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(Dix heures treize minutes)
Le Président (M. Boucher): À l'ordre, s'il vous
plaîtl
La commission du travail et de la main-d'oeuvre est réunie,
aujourd'hui, pour entendre les associations convoquées quant aux raisons
motivant l'impossibilité de parvenir à une entente relativement
aux modifications à apporter au décret de la construction,
adopté par le décret 393880 du 17 décembre 1980 et
publié à la Gazette officielle du Québec, le 30
décembre 1980.
Les membres de la commission sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie), M.
Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Gravel
(Limoilou), M. Lefebvre (Viau), M. Mailloux (Charlevoix), M. Marois (Laporte),
M. Pagé (Portneuf), M. Lavigne (Beauharnois) remplace M. Paquette
(Rosemont).
Les intervenants sont: M. Proulx (Saint-Jean) remplace M. Boucher
(Rivière-du-Loup); M. Brochu (Richmond), M. Dussault
(Châteauguay), M. Lalande (Maisonneuve) remplace M. Forget
(Saint-Laurent), M. Gosselin (Sherbrooke), Mme LeBlanc-Bantey
(Îles-de-la-Madeleine), M. Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), M. Picard (Johnson).
Je demanderais s'il y a un rapporteur pour la commission.
M. Chevrette: Je propose M. Charles Lefebvre.
Le Président (M. Boucher): M. Lefebvre (Viau)?
Adopté. Les organismes invités pour aujourd'hui sont, tout
d'abord, le Conseil provincial du Québec des métiers de la
construction, représenté par M. André Chartrand,
président; l'Association des entrepreneurs en construction du
Québec, représentée par M. Claude Chagnon,
président; la Confédération des syndicats nationaux, la
Centrale des syndicats démocratiques, le Syndicat de la construction
Côte-Nord de Sept-Îles Inc., et la Fédération des
travailleurs du Québec, FTQ-Construction.
Je demanderais aux membres du Conseil provincial du Québec et des
métiers de la construction de bien vouloir...
M. Marois: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
Remarques préliminaires M. Pierre
Marois
M. Marois: Sans empiéter sur le temps qui est
dévolu aux membres de cette commission, puisqu'on est là d'abord
pour entendre les différentes parties, obtenir leur éclairage, si
on me permettait simplement, en guise d'introduction, je voudrais d'abord, au
nom des membres de cette commission, souhaiter la bienvenue, non seulement aux
membres de la commission eux-mêmes, mais à tous les intervenants
qui auront l'occasion de se faire entendre devant nous.
Je voudrais également excuser, je sais que certains intervenants
ont reçu l'avis de convocation sans recevoir, au point de départ,
l'annexe, qui devait normalement accompagner l'avis de convocation, annexe
contenant un certain nombre de suggestions sur lesquelles,
précisément, les parties vont nous faire connaître leur
point de vue aujourd'hui.
Je voudrais encore une fois nous en excuser, dès qu'on a
attiré notre attention sur ce fait-là, on a tenté de le
corriger dans les plus brefs délais possible pour que les parties aient
en main lesdites suggestions ou propositions.
Le travail de cette commission constitue sans aucun doute une
étape importante en vue d'atteindre l'objectif qui est, au fond,
prévu par la loi elle-même, la Loi sur les relations du travail,
c'est-à-dire d'aboutir ultimement à un décret final qui
rende le plus possible justice aux parties, bien sûr dans le corridor
juridique tracé par les différentes lois et, notamment, la Loi
sur les relations du travail dans l'industrie de la construction.
Il y a eu toute une série d'étapes franchies qui nous
amènent à cette commission, étapes qui seront suivies de
d'autres à venir. On me permettra de rappeler très rapidement
qu'il y a eu forcément une période de négociation,
jusqu'à mai 1980, entre les parties. Il y a eu un protocole d'entente
entre les parties
intervenu le 9 mai 1980, une signature de la convention collective
toujours en mai 1980, une requête le 30 mai 1980 de l'Association des
entrepreneurs en construction du Québec visant à faire
décréter que la convention collective de travail s'applique
à l'ensemble de l'industrie de la construction du Québec et, par
la suite, toute une série de demandes de modifications au texte de la
convention qui accompagne la requête du 30 mai, en juin, deux fois en
juillet, également en août, à un certain nombre de
reprises, et même en septembre.
Par la suite, le 3 décembre, les parties ont été
convoquées à ma demande, ainsi que la CSN et la FTQ-Construction,
pour être informées du fait qu'il semblait, à
première vue, y avoir un certain nombre de clauses qui pouvaient
soulever des problèmes, notamment, d'ordre juridique ou d'ordre
légal et pour savoir si les parties entendaient en conséquence
modifier le projet entre cette date du 3 décembre et le 8
décembre.
Pour un certain nombre de raisons, une des parties signataires à
la convention s'étant retirée de la rencontre, bien que
l'information ait pu être fournie à ce moment-là aux
parties, et également par la suite les textes ont été
remis, communiqués à la CSD et au Syndicat de la construction
Côte-Nord et Sept-Îles. Par la suite, il y a eu, entre le 4 et le 8
décembre 1980, des explications qui ont été fournies par
les services juridiques du ministère à la demande de l'une ou
l'autre des parties qui contactaient le service juridique du
ministère.
Lors de la troisième lecture de l'étude du projet de loi
109, la question avait été posée par l'Opposition
officielle. J'avais donné l'assurance que le décret serait
promulgué dans les plus brefs délais et j'avais indiqué
aussi que, s'il n'était pas possible d'en venir à une entente
entre les parties, comme la loi le prévoit, forcément, on se
devrait de convoquer la commission parlementaire pour entendre les parties et
procéder par la suite.
J'ai reçu, le 8 décembre, un télégramme
d'une des parties signataires de la convention collective, le Conseil
provincial du Québec des métiers de la construction, m'indiquant
que les parties ne pouvaient pas s'entendre, demandant que soit
convoquée en conséquence une commission parlementaire, demandant
aussi la publication du décret, ce qui a été fait puisque,
le 17 décembre, il y a eu adoption par le gouvernement du décret,
et le décret a été publié le 30
décembre.
On a donc, en conséquence, attiré l'attention des parties
sur un certain nombre de points qui semblent à première vue faire
problème sur le plan juridique, ce qui cerne autour de cet aspect
d'ordre juridique sur certaines clauses, la notion d'intérêt
public prévue dans la loi. D'ailleurs, l'article 51 de la loi est
très clair. Il prévoit que le lieutenant-gouverneur en conseil,
le Conseil des ministres, peut procéder à des ajustements ou des
modifications, mais qu'il doit au préalable, avant de poser un geste
comme celui-là, s'il estime d'intérêt public de le faire,
convoquer la commission parlementaire; or, celle-ci est réunie ici
aujourd'hui pour entendre les parties nous apporter leur point de vue, leur
éclairage et les raisons qui, à leur avis, militent en faveur du
maintien ou du retrait de telle ou telle suggestion qui aurait pu être
soumise.
C'est donc dans cet esprit-là que nous allons travailler
aujourd'hui. Je voudrais tout de suite dire à la fois, M. le
Président, même aux membres de cette commission ainsi qu'aux
différents intervenants, que c'est avec une très grande ouverture
d'esprit que j'aborde les travaux de cette commission. Je pense que chacun
comprend, que c'est le mécanisme prévu par la loi; un certain
nombre de propositions, de suggestions accompagnaient et accompagnent l'avis de
convocation et c'est sur celles-ci que les parties vont se faire entendre
aujourd'hui. Il ne s'agit pas, bien sûr, de recommandations finales, pour
ce qui me concerne, puisque, précisément, le but de cette
commission est qu'on puisse obtenir, attirer mon attention sur un certain
nombre d'éléments et que les intervenants, par leurs
témoignages, les membres de cette commission, par leurs
différents points de vue, les questions qui pourraient être
posées, les suggestions aussi puissent apporter le meilleur
éclairage possible pour que, par la suite, je puisse, le cas
échéant, formuler des recommandations qui sembleraient
pertinentes au lieutenant-gouverneur en conseil, comme on dit dans le jargon
juridique, c'est-à-dire au Conseil des ministres qui décidera
s'il est d'intérêt public de procéder à des
modifications.
Je voudrais simplement, en terminant, pour ne pas allonger cette
entrée en matière, rappeler aussi que la loi, à la suite
de cette commission parlementaire... Rien n'empêche, bien sûr, dans
un délai raisonnable - parce qu'il ne faudrait quand même pas
traîner cela indéfiniment - sur une période de quinze jours
peut-être, rien n'empêche les parties, comme le prévoit la
loi, le cas échéant, de se voir, de se rencontrer et, si les
parties en viennent à un certain nombre d'ententes sur un certain nombre
de points, la loi prévoit qu'il est possible de le faire savoir au
ministre et qu'en conséquence, on puisse en tenir compte lors des
recommandations finales.
Voilà, M. le Président, les quelques mots que je voulais
dire à l'ouverture des travaux de cette commission.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre.
M. le député de Maisonneuve. M. Georges Lalande
M. Lalande: M. le Président, avant de souhaiter la
bienvenue aux nombreux participants qui se sont joints à nous
aujourd'hui, je voudrais vous demander d'excuser l'absence de mon
collègue de Portneuf, M. Pagé, qui a été retenu
à la maison - vous le comprendrez bien - parce que sa femme a eu
l'honneur de donner au Québec une grosse fille cette nuit. Je pense
qu'il sera ici cet après-midi. Avec la vigueur qu'on lui connaît,
il sera de retour au travail et je pense bien qu'il aura l'occasion d'aller un
peu plus en profondeur concernant le sujet qui nous occupe aujourd'hui.
Comme je le disais tout à l'heure, je souhaite la bienvenue aux
participants qui sont ici aujourd'hui et à ceux qui interviendront. Sauf
erreur, je déplore quand même l'absence de l'Association des
entrepreneurs, l'AECQ, qui n'est pas ici aujourd'hui et qui est, comme vous le
savez, signataire avec le conseil provincial de la construction.
J'espère bien qu'au cours de la journée, les représentants
de l'AECQ pourront se présenter pour qu'on puisse entendre au moins
l'avis de l'un des deux signataires.
Aujourd'hui, comme l'a dit le ministre, nous sommes réunis pour
entendre les parties, ce qui permettrait par la suite au ministre d'apporter
les modifications jugées essentielles. Au départ, sans aller
encore une fois dans les spécificités de ce que nous aurons
à discuter aujourd'hui - et nous nous réservons évidemment
toutes les interventions au cours de la journée - je dois souligner
qu'il ne reste que quinze mois avant l'échéance du décret,
qui prendra fin le 30 avril 1982. Nous sommes d'avis que pour le temps qu'il
reste, la règle des parties devrait continuer à s'appliquer de
part et d'autre. Je ne crois pas qu'il soit utile, à ce stade-ci,
d'avoir l'intervention gouvernementale à l'intérieur du
décret.
Nous aurons quelques questions à poser au cours de la
journée concernant entre autres les mécanismes de
négociation dans le domaine des relations de travail. Aussi, nous
déplorons le fait que la CSN, la CSD, le syndicat de la Côte-Nord,
qui représentent environ 30,000 travailleurs, n'aient pas
véritablement droit au chapitre dans le mécanisme de
négociation.
Nous aurons aussi l'occasion, je l'espère bien, de relever
certaines affirmations qui, pour le moins, ne sont pas tout à fait
justes de la part de certains représentants qui ont - si vous me
permettez l'expression - charrié considérablement concernant le
processus de rapatriement de la constitution canadienne. On a fait état
de beaucoup de peur concernant ce qui pourrait se passer à la
Baie James. On a suscité un sentiment exprimant que nous allions
être envahis par tous les gens du Canada si jamais ce projet concernant
le rapatriement de la constitution canadienne passait. Je pense qu'il y aurait
lieu de replacer les choses dans leur juste état.
M. le Président, cela dit...
M. Marois: J'avais pourtant essayé de créer un
climat serein, dès l'ouverture.
M. Lalande: M. le Président, c'est à peu
près ce que j'avais à dire à ce moment-ci pour vous
indiquer, grosso modo, où nous avons l'intention d'intervenir et
peut-être, à l'occasion, replacer certaines affirmations faites
dans le passé et qui auraient pu être erronées.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Maisonneuve. En tant que président, je vous
demande de transmettre nos félicitations au député de
Portneuf, de la part de tous les membres de la commission.
M. Lalande: Nous le ferons sûrement, M. le
Président.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Serge Fontaine
M. Fontaine: Très brièvement, M. le
Président, parce que je pense que le plus important, c'est d'abord
d'entendre les gens qui sont venus ici pour nous donner leur point de vue. Le
ministre a fait une bonne revue de la situation, au départ. On n'a pas
tellement à intervenir au niveau de l'historique. Je veux tout
simplement souhaiter la bienvenue à tous ceux qui viennent faire des
représentations et donner leur point de vue.
Une brève remarque. On a mentionné tantôt une liste
d'intervenants qui voulaient donner leur opinion. Je sais qu'il y a ici ties
gens qui représentent ce qu'on appelle les "pipe fitters", les plombiers
dans le domaine du pipe-line, qui ont un problème particulier à
soumettre et qui ne sont pas sur la liste des intervenants. Je ne sais pas
s'ils en ont fait la demande ou s'il est quand même possible de les
ajouter à la liste lorsque viendra le temps de les entendre.
M. Lavallée (Jean): C'est la FTQ-Cons-truction qui
représente le dossier des plombiers du local 144.
M. Fontaine: Ah bon! Parfait!
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Nicolet-Yamaska.
Je demanderais immédiatement aux
membres du Conseil provincial du Québec des métiers de la
construction, représenté par M. André Chartrand, de bien
vouloir présenter leur demande et de se placer au centre de la table,
s'il vous plaît!
S'il était possible qu'à tour de rôle chacun occupe
le centre de la table, je pense que cela serait la meilleure façon de
procéder. C'est la façon de procéder en commission.
M. Marois: Est-ce qu'il y aurait moyen qu'ils laissent
l'équipe au complet...
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît, est-ce
qu'il y aurait moyen de laisser l'équipe au complet au centre de la
table et chaque groupe qui viendra par la suite pourra occuper le centre.
Une voix: M. le Président, invitez donc la...
Des voix: Ah! Une voix: ...
Le Président (M. Boucher): II m'apparaît que la
table est suffisamment grande pour absorber tout le monde.
M. Marois: ...qu'on puisse avoir le centre de la table à
tour de rôle.
Le Président (M. Boucher): M.
Chartrand, s'il vous plaît! Vous avez la parole.
(10 h 30)
Mémoires CPQMC (International)
M. Chartrand (André): M. le ministre du Travail et de la
Main-d'Oeuvre, messieurs les membres de la commission parlementaire, je suis
André Chartrand, président du Conseil provincial du Québec
des métiers de la construction (International).
Le Conseil provincial du Québec des métiers de la
construction (International) a été très surpris que le
ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre ne respecte pas la volonté
des parties et change illégalement plusieurs articles de la convention
collective conclue le 27 mai 1980 entre le Conseil provincial du Québec
des métiers de la construction (International) et l'Association des
entrepreneurs en construction du Québec. Nous vous demandons en vertu de
quelle loi le ministre peut modifier notre convention collective.
L'article 51 de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de
la construction mentionne que "le gouvernement peut aussi, sur la
recommandation du ministre, prolonger, abroger ou modifier le décret
sans le consentement de l'association d'employeurs ou des associations de
salariés, quand il est d'avis que, dans l'intérêt public,
cette solution est la seule qui puisse remédier à la situation
existante; il ne peut toutefois modifier ainsi le décret sans que ces
associations ne soient invitées à se faire entendre devant la
commission parlementaire du travail".
Nous tenons à informer le ministre que la paix sociale existe
actuellement dans notre secteur et que l'intérêt public n'est
d'aucune façon en danger.
De plus, nous sommes d'avis que le ministre devrait consacrer plus de
temps aux modifications du champ d'application de la loi (bill 68) qui prive un
très grand nombre de salariés des bénéfices
auxquels ils auraient droit si certaines modifications y étaient
apportées.
Nous déplorons une fois de plus l'ingérence du
gouvernement dans les relations du travail dans l'industrie de la
construction.
Récapitulation des négociations 1979-1980.
Lors de la création du Comité d'étude et de
révision sur la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la
construction, le CERLIC, formé en septembre 1977 par le ministre du
Travail, le conseil provincial s'était réjoui qu'enfin le
gouvernement voulait tenter de régler certains problèmes
très complexes dans l'industrie de la construction. Le 9 janvier 1978,
notre organisme remettait à ce comité son mémoire de plus
de 200 pages.
À la page 67 de ce mémoire, le conseil provincial
recommandait que les négociations se déroulent au complet par
métier, spécialité ou occupation, avec des interlocuteurs
valables. Malheureusement, le comité Hébert de même que le
ministre du Travail n'ont pas donné suite à cette
revendication.
Au début du mois de janvier 1979, le Conseil provincial du
Québec des métiers de la construction (International) envoyait
l'avis des négociations aux employeurs.
Peu de temps après, le gouvernement continuait son
ingérence dans la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de
la construction en adoptant, au mois de février 1979, la loi 110, qui
prolongeait le décret pour une période de trois mois, et ceci
sans consultation ou consentement des parties et sans augmentation de
salaire.
Le 13 mars 1979, à la suite de l'adoption de la loi 110, nous
demandions au ministre de le rencontrer afin de discuter de la
possibilité d'obtenir une augmentation de salaire pour les travailleurs
de la construction pour les trois mois de prolongation imposés par cette
loi.
Malheureusement, cette demande
demeura sans réponse.
Conformément à la Loi sur les relations du travail dans
l'industrie de la construction, les 22 et 28 mars 1979, le conseil provincial
avisa les entrepreneurs qu'il était prêt à entreprendre des
rencontres afin d'en arriver aux structures de la négociation, ainsi
qu'une augmentation de salaire qui aurait dû entrer en vigueur le 1er mai
1979.
Après plusieurs séances de négociations, le conseil
provincial signait, le 21 mai 1979, un protocole d'entente avec l'association
des entrepreneurs. Ce protocole mentionnait qu'une augmentation de $0.40
l'heure était applicable le 17 mai 1979 sur les taux de salaire pour
tous et $0.30 l'heure, à la signature de la convention collective. La
structure de la négociation était également
acceptée et elle comprenait seize clauses dites communes,
d'intérêt général et toutes les autres clauses
devaient être négociées par métier,
spécialité ou occupation. Un comité de coordination
était alors formé de trois représentants du Conseil
provincial du Québec des métiers de la construction et trois
représentants de l'AECQ, qui avaient pour fonction de coordonner les
négociations.
Il est important de souligner que le conseil provincial n'a, d'aucune
façon, négocié quoi que ce soit, mais qu'il s'est
limité à sa philosophie selon laquelle les négociations
sont l'affaire des différents métiers, spécialités
ou occupations. Au mois de novembre 1979, plusieurs métiers,
spécialités ou occupations avaient terminé leurs
négociations particulières, tandis que plusieurs autres avaient
à peine commencé, et ceci, pour différentes raisons. Comme
la loi mentionne que le conseil provincial a la responsabilité de signer
la convention collective à cause de son degré de
représentativité de plus de 68%, plusieurs métiers,
spécialités ou occupations qui avaient terminé leurs
négociations particulières étaient
pénalisées d'une façon directe, ne pouvant obtenir leurs
augmentations de salaire de même que les conditions de travail
difficilement acquises après plusieurs mois de négociations. Le
conseil provincial profite de l'occasion pour réclamer à nouveau
que les prochaines négociations s'effectuent par métiers,
spécialités ou occupations.
Le 6 février 1980, plusieurs locaux affiliés au conseil
provincial décidaient d'aller renconter l'association des entrepreneurs,
afin de terminer au complet la négociation qui, selon eux,
traînait en longueur. Nous tenons à vous informer que,
contrairement à certaines déclarations, l'expulsion de certains
locaux du conseil provincial n'a eu aucune conséquence sur les
négociations, laissant à ces locaux les droits et
privilèges auxquels ils avaient droit. La FIPOE a même
continué de négocier certaines clauses communes.
Face à la situation existante, M. Rénald Brassard et Me
Raymond Leboeuf furent nommés conciliateurs dans le dossier de la
construction. Le conseil n'a jamais rencontré les conciliateurs au cours
de leur mandat, mais, le 1er mai 1980, notre oganisme recevait leur rapport.
Tel que le rapport le mentionnait, ces recommandations constituaient un tout
indivisible et ne pouvaient être amendées, sauf en cas d'erreurs
techniques.
Le conseil provincial convoquait une assemblée spéciale le
9 mai 1980 de tous les représentants syndicaux des locaux
affiliés ou non au conseil, afin que ces derniers puissent se prononcer
sur le projet de convention collective.
Par résolution 039-80, adoptée à
l'unanimité, les membres acceptaient les offres globales et finales de
l'association des employeurs de même que le rapport des conciliateurs,
à l'exception de quelques erreurs techniques qu'il pouvait contenir. Le
9 mai 1980, le conseil provincial signait un protocole d'entente avec
l'association des entrepreneurs en présence du conciliateur et du
président de la CSN-Construction qui signa comme témoin. À
la suite de la ratification de la convention collective par les employeurs lors
d'une assemblée générale, le conseil provincial et
l'association des entrepreneurs signaient la convention collective le 27 mai
1980. Par la suite, certaines modifications furent acceptées par les
parties et soumises au ministère du Travail afin que la convention
collective fût modifiée.
En juin 1980, l'association des entrepreneurs formulait une
requête afin de faire étendre notre convention collective en
décret. Le 16 juillet, le ministère publiait notre convention
collective afin de connaître les objections des intéressés.
Le 15 août 1980, le conseil ne faisait parvenir qu'une seule objection
relative à l'article 2103.
Le 3 décembre 1980, le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre
convoquait le conseil à une réunion afin de nous remettre copie
des points qui, selon le ministère, pouvaient aller à l'encontre
de certaines lois ou règlements.
Après plus de six mois d'étude, le ministère
exigeait que le conseil se prononce sur ces points avant le 8 décembre
1980.
À la suite d'une assemblée des gérants d'affaires
tenue le 8 décembre 1980, le conseil informa le ministère qu'il
était impossible d'en arriver à un consensus sur la
majorité des points soulevés par le ministère.
Nous tenons à souligner que l'impossibilité de s'entendre
n'existait pas avec l'AECQ mais plutôt avec le ministère. Nous
sommes convaincus que contrairement aux prétentions du ministère,
la très grosse majorité des articles soulevés n'est pas
illégale.
Le 12 décembre 1980, le conseil demandait au ministère une
rencontre afin de connaître les raisons des articles
présumément illégaux.
Le 17 décembre 1980, le ministère a finalement
publié le décret de l'industrie de la construction en y changeant
plusieurs articles et cela, à l'encontre de la volonté des
parties.
Le 13 janvier 1981, le ministère nous avisait que, dans les
circonstances, il ne jugeait pas utile de donner suite à notre demande,
comme la commission parlementaire se réunirait pour régler ces
problèmes.
Le 21 janvier 1981, le conseil était avisé de la tenue de
la commission parlementaire pour le 27 janvier 1981 et il recevait les
modifications apportées au décret, l'annexe B.
Nous aimerions connaître le contenu de l'annexe A dont nous
n'avons jamais reçu copie.
Nous croyons qu'il est totalement inacceptable que le gouvernement nous
accorde un délai aussi court pour se préparer à commenter
tous les points soulevés par le ministère et qui pourraient
enlever aux travailleurs de la construction des conditions de travail si
difficilement acquises.
Nous prions les membres de cette commission de bien vouloir excuser
certaines erreurs qui pourraient s'être glissées à
l'intérieur de ce mémoire.
Conclusion. Position du CPQMC (International): Compte tenu des
exposés qui précèdent, le Conseil provincial du
Québec des métiers de la construction (International) demande:
Premièrement, que soit publié sans délai un "erratum"
corrigeant le décret pour le rendre parfaitement conforme à la
convention, maintenant que tel décret existe.
Deuxièmement, qu'aucune autre modification ne soit faite au texte
déposé par le Conseil provincial du Québec des
métiers de la construction et l'AECQ, sauf s'il s'agit de modifications
ayant pour objet de corriger une clause discriminatoire, ce sur quoi nous
serions prêts à apporter notre concours.
Le tout respectueusement soumis.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Chartrand.
M. Marois: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Marois: ...je voudrais d'abord remercier le porte-parole, le
président du Conseil provincial du Québec des métiers de
la construction. Simplement quelques commentaires et peut-être une ou
deux questions tout d'abord. Je comprends, d'ailleurs c'est une de vos
conclusions et de vos recommandations, que vous mentionniez le fait que lors de
la publication du décret, un certain nombre de modifications ont
été apportées. Je dois vous dire que j'ai reçu, en
date du 21 janvier, donc vers le 22 ou le 23, une lettre de l'Association des
entrepreneurs en construction du Québec, qui, effectivement,
relève un certain nombre d'errata - comme on dit dans le jargon -dans la
publication. Je peux vous dire là-dessus que vous avez parfaitement
raison. Entre le document qui a été acheminé au Conseil
des ministres et la publication dans la Gazette officielle, il s'est
effectivement glissé bon nombre d'errata. Je peux donner
là-dessus l'assurance de l'entière coopération du
ministère. Il va de soi que les erreurs qui ont pu se glisser seront
pleinement corrigées. S'il y en a en particulier que vous relevez,
j'accepterais volontiers de recevoir une note par écrit pour attirer
notre attention, pour être sûr que rien n'a été
oublié de ce qui apparaissait être des modifications qui, pour
l'essentiel, sont des erreurs.
Il y en a de deux types, d'après ce que j'ai pu voir.
Effectivement, on en a relevé, de notre côté, pas loin de
90. Il y a des erreurs de ponctuation, dans certains cas, qui peuvent quand
même changer le sens. Une virgule mal placée, cela peut changer le
sens d'une clause. Il y en a d'autres qui sont des erreurs de traduction. Au
moment où la révision a été faite, comme cela est
prévu, par les linguistes, cela a pu avoir un effet, s'il y a des choses
là-dessus, mais déjà, de notre côté, on en a
relevé effectivement une bonne liste. Vous pouvez être
assurés qu'on va apporter les corrections et, si vous avez des choses en
particulier, j'aimerais que ce soit porté à notre connaissance et
soyez assurés qu'on va faire le nécessaire en conséquence.
Là-dessus, vous avez parfaitement raison.
Deuxième point, pour ne pas qu'il y ait d'ambiguïté,
à la page 6 de votre mémoire, vous dites: Nous aimerions
connaître le contenu de l'annexe A dont nous n'avons jamais reçu
copie. Effectivement, quand le Secrétariat des commissions a
envoyé les documents, il a envoyé un document, qui est celui que
vous avez, sur lequel apparaît en haut, à droite: Annexe B. C'est
l'annexe à un mémoire qui a été examiné. Il
n'y a donc pas d'annexe A comme telle. L'annexe A, c'est purement une note que
nous avions qui est la liste des groupes à qui il faut envoyer à
la fois l'avis de convocation et, forcément, les suggestions de
modifications. Il n'y a donc pas d'annexe A comme telle qui impliquerait des
changements qui n'auraient pas été portés à la
connaissance des parties, parce que, comme vous le savez, la loi
prévoit, comme vous l'avez cité, comme je l'ai fait
moi-même, qu'il ne peut y avoir de modifications sans que les parties
aient été
consultées à ce sujet en commission parlementaire.
(10 h 45)
Troisième point, pour ce qui concerne votre autre recommandation,
à toutes fins pratiques, vous nous dites, après examen de tout
cela, je présume, qu'à votre avis il n'y a aucune modification
qui s'impose, à moins, nous dites-vous - je ne veux pas mal
interpréter votre conclusion - qu'on ne trouve une clause
discriminatoire. Je reviens donc à ce que j'ai évoqué plus
tôt en introduction. Vous avez examiné les suggestions, les
propositions qui ont été soumises, qui, encore une fois, ne sont
pas des propositions finales. Il ne faut pas prendre cela pour des
recommandations finales avec lesquelles je partirais pour le Conseil des
ministres, puisque c'est pour cela qu'on a une commission parlementaire, pour
écouter les parties, entendre les points de vue, avoir tout
l'éclairage qu'il faut pour rendre le plus totalement, le plus
pleinement possible justice à la convention négociée par
les parties, à moins qu'il n'y ait des points où il y a vraiment
des illégalités.
Je reviens sur ce point-là. Je comprends donc que votre
conclusion, à la suite d'une analyse. C'est qu'à votre point de
vue, il n'y aurait aucune clause qui serait contraire à quelque loi que
ce soit. Vous me direz si je me trompe. Je ne voudrais pas fausser votre
interprétation. À votre point de vue, un certain nombre
d'articles, comme on l'a mentionné dans les propositions que vous avez
eues en main, ne viendraient-ils pas à l'encontre de la loi 110, parce
que c'est différent par rapport à la négociation
antérieure, au décret précédent, il y a maintenant
la loi 110 concernant les artisans? À votre point de vue, n'y a-t-il pas
un certain nombre de clauses, comme on l'a mentionné dans le document de
travail qui vous a été fourni, qui viennent légalement en
contradiction avec la loi 110?
Deuxièmement, - je vais prendre un autre exemple - en ce qui
concerne les cotisations, une fois les cotisations perçues, à
votre avis, la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la
construction ne dit-elle pas textuellement que ces cotisations doivent passer
par les associations représentatives? En d'autres termes, vous savez
que, sur certaines de ces clauses, notre suggestion est qu'il faut respecter la
loi et, bien sûr, les expressions "union" et "syndicat". Je pense que ce
sont les expressions utilisées dans la convention et le décret,
mais l'expression "associations représentatives" n'apparaît pas
dans le projet, dans la convention collective et dans le décret. Or, la
loi dit bien que cela doit passer par le canal des associations
représentatives. Ce que nous avons suggéré, c'est
d'introduire cette expression simplement pour respecter la loi.
À votre avis, n'y a-t-il pas là, sur ce point comme sur
l'autre que j'ai évoqué - je prends deux exemples - des choses
qui paraissent à première vue contraires à l'une ou
l'autre des lois existantes et ne serait-il pas pertinent d'apporter en
conséquence les corrections qui s'imposent?
M. Pouliot (Maurice): Maurice Pouliot, directeur
général du Conseil provincial du Québec des métiers
de la construction (International). M. le ministre, lors de la réunion
du 3 décembre, le contentieux du ministère du Travail nous
remettait un document sans information nous disant que ces clauses pourraient
être ultra vires et qu'on devrait avoir des informations. D'ailleurs,
c'est l'objet de la demande du conseil provincial de rencontrer le contentieux
pour connaître exactement quelles sont les clauses et les informations.
Le ministère du Travail nous avisait en disant: On ne juge pas cela
utile. Il y a une commission parlementaire, tel que le reflète notre
mémoire. C'est ce dont on aurait aimé discuter et, en ce qui nous
concerne, on pense que la négociation dans l'industrie de la
construction a duré un certain temps qui est peut-être trop long
et qu'il n'appartient pas au ministre du Travail de modifier la volonté
des parties. C'est aux parties de s'asseoir, de négocier et de
régler les problèmes.
Suivant le document que vous nous avez remis le 3 décembre et
celui du 22 janvier, on est en train d'enlever des droits acquis sur la
convention collective. On modifie, je pense, ou on a l'intention de modifier
50% de la convention. On est loin de partager l'opinion du contentieux du
ministère du Travail. C'est pour cette raison qu'on aurait aimé
avoir une rencontre et faire valoir nos arguments, parce qu'on sait qu'on se
réfère souvent au règlement de placement. Je pense que le
député de Maisonneuve en a fait un peu mention. Sur un autre
sujet, on parle du règlement no 1 et on parle de la loi 110. Le
ministère a pris six mois avant de promulguer le décret et on
nous a demandé, dans l'espace de trois ou quatre jours, de commenter
tous ces points, sans information, si ce n'est une conversation
téléphonique que j'ai eue avec Me Crevier du ministère du
Travail. C'est contre les articles 51 et 61 de la loi. C'est la raison pour
laquelle, s'il y a des clauses qui sont nettement discriminatoires, on dit au
ministère du Travail qu'il peut définitivement les enlever, si
c'est dans l'intérêt public, tel que le pouvoir que la loi 201 a
donné au gouvernement de modifier le décret, mais, à
l'exception de cela, on n'a pas l'intention de faire négocier notre
convention collective par la commission ou par les députés.
M. Marois: M. Pouliot, d'une part, je
me permets de rappeler que c'est votre organisme, sous votre propre
signature, qui m'a fait parvenir, le 8 décembre, un
télégramme disant: Nous vous demandons donc de promulguer le
décret dans les plus brefs délais - forcément, vous ne
disiez pas avec le tas d'erreurs qu'il a pu y avoir dedans et qui vont
être corrigées; vous avez raison de le souligner - et qu'une
commission parlementaire suive afin que nous puissions faire connaître
nos commentaires.
Je pense bien que ce n'est plus pertinent - cela ne sert à rien
de revenir sur le passé - d'expliquer pourquoi, le 3 décembre, la
réunion n'a pas duré très longtemps, pour une raison ou
pour une autre, peu importe. C'est le libre choix des parties. Une partie que
vous connaissez bien ayant quitté la rencontre, ayant ses raisons, je
présume, de bonne foi, ce n'est pas à moi de juger, la
réunion n'a pas pu se prolonger très longuement, de telle sorte
qu'à la lumière de tout cela, il fallait forcément
convoquer la commission parlementaire, d'autant plus qu'on avait une demande en
ce sens-là et que cela paraissait fondé.
À la suite de contacts - je pense que c'est un
télégramme du 12 décembre - le ministère s'est dit
prêt, dans les communications téléphoniques, à
informer, fournir les renseignements pertinents. Il fallait forcément
procéder à la commission parlementaire dans les meilleurs
délais, si on ne veut pas que cela traîne indéfiniment.
Mais, ceci étant dit, je repose la question très
précise que j'ai posée tout à l'heure: Les clauses
discriminatoires, je veux bien. Et ce n'est pas là-dessus - vous l'avez
noté, je pense bien - que portent les notes, les suggestions, les
propositions qui ont été envoyées aux parties. Elles
portent essentiellement sur des questions d'ordre légal. Est-ce que, oui
ou non, telle ou telle clause est ou n'est pas légale, est ou n'est pas
conforme à telle ou telle loi qui peut exister?
Je vous repose concrètement ma question, puisque votre
conclusion... Et je ne veux pas mal interpréter votre mémoire, je
veux simplement bien le comprendre et bien comprendre votre point de vue, comme
on va essayer de comprendre parfaitement, le mieux possible, le point de vue de
chacune des parties qui se présentent ici, pour faire le travail le plus
correct et le plus juste possible, mais dans le cadre des lois qui existent. Je
ne m'embarquerai pas dans des discussions sur le projet Trudeau. Aujourd'hui,
nous sommes là pour regarder l'opinion des parties sur cela. On
discutera de cela en temps et lieu. C'est une autre chose.
Mais la loi nous fixe un corridor que je voudrais qu'on respecte dans le
meilleur climat possible, pour essayer d'aboutir à quelque chose qui
soit juste et correct, mais aussi parfaitement légal.
Je vous repose ma question très précise. Prenez l'article
8.03 du décret ainsi que l'article 8.04. L'article 61 de la Loi sur les
relations du travail dans l'industrie de la construction permet qu'il y ait des
clauses de précompte syndical, cela va de soi. Il n'en demeure pas moins
que ces clauses ne peuvent pas aller à l'encontre de l'article 38 de la
même loi, qui prévoit que les cotisations syndicales doivent
être remises par l'office aux associations représentatives,
indiquant ainsi que c'est à ces dernières et non pas à
l'office qu'il revient de transférer les cotisations syndicales aux
syndicats ou unions qui leur sont affiliés.
Conséquemment, le fait pour ces dispositions d'édicter que
les cotisations doivent être remises non seulement aux associations
représentatives, mais également aux syndicats et unions
affiliés à ces dernières, là il nous semble y avoir
quelque chose qui n'est pas conforme à la loi. Essentiellement, les
amendements qui sont suggérés ou proposés ont pour effet
de revenir à ce que prévoit textuellement la loi et ce qui
était, si ma mémoire est bonne, exactement prévu dans le
décret de 1977. Je prends cet exemple. J'ai évoqué
tantôt aussi... je vous ai également posé une autre
question à savoir si, à votre point de vue, il n'y a pas un
certain nombre de clauses qui contreviennent à... ou empiètent
sur la loi no 110 concernant l'artisan.
