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Etude du projet de loi no 45
(Dix heures sept minutes)
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, madame et
messieurs!
La commission permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de
l'immigration est réunie pour poursuivre l'étude article par
article du projet de loi no 45, Loi modifiant le Code du travail et la Loi du
ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Les membres de la
commission sont M. Bellemare (Johnson) remplacé par M. Russell
(Brome-Missisquoi); M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Brochu (Richmond)
remplacé par M. Goulet (Bellechasse); M. Ciaccia (Mont-Royal), M.
Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Couture (Saint-Henri), M. de Bellefeuille
(Deux-Montagnes), M. Forget (Saint-Laurent), M. Gosselin (Sherbrooke)
remplacé par M. Gagnon (Champlain), M. Johnson (Anjou), M. Jolivet
(Laviolette), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Laplante (Bourassa), M. Lavigne
(Beauharnois), M. Mackasey (Notre-Dame-de-Grâce), M. Marois (Laporte)
remplacé par M. Godin (Mercier); M. Pagé (Portneuf), M. Roy
(Beauce-Sud).
M. Chevrette: M. le Président, on avait dit hier qu'on
nommerait des gens, est-ce que vous avez nommé M. Jean-Guy Mercier?
Le Président (M. Marcoux): M. Mercier va remplacer M. de
Bellefeuille. M. Jean-Guy Mercier (Berthier) pour remplacer M. de Bellefeuille
(Deux-Montagnes). Est-ce qu'il y a d'autres changements?
La première convention collective
Le Président (M. Marcoux): Nous en étions à
l'article 44; adopté?
M. Forget: Vous êtes trop vaillant, M. le Président.
On voit que c'est le matin.
Le Président (M. Marcoux): Je posais une question. C'est
parce que j'ai passé une bonne nuit. M. le ministre.
M. Johnson: M. le Président, l'article 44 vise
l'intervention du ministère face à une première convention
collective. Il comprend un processus que je vais décrire rapidement
juste au cas où ce ne soit pas clair au niveau du texte. S'il y a une
première convention collectives, si les parties, quelle que soit la
phase de négociation, ne s'entendent pas, l'une d'elles peut faire appel
au ministre, qui envoie, à ce moment, un personnage qui a d'abord et
avant tout un rôle de médiation. Si, lors de cette
médiation, il se rend compte qu'il est incapable d'obtenir une entente
entre les parties, il peut décider qu'il se prononcera au fond de la
convention.
A partir du moment où il fait rapport au ministre qu'il ne peut
pas rapprocher les parties, mais devra se prononcer au fond de la convention
ou, en pratique, rédiger la convention, le lock-out ou la grève
doit prendre fin. L'arbitre rend sa sentence en étant lié par
deux sortes d'éléments. Il faudra peut-être qu'on pense
à ajuster le vocabulaire en cours de route quand on y sera, paragraphe
par paragraphe. Le premier élément, c'est toute forme d'entente
entre les parties, évidemment.
On sait qu'en pratique, quand un tribunal d'arbitrage a à se
prononcer dans ces circonstances où il est obligatoire et, finalement,
ça ressemble un peu à l'arbitrage obligatoire de la
première convention collective si ça ne fonctionne pas. On sait
que les parties ont tendance à s'entendre, signer des lettres d'entente,
des protocoles, etc., l'arbitre doit être lié par toutes ces
ententes, ce qui est normal. Deuxièmement, par une formule qui n'est
peut-être pas la plus heureuse, mais au sujet de laquelle on aura
à discuter en cours de route, on dit que l'arbitre doit tenir compte
d'événements d'environnement. Il y a un problème
d'interprétation au sujet de la notion de conditions similaires que nous
aurons à soulever sans doute en cours de route. Mais il doit tenir
compte d'un environnement. C'est un peu vague, mais on veut tenir compte d'une
réalité, par exemple, qui peut être la
réalité régionale, le type d'entreprise dans une
région donnée, etc.
Mais, à partir du moment où l'arbitre a rendu sa sentence,
elle est évidemment exécutoire pour une période maximale
de deux ans. Finalement et effectivement, j'avais l'intention, plutôt que
de l'apporter sous forme de texte amendé... je mentionnerai simplement
qu'à l'article 81h, pour des raisons qu'il me fera plaisir d'expliquer
quand on sera rendu là, on supprimerait "qu'elle ne peut
ré-troagir au-delà de six mois à compter de cette date".
On supprimerait simplement cette restriction quant à la
rétroactivité de la convention collective.
Je m'excuse, M. le Président, rendu à l'article 81h, en
fait, ce qu'il faudrait supprimer, c'est "à compter du moment de son
dépôt "et" elle ne peut rétroagir au-delà de six
mois à compter de cette date".
M. Forget: A compter du moment de son dépôt?
M. Johnson: C'est ça. L'article 81h dit: "La sentence
arbitrale lie les parties pour une période d'au moins un an et d'au plus
deux ans, à compter du moment de son dépôt. Elle ne peut
rétroagir au-delà de six mois à compter de cette date.
L'article se lirait comme suit; La sentence arbitrale lie les parties
pour une période d'au moins un an et d'au plus deux ans. Les parties
peuvent cependant convenir d'en modifier le contenu en partie ou en tout.
Une Voix: C'est votre proposition?
M. Johnson: On supprimerait à la fois la notion de
"à compter du dépôt" qui est là, en fait, pour
permettre de faire référence à quelque chose quand on
parle de rétroactivité.
Bon! M. le Président, je présume qu'on va l'aborder
paragraphe par paragraphe.
M. Forget: Oui, mais, pour ce qui est de la procédure, je
pense qu'on pourrait le faire paragraphe par paragraphe, avec une seule
réserve, M. le Président, peut-être que vous pourrez nous
donner une indication là-dessus. Il y a effectivement une modification
que nous chercherions à y apporter; c'est ce qui se comprend mal ou ne
s'explique presque pas, si on se borne à une modification au premier
paragraphe. Je demanderais votre permission pour présenter,
simultanément, un ensemble de trois motions qui modifient les trois
premiers paragraphes, parce que je pense que c'est la seule façon de le
faire, mais qu'on discutera de façon groupée, de manière
à les rendre plus intelligibles; autrement, on va rendre la discussion
presque impossible étant donné que, prise isolément, la
modification au premier paragraphe n'aurait aucun sens si on laisse les autres
paragraphes tels qu'ils sont.
Il n'y a pas de problème là-dessus, M. le
Président?
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que vous entendez tenir
des propos généraux avant d'en venir à ces
amendements?
M. Forget: Oui, avec votre permission, en effet. Est-ce que je
commence tout de suite?
Le Président (M. Marcoux): Oui.
M. Forget: Nous sommes devant une disposition entièrement
nouvelle de la loi 45, de nos lois du travail. C'est une disposition qui a
beaucoup de choses qui peuvent susciter et vont susciter effectivement des
commentaires, mais, dans mes remarques préliminaires sur l'ensemble de
cette section I A, je vais me limiter aux considérations
générales.
La première considération générale qui me
vient à l'esprit, c'est que cette disposition arrive un peu comme un
cheveu sur la soupe, dans le sens que, contrairement à la plupart des
autres modifications qui sont incorporées dans le projet de loi 45,
c'est la dernière arrivée, ou à peu près; il y a
une ou deux autres notions de ce genre qui sont arrivées au tout dernier
moment. Ce n'est pas une mesure qui a fait l'objet du même genre de
discussion, pendant aussi longtemps et de façon aussi ouverte, que les
autres propositions, celles qu'on étudiera peut-être aujourd'hui
relativement à l'arbitrage, celles qui sont intervenues au niveau du
processus d'accréditation et qui étaient sur le tapis depuis
longtemps et au sujet desquelles presque tout le monde qui avait quelque chose
à dire s'est exprimé.
C'est quelque chose de beaucoup plus récent que cette notion de
l'arbitrage obligatoire d'une première convention collective et, dans le
fond, tout ce qui a été avancé par le ministre
là-dessus l'a été à titre d'affirmation presque
gratuite, dans le sens au moins où il ne s'est pas donné la peine
de déposer quelque étude fouillée que ce soit, ni
même quelque donnée que ce soit pour permettre d'évaluer
l'importance du phénomène auquel on veut remédier. Il a
affirmé que la première convention collective était un
point d'accrochage particulièrement important, qu'il donnait lieu, plus
que d'autres conventions collectives, à des conflits difficiles et
interminables. Mais c'est une affirmation qui pourrait faire l'objet d'une
étude objective; on pourrait nous donner des chiffres là-dessus,
d'autant plus que, lorsque nous avons eu une mini-commission parlementaire pour
entendre, de façon sommaire, les représentants syndicaux et les
représentants patronaux, on a eu un démenti formel qui a
été apporté à cette prétention du ministre,
de la part de certains porte-parole syndicaux. On a dit que la première
convention collective est un phénomène qui n'est pas
essentiellement différent de celui d'une autre négociation.
On est en face, donc, pour celui qui n'a pas accès à tous
les chiffres et à toutes les études du ministère, de deux
affirmations contradictoires et d'aucun effort véritable pour
éclaircir vraiment la situation et nous donner une image
détaillée, articulée, des problèmes qui peuvent
être soulevés ou qui peuvent ne pas être soulevés par
une première convention collective, par opposition aux autres. C'est
bien sûr qu'on va pouvoir nous citer un certain nombre de cas où
la première convention collective a suscité des problèmes,
mais ce n'est pas une démonstration qu'il faut des dispositions
spéciales dans le Code du travail parce qu'on pourrait faire cela
fait longtemps qu'on le dit des exemples; ce n'est pas une
démonstration. Même si on peut citer des exemples, on n'a pas
nécessairement à faire la preuve, en donnant des exemples, que le
problème est vraiment spécial.
Le ministre citait la nuit dernière, l'évolution qu'a
connue la législation du travail au Québec depuis l'ancienne loi
qui a précédé la loi sur les relations ouvrières
je ne me souviens pas comment elle s'appelait de 1944, où
il y avait plusieurs procédés: il y avait la conciliation
obligatoire, il y avait l'arbitrage, etc. C'était très
structuré. Effectivement, il a mentionné que, parmi cet
enchaînement de procédures, dès 1944 et cela,
jusqu'à 1964, il y avait l'arbitrage obligatoire. Voici que, à
l'occasion d'un problème qu'il prétend être spécial,
mais au sujet duquel d'autres ont dit devant nous qu'il ne l'était pas,
il réintroduit une mesure qui a été abandonnée et
il y a treize ou quatorze ans, comme étant une mesure
désuète, l'arbitrage obligatoire, arbitrage qui vient s'imposer
aux parties sans qu'elles veuillent, d'un commun accord, que l'arbitrage
facultatif soit dans le code.
Au fond, même s'il n'est pas dans le code, je pense bien que si
les parties s'entendaient pour faire arbitrer une querelle, on n'a même
pas besoin de disposition du code; mais c'est dans le
code. De toute manière, il n'y a évidemment pas
d'objection à cela. Mais qu'une disposition intervienne dans le code
pour que l'arbitrage se fasse même si une des parties ne le souhaite pas,
cela semble à peine une mesure progressiste qui s'inscrit dans la ligne
d'évolution de notre législation du travail, puisque comme le
ministre l'indiquait hier soir, cela a déjà été
là comme recours général et cela a été
abandonné.
Donc, deux points généraux, à ce jour, l'absence
des données, d'études et l'absence même d'une discussion
vraiment structurée sur un nombre de mois et d'années suffisant
pour nous permettre de prendre un certain recul relativement à ces
dispositions, contrairement à d'autres dispositions du Code du travail
qui ont été largement débattues. Il y a un aspect de
nouveauté qui ne permet pas de compenser des études
sérieuses, fouillées, qui permettraient de savoir si c'est le
ministre ou si ce sont les gens qu'on a entendus en commission parlementaire
qui a raison là-dessus.
D'autre part, l'introduction dans notre loi du travail, la
réintroduction, devrais-je dire, d'un principe d'arbitrage qui est
imposé à au moins une des parties et qui pose toutes sortes de
problèmes, c'est de s'écarter de la philosophie que le ministre,
avec notre appui le plus total d'ailleurs, prétend introduire, et qui
est de laisser aux parties le plus possible le soin de déterminer leurs
relations et les rapports qui les régissent dans le cadre le moins
contraignant possible, le moins tatillon ou interventionniste possible. Je
pense bien que le ministre a fait quelques accrocs à ce principe en
cours de route, mais il reste qu'au moins, il a proclamé son attachement
au principe et c'est déjà beaucoup, puisque cela nous permet au
moins de le référer à ses propres principes, à
l'occasion, avec le sentiment qu'on est sur un terrain commun, quelles que
soient les dérogations qu'il se permet.
Mais dans ce cas-ci, il s'en permet une, très
sérieusement. Je me demande si on ne peut pas voir là un signal
de la part du gouvernement. Je déborde peut-être un peu du
caractère presque rigoureusement technique des remarques que je faisais
jusqu'à maintenant, mais je me demande si on ne peut pas voir dans
l'évolution de la pensée du gouvernement, telle qu'elle
s'applique au problème, s'il y a un problème particulier, au
moment de la première convention collective, l'évolution de la
pensée du gouvernement qui pourrait porter des fruits fort surprenants
et fort controversés, j'en suis sûr, si on voulait l'appliquer
dans d'autres domaines.
En effet, dès qu'on dit: II y a un problème particulier de
la première convention collective, que ce soit vrai ou pas, qu'on puisse
contester ça ou pas, admettons, pour les bénéfices de
l'argument, qu'il y a un problème particulier. Quand il y a un
problème particulier, il semble que le gouvernement actuel pense que
l'arbitrage obligatoire peut être une solution à un
problème particulier. Il y a d'autres problèmes particuliers dans
le domaine du travail, M. le Président, j'ai à peine besoin de le
signaler.
Il y a même une commission, ou un comité d'étude ou
un groupe de travail je ne sais pas comment le qualifier le
groupe de travail Martin, sur le problème très particulier, sans
aucun doute, qui existe dans le secteur public et parapublic.
Serait-il imaginable de concevoir qu'on se dirige, de ce
côté-là aussi, en face d'un problème particulier,
vers une solution particulière, et est-ce que l'arbitrage obligatoire,
qui semble la solution favorisée à un problème particulier
par le gouvernement, pourrait être également une bonne solution
pour cet autre problème particulier? Je ne peux pas m'empêcher d'y
voir une adhésion à une modalité de solution qui, en plus
d'être un retour en arrière, peut sans aucun doute, être
l'annonce de choses à venir dans le futur lorsque d'autres
problèmes particuliers se posent.
Dans l'attitude que l'on a pu observer chez le patronat, mais
peut-être plus particulièrement encore dans le mouvement syndical,
je pense qu'il y a une certaine, pour ne pas dire plus, une certaine
ambivalence. On est probablement heureux de disposer d'un instrument qu'on
pourra utiliser contre des patrons de mauvaise foi, selon l'expression bien
connue, mais on ne peut pas faire autrement, j'imagine, que de se poser la
question, à quel moment cet instrument va être tourné
contre un syndicat.
Si on laisse s'accréditer dans notre loi du travail, en 1977,
presque en 1978, l'idée d'un arbitrage obligatoire, parce qu'il y a
quelque chose qui n'est pas tout à fait pareil aux autres situations, on
met le pied dans la porte de l'arbitrage obligatoire et après ça,
on pourra, du côté gouvernemental, argumenter sur un
précédent créé pour dire: Voyez, on l'a fait dans
les premières conventions collectives et qu'est-ce que vous aviez, vous
du mouvement syndical; vous n'avez pas déchiré votre linge, vous
ne vous êtes pas roulés par terre en public, après tout. Si
c'était bon pour régler un problème qui vous
intéresse, pourquoi est-ce qu'on ne l'utiliserait pas pour régler
un problème qui intéresse d'autres, le public, les malades, etc.?
C'est un raisonnement qu'on pourrait tenir.
M. Johnson: C'est vous qui avez adopté la loi 253, si je
ne m'abuse. C'était cela votre administration?
M. Forget: La loi 253. Si le ministre veut qu'on parle de la loi
253, mais je ne voudrais pas anticiper sur une autre discussion, M. le
Président, on pourrait parler de la loi 253 pendant au moins une heure,
si vous le souhaitez. Il y a beaucoup de choses qu'on peut dire
là-dessus, très certainement.
M. Jolivet: La commission Martin s'en charge.
M. Forget: Le Parlement étant souverain, on n'a pas besoin
d'attendre la commission Martin pour parler de la loi 253. Mais, justement, il
va falloir régler le problème des services essentiels, il va
falloir régler le problème des hôpitaux et peut-être
des écoles, quoique... Il n'y a pas 22 000 solutions.
Qu'on ne se fasse pas d'illusion, on ne réinventera pas la roue
en janvier ou en février. On va retomber sur le terrain très
familier des solutions déjà connues, déjà
explorées, et on va pouvoir modifier des modalités de
détail, mais il n'y a pas 22 000 solutions à ce problème.
Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée. On va voir justement si on
l'ouvre ou si on la ferme, mais il n'y a pas 22 000 situations.
J'ai évidemment une citation littéraire et
particulièrement appropriée au moment où le
député de Mercier se joint à nous, je le salue d'ailleurs,
mais, pour être sérieux deux minutes, il reste que cette
question...
Le Président (M. Marcoux): II vous reste environ quatre
minutes pour introduire votre amendement en même temps.
M. Forget: Ah! M. le Président, si on ne vous avait pas,
il faudrait vous inventer.
Le Président (M. Marcoux): J'allais dire que vous avez
passé une nuit reposante.
M. Forget: Au contraire, mais on finit par être philosophe,
M. le Président. Je vais effectivement en venir à la proposition
d'amendement, parce qu'il y a c'est là-dessus que je termine mes
remarques générales dans cette question d'arbitrage une
chose absolument curieuse. C'est qu'on demande au ministre de s'impliquer de
façon singulièrement profonde dans le processus de
négociation, lorsqu'au moment d'une difficulté dans la
négociation d'une première convention collective, on lui demande
à lui d'intervenir, d'intervenir presque personnellement, sans lui
donner aucune balise véritable dans l'évaluation de la situation
et dans la décision de décréter un arbitrage obligatoire.
C'est la raison pour laquelle il y a une approche différente qu'on
aimerait soulever, qui fait l'objet des motions d'amendement que je vais lire
à la suite.
Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, il y en a trois qui
visent les trois premiers alinéas ou est-ce que ce sont des paragraphes.
Ce sont des paragraphes, je pense: paragraphes 81a, 81b, 81c. C'est
essentiellement le principe d'un arbitrage obligatoire, le même, puisque
le principe étant adopté en deuxième lecture, M. le
Président, on ne peut pas s'en éloigner. Mais, la modalité
d'enclenchement est différente puisqu'elle fait appel au tribunal du
travail plutôt qu'au ministre. M. le Président. Avant de les
présenter, je vais garder une minute et demie ou deux minutes et quart
qui me restent pour donner une chance à nos collègues de l'Union
Nationale de faire leurs remarques générales et je reviendrai une
fois qu'ils auront terminé pour présenter les motions
d'amendement.
Le Président (M. Marcoux): Je pense que cela va faciliter
nos travaux. M. le député de Brome-Missisquoi.
M. Russell: M. le Président, d'une façon
très brève, on ne peut pas trop s'étendre. Je sais qu'on
veut tâcher d'accomplir aujourd'hui beaucoup de besogne, le plus
possible. Pour ce faire, je vais tâcher de coopérer au maximum
pour cette réussite. Je vous en prie, parlez plus fort, peut-être.
C'est le premier exposé du matin. On a la voix plus faible. M. le
Président, je comprends que ce paragraphe est un paragraphe très
délicat et très sensible. Je sais qu'au ministère du
Travail on a un bagage d'expériences qu'on a certainement
évoquées pour en arriver à des amendements, comme on le
propose ce matin à la loi 45. Il y a aussi, il faudrait peut-être
demander au ministre, il pourra répondre tout à l'heure, s'il
s'est référé à la loi de la
Colombie-Britannique.
Je sais qu'elle a été amendée il y a
déjà quatre ans. Donc quatre ans d'expérience dans un
article un peu semblable à celui-là, à savoir que les
employeurs peuvent demander l'arbitrage aussi bien que les employés. Si
le ministre pouvait nous dire où il a pris ses informations pour nous
arriver avec un article comme celui-là auquel je ne suis pas
complètement opposé même si j'ai des réserves sur
certains points.
Quand il s'agit d'une première convention collective, souvent on
arrive dans des situations assez délicates et assez difficiles. Je
prends des cas bien particuliers dans l'entreprise privée où il y
a des gens qui ont exploité des industries pendant des années
sans syndicat et qui ont toujours conservé ce paternalisme. A un moment
donné, on se réveille un matin et on passe à un syndicat.
Il y a là une réticence qui est très marquée
surtout avec les membres de nos syndicats d'aujourd'hui, avec la coutume de
demander toujours deux fois plus pour accepter bien souvent 10% de ce qu'on
demande. Cela crée une situation presque inacceptable, un climat
très mauvais. J'accepte le principe de l'arbitrage, à la suite
d'un examen très méticuleux de la situation. C'est pour cette
raison que je me posais des questions à l'article 81c. On disait que le
ministre peut je présume et je n'ai pas de doute sur la bonne foi
du ministre actuel qu'il examinera en profondeur la situation avant de
donner droit à cet arbitrage qui souvent est extrême, comme le
disait le député de Saint-Laurent, arbitrage qui peut, encore
là, brimer une partie, soit le syndicat ou le patron, d'un
privilège de cette négociation qu'on veut quand même
conserver.
Le ministre actuel ne sera pas toujours là. Il aura
peut-être un successeur demain. Lui n'aura peut-être pas la
même...
Une Voix: D'en mourir.
M. Johnson: Je ne voudrais pas mourir sur la job.
M. Russell: Demain, il y aura un successeur et, si on conserve
cet article ou ce principe, cela pourra peut-être devenir dangereux de
brimer des gens qui sont de bonne foi ou veulent négocier et qui se font
imposer l'arbitrage. Par contre, je me demande si c'est là la meilleure
façon de régler
ces problèmes. On a de l'expérience, au ministère,
actuellement, dans les conditions de travail. La Colombie-Britannique a une
clause un peu semblable à celle-là, sinon presque authentique; on
pourrait peut-être, si on l'a examinée, nous dire l'histoire
passée de cette loi, la façon dont elle a fonctionné. Je
sais que ça n'a pas toujours bien fonctionné en
Colombie-Britannique, mais il y a certainement des statistiques qui ont
été établies pour savoir comment on l'a utilisée,
cette clause, quels ont été les résultats de cette clause.
Est-ce que cela a été fructueux? Est-ce que cela a
été désastreux? Je pense qu'on a certainement là
des réponses.
Par contre, disons qu'on l'enlève, on l'amende, on ne la met pas,
cette clause. De quelle façon règle-t-on ces grèves qui
durent des mois et des mois, qui sont économiquement un désastre
pour le syndicat, aussi bien que l'employé, qui est entêté,
qui va souvent se couler plutôt que de céder? Je pense qu'on doit
penser à trouver un mécanisme pour les régler, et je me
demande si on en a un meilleur. Actuellement, je ne suis pas prêt
à condamner celui-là. J'ai des questions, j'ai des
réserves. J'ai un peu de réticence mais, si on n'en a pas de
meilleur à proposer, je serais prêt à accepter
celui-là, je serais prêt à recommander celui-là.
Je parle peut-être en mon nom personnel plutôt qu'au nom du
parti, par l'expérience vécue personnellement dans des cas bien
particuliers de l'entreprise privée. Je connais aussi des cas dans
l'entreprise publique où il aurait peut-être été
mieux d'avoir l'arbitrage que de laisser un tiraillement se dérouler
pendant des mois et des mois. Donc, le ministre, tout à l'heure,
pourrait peut-être nous donner un peu des statistiques qu'il a
recueillies, nous dire de quelle façon il s'est penché sur cette
expérience passée et sur quoi il s'est basé pour nous
apporter cet amendement à la présentation originale du projet de
loi no 45. Si je suis satisfait de ses commentaires, de ses preuves qu'il nous
fera, il finira peut-être par me convaincre de voter en faveur de cet
article tel que présenté actuellement, peut-être avec
quelques commentaires que je pourrai faire aux articles suivants, parce que je
présume qu'actuellement on discute particulièrement des trois
premiers, comme l'avait demandé le député de Saint-Laurent
et que, tout à l'heure, on reviendra à la discussion article par
article. Donc, je pourrai faire mes remarques aux articles bien
particuliers.
M. le Président, je ne sais pas si mon collègue de
Bellechasse a des remarques là-dessus. Sinon, je vais laisser le
député de Saint-Laurent continuer à faire ses remarques et
peut-être nous apporter des amendements heureux pour corriger certaines
situations qui existent actuellement dans ce domaine.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Oui, on vous les distribue.
M. Johnson: D'accord. C'est parce que j'avais peut-être
quelques commentaires généraux...
M. Forget: Bon, bien, écoutez! On va attendre.
M. Johnson: ... immédiatement. J'aimerais répondre
en partie au moins aux affirmations, aux qualifications d'affirmations
gratuites que j'ai reçues du député de Saint-Laurent.
D'abord, c'est vrai que cette partie du projet est inspirée de la
loi de la Colombie-Britannique. Après une expérience de quatre
ans, on se rend compte qu'il y a eu dix cas soumis en trois ans je
m'excuse; non pas quatre ans, mais trois ans, c'est la base de nos statistiques
que trois fois, l'accréditation d'une unité a
été révoquée lors de la deuxième
négociation de convention collective.
On se rend compte qu'il y a eu une dizaine de cas, en trois ans, en
Colombie-Britannique, en vertu des dispositions relativement similaires
à celles-ci et que, à trois reprises, malgré la conclusion
de cette première convention collective par arbitrage, il y a eu, lors
de la négociation de la deuxième convention collective,
révocation de l'accrédiation du syndicat. Dans les autres cas, on
peut donc présumer, si c'est un peu comme ce qui se passe au
Québec et l'analyse qu'on peut en faire, qu'il s'agissait probablement
de refus de la part de I employeur de négocier, à toutes fins
pratiques, pour fins de non-reconnaissance du syndicat et que cela a permis la
reconnaissance du syndicat aveo succès, puisque sept des dix,
l'année suivante ou deux ans après, ont pu conclure une
convention collective librement.
Deuxièmement, il y a... Le député de Saint-Laurent
affirmait que, finalement, c'est un peu pendu par un crochet dans le ciel, mais
il y a quand même, d'abord, une revendication qui vient du monde syndical
et qu'on retrouve aux mémoires de la Fédération des
travailleurs du Québec et de la CSN, lors de leur comparution en
commission parlementaire. On y affirme, dans le cas de la
Fédération des travailleurs du Québec, à la page 11
du mémoire: "il y a lieu, ici, de noter que plusieurs des conflits les
plus longs et les plus durs surviennent au moment de la négociation
d'une première convention collective. Cette première
négociation est souvent considérée par l'employeur comme
une occasion de briser le syndicat nouvellement formé. Dans les faits,
plusieurs des conflits qui surviennent au moment de la négociation de la
première convention collective sont des conflits pour la reconnaissance
syndicale et dégénèrent en situations
désespérées". Il y a ensuite quelques autres
commentaires.
Dans le mémoire conjoint CSN/CEQ, pages 27 et suivantes, on
introduit cette conviction qu'il y a évidemment beaucoup de leurs
syndicats, en première convention collective, qui connaissent des
problèmes: "Nous estimons que ce phénomène s'explique par
la résistance à la reconnaissance syndicale qui se manifeste non
seulement à l'occasion de l'accréditation, mais aussi lors de la
négociation ". La CSN va même jusqu'à dire que ces
dispositions risquent fort de ne rien changer au mal si l'article ne
prévoit pas que, dès la requête, la grève ou le
lock-out cessera. Finalement, l'introduction de nos modifications à
l'effet de mettre fin à la grève ou au lock-out, lorsque le
conseil d'arbitrage décide de se prononcer, au fond, est un principe qui
est admis par la partie syndicale entre autres.
D'autre part, lors de la publication du projet de loi, nous avons
reçu plusieurs mémoires que j'ai évoqués, des
documents que je n'ai pas, nécessairement, distribués, dans
certains cas, des opinions personnelles de certains juristes, certains
représentants de la Chambre de commerce, par exemple, il y a un des
mémoires que je n'ai pas déposé, qui vont dans ce
sens.
C'est la même chose avec le mémoire de
l'Hydro-Québec, et il y a une partie du mémoire du
Barreau,également, qui l'évoque.
M. Forget: L'arrêt de la grève ou du lock-out au
moment où l'arbitrage...
M. Johnson: Où l'arbitrage intervient, d'accord.
Egalement, sur d'autres modifications que nous avons apportées, à
la suite de différents commentaires provenant à la fois des
syndicats et de certains autres groupes comme les chambres de commerce et les
techniciens du Barreau, ou ailleurs.
D'autre part, M. le Président, j'ai fait état d'une
étude statistique, qui n'est pas substantielle, mais qui est
complète malgré tout, du problème des conflits entre 1972
et 1976 inclusivement, et touchant une première convention collective.
Il y a eu, de 1972 à 1976, respectivement, 26, 28, 26, 32 et 24 conflits
qui étaient des premières conventions collectives. De
façon générale, ces conflits ont mis... en moyenne, il y a
eu 18 mois d'écoulés entre le moment de l'accréditation et
la signature de la convention collective, ce qui est plus élevé
que la moyenne générale qu'on observe dans le cas d'une
deuxième convention collective ou des conventions
subséquentes.
Donc, je pense qu'il y a quand même un fondement. Je suis d'accord
avec le député de Saint-Laurent que c'est une entorse importante
au principe de base qui est dans le Code du travail, qui est la libre
négociation entre les parties, mais je pense que, compte tenu des...
M. Russell: Est-ce que je pourrais demander au ministre... Je
sais qu'il n'y a pas de dépôt de documents en commission, mais,
s'il le voulait, on pourrait peut-être obtenir des photocopies de ces
documents.
M. Johnson: Oui, ce sera possible à la prochaine
commission. Je me ferai un plaisir de les envoyer à tous les membres de
la commission, s'ils le désirent, à titre personnel.
Donc, de façon générale, M. le Président, il
s'agit de dispositions qui dérogent à l'esprit et à
l'économie du Code du travail, c'est vrai. On a un exemple dont on peut
s'inspirer, c'est celui de la
Colombie-Britannique. D'autre part, je pense que c'est une technique qui
permettra, dans certains cas, d'anticiper; au départ, par sa valeur
dissuasive et cela m'apparaît très important. L'employeur qui
serait tenté de procéder à des mesures plus ou moins
dilatoires dans le but de ne pas reconnaître l'association
accréditée, sachant qu'il peut avoir un arbitrage en plein visage
en cours de route, aura peut-être plutôt tendance à essayer
de régler. De la même façon, l'association
accréditée qui serait tentée de prolonger la
période de négociations, sachant que la grève ou le
lock-out devra prendre fin à partir du moment où on demande
l'arbitrage, avant d'y avoir recours, aura peut-être tendance à
mieux agir au niveau de la conciliation puisque, de fait, on impose
l'étape de la conciliation dans cette mesure; on dit: si la conciliation
était infructueuse.
D'autre part, le ministre a toujours le pouvoir qui est
discrétionnaire de nommer le conseil d'arbitrage et ici, le mot "peut"
n'est pas attributif de juridiction, comme on l'a vu dans un autre cas
avant-hier.
Donc, pour l'ensemble de ces raisons, je pense que ces dispositions, qui
sont à la fois une entorse à l'économie
générale, évidemment, et du droit à peu près
nouveau, qui est nouveau pour le Québec parce qu'on avait
déjà supprimé l'arbitrage depuis un bout de temps, depuis
1964, mais qui n'est pas nouveau au niveau canadien, cela existe en
Colombie-Britannique, je pense que ces dispositions sont justifiables et
qu'elles sont assez valables dans leur ensemble.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Sainte-Marie, suite à ce que vient de dire le ministre. Sur le
même point? Question du député de Bellechasse.
M. Goulet: Je vous remercie, M. le Président; c'est parce
que le ministre a dit qu'il y avait une moyenne de 18 mois de
négociations jusqu'à temps que la convention soit signée.
De jours francs de grève, est-ce que vos statistiques le disent?
M. Johnson: C'est-à-dire ce que j'ai, au niveau de cette
étude il faudrait faire un extrait la durée moyenne
en jours ouvrables, mais pour l'ensemble des conflits à chaque
année et non pas pour chacune de ces grèves. Il est possible de
l'obtenir pour chacune puisqu'on a le nombre de jours ouvrables pour
l'ensemble. Je ne l'ai pas ici devant moi, mais de façon
générale, je présume que s'applique ici sans doute la
même règle qu'on a vu dans le cas des briseurs de grève.
Dans le cas des briseurs de grève, la durée moyenne... Dans le
cas des conflits où il y a des briseurs de grève, la durée
moyenne du conflit tel quel, c'est-à-dire de la grève ou du
lock-out, est de six fois supérieure à la durée moyenne
qu'on retrouve dans les autres situations.
Je présume que dans ce cas, on n'arriverait peut-être pas
à un chiffre aussi élevé, si je regarde les moyennes
ouvrables pour l'ensemble, mais...
M. Forget: Ne présumons pas des chiffres, à moins
de les avoir.
M. Johnson: Mais on a une durée moyenne en jours
ouvrables, par exemple, pour l'année 1976 où il y a eu 24 cas
dont trois lock-out, de 137 930 jours-homme perdus, ce qui est
considérable si on regarde le nombre de jours qui est impliqué
dans les autres cas, pour un nombre analogue de salariés pourtant,
où on se retrouve avec 44 000 jours-homme perdus, 31 000, 67 000 et 78
000, 137 000 dans le cas de 1976. Mais évidemment, cela dépend du
nombre et cela dépend de l'importance de chacun des cas.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, je vais faire cela
brièvement, puisque le député de Saint-Laurent nous a
déjà annoncé qu'on aurait l'occasion de discuter sur les
détails par le biais de chacun de ses amendements. Mais les commentaires
que je voudrais passer sur l'article 44 vont peut-être répondre
à la question que posait le député de Brome-Missisquoi
tantôt.
Il faut se replacer dans l'esprit de l'article 44 dont l'objectif
premier est de tenter de trouver une solution aux nombreux conflits qu'on a
appelés de représentation syndicale, d'accréditation,
c'est-à-dire des conflits ou des négociations qui perdurent
après qu'un groupe de salariés ait eu la reconnaissance
syndicale. Dans ce sens, le député de Brome-Missisquoi se
demandait pourquoi la dernière partie, par rapport au projet original de
81a, avait été enlevée.
Je pourrais prendre un exemple pour mieux expliquer de quelle
façon on peut fonctionner dans une tentative de règlement de ce
genre de conflit de représentation syndicale. Si on prenait le cas, par
exemple, de la syndicalisation des vendeurs d'automobiles. Les vendeurs
d'automobiles ont tenté à deux reprises de se syndiquer, entre
1972 et 1974. On a connu, on a obtenu 150 accréditations de groupes de
vendeurs d'automobiles au Québec. Aucun de ces 150 groupes qui avaient
obtenu légalement l'accréditation, n'a réussi à
conclure une convention collective. Un groupe seulement sur les 150 a fait la
grève qui a duré 10 mois; c'était dans la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean. Il y a eu par la suite un effondrement de ces 150
syndicats qui n'avaient pas réussi à conclure de conventions
collectives. Deux ans plus tard, en 1974, un autre mouvement est reparti pour
tenter de syndicaliser encore une fois les vendeurs d'automobiles;
c'était cette fois dans la région de Montréal. On a obtenu
50 accréditations et aucun de ces groupes n'a réussi, au moment
où on se parle, à négocier une convention collective. On
peut se demander pourquoi des groupes qui, légalement, ont obtenu une
accréditation, ne sont pas arrivés à négocier une
convention collective. Il faut qu'on souligne aussi que même avec les
mesures "antiscabs" qui sont prévues dans le projet de loi actuel,
même là, ils ne pourraient réussir à négocier
uen première convention collective, s'il n'y avait pas des mesures
spéciales pour les y aider, parce que ce sont souvent des groupes de
deux ou trois pris isolément que l'employeur peut facilement remplacer
lui-même.
Ce serait le même cas, par exemple, pour des employés de
restaurant. On se rappelle les nombreuses tentatives qui ont été
faites pour essayer de regrouper les employés de restaurant, mais cela a
toujours été des échecs constants.
Ces petits groupes n'ont souvent pas la possibilité physique,
technique, de faire la grève. L'employeur, devant une
accréditation, n'a aucun intérêt à négocier
véritablement une convention collective, puisqu'il n'y a pas de
véritable rapport de forces qui existe dès le départ. Ces
mesures, de la façon dont elles sont prévues à l'article
44, vont amener une première convention collective. Le vécu de la
première convention collective va faire en sorte que l'employeur, avec
le groupe des syndiqués, va apprendre à vivre ce que sont des
relations de travail. Il est, la plupart du temps, reconnu que, lors de la
deuxième négociation, on ne rencontre plus les problèmes
qu'on pouvait rencontrer la première fois. L'employeur a appris à
vivre avec une convention collective et a aussi appris que, souvent, ça
régularise les rapports entre les individus, ça
dépersonnalise les problèmes et, finalement, c'est un bienfait
pour tout le monde.
Dans le cas de ce genre de conflit, il faut donc trouver un
mécanisme qui permette, dans un premier temps, une solution
spéciale pour régler une première convention collective;
par la suite, les rapports deviennent normaux, se déroulent de la
même façon que pour l'ensemble des autres syndicats.
C'est donc pour ça qu'il était important là
je m'adresse au député de Brome-Missisquoi dans l'article
qui était le pivot de tout l'article 44, c'est-à-dire 81a, de ne
pas poser une double condition pour amener l'exercice de l'arbitrage d'une
première convention collective.
Si on gardait en tête tout au long des discussions qu'on va avoir
ces exemples, on comprendrait facilement le bien-fondé de chacun des
articles qui vont suivre.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Mackasey: Franchement, M. le Président, j'étais
pour dire probablement la même chose que le député de
Sainte-Marie. Je sais que cet amendement, ce changement, à l'article
81a, est basé pas mal sur l'expérience en Colombie-Britannique.
Je pense, en principe, que c'est une bonne chose, une amélioration;
c'est une autre technique, il faut essayer, par tous les moyens possibles.
Maintenant, je sais où je savais, mes chiffres ne sont pas exacts, qu'il
y avait à peu près 20 ou 22 demandes en Colombie-Britannique pour
l'application d'un tel article ou d'une telle initiative de la part du
ministre. Seulement 7 ont été acceptées.
Les syndicats, en général, pas nécessairement les
syndicats accrédités pour la première fois,
mais le mouvement syndical en Colombie-Britannique prétend
maintenant que, si les syndicats sont tellement faibles qu'ils sont
obligés de demander l'arbitrage parce qu'ils ne peuvent pas faire une
grève, ils n'auraient peut-être pas dû être
accrédités au début. C'est ce que pensent les
syndicalistes en général.
Deuxièmement, ils trouvent, en Colombie-Britannique au moins, une
tendance de l'employeur à demander l'arbitrage immédiatement,
parce que les arbitres arrivent avec une convention accordant un salaire
moindre que ce qu'on aurait obtenu par les négociations normales.
Peut-être à cause de l'Inflation Board ou pour d'autres raisons,
très souvent la décision du conseil d'arbitrage est moins
acceptable que ce que vous trouvez dans les autres domaines où les
syndicats ont cinq ou dix ans d'existence.
Pour cette raison, on n'a pas maintenant tendance à se servir de
cet article en Colombie-Britannique. Le ministre pense déjà
à faire des amendements. Il faut regarder les deux côtés de
la médaille. L'employeur qui ne veut pas négocier de bonne foi,
disant que c'est à cause de son manque d'expérience, il n'y a pas
de manque d'expérience par les employeurs aujourd'hui. Ils ont toujours
à leur disposition l'assistance, non pas seulement des avocats
spécialisés, mais du CMO, du Board of Trade, BC Employers
Association, etc. Ils ne sont pas faibles, mais ils ne font pas de
négociations. Ils laissent les syndicats aller en grève et ils
vont au gouvernement en disant: Terminez cette grève par
l'arbitrage.
Souvent, comme je l'ai dit, la convention est moins acceptable qu'on ne
le pense. Cela met le syndicat devant une certaine position. Les
employés disent: Peut-être que nous n'avons pas choisi le meilleur
des deux ou trois syndicats qui cherchaient notre accréditation ou notre
cotisation, dès le départ. Maintenant ils n'aiment pas
l'idée, généralement. L'employeur trouve que c'est un bon
moyen. On a commencé par l'arbitrage, pourquoi pas dans une
deuxième, troisième, quatrième ou cinquième
convention. Il y a un mouvement en Colombie-Britannique qui demande, à
cause de cette initiative de la première convention, de l'appliquer,
règle générale, en Colombie-Britannique afin qu'il n'y ait
plus de grèves, plus de lock-outs, mais pour tous les conflits qui ne
sont pas réglés par le médiateur ou par la conciliation,
il y aurait seulement l'arbitrage au bout.
On sait que c'est un pas en arrière, mais, quand même,
cette tendance commence, parce que le public dit: La première convention
a été réglée par l'arbitrage. C'est une maudite
bonne idée. Pourquoi pas la deuxième? Pourquoi pas la
troisième? Pourquoi pas la quatrième? Cela arrive. Cela arrive
à un point tel que des groupes s'organisent à ce moment-ci en
Colombie-Britannique, Bill Hamilton Chamber of Commerce, BC Fed, BC Employers
Association, CMO, si vous voulez, la Chambre de commerce. Cela a bien
été, vous voyez ce qui est arrivé, par l'arbitrage.
L'arbitrage, cela fonctionne. On a demandé l'arbitrage. Le conflit est
réglé. Pourquoi est-ce qu'on n'applique pas le même
principe dans l'autre conflit qui dure depuis deux mois maintenant, entre le
Teamstex et Macmillan-Bloedel. Cela dure déjà depuis trois mois.
Pourquoi la loi ne dit-elle pas qu'il faut que ce soit réglé par
l'arbitrage? Vous voyez le danger. Ce n'est pas un danger au point... mais
c'est le public qui dit au gouvernement quoi faire. Normalement, c'est... Il y
en a qui prétendent que le mouvement syndical est mauvais. Il faut
trouver une solution. Every thing is essential. La solution, c'est l'arbitrage,
même si on sait que l'arbitrage n'est pas la solution, parce que cela a
toujours tendance à faire traîner la décision.
Avec les policiers, les pompiers de Montréal, quelques fois, on
attend deux ans pour une décision de la cour pour la convention
collective. C'est pour cela qu'ils agissent parfois illégalement et
qu'ils vont en grève, avec le droit ou pas.
Ce sont mes observations. J'accepte le principe, mais il faut quand
même souligner aux membres ici quelque chose qu'ils savent, qu'en
Colombie-Britannique, les syndicats qui acceptaient sans réserve ce
concept au départ, maintenant, entre eux, disent: On ne demande pas
cette formule. C'est seulement le patron qui la demande maintenant, parce que
chaque fois que c'est réglé par l'arbitrage, la tendance du
public est de demander que ce soit la méthode de régler tous les
conflits en Colombie-Britannique.
Deuxièmement, je pense que, si un conciliateur n'est pas capable
de régler le premier conflit, si un syndicat en est rendu au point
d'avoir à demander lui-même l'assistance du ministre pour mettre
à sa disposition un conseil d'arbitrage, cela veut dire que le syndicat
est faible.
S'il est faible, il va mourir. Si ce n'est pas aujourd'hui, c'est
l'année prochaine ou l'année suivante. Peut-être que cela
n'aurait pas dû être le syndicat à être
accrédité au début, au départ. Je veux tout
simplement dire qu'il y a des amendements à faire et je partage le
sentiment du député de Sainte-Marie qu'il y...
M. Jolivet: Quand vous parliez, tout à l'heure, de la
Colombie-Britannique, est-ce que vous avez des indications parce que
vous parlez d'un syndicat qui serait faible, s'il demandait l'arbitrage
est-ce que vous avez des indications sur le nombre de demandes qui ont
été faites par les syndicats et les patrons dans une question
d'arbitrage?
M. Mackasey: La dernière fois que je me suis
informé ce n'était pas officiel il y avait 20
demandes, dont seulement 7 étaient acceptées de la part du
ministre, du ministère et, dans 5 cas, c'était à la
demande de l'employeur. Naturellement, tout le monde dit: Voilà la
formule magique. Le député de Laviolette, qui a une grande
connaissance des conventions, sait que, dans les services publics à
Ottawa, on en a discuté formellement. Le meilleur principe au
départ, avant qu'on commence les négociations, c'est que nous
avons le choix, que cela se termine par l'arbitrage ou par les méthodes
normales.
Le choix devrait être fait avant le début. On court sa
chance et, dans plusieurs syndicats, cela se reflète dans la
première, la deuxième, la troisième, la quatrième
convention parce que la décision de l'arbitre en est une bonne, et cela
impose à l'arbitre une autre chose, M. le ministre. Les gouvernements
savent fort bien que si l'arbitre, "the arbitrator ", traîne la
décision parce qu'il sait qu'on ne peut pas aller en grève, il
traîne, il a beaucoup à faire... Si c'est Cari Goldenberg, il fait
trois ou quatre arbitrages en même temps, cela traîne un peu.
L'arbitre sait qu'à la prochaine négociation, le syndicat optera
pour le droit d'aller en grève.
Mais, la raison pour laquelle je pense que cette méthode est
préférable à celle-là, c'est que vous êtes
obligé de décider d'avance le syndicat. Si vous voulez vraiment
que les points principaux des négociations soient réglés
par l'arbitrage ou par une grève, si vous voulez, il faut prendre la
décision avant que cela commence. Il y a des syndicats dans les services
publics cela arrive souvent dans les services publics qui ont
déjà négocié trois, je pense, même quatre
conventions collectives et, dans tous les cas, ils ont choisi l'arbitrage.
Dans d'autres cas, après une ou deux expériences avec
arbitre, ils ont décidé d'opter, comme lbs postiers
l'année passée ou il y a deux ans, pour la grève. La
grève a duré 40 jours. Ils ont perdu $8000, chaque membre. Ils
n'ont rien gagné avec cela. S'ils étaient allés à
l'arbitrage, au départ, probablement qu'ils auraient les mêmes
conditions et ils n'auraient pas été en grève, ils
n'auraient pas perdu un cent. Je pense que je préférerais cette
option au lieu de l'autre. Encore, néanmoins, je partage les sentiments
du député de Sainte-Marie. L'article 81a renferme les deux
conditions, si l'intervention du conciliateur s'est avérée
infructueuse et si les parties ne parviennent pas à mettre fin à
une grève ou à un lock-out.
Il faut donner au syndicat l'occasion de déclencher une
grève légale. La raison pour cela, naturellement, c'est d'imposer
des conditions à l'endroit de l'employeur et là, l'employeur,
après deux jours, peut aller demander au ministre d'imposer le conseil
d'arbitrage.
Avec le changement que le ministre apporte, quand le paragraphe b) est
éliminé, il n y a pas grand changement entre l'article 8a et un
article, je pense, qui s'applique aux conventions normales, l'article 29, je
pense, du Code du travail. C'est 78, je crois. Alors, il n'y a pas de grande
différence. Je termine mes remarques, M. le Président, je
parlerai sur l'amendement plus tard.
M. Forget: Est-ce qu'il y a d'autres remarques
générales?
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Joliette-Montcalm voulait parler brièvement.
M. Chevrette: Je m'excuse, M. le Président. Je voudrais
répondre, d'une certaine façon, à un commentaire qui a
été souligné par le député de Saint-Laurent.
Il disait que c'était complètement du droit nouveau et que
ça créait un précédent extrêmement dangereux
qui pouvait aller dans le sens comme disait M. Mackasey... Excusez... de
créer un précédent qui serait la règle
générale pour régler l'ensemble des conflits.
Je pense que, dans le domaine des relations du travail, il y a des
précédents en ce qui regarde la procédure. Ce ne sont pas
des précédents tellement viables. Je me souviens de l'arbitrage
obligatoire dans l'enseignement. Ce sont plutôt des mesures temporaires,
bien sûr, qui sont amendées non pas dans un sens restrictif, mais
toujours de plus en plus large.
On vit un problème depuis quelques années, la
première convention collective, qui est une question de lutte pour la
reconnaissance du syndicalisme comme tel. Je suis convaincu que si les
mentalités évoluent pour arriver à faire en sorte que le
syndicalisme soit quelque chose d'accepté comme mentalité,
l'arbitrage d'une première convention collective deviendra pratiquement
un mécanisme caduc par la suite et, contrairement à ce qui est
avancé par le député de Saint-Laurent, ne deviendra pas
une mesure qui va tenter de s'élargir pour devenir un mécanisme
d'ordre courant pour l'ensemble des conflits. Je suis convaincu que le courant
passé nous permet de prévoir ça assez facilement. On n'a
qu'à penser à l'expérience du domaine de l'enseignement en
particulier, qu'on a vécue depuis 1960, et je vais vous donner un autre
exemple pour prouver ce que j'avance.
Les associations reconnues... Si le député de Johnson
était ici, il nous dirait: C'est vrai. On sait qu'il a
déjà existé un article du Code du travail qui disait, par
exemple, que dès que tu t'assois avec un patron, tu es
réputé être, à toutes fins pratiques,
accrédité pour les fins du processus ou des mécanismes de
négociation, et puis, cela s'est estompé. Cela n'a même pas
favorisé le syndicalisme comme on pensait que ça le ferait
à l'époque, parce que les gens préféraient avoir
une structure légale, plutôt que d'aller s'asseoir... Cela
devenait une passe que tu faisais au patron, à toutes fins pratiques. Tu
t'assoyais devant lui et tu disais: Je voudrais discuter de convention
collective, tu t'arrangeais pour avoir des témoins, et oup! il t'avait
reçu, il avait discuté deux heures. Automatiquement, tu devenais
fort, face au Code du travail. Tu avais droit et accès à tous les
mécanismes, y compris le droit à l'arbitrage ou à la
grève. C'était sensé, cela, à l'époque, si
on lit le journal des Débats, créer un mouvement fantastique pour
la syndicalisation. Absolument pas. Je pense que la norme de 35% qu'on
introduit dans le Code du travail pour fins de dépôt de
l'accréditation va faire en sorte que, petit à petit, la
mentalité va changer, le syndicalisme va être accepté comme
formule normale dans l'entreprise et, à ce moment-là, les
premières conventions collectives se feront sur le contenu même
des conventions collectives et non pas sur la reconnaissance du syndicalisme. A
ce moment-là, les gars vont préférer de beaucoup se
soumettre aux mécanismes normaux du Code du travail que de se
prévaloir de
la procédure spéciale du cas d'une première
convention collective.
C'est un remède qui va guérir un mal et probablement que,
d'ici quelques années, on aura seulement à constater que ce
mécanisme est devenu désuet, parce que les gens ne font plus
cette lutte contre la reconnaissance même du mouvement syndical.
C'était cet aspect que je voulais développer en
particulier, comme principe général. J'ai quelques remarques
à faire et j'aurai aussi une question parce qu'il y a un petit point qui
m'intrigue, mais ce n'est pas majeur. Sur le fond, je suis très heureux
qu'on introduise cette nouvelle dimension, dans le Code du travail, qui va
permettre, je pense, d'éviter les longs conflits qui ne sont pas du tout
axés, présentement, sur la reconnaissance de conditions de
travail, ce désir de conclure des conditions de travail, des ententes
collectives entre les parties. On pense à Pierreville, par exemple; on
pourrait penser à Trust Royal, Radiomutuel. Tous ces conflits n'ont
jamais été axés sur la négociation de conditions de
travail. Je suis convaincu que, dans ces entreprises, les salariés
auraient demandé une augmentation plus grande que celle qu'ils
négocient présentement. Et si l'employeur avait l'assurance que
le syndicat aurait renoncé à son accréditation,
probablement qu'il leur aurait donnée. Ce n'est pas pour rien qu'on
introduit cette mesure; c'est pour éviter ce genre de situation, quand
dans une société dite civilisée de 1977c'est un peu
inconcevable on est obligé d'arriver avec une telle mesure pour
éviter que les gens en soient limités ou rendus à discuter
sur la reconnaissance même du syndicalisme pour quelque chose qui est
reconnu de facto dans plusieurs pays, mais qui, ici, est encore vu comme des
gros méchants; Les syndiqués sont encore vus comme de "gros
méchants". Vous allez me dire, il y a des leaders syndicaux qui voient
les patrons comme de "gros méchants", bien sûr; Mais ce n'est pas
l'objet de mes propos. Mais il reste que, dans le cadre d'un arbitrage d'une
première convention collective, je suis d'emblée pour. Et
j'espère qu'on pourra corriger cette minorité de compagnies qui
se spécialisent dans ça. Je pourrais vous nommer des compagnies
qui ont quelques usines au Québec et, comme c'est une
accréditation par usine, ce sont des luttes, chaque fois, pour la
reconnaissance syndicale. Et c'est un an, un an et demi, deux ans de
négociation, de grèves, de lock-out. C'est là qu'on voit
que la bonne foi, dans le Code du travail, tel qu'écrit... M. le
député de Saint-Laurent parlait des balises. La bonne foi, c'est
quoi? On pourrait donner des exemples pour démontrer que la bonne foi
consiste, à mon sens, à s'asseoir et à chercher les
mesures les plus normales, les plus justes, dans les circonstances. Quand je
dis "dans les circonstances", ça veut dire; tenir compte des
capacités de payer des compagnies, mais aussi, pour un syndicat,
d'espérer recevoir, pour ses salariés, des conditions tout
à fait comparables à des industries du genre. Merci.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Merci, M. le Président. Je vais
immédiatement faire la lecture des motions d'amendements sur les trois
premiers paragraphes et j'en donnerai, après, l'explication.
Première motion: Motion d'amendement à l'article 44. "Que
le paragraphe 81a), de l'article 44, soit modifié en remplaçant,
à la troisième ligne, les mots "une partie" par les mots "l'une
des parties, qui allègue la mauvaise foi de l'autre "; en
remplaçant, dans la quatrième ligne, les mots "ministre " par les
mots "tribunal, une ordonnance ayant pour effet", et en remplaçant, dans
les cinquième et sixième lignes, les mots "lorsque l'intervention
du conciliateur s'est avérée infructueuse" par l'alinéa
suivant: "Une partie ne peut faire une telle demande, à moins qu'un
conciliateur ne soit intervenu et que son intervention se soit
avérée infructueuse ". Le paragraphe amendé se lirait
comme suit: 81a): Dans le cas de la négociation, l'une des parties, qui
allègue la mauvaise foi de l'autre, peut demander au tribunal une
ordonnance ayant pour effet de soumettre le différend à un
conseil d'arbitrage. Une partie ne peut faire une telle demande, à moins
qu'un conciliateur ne soit intervenu et que son intervention se soit
avérée infructueuse".
Deuxième motion d'amendement: "Que le paragraphe 81b) de
l'article 44, soit modifié en remplaçant, dans la première
ligne, les mots "au ministre" par les mots "faite au tribunal"; en
remplaçant tous les mots dans les deuxième et troisième
lignes par les suivants: "et contenir une description des motifs pour lesquels
la partie requérante allègue la mauvaise foi de l'autre partie ",
et en ajoutant l'alinéa suivant: "une copie de la demande doit
être transmise, en même temps, à l'autre partie".
Le paragraphe amendé se lirait comme suit: "La demande faite au
tribunal doit être faite par écrit et contenir une description des
motifs pour lesquels la partie requérante allègue la mauvaise foi
de l'autre partie; une copie de la demande doit être transmise en
même temps à l'autre partie".
Troisième motion: Que le paragraphe 81c de l'article 44 soit
modifié en remplaçant, dans la première ligne, le mot "le"
par les mots "si le tribunal en vient à la conclusion que la
négociation en cours est entachée de mauvaise foi pour des
raisons qui ne peuvent être imputées à la partie
requérante, il ordonne l'arbitrage. Le ministre doit alors veiller
à l'application de l'ordonnance. Toutefois, le..."; en retranchant, dans
la première ligne, les mots "sur réception de la demande"; en
remplaçant, dans les première et deuxième lignes, le mot
"charge" par les mots "alors, s'il le juge à propos, désigner";
en remplaçant, dans la deuxième ligne, les mots "conseil
d'arbitrage de faire enquête sur" par les mots "médiateur dans";
et en remplaçant, dans la troisième ligne, les mots "et de tenter
de le régler" par les mots "une entente entre les parties, à tout
moment avant la nomina-
tion d'un conseil d'arbitrage rend caduque l'ordonnance du tribunal;
s'il n'y a pas d'entente dans le délai fixé par le ministre, le
médiateur doit publier un rapport sur la position finale de chacune des
parties".
Le paragraphe amendé se lirait comme suit: "Si le tribunal en
vient à la conclusion que la négociation en cours est
entachée de mauvaise foi pour des raisons qui ne peuvent être
imputées à la partie requérante, il ordonne l'arbitrage.
Le ministre doit alors veiller à l'application de l'ordonnance.
Toutefois, le ministre peut alors, s'il le juge à propos,
désigner un médiateur dans le différend. Une entente entre
les parties, à tout moment avant la nomination d'un conseil d'arbitrage,
rend caduque l'ordonnance du tribunal; s'il n'y a pas d'entente dans le
délai fixé par le ministre, le médiateur doit publier un
rapport sur la position finale de chacune des parties".
Alors, M. le Président...
M. Johnson: M. le Président, est-ce qu'on pourrait, pour
les fins de la discussion ordonnée, considérer que nous allons
envisager en fait et j'adresse ma question surtout au
représentant de l'Union Nationale, à ce moment-làles
articles 81a, b et c ensemble, et disposer dans un sens ou dans l'autre de
l'ensemble? C'est un tout, de toute façon.
M. Forget: C'est un tout. M. Johnson: D'accord.
M. Forget: Si vous n'y voyez pas d'objection, M. le
Président, j'aimerais malgré tout, dans l'explication qu'on peut
donner des trois amendements, qui couvrent pas mal de points, qu'on soit un peu
plus libéral dans l'interprétation des droits de parole. Je n'ai
pas l'intention de parler une heure et demie mais cela peut être
embêtant...
M. Johnson: D'accord.
M. Forget: ... s'il y a des questions et réponses, de s'en
tenir à la limite de 20 minutes. Alors, il s'agit là d'un
ensemble de propositions qui retiennent, comme il faut le retenir,
l'idée d'un arbitrage obligatoire. On pourrait avoir envisagé
d'autres procédures, on pourrait avoir envisagé, comme le
soulignait le député de Notre-Dame-de-Grâce tout à
l'heure, un processus où il y avait une fourchette, en quelque sorte, au
début du processus et où le syndicat, enfin les deux parties
devaient choisir une branche ou l'autre de la fourchette avant même que
le processus de négociation ne débute. Mais ce serait sans doute
là quelque chose qui découlerait d'un esprit différent.
C'est la raison pour laquelle, même si c'est une solution qui se
retrouve, par exemple, dans le Code du travail canadien, c'est une solution
difficile à intégrer dans le cadre d'un amendement puisqu'on nous
propose un principe radicalement différent, c'est l'arbitrage comme
mesure ultime dans une négociation qui, par ailleurs, suit son cours
normal.
