Journal des débats de la Commission des transports et de l'environnement
Version préliminaire
43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)
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Le
jeudi 2 février 2023
-
Vol. 47 N° 4
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de Stratégie gouvernementale de développement durable 2023-2028
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11 h 30 (version non révisée)
(Onze heures quarante minutes)
Le Président (M. Jacques) : Bonjour
à tous. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des
transports et de l'environnement ouverte.
La commission est réunie afin de
poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le
projet de Stratégie gouvernementale de développement durable 2023-2028.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. St-Pierre Plamondon (Camille-Laurin) est remplacé par M. Arseneau
(Îles-de-la-Madeleine).
Le Président (M. Jacques) : Merci.
Ce matin, nous entendrons les organismes suivants : Équiterre et le Centre
d'études et de recherches intersectorielles en économie circulaire. Comme la
séance a commencé à 11 h 39, y a-t-il consentement pour poursuivre
nos travaux au-delà de l'heure prévue? Consentement? Merci.
Je souhaite la bienvenue aux représentants
d'Équiterre, Mme Colleen Thorpe et M. Marc-André Viau. Vous avez 10 minutes
pour faire votre présentation, merci.
Mme Thorpe (Colleen) : M. le
Président, M. le ministre, chers élus, merci de nous avoir invités à prendre la
parole aujourd'hui. Nous tenons d'emblée à souligner que la production d'une
stratégie de développement durable pour l'appareil gouvernemental représente un
travail ardu, et sa mise...
Mme Thorpe (Colleen) : ...en
œuvre encore plus. Les commentaires et recommandations que nous vous présentons
aujourd'hui se font dans un contexte de dérèglement climatique et
d'effondrement du vivant. Le développement durable de 2023 n'est plus celui de
2008. Pour être ambitieuse et réaliste, la stratégie de développement durable
va devoir s'arrimer avec d'autres orientations gouvernementales en
développement telles que la Vision énergétique 2050 et la Politique
nationale d'architecture et d'aménagement du territoire. Son succès se mesurera
par les solutions mises de l'avant et la volonté politique de les appliquer.
La vision du gouvernement en matière de
développement durable et les grandes orientations du projet de stratégie sont
louables, et Équiterre s'y retrouve. Cela étant dit, nous sommes d'avis que
l'action gouvernementale des dernières années s'y oppose à bien des égards.
Nous sommes intéressés de savoir quelles seront les actions qui corrigeront le
tir afin que l'action gouvernementale soit cohérente et permettent d'atteindre
une véritable transition socioécologique. Je passe que la parole à mon
collègue.
M. Viau (Marc-André) : Merci,
Colleen. M. le Président, M. le ministre, membres de la Commission, j'aimerais
mettre l'accent sur quelques éléments précis de la stratégie, là, qui nous
interpellent chez Équiterre. C'est lié aux constats effectués et à certaines
pistes d'action envisagées. D'abord, je dois dire que la façon d'aborder la
transition juste met les bases d'une conversation franche et sur un sujet qui
n'est pas évident. On mentionne à l'objectif 1.2 que, sous l'impulsion des
politiques publiques relatives au développement durable, dont celles liées à
l'atténuation des changements climatiques et à l'adaptation à ceux-ci, le
marché du travail se transforme et que, par conséquent, des emplois sont amenés
à évoluer, d'autres à acquérir une nouvelle importance et certains à
disparaître. Il faut féliciter le gouvernement de ne pas tomber dans les mêmes
effets de toge que la première ministre de l'Alberta, qui est dans le déni par
rapport à cet enjeu-là. Il serait cependant pertinent d'élaborer davantage les
pistes d'action envisagées pour cette transition juste, de concert avec les
travailleuses et les travailleurs, et que tout... pour cette stratégie-là.