M. Toupin (Robert): Je suis Robert Toupin, procureur du conseil
provincial. J'aimerais répondre à vos questions. Selon la
position du conseil provincial, nous considérons, en ce qui a trait
à vos recommandations ou à ce qui est négocié dans
la convention collective, que cela ne déroge pas à la loi
concernant les artisans, le projet de loi no 110.
Par contre, concernant le précompte des cotisations syndicales,
la position du conseil est très ferme. Effectivement, la clause que l'on
retrouve dans la convention collective ou dans le décret maintenant
concernant la remise desdites cotisations aux syndicats, unions, ainsi qu'aux
associations représentatives, est illégale car elle va à
l'encontre de l'article 38. L'article 38 est d'une clarté assez ferme.
Il dit bien que l'office remet les cotisations ainsi reçues aux
associations représentatives. Conséquemment, la loi n'habilite
absolument pas l'office à remettre lesdites cotisations syndicales aux
unions ou syndicats affiliés à l'association
représentative. Il y a même plus. Tout le régime de la Loi
sur les relations du travail dans l'industrie de la construction est
basé sur cette reconnaissance de l'association représentative au
détriment des syndicats et unions. Par contre, le conseil provincial
tient à préciser qu'étant donné que l'association
représentative est détentrice de ce droit, de
ce pouvoir de recevoir directement de l'office des cotisations
syndicales, il n'y aurait pas illégalité à ce que l'office
et l'association représentative signent ou parviennent à une
entente dans la distribution desdites cotisations syndicales aux syndicats ou
unions, mais à la seule condition qu'il y ait entente entre
l'association représentative. C'est pour cela que dans ces
articles...
M. Chevrette: Me Toupin, l'amendement qui vous est soumis ne vise
pas précisément à garder la légalité de
l'article...
M. Toupin: Tout à fait.
M. Chevrette: ...tout en vous permettant la possibilité...
Donc, vous devez être en accord avec l'amendement qu'on
suggère.
M. Toupin: Dans l'exemple soumis par le ministre, la
recommandation, si je me rappelle bien, du ministre concernant la remise des
précomptes syndicaux, vous enlevez de cet article les termes "syndicats
et unions" pour ne laisser que les mots "associations représentatives"
pour le rendre conforme à l'article 38. Là-dessus, formellement,
le conseil n'a pas d'objection à telle recommandation du ministre.
M. Marois: Ah bon! On avance. D'accord, je prends note.
Écoutez! Je ne vais pas vous poser des questions, je ne vais pas prendre
chacune des propositions. Encore une fois, on est ici pour essayer - je vous le
dis très franchement, encore une fois, le plus honnêtement du
monde - d'aboutir à quelque chose qui soit le plus juste, qui respecte
l'esprit et la volonté des parties dans leur négociation et la
lettre même au maximum, à condition que cela respecte aussi
parfaitement la légalité des choses dans la mesure où il y
a des lois, et ce n'est pas aujourd'hui qu'on va les changer.
Alors, s'il vous apparaît qu'il y a d'autres points - je ne vais
pas les prendre un par un; je prends note des commentaires à ce jour; je
vous ai déjà dit, en ce qui concerne les errata, les erreurs qui
ont pu se glisser ici, il y en a en particulier -j'aimerais que vous les
portiez à notre attention dans un délai raisonnable. Encore une
fois, je me permets de rappeler une chose, et je ne m'étendrai pas plus
longuement là-dessus. Il n'y a rien qui empêche - je pense que la
loi le prévoit très clairement - les parties, si cette commission
termine ses travaux aujourd'hui, de se voir de nouveau pour convenir, le cas
échéant, d'ajustements ou de modifications et de nous les faire
connaître dans un délai raisonnable. (11 heures)
Est-ce qu'il y aurait - c'est ma dernière question, M. le
Président; je ne veux pas empiéter sur le temps des autres
-à votre point de vue, d'autres éléments dans les
propositions ou les suggestions qui vous ont été remises, qui
à votre point de vue auraient du sens, ou paraîtraient
acceptables? Je comprends que vous convenez que, sur la question du
précompte syndical, il y a un ajustement quelconque qui s'impose. Est-ce
qu'il y en aurait d'autres, à votre point de vue, dans la liste ou si,
pour l'instant...
M. Pouliot: Non, selon le conseil provincial, il n'y a pas
d'autre illégalité, si ce n'est la question de l'article 38 et la
remise des cotisations syndicales - Me Toupin l'a expliqué assez
clairement - entre l'association représentative et l'office, concernant
la remise des cotisations syndicales. Merci.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Maisonneuve.
M. Lalande: M. Chartrand ou M. Pouliot, il y aurait une
première question précise que je voudrais vous poser. À
l'article 5.04 lb, est-ce que vous croyez que cet article est tout à
fait illégal? Ne croyez-vous pas que cela contredit quelque peu le
règlement de placement, en ce sens que ce n'est pas la distance qui
donne la préférence d'embauche dans une région? J'aimerais
que vous me répondiez sur ce point précis et j'aurai une autre
question par la suite. Est-ce que vous avez les modifications?
M. Pouliot: Oui, j'ai les modifications. Je pense que pour
l'article 5.04 ce qui était dans l'esprit du contentieux du
ministère du Travail se réfère plutôt à la
loi sur la qualification pour mention professionnelle, le bill 49, qu'au
règlement no 5 concernant le placement. Selon notre
interprétation, l'article 5.04 est totalement légal. D'ailleurs,
cette convention collective a été négociée par une
multitude d'avocats, tant de la partie patronale que syndicale. Ils devraient
avoir la compétence pour regarder les textes et savoir si ces articles
étaient légaux.
M. Lalande: J'aurais une question un peu plus
générale à vous poser aussi. Puisque, dans votre
mémoire, vous en arrivez à la conclusion qu'effectivement il n'y
a pas de clause discriminatoire véritable ou illégale à
l'intérieur de cela, je voudrais vous demander, dans un premier temps,
puisque l'Association des entrepreneurs n'est pas ici, s'il y a eu des contacts
avec eux. Est-ce qu'il y a eu des récriminations de la part de l'AECQ,
est-ce qu'il y a certaines clauses qui ont été
dénoncées comme étant discriminatoires en relation avec
vous?
Deuxièmement, je voudrais vous demander, si vous croyez qu'il n'y
a rien d'illégal ou de discriminatoire à l'intérieur,
quels motifs vous prêtez au gouvernement ou au ministre d'intervenir
à ce moment.
M. Pouliot: On a tenté d'avoir une rencontre, comme je
l'ai mentionné, avec le contentieux du ministère du Travail afin
qu'il nous dise exactement quelles sont les clauses qui peuvent être
discriminatoires et ce qui devrait être illégal. On n'a pas eu
cette rencontre.
Dans un deuxième temps, le conseil provincial n'a pas eu de
plainte formelle, si ce n'est le mémoire de la CSN qui mentionne qu'il y
a probablement certains articles à l'intérieur de la convention
collective qui sont, selon eux, discriminatoires. On voudrait, s'il y a une
possibilité, que le ministère nous prouve en quoi ils sont
discriminatoires. On est d'accord pour prendre nos responsabilités et
modifier la convention collective ou le décret, parce qu'il est tout de
même prévu qu'on peut faire des recommandations au ministre.
Lorsque notre convention est demandée en extension juridique, il
appartient au ministre du Travail d'en faire ce que bon lui semblera. On a vu
cela dans les années antérieures, ce qui s'est produit. C'est ce
que nous déplorons et dénonçons encore aujourd'hui.
M. Marois: M. le Président, si on me permet une remarque.
M. Pouliot, vous conviendrez avec moi que le ministre n'a rien à prouver
ici aujourd'hui. Des documents vous ont été remis. On attire mon
attention sur un certain nombre de clauses, en disant: Faites attention parce
qu'il semble, à première vue, y avoir un certain nombre de choses
qui ne sont pas légales. Effectivement, ensemble, on vient de mettre le
doigt sur une clause concernant les cotisations syndicales. Nous sommes
d'accord sur celle-là. Nous sommes ici pour vous entendre, les parties,
nous dire et nous communiquer votre point de vue. C'est l'occasion
rêvée, pour nous, de le connaître, de vous voir nous
apporter le maximum d'éclairage. Encore une fois, je voudrais qu'on soit
informé, si je dois aller jusque là, si je suis appelé
à formuler des recommandations, parce qu'il n'y a pas d'entente à
la suite des rencontres qui pourraient avoir lieu, je n'ai pas à
décider de ça, entre les parties. Je n'ai pas de recommandations
d'ententes sur un certain nombre de choses. À partir du moment où
on vient de mettre le doigt sur une clause, vous me dites: Oui, il faut des
ajustements, parce que ça ne nous paraît pas légal. Tout en
essayant de respecter au maximum la volonté des parties, je suis
appelé à faire des recommandations au Conseil des ministres qui
décidera, parce que c'est ça, le texte de la loi, le
lieutenant-gouverneur en décide, s'il juge que c'est
d'intérêt public. S'il y a des choses qui sont contraires à
une loi, forcément, on va devoir procéder. Profitez de l'occasion
pour nous faire connaître complètement notre point de vue, s'il y
a des éléments qui vous semblent supposer un certain nombre
d'ajustements, sans préjuger de rencontres que vous pourriez avoir avec
l'autre partie.
Encore une fois, je tiens à vous redire - je m'excuse
d'empiéter, je vais être très bref - je voudrais le dire
pour tout le monde, tous ceux qui pourraient juger pertinent d'avoir des
contacts, même après les travaux de cette commission
parlementaire, avec le contentieux du ministère sur l'un ou l'autre des
points, je peux vous assurer que des directives ont été
données de façon très précise, en ce sens, au
contentieux, pour, le cas échéant, fournir toutes les
explications requises et recevoir les commentaires qui pourraient sembler
pertinents.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: II me semble qu'on a procédé un peu
à l'envers de ce qu'on devrait faire dans des cas semblables. On nous
dit qu'il y a eu une convention collective signée, il y a eu entente et,
par la suite, le Conseil des ministres ou le ministre du Travail fait part aux
parties qu'il y a des choses dans l'entente qui ne seraient pas légales,
qui ne seraient pas conformes aux lois existantes. Par la suite, il y a une
rencontre qui est prévue entre le contentieux du ministère et les
représentants de la partie patronale et de la partie syndicale. Or,
cette rencontre, à ce qu'on nous dit, n'a duré que quelques
instants.
De fait, les commentaires qu'aurait pu formuler le contentieux du
ministère du Travail face à l'entente n'ont pas été
faits. On nous présente ce matin un document qui nous indique quelles
modifications on devrait apporter à cette entente pour la rendre
légale. D'abord, on peut dire deux choses: ou bien on peut modifier
l'entente pour la rendre légale ou bien on peut modifier les lois pour
les rendre conformes à l'entente. Ce sont deux positions. Le ministre
semble préférer la position qu'il faut modifier l'entente
plutôt que la loi.
Mais il serait peut-être important que le contentieux du
ministère, soit par l'entremise du ministre ou par un des avocats qui y
travaillent, nous dise, à propos de chacune des clauses qu'on nous
soumet, pourquoi cette clause vient en contradiction avec la loi et avec quel
article de la loi. Je pense bien que ce qu'on est en train de voir, c'est que
les gens n'ont pas eu le temps
d'avoir les explications du ministère. Ils semblent de bonne foi,
car ils nous disent que, sur certaines clauses, ils sont d'accord avec
certaines modifications; il y aurait peut-être autre chose qu'on pourrait
certainement trouver là-dedans, des points d'entente faciles, si on leur
donnait l'explication voulue, à savoir pourquoi telle ou telle clause de
l'entente ne respecte pas la loi.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Je comprends un peu ce que le député
de Nicolet dit, sauf qu'on est aux prises avec une situation de fait dans la
présente négociation. On négocie en fonction d'un cadre
légal. Je pense qu'à partir du fait que le ministre fait des
suggestions et qu'on siège en commission parlementaire, c'est au groupe
invité à dire: M. le ministre, la suggestion que vous faites...
Les gens pourraient même poser des questions au ministre, par exemple.
Ils pourraient même dire au ministre: Nous, on prétend que vos
prétentions ne sont pas fondées relativement à tel point
que vous avez changé, pour telle et telle raison. Là, ça
devient de l'argumentation qui permettrait au ministre de dire...
M. Fontaine: II faudrait peut-être d'abord que le
ministère dise à ces gens pourquoi on a modifié...
M. Chevrette: Ils ont reçu la liste des modifications.
M. Fontaine: Mais on ne leur dit pas pourquoi, on leur donne une
liste de modifications, mais on ne leur dit pas pourquoi on veut les
apporter.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Marois: La rencontre prévue le 3 décembre a
été convoquée notamment pour ça; je n'y peux rien
si une des parties signataires a quitté la salle, pour une raison que,
je présume, elle jugeait valable. Toutes les parties qui ont pris
contact avec le ministère, dans la mesure du possible, ont
été vues, il y a eu des communications
téléphoniques pour leur fournir les renseignements pertinents sur
les questions qui étaient posées; seulement, je suis
obligé d'agir dans le cadre de la loi actuelle et ce n'est pas
aujourd'hui qu'on va changer quelque loi que ce soit. Les parties peuvent en
profiter à l'occasion, comme cela a été fait ce matin
d'ailleurs, et nous dire: Tel et tel point, on pense que vous devriez
réviser ça un jour ou l'autre. Très bien, mais on est ici
pour entendre l'opinion des parties, leur point de vue, pour avoir un
éclairage, surtout à partir du moment où on a une demande
formelle de procéder en commission parlementaire et que tout le monde
nous dit en plus... Je me souviens très bien, à partir du moment
où j'ai occupé les fonctions que j'occupe aujourd'hui, des
pressions énormes et fondées, justifiées, qui
étaient mises sur nous par les parties pour que le décret soit
publié, que les travailleurs soient pleinement protégés,
qu'il n'y ait pas de vide juridique, que ce soit fait au plus sacrant. À
partir du moment où il y a eu des rencontres et à partir du
moment où on demande qu'il y ait une commission parlementaire, il n'y a
pas lieu de retarder.
Encore une fois, ça ne préjuge en rien, je le dis bien,
c'est purement l'éclairage que les parties vont nous apporter sur les
questions qui sont soulevées. On est là pour les entendre, pour
dire pourquoi cela a du sens, pourquoi cela n'a pas de sens. On a eu un premier
témoignage, on va voir les autres et, partant de là, ça
n'exclut, encore une fois, aucune consultation qui pourrait sembler pertinente
par les parties auprès des services du ministère et ça
n'exclut pas non plus que les parties puissent se rencontrer et nous faire part
d'ajustements qu'elles pourraient juger pertinents. D'ailleurs, ça s'est
fait - je l'ai indiqué dans le bref rappel historique -plusieurs
demandes de modifications en cours de route nous sont venues des parties depuis
le mois d'août, en particulier, si ma mémoire est bonne; j'ai
évoqué l'historique tantôt, alors il n'y a rien de
fermé. On n'en est pas à une étape finale.
M. Fontaine: Je comprends très bien la position du
ministre et je pourrais même dire que je suis d'accord avec lui. Si on
veut modifier les lois, si on n'est pas d'accord avec les lois existantes et
qu'on veuille faire des suggestions pour des modifications ultérieures,
je pense que le ministère est là pour jouer son rôle et,
s'il y a des modifications à apporter, il va le faire. Il reste
cependant un fait, c'est qu'on a remis à ces gens-là une liste
d'amendements qu'on veut apporter au décret et nous, parlementaires,
n'avons pas eu d'explication. On nous dit que des explications partielles ont
été données au téléphone, mais jamais
d'explications précises quant à savoir... Par exemple, si on
prend le premier point, l'article 17.06: travail interdit, le ministre a dit:
Enlever, après les mots "de l'industrie de la construction", les mots
"et pour toute autre personne". Il faudrait peut-être que le
ministère nous explique pourquoi il veut enlever ça et, à
ce moment-là, les gens qui sont là, représentés
également par des conseillers juridiques, pourront, comme si on
étudiait un projet de loi article par article, nous dire s'ils sont
d'accord ou non avec la modification d'ordre juridique que veut
apporter le ministre, parce qu'il semble bien que ce ne sont que des
modifications d'ordre juridique. Il n'y a pas de modifications de fond.
M. Marois: M. le Président, je voudrais juste faire une
remarque. Je comprends parfaitement bien la réaction du
député, je voudrais rappeler simplement une chose. Je ne peux pas
lire pour les députés les documents qu'on leur fournit. On a
remis -chaque parlementaire l'a, comme les parties - d'abord le document qui
accompagne l'avis de convocation, qui contient un certain nombre de suggestions
et, en plus, on a aussi fourni - à moins que je ne sois mal
informé, on me dit que cela a été remis à chaque
parlementaire - le document qui a été remis aux parties lors de
la rencontre du 3 décembre. Ce n'est pas compliqué; je ne suis
quand même pas pour me lever debout, m'en aller au tableau et commencer
à expliquer que, dans la colonne de gauche, ça reprend de
façon schématique, sous des rubriques spécifiques, un
certain nombre de clauses numérotées avec, à droite, la
référence concernant telle loi ou tel article en regard desquels
on pense qu'il y a quelque chose qui n'est pas parfaitement correct sur le plan
légal.
M. Fontaine: C'est facile, mais, quand il y a un malentendu
quelque part, c'est que, normalement, il y a deux parties qui n'ont pas la
même opinion. Là, on nous donne, d'un côté, les
articles de la convention collective et, de l'autre côté, les
articles de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la
construction, par exemple. Je suis bien d'accord, on a tout ça en main,
mais ça ne nous donne pas les explications à savoir de quelle
façon le ministre ou le ministère interprète tel article
de la loi pour en arriver à une demande de modification du
décret. C'est tout simplement ça qu'on voudrait avoir ce matin,
pour que les parties puissent, elles aussi, donner leur opinion. On nous donne
des articles, mais on ne donne pas d'explications.
Quand on étudie un projet de loi article par article en
commission parlementaire, habituellement, lorsqu'on lit l'article, le ministre
donne des explications et, quand il présente des modifications à
cet article, il nous donne également des motifs pour lesquels il veut le
modifier. C'est cela que vous ne faites pas ce matin. (11 h 15)
M. Marois: Je vais ajouter seulement une dernière chose
là-dessus. Encore une fois, si on n'est pas satisfait de ce que
prévoit la loi qui trace le corridor dans lequel on doit travailler ici,
je ne disconviens pas de ce fait, les choses ne sont jamais figées dans
le béton de façon éternelle - je pense que les perfections
absolues, on est loin de les atteindre tout le temps - et, si des ajustements
s'imposent, je suis prêt à les regarder et je suis obligé
de fonctionner dans le cadre de la loi qui est là. La loi dit
très bien, à l'article 51, troisième paragraphe: Le
gouvernement peut aussi, sur la recommandation du ministre, prolonger, abroger
ou modifier le décret sans le consentement des parties - une association
ou des associations de salariés - quand il est d'avis que dans
l'intérêt public, cette solution est la seule qui puisse
remédier à la situation. Il ne peut toutefois modifier ainsi le
décret sans que ces associations ne soient invitées à
être entendues devant la commission parlementaire du travail, de la
main-d'oeuvre et de l'immigration, quant aux raisons motivant
l'impossibilité de parvenir à une entente relativement aux
modifications apportées au décret.
En d'autres termes, les parties sont là aujourd'hui. On est
là pour les entendre. Toutes les parties vont nous faire part, je
crois... Encore une fois, s'il y a des ajustements... je ne prétends pas
que tout est parfait. Dans la mesure du possible, les informations pertinentes
ont été communiquées aux parties qui sont
évidemment forcément beaucoup plus familières qu'on peut
l'être, parce qu'elles sont plongées là-dedans à peu
près tous les jours. Elles connaissent très bien ces
mécanismes, les clauses de la convention collective, du décret et
des différents articles des différentes lois en question. Elles
nous font connaître leur point de vue. On a eu, ce matin, jusqu'ici un
premier témoignagne. On nous signale qu'il y a eu un certain nombre
d'erreurs. On n'en disconvient pas et on va procéder aux corrections qui
s'imposent.
Deuxièmement, on nous suggérait qu'il n'y avait pas de
modifications. On a convenu, je pense bien, dans la discussion sur un point
que, pour les cotisations syndicales, un ajustement s'impose. Il n'y a rien de
figé à partir d'aujourd'hui. L'étape que nous franchissons
aujourd'hui n'est pas finale. Je pense qu'on devrait continuer et laisser le
maximum de temps aux parties, puisqu'on est là pour les entendre.
M. Fontaine: M. le Président, je voudrais peut-être
intervenir une dernière fois sur ce point. Il me semble, ce matin, qu'on
soit dans une situation exceptionnelle. La loi prévoit qu'on doit
entendre les parties pour nous dire les raisons pour lesquelles elles ne sont
pas entendues.
Or, je dois comprendre qu'elles se sont entendues. C'est plutôt le
ministère qui veut modifier l'entente qu'elles ont eues ensemble. Il
faudrait peut-être que le ministère nous dise pourquoi il veut
modifier l'entente qu'elles ont eue ensemble. Le ministère nous dit:
C'est pour des raisons d'ordre juridique,
parce que l'entente ne respecte pas certaines lois. Si l'entente ne
respecte pas la loi, qu'on nous dise quelles sont les raisons pour lesquelles
l'entente ne respecte pas la loi. Alors, les parties vont comprendre les
raisons pour lesquelles le ministère veut modifier l'entente et elles
vont donner leur opinion juridique, si elles sont d'accord avec
l'interprétation du ministère et de la loi.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Maisonneuve.
M. Lalande: M. le Président, cela complète un peu
la question du député de Nicolet-Yamaska. Je dois
reconnaître avec le ministre que, effectivement, au mois de
décembre, un document a été déposé,
celui-ci, auquel je fais référence. Lors de l'étude
article par article, on a dit qu'à son avis, ce n'était pas
conforme ou illégal dans certains cas. Je pense que cette partie du
travail a été faite. Tout de même, c'est là et on
n'avait qu'à en prendre connaissance. C'est un point.
Mais l'autre point qu'apporte le député de Nicolet-Yamaska
m'apparaît fort important à ce stade-ci. Il y a effectivement
entente entre les deux signataires là-dessus. Ma question est la
suivante: Pourquoi l'urgence du ministère d'intervenir là-dedans,
à quinze mois de la fin du décret?
Je sais que, par ailleurs, dans d'autres circonstances, vous
dénoncez la politique des gros pieds, mais j'ai un peu l'impression que
le ministère est en train de mettre ses gros pieds là-dedans. Je
comprends qu'en vertu de l'article 51 de la Loi sur les relations du travail
dans l'industrie de la construction, vous avez le droit de le faire et c'est
aussi votre devoir. Je voudrais simplement savoir l'urgence et l'importance d'y
aller immédiatement.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Je ne veux pas répondre à la place du
ministre, mais, personnellement, j'ai été appelé aussi
à rencontrer des gens. Il y a une certaine urgence, bien sûr.
C'est toute la notion de rétroactivité des griefs. On est sur la
loi sur les décrets des conventions collectives et il y a une
procédure bien précise à suivre dans la loi qui
régit les conventions collectives et les décrets. Dès
qu'un groupe peut se plaindre d'une clause discriminatoire, on n'a pas le
choix, il faut l'étudier. Que voulez-vous? On ne changera pas
aujourd'hui l'économie de la loi régissant les relations du
travail dans l'industrie de la construction. Il n'en demeure pas moins qu'il y
a une partie signataire et qu'il y a quand même des parties
représentatives, une multitude d'entre elles. C'est vous-même, au
début de votre exposé, qui avez utilisé cette expression
en prenant comme exemple la CSN, en prenant comme exemple d'autres groupes de
salariés, comme la CSD, et en disant vous-même qu'ils
n'étaient pas représentés à la table de
négociation.
À plus forte raison, à partir même de votre
argumentation, on est bien obligé de dire que le seul moyen pour les
parties qui ne sont pas parties prenantes à la signature du contrat,
c'est de suivre le processus normal de la promulgation du décret, de la
présentation de leurs objections, de l'étude par le ministre et
la présentation en commission parlementaire pour fins de ratification.
C'est le processus normal. On remet en cause, avec la discussion qu'on est en
train de faire, le processus normal décrit dans la loi
présentement. Je dois vous avouer qu'à partir même du 12
décembre, je pense, le télégramme de M. Pouliot...
Une voix: Le 8.
M. Chevrette: Le 8? ...dans lequel il dit lui-même qu'il ne
pense pas en arriver à un consensus sur la majorité des articles
soulevés par le ministre. Le ministre est obligé de tenir compte
des remarques qui ont été faites par tous les autres groupes, il
est obligé de regarder ce que le contentieux a fait comme étude
et je dois vous dire qu'on a même eu des pressions pour la promulgation
du décret au plus vite, parce que cela pénalisait sur la
rétroactivité des travailleurs. On sait le nombre de faillites
qu'il y a dans le domaine de la construction. Vous irez courir après
certains entrepreneurs qui partent sous d'autres noms, ou qui disparaissent
dans le décor, et trouver la compagnie après. C'était tout
cela qui urgeait pour la promulgation du décret. Donc, je pense que
là-dessus on devrait même arrêter la discussion et faire en
sorte qu'on discute vraiment les points essentiels et qu'on arrive à se
brancher sur les articles qu'on a devant nous.
Le Président (M. Boucher): M. Pouliot.
M. Fontaine: M. le Président, je reviens encore une fois
très brièvement.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Le ministre et son adjoint parlementaire... Vous
n'êtes pas adjoint parlementaire?
M. Chevrette: Non.
M. Fontaine: Ah! c'est vrai! Le ministre et le
député semblent oublier qu'il y a eu une entente et que,
normalement, on est ici, en commission parlementaire, pour entendre
les associations convoquées sur les raisons motivant
l'impossibilité de parvenir à une entente relativement aux
modifications apportées au décret. Il y a eu une entente. C'est
le ministre qui propose des modifications et il n'a pas pu, parce qu'il y a une
réunion qui n'a pas pu se tenir à un moment donné, donner
les raisons juridiques pour lesquelles il veut modifier cette entente. S'il
veut les donner ce matin, les gens vont pouvoir lui répondre. S'il ne
les donne pas, ils ne pourront pas répondre.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Marois: M. le Président, je vais intervenir une
dernière fois mais, en ce qui me concerne, cela va être tout parce
qu'on est là - c'est la loi qui nous le dit - pour entendre les parties.
Il me semble qu'on devrait consacrer l'essentiel de notre temps à les
écouter, parce que les parties pataugent là-dedans tous les jours
et connaissent la convention. Elles connaissent le décret. Elles
connaissent les lois. Elles connaissent les propositions ou les suggestions qui
ont été formulées par le ministère et elles sont
là pour nous faire connaître leur point de vue, nous dire
pourquoi, à leur point de vue, elles ne peuvent pas en arriver à
une entente entre elles sur ces suggestions possiblement parce que, comme un
des premiers intervenants nous l'a dit ce matin, de leur point de vue, pour
l'essentiel, il ne doit pas y avoir de modifications parce que tout est
parfait.
Je me permets de rappeler - je suis peut-être passé trop
vite sur l'historique ce matin, je sais bien qu'on n'est pas tous et moi non
plus, je ne prétends pas l'être, des spécialistes du
domaine - qu'il y a un historique très complexe. Dans l'historique, je
suis peut-être passé un peu trop vite. Bien sûr, il y a eu
une entente. Une convention collective a été signée par
les parties qui, légalement, doivent le faire. C'est une première
chose. Cette convention, - je l'ai dit - le 16 juillet 1980, a
été publiée. Il y a eu une publication comme la loi le dit
et, en plus, les modifications qui avaient été demandées
par les parties à ce moment-là ont été
publiées dans la Gazette officielle avec un avis, comme le dit la loi,
lequel avis stipulait en plus - parce que c'est le droit - que toute objection
devait être formulée dans les 30 jours, parce qu'il y a des gens
qui sont directement touchés, mais qui ne sont pas parties prenantes
comme signataires, négociateurs, si vous voulez, de la convention et qui
ont des points de vue à faire valoir.
On a reçu effectivement, du 7 au 28 août, à peu
près 70 objections dont certaines provenaient de groupes qui sont ici et
qui veulent se faire entendre. Ces nombreuses objections ont été
regardées par le contentieux du ministère, on n'a pas retenu tout
le paquet. Je pense que, finalement, on en arrive à une liste de 28 ou
30 clauses -je ne sais plus - qu'on a soulevées, qui ont
été remises aux parties, qui ont été remises aux
parlementaires. Là, on est rendu à l'étape d'entendre les
parties. Quand même on discuterait longtemps ce qui a fait que la
réunion du 3 décembre a marché ou n'a pas marché,
cela ne nous avancera pas beaucoup. Ce qui va nous avancer, au point où
on en est c'est d'entendre les parties - parce qu'il y a des objections qui ont
été formulées par des parties. Quand j'ai
évoqué tantôt - je vais prendre un exemple bien concret -
la question des cotisations syndicales, c'est justement une objection qui nous
est venue d'une des parties qui compte se faire entendre aujourd'hui, pour en
mentionner une. Je n'ai pas pigé cela dans les arbres. C'est là.
C'est retourné aux parties. Elles vont nous faire connaître leur
point de vue, pourquoi elles ne peuvent pas en arriver à une entente sur
ce qui est suggéré. Et, avec leur éclairage, on jugera si
c'est pertinent, et je me ferai mon opinion finale. C'est ce que la loi dit.
J'acheminerai en conséquence ce qu'il semble pertinent d'acheminer au
Conseil des ministres qui, lui, verra si c'est d'intérêt public de
faire des modifications ou pas.
On essaie de procéder le mieux possible, M. le Président,
surtout avec une demande légitime qui nous est venue de convoquer une
commission parlementaire.
M. Fontaine: Vous ne trouvez pas cela un peu inquiétant de
voir qu'une des parties signataires de l'entente arrive ici et nous dise: II
n'y a qu'une chose sur laquelle on s'entend pour qu'il y ait une modification.
Pour le reste, tout est correct, selon nous, selon la loi?
M. Marois: Écoutez, c'est vraiment la dernière
question à laquelle je réponds sur ce sujet. Il n'y a rien qui
m'inquiète là-dedans. Il n'y a personne ici, à cette
table, qui va tordre le cou des parties. Ils sont des groupes libres. On vit en
démocratie, jusqu'à nouvel ordre. J'espère qu'on va vivre
encore pour un maudit bout de temps en démocratie. En ce qui nous
concerne, tant qu'on va être là, on va faire tout ce qui est
humainement possible pour que cela reste comme cela. Ils sont libres de faire
connaître leur point de vue. On va toujours bien respecter les groupes
qui se présentent ici. On va voir s'il y a une variété de
points de vue et on se fera une opinion. On est là pour les entendre. Si
un groupe nous dit: Sauf sur tel point - ce que j'ai compris tantôt - les
erreurs, corrigez-nous cela. Deuxièmement, la question de cotisation
syndicale, il y a peut-être quelque chose là
que vous devriez regarder, on n'en disconvient pas. Pour le reste, on
pense qu'il ne doit pas y avoir d'autres modifications. Je dis: Pour l'amour du
bon Dieu, laissons-leur une chance de nous dire - pour ne pas prendre plus de
leur temps - si, à leur point de vue, il y a d'autres
éléments, dans les suggestions qui ont été
formulées, qui leur paraissent fondés ou pas et qu'on puisse
entendre tous les groupes dans le courant de la journée et des heures
qui sont mises à notre disposition. Sinon, si on continue, on rogne sur
le temps prévu pour le témoignage des parties. Cela me
paraît, admissible jusqu'à un certain point, quand c'est
fondé, c'est correct, je n'ai pas d'objection, il me semble qu'on ne
devrait pas abuser et leur laisser le maximum de temps.
Le Président (M. Boucher): M. Pouliot.
M. Pouliot: M. le ministre, pour ce qui est de la réunion
du 3 décembre, le ministre du Travail mentionne que les parties - je
vais prendre ses paroles - on est plongé là-dedans.
Selon le document qu'on nous remet, si on prend le droit au travail, les
articles 3.02, 17.06, 18.01, 18.03, 20.02, 25.08, premier paragraphe, vont
à l'encontre des alinéas 2 et 3, non refondus, 1979, chapitre 2a
18 de l'article 19.
C'est un drôle de jargon. Le contentieux du ministère du
Travail aurait pu nous écrire exactement quelles sont les raisons pour
lesquelles il décide que tous ces articles pourraient être
illégaux. Je veux bien croire que c'est un document venant d'un rapport
de discussion, mais il nous a semblé qu'on aurait pu nous écrire
et on partage l'opinion du député de l'Union Nationale.
Pour ce qui est de l'intérêt public...
M. Marois: Je m'excuse de vous interrompre. Je respecte
parfaitement bien votre opininon et votre point de vue. Mais, pour l'amour du
bon Dieu, le 3 décembre, la rencontre, c'était une maudite belle
occasion de les recevoir, les explications. Ce n'est quand même pas moi
qui ai quitté la réunion.
M. Pouliot: Non. C'est le ministre qui a décidé de
convoquer des parties qui n'étaient pas des parties reconnues par la
loi, par exemple.
M. Marois: D'accord. Mais ce n'était pas une
réunion de négociation, pas plus qu'ici, en commission
parlementaire, ce n'est pas une séance de négociation. C'est une
rencontre d'information. Cela nous paraissait légitime. Je respecte le
point de vue des autres, mais je dis qu'il y avait là une belle occasion
d'avoir de l'information.
M. Pouliot: Oui. Le 4 décembre aussi, il y avait une belle
occasion.
L'article 32.02 du décret, je ne mentionne que les dispositions
contraires à la loi - et cela a été signé par les
parties - dit que toute disposition du décret qui pourrait être
contraire à la loi ou aux règlements adoptés pour son
application est nulle et sans effet. (11 h 30)
Je pense qu'on l'a textuellement et les parties l'ont signé. S'il
y a des articles où c'est très clair qu'ils sont contre les lois
ou règlements, ils n'ont pas d'effet. Mais, lorsqu'on joue avec
l'article 51 de la loi et qu'on mentionne l'intérêt public, c'est
là que le ministre détient son pouvoir de modifier notre
convention collective ou de modifier le décret. L'intérêt
public, on l'a mentionné assez clairement, n'est d'aucune façon
en jeu actuellement.
Je voudrais, en terminant, s'il n'y a pas d'autres questions, mentionner
que le conseil provincial, que je sache, détient encore 68% de
degré de représentativité, indépendamment qu'on ait
reconnu une cinquième association par le truchement de la loi no 109 et
que l'on ait l'intention, lorsque les représentants du local 144 et des
pipe-lines vont formuler des demandes au conseil provincial, qu'il y ait des
rencontres et une réouverture de négociation et qu'il puisse y
avoir des ententes possibles pour modifier certaines clauses qui ont
déjà été acceptées lors de
l'assemblée du conseil provincial du 9 mai. Le conseil provincial a
même demandé, par une lettre, le 12 octobre 1979 - je mentionne
cela pour les travailleurs qui ont un problème actuellement sur le
pipe-line - à l'AECQ une table particulière pour continuer la
négociation ou commencer la négociation sur le pipe-line.
Il est clair, pour le conseil provincial, qu'on ne s'est pas
ingéré dans la négociation. On a respecté ce que
les métiers, spécialités ou occupations avaient
signé. Cette lettre de l'AECQ est restée sans réponse, on
doit le dire, et on ne sait pas où en est rendu effectivement le dossier
concernant le pipeline, mais on peut dire que le comité de coordination
a prévu pas moins de dix rencontres pour le local 144. Lors de ces
rencontres, les négociations des mois d'août 1979 à
décembre 1979, il aurait dû y avoir discussion et
dépôt des demandes concernant le pipe-line pour le conseil
provincial. On n'a pas en main les demandes et celui qui a le mandat de
négocier le pipe-line, c'est l'association unie, locale 144, qui est
encore en tutelle depuis plus de cinq ans comme, sûrement, vous
êtes au courant; elle a le mandat de négocier le pipe-line. Mais
le conseil provincial va certainement apporter son concours à l'appui du
local 144 pour une réouverture des négociations si on a une
demande. Mais je tiens à souligner que, lors
de l'assemblée des agents d'affaires à laquelle le local
144 était présent, il n'a pas été question de
dissidence et d'aller contre le projet de convention collective. Cela a
été accepté à l'unanimité. Par la suite, il
semblerait qu'il a voulu avoir une réouverture des négociations,
ce qui, semble-t-il, a été refusé par l'AECQ. Mais je
tiens à souligner qu'il n'est pas dans notre intérêt - je
pense, dans l'intérêt de personne - que les travailleurs soient
pénalisés. On va donner tout le support possible. On a des
lettres qu'on a échangées avec l'AECQ là-dessus qui disent
que, pour eux, les négociations, il semblerait que c'est
terminé.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Pouliot. Est-ce qu'il
y a d'autres questions?
