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'Quinze heures dix minutes)
Le Président (M. Laplante): À l'ordre! À
l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît'. Messieurs,
mesdames, si vous voulez bien prendre vos places.
La commission élue permanente du travail, de la main-d'oeuvre et
de la sécurité du revenu se réunit afin d'entendre des
organismes en regard des raisons motivant l'impossibilité de s'entendre
relativement aux modifications à apporter au décret de la
construction adopté par le décret 3938-80 du 17 décembre
1980. Les membres de cette commission sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie), M.
Brassard (Lac-Saint-Jean) remplacé par M. Ouellette (Beauce-Nord), M.
Dauphin (Marquette), M. Dean (Prévost), Mme Dougherty (Jacques-Cartier),
Mme Harel (Maisonneuve), M. Lavigne (Beauharnois) remplacé par M.
Marquis (Matapédia), M. Marois (Marie-Victorin), M. Perron (Duplessis)
remplacé par M. Leduc (Fabre), M. Rivest (Jean-Talon) et M.
Vallières (Richmond). Avez-vous des changements, M. le
député de Jean-Talon, pour cette commission?
M. Rivest: Non, nous ne serons que deux. Oh! II y a M.
Bélanger.
M. Bélanger: II y a moi qui remplace M.
Vallières.
Le Président (M. Laplante): II me semblait bien, parce que
je ne retrouvais pas votre nom.
M. Bélanger: Oui, mon cher monsieur, c'est important.
Le Président (M. Laplante): M. Vallières (Richmond)
est remplacé par M. Bélanger (Mégantic-Compton).
M. Bélanger: C'est cela.
Le Président (M. Laplante): Les intervenants sont: M.
Chevrette (Joliette), M. Gauthier (Roberval), M. Hains (Saint-Henri), M.
Johnson (Vaudreuil-Soulanges), M. Leduc (Fabre) remplacé par M. Perron
(Duplessis), M. Mailloux (Charlevoix), M. Paquette (Rosemont), M. Polak
(Sainte-Anne) et M. Rochefort (Gouin). J'aimerais avoir une suggestion pour un
rapporteur, s'il vous plaît. M. Ouellette (Beauce-Nord)?
M. Ouellette: Oui.
Le Président (M. Laplante): Maintenant, les groupes qui se
feront entendre aujourd'hui sont les suivants, que je vous donne par ordre
d'entente: le premier groupe sera le Syndicat des travailleurs de la
construction du Québec (CSD); le deuxième groupe sera la
Fédération nationale des syndicats du bâtiment et du bois
(CSN); le troisième groupe, le Conseil provincial du Québec des
métiers de la construction (international); le quatrième groupe,
la Fédération des travailleurs du Québec
(FTQ-Construction); le cinquième groupe, l'Association des entrepreneurs
en construction du Québec. Seulement ces cinq groupes
présenteront des mémoires aujourd'hui.
Il y a une entente autour de la table entre les partis. Vu
qu'actuellement nous n'avons reçu que deux mémoires
écrits, il y aura une période d'environ dix à quinze
minutes pendant laquelle vous pourrez exprimer ou résumer votre
mémoire, après quoi il y aura une période de quinze
à vingt minutes de questions. Je voudrais que ce soit entendu pour tout
le monde, à cause de la complexité des interventions et du
travail qu'il y aura à faire après la présentation.
M. Lavallée (Jean): Jean Lavallée, de la
FTQ-Construction. M. le Président, je trouve qu'étant
donné que nous représentons 46%, si on donne à tous le
même temps, on en a peut-être un peu plus que pour quarante minutes
dans notre temps.
Le Président (M. Laplante): Monsieur, je veux vous
arrêter. Ce n'est pas habituel, ce que vous faites là. Il reste
que les membres de la commission vont juger eux-mêmes.
M. Lavallée: Vous nous dites...
Le Président (M. Laplante): On n'a rien coulé dans
le ciment.
M. le ministre, avez-vous des...
Remarques préliminaires M. Pierre
Marais
M. Marois: Oui, M. le Président, j'ai des remarques.
Très rapidement, je voudrais saluer à nouveau mes
collègues membres de cette commission. C'est devenu une habitude pour
cette commission, qui abat beaucoup de
travail ces jours-ci. Je voudrais également saluer tous les
porte-parole des divers organismes qui sont réunis aujourd'hui, qui ont
bien voulu se déplacer un lundi, mais je pense bien que tout le monde
comprend qu'il fallait le faire absolument aujourd'hui, puisque chacun sait que
le décret présentement en vigueur dans la construction prend fin
à minuit ce soir. Je me permets de comprendre que ce n'est certes pas la
volonté de quelque organisme ou groupe ayant des intérêts
immédiats dans cette affaire, ni certainement l'intention de quelque
membre de cette commission de faire en sorte qu'on puisse se retrouver devant
un vide juridique à minuit ce soir. C'est pourquoi, au meilleur rythme
possible de nos travaux, c'est bien mon intention - je le dis très
clairement - de pouvoir formuler des recommandations en soirée, avant
minuit, pour adoption, à un Conseil des ministres spécial qui
statuera définitivement, comme le prévoit la loi. (15 h 15)
Nous sommes donc réunis, je le disais, pour entendre les parties,
conformément au paragraphe 4 de l'article 51 de la Loi sur les relations
du travail dans l'industrie de la construction, qui prévoit que "le
gouvernement peut aussi, sur la recommandation du ministre, prolonger, abroger
ou modifier le décret sans le consentement de l'association d'employeurs
ou des associations de salariés quand il est d'avis que dans
l'intérêt public, cette solution est la seule qui puisse
remédier à la solution existante; il ne peut toutefois modifier
ainsi le décret, sans que ces associations ne soient invitées
à être entendues devant la commission parlementaire du travail, de
la main-d'oeuvre et de l'immigration, quant aux raisons motivant
l'impossibilité de parvenir à une entente relativement aux
modifications à apporter au décret." La loi prévoit
quelles sont les parties syndicales qui sont nommées dans la loi, de
même que l'association d'employeurs qui est spécifiée au
paragraphe c de l'article 1 est l'Association des entrepreneurs en construction
du Québec.
M. le Président, je ne voudrais absolument pas abuser du temps,
puisqu'on est là pour entendre les parties, mais il me paraît
important - puisqu'il se produit quelque chose qui est quand même un peu
inusité à certains égards dans le domaine des relations du
travail et, en particulier, dans le domaine de la construction, ce qui fait que
nous sommes réunis ici aujourd'hui en commission parlementaire - de
rappeler, très rapidement, quelques faits. Il faut se rappeler
qu'à l'issue du vote qui a été tenu en novembre 1981 par
l'Office de la construction du Québec, aucune des associations de
salariés représentatives, conformément à la loi,
n'a réussi à obtenir un degré de plus de 50%.
Compte tenu de ce qui précède, l'Association des
entrepreneurs en construction du Québec, communément
appelée l'AECQ, donnait avis à toutes les associations de
salariés représentatives, et ce dès le 14 janvier 1982, de
sa disponibilité pour les rencontrer et commencer sans délai les
négociations.
Toutes les tentatives de la Fédération des travailleurs du
Québec (construction), la FTQ-Construction, du Conseil provincial du
Québec des métiers de la construction international, le CPQMC
international, de la Confédération des syndicats nationaux
construction, la CSN-Construction et de la CSD pour en arriver à la
signature d'un protocole d'entente entre toutes ou entre certaines de ces
associations représentatives des travailleurs ont
échoué.
Devant l'impossibilité de négocier avec des associations
de salariés représentatives à un degré de plus de
50%, l'AECQ m'avisait par écrit, le 23 mars 1982, de sa décision
de me remettre un projet de conditions de travail applicables à compter
du 1er novembre 1982.
Le 30 mars 1982, l'AECQ m'a présenté une requête
pour que le décret soit prolongé de deux années avec
certaines modifications d'ordre pécuniaire.
Dès le 2 avril, j'ai désigné MM. Bernard Crevier et
Denis Tremblay du service de conciliation du ministère, pour agir dans
ce dossier. Après avoir rencontré toutes les parties
intéressées, MM. Crevier et Tremblay en venaient à la
conclusion qu'il n'y avait, de leur point de vue, à ce moment-là,
aucune possibilité de rapprochement, particulièrement des
associations de salariées représentatives entre elles.
Dès le début d'avril 1982, le 8 en particulier, l'AECQ,
par la voix des journaux, adressait un message aux travailleurs de la
construction, qui reprenait essentiellement le contenu de la requête pour
modifications qui m'avait été soumise le 30 mars 1982.
Le 16 avril 1982, quelques jours plus tard, mon adjoint parlementaire,
M. Robert Dean, député de Prévost, a tenté un
ultime effort de conciliation auprès des associations de salariés
représentatives en vue d'en arriver à ce qu'elles conviennent
entre elles d'un protocole d'entente aux fins de la négociation. Dans
les jours qui ont suivi, la Fédération des travailleurs du
Québec, la FTQ-Construction, et le Conseil provincial du Québec
des métiers de la construction (international), le CPQMC, convenaient
d'un pareil protocole et entamaient directement avec l'AECQ des pourparlers en
vue de prolonger le décret en y apportant un minimum de modifications,
surtout d'ordre pécuniaire. À la demande des
intéressés, le 23 avril, j'ai désigné M. Raymond
Leboeuf à
titre de médiateur spécial dans ce dossier.
En dernière heure, le 30 avril, le dernier jour du décret,
le jour même de l'expiration du décret, les deux associations de
salariés représentatives à un degré de plus de 50%
et l'association d'employeurs en venaient finalement à une entente quant
aux modifications à être apportées au décret pour
les deux prochaines années. C'était, j'allais dire, une
espèce de première, mais c'était une première; une
entente de principe est intervenue entre les parties. Pour permettre la
consultation des instances, les parties m'ont demandé de prolonger
jusqu'au 31 mai 1982 le décret qui devait expirer le 30 avril
précédent, ce qui a été fait.
Lors d'une assemblée générale tenue à
Montréal le 19 mai, les membres de l'Association des entrepreneurs en
construction du Québec, l'AECQ, n'ont pas accepté l'entente de
principe intervenue le 30 avril. Donc, la loi prévoit, dans ce cas, que
les parties sont conviées en commission parlementaire, ce que nous
faisons aujourd'hui, pour entendre les parties nous faire part de leur point de
vue, nous expliquer les raisons qui motivent l'impossibilité de parvenir
à une entente. À la lumière de ces diverses
considérations, notamment, bien sûr, de l'entente de principe
intervenue, j'aurai à formuler des recommandations au Conseil des
ministres, et le gouvernement procédera sans délai pour faire en
sorte qu'il y ait un décret dans la construction.
Voilà, M. le Président - je m'excuse, je n'ai pas voulu
abuser du temps - les quelques remarques préliminaires que je voulais
formuler à ce moment-ci de nos travaux.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Jean-Talon.
M. Jean-Claude Rivest
M. Rivest: M. le Président, en ce qui nous concerne, nous
voulons - nous n'avons guère le choix, pas plus que l'ensemble des
parties en cause - participer à une commission parlementaire qui, de
toute évidence, est in extremis. Le ministre vient de faire état
des efforts que lui-même, son adjoint parlementaire ainsi que le
ministère du Travail ont fait au cours des derniers mois, avec
l'ensemble des parties au dossier des travailleurs de la construction. Sans
doute le ministre et ses collaborateurs ont-ils été de bonne foi
de façon à éviter le genre de situation dans laquelle on
se trouve placé. Je veux simplement lui rappeler que, derrière
cette urgence à laquelle nous devons faire face, il y a le
problème économique de l'ensemble de l'industrie de la
construction. Quant à nous, on est quelque peu étonnés
que, compte tenu des conditions économiques qui prévalent, ce ne
soit que mardi dernier que le gouvernement a semblé commencer à
être sensible, en termes économiques, en termes de
développement économique, au problème de l'industrie, des
travailleurs et des entrepreneurs dans le secteur. M. le Président, je
dois vous dire que nous le regrettons profondément. Nous pensons aussi
que le gouvernement aurait dû, par des mesures, au cours des
dernières années, être beaucoup plus vigilant pour relancer
ce secteur qui est à l'origine des problèmes, je pense bien, que
l'on connaît en ce moment.
Deuxièmement, il y a la loi qui a été
adoptée. À l'époque - je relisais, nous relisions les
déclarations du ministre et du gouvernement - au moment de l'adoption de
cette loi il y avait beaucoup d'optimisme. On pensait qu'on pouvait
éviter les situations qu'on avait vécues dans le passé
mais on a abouti à la même chose. Donc, sur le plan de la loi no
109 aussi, compte tenu de l'expérience que l'on vit, il y aurait
peut-être lieu d'y jeter un second regard pour voir les avenues qui
pourraient être ouvertes de manière à éviter ce
à quoi on a assisté, c'est-à-dire une division très
large de l'ensemble des travailleurs du secteur de l'industrie de la
construction face aux employeurs qui, semble-t-il, connaissent également
leurs problèmes. Alors, nous sommes prêts à regarder de
nouveau, M. le ministre, cette dimension également.
En troisième lieu, les mémoires qui nous sont parvenus et
les représentations que les différentes parties à la table
vont faire soulèvent des questions extrêmement complexes. On
participe à une commission parlementaire à quelques heures d'une
décision qui est, elle aussi, extrêmement complexe, une
décision que le Conseil des ministres devra, de toute évidence,
prendre en soirée. On est un peu sceptique - je le dis en toute
naïveté au ministre - sur l'attention qui sera accordée aux
travaux de cette commission et aux influences que les travaux de cette
commission auront ou pourront effectivement avoir sur la décision que le
Conseil des ministres doit prendre ce soir. Mais, puisqu'on en est là,
M. le Président, compte tenu des délais qui sont
extrêmement impératifs, autant pour les travailleurs que pour les
entrepreneurs en cause et, je pense, pour l'ensemble de la
société québécoise - mon collègue de
Mégantic-Compton est le porte-parole de l'Opposition dans ce dossier -
nous entendons apporter à la commission parlementaire toute notre
collaboration et je pense qu'elle doit s'exprimer en termes de
célérité. Sans plus, M. le Président, ce sont les
quelques remarques que je voulais vous adresser en début de
séance.
Auditions
Syndicat des travailleurs de la construction de la
CSD
Le Président (M. Laplante): Merci. J'appelle maintenant le
Syndicat des travailleurs de la construction du Québec, la CSD, comme
témoin. Si vous voulez prendre les places du centre, s'il vous
plaît! Vous allez être obligés de vous déplacer,
messieurs.
Pour les fins du journal des Débats, je vous demanderais
d'identifier l'organisme que vous représentez ainsi que les personnes
qui vous accompagnent, s'il vous plaît!
M. Gingras (Claude): Claude Gingras, vice-président de la
Centrale des syndicats démocratiques, représentant ici, à
la commission parlementaire, le Syndicat des travailleurs de la construction du
Québec (CSD).
Le Président (M. Laplante): Voulez-vous présenter
le monsieur qui vous accompagne?
M. Gingras: M. Raynald Carey, président du Syndicat des
travailleurs de la construction du Québec (CSD).
Le Président (M. Laplante): Merci. Allez-y, monsieur.
M. Gingras: M. le Président, messieurs les membres de la
commission parlementaire, la CSD tient d'abord à remercier le leader du
gouvernement et la commission parlementaire pour son invitation.
Inutile d'insister sur le fait qu'à la CSD la participation sous
toutes ses formes est une priorité absolue. Notre exposé sera
court mais vise à exposer clairement la position de nos membres face
à l'imbroglio actuel de l'industrie de la construction, ainsi que leurs
aspirations.
La CSD-Construction représente 9000 travailleurs oeuvrant dans
tous les secteurs de l'industrie de la construction. Depuis quelques
années, on a assisté, au Québec, à la
démocratisation de bon nombre de nos pratiques collectives. Avec 10% de
représentation des travailleurs, la CSD-Construction illustre cette
démocratisation dans les secteurs en cause.
La CSD-Construction provient de la volonté des travailleurs de
donner priorité au pluralisme démocratique plutôt qu'au
monopole de représentation. Fidèle à ce mandat clairement
exprimé, la CSD-Construction a participé à toutes les
démarches prévues, et dans les délais prescrits, afin de
représenter ses membres dans la négociation.
La CSD-Construction a participé à toutes les rencontres
convoquées par l'association patronale. Incidemment, la CSD et son
syndicat de la construction déplorent le fait que certaines associations
syndicales n'aient pas accepté le pluralisme démocratique en
tentant plutôt de réactiver la notion dépassée du
monopole syndical et en refusant systématiquement de participer à
la négociation.
Cédant à cet essai de retour en arrière et
renonçant au changement qu'il avait lui-même implanté et
que les travailleurs avaient démocratiquement entériné, le
ministère du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu a favorisé par ses interventions la
monopolisation de la négociation. En effet, à la suite de la
requête présentée au ministère par l'association
patronale, la conciliation, la médiation et même l'intervention de
l'adjoint parlementaire ont redonné aux "alliés naturels" la
plate-forme du monopole.
Conséquemment, la CSD-Construction a été
écartée de la négociation. Le retour en arrière,
encouragé par le ministère, a éliminé la
CSD-Construction du processus de négociation et cela, nous ne nous
limitons pas à le déplorer, nous le dénonçons.
Avec de telles attitudes, comment voulez-vous que nous vendions à
nos membres la bonne foi de l'actuel gouvernement?
La CSD-Construction, écartée du processus de la
négociation, peut maintenant difficilement se prononcer sur tous les
aspects du litige en cause.
Sur l'essentiel, toutefois, la CSD et son syndicat de la construction
considèrent d'abord que la négociation n'est vraiment pas
allée assez loin. Le normatif a été complètement
laissé de côté: sécurité d'emploi, semaine de
travail, périodes de vacances, etc.
Ensuite, la hausse salariale de 10% est basée sur une logique
douteuse, si logique il y a. Selon une étude réalisée par
le Service de recherche de la CSD en mars 1982 - je vous dispense de l'annexe
qui est à notre document, vous pourrez la consulter à loisir,
elle témoigne exactement de cette prise de position de la CSD - les
travailleurs ont perdu dans les trois dernières années 8,8% au
seul titre du pouvoir d'achat. La hausse salariale est donc non pas de 10%,
mais de 1,2%. C'est complètement ridicule. (15 h 30)
À l'heure où on se parle, avec les taux d'inflation qu'on
connaît, ce 1,2% est déjà périmé et les
travailleurs ont déjà commencé à s'appauvrir. Dans
ce secteur comme dans bien d'autres, ce ne sont pas les salaires versés
depuis trois ans aux travailleurs qui ont provoqué la crise et le
marasme. Progressivement et parallèlement, depuis trois ans, les
travailleurs s'appauvrissaient et l'emploi régressait. Ceux qui
prétendent que les 10% sont suicidaires ont complètement perdu le
sens des réalités.
Le respect du pluralisme démocratique aurait pu éviter un
tel appauvrissement des travailleurs, mais il est maintenant trop tard.
À la suite de la prolongation d'un mois accordée à
la dernière minute par le ministère, il ne reste maintenant plus
de délai. Pourtant, la CSD-Construction avait proposé un
délai de trois mois, accompagné d'une hausse salariale
immédiate, pour faire une vraie négociation, mais la proposition
n'a pas été retenue. À la fin d'avril, on a
préféré prolonger le décret d'un mois seulement. La
CSD et son syndicat de la construction considèrent donc que le
ministère n'a plus le choix. L'entente intervenue doit être
respectée, mais, à l'avenir, il ne faudrait pas
répéter ce qu'on a connu.
On a appris par les médias que le litige venait du fait que les
entrepreneurs spécialisés dans le domiciliaire
considéraient que le pourcentage de 10% était trop
élevé. Raison de plus, selon la CSD, pour que l'entente soit
respectée. Le débat de l'uniformisation des salaires entre les
différents secteurs de l'industrie de la construction a
été réglé il y a plus de dix ans et c'est inutile
de revenir en arrière. En 1969, en effet, on a entrepris
l'uniformisation des salaires du domiciliaire, du non-domiciliaire, du
provincial, du régional, etc., et on sait au prix de quels débats
toute cette négociation s'est faite. Pour la CSD et son syndicat de la
construction, cette question est close. Jamais les travailleurs n'accepteront
de revenir sur le principe du salaire égal à travail
égal.
Ce qui importe, maintenant, c'est de remettre le monde à
l'ouvrage dans un climat de confiance et de paix industrielle. La CSD
considère que c'est cela, la priorité collective du Québec
et, pour relancer l'économie, il faut que la construction
redémarre. C'est pourquoi la CSD accepte, comme compromis, l'application
de l'entente intervenue. Conformément aux pouvoirs qu'il possède,
le ministre doit immédiatement décréter l'application de
cette entente, entente à laquelle il a, incidemment, participé.
L'industrie de la construction constitue actuellement dans notre
société un des rares points de convergence des problèmes
économiques et des préoccupations sociales. Il faut relancer
l'économie et régler la crise du logement. Mettons-nous à
l'ouvrage!
Le Président (M. Laplante): Merci, messieurs. M. le
ministre.
M. Marois: M. le Président, je voudrais remercier les
porte-parole de la Centrale des syndicats démocratiques et de son
syndicat de la construction de leur mémoire. Il y a l'annexe qui
développe, de façon beaucoup plus importante, comme vous l'avez
évoqué, ce que vous appelez l'évaluation de la perte du
pouvoir d'achat sur la base des trois dernières années. Quant
à l'ensemble des commentaires généraux, je prends bonne
note de la recommandation sur laquelle vous avez insisté à la fin
de votre mémoire. Je sais que mon collègue, l'adjoint
parlementaire, le député de Prévost, aura quelques
questions, commentaires et remarques à formuler. Je tiens à vous
dire que je voudrais qu'il soit bien clair entre nous - chacun, bien sûr,
est libre de ses interprétations, c'est ça la vie en
société démocratique - que l'intention simple, seule et
unique du ministère du Travail, du ministre et de son adjoint aura
été, c'est pour cela que je me suis permis de faire le bref
rappel historique de tout à l'heure, de tenter de contribuer à
faire en sorte que puisse se dégager une entente entre les parties
syndicales permettant que le processus de négociation,
conformément à la loi, puisse s'engager.
J'ai pris bonne note des commentaires qui sont contenus dans votre
mémoire, qui apportent un éclairage plus large sur l'ensemble des
relations du travail. On est ici aujourd'hui pour examiner la question du
décret. Vous avez une recommandation bien précise, ce qui
n'exclut pas vos commentaires d'ordre plus général, qui seront
certainement examinés au mérite.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Bélanger: Merci, M. le Président. Au nom de ma
formation politique, je voudrais également remercier M. Gingras pour son
exposé. Si j'ai bien compris, vous êtes prêt à
accepter l'entente qui avait été convenue entre l'AECQ et les
centrales syndicales en date du mois dernier.
Je n'ai pas d'autre chose à rajouter. Comme l'a mentionné
le ministre, c'est évident qu'à la lecture de ce rapport, cela
nous apporte encore plus d'éclairage. Je ne fais que vous remercier de
vous être déplacés jusqu'ici.
