Journal des débats de la Commission des transports et de l'environnement
Version préliminaire
43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions
Le
jeudi 8 février 2024
-
Vol. 47 N° 35
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 48, Loi modifiant principalement le Code de la sécurité routière afin d’introduire des dispositions relatives aux systèmes de détection et d’autres dispositions en matière de sécurité routière
Aller directement au contenu du Journal des débats
11 h (version non révisée)
(Onze heures trente minutes)
Le Président (M. Jacques) : Bonjour
à tous. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des
transports et de l'environnement ouverte.
La commission est réunie afin de procéder
aux consultations particulières et aux auditions publiques sur le projet de loi
n° 48, Loi modifiant principalement le code de la sécurité routière afin d'introduire
des dispositions relatives aux systèmes de détection et d'autres dispositions
en matière de sécurité routière.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. Mme Dufour, Mille-Îles, est remplacée par M. Beauchemin,
Marguerite-Bourgeoys.
Le Président (M. Jacques) : Merci,
Mme la secrétaire. Nous entendrons ce matin les organismes suivants : l'Association
des écoles de conduite du Québec, Vélo Québec, ainsi que M. Antoine Bittar et Mme
Elizabeth Rivera.
Je souhaite maintenant la bienvenue à...
aux représentants de l'Association des écoles de conduite du Québec. Je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé, après
quoi nous procéderons aux échanges avec les membres de la commission. Je vous
invite donc à vous présenter et à débuter votre exposé.
Mme Ferrazzano (Karen) : Merci.
M. le Président, Mme la vice-première ministre et ministre...
11 h 30 (version non révisée)
Mme Ferrazzano (Karen) : ...des
Transports, Mmes et MM. les députés, bonjour, Je suis Karen Ferrazzano, la
présidente des associations des écoles de conduite du Québec, l'AECQ. Je suis
accompagnée de M. Marc Thompson, qui est à ma droite, directeur général de l'association,
ainsi que de M. Francis Bérubé, à ma gauche, qui est le directeur des affaires
provinciales pour le Québec à la FCEI, notre organisation étant membre de la
fédération.
Fondée en 1958, l'AECQ est un organisme
sans but lucratif constituant le plus important regroupement de propriétaires d'écoles
de conduite au Québec. Elle représente ses membres et se veut un modèle de
leadership auprès des décideurs publics, avec qui elle agit en tant que
partenaire. L'AECQ a développé, au cours des années, des produits et services
qui permettent d'offrir aux apprenants des cours de conduite automobile, moto
et véhicule lourd de qualité. Elle fait la promotion du professionnalisme au
sein de l'industrie des écoles de conduite. Elle promeut une image valorisante
des métiers reliés aux écoles de conduite, soutient les organisations axées sur
la sécurité routière et coopère avec elles. Elle contribue à former des
conducteurs coopératifs, sécuritaires et responsables, favorisant une éducation
respectueuse de l'éthique et de bonnes pratiques de la part de toutes les
écoles membres. Au cours des années, elle a contribué à la réduction des
accidents, des blessures et des décès sur nos routes grâce à un enseignement de
la conduite compétent et professionnel.
Nous vous remercions de nous recevoir
aujourd'hui dans le cadre des consultations du projet de la loi n° 48, Loi
modifiant principalement le Code de la sécurité routière. À la lecture de nos
commentaires déposés à la commission, vous constaterez que nous souhaitons
mettre en relief plusieurs déséquilibres dans notre industrie, induits en
raison du plafonnement des tarifs dans notre secteur d'activité. Pour vous en
parler davantage, je cède la parole à Marc Thompson.
M. Thompson (Marc) : Alors, M.
le Président, depuis plus d'une décennie, nous demandons, année après année,
que le marché des cours de conduite au Québec soit véritablement libéralisé. En
dépit de certains progrès, comme l'indexation gouvernementale, nous souhaitons,
par la présente, rappeler que, d'un point de vue entrepreneurial, l'interventionnisme
actuel de l'État dans l'industrie des écoles de conduite est intenable. Nous
considérons, en outre, que la fixation, par le gouvernement, du prix du cours
de conduite prive nos entrepreneurs d'un levier fondamental pour la gestion de
leurs entreprises, c'est-à-dire l'élaboration d'une politique de prix. En
effet, l'approche actuelle du gouvernement, dans cette industrie, occulte
totalement le fait que c'est l'entrepreneur seul qui assume les risques d'affaires
dans une école de conduite. Il s'agit là d'une situation anormale, qui fait en
sorte que le propriétaire d'une école de conduite peut difficilement se
positionner en fonction de ses propres priorités et de la réalité du marché
dans lequel son entreprise évolue.
Il ne semble que personne ne saisisse que
les salaires, l'essence, les coûts de loyer, l'acquisition ou l'entretien des
véhicules, les assurances, les taxes et autres dépenses ont augmenté, au cours
des dernières années, de façon exponentielle. Vous savez, au cours des derniers
mois, nous avons établi un partenariat avec Équiterre et avons fait la
promotion du virage vers les véhicules électriques et vers l'écoconduite.
Malheureusement, beaucoup d'écoles ne peuvent se le permettre, à cause des
coûts engendrés par l'achat des véhicules, car leur marge de manoeuvre est trop
limitée, en raison de la fixation des tarifs par le gouvernement. Le prix du
cours de conduite ne nous permet aucune flexibilité pour la rétention du
personnel enseignant, compte tenu du salaire que nous sommes en mesure de leur
verser. Le taux de roulement a atteint des proportions insupportables. Nous
sommes face au défi de l'inflation et de la pénurie de main-d'œuvre, comme les
autres petites entreprises, et nous n'avons pas les moyens de faire face à la
musique.
Nous avons fait un sondage CROP, et nous
avions au-dessus de 2 000 réponses, et les critères qui font que les gens
choisissent une école, le premier, c'est la proximité, le deuxième, c'est la
qualité, et le troisième, c'est le prix. Et, imaginez-vous, là, 88 % des
gens, dans notre sondage, ne savaient pas que c'est le gouvernement qui fixait
les prix...
M. Thompson (Marc) : ...donc
je trouve qu'il n'y a pas vraiment à se gêner pour enlever le prix, personne ne
va s'en apercevoir, si on regarde ça de façon positive. Alors, je cède la
parole à Francis, qui pourrait vous en dire davantage.
M. Bérubé (Francis) : Merci,
Marc. Évidemment, aussi, en tant que PME, les écoles de conduite subissent,
comme toutes les autres PME, une forte hausse, par exemple, des tarifs
d'électricité, les plus importantes des 25 dernières années, les hausses du
salaire minimum, qui induisent un effet domino sur tous les salaires, sans
oublier les hausses parfois fulgurantes des taxes municipales et des loyers.
Vous savez, lorsqu'on les interroge, les
PME, sur les mesures prises pour combattre l'inflation, il devient évident
qu'au-delà du défi lui-même, les écoles de conduite sont particulièrement
limitées, en termes de marge de manœuvre pour y faire face. En effet, la
première réaction entrepreneuriale est de hausser les prix pour affronter
l'inflation. Cette option est presque inenvisageable pour les écoles de
conduite, étant limitée par l'indexation, justement, des tarifs par le
gouvernement du Québec. Suivant cela, la deuxième réaction des propriétaires de
PME, c'est de travailler plus d'heures pour alléger les coûts de main-d'oeuvre.
Plusieurs propriétaires d'école de conduite vivent cette réalité-là. Donc,
c'est la deuxième, c'est... en fait, dans leur cas, c'est presque la première
façon d'affronter l'inflation, c'est de travailler plus d'heures. Donc, on
parle de semaines, en général, de huit jours. La FCEI avait déposé un rapport
pour démontrer que les heures travaillées, en moyenne, pour les entrepreneurs
en pénurie de main-d'oeuvre, c'étaient des semaines de 60 heures. Finalement,
bon nombre d'entre eux doivent réduire leurs marges bénéficiaires, qui, dans un
contexte réglementé, à l'image des écoles de conduite, voit déjà le citron déjà
pressé au maximum.
En somme, l'État ne peut, à travers sa
régulation, à la fois tabler sur les grands avantages que comporte le secteur
privé pour la délivrance de cours de conduite au Québec, tout en niant de facto
le statut d'entrepreneur de ceux qui desservent la population. Avec le temps,
cette situation incongrue est devenue la source de contraintes inconsidérées
pour l'industrie.
Je veux aussi brièvement aborder la
question de l'article 41 du projet de loi, qui soulève certaines appréhensions.
Dans l'optique où les formations offertes par les écoles de conduite au Québec
puissent être également dispensées par les établissements d'enseignement, nous
nous retrouverons devant un enjeu d'équité majeur. En effet, le secteur privé
ne pourra en aucun cas demeurer compétitif dans un environnement d'affaires où
un service largement subventionné par l'État, avec des capacités nettement
supérieures de rémunération et sans contrainte de fixation des prix qui influe
sur la rentabilité financière, est mis en place. Donc, dans de telles
conditions de marché, plusieurs écoles de conduite pourraient fermer leurs
portes. Cela encouragerait incidemment une demande encore plus grande pour une
desserte du secteur public, celui-ci pouvant remplacer, à terme, dans un
scénario, les écoles privées. En définitive, ce changement, s'il advenait,
pourrait pour engendrer des coûts importants pour l'État, et, en conséquence,
nous jugeons que le gouvernement devrait procéder à une analyse d'impact
réglementaire afin d'en faire les estimations si c'est la direction qui est
prise. Sur ce, je cède la parole à Karine de nouveau. Merci.
• (11 h 40) •
Mme Ferrazzano (Karen) : Merci.
Nous sommes ici aujourd'hui pour parler de la sécurité routière, et ce qu'il
est important de comprendre... la base de la sécurité routière, bien, c'est
nous, les écoles de conduite qui la débutent. On commence avec tout nouveau
conducteur, on lui donne la formation qu'il a besoin pour être sécuritaire,
coopératif et responsable sur la route, et c'est ce qui va engendrer d'avoir un
meilleur bilan routier, et c'est ce qui va amener à avoir une meilleure
sécurité routière. Donc, si, à la base, on ne peut pas payer à nos employés
moniteurs instructeurs leur juste valeur, malheureusement, on est en train de
les perdre, et c'est ce qui se passe aujourd'hui sur le marché.
Donc, on demande à nos formateurs,
moniteurs ou instructeurs, de faire un minimum de 249 heures, avec une note de
passage de 75 %. Donc, ce n'est pas la normale de 60 % qu'on a dans
plusieurs domaines. On leur demande d'être de bons pédagogues, d'excellents...
Vulgarisateurs, excusez-moi des communicateurs, de travailler à des heures
atypiques, le soir, les week-ends, à des heures coupées, des fins de semaine,
d'être ponctuels, d'être patients, d'être à l'écoute de l'élève, d'être calmes,
d'avoir le souci du détail, de démontrer une empathie.
Aussi, on doit mentionner qu'on travaille
aussi avec beaucoup de personnes qui ont des besoins spéciaux, donc des
personnes qui sont anxieuses sur la route, des personnes qui ont des TDAH, des
personnes qui ont, tu sais, des troubles de l'autisme donc, et je peux en
nommer plusieurs. Donc, il va falloir...
Mme Ferrazzano (Karen) : ...qu'on
puisse payer à nos instructeurs moniteurs à leur juste valeur pour qu'ils
puissent gérer cette situation... cette situation-là et travailler avec les
élèves pour les amener à être sécuritaires. Tout cela pour une moyenne de
salaire, en ce moment, bien souvent près du salaire minimum. Nous pourrions
faire mieux, offrir plus, mais le cadre réglementaire nous ne le permet pas.
Nous pensons que notre place, quand nous parlons de sécurité routière, devrait
être valorisée davantage, car tout débute par nous, comme je l'ai dit tantôt,
le premier contact avec la route, c'est avec nos formateurs qu'il se fait,
partir du bon pied avec une formation de qualité, c'est une forme de
prévention. C'est donc avec plaisir que nous allons répondre à vos questions et
échanger avec vous. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup pour votre exposé. Nous allons commencer les échanges avec la partie
gouvernemale... la partie gouvernementale. Donc, je cède la parole à Mme la
ministre pour une période de 13 minutes.
Mme Guilbault :Merci. La partie gouvernemale vous salue, M. le Président,
ainsi que tous les collègues, bien sûr, et salutations aux gens de
l'Association des écoles de conduite, de la FCEI aussi. Merci beaucoup, Mme,
Messieurs, d'être ici avec nous aujourd'hui pour cette dernière journée de
consultations particulières. On a déjà entendu plusieurs groupes et il y a
certains groupes comme vous qui sont assez nichés de par leur mission. Alors,
très intéressant que de vous entendre, d'avoir reçu votre mémoire, puis que
vous preniez la peine de venir nous le présenter en personne. Merci beaucoup
d'être ici et salutations aux collègues, aux équipes aussi, là, je ne sais pas
si j'avais salué tout le monde en ce début de journée. Donc, merci beaucoup.
J'ai envie de commencer, de rebondir sur
un peu la chute de votre exposé, Mme, ce que vous avez dit, je paraphrase, là,
mais vous êtes, en fait, le premier, le tout premier intervenant en quelque
part dans la formation des gens. Et partir du bon pied avec un bon programme,
c'est en quelque sorte une des clés de la prévention. Et moi, je suis
parfaitement d'accord avec vous. Je n'aurais pas pu mieux le dire. C'est
d'ailleurs la raison pour laquelle... Parce que comme je fais toujours la mise
en contexte, là, quand les... on discute avec les groupes, ce projet de loi là
contient un certain nombre d'éléments qui viennent donner suite à des mesures
du plan d'action en sécurité routière qui est la pièce, la plus grosse pièce,
si on veut, là, qui contient une foule de mesures sur six axes. Donc, le projet
de loi vient en opérationnaliser quelques-unes, mais, je dirais, la pièce
maîtresse, c'est vraiment le plan d'action en sécurité routière.
Dans le projet de loi, on aborde la mesure
26, sur la formation obligatoire, qui va devenir obligatoire pour le permis
commercial, mais avant d'en arriver à la formation qui va être introduite, il y
a la mesure 24 aussi, dans notre plan, revoir la formation destinée aux futurs
conducteurs. Et ça, donc, c'est aussi une mesure qui va se faire en
collaboration avec vous, parce qu'on y dit, ici, «poursuivre les activités»...
non, pardon, ce n'est pas la bonne, «revoir le contenu des cours de conduite
afin de mettre les usagers vulnérables au cœur des parcours d'éducation à la
sécurité routière», donc. Et donc ça, pour moi, ça va exactement dans le sens
de ce que vous avez dit, là, revoir la formation, toujours... dans le fond,
c'est un processus d'amélioration continue, les formations, parce que je ne
sais pas depuis combien d'années que vous êtes là-dedans, mais probablement que
vous avez vu déjà plusieurs évolutions au fil des contenus, avec la mouvance
sociale, je dirais, les préoccupations qui apparaissent, les nouveaux
développements, la nouvelle façon d'aménager les territoires, les rues, et tout
ça. Et donc j'aimerais ça vous entendre, comme vous êtes ici aujourd'hui, on a
des gens de la SAAQ, probablement, d'habitude, aussi dans la salle. J'imagine
que vous travaillez beaucoup en collaboration avec la SAAQ. Dans ce processus
de réévaluation puis d'amélioration continue des contenus de formation pour nos
jeunes, parce que vous avez tellement raison, c'est la clé, la clé... Moi, je
me souviens encore de mes cours de conduite avec mon prof... ici, à Sainte-Foy,
et donc je me rappelle encore des phrases chocs qu'il me disait, puis, tu sais,
un bon prof de conduite, je pense que ça peut faire une nette différence dans
le comportement du jeune au moment où il est jeune, puis, après ça, par la
suite.
Donc, de quelle façon est-ce que vous
travaillez avec la SAAQ? De quelle façon est-ce que vous vous faites au...
peut-être pas au quotidien, mais, tu sais, d'année en année, de quelle façon
vous gérez cette réévaluation-là, cette collaboration-là à la faveur du meilleur
programme de formation, toujours le plus, je dirais, moderne, lucide et porteur
possible pour nos jeunes?
Mme Ferrazzano (Karen) : Bien,
on travaille en partenariat avec la SAAQ, donc, comme vous dites, on les
rencontre assez souvent, ça, c'est vrai. Plus en plus, on se rencontre encore,
plus... des rencontres plus rapprochées. Donc, c'était un peu espacé, le temps
que la SAAQ a pris le dessus, après l'AQTR, comme vous le savez très bien, puis
là on a des rencontres plus rapprochées. On a aussi...
Mme Ferrazzano (Karen) : ...des
rencontres avec les regroupements pour venir sur des bases qu'on peut présenter
à la SAAQ ensemble. La SAAQ est en train de travailler sur un nouveau,
justement... donc un nouveau programme qui va évoluer, d'une certaine manière,
mais pour le moment, on ne sait pas encore c'est quoi, cette évolution. Donc,
on attend de voir qu'on voit comment on va grandir avec eux. Je pense que la
SAAQ a dû freiner un moment avec le changement de leur système, là, durant
l'année dernière, comme vous savez très bien, puis il y a eu comme un... un
petit... mais, tu sais, un petit moment, là...
Mme Guilbault :On n'en a pas eu connaissance.
Mme Ferrazzano (Karen) : Oui,
c'est ça... c'est ça, vous êtes bien en bonne connaissance de ça. Donc, je
pense qu'ils ont mis juste ce projet-là un peu de côté, mais ils sont toujours
ouverts à ce qu'on travaille avec eux là-dessus.
