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Version finale

32e législature, 4e session
(23 mars 1983 au 20 juin 1984)

Le mardi 21 juin 1983 - Vol. 27 N° 125

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi 192 - Loi constituant le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec


Journal des débats

 

(Douze heures quatre minutes)

Le Président (M. Brouillet): À l'ordre, mesdames et messieurs!

La commission permanente du travail est réunie pour étudier article par article le projet de loi 192, Loi constituant le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec.

Les membres de cette commission sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Cusano (Viau), Dean (Prévost), Johnson (Anjou), Mme Harel (Maisonneuve), M. Lafrenière (Ungava), Mme Lachapelle (Dorion), MM. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), Marquis (Matapédia), Paradis (Brome-Missisquoi), Johnson (Vaudreuil-Soulanges), Gauthier (Roberval).

Les intervenants sont: MM. Bélanger (Mégantic-Compton), Champagne (Mille-Îles), Fortier (Outremont), Leduc (Fabre), Pagé (Portneuf), Payne (Vachon), Polak (Sainte-Anne), Proulx (Saint-Jean), Vaugeois (Trois-Rivières).

Maintenant, il conviendrait de désigner un rapporteur.

Mme Lachapelle: Je propose le député de Roberval.

Le Président (M. Brouillet): Tout le monde est d'accord pour que le député de Roberval soit le rapporteur de la commission. Très bien.

M. Gauthier: Avec deux chefs de l'autre bord, qu'est-ce qu'on va faire?

Le Président (M. Brouillet): J'invite l'adjoint parlementaire à nous faire quelques remarques préliminaires.

Remarques préliminaires M. Robert Dean

M. Dean: M. le Président, nous sommes réunis pour étudier article par article le projet de loi 192, Loi constituant le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec. Il s'agit d'une initiative privée d'une centrale syndicale québécoise qui groupe plus de 400 000 adhérents. Ce projet de loi donne suite à leur demande de créer ce fonds de solidarité qui a pour but, d'abord, le maintien de l'emploi, en participant au sauvetage d'entreprises en difficulté et en élaborant des solutions, des projets concrets de rechange là où les entreprises doivent fermer leurs portes; deuxièmement, la création d'emplois en participant au financement d'entreprises en expansion et de grands projets industriels, en proposant la création d'entreprises nouvelles et en proposant des projets d'expansion ou de modernisation des entreprises financées; troisièmement, l'amélioration des conditions de travail, en implantant le respect des lois régissant l'environnement du travail, comme les normes minimales de santé et de sécurité, la protection de l'environnement dans les entreprises financées, en visant à améliorer constamment, par la suite, les normes minimales imposées; quatrièmement, le développement économique, en canalisant une partie des épargnes des travailleurs vers les investissements en capital de risque, en mettant de l'avant des projets d'investissements viables, en proposant des stratégies de développement des entreprises dans leurs secteurs respectifs, s'accordant avec les objectifs de la stratégie québécoise, et en mettant de l'avant une politique de plein emploi.

Durant cette étude article par article, nous sommes prêts - c'est l'objet de cette étape de notre procédure - calmement, sans passion, à répondre aux questions, à clarifier certaines choses pour les membres de l'Opposition et à profiter de leur sagesse et de leur expertise afin de bonifier si possible ce projet de loi.

Pour ce faire - parce que, justement, la grande préoccupation de tous et de toutes est que ce fonds soit créé, qu'il atteigne les buts visés et le fasse dans le respect et dans la protection des intérêts financiers des travailleurs et des travailleuses qui décideront d'investir dans le fonds de solidarité - je me fais entourer d'une batterie assez impressionnante, j'espère, d'experts dont les compétences sont mises à profit et à la disposition de cette commission. Si vous me le permettez, je les présenterai. D'abord, Me Jules Brière, qui n'est sûrement pas inconnu de nos amis de l'Opposition, du bureau Brière, Roy, Gingras et Mailhot, qui s'est chargé de la rédaction du projet de loi; Me Normand Chatigny, consultant en ce qui regarde la structure juridique; Me Gérald Lacoste, du bureau Martineau, Walker et Associés, consultant sur les relations avec la Commission des valeurs mobilières du Québec; Me André Laverdière, inspecteur général des institutions financières, qui se chargera particulièrement

de l'article 2, s'il y a des questions ou des explications là-dessus; M. Jean-Charles Beaulieu, du ministère des Finances, qui pourra répondre aux questions sur les avantages fiscaux; M. Denis Dionne, consultant, qui est en charge des scénarios financiers du fonds; M. Pierre Laflamme, consultant en matière de relations publiques; M. Paul-Arthur Fortin. Est-il ici? Excusez-moi, il n'est pas encore ici; M. Claude Blanchet, consultant au fonds de solidarité; M. Jean-Guy Frenette, directeur de la recherche à la FTQ et responsable du projet du fonds, et M. Maurice Prudhomme, coordonnateur du fonds.

Seulement un mot et c'est tout ce que je vais dire là-dessus. Le projet de loi - je l'ai souligné au début - est une initiative privée, l'initiative d'un groupe substantiel de citoyens et de citoyennes du Québec qui veut faire quelque chose de positif et de concret dans le domaine du développement économique et favoriser l'investissement des travailleurs et des travailleuses dans le capital de risque. Le projet de loi, évidemment, existe pour encadrer ce fonds. Le projet de loi pourvoit à l'organisation du fonds, définit ses fonctions principales et délimite certaines exigences. Par exemple, le fonds pourra investir dans toute entreprise, mais il devra consacrer aux entreprises québécoises au moins 60% de son actif sous une forme ne comportant pas de garanties ni de cautionnements. Le projet de loi prévoit aussi la possibilité pour les salariés d'obtenir de leur employeur individuellement ou par l'intermédiaire d'une association accréditée la retenue sur leurs salaires de montants leur permettant d'acquérir des actions du fonds; enfin, le projet de loi attribue à la Commission des valeurs mobilières du Québec la fonction de vérifier l'exécution par le fonds des obligations que lui impose la présente loi.

M. le Président, je pense que toute autre remarque de ma part serait superflue, parce que les membres de cette Chambre ont beaucoup de travail à faire si on veut voir l'été un jour à l'extérieur de l'Assemblée nationale. Je vais terminer là-dessus en espérant qu'avec la bonne collaboration des membres de l'Opposition nous pourrons adopter ce projet de loi avant l'ajournement.

Le Président (M. Brouillet): Le porte-parole de l'Opposition, M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Pierre-J. Paradis

M. Paradis: M. le Président, je ne vous causerai pas une grande surprise en vous annonçant qu'à cause du carcan au niveau du temps dans lequel on est placé on n'a pas eu le temps, de faire la préparation honnête et sérieuse qu'exige, l'étude article par article, d'un tel projet de loi. Et vous comprenez pourquoi; on a siégé avec la guillotine jusqu'à 2 heures sur une loi dans le domaine du travail. C'est possible qu'au cours de l'après-midi on ait le temps de le faire. Mais je suis content du climat qui s'établit ce matin au début de nos travaux et qui se différencie ou se distingue, je pense, avec distinction du climat qui a régné dans les interventions en Chambre hier soir.

On n'a pas prisé, du côté gouvernemental, les observations des membres de l'Opposition en Chambre au niveau de la deuxième lecture. On ne les a pas prisées, parce qu'on n'a pas compris la grande prudence qui doit animer chacun d'entre nous lorsqu'on parle de l'argent des travailleurs et des travailleuses du Québec. L'objet du projet de loi est de constituer un fonds de solidarité des travailleurs du Québec. L'objet du projet de loi est de prendre une partie du chèque de paie des travailleurs et des travailleuses de chacun de nos comtés et de la mettre à la disposition d'un fonds qui va être contrôlé par la Fédération des travailleurs du Québec pour l'investir dans le maintien, le soutien et, possiblement, la création d'emplois. Ce sont les buts avoués du projet de loi.

En tant qu'Opposition, en tant que députés, en tant que membres de l'Assemblée nationale et en tant que responsables vis-à-vis des travailleurs et des travailleuses qu'on représente ici, on a l'obligation - je vous le soumets respectueusement - d'obtenir des précisions et des garanties - garanties qui peuvent être d'un ou de plusieurs ordres -qui peuvent faire en sorte qu'on est assurés comme parlementaires, en votant pour le projet de loi, que l'argent pris sur le chèque de paie de notre travailleur, même avec son consentement, - le capital, du moins - est garanti ou, encore mieux, que le capital et une partie des intérêts sont garantis. C'est une option. C'est une vue. Si ce n'est pas là le but du projet de loi de garantir aux travailleurs que le capital qu'ils investissent va être là quand ils en auront besoin, c'est de s'assurer que nos travailleurs et nos travailleuses qui investiront dans ledit fonds auront compris que l'investissement qu'ils font dans une régime de retraite, ils ne pourront le toucher que dans des conditions très spécifiques prévues au projet de loi. Je m'arrête avant de tomber dans l'étude article par article mais, pour qu'on se comprenne bien, c'est un investissement qu'ils pourront toucher aux alentours de la retraite. On dit toujours que quand on sera beaucoup plus vieux, on sera à la retraite. C'est un investissement qu'ils ne pourront pas toucher avant ce moment-là. C'est un investissement qui n'aura pas de marché secondaire, par définition. Ce n'est pas un placement sur lequel on peut compter - selon

l'âge, mais pour la majorité de ceux qui vont y investir - obtenir une récupération, toucher de l'argent dans deux, trois, quatre ou cinq ans pour l'achat d'une maison, l'achat d'une automobile, pour envoyer les enfants à l'école.

Donc, c'est un fonds de retraite, qui comporte également un élément de risque. Ce n'est pas un fonds de retraite sur lequel le régime d'assurance-dépôts garantit que tout le capital va être là. C'est un fonds de retraite risqué. Si c'est la volonté des travailleurs et des travailleuses d'y investir en ayant bien compris cela, c'est notre devoir de parlementaires de l'expliquer même si le temps est très limité, même si le gouvernement nous a placé un carcan de quatre jours pour faire toute la lumière là-dessus. C'est un message qui doit être entendu pour s'assurer que les travailleurs et les travailleuses du Québec comprennent bien dans quoi ils investissent. Ce n'est pas de l'épargne avec un rendement supérieur ou inférieur garanti. C'est un fonds de pension qui va être investi dans la PME et avec un taux de risque. Cela veut dire qu'il peut arriver qu'à la retraite le capital souscrit ne soit plus là dans sa totalité. Il peut arriver que le capital souscrit soit là dans sa totalité avec des fruits, si les investissements ont rapporté. Il faut être certain que nos travailleurs et nos travailleuses, que nous représentons comme députés, comprennent très clairement où va leur argent, quel est le risque, quand ils pourront le récupérer et combien de cet argent-là ils pourront récupérer. C'est le premier point.

Le deuxième point, c'est un rôle d'éducation, c'est un rôle de participation des travailleurs à notre système économique. Ce rôle de participation à notre système économique peut-il être bien compris par le travailleur qui n'investira pas un fonds de retraite, de capital de risque, dans sa boîte à lui, dans son usine à lui, pour préserver son emploi à lui, pour maintenir son emploi à lui ou celui de ses confrères ou de ses consoeurs, pour créer des emplois dans sa boîte à lui où on pourra ajouter, de façon optimiste, d'autres emplois, mais pour des gens qu'il va connaître? C'est un fonds qui n'a pas ce degré de personnalité et qui risque peut-être - c'est une question que j'adresse à l'adjoint parlementaire au ministre du Travail, parrain du projet de loi - parce qu'il n'est pas identifiable dans son milieu, de ne pas atteindre cet objectif de participation dans l'entreprise. Vous comprendrez que, dans de telles circonstances, les articles qui vont toucher cet aspect du problème feront l'objet de nos questions.

Pourquoi sauter des étapes? On prend un travailleur, une travailleuse, qui ne participe pas à la capitalisation de son entreprise. Au lieu de l'inviter à participer à la capitalisation de l'entreprise où il retire son gagne-pain, finalement, on l'invite à participer à la capitalisation d'entreprises qui peuvent, dans les pires des cas, être éloignées de sa communauté, qui peuvent dans les pires des cas, être en compétition directe avec sa "job". Il faut regarder cela et se poser la question froidement. Est-ce que le projet de loi ne saute pas une étape dans le domaine des relations du travail? Est-ce qu'en éloignant le fonds du travailleur on va avoir une implication et une compréhension du mécanisme? Est-ce que le rôle d'éducation qu'on retrouve dans les notes explicatives dudit projet de loi va être réalisable dans de telles circonstances? C'est une question fondamentale.

Est-ce que le travailleur, à qui on aura expliqué qu'il s'agit d'un fonds de retraite en capital de risque qu'il ne pourra toucher que lorsqu'il sera aux alentours de sa pension, va être motivé à offrir une plus grande productivité dans l'entreprise où il travaille si l'argent qui est pris sur son chèque de paie est investi ailleurs que dans l'entreprise où il travaille? Est-ce que ce travailleur va avoir la même motivation à se tenir au courant de la gestion - je ne dirais pas quotidienne, mais on pourrait parler de mensuelle ou de trimestrielle - de ce fonds qui, dans la majorité des cas, n'affectera pas l'entreprise où il travaille? M. le Président, ces deux premières questions relèvent de l'intérêt même du travailleur et de la travailleuse qui va investir dans ce fonds, relèvent des principes fondamentaux de la loi qui est devant nous, relèvent des objectifs visés par les objectifs fondamentaux qui sont contenus dans ce projet de loi.

M. le Président, il ne s'agit pas, non plus, de se laisser impressionner - quand on est législateur, cela ne prend pas beaucoup de temps à acquérir l'expérience nécessaire -par les titres ronflants des projets de loi. Souvent, derrière le titre, se cache la réalité que l'on retrouve dans le mécanisme, dans les objectifs et qu'on retrouvera dans la pratique, une fois le projet de loi adopté. Ce projet de loi, on le nomme, on le baptise. C'est peut-être dans l'intention d'un processus de communication, pour ne pas dire d'un processus de propagande quand on connaît le gouvernement, nos amis d'en face. On l'appelle la Loi constituant le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec. Lorsqu'on se retrouvera dans l'application, on aura tôt fait de réaliser que c'est le fonds de la FTQ. Il faut être clair. Si la FTQ met sa crédibilité en jeu, si la FTQ pilote le dossier, si la FTQ administre le fonds, il faudrait que les citoyens du Québec sachent que c'est le fonds de la FTQ et non pas le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec. C'est le fonds de la FTQ. Si le conseil d'administration est composé en

majorité de gens de la FTQ, comme c'est prévu présentement au projet de loi, il faudrait que le titre reflète ce que le projet de loi est. On va commencer par cela. Si, également, l'intention de la Fédération des travailleurs du Québec est de mettre à contribution ses membres, ceux qui volontairement, en vertu du droit d'association qui est prévu à notre Code du travail, ont choisi d'adhérer à cette centrale syndicale, si c'est la clientèle visée par la Fédération des travailleurs du Québec, il va falloir l'exprimer clairement également au niveau de la mécanique parce que, dans le cas où le fonds atteindrait ses objectifs, il faut que ceux et celles qui ont eu l'idée, qui ont pris des risques en s'embarquant dans un tel processus en récoltent les dividendes. Autant le travailleur récoltera son dividende pécuniaire, autant sa centrale syndicale pourra en récolter les dividendes politiques dans le sens syndical du terme.

Autant également, si le fonds ne connaît pas, parce qu'il n'y a pas de garanties suffisantes pour le travailleur et pour la travailleuse, les succès anticipés, il faudra que la centrale syndicale qui l'a mis de l'avant en prenne la responsabilité politique au sens syndical. Il me semble, à la première lecture du projet de loi - parce que, je vous l'ai dit, on n'a pas eu le temps, article par article, de faire l'analyse détaillée qui s'impose - évident qu'on doit faire preuve de transparence dans la rédaction du projet de loi. Il me semble qu'on doit faire preuve de transparence non pas seulement dans la rédaction, mais dans l'objectif visé. Il me semble qu'on doit faire preuve de transparence dans le contrôle du conseil d'administration du fonds. Il me semble que les travailleurs et les travailleuses de l'ensemble du Québec qui écoutent nos discours en Chambre sont en droit de savoir que ce sont prioritairement, sinon exclusivement, les membres de la FTQ qui contribueront à bâtir financièrement ce fonds.

Si je lance ces appels à la prudence au député de Prévost, au gouvernement - on me dira qu'il y a des distinctions - et, dans certains cas, des distinctions fondamentales -c'est que, comme législateurs, on a déjà, unanimement dans certains cas, donné notre appui à un mouvement comme le mouvement des caisses d'entraide économique. Je le dis sous réserve des distinctions.

On nous a parlé de création d'emplois dans nos milieux, dans nos communautés, dans nos régions. On nous a parlé de maintien d'emplois au même endroit. Les expériences vécues sont des expériences qu'on ne peut ignorer; il faut distinguer ce qu'il y a à distinguer. Mais il faut également comparer ce qu'il y a à comparer dans cette expérience. Une des distinctions fondamentales relève du fait qu'au niveau du mouvement des caisses d'entraide économique il s'agissait d'une institution prêteuse. Il ne s'agissait pas d'une institution qui achetait du capital-actions dans des entreprises. On est conscient de cela. Il y a quand même, au niveau de l'idéologie de base du mouvement des caisses d'entraide économique, tout l'aspect création, maintien d'emplois, stimulation de l'économie dans nos milieux. On connaît les répercussions. On sait que des centaines de milliers de Québécois de bonne foi, dans cet esprit de relance économique, dans cet esprit de création et de maintien d'emplois dans leurs milieux, ont investi une partie importante, dans plusieurs cas, de leurs épargnes dans ce mouvement québécois et on sait aujourd'hui dans quelle situation se retrouvent ces gens. Est-ce qu'on a analysé froidement le pis-aller, que j'appelle, dans ce dossier pour nos travailleurs et pour nos travailleuses? (12 h 30)

Cette fois-ci, ce ne sont pas les épargnes qu'on prend; c'est une partie du chèque de paie. C'est, pour le moins, aussi important que les épargnes, c'est souvent plus vital que les épargnes. Est-ce qu'on a analysé, de façon à en tirer des conclusions positives comme négatives, l'expérience des SODEQ? Est-ce qu'on a fait l'analyse qui s'imposait pour savoir quels sont les éléments positifs en comparant ce qui est comparable et en distinguant ce qu'il faut distinguer? Est-ce qu'on a fait les analyses comparatives et qu'on est prêt aujourd'hui à nous présenter un tableau clair avant de nous demander un vote comme parlementaires, en disant: Voici l'expérience des caisses d'entraide, voici ce qui est comparable et ce qui ne l'est pas; dans ce qui est comparable, voici les éléments positifs et les éléments négatifs qu'on a retirés de l'expérience?

Même tableau dans le cas des SODEQ. Il me reste deux minutes, j'aurais eu beaucoup de choses à ajouter dans ces notes préliminaires, mais j'espère que, de l'autre côté de la table, on comprend qu'en posant ces questions, qu'en convoquant la partie d'en face à un sommet sur la sécurité de l'argent des travailleurs et des travailleuses on fait montre d'un grand respect pour cet argent durement gagné pendant des heures de travail ardu. Ce respect, je n'accepterai pas, comme parlementaire, qu'on nous le reproche; je vais plutôt demander, à des parlementaires qui se sont prononcés, hier soir, en deuxième lecture, sans s'être posé ces questions fondamentales de penser aux vrais intérêts des travailleurs et des travailleuses.

Je vais vous dire, M. le Président: C'est impossible d'avoir des garanties absolues lorsqu'on se lance dans les affaires - et c'est ce que vise le fonds - mais il y a des garanties minimales qu'on est en droit d'exiger comme parlementaires, il y a des

garanties minimales que chacun des parlementaires doit exiger avant de voter pour ou contre un tel projet de loi. Ceux qui se prononcent sans avoir exigé ou demandé et obtenu ces garanties minimales font preuve d'irresponsabilité envers les travailleurs et les travailleuses. Ceux qui sont convaincus, ceux qui ont obtenu ces garanties minimales peuvent s'exprimer en toute liberté. S'ils sont convaincus que ces garanties font partie intrinsèque du projet de loi et des amendements qui seront soumis, etc., c'est leur droit d'expression le plus fondamental de le dire et de l'expliquer aux autres. Mais que ceux qui ne se sont jamais posé de questions sur ces garanties fondamentales se taisent, pour le moment, et participent à nos travaux, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Reed Scowen

M. Scowen: Merci. Au début, M. le Président, je veux dire que j'espère que la commission parlementaire va se dérouler de façon beaucoup plus saine et sereine que le débat d'hier soir. Personnellement, je n'ai pas apprécié les discours du député de Prévost, de Joliette et du ministre de la Main-d'Oeuvre pendant le débat sur la motion de report. On a été accusés d'être traîtres; le député de Prévost a invoqué la question du F-18, la question de l'entente du Nid-de-Corbeau, je ne sais pas quoi, en nous accusant de ne pas avoir eu à coeur les intérêts des travailleurs.

Je pense que, s'il a l'intention de continuer la commission parlementaire dans le même sens chaque fois qu'on soulève une objection ou une question, les choses ne vont pas aller très loin. J'espère que ces choses vont cesser. Je pense qu'il n'est pas antisyndical de poser des questions sur le projet de loi. Je dois dire que la réunion qu'on a eue ce matin avec les membres et les leaders du syndicat a été beaucoup plus fructueuse et s'est déroulée dans un climat beaucoup plus serein et beaucoup plus intéressant que la démonstration à laquelle on a eu droit hier soir.

Cela étant dit, je répète que j'espère que personne ne va prendre mes propos dans un sens antisyndical. Nous sommes ici, aujourd'hui, devant la création de ce qui peut devenir, on l'espère, une grande institution financière au Québec, une institution qui va durer longtemps, qui va réussir, qui va inciter la participation de centaines de milliers de Québécois, dans laquelle ils vont mettre une partie de leur chèque de paie comme l'a dit le député de Brome-Missisquoi, de leurs épargnes.

Quand on assiste à la création d'une institution financière, ce n'est pas antisyndical d'insister pour que le projet de loi qui la crée - parce que, semble-t-il, c'est une institution financière qui a besoin d'un projet de loi pour sa création - soit étudié par tous les moyens possibles dans une ambiance la plus neutre, la moins partisane possible et par le plus grand nombre de personnes possible.

Je conviens que le projet a été conçu par un groupe de personnes qui sont à la fois dévouées à la cause et très compétentes. Je ne le nie pas; elles ont tous un parti pris dans l'affaire, elles l'ont à coeur. C'est leur affaire et c'est normal, elles y ont mis beaucoup d'énergie et elles veulent que ce soit adopté le plus vite possible, parce que c'est leur enfant et qu'elles veulent voir la naissance, l'accouchement dans le plus bref délai. J'ai assisté, j'ai participé à beaucoup de projets moi-même dans ma vie et je les comprends. C'est leur rôle. Je les félicite.

Cependant, c'est le rôle de l'Assemblée nationale et de l'Opposition, si on adopte un projet de loi qui a pour effet de créer une institution financière permanente au Québec, de s'assurer que c'est fait d'une façon qui va satisfaire toutes les normes de sécurité qui sont convenables, qui sont nécessaires dans ce cas. Ce n'est certainement pas la faute, si vous voulez, de l'Opposition si le projet de loi a été déposé le 10 juin. L'affaire traîne avec les personnes qui l'ont conçue depuis longtemps. Les règles du jeu à l'Assemblée nationale sont bien connues. Nous sommes au mois de juin devant un nombre important, même impossible de projets de loi qu'on est obligé d'étudier jour et nuit.

Parfois, il y a des choses qui arrivent; on en a eu des exemples l'été passé: on adopte les choses à la vapeur qu'on regrette après, que même le gouvernement regrette. Je me souviens de la petite affaire du vin dans les épiceries; ce n'était pas une grosse affaire, cela a été vite réglé, mais c'est quand même un exemple de quelque chose qui peut arriver. Dans ce cas-ci, on ne parle pas d'une petite chose comme le vin dans les épiceries, dans les restaurants. On parle, je le répète, de la création d'une institution financière qui va durer longtemps. Si sa réalisation est retardée de quelques semaines ou de quelques mois pour assurer tout le monde que cela est lancé sur une base solide, je pense que ce délai, ce retard, sera vite oublié pendant les trois, quatre, cinq, dix, vingt années à venir, si l'affaire est une réussite.

Si on accepte de l'adopter à toute vitesse, dans la nuit, et que cela ne marche pas, les gens vont nous tenir responsables, comme ils l'ont fait l'été dernier, d'ailleurs, d'avoir manqué à notre responsabilité pendant l'étude et l'adoption de ces projets de loi. Je dois vous dire, M. le Président, que je trouve presque inconcevable qu'on puisse même nous demander d'adopter un tel projet de loi dans

un délai de trois ou quatre jours. Même la demande, je la trouve inconcevable. Mais on a accepté de l'étudier, ici, en commission parlementaire, et on va le faire avec, quant à moi, personnellement, beaucoup de réserve pour les raisons que j'ai invoquées.

Le problème des caisses d'entraide, qui est une autre institution créée par une loi québécoise, a causé un tort très important en ce qui a trait à la confiance des investisseurs québécois dans leurs propres institutions. Cette expérience, qui date de quelques semaines ou de quelques mois seulement, comme mon collègue l'a souligné, est encore vécue. Avant de nous permettre de répéter cette expérience, mon Dieu! j'espère que les membres des syndicats ne vont pas dire que nous sommes antisyndicaux d'insister pour qu'une institution dans laquelle ils seront invités à investir leurs épargnes soit examinée d'une façon appronfondie.

Je peux dire la même chose au sujet des SODEQ. En 1975, j'ai eu le privilège de participer au début des SODEQ, quand je travaillais pour le ministre de l'Industrie et du Commerce. Cela a été étudié, reétudié et analysé. Les SODEQ ont été lancées finalement en 1979 - si ma mémoire est bonne - par le gouvernement actuel. Même avec toutes ces études et analyses, cela a été un échec. Le fonds de solidarité est quelque chose entre la SODEQ et la caisse d'entraide, qui sont des échecs.

On propose, d'ici mercredi, que l'on encourage l'accouchement d'une telle institution. Est-ce qu'on a le droit de poser des questions? Oui. Est-ce qu'on a la responsabilité de poser des questions? Oui. Est-ce qu'on va poser des questions? Oui. J'espère que tout le monde va comprendre.

La chose qui m'a frappé, quand j'ai écouté surtout les créateurs, les instigateurs de ce fonds - il y en a plusieurs - c'est que nous sommes devant ce que quelqu'un a décrit comme un projet d'épargne de risque. Même l'idée d'une institution d'épargne de risque, c'est, en quelque sorte, une contradiction en soi, parce que, quand les gens pensent à l'épargne, ils pensent instinctivement à quelque chose qui ne comporte pas beaucoup de risque. Ceux qui proposent le projet sont confiants; ils peuvent expliquer cette contradiction possible entre les deux à ceux qui vont investir; ils peuvent continuer de l'expliquer pendant les années que cela va durer et, même plus important, ils peuvent administrer un fonds d'épargne de risque. Mais la preuve n'était pas faite jusqu'ici.

Je pense qu'on a le droit d'aller en profondeur dans cette définition et d'avoir une idée de ce que cela veut dire. Je vous donne juste un exemple, M. le Président, pour soulever les questions de fond qu'on se pose. Le fonds va être obligé d'investir au moins 60% de son actif dans les actions des

PME. Cela se comprend, c'est la base même de l'idée. L'objectif, entre autres, c'est de stimuler la connaissance de l'économie des travailleurs, d'inciter les travailleurs à s'impliquer davantage dans le succès de l'entreprise, d'inciter les propriétaires et les administrateurs à s'impliquer davantage dans le bien-être des travailleurs. Tous ces objectifs, on les partage à 100% et depuis longtemps, d'ailleurs. (12 h 45)

À titre d'exemple, je suis persuadé que les travailleurs, même après avoir reçu le bénéfice de l'abri fiscal, vont commencer à se poser des questions sur la valeur de leurs parts; c'est normal. Ils vont recevoir, après qu'ils auront investi 1000 $, un certificat indiquant qu'ils détiennent 1000 actions de catégorie À d'une valeur de 1 $. Chaque trimestre, ou chaque année le fonds sera obligé de faire un rapport à ses actionnaires, comme tous les autres fonds, comme toutes les autres sociétés quant à la valeur de leurs parts. Comment cette valeur sera-t-elle évaluée, calculée? Comment peut-on évaluer les parts, les actions dans 300 ou 400 PME? Pour moi, c'est presque impossible. Il va y avoir beaucoup de pressions sur les administrateurs du fonds pour présenter un bilan positif dans lequel les parts progressent, où il y a une augmentation de valeur parce que la rentrée de fonds est très dépendante de l'augmentation de valeur.