M. Gingras: Nous vous remercions de nous avoir entendus.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Prévost.
M. Dean: M. le Président, je voudrais juste commenter
certaines remarques du député de Jean-Talon et,
particulièrement, une remarque du mémoire. Je trouve que le
député de Jean-Talon y est allé un peu injustement dans
ses remarques en disant que le gouvernement ne se préoccupe de la
question de la construction que depuis tout récemment. Après
tout, nous avons entrepris des programmes, tels que OSE, Logirente, dans le but
de faciliter l'accès à la propriété
et, par le fait même, de stimuler l'industrie de la
construction.
Il y a une autre chose qu'on a mentionnée l'autre jour, mais
qu'il serait bon de mentionner dans le contexte de cette commission
parlementaire. On nous dit que, cette année, le taux de vacance dans le
logement familial est à 1% et que, dans une situation normale de taux
d'intérêt, cela aurait automatiquement engendré la
construction de 69 000 logements dans une année où le taux de
vacance est si restreint, soit de 1%. S'il n'y a que 29 000 logements
programmés pour la construction cette année, il faut quand
même souligner en passant ce que pas mal tout le monde reconnaît,
sauf le parti de l'Opposition du Québec. Le taux d'intérêt
est la grande raison de la lenteur de la construction actuellement, surtout
dans le secteur des logements domiciliaires familiaux.
En guise de commentaires, je veux juste ajouter que l'intervention du
ministère du Travail n'était pas dans le but de favoriser quelque
système ou quelque groupe que ce soit, mais, à défaut
d'une alliance entre les quatre parties syndicales pour négocier
à la table de négociations, notre intervention était, si
possible, de convaincre les quatre parties syndicales reconnues par la loi de
s'entendre. Malheureusement, il y en avait quatre et il n'y en a que deux qui
se sont entendues. Heureusement, c'en étaient deux qui permettaient de
former une majorité telle que définie par la Loi sur les
relations du travail dans l'industrie de la construction.
Effectivement, une entente négociée en a
résulté, plutôt que la nécessité pour le
gouvernement, soit de laisser aller les choses ou d'imposer une convention
collective et un décret pour les prochaines années. Nous croyons
toujours que le système de la négociation collective est
destiné à permettre aux parties de s'entendre par la
négociation. Le gouvernement ne cherche pas du tout, en aucune
situation, à se substituer aux parties à défaut d'une
négociation collective entre la partie patronale et la partie syndicale.
Dans ce cas, malgré tous les efforts, chose assez inusitée que
c'est une association patronale qui, chose rare, rejette une entente,
plutôt qu'une association syndicale. C'est devant ce dilemme qu'on se
trouve aujourd'hui. C'est la raison pour laquelle nous sommes obligés
d'imposer, par décision du gouvernement, un décret pour les
prochaines années. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Non, M. le Président, j'ai pris note des
remarques du député. Je pense bien que ce n'est pas le moment de
faire le débat.
Le Président (M. Laplante): D'accord. Mme la
députée de Maisonneuve.
Mme Harel: M. Gingras, M. Carey, dans votre mémoire, vous
dites accepter comme compromis l'application de l'entente qui est intervenue,
à laquelle vous n'avez pas été partie prenante, mais vous
notez que, sur l'essentiel, il vous semble que cela ne soit pas allé
assez loin. Entre autres, vous insistez sur le normatif qui aurait
été laissé de côté, particulièrement,
la sécurité d'emploi, la semaine de travail, les périodes
de vacances. À ce stade-ci, est-ce que vous avez des
représentations à faire sur ces questions à la commission
parlementaire?
M. Gingras: Sur cette partie, il est certain que, nous, de la
CDS, on exigeait au moins que les travailleurs de la construction aient un
minimum de protection de leur emploi. Bien sûr, on a un règlement
dans l'industrie de la construction qui tend à cerner, si vous voulez,
le nombre de travailleurs de la construction, ce qui s'appelle les permis de
travail dans l'industrie de la construction, mais ce règlement ne va
quand même pas donner une espèce de sécurité
d'emploi aux travailleurs de la construction. On exigeait dans nos demandes
qu'un minimum soit consenti, très loin de ce qui existe dans
l'entreprise en général comme forme d'ancienneté et de
respect de l'ancienneté à l'intérieur des entreprises,
mais on ajoute aux dispositions du règlement que les travailleurs qui
sont embauchés par un employeur puissent au moins être mis
à pied par ordre d'ancienneté de façon qu'ils puissent
savoir, lorsqu'ils sont embauchés par une entreprise, qu'ils ont une
possibilité de travail chez cet employeur pour la durée d'un
contrat, ce que les travailleurs de la construction n'ont pas encore acquis
comme droit et ce qui existe de façon régulière et normale
dans l'ensemble de l'industrie. C'est une des dispositions minimales que, je
pense, en 1982, on aurait dû au moins négocier pour les
travailleurs de la construction. Dans la négociation qui a
été menée, ces dispositions n'ont pas pu être
négociées. C'est dans ce sens qu'on parle des dispositions
importantes traitant de la stabilité des travailleurs de la construction
chez leur employeur, de leur sentiment d'être dans une industrie à
part entière et que leurs droits ou leur ancienneté soient
respectés un tant soit peu au niveau de l'industrie. Mais ils n'ont pas
ce sentiment. Je pense qu'il est grand temps que, quant à la
négociation, on pense à leur donner ce sentiment. C'était
le sens de notre interprétation et je pense que M. Carey a quelque chose
à ajouter là-dessus.
M. Carey (Reynald): Si vous permettez, je voudrais ajouter,
à la question posée par Mme la députée de
Maisonneuve, que l'on aurait pu, je pense, dans un contexte économique,
surtout celui de la construction, à son plus bas niveau - en tout cas,
je n'ai pas connu cela depuis plusieurs années -uniformiser davantage.
Vous avez encore des travailleurs de la construction qui font 45, 50 heures par
semaine. Le temps supplémentaire est aussi payé pour certains
immédiatement à taux double après les heures
régulières et, pour d'autres, à temps et demi. Je pense
que c'est un contexte dans lequel on aurait pu uniformiser tous ces points.
C'est la même chose pour les vacances. On dit: vous avez une règle
générale, les travailleurs ont le droit de prendre des vacances
durant l'été, mais il y a tellement d'exceptions que, finalement,
il n'y a que la moitié des travailleurs qui ont le droit de prendre des
vacances. On pensait que cela aurait été l'occasion de
négocier ces points et de compléter la convention collective.
Mais, à ce moment-ci, vous demandez si nous aimerions avoir autre
chose. Oui, il y aurait autre chose, mais on est conscient qu'à cause du
cheminement qui a été fait, il n'est pas possible pour nous de
mettre autre chose dans la législation actuelle, mais on veut avoir au
moins ce qu'on a pu croire être accepté par la majorité des
travailleurs et l'association patronale au niveau de sa direction.
Le Président (M. Laplante): MM. Carey et Gingras, les
membres de cette commission vous remercient pour la présentation de
votre mémoire.
M. Gingras: Nous vous remercions.
Le Président (M. Laplante):' J'appelle maintenant la
Fédération nationale des syndicats du bâtiment et du bois
(CSN).
Messieurs, pour les fins du journal des Débats, veuillez
identifier votre organisme et les personnes qui vous accompagnent, s'il vous
plaît!
Fédération nationale des syndicats du
bâtiment et du bois (CSN)
M. Leclerc (Yvon): M. le Président, Yvon Leclerc,
président de la Fédération nationale des syndicats du
bâtiment et du bois, CSN. Je suis accompagné du camarade Florent
Audet, qui était le responsable du dossier de la négociation et
également de militants et d'officiers de la CSN-Construction de diverses
régions du Québec.
M. le Président, M. le ministre, Mme et MM. les
députés, il y a quelque chose qui ne va pas au royaume du
Québec. Une fois de plus, nous nous retrouvons en commission
parlementaire, à quelques heures d'une échéance
importante.
Nous sommes tous conscients du pouvoir réel détenu par le
ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu et par le Conseil des ministre sur les conditions de travail des
milliers de travailleurs de la construction. (15 h 45)
M. Marois, le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu a sûrement, parmi ses documents, devant
lui ou dans sa serviette, la solution à nos problèmes
immédiats. Nous pouvons imaginer les hypothèses de solution du
ministre: ne rien faire pour l'instant en laissant pourrir encore plus la
situation, donner raison à certains entrepreneurs en imposant un
décret avec un contenu moindre que ce que nous retrouvions dans
l'entente et le rapport du médiateur, ou bien ratifier textuellement
l'entente de principe, ou encore saisir l'occasion qui se présente
à lui en modifiant le décret dans le sens de
l'intérêt public.
Cette dernière possibilité, au moment où nous
sommes et dans les circonstances que nous connaissons, est la seule solution
qui puisse remédier à la situation existante. Il n'est pas
d'intérêt public, dans le difficile contexte économique
actuel, que l'industrie de la construction connaisse une autre période
troublée. Il n'est pas d'intérêt public non plus que les
travailleurs de la construction se retrouvent sans un minimum de conditions de
travail. Nous devons souligner que les travailleurs de la construction font
partie du public et, donc, leur sort est d'intérêt public.
Dans les circonstances actuelles, nous devons reconnaître
l'impossibilité de parvenir à une entente, et la raison en est
simple. D'un bout à l'autre de cette période de
négociation, les patrons ont toujours refusé de négocier.
Dès le 20 novembre 1981, M. Claude Chagnon, président de l'AECQ,
l'indique clairement, il donne le ton. Le 5 mars 1982, l'AECQ énonce ses
principes de non-négociation. Le 30 mars, l'AECQ vous transmet, M. le
ministre, à vous et à d'autres membres du Conseil des ministres,
dont le premier ministre lui-même, son ultimatum. Le sens et le ton de
cet ultimatum vous sont sûrement apparus quelque peu impertinents.
Pourtant, cette arrogance est le seul mode d'expression de l'AECQ que nous
connaissions depuis un certain temps.
Malgré tout, la FTQ-Construction et le CPQMC, en l'absence de
négociations toujours refusées carrément par l'AECQ, ont
accepté, sous la forme d'une entente de principe, le diktat patronal. Le
cynisme patronal n'étant pas mince, cette entente de principe tombe
après l'assemblée de l'AECQ du 19 mai, tenue au
Reine-Élizabeth. Les patrons membres, excités par la
situation
économique et chauffés à bloc par des mois de
discours belliqueux, dépassent les bornes.
M. le ministre, dans les circonstances, il est impossible d'en arriver
à une entente. Les patrons ne veulent et ne savent pas négocier.
La partie syndicale ne peut négocier seule. De toute façon,
même avec de multiples concessions de la part des travailleurs, les
patrons ne savent plus reconnaître leurs propres intérêts;
c'est en dehors de toute logique. L'entente se révélant
impossible, vous devez, M. le ministre, modifier le décret dans
l'intérêt public. Cette solution est la seule qui puisse
remédier à la situation existante. Vous devez saisir l'occasion
en posant des jalons pour rétablir la situation.
Nous ne vous demandons pas de décréter les conditions de
travail idéales, et même pas normales, pour les travailleurs de la
construction, qui en ont pourtant vraiment besoin. Nous vous demandons
d'assurer un minimum de conditions de travail afin de permettre à
l'industrie de fonctionner. À quelques heures de
l'échéance, et de la façon que nous sommes tous
placés actuellement, nous ne pouvons remettre d'aplomb notre industrie
d'un seul coup. Nous vous demandons d'assurer au minimum, dans ce
décret, les conditions contenues dans l'entente de principe et quelques
éléments de base permettant à l'industrie de se redresser
un peu.
Nous ne vous demandons pas de faveur; nous réclamons justice au
nom des travailleurs de la construction. Si nous en sommes rendus là,
c'est entre autres parce que, depuis des années, les droits des
travailleurs, les droits syndicaux ont été sérieusement
réduits par des amendements successifs à la loi pendant que
d'autres amendements favorisaient la mainmise patronale sur l'industrie. En
temps et lieu, nous ferons valoir le point de vue des travailleurs, notre point
de vue pour les réformes en profondeur de la législation de la
construction. Pour l'instant, nous vous demandons d'utiliser les pouvoirs que
vous avez en vertu de la loi, l'article 51, entre autres, pour modifier le
décret dans les conditions suivantes: 1) Le décret doit contenir
au minimum les conditions prévues dans l'entente de principe.
Sur les questions salariales, l'entente est plus que raisonnable.
D'ailleurs, le médiateur, Me Raymond Leboeuf, le démontre bien
à la page 3 de son rapport du 27 avril 1982. Dans son rapport, l'aspect
salarial est davantage généreux que l'entente comme telle. Nous
pensons que vous devriez vous référer à cela, que cela
devrait s'appliquer à partir du 1er mai 1982. Dans le cas des primes,
cela devrait s'appliquer et le taux minimal de 1 $ pour la deuxième
année devrait aussi s'y retrouver. 2) Le décret doit contenir une
réduction des heures de travail sans perte de salaire. La
généralisation de la semaine de travail de 40 heures serait
d'ailleurs une excellente contribution pour réduire le chômage. 3)
Le décret doit contenir une forme d'ancienneté. Il est
inadmissible que les travailleurs de la construction ne profitent d'aucune
forme de sécurité d'emploi. À défaut d'inscrire
notre demande, l'article 15, l'introduction dans le décret d'articles
tels que l'article lp), produit par le Conseil provincial du Québec des
métiers de la construction, ou l'article 16.06 de la FTQ-Construction
serait, à notre avis, un pas dans le bon sens.
Nous devons souligner que la sécurité d'emploi est
essentielle à plusieurs points de vue. La sécurité
physique est très négligée sur les chantiers à
cause de la crainte de plusieurs de se retrouver sans emploi. De plus, le
décret est très souvent bafoué pour la même raison.
4) Le décret doit contenir une clause nous protégeant contre les
artisans, les braconniers, les "chaudrons" qui ont développé un
marché noir en marge de toutes les normes de l'économie du
Québec. Une telle situation intolérable existe même sur un
des gros chantiers, celui de la Baie-James, hélas! 5) Le décret
doit contenir en lui-même des possibilités réelles de se
faire appliquer. Dans le décret, il y a très peu, et pourtant ce
n'est pas appliqué. Il faut renforcer les possibilités de
recours, d'autant plus que l'AECQ est friande de procédures tatillonnes
et d'objections préliminaires. (Voir les demandes touchant les articles
sur les griefs et l'arbitrage). 6) Le décret doit contenir des
conditions particulières pour des travailleurs qui s'exilent à la
Baie-James ou dans d'autres chantiers éloignés pour gagner leur
vie. Les conditions de vie (un par chambre, etc.), les délais de sortie
du chantier doivent être améliorés, d'autant plus que les
entrepreneurs, la SEBJ et le gouvernement se félicitent que les
échéanciers et les coûts soient au-delà de leurs
espoirs à cause de l'excellente qualité de la main-d'oeuvre qui
se retrouve à la Baie-James. 7) Le ministre devrait profiter de
l'occasion pour régulariser la situation en regard des travaux du
pipeline, et vous la connaissez, M. le ministre.
Pour terminer, M. le ministre, nous devons vous rappeler que le
décret que vous promulguerez ne doit pas contenir de clauses
discriminatoires contre des travailleurs ou leur association syndicale; en
conséquence, aucune association syndicale ne devrait être exclue
de comités prévus dans le décret que vous
promulguerez.
M. le ministre, en modifiant le décret
dans le sens que nous vous indiquons, vous agirez dans
l'intérêt public. Vous contribuerez à mettre un peu d'ordre
dans notre industrie. Vous poserez des jalons pour que cela aille mieux.
Dans ces conditions, la relance de l'industrie de la construction pourra
se faire. Les travailleurs, les entrepreneurs et l'ensemble de la population du
Québec ont intérêt à voir l'industrie de la
construction repartir.
Quand le bâtiment va, tout val Respectueusement soumis par la
CSN-Construction.
Le Président (M. Laplante): Merci, messieurs. M. le
ministre.
M. Marois: M. le Président, je voudrais d'abord remercier
les porte-parole de la CSN-Construction de leur mémoire. J'ai pris bonne
note des recommandations qui sont contenues dans le rapport. Comme vous l'avez
évoqué, M. Leclerc, il est évident que je me devais
d'arriver au moins avec un certain nombre d'hypothèses en tête,
pour les raisons que vous mentionnez dans votre mémoire.
Vous refaites un historique qui est là. J'ai pris bonne note de
ce que vous mentionnez, particulièrement au bas de la page 3 de votre
mémoire. En temps et lieu, je comprends que vous ferez valoir votre
point de vue pour ce que vous appelez des réformes en profondeur de la
législation concernant la construction. Je recevrai avec plaisir toute
recommandation ou suggestion qui pourrait provenir de quelque groupe que ce
soit et qui serait susceptible éventuellement d'améliorer les
choses et, comme vous le dites, de les améliorer de façon
profonde.
Ceci étant dit, sur la base de la piste que vous suggérez,
soit d'assumer les responsabilités qui sont prévues par la loi et
de faire les recommandations qui s'imposent pour qu'il y ait un décret
à partir de minuit, ce soir, qu'il n'y ait pas de vide, que les
travailleurs ne soient pas pénalisés, c'est ce que j'ai, certes,
l'intention de faire.
Vous formulez un certain nombre de recommandations précises qui
m'apparaissent claires, sauf deux sur lesquelles j'aimerais vous poser deux
questions, essentiellement des questions d'éclaircissement pour
être certain qu'on comprend bien la portée exacte de deux de vos
recommandations. Il s'agit des recommandations 3 et 4. Je le dis tout de suite,
je le dis clairement, et c'est d'ailleurs pleinement conforme à la loi:
Si l'entente de principe intervenue devait contenir ou comprendre des clauses
discriminatoires, la loi est précise et formelle là-dessus, le
ministre doit, en toute justice et en toute équité - la loi le
prévoit formellement - s'assurer qu'il n'y a pas de clause qui puisse
être discriminatoire ce qui serait d'ailleurs contraire à la
loi.
Ceci étant dit, je reviens aux recommandations 3 et 4.
Pourriez-vous nous expliquer, de la façon la plus concrète
possible, votre recommandation 3, particulièrement le passage où
vous dites: "À défaut d'inscrire notre demande, l'article 15..."
Pourriez-vous nous dire exactement de quoi il s'agit? Quel est votre point de
vue exact sur cette recommandation?
Deuxièmement, pourriez-vous concrétiser ce que vous
évoquez à la recommandation 4 de votre mémoire où
vous dites: "Le décret doit contenir une clause nous protégeant
contre les artisans, les braconniers, les "chaudrons" qui ont
développé un marché noir en marge de toutes les normes de
l'économie du Québec"?
Le Président (M. Laplante): Allez-y, monsieur.
M. Leclerc: M. le ministre, M. le Président, je m'excuse,
on doit s'adresser au président. Écoutez, à la
CSN-Construction, on conçoit, on comprend que, dans notre demande, pour
certains, ça puisse être difficile à cause des
mentalités qu'il y a dans l'industrie de la construction. La clause
prévoit une série de mécanismes que certains peuvent
trouver difficiles d'application, et, alors ils y sont hostiles. On a lu les
demandes faites par la FTQ ou le conseil provincial. Dans une certaine mesure,
ça rejoint des objectifs auxquels on souscrit. On dit que si celle
proposée par la CSN-Construction est trop aride, on est prêt
à faire un bout dans celle proposée soit par la FTQ ou par le
conseil provincial dont les mécanismes peuvent être moins arides.
On obtient peut-être moins rapidement les résultats que l'on
souhaitait avoir depuis fort longtemps, mais les travailleurs de la
construction ont le droit, comme l'ensemble des autres travailleurs
organisés en Amérique du Nord, d'avoir des clauses
d'ancienneté, ce qui est difficile dans l'industrie de la construction.
On dit qu'on est capable d'y aller par étapes. C'est pour ça
qu'on dit qu'à défaut de la clause qu'on proposait comme demande
- notre article 15 - on est prêt à aller faire un bout dans ce
cas. Ce sera une étape d'ici à ce qu'on puisse atteindre
l'objectif qu'on souhaite avoir.
M. Marois: M. Leclerc - je m'excuse, M. le Président - si
je comprends bien, lorsque vous dites "inscrire notre demande", il s'agit de la
demande...
M. Leclerc: ... déposée...
M. Marois: ... que la CSN avait déposée...
M. Leclerc: ... devant l'AECQ en date du 22 mars, si je ne me
trompe. À partir du moment où on l'a déposée,
l'AECQ a cessé de convoquer les associations syndicales.
Le Président (M. Laplante): Si vous avez d'autres
questions...
M. Leclerc: On prévoyait les mises à pied, les
rappels, etc.
Concernant votre question sur la recommandation 4, je me souviens que,
lorsqu'il y a eu les modifications au projet de loi no 110, nous étions
intervenus pour vous dire qu'on ouvrait la porte aux artisans, aux braconniers,
et on s'y était opposé. Par contre, il y en a qui nous avaient
dit, à ce moment-là: Ces amendements peuvent permettre à
l'Office de la construction, dans son règlement sur le placement,
d'introduire une protection aux artisans.
Ce qu'on vous dit, nous autres - si ce n'étaient que des artisans
qui travaillent à la rénovation de vieilles maisons, etc., mais
on les retrouve même sur de gros chantiers -c'est qu'un employeur, membre
de l'AECQ ou de la AEBJ à la Baie-James, ne peut pas engager des
artisans avant d'avoir épuisé le bassin de la main-d'oeuvre, les
"A", dans l'industrie de la construction, qui sont classifiés comme
tels, ce qui ne se fait pas actuellement. (16 heures)
II y a des employeurs à la Baie-James, selon nos informations,
qui ont des camions, des équipements. Ils laissent ça dans la
cour et ils font appel à des "jobbineux", des employeurs qui ne sont pas
du tout membres de l'AECQ et qui agissent ouvertement. On dit donc qu'il faut
resserrer... Évidemment, on ne pourra pas mettre derrière chaque
artisan ou braconnier un policier, mais il y a des pas qu'on peut faire en
avant et qu'on ne fait pas. Il y a soit un manque de volonté politique,
soit un manque de volonté à la table de négociation. Il me
semble, à ce niveau, que c'est même dans l'intérêt de
l'AECQ d'accepter une telle clause, parce qu'elle protégerait ses
membres qui sont de bonne foi et qui paient les taux prévus par le
décret, tout cela.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Bélanger: Merci, M. le Président. Si on revient,
M. Leclerc, a la recommandation 4 où vous dites, par exemple, que le
décret doit contenir une clause vous protégeant contre les
artisans. Est-ce que vous iriez aussi loin que de vouloir éliminer
totalement les artisans dans le domaine de la construction?
M. Leclerc: On ne peut pas les éliminer dans le cadre
d'une négociation. C'est toujours des changements à la loi. Sauf
qu'on dit: lorsqu'il y a des artisans dans l'industrie, ils devraient respecter
le décret. On devrait faire en sorte que les taux, les conditions
prévues par le décret soient respectés, que leurs heures
soient rapportées, que ce ne soit pas du travail noir, du travail en bas
des prix, du "cheap labour", des gens qui ne "rapportent" nulle part et qui,
lorsqu'ils ont un accident, un problème d'assurance-maladie sont les
premiers à venir se plaindre aux organismes d'État pour recevoir
une compensation, alors que ces gens ne paient jamais nulle part. C'est cela
qu'on veut, qu'il y ait un contrôle. On contrôle le salaire des
députés. On contrôle le salaire des travailleurs de la
construction qui travaillent pour des employeurs de bonne foi. Pourquoi ne
contrôlerait-on pas ces gens-là aussi?