Dans un deuxième temps, j'ai été
agréablement surpris de la stratégie sur l'enjeu de mobilité... par un passage
de la stratégie sur l'enjeu de mobilité. Quand on lit dans le document, aux
pistes d'action anticipée de l'objectif 4.2, et je cite : «En ce qui
concerne le transport des marchandises, il est important d'agir pour diminuer
le nombre de véhicules sur nos routes ainsi que le poids et le volume des
camions», eh bien, nous disons félicitations. Cette piste d'action anticipée
doit se réaliser. C'est ça que ça nous prend pour la mobilité, il faut réduire
la taille et le volume du parc de véhicules, il faut être plus efficace dans
notre mobilité, mais on se demande pourquoi la stratégie fait un pareil constat
en transport de marchandises, mais pas pour les véhicules personnels. C'est
exactement le même problème : trop de camions légers, trop gros, trop
lourds.
Par contre, il faut souligner que le
gouvernement souhaite prêcher par l'exemple dans ce domaine. Il est
rafraîchissant de constater que, parmi les pistes d'action envisagées à
l'objectif 5.8, la stratégie mentionne, et je cite : «Il est souhaité
des ministères et organismes qu'ils optimisent l'usage des véhicules et les
déplacements ainsi qu'ils fassent des choix écoresponsables de véhicules en misant
sur des technologies plus propres, l'électrification et la diminution de la
taille des véhicules.» On trouve donc à deux reprises dans le document
l'identification de la taille des véhicules comme un enjeu problématique. Ça
fait du bien de voir qu'on arrive à la même conclusion du côté du gouvernement
que celle à laquelle nous le sensibilisons depuis maintes années. On encourage
le gouvernement à répondre à ses propres constats par des actions concrètes.
Avant de repasser la parole à ma collègue,
j'aimerais dire un mot sur l'écofiscalité. Dans le document de stratégie
proposé, il est écrit que «l'écofiscalité est un outil qui peut jouer un rôle
important et que le ministère de l'Environnement conseille les ministères et
les organismes qui souhaitent être accompagnés dans l'instauration, la gestion
ou l'évaluation d'une mesure écofiscale». À la lecture de la section sur
l'écofiscalité, on ne sent pas que le gouvernement est emballé par cet outil.
Ça contraste pas mal avec la sortie de la stratégie en 2015. Le gouvernement de
l'époque avait même créé un groupe de travail sur l'écofiscalité. Disons qu'on
était davantage dans une logique proactive pour voir comment nos outils fiscaux
pouvaient permettre de répondre aux impératifs du développement durable plutôt
que de simplement constater leur existence en 2023. L'écofiscalité ne doit pas
être juste un outil fiscal qu'on ajoute par-dessus les programmes existants. Il
faut revoir le financement de l'ensemble des programmes pour introduire de
l'écoconditionnalité et de...
M. Viau (Marc-André) : ...je
repasse la parole à ma collègue.
Mme Thorpe (Colleen) : Nous
sommes d'avis que le projet de stratégie ne fait qu'effleurer un enjeu de
taille, soit notre système alimentaire. Celui-ci est précaire en raison, entre autres,
du dérèglement climatique. Et comme nous le savons, l'insécurité alimentaire
est amplifiée avec l'inflation que nous connaissons. Dès maintenant, nos
récoltes et nos menus doivent nourrir la santé humaine et la santé planétaire.
La stratégie ne fait pas mention de la nécessité de diversifier les régimes et
d'éliminer les aliments ultratransformés qui sont une source de gaspillage
nutritionnel. En ce sens, nous suggérons de modifier la définition
d'alimentation durable pour y intégrer ces notions. Nous suggérons également
d'adopter un programme universel d'alimentation scolaire québécois et aussi de
protéger intégralement le territoire agricole en tant que ressource stratégique
non renouvelable.
Le récent bilan de gestion des matières
résiduelles nous rappelle à quel point nous devons changer de paradigme et que
notre société d'État, RECYC-QUÉBEC, doit se muter en RÉDUC-QUÉBEC. Pour y
arriver, les mesures écofiscales doivent être déployées pour internaliser les
coûts de gestion des matières résiduelles. Nous sommes d'avis que des mesures
doivent être intégrées dans les systèmes de responsabilité élargie des
producteurs, notamment pour les appareils électriques et ménagers, afin de
soutenir le réemploi des biens. La stratégie pourrait également intégrer la
durabilité et la réparabilité dans les critères d'appel d'offres publics et
faire des ministères et organismes un levier pour soutenir les activités de
réparation. Nous sommes ravis de constater que la stratégie prévoit la
possibilité qu'il soit apporté des modifications à la Loi sur la protection du
consommateur qui pourrait porter notamment sur la durabilité des biens de
consommation.