M. Marois: Je n'ai pas d'autres questions à poser, M. le
Président. Je tiens à remercier les membres de cet organisme qui
nous ont fait connaître leur point de vue.
Le Président (M. Boucher): Au nom des membres de la
commission, je remercie les représentants du Conseil provincial du
Québec des métiers de la construction. J'appellerais maintenant
l'Association des entrepreneurs en construction du Québec, mais on me
dit que ses représentants ne sont pas ici ce matin.
Une voix: J'en prends acte.
Le Président (M. Boucher): Le prochain organisme que j'ai
mentionné dans la liste serait la Confédération des
syndicats nationaux représentée par M. Yvon Leclerc. Si vous
voulez vous avancer et vous identifier.
CSN-Construction
M. Leclerc (Yvon): Je suis Yvon Leclerc, président de la
Fédération nationale des syndicats du bâtiment et du bois
qui regroupe quelque 37,000 travailleurs dont environ 5000 dans les secteurs du
bois ouvré, scierie, matériaux de construction et meubles, et
environ 32,000 dans le secteur de la construction.
Si vous me le permettez, M. le Président, avant de commencer,
j'aimerais vous présenter ceux qui m'accompagnent. Entre autres, il y a
le camarade Louis-Philippe Bernier, trésorier de la
fédération, derrière moi. Je suis accompagné,
à ma gauche, de M. Lucien Poulin qui était le responsable
à la CSN-Construction des dernières négociations dans le
secteur de la construction et, à ma droite, du camarade Maurice
Sauvé, directeur des services à la fédération.
J'aimerais également souligner la présence de militants et
membres de la CSN-Construction à cette commission parlementaire.
C'est avec une certaine appréhension que nous avons reçu
le rapport du ministre du Travail concernant les articles de la convention
collective conclue entre l'Association des employeurs en construction du
Québec et le Conseil provincial du Québec des métiers de
la construction. Le nombre de dispositions que le ministre du Travail
considère non conformes à la loi nous a
désagréablement surpris.
Nous considérons que le ministre veut, dans plusieurs cas, se
servir des pouvoirs très étendus qui lui sont
conférés par la loi pour intervenir dans des ententes qui ont
été conclues librement entre les parties au cours de la
négociation.
Malgré que nous soyons en désaccord avec plusieurs clauses
de cette convention, nous ne pouvons accepter que le ministre décide
unilatéralement - comme les gens d'Ottwa - de changer des dispositions
qui ont été négociées par les parties; à
moins qu'il ne fasse la preuve que les dispositions sont interdites par la loi
- ne nous servez pas la médecine qu'Ottawa vous sert - ou qu'elles sont
discriminatoires pour les associations syndicales minoritaires ou pour une
catégorie d'employeurs qui ne les ont pas consenties, telles que
définies à l'article 49 de la Loi sur les relations du travail
dans l'industrie de la construction.
Nous considérons que l'industrie de la construction a
été tellement réglementée par différentes
lois ou règlements, que la liberté des associations tant
patronales que syndicales est tellement limitée que le ministre devrait
être très prudent dans ses interventions et ne pas
interpréter plus restrictivement ce que la loi lui permet. Le ministre
peut invoquer que les changements qu'il propose sont dans
l'intérêt public, mais il faut avoir présent à
l'esprit que les travailleurs syndiqués de l'industrie de la
construction ont comme préoccupation, comme tous les autres travailleurs
syndiqués, la protection de leur emploi et de leur revenu; c'est
d'ailleurs le but de tout syndicat qui se respecte.
Le ministre ne doit donc pas interpréter la loi comme une
négation du droit à la négociation pour les travailleurs
de la construction. Les travailleurs de la construction doivent
également faire partie du public que le ministre a le devoir de
protéger. S'il désire changer des ententes qui sont intervenues
entre les parties au nom de l'ordre public, il devrait se préoccuper des
augmentations de salaire qui sont accordées aux travailleurs de la
construction qui font en sorte que, dans trois ans, ils auront perdu 8%
à 10% de leur pouvoir d'achat.
Si vous me permettez, M. le ministre, j'ouvrirais la parenthèse
suivante: II pourrait plutôt accorder rétroactivement les $0.30
d'augmentation à ceux qui en ont été
discriminatoirement privés par les "boss" parce qu'ils ont
refusé de se laisser acheter au détriment d'énormes
reculs.
Le ministre pourrait également, au nom de l'intérêt
public, proposer des amendements au décret pour permettre aux
travailleurs de la construction de récupérer les quelques
millions qu'ils se font couper par l'assurance-chômage pendant la
période des vacances d'hiver. Le ministre pourrait proposer que la
formule de vacances négociées par les monteurs de lignes
s'applique à tous les travailleurs de l'industrie. La
réalité était que pendant la prétendue
période de vacances d'hiver, 70% à 75% des travailleurs de la
construction sont effectivement en chômage.
Nous considérons que le ministre choisit la méthode
facile, pour ne pas dire simpliste, dans la façon dont il propose de
modifier le décret. C'est sans aucun doute plus facile d'abroger une
disposition plutôt que de la modifier de façon qu'elle concorde
avec les lois et règlements, tout en respectant la volonté des
parties.
Nous avons donc l'intention de prouver aux membres de cette commission
que plusieurs des amendements du ministre ne reposent sur aucun fondement
juridique. Nous allons également proposer des amendements qui, tout en
respectant la volonté des parties, pourraient enlever les
ambiguïtés qu'ils peuvent avoir vis-à-vis de la loi ou les
règlements. Nous allons également démontrer que le
ministre passe sous silence certaines dispositions qui sont tout à fait
discriminatoires pour les associations syndicales minoritaires.
Nous ferons, M. le ministre, nos commentaires dans le même ordre
que le document qui nous a été transmis en retard, après
que nous ayons fait part au bureau du ministre que d'autres l'avaient
reçu bien avant nous, le document faisant état de certaines
modifications que le ministre veut apporter. Ce sera dans cet ordre.
J'aimerais tout de suite soulever l'aspect du pipe-line. Il ne fait pas
partie de notre document parce que nous ne pensions pas qu'il en serait
question ici, mais nous avons également des commentaires à
formuler là-dessus, parce que vos conciliateurs ont recommandé un
projet d'entente entre un local en tutelle et des "boss", qui serait
illégal, selon nous, et discriminatoire pour les membres autres que ce
syndicat en tutelle.
Le ministre prétend que les articles suivants de la convention ne
seraient pas conformes à l'article 19 de la loi 110, soit les articles
3.02, 17.06, 18.01, 18.03, 20.02 et 25.08, paragraphe 1, et ce, principalement,
à cause des artisans.
Voyons ce que l'article de la loi dit: "L'artisan qui exécute des
travaux de construction aux fins personnelles autres que commerciales ou
industrielles pour une personne physique, n'est pas assujetti à la
présente loi, sauf aux fins de l'article 92 qui concerne les avantages
sociaux."
Quant à l'artisan qui exécute des travaux de construction
autrement qu'aux fins personnelles autres que commerciales ou industrielles
d'une personne physique, sa rémunération est égale
à la rémunération en monnaie courante et aux
indemnités ou avantages et à une valeur pécuniaire
déterminée par une convention collective ou un décret;
pour un salarié exécutant de semblables travaux, les articles 78,
82 et 92 s'appliquent à lui. De plus, il doit afficher son contrat sur
les lieux de ses travaux et en faire parvenir une copie à l'Office de la
construction.
De plus, il faut avoir à l'esprit que l'artisan n'est pas couvert
par la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction;
c'est par exception que certains articles de la loi peuvent s'appliquer
à l'artisan.
La loi n'accorde pas de droit au travail à l'artisan dans
l'industrie de la construction; tout ce qu'elle fait, elle lui accorde des
garanties s'il travaille dans l'industrie de la construction. Les parties
à la négociation ne peuvent certainement pas négocier pour
les artisans, ils se doivent de les ignorer. La loi prévoit donc que les
travaux exécutés par les artisans ne sont pas assujettis à
la loi, tout comme ceux qui sont exécutés par des salariés
permanents des affaires sociales ou ceux qui sont exécutés par
les salariés des entreprises d'exploitation forestière, etc.
L'article 3.02, le champ d'application industriel. Nous proposons de
modifier cet article de la façon suivante: Le champ d'application
industriel de la présente convention comprend tous les travaux de
construction tels que définis dans la loi et dans les règlements.
En conséquence, tout salarié et tout employeur exécutant
de tels travaux est assujetti au présent décret.
Une telle modification clarifierait une fois pour toutes que les
conditions du décret ne s'appliquent qu'aux salariés et aux
employeurs qui exécutent des travaux de construction. C'est d'ailleurs
la seule interprétation qui peut être donnée à cet
article; c'est celle qui a toujours été donnée dans le
passé. Jamais personne n'a prétendu que le décret pouvait
être applicable à des personnes qui étaient exclues du
champ d'application industriel ou professionnel.
Le ministre peut invoquer que nous n'avons pas à
répéter ce qui est déjà prévu dans la loi,
mais nous devons avoir présent à l'esprit que le décret
doit, dans la mesure du possible, être rédigé de
façon telle qu'il soit compris par les travailleurs de cette industrie.
Souvenez-vous de l'ancien président du Conseil consultatif de la
main-d'oeuvre, M. Morin, qui disait que le décret était mal
foutu, tout ça. Alors, quand on essaie d'être
précis, on vient nous corriger ça.
À titre d'exemple, nous pourrions vous citer la plupart des
conventions collectives conclues en vertu du Code du travail. Les syndicats
détiennent une juridiction en vertu de l'accréditation qu'ils ont
obtenue suivant le Code du travail. Cependant, pour fins de
compréhension, ils établissent, par convention, le champ
d'application et personne, à notre connaissance, n'a invoqué
qu'une telle disposition était illégale ou contraire à
l'ordre public.
L'article 17.06, travail interdit. Nous sommes d'accord avec la
modification proposée par le ministre.
L'article 18.01, droit au travail. Nous nous opposons à
l'abrogation de cet article, tel que proposé par le ministre. Comme nous
l'avons déjà mentionné, le décret ne peut
s'appliquer qu'aux employeurs et aux salariés de la construction, tel
que défini aux articles 3.01 et 3.02. Nous le répétons,
encore une fois, l'artisan n'est pas couvert par le décret; le ministre
ne peut donc prétendre que l'article 18.01 peut lui être
applicable. C'est d'ailleurs le gouvernement lui-même qui a
décidé, par l'adoption de la loi, de l'exclure de l'application
de la loi, malgré les objections que la CSN et toutes les autres parties
ont présentées au ministre lors de l'adoption de cette loi. C'est
lui qui a fait son lit, qu'il couche dedans maintenant.
L'article 18.03, sous-contrats, certains travaux. Nous nous opposons
à l'abrogation de cet article par le ministre. Cet article
prévoit la réglementation de l'octroi de certains sous-contrats
et il ne s'applique qu'à l'employeur et aux salariés de
l'industrie de la construction. Nous ne pouvons comprendre que le ministre
puisse considérer cette disposition illégale quand le même
gouvernement dont il fait partie négocie lui-même une clause de
sous-contrat qui est beaucoup plus restrictive dans la convention des affaires
sociales (voir l'article 29 de la convention des affaires sociales).
Une très grande majorité des conventions collectives
conclues au Québec contiennent des dispositions concernant l'octroi de
sous-contrats. De plus, la Loi sur les relations du travail (article 61)
prévoit spécifiquement que les parties peuvent négocier
des dispositions concernant les mouvements de main-d'oeuvre, y compris
l'ancienneté. Si la convention collective contenait une disposition sur
l'ancienneté, le ministre nous dirait-il qu'elle est illégale
parce qu'elle brime le droit de l'artisan d'être embauché en
priorité, avant le vrai travailleur de la construction? Nous ne croyons
pas que les articles de la loi 110 concernant les artisans annulent l'article
61 de la loi, à moins que le ministre ne nous dise qu'il veut interdire
aux travailleurs de la construction le droit de négocier toute forme de
sécurité d'emploi et de revenu. Si c'est cette loi de la jungle
que le ministre veut imposer en permanence, nous aimerions le savoir.
L'article 22.02, travail interdit et travail permis durant les
congés annuels obligatoires. Nous n'avons pas d'objection à la
modification proposée par le ministre.
L'article 25.08, paragraphe 1, ligne de transport et de distribution
d'énergie électrique, poste de transformation et réseau de
communication. Nous nous opposons à l'abrogation de cet article par le
ministre pour les mêmes raisons que celles que nous avons
invoquées à l'article 18.03. (11 h 45)
Chapitre II. Les comités (article 61). Nous ne sommes pas
d'accord avec l'interprétation que le ministre semble vouloir donner
à la loi et principalement à l'article 61 de la Loi sur les
relations du travail dans l'industrie de la construction. Nous ne pouvons
concevoir cet article comme limitant le droit des parties à la
négociation.
Les deux premiers paragraphes de cet article imposent des obligations
aux parties. Le troisième paragraphe se lit comme suit: "II peut - le
décret - contenir notamment les dispositions concernant
l'ancienneté, les mouvements de main-d'oeuvre et les travaux par
roulement, les travaux de nuit, les travaux du dimanche ainsi que les
majorations de salaire, les primes, les indemnités et allocations
diverses, les tableaux d'affichage, les vestiaires et les outils."
Si le législateur a employé le mot "notamment", c'est
à titre d'exemple et non pas dans un sens limitatif.
Nous considérons qu'à moins d'une interdiction expresse
dans une loi ou un règlement, les parties ont le droit de
négocier toute disposition qui ne contrevient pas à l'ordre
public ou qui n'est pas discriminatoire.
L'article 3.03. Comité de révision: Nous nous objectons
à l'abrogation de cet article par le ministre.
Cet article prévoit la formation d'un comité pour
étudier plus spécifiquement le champ d'application de la
construction avec un pouvoir de recommandations aux parties et au ministre;
à moins que le ministre n'ait décidé qu'il était
illégal pour les parties de lui faire des recommandations dans un champ
d'activités où elles sont très concernées, nous ne
voyons rien d'illégal. Le ministre pourrait peut-être penser que
la formation du comité est discriminatoire, mais nous ne pouvons voir en
quoi, car il s'agit de critères que le gouvernement avait prévus
lui-même dans la loi pour la formation du comité mixte de
l'industrie de la construction.
L'article 6.02. Code des ententes relatives aux conflits de
compétence. Nous
nous opposons à l'abrogation de cet article par le ministre. Nous
proposons cependant les modifications suivantes pour le rendre conforme aux
articles 42a et 49 de la loi.
Le paragraphe a) de cet article devrait se lire de la façon
suivante: "a). Comité de codification du Code des ententes relatives aux
conflits de compétence:
En vue d'aider les parties à s'entendre sur le conseil
d'arbitrage, à décider sur les conflits de compétence, les
parties forment un comité composé d'un représentant de
chaque association représentative à un degré de 15% ou
plus, d'un nombre égal de représentants de l'association
d'employeurs. Le comité peut demander à l'office de nommer un
représentant."
Le comité prévu à 6.02a est un comité
technique qui n'a aucun pouvoir de décision pour changer quoi que ce
soit dans la loi ou les règlements ni même pour faire des
recommandations. Son seul but est de clarifier l'interprétation du
règlement particulier sur la formation et la qualification
professionnelles. Nous ne considérons pas cette disposition contraire ou
non conforme à l'article 61 de la loi. Nous la considérons
cependant discriminatoire en vertu des articles 42a et 49 de la loi. En effet,
il s'agit d'une forme de négociation entre les parties qui peut avoir
des répercussions sur le travail à être
exécuté par certains salariés. De plus, ce comité
doit être financé par tous les travailleurs de la construction
à même le budget de l'Office de la construction.
La modification que nous proposons rendrait cet article conforme
à la loi, selon nous.
L'article 28.07. Comité visant à la sécurité
d'emploi et du revenu du salarié. Nous nous opposons aux modifications
proposées par le ministre. Nous ne pouvons concevoir en quoi cette
disposition contrevient à l'article 61 de la loi; au contraire, les
parties ne font que commencer à appliquer ce qui était une
recommandation de la Commission d'enquête sur la liberté
syndicale, voir recommandations nos 133 et 134 du rapport Cliche, M. le
député de Joliette-Montcalm doit s'en souvenir. Vouloir
restreindre le champ d'activité du comité, comme le fait le
ministre, nous apparaît vouloir jouer à l'autruche et ne pas tenir
compte de la réalité de l'industrie. De plus, ce comité
n'a que des pouvoirs de recommandations.
Chapitre III. Placement, préférence d'embauche (article
78). L'article 78 de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la
construction prévoit que l'office est responsable du placement des
salariés de la construction et qu'il doit adopter un règlement
à cette fin.
Par les pouvoirs qui lui étaient accordés par l'article
78, l'office aurait pu décider d'abolir les bureaux de placement
syndicaux; il aurait pu obliger les employeurs à recourir exclusivement
au bureau de l'office pour embaucher la main-d'oeuvre, etc. Il aurait
également pu établir des critères très stricts
d'embauche tels que l'ancienneté des travailleurs dans l'industrie pour
fins d'embauche. Cependant, l'office s'est contenté de
réglementer le droit général à obtenir une carte de
classification et à établir une certaine priorité d'emploi
régionale, tout en laissant une grande liberté à
l'employeur de déplacer la main-d'oeuvre d'une région à
une autre, ainsi que la liberté d'embaucher à peu près
n'importe quel travailleur détenteur d'un certificat de classification,
sans respecter aucune priorité, même pas celles qui peuvent
être imposées aux bureaux de placement syndicaux pour leur code
d'éthique.
Nous ne pouvons concevoir que les dispositions des articles 5.04,
paragraphe lb, sous-paragraphes 25.07, 25.08 (3) et les sous-annexes B ou C
contreviennent à l'article 78 de la loi, ou au règlement no 5 sur
le placement des salariés de l'industrie de la construction, car il
s'agit de mouvements de main-d'oeuvre, ce qui est spécifiquement permis
de négocier par l'article 61 de la loi.
De plus, l'article 32.02 de la convention stipule de façon assez
claire que tous ces articles ne peuvent être en contradiction avec le
règlement sur le placement et toute autre loi.
Vous me permettrez, M. le ministre, de faire une parenthèse. La
CSN s'est battue pour avoir un tel règlement sur le placement. Pour
nous, c'est un pas en avant. Je tiens à vous dire qu'on tient encore
à ce que ce règlement sur le placement soit maintenu et
même amélioré, dans l'intérêt des travailleurs
de la construction dans leur ensemble, de ceux qu'on représente
évidemment.
Article 5.04 (1) B - exception: électricien, certains travaux.
Nous nous opposons à la modification proposée par le ministre.
Nous la trouvons cependant un peu ambiguë, car, au chapitre 14, le
ministre propose d'abroger au complet l'article 5.04 sous prétexte qu'il
contrevient à la Loi sur la qualification de la main-d'oeuvre. Pour le
moment, nous limiterons nos objections au règlement sur le placement.
Nous proposons donc la modification suivante: Remplacer la phrase qui se lit
comme suit: "Si aucun tel électricien n'est disponible sur le chantier,
l'employeur embauchera de préférence un électricien
compétent en travaux de soudure s'il y en a un de disponible qui
réside à moins de 120 kilomètres de tel chantier" par la
phrase suivante: "L'employeur embauchera de préférence un
électricien compétent aux travaux de soudure, s'il y en a un de
disponible qui répond aux critères d'embauche
édictés par le règlement no 5 relatif au
placement des salariés de l'industrie de la construction."
Malgré que nous demeurions convaincus que le texte
négocié par les parties ne peut être
interprété de façon à limiter l'application du
règlement no 5, l'amendement que nous proposons devrait rassurer le
ministre tout en respectant l'entente intervenue entre les parties à la
négociation.
L'article 25.07, préférence d'embauche. Nous nous opposons
à l'abrogation de cet article par le ministre pour les mêmes
raisons que celles pour lesquelles nous nous sommes opposés à la
modification que le ministre propose à l'article 5.04 (1) B.
Dans le but de rassurer le ministre tout en respectant la volonté
des parties, nous proposons d'ajouter, à la fin du quatrième
alinéa, la phrase suivante: "Les préférences d'embauche
prévues à cet article doivent s'appliquer conformément au
règlement no 5 sur le placement des salariés de la
construction."
L'article 25.08 (3), ligne de distribution d'énergie
électrique et poste de distribution. Nous nous opposons à ce que
le ministre abroge ce paragraphe pour les mêmes raisons que celles que
nous avons mentionnées aux articles 5.04 et 25.07.
De plus, il est déjà prévu, à la sous-annexe
C de l'annexe B, que la priorité d'emploi doit s'appliquer dans le
respect des régions de placement, ce qui ne peut s'appliquer qu'aux
régions de placement définies au règlement no 5 sur le
placement.
Annexe B, sous-annexe C, définition des emplois particuliers aux
lignes de transport et de distribution d'énergie électrique, aux
postes de transformation et aux réseaux de communication. Nous nous
opposons aux modifications proposées par le ministre pour les raisons
que nous venons de mentionner plus haut.
Chapitre IV, conflit de compétence.
L'article 6.01, soumission d'un conflit. Nous nous opposons à la
proposition du ministre d'abroger cette disposition.
Nous sommes d'accord cependant que le paragraphe 6 concernant la
troisième étape doit être biffé, parce qu'il
pourrait contrevenir à l'article 80 de la loi. Nous considérons
que les parties ne peuvent accorder à l'Office de la construction le
pouvoir de trancher les conflits de compétence, ce pouvoir étant
accordé au conseil d'arbitrage formé en vertu de la Loi sur la
qualification.
L'article 6.03, continuité des travaux. Nous n'avons pas
d'objection à la modification proposée par le ministre.
Chapitre V, précompte syndical.
L'article 8.03, remise des cotisations syndicales
précomptées. Nous n'avons pas d'objection à la
modification proposée par le ministre.
L'article 8.04, obligation de l'employeur. Nous n'avons pas d'objection
à la modification proposée par le ministre.
L'article 8.05, avis à l'office. Nous n'avons pas d'objection
à la modification proposée par le ministre.
Chapitre VI, devoirs imposés à l'Office de la construction
du Québec.
Article 8.06, avis de l'office à tous les employeurs. Nous
n'avons pas d'objection à la modification proposée par le
ministre.
Chapitre VII, régime patronal.
Section 11, régime patronal. Nous nous opposons à
l'abrogation de cette disposition telle que proposée par le ministre.
Nous considérons que cette disposition ne contrevient d'aucune
façon à la loi; au contraire, cette disposition ne fait que
confirmer ce qui est déjà prévu dans la loi.
Chapitre VIII, rapport mensuel à l'Office de la construction du
Québec.
L'article 17.04, rapport mensuel à l'office. Nous nous opposons
à l'abrogation de cette disposition telle que proposée par le
ministre.
Nous avons déjà expliqué notre
interprétation des articles 61 et 82. Encore une fois, nous tenons
à répéter que ces articles ne peuvent être
interprétés comme limitatifs. Compte tenu de cette
interprétation, nous ne pouvons concevoir que l'article 17.04
contrevient à la loi.
De plus, ces dispositions nous apparaissent essentielles pour les
associations syndicales si elles veulent être en mesure de
défendre les intérêts de leurs membres. En effet, comment
peut-on, par exemple, aviser nos membres que l'employeur ne remet pas les
montants de ses vacances ou de ses avantages sociaux à l'Office de la
construction? Si l'article 81 de la loi permet à l'office de prendre les
recours en faveur des salariés, il n'empêche pas, à notre
avis, le salarié d'exercer lui-même son recours. D'ailleurs,
tantôt, le député de Joliette-Montcalm rappelait qu'il y
avait bien des employeurs qui disparaissaient à la suite de faillites.
C'est pour surveiller un peu plus ces gens.
Chapitre IX. Indemnités de congé annuel obligatoire et de
jours fériés chômés.
L'article 20.06, paragraphe 4, sous-paragraphe d), versement de
l'indemnité des congés annuels obligatoires et des jours
fériés et chômés. Nous n'avons pas d'objection
à la modification telle que proposée par le ministre.
Chapitre X. Intérêts. Article 20.07, intérêts.
Nous nous opposons à l'abrogation de cette disposition telle que
proposée par le ministre.
Nous comprenons qu'il est pratique pour le ministre de se servir de
l'intérêt des sommes d'argent des vacances des salariés de
l'industrie de la construction pour financer l'Office de la construction du
Québec. Ils ont
même été chercher des fonds inconnus. Nous ne
pouvons cependant pas être d'accord avec une telle pratique car les fonds
ainsi recueillis servent à financer des programmes comme celui du
placement des salariés de l'industrie de la construction ou à
faire appliquer les normes de sécurité dans cette industrie,
alors que tous les autres secteurs reçoivent les mêmes services
qui sont financés à même les deniers publics. Pour nous, il
s'agit d'une double taxation pour les salariés de l'industrie de la
construction. On a notre voyage, vous pouvez en être certain.
Chapitre XI. Déplacement de grue. L'article 24.19,
déplacement de grue.
Nous nous opposons à l'abrogation de cette disposition par le
ministre. Nous considérons que cette disposition est en tout point
compatible avec l'article 19 de la loi et surtout avec le règlement no 1
qui en découle. En effet, l'arrêté en conseil du 22
décembre 1970 prévoit les dispositions suivantes pour le
déplacement des salariés: Le décret peut déterminer
les frais de déplacement de même que la rémunération
du temps de déplacement des salariés de la construction pour tout
déplacement du lieu de résidence du salarié au chantier de
construction ou pour tout déplacement d'un chantier à un autre
à l'intérieur de la province.
L'arrêté en conseil 3628 du 29 novembre 1972 établit
des conditions spéciales concernant l'assujettissement des grutiers qui
sont les suivantes: "2 a) Grutier. Tout grutier affecté habituellement
par son employeur à un travail de construction, mais appelé
occasionnellement à effectuer comme tel un travail autre qu'un travail
de construction demeure assujetti à la Loi sur les relations du travail
dans l'industrie de la construction.
Avec les dispositions contenues dans les règlements, nous ne
pouvons concevoir pour quelle raison le ministre considère que l'article
24.19 du décret n'est pas conforme à l'article 19 de la loi,
à moins que le ministre considère que cette disposition pourrait
nuire aux artisans. Encore une fois, pour nous, les artisans ne sont pas
couverts par la loi. Les parties n'ont pas à contracter pour eux.
Chapitre XII. Durée. L'article 32.01, durée. Nous nous
opposons à la modification proposée par le ministre. Nous ne
pouvons concevoir de quelle façon cet article peut contrevenir à
l'article 51 de la loi, même si seul le ministre peut décider de
prolonger le décret. Rien, à notre avis, n'empêche les
parties de prolonger la convention d'un commun accord et d'adresser au ministre
une requête en vue de sa prolongation. Si cette disposition peut
être devenue contraire à la loi, c'est que le ministre, dans la
publication du décret, a changé ce qui avait été
négocié par les parties. Lors de la négociation, les
parties n'avaient pas mentionné qu'elles voulaient prolonger le
décret, mais elles s'étaient réservé le droit de
prolonger la convention collective de travail. Ce qui est autre chose.
Chapitre XIII. Procédure de règlement de grief-droit.
Article 12.01, droit. Nous sommes d'accord avec la modification proposée
par le ministre.
Chapitre XIV. Qualification de la main-d'oeuvre. Pour les raisons que
nous avons déjà mentionnées, nous ne pouvons concevoir que
les articles mentionnés à cette section contreviennent à
l'article 61 de la loi. Nous devons donc voir s'ils contreviennent à la
Loi sur la qualification et la formation professionnelle.
La Loi sur la qualification professionnelle établit que seul le
ministre peut rendre obligatoires les dispositions concernant l'apprentissage
d'un métier. Elle prévoit également, à l'article
56, que toute disposition relative à la formation et à la
qualification professionnelle contenue dans un décret ou une convention
collective conclue en vertu de la Loi sur les relations du travail dans
l'industrie de la construction, demeure en vigueur tant qu'elle n'a pas
été remplacée par une disposition d'un
règlement.
À notre connaissance, le seul règlement qui a
été adopté et qui régit les métiers de la
construction est le règlement no 1 qui régit certains
métiers, mais qui ne régit pas ce qu'il est convenu d'appeler des
emplois ou des classifications. Ce règlement ne s'applique pas non plus
aux travaux de lignes électriques, de réseau
téléphonique et au système d'intercommunication. (12
heures)
Nous considérons donc que le décret peut contenir toute
disposition qui se rattache aux classifications et aux emplois, à moins
qu'elle ne contrevienne aux définitions de métiers
établies dans le règlement no 1 ou que ces dispositions soient
discriminatoires pour une association ou ses membres.
L'article 61 de la loi oblige même les parties à inclure
dans le décret des dispositions concernant la classification des
emplois.
Article 5.04. Nous nous opposons à la proposition du ministre
d'abroger cette disposition. Nous ne pouvons concevoir de quelle façon
cette disposition contrevient à la Loi sur la formation et la
qualification professionnelles, car elle spécifie par quels travailleurs
seront exécutés certains travaux qui ne sont pas
réservés à un métier, suivant la définition
de métier que l'on retrouve au règlement no 1 sur la
qualification et la formation professionnelle de la main-d'oeuvre.
Article 17.01, paragraphe 4, sous-paragraphes a) et b). Nous nous
opposons à la proposition du ministre d'abroger ces deux dispositions.
Ces deux dispositions n'ont
aucun rapport avec la qualification professionnelle de la main-d'oeuvre.
Ces deux dispositions spécifient de quelle façon les travailleurs
vont être rémunérés s'ils exécutent des
travaux qui font partie d'une classification.
Article 17.01, paragraphe 3, alinéa 2. Nous nous opposons
à la proposition du ministre d'abroger cette disposition. Même
s'il s'agit de dispositions qui sont déjà contenues dans la loi,
il nous apparaît important de rappeler à l'apprenti qu'il doit
faire valider chacune de ses périodes d'apprentissage et de rappeler
à l'employeur surtout que dès qu'il est avisé que
l'apprenti a changé de période d'apprentissage, il doit lui
verser le salaire qui correspond à cette période. L'employeur
l'oublie bien souvent.
Article 25.02, paragraphe 2. Louage et affûtage d'outils. Nous
nous opposons à la modification proposée par le ministre.
Considérant que l'affûtage des outils ne fait partie d'aucune
définition de métier, nous ne pouvons concevoir que cette
disposition contrevienne à la loi pour les mêmes raisons que
celles que nous avons déjà mentionnées à l'article
5.04.
L'annexe B, sous-annexe A, définition des occupations exclusives
à toute l'industrie de la construction. Nous nous opposons à
l'abrogation, par le ministre, des quatre premiers alinéas de cette
disposition. Il s'agit, comme nous l'avons déjà mentionné,
d'établir des classifications ou occupations et par qui le travail
relié à ces occupations va être exécuté. Si
le groupe de salariés non qualifiés ne peut exécuter des
travaux qui sont réservés exclusivement aux métiers en
vertu du règlement no 1 sur la qualification de la main-d'oeuvre, nous
ne trouvons aucune loi leur interdisant de protéger leur occupation de
la même façon que les salariés qualifiés voient leur
métier protégé par le règlement no 1.
À notre avis, rien dans la sous-annexe A de l'annexe B ne
contrevient ou n'empiète sur la juridiction de métier
définie par le règlement no 1.
Chapitre XV. Article 1.01, sous-paragraphe v), définition, union
ou syndicat. Nous n'avons pas d'objection à l'amendement proposé
par le ministre.
Chapitre XVI. Les articles discriminatoires. Nous considérons que
le ministre a oublié au moins trois articles qui sont tout à fait
discriminatoires pour les parties syndicales minoritaires.
Article 25.08, paragraphe 2. Cet article permet l'accès à
certains chantiers aux représentants du groupe syndical majoritaire et
le rend à toutes fins impossible aux groupes syndicaux minoritaires. Cet
article oblige l'employeur à fournir le moyen de transport, ainsi que le
gîte et le couvert, aux représentants du groupe syndical
majoritaire dans les endroits inaccessibles par véhicule
régulier. De plus, cet article contredit l'article 9.04 qui est un
article de portée générale qui ne fait pas de
distinction.
Pour les lignes de transport et de distribution d'énergie
électrique, postes de transformation et réseaux de communication,
l'employeur pourrait prétendre que, compte tenu de l'exception
prévue à l'article 25.08, paragraphe 2, il n'a pas à tenir
compte de l'article 9.04.
Nous proposons de modifier cet article de façon à le
rendre non discriminatoire, c'est-à-dire conforme à la loi. Cet
article devrait se lire de la façon suivante:
Lignes de transport et de distribution d'énergie
électrique, postes de transformation et réseaux de communication.
"L'employeur doit rendre disponible, sans frais, un moyen de transport dont il
dispose au représentant syndical, afin que ce dernier puisse rencontrer
les salariés de l'employeur aux endroits inaccessibles par
véhicule régulier. L'utilistion d'un tel moyen de transport doit
correspondre avec les opérations normales du chantier."
Article 28.06. Comité des avantages sociaux. Cet article
prévoit la formation d'un ou de plusieurs comités pour
étudier les problèmes relatifs aux avantages sociaux d'un ou de
plusieurs métiers, emplois ou occupations. Ce comité est
formé exclusivement de représentants des employeurs et de
l'association syndicale majoritaire.
Ces comités peuvent recommander des changements au régime
des avantages sociaux qui s'applique à tous les salariés de
l'industrie de la construction. Il s'agit, en fait, de négociation des
conditions de travail.
Considérant que l'article 42a de la Loi sur les relations du
travail dans l'industrie de la construction permet à toute association
représentative à un degré de 15% et plus d'être
représentée à toutes les séances de
négociations, nous considérons que cette disposition est
discriminatoire et non conforme à la loi.
Nous proposons donc la modification suivante à l'article 28.06:
"Les parties forment, au cours du décret, un ou plusieurs comités
chargés d'étudier les problèmes relatifs aux avantages
sociaux et propres à un ou plusieurs métiers, emplois ou
occupations. Ce comité, par la suite, fait connaître ses
recommandations unanimes aux membres du comité mixte de la construction.
Ce comité est formé d'un représentant de chaque
association représentative à 15% et plus et d'un nombre
égal de représentants de l'association d'employeurs."
L'annexe B, sous-annexe C, paragraphe 9, comité de
classification. Nous nous opposons vigoureusement à cette disposition
qui est tout à fait discriminatoire pour les
associations syndicales minoritaires. Elle prive leurs membres
d'être entendus et représentés devant un comité qui
aura à juger de leur classification.
Compte tenu des conséquences que les décisions de ce
comité peuvent avoir sur les travailleurs membres d'une association
minoritaire, il serait tout à fait discriminatoire qu'ils ne soient pas
représentés à ce comité.
Voyons les pouvoirs de ce comité et sa formation.
Il est formé de représentants des employeurs et du groupe
syndical majoritaire;
II a le droit de décider que même le salarié qui a
exécuté le nombre d'heures requis peut se voir refuser une
classification;
II a le droit de décider qu'un salarié qui n'a pas
exécuté les heures requises possède la compétence
nécessaire pour être classifié - deux droits assez
arbitraires -.
L'office de la construction doit appliquer les décisions de ce
comité;
S'il survient un différend, seuls les employeurs et les
représentants du groupe syndical majoritaire peuvent soumettre ce
différend à un arbitre.
Comme on peut le constater à sa lecture, l'article 25.08,
paragraphe 3, priorité d'emploi, se lit comme suit: "La priorité
d'emploi des salariés effectuant des travaux mentionnés en titre
est décrite dans l'annexe B, sous-annexe C, laquelle fait partie
intégrante de la présente convention."
Aux paragraphes 1, 2 et 3 de la sous-annexe C de l'annexe B, on retrouve
les modalités d'application de la priorité d'emploi.
Ce comité possède non seulement le pouvoir de classifier
les salariés de cette catégorie pour fins de salaire, mais il
possède également le pouvoir de décider s'il a le droit de
travailler dans certaines catégories d'emploi.
Nous sommes cependant d'accord avec le principe que les salariés
ayant effectué le plus grand nombre d'heures à titre de monteur
de ligne aient la priorité d'emploi.
Afin que cette clause ne soit pas discriminatoire, nous proposons les
modifications suivantes.