M. Bélanger: Je vous demandais si vous vouliez abolir
totalement le statut d'artisan. C'est que l'artisan doit détenir
d'abord, vous le savez, une licence comme artisan de la Régie des
entreprises en construction du Québec; il doit également fournir
un certain bon de solvabilité, etc. Donc ces artisans qui respecteraient
ces normes, selon vous, on pourrait les conserver. Ce serait uniquement les
"chaudrons", les "jobbers" et tout ce que vous voulez.
Une autre question, M. Leclerc, avant de terminer. À la page 5,
article 7, vous dites que: Le ministre devrait profiter de l'occasion pour
régulariser la situation en regard des travaux du pipeline. Est-ce que
vous voulez surtout faire état de l'embauche pour le pipeline?
J'aimerais connaître vos impressions.
M. Leclerc: Le ministre et vous aussi, je pense, M. le
député, êtes au courant de la situation. Ce n'est pas par
rapport à cela. Ce qu'il y a actuellement, c'est que les travailleurs
sont payés selon le taux prévu par décret et qu'ils
obtiennent, à part cela, un autre montant par un moyen
détourné. Ce serait le temps de régulariser cette
situation.
M. Bélanger: Vous n'avez aucun problème en ce qui a
trait à l'embauche sur le chantier ou gazoduc?
M. Leclerc: On vous l'a dit. On en a fait part publiquement.
M. Bélanger: Vous en avez fait part.
M. Leclerc: On a fait part au ministre du Travail et de la
Main-d'Oeuvre et au ministre de la Justice de nos problèmes. Sauf
qu'à ce moment-ci, comme on le dit, s'il y a des modifications, à
la législation ce sera à l'occasion d'autres commissions
parlementaires. On pense avant tout, aujourd'hui, à
l'intérêt des quelque 90 000 travailleurs qui doivent avoir demain
les
meilleures conditions possibles. Je pense que c'est cela qui est
prioritaire. On a d'autres types de problèmes qu'on regrette, mais
là on essaie de les prendre un par un.
M. Bélanger: D'accord. M. le Président, vous me
permettrez de remercier MM. Leclerc et Audet. Je prends bonne note de vos
remarques.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Prévost et, après, M. le député de Jean-Talon.
M. Dean: M. Leclerc, au sujet de la recommandation 3, est-ce que
je pourrais demander à vos représentants et aux
représentants de la FTQ et du conseil provincial - parce qu'on va
être bourré de papiers d'ici minuit, ce soir, et peut-être
pour faciliter le travail qu'on a à faire - de donner à M.
André L'Heureux le texte des trois clauses que vous y avez
évoquées, pour chaque centrale: les articles 15 de la CSN, 1p) du
conseil provincial et 16.06 de la FTQ?
M. Leclerc: II est fort possible, M. le Président, de
donner suite à la demande du député de Prévost.
Le Président (M. Laplante): D'accord? M. le
député de Jean-Talon.
M. Rivest: M. Leclerc, une question. Est-ce que vous pourriez
être plus spécifique, à la recommandation 2 sur la
réduction des heures de travail? En fait, qu'est-ce que très
particulièrement que vous demandez au ministre d'inclure dans la
décision qu'on prendra ce soir, en termes pratiques?
M. Leclerc: Je suis content, M. le Président, que le
député me pose cette question. Cela va me permettre de
préciser une chose: Je ne souhaiterais pas, même si c'était
idéal un jour, que cela s'applique tout de suite dans les chantiers
isolés et à la Baie-James. Si jamais vous pensez cela et s'il y a
des gens qui pensent cela, on va se faire recevoir par des gros cailloux quand
on va aller là. Je tiens à faire tout de suite cette mise au
point. Il y a encore des travailleurs qui travaillent 45 ou 50 heures dans
l'industrie de la construction en bas. Je pense à ceux qui travaillent
à l'excavation, avec de l'équipement lourd et tout cela. Je pense
que ce serait bon pour eux aussi de généraliser cela à 40
heures. À ce moment-là, cela permettrait aussi à plus de
travailleurs de travailler dans l'industrie, à ceux qui ont le droit
présentement et qui sont en chômage. Aux dernières
statistiques, pour 1981, la moyenne d'heures pour les travailleurs de la
construction était de 1069 et le revenu moyen était à
peine de 15 000 $.
Le Président (M. Laplante): Sur ce,
MM. Leclerc et Audet, les membres de cette commission vous remercient
pour votre mémoire.
J'appelle maintenant le Conseil provincial du Québec des
métiers de la construction (international). Un moment, s'il vous
plaît! Voulez-vous aller au centre, s'il vous plaft? Si vous voulez bien
vous identifier, identifier le groupement que vous représentez et les
personnes qui vous accompagnent.
Conseil provincial du Québec des métiers
de la construction
M. Chartrand (André): André Chartrand,
président du Conseil provincial du Québec des métiers de
la construction (international), et Maurice Pouliot, directeur
général du conseil.
M. le ministre, mesdames, messieurs...
Le Président (M. Laplante): Le monsieur qui vous
accompagne s'appelle comment?
M. Chartrand: Pardon? Une voix: Maurice Pouliot.
Le Président (M. Laplante): II y a M. Pouliot...
M. Chartrand: M. Pouliot.
Le Président (M. Laplante): ... et l'autre monsieur qui
vous accompagne? Vous êtes seuls?
M. Chartrand: Oui, on est seulement deux.
Le Président (M. Laplante): Vous êtes seuls.
M. Chartrand: II y a aussi Francine Legault.
Le Président (M. Laplante): Francine Legault.
M. Chartrand: C'est cela.
Le Président (M. Laplante): Merci.
M. Chartrand: Agent d'information.
Le Président (M. Laplante): M.
Chartrand est-il là?
M. Chartrand: Pardon?
Le Président (M. Laplante): M.
Chartrand est-il là aussi?
M. Chartrand: Mais oui! Je me suis nommé au début,
M. le Président.
Le Président (M. Laplante): D'accord. Je m'excuse,
monsieur. C'est pour les fins du journal des Débats.
M. Chartrand: C'est André Chartrand.
Le Président (M. Laplante): Commencez, monsieur.
M. Chartrand: M. le ministre, madame, MM. les membres de la
commission, c'est maintenant devenu une coutume pour les partenaires de
l'industrie de la construction de se présenter devant la commission pour
solutionner les problèmes relatifs à l'établissement des
conditions de travail applicables à notre secteur d'activité.
Lors des récentes négociations, le Conseil provincial du
Québec des métiers de la construction (international) a tout fait
pour éviter l'intervention gouvernementale au chapitre du renouvellement
de la convention collective des travailleurs de la construction. Nous avons cru
qu'il était préférable d'établir de nouvelles
dispositions résultant d'un consentement mutuel entre les parties
plutôt que de se voir imposer à nouveau des modifications au
décret qui ne pourraient satisfaire ni les employeurs ni les
syndicats.
Jusqu'au 19 mai dernier, nous pensions avoir atteint cet objectif. Les
consultations faites auprès de nos locaux affiliés nous
indiquaient clairement l'intention de signer l'entente négociée
avec l'association des employeurs. Nous étions loin de nous douter de la
défection de la partie patronale. Nous devons vous avouer que nous avons
été surpris de la position adoptée par les membres de
l'Association des entrepreneurs en construction du Québec, l'AECQ, lors
de leur assemblée générale tenue le 19 mai 1982. Ce
comportement ne peut s'accorder aux discours tenus par les employeurs depuis le
début des rencontres de négociation et s'inscrit
complètement à l'encontre des énoncés de principe
faits par le conseil d'administration de l'AECQ. Au cours des derniers mois,
les employeurs, par le biais d'annonces publiées dans deux quotidiens de
la province, demandaient aux salariés de la construction d'éviter
de lancer l'industrie dans des négociations interminables et sans issue.
Nous avons assisté à toutes les rencontres auxquelles l'AECQ nous
avait conviés afin de commencer les négociations de la convention
collective des travailleurs de la construction. Nous croyons que le conseil
provincial international a assumé pleinement ses responsabilités
pour éviter que ne se produise la présente situation. Il nous est
impossible de porter le même jugement envers les employeurs. Nous
déplorons leur incapacité à réaliser entre eux ce
qu'ils nous ont demandé de faire.
M. Pouliot (Maurice): M. le Président,
MM. les membres de la commission, je vais faire quelques commentaires
aux différents chapitres pour activer un peu la commission
parlementaire. Lorsqu'on dit que l'AECQ a été dans
l'impossibilité de réaliser ce qu'elle nous a demandé, on
fait mention directement à des médias d'information, au fait que
l'AECQ a acheté des pages mentionnant la bataille des chefs. Finalement,
les chefs se sont entendus. Ce sont les entrepreneurs de l'AECQ, qui n'ont pas
d'entente. On l'a vu très clairement lors de son assemblée. Ce
qui s'est produit lors des différentes négociations nous
paraît totalement inacceptable. Il est évident que le conseil
provincial international a cédé plusieurs choses, mais on a
prouvé à l'AECQ qu'il y avait plus d'entente du côté
syndical qu'il ne pouvait en exister du côté patronal.
Le Président (M. Laplante): M. Pouliot, étant
donné les directives qu'on a données au début, je ne sais
pas si M. Chartrand voudra résumer le mémoire ou tout le lire,
mais j'aimerais mieux que ce soient les membres de cette commission qui vous
posent des questions sur ce qui est en dehors du texte qu'on a actuellement.
D'accord?
M. Chartrand: D'accord, M. le Président. Les
récentes décisions nous ont entraînés dans une
situation sans issue. Malgré notre réserve face à
l'intervention de l'État dans les négociations, nous ne pouvons
que féliciter le ministre d'avoir convoqué cette commission pour
tenter de régler l'impasse dans laquelle nous nous retrouvons tous
aujourd'hui.
À notre avis, les travaux de la présente commission
constituent le dernier recours avant que les travailleurs ne commencent
à exercer leur droit de grève et certains autres moyens de
pression. Nos affiliés ont déjà tenu des assemblées
à travers tout le territoire de la province de Québec afin de
recommander l'acceptation de l'entente de principe intervenue le 30 avril 1982
entre notre association et l'AECQ. À la suite de cette consultation,
l'entente de principe a été ratifiée par la
majorité des syndiqués de nos locaux affiliés. Il est donc
moralement impossible pour le conseil provincial international de retourner
à la table des négociations, surtout après que le
président de l'AECQ nous ait fait part des intentions véritables
de son organisme, et je cite: Je voudrais cependant vous transmettre la
volonté évidente de nos membres de geler les salaires des
travailleurs de la construction pour au moins un an à compter du 1er mai
1982, particulièrement dans le secteur de l'habitation.
Nous acceptons mal ce revirement subit de la situation. À quoi
ont servi les offres patronales? Aujourd'hui, nous les accusons d'avoir
trompé notre bonne foi et d'avoir
berné indûment l'ensemble des travailleurs de l'industrie
de la construction. Il ne faut pas d'ailleurs se surprendre du
mécontentement des travailleurs face à la situation actuelle. Le
25 mai, le directeur général de l'AECQ nous faisait parvenir un
télégramme dans lequel il protestait contre certaines pressions
faites sur différents chantiers afin d'obtenir les conditions de
l'entente négociée. Nous croyons que cette réaction est
fort légitime de la part des travailleurs. Ils ont le sentiment d'avoir
été abusés par la partie patronale. Je pense que nous
devons tous reconnaître que, depuis l'adoption de la loi 290, le 18
décembre 1968, toutes les négociations ont été
ardues. Elles ont été ponctuées de nombreux arrêts
de travail et se sont souvent soldées par un échec. Le climat
s'est compliqué encore plus à la suite de l'adoption de la loi
109. Il est devenu quasi impossible de dégager une majorité
absolue chez les associations syndicales. D'ailleurs, lors d'une commission
parlementaire précédente, nous avions fait part de nos doutes
quant à la pertinence de reconnaître autant de situations
syndicales dans l'industrie de la construction. Comme nous l'avions
prévu, les derniers mois ont donné lieu à toute une
série de chassés-croisés entre les associations syndicales
afin de tenter de réunir la majorité requise par la loi pour
amorcer les négociations. Pour des raisons qui nous paraissent purement
politiques, aucun des projets de coalition n'a pu être accepté.
Nous ne demandions pas l'impossible. Nous exigions seulement d'occuper la place
que nous donnait le pourcentage de représentativité fixé
à 24%. Nous avons multiplié efforts et discussions, et ce n'est
qu'à la suite d'une convocation faite le 16 avril 1982 par l'adjoint
parlementaire du ministre du Travail, M. Robert Dean, qu'il a été
possible de déposer, conjointement avec la Fédération des
travailleurs du Québec, la FTQ-Construction, une série de
demandes portant seulement sur quelques points majeurs du décret, soit
les salaires, les frais de déplacement, les primes, l'artisan, les
avantages sociaux, le fonds spécial d'indemnisation et la durée
de la convention collective. (16 h 15)
J'aimerais que vous compreniez qu'il a été difficile pour
le conseil provincial international et ses affiliés de prendre cette
décision. Ce choix impliquait que nous renoncions à une
négociation par métier et que nous retirions nos demandes tant
sur les clauses générales que particulières. En fait, cela
voulait dire que, dans le but de favoriser une relance de l'activité
dans l'industrie de la construction, nous renoncions à un droit
fondamental, soit celui d'une véritable négociation de nos
conditions de travail. Il y a peu de syndiqués au Québec qui
soient allés aussi loin que ceux de la construction.
Dans le but de faciliter les échanges avec la partie patronale,
nous demandions au ministre de désigner un médiateur
spécial, ce qui a été fait le 23 avril par la nomination
de Me Raymond Leboeuf. Nous ne pouvons ici que souligner l'excellence de son
travail. C'est en partie grâce à sa collaboration et à sa
disponibilité qu'il a été possible de conclure un accord
de principe avec l'AECQ et d'éviter ainsi un vide juridique qui aurait
pu être préjudiciable pour l'ensemble de l'industrie.
Le 27 avril, Me Leboeuf déposait son rapport de médiation
qui suggérait globalement une prolongation du décret pour une
période de deux ans, une majoration des salaires de 10% pour chaque
année, avec un minimum d'augmentation de 1,25 $ la première
année et de 1,20 $ la deuxième année, une modification
touchant le travail donné aux artisans par les entrepreneurs, la
reconduction des dispositions particulières touchant les travaux
relatifs aux immeubles d'habitation de huit logements et moins, une hausse de
l'indemnité accordée pour les repas ou pour l'utilisation du
véhicule du salarié, une augmentation annuelle de 10% du montant
des primes, une hausse de 15% par année des frais de transport, une
majoration annuelle de 10% de la contribution de l'employeur aux régimes
d'avantages sociaux et, enfin, une augmentation de 0,01 $ l'heure
travaillée pour la contribution de l'employeur au fonds spécial
d'indemnisation.
Le contenu de ce rapport ne rencontrait pas l'unanimité au sein
de nos affiliés. À différents niveaux, pour chacun des
métiers que nous représentons, ce rapport signifiait un statu quo
important de leurs conditions de travail. Cependant, nous étions
conscients qu'il fallait être réalistes. Avec beaucoup de
justesse, Me Leboeuf précisait, dans le préambule de son rapport
de médiation, ce qui suit: "II ne faudrait pas que les espoirs
déçus de certains précipitent le monde de la construction
dans une grève inopportune, alors que tant de gens font tant d'efforts
pour relancer notre société dont votre industrie se doit
d'être l'une des figures de proue. Je vous prie donc, MM. de la
construction, de faire preuve de la maturité dont vous êtes
capables et qu'exigent de tous les temps difficiles que nous traversons."
Sincèrement, nous croyons que le monde syndical a
démontré à la population toute entière sa
volonté d'être raisonnable et de contribuer à l'effort
collectif que nécessite la situation économique actuelle. Nous ne
pouvons pas en dire autant de la partie patronale.
Tout au cours des négociations, elle a adopté une attitude
arrogante à l'endroit des associations syndicales
représentatives. Je pense, en autres, toujours, à ses
annonces
publiées dans les journaux et dans lesquelles elle se donnait
comme mission de régler les problèmes de ses salariés. Il
nous a fallu une bonne dose de retenue pour ne par réagir à cette
ingérence.
S'il est vrai que les travailleurs doivent faire preuve de
modération dans leurs revendications, il est également vrai que
les entrepreneurs doivent eux aussi contribuer à cette relance en
acceptant une diminution de profits. Nous nous accordons là-dessus avec
l'AECQ, lorsque son président indique que les travailleurs et les
employeurs de la construction doivent unir leurs efforts pour sauver leur
gagne-pain. Cependant, nous n'accepterons jamais que les travailleurs soient
les seuls à fournir ces efforts.
Le 28 avril, le conseil d'administration de l'AECQ rejetait le rapport
de médiation et nous soumettait de nouvelles propositions. Dans un
ultime effort de règlement, nous avons, encore une fois,
révisé nos positions et nous lui adressions notre
contreproposition. Enfin, avec l'aide de Me Leboeuf, nous en arrivions à
un accord de principe dans la nuit du 30 avril. Immédiatement, nous
avons informé le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu que nous consentions à ce que le
gouvernement prolonge le décret de la construction pour une durée
d'un mois, afin de nous permettre de nous conformer aux modalités de la
loi entourant l'acceptation ou le refus de l'entente
négociée.
Le conseil provincial international a recommandé à ses
affiliés l'acceptation de cette entente de principe. C'est avec une
majorité qu'elle a été acceptée.
Cette proposition est finale. Dans notre esprit et dans celui de nos
affiliés, il n'est plus question pour nous d'aller en deçà
de l'entente de principe signée le 30 avril 1982.
Au cours des trois dernières années, les augmentations
salariales consenties aux travailleurs de la construction n'ont même pas
atteint le pourcentage d'augmentation du coût de la vie. Leur pouvoir
d'achat s'est sensiblement érodé et nous avons oublié les
pricipes de l'enrichissement collectif. Le taux d'inflation pour ces trois
dernières années se situait autour de 37% et les augmentations de
salaire versées étaient d'environ 23%.
En plus, le travailleur de la construction n'a pas le revenu annuel que
nous pourrions penser. En 1980, le salaire moyen était de 13 614 $. Il
faut également comprendre que nos syndiqués subissent plus
durement que les travailleurs des autres industries les effets de la crise
économique. Leur revenu annuel est établi directement selon le
taux d'activité dans la construction. C'est le nombre d'heures
travaillées qui compte pour s'assurer un revenu décent dans la
construction. En tant qu'association syndicale, nous avons la
responsabilité de négocier un minimum d'augmentation. Nous
croyons que les hausses établies dans l'entente du 30 avril sont
vraiment un minimum, rien de plus.
C'est avec beaucoup d'amertume que nous avons accueilli, le 20 mai
dernier, la décision des membres de l'AECQ de rejeter l'entente de
principe. Nous nous demandons sérieusement si les entrepreneurs sont
conscients des conséquences désastreuses que peut entraîner
ce geste pour l'ensemble de l'industrie. Il est déjà acquis que
nos syndiqués ne voudront jamais travailler sans convention collective.
Ils étaient déjà mécontents de ne recevoir les
augmentations salariales qu'à partir du 20 mai au lieu du 1er mai. Le
refus des employeurs ne favorisera sûrement pas la stabilité de
l'industrie.
Selon nos informations, il semble que cette prise de position soit le
résultat de la campagne de boycottage entreprise au cours des
dernières semaines par l'Association provinciale des constructeurs
d'habitations du Québec. On nous a même laissé entendre
que, si le vote avait été calculé selon la
pondération des heures travaillées au sein de l'entreprise de
chaque entrepreneur, l'entente de principe serait aujourd'hui acceptée.
Il est quand même aberrant de constater que ce sont les "chaudrons" de la
construction qui ont décidé des conditions applicables à
l'ensemble de l'industrie. Dans notre milieu, on qualifie de "chaudrons" les
petits entrepreneurs qui pratiquent le braconnage en violant quotidiennement le
décret et les lois, en oubliant la sécurité sur les
chantiers et en ne déclarant pas les heures travaillées, les
salaires versés, etc.
L'APCHQ ne réclame rien de moins que le gel des salaires, pendant
un an, dans la construction, sous prétexte qu'une hausse salariale
freinerait la construction domiciliaire. Pourtant, les augmentations salariales
fort raisonnables consenties aux cours des trois années
précédentes n'ont pas empêché la chute des
activités du secteur domiciliaire.
Nous ne sommes pas des économistes, mais nous doutons
sérieusement de l'efficacité qu'aurait une telle mesure dans le
développement domiciliaire. Quant à nous, il paraît
évident actuellement que ce sont les taux élevés de
l'intérêt hypothécaire qui sont les grands responsables du
peu d'activités que nous connaissons dans le secteur de l'habitation.
Nous ne croyons pas qu'un gel des salaires entraînerait une reprise des
activités. II est simpliste d'imputer à la main-d'oeuvre les prix
exorbitants que doivent payer les consommateurs et les investisseurs pour
acquérir un bien immobilier.
Après tout, la construction d'une maison unifamiliale ne
nécessite qu'environ 675 heures travaillées. Ce chiffre
représente 30% du coût de la construction. Ce n'est pas
parce qu'on arrêterait une progression normale des salaires que
cela faciliterait l'accès à la propriété et
amorcerait une reprise de l'activité de la construction. Nous suivons
assez mal le raisonnement des petits entrepreneurs. Cependant, nous comprenons
que les travailleurs de la construction font actuellement les frais d'une
mésentente au sein de l'AECQ.
Au conseil provincial international, nous sommes conscients des
énormes difficultés qu'éprouve tout le secteur de la
construction domiciliaire. Nous sommes prêts à collaborer avec les
employeurs pour trouver des solutions réalistes. Nous aurions même
participé activement au comité technique sur le programme
gouvernemental de relance de la construction domiciliaire si le ministre Tardif
nous avait invités à le faire. Nous supposons qu'il a dû
oublier que nous représentions 24% des travailleurs de la
construction.
Cependant, nous refusons que l'ensemble de l'industrie subisse les
contrecoups des problèmes de l'habitation. Nous voulons mettre en garde
les petits entrepreneurs contre la tentation qu'ils semblent avoir
d'établir les conditions de travail pour tous les autres secteurs de la
construction comme le commercial, l'industriel, l'institutionnel et les travaux
de génie civil. Ce genre de travaux regroupe des entrepreneurs et des
travailleurs qui oeuvrent rarement dans le secteur domiciliaire. Ils
connaissent des particularités fort différentes. Nous doutons
qu'ils acceptent sans broncher l'intervention directe des constructeurs de
maisons unifamiliales dans leurs affaires. Nous croyons que le vote pris
à l'AECQ lors de sa dernière assemblée
générale ne reflète pas la réalité.
