?
M. Langlois: C'est très difficile de répondre
à cela. Cela reste toujours des cas particuliers, mais quand les cas
sont tellement nombreux, cela devient presque une politique. Je pense que c'est
même légal de le faire, en vertu de l'article 56.
L'interprétation de l'article 56 est tellement large que je pense qu'on
peut le faire légalement. On peut accorder ces pensions
légalement, parce que ce n'est pas précisé. On pourrait le
citer. Il est en annexe ici. Il reste une chose: quand on dit que ce sont des
particuliers, il faut bien s'entendre; dans les cas de pneumoconiose, de
silicose et d'amiantose, ce ne sont plus des cas particuliers, parce que tous
les cas en haut de 5% qui, selon nous, ne correspondent absolument pas à
une déficience physique, sont compensés automatiquement, parce
qu'ils perdent leur certificat médical. Ce n'est plus un cas
particulier. C'est un cas général. Dans le cas des compensations
pour surdité, il faudrait voir... Je pense que c'est la direction de la
CSST, beaucoup plus que nous, qui peut répondre à cela. Nous
disons qu'il y a beaucoup de cas semblables. C'est tout ce qu'on peut dire.
M. Maltais: M. Langlois, à un moment donné, vous
comparez les coûts de 1975 à 1982, au niveau des deux sortes de
mines: les mines de fer qui font partie d'un groupe différent et les
mines non ferreuses. Est-ce la même proportion d'augmentation qu'on a vue
ou qu'on voit dans d'autres industries, par exemple, la construction ou je ne
sais quoi? C'est quoi, la proportion?
M. Langlois: Je n'ai pas comparé avec d'autres industries.
Je ne pourrais pas vous dire si les proportions sont les mêmes.
Simplement, si vous vous référez...
M. Drouin: Je peux vous donner une explication. Il y a,
évidemment, l'inflation qui est une chose, mais vous avez une
explication à l'annexe 6 du tableau où on voit la variation de
l'échelle des indemnités d'une année à l'autre.
Vous avez la courbe au-dessus qui donne le taux d'indemnisation en fonction du
système. Le système est lui-même plus
généreux, surtout depuis l'adoption de la loi 114. C'est une
explication de l'augmentation du coût. L'augmentation du coût n'est
pas seulement conséquente à ce qu'on peut appeler de la
libéralité, c'est le système aussi qui est devenu plus
généreux.
M. Maltais: Mais, lorsque vous faites vos statistiques, est-ce
que vous les faites...
M. Drouin: Non, je ne fais pas de statistiques, je les regarde
seulement.
M. Maltais: Vous les regardez. Mais, est-ce que, dans la
comparaison, on inclut le nombre d'heures travaillées, par exemple,
proportionnellement? Est-ce qu'on a tenu compte de la proportion? Disons qu'en
1975, il y avait 10 000 000 d'heures travaillées. En 1982, j'imagine
qu'il y en a moins de 10 000 000.
M. Drouin: Ce sont des tableaux de fréquence.
M. Maltais: D'accord.
M. Drouin: Cela tient compte du nombre d'heures. Je parle des
statistiques en noir, non pas la ligne du haut.
M. Maltais: Vous nous dites finalement, à la fin de votre
mémoire, qu'il y a quand même encore beaucoup d'accidents. Le
domaine minier, c'est malheureusement un domaine, comme vous l'avez
souligné, qui n'est pas facile. Est-ce que, dans les accidents qu'on
retrouve depuis cinq ans, il y a moins de pertes de vie ou est-ce qu'il y a
moins de blessures plus graves comme la perte de membres et ces
choses-là?
M. Drouin: Vous avez la réponse, M... J'ai des
problèmes, ici, et je ne me rappelle pas votre nom, M. le
député de...
M. Maltais: Maltais, député de Saguenay.
M. Drouin: La réponse est ici dans le tableau de l'annexe
VIII où on voit justement le taux de variation des accidents
sérieux. On voit que les accidents sérieux sont passés de
l'ordre d'environ 55% en 1977 à environ 16% en 1982. On est rendu
environ à 19% en 1983, à l'heure actuelle. Le nombre total
d'accidents sérieux diminue. C'est une statistique par rapport au nombre
d'accidents compensés. Cela veut dire qu'en 1977, 45% des accidents
compensés étaient considérés comme des accidents
mineurs, tandis qu'en 1982, on est rendu à 84% des accidents
jugés mineurs compensables. C'est cela qu'on vous dit justement. Avant
cela, l'annexe VII démontre la même chose, savoir que, par
exemple, en 1973, pour 100 accidents mineurs, 66 étaient sérieux,
tandis qu'en 1981, pour encore 100 accidents mineurs, 132 sont sérieux,
c'est-à-dire sont compensables. Cela veut dire qu'il y a
quelque chose qui ne tient plus dans tout cela. La fréquence
augmente et, malgré tout, le taux d'accidents sérieux
diminue.
M. Langlois: Pour les accidents mortels, la preuve est encore
plus éclatante. Pour les membres de l'AMMQ, il y a un dernier tableau,
à la page 10. Il y en avait douze en 1974 et, en 1982, il y en avait un.
Évidemment, il y en a eu neuf en 1980, à cause de l'accident de
Belmoral, mais cela a diminué graduellement.
M. Maltais: J'ai presque terminé, M. le Président,
si vous le permettez.
Le Président (M. Blouin): II faut suspendre à 18
heures précises. Si vous pouviez conclure...
M. Pagé: On continuera tantôt.
M. Maltais: II nous reste quand même quelques minutes.
Le Président (M. Blouin): Oui.
M. Maltais: Dans votre conclusion, il y a quand même
plusieurs points marquants. Il y a trois recommandations bien
spécifiques, mais il y en a une qui semble tout à fait
inacceptable pour l'ensemble de l'industrie minière. Vous dites ni plus
ni moins: C'est un organisme qui devait être modeste et qui est devenu un
monstre.
M. Langlois: Exactement. D'ailleurs, on n'a qu'à faire
référence à la préface du livre blanc et aux
paroles de M. Marois, qui le disait lui-même. On a commencé par la
loi 17. Je pense qu'on a oublié le livre blanc dans la brume, lorsqu'on
a rédigé la loi 17, parce que, dans la loi 17 elle-même, il
y a un article, par exemple, qui touche 41 champs d'activité plus un 42e
où on profite de la réglementation sur n'importe quoi; quand un
organisme administre seulement un article comme celui-là, il faut qu'il
soit gros. Tout de suite, la loi 17 contredit les objectifs du ministre Marois
dans la préface du livre blanc. Premièrement, on est pris avec
cela: cet organisme découle de la loi 17. En plus de cela, je pense
qu'on l'a amplifié passablement.
Le Président (M. Blouin): Merci, M. Langlois. Merci, M. le
député de Saguenay. On pourra revenir à 20 heures. Pour le
moment, la commission élue permanente du travail doit suspendre ses
travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 heures)
(Reprise de la séance à 20 h 21)
Le Président (M. Gagnon): À l'ordre! Lors de la
suspension de nos travaux, nous étions à entendre l'Association
des mines de métaux du Québec Inc. Je pense que l'audition du
mémoire était terminée et que le député de
Saguenay avait la parole. M. le député de Saguenay.
M. Maltais: Merci, M. le Président. Alors, nous en
étions rendus au préambule, avant la conclusion du rapport. Et
à la page 36, vous nous dites, messieurs, que, malgré les
enfarges de la loi 17 et malgré aussi la difficulté d'application
des nombreux règlements promulgués par cette loi et par la CSST,
nombreux règlements que vous êtes obligés d'appliquer, vous
continuez les activités de prévention des accidents et aussi des
maladies industrielles. J'imagine que lorsque vous continuez ces
activités, ce sont des coûts également parce qu'il n'y a
rien de gratuit.
Finalement, on peut dire que, malgré la réglementation qui
s'applique aux travailleurs, vous êtes conscients que cette
réglementation n'est pas suffisante et vous êtes obligés de
continuer de prévenir quand même, d'investir des sommes pour
prévenir.
M. Langlois: On ne dit pas que la réglementation n'est pas
suffisante, justement parce qu'on dit qu'il y a trop de réglementation.
Et une de nos recommandations, la première, c'est la
déréglementation. Ce qu'on dit tout simplement, c'est qu'on avait
un système auparavant et qu'on aimerait bien qu'on nous laisse
travailler. C'est pour cela qu'on suit... On a des approches auxquelles on
croit, on a une base de prévention qui est établie depuis 35 ou
40 ans à laquelle on croit et qu'on a rodée pendant toutes ces
décennies. On ne veut pas, justement, avoir une réglementation
qui nous empêche de travailler à l'intérieur de notre
schème. On est prêt à subir la réglementation qu'il
y a, mais ce n'est pas parce qu'on le veut.
M. Drouin: Je n'en ai pas tellement long à ajouter, c'est
qu'on va se conformer à tous les règlements qui vont sortir. Et
le meilleur exemple qu'on puisse vous donner, c'est le règlement sur le
programme de prévention. On a mis tous les efforts en marche pour
s'assurer qu'on ferait de bons programmes de prévention parce qu'on
trouvait dans le programme une quantité d'éléments
intéressants. Comme, par exemple, le règlement mettant l'emphase
sur l'entretien préventif, c'était une faiblesse qu'on avait chez
nous, on en a profité pour renforcir la question de l'entretien
préventif. Le règlement mettait de l'emphase sur les normes; on
n'est pas d'accord avec l'approche des normes, mais on sait qu'il y avait des
faiblesses là-dessus, on a embarqué.
On embarque dans tout cela, mais tout ceci pour dire qu'on va prendre
dans la loi tout ce que l'on voit, où l'on est certain que cela va nous
aider à faire avancer la cause; on va embarquer. Mais on ne changera pas
la priorité. La priorité, pour nous, c'est la supervision et on
va continuer là-dessus. On ne dira pas que c'est à travers des
comités qu'on va s'acquitter de nos responsabilités. L'article 51
de la loi définit un paquet de chapitres. On n'est libéré
d'absolument rien au point de vue des responsabilités. On va continuer
là-dedans. Mais ce ne sera pas à travers le paritarisme qu'on
croit pouvoir atteindre les objectifs beaucoup plus progressifs que ce que l'on
a là. Mais on va collaborer à 100% partout où c'est
possible.
M. Maltais: D'accord. Ma question -peut-être que je n'ai
pas été assez clair -c'est qu'en sus des 42 règlements
vous appliquez une politique qui vous est propre. Cette politique...
M. Drouin: Exactement.
M. Maltais: ...entraîne automatiquement des coûts, ce
qui veut dire que vous avez ni plus ni moins une double taxation de ce
côté. C'est une taxation volontaire de votre part.
M. Langlois: On est habitué à cela et on
l'assume.
M. Maltais: Cela nous amène aux conclusions, M. Langlois.
Parmi vos trois recommandations qui sont, je pense, très claires, la
première nous dit que finalement la loi 17, dans son application, n'est
pas réaliste, qu'il y a des irritants - c'est un mot bien à la
mode par les temps qui courent - continuels et que toute cette
réglementation n'apporte rien de nouveau aux travailleurs. Est-ce que
c'est vrai?
M. Langlois: Très peu; je ne peux rien dire parce que
c'est un mot absolu, mais très peu à nos travailleurs. Je pense
que M. Drouin s'est exprimé très bien dans le cas du
règlement sur le programme de prévention. Certains autres
règlements n'apportent rien du tout. Il y a certains règlements
qui sont proposés et on est obligé de se battre pour les
éliminer parce qu'ils ne sont pas réalistes, ou les ramener
à une base un peu plus réaliste.
M. Maltais: Si je comprends bien, parmi les 42 règlements
vous trouvez qu'il y en a un peu trop.
M. Langlois: C'est-à-dire les 42 champs
d'activité...
M. Maltais: Champs d'activité.
M. Langlois: C'est différent parce qu'un champ
d'activité peut vouloir dire beaucoup de règlements. On dit qu'on
ne résoudra pas le problème seulement avec des règlements.
Cela en prend certains. Il y a certains règlements qui sont
nécessaires, mais c'est ce qu'on appelle la robotisation de la
prévention. Cela serait trop facile d'avoir toute une série de
règlements très détaillés où on pourrait
dire: On applique tel règlement et on règle le problème.
Ce n'est pas vrai. Le problème de la santé et de la
sécurité du travail se règle aussi avec les personnes.
C'est la responsabilisation des personnes qui est le plus important
élément dans cela. Beaucoup plus que les règlements. On ne
nie pas qu'il doit y avoir de temps en temps certains règlements, mais
une foule de règlements qui essaient de régler tous les
détails, on est absolument contre cela. À notre point de vue,
cela va à l'inverse de la responsabilisation parce que, quand tu as 100
ou 200 règlements, tu te fies sur les règlements et finalement tu
n'es pas incité à faire de la prévention toi-même.
C'est aussi simple que cela.
M. Maltais: Dans la recommandation 2, M. Langlois, vous dites: II
est clair, cependant, que la norme zéro exigée par la CSST pour
la qualité de l'environnement ne règle pas le problème.
Là-dessus, vous faites référence à certaines
maladies industrielles et aussi aux critères d'admissibilité qui
ne font pas votre bonheur. Vous trouvez que la mesure est un peu trop "at
large", si je peux m'exprimer ainsi. Finalement, c'est un contrôle
tatillon et en réalité ce n'est pas un véritable
contrôle, cela ne vous satisfait pas.
M. Langlois: Quand on parle de la norme zéro, c'est au
niveau de l'amiantose et de la silicose. La CSST exige pour réassigner
notre travailleur - elle n'est pas contre en principe - qu'il y ait zéro
poussière d'amiante et zéro poussière de silice sur le
site minier. Cela est irréaliste. On peut se promener ici dans la salle
et on va trouver des poussières d'amiante et des poussières de
silice. Donc, c'est absolument irréaliste. C'est aussi bien de dire
qu'on défend de réassigner les travailleurs sur le site minier.
Je ne sais pas si tu veux... (20 h 30)
M. Drouin: Moi, je regarde cela. Si je me rappelle les
débats de 1975, la norme zéro, le mot était sorti cette
fois à l'occasion d'une déclaration du Dr McDonald qui disait que
la seule façon de s'assurer que quelqu'un ne fasse plus d'amiantose est
de ne plus être jamais exposé à l'amiante. C'était
quelque chose dans ce genre, je ne me rappelle pas les détails. C'est
cela que cela voulait dire. C'est clair. La meilleure façon, d'ailleurs,
de prévenir le divorce, c'est
d'interdire le mariage. C'est évident que c'est quelque chose
dans ce genre qu'il faut faire. Mais la norme zéro, il y a une
incongruité là-dedans qui vient du fait que ce n'est pas conforme
à la politique de l'American Public Health Association qui était
le barème utilisé par les médecins avant l'entrée
en vigueur de la loi 52. Le retrait préventif d'un travailleur dans un
milieu où il était exposé à la poussière ne
dépendait pas seulement d'une observation de la qualité de ses
poumons ou encore de sa capacité physique de respirer. Cela
dépendait des années d'exposition et de la qualité de
l'exposition. Par exemple, on disait: Quelqu'un qui avait atteint un
état pulmonaire quelconque après 35 ans d'exposition, il lui
restait deux ans d'exposition à faire et ils disaient: Ce type-là
n'aura pas de problèmes à continuer jusqu'à la fin. En
fait, les problèmes psychologiques qu'il est susceptible de
développer si on le retire du milieu sont plus graves que les
problèmes qu'il peut développer dans la continuation de
l'exposition; mais, pour le même type d'exposition, un type qui a 35 ans
ou 30 ans a besoin d'un retrait après cinq ou six ans d'exposition. En
d'autres mots, la norme zéro est une norme administrative facile
à régler, tandis que la norme ou la politique de l'APHA est une
solution de problèmes cas par cas sur une base professionnelle, sur une
base médicale. Je suis convaincu qu'un type de 35 ans qui aurait, par
exemple, une radiographie d'une certaine importance, doit sortir
complètement du milieu. Quand il est rendu à 63 ans, le
problème n'est plus là. La norme zéro, c'est relatif.
C'est fonction de quelque chose de beaucoup plus grand que du simple point de
vue administratif.
M. Langlois: J'aimerais vous apporter un exemple de ce que je
vous ai dit tout à l'heure au sujet de la norme zéro. On en a eu
un exemple dans une mine de la Côte-Nord où un travailleur avait
des rayons X ou une radiographie pulmonaire qui montrait des signes de
silicose. On a voulu le recycler dans une chambre d'ordinateur, à
atmosphère contrôlée, mais on n'a pas pu, parce que le
règlement défendait de le recycler sur le site minier et que la
chambre d'ordinateur était sur le site minier.
M. Maltais: Dans votre troisième recommandation, vous
faites beaucoup état, d'abord, du manque de communication et de la
très mauvaise gestion du système. Pour vous, ce serait quoi,
l'idéal?
M. Langlois: Ce qu'on dit dans notre recommandation, au niveau
des contrôles... D'abord, on ne parle pas du manque de communication. On
dit qu'on s'est équipé de façon très
sophistiquée avec des dizaines de millions de dollars au niveau des
communications. Donc, on pourrait très facilement établir des
contrôles pour les cas abusifs, comme on vous a démontré,
par exemple, que la fréquence des accidents augmente parce qu'on
compense de plus en plus les accidents mineurs et les accidents sans fait
accidentel précis, et ces cas, on pourrait les contrôler
très facilement à cause de l'équipement sophistiqué
d'ordinateurs et de communications qu'on a dans le moment. Ce serait
très facile. On m'a dit ce soir qu'on avait encore des enquêteurs.
On n'en a jamais vu depuis trois ou quatre ans. On en avait auparavant, il y a
dix ans. Il y avait des enquêteurs qui faisaient certaines
enquêtes. Présentement, je pense que c'est disparu
complètement du système. J'aimerais dire une chose
là-dessus. On n'aide pas les travailleurs là-dessus. On aide ceux
qui abusent du système. Ceux qui abusent du système, dans le
fond, ils se cherchent une porte ouverte. Si la porte est ouverte, ils entrent.
Je pense que j'en ai parlé un peu tout à l'heure et je crois
qu'on doit y revenir: les travailleurs honnêtes qui sont
accidentés, ceux-là doivent être compensés de la
meilleure manière possible et réadaptés de la meilleure
manière possible. Ce qu'on veut prévenir, ce sont les abus et on
sait que c'est le petit nombre.
M. Maltais: M. le Président, j'aimerais remercier M.
Langlois et les personnes de son association qui l'accompagnent. Même si
les questions ont paru longues, j'aimerais seulement ajouter un petit point
pour un certain éclairage et je prierais peut-être les personnes
de la CSST d'écouter. Je ne connaissais pas les gens de l'association
qui sont ici présentement. Cela fait seulement six mois que j'ai
été élu député. Soyez sans crainte, ce
n'étaient pas des questions plantées. Merci.
Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le
député de Saguenay. M. le député de
Sainte-Anne.
M. Maltais: Je suis sûr qu'il y en a qui se sont reconnus,
M. le ministre.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: Merci, M. le Président. M. Langlois, d'abord,
est-ce que votre association est présentement représentée
ou est-ce qu'elle a déjà été
représentée au conseil de la CSST?
Une voix: ...
M. Polak: Excusez-moi, mais c'est moi qui ai posé la
question et c'est lui qui répond. D'accord?
Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Cusano: Tu peux t'asseoir là-bas. Une voix:
...
Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Cusano: Tu peux t'asseoir là-bas si tu veux
répondre.
Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. le député de Sainte-Anne.
M. Polak: M. Langlois, ne portez pas attention à ce qui se
passe de l'autre côté de la clôture, répondez donc
à ma question.
M. Langlois: Je ne pense pas pouvoir dire que l'association est
représentée au conseil d'administration. Il est vrai que notre
directeur des services techniques siège au conseil d'administration de
la CSST; il est là comme expert, il est le représentant du
Conseil du patronat.
M. Polak: Avant vous, le mémoire de l'Association des
entrepreneurs en construction nous a parlé du pourcentage - je pense que
c'est à peu près 16% - du total des recettes auxquelles ils
contribuent. Votre organisme, ou les mines, vous contribuez pour combien, au
total, à l'enveloppe de la CSST, à peu près, en
pourcentage?
M. Langlois: II faut bien s'entendre. Notre organisme
représente à peu près 18 000 travailleurs; donc, on ne
peut s'attendre à en représenter autant que ceux de la
construction, qui, eux, en ont 125 000 ou 150 000. Si ma mémoire est
bonne, l'organisme que je représente contribue en versant une somme de
l'ordre de 25 000 000 $ environ. Faites la proportion avec le budget d'environ
980 000 000 $. Maintenant, cela n'inclut pas les services de prévention
qu'on fournit, cela n'inclut pas toute une série d'autres choses.
M. Polak: Maintenant, j'imagine que les mines ne fonctionnent pas
seulement dans la province de Québec. Si on parle sur le plan national -
pour moi, le plan national veut dire le plan canadien - avez-vous des mines ou
des membres qui gèrent des mines en Ontario, par exemple, en même
temps que dans la province de Québec?
M. Langlois: C'est évident que les compagnies
minières sont de grosses entreprises qui oeuvrent aussi bien
internationalement que nationalement, mais il faut dire que les
activités minières sont autonomes dans les endroits où
elles s'exercent. Si on prend l'exemple de la compagnie Noranda, qui
gère quelque chose comme 25 ou 30 mines à travers le monde et
à travers le Canada, dont quelques-unes ici, au Québec, tout ce
qui est au Québec est autonome.
Vous demandez la comparaison qui peut exister entre les autres provinces
et le Québec.
M. Polak: Ce matin, un témoignage a été
rendu. Si on prend l'exemple de l'Ontario et du Québec, on paie, dans le
secteur de la construction, le double tarif pour à peu près les
mêmes services; grosso modo, car c'est difficile à comparer.
M. Langlois: C'est très difficile de faire des
comparaisons. D'abord, si on se compare à l'Ontario, on compare sur des
méthodes différentes, on fait des catégories
différentes. Par exemple, les mines d'or sont ensemble, les mines de
nickel sont ensemble. Je dois vous avouer que le peu de temps qui nous a
été donné pour la préparation du mémoire ne
nous a pas permis de faire la recherche nécessaire à la
comparaison entre l'Ontario et le Québec ou même la Colombie
britannique et le Québec.