Afin de permettre une mise en œuvre
efficace par l'ensemble de l'administration publique et plus largement de notre
société, la formation est la clé de voûte pour changer les pratiques. Il n'est
plus le temps d'aborder le développement durable uniquement sous la forme de
sensibilisation mais via des réels programmes de formation et d'éducation.
Alors que le secteur de la construction, et de la rénovation, et de la
démolition, et des ICI est responsable de plus de 50 % des matières
éliminées au Québec, il est évident que les métiers de la construction sont peu
ou pas exposés aux pratiques écologiques pour limiter leur impact
environnemental. Il est tout aussi étonnant de constater que la formation
initiale à l'enseignement n'inclut pas de cours obligatoires en éducation
relative à l'environnement rejoignant l'ensemble des étudiants et étudiantes.
La Régie du bâtiment tout comme l'Ordre des professions doivent s'impliquer
plus rapidement pour faciliter la mise en œuvre de ces programmes.
Je passerais la parole à Marc-André pour
conclure.
M. Viau (Marc-André) : Donc,
pour résumer notre propos, là, je dirais qu'à partir du moment où le
gouvernement adopte et conserve des lois, comme celle concernant l'accélération
de certains projets d'infrastructure, qui ont pour principale conséquence
d'affaiblir la réglementation environnementale et les mécanismes de
consultation publique, eh bien, à ce moment-là, l'action gouvernementale
s'éloigne des objectifs de développement durable. Comme nous l'avons fait
remarquer, plusieurs constats effectués dans le cadre de cette stratégie sont
pleins de lucidité, mais, si les constats demeurent à l'état de constats, la
stratégie ne remplit pas son rôle. Comme pour l'avenir énergétique dont il est
question avec le projet de loi n° 2 et une éventuelle consultation
publique, nous vous recommandons d'ailleurs, M. le ministre, de mettre en place
un BAPE générique sur le sujet. Il ne faudrait pas que les dimensions
environnementales continuent de faire les frais du développement. Il ne
faudrait pas oublier que, dans l'expression développement durable, il y a le
mot durable. Merci.
• (11 h 50) •
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup pour votre présentation. Je cède maintenant la parole à M. le ministre
pour le début des échanges pour une période de seize minutes 30.
M. Charette : Merci, M. le
Président, vous deux. Un plaisir de vous retrouver malgré le fait que ce soit à
travers nos écrans respectifs. Donc, merci à vous mais merci également à
Équiterre, joueur incontournable au Québec depuis de nombreuses années sur ces
questions-là. Donc, toujours intéressant, là, de vous entendre.
Un constat que j'ai pu partager avec
quelques groupes depuis le début de la consultation, c'est le suivant, en fait,
c'est ce que je réalise, il y a plusieurs éléments qui ne font pas partie ou
qui ne sont pas écrits noir sur blanc dans la stratégie mais qui font l'objet
de politiques ou de stratégies à travers le gouvernement. Vous avez mentionné
l'agriculture durable notamment. C'est vrai qu'il n'y a pas de long chapitre
dans la stratégie gouvernementale de développement durable, mais le ministère
de l'Agriculture, à travers notre collègue, a déposé une stratégie
d'agriculture durable qui reprend d'ailleurs plusieurs des éléments que vous
avez mentionnés comme souhait.
Donc, ma question, c'est la
suivante : Est-ce que...
M. Charette : ...dans la
stratégie, on doit reprendre toutes les initiatives ou se référer à toutes les
initiatives qui sont clairement dans l'optique du développement durable, mais
qui sont contenues dans d'autres stratégies gouvernementales? Bref, est-ce
qu'il faut tout répéter ou on peut, tout simplement, s'y référer comme étant
aussi des pratiques de développement durable qui font partie de l'action
gouvernementale et des ministères et des organismes liés?