M. le ministre, madame, MM. les membres de la commission, compte tenu de
la situation dans laquelle nous a entraînés la décision des
employeurs de rejeter l'entente de principe intervenue le 30 avril 1982 entre
l'AECQ, le conseil provincial international et la FTQ-Construction; compte tenu
que notre organisme est allé aux limites extrêmes des principes
qu'il défend en concluant une entente plus que raisonnable pour
l'industrie de la construction; compte tenu que les travailleurs ont
accepté une perte de leur pouvoir d'achat et ont renoncé à
un enrichissement; compte tenu que la prolongation du décret jusqu'au 31
mai 1982 n'a pas donné les effets escomptés et n'a servi
qu'à priver les travailleurs d'augmentations de salaire; compte tenu que
nous avons déjà suffisamment démontré notre bonne
foi et notre bonne volonté en laissant tomber des revendications que
nous jugions fondamentales; compte tenu que la promulgation de nouvelles
conditions de travail devraient assurer la paix sociale sur les chantiers de
construction; compte tenu qu'il devient impérieux pour tous les
partenaires de connaître les règles du jeu afin de favoriser une
relance dans l'industrie de la construction, le Conseil provincial du
Québec des métiers de la construction (international) vous
demande de modifier le décret relatif à l'industrie de la
construction dans la province de Québec, sans le consentement de
l'Association des employeurs, puisque cette solution nous apparaît
être le seul recours pour remédier à la situation qui
prévaut actuellement.
Nous demandons que le décret soit immédiatement
modifié selon les dispositions négociées dans l'entente de
principe du 30 avril 1982 avec effet rétroactif au 1er mai 1982.
Nous demandons également à la commission de retenir les
recommandations contenues dans le rapport de médiation soumis par Me
Raymond Leboeuf relativement aux primes et à l'artisan.
Le problème de l'artisan a pris des proportions alarmantes dans
la construction. Il faut absolument prendre des mesures pour mettre fin au
braconnage fait sur les chantiers par les artisans déloyaux. Si l'AECQ
avait été vraiment de bonne foi, elle aurait immédiatement
accepté la proposition du médiateur qui visait à
éliminer cette plaie de notre industrie.
Nous pensons que l'inclusion dans le décret d'un article visant
l'artisan et l'application stricte de cet article par l'Office de la
construction du Québec sur les chantiers pourraient mettre fin à
ce braconnage qui est cautionné par certains entrepreneurs.
Le texte proposé se lirait comme suit. Article 18.03: "Tout
employeur qui désire accorder un sous-contrat ou du travail doit
l'accorder à un employeur qui détient une licence de la
Régie des entreprises de construction du Québec et qui est membre
de l'Association des employeurs, conformément à la section
11."
La majoration des primes accordées à la section 23 du
décret doit être faite selon les indications du rapport de
médiation. Nous pensons tout particulièrement à la prime
accordée aux contremaîtres et aux chefs d'équipe. Ceux-ci
assument des responsabilités supplémentaires en acceptant ces
fonctions. Une absence d'augmentation risque de les faire hésiter
à continuer d'occuper ces postes. Nous croyons qu'une hausse de 10% par
année est plus que raisonnable.
L'ensemble de ces demandes constitue, messieurs, la position finale du
Conseil provincial du Québec des métiers de la construction
(international) et de ses affiliés.
Le tout respectueusement soumis par le conseil provincial.
Le Président (M. Laplante): Merci,
messieurs. M. le ministre.
M. Marois: M. le Président, je voudrais remercier les
représentants et les porte-parole du Conseil provincial du Québec
des métiers de la construction (international). Je comprends
parfaitement bien - je vais le dire comme je le pense - les frustrations qui
ont pu être vécues par les porte-parole syndicaux, de quelque
association syndicale qu'ils soient, comme vous le signalez dans votre
mémoire.
Je pense que tous et chacun en prennent conscience à la
lumière aussi bien des chiffres qui nous ont été
cités, à ce jour par la CSD, que des chiffres que vous venez de
donner concernant les hausses de salaire - la CSN y a fait allusion aussi - en
regard de la progression de l'inflation, du coût de la vie. Je pense que
tout le monde admettra qu'il y a eu un effort qu'il importe de noter, de la
part d'associations syndicales, pour tenter d'en arriver à
négocier, compte tenu d'un contexte économique qui n'est pas
facile, et d'en arriver à une entente de principe, ce qui était
une première, ce qui était inusité dans le monde de la
construction, avec son autre volet aussi inusité, dont on aura
l'occasion de parler plus amplement tout à l'heure, à savoir que
cela a été rejeté non pas par une partie syndicale, mais
par une partie patronale. Pourtant, il y a votre recommandation de base qui est
collée à l'entente de principe. (16 h 30)
Je prends bonne note de vos commentaires, de vos remarques et de vos
recommandations. Il y a une chose cependant. J'aimerais que vous formuliez des
commentaires additionnels explicitant vos remarques concernant le pouvoir
d'achat, l'inflation et les taux de salaire qui ont été
négociés dans l'entente de principe, ce que cela implique comme
compromis. Je pense que ça pourrait être apprécié,
si tant est que vous sentez le besoin de le faire, par les membres de cette
commission.
Je prends également bonne note de vos commentaires concernant
l'article 18.03 qui est relié à toute la question des artisans.
Je me souviens qu'on avait eu l'occasion, en commission parlementaire, en juin
1981, d'aborder l'article 18.03 où il y avait certaines recommandations
de formulation qui paraissaient illégales ou contraires à des
amendements qui ont été apportés par la loi 110, si ma
mémoire est bonne, concernant le droit et les pouvoirs reconnus aux
artisans, mais ces droits et ces pouvoirs entraînent aussi des
obligations.
Je pense que vous avez parfaitement raison d'attirer notre attention sur
- là, je ne me prononce pas sur la formulation - le fait qu'il y a
besoin - quelqu'un a dit que ça supposait une volonté politique,
mais il faut que ça se traduise dans le concret - d'un suivi dans
l'application concrète par l'Office de la construction du Québec,
par la Régie des entreprises de construction du Québec, pour
faire en sorte que les droits et les pouvoirs qui sont légalement
reconnus à certains, dans une société, ne deviennent pas
des droits et des pouvoirs qu'on exerce illégalement, qu'on outrepasse.
En d'autres termes, je pense que la question mérite d'être
examinée attentivement afin de voir ce qu'il est possible de faire dans
le cadre du décret.
Il y avait effectivement une recommandation dans le rapport du
médiateur dans ce sens, qui tournait non pas tellement autour de la
notion d'employeur versus entrepreneur, mais autour d'un élément
qui, semble-t-il, a fait problème dans l'application concrète et
surtout dans le contrôle de l'application concrète: c'est
l'absence d'une notion de travail dans le texte de l'article 18.03. En tout
cas, je prends bonne note des commentaires que vous avez formulés
à ce sujet, mais s'il y avait des commentaires additionnels concernant
les salaires...
M. Pouliot: M. le Président, je pense que le ministre nous
a posé deux questions. Pour ce qui est des augmentations de salaires,
notre mémoire démontre assez clairement que les augmentations qui
ont été consenties et acceptées lors des dernières
négociations n'ont jamais été plus élevées
que l'augmentation du coût de la vie. L'augmentation du coût de la
vie a été de 37% et on a eu seulement 23% d'augmentation sur les
salaires. Le même phénomène se produit actuellement. On a
accepté en principe - le conseil provincial international - une
augmentation de 10% alors que le coût de la vie est tout près de
12,8%. Il nous apparaît évident que c'est le maximum de consensus
qu'on pouvait accepter.
Évidemment on n'acceptera jamais le gel des salaires, ce que nous
propose l'Association des entrepreneurs en construction par une lettre qu'elle
nous a fait parvenir et encore aujourd'hui par une lettre qui a
été soumise à la commission parlementaire.
On doit vous dire qu'on demande au ministre d'intervenir dans
l'intérêt public. Contrairement à ce que certains pensent,
l'intérêt public sera en jeu cette semaine si on n'obtient pas le
minimum des conditions qui ont été dûment
négociées et acceptées de part et d'autre.
Concernant le cancer qui existe en ce qui nous concerne - l'artisan dans
l'industrie de la construction - lorsqu'on parle de la Régie des
entreprises de construction, on sait qu'il n'y a que 26 inspecteurs pour tout
le territoire de la province de Québec. Ils ne peuvent pas "policiser"
la question de l'artisan, à savoir si les contrats sont
exactement comme ils devraient être. On veut avoir une clause
à l'intérieur du décret de la construction et ce serait
l'Office de la construction qui aurait à veiller à l'application
du décret ou de la convention collective. On veut donc éliminer
l'artisan.
On pourrait dire que, lors de l'adoption de la loi 110, le conseil
provincial avait mentionné qu'il pouvait y avoir des artisans qui
pourraient travailler, disons, à l'exclusion d'une construction neuve,
lorsqu'il est question de réparations, d'entretien et de choses
semblables. Actuellement, plus ça va, plus on s'aperçoit qu'il se
crée des artisans; ce sont eux qui sont les braconniers de l'industrie
de la construction et, à notre avis, ils ne paient pas souvent
d'impôt. C'est sur le dos des salariés de l'industrie de la
construction. C'est pour cette raison qu'on le demande et qu'on a poussé
très fort, lors des différentes rencontres. Finalement, l'AECQ
avait accepté la formule de compromis concernant l'artisan et l'article
18.03. Évidemment, le conseil d'administration de l'AECQ a
décidé le contraire. On pense que, si on veut réellement
avoir une relance dans l'industrie de la construction et légaliser
toutes les conditions applicables, il faut absolument régler le
problème de l'artisan. Si on n'a pas réglé le
problème de l'artisan, à notre humble avis, on n'a pas
réglé le problème de l'industrie de la construction.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Bélanger: Merci, M. le Président. À la
page 15, vous arrivez avec une affirmation à savoir que la construction
d'une maison unifamiliale ne nécessite qu'environ 675 heures
travaillées. Est-ce que vous pouvez me dire à quel endroit vous
avez pris vos chiffres? De quelle façon en êtes-vous arrivé
là?
M. Pouliot: C'est dans le rapport de l'Office de la construction
concernant la préfabrication, qui vient de sortir au cours des derniers
mois. C'est là qu'on retrouve le chiffre de 675 heures.
M. Bélanger: D'accord. C'est sûrement la
préfabrication d'une maison en usine et non la construction d'une
maison.
M. Pouliot: Non, la construction.
M. Bélanger: La construction d'une maison prête
à être habitée?
M. Pouliot: C'est ça.
M. Bélanger: Ce ne sont pas les chiffres que j'ai. J'ai
plutôt les chiffres de 1100 heures, en tenant compte d'une maison
extrêmement simple, 24 x 40 avec très peu de fantaisies ou tout ce
que vous voudrez.
M. Pouliot: On pourra vous faire parvenir notre source
d'information, mais on parle de la main-d'oeuvre lors de la construction d'une
maison unifamiliale.
M. Bélanger: Vous dites également que ce n'est pas
l'augmentation de salaire qui va faire en sorte que les maisons
résidentielles vont se vendre ou non. Je tiens quand même à
vous faire remarquer qu'à partir de mes chiffres, soit 1100 heures,
l'augmentation de 1,25 $ l'heure représente une augmentation
d'exactement 1800 $ à 2000 $ par année, ce qui, en quelque sorte,
neutralise le programme d'accession à la propriété mis en
place par le gouvernement, qui donne justement un maximum de 1800 $ par
année. Donc, ce n'est pas avec cette augmentation de salaire, vous en
êtes conscient, j'en suis persuadé, ce n'est pas parce que vos
travailleurs vont avoir 1,25 $ l'heure de plus qu'on va relancer la
construction.
M. Pouliot: Non, c'est sûr que ce n'est pas avec une
augmentation de salaire de 1,25 $ ou de 10%, parce que je pense qu'on en est
plutôt à 10% d'augmentation, qu'il va y avoir une relance dans
l'industrie de la construction. Il faut assurément qu'il y ait un
programme de relance dans l'industrie de la construction et baisser les taux
d'intérêt. D'ailleurs, je vais profiter de l'occasion pour
mentionner que le conseil provincial international n'a jamais été
invité à participer à aucune des rencontres concernant la
relance de l'industrie de la construction. Il y a même eu une question
à l'Assemblée nationale, qui venait de M. Ciaccia, et le premier
ministre a répondu qu'il avait rencontré les centrales syndicales
de la construction et il ne parlait que de la FTQ et de la CSN. Je ne sais pas
ce qu'on fait du Conseil provincial du Québec des métiers de la
construction qui représente tout de même 24% et, si on parle de
prendre une certaine somme d'argent qui provient de la Caisse de
dépôt et de placement, on doit dire qu'avant le projet de loi no
109, le conseil provincial représentait 68% des travailleurs de
l'industrie de la construction.
Le même phénomène se retrouve aussi dans
différents comités où on ignore totalement le conseil
provincial. On peut parler de la Commission de la santé et de lasécurité du travail où on n'est pas présent. On
ne sait pas ce qui se produit, mais lorsqu'on s'aperçoit des heures qui
sont effectuées dans l'industrie de la construction, on peut se rendre
vite compte que le conseil provincial international existe encore et qu'il a
été l'association qui, lors du dernier vote, a augmenté
son degré de représentativité de 19% à 24%.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Prévost - excusez-moi - avez-vous d'autres questions? Non, d'accord.
M. Bélanger: Je voudrais juste remercier M. Chartrand et
M. Pouliot d'être venus nous présenter leur mémoire. Si
j'ai bien compris, vous aussi, vous êtes d'accord pour accepter l'entente
qui est intervenue, minimum et plus.
Une voix: Oui.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Je voudrais simplement, M. le Président, si
vous me le permettez, attirer l'attention du ministre sur la pièce 3 du
mémoire de l'Association des maîtres couvreurs du Québec
qui a des représentations particulières dont elle aimerait bien
que vous teniez compte dans la décision que vous vous apprêtez
à prendre.
Le Président (M. Laplante): Merci. M. Rivest: Oui,
M. Pouliot.
M. Pouliot: M. le Président, je pourrais sûrement
répondre que l'objectif du conseil provincial a toujours
été d'avoir une négociation par métiers et, au
cours des récentes négociations, on a laissé tomber cet
objectif pour arriver à une entente. Évidemment, il y a une
lettre de l'Association des maîtres couvreurs du Québec, qui est
prête à discuter des amendements possibles au décret de la
construction. On désire obtenir des amendements concernant les
couvreurs, qui ont un problème très particulier.
Je voudrais aussi parler du cas du gazoduc. Actuellement, on demande
aussi qu'à l'intérieur du décret il y ait les conditions
du Canadian Pipeline Agreement. On se rappelle que, lors d'une commission
parlementaire tenue au mois de juin, j'avais mentionné le fait qu'on
voulait obtenir les conditions du Canadian Pipeline Agreement. Finalement, le
gouvernement a décidé de ne pas acquiescer à notre demande
et on s'est retrouvé devant un juge qui a donné raison, pour
l'instant, aux parties. Donc, on voudrait que soit légalisé ce
qui existe. Ce n'est pas illégal actuellement, mais ce sont les
conditions du Canadian Pipeline Agreement qui devraient être incluses
dans le décret. Le ministre a le pouvoir, après la commission,
d'inclure ces conditions qui sont, en somme, respectées, au moment
où on se parle.
Il y a aussi un problème particulier concernant la distribution.
Dans les prochains jours, un problème va probablement survenir. Vous
avez une copie des demandes de l'Association unie, local 144, pour tenter de
solutionner le problème de la distribution, qui est indirectement
relié au problème du "mainline" du gazoduc. Donc, ce sont deux
demandes qu'on voudrait voir rajoutées.
On peut aussi parler de la discrimination qui existe dans l'embauche de
certains travailleurs du gazoduc par la compagnie Pe-Ben qui embauche
actuellement dans certains métiers, qui donne une exclusivité
à la FTQ-Construction. On pense que, dans la construction, il y a ce qui
s'appelle la liberté syndicale, et elle devrait exister. On a
expliqué très clairement notre position au ministre dans des
lettres à la suite du télégramme. On s'aperçoit que
le même problème semble vouloir revenir concernant la compagnie
Pe-Ben. On demanderait que ce soit regardé de très près et
qu'on cesse la discrimination flagrante qui existe dans l'industrie de la
construction.
Le Président (M. Laplante): Mme la députée
de Maisonneuve.
Mme Harel: Oui, M. Pouliot, j'aimerais savoir si vos membres
travaillent particulièrement dans l'institutionnel, le commercial.
Travaillent-ils surtout sur les gros chantiers? Quelle est la proportion de vos
membres qui travaillent dans le domiciliaire? Si vous me le permettez, je vais
vous poser cette question. Ensuite, vous notez dans votre rapport qu'il y a des
particularités fort différentes entre les secteurs. En ce qui
vous concerne, compte tenu de cette uniformisation qui existe depuis 1969,
considérez-vous que des difficultés nouvelles seraient
créées si cette uniformisation était mise de
côté?
M. Pouliot: En ce qui a trait à la première
question sur le pourcentage de nos membres qui travaillent dans le
domiciliaire, évidemment, je dois vous dire que la FTQ représente
probablement un pourcentage supérieur dans le domiciliaire. La
majorité des membres que nous représentons sont dans ce qu'on
appelle l'industrie lourde, le commercial et ces choses-là, mais on
représente tout de même un certain pourcentage de travailleurs qui
sont... D'ailleurs, un travailleur de la construction est polyvalent. Il peut
aller travailler dans l'industrie lourde, dans les maisons unifamiliales, les
duplex et ainsi de suite, mais, tout de même, le pourcentage est
là. Peut-être 10%, à l'occasion, vont travailler dans la
construction domiciliaire. (16 h 45)
Lorsque vous parlez d'uniformiser les conditions de travail, il y a
déjà eu une clause. Il y a actuellement une clause
particulière qui existe pour les conditions de travail dans les
immeubles de huit logements et moins. Donc, le conseil provincial est conscient
du problème de l'habitation.
D'ailleurs, si on lit attentivement le décret relatif à
l'industrie de la construction, on va s'apercevoir que les endroits où
des conditions particulières s'appliquent, c'est dans ce qu'on appelle
l'industrie lourde: chimique, métallurgique, sidérurgique,
pétrolière, ainsi de suite. On a pris en considération le
fait que les maisons unifamiliales ont des conditions un peu
particulières, mais pas pour les salaires. Pour les salaires, c'est un
salaire uniforme qui a été acquis après de nombreuses
batailles. On n'est pas prêts à laisser tomber le salaire
uniforme, si on veut, d'un charpentier-menuisier, qu'il travaille dans une
maison unifamiliale ou qu'il travaille dans l'industrie lourde. C'est le
même taux de salaire qui s'applique, et, à notre avis, qui doit
continuer de s'appliquer. C'est ce qui a été dûment
accepté au cours des négociations qui viennent de se terminer, du
moins en ce qui nous concerne.
Le Président (M. Laplante): Sur ce, M.
Legault, M. Pouliot et M. Chartrand, les membres de cette commission
vous remercient pour votre participation.
Maintenant, j'appelle la Fédération des travailleurs du
Québec, FTQ-Construction.
Comme tous les organismes, s'il vous platt, voulez-vous identifier votre
organisme et ceux qui vous accompagnent, pour les fins du journal des
Débats?
FTQ-Construction
M. Lavallée (Jean): Jean Lavallée, président
de la FTQ-Construction; à mon extrême gauche, MM. Yves
Paré, du local 791, des opérateurs de machinerie lourde,
Louis-Marie Cloutier, du local 9, des charpentiers-menuisiers, ainsi que
Jean-Paul Rivard, directeur général de la FTQ-Construction, et
plusieurs autres officiers et militants de la FTQ-Construction.
Le Président (M. Laplante): Merci.
M. Lavallée: M. le Président, M. le ministre,
mesdames et messieurs les membres de cette commission, encore une fois, la
quatrième depuis l'adoption de la Loi sur les relations du travail dans
l'industrie de la construction, en 1968, le gouvernement est obligé
d'intervenir et d'imposer par voie de décret les conditions de travail
que les parties en cause n'ont pas réussi à négocier. En
fait, seules les conventions collectives signées en 1976 et 1979 ont
été le fruit d'une entente entre des parties majoritaires. Pour
les travailleurs de la construction, l'accès
généralisé à la syndicalisation que prévoit
la loi québécoise dans leur industrie a donc peu contribué
à en faire les privilégiés qu'on croit qu'ils sont.
En 1981, ils faisaient moins de 1000 heures de travail en moyenne et
gagnaient quelque 15 000 $. Cette année, selon toutes les
prévisions, ce salaire aura diminué en chiffres absolus. Nombreux
sont ceux parmi nos membres qui, pour la première fois de leur vie, ont
eu à recourir à l'aide sociale, ayant épuisé toutes
les semaines de prestations d'assurance-chômage auxquelles ils avaient
droit. Il s'agit là d'un phénomène tout à fait
nouveau pour les "vrais" travailleurs de la construction, ceux qu'on
décrit habituellement comme "gagnant leur vie" dans cette industrie.
Outre le fait qu'ils deviennent une charge directe pour l'État du
Québec et soulagent ainsi le programme fédéral
d'assurance-chômage, vous devez penser à l'effet relatif des
augmentations de salaire que prévoira le nouveau décret. Les
pourcentages consentis ne s'appliquent pas à des salaires de ministres,
de médecins ou de gérants de compagnie. Ils influenceront les
revenus de gens brutalement touchés par la crise économique que
nous traversons.
La loi est impraticable. Les beaux objectifs d'harmonisation des
relations du travail qui ont présidé à l'adoption de la
Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction et
à ses divers amendements, par la suite, n'ont jamais été
atteints. Il ne faut pas confondre absence de conflit et calme relatif avec
"bonnes relations". La loi actuelle, rendant très difficile sinon
impraticable le système de négociations dans ce secteur, permet
aux employeurs de se croiser les bras et de regarder s'appauvrir une
main-d'oeuvre qualifiée dont ils tirent pourtant une plus grande part de
profit, puisque, comme on le verra plus loin, la part relative des coûts
de la main-d'oeuvre dans la construction diminue d'année en
année. On l'a dit et redit devant diverses commissions parlementaires et
devant tous les comités d'enquête chargés de faire la
lumière sur notre industrie: la loi est impraticable parce qu'elle
institue une pluralité et une concurrence syndicales quasi
illimitées, tandis qu'elle crée artificiellement l'unité
de la partie patronale.
Le résultat, on l'a eu au cours des derniers mois: la
FTQ-Construction, très majoritaire dans l'industrie, bien
implantée dans toutes les régions et représentative de
tous les métiers, a dû rechercher des alliances de
négociation avec des associations de salariés que la même
loi l'avait amenée à affronter dans une campagne de maraudage
institutionnelle, quelques semaines plus tût.
Il n'y a évidemment pas eu d'entente véritable de
négociation, les dirigeants des autres organismes syndicaux tentant de
profiter de l'aberration de la loi pour se faire du capital politique et
imposant des conditions inacceptables à la FTQ-Construction. Nous avons
donc dû convenir d'un protocole très insatisfaisant avec le
conseil provincial international, puisqu'il ne porte que sur huit
points. Nous aussi, comme le mentionnaient les autres intervenants, nous avions
à coeur la sécurité du revenu et la réduction de la
semaine de travail, mais, dans le contexte actuel, nous avons cru bon de
laisser se tasser les choses, pour y revenir un peu plus tard, lors d'une autre
négociation. Nous voulions ainsi éviter que l'ensemble des
conditions des travailleurs de la construction ne soient encore une fois
imposées unilatéralement par le gouvernement.