M. Polak: Maintenant, au point de vue de la
réglementation, il y a quelqu'un ici des mines Noranda, qui,
peut-être, connaît quelqu'un travaillant pour Noranda en Ontario.
Au point de vue de la réglementation, est-ce que Québec est vu
comme un vrai problème, et beaucoup moins en Ontario, ou si
Québec est un modèle où tout est magnifique et où
tout va très bien, parce qu'on a un président de la CSST qui sait
vraiment ce qu'il fait, alors que, dans d'autres provinces, ce n'est pas le
cas? Y a-t-il des rumeurs qui circulent dans l'industrie à cet effet, y
a-t-il des comparaisons entre l'une et l'autre?
M. Marcoux (Camil): L'impression qu'on a est que la
réglementation au Québec est beaucoup plus sévère
que dans les autres provinces et probablement ailleurs dans le monde.
Maintenant, c'est difficile de répondre exactement à votre
question, car, dans toutes les provinces, on trouve toujours que la
réglementation est difficile. Il y a une chose qu'on commence à
regarder, justement. Sans avoir d'étude de faite dans ce domaine, on a
drôlement l'impression que, dans les montants payés en
compensation dans les autres provinces et à la CSST ici au
Québec, le pourcentage qui revient aux accidentés est minime en
comparaison du montant total payé. Avec les informations qu'on a - je
crois que la CSST serait peut-être plus en mesure de fournir
l'information - on a l'impression que les accidentés
reçoivent entre 25% et 30% des montants versés à la
CSST. Ces montants incluraient même des montants capitalisés. On
parlait tout à l'heure, dans des cas de surdité, de 200 000 $,
etc.
M. Polak: Selon votre connaissance personnelle, avez-vous
l'impression que la lourdeur de l'appareil administratif - on a appelé
cela le monstre administratif, la grande boîte ou un deuxième
stade olympique - de la CSST, ici dans la province de Québec, en
connaissance de cause, en parlant avec d'autres personnes d'autres provinces,
en vous basant sur ce fait, avez-vous l'impression que ce n'est pas du tout la
même histoire ailleurs qu'ici au Québec?
M. Marcoux (Camil): Lorsqu'on discute de ces problèmes
avec les personnes qui travaillent dans les autres provinces, même si
elles trouvent qu'elles paient assez cher pour les accidents, on a la sympathie
de ces personnes envers le Québec.
M. Polak: Concernant le nombre d'accidents ou la gravité
des accidents, en comparant d'autres provinces avec le Québec, avec ce
grand appareil administratif, peut-on dire qu'au Québec il y en a
beaucoup moins que dans d'autres provinces? A-t-on moins d'avantages ou est-ce
que cela n'est pas prouvé?
M. Marcoux (Camil): Cela dépend des années dont on
parle. Si on parle du passé, le Québec a toujours
été reconnu comme ayant les meilleures fréquences au point
de vue des accidents dans les mines. Depuis quelques années, depuis les
années récentes, c'est le contraire. Dans nos statistiques
concernant Noranda, le Québec est au bas de la liste. On pense qu'on
fait le même travail que celui qu'on faisait au point de vue de la
prévention. On pense qu'il y a moins d'accidents sérieux qu'on en
avait, mais, pour une raison ou pour une autre, il y a plus d'accidents
compensés que ceux qu'on avait dans le passé.
M. Polak: Je vais vous interroger, parce que vous parlez de ce
sujet. À la page 32 de votre mémoire, vous faites
référence à la prévention. Concernant la
prévention, cela va beaucoup mieux maintenant. Peut-on créditer
la CSST de cela ou peut-on dire que c'était déjà un
système qui existait dans les mines, qu'on a développé,
qu'on a peut-être eu l'appui de la part de la CSST, mais que ce n'est pas
la CSST qui a fait changer la situation? Qui devons-nous créditer pour
le changement qui a eu lieu, le fait qu'il y a moins d'accidents graves?
M. Langlois: Je pense qu'on l'a dit très clairement dans
notre mémoire, parce qu'on croit beaucoup plus à notre
système qu'à celui de la CSST. Je pense que vous pouvez tirer les
conclusions à partir de cela. J'aimerais mentionner une chose, c'est
qu'en 1974, on a engagé un bonhomme, M. Savoie, qui avait comme objectif
de diminuer les accidents mortels. Je ne peux pas vous dire qu'il est le grand
responsable du fait d'être parti de dix ou onze accidents mortels par
année pour ramener ce nombre à un, mais, en fait, c'est ce qui
est arrivé et il y a eu une diminution des accidents mortels. Il s'est
appliqué spécialement à diminuer les accidents mortels.
C'est un bonhomme qui travaille encore pour nous, qui est à son bureau
à Val-d'Or et qui s'occupe strictement de la prévention. Nous
avons deux ou trois inspecteurs à cet endroit. Sa vocation a
été de diminuer les accidents mortels. Ce n'est pas la CSST qui
est responsable de cela. (20 h 45)
M. Polak: D'accord. Je veux revenir sur ce que vous avez
relaté à la page 26 de votre mémoire, les quelques
exemples qui semblent vraiment très frappants, la surdité pour
une personne de 70 ans, une de 80 ans et même une de 90 ans. Quand le cas
est arrivé, avez-vous insisté pour que votre médecin ou le
médecin de la compagnie examine également ce monsieur?
M. Langlois: Je pense qu'ils sont sourds. Il n'y a aucun doute
là-dessus. Je ne sais pas s'ils sont sourds à cause de leur
travail antérieur ou si c'est tout simplement à cause de la
vieillesse, ce serait un débat à faire. J'ai dit avant le
dîner que c'était permis par l'article 56 de la loi, en faisant
une interprétation large de l'article ou peut-être d'un autre
article. De toute façon, je pense qu'on avait le droit parce que le gars
pouvait être compensé à vie. Que voulez-vous qu'on vous
dise? Je pense que c'est la loi qui est fautive là-dedans. Je pense tout
simplement qu'on ne devrait pas compenser les retraités, surtout pour
surdité. On les compense - on est d'accord avec cela -quand ils sont au
travail et ils ne perdent pas leur emploi.
M. Drouin: M. le Président, je sais qu'évidemment
la commission est prise avec un problème d'indemnisation à vie et
l'article 38.4. Cette fameuse gymnastique est extrêmement complexe. Il me
semble que le gouvernement pourrait faire quelque chose de rapide pour aider la
commission et là, je peux même travailler en ce sens, étant
accidentellement membre du conseil d'administration. Il me semble qu'il n'y a
pas de logique là-dedans. On peut trouver quelque part un trou dans la
loi qui fait qu'on ne peut pas accorder des indemnités pour retour au
travail à un gars de 90 ans. Il y a des maudites limites. Il y a
quelque
chose qui ne marche pas là-dedans. Cela a beau être la loi.
Il doit y avoir un trou dans la loi pour régler cela. Cela n'a pas de
sens.
M. Polak: M. Langlois, tout de même, vous saviez qu'il y a
un président-directeur général, le P.-D.G., et tout le
monde parle de ce M. Sauvé. Quand des cas comme cela se produisent,
est-ce que vous communiquez avec M. Sauvé pour dire: Voici, il y a
quelque chose qui se passe, cela ne tient pas debout. Comment est-ce qu'il
réagit? Est-ce qu'il est sourd ou est-ce qu'il vous écoute?
M. Langlois: Je ne peux pas dire que je communique
personnellement avec M. Sauvé. Il y en a certains qui communiquent.
M. Polak: Pour moi, c'est important. Je voudrais savoir si M.
Sauvé est au courant. Si c'est seulement un ou deux cas, je comprends
que, dans les milliers de cas de la province de Québec, c'est bien
difficile. Dans votre mémoire, vous dites: II y a un certain laxisme, un
libéralisme, un abus du système, vous faites
référence à cela. Ce sont tout de même des
accusations assez graves. Je vous demande: Avez-vous pris le temps ou la peine
de communiquer avec M. Sauvé et de lui dire: Voici, il y a cinq, six,
sept ou huit cas. Il y a une limite parce que c'est notre argent, ce sont les
employeurs qui paient. Qu'est-ce que vous faites avec cela? Votre laxisme. Vous
êtes le grand "boss"? Avez-vous fait cette tentative soit avec lui soit
avec un de ses vice-présidents ou quelqu'un qui s'occupe du dossier?
Deuxièmement, quelle était la réaction?
M. Drouin: J'ai deux réponses à vous donner M. le
député. La première, ce serait d'abord de poser à
nouveau la question à M. le président quand il viendra ici. C'est
lui qui va donner une réponse là-dessus. Deuxièmement, je
crois qu'il y aurait peut-être lieu de penser à aider la
commission, à guider la commission, à nous guider à la
commission, de faire en sorte que nous ayons les contrôles de nos
déboursés à la commission. Nous tenons un peu trop pour
acquis - je n'ai pas le droit de parler comme cela, je ne suis pas à la
commission - à la commission, on tient trop pour acquis le fait qu'il
faut protéger le travailleur. Je suis d'accord avec cela. Mais, à
un moment donné, il faut remettre à César ce qui
appartient à César. Ce qu'on demande, c'est strictement de
l'équité, pas autre chose que de l'équité, pas plus
que cela, mais des contrôles.
M. Langlois: J'aimerais ajouter tout simplement que je crois
personnellement que
M. Sauvé est très au courant de toutes ces questions.
M. Polak: II est au courant.
M. Langlois: Je le crois. Du moins, son personnel est
sûrement très au courant de la question.
M. Polak: Maintenant, vous n'étiez pas ici et je sais que
le président, cet après-midi, m'a refusé une telle
question quand je demandais de comparer le mémoire d'un groupe avec
celui d'un autre groupe. Je ne voudrais pas le faire pour respecter la
jurisprudence créée par votre confrère, M. le
Président. J'ai été très impressionné - je
suis ici depuis le début, lundi - par le mémoire de ce groupement
qui représente les accidentés. Il n'y a pas de doute dans mon
esprit que, si cela prend un groupement ou une fédération pour
représenter les accidentés et faire valoir leurs
réclamations, il y a quelque chose qui ne marche pas, parce que,
autrement, ils n'auraient pas besoin de cette représentation. Même
si la moitié de ce qui a été dit est vrai, d'après
moi, la situation est pas mal scandaleuse. Un élément qui sortait
très souvent, c'étaient les délais, les délais
d'appel, les délais pour produire la réclamation, pour se faire
écouter et pour ouvrir les dossiers. Cela créait toutes sortes de
problèmes. En physiothérapie, avant que ce soit permis, la
personne, qui continuait de souffrir, était payée. En tout cas,
tout le monde était d'accord que c'était un problème
grave, le problème des délais. Quelle est votre opinion sur ce
problème? Du côté patronal, avez-vous un commentaire
là-dessus?
M. Drouin: M. le Président, là-dessus,
personnellement, je ne pense pas que les mines aient beaucoup connu ce
problème des gens qui se plaignent. Il y en a un qui fait la parade ici
et qui dit qu'il n'a pas assez depuis des années, mais c'est un cas
particulier. Je ne connais pas de problèmes personnellement où
les gens se plaignent d'être sous-payés, mais il y en a, des
sous-payés, c'est vrai. Et j'admets que les délais sont longs
à cause des listes considérables d'attente pour passer en
révision, des listes considérables d'attente pour passer à
la Commission des affaires sociales, mais il me semble qu'il y a un message
dans ces listes considérables d'attente. S'il y a tant de gens qui s'en
vont en révision et en appel... Il y a deux sortes d'appel. Il y a ceux
qui n'en ont pas assez et ceux qui pensent qu'il y en a trop eu. Il y a deux
sortes de gens qui réclament. Il y a des sous-payés - je suis
convaincu qu'il y en a - mais il y a des surpayés, et les employeurs
sont aussi convaincus qu'il y en a. Tout cela pour dire qu'il y a du
contrôle. La commission a pris une position dernièrement qui
s'appelle la "reconsidération interne." Je pense que c'est un bon pas en
avant, mais, d'un autre côté,
il faut absolument qu'il y ait, au niveau du fonctionnarisme, des gens
qui prennent un peu leurs responsabilités. C'est peut-être cela,
le problème.
M. Langlois: J'aimerais ajouter seulement un mot
là-dessus, seulement un commentaire. Au niveau de notre association, on
s'est efforcé de demander nous-mêmes à nos membres d'avoir
un meilleur contrôle sur leurs cas, chacun de leurs cas et on
s'aperçoit... Si vous regardez le tableau, à la page 6 ou 7, il y
a une certaine remontée en 1983. On était descendu à 16%
d'accidents graves et là, on remonte à 19%. C'est peut-être
à cause du meilleur contrôle qu'on a demandé à nos
gens d'exercer sur ces cas-là, de les contester, et des choses comme
cela.
M. Polak: M. le Président, seulement une dernière
question. C'est peut-être sur un plan personnel et cela n'affecte pas
tellement votre mémoire, mais, à la page 5, vous avez
parlé de la travailleuse enceinte. Dans l'industrie des mines de
métaux, il n'y en a pas beaucoup, j'imagine.
Une voix: Non, non.
M. Polak: Deuxièmement, je voudrais seulement faire le
point, parce que j'avais l'impression que c'était un peu l'opinion des
hommes, comme on connaît généralement les hommes, parce que
nous venons d'élire deux députés du sexe féminin,
et pour nous, une travailleuse enceinte, ce n'est pas toujours un accident de
travail.
Des voix: Ah! Ah!
M. Langlois: Ce que j'ai dit là-dedans -je ne veux pas
aller plus loin que ce que j'ai dit - c'est qu'on espère que ce n'est
pas l'employeur qui est responsable.
M. Polak: On s'entend bien. Merci.
Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le
député de Sainte-Anne. M. le député de
Saint-Jacques.
M. Champagne (Saint-Jacques): Je vais être court, M. le
Président. Je m'adresse à M. Langlois. Dans votre mémoire,
à la page 31, on lit ceci: "Les dossiers des réclamants
attribuables aux mines fermées sont pour nous un énorme
problème - et là, j'insiste -parce qu'il n'est possible d'avoir
aucune information sur leur véracité ou leur validité." Je
voudrais savoir qui, chez vous, a demandé ces informations, quelles
étaient les informations que vous vouliez, à qui les informations
ont été demandées à la CSST et, finalement, quels
motifs, quelles raisons on vous a données pour vous refuser ces
informations.
M. Langlois: Votre question, en fait, on peut y répondre,
parce que c'est seulement une question. Il reste que, jusqu'à
maintenant, on ne peut pas, à cause de la confidentialité des
dossiers... C'est une politique de la CSST de ne pas fournir de renseignements
aux associations. Peut-être que M. Drouin pourra continuer
là-dessus tout à l'heure. À cause des mines
fermées, où plusieurs millions sont payés par la classe
d'employeurs dont les membres font partie de compagnies qui existent encore, on
a voulu avoir des renseignements pour pouvoir contrôler la
véracité et la validité des cas. On a écrit
à la commission, au vice-président de la commission, M. Bernier,
et on nous a répondu qu'on ne pouvait pas les avoir, que cela nous
prendrait une procuration de chacun de nos membres. Peut-être même
pas cela... Je ne me souviens pas de la lettre, mais je pense qu'on l'a ici, on
pourrait la lire. Cela disait qu'on ne pouvait avoir cette sorte
d'information.
Vous comprendrez très bien qu'une information, comme cela a
été le cas dernièrement, en 1983, au sujet de la
surdité, qui a été imputée à une mine qui
s'appelle Wasamac, qui a fermé ses portes en 1970 ou en 1971, personne
n'est au courant de cela. Il n'y a pas un membre existant, il n'y a pas une
activité parce que cela ne lui appartient pas. Cela va être
imputé à la classe, mais personne ne peut savoir si le bonhomme a
raison de réclamer pour surdité ou pas et, surtout, d'en faire
porter la charge à une mine qui est fermée depuis une douzaine
d'années. C'est cette information qu'on veut et je pense qu'on a le
droit de l'avoir légalement. Il va falloir passer par un très
long processus, il va falloir une procuration personnelle de chacun des
présidents des mines qui sont membres de notre association afin
d'obtenir le droit d'avoir des renseignements à l'association pour agir
au nom de nos membres.
M. Champagne (Saint-Jacques): Si je comprends bien, on vous
demande de payer, mais on ne veut pas vous donner d'explication.
M. Langlois: C'est à peu près cela.
M. Champagne (Saint-Jacques): Y a-t-il d'autres renseignements
sur d'autres sujets que vous auriez demandés à la CSST et qu'on a
refusé de vous donner?
M. Langlois: Non.
M. Champagne (Saint-Jacques): C'est le seul cas. Je n'ai pas
d'autres questions, M. le Président.
Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le
député de Saint-Jacques.
M. le député de Viau.
M. Cusano: Je serai, moi aussi, très bref. Le
mémoire est très bien présenté et j'apprécie
spécialement les annexes qui montrent les tableaux. J'aurais deux
questions. Voici la première. À la page 9, M. Langlois, vous avez
dit que les interventions de la CSST vous causent des difficultés de
travail et vous continuez, à l'autre paragraphe, en disant que vous
êtes habitué à ces interventions. Vous parlez
spécifiquement de 14 enquêtes de la part de la CSST. Pourriez-vous
préciser comment ces enquêtes ont amené des
difficultés dans le milieu du travail?
M. Langlois: II faut faire une distinction; cela nous apporte des
difficultés parce que cela nous embête au point de vue du temps,
etc. Au sujet de ces 14 enquêtes, nous avons préparé un
mémoire pour le ministre du Travail et pour le ministre des Affaires
sociales. Nous les avons énumérées; il y en avait 13 et il
y en a une 14e qui est venue s'y ajouter. On a mentionné aussi certaines
descentes de la CSST dans certaines mines qui, à notre avis,
n'étaient pas nécessaires. Une, par exemple, s'est faite dans une
mine de la Côte-Nord et on a saisi, avec l'aide de policiers
armés, tous les documents et les dossiers des accidentés. On a
fait une liste de 2500 infractions et imposé une amende de 625 000 $;
après un an ou deux de discussions, finalement, on a réglé
à l'amiable pour 16 000 $. C'est une descente qu'on a faite dans l'une
des mines de la Côte-Nord.
Quant aux enquêtes, on commence par l'enquête Selikoff
à Thetford; il y en a eu une à Noranda, on en a mentionné
une à Gaspé, il y a eu un bilan de santé dans le
Nord-Ouest. De toute façon, on en énumère 14, je ne suis
pas pour toutes les énumérer ici. Je pense qu'on a eu assez
d'enquêtes dans le secteur minier, on devrait nous ficher la paix pour un
bout de temps. (21 heures)
M. Cusano: Merci. Dans votre tableau qu'on trouve à
l'annexe VI, si je me permets de l'interpréter, vous avez des
statistiques qui remontent à 1947. Si je comprends bien le tableau, ce
qui apparaît en gris, c'est la fréquence des accidents, et la
ligne qui suit, qui est au haut de cette fréquence-là, c'est
l'indemnité; c'est-à-dire le montant qu'on...
M. Drouin: C'est le montant maximal...
M. Cusano: C'est cela, c'est le maximum assurable. Et on voit ici
que...
M. Drouin: ...assurable, le maximum que l'individu reçoit.
Excepté qu'à partir de 1990 - pas 1990, je suis mêlé
- de 1978, à partir de 90% net, le chiffre qui est mis à la
ligne... Il fallait que je me donne un barème quelconque, j'ai mis la
courbe qui s'appelle l'homme marié avec deux dépendants, à
partir de 90%, c'est le chiffre de cet homme-là. Là, c'est
variable en fonction du revenu net de l'individu. Le revenu net varie en
fonction du nombre de dépendants, l'impôt entre là-dedans.
Alors, celui-là, c'est l'homme marié et deux
dépendants.
M. Cusano: Et vous mentionnez les jours au haut. Pour les fins du
journal des Débats, vous avez sept jours, de 1947 à 1955; cinq
jours jusqu'à 1964, cela est quoi exactement?
M. Drouin: C'est la période d'attente avant d'avoir droit
aux indemnités.
M. Cusano: Ah bon!
M. Drouin: Vous remarquez que, jusqu'en 1955, l'individu avait
sept jours ouvrables d'absence avant d'avoir droit aux indemnités; et
puis l'impact, quand cela a passé à cinq jours, a
été quelque peu significatif, mais pas beaucoup. L'impact de cinq
jours à trois jours a été négligeable. Et, de trois
jours à un jour, il a été négligeable
jusqu'à ce que l'on remonte l'échelle des indemnités. Mais
ce qu'il est intéressant de remarquer, c'est le parallélisme qui
existe entre la courbe de l'indemnité et la courbe de la
fréquence des accidents. C'est très important de voir ce
parallélisme dans ces deux-là. C'est pour cela qu'on n'est pas
capable de nier que, à un moment donné, pour certaines personnes
qui ont des tendances à profiter d'un système, il y a une
incitation...
M. Cusano: C'est cela.
M. Drouin: ...pour certaines personnes. La zone que j'appelle
"savonneuse"...
M. Cusano: C'était ma prochaine question, la zone
"savonneuse".
M. Drouin: ...ce n'est pas péjoratif, c'était
simplement le fait, c'est le temps où l'individu a droit aux cinq
premiers jours payés directement par l'employeur. Là, il n'y a
plus d'interruption dans la paie.
M. Langlois: Oui. J'aimerais juste ajouter une chose. C'est qu'on
n'est pas contre le fait qu'on a augmenté les indemnités, mais,
si on augmentait les indemnités et si on établissait des
contrôles pour que ce soient les vrais accidentés qui en
profitent, on serait absolument d'accord.
M. Cusano: Parfait, je vous remercie,
M. Langlois et vos confrères.
Le Président (M. Gagnon): Merci à l'Association des
mines de métaux du Québec de sa présentation à
cette commission parlementaire. J'inviterais maintenant le comité de
direction de la Commission de la santé et de la sécurité
du travail, la CSST, à prendre place à la table.