Le paragraphe a) devrait se lire comme suit: "Dans les 30 jours suivant
la signature de la convention, les employeurs et les représentants des
associations syndicales représentatives à un degré de 15%
et plus forment un comité de sélection et de classification,
lequel aura le mandat suivant:..."
Nous proposons les modifications suivantes au paragraphe b) "Advenant le
cas où un différend découlant du mandat du comité
survient, le différend pourra être soumis à l'arbitrage en
vertu de la procédure de grief et d'arbitrage prévue au
décret."
Chapitre XVII, les modifications du ministre.
Enfin, nous vous transmettons une liste des articles qui ont
été modifiés unilatéralement par le ministre sans
le consentement des parties à l'occasion de la publication du
décret dans la Gazette officielle du 30 décembre 1980. J'ai pris
bonne note de ce que le ministre a dit tantôt. Néanmoins, nous les
avons énumérés et je ne vais pas vous les lire, parce
qu'ils sont assez nombreux.
En terminant, nous ne pouvons que déplorer de telles
interventions de la part du ministre qui viennent fausser complètement
les règles du jeu de la négociation.
De telles interventions auront comme conséquence que l'une ou
l'autre des parties acceptera des dispositions à la table de
négociation en se disant qu'elle n'aura qu'à voir le ministre
pour les faire changer suivant sa volonté.
Nous le répétons,, même si nous ne sommes pas
d'accord avec plusieurs dispositions du décret, le ministre doit
respecter l'intention des parties.
Pour nous, une fois de plus, plus cela change et plus cela est pareil.
Nous sommes même à même de constater que le contentieux
n'aura pas droit de recevoir de bonnes notes, vu qu'il a mal fait son devoir
comme en 1977.
Le tout respectueusement soumis à Québec, le 27 janvier
1981.
Yvon Leclerc.
Le Président (M. Boucher): Merci beaucoup, M. Leclerc. M.
le ministre.
M. Marois: M. le Président, je voudrais remercier le
porte-parole de la CSN-Construction. Je voudrais remercier de leur
mémoire les représentants qui sont ici. Je pense que la
façon de le présenter facilite grandement notre travail, parce
que c'est regroupé sous les rubriques correspondant à celles qui
ont été soumises pour examen et, en plus il y a un certain nombre
d'éléments additionnels sur lesquels la CSN-Construction attire
notre attention.
Je voudrais formuler un certain nombre de commentaires et de questions
si les porte-parole de la CSN-Construction veulent en prendre note et
réagir par la suite. Je vais débouler ma liste sur un certain
nombre de points. Je pense que, sur bon nombre de points, vos commentaires
écrits, tels que vous nous les avez communiqués, sont très
clairs. Vous faites valoir votre point de vue et soyez assurés qu'on va
examiner cela très attentivement, au mérite et, encore une fois,
avec beaucoup d'ouverture d'esprit.
Sur la question d'ensemble, parce que cela recoupe un certain nombre de
clauses
ou d'articles, je dirais spontanément qu'on est d'accord avec
votre prétention voulant que le décret ne doit s'appliquer qu'aux
travailleurs de la construction, concernant tout le problème des
artisans. C'est pourquoi, quand le décret - c'est en même temps un
commentaire-question, en un certain sens -indique, à l'article 3.02, que
"toute personne exécutant de tels travaux est assujettie au
décret", est-ce que cela ne vise pas l'artisan et une telle disposition,
si cette interprétation est vraie, ne devrait-elle pas paraître
dans le décret comme tel? C'est un commentaire-question en passant.
Au bas de la page 8 et à la page 9... Une question qui me vient
à l'esprit, sur les comités, c'est que le décret ne
prévoit aucune clause, si ma mémoire est bonne, et aucun
mécanisme de financement des travaux de ces comités. Qu'est-ce
qui va arriver du financement des travaux et du fonctionnement de ces
comités en question? Il n'y a rien de prévu dans le décret
comme tel. C'est une question que je pose. D'autre part, je comprends qu'aux
pages 8 et 9, ce que vous soulevez, ce n'est pas, de votre point de vue, la
question du bien-fondé de l'existence de ces comités, mais
plutôt l'aspect qui vous paraît discriminatoire et que vous
reprenez, en un certain sens, à la fin de votre mémoire. Je veux
être sûr qu'on comprend bien votre point de vue, parce que c'est le
même argument qu'à l'article 6.02, au bas de la page 8 et à
la page 9, et cela revient aussi ailleurs, à d'autres commentaires. Par
ailleurs, aux pages 11 et 12, j'ai pris bonne note de vos commentaires sur les
articles 5.04 (1) B et sur 25.07 où vous formulez une suggestion
très précise. À la page 13, au chapitre IV, sur le conflit
de compétence, article 6.01, paragraphe 6, vous dites que vous
êtes d'accord que le paragraphe 6 concernant la troisième
étape devrait être biffé parce qu'il pourrait contrevenir
à l'article 80 de la loi. Nous considérons que les parties, et le
reste... Le pouvoir de trancher les conflits de compétence, ce pouvoir
étant accordé au conseil d'arbitrage formé en vertu de la
loi, d'une part. À moins que ma question, à votre point de vue,
ne soit pas pertinente, sur l'article 6.02, il y a un comité de
codification du code des ententes relatives aux conflits de
compétence... en d'autres termes, une certaine interprétation de
cet article serait que... on codifie une forme de jurisprudence rendue ici ou
ailleurs, laquelle forme se trouverait à lier plus ou moins les
instances appelées à trancher. Est-ce que vous partagez ce point
de vue ou non? (12 h 45)
Maintenant, j'ai pris note de vos commentaires en ce qui concerne
l'article 24.19, déplacement de grue, le grutier; on va regarder
ça.
Article 32.01, page 17 de votre mémoire, concernant la
durée. Vous dites, à la dernière phrase de ce paragraphe:
"Si cette disposition peut être devenue contraire à la loi, c'est
que le ministre, dans la publication du décret, a changé ce qui
avait été négocié par les parties. Lors de la
négociation, les parties n'avaient pas mentionné qu'elles
voulaient prolonger le décret" - effectivement, le texte qu'on a devant
nous, je parle du décret publié, celui qu'on a tous devant nous
ici - mais qu'elles s'étaient réservé le droit de
prolonger la convention collective de travail."
Je prends note de ça, on va vérifier ce qui est
arrivé, quand on reçu le texte, quand il y a eu la
première publication, si c'était conforme au texte qui avait
été reçu.
Mais selon votre prétention, j'imagine que vous l'avez
regardé, j'aimerais avoir quelques éclaircissements
là-dessus. Quelle était la formulation, à votre point de
vue, du texte original, signé par les parties et à quelle
étape les textes, le cas échéant, si c'est ça qui
s'est présenté, auraient été modifiés, ce
qui viendrait changer forcément le sens et les interprétations
qu'on peut donner?
Aux pages 21 et suivantes de votre mémoire, vous soulevez ce que
vous appelez trois clauses qui vous apparaissent discriminatoires, et
là, vous fondez votre argumentation sur - je veux être certain
qu'on comprend parfaitement bien - les articles 42a et 49 de la loi. L'article
42a dit qu'une association représentative, à un degré de
15% ou plus, a le droit d'être présente lors des séances de
négociation et de soumettre des demandes relatives au contenu de la
convention collective. Je comprends que par interprétation, vous donnez
une extension à ces articles, quand on en arrive à la mise sur
pied de comités et quant à la participation des uns et des autres
aux comités.
En plus, vous mentionnez l'article 49. Je comprends que vous faites
référence particulièrement au deuxième paragraphe,
où il est dit: Le ministre peut recommander des modifications non
agréées par les associations visées au premier
alinéa de l'article 49, pour soustraire une autre association de
salariés ou les membres d'un secteur de l'association d'employeurs
à une clause discriminatoire, ou à une clause qui n'affecte que
ses membres et à laquelle elle n'a pas consenti, etc.
J'aimerais vous entendre un peu plus longuement sur la base juridique ou
légale d'argumentation au soutien de ce que vous évoquez. En ce
qui concerne, encore une fois, comme vous l'avez noté vous-même,
M. Leclerc, les pages 25 et suivantes, je prends bonne note. D'autant plus que
là, vous nous fournissez une liste très détaillée
d'articles, soyez assurés que ce sera scruté à la
loupe.
Je tiens à vous le dire, ce n'est certainement pas de mauvaise
foi ou par
volonté d'unilatéralisme, pas du tout; cela a
été porté à notre connaissance. J'aime bien, qu'on
ait toute une série d'articles qui a été relevée,
je l'ai mentionné moi-même, on en a relevé nous-mêmes
un certain nombre; soyez sûrs que cela va être corrigé.
Le Président (M. Boucher): M. Leclerc.
M. Leclerc: Si vous me permettez, je vais demander à mon
camarade Lucien Poulin de répondre.
Le Président (M. Boucher): M. Poulin.
M. Poulin (Lucien): D'abord, pour procéder dans le
même ordre, à l'article 3.02, on ne considère pas que le
texte actuel est contraire à la loi parce qu'on ne pense pas que les
parties puissent interpréter, que quiconque puisse interpréter
même le texte qui a été négocié par les
parties comme étant contraire à la loi. On part du principe qu'en
vertu de 3.01 le décret ne couvre que les salariés et les
employeurs, sauf que la modification qu'on propose à 3.02 est dans le
but de clarifier de façon qu'il n'y ait plus de confusion possible tout
au long du décret. Je pense que ça établit une
clarification tout au long du décret. Qu'on parle de personnes ou qu'on
parle d'autre chose, je pense qu'on établit tout de suite là que
ça ne s'applique qu'à des salariés et des employeurs de la
construction. C'est une clarification qui nous apparaît plus nette que le
texte actuel, non pas parce qu'on considère le texte actuel comme non
conforme à la loi.
À propos des comités, vous nous dites qu'il n'y a aucun
mécanisme de financement. Il y a un comité qui a un
mécanisme de financement prévu, c'est le comité des
codifications des ententes relatives aux juridictions de métiers. Pour
les autres comités, comme il n'y a rien de prévu dans le
décret quant au financement de ce comité-là, il va de soi
que les parties qui participeront à ces comités
défraieront leurs frais, ils paieront pour participer aux comités
comme ils paient normalement en négociation, ils paieront leurs frais
pour participer aux comités.
Pour les articles qui nous apparaissent discriminatoires aux pages 8 et
9, je pense qu'il est important que les corrections soient faites. D'abord,
malgré l'optimisme de certains, on peut se réveiller après
le mois de mars avec une situation où il n'y a plus d'associations
majoritaires - toujours dans les hypothèses. Je pense donc qu'il serait
prudent de prévoir, lorsqu'on parle d'associations
représentatives majoritaires, des associations représentatives
à un degré de 15% et plus, de façon que ce ne soient pas
des comités bidons qui n'auraient pas de pouvoir de fonctionnement.
Deuxièmement - je pense que ça répond à une
autre de vos questions que vous aviez posées en dernier - on
prétend que certains de ces comités, sont discriminatoires. Dans
les articles discriminatoires, on prétend qu'il y en a qui sont
discriminatoires parce que ce sont des comités qui ont certains pouvoirs
de négociation, en fait, et qu'en vertu de 42a on devrait être
partie à tout ce qui concerne la négociation. On prétend
qu'ils sont discriminatoires aussi, dans certains cas, parce que ces
comités ont des pouvoirs de décision qu'ils détiennent et
qui pourraient affecter les membres des associations minoritaires. Je ne sais
pas si c'est clair.
M. Chevrette: Là-dessus, M. Poulin, je me permets une
sous-question...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: J'ai lu votre texte, je ne sais pas si c'est une
boutade, ne la prenez pas comme agressive, mais si je lis la conclusion de
votre texte vous demandez qu'on ne se mêle pas de la convention
collective parce que ça change l'intention des parties. Est-ce que
l'intention des parties était d'avoir des associations de 15% et plus ou
de voir l'association représentative majoritaire siéger au
comité? Comment conciliez-vous votre conclusion avec votre
allégation?
M. Poulin: Je pense qu'il ne faudrait pas déformer le
texte de notre mémoire. Dans notre mémoire, on ne dit pas au
ministre de ne rien modifier, on lui dit de respecter l'intention des parties
tant et aussi longtemps que ce n'est pas discriminatoire pour une association
ou que ce n'est pas illégal, ou qu'il nous prouve que c'est dans
l'intérêt public. Je pense que le ministre a deux pouvoirs, celui
de modifier ce qui est illégal et celui de modifier ce qui est
discriminatoire.
Il peut aussi modifier ce qui lui apparaît contre l'ordre public,
mais c'est un pouvoir très discrétionnaire et on voudrait qu'il
l'exerce très prudemment. Je pense qu'on prend la peine de dire dans
notre mémoire que, quand c'est contraire à la loi ou que c'est
discriminatoire pour les associations représentatives minoritaires, on
est d'accord que cela doit être modifié, mais on dit que cela doit
se faire le plus possible dans le respect de l'intention des parties en
négociation. Je ne sais pas si cela répond à votre
question.
M. Chevrette: Oui.
M. Poulin: Je pense que je peux continuer à vous dire que
c'est dans cette intention qu'on a proposé de petites modifications aux
articles 5.04 (1) B et
25.07. Je pense que nos modifications auraient le mérite de
respecter ce que les parties ont négocié. On parle de 120
kilomètres des fois. On dit: Cela pourrait peut-être un peu
contrevenir au règlement de placement. Qu'on dise que cela se fasse dans
le respect du règlement de placement. Je pense que cela respecte la
volonté des parties tout en rassurant ceux qui pourraient penser que
c'est illégal.
Pour ce qui est de l'article 6.01, les conflits de compétence, on
pense que, là, cela contrevient réellement à la loi, parce
qu'un article de la loi dit que tous les conflits de compétence entre
les métiers ou entre un métier et une classification doivent
être tranchés par le conseil d'arbitrage. Dans le décret,
on dit que la décision de l'Office de la construction doit s'appliquer,
si une des parties n'a pas contesté dans deux jours. On ne sait
même pas si les parties auront le temps dans deux jours d'être
renseignées sur les décisions de l'office. Cela nous
apparaît d'abord brimer le droit des parties de contester. Cela nous
apparaît aussi contraire à la loi, parce que c'est une juridiction
réservée exclusivement, selon nous, au conseil d'arbitrage de
trancher les conflits de compétence.
Pour ce qui est de l'article 6.02, le ministre nous demande si cette
jurisprudence lierait les parties. Je ne pense pas qu'on dise nulle part que
cette jurisprudence ou les ententes codifiées vont lier les parties. On
dit que cela va servir aux parties pour les éclairer, pour
décider et interpréter le règlement. On sait que les
juridictions sur les métiers, c'est un domaine qui peut créer
assez de conflits. Il nous apparaît au moins essentiel que les parties
fassent un effort pour s'entendre sur certains points précis, d'abord
pour exempter les problèmes sur les chantiers et afin qu'on se ramasse
moins souvent devant les comités d'arbitrage qui prennent assez de
temps, entre parenthèses, à rendre des décisions. Quand
les décisions sont rendues, la plupart du temps, les chantiers sont
terminés. S'il pouvait y avoir un mécanisme afin d'aider les
parties à s'entendre avant que les chantiers ne soient terminés,
je pense que le ministre devrait respecter cela.
L'article 32.01, deuxième sous-paragraphe, c'est pour la
durée. Dans la première version, dans l'avis qui avait
été publié, on retrouvait le mot "convention", si ma
mémoire est bonne. Le changement nous est apparu dans la publication de
la Gazette officielle du 30 décembre. On a changé le mot
"convention" par le mot "décret". Je pense que c'est là qu'on a
rendu... Les parties n'avaient jamais parlé de pouvoir prolonger le
décret, elles avaient parlé de pouvoir s'entendre entre elles
pour prolonger la convention. Dans l'avis, c'était comme cela, on
parlait de convention. À l'article 32.01, on disait: "La présente
convention entre en vigueur et elle le demeure. Il est cependant loisible aux
parties ci-haut mentionnées de prolonger l'application par commune
décision pour toute période qu'elles jugeront utile." Les parties
ne parlaient pas de décret, elles parlaient de l'entrée en
vigueur de la convention. Elles disaient qu'il fallait prolonger cette
convention. Je ne voyais pas, à ce moment-là, ce qui pouvait
être illégal. Ce qui m'est apparu illégal, c'est la
publication du décret lui-même quand on a mis le mot
"décret".
M. Marois: Je prends note de cela. On va le regarder de
près. Je vais vérifier attentivement. Ne pensez-vous pas - je
vais vous poser une question et je vais formuler un commentaire - qu'à
partir du moment où... Il y a une convention collective qui intervient.
Après cela intervient le décret. Le décret est d'ordre
public. C'est ce qui lie tout le monde. Peut-on parler, dans un texte qui
devient un décret, d'une prolongation possible d'une convention? C'est
la question que je me pose. La loi prévoit que les parties peuvent
demander au ministre par requête de prolonger pour telle ou telle raison.
Au fond, est-ce que je me trompe en disant qu'une des préoccupations que
vous avez - je ne veux pas vous prêter des interprétations, je
pose la question et vous verrez - ce n'est pas que, quand arrive la fin du
décret et que, pendant une certaine période, il y a une
négociation, il y a une convention collective qui est signée,
sont protégés ceux qui sont protégés par la
convention collective, mais tant qu'elle n'est pas prolongée par
décret, il risque d'y avoir une période de vide juridique total
où des travailleurs pourraient être lésés
complètement dans leurs droits? Est-ce que je comprends que votre
préoccupation fondamentale, c'est celle-là, au fond, d'essayer de
trouver une formule qui ferait en sorte qu'il ne puisse pas y avoir cette
espèce de trou, de vide juridique où des travailleurs pourraient
être dans une situation où ils n'ont aucune espèce de
protection? Est-ce que la réponse à cela, une des
possibilités, ce n'est pas justement la demande presque automatique
d'extension du décret, au moment du démarrage ou en cours de
négociations, avant que le décret arrive à terme? Est-ce
que je comprends votre préoccupation, d'une part? Deuxièmement,
ce que je viens de mentionner peut-il être une formule valable?
M. Poulin: En tout cas, je pense que la prolongation par le
ministre - je vais vous le dire tout de suite - on est loin d'être
d'accord avec cela, mais ce qu'on fait, c'est qu'on fait un peu un
parallèle avec le Code du travail.
M. Marois: Je m'excuse de vous interrompre. Si vous permettez,
seulement une parenthèse. Ce que j'évoque là, c'est
simplement dans l'état actuel des choses, ce que la loi dit et ce n'est
pas le ministre qui prend l'initiative, selon le texte de loi, c'est à
la demande des parties, si ma mémoire est bonne.
M. Poulin: Le ministre peut le prolonger lui-même.
M. Marois: De lui-même. C'est possible. Il est prévu
qu'à la demande des parties, cela peut se faire.
M. Poulin: II peut de lui-même ou à la demande des
parties, mais, en tout cas, on fait un parallèle avec le Code du travail
qui permet aux parties de prolonger leur convention collective. Le Code du
travail va même plus loin. II permet de le négocier, que la
convention continue de s'appliquer tant que les parties n'ont pas acquis le
droit de grève ou de lock-out. Je ne vous dis pas qu'on s'opposerait
à une disposition de la loi qui dirait que le décret continue de
s'appliquer tant que les parties n'ont pas décidé d'exercer leur
droit de grève ou de lock-out, mais, actuellement, la loi n'est pas
comme cela. On pense quand même que les parties doivent se
réserver le droit de prolonger leur convention qui s'appliquerait entre
les parties signataires ou les parties représentatives. C'est sûr
que, dans certains cas, ce ne sera pas une application complète du
décret. Cela peut causer des problèmes, mais il s'agit au moins
d'essayer de boucher un peu le vide juridique créé.
M. Marois: Le vide. Bon! On se comprend bien là-dessus.
D'accord. La seule chose, c'est que je voudrais être bien sûr que
ce que vous proposez est une formule possible, valable et inattaquable sur le
plan juridique, parce que, s'il y a différentes interprétations
possibles - je ne veux pas me prendre pour le juriste non plus - si, à
partir du moment où on dit que l'interprétation de la loi, c'est
quand il y a une convention collective, dans le régime des relations de
travail dans l'industrie de la construction, tel que la loi qui est là
le prévoit, à partir du moment où il y a un décret,
le décret est d'ordre public. Il s'applique pour tout le monde. En ce
sens, la convention collective se trouve de côté. C'est la
convention collective qui a permis d'arriver au décret qui
protège tout le monde.
Une des questions que je me pose... on va la regarder. Même si,
strictement, sur le plan légal, ce que vous suggérez pouvait se
faire, qu'il y ait une prolongation de convention collective, est-ce qu'on ne
se retrouve pas inévitablement devant le même problème en
partie? Est-ce théoriquement faisable? Une convention collective
extensionnée dans le temps, la durée se trouve prolongée
d'un commun accord des parties, si c'est faisable, mais que cela ne couvre pas
tous les travailleurs de la construction. Et là, on se retrouve comme le
chat qui court après sa queue, c'est-à-dire qu'on revient au vide
juridique qui est le problème que vous cherchez à
régler.
M. Poulin: Je partage l'opinion que cela ne couvrirait
peut-être pas tous les travailleurs de la construction, mais si on
réussit à en couvrir 95%, au moins on règle une partie du
problème, dans le cadre des lois actuelles.
M. Marois: II va nous rester à regarer si
légalement il y a convention collective ou pas dans le régime des
relations du travail dans l'industrie de la construction à partir du
moment où le décret est là. Si la conclusion est non, la
seule formule devient forcément la demande d'extension.
Je pense qu'on se comprend bien sur l'objectif.
M. Poulin: On se pose une question nous aussi: Est-ce que le
décret annule la convention collective?
M. Marois: II l'extensionne. Il s'agit de voir quelle est
l'implication. D'accord. Je prends note de vos commentaires. On va regarder
cela. Le décret est issu de la convention collective, forcément.
J'ai des doutes. Mais on va le regarder.
Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous avez
terminé?
M. Lalande: M. le Président.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Maisonneuve.
M. Lalande: Si vous avez terminé...
Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous avez
terminé?
M. Poulin: Oui.
M. Lalande: Je voudrais simplement remercier la CSN-Construction.
On a fait part de façon très claire, très précise -
c'est sûrement une contribution qui se fait à ce stade-ci - de
l'opinion d'un intervenant qui ne négocie pas, justement. En ce
sens-là, c'était intéressant de l'entendre.
Je voudrais cependant indiquer, dans l'aparté que M. Leclerc a
fait au départ, qu'il m'apparaît utile de réaffirmer
à ce stade-ci que l'article 51 de la loi prévoit bien que le
ministre, le gouvernement a le droit d'intervenir là-dedans. Il ne
s'agit donc
pas de s'interroger sur la légalité. Je pense que, comme
l'a bien expliqué le ministre, il faut que l'autorité du
Québec se manifeste à certaines occasions, surtout lorsque cette
autorité, au niveau du décret, se manifeste à partir d'une
convention collective qui est issue de cela.
Il m'apparaît très juste que cela se fasse. Et
permettez-moi de vous dire que ceci est fondamentalement différent d'un
autre genre d'unilatéralisme auquel nous avons affaire à l'heure
actuelle. Celui-ci est légitime et légal, à mon avis, et
il procède de façon fort civilisée, alors que dans d'autre
cas, il n'est, selon mon opinion personnelle, probablement pas légitime
et sûrement pas très légal non plus.
Je voulais quand même préciser ces décisions.
M. Marois: Est-ce qu'on est en train d'en arriver finalement
à une unanimité là-dessus? Ce n'était pas tout
à fait ce qui ressortait de l'Assemblée nationale l'autre jour,
mais enfin.
M. Lalande: C'est de votre faute. Si vous aviez voulu collaborer,
on aurait été d'accord.
M. Marois: Pouvez-vous ramper gentiment par terre et vous
enfoncer en dessous du tapis?
M. Lalande: Le ministre s'éloigne de la pertinence.
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît:
M. Marois: Mais quand on crache en l'air...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Maisonneuve.
M. Lalande: J'ai terminé, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Vous avez terminé?
M. Lalande: Oui.
Le Président (M. Boucher): Est-ce qu'il y a d'autres
questions?
Au nom des membres de la commission, je remercie les
représentants de la CSN pour leur mémoire.
CSD
J'inviterais maintenant les représentants de la CSD à bien
vouloir prendre place au centre.
Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous avez un
mémoire, M. Dalpé?
Une voix: Non.
Le Président (M. Boucher): Si vous voulez vous identifier
et présenter votre mémoire.
M. Dalpé (Paul): Je suis Paul Dalpé,
président de la CSD. Je suis accompagné de M. Raymond Lortie,
représentant syndical du Syndicat provincial des travailleurs de la
construction du Québec.
M. le Président, M. le ministre et messieurs les membres de la
commission. Nous n'avons pas préparé de mémoire pour la
bonne raison que le ministre lui-même s'est chargé de mentionner.
Nous sommes parmi ceux qui ont été oubliés dans l'avis et
dans l'émission des différents documents qui devaient servir
à la préparation de cette commission. Également, nous
n'avons pas été convoqués à la réunion du 3
décembre.
Toutefois, nous avons convenu de faire des représentations
à cette commission sur ce qui nous apparaît discriminatoire dans
la publication du décret, tel que paru dans la Gazette du 30
décembre. Notre présentation sera brève et elle traitera
de quatre points en particulier et toujours vis-à-vis de la
discrimination. Pourquoi nous limitons-nous à cette partie? C'est que
nous croyons que les parties, en vertu de la loi, ont négocié, se
sont entendues, que le résultat de la négociation est le leur et
nous entendons respecter ce qu'elles ont convenu. Donc, nous ne voulons pas
nous immiscer dans ces pourparlers. Cependant, il y a, à
l'intérieur de la publication du décret, des articles qui nous
apparaissent discriminatoires et je vais tenter de les citer par ordre
numérique.
Le premier est l'article 7.03. Déjà, dans la loi, on
prévoit que le travailleur doit être muni d'un document attestant
qu'il fait partie d'une organisation syndicale et c'est l'office qui se charge
de lui émettre un tel certificat. Dans le projet de décret, il y
a toute une procédure qui, dans les cinq jours de son embauche, fait en
sorte qu'il a non seulement à montrer, mais à remplir - ce que le
décret prévoit comme étant l'annexe E - un autre document
où il va réciter à nouveau certains faits.
Que les parties qui ont négocié aient senti le besoin
d'avoir une telle formule à cause de la multiplicité des
organisations syndicales qui les composent, nous n'avons rien à dire,
mais que cela ait comme conséquence de viser une organisation syndicale
comme la nôtre et de faire en sorte que les travailleurs impliqués
soient sujets ou victimes, à un moment donné, d'une utilisation
par l'employeur de ce processus pour des fins autres que celles qui sont
visées, soit par la loi ou par la
convention, nous croyons qu'il y a là discrimination. Je vais
vous donner un exemple: Un employeur embauche un travailleur. Il sait
pertinemment qu'il appartient à la Centrale des syndicats
démocratiques, mais, en vertu d'une série de règlements ou
de directives qu'il reçoit de l'Office de la construction, il
décide qu'il va imposer comme cotisation syndicale un cent l'heure,
parce que, dans la liste des directives, il y a en fait une organisation
syndicale qui impose un cent l'heure. C'est comme si la carte que le
travailleur a en main n'avait absolument aucune valeur. Je répète
que si les organisations syndicales qui ont négocié cette clause
en ont besoin pour leurs propres fins, libre à elles de l'utiliser, mais
nous y voyons là une forme possible de discrimination à l'endroit
d'une organisation comme la nôtre, qui n'a qu'une formule de cotisation
syndicale dans laquelle tous les travailleurs sont d'ailleurs impliqués.
Il n'y a pas d'organisation spécifique chez nous, tout le monde est dans
la même organisation. (12 h 45)
Le deuxième point traite de l'article 25. Je suis surpris que le
ministre, lorsqu'il a fait l'énumération de toutes les
doléances qu'il avaient reçues de la part des différentes
organisations, n'ait pas retenu celle-là, parce qu'elle nous
apparaît encore comme étant de la discrimination pure et simple.
On décide dans cet article du projet de convention collective qui
pourrait devenir décret qu'à l'occasion de perte d'outils,
l'employeur sera appelé à verser 75% et l'organisation syndicale
25% au travailleur qui les aurait perdus. Nous posons la question: En vertu de
quoi une autre organisation syndicale qui négocie pour ses membres
a-t-elle le droit de condamner la nôtre à verser 25% des
cotisations syndicales qui appartiennent à l'ensemble des travailleurs,
non pas à ce groupe particulier qui est visé par la disposition,
de lui payer 25% en cas de perte de ses outils? C'est une question que nous
posons. Quant à nous, nous nous opposons à cette disposition.
Une autre qui nous paraît encore plus flagrante traite de
l'expiration du décret. À l'article 32.01, on nomme le Conseil
provincial des métiers, et, dans le deuxième paragraphe, on
laisse entendre qu'il pourra à la toute fin décider de prolonger.
Or, en vertu de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la
construction, le caractère représentatif doit être obtenu
dans les quatre mois qui précèdent l'expiration du décret.
Comment, à ce moment, peut-on, par décret, garantir que c'est un
tel ou un tel qui va être présent, donc qui va être nanti du
droit de prolonger le décret? On trouve une formulation par laquelle
ceux qui seront nantis de ce droit de représentativité pourront
le faire. Je pourrais certainement fonctionner, mais qu'on le garantisse
à quelqu'un à qui on ne peut pas garantir le droit de
représentativité, je ne peux pas fonctionner. Quant à
nous, c'est de la discrimination par rapport à toutes les organisations
qui ont toute la même prétention d'en arriver à
représenter de façon majoritaire ou de plus en plus substantielle
les travailleurs de la construction.
Mon quatrième point, et c'est le dernier, touche la
classification des monteurs de lignes. Il y a dans le décret, à
l'annexe 8, sous-annexe C, un comité qui doit être formé
où on va classifier les travailleurs de ce secteur. Or, ceci nous
apparaît absolument inacceptable parce que c'est de la discrimination
pure et simple envers les travailleurs qui ne sont pas membres de l'association
qui va détenir le contrôle de la classification. Cela nous
implique et cela implique tous les autres qui ne sont pas partie de la
majorité. Cela les vise de façon directe et je pense qu'aucun
gouvernement n'a le droit d'accepter une disposition comme celle-là.
Cela va avoir comme conséquence de priver de son droit de grief le
travailleur comme tel. Je pense que cela est absolument inacceptable.
C'était, M. le Président et messieurs les membres de la
commission, les points sur lesquels nous cherchions à attirer votre
attention.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Marois: M. le Président, je voudrais remercier M.
Dalpé, porte-parole de la Centrale des syndicats démocratiques,
de ses commentaires et des points sur lesquels il a bien voulu attirer notre
attention. Un sur lequel on a eu l'occasion d'amorcer la discussion
tantôt et qui concerne la durée, 32.01, c'est un point qu'on va
regarder. J'ai pris aussi bonne note de votre dernier commentaire concernant
l'annexe qui touche les monteurs de lignes. C'était
évoqué, d'ailleurs, dans la lettre du 13 août 1980 qui
était adressée, par le Syndicat des travailleurs de la
construction du Québec (CSD), à mon prédécesseur,
Pierre-Marc Johnson.
En ce qui concerne les deux autres points que vous avez
soulevés... En ce qui concerne 25.05, vous invoquez le fait qu'à
votre point de vue, tel que formulé, même si, par
définition, en vertu d'interprétations de la loi des
décrets, lorsqu'un décret est promulgué, forcément,
il y a extension d'une volonté de certaines parties qui ont
négocié à une convention collective, vous dites
qu'à votre point de vue, c'est une clause qui serait terriblement
discriminatoire, le fameux 75.25. On prend note de cela et on va regarder
cela.
Sur 7.03, je voudrais être bien certain
que j'ai bien compris. C'est le premier point que vous avez
soulevé pendant que vous formuliez vos commentaires, parce que ce n'est
pas mentionné dans la lettre du mois d'août et, comme on n'a pas
de texte écrit devant nous, je voudrais être certain qu'on note
l'éclairage le plus complet possible sur ce point. Vous avez
donné un exemple. Je ne suis pas certain d'avoir parfaitement saisi. Si
je pars du texte de l'article 7.03, si on part de ce texte, est-ce que vous
pourriez nous pointer de façon très précise le texte ou
les bouts de texte à partir desquels vous appuyez les commentaires que
vous avez formulés tout à l'heure?
M. Dalpé: À 7.038, on dit que, dans un délai
maximum de cinq jours ouvrables du début de l'emploi d'un
salarié, l'employeur doit remplir à l'égard du
salarié une formule... C'est l'annexe F. À l'annexe F, on doit
démêler ni plus ni moins dans quelle organisation syndicale le
travailleur déclare se trouver. Il peut y avoir, dans le cas de la CSN,
un nom seulement, dans le cas de la Centrale des syndicats
démocratiques, un nom seulement, dans le cas du Syndicat de la
Côte-Nord, un nom seulement; mais lorsqu'on se retrouve dans les
organisations qu'on appelle de métier, là, il peut y avoir du
démêlage à faire et c'est à l'intention de ces
organisations que cette formule existe.
On ne peut pas demander à un patron qui a une carte CPMQ, Conseil
provincial des métiers, de démêler tout de suite dans
laquelle des organisations le travailleur se trouve, ça lui prend cette
formule-là. Mais pour les autres, elle est absolument inutile. Or, c'est
le prétexte qui a été utilisé, j'ai cité un
exemple, je ne l'ai pas inventé, pour un employeur de l'utiliser et,
à partir des directives fournies par l'office, qui donne une
série de cotisations syndicales à être versées, de
choisir la moins onéreuse pour son travailleur. Au lieu d'exiger la
cotisation qui était effectivement mentionnée dans ce que je vais
appeler le catalogue de l'office, il a décidé de lui exiger la
cotisation la moindre, soit $0.01 l'heure. Que voulez-vous que ça fasse
pour nous autres $0.01 l'heure? Ce n'est pas notre cotisation, mais l'employeur
a pu se permettre ça à cause de ce fameux article qui n'a rien
pour nous. Cela ne nous vise pas en aucune façon. Cela vise à en
démêler d'autres qui, en fait, ont des raisons à ce qu'ils
appartiennent à des organisations multiples. Pour nous cette formule est
discriminatoire. C'est ce que je veux dire.
M. Marois: M. Dalpé, j'avoue ne pas avoir
vérifié ce point-là dans l'ancien décret, mais
est-ce que dans l'ancien décret, c'était sensiblement la
même formulation d'articles et de formules?
M. Dalpé: Je ne pourrais pas vous dire.
M. Marois: En d'autres termes, j'étais porté
à penser que oui, en me disant - mais là je ne veux pas
présumer de rien - que vous nous donnez un exemple très concret
sur le comportement d'un employeur. Je présume que cela s'est fait dans
le cadre de l'application de l'ancien décret ou peut-être que
ça s'est fait dans le cadre de l'application du décret actuel,
depuis qu'il a été publié, promulgé. C'est pourquoi
je voulais voir si l'ancien décret comportait...
M. Dalpé: Je crois que oui.
M. Marois: ... sensiblement la même clause, sensiblement la
même formule. Est-ce que ce n'est pas inhérent au comportement de
l'employeur plutôt qu'à la clause comme telle et à la
formule comme telle? En d'autres termes, ce que vous évoquez, c'est le
comportement inacceptable d'un employeur qui s'est servi de... pour atteindre
d'autres fins.
M. Dalpé: Je vous cite l'exemple pour vous dire que la
conséquence de cette clause-là a été cela dans ce
cas-là. Va-t-on permettre à une multitude d'employeurs d'utiliser
cela? Il y aura des problèmes par après pour tout le monde.
M. Marois: Pour être certain que je comprends bien votre
point de vue, je voudrais simplement essayer de bien comprendre si ce que vous
dites, ce que vous évoquez, l'exemple que vous venez de donner, c'est
inhérent à la clause elle-même, telle qu'elle est
formulée, ou à un comportement, à un abus. II y a parfois
des congédiements ou des mesures disciplinaires absolument pas
fondées et il y a des recours là-dessus. C'est pour cela qu'il y
a des clauses concernant les procédures de grief et les
règlements de conflit, etc.
M. Dalpé: L'obligation pour l'employeur de remplir cette
fameuse annexe F peut être une invitation à régler cela au
plus simple et à se foutre, en fait, de la représentation que le
travailleur lui présente. II peut dire: Je fais partie de telle
organisation syndicale, je vais te facturer le moins cher, $0.01. Cela va
très bien. Comment le reste se comporte-t-il? Je n'en sais rien. C'est
parce que l'employeur doit remplir l'annexe qu'il peut se permettre ce
jeu-là.