Du côté patronal, la puissante Association des
entrepreneurs en construction du Québec, l'AECQ, mandatée par son
conseil d'administration, concluait avec nous une entente de principe sur ces
huit points, que tout le monde s'accordera à qualifier d'infiniment
raisonnables.
M. le Président, nous ne sommes pas les seuls à le
mentionner. J'ai un éditorial du journal Québec construction, qui
n'est pas un journal syndical. Il se lit à peu près comme ceci:
Comme le démontre une étude économique publiée dans
Québec construction, le 5 avril, les taux de salaire dans la
construction ont augmenté de 25,8% depuis 1978, tandis que le taux
d'inflation a été, au cours de cette période, de 36%. Avec
les hausses de 10% par an, au cours des deux prochaines années, il y a
fort à parier que les salariés de la construction n'augmenteront
pas leur pouvoir d'achat d'ici 1984. Enfin, on a éviter cette
année, pour la première fois depuis 1976, le vide juridique que
crée l'expiration du décret et les arrêts de travail qui
ponctuent d'ordinaire les négociations dans l'industrie. L'Association
de la construction de Montréal et du Québec n'a pas tort de
qualifier le règlement proposé de raisonnable dans les
circonstances, jusqu'à en être syndicalement indécent.
Cependant, par le jeu d'une belle apparence de démocratie, cette entente
était dénoncée dans une assemblée
générale "paquetée" par l'Association provinciale des
constructeurs d'habitations du Québec, l'APCHQ. Faut-il rappeler que, du
côté patronal, cette association, qui n'est pas partie au
décret, représente des entrepreneurs s'accaparant une très
petite minorité des heures travaillées dans l'industrie de la
construction au Québec?
C'est à cause de ces aberrations de la loi que nous nous
retrouvons devant vous aujourd'hui. Dans les circonstances, nous nous
contenterons de réclamer que vous imposiez un décret qui traduise
simplement les ententes minimales négociées devant le
médiateur Me Raymond Leboeuf. Comme ces ententes, le décret
devrait prévoir des augmentations rétroactives au 1er mai 1982.
Il devrait y avoir les mêmes augmentations sur les primes que sur les
salaires.
Mettre fin à l'aberration. Dans un autre ordre d'idées, il
faudra bien que les législateurs corrigent un jour les aberrations de la
loi actuelle et traduisent, dans les règles du jeu de la
négociation, la représentativité réelle des parties
en cause. La pluralité syndicale, loin de favoriser une saine
démocratie, donne lieu à l'appropriation de cotisations
syndicales par des associations qui non seulement ne négocient pas, mais
ne sont pas tenues de dispenser des services à leurs membres.
C'est parce que le processus de négociation était
bloqué et que les travailleurs de la construction sont victimes de l'une
des pires crises économiques connues depuis des décennies que la
FTQ-Construction a accepté de limiter à des améliorations
minimales ses demandes cette année. Nous espérons
également que le gouvernement comprendra l'urgence d'apporter des
amendements majeurs à la Loi sur les relations du travail dans
l'industrie de la construction.
Il n'est donc pas inutile de rappeler les positions que nous
défendions en 1977 devant la commission d'enquête sur les
relations du travail dans l'industrie de la construction, CERLIC, alors que le
conseil provincial et la FTQ-Construction ne formaient qu'une seule et
même entité. Nous n'avons pas changé d'avis à ce
sujet: nous souhaitons toujours que les associations syndicales recueillant
moins de 25% des adhésions, lors du vote d'allégeance syndicale,
perdent leur caractère de représentativité et que leurs
membres soient invités à choisir une autre association parmi
celles qui auraient réussi à receuillir une proportion de
représentativité supérieure à ce minimum de 25%.
Nous réclamons, en outre, qu'une association détenant une
majorité simple des voix soit habilitée à négocier,
au nom de l'ensemble, une convention collective de travail.
Des droits bafoués. Ces changements ne sont pas des caprices. Ils
permettraient aux travailleurs de la construction de profiter, dans la
réalité, d'un droit qui leur est reconnu en principe dans la loi:
le droit à la négociation. Ils en ont grandement besoin. Leur
convention collective demeure d'une faiblesse qui traduit bien les lacunes de
la loi: la formule de grief est impraticable, les conditions de travail sont
pour la plupart laissées à l'arbitraire patronal et au jeu du
rapport de forces, chantier par chantier, les bénéfices marginaux
sont nettement insuffisants et les droits syndicaux quasi inexistants.
Cette année, après la scission avec le conseil provincial
international, forte d'une réorganisation interne qui a assaini son
fonctionnement et donné libre cours à la démocratie
syndicale, la FTQ-Construction avait préparé un projet de
convention collective qui corrigeait la plupart des insuffisances de la
convention collective des
travailleurs de la construction. On y trouvait, entre autres, un projet
de sécurité du revenu tellement essentiel à cette
catégorie de travaileurs plus que toute autre exposée aux
fluctuations cahotiques de l'économie.
Nous avons décidé, dans les circonstances de mettre de
côté ces revendications. Mais nous n'attendrons pas des
années qu'une réforme de la loi vienne enfin permettre l'exercice
véritable du droit à la négociation. Nous engageons le
gouvernement à agir promptement à ce chapitre. Il connaît
depuis fort longtemps les données du problème et ses
conséquences. Qu'il ne force pas les travailleurs à exprimer par
des moyens radicaux leur désespoir.
Des conditions minimales. Doit-on le rappeler, les conditions que nous
vous demandons de porter au décret sont minimales. Les augmentations de
10% par année ne constituent même pas une protection
complète du pouvoir d'achat et elles s'appliquent aux revenus de
travailleurs qui n'ont pas travaillé six mois en moyenne, l'année
dernière. Nous trouvons quasi humiliant de nous présenter devant
vous aujourd'hui avec de telles revendications.
Mais, puisque même ces conditions indécentes ont
été refusées par l'assemblée générale
des patrons "démocrates" et que vous entendez aujourd'hui un concert de
braillards entonner le thème de l'incapacité de payer des
patrons, nous sommes forcés d'argumenter quelque peu. Comme ce sont les
entrepreneurs en construction domiciliaire qui se sentent égorgés
par une ridicule augmentation salariale de 10%, rappelons quelques petites
vérités. Au cours des trente dernières années, les
coûts relatifs en main-d'oeuvre ont radicalement chuté dans la
construction domiciliaire, partout en Amérique du Nord.
En 1972, un rapport de recherche du Conseil national de recherches du
Canada, intitulé "L'industrialisation des maisons individuelles" et que
vous trouverez en annexe, affirmait qu'en 1969, seulement 24% du coût
total d'une maison construite sur place était dû au travail, 74%
au coût des matériaux et 2% à l'équipement. Les
chercheurs soutenaient, par ailleurs, que cette diminution radicale du
pourcentage des coûts relatifs de main-d'oeuvre comparée aux
habituels 40% et 50%, en vigueur vingt ans plus tôt, était
occasionnée par "l'emploi de matériaux et
d'éléments impliquant un important travail en usine et un emploi
croissant de machines". Ils remarquaient par ailleurs que la
productivité avait doublé au cours des vingt dernières
années: "Pour la maison de 1969, il ne faut que 55% de la main-d'oeuvre
qu'exigeait la maison de 1949." C'est compréhensible, avec les
changements technologiques.
Même si, à notre connaissance, des données
semblables ne sont pas disponibles pour la situation actuelle, qui oserait
prétendre que cette tendance ne s'est pas accentuée au cours des
dix dernières années? La préfabrication,
l'évolution des techniques de construction, le perfectionnement des
machines et l'utilisation de nouveaux matériaux réduisent sans
cesse la main-d'oeuvre nécessaire dans l'industrie de la
construction.
Aux États-Unis, on estime à 2% par année la
diminution de la main-d'oeuvre active dans l'industrie de la construction. Dans
le dernier rapport de recherche de l'OCQ, 4e trimestre de 1981, sur
l'activité des "vrais bâtisseurs", on constate qu'au Québec
cette diminution a été de 3% entre 1980 et 1981. D'ailleurs,
ça aussi, vous l'avez en annexe. (17 heures)
Les braconniers de la construction. Que veulent les constructeurs
d'habitations? Ils ne s'en cachent pas. Aussi, je trouvais curieux, dans un
autre journal qui n'est pas non plus un journal syndical, appellé
l'Habitabec, une série de trois articles pour relancer l'économie
du Québec. Cela me fait rire. Déréglementation de
l'industrie de la construction. Ensuite, on trouve qu'ils sont trop pris par
les bureaux de placement. Formation de la main-d'oeuvre. Le cloisonnement des
métiers, décloisonner cela. La double juridiction des organismes,
l'OCQ, la Régie des entreprises de construction, la CSST, le BEE. Ils
sont obligés d'avoir une licence de la Régie des entreprises de
construction du Québec, une accréditation auprès
d'Hydro-Québec, la qualification en vertu de la Loi sur la qualification
professionnelle des entrepreneurs de construction, un permis de vendeur
itinérant et un cautionnement en vertu de la Loi sur la protection du
consommateur. C'est ce que ces mêmes personnes nous suggèrent pour
relancer l'économie au Québec. Comment peut-on relancer
l'économie au Québec en déréglementant toute
l'industrie de la construction d'habitations et en donnant cette
réglementation seulement dans l'industrie lourde ou l'autre industrie,
excepté l'habitation. Si c'est le genre de situation que les
associations de constructeurs d'habitations nous suggèrent pour relancer
l'industrie, je pense qu'on va avoir beaucoup de difficulté à
s'entendre. Je pense que, d'autre part, on aura la chance d'en discuter.
Leur association l'exprimait candidement lors du sommet
économique de Québec, il y a quelques semaines, ils veulent
être libérés du décret et ils demandent la
déréglementation de l'industrie du bâtiment. En clair, cela
veut dire la légalisation du braconnage déjà intensivement
pratiqué avec la complicité des membres de l'association. Cela
veut dire aussi la voie libre au "cheap labour", aux conditions dangereuses et
à l'intimidation patronale quotidienne de
travailleurs ne détenant plus de droits.
Déjà, la loi no 110, en précisant le statut des
artisans, légalisait une bonne partie du braconnage. Cet assouplissement
de la loi annule en bonne partie les effets du règlement de placement
sur la sécurité d'emploi des vrais travailleurs de la
construction. Mais, non contents de cette reconnaissance légale de leur
statut, bon nombre d'artisans trouvent le moyen de travailler dans
l'illégalité.
Une brève comparaison de chiffres nous en donne la preuve. 3285
artisans étaient enregistrés à l'OCQ en 1981. De ce
nombre, 2039 avaient enregistré des heures de travail. Or, seulement
1200 sont enregistrés à la Régie des entreprises de
construction du Québec, comme les y force la loi. J'écoutais,
tout à l'heure, M. Bélanger qui posait la question à un
des intervenants. Ils doivent être enregistrés à la
régie. On s'aperçoit qu'il y en a beaucoup qui ne s'enregistrent
pas. Il y a donc 800 artisans dont on peut prouver qu'ils ont travaillé
illégalement. Tout le monde sait qu'il ne s'agit là que de la
pointe de l'iceberg. Cela ne tient pas compte des heures non
enregistrées, pas plus d'ailleurs que cela ne tient compte des milliers
d'illégaux enregistrés ni à un endroit ni à
l'autre.
À l'heure où le gouvernement, pris de panique, cherche
fébrilement à qui extorquer de quoi combler ses trous, il
pourrait récupérer des millions en impôt simplement en
essayant de bloquer une partie de l'évasion fiscale que pratiquent
ouvertement les braconniers de la construction. On aura une quelconque
idée de l'ampleur de cette évasion fiscale en faisant le calcul
mental suivant. En 1981, selon l'OCQ, les salariés de la construction
faisaient, en moyenne, 984 heures de travail pour un revenu moyen de 15 227 $.
Les artisans, eux, ne déclaraient, en moyenne, que 300 heures et
touchaient un revenu moyen de 4365 $, c'est-à-dire qu'ils ne payaient
pas un cent d'impôt, alors que les salariés, eux, étaient
imposés sur plus de 10 000 $ en moyenne.
Notre connaissance du milieu nous fait croire que les braconniers
légaux ont caché au moins les deux tiers de leurs heures
travaillées. Nous estimons à quelque 18 000 000 $ les sommes
identifiables cachées, ce qui aurait rapporté quelque 4 000 000 $
à l'État. Et nous ne parlons que des légaux ayant
conservé un tiers d'honnêteté, nous ne parlons pas des
illégaux malhonnêtes aux trois tiers.
Les conséquences de ce braconnage ne sont pas désastreuses
seulement pour la sécurité d'emploi des travailleurs et pour les
finances publiques, elles le sont aussi pour les consommateurs qui ne jouissent
pas de garanties de qualité et d'honnêteté de la part de
ces aventuriers.
Une déréglementation entraînerait la multiplication
de projets dégueulasses comme Paravert à Laval, le projet
Émérillon sur la rive sud de Montréal ou le projet Abeille
qui était bien connu dans le temps, si je me rappelle bien, où
les usagers se sont retrouvés dans des domiciles ayant de graves
défauts de construction.
Le braconnage est aussi dommageable aux entrepreneurs sérieux qui
veulent gagner leur vie honnêtement dans notre industrie. En effet, nous
ne comprenons pas les revendications à courte vue de l'APCHQ qui, par
ses demandes du retour à la loi de la jungle, risque de faire crever une
bonne partie de ses membres.
Nous jugions cette digression sur les braconniers nécessaire
à plus d'un point de vue. Elle permet d'éclairer quelque peu le
tableau du marasme dans lequel se débattent les travailleurs de la
construction et, surtout, elle dévoile la vraie nature des intentions de
ceux qui ont sabordé la conclusion de l'accord sur les conditions
minimales de renouvellement de la convention collective des travailleurs de la
construction.
Ceux qui s'opposent aux hausses insignifiantes que nous réclamons
ne veulent rien d'autre que d'accroître leurs profits sur le dos des
travailleurs. Les véritables facteurs de la hausse constante des
coûts de construction, il faut les chercher ailleurs que du
côté de la main-d'oeuvre. Ils sont dus, bien sûr, au
coût des matériaux, mais aussi à la spéculation et
à la multiplication injustifiée des sous-traitants inutiles. Il
n'est en effet pas rare que deux ou trois entrepreneurs et sous-traitants se
refilent des contrats avant même que la première pelletée
de terre ne soit levée. Quelque 25% à 30% de profits sont
déjà réalisés avant que la maison ne soit mise en
chantier. Il ne faudrait pas non plus mettre de côté tout le
phénomène du scandale des taux trop élevés
d'intérêt qui sévit actuellement.
À qui profitera une plus grande déréglementation?
Sûrement pas aux consommateurs et aux salariés. Elle permettra aux
développeurs et profiteurs de tout acabit de spéculer à
qui mieux mieux. Comment expliquer autrement qu'une maison de 50 000 $ au
Québec se vende 80 000 $ en Ontario et 100 000 $ en Alberta ou en
Colombie britannique? Pourtant, dans ces régions, la syndicalisation
n'est pas généralisée. Ce sont de pareils
déréglements qu'envient les dirigeants de l'APCHQ.
Un geste simple et rapide. Pour conclure, nous vous demandons simplement
de confirmer par voie de décret ce qui a été
négocié en présence du médiateur et ce qui a fait
l'objet d'ententes avec les dirigeants de l'AECQ pour fins de clarification
ultérieurement au 30 avril 1982. Nous vous demandons en outre d'y
ajouter la recommandation d'amendement de l'article 18.03 visant à
réduire le travail braconnier
et frauduleux. Le tout se trouve d'ailleurs en annexe au présent
mémoire.
Nous vous demandons enfin de donner un effet rétroactif au 1er
mai aux augmentations salariales et d'augmenter les primes de 10% par
année, tel que recommandé par le médiateur, Me Raymond
Leboeuf.
Nous attendons aussi une action rapide pour rendre le processus de
négociation praticable dans l'industrie de la construction.
Pour terminer, M. le Président, j'aimerais relever un fait. Nos
confrères du conseil provincial nous accusent de discrimination
concernant le gazoduc vis-à-vis de Pe-Ben. Je ne pense pas que le
règlement de placement soit bafoué et je poserais la même
question au sujet de ce qui arrive avec les plombiers qui travaillent chez
Pe-Ben. Est-ce que la même discrimination se fait? On est accusé
d'être en majorité sur les chantiers. C'est sûr que,
lorsqu'on représente 80% des gens d'un métier dans certains cas,
on est en majorité, mais il y a beaucoup de représentants,
beaucoup de salariés de l'union internationale dans différents
métiers qui sont chez Pe-Ben, soit parmi les manoeuvres, mais, au niveau
des plombiers, ce sont uniquement des salariés du local 144, donc,
personne de la FTQ-Construction. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): Merci, messieurs. M. le
ministre.
M. Marois: M. le Président, je voudrais remercier les
porte-parole et représentants de la FTQ-Construction de leur
mémoire. Il y a beaucoup de choses dans le mémoire, une analyse
générale de l'ensemble des problèmes de fond qui ont aussi
été évoqués par d'autres porte-parole d'autres
groupes qui se sont présentés devant nous jusqu'à
maintenant. On ne reviendra pas sur le détail de ça aujourd'hui,
je pense que ce n'est ni le lieu ni le moment.
Je comprends que la FTQ-Construction nous rappelle ses positions de
base, qui avaient déjà été définies au cours
des travaux de la commission Hébert. On aura sûrement l'occasion
d'y revenir, je l'ai évoqué tout à l'heure.
Il est exact, je le rappelle, qu'on est dans une situation à tout
le moins inusitée. Je pense que tout le monde l'admettra, enfin, on
verra si tout le monde l'admet, rendu à la fin de la journée. II
me semble que l'évidence des chiffres et des faits devrait nous amener
tous et chacun, toutes et chacune, à admettre que l'évolution des
salaires, à tout le moins l'entente de principe telle que
présentée, impliquait un effort plus que raisonnable de la part
des travailleurs dans une conjoncture économique qui n'est pas facile.
Ce n'est certes pas en soi le seul et unique élément d'une
relance, mais il est évident qu'une entente de principe qui amène
des conclusions sur une base salariale à des niveaux qui sont - je
pourrais les qualifier autrement, mais je me contentrai pour l'instant de dire
ceci - plus que raisonnables, compte tenu de l'évolution du coût
de la vie, n'est certainement pas un élément qui freine une
relance et n'est certainement pas un élément qui manifeste une
absence de volonté de contribuer à une relance dans le secteur de
la construction.
J'ai pris bonne note aussi du fait que c'est un dossier qui y est quand
même relié, mais qu'il faut clairement distinguer pour les fins de
nos travaux et des recommandations que je dois faire avant minuit, au Conseil
des ministres spécial, afin d'adopter un décret assurant non
seulement une paix sociale, mais l'existence d'une convention qui traite les
travailleurs justement. Je me dois de dire, à ce point-ci de nos
travaux, qu'il me semble - tout le monde va l'admettre -y avoir eu,
malgré les difficultés inhérentes à l'ensemble des
relations du travail dans le secteur de la construction sur lesquelles il nous
faudra revenir, un effort du côté syndical. Cela me paraît
évident. Je pense que tout le monde doit le reconnaître et
l'admettre.
Ceci étant dit, j'aimerais que vous commentiez cela un peu. Vous
le formulez de différentes façons, vous y revenez à
différentes reprises par divers biais, mais particulièrement
à la page 11 où vous le prenez par le biais des coûts
comparés de construction d'une maison; vous faites une comparaison entre
le Québec, l'Ontario et l'Alberta ou la Colombie britannique: 50 000 $
par rapport à 80 000 $ ou 100 000 $ de coûts de construction. Vous
reliez cela, si je comprends bien votre mémoire, notamment à
l'évolution des salaires ici, notamment, mais pas exclusivement. Je
pense qu'il serait intéressant que vous développiez davantage ce
point, la question de l'évolution des salaires, de l'impact sur les
coûts. Bien sûr, ce n'est qu'un des éléments d'impact
et vous le soulignez. D'autres groupes aussi l'ont souligné avant vous,
mais je pense qu'il serait intéressant pour nous que vous puissiez
développer ce point.
Également, j'ai pris connaissance de toutes et chacune des
propositions; vous demandez, bien sûr, que le minimum soit fait et qu'on
s'en tienne au strict minimum. À votre point de vue, il y a un certain
nombre d'ajustements qui devraient être faits à l'entente de
principe qui est intervenue entre les parties. Vous formulez,
particulièrement, une recommandation concernant l'article 18.03. J'ai eu
l'occasion, tout à l'heure, de poser la même question à un
autre groupe syndical qui vous a précédés. J'aimerais que
vous précisiez la portée et le sens de votre
recommandation.
Je l'ai évoqué et je me permets de le rappeler, la loi 110
est là, elle confère un certain nombre de droits, de pouvoirs
à des artisans. L'article 1, paragraphe u de la loi, définit bien
clairement ce qu'est un artisan. Par voie de conséquence, si tant est
que des gens agissent dans l'illégalité, s'il y a des trous dans
des textes qui rendent l'application plus difficile, plus délicate et
qui empêchent notamment un contrôle qui permette l'application
stricte de la loi, je pense que c'est légitime de soulever la question
pour s'assurer qu'on ne fasse pas des choses qui seraient contraires à
la loi ou aux règlements. On ne peut pas modifier ici, ou au Conseil des
ministres, la loi. On peut certainement s'assurer que la loi trouve sa pleine
et entière application, notamment, par l'entremise de l'Office de la
construction du Québec.
Deuxièmement, si tant est que c'est nécessaire, comme vous
le suggérez, comme d'autres l'ont suggéré, des ajustements
pourraient s'imposer à l'article 18.03. J'aimerais que vous nous
expliquiez davantage le sens, la portée, l'objectif concret de votre
recommandation à l'article 18.03. (17 h 15)
M. Rivard (Jean-Paul): M. le ministre, pour répondre sur
le prix des maisons, il est assez difficile de donner tous les détails
heure par heure. Il y a des études qui sont faites, qui se situent
à 675. Il y a des députés qui ont des études,
faites probablement par l'APCHQ qui tire la couverte de son côté
parce que ce sont leurs amis et qu'ils veulent peut-être gonfler le prix
des maisons pour essayer de faire peur aux gens pour montrer ce que
l'augmentation de salaires donnerait. Le prix des maisons a toujours
été et sera toujours fait en vertu de l'offre, de la demande et
du marché. Il y a quelques années, on entendait le
président de l'Association des agents immobiliers de l'Ontario, qui
était venu ici au Québec, dire qu'au Québec, le prix des
maisons n'était pas encore favorable aux agents immobiliers et qu'il
faudrait au moins l'augmenter au même niveau que l'Ontario. Donc, le prix
des maisons a toujours été créé artificiellement
par ceux qui contrôlent, et par ceux qui contrôlent, pour
commencer, les terrains. Une loi qui est vraiment utile et nécessaire
ici au Québec, c'est la loi sur le zonage agricole qui a fait en sorte
que les spéculateurs - les fraudeurs aussi qui sont là-dedans -
qui avaient le monopole des terrains se sont vus, à un moment
donné, propriétaires d'une petite mine d'or, et c'est bien dur de
leur faire lâcher cette mine d'or maintenant à des prix
décents.