Dans ce contexte, malgré tout, nous en venons à une
série d'amendements dont le point principal, peut-être, est de
faire de la raison d'être de l'arbitrage obligatoire, au moment d'une
première convention collective, pas la façon habituelle et
automatique d'intervenir mais une façon d'intervenir qui est
basée essentiellement sur la constatation, par le tribunal, de la
mauvaise foi. Autrement dit, ce n'est pas parce que des négociations
sont longues ou officielles que ce soit la première, la
deuxième ou la troisième convention collective, peu importe
ce n'est parce qu'elles sont difficiles, pénibles, que les
parties s'opposent avec vigueur et détermination, que cela en fait un
phénomène particulier. A notre avis, cela ne peut être le
cas que lorsqu'il y a une mauvaise foi caractérisée. A ce
moment-là, cela devient une décision de type judiciaire et c'est
une décision qui devrait, à notre avis, s'inscrire dans le
contexte d'une élaboration de critère de bonne foi.
Dans le fond, les exemples qui ont été soulevés
à l'appui d'une mesure comme celle-là, c'étaient des
arguments qui étaient, effectivement, basés sur la mauvaise foi
qu'on imputait, dans la majeure partie des cas, dans les exemples
soulevés, à la partie patronale. On disait: On n'accepte pas,
dans le fond, la syndicalisation, on ne veut pas se rendre compte qu'on fait
face à un mouvement syndical légitime et on prend tous les moyens
pour y faire échec.
Et, dans le fond, ce qu'on visait, c'est une situation où il y a
mauvaise foi. A défaut de mauvaise foi, tout ce que l'on peut dire,
c'est que la négociation est difficile, qu'elle est longue mais, il n'y
a, en soi, rien de malin là-dedans ou rien de caractéristique
là-dedans. Si on ne peut pas prouver la mauvaise foi, il n'y a rien qui
distingue la première convention collective de la deuxième ou de
la troisième.
Là où la première convention collective
présente plus de problèmes, c'est que précisément,
il peut y avoir des comportements, lors de la première convention
collective, qui peuvent être qualifiés de mauvaise foi. Une fois
que l'habitude et le pli sont pris, même le patron qui admettait avec une
immense difficulté la légitimité d'une action de syndical
isation, une fois qu'il a signé une première convention
collective, il y a habitude prise, et il ne se réfugiera pas dans
certaines tactiques ou certaines stratégies. Mais s'il n'y a pas de
mauvaise foi, si, effectivement, il y a une difficulté d'en venir
à une entente pour des raisons qui ne sont pas particulières
à une attitude de refus du syndicalisme, il n'y a vraiment pas raison
d'enclencher un mécanisme spécial.
Et si c'est une question de mauvaise foi ou de bonne foi, à mon
avis, il est important que ce soit le Tribunal du travail qui établisse
là-dessus une jurisprudence qui sera utile à d'autres fins, de
toute façon, qui permettra justement, avec les années, de
constituer un corpus de décision qui va nous donner des balises sur la
définition de la bonne foi. Ce n'est surtout pas la place du ministre
d'intervenir dans ce processus parce que c'est politiser
l'interprétation, à ce moment-là, d'une in-
tervention. Si cela se fait dans le cadre d'un appel à la bonne
foi, c'est prendre le risque sérieux que, chaque fois qu'on invoquera la
mauvaise foi, on implique, on invite ou on ouvre la porte à une
intervention de caractère politique, pas nécessairement dans son
intention ou dans son contenu mais, au moins, par la qualité de la
personne ou de l'autorité en vertu de laquelle elle est faite. Mais
cela, c'est suffisant pour la politiser, très souvent.
Alors, les deux propositions sont corrélatives,
c'est-à-dire d'une part, faire de la mauvaise foi la raison de
l'enclenchement du mécanisme et, deuxièmement, faire du tribunal
l'organisme approprié pour constater la mauvaise foi; les deux vont
ensemble. On ne peut pas imaginer qu'on se prononce sur la mauvaise foi
à moins que ce soit par un tribunal, et on ne peut pas justifier le
tribunal à moins de lui donner, dans le fond, les critères sur
lesquels il va exercer sa juridiction. Les deux vont ensemble. C'est remplacer
l'enclenchement du mécanisme prévu dans le texte qui est devant
nous à l'initiative du ministre, qui est, effectivement, le ministre,
par le Tribunal du travail.
Les autres dispositions de la première motion d'amendement, c'est
d'exiger que la partie qui allègue la mauvaise foi de l'autre n'en soit
pas elle-même coupable. Il est bien évident que ce serait un
processus assez futile qu'une partie qui, elle-même s'est
dérobée à une négociation véritable, a
utilisé des manoeuvres, etc., soit elle-même exempte de ce
blâme pour pouvoir revendiquer la mauvaise foi de l'autre. Ce serait
assez odieux qu'une partie de mauvaise foi puisse invoquer la mauvaise foi de
son partenaire dans la négociation, de le faire impunément et
d'obtenir une décision qui fait son affaire alors que, si les
circonstances avaient été autres, l'accusation aurait pu lui
être adressée. Donc, je pense que cela, c'est une règle de
simple bon sens. Pour invoquer le non-respect d'une loi, il faut soi-même
ne pas s'exposer aux blâmes que l'on reproche à l'adversaire.
Cela, c'est relativement facile.
L'autre disposition, c'est d'exiger qu'une conciliation soit
intervenue.
En effet, sauter tout de suite à pieds joints dans une
procédure d'arbitrage obligatoire, est un peu odieux, c'est une
procédure qui pourrait donner lieu à un abus et qui pourrait,
dans le fond, ouvrir la porte, comme je l'ai indiqué, comme mon
collègue de Notre-Dame-de-Grâce l'a indiqué, à la
notion que si, c'est si facile, pourquoi ne pas l'utiliser à toutes les
sauces?
Quand vous arriverez dans les conflits des services publics, si vous
avez fait la démonstration, ne serait-ce que par deux, trois ou quatre
exemples, que l'arbitrage obligatoire a réglé un conflit qui se
serait éternisé autrement, etc., vous aurez de la part du public
une pression très considérable pour utiliser le même
instrument à d'autres sauces.
Il faut quand même insérer dans ce mécanisme
certaines précautions. C'est pour ça qu'il y a la
référence à la mauvaise foi qui est faite, pour que ce ne
soit pas nécessairement un mécanisme automatique, qu'il y ait une
preuve qui doit être faite qu'il y a quelque chose de spécial. Ce
n'est pas simplement qu'il y a un conflit, il y a quelque chose de
spécial dans ce conflit qui fait qu'il ne pourra pas se
régler autrement effectivement et de façon saine. Il y a aussi la
nécessité de demander aux parties: Ecoutez, essayez de vous
entendre entre vous par le processus de la conciliation. Or, le texte que le
ministre nous a soumis fait allusion à la conciliation, mais il y fait
allusion de façon fort ambiguë. Il dit: "Une partie peut demander
au ministre de soumettre le différend à un conseil d'arbitrage,
lorsque l'intervention du conciliateur s'est avérée
infructueuse".
Cela ne veut pas nécessairement dire qu'il doit y avoir
conciliation; c'est que, s'il y a conciliation, il faut que cela ait
été infructueux pour demander l'arbitrage. Cela ne veut pas
nécessairement dire qu'il doit y avoir conciliation. En d'autres termes,
s'il y a une demande de conciliation en vertu des articles
précédents, il faut attendre que la conciliation ait produit ses
fruits, dans le sens que le conciliateur avoue qu'il ne réussit pas
à rapprocher les parties et que les parties disent: Ecoutez, ça
ne marche pas, la conciliation. Il ne faut pas, autrement dit, que l'autre
partie, celle qui ne demande pas l'arbitrage, puisse dire: Ecoutez, c'est
prématuré, on est encore en conciliation, ce n'est pas fini.
C'est tout ce que veut dire le texte à l'heure actuelle.
Ce que nous proposons, c'est que le texte aille plus loin que ça,
qu'il dise qu'il faut qu'il y ait eu conciliation.
Je vais reprendre mon argumentation, M. le ministre.
M. Johnson: C'est ce que dit, je pense, le texte.
M. Forget: Non, ce que je dis, c'est que, de la façon dont
c'est formulé, on dit que s'il y a eu une conciliation, il faut qu'elle
ait été infructueuse, c'est-à-dire qu'il faut qu'elle se
soit déroulée, qu'elle se soit complétée. Il ne
faut pas que la partie...
M. Johnson: II n'est pas nécessaire qu'il y ait eu
consultation, mais s'il y en a eu une, elle a été
infructueuse...
M. Forget: Qu'elle soit terminée. Une partie pourrait
dire, autrement: Ecoutez, c'est prématuré, votre requête
pour un arbitrage, on est encore en conciliation et on n'est pas sûr que
ça ne donnera pas des fruits. C'est une objection qui pourrait
être faite là-dessus et il pourrait se trouver des gens pour
argumenter que, même s'il n'y a pas eu consultation, comme il n'y a pas
eu demande de consultation par aucune des deux parties, comme il n'y a pas eu
consultation, par définition, elle n'est pas infructueuse, alors, on a
le droit tout de suite de demander l'arbitrage.
Cela se plaiderait, et même très facilement. Donc, à
mon avis, il faut aller un peu plus loin que ça et dire, comme on le
fait: Une partie ne peut faire une telle demande, à moins qu'un
concilia-
teur ne soit intervenu premièrement, il faut qu'il y en
ait eu un de demandé, ils n'ont pas le choix, c'est nécessaire,
que son intervention se soit avérée infructueuse, donc, la
conciliation est terminée et ça n'a pas donné de fruit,
évidemment, si cela avait donné des fruits, le problème ne
se poserait plus et qu'effectivement, le processus soit arrivé
à son terme.
M. Johnson: Est-ce que le député de Saint-Laurent
me permet, à ce sujet?
M. Forget: Oui.
M. Johnson: J'en reparlerai avec les juristes. A un moment
donné, j'ai eu tendance à être d'accord avec le
député de Saint-Laurent, sauf que l'on dit quand même...
"dans le cas des négociations d'une première convention
collective pour le groupe de salariés visés par
accréditation, une partie peut demander au ministre de soumettre le
différend à un conseil d'arbitrage, lorsque l'intervention du
conciliateur s'est avérée infructueuse". Il faut donc
nécessairement qu'il y ait eu conciliation, puisque le fait de demander
l'arbitrage est relié au fait de l'échec de la conciliation, il
faut donc qu'il y ait eu conciliation.
J'avoue qu'une lecture, une relecture rapide de ça peut faire
penser que c'est seulement s'il y a eu une conciliation et si elle a
été infructueuse et que, s'il n'y en a pas, on pourrait le
demander quand même, sauf que, quand la partie demanderait un arbitrage,
le ministre regarde le texte et dit: Vous demandez un arbitrage, vous pouvez le
demander lorsque l'intervention du conciliateur s'est avérée
infructueuse, donc il n'y a pas eu de conciliation chez vous, je vous envoie un
conciliateur.
Il me semble que le texte, logiquement, présuppose... On s'entend
très bien sur l'objectif, il n'y a aucun doute là-dessus. Je
pense que ça devient une question d'interprétation de la
rédaction qui est là; c'est évident qu'il faut qu'il y ait
eu une consultation avant de permettre l'ouverture à la notion
d'arbitrage ou même d'un tribunal du travail, etc.
M. Forget: C'est évident pour vous, c'est évident,
pour moi, M. le ministre, mais ce n'est pas évident quand on lit le
texte. Rendons-le donc évident. Les interprétations que
vous-même et vos successeurs ferez de l'article, cela ne démontre
rien en droit. Ne courez pas de risque là-dessus, parce que cela pourra
être plaidé.
De toute façon, je pense que le point est fait et qu'on pourra y
revenir. Il reste qu'il me semble que c'est absolument essentiel d'avoir un
texte clair, de ne pas courir de risque sur l'interprétation, un point
de détail.
Finalement, dans la question de... pas finalement, parce qu'il y a autre
chose... L'article 81b est modifié parce que l'on dit: "La demande doit
être faite par écrit et copie doit en être transmise
à l'autre partie." S'il est évident qu'on veut faire reposer la
demande d'arbitrage obligatoire sur la mauvaise foi, il faut que la demande
soit motivée.
Il faut qu'on dise en quoi. Il faut que la partie qui demande
l'arbitrage dise en quoi l'autre partie a fait preuve de mauvaise foi, parce
que c'est à partir de cette déclaration motivée que le
tribunal va édifier son interprétation, au cours des
années, de ce que constitue la bonne foi. Il faut donner des ouvertures.
Il ne faut pas que la bonne foi, comme le ministre l'a dit, demeure un concept
vague et artificiel. Si on veut que les balises, éventuellement, soient
articulées dans la bonne foi, il va falloir donner au Tribunal du
travail l'occasion de se prononcer et d'édifier une jurisprudence,
à moins qu'on se pense capable de la définir, a priori, dans un
texte de loi. J'en doute. Je pense qu'il va falloir donner au tribunal
l'occasion de se prononcer. L'occasion de se prononcer viendrait, dans notre
formulation, parce qu'il serait en face d'une demande motivée. Il va
falloir qu'il décide de ces cas, à l'aide des motifs
invoqués. Il va trouver que certains motifs sont valables, que d'autres
ne sont pas valables. C'est comme cela qu'une jurisprudence va s'édifier
sur la signification de négocier de bonne foi. Je pense que la
motivation est essentielle; que copie soit transmise à l'autre partie,
c'est déjà compris, bien sûr.
Quant à l'article 81c, cela pose, dans sa formulation actuelle,
un problème fondamental. Nous y reviendrons probablement plus tard, mais
il reste que vous avez à l'article 81c... J'en fais la lecture
brièvement, dans sa formulation officielle: "Le ministre, sur
réception de la demande, peut charger un conseil d'arbitrage de faire
enquête sur le différend et tenter de le régler."
Vous avez une confusion des genres, vous avez un conseil d'arbitrage qui
devient un enquêteur. Ce n'est pas son rôle de faire une
enquête, parce que, quel est l'objet de l'enquête? L'objet de
l'enquête, c'est-à-dire si oui ou non il y a objet à faire
un arbitrage. En quelque sorte, l'enquêteur préjuge de son
arbitrage par l'enquête qu'il fait. Oui, il préjuge un peu du
fond. Il préjuge de l'opinion qui se forme sur les parties, du
bien-fondé de la position respective et il en vient à dire: On
recommande l'arbitrage.
L'arbitrage est déjà préjugé, dans une
certaine mesure, par le fait que le même groupe de gens qui forme le
conseil d'arbitrage a déjà été appelé
à intervenir comme enquêteur. C'est comme si on demandait à
un tribunal de faire le travail de la police et de dire, après cela,
vous allez évaluer sur les preuves qui vous sont soumises par le
procureur de la couronne. Ce sont deux choses différentes. Un tribunal
d'arbitrage, un conseil d'arbitrage, est là pour arbitrer, une fois
qu'il est saisi de la chose. Ce n'est pas à lui de se saisir
lui-même d'une cause. On a une confusion des genres qui m'apparaît
absolument inacceptable.
Dans notre version, c'est le tribunal qui décide s'il y a
mauvaise foi et s'il y a lieu d'aller en arbitrage, une fois que cette
évaluation est faite. Il y a quand même là une étape
supplémentaire qui est prévue, c'est que le ministre
désigne un médiateur. Il y a eu mauvaise foi. Le tribunal a
jugé qu'il y avait mauvaise foi. Cependant, avant de forcer les gens
à accepter une décision du tribunal, es-
sayons, par un médiateur, de rapprocher les parties et de
définir une situation, une solution à ce problème, une
solution que les parties auront encore le loisir d'accepter volontairement; ce
n'est pas sans importance de pouvoir le faire volontairement.
Si évidemment il y a un médiateur qui intervient, le
ministre n'est pas toujours obligé... Il peut alors, s'il le juge
à propos, désigner un médiateur, s'il voit que les
circonstances s'y prêtent, si la durée du conflit, etc. S'il y a
un tas de choses qui s'y prêtent, il y a quand même la
possibilité de s'informer, etc. Il peut désigner un
médiateur et, à ce moment-là, les parties peuvent, par une
entente entre elles, mettre fin à l'instance engagée pour
déboucher sur un arbitrage.
S'ils s'entendent, tout va bien. Cela rend caduque l'ordonnance. Il faut
prévoir que cela la rend caduque, autrement on a une ordonnance qui
n'est jamais exécutée. Et s'il n'y a pas d'entente dans le
délai que fixe le ministre, je pense que, pour ce qui est des
délais, on peut donner un pouvoir discrétionnaire au ministre. Ce
n'est quand même pas très malin. Ce n'est pas là discuter
et décider de la bonne foi ou de la mauvaise foi des parties. Etant
donné toutes les circonstances, cela ne peut pas durer des mois. Il faut
que cela se fasse vite, ou plus ou moins vite. Il fixe un délai. S'il
n'y a pas entente dans le délai fixé, le médiateur doit
publier le rapport.
Là, c'est de faire intervenir la pression de l'opinion publique
sur les parties. Après que le médiateur soit intervenu, on sait
qu'il y a mauvaise foi. Regardons le contexte dans lequel un tel rapport serait
publié. Le tribunal a déjà dit: La partie, celle qui n'a
pas demandé l'arbitrage, a été jugée de mauvaise
foi par le tribunal. C'est une drôle de pression de dire... Ce n'est pas
le syndicat qui dit devant la télévision: L'employeur est de
mauvaise foi. C'est le tribunal qui dit: L'employeur est de mauvaise foi.
Là, le ministre, parce qu'il voit que peut-être la chose est
mûre, nomme un médiateur et le médiateur dit: Je ne
réussis pas à les faire entendre. Il publie son rapport.
A mon avis, on n'ira jamais plus loin que cela. Quand un
médiateur qui publie son rapport, après qu'un tribunal a
prononcé la mauvaise foi, il n'y a personne qui va s'entêter bien
longtemps. Et si jamais il s'entête, il y a un arbitrage qui
apparaît, à ce moment, comme le dernier recours, effectivement.
Mais il est important que cela apparaisse comme le dernier recours pour toutes
les raisons qu'on a citées précédemment. Dans les raisons
que mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce a citées, il y a
effectivement une possibilité dans cette question; c'est que ce qu'on
envisage maintenant comme une solution à des problèmes de
syndica-lisation, etc., va, dans quelques années, apparaître comme
un instrument pour l'employeur.
L'évolution s'est faite en Colombie-Britannique dans ce sens, et
c'est très net. Il y a en plus le danger qu'un recours à
l'arbitrage, s'il règle le conflit, il le réglerait
effectivement, quelles que soient les modalités, le conflit cesserait et
les conditions de travail seraient déterminées. C'est
obligatoire, donc, ce serait respecté. Que cela crée une pression
très grande pour faire évoluer notre Code du travail de
façon rétrograde, d'une façon qui n'est pas souhaitable.
Parce qu'on ne peut pas envisager que les conflits, à la grandeur du
Québec et dans toutes les industries, se règlent par des
questions d'arbitrage. Ce n'est pas possible. Il ne faut pas créer
encore dans cette question d'arbitrage une expectative. J'ai souligné,
à plusieurs reprises dans la question des votes, la question qu'on a
soulevée hier également, j'ai souvent soulevé ce danger
que, lorsqu'on touche à une loi où il y a eu tellement de
problèmes, tellement d'attentes qui font suite à une
modification, on crée une expectative qui soit un peu explosive dans ce
cas-là aussi.
Ce qu'on envisage comme une solution particulière, qui serait
invoquée sept ou huit fois par année, c'est que cela devienne
comme une espèce de: un peu comme un apprenti sorcier invente une
nouvelle formule et finalement, cela devient très explosif. Je pense
qu'il faut entourer cela de toutes les précautions. La procédure
que nous soumettons dans ces trois amendements, soit le tribunal qui prononce
la mauvaise foi, qui élabore une chose très utile qui va
être des balises de la mauvaise foi et de la bonne foi, je pense que le
ministre s'entend avec nous là-dessus pour dire que c'est utile. Il faut
lui donner des ouvertures pour le faire. Il ne s'agit pas simplement de dire:
II faudrait que cela se fasse.
Il faut permettre que cela se fasse quand cela compte. Cela peut compter
là. Et tous les exemples que le ministre a donnés et que ses
collègues ministériels ont donnés pour justifier
l'arbitrage à une première convention collective, sont, dans le
fond, basés sur la mauvaise foi du patron. Qu'on la prouve la mauvaise
foi du patron et qu'on recule le plus possible le moment où l'arbitrage
s'impose. Qu'on sorte le ministre de décisions politiques sur la bonne
foi ou l'à-propos d'un arbitrage. Qu'on fasse se prononcer le Tribunal
du travail là-dessus. Qu'on donne au ministre la possibilité de
faire intervenir un médiateur. Qu'on ne donne pas à un conseil de
conciliation le pouvoir de faire enquête et de juger, après que la
juridiction qu'il s'est lui-même donnée, comment il va
l'exercer.
Ce sont des situations qu'on crée qui sont complètement en
dérogation, il me semble, avec la direction dans laquelle on devrait
aller. Pouvoir discrétionnaire au ministre, politiser des
décisions, mettre un conseil d'arbitrage dans une situation presque de
conflit, pas des conflits d'intérêts, mais d'un conflit
"drôle". Le conseil d'arbitrage est saisi à peu près comme
un tribunal. Ce n'est pas un tribunal, mais on lui donne un peu ce rôle.
Ce n'est pas à lui de faire ces enquêtes avant, pour justifier
s'il devrait être saisi ou pas saisi. Cela le place dans une situation
inusitée et certainement pas souhaitable.
Je comprends pourquoi le ministre, dans sa formulation,
évidemment, en est venu à cette conclusion. C'est qu'il se dit:
Cela n'a pas de bon sens de se précipiter, tête baissée,
sur simple demande, dans un arbitrage obligatoire. Il faut quand même
qu'il y ait des choses, et il n'a pas voulu multiplier les étapes,
multiplier les procédu-
res. C'est très joli de ne pas vouloir multiplier les
procédures, sauf que, quand on écrase tout un processus qui
implique différentes tranches et qu'on confie tout ça au
même organisme, l'espèce de pot-pourri qui en résulte, au
niveau des juridictions et de compétences, ce n'est pas
nécessairement une amélioration et, à mon avis, c'est, au
contraire, faire courir un très sérieux risque que l'ensemble de
cette histoire soit... Il faut bien le dire, parce que c'est sincèrement
tel que ça nous apparaît. Cela apparaît comme un risque
sérieux de déception.
Je veux terminer sur une note, M. le Président. Je l'ai
indiqué en deuxième lecture; au mois d'août, on l'a
indiqué et, en particulier, mon collègue de
Notre-Dame-de-Grâce l'a indiqué, c'est une bonne idée
d'avoir quelque chose pour régler des problèmes particuliers
à la première convention collective. On est d'accord avec
ça, mais attention à la façon dont on le fait. On est
d'accord avec le principe. Le principe est bon. C'est vrai qu'il y a des
problèmes. La démonstration n'a pas été faite de
façon absolument claire, à savoir quels sont les
problèmes, quelle est leur nature, etc., mais, de façon
impressionniste, on a un peu une idée vague et générale
qu'il y a là quelque chose qu'il faut régler et on est d'accord
qu'il faut porter une attention spéciale à la première
convention collective, mais pas n'importe comment. Pas en ouvrant la porte
à des choses qu'on ne veut pas, dans le fond, pas en mélangeant
les juridictions, pas en politisant les conflits autour d'une première
convention collective, parce que le syndicat qui entre dans une boîte,
qui entre dans une industrie, sous la rubrique de la politisation et d'une
intervention trop évidente du ministre, à mon avis, ne se situe
pas dans cette entreprise, ne met pas les pieds dans l'entreprise, n'acquiert
pas pignon sur rue, en quelque sorte, de la bonne façon. Ce genre de
paternité, si l'intervention ministérielle est trop visible,
c'est quelque chose qui, avec les années, pourra être un
sérieux boulet de canon.
Alors, essayons de le faire, de manière qu'on améliore la
situation plutôt que de la détériorer, et je pense que, si
nos amendements étaient acceptés, je serais prêt à
en réviser la formulation, M. le Président, s'il y a quelque
chose que le ministre n'aime pas dans tel ou tel mot. Je pense que ce n'est pas
sur les mots qu'on en a, c'est sur la conception même du
mécanisme, et on est bien ouvert pour modifier, dans la forme, nos
propositions d'amendements. Mais essayons d'y repenser avant de plonger.
M. Johnson: M. le Président...
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Bellechasse.
M. Johnson: Oui.
M. Goulet: Merci, M. le Président. A propos des
amendements apportés par le député de Saint-Laurent, M. le
Président, je me pose la question, à savoir si ça
n'apportera pas plus de confusion que ce que le ministre a
suggéré.
Le principe de l'article 81, c'était d'abord d'apporter des
mesures sociales qui vont dans l'intérêt de tout le monde, les
travailleurs et les patrons, et qu'on arrête ces conflits
interminables.
Ce qu'on suggère là, je me demande si ce n'est pas une
étape de plus. Lorsqu'on veut forcer une partie à
démontrer la mauvaise foi de l'autre, c'est bien beau d'accuser
quelqu'un de mauvaise foi, mais il va falloir qu'elle se débatte, il va
falloir qu'elle prouve... Cela sera une étape. Cela sera de
l'argumentation. Je me demande si cela n'aura pas pour effet d'envenimer
davantage l'atmosphère, ce qui, au lieu de rapprocher les parties, va
peut-être les éloigner. Cela va prendre bien du temps,
démontrer la mauvaise foi de l'autre. Il y a une étape qui sera
assez longue.
Ce n'est pas seulement limité à la mauvaise foi. Comme le
disait le député de Joliette-Montcalm, il y a souvent de la
mauvaise foi, très souvent, mais ce n'est pas seulement ça.
Parfois, cela peut être seulement sur un article quelconque où,
véritablement, il n'y a pas de mauvaise foi, mais on ne peut pas
s'entendre. Ce n'est pas parce qu'on ne veut pas, on ne peut pas s'entendre. Il
n'y a pas toujours de la mauvaise foi. Il y en a un bon pourcentage, mais ce
n'est pas toujours la cause. Je pense que le principe, si on s'en tient au
principe, qui était de ramener les deux parties à s'entendre et
à gagner du temps... Je me demande si cela n'aura pas pour effet
d'étirer le temps davantage, que cela en prenne peut-être plus que
cela en prenait déjà, parce qu'on veut un règlement le
plus tôt possible. C'est un peu ça, le principe de l'article 81a,
pour qu'on voie pas de conflits interminables, comme on l'a dit tantôt...
Pour en nommer, Radiomutuel, Thibault...
Le ministre peut nommer un conseil d'arbitrage pour régler la fin
du conflit. Je me demande, lorsque l'on parle de mauvaise foi, si ce n'est pas
l'ouverture à des cas de mauvaise foi. On ne fait pas penser, à
un moment donné, aux gens en cause... S'il n'y a pas de mauvaise foi, on
va évoquer la mauvaise foi pour que ça prenne le plus de temps
possible et automatiquement on va créer de la mauvaise foi. Je me
demande si ce n'est pas une porte qu'on ouvre à l'une ou l'autre des
parties. S'il n'y a pas mauvaise foi, on leur ouvre une porte pour dire: II
devrait y avoir mauvaise foi et battez-vous pour prouver qu'il y a de la
mauvaise foi. C'est une question que je pose.
Sans modifier les articles, il y aurait...
M. Forget: Est-ce que le député me permettrait une
question?
M. Goulet: Oui.
M. Forget: II semble indiquer, par ses remarques, que, dans son
idée, l'arbitrage d'une première convention collective devrait
être automatique. Simplement si ça prend un peu trop de temps
à négocier, qu'il y a une entente et que les gens ne parviennent
pas à s'entendre, là il faut un arbitrage. Est-ce que cette
argumentation, si c'est ça, ne s'applique pas, dans le fond, à
tous les conflits où il y a une difficulté à
s'entendre?
M. Goulet: M. le député de Saint-Laurent, le
ministre peut, quand il le juge opportun... Mais si, à un moment
donné, il n'y a pas de mauvaise foi, on ouvre une porte à ce
qu'il y en ait de la mauvaise foi. Le temps que les gens...
M. Forget: Ce n'est pas là ma question. S'il n'y a pas de
mauvaise foi... Vous ditez, même s'il n'y a pas de mauvaise foi, il
devrait y avoir de l'arbitrage. Cela veut donc dire que, à votre avis,
l'arbitrage est une bonne façon de régler les conflits,
même en l'absence de mauvaise foi, quand tout simplement les parties ont
des positions opposées et ne réussissent pas à
s'entendre.
M. Goulet: II y aura arbitrage... Quand il y a une limite, mais
il ne faudrait pas que ce soit interminable; là on ouvre une porte pour
que ça devienne interminable, ça devienne aussi long que ce
l'était. C'est ce que je voulais dire.
M. Forget: II peut y avoir arbitrage quand ça devient
interminable?
M. Goulet: Absolument.
M. Forget: Ce n'est pas limité à la première
convention collective.
M. Goulet: Non, je comprends, mais ce que vous dites et ce que
l'article 81 dit, c'est que c'est limité à la première
convention collective.
M. Forget: II faut limiter à la première convention
collective, autrement, vous ouvrez la porte à ce qu'il y ait de
l'arbitrage tout le temps. C'est ça le problème.
M. Goulet: Non.
M. Forget: Pourquoi pas?
M. Goulet: Ecoutez, il faut qu'il y ait de la bonne foi, en
quelque endroit, à un moment donné. C'est que vous ouvrez... Dans
ce que vous amenez là, M. le député de Saint-Laurent,
c'est que, à la minute où on va prouver la mauvaise foi, vous
ouvrez la porte à ce que ça devienne très long. Le
ministre peut dire: Ecoutez, règlement pour règlement, si le
ministre juge que ça prend un règlement le plus tôt
possible, pour le bien de tout le monde! On l'a dit, parce que le principe de
ça, c'est une mesure sociale qui va dans l'intérêt des
travailleurs. L'intérêt des travailleurs et peut-être aussi
l'intérêt des patrons, dans certains cas. A ce moment, le ministre
peut juger quand c'est le temps.
Avant que le député de Saint-Laurent me pose une question,
ce que je voulais dire au ministre c'est que, dans 81b, c'est-à-dire
dans l'amendement proposé par le ministre: "la demande au ministre doit
être faite par écrit " j'aimerais et c'est peut-être
dans le même sens que le député de Saint-Laurent que
ce soit motivé. Il est entendu que si c'est par écrit, ça
va être motivé. C'est en- tendu que si ce n'est pas motivé,
le ministre va demander une motivation, le pourquoi.
M. Johnson: Pas nécessairement, en ce sens qu'on dit "la
demande doit être faite par écrit" parce qu'il faut, dans chacun
de nos dossiers, un déroulement formel. C'est très important pour
retracer les étapes.
M. Goulet: Ce que nous aimerions c est que...
M. Johnson: Ce n'est pas nécessairement motivé, il
n'y a rien qui l'empêche.
M. Goulet: M. le Président, ce que je voulais dire au
ministre c'est que nous aimerions, si ce n'est pas nécessairement
motivé, que ce soit nécessairement motivé. Qu'il y ait de
l'argumentation dans les écritures de façon qu on dise au
ministre pourquoi; parce que la demande au ministre doit être faite par
écrit, mais ça peut être juste une demande de trois lignes.
Est-ce que le ministre va répondre immédiatement à la
demande? Il va sûrement s'informer de la raison. Là, c'est bon
qu'il y ait de l'argumentation dans les écritures.
Une dernière chose. Le médiateur... Il y a
déjà... C'est une autre étape qui va apporter quoi de
nouveau? Une fois que le tribunal a constaté, je me demande, M. le
Président, si ce n'est pas ce qu'on propose un genre de
chinoiserie politique ou juridique pour étirer le temps,
intentionnellement; ça va amener beaucoup de confusion et je reviens au
principe que j'ai évoqué au départ.
Si on veut que ce soit une mesure de paix sociale pour arrêter
d'étirer cela et que cela devienne interminable, je me demande si on
n'ouvre pas là une quantité de portes pour que cela devienne
interminable et qu'il y ait un paquet de chinoiseries là-dedans. Tout
simplement, on étire légalement du temps et c'est ce qu'on veut
éviter, c'est le principe. Je pose la question au député
de Saint-Laurent, je me demande si ce ne sont pas là les
problèmes que cela va apporter. D'après moi, cela crée
beaucoup plus de confusion que les amendements que le ministre avait
apportés.
M. Johnson: M. le Président, mon droit de
réplique.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que c'est très
court?
M. Russell: C'est très court. M. le Président, je
pense que...
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Brome-Missisquoi.
M. Russell: ... l'amendement qui nous est soumis par le
député de Saint-Laurent, à mon avis, vise un principe bien
particulier, c'est d'enlever cette épée de Damoclès des
mains du ministre. Là-dessus, je suis d'accord. Par contre, je demeure
un peu susceptible parce que quand j'examine cela, dans le contexte et le champ
dans les-
quels je travaille beaucoup, je suis susceptible aux choinoiseries
juridiques. J'ai peur de cela; cela me fait peur. J'ai tâché
d'examiner d'une façon très rapide l'amendement qui a
été proposé par le député de Saint-Laurent,
lui qui connaît très bien ces procédures juridiques, il est
excellent et fait un bon travail là-dedans; si j'avais la même
formation que lui, je serais peut-être susceptible de mieux comprendre
les raisons de toutes ces chinoiseries juridiques. Mais comme je ne les
comprends pas, je deviens un peu...
M. Bisaillon: Vous seriez aussi chinois.
M. Russell: Peut-être plus. Quand j'ai écouté
tout à l'heure le député de Sainte-Marie, il m'a convaincu
d'être en faveur de l'amendement du député de Saint-Laurent
sans que je ne l'aie entendu. Mais après avoir entendu le
député de Saint-Laurent qui a bien expliqué, de
façon très claire, son amendement, je pense l'avoir bien compris
et le résumé c'est cela: Actuellement, c'est une
responsabilité qui est énorme qu'on met entre les mains du
ministre et c'est lui qui doit agir dans des cas très critiques. Je me
rapporte au cas de la United Aircraft où personne n'a réussi
à prouver la mauvaise foi et, à ce moment-là, si cela
avait été la première convention collective, le ministre
aurait été obligé d'agir et cela aurait été
une responsabilité peu ordinaire. On connaît le climat qui
existait dans ce cas bien particulier. Je dis que si c'était un cas
comme celui-là, le député de Saint-Laurent aurait
drôlement raison de remplacer le ministre par le tribunal. Moi, je vous
avoue honnêtement, M. le Président, que le tribunal me fait peur.
J'ai beaucoup de réserve là-dessus et je me demande si je ne me
rallierais pas plutôt à ce qui est soumis actuellement par le
ministre dans son article 81a, qu'il y aura un conciliateur si
j'interprète comme il le faut et c'est là que je voudrais poser
la question au député de Saint-Laurent et c'est un "must"
qu'en aucun temps, en aucune circonstance, le ministre ne pourra charger le
conseil d'arbitrage d'agir qu'après la conciliation. Je pense que
l'article me semble clair. En aucun cas il ne pourra le faire s'il n'a pas eu
un conciliateur. Donc, si c'est cela, je suis d'accord là-dessus; cela
me satisfait et je préfère cela, tout en laissant la
responsabilité au ministre. J'espère, même, que le ministre
va agir avec la plus grande sagesse. Pour le ministre actuel, je sais qu'il n'y
a aucun problème. J'espère que son successeur suivra les
mêmes traces que le ministre actuel et qu'on pourra, dans ces cas, avoir
non pas des jugements de Salomon mais quelque chose d'objectif.
Je termine là-dessus, M. le Président, en vous disant
simplement ceci: Comme il s'agit simplement d'un premier essai, comme on
devrait avoir, d'ici quelque temps, un nouveau code, je serais disposé
à me rallier à la proposition du ministre et dire: On va faire un
premier pas et si cela ne fonctionne pas, espérons qu'on va pouvoir le
corriger. Si cela commence à créer des problèmes dans le
climat qui existe actuellement, c'est assez grave qu'on ne peut pas avoir pire
que ce que l'on a.
Je serais prêt, étant donné ma crainte de la
chinoiserie juridique, à accepter ce qui est soumis par le ministre
actuellement.
M. Johnson: M. le Président...
M. Chevrette: Excusez, est-ce qu'on vous dérange, M. le
Président?
M. Johnson: M. le Président.
M. Chevrette: C'est ce qu'on a dit, la méditation prend
forme...
Le Président (M. Marcoux): J'espère que je ne vous
dérange pas. M. le ministre.
M. Johnson: Je m'excuse de déranger les concertations de
la présidence et de l'Opposition. M. le Président, d'abord,
seulement un détail formel sur l'interprétation...
Le Président (M. Marcoux): Avez-vous quelque chose contre
la concertation?
M. Johnson: Absolument pas, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): Je pense que la philosophie de
votre gouvernement...
M. Johnson: A l'article 81a, M. le Président, sur
l'interprétation qu'en donnait le député de Saint-Laurent
tout à l'heure au sujet de l'obligation de la non-imposition de la
conciliation, je pense que le texte parle de lui-même. Cependant,
à la rigueur, si c'est pour le rendre plus clair, on pourrait dire
qu'indépendamment de l'amendement du député de
Saint-Laurent, après que l'intervention du conciliateur se sera
avérée infructueuse, à ce moment-là, il n'y a plus
aucun doute possible. Il y a, par définition, une conciliation qui est
intervenue.
M. Forget: C'est la même formulation. M. Bisaillon:
C'est clair.
M. Johnson: Etant donné qu'on dit que la nomination d'un
conseil d'arbitrage est référée après que... si
elle n'a pas eu lieu jusqu'à maintenant, étant donné que
l'on met un futur, elle s'avérera infructueuse, on implique
nécessairement qu'il faudra qu'il y en ait une. D'accord? Cela pourrait
se lire comme suit, sans en faire une motion, pour les fins du
secrétariat, on va en faire un amendement ou un sous-amendement, je
pense.
M. Bisaillon: Afin de les colliger pour que, tout de suite
après...
M. Johnson: C'est cela. Au moment où on rendra le texte
final, on verra, au niveau de mon intention.
Une Voix: Une fois qu'on aura battu les amendements.
M. Johnson: M. le Président, il y a plusieurs
éléments dans les trois amendements, en fait, du
député de Saint-Laurent: II y a d'abord cette notion fondamentale
à laquelle se réfère son texte, de bonne ou de mauvaise
foi, de mauvaise foi, en fait, qui doit se lire en fonction de l'article 41,
où on parle de la nécessité de l'obligation pour les
parties de négocier de bonne foi, la mauvaise foi étant
l'inverse, en principe. On ne fait pas appel, cependant, à la notion de
diligence, et cela pourra poser un problème, j'y reviendrai.
Si je reprends le texte du député de Saint-Laurent et je
résume brièvement, dans un scénario, ce que cela pourrait
représenter, vous avez une première accréditation d'un
syndicat, dans une entreprise, pour la première fois, où cela
accroche en cours de route. Présupposons que l'employeur n'est pas de
très bonne foi, ou encore que l'employeur a très peur de
l'idée d'avoir un syndicat chez lui et que, bref, il se sent incapable
de faire face à tout cela, cela traîne en longueur. Oui.
M. Forget: Vous dites: Soit que l'employeur est de mauvaise foi,
soit qu'il a très peur, mais peu importe ses sentiments et ses
états d'âme, qu'il ait peur ou qu'il n'ait pas peur, ce qui est
important, c'est qu'il se comporte de manière que la négociation
ait lieu, ou qu'il ne se comporte pas de manière qu'elle ait lieu.
M. Johnson: Excellent.
M. Forget: Dans le fond, c'est seulement au niveau des
comportements analogues à un comportement non diligent et non de bonne
foi qu'il y a cause à soulever un problème.
M. Johnson: Donc, je pense que le député de
Saint-Laurent nous amène au coeur du problème. Tout en
étant parfaitement je vais essayer de me trouver une autre
expression parce que, comme c'est la 35e motion d'amendement du
député de Saint-Laurent et, au moins, la douzième au sujet
de laquelle je commence par dire: Je comprends la bonne intention du
député de Saint-Laurent, cependant... Alors, je vais me trouver
une autre formule pour anticiper un peu de la recommandation que je ferai en
commission au sujet de son amendement.
L'intérêt, finalement, de son amendement, c'est cette
notion de donner une ouverture précise pour que le Tribunal du travail
fasse de la jurisprudence sur la notion de mauvaise foi et je trouve que c'est
extrêmement intéressant comme idée.
Dans ce contexte, cependant, cela m'apparaît extrêmement
dangereux et je m'explique. Je pense que je ne suis pas sûr qu'on va le
trouver dans le cadre du projet de loi 45. Eventuellement, il faudra à
un moment donné, donner un jour au Tribunal du travail cette ouverture
à créer spécifiquement et non pas de façon
ancillaire la jurisprudence sur la notion de bonne ou de mauvaise foi.
L'alternative étant d'essayer de la canter dans le code, de canter ces
comportements qui seraient susceptibles d'être qualifiés de
mauvaise foi, etc., mais ce n'est pas pour demain matin, c'est sûr, je
pense que ça va prendre même beaucoup de temps avant qu'on y
arrive, parce que c'est extrêmement complexe.
Donc, en attendant, le Tribunal du travail, ça lui arrive de
parler de bonne ou de mauvaise foi dans sa jurisprudence, mais c'est de
façon générale, de façon ancillaire. Par son
amendement, le député de Saint-Laurent, finalement, fait de cette
notion de mauvaise foi, le coeur de la décision que prendra le Tribunal
du travail, donc, l'ordonnance d'arbitrage. En d'autres termes, si le tribunal
était devant une situation où, quant à
l'appréciation de ce qu'est la bonne ou la mauvaise foi, il est
lui-même incertain, on n'aura pas d'ouverture à l'arbitrage,
puisque c'est ça la base du recours. Cela, ça m'apparaît
dangereux.
M. Forget: Le bénéfice du doute.
M. Johnson: C'est une notion de bénéfice du doute,
sauf que ça ne règle pas le problème dans le champ et
c'est en ce sens que ça devient dangereux. D'autre part, il y a toute la
mécanique ouverte par le député de Saint-Laurent et si on
la plaçait dans le contexte de délai, dans un contexte où
la mauvaise foi est là mais peut-être pas patente, comme disent
les anglophones, elle n'est peut-être pas évidente ou manifeste.
Qu'est-ce qu'on a? On a d'abord la conciliation obligatoire, dans ce
cas-là. Dans une deuxième étape, on a le tribunal qui
intervient suite à une requête. Dans une troisième
étape, on a le ministre qui apparaît comme une espèce de
deus ex machina qui va pouvoir se permettre de suspendre l'ordonnance d'un Dieu
sorti des machines qui, en vertu du texte du député de
Saint-Laurent, doit alors veiller à l'application de l'ordonnance.
Cela m'apparaît, je dirais, probablement, comment dit-on
ça, qu'est-ce que c'est l'expression?
M. Forget: Sub judice.
M. Johnson: Non, pas sub judice.
M. Bisaillon: Mutatis mutandis.
M. Johnson: Le député de Sainte-Marie voudrait
peut-être dire, in vino veritas, aussi. Cela m'apparaît hors de
juridiction, ultra vires des pouvoirs du ministre d'une certaine façon.
C'est-à-dire c'est une confusion de l'exécutif et du judiciaire.
Le tribunal rend une ordonnance et on donne le pouvoir au ministre de
l'appliquer, mais ça veut dire quoi, l'appliquer? Cela veut dire la
suspendre? Y fixer un délai? La modifier?
M. Forget: C'est comme quand le ministre de la Justice s'occupe
de l'incarcération d'un condamné, c'est lui qui applique
l'ordonnance.
M. Johnson: Oui. Donc, ça voudrait dire que le ministre
doit nommer les membres du conseil d'arbitrage, si je comprends bien?
L'ordonnance du tribunal se formulerait de la façon suivante...
M. Forget: Probablement.
M. Johnson: Donc, je défère le différend
à un conseil d'arbitrage. Là, on dit: Le ministre est
chargé de l'application; je suppose qu'il nomme le conseil
d'arbitrage?
M. Forget: Oui.
M. Johnson: Etape no 4, on a vu la conciliation, l'intervention
du tribunal; étape no 3, le médiateur, après que le
ministre ait décidé de nommer ou de différer la nomination
du conseil d'arbitrage puisqu'il a nommé un médiateur. Le
médiateur, ça pose un problème en soi, soit dit en
passant, c'est qu'on n'a pas de... c'est vrai que dans le code, on ne
définit pas ce qu'est un conciliateur. Cependant, on définit ses
fonctions à l'article... l'article où on définit la
conciliation. Un des articles du code définit la conciliation, je pense
que c'est autour de l'article 44, article 43. On ne définit pas
cependant ce qu'est la médiation.
Au départ, ça pourrait poser un problème. Etait-ce
un médiateur qu'on a nommé ou pas? Finalement, les
médiateurs font un rapport public comme le demande le Conseil du
patronat dans son mémoire. Enfin, ce n'est pas tout à fait la
mécanique que suggère le député de Saint-Laurent,
loin de ça.
M. Forget: Non.
M. Johnson: Mais la notion d'un médiateur qui rend public
un rapport, c'est une notion, aux yeux du Conseil du patronat, qui est
fondamentale en disant: l'opinion publique va jouer le rôle qu'elle peut
jouer là-dedans, etc. On respecte la liberté des parties.
Finalement, on pourrait procéder cette fois à une nouvelle
intervention du ministre qui choisit vraiment non pas de différer la
nomination du conseil d'arbitrage, mais de nommer l'arbitre. Je pense qu'on est
rendu un peu plus loin que trois ou quatre mois. Il y a un problème de
temps très sérieux, je pense, qui va se poser
là-dedans.
Deuxièmement, à l'intérieur de cette
mécanique, il y a pour moi des incertitudes quant au pouvoir d'un
ministre de différer l'application d'une ordonnance du tribunal.
Troisièmement, le problème de la définition de ce
qu'est un médiateur. Si je mets tout cela ensemble, M. le
Président, je me dis dans le fond qu'on ne se donne pas vraiment les
moyens d'atteindre l'objectif que cela vise. L'objectif que cela vise, c'est,
dans une situation de conflit qu'on qualifie souvent de reconnaissance
syndicale, d'essayer de régler le problème pour le bien des
parties le plus rapidement possible, pour le bien de l'ensemble.
Là, on s'enfarge non seulement dans une mécanique en
quatre étapes qui risque d'être longue, mais également dans
une mécanique où il y a, quant à moi, certaines
imprécisions sur le plan juridique ou, en tout cas, des
possibilités d'interprétation importante.
Finalement, je terminerai en évoquant cette partie de
l'amendement qui traite de la bonne ou de la mauvaise foi. Encore une fois,
bien que son objectif de créer une jurisprudence spécifique sur
la question soit intéressant, cela m'apparaît extrêmement
dangereux, sur le plan carrément de cet amendement.
On dit: Si le tribunal en vient à la conclusion que la
négociation en cours est entachée de mauvaise foi pour des
raisons qui ne peuvent être imputées à la partie
requérante, il ordonne l'arbitrage.
Mais qu'est-ce qui arrive s'il y a un élément de mauvaise
foi qui est imputable à la partie requérante et que le tribunal
est obligé de constater que oui, l'employeur est de mauvaise foi, il y a
des signes manifestes de cela et qu'on commence à établir une
jurisprudence? Il dit: En cours de route, soit dit en passant, telle semaine le
syndicat a fait telle chose. Probablement que le syndicat était de
mauvaise foi là-dedans aussi. On est devant, finalement, un
cul-de-sac.
M. Forget: M. le Président, ce n'est pas ce que cela veut
dire, cela veut dire qu'il y a mauvaise foi. Le tribunal dit qu'il y a mauvaise
foi, mais la mauvaise foi n'est pas imputable à la partie qui a
demandé l'arbitrage. Autrement dit, une partie qui est coupable de
mauvaise foi ne peut pas se prévaloir de l'arbitrage obligatoire pour
imposer quelque chose à l'autre alors qu'elle est elle-même de
mauvaise foi dans la négociation. C'est un peu pour répondre
à l'objection qu'a soulevée mon collègue. On pourrait
envisager une situation où on dirait: On va faire tout ce qu'on peut
pour bloquer la négociation. Après cela, on va aller demander un
arbitrage, quand on sentira que c'est mûr. Il faut éviter
cela.
M. Johnson: D'accord. La situation inverse pourrait se produire
aussi. J'ai à l'esprit un exemple en ce moment qu'on a devant nous qui
n'est malheureusement pas une première convention collective, sans cela
il serait réglé depuis un bout de temps, avec ce type
d'amendement; enfin, il serait réglé dès le 31
décembre, peut-être.
Il s'agit d'un cas où, manifestement, selon les rapports de mes
conciliateurs, il y a mauvaise foi de la part de négociateurs syndicaux
qui, systématiquement, à la table de négociation,
augmentent leurs demandes de fois en fois. Cela m'apparaît manifeste, je
pense que cela tombe sur le sens commun. Dans ce cas, je pense que l'employeur
pourrait se prévaloir de cette mauvaise foi, effectivement. Mais, dans
la formulation du député de Saint-Laurent qu'on a à
l'article 81c, on dit: Si le tribunal en vient à la conclusion que la
négociation en cours est entachée de mauvaise foi pour des
raisons qui ne peuvent être imputées à la partie
requérante mais il peut arriver que la partie requérante,
effectivement, soit également de mauvaise foi.
M. Forget: Vous ne pensez pas que, quand il y a deux parties en
face l'une de l'autre qui sont toutes les deux de mauvaise foi, cela ne devient
pas d'ordre public d'intervenir.
M. Johnson: Voilà. Le texte...
M. Forget: Non, cela ne devient pas d'ordre public à ce
moment-là.
M. Johnson: Ah bon! Oui, mais cela dépend. Effectivement,
c'est cela qu'on veut empêcher. Je pense qu'au niveau de la
mécanique concrète de ce qui se passe et du rapport psychologique
qui peut exister entre des parties dans un conflit qui s'envenime et qui dure
trois, quatre, cinq, six, sept mois, à un moment donné, il y a
des actes, dans le temps, ou, à un moment donné, il y a
peut-être eu une provocation initiale de la part d'une des parties, mais
il y a, l'expression anglaise "the buildup ", une espèce de
montée finalement jusqu'à temps que vraiment plus personne ne se
parle.
Or, si on constate, en cours de route, qu'il y a effectivement un peu de
mauvaise foi d'un côté, beaucoup de l'autre côté, le
tribunal est dans une situation d'impossibilité de déférer
cela à l'arbitrage et ce n'est pas cela qu'on recherche. Ce qu'on
recherche, c'est un règlement. L'avantage du texte que nous proposons,
je pense, bien qu'il ne contient pas cet avantage manifeste de permettre au
Tribunal du travail de commencer à développer une jurisprudence
sur la bonne foi, c'est qu'il permet cette latitude à 81d, entre autres,
au conseil d'arbitrage d'apprécier le comportement des parties au moment
où il décide, effectivement, de se prononcer sur le fond et cette
appréciation est en fonction de la bonne foi et de la mauvaise foi et
également, de la diligence.
Si on tombe dans le cas que soulignait, tout à l'heure, le
député de Bellechasse, il peut arriver qu'il n'y ait pas vraiment
une mauvaise foi, mais qu'il y ait incapacité pour les gens de
s'entendre. On peut présumer que le conciliateur aura été
capable de faire quelque chose. D'ailleurs, l'essentiel du rôle de nos
conciliateurs c'est de permettre à des gens de pouvoir se parler. Mais
si cela ne fonctionne pas au-delà de cela, parce que le conciliateur a
connu un échec pour des raisons qui peuvent relever de la situation et
pas seulement de lui, on permet quand même au conseil d'arbitrage
d'interpréter la situation, eu égard à 41, bonne foi et
diligence.
Et là, s'il y a un peu de mauvaise foi des deux
côtés, pas mal d'absence de diligence d'un autre, il peut
décider qu'effectivement la façon de le régler, c'est de
passer à l'arbitrage et de se prononcer, lui, sur le fond. Mais si ce
conciliateur considère que c'est une négociation dite normale,
qu'il n'y a pas lieu et que vraiment les parties pourront s'entendre, il peut
décider de ne pas se prononcer sur le fond. Remarquez que cela
m'étonnerait que ça se produise. Ce qui va arriver, c'est que le
conseil d'arbitrage, avant de prendre sa décision, va se prononcer sur
le fond, va mettre les parties dans une situation où il va les inciter
à régler, s'il n'y a pas vraiment de mauvaise foi entre les
parties, d'un côté comme de l'autre.
Tandis que s'il y a de la mauvaise foi manifeste de l'une des parties,
c'est clair, il va se prononcer sur le fond. La décision de se prononcer
sur le fond va se faire en fonction de cette dili- gence et de cette mauvaise
foi. Pour ces raisons, M. le Président, et quelques autres qui seront
probablement exprimées par certains de mes collègues...
M. Mackasey: Je veux aussi parler sur l'amendement.
M. Johnson: Pardon?
M. Mackasey: Je veux aussi parler sur l'amendement.
M. Johnson: Oui. Cela va être terminé. M.
Mackasey: Ils sont en temps.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Mackasey: Je m'excuse, M. le Président.
M. Chevrette: Respectueusement, vous n'avez pas respecté
la demande de parole. Parce que M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce n'est pas ici depuis une heure et j'avais
demandé la parole, il y a à peu près une demi-heure.
M. Mackasey: Je n'étais pas présent...
M. Chevrette: Je n'ai pas encore dit un mot.
Le Président (M. Marcoux): ... Pas sur l'amendement
tantôt, vous en avez parlé?
M. Chevrette: D'accord, allez-y. Juste pour vous faire remarquer
que la concertation semble évidente.
M. Mackasey: II est regrettable que je n'aie pas
été ici pendant 20 minutes.
M. Chevrette: M. le Président, pour les fins du journal
des Débats, vous avez compris que c'était une farce.
Le Président (M. Marcoux): Le Président a le sens
de l'humour.
M. Forget: De toute façon je voudrais assurer le
président et le député de Joliette-Montcalm que je n'ai
rien fait pour le priver d'un droit de parole.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Mackasey: J'ai été absent, M. le
Président, comme le député l'a souligné, 20
minutes, une demi-heure. Je ne sais pas si j'aurais appris quelque chose, or if
it would have been worse for having listened to you during that period. I have
no excuse to make for being away. What I do not want to do is to make another
amendment. I cannot wait and I am still thinking very seriously of it because
je partage le principe selon lequel le ministre désire arriver à
une première convention
collective sans grève. Je partage le sentiment du
député de Sainte-Marie que la clause originale, avant
d'être amendée... Et je viens à l'amendement du
député de Saint-Laurent; cela dans la plupart des cas, agirait
contre les meilleurs intérêts du syndicat parce que le patron
commencerait une grève ou un "lock-out" et laisserait faire pour un an,
si nécessaire, ou six mois, afin de casser le syndicat. Durant cette
période, il travaillerait en arrière pour créer un autre
syndicat, un autre groupement d'accréditation.
Il vaut mieux laisser tomber la section b, parce que le but des
changements, selon nous, c'est d'en arriver à une première
convention collective sans grève. Cela, c'est le but au moins. Alors, la
procédure du ministre je dis ça très rapidement
c'est que lorsqu'un conciliateur lui-même n'est pas capable d'en
arriver à une convention collective acceptable pour le patron et pour le
syndicat, et qu'un des deux demande au ministre les services d'un conseil
d'arbitrage, des arbitres, c'est par cette méthode qu'on en arrivait
à une conclusion.
Je suggère au ministre ou je lui demande s'il y avait...
M. Johnson: Oui.
M. Mackasey: Je veux simplement parler au ministre et non pas
à son élève. Je demande au ministre, en toute
sincérité, qu'au lieu de l'intervention d'un conciliateur, on
suggère l'intervention, dans la première convention seulement,
d'un conseil de conciliation. Songer à cela pour une minute.
M. Johnson: ... d'arbitrage.
M. Mackasey: Non, je n'ai pas parlé d'arbitrage. J'ai
parlé...
M. Johnson: Un conseil de conciliation?
M. Mackasey: Oui. Je vais vous dire pourquoi, s'il vous
plaît.
M. Johnson: Je m'excuse. Qu'est-ce que vous appelez un conseil de
conciliation?
M. Mackasey: Trois hommes au lieu d'un conciliateur: Un officier,
nommé par le syndicat, un, suggéré par le patron et le
troisième, par le ministère ou si, encore, les deux...
M. Johnson: Je m'excuse, mais ça, ça ne peut pas...
Les conciliateurs, ce sont des fonctionnaires du ministère, et moi, je
ne laisserai jamais un patron ou un syndicat nommer un conciliateur dans le
ministère.
M. Mackasey: M. le ministre, je crois bien qu'il n'y a pas de
conseil de conciliation dans votre Code du travail. On n'en emploie pas
à Québec, mais ça ne veut pas dire que c'est impossible de
le faire. Auparavant, il n'y avait pas cette clause non plus. On n'avait pas
l'arbitrage pour terminer la première convention collective non plus. Je
suggère seulement une formule qui, je pense, va aller mieux. Si vous
voulez que je présente la formule dans un amendement, je peux le faire.
Je préfère le faire dans l'esprit de conciliation, "it is a good
word, O.K.?"
Au lieu que ce soit un officier qui, dans la même méthode
que vous formulez...
Le Président (M. Marcoux): Je m'excuse de vous
interrompre, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, mais je
ne suis pas convaincu que vous parlez sur l'amendement...
M. Mackasey: Vous n'êtes pas convaincu encore...
Le Président (M. Marcoux): ... disons sur l'ensemble des
amendements proposés par le député de Saint-Laurent sur
lesquels nous discutons...
M. Mackasey: Quand vous dites que vous n'êtes pas
convaincu, vous n'en êtes pas arrivé à une décision
encore. Alors, laissez-moi terminer...
Le Président (M. Marcoux): Oui. M. Mackasey: ...
là, vous direz que... Une Voix: II n'est pas
complexé...
Le Président (M. Marcoux): Vous avez besoin d'arriver vite
à l'amendement...
M. Mackasey: Exactement.
Le Président (M. Marcoux): ... parce que je vais
être convaincu rapidement.
M. Mackasey: La raison pour laquelle je n'y suis pas
arrivé rapidement, c'est que le ministre, avec raison, a souligné
le fait que jusqu'à maintenant, à Québec, les conseils de
conciliation n'existent pas. O.K., I know that and you know that. I am saying
that, in the first collective agreement, if we were to use a Conciliation Board
je m'excuse de le dire en anglais but I want to make it short,
because I do not want to look for words rather that an officer, it would
help in the following manner...
M. Johnson: Non, mais je n'aurais qu'une question. C'est vraiment
sur le vocabulaire. When you talk about a Conciliation Board, there is one
member named by the Union, one named by the "patron" and one by the
Department.
M. Mackasey: Exactly.
M. Johnson: But these people, are they from the "service de
conciliation" or are they people from outside?
M. Mackasey: They can be people from outside. Why do they have to
be inside?
M. Johnson: Bon! A ce moment-là, ce ne sont pas des
conciliateurs.
M. Mackasey: I would say that the Union should get whom they
like, management can...
M. Johnson: Vous me parlez, en fait, d'une espèce de
conseil de médiation.
M. Mackasey: Well, I am coming to that if you let me, O.K.? We
can talk about the...
Le Président (M. Marcoux): Je vous arrête, parce que
vous ne parlez pas...
M. Forget: M. le Président, sur un point de
règlement.
Le Président (M. Marcoux): Sur une expression de
règlement?
M. Forget: Sur une expression de règlement. Je crois que
la discussion que nous avons est très large.
Le Président (M. Marcoux): Très large.
M. Forget: II est possible, si vous obligez mon collègue
de Notre-Dame-de-Grâce à présenter un amendement formel au
texte qui est devant nous, à ce moment-là, qu'on s'engage dans un
débat qui va être plus long que de laisser simplement accrocher
ses remarques à la référence qui se trouve à
l'article 81a sur un conciliateur.