Une voix: Pourrait-on suspendre les travaux quelques
instants?
Le Président (M. Gagnon): Pardon? Nous allons suspendre
nos travaux pendant cinq minutes.
(Suspension de la séance à 21 h 4)
(Reprise de la session à 21 h 10)
Comité de direction de la CSST
Le Président (M. Gagnon): M. Robert Sauvé, en vous
souhaitant la bienvenue, je vous demanderais de nous présenter les gens
qui vous accompagnent et de faire lecture de votre mémoire.
M. Sauvé (Robert): M. le Président, M. le ministre,
MM. les députés, il me fait plaisir de vous présenter mes
collègues du comité de direction. À ma droite, M. Lionel
Bernier qui est le vice-président à la réparation.
À ma gauche immédiate, M. Jean-Louis Bertrand qui est
vice-président à la prévention et à l'inspection.
Et, M. Pierre Lafrance qui est le secrétaire de la commission.
Nous sommes très heureux, M. le Président, mes
collègues et moi, de pouvoir vous fournir toutes les explications. Vous
avez pu, je pense, partager notre quotidien. D'un côté, nous
sommes des mesquins, trop laxistes dans l'inspection - et je pourrais continuer
l'énumération - et de l'autre, nous sommes des Pères
Noël, nous payons des gens qui vont à la chasse et nous harcelons
les employeurs avec les inspecteurs.
Je voudrais profiter de l'occasion, M. le Président, pour
remercier nos 2500 employés qui vivent quotidiennement avec ce que vous
avez entendu. Nous sommes chanceux d'avoir des gens qui ont
développé chez nous un très grand sentiment d'appartenance
à la commission et qui travaillent très fort, et parfois, dans
des conditions difficiles. Il y a des gens qui peuvent être
exaspérés à l'occasion, qui ont des problèmes de
comportement et qui peuvent même frapper des employés. Ce n'est
pas toujours facile. Je tiens à les féliciter au nom de mes
collègues, je pense que c'est une équipe assez
extraordinaire.
Pour permettre un échange aussi complet que possible, je ne
parlerai que de quatre sujets qui sont revenus dans de nombreuses remarques.
Par la suite, je passerai la parole à mes collègues de la
réparation et de la prévention et de l'inspection qui feront des
remarques dans leur juridiction respective. Et vous avez remarqué que
nous vous avons distribué quelques documents de façon que
personne ne puisse dire que vous avez été inondés de
documents, et que nous ne prenons pas tout le temps qui nous est alloué
pour parler. Nous voulons répondre à vos questions.
Mes quatre sujets sont: les bureaux de révision, la
médecine chez nous, le retrait préventif de la femme enceinte et
la téléphonie. Mes collègues parleront de leurs sujets
dans leur domaine respectif. Je pense que ce sont quatre sujets que nous avons
beaucoup entendus au cours de ces quatre dernières journées.
Je commence par les bureaux de révision. Quand je suis
arrivé à la commission, en février 1977, les commissaires
du temps faisaient des auditions et les décisions étaient
confirmées par la commission du temps. Chose à remarquer, ces
auditions étaient discrétionnaires. Vous pouvez le remarquer tout
de suite, la commission était donc juge et partie dans le temps. La
commission, qui administrait l'application de cette loi, l'interprétait
également en dernier ressort.
Immédiatement, au mois de septembre 1977, la loi 5 est
entrée en vigueur et nous avons eu la création des bureaux de
révision et l'appel à la Commission des affaires sociales. Je
tiens à vous faire remarquer, M. le Président, qu'il y a douze
commissions au Canada, les dix provinces et les deux territoires, et que, dans
ces douze commissions, nous sommes la seule où il y a un appel à
l'extérieur de la commission. Encore aujourd'hui, je me rappelle, pour
avoir assisté à la réunion annuelle des commissions,
m'être fait rabrouer par mes confrères présidents des
autres commissions pour avoir créé ce précédent,
parce que les bons amis disaient: Robert, tu crées un
précédent fort dangereux. Tu n'auras plus de contrôle sur
tes politiques. Ce sont les gens de l'extérieur qui vont faire cela.
Sur le plan des principes, c'est assez étonnant que des gens qui
sont connus pour la défense des droits de la personne ne
considèrent pas qu'ils sont juges et parties dans ce cas. Il y a une
bonne nouvelle à l'horizon, je pense que l'Ontario aura une nouvelle loi
en 1984, et il est possible qu'il y ait un recours à l'extérieur
ou tout au moins un tribunal comme un bureau de révision, mais
séparé de la commission.
Encore en 1983, nous sommes la seule commission au pays où il y a
un droit d'appel à l'extérieur. Par le biais de la Loi sur la
santé et la sécurité du travail, la Loi
sur le Barreau a été amendée pour permettre, comme
cela se faisait et cela se fait chez nous, aux représentants syndicaux
et aux non-avocats de représenter leurs collègues de travail. Je
pense que c'est très important. Notre ami Claude Pétel - je ne
sais pas s'il est dans la salle - peut aller devant la Commission des affaires
sociales grâce à un amendement que nous avons
suggéré et qui est dans la Loi sur la santé et la
sécurité du travail.
Troisièmement, M. le Président, nous n'avons jamais
comparu devant la Commission des affaires sociales pour pouvoir laisser libre
cours aux parties. Bien plus, pour faciliter la tâche des parties, nous
remettons le dossier intégral, sauf à l'employeur où la
partie médicale est remise à son médecin. La CAS nous a
souvent demandé de faire un tri dans les dossiers pour ne pas avoir de
gros dossiers. Nous donnons intégralement les dossiers.
Une chose étonnante, M. le Président, c'est le seul
endroit dans tout le système judiciaire ou quasi judiciaire où on
fait le même procès deux fois. La cause, ou le procès de
novo, comme on dit en termes juridiques, se fait d'abord devant le bureau de
révision et on recommence la même chose devant la Commission des
affaires sociales. C'est la raison pour laquelle nous sommes d'accord avec la
suggestion contenue dans le projet de loi 42 qui veut une révision
administrative et l'appel à la CAS, mais nous sommes entièrement
d'accord, comme comité de direction, que tous les appels aillent
à un tribunal administratif indépendant. Et, si je peux faire une
suggestion, je crois que cela devrait être un nouveau tribunal
administratif, parce que le Tribunal du travail est un peu en conflit et c'est
lui qui décide déjà sur le plan pénal. Il ne
pourrait donc pas exercer cette juridiction de révision. La CAS n'a pas
de division spécialisée en inspection ou en finance, par exemple.
Puisque nous avons prôné l'appel à l'extérieur et
que nous sommes d'accord pour la rapidité des décisions, nous
n'avons aucune espèce d'objection.
Je tiens à vous dire, M. le Président, qu'on a beaucoup
parlé de délais. On semble dire qu'il y a
énormément de demandes en révision. Dans les
dernières années, en 1981, 1982, 1983, en chiffres ronds, nous
avons reçu au-delà de 300 000 réclamations. Du 1er janvier
1982 au 31 décembre 1982, nous avons reçu 4781 demandes de
révision sur au-delà de 300 000 réclamations. Ce sont 400
demandes par mois. Vous voyez que le pourcentage n'est pas énorme. Dans
la même période, les bureaux de révision ont rendu 5593
décisions. Du 1er janvier 1983 au 30 juin 1983, nous avons reçu
3859 réclamations et les bureaux de révision ont rendu 3859
décisions.
Les délais: Au bureau de Longueuil, le délai moyen est de
six mois. Au bureau de Hull, de dix mois. Au bureau de Rimouski, de six mois.
Au bureau de Laval, de trois mois. Au bureau de Montréal, de huit mois.
Au bureau de Sherbrooke, de quatre mois. En Abitibi, de trois mois. En
Mauricie, de deux mois. Au Saguenay, d'un an. À Québec, de trois
mois. Sur la Côte-Nord, de quatre mois. Ce qui est important, c'est que
nous avons fait des expériences aux bureaux de Laval et de
Montréal et il est extrêmement difficile de procéder avant
quatre mois parce que les parties demandent de nouvelles expertises et vous
savez que cela prend de trois à quatre mois, un minimum de trois mois
dans certaines spécialités, pour avoir un rendez-vous et avoir le
rapport pour pouvoir faire l'expertise.
Nous avons essayé. Le taux de remise dans le mois où on
l'a essayé était de 40%. On parle beaucoup de délai. On
parle de délai à la CAS. C'est vrai. Je pense que la situation va
s'améliorer parce que cela ne relève pas de nous. Cela
relève du ministère responsable de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, cette commission. Ces gens viennent d'ajouter
des membres dans la division des accidents du travail. Eux aussi ont un haut
taux de remise. Cela va jusqu'à un tiers à certains mois. C'est
beaucoup. Cela ne dépend pas du tribunal, cela dépend des
parties. Ils ont pris plus de temps à démarrer. En 1978, ils ont
rendu 5 décisions. En 1979, 80. En 1980, 136. En 1981, 191. En 1982,
405. En 1983, 783. Vous voyez qu'ils semblent avoir pris un rythme qui va
permettre d'amenuiser ces délais. Nous le souhaitons. Voilà, M.
le Président, pour ce qui est des tribunaux, les bureaux de
révision.
Le deuxième point que je voudrais traiter, c'est celui du retrait
préventif de la femme enceinte. Nous sommes entièrement d'accord
au comité de direction, et je pense que, sans vouloir présumer de
sa décision, le conseil d'administration serait également
d'accord pour qu'il y ait une politique globale de congés de
maternité. Il est difficile de rester dans le système actuel
où il y a trois organismes qui s'occupent de programmes de congés
de maternité: la Commission des normes du travail,
l'assurance-chômage et nous. Je pense que c'est une responsabilité
de l'État que d'avoir une politique globale de congés de
maternité. Nous n'avons pas d'objection à l'administrer, mais je
pense que c'est une politique d'État. On a dit bien des choses sur la
loi, mais la loi est assez explicite selon nous. Il y a d'abord la
réaffectation avant le retrait préventif si la chose est
possible. Si la réaffectation n'est pas possible, là le retrait
préventif, doit s'exercer. La seule chose que nous avons dite, c'est
que, six mois après le début de l'entrée en vigueur de cet
article, après un certain temps d'expérience, la
condition personnelle doit être reliée au travail.
Il circule - et la Fédération des infirmières l'a
fait circuler - un procès-verbal d'une rencontre entre des
médecins des DSC de la région métropolitaine et des
médecins de la réparation du bureau de Montréal. Un
document du 23 mars. De cette réunion, il y a eu un document de travail
-et c'est bien estampillé "Document de travail", à droite en haut
- qui a été fait pour consultation. D'un côté, on
nous reproche de faire de la consultation. De l'autre côté, on dit
qu'on n'en fait pas assez. C'était un document pour consultation. Il n'y
a aucune politique qui a été signée par le
vice-président à la réparation ni approuvée par le
comité de direction pour suggestion au conseil d'administration, parce
que c'est une politique qui doit aller dans le manuel. Par voie de
conséquence, elle doit être approuvée par le conseil. Cela
veut donc dire que, si certains DSC appliquent cette politique, ce n'est pas la
politique de la commission. Ils doivent continuer à fonctionner cas par
cas et selon la situation de la personne en cause.
Il y a une chose intéressante, M. le Président. Je vous
demanderais de regarder le tableau 25, intitulé: Retrait
préventif de la travailleuse enceinte ou qui allaite, 12 décembre
1983, en bas à droite. Il faut savoir que le nombre de femmes enceintes
au Québec, annuellement, varie entre 90 000 et 100 000. Vous voyez qu'en
1981, cela ne faisait que commencer. Il y a eu 1259 demandes de prestations.
1214 ont été acceptées, 45 ont été
refusées pour un total d'indemnités versées de 2 600 000
$. En 1982, le nombre de demandes de prestations a triplé. Cela veut
donc dire qu'il y a eu une politique d'information. Il y a eu 3915 demandes.
3543 ont été acceptées - c'est le tableau 25
intitulé: Retrait préventif de la travailleuse enceinte ou qui
allaite - 372 ont été refusées pour un total de 13 800 000
$. Pour l'année 1983 - évidemment, il s'agit de demandes au 1er
novembre 1983 et estimées en vertu de l'expérience que nous avons
-pour 3925 cas, au moment où on se parle, il y a eu 3593 cas
acceptés, 332 refusés pour un total de 16 500 000 $. On
prévoit, en 1984, 4100 demandes.
En fait, quand le programme sera bien connu, selon nos estimations, il y
aurait à peu près 5000 demandes de prestations par année.
Vous constatez - parce qu'on a entendu bien des choses, il y a des gens qui ont
dit: On a resserré la vis, on a resserré les politiques - une
chose étonnante: il y a plus de cas acceptés en chiffres absolus
en 1983 qu'en 1982 et le nombre de rejets est inférieur en chiffres
absolus et en pourcentage. Voilà ce que j'avais à dire sur le
retrait préventif de la femme enceinte. (21 h 30)
La médecine. D'abord, je pense qu'il est important de souligner
la façon dont fonctionne le système d'évaluation
médicale à la commission. L'évaluation médicale
permet d'établir la relation entre la demande de prestations et la
lésion, la durée de l'incapacité totale ou temporaire, la
nécessité de soins de physiothérapie, par exemple, et elle
a pour but de fixer le pourcentage de la perte d'intégrité
physique lorsque la travailleuse ou le travailleur est atteint d'une
incapacité permanente. Le rôle du médecin traitant est
d'assurer au travailleur les soins adéquats et d'indiquer à la
commission la durée et la fin des traitements ainsi que le taux de
déficit subi. Là, on reçoit le rapport médical du
médecin traitant; c'est là qu'entrent en jeu les médecins
de papier, comme on l'a dit. Les médecins de la commission n'examinent
et ne voient aucun patient; c'est bien important. Toute expertise est faite par
des médecins externes à la commission. Ces médecins
spécialistes évaluateurs sont des médecins de pratique
privée reconnus par la corporation professionnelle; évidemment,
ils ne sont pas des médecins fonctionnaires de la commission, ils
viennent chez nous, payés à vacation, pour faire des expertises.
Nous n'avons pas de liste d'experts, ce sont des médecins
spécialistes qui s'offrent pour l'expertise.
Vous savez, 75% de nos cas sont des cas d'orthopédie.
L'Association des orthopédistes a demandé à ses 198
membres s'ils étaient prêts à faire de l'évaluation;
120 ont répondu oui, donc 40% des médecins orthopédistes
ne veulent pas faire d'évaluation pour toutes sortes de bonnes raisons.
Par exemple, un médecin qui soigne son patient trouve difficile,
à juste titre, de dire quand son patient ou sa patiente peut recommencer
à travailler, de combien est son taux d'incapacité. Il y en a qui
ne veulent pas faire cela et cela se comprend. Je ne peux pas forcer les
médecins à le faire.
Ce qu'on sait, c'est que nous avons une liste de 120 médecins
orthopédistes qui le font. Donc, la commission réfère le
travailleur à un médecin spécialiste qui réalise
l'évaluation. Pour faciliter la tâche de tout le monde, il y a
quatre ans, nous avons décidé de faire un centre
d'évaluation, c'est-à-dire de mettre à la disposition des
médecins spécialistes des locaux pour l'expertise
médicale, l'équipement et le secrétariat
nécessaires à leur tâche.
Ce qui arrivait autrefois, c'est que l'accidenté allait voir le
médecin spécialiste et nous attendions le rapport trois ou quatre
mois. Il fallait prendre le rendez-vous et il nous arrivait même d'aller
chercher le rapport sur le bureau du médecin pour faciliter la
tâche de tout le monde. Vous allez comprendre que l'accidenté veut
bien savoir s'il peut retourner à l'ouvrage, quelle
est sa condition et quel sera son taux d'incapacité s'il y en a.
C'est tout à fait normal qu'une personne veuille le savoir. Entre-temps,
si elle pouvait travailler pendant que nous attendions le rapport, nous
déboursions une incapacité totale temporaire. En sains
gestionnaires, nous avons décidé de dire aux spécialistes:
Plutôt que de vous envoyer les patients chez vous, venez donc chez nous,
on va vous donner un Dictaphone, on va vous donner un secrétariat et
nous aurons tout le lendemain. Cela fonctionne à merveille.
C'est intéressant, sauf que nous ne sommes pas là, dans le
cabinet médical. J'ai entendu une femme qui a dit qu'elle avait
été examinée nue, devant tout le monde. Le bureau est au
28e étage du complexe Desjardins et le premier voisin est au Vermont, je
pense. Il ne faut quand même pas exagérer. Au cas où il y
aurait des problèmes, nous avons décidé d'avoir une
politique d'accueil. Nous avons, depuis quelque temps, une personne qui
reçoit les patients, les accidentés avant l'examen, qui leur
explique ce qui va se passer parce qu'il y a des gens qui sont nerveux, qui
voudraient savoir ce qui va se passer. Au sortir de l'examen, s'il y a quelque
chose, nous espérons qu'elle le dira tout de suite. Il est bien
évident que si, dans la matinée, il y a deux patients sur trois
qui disent qu'ils ont été bardassés, on va savoir que le
docteur Untel, qui n'est pas notre employé, a l'air de bardasser les
patients et il y a quelqu'un du service médical qui va aller le voir
pour lui dire: Écoute, on a des plaintes, cela ne peut pas fonctionner
comme cela; ou tu changes ou tu arrêtes de faire des expertises. Et cela,
on le saura. Sur le plan médical, j'espère avoir clarifié
la situation et nous serons heureux de répondre aux questions sur ce
plan.
Il me reste un sujet, qui a fait parler beaucoup, la
téléphonie. Dieu sait que nous avons dépensé
beaucoup d'énergie pour trouver des solutions à ce
problème. C'est un problème très préoccupant,
particulièrement à Montréal. Dans les autres
régions, de façon générale, nous n'avons pas
beaucoup de problèmes. Évidemment, s'est assez comique parce
qu'on fait beaucoup de tests nous aussi. Nous allons dans les régions et
nous allons visiter beaucoup d'entreprises, de mines, de chantiers forestiers,
etc. Nous ne restons pas uniquement au bureau, nous sortons pour aller voir ce
qui se passe sur le terrain, si les politiques ont de l'allure; nous allons
vérifier un certain nombre de choses.
Nous appelons nous aussi. Il arrive qu'on a la communication
immédiatement et il y a d'autres fois, deux minutes après, qu'on
peut attendre. À Montréal, on a un système
téléphonique très sophistiqué qui a
coûté 400 000 $. Cela a été approuvé par le
conseil d'administration parce que cela a été discuté au
conseil. On disait: Comment se fait-il qu'on a tant de problèmes? Nous
maintenons, en moyenne, vingt téléphonistes par jour à ce
bureau qui reçoivent - et là, c'est un cycle bien connu - le
lundi, à peu près 2400 appels et, le vendredi, cela descend
à 1800 par jour. Au mois d'août, nous avons reçu 39 000
appels; au mois de septembre, 42 000; au mois d'octobre, 35 000; au mois de
novembre, 42 000. Les taux d'appels auxquels on a répondu - et c'est
là que c'est intéressant - 87% le lundi, 81% le mardi, 83% le
mercredi, 95% le jeudi et 84,9% le vendredi. La moyenne d'employés est
de vingt et le délai moyen d'attente avant réponse, en secondes,
c'est: 44 secondes, 71 secondes, 56 secondes, 9 secondes et 52 secondes. Et
j'ai pris une semaine au hasard.
Il y a des journées où vous pouvez attendre. Le lundi,
c'est plus compliqué et, deuxièmement, la durée des
communications est d'environ deux minutes par appel. Si vous voulez parler
à tel agent d'indemnisation et qu'il est en train d'expliquer quelque
chose à quelqu'un, à ce moment, vous avez des problèmes.
Nous ne sommes pas satisfaits parce que, le taux de rejet dépassant 15%,
nous trouvons que ce n'est pas normal. Les grands magasins tolèrent 15%
- on ne se considère pas un commerce, mais les grands magasins qui sont
en affaires considèrent que 15% est acceptable - nous, nous voudrions
que ce soit un maximum de 10%.
Ce que nous avons fait, nous sommes en train de programmer le
système. On espère qu'au mois de mai 1984, notre nouveau
système de paiements permettra de payer deux fois par mois, ce qui fait
que les gens n'appelleront plus pour dire: Est-ce que mon chèque est
parti? Quand est-ce que je vais avoir mon chèque? Là, cela sera
clair, comme l'aide sociale, deux fois par mois. Je ne veux pas qu'on se
compare ou qu'on nous compare aux affaires sociales ou au bien-être, au
salaire garanti, mais tout le monde saura à ce moment qu'on paie deux
fois par mois. Ce sera clair et je pense qu'ailleurs, il n'y a pas de
problème quand c'est très clair.
Deuxième mesure: avec le chèque qui sera émis au
mois de mai, toutes les explications du chèque seront sur le talon. Et,
depuis le 2 décembre 1983, les comptes médicaux sont payés
par la RAMQ et nous remboursons la RAMQ. Ce qui fait qu'un certain nombre
d'appels téléphoniques devraient disparaître, parce que,
là aussi, c'est à la source qu'il faut corriger le mal; c'est de
voir à ce qu'il y ait moins d'appels. Si on réussit, je pense que
nous n'aurons plus, avec cette mesure importante, les problèmes que nous
avons connus avec la téléphonie; c'était bien pire que
cela en 1982. Mais cela ne nous satisfait pas encore, M. le Président,
de voir ce qui se passe avec la téléphonie à
Montréal. Ailleurs, ce n'est
que très sporadiquement qu'il y a un problème. C'est
évident que, s'il y a deux téléphonistes et que l'une est
malade, le temps que l'autre se familiarise, il peut y avoir des délais.
Ce sont des choses normales partout.
Voilà ce que je voulais dire sur les quatre sujets qui ont fait
parler beaucoup de gens. Nous avons suivi cela avec beaucoup
d'intérêt. Nous savons qu'il y a toujours lieu à
amélioration. Et je pense que nous avons fait des preuves dans ce
sens-là. Je passerais la parole à mon collègue, Lionel
Bernier.