Ce que j'aimerais rapporter, un petit
point de plus, si vous permettez, c'est vraiment nos formateurs qu'on doit bien
former, bien entourer. Je vais vous dire, aujourd'hui, à l'association, l'année
passée, on a fait à peu près 13 formations de moniteurs, O.K., de classes
pleines de moniteurs et c'est parce qu'il y a un grand roulement, O.K., ils ne
sont pas payés à leur juste valeur. Et donc ils décident, après avoir commencé
le métier : Bien, écoutez, ça prend trop, je ne suis pas prêt, ce n'est
pas le salaire que je suis payé, ce n'est pas... c'est inadéquat. Donc là ils
se changent vers d'autres industries, malheureusement. Donc, en général, on
faisait trois à quatre formations par année. L'année dernière, on en a fait 13,
puis Marc, l'année d'avant, je pense que c'est à peu près la même chose. Oui,
donc c'est des grosses formations, un gros chiffre qu'on doit entraîner.
Ça fait que, de mon avis à moi et de notre
avis à nous, c'est qu'il faut vraiment cibler notre personnel, O.K., pour
pouvoir qu'eux, ils puissent, justement, bien former ces étudiants-là, ces
nouveaux conducteurs là, avec un nouveau PESR qu'on va travailler avec la SAAQ,
bien sûr.
Mme Guilbault :Vous avez combien de formateurs au sein de l'association?
Combien de personnes environ qui sont des formateurs?
M. Thompson (Marc) : Je
dirais autour de 1 000.
Mme Guilbault :Donc, ce que vous dites, c'est que le taux de roulement a
augmenté, si bien que vous faites plus de formation pour le même bassin de
formateurs.
M. Thompson (Marc) : Oui.
C'est incroyable. Autant de moniteurs qu'instructeurs. Puis on a aussi quelques
cours en anglais, on n'a pas le choix, parce qu'il y a des gens qui sont
anglophones, là. Puis il y a une autre chose aussi, c'est qu'on a pris les
devants sur plusieurs sujets, comme, par exemple, l'écoconduite. On a mis, dans
nos cours aussi, on a mis les véhicules électriques, on a mis aussi les aides à
la conduite qui n'existent pas dans le PESR actuellement. Il y a des...
beaucoup de choses. On a aussi de la formation continue pour les formateurs,
moniteurs, instructeurs, ils appellent ça maintenant formateurs, alors on a...
on fait... puis on met ça aussi sur notre site Internet par la suite. Alors, on
est vraiment proactifs. Puis je pense que notre réputation auprès de la SAAQ
est excellente. On a établi des liens, puis on travaille souvent ensemble, puis
on se téléphone, puis on a même... à quelques occasions, on a les numéros
personnels de certains employés. Ça fait qu'on est vraiment proactifs.
• (11 h 50) •
Puis on a pris une... on a une... on a des
partenariats avec Équiterre, avec l'AQRP, parce que l'AQRP, les gens âgés
souvent ont besoin d'avoir des rafraîchissements ou tout ça, alors on a une
entente avec l'AQRP. Ça, c'est très intéressant. Puis on a plusieurs
partenariats comme ça, Alco Prévention. Alors, on prend bien soin d'éduquer
notre monde et de s'assurer qu'ils transmettent aux élèves. On a aussi beaucoup
de choses qui viennent de la FCEI parce qu'on a un partenariat. Toutes nos
écoles sont membres de la FCEI et c'est l'association qui paie leur abonnement.
Alors, ils ne peuvent pas dire : Je n'ai pas les moyens, on paie pour eux
autres, ça fait qu'à partir... à même la cotisation, si on veut. Alors, on a un
excellent partenariat avec la FCEI. Ils nous aident beaucoup et ils nous
donnent aussi beaucoup de documents. C'est très intéressant pour ça. Alors,
c'est un peu la façon dont on travaille.
Mme Guilbault :Puis pour le contenu, je disais tout à l'heure, vous êtes
probablement... le contenu du PESR, vous êtes probablement, c'est ça, en
amélioration continue. Comment ça fonctionne? Est-ce que vous le modifiez?
Est-ce que vous vous le réanalysez en permanence puis, à une certaine
périodicité, vous faites des changements? Parce que j'imagine, si vous le
changez toujours...
Mme Guilbault :...vous ne pouvez pas toujours reformer vos formateurs,
puis donc comment est-ce que vous procédez pour les mises à jour? Est-ce qu'il
y a une périodicité, est-ce que c'est au besoin, est-ce que c'est en continu?
M. Thompson (Marc) : Malheureusement,
le guide de formation des moniteurs ou des instructeurs commence à être désuet,
il date de 2012. Alors, on est obligé d'en ajouter. Alors, Karen, par exemple,
qui enseigne, qui fait de la formation, puis on a d'autres... on en a... on a
même une personne qui vient de chez Chisasibi, parce qu'on femme aussi... on a
des ententes avec les Cris, on a des ententes aussi avec le Nunavik, avec la
commission scolaire Kativik. Alors, on a des ententes puis on fait de la
formation pour les autochtones. Alors, on est vraiment en avance, je peux dire,
puis ça, ce n'est pas nécessairement dans le PESR, mais on utilise vraiment le
PESR, mais on a rajouté des choses, notre volume est plus important, disons,
que seulement le Carnet d'accès à la route.
Mme Ferrazzano (Karen) : Si
je peux me permettre de rajouter à ça, nos formations pour les membres de la...
donc les écoles de conduite qui sont membres de l'AECQ, on leur donne de la
formation continue. Donc, on a, si vous voulez, un petit groupe qui travaille
sur de la formation continue et qui envoie ces informations-là à tous nos
moniteurs, instructeurs existants. Et comme M. Thompson l'a dit, dans les
formations, nous, les maîtres formateurs qui formons, donc, des moniteurs et
des instructeurs, on rajoute au programme de la SAAQ pour pouvoir combler le
besoin d'aujourd'hui, parce que la réalité de 2012, on s'entend, ce n'est pas
la réalité d'aujourd'hui. Donc, c'est tout du travail qui est fait à l'interne
et tous les rajouts qu'on rajoute pour nos moniteurs, instructeurs.
Et on aimerait partager ça avec la SAAQ
puis on leur a déjà dit. Mais, je pense, votre question à vous, c'était comment
est-ce qu'on fait avec la SAAQ? On n'est pas rendu à travailler encore le PESR
avec la SAAQ. Donc, comme j'ai dit, je pense qu'il y a eu un stop à cause de la
situation de l'année passée, et donc on n'est pas revenus là-dessus, mais ils
vont nous consulter là-dessus pour pouvoir développer ce volet-là.
M. Thompson (Marc) : Mais
c'est parce qu'aussi il faut dire qu'il y a eu certaines choses qui sont
devenues plus prioritaires, comme prenons, par exemple, la classe 1, ce
qui fait que ça retarde le PESR, parce que c'est urgent de régler la
classe 1. Sinon, je pense qu'on serait plus avancé sur PESR. S'il y en a
qui ne savent pas c'est quoi, le PESR, c'est le Programme d'enseignement en
sécurité routière. Alors, à cause de ça, des fois, on a des retards, parce que
le ministère des Transports dit à la SAAQ : Non, non, non, il faudrait
s'occuper de tout ça tout de suite, ça fait que, là, nous autres, on se déplace
un peu, mais une chance, on est capables de s'organiser quand même.
Mme Guilbault :Parce que... En effet, il ne me reste vraiment pas beaucoup
de temps, mais je vais donc l'aborder parce que, c'est ça, vous avez raison, la
mesure... en fait, c'est qu'on a les deux mesures dans le PASR, à ne pas
confondre avec le PESR. Moi, mon plan d'action en sécurité routière, je
l'appelle PASR, mais il y a aussi la mesure, là, puis qui est l'objet, entre
autres, de votre mémoire : rendre obligatoire la formation pour
l'obtention d'un permis pour conduire un véhicule commercial.
Et donc, là, ce que vous dites, c'est
qu'on vous a demandé de prioriser le nouveau contenu de formation qui va
devenir obligatoire avec, pour échéance, cette année, alors que, l'autre, on
avait donné en échéance, en continu, 2024, 2028, en se disant justement que ça
allait être un travail peut-être de plus longue haleine pour refaire une mise à
jour complète, à la lumière, en plus, de ce qu'on a mis là-dedans, en termes de
nouveaux aménagements, et tout ça, les zones scolaires, et tout, que ça se
reflète dans la formation de nos jeunes.
Mais en terminant... Il me reste quoi, une
minute?
Le Président (M. Jacques) : 22 secondes.
Mme Guilbault :Ah bien, 22 secondes, ça fait qu'en fait je ne pourrai
même pas poser de question, mais simplement vous remercier. Et on a besoin de
vous pour pouvoir mener à terme ces deux mesures-là. Alors, un très, très grand
merci pour votre travail.
Mme Ferrazzano (Karen) : Merci
à vous.
Le Président (M. Jacques) : Merci.
Ceci met un terme aux échanges avec la partie gouvernementale. Je cède
maintenant la parole à la... à l'opposition officielle, à M. le député de
Nelligan.
M. Derraji : Oui. Merci,
M. le Président. Bienvenue à vous trois, et je trouve ça intéressant que vous
êtes venus avec l'AECQ que je tiens à saluer, donc, parce qu'au niveau des
études qu'elle met sur la table... Et vous avez vu le Parti libéral depuis le
retour, il a un thème, c'est le thème des PME. Moi, quand j'ai lu votre mémoire,
il y avait pas mal d'informations, mais l'information qui m'a le plus touché,
c'est l'état de situation de votre industrie. Parce qu'on vient... on veut bien
dire aujourd'hui qu'on veut compter sur vous en termes de collaboration, mais
si votre industrie souffre, on ne peut plus compter sur vous. Il ne faut pas se
raconter des histoires. Donc, pouvez juste nous éclairer sur vos demandes dans
ce cadre. Parce que là, j'ai vu les fixations de tarifs...
M. Derraji : ...et vous avez
même dit que ça affecte un peu la survie de votre industrie. Donc moi, je pense
qu'on ne peut pas passer à côté de cela. Si votre industrie ne va bien... ne va
pas bien, on manque un bout important dans la chaîne de la sécurité routière.
Mme Ferrazzano (Karen) : Effectivement.
C'est... on est les premiers répondants, si vous voulez, de la sécurité
routière, et donc notre demande à nous aujourd'hui, c'est d'enlever justement
le plafonnier du prix des cours de conduite pour pouvoir atténuer à toutes les
augmentations qu'il y a eues. Que ça soit salaires, dépenses, loyer,
assurances, tout a augmenté et de beaucoup, mais aussi les salaires d'employés
pour qu'on puisse leur payer leur juste value comme j'ai dit un peu plus tôt,
pour qu'ils puissent justement fournir ce travail-là pour la sécurité routière,
parce qu'on ne veut pas enfreigner la sécurité routière, étant donné qu'on en
pourra plus avoir de bons moniteurs, instructeurs dans le prix.
M. Derraji : Oui. Mais ça, je
suis d'accord. Mon... notre porte-parole en économie est juste à côté de moi.
Mme Ferrazzano (Karen) : Oui.
M. Derraji : Moi, j'aimerais
bien qu'on parle de la situation économique parce que je pense que vous êtes le
premier groupe qui nous partage cette situation. On ne peut pas passer à côté,
surtout quand vous êtes dans toutes les régions du Québec. Parlez-nous de la
situation avec du détail, parce que, là, j'ai vu le coût de l'énergie, j'ai vu
la pression sur le salaire minimum, j'ai vu les hausses parfois fulgurantes des
taxes municipales. Ça, c'est réel, c'est des coûts directs qui affectent votre
industrie. Donc, élaborez plus comme ça la plupart des élus vont être
conscientisés par rapport à la réalité de votre industrie, et par la suite, on
va parler de l'impact parce qu'on a besoin de vous. Si j'ai des écoles qui
ferment demain, je ne pense pas qu'on aide le secteur de la sécurité routière,
à part que c'est très important d'un point de vue économique.
M. Bérubé (Francis) : Bien,
si je peux ajouter, en fait, c'est parce... en fait, la réalité actuelle des
PME est difficile, je pense que je n'apprends pas rien à personne. Là, on voit,
dans les journaux, des fermetures de plus en plus régulières. C'est parce que
la réalité, c'est que les écoles de conduite... ce que j'expliquais tantôt,
c'est que les mesures pour affronter l'inflation actuellement, c'est... c'est
d'augmenter les prix. Mais la réglementation gouvernementale actuellement ne
permet pas aux entrepreneurs des écoles de conduite d'augmenter ces prix-là.
Donc la première réaction pour survivre, il ne peut pas la mettre en œuvre,
cette augmentation des prix.
Ensuite, c'est de... les trois premières
réactions entrepreneuriales des PME ensuite, c'est le... c'est de travailler
plus d'heures. Mais je parlais avec les entrepreneurs du secteur, puis c'est
des semaines... c'est sept jours sur sept, là, pratiquement, là. Donc, on vient
épuiser ces entrepreneurs-là parce que d'abord ils cherchent à compenser en
travaillant plus d'heures. L'autre élément, c'est... c'est de puiser dans ses
marges bénéficiaires, mais les marges bénéficiaires dans ce secteur-là sont
extrêmement limitées. On est dans un contexte de pénurie de main-d'œuvre. Ils
ne peuvent pas offrir des salaires compétitifs sur le marché. Puis, même s'il y
a une... une indexation des tarifs, là, même s'il y a une indexation, là,
l'IPC, là, ce n'est pas la... ce n'est pas une mesure qui est nécessairement
représentative pour toutes les entreprises. Puis certains éléments de
l'inflation peuvent être plus importants. Par exemple, l'augmentation des
carburants va affecter de façon plus disproportionnée les écoles de conduite.
La pénurie de main-d'œuvre à Montréal est importante, mais elle est plus aiguë
en Abitibi-Témiscamingue, et ils vont être en compétition pour le marché du
travail avec, par exemple, des minières qui offrent des salaires très
compétitifs, à Ottawa, avec la limite avec la fonction publique. Donc, il y a
tous ces éléments-là. Donc, même si l'indexation, ça ne demeure pas une mesure
fiable pour prendre une photographie de la réalité entrepreneuriale de ces
écoles-là en fait.
• (12 heures) •
M. Derraji : Oui. Vous avez
marqué, dans votre mémoire, parmi les 63 juridictions aux États-Unis et au
Canada, le Québec est la seule qui impose aux écoles de conduite un prix
maximum. Moi, je vous demande aujourd'hui, d'une manière très claire, c'est
quoi votre demande? Parce que là, il y a pas mal de choses. Il y a des choses
directes et des choses indirectes qui affectent votre industrie, mais on
s'entend que tout le monde autour de la table est conscient de l'apport des
écoles de conduite. Mme la ministre vient de le mentionner. Mais maintenant,
concrètement, vous êtes à la FCEI, vous êtes... vous représentez les écoles.
C'est quoi vos demandes concrètement sur la table pour que vous puissiez jouer
votre rôle convenablement?
M. Thompson (Marc) : C'est...
c'est enlever le prix plafond et laisser le libre marché.
M. Derraji : Comme dans le
cas des motos, lancer... des motos.
M. Thompson (Marc) : Comme
dans les motos, et dans les motos, là, il n'y a jamais eu d'exagération,
jamais. C'est... Le marché et stable à peu près partout à travers la province.
Les prix se ressemblent beaucoup sans qu'ils soient fixés là.
M. Derraji : Oui.
M. Thompson (Marc) : Puis je
suis certain... puis d'ailleurs...
12 h (version non révisée)
M. Thompson (Marc) : ...avant
qu'il y ait le cours obligatoire, le marché des cours de conduite existait et
il n'y avait pas de guerre de prix. Il n'y avait rien de tout ça. Ça fait que
les gens, là...
M. Derraji : Parlez-nous
des prix. Parce que ce n'est pas tout le monde qui est au courant de ce qui se
passe. Parlez-nous des prix. Dites-nous qu'est ce qu'il se passe dans l'industrie,
pourquoi c'est très important aujourd'hui pour vous de demander une
libéralisation, comme à l'image de ce qui se passe au niveau de l'enseignement
de la moto. Mais parlez-nous plus ou moins c'est quoi les... c'est quoi la
tarification? Croyez qu'aujourd'hui, là, on ne peut plus aller là, là. Ce prix
maximum, ça ne nous aide pas.
M. Thompson (Marc) : Non,
parce qu'il y a des besoins qui sont différents, dépendant des endroits,
premièrement. Alors, il y a des endroits aussi où les salaires sont beaucoup
plus élevés. Puis ensuite le cours de conduite, le prix n'est pas un frein,
malgré ce que certains pensent, n'est pas un frein au fait d'aller chercher son
permis de conduire. Ça coûte moins cher que... Souvent, ça coûte moins cher que
d'avoir un téléphone cellulaire. Mais le cours de conduite sert toute, toute
votre vie. Puis vous le payez une fois puis ça sert toute votre vie. Ça fait
que même s'il monte à 1 200 $ ou 1 300 $, ça ne fera pas
une différence. Puis ensuite la concurrence va exister de toute façon.
Puis un des problèmes qu'il y a
actuellement, c'est que, prenons par exemple les voitures, la moyenne d'âge des
voitures des écoles de conduite actuellement est de huit ans. Et ça, ce n'est
pas moi qui l'invente, là, ça vient des... des ingénieurs de la SAAQ qui s'occupent
de... les vérifications. Alors, ça, c'est un autre exemple. Alors, quand les
gens... Beaucoup ont acheté des véhicules électriques, là.
M. Derraji : Oui, j'en
ai vu, oui.