On a vu cela, d'ailleurs, dans les SODEQ; un des problèmes des SODEQ était la rentrée de fonds qui était arrêtée parce que les investisseurs, même avec l'abri fiscal qui était là et qui est encore là; même si l'abri fiscal était intéressant, disaient: Écoutez, la valeur des actions, finalement, c'est la moitié ou le tiers ou même 10% de ce que nous avons investi. Nous avons des actions de 1 $ et cela vaut 0,10 $, ou 0,15 $, ou 0,30 $. L'effet de cette diminution de valeur des actions a causé un gel dans la rentrée de fonds; les gens ont décroché des SODEQ. Quand les gens commencent à décrocher, il y a un effet psychologique sur la confiance dans l'institution même. On connaît déjà l'expérience de ce qui peut arriver quand les gens commencent à perdre confiance dans leurs institutions financières. On l'a vu avec les SODEQ et les caisses d'entraide.

Comment le fonds serait-il capable de maintenir cette confiance quand 60% de son actif sont investis dans les PME, dont les actions sont très difficiles à évaluer? Qui va les évaluer? Sur quelle base? Est-ce que cela sera fait d'une façon neutre par une tierce partie? Est-ce que ce sera fait par le fonds même? Est-ce que ce sera toujours fait d'une façon consistante? Qu'est-ce qui va arriver si, à un moment donné, pour le rapport annuel, le fonds se trouve dans la situation où il est obligé, d'après les conseils

de certaines personnes - qui sont loin d'être les seuls conseils qu'on peut trouver -d'indiquer qu'il y a une baisse dans la valeur des parts, des actions?

Ils seront devant une situation difficile, car il y a pas une seule façon d'évaluer la valeur des actions qu'ils vont détenir dans les PME. Il y aura probablement trois opinions différentes. Qui va décider? Il y a un conflit d'intérêts possible là-dedans, car les dirigeants du fonds auront la responsabilité ou l'autorité d'établir la valeur de leurs actions. C'est un peu l'expérience qu'on a vécue dans les caisses d'entraide.

Il y a un paquet d'autres questions qui pourraient être posées aussi. J'indique celles-là simplement comme un élément clé parce qu'on est devant cette contradiction: épargne de risque. Il faut rappeler, dans cette affaire, que les personnes seront capables de retirer leurs parts seulement avec l'approbation du conseil d'administration; ce n'est pas quelque chose où on va avoir un marché secondaire. C'est le conseil d'administration qui va décider, quand la personne prend sa retraite. La personne qui va, finalement, demander que ses actions soient rachetées, est-ce qu'ils vont lui accorder toute l'augmentation dans la valeur des PME, s'il y a augmentation? Est-ce qu'ils vont l'obliger à encaisser les pertes subies? Est-ce que les gens vont penser qu'ils ont de l'épargne alors qu'ils ont effectivement, de l'argent investi dans un fonds mutuel? En ce qui me concerne, ce sont des questions qu'il faut non seulement étudier ici, mais sur lesquelles il serait très intéressant d'avoir les opinions des personnes de l'extérieur qui n'ont pas de parti pris ni d'un côté ni de l'autre, qui n'ont pas une opinion négative ou positive envers ce principe comme tel, mais qui veulent seulement considérer froidement l'affaire pour nous en faire connaître les dangers possibles.

Par exemple, on vient d'adopter un nouveau projet de loi concernant la Régie de l'assurance-dépôts. Pendant le débat de deuxième lecture, pendant l'étude article par article, et, ensuite, à deux ou trois conférences de presse qu'il a convoquées; le ministre a dit, avec une grande fierté, que le Québec est maintenant devenu une des régions les plus exigeantes du Canada quant à la surveillance de nos institutions financières. Je peux vous référer aux discours et aux déclarations du ministre vieilles de seulement quelques semaines.

Est-ce que la Régie de l'assurance-dépôts va assurer les dépôts de cette institution? Si c'est pour de l'épargne, elle doit certainement le faire. Si c'est pour du capital de risque, elle ne le doit certainement pas. Si c'est un peu les deux, comment l'expliquer? Comment tout le monde sera-t-il capable de le comprendre? Le ministre fait un discours vendredi, dans lequel il se vante de cette nouvelle rigueur dans les institutions financières du Québec et on fait suivre ses déclarations d'il y a une semaine par la création d'une nouvelle institution financière dont les règles du jeu sont loin d'être claires et où les tierces parties n'ont jamais eu l'occasion de nous conseiller. Je pense qu'on fera quelque chose d'irresponsable - je dis "irresponsable" -devant les membres des syndicats à qui nous dirons avec notre approbation: Allez-y! L'Assemblée nationale a dit que vous aviez quelque chose de solide.

Avant de donner cette indication aux travailleurs du Québec, je veux m'assurer -et je suis persuadé que ma formation politique le veut également - qu'on peut donner cette bénédiction en pleine connaissance de cause. Merci.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Roberval.

M. Michel Gauthier

M. Gauthier: M. le Président, je dois dire que j'ai apprécié davantage l'intervention du porte-parole officiel de l'Opposition que celle du député de Notre-Dame-de-Grâce, pour un certain nombre de raisons. Tout d'abord, je dois dire que je trouve un peu décevante cette espèce d'intervention qui brandit des épouvantails à gauche et à droite et qui fait référence à des expériences qui n'ont peut-être pas toujours été heureuses, mais dont on a retiré une certaine expertise.

Pour revenir à l'intervention du porte-parole officiel de l'Opposition, le député de Brome-Missisquoi, il y a un certain de nombre de préoccupations qu'il a émises et auxquelles, je pense, le gouvernement s'associe très franchement. Quant à sa première préoccupation, le député de Brome-Missisquoi nous dit qu'il faudrait faire comprendre aux travailleurs que c'est un fonds de retraite à risque. M. le Président, je ne sais pas si le député de Brome-Missisquoi a cru percevoir, dans la démarche gouvernementale, jusqu'à présent, que nous essayions, par quelque moyen que ce soit, d'empêcher les travailleurs de comprendre ou de se rendre compte du genre d'outil qu'on voulait mettre à leur disposition.

Le gouvernement est tellement prêt à l'expliquer et à le faire comprendre aux travailleurs - parce qu'on pense qu'ils sont capables de comprendre ces choses - que, déjà des montants importants sont prévus par le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu pour procéder à l'éducation des membres, pour procéder à une vaste période de formation et d'information au sujet du fonds de solidarité. C'est déjà là à l'intérieur même du projet de loi. C'est une mesure qui, à mon sens, assure

les membres de l'Opposition que le gouvernement veut procéder de la façon la plus transparente possible, que le gouvernement veut non pas cacher des choses aux travailleurs, mais les informer et les mettre au courant de cet outil qu'on met à leur disposition.

Un argument qui est revenu hier soir: le fonds serait investi dans différentes entreprises qui ne sont pas nécessairement l'entreprise du travailleur qui y met de l'argent. Cet argument, à mon avis, est très faible parce que, selon la même logique, on pourrait très bien inviter les citoyens du Québec ou les travailleurs du Québec à ne pas investir dans leur caisse populaire parce que la caisse populaire va probablement prêter ou fournir des fonds de fonctionnement à une entreprise qui est concurrente de la leur.

Il faut, tout de même, réaliser une chose... Je n'ai pas interrompu l'Opposition. Je les ai écoutés avec respect. Vous devriez le faire plus souvent; peut-être que vous comprendriez, vous entendriez. On offre un outil aux travailleurs, qui, bien sûr, ne répond peut-être pas à 100% aux aspirations de chacun des travailleurs du Québec parce que leurs aspirations sont peut-être bien différentes de l'un à l'autre, mais c'est un fonds d'investissement dans des PME québécoises pour soutenir de l'emploi, pour soutenir de l'activité économique. Il ne faudrait, tout de même, pas exagérer outre mesure cet argument, mais penser qu'il est normal que les travailleurs puissent collaborer avec leurs centrales syndicales ou avec d'autres travailleurs pour faire des investissements, que ce soit dans leur entreprise ou dans d'autres entreprises.

Je ne pense pas qu'il y ait eu d'exigence de la part des travailleurs - et ceux qui veulent le faire peuvent le faire, d'ailleurs - d'investir directement dans leur entreprise. Il y a de plus en plus d'expériences heureuses à cet effet qui permettent aux travailleurs de prendre part à leur propre entreprise quand ils le désirent.

Le troisième argument: c'est le fonds de la FTQ plutôt qu'un véritable fonds de solidarité. Depuis le temps qu'on chante des deux côtés de la Chambre que les centrales syndicales n'ont pas toujours joué leur rôle dans le développement économique, il m'apparaît que la FTQ est arrivée là avec une excellente idée qu'on doit encourager. C'est une initiative intéressante. Ce n'est pas sous prétexte que ce ne sont pas toutes les centrales syndicales qui ont eu l'idée en même temps qu'on ne doit pas encourager cette initiative.. Il faut faire tout notre possible pour qu'elle se développe pour permettre aux travailleurs de faire un pas dans la prise en main de l'économie.

J'achève, M. le Président, parce que le temps nous presse. Le quatrième argument qui nous a été donné: les éléments de garanties pour la sécurité des investissements. Je dois, d'abord, dire qu'il y a dans le projet de loi 6 - on va les étudier - un certain nombre d'éléments de garanties importantes pour les travailleurs. C'est évident que, quand on décide de faire de l'investissement à risque, cela comporte un élément d'incertitude. On ne peut pas garantir à chaque personne qui décide de faire des investissements à risque qu'elle va retrouver son argent parce que ce ne serait plus effectivement des investissements à risque. Je dois dire là-dessus, en terminant, que le gouvernement du Québec a procédé depuis quelques mois à un certain nombre de réformes qui permettent de surveiller davantage toute l'évolution, tout le fonctionnement de nos institutions financières. On est de ceux, et j'en suis, qui croient que les travailleurs du Québec sont capables, comme les hommes d'affaires, de faire des investissements. Parfois, ils vont faire des investissements moins heureux, mais d'autres fois aussi ils vont faire des investissements très heureux. Nous croyons que ces travailleurs ont cette capacité, ont ces possibilités. Nous croyons également qu'on peut se servir des expériences passées qui ont été parfois malheureuses pour ne plus refaire les mêmes erreurs.

Avec les nouvelles structures d'inspecteur général, avec la refonte de la Loi sur la commission des valeurs mobilières, avec un certain nombre de mesures d'encadrement qui sont maintenant dans le décor, nous croyons que les travailleurs du Québec, avec la collaboration d'une centrale syndicale, sont nettement en mesure d'entreprendre une expérience qui est sur une base volontaire, une expérience de prise en main de leur économie.

Le Président (M. Jolivet): Cela dit, la parole sera au député de Vaudreuil-Soulanges dès la reprise, à 15 heures.

Une voix: Non, à 20 heures.

Le Président (M. Jolivet): Excusez-moi, je suis dans la lune.

M. Dean: II y avait une proposition de fonctionner de 15 heures à 16 h 30 et de 20 heures à 24 heures, moyennant le consentement.

Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou d'une autre, il aura la parole dès la reprise qui sera déterminée par les deux leaders.

(Suspension de la séance à 13 h 01)

(Reprise de la séance à 15 h 53)

La Présidente (Mme Lachapelle): Nous sommes réunis ici aux fins d'étudier le projet de loi 192, Loi constituant le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec.

Les membres de cette commission sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Cusano (Viau), Dean (Prévost), Johnson (Anjou), Mme Harel (Maisonneuve), M. Lafrenière (Ungava), Mme Lachapelle (Dorion), MM. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), Marquis (Matapédia), Paradis (Brome-Missisquoi), Johnson (Vaudreuil-Soulanges), Gauthier (Roberval).

Les intervenants à cette commission sont: MM. Bélanger (Mégantic-Compton), Champagne (Mille-Îles), Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), Leduc (Fabre), Pagé (Portneuf), Payne (Vachon), Polak (Sainte-Anne), Proulx (Saint-Jean), Vaugeois (Trois-Rivières).

M. Paradis: On était, dans les remarques préliminaires, Mme la Présidente, au député de Vaudreuil-Soulanges.

La Présidente (Mme Lachapelle):

Parfait. Alors, la parole est à M. Johnson, député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Daniel Johnson

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, Mme la Présidente. J'ai la surprise de voir que vous pouvez désigner les députés par leur nom en commission parlementaire contrairement à ce qui se fait à l'Assemblée nationale. Pas de problème.

Le projet de loi 192 qui est devant nous - on l'a dit longuement à l'Assemblée, au salon bleu - est une actualisation de la concertation sur laquelle le Québec doit compter pour réorienter son développement économique et va tenir à la participation de trois agents principaux: les travailleurs, les entreprises et le gouvernement. Comme je le dis, on a devant nous l'actualisation du rôle qu'entrevoient les travailleurs ou, à tout le moins, la FTQ comme preneurs à part entière dans l'entreprise de concertation qui commence à faire couler beaucoup d'encre. Depuis plusieurs années, en Amérique du Nord, aux États-Unis très certainement, un nombre presque incalculable d'auteurs sont en train de suggérer des façons d'arriver à des politiques industrielles de réajustement; les changements considérables qui sont en train de se faire dans les caractéristiques des emplois à venir, étant donné les mutations que connaissent à peu près tous les volets du commerce international, les exigences de la concurrence, etc., vont appeler chaque pays à se doter d'une politique beaucoup plus cohérente que ce que le monde industriel a pu se donner jusqu'à aujourd'hui.

Il y a des gens qui en sont conscients, il y a des gens qui n'en sont pas conscients et, parmi les gens qui en sont conscients, il y en a qui font quelque chose et il y en a qui ne font rien. Un des acteurs qui manifestement s'aperçoit qu'il faut faire quelque chose et qui, manifestement, entend faire quelque chose c'est la FTQ. Mais cela ne règle le problème qu'au tiers, et même pour une partie du tiers du monde du travail que de voir le projet de loi 192 devant nous.

Le gouvernement, quant à lui, en appuyant l'initiative qui est devant nous, semble également manifester son intérêt pour la concertation. De façon concrète, le gouvernement aurait dû faire un peu plus qu'appuyer, de façon incidente ou accessoire, un projet de loi qui est une initiative privée; le député de Prévost nous l'a répété à bien des reprises. Cela laisse, dans l'entreprise de concertation nécessaire, un trou encore passablement grand. On peu juste souhaiter, à ce moment-ci, que le gouvernement, après tant d'années de rapports de toutes sortes, de publications de toutes sortes, trouve une façon d'articuler, de façon cohérente, concrète et appuyée sur un consensus, son action comme agent de concertation pour qu'on arrive à un résultat dont on peut tous être fiers.

L'autre trou béant, c'est celui de l'entreprise où on ne note pas encore la même volonté, exprimée concrètement par la FTQ, d'une part, où on ne note même pas le même ferment de discussion qu'on peut voir dans les différents gouvernements quant à la nécessité pressante de changer un peu l'orientation de l'économie du Québec. C'est de cela qu'on discute, ici, à l'Assemblée nationale.

Je disais hier, en terminant le discours de deuxième lecture, qu'on pouvait espérer que l'initiative de la loi 192 pourrait servir de locomotive et que, à l'expérience des entreprises où il y aura participation éventuelle au Fonds de solidarité des travailleurs du Québec, des entrepreneurs, des propriétaires, le monde des employeurs, si on veut, verront qu'il y a énormément d'occasions où, concrètement, par la participation financière du travailleur - et cela reste à venir, comme je le dis - par un encadrement et une incitation plus précise, plus cohérente de la part du gouvernement, l'expérience de concertation à trois peut réserver des fruits extrêmement intéressants pour l'avenir et porteurs d'espoir.

J'écoutais, le député de Roberval avant la suspension; il a voulu critiquer, si j'ai bien compris, les remarques du député de Brome-Missisquoi, mon collègue. Il a prétendu que celui-ci a fait preuve de faiblesse dans les articulations de son argumentation sur les préoccupations que le gouvernement dit partager. J'écoutais le député de Roberval et je ne voyais pas, compte tenu des arguments qu'il faisait, valoir, ce qui faisait ressortir la faiblesse de ce que mon collègue pouvait

avoir dit. On a reproché au député de Brome-Missisquoi de prétendre que le gouvernement empêchait les travailleurs de comprendre qu'il s'agissait d'un régime d'épargne retraite, d'une épargne solidarité ou d'une retraite solidarité.

Je n'ai jamais compris, lorsqu'on veut soutenir une proposition comme celle-là, qu'il s'agit de taire la proposition inverse. Je m'explique. Quant à nous, il y a des manques - on regarde la revue de presse depuis trois mois - à décrire précisément ce qui devient de plus en plus clair, soit qu'on parle de l'épargne de risque ou d'un fonds de retraite relativement de risque. Je cherche vainement les interventions qui ont pu être faites depuis trois mois et qui décrivent, pour les travailleurs, quel genre de bateau on est en train de construire dans lequel ils navigueront avec un peu tout le monde. Je n'emploie pas le mot "bateau" au sens péjoratif, loin de là. Je parle d'un nouveau véhicule, d'une nouvelle façon d'intervenir dans le monde économique pour soutenir l'emploi, etc. Cela manque beaucoup. Je reviendrai sur la divulgation qui me paraît importante si on veut recueillir l'adhésion volontaire des travailleurs à ce programme.

J'entendais le député de Roberval qui disait: Les libéraux semblent insister sur le fait que les travailleurs devraient investir dans l'entreprise où ils travaillent. Selon le député de Roberval, c'était équivalent à prétendre que les dépôts dans une caisse populaire devraient être soumis, quant à leur investissement éventuel, à la volonté universelle des déposants et qu'on devrait faire des investissements exactement à peu près dans la même région qui est desservie par la caisse populaire. Ce n'est pas nécessairement le cas.

On parlait de ce problème, que nous avons soulevé, de la forme des garanties à l'égard de certains investissements qui, quand on parle d'épargne, quand on parle de retraite, ne peuvent pas être complètement absents du portrait. On nous a dit qu'il y a déjà des garanties. Oui, il y en a quant à la constitution d'une réserve, par exemple, de 50% des investissements qui sont faits sans avoir de garantie ou de cautionnement pour les deux ou trois premières années, de mémoire. Dans ce sens-là, cela répond en partie aux préoccupations.

Tout cela pour montrer qu'il y a un problème fondamental si on veut recueillir l'adhésion des travailleurs individuellement. Si on parle de formation économique des travailleurs, on ne parle pas d'un cadre où les travailleurs, tout en participant financièrement, auront délégué la conscience de ce que sont l'économie et la participation à l'économie à d'autres, qu'il s'agisse d'agents syndicaux, qu'il s'agisse du conseil d'administration, qu'il s'agisse des analystes, qu'il s'agisse du fonds de solidarité tel qu'il est décrit là. Je ne pense pas qu'on avance ainsi sur la voie de la meilleure compréhension qu'un plus grand nombre de gens peuvent avoir de la façon dont le système économique doit fonctionner.

Dans ce sens-là, la divulgation, dont on doit rechercher l'expression la plus claire possible dans le projet de loi et dans l'encadrement que la Commission des valeurs mobilières, par exemple, peut donner à l'émission et au traitement, si on veut, de façon générale, des actions de catégorie À, doit s'articuler sur deux pôles. Le premier est la nature des interventions du fonds. Que va faire le fonds de solidarité? Quels sont ses objectifs, le plus précisément possible, de sorte que les travailleurs vont comprendre précisément dans quoi ils sont en train d'investir? Quel est l'échéancier de son action? Investit-il à très long terme? Est-ce pour cinq ou dix ans dans certains cas? Est-ce conditionnel à l'expansion d'une entreprise, à sa reprise de solidité? Ces fonds seront éventuellement investis dans des entreprises pour combien de temps et sous quelle forme? Il y a toute la description possible dans le projet de loi qui permet toutes les interventions et les aides financières possibles, mais il n'y a pas dans les objectifs quelque chose qui permet de voir si c'est assimilable à un fonds mutuel qui rentre et qui sort d'une entreprise, qui va privilégier un secteur industriel plutôt qu'un autre. Cela m'apparaît important, si l'on parle de réorienter l'économie du Québec, que l'on sache à quelle enseigne logent les principes qui vont présider au conseil d'administration à l'investissement dans une entreprise ou dans une autre. Au-delà du fait que cela maintient ou crée des emplois, je pense qu'il faut plus que cela. C'est la nature des interventions et des préoccupations qu'on a fait valoir. Il faut donc éliminer ce que j'appellerais les occasions de confusion qui peuvent s'élever.

Quand on allègue le cas des caisses d'entraide et des SODEQ, ce n'est pas pour prétendre qu'on est devant un véhicule identique qui risque, dans quelques années, de connaître le même sort absolument épouvantable. Ce que l'on fait ressortir, c'est qu'il est utile de s'inspirer des leçons d'expérience récente pour s'assurer que les gens qui vont participer avec leurs deniers et leurs retenues salariales à ce fonds-là vont savoir dans quoi ils s'embarquent. Je pense qu'on peut dire, aujourd'hui, que les dizaines de milliers de sociétaires des caisses d'entraide ne savaient pas, c'est bien évident, dans quoi ils s'embarquaient. Lorsqu'on voit le résultat final, ils se sont aperçus qu'ils n'avaient pas du tout de certificats de dépôt garanti par je ne sais quoi, mais ils avaient des titres qui représentaient une participation assimilable à des actions ordinaires sur lesquelles ils

n'étaient pas essentiellement certains de recevoir quelque chose à la fin du compte. Dans ce sens-là, la nature des interventions du fonds doit faire l'objet d'une discussion un peu plus longue afin qu'on apprenne quels sont les objectifs du fonds de solidarité à cet égard-là. Si cela se prêtait à ce qu'on puisse les inclure dans le projet de loi comme tel, tant mieux, je pense que tous seront mieux servis.

Ma deuxième remarque porte sur la nature de la participation même du travailleur. Il devient l'heureux détenteur, le porteur, le propriétaire de quel genre de titre? Quels sont les qualités et les caractéristiques de ce titre que sont les actions de catégorie À? Est-ce qu'il est en train de se constituer un portefeuille, comme il pourrait avoir le choix de le faire? Est-ce qu'il est en train de devenir comme d'autres qui ont investi sur le marché public des actions, souvent de petits montants? Ce n'est pas tout le monde qui a des portefeuilles de 50 000 $, 100 000 $ ou 500 000 $. Il y a des gens qui ont de petits portefeuilles et qui font leur éducation économique ainsi. Est-ce que sa participation est assimilable à l'oeuvre de formation économique que la Bourse lance par voie de concours dans les écoles avec des portefeuilles fictifs, que d'autres petits clubs de placement qui existent dans les cégeps permettent de faire à coup de mises de fonds de 50$ ou 100 $ constituées à même le travail d'été d'étudiants qui veulent connnaître le fonctionnement de la Bourse. Ils se font un petit portefeuille d'environ 2000 $ ou 3000 $, ils sont 30 à 40 qui administrent cela et apprennent ce qu'est la participation à l'économie, l'économie de marché, etc. Est-ce assimilable à cela, oui ou non? Cela va dépendre de ce que le travailleur peut faire avec ce titre-là.

On a découvert qu'il n'est pas aliénable au même titre que les actions de compagnies qui sont cotées en Bourse. Cela peut être un peu ennuyeux pour le travailleur qui est rendu au point où l'idéal du projet voudrait le voir, c'est-à-dire qu'il comprend ce qu'est l'économie de marché, il sait ce qu'est une entreprise, il sait comment en lancer une, il sait comment cela fonctionne. Il a mis, sur 5 ou 6 ans, environ 7000 $ à 8000 $ là-dedans - ce n'est pas inconcevable - et là il dit: Je vais m'en créer un, commerce, avec 3 autres personnes et je vais aller chercher mon équité. J'ai une équité de 6000 $ à 7000 $ dans le fonds de solidarité et là j'aimerais m'en servir pour fonder une entreprise ou participer à la formation d'une nouvelle petite entreprise. Mais là, c'est le conseil d'administration du fonds de solidarité qui va décider de ce qu'il arrive à son équité, à son actif à lui. On s'est pas mal entendu sur le fait que le marché secondaire va être relativement restreint, c'est le moins qu'on puisse dire. Il n'est donc pas dans les conditions où cela va être rachetable en vertu du projet de loi et il n'y a pas de marché secondaire. Il a donc un montant de 6000 $ à 7000 $ de son argent accumulé depuis longtemps qui lui a permis de participer au maintien et à la création d'emplois, selon les termes du projet de loi, mais il ne peut plus sortir ce montant. Il ne peut plus le sortir.

Dans ce sens, il m'apparaît important qu'il y ait des aménagements dans le genre de réserves ou le genre de portefeuilles marginaux, dans ce que j'appellerais certains des postes d'actifs du fonds de solidarité, qui puissent prévoir qu'il y a des circonstances où le travailleur, les autres autour de lui et l'économie de son milieu auraient intérêt à pouvoir retirer les sommes déposées avec d'autres pendant un certain temps. Il m'apparaît que la loi doit pouvoir refléter cette réalité, pour ne pas s'apercevoir dans deux ou trois ans qu'on a créé des retards, qu'il y a des choses non seulement inattendues qui se sont produites, mais qu'on ne souhaitait pas voir arriver.

C'est à ce moment, et en 48 heures au maximum, que nous sommes censés trouver les formulations les plus claires qui permettent de s'assurer que les travailleurs comprennent quel est le véhicule, comprennent que cela leur appartient tout en comprenant qu'ils ne peuvent pas aller chercher leur argent. Cela amène la question à savoir si on ne doit pas élargir un peu les cas de rachat, d'aliénation, etc. De toute façon, c'est l'étape des remarques préliminaires qui annoncent un peu la nature de nos préoccupations. De façon concrète, je pense qu'on peut y donner suite. Il faut s'assurer que le projet de loi 192 soit formulé et compris, assumé par tous ceux qui seront guidés par ce qu'il y aura là-dedans d'une façon telle que le projet de loi sera un excellent garant de la pérennité de l'institution.

Si on remonte au fait qu'il faut de la concertation et que cela est un volet ou une sorte d'expression d'un des volets possibles de concertation tripartite, j'aimerais savoir si cela durera longtemps et qu'on ne se réserve pas des lendemains douloureux parce que la pierre d'assise qui est l'adhésion volontaire des travailleurs à ce système n'a pas été assurée parce que les dispositions n'étaient pas claires, parce que l'interprétation que le conseil d'administration ou d'autres agents peuvent en faire d'une façon ponctuelle est plus large que ce que les travailleurs croyaient. Cela leur réservera des déceptions. Je ne pense pas que nous ferions une oeuvre utile en ayant un projet de loi qui créera des déceptions chez des gens dont on recherche l'adhésion volontaire. "Once bitten, twice shy", comme disent les anglophones.

Dans ce cas, durant les courtes heures

dont nous disposons, notre devoir est de trouver comment améliorer, dans la recherche des objectifs de fond, la formulation d'un projet comme celui-ci; c'est pourquoi nous sommes à l'étude article par article.

Le Président (M. Brouillet): Très bien, merci. M. l'adjoint parlementaire.