Ce qu'il veut c'est simplement que la fonction de conciliation soit
exercée par trois personnes plutôt que par une personne. C'est
minime comme explication, mais cela a des implications...
M. Mackasey: If you will let me follow the procedure and if, at
the end, you say no, it will be no and I will not bring in an amendment.
Le Président (M. Marcoux): Je voudrais m'as-surer qu'il y
a quand même consentement pour qu'on discute de cette façon parce
que je croyais que vos amendements formaient un tout dont on discutait, de
façon cohérente, avant d'en arriver à une décision,
concernant ces amendements et que, par la suite, le député de
Notre-Dame-de-Grâce pourrait arriver avec une nouvelle
hypothèse...
M. Mackasey: Non, non je...
Le Président (M. Marcoux): ... mais ça
m'apparaissait comme une nouvelle façon de vouloir atteindre des
modalités vraiment différentes, d'atteindre l'objectif de ces
paragraphes. Mais, s'il y a consentement pour laisser le député
de Notre-Dame-de-Grâce poursuivre la défense de sa
proposition...
M. Johnson: M. le Président, si vous permettez. Je n'ai
aucune objection à accorder le consentement à ce qu'on
déborde le cadre de l'amende- ment puisqu'on essaie de brasser
l'ensemble de la question de la première convention collective.
Cependant, je ferai une réserve. Je demanderai au député
de Notre-Dame-de-Grâce de me permettre une affirmation, c'est que, quand
il me parle d'un conseil de conciliation qui est une institution inexistante
ici, je peux lui dire que sans mettre les mots là, c'est exactement ce
qu'on fait à l'article 81d, dans la mesure où le conseil
d'arbitrage agit d'abord, a pour rôle d'abord d'essayer de parvenir
à une entente. De plus, ce conseil d'arbitrage est formé d'une
personne nommée par le syndicat, une personne nommée par
l'employeur et une personne nommée par le ministre et elles sont
choisies à même la liste fournie par le CCTMO.
M. Mackasey: OK, there is one difference however. Le conseil
d'arbitrage selon l'article 81d, has the power to arbitrate, impose; its
settlement is the settlement.
M. Johnson: Pas dans un premier temps. Eventually.
M. Mackasey: Yes, but eventually that is the offer. What I am
trying to make, understanding exactly, and I appreciate what you are telling me
because there are nuances in the two codes... I am saying that if you name a
Conciliation Board, rather than an officer, in the first convention and
we will not get into the argument of where you pick them or where you select
them from... The Union has its representative, management has its
representative and the ministry has its chairman. What comes out of that
negotiation, Mr Minister? Usually two reports. Souvent des clauses assez
difficiles sont réglées. Sometimes the two reports show the same
recommendations on most clauses and it brings down, it minimizes, the two
reports minimize... Usually, the chairman... It is rare you get a unanimous
report; if you do, you have the settlement, but you get a majority report and
you get a minority report and the difference, sometimes, is limited to wages,
working conditions, very few... The Minister can, then, turn that report over
to a mediator whose role will be clearly defined as mediating the differences
between the majority report and the minority report. If the mediator cannot,
through mediation, settle the differences, then article 81d comes into play and
the arbitrator "conseil d'arbitrage" will then finally have to make the
decision and make a ruling of the differences which the mediator was unable to
solve.
It seems to me very simple. Instead of a conciliation officer
just to summarize you have a Conciliation Board. Experience indicates
that there will be two reports, a majority report and a minority report, which
may differ only in degree, rather than in substance, or perhaps only in such
fundamental things as wages or working conditions, but quite often solve very
touchy, difficult things through negotiation. Those reports are given to the
Minister the majority report and the minority report he, in turn,
names a mediator,
the mediator knows what is the outstanding disagreement and, if after a
short period of time, the mediator cannot resolve those disagreements, then the
Minister takes it back from the mediator and gives it to the "conseil
d'arbitrage" et celui-ci finalement va devoir rendre une décision
binding on both parties.
It is much closer to conventional bargaining and it makes sense. C'est
ça.
M. Johnson: Je vais prendre deux minutes, en espérant que
je réponds aux inquiétudes du député de
Notre-Dame-de-Grâce, de telle sorte qu'on puisse continuer plus
formellement sur l'amendement du député de Saint-Laurent.
Je pense finalement que l'objectif... Je comprends le déroulement
qu'on nous décrit et c'est vrai que c'est légèrement
différent de ce qu'on trouve là, mais je pense que cela inclut
à peu près ce que recherche le député de
Notre-Dame-de-Grâce, en ce sens que le conseil d'arbitrage, nommé
à l'article 81d, est absolument l'équivalent, en termes de
personnes et de représentation, du Conciliation Board dont il me parle.
Ce sont des représentants du syndicat et de l'employeur et un
représentant du ministre.
Or, l'article 81d nous dit bien, dans un premier temps, que le conseil
peut ensuite décider de déterminer le contenu. D'accord? Avant,
qu'est-ce qu'il a fait, le conseil? Il a fait l'équivalent d'une
conciliation en disant "peut charger un conseil d'arbitrage de faire
enquête sur le différend et de tenter de le régler". Donc,
on arrive finalement à un processus de type conciliation. C'est
évident que c'est ce qu'il va commencer à faire. S'il y a
effectivement, dans ce conseil d'arbitrage, l'équivalent d'un rapport
minoritaire et on peut s'attendre à ce que ce soit cela on
sait finalement que c'est le président du conseil d'arbitrage, comme
dans la plupart des conseils d'arbitrage, qui a un rôle
prédominant à jouer parce que, souvent, les parties ne
s'entendront pas.
On a franchi cette étape d'élagage des
éléments. Il peut dire: Voilà, nous proposons cela. Il y a
effectivement une entente entre les parties et, formellement, il s'en remet aux
parties. Ce n'est plus le conseil qui décide, il s'en remet aux parties,
donc au négociateur syndical, au négociateur patronal et
non pas à leurs arbitres et dit: Voici la base d'une entente. Si
elle se règle, il n'y a plus de problème. Si elle ne se
règle pas, à l'article 81d, il peut décider à ce
moment-là, eu égard au comportement des parties quant à
l'article 41, c'est-à-dire diligence et bonne foi, qu'il va se prononcer
au fond, avec les conséquences qu'on sait, sur la grève et le
lock-out.
M. Mackasey: La seule différence, M. le ministre je
suis complètement d'accord avec vous c'est qu'au lieu d'un
officier qui est un fonctionnaire, qui est un expert quand même, qui doit
agir d'une façon neutre, his report that comes back to you is very
limited, he is not really negotiating a settlement, he is trying to solve the
problems and sort out the problems through his report. What I am suggesting is
new, but what it is doing for you is eliminating the conciliation officer and
setting up a panel, in the same way as you have the arbitration, with very much
the same powers, except not the power to impose the settlement. The benefit is
that you have at your disposition two legitimate points of view after a
negotiation in front of the Conciliation Board, to which all parties are
represented, two reports saying, outlining, specifying, what has been agreed to
and what is still outstanding, particularly by the person who writes the
report, and somebody else makes a minority report, in which case you then still
have the additional weapon of the mediator before you have to go to the conseil
d'arbitrage.
The reason I want to do this is to try, as much as possible, for the
first collective agreement to settle it in the normal traditional manner of
bargaining, rather than imposing arbitration. Because the philosophy of this,
is that you are going to end up with arbitration which is what the deputy from
Sainte-Marie pointed out. You drop article 81b which deals with a strike and a
lock-out. You are going to end up with arbitration. It is much better to arrive
at a positive result through negotiation and I think the Conciliation Board
would be a big step forward over a conciliation officer.
By the very nature of a tri-part make-up, the conciliation officer, M.
le ministre, could be the chairman, the Union would have a member on the board,
the employer would have a member on the board. The officer could be the
chairman. What you would have, that you do not presently have, is two reports,
if necessary, one by the Union representative stating what issues are still
unresolved or what he is not happy with, management the same, but what is
important is that they will have listed all the things that they both agree to
and are binding in the sense that they were appointed by their members.
At the stage, the disagreements would be clearly defined, the mediator
could perhaps solve them, and if he cannot then he gives them to the conseil
d'arbitrage who will, to some degree, repeat what the Conciliation Board did,
but will not have to because it will have the two reports at its disposal.
That is what I think would be a big step and you should think about it.
I am only asking that you change the "officer" stage to a "Conciliation Board"
stage. It is new, it is novel, it is different but it works in other
jurisdictions, and it works very well.
M. Johnson: M. le Président, est-ce que l'amendement du
député de Saint-Laurent est adopté?
Le Président (M. Marcoux): Oui.
M. Johnson: Je demanderais effectivement qu'on considère
l'adoption ou le rejet de l'amendement du député de
Saint-Laurent.
M. Forget: II n'y a pas d'autres interventions?
M. Johnson: Non.
Le Président (M. Marcoux): Je voudrais d'abord savoir si
vous considérez les amendements comme un amendement?
M. Johnson: Oui, globalement. Je pense que oui, on s'était
entendu sur tout cela, au départ.
M. Forget: Oui, d'accord, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que l'amendement
proposé par le député de Saint-Laurent est
adopté?
M. Johnson: Rejeté. M. Forget: Sur division.
Le Président (M. Marcoux): Rejeté sur division.
M. Johnson: II s'agit bien, pour les fins du
procès-verbal, M. le Président...
Le Président (M. Marcoux): Les amendements concernant les
paragraphes 81a, 81b et 81c.
M. Bisaillon: Rejeté.
M. Johnson: ... et d) rejeté.
M. Bisaillon: Rejeté.
Le Président (M. Marcoux): Un instant.
M. Forget: Sauf qu'il n'y avait pas d'amendement à
l'article 81d).
M. Bisaillon: Non, mais comme ils sont reliés, c) et d)
vont ensemble.
Le Président (M. Marcoux): Nous revenons à la
proposition principale.
M. le député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, juste avant que le ministre
ne fasse l'amendement qu'il a annoncé à l'article 81a, à
la suite de discussions avec le député de Saint-Laurent,
j'aimerais quand même souligner une chose: Le ministre, tantôt, a
retenu, une des hypothèses de travail du député de
Saint-Laurent pour étude ultérieure.
J'aimerais lui souligner certaines réserves que j'ai à
l'article 81, paragraphes c) et d), pas dans le but d'en faire des amendements
mais dans le but, cependant, que cela soit, après usage, après
pratique, probablement étudié ultérieurement dans les
mêmes étapes qui vont venir. Si on regarde 81c et 81d, les
mêmes personnes qui auront à tenter de rapprocher les parties,
à jouer un rôle de médiation, seront celles qui, par la
suite, pourront décider d'arbitrer le contenu de la convention
collective.
Alors, il me semble qu'il y a un peu un rôle de juge et partie
à la fois, et que si, en faisant leur travail de médiation, elles
ont été amenées à suggérer des positions aux
parties, elles auront de fortes tendances, pour ne pas dire de forts
préjugés, à régler le différend de cette
façon lorsqu'elles se prononceront, en tant que conseil d'arbitrage, sur
le contenu. Il y aurait peut-être plus tard, après avoir
expérimenté cette formule, deux hypothèses de travail: une
première qui serait d'avoir deux types de personnes différents,
c'est-à-dire un médiateur carrément à l'article 81c
et un conseil d'arbitrage à l'article 81d, ou encore, seulement une
étape.
Il me semble que le ministre devrait retenir ces deux hypothèses
de travail pour qu'après l'expérimentation de la formule, telle
qu'on l'a adoptée actuellement, on puisse étudier cela dans le
futur. Je ne disais pas cela pour faire des amendements, c'était
seulement pour souligner qu'on aurait avantage à essayer cette formule
qui nous est suggérée, mais pour retenir aussi que, plus tard, il
faudra travailler sur une approche différente.
M. Johnson: On le note, M. le député. M. le
Président, je prends bonne note de la suggestion du député
de Sainte-Marie. Alors, je veux donc suggérer moi-même, pour
clarifier le texte, à la demande du député de
Saint-Laurent, que l'article 81a se lise comme suit... Donc, ma motion est en
ce sens d'amender l'article 81a, où il y a un sous-amendement, pour
qu'à la cinquième ligne de l'article 81a, on remplace le mot
"lorsque" par "après que", et qu'au sixième alinéa, donc,
on remplace les mots "s'est avérée " par "se sera
avérée". Enfin, qu'on remplace le mot "s'est" par "se sera".
Donc, l'article 81a se lirait comme suit: "Dans le cas de la
négociation d'une première convention collective pour le groupe
de salariés visé par l'accréditation, une partie peut
demander au ministre de soumettre un différend à un conseil
d'arbitrage après que l'intervention du conciliateur se sera
avérée infructueuse.
M. Chevrette: C'est "le différend " et non pas "un
différend".
M. Johnson: Je m'excuse, le différend, oui. Adopté.
M. le Président? Adopté. M. le Président, pour les fins
de...
Le Président (M. Marcoux): Au cinquième
paragraphe...
M. Johnson: C'est-à-dire qu'on revient à l'article
44 du projet de loi, globalement?
M. Jolivet: C'est la cinquième ligne après
l'alinéa.
M. Forget: Oui, c'est la cinquième ligne. M. Johnson:
Je reprends, dans le cas... M. Forget: Sixième ligne.
M. Johnson: ... de la négociation d'une première
convention collective pour le groupe de sa-
lariés visés par l'accréditation, une partie peut
demander au ministre de soumettre le différend à un conseil
d'arbitrage, après que l'intervention du conciliateur se sera
avérée infructueuse."
M. Chevrette: Adopté.
M. Johnson: Adopté. M. le Président, est-ce qu'on
considérera que l'article 44 du projet de loi est adopté?
M. Forget: Non, M. le Président.
M. Johnson: Non? Est-ce qu'on peut considérer cependant,
pour les fins de la discussion, que nous n'avons plus à revenir sur
l'article 81a, b), c), ni d)?
M. Forget: Non.
M. Johnson: Non, vous voulez revenir au paragraphe d), je
suppose?
M. Forget: Je veux revenir au paragraphe c), parce qu'il y a
là un problème qui n'est pas clarifié, de double emploi,
et j'aimerais faire lecture d'un amendement. Je vais le faire circuler, mais je
le regrette, c'est un défaut de concordance de notre part, il y a une
correction qui devrait être faite à la main. Peut-être
devrait-on le faire circuler pour qu'on puisse faire la correction, au moment
où j'en ferai la lecture.
M. Bisaillon: M. le Président, est-ce que je peux poser
une question au député de Saint-Laurent?
M. Forget: Oui.
M. Bisaillon: Est-ce qu'on n'avait pas convenu que sur les
paragraphes a), b), et c), il présentait l'ensemble de ses motions,
qu'une fois qu'on avait disposé des motions d'amendement
présentées, donc les trois qu'il nous avait annoncées,
qu'on considérerait les paragraphes a), b) et c) comme
réglés?
M. Forget: Non, ce que j'ai demandé...
Le Président (M. Marcoux): Nous avons convenu de les
adopter ou de les rejeter en bloc, mais comme le député de
Saint-Laurent a encore la parole, il peut proposer d'autres amendements, pourvu
que ce ne soient pas des amendements déjà débattus.
M. Johnson: C'est ça, d'accord.
Le Président (M. Marcoux): La parole est au
député de Saint-Laurent.
M. Forget: Je vais attendre qu'on le distribue, parce qu'il y a
une correction à faire, pour être bien sûr qu'on se
comprend. Je demanderais peut-être une suspension de quelques secondes,
parce qu'on me signale qu'il y a une autre concordance à faire.
Le Président (M. Marcoux): La parole est au
député de Saint-Laurent.
M. Forget: Je vais attendre que chacun regagne son siège,
parce qu'il y a plusieurs modifications.
Le Président (M. Marcoux): Nous attendons le
député de Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Pour le journal des Débats, admettez que
vous aviez suspendu. Il faut que je prenne le temps de revenir à la
table.
M. Forget: M. le Président, je vais lire lentement le
texte et je m'en excuse. Mais, étant donné qu'on est samedi, on
n'est pas en mesure de faire dactylographier de nouveau. Il s'agit d'un
amendement à l'article 81c qui se lit comme suit: "Que le paragraphe 81c
de l'article 44 soit modifié, en ajoutant dans la première ligne,
après le mot "demande", les mots "demande au conciliateur un rapport
conformément à l'article 45. Ce rapport doit permettre
d'apprécier le comportement des parties dans la négociation. Si
le rapport est incomplet ou insuffisant, le ministre peut demander au
conciliateur de compléter son rapport ou il peut nommer un
enquêteur à cette fin" et en retranchant, dans les deuxième
et troisième lignes, les mots "faire enquête sur le
différend et de tenter de le" et en ajoutant, dans la troisième
ligne, après le mot "réglé"... Je vais répondre
lentement, excusez-moi.
M. Johnson: Pourriez-vous y aller rapidement et ensuite le
reprendre lentement?
M. Forget: D'accord. ... "Et en retranchant dans les
deuxième et troisième lignes les mots "faire enquête sur le
différend et de tenter de le" et en ajoutant dans la troisième
ligne, après le mot "réglé", les mots "le
différend".
M. Johnson: Pourriez-vous relire cette partie-là
également lentement pour les fins de notre rédaction et ensuite
lire lentement le texte tel qu'amendé? Comment se lirait-il?
M. Forget: ... et en retranchant dans les deuxième et
troisième lignes, les mots "faire enquête sur le différend
et de tenter de le" et en ajoutant dans la troisième ligne, après
le mot "réglé", les mots "le différend".
Le paragraphe amendé se lirait comme suit: 81c. "Le ministre, sur
réception de la demande, demande au conciliateur un rapport
conformément à l'article 45. Ce rapport doit permettre
d'apprécier le comportement des parties dans la négociation. Si
le rapport est incomplet ou insuffisant, le ministre peut demander au
conciliateur de compléter son rapport ou il peut nommer un
enquêteur à cette fin". Là, il y a un problème.
M. Johnson: Vous avez supprimé "bonne foi", vous l'avez
remplacé par "le comportement".
M. Forget: Oui, mais je regrette, notre concordance
n'était pas complète. Je n'ai pas de début de phrase
après.
M. Johnson: M. le Président, je n'ai pas d'objection
à ce qu'on suspende encore pendant deux minutes, s'il le faut, il n'y a
pas de problème.
Le Président (M. Marcoux): Nous allons suspendre encore
pour deux minutes.
(Suspension de la séance à 12 h 40)
Reprise de la séance à 12 h 48
Le Président (M. Marcoux): Fin de la suspension.
M. Forget: M. le Président, je reprends la lecture du
texte tel qu'amendé, parce qu'autrement c'est très difficile de
le faire sur le bout de la table.
Le Président (M. Marcoux): Oui, parfait.
M. Forget: Le texte tel qu'amendé se lirait comme suit:
81c) "Le ministre sur réception de la demande, demande au conciliateur
un rapport conformément à l'article 45. Ce rapport doit permettre
d'apprécier le comportement des parties dans la négociation. Si
le rapport est incomplet ou insuffisant, le ministre peut demander au
conciliateur de compléter son rapport ou il peut nommer un
enquêteur à cette fin. Si le ministre, à partir des
informations qui lui sont soumises, juge que la négociation ne pourra se
terminer par une convention collective...
M. Johnson: Un instant.
M. Forget: ... ne pourra se terminer par une convention
collective.
M. Johnson: Ne pourra se terminer par...
M. Forget: ... ne pourra se terminer par une convention
collective...
M. Johnson: Et non pas par la conclusion d'une convention
collective, mais par une convention collective.
M. Forget: Indifféremment. M. Johnson:
D'accord.
M. Forget: ... il peut charger un conseil d'arbitrage...
Le Président (M. Marcoux): Alors, vous supprimez il... Il
peut...
M. Forget: ... charger un conseil d'arbitrage de régler le
différend ". Est-ce que cela va pour tout le monde?
M. Johnson: Je relis, M. le Président, si vous me
permettez, pour les fins de la discussion. "Le ministre, sur réception
de la demande, demande au conciliateur un rapport conformément à
45. Ce rapport doit permettre d'apprécier le comportement des parties
dans la négociation. Si le rapport est incomplet ou insuffisant, le
ministre peut demander au conciliateur de compléter son rapport ou il
peut nommer un enquêteur à cette fin. Si le ministre, à
partir des informations qui lui sont soumises, juge que la négociation
ne pourra se terminer par une convention collective, il peut charger un conseil
d'arbitrage de régler le différend". C'est cela?
M. Forget: M. le Président, sur cet amendement. Son but
est de tenant compte de la motion qui a été défaite
précédemment et qui avait pour intérêt principal de
substituer au jugement, à la discrétion du juge, l'ordonnance
d'un tribunal quant au comportement des parties ou plutôt à la
bonne foi scinder la double tâche que l'article 81c attribue
actuellement au conseil d'arbitrage. Le conseil d'arbitrage est appelé
à jouer le rôle, d'abord d'enquêteur, ce qui est un
rôle nouveau pour un conseil d'arbitrage, et il n'est pas
précisé sur quoi son enquête doit porter. Cependant, on
voit que son enquête implicitement doit porter sur plus que simplement
les positions des parties, parce qu'éventuellement il aura à
déterminer s'il est nécessaire d'aller à l'arbitrage ou de
ne pas y aller.
Donc, c'est une situation où il doit à la fois faire une
enquête sur la position respective des parties et aussi sur leur
comportement, de manière à pouvoir juger si le comportement que
les parties ont affiché durant la négociation est susceptible de
les amener à une convention collective. D'ailleurs, quand on regarde
81d, on revient un peu en arrière en disant que, dans la décision
que le conseil d'arbitrage va donner sur le litige, il va tenir compte du
comportement des parties. Cela aussi, c'est un mélange; cela montre donc
qu'il y a un double mélange. Je le reprends pour être bien
sûr que je me fais comprendre.
D'abord, au niveau des fonctions, le conseil d'arbitrage joue le
rôle d'un enquêteur et joue le rôle traditionnel d'un conseil
d'arbitrage qui est de se prononcer sur le fond du litige.
Deuxièmement, ce qui fait l'objet de son attention il y a
une autre confusion là-dessus il s'occupe du fond du litige,
c'est-à-dire découvrir la position respective des parties; mais
il est amené, par l'article 81d, à tenir compte du comportement
des parties dans la décision qu'il rend sur le fond du litige, et par
l'article 81c, il est amené également à tenir compte du
comportement des parties sur la recommandation qu'il doit faire ou sur la
conclusion à laquelle il doit arriver, c'est-à-dire de se rendre
jusqu'à l'arbitrage lui-même ou de ne pas s'y rendre. Alors, il y
a une
espèce de confusion totale de fonctions d'enquête et de
fonctions d'adjudication arbitrale. Il y a une confusion totale, à
l'article 81c et, plus tard, à l'article 81d, entre ce qui fait l'objet
du litige, c'est-à-dire les positions respectives des parties et
également leur comportement. Leur comportement est pertinent à
deux égards: II est pertinent d'abord quant à conclure s'il va
falloir arbitrer de façon obligatoire le différend ou ne pas le
faire. Il est aussi pertinent, ce comportement, selon l'article 81d on
le verra tantôt quant à la nature de la décision qui
est prise sur le fond du litige, parce que l'article 81d dit que le fond du
litige va être arbitré en tenant compte du comportement. Alors, il
n'est plus question d'aller vers l'arbitrage ou de ne pas y aller. Il est
simplement question à l'article 81d, de décider quelles seront
les conditions de travail; dans la détermination des conditions de
travail, on invite le conseil d'arbitrage à tenir compte du comportement
sur lequel il aura lui-même enquêté en vertu de l'article
81c et dont il se sera servi pour décider s'il doit y avoir arbitrage ou
pas. Inévitablement, il se servira de la même connaissance pour
décider quel genre de conditions de travail doit être
imposé.
C'est une situation indescriptible de confusion; enfin, peut-être
que d'autres auraient plus de talent que moi pour décrire la confusion,
mais je pense qu'elle est là. Elle est là au niveau des fonctions
et elle est là au niveau des sujets qui font l'objet du travail du
conseil d'arbitrage, une double confusion.
Ce que j'essaie de faire, ce que nous essayons de faire par l'article
81c, c'est de tirer ça au clair et de dire: Bon! Ecoutez! Il y a une
question de comportement qu'il faut évaluer au moment de décider
si oui ou non il faut aller en arbitrage. L'enquête dont on charge le
conseil d'arbitrage ne devrait pas être faite par lui. On devrait
demander au conciliateur, puisqu'il y en a un, et on sait, avec l'amendement
qu'a accepté le ministre, qu'il va nécessairement y avoir un
conciliateur. Alors, parmi les choses que le conciliateur qui est
obligatoire dans ce cas-ci, ce qu'il n'est plus ailleurs une des choses
sur lesquelles il devra faire un rapport, c'est non seulement le litige, les
positions respectives des parties, mais aussi sur le comportement des parties
dans la négociation.
C'est là-dessus que le ministre doit se baser, sur le
comportement des parties, de même que sur un exposé de leur
position respective, pour décider s'il doit charger un conseil
d'arbitrage d'intervenir. Il me semble que c'est beaucoup plus clair. On dit:
On a un rapport, le rapport du conciliateur notre collègue avait
suggéré un conseil de conciliation, ce n'est pas retenu par le
ministre mais de toute façon, on a un conciliateur, il fait un
rapport, il est là et il est au courant de ce qui se passe, pourquoi ne
pas lui demander de faire son enquête, plutôt que de demander au
conseil d'arbitrage qui aura pratiquement un rôle de tribunal à
jouer sur le fond. Ce n'est pas approprié. Demandons au conciliateur de
compléter son rapport de conciliation en donnant, ce qu'il ne fait pas
ordinairement, des commentaires, des constatations sur le comportement des
parties. Informé de ça, le ministre va savoir tout ce qu'il a
besoin de savoir pour prendre une décision éclairée. Il va
connaître le comportement des parties dans le rapport de quelqu'un qui
est intervenu, ainsi que la position respective des parties. Là il va
dire qu'il faut que le conseil d'arbitrage intervienne, étant
donné l'écart qui existe entre les parties, étant
donné les observations qu'on a faites sur le comportement. Entre
parenthèses, M. le Président, dans les modifications de
dernière minute que j'ai introduites dans l'amendement que je
présente, j'ai mis "comportement", alors que le texte original, tel que
vous avez pu vous en rendre compte, mentionnait "la bonne foi". Mais je pense
que ça rend inattaquable, sur le plan de la recevabilité, mon
amendement. Pour échapper au juridisme, il faut bien se rendre compte
que, quand on parle de comportement et l'article 81d en parle ce
qui m'apparaît clair, c'est qu'on parle de comportement dans le sens
où le comportement permet d'éclairer la bonne ou la mauvaise foi
des parties. Ce n'est pas...
M. Johnson: Et la diligence.
M. Forget: Et la diligence, je pense que le ministre a raison car
la diligence aussi pourrait être mentionnée. Donc, c'est
peut-être plus correct de parler de comportement. Mais l'esprit est
là, c'est un élément, ce comportement, pour décider
si oui ou non il doit y avoir arbitrage. La façon dont le texte actuel
l'introduit, c'est au niveau de l'adjudication sur le fond. Peut-être
doit-on tenir compte du comportement dans l'adjudication sur le fond, mais si
on en tient compte dans l'adjudication sur le fond dans 81d, à plus
forte raison doit-on en tenir compte quand on décide si oui ou non il
doit y avoir arbitrage. Il me semble que c'est nécessaire. Si on a
besoin de cette information au moment de décider d'aller en arbitrage ou
non, il me semble que c'est une connaissance antérieure à
l'arbitrage, antérieure à la désignation d'un conseil
d'arbitrage, d'où la nécessité de charger quelqu'un
d'autre de faire ce travail.
D'ailleurs, le député de Sainte-Marie l'a soulevé
tantôt dans une intervention; il me semble que c'est normal, on ne
demande pas aux tribunaux de faire le travail de la police. Ce que je dis est
caricatural mais c'est un peu cela. On ne dit pas aux tribunaux: allez voir
s'il y a quelqu'un qui a commis un vol et si vous en trouvez un,
évidemment, vous le jugerez. On a dépassé ce stade depuis
bien longtemps. C'est placer des arbitres dans une situation très
délicate que de leur imposer de faire l'enquête sur les
faits...
M. Mackasey: ... le conseil d'arbitrage, pour moi, est juste un
conseil de conciliation.
M. Forget: Mais le ministre ne veut pas de conseil de
conciliation parce que cela ne va pas dans la vision cartésienne qu'il
se fait de son système.
M. Mackasey: C'est dommage.
M. Forget: Alors, c'est pour le taquiner en passant, M. le
Président, mais...
M. Mackasey: ...
M. Forget: ... il reste qu'il ne veut pas de conseil d'arbitrage,
alors on n'en parle pas. On n'est pas pour s'entêter là-dessus. On
pense toujours que ce serait une bonne idée mais on n'en parle plus. Au
moins, il y a un conciliateur; pourquoi pas lui demander un rapport
circonstancié, sur le fond, sur le comportement des parties, et le
ministre sera protégé? Il aura un dossier complet, il ne prendra
pas une décision sur demande, en demandant à quelqu'un d'autre de
faire enquête après coup. Le ministre se trouve dans la position,
si on ne fait aucune modification, où il dit: Ah! oui, on donne un
arbitrage. Pourquoi? C'est parce qu'on me l'a demandé. Ce n'est pas
beaucoup comme justification.
M. Johnson: Ce n'est pas ce que le texte dit. Le texte ne
défère pas à l'arbitrage; le texte défère
à une commission d'arbitrage qui va décider si oui ou non elle va
se prononcer sur le fond.
M. Forget: C'est presque...
M. Johnson: C'est très différent.
M. Forget: ... un jeu de mots, à la limite.
M. Johnson: Non.
M. Forget: Parce que quand on a le pied dans l'étrier, par
la nomination d'un conseil d'arbitrage...
M. Johnson: On peut monter ou descendre du cheval.
M. Forget: On peut monter ou descendre du cheval; mais il reste
que si on descend du cheval en cours de route, on risque de se casser la
gueule; alors il vaut mieux le faire arrêter avant.
M. Johnson: Je suis bon cavalier.
M. Mackasey: You get on a horse in the wrong direction, you are
in trouble. Je pense que c'est ce qui arrive, le ministre looks that way and
the horse is going that way.
M. Johnson: Le député de Saint-Laurent sait
très bien que pour être un bon cavalier, il faut tomber du cheval
au moins sept fois.
M. Forget: Je ne fais pas de cheval, M. le Président, mais
je suis bien prêt à prendre la parole du ministre
là-dessus. Il reste que, surtout quand on monte à cheval, il ne
faut pas s'en aller dans toutes les directions à la fois. Cela aussi,
c'est important. Encore une fois, il y a quelque chose qui ne va pas dans le
mécanisme; je comprends qu'on veut le simplifier à outrance en
fusionnant toutes les fonctions dans un même individu, mais c'est presque
de la législation d'exception, dans le fond, parce qu'on dit que ce sera
invoqué très rarement. La confusion des genres dans les
législations d'exception, on en a assez entendu parler pour y être
sensibles, je pense qu'on s'y livre. Le ministre intervient pour juger du
comportement.
J'ai pratiquement jugé du fond, et ce n'est pas souhaitable. M.
le Président, je remarque qu'il est 13 heures.
Le Président (M. Marcoux): Oui.
M. Johnson: M. le Président, je demanderais la suspension
de la séance jusqu'à 15 heures.
Le Président (M. Marcoux): La commission suspend ses
travaux jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 2)
Reprise de la séance à 15 h 10
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, madame et
messieurs!
Nous étions à discuter de l'amendement proposé par
le député de Saint-Laurent, à l'article 81c. Le
député de Saint-Laurent avait complété, je crois,
son exposé.
M. Forget: Sans épuiser mon droit de parole, je l'avais
complété.
Le Président (M. Marcoux): C'est ça. Est-ce que
l'amendement est adopté?
M. Goulet: M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: M. le Président, l'amendement proposé
par le député de Saint-Laurent, je ne sais pas si lorsqu'il dit
"au conciliateur", le mot conciliateur est le même qu'on retrouve
à l'article 81a ou si c'est un autre conciliateur. Si c'est le
même, à l'article 81a, à la fin, on disait: "le
différend d'un conseil d'arbitrage après que l'intervention du
conciliateur se sera avérée infructueuse". Il y a eu une
modification, un sous-amendement amené par le ministre, et le
sous-amendement a été adopté. Si c'est le même
conciliateur, je me demande ce qu'il vient faire à l'article 81c, parce
qu'on dit bien: "après que l'intervention du conciliateur se sera
avérée infructueuse".
Je comprends que, probablement par cet amendement, le
député de Saint-Laurent vise à calmer ou à
répondre aux appréhensions du député de
Sainte-Marie qui ne semble pas vouloir que le conseil d'arbitrage soit juge et
partie. Alors, c'est pour ça qu'on voulait simplement que ce soit le
conciliateur qui fasse enquête, et ensuite le conseil d'arbitrage
pourrait tenter de régler le conflit.
Je ne vois pas, M. le Président, pourquoi cela vient dans cet
article, parce qu'il est déjà à l'article 81a.
M. Forget: II n'y a pas de rapport à l'article 81a.
M. Goulet: II n'y a pas de rapport, on dit... c'est-à-dire
qu'en vertu de l'article 45, qui dit ceci: "Le conciliateur fait rapport au
ministre à la demande de ce dernier". On dit: "Après que
l'intervention du conciliateur se sera avérée infructueuse". Je
ne vois pas ce qu'il vient faire dans ça. C'est entendu que le conseil
arbitral, pour décider, devra étudier et prendre connaissance du
rapport du conciliateur. Il y aurait peut-être, ce que le
député de Sainte-Marie semblait vouloir aussi cet avant-midi, que
le conseil arbitral ne soit pas juge et partie; c'est pour faire une
différence. Mais quant au conciliateur, si son intervention s'est
avérée infructueuse, c'est qu'il a déjà fait un
rapport au ministre.
M. Forget: Non. M. Goulet: Bien...
M. Forget: Non, le conciliateur n'est pas tenu de faire
rapport.
M. Goulet: Non, mais après que le ministre le lui aura
demandé. En vertu de l'article 45, le ministre va certainement le lui
demander.
M. Forget: Pas nécessairement.
M. Goulet: Ecoutez.
M. Forget: II n'y a rien qui le dit.
M. Goulet: "Le conciliateur fait rapport au ministre à la
demande de ce dernier ", si le ministre le demande. On le dit.
M. Forget: II faut qu'il le demande dans ce cas-là.
M. Goulet: Oui, mais j'imagine qu'il va le demander s'il veut
l'avoir.
M. Forget: II n'y a rien qui le dit.
M. Chevrette: II faut prendre pour acquis qu'un ministre est
intelligent.
M. Forget: C'est beaucoup supposer, M. le Président.
M. Johnson: De façon générale.
M. Goulet: Si vous me le permettez, M. le Président,
d'après ce qu'on voit dans les autres articles, je ne vois pas pourquoi
le ministre ne demanderait pas le rapport. Il va falloir qu'il le demande
à un moment donné; il me semble que c'est assez clair. Le
ministre va être obligé de demander ce rapport-là.
M. Forget: Si c'est clair, on peut le dire.
M. Goulet: C'est clair. Vous aimeriez que ce soit écrit:
Le ministre va demander le rapport à tel moment. Il va le demander. Si
l'intervention du conciliateur s'est avérée infructueuse, je ne
vois pas... A l'article 81c, on dit: "Le ministre peut charger le conseil
d'arbitrage de faire enquête sur le différend et de tenter de le
régler". Si on veut être cohérent c'est après que le
conciliateur a fait son travail. On ne peut pas lui demander de le faire de
nouveau à moins qu'on ne confie cela à un autre conciliateur et
qu'on lui dise: Fais le travail du premier. Il a déjà
donné son rapport. Si cela s'avère infractueux le ministre va lui
demander...
M. Forget: La plupart des conciliateurs ne donnent pas de
rapport. C'est très fréquent. Surtout quand ils n'en viennent pas
à une entente, il peut être souhaité par les parties qu'il
n'y ait pas
de rapport de produit. Les parties, en demandant au ministre
d'intervenir, peuvent faire état qu'il y a eu un conciliateur et que le
conciliateur a échoué et se limiter à cela. Le ministre
n'est pas tenu, non plus, de demander un rapport.
M. Goulet: Oui, mais M. le Président, compte tenu des
autres articles, le ministre devra, à un moment donné, demander
le rapport, parce que excusez les mots ce serait stupide de sa
part si, à un moment donné, il ne le demandait pas, ce rapport.
Il va falloir qu'il le demande à un moment donné.
M. Forget: II faut imaginer des circonstances où il se
trouverait plus confortable de ne pas le demander.
M. Goulet: M. le Président, si c'est le même
conciliateur qu'on retrouve à l'article 81a, je ne vois pas du tout le
pourquoi de "cet article-là". C'est ce que j'avais à dire sans,
comme le disait le député de Saint-Laurent...
Le Président (M. Marcoux): Le pourquoi de l'amendement,
vous voulez dire?
M. Goulet: Pardon?
Le Président (M. Marcoux): Le pourquoi de
l'amendement?
M. Goulet: De l'amendement, oui. Le Président (M.
Marcoux): D'accord.
M. Johnson: M. le Président, sur l'amendement. Evidemment,
je serai contre cet amendement pour une série de raisons. D'abord, je
reprendrai à mon compte, peut-être pas tout à fait pour les
mêmes raisons, la conclusion du député de Bellechasse. En
vertu de l'article 45 qui est évoqué ici dans le texte de
l'amendement, mais qui est là indépendamment du fait qu'on
l'invoque ou pas, c'est comme cela que ça fonctionne au ministère
du Travail. Quand le ministre veut être renseigné sur un conflit,
il ne téléphone pas aux parties; il demande un rapport au
conciliateur et cela quotidiennement. Le rapport n'est pas
nécessairement écrit; dans certains cas, il l'est.
Parfois le ministre s'adresse au directeur général ou au
directeur du service, parfois il communique directement avec un des
conciliateurs pour des raisons d'efficacité dans le contexte, parce
qu'il veut plus de précisions sur certaines choses. Il le fait en vertu
de l'article 45. Deuxièmement, il le fait en vertu du pouvoir de
discrétion ministérielle et du pouvoir d'administration du
ministre qui est le pouvoir général d'un ministre à
l'intérieur du ministère. Cela ne pose aucun problème, la
notion de l'article 45, et je suis entièrement d'accord avec le
député de Bellechasse à cet effet.
Si le rapport est incomplet ou insuffisant, le ministre peut demander au
conciliateur de compléter son rapport. C'est ce qu'il fait. Un
conciliateur, comme cela m'est déjà arrivé depuis six
mois, à qui je demande ou je fais demander, au service de conciliation,
des renseignements sur tel conflit..., et je me rends compte parce que la
formulation de ma question n'était pas précise ou, pour une
raison ou pour une autre, je considère que c'est incomplet ce qu'on me
donne comme information, je rapplique ou je fais rappliquer quelqu'un de mon
cabinet et, à un moment donné, le ministre a l'information. Il
n'y a aucun problème là.
On n'est pas obligé de lui demander de compléter son
rapport. Je lui demande de me faire rapport.
Deuxièmement, il peut nommer un enquêteur à cette
fin, je ne vois pas pourquoi il irait nommer un enquêteur. Il y a un
conciliateur pourquoi amener un nouveau personnage?
Troisièmement, si le ministre, à partir des informations
qui lui sont soumises, juge que la négociation ne pourra se terminer par
une convention collective, le ministre exerce un jugement. Sur la base de quoi?
Oublions même que le député de Saint-Laurent, dans sa
motion a évoqué l'article 45, ce qui va de soi, parce que
l'article 45 est là et donne le pouvoir au ministre. Ce qui arrive, en
pratique, il demande à son conciliateur d'évoquer effectivement
le comportement des parties, l'analyse, son impression. Je pourrais
éventuellement déposer des rapports de certains de mes
conciliateurs, mais dans des conflits très précis où il y
a des opinions, des évaluations du comportement des parties. C'est
courant. Cela permet un peu d'apprécier la qualité de la
négociation ou du contexte, et cela nous permet un peu de savoir
où on s'en va et quelle sera la prochaine étape à aborder,
pas nécessairement une étape au sens du code, une étape au
niveau des interventions de façon générale du
ministère et du contenu de ces interventions.
Pour ma part, je pense, l'évocation de l'article 45 est inutile
et superfétatoire.
Deuxièmement, l'idée d'amener un troisième
personnage là-dedans est à mon avis inutile.
Troisièmement, s'il juge que ceci ne se terminera pas par une
convention collective, c'est évidemment l'objet de toutes les
dispositions sur l'arbitrage de la première convention.
Donc, c'est également un peu superflu. Il peut charger un conseil
d'arbitrage de régler le différend. On l'a, cela ici. "Le
ministre, sur réception de la demande, peut charger un conseil
d'arbitrage de faire enquête sur le différend et de tenter de le
régler". Essentiellement, c'est encore là. En d'autres termes,
pour moi, fondamentalement, c'est cela qui se passe. Aller le préciser
dans le temps. On va me dire: II y a des choses qui vont mieux en les disant
qu'en ne les disant pas. Je suis sûr que c'est l'argument que va me
servir le député de Saint-Laurent.
Cependant, comme c'est un texte de loi, il ne s'agit pas de faire en
sorte que ce soit non plus inutile et l'occasion, entre autres, de
procédures, par exemple d'une procédure judiciaire où on
contesterait la nomination du conseil d'arbitrage nommé par le ministre
parce qu'on pourrait invo-
quer que le conciliateur a mal complété son rapport. C'est
au ministre d'évaluer la qualité et c'est finalement très
subjectif. Souvent, ces décisions se prennent parfois non pas
rapidement, mais dans des situations où il faut agir rapidement.
Je trouve finalement que, de façon générale, c'est
un peu inutile d'ajouter des choses qui y sont et qui font partie du seul mode
de fonctionnement possible au ministère. C'est pour cette raison et
quelques autres, M. le Président, que je rejetterai l'amendement du
député de Saint-Laurent. Le dernier élément, je
m'excuse, que j'allais oublier, c'est que de toute évidence, quand on
fait appel à une espèce de formalisation du rapport du
conciliateur su rie comportement des parties, même si on a
supprimé la mauvaise foi, tout à l'heure, dans le fond,
comportement cela s'interprète à l'égard de 41 bien plus
qu'autre chose. C'est à peu près évident.
Là, on va faire porter sur les épaules du ministre
l'"odieux" d'évaluer si oui ou non il y a bonne ou mauvaise foi ou
diligence ou pas d'une certaine façon. Oui?
M. Forget: Au contraire.
M. Johnson: On le fait porter sur les épaules du
conciliateur, mais le conciliateur, il n'est personne aux yeux de la loi. Il
joue son rôle, sauf que ce n'est pas le conciliateur qui va prendre une
décision. C'est le ministre qui doit prendre la décision sur la
base des informations du conciliateur. Ce n'est pas le conciliateur qui a le
pouvoir de dire: II y aura un conseil d'arbitrage. Si c'était le
conciliateur, il n'y aurait pas de problème. Mais c'est le ministre.
Donc, il faut que le ministre apprécie la qualité, le contenu; il
faut qu'il fasse un acte de foi là-dessus. On dit: C'est le ministre qui
va décider qu'il y a un conseil d'arbitrage qui va tenter de
régler le différend. On dit: Qu'on fasse la demande, on nomme le
conseil d'arbitrage qui s'en va dans le champ, qui évalue,
effectivement, tout cela, qui décide si, oui ou non, il va se prononcer
au fond. Ce sont vraiment ceux qui vont être dans le dossier. C'est cela
qui compte. Deuxièmement, dégager le ministre de l'aspect un peu
odieux d'essayer de juger de la bonne ou de la mauvaise foi des parties, alors
qu'on est même hésitant à le confier au Tribunal du travail
dans un premier temps. Imaginez-vous, au ministre, quel genre de jurisprudence
cela fait!
Je pourrais peut-être aller un peu plus loin et dire que c'est une
espèce d'hommage à la conception un peu "pompiériste" du
rôle du ministre là-dedans puisqu'on lui confie de porter
formellement un jugement sur le comportement des parties. Je pense que ce n'est
pas le rôle du ministre.
M. Forget: Le ministre vient de donner la meilleure
défense qu'on peut imaginer pour l'amendement. Le problème, c'est
qu'il n'est pas conséquent avec sa logique. Il vient de donner toutes
les raisons pour lesquelles il ne faut pas donner au ministre un pouvoir
discrétionnaire sans l'assortir de certaines modalités, et,
effectivement, ce qu'il se propose de faire dans cet article et les autres qui
l'accompagnent, c'est de prendre des décisions extrêmement
politiques et extrêmement personnelles sur la base d'une absence totale
d'information, autre que celle qu'il aura par les journaux ou par
ouï-dire. Parce que ne nous faisons pas d'illusions...
M. Johnson: Vous présumez que c'est un ministre
farfelu.
M. Forget: M. le Président, j'ai la parole.
Ne nous faisons pas d'illusions. Ce devant quoi on est, c'est une
confusion. Je croyais que le ministre s'était trompé, qu'il ne
cherchait pas la confusion à plaisir, mais il est clair qu'avec
l'article 81c, il cultive la confusion, parce qu'il est clair que lorsque le
ministre, "sur réception de la demande, peut charger", etc., il prend
une décision. Je pense que c'est très clair qu'il prend une
décision. Or, il n'y a rien dans les articles antérieurs qui
l'équipe pour prendre cette décision, sauf une demande, une
demande qui est basée sur quoi? Une demande qui est basée sur
l'intervention avortée d'un conciliateur, mais qui, étant
donné qu'on se réfère aux clauses générales
de la conciliation, le rapport lui-même du conciliateur ne traite pas
spécifiquement de la question qui est le critère de
décision dans ce cas-là, qu'est le comportement des
parties...
C'est bien clair que les parties ne s'entendent pas. C'est clair que ce
qui constitue la base habituelle d'un rapport de conciliateur, c'est qu'on ait
rencontré les parties, que telle et telle partie a telle et telle
prétention, que l'autre partie a telle et telle autre prétention
et que, sur un certain nombre de sujets, il n'y a pas possibilité
d'entente. Mais la mission d'un conciliateur, ce n'est pas la mission d'un
enquêteur. Ce n'est pas de s'interroger sur les motivations, les
comportements des parties, leur diligence et leur bonne foi, c'est simplement
de constater, soit un accord sur certaines clauses, soit une
impossibilité d'en arriver à un accord sur d'autres clauses.
Quand on se réfère à l'article 45 sans modifications, sans
prévoir la possibilité qu'il va y avoir un peu plus que le
rapport formel d'un conciliateur, on va retomber devant un rapport qui est
extrêmement laconique, qui peut, à l'occasion et de façon
incidente, dire telle ou telle chose sur le comportement des parties, mais qui
n'a pas pour but d'éclairer, de façon objective et
complète, le comportement des parties. Ce ne peut être
qu'incident. Ce ne peut être que, par exemple, le comportement durant la
phase de conciliation, ce qui n'est pas nécessairement ce qu'il y a de
plus pertinent. Ce n'est pas une tentative pour faire l'histoire du cas, en
quelque sorte, pour employer un terme emprunté à une autre
discipline; on ne fera pas l'histoire du cas de ce conflit-là. On pose
tout simplement un diagnostic à un moment précis. On dit: II y a
tel et tel symptôme de mésentente sur tel et tel point et,
incidemment, on peut, évidemment, décrire le comportement des
parties qui ont refusé ou accepté, avec plus ou moins de
réticence, de collaborer avec le conciliateur, mais c'est loin
d'être une investigation complète qui permettrait au mi-
nistre de porter son jugement, ce pouvoir auquel le ministre tient tant
et qui semble lui donner une telle satisfaction de pouvoir décider de
mettre en branle le mécanisme d'arbitrage.
Pour la protection même du ministre, pour que cette
décision ne soit pas trop facilement attaquable, pour qu'il ne soit pas
accusé de faire de la politique avec cela, ou du pompiérisme,
selon son expression favorite, il faut qu'il puisse alléguer. J'ai
devait moi les faits qui basent mon intervention. Or, le rapport du
conciliateur, rapport qu'il n'est même pas tenu de produire, sauf par
référence à d'autres articles, mais encore là, on
ajoute des décisions à des décisions, on ajoute des
pouvoirs discrétionnaires à des pouvoirs discrétionnaires;
pour utiliser le pouvoir discrétionnaire de 81c, on dit qu'il peut
utiliser le pouvoir discrétionnaire de 45. Pourquoi ne pas en faire une
condition stricte, de manière qu'une partie ne puisse pas l'accuser
d'avoir fait du zèle en allant chercher à droite et à
gauche des rapports qui peuvent tarder, qui peuvent impliquer certains
délais. Le conciliateur peut dire: Oui, M. le ministre, je vais vous
donner mon rapport; mais j'aimerais mettre mes notes en forme avant de vous le
donner. Et il peut s'écouler un certain nombre de jours, peut-être
une semaine et demie ou deux semaines avant que le rapport du conciliateur soit
remispeut-être trois semaines, j'ai déjà vu plus
long. A ce moment, une des parties peut dire et même accuser
publiquement le ministre de temporiser, de se prévaloir d'autres
dispositions du Code du travail, alors qu'il n'est pas tenu de le faire dans
les circonstances puisqu'on dit: "Sur demande", il prend des décisions.
Sur demande, ça veut dire quelque chose. Là on va alléguer
qu'il y a une autre disposition du code qui permet au ministre de demander des
choses, alors que ce n'est pas prévu dans cette disposition. Des causes
de mésentente, mais aussi des causes de contestation, pas judiciaire,
d'une décision qu'il prend. Il s'expose plus qu'il ne le faut en
utilisant son pouvoir discrétionnaire, alors qu'il ne se donne pas les
moyens d'obtenir un exposé des faits. Il prend une décision et
c'est seulement après qu'il demande de faire enquête. C'est comme
l'attitude qu'on reprochait au Gl américain au Viêt-nam; ils
tiraient d'abord et ils posaient les questions après. C'est un peu ce
qu'on demande au ministre de faire. Il va décider qu'il y a lieu de
créer un conseil d'arbitrage, et après cela, il va dire: Allez
donc trouver si je n'avais pas des raisons de faire cela. Allez faire
enquête. Peut-être allez-vous découvrir que le comportement
des parties n'est pas approprié. Mais à ce moment, comme la
décision d'amorcer l'arbitrage est déjà prise, vous en
tiendrez compte dans la décision que vous rendrez sur le fond. La belle
affaire! On a un beau processus; c'est très satisfaisant; c'est tout
naturel de procéder comme cela. On a toujours fait ça. Cela
viendrait spontanément à quiconque penserait, à
l'arbitrage, de procéder de cette façon. Voyons donc! Tout
ça, sous prétexte que c'est dans la loi. On peut utiliser un
autre article, c'est à la discrétion du ministre. C'est la
confusion qu'on cultive. On cultive la confusion sous prétexte qu'on a
des pouvoirs dis- crétionnaires. C'est bien sûr qu'on a des
pouvoirs discrétionnaires, mais qu'on apprenne à les utiliser de
façon intelligente.
M. Johnson: Voyons donc! C'est que le député de
Saint-Laurent donnait de l'argumentation en disant à peu près
ceci, sauf erreur: si le conciliateur n'a pas eu le temps de fournir son
rapport... Le ministre peut lui demander... ça peut prendre deux ou
trois semaines, mais...
M. Forget: Cà, c'est le scénario du ministre.
M. Johnson: Non, mais c'est que, dans l'amendement que vous
présentez, vous dites exactement ceci: "Si le rapport est incomplet ou
insuffisant, le ministre peut demander au conciliateur de compléter son
rapport." C'est le même conciliateur, le même rapport, mais
ça peut quand même prendre trois semaines ou un mois.
M. Forget: Bien sûr, mais dans quel contexte ai-je dis
cela, M. le député de Bellechasse? J'ai dit cela dans le contexte
de l'utilisation, par le ministre, d'un pouvoir discrétionnaire. Or j'ai
dit: Monsieur le ministre, vous avez besoin que l'utilisation que vous faites
d'un pouvoir discrétionnaire soit circonscrit par la loi, de
manière qu'on ne vous blâme pas d'utiliser d'autres dispositions
de la loi pour retarder les choses, si c'est prévu qu'il doit le
demander. D'abord, le conciliateur qui va être convoqué, dans le
cas d'une première convention collective, va être averti d'avance
qu'il va devoir présenter un rapport au ministre, pas seulement sur le
fond du litige mais aussi sur le comportement des parties de manière que
le ministre prenne une décision en connaissance de cause.
M. Goulet: C'est prévu à l'article 45, cela.
M. Forget: Non, ce n'est pas prévu à l'article 45.
Tout ce qu'on dit, c'est que le ministre peut, s'il le veut, demander un
rapport, qui va porter sur quoi, M. le député de Bellechasse? Il
va porter sur cela...
M. Goulet: Si vous me le permettez, je ne voudrais pas que ce
soit un débat.
M. Forget: ... et sur quoi portent les rapports de conciliateurs,
d'habitude. Pas sur le comportement des parties, en vertu de l'article 41.
M. Goulet: Si le ministre demande un rapport, j'imagine que le
rapport va porter exactement sur le litige.
M. Forget: Le litige mais pas le comportement des parties, en
vertu de l'article 41. C'est différent, cela.
M. Goulet: On va écrire quoi dans ce rapport?
M. Forget: On ne recommencera pas le débat qu'on a eu hier
là-dessus, mais je pense que vous pouvez admettre qu'il y a une
distinction.
M. Goulet: Je comprends que je n'y étais pas hier...
M. Forget: Est-ce que vous me posez une question ou vous faites
un débat?
M. Goulet: Non, je vous pose la question.
M. Forget: A ce moment-là, je peux réclamer mon
droit de parole et vous ferez votre débat après.
M. Goulet: Je vous pose la question, M. le député.
Si c'est le même conciliateur, le même type et que le ministre lui
demande un rapport en vertu de l'article 45 il a le droit de demander ce
rapport quelle différence y a-t-il entre le rapport qui est
là et ce que vous amenez? Quelle sera la différence dans le
rapport, entre ce que vous amenez et ce qui sera demandé par le
ministre, par le biais de l'article 45? C'est le même rapport et le
même conciliateur. Quelle différence y aura-t-il entre les deux
rapports? C'est la question que je vous pose.
M. Forget: Vous avez terminé? M. Goulet: Oui.
M. Forget: Voulez-vous vraiment qu'on vous donne la
réponse à votre question?
M. Goulet: Oui, certainement. Je trouve cela confus et j'aimerais
le savoir.
M. Forget: II y a au moins deux différences.
Le Président (M. Clair): Brièvement, M. le
député.
M. Forget: M faut bien que je réponde à la
question, cela fait deux fois que je le fais et sans succès. Alors, je
vais essayer une troisième fois.
M. Chevrette: ...
M. Forget: Je n'en suis pas sûr.
En vertu de l'article 41, admettez-vous qu'il y a une
référence à la diligence et à la bonne foi dans la
façon de mener une négociation? Admettez-vous cela?
M. Goulet: Oui.
M. Forget: Admettez-vous qu'il y a une distinction entre la
façon dont on mène une négociation, le comportement qu'on
a durant la négociation relativement à l'obligation de diligence
et de bonne foi, d'une part, et, d'autre part, les points en litige, le fond du
litige? Il y a une bonne distinction, je pense que c'est assez clair, entre le
comportement des parties et ce sur quoi elles négocient.
Or, le rapport déposé par un conciliateur, quand il en
dépose un, c'est normalement un rapport qui fait le bilan des points du
litige, du fond du litige, sur lequel il y a accord ou pas. Cela peut
incidemment, mais pas principalement, dire: On a eu des difficultés
à convoquer les parties, elles n'ont pas voulu nous rencontrer, etc.,
mais ce sont essentiellement des constatations que le conciliateur fait sur la
phase qui l'intéresse, sa phase de conciliation. Il n'a pas à
juger, comme conciliateur, si, durant toutes les négociations, les
parties se sont conformées à l'article 41, si elles ont
négocié avec diligence et bonne foi.
Or, cette constatation, qui n'apparaît pas normalement dans le
rapport d'un conciliateur, est cruciale pour mettre en branle les articles 81a,
81b, etc. C'est pour ça que je dis qu'il faut le mentionner dans ce
chapitre, parce que c'est un rapport de conciliateur, à ce
moment-là, qui serait différent, dans ces exigences, du rapport
ordinaire d'un conciliateur.
C'est là la première raison pour l'y insérer. La
deuxième raison, c'est qu'on peut évidemment dire que le ministre
peut se rabattre sur des dispositions facultatives de l'article 45, mais, comme
l'usage que va faire le ministre de cette décision, de
décréter l'arbitrage obligatoire, est une décision lourde
de conséquences et susceptible d'être controversée, il est
préférable qu'il le fasse non pas en vertu d'un pouvoir
discrétionnaire très général et très ouvert,
mais qu'il puisse s'appuyer sur des dispositions de la loi qui l'obligent
à certaines procédures régulières, de
manière à pouvoir dire: Ecoutez, ce n'est pas pour retarder les
choses que j'ai utilisé mon pouvoir de l'article 45, la loi exige que
j'obtienne un rapport du conciliateur qui soit complet, non seulement sur le
fond du litige, mais sur le comportement des parties.
C'est ça qui va l'aider à décider s'il doit
créer un conseil d'arbitrage. C'est ça que je dis, il y a deux
raisons, ce sont deux raisons qui, même prises isolément,
suffiraient à inscrire cette disposition dans l'article 81. Bien
sûr, on peut dire: On n'en a pas besoin les gens ont du bon sens, sont
fins, tout le monde s'aime, tout le monde est gentil, il n'y aura pas de
problème. Mais si tout le monde était fin et si tout le monde
était gentil, on n'aurait pas d'arbitrage. Ce sont des circonstances qui
sont très controversées. Ce n'est pas facile de
décréter l'arbitrage. Il faut non pas seulement avoir de bonnes
raisons, mais démontrer ouvertement que les raisons qu'on a sont bonnes.
C'est ça que je dis au ministre. Munissez-vous d'instruments.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: M. le Président, à écouter le
député de Saint-Laurent, on aurait l'impression qu'un
conciliateur est un genre de personne qu'on envoie écouter parler deux
groupes, qui regarde, revient et dit: Je ne suis pas capable de rien faire.
C'est marqué dans la clause qu'il doit tenter de rapprocher les parties
parce qu'il s'ouvre la trappe à un moment donné de
faire des suggestions, de voir ce qui accroche dans telle clause, dans telle
partie de la convention collective, tel type de conditions de travail, pour
savoir exactement présenter la clause ou l'article précis qui
raccrocherait ou rapprocherait même les parties.
C'est un rôle très important et ces gars sont en mesure de
vérifier aussi sur place les chances éventuelles de voir ces
parties conclure un contrat collectif de travail. Cela ne prend pas un
psychologue et un psychiatre, je crois, ou un docteur spécialisé
pour détecter la mauvaise foi des interlocuteurs pour dire au ministre
du Travail: Ce conflit est pourri et je pense bien qu'il n'y a pas grand jus
à sortir de là quand bien même je continuerais des mois et
des mois à concilier.
Ils ne se parlent pas et sont rébarbatifs l'un à l'autre.
Cela, je pense bien, exige un conciliateur qui a l'expérience de la
conciliation. Ordinairement, ce sont des gens qui ont eu l'expérience de
la négociation, l'expérience des relations du travail comme
telles, d'anciens agents de griefs, des gars, en fait, qui ont vécu
pratiquement ce que sont des relations de travail, qui ne se sont pas
contentés de lire des grandes théories écrites sur ce que
sont les relations du travail.