M. Marois: Si on lit l'article 7.03, le deuxième
paragraphe de l'article 7.03b, on dit: "Cette formule fournie par l'employeur
doit être dans la forme prescrite à l'annexe F - comme vous l'avez
dit - et elle doit être signée par le salarié pour attester
la véracité des renseignements qui y sont inclus."
M. Dalpé: Le salarié paie $0.01 l'heure.
N'aimeriez-vous pas cela payer seulement $0.01 l'heure de cotisation? Il va
essayer cela, même s'il sait que son organisation syndicale lui facture
$5 par semaine, il va essayer de payer $0.01 l'heure. C'est normal comme
comportement. Un vrai syndiqué va se battre, mais un gars qui est pris
pour être syndiqué, comme on dit, il va essayer de payer $0.01.
Cela existe.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Maisonneuve.
M. Lalande: Justement, M. le Président, à cette
annexe B, de façon précise, il y aurait lieu d'apporter des
corrections immédiates au niveau technique à la liste où
il y a la Centrale des syndicats démocratiques, CSD, etc. Je pense
qu'à Conseil provincial du Québec des métiers de la
construction, il faudrait enlever FTQ, le biffer, pour être conforme
à la loi 109 et...
M. Marois: En conformité avec la loi 109.
M. Lalande: ...finalement, il faudrait ajouter un peu plus loin,
FTQ-Construction pour se conformer à la loi 109.
M. Marois: C'est noté.
M. Lalande: J'ai été fortement
intéressé par la substance des propos qu'a tenus M. Dalpé,
notamment à 7.03, à l'article 25, à l'article 32.01.
Finalement, il a soulevé un point sur lequel, au nom de la
démocratie, il faudrait peut-être y aller plus
profondément. On sait que le gouvernement -c'est un secret de
polichinelle - favorise une certaine centrale syndicale dans tout cela, mais
là...
M. Chevrette: Passe-moi donc le crachoir pour..
M. Lalande: ...je pense que M. Dalpé a fait la preuve
là-dedans qu'il y a des problèmes de discrimination
véritable et profonde. Je pense qu'il faut le souligner. Il ne faut pas
avoir peur de le voir de la façon que c'est.
M. Chevrette: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: ...je pense que le député de
Maisonneuve aurait profit à lire les lois 290 et 9. Il se rendra compte
qu'il est tombé dans la mauvaise formation politique dans ce
cas-là parce que c'est justement parce qu'on applique les lois
adoptées sous le régime libéral qu'on a le portrait exact
qu'on a là. Franchement, c'est preuve de méconnaissance pour ne
pas dire plus et je vais arrêter à "méconnaissance", parce
que j'aurais le goût d'ajouter un autre terme. (13 heures)
J'ai écouté moi aussi attentivement les propos de M.
Dalpé. Je pense que ce n'est pas au niveau du décret que le
problème se pose; c'est au niveau de la loi. Les remarques que vous
faites relèvent de l'application intégrale d'une loi qui n'a pas
été amendée dans sa substance en ce qui regarde, par
exemple, l'application des cotisations. Moi aussi, je trouve cela aberrant, par
exemple, qu'on niveau d'une clause de convention collective, cela puisse
devenir une incitation au maraudage. C'est ce que vous dites, en d'autres mots.
C'est vrai. Je trouve cela grave, mais que voulez-vous? La loi de l'industrie
de la construction est claire. Il y a une association majoritaire qui a le
pouvoir de négocier et elle a le droit de négocier pour et au nom
de l'ensemble des travailleurs. C'est une aberration dans la loi de, la
construction. Je l'ai toujours dit et, là-dessus, je vous donne raison.
Tel que stipulé là, un syndicat peut très bien vouloir
payer 25%, - vous avez raison - mais un autre peut dire: Moi, je ne le paie pas
et les membres sont d'accord pour ne pas payer. Cela n'empêche pas
l'association représentative de décréter que l'employeur,
lui, participe à 75% et qu'un syndicat peut rendre ou ne pas rendre un
service additionnel à ses membres. Je suis entièrement d'accord
avec vous, mais, dans la loi, actuellement, on n'a pas le choix. C'est
l'association représentative majoritaire qui a le mandat de signer, qui
a le mandat de négocier pour et au nom... Et la loi stipule clairement
que vous n'avez pas le choix d'appartenir ou de ne pas appartenir.
Là-dessus, je dois vous avouer que c'est un peu vrai que l'individu qui
fait un choix, parce qu'il est forcé de le faire, bien souvent, peut
aimer un type de centrale syndicale et ne pas aimer sa cotisation.
Tel que stipulé là, l'individu qui veut payer "la" cent de
l'heure, comme vous dites, quand arrive le temps des maraudages en vertu de la
loi, peut opter, à ce compte-là, pour la centrale qui charge
"une" cent. C'est son droit. Et s'il a opté pour la CSD, il doit payer
le coût de la cotisation CSD.
Je pense qu'il y a peut-être des salariés qui manquent le
bateau là-dessus. Mais il est aussi du devoir des centrales syndicales
ou des regroupements de salariés d'aviser les employeurs du coût
ferme de leurs cotisations. C'est clair aussi. Dans la loi, cela
n'enlève pas à l'employeur l'obligation de percevoir les
cotisations fixées démocratiquement par les centrales ou par les
syndicats impliqués. C'est parce que vous avez rencontré un
employeur, dans le cas que vous donnez, qui voulait se payer votre
tête ou bien se payer celle du travailleur. Dans un cas comme dans
l'autre, il pouvait se payer la tête des deux, en disant que vous autres,
vous ne faisiez pas votre devoir ou bien en disant à l'autre: Tu es
nono, tu ne connais même pas ta cotisation. Cela aurait pu être
cela aussi.
Personnellement, je pense que l'article 25 est légal,
malgré les prétentions de M. Dalpé. Il est légal en
fonction des lois existantes. Là où il faut s'enligner, c'est sur
l'amendement à la loi et non pas sur l'amendement au décret.
C'est bête de dire cela, c'est vrai, mais c'est une constatation qu'on
est obligé de faire.
M. Dalpé: Je pourrais vous rappeler, M. le
commissaire...
M. Chevrette: Ceci était en 1974.
M. Dalpé: Je vous traite de commissaire, à titre de
membre de la commission, ici. L'autre partie, cela fera partie de
l'histoire.
Cet aspect auquel je me réfère a été
négocié par un groupe particulier. Et il s'adresse à un
groupe particulier, celui des ascenseurs. Cela ne s'applique pas à
d'autres. Cela ne s'applique qu'au groupe des ascenseurs.
Or, il y a des gens d'ascenseurs chez nous. Mais ces gens d'ascenseurs,
chez nous, ne font pas partie seulement d'un groupe d'ascenseurs. Ce sont des
membres, à part entière, du Syndicat des travailleurs de la
construction.
Ce que je veux dire, c'est que le groupe des ascenseurs qui a
négocié la disposition peut se l'imposer à lui, mais il ne
peut pas nous l'imposer à nous, à notre syndicat, parce qu'il n'y
a pas que des gars d'ascenseurs là-dedans, il y en a d'autres. Or, on
demande à d'autres de payer pour les gars des ascenseurs.
M. Chevrette: Je comprends. Vous faites référence,
à ce moment-là, à la structure même de...
M. Dalpé: Oui.
M. Chevrette: ...votre organisme. En d'autres mots, vous n'avez
pas de section de mécaniciens en ascenseurs ou travailleurs...
M. Dalpé: Alors, alors que ceux qui l'ont
négocié en ont. Entre eux, ils forment le groupement des
ascenseurs, ils cotisent et disent: À même notre cotisation, on
prendra 25% dans le cas de vol d'outil ou de perte. Mais en vertu de cette
disposition, ils disent: Vous autres aussi, vous en avez, mais vous prendrez
les cotisations de tous vos membres pour les payer. Pas seulement nos membres,
pas seulement ceux de l'ascenseur.
M. Chevrette: Là, je le comprends.
M. Lalande: Si je comprends bien, ce n'est pas tellement au
niveau de la légalité. Je pense que cela peut être
légal, mais ce n'est sûrement pas très légitime.
C'est drôlement discriminatoire à sa façon même, en
tout cas, face à ceci.
M. Dalpé: En fonction d'un avis juridique que nous
détenons de M. Thibodeau, qui est notre conseiller juridique, cela
semble non seulement discriminatoire, mais illégal.
M. Lalande: D'accord.
M. Dalpé: C'est cela que j'ai voulu soulever. Qu'ils le
fassent, on n'a rien contre cela, mais c'est parce qu'ils l'imposent à
une organisation qui ne contient pas seulement des gens d'ascenseur.
Le Président (M. Boucher): Est-ce qu'il y a d'autres
questions?
Compte tenu que nous avons dépassé l'heure de la
suspension...
M. Chevrette: Est-ce qu'on pourrait avoir l'avis juridique dont
M. Dalpé parle? Vous l'avez, vous autres. J'aimerais l'avoir. À
titre de renseignement, on pourrait au moins regarder. Je pense qu'il n'y a
rien qui empêche, dans un groupe de salariés structurés en
organisation, des mises en commun non plus. J'aimerais fouiller toute cette
dimension pour voir exactement, par rapport à la Loi des décrets,
ce que cela représente.
Le Président (M. Boucher): Messieurs, compte tenu que nous
avons dépassé l'heure de la suspension, je remercie les membres
de la CSD pour leur mémoire.
La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.
Une voix: Consentement pour 14 h 30.
Le Président (M. Boucher): Est-ce qu'il y a consentement
pour reprendre à 14 h 30?
M. Marois: 14 h 30. Le Président (M. Boucher): 14 h
30. M. Marois: D'accord. Le Président (M. Boucher): Merci.
CSuspension de la séance à 13 h 06)
(Reprise de la séance à 14 h 42)
Le Président (M. Boucher): À l'ordre, s'il vous
plaît!
À la suspension de 13 heures, nous avions terminé avec la
Centrale des syndicats démocratiques. J'appellerais maintenant le
Syndicat de la construction Côte-Nord de Sept-Îles Inc. Est-ce
qu'il est présent? Je note l'absence des représentants du
Syndicat de la construction Côte-Nord de Sept-Îles Inc. J'appelle
maintenant la Fédération des travailleurs du Québec,
FTQ-Construction, représentée par M. Jean Lavallée,
président. Messieurs, si vous voulez vous identifier et procéder
à la lecture de votre mémoire, s'il vous plaît.
FTQ-Construction
M. Lavallée (Jean): M. le Président, Jean
Lavallée, président de la FTQ-Construction. J'aimerais apporter
certaines précisions devant les membres de cette commission pour
expliquer un peu ce qu'est la FTQ-Construction au moment où on se parle.
Ce matin, on a fait une relation avec la loi 109 en disant que c'était
du favoritisme, mais je pense que la loi 109 ne fait que corriger une situation
qui s'était détériorée au cours des années.
C'est simplement qu'au moment de l'adoption de la loi 290, c'était la
FTQ qui était l'association représentative. Donc, c'est tout
simplement pour corriger cette situation.
J'aimerais vous présenter les membres de l'exécutif et de
l'organisation que je représente qui sont, à mon extrême
droite, Louis-Marie Cloutier, des charpentiers-menuisiers, local 134, suivi du
confrère Roger Poirier, qui a changé de position, qui est
secrétaire, qui vient des plâtriers; à la gauche de M.
Cloutier, Robert Roy, du local 144 des plombiers; Me Laurin, qui est notre
conseiller juridique à la FTQ-Construction; le directeur
général de la FTQ-Construction, Jean-Paul Rivard; à ma
gauche immédiate, Yves Paré, des opérateurs de machinerie
lourde, local 791, suivi de Normand Tousignant, du local 62, des manoeuvres;
Paul Lebel, qui remplace Carol Boucher, des "linemen", des monteurs de
ligne.
Il va sans dire que nous ne saurons pas définitivement avant le 8
mars quel va être notre taux de représentation ou notre certificat
de représentativité vis-à-vis des travailleurs de la
construction. Aujourd'hui, la FTQ-Construction parle au nom des
différents métiers suivants, que je veux vous
énumérer, pour qu'on sache l'importance, au moment où on
se parle de la FTQ-Construction. (14 h 45)
Étant que nous sommes les derniers à parler, on semble
peut-être être marginal, mais, tous ces métiers qui sont ici
présents nous ont appuyés pour préparer le document qu'on
vous a soumis devant cette commission. Ce sont les métiers suivants: les
opérateurs du local 791, les monteurs de lignes, les charpentiers
menuisiers du 134 avec plusieurs autres locaux aussi, les plombiers du local
144, les poseurs de gicleurs et de réfrigération, les poseurs de
plafonds suspendus, les plâtriers et finisseurs de ciment, les manoeuvres
du local 62, les cavaleurs, les électriciens de la FIPO, les
briqueteurs, les peintres, les poseurs de systèmes intérieurs et
parqueteurs. Tous ces métiers, sans exagérer le nombre,
représentent entre 65,000 et 70,000 travailleurs de la construction au
Québec selon les listes fournies par l'Office de la construction.
Je tenais à faire cette mise au point devant la commission pour
signaler ce qu'est la FTQ-Construction présentement à la suite de
l'adoption de la loi 109; par contre, ce n'est pas une représentation de
68% qu'on détient, c'est tout simplement qu'on aura cette
représentation à la suite du vote dans l'industrie de la
construction qui va avoir lieu très bientôt.
On a aussi présenté un mémoire pour discuter de
tous les articles qui nous ont été soumis par le contentieux du
ministère. On espère pouvoir discuter à fond de tous ces
points. Vous remarquerez aussi qu'on a fait circuler un deuxième
document - je ne sais pas si on l'a passé - qui concerne les clauses
concernant les travaux de pipe-lines qui ont été ajoutées,
qu'on a finies tard hier soir. Donc, cette commission est importante pour nous.
On est sérieux. On veut faire du travail pour qu'on puisse, une fois
pour toutes, avoir un décret qui serait conforme à ce qui avait
été discuté et entériné lors des
dernières négociations. Maintenant, je passerai la parole
à M. Jean-Paul Rivard, qui est directeur-général de
l'organisme et qui va faire lecture du document.
M. Rivard (Jean-Paul): M. le Président, M. le ministre,
messieurs les députés, la FTQ-Construction a pris connaissance
des modifications proposées par le contentieux du ministère du
Travail et nous avons dans le texte que vous avez devant vous pris position sur
chacun des articles concernés. Je crois qu'il ne faut pas faire un
survol général des clauses. Je pense qu'il faut discuter à
fond chacune de ces choses. À la section I du décret, aux
définitions, je pense qu'il faudrait être prudent et ajouter
là-dedans la définition de FTQ-Construction et indiquer qu'il
s'agit de la FTQ-Construction, qui est une nouvelle association
représentative, l'association représentative majoritaire, nous
croyons, et qu'il faut l'inclure comme telle. Aussi à noter les
corrections de concordance afin de remplacer partout dans le décret le
conseil provincial par le terme association représentative majoritaire,
parce que nous croyons que le conseil provincial va devenir une organisation
microscopique pour autant que nous sommes concernés. Nous ne pouvons
pas lui laisser continuellement le mandat parce qu'il ne sera plus une
association majoritaire.
À l'article 1.01v, la FTQ-Construction est d'accord pour que
soient biffés les sigles apparaissant audit article, le terme
"association représentative" étant suffisamment clair.
Quant au champ d'application industriel, à l'article 3.01, nous
n'avons pas d'objection à la recommandation du ministère et nous
sommes prêts à retrancher la dernière phrase qui se lit:
"En conséquence, toute personne exécutant de tels travaux est
assujettie au décret."
Quant au comité de révision prévu à
l'article 3.03, nous sommes en désaccord avec la proposition d'abroger
cette disposition. Le ministère semble alléguer que les
dispositions sont illégales en vertu de l'article 61, mais rien n'est
plus faux parce que ce comité n'a aucun pouvoir de
légiférer et n'a comme pouvoir et mandat que d'étudier des
choses et faire des recommandations au ministère. Donc, je ne pense pas
que ce soit illégal aujourd'hui de commencer à faire des
représentations.
Nous croyons que les objections du contentieux du ministère
là-dessus sont que le décret viendrait légaliser une sorte
de comité comme ça et qu'on semblerait transférer au
ministère ou au gouvernement les obligations et droits résultant
de ce comité et je pense qu'il n'y a rien de plus faux là-dedans.
S'il y avait des obligations, c'est le comité qui doit les remplir parce
que c'est le comité qui se lie.
Notamment, l'article 61 - et nous allons en discuter ici, je pense que
ça va valoir pour toutes les autres fois où nous allons aller
à l'encontre de l'interprétation du ministère en ce qui
concerne cet article -dit clairement que le décret peut contenir
notamment des dispositions concernant l'ancienneté, les mouvements de
main-d'oeuvre, etc. Nous croyons que l'utilisation du terme "notamment" ne
laisse aucune ambiguïté, suivant la définition même du
dictionnaire. Ce terme signifie, entre autres, donc n'est pas limitatif et
n'empêche pas les parties de signer des ententes et d'inclure des
articles qui ne sont pas spécifiquement défendus par la loi.
À cet article-là, nous demandons: Est-ce que les
tentacules du ministère sont si longues et s'immiscent si
profondément dans les relations patronales-ouvrières qu'il est
dorénavant défendu aux parties de s'entendre sur des sujets qui
ne font pas partie des mandats donnés en exclusivité à
d'autres organismes, notamment l'OCQ, ou est-ce que les projets futurs et
anticipés du ministère sont inavouables et ont déjà
force de loi? Parce que, dans tout le document et dans toutes les
recommandations du ministère, on sent, de la part du ministère,
que ce n'est pas légal, que ce n'est pas illégal; on semble
empiéter sur des plates-bandes du ministère en ce qui concerne
peut-être des projets de politique globale d'emploi qui ne sont pas
encore des lois. Là-dessus, nous ne sommes pas d'accord que les
désirs du ministère, qui ne sont pas encore lois, aient
priorité.
À l'article 5.04, l'exécution du travail par le compagnon
ou l'apprenti. Dans un premier temps, la suggestion du ministère est de
retrancher une phrase aux dispositions de l'article 5.04.1b. Dans un
deuxième temps, le ministère suggère d'abroger purement et
simplement l'article 5.04 au complet.
Cette position est manifestement contradictoire et nous oblige à
prendre position sur chacun des sujets impliqués. Les dispositions de
l'article 5.04.1a de la convention sont les mêmes que celles qui
apparaissent dans le décret précédent. Nous ne voyons pas
comment ce qui était légal peut devenir subitement
illégal.
Quant à l'article 1b qui prévoit la soudure dans le cas de
travaux électriques, cette disposition ne fait que confirmer un
état de fait existant. On doit se rappeler que les travaux de soudure
sont traditionnellement considérés dans le secteur de la
construction comme l'exercice d'un emploi et non d'un métier. Il est de
coutume dans la construction que la soudure soit faite par les gens du
métier concerné pour autant qu'il y ait des ouvriers, des
salariés capables d'effectuer ce genre de travail. C'est ainsi que de
prévoir l'utilisation d'un électricien résidant dans un
rayon de 120 kilomètres du chantier est une clause légalement
acceptable, puisqu'elle ne fait pas obstacle à la disposition dudit
règlement de placement quant à l'utilisation des salariés
dûment classifiés à l'intérieur d'une région
de placement. Il est clair et net que le décret qui découle d'une
convention collective ne peut avoir priorité sur un règlement,
notamment le règlement de placement ou le règlement no 1 sur la
formation et la qualification professionnelles. Il n'y a donc pas lieu de dire
ici que cet article est sujet au règlement de placement. C'est
évident, c'est l'évidence même.
L'article 5.04.2 prévoit la pose d'attachement au profit de
l'opérateur. Cette clause ne vient aucunement en contradiction avec les
dispositions du règlement sur la formation et la qualification
professionnelles, puisqu'une telle pose peut aisément être
comprise dans ce que le règlement considère comme
l'opération d'une pièce de machinerie. Si le ministère
prétend que c'est illégal de mettre une clause comme cela, que
cela vient à l'encontre du règlement, c'est peut-être parce
que le règlement prévoit que cela fait partie de l'exercice du
métier. Il ne serait donc pas illégal de l'inscrire ici, de
répéter le règlement. Si le règlement le
défendait expressément, là, on pourrait peut-
être prétendre que c'est illégal. Le
règlement est muet là-dessus.
Le paragraphe 3 de l'article 5.04 traite de manutention. Notons tout de
suite que le premier alinéa dudit paragraphe demeure inchangé
quand on le compare au paragraphe 2 de l'article 5.04 du décret
précédent. Il n'avait pas été soulevé que
c'était illégal.
L'alinéa suivant qui prévoit que l'employeur peut faire
exécuter la munutention par n'importe quel salarié de son choix,
sauf les exceptions prévues par la suite, confirme une situation de fait
vécue par tradition dans le secteur de l'industrie de la construction,
tradition qu'on appelle "les coutumes du métier". Il ne s'agit donc pas
d'une innovation qui va à l'encontre des dispositions régissant
l'exercice d'un métier.
L'alinéa suivant, soit celui qui traite du gréage
mécanisé, présente une situation différente,
puisque cette disposition exclut de l'exercice des métiers la
manutention qui leur appartient. Il s'agirait donc, par cet alinéa,
d'enlever à certains métiers l'exercice d'une juridiction qui
leur a été traditionnellement reconnue. On touche alors
carrément à l'exercice du métier et aux traditions du
métier et on se place ainsi dans une situation
d'illégalité. La FTQ-Construction est donc d'accord pour qu'on
abroge l'alinéa qui se lit: "Aux fins du paragraphe 3 de l'article 5.04,
le mot "manutention" n'inclut pas le gréage mécanisé."
D'ailleurs, si on regarde le décret comme tel, il y a un vide quelque
part parce qu'on exclut le gréage mécanisé de la
définition du mot "manutention" et personne ne dit à qui cela
appartient. Donc, on donne encore totalement à l'employeur dans ses
droits de gérance la liberté totale de décider qui va
faire le gréage mécanisé. Si c'est légal de
permettre à l'employeur de faire cela, cela doit être légal
de s'entendre pour le donner à quelqu'un.
Est-ce que le fait pour l'employeur d'agir à sa guise constitue
la légalité ou si le fait d'incruster dans les mots des
méthodes de travail et des répartitions de tâches vient en
conflit avec ceux qui ont la vision mystique d'une politique d'emploi globale
qui n'inclurait pas la volonté des composantes d'un secteur
donné?
Nous désirons conclure sur les dispositions de l'article 5.04 en
soulignant qu'il s'agit de la meilleure façon d'éviter la
perturbation des chantiers de construction par les initiatives des employeurs
qui se refusaient à respecter les coutumes des métiers. Si la
clause est illégale, où est la légalité en ce qui
concerne la manutention?
J'aimerais porter à l'attention du ministère que,
traditionnellement, sur les chantiers, chaque métier faisait du lobbying
auprès de l'employeur pour essayer d'obtenir la manutention ou des
choses qui n'étaient pas prévues au règlement sur la
formation professionnelle afin de donner plus de travail à ses membres.
Cette clause vient clarifier certaines choses, attribuer le travail à
certains métiers. Donc, le problème est réglé. Il
est réglé d'une façon légale, par écrit,
dans une entente entre les parties.
L'article 6.01, soumission d'un conflit, et l'article 6.02, code des
ententes relatives aux conflits de compétence: on veut les traiter
ensemble. La procédure prévue par les deux articles constitue un
effort par les parties à trouver un mécanisme leur permettant de
régler à l'amiable les mésententes qui peuvent survenir.
Cela n'enlève aucun pouvoir au conseil d'arbitrage qui a comme mandat
ultime de régler définitivement tout litige qui pourrait survenir
quant à un conflit de compétence. Donc, c'est une tentative par
les parties de régler à l'amiable avant que cela aille plus loin,
essayer de le régler sur le chantier même et cela, toujours en
fonction de codes, d'ententes qu'il y a déjà eues dans le
passé. Il y a des ententes qui disent à un moment que tel travail
appartient à tel métier, alors c'est toujours dans le but de
respecter ce genre d'entente et régler à l'amiable. Tant et aussi
longtemps qu'un conflit va se régler à l'amiable et qu'il n'y a
personne de lésé et personne qui se plaint, on ne voit pas en
quoi le ministère pourrait intervenir. On ne voit pas en quoi ce serait
son affaire.
Remise des cotisations syndicales précomptées, obligation
de l'employeur et avis de l'office. Les articles 8.03, 8.04 et 8.05. Sans se
compromettre sur la légalité des clauses dans la convention
collective, la FTQ-Construction renonce à engager un débat de
principe sur les clauses énumérées et n'a pas objection
à ce que le terme "association représentative" remplace les
termes "syndicat" ou "union" quant à la remise de cotisations syndicales
et quant à l'avis à l'office.
Cependant, nous sommes disposés à accepter la
recommandation ou la modification proposée par le ministère
à l'effet d'inclure la possibilité pour les syndicats, les
associations représentatives, de faire une entente avec l'office pour
que cet argent, ces cotisations syndicales soient envoyées aux syndicats
ou unions concernées, comme cela existait dans le décret
précédent, de toute façon.
A l'article 8.06, nous acceptons la recommandation du ministère
de biffer les mots "par courrier recommandé".
Quant à la section XI, le régime patronal, nous pourrions
difficilement prétendre que cette section est illégale puisque
nous maintenons que l'article 61 de la loi n'est pas limitatif. Soit dit en
passant, c'est une clause qui favorise les patrons. Si vous voulez l'enlever,
on ne fera pas de grève. Mais on ne croit pas que ce soit
illégal.
À l'article 12.01, procédures de grief, nous sommes
d'accord à l'inclusion de l'association représentative parmi les
parties qui peuvent loger un grief.
À l'article 17.01, 3, alinéa 2, la révision
exigée du carnet d'apprentissage dans les 30 jours de chacune des
périodes d'apprentissage répète les dispositions existant
à l'article 5.02 du règlement sur la formation et la
qualification professionnelles, ainsi que les dispositions traitant du paiement
à 5.05.
On ne pourra nous opposer qu'il s'agit d'une disposition
répétitive inopportune et illégale, puisque les
dispositions traitant des activités interdites à la section 30 de
la convention collective n'ont pas fait l'objet de pareils commentaires par le
ministère, même si elle répète les dispositions de
la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction.
Nous trouvons quand même curieux que cette convention collective
semble avoir été scrutée à la loupe et on n'a pas
vu qu'il y avait des répétitions d'articles de la loi qui
étaient contraigrantes pour les syndicats.
À l'article 17.01, 4, a) et b), ces dispositions prévoient
des taux de salaire applicables. Cela ne tient pas du tout à un conflit
avec le règlement no 1 sur la qualification et la formation. Il s'agit
d'une disposition salariale expressément prévue par les
dispositions de l'article 61 de la loi. On a le droit de négocier des
salaires.
Même si nous pouvions prétendre que le règlement no
1 n'empêche pas les parties de s'entendre sur un salaire supérieur
pour l'apprenti, le fait est que l'apprenti est spécifiquement exclu de
l'application des dispositions des clauses en question.
Donc, le règlement n'est pas impliqué et la
prétention du ministère est indéfendable. Nous croyons
d'ailleurs que c'est une des causes pour lesquelles le contentieux du
ministère a refusé de nous rencontrer et de justifier ses
prétentions. Nous avons fait des efforts, même si nous sommes
d'accord avec le ministre que nous n'avons pas eu l'occasion, le 3
décembre, d'avoir plus d'explications de la part du contentieux. Ce
n'est pas notre faute. Après cela, on a quand même demandé
des rencontres qui nous ont été refusées. On aurait voulu
avoir plus d'explications là-dessus. Ces rencontres nous ont
été refusées. (15 heures)
À l'article 17.04, rapport mensuel à l'office. Ces
dispositions sont de toute première importance. Il est tout à
fait impensable que les salariés, par leurs représentants,
n'aient pas accès à l'information portant sur le respect des
dispositions qui les concernent directement. Nous dénonçons toute
tentative d'isoler, en termes d'information et d'accès à
l'information, les travailleurs de l'industrie de la construction et leurs
associations syndicales.
Il est d'ailleurs à noter que la seconde partie à
l'entente collective, soit la partie patronale, est elle-même d'accord
pour que l'accès à l'information soit permis aux
représentants syndicaux de qui émane alors l'initiative
d'apporter des restrictions.
L'article 17.06, travail interdit. L'article traduit ce qui a
été négocié entre les parties et il n'y a pas lieu
de le modifier. Quant à l'artisan, on ne peut craindre qu'il soit
visé par ledit article puisque la disposition fait
référence aux salariés seulement et ne vise nullement
l'artisan.
L'article 18.01. Nous croyons comprendre que la préoccupation du
ministère se situe au niveau de l'artisan. Dans un désir
d'éviter un litige qui n'en est pas un, nous sommes disposés
à ajouter le terme "entrepreneur" après le terme "employeur",
à la première ligne du paragraphe.
L'article 18.03, sous-contrat, certains travaux. Nous croyons que
l'article 18.03 ne peut pas être illégal parce que c'est une
entente qui est intervenue entre salarié et employeur, qui régit
salarié et employeur et qui ne régit personne d'autre. Alors,
l'article 92 de la loi qui fait l'obligation à un entrepreneur, à
un employeur de détenir une licence de la Régie des entreprises
de construction du Québec est répété là. On
ne fait que répéter une disposition de la loi. Je ne vois pas en
quoi cela pourrait être illégal.
Travail interdit et travail permis durant les congés annuels
obligatoires. Considérant la modification apportée à
l'article 18.01 quant à l'entrepreneur, nous n'avons pas objection
à ajouter, après le mot "personne", les mots "assujettie au
décret", au premier alinéa du présent article.
À l'article 20.06.4d, nous sommes disposés à
retrancher la dernière phrase, tel que recommandé par le
ministère.
À l'article 20.07, les intérêts. La disposition
apparaissant dans le projet de décret est mal rédigée et
inversée par rapport à l'objectif visé. Cet objectif est
de s'assurer que les intérêts seront remis aux salariés
dans un pourcentage excédant 90%, lequel devient un minimum. Nous nous
opposons à ce que cet article soit abrogé, même si nous
sommes conscients qu'il va à l'encontre d'une réglementation
déjà formulée par le ministère et qui avait pour
effet de contourner une disposition librement consentie entre les parties
contractantes. Les parties n'ont d'ailleurs pas été
consultées quant à ce règlement. Il est devenu coutume
malheureusement de balayer à coup d'arrêtés en conseil les
ententes qui ne plaisent pas à certaines personnes et de permettre
à l'OCQ de fouiller dans les poches du salarié et d'y puiser des
revenus afin de remplir des mandats qui lui sont donnés par le
législateur
et ce, le plus souvent, contre le désir des parties
concernées.
Déplacement de grue, à l'article 24.19. Le
ministère semble s'interroger sur l'application des dispositions de la
convention collective ou du décret dans le cas de transport d'une grue
mobile. Cette situation ne nous paraît pas davantage illégale que
celle qui vaut dans le cas où le salarié conduit un camion qui
transporte des salariés au début des heures de travail et sur de
longues distances. En fait, cet employé travaille pour un employeur
professionnel de la construction.
Il en va de même quant au salarié qui se déplace
dans le véhicule de l'employeur entre deux lieux de travail, tel que
prévu à l'article 24.02. Il faudrait aussi rendre illégal
l'article 24.02, pour être logique.
Si le ministère veut être logique avec lui-même,
pourquoi ne conteste-t-il pas également la légalité de
l'article 24.05 auquel l'article 24.19 se réfère? Les
dispositions de l'article 24.19 ne font en fait que créer une occasion
d'application de l'article 24.05 et exiger de l'employeur qu'il paie pour les
dépenses de voiture du salarié qui doit suivre la grue dans ses
déplacements. Or, depuis des années, l'article 24.05 couvre
spécifiquement l'utilisation de la voiture du salarié. Cette
utilisation ne peut, à toutes fins pratiques, se faire qu'en dehors du
chantier. S'il devait y avoir une controverse, il n'appartient pas au
ministère de passer par-dessus la tête de l'autorité
compétente constituée par le ministère lui-même pour
juger des cas soulevés quant à l'assujettissement au champ
d'application.
Louage et affûtage d'outils, article 25.02 2. L'affûtage
d'outils par le salarié du métier concerné entre dans le
cadre normal de son travail et ne constitue pas une dérogation à
sa juridiction de métier telle que définie par le
règlement sur la formation et la qualification.
S'il est maintenant illégal de s'entendre pour attribuer des
tâches à certaines personnes au lieu d'autres, surtout quand ces
tâches ne font pas spécifiquement partie d'un métier,
qu'attendons-nous pour déclarer illégales toutes les annexes de
la convention collective qui attribuent certaines fonctions à certaines
catégories d'emplois et d'occupations, et par le fait même,
à certaines personnes? Si le ministère prétend que le
règlement no 1 couvre l'affûtage des outils, nous sommes
disposés à jouer à ce jeu et à amender le
règlement pour créer de nouveaux métiers en
commençant par celui d'affûteur. Nous sommes certains que la
perspective ne vous réjouit pas, parce qu'il est depuis longtemps dans
la politique du ministère de ne pas encourager de formation et de
qualification dans des domaines où il n'y en avait pas auparavant. Donc,
on ne peut prétendre qu'il y en a quand il n'y en a pas.
L'article 25.07: Préférence d'embauche l'article 25.08 3:
Lignes de distribution d'énergie électrique, priorité
d'emplois, l'annexe B et le sous-annexe C, doivent être traités
ensemble.
Ces trois dispositions que nous traitons ensemble, la priorité
conférée par ces dispositions équivaut à une
ancienneté relevant expressément du champ d'application du
décret tel que prévu à l'article 61 de la loi.
Le but visé par l'article 25.07 est d'accorder une
priorité d'embauche à des salariés qui ont le malheur
d'avoir plus de 50 ans ou de souffrir d'incapacité. Cela a
peut-être été mal rédigé. On dit que c'est un
malheur d'avoir cinquante ans, mais c'est la façon.
Nous ne pouvons croire qu'une telle chose soit illégale quand on
sait que le gouvernement actuel a déjà adopté une loi
forçant les employeurs à embaucher un certain pourcentage de
handicapés. Cette clause du décret va dans le même esprit,
sinon dans les mêmes circonstances quant au genre de handicapés
qu'elle veut protéger. Qu'y a-t-il d'illégal à favoriser
ou accorder une préférence à un vieux salarié de la
construction lorsque ce dernier possède les qualifications et
classifications exigées en vertu du règlement? Pourquoi redonner
aux employeurs la latitude discriminatoire qu'ils possédaient
d'embaucher des salariés de course, au détriment des autres plus
âgés et parfois plus lents, quand le travail à effectuer
est compatible avec leurs capacités physiques?
Quant à l'article 25.08 3 et l'annexe B sous-annexe C, il est
clair que ces articles ne sont pas illégaux et n'entrent pas en conflit
avec l'article 78 de la loi et le règlement relatif au placement des
salariés. Les clauses supposément litigieuses ne font que mettre
fin à l'anarchie qui régnait dans le domaine des lignes de
distribution électrique et c'est aussi, nous croyons, le but visé
par le règlement de placement. Ces clauses sont complémentaires
et non incompatibles avec le règlement car les critères du
règlement sont fondamentalement les trois suivants. Premièrement,
avoir travaillé un certain nombre d'heures dans une période
définie; deuxièmement, détenir un certificat de
classification et, troisièmement, avoir son domicile dans la
région concernée.
Quand ces conditions sont rencontrées par plusieurs
salariés, qu'est-ce qui empêche les parties au décret de
décider ceux qui, parmi ces salariés admissibles, auront la
priorité d'embauche? L'annexe B sous-annexe C ne fait que renforcer
l'esprit du règlement où elle donne priorité aux
salariés ayant plus de 7000 heures, mais moins de 4500 heures
d'expérience dans le métier. Quand tous ces salariés des
7000 heures sont embauchés, les
salariés ayant plus de 4500 heures, mais moins de 2000 dans le
métier, ont priorité et quand tous les salariés ayant 4500
heures d'expérience ont trouvé du travail priorité est
donnée à celui qui en possède plus de 2000, et ainsi de
suite jusqu'à ce qu'on embauche de nouveaux salariés.