M. Thompson (Marc) : On
en... On en commande, puis on pousse là-dessus. Puis on a un partenariat d'ailleurs
avec une entreprise pour les aider. Comme on a un partenariat avec les
assurances, avec une compagnie d'assurance. Tu sais, on essaie de sauver de l'argent,
mais c'est... Ce n'est pas suffisant. Puis c'est certain que si le plafond est
enlevé, il y a des endroits puis il y a des gens qui vont augmenter leurs prix.
Mais le prix, par contre, ils vont être clairs sur le... Parce qu'il ne faut
pas oublier une chose, hein, ceux qui n'arrivent pas, ils trouvent des moyens d'arriver,
en dehors du... Puis ça, je pense que la SAAQ est au courant, puis tout le
monde est au courant.
Alors, c'est certain que ça, ça va se
résorber. Tu sais, il n'y aura pas de monde qui va vendre des livres à
80 $, là. Pourtant ça existe, là. Il ne faut pas se faire d'illusions.
Peut-être que ça vous fait rire, là, mais nous, on assiste à la Driving School
Association of America. On va là aux conférences à tous les ans. Puis à un
moment donné, il y a un de mes administrateurs qui m'a demandé : Coudon,
le Québec, c'est-tu un pays... un pays communiste? Parce que le prix des cours
était fixé. Ha! Ha! Ha!
M. Derraji : Pas sûr que
Mme la ministre est communiste, je peux vous le dire.
Mme Guilbault :Non, c'est certain.
M. Thompson (Marc) : Puis
ensuite, écoutez, même si Mme la ministre dit qu'il faut des améliorations au
PESR, puis que, nous, on le croit, puis tout ça, il reste que c'est le meilleur
cours qu'il y a en Amérique du Nord. Moi, là, j'ai les cours des 51 états
américains, puis de tout ce qui se passe au Canada. J'ai des communications
avec les gens de la Colombie-Britannique. Il n'y a pas de cours meilleur que le
cours PESR que nous avons au Québec. Sauf qu'il y a plus d'heures que partout,
on a 15 heures de pratique alors que le Minnesota, par exemple, en a sept.
Alors, tu sais, tout ça, là, il y a de l'argent derrière de ça.
M. Derraji : Il me reste
et une minute. Je vous remercie parce que ça a été très clair par rapport à ce
plaidoyer. Est-ce que vous avez vu l'étude d'impact réglementaire publiée? Et
il y a eu aussi un mémoire qui a été déposé au Conseil des ministres. Vous avez
vu les deux?
M. Bérubé (Francis) : L'étude
d'impact réglementaire...
M. Derraji : Oui, oui.
Et c'était pour quoi, votre constat?
M. Bérubé (Francis) : Bien,
écoutez, nous, on soulève un des éléments, là, qui n'a pas été analysé, mais
une des choses qu'on demande, c'est que, si, par exemple, il y a un transfert
vers le secteur public, s'il y a une reconnaissance des établissements d'enseignement,
ça va nécessairement engendrer des coûts minimalement pour l'État puis ça peut
avoir un impact aussi sur les entreprises, tu sais, parce qu'il y aurait des
possibilités de fermeture. Parce que compétitionner contre un secteur largement
subventionné qui ne vit pas avec les mêmes contraintes que les entreprises
privées, ça va être impossible. Ça fait que c'est... Donc, c'est ça l'enjeu.
Donc, ça, c'est un des éléments qu'on juge qui devrait être évalué, s'il y a un
transfert, en fait, des cours de conduite vers le secteur public. Et la porte
nous semble ouverte avec ce qui est dans le projet de loi.
M. Derraji : O.K. Je
vous remercie pour votre passage. Et sûrement on fera un autre suivi avec vous.
Merci.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup, M. le député de Nelligan. Je cède donc la parole à M. le député de
Taschereau, pour 3 min 30 s
M. Grandmont : Merci, M.
le Président. On a peu de temps. J'aimerais ça couvrir deux questions avec
vous. La première concerne les prix. On en a beaucoup parlé. Puis j'ai quand
même, moi, une certaine crainte que, si on est...
M. Grandmont : ...les prix,
bien, dans certains secteurs du Québec, la Côte-Nord, l'Abitibi par exemple, on
se retrouve avec... Il y a peu de joueurs, il y a peu d'écoles de conduite, on
pourrait se retrouver avec des hausses de prix assez importantes. On n'a pas
l'offre et la demande pour être capable, justement, de créer cette
compétition-là. Est-ce que, si on ne va pas dans ce sens-là, une augmentation
des... des prix fixée par règlement pourrait répondre à votre demande aussi?
M. Thompson (Marc) : Bien, on
a ouvert dernièrement, là, à Malartic, Rouyn... puis là il y a Amos qui
s'ouvre, ça fait qu'il y en a des nouvelles écoles qui s'ouvrent dans ce
coin-là. Puis moi, je sais que les prix qu'il y a là-bas sont maintenus près
du... très près du prix maximum fixé par le gouvernement. Puis je n'ai jamais
vu des écoles augmenter leur nombre d'élèves comme il augmente actuellement.
J'ai vu une école, là, aller chercher des centaines d'élèves en l'espace d'un
an. C'est... c'est incroyable. Ça fait que le prix... Comme je disais, là, le
prix, c'est le facteur trois...
M. Grandmont : Oui. Bien,
c'est parce qu'il est fixe, en fait.
M. Thompson (Marc) : ...du
cours de conduite...
M. Grandmont : Donc, c'est
sûr que ce n'est pas un critère.
M. Thompson (Marc) : ...ça
fait que...
Mme Ferrazzano (Karen) : Je
veux rajouter un petit point. Il ne faut pas oublier que dans le temps il y
avait un moratoire, donc on ne pouvait pas ouvrir des écoles de conduite un peu
partout. Tandis qu'aujourd'hui on n'a plus ça, donc la compétition va être
saine. Nous, en tant qu'association, si on va trouver que, disons, en Abitibi,
je ne sais pas, le prix devient 4 000 $, on va dire : Bien,
c'est exagéré. On va peut être suggérer à quelqu'un d'aller ouvrir une école
là, avoir un prix qui est plus normal, et donc ça va faire que la compétition
va ramener le prix vers le bas.
M. Grandmont : O.K. On aura
sûrement l'occasion d'en reparler pendant l'étude détaillée, là, mais je... En
tout cas, c'est parce que je veux vraiment couvrir l'autre... l'autre point
aussi, qui est important pour moi, là. Mais je ne suis pas tout à fait
convaincu, mais on pourra en jaser.
Lors des consultations en 2017, il y avait
des intervenants qui avaient émis l'hypothèse qu'on devrait faire... refaire
des requalifications du permis de conduire, au moins d'un point de vue
théorique. C'est-à-dire que les gens refassent une formation comme dans
différents domaines, dans le travail en général, les cours de sauveteur pour donner
un autre exemple. Qu'est-ce que vous pensez de ça l'idée de, périodiquement,
aux cinq, aux 10 ans de demander aux Québécois et aux Québécoises de
refaire une requalification, une revérification, une évaluation?
Mme Ferrazzano (Karen) : Absolument
d'accord avec vous. Moi, je donne des formations au niveau corporatif, donc
c'est des gens qui conduisent depuis 30 et 40 ans, et les erreurs que ces
gens-là font dans les voitures... ils ont besoin d'un rafraîchissement. Ce
n'est pas parce qu'ils ne connaissent pas la loi ou ils ne veulent pas
appliquer la loi...
M. Grandmont : La loi change.
Mme Ferrazzano (Karen) : ...mais
c'est parce qu'en tant... conducteur... Premièrement, la loi change, mais
deuxièmement, en tant que conducteur, on tombe avec des habitudes. Ah! je n'ai
pas mis mon clignotant, il n'y a rien qui s'est passé. Je ne l'ai pas mis
encore, il n'y a rien qui s'est passé. Ça fait que je tombe à ne plus le
mettre, ça devient comme une habitude. Mais, tu sais, là, la journée où il fallait
que je mette mon clignotant puis je ne l'ai pas mis, là c'est... on se rend
compte, bien, il a eu un accident. Donc, c'est très important de faire un
rafraîchissement au moins à tous les 10 ans.
M. Grandmont : Là, vous
n'avez rien dans votre mémoire par rapport à ça, à ma connaissance.
Mme Ferrazzano (Karen) : Non.
M. Grandmont : Si vous avez
déjà des idées là-dessus, peut-être juste les envoyer à la commission...
Mme Ferrazzano (Karen) : Oui,
ça va me faire plaisir.
M. Grandmont : ...pour qu'on
puisse en prendre connaissance. On pourrait éventuellement en discuter, là.
Mme Ferrazzano (Karen) : Ça
va me faire absolument plaisir.
M. Grandmont : Je ne dis pas
qu'on prend position là-dessus, mais...
M. Thompson (Marc) : Actuellement,
comme... comme je disais, on le fait avec l'AQRP pour les retraités provinciaux
du secteur...
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup. Ceci met fin aux échanges avec les membres de la commission. Je vous
remercie pour votre participation. Et je suspends quelques instants pour faire
place au prochain groupe.
(Suspension à 12 h 10)
(Reprise à 12 h 12)
Le Président (M. Jacques) : Nous
reprenons nos travaux. Et je souhaite la bienvenue à la représentante de Vélo
Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de
la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à débuter votre exposé.
Mme Bebronne (Magali) : Merci,
M. le Président. Mme la ministre, Mesdames et Messieurs les membres de la
commission, représentants du ministère des Transports et de la Société
d'assurance automobile du Québec, merci d'avoir convié Vélo Québec à ces
auditions dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 48. Je m'appelle
Magali Bebronne et je suis directrice des programmes chez Vélo Québec.
Depuis plus de 50 ans, Vélo Québec
fait la promotion du vélo sous toutes ses formes, pour le tourisme, pour les
loisirs, mais, bien sûr et plus que jamais, comme moyen de transport. Le Vélo
Québec est connu pour son expertise en matière de vélo, mais vous savez
peut-être moins que nous nous préoccupons depuis bien longtemps de la sécurité
des piétons et particulièrement des déplacements actifs et sécuritaires des
enfants vers l'école.
Depuis 2005, avec le programme À pied, à
vélo, ville active, Vélo Québec et ses partenaires ont réalisé plus de
675 plans de déplacements scolaires dans toutes les régions du Québec. En
plus du guide technique aménagé pour les piétons et les cyclistes, Vélo Québec
publiera également en 2024 un guide de sécurisation des abords des écoles, avec
le soutien du Fonds de la sécurité routière.
D'emblée, nous tenons à saluer le plan d'action
en sécurité routière très exhaustif présenté par Mme la ministre en août
dernier et le dépôt rapide de ce projet de loi afin de concrétiser sans tarder
certaines des mesures phares de ce plan. Ce leadership fort est nécessaire et
bienvenu face à la dégradation récente du bilan routier, en particulier chez
les usagers non protégés.
Dans le mémoire que nous vous avons
soumis, vous retrouverez plusieurs propositions qui vous paraîtront parfois
dépasser la portée de ce projet de loi, mais qui nous paraissent indissociables
d'une stratégie de sécurité routière.
Notre première proposition porte sur le
principe de prudence dont vous ont également entretenus nos collègues de
Piétons Québec. En tant que représentants d'usagers dits vulnérables, nous
tenons à réitérer, comme nous le faisons d'ailleurs depuis l'introduction du
principe de prudence en 2018 dans le CSR, que le troisième alinéa de
l'article 3.1 vient affaiblir toute la portée du principe cardinal supposé
guider nos approches en sécurité routière. Alors qu'il devrait établir une
hiérarchie claire de responsabilités entre les différents usagers de la route,
avec cet alinéa, on vient créer une fausse équivalence entre l'obligation de se
protéger et l'obligation de ne pas mettre en danger les autres.
C'est problématique. Conduire un véhicule
de deux tonnes ou plus vient avec de grandes responsabilités, comme le rappelle
très pertinemment d'ailleurs votre porte-parole Katherine Levac, dans
l'excellente campagne qui soutient le plan d'action en sécurité routière. Cela
ne peut en aucun cas être mis sur un pied d'égalité avec le fait de se déplacer
à pied ou à vélo. Malheureusement, la façon dont l'article 3.1 est rédigé
ouvre grand la porte aux dérives.
Nous avons ainsi dénoncé récemment des
messages de partage de la route qui mettaient davantage, voire exclusivement,
l'emphase sur des comportements attendus des usagers vulnérables pour assurer
leur propre sécurité plutôt que sur la responsabilité des plus gros envers les
plus vulnérables. Nous proposons donc, dans un premier temps, de corriger cette
incongruité pour aligner notre principe de prudence sur ceux adoptés par
d'autres pays et conventions.
Dans un second temps, nous aimerions que
cet article soit suivi d'effets et puisse ouvrir la fois... la voie, pardon, à
des sanctions accrues lorsqu'un comportement dangereux met à risque un usager
ou une usagère non protégée.
Notre deuxième orientation vient rappeler
l'importance, comme dans n'importe quelle stratégie de santé et sécurité, de
réduire le risque à la source. En sécurité routière, le risque de décès et de
blessures graves est directement proportionnel au nombre de déplacements
motorisés. La stratégie Réduire, transférer, améliorer, mise de l'avant par
notre politique de mobilité durable, est donc sans doute un de nos meilleurs
outils pour améliorer la sécurité routière. Réduire le nombre de trajets à
effectuer et provoquer un transfert modal vers des modes plus durables qui sont
aussi des modes plus sécuritaires, c'est une stratégie légitime de sécurité
routière. Développer le transport en commun, multiplier les aménagements
cyclables, rendre confortables les déplacements à pied, améliorer
l'intermodalité sont autant de stratégies qui doivent permettre à ces modes...
Mme Bebronne (Magali) : ...d'être
plus attractifs, mais aussi plus compétitifs par rapport à l'auto solo. C'est
dans cet esprit que nous vous soumettons plusieurs propositions qui
permettraient de rendre plus efficaces et attrayants les déplacements à vélo.
Cela passe par des mesures très concrètes, comme la création de passages
prioritaires pour cyclistes, mais aussi l'autorisation pour les cyclistes de
traiter les arrêts comme des céder le passage, comme c'est déjà le cas dans
huit États américains.
Sur les questions très spécifiques aux
vélos, permettez-moi d'exprimer notre très grande déception que ce projet de
loi n'ait pas permis de régler une bonne fois pour toute la question de la
définition des vélos à assistance électrique que nous attendons maintenant depuis
quatre ans. Alors que les engins de tout acabit prennent d'assaut les pistes
cyclables du Québec, y compris des scooters, voire des motos électriques qui se
font passer pour des vélos à assistance électrique à cause du flou
réglementaire, nous sommes préoccupés que le resserrement tant attendu par nos
usagères et usagers de pistes cyclables se fasse toujours attendre.
Quant aux appareils de contrôle
automatisés, nous soutenons entièrement la volonté gouvernementale de massifier
et de simplifier le traitement des infractions constatables par des ACA. Comme
d'autres groupes avant nous, nous sommes d'avis que Québec devrait viser un
taux de couverture suffisant pour réellement changer de paradigme. Notre
approche ne devrait pas être de saupoudrer quelques photoradars dont les
automobilistes connaissent par cœur les emplacements, mais bien de créer une
conscience permanente que tout excès de vitesse ou feu rouge brûlé pourrait se
solder par une sanction pécuniaire. Ce que l'on vise, ce n'est pas le respect de
500 radars, mais bien le respect de l'ensemble des vitesses et de la
signalisation présentes sur notre territoire.
Nous sommes conscients que la demande pour
les systèmes de détection sera très forte et nous comprenons que ceux-ci se
concentrent en premier lieu sur des infractions de vitesse et de respect des
feux rouges. Nous vous... nous vous soumettons tout de même dans notre mémoire
des exemples d'autres infractions qui pourraient être surveillées de façon
automatique, notamment celles qui ont pour effet de mettre à risque les
cyclistes le long d'axes cyclables très achalandés. On pourrait ainsi assurer
un meilleur respect des feux verts en forme de flèche qui offrent aux cyclistes
des phases de traverse protégées des virages de véhicules.
Je vous le disais, chez Vélo Québec, les
déplacements actifs des élèves vers l'école sont une préoccupation de longue
date. Dans les centaines de plans de déplacements scolaires que nous avons
réalisés, nous prenons toujours soin de cartographier les codes postaux des
élèves fréquentant une école afin d'identifier les cheminements prioritaires à
sécuriser pour répondre aux besoins des familles. Vous trouverez un exemple de
ce genre de cartographie dans notre mémoire. Cela permet de constater en un
coup d'œil l'ensemble des rues où circulent matin et soir les familles qui
vivent à moins de 15 minutes de marche de l'école. Et, sans surprise, on
est bien loin de la simple zone scolaire. C'est pourquoi nous nous joignons à
tous les groupes qui, ces derniers jours, sont venus vous dire que la
sécurisation des déplacements vers l'école devrait viser un périmètre bien plus
vaste que les abords immédiats du terrain de l'école. C'est aussi notre
conviction. Et j'ajouterais que, même si nous avons toujours priorisé les
déplacements à pied, il faudra à l'avenir également proposer des voies
cyclables sécuritaires dans les diagnostics et les mesures de sécurisation. Il
nous paraît inconcevable qu'aujourd'hui encore, certaines écoles interdisent
carrément à leurs élèves de venir à vélo.