Réplique de l'adjoint parlementaire

M. Dean: Très brièvement, je pense que toutes les remarques des trois porte-parole de l'Opposition étaient pour circonscrire les questions, les soucis, les inquiétudes qu'ils avaient et leur désir de rendre ce projet de loi le plus acceptable et rassurant possible. Ce sont des objectifs que nous partageons. Si j'essayais dans une série de remarques de répondre à toutes les questions ou à tous les problèmes posés, je risquerais de faire à l'avance l'étude article par article. Plus courtes seront mes remarques, plus vite on entreprendra l'étude article par article dans laquelle on pourra profiter des gens que nous avons ici et qui sont en mesure, de par leur participation dans la préparation du projet, de mieux répondre au plus grand nombre de questions de l'Opposition. Je pense que ce serait faire un travail utile. (16 h 15)

Vous me permettrez peut-être seulement d'essayer de faire quelques remarques assez larges englobant un certain nombre de sujets soulevés par l'Opposition. Je reviens au premier principe que c'est un fonds proposé par un groupe de citoyens et de citoyennes. Certaines des options ou certains des grands cadres de fonctionnement ou de conception de ce fonds sont une question de choix. Leurs choix ont été exprimés dans ce qu'ils ont déjà produit et dans ce qu'ils vont produire d'ici le moment où on cherche à convaincre les travailleurs et les travailleuses d'embarquer dans ce fonds. Ces choix peuvent être contestés à un moment donné. Ils peuvent aussi être balisés, bonifiés ou modifiés à la suite de suggestions. C'est, quand même, une approche qui représente certains choix fondamentaux exercés par la FTQ.

Il faut aussi souligner - je pense que l'unanimité se fait là-dessus - le courage de la FTQ - je pense qu'on peut employer ce mot - qui, comme centrale syndicale, sort beaucoup des sentiers battus du syndicalisme québécois et veut participer de façon particulière et concrète à ce nouvel élan de l'économie. Sous réserve de toutes les précisions, informations et garanties qu'on va essayer de donner au cours de nos discussions, il ne serait pas exagéré de dire que la meilleure garantie du sérieux, de la sécurité et du bon fonctionnement du programme, c'est qu'une centrale syndicale comme la FTQ ne peut quasiment pas se permettre de ne pas réussir; elle ne peut pas se permettre de ne pas donner les garanties aux travailleurs et aux travailleuses avant que ces personnes embarquent dans le fonds.

En disant que la FTQ ne peut pas se permettre de ne pas réussir, on doit aussi globalement faire confiance à la Commission des valeurs mobilières, qui a une série de critères et qui est chargée par le gouvernement, par nos lois, d'exercer une fonction de surveillance, d'inspection, d'exigence, de rigueur dans tout ce qui regarde - j'allais dire "de près ou de loin", mais je ne le dirai pas - les questions d'investissements de valeurs mobilières. Si la Commission des valeurs mobilières a des exigences d'information préliminaire, d'explications concrètes à des investisseurs possibles sur la nature des investissements qu'ils sont appelés à faire, ainsi que sur des éléments de contrôle, il faut aussi indiquer qu'il faut quand même faire confiance, tout en balisant des choses, à cette administration et à ce souci de voir à la bonne gestion de ce genre de fonds, le plus rapidement possible.

Il faut aussi faire confiance - j'ai appris cela il y a déjà de nombreuses années aux travailleurs et aux travailleuses mêmes. J'ai appris depuis longtemps que, lorsqu'il s'agit de cents et de piastres, cela ne prend pas un cours classique pour être très astucieux et pour poser plusieurs questions avant de se départir ou de gaspiller ces dollars. Si nous sommes d'accord qu'il est aussi arrivé que des gens de bonne volonté, dans le passé, soit intentionnellement ou par exprès, aient réussi à faire tourner au vinaigre des bons projets d'investissement et à abuser de la confiance des gens, il faut aussi dire que les travailleurs qui sont sollicités vont exiger des renseignements solides, des assurances que leurs investissements vont être fructueux et rentables. Évidemment, on parle de capital de risque et je pense, par définition, que, quand on parle franchement de capital de risque, le mot "risque" indique qu'il y a des risques. On ne peut pas risquer du capital de risque sans qu'il y ait risque.

Quant à cette approche, à cause des avantages fiscaux, qui donne la possibilité de transférer ces actions dans un régime d'épargne retraite, c'est d'abord pour assurer la stabilité du fonds que cet aspect de contrôle serré des entrées et sorties de l'argent est incorporé dans la structure du fonds. Il y a aussi le fait que pour ce qui est du secteur privé de l'économie, 75% des travailleurs n'ont pas de fonds de retraite autre que le Régime de rentes du Québec. Ce n'est pas un mauvais service à leur rendre, ce n'est pas une mauvaise éducation à faire aux travailleurs d'englober cette caractéristique de retraite combinée avec un investissement. Cela peut être une

orientation très utile pour les travailleurs comme individus, tout en assurant une stabilité à ce fonds.

Je pense à un autre concept. Le député de Brome-Missisquoi a demandé: Qu'est-ce que je peux dire à un travailleur d'usine chez nous qui dit: Est-ce que je peux investir mon argent dans mon usine? C'est un souci bien légitime. Encore là, on a pris une approche collective, si vous voulez, pour ce fonds parce qu'on a de mauvais exemples, malheureusement. Si on a de bons exemples de travailleurs qui ont, dans une situation de crise, investi dans leur usine, des exemples de réussite dans ce secteur, on a aussi connu, au Québec comme ailleurs, des situations où des travailleurs investissant dans leur usine, pour des raisons soit du marché, soit pour mauvaise gestion, soit à cause de la malchance, soit simplement à cause de l'inévitabilité de certains échecs économiques, ont tout perdu et, à cause de cela, ont fini par perdre non seulement leur argent, mais leur emploi, leur usine, leur sécurité et tout le "kit". Donc, le fait d'avoir une approche collective assure une stabilité, un élément de sécurité pour l'argent des travailleurs, dans ce sens que le travailleur va prendre des actions dans le fonds et que c'est le fonds, avec son conseil d'administration, ses conseillers, qui va investir cet argent dans des entreprises. Évidemment, on peut présumer que, si un groupe de travailleurs, une majorité de travailleurs des entreprises A, B, C, investit dans le fonds et que le moment arrive où leur industrie, leur entreprise a besoin de capitaux ou de différentes formes d'implication financière qui sont évoquées dans le projet de loi, ces travailleurs ou leur entreprise vont adresser au fonds des demandes, soumettre des projets et le fonds va probablement avoir un certain préjugé favorable à l'égard d'une participation du fonds, mais la participation dans la compagnie A, B, C, sera une participation par le fonds qui amène la force d'un investissement collectif. Il y a cet élément qui distingue. Peut-être que je ne suis pas très clair et précis, mais on va essayer tantôt d'être beaucoup plus clair et précis à mesure qu'on attaquera l'étude article par article.

Vous avez évoqué aussi, avec toutes les raisons au monde - encore là, on partage le souci de l'Opposition - la question des caisses d'entraide et des SODEQ. Bien sûr, on a vécu des expériences malheureuses, douloureuses. Tout en admettant qu'il faut bien faire notre travail de législateurs, il faut présumer que ceux et celles qui ont contribué à l'élaboration de ce projet sont très conscients de ces mêmes échecs, sont très conscients de ces mêmes problèmes et on peut espérer qu'ils vont avoir de bonnes réponses à donner quand on s'attaquera à des questions particulières au cours de cette étude article par article.

Une dernière note que j'ai ici. Pour ce qui est des remarques du député de Vaudreuil-Soulanges sur la concertation, je suis on ne peut plus d'accord avec lui quand on dit: Comme cela prend deux pour danser, cela prend peut-être trois pour se concerter. Si une centrale manifeste son désir de participer à la concertation, je suis bien d'accord qu'il faut éventuellement que le gouvernement implante des structures de concertation - si j'ai bien saisi ses remarques - sauf que je dis éventuellement parce que, des fois, ce ne sont pas les structures qui sont les plus importantes, mais c'est l'esprit, l'expérience dans le concret. Si cela donne éventuellement des structures, tant mieux, pour autant que les structures servent l'objectif. Pour ce qui est du monde patronal, encore là, j'attends avec impatience des preuves concrètes du monde patronal dans le domaine de la concertation. Je n'exclus pas les autres centrales syndicales. Je pense que j'exprime mon complet accord avec le député de Vaudreuil-Soulanges.

Cela dit, je vais toucher à un point inscrit dans mes notes sur les remarques du début du député de Brome-Missisquoi, là où il commence à parler du nom du fonds, en espérant que cela serve d'entrée en matière à l'étude l'article par article.

Étude article par article

M. Paradis: M. le Président, au niveau du préambule, qui fait partie du projet de loi, si on pouvait l'attaquer tout de suite, j'aurais un amendement à proposer.

Préambule

Le Président (M. Brouillet): Vous savez que nous devons suspendre les travaux à 16 h 30. Je ne sais pas, si vous déposiez votre amendement tout de suite, il pourrait être considéré.

M. Paradis: II n'est pas rédigé. Je vais en avertir immédiatement, pour considération, le député de Prévost, le rédacteur de l'autre côté. J'ai expliqué dans quel carcan on avait été placé. L'amendement aurait pour but de substituer deux mots à l'avant-dernière ligne du dernier paragraphe des attendus, où on dit: "Attendu que l'établissement d'un fonds de cette nature requiert l'adoption de dispositions législatives particulières tant en ce qui concerne son organisation qu'en ce qui concerne la protection des épargnants auxquels il fera appel." Je changerais le mot "épargnants" pour le mot "investisseurs" -justement, on parle, dans le premier paragraphe, d'un fonds d'investissement -pour que le travailleur n'ait pas la notion

que c'est de l'épargne sécurisée, mais que c'est de l'investissement qu'il fait, que c'est du capital de risque qu'il fait. Ce serait la proposition d'amendement. On peut y revenir.

Le Président (M. Brouillet): On en prend note et on pourra y revenir au retour, à 20 heures. Peut-être qu'on pourrait terminer le préambule, les remarques préliminaires.

M. Paradis: Je pensais que c'était terminé.

M. Dean: C'était terminé, sauf que j'aimerais poser une question au député de Brome-Missisquoi parce qu'il a évoqué le titre, le nom du fonds.

M. Paradis: Oui.

M. Dean: Est-ce qu'il va y avoir des amendements?

M. Paradis: Je peux vous dire tout de suite ce que je pense, sans l'avoir par écrit; le rédacteur est à côté également. À l'article 1: "Une compagnie à fonds social est constituée sous la dénomination sociale de "Fonds de solidarité des travailleurs du Québec". Afin de l'identifier à son créateur, à celui qui l'a mis sur pied, je mettrais entre parenthèses au bout "FTQ" pour que ce soit bien clair dans la tête des gens. D'ailleurs, les commentaires que vous avez au bas, nous indiquent que le gouvernement désire que cela soit réellement identifié à la FTQ. Et "ci-après appelée" le Fonds, on l'appellerait "le Fonds (FTQ)".

M. Dean: Je voudrais, avant la suspension, dire qu'on n'est pas coulé dans le béton, même le béton FTQ-Construction, là-dessus. Par contre, on va vous exposer du pour et du contre à la reprise ce soir. Autant on peut être d'accord avec l'objectif de mieux l'identifier, autant on voit certains dangers dans la façon de le faire. On va exposer nos points de vue et, après cela, on va...

M. Paradis: Je voulais juste le donner. De toute façon, si cela avait été coulé dans le béton complètement, il y a toujours des dangers de saccage.

M. Lalonde: On va régler. "Tu règles ou..."

Le Président (M. Brouillet): Alors, il est 16 h 30. Nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 20 heures, ce soir.

(Suspension de la séance à 16 h 30)

(Reprise de la séance à 20 h 27)

Le Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente du travail reprend l'étude article par article du projet de loi 192, Loi constituant le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec.

Nous étions rendus aux attendus, au préambule de la loi et l'Opposition avait proposé un amendement. Il faudrait peut-être disposer de cet amendement. L'amendement consistait à remplacer, à l'avant-dernière ligne et à la dernière ligne du préambule -le mot enjambe les deux lignes - le mot "épargnants" par le mot "investisseurs".

Est-ce que quelqu'un aurait une intervention sur l'amendement?

M. Dean: Je propose, comme mode de fonctionnement et afin de sincèrement dépolitiser ou "départisaner" toute déclaration, de me faire un peu l'animateur et d'utiliser aux fins d'explication de fait les experts juridiques ou autres qui sont ici et qui ont travaillé à ce dossier. Ils exposeront cliniquement les options, les choix, le pourquoi des problèmes évoqués par vos questions; à la suite de quoi, nous prendrons des décisions. Je dois dire que, même si certains objets des discussions de ce soir toucheront peut-être des décisions du gouvernement, le ministre concerné est près de l'appareil téléphonique et viendra rapidement, si nécessaire.

Une voix: C'est qui ça?

M. Dean: M. Parizeau. Pas M. Frechette.

M. Paradis: On accepte ce mode de fonctionnement qui va finalement accélérer le rythme des travaux.

M. Dean: On n'est fermé à rien. M. Brière, je vous demanderais, en mon nom...

Le Président (M. Brouillet): M. Brière pourrait peut-être, au nom de l'adjoint, donner quelques explications ou réactions face à cet amendement.

M. Dean: Remarquez que c'est plus une explication qu'une réaction. C'est que le terme "épargne" s'inspire de la Loi sur les valeurs mobilières. Il ne s'agit pas, ici, d'épargnants dans le sens de déposants dans des comptes d'épargne. Tout le vocabulaire de la protection du commerce des valeurs mobilières comporte, comme pierre angulaire, la notion d'épargne. Au fond, on réglemente l'appel public à l'épargne quand on réglemente les valeurs mobilières.

Ainsi, le titre II de la Loi sur les valeurs mobilières s'intitule Appel public à

l'épargne. Tout au long de cette loi, il est question de cette notion très large de l'épargne. Maintenant, pour ce qui est du bien-fondé de l'amendement, je ne veux pas me prononcer, mais je voulais tout simplement donner cette explication. Quelqu'un m'a souligné - et j'attire votre attention sur ce fait - que dans le texte anglais de ce projet de loi, au dernier paragraphe, le mot "épargnants" est traduit par "investors".

M. Paradis: Je suis bien content, car les anglophones pourront jouir d'une transparence additionnelle.

M. Dean: Cela éclaire ce que je viens de dire: ce ne sont pas les épargnants au sens de déposants dans un compte d'épargne. Ceci dit, je laisse au...

M. Paradis: Dans notre francophonie, le mot "épargnant" a une connotation dans le langage usuel. Sans me référer à quelque dictionnaire que ce soit mais strictement à la compréhension qu'un député représentant une conscription rurale ou semi-rurale peut en avoir, une épargne, c'est quelque chose qui est garanti. Un investissement, c'est quelque chose qui inclut la notion de risque. Je pense que des discussions que nous avons pu avoir jusqu'à maintenant, il est clair, net et précis qu'il y a une notion de risque qui est impliquée pour le salarier qui va investir dans ce fonds.

Si on retourne au premier attendu, on voit: "Attendu que la Fédération des travailleurs du Québec a proposé que soit constitué un fonds d'investissement..." Qui investit dans un fonds d'invesstissement? Si ce sont des épargnants, au sens usuel, qui investissent, ces gens s'attendent à des garanties. Le mot "épargnant" fait appel à nos notions d'épargnes et nos épargnes, lorsqu'on les dépose, traditionnellement, on s'attend, au moins, à ce qu'elles nous reviennent avec des fruits.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, quand tu épargnes de l'argent, tu "sauves" de l'argent.

M. Paradis: Je ne pense pas, sur le plan juridique - là-dessus, Me Brière pourra me répondre - que cela pose un accroc à la Loi sur les valeurs mobilières, mais je pense que, d'un autre côté, cela peut permettre -là, je m'adresse au député de Prévost - aux travailleurs de comprendre davantage ce dont il s'agit; il s'agit d'un investissement. Si on me dit que, techniquement, cela va en conflit avec la Loi sur les valeurs mobilières, etc., je serais prêt à entendre cet argument et le considérer. Mais si cela ne va pas en conflit, je pense, au nom de la transparence et de la bonne compréhension par les travailleurs de la nature du fonds, qu'on ne devrait pas les qualifier d'épargnants ou qualifier l'argent qu'ils y injectent d'épargnes; on doit plutôt parler d'investissements.

M. Dean: M. le Président, je voudrais demander au porte-parole de l'Opposition si la question qu'il a évoquée, de mieux identifier le fonds de solidarité FTQ, s'applique à ce préambule quant au titre de la loi ou si c'est à l'article 1.

M. Paradis: II y a le titre du préambule qui est affecté.

M. Dean: D'accord.

M. Paradis: Le titre du préambule, c'est le même nom, c'est le projet de loi 192, Loi constituant... Je pense que le titre vient, suivant notre tradition parlementaire, à la fin de l'étude article par article. Nous allons avoir besoin d'en discuter, à cause de la rédaction de l'article 1, dès l'article 1, mais je ne pense pas que ce soit dans le préambule. Je pense que le préambule commence avec "Attendu" et, à partir de "Attendu", nulle part, on ne se sert du nom comme tel, du titre; alors, on n'a pas senti le besoin d'intervenir.

Le Président (M. Brouillet): À la fin, on adoptera le titre et l'ensemble des sous-titres et, alors, celui-là sera compris dedans. Une fois qu'on aura vu l'article 1, s'il y a lieu d'amender les titres et les sous-titres, on le fera à la fin.

M. Dean: Juste à titre d'information, le paragraphe 2 de l'article 276 de la Loi sur les valeurs mobilières, que vous avez cité, d'ailleurs, dans les commentaires que vous avez sous les yeux sur l'article 36, décrit le rôle de la Commission des valeurs mobilières. Un de ses principaux rôles, c'est d'assurer la protection des épargnants. Alors, c'est vous dire à quel point ce terme est utilisé dans le vocabulaire du commerce des valeurs mobilières. Il n'a pas cette connotation locale que vous lui donnez.

M. Paradis: Encore une fois, je suis certain que l'investisseur utilise ses épargnes pour investir.

M. Dean: Techniquement je dois vous dire que cela restreint un peu le sens, mais en tout cas.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, je suis d'accord et il me semble que c'est avec raison que la suggestion est faite en l'occurrence. Je comprends que nous parlons des épargnants à l'article 276, mais ce sont toutes les formes d'investissement et

d'épargne possibles qui sont visées par les actions de la Commission des valeurs mobilières, alors qu'en l'occurrence c'est un véhicule d'action de la catégorie À qui est visé par la loi.

M. Dean: Le gouvernement n'a pas d'objection. On ne tiendra pas une bataille bien longtemps là-dessus, sauf qu'il y a cette question de cohérence. Si cela peut bien amorcer nos discussions, allons-y pour "investisseurs".

Le Président (M. Brouillet): L'amendement est donc adopté. Adopté.

M. Dean: Est-ce que le préambule est adopté?

Le Président (M. Brouillet): Le préambule, tel qu'amendé, est-il adopté?

M. Paradis: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Le préambule est donc adopté, tel qu'amendé, sur division.

Nous sommes maintenant à l'article 1.

Constitution et siège social

M. Dean: L'expression "compagnie" indique le caractère à but lucratif de la corporation créée. Vous avez les mêmes notes que moi, M. le Président. Le porte-parole de l'Opposition nous a fourni la même note explicative: un minimum de discussion et un maximum d'éclaircissements.

M. Paradis: Dans les commentaires qu'on a sur ce qui suit, on lit en même temps: "L'expression "compagnie" indique le caractère à but lucratif de la corporation créée." Si on se comprend bien, cela veut dire que la corporation créée peut faire des profits, peut faire des pertes, peut avoir des bilans équilibrés. Toutes les situations d'une compagnie à but lucratif sont envisagées. On dit également: "Le nom s'apparente à celui de la Fédération des travailleurs du Québec qui est l'instigatrice du projet. Ce choix ne risque pas de créer de confusion avec un autre organisme inscrit chez l'inspecteur général des institutions financières." Mais, lorsqu'on parle de Fonds de solidarité des travailleurs du Québec, dans le but d'avoir la certitude que le nom ne prête pas à confusion, dans le but d'avoir la certitude que le nom identifie bien le fonds de la FTQ qui est l'instigatrice «de ce projet de loi - je le dis à titre de suggestion avant d'en faire un amendement formel - on pourrait considérer peut-être de l'identifier plus spécifiquement en disant: Le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec (FTQ) ou le Fonds des travailleurs du Québec

(FTQ), ci-après appelé le fonds. On ajouterait encore une fois le Fonds FTQ pour que les gens sachent bien à quoi s'en tenir, qu'il ne s'agit pas d'un fonds de l'ensemble des centrales syndicales. L'un des documents qu'on nous avait remis - je le cherche, je ne le trouverai pas, j'en amène toujours trop -parle de l'implication du syndicalisme ou des syndicats en général; le document de vulgarisation que vous nous avez remis, M. le député de Prévost, parle des syndicats en général. Dans le cas qui nous concerne, c'est bien clair, bien net et bien compris. D'ailleurs, les commentaires que vous nous avez transmis indiquent que vous voulez, comme gouvernement, que ce soit identifié. En parlant de Fonds de solidarité des travailleurs du Québec, je ne suis pas convaincu que, d'abord, l'ensemble de la population identifiera ce fonds à la FTQ.

M. Dean: M. le Président, j'inviterai une autre personne à parler sur les évaluations qui ont été faites. Je voudrais dire que, du point de vue du marketing, de l'identification, nous sommes d'accord, en principe, avec le député de Brome-Missisquoi. Je dois, évidemment, souligner que l'identification FTQ peut se faire quand même et va se faire par la publicité, le prospectus, l'information fournie par le fonds aux membres ou aux investisseurs. Par contre, je dois dire, pour tout dire, qu'on s'est torturé et qu'on a essayé plusieurs versions de noms pour différentes raisons, pour que cela ne ressemble pas trop à d'autres noms, pour éviter autant que possible la confusion. Si le choix a été ainsi fait, c'est dans le sens que, si on identifie, entre parenthèses (FTQ), même dans la loi, est-ce que des investisseurs pourraient être induits en erreur, en croyant que la FTQ assurerait la solidité du fonds ou garantirait en quelque sorte les investissements?

Il serait mieux de demander à M. Lacoste d'ajouter quelques commentaires sur les aspects techniques de ce choix.

M. Paradis: Avant l'intervention de M. Lacoste, strictement sur le plan de la vulgarisation qu'on s'apprête à donner dans la pratique au projet de loi, dans un document qui s'intitule Fonds de solidarité, mars 1983, qui est un document de la FTQ, on retrouve à la deuxième feuille, en page frontispice, le titre, en grosses lettres noires: Pourquoi il est essentiel que les syndicats - au pluriel -prennent le leadership de ce type d'intervention. Mais nous savons très bien, à la suite des informations qui nous ont été transmises, que c'est le syndicat FTQ qui prend le leadership de ce type d'intervention. Je pense que la nuance dans ce sens milite en faveur d'une clarification. Il s'agit bien du fonds de la FTQ, parce que, même dans les documents de vulgarisation, même sur la

première page, on retrouve FTQ. Là-dessus, j'admets cela, ils ont mis leur sigle avec leur nom. Lorsqu'on voit un titre: Pourquoi il est essentiel que les syndicats... si j'étais un lecteur qui n'avait pas eu l'avantage de participer au débat en deuxième lecture, qui n'avait pas eu l'avantage d'en discuter avec les parties, je serais porté à croire que ce sont les syndicats québécois qui sont impliqués, qui prennent le leadership de ce type d'intervention, alors que clairement et définitivement c'est la FTQ qui le prend.

M. Dean: M. le Président, en mon nom, M. Lacoste.

La question du nom, c'est la préoccupation principale de protection de l'épargne des investisseurs. Il faut se poser la question pour éviter de créer toute illusion également dans la tête des gens qui vont investir dans ce fonds sur l'endroit où va cet argent. Autant c'est important de décrire qui est le promoteur du fonds, c'est-à-dire la FTQ, autant il faut éviter de tellement bien le décrire que les gens s'imaginent qu'ils font un dépôt auprès de la FTQ qui leur garantit de quelque façon que ce soit leurs épargnes. La crainte qui est soulevée de ne pas laisser penser que c'est la FTQ devrait normalement être dissipée lorsqu'on comprend que chaque personne qui sera invitée à souscrire des actions du fonds se fera remettre un document qui ne sera pas celui-là - je vais vous expliquer pourquoi tantôt - et qui sera approuvé par la Commission des valeurs mobilières. Ce qui est prévu, c'est que le document serait de la nature de celui qui est remis par ce qu'on appelle communément les fonds mutuels, les SICAV ou les autres.

La Loi sur les valeurs mobilières défend l'utilisation de documents qui contiennent des mentions autres que celles qui sont dans le prospectus, le dossier d'information ou le document qui tient lieu de prospectus. Ces documents décriront très bien le rôle de la FTQ par rapport au fonds. Même au niveau de ce qui est prévu, des assemblées générales ou des souscriptions directes toutes les personnes qui souscriront au fonds auront eu ce document. (20 h 45)

M. Paradis: Je suis sensible à votre argumentation. Je suis d'accord que les personnes qui vont souscrire vont toutes avoir l'information de la Commission des valeurs mobilières dans le sens où vous l'indiquez, mais elles vont également avoir -parce que je connais les capacités, les moyens de diffusion et les systèmes d'impression de la FTQ - en main d'autres documents. Les documents qui circulent présentement - nous sommes contents qu'ils circulent, cela prouve qu'on ne veut pas cacher ce qui se passe réellement dans ce dossier - nous indiquent que ce sont les syndicats qui doivent prendre le leadership de ce genre d'intervention. Si, au niveau de la sécurité, vous craignez que les gens pensent que c'est la FTQ qui garantit les sommes qui sont déposées - nous reviendrons sur les garanties plus tard - c'est encore plus inquiétant si on pense que ce sont "les syndicats". Parce que la garantie n'est pas simplement doublée, mais on ajoute la CSN, on ajoute la CEQ, on ajoute la CSD, on ajoute les autres grands syndicats, on ajoute même les syndicats de boutique. Il faut être certain que les gens sachent bien où va leur argent. Leur argent ne va pas dans les mains des syndicats québécois; l'argent va dans le fonds qui, suivant les articles qu'on verra plus tard, est administré par un conseil d'administration contrôlé par la FTQ. Il s'agit que ce soit clair, pour la personne qui investit dans ce fonds, que c'est la FTQ qui contrôle son argent et que la FTQ, avec sa majorité au conseil d'administration, est celle qui, en dernier recours, va prendre toutes les décisions.

M. Dean: Le seul point que je voulais illustrer - je ne porte pas de jugement sur le fait de savoir si c'est opportun ou non -c'est que le risque, en mettant le sigle "FTQ" entre parenthèses ou en mettant "de la FTQ", c'est qu'on puisse laisser planer l'idée qu'il s'agit d'un fonds qui appartient à la FTQ. Cette idée peut créer une illusion de protection qui, d'après moi, est plus néfaste que de ne pas le dire dans le titre du fonds. Il reste que tous les documents qui vont le véhiculer vont très bien expliquer le mécanisme de gestion du fonds et comment il a été constitué ou promu. C'était uniquement dans ce sens que je disais: II y a peut-être un risque à laisser penser que c'est un fonds qui appartient à la FTQ.

M. Paradis: Ce ne seraient pas tous les documents; ce seraient les documents qui émanent de la Commission des valeurs mobilières. Vous pouvez vous porter garants de ces documents. Les autres documents qui vont circuler, comme celui-ci, indiquent quelque chose qui va en sens contraire.

Quant à la croyance populaire que la FTQ pourrait garantir le fonds, je vous dirai que le gouvernement, en en faisant un projet de loi, risque également, en ce qui a trait à la croyance populaire, de laisser croire aux investisseurs que le gouvernement est derrière - sans dire garantir - le projet de loi. Cela implique un degré de confiance chez l'investisseur que le gouvernement supporte, de façon très ouverte, cette idée. Je pense que la garantie gouvernementale qui peut être pressentie est encore plus importante que la garantie FTQ.

Soyons le plus clair possible avec les gens, c'est le sens de mon intervention. Je ne pense pas que la FTQ, comme telle - elle

se met la tête sur le billot, dans un certain sens - ait de réserve à ce que le fonds, qu'elle va administrer, qu'elle va contrôler, soit clairement identifié, sans aucun doute, à la centrale syndicale qui va l'administrer.