Abroger ces dispositions signifierait que l'employeur regagne, par le
biais du ministère, toute la marge de manoeuvre qu'il a consenti
à limiter lors des dernières négociations et l'on
reverrait apparaître des salariés avec très peu
d'expérience pour remplacer les salariés plus âgés,
possédant 7000 heures et plus d'expérience. Cela pourrait aller
même jusqu'à 30,000 heures et tout cela parce que l'employeur y
verrait l'occasion de sauver des frais de chambre et pension ou de favoriser
encore une fois la vente de jobs par des surintendants ou contremaîtres
peu scrupuleux.
Nous avons de la difficulté à croire que la
légalité consiste à laisser l'employeur agir à sa
guise et l'argumentation servie aux articles concernant les artisans, qui
viendra plus tard, vaut ici également. Nous sommes convaincus que cette
commission ne cautionnera pas les étranges orientations des personnes
qui s'abritent derrière une pseudoillégalité de certaines
clauses pour se créer une chasse gardée car vous supporterez
alors l'odieux de nous forcer à prendre d'autres mesures pour faire
respecter ce qui fut négocié de façon civilisée.
Ces clauses ont été négociées de façon
civilisée, contrairement à ce qui existait dans le passé.
Si vous redonnez la possibilité à l'employeur de discriminer
encore contre les salariés les plus anciens dans un certain
métier et ce, à l'intérieur de ses droits de
gérance, il nous faudra bien lui faire exercer ses droits de
gérance de façon compatible avec ses engagements à la
table des négociations.
Je vous réfère aussi à une lettre apparaissant en
annexe, provenant du directeur du placement de l'OCQ en date du 8 mai 1979 et
adressée au Syndicat des monteurs de lignes. Cette lettre établit
clairement que le fait de faire respecter l'ancienneté de métier
n'était pas une entrave à l'application dudit règlement
relatif au placement des salariés de la construction. Les
critères du règlement de placement auront toujours
priorité.
Je voudrais souligner aussi que lors d'une conversation que j'ai eue
jeudi dernier avec un haut placé de l'Office de la construction,
celui-ci a émis l'opinion que cette clause-là n'entrait nullement
en contradiction avec le règlement de placement. Je lui ai
demandé une lettre et, pour certaines raisons, je n'ai pas encore
reçu cette lettre.
Cette priorité d'emploi a été obtenue partiellement
en 1976 après une grève de sept semaines et la dernière
touche à cette clause a été apportée lors des
dernières négociations. Si cette clause n'était pas
illégale au dernier décret, je ne vois pas pourquoi elle devient
illégale aujourd'hui.
Nous avons réussi à nous entendre dans l'harmonie pour une
fois. Si la loi empêche ce genre d'ententes, qu'on se hâte
d'amender la loi et qu'on laisse en paix les salariés qui
bénéficient enfin d'une plus grande justice.
À l'article 25.08 1, lignes de transport et de distribution
d'énergie électrique, il y a une clause qui parle
spécifiquement de l'artisan. La clause de sous-contrat vise une
situation particulière. Elle régit contractuellement une
situation à laquelle les parties ont consenti.
Lorsque la loi permet à l'entrepreneur en construction d'oeuvrer
dans le secteur de l'industrie de la construction, elle ne garantit pas pour
autant à chacun d'eux que ses services seront retenus. De la même
façon, la loi reconnaît le statut d'artisan et elle permet
à ce dernier d'oeuvrer dans le secteur. Elle ne lui garantit pas pour
autant d'exécuter le travail aux lieu et place de l'entrepreneur, non
plus que d'un salarié. C'est à chacune des composantes de
définir sa place.
Il y a une marge entre la reconnaissance de l'artisan et le fait de
vouloir lui donner des garanties que les autres partenaires n'ont pas. Pourquoi
donnerait-on davantage de protection à l'artisan qu'on ne voudrait en
donner au salarié lui-même qui oeuvrait dans le secteur avant
même que l'artisan soit une créature reconnue?
Le présent gouvernement, en voulant agir de bonne foi,
croyons-nous, s'est carrément rangé du côté de
l'artisan en croyant peut-être que l'activité de ce dernier
contribuait à mettre un frein à la hausse des coûts de
construction qui frappe le secteur domiciliaire, faisant, par le fait
même, grimper de façon astronomique le coût des logements.
Il faut être un peu naïf pour penser ainsi; car tant et aussi
longtemps que les taux d'intérêts, la spéculation sur les
terrains et l'augmentation vertigineuse des prix des matériaux de
construction seront sous le contrôle exclusif de ceux qui en profitent,
toute tentative d'essayer de limiter les dégâts en favorisant
l'artisan se fera sur le dos du salarié et du consommateur car ce
dernier - le consommateur - transigera la plupart du temps avec des personnes
insolvables qui pourront difficilement être poursuivies pour leurs
bévues.
Je voudrais ici ouvrir une parenthèse sur le coût des
terrains de construction. À cause de la Loi sur le zonage agricole, qui
est d'ailleurs une très bonne loi, qui a limité l'expansion des
villes jusqu'à un certain point, le coût des terrains est rendu
aujourd'hui presque inabordable; vous devez
certainement être au courant de ça. Il n'y a pas encore de
législation là-dessus, c'est la libre entreprise, la
liberté du loup de manger l'agneau et c'est ce gui arrive.
De plus, en favorisant l'artisan, l'État encourage ce qu'il
déplore, c'est-à-dire la fraude fiscale par le moyen de
l'économie invisible qui constitue, selon certains, 20% de notre
économie. Les récentes évaluations chiffrent à
$1,000,000,000 le total de la fraude dont seulement $100,000,000 sont
récupérés et encore à quel prix.
Je pense qu'on devrait plutôt s'attarder à changer certains
règlements qui concernent le champ d'application de la loi, afin de
clarifier certaines situations où le travailleur de la construction
arrête à un moment donné d'être un travailleur de la
construction et, le lendemain, redevient un travailleur de la construction. Il
y aurait peut-être un peu d'ordre à mettre là-dedans et
nous sommes entièrement disposés à collaborer en tout
temps là-dessus avec le ministère.
Malgré que nous ayions scruté la loi à la loupe
pour essayer de découvrir ce sur quoi le ministère se base pour
déclarer illégales lès dispositions de l'article 25.08 1,
nous n'avons rien pu trouver pour justifier cette prétention du
ministère et nous ressentons fortement le fait d'avoir à venir
ici défendre des choses parfaitement légales simplement parce que
quelqu'un se cachant derrière l'anonymat n'a eu qu'à
prétendre sans avoir à prouver et à défendre ses
allégués. (15 h 15)
Si l'article 25.08 1 devrait être illégal, cela placerait
logiquement l'employeur dans l'illégalité chaque fois qu'il
embauche ou n'embauche pas d'artisan pour effectuer du travail. Là, nous
nous servons d'un raisonnement aussi tortueux que celui dont fait preuve le
ministère; car, s'il est illégal pour les parties de s'entendre
sur le genre de sous-contrat qui peut être attribué à un
artisan, il n'est pas plus légal pour l'employeur seul de refuser ou
même de donner du travail à ce dernier. Voilà où
nous mène l'illogisme. Le droit d'attribuer du travail à un
artisan découle d'un droit de gérance de l'employeur. Nous
croyons ce droit de gérance négociable. Les employeurs disent
qu'il ne l'est pas, mais, finalement, ils négocient. Quand on
négocie et qu'on limite le genre de contrat à donner à un
artisan, je ne vois pas pourquoi ce serait illégal que l'employeur
abandonne certains de ses droits de gérance.
Article 28.07, comité visant à la sécurité
d'emploi et de revenu du salarié. La même argumentation vaut dans
le cas du comité visant à la sécurité d'emploi que
celle qui a valu pour les autres comités. Ce comité n'a comme
mandat que de faire des recommandations.
Annexe B, sous-annexe A, définition des occupations exclusives
à toute l'industrie de la construction. Là-dessus, c'est assez
long. Je vais essayer de résumer. L'Union internationale des journaliers
a négocié une juridiction exclusive pour certaines occupations,
certains emplois qui ne font pas partie des métiers couverts par le
règlement no 1. Je crois que l'employeur avait tous les droits de
gérance nécessaires pour donner tels et tels travaux qui ne sont
pas couverts par le règlement no 1 à tels et tels
salariés. Je ne vois pas pourquoi l'union, le syndicat en question,
quand c'est sa juridiction syndicale par-dessus le marché, n'aurait pas
le droit d'avoir une entente avec l'employeur qui réserve exclusivement
certains emplois à certains travailleurs. En fait, c'est le fondement de
toute notre argumentation là-dessus et nous citons quelques articles de
la loi pertinents dans ce contexte.
Nous répétons aussi, à 23b...L'article 61, au cas
où il y en aurait qui n'auraient pas la loi devant eux, dit, au
commencement du premier paragraphe: "Le décret doit contenir des
dispositions concernant la classification des emplois." En fait, c'est ce que
le syndicat a fait, il a négocié la classification d'emplois, ce
qui est permis par la loi.
Précisons tout de suite que l'utilisation du vocable "occupation"
ne vise pas à créer une nouvelle catégorie de travailleurs
de la construction, mais plutôt à permettre une
différenciation pratique entre les emplois exclusifs et les emplois
communs. Le texte pourrait utiliser le terme "emploi" plutôt que le terme
"occupation" sans que cela ne porte à conséquence. Le
décret précédent qui considérait tous les emplois
comme communs ne tenait pas compte de cette réalité. Ce faisant,
il énonçait d'ailleurs un principe que les parties se sont
refusé de mettre en application, suggérant que tous les
travailleurs de métier pouvaient travailler à de tels emplois. Ce
que l'entente veut dire, c'est que les gens de métier ne pourront pas
faire ces travaux quand ils n'auront plus de travail dans leur métier,
ce sera réservé aux manoeuvres du domaine.
On peut difficilement demander à ce syndicat de laisser aller ce
qui fut le coeur même de sa négociation. Cela a été
une négociation pas tellement facile qui a permis de régulariser
certaines choses.
De façon contradictoire, le gouvernement a tenté, par le
règlement de placement, de protéger les vrais travailleurs de la
construction, tout en refusant pour autant de consentir un minimum de
protection aux travailleurs qui n'avaient pas de métier, mais qui
étaient tout autant de vrais travailleurs de la construction. Il n'y a
pas seulement les gens de métier qui sont de vrais travailleurs de la
construction.
L'exclusivité de certains emplois a fait l'objet d'un consensus
syndical et d'un
consensus avec la partie patronale. Il s'agit donc d'un sujet auquel la
négociation a trouvé une réponse claire et précise
et que le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre doit aborder avec
prudence. On ne peut se servir du prétexte de
l'illégalité, considérant l'état des textes
législatifs et réglementaires, et prendre appui sur une
impression pour saboter ce qui constitue le coeur de la négociation de
l'Union des journaliers.
Refuser l'exclusivité desdits emplois équivaudrait non
seulement à placer de vrais travailleurs de la construction dans une
situation où ils n'ont pas de protection, mais aussi à rendre
confuse la situation pour toutes les parties.
Un tel refus aurait également pour conséquence de
dévaloriser le travail d'un grand nombre de travailleurs de la
construction, alors que la démarche devrait être contraire.
Enfin, un tel refus risque d'être perçu comme une
décision politique administrative en vue d'un éventuel et vague
projet dont elle a le seul secret, politisant ainsi le débat et
intervenant comme partie plutôt que comme protecteur de
l'intérêt public.
À l'annexe B, sous-annexe B: Emplois communs. Nous apportons ici
un nouveau texte. Nous avons un texte qui ne découle pas des
modifications proposées par le ministère, mais qui est une
entente intervenue entre l'Union des journaliers, qui a la juridiction dans le
domaine, et l'Union des plâtriers afin de changer un texte de l'entente
qui est intervenue entre la partie patronale et l'Union des journaliers qui
semblait quasiment vouloir empiéter sur la juridiction du
plâtrier. Afin de respecter le règlement sur la formation
professionnelle, le règlement no 1, les parties ont consenti à
faire une modification qui se lit comme suit: La première modification
vise à remplacer le terme "ses", possessif, par le terme "ces",
démonstratif, de la dernière phrase de l'alinéa a) et ce,
afin d'éviter une interprétation qui aurait un effet limitatif.
La deuxième modification vise à compléter l'alinéa
d) en ajoutant l'expression "et sauf lorsque requis pour la finition de ciment
ornementation".
Article 32.01 1. Durée. Il est évident que la clause de
prolongation ne peut avoir un effet sur le décret. II ne s'agit pas de
prolonger un décret, mais de prolonger la convention collective de
travail, ce à quoi on pourrait difficilement s'opposer.
Pour terminer le chapitre des clauses jugées illégales,
nous vous soulignons que la tendance du ministère semble être de
réglementer de plus en plus toutes les activités du secteur de la
construction et nous aimerions citer, à l'encontre de cette orientation,
un extrait du discours inaugural du premier ministre du 5 novembre 1980: "Un
nettoyage dans les plus brefs délais des règlements
désuets non applicables et non appliqués, en commençant
par les secteurs du transport et de la construction où la
prolifération et l'enchevêtrement sont particulièrement
denses." Ce n'est pas nous qui l'avons dit.
J'ai terminé sur ce que sont les modifications
suggérées par le ministère. Cependant, il y a d'autres
éléments qui font partie de notre mémoire et que nous
aimerions soulever ici, en commission parlementaire, afin de la saisir en bonne
et due forme de nos demandes dans ce domaine.
Pour nous, les objections soulevées par le ministère ne
sont pas nos seules préoccupations. Le climat des dernières
négociations n'a pas été des plus sereins et cela,
dû en grande partie au désir du "Building Trades Department of
Washington" de maintenir son hégémonie sur les syndicats faisant
traditionnellement partie de la FTQ-Construction.
Le décret, tel que publié le 30 décembre 1980,
contient plusieurs clauses erronées et d'autres qui n'ont jamais fait
l'objet d'une entente. Nous vous les soumettons donc.
Article 20.01 2a. À cet article, il y avait eu une entente entre
la partie patronale devant le conciliateur et la partie syndicale, notamment
l'Union des menuisiers, à savoir que les modalités de vacances
décrites à cette clause ne s'appliquaient pas aux travaux
relatifs au métro. Cela n'apparaît pas dans le décret. La
partie patronale refuse, conjointement avec le syndicat, de demander que cette
disposition soit incluse dans le décret. Je pense que c'est aussi une
des raisons pour laquelle la partie patronale n'est pas ici. Elle aurait
été mise en contradiction plusieurs fois avec ce qu'elle a
signé elle-même. Nous demandons au ministère d'inclure au
décret les dispositions qui ont été
négociées entre les parties et que vous trouverez en annexe au
présent document.
À l'article 24.16 1b, alinéa 1). Cette clause,
gagnée après une dure lutte pour une deuxième fois, car
elle avait été accordée aux négociations de 1974 et
la partie patronale était revenue sur sa parole lorsque la grève
des électriciens fut terminée et que les membres eurent
accepté les offres de retour au travail; cette clause, disions-nous,
devait s'appliquer en plus des dispositions prévues à 24.09 et
cela peut vous être certifié par le conciliateur de
l'époque (1980), Me Raymond Leboeuf. Ce n'est pas la première
fois que la partie patronale ne respecte pas sa parole et refuse de
concrétiser dans la lettre ce sur quoi elle s'est entendue.
Lors de la publication du décret en juillet 1980, des
démarches ont été vainement faites par la
Fraternité inter-
provinciale des ouvriers en électricité (FIPOE)
auprès de l'AECQ afin d'ajouter au texte les mots suivants: "Cette
clause ne restreint pas l'application de 24.09".
Cet ajout eut été conforme à l'entente survenue en
présence du conciliateur et c'est pourquoi nous vous demandons de faire
cet ajout vous-même. Vous trouverez aussi en annexe une lettre
adressée au ministre du Travail de l'époque, décrivant la
situation, les circonstances, ce qui était arrivé, et demandant
aussi au ministre de tenir compte de l'objection des électriciens en ce
qui concerne cette clause particulière.
Annexe B, sous-annexe A. Définition du travailleur souterrain.
Nous savons tous que le Conseil provincial du Québec des métiers
de la construction détient de par la loi - et encore pour quelques jours
- le mandat de négocier la convention collective des salariés de
la construction.
Cependant, ce pouvoir avait été
délégué à chaque métier en ce qui avait
trait aux clauses concernant exclusivement le métier. La partie
patronale avait accepté de négocier en fonction de cette
délégation de pouvoirs et des tables de métiers avaient
été établies pour les fins de négociations des
clauses particulières de chacun de ces métiers.
Or, il arrive qu'à la table particulière des manoeuvres
une entente survient sur la définition du travailleur souterrain
(mineur), laquelle entente concernait des membres d'un autre syndicat de
métier, soit le local 791 des opérateurs de machinerie
lourde.
L'entente fut scrutée par le local 79.1, trouvée conforme,
puisqu'elle n'empiétait pas sur sa juridiction, et acceptée comme
telle. Jusque-là, tout va bien. Ce n'est que plus tard que le local 791
des opérateurs entend dire qu'une autre entente est survenue, qui
changeait l'entente première et cela, sans que le local 791 qui
était aussi impliqué -parce que le changement n'implique que ses
membres - soit avisé de l'entente en temps et lieu et puisse la
négocier. Cette entente a été négociée
directement avec le Conseil provincial du Québec des métiers de
la construction et l'AECQ, cela en violation même du protocole d'entente
qu'il y avait eu entre les parties qui disait que la juridiction de
métiers, les clauses concernant chaque métier devaient être
négociées par le métier concerné.
Nous demandons donc que la définition du travailleur souterrain
apparaissant dans la Gazette officielle du 30 décembre 1980 soit
biffée et remplacée par celle apparaissant dans la Gazette
officielle du 16 juillet 1980 et qui avait été acceptée
par toutes les parties et non pas par quelques personnes sans mandat.
Cela conclut notre mémoire pour le moment. Vous trouverez en
annexe un tas de documents. Nous avons ici avec nous Me
Robert Laurin qui va vous parler du cas spécifique des
plombiers.
En conclusion, nous espérons de tout coeur que le
ministère respectera la volonté des parties et se servira de son
droit pour corriger des situations qui doivent l'être et non pas pour
attacher les parties dans un cadre législatif étroit et
anticipé, mais qui n'existe pas encore, et lequel, nous
l'espérons, n'existera jamais.
J'aimerais citer une personne - on ne les cite que lorsqu'ils sont
morts, habituellement - Robert Kennedy, qui disait: "Une société
libre est une société qui accepte la libre négociation
entre travailleurs et employeurs." Je ne sais si je le cite textuellement. Je
l'ai entendu moi-même.
Me Laurin.
M. Laurin (Robert): La question du pipe-line est peut-être
l'une des questions les plus cruciales de la présente commission
parlementaire. Sans diminuer l'importance des autres sujets, je pense que tout
le monde est conscient que les plombiers, pour une chose, sont placés
dans une situation extrêmement névralgique.
Notre intention, ce n'est pas d'implorer la charité du
gouvernement. C'est peut-être d'apporter des précisions et des
arguments voulant démontrer qu'effectivement, il y a des correctifs
légaux qui peuvent être apportés à la situation.
On vous a remis un document qui est paginé à compter de la
page 29, qui est en fait la suite du document préalablement remis par la
FTQ-Construction. J'invite chacune des personnes présentes à
faire la lecture textuelle du document. Je n'ai pas l'intention de reprendre
mot pour mot le texte comme tel, si ce n'est que de vous donner des
explications sur le problème de fond en ce qui a trait aux travaux de
pipeline.
La mise en contexte la plus importante en ce qui concerne les travaux de
pipe-line, c'est de savoir que le décret contient plusieurs clauses
traitant des travaux de pipe-line qui n'ont fait l'objet d'aucune
négociation. Le régime régissant, dans le décret
qu'on discute, les travaux de pipeline, n'a jamais été
discuté entre les parties et ne représente que les offres de la
partie patronale, ce qui veut dire que le document dont on discute ne reprend
que ce que la partie patronale a mis de l'avant. (15 h 30)
Le déroulement des négociations, est relaté dans le
document. Vous allez voir qu'il y a eu différentes démarches.
Parmi les premières, il y a eu l'idée, acceptée par tout
le monde, incluant la partie patronale, de former une table spéciale
particulière pour le pipe-line, considérant qu'il s'agit d'un
secteur d'activité qui est, évidemment, particulier et qui, au
niveau du fonctionnement, appelle des
équipes de travail qui, elles aussi, sont particulières.
Notons tout de suite que les trois métiers impliqués sont ceux
des manoeuvres, des opérateurs de machinerie lourde ainsi que des
plombiers. Il a été convenu, je le disais, avec la partie
patronale, qu'une table spéciale aurait lieu pour négocier les
clauses particulières pour les travaux de pipeline. Cette table de
négociation n'a jamais servi. La démarche de la partie patronale
a été de déposer un document disant: Voici les offres
finales et globales de la partie patronale et elle a refusé
systématiquement de négocier toutes et chacune des clauses, que
ce soit à l'occasion de la table spéciale ou d'une
négociation plus générale.
Maintenant, la situation est la suivante. On se retrouve en
présence d'un décret qui contient des clauses qui n'ont jamais
été négociées. C'est un peu comme si on faisait le
choix entre des propositions syndicales et des propositions patronales pour
dire: On prend effectivement les propositions patronales. Si on accepte cette
idée - je reviendrai sur l'aspect légal, je suivrai avec l'aspect
légal - cela veut dire, à toutes fins pratiques, qu'une partie
autant syndicale que patronale pourrait mettre sur la table, pour un secteur
important comme celui du pipe-line, une offre finale et dire: Je ne
négocie pas et le gouvernement choisira, pour les fins du décret,
les offres ou les propositions qui lui plairont le plus. C'est, je pense...
M. Chevrette: Me permettez-vous de vous arrêter,
maître?
M. Laurin (Robert): Oui.
M. Chevrette: Comment conciliez-vous votre argumentation avec le
fait qu'on doit publier le résultat des négociations?
M. Laurin (Robert): Je comprends l'attitude. Je n'attaque pas le
ministère qui, au niveau de la promulgation du décret, a
promulgué un document qui se voulait comme convention collective de
travail, quitte à réserver aux parties de se faire entendre
éventuellement et d'apporter des modifications. Je pense que votre
intervention, en ce qui me concerne, est très pertinente, parce que je
pourrais être mal compris. Notre intervention n'est pas d'accuser le
gouvernement d'avoir pris position. Notre position est plutôt de dire: Si
vous maintenez, par ailleurs, ces clauses-là, vous prendrez position.
Dans l'état actuel des choses - je pense que cela a été
l'attitude pour toutes les autres clauses - vous n'avez pas fait de
sélection de clauses et pris position. Ce que je comprends, c'est que
vous avez publié ce qui se voulait être une convention collective
de travail et vous avez apporté à l'attention des parties
certains commentaires ou, orientations en tout cas, -peu importe comment on les
qualifie - pour dire: On aimerait vous entendre là-dessus avant de
décider. Ce que je comprends, c'est que la décision, elle n'est
pas déjà prise; elle se prendra. J'insiste quand même et
j'ai peut-être appuyé très fortement dans ce début
d'exposé sur le fait qu'il s'agirait d'une prise de position, à
notre avis, si on acceptait de maintenir dans le décret et de faire un
décret final, définitif, qui, lui, contiendrait encore et
toujours systématiquement la proposition patronale qui, elle, n'a pas
été négociée.
Or, je profite de votre intervention -j'en suis heureux d'ailleurs -
pour situer notre prise de position. Il demeure par ailleurs que vous aurez
à faire un choix sur ces clauses-là et que - évidemment,
on vous donne notre interprétation, - il s'agirait effectivement de
choisir.
M. Chevrette: Si je reprends votre raisonnement, vous ne
blâmez pas le gouvernement d'avoir publié un texte de convention
collective. Je comprends que c'est peut-être délicat, mais
j'interprète vos paroles comme ceci. J'interprète que l'agent
négociateur officiel du côté syndical a accepté de
signer une convention collective ou que la partie représentative
majoritaire a accepté de signer une convention collective qui
crée une discrimination vis-à-vis d'un groupe de salariés
plus spécifique que sont les plombiers ou les "pipe fitters". Ces
gens-là n'ont pas eu de chance de se faire entendre et, à toutes
fins pratiques, vous voulez nous faire comprendre qu'un groupe a
été victime de discrimination et que cette discrimination lui est
carrément faite par l'association représentative majoritaire. Si
je suis obligé de conclure cela, est-ce que je me trompe?
M. Laurin (Robert): II y a deux agents qui interviennent: il y a
l'association patronale qui refuse de négocier. Il faut comprendre aussi
- j'allais l'expliquer - que tout le monde a tenu pour acquis que la
négociation se continuerait. Tout le monde a compris -
évidemment, je peux me tromper, mais j'en fais l'affirmation, je me
référerai d'ailleurs au rapport du conciliateur - qu'il devait y
avoir une table spéciale là-dessus. Tant que les parties ne
s'assoiront pas, le problème ou la question n'est pas tranchée,
ce qui expliquerait qu'il n'y ait pas eu davantage de rebondissements
légaux, par exemple, au niveau du projet de convention collective. De
fait, le conciliateur qui est intervenu à la toute fin des
négociations a lui-même dit et suggéré que les
négociations se fassent en ce qui concerne le pipe-line, clause qui
serait éventuellement incluse dans le décret. Or, le conciliateur
lui-même,
qui est évidemment l'élément neutre, a priori,
intervenu dans le dossier, à la toute fin d'ailleurs dégage
l'impression qui était celle de tout le monde. C'est un peu comme si on
négocie à peu près toutes les clauses, qu'on se
réserve pour la fin le pipe-line et qu'à la toute fin, on le
mette de côté, avec la conséquence que le document qui
s'appelle convention collective ne fait pas suite à une
négociation.
Les gens ont l'impression, à tort ou à raison - cela
pourrait être discutable -incluant le conciliateur, qu'effectivement, une
négociation doit se poursuivre là-dessus, sauf que le maintien -
c'est l'argument que je rattachais - de ces clauses, même si elles
paraissent dans un document, constituerait un choix de la façon
suivante... Prenons l'exemple inverse: Je représente les plombiers, je
négocie pour les plombiers et, à l'occasion d'une table de
négociation avec la partie patronale, je mets des offres sur la table et
je ne bouge plus en disant: C'est final, je ne négocie pas. Il n'est pas
impossible, en pratique, de la façon que cela se déroule, que ce
que j'aurai mis sur la table va paraître dans ce qu'on appelle la
convention collective, sauf qu'il s'agit pour le moins d'une situation fort
ambiguë, dans le sens que cela aurait pu tout aussi bien, dans l'exemple
que je donne, être des propositions syndicales.
Maintenant, j'en viens, de façon peut-être plus stricte et
plus légale, à la question de savoir pourquoi le ministère
devrait intervenir. Il n'est pas impossible de dire que, si cela se retrouve
dans le document, nous, au ministère, on n'a pas à intervenir. On
peut comprendre que c'est bien malheureux, que vous n'avez pas pu
négocier, que cela s'est fait d'une façon
irrégulière, mais il reste que c'est dans le document; donc on
n'a pas à prendre l'initiative de dire: Ce qui est dans la convention,
ce n'est pas tout à fait le fruit d'une véritable
négociation. Là-dessus, on pourrait suivre cette
prétention, sauf si, effectivement, cela fait intervenir
l'intérêt public. Vous avez comme rôle, et c'est la
possibilité de modification qui vous est donnée, la
possibilité d'apporter des correctifs. Le contexte de la
négociation dans la construction est particulier. On a prévu que
la négociation se faisait à l'échelle de la province de
Québec pour un ensemble de métiers avec deux agents
négociateurs, du moins officiellement. On a une négociation qui,
a priori, est tout à fait centralisée dans toute la province de
Québec. Il est évident que ce mécanisme de
négociation sur une aussi grande échelle ne peut être
valable que dans la mesure où on prévoit une contrepartie pour
éviter des abus et une discrimination de fait, d'où le concept
d'intérêt public, c'est-à-dire que le concept
d'intérêt public intervient comme contrepartie à un
système de négociation ne prévoyant pas légalement
et complètement que les plombiers, par exemple, vont négocier les
clauses des plombiers et qu'ils vont signer leur propre convention collective
de travail. Or, comme interviennent d'autres agents, que ce soit le conseil
provincial ou, du côté patronal, un agent unique, il est possible
qu'il y ait des abus, il est possible que des clauses ne fassent pas l'objet
d'une négociation et apparaissent dans le document.
C'est exactement la situation. Ici, elle est particulière et elle
fait intervenir l'intérêt public, dans l'optique suivante. D'une
part, elle touche à un secteur important pour lequel il n'y a eu aucune
espèce de négociation. S'il y avait eu une négociation
plus ou moins fructueuse pour la partie syndicale, on pourrait dire
jusqu'à quel point, au niveau du ministère, on intervient. Il n'y
a pas eu négociation, aucune négociation, il n'y a pas eu
amélioration des offres patronales, dans un sens ou dans l'autre, il n'y
a rien eu de changé, c'était une position tout à fait
statique. La partie patronale a profité du contexte, finalement, pour
voir incluses les clauses dans ce qu'on appelle la convention collective.
Or, il s'agit, quant à nous, d'un subterfuge, si on
considère que la négociation est finie, terminée.
L'objectif de la loi et de la discussion, de toute façon, sur le
décret, c'est en tenant compte principalement d'une négociation.
Si elle n'a pas eu lieu, en prenant, de façon définitive, la
proposition patronale, et en maintenant ça comme ça, on refuse de
servir l'intérêt public et, plus que ça, on refuse
d'exercer le rôle qui est celui du lieutenant-gouverneur en conseil
prévu par l'article 51 de la loi, qui est une espèce de
contrepartie de protection des intérêts des gens qui sont
impliqués là-dedans; sinon la négociation pour tout le
monde, une négociation unique, avec des agents uniques, ce n'est pas
réaliste, peu importe le secteur d'activités.
Pour compenser ça, évidemment, règle
générale, on respecte ce qui est négocié, on
comprend que la commission parlementaire n'est pas une table de
négociation mais, dans des cas extrêmes, possibilité
d'intervention qui est légalement confirmée par l'article 51.
C'est dans ce contexte que, suite à la proposition qui est faite
par le conciliateur, nous posons la question suivante: Tenant pour acquis qu'il
n'y a pas eu négociation, que fait le ministère? Est-ce qu'il
prend sur lui de mettre des clauses dans le décret de façon
à assurer la protection des intérêts, est-ce qu'il ne met
absolument rien concernant les travaux de pipe-line, en disant: Vous ne l'avez
pas négocié? Ou est-ce qu'il permet de poursuivre la
négociation? On a, dans le texte, fourni deux choix. Il nous
apparaît inadmissible qu'on maintienne
les positions patronales uniquement.
On a évidemment en tête de suggérer d'appliquer des
clauses qui s'appliquent à l'échelle canadienne, ce qui s'appelle
le "pipeline agreement". On est, par ailleurs, conscient qu'il est va
être difficile de vendre au gouvernement de mettre carrément dans
le décret de la construction l'entente canadienne, et pour toutes sortes
de raisons qu'on peut éviter de discuter.
Par ailleurs, on attire votre attention, dans le document, sur le fait
que certaines clauses sont en application depuis le 1er avril 1979. Je fais
référence, par exemple, à la clause salariale, article
13.64, qui, dans les faits, est appliquée. Au moment où vous
retiendrez la proposition salariale de la partie patronale, vous
déciderez d'un recul par rapport à ce qui existe dans les faits.
C'est le premier choix, c'est-à-dire se baser sur ce qui se vit depuis
plusieurs années et que, finalement, vous ne feriez que confirmer dans
le texte.
Le deuxième choix - à mon humble avis, il est très
sérieux - c'est, dans la situation, à cause de la discrimination,
à cause de l'arbitraire et du préjudice subi qui, entre
parenthèses, risquent de troubler de façon très manifeste
la paix industrielle dans le secteur de la construction, de renvoyer les
parties négocier, tel que cela apparaît dans la suggestion du
conciliateur qui est une personne qui a pris le soin de se plonger dans le
contexte. Lorsque le conciliateur propose d'inclure éventuellement dans
un décret ce qui sera négocié, c'est après
s'être plongé dans le contexte et après avoir
constaté qu'il était flagrant qu'il n'y avait pas eu
négociation. Sinon, évidemment, on comprendrait mal sa
suggestion.
Or, il y a deux possibilités: ou vous confirmez certains faits,
certains avantages qui existent déjà, qui ont fait l'objet d'une
entente avec l'employeur actuellement actif dans le secteur du pipe-line ou
vous renvoyez, ce qui est facilement faisable sur le plan légal, les
parties négocier ce qu'elles n'ont jamais négocié. (15 h
45)
Je termine en disant - pour éviter d'être trop long - qu'il
faut réaliser que si on ne règle pas le problème, on cause
un préjudice important et on risque de perturber finalement le climat en
ce qui concerne ce secteur de la construction. Dire qu'on ne peut pas
intervenir ne serait pas réaliste, d'une part, parce que sur le plan
légal il est possible d'intervenir, il y a une clause
d'intérêt public. Deuxièmement, refuser d'intervenir pour
des raisons d'opportunité, dire: Est-ce qu'on doit intervenir? c'est
mettre carrément de côté la situation et le contexte des
négociations et, ce qui est encore plus grave, éviter une
situation de problème, de crise, qui non seulement est vécue
actuellement, mais qui continuera à être vécue. Or, il faut
régler le problème.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le ministre.
M. Marois: M. le Président, je voudrais d'abord remercier
les porte-parole de la FTQ Construction de leur mémoire. Je pense qu'eux
aussi ont regroupé l'ensemble des commentaires de façon
très détaillée autour de la liste telle qu'elle avait
été présentée. À ces commentaires, ces
opinions que vous émettez dans un sens ou dans l'autre, vous avez
ajouté deux blocs. Un bloc concernant ce que vous appelez des clauses
erronées et l'autre bloc, celui justement sur lequel on entendait un
intervenant, qui concerne les travaux de pipe-line.
Je voudrais formuler un certain nombre de commentaires et de questions.
Je vais débouler ça, si vous pouvez en prendre note et
peut-être le reprendre par la suite. Au préalable, je voudrais
dire, pour que cela soit très clair entre nous, je l'ai
évoqué ce matin, mais ce n'est peut-être pas inutile d'y
revenir très rapidement que l'article 61 de la loi, dans les deux
premiers paragraphes, prévoit des clauses obligatoires. L'article 61
dit: "Le décret doit contenir..." telle et telle chose. Deuxième
paragraphe: " II doit aussi contenir..." telle et telle chose. Et,
troisième paragraphe, comme vous l'évoquez et comme d'autres
intervenants l'ont fait depuis ce matin: "II peut aussi contenir notamment..."
Notamment dans le sens de "notamment" mais non exclusivement; ce n'est pas une
liste fermée. Je pense qu'on ne se chicanera pas longtemps sur le sens
et l'interprétation d'un texte comme celui-là, c'est clair.
Mais comme vous l'avez dit aussi, "notamment", non exclusivement, toute
une série de choses, à la condition, forcément, que
ça n'empiète pas sur des lois existantes, c'est-à-dire que
ce ne soit pas illégal par rapport à d'autres lois existantes,
que ça ne soit pas contraire à l'ordre public ou que ça ne
soit pas carrément une clause de façon évidente
carrément discriminatoire, auquel cas, c'est là qu'est la balise
du "notamment". Je pense que M. Rivard l'a évoqué à peu
près dans ces termes-là aussi, et c'est bel et bien notre
approche.
Deuxièmement, vous mentionnez, je n'ai pas retrouvé le
passage dans votre mémoire, mais ça m'a frappé quand vous
l'avez mentionné en cours de route - je voudrais aussi que ce soit bien
clair, je pense que c'est à peu près l'expression - qu'il y
aurait peut-être quelque désir inavouable autour d'une quelconque
politique, etc. Je voudrais qu'il soit bien clair entre nous qu'il n'y a aucune
espèce de désir inavouable de qui que ce soit ou de quoi que ce
soit autour d'une prétendue politique de l'emploi. Il y a là des
lois, il y a là un régime de négociation dans le secteur
de la construction. Notre volonté
est de respecter ce régime de négociation, sur la base
strictement des balises qui sont prévues dans la loi, notamment à
l'article 61 quand on parle du "notamment", mais que ça ne soit pas
contraire à tel et tel morceau, point, pas autre chose.