En complément des efforts de sécurisation
physique des écoles qui sont à juste titre priorisés par le plan d'action
gouvernemental, permettez-moi de sensibiliser les membres de cette commission
aux efforts d'éducation que Vélo Québec déploie depuis 2015 pour former les
jeunes du primaire à la pratique sécuritaire et autonome du vélo. Avec son
programme cycliste averti, Vélo Québec s'est inspiré des meilleures pratiques
pour offrir une éducation au vélo exhaustive comprenant des occasions de
pratique sur route, un examen individuel et un bulletin personnalisé pour
chaque élève participant. Si nous avons pu compter ces dernières années sur le
soutien de la SAAQ, du ministère de l'Éducation et du ministère de
l'Environnement pour accompagner la croissance du programme, nous espérons que
celui-ci continuera à bénéficier d'un soutien continu et prévisible pour les
années à venir afin que nous puissions à notre tour répondre à la demande des
milieux scolaires pour cette initiative.
• (12 h 20) •
Je terminerai ce court exposé en abordant
la question des données. Vous le savez sans doute, ce qu'on ne mesure pas ne
compte pas. Alors, quand on regarde les données de sécurité routière qui sont
compilées par la SAAQ, il faut garder à l'esprit que celles-ci occultent toutes
les blessures subies par des usagers vulnérables sur la voie publique
lorsqu'aucun véhicule moteur n'est impliqué. Alors qu'un automobiliste est
comptabilisé et peut être indemnisé pour s'être blessé en déneigeant son auto,
les piétons et cyclistes blessés dans des collisions vélo, vélo, vélo,
cycliste, vélo, piéton ou même vélo, scooter électrique se faisant passer pour
un vélo électrique ne sont ni comptabilisées ni indemnisées. Lors du projet de
loi n° 22 présenté par le ministre des Transports de l'époque, M. Bonnardel,
nous avons plaidé pour une indemnisation universelle des usagers de la route.
Le ministre a alors mandaté un groupe de travail de la SAAQ afin de quantifier
ces victimes invisibles et proposer des avenues pour leur indemnisation. Ce
groupe doit rendre ses conclusions dans les prochaines semaines. Nous avons
hâte d'en prendre connaissance et nous espérons qu'il sera donné rapidement
suite à ses recommandations éventuelles. Alors que les Québécois bénéficient
pour une troisième...
Mme Bebronne (Magali) : ...troisième
année consécutive d'un congé de contribution d'assurance sur leur permis de
conduire, nous pensons qu'il n'y aurait pas de meilleur moment pour faire ce
choix de société. Je vous remercie pour votre attention.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup pour votre exposé. Nous allons commencer des échanges avec les membres
de la commission, avec Mme la ministre des Transports et de la Mobilité durable
pour 15 minutes.
Mme Guilbault :Oui, merci, merci, merci beaucoup, M. le Président. Merci à
vous d'être ici avec nous aujourd'hui et de vous être déplacée ici pour nous
présenter le mémoire très intéressant. Nous, on était heureux d'avoir
Vélo-Québec qui venait, bien, d'abord saluer le plan, c'est toujours agréable
d'avoir des gens qui viennent saluer le plan, mais amener justement l'angle des
cyclistes, et je trouve ça intéressant. Il y a plusieurs choses dans la
présentation, mais il y a peut-être certains éléments sur lesquels je
voudrais... je voudrais revenir, puis le premier qui me saute aux yeux, moi, en
tout cas, quand je regarde le projet de loi, parce que dans le... Je le disais,
le Plan d'action sécurité routière, il contient 27 mesures, vous l'avez
regardé certainement dans son ensemble, qui touchent pour une grande part, soit
directement, soit indirectement, les cyclistes. C'est sûr qu'il y a plusieurs
choses. Il y a six axes, mais ultimement... Puis la campagne de communication,
notamment avec... avec Catherine Levac, dont on est bien fier aussi.
Mais un des éléments qui est important
pour la répression, puis là on pourra parler aussi des systèmes de détection,
mais c'est l'augmentation des amendes qu'on prévoit en l'article 61, 62,
63, je pense, ou quelque chose comme ça, en tout cas à partir de
l'article 61. Alors, je me demandais si... bien, premièrement, est-ce que
vous avez eu l'occasion de le regarder un peu plus en détail. Parce que moi,
je... tu sais, je me suis fait sortir la liste des articles du CSR qu'on
modifie, puis vous voyez cinq, six, sept. Il y a au minimum sept infractions
qui touchent les cyclistes qui vont augmenter, tu sais, le conducteur qui a
suivi une distance qui n'était pas prudente, conducteur qui, en effectuant un
virage, n'a pas respecté la priorité accordée aux piétons et aux cyclistes à
une intersection, le conducteur accédant propriété privée n'a pas cédé le
passage aux véhicules, aux cyclistes ou aux piétons, conducteur face à un feu
rouge, n'a pas immobilisé son véhicule avant d'effectuer un virage à droite et n'a
pas cédé le passage aux piétons ou aux cyclistes, conducteur faisant face à un
feu de circulation défectueux ou inopérant, n'a pas immobilisé son véhicule et
n'a pas cédé le passage aux piétons ou aux cyclistes conducteurs faisant face à
un panneau d'arrêt, n'a pas immobilisé son véhicule et n'a pas cédé le passage
aux piétons ou aux cyclistes, et le conducteur faisant face à un panneau
d'arrêt n'a pas immobilisé son véhicule et n'a pas cédé le passage aux piétons
ou aux cyclistes.
Je le dis parce qu'hier on se disait que
la façon dont le projet de loi est rédigé, c'est des renvois d'article en
article, puis, ultimement, on ne sait pas vraiment clairement, dans le projet
de loi comme tel, de quoi on parle. Ça fait que je pense que, pour le bénéfice
de tout le monde, de savoir qu'il y a au minimum six articles du CSR qui vont
être modifiés avec des amendes à la hausse, qui touchent les cyclistes puis les
piétons aussi, mais aujourd'hui, parlons des cyclistes, alors moi, je trouve
que c'est une bonne chose. Ça fait que je me demandais, vous, ce que vous en
pensiez. Est-ce qu'on fait le tour? Est-ce qu'il y a des choses que vous auriez
ajoutées, modifiées, que vous n'auriez peu être pas... des articles que vous
auriez peut être pas mis là ou... ou autres observations là dessus?
Mme Bebronne (Magali) : Écoutez,
on avait bien pris connaissance de ces changements-là. C'est sûr que c'est
fastidieux dans un projet de loi, mais on avait bien fait nos devoirs. C'est
une excellente chose. Je pense que Piétons Québec avait bien mis de l'avant
comment des situations qui résultent un peu... qui ont les mêmes résultats en
termes de non-respect de la priorité piétonne, étaient traités complètement
différemment en termes de montants des sanctions, en termes de points
d'inaptitude également. Puis c'est malheureux, mais j'ai le sentiment que
parfois, au Québec, on respecte mieux un panneau qu'on ne respecte un humain.
Alors, de remettre de l'avant, d'harmoniser d'une part et puis de rehausser les
sanctions pour toutes ces infractions-là qui sont en fait un refus de priorité,
c'est une excellente chose. On le salue, on en est bien content.
Mme Guilbault :Puis est-ce que... Selon ce que vous observez, parce que
c'est sûr qu'il y a une tendance aussi à la mobilité active de plus en plus,
que ce soit à pied, à vélo et... Et d'ailleurs, dans le plan, on a un
projet-pilote pour les nouvelles mobilités, donc la trottinette qui... Bon, il
y a des enjeux autour de ça, mais ces nouvelles mobilités-là qui apparaissent
mais qui ne sont pas actuellement encadrées, notre objectif, c'est
éventuellement de les encadrer. On ne pourra pas éternellement faire fi de leur
existence, donc aussi bien les encadrer. Mais pour le vélo, est-ce que...
est-ce que selon vous, puis je pense aussi au... comment on l'appelle? La
bicyclette assistée, je pense, bicyclette intelligente qui est de plus en plus
populaire aussi pour les gens qui n'ont pas envie de l'aspect athlétique
nécessairement, mais qui aiment se déplacer en vélo. Qu'est-ce qui pour vous en
termes d'encadrement ou comment est-ce que... est-ce que vous trouvez que c'est
suffisamment encadré? Ou comment est-ce que vous voyez un encadrement éventuel
davantage dans la mesure où, entre autres, il y a de plus en plus de vélos, il
y a du vélo assisté, il y a, comme un... Puis c'est combiné avec la façon dont
on aménage maintenant de plus en plus nos rues, il y a de plus en plus de
pistes cyclables, etc. Avez-vous une réflexion là dessus?
Mme Bebronne (Magali) : On
était bien content de voir le projet-pilote au mois de juillet, sur la
micromobilité, les ATPM, les appareils de transport personnel motorisés...
Mme Bebronne (Magali) : ...de
venir clarifier qu'est-ce qui est une trottinette légale et qu'est-ce qui est
une trottinette illégale, c'est une excellente chose, ça montre qu'on a appris
de nos erreurs et qu'on n'attend pas que les rues soient envahies de ces
véhicules-là pour légiférer. Donc, bravo pour la proactivité, de ce côté-là.
On était contents de voir aussi la limite
de vitesse, la limite de puissance qui était imposée sur les trottinettes, les
gyroroues. Je vous dirais qu'on aurait aimé voir le même genre de proactivité
du côté des vélos à assistance électrique, parce qu'eux aussi ils sont vraiment
déjà sur nos rues. On a des scooters électriques et des motos électriques, et
c'est très, très clair, quand on sonde nos membres, et puis ça nous arrive de
tout bord, tout côté, à quel point les gens se sentent mis en danger de devoir
partager des voies cyclables et des pistes cyclables avec des scooters, des
cyclomoteurs et des motocyclettes qui n'ont rien à faire sur ces voies
cyclables.
Alors ça, pour nous, c'était vraiment la
priorité. On est en contact avec le ministère et on sait que le travail se
poursuit. On aurait beaucoup aimé que, tant qu'à rouvrir le code de la sécurité
routière en ce début d'année, ce soit l'occasion de régler une bonne fois pour
toutes cette question, parce que les tensions, et les frustrations, et les
frictions sont assez vives, que ce soit sur les voies cyclables urbaines, tout
comme les réseaux régionaux qui ne relèvent pas de la voie publique, mais on le
sait que, le jour où on va régler tout ce qui touche la voie publique, ça va
nécessairement avoir une incidence sur le marché. Et malheureusement, chaque
nouvelle saison où on n'a pas légiféré à ce sujet là, eh bien, c'est un nouveau
lot de véhicules incompatibles avec la sécurité des autres usagers qui se
rajoutent sur nos voies cyclables.
Mme Guilbault :Oui, bien, tout à fait. Exactement, ce que vous dites, là,
c'est ce que je nommais, puis là je cherchais, c'est la mesure 18, ici,
dans le plan Encadrer la circulation sécuritaire des appareils de transport
personnels motorisés. Puis là on a trois sous-mesures : prévoir un encadrement
temporaire, donc, c'est le projet, c'est le projet pilote qui est publié cette
année pour la circulation sécuritaire des trottinettes électriques, des
appareils gyroscopiques, ça, je ne sais pas exactement c'est quoi, mais en tout
cas, et d'autres appareils de micromobilité; mettre en... par la suite, mettre
en oeuvre une stratégie de communication pour informer les citoyens du nouvel
encadrement concernant les ATPM; et ultimement d'ici 2025, c'est l'échéance
qu'on se donne, évaluer la sécurité des ATPM. Pour exactement ce que vous dites
là, là, ces choses-là sont apparues, puis on ne sait pas exactement. Puis déjà
la cohabitation, je pense, entre les vélos et les voitures puis même les
piétons là-dedans, des fois, c'est des espaces partagés, c'était déjà un... en
soi, ça nécessitait déjà en soi d'être encadré, donc en ajoutant tout ça.
Alors, est ce que vous considérez que
c'est une bonne chose, la mesure en trois sous mesures puis l'échéancier qu'on
se donne pour en arriver avec un encadrement, considérez-vous que c'est la
bonne chose à faire?
Mme Bebronne (Magali) : Oui,
bien sûr. Ce qui est important aussi, dans des projets pilotes, c'est de
pouvoir mesurer les choses, je pense que ça fait partie des questions que nous
avions au mois de juillet, quand le projet pilote a été prononcé ou a édicté,
de s'assurer qu'on mesure bien les choses parce que, malheureusement, toutes
ces choses-là qu'on ne mesure pas, je le disais, les statistiques de la SAAQ ne
reflètent pas les collisions qui peuvent justement se produire entre des
trottinettes, des vélos, des piétons, tant qu'il n'y a pas de véhicules moteurs
immatriculés d'impliqués, alors de prendre le soin de bien mesurer l'effet de
ce projet pilote pour éventuellement y apporter des justifications, c'est une très
bonne chose.
Je pense qu'un des principes qui doit nous
nous guider dans les contraintes et les... et les règlements qu'on édicte
autour de ça, c'est de toujours regarder non seulement les risques associés à
un mode de transport, mais également les bénéfices. Et je vous dirais qu'entre
un vélo, un vélo à assistance électrique où on doit pédaler, et un vélo qui a
un simple accélérateur, et une trottinette, il y en a un qui permet de faire de
l'activité physique, donc qui vient nous aider à rejoindre nos objectifs en
santé, et puis il y en a aussi qui sont plus dangereux que d'autres, hein, une
trottinette, ça reste qu'on n'a pas beaucoup de points d'appui, les roues sont
plus petites, etc. Donc, de mesurer le niveau de contrainte qu'on applique à
chacun de ces appareils-là, non seulement en fonction des risques, mais
également en fonction des bénéfices.
• (12 h 30) •
Mme Guilbault :Tout à fait. Vous avez fait une recommandation aussi sur...
puis je trouve ça intéressant parce que vous passez juste après l'Association
des écoles de conduite, puis on en a beaucoup parlé avec eux, numéro 4.5,
assurer la mise à jour des connaissances des conducteurs, conductrices. Et donc
on en a parlé pendant 10, 15 minutes, pour ma part, avec les gens qui vous
ont précédés, est-ce que... puis eux sont en démarche pour... avec la SAAQ pour
justement... en fait, on a compris que c'est en quelque sorte une espèce de
mise à jour permanente, mais là il y a... les travaux ont été un petit peu
ralentis par d'autres occupations que la SAAQ a eues dans la dernière année,
mais... mais c'est la mesure 24 du plan d'action en sécurité routière,
donc. Alors ça, pour nous, c'était très important aussi parce que les choses
changent justement, là, ne serait-ce que l'apparition de tous ces nouveaux
modes là de transport actifs, mais aussi la façon d'aménager les villes, de
plus en plus, elles font des aménagements autour des écoles, mais pas seulement
autour des écoles, des rues piétonnes, des choses comme ça, alors... Alors
donc, est-ce que...
12 h 30 (version non révisée)
Mme Guilbault :...vous, je ne sais pas si vous avez déjà collaboré, si
vous collaborez avec la SAAQ dans ces réflexions-là, sur les éventuels contenus
de formation, qu'ils appellent le PESR, dans les écoles de conduite. Est-ce que
vous avez connaissance, si la cohabitation avec les vélos, l'existence de
cyclistes et de ces nouvelles mobilités là font partie des formations
actuellement? Est-ce que les nouveaux conducteurs sont sensibilisés? Est-ce que
vous collaborez avec les... que ce soit l'Association des écoles de conduite et
ou avec la SAAQ sur toutes ces questions-là?
Mme Bebronne (Magali) : Ce n'est
pas tant le cas actuellement, mais je vous dirais qu'on est très ouverts à le
faire, à faire en sorte que les nouveaux conducteurs puissent être formés à la
réalité de la cohabitation avec des usagers plus vulnérables. On a vu que,
notamment dans le PESR, l'an dernier, on a pu enfin introduire la... l'ouverture
pivot ou la portière hollandaise, selon comment on l'appelle. Donc, c'est
vraiment de développer cet automatisme, pour un conducteur ou une conduite,
lorsqu'ils sortent de leur véhicule, d'ouvrir leur portière avec la main
opposée pour s'obliger à regarder en arrière. On sait que les incidents d'emportiérage,
c'est la crainte numéro un des cyclistes en milieu urbain, et à juste titre. Il
y a énormément de collisions qui sont causées par des conducteurs inattentifs
qui ne font pas attention en ouvrant leur portière. Donc, de voir par exemple
ce genre de modification là dans le PESR, c'est extrêmement positif. La SAAQ
nous a d'ailleurs soutenus nous-mêmes pour faire une campagne de
sensibilisation à ce nouvel automatisme, ce geste qui peut vraiment sauver des
vies.
Le point 4.5, qu'on avait dans notre
mémoire, c'était de dire : c'est une chose, de mettre à jour la formation
initiale des conducteurs, mais comment est-ce qu'on s'assure peut-être,
justement, aux 10 ans, que toutes ces nouvelles dispositions, qui sont
inscrites dans le code de la sécurité routière ou dans le programme d'éducation,
ne touchent pas seulement les nouveaux conducteurs, mais bien tous ceux qui
conduisent depuis 10, 20, 30, 40 ans et qui ne se sont pas mis à jour dans
leurs... dans leurs connaissances. C'est assez aberrant, parfois, ça reste
anecdotique, mais à quel point les gens ignorent qu'ils peuvent... qu'ils
doivent par défaut changer de voie pour dépasser des cyclistes, qu'ils ont le
droit, par exemple, de franchir des lignes continues ou des lignes doubles pour
le faire, que les cyclistes ne sont pas tenus d'emprunter une piste cyclable
même s'il en existe une, etc. Alors, il y a beaucoup d'éducation à faire, non
seulement auprès des nouveaux conducteurs, mais surtout auprès des conducteurs
existants.