M. Dean: M. le Président, je voudrais d'abord apporter un élément de correction. Je pense que l'expression "les syndicats", dans ce document, doit être comprise dans le sens que ce sont les syndicats affiliés à la FTQ. Si on fait de la sémantique, l'expression, c'est "centrales syndicales"; la FTQ, la CSN, la CSD, ce sont des centrales syndicales.

Le document publié par le fonds de solidarité que vous avez en main, je présume que c'est un document préliminaire du fonds et un document de sensibilisation d'un certain nombre de cadres syndicaux à savoir s'il est souhaitable de créer un fonds, les objectifs, les analyses, etc. Mais il faut comprendre les mots dans leur sens et, dans le sens de ce document, "les syndicats" veut dire, en langage FTQ, les différentes - ainsi que la CSN les appellerait peut-être -fédérations syndicales. Il y a plusieurs fédérations syndicales, dans le sens français du mot, qui sont affiliées à la FTQ. C'est dans ce sens qu'on devrait utiliser le nom "syndicats". Deuxièmement, je dois dire que, dans un souhait, un désir ou un objectif légitime de clarté, de transparence, il ne faut pas, non plus, risquer de créer d'autres fausses impressions ou d'autres manques de transparence à l'autre extrême.

Cela dit, vu qu'il s'agit du titre, je me demande s'il ne serait pas souhaitable, sans vouloir couper la parole à quiconque, comme on dit dans le monde des négociations, de mettre l'article 1 sur la glace pour un certain temps. On verra ce qu'on fait avec le reste et on y reviendra. Maintenant, est-ce que l'Opposition veut s'exprimer là-dessus?

M. Paradis: Avant qu'on mette cet article sur la glace, même si on accepte ce principe parce qu'il est directement relié au titre, il reste que, dans les autres articles, on risque d'adopter les mots "le fonds" strictement.

M. Dean: Je pense que oui.

M. Paradis: On ferait peut-être mieux de régler le problème. Je suggère cela, mais en laissant toute ouverture pour mettre l'article sur la glace. On peut accrocher à plusieurs articles à cause de l'expression "le fonds".

Il faut voir les titres de journaux et constater de quelle façon cela a été compris par les journalistes ou par celui qui compose les titres dans le journal: "Le fonds d'investissement de la FTQ emballe Biron, mais contrarie le Bureau du commerce." Biron l'identifie bien clairement.

Dans le Devoir: "Le fonds de solidarité des travailleurs compte investir 200 000 000 $ en trois ans." L'interprétation est différente. Ce sont deux journalistes du Devoir: le 5 mars, M. Rodolphe Morissette parle du fonds d'investissement de la FTQ et, le 11 juin, M. Gilles Lesage, parle du Fonds de solidarité des travailleurs. Il y a déjà de l'ambiguïté entre les deux. "Fonds de solidarité: un haut fonctionnaire du gouvernement prêté à la FTQ". "Fonds de solidarité (FTQ)" les gens disent: Oui, la FTQ en fait partie, mais est-ce que c'est le tout, l'ensemble, ou s'il n'y a pas d'autres syndicats?" Feu vert à la création du Fonds de solidarité de la FTQ." La journaliste de la Presse, Linda Binsse, elle, l'associe directement à la FTQ. "Le fonds de relance suggéré par la FTQ." On ne sait pas si c'est le fonds de la FTQ. Cela, c'est dans Actualités économiques. "FTQ, la loi créant le fonds de solidarité serait imminente." Est-ce que c'est le fonds de la FTQ ou si c'est le fonds de l'ensemble des centrales syndicales et des travailleurs? "Is this fund necessary?" "Aide à la PME." "Bourassa loue la FTQ." Est-ce que c'est strictement le fonds de solidarité ou s'il s'agit du fonds de solidarité de la FTQ?

M. Dean: Est-ce bien le M. Bourassa qu'on connaît?

Une voix: C'est le petit Robert.

M. Dean: Ce serait bien la première fois qu'il loue la FTQ.

M. Paradis: M. le Président, à la suite de son vote sur les secteurs public et parapublic, je suis certain qu'il ne s'agit pas du député de Bourassa.

M. Dean: M. le Président, je ne veux pas prolonger la discussion pour rien. Justement, nos amis les journalistes ne donnent pas toujours le reflet le plus clair de la voix du peuple non plus. On constate aussi, souvent, que même un titre ne reflète aucunement l'article auquel il se rapporte, car il y a deux personnes différentes qui interviennent. Dans les bonnes conditions de travail négociées pour les journalistes par les différents syndicats ou par les différentes centrales syndicales, quelquefois, le même gars n'est pas là au premier ou au deuxième quart de travail. Il y a une moitié du travail qui est faite par l'un, et l'autre moitié par l'autre.

Cela dit, je pense qu'il n'y a aucune façon au monde de s'assurer qu'un client, qu'une personne, qu'un citoyen n'achète pas, un jour, un produit GM en croyant que c'est un produit Ford ou n'achète pas ITT en

croyant que c'est une multinationale. Effectivement, c'est une incapacité temporaire et totale de la CSST. Cela dit, dans notre société, malgré les efforts de tous les publicistes, sémanticiens et de ceux dont la fonction est de clarifier des choses, il y a quand même des gens qui sont mêlés de toute façon.

Dans le présent cas, je peux me tromper, mais je pense - et je suis toujours ouvert à tous les commentaires et à toutes les suggestions - que ce qui est vraiment important dans tout cela, c'est le contenu des documents d'information ou des prospectus qui seront fournis en fonction de la loi, et des ordonnances ou des directives de la Commission des valeurs mobilières. C'est cela qui sera vraiment déterminant dans la clarté et la transparence souhaitables vis-à-vis des investisseurs et c'est cela qui finira par motiver la décision d'investir ou non, de se retirer après 60 jours, tel que prévu dans la loi, ou de s'embarquer et de changer d'idée six mois après, tel que prévu dans la loi, pour arrêter d'investir.

M. Paradis: Je vais vous poser la colle suivante et je l'annonce comme telle. On a un fonds de solidarité qui est l'initiative, qui vient à l'instigation de la FTQ. Supposons -là, nous sommes dans des hypothèses et le président pourrait refuser ma question, mais je suis obligé de la poser - qu'une autre centrale syndicale, la CSD par exemple, nous arrive à l'automne et demande, elle aussi, d'avoir un fonds de solidarité des travailleurs. De quelle façon, une fois que le titre est donné à un syndicat de façon globale, peut-on imaginer que nous allons créer le fonds de solidarité des travailleurs du Québec II?

M. Dean: M. le Président, en étant un peu au courant de la gymnastique qu'on a faite pour trouver ce nom-là et pour que cela ne ressemble pas trop à toutes sortes d'autres organismes ou "patentes" qui existaient ou qui ont été créés en cours de route, je dirai qu'il faudrait peut-être que la CSD, la CSN ou la CEQ sortent leur petit Robert - pas Robert Bourassa - ou le Larousse pour trouver un autre nom. Si on veut éviter la confusion, il faudrait quand même faire preuve d'imagination et peut-être trouver un autre titre qui ne ressemblerait pas trop à celui-là.

M. Paradis: J'émettrai le commentaire suivant. Le titre qu'on a trouvé est globalisant. Ce que l'on recherche - et cela a été indiqué dès le début dans nos remarques préliminaires - c'est la spécificité. Il faut que ce soit spécifique. Si je suis un travailleur dans une usine et que j'investis dans le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec, il faut que je sache - il faut que ce soit dit parce que je n'aurai peut-être pas le temps, à cause de plusieurs préoccupations, d'aller le vérifier - qui l'administre. Si je ne l'ai pas dans le titre, on m'appelle à un deuxième raisonnement ou un troisième que je ne ferai peut-être pas.

Il est dit dans les notes explicatives que le projet de loi est à l'instigation de la Fédération des travailleurs du Québec. Soyons consistants. S'il s'agit de la Fédération des travailleurs du Québec, disons qu'il s'agit du Fonds de solidarité des travailleurs du Québec ou du Fonds des travailleurs du Québec en mettant la dénomination FTQ et, lorsqu'on parlera du fonds, on parlera du Fonds FTQ. Le travailleur qui investira saura que son argent est administré par la FTQ. Cela peut l'inciter à investir.

M. Dean: Deux petits points et, ensuite, on le mettra vraiment sur la glace et on ira à l'article 2. Si un autre projet de loi semblable devait venir dans six mois à l'initiative de la CSN, de la CSD ou de la CEQ et qu'on proposait de l'appeler le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec CSN ou CSD, je pense qu'avec raison, si le gouvernement ne le faisait pas de son propre chef, le porte-parole de l'Opposition pourrait dire: Malgré la petite étiquette, il y a trop de danger de confusion. Ce titre n'est pas moins spécifique, par exemple, qu'une entreprise qui s'appelle Asbestos Limited. Cela s'adonne à être la première qui s'appelle Asbestos Limited, mais ensuite on n'encourage pas d'autres entreprises à choisir le même nom. On les empêche même de le faire, d'après mes connaissances limitées dans ce domaine. On ne peut pas permettre trop facilement - surtout appuyé par une législation - que deux ou trois Asbestos Limited différentes se promènent dans le paysage et concurrencent la loyauté des consommateurs ou des acheteurs. (21 heures)

M. Paradis: On pourrait avoir une Asbestos Limited, une Asbestos Uranium Limited, une Asbestos Nickel Limited, et on pourrait être porté à croire que c'est la même maison mère. Dans le cas qui nous concerne, il s'agit définitivement d'un conseil d'administration qui va provenir de la maison mère. Je ne pense pas que la maison mère ait quelque réserve à ce que le fonds soit clairement étiqueté Fonds de solidarité des travailleurs du Québec (FTQ).

M. Dean: On le met sur la glace.

Le Président (M. Brouillet): On suspend l'article 1. Passons à l'article 2.

M. Dean: M. le Président, peut-on convenir que, là où on trouve le "Fonds" dans les autres articles, cela va être adopté sous réserve de l'article mis sur la glace?

Le Président (M. Brauillet): Article 2?

M. Dean: L'article vise à rendre applicable la partie IA de la Loi sur les compagnies au lieu de la partie II de cette loi dont l'application serait autrement automatique. Il écarte, de plus, l'application de certaines dispositions de la partie IA parce que non pertinentes. L'intérêt de rendre la partie IA applicable à la compagnie réside surtout dans la plus grande souplesse que permettent ces dispositions législatives plus modernes. Là, il y a un précédent d'une autre société, qui explique en détail les raisons de ce précédent.

Le Président (M. Brouillet): Est-ce qu'il y a des questions, des commentaires sur cet article avant de passer à l'adoption?

M. Paradis: Oui, parce que, si je recevais un prospectus qui se lisait comme suit - je suis un peu rouillé dans mes notions de droit corporatif - j'aurais beaucoup de questions qui me viendraient à l'esprit: "Malgré l'article 125 de la Loi sur les compagnies (LRQ, chapitre C-38) les dispositions de cette loi qui sont applicables aux compagnies constituées par dépôt de statuts s'appliquent, en les adaptant, au fonds dans la mesure où elles ne sont pas inconciliables avec la présente loi, sauf l'article 2, le deuxième alinéa de l'article 46, le paragraphe 1 de l'article 53, l'article 54, les articles 123.9 à 123.11, 123.21 à 123.28, 123.55, 123.72, 123.82, 123.91 à 123.93, 123.95, 123.96, 123.98 à 123.100, le deuxième alinéa de l'article 123.114 et les articles 123.115 à 123.39. "Le fonds est réputé avoir été constitué par dépôt de statuts, le (insérer ici la date de sanction de la présente loi). "Ces statuts peuvent être modifiés mais le dépôt de statuts ne peut avoir pour effet de modifier une disposition de la présente loi."

J'aimerais que, en langage compréhensible, pour ne pas avoir côte à côte les articles énumérés, etc., on me dise qu'est-ce que c'est cela.

M. Dean: M. le Président, je me rends volontiers à la question du porte-parole, le député de Brome-Missisquoi, mais je veux quand même dire que le député de Brome-Missisquoi a l'avantage d'être avocat. Il dit que ses notions de droit corporatif sont rouillées; les miennes n'ont jamais même été créées, donc elles ne peuvent pas êtrerouillées, mais le fait demeure que, en praticien, j'ai lu plusieurs lois dans ma vie et ce n'est pas la première fois dans l'histoire du monde qu'on voit de telles choses.

M. Paradis: Non, je ne critique pas la technique de rédaction.

M. Dean: Pour le contenu du projet, je demanderais à Me André Laverdière, représentant de l'inspecteur général des institutions financières, d'en expliquer le sens.

Résumer en quelques mots cet article serait peut-être assez difficile, mais je vais quand même essayer le mieux possible de donner une explication. Disons, d'abord, que cette compagnie est créée par une loi spéciale. Si les mots: "Malgré l'article 125 de la Loi sur les compagnies" n'étaient pas là, cette compagnie serait régie par la partie II de la Loi sur les compagnies qui s'applique aux compagnies créées par loi spéciale. Cela n'aurait pas été tellement avantageux parce que la partie IA qui a été introduite en 1980 vient, en fait, assouplir et rendre plus modernes les dispositions du droit corporatif applicables aux compagnies. On a donc voulu que cette compagnie, quoique créée par loi spéciale, soit assujettie à la nouvelle partie IA de la Loi sur les compagnies.

M. Paradis: Dans le but d'assouplir quels mécanismes de fonctionnement?

M. Dean: Vous me demandez, en fait, l'avantage de la partie IA sur les autres dispositions?

M. Paradis: Oui. La partie IA dont les articles sont visés spécifiquement.

M. Dean: C'est-à-dire que toute la partie IA vient contrôler cette compagnie, vient s'appliquer à cette compagnie, sauf certains articles parce qu'ils n'étaient pas applicables ou parce qu'ils étaient inconciliables avec la loi spéciale qu'on veut créer. Exemple: 123.9 et 123.11 qui parlent de la constitution d'une compagnie selon la partie IA. Cela ne peut pas être applicable vu qu'on la constitue par une loi spéciale. Autre exemple, 123.21 à 123.28, sur la dénomination sociale des compagnies. À ce moment, il n'apparaissait pas opportun que le directeur puisse changer le nom de la compagnie, par exemple, des choses comme cela. 123.55, c'est relatif au rachat d'actions dans certains cas.

M. Paradis: II y a des dispositions spécifiques pour les transactions d'actions qui sont prévues dans la loi.

M. Dean: Disons que toute la loi s'applique. Il y a à peu près dans la partie IA 160 articles, plus les articles de la partie I - il y en a au moins une centaine ou 75 -qui vont s'appliquer à cette compagnie comme à toute compagnie à capital-actions créée en vertu de la partie IA, sauf des articles qui ne pourraient pas s'appliquer

parce que c'est une loi spéciale ou encore qui ne pourraient pas s'appliquer parce que des dispositions similaires sont prévues dans la loi spéciale ou encore, dans le cas de fusion, par exemple. On n'a pas fait entrer les articles de fusion parce qu'on ne voulait pas, non plus, que cette compagnie puisse fusionner une autre compagnie déjà créée en partie IA ou en partie I, par exemple.

M. Paradis: C'est un point important, quand même.

M. Dean: Je pense que c'est assez important. Elle va rester telle qu'elle est et, si on veut toucher une disposition de cette loi, cela va prendre une autre loi. Par ailleurs, on pourra modifier, ajouter des choses qui ne sont pas inconciliables avec cette loi en déposant des statuts de modification.

M. Paradis: Est-ce que vous auriez des exemples à ce titre?

M. Dean: Des exemples.

M. Paradis: De ce qu'on pourrait faire sans passer par l'Assemblée nationale.

M. Dean: Si on va au capital-actions, il est prévu qu'on pourra, par exemple, modifier ou ajouter d'autres catégories d'actions. La loi prévoit la catégorie À. On pourra, par exemple, si le fonds a besoin d'investissements ou de financement sous forme d'actions privilégiées, créer des catégories d'actions privilégiées, ainsi de suite, sans droit de vote. On pourra aussi ajouter d'autres genres de dispositions, toute autre disposition qui ne serait pas inconciliable avec cette loi. Un exemple là-dessus: on pourrait vouloir préciser certains objets, mais l'exemple est peut-être mal choisi parce que cette compagnie aura tous les pouvoirs d'une personne physique. Autrement dit, elle peut tout faire, tous les commerces, tout. Quelles dispositions on pourrait ajouter? Ce seraient des dispositions plutôt restrictives, je dirais, puisqu'ils ont déjà des pouvoirs très étendus. Ils pourraient peut-être par statuts de modification ajouter certaines dispositions qui viendraient restreindre certaines choses ou préciser certaines formes d'investissement, des choses comme cela.

M. Paradis: Au niveau de la restriction des pouvoirs, ce n'est pas ce qui m'inquiète le plus comme législateur. C'est au niveau de l'élargissement de ce qui est prévu. Vous avez donné l'exemple de l'émission possible de catégories d'actions diverses. À première vue - prima facie, comme on dit dans le vocabulaire - cela me semble permettre l'élargissement de ce qu'on prévoit.

M. Dean: C'est déjà prévu dans la loi. Ce n'était peut-être pas un bon exemple dans ce sens-là, mais on y viendra plus tard.

M. Paradis: Est-ce que, à votre connaissance, il y a d'autres exemples où on pourrait élargir, par l'interaction de la partie IA de la Loi sur les compagnies, les pouvoirs que l'on accorde à ce fonds dans la présente loi?

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): S'il a tous les droits d'une personne physique, c'est bien difficile à élargir.

M. Dean: C'est difficile, mais on pourrait peut-être venir préciser des choses en le limitant, par exemple, au niveau des investissements. On pourrait vouloir mentionner, dans des statuts, que certaines formes d'investissements dans tel genre d'entreprise seront faits selon telles conditions. Si cela ne contredit pas la loi, cela pourrait être indiqué. Mais vu qu'il a déjà tous les pouvoirs, ce serait peut-être plus de la restriction.

M. Paradis: Pour ce qui est des restrictions, cela ne m'inquiète pas, parce que le cadre qu'on donne...

M. Dean: C'est cela.

M. Paradis: ...s'il est rétréci, finalement, c'est à la discrétion du conseil d'administration, qui va administrer le fonds. Ce que je veux, c'est votre parole qu'il n'y a pas d'élargissement possible.

M. Dean: D'abord, les dispositions de la loi elle-même ne peuvent pas être modifiées. Vous ne pouvez pas même faire quelque chose d'inconciliable avec cette loi. Alors, cela étend encore le principe. Il faut dire, par ailleurs, qu'étant en partie IA elle a déjà de très grands pouvoirs. Alors, venir élargir cela par statuts de modification, ce serait difficile parce qu'on ne peut pas toucher aux normes et aux garanties contenues dans la loi.

Le Président (M. Brouillet): Sur l'article 2, y aurait-il d'autres questions? L'article 2 est adopté?

M. Paradis: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Article 3?

M. Dean: Le siège social ne pourrait être établi en dehors de la Communauté urbaine de Montréal sans modification à la présente loi. La raison, c'est que la vaste majorité non seulement de la population du Québec, mais des adhérents à la centrale

FTQ habite la région. On ne voudrait pas que le fonds déménage de nuit, comme la fédération des caisses.

Le Président (M. Brouillet): Est-ce que l'article 3 est adopté?

M. Paradis: Je me posais une question parce que, dans mes notions rouillées de droit corporatif, le conseil d'administration peut toujours décider, à l'intérieur du Québec, de changer son siège social de municipalité, de territoire, de district judiciaire, etc. Pourquoi veut-on s'astreindre à une telle chose? C'est ma seule question.

M. Dean: C'est pour les raisons que je viens d'évoquer. C'est que, administra-tivement, la vaste majorité de la clientèle potentielle du fonds habite la région métropolitaine de Montréal, les administrateurs en bonne partie également. Aussi, Montréal est un centre financier et on crée une institution financière.

M. Paradis: Je n'ai pas d'objection de principe, mais je me demandais, dans ce cas, si on ne s'en remettait pas, comme dans les autres cas, aux règles usuelles du droit corporatif. C'était ma seule question.

M. Dean: On me corrige. Les gens de l'Opposition m'ont dit à plusieurs reprises qu'on créait une institution financière. Techniquement, paraît-il, ce n'est pas le cas. J'espère que cela ne soulèvera pas de débat.

Le Président (M. Brouillet): L'article 3 est adopté?

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, en faisant remarquer, M. le Président, qu'on a fait valoir exactement les mêmes raisons pour que le siège social de la Société québécoise des pêches soit à Gaspé plutôt qu'à Québec et cela a été rejeté par le gouvernement.

M. Dean: Une fois de plus, vous avez perdu. (21 h 15)

Le Président (M. Brouillet): Article 4?

Administration

M. Dean: Cet article fixe la composition du conseil d'administration du fonds. La durée du mandat des administrateurs sera déterminée par règlement du fonds qui pourrait la fixer à un an pour certains et à deux ans pour d'autres de manière à assurer une continuité. Selon la Loi sur les compagnies, la durée maximale d'un mandat d'administrateur est de deux ans. Cette règle s'appliquera ici à tous les membres du conseil à l'exception du président-directeur général. Nous avons à introduire ici un amendement.

Le Président (M. Brouillet): Une minute! Excusez-moi, M. l'adjoint. Est-ce que vous préférez qu'on l'adopte paragraphe par paragraphe? C'est préférable habituellement.

M. Dean: Oui, d'accord.

Le Président (M. Brouillet): Quand on arrivera au 2e, on pourra présenter l'amendement.

M. Dean: D'accord.

Le Président (M. Brouillet): Alors, on dit: Les Affaires du fonds seront administrées par une administration composée comme suit: "1° sept personnes nommées par le Conseil général de la Fédération des travailleurs du Québec. Est-ce que ce premier paragraphe est adopté?

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):

J'aurais une question préalablement - encore une fois, mes notions sont rouillées - sur les deux premières lignes de l'article 4. Quant aux affaires du fonds - j'essaie de me souvenir - ceux qui sont quotidiennement proches de cela pourraient-ils me dire la différence entre "the business of a corporation and the affairs of the corporation"? Est-ce "the business" ou les affaires du fonds?

M. Dean: C'est la "business".

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est l'appellation française reconnue qui traduit "the business of the corporation".

M. Dean: Oui.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II y a la notion de "business" et celle "the affairs" qui sont intervenues.

M. Dean: Non, mais c'est plutôt "business".

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Bon, d'accord.

M. Dean: Dans le texte anglais, je ne sais pas comment on a mis cela.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Vous avez le texte anglais.

M. Dean: Excusez, je peux ajouter que l'article 83, par exemple, dit: "Les affaires de la compagnie sont administrées..." J'ai le texte anglais ici.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Est-ce

que "the affairs" veut dire les affaires internes? Non, c'est la gestion, c'est la prise de décision politique, etc. Mais "the business" - j'essayais de me souvenir - il me semble que cela se rattache à la nature des activités. Ce sont les actionnaires qui décidaient de cela. Je pensais à la "business of the corporation". C'est dans la section "affairs", dirait-on, plutôt que dans "business".

M. Dean: Oui, mais je pense que c'est l'expression consacrée dans les lois, tant dans la loi générale que dans les lois particulières qui créent des corporations. On parle des affaires de la compagnie, des affaires de la société etc. C'est plus dans le sens des affaires courantes. Ce serait "affairs" au sens où vous l'entendez en anglais plutôt que "business."

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):

Comme dans la traduction.

M. Dean: Oui, probablement.

Le Président (M. Brouillet): Est-ce que le premier paragraphe est adopté?

M. Paradis: M. le Président, même si je consens à le traiter comme vous le suggérez, il y a des remarques globales qui s'imposent. Tout cela est interrelié, finalement. On parle d'un conseil d'administration de treize personnes. À l'alinéa 1, on parle de sept personnes nommées par le Conseil général de la Fédération des travailleurs du Québec. On tentera de le résumer, on ne peut pas sauter le paragraphe 2: "deux personnes élues par l'assemblée générale des détenteurs d'actions de catégorie À." Ce sont les investisseurs qu'on appelle communément. "3 trois personnes nommées par les membres visés dans les paragraphes 1° et 2° parmi les personnes que ces membres jugent représentatives des entreprises industrielles pour une, des institutions financières pour une autre et des agents socio-économiques pour la troisième." Finalement, on se rend compte que ces trois administrateurs ont le droit de veto si on peut utiliser cette expression; même plus que cela, le droit de proposition. Pour les nommés, la majorité appartient aux sept premiers. Donc, cela fait, si on compte bien, dix administrateurs nommés par la FTQ. "4° la personne qui est nommée président-directeur général du fonds par les membres visés dans les paragraphes 1° , 2° et 3° ". Il s'agit, encore une fois, de personnes nommées par la FTQ. Pour être clair, malgré les différences ou les contingences qu'on s'est fixées de les choisir dans certaines strates de la vie socio-économique québécoise, il y en a onze sur treize dont la nomination dépend, finalement, de la FTQ comme telle et il y en a deux sur treize dont la nomination dépend de l'assemblée générale des détenteurs d'actions de catégorie A.

Je comprends fort bien que, la FTQ allant au batte sur ce projet de loi, veut en avoir le contrôle. Quand tu vas au batte, tu veux savoir ce qui se passe et tu veux être en mesure, si tu mets ta tête sur le bûcher, de réagir et de prendre les décisions qui s'imposent. Nous sommes dans une proportion de onze-deux. Je vous dis simplement, pour fins de commentaire, M. le député de Prévost, qu'à onze-deux, cela m'apparaît plus qu'un contrôle; cela m'apparaît - cela justifiera mon argument sur le Fonds (FTQ) -quasiment un monopole dans le sens du contrôle du fonds. Les deux seront très minoritaires. Je ne veux pas par mes propos remettre en cause la notion de contrôle par la FTQ. Je veux juste souligner les proportions.

M. Dean: M. le Président, je demanderais à Jean-Guy Frenette de vous donner quelques éclaircissements en mon nom sur le raisonnement qui a motivé ces choix-là. J'ajouterai ensuite au besoin mes propres commentaires.

Pour la FTQ, c'était très clair, et c'était une condition sine qua non, qu'elle puisse promouvoir la création d'un tel fonds dans ses rangs si elle en avait le contrôle majoritaire au niveau du conseil. Cela dit, on tombe dans un problème que je peux appeler de tuyauterie. Comment, après avoir nommé sept membres, peut-on s'assurer qu'on a des représentants de l'extérieur du mouvement syndical, c'est-à-dire des hommes d'affaires, des représentants des institutions financières et des représentants des groupes socio-économiques qui ne seront pas des "yes-men", mais des hommes crédibles, des hommes d'expérience? On veut s'assurer qu'on aura une expérience de l'extérieur des rangs de la FTQ. C'est cette garantie qu'on veut avoir et on ne sait pas par quel autre mécanisme on peut s'assurer cette garantie d'une représentation de personnes du milieu des finances, du milieu des affaires et des milieux socio-économiques.

M. Paradis: Vous me permettrez un commentaire?

M. Dean: Puisque l'assemblée générale des actionnaires sera formée de travailleurs, donc d'actionnaires ordinaires, il n'y a plus aucun contrôle possible sur une représentation de l'extérieur si on ne vient pas le préciser là. C'est un problème de tuyauterie; il faut s'assurer d'une représentation et d'une expertise extérieure à nos rangs.

M. Paradis: Même en vous concédant le

contrôle - ce n'est pas là-dessus que j'argumente - vous ne contrôlez pas simplement le fonds, vous contrôlez le choix de la personne qui sera représentative des entreprises industrielles, des institutions financières et des agents socio-économiques. Si vous désirez un éclairage détaché, pourquoi avez-vous besoin de prévoir que la nomination de ces personnes sera contrôlée par la FTQ? Si vous désirez réellement un éclairage détaché au niveau des entreprises industrielles, pourquoi ne demandez-vous pas à un organisme qui représente des entreprises industrielles de vous désigner un administrateur? Pourquoi ne demandez-vous pas aux institutions financières qui sont clairement identifiées, qui sont organisées en associations, de vous désigner un administrateur et ne procédez-vous pas de la même façon au niveau des agents socio-économiques? Là, vous ne voulez pas simplement contrôler le fonds ou l'éclairage distant dont vous nous parlez; vous voulez contrôler les éclaireurs. Vous pouvez avoir des justifications pour le faire, mais c'est une approche différente.