Comme je l'ai dit ce matin quant aux erreurs relativement nombreuses qui
ont pu se glisser au moment où le décret a été
imprimé, on a pris bonne note des commentaires qui ont été
faits jusqu'à maintenant là-dessus, et ce sera corrigé,
soyez-en assurés.
Cela étant dit, à la page 2, je pense que vous
l'évoquez, vous formulez un certain nombre de commentaires concernant
des comités et notamment le comité de révision. Je
voudrais vous poser la même question que j'ai posée ce matin
à un autre groupe intervenant devant nous. À part un cas, je
pense d'ailleurs que cela a été relevé par un des
intervenants, où est prévue une clause quant au mode de
financement de ces comités, dans les autres cas, il n'y a aucune clause
qui prévoit la façon dont les travaux de ces comités vont
être financés. Or, qu'est-ce qui arrive? C'est une question que je
voulais vous poser.
Deuxièmement, je reviendrais un peu en arrière ou,
plutôt, au bas de la page 12 de votre mémoire concernant votre
commentaire sur le droit au travail. À l'article 18.01, vous dites:
"Nous croyons comprendre que la préoccupation du ministère se
situe au niveau de l'artisan, etc." Là, vous formulez une suggestion qui
viserait à ajouter le terme "entrepreneur" après le terme
"employeur", à la première ligne du paragraphe. Je voudrais que
vous soyez un peu plus explicite - parce que là, c'est très
ramassé, forcément, comme proposition - pour nous dire en quoi
cette formulation que vous proposez, à votre point de vue,
réglerait le problème, si tant est qu'il y a effectivement un
problème d'ordre juridique.
À la page 14, vous formulez des commentaires concernant l'article
20.07 sur la question des intérêts. Cela a été
soulevé ce matin. Vous n'êtes pas d'accord avec le proposition qui
a été formulée et vous l'expliquez. Vous dites, cependant,
que la "disposition apparaissant dans le projet de décret est mal
rédigée et inversée par rapport à l'objectif
visé. Cet objectif est de s'assurer que les intérêts seront
remis aux salariés dans un pourcentage excédant 90%, lequel
devient un minimum". Par ailleurs, vous dites: "Nous nous objectons non
seulement à ce que ce soit abrogé, même si nous sommes
conscients que cela va à l'encontre d'une réglementation
déjà formulée par le ministère etc." Là,
vous formulez un certain nombre de commentaires. Je voudrais dire, concernant
cette réglementation que vous évoquez, que l'article 123 de la
Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction
prévoit - c'est le texte - que "le gouvernement peut faire tout
règlement jugé nécessaire pour donner effet aux
dispositions de la présente loi. Il peut également adopter tout
règlement autorisant l'office à utiliser pour son administration
une partie des sommes qu'il perçoit au titre d'avantages sociaux et une
partie ou la totalité des fonds ou des intérêts des fonds
gardés en fidéicommis pour les congés payés, les
avantages sociaux ou à quelque autre titre, etc." Le règlement
est publié.
En d'autres termes, c'est un pouvoir spécifiquement reconnu
à l'article 123 de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie
de la construction. J'aimerais avoir votre opinion en poussant cela un peu plus
loin. D'accord, vous nous dites en d'autres termes, "balayer à coups
d'arrêtés en conseil des ententes qui ne plaisent pas, etc." J'ai
pris note de cela. Il n'en reste pas moins que l'article 123 est là,
qu'un règlement par arrêté en conseil existe. Il semble,
à première vue, qu'il y a là une contradiction, en tout
cas sur le plan juridique, entre la proposition telle qu'elle est contenue
à l'article 20.07 du décret et effectivement le pouvoir
accordé en vertu de l'article 123 et les faits. Je voudrais avoir votre
point de vue un peu plus poussé là-dessus.
Sur l'article 24.19, page 14 de votre mémoire, déplacement
de grue, vous vous opposez, là aussi. Je voudrais vous poser une
question. Bien sûr, il s'agit d'un article, si ma mémoire est
bonne, qui n'existait pas dans l'ancien décret; il n'y avait rien dans
l'ancien décret. Ce que je voudrais savoir, de votre point de vue, sur
la base de votre expérience, c'est si, dans les faits, au-delà
des lois, des règlements, des décrets et des conventions, tout ce
qu'on voudra, ce qui est contenu dans le nouveau décret et qui
était dans la convention collective et qui s'est trouvé
étendu dans le décret correspond aux faits, si c'est comme cela
que cela se passe sur le terrain. En d'autres termes, l'article 24.19 tel que
formulé dans le décret - vous vous opposez à ce que ce
soit changé - est-ce que c'est comme cela que cela se passe dans les
faits? Est-ce simplement une situation de fait, en d'autres termes,
confirmée par un article qui a été
négocié?
Aux pages 23 et suivantes - je ne voudrais pas abuser du temps de la
commission, parce que, sur les autres points, vos commentaires sont très
précis, votre point de vue est très clair - l'annexe B,
sous-annexe A, il s'agit de la définition des occupations exclusives.
Là aussi, au-delà du jargon juridique, la question que je
poserais, c'est la suivante parce que là, vous l'expliquez en disant, au
bas de la page: "Précisons tout de suite que l'utilisation - au bas de
la page 23b - du vocable "occupation" - qui est le mot qui apparaît dans
le texte -
ne vise pas à créer une nouvelle catégorie de
travailleurs de la construction, mais plutôt à permettre une
différenciation, pratique entre les emplois exclusifs et les emplois
communs". En d'autres termes, quand même, dans le concret, cela va fermer
le champ à certains pour le réserver à d'autres. Je
simplifie peut-être grossièrement mais, en fait, c'est cela. Ce
que je voudrais savoir, c'est dans les faits, avant l'entrée en vigueur
du décret, comment cela se passe-t-il, concrètement? En d'autres
termes, est-ce une simple confirmation de faits, de votre point de vue, ou si
c'est plus que cela?
Quant aux pages suivantes, mon collègue de Joliette-Montcalm a
commencé à poser quelques questions. Je présume qu'il va
revenir. Je voudrais vous dire ceci. D'abord, ce que vous appelez les clauses
erronées 20.01, 2a, 24.16 et il y a l'annexe, on va vérifier cela
très attentivement. On va regarder cela très attentivement. Ce
que je veux vérifier aussi, c'est dans quel état nous est
arrivé le texte. Par exemple, vous évoquez le cas des travaux
relatifs au métro, c'est-à-dire que dans un document qui a
circulé, ajoutait dans le texte. On parlait des travaux décrits
au paragraphe 6 de l'article 21.03 et là, c'est ajouté: "Sauf les
travaux relatifs au métro." C'est disparu en cours de route, si ma
mémoire est bonne, mais je donne cela sous réserve de
vérifier très honnêtement. Dans le texte de la convention
une fois signée, c'est là qu'on veut vérifier si cela y
était. Donc, ce serait à nous de faire nos corrections, si cela
avait carrément disparu au moment où on a reçu le texte
parce que là, le problème n'est pas du tout le même. On se
comprend bien là-dessus. Je ne vais faire qu'un seul commentaire
général concernant le cas des travaux de pipe-line. Depuis ce
matin, dans les interventions, et toutes passablement étoffées -
je pense qu'elles nous apportent, de toute façon, un bon
éclairage - jusqu'à maintenant, plusieurs interventions qu'on a
entendues apportent un éclairage et cela va être regardé
très sérieusement, les arguments. Dans les cas où il y a
accord sur les changements et que cela se recoupe, s'il se dégage des
consensus, cela va aller de soi, mais dans les cas où ce n'est pas le
cas - c'est le cas de le dire -cela va être regardé de très
près.
Dans certains cas, depuis ce matin, on me dit: Faites attention parce
qu'il y a la liberté des parties de négocier et cela doit
être respecté. C'est notre convention négociée et on
ne veut pas d'intrusion là-dedans. À d'autres moments, on me dit:
Vous devriez regarder tel point. Seulement, allez-y avec
énormément de prudence. Dans d'autres cas, on me dit: II y a
telle et telle chose. Cela n'a pas été inclus et cela pourrait
avoir des conséquences très graves. Là, vous avez le
pouvoir de vous servir de la loi. Là, vous vous en mêlez. Bien
sûr, on invoque l'intérêt public, la discrimination ou
d'autres raisons. Je ne veux pas blaguer avec cela, mais je veux simplement
qu'on voie bien que, depuis ce matin, cela valse à travers tout cela.
Parfois, on cite même John Kennedy qui parlait aussi de la liberté
d'association et de la liberté de négociation. En d'autres
termes, je pense qu'on se rend tous compte - c'est une leçon que je
retiens de la journée - que parfois, cela peut être utile,
l'article qui est dans la loi qui dit: Si c'est d'intérêt public,
le lieutenant-gouverneur en conseil, c'est-à-dire le Conseil des
ministres peut décider de changer les choses. Cependant, quand il s'agit
de blocs complets où des choses semblent absentes, on me dit: II y a eu
ou il n'y a pas eu négociation. Bien sûr, cela a été
dit. Je pense qu'on se comprend clairement. On n'est pas ici pour
négocier, ce n'est pas la place. On est ici pour vous entendre, prendre
note de vos commentaires, de vos arguments. (16 heures)
Quant à moi, je prends note de ce que vous avez dit. On a vos
documents en plus de toutes les annexes. Il reste - cela a été
évoqué - ou bien la piste, le ministre fait une recommandation en
disant au Conseil des ministres: On juge que c'est d'intérêt
public pour des causes de discrimination ou pour des causes d'ordre public ou
d'intérêt supérieur, etc., ou bien il reste toujours, vous
l'avez évoqué - il me semble que c'est une piste qui devrait
être regardée très sérieusement par les parties
à cause du principe fondamental que vous avez mentionné - la
liberté de négociation d'une convention collective qui
émane des parties et autant que faire se peut, dans la mesure où
cela respecte le cadre juridique des relations de travail dans ce domaine, doit
être respectée comme telle; la possibilité n'est jamais
exclue, celle que les parties acceptent de se retrouver à la table et
dire: II y a tels et tels points, et on veut les regarder, on veut les
discuter. À partir du moment où il y a des ententes qui
ressortent de cela constamment, vous le savez, cela peut être soumis par
requête au ministre et les ajustements peuvent être faits en
conséquence. La loi est conçue ainsi.
Néanmoins, cela dit, vous ferez, vous aussi, vos propres
réflexions et cheminements et examens des voies possibles; on va les
faire aussi de notre côté, je peux vous assurer qu'on va regarder
cela de très près.
Je m'excuse d'avoir été aussi long, mais j'ai
formulé un certain nombre de commentaires et de questions. J'aimerais
avoir vos réactions avant de céder la parole à
d'autres.
Le Président (M. Boucher): M. Rivard.
M. Rivard: Je vais répondre à quelques-unes de vos
questions et je vais en laisser
quelques autres, qui sont d'aspect plus légal, à Me
Laurin.
En ce qui concerne les désirs inavouables du ministère, M.
le ministre, il y a plusieurs années, avant même que le beau
rêve du Parti québécois se réalise et que vous y
soyez élu - vous ne rêviez même pas à cela dans ce
temps-là - il y a eu un livre blanc du ministère du Travail qui a
été finalement mis sur les tablettes. On pensait, à un
moment donné, que la nouvelle version de ce livre blanc de politique
globale de l'emploi était revenu, parce que cela suinte du
ministère que certaines de nos clauses de convention collective viennent
en contradiction avec les orientations du ministère. Cela nous fait
peur...
M. Marois: Je vais vous dire tout de suite une chose, pour que ce
soit bien clair entre nous. Jusqu'à nouvel ordre et quand cela ne fera
plus l'affaire, quand le premier ministre trouvera que c'est le temps d'en
trouver un meilleur, il en nommera un autre. Jusqu'à nouvel ordre, je
suis ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Le ministère peut
peut-être avoir ses politiques. Jusqu'à nouvel ordre, étant
donné que je suis le ministre, le ministère va tâcher
d'avoir des politiques que le ministre pense les plus pertinentes. Je suis
prêt à recevoir toutes les suggestions et recommandations. Mais
à un moment donné, c'est par là. Il peut y avoir des
livres bleus, blancs, roses, verts. S'il y en a sur les tablettes et s'il y a
des choses intéressantes, je suis bien prêt à les regarder.
Mais pour le reste...
M. Rivard: On ne peut qu'applaudir...
M. Pagé: Vous n'êtes plus de bonne humeur?
M. Marois: Non, je suis de très bonne humeur.
M. Rivard: ... à une telle déclaration.
M. Marois: Je ne veux pas qu'il y ait d'ambiguïté
entre nous là-dessus. Je veux que ce soit clair.
M. Chevrette: II veut fêter ta fille.
M. Rivard: M. le ministre, vous avez parlé des
comités, de la méthode de financement des comités. Je ne
crois pas, comme je l'ai dit préalablement, que le fait que la
convention collective devienne décret renverse les charges et que les
obligations et droits résultant de la convention collective soient
transférés au ministère. Donc, s'il y a des comités
qui ne prévoient pas de méthode de financement pour les
activités du comité, il appartient aux parties qui nommeront des
personnes à ces comités, de voir à se faire financer.
C'est ainsi que cela a toujours existé.
Je voudrais citer un exemple. Lors du dernier décret, lorsqu'il y
a eu le comité sur les conditions de vie, on a demandé au
ministère, parce que cela nécessiterait des déplacements
en dehors du Québec...
M. Marois: C'est ce que j'allais dire. Il n'y a pas eu un cas
pour lequel on a reçu la facture au ministère?
M. Rivard: Vous l'avez acceptée avant qu'on commence les
activités.
M. Marois: Parfait. Si cela a été accepté,
c'est accepté.
M. Rivard: On était presque convaincu - je ne sais pas si
je devrais le dire - que le ministère allait refuser. On se serait
arrangé quand même.
Maintenant, à l'article 20.07. Il est certain qu'il y a l'article
123 de la loi. On ne peut pas le nier. Mais l'article 123 de la loi permet
à l'OCQ de faire de la réglementation. Il y a eu, en 1976, quand
on a signé la clause 20.07, qui prévoyait 90% des
intérêts qui soient versés aux salariés, un
arrêté en conseil qui nous a empêchés de retirer ce
90% où l'Office de la construction en a pris une partie importante.
On sait très bien que l'article 123 est là. On le dit dans
le texte. On sait que cela vient à l'encontre d'un règlement.
Mais quand même, on n'est pas d'accord avec cela. Cette
réglementation a pris effet, a été mise en pratique, et on
s'est servi de cette possibilité parce qu'on a vu, à un moment
donné, que les parties voulaient récupérer l'argent des
intérêts de leurs vacances. Je pense qu'il n'y a rien de plus
normal que cela. Si le gouvernement veut donner à l'OCQ des mandats qui
touchent les gens de la construction, il est normal que ce soient les deniers
publics qui servent et non pas seuls ceux des travailleurs de l'industrie de la
construction. À un moment donné, le gouvernement parlait de
civiliser cette jungle-là, civiliser avec notre argent continuellement,
c'est là qu'on n'était pas d'accord.
Ce qui était voulu dans la clause, c'était que 90%, ce
soit un maximum; que 90% de l'argent de vacances, des intérêts de
l'argent de vacances soient payés et même plus. C'est 90% au
minimum et même plus, si possible, compte tenu de la possibilité
de l'OCQ d'aller piger dans ce montant-là. Je pense qu'aujourd'hui c'est
25% des montants de vacances qu'ils prennent. Il reste donc 75%. Ce taux de 25%
peut augmenter et peut diminuer, à un moment donné. Le but
recherché par les syndicats, c'était d'aller
récupérer un minimum de 90% de cet argent. Je ne sais pas si
c'est clair et si cela
répond à vos questions.
En ce qui concerne l'article 24.19, le déplacement de la grue,
non, cela ne correspond pas à une situation qui était
vécue auparavant. Cela correspond à une situation qui est
vécue aujourd'hui, parce que l'article 24.19 a eu pour effet de donner
l'obligation à l'employeur qui déménage une grue sur une
distance donnée de payer un salarié pour qu'il suive la grue avec
sa voiture, pour ne pas que le salarié se retrouve 80 milles plus loin
à pied avec seulement une grue pour s'en retourner - et ça ne
retourne pas vite. Alors, il y a un salarié, il y a des grues pour
lesquelles le syndicat a obtenu que deux hommes y soient assignés. Donc,
quand une telle grue est déplacée, un salarié prend sa
voiture, suit la grue et il peut s'en retourner chez lui après avoir
déplacé la grue.
Alors, c'est une obligation nouvelle qui a été
causée et on ne pense pas que cela entre en contradiction avec le champ
d'application. Je vous cite quelques exemples de ce qui arrive
présentement dans la construction. Je prends l'exemple d'un syndicat que
je connais bien: les monteurs de lignes. Les monteurs de lignes, eux, se
rendent tous les matins à ce qu'on appelle un point de rencontre. Ici,
à Québec, c'est dans une cour d'Hydro-Québec. Ce n'est pas
le chantier. Tous les travailleurs se rendent là, c'est le point de
rencontre. Ils montent dans le camion et en montant dans le camion, ils sont
couverts par le champ d'application. En tout cas, on a toujours tenu pour
acquis qu'ils étaient couverts par le champ d'application et tout le
monde serait étonné aujourd'hui de s'apercevoir qu'ils ne sont
pas couverts par le champ d'application de la loi. Le conducteur du camion est
payé en temps supplémentaire quand il conduit le camion et
personne n'a jamais contesté qu'il était couvert par le
décret.
C'est la même position aussi lorsqu'un employé part du
siège social de l'employeur pour se rendre sur un chantier. Prenons les
services: les ascenseurs, la réfrigération. Le travailleur part,
à un moment donné, de la bâtisse de l'employeur, de l'usine
ou de l'entreprise de l'employeur pour aller sur un "call", si vous voulez, sur
un appel de services. Il est couvert par la loi. Pourquoi lui ne serait-il pas
couvert parce qu'il sort d'un chantier, à un moment donné?
M. Marois: M. Rivard, pour être certain que j'ai bien
compris votre réponse à ma question, vous me dites
qu'évidemment il n'y avait pas de clause du genre dans l'ancien
décret. Est-ce que j'ai bien compris que vous m'avez dit qu'à
votre connaissance, sur la base de votre expérience, il n'y avait pas
l'équivalent, dans les faits, de cette clause-là sous l'ancien
décret?
M. Rivard: II y a l'équivalent, on pourrait dire, à
l'article 24.02 qui était peut-être un équivalent qui
pourra peut-être, à la longue...
M. Marois: Mais dans des cas de déplacement de grue.
M. Rivard: Non, de déplacement de grue comme tel, il n'y
avait rien de prévu dans le décret.
M. Marois: Bon! Vous me dites que depuis x temps,
c'est-à-dire depuis la signature de la convention, depuis la publication
du décret, dans les faits, c'est appliqué partout.
M. Rivard: Cela s'applique partout, oui; partout où il y a
des déplacements de grues.
M. Marois: Oui, forcément.
M. Rivard: On ne déplace pas des grues juste pour le faire
appliquer, remarquez bien, mais cela s'applique. Je peux peut-être donner
la parole ici - pardon, M. le ministre - au représentant des
opérateurs grutiers qui a négocié cette clause.
M. Paré (Yves): Mon nom est Yves Paré du local 191
des opérateurs. Le problème qui survenait dans le
déplacement des grues, c'est qu'il y a deux hommes sur une machine de 35
tonnes et plus, c'est-à-dire sur une grue de 35 tonnes et plus, et que
le deuxième homme n'avait pas d'autre choix que de s'asseoir dans la
cabine arrière de la grue. On s'est dit, lors de la négociation:
Pour une distance de plus de 80 kilomètres, c'est-à-dire 50
milles, un des deux salariés, soit l'opérateur ou son "helper",
si vous voulez - parce qu'il doit y avoir deux hommes - fournit son
véhicule, suit la grue et l'employeur doit lui défrayer les frais
négociés à l'article 24.05. À ce moment-là,
d'abord, pour la sécurité, parce que le gars qui est pris
à faire 200 milles en arrière de la grue, ce n'est pas trop
intéressant. C'est tout simplement une confirmation de la disposition de
24.02, qui est une règle générale et qui dit: Au cours
d'une journée normale, pour le déplacement du salarié
aller-retour de la place d'affaires ou du siège social de l'employeur
jusqu'au chantier ou d'un chantier à un autre et qui est couvert par le
champ d'application, l'employeur - ce n'est pas si le salarié prend son
véhicule - devra exiger que le salarié prenne son véhicule
et lui payer $0.20 le kilomètre. On ne va pas à
l'extérieur du champ d'application. C'est le même champ
d'application des autres travailleurs de l'industrie de la construction, sauf
qu'on force l'employeur à lui verser $0.20 le kilomètre.
M. Rivard: En ce qui concerne l'article 21.02, les travaux
relatifs au métro, vous trouverez dans les originaux qui vous ont
été envoyés que ces dispositions n'apparaissent pas
là. Cela découle du fait que, dans la hâte des
dernières minutes de la négociation, la rédaction finale
des textes, la partie patronale - on ne sait pas si c'est malicieusement ou non
- n'a pas inclus l'entente telle quelle dans le projet et cela est passé
inaperçu dans la hâte des dernières négociations
où ceux qui ont négocié étaient poussés par
les événements, où le conseil provincial essayait le plus
vite possible de signer une convention collective, car, pendant qu'il y avait
encore des syndicats qui étaient en grève, il fallait se battre
contre cela. Finalement, cela a passé comme ça. Quand cela a
été publié, on s'est aperçu qu'une erreur
s'était glissée. Cela ne veut pas dire que, parce qu'il y a eu
une erreur, la volonté des parties n'est pas expressément
décrite dans le contrat comme tel. Je ne crois pas qu'on devrait priver
un syndicat de ce qui avait été négocié en bonne et
due forme. Vous pouvez nous dire: Vous invoquez votre propre négligence
- non pas turpitude. Quand les choses passent vite, il y a des erreurs qui se
font. En d'autres termes, on pourrait prendre des contrats de vente de terrains
où il y aurait une erreur, où le contrat ne décrirait pas
la volonté des parties ou l'entente des parties, un tel contrat pourrait
être déclaré nul. Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait
pas inclure au décret un amendement ou l'entente signée,
paraphée par les parties. Ce ne serait que rendre justice au syndicat
concerné. Aux autres questions que vous avez posées, les
réponses vont vous être données par Me Laurin.
M. Laurin (Robert): II y a évidemment une question sur
l'artisan, le concept d'entrepreneur plutôt qu'employeur. Je pense que la
suggestion est la suivante: En utilisant le terme "entrepreneur" plutôt
qu'"employeur", on inclut l'artisan, laissant de côté la
discussion sur la présence de l'artisan dans le secteur de la
construction. Évidemment, les parties qui se sont succédé
ont toutes dit qu'elles étaient en désaccord avec le fait qu'on
isole l'artisan par une loi et que, finalement, on le protège davantage
qu'on peut protéger les autres parties qui, elles, sont appelées
à négocier. Maintenant, la question se pose quand même
quant à l'intervention ou l'ingérence de l'artisan. Comme le
décret dit que sont seuls habilités à travailler les
salariés et les employeurs, il pourrait se poser une contradiction,
même si on tient pour acquis que, même dans cette hypothèse
de travail, si l'artisan n'est pas régi par la loi, il reste que le
décret dit, indépendamment de la loi qui protège quand
même l'artisan: Les deux seuls habilités à travailler, ce
sont l'employeur et le salarié.
Dans cette optique, le terme "entrepreneur" pourrait être plus
large et couvrir l'artisan. Maintenant, il y a la petite parenthèse sur
la question de l'artisan, il faut quand même se poser la question. Il est
évident que, lorsque le gouvernement a décidé de
légiférer et de reconnaître l'artisan, il a
décidé de l'opportunité de légiférer et de
dire: On reconnaît cette créature, sauf qu'on doit quand
même se poser la question: D'une part, qu'est-ce qu'on fait avec cette
nouvelle créature par rapport aux deux autres partenaires?
Deuxièmement, en quoi intervient le fait pour les deux autres
partenaires de consentir contractuellement à la base, au niveau de la
convention - et éventuellement, cela deviendra décret - en quoi
les deux partenaires ne peuvent-ils pas limiter l'intervention de l'artisan
dans certains travaux? Pourquoi les deux autres parties ne pourraient-elles pas
se protéger? La crainte, cela pourrait être d'aller trop loin.
Évidemment, si tel était le cas, il serait toujours possible d'y
voir par réglementation, ce sur quoi, on n'a pas de contrôle, et
ce qui est toujours la prérogative législative, sauf que, tant
qu'il n'y a pas d'exagération, tant que cela couvre des situations
particulières, à mon humble avis, il ne s'agit pas d'une
situation d'illégalité. On a beau dire que l'artisan n'est pas
couvert par la loi, rien ne dit qu'on ne peut pas négocier et qu'on ne
peut pas s'engager, réciproquement, quant à l'utilisation d'un
tiers. C'est dans ce sens qu'un employeur pourrait limiter, quant à lui,
pas quant à l'artisan, l'utilisation d'un artisan. (16 h 15)
Maintenant, l'autre point, c'est celui des emplois. La question
était posée ainsi: En ce qui a trait aux emplois exclusifs ou ce
qu'on appelle les occupations exclusives, est-ce que ça correspond
à une situation de fait? La réponse est tout à fait
catégorique, oui. Cela correspond tout à fait, je dis bien tout
à fait, à une situation de fait, tellement qu'il existe
même d'autres emplois exclusifs qui n'y apparaissent pas, parce qu'en
termes de négociations - vous le verrez dans le document - la partie
patronale a dit: On est prêt à accepter pour ceux-là et on
verra plus tard. Faisons l'expérience de cette exclusivité pour
ceux-là, ce qui correspond, de toute façon, aux faits et on verra
à aborder les autres cas plus tard. Ce qui veut dire que, lorsqu'on dit
un boutefeu ou un dynamiteur, pour prendre un exemple, dans les faits, c'est un
travail qui est fait exclusivement par une personne qui est effectivement un
boutefeu.
Lorsqu'on crée une exclusivité, on ne va pas chercher des
choses qui étaient communes et qu'on voudrait rendre exclusives; c'est
tellement vrai qu'autant la
partie patronale a accepté l'idée, autant les parties
syndicales ou les unions syndicales l'ont fait, d'où la démarche
qu'on a faite, préalablement au dossier, d'aller chercher un accord des
autres syndicats impliqués, parce qu'on trouvait à se donner une
exclusivité.
Je le dis bien catégoriquement - vous pourrez le vérifier,
cela explique d'ailleurs le consensus autant patronal que celui des autres
unions, vous avez vu que personne ne s'y oppose, que ce soit la CSN, etc. -
dans les faits, ce sont effectivement des emplois exclusifs.
Il faut comprendre que, quand on a réglementé les
métiers, au niveau de la formation professionnelle, on n'a pas
réglementé les emplois, vous le verrez dans le texte. Quand on
dit que ces emplois sont communs, cela veut dire que tous les métiers
peuvent les faire. Cela n'a pas dégénéré plus qu'on
ne l'a connu, comme nous le disons dans le document, à cause d'un
consensus, c'est-à-dire que les métiers, quels qu'ils soient,
n'ont pas, du jour au lendemain, réclamé ce qui n'est pas leur
travail. Heureusement, parce que la situation aurait complètement
dégénéré. D'une part, les métiers sont
protégés. Ceux qui exercent des emplois ne peuvent pas faire le
travail des salariés de métier.
Les emplois présentent, pour certains d'entre eux, une situation
qui est analogue, tout en n'étant pas des métiers. Cela s'inscrit
dans le cadre de la valorisation du travail. Ce n'est pas parce qu'on n'est pas
un métier régi par le règlement sur la formation qu'on n'a
pas droit, en tant que vrai travailleur de la construction, de
bénéficier des effets d'une valorisation au niveau du travail et
aussi de faire en sorte que ce ne soient pas les métiers qui viennent
faire mon travail.
Actuellement, la construction est un monde dont les paramètres se
définissent; les métiers ont leur place, les emplois ont leur
place. Il y a, parmi les emplois, dans les faits et depuis longtemps, des
emplois communs et des emplois exclusifs. Cela ne fait que confirmer la
chose.
Je fais une petite parenthèse, je ne veux pas être trop
long, en ce qui concerne la légalité. Il apparaît
très évident, vous allez le voir dans le texte, qu'on aurait pu
discuter pour savoir si le règlement sur la formation, en vertu de la
Loi sur la formation professionnelle, pourrait couvrir les emplois. La
question, de toute façon, est académique, parce que le
règlement ne couvre pas les emplois. Dans la mesure où le
règlement ne couvre pas les emplois, mais uniquement les métiers,
il serait carrément faux de prétendre que, lorsqu'on
prévoit, dans le décret, une classification d'emplois, ça
va à l'encontre du règlement sur la formation professionnelle qui
ne vise - c'est le règlement qui est fait comme ça - que les
métiers.
Donc, il n'y a aucune contradiction au niveau de la
légalité. Le fait de bloquer, par exemple, l'exclusivité
de certains emplois pourrait être dans un dessein d'étendre
éventuellement le règlement sur la formation, sauf que la
discussion, au niveau du décret, je ne pense pas qu'elle doive se placer
à ce niveau. On doit constater un état de fait actuel, une
négociation actuelle qu'il faut respecter.
Le dernier point c'est celui de la négociation qui est toujours
possible et la possibilité d'intervention subséquente. Je fais la
référence en ce qui concerne le pipe-line. Il y a deux choses sur
lesquelles je veux attirer rapidement votre attention. D'une part le fait qu'il
y ait des clauses dans la convention collective concernant le pipeline
n'implique pas que le gouvernement ne peut pas intervenir. Si c'était
ça, le concept d'intérêt public, vous ne pourriez pas
l'utiliser à toutes fins utiles, en tout cas tel qu'il est, parce que
vous intervenez toujours après que la convention est signée. Or,
ce ne serait pas un argument que de dire: Parce que ça apparaît
dans la convention, nous, maintenant, au niveau du ministère, du
gouvernement, ne pouvons plus intervenir, c'est dans le document et tant pis.
Or, justement, on a prévu qu'après cette signature, malgré
la présence de clauses dans le cas d'intérêt public, il y a
possibilité d'intervenir et ça devient important de le faire.
Où est maintenant la démarcation? Si je négocie des
clauses et que je les négocie mal ou peu, je ne peux pas demander une
intervention au niveau du lieutenant-gouverneur en conseil sur recommandation
du ministre. C'est une négociation qui n'est pas parfaite et là
la commission parlementaire deviendrait une table de négociation visant
à améliorer, alors que, dans le cas du pipeline, il n'y a eu
carrément aucune négociation, cela a toujours été
retardé, il y a eu une table spéciale jamais utilisée, il
y a eu intervention du conciliateur, il y a recommandations du conciliateur.
Toutes les parties - vous l'aurez noté - qui sont passées devant
vous ont dit: Effectivement, là, il y a un problème.
Même celles qui n'en ont pas traité dans leur document
diront: On est bien d'accord qu'il y a effectivement un problème
là. Ce qui dégage ce qui s'est passé au niveau des
négociations, ce qui dégage bien qu'il ne s'agit pas d'une
négociation imparfaite, mais d'une situation limite. C'est
carrément une situation limite.
Et, dernier commentaire, le gouvernement pourrait dire: Continuez
à aller négocier, on va laisser ça comme ça
entre-temps. Il faut absolument ouvrir la porte sur la négociation de
façon à forcer les partenaires à négocier, alors
qu'autrement on
aura beau dire: La négociation continue d'être possible,
elle ne sera pas vécue. La partie patronale a constamment
démontré dans cette négociation qu'elle ne voulait pas
négocier pour une chose. Or, si on dit: Ça demeure une
possibilité, il est clair que, si on n'en fait pas un point
précis, si on n'en fait pas un article précis, il n'y aura pas de
négociations.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Laurin.
M. le ministre.
M. Marois: Je n'ai pas d'autres questions, pas d'autres
commentaires, je pense que ça m'éclaire très bien.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Je voudrais quand
même que vous preniez avis que le député de Maisonneuve
aura des questions à poser immédiatement lorsqu'il reviendra; il
est allé faire un appel téléphonique présentement.
Il aura donc des questions à poser au ministre, à la commission
et aux parties, entre autres sur le document portant sur les clauses concernant
les travaux de pipe-line.
J'aurais un bref commentaire à formuler, qui s'adressera surtout
au ministre. D'abord je tiens à m'excuser de ne pas avoir
été ici ce matin. On m'a informé que le ministre, au
début des travaux de la commission, n'avait pas, comme on était
possiblement en droit de s'y attendre, fait la ventilation et donné des
explications à l'appui de chacun des amendements au décret
apportés par le lieutenant-gouverneur pour ainsi justifier la
volonté du gouvernement de modifier le décret signé par
les parties.
Je dois dire au ministre que j'ai été surpris, lorsque
j'ai pris connaissance des dispositions qui allaient être
modifiées par le lieutenant-gouverneur, de constater que certaines des
modifications débordaient le cadre strictement juridique qui,
normalement, doit être concerné par un tel arrêté en
conseil ou une telle position du lieutenant-gouverneur, et je m'explique. On a
des parties, on a l'AECQ, qui, malheureusement n'est pas venu comparaître
aujourd'hui -j'espère qu'après ça ils ne viendront pas
dire qu'on ne les entend pas - et on a ensuite le Conseil provincial des
métiers de la construction ou ce qui en reste, qui ont
négocié de bonne foi, ardument, qui ont négocié
pour avoir plus ou pour en donner moins selon le côté de la table,
mais ils en sont quand même venus à une entente. Cette entente
doit normalement être signée, être déposée au
gouvernement pour recevoir son approbation et ainsi devenir le
décret.
À ma connaissance, les pouvoirs du lieutenant-gouverneur de
modifier ce décret sont limités et les pouvoirs du ministre du
Travail et de la Main-d'Oeuvre, parce que c'est quand même lui qui assume
le leadership au sein du cabinet à cet égard, doivent se limiter
à corriger ce qui, dans l'entente négociée, est
jugé comme illégal ou encore comme allant à l'encontre
d'une loi, d'un règlement ou encore allant même à
l'encontre d'un règlement appliqué par un partenaire du monde du
travail ou une des parties de la structure, que ce soit, par exemple, la
Régie des entreprises en construction ou des choses comme cela.
Je dois vous dire que je suis surpris de constater certaines clauses. Je
vais vous donner un exemple: la clause portant sur le pourcentage des
dépôts pour vacances. Je suis surpris que le gouvernement
intervienne à ce niveau, d'autant plus que l'Office de la construction
du Québec, on s'en rappellera, à ses débuts, était
véritablement l'émanation du monde du travail et du monde
patronal. On se rappellera que jusqu'à il y a quelques mois,
peut-être un peu plus d'un an, l'OCQ se finançait à
même les contributions des parties. L'OCQ, pour moi, cela
m'apparaît comme étant véritablement l'objet qui appartient
au monde patronal et au monde syndical, mais le gouvernement a
éjecté quelques millions depuis quelques années, depuis
les mandats nouveaux qui ont été donnés à l'OCQ,
notamment au chapitre du contrôle du placement de la main-d'oeuvre.
Je ne m'explique pas et je ne comprends pas - cela a peut-être
été signalé ce matin, je m'en excuse, je n'étais
pas ici -que le gouvernement et le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre
se permettent d'intervenir dans des cas comme ceux-là, des cas aussi
comme celui qui a été porté à l'attention de la
commission tout à l'heure, plus spécifiquement par les
commentaires de nos représentants, en ce qui concerne les frais de
millage ou des choses comme celles-là.
Le ministre nous dit: Nous allons prendre en très sérieuse
considération les arguments invoqués ici aujourd'hui. Très
bien, j'en conviens, parfait, merci beaucoup, mais, concrètement,
à quoi cela va-t-il aboutir?
J'aimerais que le ministre nous dise -je ne le sais pas, probablement
que la commission va terminer ses travaux aujourd'hui - pourquoi il n'a pas
appuyé chacune de ces modifications sur une argumentation légale
et juridique. Je conviens que le gouvernement et le ministre du Travail et de
la Main-d'Oeuvre doivent intervenir si, par exemple, l'entente librement
négociée met de côté ou vient contourner un
règlement, par exemple celui de la Régie des entreprises en
construction ou encore si la convention librement négociée entre
les parties vient contourner ou faire fi de mesures réglementaires
concernant la formation ou encore la qualification de la main-d'oeuvre.