Mme Guilbault :Puis un dernier point, parce qu'il ne me reste pas beaucoup
de temps, sur les... implanter suffisamment... c'est 4.1, implanter
suffisamment de systèmes de détection. Alors, vous avez sans doute évidemment
remarqué, là, que les... l'introduction de davantage de systèmes de détection
avec des lieux désignés, notamment les zones scolaires et les zones de
chantier, fait... occupe une grande partie du plan d'action puis fait l'objet d'une
partie du projet de loi aussi. Alors, j'imagine que vous considérez que c'est
une bonne chose. Et, comme cycliste, j'imagine, vous êtes cycliste vous-même,
ou en tout cas vous connaissez bien les... le... la façon... comment ça se
passe pour les gens qui font du cyclisme au Québec, donc est-ce qu'actuellement
les radars photo ou la présence de radars photo, que ce soient des radars
pédagogiques qui servent à sensibiliser les conducteurs à leur vitesse ou des
véritables radars qui génèrent des contraventions, est-ce que vous considérez
que ça fait un certain effet, que vous vous sentez plus en sécurité? Est-ce que
vos membres se sentent plus en sécurité? Est-ce que, pour eux, c'est une bonne
chose d'avoir à la fois des radars pédagogiques et des vrais radars photo sur
le réseau?
Mme Bebronne (Magali) : Écoutez,
je pense que beaucoup de gens qui sont venus ici au cours des deux, trois
derniers jours ont cité toutes les données probantes qui montrent que les
radars pédagogiques... les radars photo, pardon, ont vraiment un effet sur la
vitesse pratiquée, le taux de contravention, etc. On a eu des bons experts, notamment
Marie-Soleil Cloutier, etc. Donc, nous, on est en faveur de tout ce qui va
permettre de faire respecter cette... la vitesse affichée, les feux de
circulation.
C'est vrai qu'en tant que cyclistes, on n'est
pas sur un trottoir, au... en tant que piétons, c'est souvent aux intersections
qu'on est, donc qu'on est mis à risque. En tant que cyclistes, on est amenés à
cohabiter vraiment sur la même route, et ça peut être très effrayant de devoir
cohabiter avec des véhicules qui vont beaucoup trop vite. C'est bien sûr une
question aussi d'aménagement, mais en ce sens, on est complètement favorables à
l'orientation de ce projet de loi de vraiment massifier le nombre de radars. Et
comme on le dit très bien, il ne s'agit pas de donner peur de ce radar-ci en particulier,
parce qu'on sait qu'il se situe à tel endroit et qu'on puisse s'attendre... et
puis c'est tellement bien affiché, on fait attention à cet endroit-là et puis
on repart en fou. Il faut vraiment créer cette espèce de changement de
paradigme où on craint en tout temps, et ce qu'on respecte, ce n'est pas le
radar, mais c'est la signalisation partout. Donc, on vous encourage à les
déployer. Si certaines municipalités, comme la ville de Montréal, souhaitent
aller plus loin, puis on voit que les besoins sont immenses, qu'ils puissent
éventuellement le faire également...
Mme Guilbault :...j'imagine, j'ai... il me reste très peu de temps. Alors,
encore une fois, merci, merci beaucoup d'être venue nous rencontrer
aujourd'hui.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole à M. le député de
Marguerite-Bourgeoys pour 11 min 15 s.
M. Beauchemin : Merci
beaucoup, M. le Président. Merci à vous d'être ici aujourd'hui. Je veux
commencer à propos de «cédez le passage». On l'a vu, c'est un peu huit États,
je pense, aux États-Unis qui... il y a huit États, aux États-Unis, qui
permettent le «cédez le passage», puis je me rappelle, il n'y a pas si
longtemps, à Montréal, il y a eu un groupe de cyclistes, en fait, qui avait
décidé de démontrer par l'absurde comme quoi que... bon, d'absolument, tout le
temps, faire son stop, dépendamment de la région, évidemment, là, de Montréal,
pouvait créer un chaos incroyable dans le trafic. Et puis je pense que c'est le
long du corridor de la route de Maisonneuve, au centre-ville de Montréal, à
tous les arrêts, tous les cyclistes... un groupe a fait son arrêt, puis ça a
créé des bouchons, c'était impossible de... Ça fait que, par l'absurde, ils ont
prouvé le point comme quoi que, bon, bien, il y a des moments, effectivement,
où est ce qu'il y a un stop, en cycliste, ça peut être plus optimal.
La question que je me pose... parce que
c'est, évidemment, pour permettre une meilleure fluidité aussi, d'une certaine
façon... la question que je me pose, c'est : Maintenant qu'il y a,
effectivement, les trottinettes, les vélos assistés, etc., comment voyez-vous
le vivre-ensemble de tout ce monde-là avec... si on allait de l'avant avec ça?
Parce que moi, personnellement, pour un cycliste, je suis totalement d'accord
de céder le passage, là, de céder le passage, mais quand on en arrive,
justement, avec une trottinette, qui va, des fois, plus vite que des vélos,
avec tout... Comment vous voyez ça, vous?
Mme Bebronne (Magali) : Bien,
il faut veiller, d'une part, à ce qu'on fasse respecter les limites de vitesse
sur ces véhicules-là. Là, la limite des trottinettes a été fixée à 25
kilomètres-heure. C'est une vitesse qui est tout à fait compatible avec la
vitesse moyenne pratiquée par les cyclistes eux-mêmes. Donc, c'est 32
kilomètres-heure au niveau des vélos à assistance électrique. Si vous nous
demandez, c'est un petit peu trop rapide, puis c'est un peu le problème d'avoir
tant tardé à légiférer, c'est que, maintenant qu'on a tant de véhicules sur...
de ce type de véhicule sur nos routes, c'est trop tard pour revenir en arrière.
Quoi qu'il en soit, l'énergie cinétique,
la vision périphérique, la distance de freinage de tous ces véhicules n'ont
aucune commune mesure avec celles d'un véhicule de deux tonnes. Donc, de
vouloir faire du mur-à-mur... puis on entend souvent ça, hein, du mur-à-mur...
et dire que ce qui est bon pour un automobiliste dans un véhicule de deux
tonnes, circulant à 50 kilomètres-heure, doit également s'appliquer exactement
de la même façon à un cycliste qui roule à 20, 25 kilomètres-heure, sur un
véhicule beaucoup plus léger, il y a quelque chose de non proportionnel, et ça
ne fait pas de sens. Il y a des études qui ont été menées... Parce que vous
savez que ce qu'on appelle l'arrêt Idaho a été implanté en Idaho dès les années
80. Il y a des études, bien sûr, qui ont été menées pour mesurer si c'était un
comportement qui était plus dangereux. Ce qu'ils ont trouvé, c'est que, dans la
première année d'implantation, il n'y avait pas eu d'effet sur les décès, et
qu'on avait constaté une baisse de 14 % et quelques dans les blessures des
cyclistes. Ça peut vraiment paraître contre-intuitif, mais la réalité, c'est
que si vous vous arrêtez complètement et que vous devez repartir, vous êtes
exposé plus longtemps, dans l'intersection, le temps que vous repartiez, à
très, très basse vitesse.
• (12 h 40) •
Alors, de dire que l'exigence, ça
deviendrait de ralentir suffisamment pour pouvoir faire une bonne évaluation de
l'intersection, et, si la voie est libre, on pourrait poursuivre, ça ne veut
absolument pas dire qu'on viendrait absoudre les cyclistes de l'obligation de
céder le passage pour les piétons. Puis d'ailleurs le renforcement des
sanctions, et puis l'emphase qu'on met sur tous ces articles qui touchent le
«cédez le passage», ils s'appliquent aussi aux cyclistes, et c'est une
excellente chose qu'on vienne dire : Ce qui est important, c'est l'humain,
et ce qu'on respecte, et à qui on cède le passage, c'est l'humain, et non pas
le panneau rouge. Alors, pour toutes ces raisons-là, c'est important de le
faire.
L'autre avantage de sécurité que ça
représente, c'est que ça permet de quitter l'intersection avant les véhicules.
Transport for London, qui est quand même une entité qui fait beaucoup, beaucoup
de recherches et de données, s'étonnait du fait que les femmes cyclistes soient
trois fois plus nombreuses à avoir des accidents mortels avec des véhicules
lourds, alors qu'elles ne représentaient qu'un quart de la population cycliste.
Et l'hypothèse qu'ils ont eue derrière ce phénomène, c'est de dire que les
femmes sont tellement respectueuses de la signalisation — désolée de
faire des généralisations — que ça les a amenées à se mettre...
Mme Bebronne (Magali) : ...à
risque, là où les hommes, justement, prenaient plus de libertés et quittaient
les intersections avant les manoeuvres dangereuses, par exemple, de virage des
véhicules lourds.
Je ferais un dernier parallèle. Lors de la
révision du Code de la sécurité routière, en 2017-2018, on a permis aux
cyclistes d'utiliser les phases piétonnes des feux de circulation pour
justement traverser et avoir une longueur d'avance sur le reste de la
circulation pour pouvoir traverser de façon sécuritaire et visible. Ça a été
largement accepté. Je ne sais pas vous, je n'ai jamais entendu qu'il y avait eu
un enjeu avec ce genre de permission ou d'adaptation du Code de la sécurité
routière aux cyclistes.
M. Beauchemin : Bien, c'est
fort intéressant. Je comprends, en fait, qu'une des choses qu'indirectement
vous suggérez, c'est que, par exemple, sur les pistes cyclables, qu'il n'y ait
pas de différentiel de vitesses permises, dépendamment du machin sur lequel on
se transporte, là, si je comprends bien, là.
Mme Bebronne (Magali) : Oui.
C'est certain que l'arrivée et la multiplication du vélo à assistance
électrique, d'abord, c'est une excellente chose, on va se le dire, ça met sur
deux roues tout un pan de la population qui n'avait jamais envisagé de faire du
vélo. Alors, on parle souvent des problèmes, je veux quand même rappeler que le
vélo à assistance électrique, c'est avant tout une opportunité. Mais ce que ça
veut dire, avec la multiplication du nombre d'engins qu'on va avoir, c'est que
les infrastructures vont devoir s'adapter, et avoir 1,5 mètre, quand on va
avoir des différentiels de vitesse, ça va provoquer des manœuvres de
dépassement dangereuses. Alors, les nouveaux standards qu'on voit désormais,
que ce soient les axes de Réseau Express Vélo, à Montréal, ou les corridors
Vélocité dont on vient d'annoncer un plan ambitieux, ici, à Québec, c'est un...
c'est le nouveau standard qu'il faut viser. Il faut viser des voies cyclables
suffisamment sécuritaires pour que deux usagers puissent se dépasser l'un
l'autre, si, justement, il y a des différentiels de vitesses importants.
M. Beauchemin : Sur, disons
le respect des vitesses, sur le respect des moeurs à suivre, etc., j'assume
que, bon, les corps policiers ont un rôle à jouer pour s'en assurer.
Croyez-vous qu'il y ait une éducation à faire aussi au niveau des corps
policiers, à savoir quelle est la réalité des gens à vélo, versus ceux qui sont
à pied et ceux qui sont en automobile? Parce qu'il y a un traitement qui est
aussi sévère, je crois, en ce moment, là, pour des cyclistes, O.K.,
malheureusement, par rapport à ce que les automobilistes ont à avoir.
Mme Bebronne (Magali) : Écoutez,
on siège sur le comité vélo du service de police de la ville de Montréal, par
exemple, on a vraiment souvent l'occasion d'échanger avec eux. Les services de
police dans des milieux très urbanisés où le transport actif est une réalité
qui prend de plus en plus d'ampleur sont quand même bien sensibilisés à cette
réalité. Et, s'il y a bien un service de police, je pense, qui comprend ça, c'est
le SPVM. Eux ont déjà dit, par le passé, qu'ils se contentaient d'un
ralentissement marqué à une intersection munie d'un arrêt. Alors, il y a cette
compréhension-là, d'autant qu'un certain nombre d'eux patrouillent eux-mêmes à
vélo, que c'est irréaliste de demander un arrêt complet.
Puis je rajouterais que c'est un peu
donner des munitions à l'espèce de discours anticyclistes, là. De tenir les
cyclistes à un standard qui est irréaliste et non nécessaire, ça donne beaucoup
de munitions à ceux qui aiment tellement taper sur les cyclistes qui ne
respectent pas les arrêts. C'est certain que, si on avait des règles qui
étaient plus adaptées à leur réalité, on enlèverait cet élément de friction
parce que les attentes seraient plus claires pour tout le monde.
M. Beauchemin : Tout à
l'heure, vous avez parlé de... Je pense que c'était... le mot spécifique que
vous avez utilisé, mais d'infrastructures routières, là, pour assister, là,
aider la protection des cyclistes. Ce n'est pas uniforme partout au Québec, les
routes numérotées comme on parle lorsqu'on est à la campagne, parfois, il n'y a
aucun accotement, des fois, il y en a, etc. Est-ce que vous pouvez un peu
élaborer là-dessus, votre opinion, sur l'ensemble routier du Québec?
Mme Bebronne (Magali) : Quand
on vient parler des accotements, effectivement, je pense que c'est une
politique du MTMD de faire en sorte que, quand on refait des routes, désormais,
on ajoute des accotements. On sait que c'est non seulement bénéfique pour la
sécurité des cyclistes, mais, en plus, ça augmente la durabilité des routes,
alors on aurait vraiment tort de s'en priver. Ça reste que, parfois, ce n'est
pas très bien entretenu et ça peut être dangereux de rouler à cet endroit-là.
Donc, bien sûr, il faut développer tout ça.
Là encore, on ne peut pas avoir une
approche mur à mur, et c'est pour ça qu'on a des experts qui regardent
vraiment, selon la réalité d'un milieu, si la piste cyclable doit être
physiquement séparée de la circulation ou si, dans des rues locales, un simple
apaisement de la circulation peut faire l'affaire. On a quand même beaucoup de
municipalités avec lesquelles on travaille. On sent vraiment cette volonté-là.
Beaucoup de municipalités aussi qui font appel à nous pour des plans de
déplacements scolaires parce qu'ils comprennent l'importance de pouvoir
promouvoir les déplacements à pied, à vélo vers l'école.
M. Beauchemin : Je vois que
vous êtes constructive, je vois que vous êtes positive par rapport au projet de
loi. Vous en émettez certaines critiques, évidemment, c'est correct, là, c'est
normal. J'ai une question à vous poser à propos des données, du data. Est-ce
que vous avez, par exemple...
M. Beauchemin : ...les
données sur d'autres juridictions, que ce soit au Canada, mais, disons à
l'étranger, comme par exemple l'Australie, que je sais que, les dimanches, on
peut être en vélo sur les autoroutes. Est-ce que vous avez des données comme ça
qui pourraient être... qui pourraient nous éclairer au niveau de justement
comment intégrer le monde des vélos un peu plus, là, dans le quotidien?
Mme Bebronne (Magali) : Je
pense que chaque pays vient avec ses défis. Puis on sait à quel point... Nous,
le grand trou dans les données qui nous préoccupe, c'est justement à quel point
on est dans le flou sur les collisions... Il y a impact... deux... deux usagers
vulnérables entre eux qui ne sont comptabilisés nulle part. C'est anecdotique,
mais on a déposé récemment au Fonds de la sécurité routière une demande pour
faire une campagne de sensibilisation à destination des cyclistes sur
l'importance du respect de la priorité piétonne. Et une des questions qu'on
nous demande, c'est comment cela va améliorer le bilan routier. Mais je suis
désolée de dire qu'on n'a aucune donnée pour pouvoir affirmer que ça va
améliorer le bilan de sécurité routière puisque le bilan ne recense pas ce
genre d'incidents.
Alors, ça nous amène à devoir prendre des
décisions sur la base parfois d'anecdotes et de ressentis, etc. Si on pouvait
mesurer ses incidences, ça nous permettrait de prendre des décisions plus
éclairées. Et puis, je vous... je vous le mentionnais aussi, ça vient toucher à
toute la question de l'indemnisation. Actuellement, si on voulait élargir
l'indemnisation et la rendre universelle pour l'ensemble des victimes de la
route, on ne sait pas combien ça nous coûterait. Peut-être que le groupe de
travail de la SAAQ, dans les prochaines semaines, sera en mesure de chiffrer
ça, mais on avance à l'aveugle et c'est très regrettable.
Le Président (M. Jacques) : ...ceci
met fin aux échanges avec l'opposition officielle. Je cède maintenant la parole
à M. le député de Taschereau pour 3 min 45 s
M. Grandmont : Oui.
Merci, M. le Président. Merci, Mme Bebronne pour votre participation. Je
voulais aller d'abord... Bien, je peux commencer par quand même souligner
quelque chose d'important. Selon les documents que vous produisez, là, l'état
du vélo du Québec, là, il y a 4,5 millions de cyclistes au Québec, dont
1,1 million sont des enfants, 2,7 millions qui en font toutes les
semaines puis 2,1 millions qui l'utilisent comme moyen de transport. Donc,
c'est quand même assez considérable. Vous parlez au nom de vos membres, vous
l'avez dit quelques fois, mais vous représentez encore quand même une large
part de la population qui circule sur nos routes à vélo. Donc, je voulais juste
comme le placer. Aller après ça sur la question, là, des indemnisations.
Actuellement, là, il y a... Ce n'est pas
couvert, en fait, là, par la SAAQ. Ou, en tout cas, certains cyclistes ont pu
aller chercher des indemnisations, mais ce n'est pas tout le temps facile. De
mémoire, j'amène ça, mais est-ce que... est-ce que... En fait, qu'est-ce que ça
changerait, en fait, pour les... pour les cyclistes de pouvoir être indemnisés
par la SAAQ?