M. Dean: On y a pensé sérieusement. Le problème est, d'abord, de s'assurer d'un représentant des entreprises industrielles, donc des hommes d'affaires. On a pensé à nommer des organisations patronales qui pourraient le déléguer, mais il y en a au moins trois: le Conseil du patronat, l'Association des manufacturiers et la Fédération canadienne des entreprises indépendantes.

M. Paradis: Les chambres de commerce.

M. Dean: Les chambres de commerce. Là, ça nous fait une liste plutôt longue. On est, par contre, déjà en contact avec une association patronale qui suit le fonds, qui étudie avec nous, bon, et qui est intéressée. Je n'ai pas à la mentionner, mais on a déjà, de ce côté, la certitude qu'on va avoir une représentation véritable et réelle et une expertise dont on a besoin dans l'entreprise industrielle. Un peu la même chose du côté des institutions financières. Il y en a déjà plusieurs et elles ne sont pas regroupées dans un seul organisme, malheureusement. On a déjà l'appui d'une organisation financière qui est prête à nous aider. On aura nécessairement du travail de complémentarité à faire. On ne sait plus où on s'arrêterait dans l'énumération de cette liste si on avait à se faire déléguer quelqu'un par des organismes comme ceux-là.

On a le même problème avec les agents socio-économiques. Là, on ne peut pas énumérer tous les organismes socio-économiques. Notre préoccupation, c'est d'avoir des gens sérieux, des gens qui ont une crédibilité dans ces milieux et qui nous apportent une expertise extérieure. C'est évident qu'on va choisir des personnes qui ne seront pas des "yes-men" parmi les noms qui vont arriver là.

M. Paradis: On peut, comme Opposition, avoir une idée au niveau des entreprises industrielles à cause de ce qui a filtré jusqu'à maintenant; on peut également au niveau des institutions financières avoir une bonne notion également à cause de ce qui a filtré jusqu'à maintenant. Mais, quand on parle des agents socio-économiques, je vous prie de me croire que cela commence à être vaste. À ce niveau, est-ce que vous pourriez laisser filtrer quelques indications?

M. Dean: M. Frenette, si vous voulez.

On n'a pas encore quelqu'un, mais on voudrait avoir quelqu'un qui effectivement n'est pas identifié au monde industriel, qui n'est pas identifié comme tel au monde financier, mais qui a une certaine ascendance sur la population québécoise dans ses expressions d'idées, d'opinions et qui assure une certaine transparence aussi du fonds au niveau de la population.

M. Paradis: C'était une question de 64 000 $, vous l'avez réduite à 32 000 $. C'est déjà un bel effort. Au niveau du deuxième alinéa, vous avez choisi d'inclure au projet de loi "deux personnes élues par l'assemblée générale des détenteurs d'actions de catégorie A." Cela me semble être, malgré la rouille qui perdure, bien spécial. Les actionnaires dans un fonds, normalement, ont plus de voix au chapitre que l'on n'en retrouve ici. J'oserais même dire que les actionnaires ont "la" voix au chapitre. On déroge aux habitudes. On déroge à la Loi sur les compagnies de façon très profonde. Tenant pour acquis la situation de fait qui devrait normalement se produire puisque ce sont des travailleurs de la FTQ qui, je pense, dans un premier temps, pour le moins, vont être les plus directement impliqués dans le fonds, quelle est la réserve que vous avez à donner plus de pouvoirs ou à donner, je dirais, des pouvoirs plus importants à l'assemblée générale des détenteurs d'actions? Qu'est-ce qui vous incite à les reléguer dans ce rôle de minorité absolue de deux sur onze, parce que ce sont eux les propriétaires des actions?

M. Dean: D'abord, nos structures de la FTQ. Je vous donne un exemple, le Syndicat des métallos compte 35 000 membres; ils élisent au suffrage universel leur directeur québécois. Ce même directeur québécois se présente au congrès de la FTQ et est élu vice-président de la FTQ parce qu'il représente un très gros secteur. C'est la même personne, les métallos ont un vice-président à la FTQ et, hypothétiquement, le

conseil général pourra nommer le directeur des métallos au fonds. Comme directeur de son syndicat, vice-président de la FTQ et administrateur du fonds, il va représenter 40 000 membres par ses deux mandats, le mandat qu'il a comme directeur de son syndicat élu au suffrage universel et son mandat au niveau du congrès de la FTQ. Ainsi, quand on aura sept vice-présidents de nommés, on aura couvert à peu près, sous forme de représentation syndicale, 90% des membres déjà affiliés à la FTQ, qui élisent eux-mêmes leur directeur dans la structure syndicale. (21 h 30)

Déjà, les deux autres actionnaires ordinaires vont venir, d'une certaine façon, pour ne pas risquer qu'il y ait double représentation du même syndicat, deux administrateurs qui viennent du même syndicat, ce qui serait un déséquilibre. Ce sera vraiment pour s'assurer que ce sont des travailleurs qui sont dans des usines qui viennent donner une expertise d'usine et de travailleurs. De toute façon, pour tous les travailleurs affiliés à la FTQ, leur représentation est déjà assurée syndicalement par les représentants qui vont être nommés par le conseil général.

M. Paradis: Je suis très bien votre raisonnement, mais j'essaie de concilier une logique qui me semble contradictoire non pas dans le même article, mais dans des articles différents du projet de loi. À l'article 1, on crée une compagnie à but lucratif qu'on veut distinguer clairement de la structure de la fédération qui, je le présume, est incorporée en vertu de la Loi sur les syndicats professionnels. Non? C'était une présomption juris tantum et non une présomption juris et de jure, elle n'est pas irréfragable, vous pouvez la commenter.

M. Dean: La FTQ n'est pas une personne.

M. Paradis: D'accord, c'est une confédération de syndicats. De toute façon, si elle n'est pas une personne et si elle n'est pas incorporée en vertu de la Loi sur les syndicats professionnels, j'aimerais que vous me disiez bien clairement, au point de vue juridique, ce que c'est. Mais, à l'article 1, vous semblez vouloir distinguer, de façon très définie, très nette le fonds de la FTQ en créant une compagnie à but lucratif. C'est le premier pas; c'est une logique.

Lorsqu'on arrive à l'article 4, vous nous parlez de quelque chose qui se tient comme argumentation, qui est une autre logique. Vous dites: La structure syndicale, ta-ta-ta-ta etc., je ne sais pas comment ils vont traduire cela. Là, je vois deux logiques, à pas beaucoup d'articles de distance, qui, c'est le moins que je puisse dire, m'apparaissent en contradiction. Pourquoi?

M. Dean: C'est que l'on voulait bien s'assurer, étant une compagnie autonome, qu'il soit très clair pour tous les travailleurs et aussi pour la FTQ que jamais, quelque somme d'argent que va mettre un travailleur dans le fonds, en aucune façon la FTQ, comme organisation syndicale, ne peut utiliser ces sommes. Elle ne pourra toucher d'aucune façon ces sommes; cela ne lui appartient pas.

M. Paradis: Même pour la dépense professionnelle?

M. Dean: Pour n'importe quelle fin syndicale, aussi légitime soit-elle et aussi acceptée soit-elle par les travailleurs comme type d'intervention. Jamais, en aucune façon, la FTQ ne pourra y toucher. C'est pour cela que nous voulons que ce soit très séparé et c'est pour cela que nous avons voulu que ce soit une loi spéciale qui le crée afin que ce soit très clair que ce sont des sommes qui n'iront qu'au fonds, que cela ne servira qu'au fonds et que pour ses fins.

M. Paradis: C'est la logique de l'article 1.

M. Dean: Oui, c'est notre principe d'avoir une loi et un fonds bien distinct de la FTQ, mais, en même temps, ce fonds doit avoir un contrôle politique et une orientation politique qui doivent lui être donnés. C'est pour cela que nous voulions que ce soit la FTQ, comme instance, comme centrale syndicale, qui donne les orientations politiques et les grands objectifs du fonds, parce que ce sera la centrale qui aura à faire et à soutenir la promotion du fonds. On veut que cela reste un fonds qui continuellement corresponde à des objectifs syndicaux définis par une centrale syndicale. Après que la centrale aura mis sur pied un fonds de cette nature de 200 000 000 $ qui aura préservé les orientations syndicales, on ne veut absolument pas se retrouver dans cinq ans ou dans quatre ans avec une assemblée d'actionnaires qui décident tout d'un coup d'aller chercher des administrateurs etc., ici et là et, là, perdre le contrôle syndical de ce fonds. Si on le met sur pied et qu'on y met des efforts, c'est effectivement pour pouvoir contrôler son orientation syndicale. On ne veut pas qu'il l'échappe par le biais d'une assemblée d'actionnaires qui pourrait par toutes sortes de voies...

M. Paradis: Je ne vous parlais pas de l'échapper. Entre l'échapper et onze à deux, il y a une marge. Je m'interrogeais strictement sur l'influence - pas le pouvoir décisionnel parce que, lorsqu'on n'a pas le

contrôle, le pouvoir décisionnel, on sait ce que c'est, on vit cela souvent - que peut avoir une représentation plus forte au sein du conseil d'administration des détenteurs d'actions, simplement à ce sujet. Onze à deux, vous y allez.

M. Dean: Sept, c'est suffisant. On n'en demande pas plus que sept nommées par la FTQ, mais seulement nous ne pouvons pas nous assurer que les représentants qu'on veut avoir du monde des entreprises industrielles, du monde financier et des agents socio-économiques seront en permanence au conseil; on ne peut pas s'assurer de cela par le biais d'une assemblée d'actionnaires. On ne peut pas se l'assurer et on ne peut pas se donner cette garantie et on veut l'avoir.

M. Paradis: Vous ne seriez pas satisfaits en ajoutant une condition, en augmentant le nombre au paragraphe 2 et en le diminuant au paragraphe 1 - c'est strictement hypothétique - mais en posant l'exigence que la personne détentrice d'actions de catégorie À soit membre de la FTQ.

M. Dean: Cela touche toute la limitation de tous les adhérents au fonds. Il faudrait que tous les adhérents, de par votre suggestion...

M. Paradis: Non, non, strictement les détenteurs.

M. Dean: Au deuxième alinéa, que ce soit uniquement des détenteurs d'actions ordinaires de catégorie À et que ces deux élus soient effectivement des membres de la FTQ.

M. Paradis: Non, mais dans le but d'en ajouter plus que deux...

Une voix: C'est cela, il en remet.

M. Paradis: ...d'en enlever à l'alinéa 1 et d'en ajouter à l'alinéa 2.

M. Dean: Non.

M. Paradis: Et en posant l'exigence qu'ils soient des syndicalistes de la FTQ.

M. Dean: Non, c'est inacceptable. M. Paradis: Pourquoi?

M. Dean: Politiquement, c'est la centrale FTQ, par son conseil général et par son congrès. Le fonds aura ses activités, ses assemblées d'actionnaires, mais le congrès de la FTQ discutera également du fonds, des orientations et des objectifs aussi. Il y aura les deux structures qui se supporteront l'une et l'autre continuellement. Le congrès de la FTQ et le conseil général de la FTQ doivent garder le contrôle du conseil d'administration du fonds. C'est pour cela que le paragraphe 1 est intouchable.

M. Paradis: Inviolable. M. Dean: Inviolable.

Le Président (M. Brouillet): Nous sommes revenus au paragraphe 1. Est-ce que le député de Vaudreuil-Soulanges avait des considérations générales sur le paragraphe 4?

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Non, cela va, c'est sur un autre.

Le Président (M. Brouillet): Non, cela va. Bon. On peut procéder maintenant paragraphe par paragraphe.

Une voix: Oui.

Le Président (M. Brouillet): Le paragraphe 1 est-il adopté?

M. Paradis: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Le paragraphe 2 est-il adopté?

M. Dean: II y a un amendement là-dessus.

Le Président (M. Brouillet): Ah oui! C'est vrai. Au paragraphe 2, il y a un amendement que je vous lis: L'article 4 est modifié par le remplacement, dans la première ligne du paragraphe 2 du premier alinéa, du mot "détenteurs" par le mot "porteurs". Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Paradis: Je veux seulement savoir pourquoi.

M. Dean: Parce que dans la Loi sur les valeurs mobilières on utilise le mot "porteur".

M. Paradis: Cela va.

Le Président (M. Brouillet): Adopté.

M. Paradis: L'amendement est adopté.

Le Président (M. Brouillet): Le paragraphe 2, tel qu'amendé, est-il adopté?

M. Paradis: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Paragraphe 3?

M. Paradis: Je voudrais seulement bien

comprendre le paragraphe 3. On y dit: trois personnes nommées par les membres visés dans les paragraphes 1° et 2 - cela va, ils sont déjà choisis - parmi les personnes que ces membres jugent représentatives des entreprises industrielles, institutions financières, agents socio-économiques... De la co...

Des voix: De la cohabitation. M. Paradis: ...cohabitation. Une voix: De la coordination..

M. Paradis: Les sept personnes du conseil général et les deux personnes de l'assemblée générale, dans quel tas de personnes, si vous me permettez l'expression, vont-elles effectuer leur choix? De la façon dont cela est rédigé, on nous dit: "Trois personnes nommées par les membres visés dans les paragraphes 1° et 2°". On sait que ce sont les sept personnes du conseil général et que ce sont les deux personnes élues par l'assemblée générale des porteurs d'actions. Elles choisissent parmi les personnes que ces membres jugent représentatives. Elles peuvent prendre n'importe quelle personne, "at large".

Le Président (M. Brouillet): Le paragraphe 3 est-il adopté?

M. Paradis: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Paragraphe 4?

M. Paradis: Seulement une question concernant la mécanique avant d'adopter le paragraphe 4. Cela ne touche pas spécifiquement le paragraphe 4, mais quant à la façon pratique de procéder, les premiers membres qui seront nommés seront ceux visés au paragraphe 1?

Une voix: Article 6.

M. Paradis: C'est à l'article 6. D'accord. Cela va. On n'est pas encore rendu là.

Le Président (M. Brouillet): Le paragraphe 4 est-il adopté?

M. Paradis: Oui, sur division.

Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Le deuxième alinéa?

M. Paradis: Le deuxième alinéa se lit ainsi: "La personne visée dans le paragraphe 4 - on parle du P.-D.G. - du premier alinéa est membre du conseil d'administration pour la durée de l'exercice de ses fonctions à titre de président-directeur général".

Quel en est le minimum et quel en est le maximum, tout comme pour la météo?

M. Dean: Tel qu'écrit ici, il n'y a pas de minimum ni de maximum. Il appartiendrait aux membres du conseil d'administration de déterminer la durée du mandat du directeur général. Il est, pendant la durée de son mandat, administrateur d'office en quelque sorte.

M. Paradis: II n'y a ni minimum ni maximum.

M. Dean: Non. Pour les autres, il y a un maximum de deux ans en vertu de la Loi sur les compagnies.

Le Président (M. Brouillet): Le deuxième alinéa est-il adopté?

M. Paradis: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division. L'article 4, tel qu'amendé, est-il adopté?

M. Paradis: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Adopté, tel qu'amendé, sur division. Article 5?

M. Dean: M. le Président, je lirai cet article, si vous le voulez bien. "S'il survient une vacance parmi les membres du conseil d'administration visés dans le paragraphe 1 du premier alinéa de l'article 4, le Conseil général de la Fédération des travailleurs du Québec peut nommer une personne pour la durée non écoulée du mandat".

Est-ce que l'article est adopté?

Le Président (M. Brouillet): Y a-t-il des commentaires ou des questions?

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):

J'aurais une question.

Le Président (M. Brouillet): Une question? Oui.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II est bien évident que ceux qui ont le droit de nommer peuvent aussi démettre. Cela s'appliquait à l'article 4, dans le cas du président-directeur général. On fait remarquer, dans les notes explicatives, qu'on doit pourvoir au pouvoir de remplacer, ce qui est différent de ce qui est prévu dans la Loi sur les compagnies. Présumément, par l'application des lois générales sur les compagnies, s'il y avait vacance aux postes d'administrateurs occupés par les personnes visées au deuxième alinéa de l'article 4, c'est-à-dire les gens élus par les

actionnaires, c'est le conseil d'administration qui désignerait le remplaçant.

M. Dean: C'est cela.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): À plus forte raison pour le troisième alinéa de l'article 4, quant aux trois personnes qui représentent différents intérêts.

Le Président (M. Brouillet): L'article 5 est-il adopté?

M. Paradis: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Article 6?

Une voix: Voilà la mécanique. (21 h 45)

M. Dean: Cette disposition pourvoit aux modalités de démarrage du fonds. "Les premières personnes nommées suivant le paragraphe 1 du premier alinéa de l'article 4 peuvent nommer, pour une période d'au plus un an, deux personnes pour agir comme administrateurs jusqu'à l'élection des personnes mentionnées au paragraphe 2 de cet alinéa. "Dès que les administrateurs visés dans les paragraphes 1 et 2 du premier alinéa de l'article 4 ont été nommés, deux exemplaires de la liste de leur nom, prénom, adresse et profession doivent être déposés auprès de l'inspecteur général des institutions financières par le secrétaire général de la Fédération des travailleurs du Québec. Ces administrateurs entrent en fonction à compter de la date de ce dépôt."

Cette disposition pourvoit aux modalités de démarrage du fonds. Elle est nécessaire en raison du fait que le fonds est constitué par une loi plutôt que par des fondateurs au sens des articles 123.9 et suivants de la Loi sur les compagnies.

Le Président (M. Brouillet): L'article 6 est-il adopté?

M. Paradis: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division. J'appelle l'article 7.

Capital-actions

M. Dean: L'article 7 se lit comme suit: "Le fonds est autorisé à émettre des actions de catégorie À, sans valeur nominale, donnant les droits prévus par l'article 123.40 de la Loi sur les compagnies, le droit d'élire deux administrateurs suivant le paragraphe 2 de l'article 4 et le droit de rachat prévu par les articles 10 et 11. "Les administrateurs peuvent en outre, par statuts de modification, créer, suivant les articles 123.101 et 123.103 de la Loi sur les compagnies, toute autre catégorie d'actions ne donnant pas le droit de voter à l'assemblée des actionnaires. Les statuts de modification déterminent les autres droits, privilèges, conditions et restrictions afférents aux actions de chaque catégorie."

Si vous voulez bien, je vous lirai l'article 123.40 de la Loi sur les compagnies: "Le capital-actions d'une compagnie doit comprendre des actions donnant le droit: "1° de voter à toute assemblée des actionnaires; "2° de recevoir tout dividende déclaré; et "3 de partager le reliquat des biens lors de la liquidation de la compagnie."

Le Président (M. Brouillet): Est-ce que l'article 7 est adopté?

M. Paradis: Une seconde!

Le Président (M. Brouillet): Vous avez peut-être quelques questions ou commentaires avant de l'adopter.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): D'une part, au niveau de la rédaction, en ce qui concerne le droit d'élire deux administrateurs suivant le paragraphe 2 de l'article 4, est-ce qu'il n'y a pas redondance ici d'ajouter que c'est suivant le paragraphe 2 de l'article 4 si la Loi sur les compagnies s'applique par le biais de l'article 123.40 aux droits afférents à ces actions-là? La Loi sur les compagnies prévoit qu'il y ait une assemblée des actionnaires dans certains délais. Lors de l'assemblée des actionnaires, ceux qui ont le droit de nommer des actionnaires, de les élire, le font dans le déroulement normal de l'assemblée. Mais ce qui est différent par rapport à la loi générale, c'est que ces actions ne comportent le droit d'élire que deux administrateurs. C'est tout à fait indépendant du deuxième paragraphe de l'article 4.

M. Dean: Si le député de Vaudreuil-Soulanges ou si le porte-parole de Brome-Missisquoi voulait faire cela sous forme d'amendement, on serait disposés à l'accepter; cela pourrait bonifier le texte.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):

D'accord. De façon plus formelle, renseignements pris, ayant entendu les conversations sotto voce qui se sont déroulées de l'autre côté de la table, je soumets la proposition d'amendement suivante: retrancher les mots "suivant le paragraphe 2 de l'article 4" aux troisième et quatrième lignes du premier paragraphe de l'article 7 du projet de loi 192.

Une voix: Premier alinéa.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):

Premier alinéa.

Le Président (M. Brouillet): J'aimerais que quelqu'un l'écrive. Je vais vous lire l'amendement. L'article 7 est modifié par la suppression, dans les troisième et quatrième lignes du premier alinéa, des mots "suivant le paragraphe 2 de l'article 4." Adopté?

M. Paradis: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): L'article 7 tel qu'amendé est-il adopté?

M. Paradis: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): L'article 7 tel qu'amendé est adopté sur division. L'article 8?

M. Dean: L'article 8 se lit comme suit: "Seule une personne physique peut acquérir ou détenir une action de catégorie A. Le porteur d'une action de catégorie A ne peut l'aliéner qu'avec l'autorisation du conseil d'administration ou d'un comité composé de personnes désignées à cette fin par ce dernier." Cet article restreint la possibilité d'acquisition et de transfert des actions de catégorie A de manière à les rendre admissibles au crédit d'impôt.

M. Paradis: Dans un premier temps, j'aurais une question au député de Prévost. La question ne portera pas sur l'article comme tel. La question va porter sur le commentaire. Cet article restreint la possibilité d'acquisition et de transfert des actions de catégorie À de manière à les rendre admissibles au crédit d'impôt. Est-ce qu'on pourrait avoir des éclaircissements là-dessus?

M. Dean: Cela fait référence à la déclaration ministérielle qui a été faite par le ministre des Finances.

M. Paradis: Ce n'est pas toujours compréhensible, les déclarations ministérielles du ministre des Finances.

M. Dean: C'est pour cela qu'il y a un expert du ministère des Financesl

Je vais tenter de répondre par la bouche d'un représentant du ministère des Finances, M. Beaulieu.

M. Parizeau a annoncé que les particuliers seraient admissibles à un crédit d'impôt. C'est la raison pour laquelle c'est limité à des particuliers.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): On ne parle pas de cela.

M. Paradis: Cela va sur la limitation à des individus, à des personnes physiques, autrement dit. Mais c'est la question de l'implication du transfert là-dedans.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): La restriciton quant au transfert.

M. Dean: Ce n'est pas transféré à une personne morale. Ici, c'est tout ce que cela signifie. Les possibilités de transfert ailleurs sont dans d'autres dispositions.

M. Paradis: Les possibilités de transfert sont limitées à une personne physique et la personne physique à qui on transfère jouit-elle d'un crédit d'impôt?

M. Dean: Non, c'est le premier acquéreur. Ce sont les nouvelles actions émises par la corporation qui donnent droit à un crédit.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):

L'objet de la question est également d'avoir des éclaircissements sur la condition apparente. De la façon dont le député de Prévost en a parlé, c'est la restriction du transfert au sens large, c'est-à-dire que ce n'est pas alinéable à l'initiative et tout à fait librement par le travailleur. Le conseil d'administration a un droit d'approbation du transfert. À l'écoute du commentaire du député de Prévost, j'ai cru que c'était cette caractéristique qui, s'ajoutant au fait que seule une personne physique pouvait en être acquéreur, faisait en sorte que l'action était admissible au crédit d'impôt. Je peux comprendre que seule une personne physique peut bénéficier du crédit d'impôt. Je ne vois pas que ce soit une condition additionnelle que le conseil d'administration soit obligé d'approuver si, oui ou non, il le transfère, il l'aliène. Est-ce que le commentaire est mal rédigé ou mal présenté?

M. Dean: C'est plutôt le commentaire que le texte qui est mal rédigé.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Donc, l'admissibilité au crédit d'impôt est réservée aux seules personnes physiques...

M. Dean: D'accord.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): ...en vertu d'une déclaration ministérielle. Point final. Là-dessus, il n'y a pas de difficulté; c'est là l'objectif de tout le processus qui est devant nous. De toute façon, on n'est pas en train de suggérer qu'il faille élargir cela aux personnes morales ou quoi que ce soit.

Le deuxième aspect plus important de l'article 8 a, évidemment, trait aux restrictions sur l'alinéation des actions, sur le transfert. J'ai évoqué, un peu plus tôt

dans la journée, la possibilité que, au fil des ans, un ou des travailleurs agissant de concert décident de se lancer en affaires et veuillent s'assurer qu'ils pourront encaisser l'épargne qu'ils ont ainsi mise de côté, selon les termes de la loi. N'ayant pas atteint l'âge de 60 ans, il n'est pas question de racheter, en l'occurrence, dans l'exemple que je donne, mais il est question de vendre à quelqu'un pour réaliser leur investissement. Je trouve un peu exorbitant que le conseil d'administration ait le pouvoir de décider d'un transfert dans des circonstances comme celle-là. Ceci me porte à suggérer que le fonds pourrait peut-être se constituer une espèce de réserve, relativement minime, qui permettrait, dans des cas comme celui que j'évoque de travailleurs qui veulent réaliser leur investissement, de rencontrer une exigence de rachat additionnelle qui irait au-delà de celle qui est prévue à l'article 10. J'aimerais avoir les commentaires du député de Prévost sur cette question qui n'est pas tellement hypothétique à mon sens; dans quelques années, ce ne sera pas hypothétique.

M. Dean: M. le Président, avant de faire faire des commentaires plus techniques par M. Frenette, je dois vous dire que je pense que la possibilité évoquée par le député de Vaudreuil-Soulanges est certaine. Dans le monde réel, on connaît des travailleurs qui disent: Je vais faire un bout dans telle usine et mon rêve, c'est de sortir du bruit de la machine, de la saleté, etc., et de...

Une voix: S'acheter un dépanneur.

M. Dean: Oui, un dépanneur! Mais je pense aussi que tout travailleur ferait bien de suivre ce que je crois être un bon principe de placement, soit de ne pas mettre tous ses oeufs dans un même panier. Je peux vous donner l'exemple d'un travailleur de GM, à Sainte-Thérèse ou à Saint-Eustache où, en vertu de certaines ententes avec le syndicat, l'entreprise offre aux travailleurs des actions dans GM. C'est concevable.

Deuxièmement, je voudrais évoquer que, dans la documentation fournie par le fonds de solidarité, on parle de montants relativement modestes pour un travailleur; on donne certains exemples, 1% du salaire, etc. Il est concevable, pour autant que le travailleur soit bien renseigné et qu'on lui explique bien ce qui arrive à l'argent qu'il investit, dans ce fonds, qu'il choisisse quand même d'investir peut-être une partie de ses possibilités d'investissement dans le fonds de solidarité. S'il travaille à GM et qu'il choisit d'acheter quelques actions dans son entreprise - pour évoquer une possibilité -indépendamment du fonds de solidarité et qu'il achète des obligations du Québec ou des obligations du Canada pour avoir plus de liquidités, je pense que ce serait tout à fait souhaitable et même normal pour un travailleur au revenu assez modeste de viser - je ne sais pas si le mot est approprié - un portefeuille personnel de placement. Je retourne à un des principes de base, soit la nécessité d'une certaine stabilité, solidité et de pas trop de fluctuations dans les dollars qui sont mis dans le fonds de solidarité afin d'éviter des fluctuations dans le destin des entreprises où on aura investi cet argent. (22 heures)

Si M. Frenette veut ajouter d'autres commentaires.

Oui. Nous avons plusieurs entreprises en cogestion, en copropriété où les travailleurs ont des actions. Notre expérience - c'est ce qu'on applique dans ces cas - nous montre qu'il doit toujours y avoir des restrictions sur les transferts d'actions. C'est toujours le même phénomène. Au début d'une année financière, alors que le travailleur qui aurait investi 100 $ aura touché environ 75% d'exemption et de réduction fiscale sur ses actions, il peut vouloir les revendre le 1er janvier et que quelqu'un lui dise: Je te donne 0,25 $ pour chacune parce que tu as eu 75% d'exemption fiscale, tu as eu 0,75 $ de réduction. Le travailleur dit: Oui, 0,25 $, d'accord, alors que son action vaut toujours pareillement, dans le fond, 1 $. On veut éviter ce genre de chose, parce qu'on ne veut pas qu'il y ait de marché secondaire sur ces actions. Pour éviter le jeu, il n'y a pas de marché secondaire. On veut que ce soit une épargne stable et que l'argent soit protégé. Donc, c'est pour cela que les limitations sur les transferts se feraient dans une perspective positive si le transfert se fait au moment où l'action se vend à sa valeur réelle. On ne veut pas que les travailleurs liquident comme cela, au hasard, des actions qu'ils auraient et qui ont une valeur beaucoup plus élevée.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Si je peux me permettre, vous avez prononcé une phrase très importante: On ne veut pas qu'il y ait de marché secondaire.