À ce moment-là, c'est l'obligation du gouvernement, c'est
l'obligation du ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre non seulement
d'intervenir, mais de corriger ce qui a été librement
signé pour que ce soit conforme à nos lois et à nos
règlements. Mais lorsque le ministre, par le geste légal qu'il
pose, vient modifier et corriger en fait des points qui ne sont pas des points
de droit, mais strictement des points de fait, comportant des avantages pour
les parties, librement négociés, je m'inquiète. Je
m'inquiète d'autant plus - si c'est le cas, je n'étais pas
là - qu'à un certain moment on a signalé aux parties que
ces articles ou ces sujets sont modifiés parce qu'ils vont à
l'encontre de l'orientation du ministère. Vous savez, il n'y a rien de
certain dans l'orientation du ministère, il n'y a rien d'officiel, il
n'y a rien de déposé. L'orientation du ministère, ce n'est
pas quelque chose qui est palpable et visible. Ce n'est même pas visible
dans l'assiette du ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre tous les matins,
l'orientation du ministère. L'orientation du ministère, c'est
bien souvent le titulaire du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre
qui est appelé à la donner.
J'aimerais savoir du ministre plus particulièrement ce qu'il
entend faire, si, à partir de la bonne et valable considération
qu'il entend donner aujourd'hui aux arguments qui ont été
invoqués, il est possible qu'il apporte de nouvelles modifications, quel
délai il peut se donner pour analyser tout cela, les
représentations qui nous sont faites aujourd'hui, quitte à
réagir ultérieurement, dans quel délai il entend le faire
et selon quelle procédure. Si le ministre nous confirme qu'il est
possible pour lui d'apporter de nouvelles modifications du décret allant
dans le sens de ce qui avait été négocié, entend-il
convoquer à nouveau la commission parlementaire ou tout au moins
entend-il donner un avis dans la Gazette officielle, etc., etc., avec des avis
aux partis d'Opposition et tout cela? (16 h 30)
M. Marois: Oui, très rapidement, M. le Président,
je comprends et je pense que tous les intervenants qui sont là avec nous
depuis ce matin et les membres de cette commission comprennent parfaitement
bien les motifs qui ont retenu le député de Portneuf ce matin,
qui l'ont empêché d'être parmi nous.
Je ne voudrais pas tout reprendre. On a eu l'occasion de discuter bon
nombre de points, à toutes fins pratiques, presque tous les points, sauf
les derniers que vient de soulever le député de Portneuf. J'ai
dit ce matin que j'abordais ces travaux à la fois sur la base
strictement de la loi qui est là, de l'article 51 de la loi,
troisième paragraphe et, d'autre part, avec une grande ouverture
d'esprit. J'ai rappelé qu'après la signature de la convention
collective, elle nous a été envoyée, forcément;
elle a été publiée avec un avis que ceux et celles qui
avaient des objections pouvaient les faire valoir dans un délai de 30
jours, si ma mémoire est bonne. Effectivement, on a reçu bon
nombre d'objections - si ma mémoire est bonne, environ 70 - provenant
même de certains des intervenants qui sont ici aujourd'hui, qui ont
témoigné devant nous. Ces objections étaient basées
sur des cas de discrimination ou sur des cas d'ordre légal, des choses
qui viennent en contradiction avec l'une ou l'autre loi existantes.
Par exemple, on a évoqué un cas au cours de cette
journée où bon nombre d'intervenants se sont dits d'accord avec
les suggestions qui ont été formulées jusqu'à
maintenant et d'autres ont convenu en cours de route - c'est, au moins, un
point qui est très clair, il semble se dégager un consensus sur
la question des cotisations syndicales -que l'expression "association
représentative" -c'est l'expression utilisée dans la loi - doit
se retrouver dans le décret, alors qu'on utilise les expressions "union"
ou "syndicat", ce qui fait une différence, mais là, c'est
purement d'ordre légal. À partir des objections reçues,
des études ont été faites de ces objections; un certain
nombre ont été retenues et portées à l'attention
des parties. Des documents ont été envoyés aux parties un
peu avant ou autour du 3 décembre. Il y a eu des rencontres et le reste.
Ces documents, qui ont d'ailleurs été remis aux membres de cette
commission, relevaient chacune des clauses et l'article correspondant de loi ou
de règlement qui semblait faire problème, que ce soit sur le plan
légal ou sur le plan de la discrimination.
J'ai bien dit ce matin que nous n'en étions pas à une
étape finale ici à la commission à partir de suggestions,
d'hypothèses, de points sur lesquels on a attiré mon attention.
Nous en sommes rendus à l'étape du travail qu'on a fait depuis ce
matin et ma foi, les témoignages qui ont été
apportés sont extrêmement intéressants sur bon nombre de
points. On ne va certainement pas prendre cela à la
légère. Je pense que le député de Portneuf a assez
l'habitude de travailler avec moi en commission parlementaire depuis quatre ans
qu'il sait fort bien qu'on n'a pas l'habitude de s'amuser en commission
parlementaire. On fait un travail. On va essayer de le faire le plus
sérieusement du monde, partant des commentaires et des points de vue.
Aujourd'hui, les parties nous font connaître leur point de vue sur les
éléments, les points qui ont été portés
à leur connaissance en nous disant: On est d'accord ou on n'est pas
d'accord avec tel et tel point. Même, depuis ce matin, un certain nombre
de points
additionnels ont été portés à notre
connaissance par l'un ou l'autre intervenant, soit sur ce qu'on appelle des
clauses erronées, soit sur ce qu'on appelle des clauses oubliées,
soit sur ce qu'on appelle des éléments de discrimination qui
n'apparaissaient pas dans la liste de suggestions qui ont été
formulées. On va tenir compte de tout cela.
Il y a eu aussi des interprétations différentes, des
points de vue différents qui ont été exprimés sur
certains points. C'est pour cette raison aussi que j'ai posé à
quelques reprises une question tout au long de nos travaux: Dans les faits,
comment les choses se passent pour voir quelle est aussi la
réalité des choses. Il y a les lois. Il y a les
règlements. Il y a les faits. Tout cela doit s'équilibrer si on
veut rendre pleinement justice aux parties et respecter ce principe de base de
la liberté de négociation des parties. Au moment où les
travaux de cette commission vont se terminer aujourd'hui, nous avons un
éclairage extrêmement important qui nous a été
apporté sur bon nombre d'éléments qui avaient
été portés à ma connaissance et, qui ont
été soumis aux parties. Leur réaction, je pense, est plus
qu'intéressante sur bon nombre des éléments. Le
député de Portneuf a lui-même soulevé un
élément qui, semble-t-il mérite d'être
regardé de très près. Partant de là, je vais
continuer à faire mes devoirs avec l'équipe, comme la loi le
prévoit. Pour répondre à votre question: Qu'est-ce qui va
se produire maintenant? On va donc procéder à l'analyse en
détail, en profondeur, à la lumière des commentaires qu'on
a reçus, des divers points qui ont été
soulevés.
Pendant qu'on fait ce travail, en même temps - et c'est une
invitation que je me permets de faire ici, la loi le permet - rien
n'empêche les parties de se revoir. Et dans la mesure où cela peut
sembler souhaitable, il semble aussi souhaitable que cela puisse se faire dans
les meilleurs délais possibles. Je pense qu'on peut se donner des
délais raisonnables. Si quinze jours, trois semaines paraissent des
délais raisonnables, très bien. Je suis prêt à
procéder sur cette base. Si on pense que cela peut être un peu
plus long, je n'ai pas objection à le considérer aussi, pour que,
ultimement, - et la loi le prévoit, cela a été
évoqué tantôt avec pertinence, me semble-t-il - les parties
puissent se revoir, en venir à des ententes sur un certain nombre de
points, que ce soit des choses qui ont été soulevées par
nous ou par l'une ou l'autre des parties ou des questions de clauses dites
erronées ou d'autres éléments, peu importe. Et s'il se
dégage des ententes entre les parties, que cela nous soit soumis. On va
simplement les entériner à partir de ce moment-là.
Donc, je me donne un délai relativement raisonnable. Il me
semblerait qu'on ne devrait pas excéder quelque chose qui tournerait
autour de la fin de février, début de mars, pour finir
l'ensemble, si cela paraît quelque chose de raisonnable. En d'autres
termes, les étapes qui sont prévues par la loi.
M. Pagé: Brève question, M. le Président. Le
ministre ne veut pas dire par là, j'espère, qu'il subordonne son
action à une rencontre des parties, à un retour des
négociations?
M. Marois: Non. Vous savez, une chose que je peux imposer...
M. Pagé: II est possible que l'AECQ démontre
très peu d'empressement à retourner négocier.
M. Marois: Ce que je veux dire, de toute façon, M. le
Président, ce n'est pas au ministre, et la loi n'est pas ainsi faite, de
prendre la décision que les parties doivent négocier et vont
négocier. Ce n'est pas comme cela que la loi est faite.
M. Pagé: Mais dans les faits, vous pourriez entendre
cela.
M. Marois: II me semble qu'il pourrait être souhaitable que
les parties puissent se voir, en discuter, nous faire part des résultats
de leurs travaux. Et le cas échéant, si les travaux ont pour
effet de bonifier, du point de vue des parties, leur convention collective
prolongée par décret, tant mieux. On va certainement en tenir
compte. Cela me paraît souhaitable.
M. Pagé: J'ai bien compris que c'était d'ici le 10
mars?
M. Marois: Le 10 mars. J'espérais un délai
raisonnable de quinze jours, trois semaines, pour nous mener quelque part vers
la fin de février. Si cela paraît un délai raisonnable pour
les parties, tant mieux. Si cela paraît un peu trop serré, on me
le fera savoir.
M. Pagé: D'accord. Il faudrait que vous fassiez cela avant
le déclenchement des élections. On ne voudrait pas que ce soit un
problème de plus à régler, à ajouter sur notre
liste.
M. Marois: Ne vous en faites pas, votre liste sera très
courte. De toute façon, c'est une liste que vous aurez à regarder
dans plusieurs années.
M. Pagé: On verra. Ce sont eux qui vont décider, de
toute façon.
M. Marois: De toute façon, on travaille.
Je l'ai souvent dit. Il y a des choses que je compte finir d'ici la fin
du mandat, quelle que soit la date de l'élection, et il y a des choses
que j'aurai à finir après un renouvellement de mandat, cela me
paraît très clair.
M. Pagé: Vous continuerez à vous interroger sur
votre orientation.
Le Président (M. Boucher): M. Rivard.
M. Rivard: Je m'excuse, mais j'ai oublié quelque chose
tout à l'heure. Je voulais insister un peu sur un point en particulier
des recommandations du ministère. Cela se situe à l'article
17.01, sous-paragraphe 4, alinéas a) et b). J'en ai parlé dans le
mémoire, mais je voulais broder un peu plus là-dessus. Cela m'a
échappé.
Le chaudronnier et le monteur d'acier de structure ont
négocié une clause qui prévoit que le soudeur - quand la
soudure est faite dans ce métier, sur des travaux reliés -est
payé au taux de salaire du monteur d'acier de structure ou du
chaudronnier, selon le cas. Le ministère prétend que cela
pourrait contrevenir au règlement no 1.
Je voudrais juste souligner au ministère que cet article exclut
spécifiquement l'apprenti de l'application de cette clause. Donc, cela
s'applique seulement au soudeur qui n'est pas régi par le
règlement no 1 et c'est une négociation d'un salaire
spécifique pour un travail spécifique. Merci.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Je voudrais revenir sur deux points. Le premier
concerne la reconnaissance d'un champ spécifique pour le journalier ou
le manoeuvre. J'ai regardé, il y a différents titres: manoeuvre,
manoeuvre spécialisé et tout le "kit". J'ai l'impression qu'on ne
s'entend pas facilement même sur le plan légal. J'ai
écouté votre conseiller juridique, c'est un très bon
plaideur. Je pense que le problème ne se situe pas au niveau du fait que
le décret ne permet pas de définir des emplois; le décret
le permet. Mais par rapport, par exemple, à l'exclusivité d'un
champ, je pense que c'est là qu'on n'a pas le droit en vertu de la loi
sur la qualification professionnelle. Je vous donne un exemple. Que vous
négociiez le fait qu'un journalier fasse exclusivement tel type de
travail, cela devient en contradiction avec la loi sur la qualification
professionnelle. Prenons l'exemple du menuisier. Dès que vous dites:
Seul un journalier peut faire tel type d'emploi, vous excluez le fait qu'un
menuisier puisse le faire. C'est cela qui semble être l'objectif
fondamental ou, en tout cas, vous y avez mis passablement d'emphase. J'ai
compris que vous vouliez que le journalier ait l'exclusivité de
certaines classes. Si c'est cela, vous entrez en contradiction
carrément, parce qu'on dit que, dans la loi sur la qualification
professionnelle, seul le ministre peut, par règlement - c'est ce que la
loi dit, à peu près, en vertu de l'article 61, si j'ai bien
compris - définir des champs exclusifs d'embauche.
Je voudrais que vous m'éclairiez davantage. Parce que ce n'est
pas sur le fait de la définition des emplois qu'on accroche, au niveau
des suggestions, mais bien sur la restriction quant à la
possibilité de faire. Je prends un autre exemple d'un employeur qui
oeuvre dans le coffrage. Avec votre clause, si j'ai bien compris, pour certains
types d'emploi, ce seraient exclusivement des journaliers, et pour un autre
type d'emploi, le menuisier spécialisé dans le coffrage ne
pourrait pas accomplir des tâches normalement dévolues au
journalier puisque, par la clause du décret, vous lui reconnaissiez
l'exclusivité de ces types de tâche. Il me semble qu'il y a un
problème d'ordre légal par rapport à la loi sur la
qualification professionnelle et peut-être d'ordre pratique pour les
petits entrepreneurs qui font du coffrage et qui, bien souvent, vont le faire
avec quatre ou cinq employés; et il y a une certaine convergence dans
les emplois à certains moments. J'aimerais vous réentendre
là-dessus.
M. Laurin (Robert): La première note que je voudrais
faire, c'est de répéter que dans les faits, pour les emplois
exclusifs - je dis bien les emplois actuellement exclusifs dans le
décret; je ne parle pas des autres qui sont, eux, communs - ce n'est pas
un travail qui est fait par les métiers. Le travail de dynamiteur, par
exemple, n'est pas un travail qui est fait par les menuisiers ou par un autre
métier. Ceux qui sont couverts comme exclusifs, ce n'est pas un travail
qui est fait par d'autres métiers.
Deuxièmement, il demeure dans le décret des emplois
communs. Vous avez donné l'exemple du coffrage. Cela apparaîtrait
dans les emplois communs. Le manoeuvre, d'une part, n'a pas été
inclus dans... le travailleur, c'est-à-dire, n'a pas été
inclus comme emploi exclusif. C'est la même chose pour le manoeuvre
spécialisé. Cela apparaît toujours dans les emplois communs
indépendamment que dans les faits, ce soit un travail fait ou non
toujours par, par exemple, les manoeuvres ou les journaliers par opposition aux
menuisiers. Pour ceux qui ont été expliqués,
définis ou décrits comme étant exclusifs, ce sont des
travaux faits exclusivement.
Maintenant, il est important de comprendre qu'il y a environ 35,000
travailleurs qui n'ont pas de carte de compétence et qui sont des
travailleurs de la
construction. Pour environ 5000 emplois, vous avez un surplus de
travailleurs qui, eux, n'ont pas de carte de compétence ou de carte de
métier et qui doivent, évidemment, exercer des fonctions qui sont
des emplois. Autant on protège les métiers d'un côté
par la réglementation en disant: Ceux qui n'ont pas la carte de
compétence ne peuvent pas le faire, à contre-courant ou en
contrepartie, nous demandons d'accorder un minimum de protection. C'est dans ce
sens-là que les emplois dits exclusifs représentent un minimum
dans l'état actuel des choses, parce qu'on pourrait discuter d'autres
emplois, à savoir s'ils devraient être exclusifs. (16 h 45)
Maintenant, sur le plan légal - parce qu'il semble y avoir une
difficulté sur le plan légal - la loi sur la formation ne dit pas
que tous les emplois devront - ou l'exercice des emplois communs, exclusifs,
peu importe - être réglementés. La loi ne prévoit
pas de façon spécifique que le règlement doit régir
à la fois les métiers et les emplois. La loi prévoit un
certain champ d'application, mais quand vous regardez le règlement vous
vous apercevez spécifiquement, par exemple, à l'article 2.01, que
le présent règlement régit l'exercice des métiers.
À 3.2, sur le champ d'exercice, toujours dans le même
règlement: "Les tâches que peut accomplir un travailleur
qualifié dans l'exercice de son métier sont celles
comprises..."
Or, le règlement s'attache uniquement aux métiers, en
disant: Vous, électriciens, voici les tâches que vous pourrez
faire comme électriciens, mais le règlement ne limite aucunement
l'exécution du travail dans des emplois. C'est d'ailleurs une partie qui
elle est prévue dans une autre loi, soit la Loi sur les relations du
travail dans l'industrie de la construction, qui dit que la classification des
emplois peut faire l'objet d'une négociation. Si on veut comprendre
pourquoi, c'est que, en termes de métiers, on a une situation qui est
plus claire a priori, alors qu'en termes d'emplois communs c'est une situation
qui est plus vague a priori. On comprendra cela, c'est-à-dire qu'il y a
certains travaux où on se pose la question à savoir qui peut les
exécuter, alors que dans le cadre du métier c'est clair qu'un
électricien fait des travaux d'électricité.
Je ne prends pas les cas limites, à savoir les conflits de
juridiction, mais le métier, par tradition, a toujours été
bien identifié, alors que pour l'emploi c'est plus vague. On permet aux
parties de négocier ce qui sera fait, en termes d'emploi, par tel ou tel
emploi. On permet aussi, comme on l'a fait, de dire: Voici un type d'emploi
qu'on réserve à une catégorie de travailleurs qui, comme
je le mentionnais tantôt, de toute façon, représente un
grand nombre de travailleurs qui, eux, n'ont pas de carte de compétence.
On ne va pas chercher une juridiction qu'aurait un métier autrement. On
ne vient pas en contradiction avec le règlement qui lui - j'ai pris la
peine de mentionner les deux articles - se limite aux tâches qui sont
celles du métier et qui dit: Vous êtes électricien, voici
ce que vous pouvez faire comme électricien.
Jamais jamais la Loi sur la formation et la qualification
professionnelles ne dit: Dans des tâches qui ne sont pas celles des
métiers, vous ne pourrez pas négocier ces tâches ou vous ne
pourrez pas en faire l'objet d'une quelconque entente. Jamais la Loi sur la
formation et la qualification ne dit: Voici des tâches sur lesquelles
vous ne pourrez pas mettre le doigt, en excluant les métiers. La Loi sur
la formation et la qualification professionnelles, suivie par son
décret, a dit: Voici les métiers, vous ne posez pas le doigt
là-dessus. Elle n'a pas dit, et il n'y a aucune disposition dans cette
loi qui dise qu'on n'a pas le droit de faire ce qu'on fait, c'est-à-dire
de négocier sur des emplois. Sinon - je termine là-dessus - cela
voudrait dire, si on en venait à la conclusion contraire, que la Loi sur
la formation et la qualification professionnelles et la Loi sur les relations
du travail dans l'industrie de la construction se contredisent, parce que la
Loi sur la formation et la qualification professionnelles protégerait
plus que les métiers et, dans les faits, au niveau du
règlement.
Or, je dis: Les lois ne sont pas contradictoires. Quand on a
prévu, dans la Loi sur les relations du travail la possibilité de
négocier sur les emplois, cela correspondait à un état de
faits, d'une part. D'autre part, ce n'est pas contradictoire, alors que si on
prend la version contraire on n'a pas tellement le choix que de dire: Voici
deux lois contradictoires. Voici un domaine occupé par la Loi sur la
formation et la qualification professionnelles mais la Loi sur les relations
dit: Vous pouvez négocier. Or, ou il y a contradiction ou il n'y en a
pas. Dans notre thèse, il n'y en a pas.
M. Chevrette: Un commentaire ou une petite question pour finir.
Sur la question des artisans, votre argumentation me paraît assez
logique, dans le sens suivant: ce n'est pas parce que j'ai un privilège
qui m'est donné en vertu d'une loi que je peux exercer par la suite ce
même privilège, si un individu ne veut pas user du
privilège qui m'est donné. En d'autres mots, ce n'est pas parce
que la loi me permet de travailler sur les chantiers de construction qu'un
entrepreneur est obligé de m'engager. À partir de ce syllogisme,
si je me permets l'expression, il m'apparaît que ce n'est pas
contradictoire dans le décret. Quant aux "pipefitters" ou aux plombiers,
je vous avoue que c'est un autre point très complexe. Je
suis très bien votre argumentation sur la discrimination, ils
sont victimes de discrimination dans la convention collective, la
négociation. Là où je bloque systématiquement,
c'est sur le plan légal, purement et simplement, c'est que l'agent
autorisé, du côté syndical, ne signe pas tout seul;
même si le patron ne voulait pas en discuter, il reste qu'à la
fin, on est arrivé à un accord, quel que soit le contenu. C'est
ça qui m'embête le plus. Il y a eu un accord conjoint. Est-ce que
les clauses écrites là sont discriminatoires, parce que c'est
toute la notion de la loi sur le décret de la convention collective?
Le ministre, d'après moi, a le pouvoir de corriger une clause qui
est discriminatoire, c'est ça qui m'embête, parce que je me
rappelle un plaidoyer fait en 1977, au moment où on avait parlé
des clauses discriminatoires. Est-ce que les clauses sont discriminatoires
comme telles ou si c'est un fait relatif à la négociation qui est
discriminatoire pour le groupe? C'est ça, regardez. Prouver la
discrimination d'une clause comme telle, c'est assez difficile; vous en
conviendrez, prouver de la discrimination demeurera toujours difficile.
Le fait qu'il n'y ait pas eu de négociation, que ce soit
constaté par un conciliateur, ça apporte au moins une preuve de
discrimination vis-à-vis du groupe, je suis d'accord avec vous. La
discrimination ne vient pas dans la promulgation du décret, elle ne
vient pas dans le rôle d'autorité du ministre, la discrimination,
c'est un groupe vis-à-vis de son agent représentatif majoritaire,
c'est tout le phénomène légal, qui est ambigu, complexe.
Je vous avoue que ce n'est pas moi qui vais décider en dernier ressort,
mais je me rends compte d'une chose, c'est que la discrimination ne vient pas
comme telle du fait de la promulgation du décret, elle vient dans les
relations internes de la partie syndicale. Vous n'avez pas nié ça
dans vos premiers propos.
Je vous avoue que je vais souhaiter bonne chance au ministre.
M. Laurin (Robert): Là-dessus, si on me permet un
commentaire, c'est à la fois que le mécanisme de
négociation et l'acceptation des clauses ont été
discriminatoires, que les clauses également sont discriminatoires, en ce
qu'elles constituent l'offre ou la position patronale. Sur le plan
légal, il y a quand même une précision qui me paraît
importante, c'est que la loi ne cite pas uniquement le cas de discrimination
des clauses, la loi utilise le concept d'intérêt public, ce qui,
à mon avis, peut couvrir les deux situations, à la fois la clause
discriminatoire disant, par exemple, que les membres de la CSN seront
obligés de travailler plus que les autres, ou que dans le
mécanisme de négociation, je refuserais de tenir compte des
intérêts d'un groupe que je suis censé
représenter.
À mon avis, parce que la loi utilise le concept de
l'intérêt public, je peux intervenir dans les deux cas. Supposons
que je suis l'agent unique et que je refuse de négocier pour tout un
secteur, et, peu importent les raisons, tout le monde ici les devine, je refuse
donc de négocier pour tout un secteur ou j'accepte ce qu'on me met sur
la table comme employeur, l'employeur me met quelque chose sur la table et je
l'accepte carrément.
Le contenu ou la clause n'est peut-être pas discriminatoire dans
certains cas, mais il reste que le processus de négociation l'a
été. C'est pour ça que je disais que
l'intérêt public dont on parle intervient toujours après la
signature d'une convention collective. Or, cela présuppose que l'agent
négociateur l'a accepté, parce que s'il ne l'avait pas
accepté, il n'y avait pas de convention, évidemment... Ce qui
veut dire que l'agent négociateur a accepté des choses qui ont
débordé carrément les règles du jeu en ce qui
concerne un représentant unique et qui doit représenter, au mieux
de ses efforts, les différents groupes qui sont les composantes de
ça.
Dans la mesure où ça se fait, tant mieux, mais là
où cela ne se fait pas, dans le processus même, si cela ne se fait
pas... Je vous donne un exemple peut-être plus carré, supposons
que la CSN représente la très grande majorité des
électriciens au Québec et que je décide, dans une
espèce de manoeuvre au niveau du processus de la négociation, de
ne pas négocier les clauses sur les électriciens et d'accepter
carrément le projet patronal, la clause, comme telle, ne serait pas
discriminatoire, mais tout le monde crierait en disant: C'est une situation qui
est absolument inacceptable et on pourrait facilement dire:
L'intérêt public est en jeu.
C'est la même situation qui est peut-être moins
colorée que dans l'exemple que je vous ai donné...
M. Chevrette: ...
M. Laurin (Robert): ... c'est un exemple qui est moins
coloré, mais c'est un exemple aussi flagrant parce que ça couvre
évidemment un secteur important et on est dans une situation où
il y a absence totale de négociation. Ce n'est pas une plus ou moins
bonne négociation. Or, c'est justement, à mon humble avis, le cas
limite qui permet de faire intervenir l'intérêt public autant sur
la nature des clauses, quant à l'aspect discriminatoire, que sur le
processus qui peut être discriminatoire. Je pense que c'est flagrant en
tout cas dans l'exemple que j'ai donné. Il y a un agent
négociateur, mais, par ailleurs, il y a une protection prévue
dans la
loi qui ne s'accrochera pas à des détails. On ne pourra
pas vous convaincre dans des détails, on ne pourra pas vous convaincre
sur ce qui constitue le coeur même d'une négociation, dans le sens
qu'une clause a plus ou moins été négociée.
Je reviens et je termine là-dessus, l'article 24.16 pour les
électriciens, cela a fait l'objet d'un consensus en présence du
conciliateur, vous pouvez le vérifier. Tout le monde est d'accord,
incluant la partie patronale et, comble de surprise, au moment où la
convention est signée par les agents dûment reconnus par la loi,
la clause n'apparaît plus. Ce sont des cas types, ce sont des cas
d'espèce qui sont flagrants.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Maisonneuve.
M. Lalande: Je serai assez bref, M. le Président. Il n'y a
qu'un point qui a été soulevé par la FTQ - Construction et
j'aimerais entendre l'argumentation du ministre là-dessus; c'est
concernant l'article 25.07 qui est la préférence d'embauche des
plus de 50 ans ou moins. Pourquoi le ministère en est-il venu à
la conclusion que c'était illégal? Est-ce que le ministère
s'appuie sur la Charte des droits et libertés de la personne? On se sent
un peu mal à l'aise là-dedans, c'est-à-dire de ne pas
reconnaître, et je pense que ça a été bien
expliqué tout à l'heure, de permettre à un vieil
employé de pouvoir accéder à un employé depuis
longtemps... Quelle est l'argumentation juridique selon laquelle vous pensez
que c'est illégal?
M. Marois: Pendant que vous continuez à poser vos
questions, j'en prends note.
M. Lalande: L'autre point que je voudrais aussi soulever, c'est
l'article 25.08, à la page 22. Selon le raisonnement que vous faisiez
tout à l'heure, si on restreint le droit de gérance à
l'employeur concernant les sous-contrats qu'un employeur peut donner aux
artisans, je me demande si, par voie de conséquence, ça ne va pas
limiter sérieusement les artisans au monde du travail. C'est la question
que je vous pose.
M. Rivard: C'est exactement le but. On ne représente pas
les artisans. Les artisans, autant que nous sommes concernés, sont des
parasites dans l'industrie de la construction, rien d'autre que ça. Le
ministère peut les considérer autrement, ça le regarde,
mais, en ce qui nous concerne, nous ne représentons pas d'artisans, nous
représentons des salariés et la clause que nous avons
négociée est exactement le même genre de clause ou le
même esprit de clause que celle que vous retrouvez dans presque la
totalité des conventions collectives industrielles où les parties
s'entendent - la partie syndicale va le chercher par la négociation -
pour limiter les sous-contrats. Donc, si cette clause-là est
illégale, quand la loi ne défend pas spécifiquement un tel
genre de clause, quand le Code du travail ne prévoit pas non plus un tel
empêchement, il faudrait conclure que, dans tous les domaines, dans la
construction et ailleurs, ce genre de clause est illégal aussi.
Montrez-moi une disposition de la loi qui défend de limiter le
travail des artisans, là, je dirai: C'est vrai, c'est illégal. On
a regardé dans la loi, on l'a scrutée, on l'a virée de
tous les bords, on a voulu rencontrer le contentieux là-dessus, il n'y a
pas eu moyen. On n'a pas eu d'explication. On est juste assez de grands
garçons pour pouvoir lire des clauses de loi et pour essayer de les
comprendre. On n'a jamais pu voir quelque chose sur lequel le ministère
peut s'accrocher pour venir prétendre qu'il est illégal
d'interdire certains travaux à des artisans. (17 heures)
M. Marois: M. le Président, pour répondre
rapidement à la question posée par le député, la
prétention était la suivante, mais il y a eu des arguments
aujourd'hui qui nous ont été apportées, en tout cas, qui
méritent d'être scrutés à la loupe. Cela
étant dit, la prétention était la suivante, quand on
regarde l'article 25.08. Il y a l'article 78 de la Loi sur les relations du
travail dans l'industrie de la construction qui dit: L'office est responsable
du placement -c'est le point 1 de l'article 78 - des salariés de la
construction. Il doit, au plus tard le 1er juillet 1976, adopter tout
règlement, etc., a) prévoyant telle et telle chose; b)
prévoyant des critères d'embauche. C'est le texte de loi. La
prétention est qu'une interprétation de l'article 25.08 veut que
cela se trouve indirectement ou directement à édicter des
critères d'embauche comme tels, matière qui relève de
façon exclusive de l'office en vertu de l'article 78.
Cependant, on a entendu une argumentation qui fait une nuance
fondamentale sur cette notion même de critère d'embauche, si j'ai
bien compris l'argumentation. Je la résume. On ne va pas reprendre toute
la discussion. Ce sera examiné au mérite, mais la base de
l'argumentation était celle-là.
Là-dessus, M. le Président, s'il n'y a pas d'autres
interventions, je voudrais très rapidement, pour ne pas allonger, quitte
à...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Maisonneuve.
M. Lalande: Je voudrais cependant que vous n'oubliiez pas
l'article 25.07. Avez-vous répondu à ceci, à l'article
25.07?
M. Marois: Cela couvre l'ensemble des articles 25.07, 25.08.
M. Lalande: Oui.
Le Président (M. Boucher): Oui.
M. Lavallée: C'est simplement pour terminer du
côté de la FTQ-Construction. Cela nous a fait plaisir de
contribuer aux travaux de cette commission tout en espérant que la
lumière apportée lors de ces travaux va éclairer le
ministre, comme il l'a mentionné tout à l'heure. Nous sommes
à son entière disposition et prêts à collaborer pour
essayer de régler cela le plus rapidement possible. Soyez assuré
que, de notre côté aussi, nous allons faire les démarches
possibles afin d'essayer de régler cela entre les parties pour ne pas
que le ministre ait à trancher sur tous ces points-là. Mais,
advenant le cas qu'il n'y ait pas de possibilité de régler les
problèmes entres les parties, soyez assuré qu'on est à
votre entière disposition, si vous avez besoin d'explications
additionnelles.
M. Marois: Merci.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Marois: M. le Président, avant que...
M. Lalande: Si le ministre me le permet, je le laisserai
conclure...
M. Marois: Vous direz un petit mot. Si vous voulez y aller
après, je n'ai pas d'objection. Avant que les parties et les
intervenants nous quittent, je voudrais d'abord remercier tous les intervenants
qui sont venus devant nous depuis ce matin. À leurs commentaires, leurs
recommandations, leurs remarques passablement étoffées, je dois
dire, depuis ce matin, s'ajoutent les questions, les remarques, les
commentaires des collègues autour de la table. Je pense que cela
correspond passablement en fin de journée au souhait que je formulais ce
matin d'apporter un éclairage - c'est vraiment le cas -
intéressant sur bon nombre des points pour nous permettre d'arriver
à quelque chose qui soit le plus juste possible pour les parties.
Je me permets de rappeler - avant que les intervenants nous quittent -
que, forcément, je vais me donner un délai raisonnable. J'ai
parlé de quinze jours. Si on pense que c'est trop court, ce sera trois
semaines. Il me semble que ce serait difficile de déborder la fin
février, je pense, pour des raisons qui paraissent évidentes pour
tout le monde; il y a des opérations qui doivent se passer dans le
domaine de la construction à partir de la fin février, si ma
mémoire est bonne. Il serait peut-être souhaitable que ce soit
fait avant.
Reprenant à nouveau l'échange que nous avions, M. le
Président, le député de Portneuf et moi, et revenant
d'ailleurs sur une suggestion qui a été faite par le
député de Maisonneuve, si cela paraît possible, il me
semble que ce serait souhaitable que les parties puissent se voir pour
respecter profondément le principe qui a été
évoqué souvent tout au long de cette journée pour, le cas
échéant, voir s'il est possible d'en arriver à des
ententes, que ce soit sur des choses qui seraient erronnées, des choses
qui auraient été oubliées, des choses qui n'auraient pas
été négociées, des choses qui paraissent contraire
à l'intérêt public, notamment en ce sens que c'est
illégal. Je vous rappelle simplement le cas des cotisations syndicales.
On pourrait peut-être reprendre quelques autres points et, par la suite,
nous faire part des résultats. J'ajouterais une chose. Je ne sais pas si
cela peut paraître utile si je vais dire une énormité - si
c'est une énormité, j'en assumerai les conséquences - mais
je regrette que l'Association des entrepreneurs en construction du
Québec ne se soit pas présentée devant nous. C'est une
table privilégiée ici pour faire connaître les points de
vue des uns et des autres. Cependant, j'ai reçu une lettre de
l'association me faisant part, notamment, des errata avec une espèce de
procès d'intentions. J'ai essayé d'expliquer. De la même
façon que certains des intervenants l'ont dit, dans la transmission de
textes, parfois, il peut se commettre des erreurs. Cela vaut d'un
côté, cela vaut pour tout le monde. Publiant rapidement le
décret, il y a un certain nombre d'erreurs, et cela va être
corrigé. Ayant cette lettre en main, j'ai bien l'intention d'y donner
suite et de répondre à l'Association des entrepreneurs en
construction du Québec pour leur dire ce que j'ai dit ici, à
cette commission parlementaire, concernant ce bloc d'errata. Si cela
paraît souhaitable et si cela peut être utile - ce n'est
certainement pas mon intention, ce qui serait d'ailleurs complètement
contraire à la loi, de forcer les parties à négocier, pas
du tout - si cela paraît utile et souhaitable, je n'hésiterai
absolument pas, dans la communication que j'aurai, écrite d'abord et
verbale s'il le faut par la suite, avec l'Association des entrepreneurs en
construction, à leur indiquer qu'il nous apparaît souhaitable -
ils feront ce qu'ils voudront, les parties sont libres -que les parties
puissent se rencontrer et qu'on limite au minimum, minimum, minimum
l'intervention que le lieutenant-gouverneur en conseil, le Conseil des
ministres ultimement, pourrait juger nécessaire à la
lumière de cette notion d'intérêt public qui est dans la
loi.
Là-dessus, encore une fois, je voudrais remercier tous les
intervenants et remercier tous les membres de cette commission. Je pense qu'on
a pu faire un travail extrêmement valable qui sera loin d'être
inutile. Je peux vous en donner ma parole.
M. Rivard: Ce n'est pas une énormité, M. le
ministre.
M. Marois: Merci.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Maisonneuve.
M. Lalande: Je voudrais simplement, très
brièvement, concourir avec le ministre pour établir qu'il y a eu
une haute qualité au niveau des interventions. Le travail est
étoffé, bien présenté et avec un ton fortement
constructif pour tout le monde. Je pense qu'à la commission, on
l'apprécie de façon particulière. Je remercie encore une
fois la FTQ de façon particulière, mais tout le monde de
façon générale d'avoir participé si activement
à cette séance.
Le Président (M. Boucher): En tant que président,
il me reste à remercier, au nom de tous les membres de la commission,
les intervenants que nous avons entendus aujourd'hui et à demander au
rapporteur de faire rapport à l'Assemblée nationale au nom des
membres de cette commission.
La commission du travail et de la main-d'oeuvre ajourne ses travaux sine
die.
(Fin de la séance à 17 h 8)