Mme Bebronne (Magali) : Écoutez,
puis vous avez raison de rappeler que les cyclistes, c'est M. et Mme
Tout-le-Monde, puis la moitié des Québécois font du vélo. Alors, quand on dit
les cyclistes, ce sont aussi les automobilistes. Et typiquement, quand vient le
temps de parler d'indemnisation, c'est fou de penser que, selon nos chiffres,
neuf cyclistes sur 10 possèdent un permis de conduire, contribuent au Fonds
d'indemnisation de la SAAQ, mais que si, un jour J, ils décident de prendre
leur vélo plutôt que leur auto et qu'ils se blessent, que ce soit tout seul ou
dans une collision avec un autre vélo ou avec un piéton, le choix sécuritaire
qu'ils auront fait pour le reste de la société, celui qui évite quatre à sept
fois le risque qu'un automobiliste court lui-même et qu'il fait encourir au
reste de la population, il a fait ce choix-là, il nous aide à répondre à nos
défis et il sera pénalisé parce qu'il n'aura... ses traitements ne seront
pas... ne seront pas couverts, son revenu ne sera pas couvert, etc. On a eu des
cas complètement déchirants, même de cyclistes qui ont dû se battre pendant
cinq ans, s'endetter de 50 000 $ pour faire valoir leurs droits, pour
prouver qu'un véhicule avait été impliqué dans la collision qui leur a causé
des dommages immenses. Je pense au cas de Béatrice Létourneau à Rimouski. Ce
n'est pas normal, surtout quand on contribue à un service d'assurance, de ne
pas pouvoir bénéficier de cette protection-là.
• (12 h 50) •
M. Grandmont : Parfait.
Merci. C'est un exemple qui est très éloquent, effectivement. J'aimerais vous
amener aussi sur les... les ACA, les appareils de contrôle automatisés, là. On
le voit, dans la loi, il y a une flexibilité qui est donnée pour l'évolution
des systèmes de détection. Vous listez quelques cas où ça devrait ou pourrait
être utilisé éventuellement. On a parlé précédemment aussi de la possibilité
d'utiliser pour les traverses piétonnes. Vous ne le nommez pas, mais je
comprends que c'est peut-être porté par Piétons Québec. Mais quels sont les autres
cas où vous aimeriez que ce soit utilisé éventuellement pour constater les
infractions?
Mme Bebronne (Magali) : Oui,
tout à fait. Bien, d'abord, on est bien heureux que ce soit justement inscrit
dans un règlement. On sait qu'on n'aura pas besoin de rouvrir le Code de la
sécurité routière pour pouvoir intégrer des nouvelles infractions constatables
automatiquement. Un des exemples qu'on cite, c'est justement le long des
nouveaux standards de piste cyclable, les corridors Vélo cité, les réseaux
express vélos. Il y a vraiment un soin particulier qui est apporté à faire en
sorte que le phasage des feux de circulation permette aux cyclistes de
traverser à une phase qui est protégée, c'est-à-dire une phase qui ne permet
pas le virage des véhicules. On sait que le virage à droite, c'est une des...
un des scénarios de collision les plus fréquents entre des automobiles...
Mme Bebronne (Magali) : ...c'est
des cyclistes, alors on vient créer vraiment un phasage parfait. Et puis là, on
a des automobilistes qui ne semblent pas comprendre le sens d'une flèche allant
tout droit et qui se permettent de tourner dans la voie. C'est un exemple de
choses... en plus, on sait exactement où ça se situerait. De faire en sorte que
ce genre de comportement soit mieux contrôlé, ce serait fort intéressant. On
peut aussi citer le cas de l'interblocage qui met aussi à risque les piétons et
les cyclistes. Là aussi, ce sont des points généralement très, très bien
connus. Je pense à Montréal aux abords du pont Jacques-Cartier. Quand le service
de police s'est décidé à faire une opération, ils ont remis énormément de
tickets.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup. Ceci met fin aux interventions de M. le député de Taschereau. Je vous
remercie pour votre participation aux travaux et je suspends les travaux pour
quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 52)
(Reprise à 12 h 56)
Le Président (M. Jacques) : Nous
reprenons nos travaux. Je souhaite maintenant la bienvenue à M. Antoine
Bittar et Mme Elizabeth Rivera. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la période
d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous
présenter et à débuter votre exposé.
Mme Rivera (Elizabeth) : Merci.
Bonjour, M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés. Je
m'appelle Elizabeth Rivera, je siège dans le conseil d'administration de MADD
Montréal comme présidente.
M. Bittar (Antoine) : Bonjour,
Antoine Bittar. Je suis directeur dans le conseil d'administration de MADD
Montréal...
Mme Rivera (Elizabeth) : ...MADD
Montréal est un organisme de bienfaisance qui vient en aide aux victimes et
autres vivant de la conduite avec les capacités affaiblies. Elle aussi
sensibilise la population au fléau qui est la conduite avec les capacités
affaiblies. Nous sommes devenus membres en 2017 suite au décès de notre fille.
Tout a commencé à 4 h et demie du matin, le 20 mars 2017, quand les
deux policiers sont venus à notre porte pour nous annoncer l'inimaginable.
Cette phrase que tout parent redoute, mais aucun parent ne mérite
entendre : Votre fille est décédée ce matin d'un accident de voiture. Tout
d'un coup, notre vie change. Je ne peux pas décrire la douleur, la détresse et
le désespoir qui a changé complètement ma vie ce jour-là et celle de ma
famille. Je pourrais passer beaucoup de temps à vous... à vous parler de ce que
je vis et ce que j'ai vécu, mais je trouve que le plus important, c'est de dire
que celle qui a perdu le plus, c'est ma fille. Elle a perdu le droit de
vieillir, de s'épanouir professionnellement. Elle a perdu le droit de choisir
sa robe de mariée, de bâtir une famille, de conseiller ses petits frères qui
sont maintenant adultes et d'un jour veiller sur nous, ses parents
vieillissants.
Depuis cette perte, moi, je me suis dit
que... je ne me suis jamais demandé pourquoi. Je me suis toujours
demandé : Comment? Comment je vais faire pour que son décès ne soit pas en
vain? Comment faire pour ne pas l'oublier, ne pas oublier sa voix, son rire et
sa personnalité... elle était incroyable? Et surtout, comment faire pour que
cette perte ne se reproduise plus? Alors, mon mari et moi, on a ce combat...
notre cheval de bataille qui est... qui est les sanctions administratives à 0,05.
Je laisse Antoine continuer.
M. Bittar (Antoine) : Oui,
vous avez reçu le mémoire de MADD Canada qui a été soumis. Je vais parler un...
je vais reprendre un petit peu les textes parce qu'on trouve que c'est
important, parce que vous avez déjà eu beaucoup d'experts qui sont venus pour
expliquer les bienfaits, si je peux dire, du 0,05 au 0,08. Alors, je vais juste
me le permettre... c'est sûr que nous avons regardé le projet de loi n° 48
et tout de suite, ce qui nous a... aperçu, c'est qu'il manquait un article sur
les sanctions administratives ou les mesures administratives à partir de 0,05,
alors, à partir du document de MADD Canada.
• (13 heures) •
Et je veux juste clarifier les choses,
MADD Canada n'est pas contre l'alcool, MADD Canada demande juste aux gens que,
si vous consommez, pour vous, pour les gens autour de vous, pour les gens sur
votre rue, de ne pas conduire de véhicule, et il y a beaucoup de moyens de
retourner à la maison en toute sécurité aujourd'hui. Il y a peut-être
20 ans, 15 ans, ça ne l'était pas, mais c'était... Maintenant,
c'est... c'est quelque chose d'automatique. Vous avez les... pour nous aussi,
c'est un petit peu la bataille des ceintures de sécurité. Au début, c'était
très dur les implémenter, c'était dur de faire comprendre aux gens, c'était
pour la sécurité, le courage politique a été fait. Ça a été fait, et les
chiffres prouvent que ça a sauvé énormément de vies, comme les études
présentement sur le 0,05, sur les sanctions administratives. Vous avez eu des
experts comme je vous dis. Alors, on ne va pas revenir là-dessus. Alors, je
reviens juste un petit peu sur le texte. Ils demandent que «le Québec doit
mettre en place une suspension administrative de permis de conduire d'une
période de sept jours et une mise en fourrière administrative du véhicule pour
une période de sept jours pour les conducteurs interceptés dont le taux
d'alcool dans le sang établi à l'aide d'un appareil de détection approuvé se
situe entre 0,05 % et 0,79 %. Ce programme de sanctions administratives
devrait inclure une pénalité financière, des frais de rétablissement du permis
de conduire, des amendes croissantes en cas de récidivisme et l'obligation de
se soumettre à un programme de réhabilitation pour toute récidive durant une
période de 10 ans.» Les recommandations ont été faites dans un rapport qui
a été publié en 2022. Donc, vous avez le lien sur le document. Dans les
années 70, les autres provinces ont commencé à le faire, mais ils avaient
mis une suspension de 24 heures. Au cours des 15 dernières années,
les provinces et les territoires ont reconnu la nécessité de renforcer les
sanctions pour un taux... pour les taux d'alcool dans le sang se situant dans
une zone d'avertissement, en augmentant la période de suspension de 24 h à
trois jours ou à sept jours pour une première infraction, avec des conséquences
croissantes pour chaque récidive. Plus récemment, les...
13 h (version non révisée)
M. Bittar (Antoine) : ...les
provinces ont ajouté des périodes de mise en fourrière des véhicules. Ces
programmes de suspension administrative sont efficaces, peu coûteux et
respectueux de la Constitution canadienne.
Sur la base d'une conception erronée, des
craintes ont été soulevées, estimant que l'industrie des bars et des
restaurants subirait des pertes de revenus catastrophiques avec la mise en
place d'un programme de suspension administrative. Les... pardon, les faits n'appuient
pas une telle croyance. Les études ont montré que les programmes de suspension
administrative pour les conducteurs ayant un taux d'alcool dans le sang de 0.05
ont peu d'impact à long terme sur l'industrie. ...presque toutes les provinces
et territoires du Canada ont adopté un programme de suspension de permis et de
sanctions administratives pour les conducteurs dont le taux d'alcool dans le
sang se situe à 0.05, et leur industrie de l'hospitalité n'a pas subi de
dommages significatifs ou permanents.
Dans la conclusion, sans un programme bien
structuré de suspension administrative de permis, il manque au Québec un
élément législatif clé pour mettre... qui pourrait faire une réelle différence
et avoir un impact significatif dans la lutte contre la conduite avec les capacités
affaiblies. Un tel programme de suspension immédiate de permis est un outil
important pour retirer du réseau routier les conducteurs aux capacités
affaiblies par l'alcool et ainsi réduire le nombre de décès et de blessures qui
découlent de ce comportement irresponsable et en plus d'être dissuasif,
efficace pour empêcher les conducteurs de prendre le volant s'ils ont consommé.
La mise en place d'un programme de
suspension administrative de permis pour les conducteurs dont le taux d'alcool
dans le sang est de 0.05 et plus... et plus a été étudiée, débattue et
analysée. Le concept est présentement... présenté à la Commission des
transports et de l'environnement en 2007 et en 2010. Ces programmes sont
soutenus par les organisations de sécurité routière. En 2009, il s'agissait...
ils faisaient partie des recommandations de la Table québécoise de sécurité
routière. Des sondages récents ont montré que les Québécois et Québécoises
soutiennent la mise en place d'un tel programme. Dans un sondage mené en
novembre 2023 par la SOM... les Coops de l'information, 61 % des
répondants ont affirmé être en accord avec cette mesure. Des sondages effectués
l'an dernier par l'Association pour la santé publique du Québec ont montré que
50 % des répondants en mars 2023 et 57 % des répondants en mai 2023
soutenaient un tel programme. Le coroner Yvan Garneau... a également fait la
recommandation dans son rapport déposé en décembre 2023. Et pourtant, jusqu'à
maintenant, la province de Québec n'a pas encore démontré son intérêt à mettre
en place une... cette importante mesure de lutte contre la conduite avec des
capacités affaiblies par l'alcool qui sauve des vies.
Le résultat : au Québec, un individu
peut conduire un véhicule motorisé avec un taux d'alcool dans le sang
unanimement reconnu comme dangereux presque partout au Canada et dans la
plupart des pays développés. Nous demandons à la Commission sur les transports
et l'environnement et le gouvernement du Québec de faire en sorte que le réseau
routier soit plus sécuritaire pour que tous les usagers... pour tous les
usagers en mettant en place un programme complet de suspension administrative
immédiate de permis pour les conducteurs dont le taux d'alcool dans le sang est
de 0.05.
Une chose qu'on voudrait dire, c'est que,
quand on a perdu Jessica, quelques années après, on a appris que ça avait déjà
été discuté et on était vraiment en colère. Pour nous, c'est une
incompréhension, et on se demandait combien de vies auraient pu être sauvées si
les gens avaient pu prendre la décision qui était flagrante pour nous. Et quand
on parle à toutes les personnes face à face, tout le monde le sait, puis on est
la seule province qui ne le font pas. Alors, aujourd'hui, on vient vous
demander s'il vous plaît... J'ai entendu hier le courage. Je vous demande d'avoir
le courage de faire un amendement à la loi. Merci.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup pour votre exposé. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre pour
16 minutes 30 secondes.
Mme Guilbault :Oui. Merci, M. le Président. Mme Rivera, M. Bittar,
merci beaucoup d'être ici aujourd'hui avec nous. Très, très courageux. On avait
tous lu votre mémoire. C'est une chose d'envoyer un mémoire, c'en est une autre
de prendre le temps de venir nous rencontrer. Je sais que vous habitez dans la
grande région de Montréal, donc de vous déplacer ici et d'avoir le courage de
faire l'exposé que vous avez fait en plaçant le contexte de l'épreuve terrible
que vous avez vécu. Merci beaucoup, beaucoup. Je pense qu'il y a peu de gens
ici qui peuvent s'imaginer la douleur que vous avez vécue, sinon, fort
probablement, ma collègue de Soulanges, qui est ici présente, avec qui je vous
ai d'ailleurs rencontrés la première fois l'automne dernier, avec qui vous
travaillez sur ce dossier-là notamment puis sur toute la question de la
sécurité routière depuis... depuis plusieurs mois. Donc, merci beaucoup d'être
ici avec nous aujourd'hui...
Mme Guilbault :...je vais... je vais échanger avec vous sur certains
éléments. Et je sais qu'il y a mes collègues de René-Lévesque et de...
d'Iberville, ici aussi, qui auront des questions aussi ou en tout cas un
intérêt à échanger aussi avec vous.
Je voudrais commencer par peut-être
situer. Parce que le projet de loi dont on parle aujourd'hui, c'est le projet
de loi n° 48, comme vous savez, qui donne suite à certaines mesures qui
sont contenues dans le plan d'action en sécurité routière que j'ai déposé
l'automne dernier, qui contient plusieurs mesures, qui ne contient pas la
mesure sur laquelle vous venez nous entretenir aujourd'hui, mais qui en
contient quand même plusieurs.
Vous avez évoqué le coroner. J'ai moi-même
passé plusieurs années au bureau du coroner et dans certaines... dans le cadre
de certaines investigations. D'ailleurs, on travaillait avec le groupe MADD
pour certains aspects, vous avez parlé de la ceinture de sécurité, il y a eu le
texto au volant aussi, il y a eu plusieurs, comme ça, grands sujets qui se sont
imposés au fil des années.
Et donc, je me demandais si vous avez pris
connaissance de ce plan d'action là, sur la sécurité routière. Parce que je
sais que votre groupe est très actif sur divers éléments de la sécurité
routière, alors je me demandais d'abord si vous aviez eu l'occasion d'en
prendre connaissance, et ce que vous en pensiez, à titre de personnes très,
très activement impliquées dans la sécurité, notamment en ce qui touche les
aménagements, la formation, ce qui touche aussi les campagnes de
sensibilisation qui font souvent l'objet de recommandations de coroners depuis
plusieurs années et qui sont des avancées, à mon sens, du moins, qui sont...
qui sont présentes dans ce plan d'action là.
M. Bittar (Antoine) : Je vais
vous dire, Elizabeth et moi, on est vraiment comme bénévoles et on travaille
beaucoup avec Montréal. Ce MADD Canada, MADD Québec font, c'est plutôt du
côté... d'un certain côté, avec Marie-Claude Morin, de Canada, qui analyse le
tout, et on échange. Alors, voir le projet au complet, je veux être franc avec
vous, non. Je sais qu'on a regardé certaines choses. On parle et on reconnaît
qu'il y a eu des avancées qui ont été faites sur la réhabilitation, et tout.
Nous, ce qu'on s'aperçoit, c'est qu'il y a
beaucoup de... on est vraiment peut-être chef de file pour, ce que je veux
dire, le médicament. Nous, ce qu'on vous demande, c'est de la prévention. C'est
de régler le problème avant que ça vient. Parce qu'il y a quelqu'un qui a une
maladie et qu'on lui donne un bon médicament, c'est bien, mais si on peut
d'avance régler que la personne ne tombe pas malade, c'est ça qu'on regarde.
Alors, il y a beaucoup de choses qui ont
été faites en réhabilitation. Même moi, mon fils, on a déjà été parler à un
organisme qui s'appelle Point zéro, c'est des personnes qui ont été... qui ont
eu un... qui se sont fait attraper, si je peux dire. Et je peux vous dire que
quand on leur explique notre histoire, ils se lèvent. Ce n'est plus la même
chose. Quand ils rentrent, c'est : Ah! il faut encore passer 1 h à
faire notre programme. Et quand on leur parle, ils comprennent, ils disent :
si j'avais pu, on est chanceux de ne pas avoir tué quelqu'un. C'est ce qu'ils
nous disent. Puis ils disent, ça revient à la même chose : si on a pu
retourner en arrière, on le ferait.
C'est ça qu'on essaie de vous expliquer.