M. Dean: C'est cela.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Même avec approbation?

M. Dean: Surtout, ne pas laisser cela ouvert et ne pas encourager ce genre de marché secondaire qui, nécessairement, se fait toujours à rabais sur la valeur des actions.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Pour protéger le travailleur contre lui-même.

M. Dean: Exactement. Contre des événements de sa vie que, parfois, il ne

contrôle pas.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Contre lui-même. C'est loin de l'éducation économique; c'est l'encadrement personnel.

M. Dean: C'est l'éducation qu'il nous faudra faire. Il faut qu'il préserve son épargne. Il faut qu'il préserve ses actions; elles ont une valeur et il ne peut les liquider à rabais.

Je voudrais ajouter un mot sur vos réticences à protéger le travailleur contre lui-même. Je me rappelle que, lors...

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est comme cela qu'on s'exprime,

M. Dean: ...de l'instauration du Régime de rentes du Québec, les centrales syndicales ensemble publiaient des centaines de milliers de copies de journaux dans lesquelles elles incitaient les travailleurs à ne pas liquider leurs régimes antérieurs. Lors de l'entrée en vigueur du Régime de rentes du Québec, il y avait une période durant laquelle ils pouvaient liquider des régimes de rentes antérieurs. On a fait une immense campagne pour empêcher que les travailleurs ne fassent cette folie. Il y a plusieurs travailleurs qui ont fait fi de nos recommandations et qui l'ont regretté amèrement plus tard. Il faut faire de la formation économique. Cela veut dire qu'une partie de cette formation peut être d'éviter, comme vous le dites, que le travailleur ne cède à la tentation de faire certaines erreurs qu'il pourrait regretter ensuite.

Le Président (M. Brouillet): Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: M. le Président, je voudrais poser la question suivante à M. Frenette: Est-ce que la promotion qui se fera auprès des travailleurs de ce projet de fonds, vous avez l'intention de l'axer sur la sécurité à la retraite? Est-ce que cela a une référence ou une connotation non pas avec un fonds de retraite, mais avec une épargne qui permet un crédit d'impôt, mais qui est disponible au moment de la retraite?

M. Dean: Évidemment. C'est là, d'ailleurs, qu'est l'avantage pour le travailleur de souscrire au fonds. C'est de pouvoir bénéficier à la fois du crédit d'impôt et de la réduction fiscale lorsqu'il va transférer cette action-là dans un REER autogéré. Et ce n'est qu'au moment du transfert qu'il obtiendra, en moyenne, 40% de réduction fiscale sur son achat d'actions.

Il est évident que l'objectif du fonds est de préserver la valeur des actions et d'avoir un rendement, donc de demander au travailleur de conserver ses actions dans le fonds, puisque le fonds doit avoir une période de quelques années avant d'atteindre sa rentabilité. C'est nécessairement sa période de démarrage. On demande donc au travailleur de conserver ses actions, parce que ce sera s'il conserve ses actions jusqu'au moment où le fonds sera rentable et qu'il aura rétabli la valeur des actions que le travailleur aura alors un intérêt réel, c'est-à-dire qu'il pourra toucher l'intérêt réel.

Cela ne veut pas dire que le transfert sera impossible. Toutefois, cela va obliger le travailleur qui voudrait, par exemple un samedi soir à la taverne, aller vendre et liquider son action à une période de réflexion. Cela va l'obliger - mais n'importe qui peut le faire à l'heure actuelle et cela s'est fait abondamment - à une période de réflexion. Il faut qu'il fasse la demande au conseil et ce dernier pourra le permettre.

Mme Harel: Est-ce que cela peut éventuellement, par exemple, vous amener au cours d'une campagne de promotion à inciter des organisations syndicales ou des travailleurs - puisqu'il y a une disposition, je pense, qui permet à l'organisation syndicale de décider, je pense en assemblée générale, de participer au fonds - à se doter de l'équivalent d'un fonds de retraite?

M. Dean: Tout à fait.

Mme Harel: En fait, vous le concevez dans l'optique d'un fonds de retraite géré d'une certaine façon par les travailleurs.

M. Dean: Oui, puisque beaucoup de travailleurs n'ont pas pu se constituer un fonds de retraite dans le secteur privé et que c'est une minorité de travailleurs du secteur privé qui a un régime de retraite privé. Il est donc évident que les éléments de promotion du fonds sont que les travailleurs puissent aussi, par le biais d'un investissement dans ce fonds-là, se constituer - c'est une chose qu'ils n'ont jamais eu l'occasion de faire - un fonds de retraite; c'est évident. Et ce sera la responsabilité du fonds de s'assurer que ce fonds de retraite est là et qu'ils pourront toucher la valeur qu'ils auront investie dans ce fonds plus le rendement du fonds.

Le Président (M. Brouillet): Est-ce qu'il y aurait d'autres questions ou commentaires sur l'article 8?

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):

J'essayais de voir en pratique comment fonctionnait la période de refroidissement qu'évoquait le député de Prévost, ou M. Frenette, quant au désir d'un travailleur d'aliéner ou de vendre les actions de catégorie À qu'il a acquises. Après une simple lecture, nous sommes en train de

découvrir en discutant ce qu'il y a là-dessous. Ce qu'il y a là-dessous, c'est qu'on ne veut pas qu'il y ait de marché secondaire trop facile d'accès. Je présume que c'est ce que vous voulez dire. Vous ne voulez pas dire "pas de marché secondaire"; autrement, il ne pourrait même pas l'aliéner, point final. C'est bien entendu, il pourrait seulement le racheter plus tard, ou la succession, etc. J'essaie de comprendre de quelle façon, en pratique, vous envisagez que cela va fonctionner. Quel genre de cas est-ce en train de couvrir? Vous pouvez l'aliéner, oui, mais c'est un comité ou le conseil qui va approuver cela avant que ça se produise.

M. Dean: C'est un comité permanent qui recevra toutes les demandes et probablement qu'il les accordera aussi. Si cela se fait et qu'on se rend compte que le tout se passe normalement et qu'il n'y a pas de liquidation à rabais, c'est l'évaluation que portera le conseil.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Bon, quels sont les critères qui sont retenus par le comité d'approbation?

M. Dean: On ne les a pas. Ils ne sont pas définis.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):

J'essaie de concilier deux objectifs dont l'un très général et qui m'apparaît important quand on parle de gens qui font des investissements est celui de conserver le choix de changer le situs de leurs épargnes dans le sens qu'ils peuvent les vendre. À un certain moment, au-delà de cesser d'acquérir, comme la loi le permet - et on le verra plus loin - ils peuvent décider de céder ce qu'ils ont déjà acquis. Il me semble que c'est un principe général qui est important quand on a affaire à des investisseurs.

Le deuxième objectif, c'est celui qui transpire partout ici, certainement dans vos commentaires, dans la présentation qui a été faite du projet loi, "de responsabiliser le travailleur" à l'égard de sa participation au développement économique. Je trouve - c'est le moins que je puisse dire - très paternaliste, dans ce contexte-là, la procédure d'approbation par le conseil d'une décision libre. Vous me dites que c'est moins libre le samedi soir à la taverne. Je n'admets pas cela. La liberté, c'est la liberté. Je trouve assez paternaliste de soumettre à une telle procédure la cession des actions de catégorie À qu'un travailleur peut avoir acquises. Si on parle vraiment de "cooling off", si on parle de donner une chance à un travailleur de corriger à temps une erreur qu'il est en train de commettre, d'accord. Mais l'erreur sera jugée de l'extérieur; quant à son erreur à lui, il en devient très responsable. On apprend par nos erreurs. Dans la mesure où vous semblez dire que le marché des gens auxquels on a affaire n'ont pas l'habitude de transiger en semblable matière, qu'il faut avoir un temps d'arrêt institutionnalisé, pourquoi ne pas parler d'un temps d'arrêt, d'une période de réflexion, d'une approbation de transfert par le comité dans les 30 jours de la demande, toute demande étant rétractable dans les 30 jours en question, de sorte qu'une demande de transfert ne serait pas irrévocable dès qu'elle est soumise?

Là, on ne voit pas le mécanisme. S'il y a une demande de transfert l'avant-veille du jour où siège le comité et que cela semble correct, on l'approuve, comme vous le dites, la plupart du temps. Mais là, le travailleur change d'idée. Je comprends qu'on le responsabilise à outrance si on lui laisse faire ses erreurs. Vous me dites que l'objectif d'empêcher que des erreurs ne soient faites par des gens moins habitués à ce genre de transaction demeure un objectif du projet de loi et de toute l'oeuvre de formation à laquelle vous êtes en train de vous livrer. Il m'aurait semblé que, dans ce cas-là, institutionnaliser un temps d'arrêt répondrait au double objectif de laisser un choix aux gens et d'avoir un "back-stop" ou un temps d'arrêt ou une pause qui fait réfléchir quant au contenu de l'article 8.

Le Président (M. Brouillet): La députée de Maisonneuve avait demandé la parole.

Mme Harel: Sur la même question, mais dans un autre ordre d'idées, je voudrais demander à M. Frenette si l'esprit général de la loi n'était pas de faire assumer plus collectivement qu'individuellement cette responsabilité d'investissement. Puisque le travailleur ne peut pas individuellement demander de retenir une somme sur son salaire, qu'il faut qu'il y ait au moins 20% ou le moindre des deux, en fait, 50 employés ou 20%, cela suppose donc, d'une certaine façon, une espèce de désir collectif. Est-ce que, dans l'esprit général de la loi finalement, ce n'est pas plus une responsabilité qui, selon vous doit être assumée collectivement? C'est à la fois une responsabilité personnelle, dans un sens, puisque c'est une épargne pour la retraite et une responsabilité collective, puisque, avec le risque que cela encourt, il y a contribution au développement économique.

M. Dean: On veut vraiment se donner le temps de pouvoir expliquer cela au travailleur qui se ferait solliciter, parce que le travailleur peut être sollicité pour vendre son action et même la vendre à rabais, à perte par rapport à la valeur qu'elle a aux livres. Il est possible que la première offre qui lui arriverait serait le coût net de son action pour le travailleur, soit 0,25 $. La

sollicitation ne se fera qu'à ce niveau. Ceux qui voudraient en acheter pourraient les récupérer à 0,25 $ environ, alors qu'elles peuvent valoir effectivement 1 $ aux livres. On veut tout simplement en profiter pour faire en même temps l'éducation du travailleur, pour lui dire: Tu veux vendre ton action 0,25 $, tu peux la vendre, mais elle vaut 1 $ comme valeur aux livres. Après, le travailleur verra. Nous pourrons lui dire qu'on l'y autorise, tout en le prévenant que son action vaut 1 $. Cela nous donnera au moins le temps de rappliquer auprès des travailleurs pour leur dire ce que cela vaut pour qu'ils ne se fassent pas avoir dans une transaction rapide. Comme les montants seront minimes, puisque l'objectif est de 125 $ par année - avant qu'on ait eu le temps de faire l'évaluation des actions, parce qu'il faut savoir ce que valent leurs actions et comment ils peuvent les revendre ou les transférer - qu'il n'y aura jamais plus, en moyenne, que 100 $ ou 125 $ par année de contribués par le travailleur. Ce n'est pas avec cela qu'il pourra se dépanner lors d'un événement malheureux de sa vie. (22 h 15)

Par contre, si, effectivement, il vend 25 $ chacune ses premières actions, qu'il a payées 100 $ il dira: Je ne veux plus rien savoir de cela, j'ai perdu 75 $, alors qu'autrement il aurait eu son crédit d'impôt. On veut juste se donner le temps de faire cette éducation-là aux travailleurs en disant: On va vous redire, avant le transfert dans le fonds, ce que vaut votre action et vous prendrez votre décision après. S'ils veulent perdre dessus, ce n'est pas plus grave que cela. C'est un peu l'expérience que l'on vit et que l'on a vécue dans plusieurs cas; des travailleurs qui ont des actions d'entreprises, surtout quand ce ne sont pas des montants importants, que c'est leur première expérience d'actions et qu'ils ont besoin d'un petit montant d'argent, peuvent très bien être sollicités. Il peut y avoir d'excellents acheteurs de ces actions à 25 $, la première année.

Très brièvement, M. le Président, il me semble qu'il y a aussi un certain lien de concordance ou de logique entre ce qui paraît un désavantage et - c'est le deuxième volet de cet investissement - le deuxième avantage fiscal qui y est rattaché, c'est-à-dire la possibilité de se constituer un fonds de retraite. Donc, si cela peut paraître un désavantage de contrôler un peu la liberté de liquidation, il y a aussi une incitation positive envers le travailleur via le régime enregistré d'épargne-retraite.

Le Président (M. Brouillet): L'article 8...

M. Paradis: Un petit instant, M. le Président! Sur le même sujet, dans l'esprit de la période de "cooling-off" - je n'ai pas de rédaction à proposer, si on le mettait sur la glace, je pourrais en trouver une et y revenir demain - que je comprends, on veut avoir le temps, au niveau de la centrale syndicale, d'expliquer cela aux travailleurs. Cela va, je suis prêt à accepter cette argumentation, mais qu'on impose l'autorisation sans critère du conseil d'administration, c'est plus qu'un frein, c'est un "brake" à la transférabilité des actions.

On pourrait imposer une vente, pas sous condition, mais une vente suspensive, un délai pendant lequel le travailleur serait obligé d'aviser le conseil du transfert et pourrait jouir d'une période de 30 ou 60 jours pour se raviser après avoir consulté sa centrale syndicale. Mais la décision, dans le sens de l'éducation qu'on veut faire du travailleur, reviendrait, à ce moment-là, au travailleur comme tel. Là, la décision ne revient pas au travailleur. Le droit de veto est au conseil d'administration sans aucun critère.

M. Dean: M. le Président, ceci peut être vrai, mais il ne faut pas oublier qu'avant d'investir 1 $ le travailleur aura été amplement informé de cette condition comme d'autres. Il saura à l'avance ce qui arrive aux dollars qu'il investit, ce qu'il peut faire et ne pas faire.

En réponse aux commentaires du député de Vaudreuil-Soulanges, je retourne à mes remarques du début. Il a des choix à faire et, s'il est bien renseigné à l'avance - et il doit l'être - il a le choix de ne pas investir s'il n'aime pas cette restriction sur une partie de ses épargnes. Il n'a qu'à investir ailleurs et à ne pas accepter.

Si M. Beaulieu voulait ajouter des commentaires là-dessus.

Étant donné qu'on donne un crédit assez important aux personnes qui acquièrent ces actions, il n'est pas souhaitable pour le fonds que les acquisitions d'actions soient faites uniquement dans le but de faire de la planification fiscale. S'il n'y a pas de restriction quant au transfert, il serait peut-être intéressant pour des personnes d'acquérir les actions afin de les revendre immédiatement après, à d'autres qui, elles ne paient pas d'impôt - ce peut être leur conjoint - simplement pour profiter du bénéfice fiscal.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je voudrais demander si c'est le ministère des Finances ou si c'est le ministère du Revenu qui a insisté sur le deuxième membre de l'article 8 parce que M. Frenette a fait une défense pleine et entière qui repose sur des considérations tout autres que ce que vous venez de faire valoir.

M. Dean: Ce sont des considérations,

par ailleurs, qui s'ajoutent à ce que M. Frenette a déjà dit.

Une voix: Complémentaires. M. Dean: C'est cela.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Cela tombe bien que la même formulation rencontre tous ces objectifs-là, si je comprends bien. C'est plutôt rare.

M. Dean: Effectivement.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Si on travaillait assez longtemps, on trouverait d'autres raisons que personne ne soupçonne. Je persiste à croire qu'on ne changerait pas fondamentalement, sauf à l'égard des commentaires qui viennent d'être faits par le représentant du ministre des Finances, les objectifs que la FTQ recherche si on avait une disposition, un ajout dans l'article 8, par exemple, disant que l'aliénation - ce n'est pas sûr que, dans le contexte, cela a du bon sens et que cela ne peut pas être mal interprété - ne prendrait effet que le 30e jour suivant la demande qui en est faite par le porteur, sauf son droit de changer d'idée en mot de tous les jours.

Là, on est retourné à la "cooling-off period". Je pense qu'on maintient la liberté des investisseurs. Ce ne sont pas des grosses sommes effectivement dans les premières années. Quand on parle de formation et de responsabilisation des gens, on a atteint tous ces objectifs-là tout d'un coup. Il y a peut-être le ministre du Revenu qui va trouver que c'est moins comique pour lui.

M. Dean: Sauf que, lorsqu'on parle de fiscalité, on touche une décision gouvernementale.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Il n'est pas question ici de trouver une façon que le crédit d'impôt soit transférable à chaque nouvel acheteur de l'émission originale; le crédit d'impôt est accordé de toute façon. Il y a l'émission d'actions de catégorie A. Il y a quelqu'un, une personne physique, quelque part, qui en achète et il y a une personne physique quelque part qui a 35% de crédit d'impôt. C'est fait. Qu'il la vende demain ou dans 10 ans, à mon sens, cela ne change strictement rien. Le geste qu'a voulu poser le ministre des Finances pour inciter les travailleurs à souscrire à ce fonds lui coûte quelque chose, je le répète que l'action soit cédée, aliénée le lendemain de l'acquisition ou à quelque moment que ce soit plus tard.

Ce n'est pas complètement assimilable au Régime d'épargne-actions où il y avait des exigences de retenir, dans son portefeuille, les actions admissibles à ce régime. C'est entendu que l'objectif de planification fiscale était plus présent à l'esprit des gens qu'on visait à l'origine, en 1979, dans l'instauration du Régime épargne-actions. Ce n'est pas du tout cela, ici, l'objectif. Il y a une incitation à constituer le fonds; ce n'est pas une incitation à investir, si vous voyez la nuance; ce n'est pas exclusivement pour les travailleurs - c'en est une, il n'y a pas de doute - une incitation à prendre une décision d'investissement. C'est une incitation, globalement, qui va faciliter la constitution du fonds de solidarité.

M. Dean: Je reviens à ce que j'ai dit tantôt. Comme dans toute autre offre d'action, possibilité d'investissement, il y a des conditions déterminées par celui qui fait l'offre, il y l'exigence d'une pleine et ample information et il y a un choix qui se fait en connaissance de cause.

M. Paradis: Ce n'est pas cela qu'on met en doute. Sur cela, on est entièrement d'accord. Ce qui nous préoccupe, c'est la philosophie du fonds. On nous dit qu'en plus de faire de la stimulation de l'économie, de la création et du maintien d'emplois, on veut faire l'éducation de nos travailleurs et de nos travailleuses au monde des affaires. Mais si l'on met une condition aussi paternaliste, pour utiliser un mot déjà utilisé par mon collègue de Vaudreuil-Soulanges, est-ce qu'on atteint cet objectif-là? C'est la philosophie qu'on remet en question. On n'a pas senti, dans les propos du représentant de la Fédération des travailleurs du Québec, que c'était la philosophie recherchée. Ce que l'on recherchait, selon ce qu'on a compris, c'est à éviter la vente à la taverne le samedi soir, qui avait été mentionnée comme exemple, que le travailleur regrette finalement une telle décision prise peut-être émotivement tout d'un coup.

Dans certains cas, cela peut être vrai. Alors, qu'on accorde cette protection au travailleur ou à la travailleuse, nous sommes parfaitement d'accord qu'on lui donne une période de "cooling-off", mais de là à dire qu'il n'y aura strictement d'aliénations qu'avec l'autorisation du conseil d'administration sans donner aucun critère, il me semble qu'on va philosophiquement à l'encontre de l'objectif qui est de donner une éducation d'investissement à ce travailleur-là. J'accepte votre argument que, lorsqu'il investit de l'argent, il sait à quoi s'en tenir. Mais, tout cela étant compris, si l'on recherche la période de "cooling-off", on peut l'obtenir autrement et de façon beaucoup moins paternaliste. On aura alors atteint l'objectif et rejoint la philosophie de l'éducation qu'on veut donner au travailleur.

M. Dean: M. le Président, je voudrais commenter. Je me pose une question car, si

on énumère à l'avance des critères dans la la loi, il faudrait qu'un jour on amende la loi si on se rend compte qu'il y a d'autres critères.

M. Paradis: Ce n'est pas la meilleure des suggestions.

M. Dean: Deuxièmement, c'est peut-être sur une partie de la philosophie qu'on s'interroge. Lorsqu'on parle de formation des travailleurs, il ne s'agit pas seulement de la formation uniquement sur cet élément de l'investissement. C'est plutôt la formation dans un sens d'implication financière dans l'économie, c'est-à-dire sur la responsabilité des travailleurs de s'impliquer par une partie de leurs épargnes dans le soutien et la création d'emplois, ainsi que dans le développement industriel. Il s'agit pour les travailleurs de bâtir peut-être un sens macro-économique, si vous me permettez l'expression, d'appartenance à l'économie au moyen d'un léger investissement prélevé à même leur salaire et qui, je le souligne, serait librement consenti.

Finalement, j'ajouterais qu'un autre élément serait d'éviter une dévalorisation des actions provoquée souvent par une vente trop rapide.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Quant à la valeur des actions, elle est déterminée dans la loi. Le marché secondaire demeurera toujours bien mince et une occasion ponctuelle pour certains de peut-être pouvoir céder ce qu'ils ont acquis. Ce n'est donc pas le meilleur argument que soulève le député de Prévost, en l'occurrence. C'est pour cela que je le relève. Les autres, je ne les relève pas parce qu'ils sont très bons. Il n'y a pas de problème.

M. Dean: On ne peut pas toujours avoir raison.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II y a donc les trois volets - j'y reviens un peu; vous voyez mon insistance - la liberté de disposer d'un investissement ou d'un bien, l'objectif de responsabiliser les gens qui font maintenant affaires dans ces matières-là, comme ils le font dans le fonds de la FTQ. Je veux bien croire qu'on est parfaitement libre d'acquérir ou non des actions une fois qu'on a vu dans le prospectus à quelles conditions on le fait. C'est parfaitement exorbitant de voir qu'on aura sur le marché une action que les gens vont acheter sachant pertinemment et clairement, je le répète, qu'ils ne pourront jamais la vendre. C'est un peu fort, il me semble, sous prétexte d'empêcher les gens de faire des erreurs. (22 h 30)

Évidemment, je fais partie de l'école de la ligne dure en matière d'apprendre par nos erreurs. Comme groupe moins habitué que d'autres à jouer dans les choses financières, jamais on ne surmontera ce retard ou cette ignorance relative si, chaque fois que l'on commet une erreur, on est couvert par quelqu'un, on est protégé. C'est à force de faire des erreurs, de réaliser que l'on n'aurait pas dû faire cela que, dans l'avenir, on ne le fera pas.

On a passé notre temps, ce matin, à dire: Ah oui, le fonds FTQ, cela ne sera pas les caisses d'entraide. Moi, je ne suis pas inquiet de cela. L'expérience est là, justement. On a appris de cette erreur. À l'époque, on se souvient, d'ailleurs, qu'il y avait l'école de la ligne dure qui prétendait que, si on voulait vraiment renforcer l'avenir des institutions financières québécoises, il ne fallait pas "shooter" 60 000 000 $ ou 90 000 000 $ pour alléger le fardeau de ceux qui avaient fait une erreur collectivement. Est-ce qu'on a appris aux gens qui ont été rescapés, grâce à l'intervention de l'État que, quand il y a du risque, il faut regarder cela de près et, si on fait une erreur, la prochaine fois on n'en fera pas? Là, chaque fois, on se fait rescaper et on se fait protéger d'une façon stricte de faire une erreur. Les sommes sont petites le nombre de gens est petit. Globalement, je ne pense pas qu'on assiste à des "run on the bank", comme on dit. Ce n'est pas susceptible d'arriver. On ne peut pas retirer, de toute façon, ce qui est dans le fonds.

J'entendais autour de la table - à voix basse - tout à l'heure, que cela assurait la stabilité du fonds. Il n'y a aucune différence entre celui qui vend l'action qu'il a et celui qui cesse d'acquérir, qui transmet son avis de 60 jours. Le fonds est constitué, les sommes déjà versées. Les titres de propriété ou certificats que les porteurs ont entre les mains, s'ils se promènent, cela ne fait pas de différence au bilan du fonds, pas plus que le marché secondaire de la Bourse de Montréal. Qu'il y ait 1 000 000, 10 000 000, 100 000 000 d'actions qui se transigent dans une journée, le bilan des sociétés dont les titres sont transigés ne change pas d'un cent littéralement. Ce qui change, c'est l'identité du porteur; il y en a qui ont réalisé sur l'investissement; il y en a d'autres qui ont acheté quelque chose, qui selon eux sera meilleur plus tard. C'est ça le marché, c'est ça l'éducation économique; c'est ainsi que cela fonctionne encore.

Persister à vouloir soumettre à un comité composé de personnes désignées par le conseil etc., pas juste les conditions d'exercice d'une cession d'aliénation, mais le droit strict d'aliéner m'apparaît aller à l'encontre de l'objectif fondamental de formation économique des travailleurs. Surtout que cela empiète sur le concept de liberté des gens. C'est surtout à cela que je

tiens.

M. Dean: J'inviterais Me Lacoste à faire quelques commentaires.

Si on touche à la question de l'aliénation, sans le savoir, on risque de toucher à toute la conception de la réglementation du fonds par la Commission des valeurs mobilières. J'aurai l'occasion d'en parler plus tard, ce soir. Le régime qui sera appliqué sera analogue à celui des SICAV, les sociétés d'investissement à capital variable, qu'on appelait autrefois les fonds mutuels, ne sera pas un régime par lequel on prévoit tous les mécanismes du marché secondaire. Par exemple, on n'appliquera pas cette partie de la loi sur les rapports d'initiés.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Cela prendait quelqu'un qui a 10% de...

M. Dean: Non, ce n'est pas nécessairement par 10%; c'est toute cette partie de l'usage d'information privilégiée. On tombe dans toute cette question. La raison pour laquelle on arrive à cette question de l'aliénation est intimement liée aussi au droit de rachat. D'habitude, le capital-actions permanent n'est pas rachetable, sauf, dans des cas bien particuliers, par l'entreprise qui a émis les titres. Si on ne prend pas garde sur cette question de l'aliénation, on risque de voir, si petit soit-il, un marché secondaire dont le prix, lors de l'aliénation, variera suivant l'âge de celui qui l'a acquise du fonds. Plus il sera près de l'âge de la retraite, plus cette action vaudra cher. Alors, celui qui a 63 ans, lui, pourra avoir environ 0,98 $ pour son action, car elle va être rachetable très bientôt par le fonds si elle vaut toujours 1 $, alors que le travailleur qui a 25 ans, lui, il va l'avoir lontemps. Alors, il y a toute cette notion qui entre en ligne de compte parce qu'on a dit qu'elle n'est pas rachetable, sauf au moment de la retraite.

Il me semble donc que la façon d'aborder la question, c'est de dire: Est-ce que celui qui souscrit à l'action, lorsqu'il l'achète, est vraiment informé de cette restriction particulière quant à son investissement qui fait qu'il l'aura pour le temps qui lui reste avant d'atteindre ses 65 ans? La question d'information réside au niveau de l'acquisition de l'action. Une fois qu'il est bien informé de cela, il prend une décision. Je ne veux pas entrer dans le débat sur le mérite, à savoir si on a, oui ou non, le droit d'aliéner parce que je pense que le problème est au tout début.