On appelle cela des bonshommes concrets pragmatiques qui savent un peu
toiser une personne et qui disent: Ce patron-là, il va falloir que je
sois doux avec lui, si je veux l'amener à être plus "cool" dans
ses relations.
M. Forget: M. le Président, le député de
Joliette-Montcalm me permettrait de rectifier les faits. Je n'ai pas
accusé les conciliateurs d'être des gens malhabiles ou mal
informés.
M. Chevrette: Je n'ai pas dit que vous aviez porté des
accusations.
M. Forget: Oui, par contraste.
M. Chevrette: J'ai dit que vous aviez une mauvaise perception, M.
le député de Saint-Laurent.
M. Forget: Non, non, j'ai beaucoup d'admiration pour certains
conciliateurs; je pense qu'ils sont des hommes de talent.
M. Chevrette: ... pas pour faire un excellent rapport au
ministre...
M. Forget: Sûrement, sûrement.
M. Chevrette: ... sur le comportement des parties.
M. Forget: Pourvu qu'on le lui demande, il n'y a pas
d'erreur.
M. Chevrette: Bien sûr, bon. M. Forget: Bien
sûr.
M. Chevrette: Voici, je continue, si cela ne vous dérange
pas trop. Un conciliateur est là pour amener les parties, comme je le
disais tantôt, à se rapprocher. C'est le premier individu, la
première personne sur le plan des serviteurs de l'Etat, dans la
hiérarchie des serviteurs de l'Etat, qui est capable de dire au
ministre, de façon directe : avec tous les efforts que j'ai faits, cela
ne sert à rien. Vous pouvez bien immédiatement procéder
à la nomination d'un tribunal d'arbitrage, parce que le conflit est
très pronfond. Le patron... " N'oubliez pas que dans les caucus, en plus
de cela, M. le député de Saint-Laurent, quand on sépare
les parties pour faire de la conciliation, sur le plan concret, il s'en dit des
choses dans une antichambre avec un seul groupe. On découvre même
dans ces milieux-là, dans ces petites chambres-là, toute la haine
qu'un porte-parole syndical peut avoir, par exemple, contre un patron; on peut
détecter très facilement que tel patron, si ce n'était pas
du porte-parole syndical, si c'en était un autre, serait même plus
souple. C'est facile de constater cela en faisant de la conciliation.
M. Forget: Là, c'est le député de
Joliette-Montcalm qui fait de la psychiatrie.
M. Chevrette: Absolument pas, je ne suis pas un psychiatre. Au
contraire, je ne le voudrais pas non plus. Mais j'aimerais que vous me
qualifiiez de psychologue naturel.
M. Johnson: Et modeste.
M. Chevrette: II est quatre heures moins vingt minutes. Je trouve
que vous avez voulu minimiser, peut-être sans le vouloir, M. le
député de Saint-Laurent, le rôle du conciliateur qui,
à mon avis, est l'homme tout choisi pour faire un rapport permettant au
ministre de porter un jugement. Et j'abonde dans ce sens-là avec le
député de Bellechasse. L'essentiel de l'étude des
comportements n'est pas de dire au ministre: Lui, il est de mauvaise foi
à 40%, 50% ou 60%, ou à 80%. L'essentiel, c'est qu'il dise au
ministre: Les comportements, en négociation, ne favorisent en rien un
règlement sans l'intervention du mécanisme d'arbitrage
obligatoire.
D'après ce que j'ai vu, ce que j'ai entendu, il n'y a pas de
possibilité d'espérer un règlement par voie de
négociation au sens strict du mot, selon les mécanismes normaux.
Je suis d'accord avec vous qu'il n'a pas à juger toute l'intention, la
mauvaise foi qu'il peut y avoir d'un côté comme de l'autre, mais
il est là pour être capable de juger si la situation exige
l'intervention du ministère. C'est cela qu'on entend par l'étude
des comportements que vous interprétez d'une toute autre
manière.
A partir de ce sens pratique, nous pouvons rejeter immédiatement
cet amendement et passer à l'adoption de l'article 88.
Le Président (M. Marcoux): Comme il n'y a pas d'autres
intervenants sur l'amendement, l'amendement proposé par le
député de Saint-Laurent est-il adopté?
M. Johnson: Rejeté, M. le Président. M. Forget:
Sur division.
Le Président (M. Marcoux): Rejeté sur division.
Nous revenons au paragraphe 81d. Adopté?
M. Johnson: On n'adopte pas le paragraphe, on le
considère.
Le Président (M. Marcoux): On ne veut pas adopter le
paragraphe. En fait, on revient à l'article 44 comme tel. Y a-t-il
d'autres...
M. Forget: Oui, M. le Président, il y en a d'autres.
Le Président (M. Marcoux): II y en a d'autres. M.
Forget: Sur le paragraphe c). M. Johnson: Ah! sur c) encore.
M. Forget: On en a encore une. On y va par étape,
puisqu'on ne veut pas mélanger personne. Il reste qu'en mettant de
côté...
Une Voix: Oui...
M. Forget: Le caillou est un peu plus gros par exemple. En
mettant de côté les questions d'utilisation, par le ministre, de
son pouvoir discrétionnaire et des précautions qui, à
notre sens, auraient dû l'entourer cela vient d'être
défait il reste que, très étroitement, il
m'apparaît qu'il faut éliminer le double rôle du conseil
d'arbitrage.
Il n'est pas normal, il n'est pas usuel et il est même dangereux
pour le sain fonctionnement d'un conseil d'arbitrage de demander à un
conseil d'arbitrage de faire enquête pour savoir s'il devrait arbitrer
et, après cela, d'arbitrer sur le même cas, sur le même
litige.
Dans ce but, je veux donc présenter l'amendement suivant: Que le
paragraphe 81c de l'article 44 soit modifié en remplaçant, dans
la première ligne, le mot "peut" par le mot "doit", en remplaçant
dans les deuxième et troisième lignes les mots "de faire
enquête sur le différend'et "de" par le mot "pour" et en
retranchant dans la troisième ligne le mot "le" et en ajoutant dans la
troisième ligne après le mot "régler" les mots "le
différend".
Le paragraphe amendé se lirait comme suit: "Le ministre, sur
réception de la demande, doit charger un conseil d'arbitrage pour tenter
de régler le différend."
On en revient à l'expression de l'intervention spéciale,
par arbitrage, pour régler une première convention collective,
puisque le principe est posé que, quand il y a des difficultés,
quand il y a un écart trop grand entre les parties on nous dit
que le conciliateur va nous donner tout cela sur un plateau, va permettre au
ministre de poser son jugement, de façon impériale il
pourra juger, à ce moment-là, qu'il faut donner le feu vert au
conseil d'arbitrage sans autres atermoiement, sans autres difficultés,
sans autre embûche, et éviter surtout, parce que c'est là
le but, de placer des gens qui sont membres d'un conseil d'arbitrage à
qui on dit: Vous faites partie d'un conseil d'arbitrage. Toutes les
dispositions sur l'arbitrage et les différends s'appliquent à
vous, sauf que vous ne savez pas encore si vous allez arbitrer; vous êtes
nommés pour arbitrer, peut-être, si vous jugez bon qu'il faut
arbitrer; vous allez commencer votre travail en faisant enquête.
Qu'est-ce qu'on va trouver en faisant enquête? Dans quelle
situation les membres du conseil d'arbitrage vont-ils se retrouver? Le conseil
d'arbitrage, comme le nom l'indique, est composé de trois personnes: une
désignée par l'employeur, une désignée par
l'association de salariés, l'autre par le ministre. Ils vont aller faire
enquête. On sait ce qui va se passer quand ils vont faire enquête.
Il risque qu'il n'y ait pas seulement une vérité. Il va y avoir
la vérité de l'arbitre patronal. Il va y avoir la
vérité de l'arbitre syndical et il va y avoir la
vérité du président. Parce que, question
d'appréciation, de pondération, d'évaluation, enfin, ce
n'est jamais noir sur blanc, ces histoires, pour une partie. Si c'était
noir sur blanc, il n'y aurait pas de différend, on ne serait pas dans un
état de crise. M y a donc des points de vue diamétralement
opposés, et c'est le rôle accepté par la tradition que,
à un conseil d'arbitrage, siège un arbitre pour
représenter chacun des points de vue. Alors, on ne fait pas là de
progrès.
C'est le président qui doit finalement trancher. Le
président tranche présumément parce qu'autrement
l'histoire s'arrêterait là et on n'aurait pas besoin d'explorer
davantage. Il va trancher dans le sens qu'il doit agir finalement comme le
conseil d'arbitrage sur le fond. Oui, mais ce n'est pas amusant, parce que
l'arbitre, lui, préside. Celui qui est désigné par le
ministre s'est déjà branché en faveur d'une des deux
parties. Il a déjà adopté et épousé la
perception d'une des deux parties. C'est gênant de présider un
conseil d'arbitrage quand on a déjà donné des signes
extérieurs, c'est le moins qu'on puisse dire, qu'on a des
préjugés favorables dans un sens ou dans un autre.
C'est une situation inévitable, bien sûr, en bout de ligne.
Quand on adjuge sur le fond, c'est bien sûr que le président doit
éventuellement trancher. Mais tant qu'il y a l'incertitude, tant que les
deux arbitres qui représentent les parties sur le fond, d'une certaine
façon, sont dans l'incertitude quant à la façon dont leur
président va finalement trancher entre elles ou entre eux, si on parle
des arbitres, il y a toujours le désir de montrer un esprit de
concession et de se rapprocher autant que possible d'un consensus qu'on
espère malgré tout voir se dégager de l'arbitrage.
Comme on ne sait pas de quelle façon l'arbitre va pencher, on
espère, par une expression de bonne volonté et d'ouverture
d'esprit, cela, je me place au point de vue de chacun des arbitres, convaincre
le président que finalement c'est peut-être de son
côté à soi qu'est le bon sens, l'ouverture d'esprit, etc.
Tout ce mécanisme interne, c'est un groupe de trois personnes. Ce n'est
pas confiné à l'arbitrage, mais c'est plus officiel dans le cas
de l'arbitrage. Il est bousillé, il est sérieusement
menacé, quand, déjà, un des arbitres ou l'arbitre
nommé, désigné par l'une des parties, s'est fait une bonne
idée de la direction dans laquelle le président du tribunal va
pencher.
Il se dit: Lui, on sait déjà qu'il ne nous a pas
aimés, ou bien il nous a aimés, et tellement qu'il a
décidé que finalement il devait y avoir un arbitrage.
Typiquement, ce serait probablement, initialement au moins, l'arbitre
représentant le patron qui va dire: On nous impose l'arbitrage. Le
président a déjà fait partie commune avec l'arbitre
désigné par le syndicat. La possibilité d'arriver à
une solution arbitrale saine, qui soit celle qui est voulue par le
mécanisme d'arbitrage, est handicapée. A cela, il n'y a pas
d'argument qu'on puisse me présenter. Je n'en ai pas entendu et je
serais bien curieux d'en entendre un qui me démontrerait que cela n'a
pas d'importance.
Il y a un rideau de fer qui tombe entre les deux étapes. Une fois
qu'ils ont décidé qu'ils devraient arbitrer, ils ont pu se dire
n'importe quoi, ils ont pu faire n'importe quoi, ils oublient tout cela. C'est
du passé. Ce sont des gens qui, pour employer les mots du
député de Joliette-Montcalm, sont compétents,
réalistes et ils n'ont pas appris cela dans les livres...
M. Chevrette: Ils l'ont l'affaire.
M. Forget: Dans les livres, ils ont peut être
aperçu, ils ont peut-être entendu parler qu'on avait des rancunes,
Mais, dans le fond, dans la réalité, cela n'existe pas, la
rancune et, toutes ces affaires, ce n'est pas vrai. On est au-dessus de cela
parce qu'on est déjà en pratique à un conseil d'arbitrage,
et on fait tomber le rideau et on recommence, comme si de rien n'était.
Ecoutez, il faut s'amuser un petit peu, parce que si ce n'était pas
drôle, ce serait tragique. Ce n'est pas vrai que cela va se passer comme
cela. C'est une autre confusion des genres. Il y en a déjà
quelques-unes, mais cela en est une. C'est peut-être la plus grave, parce
que quand on fait ça, on insert dans un processus d'arbitrage qui,
à l'heure actuelle... Cela ne fonctionne pas toujours, l'arbitrage, mais
ça fonctionne d'autant mieux que cela a été toujours
volontaire dans le passé. Enfin, depuis 1964, l'arbitrage est volontaire
et cela aide à le faire accepter.
M. Johnson: Les policiers...
M. Forget: Oui, avec... D'accord.
M. Johnson: Les pompiers, y compris l'ancien ministre du
Travail.
M. Forget: C'est un exemple qui parle pour lui-même, mais,
à part ça, c'est un mécanisme volontaire qui a acquis sa
crédibilité depuis quelques années quand on décide
d'y recourir à cause de son caractère volontaire. Là,
déjà, on lui impose un caractère obligatoire. C'est
déjà une contrainte, c'est déjà une restriction. En
plus de ça, on n'utilise pas l'arbitrage comme on l'a toujours
utilisé, on l'utilise dans une nouvelle préparation, dans une
nouvelle sauce où ce n'est plus seulement de l'arbitrage. C'est de
l'arbitrage peut-être bien: Peut-être bien que oui, peut-être
bien que non, selon la discrétion du conseil d'arbitrage, et dans cette
première décision les gens mettent leurs cartes sur la table, le
président met ses cartes sur la table et il ne peut plus fonctionner
comme président du conseil d'arbitrage pour la deuxième et la
plus importante étape, qui est d'arbitrer sur le fond, pas d'arbitrer
sur l'arbitrage.
Alors, M. le Président, c'est bien simple. Il s'agit simplement,
une fois que le ministre a utilisé son grand pouvoir
discrétionnaire dont il nous parlait tantôt avec sa sagesse, avec
toutes ses lumières, avec tout ce qu'il a comme outils qui n'est pas dit
dans la loi et à quoi il peut avoir recours, y compris la lecture des
journaux, l'influence du caucus, etc...
M. Johnson: C'est ça.
M. Forget: Ce n'est pas mentionné, ça, dans la loi,
mais on sait que c'est là.
M. Johnson: Ce sont des choses qui font partie de la vie.
M. Forget: Cela fait partie de la vie, cela aussi. Ce n'est pas
dans les livres.
M. Johnson: Oui.
M. Forget: C'est peut-être dans quelques livres,
peut-être pas dans les livres du député de
Joliette-Montcalm, mais, de toute façon, en utilisant ce grand pouvoir
discrétionnaire, il va être dans une situation où il se met
le pied dans l'étrier; il la prend, la décision; c'est lui. Eh
bien, qu'il la prenne donc jusqu'au bout! Qu'il ne demande donc pas au conseil
d'arbitrage de partager avec lui l'odieux de la décision.
M. Johnson: C'est ça.
M. Forget: Qu'il la prenne, la décision, et qu'il demande
à l'arbitrage d'arbitrer, point. C'est ça, le sens de
l'amendement. C'est simple, ça. Je pense que tout le monde va comprendre
ça alentour de cette table, et on ne devrait pas être
obligé de l'expliquer longuement; que les arbitres arbitrent et que le
ministre...
M. Johnson: "Ministre".
M. Forget: "Ministre", et ça va nous ramener sur le
terrain des vaches.
M. Johnson: M. le Président, sur l'amendement du
député de Saint-Laurent, j'aimerais d'abord savoir s'il est
d'accord avec une modification strictement formelle de son amendement avant
qu'on considère, non pas sa recevabilité, mais si on doit
être en faveur ou pas. C'est, qu'en fait, il doit charger un conseil
d'arbitrage de tenter de régler et non pas pour, n'est-ce pas?
M. Forget: Oui, je remercie le ministre. C'est un meilleur
français.
M. Chevrette: C'est un autre livre qu'a lu le ministre.
M. Johnson: Bon! Alors, M. le Président, il y a deux
éléments introduits à cet amendement... Pardon? Le "de",
oui. Je pense que...
M. Forget: Oui, je le prends à mon compte...
Le Président (M. Marcoux): ... l'amendement...
M. Forget: ... de la façon dont le ministre prend à
son compte les bons amendements, M. le Président.
M. Bisaillon: Le député de Saint-Laurent prend pour
son compte.
Une Voix: Et non pas "à"...
M. Johnson: En fait, il y a deux éléments dans
l'amendement du député de Saint-Laurent. D'abord, il y a
l'introduction du mot "doit" et non pas "peut"; deuxièmement, il y a la
suppression de "faire enquête'.
Il y a une drôle de différence entre le "doit" et le
"peut". En pratique, si on adoptait l'amendement du député de
Saint-Laurent. On a un conciliateur au dossier; en principe, la conciliation
n'est pas tellement avancée, au stade où on en est; c'est
peut-être une espèce de demi-échec. Une partie fait la
demande au ministre, le ministre est obligé, d'après le texte, de
confier la question à un conseil d'arbitrage.
Or, le conciliateur peut considérer, à ce stade, qu'il y a
encore de la place pour un règlement. La partie qui a formulé la
demande pour obtenir un tribunal d'arbitrage va invoquer le fait que la
conciliation a échoué, et le ministre n'aura plus aucun choix.
Tandis que, si on met "peut", le ministre peut dire: II y a un conciliateur et
il nous donne son évaluation. Il dit: C'est comme cela que ça se
passe à cause de la période de l'année, des
problèmes qui sont impliqués. Je pense que, d'ici une semaine,
ça va dégeler.
Vous empêchez, finalement, le règlement normal de ce que
serait ce conflit. Le ministre peut décider que la conciliation n'a pas
encore échoué, en vertu du texte que nous présentons. Vous
faites en sorte que la partie...
Prenons l'exemple d'un patron ou d'un syndicat qui a
décidé qu'il obtiendrait une sentence arbitrale; vous lui donnez
toutes les armes d'obtenir carrément la sentence arbitrale presque
automatiquement. Le ministre n'a aucun pouvoir de les mettre dans une situation
telle qu'ils seront obligés de procéder par le mécanisme
normal qui est celui de la conciliation et de la libre négociation. A ce
titre, je ne peux évidemment pas accepter le mot "doit".
Deuxièmement: Quant à la suppression de faire
enquête, je ne m'opposerais pas à ce que cette notion de faire
enquête saute puisqu'elle est implicite. On dit: "de tenter de
régler le diffié-rend". C'est probablement implicite qu'il y a un
pouvoir d'enquête. Pour essayer de régler le problème, il
faut bien que le conseil d'arbitrage sache ce qui se passe. Comme les articles
63 à 79 et 81 s'appliquent à ce conseil d'arbitrage du
code, j'entends il est bien évident qu'il a un certain pouvoir
d'enquête... Non seulement un certain, mais un pouvoir très
précis qu'on va établir, y compris le duces tecum et le mandat,
non pas d'amener, mais d'assignation. Alors, il n'y a probablement pas de
problème à supprimer le pouvoir d'enquête.
Sur le plan juridique, ça m'apparaît le gros bon sens que,
par définition, on ait le pouvoir d'enquête, à moins que
mes légistes ne me disent que, à cause de certaines
interprétations de la jurisprudence, ce serait essentiel de le
conserver. Mais je pense qu'il va de soi que, par définition, il a un
pouvoir d'enquête, évidemment s'il essaie de régler un
problème.
A part du "doit" qui fait que c'est vraiment la partie qui s'est
enlignée pour obtenir un arbitrage et qu'elle est dans une situation
où elle peut l'obtenir automatiquement, ça change l'esprit de
l'ensemble des articles 81a à 81d, dans la mesure où on veut que,
premièrement, il y ait une conciliation; deuxièmement, que le
ministre ait ce pouvoir discrétionnaire de dire: Vous allez continuer en
conciliation, sinon on va nommer un conseil d'arbitrage. Mais au conseil
d'arbitrage, ne l'oublions pas, il y a différentes étapes.
D'abord, on va tenter de régler. En d'autres termes, il devient un peu
et je trouve regrettable que le député de
Notre-Dame-de-Grâce n'ait pu se joindre à nous cet
après-midi parce que, dans le fond, son "Conciliation Board", c'est
ça. Fondamentalement, c'est ça. C'est un représentant
nommé par la partie syndicale, un représentant par la partie
patronale et le représentant du ministre qui tentent de régler le
différend. Il l'a son "Conciliation Board", sauf qu'on dit qu'à
partir de là, il tente de régler, cela ne règle pas.
Deuxième étape, ils vont décider et, là, ils
ont le temps de décider si oui ou non ils vont se prononcer sur le fond
de la convention. Ils peuvent très bien décider de ne pas se
prononcer sur le fond de la convention et dire: On a essayé de
régler le différend, on considère, compte tenu de la
situation ou de l'attitude des parties que nous nous retirons de tout cela et
il faut que cela continue dans l'état où c'est parce que, dans le
fond, on est un peu, ici, nous, comme des épouvantails, un peu comme le
conciliateur dans le cas de la conciliation obligatoire qu'on amenait un peu
formellement dans le dossier pour faire courir des délais. On pense
qu'une des parties nous a amenés ici pour des raisons, dans le fond, qui
n'ont rien à voir avec un règlement réel qui pourrait se
faire et qui aurait pu se faire au moment où nous tentions de
régler le différend.
D'autre part, il peut décider, au contraire, qu'il jugera, au
fond. Cela, en soi, c'est une décision, de décider si oui ou non
il va procéder à la rédaction de la convention collective.
Une fois qu'il a pris cette décision, il procède, effectivement,
à la rédaction de la convention collective. Tout cela a l'air
d'être de longues étapes mais, en pratique, c'est très
court, puisque ce sont les mêmes personnes; ce n'est pas comme nommer un
nouveau médiateur, un nouvel enquêteur, une
appréciation
du ministre, un Tribunal du travail et, finalement, un nouveau conseil
d'arbitrage. Ce sont toutes les mêmes personnes mais qui agissent de
façon différente a différentes étapes de
l'évolution du dossier.
Pour ces raisons, évidemment, je demanderai de rejeter
l'amendement du député de Saint-Laurent, à moins qu'il ne
le reformule au sens où cela fait simplement supprimer l'expression "de
faire enquête", et c'est cela.
M. Forget: Si le ministre me dit qu'il va voter pour
l'amendement, si on remplace "peut" par "doit"...
M. Russell: "doit " par "peut".
M. Forget: C'est cela "doit" par "peut"!
M. Johnson: Le ministre, sur réception de la demande, peut
charger un conseil d'arbitrage de tenter de régler le
différend.
Le Président (M. Marcoux): Le nouvel article 81c se lirait
comme suit: "Le ministre, sur réception de la demande, peut charger un
conseil d'arbitrage de tenter de régler le différend."
M. Johnson: Peut-on passer en considération de l'article
81d, M. le Président?
M. Forget: Oui, à moins que l'Union Nationale ait des
représentations à faire sur cela, M. le Président.
M. Goulet: Non, M. le Président, il y avait deux petits
mots de quatre lettres qui étaient exactement la même chose mais
étant donné qu'on les change... Quant à moi, entre "peut "
et "doit", il y a une très grande différence mais si on met
"peut" à la place de "doit", c'est parfait. J'en aurais eu long à
dire sur la différence entre les deux mots, mais si on consent à
ramener le mot "peut", bravo!
Le Président (M. Marcoux): Parfait. Article 81d.
M. Forget: Ici, M. le Président, on a, dans ce paragraphe
81d), une ambiguïté qui m'apparaît qu'il faudrait
éclaircir. A l'article 81c, nous avions une espèce de
chevauchement sur l'idée de faire enquête et de régler le
différend. Là, il est clair que le mandat est de régler le
différend, mais l'article 81d incorpore plusieurs notions d'une
décision ultérieure sur le contenu de la convention collective,
incorpore même l'idée que s'il le juge nécessaire, compte
tenu du comportement des parties et eu égard à l'article 41;
c'est donc là que le ministre veut faire entrer l'évaluation de
la bonne foi et de la diligence. C'est une façon curieuse de tenir
compte du comportement des parties, que de les pénaliser dans la
façon dont les conditions de travail sont réglées.
C'est assez étrange que ce facteur, à savoir si les
parties se sont comportées avec diligence et bonne foi, n'intervient pas
au moment de prendre la décision de former le conseil d'arbitrage mais
intervient dans la détermination des conditions de travail. Je ne
m'explique vraiment pas cela, je ne vois vraiment pas pourquoi. C'est une
espèce d'annexe à la section VIII de la loi où on dit: On
décrète les pénalités en vertu de la loi.
Pénalité, normalement, c'est le paiement d'une amende. Si une
partie a contrevenu à une disposition de la loi, elle est normalement
passible d'une amende de $500 par jour jusqu'à un maximum de $500 par
jour de poursuites sommaires devant le Tribunal du travail.
Ici, on demande au conseil d'arbitrage de décider, de s'inspirer
du comportement des parties, et on réfère spécifiquement
à un article, 41, et on dit: Vous allez vous inspirer de ça pour
déterminer les conditions de travail, le contenu de la convention
collective. C'est comme si on disait, à l'article 41, il y a deux
pénalités. Il y a une pénalité qui est la
pénalité normale, une amende jusqu'à un maximum de $500
par jour, mais si c'est un acte répréhensible commis dans le
contexte de la négociation d'une première convention collective,
il y a une deuxième pénalité. C'est que le contenu de la
convention collective va être infléchi dans un sens ou dans
l'autre, en considération de la diligence et de la bonne foi de l'une
des parties.
C'est ce qu'on appelle, en droit criminel une notion qui est bien
connue le "double jeopardy", c'est-à-dire que pour un même
acte ou une même offense évidemment, c'est une notion de
droit criminel, ce n'est pas une notion comme telle de droit pénal
pour un même acte ou une même offense, une personne ne peut
pas être accusée deux fois. S'il y a, par exemple, un
procès criminel qui est renvoyé pour vice de forme ou qu'on veut
produire un acte d'accusation avec quelques légères
modifications, il est interdit..., l'avocat de la défense peut obtenir
le renvoi de la cause en disant que son client ne peut pas être
accusé deux fois de la même offense, il ne peut pas être mis
en risque d'être condamné deux fois pour la même chose.
Evidemment, je comprends que c'est une notion de droit criminel. Mais il
y a quelque chose de fondamental aussi dans la notion qu'il y a une
pénalité pour un comportement, il n'y en a pas deux. Ici, on dit:
"Dans la détermination des conditions de travail, dans le contenu de la
convention collective, on va porter un jugement sur le comportement et on va
s'en inspirer." Je n'ai jamais vu ça et je ne comprends pas ça. A
supposer que ce soit le syndicat qui se soit livré à des
manoeuvres dilatoires, ou comme le ministre le disait tout à l'heure,
à chaque rencontre de négociation, augmentait ses demandes, etc,
ça voudrait dire qu'on va fixer le contenu de la convention collective
à un niveau inférieur à ce qu'il aurait été
si on n'avait pas proposé ce jugement.
Le ministre fait des signes de tête désespéré
en me disant: ce n'est pas ça qu'il veut dire, mais c'est bien ça
que l'article dit, par exemple. Ce n'est pas le ministre qui va décider,
ça va être le conseil d'arbitrage. Je regrette beaucoup, mais
même avec le ministre actuel, il peut avoir des surprises lui-même.
Si je lis le français, à moins
que la longueur des heures que nous travaillons nous empêche de
lire, "le conseil d'arbitrage peut ensuite décider de déterminer
le contenu de la première convention collective, compte tenu du
comportement des parties, eu égard à l'article 41." Cela n'a
qu'une signification possible, il n'y en a pas dix, il n'y en a même pas
deux. Cela veut dire qu'il observe si l'article 41 est observé ou pas,
s'il juge qu'il n'a pas été observé, il s'en inspire.
Ça ne peut pas être pour donner plus à la partie qui est
coupable de mauvaise foi et de manque de diligence; cela va être pour lui
donner moins.
Donc, c'est une pénalité. C'est une
pénalité, pas par amende, mais en transformant les termes de la
convention collective, enfin, c'est la décision arbitrale qui va lui
tenir lieu de convention collective. Cela n'a pas de bon sens, cela n'a pas de
bon sens, je pense qu'il faudrait que je le dise mille fois, parce que c'est
assez clair, une fois qu'on l'a dit, je pense qu'il n'y a pas
d'interprétation à faire. Qu'est-ce que pourra dire le ministre
là-dessus, parce qu'il va certainement nous dire qu'il y a quelqu'un de
bon sens qui va juger ça avec bon sens. Mais c'est écrit en
français, ça, M. le Président. Il n'est pas question de
bonne foi.
Si le conseil d'arbitrage va en contradiction avec ça, sa
décision est attaquable par la Cour Supérieure.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Bellechasse auparavant.
M. Johnson: Est-ce que le député de Saint-Laurent,
en fait, me permet une question? Je voudrais simplement qu'on se comprenne
bien. Effectivement, peut-être qu'à cause de la rédaction,
je l'ai toujours interprété dans un sens différent, donc
c'est clair puisque l'interprétation du député de
Saint-Laurent qui, je suis sûr, est de bonne foi, il a lu attentivement
le texte puisqu'il a pris la peine de formuler un amendement, est totalement
différente de celle que j'en fais. Donc, c'est clair que le texte n'est
pas clair.
Il faudrait bien qu'on se comprenne sur l'objectif. Ce n'est pas de dire
que le contenu de la convention collective va tenir compte de la bonne ou de la
mauvaise foi des parties. Le syndicat a été de mauvaise foi;
donc, on donne $0.03 d'augmentation au lieu de $0.50. Ce n'est pas cela. C'est
la décision de procéder effectivement à la
rédaction de la convention collective qui, elle, est en fonction de
l'attitude des parties. Je ne sais pas si on se comprend?
M. Forget: On se comprend très bien. M. Johnson:
Bon
M. Forget: Cela illustre mon point de vue, M. le
Président. Cette intervention du ministre illustre mon point de vue que
la question de la violation à l'article 41 arrive trop tard. La
référence, à l'article 41, au comportement des parties
dans le déroulement de cela, ça arrive trop tard. Il faudrait le
mentionner avant, parce que ce n'est pas là que c'est pertinent. C'est
pertinent à des étapes antérieures.
On s'est fait refuser toutes nos motions là-dessus et
c'était cela, le but, de placer la question de la bonne ou de la
mauvaise foi et de la diligence...
M. Johnson: Entre les mains du ministre.
M. Forget: ... entre les mains du ministre. C'est lui qui
enclenche le processus. Qu'est-ce que vous voulez? Je regrette, mais vous avez
choisi de vous coucher dans ce lit-là, d'enclencher un processus
d'arbitrage et, là, vous voulez motiver la décision, une fois
qu'elle est prise.
M. Johnson: On veut la faire porter...
M. Forget: Vous voulez la motiver une fois qu'elle est prise.
M. Johnson: .. le plus près possible des parties. Ce n'est
pas le ministre qui est près des parties, il ne faut pas se compter des
blagues; c'est le conciliateur ou c'est le tribunal d'arbitrage. Ce n'est pas
le ministre.
M. Forget: Mais oui, ce serait justement si facile, dans le cas
d'un conciliateur qui est appelé à intervenir dans la
négociation d'une première convention collective, de faire porter
son rapport aussi sur cet aspect-là, étant donné qu'on
sait, contrairement à d'autres négociations, qu'il y a quelque
chose qui va suivre l'intervention du conciliateur. Il faudrait faire cela
plutôt que d'attendre que le conseil d'arbitrage soit nommé et de
demander au conseil d'arbitrage de faire enquête sur le respect de
l'article 41. Dans le fond, c'est cela, M. le ministre, qui est implicite dans
votre affaire; avant l'amendement que vous avez accepté tantôt,
c'était même explicite. Pour comprendre tout cela, il faut sauter
d'un paragraphe à l'autre; à l'article 81c, vous nommez un
conseil d'arbitrage qui fait enquête. On dit: Faire enquête sur
quoi? Il faut sauter à l'autre paragraphe pour aller accrocher le
respect de l'article 41, le comportement. Vous avez la nomination dans un
paragraphe, la décision dans un autre et le critère de
décision dans le troisième. Il y a un vice de
rédaction.
M. Johnson: Je me souviens qu'on a fait de longs exposés
en arrivant à l'article 81 du projet de loi. Je pensais qu'à ce
moment-là j'avais fait le tour de cette question. Je ne voudrais pas
reprendre toute la discussion sur les paragraphes a, b et c de l'article 81. Ce
que je dis, c'est qu'à partir du moment où ce qu'il y a dans les
paragraphes a, b et c de l'article 81 est acquis, l'article 81d est là
comme un mécanisme qui permet, de la même façon que le
"Conciliation Board" que voulait le député de
Notre-Dame-de-Grâce ce matin, d'apprécier si, oui ou non, c'est un
problème de contenu qui se pose. Je comprends que le conciliateur l'a
apprécié dans un premier temps, mais il peut arriver qu'il se
trompe. Il peut arriver qu'il y ait un problème d'évaluation. Il
peut arriver que les parties aient évolué en cours de route
aussi, parce que, là, elles voient venir l'arbitrage. Il y a un conseil
d'arbitrage nommé. Le patron sait qu'il va peut-être y
avoir une sanction qui va être décidée par un tiers,
un contenu de convention collective qui va peut-être être
décidé par un tiers. Il a encore le temps de régler.
Qu'est-ce qu'on donne comme période tampon? La période
tampon qu'on donne, c'est que le conseil d'arbitrage regarde ce qui se passe et
essaie de régler le différend. Si cela ne se règle pas, il
arrive à un stade où il dit: Bon, messieurs, on ne parle plus; je
décide, compte tenu de votre comportement, à l'une et/ou à
l'autre, que je procéderai à la rédaction de cette
convention collective. C'est une épée de Damoclès sur la
tête du patron ou du syndicat, dans ce cas-là. C'est une
période tampon fondamentale et essentielle. Sans cela, cela aurait,
encore une fois, presque un caractère automatique. Le but, ce n'est pas
vraiment de dire qu'il y a quelqu'un de mauvaise foi dans tout cela. Le but,
c'est d'en arriver à un règlement. Il ne s'agit pas, parce qu'on
constate qu'il y a de la mauvaise foi quelque part, qu'on devienne
paralysé, mais qu'on obtienne justement quelque chose d'efficace et
qu'on obtienne le règlement au-delà du problème de la
mauvaise foi.
Je suis d'accord, on pourrait reformuler l'article 81d pour le rendre
plus clair, en ce sens que ce n'est pas en termes de contenu de la convention
collective que la mauvaise foi ou la bonne foi d'une des parties compte. C'est
parce qu'il y a mauvaise foi ou absence de diligence des parties, au jugement
d'un conseil d'arbitrage regroupant trois personnes, dont l'une nommée
par le ministre et l'autre désignée par les parties à
même les listes du CCTMO, que le conseil décide: Très bien,
je vais maintenant régler au niveau du fond. Cela m'apparaît une
période importante.
Je ne sais pas si le député de Saint-Laurent est convaincu
de mon argumentation et s'il désire que... En fait, ce que je
proposerais, ce serait de reformuler l'article 81d pour que ce soit très
clair que la question du "compte tenu du comportement des parties eu
égard à l'article 41 " se rattache à la décision de
cesser de tenter de régler le différend et de procéder
à la rédaction. Cela ne concerne pas le contenu de la
rédaction, c'est bien évident.
M. Forget: Je pense qu'il va falloir, à ce
moment-là, que le ministre rédige l'article 81d en deux
alinéas. Il va falloir qu'il prenne un alinéa où il dira:
"Compte tenu du comportement des parties eu égard à l'article 41,
le conseil d'arbitrage décide...
M. Johnson: "Peut décider qu'il doit "
M. Forget: "... peut décider qu'il doit déterminer
le contenu de la première convention collective." C'est cela. Alors, il
informe les parties.
M. Johnson: Je soumettrais rapidement l'hypothèse suivante
pour qu'on y réfléchisse, quitte à ce qu'on en suspende
l'étude: "Le conseil d'arbitrage peut décider que, compte tenu du
comportement des parties eu égard à l'article 41, il devra
déterminer le contenu de la convention collective."
Je pense que cela devient beaucoup plus clair...
Une Voix: De la première.
M. Johnson: "de la première convention collective."
On peut procéder à une rédaction. Malheureusement
elle est écrite à la main, mais on va essayer de vous en
distribuer des copies. Pourrait-on suspendre l'étude de l'article 81d,
M. le Président, c'est-à-dire les considérations de
l'article 81d et prendre l'article 81e?
Le Président (M. Marcoux): Auparavant, je demanderais au
député de Bellechasse s'il veut encore s'exprimer sur l'article
81d.
M. Goulet: Dans les changements qu'il y avait, c'était le
conseil d'arbitrage qui décidait au lieu du ministre. C'était le
changement fondamental qu'il y avait. On était d'accord
là-dessus. Tel que formulé, il me semble que c'est
évident, mais, selon les dernières paroles du ministre, je ne
m'oppose pas non plus à changer la phraséologie de l'article
81d.
Le Président (M. Marcoux): L'article 81e? M. Chevrette:
Adopté.
M. Bisaillon: C'est une demande des parties, toutes les parties
ont demandé cela.
Le Président (M. Marcoux): L'article 81f? Sur l'article
81e, M. le député de Portneuf.
M. Pagé: Seulement une question que je voudrais poser au
ministre. Le ministre se rappellera que, dans nos cours de droit, souvent on se
référait au fameux législateur et on se demandait ce que
le législateur avait voulu dire par là.
M. Johnson: Celui qui ne parle jamais pour ne rien dire, c'est
cela?
M. Pagé: Pardon?
M. Johnson: Le législateur, c'est bien le même dont
on dit qu'il ne parle jamais pour ne rien dire?
M. Pagé: C'est cela, jamais pour ne rien dire. On le voit.
On voit cela régulièrement et souvent.
C'est toujours avec un peu d'inquiétude que je vois le terme
"doit" dans des articles de loi. Je ne veux pas revenir à l'article 81c
ou à l'article 81d, mais me limiter à l'article 81f. Lorsqu'il
est dit que le conseil d'arbitrage doit tenir compte, entre autres, des
conditions de travail qui prévalent dans des entreprises semblables ou
dans des circonstances similaires, j'aimerais savoir du ministre quelle
latitude cela peut laisser au conseil sur la
spécificité d'une entreprise ou d'une industrie. On
pourrait se référer à plusieurs exemples.
Qu'on prenne le cas je vais tenter d'être bref du
transport scolaire. La façon dont le travail est effectué oblige
ces travailleurs, somme toute...
M. Johnson: Si le député de Portneuf me
permet...
M. Pagé: Oui.
M. Johnson: Effectivement ce sera le mot "peut". Ce débat
qu'il est en train d'amorcer a été fait depuis deux semaines avec
différents experts, etc.
M. Pagé: Ah! d'accord.
M. Johnson: Je n'ai pas eu l'occasion, au moment où on a
considéré l'article 81 f, je n'ai pas eu le temps de vous le
dire. C'est le conseil...
Le Président (M. Marcoux): On change le mot "doit" par le
mot "peut"?
M. Johnson: C'est cela.
M. Pagé: Vous avez présumé mon amendement et
vous l'adoptez. Je suis chanceux.
M. Johnson: Presque. M. Pagé: Je vais intervenir
plus souvent. Le Président (M. Marcoux): L'article 81g? M.
Pagé: Merci!
M. Johnson: Je remercie le député de Portneuf de sa
suggestion. Elle correspond d'ailleurs à ma réflexion. Cela lui
permettra d'éviter un débat là-dessus.
Le Président (M. Marcoux): L'article 81g? L'article 81g,
adopté. L'article 81h? On avait supprimé...
M. Forget: M. le Président, mes amendements ne sont
pas...
Le Président (M. Marcoux): En ordre. M. Forget: ...
en ordre. J'avais...
Le Président (M. Marcoux): Voulez-vous qu'on suspende la
séance trente secondes?
M. Forget: Non, je viens simplement de me rendre compte qu'ils
étaient dans l'ordre inverse de l'ordre habituel. A l'article 81e, j'ai
une observation. C'est relativement au premier paragraphe, avec votre
permission.
Le Président (M. Marcoux): Comme il y a un excellent
esprit de collaboration, je vais faire appel à la collaboration de tous
les membres...
M. Forget: La dernière chance.
Le Président (M. Marcoux): ... pour permettre au
député de Saint-Laurent de revenir à 81e. C'est ce qu'on
appelle avancer en reculant.
M. Chevrette: En reculant. C'est le cheval de tout à
l'heure.
M. Forget: C'est cela. C'est le même animal.
M. Chevrette: Mon grand-père appelait cela un piton.
Le Président (M. Marcoux): Allez-y, M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, c'est relativement au premier
paragraphe que je relis pour le bénéfice de tout le monde. "Si
une grève ou un lockout est en cours à ce moment, il doit prendre
fin à compter du moment où le conseil d'arbitrage informe les
parties qu'il a jugé nécessaire de déterminer le contenu
de la convention collective pour régler le différend". Ce que
l'on ne dit pas ici, c'est ce qui se passe à la suite de cela. On
présume que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, mais on
ne dit pas ce qui se passe s'il n'y a pas fin de la grève ou du
lock-out.
Une Voix: Ils rentrent au travail.
M. Forget: Oui, mais qu'est-ce qui arrive à l'arbitrage? A
mon avis, il serait dangereux de permettre à une partie de laisser se
dérouler l'arbitrage tout en maintenant ses moyens de pression. Il y a
un choix qui est fait. Il y a un choix et il y a une décision. On dit:
II faut que cette grève ou ce lock-out se termine et il faut
l'intervention d'un tiers pour le régler. On se trouve dans la
période où la grève est légale et il n'y a rien qui
interdit, dans le cas du lock-out, à l'employeur de continuer un
lock-out. Evidemment, il y aurait les sanctions pénales. On en a
déjà discuté beaucoup, des sanctions pénales, et on
n'a pas été convaincu par personne que c'étaient des
solutions.
Peut-être qu'il y aurait lieu, à ce moment, de dire: Si la
grève ou le lock-out n'est pas suspendu à partir du moment
où le conseil d'arbitrage rend sa décision, à ce moment,
le conseil d'arbitrage ne peut procéder, parce que, dans le fond, c'est
comme jouer à pile ou face. C'est pile, tu gagnes et face, je perds, des
choses dans ce genre. C'est une situation à laquelle, à mon avis,
on ne peut pas remédier à moins de prévoir
spécifiquement que, si l'indication contenue à l'article 81e
n'est pas suivie, observée par les parties, pour le temps où ce
n'est pas observé, le tribunal est figé dans le fond dans
l'immobilité et ne peut pas procéder.
Si les parties, finalement, se conforment à la prescription de la
loi, là on peut procéder à l'arbitrage. Je pense que
c'était dans les mémoires de
certaines centrales et dans ceux du patronat. D'ailleurs, tout le monde
s'entendait là-dessus; s'il y avait un arbitrage, il fallait que les
moyens de pressions cessent. On ne pouvait pas utiliser les deux instruments
pour poursuivre la même fin. Dans ce sens, je proposerais cet
amendement-ci qui précisément vise à ajouter une toute
petite phrase: Que le premier alinéa du paragraphe 81e de l'article 44
soit modifié en ajoutant dans la cinquième ligne
après...
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Sainte-Marie voudrait vous poser une question.
M. Bisaillon: Est-ce que le député de Saint-Laurent
pourrait juste nous le lire, sans le faire pour l'instant, comme il l'a
déjà fait au cas où il y aurait des
possibilités...
M. Forget: Vous voterez pour si c'est bon. On vous en a
passé quelques-uns comme cela. C'est peut-être une occasion de
nous rendre la politesse.
M. Bisaillon: Vous comprenez ce que je veux dire? Vous pourriez
nous le lire avant de le faire de façon formelle.
M. Forget: Oui, je vais le lire, c'est cela. Je le ferai de
façon formelle après. D'accord. Que le premier alinéa du
paragraphe 81e de l'article 44 soit modifié en ajoutant dans la
cinquième ligne, après le mot "différend", les mots
"à défaut de mettre fin à la grève ou au lock-out,
le conseil d'arbitrage ne peut procéder". L'alinéa amendé
se lirait comme suit: 81e) premier alinéa, bien sûr,
seulement "Si une grève ou un lock-out est en cours à ce
moment, il doit prendre fin à compter du moment où le conseil
d'arbitrage informe les parties qu'il a jugé nécessaire de
déterminer le contenu de la convention collective pour régler le
différend. A défaut de mettre fin à la grève ou au
lock-out, le conseil d'arbitrage ne peut procéder." C'est cela. Je pense
que le sens est clair. J'espère que le sens est clair. S'il n'est pas
clair, je suis disponible pour donner des précisions
supplémentaires, M. le Président. J'essaie d'anticiper des
objections possibles et...
M. Chevrette: Je vais vous en faire.
M. Forget: Le député de Joliette-Montcalm est tout
prêt à en faire. Je vous écoute, M. le député
de Joliette-Montcalm.
Le Président (M. Marcoux): Monsieur le
député de Bellechasse avant.
M. Goulet: M. le Président, j'espère que le
député de Saint-Laurent ne m'en voudra pas de ne pas être
d'accord pour une troisième fois, mais lorsque nous siégeons ici,
ce n'est pas pour être en accord ou en désaccord, c'est pour
défendre des principes.
Si on met un tel amendement, M. le Président, on ouvre encore une
porte aux gens pour dire:
N'entrez pas au travail. Le retour au travail est obligatoire avant que
le conseil d'arbitrage détermine. Le retour au travail est obligatoire.
Si les gens ne retournent pas au travail, M. le Président, ce sera
outrage au tribunal, tout simplement. Ce qui se passe actuellement, c'est qu'il
y a des injonctions et les gens n'entrent pas plus au travail.
Souvent, le syndicat, à la dernière minute, pour fermer
une convention collective, va négocier sur l'injonction, par exemple: un
tel a été accusé de telle chose. Si vous enlevez votre
accusation, on va signer... Cela retarde la convention. Là, c'est
obligatoire. Cela n'empêche pas du tout le conseil d'arbitrage de
commencer à travailler. Cela ne l'empêche pas du tout. Si les gens
ne rentrent pas au travail, si la grève se continue, il y aura outrage
au tribunal tout simplement.
Je pense qu'on leur ouvre une porte en disant: "Ecoutez! Si vous
n'entrez pas..." Il faut qu'ils rentrent au travail où c'est la loi qui
prévaut.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Pagé: M. le Président, seulement une question
que me permettrait mon bon ami le député de Bellechasse. C'est
qu'à ma connaissance, il ne me semble pas que, si une des parties ne
veut pas obtempérer, ce soit un outrage au tribunal.
M. Goulet: Non, ce n'est pas un outrage au tribunal.
M. Pagé: Ce serait strictement et uniquement une amende,
purement et simplement.
M. Goulet: Une amende, d'accord, selon le code. Mais ce qui
arrive...
M. Pagé: ... une violation de la loi.
M. Goulet: ... c'est que souvent, à la fermeture d'une
convention...
M. Pagé: ... ce n'est pas grave...
M. Goulet: Si vous permettez, M. le Président, la
dernière limite en négociant, c'est que s'il y a amende, le
syndicat va essayer de faire enlever les amendes, et c'est ça qui
retarde souvent la signature d'une convention collective. Alors, là,
s'il y a amende, cela n'empêche pas du tout le conseil d'arbitrage de
commencer à rédiger sa convention collective. Sans ça,
ça va retarder encore. Ce qu'on veut, c'est que ça se fasse plus
vite que ça se faisait. Si on ouvre des portes, ça va continuer
encore à prendre du temps et on ne sauvera rien là-dedans; on ne
changera rien. Il y aura amende, M. le Président. Je ne vois pas
pourquoi cela empêche le conseil d'arbitrage de commencer son travail et
de commencer à écrire sa convention collective.
Mais ce qui se passe actuellement, c'est que s'il y a des amendes,
souvent à la dernière minute, soit avant la signature de la
convention collective, le syndicat va perdre ou va négocier avec le
patron
pour essayer de faire enlever ces amendes. C'est du temps de perdu et
qui n'aurait pas dû se perdre, parce que cette amende ne devrait pas
être là. Alors, s'il y a amende, tout simplement, il y a amende et
ça n'empêche pas le conseil d'arbitrage de commencer et de
continuer son travail.
Je pense qu'on ouvre une porte assez dangereuse.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: L'objectif de M. le député de
Saint-Laurent, par cet amendement, semble vouloir être une incitation aux
syndicats ou au patronat, en disant Si vous ne faites pas ça, si vous ne
vous conformez pas à l'ordonnance ou au fait que le conseil d'arbitrage
a pris une décision, vous allez être pénalisés et on
ne rendra pas de sentence tout de suite. Mais cela a un effet exactement
contraire au but recherché, je pense, par le député de
Saint-Laurent. Parce que quelqu'un qui ne le voudrait pas dirait: La sentence
arbitrale, il n'y en aura pas. On va rester en grève. Et l'objectif de
la loi, à cause de cette dimension, est précisément de
mettre fin à des conflits qui s'éternisent.
A sa première lecture, j'ai compris immédiatement
l'objectif du député de Saint-Laurent. Mais dans les faits, cela
aura pour effet exactement le contraire de ce qu'il recherche, et j'abonde dans
le sens du député de Bellechasse là-dessus.
Dans une loi, quand on veut qu'une loi soit respectée, je pense
qu'il ne faut pas ouvrir une porte à la violation possible de la loi.
Ils seront dans l'illégalité, ceux qui ne s'y conformeront pas,
et il reste encore beaucoup de bons citoyens qui sont soucieux du respect des
lois. Et à ce moment-là, ne leur dites pas que s'ils ne
respectent pas la loi, la seule pénalité qu'ils ont, c'est que le
tribunal ne procédera pas. Ce n'est pas fort face à une
violation. Je vous assure que les embûches, face au viol, ne sont pas
métalliques.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, il y a deux aspects que je
voudrais souligner, c'est, dans le genre de sentences arbitrales qui peuvent
être rendues, il y a possibilité, dans les circonstances, que le
conseil d'arbitrage rende des sentences intérimaires pour régler
les problèmes les plus urgents en se donnant le temps d'examiner plus
à fond l'ensemble de la convention collective. Or, si par exemple le
conseil d'arbitrage était nommé et que la grève ou le
lock-out ne cessait pas, avec l'amendement du député de
Saint-Laurent, on s'empêcherait de passer au moins une sentence
intérimaire pour régler un problème majeur, quitte,
après cela, à continuer les discussions. C'est le premier
point.
Le deuxième point, c'est que l'amendement couvre la grève
et le lock-out. Pour ce qui est de la grève, il me semble que c'est
couvert puisque le syndicat, qui sait qu'il doit respecter la loi et qui ne la
respecte pas, a les pénalités prévues à la loi.
Cependant, pour ce qui est du lock-out, cela veut dire qu'un employeur
qui aurait un petit groupe de salariés cinq ou six et qui
se sentirait les reins assez forts pour maintenir quand même son lockout,
serait dans l'illégalité et qu'entre temps, tout ce qu'il veut
bloquer continuerait de l'être, c'est-à-dire qu'il n'y aurait pas
de convention collective, et c'est son objectif. Dans le cas de l'amendement,
il me semble que le lock-out ne peut pas être placé sur le
même pied que la grève.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que l'amendement sera
adopté?
M. Chevrette: Rejeté. M. Johnson:
Rejeté.
Le Président (M. Marcoux): Rejeté sur division.
Nous revenons à l'article 81h, dont les troisième et
quatrième lignes avaient été biffées. Le nouvel
article 81h se lit comme ceci: "La sentence arbitrale lie les parties pour une
période d'au moins un an et d'au plus deux ans. Les parties peuvent
cependant convenir d'en modifier le contenu en partie ou en tout." C'est la
proposition, telle que présentée par le ministre. Est-ce que
ça va pour l'article 81h?
Des Voix: Cela va.
M. Forget: M. le Président, si le ministre n'avait pas
révisé son texte, on aurait présenté un amendement
dans le même sens.
M. Johnson: Je regrette, si je l'avais su je vous aurais
laissé présenter votre amendement. Vous auriez dû nous le
dire!
Le Président (M. Marcoux): Maintenant, l'article 81i: "Les
articles 63 à 79 et 81 s'appliquent au conseil d'arbitrage prévu
à la présente section." Adopté?
Une Voix: Adopté.
Le Président (M. Marcoux): Etes-vous prêts à
adopter l'article 44 au complet?
M. Johnson: Non, pas encore, il y a 81d, M. le
Président.
Le Président (M. Marcoux): Oui, la nouvelle
rédaction.
M. Johnson: Si vous permettez, M. le Président, parce
qu'on va entrer dans un tout nouveau chapitre, je demanderais une suspension de
cinq minutes. Etant donné qu'on est en train de rédiger un texte
de loi, je préférerais qu'on prenne le temps nécessaire
pour que ce soit précis.
Le Président (M. Marcoux): Suspendu pour cinq minutes.
(Suspension de la séance à 16 h 38)
Reprise de la séance à 16 h 48
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le ministre.
M. Johnson: M. le Président, à l'article 81d que
nous reformulerions de la façon suivante... Je vais d'abord en faire une
ou deux lectures rapides et ensuite procéder à une vitesse qui
permet de prendre la sténo. L'article 81d se lirait comme suit: "En
raison du comportement des parties, eu égard à l'article 41, le
conseil d'arbitrage peut décider qu'il doit déterminer le contenu
de la première convention collective. Il informe alors les parties et le
ministre de sa décision".
Je recommence: "En raison du comportement des parties, eu égard
è l'article 41, le conseil d'arbitrage peut décider qu'il doit
déterminer le contenu de la première convention collective. Il
informe alors les parties et le ministre de sa décision". Alors, je
relis rapidement pour la dernière fois: "En raison du comportement des
parties, eu égard à l'article 41, le conseil d'arbitrage peut
décider qu'il doit déterminer le contenu de la première
convention collective. Il informe alors les parties et le ministre de sa
décision ".
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que le
député de Bourassa a un amendement à nous proposer?
M. Forget: Après le député de Bourassa.
Le Président (M. Marcoux): Après vos
hésitations, nous revenons à l'article 81d, tel que
proposé par le ministre.
M. Johnson: Adopté, M. le Président. Le
Président (M. Marcoux): Adopté.
M. Johnson: Est-ce que cela vous satisfait comme
rédaction?
M. Forget: La rédaction est plus claire. Je ne peux pas
dire qu'on est satisfait du sens.
M. Johnson: Oui, évidemment.
M. Forget: Mais, au moins, il y a une des confusions possibles
qui a été éliminée.
Le Président (M. Marcoux): Vous avez encore quelques
larmes à verser, mais...
M. Forget: Oui, bien sûr, des larmes, j'en ai à
verser, M. le Président, mais je me retiens, parce que s'il fallait que
je donne droit immédiatement à mes sentiments, je pourrais
à peine continuer.
M. Johnson: L'article 44 est-il adopté, M. le
Président?
Des Voix: Adopté.
Le Président (M. Marcoux): L'article 44...
M. Johnson: Tel que modifié.
Le Président (M. Marcoux): ... adopté tel
qu'amendé à diverses reprises. Article 45. Adopté?
M. Jolivet: Adopté.
M. Forget: Un instant! On va savoir ce que c'est. Oui,
adopté, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): Adopté. Article 46. A
l'article 45, il y avait un amendement... 45a...
M. Johnson: Article 45a du projet de loi, M. le
Président.
M. Laplante: L'article 45 est adopté, il reste l'article
45a.
Le Président (M. Marcoux): Un instant!
M. Forget: II y a un amendement qu'il faut adopter.
Le Président (M. Marcoux): II y a un amendement?
M. Forget: A l'article 45a.
M. Johnson: C'est ça, à l'article 45a.
M. Forget: Pour les fins du rapport, pas pour les fins de notre
procédure interne.
M. Johnson: M. le Président, l'article 45 du projet est-il
adopté?
Des Voix: Adopté.
Le Président (M. Marcoux): Adopté.
M. Johnson: L'article 45a du projet est-il adopté?
M. Forget: Adopté. M. Johnson: Adopté. M.
Chevrette: Adopté.
Le Président (M. Marcoux): Adopté. Article 46.
M. Forget: Cela va être un peu plus loin, M. le
Président.
M. Laplante: Là, je pense qu'on a sept ou huit
amendements.
M. Forget: Je suis prêt à céder ma place au
député de Bourassa, s'il a des amendements à proposer, M.
le Président.
M. Laplante: Je viens...
M. Johnson: Pensez-vous qu'il aurait plus de chance?
M. Forget: Peut-être, peut-être.
Arbitrage des griefs
M. Johnson: Vous avez raison.
M. le Président, l'article 46, comme on le voit, porte sur toute
la question de l'arbitrage des griefs. Je sais que le député de
Saint-Laurent, lors du discours de deuxième lecture que j'ai relu avec
attention, après qu'il l'a prononcé en Chambre, a fait une bonne
partie de son exposé sur la question de l'arbitrage des griefs où
il a introduit sa critique quant au fondement d'une certaine formalisation de
l'arbitrage des griefs, j'en suis très conscient.
L'article 46, dorénavant, et l'article 47 du projet de loi,
puisqu'on les a fusionnés, ont été largement
modifiés par les amendements que j'ai apportés, que j'ai
déposés récemment et que nous envisageons maintenant. Tout
cela, dans un but d'abord de rendre un peu plus limpide un texte qui ne
l'était peut-être pas. Deuxièmement, en tenant compte au
niveau du fond, de nombreuses représentations à la fois de la
conférence des arbitres de la Chambre de commerce, du Barreau canadien
et des syndicats. Le Conseil du patronat avait également fait quelques
remarques, si je ne m'abuse. Nous en avons tenu compte dans l'ensemble de ces
mémoires et de ces revendications qui ont été
déposés. Je devrais dire que la majorité des amendements
que nous avons apportés, en fait, sont des amendements qui ont un but
vraiment de nature technique, de faire de ce texte juridique d'abord un texte
qui est plus clair, et deuxièmement, d'apporter carrément des
aménagements à tout le processus de l'arbitrage des griefs qui le
rendent à la fois le plus efficace possible. Ils confient quand
même des pouvoirs clairs et plus certains à nos conseils
d'arbitrage qui, jusqu'à maintenant, ont dû travailler dans un
contexte parfois d'une certaine illégalité. Par exemple, en
matière d'assignation des témoins, on sait que les conseils
d'arbitrage assignent des témoins sur les documents d'assignation de la
Cour supérieure en y mettant un intitulé étampé ou
simplement à la machine à écrire "Le tribunal
d'arbitrage". On signifie ces procédures aux parties qui habituellement
les respectent.
C'est courant, d'ailleurs, celui qui vous parle en a reçu une
récemment. Un membre de mon Cabinet a été assigné
comme témoin dans un grief à l'occasion du fait qu'il avait
été témoin d'un événement, semble-t-il, lors
de la visite à la Baie James, qui a fait l'objet d'un grief par la
suite. Il a reçu ce bref d'assignation au Cabinet et comme il s'agit
d'un avocat, il se demandait pourquoi c'était la Cour supérieure
qui le convoquait devant un tribunal d'arbitrage; il s'est rendu compte
qu'effectivement le bref d'assignation émanait de la Cour
supérieure. Mais ce n'était que le document. On sait que c'est
une pratique presque courante, finalement, en matière d'arbitrage de
griefs. Dans le fond, c'était totalement illégal.
On simplifie cela; il ne s'agit pas de dire qu'on efface ce genre de
chose, mais on constate que, dans le fond, ils auraient peut-être
dû toujours avoir ce pouvoir. Absolument frustrés devant
l'incapacité du législateur depuis des années de leur
confier clairement ces pouvoirs dans la loi, ils ont eu recours à des
moyens un peu détournés pour atteindre leurs fins.