Ça fait que oui, il y a des choses qui sont faites pour les gens qui se font
attraper, mais il faut voir l'avant, il faut la prévention. Et c'est... comme
on dit, c'est quelque chose de... c'est déjà en place, ça peut être fait
tellement vite. Vous descendez de 0,08 à 0,05, je ne pense pas qu'il y a
beaucoup de choses qui doivent être faites à la SAAQ, avec les corps policiers.
C'est sûr que nous, ce qu'on demande, on a
la pétition, et je remercie M. Derraji, justement, pour la pétition, son
support, c'est sûr qu'on demande le 0,05, on demande beaucoup plus de
prévention, de communication. Il y en a, mais vous savez, quand vous regardez
une publicité à la télévision, vous la comprenez, cinq minutes après, c'est...
c'est oublié.
• (13 h 10) •
Et une chose qui est importante, en
faisant cette modification et en appliquant la loi, c'est qu'il nous faut
beaucoup plus de contrôle routier. Parce que c'est facile, les personnes, ils
peuvent voir tant qu'ils veulent, mais sans qu'ils ne se font pas attraper, ils
ne vont pas le comprendre. Et je pense que, comme la CAA l'a dit et comme les
autres l'ont dit, on est rendus là, même que je pense qu'on est... Moi, je
pense vraiment qu'on est en retard. Combien de vies on aurait pu sauver avec un
amendement tellement facile. Je reviens à ma question : pourquoi on est la
seule province qui ne le fait pas encore?
Mme Guilbault :Bien, vous avez raison de dire que c'est une chose de
mettre une règle, mais s'il n'y a pas une surveillance ou s'il n'y a pas
quelqu'un pour s'assurer du respect de la règle. Puis vous avez parlé de la
présence policière, tout à fait, les barrages policiers, les interceptions
policières, c'est, en fait, la clé pour, des fois, malheureusement, faire
respecter les choses ou sanctionner les infractions, parce que sinon, ça peut
se faire impunément.
Je me demandais si vous aviez... Parce que
quand j'étais à la Sécurité publique, si je ne m'abuse, je ne sais pas où on en
était quand j'ai quitté, mais on travaillait avec l'association des
propriétaires de bars, parce qu'évidemment les jeunes boivent notamment dans
les bars, les restaurants, sur les cours qui se donnent ou la sensibilisation
du personnel dans les bars pour détecter les jeunes ou les gens...
Mme Guilbault :...en général, là, mais ça... il y a beaucoup de jeunes
dans les bars. Enfin, je ne sais pas s'il y a encore des jeunes dans les bars,
bref, les gens qui vont boire dans les établissements licenciés et qui vont
boire de l'alcool, pour détecter puis agir, puis empêcher ces gens-là de quitter
en état d'ébriété avec leurs clés de voiture puis tout ça. Est-ce que vous,
vous avez déjà travaillé avec ces gens-là? Est-ce que vous avez eu l'occasion
de vérifier? Parce que ça, c'était un des éléments qu'on voulait mettre en
place. Parce qu'il n'y a pas toujours un policier sur le chemin du retour à la
maison, malheureusement, donc je pense qu'une autre bonne façon à la source,
indépendamment du taux d'alcoolémie qui est permis ou non, c'est de s'assurer
que la personne qui a trop bu ne quitte pas l'endroit où elle a bu cet
alcool-là avec sa voiture.
Mme Rivera (Elizabeth) : Moi,
je voulais dire une chose, quand la personne qui conduisait la voiture quand ma
fille a décédé, c'était la Saint-Patrick, O.K., lui était au bar depuis une
heure de l‘après-midi, 13 heures, il y a une vidéo qu'il ne pouvait plus
marcher, on continuait à le servir. Après ça, il est parti, il est allé dans un
autre bar et alors il n'y a personne qui n'a dit rien. J'étais dans un mariage
l'année passée, il y avait un monsieur qui était debout, il ne pouvait plus se
tenir debout et on continuait à lui donner à boire. Alors, il n'y a pas de...
il n'y a personne qui va dire à quelqu'un : Bien, écoute, donne-moi tes
clés, tu ne vas pas conduire. Moi, jusqu'à maintenant, je n'ai jamais vu ça et
je n'ai jamais entendu ça. Alors ça, je ne pense pas que ça fonctionne. Et puis
déjà en sachant qu'à 0,05 nos capacités sont affaiblies, pourquoi on laisse...
on continue à dire : Bien, à 0,08, ça peut passer. Il y a des gens... Moi,
je ne comprends pas. Nous, notre question est : Pourquoi ça ne fonctionne
pas? Si vous me donnez une réponse claire, et moi je vais dire : Ah!
D'accord, oui, vous avez raison, on va la comprendre. Mais maintenant on ne
comprend pas. Et je vous dis que, dans les bars, ça ne fonctionne pas.
M. Bittar (Antoine) : D'un
côté, le barman n'est pas une personne qui peut savoir en regardant quelqu'un à
quel niveau il est, il peut penser... Je veux prendre un petit peu la défense
d'un bar, parce qu'un bar c'est quand même assez dur, puis je sais qu'à un
certain moment, les jeunes buvaient, je pense, de la vodka avec du Red Bull.
Alors, vous avez quelque chose qui vous monte et vous avez quelque chose qui
vous... qui vous descend. C'est dur à une personne physiquement de regarder
dire : Non, toi, oui, toi non, prendre la clé. Écoutez, c'est même dur
pour nous des membres de la famille, des fois de dire on va prendre ta clé.
C'est une bataille. Alors, un inconnu qui arrive, et son travail, c'est de
vendre l'alcool, c'est... c'est ça, arriver de le faire, je ne sais pas.
Je sais que, dans d'autres provinces ils
n'ont pas les mêmes lois, et il y a des membres de Madd, des victimes de Madd
qui poursuivent les bars et généralement qui gagnent ça. Ça fait que ça peut
arriver un certain moment, où est ce qu'il va y avoir des poursuites suite à un
décès parce que la personne est sortie d'un bar et que personne n'a rien fait.
Mais je pense que c'est... c'est de miser sur le mauvais cheval, ce n'est pas
ça. C'est comme n'importe quoi. Tu forces quelqu'un, tu lui dis : Écoute,
on ne sait pas où t'es rendu, tu ne sais pas. Tu penses que tu es... tu penses
que tu es capable de conduire, c'est c'est peut-être de l'insouciance.
Écoutez, on a tous été jeunes, vous savez,
je vais être franc, et mes amis et moi, on a été jeunes, puis il ne s'est rien
passé. On ne comprenait pas, on ne comprend pas. C'est tant que ça ne nous
arrive pas, tant qu'on ne l'a pas vécu, vous ne pouvez pas le comprendre. Et
c'est ce qu'on essaye de faire, c'est qu'on essaye de dire à tout le
monde : On n'est pas là pour parler de Jessica, on veut juste vous
éviter... puis je vous regarde dans les yeux, on veut juste vous éviter que
vous et votre famille, vous passiez parce qu'on n'a pas assez. Et il y en a
beaucoup plus que vous le pensez. Je vais être franc avec vous, les victimes au
Québec n'arrivent pas à en parler... C'est très dur de venir en parler. C'est
de revivre à chaque fois un moment que vous aimeriez que je sais qu'on ne peut
pas oublier, et on comprend... En fin de compte, c'est de l'incompréhension
totale de se dire : Bien, voyons donc! On est en train d'ouvrir un projet
de loi sur la sécurité, et une des plus grosses mortalités qu'il y a sur les
routes, c'est l'alcool. On ne vous demande pas 0,0, on demande 0,05 parce qu'on
comprend. Et le... Et comme ce que je vous dis, c'est que quand on parle aux
gens, c'est encore la grande différence, on ne parle pas du 0,05 du Code
criminel, on parle du 0,05 du Code de la sécurité routière. Quand on explique
face à face aux gens et ils comprennent, on est la seule province. Ça
fonctionne ailleurs. Pourquoi on ne le fait pas?
Je ne suis pas le gouvernement. On demande
au gouvernement, on n'a pas de réponse. On se fait dire... je ne veux pas dire
les réponses qu'on a sont tellement... En tout cas, je n'ai pas de mots pour le
dire. Mais vous savez, au début on a essayé d'expliquer quelque chose, on
dit... on ne voudrait même pas le souhaiter notre pire ennemi ce... par où on
passe. Et je vais être franc avec vous, on n'est pas passé par le pire parce
qu'après il faut comprendre qu'il y a la cour, il y a les documents, il y a
toute la paperasse. Ça prend un an et demi. Vous n'êtes jamais
satisfait de la... de la condamnation. Vous vous...
M. Bittar (Antoine) : ...pourrai
jamais l'être. Notre vie, c'est une prison. À chaque fois, on essaie de parler
de la mémoire de notre fille. Vous savez, ma fille, elle rentrait,
c'était : Bonjour, hola, la familia... C'était une lumière qui rentrait.
Je ne sais pas quoi dire. Je sais que je dis quelque chose puis... écoutez, je
dis : Mon rêve, c'était de marcher dans l'allée pour le mariage de ma
fille avec elle. Tout ce que j'ai pu faire, c'est de marcher pour l'amener au
four crématoire. Évidemment, ce n'est pas normal, puis ça peut être évité. Il y
a tellement de monde qui peuvent... Combien de vies ils auraient pu sauver? Je
ne sais pas quoi vous dire, c'est... Pour moi, ce n'est même pas une
discussion, ça devrait être deux minutes, point final, c'est : Pourquoi?
Ça sauve des vies. Vous avez les chiffres, vous avez tout devant vous.
Qu'est-ce qui vous manque? Un courage? Dites-nous qu'est-ce qu'on doit faire?
Parce que je pense que les gens sont prêts. Ils comprennent. Plus en plus, on
en parle. Ah oui! Les sondages augmentent, 50-61, c'est sûr que, dans les
grandes villes, c'est plus dangereux, c'est plus facile, on a plus de
transports en commun. En banlieue, plus loin, oui, il y a moins de choses, mais
vous avez de la famille, vous avez des amis, vous avez une responsabilité, ce n'est
pas juste, vous. Je veux dire, quand on dit à quelqu'un, ah! écoute, on va
m'empêcher de prendre deux, trois bières, moi, je suis capable. O.K., si tu
penses que tu es capable, d'accord, mais une autre personne qui a peut-être
pris un médicament, qui a pris deux bières, une bière de moins que toi, va se
promener sur ta rue, il va tuer un de tes enfants. Ah non! Pourquoi tu juges
que, pour toi, tu peux le faire, et quand on te dit qu'un autre peut le faire
puis être aussi dangereux, là, tu commences à comprendre.
Tout le monde, tout le monde est pris dans
ce... tout le monde doit être conscient que c'est un danger puis qu'il y a un
moyen. Il n'y a personne qui peut vous dire : Oui, toi, c'est 0,05, toi,
c'est 0,06, tu as le médicament, tu as la fatigue, tu t'en vas à un certain
moment. Tu ne peux pas. Il faut mettre une règle, il faut partir quelque chose.
On s'est aperçu qu'au 0,08, c'est trop élevé, 0,05, ça réduit de 50 %, la
deuxième année, et plus, les mortalités. 85 l'année dernière, une quarantaine
de sauvés. Depuis 2010, ça fait combien? 160? Qui peut. Qui peut dire que vous
avez sauvé 160 en faisant un changement? C'est juste ça.
Mme Guilbault :Merci. Merci beaucoup. Comme le temps avance, je vais céder
la parole à ma collègue d'Iberville, mais, encore une fois, je vous remercie
énormément d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer.
Le Président (M. Jacques) : Mme
la députée Iberville... précisément.
Mme Bogemans : Merci, M. le
Président. Écoutez, c'est extrêmement touchant, le témoignage que vous venez de
livrer. Comme maman, comme plusieurs, comme pères aussi, ça vient nous
chercher. La famille, c'est ce qu'on a de plus précieux, c'est ce qu'on veut
protéger à tout prix, vraiment, vous nous l'avez bien rendu, là. On ne peut pas
faire abstraction, là, de ce que vous nous avez livré. Mais ce que vous disiez,
Mme Riviera, au départ, c'était vous êtes sortie de cette expérience-là en vous
demandant : Comment? Comment faire? Puis vous, M. Bittar, vous disiez que c'était
par la prévention. Vous voulez agir, à partir de maintenant, sur la prévention.
Dans le cadre du projet de loi qu'on a
actuellement, on parle énormément de sensibilisation, de zones scolaires, de
corridors, même, scolaires, pour élargir. On parle encore d'enfants. Je pense
qu'on peut se retrouver assez facilement sur ce terrain-là. Puis je voulais
savoir... parce que vous parliez, entre autres, dans votre mémoire, de plus de
surveillance, plus de barrages, puis je voulais savoir ce que vous pensiez... qu'on
proposait en ce moment dans le projet de loi, si ça rejoint vos attentes pour
protéger les enfants autour des zones scolaires?
• (13 h 20) •
M. Bittar (Antoine) : Je peux
me permettre? Parce que je m'occupe aussi, dans mon arrondissement, du comité de
sécurité routière puis j'avoue qu'on est très proactifs, justement, sur le
30 %. On allonge les zones qui... On a une rue, chez nous, qui est une rue
principale, tu commences, tu as une école, tu as un parc, tu continues, tu as
un parc, tu traverses à un train, tu as un chemin pour les écoliers. On
commence vraiment... on dit : Toute la rue devrait être 30 %. Je sais
que c'est une mesure qui peut être un petit peu dure, mais on est tout à fait
d'accord que... Et on a des trottoirs. Il faut comprendre que c'est encore plus
dangereux pour les places qu'il n'y a pas de trottoir. Alors, oui, tout ce qui
est pour la sécurité, nous sommes d'accord.
Mme Bogemans : Puis, au
niveau, justement, du renforcement de ces mesures de sécurité là, puis je pense
qu'encore on se rejoint sur le sujet, là... vous tablez, est-ce que vous
trouvez que les radars, les lumières, là, le fameux gyrophare pour
sensibiliser, les panneaux arrêt lumineux et puis la présence policière peuvent
faire une différence?
Mme Rivera (Elizabeth) : ...
Mme Rivera (Elizabeth) : ...et
nous, on participe souvent avec les policiers dans les barrages routiers et il
y a des personnes à 0,06 qu'il faut laisser partir parce qu'on on ne peut
rien faire. Et c'est dommage parce qu'on sait que les capacités sont
affaiblies. Alors, on les laisse partir et c'est vraiment dommage de voir ça
comme parent et de voir qu'on est comme... on ne peut rien faire. On ne peut
rien faire, on sait que c'est 0,06, 0,07. Alors c'est ça qui est comme une
frustration pour nous, si on peut dire, puis une incompréhension.
M. Bittar (Antoine) : Si je
peux ajouter. Vous savez ce qui est drôle, parce qu'on discute avec les
policiers, et on sait que le taux peut augmenter ou peut descendre. Alors, s'il
attrape quelqu'un 0,06, on le laisse partir, la personne, deux minutes plus
loin, au coin d'une rue, va faire un accident. Vous savez, on peut vous
sortir... on pourrait en parler. Puis le pire, c'est que c'est des choses que
j'imagine vous savez déjà. C'est des choses qui ont une logique implacable. On
ne devrait pas pouvoir...
Le Président (M. Jacques) : Ceci
met fin aux échanges avec la partie gouvernementale. Je cède maintenant la
parole à l'opposition officielle, M. le député de Nelligan, pour 12 min 23 s.
M. Derraji : Merci, M. le
Président. Mme Rivera, M. Bittar, merci pour votre présence. Je pense
qu'autour de la table il n'y a personne qui doit rester insensible à vos
propos. Et je sais que vous ne voulez pas mener ce combat uniquement au nom de
Jessica, mais moi je tiens à vous saluer parce que j'ai eu à parler avec
d'autres victimes et vous avez raison de dire : Ils refusent de prendre la
parole publiquement et je les comprends parfaitement. Et je ne vais pas dire
aujourd'hui : Si je suis dans votre place, est-ce que je vais mener ce
combat? Ce combat vous le menez depuis très longtemps et vous avez raison de
dire qu'on a les évidences sur la table, l'INSPQ, la SPQ. Hier, 54 %...
c'est quand que vous avez dit 50 %, c'est 52 %, en Colombie-Britannique,
la réduction des collisions. Mais moi, j'aimerais bien... parce que ce n'est
pas facile mener ce combat, j'aimerais bien que vous nous éclairer sur toutes
les démarches que vous avez faites depuis le début. C'est qui les personnes que
vous avez rencontrées pour sensibiliser? Que ça soit la partie gouvernementale,
les acteurs de la société civile, par quel chemin vous avez passé? Parce que je
sais que c'est très dur.
M. Bittar (Antoine) : Oui,
comme je vous dis, on a... quand on s'est aperçu de ce qui s'est passé, on
avait commencé... on a commencé avec notre ville, on a réussi à mettre un banc
commémoratif au nom de Jessica et au nom des victimes. On a continué à
travailler avec MADD. Là, nous avons rencontré, à ce moment-là, M. Carlos
Leitão et, en même temps, je pense, M. Monsef Derraji aussi... bien,
enfin, le rattaché, qui nous ont dit : On est intéressé de travailler avec
vous. On a eu une rencontre avec M. Carlos Leitão, M. Derraji était
là, et on avait parlé de faire une pétition, des lettres ouvertes, et tout.
M. Leitão a dit : D'accord, il s'en est occupé. Alors, on a fait des
lettres ouvertes dans les journaux, on a fait une pétition, qui était en 2022,
si je me souviens bien, avec M. Carlos Leitão.