Le Président (M. Gagnon): M. Bernier.
M. Bernier (Lionel): M. le Président, M. le ministre, MM.
les députés, il me fait plaisir à mon tour d'avoir
l'occasion, après ces quelques journées d'écoute,
d'expliquer les programmes de réparation de la CSST et de
répondre, au cours des heures qui vont suivre, aux questions qu'on se
pose sur l'administration de ces programmes.
Nous avons tous pu constater, je pense bien, au cours des travaux de la
présente commission, que tout le domaine de la réparation des
lésions professionnelles comporte des volets qui sont loin de faire
l'unanimité des parties intéressées, qui sont souvent
carrément contradictoires et, selon les conceptions et les philosophies
en présence, qui sont plus souvent qu'autrement irréconciliables
ou en tout cas difficilement conciliables. Nous avons assisté à
des commentaires, des comportements, des attitudes et des déclarations
qui se reproduisent par dizaines de cas ou centaines de cas par semaine dans
chacun de nos bureaux régionaux, où les employeurs contestent les
demandes de prestation des accidentés et où les travailleurs
revendiquent tous les droits que la loi leur reconnaît, et parfois
au-delà.
Nos employés ont, à tous les jours, à concilier ces
positions dans le cadre spécifique des lois que le législateur a
adoptées et parfois dans le cadre de dispositions qui ne sont pas
toujours aussi claires que nous voudrions qu'elles soient. Je veux dire que la
Loi sur les accidents du travail actuelle, qui remonte à 1931,
même si elle a été rapiécée à
plusieurs reprises au cours des années passées, contient des
dispositions - je me permettrai ce jugement - qui la rendent de plus en plus
difficilement applicable.
Si on peut mesurer l'efficacité d'une loi par l'ampleur des
contestations juridiques qui l'accablent, le nombre de contestations juridiques
qui ont été dirigées contre cette loi depuis quatre ou
cinq ans ont contribué, quant à nous, pour une bonne part,
à en rendre l'administration plus complexe et plus hésitante. Je
ne prendrai que les exemples de l'article 38.4 et celui de l'amiante.
(21 h 45)
On a fait état de l'article 38.4 au cours des débats qui
sont passés. J'aimerais rappeler qu'avant 1978, les accidentés
qui étaient indemnisés l'étaient sur la base ad hoc, sur
la base des décisions purement médicales, sans qu'il existe
nécessairement un barème officiel. Nous avons adopté un
premier barème de déficit physique en 1978; et nous avons eu, par
la suite, des décisions de la Commission des affaires sociales, des
décisions des tribunaux civils nous disant que ce n'était pas
suffisant d'avoir un barème de déficit physique; il fallait aussi
déterminer la perte de la capacité de travailler. Nous avons
bâti une méthode d'évaluation de la perte de la
capacité de travail et, quand on dit qu'on a bâti une
méthode, cela a l'air tout simple d'évaluer la perte de la
capacité de travailler, mais, quand il s'agit de déterminer, pour
un travailleur de 50 ans, de 55 ans, qui a une scolarité de trois ans ou
de cinq ans et qui a mal dans le dos, quel est le pourcentage - parce que c'est
ce que la loi nous oblige de faire, l'article 38.4 nous oblige à le
faire - de perte de capacité de ce travailleur de façon
permanente, à vie, quels que soient les programmes qu'on pourra retenir
pour ce travailleur, c'est un problème très complexe.
Nous avons développé une méthode qui nous a permis
de régler une bonne partie des dossiers, mais une bonne partie aussi de
la contestation des travailleurs porte sur cet aspect de la loi. Il y a eu un
recours collectif pour nous dire qu'on n'avait pas appliqué la loi
depuis 1931. Nous avons eu une décision de la Cour suprême disant
que nous devions adopter une méthode quelconque pour l'évaluer et
nous avons essayé - en attendant que le législateur adopte des
mesures différentes - de bâtir un système nous permettant
de régler le plus grand nombre de cas possible. Mais cela n'a pas rendu
facile l'administration de cette loi pour ceux qui, dans le champ, dans les
régions, ont eu à l'appliquer.
Le deuxième problème a été celui de
l'amiante. Là encore, différentes décisions des tribunaux
sont venues rétrécir ou réduire le champ d'application de
la loi et des règlements les concernant, de telle façon
qu'aujourd'hui, malgré des opinions médicales universellement
admises, il n'est plus possible de retirer un travailleur de l'amiante de son
milieu de travail. Cela aussi, cela a été une période
difficile.
Enfin, malgré les reproches qui peuvent nous être faits,
d'un côté, de payer n'importe quoi, de gaspiller l'argent des
employeurs et, de l'autre, de payer avec une parcimonie qui, selon ce qu'on a
entendu, friserait l'indécence, je dois signaler qu'il existe tout de
même, dans cette loi, un certain nombre de règles qui, d'un
côté, limitent les avantages accordés aux
accidentés - ce n'est pas nous qui le faisons et, de l'autre,
énoncent des principes d'équité favorables aux
bénéficiaires. Cela aussi, on doit l'appliquer. Bien sûr,
quand on le fait, on ne fait plaisir ni à l'un ni à l'autre.
Je ne citerai, rapidement, que trois articles. Premièrement,
l'article 24, paragraphe 3, qui dit: Lorsqu'un travailleur refuse un examen
médical - ce n'est pas une décision de la direction de la
commission, cela est la loi - on suspend le paiement de l'indemnité
à laquelle le travailleur a droit s'il refuse de se soumettre à
l'un des examens prescrits par la présente loi ou ordonnés en
vertu de l'une de ses dispositions, ou s'il entrave de quelque façon que
ce soit l'un de ces examens et le paiement de l'indemnité reste ainsi
suspendu jusqu'à ce que l'examen ait été fait.
Le paragraphe suivant, cela est la même chose, dans le cas du
travailleur qui refuse de subir un traitement. Je cite deux exemples de limites
qui sont dans la loi et qui nous sont imposées, qu'on doit appliquer
quand cela se présente. Bien sûr, quand on applique ces deux
articles, cela ne fait pas plaisir à ceux à qui on les applique
et cela crée de la contestation parfois violente.
Nous avons un autre article, cependant, l'article 63, paragraphe 8, qui
prévoit que la commission doit juger selon l'équité. Quand
on applique cet article, ce sont les employeurs qui nous disent que nous
n'avons pas assez de contrôle, que nous payons n'importe quoi. L'article
se lit comme suit: "La commission rend ses décisions suivant
l'équité, d'après le mérite réel et la
justice du cas, et elle n'est pas tenue de suivre les règles ordinaires
de la preuve en matière civile. Elle peut, par tous les moyens
légaux qu'elle juge les meilleurs, s'enquérir des matières
qui lui sont attribuées."
Et vous avez finalement l'article 111.8, qui dit que, dans le cas des
maladies professionnelles mentionnées, le travailleur a droit à
une présomption favorable. Par conséquent, quand le travailleur
présente une réclamation pour une maladie professionnelle, que ce
soit la surdité ou que ce soit une autre maladie professionnelle,
lorsqu'il y a un rapport médical disant que ce travailleur-là a
une maladie professionnelle, que la maladie est dans la liste de la loi et
qu'il a occupé un emploi qui a pu lui transmettre cette
maladie-là, c'est automatique, on doit reconnaître cette maladie
comme étant professionnelle. Bien sûr, quand on le fait,
particulièrement dans le cas de la surdité, cela crée des
contestations.
Sur un autre plan, nous avons entendu des intervenants nous dire, d'un
côté, que nos programmes de réadaptation n'étaient
pas assez généreux, sinon inefficaces, et, de l'autre, qu'ils
étaient trop - j'utiliserai des guillemets - "libéraux",
même s'ils ne faisaient que résulter de l'application de la loi.
Je pourrais peut-être rappeler brièvement ce qui a
été fait en matière de réadaptation. Je
n'apprendrai rien à personne sans doute en disant qu'en 1976-1977 - il
s'agit de lire le rapport Riverin, qui a été produit à ce
moment-là, ainsi que le rapport Mineau, alors à la Commission des
accidents du travail de l'époque - il se ne faisait pas de
réadaptation à la commission.
Nous avons, à compter de 1977-1978, commencé à
bâtir des programmes de réadaptation qui pouvaient répondre
aux réclamations, aux exigences des travailleurs et qui pouvaient en
même temps humaniser tout le processus de réparation plutôt
que de penser en simples termes d'indemnisation ou d'assistance
financière. Nous voulions véritablement orienter nos programmes
vers la réadaptation, pas seulement physique, mais aussi sociale.
À ce moment-là, la réadaptation dans la loi était
reconnue comme étant un privilège, c'est-à-dire que la
commission pouvait accorder de la réadaptation, c'était une
décision qui était arbitraire et qui n'était pas
matière à appel.
En 1978, le législateur a fait de la réadaptation un droit
dans la loi, et, à partir de ce moment-là, nous avons pu - il a
donné des pouvoirs, il en a même fait le devoir à la
commission - bâtir des programmes de réadaptation, ce que nous
avons fait. Nous avons bâti une série de programmes de
réadaptation avec des professionnels dans toutes les régions et
nous avons demandé à ces professionnels d'inventer, avec nous,
avec les travailleurs et avec les employeurs, des programmes de
réadaptation. Nous avons aujourd'hui toute une série de
programmes de réadaptation et, dans chaque cas, chaque fois qu'un
travailleur est atteint d'un déficit physique et qu'il a des
problèmes de retour en emploi, nous le référons en
réadaptation, là où il y a des professionnels qui
évaluent sa situation et bâtissent avec lui le programme
adapté à sa condition.
Rapidement, je voudrais donner quelques chiffres par rapport à la
réadaptation, c'est le tableau 19 que vous avez dans vos cahiers. Vous
avez, dans ces tableaux, à la page 19 (les feuilles jaunes) le
détail des programmes de réadaptation,
l'énumération de ces programmes ainsi que l'évolution de
ces programmes en termes de coûts depuis 1978. Vous pouvez voir qu'on
avait, en 1978, des programmes de réadaptation qui nous coûtaient
3 300 000 $; et, en 1983, notre estimation, c'est que nos programmes de
réadaptation vont coûter 52 000 000 $. Il faut dire que, dans les
coûts de ces programmes, vous avez, particulièrement dans la
première partie, des coûts qui sont des coûts
d'indemnité pendant la période d'absence du travail.
J'aurai l'occasion, si vous avez des questions, de répondre plus
précisément sur
chacun de ces programmes et de les expliquer, si vous le
désirez.
Sur le plan médical, le président a expliqué le
rôle des médecins. Je voudrais tout simplement préciser
ceci. J'ai entendu cela au cours des premières journées de cette
commission parlementaire et on a déposé des documents faisant
état de commentaires qui étaient faits par des médecins
dans les dossiers des travailleurs. Je dois dire que je ne tolère pas et
que je n'accepte pas - et au comité de direction, nous ne
tolérons pas, nous n'acceptons pas -que des fonctionnaires de la
commission fassent des remarques ou des commentaires désobligeants dans
le dossier des travailleurs. Nous avons, en 1978, averti notre personnel, parce
qu'à ce moment-là, on avait deux groupes de gens qui pouvaient
faire des commentaires dans les dossiers des travailleurs. On avait des
enquêteurs qui, parce que les dossiers n'étaient pas remis aux
travailleurs, sous le sceau de la confidentialité, pouvaient faire des
commentaires qui n'étaient pas acceptables. Nous avons d'abord
réglé cette question. Nous avons élaboré une
politique écrite très sévère, dans laquelle nous
avons défendu aux enquêteurs de faire des commentaires, quels
qu'ils soient, sur des attitudes des travailleurs. Nous avons fait la
même chose pour les médecins, parce que tant que les rapports
médicaux n'étaient pas distribués à
l'extérieur, qu'ils étaient confidentiels - et la
confidentialité, c'était pour la commission... Lorsque nous avons
décidé de remettre les rapports médicaux aux travailleurs,
du même coup, nous avons informé les médecins. Et nous
avons dit à nos médecins internes d'aviser les médecins
externes, parce qu'il y a aussi des commentaires de la part de médecins
de pratique privée. Nous les avons avisés que nous ne
tolérerions pas et que nous n'accepterions pas de tels commentaires. Le
président et moi-même avons fait une tournée
régionale à plusieurs reprises. Nous avons rencontré nos
employés et, chaque fois, nous sommes revenus sur ce sujet. Et nous les
avons prévenus que, si de tels cas étaient portés à
notre connaissance, nous prendrions des mesures disciplinaires.
L'autre point qui a été soulevé, c'est celui des
cas particuliers qui ont été soumis à titre d'exemples de
situations qui, dit-on, sont le reflet de situations générales
à la commission. Bien sûr que cela paraîtrait trop facile si
j'affirmais que les cas particuliers qui ont été soumis sont des
exceptions. Si je disais cela, ce serait trop facile et on n'avancerait pas
beaucoup dans le débat. Je pourrais, d'un autre côté, vous
fournir un paquet de statistiques pour appuyer mon affirmation et dire: Ce sont
vraiment des exceptions, voici ce qui se passe vraiment. De fait, je pense que
les statistiques sont valables pour démontrer les résultats
d'ensemble et on aura l'occasion de vous en fournir au fur et à mesure
que l'on expliquera notre fonctionnement. Mais c'est seulement dans ce sens que
je voudrais, quant à moi, les utiliser. Pour les cas particuliers, pour
ceux qui ont été déposés ici, ou chaque fois qu'un
cas particulier se présente à la commission qui touche ma
juridiction, j'examine les dossiers; je les fais venir et je les examine. Je
préfère toujours les regarder un à un, les évaluer
et apporter les correctifs appropriés, lorsque je peux le faire. Lorsque
les régions peuvent le faire, ce sont les régions qui
interviennent et qui règlent les situations. (22 heures)
Les cas qui ont été soumis ici devant cette commission, je
les ai fait relever et je les ai examinés un à un. Je ne les
reprendrai pas un à un ici et je ne veux pas excuser nos employés
pour ce qui s'est passé dans ces dossiers, mais je dois dire que
lorsqu'on examine ces cas-là, ils sont extrêmement complexes. On
comprend également pourquoi ces dossiers ont créé des
problèmes. On se rend compte, par exemple, qu'il y a toujours un
problème de communication entre le médecin traitant et les
médecins spécialistes, bien souvent, à qui le
médecin traitant réfère ses patients. On peut donc se
rendre compte de cela dans les dossiers. On se rend compte également que
le médecin traitant a beaucoup de difficulté à
établir la relation de cause à effet entre la lésion et la
pathologie d'origine non professionnelle. Le problème, dans ces
cas-là, est que ce sont des gens qui ont eu une petite lésion
bien souvent et, dans un certain nombre de cas, il n'y a même pas de taux
d'incapacité qui a pu être accordé. C'est zéro ou
100%. Pourquoi dis-je cela? C'est parce que les gens ont une pathologie qui
n'est pas reliée à la lésion professionnelle. Ils
souffrent d'autre chose, mais la lésion professionnelle est un
élément qui intervient. Par contre, le problème des
médecins est de faire le partage entre ce qui est relié à
la lésion professionnelle ou à autre chose.
Un travailleur qui a subi trois crises cardiaques et qui se coupe
ensuite un doigt, ce n'est pas nécessairement parce qu'il s'est
coupé un doigt qu'il ne peut pas retourner sur le marché du
travail, mais cela ajouté à sa situation générale
fait que c'est difficile. Il s'agit donc de déterminer si on lui donne
3% parce qu'il s'est coupé un doigt - comme on donnerait à un
autre travailleur - ou si on lui donne 100% et on fait payer l'ensemble du
coût de ce dossier par l'employeur. C'est aussi simple que cela comme
question mais ce n'est pas si simple à régler.
En regardant ces dossiers, ce sont des éléments qu'on
constate. C'est donc extrêmement difficile et, finalement,
généralement, il y a quelqu'un qui tranche en
dernier ressort et qui doit prendre la décision. Même si la
Régie des rentes a déclaré l'invalidité, cette
invalidité de la Régie des rentes est très
générale. Elle n'a rien à voir avec une blessure qui doit
être compensée selon la loi. Je parle toujours dans le cadre de la
loi parce qu'on a les limites imposées par la loi. On n'a pas le droit,
en vertu de la loi, de payer pour une lésion qui n'est pas une
lésion professionnelle.
Généralement, ce sont des cas de dos et il est
extrêmement difficile d'établir cela. Je vous disais que je
regardais certains cas où le médecin traitant ne peut même
pas établir qu'il y a un taux d'incapacité, mais le travailleur
ou la travailleuse, à cause d'autres facteurs, n'est pas capable de
retourner à son travail ou encore l'employeur en profite à ce
moment-là pour le congédier. Il y a aussi un autre facteur dans
les dossiers déposés et qui est triste; dans certains de ces
cas-là, ce sont des travailleurs d'origine ethnique
étrangère qui sont unilingues, ne parlant ni anglais ni
français. Cela ne facilite pas les rapports avec leur médecin
traitant non plus qu'avec les médecins spécialistes qui les
voient. Cela ne facilite pas non plus les rapports avec les employeurs ni avec
personne. Il est très difficile d'expliquer à ce moment-là
le partage de la relation entre la lésion et d'autres facteurs
pathologiques qui n'ont aucun rapport avec la lésion
professionnelle.
Il est bien évident - c'est un petit peu comme le retrait
préventif de la travailleuse enceinte - que, bien souvent, dans ces
cas-là, la solution est de reconnaître ces gens invalides, un
point, c'est tout. C'est la solution la plus simple et la plus facile. Mais,
une fois qu'on a dit cela, il faut regarder les conséquences.
Je voudrais terminer sur un dernier point: l'information aux
accidentés. Nous avons vécu des temps où il était
extrêmement difficile pour un accidenté -ayant moi-même eu
à défendre des dossiers d'accidentés lorsque
j'étais dans la pratique privée où j'ai connu cette
expérience -d'avoir l'information de la commission concernant ses
politiques d'évaluation ou ses politiques générales
d'indemnisation. Comme c'était difficile d'avoir des auditions, j'ai
attendu un an dans un cas pour essayer d'en avoir une et je n'en ai pas eu.
C'est une mesure qui nous paraît importante d'informer les travailleurs
de leurs droits. Nous avions à la commission toute une série de
manuels qui fusionnaient des procédures, des politiques et des
programmes. Nous avons finalement fait un manuel qui regroupe toutes les
politiques et tous les programmes de la commission, et nous l'avons
distribué largement. Nous l'avons rendu accessible à toutes les
régions. Ce document a été ou sera...
Une voix: Il l'a été.
M. Bernier: Il a été déposé. Il
contient toutes les politiques et tous les programmes, que ce soit
d'indemnisation ou de réadaptation, les services médicaux. Il
contient également les politiques concernant les médecins.
Lorsqu'on dit que ce ne sont pas les médecins de la commission qui
fixent les taux d'incapacité, la politique est très claire: le
médecin doit trancher à partir de rapports d'experts et il doit,
en priorité, utiliser le rapport du médecin traitant. La
politique est très claire sur ce point et les autres politiques de
réadaptation sont toutes aussi claires. Nous avons distribué ce
manuel. Les parties l'ont. Les parties peuvent l'utiliser. C'est excellent
lorsqu'un travailleur, un représentant des travailleurs ou d'un
employeur peut dire à un fonctionnaire: Voici, c'est ce qui est inscrit
dans votre manuel et vous devez appliquer cela. À ce moment-là,
il doit le faire.
Nous avons également, récemment, commencé à
publier un recueil de jurisprudence. Nous avons, d'abord, fait un recueil de
jurisprudence concernant l'inspection et nous avons élargi. Nous en
avons un maintenant concernant les décisions des bureaux de
révision en matière de réparation. Ce recueil de
jurisprudence est distribué à toute personne - j'ai un peu de
difficulté à comprendre pourquoi on dit qu'on l'avait obtenu sous
la couverture; c'est officiel, le conseil d'administration a tranché
là-dessus - qui en fait la demande gratuitement. Nous avons, je pense,
une liste d'environ 620 personnes qui l'ont demandé et qui vont le
recevoir régulièrement. À compter de janvier ou de
février, nous allons avoir un fascicule qui va regrouper l'inpection et
la réparation, mais ce recueil de décisions est accessible
à tout le monde.
Finalement, j'ai entendu également que les accidentés,
dans certains cas, avaient de la difficulté à recevoir leur
dossier. C'est une règle aussi très claire: tout accidenté
qui en fait la demande reçoit dans les jours qui suivent son dossier
intégral. S'il ne l'a pas demandé, lorsqu'il y a révision
ou appel, nous prenons l'initiative de lui en envoyer une copie. Mais
dès qu'il le demande, c'est automatique, nous lui en remettons une copie
gratuitement. C'étaient les points que je voulais toucher. Je vous
remercie.
M. Bertrand (Jean-Louis): Jean-Louis Bertrand.
Le Président (M. Blouin): M. Bertrand.
M. Bertrand (Jean-Louis): M. le Président, M. le ministre,
MM. les députés, j'aimerais avec vous faire assez rapidement un
tour d'horizon de la prévention et de l'inspection à la
Commission de la santé et
de la sécurité du travail. Comme vous l'avez entendu
à de multiples reprises, il s'agit de l'application de la Loi sur la
santé et la sécurité du travail et, plus
particulièrement, d'atteindre deux objectifs fondamentaux que fixe la
loi: tenter d'éliminer à la source les dangers par le
contrôle, et la participation active des employeurs et des travailleurs
à la réalisation de cet objectif.