Mme Thorpe (Colleen) : On est
bien sensibles à ce défi de ne pas vouloir tout répéter et ne pas tout inclure,
parce que ça fait des documents qui sont complexes et très, très larges. Ce
qu'on voulait amener avec la question alimentaire, c'était une espèce de
priorisation, et, compte tenu que c'est un besoin de base des Québécois, compte
tenu de la précarité de notre système, on voulait avoir une place plus marquée
pour cet enjeu-là, qui n'apparaît pas actuellement à ce moment-ci. On est bien
conscients qu'il y a d'autres documents qui adressent ces problématiques.
Pour la question alimentaire, on se dit
que, comme on est en situation d'urgence, et s'il devait y avoir des pénuries
alimentaires occasionnées par des ruptures d'approvisionnement, ce qui est
probable dans les années à venir, avec les changements climatiques, qu'on
devrait voir cette priorité reflétée dans la stratégie. Et l'agriculture,
contrairement à certains autres domaines, demande un long temps de prévoyance
pour changer un système agricole. Il y a beaucoup d'éléments à changer sur
notre système agricole actuellement, et il faut le prévoir dès maintenant. Et
donc on voudrait voir cette priorité dans la stratégie.
M. Charette : Je le
comprends. Et peut-être vous rassurer... Mais, quoique vous aviez eu à
commenter la politique de développement... non pas de développement, mais
d'agriculture durable du MAPAQ, à sa présentation... mais on parle de
souveraineté alimentaire, on parle de protéger le territoire agricole, on parle
d'accompagner les agriculteurs pour développer des cultures qui soient moins dépendantes
des pesticides, on parle de financement de mesures, bref, je pense que c'est un
volet qui est très, très bien couvert, mais merci, là, de nous rappeler
l'importance de l'agriculture.
Vous avez parlé d'éducation, comme quoi ça
devrait être enseigné dans toutes nos écoles, l'importance de l'environnement,
l'importance du développement durable. J'en suis, et c'est une recommandation,
là, qui, normalement, va s'incarner dans le nouveau cours de citoyenneté qui
est en déploiement, actuellement, dans nos écoles primaires et secondaires.
Lorsque la réforme a été annoncée, il y a, quoi, il y a un petit peu plus d'une
année, c'est un des blocs qui a été présenté, et ça, c'est une excellente
nouvelle. Déjà, nos jeunes... Je le vois, là, j'ai des jeunes, moi, avec des
écarts d'âge assez importants. Je ne veux pas blâmer ma plus vieille, qui a 25
ans aujourd'hui, mais, dans son discours, c'était moins présent, parce qu'à
l'école c'était moins présent, on en parlait moins. Ma plus jeune a 15 ans, et
ça fait partie déjà de ses préoccupations, ça fait partie de ce qui est
enseigné à l'école, et ça le sera encore davantage avec le nouveau cours, là,
qui est en implantation. Donc, il y a une très belle évolution chez nos jeunes,
on les sent plus mobilisés, et, oui, l'école aura la possibilité de jouer un
rôle encore plus prépondérant à ce niveau-là.
Je sais que j'ai des collègues qui veulent
intervenir aussi, je ne prendrai pas tout le temps de parole, mais juste vous
revenir sur la question de la mobilité. C'est clair, c'est important. Les
transports, on le sait et on ne le répétera jamais assez, là, c'est, de loin,
notre principale source d'émissions, c'est plus de 40 % de nos émissions
de GES. Il faut agir à différents niveaux. J'aimerais vous entendre au niveau
de l'intermodalité. On a un réflexe, et c'est le défaut des nations avec un
vaste territoire, on fait tout passer par le routier, mais pas suffisamment par
le train ou pas suffisamment par le bateau, deux sources de transport, là, qui
sont beaucoup moins émissives. Est-ce que vous avez une réflexion à nous
partager sur autant l'usage du bateau ou des trains pour limiter nos émissions
de gaz à effet de serre?