Toutefois, si on laisse une possibilité, qui devrait, selon moi, être encadrée, à un certain moment, par un règlement du fonds et approuvée par les actionnaires, etc., pour que ça soit bien encadré, dans cette période de réflexion, de "cooling-off", si on dit que c'est normal de permettre un transfert, il faudrait aussi avoir le temps d'expliquer ou de rappeler au porteur de valeurs, les conséquences fiscales de l'aliénation. Il va recevoir ses 0,25 $, lui, s'il l'a vend 0,25 $, mais il ne faut pas qu'il oublie que le fisc va présumer qu'il dispose de son action et, là, il recevra un feuillet T-4 parce qu'il avait différé l'impôt pendant tout ce temps-là. Il y a, à ce moment-là, des conséquences fiscales qui vont varier selon ses revenus. Il y une foule de choses ou de raisons, non seulement sur la nature de cette action-là, mais aussi sur les conséquences de l'alinéation, qui font qu'il a semblé raisonnable de dire qu'il n'y aurait pas de facilité de transférer.

Si l'on en venait à laisser la libre aliénation, il est possible, en présumant que le fonds fait d'excellentes affaires, que les actions valent plus que 5 $. Il est théoriquement possible qu'il y ait un marché secondaire qui s'active là-dessus. Et s'il y a un marché secondaire qui s'active, il va falloir revoir le plan qui a été approuvé ou soumis à la commission et sur lequel il y a eu un accord de principe où l'on ne réglementait pas la diffusion d'information privilégiée quant aux opérations sur les titres.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Vous avez allégué - j'espère qu'on ne dévie pas trop - les conséquences fiscales. Cela se rapporte à l'alinénation et cela a été précédemment évoqué. On a fait part que le deuxième membre de l'article 8 avait comme raison additionnelle à celles expliquées par M. Frenette des considérations d'ordre fiscal.

M. Dean: Cela n'a rien à voir avec le crédit d'impôt, ce dont je viens de parler. Il s'agit de la déduction admissible au titre du régime d'épargne-retraite.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, c'est entendu.

M. Dean: Le crédit d'impôt est séparé du régime d'épargne-retraite. Ce sont deux choses différentes.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):

D'accord. Quelle est l'incidence du crédit d'impôt sur une aliénation? À court terme, il n'y en a pas. Le crédit d'impôt, c'est une fois pour toutes.

M. Dean: Le crédit d'impôt est accordé lors de l'acquisition et il est, d'ailleurs, reportable, d'après la déclaration ministérielle. Mais la déduction du revenu imposable dans l'année où le montant est investi dans un régime d'épargne-retraite, c'est uniquement différer de l'impôt. Lorsque le travailleur, le souscripteur ou le porteur

les aliène, cela peut faire quelques années qu'il n'a pas lu le prospectus. Je pense bien qu'il faut, au moins, l'informer des conséquences de son aliénation parce que, sur les 0,25 $ qu'il pense recevoir, il aura un compte d'impôt qui va suivre dans l'année.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Étant donné qu'il a cherché un abri fiscal dans un REER.

M. Dean: Je voulais souligner ces points-là avant de toucher plus avant au transfert, parce que cela fait partie d'un tout. Donc, cette restriction apparente d'aller demander une permission, elle n'est pas encadrée. Ce n'est pas nécessairement que c'est impossible d'aliéner, mais c'est certainement une restriction au transfert. On ne connaît pas les conditions; cela pourra faire l'objet d'un règlement ou d'une politique du fonds qui pourra être critiquée à l'assemblée annuelle, etc. Cela pourra se développer plus tard. Mais il y a quand même des conséquences pour les travailleurs de retirer toute restriction. Il peut très bien aliéner ses actions sans en avoir les conséquences. Je voulais simplement souligner ce point-là.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):

D'accord. À l'article 8, au sous-paragraphe 3 capital-actions, qu'on est en train de discuter, on a établi les droits afférents aux actions par référence à la Loi sur les compagnies: le droit d'élire des administrateurs, donc le droit de voter aux assemblées, à 123.40; le droit au reliquat en cas de liquidation - personne ne souhaite cela; donc, il n'en est pas question là-dedans - le droit aux dividendes. Je me demandais où le soulever et il ne m'apparaît pas que je puisse le soulever ailleurs qu'ici. C'est un des droits prévus dans la Loi sur les compagnies. Quelle va être la pratique du fonds essentiellement au titre des dividendes? Là, on a une action; selon le prospectus, l'investisseur sait qu'il ne peut la céder, l'aliéner comme il pensait. Par ailleurs, il sait qu'il a le droit de désigner des administrateurs. On lui dit que, si jamais on liquide le fonds à un moment X, il aura sa quote-part comme actionnaire. La question qui se pose est celle des dividendes. Qu'est-ce qu'on va faire avec cela? Est-ce assimilable à l'aliénation de la valeur du fonds que de payer des dividendes dans ce cas-là, selon le même raisonnement? Il détient des actions; il n'a pas le droit de les aliéner sans approbation, mais la plus-value représentée par le rendement qu'atteindrait le fonds, traduite sous forme de dividendes versés aux actionnaires, il pourrait en disposer à sa guise? Il peut donc disposer du fruit de l'investissement, mais pas du capital.

M. Dean: J'inviterais M. Dionne.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Donc, il ne bâtit pas vraiment de l'épargne si la politique des dividendes est que cela peut être versé et que les gens le dépenseront comme ils voudront. On n'a pas pas bâti de l'épargne, ça ne s'est pas accumulé; il a seulement accumulé du capital, avec ce que cela vaut avec l'inflation.

M. Dean: Me Brière va faire un commentaire sur l'aspect juridique et M. Dionne va vous expliquer un certain nombre de scénarios financiers pour répondre à votre question.

Je veux simplement vous dire que le versement de dividendes n'a vraiment rien à voir avec la non-transférabilité des actions sur le plan juridique. Une action peut être non transférable et valoir à son porteur un dividende.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je suis parfaitement d'accord avec vous.

M. Dean: Sur la politique de paiements de dividendes, peut-être que monsieur, à ma gauche, serait plus compétent que moi pour répondre.

Quant à la politique de versement de dividendes, elle a été conçue un peu de la même manière que le fonctionnement d'un dividende qui est perçu via un régime d'épargne-retraite, dans le sens où un rendement qui est accumulé dans le fonds s'accumule à la valeur de l'ensemble des actions et est réinvesti continuellement dans le fonds. Le porteur de l'action pourra en toucher le fruit lorsqu'il pourra, à sa retraite, par exemple, monnayer son action.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): À la retraite.

M. Dean: Suivant les critères qui vont être déterminés par les administrateurs ou le comité.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Alors, la clef de tout cela, c'est d'inciter les gens non seulement à souscrire, à bénéficier du crédit d'impôt, mais littéralement - et c'est préférable - à transférer leur action dans un régime d'épargne-retraite autogéré. Autrement, on ne constitue pas de l'épargne. Si je comprends bien, on va verser des dividendes quand on le pourra financièrement, quand ce sera souhaitable etc., et la personne qui recevra un dividende pourra en disposer à sa guise, essentiellement, si ce n'est pas dans un régime enregistré d'épargne-retraite.

M. Dean: Effectivement, il est conçu pour que le porteur de l'action soit avantagé

à le transférer dans un régime d'épargne-retraite et, à ce moment, cela va être préférable pour lui que ses revenus soient réinvestis dans son fonds d'épargne-retraite pour qu'ils ne soient pas imposables.

Le Président (M. Brouillet): Toujours sur l'article 8, est-ce que vous seriez prêts...

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Dans la logique de nos interventions préalables, il me semble que mon collègue de Brome-Missisquoi a un mot à ajouter.

M. Paradis: Je vais peut-être proposer une modification mal rédigée - je vous en préviens tout de suite, je l'ai rédigée à la plume, à côté; elle a besoin de retouches -mais dans cet esprit et, si on est d'accord sur l'esprit, on pourra demander à M. Brière de la traduire correctement. "Seule une personne physique peut acquérir ou détenir une action de catégorie A." On s'entend là-dessus, on a expliqué pourquoi, pas de modification, pas de problème. "Le porteur d'une action de catégorie A..." Au lieu d'une interdiction, au lieu d'indiquer: "ne peut l'aliéner", pour rejoindre la philosophie de la FTQ, on dirait: "peut l'aliéner en tout temps. L'aliénation, toutefois, ne prend effet que 30 jours après la transaction. Pendant cette période, celui qui offre d'aliéner peut renoncer à la transaction." On aurait rejoint la philosophie qui est recherchée par les promoteurs du projet de loi, par la FTQ. (22 h 45)

Je n'ai rien trouvé - je m'excuse, c'est peut-être par distraction - dans les arguments de fiscalité, qui coûterait plus cher au gouvernement parce que le crédit d'impôt profite strictement au premier acquéreur. Le deuxième acquéreur n'en profite pas et à ce moment on contribuerait davantage - vous n'aimerez peut-être pas l'expression - à libéraliser l'apprentissage au monde économique du travailleur et de la travailleuse.

M. le député de Prévost, j'aimerais que M. Brière nous répète à haute voix, si c'est possible, l'argument. J'ai saisi que cet amendement-là n'irait pas à l'encontre de la philosophie des instigateurs du projet de loi. C'est ce que j'ai compris à la suite des représentations qui nous ont été faites. Si cela va contre la philosophie des instigateurs, j'aimerais qu'on m'indique contre quelle philosophie.

M. Dean: M. le Président, je retourne à des choses que j'ai déjà dites, soit que le souci de la liberté est très louable, sauf que la liberté dans ce cas-là s'exerce avant l'investissement. On reçoit de l'information.

Deuxièmement, vous faites aussi allusion à l'implication de la formation. J'ai tenté précédemment de mentionner qu'il y a beaucoup d'autres éléments de formation économique et financière englobés dans la philosophie globale de ce projet de loi. Il y a ici certainement une crainte à savoir que, si l'on ouvre trop la porte, on peut risquer que certaines personnes n'acquièrent des masses d'actions simplement aux fins de toucher des avantages fiscaux.

M. Paradis: J'aimerais que vous m'expliquiez cela. C'est cet aspect-là que je ne saisis pas. C'est peut-être à tort que je ne saisis pas, mais j'ai compris que l'avantage fiscal appartenait au premier détenteur, c'est-à-dire à l'acquéreur original du titre et que, par la suite, le second acquéreur ne jouissait pas de cet avantage fiscal. C'est ce que j'ai compris. Si je n'ai pas bien compris, qu'on me l'explique autrement.

M. Dean: Si le deuxième acquéreur n'a pas d'avantage fiscal, il va acheter l'action à rabais.

M. Paradis: Oui, mais qu'il l'achète à rabais ou qu'il l'achète à plein prix, cela ne me semble pas être la principale préoccupation et peut-être que notre travailleur aura appris ce qu'est un rabais fiscal. Il aura probablement compris cette notion-là. On m'a donné plus tôt comme argumentation le facteur âge. Cela vaut peut-être plus pour quelqu'un qui est près de la retraite, etc. C'est basé sur l'âge. Je ne suis pas certain que c'est conforme - je sais qu'on suspend la Charte canadienne des droits et libertés - à la charte québécoise, le critère basé sur l'âge. Si c'est l'un des critères dont le conseil d'administration entend tenir compte avant d'autoriser des transferts, on s'embarque dans de jolis draps.

M. Dean: Je pense que ce n'est pas ce qui a été dit, monsieur. Il s'agissait plutôt d'une réflexion sur une statistique probable de ce qui va se produire.

M. Paradis: C'est ainsi que je l'ai compris. Si, au niveau du conseil, il fallait qu'accidentellement on en fasse un critère et que notre décision repose là-dessus avant d'autoriser le transfert, c'est drôlement attaquable. C'est le moins qu'on puisse dire. À ce moment-là on fait une restriction absolue, sans aucun critère, alors qu'on veut éduquer le travailleur à l'investissement. Je suis prêt à partager l'argument de la FTQ, sérieusement. Je ne veux pas qu'un travailleur qui est en peine ou qui a une complication économique soudaine, même si ce ne sont pas des montants importants, prenne une décision spontanée sans avoir le temps d'y réfléchir. J'achète cet argument. Je l'achète même à contre-poil, comme on

dit, mais je l'achète. Permettons-lui d'avoir cette période de réflexion. Inscrivons-le dans la loi. Mais que le principe, au lieu d'être la non-alinéation, soit l'aliénation. Je ne peux pas voir en quoi la modification qu'on suggère pourrait détruire la philosophie qui a été énoncée par la Fédération des travailleurs du Québec.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Cela se rapproche tellement plus de ce qu'est un investissement en actions. Au moins, il n'y aura pas deux sortes d'investisseurs dans ce genre d'actions. Déjà, il va y avoir trois genres. Il va y avoir ceux-là. Il va y avoir les gens qui vont aller dans les sociétés en voie de développement, le nouveau "deal" qui a été proposé dans le budget, le REA qu'on connaît pour certaines autres entreprises. Il y a, finalement, l'achat habituel d'actions. Il y a même quatre genres d'investisseurs sur le marché devant des actions qui, quant aux droits, privilèges, restrictions, à la possibilité de croissance de la valeur du capital et tout cela, sont toutes semblables et qui, à leur face même, sont identiques les uns aux autres. Mais il y a quatre genres de détenteurs qui se promènent dans le portrait avec des conséquences assez différentes les unes des autres. M. le Président, si vous voulez noter le droit de parole qui est exercé.

M. Dean: M. le Président, M. Beaulieu, en mon nom.

Au niveau du crédit d'impôt, c'est le premier acquéreur, comme on l'a souligné, qui obtient le crédit. Cependant, le crédit a été accordé dans l'optique qu'on voulait que les gens qui acquièrent les actions pour le fonds obtiennent un crédit et non que les gens utilisent le crédit seulement à titre de planification fiscale, qu'ils acquièrent l'action pour obtenir le crédit d'impôt et la vendent le lendemain ou six mois après, seulement pour le bénéfice fiscal. C'est au moment de l'acquisition que la question se pose. C'est pour cette raison que la restriction quant au transfert fait en sorte que les gens n'utiliseront pas l'acquisition d'actions aux seules fins de bénéficier d'un crédit fiscal. Je pense que, de façon claire, le coût fiscal pour l'État risque d'être beaucoup plus grand s'il y a une attraction très large donnée à tous les investisseurs aux fins de planification fiscale, alors que le but de ce crédit d'impôt est de permettre au travailleur d'investir dans du capital de risque. Donc, il y a un certain coût fiscal qui a sans doute été donné.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui. On s'est informé auprès du ministre cet après-midi. Il parlait de 7 500 000 $ l'an prochain, enfin, il faudrait le relire. Il y avait une série de chiffres là-dessus fondés sur la popularité du programme auprès des travailleurs sur le montant qui serait investi. Il y a une relation directe, c'est bien évident.

M. Paradis: Mais je ne peux pas voir comment cela peut - c'est ce que j'aimerais comprendre - augmenter le coût pour le ministre des Finances si seulement le premier acquéreur peut en bénéficier.

M. Dean: II va y en avoir plus.

M. Paradis: II va y en avoir plus? Le fonds va fonctionner mieux? Si le fonds fonctionne mieux - je vous remercie de la réponse - c'est peut-être une possibilité, mais je ne pense pas que le ministre des Finances ait objection à ce que le fonds fonctionne bien, même qu'il devance ses objectifs. Je ne pense pas que ce soit le cas.

Dans le cas d'un deuxième transfert, de la personne qui l'aura acquis d'un premier acquéreur et qui, elle, n'aura pas bénéficié d'un crédit d'impôt, on pourra peut-être en arriver plus rapidement à la valeur. C'est peut-être là que je rejoins les préoccupations énoncées par le député de Notre-Dame-de-Grâce dans ses remarques préliminaires, ce matin. Je suis certain que, dans la première transaction, ce ne sera pas la véritable valeur à cause de l'incidence du crédit d'impôt. Mais, plus il va y avoir de transferts, plus on sera capable de vérifier, avec le temps - ce n'est pas créé seulement pour un an - la véritable valeur de l'action.

Le Président (M. Brouillet): Y a-t-il une réponse ou un commentaire à donner là-dessus? Est-ce dans la même veine, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce? Oui.

M. Scowen: Je ne sais pas. Je viens d'arriver. Je m'excuse, mais j'ignore si cette question a déjà été posée. Vous prévoyez la création d'un comité désigné pour prendre les décisions sur les aliénations. Est-ce que vous avez déjà donné une idée de l'ampleur et des exemples de cas qui pourront justifier l'approbation de l'aliénation? Est-ce qu'il a été question de cela? J'avais compris qu'il n'était pas question d'un marché secondaire, mais est-ce quelque chose qui se fera souvent? C'est quoi?

Une voix: C'est déjà fait. M. Scowen: C'est fait.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, je tiens seulement à vous signaler que votre question est recevable, mais cela fait environ une heure que nous étudions cet article.

M. Scowen: Est-ce que vous avez la

réponse à cette question?

M. Dean: Oui, je pense, M. le Président.

M. Scowen: II n'est pas nécessaire de le répéter si vous en avez déjà parlé.

Le Président (M. Brouillet): Oui. On a abordé un peu cette question, mais il peut quand même y répondre. Je vous dis cela en passant. La question est recevable. Je tenais à vous faire part du fait que nous avons longuement discuté cet article, mais M. Frenette peut bien y répondre.

M. Dean: Je vous donne un exemple. Une personne n'a plus d'emploi et elle doit quitter la région ou quitter le Québec pour aller travailler ailleurs, aux États-Unis ou n'importe où. Elle n'a plus d'attache au Québec. C'est fini. Elle demande alors un transfert, c'est bien évident.

M. Scowen: Elle se trouve mal prise sur le plan financier et a besoin de son argent.

M. Dean: Pour les trois ou quatre premières années, on vous l'a dit, le fonds ne fera pas ses frais. Le fonds a besoin d'une période de maturation. Au cours des trois ou quatre premières années, il est bien évident que le fonds ne sera pas capable de maintenir la valeur de l'action. C'est inscrit. C'est très clair. Ce qu'on ne veut pas, c'est que, au cours de ces trois ou quatre premières années, les travailleurs liquident une action qui va maturer et trouver sa pleine valeur dans quelques années. Donc, on ne veut pas que des pressions soient créées sur un marché secondaire à rabais où des gens vont être intéressés à acheter des actions et à en acheter en masse si elles sont offertes à rabais et en dessous de la valeur réelle inscrite au fonds. Il y a des gens qui vont pouvoir concentrer ainsi certaines actions et ils vont le faire au détriment de l'épargnant qui est le travailleur original à qui on aura fait la promotion du fonds en lui disant que c'est de l'épargne, que c'est stable, en lui disant de la laisser là et qu'elle lui rapportera. Les objectifs du fonds sont de toucher complètement, à la retraite, l'avoir qu'on aura investi là-dedans, en plus des dividendes que le fonds versera. C'est ce qu'on va vendre aux travailleurs et c'est ce qu'on veut qu'ils comprennent. Le fait de pouvoir transférer les actions en tout temps ne constituera jamais un élément de vente. On ne dira jamais aux travailleurs de faire cela. On va plutôt leur dire: Non, ne faites pas cela.

M. Scowen: Mais l'article 8 prévoit le transfert d'une action à une autre personne physique, n'est-ce pas?

M. Dean: C'est cela.

M. Scowen: Est-ce que le comité va garder le droit de déterminer non seulement le droit à la personne À de vendre, mais aussi le nom de la personne?

M. Dean: Non, non.

M. Scowen: II peut vendre à n'importe qui?

M. Dean: Oui.

M. Scowen: Une fois que l'approbation est donnée, il aura le droit de vendre cette action à n'importe qui et au meilleur prix qu'il peut toucher?

M. Dean: Oui. Ah oui!

M. Scowen: C'est très important.

M. Dean: II n'y a pas de limitation sur la personne comme telle pour acheter. C'est bien évident.

M. Scowen: Et au prix auquel il peut la vendre. Une fois que l'approbation est reçue par la personne physique, il peut vendre cette action au prix du marché.

M. Dean: Oui. (23 heures)

M. Scowen: Je trouve que c'est un élément très important dans l'affaire. Si vous n'essayez pas de contrôler le prix auquel cela doit être transféré - je ne sais pas si c'est possible - vous créez, si vous donnez le droit à plus qu'à un nombre très limité de personnes de le faire, un marché secondaire. La personne qui achète, est-ce qu'elle sera obligée d'aller devant vous pour avoir le droit de la transférer à une troisième personne?

M. Dean: Oui.

M. Scowen: Elle peut le vendre à n'importe quel prix aussi?

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): En ayant à l'esprit les bons conseils que vous lui aurez transmis sur l'opportunité de le faire ou de ne pas le faire.

M. Dean: Tout à fait. On va avoir le temps de leur expliquer de ne pas poser ce geste, pour le premier.

M. Scowen: Comment définir une personne qui est mal prise sur le plan financier? Vous allez vous trouver devant toutes sortes de demandes. Je quitte la

province, c'est une chose. Mais moi je suis mal pris, moi j'ai des dettes parce que je viens de m'acheter un chalet d'été, diront d'autres personnes. Il y a un trou là que je trouve très important. Ce comité peut devenir une affaire très importante et très active à moins que vous n'ayez une idée très précise des limitations. Si c'est n'importe qui qui se trouve mal pris et qu'il veut liquider quelques-uns de ses actifs, à cause de la justice, de problèmes familiaux et de la séparation d'un homme de sa femme, vous allez vous trouver avec un paquet d'actions un peu partout. Non?

M. Dean: J'ai déjà répondu en partie à ce qu'évoque le député de Notre-Dame-de-Grâce. C'est un fonds d'investissement, oui. On parle d'une première. Si ce n'est pas une première mondiale, comme le député l'a dit hier soir, c'est une deuxième au moins au Québec. Mais c'est peut-être une première mondiale en dehors du Québec. Ce n'est quand même pas un fonds d'investissement tout à fait comme un autre. Il y a un élément de stabilité qu'on désire établir. L'individu qui va avoir accès à toute l'information avant de décider d'investir, exerce une liberté de choix, à ce moment. Deuxièmement, les montants prévus dans les scénarios réalistes, ce ne sont pas des montants mirobolants. On vise peut-être 125 $, 200 $ par travailleur par année. Ce sont des petits montants.

Aussi, le travailleur a d'autres choix. S'il veut diversifier son porte-feuille d'actions, il peut acheter des obligations du Québec, des obligations fédérales, investir dans sa propre compagnie. J'ai évoqué des possibilités. Il a tout intérêt à ne pas mettre tous ses investissements nécessairement dans le fonds de solidarité. Les montants sont relativement restreints aussi. S'il est mal pris, ce n'est pas la seule source de salut pour lui. Je reviens à cette approche collective d'investissements où plusieurs petits mettent leur peu d'argent ensemble pour faire un gros montant pour jouer un rôle dans l'économie, surtout dans les questions de soutien et de création d'emplois, de développement économique, de capital de risque et tout cela.

Il y a une deuxième incitation, soit l'élément épargne-retraite qui est aussi greffé là-dessus. À l'objectif stabilité du fonds, ce qui veut dire un minimum de flottement des investissements, on ajoute une deuxième motivation au travailleur de laisser son argent afin de se donner un régime d'épargne-retraite en soulignant que, dans le secteur privé au Québec, 75% des travailleurs n'ont aucun fonds de retraite autre que le Régime des rentes du Québec.

M. Scowen: Votre espoir est fondé sur la bonne volonté des gens de participer à un fonds de solidarité. Je comprends. Mais c'est drôle comme l'argent est important, une fois que vous commencez à penser à l'argent comme à quelque chose à part la solidarité. Moi, je prévois des saisies de biens, des problèmes familiaux, des décès, toutes sortes de problèmes. Je pose la question parce qu'il me semble que vous devez avoir une idée assez précise de l'ampleur de ce comité et des situations que vous serez prêts à accepter. Juste un exemple, est-ce que ce sera un seul comité central qui va prendre cette décision ou si ce sera un comité pour chaque syndicat ou pour chaque unité?

M. Dean: C'est le fonds. Un règlement du conseil d'administration présenté, discuté en assemblée générale et accepté par tous les actionnaires déterminera les paramètres des transferts.

M. Scowen: Vous avez bien pensé à la réponse que vous m'avez donnée quand j'ai dit qu'une fois la permission de vendre accordée à la personne elle aura le droit de le vendre à n'importe qui à n'importe quel prix? Si, par exemple, vous lui donnez le droit de le vendre et que le prix, sur le rapport annuel, est de 3 $, qu'elle essaie de le vendre et n'est pas capable de le vendre au-dessus de 2 $, tout le monde va comprendre très vite que la valeur réelle est de 2 $, parce que vous créez un marché secondaire avec ce comité. Même si c'est un petit marché secondaire, vous allez avoir droit à un article dans Finance ou Les affaires où on va dire, exactement comme ils ont dit dans le cas des SODEQ, en Beauce-Appalaches: Les actions se transigent à 0,30 $ sur le dollar. Ce sera connu. C'est cela, mais cela ne vous dérangerait pas?

M. Dean: En principe, on ne veut pas créer de marché secondaire. On va faire toute la formation, toute l'information pour qu'il ne se développe pas de marché secondaire, parce que nécessairement un marché secondaire va jouer contre le travailleur.

M. Scowen: Mais vous êtes obligés de le faire.

M. Dean: On peut être obligé de le faire dans certaines circonstances.

M. Scowen: Vous ne le voulez pas, mais vous le prévoyez dans la loi.

M. Dean: Oui, là où on ne pourra pas y échapper.

M. Scowen: Me permettez-vous de mettre un point d'interrogation à côté de cet article? Je ne sais pas, peut-être que j'exagère l'importance de cet aspect, mais

jusqu'ici c'était un fonds fermé et maintenant c'est ouvert.

M. Dean: On veut l'ouvrir le moins possible.

J'étais pour dire cela, M. le Président: Le désir est de le garder le plus fermé possible, mais au moins, quand même, parce qu'on ne peut pas prévoir toutes les raisons de toutes les personnes qui pourraient investir, de laisser une porte ouverte assez bien contrôlée, verrouillée, mais une porte par laquelle il sera possible pour un individu de s'en sortir dans des circonstances exceptionnelles.

Il faut peut-être ajouter, du point de vue juridique, que des restrictions au transfert d'actions dans des compagnies, c'est assez fréquent et des restrictions aussi fortes que celles-ci se rencontrent très souvent.

Une voix: Pas des fonds de 500 000 $. On n'est pas à la Bourse.

M. Dean: Peut-être pas des familles aussi grandes que celle de la FTQ.

Le Président (M. Brouillet): Je crois qu'on commence à revenir sur des choses qui ont été dites plusieurs fois. Je me dois, en tant que président, de demander si on dispose de cet article; le temps serait venu.

M. Paradis: On propose l'amendement qu'on a proposé tantôt: Que l'article 8 se lise comme suit: "Seule une personne physique peut acquérir ou détenir une action de catégorie A. Le porteur d'une action de catégorie A peut l'aliéner en tout temps. L'alinéation ne prend effet que 30 jours après la transaction. Pendant cette période, celui qui offre d'aliéner peut renoncer à la transaction."

M. Dean: M. le Président, est-ce qu'on pourrait suspendre cette question? Je voudrais regarder certains points.

M. Paradis: D'accord.

Le Président (M. Brouillet): Nous suspendons l'amendement à l'article 8, ainsi que l'article lui-même. Article 9?

M. Dean: L'article 9 se lit comme suit: "Malgré l'article 8, une action de catégorie A peut être transférée à un fiduciaire ou acquise par celui-ci dans le cadre d'un régime enregistré d'épargne-retraite dont l'actionnaire est bénéficiaire. "Le fiduciaire est toutefois assujetti à l'article 8 à l'égard de tout transfert à une personne autre que l'actionnaire de qui il a acquis une action de catégorie A."

Le Président (M. Brouillet): II y a un amendement qui est proposé à l'article 9. Je vous lis l'amendement: L'article 9 est modifié par l'insertion à la fin du premier alinéa de ce qui suit: "Ce dernier est réputé conserver cependant le droit de vote afférent à l'action ainsi transférée."

M. Dean: C'est pour simplifier le processus de procuration qui, autrement, devrait être institué. Lorsque l'action est remise à un bénéficiaire, cela constitue un transfert juridiquement. Le fiduciaire devient donc titulaire du droit de vote et la pratique courante démontre que, dans ces cas, le fiduciaire donne procuration au bénéficiaire. Cette procuration doit autoriser une autre procuration. Alors, c'est pour simplifier le processus. Comme on avait la chance de mettre les statuts dans la loi, c'est préférable de simplifier les choses.