Depuis l'adoption de cette loi par l'Assemblée nationale, il y a
deux champs qui me préoccupent davantage, soit l'inspection, d'abord, et
la prévention, ensuite. Concernant l'inspection, depuis 1981, vous savez
que tous les services d'inspection qui appartenaient auparavant à quatre
organismes différents sont maintenant unifiés et, dès le
début de l'année 1981, ces services étaient
entièrement opérationnels. Comme vous vous en doutez
sûrement, il a fallu s'assurer d'une formation adéquate de ces
inspecteurs, préparer les manuels d'opération du nouveau service
d'inspection, préparer évidemment aussi le manuel de l'inspecteur
dont vous avez entendu parler, manuel qui a été, comme cela a
été dit, discuté en comité plénier du
conseil d'administration. Vous retrouvez essentiellement dans ce manuel les
quatre types d'interventions qu'on retrouve dans la loi, soit l'intervention
sur l'inspection de conformité qui a pour objectif d'aller dans une
entreprise, au niveau d'un établissement, et de vérifier le
respect des règlements. Comme vous le savez, ces règlements
doivent être envisagés comme autant de règles de base de
prévention. Le deuxième programme d'inspection concerne le cas de
refus de travail; la loi nous demande d'intervenir dans des délais
rapides pour pouvoir régler les cas de refus. Le troisième
programme concerne les plaintes que les travailleurs ou les employeurs peuvent
faire concernant l'application de la loi, et le dernier concerne les
enquêtes d'accidents. Comme je vous le disais, ce service fonctionne
depuis janvier 1981. Vous avez, dans les tableaux qu'on vous a remis, un
tableau qui indique le nombre d'inspections de conformité - c'est le
tableau 3 d'enquêtes d'accidents, de plaintes et de refus pour 1981, 1982
et 1983.
En plus, les services d'inspection ont préparé des guides
techniques pour les fins de l'application de la réglementation et,
particulièrement - et tantôt, on entendait les gens de
l'Association des mines de métaux -par exemple, dans le secteur des
mines, des guides concernant les treuils utilisés dans les mines. On
est, quand même, des spécialistes au niveau du service de
l'inspection et de la prévention. L'Association des mines de
métaux, lors d'un dernier colloque portant sur la prévention, a
demandé qu'un de nos inspecteurs se rende à son colloque, pour
parler de l'entretien des treuils dans les mines. Je pense que c'est une
reconnaissance par cette association du fait que certains de nos inspecteurs
ont une bonne compétence.
En plus, le service d'inspection a dû préparer des
inspections dans des champs nouveaux et particulièrement au niveau de
l'agriculture. C'était un champ qui n'avait pas encore été
abordé par l'inspection dans le domaine de la santé et de la
sécurité. Aussi, nous avons dû créer un bureau de
révision et, comme l'a dit tantôt mon collègue, M. Bernier,
le rapport des décisions de ce bureau est disponible sur demande.
Quant à l'aspect de la prévention, l'objectif a d'abord
été de mettre en place des équipes de base, tant à
la direction générale que dans chacune des directions
régionales et d'engager des spécialistes pour les fins
d'application de la loi, particulièrement en hygiène, en
médecine du travail, en toxicologie et du côté de la
formation, de même, évidemment, que du côté de
l'ingénierie. L'accent a été mis pour soumettre,
aussitôt que possible, au conseil d'administration la
réglementation de base pour les fins d'application de la loi. D'abord,
une proposition pour déterminer les secteurs qui doivent être
déclarés prioritaires pour les fins d'application de la loi;
préparer aussi la réglementation de base dont les comités
de santé et de sécurité, les règlements-cadres pour
les associations sectorielles, les services de santé et les programmes
de prévention, pour n'en citer que quelques-uns.
Nous avons aussi préparé des guides pour aider les
employeurs et les travailleurs à appliquer la loi. Je vous
réfère particulièrement au guide concernant
l'élaboration d'un programme de prévention, tant dans les
chantiers que dans les établissements. Je voudrais vous souligner que
ces guides ont fait l'objet de consultations auprès des
représentants tant des travailleurs que des employeurs et,
particulièrement en ce qui concerne le programme de prévention
sur les chantiers, en consultation avec l'Association des entrepreneurs en
construction du Québec et les organismes qui en sont membres. La
même approche s'est faite auprès de l'Association des mines de
métaux pour justement s'assurer - et je le souligne que c'est un guide;
ce n'était donc pas obligatoire - que ce soit l'outil le plus
adéquat possible pour l'application de la loi au niveau des
établissements ou des chantiers. Nous avons aussi pensé à
d'autres types de guides comme celui qui concerne l'analyse des risques ou
encore les registres de l'article 52. Je souligne toujours qu'il s'agit de
guides et non pas de choses obligatoires. (22 h 15)
Nous avons, évidemment, mis aussi beaucoup l'accent sur
l'information auprès des employeurs et des travailleurs, d'abord,
sur la loi elle-même. Nous avons aussi mis à la disposition
des employeurs et des travailleurs l'information de base en santé et en
sécurité, particulièrement par la création d'un
centre de documentation et d'un répertoire toxicologique. Nous avons
participé à des sessions d'information et de formation tant
auprès des établissements eux-mêmes qu'auprès de
groupes réunissant des employeurs ou des travailleurs dans un secteur,
auprès de groupes spécialisés, par exemple, les colloques
qu'on a tenus chaque année avec le Conseil du patronat.
Au niveau de guides plus techniques, nous avons sorti des guides
concernant, par exemple, la lutte contre le bruit ou encore le guide concernant
les respirateurs.
Nous avons aussi créé des liens étroits avec nos
principaux partenaires dans l'application de cette loi, d'abord avec le
ministère des Affaires sociales et son réseau et, plus
particulièrement, avec les centres hospitaliers ayant un
département de santé communautaire. Nous avons, avec eux,
préparé et soumis au conseil d'administration un contrat type qui
encadre les contrats spécifiques qui régissent les relations
entre la commission et les centres hospitaliers ayant un département de
santé communautaire. Ces liens nous assurent une coordination entre la
commission et le réseau des affaires sociales, tant au niveau de
l'ensemble du Québec qu'au niveau de chacune des régions. Au
niveau régional, cela se fait par le biais de ce qu'on appelle une table
de concertation qui réunit des représentants de la commission, de
même que des représentants du CHDST ou encore d'autres organismes
intéressés. Le principal est peut-être le ministère
de l'Éducation.
Nous avons établi avec eux, comme la loi l'indiquait, des
relations privilégiées, d'une part, pour assurer la formation de
certaines ressources humaines qui manquaient au Québec pour permettre
une bonne application de la loi. Je fais référence
particulièrement à un cours qui a été mis sur pied
en collaboration avec le ministère de l'Éducation et les
cégeps pour former des techniciens en hygiène industrielle. Je
suis bien heureux que les étudiants qui ont suivi ce cours aient tous
trouvé un débouché au niveau du marché du
travail.
Nous avons aussi assuré avec le ministère l'introduction
dans les cours de formation professionnelle des éléments de
santé et de sécurité. Évidemment, c'est un
processus qui est assez long; le ministère revoit les profils de
formation professionnelle. D'ailleurs, actuellement, il y a une réforme
en cours de ce côté. On a eu l'assurance de leur part qu'au fur et
à mesure de la révision des programmes les éléments
de santé et de sécurité seraient introduits. Je pense
qu'il est important que les futurs travailleurs, lorsqu'ils apprennent leur
métier, apprennent aussi les règles de base en santé et en
sécurité de sorte que, dès le départ - et cela a
été cité comme un élément important - ils
aient une connaissance des risques, des dangers inhérents aux
tâches qu'ils vont exécuter, une connaissance de base des produits
et des outils qu'ils vont manipuler suffisante pour y faire face
adéquatement et s'intégrer dans l'approche que veut la loi, soit
la prévention des accidents et des maladies.
Particulièrement avec le ministère de l'Éducation,
nous avons mis l'accent sur la formation dans les profils qui conduisent au
secteur de la construction. Nous pensions qu'il était important que tout
travailleur de la construction reçoive des éléments de
base de formation concernant le code de sécurité des travaux de
construction. Comme vous le savez, c'est un programme qui a été
développé, à l'époque, par l'Office de la
construction du Québec et que nous avons poursuivi; ce programme se fait
en relation étroite avec le ministère de l'Éducation et
particulièrement les centres de formation professionnelle.
Un autre point sur lequel, évidemment, nous avons mis beaucoup
l'accent, c'est la création d'associations sectorielles. Vous avez un
tableau qui vous indique les associations sectorielles formées; c'est le
tableau vert no 2. Sont formées actuellement les associations
sectorielles dans les secteurs des affaires sociales, du transport et
entreposage, du service automobile, de l'industrie des textiles primaires, de
l'imprimerie et des activités connexes et de l'administration publique.
Je pense qu'on voit là l'exemple qu'il est possible, pour les
associations d'employeurs et les associations représentant les
travailleurs, d'unir leurs efforts pour se créer un instrument leur
permettant de gérer leur santé-sécurité dans leur
milieu respectif. Nous espérons qu'au printemps 1984 l'association dans
le secteur des produits de métal, de même que dans celui de la
fabrication d'équipements de transport et de machines sera aussi
opérationnelle.
Il y a un certain nombre d'associations sectorielles qui sont en
suspens. Je pense que vous avez eu l'occasion d'entendre des
représentants patronaux du côté des mines et du
côté de la construction. Du côté de la construction,
vous savez que la loi l'impose. Nous avons mis beaucoup d'efforts pour amener
les deux parties, volontairement, à créer l'association
sectorielle. Je pense que vous avez pu voir le type de blocage qui peut exister
du côté patronal.
Cependant, ayant à l'esprit un des aspects de base au niveau de
la création d'une association sectorielle, soit suggérer des
modifications à la réglementation, nous avons, depuis maintenant
plus d'un an et demi, créé un comité consultatif où
siègent des représentants de l'Association des
entrepreneurs en construction, de même que des
représentants des associations représentatives, au sens de la Loi
sur les relations du travail dans l'industrie de la construction. Il y a aussi
un comité conjoint auquel nous déposons des projets d'amendements
au code de sécurité des travaux de construction; ces amendements
sont discutés avec les représentants des deux parties. Ce
comité consultatif, évidemment, forme des sous-comités
pour examiner des points techniques précis, faire rapport au
comité conjoint pour ensuite soumettre le tout au conseil
d'administration, éventuellement, comme modification à la
réglementation. Je pense que c'est un point important où les
parties, tant patronale que syndicale, peuvent influer sur la
réglementation.
C'étaient là les principaux points sur lesquels je voulais
attirer votre attention. Je vous remercie de votre attention et je suis
disposé à répondre à vos questions. Merci.
M. Sauvé: Avant de passer à la période de
questions, M. le Président, je voudrais donner quelques mots
d'explication sur cette brochure que vous avez, le Régime
québécois de santé et de sécurité du
travail, éléments de comparaisons avec d'autres régimes
canadiens. Elle était dans les documents que nous vous avons
donnés au début de la séance. C'est simplement parce que
plusieurs questions ont été posées là-dessus. Si
vous regardez le tableau 1 à la page 3, vous avez le nombre d'employeurs
qui contribuent aux fonds d'accident pour l'année 1982; le Québec
est toujours souligné; vous avez les dix provinces et les deux
territoires. Le tableau 2 est le rapport entre les réclamations à
la suite de lésions professionnelles et l'emploi total; c'est
intéressant de regarder les comparaisons entre les différentes
provinces. Les maximums assurables au tableau 3. L'indemnisation pour
incapacité totale temporaire au tableau 4. L'indemnisation pour
incapacité totale permanente, en 1983, au tableau 5. Ce sont des
questions que les gens se posaient ou ont posées. Vous avez le rapport
entre l'indemnité maximale prévue et la moyenne des salaires, le
mode de rajustement des rentes pour incapacité permanente, les
cotisations des employeurs en 1982, la masse salariale assurable par province
et les montants perçus en millions; la masse salariale est en milliards:
par exemple, on voit qu'au Québec nous avons cotisé sur 34 700
000 000 $ et nous avons perçu 667 000 000 $ de cotisations. Vous avez
les revenus de placements des commissions à travers le Canada, la
comparaison des taux moyens de contribution. Là, c'est
intéressant; depuis l'année 1978 jusqu'à l'année
1984 comprise, vous avez la comparaison entre la Colombie britannique,
l'Ontario et le Québec. Vous voyez que le taux moyen au Québec en
1978 était de 1,90 $, à la page 17 - je répète,
1,90 $ en 1978 - et qu'il est de 1,89 $ en 1984, alors qu'en Ontario il
était de 1,57 $ en 1978, et de 2,17 $ en 1984, par rapport au
nôtre à 1,89 $, et qu'en Colombie britannique il était de
2,07 $ en 1978 et de 2,86 $ des 100 $ de salaire en 1984.
C'est assez intéressant. On voit la situation financière
des commissions au tableau 12. On a fait grand état, depuis le
début de cette commission, du déficit de 39 000 000 $ de
l'année 1982. Je vous rappelle, si vous lisez le document à la
page 19, que l'Ontario, en 1982, a eu un léger déficit de 612 000
000 $. Vous n'en avez pas entendu parler beaucoup, M. le Président. Je
pense que le nôtre, on aurait du le dire en anglais, on n'en aurait
jamais entendu parler.
Voilà, M. le Président, nous sommes disponibles pour
répondre à vos questions.
M. Cusano: C'est intelligent, cela!
Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Cusano: Très intelligent!
Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Cusano: On va s'en parler.
Le Président (M. Gagnon): À l'ordre! Vous aurez
l'occasion de prendre la parole tantôt. Merci. M. le ministre.
M. Fréchette: Merci, M. le Président. La prudence
devrait probablement m'inciter, à ce stade-ci, à ne pas
intervenir du tout, particulièrement à la suite des sursauts que
j'endends à ma gauche depuis quelques secondes. Le motif est très
clair pour lequel ce devrait être cela et ce sera cela, quant à
moi, tout en me réservant, bien sûr, le droit d'intervenir plus
tard dans le cours de nos travaux par voie de commentaires ou par voie de
questions. Je voudrais strictement me limiter à remercier les
témoins qui viennent de se faire entendre et à tirer une
première conclusion générale.
Je comprends que nos travaux ne sont pas complétés, loin
de là; nous allons les continuer pendant la période prévue
par l'ordre que l'Assemblée nationale nous a donné et
conformément aux ententes qui sont intervenues entre les partis. Il y a,
cependant, au-delà des personnes - et quand je parle des personnes, je
ne réfère pas exclusivement et strictement à celles qui
sont devant nous ce soir, mais à toutes les personnes que nous avons
entendues depuis, maintenant, quatre jours - une constante qui
se dégage et à laquelle M. Bernier, en particulier, a
référé dans son témoignage: c'est que nous sommes
dans une matière qui, par son essence, est contentieuse. Il est
très clair - je pense qu'on peut arriver à cette conclusion
à ce stade-ci sans attendre la fin de nos travaux - que jamais personne
ne sera satisfait de quelque système que ce soit. Cela me semble tout
à fait évident. (22 h 30)
Nous sommes dans une matière qui est liée de très
près à ce que j'appellerais le champs global ou la vaste
juridiction des relations du travail et, comme je vous le disais il y a un
instant, par essence même, il s'agit toujours de matière
contentieuse qui devrait peut-être idéalement permettre que des
consensus se dégagent sur le fond. Mais nous avons tous - quand je dis
"nous", j'implique, évidemment, et peut-être au premier chef les
gouvernements - un bon bout de chemin à faire pour espérer
pouvoir atteindre cet idéal. Quelqu'un, au cours des quatre derniers
jours, a dit: II n'y a pas simplement les lois qui font obstacle, mais il y a
aussi les mentalités, les attitudes qui, à bien des
égards, font en sorte que toutes espèces de litiges naissent
à toute espèce d'époque, également. Est-ce que
c'est à cause des lois? Est-ce que c'est à cause des
règlements? Est-ce que c'est à cause, précisément,
des mentalités? Peut-être qu'il y a un peu de ces trois
éléments qui font que la situation, au Québec, est ce
qu'elle est en cette matière.
Sur le plan encore de la constatation générale, il est
fort évident, me semble-t-il, qu'ensemble nous allons avoir
intérêt à continuer de nous parler, d'échanger des
informations et des évaluations. Pour les motifs dont je vous ai
parlé au tout début de ces remarques brèves, je n'irai pas
plus loin ni dans mes observations ni, non plus, dans la possibilité qui
est la mienne de procéder par voie de questions. Je me réserverai
plutôt le droit d'intervenir après que mes collègues des
deux côtés de la table auront exécuté leurs mandats
respectifs.
Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le ministre. M. le
député de Viau.
M. Cusano: Merci, M. le Président. Depuis le commencement
de cette commission, le tout s'est déroulé très calmement
parce que les gens se sont présentés, sont venus ici en toute
sincérité. Je me sens un peu offusqué présentement
par certains commentaires. Je vais revenir aux commentaires. Je voudrais
seulement rappeler à l'honorable juge que j'étais unilingue, je
suis devenu bilingue et, après, je suis devenu trilingue. Qu'il veuille
me parler en italien, en français ou en anglais, n'importe quand, on va
y aller, on va se parler. Quand il fait des commentaires à savoir qu'il
aurait dû présenter ces statistiques en anglais et qu'on aurait
mieux compris, je comprends, M. le Président, que des témoins
ici, des invités aient parlé de l'arrogance de l'honorable
juge.
M. Sauvé: Je vous félicite, M. le
député, de parler trois langues.
M. Cusano: Excusez, j'ai la parole, M. le juge, j'ai la parole.
Vous allez avoir beaucoup de temps, M. le juge. On a entendu l'Assemblée
des travailleurs et travailleuses accidentés du Québec. On a
entendu, M. le Président, la Confédération des syndicats
nationaux. On a entendu la Fondation d'aide aux travailleurs accidentés,
la Corporation professionnelle des physiothérapeutes, le Mouvement
d'aide aux accidentés du travail du Québec.
Je m'excuse si une fois de temps en temps je fais une erreur en
français. On a entendu au bas de l'échelle. On a entendu aussi un
groupe d'intervenants professionnels de la santé de CLSC, la
Fédération québécoise des infirmières. Oui,
il y avait un groupe d'intervenants professionnels. Ils étaient ici, M.
le ministre. On a entendu les infirmières, l'Association des industries
forestières du Québec. On a entendu le conseil d'administration
de la CSST; on a pu remarquer un peu ce qu'était le paritarisme.
C'était une "Candid Camera" M. le Président, oui, une "Candid
Camera"; on a vu ce qu'est le paritarisme.
Une voix: Pourriez-vous nous dire en français à
quoi cela correspond?
M. Cusano: Oui, "Candid Camera", c'est "les Insolences d'une
caméra". On a entendu l'Association des entrepreneurs en construction
et, tantôt, l'Association des mines de métaux. Le tout s'est
déroulé dans le calme de la part des membres de cette commission.
Je ne crois pas qu'il y ait eu d'arrogance de part et d'autre. Mais, lorsqu'on
entend vos commentaires ou ceux de votre collègue, lorsqu'il parle des
cas litigieux, il se réfère spécifiquement à des
cas d'origine ethnique. Pour son information...
M. Fréchette: M. le Président, une question de
règlement.
Le Président (M. Gagnon): Sur une question de
règlement, M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, je veux bien
concourir à l'observation faite par le député de Viau que,
depuis quatre jours, nos travaux se sont déroulés dans le calme,
dans la sérénité. Je ne veux pas, non plus, empêcher
le député de Viau de tirer des conclusions ou de procéder
à des
interprétations, mais il me semble que la vérité a
quand même sa place. J'ai entendu comme lui le vice-président
à la réparation, M. Bernier, parler des motifs pour lesquels il
peut y avoir parfois dans des dossiers de la difficulté à donner
satisfaction à ceux qui demandent des renseignements. Or, ce à
quoi le député de Viau se réfère est un
élément parmi cinq ou six qui ont été
soulevés par le témoin. Quand le député de Viau dit
qu'il s'est référé spécifiquement ou exclusivement
à cet aspect-là, je m'excuse, mais, en tout cas, quant à
moi, ce n'est pas ce que j'ai compris.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Je suis d'accord avec le ministre que c'est entre
autres choses. Mais on semble ramener cela, une fois de temps en temps, autour
de cette table. Pour son information, je suis très proche de ces
communautés culturelles et je peux lui dire que, lorsque quelqu'un a un
malaise, il va s'assurer d'aller voir un médecin traitant qui parle sa
langue maternelle. Proportionnellement, il y a assez de médecins qui
parlent l'italien, il y a assez de médecins qui parlent le portugais, il
y a assez de médecins qui parlent le grec. Avancer que c'est cela le
problème, non. Mais, même si c'était cela, parce que ce
n'est pas une exclusivité d'aller chez un médecin de sa langue
maternelle, il me semble que toute personne qui va aller chez un
médecin, si elle n'est pas capable de comprendre le médecin, va y
aller avec un interprète, parce que sa santé, c'est quelque chose
à quoi tout le monde tient.
Le président, parmi plusieurs remarques, parlait du service
d'accueil. Vous avez instauré un service d'accueil, et, si ce service
d'accueil fonctionnait si bien, je pense qu'on n'aurait pas entendu parler de
tous les cas qui nous ont été présentés. Vous
parlez d'un système sophistiqué de téléphonie et
vous vous comparez à l'entreprise privée. Mais il y a une chose
que vous oubliez dans toute cette question, c'est que, si un individu appelle
chez Eaton et n'a pas de réponse, il va essayer Simpsons. Et s'il est
à Laval et que cela ne fonctionne pas avec Simpsons ou La Baie, il va
appeler Sauvé Frères. Il a un grand choix. Mais, malheureusement,
les accidentés, les travailleurs ou les syndicats n'ont pas de choix.
Lorsqu'ils ont des problèmes, ils ont seulement une place où
appeler et, lorsque cela ne fonctionne pas là-bas, c'est aux bureaux des
députés qu'ils appellent. Donner des chiffres indiquant que le
lundi il y a plus d'appels téléphoniques que le mardi et ainsi de
suite, ce sont des excuses. Statistiquement, c'est bien beau, mais cela ne
donne pas un service à la clientèle et ce n'est pas
d'aujourd'hui. Le service à la clientèle, pour moi, en ce qui
concerne n'importe quel appareil gouvernemental, doit être un service
adéquat et qui répond aux besoins des gens.