M. Viau (Marc-André) : Définitivement.
Merci pour votre question, M. le ministre. Il y a définitivement des
optimisations logistiques à effectuer et des pistes à explorer pour que ce soit
le ferroviaire. Pour le transport de marchandises par bateau, il n'est pas sans
conséquence non plus sur la biodiversité, là. On parle...
M. Viau (Marc-André) : ...la
capacité du port de Montréal, notamment, avec la construction d'un deuxième
port à Contrecœur qui se fait en plein dans l'habitat du chevalier cuivré, qui
va menacer la survie de ce poisson-là. Donc, oui pour explorer des pistes
alternatives, mais pas sans prendre en conséquence l'ensemble des conséquences
environnementales que peut causer un déplacement des activités d'un mode à
l'autre.
M. Charette : ...défis que
nous avons en matière d'environnement. On a eu l'occasion, entre collègues, de
parler notamment du tramway et du REM. Même lorsqu'on développe des
infrastructures de transport collectif, il y a des incidences, il y a des
milieux plus fragiles, parfois des milieux humides, parfois des milieux avec
des espèces qui sont déjà identifiées comme vulnérables. Bien d'accord avec
vous, il faut prendre ces éléments en considération, mais toute bonne action en
environnement entraîne aussi, malheureusement, dans bien des cas, des
conséquences en environnement qu'il faut mitiger, tout simplement.
Parce que le temps est très serré, malgré
l'importance des sujets qui nous occupe, je veux laisser la parole à mes
collègues, mais je vous réitère mes remerciements, puis on aura l'occasion de
se reparler, là, pour d'autres collaborations. Merci beaucoup.
Le Président (M. Jacques) : Merci,
M. le ministre, je cède maintenant la parole au député de Côte-du-Sud.
M. Rivest : Oui, bonjour.
Merci beaucoup. D'abord, je souligne le volet assez positif de votre mémoire
puis de la façon qu'il est abordé. Puis je tiens à souligner parce que c'est
toujours intéressant de voir que les idées sont bonnes, puis on rajoute ce
volet-là d'aller un petit peu plus loin en rajoutant des objectifs... qui
peuvent être vérifiés, validés. Tout ça, je tenais à le souligner puis vous
dire bravo là-dessus.
Vous avez abordé, dans votre présentation,
le volet d'outils fiscaux, et vous, dans vos recommandations, vous parlez
d'instaurer, de voir la possibilité d'instaurer de nouvelles mesures
écofiscales. Est-ce que vous pourriez élaborer un petit peu pour nous donner
certaines pistes, là, de quel pourrait être ce volet innovant là, dans
l'écofiscalité, que vous pouvez proposer?
M. Viau (Marc-André) : Bien,
on ne va pas réinventer la roue, là. Il y a plusieurs pistes d'action qui ont
été déjà envisagées, la plupart dans le secteur de la mobilité, là, que ce soit
un frais lié aux émissions de GES des véhicules plus polluants, par exemple.
Donc, ça, c'est un principe d'écoconditionnalité dont il a été beaucoup question
dans les dernières années au Québec, dans la dernière campagne électorale,
également, faut-il le rappeler? Mais on peut penser aussi, également, à la
révision de l'ensemble des programmes. C'est ça, le propos qu'on a fait un peu
plus tôt dans l'allocution, c'est de dire : Bien, on ne doit pas seulement
ajouter des principes d'écofiscalité par-dessus ce qui se fait d'existant. On
peut retourner, on peut faire une évaluation des programmes, voir comment ces
programmes-là sont financés et est-ce que ce financement-là mériterait d'être
lié davantage à des objectifs environnementaux. Et, en pensant de cette
façon-là, on peut peut-être arriver à faire des gains plus significatifs.