En somme, c'est ce que j'ai à dire sur la toile de fond de
l'ensemble de ces articles. Brièvement, je pourrais peut-être
résumer, par quelques notes explicatives, quel est le contenu en gros,
de ces articles. On écrit, par exemple, l'article au complet au lieu de
faire des corrections considérables. Les changements sont les
mêmes qu'à l'origine, sauf ce qui suit: On ne parle plus de la
correction dans le texte anglais. On biffe le premier alinéa qui
était proposé par le paragraphe c) pour la bonne raison qu'on ne
parle plus de la commission d'arbitrage des griefs, mais qu'on a
décidé de parler au tribunal d'arbitrage dans tous les cas. On
conserve, cependant, l'alinéa qui prévoit que le code
prévaut sur la convention collective aux cas d'incompatibilité.
Le dernier alinéa du projet de loi 45 est rédigé un peu
différemment pour en arriver finalement à peu près
à la même chose. Ensuite, on retombera à d'autres
dispositions qu'on retrouve, en fait, sous l'ancienne rubrique de 47. Les
paragraphes a), b), c), et d) de l'article 88 sont supprimés. Les
articles traitaient de la révocation. Beaucoup de gens nous ont fait
valoir que l'on écrivait beaucoup de textes pour régler des cas
bien rares et qu'au surplus, ces cas étaient réglés de
façon satisfaisante actuellement en vertu du Code de procédure
civile. On a fait valoir également que l'introduction du Tribunal du
travail amènerait une juridiction de plus dans le système et que
cela ne faisait pas pour autant, par définition, sauter la Cour
supérieure.
L'article 88a correspond à l'article 88e du projet de loi. Il y
a, en fait, essentiellement une différence de style. L'article 88b
correspond à l'article 88f à l'origine dans le projet de loi.
Cependant, la dernière phrase de f) du projet de loi est devenue la
première phrase de e) dans le présent amendement.
M. le Président, si vous me le permettez, je pense que cette
énumération que je fais et qui n'a pas l'air très
stimulante pour qui que ce soit est peut-être utile pour les fins de
consultation éventuellement au journal des Débats.
A l'article 88c, il y a un nouvel article qui est suggéré
où il s'agit des décisions pro forma pour permettre à un
arbitre de se dessaisir des cas qui sont réglés, souvent sans
audition, dans lesquels il y a eu un désistement.
A l'article 88d, c'est un nouvel article qui ressemble à
l'article 70 du code qui concerne le conseil d'arbitrage. Il a
été suggéré pour des raisons pratiques.
A l'article 88e, la première phrase apparaissait au paragraphe
b), comme on l'a dit précédemment. Le deuxième
alinéa est ajouté pour prévoir un délai avant de
convoquer une partie. C'est une procédure analogue à celle qu'on
retrouve à l'article 19 du code, dans le cas du congédiement pour
activités syndicales.
L'article 88f correspond à l'article 88g du projet de loi
à l'origine qu'il reproduit à peu près inté-
gralement où on prévoit cependant un délai de cinq
jours francs lorsqu'une partie demande l'assignation d'un témoin.
L'article 88g est un article copié du Code de procédure
civile pour permettre aux arbitres qui seraient un peu ennuyés de poser
des questions, de pouvoir le faire clairement.
L'article 88h reproduit l'article 309 du Code de procédure civile
suggéré par plusieurs intéressés, les
techniciens.
L'article 88i reproduit l'article 88h. On précise que l'arbitre
peut visiter tout biens-meubles ou immeubles qui se rapportent aux griefs. On
permet à l'arbitre d'interroger les personnes qu'il rencontre sans avoir
à obtenir la permission des parties présentes.
L'article 88j est le nouvel article qui prévoit qu'une
mésentente, qui survient entre le moment de l'accréditation d'un
syndicat et la conclusion de sa première convention collective ou encore
entre l'expiration d'une convention collective et la conclusion de celle qui
suit, peut être déférée à l'arbitrage, comme
s'il s'agissait d'un grief. Cela répond à une
préoccupation d'ailleurs qui avait été soulevée, je
pense, par le député de Notre-Dame-de-Grâce. Il y a
actuellement un trou qui faisait l'objet de discussion devant les arbitres et
c'est cela qu'on règle enfin.
L'article 88k, c'est la reproduction de l'article 88i, sauf que l'on ne
fait plus la mention que le tribunal doit décider suivant la
règle de droit, mais bel et bien, qu'on retourne aux notions
jurispru-dentielles, ce qui implique qu'il y a possibilité
d'équité pour les bonnes consciences, dans la mesure où la
convention y pourvoit.
L'article 88I, c'est le nouvel article pour régler le
problème concret d'arbitrage, comme, par exemple: Un arbitre peut avoir
à interpréter la Loi électorale, si un employeur
sévit contre un salarié qui s'absente pour aller voter ou encore
s'il refuse de travailler en vertu d'une loi de sécurité,
etc.
L'article 88m reproduit l'article 88j. Cependant, la rédaction a
été modifiée pour permettre à l'arbitre de se
prononcer sur l'opportunité d'une sanction. C'est là une
disposition que l'on trouve dans les lois de toutes les provinces et du
férédal.
L'article 88n est là pour le cas, peu fréquent, il est
vrai, où un arbitre devrait ordonner à un salarié de
rembourser une somme importante à son employeur.
L'article 88o est le nouvel article pour donner une compétence
à l'arbitre d'ordonner le paiement de l'intérêt. Il pouvait
ordonner un montant, mais non pas le paiement de l'intérêt.
L'article 88p, c'est une précision suggérée par
plusieurs personnes quant à la possibilité de réouverture
de l'enquête par le conseil d'arbitrage.
Je pense qu'on a fait le tour de l'ensemble des articles couverts par
celui-ci, l'article 46.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Bellechasse. Adopté?
M. Goulet: Non, je voulais dire, si...
M. Forget: Je n'ai pas d'objection à donner la
parole...
M. Goulet: Seulement quelques commentaires, M. le
Président. Je ne voulais pas enlever la parole au député
de Saint-Laurent. Je veux bien suivre le cours normal.
Ces amendements tiennent compte de la conférence des arbitres,
également de ce que nous a dit le Barreau canadien. En grande partie, je
pense, que cela clarifie et que cela apporte des précisions opportunes.
Cela tient compte des observations des personnes qui travaillent dans le
milieu.
Nous de l'Union Nationale, nous avons quelques questions sur les
articles 88e et 88j, mais, en bloc, je peux vous dire que nous sommes
satisfaits de ces amendements. C'est une grande amélioration au projet
initial, le projet 45. En tout cas, somme toute, nous sommes satisfaits de ces
amendements. Il y aura quelques questions, comme je l'ai dit, sur des articles
bien particuliers.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: On touche un article entièrement nouveau et,
comme l'indiquait le député de Bellechasse, il s'agit d'une
amélioration. C'est indubitable. Il y a un très grand nombre de
règles qui existaient dans le paysage au niveau de la jurisprudence ou
des habitudes que l'on codifie. Les remarques que le ministre a faites
relativement aux pratiques utilisées par le tribunal d'arbitrage pour
convoquer les témoins, quand on les jumelle aux remarques qu'il a faites
relativement à l'article 39, constituent presque un cours de sociologie
juridique. Dans un cas, un article de la loi prévoyait une obligation
qui n'a jamais été respectée pendant 25 ou 30 ans.
Constatant cela, les législateurs s'empressent de supprimer
l'article en question plutôt que de le faire respecter. Je ne blâme
pas le ministre, je ne fais qu'observer. Dans un autre cas, les conseils
d'arbitrage n'avaient pas le pouvoir de convoquer des témoins en vertu
de la loi, mais le faisaient quand même et donnaient à cela
l'apparence d'un pouvoir légal. Ici aussi, le législateur
s'empresse de leur donner le pouvoir qu'ils exerçaient finalement depuis
des années. Il y a une leçon dans tout cela, je pense. Il serait
dommage de ne pas la souligner au passage parce qu'on a des témoignages
intéressants. C'est que dans un domaine comme le droit du travail, il
n'y a pas tellement de choses qu'on peut faire en dehors de ce que, dans le
fond, le public auquel on s'adresse est prêt à accepter et ce dont
il a besoin.
La grande difficulté, c'est de le découvrir. C'est
peut-être pour cela que, dans l'élaboration d'une loi comme le
Code du travail, dans le fond, le travail de consultation et
d'élaboration avec les milieux intéressés est
extrêmement important parce qu'il ne faut pas se faire d'illusions... Le
passé est garant de l'avenir dans ce domaine comme dans d'autres. Si on
a trouvé qu'indépendamment des lois, il y avait des choses qui
devaient être faites ou pas faites dans le passé, cela risque fort
de se produire aussi dans l'avenir. Donc, de consacrer comme lettre morte les
dispo-
sitions dont les gens ne veulent pas ou alors de faire comme si elles
existaient quand les gens en ont vraiment besoin, même si le
législateur a jugé que ce n'était pas opportun de le
mettre dans la loi, il y a des limites à cela.
Ces limites sont surtout sur les modalités, les encadrements, la
façon de faire les choses plutôt qu'essentiellement sur des choses
plus substantielles. Je crois que c'est bon que le législateur, que nous
sommes collectivement, se fasse rappeler, de temps à autres, qu'il y a
une réalité en dehors du Parlement qu'on ne peut pas mettre de
côté. Il y a aussi une autre chose que j'aimerais souligner de
façon générale que l'on retrouve dans ces dispositions sur
lesquelles, comme le ministre l'a dit, j'ai fait des commentaires, au niveau de
la deuxième lecture, et qui trouve, dans les dispositions sur
l'arbitrage, un point d'ancrage particulièrement remarquable! c'est la
judiciarisa-tion des relations du travail. C'est-à-dire, la tentation
qu'on a de transformer cela de plus en plus en un processus très
formalisé qui a des règles très strictes. Je dirais
à cela que si cela allait complètement à l'encontre de nos
traditions, on ne s'y affairerait présumément pas à cause
des remarques que je disais tantôt sur la sociologie juridique. Ce serait
désuet. Ce serait caduc. Cela n'aurait pas d'effet.
Il doit donc exister, dans la façon dont on envisage les
relations au Québec, quelque chose de particulier. Il est
peut-être bon de le souligner au moment où on aborde ce chapitre
parce que, dans le fond, il y a une tendance plus grande au Québec, dans
nos lois du travail, à préciser les points et virgules et les
modalités, les procédures de façon beaucoup plus
complète qu'on ne le fait, par exemple, dans le droit américain.
On l'a soulevé au cours de longues discussions. C'en est peut-être
un des éléments de la réalité sociologique, ce
désir des gens de trouver un cadre au Québec beaucoup plus
circonstancié et ramifié que d'autres pays ne désirent
avoir. C'est peut-être important de reconnaître cela tout en
mesurant clairement aussi toutes les implications de cette tendance.
Je pense que le chapitre qu'on vient de laisser sur l'intervention lors
de la première convention collective qui n'est probablement pas la
version définitive... Si on regarde, dans cinq ans d'ici ce qui va se
produire, on peut anticiper qu'il va y avoir des modifications, certainement,
dans la façon d'envisager ces mesures avec l'expérience et
peut-être même dans le libellé des articles en question.
Mais cela aussi c'est une façon de préciser des choses.
Il va falloir savoir où s'arrêter et, là-dessus, je
crois que le ministre a été bien avisé de retrancher, dans
sa révision un excès de juridisme ou de judiciarisation, quand il
a enlevé toutes les dispositions relatives à la récusation
des arbitres. Ça, c'était vraiment un processus judiciaire.
Même s'il y a une tendance, et qu'on peut la constater, c'est une
question de mesure. Je pense qu'il a bien mesuré la distance qui lui
permettait d'aller dans cette direction en enlevant les dispositions en
question.
La question qu'on peut se poser, c'est s'il ne reste pas, dans ce
texte-là, un certain nombre de choses qui sont un petit peu trop
judiciaires, malgré tout, d'inspiration. Il y en a une que je
soulèverai plus tard de façon spécifique, mais dont je
peux parler ici de façon générale, c'est la question de
l'immunité.
L'immunité, la plupart des gens, quand on propose ça dans
un texte de loi, disent: Bien oui, l'immunité, c'est vrai, dans le fond.
Nul ne peut être poursuivi pour ce qu'il fait officiellement et de bonne
foi. D'ailleurs, c'est tellement normal; ça va tellement de soi. Mais
attention, ce n'est pas un pouvoir, ce n'est pas une protection dont tout le
monde peut bénéficier. On pourrait dire du chauffeur d'autobus
qu'il ne peut être poursuivi pour les actes qu'il pose officiellement et
de bonne foi. Pourquoi pas? Après tout, on pourrait dire ça de
n'importe qui: Nul ne peut être poursuivi pour les actes qu'il pose de
bonne foi dans l'exercice de ses fonctions.
Comment se fait-il que ce ne soit pas dans le Code civil? Attention!
C'est une notion bien différente de celle qui dit qu'on ne doit pas
abuser des poursuites judiciaires contre des gens de bonne foi. Cela, c'est
l'explication de sens commun de ces dispositions, mais ce n'est pas leur
signification véritable. Elles ont une signification beaucoup plus
stricte et beaucoup plus exigeante que cela dans le contexte des lois.
Si bien que, jusqu'à il y a quelques années, seulement les
juges disposaient d'une immunité, les vrais juges, les vrais tribunaux,
et personne d'autre. Les députés, mais dans un cadre aussi
très limitatif. Ce n'est pas: Tout député ne peut
être poursuivi pour ce qu'il fait de bonne foi comme
député. On a une immunité limitée à ce qu'on
dit à l'Assemblée nationale, etc. D'ailleurs, on amende
actuellement la loi de la Législature pour prévoir
l'immunité pour ceux qui rapporteront par la télévision,
la radio, etc., dans le cadre de la transmission électronique des
débats.
C'est donc un concept qui ne peut être galvaudé,
utilisé à n'importe quelle sauce, simplement pour faire bien ou
pour avoir l'air d'être aimable vis-à-vis de certaines personnes.
C'est un concept qui est un prolongement de la fonction judiciaire ou de
fonctions officielles très particulières. Je ne veux pas
anticiper sur le débat; je voulais simplement citer cela comme une
illustration de la règle générale.
Pour ce qui est de la possibilité, pour le tribunal d'arbitrage,
de rendre une sentence à partir de la preuve recueillie plutôt que
par des exigences légales, je félicite le ministre d'avoir
modifié la rédaction là-dessus. Même si nous
conservons certaines remarques à ce sujet, il demeure que, je pense,
tous les groupes qui se sont fait entendre devant nous ont souhaité voir
la formulation originale restaurée dans la mesure du possible.
Le plus important principe qui est soulevé par ça, c'est
au point qui, lui aussi, a été mentionné lors de
l'étude en deuxième lecture et qui a été repris par
des commentateurs indépendants. C'est la restriction de l'accès
aux griefs, d'une part pour les patrons c'est déjà dans
les lois et, d'autre
part, pour l'association accréditée, c'est-à-dire
la fermeture de l'accès aux griefs aux membres individuels d'une
association de salariés. Jusqu'à maintenant, il a
été possible, pour un individu qui se sentait lésé,
qui avait raison de croire que la convention collective lui accordait certains
droits que le patron lui refusait, de mettre en marche un mécanisme de
redressement du tort qu'il prétendait lui avoir été
causé sans demander la permission à qui que ce soit. Une nouvelle
rédaction restreint ce droit aux parties. Comme l'individu n'est pas une
partie à une convention collective il n'en est que le
bénéficiaire; la partie c'est essentiellement l'association
accréditée, d'une part, et le patron, d'autre part c'est
une restriction qui, à mon avis, s'accorde mal avec, d'abord, la
défense de la liberté d'association. La liberté
d'association peut vouloir dire, bien sûr, qu'on peut
éventuellement puisque c'est une liberté d'association; ce
n'est pas une obligation d'association vouloir exercer, à titre
individuel, un recours en vertu de son contrat de travail, parce que c'est un
contrat de travail qui a une valeur pour l'individu, pas seulement pour le
groupe, ce qu'il ne sera plus possible de faire.
Le ministre nous dira: Ecoutez, il y a une correspondance à cela
dans l'article sur le "duty of fair representation", à l'article 38 ou
quelque chose comme cela. Dans une certaine mesure, il a raison, mais, pour des
raisons très limitées, c'est-à-dire le cas de perte
d'emploi à la suite d'une expulsion du syndicat, etc. Dans d'autres
secteurs, il n'a que les recours civils. Pour toute autre cause de plainte, en
vertu même de la convention collective, il ne semble pas pouvoir exercer
autre chose contre le syndicat qu'un recours en vertu des tribunaux de droit
commun. D'un autre côté, il n'a pas le recours de dire: Si vous ne
voulez pas me défendre, si vous ne voulez pas revendiquer mes droits
pour moi, je vais le faire moi-même. Il ne peut pas le faire
lui-même et, si son syndicat ne le fait pas, il peut le poursuivre en
Cour supérieure, à moins, bien sûr, qu'il ne soit l'objet
de sanctions ou d'expulsion par son syndicat et que ça ne mène
à une perte d'emploi, donc dans des cas exceptionnels. Mais il y a bien
d'autres griefs que ceux-là, surtout de petits griefs qui doivent
pouvoir être soulevés sans remuer mer et monde.
C'est un point fondamental que nous allons certainement soulever, parce
que c'est un droit qui existe, un droit acquis pour tous les salariés du
Québec. C'est un droit dont la loi les prive sans contrepartie. Il n'y a
pas de justification à ça; on n'en a pas suggéré,
sauf celle que je viens d'indiquer qui est loin de recouvrir le même
champ d'application. Donc, c'est une justification partielle, au mieux.
On fait bien des choses là-dedans qui sont bonnes dans
l'ensemble. Ce sont relativement des questions de détail. Nous les
parcourons une à une. Un dernier point, c'est qu'il y a, tout à
fait à la fin, une possibilité pour le tribunal de rouvrir
l'enquête de son propre chef, proprio motu. On ne prend pas la
précaution de dire que cela doit être fait pour cause, alors que
dans un autre article an- térieur on a, au niveau des décisions
du commissaire du travail, un article nouveau qu'on a introduit pour justement
supprimer la notion de "pour cause " qui était vague, et y
insérer des motifs explicites. Il me semble que c'est probablement les
mêmes motifs qui donneraient ouverture à la réouverture de
l'enquête si on m'excuse le pléonasme et il serait
facile, étant donné que c'est maintenant dans le Code du travail,
de dire que les mêmes raisons qui donnent occasion à rouvrir,
à réexaminer une décision par le commissaire du travail
peuvent aussi donner ouverture à un tribunal d'arbitrage de rouvrir son
enquête. Je ne veux pas commencer par la fin, je voulais le mentionner
parce que cela m'apparaît être les trois ou quatre points
d'ensemble que l'on peut trouver à ce sujet. Maintenant, sur chacun
d'entre eux, nous aurons des propositions ou des questions plus
spécifiques à faire. Là-dessus, je vais terminer mes
remarques générales.
Le Président (M. Marcoux): D'abord, nous allons
commencer...
M. Goulet: M. le Président, si vous me permettez, il y
aurait juste un point... A l'article 88, j'aurais aimé le mentionner
tantôt, on dit: "Si l'association accréditée et l'employeur
y donnent suite pendant le grief, sinon, celui-ci y sera
déféré à un arbitre ". Cela veut dire qu'un
salarié seul ne peut pas lever un grief, ne peut pas demander un grief.
M. le Président, j'ai amené ici un argument l'autre jour, une
fois où je siégeais, alors que j'ai vécu cette chose. Je
ne trouve pas acceptable qu'on mette cela dans un projet de loi parce que
souvent enfin, dans le cas qui était arrivé sur une
centaine de syndiqués, ce qu'on appelle l'exécutif, ce dernier va
régler un conflit à sa convenance et parfois, trois ou quatre
personnes sont oubliées et pour qui cela ne fait pas l'affaire, et ils
ne peuvent pas lever de griefs. Souvent ce grief serait contre la
décision prise par le syndicat, c'est-à-dire contre la
négociation faite par le syndicat. J'ai vécu cela, je l'ai dit
l'autre jour, soit la fameuse affaire du SPEQ les professeurs de
l'enseignement spécialisé lorsque nous nous sommes
intégrés à la commission scolaire et les autres au CEGEP.
Je ne veux pas lancer d'accusation même si nous avons l'immunité,
mais en bon canadien, les gars se sont organisés entre eux, quatre ou
cinq professeurs; dans le cas dont je vous parle précisément,
nous étions treize. Ils ont dit: Les petits gars, il n'y a pas d'ouvrage
pour vous autres; on vous oublie, point final. On a pu lever un grief à
ce moment-là; mais là, on ne pourrait plus le faire
personnellement, si le syndicat ne l'accepte pas. L'association
accréditée c'est l'exécutif. Si le syndicat ne l'accepte
pas, cela veut dire que... Le grief comme tel est que souvent l'exécutif
du syndicat...
M. Chevrette: Vous ne pouvez pas comparer, M. le
député de Bellechasse, parce que dans l'exemple que vous donnez,
ce serait l'interprétation même de l'article 36 du Code du travail
quant au processus d'intégration. A ce moment-là, ce n'est pas
une question qui est reliée à l'interpréta-
tion ou l'application d'une convention collective. C'est
l'interprétation et l'application d'un article de la loi comme tel.
M. Goulet: A mon bureau, depuis que je suis député,
cela est arrivé au moins à deux reprises où le syndicat a
pris une décision, a accepté quelque chose mais où le
syndiqué n'est pas content de la décision du syndicat; il ne peut
pas lever de grief. Alors, qu'a-t-il pour se débattre? Absolument
rien.
Je ne vois pas pourquoi un syndiqué, comme individu, ne peut pas
lever un grief, si lui-même décide personnellement, sans qu'il
puisse faire décider le syndicat à sa place.
Mais si lui, personnellement, il le décide, pourquoi ne
pourrait-il pas lever un grief à un moment donné? Parce qu'il
peut y avoir des conflits de personnalité entre le syndiqué et
l'exécutif du syndicat et le gars ne pourra pas faire passer son grief.
Il peut avoir raison de lever un grief. Mais ce sont souvent des conflits de
personnalité entre le syndiqué et l'exécutif; cela arrive
souvent. En tout cas, dans les trois cas que j'ai connus, soit le mien avec
douze autres professeurs et aussi deux autres cas que j'ai connus, un pour le
ministère des Transports, où le gars ne pouvait pas se faire
entendre parce que le syndicat lui disait: Tais-toi. L'exécutif disait:
Tais-toi, le patron a raison; et le gars disait: Non, ils n'ont pas raison.
Souvent, c'est un conflit de personnalité.
Je ne vois pas pourquoi il ne peut pas se faire entendre. Je n'ai pas de
formation légale, mais M. le ministre l'a dit l'autre jour, lorsqu'on
parle de droit, il y a un article, quel que soit le droit dont nous parlons, il
y a un article qui dit qu'on peut toujours se faire entendre à un moment
donné, si on n'est pas content.
Je ne vois pas pourquoi on met un article comme ça, parce qu'on
ferme les portes hermétiquement.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: C'est juste pour souligner au député
de Bellechasse qu'il ne faut pas confondre la possibilité de faire un
grief pour un syndiqué avec l'organisme qui doit mener ce grief. Dans
l'exemple que vous donnez, effectivement, n'importe quel syndiqué peut
faire un grief, c'est-à-dire acheminer un grief à l'organisation
syndicale et c'est l'organisation syndicale, par la suite, qui mène la
procédure. Ce dont vous parlez, ce que vous craignez, c'est
réglé par l'article 28 du projet de loi qui a amendé
l'article 38 du code et on y dit que "une association accréditée
ne doit pas agir de mauvaise foi ou de manière arbitraire ou
discriminatoire, ni faire preuve de négligence grave à l'endroit
des salariés compris dans son unité d'accréditation."
Si tel est le cas, il y a une procédure que le salarié
peut utiliser contre son syndicat au niveau du ministère du Travail. Ce
que vous voulez viser est prévu à l'article 28 qu'on a
réglé.
M. Johnson: S'il s'agit d'une mesure disciplinaire ou d'un
renvoi.
M. Chevrette: Ou d'un renvoi.
M. Johnson: Dans les autres cas, c'est le recours devant les
tribunaux.
M. Goulet: Je ne veux pas entreprendre de discussion, mais c'est
parce qu'on dit toujours que c'est basé sur la bonne foi. On ne peut pas
parler de mauvaise foi, je suis bien d'accord. A ce moment-là, on
revient aux discussions du député de Saint-Laurent avant l'heure
du dîner. Il y a toujours la mauvaise foi et la bonne foi. Qui va
décider s'il y a bonne foi ou mauvaise foi? Si l'association dit: De
bonne foi, nous disons non, on ne s'en occupe pas. Si le syndiqué dit:
Je veux que vous vous en occupiez; qui décide s'il y a de la bonne foi
ou non?
Une Voix: La Cour supérieure.
M. Goulet: La Cour supérieure, ah bon! D'accord.
M. Bisaillon: Sauf à l'article 28. M. Johnson: Sauf
à l'article 28.
M. Bisaillon: Sauf à l'article 28 ou si c'est une sanction
disciplinaire...
M. Goulet: Je ne veux pas apporter d'amendement, M. le
Président. Le but est d'améliorer le projet de loi, mais je n'ai
pas préparé d'amendement et je n'en apporterai pas, mais à
un moment donné, c'est bon de se référer à certains
faits vécus. Je pense que c'est le but.
M. Johnson: M. le Président, si vous permettez, si le
député de Bellechasse permet. Je pense que le
député de Sainte-Marie voulait parler aussi. L'article 28 du
projet de loi, juste résumer ça un peu. Quand je disais, à
une question où le député de Saint-Laurent argumentait sur
la recevabilité, "duty of fair representation". Je pense qu'il devient
évident, en vertu de l'article 46, qu'effectivement, le "duty of fair
representation" se situe carrément dans le contexte de la loi, puisqu'on
donne la propriété collective du grief aux articles 88 et
suivants du code, en vertu de notre article 46. C'est là que vient se
greffer et c'est venu tout à fait spontanément, et de la part du
député de Saint-Laurent et de la part du député de
Bellechasse de parler de cette question qu'on retrouve à l'article
28.
Ce qu'il dit en gros, l'article 28, c'est pour le député
de Bellechasse que je le répète, l'article 28 établit le
principe général de la non-discrimination, l'attitude qu'il ne
doit pas être arbitraire ni de mauvaise foi. Le paragraphe suivant
prévoit que si cette attitude est décrétée, mais
dans les cas spécifiquement de renvoi ou d'une
sanction disciplinaire, il y a un mécanisme de recours,
d'arbitrage pour l'individu. Dans les autres cas, c'est le recours de droit
commun qui existe, c'est-à-dire l'évocation en Cour
Supérieure ou quelque chose de ce type.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce qu'on peut discuter
paragraphe par paragraphe maintenant?
M. Forget: M. le Président, au-delà du "duty fair
representation", avec la couverture relativement étroite qu'elle a dans
le chapitre à l'article 38, j'aimerais savoir comment le ministre peut
justifier faire du grief la propriété du syndicat? Parce que
justement il y a beaucoup de cas qui ne sont pas couverts ou qui sont couverts
de façon fort imparfaite, parce que la possibilité d'avoir un
recours aux tribunaux du droit commun n'est quand même pas un recours
très accessible pour la plupart des salariés. Alors, comment
justifier enlever un boeuf en échange d'un oeuf? Vous savez, ce n'est
pas tout à fait la même grosseur, ce n'est pas le même champ
d'application.
M. Johnson: Les propos du député de Saint-Laurent
me font penser un peu à une chanson de Charlebois: Un oeuf... La notion
de la propriété collective...
M. Pagé: C'est quoi la chanson de Charlebois?
M. Johnson: Un oeuf... La notion de propriété
collective du grief correspond, et j'ai eu l'occasion, au moment du
dépôt de l'ensemble des amendements et des considérations
générales au début de l'étude article par article,
de le dire et provient du fait que l'économie du code est à
l'effet qu'on crée, non pas une personnalité juridique en
l'existence d'une association accréditée, mais qu'on
confère une sorte d'existence très particulière au niveau
du Code du travail à cette association, d'où découlent des
responsabilités. On sait que, par définition, cette association
n'est pas quelque chose d'artificiel, étant donné qu'elle ne peut
exister que dans la mesure où elle a un caractère
représentatif qui est vérifié par le
commissaire-enquêteur et qui est conditionnel à l'obtention du
certificat d'accréditation.
On prévoit que cette association peut agir et doit agir, dans le
cas de 28, au premier paragraphe, de façon équitable, si on veut,
envers tout le monde. Ceci dit, c'est un geste, et je n'ai pas de
difficulté à l'admettre, qui découle d'une conviction
qu'on peut avoir confiance dans ce qui s'appelle l'institution qui est une
association accréditée aux fins du code. Alors la règle,
c'est la confiance possible, la responsabilité de cet organe, pour ne
pas dire organisme, que devient l'association accréditée.
Or, la démocratie syndicale, entre parenthèses, qui existe
de façon générale et qui est, je pense, la règle au
Québec même si certains accrocs évidents ont fait
l'objet de manchettes et de discussions, mais c'est la règle fait
que, à un moment donné, il y a des choix qui, collective- ment,
se prennent par les salariés pour la défense de leur
intérêt collectif. Et j'en ai donné un exemple, c'est le
syndicat qui, après une grève qui a été longue et
dure, à qui il reste en caisse quelques centaines de dollars, et qui est
devant la possibilité de loger 25 à 30 griefs, et qui sait qu'il
n'aura pas les moyens de loger tous ces griefs. Donc, il faut que la
règle tranche quelque part. On présume que c'est l'association
accréditée qui en déciderases balises sont d'abord
des balises de faits et de réalité, puisque c'est une association
représentative vu qu'elle a été accréditée,
et on présume que ses décisions sont représentatives.
Deuxièmement, on a introduit à l'article, au sujet de la
non-discrimination de l'attitude non arbitraire qui soit de mauvaise foi, une
espèce d'obligation générale d'attitude à ce niveau
qui connaît une sanction précise au deuxième paragraphe
dans le cas spécifique de choses qui relèvent, encore une fois,
du droit au travail. C'est une chose qui revient encore dans ce contexte, de la
même façon que dans le cas du "closed shop".
Pour ces raisons, je pense que, malgré les difficultés que
cela peut poser à certains membres de la commission, la
propriété collective du droit de grief temporisé par les
éléments qu'on a vus est justifiable. Il y a quelque chose qui,
de fait, colle à la réalité et au sens commun de ce qui se
passe dans la vie des associations accréditées.
M. Forget: Sur ce point-là, M. le Président, il est
clair que le ministre base son raisonnement sur une notion de confiance. Ce
n'est pas tellement une notion de confiance qui doit nous inspirer
là-dessus. C'est un peu comme si on disait, dans le domaine de la
protection du consommateur: En général, les consommateurs ne se
font pas frauder systématiquement tout le temps, on n'a donc pas besoin
d'une Loi de la protection du consommateur, il faut faire confiance
après tout. C'est vrai que le commerce est basé sur la confiance,
sinon cela ne marcherait pas. On en serait encore à l'économie de
l'âge de pierre: on se fabriquerait nos propres chaussures de peur de se
faire frauder en achetant celles fabriqués par les autres, etc. Il y a
donc un élément de confiance.
Cela ne veut pas dire qu'il ne doit pas y avoir des lois de protection
des consommateurs. Dans le fond, ce n'est pas tellement la confiance qu'invoque
le ministre, c'est le laisser-faire. Admettant qu'il peut y avoir des abus et
admettant que les abus ne sont pas couverts adéquatement par les
dispositions de la loi, il dit: Faisons confiance malgré tout.
La propriété collective du grief, c'est bien joli, cela
fait une jolie phrase, quand on s'adresse aux militants syndicaux, surtout aux
représentants des centrales, sauf que la propriété
collective des griefs, c'est équivalant, dans le contexte des
amendements apportés au Code du travail, à l'expropriation de la
propriété individuelle du grief. L'un ne va pas sans l'autre.
Qu'on ne nous dise pas: II faut faire confiance.
Il est bien clair que cela va faire une belle jambe aux syndiqués
qui, justement, dans un syndicat, après une grève, se retrouvent
avec quel-
ques centaines de dollarspour employer l'exemple du ministre
en banque. Qui doit décider, dans tous les griefs, ceux qu'il va
pousser plus loin et ceux qu'il ne poussera pas plus loin? Cela va lui faire
une belle jambe de se faire dire cela, que c'est maintenant une
propriété collective.
M. Bisaillon: Suggérez-vous que l'Etat paie, que l'Etat
défraie l'ensemble des arbitrages?
M. Forget: Non.
M. Bisaillon: Que suggérez-vous, s'il lui reste $300 en
caisse et qu'il a cinq arbitrages à mener? Est-ce que ce n'est pas le
droit de l'assemblée générale de choisir lequel elle va
mener?
M. Forget: C'est son droit.
M. Bisaillon: Quelle autre mesure suggére-riez-vous?
M. Forget: Ne nous excitons pas, M. le député de
Sainte-Marie. Il reste que...
M. Bisaillon: M. le Président, je trouve que le
député de Saint-Laurent perd un peu de temps actuellement et
qu'il nous étire un peu le temps, parce qu'il continue à faire
une discussion générale alors qu'on devrait commencer à
discuter article par article.
M. Forget: Soyons calme, M. le Président, on a tout le
temps.
M. Bisaillon: Je suis très calme.
M. Forget: On a tout le temps qu'il nous faut. D'ailleurs, on
travaille dans une atmosphère de calme.
M. Bisaillon: Bien sûr!
M. Forget: Je trouve que la fin de semaine, comme cela, c'est
très propice au travail parlementaire.
M. Bisaillon: Bien sûr, on peut même siéger
demain si vous êtes d'accord.
M. Forget: Oui, si c'était en mon pouvoir, sûrement,
je n'aurais aucune hésitation à siéger jusqu'à
minuit demain soir. Après tout, c'est tout à fait normal, on n'a
pas d'appels téléphoniques, pas de courrier, aucune distraction.
Je trouve que cela favorise la concentration à un degré
extraordinaire.
Une Voix: A l'ordre!
M. Forget: Ce n'est pas moi qui ai soulevé le sujet du
temps, etc.
M. Bisaillon: Je vous ai demandé si vous sug-
gériez quelque chose. Je voudrais avoir votre réponse. C'est une
question que je vous pose.
M. Forget: Oui, je suggère quelque chose, bien sûr.
Je suggère, premièrement, de ne pas faire cette modification et
de permettre, par ce moyen et par d'autres moyens très faciles qu'on
peut suggérer, au salarié individuel de prendre lui-même
des mesures pour que ses droits, en vertu de son contrat de travail, soient
respectés. Si son syndicat ne peut pas le faire pour lui et qu'il est
trop pauvre, le pauvre syndicat, pour l'aider, il pourrait au moins avoir
d'autres possibilités de le faire. Ce n'est pas malin d'en inventer. On
vous fournira des exemples le moment venu, mais il reste qu'il y a un principe
dans quelques minutes, si vous voulez ou plus tard, si ce n'est pas
convenable; il faut quand même que ce soit sérieux, M. le
Président qu'il y a des options. Ce n'est pas nous qui
suggérons un changement, c'est le ministre qui en suggère un. Les
raisons qu'il donne ne sont pas valables, c'est une expropriation d'un droit
acquis des travailleurs, sans contrepartie.
Toutes les autres justifications qu'on donne sont des justifications de
laisser-faire.
M. Bisaillon: Ce n'est pas vrai, c'est faux ce que vous
dites.
M. Johnson: C'est dans la majorité des conventions
collectives que le grief appartient au syndicat.
M. Forget: Comme les clauses d'atelier fermé que le
ministre veut interdire pour l'intérêt public.
M. Johnson: Voilà, elles ne touchent pas toutes au droit
au travail.
M. Chevrette: II y a une différence énorme, M. le
député de Saint-Laurent...
M. Forget: Ah oui! bien sûr!
M. Chevrette: ... entre le fait pour un salarié de lever
un grief et de décider de le conduire à l'arbitrage.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Joliette-Montcalm?
M. Chevrette: Je pense que vous ne faites pas cette
différence. Le salarié peut toujours lever un grief, mais prendre
la décision de le conduire en arbitrage, c'est très
différent. Il y va même de l'intérêt collectif dans
une association syndicale.
Exemple: Prenez le grief d'un individu qui se sentirait
lésé parce qu'il prétend qu'il aurait droit à
quelque chose, $23 sur l'assurance-groupe. Le fait de faire prendre cette
décision pourrait créer un précédent pour
l'ensemble qui gonflerait la masse salariale de l'employeur et qui pourrait
nuire à la collectivité. Par exemple, dans le cas des partiels,
je suis persuadé que dans, le fait de lever un qrief,
il n'y a pas de préjudice. Tu le lèves, tu
l'étudiés. Mais j'ai la conviction que c'est aux groupes de
salariés à définir si conduire ce grief à
l'arbitrage n'a pas une incidence négative pour l'ensemble de la
collectivité qui s'est regroupée dans un syndicat.
Deuxièmement, moi, en tout cas, je ne connais pas de convention
collective où c'est le salarié qui décide d'aller en
arbitrage. Je n'en connais pas.
M. Forget: Les conventions collectives sont
négociées par les syndicats, pas par les salariés.
M. Bisaillon: Alors vous voulez quoi? Qu'on retourne aux contrats
individuels?
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Bisaillon: On se fait dire des énormités, M. le
Président, il faudrait quand même qu'on réagisse un
peu.
Le Président (M. Marcoux): Vous réagirez...
M. Bisaillon: C'est incroyable d'entendre un homme aussi
sérieux que le député de Saint-Laurent nous abrutir de
déclarations toutes fausses, toutes croches.
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre! La parole est au
député de Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Que dit-il?
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Tâchez de reconnaître la
deuxième partie de mon comté.
M. le Président, l'interprétation et l'application d'une
convention collective, cela ne peut pas être confié à un
individu, à un salarié. Sinon, c'est la négation
même de ce que c'est que l'association, le droit d'association. Je
demande au député de Saint-Laurent, qui est fort, en tout cas, il
m'a impressionné avec sa grande logique de théoricien, mais,
depuis 20 minutes, il a abandonné complètement cette logique
pour, je pense, essayer de faire ce qu'on appelle faire un "filibuste"
déguisé. Je pense qu'il faut être complètement
réaliste. Je le répète, M. le député de
Saint-Laurent, le ministre n'enlève pas le droit au grief. Ce qu'il
soustrait d'une façon très explicite, c'est le droit d'en
décider pour la collectivité, il précise ce qui se fait
dans les faits. D'ailleurs, le ministre du Travail, depuis le début, a
toujours dit que le bill 45 en était un où on transposait des
situations de fait à l'intérieur d'un projet de loi à
court terme et qu'il y aurait une réforme plus globale.
A court terme, on n'a fait que préciser que l'individu a le droit
au grief, mais pour l'interprétation et l'application et le sort du
groupe; revenons aux vieilles traditions, revenons aux contrats individuels;
laissons l'individu créer les précédents qu'il voudra bien
créer. Cela, je pense, serait contre la logique que l'ex-ministre, le
député de Saint-Laurent...
M. Pagé: Plus vite qu'on pense.
M. Chevrette: ... tente de vouloir exploiter. Je comprends que
cela fatigue. La grande fatigue peut contribuer à faire faire des
écarts à la grande logique théorique qu'il a
exposée depuis le début...
M. Forget: M. le Président, une question de
règlement. Le député de Joliette-Montcalm n'a pas à
faire de particularités. Je ne suis certainement pas plus fatigué
qu'il l'est, apparemment, d'après les propos qu'il tient.
M. Chevrette: On est plusieurs de notre côté pour se
relayer, M. le député de Saint-Laurent. Vous avez assumé
toute la tâche. Il faut comprendre.
M. Forget: II est vrai que je n'ai pas dormi durant la
séance, M. le Président.
M. Chevrette: Et moi non plus.
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre!
M. Chevrette: Vous étiez dans les carottes, comme on dit
communément chez nous.
M. Bisaillon: M. le Président, est-ce que je pourrais
ajouter un élément...
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: ... à l'avantage du député de
Saint-Laurent. Car, malgré tous ses appels au calme je vois que
c'est la première cigarette qu'il allume depuis qu'on siège
ce doit être une façon d'attirer chez lui aussi un calme
qui commence à le laisser.
Est-ce que le député de Saint-Laurent pourrait comprendre
qu'il y a d'autres moyens aussi pour une organisation syndicale de
régler ses griefs que l'arbitrage? C'est théorique, ça, de
penser que quand on met en marche un grief, automatiquement, ça s'en va
en arbitrage. C'est très théorique, ça. C'est loin du
vécu, et c'est loin aussi de l'organisation collective.
Voulez-vous que je vous donne des exemples de ce qu'un groupe peut faire
pour essayer de régler son grief? Prenons le milieu enseignant. Le grief
est formulé par l'enseignant. Il touche, par ricochet, l'ensemble des
autres syndiqués. Il est défendu par le représentant
syndical auprès des autorités et on n'a pas gain de cause. Avant
d'aller en arbitrage, M. le député de Saint-Laurent, ne
pensez-vous pas que le groupe pourrait décider, par exemple, de se
présenter à une assemblée publique de la commission
scolaire et de présenter son problème aux commissaires
d'écoles pour essayer de le régler directement avec eux? Ne
pensez-vous pas que le groupe pourrait, par exemple, réunir les
parents dans chacune de leurs écoles et leur expliquer le
problème et que la commission scolaire ne veut rien entendre à
son grief, et, par la voie de la pression publique, tenter de régler son
grief? Est-ce que vous comprenez qu'il pourrait y avoir d'autres façons
de régler les griefs que l'arbitrage, et que, dans votre façon
d'envisager ça, vous amenez les syndiqués dans un goulot
d'étranglement où, forcément, chaque fois, dans votre
tête, qu'ils initient un grief, il faut qu'ils dépensent de
l'argent à un arbitrage? C'est à l'encontre de tout ce qui se vit
quotidiennement dans le milieu, tant du côté patronal que du
côté syndical. Même les employeurs qui vous écoutent
ne vous prendraient pas au sérieux.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Portneuf.
M. Pagé: M. le Président, on va tenter d'être
le plus calme, le plus serein possible.
M. Godin: M. le Président, il n'y a pas un seul
modèle d'intervention ici. S'il faut tous se modeler sur le rythme,
d'une lenteur extrême, genre "steamboat" du Mississipi, qui est le propre
du député de Saint-Laurent, il faudrait qu'on laisse une partie
de ce qu'on est au vestiaire. Moi, ça ne m'intéresse pas.
Reconnaissons, M. le Président, que chacun a son style et c'est tout.
Chaque fois qu'on intervient un peu à haute voix, avec un ton un peu
plus élevé que d'autres, on se fait traiter d'être
énervé ou de ne pas être calme. Moi, je n'accepte pas
ces...
Le Président (M. Marcoux): Le Président ne
reçoit pas le mandat de juger les styles en vertu de notre
règlement.
M. Godin: Les membres non plus. Merci beaucoup.
M. Pagé: M. le Président...
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Portneuf.
M. Pagé: M. le Président, l'affirmation du
député de Mercier vient confirmer, vient refléter une
attitude qu'on remarque chez le gouvernement surtout depuis quelque temps,
depuis le conseil national, depuis la convocation du conseil et tout ça,
qui, pour nous...
M. Bisaillon: Cela, c'est un exemple de la lenteur de
l'Opposition.
M. Pagé: Non...
M. Godin: Le ronron de l'Opposition.
M. Bisaillon: ... pas dans le journal des Débats, M. le
Président, vous parlez lentement, il étire le temps encore.
M. Godin: Le ronron de l'Opposition, M. le Président. Ce
sont des moteurs à deux temps, M. le Président.
M. Pagé: On ne pourra être taxé de faire des
procédures qui viseraient uniquement à utiliser le temps ou quoi
que ce soit, parce que j'aurais pu intervenir sur tous les amendements qui ont
été présentés par I Opposition officielle cet
après-midi...
M. Godin: Pas trop vite!
M. Pagé: ... et, à ce moment-là, vous
m'auriez taxé de faire ce qu'on appelle du "filibuster".
M. Godin: Pas trop vite! Vous allez trop vite! M. Chevrette:
II va trop vite, là.
M. Pagé: M. le Président, j'aurais une question au
ministre, après que j'aurai eu l'occasion, si on me la laisse, de faire
un commentaire sur l'article qui est présenté pour adoption.
Je pense, M. le Président, que tout le monde veut probablement
atteindre les mêmes objectifs par les commentaires qu'on formule depuis
tout à l'heure, sauf qu'on a des perceptions bien
différentes.
J'aurai le commentaire suivant, M. le Président, et j'adresserai
des questions au ministre. L'article 88 nous définit toute la
procédure d'arbitrage des griefs. Il y a eu des amendements qui ont
été déposés par le gouvernement et qui visent
essentiellement à bonifier ce qui avait été
présenté antérieurement, mais, M. le Président, je
remarque et je constate que la question qui est soulevée par le
député de Saint-Laurent, à savoir le droit qui pourrait
éventuellement appartenir à l'individu, par rapport à ce
que le ministre a affirmé, qu'un grief se devait d'être une
propriété collective de l'association...
M. Johnson: Non, même pas le droit de grief, le droit de
porter un grief à l'arbitrage.
M. Pagé: C'est ça.
M. Johnson: C'est très différent.
J'ai peut-être fait un lapsus, dans l'exposé
préliminaire, mais cela a toujours été clair dans mon
esprit.
M. Pagé: Non, on se comprend, on est sur la même
longueur d'ondes et M. le Président, vous me permettrez de dire au
ministre que je veux être bref, et je vais tenter, si j'ai à citer
ses paroles, de le citer le plus exactement possible, pour que ça ne
crée pas d'ambiguïté.
L'article 88 prévoit tous les mécanismes d'arbitrage des
griefs. Pas de problème. Vous avez présenté des
amendements qui améliorent le projet tel que déposé, qui
visent somme toute à peut-être alléger la procédure
le plus possible d'une part, et faire en sorte, d'autre part, que les
droits auxquels une partie peut prétendre, en vertu de la
convention, puissent vraiment être exercés, qu'on puisse avoir ce
qu'on est en droit de s'attendre de la convention; c'est parfait, c'est bien.
D'ailleurs c'est pour ça, l'arbitrage des griefs.
Mais, M. le Président, je me devrai de porter à
l'attention du ministre... On a parlé, tout à l'heure,
d'exemples, on en a donné et on a surtout fait référence
à des associations accréditées qui ont bien des membres et
qui, par le fait même, ont peut-être plus de moyens financiers.
Mais, M. le Président, il faut quand même constater que ce ne sont
pas toutes les associations accréditées au Québec qui ont
bien des membres et qui ont, par le fait même, beaucoup de moyens
financiers à leur disposition. Ce qu'on soulève... Je serais
curieux de savoir du ministre combien il y a d'associations
accréditées, au Québec, qui, actuellement, ont moins de 50
membres?
M. Johnson: A l'oeil, je dirais sans doute plus du quart,
peut-être même près de la moitié.
M. Pagé: Cela peut aller jusqu'à 35% ou 40%. Je me
dis, M. le Président, comme avocat, comme législateur, que c'est
très bien, il n'y a pas de problème, c'est parfait. Mais il faut
toujours regarder une loi qu'on adopte dans la perspective d'une application
éventuelle et ce qu'on constatele député de
Joliette-Montcalm pourra me le confirmer éventuellement c'est
que, la procédure, telle qu'on la connaît... Le
député de Sainte-Marie nous disait, tout à l'heure, qu'il
y a beaucoup d'éventuels griefs qui ne sont pas plaidés à
cause de la procédure inhérente qui est prévue dans le
code.
C'est là le problème qu'on soulève. On voit souvent
je n'ai peut-être pas l'expérience de négociation ou
d'avoir participé dans le milieu, dans des associations
accréditées où il y a beaucoup de membres, mais mon
expérience, je l'ai eue avec des associations accréditées
de 25, 30, 40 membres, et je dois vous dire que la procédure de grief
qui est là, c'est beau, c'est bien, mais avant de s'en servir, M. le
Président, ça fait réfléchir. Il y a des droits qui
se perdent parce que la procédure est trop lourde ou,
éventuellement, trop coûteuse, si elle va jusqu'au bout. Le
député de Joliette-Montcalm nous donnait, tout à l'heure,
l'exemple d'un syndicat qui se relève d'une grève qui a
été assez longue, assez onéreuse, et qui se doit de
choisir les points sur lesquels il tablera ou il revendiquera
éventuellement.
Cela remet en cause le principe qu'on aura échangé et
qu'on aura probablement à débattre suite à des amendements
qu'on formulera tantôt. Mais une chose est certaine, c'est que moi j'ai
vu, et souvent, des associations accréditées ne pas amorcer une
procédure d'arbitrage parce qu'elle n'avait tout simplement pas les
moyens, d'une part. Là, je ne ramène pas le débat à
l'intérieur du syndicat à savoir quelles sont les
priorités qu'on donne dans les choses à alléguer. On n'en
a pas et on n'a pas les moyens pendant un an. Cela, on l'a déjà
vu. Ou encore, M. le Président, il y a l'autre aspect. Vous savez, un
projet de loi comme celui- là doit viser essentiellement, et c'est cela
le rôle du législateur, à faire en sorte que la loi soit
telle qu'il y ait le moins de problèmes possible. Mais, comme je le
disais tantôt, il faut toujours l'envisager dans la perspective de son
application. Qu'on regarde l'effet pour l'employeur dans certains cas. J'ai
déjà vu une convention collective, c'était une association
de 25 employés et, pendant les négociations, les intentions et
l'interprétation des articles se définissaient.
Somme toute, c'est un peu comme l'intention du législateur qui se
définit à un moment donné et on aura à vivre avec
une loi par la suite. Là, bien souvent, c'est différent. On se
demande ce qu'on a voulu dire avec tout cela. J'ai déjà vu des
cas où les employeurs ont dit oui à des choses qu'ils avaient
refusées dans le cadre de la négociation et s'ils ont dit oui par
la suite, c'est strictement qu'ils savaient qu'une procédure de grief
s'en venait éventuellement. On voit cela souvent. Autant on peut voir
souvent une association qui va dire: On n'a pas les moyens d'amorcer cette
procédure sans trop connaître son échéance, autant
on peut voir des employeurs qui diront ou qui se feront dire: Ecoutez, si vous
ne nous le donnez pas, on va amorcer la procédure d'arbitrage, on va
éventuellement gagner, on a suffisamment de motifs pour gagner. Si on
gagne, cela va vous coûter X milliers de dollars. Bien souvent,
l'employeur va dire: Bien écoutez, j'aime autant les donner plutôt
que d'avoir à me soumettre à une procédure qui sera
longue, qui sera coûteuse et où j'aurais à me faire
représenter.
M. Jolivet: Est-ce que je pourrais poser une question? C'est
parce que je vous suis mal.
M. Pagé: Oui. Comment cela?
M. Jolivet: Vous parlez de grief, et tout à coup, vous
parlez de mésentente. Ce n'est pas pareil. Au sens d'une convention
collective, un grief c'est individuel, et une mésentente, c'est une
mésentente sur le contenu de la convention collective. C'est ce que vous
dites. Ce n'est pas pareil.
M. Pagé: Ce que je veux dire... On ne s'enfar-gera pas
dans les termes.
M. Jolivet: Ah non, non, c'est important. Moi je vous
parle...
M. Pagé: Ce que je veux essentiellement... Ecoutez,
voulez-vous qu'on prenne les dix dernières minutes pour se donner
supposément des cours de part et d'autre. On sait ce qu'on pense.
M. Godin: II perd son ronron. M. le Président, il perd son
ronron.
M. Jolivet: Non. Je suis une personne qui vient d'un milieu
où on a eu à négocier, à discuter des griefs et
à faire des arbitrages.
M. Pagé: Ce que je veux dire, essentiellement, c'est ceci:
quand une association d'enseignants
amorce une procédure, elle a sûrement plus de moyens
à sa disposition qu'une association accréditée de 15 ou 20
travailleurs. Le problème est là. Je pense que la
procédure qui est prévue à l'article 88, elle est bien,
vous avez des amendements qui visent à bonifier tout ça; je ne
veux pas reprendre tout le débat. On se comprend bien.
Ce que je voudrais demander au ministre... Je vais vous dire bien
humblement, des solutions je n'en ai pas plus que d'autres. Croyez-vous
qu'éventuellement, le législateur sera en mesure d'assurer, par
des amendements qu'il pourra apporter au projet de loi 45 ou dans d'autres lois
éventuellement, d'éviter des situations comme celles-là
où, par exemple, une association, parce qu'elle n'a pas de moyens
financiers, n'ira pas plus loin ou encore, un employeur, parce qu'il y a la
possibilité que ça lui coûtera $2000 ou $3000 de
procédure et tout ça, préfère ne pas plaider son
droit; il préfère plutôt dire oui tout de suite.
C'est ça ma remarque, mon commentaire.
M. Johnson: M. le Président, le député de
Portneuf, en fait, me posait une question.
M. Pagé: Oui.
M. Johnson: D'abord, je pense que l'intervention du
député de Laviolette a bien criconscrit le sens du débat,
et les interventions qui ont précédé aussi, quant à
la notion de grief par rapport au droit de porter le grief en arbitrage.
Deuxièmement, écoutez, ça fait partie de la vie.
M. Pagé: C'est pour ça qu'on demande de le
modifier.
M. Johnson: Non, vous savez qu'il y a des associations plus
fortes que d'autres. Dans le fond, ce que semble suggérer le
député de Portneuf, c'est qu'il faudrait que l'Etat finance,
pense à une formule qui permettrait à une petite association
accréditée de pouvoir, disons, porter un grief en arbitrage.
Disons qu'il y a huit gars dans une unité accréditée,
c'est un syndicat qui n'est affilié à aucune centrale; donc, il
n'a pas de sources de revenus qui peuvent lui venir en aide, parce que
ça se fait couramment, soit dit en passant, que la centrale finance, en
partie, l'unité locale.
M. Pagé: Cela ne se fait pas tout le temps.
M. Johnson: Cela ne se fait pas tout le temps. Pourquoi est-ce
qu'on obligerait ces unités? Cela fait partie de la vie. Je veux dire,
dans la société, il y a des gens mieux équipés que
d'autres. Ce que la loi doit faire, ce n'est pas...
M. Pagé: Ce que vous dites, c'est qu'il y a des gros et
des petits.
M. Johnson: Ce que la loi doit faire...
M. Pagé: C'est ça que vous dites, bien oui, c est
ça que vous dites.
M. Johnson: II ne faudrait pas charrier, là.
M. Pagé: Je ne veux pas charrier, c'est ce que vous
dites.
M. Johnson: Ce que la loi doit faire...
M. Pagé: Le problème que j'ai voulu faire
ressortir...
M. Johnson: ... ce n'est pas d'instaurer l'égalité
de fait de tous, mais elle doit permettre, au maximum, les possibilités
d'égalité. Maintenant, écoutez, je pourrais poser le
problème de la même façon; les gens qui vont acheter un
télécouleur ou même un téléviseur en noir et
blanc à $125, comme ça se vend maintenant, qui ont de la
difficulté avec cet appareil et qui veulent réclamer en vertu des
nouveaux amendements au Code civil, etc., les lois concernant la protection du
consommateur. Le recours est plus difficile pour un gars qui fait $125 net par
semaine que pour un gars qui en fait $600 par semaine; c'est
évident.
Finalement, ce à quoi réfère le
député de Portneuf, M. le Président, si vous me le
permettez, c'est toute une conception, non seulement une conception de la
société, mais une analyse de ce qui se passe dans cette
société.
Sur ces mots, M. le Président, je vais demander la suspension de
nos travaux jusqu'à vingt heures.
M. Goulet: M. le Président, sur la suspension des
débats. Il est déjà arrivé ici ce n'est pas
une coutume mais au lieu de reprendre les débats de 20 heures
à minuit, que nous siégions, par exemple, que nous continuions
à siéger jusqu'à 20 heures ou 20 h 30. Je fais tout
simplement la suggestion, c'est... M. le Président...
M. Johnson: Je comprends.
M. Goulet:... je veux dire au ministre que c'est le même
temps...
Une Voix: C'est ministériel.
M. Goulet: Mais au lieu de suspendre pour deux heures...
M. Johnson: En fait, techniquement, on continuerait
jusqu'à, on pourrait continuer jusqu'à 22 heures, ce soir...
M. Goulet:... c'est de faire notre temps, mais...
M. Johnson: ... sans arrêter que vous voulez dire?
M. Goulet: Ou encore peut-être prendre une demi-heure. Je
ne faisais que la suggestion. Ou encore prendre une demi-heure et terminer
à...
M. Johnson: Reprendre immédiatement.
Le Président (M. Marcoux): La suggestion du
député de Bellechasse à l'effet que nous continuions nos
travaux...
M. Goulet: Ce n'est peut-être pas conforme, M. le
Président, aux règlements et aux motions...
Le Président (M. Marcoux): Non, non, c'est normal. C'est
le moment pour le faire. Je sais que vous n'avez pas fait de motion; vous avez
parlé de suggestion...
M. Goulet: C'est parce que cela n'aide pas.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que la suggestion est
retenue?
M. Johnson: Est-ce que le député de Saint-Laurent
recevrait cette suggestion?
M. Forget: Je ne suis pas très favorable à la
suggestion.
M. Johnson: Alors, M. le Président, je vais demander la
suspension de nos travaux jusqu'à 20 heures.
Le Président (M. Marcoux): Alors, la séance est
suspendue jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 heures)
Reprise de la séance à 20 h 13
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, messieurs
La commission du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration
reprend ses travaux sur le projet de loi 45. Nous en étions à
l'article 46.
M. Pagé: M. le Président, le ministre était
à répondre à une question que je lui avais posée.
Il était à nous donner son cours sur la distinction entre le gros
et le petit.
M. Johnson: M. le Président, je pense que j'avais à
peu près terminé mes considérations qui sont finalement
des généralités. J'en reviens au fait que, finalement, les
préoccupations du député de Portneuf découlent du
fait qu'il constate, comme s'il venait de le découvrir, que dans la
société, de façon générale, il y a des
inégalités. Je pense qu'on en est tous très conscients et
que c'est vrai pour les groupes, les uns face aux autres. C'est vrai pour une
PME face à une multinationale; c'est vrai pour un syndicat de huit
membres, par rapport à un syndicat qui en a 3000. Cela fait partie de la
réalité quotidienne. Il faut évidemment encourager la
syndicalisation et le minimum de...
M. Pagé: Pour les fins du journal des Débats, je
crois que le ministre a le sourire.
M. Johnson: ... tracasseries pour les petites unités.
Le Président (M. Marcoux): Et de un.
M. Forget: Oui, et de un, M. le Président, en effet.
Le premier amendement, comme il se doit, est un amendement qui vise
à restaurer un mot dans le texte du premier alinéa du paragraphe
88 de l'article 46. La motion d'amendement se lit donc ainsi: Que le premier
alinéa du paragraphe 88 de l'article 46 soit modifié, en
remplaçant dans la troisième ligne, les mots "l'association
accréditée et l'employeur" par les mots "les parties ".
L'alinéa amendé se lirait comme suit: "Tout grief doit
être soumis à l'arbitrage " en la matière "en la
manière oui il y a une faute ici prévue dans la
convention collective si les parties y donnent suite. Sinon il est
déféré à un arbitre choisi par l'association
accréditée et l'employeur ou, à défaut d'accord,
nommé par le ministre."
M. le Président...
M. Johnson: M. le Président, sur la recevabilité,
si vous permettez, rapidement je pense que ce sera la seule intervention
que nous ferons probablement sur la recevabilité par son
amendement, le député de Saint-Laurent introduit une notion que
nous avons longuement débattue lors des considérations
générales sur l'ensemble de l'article 46. Mais en fait,
l'introduction de son amendement restaure exactement le texte original du Code
du travail.