Les commentaires de M. Bernier nous ont dit beaucoup de choses et, M. le
ministre, je ne ferai pas le tour de l'ensemble; je veux seulement en souligner
quelques-unes. Vous dites: C'est sûr, tout le monde est d'accord, la
réparation ne fait pas l'unanimité. C'est sûr! "Motherhood
and apple-pie". Personne n'est contre la vertu. Ce sont des affirmations
très gratuites et tout le monde peut les faire. Vous dites, entre
autres, que vous avez bâti des méthodes qui facilitent la chose.
D'un autre côté, vous dites que l'administration n'est pas
facile.
Vous avez préparé des documents, on vient de nous donner
certains documents. Je ne sais pas combien de documents vous envoyez partout.
Je pense que c'est à peu près un centième. Vous dites que
ces textes sont bien précis et, de l'autre côté, vous dites
que ce n'est pas facile. Si c'est précis, si c'est bien fait, cela ne
devrait pas être difficile. C'est simple! Il me semble que deux plus deux
font quatre! Et vous avez des problèmes.
M. Polak: À la CSST, c'est cinq.
M. Cusano: Ah bon! On remarque aussi la date; je suis sûr
que mes collègues vont en parler. On nous donne des documents, ici, de
septembre 1983, c'est le volume no 1. On a pris des mesures. Est-ce la semaine
dernière, est-ce que cela fait trois ou quatre mois que vous êtes
en place? Je pense qu'on nous a dit que cela fait quatre ans que vous
êtes là. On donne de la jurisprudence, volume 1, no 1, en
septembre 1983. C'est cela que vous appelez de la clarté!
Vous dites que vous avez établi des méthodes de
déficit physique très claires et précises. Encore
là, si elles étaient très claires et précises,
elles ne seraient pas contestées. Elles ne se ramasseraient pas devant
la Commission des affaires sociales. On a vu des cas, ici, qui
démontrent des grandes différences. Vous avez bâti quoi? Y
a-t-il une chicane entre vous et la Commission des affaires sociales? Pourquoi
on établit certaines choses à la Commission des affaires sociales
et pas chez vous? Ce sont des questions que je me pose. Pourquoi, s'il y a des
systèmes ailleurs, à la Commission des affaires sociales, ne
prenez-vous pas un système en place? Non, vous le renvoyez. Sur votre
information - je reviens encore sur le fait - vous dites: La politique est
très claire. Je me pose la question, à savoir si cette politique
est appliquée de la même façon dans toutes les
régions parce que cela a été un de vos grands
désirs, la régionalisation. On parlera des coûts de la
régionalisation après. C'est clair, c'est précis.
C'est pour cela qu'il faut faire des conférences et expliquer tout cela.
(22 h 45)
En tout cas, en ce qui me concerne, M. le Président, les
témoignages qu'on a reçus ici n'ont fait que confirmer les
quelques cas de mon comté. Lorsque les gens viennent chez nous,
qu'est-ce qu'on fait? On a parlé de la téléphonie tout
à l'heure. J'ai essayé moi-même d'appeler au bureau de
Montréal. Je dois même vous avouer une chose: Je me suis
fâché contre ma secrétaire parce que cela faisait trois
jours que je lui demandais de rejoindre le bureau. Elle a dit: M. Cusano, c'est
impossible. Elle m'a dit: J'appelle et on me fait écouter de la musique.
J'ai dit: Je vais appeler. Je pense que je peux le répéter ici,
je me suis fâché contre ma secrétaire et je lui ai dit:
Donne-moi le numéro de téléphone et je vais appeler
moi-même. J'ai appelé. Après deux ou trois appels, on nous
fait entendre de la musique...
M. Pagé: De Radio-Canada!
M. Fréchette: Qui prône l'indépendance!
M. Cusano: ...de Radio-Canada, à ce qu'on me dit, qui
prône l'indépendance. Vous me mettez les paroles dans la bouche,
M. le ministre.
M. Fréchette: De la musique russe.
M. Pagé: M. le Président, pour l'information de
ceux qui nous écoutent, il faut dire que c'est une "inside joke". C'est
quelque chose qui s'est passé au mois de mai.
Une voix: Exactement.
M. Cusano: C'était de la musique russe et on expliquait
comment la Russie avait obtenu son indépendance. Cela m'a frappé.
Je sais que vous m'avez déjà expliqué que ce
n'était pas vous qui aviez le contrôle, justement. Vous pouvez
comprendre comment cela peut être frustrant pour l'individu qui vous
appelle.
Vous dites que des accidentés peuvent recevoir leur dossier
automatiquement. Il y a des cas dans mon comté de gens qui essaient de
l'avoir. Je vous donnerai en temps et lieu les numéros de
téléphone et les noms des personnes qui, justement, n'ont pas eu
leur dossier automatiquement ou, si elles l'ont eu, cela a pris beaucoup de
temps. On peut bien blâmer Postes Canada, mais ces gens ont eu beaucoup
de difficultés.
M. le Président, c'est tout. On posera des questions très
claires, très précises. Je m'excuse auprès des gens de
cette commission si je me suis senti quasiment attaqué tout à
l'heure. C'est parce que cela arrive un peu trop souvent et on accumule ces
choses-là. Je m'en excuse auprès des membres de la commission. Je
comprends très bien comment ces accidentés sont offusqués,
frustrés à cause de leurs contacts avec la CSST. Merci.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Portneuf.
M. Sauvé: M. le Président, pourrait-on faire des
remarques?
Le Président (M. Gagnon): Oui, effectivement.
M. Sauvé: Je pense que, sans cela, on va se perdre.
Une voix: Non, on ne se perdra pas. Le Président (M.
Gagnon): M. Sauvé.
M. Sauvé: Je félicite le député de
Viau de parler trois langues. J'en suis bien content. Tout ce que mon
collègue, M. Bernier, a voulu dire, c'est que, parmi les
problèmes, il y a des problèmes de communication et ce sont des
cas que l'ATTAQ elle-même a soulignés. Lundi, l'ATTAQ a
donné un certain nombre de cas. Nous y reviendrons. Nous avons fait
sortir les dossiers. Vous allez voir ce que c'est, pourquoi ce n'est pas si
facile. C'est beau à entendre comme cela, mais vous verrez ce que c'est
sans personnaliser le débat, mais en prenant le dossier. Tout ce qu'il a
voulu dire, c'est que certains des cas cités étaient ceux de gens
d'ethnies différentes, des Grecs, des Portugais, etc. C'est tout ce
qu'il a voulu dire.
M. Cusano: Le syndrome méditerranéen, M. le
Président!
M. Sauvé: Pardon?
M. Cusano: C'est cela que vous appelez le syndrome
méditerranéen.
M. Sauvé: Non.
Le Président (M. Gagnon): Excusez-moi, M. le
député de Viau.
M. Sauvé: Je pense que c'est ce qu'on a dit tantôt,
c'est qu'on ne tolère pas les remarques que des médecins ont
faites dans les dossiers. M. Bernier a été très clair
tantôt. Je voudrais bien qu'on se comprenne. On a dit que, comme
politique, cela n'était pas toléré, mais on ne peut pas
suivre à la piste les 2500 employés. Lorsque cela nous est
souligné, des mesures disciplinaires sont prises. Si elles ne sont pas
prises, elles
devraient être prises par le supérieur immédiat.
Ce que je disais, tout simplement - et c'est cela qui a fait sursauter
le député de Viau, je pense - c'est que le déficit de 612
000 000 $ en Ontario, en 1982, c'était gros comme cela sur quatre lignes
dans le Globe and Mail. C'est pour cela qu'au Québec on n'en a pas
entendu parler. C'est tout ce que je voulais dire. Je ne vois pas pourquoi on
sursaute. Je comprends, parce qu'on est de nationalité
différente, qu'on peut être plus sensible, j'accepte cela. Mais je
ne crois pas qu'il y ait grand-chose là-dedans.
Quand on parle de la téléphonie d'Eaton et d'Air Canada,
je ne sais pas si vous avez déjà appelé chez Air Canada
les jours de tempête ou même aux heures de pointe. Là aussi,
il y a de la musique. Là aussi, il n'y a pas grand concurrence pour
certains vols; entre Quebecair et Air Canada, des fois il n'y a pas grand
concurrence.
Chez nous, on n'a le choix ni de nos clients employeurs, ni de nos
clients travailleurs. Dans une compagnie d'assurances privée, on a le
choix de son client, on a le choix d'accepter un client, un nouvel
assuré. Un ancien assuré, si son ancien dossier est mauvais, on
peut lui dire: Monsieur, on va hausser votre prime tellement, dans le fond, que
la personne change de compagnie. Il n'y a pas de problème
là-dedans. Il faut faire attention.
Je n'ai pas compris la remarque sur la CAS. Je ne sais pas. L'exemple
qu'on a donné, c'est qu'il pouvait y avoir de la chicane. Il n'y en a
pas du tout. Il n'y a pas de chicane, à ma connaissance, entre la Cour
d'appel et la Cour suprême. On n'a pas compris du tout votre
remarque.
Quant au dossier, si M. Bernier a dit cela, c'est que, quand quelqu'un
va au bureau et veut avoir son dossier, s'il est là, il va l'avoir dans
la journée. Si c'est un vieux dossier - de ce temps-ci, M. le
Président, il y a beaucoup de cas de révision de vieux dossiers;
c'est tout à fait normal dans une période de situation
économique difficile, les gens font réviser les vieux dossiers -
un dossier qui date de 1971, comme vous allez le voir tantôt dans
certains cas, il n'est plus au bureau; il est dans ce qu'on appelle la
voûte et il est sur microfilm. Il est au siège social à
Québec. Il faut donc reconstituer le dossier et le faire revenir. Vous
ne l'avez pas dans la journée, c'est évident. Il n'y a pas un
système qui est comme cela.
Je pense qu'il faut faire bien attention. Je voudrais qu'on se parle
bien clairement. Nous avons des livres ouverts. Nous avons des explications.
Nous sommes prêts à tout faire. Ce que je veux vous dire, c'est
que, si cela allait si mal... Ce n'est pas ce qui a été dit lors
d'un sondage fait par SORECOM - pas par nous, pas un sondage interne, mais un
sondage fait par SORECOM - entre le 25 octobre et le 2 novembre auprès
de 715 accidentés - pas du public en général - dans la
région de Montréal, Laval et Longueuil. Le taux de satisfaction:
pour l'indemnisation, par exemple, 81% des gens se disent satisfaits du
service; 63% se disent satisfaits de la réadaptation. Là-dedans,
il y en a 10% qui ne répondent pas parce qu'ils n'ont pas eu les
services. C'est pour cela que le pourcentage est un peu plus bas. Nous avons
regardé cela. 76% jugent le personnel compétent. 73% ont
contacté par téléphone. 67% se disent satisfaits des
décisions du bureau de révision. 17% ne sont pas satisfaits. 72%
des accidentés considèrent que la CSST joue très bien son
rôle.
On a constaté, comme on le sait depuis longtemps, que nous avons
un problème sur le plan médical. Les gens sont moins satisfaits
parce qu'il y a un problème très simple, c'est que le
médecin qui fait l'évaluation, qu'il travaille pour qui que ce
soit, c'est lui qui dit: Chère madame ou cher monsieur, vous êtes
apte à retourner au travail à telle date. Cela ne plaît pas
toujours. Deuxièmement, c'est lui qui fixe -ou c'est elle, la femme
médecin - le taux d'incapacité. Ce n'est pas toujours celui qu'on
attendait. On nous dit qu'il y a de l'insatisfaction là-dedans. 55% sont
satisfaits de la rapidité. Donc, on se dit: Pourquoi a-ton fait un
sondage? Uniquement auprès des accidentés pour savoir quels
étaient les points qui devaient être améliorés.
Je pense, M. le Président, que l'image n'est pas celle qu'on nous
a donnée et j'espère qu'on aura l'occasion de revenir sur des cas
qui ont été discutés. Les associations patronales aussi
ont dit des choses assez cocasses. Nous avons entendu cela. Nous avons
été, je pense, très patients. Nous avons attendu pendant
quatre jours. C'est long. Quand vous ne pouvez pas répondre, c'est
très long. J'ai été surpris d'apprendre que je pouvais
être arrogant, quand on n'a même pas communiqué avec moi.
C'est assez difficile à comprendre, cela aussi.
Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Je dois vous
exprimer, dans un premier temps, notre satisfaction de voir comparaître
ici en commission parlementaire M. le juge Sauvé,
président-directeur général de la Commission de la
santé et de la sécurité du travail. Cela faisait
déjà un bon bout de temps qu'on vous attendait. Non, c'est
sincère. C'est plein d'enthousiasme. Depuis le mois de juin 1983 qu'on
parle de la possibilité d'avoir un échange.
On aura passé ensemble l'étape d'une question avec
débat. On aura passé ensemble l'étape de nombreuses
questions, quoique
spécifiques, mais qui nous tenaient à coeur et qu'on a eu
l'occasion de porter à l'attention du ministre du Travail qui a fait
tout ce qui était humainement possible pour y répondre de son
mieux compte tenu du fait, évidemment - cela va de soi - que les
réponses devaient venir de votre commission et, plus
particulièrement, de votre bureau.
La motion a été adoptée. Le gouvernement et
l'Opposition ont accepté unanimement qu'on se réunisse du 12 au
15 -finalement, ce sera jusqu'au 16 décembre -pour que les
parlementaires voient ensemble, avec ceux qui sont venus se faire entendre, de
quoi retourne, finalement, l'administration de la Commission de la santé
et de la sécurité du travail en termes de performance et en
termes d'objectifs.
C'est donc dire qu'on s'appuyait - et on l'aura constaté dans les
débats - sur deux objectifs dans le cadre de cette commission. Tout
d'abord, un dialogue ou un échange avec la commission comme partenaire
gouvernemental, évidemment, dans son objectif d'intervenir
là-dedans et aussi avec ceux qui sont directement concernés par
toute l'activité de la commission; c'était le premier objectif.
Le deuxième, c'était de profiter de cette réflexion et de
cet échange pour qu'on puisse voir ensemble si l'adoption de la loi 17,
et son application subséquente par étapes, avait profité
à la société québécoise, en
général. Il faut en convenir: quand des centaines de milliers de
réclamations arrivent chez vous chaque année, il faut dire que ce
que vous administrez, c'est une boîte qui touche l'ensemble de la
société.
La grande question est la suivante: La loi 17 a-t-elle atteint ses
objectifs? Les idéaux auxquels tous ont été conviés
en 1978 au moment du débat et en 1979 au moment de l'adoption ont-ils
été atteints? S'ils l'ont été, tant mieux. S'ils ne
l'ont pas été, pourquoi ne l'ont-ils pas été, dans
quel cadre et dans quel délai pourront-ils l'être?
On a commencé à siéger lundi. Je dois, tout
d'abord, vous dire qu'on a apprécié votre présence. Vous
venez de nous signaler que vous avez été très attentif et
que vous avez pris des notes - d'ailleurs, je peux confirmer que vous semblez
avoir pris beaucoup de notes - sur les mémoires présentés
par chacun et chacune. Il en ressort, après quelques jours d'auditions,
un sentiment généralement exprimé dans les deux
premières journées, tout au moins - et vous en conviendrez certes
- de mécontentement à l'égard de votre commission. (23
heures)
À ce sujet, peut-être que je me trompe, mais je trouve trop
facile l'argument voulant que le régime que l'on administre est tel que
ceux qui paient vont toujours trouver qu'ils paient trop cher et ceux qui
reçoivent sont susceptibles de trouver qu'ils ne reçoivent pas
toujours assez ou pas suffisamment ou pas dans le bon délai.
Je dois témoigner, M. Sauvé, que je ne m'attendais pas
à du mécontentement aussi fortement exprimé de la part des
intervenants. Cela a été - et mon collègue de tout
à l'heure en a donné la liste - à partir de
l'Assemblée des travailleurs et travailleuses accidentés du
Québec qui est venue porter à la connaissance des
députés des faits troublants en regard non seulement de
l'administration de la commission, mais aussi de l'application de la loi. Cela
a été la Confédération des syndicats nationaux qui
est venue nous entretenir sur des sujets plus particuliers, que ce soit sur la
notion du retrait préventif, que ce soit sur la notion du droit de
refus; ce sont quand même des éléments essentiels à
l'appui de l'adoption de la loi 17, au coeur même. Cela a
été aussi l'occasion pour la CSN de venir témoigner devant
nous que, dans des secteurs aussi prioritaires que le monde de la forêt,
la loi 17 n'avait pas changé grand-chose. Cela a été la
Fondation d'aide aux travailleurs accidentés et plus
particulièrement le témoignage de M. Chartrand qui a
consacré sa vie à des questions comme celle-là, qui a
été lui aussi très éloquent, très clair, qui
a eu l'occasion d'adresser une note plutôt faible au service d'inspection
de votre commission.
Cela a été la Corporation professionnelle des
physiothérapeutes qui est venue témoigner et qui, encore une
fois, a dressé un jugement sévère à l'égard
de votre commission, de son administration et des relations de cette
corporation avec votre commission. Cela a été le Mouvement d'aide
aux accidentés du travail, avec M. Guay, qui est venu faire à la
face de la commission la démonstration de cas pathétiques, des
cas inquiétants. Je me rappelle, entre autres, l'aspect de la distorsion
entre les pourcentages établis par la Commission de la santé et
de la sécurité du travail et ce qui peut être établi
par la Commission des affaires sociales, après le processus de la
révision, évidemment.
Cela a été l'Association des industries forestières
du Québec avec M. Duchesne qui est presque venu lancer un cri d'alarme
à la commission en demandant, en souhaitant, tout au moins, que la
Commission de la santé et de la sécurité du travail puisse
s'appuyer sur l'expérience du passé, ajouter des initiatives pour
atteindre enfin de véritables performances dans le secteur forestier.
Cela a été l'association Au bas de l'échelle qui, avec la
Fédération des infirmières, est venue aussi adresser des
critiques sévères à votre organisme.
Aujourd'hui, c'est l'Association des entrepreneurs en construction du
Québec qui, vous l'avez entendue comme moi, n'y est pas
allée avec le dos de la cuillère, qui vous a dit des
choses, beaucoup de choses très dures sur lesquelles elle a dû
atténuer, mais, pour d'autres, elle a totalement confirmé. Cela a
été l'Association des mines de métaux du Québec qui
est venue nous parler de votre performance.
Somme toute, ces témoignages sont devenus pratiquement de
véritables accusations à l'égard de votre commission,
accusations au niveau de la gestion, et Dieu sait si on en a parlé hier
avec cet organisme paritaire que vous côtoyez au moins une fois par mois
et qui forme le conseil d'administration! Si on fait référence
à la façon dont votre budget pour la présente année
a été adopté, il faut convenir que c'était
peut-être dit de façon élégante, un peu comme on le
fait en diplomatie, mais ce n'était pas facile, c'était dur pour
votre organisme de savoir que ces gens, qui ont été
conviés par vous à adopter un budget en première lecture,
si je puis utiliser le terme, sans posséder les résultats de
l'année 1982... Et en quelques secondes, peut-être quelques
minutes - mais pas plus qu'un nombre de minutes qui se compte sur les doigts de
la main - par coïncidence ou autrement, le rapport des états
financiers 1982 serait arrivé, immédiatement après la
première lecture, j'en conviens. Quand même, cela traduit une
situation inquiétante qui implique une appréciation et un
jugement sévères.
Donc, c'est le portrait. Cela a été reproduit assez
sensiblement par les médias, les gens qui sont ici, les gens qui ne
peuvent peut-être pas toujours faire des déclarations publiques,
mais qui sont quand même intéressés et qui en viennent
à la conclusion, après quelques jours d'audition, que vous avez
été l'objet d'accusations dures et que c'est un
réquisitoire sévère qui vous a été
livré.
Vous arrivez; vous avez le privilège de témoigner; on vous
écoute et là, la surprise de l'accusation fait place à une
déception du plaidoyer. Vous arrivez, M. le juge, et vous me dites que
vous vous êtes référé à des aspects
spécifiques dans votre réponse, ce soir. Vous semblez faire fi de
toutes ces accusations portées à l'endroit de votre
organisme.
Vous avez parlé des droits des accidentés, par rapport aux
droits des autres provinces. Entre parenthèses, si vous le permettez,
j'apprécie ces références aux autres provinces et
même le document que vous nous avez produit; cela nous témoigne
que la Commission de la santé et de la sécurité du
travail, c'est comme un peu partout au Québec: on est Canadien ou on ne
l'est pas.
Vous nous parlez du retrait préventif, des médecins.
Là, face à ce qu'on peut qualifier d'une série de
critiques ou d'accusations, vous venez nous parler de la
téléphonie, vous nous dites que 400 000 $ ont été
investis à Montréal, que vingt téléphonistes
travaillent en moyenne, qu'il y a 84% de réponses dans un délai
de deux minutes, le lundi matin, qu'il y en a 93% le vendredi
après-midi. Et vous coiffez le chapeau avec le sondage selon lequel 81%
des gens seraient satisfaits.
C'est à se demander, M. le Président, si cela ne serait
pas qu'en ce faisant, vous n'avez pas indiqué que tout ce beau monde
s'est trompé durant trois jours et que nous avons raison. Nous avons
encore devant nous 53 minutes, ce soir. Nous aurons trois heures demain
après-midi et quatre heures demain soir. C'est donc dire qu'on a un laps
de temps appréciable, ou tout au moins satisfaisant, pour avoir un
échange utile et, je l'espère, fructueux. Je l'espère bien
sincèrement.
Avant d'aborder des questions particulières qui se
réfèrent à des pans entiers de l'activité de votre
commission, je voudrais vous donner une chance, parce que vous avez pris
beaucoup de notes lorsque les gens sont venus témoigner. Vous savez, il
ne faut pas nous imputer des motifs comme cela.
M. Fréchette: ...sentence.
M. Pagé: J'apprécierais, M. le Président -
si vous preniez tout au moins le temps qu'il nous reste ce soir et, si vous
avez besoin de temps au début de l'après-midi demain, il vous
sera loisible de le faire -que vous puissiez, dans le but de vous
décharger finalement de ces nombreuses accusations qui ont plu depuis
deux jours, répondre à chacun des mémoires qui ont
été présentés ici, ces huit ou neuf
mémoires. Vous pouvez le faire et cela serait tout à fait
légitime, je pense. Ce à quoi, d'ailleurs, je m'attendais ce soir
quand vous êtes arrivé - je dois en convenir, je sais que vous
avez une expérience juridique assez poussée -c'est que vous
preniez chacun des documents et que vous disiez: dans ce domaine, on a
été accusé de telle chose, telle chose, telle chose; les
réponses sont cela, cela, cela. Non pas parler de
téléphonie, de 84% de performance dans un délai de deux
minutes et d'une petite musique qui joue, parce qu'il y a des contradictions
flagrantes.