M. Rivest : Je comprends.
• (12 heures) •
Mme Thorpe (Colleen) : Si je
peux me permettre d'ajouter, c'est aussi une question d'analyser
l'écofiscalité, c'est-à-dire qu'on est aux balbutiements de ces outils-là. Si
on regarde la redevance à l'élimination, qui est passée de 10 $, en 2006,
à 30$, en 2022, ce qui est en soi une bonne nouvelle, mais est-ce que c'est la
bonne hausse pour dissuader le recours à l'élimination? On n'a pas vu d'étude
pour nous dire c'est quoi, le bon tarif, et on sait très bien que l'élimination
est une grande problématique, avec les résultats qu'on a eus du bilan, très
récemment.
M. Rivest : D'accord. Merci.
Si vous pouvez me permettre, aussi, vous avez mentionné l'idée de vision à long
terme, sur cette vision gouvernementale là, en matière de développement
durable. Si on avait une baguette magique ensemble et quelques minutes devant
nous, quelle serait cette vision-là? Pouvez-vous nous porter quelques éléments
que vous souhaiteriez voir dans cette vision à long terme?
M. Viau (Marc-André) : Bien,
je veux dire, l'énoncé de vision proprement dit de la stratégie est pavé de
bonnes intentions, donc il n'y a pas énormément à revoir dans cet énoncé de
vision là. Je pense qu'il aurait...
12 h (version non révisée)
M. Viau (Marc-André) : ...ils
gagneraient à être... à se transposer davantage dans l'ensemble des ministères,
ce que je ne crois pas est la réalité actuellement, quand on regarde certaines
actions de certains ministères. Donc, si on est capable de transposer cette
vision-là, mais non seulement de transposer cette vision-là, et c'est encore un
propos qu'on tenait un petit peu plus tôt dans l'allocution, c'est qu'on ne
doit pas rester à l'état de vision ou à l'état de constat. Il faut matérialiser
cette vision-là, il faut matérialiser les constats.
Or, malheureusement, à certains égards, et
pas à tous les égards, mais à certains égards, il y a certaines politiques
gouvernementales. J'ai fait référence à la politique sur l'accélération des
projets de loi d'infrastructures. On peut penser à des projets également qui
sont en développement, comme le projet de troisième lien. Donc, on a un
ensemble d'actions gouvernementales qui vont à l'encontre de la vision qui est
proposée. Donc, la vision, en tant que telle, elle peut être la meilleure. Si
elle ne se matérialise pas en action concrète pour refléter cette vision-là, la
stratégie ne demeure qu'une stratégie.
Une voix : Merci.
Le Président (M. Jacques) : Merci,
M. le député. Je cède maintenant la parole à la députée d'Argenteuil.
Mme Grondin : Il reste
combien de temps?
Le Président (M. Jacques) : Il
reste environ quatre minutes.
Mme Grondin : Parfait. Madame
Thorpe, monsieur Viau, bonjour. Merci pour le mémoire que vous avez déposé. C'est
toujours très intéressant d'avoir votre apport dans ces réflexions-là. Moi, je
voudrais me concentrer... Puis il y a des mots-clés que je retiens dans le
cadre des échanges que nous avons, là c'est la notion d'exemplarité de l'État, puis
toute la question de l'écofiscalité, donc la nécessité de faire des analyses ou
de pousser plus loin cette réflexion-là d'écofiscalité.
Moi, j'aimerais ça qu'on se concentre sur
l'orientation 2. Vous n'êtes pas sans savoir qu"agir en faveur de la nature
pour la santé", inévitablement, c'est quelque chose qui m'intéresse
grandement. Et vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a comme des engagements en
termes de plan nature, en termes de plan eau, sur la question de l'eau. Donc,
est-ce que vous avez des éléments, dont vous voudriez nous faire part à ce
niveau-là, des recommandations, des mots-clés, une intention de poursuivre les
échanges sur cette question-là?
M. Viau (Marc-André) : Je
vais essayer de répondre à la question, je ne sais pas si je l'ai bien
comprise. Pour la nature, et pour l'eau, et pour la santé, si on a des
recommandations qui sont liées à l'exemplarité de l'État et l'écofiscalité, c'est
bien ce que je comprends.