Or, l'objet du projet de loi 45 à l'article 46, c'est de
remplacer effectivement "les parties" par "l'association
accréditée". Cela va carrément à l'en- contre de
l'objet du projet de loi 45, à ce niveau-là. Ce qui
n'empêche pas qu'au niveau du fond, je pense que nous pourrions le
débattre, mais étant donné que nous l'avions
débattu, je me permets de soulever la recevabilité.
M. Forget: M. le Président, excusez-moi, je pensais
que vous disiez quelque chose sur la recevabilité, il reste que
lorsque je regarde l'article 88 actuel, je vois que l'amendement que le
ministre apporte ne comporte pas simplement le remplacement des mots en
question. Il comporte l'addition de trois alinéas qui sont les trois
alinéas qui prévoient que l'arbitre nommé par le ministre
est choisi sur la liste prévue; que l'expression tribunal d'arbitrage
comprend un arbitre unique; et que les dispositions de la présente
section prévalent en cas d'incompatibilité sur les dispositions
de toute convention collective.
Donc, il n'est pas clair que le but de l'article 46 soit de simplement
changer des mots. Il est beaucoup plus vaste que cela. Et, relativement aux
autres objets, le remplacement de ces mots est décidément
secondaire, puisqu'il s'agit d'une variation dans l'expression qu'on utilise
beaucoup plus que d'une modification du processus lui-même de grief et de
l'arbitrage. C'est quelque chose qui est essentiellement secondaire et d'autre
part, l'amendement que nous présentons ne modifie pas seulement de cette
manière puisqu'il y a d'autres dispositions de l'alinéa de
l'article qui sont modifiées par l'amendement.
Pour ces raisons, je ne vois pas pourquoi on devrait se tenir sur un
légalisme trop strict. Il est vrai que de façon
générale, nous avons déjà fait allusion à
cette question. Mais nous n'en avons pas débattu de façon
spécifique puisqu'on s'est étendu sur des considérations
philosophiques y compris la distinction entre les gros et les petits.
Mais il s'agit de revenir strictement à une question de texte
plutôt qu'à des questions philosophiques, et il me semble qu'on
devrait dans l'esprit permettre la discussion la plus large possible de ce
projet de loi, accepter que cet amendement soit recevable, et le ministre sera
toujours libre, bien sûr, d'en disposer comme bon lui semblera, et la
commission également, mais je ne vois pas que nous nous placions ici
devant vraiment le problème de rendre l'effet du projet de loi
inopérant quant à une disposition essentielle.
Le Président (M. Marcoux): Sur la recevabilité.
M. Chevrette: M. le Président, l'objet même de
l'article 88, si nous n'avions pas le premier paragraphe, les autres ne
pourraient plus exister, puisque ce sont tout simplement des modalités.
L'amendement apporté par le projet de loi no 45 vise à remplacer
le mot "partie ", si vous lisez l'article 88, et je vais vous le lire pour
votre bénéfice: "Tout grief doit être soumis à
l'arbitrage en la manière prévue dans la convention collective,
si elle y pourvoit, et si les parties y donnent suite; sinon, elle est
déférée à un arbitre choisi par la partie, ou,
à défaut d'accord, nommé par le ministre ".
Vous remarquerez, dans l'article 46 du projet de loi 45: "Tout grief
doit être soumis à l'arbitrage en la manière prévue
à la convention collective, si elle y pourvoit, et si l'occasion
accréditée et l'employeur y donnent suite".
C'est là qu'est l'objet même: "et si l'association
accréditée et l'employeur y donnent suite", au lieu des parties,
pour bien démontrer que cela exclut le salarié. C'est l'objectif
fondamental, c'est l'objet même de la proposition d'amendement, pour
ainsi dire, par le projet de loi 45, au Code lui-même; en revenant, on
détruit automatiquement l'essence même.
M. Forget: II faudrait que le député de Bellechasse
écoute le député de Joliette-Montcalm, parce que je crois
que ce dernier est en train de répondre à une interrogation que
se posait le député de Bellechasse.
Je m'excuse, mais c'est de façon lapidaire la réponse
à une question que je sais que le député de Bellechasse se
posait. Je m'excuse de cette intervention, mais je sais que...
M. Bisaillon: C'est de la conciliation volontaire?
M. Goulet: Je remercie le député de Saint-Laurent.
Je lui avais posé une question, parce que le mot "partie " ne veut pas
dire la même chose pour tout le monde, et je voulais savoir comment il le
voyait et j'aurais posé la question au ministre, pour savoir comment il
le voyait.
M. Johnson: Ce n'est pas tellement la question de savoir comment
on le voit, ni comment cela a été interprété
finalement. L'interprétation, par la jurisprudence, c'est que les
parties... cela permet aux salariés effectivement... Alors l'objet, pour
être conséquent avec 19, qu'on a adopté, où on a
référé à la notion de propriété
collective du grief, il est bien évident que l'amendement que nous
apportons au Code du travail, par le projet de loi 45 on peut ne pas
être d'accord, je comprends ça c'est de dire que, à
toutes fins pratiques, le salarié est exclu, c'est l'association
accréditée.
D'autre part il y a eu une exception de prévue à 19b,
comme on l'a vu dans le cadre du "duty of fair representation". Or, le projet
de sous-amendement du député de Saint-Laurent est à
l'effet de restaurer la formule originale du Code du travail, qui
prévoit que "les parties ", ça inclut donc le salarié, en
vertu de la jurisprudence, et c'est, à mes yeux, M. le Président,
un amendement qui est irrecevable pour ces raisons.
M. Goulet: Je ne sais pas si c'est dans l'ordre, M. le
Président, vous m'excuserez d'aller plus loin, mais c'est pour le bien
de la question.
A l'article 88e, on dit qu'on donne aux par-
ties... "Le tribunal d'arbitrage doit donner aux parties
intéressées l'occasion d'être entendues." J'imagine que
c'est si le conseil arbitral a jugé ou que l'association a
décidé que le grief serait dé-battable. Vous me suivez? Si
le grief est rendu là-bas, mais s'il n'est pas rendu, c'est sur cela que
nous nous battons, ça veut dire que, au niveau de 88, le grief a
été arrêté, il ne s'est pas rendu; les
minorités dont vous parliez tantôt, vous disiez: On sait qu'elles
existent. S'il peut se faire entendre à 88e, il a été
jugé recevable et par l'association et...
M. Johnson: Oui, mais si le député de
Bellechasse me le permet les parties qu'on vise à 88e, ce sont
toutes les parties qui peuvent être impliquées dans le litige; or,
en pratique et c'est de là qu'est venue la précision dans
les modifications qu'on a apportées au projet de loi 45, après de
longues discussions que j'ai eues avec les représentants de la
conférence des arbitres, ce que les arbitres font, c'est que, quand un
grief touche une personne en particulier, maintenant qu'on donne le droit de
propriété collectif au recours à l'arbitrage pour le
grief, de toute façon, les arbitres vont faire venir la personne ou les
personnes qu'ils jugent utiles. Dans la pratique, ils ont commencé
à le faire et, deuxièmement, étant donné la
série de modifications qu'on apporte à 88, on leur donne vraiment
un pouvoir spécifique de le faire. Cela n'empêche donc pas qu'un
recours ne peut pas être logé par l'individu, il ne peut
être logé que par l'association accréditée, c'est
l'objet de notre amendement. Or, ce que veut faire le député de
Saint-Laurent, par son amendement, c'est de restaurer l'ancienne formule, avec
la notion des parties.
La jurisprudence n'a pas été unanime là-dessus, il
y a de la confusion dans la jurisprudence du Travail, quant à la
signification du mot "partie", et on a permis à des salariés de
porter directement leur grief en arbitrage dans une certaine jurisprudence. Ce
qu'on veut faire, nous, c'est écarter cela; donc, restaurer l'ancien
principe, c'est carrément aller à l'encontre de l'objet de
l'article du projet de loi 45. Donc, à mes yeux, M. le Président,
c'est irrecevable.
M. Chevrette: Je voudrais ajouter quelque chose, M. le
Président, parce que, depuis le début, il y a une chose qui
m'intrigue et qui m'agace à la fois, je veux dire que cela m'agace, non
dans le sens que cela me fatigue... Je remarque que toute la thèse qui
est sous-tendue par les amendements du Parti libéral, de l'Opposition
officielle, est toujours une thèse axée sur la défense du
droit individuel; jamais de rapports collectifs, ou à peu près
pas. Je m'excuse, cela a de l'importance...
Le Président (M. Marcoux): Sur la recevabilité.
M. Chevrette: Sur la recevabilité. Le Code du travail...
Et le député de Portneuf, qui est un homme de droit, va m'appuyer
là-dessus...
Une Voix: Droit.
M. Chevrette: ... de droit. J'ai dit de droit. Le reste, ce n'est
pas à moi à en juger. C'est personnel.
M. Pagé: Cela dépend du sens.
M. Chevrette: Ce que je veux ajouter est ceci. Le droit au
travail, comme tel, doit faire partie du cadre des lois de travail, mais les
rapports, les normes sont des normes qui régissent les rapports
collectifs tout en assurant un droit au travail, mais ce droit ne doit pas
primer les normes ou les droits qu'on accorde à la collectivité;
sinon, aussi bien ne pas avoir de Code du travail, s'il relègue cela au
contrat individuel. L'amendement est très clair là-dessus. Je
pense qu'on l'a expliqué avant le souper et je le répète,
brièvement en tout cas; je pense que l'individu a un droit strict de
déposer un grief, mais c'est subordonné à la
décision de la collectivité en ce qui regarde l'arbitrage,
à cause de l'importance face à la retombée positive ou
négative du règlement d'un grief.
M. Johnson: M. le Président, vous considérez-vous
suffisamment informé?
M. Forget: M. le Président, comme le député
de Joliette-Montcalm a fait un aparté philosophique, je pense que je
devrais avoir la permission de faire...
M. Laplante: ... une analyse de votre congrès
d'orientation.
M. Forget: Oui, oui; ce n'est pas une analyse qui est
entièrement fausses; au contraire, elle a beaucoup de fondement. Mais,
essentiellement, il faut faire attention de ne pas caricaturer des positions en
présentant une position qui est beaucoup plus formelle et
théorique, entre les droits individuels et les droits collectifs, que
c'est le cas dans la réalité des choses.
M. Johnson: M. le Président, si vous me permettez, je
pense que le député de Saint-Laurent est sur le fond, en ce
moment, il n'est pas sur la recevabilité.
M. Chevrette: Comme je l'étais.
M. Johnson: Comme le député de Joliette-Montcalm,
je pense.
M. Forget: Comme j'ai dit que je ne m étais pas
opposé, on nous passerait probablement la même tolérance
qu'au député de Joliette-Montcalm.
M. Jonhson: Pour trente secondes?
M. Forget: Oui, pour une minute et demie ou deux, comme le
député de Joliette-Montcalm l'avait fait.
M. le Président, très brièvement, cette question de
défense des droits individuels ne peut pas être
complètement évincée du Code du travail.
Parce que dans le fond, quand on veut défendre les travailleurs,
on ne veut pas défendre seulement la notion de travailleurs ou une
espèce d'abstraction qu'est la condition ouvrière, on veut
défendre les travailleurs concrets en chair et en os; ce sont des
individus. Il se peut qu'ils partagent certains attributs en commun tels que
d'être des salariés. Il est très important de pouvoir les
défendre comme individus. Finalement, c'est la raison d'être du
syndicat: de se regrouper pour défendre des individus qui ont des
attributs communs.
Quand il se pose un problème entre un individu et un groupe, par
opposition à entre un individu et un employeur qui peut lui aussi
être un groupe, dans le fond, parce que souvent, l'employeur est une
personne morale. Il se pose les mêmes problèmes
d'équité, dans le fond, dans l'un et dans l'autre cas. Le Code du
travail ne peut pas ignorer les problèmes qui se posent entre
l'individu-travailleur et la collectivité des travailleurs, pas plus
qu'il peut ignorer le problème de relations entre l'individu-travailleur
et la collectivité qui est souvent aussi, dans le fond, l'employeur,
puisque ça peut être un organisme public, une
société a but lucratif, mais où les actionnaires sont plus
nombreux que les employés.
Donc, il y a des rapports collectifs, mais derrière cela, il y a
des droits individuels du travailleur, et quand on parle d'arbitrage, on parle
d'arbitrage d'un grief entre un travailleur et son employeur. Mais qui va
attribuer les relations entre un travailleur et le groupe qui est censé
le représenter, mais qui ne le représente pas toujours? On ne
demande pas que le syndicat soit toujours forcé de prendre fait et cause
pour chacun de ses membres. Ce qu'on dit, c'est qu'on ne devrait pas
créer une structure au nom des intérêts collectifs qui
éliminent les possibilités de recours individuels par d'autres
moyens peut-être, mais certainement pas d'éliminer le droit de
recours individuel qui demeure, malgré tout, la propriété
inaliénable de l'individu.
Peut-être que parfois, il ne pourra pas se faire défendre
par son groupe, mais au moins pourrait-il se défendre seul. Le Code du
travail va plus loin que son objectif réel lorsqu'il prive l'individu de
tout moyen de défense, même s'il veut lui se défendre tout
seul, à défaut d'autres moyens. Là-dessus, M. le
Président, je me tais.
Le Président (M. Marcoux): Compte tenu...
M. Forget: Cela commençait à vous ébranler,
n'est-ce pas?
M. Godin: Ne désespérez pas surtout.
M. Forget: Ah non!
M. Godin: Cela peut être long.
Le Président (M. Marcoux): II m'apparaît que
l'amendement proposé, plutôt que d'être une proposition qui
vise à préciser ou à limiter, ou à délimiter
les agents en cause veut élargir la définition de "parties" ou
des gens en présence. En ce sens- là, il apparaît
davantage, par rapport à l'objet de l'article lui-même, comme une
contre-proposition plutôt qu'une proposition visant à exclure ou
à préciser un groupe qui serait défini de façon
générale. En ce sens-là, je pense que votre amendement est
plutôt une contre-proposition qu'une proposition d'amendement.
M. Johnson: Donc, il est irrecevable.
Le Président (M. Marcoux): Dans le sens que je juge,
l'amendement irrecevable.
M. Johnson: M. le Président, on est à l'article
88?
Des Voix: C'est cela.
M. Johnson: Est-ce qu'on passe à l'article 88a?
M. Forget: Non, M. le Président. Nous sommes toujours
à l'article 88 et j'aimerais présenter un amendement au premier
alinéa du paragraphe 88...
M. Laplante: Vous n'aviez pas tout dit?
M. Forget: ... Non, je n'avais pas tout dit. J'aborde un sujet
entièrement nouveau et je le fais, M. le Président, à la
suite de mémoires, de représentations qui ont été
faites et dont le ministre ne semble pas avoir tenu compte. Je vais lire tout
de suite l'amendement. J'irai plus tard aux raisons: "Que le premier
alinéa du paragraphe 88 de l'article 46 soit modifié en ajoutant
dans la première ligne, après le mot "grief", les mots "relatif
à l'interprétation, l'application ou la violation d'une
convention collective". L'alinéa amendé se lirait comme suit:
"Tout grief relatif à l'interprétation, l'application ou la
violation d'une convention collective doit être soumis à
l'arbitrage en la manière prévue par la convention si elle y
pourvoit et si l'association accréditée et l'employeur y donnent
suite, sinon il est déféré à un arbitre choisi par
l'association accréditée, l'employeur ou à défaut
d'accord, nommé par le ministre ".
La raison de ceci, M. le Président, se retrouve dans le
mémoire de la conférence des arbitres où on fait allusion
à cette difficulté qui a été soulignée dans
la jurisprudence. Je me permets de lire un extrait de ce mémoire...
M. Bisaillon: Question de règlement. Je voudrais avant de
faire ma question de règlement, poser une question au
député de Saint-Laurent pour savoir si j'ai bien compris ce qu'il
changeait. Est-ce que je trompe en disant que ce que vous ajoutez, ce sont les
mots "relatif à l'interprétation, l'application ou la violation
d'une convention collective"? Est-ce uniquement cela?
M. Forget: Uniquement cela.
M. Bisaillon: Sur la question de règlement, je
prétends que cela va à l'encontre de la définition
même de "grief". "Grief" est défini, dans le Code du
travail, actuellement, à l'article 1g, au tout début. Je ne vois
pas ce que cela ajoute. Violation, c'est autre chose.
M. Forget: Je pense que sur la recevabilité... Une
Voix: Ce n'est pas sur la recevabilité. M. Forget: C'est
seulement une question.
M. Johnson: C'est seulement une question, d'après ce que
j'ai compris... Je n'ai pas contesté la recevabilité, j'ai
seulement dit que, d'après moi, ce qui était là
était inutile, puisque "grief" était déjà
défini dans le Code du travail.
M. Forget: Ah bon! Il semble qu'il y ait des difficultés
d'interprétation de cela ou des difficultés d'application que la
jurisprudence et que la Conférence des arbitres a soulignées dans
son mémoire. C'est de cela que je m'inspire, M. le Président,
pour poser la question au ministre, de façon formelle, à savoir
si...
M. Johnson: Pour quelle raison?
M. Forget: Pour quelle raison, effectivement, mais si vous me
permettez, je vais lire, en premier lieu, pour l'information des membres de la
commission, parce que je pense que c'est peut-être un peu
mystérieux, le paragraphe très court dans le mémoire de la
Conférence des arbitres. On parle, à la page 18, de l'aire
juridictionnelle. On dit: "A ce sujet, la conférence estime
nécessaire de mettre en relief cinq problèmes; Le premier, c'est
le grief en tant que mésentente relative à la violation de la
convention collective. L'arbitre des griefs au Québec n'a
compétence que sur les mésententes relatives à
l'interprétation et à l'application des conventions collectives.
En raison de cette définition du grief, l'arbitre
québécois n'aurait pas compétence selon une tendance
jurispru-dentielle. Sur les cas de prétendues violations de la
convention collective, comme par exemple les cas de réclamation en
dommages-intérêts à la suite d'une grève
illégale. C'est du moins la position jurisprudentielle qui s'est
inscrite dans le courant de l'affaire Bédard-Girard. Par contre une
autre tendance juridprudentielle, s'autorisant de l'affaire Polymer, a fait
droit à de telles réclamations lorsque les conventions
collectives définissaient les griefs en y comprenant les violations de
la convention collective. Pourtant l'affaire Polymer ne relevait pas du droit
québécois. "Bien sûr, comme on le sait, cela relevait du
droit fédéral. "En tout état de cause la jurisprudence
québécoise est de plus en plus ambiguë sur le sujet. Aux
fins de clarifier la situation, la Conférence des arbitres croit qu'il
serait approprié que le législateur québécois
élargisse la définition du grief pour la mouler sur celle du
législateur canadien, etc. Recommandation no 12: Que l'article 1g
ce n'est plus cela à cause des modifications soit modifié
et qu'on y ajoute la mésentente en violation de la convention
collective".
M. Johnson: Oui, d'accord.
M. Forget: Je pense que cela résume assez bien ce qui
m'amène à présenter cette motion.
M. Johnson: J'ai effectivement une réponse à cela.
En fait, le député de Saint-Laurent aurait raison de vouloir
donner suite aux demandes de la Conférence des arbitres qu'on retrouve
également dans le mémoire de Me Barré que je lui ai fait
parvenir, et c'est vrai que la jurisprudence au Québec est confuse quant
à savoir si la violation de la convention collective fait partie ou non
du grief. Or, le juge Pigeon, au nom d'un banc de neuf juges de la Cour
suprême, dans le cas de General Motors of Canada contre Pierre Brunet et
autres, daté du 2 novembre 1976, mais publié en 1977, tout
récemment, dit ce qui suit donc c'est la Cour suprême qui
se prononce de façon finale sur la question : Va-t-on
prétendre que sous le Code fédéral, il faut exclure la
portée de cette disposition, etc.
A mon avis, on ne saurait établir une distinction entre un
différend relatif à l'application d'une convention collective et
un différend relatif à sa violation parce qu'il s'agit simplement
de deux façons d'envisager le même problème. Il ne peut pas
être question de violation de la convention collective si elle est sans
application. En d'autres termes, c'est pour une raison fondamentalement
technique sur le plan juridique, la Cour suprême s'est prononcée
pour dire que dorénavant la notion de violation est comprise dans la
notion d application de la convention collective. Donc, cela ne pose plus de
problème.
J'admets avec le député de Saint-Laurent qu avant ce
jugement il aurait probablement fallu effectivement amender le Code du travail.
Maintenant, ce n'est plus nécessaire. C'est très clair, le
jugement est final. Ce n'est même pas un obiter dictum. C'est dans le
jugement.
M. Forget: Pour être bien sûr que je comprends la
citation que vient de faire le ministre... le juge Pigeon dit: Si une
convention collective est sans application, il ne saurait être question
qu'il y ait une violation.
M. Johnson: Non, c'est-à-dire, ce n est pas tout à
fait ce qu'il dit. Il ne saurait pas être question de violation de la
convention collective si elle est sans application.
M. Forget: D'accord. C'est ce que je voulais citer.
M. Johnson: C'est dans le sens contraire.
M. Forget: A ce moment-là, la question qui se pose est
que, si elle n'est pas sans application, donc, si elle a une application
et là il faudrait que j'aie lu tout le dossier pour vraiment pouvoir
répondre à la question; peut-être le ministre
l'a-t-il fait? mais s'il y a une convention collective qui trouve son
application dans une affaire en litige, parce que c'est toujours relatif
à une affaire en litige qu'un jugement est porté, est-ce
qu'à ce moment l'inverse du jugement est vrai? Parce que c'est
très facile de dire: La convention collective ne s'applique pas à
ce litige. Elle ne dit rien. Elle est silencieuse. Il ne saurait être
question de violation d'une convention collective qui n'a pas d'application au
cas en litige. Mais cela n'a pas d'infé-rence nécessaire dans le
cas contraire.
M. Johnson: Un peu plus loin dans le jugement du juge Pigeon, on
trouve que "le litige découlait d'une sentence arbitrale tenant lieu de
convention collective. On ne s'entendait pas sur l'interprétation de
cette sentence et sur son application rétroactive. Je ne vois pas
comment on a pu statuer qu'il ne s'agissait pas d'une mésentente
relative à l'interprétation ou à l'application d'une
convention collective quand je lis les motifs", etc. Donc, pour lui, ce n'est
pas un problème. C'est que, si on invoque violation, c'est
nécessairement sur la base du problème d'une mésentente
quant à l'application. Et la base de ceci constitue le grief. Je pense
que dorénavant, étant donné que le jugement de la Cour
suprême est publié depuis, je pense que cela fait trois mois
à quatre mois au maximum, donc, avant, sans doute, que les...
M. Forget: C'est une très bonne explication et je pense
que c'est utile d'avoir cette mise au point au journal des Débats. Donc,
je retiens mon amendement, M. le Président. Quoique c'est beaucoup plus
long de faire cela ainsi, de toute façon, ni plus court d'ailleurs.
Une Voix: Deux zéros, recherchistes.
M. Forget: Donc, à défaut de cet amendement, M. le
Président, j'en ai un autre, cependant. Ils ont d'ailleurs pu en trouver
un autre.
M. Johnson: Vous allez en trouver un autre?
M. Forget: Peut-être y a-t-il ici aussi une explication
miracle.
M. Johnson: Pour les fins de la commission, l'amendement du
député de Saint-Laurent a été retiré tout
simplement.
M. Godin: Est-ce que le suivant est semblable? Est-ce que le
suivant est destiné uniquement au journal des Débats ou à
modifier vraiment...
M. Forget: Non, le suivant est destiné...
M. Godin: Parce que cela peut nous mener loin, cela peut nous
mener très loin.
M. Forget: Oui, c'est vrai.
M. Godin: Ce n'est pas une encyclopédie que nous faisons
ici.
M. Forget: Je ne sais pas. Il y a un professeur de droit qui m'a
dit récemment qu'il y a une tradition qui se développe dans les
mémoires préparés souvent d'ailleurs par les professeurs
de droit pour la Cour d'appel ou la Cour suprême, qui est de faire
référence maintenant au journal des Débats, et surtout aux
délibérations de la commission parlementaire qui étudie un
projet de loi article par article.
Et quand je suis passé à la faculté de droit, cela
ne se faisait pas, et maintenant c'est une pratique qui tend à
être acceptée. Je pense que quand il y a des points de droit dont
on a connaissance et qui se soulèvent, il est fort opportun d'avoir une
déclaration du ministre pour savoir qu'elle est la signification qu'il
attache au projet de loi.
M. Godin: Vous violez le règlement, mais, enfin...
M. Forget: L'autre amendement est toujours relatif au paragraphe
88 de l'article 46, et j'aimerais le lire maintenant: "Que le paragraphe 88 de
l'article 46 soit modifié, en ajoutant à la fin l'alinéa
suivant: Un grief ne peut pas être déclaré irrecevable pour
le seul motif du défaut de dépôt de la convention
collective. Toutefois, la décision arbitrale sur un tel grief ne peut
produire ces effets qu'à compter du jour auquel le dépôt de
la convention collective est effectué."
Ceci est également inspiré d'une recommandation de la
conférence des arbitres, à la page 21, et elle est
destinée, aux yeux de ce groupe, à empêcher qu'un grief ne
soit jugé prématuré.
Vous me permettrez de faire lecture également brièvement
de cette considération: "Le grief prématuré. Il est de
jurisprudence bien établie que lorsqu'un arbitre est saisi d'un grief
logé avant le dépôt de la convention collective, un tel
grief doit être jugé prématuré et partant,
irrecevable. Cette solution s'impose en raison de l'article 60 du Code du
travail. La conférence s'étonne qu'un salarié ne puisse
obtenir justice à cause du défaut de dépôt de la
convention collective, dépôt qu'il ne contrôle pas. Certains
pourront prétendre que le grief peut être repris. La solution est
loin d'être certaine, surtout lorsque des délais de prescriptions
sont en cause. D'autres rappelleront que le salarié n'a qu'à
poursuivre en responsabilités civiles son syndicat. Il ne s'agit certes
pas là d'une solution idéale. On ne leur fait pas dire, aux
arbitres. "Aussi, la conférence estime que le législateur se doit
de corriger une situation qui, à la limite, ne pénalise que le
salarié. "Aux fins de concilier l'économie de l'article 60 du
Code du travail et le droit du salarié, la conférence
suggère l'adoption d'un texte conforme à l'idée
énoncée à la recommandation qui suit: "Recommandation no
15. Qu'il soit prévu dans la loi qu'un grief ne peut pas être
déclaré irrecevable pour le seul motif du défaut de
dépôt de la convention collective, mais que la décision
arbitrale sur un tel grief ne produit ses effets que sous condition du
dépôt de la convention".
C est ce que j'ai repris presque mot à mot dans ce projet
d'amendement.
M. Johnson: M. le Président, en fait, je
référerais à l'article 40 du projet de loi. Nous l'avons
amendé afin de prévoir qu'une convention collective... Je n'ai
pas le texte devant moi...
M. Bisaillon: ... à compter du dépôt.
M. Johnson: Voilà, ce dépôt a un effet
rétroactif à la date prévue dans la convention collective,
pour son entrée en vigueur, ou, à défaut, à la date
de la signature de la convention collective. Justement, c'était pour
nous une façon de répondre à la demande, à la
préoccupation de la Conférence des arbitres à ce sujet,
puisque, en rendant ce dépôt rétroactif à la date de
la convention collective, on permet, effectivement, la reconduction, la base,
la substance à partir de laquelle on peut effectivement formuler le
grief. Je pense qu'on a atteint exactement le même objectif, sauf qu'on
l'a fait par voie d'amendement à l'article 40.
M. Forget: M. le Président, cette objection est valable
seulement dans certains cas. Si l'instance est commencée, le grief est
logé avant le dépôt. A ce moment, le conseil d'arbitrage,
le tribunal d'arbitrage ne peut décider qu'en fonction du
dépôt ou du non-dépôt. Même si on invoque,
devant lui, qu'une convention collective qui n'a pas été
déposée existe et qu'elle pourra un jour être
déposée et avoir un effet rétroactif, il reste qu'il sera
débouté de son grief, indépendamment de cette
possibilité parce que le conseil d'arbitrage ne veut pas se prononcer
sur une chose hypothétique; il faut que le dépôt soit
effectué.
M. Johnson: Cependant, la réponse à ça, M.
le Président, ce serait 88j que nous introduisons, qui prévoit
qu'une mésentente relative au maintien des conditions de travail
prévue à 47 ou à 81e doit être
déférée à l'arbitrage par l'association de
salariés intéressée comme s'il s'agissait d'un grief.
M. Forget: Oui, mais ça, c'est pour l'ancienne convention
collective, ce n'est pas pour la nouvelle.
M. Johnson: On ne peut pas faire un grief sur un contrat qui
n'est pas signé, on peut le faire seulement en vertu de l'ancien.
M. Forget: Oui, mais le contrat peut être signé sans
être déposé.
M. Chevrette: Oui, mais à 40, deuxième
paragraphe...
M. Forget: Non, s'il n'est pas déposé au moment
où le grief est logé, le grief sera rejeté parce qu'il n'a
pas déposé; le tribunal d'arbitrage ne pourra pas dire: C'est
vrai, ça peut être déposé un jour. Il est
déposé ou il n'est pas déposé. S'il n'est pas
déposé, il n'a pas d'effet. Si un jour il a un effet
rétroactif... Mais ce jour n'est pas encore venu. On est
coincé.
M. Johnson: Si vous permettez, M. le Président, en
pratique, si on peut éviter de le faire sous forme d'amendement et si
mes explications satisfont le député de Saint-Laurent... C'est
que, à ce moment-là, si on est capable d'aller en arbitrage,
c'est l'association accréditée qui va en arbitrage sur les
griefs, par définition, étant donné ce qu'on a
adopté comme principe et ce qu'on va adopter formellement... Elle peut
également déposer la convention collective, et comme l'effet est
rétroactif, en vertu de l'article 40, il n'y a plus de problème.
Evidemment, là où techniquement ça pourrait
peut-être poser un problème, c'est si l'association
accréditée a signé une convention collective, ne l'a pas
encore déposée, s'en va en arbitrage sur un grief et oublie de la
déposer. Mais on peut présumer que, si elle est capable d'aller
en arbitrage, elle est capable de déposer le texte et si elle
dépose le texte, comme il a un effet rétroactif, l'arbitrage va
devoir en tenir compte.
Alors, finalement, sur le plan pratique, je pense qu'on a pallié
cela.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, est-ce que je pourrais
d'abord poser une question au député de Saint-Laurent?
Est-ce que sur 88, le député de Saint-Laurent a d'autres
amendements?
M. Forget: Oui.
M. Bisaillon: Est-ce que je pourrais me permettre, M. le
Président, de faire une suggestion pratique...
Une Voix: ...
M. Bisaillon: Non, je m'attendais à cette réponse
là.
Est-ce que je pourrais me permettre de faire une suggestion
pratique?
Une Voix: ...
M. Bisaillon: Non, je m'attendais à cette réponse.
J'ai l'impression, quant à moi, que la formulation qui nous est
présentée ajoute effectivement quelque chose quant à la
clarté du texte, même si on prend 40 et 88. Est-ce qu'on ne
pourrait pas suspendre, pour l'instant, l'amendement présenté par
le député de Saint-Laurent et demander aux spécialistes de
regarder pour voir si cela ne peut pas être aménagé, sinon
on reviendra par la suite?
M. Forget: Je n'ai pas d'objection, M. le Président, parce
que la thèse que j'ai défendue depuis l'article 1, c'est que le
Code du travail, dans la mesure du possible, devait être facile à
lire. On a vu,
par le genre de réponses que m'a données le ministre,
réponses qui sont valables sur le plan juridique, qu'on se
promène d'un bord à l'autre pour répondre à une
question en vertu de l'article 88. Si on pouvait le dire à l'article 88,
j'applaudirais et, si cela peut permettre de le faire, je n'ai pas d'objection
à suspendre les discussions là-dessus.
M. Godin: ... redondant, par ailleurs.
Le Président (M. Marcoux): On suspend le débat sur
ce projet d'amendement.
M. Godin: Le principe mis de l'avant par le député
de Saint-Laurent impliquerait peut-être qu'à chaque article, il
faudrait répéter le code au complet.
M. Forget: Non, M. le député de Mercier, c'est que
je pense qu'on a remarqué, au cours de tous nos travaux, que le Code du
travail a été quand même un peu alambiqué, assez
souvent. Sa rédaction n'est pas aussi bonne qu'elle pourrait
l'être pour en permettre une compréhension facile et il n'est pas
difficile d'imaginer une meilleure rédaction. C'est le
problème.
M. Godin: Mais il ne faut pas tomber dans la redondance non
plus.
M. Forget: Non, ce n'est pas de la redondance. C'est
l'accessibilité des textes aux gens qui ne sont pas
diplômés en droit.
M. Godin: Cela part d'un bon naturel, mais, quand même,
j'émets des réserves.
M. Bisaillon: Chassez le naturel et il revient au galop.
M. Forget: Comme cet amendement est suspendu et comme je n'ai pas
d'autre amendement à l'article 88, j'imagine qu'on va suspendre
l'article 88 et qu'on y reviendra.
M. Johnson: Oui. M. le Président, si vous me permettez,
quant à moi, le moment de la suspension est peut-être
terminé sur la question de l'article 88. Je viens de parler à nos
juristes et cela n'a pas pris tellement de temps, c'est que...
M. Forget: C'est mauvais signe, cela.
Une Voix: Quant à ce qui peut arriver à votre
amendement, oui.
M. Johnson: La réponse... Les juristes m'affirment que
c'est cela, la réponse, et que l'inconvénient de la formulation,
finalement... Evidemment, si on n'avait pas amendé l'article 40 et si on
n'avait pas introduit l'article 88j, d'accord, ce serait une bonne façon
de le régler. Cependant, comme on a amendé l'article 40 et qu'on
a introduit l'article 88j, on pense que le problème est
réglé. La seule chose qu'il faut faire, c'est qu'il faut que
l'association accréditée, à un moment donné, avant
que le juge du tribunal d'arbitrage rende sa sentence, s'arrange pour
déposer la convention; faire autrement, même si c'est pour des
fins de clarté du texte, pourrait produire une situation où,
finalement, on permet aux gens, carrément, de procéder à
l'arbitrage sans jamais déposer la convention collective. Là,
cela pourrait amener des difficultés un peu plus considérables.
Je pense qu'on fait le tour de la question et qu'on répond, finalement,
à la préoccupation. Les juristes m'assurent que, de façon
très informelle, on a consulté certains des arbitres qui
considèrent qu'effectivement, la réponse à leur
préoccupation, on l'obtient par les articles 40 et 88j.
M. Bisaillon: Est-ce que je dois comprendre qu'à ce
moment-ci, on pourrait admettre que l'amendement est rejeté sur
division? Ou retiré?
M. Forget: Rejeté sur division.
Le Président (M. Marcoux): Rejeté sur division.
M. Johnson: Rejeté sur division. M. Godin: M. le
Président...
Le Président (M. Marcoux): Rejeté sur division. Je
vais le lire, un instant, pour que cela soit très clair. L'amendement
suivant était proposé: "Un grief ne peut être
déclaré irrecevable pour le seul motif du défaut de
dépôt de la convention collective. Toutefois, la décision
arbitrale sur un tel grief ne peut produire ses effets qu'à compter du
jour auquel le dépôt de la convention est effectué". Cet
amendement, proposé au paragraphe 88 de l'article 46, est rejeté
sur division. La parole est au député de Saint-Laurent.
M. Forget: Merci, M. le Président. Alors, 88a.
M. Johnson: On considère que la discussion sur l'article
88 est terminée?
M. Forget: Oui, quant à moi, M. le Président, elle
est terminée.
Le Président (M. Marcoux): Article 88a.
M. Forget: L'article 88a est cette disposition qui stipule
qu'aucun membre du tribunal d'arbitrage ne peut être poursuivi en justice
en raison d'actes accomplis de bonne fois dans l'exercice de ses fonctions.
J'ai un amendement là-dessus qui est inspiré par le paragraphe
suivant, que je vais lire dans le mémoire de la conférence des
arbitres. Cela s'intitule, à la page 16, L'immunité. "L'arbitre
des griefs ne dispose pas, à l'instar du juge des tribunaux de droit
commun, d'une véritable immunité judiciaire et garantie par la
loi. "Il ne jouit pas non plus de l'immunité personnelle
conférée par la Loi des commissions d'enquête. Il est
cependant généralement admis qu'à titre d'organisme
judiciaire, l'arbitre dispose d'une immunité relative, même s'il
n'y a eu,
jusqu'à maintenant, aucune situation malheureuse, il
apparaît nécessaire, selon la conférence, que cette
immunité soit formellement consacrée".
Il apparaît clairement, M. le Président, que nous sommes en
présence d'un mémoire préparé par la
conférence des arbitres qui se dit: on aimerait bien, comme arbitres,
avoir une immunité. Leur témoignage sur ce point et je le dis en
tout respect, est quand même un témoignage qui n'a pas le
même degré de détachement que le témoignage qu'ils
donnent quant à d'autres dispositions du projet de loi. Malgré
cela, ils affirment clairement qu'il n'y a eu jusqu'à maintenant, aucune
situation malheureuse, c'est-à-dire que jamais un arbitre n'a
été poursuivi pour une décision qu'il a rendue; donc le
problème ne s'est jamais posé. C'est important de s'en
souvenir.
C'est effectivement ce qu'on constaterait dans la plupart des cas
où des gens ont des responsabilités d'adjuger sur tel ou tel
problème, entre des parties. Le problème ne se pose pas seulement
pour les arbitres, il y a des dizaines et des dizaines de fonctions analogues
qui sont prévues dans plusieurs lois du Québec et pour lesquelles
il n'y a pas d'immunité.
L'immunité est une caractéristique de la fonction
judiciaire; or, des arbitres ne sont pas des juges, quelles que soient les
prétentions de certains à le dire.
M. Johnson: Quasi judiciaires, puisque les
commissaires-enquêteurs...
M. Forget: Ils ne sont pas des juges, M. le Président.
M. Johnson: Oui, mais les commissaires-enquêteurs ont une
immunité et ils ne sont pas non plus des juges.
M. Forget: Ils ont une immunité, mais c'est une
immunité conférée par une loi spéciale et ce n'est
pas une pratique générale que des gens qui ont des
décisions à prendre, même en vertu des lois, jouissent
d'une immunité. Seulement les juges, membres des tribunaux judiciaires,
jouissent d'une immunité, dans le sens de l'article 88a, et il n'est
donc pas, à mon avis, acceptable que l'on inscrive dans nos lois un
principe comme celui-là, qui n'est absolument pas nécessaire, il
n'y a jamais eu de problème dans le passé. Les arbitres
eux-mêmes l'avouent. Il y a, encore une fois, des tas de fonctions
analogues pour lesquelles il n'y a pas d'immunité.
C'est vouloir donner à ces gens qui ne souhaitent pas, par
ailleurs, assumer un certain nombre de caractéristiques de la fonction
judiciaire, y compris la permanence, l'exclusivité et autres obligations
inhérentes à la fonction, un statut et une protection à
mon avis, auxquels ils n'ont pas droit et dont ils n'ont pas besoin.
C'est la raison pour laquelle je crois qu'il faut amender l'article 46,
de manière que le paragraphe 88a de l'article 46 soit retranché
du projet de loi no 45.
M. Johnson: A l'effet de...
M. Laplante: J'aurais une question à poser au
député de Saint-Laurent.
M. Forget: De retrancher le paragraphe.
M. Laplante: Si, dans l'exercice de leurs fonctions, il n'y a pas
d'immunité et s'ils sont trouvés coupables d'une action
involontaire qu'ils auraient posée suite à leurs fonctions, qui
paierait l'amende de ces gens, s'il y avait amende, je ne parle pas de cas de
prison?
M. Forget: Premièrement, il n'y a pas d'amende à
payer, puisqu'il ne s'agirait pas d une infraction. L'immunité qui est
recherchée ici est une immunité face à des poursuites en
responsabilité civile pour dommages-intérêts.
Il faudrait que la personne prouve dommage, qu'ils sont responsables du
dommage et, plus que ça, il faudrait prouver qu'ils ont utilisé
leur pouvoir de façon évidemment arbitraire et de mauvaise
foi.
M. Laplante: Est-ce qu'un conseiller municipal a une
immunité?
M. Forget: Je ne pourrais pas répondre à cette
question, mais je ne crois pas qu'un tel conseiller ait une
immunité.
M. Laplante: Je sais que les commissaires ne l'ont pas non
plus.
M. Forget: Ni les commissaires d'école. Il y a très
peu de gens, à part des juges, qui ont une immunité, très
peu de gens, et admettons même qu'il y ait une action en
dommages-intérêts qui soit intentée, à ce
moment-là, le ministre qui, en somme, cautionne, par sa liste des
arbitres, la qualification des arbitres, aurait toujours le choix de dire:
Voici une poursuite contre un arbitre; à notre avis, même si,
techniquement, il s'est rendu coupable d'une négligence portant
préjudice et qu'il a été trouvé finalement
responsable, pas coupable, parce que c'est sur un plan civil, nous allons
assumer sa défense et nous allons assumer le paiement des
dommages-intérêts, puisque c'est un arbitre choisi dans notre
liste.
Alors, cette solution est toujours disponible pour le gouvernement et
c'est une assurance que j'ai donnée moi-même, quand j'occupais des
fonctions ministérielles, à des gens qui se trouvaient exactement
dans la même position, c'est-à-dire que c'étaient des
personnes qui agissaient aux comités de révision du régime
d'assurance-maladie et qui étaient chargées de réviser les
cas de pratique abusive. Lors de la révision de cas de pratique abusive
par certains médecins, ils en venaient à des conclusions telles
que tel ou tel médecin s'était livré à des actes de
façon inconsidérée et devait rembourser des montants
allant jusqu'à $80 000 ou $100 000.
M. Laplante: Croyez-vous, par exemple, qu'il y
a un danger. Je vais vous donner un cas concret; je ne voudrais pas que
vous le voyiez comme une tentative de faire de la basse politique ou des choses
comme cela. Les événements sont passés. Lors de l'adoption
de la loi 19, vous avez créé à ce moment-là des
pénalités pour les commissaires...
M. Forget: Ce n'est pas 19.
M. Laplante: La loi du retour au travail. Vous avez
institué à ce moment-là, des pénalités pour
les commissaires qui se prononcent de n'importe quelle façon en
assemblée publique dans l'exercice de leurs pouvoirs des amendes plus
fortes qu'un syndicat n'en pouvait avoir. Si on avait eu une immunité,
à ce moment-là, on aurait pu, nous autres, sans que ce soient des
contestations, présenter toujours face aux syndiqués une
contestation libre face à cette loi. Cela a empêché des
groupes d'administrateurs de se prononcer sur une loi, en somme, sur laquelle
ils n'avaient jamais été consultés. Tout de suite, on nous
imposait des amendes; on n'avait qu'à parler à un syndiqué
et lui dire; Ecoute, la loi, je n'en suis pas certain, fais ce que tu veux,
mais, si j'étais à ta place, je n'entrerais pas. Tout de suite,
j'étais passible de $5000 d'amende automatiquement. Je n'étais
qu'un commissaire.
M. Forget: C'est un...
M. Laplante: Ce sont ces abus-là qui font, je crois,
qu'ils demandent une immunité au cas où des choses comme cela
pourraient arriver.
M. Forget: Je ne pourrais pas prétendre vous donner une
réponse quant à l'immunité vis-à-vis des sanction
pénales. Je pense que le sens de ces immunités n'est pas de
garantir l'immunité contre des sanctions pénales, mais contre des
poursuites civiles seulement. L'exemple que je vous donnais, celui des
médecins, c'était que ces médecins eux-mêmes qui
siégeaient à ces comités, qui recommandaient qu'un tel
doive rembourser $80 000 ou $100 000, se sont évidemment posé la
question d'immunité. Ils ont été effectivement poursuivis
dans un cas par un de leurs collègues qu'ils avaient condamné
à rembourser une somme de quelque $100 000. Ils m'ont demandé
l'immunité au moment de l'ouverture de la Loi sur l'assurance-maladie et
j'ai refusé. Mais j'ai dit, cependant: Nous allons prendre fait et
cause, c'est-à-dire nous allons vous défendre, si vous êtes
condamnés à rembourser. En quelque sorte, ce serait inimaginable
de toute façon, qu'un tribunal dise à quelqu'un qui est
nommé pour faire rembourser quelqu'un qui est coupable d'une
dérogation, dans le fond, aux normes professionnelles; Vous allez
rembourser, parce que vous avez jugé qu'il était coupable, on
paiera l'indemnité de toute manière.
C'est toujours ouvert pour le ministère et, à mon avis,
c'est une meilleure garantie. Cela permet au ministre de décider, dans
le fond, s il y a lieu, pour des raisons d'ordre public, selon les
circonstances, de donner un appui financier ou ne pas le donner plutôt
que de dire à des gens qui ne sont pas véritablement des juges,
qui n'ont pas fait serment à un mandat, fait un serment d'office, qui
n'ont ni la permanence ni les obligations d'exclusivité: Ce que vous
faites, c'est bien. Je pense que c'est un mauvais principe.
Je m'excuse, je pense que le député de Sainte-Marie a une
question.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Je n'ai pas de question, M. le Président,
mais peut-être seulement un témoignage à faire pour
confirmer quelque chose que le député de Saint-Laurent a
mentionné. Effectivement, à ma connaissance non plus, il n'y a
pas de cas où des arbitres parce que là on parle d'un
membre de tribunal, donc, c'est collectif aussi, cela se fait à trois
je n'ai pas connu de cas où des membres de tribunal avaient
été poursuivis en justice à cause de leur travail. Ce qui
est arrivé, et un exemple en est la cause de Louis Tremblay contre la
Régionale Chambly, le ministère du Travail, etc., c'est que
l'arbitre est mis en cause, mais, être mis en cause, ce n'est pas
être poursuivi. On conteste sa sentence, son jugement, et, par le fait
qu'une partie conteste la sentence, l'arbitre est mis en cause. Mais, à
ce moment-là, celui pour qui il travaille doit prendre effectivement
fait et cause pour lui. Quant à moi, je ne verrais pas de quelle
façon on ajouterait quelque chose. Souvent une loi arrive, pour
concrétiser on l'a exprimé pour le précompte
syndical, on l'a exprimé pour le vote secret ou une certaine
partie d'une loi arrive pour consacrer ce qui est généralement
reconnu.
De façon générale, on n'a jamais eu cet article et
cela n'a pas créé de problème. Il me semble que je serais
sensible, en tout cas...
M. Forget: Favorable.
M. Bisaillon: ... si le ministre était accueillant,
à ce qu'on accepte l'amendement du...
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: C'est simplement une question au sujet de l'amendement
qu'apporte le député de Saint-Laurent. Sa proposition va à
l'encontre de ce que la Conférence des arbitres demande,
complètement à l'encontre de cela.
M. Forget: C'est ce que j'ai dit d'ailleurs.
M. Goulet: Ce que la Conférence des arbitres demande,
c'est ce que le projet 45 offre et c'est aussi ce que le projet 24 que ceux qui
l'ont présenté ont bien connu, offrait... Il n'a pas
été amené, mais en tout cas. Lorsque vous dites que ce
n'est pas un tribunal, encore là, cela va à l'en-contre de la
conférence des arbitres de la conférence des arbitres qui dit:
"II s'agit d'un tribunal authentique. Ce caractère est d'ailleurs
unanimement reconnu à l'arbitre des griefs par les tribunaux de droit
commun qui l'ont qualifié de tribunal statutairement constitué".
Quand vous dites
que ce n'est pas un tribunal, je ne sais pas quels sont vos commentaires
là-dessus.
M. Forget: Ce n'est pas un tribunal judiciaire, c'est un tribunal
administratif, comme il y en a beaucoup. Mais on utilise assez largement la
notion de tribunal administratif par opposition à une commission qui
donne des règlements ou des choses comme cela; mais ce n'est pas un
tribunal judiciaire. Il est très clair, quand on connaît
l'identité des arbitres, que ce ne sont pas des juges dans le sens
professionnel du mot, ce sont des professionnels qui ont pignon sur rue et qui,
moyennant une rétribution per diem, acceptent de jouer ce rôle de
temps à autre. Mais effectivement, ils n'acceptent aucune des
restrictions et des exigences du statut de juge. A mon avis, tant et aussi
longtemps que cette affaire n'est pas clarifiée, ils ne devraient pas
bénéficier des avantages qui vont avec le statut de juge, quant
à l'exercice des pouvoirs que la loi leur donne.
De toute façon, ils n'en ont jamais eu vraiment besoin. Ils
l'avouent eux-mêmes. C'est clair que cela leur fait un petit velours d
avoir un des attributs du juge, sans en avoir les obligations. Je le dis en
toute sympathie et sans critique. C'est un trait assez humain. Le groupe
intéressé dit: On aimerait bien l'avoir même si on n'en a
jamais eu besoin. Il reste qu'ils n'en ont l'admettent eux-mêmes.
Quant à ce qui est de la loi 24, je peux vous dire une chose.
C'est peut-être un secret du cabinet, mais il reste qu'il y avait un
projet de loi qui devait être adoptée et finalement
déposée et qui modifiait le Code du travail. A titre de
président du comité des ressources humaines... la question
d'immunité des arbitres en est une qui faisait l'objet d'une objection
formelle de la part du comité des ressources humaines qui
empêchait et retardait l'adoption du projet de loi par le cabinet.
M. Goulet: M. le Président, l'expression "tribunal est en
effet généralement réservée aux organismes qui
exercent des fonctions judiciaires, aux organismes exclusivement
juridictionnels. Les tribunaux de droit commun semblent reconnaître ce
mot "tribunal", et c'est également la même chose dans mon esprit.
C'est pour cela que je posais la question.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Je vais dire comme je l'ai déjà dit
pour la deuxième fois, j'ai un tiraillement qui est le suivant: C'est la
nomination des arbitres qui me fatigue un peu ici. Par expérience, je
sais comment ils sont nommés. Il y a des échanges à la
bonne franquette; le patronat en présente dix, le syndicat en
présente dix et dit: Si tu fermes ta "boîte", bien... Cette
nomination, la connaissant, me porte à être passablement
tiraillé intérieurement, parce que, fort d'une immunité
consacrée dans la loi, il s'agit d'un seul "crackpot" excusez
l'expression qui "fly", comme on dit aussi dans la même
expression, pour qu'on se ramasse...
M. Goulet: Pour les gars du milieu.
M. Pagé: Cela va bien avec la loi 101: un "crackpot qui
fly".
M. Chevrette: C'est la nomination des arbitres liée avec
une certaine tradition qui veut que quelqu'un qui ne l'a pas soit plus prudent
que quelqu'un qui a la sécurité. Je compare cela un peu à
une sécurité d'emploi. Le gars qui a une sécurité
d'emploi absolue est un peu moins prudent que celui qui est en période d
acquisition de sa permanence. Lui est prudent. C'est ce qui explique mes
tiraillements.
M. Forget: M. le Président, quand on joint l'argument que
vient d'avancer le député de Joliette-Montcalm, argument auquel
je n'avais pas pensé, le processus de nomination et la notion de prendre
fait et cause comme l'a mentionné le député de
Sainte-Marie, on se rend compte que c'est aussi un frein sur l'initiative
qu'ont les parties à désigner des gens envers lesquels ils
devraient prendre fait et cause, si jamais ils font des folies. C'est
peut-être, dans le système actuel, un assez bon frein qu'il
faudrait garder à cause de la façon de nommer ces gens.
M. Johnson: M. le Président, je suis tiraillé...
M. Forget: Tiraille du siècle.
M. Pagé: Tout le monde est tiraillé dans le fond,
c'est monsieur Garneau et ce sont ses députés.
M. Johnson: En fait, si on essaie de regarder rapidement les
avantages et les inconvénients c'est extrêmement difficile, je
pense, de prendre cette décision. Et il va falloir qu'on en prenne une
ou qu'on suspende l'article ce que je trouverais regrettable, parce que
cela aurait comme effet de nous faire suspendre tout l'article en fin de
soirée, si on y parvient, vers minuit L'avantage
d'immunité est que cela permet un recrutement évidemment plus
facile. L'individu qui sait que, comme arbitre, il peut rendre une
décision dans laquelle il condamne un employeur à $50 000 de
paiement envers quelqu'un..., et je n'ai aucune immunité, moi. Je veux
bien croire que je vais être de bonne foi et qu'il va falloir qu'on
prouve que je n'étais pas de bonne foi, etc., ou qu'on applique les
critères de la jurisprudence de Hlookoff et al. versus City of
Vancouver, 1968, 1967, Dominion Law Reports, page 119 et 132: The authorities
make it clear that a person exercising a judicial or quasi judicial power
et la jurisprudence dans le passé a défini le rôle
des arbitres comme étant un pouvoir judiciaire ou quasi judiciaire
is not in the absence of fraud, collusion or malice, liable to any civil
action at the suit of a person agreed by this decision.
C'est un principe. Dans le cas de la Dominion Rubber Ports, je ne sais
pas de quel tribunal il s'agit; je présume qu'il s'agit de la Cour
suprême puisque c'est DLR. Ce n'est peut-être pas
nécessairement cela. C'est le principe général. Cependant,
encore une fois, pour l'individu qui serait apte de bonne foi, mais qui, dans
une décision très difficile, serait susceptible de se faire
accuser de négligence, on va avoir de la difficulté, à un
moment donné, à le recruter. Deuxièmement, les arbitres
c'est vrai qu'ils ne sont pas des juges au sens de la Loi des tribunaux
judiciaires, que tous ne sont pas nécessairement des gens qui ont une
formation juridique cependant, ont été nommés avec,
en passant dans une allée de deux soldats, d'un côté, le
patronat, de l'autre côté, les syndicats ou CCTMO. Il faut qu'ils
passent à travers cette ligne avant d'être nommés.
Troisièmement, la conférence des arbitres
évidemment on pouvait s'y attendre à ce qu'elle le demande
demande le conseil consultatif de façon unanime; les deux parties sont
d'accord avec cela. Quatrièmement, il y a le fait que c'est quand
même un peu aléatoire que de soumettre cela à
l'intervention de l'Etat qui dirait: On va prendre fait et cause pour vous
cela a effectivement été le cas dans la cause de Tremblay.
Mais on me dit que le ministère de la Justice, depuis quelque
temps, a décidé qu'il n'interviendrait pas dans ce type de
procédure, dorénavant.
Sur cela, en fait, on n'a aucune garantie. On pourrait décider,
à un moment donné, sous un gouvernement que c'est oui, que le
ministère de la Justice va intervenir. Mais à un moment
donné, il peut décider de ne plus intervenir. Cela peut tomber
entre deux chaises, parce que ce n'est pas toujours au coeur des
préoccupations du ministre de la Justice que le problème des
arbitres de griefs. Donc, ces inconvénients de ne pas donner
l'immunité m'apparaissent réels. Par contre,
l'inconvénient de donner l'immunité, c'est l'ouverture possible
à un certain abus de pouvoir. Comme on a affaire à des gens qui
sont nommés, c'est vrai par les deux parties, mais qui, dans la
majorité des cas, reflètent une des tendances des parties, ils
pourraient être tentés, puisqu'ils ont l'immunité, dans
certains cas, de donner droit plutôt à un penchant naturel que de
rendre une décision qui soit la plus authentiquement objective possible.
Je trouve que c'est carrément un dilemme à ce niveau.
Le deuxième désavantage également de
conférer l'immunité, c'est que c'est exceptionnel que de
conférer l'immunité. Je suis d'accord avec le
député de Saint-Laurent. L'esprit de nos lois, de façon
générale, dans le cas des gens élus, par exemple, dans le
cas des juges, dans le cas des gens nommés en vertu de la loi des
commissaires-enquêteurs, ou dans le cas de toutes les lois qui donnent
des pouvoirs à une personne en référant à la Loi
des commissaires-enquêteurs, c'est spécifique. Ce serait
créer une autre catégorie de personnes.
Devant ces arguments, si je fais la somme, la "balance" des
inconvénients, comme on dit par- fois, comme j'ai quatre arguments en
faveur de l'immunité, et trois contre, je comprends que ce n'est pas
nécessairement un jugement de fond, mais cela me paraît
extrêmement dificile à évaluer. Je suis prêt à
continuer le débat là-dessus.
M. Goulet: Est-ce que je peux poser une question au ministre?
Le Président (M. Marcoux): Un instant, le
député de Bellechasse.
M. Goulet: Dans le passé, pour ce cas précis de
l'argumentation, pour aider le ministre à être moins
tiraillé, et un peu tout le monde, a-t-on eu des difficultés dans
le passé, pour cette argumentation? A-t-on eu de la difficulté
à trouver des arbitres?
M. Johnson: Dans le passé.
M. Goulet: Vous dites: C'est possible que, si on ne donne
l'immunité, cela devienne difficile de recruter des arbitres. Y a-t-il
quelqu'un autour de la table qui peut nous dire: Oui, on a des chiffres.
M. Pagé: Oui, aucune difficulté à en
recruter.
M. Goulet: II n'y a pas eu de difficulté à en
recruter.
M. Johnson: On me dit qu'il n'y a pas de difficulté de
recrutement proprement dit.
M. Goulet: Pourquoi y en aurait-il?
M. Johnson: A un moment donné, dans un cas
précis... Pardon?
M. Pagé: Trois à trois!
M. Jolivet: C'est vrai, je ne pense pas qu'il y ait eu vraiment
de véritables difficultés de recrutement. Remarquez que la
règle des 90 jours pour rendre la sentence sous peine de perdre les
honoraires, ne simplifiera pas non plus le recrutement des arbitres. Je pense
que c'est très clair. Il y a des avantages en ce moment à
être arbitre, avec les modifications qu'on propose au Code du travail,
parce que cela leur donne un statut plus précis, des pouvoirs plus
fermes, etc., et on clarifie finalement leur rôle. Cependant, ils
demandent l'immunité; les parties la demandent depuis un bout de temps.
On ne leur accorderait pas, alors que d'autre part, au niveau du recrutement,
on les "désincite" un peu, parce qu'il y en a qui sont habitués
à étirer cela un peu plus que trois mois. Je me dis, d'une
certaine façon, tant mieux si ceux qui acceptent sont des gens qui sont
prêts à prendre la possibilité de rendre les sentences en
moins de 90 jours, sous peine de perdre leurs honoraires.
Je maintiendrais quand même ma position, en ce sens. Si je regarde
cela, c'est entre un argument d'efficacité d'une part, et de ce que
j'appellerais une perception de ce qui doit être réaliste, et
finalement, un penchant naturel à être plutôt
porté vers le respect des droits civils, des règles
générales qui s'appliquent à tous les citoyens.
Dans ce cas-ci, je choisirais plutôt la première
partie.
M. Forget: M. le Président, il me semble que le ministre
rate une belle occasion de...
Le Président (M. Marcoux): La parole est au
député de Portneuf, sur le même sujet.
M. Pagé: M. le Président, seulement quelques
commentaires pour demander au ministre de réviser sa position. Je ne
reprendrai pas ici tous les arguments à saveur juridique, voulant qu'un
arbitre ne soit pas régi par la Loi des tribunaux judiciaires et qu'il
exerce une fonction quasi judiciaire seulement ou autre; ce n'est pas cela.