On n'est pas à la commission et on n'est pas chez vous. Vous avez
tenté - là je donne un exemple parmi tant d'accusations -de faire
valoir tout à l'heure qu'il y avait une similitude, un suivi, une
connexion, si je peux utiliser le terme, entre les décisions de la CSST
et les décisions de la Commission des affaires sociales. À la
page 4 du mémoire de l'ATTAQ, on indique clairement, disant que cela ne
s'explique pas, que la Commission de la santé et de la
sécurité du travail reconnaît des pourcentages
d'incapacité de 2%, 5%, 15% et que ces gens-là vont
chercher des 20%, 50%, 80% et même dans certains cas 100% à la
Commission des affaires sociales. Vous ne pouvez pas laisser traîner une
accusation comme celle-là en l'air. Vous devez vous défendre. Et
si on faisait le tour de ce mémoire-là, on en aurait beaucoup
d'autres... Vous dites qu'il n'y a aucun médecin qui est à
l'emploi de la commission. À la page 5 du mémoire, on dit
très bien: "Le volet principal - c'était Mme Lefebvre qui parlait
à ce moment-là - de cet appareil, c'est le bureau médical.
Composé essentiellement de médecins fonctionnaires, pour une
grande part, de généralistes, salariés à la
commission (à l'exception de quelques-uns à vacation) ce bureau
détient les pleins pouvoirs en matière médicale." Vous
dites qu'il n'y a aucun médecin à votre emploi. Qui dit vrai?
C'est une accusation qui est grave ici. Vous devez relever chacune de ces
accusations parce que, si vous ne le faites pas, ce sont deux
possibilités, M. le juge, et vous le savez: c'est soit un plaidoyer de
culpabilité, un enregistrement, plutôt, de plaidoyer de
culpabilité ou encore c'est de dire: Tous ces gens-là se sont
trompés et j'ai la vérité. Je ne pense pas que vous ayez
soutenu cela.
M. Fréchette: M. le Président,
écoutez...
M. Pagé: Je terminais avant de céder la parole au
ministre.
Le Président (M. Gagnon): M. le ministre...
M. Fréchette: M. le Président, j'ai une
question...
Le Président (M. Gagnon): M. le ministre...
M. Pagé: Non, il n'y a pas de question. Je terminais, M.
le Président.
M. Fréchette: M. le Président...
Le Président (M. Gagnon): ...une question de
règlement?
M. Pagé: Une question de règlement sur quoi?
M. Fréchette: ...j'ai une question de règlement
à soulever. Arrogance pour arrogance, paternalisme pour paternalisme et,
finalement, juge pour juge, il y a un certain nombre de choses qui ont, en soi,
des limites. Et là, M. le Président, on est en train de passer
à jugement, voyez-vous, à rendre verdict, un peu comme on
prévoyait que cela allait se terminer depuis le temps que c'est
réclamé. On sait très bien que l'Opposition, depuis le
temps qu'elle réclame cette commission, c'est en fonction de trouver des
coupables sur la place publique. Et c'est carrément vers cela que
maintenant on est en train de se diriger.
Le député de Portneuf est un avocat d'expérience,
compétent, fort habile et, de surcroît, rendant jugement
rapidement, même avant que les "accusés", aient eu l'occasion de
témoigner. Dans ces circonstances, ils rendront leur verdict
après que l'exercice aura été complété -
cela sera leur droit strict - mais ils devraient au moins avoir la
décence de laisser l'occasion à ceux qui sont l'objet de leur
vindicte de s'expliquer jusqu'à la fin. Là, on oublie
expressément les conditions ou les règles fondamentales que, je
le croyais, le député de Portneuf respectait et connaissait. Mais
il est en train de nous faire la preuve qu'effectivement cela ne pèse
pas beaucoup dans la balance. Et quand on dit: Vous n'avez pas d'autre choix,
ou bien c'est un verdict de culpabilité, c'est le juge qui parle
aussi.
M. Pagé: M. le Président, sur les commentaires de
mon collègue...
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: ...on concourt dans le même sens. Je veux,
par l'intervention que je viens de faire, la question que j'ai posée -
parce que cette question est là - demander à la commission de
réagir, de répondre et de répliquer aux nombreuses
accusations qui ont plu contre elle depuis deux jours. Et, ce faisant - parce
qu'il y en a dans chacun des mémoires - je vous demande de
répondre à chacun de ces mémoires. Cela, c'est pour que
les deux côtés de la médaille, en toute
équité, en toute justice...
M. Fréchette: ...verdict.
M. Pagé: Mais si le témoin ou si la personne qui
est visée dit: Je ne réponds pas... On vient me parler de
téléphonie, M. le Président, ce soir, 84% et 93%, alors
que c'est bourré d'accusations qui sont pas mal plus sérieuses en
fait. Malgré tout l'aspect important des services à la
clientèle, c'était pas mal plus sérieux et plus grave.
Alors, la première question, c'est une proposition. Je vous propose, MM.
de la commission de la santé, de faire le tour. C'est cela.
M. Sauvé: II y a beaucoup d'appréciation dans
tout... (23 h 15)
Le Président (M. Gagnon): M. Sauvé, avant de vous
donner la parole, sur la question de règlement, si je lis le mandat de
la commission, je voulais moi aussi intervenir
tantôt parce que, de la façon dont les questions
étaient posées, j'avais l'impression de présider un
tribunal alors que c'est une commission parlementaire. Le mandat de la
commission, c'est d'examiner l'administration et le fonctionnement de la
Commission de la santé et de la sécurité du travail. On a
parlé d'indemnisations, de verdicts de culpabilité.
M. Maltais: Bien non, bien non.
Le Président (M. Gagnon): C'est une commission
parlementaire et c'est seulement dans ce sens que je veux vous ramener à
l'ordre.
Une voix: On n'a pas dit cela, M. le Président, ce n'est
pas nous.
Le Président (M. Gagnon): M. Sauvé.
M. Sauvé: M. le Président, nous ne sommes pas venus
ici pour plaider, nous sommes venus ici pour répondre à vos
questions. C'est bien différent, M. le Président, c'est une tout
autre histoire. Si on avait parlé pendant des heures, on nous aurait
dit: Ah! vous voulez occuper le temps, vous ne nous laissez pas le temps de
poser des questions. Nous avons essayé de répondre sommairement
aux grandes questions qui ont été posées, sans entrer dans
tous les détails, en se disant: On va nous questionner. C'est tout
à fait normal et c'est pour cela qu'on est ici. Nous sommes venus pour
répondre de notre administration sur le plan du fonctionnement et de
l'administration. Vous allez comprendre, M. le Président, que c'est
très vaste et que nous avions fort bien compris que nous étions
ici pour que nous questionnent les partis autour de la table. Si vous voulez
procéder différemment, qu'on nous dise comment. Nous n'y avons
pas d'objection. Je suis très disponible et mes collègues le sont
aussi.
Le Président (M. Gagnon): Effectivement, M. Sauvé,
vous êtes ici pour répondre aux questions des membres de la
commission. M. le député de Portneuf.
M. Pagé: M. le Président, la démarche que je
faisais, c'était strictement dans le but de permettre à la
commission de réagir à chacun des mémoires. Nous aurions
été disposés, quant à nous, à vous donner
tout le temps nécessaire pour ce faire. Je ne parlerai pas de plaidoyers
pour ne pas choquer mon ami, le député de Sherbrooke, mais je
peux quand même confirmer tout au moins qu'en ce qui concerne ce que vous
nous dites ce soir, à l'égard de toutes ces accusations qui ont
été portées, je n'ai pas de défense à faire
valoir et, si vous avez des questions, posez-les. Je vous l'offre.
Êtes-vous prêt à réagir?
M. Sauvé: Je n'ai pas dit cela, M. le Président.
Faites attention! M. le Président, je n'ai pas dit qu'on n'était
pas prêt à répondre et que ce qui est là est bien.
On est capable de donner une multitude d'exemples, mais ce qu'on pensait, c'est
qu'en répondant à des questions nous aurions pu établir
toutes les politiques. C'est bien facile. J'ai expliqué, par exemple,
comment fonctionnaient les bureaux de révision d'un bout à
l'autre, depuis le début, leur évolution, ce qui devrait
peut-être se faire selon ce que le législateur voudrait faire. Je
pensais que, de cette façon, on pouvait dire: Y a-t-il d'autres choses
qui peuvent être faites? Que pensez-vous de telle solution? Voulez-vous
faire d'autres choses? Si on reprend chacun des mémoires - vous allez
comprendre, comme M. le député l'a dit, que, dans celui de
l'AECQ, entre autres, on n'y est pas allé avec le dos de la
cuillère -ce sera probablement très long et je ne suis pas
certain que ce sera très profitable à la commission. Lorsqu'on
dit des choses, par exemple, que nous devrions poursuivre les accidentés
dans les accidents d'automobiles, c'est une aberration et ces gens le savent
fort bien. Nous sommes, en vertu de la loi, les premiers à payer. Je
demanderais au député d'écouter, parce que, après
cela, il pose des questions et il dit que je n'ai pas répondu.
M. Pagé: Je soulève une question de
règlement à ce moment-ci. J'étais...
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Portneuf, sur une question de règlement.
M. Pagé: Je comprends, M. le juge, que vous avez le droit
de formuler des commentaires, mais je peux vous assurer qu'on vous
écoute. Malgré que j'ai été en train de faire un
signe à mon collègue, je sais que vous étiez en train de
parler du volet du mémoire de l'AECQ touchant la Régie de
l'assurance automobile et les primes payées par rapport à celles
de la CSST et tout cela.
M. Sauvé: C'est important...
M. Pagé: On vous écoute. On vous suit et on est
très intéressé à vous.
M. Sauvé: Oui, mais j'ai vu tantôt que vous aviez
posé des questions et je ne suis pas certain que vous ayez tout
entendu.
M. le Président, ma question est la suivante: Les gens savent
fort bien que nous sommes, en vertu de la loi, les premiers à payer et
que la Régie de l'assurance automobile est un régime d'assurance
"no fault", la responsabilité sans faute. En vertu
de quoi pourrions-nous poursuivre? D'où cela vient-il de penser
cela? On nous a écrit pour dire: Quelle est l'entente que vous avez eue
avec la RAAQ? Il n'est pas question qu'il y ait entente, ce n'est pas possible.
Si on commence dans ce style, cela va avancer à quoi? Est-ce que cela
est une accusation? Faut-il considérer que c'est une accusation? On n'en
finira jamais et je pense que cela ne sera pas du tout utile. Nous sommes venus
ici pour répondre à des questions et pour éclairer votre
commission. Je peux parler longuement de toutes sortes de choses écrites
dans ce mémoire et qui ne feraient pas avancer du tout les choses. Si
les députés considèrent que c'est sérieux, nous
allons répondre à toutes les questions sur ces mémoires
qu'ils voudront bien nous poser. Quand il s'agit des taux dans la construction,
il faudrait qu'on compare les mêmes choses qu'on les regarde et qu'on
s'explique plus longuement.
C'est là-dessus qu'il faut travailler. Je pense que nous avons
fait un changement important, en 1979, dans la construction et à la
demande des gens de la construction. Avant 1979, M. le Président, dans
la construction, il y avait trois unités de taux. La plupart des gens
étaient à un taux couvert par le décret - tout le monde
connaît le décret de la construction - tout le monde payait 4,70 $
les 100 $ de salaire. Ils disaient, à juste titre: Ce n'est pas correct
qu'un entrepreneur qui fait du revêtement intérieur soit au
même taux que celui qui fait du montage de charpente d'acier. À
leur demande, nous avons fait 62 unités au lieu de 3. Le plus bas taux
est à 1,45 $ maintenant et le plus haut est à 21,63 $. En
Ontario, il y a douze unités. Vous voyez comment c'est difficile de
comparer. On voit tout de suite la difficulté sur les taux de la
construction. Nous avons 62 unités et nous les avons réparties au
maximum possible à leur demande. Vous comprendrez fort bien que celui
qui paie 1,45 $ ne veut pas monter et que celui qui paie 21,63 $ veut
descendre.
Il n'y a pas de mystère dans l'assurance, M. le Président.
C'est basé sur les coûts et, pour votre information, pour ceux qui
lisent le rapport du surintendant des assurances, celui que maintenant on
appelle, je pense, l'inspecteur général, les coûts
d'administration de l'entreprise privée en assurance varient entre 25%
et 30% alors que, chez nous, cela tourne entre 8% et 12%, selon les
années. Il y a une énorme différence. On ne peut pas
lancer toutes sortes de choses. Quand on se compare avec l'Ontario, en Ontario,
il y a douze unités. C'est 3,33 $ le plus bas taux et 15,91 $ le plus
haut. Est-ce qu'on va se mettre à regarder chaque page et dire: Voici,
à telle place, il y a telle erreur, à telle place, il y a telle
autre erreur. On n'a pas pensé qu'on avait été
convoqué pour cela. On a pensé qu'on nous convoquait pour
répondre à vos questions sur le plan des politiques que nous
administrons, sur la loi que nous administrons.
Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.
M. Fréchette: M. le Président, je vais
effectivement, avec votre permission, poser quelques questions aux
témoins qui sont devant nous après une observation d'ordre
général qui m'est suggérée par les remarques du
député de Portneuf. Le député de Portneuf, encore
une fois très habilement, a fait la revue des commentaires qui nous ont
été soumis depuis lundi dernier par les différents groupes
et les différents organismes qui sont venus se faire entendre. Il
était évident que nous ne devions pas nous attendre que ces gens
viennent nous dire ou enfin mettent sur la place publique les choses qui vont
bien. Cela m'apparaît de l'essence même de l'exercice qu'on est en
train de faire.
Il ne faudrait quand même pas perdre de vue, et on me corrigera si
je faisais erreur, qu'aucun des organismes que nous avons entendus depuis lundi
dernier n'a réclamé la disparition ou l'abolition de l'organisme
dont on discute, sauf l'AECQ, évidemment. Vous avez vous-même
évalué qu'il y avait là des choses grosses dans le dossier
de l'AECQ et qu'on n'y allait pas avec le dos de la cuillère. Que les
organismes qui, régulièrement, traitent avec la Commission de la
santé et de la sécurité du travail soient venus ici pour
nous indiquer quelles sont les choses qui, dans leur évaluation,
devraient être réévaluées et corrigées, cela
m'apparaît tout à fait normal et, de surcroît, cela
m'apparaît aussi satisfaire aux objectifs de cette commission. Cependant,
aucun de ces organismes - sauf l'AECQ, et avec combien de réserves,
après que quelques questions lui ont été adressées
- personne n'a réclamé la disparition ou l'abolition de la
Commission de la santé et de la sécurité du travail. Ce
qu'on veut, c'est améliorer les choses qui sont améliorables et
on l'a dit au tout début de la commission: II n'y a pas de lois, il n'y
a pas de règlements, il n'y a pas de personnes qui ne soient pas
perfectibles. Si c'est toujours l'objectif de la commission, je pense qu'on va
atteindre notre objectif.
Je vais maintenant poser quelques questions, si vous me le permettez, M.
le Président, aux gens de la permanence de la commission. Je prendrai
les mémoires les uns après les autres et en procédant
à l'inverse de ce qu'a fait le député de Portneuf. Je me
référerai effectivement au mémoire de l'Association des
entrepreneurs en construction du Québec. Je pense que tous
les observateurs, même ceux qui, à plusieurs égards,
ont plusieurs reproches à faire à la Commission de la
santé et de la sécurité du travail, vont convenir qu'il
s'est agi là du mémoire à peu près le plus "dur"
vis-à-vis de l'organisme. On retrouve dans ce mémoire une
affirmation qui a été atténuée par M. Dion - je
n'en disconviens pas - qui est lourde de conséquences et qui a presque
l'allure d'une accusation. On a dit et on a écrit que la Commission de
la santé et de la sécurité du travail fournissait des
sommes d'argent ou fournissait des subventions à des associations
syndicales dans le but de leur permettre de donner des cours et
qu'effectivement, de semblables cours ne se donnaient pas. Oui, M. le
député de Sainte-Anne. Vous pouvez manifester de la façon
que vous le voudrez, c'est votre droit.
M. Pagé: ...
M. Fréchette: II s'endort. C'est aussi son droit.
M. Pagé: II siège la nuit à cause de
vous.
M. Fréchette: M. le Président, ma question est la
suivante: À partir de l'observation de l'AECQ qui peut prendre toutes
sortes d'allures, est-ce qu'effectivement il se donne des subventions à
des associations syndicales pour des cours de formation? Si oui, ces sommes
d'argent sont-elles contrôlées par la commission et, s'il y a un
semblable contrôle, la commission sait-elle s'il se donne des cours et
quelle en est la nature? Quelle évaluation fait-elle des cours qui sont
donnés?
M. Sauvé: M. Bertrand va commencer à
répondre et, si c'est nécessaire, je compléterai, M. le
Président.
M. Bertrand (Jean-Louis): M. le Président, tantôt,
dans mon exposé général, j'ai indiqué que,
dès le départ de la mise en vigueur de la loi, on avait mis en
place les principaux mécanismes pour les fins de l'application. Or, les
articles 104 et 106 de la loi prescrivaient que la commission pouvait verser
des subventions aux parties patronales ou syndicales, aux associations
patronales ou syndicales, pour les fins de formation et d'information.
Dès le départ de la commission, celle-ci a voté des
politiques de subvention, tant du côté patronal que du
côté syndical. Dans ces politiques, évidemment, on indique,
si c'est une politique acceptée par le conseil d'administration, les
objectifs du programme, la base législative, les différentes
définitions, les champs d'application, l'administration du programme, le
budget et aussi comment ceux qui reçoivent des subventions doivent
rendre compte de ces subventions et particulièrement sur le plan
financier. Toute demande de subvention doit contenir une série de
renseignements. (23 h 30)
Puisque M. le ministre a fait allusion aux subventions du
côté syndical, vous me permettrez de prendre cette politique: Elle
doit contenir le nom légal de la centrale ou de l'association syndicale,
l'adresse du siège social, les noms et adresses des associations
affiliées puisque, si on verse une subvention à une centrale, on
doit avoir les informations concernant les associations affiliées, les
copies du certificat d'accréditation syndicale, puisqu'il s'agit de
subventions à des associations syndicales, les programmes
d'activités projetés - il y a peut-être là plus
d'intérêt pour votre commission - avec un résumé des
sujets traités ou des cours qui seront donnés et aussi, pour les
fins d'administration du programme, puisque les subventions varient selon le
nombre de membres, le nombre de membres en règle, etc. Un autre
élément important pour les fins de subventions, le secteur
d'activités économiques des participants puisque, en vertu
d'autres règles, on verse plus d'argent aux associations syndicales qui
sont dans des secteurs d'activités prioritaires, toujours dans la
même approche, soit de mettre d'abord en application la loi dans les
secteurs qui ont été décrétés prioritaires
puisque plus dangereux ou comportant plus de risques, selon nos
statistiques.
La centrale ou l'association syndicale qui reçoit ce montant doit
s'assurer de tenir des comptes et des registres qui reflètent
fidèlement et complètement les mouvements de toute somme
reçue ou utilisée pour la réalisation du programme
d'information et de formation santé et sécurité. Ces
comptes et ces registres, y compris toutes les pièces justificatives s'y
rapportant, doivent être accessibles en tout temps au représentant
de la commission. Ces registres doivent contenir un dossier pour chacune des
sessions tenues en vertu du programme de formation et doivent inclure une fiche
de renseignements sur les participants, puisqu'on peut rembourser le salaire
des participants, les listes de présence pour chaque jour de session et,
évidemment, une copie du programme de cette session.
Je vous indique cela, M. le Président, pour vous souligner
qu'après que le montant a été versé, soit à
la centrale syndicale, soit aux associations syndicales, une
vérification est faite à la direction générale de
la prévention de l'utilisation des sommes d'argent et on doit retrouver
dans ces différents registres tous les renseignements pertinents pour
justifier les dépenses d'argent qui sont faites.
Quant aux programmes qui ont été réalisés,
en 1980 - c'était le départ - 170
participants pour la CEQ pour 4 sessions; à la CSD, 15 sessions
pour 945 participants. En vous donnant ces chiffres, il y a peut-être un
point supplémentaire à souligner: le nombre de participants par
rapport au nombre de jours-participants. Souvent, on fait une session qui dure
plus d'une journée; quand je donne un nombre de participants, ce peut
être pour plus d'une journée. À la CSN, 55 sessions pour
1772 participants; à la FTQ, 159 sessions pour 3709 participants. Il y
avait aussi d'autres syndicats non affiliés à une centrale qui
ont demandé des subventions, soit la Fédération des
syndicats du secteur de l'aluminium, 9 sessions pour 20 participants. Dans leur
cas, c'est un peu spécial, ils ont décidé de former leurs
participants de façon plus intensive et cela donnait dans ce cas 260
jours-participants. Ils ont choisi de former un nombre plus restreint de
personnes, d'allouer leur budget à un nombre plus restreint pour une
formation plus longue. D'autres optent pour une formation plus intensive d'une
journée ou de deux jours pour des sessions particulières. C'est
ainsi pour chaque année où les sommes votées par le
conseil d'administration aux programmes en vertu des articles 104 et 106 sont
distribuées, en vertu de la politique adoptée par le conseil, aux
centrales ou aux associations syndicales qui doivent présenter un
programme. Les sommes leur sont versées et elles doivent nous fournir
par la suite un rapport de l'utilisation des sommes ainsi reçues. Je
pourrais continuer pour les années subséquentes, mais je pense
que la demande de M. le ministre portait davantage sur les mécanismes de
contrôle et leur fonctionnement. J'ai aussi les chiffres pour 1982.