Le Président (M. Brouillet): L'amendement est-il adopté?

M. Paradis: Cela va.

Le Président (M. Brouillet): L'amendement est adopté. L'article 9, tel qu'amendé, est-il adopté?

M. Paradis: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): L'article 9, tel qu'amendé, est adopté sur division. L'article 10?

Une voix: Je pense qu'ils avaient des amendements et nous en aurions aussi. Ce serait mieux de le mettre sur la glace.

M. Dean: Si je comprends bien, l'Opposition aurait des amendements à l'article 10 et nous avons un amendement. Est-ce qu'il y aurait lieu de suspendre cet article?

Le Président (M. Brouillet): Est-ce que l'Opposition a effectivement un amendement à proposer?

M. Paradis: M. le Président, comme je l'ai dit au début de nos travaux, à cause du carcan dans lequel on travaille présentement, on les discute un à un. On fait notre travail le plus consciencieusement possible. Je ne dis pas qu'on en a, je ne dis pas qu'on n'en a pas.

Le Président (M. Brouillet): Vous m'aviez dit au début qu'on ne suspendrait que les articles sur lesquels vous aviez des amendements à proposer et qu'on y reviendrait à la fin.

M. Paradis: C'est cela.

Le Président (M. Brouillet): On le regardera et vous verrez en l'analysant si vous en avez un à proposer.

Une voix: J'en ai un autre ici.

M. Scowen: Les articles 8 et 10 vont jusqu'au bout de la nature même du fonds. C'est en quelque sorte la définition de ce projet d'épargne de risque, comme on l'appelle maintenant. J'aurais un paquet de questions à poser là-dessus, mais qui relèvent de la nature générale du fonds.

M. Dean: On va commencer par lire l'article.

L'article 1 se lit comme suit: "Une action de catégorie A n'est rachetable par le fonds que dans les cas suivants: 1° à la demande de la personne qui l'a acquise du fonds ou, dans le cas de l'article 9, d'un fiduciaire qu'elle a désigné, si, après avoir atteint l'âge de 60 ans, elle s'est prévalue d'un droit à la préretraite ou à la retraite; 2° à la demande d'une personne qui est porteur de l'action sans l'avoir acquise du fonds, si la personne qui l'a acquise du fonds a atteint l'âge de 60 ou, en cas de décès, aurait atteint cet âge si elle avait vécu; 3° à la demande d'une personne à qui une telle action a été dévolue par succession; 4° à la demande d'une personne qui l'a acquise du fonds si elle lui en fait la demande par écrit dans les 60 jours de la date de sa souscription ou, dans le cas prévu par l'article 31, dans les 60 jours de la première retenue sur son salaire."

Nous aurons un amendement sauf que c'est écrit à la main. (23 h 15)

Le Président (M. Brouillet): Alors, il y a un amendement proposé à l'article 10. Il serait peut-être bon de le voir immédiatement.

M. Dean: L'article 10 est modifié a) par le remplacement du paragraphe 1 par le suivant: "1 À la demande de la personne qui l'a acquise du fonds si, après avoir atteint l'âge de 60 ans, elle s'est prévalue d'un droit à la préretraite ou à la retraite ou si elle a atteint l'âge de 65 ans; b) par le remplacement, dans la troisième ligne du paragraphe 2 , du chiffre "60" par le chiffre "65"; c) par l'addition de l'alinéa suivant: Dans le cas prévu par l'article 9, la demande visée dans le paragraphe 1 du premier alinéa peut être faite par le fiduciaire."

Le Président (M. Brouillet): J'aimerais avoir cet amendement écrit.

M. Dean: M. le Président, est-ce qu'on pourrait profiter de la session d'écriture pour s'absenter pour quelques minutes?

Le Président (M. Brouillet): Nous suspendons pour deux ou trois minutes.

(Suspension de la séance à 23 h 17)

(Reprise de la séance à 23 h 28)

Le Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous plaît!

Nous revenons à l'amendement à l'article 10. Vous l'avez entre les mains, on vous a remis le texte de l'amendement. Je vais, si vous me le permettez, le relire, si vous voulez bien suivre. "L'article 10 est modifié: a) par le remplacement du paragraphe 1 par le suivant: "À la demande de la personne qui l'a acquise du fonds si, après avoir atteint l'âge de 60 ans, elle s'est prévalue d'un droit à la préretraite ou à la retraite ou si elle atteint l'âge de 65 ans".

Je vais continuer et l'on reviendra pour adopter chacun de points de l'amendement, b) par le remplacement, dans la troisième ligne du paragraphe 2, du chiffre "60" par le chiffre "65". c) par l'addition de l'alinéa suivant: "Dans le cas prévu par l'article 9, la demande visée dans le paragraphe 1 du premier alinéa peut être faite par le fiduciaire".

Nous allons revenir au premier amendement. Est-ce que le premier amendement est adopté?

M. Paradis: Seulement par curiosité, on a changé l'âge non seulement dans le premier, mais aussi dans le deuxième alinéa, soit: "60" par "65". Est-ce que des données statistiques de quelque nature indiqueraient que c'est préférable d'agir ainsi?

M. Dean: Non, c'était plutôt pour indiquer que, pour une personne qui n'a pas droit à la préretraite ou à la retraite, par exemple un travailleur autonome qui déciderait d'investir dans le fonds, son droit de rachat s'exerce à l'âge de 65 ans. Cela signifie aussi une certaine concordance avec les nouvelles stipulations du Régime de rentes du Québec par-dessus le marché comme avantages sociaux.

Le Président (M. Brouillet): Cette partie de l'amendement est-elle adoptée?

M. Paradis: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Passons au b) de l'amendement: "le remplacement, dans la troisième ligne du paragraphe 2, du chiffre "60" par le chiffre "65". Cela va de soi. Est-ce adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Passons au c) de l'amendement, l'addition de l'alinéa suivant que je vous ai lu plus tôt. Est-ce adopté?

M. Paradis: b) est adopté et c) l'est aussi.

Le Président (M. Brouillet): Adopté.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Sur division, dit le député d'Ungava, pour exprimer sa dissidence.

Le Président (M. Brouillet): Nous revenons donc à l'article 10. Le premier alinéa est adopté tel qu'amendé, étant donné qu'on vient d'adopter l'amendement et que l'amendement consiste à remplacer complètement le paragraphe. Alors, le paragraphe est adopté tel qu'amendé.

M. Scowen: Oui. Ah bon! Une voix: Tel que remplacé.

Le Président (M. Brouillet): Non, non. On appelle cela "tel qu'amendé". Ce sont les formules consacrées. Adopté tel qu'amendé. Est-ce que le deuxième est adopté tel qu'amendé?

M. Paradis: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Adopté tel qu'amendé, sur division. Le troisième est-il adopté?

M. Paradis: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Le quatrième?

M. Scowen: Là-dessus, me permettez-vous de semer un peu de confusion pour quelques minutes?

Le Président (M. Brouillet): Pour quelques minutes, oui.

M. Scowen: Dans le cas de l'article 8 que nous avons suspendu, vous avez dit que vous vouliez limiter le transfert d'actions à d'autres personnes à des cas bien spécifiques, bien définis, par exemple, quand quelqu'un quitte la province ou quand quelqu'un a vraiment un problème financier très aigu. Vous voulez aussi à tout prix éviter un marché secondaire. Il me semble qu'il serait plus logique, si j'étais d'accord avec la logique de base, de biffer complètement l'article 8 et de donner le droit au fonds, au paragraphe 4, de racheter à la valeur inscrite aux livres les actions dans les cas qui sont prévus à l'article 8. Comme cela, vous évitez complètement les problèmes qui peuvent survenir avec ce marché secondaire, avec ces personnes qui vont devenir des actionnaires, mais à un prix moins élevé que le prix inscrit aux livres. Vous donnez le droit aux personnes qui sont visées par les critères bien définis de venir faire une demande de rachat au fonds. Ainsi, le problème de l'article 8 est complètement réglé parce que cela n'existe plus. Vous avez des cas très précis où vous avez le droit de racheter.

M. Dean: M. le Président, je souligne, d'abord, que le quatrième alinéa réfère à des articles qui viennent plus loin dans le projet de loi et qui traitent de principes fondamentaux du fonds, soit le droit de rachat, le droit de reconsidération d'une décision d'investir qui doit être exercé dans les 60 jours et finalement, le droit de retrait en tout temps ou d'arrêter de contribuer en tout temps au fonds de solidarité. Le paragraphe 4 reflète ce principe qui est englobé à la section IV du projet de loi. Je pense qu'il ne faudrait pas mêler les choses. Qu'on règle d'abord l'article 8 sur ses mérites.

M. Scowen: Alors, c'est soit un amendement au paragraphe 4 ou un paragraphe 5.

M. Dean: Je pense même que les raisons sont complètement différentes. La problématique de base est complètement différente d'un cas à l'autre.

M. Scowen: De toute façon, ma suggestion pourrait être incorporée au paragraphe 4 ou ajoutée à un autre paragraphe. D'après moi, c'est une solution qui est plus près de la logique de votre raisonnement. Je ne dis pas que je suis d'accord avec votre raisonnement, mais, si vous voulez être logique avec vous-même, c'est une solution qui ne me semble pas mauvaise.

Le Président (M. Brouillet): Le paragraphe 4, tel qu'il est, est-il adopté?

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Un instant! Je comprends qu'on limite le droit de rachat aux actions acquises depuis 60 jours, les 60 derniers jours du moment où on se fait une idée qu'on veut demander le rachat. Pourquoi 60 jours? Pourquoi pas 30, 90 ou quoi que ce soit?

M. Dean: Par les dispositions de la Commission des valeurs mobilières, les personnes qui veulent acheter une valeur mobilière ont jusqu'à 60 jours après l'achat pour demander une annulation possible du rachat. Il y a des dispositions qui peuvent s'apparenter à cela et il y a une période de

réflexion imposée de 60 jours. On dit: II y aura effectivement 60 jours pour la personne qui décide volontairement d'acheter une action et qui peut le faire au moment où elle aura reçu le document explicatif simplifié, le prospectus simplifié. La personne décide elle-même d'acheter ses actions, de contribuer et elle a une période de réflexion de 60 jours. On lui donne une période de 60 jours de réflexion individuelle et on la rembourse.

M. Scowen: Quel est le sens du mot "souscription"? Est-ce la première souscription ou n'importe quelle souscription?

M. Dean: La première souscription.

M. Scowen: On ne le dit pas. Ce n'est pas explicite. Une souscription, c'est quoi?

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):

L'action est souscrite.

M. Scowen: Quel est le sens du mot? M. Dean: C'est quand tu t'inscris.

M. Scowen: Puis-je faire une souscription mensuelle, par exemple?

M. Dean: Non, c'est ta décision d'embarquer dans le fonds, je pense bien. Non?

M. Scowen: C'est là le sens du mot?

M. Dean: II faut aller à l'article 24 sur les modalités de souscription. C'est toute la section IV, autrement dit. À l'article 24, ce sont les souscriptions individuelles. Les souscriptions individuelles, ce sera dès qu'il souscrit ou qu'il commence à souscrire. La personne pourra commencer à souscrire en 1983, si elle le veut. Elle arrête. Après 60 jours, on la rembourse. Elle veut se faire rembourser, on la rembourse. Si elle recommence en 1984, il s'agira d'une souscription individuelle encore.

M. Scowen: Une souscription, c'est quelque chose que vous faites annuellement.

M. Dean: Qui commence. M. Scowen: Annuellement?

M. Dean: Une adhésion. C'est au moment où elle adhère. Elle demande d'être remboursée en 1983, elle disparaît. Elle n'est plus actionnaire. Elle disparaît des livres. Elle peut recommencer.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je pense que l'article 33, quand on va y arriver, va démontrer quelque chose de différent de ce qu'on entend. Il m'apparaît - on verra -que l'article 33 prévoit une souscription chaque fois que, le quinzième jour du mois suivant la retenue sur le salaire, l'employeur verse au fonds les montants ainsi retenus. À partir de ce moment-là, il y a souscription d'actions. "Il est réputé avoir souscrit à autant d'actions de catégorie A du fonds que les montants retenus sur son salaire permettent d'en acquérir." Il y a une souscription d'actions chaque fois qu'il y a retenue sur le salaire. Ce n'est pas annuel ou quoi que ce soit. Il m'apparaît que c'est comme cela que l'article 33 va se lire. On va les regarder ensemble ou bien on va les suspendre tous les deux pour en reparler plus tard.

On est en train de se demander, au paragraphe 4 de l'article 10, à l'égard de quel nombre d'actions et sur quelles actions un droit de rachat existe sur demande de la part du travailleur. On nous dit que c'est à l'égard de la première souscription. Un avis de 60 jours, c'est peut-être vrai pour les dix derniers mots: "dans les 60 jours de la première retenue sur son salaire." Il n'y a pas de problème pour cela. Mais, par la suite, quand cela fait trois ans que le type ou la "typesse" - est-ce que cela se dit? - la personne, travailleur ou travailleuse, souscrit de cette façon par retenue sur son salaire à des actions, je crois comprendre, d'après la première partie du paragraphe 4 de l'article 10, que ce sont des actions pour lesquelles il a versé, par voie de retenue sur son salaire, certaines sommes qui font l'objet de sa demande. Celles qu'il a souscrites depuis 60 jours, les dernières qu'il a acquises, ce sont celles-là qu'il peut racheter sur demande. C'est comme cela que je le comprends et il me semble que c'est comme cela que cela se lit, surtout si on le regarde avec l'article 33.

M. Marois: Si les membres de la commission me permettent d'intervenir, il faut faire attention. Je comprends que le député de Notre-Dame-de-Grâce nous a dit, tantôt, qu'il voulait apporter un peu de confusion. Ce n'est sûrement pas l'intention du député de Vaudreuil-Soulanges. Je ne pense pas qu'on puisse faire un lien comme celui qui vient d'être fait, au sens strictement juridique. L'article 33 est là, c'est une disposition qui vise à faire un lien juridique entre la retenue sur le salaire par l'employeur et la souscription d'actions du fonds. Il faut qu'il y ait un article comme celui-là sur le plan juridique, c'est extrêmement important. Mais sauter sur le joint, comme le député de Vaudreuil-Soulanges vient de le faire, pour tenter de cerner une définition de la notion de souscription, cela m'apparaît donner une portée à l'article 33 qui ne lui est pas inhérente.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, mais qui est inhérente, par ailleurs, aux notions qu'on trouve dans la Loi sur les compagnies ou dans la Loi sur les valeurs mobilières. On ne souscrit pas juste une fois. Des actions sont souscrites, émises et payées à chaque moment où elles sont souscrites, émises et payées. Dans ce sens, ce sont toujours les 60 derniers jours à l'égard desquels des actions ont été souscrites, émises et payées.

M. Dean: Ce n'est pas clair, on peut peut-être le clarifier. Peut-être qu'on oublie qu'il y a deux façons de souscrire à des actions. À titre d'individus ou de particuliers, vous et moi, on peut acheter des actions. La première partie de la phrase vise ce cas. Si je souscris à des actions, j'ai 60 jours - un peu comme si j'achète un aspirateur électrique, j'ai un certain délai pour changer d'idée - pour obtenir le remboursement. Dans tous les cas de retenue sur le salaire, les 60 jours commencent à courir à la date de la première retenue sur le salaire. C'est cela que ça veut dire.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je peux me permettre de vous demander où on retrouve la première?

M. Dean: La première est implicite, puisque le fonds n'est pas fermé et que la seule façon d'acquérir des actions n'est pas par voie de retenue sur le salaire.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): La section IV est intitulée Acquisition d'actions de catégorie A par retenue sur le salaire.

M. Dean: Oui, mais ce n'est pas exclusif.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Ce n'est pas exclusif, pour autant, que vous me dites.

M. Dean: Si on veut donner la période de réflexion à tout le monde et non seulement aux travailleurs qui souscrivent par voie de retenue à la source, il faut prévoir les deux cas, ici dans l'article 10.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Ou dans le cas prévu à l'article 31. (23 h 45)

M. Paradis: J'ai une question qui s'applique au paragraphe 4, et aux autres alinéas. "Une action de catégorie A n'est rachetable par le fonds que dans les cas suivants." Je vous ai dit que mes notions étaient très rouillées, mais je me rappelle un certain débat sur la différence entre une action achetable et une action rachetable. Sans spécifier, le sens de la question est le suivant: la demande peut être exercée par les différentes personnes qui sont nommées aux alinéas. Est-ce que le fonds a l'obligation de racheter l'action ou si le fonds peut dire: Non, je ne la rachète pas?

M. Dean: C'est l'article 11 qui prévoit cela.

M. Paradis: D'accord, cela va.

Le Président (M. Brouillet): Le paragraphe 4 est-il adopté?

M. Paradis: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division. L'article 10, tel que...

M. Dean: Là, il y aurait un amendement.

Le Président (M. Brouillet): Excusez, il y a un amendement.

M. Scowen: Vous n'aimez pas mon idée d'un cinquième paragraphe? Vous voulez vraiment avoir ce marché secondaire?

M. Dean: Non, M. le Président.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Non, M. Frenette a dit qu'il ne voulait rien savoir de cela un peu plus tôt.

M. Dean: On ne le veut pas. Mais je pense qu'il faut dire que, uniquement sur le plan de l'implication juridique de votre suggestion d'un cinquième paragraphe, pour traduire cette idée, il faudrait prévoir les cas où c'est rachetable dans la loi.

M. Scowen: Je pense que vous devez le prévoir dans le cas de l'article 8 aussi.

M. Dean: C'est l'un ou l'autre. Ou on laisse la discrétion au conseil d'administration ou on prévoit les cas dans la loi. Votre suggestion conduirait à prévoir les cas dans la loi. En tout cas, cela me paraîtrait présenter certains désavantages de ne prévoir que certains cas, on risquerait d'en oublier.

M. Scowen: Excusez-moi, mais pour que ce soit très clair, dans l'article 8, on dit "avec l'autorisation du conseil d'administration".

M. Dean: Oui, qui définira les conditions exceptionnelles que vous voudriez qu'on introduise à l'article 10.

M. Scowen: Oui, sur la base des conditions additionnelles qui seraient déterminées par le conseil d'administration. En effet, vous transférez les définitions de

l'article 8 à l'article 10.

M. Dean: Si je peux me permettre, si je dis qu'il faudrait prévoir les cas dans la loi, c'est pour une autre raison. Ici, à l'article 10, il s'agit de rachat par les compagnies. Du point de vue du ministère des Finances, la possibilité de rachat de l'action par le fonds, au gré du conseil d'administration, signifie qu'il n'y a pas de contrôle quant à la pratique de l'acquisition de l'action par la compagnie, de sorte qu'on pourrait, en étant méchant, faire une mauvaise hypothèse selon laquelle le fonds pourrait faire bénéficier ses actionnaires de crédits d'impôt de façon systématique en faisant des achats et des ventes. Il faut bien distinguer l'achat par le fonds de la transférabilité des actions.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je pense que c'est bien inutile d'essayer de se prémunir contre cela, étant donné que ce sont les gens de la FTQ qui vont contrôler le conseil d'administration.

M. Dean: Oui, c'est sûr, mais en faisant l'hypothèse d'une grande méchanceté.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Mais c'est pour des considérations fiscales.

M. Dean: C'est cela.

Le Président (M. Brouillet): L'article 10 est adopté, tel qu'amendé, sur division.

M. Paradis: Comme vous l'avez dit.

Le Président (M. Brouillet): L'article 11?

M. Dean: L'article 11 se lit comme suit: "Sous réserve du deuxième alinéa de l'article 123.54 de la Loi sur les compagnies, le fonds est tenu de racheter toute action de catégorie A lorsque la demande lui en est faite par une personne suivant l'article 10. "Cette obligation est exécutée deux fois l'an aux dates déterminées par le conseil d'administration qui fixe le prix de rachat des actions sur la base de la valeur du fonds telle qu'établie par des experts selon les principes comptables généralement reconnus."

Le Président (M. Brouillet): Adopté?

M. Paradis: Un petit instantl Je suis en train de lire les commentaires.

Le Président (M. Brouillet): Ah! Très bien, M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Ils sont nombreux. Une voix: Avec raison.

M. Paradis: Dans le premier paragraphe des commentaires, on dit ce qui suit: "Cette disposition a pour objet d'obliger le fonds à racheter des actions de catégorie A lorsqu'une personne visée à l'article 10 le demande, mais à la condition que le test de solvabilité prévu à la Loi sur les compagnies soit positif."

M. Marois: Le député de Brome-Missisquoi connaît par coeur l'article 123.54 de la Loi sur les compagnies.

M. Paradis: Vous êtes arrivé en retard. J'ai prévenu les amis d'en face dès le début de nos travaux que mes notions de droit corporatif étaient plus que rouillées. Chaque fois qu'on a cité un article de la Loi sur les compagnies, j'ai demandé qu'on dérouille ces notions.

M. Scowen: J'attends mon leader.

Le Président (M. Brouillet): Est-ce que vous êtes prêt, vous, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, en attendant le leader?

M. Scowen: Non, non. J'ai un droit de parole de 20 minutes là-dessus, mais j'attends que mon leader dise quelque chose.

M. Paradis: Quant à l'expertise pour établir le prix, on nous dit qu'elle est faite deux fois l'an et qu'elle permettra de fixer le prix de vente des actions de six mois en six mois. À partir de quels critères va-t-on déterminer le prix de l'action?

M. Dean: II s'agit, évidemment, des critères qui sont déterminés par les méthodes employées par les experts-comptables et selon les principes comptables généralement reconnus. Cela se fait généralement selon la méthode qu'on appelle la "fair market value" ou la juste valeur marchande. C'est une méthode qui est couramment utilisée par toutes les firmes comptables dans les sociétés de "venture capital", de capital de risque de ce type et qui permet d'évaluer de six mois en six mois ou aux dates déterminées par le conseil d'administration -ici, ce serait de six mois en six mois - en procédant à une analyse cas par cas, la juste valeur de chacun des investissements. En additionnant la juste valeur de chacun des investissements effectués, donc, on détermine la juste valeur marchande globale du portefeuille d'investissements.

M. Paradis: Vous dites, finalement, que tous les six mois des experts effectueront, selon des principes comptables généralement reconnus, une analyse de la situation de chacune des entreprises, que ce soit des grandes, des PME ou des TTE, dans le but d'établir la valeur d'une action au fonds.

M. Dean: C'est exactement la façon de procéder. Il y a généralement un premier travail qui est fait à l'interne par la corporation, par les spécialistes en analyse d'investissements et c'est ensuite vérifié par les comptables agréés. Il ne manque pas d'exemples de sociétés de capital de risque où cette procédure est courante et révisée tous les six mois. Je connais plusieurs sociétés dont le portefeuille dépasse facilement 50 à 100 investissements et le travail est fait régulièrement par chacune des firmes pour tenir les actionnaires régulièrement informés de la valeur du portefeuille.

M. Paradis: Ma prochaine question s'adresse probablement - je dis probablement - aux juristes. On dit:" La valeur du fonds telle qu'établie par des experts selon les principes comptables généralement reconnus." Je saisis de la réponse que ce sont des comptables qui vont faire cela. La rédaction stipule-t-elle clairement que cette valeur va être établie par des comptables? C'est ma première question.

Ma deuxième question est la suivante: S'agit-il, suivant la rédaction, de comptables à l'interne ou à l'externe?

M. Dean: Pour répondre à la première question, la rédaction laisse une certaine marge de manoeuvre au conseil d'administration.

M. Paradis: Vous voulez dire que cela pourrait être des gens qui ne sont pas des comptables?

M. Dean: Non, je m'excuse. Je répondais à la première question où vous demandiez si la rédaction est telle que ce sont des experts qui vont fixer la valeur. Ce que la disposition dit, c'est que le conseil d'administration fixe le prix, mais sur la base de la valeur du fonds telle qu'établie par les experts. Le prix est fixé par le conseil. Si le conseil fixait une valeur différente de celle à laquelle arrivent les experts, il y a une espèce de marge d'interprétation qui pourrait permettre de dire: Ce' n'est pas sur la base de la valeur telle qu'établie par des experts ou c'est sur la base de cette valeur. Autrement dit, s'il y a un jeu très mince entre les deux chiffres, je pense que, juridiquement, cela pourrait être considéré comme valide, mais c'est le conseil d'administration qui fixe le prix de rachat, comme dans toutes les compagnies. Ce ne sont pas les tiers qui vont le fixer, n'est-ce pas?

M. Paradis: Non.

M. Dean: Bon! C'est la réponse à la première question.

M. Paradis: Cela va.

M. Dean: Quant à la deuxième question, à savoir si ce sont des gens à l'interne ou à l'externe...

M. Paradis: Est-ce que ce sont des comptables? Je maintiens ma première question.

M. Dean: ...ce sont "des experts selon les principes comptables généralement reconnus." Ce ne sont pas nécessairement des comptables agréés, tel que rédigé.

M. Paradis: Ce ne sont pas nécessairement des comptables?

M. Dean: Non, tel que c'est rédigé là.

M. Paradis: Si ce ne sont pas nécessairement des comptables...

M. Dean: Mais ils doivent respecter les principes comptables généralement reconnus.

M. Paradis: ...est-ce que cela peut être fait par des experts à l'interne, suivant la rédaction qu'on a ici?

M. Dean: Je dois vous dire oui, tel que rédigé.

M. Paradis: Étant donné l'importance de bien déterminer, avec toutes les difficultés qu'on peut présumer, la valeur la plus réelle possible du fonds - je pose ma question au député de Prévost - n'y aurait-il pas lieu de prévoir que les experts devraient être des comptables, qu'on devrait imposer cette obligation, et également des comptables à l'externe pour assurer les travailleurs et les travailleuses qui vont investir de la plus grande fiabilité possible au niveau des renseignements qu'ils vont obtenir? Il est certain que cela peut être tentant, dans la pire des situations - pour reprendre les propos du juriste qui nous parlait tantôt - à une époque donnée, à cause d'un "timing" important au niveau de congrès ou je ne sais pas quoi, si tout est fait à l'interne, de projeter une image très optimiste du fonds. Si c'était fait par des comptables à l'externe, on a des gens qui joueraient leur réputation de comptables à l'externe s'ils acceptaient de la jouer, naturellement, dans un tel dossier.

M. Scowen: Cela veut dire un prix établi par des experts, que ce soit de l'intérieur ou de l'extérieur, et vérifié par des comptables agréés. C'est ce qu'il faut faire. Cela peut être établi par des experts à l'intérieur de la boîte, mais vérifié et approuvé par des comptables agréés de l'extérieur. De cette façon, ce sera propre,

propre, propre.

M. Paradis: M. le Président, avant que l'horloge n'accroche minuit, sur cet article et sur d'autres, peut-on s'informer immédiatement de la possibilité d'avoir la présence, demain, je présume, sur un ordre de la Chambre, du ministre des Institutions financières ou celui des Finances?

M. Dean: Pour autant que son horaire le permette, je pense que oui.

M. Paradis: J'adresse la demande tout de suite pour qu'on effectue les vérifications qui s'imposent.

M. Dean: Oui, d'accord. Pourrais-je, à mon tour, M. le Président, adresser une demande à mon collègue d'en face? Demain matin, à l'heure du début de nos travaux ou même avant, s'il a d'autres amendements, pourrait-il les amener en bloc, si c'est techniquement possible.

M. Paradis: Ce à quoi je m'engage, c'est à trouver la personne affectée à la préparation des amendements et à le lui demander, si la commission sur la CRO est terminée et si elle n'a point de surcroît de travail. C'est la situation dans laquelle on est placé. Je vais le faire immédiatement.

Le Président (M. Brouillet): Nous allons ajourner nos travaux sine die.

M. Dean: L'article 11 est-il adopté?

Le Président (M. Brouillet): Non. L'article 11, je ne l'ai pas encore soumis parce qu'il y avait encore des questions en suspens. Alors, nous ajournons nos travaux sine die.

(Fin de la séance à 0 h 01)

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