Il faudrait absolument - surtout dans le cadre de la relance de
l'industrie de la construction - que les municipalités puissent prendre
le contrôle des banques de terrains qui existent. Cela commencerait
déjà à diminuer le prix des maisons. Il y a un tas
d'autres choses pour faire diminuer le prix des maisons. Notre mémoire
dit à un moment donné qu'en Colombie britannique, une maison, un
bungalow bien ordinaire peut valoir 100 000 $. En Colombie britannique, la
petite construction domiciliaire n'est pas syndiquée, presque pas
syndiquée. Il n'y a pas de syndicalisation là. Il y a encore des
travailleurs qui travaillent à 5 $ ou 6 $ l'heure.
C'est la même chose dans toutes les autres provinces et plus
particulièrement dans l'autre province peuplée, l'Ontario,
où la construction domiciliaire n'est pas syndiquée à
toutes fins utiles.
Cela n'empêche pas le coût des maisons de grimper. Ce sont
les intermédiaires exploiteurs qu'on trouve tout le long du processus
qui sont responsables de l'augmentation du coût des maisons. Comme on
dit, à un moment donné, il y a trois ou quatre entrepreneurs qui
ont fait de l'argent avant même d'avoir levé une pelletée
de terre et qui ne sont même plus dans le décor avec de l'argent
dans leur poche quand vient le temps de construire la maison. C'est ce qui est
défendu par l'APCHQ aujourd'hui. C'est ce genre de population que cette
association dépend.
M. Lavallée: Seulement pour votre information, nos
renseignements nous viennent d'une étude faite par le Trust
Général du Canada en 1981. On a pris toutes ces données
dans le journal Habitabec, qui mentionnait le prix des maisons dans chacune des
provinces du Canada. Je pense que l'endroit où le prix était le
moins élevé, c'est Shawinigan-Sud, soit 33 000 $.
M. Rivard: Quand vous voulez des explications sur l'article 18.03
et la portée de l'article 18.03...
M. Marois: Je m'excuse de vous interrompre, M. Rivard. Je
voudrais seulement vous poser une question additionnelle pour être bien
certain que j'ai compris la réponse que vous venez de donner concernant
au moins l'angle qui se trouve couvert par le biais de la syndicalisation.
Quand vous comparez le Québec avec l'Ontario et que vous comparez avec
l'Alberta et la Colombie britannique, ai-je bien compris que vous avez dit, sur
la base de ce que vous avez précisé, M. Lavallée, -vous
avez vos sources d'information - que c'était particulièrement le
secteur domiciliaire en Ontario, en Alberta et dans les autres provinces qui
n'était pas syndiqué dans le domaine de la construction ou si
c'était l'ensemble?
M. Rivard: Non, c'est particulièrement ce secteur; dans
les autres provinces. C'est surtout l'industrie lourde qui est
syndiquée. Le secteur résidentiel n'est pas syndiqué.
C'est le commercial et l'industrie lourde, parce que c'est toujours plus facile
à syndiquer. C'est assez difficile de syndiquer des "chaudrons", parce
que vous vous retrouvez tout le temps avec des braconniers, des illégaux
qui, continuellement, veulent avoir des "jobs" ou travailler un peu pour gagner
leur vie et qui vont continuellement en dessous de la table. Vous n'êtes
pas capable de syndiquer cela, parce que c'est peut-être son
frère, son beau-frère ou son cousin. C'est presque impossible
à syndiquer sur une base de "chaudrons".
C'est le profit recherché sur les maisons qui fait en sorte que
le coût des maisons augmente. À cause de la situation du
marché, aujourd'hui, il est curieux de remarquer qu'une maison qui se
vendait 57 000 $ l'année dernière est offerte maintenant à
50 000 $. Il n'est pas question que ces mêmes "chaudrons" soient tous en
faillite. Non, ils ont baissé leur profit. Supposément, c'est le
marché qui est comme cela aujourd'hui. Elle coûterait un peu moins
cher que l'année dernière, mais ce n'est pas assez. Il faudrait
encore déréglementer complètement l'industrie de la
construction pour leur faire faire encore plus de profits. C'est une chose
qu'on ne peut pas accepter.
Ce qu'on demande par l'article 18.03, en fait, c'est de pouvoir mettre
fin à l'évasion fiscale constante des braconniers, des petits
"chaudrons" et des artisans. Il serait impossible pour l'artisan et le
braconnier de vivre, s'ils n'avaient pas la complicité de ces
gens-là, défendue par l'APCHQ. À l'heure actuelle, comme
le dit notre mémoire, ils rapportent à l'OCQ 4365 $ de revenu par
année. Quand le règlement de placement fait perdre le certificat
de classification à l'un d'eux, cela crie comme des putois pour essayer
de le reconquérir et de continuer à crever a 4365 $ par
année. C'est assez dur à expliquer.
À l'Assemblée nationale, des députés des
deux partis, mais notamment du parti de l'Opposition qui doit faire le travail
de torpillage, allaient défendre ces gens, ces pauvres petits messieurs
qui avaient perdu leur certificat de classification. Il y avait des injustices
là-dedans. La situation s'est améliorée pour ces gens. On
leur a fait justice. Il y en a beaucoup là-dedans qui étaient des
artisans qui, pendant tant de temps, avaient réussi à saigner
l'assurance collective de l'industrie de la construction en se déclarant
malades, en retirant des bénéfices, des indemnités
hebdomadaires, en continuant à travailler en dessous de la table pendant
que nous, les vrais travailleurs de la construction, leur payions des salaires
chez eux, à travailler en dessous de la table et à ne rien
rapporter à l'Office de la construction. C'est pour cela qu'un tas de
ces gens ont perdu leur certificat de classification. Ils ne le disent pas. Les
députés étaient de bonne foi, ils les défendaient,
mais il leur manquait des détails. On aurait pu envoyer des centaines de
travailleurs, en chômage ou qui travaillent, avec des certificats de
classification en bonne et due forme pour aller dire à ces gens:
Hé, bonhomme, tu essaies de mettre encore des gens sur le marché
du travail dans la construction pour venir me voler "ma" job en dessous de la
table, comme ils l'ont toujours fait.
C'est cela, la situation dans la construction. C'est cela, le braconnage
constant dans la construction. Le braconnage de ces gens fait en sorte
qu'à l'heure actuelle des cotisations à la CSST ne sont pas
payées. Il y a un trou à la CSST, dit-on. Ils en sont aussi
partiellement responsables, ces gens, parce qu'ils ne respectent pas leurs
obligations. Ils ne paient absolument rien. Ils ne paient rien à
l'assurance-maladie, ils ne paient rien au Régime de rentes, mais ils en
bénéficient. Leurs enfants, leurs épouses, eux-mêmes
bénéficient de l'assurance-maladie. C'est nous qui payons
continuellement pour ces braconniers et ces fraudeurs. On vous en a
déjà parlé dans un mémoire précédent.
Des experts, dont je ne suis pas, disent que 20% de l'économie sont de
l'économie invisible. Il va falloir y mettre fin, à un moment
donné. On devrait peut-être arrêter de harceler - non pas
sexuellement comme elles le sont continuellement - les petites serveuses de
restaurant pour essayer d'aller leur arracher quelques sous et aller vraiment
voir où il y a de la fraude fiscale, avec des millions et des millions
de dollars.
Ces gens profitent continuellement de l'État dans le domaine de
la sécurité sociale. Ils se promènent en Cadillac, pour la
plupart. Plusieurs d'entre eux se promènent en Cadillac et vivent dans
des châteaux. À 4365 $ par année, je voudrais essayer de
faire pareil! Je ne détesterais pas me promener en Cadillac.
Un autre truc de ces gens, c'est qu'à un moment donné ils
se blessent en travaillant en dessous de la table, pour un "chaudron" ou pour
eux-mêmes, et ils trouvent le moyen, avec un autre employeur complice, de
se faire embaucher, d'avoir un accident cette même journée et de
recevoir des prestations des accidents du travail. Ce sont encore les autres
travailleurs et les employeurs honnêtes - il y en a - qui sont
obligés de payer pour ces fraudeurs. C'est comme cela sur toute la
ligne. Ils connaissent tous les tours. On n'a pas à leur en montrer. Ils
en savent probablement plus que nous. On pourrait en profiter pour
prendre un verre avec eux et en parler pour leur tirer les vers du nez.
Ils les connaissent tous.
C'est cela que notre article 18.03 veut éliminer. On ne veut pas
éliminer complètement l'artisan. On ne veut pas qu'il soit dans
nos jambes! On veut que ces gens soient éliminés de la
construction neuve, parce que ce n'est pas vrai que les centrales syndicales,
les travailleurs vont mettre de l'argent dans un fonds de relance de
l'industrie de la construction pour se faire voler leurs jobs par ces
braconniers et ces fraudeurs du fisc. Ce n'est pas vrai! L'APCHQ peut dire ce
qu'elle voudra, mais jamais elle ne nous embarquera là-dedans. L'APCHQ a
le front de venir nous demander cela. Elle participe au fonds de relance de
l'industrie de la construction et elle vient défendre des choses comme
cela. Ce n'est pas vrai, on va jouer cartes sur table. Si l'argent des
travailleurs doit relancer l'industrie de la construction, ce sont les
travailleurs de la construction qui vont en bénéficier et non pas
les voleurs de jobs et les fraudeurs de l'industrie de la construction. On en a
assez de cela.
Je voudrais aussi faire un commentaire qui ne m'a pas été
demandé. C'est que les dirigeants de l'AECQ sont partiellement
responsables de la situation qui existe aujourd'hui. Ce sont eux qui ont
motivé leurs employeurs à être fermes. Avant même
qu'on leur propose nos demandes, ils avaient déjà le mandat
d'être fermes. Ils ne savaient même pas ce qu'on allait demander,
mais ils avaient le mandat d'être fermes. Leur président se
promenait à travers la province et devant toutes sortes d'associations
en disant qu'il serait ferme, une attitude offensive, mais non agressive.
Là, il commençait l'agression continuellement.
Notamment, lors du congrès de l'Association canadienne de la
construction, le 20 novembre 1981, il commençait de façon
charmante en disant: "Personnellement, je suis une recrue dans le monde des
associations et de la diplomatie." Je n'ai jamais prétendu en être
une. Un peu plus loin, il commence tout de suite, ce n'est pas long, il dit:
"Je vais maintenant faire une affirmation un peu gratuite, mais cela ne me
gêne pas du tout; ce sont mes premières armes en diplomatie et
cela paraît." Pendant des mois, la même attitude agressive a
continué dans différentes lettres que je ne résumerai pas,
mais qui accusaient continuellement les chefs syndicaux de se battre entre eux
sur le dos des travailleurs, et on disait, dans des annonces de journaux, que,
si on n'acceptait pas les offres ou si le gouvernement ne les imposait pas, ils
iraient à nos membres pour les faire accepter. On pourrait
peut-être leur suggérer diplomatiquement de commencer, avant de
prendre des votes chez nos membres, par- dessus la tête des instances
syndicales, à aller chercher leur propre vote de confiance chez eux et
à laisser faire nos plates-bandes; on va s'en occuper.
Je voudrais aussi faire remarquer ou dire aux membres de la commission
que l'APCHQ se vante de représenter un tas d'employeurs et que nous,
nous avons autre chose. Nous avons ici 500 lettres signées par des
employeurs véritables qui travaillent, qui ne travaillent pas en
braconniers, qui sont des membres de l'APCHQ et qui ont signé un
document dans lequel ils disent qu'ils sont en faveur de l'entente et qu'ils ne
sont pas en faveur de sortir du décret de la construction. Vous pouvez
les consulter n'importe quand. Vous pouvez avoir les noms pour vérifier;
elles sont ici à votre disposition.
Je n'ai pas fini d'expliquer l'article 18.03, M. le Président.
Lors de la commission parlementaire du 27 janvier 1981 - je veux seulement
répondre au ministre, je ne veux pas traîner - le contentieux du
ministère avait émis l'opinion qu'une clause contrôlant le
travail de l'artisan pouvait être illégale. Eh bien, l'article 19
de la loi ne donne pas l'obligation à l'artisan de travailler, ni
à l'employeur de faire travailler un artisan. Il n'y a absolument rien,
à notre avis, qui peut empêcher les employeurs et les syndicats de
s'entendre pour limiter le travail de l'artisan dans certains secteurs. Cela se
retrouve dans tout autre secteur où on n'a pas de clauses de
sous-contrat ou de travail à forfait.
Si c'était illégal de s'entendre sur une clause ou de
mettre une clause dans le décret qui limiterait le travail de l'artisan,
parce que deux parties pourraient avoir l'air de s'entendre, il est aussi
illégal pour l'employeur - là, je procède par l'absurde
pour montrer l'absurdité de cette interprétation - de
décider de donner du travail à un artisan ou de ne pas en donner,
parce que, si on ne peut pas s'entendre avec l'employeur pour ne pas en donner,
l'employeur n'a pas le droit de ne pas en donner non plus, il doit en donner.
Ce n'est pas ce que la loi veut dire.
Ce qu'on recherche par la loi, par le décret, par la clause
18.03, c'est que ces gens fassent honneur à leurs
responsabilités, qu'ils soient aussi à part entière dans
la société et paient autant pour les charges sociales que nous
avons à payer, nous, les travailleurs de la construction, et vous autres
aussi d'ailleurs. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): D'accord.
Les règlements veulent qu'en commission parlementaire aucune
manifestation ne soit permise. Je m'en excuse, mais ce sont les
règlements. M. le député de Mégantic-Compton.
M. Bélanger: Merci, M. le Président. Je veux
évidement, moi aussi, comme le ministre l'a fait, remercier les
travailleurs d'avoir été raisonnables dans leurs demandes
d'augmentation de salaires. Je ne peux quand même pas laisser passer
certains faits qu'il faudra vraiment relever. En ce qui concerne l'habitation
domiciliaire, croire que trois ou quatre contrats sont accordés avant la
première pelletée de terre, je peux vous dire
immédiatement que c'est faux. Cela s'est peut-être
déjà fait, mais cela ne se fait plus. Cela ne se fait plus depuis
de nombreuses années.
Autre chose, si on veut parler du prix des maisons au Québec et
en Ontario, il faudra aussi comparer des pommes avec des pommes. Ce ne sont
pas, non plus, les travailleurs qui en ont tout le mérite, quoiqu'on ait
une main-d'oeuvre extrêmement qualifiée, mais c'est qu'en Ontario,
dans le prix de votre maison, vous retrouvez également le coût des
infrastructures, l'égout, l'aqueduc. En Ontario, seuls les gros
entrepreneurs peuvent se permettre de construire, parce qu'ils doivent assumer
non seulement les terrains, mais ils doivent également assumer les frais
de services qu'ils ont installés, les rues, etc. C'est pour cela que
vous retrouvez très peu de constructeurs en Ontario. (17 h 30)
Autre chose que je déplore également, c'est qu'on traite
les entrepreneurs en construction de "chaudrons", d'à peu près
n'importe quoi, alors qu'on a tous les louanges pour la petite et moyenne
entreprise. Parce qu'on produit des berceaux, parce qu'on produit des patins,
ce sont des hommes louables. Mais dès qu'on veut construire des
habitations, vous les qualifiez de "chaudrons", de fraudeurs, vous les
qualifiez d'à peu près tout.
M. le Président, je suis membre de cette association provinciale
des constructeurs et je n'en ai pas honte; au contraire, j'en suis fier. Au
Québec, on a développé de très bons entrepreneurs
en construction. D'ailleurs, c'est le premier endroit au Canada où
l'association provinciale des constructeurs s'est donné une garantie
contre la fraude, contre même les vices de construction, sans l'appui du
gouvernement. L'association elle-même s'est donné cela. Je ne
comprends pas pourquoi on ferait une différence entre la petite
entreprise familiale d'un constructeur qui devient automatiquement', parce
qu'il est constructeur, un "chaudron" et un bandit, et l'autre, qui fait
d'autres produits, comme je l'ai mentionné, et qui devient un homme
d'affaires extraordinaire que tous les ministres, tour à tour, flattent
et vantent comme entrepreneur de petite entreprise dont on a
énormément besoin. Cela, c'est une chose que je voulais
relever.
C'est évident qu'on peut comprendre que l'association provinciale
des constructeurs ait demandé qu'il n'y ait pas d'augmentation de
salaires vu le marasme de la construction actuellement. Vous êtes
d'accord avec moi qu'en 1976 on produisait au Québec 68 000
unités de logement et qu'on sera rendu probablement à 22 000 en
1982. Ces entrepreneurs ne voulaient pas - soyons sincères et je vous le
dois en toute honnêteté -épargner 2000 $ pour faire 2000 $
de plus de profits sur une propriété. Ils croyaient tout
simplement que ça pourrait faciliter la relance de la construction. Je
peux vous dire une chose. J'en ai vu des bilans d'entrepreneurs, j'ai vu le
mien en particulier du temps où j'étais entrepreneur, et 99% des
entrepreneurs en construction du Québec seraient prêts à
travailler avec une marge de profit de 8%, parce que ça
représente un profit de 3500 $ ou 4000 $ par unité de maison. Ils
sont tous prêts à travailler demain matin.
Pour ce qui est des terrains au Québec, il faut absolument que
les municipalités continuent d'offrir elles-mêmes les services;
sinon, ce seront encore, comme c'est le cas en Ontario, de gros entrepreneurs
qui auront le moyen d'investir 2 000 000 $, 5 000 000 $ dans l'achat de
terrains pour laisser cela là pendant cinq ans en attendant que le prix
des terrains augmente. Je peux vous dire une chose: Depuis cinq ans, ce n'est
pas le prix des terrains non plus qui a contribué à
l'augmentation des maisons, puisqu'il a baissé, il a diminué.
Vous pouvez encore acheter des terrains résidentiels pour moins de 1 $
le pied aux environs de Montréal. Pourquoi? Tout simplement parce qu'il
y a des entrepreneurs qui sont pris avec un paquet de terrains sur lesquels ils
ne peuvent pas construire. C'est pour ça que le prix a
diminué.
En terminant, M. le Président, je tiens quand même à
remercier les travailleurs, comme je l'ai fait au début. Je pense que
10%, c'est convenable, c'est extrêmement convenable. Il ne faudrait pas,
non plus, charrier et dire que les entrepreneurs sont tous des bandits, qu'ils
sont tous des "chaudrons". Cela, M. le Président, je ne peux pas
l'accepter.
Le Président (M. Laplante): M. Rivard.
M. Rivard: M. le député, mes remarques ne
s'adressaient pas à vous parce que vous semblez être en faveur des
10%. Vous êtes un bon "boss", vous n'êtes pas un "chaudron",
d'après ce que je peux voir.
M. Rivest: Faites-lui signer votre pétition.
M. Rivard: Je ne savais pas que l'APCHQ avait réussi
à s'infiltrer parmi les
députés pour se faire défendre de façon
aussi féroce.
M. Rivest: Faites-le signer.
M. Rivard: Vous pouvez également signer la pétition
qu'on a ici.
Le Président (M. Laplante): II n'y a pas d'autres
questions? Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Harel: M. Rivard, vous avez été terriblement
éloquent quand vous avez parlé de l'industrie de la construction,
quand vous avez parlé contre la déréglementation, contre
l'évasion fiscale. Ce n'est pas une question que je veux vous poser
parce que, si je le faisais, je pense qu'elle aurait dû être
posée également aux autres associations syndicales qui se sont
présentées devant la commission cet après-midi. Comme
ça n'a pas été le cas, on y reviendra certainement
à un moment ou à un autre.
En fait, la conclusion de votre mémoire dit ceci: "Nous attendons
aussi une action rapide pour rendre le processus de négociation
praticable dans l'industrie de la construction." Vous faites certainement
référence à ce qu'on retrouve en filigrane dans votre
mémoire sur la représentation syndicale. Je ne vous pose pas la
question parce qu'il aurait fallu que je demande aux autres associations,
particulièrement aux associations minoritaires, en quoi le processus
avait été praticable ou non praticable pour elles et, en fait,
pour qui le processus a été plus ou moins praticable. La question
reste posée - en fait, elle le sera dans l'avenir -car, si vous
êtes terriblement éloquent sur l'industrie, il y a un fardeau de
preuve à faire concernant la représentation.
Vous avez référé à l'enquête
Hébert. Il y a aussi le rapport de la commission Cliche, ce rapport de
la commission d'enquête sur l'exercice de la liberté syndicale
dans l'industrie de la construction. Sur cette question, la commission disait:
"En exigeant une représentativité de 75%, la commission croit
qu'elle permettrait la création d'un front commun syndical de
négociation, son plus grand souhait." La commission disait
également: "Sur tout chapitre du libre choix du syndicat, il est clair -
j'imagine que c'est encore, pour vous, très clair - que la
FTQ-Construction a toujours recherché le monopole de la
représentation syndicale. Elle ne s'en est d'ailleurs jamais
cachée. Comme elle ne pouvait l'atteindre directement et comme le
gouvernement ne lui a jamais permis le vote général qu'elle
réclamait, c'est par toutes sortes d'autres moyens qu'elle a
tenté de parvenir à son but."
J'ai trouvé un peu regrettable - je vous le dis comme je le
pense, honnêtement -que, dans le contexte d'un décret qui va
régir des conditions à très court terme, on aborde une
autre question qui, à mon point de vue, devrait faire l'objet d'une
autre discussion dans un autre lieu, à un autre moment.
M. Rivard: Vous trouvez indécent qu'on ait abordé
cela et je trouve tout aussi indécent que vous, étant au courant
des choses syndicales comme vous semblez l'être, veniez nous rabattre les
oreilles avec le rapport de la commission Cliche, quand vous savez très
bien ce qu'est la nouvelle FTQ-Construction aujourd'hui, depuis la scission
avec le conseil provincial (international).
Des voix: Bravo!
Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît:
Mme Harel: Alors, je vous dirai, M. Rivard...
M. Rivard: Je vais continuer, madame.
Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît!
Mme Harel: Si vous me le permettez, je vous dirai, M. Rivard, que
la commission...
M. Rivard: Je n'ai pas fini de répondre à votre
question. Vous avez ouvert la vanne.
Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. Rivard.
Mme Harel: Je vous dirai, M. Rivard, que sur cette question la
commission Cliche affirmait que, que ce soient des moyens légaux ou
illégaux, même sur le plan de la stricte légalité,
elle ne concluait pas à l'opportunité d'un monopole syndical sur
le strict plan de l'opportunité dans un cadre de pure
légalité.
M. Rivard: La commission Cliche pouvait conclure ce qu'elle
voulait. Aujourd'hui, on se trouve devant une réalité. Elle est
là, la réalité. Elle nous frappe. Le juge Cliche avait
tort.
Le Président (M. Laplante): Sur ce, MM. Cloutier,
Paré, Rivard et Lavallée, les membres de cette commission vous
remercient de votre participation à cette commission.