Le Président (M. Gagnon): M. Sauvé.
M. Sauvé: II est malheureux qu'on n'ait pas entendu cet
après-midi la personne qui s'est levée pour expliquer comment se
faisait la vérification à la suite des subventions. Il y avait
dans la salle M. Leduc de la CEQ, qui aurait expliqué - parce qu'il a eu
à justifier tous les cours - comment cela fonctionnait. Je pense que les
gens savent qu'il y a une vérification importante qui se fait à
la suite des subventions.
Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.
M. Fréchette: Alors, M. le président, une autre
situation dont l'Association des entrepreneurs en construction du Québec
s'est amèrement plainte, c'est le fait que M. Jean-Claude Murray, qui
était au conseil d'administration, n'a pas vu son contrat reconduit.
M. Pagé: Ma question, si vous le permettez, est sur le
même sujet que la question précédente. Avant qu'on aborde
la question du conseil, si vous le permettez.
M. Fréchette: Ah bon! Cela va, très bien.
Le Président (M. Gagnon): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Le ministre vient de mettre en relief les
subventions qui sont versées par la commission à des organismes
recevants, volontaires, qui se voient accrédités et à qui
on confie un mandat de prévention. Dans les documents que vous avez
produits ce soir, vous avez produit l'état de la situation des
associations sectorielles au 30 novembre 1983. On y constate qu'il y a six
associations différentes qui sont en opération dans autant de
secteurs. Deux sont prévues pour le printemps 1984 et d'autres sont en
suspens, malgré que je constate... C'est en suspens dans le secteur des
forêts, pâtes et papiers, scierie, bois et meuble. On pourra
revenir là-dessus demain. Premièrement, pourriez-vous m'indiquer
la date d'acceptation par la Commission de la santé et de la
sécurité du travail? Deuxièmement, la date d'acceptation
par la commission...
M. Sauvé: De quoi?
M. Pagé: ...de l'association sectorielle...
M. Sauvé: De la fondation!
M. Pagé: ...de la fondation ou l'accrédiation, peu
importe le terme, mais la date de la naissance de l'association; les budgets
qui ont été alloués par la commission, budget
antérieur et budget en cours, s'il y a lieu; les mandats que s'est
fixés l'association en question depuis sa fondation; le nombre de
réunions de son conseil d'administration interne depuis sa fondation; le
personnel embauché depuis sa fondation; la structure, l'organigramme
interne depuis sa fondation, évidemment. Et je me réfère
à l'association du secteur des services automobiles dont la directrice
générale est Mme Lisette Lapointe.
Le Président (M. Gagnon): M. Sauvé.
M. Sauvé: En attendant que M. Bertrand trouve les
renseignements, je veux juste ajouter une chose sur les cours de formation. La
politique a été établie et acceptée par les parties
au conseil dès le début de la commission, dans la première
année, et ce sont des montants substantiels que nous donnons.
C'est-à-dire que le budget accepté par le conseil était,
cette année, de l'ordre de 4 500 000 $ pour la formation en vertu de
l'article 106, plus 1 000 000 $ que
le gouvernement donne pour la formation à la partie syndicale.
C'est-à-dire que, dès le départ, nous avons donné 2
000 000 $ et 2 000 000 $ - c'étaient toujours des budgets adoptés
par le conseil - et le gouvernement 1 000 000 $. La partie patronale a dit: Je
n'en veux pas. Donc, la partie syndicale a dit, évidemment: Je le
prends. Et la partie syndicale, depuis le début, reçoit 1 000 000
$ de plus. La partie patronale n'a jamais pris tout le montant qui lui est
alloué parce qu'elle vient, au cours de l'année 1983, de jeter
les bases du centre patronal de formation en santé et
sécurité. Et il y a l'Association des hôpitaux du
Québec qui en a une partie, l'UPA qui en a une partie. Je ne me souviens
pas des autres; on pourrait les trouver. Ces subventions, du côté
syndical, ne sont jamais suffisantes. La distribution se fait par la partie
patronale selon ses critères, par la partie syndicale selon ses
critères, à l'intérieur des 2 250 000 $ qu'elles
reçoivent chacune. Il y a une distribution qui se fait. Nous n'avons,
comme commission, qu'à exécuter la décision prise par les
parties, respectivement. Il est bien entendu que c'est contrôlé,
vérifié, comme M. Bertrand l'a expliqué tantôt, avec
la politique qui a été adoptée par le conseil.
Je pense que M. Bertrand peut répondre à votre question
sur l'association sectorielle des services automobiles.
Le Président (M. Gagnon): M. Bertrand.
M. Bertrand (Jean-Louis): Vous avez demandé une
série de détails que je n'ai pas entièrement en ma
possession ici ce soir. Je vais m'efforcer de retrouver et d'obtenir les
réponses les plus précises possible et ce, le plus tôt
possible pour les remettre à la commission. Je peux vous souligner,
cependant, que l'association sectorielle des services automobiles va se pencher
plus spécialement sur la production de programmes de prévention
spécifiques aux établissements s'occupant de la vente des
véhicules automobiles ainsi qu'aux stations-service.
Je pense que c'est là une association qui oeuvre dans un secteur
qui n'est pas prioritaire. Cependant, dès le départ, ils ont
voulu bien souligner leur intention d'implanter les éléments de
la Loi sur la santé et la sécurité et c'est
peut-être l'élément intéressant - de l'implanter sur
une base volontaire, puisque ce n'est pas un secteur couvert par l'application
de la loi, pour amener les parties à se prendre en charge avant
même que la loi ou le règlement concernant le programme de
prévention ne s'applique à eux. Je pense que c'est une initiative
fort intéressante.
Au niveau de l'explication concernant l'association même, cette
dernière a produit un dépliant qui s'intitule "L'Association
sectorielle paritaire pour la santé et la sécurité du
travail, secteur des services automobiles". Je pourrai le remettre avec plaisir
à la commission; je n'en ai qu'un seul exemplaire dans mon cahier. On y
répète les rôles et fonctions de l'association sectorielle
et on y indique combien de travailleurs y sont réunis: 55 000
travailleurs et 9000 employeurs, répartis sur tout le territoire du
Québec, qui regroupe, particulièrement, les établissements
de détaillants de véhicules automobiles, les grossistes en
véhicules automobiles et accessoires, les détaillants en pneus,
accumulateurs et accessoires, les stations-service et postes d'essence, les
ateliers de réparations des véhicules automobiles,
débosselage et mécanique.
Évidemment, il s'agit d'un secteur spécial où vous
avez beaucoup de petites entreprises. C'est donc un secteur à couvrir
aussi sur l'ensemble du Québec et qui est peut-être
caractéristique de ce secteur, par rapport à d'autres secteurs.
On a parlé, par exemple, de celui des pâtes et papiers qui
regroupe de gros établissements.
Dans son document d'information, l'association indique que
l'année 1982 a été consacrée à la mise sur
pied de l'association, à la préparation du règlement de
régie interne, à l'assemblée générale de
fondation et au programme d'action qui était axé sur
l'information auprès des membres.
Actuellement, soit durant l'année 1983, l'association se dote du
personnel requis pour entreprendre principalement l'action que je vous ai
indiquée tantôt. Une autre mesure qu'elle a prise aussi, c'est de
revoir l'ensemble de la réglementation qui s'applique à son
secteur, pour en faire une grille, un peu sur le modèle de celle que la
commisssion avait développée pour les secteurs prioritaires, pour
aider les parties, et particulièrement la partie patronale, à se
prendre en charge, pour pouvoir lire les règlements qui ne sont pas
faciles à lire. Je pense que, pour plusieurs membres de la commission
qui sont juristes, il n'est pas toujours facile de se retrouver dans un
règlement. (23 h 45)
La commission a développé des grilles
réglementaires pour aider les parties à se retrouver à
l'intérieur de ces règlements. L'association sectorielle prend le
même chemin. Évidemment, nous l'avons développée
prioritairement pour les secteurs prioritaires. Il est intéressant de
voir qu'une association qui n'est pas encore dans un secteur prioritaire
développe le même type de grille. C'est là un des buts
poursuivis, c'est-à-dire que l'association, les parties, tant du
côté patronal que syndical, se prennent en charge et
développent leurs propres outils, à leur mesure, et je pense que
c'est éminemment souhaitable qu'on devrait faire en sorte que, de plus
en plus, c'est l'association sectorielle
qui devrait être le premier intervenant auprès des parties
patronale et syndicale dans un établissement.
Leurs services; vous avez parlé de l'organigramme. On le retrouve
dans leurs documents d'information. Il y a le service d'information, le service
de formation, le service de la recherche et le service de conseil.
Évidemment, ce sont là les grandes divisions qu'on va retrouver
dans toutes les associations sectorielles.
Évidemment, vous retrouvez aussi, comme on le retrouve dans toute
association sectorielle, le conseil d'administration et un comité de
direction, un comité administratif qui siège entre les
réunions du conseil d'administration. Je vais obtenir pour l'information
de la commission le nombre de réunions du conseil d'administration et je
vais demander aussi, pour compléter l'information, le nombre de
réunions du comité administratif. Je pense que M. le
député voulait l'avoir depuis le début de la fondation de
l'association.
M. Pagé: Si possible.
M. Bertrand (Jean-Louis): Je vais obtenir cela pour les fins de
l'information de la commission. Quant à la structure, l'organigramme que
je viens de vous indiquer rapidement satisfait-il le député ou si
vous désirez un organigramme détaillé?
M. Pagé: Je vous remercie de vos commentaires. Je
comprends que vous ne puissez répondre à toutes les questions ce
soir, c'est tout à fait explicable. Je rappelle quand même les
questions.
M. Sauvé: Excusez-moi un instant. Peut-on ajouter une
chose que je pense importante? C'est la façon dont chaque directeur
général ou directrice générale est embauché
ou choisi. Jean-Louis.
M. Bertrand (Jean-Louis): Oui, la plupart des associations,
à cause de la formation même du conseil d'administration qui est
paritaire, employeurs et associations accréditées, choisissent de
faire affaires avec des firmes-conseils pour la sélection de leur
directeur général. Quant au nombre de personnes en poste
actuellement, dans le cas des services automobiles, au 31 décembre 1983,
il y avait six personnes en poste et il est prévu, dans son budget de
1984 qui est déposé, onze personnes.
M. Pagé: Dans les renseignements que vous fournirez demain
à la commission, pourriez-vous nous donner la date précise de
fondation et le budget pour l'année 1982, le budget pour l'année
1983...
M. Bertrand (Jean-Louis): Les budgets de 1982 et de 1983.
M. Pagé: Pour les années 1982 et 1983 et le budget
requis et déposé de 1984, compte tenu que vous venez de me dire
qu'il prévoit une augmentation de personnel, etc.
M. Bertrand (Jean-Louis): II est important que j'explique
à la commission comment fonctionnent les budgets pour les associations
sectorielles. Le conseil d'administration vote un montant pour les associations
sectorielles. Ce budget ou cette enveloppe budgétaire, si vous voulez,
est réparti entre les différentes associations sectorielles et
chacune doit présenter ce qu'on appelle un budget programme dans lequel
elle doit détailler l'ensemble de ses activités avec les montants
requis pour ses activités. Ce budget est adopté par le conseil
d'administration lui-même. Je pense que c'est important de le souligner.
Ensuite la permanence, si vous voulez, verse le montant et s'assure des suivis
budgétaires. C'est la façon de fonctionner. Lorsqu'on parle du
budget pour l'année 1984, c'est évidemment le conseil
d'administration qui devra recevoir les budgets et en décider. Je ne
peux vous donner que la demande présentée par l'association et
non pas le budget qui sera octroyé en 1984, puisque seul le conseil peut
en décider.
M. Pagé: D'accord. Je voudrais quand même vous
signaler, M. Sauvé et M. Bertrand, que les questions que je pose ne
doivent, ni directement ni indirectement, être interprétées
comme étant un doute sur les objectifs de l'association. On sait que,
dans le secteur de l'automobile - d'ailleurs, cela avait été
longuement évoqué ici lors de l'étude du projet de loi 17
- il y a beaucoup à faire. Vous avez mis le point sur un aspect
particulier avec des PME, des entreprises qui ont eu souvent un, deux ou trois
employés ou encore un propriétaire unique. L'objectif est tout
à fait louable. Cependant, vous avez décrit sommairement -
peut-être pourrez-vous ajouter demain - ce qui s'est fait depuis la
fondation de l'association. En addenda, peut-être pourriez-vous -
écoutez, comme je l'ai dit souvent, on n'est pas chez vous et on n'y va
pas souvent - nous décrire quel est le processus? Comment s'enclenche le
processus de création d'une association? À l'égard de
cette association spécifique, si vous avez des documents, par exemple,
requêtes, cosignatures, peu importe, à soumettre, à nous
déposer, peut-être que vous pourriez nous les déposer.
Quels sont les documents qui ont servi, sur lesquels se sont appuyées
les parties pour que soit fondée et accréditée par la CSST
l'association dans le secteur de l'automobile?
J'aimerais savoir le budget en 1982 parce qu'ils se sont mis sur
pied.
Évidemment, il y a eu la fondation. Probablement que, comme les
autres organismes, ils se sont trouvé un local et ont embauché du
personnel. J'aimerais savoir combien de personnes ont travaillé en 1982.
J'ai cru comprendre qu'en 1982 vous avez travaillé
particulièrement sur un programme d'action qui est probablement la
préparation de cela. On doit retenir que le document qu'ils ont produit
est intéressant, mais il est davantage un document de promotion qu'un
document d'information sur le contenu ou sur ce qu'il y a à faire dans
le monde de l'automobile. C'est explicable qu'ils aient eu à faire de la
promotion, je conviens de cela. En 1983, ils se sont dotés de personnel
additionnel; donc, ils sont passés de moins de six à six. C'est
donc dire qu'ils étaient de moins de six en 1982, évidemment.
Là, ils sont à revoir l'ensemble de la réglementation - on
sait que c'est assez disparate - et des services de formation. Je voudrais
savoir ce que le service de formation a fait. Si le service de formation
pouvait nous déposer des documents, son outil de travail finalement pour
atteindre son objectif, ce serait intéressant. Aussi, évidemment,
le nombre de réunions du conseil d'administration depuis la fondation.
Je ne veux pas trop vous en demander, mais, si on pouvait aussi avoir - c'est
peut-être possible que la directrice générale vous dise: II
y a eu douze réunions - une copie au moins, peut-être pas de tous
les procès-verbaux, mais des procès-verbaux confirmant la
présence aux réunions et du nombre de réunions, cela
serait peut-être intéressant de voir cela.
M. Bertrand (Jean-Louis): Vous allez comprendre, M. le
député, que je vais évidemment devoir demander à
l'association concernée de me fournir des détails aussi
spécifiques que ceux que vous me demandez. Le délai pourrait
être un peu plus long que le délai que vous avez mis à
notre disposition comme témoins, mais je peux vous assurer que je vais
obtenir tous ces documents dont on a pris note et vous les faire parvenir.
M. Pagé: D'accord.
M. Bertrand (Jean-Louis): II est peut-être important que je
vous explique la façon, à la permanence de la commission, dont on
a abordé la question de la création des associations
sectorielles. Lorsqu'on a commencé le processus, on était
évidemment devant l'ensemble des secteurs d'activité
économique avec la prescription dans la loi de reconnaître une
association sectorielle par secteur d'activité économique. Le
processus s'est fait par la création de secteurs d'activité
prioritaire. On s'est adressé alors aux principales centrales syndicales
et plus particulièrement à la FTQ, par le biais de M. Boudreau,
puisque les membres syndicaux étant des diverses centrales - à
cette époque, c'était la CEQ, la CSN et la FTQ, mais aussi la CSD
- il y avait une espèce d'entente selon laquelle M. Émile
Boudreau, parce qu'il était reconnu comme porte-parole en matière
de santé et de sécurité pour les travailleurs - je pense
que cela a été reconnu de longue date - était celui qui
nous était, si vous voulez, prêté par le monde syndical
pour nous aider à retracer le plus précisément possible
quelles étaient les principales associations syndicales dans les
différents secteurs.
Du côté du Conseil du patronat, ces gens ont mis à
notre disposition un de leurs permanents pour faire le même exercice, M.
Duguay, du côté patronal, pour tenter de faire la liste la plus
exhaustive possible des associations patronales dans les différents
secteurs et pouvoir les regrouper par secteur. Nous avons
développé, à la permanence, en utilisant les connaissances
qu'on avait, que ce soient des affinités qu'on retrouve dans un
secteur... C'est pour cette raison qu'on a parlé longuement ici, devant
la commission, des secteurs des pâtes et papiers, de la forêt, des
scieries, du bois et du meuble, qui sont des secteurs qui ont, entre eux,
certaines affinités. Il fallait non seulement regarder les
affinités entre des groupes à l'intérieur d'un secteur ou
d'un sous-secteur, mais aussi regarder quelle était la nature de leurs
relations. Par exemple, on sait maintenant que, dans le monde de la
forêt, entre la forêt, les scieries et les pâtes et papiers,
on assiste à une intégration de plus en plus grande d'où,
évidemment, une affinité beaucoup plus grande entre la
forêt et les scieries et aussi les pâtes et papiers par rapport,
par exemple, au bois ouvré ou au meuble, qui est un peu distinct. On a
donc dû faire une grille d'analyse pour examiner cet ensemble et proposer
une possibilité de création d'associations sectorielles dans
divers secteurs.
Nous avons, par la suite, convoqué les parties, tant patronales
que syndicales, d'un secteur possible. Nous n'avons jamais tenté
d'imposer d'avance un secteur à quiconque. Nous tentions de
déterminer un secteur avec l'aide des personnes-ressources dont je vous
parlais tantôt et nous convoquions les parties patronales et syndicales
pour leur exposer, évidemment, l'objectif de la loi, la raison de la
création d'associations sectorielles - je pense que tout le monde ici
connaît cette loi - donc, leur exposer le but de l'association
sectorielle éventuelle, leur offrir notre entière collaboration
et aussi leur indiquer que le conseil d'administration ne reconnaît
qu'une seule association par secteur d'activité économique, mais
que la délimitation de ce secteur revenait - c'est une politique depuis
longtemps acceptée par
le conseil d'administration - aux parties elles-mêmes. Donc, c'est
à la suite de discussions entre les parties patronales et syndicales que
devait se faire la délimitation du secteur. Dans certains cas,
c'était peut-être plus facile. Entre autres, le secteur de
l'automobile est un secteur intéressant de ce point de vue. Dans
certains secteurs, il y avait une tradition qui préexistait - et que
vous connaissez sûrement, M. le député -reliée au
comité paritaire en vertu des décrets de convention collective.
Dans ces secteurs, déjà, les parties étaient
habituées.
On l'a aussi dans d'autres secteurs. Dans le secteur de l'imprimerie,
c'est la même chose. À cause de la présence de
comités reliés aux décrets de convention collective, il y
avait une habitude de se réunir et donc de se parler peut-être
plus facilement que dans d'autres secteurs où c'était même
nouveau pour eux de s'asseoir ensemble comme associations patronales et
syndicales à ce niveau. Je ne parle pas des négociations au
niveau d'un établissement, mais de s'asseoir à un niveau de type
sectoriel. Donc, dans ces secteurs, c'est sûr que cette habitude qui
était déjà acquise a facilité de beaucoup nos
contacts pour bien cerner quelles étaient les associations patronales ou
syndicales dans le secteur concerné, de même aussi pour
délimiter quel était le secteur propice pour leur action.
Là-dessus, il y a des variations d'un secteur à un autre. Le
secteur des affaires sociales, par exemple, qui réunit beaucoup
d'employeurs, d'établissements et aussi beaucoup de travailleurs, c'est
un gros groupe. Par ailleurs, pour un secteur comme le secteur de l'imprimerie,
qui est un plus petit groupe, c'est l'affinité et la
spécificité du secteur qui fait que ces gens-là
désiraient un secteur qui leur soit propre.
Cela vous indique le cheminement que l'on suivait et que l'on a suivi
pour tous les secteurs. Dans certains secteurs, auparavant, avant même
que la loi soit en vigueur, il y avait déjà eu des discussions.
Je pense particulièrement au secteur de la construction.
Déjà, il y avait à l'époque à l'OCQ,
relié à l'un des articles du décret de la construction, un
comité conjoint qui se réunissait pour les questions de
sécurité. J'ai eu l'occasion d'assister à une de ses
rencontres où les parties, tant patronales que syndicales, voyant
l'adoption éventuelle d'une loi, à cette époque,
semblaient prêtes à démarrer au niveau d'une association
sectorielle. Ces mêmes parties - c'est le cas e l'association sectorielle
dans le domaine e la construction - sont délimitées par la loi
elle-même. Donc, pour savoir quelles sont les associations patronales et
syndicales, c'est plus facile dans ce secteur. Les discussions entre les
parties ont démarré à cette époque et ont
continué jusqu'à aujourd'hui. J'ai été heureux,
quant à moi, d'entendre, tant du côté de M.
Lavallée, qui est un des représentants du secteur syndical de la
construction, que du côté de M. Dion, pour l'AECQ, que les deux
témoignent de leur volonté d'en arriver à une association
volontaire plutôt que forcée. (minuit)
Je dois en même temps vous indiquer que, depuis 1980,
personnellement, je me suis même impliqué parce que je crois
profondément qu'une association sectorielle peut être très
utile, tant à la partie patronale qu'à la partie syndicale. J'ai
dû me rendre compte qu'il était très difficile de les
amener à un terrain d'entente non pas, dans ce cas-là, pour
délimiter le secteur parce qu'il est délimité, mais pour
en arriver à créer l'association d'une façon volontaire.
La loi indique qu'on peut forcer la création -c'est le processus dans
lequel on est - mais j'ose toujours espérer, quant à moi, qu'on
va la créer d'une façon volontaire.
Le Président (M. Gagnon): Merci.
M. Bertrand (Jean-Louis): Demain, je pourrai compléter sur
les autres...
Le Président (M. Gagnon): Merci, on pourra se revoir
demain.
M. Pagé: Bonne nuit.
Le Président (M. Gagnon): La commission du travail ajourne
ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 0 h 1)