Je reprendrai les arguments du ministre, lorsqu'il disait: On aura
peut-être éventuellement un problème au niveau du
recrutement. Vous n'en avez pas actuellement et les arbitres n'ont pas
l'immunité, d'une part; ce ne sont pas des juges, ils n'ont jamais eu de
poursuite. Il faut quand même admettre que s'il y a des poursuites, il
peut peut-être y en avoir éventuellement, même s'il n'y en a
jamais eu jusqu'à maintenant. Il y a eu des poursuites? Pour engager la
responsabilité, éventuellement, d'un arbitre, il faudra prouver:
mauvaise foi, collusion tout au moins, il faudra prouver sa
responsabilité à un niveau quelconque. Le ministre nous dit: II
n'est pas implicite que le gouvernement du Québec prendra fait et cause
pour et au nom de la personne poursuivie, en l'occurrence l'arbitre, dans les
procédures judiciaires qui sont entreprises à son égard.
Par surcroît, encore là, c'est bien hypothétique.
Je ne vois pas en quoi le ministère du Travail et par
surcroit, si c'est lui qui a procédé au choix de l'arbitre
le gouvernement ne prendrait pas fait et cause pour la personne qui, somme
toute, a reçu un mandat du gouvernement pour exercer ces fonctions.
Il y a un élément qui est aussi assez important, c'est ce
que le député de Joliette-Montcalm a énoncé, que
ça incite définitivement à la prudence. Vous savez, quand
on parle de fonction quelconque, ça implique des responsabilités,
ça implique des obligations. On entend souvent les gens dire: Vous, les
députés, vous avez l'immunité. On a peut-être
l'immunité, mais on ne peut pas dire n'importe quoi parce que, si demain
matin, sous le couvert de mon immunité, je dis quoi que ce soit à
l'égard d'un de mes collègues, celui-ci va soulever une
procédure et ma responsabilité va être engagée;
ça peut faire en sorte que, éventuellement, je sois
expulsé de l'Assemblée nationale. C'est une
immunité...
M. Bisaillon: C'est pour quand?
M. Pagé: Non, ça messieurs, vous allez voir, je
vais avoir le temps d'en voir partir plusieurs; du moins je l'espère...
Tout au moins c'est ce que mes électeurs espèrent, mais tout cela
pour dire que souvent... Je voudrais ouvrir une parenthèse sur
l'immunité des parlementaires. Souvent on dit: Vous autres les
députés, vous pouvez dire n'importe quoi. Ce n'est pas vrai, M.
le Président, l'immunité que nous avons...
M. Godin: Donnez-nous un cas.
M. Pagé: Les références à de telles
maximes ne nous ont pas...
M. le Président, je pense qu'il y a suffisamment de motifs,
quatre ou cinq motifs, à l'appui de garder la situation qui
prévaut, le statu quo, sur cette question. Il y a des hommes
d'expérience, comme le député de Sainte-Marie, le
député de Joliette-Montcalm qui devraient représenter
peut-être plus d'autorité dans l'argumentation sur laquelle se
base le ministre pour prendre sa décision.
M. le Président, pour le bénéfice du journal des
Débats, même si le député de Joliette-Montcalm me
dit que mon argumentation est vicieuse, elle n'est pas vicieuse parce que,
somme toute, une commission parlementaire doit être un forum
d'idées, d'échanges à la lumière de
l'expérience respective de chacun.
M. Chevrette: Ce n'est pas dans ce sens et vous le savez
bien.
M. Pagé: M. le Président, quant à moi, qu'on
retranche l'alinéa, on n'aura pas de problème au niveau du
recrutement; le gouvernement, par une décision qu'il pourrait
éventuellement prendre, si le cas se présentait, pourra prendre
fait et cause pour et au nom de la personne poursuivie, ce ne sont pas les
juges, il n'y a jamais eu de poursuites et ça incite à la
prudence parce que ça impliquera que l'arbitre devra exercer ses
fonctions avec un sens de responsabilité bien précis.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, ce ne sera pas très
long. D'ailleurs, cette question, compte tenu de l'analyse que le ministre a
faite tantôt, on se rend compte que ça ne mérite pas un si
long débat parce que l'une ou l'autre des positions, je pense, se
défend aussi bien.
Je voudrais seulement me permettre de souligner au ministre qui a fait
appel, tantôt, à la règle des 90 jours pour rendre la
sentence, que l'ensemble des conventions collectives, actuellement, fixe des
délais aux arbitres qui sont nommés dans les conventions
collectives ou qui sont à nommer par les parties au moment des
arbitrages pour rendre des sentences.
Or, mes douze années d'expérience m'ont amené
à me rendre compte que, dans 85% des cas, les arbitres ne respectent pas
les délais qui sont dans la convention collective et les parties
reconnaissent, en autant qu'il n'y a pas d'exagération, que c'est
souvent physiquement impossible,
ces délais qu'on met dans les conventions collectives.
M. Johnson: Oui, cependant, ce qui est très
différent dans le projet de loi 45, c'est que c'est la loi qui impose le
délai et, deuxièmement, elle impose une sanction
extrêmement sévère: la perte des honoraires. La perte des
honoraires, c'est important, car on sait que pour certains l'arbitrage, c'est
la moitié de leur profession, la moitié de leur gagne-pain; ils
passent la moitié de leur temps à faire de l'arbitrage. C'est
sévère et, dans ce contexte, je pense que ça va poser
évidemment un certain problème de recrutement. Cependant, je
pense que l'article au sujet des 90 jours, étant donné la
sanction qu'il prête, va faire que la qualité de ceux qui se
porteront volontaires, dans les circonstances, risque d'être
améliorée.
Je maintiendrais, M. le Président, tout en disant à la
commission que ça m'apparaît très important, les nuances et
distinctions à y faire, surtout et compte tenu d'un dernier argument,
que ce n'est pas toujours nécessairement des avocats et que, de parfaite
bonne foi, ils peuvent faire des erreurs qui sont des excès de
juridiction. Quand on parle d'excès de juridiction en matière de
tribunal d'arbitrage, ça commence à être du droit un peu
compliqué et c'est vraiment les mettre dans une situation qui les
pénaliserait.
Je comprends que le député de Portneuf, qui est membre du
Barreau, se sent tout à fait dégagé face à cette
question, puisque le problème ne se pose pas pour lui, il est membre du
Barreau. Il saurait ce que c'est un excès de juridiction de façon
spontanée. Il aurait sans doute retenu cela de ses livres de droit.
Mais ce n'est pas nécessairement le cas de tous nos arbitres,
à qui il faut donner une chance, s'ils peuvent fonctionner aussi.
M. le Président, compte tenu de tout cela, je maintiendrai quand
même... D'autre part, je ferai remarquer que je n'ai pas soulevé
la recevabilité de l'amendement. Il était, de toute
évidence, totalement irrecevable, étant donné que
l'article était à l'effet de donner l'immunité, et
l'amendement du député étant à l'effet de ne pas
donner d'immunité. Mais je ne soulèverai pas la question de
recevabilité.
Le Président (M. Marcoux): Sous forme de...
M. Johnson: Non, je ne la soulève pas.
Le Président (M. Marcoux): Clarifions-la...
M. Johnson: Vous êtes lié par les parties, M. le
Président.
Le Président (M. Marcoux): ... en votant paragraphe par
paragraphe. C'est sûr que l'autre solution, c'est de voter contre, de le
battre. Un amendement qui propose de battre un paragraphe...
M. Forget: Un dernier point, M. le Président. Je regrette
la décision que vient de nous annoncer le ministre, mais il me semble
qu'il y a une tradition qui, paraît-il, semble en train de se
créer. Il semble qu'il y a une autre loi devant l'Assemblée
nationale qui a été adoptée à cette session-ci,
dans le domaine municipal, qui cherche a éviter que les gens se cachent
dans le fond, derrière des structures, des charges officielles, pour
échapper à leurs responsabilités. Il me semble que
c'était dans le même esprit et que cela aurait été
un des arguments à ajouter d'un côté de sa liste.
Celui-là aurait été très lourd. Il aurait dû
la faire pencher de ce côté-là.
Mais je n'ai pas l'intention de prolonger ce débat. Je pense,
malgré tout, que c'est un débat de principe qu'il était
important d'avoir. Je demanderais, M. le Président, le vote
enregistré.
Le Président (M. Marcoux): Nous allons voter sur
l'amendement visant à biffer le paragraphe 98a de l'article 46.
M. Goulet: Avant le vote, M. le Président, est-ce que je
peux poser une question au ministre?
Le Président (M. Marcoux): Si vous insistez.
Quels sont ceux qui sont pour l'amendement proposé par le
député de Saint-Laurent, visant à biffer le paragraphe
88a?
M. Russell (Brome-Missisquoi)? M. Bisaillon (Sainte-Marie)?
M. Bisaillon: Pour.
Le Président (M. Marcoux): M. Goulet (Bellechasse)?
M. Goulet: Pour.
Le Président (M. Marcoux): M. Ciaccia (Mont-Royal)? M.
Chevrette (Joliette-Montcalm)?
M. Chevrette: Est-ce que j'ai le droit de m'abs-tenir, ou s'il
faut voter?
Le Président (M. Marcoux): Tu as toujours le droit de
t'abstenir.
M. Chevrette: Abstention, parce que je veux calculer quelque
chose, stratégiquement.
Le Président (M. Marcoux): M. Couture (Saint-Henri)? M.
Mercier (Berthier)? M. Forget (Saint-Laurent)?
M. Forget: Pour.
Le Président (M. Marcoux): M. Gagnon (Champlain)?
M. Gagnon: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Johnson (Anjou)?
Abstention?
M. Johnson: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Jolivet (Laviolette)?
M. Jolivet: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Lacoste (Sainte-Anne)?
M. Pagé: II serait pour.
Le Président (M. Marcoux): M. Laplante (Bourassa)?
M. Laplante: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Lavigne (Beauharnois)?
M. Lavigne: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Mackasey
(Notre-Dame-de-Grâce)?
M. Pagé: Pour.
Le Président (M. Marcoux): M. Godin (Mercier)? Contre
quoi? Contre l'amendement?
M. Godin: Contre l'amendement présenté par le
député de Saint-Laurent.
Le Président (M. Marcoux): M. Pagé (Portneuf)?
M. Pagé: Pour.
Le Président (M. Marcoux): M. Roy (Beauce-Sud)?
Pour: 4 Contre: 6 Abstention: 1 L'amendement est
rejeté. Article 88b?
M. Forget: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): Adopté. 88c.
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Marcoux): 88d?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Marcoux): 88e?
M. Forget: M. le Président, j'aimerais...
M. Johnson: Je m'excuse, M. le Président, à
88c...
Le Président (M. Marcoux): Oui.
M. Johnson: Je m'excuse, j'aimerais apporter simplement une
correction. On dit, à 88c: "Si le président du tribunal
d'arbitrage est informé par écrit...". En fait, il faudrait dire:
"Si le tribunal d'arbitrage est informé par écrit...". Ce n'est
pas nécessairement seulement le président. Il y aura une autre
affaire de ce type un peu plus loin.
On passe au paragraphe 89e; c est ça, M. le Président?
Le Président (M. Marcoux): Paragraphe 88e. M. Johnson:
Paragraphe 88e.
M. Forget: Paragraphe 88e, oui.
M. le Président, nous sommes devant le paragraphe qui
détermine la manière dont on obéit à la
règle audi alteram partem, c'est-à-dire la façon dont le
tribunal s'y prend pour entendre les témoignages et les parties
intéressées. Effectivement, le premier alinéa se lit
ainsi: "Le Tribunal d'arbitrage doit donner aux parties
intéressées l'occasion d'être entendues ". A ce sujet, M.
le Président, il est clair que les mots doivent se lire de la
manière qu'ils sont définis par la jurisprudence et par la
tradition. Il est clair, par l'interprétation qu'en a donné le
ministre tout à l'heure, et par le fait même il a modifié
les premiers alinéas de l'article 88, que les parties
intéressées, ce sont, d'une part l'employeur et d'autre part
l'association de salariés.
Donc, parmi les parties intéressées ne figure pas le
salarié qui est l'occasion d'un grief. Non seulement le salarié
n'a-t-il pas le droit d'aller lui-même en arbitrage, mais il n'a
même pas le droit d'être entendu à l'occasion de l'audition
de sa cause par le tribunal d'arbitrage. On n'entend que les parties, mais on n
entend pas celui qui n'est pas une partie...
M. Goulet: Je m'excuse d'interrompre le député.
Est-ce que je peux lui poser une question, parce que j'ai justement posé
cette question au ministre et on m'a dit tantôt que pour le mot
"parties", la jurisprudence disait que c'étaient les salariés
également.
M. Forget: Non, ce qu'on vous a dit, c'était le contraire.
On vous a dit que les parties...
M. Goulet: Non, M. le ministre, je ne sais pas, là...
M. Forget: ... étant donné qu'on a changé le
début de I article 88e...
M. Goulet: Oui.
M. Forget: ... pour remplacer les parties par l'association de
salariés, on a dit: en enlevant le mot partie, on exclut le
salarié.
M. Goulet: Oui, mais moi j'ai demandé...
M. Johnson: Si on met partie, donc on inclut le
salarié.
M. Forget: Oui, mais ça n'a plus le même sens. Les
parties, maintenant, sont définies par
l'article, et les parties, devant le tribunal, ce ne sont pas les
parties de l'ancienne interprétation ju-risprudentielle. Ce sont les
parties que le tribunal reconnaît maintenant comme étant les
seules parties, c'est-à-dire l'association de salariés et
l'employeur. Donc, on a changé la jurisprudence en changeant la loi. On
a changé son sens, on ne peut plus recourir à l'ancienne
jurisprudence pour interpréter les mots "les parties" dans le contexte
actuel. Ce qui fait qu'en définissant "les parties " et j'ai
commencé mon exposé sur cet article en disant: Maintenant qu'on a
changé le premier alinéa de l'article 88, les parties sont celles
de l'article 88.
M. Johnson: Celles de l'article 88.
M. Forget: Ce ne sont plus les parties qu'on avait avant avec
l'ancien Code du Travail.
M. Johnson: Justement pour éclairer notre discussion, on
dit bien qu'il s'agit des parties intéressées et non pas les
parties tout court. "Le tribunal d'arbitrage doit donner aux parties
intéressées l'occasion d'être entendues. " Je dois dire que
c'est carrément notre intention que la notion de "parties
intéressées" recouvre évidemment le salarié qui est
personnellement affecté.
M. Forget: Je me réjouis que ce soit l'intention du
ministre, parce que je pense que si c'est son intention, étant
donné...
M. Johnson: Etant donné...
M. Forget: ... la jurisprudence confuse et le fait qu'on change
la signification des parties dans un amendement à la loi, il y a de fort
risques que ce soit mal interprété. C'est ce qui nous
amène à formuler l'amendement suivant qui se lit: "Que le premier
alinéa du paragraphe 88e de l'article 46 soit modifié en ajoutant
dans la deuxième ligne après le mot "entendues", les mots, "ainsi
qu'aux salariés qui possèdent un droit d'intervention."
L'alinéa amendé se lirait comme suit: 88e: "le tribunal
d'arbitrage doit donner aux parties intéressées l'occasion
d'être entendues, ainsi qu'aux salariés qui possèdent un
droit d'intervention".
Bien sûr, là, on va plus loin. On dit non seulement ils
doivent entendre le salarié, et non seulement les parties qui sont
désormais définies dans la loi comme étant, d'une part,
l'association et d'autre part l'employeur... Ils doivent entendre le
salarié. Mais le salarié proprio motu, de sa propre initiative, a
le droit de se présenter devant le tribunal d'arbitrage au moment
où sa cause est entendue et de se faire entendre a ce
moment-là.
Alors, c'est plus que ce qu'on pourrait obtenir par le texte simplement
en disant: Les parties, toutes les parties intéressées ont le
droit d'être entendues par le tribunal, mais c'est que proprio motu la
partie intéressée a le droit de dire: Moi, c'est moi dont on
parle, c'est moi la partie offensée là-dedans. Je comprends qu'on
a des gens pour me représenter, mais moi, j'aimerais aussi mettre mon
grain de sel dans cette affaire; et il a le droit de le faire,
évidemment, en respectant les règles de décorum que fixe
le tribunal, etc. Il n'a pas le droit de monopoliser l'attention, mais il a au
moins le droit d'être entendu de ce côté-là et il est
nécessaire, indépendamment de la signification qu'on donne au mot
"partie ", de lui donner un droit d'intervention proprio motu
c'est-à-dire le droit d'intervention, pas seulement le droit qu'on
l'entende; c'est-à-dire l'obligation du tribunal de l'entendre, mais il
a le droit d'intervenir de son propre chef.
M. le Président, je pense que c'est un amendement qui va de soi,
lui aussi, et je pense qu'il rencontre l'intention implicite du ministre. Donc,
il devrait y avoir de ce côté-là, une acceptation
également, je pense du moins, de l'amendement. Je l'espère.
M. Goulet: M. le Président, juste pour éclairer
peut-être la commission. Ce que la conférence des arbitres disait
concernant le respect de la règle audi alteram parlem...
M. Forget: Partem.
M. Goulet: Partem, je m'excuse. Selon la conférence, il
s'agit d'un principe bien connu qui ne nécessite pas son inscription
dans un texte de loi. On dit qu'on n'a même pas besoin de mettre cela
dans le texte de loi; c'est un principe qui est reconnu. Quoi qu'il en soit, la
conférence estime que le texte, tel qu'il est rédigé, au
contraire, est contraire aux règles fondamentales de la justice. En
effet, ce texte accorde le droit d'être entendu aux seules parties,
c'est-à-dire l'employeur et le syndicat. Tel que libellé, les
parties pourraient s'autoriser du texte pour prétendre que le
salarié qui a droit à l'intervention ne peut être entendu.
Pour éviter toute controverse, la conférence suggère... Ce
que le député.
M. Forget: ... commencé, M. le Président.
M. Goulet: Non, non, mais...
C'est un principe, par exemple, que toute personne qui est
accusée peut se faire entendre. On n'aurait même pas besoin de le
mettre dans le...
M. Pagé: ... pas personne d'accusé.
M. Goulet: ... des avocats comme vous, M. le député
de Portneuf.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, je pense qu'effectivement
dans l'argumentation, le député de Saint-Laurent a raison
d'analyser le mot "partie " de la façon dont il le fait actuellement. Il
a aussi raison quand il dit que les objectifs visés par le texte actuel,
les intentions du texte actuel étaient aussi de permettre aux
syndiqués de pouvoir se faire entendre. Par ailleurs, je ne pense pas
que
son amendement soit conforme à ce qu'il souhaite. Quand on prend
la dernière partie de son amendement "ainsi qu'aux salariés qui
possèdent un droit d'intervention ", c'est assez ambigu dans le sens
que, qui va déterminer que le syndiqué possède un droit
d'intervention? Il y a là une matière à interpréter
qui prête à confusion. Il me semble qu'on aurait peut-être
avantage à essayer de trouver d'autres formules que cette
formule-là, parce que cela n'est pas un automatisme. Il va falloir que
quelqu'un le reconnaisse ce droit-là. Alors, qui va faire cela?
M. Forget: L'article est attributif de droits,
c'est-à-dire que le salarié possède un droit
d'intervention en vertu de cet article-là.
M. Pagé: Mais qui va déterminer qu'effectivement
c'est celui-là plutôt qu'un autre qui possède un droit
d'intervention?
M. Forget: C'est qu'il va être... c'est dans la mesure
où le salarié est l'objet du grief.
M. Pagé: Je vais vous poser une question, M. le
député de Saint-Laurent, peut-être qu'elle pourrait servir
à me répondre. Si c'est un cas de congédiement, c'est
clair celui qui possède un droit d'intervention, et votre formule
s'applique. Mais si c'est un grief sur la tâche ou un grief sur
l'interprétation d'une clause de la convention collective, cette
interprétation-là dans un sens ou dans I autre, peut toucher au
bout de la ligne 100, 125 syndiqués. Le grief sur la tâche par
ricochet peut toucher 500 syndiqués. Lequel ou lesquels possèdent
automatiquement un droit d'intervention? C'est là qu'il est difficile;
autrement dit, ce que je veux dire c'est que votre formule fait en sorte qu'il
est difficile, selon le sujet qui est en grief, de déterminer dès
le départ, qui possède un droit d'intervention. C'est pour cela
que cette formule-là me semble ambiguë.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Moi, je pense, M. le député de
Saint-Laurent, que la formule que vous proposez crée un droit à
un tiers et dans le cadre, par exemple, de l'interprétation et de
l'application d'une convention collective, c'est identifier que c'est
l'employeur ou le syndicat.
Je prends la convention collective des enseignants au niveau provincial.
On a donné des droits aux tiers. Exemple: La Fédération
des commissions scolaires peut intervenir au cours d'un procès lorsqu'il
s'agit d'une commission scolaire contre un syndicat. C'est en vertu de la
convention provinciale que les gens ont dûment donné un pouvoir
d'intervention aux tiers, à cause de la répercussion face
à une interprétation éventuelle.
En donnant le pouvoir d'intervention face à tous les griefs
d'interprétation, vous donnez, théoriquement, à chaque
salarié, un pouvoir d'intervention sur les clauses
d'interprétation, comme M. le député de Sainte-Marie le
dit. C'est théoriquement possible, en tout cas. Votre objectif, si j'ai
bien compris, c'est de pallier le fait, par exemple, qu'on fasse des griefs de
mesures disciplinaires ou de renvoi ou encore un préjudice causé
à un individu et que le gars ne soit même pas là...
M. Forget: C'est cela.
M. Chevrette: ... ne soit même pas au courant du type de
défense qui se fait à son propre sujet. Je pense que l'objectif
que vous poursuivez, je l'appuie. C'est pour cela que j'étais d accord
quand le député de Sainte-Marie disait: "Vous avez raison",
jusqu'au moment où vous donnez un pouvoir d'intervention qui peut aller
à l'encontre des deux parties reconnues qui ont à lutter face
à une interprétation possible.
M. Forget: Là-dessus, si vous permettez, M. le
Président, brièvement, pour répondre à la question
du député de Sainte-Marie, à savoir qui va
déterminer qu'il y a un droit, dans la pratique, il n'est pas
nécessaire de déterminer cela, a priori. Le tribunal devant qui
Jean-Baptiste Beauséjour va se présenter, va dire: Quel est votre
nom, etc. Si son nom n'apparaît nulle part dans la déclaration ni
dans la plainte comme étant un individu intéressé
directement dans le grief, le tribunal disposera rapidement de son cas. Si son
nom est là, M. Untel a été congédié, a
été telle et telle chose, le tribunal en décidera ainsi. A
mon avis, le problème ne se pose pas. Il ne s'agit pas de faire des
définitions abstraites. Le tribunal aura entre les mains les
renseignements nécessaires pour dire: En effet, vous avez
été visé par le grief. Vous avez le droit de faire une
intervention. Non seulement on doit vous questionner et vous permettre de vous
faire entendre, mais vous avez le droit, de votre propre chef, de venir exposer
votre point de vue.
Si jamais il y avait des difficultés d'interprétation, si
on y voyait une difficulté d'interprétation, il ne serait pas
difficile de mettre, après le mot "salarié ", les mots "le
salarié visé nommément dans le grief". Cela
éliminerait... Je pense que cela n'est même pas nécessaire,
parce qu'effectivement, le tribunal dira: On ne peut pas entendre tout le
monde. C'est un grief de nature générale d'interprétation.
Il n'a pas à se faire entendre plus qu'un autre, mais, si son nom est
là, parce qu'il a été congédié
illégalement, etc., il pourra se faire entendre; c'est aussi simple que
cela, à mon avis.
M. Johnson: M. le Président, si vous permettez, je ne suis
pas sûr d'être convaincu par l'argument du député de
Saint-Laurent au sujet de la notion de savoir qui possède un droit
d'intervention. Le droit d'intervention, c'est une chose qu'on crée ici
par cet article.
Cependant, encore une fois c'est pour cela qu'on essaie de
trouver une formule il est très clair que ce que cela vise, c'est
de permettre à l'association et à l'employeur d'être
entendus audi alteram partem. Les parties, en fait, sont les nouvelles parties
définies à l'article 88, mais égale-
ment... Prenons des exemples concrets. Vous avez un salarié qui
est renvoyé dans un cas de mise à pied en fonction de
l'ancienneté. Le salarié renvoyé fait un grief que
l'association porte en arbitrage. On voudrait que celui qui risque d'être
mis à pied puisse être entendu à la place de celui qui fait
le grief. C'est très évident. Donc, si on garde le texte tel que
je le propose en ce moment, on dit bel et bien: "Le tribunal d'arbitrage doit
donner aux parties intéressées l'occasion d'être
entendues... "
Je comprends que ce n'est pas un argument de droit, mais c'est la
pratique courante des tribunaux d'arbitrage d'entendre la personne
intéressée et c'est une directive que la conférence des
arbitres a donnée à ses arbitres de l'entendre. Je pense que
puisqu'on qualifie, par le mot "intéressées" les parties, on va
nécessairment au-delà des seules parties qui ont
été définies à l'article 88. Sans cela, on dirait:
"Le tribunal d'arbitrage doit donner aux parties l'occasion d'être
entendues". Si on dit "aux parties intéressées", c'est qu'on va
au-delà. Si on disait "aux parties" simplement... Cela, c'est un premier
argument mais cela peut être démoli.
M. Forget: M. le Président, si vous permettez, sur un plan
logique, on ne peut pas, par une épi-thète, extensionner un
substantif. On ne peut pas dire: Parmi toutes les parties définies dans
la loi, il y a des parties intéressées et des parties non
intéressées. Cela irait. Mais il n'y a certainement pas des
parties qui ne sont pas définies dans la loi qui sont des parties
intéressées; autrement, il faudrait le définir ailleurs.
Un adjectif qualifie le substantif; il ne change pas la nature du
substantif.
M. Johnson: D'accord.
M. Forget: II ne dit pas: II y a d'autres personnes en plus, il y
a des gens qui sont couverts par le substantif.
M. Johnson: Je comprends qu'on est dans les stratosphères
de l'interprétation juridique, en ce moment, mais si on se
réfère à l'article 88, on ne rencontre pas du tout le mot
"parties". On ne dit pas: Les parties au grief sont l'association
accréditée, etc.; on dit simplement: Tout grief doit être
soumis à l'arbitrage en la manière prévue dans la
convention collective, si elle y pourvoit et si l'association
accréditée et l'employeur y donnent suite, sinon,
déféré à un arbitre, etc.
Comme on ne qualifie pas ces personnes de "parties", je
prétendais que le fait de donner une épithète, qui est le
mot "intéressées", au substantif, qui est le mot "parties",
étant donné que le mot "parties" n'est pas défini à
l'article 88, effectivement, cela a l'effet d'étendre la notion qu'on
retrouve à l'article 88, d'une part.
Deuxièmement, au niveau de la logique interne du texte
lui-même, au niveau du fait que le législateur est
présumé ne jamais parler pour rien dire mais il n'est pas
passé par ici, c'est certainje suis d'accord que cela peut sembler
po- ser des problèmes. Je persiste à croire, avec nos juristes,
que, dans le fond, cela dit ce que cela a à dire.
Nous allons essayer de trouver une autre formule. Je veux bien. Nous
allons chercher une autre formule. Mais je rejette la formule avec la notion de
droit d'intervention, puisque, à mon avis, au niveau de ses
conséquences, elles sont difficiles à apprécier, etc.
M. Goulet: Est-ce que le ministre me permet une question, M. le
Président?
M. Johnson: M. le Président, j'ai une suggestion...
Oui.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Bellechasse a une question.
M. Goulet: Par "parties" la conférence des arbitres entend
seulemen et je cite ici: "Parties, c'est-à-dire l'employeur et le
syndicat".
M. Johnson: En fait, ils sont dans le cadre. Ils ne font pas
si vous me passez l'expression de "the lateral thinking". Ils
sont encore dans le cadre des postulats de l'ancien code, quand ils disent
cela, dans le fond, alors qu'on change la formulation elle-même de
l'article 88.
Cependant, pour être plus précis, il y aurait une
possibilité. Ce serait de dire: Le tribunal d'arbitrage doit donner
à l'employeur, à l'association accréditée et au
salarié au singulier intéressé, l'occasion
d'être entendus.
M. Forget: Et un droit d'intervention?
M. Johnson: Non. On reviendrait à la formule 88e; le
tribunal d'arbitrage doit donner aux parties intéressées
l'occasion d'être entendues; ce serait: Le tribunal d'arbitrage doit
donner à l'association accréditée, à l'employeur et
au salarié intéressé l'occasion d'être entendus.
A ce moment-là, on ne crée pas de droit d'intervention,
mais on établit clairement que c'est la responsabilité du
tribunal. Ainsi, il rentre dans la définition de "parties", qu'on
retrouve au dernier alinéa de l'article 88e qui nous dit: "Si une
partie, dûment convoquée par un avis écrit d'au moins cinq
jours fait avant la date, l'heure, etc., où elle pourra se faire
entendre, ne se présente pas ou refuse de se faire entendre, le tribunal
d'arbitrage peut procéder à l'audition de l'affaire, et aucun
recours judiciaire ne peut être fondé sur le fait qu'il a ainsi
procédé en l'absence de cette partie.
M. Forget: M. le Président, je ne trouve pas cela
entièrement satisfaisant, parce qu'il y a la notion d'intervention qui
est malgré tout suggérée par la conférence des
arbitres et qui me paraît une notion importante, dans le cas où
pour un individu je comprends qu'on peut rattacher à cela toutes
sortes de principes et de précédents et d'implications pour
d'autres c'est son sort qui se décide devant un tribunal
d'arbitrage, et il n'a
pas le droit d'intervenir. Il faut qu'il attende une convocation, un
subpoena.
Il me semble que c'est une situation inique. Qu'on en prévoie la
possibilité. Il n'y avait pas d'abus de ce côté. Quand
quelqu'un est congédié, en contravention de la convention
collective, son syndicat prend fait et cause pour lui, mais décide que,
de toute façon, ils vont traiter cela au niveau des principes; et on ne
le convoquera pas. On va convoquer tout le monde, parce qu'on n'est pas
sûr, vu que le bonhomme est un peu imprévisible, etc. De toute
façon, c'est plus simple, et on veut aller rapidement. Il n'a pas le
droit d'intervenir devant un tribunal d'arbitrage où son sort est
décidé. Je trouve cela inimaginable.
M. Johnson: M. le Président, si vous permettez,
étant donné que l'article 88e crée l'obligation pour le
tribunal d'entendre les parties au lieu des parties, on dirait:
L'association accréditée, l'employeur et le salarié
intéressé s'il ne donne pas l'occasion au salarié
d'être entendu, il va y avoir un bref d'évocation et il n'aura pas
respecté la règle audi alteram partem.
D'autre part, on fait le tour de la notion de création d'un droit
d'intervention qui peut être susceptible, dans certains cas où on
vise des griefs de nature collective qui touchent une catégorie
d'employés, mais avec le même problème qui risque d'amener
effectivement des brefs d'évocation. Le tribunal a une
responsabilité de donner l'occasion d'être entendu. Ce n'est pas
un droit proprié motu de l'extérieur. Le tribunal est
responsable, s'il n'en donne pas l'occasion, et il peut effectivement se
ramasser avec un bref d'évocation. Tandis que donner un droit
d'intervention dans le cas d'un grief de nature collective et dans le contexte
d'un maraudage, puisqu'on a fait en sorte que, même en période de
maraudage, le droit de grief subsiste, on s'imagine le genre de choses que cela
pourrait produire dans certains cas. Les interventions multiples, mais, dans le
fond, dont la raison n'est pas vraiment la protection du droit de l'individu,
peuvent aussi être une arme, on présume de la pire
hypothèse. Je pense qu'en mentionnant le salarié
intéressé, on couvre la notion que recherchait fondamentalement
le député de Saint-Laurent.
D'autre part, finalement, si vous me permettez une dernière
remarque au sujet de la conférence des arbitres qui nous a soumis un
très intéressant mémoire, avec qui j'ai eu une longue
discussion, ainsi que celui de nos fonctionnaires ils se sont cependant
un peu excusés de la façon un peu rapide avec laquelle ils
avaient été obligés de fournir le mémoire,
puisqu'ils ont fait une couple de conférences éclair de
réunions de l'exécutif, etc., ils nous ont soumis
essentiellement des avis sur des idées, des choses
générales, quelques problèmes spécifiques qui
traînaient depuis la loi no 24. Mais je ne suis pas sûr, à
la lumière de l'argumentation que nous avons ici, qu'ils ne
reprendraient pas leur texte quant au mémoire à ce sujet. Le
contexte dans lequel j'ai entendu leurs revendications...
M. Forget: Le texte est là.
M. Johnson: Oui, mais, cependant, ceux qui l'ont
rédigé me l'ont présenté lors d'une réunion
au ministère, et, effectivement, nous avons discuté de cela, et
ce dont il a toujours été question dans la discussion,
c'était effectivement l'obligation qu'il faut imposer aux arbitres
d'entendre ceux qui sont touchés par le grief. J'ai toujours compris que
c'était l'objectif. Cependant, le texte est là, j'en conviens. Ce
n'est pas un texte de loi, le texte de la conférence des arbitres, c'est
un mémoire.
M. Forget: C'est un texte de personnes qui connaissent
certainement l'arbitrage et ce que cela veut dire.
M. Pagé: Sûrement les questions d'arbitrage.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Portneuf.
M. Pagé: Tout le monde a les mêmes objectifs en
tête, c'est-à-dire que l'association soit entendue, que
l'employeur soit entendu et que le salarié visé soit entendu lui
aussi et que ce ne soit pas dans le cas d'un grief sur la définition de
la tâche, par exemple, que ce soit 150 salariés qui viennent se
faire entendre pour un motif ou pour l'autre. Il s'agit maintenant de le
formuler.
Dans la formulation qui est proposée par le ministre de
salarié intéressé, qui déterminera que le
salarié est intéressé ou non? C'est le tribunal. D'accord?
Par surcroît, l'arbitre a l'immunité, en plus depuis
tantôt, depuis l'amendement que vous avez rejeté pourquoi
ne pas le dire clairement. En fait, c'est ce qu'il s'agit de rechercher par une
discussion en commission parlementaire?
C'est ma question: Si le tribunal dit, ou statue que Jos Bleau
qui prétend qu'il est intéressé par le grief qui est
débattu ou déclare qu'il n'est pas
intéressé, qu'arrive-t-il?
M. Johnson: L'individu va peut-être aller en Cour
supérieure avec un bref d'évocation.
M. Pagé: Oui, des procédures.
M. Johnson: Sauf que ce sera fait une fois, ce sera
réglé.
M. Pagé: Oui, mais ce sont des problèmes. M.
Johnson: Non, mais c'est un cas patent.
M. Pagé: Je suis d'accord. C'est cela qui est le
problème.
M. Forget: Cela prend huit mots pour le préciser dans la
loi.
M. Bisaillon: II faut s'entendre sur le mot
'intéressé". Cela veut dire, dans les circonstances, qu il faut y
être impliqué.
M. Pagé: Qui démontre un intérêt.
M. Bisaillon: Vous écoutez, cela m'intéresse, mais
cela n'implique pas...
M. Pagé: C'est intéressant à part cela. Je
n'en cloute pas. On est d'accord en principe. C'est la même chose qu'on
recherche. Il s'agit de le définir.
M. Bisaillon: C'est la nature même du grief.
M. Pagé: Je suis d'accord pour que le type aille
présenter un recours en Cours supérieure. Il n'y a pas de
problème. Mais ce sont quand même des démarches, des
procédures et c'est onéreux. Pourquoi ne pas profiter de
l'amendement et le dire clairement; cela va prendre quelques mots, et cela va
être réglé. On est ici pour faire des bonnes lois.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Bellechasse.
M. Goulet: C'était seulement pour dire au ministre...
M. Pagé: Soyez donc un bon gouvernement! M. Jolivet: M. le
Président...
Le Président (M. Marcoux): Le député...
J'attends que le ministre...
M. Goulet: Mais c'est parce que le ministre parlait du texte du
mémoire de la Conférence des arbitres.
M. Jolivet: Je sais qu'il veut parler au ministre, mais pendant
ce temps-là, je pourrais peut-être poser une question? C'est qu'on
pose...
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Beauharnois...
M. Lavigne: Cela va peut-être revenir un peu à ta
question. Ce que je recherche dans cette argumentation, c'est de pouvoir donner
au travailleur, à l'individu qui se sentirait lésé, le
droit de pouvoir intervenir. Que je regarde dans notre formule ou dans la
vôtre, c'est toujours le tribunal d'arbitrage qui a le pouvoir, autant
dans votre amendement que dans votre...
M. Pagé: Dans un cas, il est invité, dans l'autre
il a le droit de venir. C'est cela la différence.
M. Jolivet: C'est sur ce point que je veux intervenir pour la
raison suivante, parce que cela regarde ce qui a été dit. On dit:
"Dans le cas où on le présente comme un amendement nouveau, le
tribunal d'arbitrage doit donner au syndicat, à l'employeur et aux
salariés intéressés"... La question que vous posiez tout
à l'heure était pour savoir qui va déterminer qui est
intéressé. Or, dans le texte présenté par votre
amendement: "Le salarié qui possède un droit d'intervention", qui
va dé- terminer qu'un salarié a un droit d'intervention? Qui?
NI. Pagé: C'est le tribunal qui va le décider. M.
Jolivet: Donc...
M. Pagé: Le type aura le droit si vous voulez me
laisser terminer de se faire entendre. Sur la foi de cela, le tribunal
pourra dire: Monsieur, on considère que vous n'avez pas de droit
d'intervention!
M. Jolivet: Oui, mais dans l'un comme dans l'autre...
M. Pagé: On a les mêmes objectifs et on veut
atteindre la même chose dans des termes différents. Dans l'un, le
tribunal doit donner aux parties intéressées, aux salariés
intéressés, l'occasion de venir et d'être entendus. Dans
l'autre, le salarié a le droit d'y aller.
M. Johnson: M. le Président, si vous permettez, est-ce que
je pourrais demander qu'on suspende la discussion autour de cet article. On va
fouiller, parce que c'est plein de conséquences, un mot, à ce
niveau-là,... les répercussions que ça a sur les douze
articles qui suivent. Quand on parle du consentement des parties pour qu'il y
ait une extension du délai de l'arbitrage, cela pose des
problèmes. Je pense donc qu'il faudrait qu'on le regarde.
M. Goulet: Avant de suspendre la discussion, je voulais dire au
ministre que dans le mémoire présenté par la
Conférence des arbitres, le mot "parties", pour eux, signifie "parties
signataires", tandis que nous parlons de "parties intéressées".
C'est peut-être là que... A "parties signataires", ils donnent la
définition, "sous-entendu signataires", c'est-à-dire l'employeur
et le syndicat. C'est peut-être de là que cela part. Je ne sais
pas si vous... Parce que, dans le projet de loi 24... Excusez-moi, M. le
ministre. Tantôt vous parliez du texte présenté par la
Conférence des arbitres. Lorsque ces gens parlent de "partie", quand ils
donnent la définition de "parties", ils disent "employeur et syndicat".
Mais au début de leur texte, si on se rapporte au projet de loi 24, le
qualificatif qui suivait le mot "parties", était "signataires", tandis
que nous disons "parties intéressées". Leur définition de
signataire, pour "parties (signataires)", c'est la chose, tandis que
"intéressées" cela peut vouloir dire "et le
salarié"...
M. Johnson: Je suis prêt à avouer que, même
dans sa formulation actuelle, indépendamment de l'amendement du
député de Saint-Laurent, cela pose des difficultés
à cause de la définition de qui sont les intervenants à
l'article 88, pour ne pas parler de parties et qu'on s'enferre encore
là-dedans. J'aimerais qu'on suspende là-dessus et qu'on continue
et on essaiera d'y revenir.
Le Président (M. Marcoux): Y a-t-il d'autres amendements
à l'article 88e?
M. Forget: A l'article 88e, non, M. le Président. Le
Président (M. Marcoux): A l'article 88f?
M. Johnson: J'aurais simplement une correction à apporter
à l'article 88f, qui est un peu concordante avec l'autre. Au lieu de se
lire: "A la demande d'une partie, le tribunal d'arbitrage peut assigner',
c'est: "A la demande d'une partie, le président du tribunal d'arbitrage
peut assigner'.
M. Chevrette: C'est normal.
M. Johnson: Alors, à 88f: "A la demande d'une partie, le
président du tribunal d'arbitrage peut assigner un témoin pour...
etc.". Cela va?
M. Forget: Cela va.
M. Johnson: Pour 88f, M. le Président, y a-t-il des
discussions?
Le Président (M. Marcoux): Est-ce qu'il y a
d'autres...
M. Forget: Oui, il y a des discussions. On n'invente rien, M. le
Président, on est là ce soir et on essaie de tirer ce qui
paraît avoir été omis.
Je vais lire tout de suite l'amendement; son sens est, là aussi,
évident.
M. Lavigne: Oui, lire l'amendement d'abord, c'est une bonne
habitude à prendre.
M. Forget: Oui, c'est parce que parfois il est plus facile
à comprendre quand on l'a d'abord expliqué, mais ce n'est pas le
cas ici, je pense que c'est assez évident. "Que le paragraphe 88f, de
l'article 46, soit modifié en remplaçant, dans la
quatrième ligne, le mot "le" par les mots "le tribunal peut
émettre un bref d'assignation, s'il est d'avis que le témoin est
nécessaire ou le document pertinent au litige. Le paragraphe
amendé se lirait comme suit: 88f "A la demande d'une partie, le
président du tribunal d'arbitrage peut assigner un témoin pour
déclarer ce qu'il connaît, pour produire un document ou pour les
deux objets à la fois. Le tribunal peut émettre un bref
d'assignation s'il est d'avis que le témoin est nécessaire ou le
document pertinent au litige. Le bref d'assignation doit être
signifié par le tribunal d'arbitrage au moins cinq jours francs avant la
convocation ".
L'idée, M. le Président, ici et cela vient
également d'un mémoire qui a été
présenté c'est qu'on est en face d'un tribunal d'arbitrage
qui n'est pas, malgré l'habitude prise sur la papeterie de la Cour
supérieure, un tribunal judiciaire dans le plein sens du mot. On donne
à une partie le pouvoir de provoquer une assignation de témoin.
De la façon que c'est formulé, il est loin d'être
évident que le tribunal d'arbitrage ait une discrétion, parce
qu'on se souviendra de l'explication donnée par le ministre qui
alléguait une opinion de l'honorable juge Louis-Philippe Pigeon selon
laquelle, dans les cas de tribunaux administratifs et quasi judiciaires, le mot
"peut " est attributif et est l'équivalent de "doit". On a d'ailleurs
rejeté l'une de nos motions d'amendement sur cette base. Alors, pour
comprendre cela, il faut relire le texte en disant: "Le président du
tribunal d'arbitrage doit assigner un témoin à la demande de
l'une des parties." On se rend compte tout de suite que le tribunal n'a pas le
pouvoir d'apprécier si c'est une demande farfelue, parce qu'une des
parties peut assigner la ville de Montréal et la ville de Québec
pour un tribunal, et le tribunal peut dire: II les a demandées, il faut
bien les assigner... Ou alors des tonnes de documents, tous les talons de
chèques de tous les salaires versés depuis dix ans, ou je ne sais
quoi... Des demandes absolument incroyables et il appartiendrait au tribunal
d'arbitrage de juger si ces témoins sont vraiment nécessaires et
si les documents sont vraiment pertinents au litige. Encore une fois, ça
a été demandé et étant donné que ce n'est
pas un tribunal qui a toutes les règles de pratique et de
procédure ordinaire, je pense que ce serait une chose qu'il faudrait
prévoir, pour éviter les abus.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Johnson: Voulez-vous suspendre une minute?
M. Forget: On va suspendre ça aussi.
M. Johnson: On peut suspendre au complet, vous savez.
M. Jolivet: Non, ça va bien là! Continuons.
Une Voix: Ne donnez pas de mauvaises habitudes à notre
président.
Le Président (M. Marcoux): C'est suspendu pour quelques
minutes.
(Suspension de la séance à 22 h 4)
Reprise de la séance à 22 h 30
Le Président (M. Marcoux): 88f?
M. Johnson: Je commencerais au premier article que nous avions
suspendu, c'est-à-dire 88e, qu'on pourrait lire comme suit. Je pense
qu'évidemment, cela ne rend pas exactement ce que voulait le
député de Saint-Laurent. Cependant, je pense que c'est quelque
part à mi-chemin. J'espère qu'il en sera au moins partiellement
satisfait. Cela ne crée pas de droit d'intervention proprio motu.
Cela se lirait comme suit: "Le tribunal d'arbitrage doit donner,
à l'association accréditée, à
l'employeur et au salarié intéressé, l'occasion
d'être entendus. "Si un intéressé ci-dessus, dûment
convoqué par écrit, etc."
Et, au dernier alinéa: "être fondé sur le fait qu'il
a ainsi procédé en l'absence de cet intéressé
".
Est-ce que cela va ou si je dois répéter?
Le Président (M. Marcoux): Vous devriez
répéter.
M. Johnson: On va répéter brièvement. "Le
tribunal d'arbitrage doit donner, à l'association
accréditée, à l'employeur et au salarié
intéressé, l'occasion d'être entendus. "Si un
intéressé ci-dessus, dûment convoqué par un avis
écrit d'au moins cinq jours francs de la date, de l'heure et du lieu
où il pourra se faire entendre ne se présente pas, ou refuse de
se faire entendre, le tribunal d'arbitrage peut procéder à
l'audition de l'affaire et aucun recours judiciaire ne peut être
fondé sur le fait qu'il a ainsi procédé en l'absence de
cet intéressé.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que le
député de Saint-Laurent consent à retirer son projet
d'amendement pour que nous discutions à partir de la base des
modifications proposées par le ministre?
M. Forget: Non, M. le Président, je vais demander
même un vote enregistré sur mon amendement, après quoi on
pourra procéder à l'amendement du ministre.
Le Président (M. Marcoux): On peut procéder au vote
sur l'amendement immédiatement?
M. Forget: Quant à moi, oui.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Saint-Laurent proposait de modifier le premier alinéa de l'article 88e,
de la façon suivante:
Que le premier alinéa du paragraphe 88e de l'article 46 soit
modifié en ajoutant, dans la deuxième ligne, après le mot
"entendus", les mots "ainsi qu'aux salariés qui possèdent un
droit d'intervention.
Quels sont ceux qui sont pour l'amendement proposé par le
député de Saint-Laurent.
M. Bellemare (Johnson) remplacé par M. Russell
(Brome-Missisquoi)? M. Bisaillon (Sainte-Marie)?
M. Bisaillon: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Goulet (Bellechasse)?
M. Goulet: Pour.
Le Président (M. Marcoux): M. Ciaccia (Mont-Royal)? M.
Chevrette (Joliette-Montcalm)?
M. Chevrette: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Couture (Saint-Henri)? M.
Mercier (Berthier)? M. Forget (Saint-Laurent)?
M. Forget: Pour.
Le Président (M. Marcoux): M. Gagnon (Champlain)?
M. Gagnon: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Johnson (Anjou)?
M. Johnson: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Jolivet (Laviolette)?
M. Jolivet: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Lacoste (Sainte-Anne)?
M. Lacoste: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Laplante (Bourassa)?
M. Laplante: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Lavigne (Beauharnois)?
M. Lavigne: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Mackasey
(Notre-Dame-de-Grâce)? M. Godin (Mercier)?
M. Godin: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Pagé (Portneuf)?
M. Pagé: Pour.
Le Président (M. Marcoux): M. Roy (Beauce-Sud)?
La motion d'amendement est rejetée par neuf voix contre
trois.
Nous revenons au nouveau texte proposé par le ministre qui
comprend, en fait, quatre amendements: remplacer les mots "aux parties
intéressées" par "à l'association
accréditée, à l'employeur et au salarié
intéressé"; changer les mots "une partie", dans le
deuxième alinéa, par "si un intéressé ci-dessus
dûment convoqué"; ensuite, remplacer "elle pourra " par "il
pourra", et, à la fin, "en l'absence de cet intéressé"
à la place de "cette partie ".
M. Bisaillon: Adopté.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que le paragraphe 88e
est adopté?
M. Bisaillon: Adopté.
M. Forget: On n'a pas besoin de l'adopter, mais la
délibération est terminée sur le paragraphe.
Le Président (M. Msrcoux): La délibération
est terminée.
Le paragraphe 88f.
M. Johnson: On a ici le texte de l'amendement du
député de Saint-Laurent qui changerait l'article pour qu'il se
lise comme suit: "A la demande d'une partie, le président du tribunal
d'arbitrage peut assigner un témoin pour déclarer ce qu il
connaît, pour produire un document ou pour les deux objets à la
fois. Le président du tribunal peut émettre un bref d'assignation
s'il est d'avis que le témoin est nécessaire ou le document
pertinent au litige. Le bref d'assignation doit être signifié, par
le président du tribunal d'arbitrage, au moins cinq jours francs avant
la convocation".
Ce qu'on introduit ici, finalement, c'est un pouvoir
discrétionnaire au président du tribunal d'arbitrage pour
décider si, oui ou non, il va assigner un témoin. En d'autres
termes, puisque, comme on en fait lecture l'autre jour, le juge Pigeon dit que,
dans le cas d'un organisme judiciaire ou quasi judiciaire or les
tribunaux d'arbitrage sont considérés comme quasi judiciaires
le mot "peut" signifie "doit" et il est attributif de juridiction, en
pratique, qu'est-ce que ça veut dire? Cela veut dire que, si l'une des
parties au litige l'association accréditée ou l'employeur
dit: Je vais assigner prenons un exemple extrême 150
personnes, en cours de négociation, pour créer un moyen de
pression indirecte, et si la partie syndicale, à l'occasion d'un grief
d'arbitrage, en arbitrage, décide d'assigner les 150 professeurs d une
même école, le même jour, devant le tribunal, techniquement,
en vertu de notre version du texte, avant l'amendement du député
de Saint-Laurent, le président du tribunal n'a aucun choix, il est
obligé d assigner tout ce monde. Si je comprends bien, c'est un peu ce
que veut éviter le député de Saint-Laurent. D'autre part,
la conséquence de l'adoption de l'amendement du député de
Saint-Laurent amènerait la chose suivante: On pourrait avoir affaire
à ce qui risquerait d'être interprété, à tort
ou à raison, comme un déni de justice, dans le cas d un
président qui déciderait de ne pas assigner un témoin
qu'une partie demande qu'on assigne.
Si on constate ce qui se fait en Cour supérieure, c'est que le
moyen de pression qui consiste à vider un même endroit de tous les
salariés en vertu d'un bref d'assignation... Il existe, de toute
façon, devant la Cour supérieure, au moment où on se
parle. On peut très bien, dans une cause, en Cour supérieure,
faire assigner 300 témoins. L assignation se fait simplement à
partir du document, sur papier de la Cour supérieure, rempli par
l'avocat, le sceau donné à huissier et les gens sont
automatiquement assignés. En pratique, ce que le juge de la Cour
supérieure fera, c'est que, après avoir entendu les quatre
premières personnes qui ont toutes dit la même chose, il peut
très bien décider qu'il n en entend plus; il dira: De toute
façon, je sais que les 150 qui viendront ici me diront exactement la
même chose.
C'est un peu le cas pour le président du tribunal d'arbitrage; il
pourrait très bien faire la même chose et dire, dans le contexte
où on permet cette assignation massive, parce qu'on l'oblige à
assigner dès qu'une partie le demande, on pourrait quand même lui
permettre également de faire comme le juge de la Cour supérieure
fait, et dire. J ai entendu les parties. Point. Je suis suffisamment
informé.
Encore là, c'est un cas assez important. Ce n'est pas tellement
une question de ce qu est le droit collectif versus le droit individuel. C est
carrément la notion de ce qu'est l'assignation devant nos tribunaux. Et
donner ce pouvoir discrétionnaire au tribunal d'arbitrage pourrait
amener un arbitre mal luné mais il y a des juges en Cour
supérieure aussi qui peuvent l'être de refuser
carrément d'assigner une personne. Un juge de la Cour supérieure
n'a même pas ce pouvoir de refuser l'assignation d'une personne. C'est
lavocat qui décide d'assigner un témoin qui l'assigne. Je pense
que je ne me trompe pas. Le député de Portneuf est d'accord avec
cela? Ici, on donnerait en fait au tribunal d'arbitrage un pouvoir
supérieur au pouvoir d'un juge de la Cour supérieure. En disant:
A la demande des parties... Le juge a une demande devant lui, le
président du tribunal d'arbitrage a une demande devant lui pour assigner
150 personnes. Il décide: Non, vous allez en assigner douze. Même
un juge de la Cour supérieure ne peut pas faire cela.
En ce sens-là, l'amendement apporté par le
député de Saint-Laurent a quelque chose d un peu dangereux.
Cependant, il pourrait répondre à cela et il n'aurait pas
complètement tort que si le président du tribunal
d'arbitrage décide de ne pas assigner un témoin mais ce n
est peut-être pas nécessairement dans un contexte aussi
caricatural que celui que je soulignais de 150 professeurs ou 150 personnes
dans un milieu de travail il s'exposerait à une évocation
en Cour supérieure pour déni de justice. Parce que I'avocat, le
protagoniste, le représentant de l'association accréditée
pourrait dire: Le président du tribunal d'arbitrage m'a
empêché de faire ma preuve. M'ayant empêché de faire
ma preuve, c'est un déni de justice qui est une des causes
d'évocation en Cour supérieure ou cela peut-être un
manquement à la règle audi alteram partem.
On aurait donc cette garantie, malgré I amendement du
député de Saint-Laurent, que si jamais un président de
tribunal d'arbitrage s avisait injustement de ne pas assigner quelqu'un, il y
aurait toujours le recours en Cour supérieure.
Et je reviens sur cette même notion que j avais, j aimerais juste
entendre le député de Saint-Laurent me parler un peu de cela. C
est que finalement on confie au président du Tribunal d'arbitrage un
pouvoir supérieur à celui d'un juge de la Cour supérieure.
Je trouve que c'est considérable.
M. Goulet: M. le Président, si vous permettez...
Le Président (M. Marcoux): C'est parce que le ministre a
posé une question au député de Saint-Laurent.
M. Goulet: Excusez-moi, je pensais qu'il avait
terminé...
M. Forget: Brièvement, je vais vous donner la parole, M.
le député de Bellechasse. C'est vrai, dans un certain sens, que
l'analogie qu'on peut faire avec un tribunal de la Cour supérieure nous
amène à ces constatations. Cependant, la question qu'il faut se
poser, c'est peut-être que si l'analogie est juste, il n'est pas
strictement vrai qu'on donnerait plus de pouvoir au tribunal du travail. On
donnerait, dans le fond, moins de pouvoir au mécanisme d'arbitrage, de
mettre en jeu des témoins. Ce serait évidemment par le biais d'un
pouvoir discrétionnaire donné au président du tribunal,
mais il me semble que l'effet total serait que le mécanisme d'arbitrage
ne pourrait pas être utilisé aussi pleinement et aussi loin que le
mécanisme judiciaire.
Je pense que c'est approprié à la nature d'un tribunal
d'arbitrage qui n'est pas la Cour supérieure qui doit quand même
demeurer à l'intérieur de certaines limites, être
raisonnable, être accessible, être raisonnablement souple dans ses
procédures. Et souple dans ses procédures peut aussi vouloir dire
que toutes les ressources de la procédure ne seront pas ouvertes
à l'une et l'autre des parties, que l'une et l'autre des parties ne peut
pas exploiter la procédure au même degré devant un tribunal
d'arbitrage qu'elle peut le faire devant un tribunal de droit commun,
étant donné l'objectif qu'on vise qui est de rendre la justice
dans un cadre relativement informel, souple, dénué de tous les
moyens ou les façons de s'accrocher, justement, à tous les droits
qu'on a devant un tribunal de droit commun pour protéger le dernier de
ses privilèges et le dernier de ses droits, parce que ce sont des
derniers recours, dans le fond, les tribunaux de droit commun.
D'ailleurs, l'idée que ce sont des derniers recours est bien
illustrée par ce qu'a dit le ministre sur le pouvoir de surveillance de
la Cour supérieure. Cette restriction qu'on imposerait au tribunal du
travail serait, dans le fond, assez compatible avec le pouvoir de surveillance
de la Cour supérieure. Il y a une bonne relation là. On dit:
C'est vrai, il y a un pouvoir de surveillance. Pourquoi? Parce que
peut-être que la procédure ne permet pas tous les raffinements
devant le tribunal du travail, qui sont possibles en Cour supérieure.
Pourquoi ne permet-elle pas tous les raffinements? Parce que tous les
raffinements sont coûteux, ils sont sources possibles d'entraves, etc.,
pour l'une ou l'autre des parties. Par exemple, on ne prévoit pas la
sténographie de ce qui se passe devant le tribunal. C'est certainement
aussi une restriction, dans un certain sens, puisqu'on aura plus de
difficulté à faire la preuve même du caractère ultra
vires d'une décision de l'arbitre, etc., mais on le fait parce qu'on
veut que ce soit plus informel, moins ouvert à de la procédurite,
si on veut.
Dans ce contexte, je pense que ce n'est pas tellement une expansion du
pouvoir du tribunal, et cela s'inscrit dans le tribunal du travail qui a moins
de pouvoir de convoquer des gens et de lancer des subpoenas. De fait, il n'a
pas le pouvoir de lancer des subpoenas. Mais, même au niveau des brefs
d'assignation, il aurait moins de pouvoir qu'un tribunal de droit commun, que
la Cour supérieure. Il me semble que c'est approprié à la
nature de...
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Bellechasse.
M. Goulet: M. le Président, j'aime bien l'amendement
proposé par le député de Saint-Laurent; par contre,
à la première partie, à la suite de l'argumentation du
ministre, cela me satisfait, quant à la première partie de
l'amendement. Quant à la deuxième partie, et c'est là que
je trouve le bien-fondé de cet amendement, c'est sur la production de
documents, les coûts exorbitants pour produire des documents dont on
n'aurait pas besoin. Cela peut être un moyen de pression, à un
moment donné, et c'est là que c'est dangereux.
Cet amendement répond très bien à une demande du
Barreau qui, dans son mémoire, disait: "II y aurait lieu de
préciser qu'il s'agit de témoins nécessaires ou d'un
document pertinent au litige, afin de laisser une certaine discrétion
à l'arbitre, sinon, l'assignation d'un témoin ou la demande de
production de documents pourrait avoir des fins autres que celles du grief
soumis à l'arbitrage ".
Or, les fins autres, si le Barreau y a pensé et si le
député de Saint-Laurent y a pensé, je vois le
bien-fondé de cet argument, surtout pour la production de documents,
parce que, si une partie décide de demander l'exemple qu'a
donné le député de Saint-Laurent des
chèques, s'il faut reculer dix ans en arrière, ou des copies de
contrats ou quoi que ce soit qui deviendrait très onéreux pour la
partie qui fournit ces documents et qu'on juge qu'on n'en a pas besoin, cela
devient très dispendieux. Cela peut être un moyen de pression dont
une partie peut se servir, et c'est pour cela que je trouve l'amendement du
député de Saint-Laurent bien, surtout pour la deuxième
partie, quant au coût exorbitant, et surtout que cela répond
à une demande du Barreau.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Johnson: M. le Président, à la lumière de
cette situation de dilemme, pour ne pas dire tiraillement, je pense que ce
n'est pas une question aussi fondamentale que l'affaire de l'immunité
où c'est extrêmement difficile de trancher sur l'affaire de
l'immunité, je pense que, dans le cas présent, c'est plus au
niveau du déroulement, même s'il y a la notion que j'ai
évoquée du déni de justice possible et du bref
d'évocation. Que dirait le député de Saint-Laurent d'une
formule un peu comme celle-ci? Ce qu'on veut faire, c'est finalement
évi-
ter les abus. C'est un peu cela qu'on recherche. Si on disait: "A la
demande d'une partie, le président du tribunal d'arbitrage peut assigner
un témoin pour déclarer ce qu'il connaît, pour produire un
document, ou pour les deux objets à la fois, sauf s'il est d'avis que
l'assignation demandée est futile à sa face même", je pense
qu'on couvrirait là le cas d'abus évidents, mais, d'autre part,
on ne donnerait pas au président du tribunal d'arbitrage un pouvoir
tellement discrétionnaire qui risquerait, dans un cas précis
d'être un déni de justice pour une personne.