J'appelle maintenant l'Association des entrepreneurs en construction du
Québec. Monsieur, si vous voulez bien vous identifier et identifier les
personnes qui vous accompagnent, s'il vous plaît:
Association des entrepreneurs en construction du
Québec
M. Chagnon (Claude): Je suis Claude Chagnon, président de
l'AECQ, l'Association des entrepreneurs en constructionn du Québec.
À ma droite, M. Michel Dion, directeur général et M.
Jean-Pierre Langlois, adjoint. À ma gauche, M. Michel Thériault,
vice-président de l'association.
M. le Président, M. le ministre, messieurs les membres de la
commission, Mme la députée, on va essayer d'être bref. On
n'a pas de gros cahiers à vous présenter. Vous connaissez le
résultat du 19 mai. On va essayer de vous donner l'explication du
déroulement des négociations. C'est regrettable qu'on soit ici
devant cette commission et qu'on prenne le temps d'un peu tout le monde pour
régler la convention collective. On vous a présenté un
document de deux pages et on voudrait qu'il fasse partie...
Une voix: Comme s'il avait été lu.
M. Chagnon: Comme s'il avait été lu aux membres de
la commission.
Vous savez que notre conseil d'administration regroupe les quatre grands
secteurs de la construction. Au mois d'août dernier, notre conseil
d'administration se réunissait pour regarder une stratégie de
négociation en vue du règlement de la convention collective qui
se terminait le 30 avril 1982. À l'automne 1981, notre conseil
d'administration faisait le tour du Québec dans nos dix régions
pour contacter les entrepreneurs, pour regarder un peu les problèmes qui
existaient au Québec en vue des prochaines négociations. En
novembre 1981, il y avait la période de maraudage dans la construction
qui a donné le résultat suivant: aucune centrale majoritaire pour
pouvoir négocier la prochaine convention collective avec une partie
devant nous. On sait que la FTQ-Construction ramassait environ 44% des voix, le
conseil provincial, environ 23% des voix, la CSN, environ 18% des voix, la CSD,
environ 9% des voix et le syndicat de la Côte-Nord, environ 0,075% des
voix.
À la suite du maraudage dans la construction, je pense que le
conseil d'administration s'est réveillé un peu dans une impasse
et nous avons convoqué le conseil pour voir de quelle façon les
prochaines négociations pourraient se dérouler. Nous avons fait
appel à toutes les centrales syndicales en disant: Même si ces
gens-là sont minoritaires, il est sûrement possible de
régler une convention collective démocratiquement. Cela s'est
déjà vu d'autres organismes, soit des gouvernements, des
municipalités ou des commissions scolaires minoritaires qui
étaient obligés de gouverner.
Vers le 14 janvier, on convoquait toutes les centrales syndicales
à un rendez-vous qui devait avoir lieu au Sheraton le 2 février,
pour être capables de regarder une stratégie de
négociation, pour être capables de négocier dans les 90
jours, comme la loi nous le permettait. On avait connu les négociations
de 1976 avec une association très jeune qui débutait et cela
avait amené des négociations assez longues.
On avait connu le conseil de 1979, un nouveau conseil à la suite
des changements de la loi, qui est arrivé en fonction en février
et qui était obligé de commencer les négociations pour
terminer le 30 avril. Ces négociations avaient duré 12 ou 15
mois, on en était venu à une entente de convention collective et
on s'est réveillé devant le gouvernement avec une commission
parlementaire concernant le gazoduc parce qu'il restait quelques points
ouverts. Le but de l'AECQ était simple, c'était de s'entendre
avec les parties et de négocier démocratiquement une convention
collective.
Le 2 février, au Sheraton, le conseil provincial se
présentait, la CSD se présentait, mais la FTQ-Construction, la
CSN et le syndicat de la Côte-Nord ne donnaient aucun signe de vie. Le
lendemain matin, on écrivait aux centrales syndicales en leur demandant
d'être raisonnables et de venir négocier la convention collective,
même si elles étaient minoritaires. Le mot que tout le monde
s'était donné, c'était qu'il ne s'agissait pas de profiter
d'une situation pour être un agent provocateur. Dans la même
lettre, on demandait aux centrales syndicales de déposer leurs demandes
autour du 15 février. Le 15 février, aucune demande syndicale
n'était déposée. Dans les jours qui ont suivi le 15
février, nous avons convoqué de nouveau les centrales syndicales
pour le début de mars. Le même scénario, le conseil
provincial se présentait, la CSD se présentait; aucun signe de
vie des autres centrales syndicales.
Nous, les entrepreneurs en construction, vous savez qu'on regroupe les
15 000 entrepreneurs de la construction, aussi bien les petits, les moyens et
les gros. Je pense que c'est important; partout au Québec, si vous
regardez la grandeur du Québec, un petit entrepreneur, pour nous, c'est
un entrepreneur responsable. Si on veut devenir des moyens entrepreneurs ou des
gros entrepreneurs, il faut commencer par être petit. Exemple, la PME,
etc.
Je pense que l'AECQ n'a jamais -même au conseil d'administration,
les quatre secteurs sont représentés, 21 administrateurs - en
aucun temps, mis de câté les petits entrepreneurs. Je pense que
dans une société comme la nôtre, il est important de
protéger aussi bien le petit, le moyen que le gros. C'est ça,
notre mandat et c'est ça que les
entrepreneurs veulent partout au Québec.
À la suite de la rencontre du 4 mars, on s'est essayé de
nouveau et on a convoqué des tables de négociation, tout en
pensant que la FTQ, la CSN, les trois autres centrales syndicales viendraient.
Mais encore le même scénario, le conseil provincial, la CSD se
présentaient aux tables de négociation. Cela devenait de plus en
plus difficile pour le conseil d'administration qui regroupe toutes les
entreprises des quatre grands secteurs, petites, moyennes et grosses. Notre
mandat à l'AECQ, quand on a été élu le 12 novembre,
ç'a été pour administrer l'association, donc, toutes les
relations de travail à travers le Québec qui concernent 15 000
entreprises et 100 000 travailleurs. (17 h 45)
Autour du 20 mars, là, le conseil s'est vraiment penché
sur la question en disant: On s'en va vis-à-vis d'à peu
près rien. On avait fait venir des statistiques du
fédéral. On avait sorti les conventions collectives à
travers le Québec dans différents secteurs. On avait
regardé la construction parce qu'on sait que dans la construction
actuellement le marché est vraiment malade. Il ne faut pas se le cacher,
il faut regarder les faits tels qu'ils sont. Regardons l'habitation. C'est un
fait qu'il y a un malaise dans l'habitation, un malaise très grand, il
n'y a pas de travail. Il y a beaucoup de petits entrepreneurs qui travaillent
dans l'habitation. Il y a d'autres malaises dans d'autres secteurs. On n'a pas
regardé seulement le secteur de l'habitation, on a regardé les
grands secteurs. Prenons les travaux de la Baie-James; c'est autant
d'entreprises qui ne travaillent pas. Prenons l'industriel; les investisseurs,
de ce temps-ci, dans les pays industrialisés comme le nôtre, c'est
une crise un peu mondiale.
Il n'est pas facile pour les travailleurs à travers le
Québec d'accepter une diminution ou un gel de salaires. Pour ces
études, on a fait sortir 479 conventions collectives qui venaient du
fédéral, dans tous les secteurs à travers le Canada et au
Québec, on en a fait sortir une soixantaine dans tous les secteurs et on
a regardé les augmentations qui se donnaient. C'est sûr qu'il y a
bien des secteurs où les gens n'ont pas les salaires de la construction.
Le conseil, le 11 mars, unanimement - je dis bien unanimement, les quatre
secteurs - a donné le mandat au président d'essayer de rapprocher
les parties et, en même temps, de régler la convention collective.
Le mandat qui lui avait été donné était de dire: On
va être raisonnable. On va mettre des piastres sur la table tout en
pensant que les parties syndicales et même le gouvernement diront que, vu
la situation économique, on pourra, même si ce sera très
dur, et on le sait, vivre peut-être avec une augmentation de 1,25 $ la
première année et de 1 $ la deuxième année.
Après avoir fait certains contacts, le 28 ou le 29 - je ne me
rappelle pas la date on convoquait à nouveau le conseil d'administration
de l'AECQ et, là, les gens représentant le secteur de
l'habitation ont changé d'idée, ont demandé un moratoire
d'un an dans l'habitation. Je pense qu'ils en avaient le droit, c'est
démocratique. Chaque individu a le droit de changer d'idée. De
jour en jour, la situation dans la construction n'est pas plus rose qu'elle
était il y a un mois. Elle est encore pire qu'elle n'était. Quand
on pense qu'à travers le Québec, dans la construction, en 1976,
il se faisait 10 000 000 000 $ de chiffres d'affaires et qu'en 1980, selon le
rapport de l'office et de grands organismes, il se fait encore 10 000 000 000
$, de chiffres d'affaires si on regarde l'inflation, cela veut dire que c'est
une diminution très rapide dans la construction. Au niveau des heures
dans la construction, pour les travailleurs - et c'est regrettable - en 1976,
si ma mémoire ne fait pas défaut, on faisait environ 140 000 000
d'heures dans la construction et, en 1981, à peine 100 000 000 d'heures
dans la construction. C'est une diminution de 40% des heures. Si on regarde le
montant absolu des salaires payés dans la construction, en 1981, ce sont
environ 1 500 000 000 $ de salaires qui étaient payés dans la
construction, y compris les avantages sociaux.
On s'est présenté. On a eu une entente. On sait qu'il y a
eu un rapport de M. Leboeuf qui avait été nommé par le
gouvernement. Ce rapport est venu au conseil d'administration. Nous avons
convoqué le conseil d'administration et ces gens, unanimement, ont
rejeté le rapport Leboeuf et, dans les jours qui ont suivi, avec un
horaire accéléré, toutes les parties, y compris l'AECQ,
ont essayé de trouver une formule. Le 30 au soir, on aurait certainement
signé un protocole d'entente avec la collaboration du gouvernement, des
syndicats et de tout le monde, toujours sous réserve de l'approbation de
l'assemblée générale. Le résultat de
l'assemblée générale, je pense que tout le monde le
connaît. Il y a eu au-delà de 2000 personnes. Nos statuts et
règlements veulent que ce soit un vote simple. 66% ont rejeté
l'entente qu'on avait eue avec les syndicats. C'est regrettable, mais la
décision leur appartenait. C'est ce qu'on appelle de la
démocratie.
C'est sûr que je ne peux pas décider à la place de
la commission. Je pense, après avoir écouté tous les gens
cet après-midi ici, que tous sont conscients de la situation
économique. Le lendemain de l'assemblée générale,
j'envoyais une lettre aux centrales syndicales, que vous avez sûrement
entre les mains. On l'a envoyée au conseil provincial et à la
FTQ. Je vais vous lire le dernier paragraphe: "Je voudrais cependant vous
transmettre la volonté évidente de nos membres à
l'effet de geler les salaires des travailleurs de la construction pour au moins
un an à compter du 1er mai 1982, particulièrement dans le secteur
de l'habitation."
Demain matin, M. le Président, ou dans les jours qui vont venir,
je m'engage à convoquer mon conseil d'administration de nouveau et je
m'engage à mettre sur pied, si le conseil m'en donne le mandat, un
comité. C'est sûr que, dans les quatre secteurs, il y a des
malaises. Les gens qui font partie du conseil d'administration disent qu'il y a
un malaise dans l'habitation: pas de travail, les maisons coûtent cher,
la réglementation, les salaires, les artisans, les braconniers et les
taux d'intérêt. Je m'engage dans les jours qui vont venir à
former un comité avec sûrement des gens comme M. Roussin, qui est
un collègue depuis trois ans et demi et qui a toujours fait partie des
organisations comme l'habitation, de même que M. Durand et M. Armand
Houle, qui ont été de vrais défenseurs et de vrais
démocrates. Ils vont sûrement accepter de faire partie de ce
comité. On va nommer un président et, en même temps, on va
inviter sûrement les parties syndicales à venir et on va leur
demander de déposer dans 45 jours un rapport au conseil d'administration
de l'AECQ et au ministre du Travail. Soyez assurés que, si le conseil
m'en donne le mandat, ce comité devrait siéger. J'espère
et je suis convaincu que les trois personnes faisant partie du conseil
d'administration de l'AECQ qui sont des gens oeuvrant plus
particulièrement dans l'habitation vont essayer de faire en sorte qu'il
y ait un rapport de pondu dans les 45 jours pour essayer de régler cela,
pour penser en même temps à toute cette belle famille. C'est
important, il faut protéger les petits entrepreneurs. On ne peut pas les
garrocher d'un bord et de l'autre; ce n'est pas vrai. Les travailleurs dans la
construction, c'est vrai aussi, il faut les protéger. En même
temps, il faut regarder le secteur économique, donc le secteur de
l'habitation. On sait que tout le monde parle de relance économique,
j'en suis très fier et je remercie les gens qui y ont pensé;
c'est bien, mais il y a plus que cela. Il va falloir aller régler le
problème au point de départ. Après cela, si on vient
à bout de régler ce problème, il est clair que ce sera
beaucoup plus facile pour la relance économique à travers le
Québec.
Je m'engage aussi - je l'ai dit dans le passé et je le redis -
à la suite de ce rapport, à refaire le tour du Québec pour
rencontrer les gens dans les dix régions du Québec, pour faire un
rapport de ce comité et, en même temps, faire rapport du reste. Je
ne peux pas décider au nom de la commission. Je vous ai lu le dernier
paragraphe de la lettre du 30 avril qui a été envoyée au
syndicat. C'est notre position. C'est cela que l'assemblée
générale veut. Elle ne veut pas d'augmentation pour la prochaine
année dans la construction. Merci beaucoup.
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur.
M. le ministre.
M. Marois: M. le Président, je voudrais remercier
l'Association des entrepreneurs...
Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît, je
voudrais vous rappeler - je pensais que vous aviez compris tout à
l'heure - que les règles veulent qu'il n'y ait pas de manifestation, ni
pour ni contre. Ce sont les règles de l'Assemblée nationale.
M. Marois: Je disais donc que je voulais remercier les
porte-parole de l'Association des entrepreneurs en construction du
Québec de leurs notes, de leurs commentaires, d'avoir bien voulu venir
ici se faire entendre devant nous. Dans la note écrite que vous nous
remettez, on sera bien d'accord sur le premier paragraphe. Vous dites que ce
sont des circonstances très particulières - je le mettrais en
majuscule et je le soulignerais -qui ont entraîné aujourd'hui la
convocation de la présente commission. J'ai eu l'occasion de dire,
depuis le début de nos travaux, que c'était en fait assez
inusité qu'intervienne une entente de principe. Je pense que tout le
monde admettra qu'une entente de principe dans le secteur de la construction
avant la fin d'un décret, je ne me souviens pas que cela se soit
produit. C'est, évidemment, aussi assez inusité que ce soit
rejeté par une association patronale.
Ceci étant dit, comme le dirait un de mes collègues, vous
concluez par ailleurs - je présume que c'est à la suite de
l'assemblée générale du 19 mai, si ma mémoire est
bonne, de vos membres - en nous demandant, à toutes fins utiles, de
prolonger le décret en le gelant pour une période d'un an. Cela
me paraît aussi une demande assez particulière. J'aurai un certain
nombre de questions à poser, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): Avant de commencer à
poser vos questions, M. le ministre, il y a une entente actuellement entre les
deux partis pour que cela puisse dépasser 18 heures.
M. Marois: Sans refaire tout l'historique - j'ai essayé de
le rappeler très brièvement, de la façon la plus factuelle
possible au début de nos travaux; je ne vais donc pas tout reprendre
cela à ce moment-ci - le 30 mars 1982, vous me faisiez parvenir une
requête au nom de l'Association des entrepreneurs en construction, me
demandant
de modifier et de prolonger pour une période de deux ans le
décret. Il y avait toute une série de "considérant" qui
accompagnaient cette requête, mais la demande de modification concluait
que la date d'expiration devienne le 30 avril 1984, que les frais de
déplacement prévus aux articles Y et Z soient augmentés de
10% par année, que l'indemnité pour l'utilisation du
véhicule du salarié soit augmentée de 15% par année
et que les taux de salaire, c'est-à-dire les annexes D et E, soient
augmentés de 1,25 $ l'heure la première année et de 1 $
l'heure la deuxième année.
Puisque nous sommes ici pour tenter de comprendre les circonstances qui
expliquent qu'il n'a pas été possible qu'une entente de principe
se transforme en une entente tout court, c'est-à-dire une entente
ratifiée. J'imagine que, lorsque vous m'avez fait cette demande, le 30
mars 1982, vous aviez un mandat. Ma question est la suivante: Ce mandat
provenait-il du conseil d'administration, provenait-il de vos membres? Comment
ce mandat avait-il été obtenu?
M. Chagnon: Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, M. le
ministre, il est clair que le conseil d'administration avait donné un
mandat au président et le président vous a envoyé un
document à telle date. Il est clair que c'est toujours sujet à
l'approbation de l'assemblée générale. C'est la même
chose que pour la partie syndicale, quand elle signe une entente, elle est
sujette à l'approbation de l'assemblée générale.
À l'assemblée générale, il y a eu une vague qui
nous a renversés. C'est pour ces raisons que nous sommes ici
aujourd'hui. Le mandat qu'on a, même si on a fait le tour du
Québec l'automne dernier, c'est de préparer le terrain en
demandant aux gens un peu ce qu'ils veulent qu'on négocie. Il est clair
que pour toute entente dans une convention collective, il faut se
présenter devant l'assemblée générale. À
l'assemblée générale, on a été
renversés à 66%. Je pense que c'est ça, la
démocratie.
M. Marois: D'accord, je comprends bien ça, M. Chagnon. Ma
question très précise est la suivante: Le 30 mars 1982, au moment
où vous m'avez fait parvenir cette requête qui contenait les
éléments que j'ai mentionnés, est-ce que je comprends bien
- c'est ma question - que vous aviez un mandat de votre conseil
d'administration?
M. Chagnon: On avait un mandat du conseil d'administration, mais
on n'avait pas un mandat de l'assemblée générale.
M. Marois: D'accord, je comprends. Est-ce que je comprends bien
que votre conseil d'administration reflète les divers secteurs que vous
avez évoqués, que ce soit le secteur commercial, le secteur
industriel, le secteur domiciliaire?
M. Chagnon: II y a quatre grands secteurs et tous ces secteurs
sont représentés au conseil d'administration.
M. Marois: Je présume, j'imagine et je comprends - vous me
direz si je me trompe - que l'évaluation que vous faites, que tout le
monde fait, je pense bien, d'une situation économique
particulièrement difficile dans le secteur de la construction, notamment
dans le secteur domiciliaire, vous la faisiez aussi à l'époque du
30 mars ou au mois de mars de façon générale, si on veut.
(18 heures)
M. Chagnon: Oui, on a fait une évaluation de la situation
économique et elle se dégrade de jour en jour. En même
temps, il ne faut pas se le cacher, tout le monde parlait du gel des salaires,
à partir du gouvernement, et cette vague n'a pas été la
vague des Yvette, mais une vague est passée et on en est arrivé
au litige.
M. Marois: Je comprends. Vos offres et l'essentiel de la
requête ont par la suite été publiés au moins dans
un quotidien de Montréal, le 8 avril 1982.
M. Chagnon: Je n'ai pas compris.
M. Marois: Je dis que ce qui était contenu dans la
requête, notamment quant au contenu des propositions que vous formuliez
dans la requête que vous m'adressiez le 30 mars 1982, soit une
augmentation de base de 1,25 $ pour la première année et de 1 $
pour la deuxième année, c'était reflété dans
une annonce qui a été publiée par l'AECQ dans un quotidien
de Montréal, le 8 avril 1982, et qui reprenait même en
détail les taux de salaire selon chacune des catégories.
M. Chagnon: D'accord.
M. Marois: II y avait là-dedans, notamment, les poseurs de
revêtement souple, les plâtriers, les cimentiers-appliqueurs, les
briqueteurs-maçons, les carreleurs, les électriciens, les tireurs
de joints, les manoeuvres-journaliers, les charpentiers-menuisiers, les
couvreurs, les peintres. Bien que je ne sois pas un spécialiste de
l'habitation, je comprends que ces métiers-là sont non
exclusivement, mais notamment, des métiers qui oeuvrent dans le secteur
domiciliaire.
M. Chagnon: Dans les annonces qu'on a fait paraître dans
les journaux à plusieurs reprises, cela n'excluait pas l'habitation.
Cela comprenait tous les grands secteurs.
M. Marois: Bien sûr.
M. Chagnon: Là-dessus, le conseil avait donné le
mandat de faire paraître des annonces dans les journaux. Je peux vous
dire, M. le ministre, M. le Président, que concernant les annonces qui
ont paru, dans les jours qui ont suivi, on n'a pratiquement pas eu de plaintes,
quelques plaintes seulement. C'est à la dernière minute qu'il y a
eu une vague là-dessus.
M. Marois: Donc, je comprends que vous aviez non seulement les
publications mais que en plus vous aviez l'accord du conseil
d'administration.
M. Chagnon: Toujours.
M. Marois: D'accord. J'aurais une autre question. Pour l'instant,
cela nous permet de comprendre ce qui s'est passé. Je pense que cela
nous éclaire quant aux recommandations que j'aurai à formuler,
aujourd'hui même, à un Conseil des ministres spécial. Il y
a eu l'assemblée générale du 19 mai et cela a donné
le résultat que vous mentionnez au paragraphe 4 de votre note
écrite d'aujourd'hui. "Ce projet d'entente fut soumis pour ratification
à notre assemblée générale le 19 mai dernier. Le
scrutin secret compilé au vote simple, chaque entreprise ayant un vote
égal, a résulté en un rejet du projet d'entente dans une
proportion de 66%." Alors, selon vos statuts, c'est sur une base individuelle
que les votes se prennent.
Incidemment - ce serait une question additionnelle - votre association
n'est pas une fédération d'associations. C'est une association
qui regroupe des membres individuellement.
M. Chagnon: L'Association regroupe 15 000 membres au
Québec.
M. Marois: Comme vous l'avez vous-même confirmé tout
à l'heure, ce n'est un secret pour personne, le vote qui a eu lieu
auprès de vos membres est la source ou à la source - peu importe
la façon dont on le formule - de la mésentente ou de la
non-entente qui nous a amenés ici aujourd'hui. Sinon, vous aviez une
entente de principe signée entre les parties et, à ce
moment-là, les parties, de consentement, m'auraient acheminé une
demande de modification du décret dans le sens de l'entente de principe
intervenue, si tant est que cela avait été accepté.
Il y a une question que je voudrais vous poser. J'aimerais savoir, dans
le cadre de ce vote qui a été pris à votre
assemblée générale dûment convoquée du 19, si
vous avez procédé à un décompte - je comprends que
vous avez procédé à un décompte du vote individuel
tel que pris - pondéré de ce vote, à moins que ce ne soit
pas dans vos habitudes.
M. Chagnon: On a compté le vote simple et le vote
pondéré. Dans le vote pondéré, ça donnait
une majorité, si ma mémoire ne fait pas défaut, autour de
55%.