Par après, on a demandé une réponse
officielle. Il y a eu un nouveau gouvernement, puis on a eu une réponse très
simple : Vous devez la refaire parce que, comme c'est une nouvelle
législation, on n'est pas obligé de vous répondre. Alors, nos démarches ont dû
recommencer. On ne savait pas exactement où aller. On s'est fait dire par des
personnes qui avaient eu un membre du Parlement qui est passé et qui est
victime aussi. Alors, nous nous sommes adressés à Mme Picard pour voir si
elle pouvait parrainer la pétition. J'ai eu une première réunion avec elle.
Après, c'étaient plus des courriels avec son cabinet et on a continué.
À un certain moment, je leur ai demandé,
je pense au mois d'août : Est-ce que je peux avoir une réponse? Parce que
sinon, moi, j'ai des... j'ai une sorte de pression avec les membres de MADD,
les victimes. Il faut qu'on mette la pétition en place. J'ai vu qu'il n'y avait
pas de réponse en tant que telle officielle en disant que, oui, on va vous
appuyer. On a recontacté M. Derraji, comme je vous dis, il était le premier,
avec M. Leitão qui l'avait fait et on a mis la pétition en place.
C'était...
Mme Rivera (Elizabeth) : Au
mois de novembre.
M. Bittar (Antoine) : Oui, on
a mis la pétition...
Mme Rivera (Elizabeth) : On a
fait des lettres ouvertes...
Mme Rivera (Elizabeth) : Oui,
on a fait des lettres ouvertes, et tout.
Mme Rivera (Elizabeth) : ...au
ministre des Transports. À Mme Guilbault aussi, on avait fait une lettre
ouverte. C'est ça, alors Antoine est allé rencontrer Mme la députée de
Soulanges, Marilyne Picard, puis il a communiqué avec elle, qu'est ce qu'on
peut faire, et tout. Et il y a quelqu'un de son cabinet qui a communiqué avec
Antoine et lui a dit : Écoute, la ministre va être ici dans une activité
cocktail de financement. Alors, on a acheté des billets à 100 $ chaque
pour avoir deux minutes avec la ministre...
M. Derraji : ...pouvez-vous
juste répéter? Parce que je n'ai pas bien compris. La rencontre, elle était
dans le bureau ou dans un cocktail de financement?
Mme Rivera (Elizabeth) : Un
cocktail de financement. Et c'est ça, alors mon mari, il m'a dit :
Elizabeth...
M. Derraji : Non, mais juste
une chose. Est-ce qu'on vous a invités à payer les 100 $ chaque pour
rencontrer Mme la ministre dans le bureau de la députée? Juste clarifier, parce
que je n'arrive pas à suivre.
Mme Rivera (Elizabeth) : Ce
n'était pas dans le bureau, c'était dans une... dans un restaurant, il y avait
une activité de financement. Il nous a dit : Vous achetez les billets puis
vous rencontrez la ministre, vous avez deux minutes chacun avec la ministre.
M. Derraji : Et vous avez
accepté?
Mme Rivera (Elizabeth) : Moi,
je n'étais pas d'accord. Je vous dis sincèrement, moi, je n'étais pas d'accord.
J'ai dit à Antoine : Moi, je ne veux pas faire ça, mais on fait tout à
deux, et il m'a convaincue. On a été, on a rencontré la ministre, on a eu nos
deux minutes. Puis honnêtement, quand j'ai quitté l'endroit, j'étais vraiment
déçue et j'ai trouvé ça inacceptable qu'on nous demande de payer 200 $
pour rencontrer la ministre.
M. Derraji : Écoutez, je ne
sais plus quoi dire.
Le Président (M. Jacques) : ...le
député de Nelligan, je vous inviterais à revenir sur le projet de loi en tant
que tel. On s'écarte un peu des discussions en cours.
M. Derraji : Mais on...
Excusez-moi, on ne s'écarte pas. Excusez-moi, M. le Président. Je pose des
questions au groupe. Je respecte mon temps. Ils ont évoqué quelque chose
d'extrêmement important. Moi, j'ai cru que la rencontre était dans le bureau de
la députée. Je pose des questions. Ils sont libres, le groupe, de répondre ou
pas. Sérieux, je ne sais pas comment continuer l'échange avec vous.
Mme Rivera (Elizabeth) : ...pour
nous, c'était... bien, surtout Antoine, c'était important qu'on rencontre la
ministre. On s'est dit... Il me disait... C'est l'opportunité de pouvoir parler
de notre histoire, du 0,05, et tout. Comme je vous dis, moi, je trouvais ça
inacceptable. En quittant, j'étais vraiment déçue qu'on ait payé 200 $
pour quatre minutes.
M. Derraji : Je vais revenir
à la mémoire de Jessica. Vous avez eu l'échange avec Mme la ministre, vous avez
aujourd'hui les médias... que nous, on va déposer un amendement dans le cadre
de ce projet de loi pour le 0,05, et je tiens à vous le dire, ça va être un
amendement au nom de Jessica. Je sais que vous ne voulez pas personnaliser le
débat, et je sais et je ressens votre peine, M. Bittar. Aujourd'hui, c'est
votre moment. Il y a des gens qui doutent. Il y a des gens qui disent qu'on veut
interdire l'alcool. Ce n'est pas l'alcool, O.K., moi, c'est vous qui
m'intéressent aujourd'hui. Et je vous le dis, j'ai parlé avec des victimes, ils
ne veulent pas prendre la parole publiquement parce que c'est extrêmement
difficile. Et c'est très difficile pour n'importe quel élu de prendre parole
parce qu'on essaie de vous... de sentir votre peine. Je préfère que le reste de
l'intervention soit vous. Aux gens qui vont voter contre l'amendement. Vous
leur dites quoi aujourd'hui? Parce que j'espère que tout le monde va voter pour
l'amendement, qui sera au nom de Jessica. Mais ceux qui vont voter contre, vous
leur dites quoi aujourd'hui?
• (13 h 30) •
M. Bittar (Antoine) : Écoutez,
pour nous, il n'y a pas de raison de voter contre, à moins qu'il y ait des
choses qu'on ne comprend pas. C'est... Moi, j'aimerais savoir pourquoi ils
voteraient contre. C'est la même question qu'on demande au gouvernement :
Pourquoi vous ne le faites pas? Vous savez, ça veut dire que... Je vais leur
dire exactement ce que j'ai déjà dit, ça veut dire que les personnes qui votent
non, je leur pose la question, ça vaut... c'est quoi, la valeur d'une vie pour
eux? Parce qu'en disant non, vous êtes en train de dire que la mort de Jessica,
la mort de toutes les personnes qui ont... et les prochaines qui vont arriver,
ce n'est pas important. Je ne peux pas... Il n'y a pas de réponse.
Vous savez, c'est simple, ce n'est pas
compliqué. Et je sais que, quand les gens nous parlent, ils disent : Non,
non, non, et, quand on leur parle face à face ou qu'on leur explique, ils
comprennent. C'est ça qu'on veut ici, vous faire comprendre. Je veux dire, s'il
y a des personnes ici qui sont prêtes à voter non, posez-moi des questions,
dites-moi pourquoi, essayez de me faire comprendre. Parce que, même si je ne
comprends pas pourquoi vous dites non, je ne voudrais jamais que ça vous
arrive. Je suis en train de vous dire : Ça peut vous arriver, il n'y a
personne qui est à l'abri de ça.
La dernière fois, une fille qui marchait
sur la rue... sur Jean-Talon. Le 31 décembre, deux personnes qui traversent la
rue, une lumière verte... Vous parlez de sécurité. Vous faites ce que vous
aviez à faire, des... les lumières, les... Les gens sont inconscients. Ils ne
savent pas ce qu'ils font. Vous ne pouvez pas...
13 h 30 (version non révisée)
M. Bittar (Antoine) : ...pas
protéger les gens rendus où est-ce que vous êtes rendus, il faut avoir des
mesures. Et les contrôles... c'est bien, les préventions, en parler. Je sais qu'Éduc'alcool
en fait, et tout. Il faut travailler ensemble, mais, comme je vous dis, la
publicité, ça vient, ça... regarde, on l'oublie. J'aimerais ça qu'on me dise
pourquoi.
Mme Rivera (Elizabeth) : Il
faut dire aussi que conduire, c'est un privilège, mais ce n'est pas un droit.
Alors, si tu fais quelque chose qui n'est pas bien, on enlève ton privilège, c'est
ça... c'est ça qu'il faut dire. Moi, à mes enfants, ma famille, ça a toujours
été... ça a toujours été le cas. Malheureusement, ça nous est arrivé et il y a
des gens qui nous ont dit : Mais vous êtes les dernières personnes à qui
ça devrait arriver, et ça nous est arrivé.
M. Bittar (Antoine) : Une
voiture, c'est une arme.
Mme Rivera (Elizabeth) : Alors,
c'est ça, c'est... moi, je ne comprends pas. J'espère que ça ne va pas arriver
à d'autres personnes pour qu'ils comprennent que c'est quelque chose de très
important. Et on ne le fait pas... on ne le fait pas parce qu'on ne veut pas
que les gens boivent, mais pour la sécurité.
M. Bittar (Antoine) : Sauver
des vies.
M. Derraji : ...
Le Président (M. Jacques) : Il
reste... 2 min 50 s.
M. Derraji : M. Bittar et Mme
Rivera, je sais que ce n'est pas facile. Je sais que les évidences
scientifiques sont sur la table. Vous avez expliqué le pourquoi, surtout, si
des gens voteraient contre. Pour vous, est-ce que l'argument de : ce n'est
pas populaire vous suffit? Parce qu'on voit les statistiques, c'est 61 %.
Vous avez mentionné le sondage, Les coops de l'information, c'est 61 %.
Pour vous, et avec toutes les démarches que vous avez effectuées, depuis
plusieurs mois, je dirais, années, est-ce qu'il y a quelque chose d'autre que
vous aimeriez que le gouvernement fasse?
Mme Rivera (Elizabeth) : Moi,
je trouve que c'est la mauvaise information. Les gens ne comprennent pas quand
on parle du 0,08 au criminel et 0,05, sanction administrative. Les gens ne
comprennent pas. Même dans notre entourage, quand on a expliqué : Non, ce
n'est pas criminel, c'est 0,05, c'est administratif. C'est comme conduire avec
le cellulaire, les ceintures de sécurité. Alors, moi, c'est éduquer les gens à
comprendre que les mesures administratives, c'est administratif, à 0,05, et on
évite... on sauve des vies. C'est ça, le plus important pour nous. C'est ça...
c'est ça qui est important.
M. Bittar (Antoine) : Si je
peux me permettre aussi, c'est quelque chose qu'on a oublié de dire, c'est que
le système judiciaire va en profiter aussi, parce que c'est les... Si vous êtes
poursuivis au criminel, c'est beaucoup plus lourd, beaucoup plus de temps que
quand vous avez une contravention pour un feu rouge ou un stop. Vous le
contestez, vous ne le contestez pas, ça va beaucoup plus vite, ça va vraiment
alléger. Et ça, je vous le dis parce que, dans les autres provinces, ils nous l'ont
dit aussi. Ça a été un avantage pour le gouvernement. C'était juste une
parenthèse que... qui pourrait être intéressante.
M. Derraji : ...que c'est des
mesures administratives, on ne parle pas du criminel, et ça se fait ailleurs.
M. Bittar (Antoine) : Oui,
oui, toutes les provinces, toutes les provinces le font. On est la seule
province qui ne le font... qui ne le fait pas. Et c'est pour ça qu'on se
demande, c'est... je ne veux pas dire... on est bon dans certaines choses, mais
qu'est-ce qui peut justifier que le Québec se dit : On n'en a pas besoin?
Comme je vous ai dit, on a des choses de réhabilitation, on a des choses,
mais...
M. Derraji : Il reste
quelques minutes. Mais je vous le dis, encore une fois, je vous laisse le mot
de la fin. Merci. Je trouve... les questions, mais je vous laisse le mot de la
fin. Sentez-vous bien à l'aise d'adresser de... de refaire un autre message aux
membres de la commission. Je vous laisse la dernière minute.
M. Derraji : Il reste 20
secondes.
M. Bittar (Antoine) : Bien,
en fin de compte, c'est simple. Écoutez, pour moi, il n'y a aucune raison de ne
pas avoir un amendement, il n'y a aucune raison de ne pas le mettre au 0,05. On
voit que les sondages augmentent à chaque fois. C'est... c'est sauver des vies.
Et faites le calcul rapidement. Vous avez tous les experts devant vous. Il n'y
a aucune raison, il n'y a vraiment aucune raison que ça ne se fasse pas.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup. Ceci met fin à l'échange avec l'opposition officielle. Je cède
maintenant la parole à M. le député de Taschereau pour quatre minutes, huit
secondes.
M. Grandmont : Merci, M. le
Président. Mme Rivera, M. Bittar, merci beaucoup pour votre présence, merci
pour votre courage, votre témoignage. C'est... j'ai des enfants, c'est le genre
de trucs qui... genre de pensées qui m'habitent depuis que je les envoie à l'école
toutes seules puis que je les vois grandir aussi. Puis que je les vois revenir
tard aussi, elles commencent à sortir. Ma plus vieille est presque majeure,
donc elle se promène, va dans des fêtes d'amis. Puis on y pense malheureusement
tout le temps. Puis on sait qu'on a des outils qu'on pourrait mettre en place
pour être capable d'apporter une solution, de réduire les chances que ça
arrive. Puis je regardais, pendant que vous parliez, je regardais un peu ce que
disait, là, la science par rapport à ça. Puis entre 0,05 puis 0,08, les risques
qu'un conducteur soit impliqué dans un accident...
M. Grandmont : ...mortel, dans
une collision mortelle, sont multipliés par quatre. Donc, c'est majeur, c'est
quand même important. Vous pourrez corriger les chiffres, si vous avez d'autres
chiffres, là, mais c'est quand même assez important. Au Canada, on a déjà
dit : on est les seuls à être à 0,08. Toutes les provinces canadiennes
sont à 0,05, sauf la Saskatchewan, qui est à 0,04. En Europe, ça va de 0,00 à
0,05, sauf le Royaume-Uni, qui est à 0,08. La ministre, tout à l'heure, vous a
répondu qu'il y avait beaucoup de prévention, puis c'est vrai, il y a de la
prévention qui se fait depuis plusieurs années, puis on a progressé sur cet
enjeu-là, parce que c'est de plus en plus compris. Maintenant, on voit qu'il y
a encore des accidents causés par l'alcool au volant. Est-ce qu'on pourrait
dire que la sensibilisation, bien, on a atteint la limite de ce que ça peut
offrir comme solution?
Mme Rivera (Elizabeth) : ...oui.
Je pense qu'on est prêts à passer à une autre étape. Comme je l'ai dit, la
sensibilisation dans les bars, dans les restaurants, ça ne fonctionne pas, les
gens ne le font pas. Il y en a qui vont le faire, oui, mais je ne pense pas que
c'est un moyen de... C'est sûr qu'il y a plus des barrages routiers, aussi, par
les policiers, ça aussi, mais, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, nous
participons aux barrages routiers, mais il y a des gens qui sont à 0,06 qu'on
doit laisser partir. Alors, oui, je pense que, comme société, comme étant la
seule province au Canada qui ne le faisons pas, c'est le moment de réfléchir et
de passer à... de bouger.
M. Bittar (Antoine) : Si je
peux me permettre, je pense qu'on le dit souvent, si tu veux avoir un impact,
des fois, il faut que tu touches le portefeuille, ou priver quelqu'un de
quelque chose, et il va s'en souvenir. Voir une publicité à la télévision,
trois jours après, tu vas l'oublier, tandis que, si tu t'es fait attraper à
0,05, justement, et que ça t'a évité d'avoir un casier criminel, d'avoir des
mesures, ça va rester beaucoup plus longtemps dans le... et ça va affecter les
gens autour. Je me suis fait arrêter à ça, ça, ça, le message va être beaucoup
plus direct, il va se répandre beaucoup plus rapidement.
M. Grandmont : On sait que
dans les secteurs d'activités, dans le fond, qui sont contre cette mesure-là,
là, on parle souvent des tenanciers de bars, des restaurateurs, qui voient une
potentielle perte de revenus, là. Je sais qu'ailleurs dans le monde on met en
place des mesures pour continuer à encourager les gens à aller quand même au
restaurant. Par exemple, les restaurateurs vont offrir le repas à la personne
désignée conductrice pour la soirée. Est-ce que vous avez d'autres exemples de
mesures comme ça qui peuvent être mises en place pour, justement, enlever cette
crainte-là du côté des tenanciers de bars et des restaurateurs?
M. Bittar (Antoine) : Bien,
comme je vous dis, moi, je trouve ça très... vraiment bien de pouvoir donner
de... Les boissons, c'est ce qu'on entendait. Les restaurants, c'est vraiment
bien aussi. Je trouve ça très bien. Ce que je veux dire, c'est qu'à un certain
moment ça se peut très bien que les gens... les restaurants, les bars vont se
faire... au civil, vont peut-être se faire poursuivre. Ça veut dire qu'ils
devraient comprendre... Je veux dire, on regarde dans d'autres provinces, il y
a des associations, avec MADD, de la régie des alcools. Ils font de la
publicité, ils poussent, ils mettent des boîtes dans... Il y a... Tout le monde
comprend qu'il faut travailler ensemble. C'est un fléau. Je veux dire, c'est...
Quand on a eu la COVID, tout le monde s'est mis ensemble... C'est ça qui
arrive. C'est la même chose, plus ou moins la même chose.
M. Grandmont : Merci.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup. Ceci met fin à l'échange avec le deuxième groupe d'opposition. Je
vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission. Et, avant
de terminer, je dépose les mémoires des personnes et organismes qui n'ont pas
été entendus dans le cadre des auditions publiques.
La commission ayant accompli son mandat,
j'ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 13 h 40)