M. Forget: M. le Président, je ne vois aucune objection,
mais je m'interroge sur la nuance que le ministre voit entre l'amendement que
nous avons présenté et sa formulation. Autrement dit, j'aimerais
qu'il nous fournisse un exemple...
M. Johnson: Un exemple, oui.
M. Forget: ... d'un document qui n'est pas nécessaire et
d'un document qui n'est pas pertinent, mais dont la demande n'est pas futile,
à sa face même.
M. Johnson: Non, c'est-à-dire...
NI. BiSHillon: Est-ce que je pourrais me permettre de donner deux
exemples?
M. Johnson: Tous les procès-verbaux du syndicat depuis les
cinq dernières années...
M. Forget: C'est futile à sa face même... M.
Johnson: C'est futile à sa face même. M. Forget: ...
mais c'est non pertinent.
M. Chevrette: Celui du 15 février 1976, par exemple,
pourrait être pertinent; mais demander tous les procès-verbaux
depuis cinq ans, c'est prima facie...
M. Forget: Le jugement se porte surtout sur la demande telle que
formulée.
M. Johnson: Prenons le cas du témoin plutôt, que les
cas du document je pense que c'est plus simple. On dit, dans l'amendement du
député de Saint-Laurent: "Le président du tribunal peut
émettre un bref d'assignation s'il est d'avis que le témoin est
nécessaire. " On ne lui permettra pas, dans la formulation que je
suggère, de décider que tel témoin est nécessaire
ou pas. Prenons l'exemple qui est la pratique courante; les parties assignent
trois ou quatre témoins et le président décide: Non, ce
témoin, je ne veux pas l'entendre. Je considère qu'il pourrait,
en vertu de l'amendement apporté par le député de
Saint-Laurent... Tandis qu'on dit: "Sauf s'il est d'avis que l'assignation
demandée est futile à sa face même". Le fait de demander
150 assignations, c'est futile à sa face même. Le fait de dire: Je
veux qu'un tel sur un total de quatre personnes, ce n'est pas futile à
sa face même. Tandis qu'avec l'amendement du député de
Saint-Laurent, le président pourrait décider, dans sa sagesse,
que ce n'est pas pertinent d'entendre M. Untel. Il pourrait justifier plus
facilement son attitude s'il disait: "C'est futile à sa face même
d'assigner 150 personnes. " Je pense que cela restreint finalement l'univers de
référence pour l'exercice de cette discrétion qu'on lui
donne.
M. Forget: Je suis fortement tenté d'être d'accord
avec le ministre; je suis tiraillé aussi, mais je me demande si son
amendement...
M. Johnson: Join the club...
M. Forget: Je me demande si son amendement n'est pas plus
restrictif que celui que nous avons présenté dans le sens
suivant; c'est que si on dit au président du tribunal: Vous pouvez
refuser de délivrer un bref d'assignation, et pour en décider,
vous vous limiterez à examiner la face même de la demande. Dans
l'autre cas, il va regarder la face même de la demande. Cela va
être, sans aucun doute, un facteur qui va l'amener à porter un
jugement, mais aussi il va pouvoir interroger les parties
intéressées. Il va pouvoir dire: Ecoutez, vous me demandez 150
personnes, vous me demandez tel document. A sa face même, je juge cela
futile ou non nécessaire, mais peut-être avez-vous des raisons
valables. J'aimerais vous entendre. Avec notre amendement, il peut poser cette
question. Avec l'amendement du ministre, il va dire: Ecoutez, je n'ai pas
à me prononcer et à vous questionner à savoir si c'est
utile, ou si cela peut être nécessaire. Tel que formulé,
c'est futile.
M. Johnson: II appartiendra, à ce moment, à la
partie, si cela a des chances d'être utile ou pertinent, de ne pas le
formuler de façon futile, à sa face même.
M. Forget: Oui, mais c'est peut-être impossible dans les
circonstances. Cela peut forcer la crédibilité...
M. Johnson: Est-ce que quelque chose de pertinent ou d'utile
peut...
M. Forget: ...
M. Johnson: ... ne pas être futile à sa face
même? Je pense que oui, par définition. Je pense que, par
définition, quelque chose qui est utile. Je m'excuse, je me reprends,
j'ai fait un lapsus et un non-sens. Je recommence. Est-ce que quelque chose qui
est utile et pertinent, ne peut pas être à sa face même
futile, par définition? Si on juge que c'est utile et pertinent,
à sa face même, cela ne peut pas se présenter comme
étant futile.
M. Forget: Généralement, je suis d'accord. Je
soulève le problème qu'il peut y avoir un doute à
l'occasion, parce que ce n'est peut-être pas tou-
jours toute l'armée canadienne qu'on va convoquer, mais un nombre
plus limité.
M. Godin: Une porte s'est ouverte et fermée.
M. Forget: A ce moment, le doute peut exister. Ce que je dis,
c'est que selon la formulation du ministre, même quand le
président du tribunal pourrait avoir un doute et qu'il aimerait se faire
éclairer sur son doute, strictement parlant, il pourrait dire: Ecoutez,
je dois décider d'après les apparences, et non pas d'après
l'argumentation que vous allez me présenter. C'est tout.
M. Johnson: Ce serait... Mais ce n'est qu'un doute dans mon
esprit et il me semble que c'est plus restrictif.
M. Johnson: Je préciserais encore que ce ne serait pas que
l'assignation demandée, c'est que la demande d'assignation et
là je pense qu'on le circonscrit encore plus sauf s'il est d'avis
que la demande d'assignation est futile à sa face même. La demande
d'assignation, c'est assigner 150 personnes. Par contre, si on disait:
L'assignation demandée c'est d'assigner M. Untel, ce n'est pas
nécessairement... Donc, on lirait le texte 88f comme suit, M. le
Président?
Le Président (M. Marcoux): Auparavant, je voudrais savoir
si le député de Saint-Laurent retire son amendement pour que le
ministre introduise le sien?
M. Forget: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): L'amendement est donc
retiré et nous revenons au texte de 88f.
M. Johnson: Qui se lirait comme suit, M. le Président: "A
la demande d'une partie, le président du tribunal d'arbitrage peut
assigner un témoin pour déclarer ce qu'il connaît, pour
produire un document ou pour les deux objets à la fois, sauf s'il est
d'avis que la demande d'assignation est futile à sa face même. Le
bref d'assignation doit être signifié au moins cinq jours francs
avant la convocation vous vous rendez compte que je supprime "par le
président du tribunal d'arbitrage", puisque ce n'est pas le
président du tribunal d'arbitrage qui va signifier, c'est un huissier
alors, ce qu'on dit, c'est: "Le bref d'assignation doit être
signifié au moins cinq jours francs avant la convocation". Est-ce que
cela va?
Le Président (M. Marcoux): Ceci remplace le premier
alinéa de 88f.
M. Johnson: Exactement, M. le Président. Le
Président (M. Marcoux): Adopté?
M. Johnson: Est-ce qu'on peut continuer? C'est cela?
M. Forget: On peut continuer.
Le Président (M. Marcoux): Le reste est adopté.
D'accord? Pour la procédure...
M. Johnson: Y a-t-il d'autres discussions sur 88f?
M. Forget: Non.
Le Président (M. Marcoux): Bon, 88g.
M. Johnson: II y a, à 88g, M. le Président, qui
doit se lire comme suit, une correction mineure aux premiers mots. Il ne s'agit
pas de dire: "Le président du tribunal peut poser à un
témoin les questions qu'il croit utiles". C'est bel et bien: "Les
membres du tribunal peuvent poser à un témoin les questions
qu'ils croient utiles". Je répète 88g, premier alinéa:
"Les membres du tribunal peuvent poser à un témoin les questions
qu'ils croient utiles ". Est-ce que cela va?
Pour le secrétariat des commissions, cela va? A 88g, cela va?
M. Forget: Oui, cela va.
M. Johnson: Donc, 88h se lirait comme suit. Je vais retrancher
simplement quelques mots à la fin. J en fais lecture quand même au
complet: "Un témoin ne peut refuser de répondre pour le motif que
sa réponse pourrait tendre à l'incriminer ou à l'exposer
à une poursuite de quelque nature qu'elle puisse être; mais s'il
fait une objection en ce sens, sa réponse ne pourra servir contre lui
dans une poursuite pénale intentée en vertu d'une loi du
Québec ". On retranche le reste, c'est-à-dire "ou à
l'occasion d'une poursuite criminelle, ultérieure, sauf pour parjure ",
puisqu en fait ceci est prévu à l'article 5 de la Loi de la
preuve. Je pense qu'il est inopportun, dans une loi provinciale finalement, de
répéter, puisqu'on parle de l'application du Code criminel, qui
est de juridiction fédérale. Ceci n'empêche aucunement le
tribunal d'avertir la personne qu'elle peut se prévaloir des
dispositions de l'article 5. Est-ce que c'est réglé, M. le
Président? Pour 88h?
Le Président (M. Marcoux): 88h, cela va? 88i, cela va?
88j, cela va? Article 88k?
M. Forget: Non...
M. Bisaillon: ... selon l'article 67 du code?
M. Forget: Qu'est-ce qu'il y a à l'article 67?
M. Johnson: Selon l'équité et la bonne
conscience.
M. Forget: M. le Président, le député de
Sainte-Marie a une capacité de télépathie. Effectivement,
nous avons un amendement à cet article.
M. Godin: Excusez-moi, mais est-ce qu'il existe dans les us et
coutumes du parlementarisme une telle chose que le seul "filibuster"...
Le Président (M. Marcoux): II existe de la
télépathie.
M. Forget: M. le Président, une motion d'amendement
à l'article 46: "Que le paragraphe 88k de l'article 46 soit
modifié en retranchant dans la deuxième ligne le mot "seul " et
en ajoutant dans la troisième ligne après le mot "enquête "
les mots "et de tout fait pertinent au grief dont il a connaissance d'office
selon l'équité et la bonne conscience". Le paragraphe
amendé se lirait comme suit: "Le tribunal d'arbitrage doit rendre sa
sentence à partir de la preuve recueillie à l'enquête et de
tout fait pertinent au grief dont il a connaissance d'office selon
l'équité et la bonne conscience." Il s'agit, et je devrais le
dire en commençant, de noter avec satisfaction, ce que j'ai d'ailleurs
fait dans mes remarques préliminaires sur cet article,
l'élimination qu'a effectuée le ministre de la
référence à la règle de droit qui était de
nature, bien sûr, à enfermer le tribunal d arbitrage dans un
juridisme excessif. Cependant, on veut donner au tribunal d'arbitrage, je
pense, une fonction qui, ici encore, est peut-être trop calquée
sur la pratique judiciaire. Devant les tribunaux de droit commun, il est normal
que l'on s'attende à ce qu'il dise le droit et qu'il se base, pour dire
le droit, sur les faits qui ont été prouvés devant eux.
C'est évidemment, une garantie qu'aucun élément
extérieur n'interviendra dans l'adjudication d'un tribunal de droit
commun; mais c'est aussi un prix très considérable qu'il faut
payer pour cela, parce que cela oblige les parties devant un tribunal de droit
commun à littéralement faire preuve de tout ce qu'elles avancent,
soit par une preuve documentaire, soit par la production de témoins.
Cela va aussi bien que d'exiger que l'on fasse la preuve de lois
étrangères et même de lois et de règlements des
autres provinces du Canada, lorsque c'est essentiel pour un litige civil. Il
faut aller prouver, alors qu'on parle à un juge qui a accès
à la bibliothèque du Barreau, qui a accès à toutes
les sources de renseignements juridiques, que telle loi de l'Ontario est en
vigueur et qu'elle n'a pas été abrogée. Il faut
littéralement tout prouver devant un juge, de façon rigoureuse.
Il faut prouver tous les faits. Il faut produire des témoins, etc. Il
reste que l'arbitrage se fait et devrait se faire, il me semble, dans un cadre
un petit peu plus souple, pour éviter justement que le problème
que soulevait plus tôt, durant la journée, le député
de Portneuf, que le coût qu entraîne un recours à
l'arbitrage fasse finalement perdre des droits. C'est cela, dans le fond, le
sens de la modification que nous cherchons. C'est d'éviter toutes les
choses que le tribunal peut connaître d'office, parce qu'il vit dans le
même monde que n'importe qui, qu'il peut s'informer sur un grand nombre
de choses; il a, évidemment, une obligation de le faire avec
impartialité, de façon aussi complète que possible, mais,
qu'il puisse avoir accès à des choses qui sont de
notoriété publique, sans être obligé de faire la
preuve devant lui qu'il y a eu une grève à telle date, et des
choses dans ce genre, d'amener des témoins ou des choses comme cela.
Je pense que ce n'est pas malin et cela ne vise pas, comme certains
mémoires l'ont dit, et je regrette qu'on prenne une attitude aussi
juridique, aussi légaliste que c'est vouloir leur faire jouer à
la Providence, aux arbitres, leur permettre d introduire dans le
règlement des conflits toutes sortes d'éléments
étrangers selon leur bon plaisir. Je pense qu'on a quand même
affaire à des gens qui sont responsables, qui fonctionnent à
l'intérieur d'un cadre prévu par le Code du travail. Ils ont un
sentiment de leurs obligations et de leurs responsabilités sociales. Il
ne s'agit pas de les mettre au-dessus de tout. On a dit qu on voulait en faire
des superadministrateurs. Je pense que c est dans le mémoire de
l'Hydro-Québec, quelque chose dans ce genre. On voulait en faire des
êtres un peu au-dessus de tout.
Ce n'est pas du tout cela. Il ne faudrait pas que ce soit compris comme
cela. Mais il reste que, quand on dit, à 88k: "Le tribunal d'arbitrage
doit rendre une sentence à partir de la seule preuve recueillie à
l'enquête ", on en fait des minitribunaux. On rend presque
inévitable presque est un mot de trop on rend
inévitable le fait qu'il va falloir se présenter là avec
des procureurs qui savent comment on fait une preuve à la satisfaction
d'un tribunal.
Reconvoquer des gens dans le fond, si on avait des règles de
preuve un peu plus souples, qui seraient non pertinentes et non
nécessaires, comme on vient de l'établir, mais qui deviendront
pertinentes et nécessaires, parce qu'il faut tout prouver de a à
z, il nous semble que c'est excessif. Ce n'est pas l'esprit d'un arbitrage,
c'est sûr que c'est la loi des parties, c'est la convention collective,
mais il y a quand même quelque chose d'un peu plus large que cela qui est
impliqué.
L'autre clause qui est là, l'équité et la bonne
conscience, cela n'est pas pour dire: La convention collective, au diable, on
ne s'en occupe pas, mais c'est pour éviter que les parties ne
s'enferrent, au moment même de la négociation, dans l'idée
que si un jour cela va en arbitrage, on va décortiquer le sens des mots,
on va trouver des virgules, et on va dire: La virgule est-elle placée
à la bonne place et, si elle était trois mots plus tôt,
peut-être qu'on pourrait gagner notre grief, etc.
C'est en train de transformer la négociation des conventions
collectives en une espèce de cauchemar où on a des conventions
collectives grosses comme des annuaires de téléphone, pour
prévoir que la virgule est placée à la bonne place.
Là, on engage des procureurs pour se battre sur les mots, etc.
Dans le fond, souvent, il n'y a pas de contestation sur le fond. Le
patron et le syndicat se disent: On s'entend, mais il y a des rencontres
formelles. J'y ai participé à une autre époque et je sais
un peu de quoi je parle dans ce cas. Ce sont des choses très
concrètes et vécues. On se rencontre entre les parties, les
vraies parties, sans les procureurs, et on se dit: C'est cela que je veux et
l'autre dit: Si c'est cela, moi, je veux telle autre chose dans telle
affaire.
C est à peu près cela et on se quitte. On a conclu notre
convention collective. C est le soir à 11 h 30, après quelques
jours de négociation in-
tense. On revient le lendemain matin, le lendemain après-midi,
là les négociateurs se sont rencontrés, les procureurs se
sont rencontrés, et tout est à refaire. Il n'y a plus d'entente.
Ils ont deux textes. Chacun a son texte et ils ont chacun couché cela
par écrit, mais là, c'est une vraie beauté, parce que
qu'il n'y a plus un mot qui se retrouve en commun dans les deux textes.
Ils ont dit: On a perdu un arbitrage il y a quatre ans, parce que tel
mot voulait dire telle chose. Ce n'est pas évident que cela veut dire
telle chose, sauf qu'évidemment, on s'est engagé dans un
processus intenable.
Si on ne met pas l'équité et la bonne conscience ce
sont des mots que j'ai trouvés, parce que ces mots traînent un peu
partout il paraît que cela veut dire qu'on ne regarde pas... oui,
ils traînent dans le décor, je crains des objections qu'on me fera
en disant: Cela ouvre la porte à toutes sortes d'affaires. Si ce ne sont
pas les bons mots, je suis prêt à les changer.
Mais, de grâce, qu'on essaie de sortir de l'ornière, c'est
ce que je voudrais faire, sortir de l'ornière du juridisme. S'il y a
d'autres mots qui font mieux que cela et que cela ne pose pas problème,
je vais les accepter en deux secondes. Mais il faut absolument sortir nos
négociateurs de l'ornière du juridisme et, à mon avis,
c'est là l'occasion.
Quand on parle de la façon dont le tribunal du travail va
opérer, il faut, premièrement, ne pas obliger à faire la
preuve de tout, de a à z, quand c'est affaire de notoriété
publique, et, deuxièmement, ne pas d'enfarger dans les fleurs du tapis,
quand on a fait des conventions collectives. Cela ne veut pas du tout dire
"play God", cela ne veut pas du tout dire que les arbitres décident du
bien commun en fonction de leur opinion et de leur philosophie sociale. Cela
veut dire tout simplement qu'ils font leur travail honnêtement, comme des
gens de bonne foi, en pensant que les gens qui ont signé des conventions
collectives s'entendaient à peu près sur le sens des mots et
qu'on ne cherche pas les chiures de mouches. C'est essentiellement cela qu'on
voudrait voir dans cet article, M. le Président.
M. Godin: Ce n'est pas très parlementaire.
M. Forget: A cette heure-ci, il ne faut pas trop nous en
demander.
M. Godin: Non, mais c'est parce que... M. Johnson: M. le
Président.
Une Voix: Cela ressemble à des poèmes que j'ai
déjà lus!
M. Godin: Une directive, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Mercier.
M. Godin: Ces textes ne furent jamais prononcés dans un
lieu aussi sacré que celui-ci.
M. Johnson: M. le Président, si vous le permettez.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Johnson: Je comprends et je partage cette volonté. Cela
serait peut-être à mon tour de dire au député de
Saint-Laurent que c'est inspiré d'une volonté de traduire un
message et que finalement, la bonne foi et tout cela, on est tous pour cela, la
tarte aux pommes et la maternité aussi, et que tout le reste, c'est un
peu des chiures de mouches.
Mais sérieusement, la notion d'équité et de bonne
conscience est souvent comprise dans un texte de convention collective qui
prévoit que l'arbitre... En vertu de la convention collective, on
prévoit que l'arbitre... C'est le cas, par exemple, de l'enseignement.
Il y a sûrement beaucoup d'autres conventions collectives qui le
prévoient. L'arbitre jugera selon l'équité et la bonne
conscience. Cependant, il y a d'autres clauses qui restreignent cela.
L'équité et la bonne conscience, mais sans jamais aller à
l'encontre de la convention collective, etc.
Il y a d'autres conventions collectives qui ne contiennent
nécessairement pas ces dispositions. Cela peut être par oubli, par
manque d'intérêt ou cela peut être dans un échange
entre les parties, où ils ont décidé que cela ne se ferait
pas comme cela, l'arbitrage, pour une raison ou pour une autre. Parce qu'une
situation particulière a déjà prévalu à cet
endroit et à un moment donné, on a retiré la notion
d'équité et de bonne conscience qui, un jour, a peut-être
coûté très cher à l'entreprise, dans certaines
circonstances, parce que tout en étant en équité et bonne
conscience, le fond de l'objet de l'arbitrage était quelque chose
d'extrêmement onéreux pour l'employeur, et il a réussi, en
échange, dans la convention collective suivante, à faire
supprimer cette notion d'équité et bonne conscience.
Donc, la notion d'équité et bonne conscience aurait comme
effet, dans le cas des conventions collectives qui ne prévoient pas des
dispositions à cet effet et si elles en prévoient, il n'y
a pas de problème de permettre carrément à
l'arbitre d'être un interprète, non seulement un interprète
de la convention collective, mais de faire la convention collective et d'aller
carrément à l'encon- tre de dispositions de la convention
collective.
Dans notre régime de droit, cela pose des problèmes assez
sérieux. L'économie du code est encore une fois, fondamentalement
ce qui est librement négocié entre les parties. Cela poserait ce
problème.
D'autre part, la notion de règle de droit qui avait
été suggérée dans un premier temps a
été supprimée, suite à des remarques qui, à
mon avis, étaient très pertinentes. Donc, ce vers quoi on
retourne, c'est vers l'état actuel: la possibilité, pour les
parties, d'inclure ces dispositions au sujet de l'équité et bonne
conscience, mais de ne pas laisser la porte ouverte totale à un arbitre
finalement de carrément modifier le contenu de quelque chose qui a
été négocié librement.
C'est pour cette raison, M. le Président, que je demanderai au
député de Saint-Laurent s'il veut retirer son amendement, ou je
demanderai son rejet.
M. Forget: Non. Il y a d autres interventions peut-être.
J'aurais des suggestions ou des arguments à faire valoir encore.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, c'était une demande
que j'avais à adresser au député de Saint-Laurent, compte
tenu du fait que la majeure partie des conventions collectives contiennent
déjà, dans leur propre procédure d arbitrage, la mention
selon l'équité et la bonne conscience; compte tenu du fait aussi
que la majorité des conventions collectives contiennent aussi des
clauses interdisant aux arbitres de modifier, en tout ou en partie, le contenu
de la convention collective; compte tenu du fait que les explications, des deux
côtés, ont été suffisamment claires, je pense qu'on
sait où chacun se situe; est-ce que le député de
Saint-Laurent accepterait immédiatement qu'on prenne un vote
enregistré sur cette question?
M. Forget: Non, j'aimerais, malgré tout, faire une
suggestion au ministre là-dessus. Je suis sensible à certains de
ses arguments. D'un autre côté, j'aimerais revenir avec une
question à laquelle, à mon avis, il n'a pas répondu. Je
vais lui laisser le temps de consulter. Ce n'est pas urgent, mais si vous
voulez consulter.
Je suis sensible à une partie des arguments que vous avez
invoqués, c est-à-dire la norme générale, à
l'effet qu'il faut respecter la volonté des parties. Vous-même et
le député de Sainte-Marie avez souligné qu'il y a
plusieurs conventions qui prévoient déjà la clause d
équité et de bonne conscience. C est vrai.
Même en admettant cela, cependant, le problème n est pas
entièrement réglé à mon avis. Sur le plan des
principes, d'abord, on pourrait dire: Etant donné l'état et la
tendance que prennent nos négociations dans bien des secteurs d un grand
juridisme, il y a peut-être une question d intérêt qui
dépasse ce que les parties peuvent en juger, un peu comme l'atelier
fermé, etc.
A mon avis, c'est une caractéristique en croissance et
très inquiétante. Si j'y suis revenu souvent, d'ailleurs, c'est
parce que j'en ai acquis la conviction personnelle. Il me semble que,
même si en règle générale, il faut respecter la
volonté des parties, on devrait pouvoir aménager une règle
qui, parce qu'elle est d'ordre public, pourrait prendre la forme suivante;
peut-être pas la forme absolue que notre amendement lui donne, mais la
forme suivante, un peu comme la Charte des droits et libertés de la
personne, que la règle d'interprétation normale, c'est
l'équité et la bonne conscience et les conventions collectives
qui veulent échapper à cette règle doivent contenir une
disposition expresse à cet effet. C'est-à-dire que les parties,
si elles veulent effectivement négocier et donner à leur
négociation un sens très strict et très rigoureux, disent:
Nonobstant la règle générale, nous voulons que notre
convention collective soit interprétée restrictivement et en s'en
tenant à la lettre quelque chose à cet effet.
Il y aurait, malgré tout, dans tous les cas où on oublie
de le mentionner ou de le négocier, où les parties, n'ayant pas
eu d'expérience malheureuse encore, n'y rattachent pas l'importance
suffisante, ou alors, à cause de l'inexpérience de
négociateurs, ou à cause d'une opposition dans le fond
peut-être un peu superficielle, parce que, malgré tout, dans une
négociation, on peut se laisser prendre par les mots qu'on
négocie et les positions auxquelles on attache un peu d'amour propre et
qu'on dise: C'est cela et on n'est pas pour permettre à d'autres d'y
déroger.
Il me semble qu'on devrait attirer l'attention de tous les
négociateurs en disant: La règle générale
d'interprétation va être l'équité et la bonne
conscience et ceux qui veulent y déroger seront libres de le faire. Cela
sera, à ce moment-là, une dérogation à une
règle d'interprétation que, par ailleurs, le législateur
considère d'ordre public, pour mettre en échec une tendance qui
est large, qui est répandue et qui est peut-être croissante.
Je pense qu'on trouve dans cette tendance la raison d'être de
l'allongement progressif, d abord du phénomène de la
négociation, et deuxièmement, de la convention collective
elle-même. Parce que comme cela prend du temps à les
négocier, les gens se disent: Au moins, on va se donner des
répits de temps à autres en ayant des conventions plus
longues.
En soi, je ne suis pas sûr qu'il soit bon qu'on aie des
conventions trop longues, parce que les ajustements, les griefs, etc., prennent
plus de temps à se résorber puisque les moments où on peut
les ajuster sont de plus en plus rares, plus les conventions collectives sont
longues.
Pour ces raisons, il me semble qu'on pourrait faire cette suggestion.
C'est le premier volet.
Le deuxième volet, c'est le fait que je n'ai pas entendu la
réponse du ministre sur le premier aspect, c'est-à-dire la
question de la preuve, la seule preuve, et la possibilité pour les
arbitres de considérer les faits de notoriété publique qui
sont connus sans qu'on aie besoin de les prouver, contrairement au cas d'un
tribunal où il faut même prouver l'existence des lois de l'Ontario
et des règlements. Il me semble que c est une exigence trop grande pour
un tribunal d'arbitrage.
M. Johnson: On peut peut-être envisager la
possibilité quant à la notion de connaissance d'office; je
pourrais dire: C'est quoi, la connaissance d'office, finalement? Supprimer le
mot "seul", cependant, peut-être conviendrait. J'hésiterais
à ajouter des notions de connaissance d'office, parce que je pense qu'on
aurait besoin de regarder cela un peu plus longuement. Supprimer le mot "seul",
cependant, je pense que cela élargit, que c'est moins restrictif, en
tout cas, c'est bien évident, par définition.
D'autre part, quant à la deuxième hypothèse, la
règle chez nous, on dit que la règle devrait être
l'équité et la bonne conscience, sauf si les parties le
prévoient autrement. Ce n'est pas comme cela que cela se passe dans la
réalité. La réalité c'est que la règle est
la preuve, ou encore, la règle de droit et c'est exceptionnel que de
prévoir l'équité et la bonne conscience. En ce sens, ce
serait aller à l'encontre...
M. Forget: Oui, c'est vrai, mais la question que je pose, ce
n'est pas de savoir si c'est la règle actuellement, c'est de savoir s'il
ne serait pas souhaitable d'en avoir une autre.
M. Johnson: Non, ce n'est pas seulement la règle au sens
du Code du travail. On vit dans une société où la
règle, c'est la règle de droit, où la règle, devant
l'ensemble des tribunaux, c'est la règle de la preuve. La
société et nos lois sont bâties en fonction de cela. Il y
aurait peut-être avantage, dans une révision non pas seulement de
l'ensemble du droit du travail, mais de l'ensemble du droit dans notre
société, il y aurait peut-être lieu d'introduire la notion
d'équité et de bonne conscience à tous les niveaux, mais
celle-là, je ne pense pas que je puisse la promettre pour le printemps
prochain, cette réforme. En ce sens...
M. Forget: Cela existe dans la tradition juridique britannique
où on a les cours...
M. Johnson: Equity Court.
M. Forget: C'est cela, les "Equity Courts ".
M. Johnson: Voilà. Ce qui distingue, entre autres, la
société dans laquelle nous vivons... Finalement, je pense qu'on
est en train de tomber dans un débat sur les schémas culturels,
mais, dans le fond, l'"Equity Court " n'existe pas depuis 300 ans que le
Québec est le Québec. Il existe depuis que le monde britannique
existe. Finalement, je ne suis pas sûr que c'est l'occasion, en modifiant
les articles touchant l'arbitrage, de toucher à une notion aussi
fondamentale dans notre société. Le fait est que c'est la
règle de droit qui domine et la règle de preuve, tandis que
l'équité, c'est issu d'un univers culturel très
différent du nôtre. Il y aurait peut-être lieu de se
demander si, dans notre société, cela ne devrait pas être
cela.
M. Forget: ... les tribunaux judiciaires. C'est un tribunal
d'arbitrage.
M. Johnson: D'accord, c'est un tribunal d'arbitrage. Est-ce que
la supression du mot "seul " serait acceptée par le député
de Saint-Laurent?
M. Forget: En ce sens qu'on ne s'opposera pas à la
suppression du mot "seul", mais je peux difficilement accepter cela comme une
réponse adéquate aux propositions que je formule.
M. Johnson: Oui. Pour ces raisons, je deman- derai d'être
un petit peu plus expéditif, compte tenu du fait qu'on a quand
même fait un peu le tour de la question. Il est clair que...
M. Forget: Je suis prêt à voter
là-dessus.
M. Johnson: Oui. M. le Président... Je m'excuse.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Bellechasse m'avait demandé la parole.
M. Goulet: M. le Président, j'étais pour
l'amendement. Vous voyez, M. le député, on est rendu trois
à trois. J'étais pour l'amendement du député de
Saint-Laurent, parce que cela permettrait peut-être des décisions
plus humaines et moins juridiques, cela permettait d'enlever les
oeillères, et surtout que la FTQ, dans son mémoire, le demandait.
La FTQ disait ceci, si vous permettez: "Le mouvement syndical a toujours tenu
à ce que les relations du travail soient guidées par
l'équité et la bonne conscience et échappent à la
rigidité procédurière de la vie judiciaire. C'est pourquoi
nous nous opposons à ce que la règle de droit s'applique au
règlement des griefs et nous tenons à ce que, dans tous les cas,
les décisions soient rendues en vertu de la seule preuve recueillie et
selon l'équité et la bonne conscience". La FTQ le demande. Il me
semble que cela permettrait au tribunal de rendre des décisions beaucoup
plus humaines, en tout cas d'enlever ces oeillères juridiques qu'on
trouve souvent.
M. Chevrette: M. le Président, me permettez-vous de faire
une petite remarque très brève.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: L'équité et la bonne conscience, cela
n'enlève pas l'aspect juridique du contenu d'une sentence.
L'équité et la bonne conscience, c'est tout simplement en termes
de contenu, ce qui peut permettre de donner un peu plus de contenu ou un petit
peu moins... Il a une preuve devant lui. Il dit: Oui, je suis très
sensible ou je suis peu sensible, ou je suis sensible, mais me dire que cela
enlève le juridique... Si vous avez quelqu'un de très
émotif, je vous dis que c'est...
M. Forget: Ce n'est pas votre plus fort.
M. Chevrette: Non, je sais que ce n'est pas mon plus fort, mais
je peux vous dire une chose; je peux vous dire que c'est une nuance et tu le
vois à siéger à un tribunal. A l'expérience, on a
eu un paquet d'arbitrages où c'est écrit équité et
bonne conscience, et il y a des bonshommes qui se retranchent strictement
derrière les mots prononcés par les témoins et la preuve
faite par l'avocat. Il y en a d'autres qui ont l'esprit un peu plus
élastique.
M. Forget: Est-ce qu'on prend un vote enregistré, M. le
Président?
M. Bisaillon: Non, ce n'est pas nécessaire. Je pense qu'on
pourrait rejeter...
M. Forget: Non, j'aime bien les votes enregistrés.
Le Président (M. Marcoux): C'est un vote enregistré
sur l'amendement proposé par le député de Saint-Laurent
visant à modifier le paragraphe 48k dans le sens qu'il se lirait comme
suit: "Le tribunal d'arbitrage doit rendre sa sentence à partir de la
preuve recueillie à l'enquête et de tout fait pertinent au grief
dont il a connaissance d'office selon l'équité et la bonne
conscience." Quels sont ceux qui sont favorables à l'amendement du
député de Saint-Laurent?
M. Russell (Brome-Missisquoi), M. Bisaillon (Sainte-Marie).
M. Bisaillon: Selon l'équité et la bonne
conscience, contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Brochu (Richmond), M. Goulet
(Bellechasse).
M. Brochu: Pour.
Le Président (M. Marcoux): M. Ciaccia (Mont-Royal), M.
Chevrette (Joliette-Montcalm).
M. Chevrette: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Couture (Saint-Henri), M.
Mercier (Berthier), M. Forget (Saint-Laurent).
M. Forget: Pour.
Le Président (M. Marcoux): M. Gagnon (Champlain).
M. Gagnon: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Johnson (Anjou).
M. Johnson: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Jolivet (Laviolette).
M. Jolivet: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Lacoste (Sainte-Anne).
M. Lacoste: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Laplante (Bourassa).
M. Laplante: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Lavigne (Beauharnois).
M. Lavigne: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Mackasey (
Notre-Dame-de-Grâce).
Une Voix: Pour, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): M. Godin (Mercier).
M. Godin: Contre.
Le Président (M. Marcoux): M. Pagé (Portneuf).
M. Pagé: Pour.
Le Président (M. Marcoux): M. Roy (Beauce-Sud).
Le Président (M. Marcoux): L'amendement est rejeté,
neuf voix contre 3.
Nous revenons à la proposition principale...
M. Johnson: Paragraphe 88k.
Le Président (M. Marcoux): ... telle que... M. le ministre
propose de biffer le mot...
M. Johnson: Le paragraphe 88k se lirait comme suit: "Le tribunal
d'arbitrage doit rendre une sentence à partir de la preuve recueillie
à I enquête. "
Des Voix: Adopté.
M. Forget: Débat terminé.
M. Johnson: Débat terminé, M. le Président?
Paragraphe 88 I? Cela va?
M. Forget: Cela va.
M. Johnson: Paragraphe 88m.
M. Forget: Ici, nous avons un amendement. Nous n'avons pas de
numéro. Ici, il y a un amendement que je vais lire immédiatement:
"Que le paragraphe 88m de l'article 46 soit modifié en ajoutant à
la fin l'alinéa suivant: En cas de contestation sur une somme due
à la suite d'une décision arbitrale, l'une des parties peut
saisir l'arbitre dans les vingt jours de la réception de la
décision aux fins de fixer le montant qui doit être
fixé."
M. Bisaillon: M. le député de Saint-Laurent,
pourriez-vous le relire?
M. Johnson: M. le Président, si vous le permettez,
peut-être que le député de Saint-Laurent... 89d, en fait,
prévoit exactement ce contenu, sauf en termes de délai.
Fondamentalement, l'idée qui nous est amenée par le
député de Saint-Laurent est prévue à 89d.
M. Forget: Si je peux le retrouver, M. le Président...
M. Johnson: Je vais en faire lecture. 89d, qu'on retrouve
à l'article 49 du projet de loi, nous dit: "Le tribunal d'arbitrage qui
a rendu une sentence arbitrale peut, à la demande d'une partie, fixer le
montant dû en vertu de cette sentence." Ça va?
M. Forget: II n'y a pas de délai?
M. Johnson: II n'y a pas de délai. Cependant, il y a un
autre article qui traite des délais.
M. Chevrette: La majorité des sentences, c'est
ordinairement de 30 jours. Le juge rend sa sentence en disant: Si dans 30 jours
vous n'avez pas payé ou si vous ne vous êtes pas entendu sur le
quantum, je...
M. Johnson: Comme les commissaires-enquêteurs.
M. Chevrette: C'est courant.
M. Forget: D'accord. Si c'est prévu, je retire mon
amendement.
Le Président (M. Marcoux): Retiré, 88o. M.
Johnson: Ça va?
M. Forget: Non, j'ai un amendement. Je vais vérifier si
tout va bien. Ici nous avons un amendement. Je vais le lire brièvement.
Il est d'ailleurs très bref. "Que le paragraphe 88o de l'article 46 soit
modifié en ajoutant à la fin l'alinéa suivant: Le tribunal
peut adjuger envers l'une ou lautre des parties ou envers les deux dans la
proportion qu'il détermine les frais de l'arbitrage. C'est donner un
pouvoir dont le tribunal d'arbitrage ne dispose pas dans le moment, qui est
suggéré par la conférence des arbitres, entre autres".
M. Johnson: Le tribunal peut adjuger envers l'une ou l'autre des
parties ou envers les deux dans la proportion qu'il détermine les frais
de l'arbitrage...
(Suspension à 23 h 31)
Reprise de la séance à 23 h 40
M. Johnson: M. le Président, pour une raison, je ne sais
pas si elle apparaîtra justifiable au député de
Saint-Laurent... il va admettre avec moi qu'à la question de
l'arbitrage, il y a une dimension assez technique à tout cela et c'est
finalement à des gens très très
spécialisés... Cela n'a jamais fait l'objet, sauf de la part des
arbitres, dans leur mémoire, effectivement, d'une demande par-
ticulière au niveau du conseil consultatif, ni de la partie syndicale,
ni de la partie patronale. La pratique est la suivante. Evidemment, la
convention collective qui prévoit le partage des faits: l'arbitre
syndical payé par la partie syndicale, l'arbitre patronal par la partie
patronale et le président, 50/50. Il y a des conventions collectives qui
prévoient cela. Il y en a d'autres qui prévoient que c'est 100%
par l'employeur tout le temps. J'ai un exemple en tête, en ce moment. Il
y en a d'autres qui ne prévoient rien. Dans celles qui ne
prévoient rien, il y a de fait une adjudication de frais qui est
à 50/50.
Le fait d'introduire ce pouvoir entre les mains de l'arbitre et entre
autres pour les fins que voudrait atteindre le député de
Saint-Laurent, qu'il a évoquées, comme par exemple l'employeur
qui récidive sur le même type de comportement qui donne lieu
à un grief constamment et qui serait condamné à 100%. Cela
pose un problème qui n'est pas évalué par les parties
puisqu'il n'a jamais vraiment été soulevé, sinon par les
arbitres jusqu'à maintenant. Comme la pratique est qu'une adjudication
à 50/50, sauf dans les cas où il y a des dispositions dans la
convention collective, en pratique, ne cause pas trop de problèmes.
Cependant, dans les cas où il y a une adjudication prévue dans la
convention collective, on ne peut quand même pas donner à
l'arbitre un pouvoir contraire à ce qui est prévu dans la
convention collective, toujours en vertu du même principe. On n'est quand
même pas dans une affaire d'intérêt public, etc., qu'on n'a
pas à modifier ce que les parties ont librement négocié et
consenti. Pour cette raison, il ne m'apparaît pas, d'une certaine
façon, opportun, si je peux me permettre de considérer
l'amendement du député de Saint-Laurent.
M. Forget: Vous avez en partie raison quant aux stipulations qui
apparaissent dans les conventions collectives. Il serait facile de dire: A
moins que le contraire ne soit prévu, à moins de dispositions
spécifiques à l'effet contraire dans une convention collective.
Mais je pense qu'au-delà de cette objection technique, il y a un
intérêt certain à l'idée d'un frein
modérateur, en quelque sorte, envers la partie qui abuse, soit d'une
situation ou même du recours lui-même. On peut trouver soit
l'employeur qui décide, de façon butée de ne pas
obtempérer aux indications de la convention collective et aux
indications du tribunal d'arbitrage et qui récidive de manière
à épuiser un syndicat par des dépenses et par les
démarches que rendent nécessaires les arbitrages. On peut aussi,
en face d'une petite entreprise qui doit faire face à une centrale
puissante qui est prête à financer de tels recours, dans le but de
créer un pattern, de créer un précédent, etc. et
qui va se voir dans la situation d'un moyen de pression. Cela devient
l'arbitrage qui devient le moyen de pression, et le petit employeur, dans ce
cas-là, va se dire: Quant à assumer un coût de $3000, $4000
pour me défendre en arbitrage, je vais tout simplement faire des
concessions que je ne ferais pas autrement, mais que je ne peux pas me
permettre de ne pas faire.
Alors, c'est utiliser l'arbitrage dans un sens pour lequel il n'a pas
été créé, et il y a une idée très
intéressante dans l'idée de dire: Que ce soit une partie ou
l'autre il y a un frein modérateur dans l'utilisation de cette
histoire-là pour celle qui, manifestement, aux yeux du tribunal
lui-même en abuse. Il me semble que cela devrait être retenu tout
en prenant la précaution que je suis bien prêt à inscrire:
A moins que le contraire ne soit prévu. A ce moment-là si les
parties conviennent du contraire, ils courent leurs risques. On les laisse
courir leurs risques.
M. Johnson: Je ne suis pas sûr que: "A moins que le
contraire ne soit prévu dans la convention collective" c'est exact,
parce que le contraire... Qu'est-ce que c'est le contraire?
M. Bisaillon: Sauf s'il existait des dispositions à cet
effet dans la convention collective. Ce n'est pas contraire, parce que
là, on parle d'un partage, alors que des partages pourraient être
prévus de façon spécifique.
M. Forget: Sauf des dispositions spécifiques
incompatibles.
M. Bisaillon: Je ne peux pas dire incompatibles, M. le
député de Saint-Laurent, parce que là, vous parlez de
laisser le choix à l'arbitre. Il n'y a rien d'incompatible avec cela.
Sauf des dispositions sur le partage, dans des conventions collectives.
M. Pagé: Sauf dispositions sur le sujet dans les
conventions collectives.
M. Johnson: Sauf dispositions sur le sujet dans la convention
collective, je pense.
M. Forget: D'accord.
M. Johnson: M. le Président, est-ce qu'on pourrait
passer... M. le Président, est-ce que vous permettez qu'on passe
à un point suivant et on va revenir dans deux ou trois minutes
là-dessus?
M. Forget: Oui, bien sûr. M. Johnson: 88p. Ça
irait?
M. Forget: Non. Je m'excuse, M. le Président, j'avais
donné visiblement une indication que je n'avais pas d'autre amendement,
mais j'avais oublié celui-ci. On ne les fabrique pas, comme vous voyez;
je pense qu'on soulève des problèmes qui sont légitimes.
C'est la première fois, je pense, que l'arbitrage, comme
procédure, est discuté à l'Assemblée nationale. Ce
n'est peut-être pas de trop.
Que le paragraphe 88p de l'article 46 soit modifié en ajoutant,
dans la deuxième ligne, après le mot "enquête ", les mots
"dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article 39a".
C'est le point que j'ai mentionné au début de la
soirée.
L'article amendé se lirait comme suit: "88p. Le tribunal peut
ordonner, de son propre chef, la réouverture d'une enquête dans
les cas prévus au deuxième alinéa de l'article 39a .
C'est, dans le fond, une concordance avec les motifs de
réouverture de l'enquête par le Commissaire du travail.
M. Johnson: Oui.
M. Forget: Cela amenait un élément de certitude que
les révisions à des décisions du tribunal ne se feront pas
pour des raisons futiles ou arbitraires. On énumère les causes.
Et ce sont des causes que la jurisprudence a reconnues comme des occasions
valables pour rouvrir une enquête.
M. Johnson: Oui. Mais je ne suis pas sûr. Je veux revoir
l'article 39a, parce que je veux être sûr, parce que cela devient
très limitatif. Je comprends que cela empêche l'arbitre de rouvrir
pour des raisons absolument arbitraires. Par contre, c'est peut-être trop
limitatif, restrictif aussi, c'est pour cela qu'il faudrait revoir... puisqu'on
parlait tout à l'heure d'équité, etc.
M. Forget: On pourrait peut-être faire la lecture tout haut
pour les membres de la commission. "Un commissaire du travail peut
réviser ou révoquer toute décision ou tout ordre rendu
pourvu que, dans les cas où il peut y avoir appel, il n'ait pas
été interjeté appel au tribunal de la décision ou
de l'ordre et que le tribunal n'ait pas encore disposé de l'appel.
Une partie peut demander cette révision ou cette
révocation dans les cas suivants: 1. Lorsqu'il a été
prononcé au-delà des conclusions ou qu'il a été
omis de statuer sur un des chefs de la demande; 2.Lorsque la décision ou
l'ordre a été rendu sur des pièces dont la fausseté
n'a été découverte que depuis; 3. Lorsque, depuis la
décision ou l'ordre, il a été découvert des
pièces décisives dont la production avait été
empêchée par une circonstance de force majeure ou le fait de la
partie adverse; 4. Lorsque, depuis la décision ou l'ordre, il a
été découvert une preuve et qu'il appert: a)que si elle
avait été apportée à temps, la décision ou
l'ordre eût probablement été différent; b)qu'elle
n'était connue ni de la partie, ni de son procureur ou agent; c)qu'elle
ne pouvait pas, avec toute la diligence raisonnable, être
découverte en temps utile.
Toutefois, un commissaire du travail peut corriger, d'office, toute
décision ou ordre entaché d'erreur d'écriture ou de
calcul, ou de quelque autre erreur matérielle".
M. Bisaillon: Est-ce que je peux vous poser une question, M. le
député de Saint-Laurent?
M. Forget: Oui.
M. Bisaillon: Dans le cas, par exemple, où c'est un
arbitrage de griefs, le tribunal entend la preuve et commence son
délibéré. En cours de délibéré,
à l'analyse de la preuve, les trois membres du tribunal se rendent
compte qu'il y a un aspect de la preuve qui n'a pas été assez
fouillé et qu'il y aurait intérêt à fouiller cette
question. C'est dans les circonstances une réouverture d'enquête.
Dans votre optique, ce serait interdit?
M. Forget: Non, je ne pense pas, parce que tant...
M. Johnson: Effectivement, je pense que le député
de Sainte-Marie a raison...
M. Forget: Non, c'est le paragraphe 4. M. Johnson: De
l'article 39a?
M. Forget: Non, lorsque depuis la décision ou
l'ordre...
M. Johnson: C'est cela. En fait, il faudrait appeler cela une
réouverture d'enquête, effectivement, parce qu'à partir du
moment, où le tribunal prend en délibéré, il met
fin à l'enquête. L'audition étant terminée, c'est
donc une réouverture d'enquête. Or, si on réfère
à 39a, cela devient trop restrictif. Cela ne permettrait pas, par
exemple, la réouverture d'enquête dans un cas comme
celui-là.
M. Forget: Oui, vous avez raison. Ce n'est pas un article qui
vise à réviser la décision du tribunal. C'est simplement
un article qui permet de réouvrir l'enquête. Est-ce que cela veut
dire... Dans ce contexte, je pense que notre amendement n'est pas
approprié, mais est-ce que cela veut direje m'excuse que le
tribunal du travail ne peut pas, non pas rouvrir l'enquête, mais
réviser sa décision de la même façon que le
commissaire du travail peut le faire?
M. Johnson: Est-ce que cela veut dire que? Je m'excuse.
M. Forget: Est-ce que cela veut dire que, comme cet article, 88c,
traite seulement de la réouverture d'enquête et est silencieux sur
la révision d'une décision, qu'il ne peut pas réviser sa
décision, même dans les cas prévus à 39a?
M. Bisaillon: On est en arbitrage. La décision du tribunal
d'arbitrage, cela va être une sentence. La sentence est sans appel,
à moins...
M. Forget: Oui.
M. Bisaillon: ... qu'un autre tribunal ait cédé sa
juridiction...
M. Forget: Oui, je suis bien d'accord qu'elle est sans appel,
mais d'où l'intérêt de pouvoir la réviser si les
faits peuvent être renversés. Si tout à coup, on se rend
compte qu'une preuve a été dissimulée par une des
parties...
M. Bisaillon: Non. Cela peut s'expliquer par le cheminement des
tribunaux d'arbitrage. C'est justement pour cela que dans le Code du travail,
déjà, les sentences arbitrales sont sans appel. Si on n'avait
pas, et cela répond d'ailleurs aux voeux que vous formulez depuis le
début de la soirée, c'est-à-dire que le tribunal
d'arbitrage, par définition, soit moins rigoureux, moins encadré
par le juridisme, mais plutôt par les relations entre employeur et
employés.
Et si on permettait l'appel sur une sentence arbitrale, on aurait
exactement le même fonctionnement qu'au niveau des cours civiles, avec
les mêmes retards, les mêmes délais, les mêmes
contestations. Les seules contestations sur une sentence arbitrale, c'est si le
tribunal excède sa juridiction. Sur le fond, les parties acceptent
et je pense que c'est la coutume qui est établie maintenant
qu'évidemment, il peut y avoir une erreur "de jugement ' dans un
tribunal. Un tribunal peut rendre une mauvaise décision aux yeux d'une
partie ou d'une autre, mais les parties en cause ont
préféré accepter que les sentences arbitrales soient sans
appel pour, au moins, fonctionner dans un système qui soit plus
expéditif et qui, à long terme, rende plus justice aux objectifs
qu'on vise actuellement.
M. Forget: L'argumentation du député de
Sainte-Marie porte un peu à faux je m'excuse de le dire
parce qu'il est tout à fait exact qu'on a voulu que ce soit sans appel
et le fait de pouvoir faire réviser par le Tribunal du travail sa
décision est loin d'être équivalant à un appel. Vous
allez effectivement trouver que les règles à 39a n'ont pas
été inventées pour les fins de la cause. Ce sont des
règles qui s'appliquent dans les cas de tribunal pour lesquels,
justement, il n'y a pas d'appel ou d'instances administratives ou quasi
judiciaires pour lesquelles il n'y a pas d'appel. On a dit, étant
donné qu'il n'y a pas d'appel, quand on constate une erreur
grossière, comme, par exemple, un document qui était essentiel a
été dissimulé, est disparu et on se rend compte tout
à coup qu'il a été dissimulé du fait d'une partie
et on en prend connaissance, à ce moment-là, le fait qu'il n'y a
pas d'appel, parce que ce serait une cause d'appel... L'appel porte aussi sur
le fond et l'appréciation des faits, mais là, c'est quelque chose
où une partie peut profiter de sa fraude ou d'une intention dolosive et
malicieuse et on se dit que cela va trop loin de ne pas donner l'appel dans ces
cas. Ces règles de 39a sont des règles qui ont été
élaborées dans le cas des tribunaux pour lesquels il n'y a pas
d'appel, les tribunaux administratifs et quasi judiciaires. Parce que le
pouvoir de surveillance de la Cour supérieure est, avec raison le
député de Sainte-Marie le disait basé seulement sur
l'excès de juridiction, l'infraction à la règle audi
alteram partem, c'est-à-dire de ne pas entendre les parties, et de ne
pas se prononcer de façon grossièrement injuste sur les faits et
sur la cause. Mais, à part cela, il n'y a pas d'appel.
Sauf qu'on s'est rendu compte, à l'expérience, que
l'absence de possibilité d'appel était très
sévère étant donné les faits
énumérés à 39a. C'est vrai. Tantôt, on
disait: C'est très restrictif. C'est vrai que c'est restrictif. Cela ne
permettrait donc pas n'importe quel genre d'appel. Mais la dissimulation d'un
élément de preuve par une des parties, la découverte d'un
fait nouveau qui change complètement le contexte et rend la
décision injuste, il faut quand même la redresser et c'est le but
de l'exercice. Et ce n'est pas possible si on ne permet pas la
révision.
M. Bisaillon: Ce n'est pas comme devant les tribunaux civils. On
est en relation de travail. La procédure de grief peut se recommencer.
Autrement dit, si j'ai un mauvais jugement et que je pense pouvoir
l'améliorer parce que j'ai des faits nouveaux, rien ne m'empêche
de reformuler un autre grief et de recommencer la procédure. Mais
toujours au niveau d'un même tribunal ou d'un même type de
tribunal.
M. Forget: Peut-être, mais je pense que cela demeure
malgré tout une question sur laquelle j'aimerais avoir des
précisions.
Le Président (M. Marcoux): Si je comprends bien...
M. Forget: L'amendement est retiré, mais la question est
posée quant au pouvoir de révision. L'amendement retiré
est relativement au...
Le Président (M. Marcoux): L'amendement proposé par
le député de Saint-Laurent à 88p est retiré. Il
restera 880 en suspens.
M. Johnson: Est-ce qu'on pourrait le régler, dans la
mesure où c'est réglable, évidemment? Encore une fois, je
reviens au sujet de 880 quant...
Le Président (M. Marcoux): Y a-t-il consentement pour
poursuivre nos travaux jusqu'à...
M. Johnson: On n'a pas suspendu les travaux, il n'est pas
minuit.
Une Voix: II est minuit moins dix.
Le Président (M. Marcoux): Continuez.
M. Forget: Pour l'instant, il est minuit moins dix.
M. Johnson: Cela pourrait, à la rigueur, faire l'objet
d'un deuxième paragraphe, ou d'un autre article, parce que 880 traite du
taux d'intérêt. On pourrait arriver avec une formulation du type
suivant: "A moins que la convention collective ne prévoie des
dispositions relatives aux frais d'arbitrage, le tribunal peut adjuger envers
l'une ou l'autre des parties ou envers les deux dans la proportion qu'il
détermine les frais d'arbitrage".
Je pense que c'est plus clair de le mettre avant qu'après. Ce
serait: "A moins que la convention collective ne prévoie des
dispositions relatives aux frais d'arbitrage et là on tombe avec
le texte du député de Saint-Laurent le tribunal peut
adjuger envers l'une ou l'autre..." Ce serait une possibilité.
Cependant, elle pose le problème, et je pose la question au
député de Saint-Laurent sur l'opportunité, pour qu'il
m'éclaire d'ici minuit, comme il nous reste huit minutes...
M. Forget: Je suis un chronomètre vivant, M. le
Président.
M. Johnson: Dans le fond, je comprends que la conférence
des arbitres l'a demandé, mais, pour tous les autres, c'est une affaire
qui va tomber du ciel, et ce dont je suis convaincu, c'est qu'il n'y a pas
d'expectative au niveau ni de la partie patronale ni de la partie syndicale que
ce genre de disposition soit inclus dans le code pour le moment. Les seuls qui
en ont fait la demande, les seuls qui l'on invoqué, ce sont les arbitres
eux-mêmes. Dans le contexte ou, évidemment, dans les
mémoires qu'ils nous ont soumis, ils ont tendance à augmenter
leur juridiction, leur domaine et leurs attributions etc., je dis que c'est la
formulation que j'y verrais, si le député de Saint-Laurent tenait
absolument à son amendement. Personnellement, j'hésite
carrément sur l'opportunité d'inclure un article comme
celui-là alors qu'aucune partie n'en a fait la demande.
M. Forget: M. le Président, je pense, sur la
question...
M. Bisaillon: Elles seraient mieux de négocier ces choses
entre elles.
M. Forget: Si elles aiment mieux le faire, de toute façon
l'amendement leur laisse la porte très largement ouverte. Quoique je
croie qu'il faut, en général, faire les choses en consultation
avec tout le monde, il demeure que le Parlement n'est pas dans un tel
état de dépendance intellectuelle que l'on doive
nécessairement ne rien faire à moins que d'autres nous aient tenu
la main. Il me semble que si on y voit des raisons d'ordre public dans les cas
de silence des parties pour prévoir une possibilité qui pourrait
être utile et qui ne sera utilisée, j'imagine, par des arbitres de
bonne foi que lorsqu'elle pourra être utile, il me semble qu'on a le
devoir de l'inscrire.
M. Johnson: Cependant, je répondrais au
député de Saint-Laurent que, d'abord, je ne vois pas de raison
d'ordre public et, deuxièmement, étant donné qu'il n'y a
pas cette demande, je n'en vois toujours pas l'opportunité en ce
sens-là. Je ne vois pas de raison d'ordre public de l'inclure. Comme il
n'y a pas de demande et comme cela s'inscrit dans un contexte autour duquel il
y a eu beaucoup de discussions au sujet de l'arbitrage avec l'ensemble des
parties, depuis 1974 au CCTMO, il y a eu des positions divergentes
évidemment sur un tas de choses, mais cela n'a jamais fait l'objet d'une
de-
mande des premiers intéressés et ils demeurent finalement
ceux qui veulent travailler librement dans la négociation.
Personnellement, je préférerais que 880 demeure ce qu'il est et
qu'on n'ajoute pas même le texte que je proposais comme possible au
député de Saint-Laurent. C'est seulement pour dire que j'avais
compris son intention, mais cela m'apparaît inopportun, et je ne pense
pas que ce soit pour autant émasculer le pouvoir et les attributions du
Parlement, c'est tout simplement que cela m'apparaît inopportun. C'est
"uncalled for", comme disent les Français.
M. Forget: Pour relever les paroles du ministre selon lesquelles
personne n'en fait la demande, je pourrais dire au ministre que j'en fais la
demande et...
M. Johnson: Est-ce que je peux demander si l'amendement du
député de Saint-Laurent peut être mis aux voix, à
l'adoption ou au rejet?
M. Forget: On peut le passer aux voix en incorporant les
modifications suggérées par le ministre.
Le Président (M. Marcoux): Tel que reformulé par le
ministre.
M. Johnson: Cest-à-dire, un vote enregistré ou
non?
M. Forget: Un vote enregistré, mais je serais prêt
à ce qu'on prenne le dernier vote et qu'on le reproduise de la
même façon, si tout le monde agrée cela.
M. Johnson: D'accord! Je suis contre. M. Bisaillon: On vote
exactement...
M. Johnson: On voterait sur un nouveau paragraphe. L'amendement
est à l'effet d'inclure un nouveau paragraphe à 880.
M. Bisaillon: D'accord!
Le Président (M. Marcoux): II s'agit d'ajouter un nouveau
paragraphe qui se lirait comme suit:
A moins que la convention collective ne prévoie des dispositions
relatives aux frais d'arbitrage, le tribunal peut adjuger envers l'une ou
l'autre des parties ou envers les deux dans la proportion qu'il
détermine les frais de l'arbitrage. ' Rejeté sur division.
M.Johnson: D'accord!
M. Forget: J'avais fait allusion à un vote nominal. On
peut prendre le même vote que le dernier que vous avez pris.
M. Johnson: Oh, pardon!
Le Président (M. Marcoux): Contre, M. Goulet
(Bellechasse), M. Forget (Saint-Laurent).
M. Forget: Pour, c'est-à-dire.
Le Président (M. Marcoux): Je m'excuse. Pour. Ceux qui
sont pour l'amendement proposé par le député de
Saint-Laurent: M. Goulet (Bellechasse), M. Forget (Saint-Laurent), M.
Pagé (Portneuf).
Sont contre l'amendement: M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Chevrette
(Joliette-Montcalm), M. Gagnon (Champlain), M. Johnson (Anjou), M. Jolivet
(Laviolette), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Laplante (Bourassa), M. Lavigne
(Beauharnois) et M. Godin (Mercier).
M. Johnson: M. le Président, est-ce que l'article 46 du
projet de loi est adopté?
M. Forget: II est adopté, M. le Président.
M. Johnson: Est-ce que l'article 47 est adopté,
c'est-à-dire l'abrogation de l'article 47 qui est strictement de
concordance?
M. Forget: M. le Président , il est minuit et je pense
bien qu'étant donné le contenu de ces articles, cela ne fera pas
de grandes difficultés à notre prochaine séance.
M. Johnson: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): La commission du travail et de
la main-d'oeuvre et de l'immigration ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 0 h 7)