M. Marois: 55% de...
M. Chagnon: Du vote pondéré, 55% pour.
M. Marois: Comment cela s'est-il fait?
M. Dion (Michel): Si vous me le permettez, M. le ministre, c'est
habituel à l'AECQ. Chaque fois qu'on présente une convention - on
l'avait fait les deux fois auparavant - on procède à la fois au
vote simple et au vote pondéré. On n'a pas utilisé cette
fois-ci une procédure spéciale, on a procédé
exactement comme avant. Le vote simple, c'est un vote par membre. En
théorie, le maximum, c'est 15 000 votes qu'on pourrait avoir. Sur le
système de vote pondéré, chaque membre reçoit au
mois de septembre une pondération, c'est-à-dire que, selon les
heures qu'il travaille dans l'industrie de la construction, il a droit à
une unité de vote ou à deux, à cinq ou à quinze
unités de vote. La répartition est faite dans nos statuts depuis
que l'AECQ existe. Pour 5000 heures et moins, on a droit à un vote. De
5000 à 25 000 heures, c'est-à-dire des heures rapportées
officiellement à l'Office de la construction, on a droit à deux
votes. De 25 000 à 100 000 heures travaillées, on a droit
à cinq votes et, en haut de 100 000 heures, les gens ont droit à
quinze votes.
Pour ne pas vous embarrasser avec toute la procédure, le
système est assez simple. On identifie les gens par une couleur
lorsqu'on les enregistre. Le bulletin est de la même couleur que sa carte
et cela répond soit à un vote, deux votes, cinq votes ou quinze
votes. Quand on fait le décompte, en comptant le nombre de bulletins, on
obtient le total du vote simple et, en comptant les couleurs, en faisant la
séparation des couleurs, on a le vote pondéré.
Sur le vote simple, le vote s'est partagé, à quelque
dizaines près, 66-33. Sur le vote pondéré, c'est 54-46. Il
y a des fractions, 0,2, 0,3. Ce vote-là n'est pas officiel, ce n'est pas
prévu. Nos règlements ont prévu l'existence d'un vote
pondéré. Il y a quelques années, les membres ont
déjà tenté de modifier le règlement pour que la
convention soit acceptable selon le vote pondéré. Ce
règlement n'a pas été mis en vigueur. Le gouvernement
devait intervenir dans le processus de modification. Les membres avaient
accepté ce changement à 88% mais le gouvernement n'a pas
daigné
faire les changements de nos statuts. On fonctionne encore actuellement
selon le vote simple. Les gens à l'assemblée ont
été avertis que c'était un vote simple, mais
qu'effectivement on faisait également le vote pondéré.
Vous avez le résultat du vote. Ce n'est pas une procédure
spéciale qu'on a faite, mais c'est un vote qui se contredit, si on veut
le prendre de cette façon: le vote simple, 66-33; le vote
pondéré, 54 pour, 46 contre.
M. Marois: M. le Président, j'aurais une dernière
question pour l'instant. Je comprends que vous nous avez donné les
chiffres des deux votes qui font partie des habitudes, de vos statuts, de votre
mode de fonctionnement. Le vote simple, 66-33, vote concluant au sens...
M. Dion: Le vote légal.
M. Marois: ... légal. Par ailleurs - donc, tendance
inverse - sur une base de pondération, cela aurait été 54%
pour l'entente de principe et 46% contre. J'aurais une dernière
question: Pourquoi demandiez-vous que ce soit plutôt le vote
pondéré, à l'époque, qui soit le vote ayant,
comment dirais-je, un poids légal?
M. Dion: II faut se reporter assez loin dans le temps et remonter
jusqu'à la commission Cliche. Dans son rapport, la commission Cliche
prévoyait un système de vote pondéré au niveau de
l'association unique qui devait être créée, de façon
que, lors de la présentation d'un projet de convention collective, les
gens appelés à l'accepter ou à le refuser
représentent une majorité d'heures travaillées dans la
construction. Je n'ai pas la référence précise dans le
rapport de la commission Cliche, mais ceux qui ont lu ou qui peuvent lire le
rapport Cliche vont y retrouver l'explication de l'inclusion du vote
pondéré. Le vote pondéré n'était
prévu dans la commission Cliche, si je me le rappelle bien, que dans le
but d'accepter la convention collective ou de modifier nos statuts et
règlements. Or, nous, on ne l'utilise, c'est comme ça dans nos
statuts, qu'aux fins de modifications de nos statuts et règlements. Tout
le reste se fait selon le vote simple. Par exemple, s'il doit y avoir un
changement de cotisation, c'est au vote simple. Cela s'explique parce que tout
le monde peut être affecté par une cotisation de base; c'est le
vote simple à ce moment.
Ce vote reflétait, quand on l'a proposé aux membres, une
recommandation de la commission Cliche et les employeurs qui ont eu à
voter, lorsqu'on a proposé ces modifications à nos statuts, ont
reconnu que les heures travaillées avaient quelque chose à voir,
semble-t-il du moins, avec la décision de rejeter ou d'accepter la
convention.
M. Marois: Je n'ai pas d'autres questions pour l'instant, M. le
Président.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Dion: M. le Président, si vous me le permettez, ce
n'est pas du tout pour attaquer, c'est pour vous instruire des faits. On reste
convaincu que la légalité était le vote simple à
notre assemblée.
M. Marois: Ce n'est pas ce que je voulais mettre en cause. Je
voulais simplement qu'on nous explique bien les mécanismes...
M. Dion: Non, je sais, M. le ministre, c'était simplement
pour éclairer la commission.
M. Marais: ... et voir d'où provenaient les divers
mandats, comment s'était déroulé le processus, sur quels
mandats s'appuyaient les diverses étapes qui ont été
franchies et aussi comment s'était déroulé le vote et ce
que représentait telle ou telle façon de calculer le vote,
indépendamment de la question de la légalité. Je ne
conteste pas cela.
M. Dion: Ai-je bien compris votre question tantôt;
m'avez-vous demandé ce que cela représentait en heures ce que
cela donnait? M'avez-vous demandé cela?
M. Marois: Oui.
M. Dion: À toutes les assemblées, quand on termine,
on a l'inscription de tous les membres qui sont venus. À ce
moment-là, on peut référer à nos dossiers pour
aller chercher le calcul des heures sur la base du vote pondéré.
Par exemple, je prends les gens qui avaient un vote et je peux extrapoler pour
savoir combien ils ont exactement d'heures, ces gens qui ont voté. Je ne
sais pas pour qui ils ont voté, mais je peux vous dire que le total des
gens qui ont participé à un vote ont tant d'heures dans
l'industrie de la construction; ceux qui ont voté deux fois, tant
d'heures, les cinq votes, etc. Actuellement, le vote pondéré
représente environ 32 400 000 heures. Les gens qui ont voté
contre l'entente, c'est-à-dire les 46%, représentent environ 9
000 000 d'heures.
M. Marois: 9 000 000 d'heures?
M. Dion: Par rapport à 32 000 000.
M. Marois: Quand vous dites 32 000 000 d'heures, ce n'est pas le
total.
M. Dion: II y a 47 000 000 d'heures en tout pour ceux qui se sont
prononcés à cette assemblée. Si je le prends selon le vote
pondéré des heures, il y a 32 000 000 d'heures pour ceux qui se
sont prononcés pour l'entente. Je pense que c'est 37 000 000 et 8 000
000, quelque chose comme cela. C'est tout près. Il y a des fractions.
J'appelle fractions des 100 000 heures, mais ce sont quand même des
fractions.
M. Marois: Comme ordre de grandeur, ce serait...
M. Dion: C'est environ ce nombre. M. Marois: ... 37 000
000 pour.
M. Dion: 70% des heures ont voté pour et 30% ont
voté contre. J'ai les chiffres. Je ne pense pas que cela change quoi que
ce soit dans le discours, mais ceux qui avaient droit à un vote ont tant
d'heures, les deux votes, tant d'heures, etc.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Bélanger: M. le Président, je voudrais
également remercier les représentants de l'AECQ. J'ose
espérer que le Conseil des ministres, qui se réunira ce soir,
tiendra compte de l'intérêt des travailleurs.
L'intérêt des travailleurs, cela ne veut pas dire, M. le
Président, seulement augmenter les salaires des travailleurs. Il faut
s'assurer que ces travailleurs auront du travail. Je pense que c'est la
première chose, avoir du travail. J'espère que le Conseil des
ministres tiendra compte de la situation un peu particulière que nous
vivons en ce moment. On ne peut pas le nier, nous sommes devant une situation
de fait. Ce n'est pas, comme je l'ai mentionné tout à l'heure,
parce qu'on donnerait une augmentation de salaire de 3 $ ou 4 $ l'heure qu'on
aurait demain matin des chantiers en construction. Au contraire, je pense qu'il
faut tenter d'être raisonnable et, je l'ai dit, les travailleurs m'ont
semblé raisonnables en exigeant ou en acceptant -pas en exigeant, parce
qu'ils avaient exigé beaucoup plus - une augmentation de 10%. Mais,
encore là, il faudra tenir compte, M. le Président, du fait que
cette augmentation de 10%, même si elle est minime, va quand même
avoir un impact sur la construction résidentielle. On ne peut pas le
nier. Les faits sont là. Cela augmentera le prix de la
propriété de 2000 $. Donc, 2000 $, avec des taux
d'intérêt de 16% ou 17%, c'est dire qu'on augmente
immédiatement la mensualité de 30 $ à 45 $ par mois. Les
gens achètent une maison en fonction de leur capacité de payer et
non pas pour impressionner le voisin. On achète une maison selon la
capacité qu'on a de payer. Donc, 30 $ supplémentaires par mois,
c'est déjà beaucoup. Maintenant, je ne dis pas que les
travailleurs ne le méritent pas, parce que plus les travailleurs vont
gagner d'argent, plus ils seront susceptibles d'acheter eux-mêmes une
maison. Nous sommes dans un cercle vicieux. (18 h 15)
J'espère que le Conseil des ministres prendra en
considération tous ces éléments et que nous aurons, dans
les prochaines heures, une bonne nouvelle, à savoir que le décret
est renouvelé et que, demain matin, tous les chantiers seront ouverts.
Et non seulement cela mais, dans l'intérêt des travailleurs et des
Québécois en général, j'espère que le fameux
plan de relance de la construction domiciliaire qui nous a été
annoncé dans le budget, plan dont on ne connaît absolument rien et
qui, en ce moment, non seulement n'avantage pas, mais nuit totalement à
la construction domiciliaire... Il n'y a plus un acheteur -c'est
compréhensible - qui veut s'acheter une maison parce qu'il s'attend que,
d'ici quelques jours, on lui annonce qu'il pourra avoir une
propriété avec des taux d'intérêt à 13% ou
14% ou bien que la municipalité n'imposera plus de taxes pour tant
d'années, etc.
On a fait, d'ailleurs, la même chose lorsqu'on a lancé le
programme d'accès à la propriété. On a fait la
promesse électorale, vous vous en souviendrez, au mois de mars, juste
avant les élections. Par la suite, on a voté le projet de loi,
quelques mois à peine après, mais la commission parlementaire
établissant les critères d'admissibilité, cela a pris six
mois avant qu'on l'ait. J'espère que, cette fois-ci, M. le ministre,
vous convaincrez vos collègues qu'il est urgent que ce programme soit
connu dans les plus brefs délais possible, dans l'intérêt
des travailleurs de la construction. Merci.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Juste une remarque. Cela fait suite aux questions du
ministre au sujet du vote normal qui est pris et du vote pondéré.
C'est parce qu'il y a une difficulté. Probablement que le ministre avec
ses collaborateurs pourra l'apprécier, mais, d'un autre
côté, pour quelqu'un qui regarde ce qui est en train de se passer
et compte tenu, comme le signalait mon collègue de
Mégantic-Compton, de l'élément majeur du ministre des
Finances pour relancer l'économie - dont il a été question
d'ailleurs au sommet économique - d'une relance de la construction
domiciliaire, je me demande...
Il y a, évidemment, un certain nombre d'aspects que M. Chagnon a
évoqués; entre
autres, il y a le document qu'on a ici de l'Association provinciale des
constructeurs d'habitations. Je ne sais pas, M. le ministre, si on peut
l'inclure au procès-verbal de la réunion sans entendre les
personnes, en le déposant simplement et en le mettant en annexe au
journal des Débats.
M. Chagnon: M. Rivest...
M. Marois: M. le Président, je ne peux pas décider
d'une telle chose. C'est bel et bien stipulé à l'article 1c que
l'association d'employeurs, c'est l'Association des entrepreneurs en
construction du Québec. Si l'AECQ, l'Association des entrepreneurs en
construction du Québec, décide de faire sien un document, de le
déposer, je n'ai pas à intervenir dans la façon de
procéder, dans les statuts internes, les règlements et les
mandats qui sont donnés et parfois retirés et modifiés
à l'intérieur d'un organisme ou d'un autre.
M. Rivest: Je vais poser la question directement. Ce document a
circulé et plusieurs personnes en ont pris connaissance. Il est public.
Qu'il soit dans le journal des Débats ou qu'il ne le soit pas, peu
importe, mais je voudrais être en mesure d'évaluer cette
pondération. Je disais tantôt que le ministre pourrait le faire,
parce que cette pondération que vous avez expliquée à
l'intérieur de l'AECQ existe également, d'après les
informations qu'on me communique, à l'intérieur même de
l'association provinciale, puisqu'il y a des entreprises de tailles
différentes également dans cette association qui regroupe les
constructeurs d'habitations domiciliaires.
Ma question, c'est: En regard de la réalisation éventuelle
du programme d'habitation, de relance économique, êtes-vous en
mesure, à l'AECQ, d'indiquer à la commission et au gouvernement
ultimement les conséquences, sur les entreprises de construction
domiciliaire, d'une augmentation des taux des salaires de 10%?
Évidemment, c'est un choix que le gouvernement va devoir faire. Comme
mon collègue de Mégantic-Compton l'a dit, 10%, dans le contexte
actuel, pour les travailleurs, ce n'est pas la mer à boire,
c'est-à-dire que c'est vraiment un minimum. Quelles vont être les
conséquences économiques sur l'ensemble de la collectivité
pour les constructeurs d'habitations domiciliaires au point de vue de l'AECQ?
Parce qu'on a déjà le point de vue de l'Association des
constructeurs d'habitations domiciliaires qui est quand même assez clair
là-dessus. Est-ce que vous pourriez émettre un commentaire
là-dessus?
M. Chagnon: Je ne connais pas la position de l'association des
constructeurs d'habitations, à part de l'avoir vue dans les journaux,
etc. Une chose est claire, c'est que l'AECQ doit défendre tous les
entrepreneurs du Québec, aussi bien dans le secteur de l'habitation que
dans les trois autres secteurs. Ce sont des entrepreneurs qui sont membres de
notre association et, concernant des documents qu'ils veulent déposer
à la commission, pour nous, il n'en est pas question parce qu'on
regroupe tous les entrepreneurs du Québec. Toutefois, je peux m'engager
à ce que le comité qui sera formé, si le conseil m'en
donne le mandat, étudie page par page ce document? Toutes les
étapes seront suivies.
M. Rivest: Le document que j'ai ici expose leur point de vue et
c'est bien légitime. Il y a des arguments, des données
statistiques qui pourraient laisser penser, quand on le regarde rapidement,
qu'effectivement, comme on l'a signalé antérieurement, il
pourrait y avoir un certain nombre de petits entrepreneurs dans le domaine
domiciliaire qui auraient énormément de difficultés. Au
fond, on est placé devant la balance des inconvénients. S'il y a
des entrepreneurs, dans le domaine de la construction domiciliaire, qui
ferment, etc., ce sont des jobs que les travailleurs perdent.
D'un autre côté, il y a des gens par contre, dans le
domaine de la construction qui vont devoir travailler peut-être plus,
avec le programme annoncé dans le budget de M. Parizeau, et eux ont
très légitimement le droit d'avoir des conditions de travail, les
10%, même si l'idée de gel que vous avez avancée a
été évoquée, bien sûr, par le gouvernement.
Je ne pense pas qu'on puisse dire que les travailleurs de la construction,
compte tenu de l'industrie dans laquelle ils oeuvrent, ont sensiblement les
mêmes conditions de travail que d'autres travailleurs, comme ceux du
secteur public, à qui on applique un gel.
M. Chagnon: D'accord. Tout à l'heure, M. le
Président, on parlait de la lettre du 30 avril 1982 dans laquelle on
demande un gel des salaires pour un an, surtout dans le secteur de
l'habitation, mais dans les autres secteurs aussi. Je pense qu'il est clair,
concernant le deuxième volet de votre question, le document que vous
avez en main concernant l'habitation, que M. Rousseau et son président
ne nous ont jamais demandé de les rencontrer pour étudier ce
document. Troisièmement, même s'ils ne me l'ont pas
demandé, je m'engage à le faire regarder article par article par
le comité qui sera formé. C'est là que sera le mandat du
comité.
Le Président (M. Laplante): Je voudrais éclaircir
une chose avant d'aller plus loin dans la commission. Le document cité
par le
député de Jean-Talon ne sera pas inscrit au
secrétariat de la commission, ni au journal des Débats. Tel que
je l'ai annoncé au début de la commission, seuls les cinq
organismes qui ont produit un mémoire, que j'ai nommés lorsque
j'ai fait l'appel des groupes, sont inscrits au journal des Débats et
leurs documents seront inscrits au secrétariat des commissions. C'est
pour enlever toute ambiguïté dans l'assistance. D'accord? M. le
ministre.
M. Marois: M. le Président, je voudrais, en conclusion, en
ce qui me concerne, remercier aussi bien les porte-parole de l'Association des
entrepreneurs en construction du Québec que les divers groupes qui se
sont déplacés, qui se sont donné la peine de venir nous
rencontrer. J'ai bien compris - je voudrais revenir là-dessus pour
être très clair - les divers mandats qui ont été
donnés par le conseil d'administration de l'Association des
entrepreneurs en construction du Québec. Je comprends que ces divers
mandats concernaient aussi bien la requête qui m'a été
soumise le 30 mars 1982 que les publications dans les journaux avec les taux de
salaire dont, d'ailleurs, les textes étaient très clairs. Cela
concernait aussi bien l'habitation que le commercial et l'industriel,
c'est-à-dire l'ensemble des secteurs. Tout cela a été
dûment publié. Les négociations ont été
dûment menées, en pleine conformité avec les mandats
légalement donnés par le conseil d'administration.
Je comprends que ces offres patronales, à l'époque,
correspondaient à des chiffres très précis, notamment 1,25
$ pour la première année, et 1 $ pour la deuxième
année. Le président de l'AECQ nous a bien expliqué que le
conseil d'administration avait bien évalué ces mandats, à
la fois quant à leurs dimensions économiques, quant aux
retombées économiques, à l'impact économique sur la
construction dans les divers secteurs, et en tenant compte aussi, je
présume, à la lumière des discussions et des commentaires
qui nous ont été faits, du fait que 10%, comme plusieurs l'ont
dit, on ne peut pas dire que c'était la fin du monde, avec un minimum de
1,25 $, suivi d'un minimum de 1 $.
Je transmettrai, d'ailleurs, les remerciements qui sont venus des
diverses parties - je pense que c'était presque unanime au service de
conciliation - quant au travail qui a été fait par le
médiateur, au travail qui a été fait par mon
collègue, tout au long de ces rencontres, pour tenter d'en arriver,
effectivement, à une entente de principe.
Notre objectif, partant de là, maintenant, c'est de nous assurer,
d'une part, qu'il n'y a pas, à minuit, ce soir, de vide juridique, que
les travailleurs sont protégés, qu'il y a un décret, qu'il
y a une convention collective. On regardera attentivement les points qui ont
été portés à notre connaissance et,
également, on tiendra compte - je vous le dis très clairement -
du plan de relance. C'est un plan qui implique des discussions entre
différentes parties. Certaines parties nous ont même
signalé qu'elles seraient intéressées à être
admises à ces discussions, à y participer. Il y a aussi une
volonté manifeste, me semble-t-il, de la part des travailleurs. Je
recoupe les annonces publiées et je regarde les rapports de
médiation, je regarde les ententes de principe, je regarde le
résultat de tout ça et il semble aussi se dégager une
conscience très nette non seulement des employeurs sur la base de leurs
offres, mais aussi des travailleurs d'apporter une contribution dans une
situation pas facile sur le plan économique. Je pense que tout le monde
a admis que c'était plus que raisonnable, la base de l'entente de
principe, que ça impliquait déjà, économiquement,
une première forme de participation des travailleurs dans le contexte
d'une situation économique pas facile.
Il va de soi que, par-dessus cela, de façon additionnelle et
complémentaire, le gouvernement entend faire tout ce qui est humainement
possible, dans le cadre des choses qui sont en voie d'être
discutées, pour mettre au point, dans les plus brefs délais, un
plan de relance dans le secteur de la construction, particulièrement
dans le secteur domiciliaire. Éventuellement, il faut nous assurer que
l'ensemble de ces morceaux-là s'arrime d'une façon telle que se
maintienne à la base une paix sociale, particulièrement dans une
situation économique qui n'est pas facile.
Donc, encore une fois, M. le Président, je voudrais remercier les
membres de cette commission et les divers intervenants qui se sont
présentés devant nous.
Le Président (M. Laplante): Vous avez un dernier mot?
M. Rivest: Oui, un dernier mot au ministre. Si le ministre avait
à sa disposition des études - compte tenu de la décision
qu'il devra prendre et qui n'est pas facile, j'en conviens volontiers -
d'impact économique sur la décision qu'il va prendre, j'aimerais
bien qu'il puisse, au moment où il annoncera sa décision ou dans
les jours qui viendront, rendre publiques les données économiques
sur lesquelles s'appuiera la décision qu'il doit prendre avec ses
collègues ce soir, à la réunion spéciale du Conseil
des ministres.
M. Marois: On va tenir compte, M. le Président, de
l'ensemble de ce qu'on connaît, de ce qui est devant nous, de ce qui est
public, de ce qui a été porté à la connaissance de
tous et chacun, à partir des
documents, des études qui ont été, encore une fois,
soulignées aujourd'hui, des témoignages aussi qu'on a entendus
ici en ce qui concerne les circonstances qui font qu'une telle commission
parlementaire a dû avoir lieu, malgré le fait qu'il s'agissait
clairement et très nettement d'une première dans le monde des
relations du travail dans le secteur de la construction, c'est-à-dire le
fait que soit intervenue une entente de principe dûment signée par
des parties légalement et dûment autorisées à le
faire, également, des commentaires qui ont pu nous être faits
concernant tel coin ou tel angle de cette entente.
Le Président (M. Laplante): Sur ce,
MM. Thériault, Langlois, Dion et Chagnon, les membres de cette
commission vous remercient pour votre participation. La commission élue
permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de la sécurité du
revenu s'est réunie afin d'entendre des organismes en regard des raisons
motivant l'impossibilité de s'entendre relativement aux modifications
à apporter au décret de la construction adopté par le
décret 3938-80 du 17 décembre 1980. Je prierais le rapporteur de
faire rapport à l'Assemblée nationale. Les travaux sont
ajournés sine die. Merci.
(Fin de la séance à 18 h 30)