Mme Grondin : Bien, en fait,
ça peut. Moi, je retiens qu'il y a des sujets comme l'écofiscalité, l'exemplarité
de l'État, qui sont très importants. Mais j'aimerais ça qu'on se concentre sur
un des défis prioritaires qui est l'adaptation aux changements climatiques, qui
est aussi la lutte aux changements climatiques, mais avec la notion de solution
nature. Donc...
M. Viau (Marc-André) : Oui.
Bien, on est très favorable à l'utilisation des solutions nature. On en a fait
des recommandations. Et d'ailleurs, un peu plus tôt avec le ministre, on
parlait du plan d'agriculture durable, là. Juste pour revenir là-dessus d'ailleurs,
nos propositions concernent davantage l'alimentation que l'agriculture, mais c'est
un autre sujet. Mais on en a fait, on fait la promotion d'une agriculture
régénératrice. Chez Équiterre, ce qui est aussi partagé dans le cadre du Plan d'agriculture
durable, donc on est très favorables à ces solutions nature là. Vous avez parlé
de l'eau. Il y a eu une proposition qui a été faite pendant la campagne
électorale, qui devrait se matérialiser, j'imagine, en piste d'action.
Ceci étant dit, on parle de mitiger les
conséquences actuelles et non pas nécessairement de renaturaliser. Et je pense
que ça, c'était un des aspects peut-être qui est manquant par rapport... et
dont il a beaucoup été question lors de la dernière COP à Montréal, l'aspect
de... donc freiner le déclin de la biodiversité, mais également renaturaliser.
Donc on doit stopper l'effritement et, après ça, on doit bâtir... rebâtir les
milieux naturels. On a encore beaucoup de projets gouvernementaux qui vont
empiéter sur...
M. Viau (Marc-André) : ...milieux
naturels, notamment les milieux humides, par la construction d'autoroutes sur
les terres agricoles, par des projets industriels. Beaucoup de terres agricoles
qui sont dézonées pour des projets industriels, pour des autoroutes, c'est très
problématique.
Le Président (M. Jacques) : Bien,
merci pour la première tranche d'intervention. Je vais céder maintenant la
parole à la porte-parole de l'opposition officielle, la députée de Notre-Dame-de-Grâce.
Mme McGraw : Merci, M. le
Président. Et merci à Équiterre d'être avec nous aujourd'hui. Merci pour la
présentation et le mémoire qu'on vient de recevoir. Donc, on est en train de
prendre connaissance du document. Alors, j'ai quelques questions. Donc, juste
au début, vous parlez des recommandations...bien, la section qui s'intitule Une
hésitation marquée, vous dites que la stratégie effleure certaines thématiques
alors qu'elles devraient être davantage mises de l'avant, dont l'alimentation
durable. Mais vous dites aussi que certains principes du développement durable
ne sont pas du tout... ne sont pas mis... être mis de l'avant, dont le principe
de précaution, qui est un principe de base en développement durable. Alors,
est-ce que vous pouvez élaborer sur cette recommandation, cette observation?
M. Viau (Marc-André) : Oui.
Bien, pour le principe, bien, l'ensemble des principes de développement
durable, je pense qu'il faut et il faut approfondir leur utilisation. Il faut
qu'ils soient davantage intégrés dans les politiques qui sont mises de l'avant.
J'essaie juste de retrouver exactement, là, le principe de précaution, auquel
vous avez fait référence, dans notre mémoire. Je ne le retrouve pas,
malheureusement, là.
Mme McGraw : Ça va. C'est à
la page 7. C'était très bref comme commentaire. C'est juste parce que...
Est-ce qu'il y a d'autres... Peut-être, la question c'est qu'à part du principe
de précaution, principe... est-ce qu'il y a d'autres principes de base? Est-ce
que vous pouvez peut-être nommer d'autres principes que vous vous dites qu'il
manque dans cette stratégie, qui ne semblent pas être présents?
M. Viau (Marc-André) : Il y
a... Encore là, puis je ferai un peu le même commentaire, malheureusement, que
j'ai fait précédemment, il y a de bons principes, il y a de bons constats.
L'important pour nous, c'est qu'est-ce qu'on va faire avec ces constats-là,
qu'est-ce qu'on va faire avec ces principes là. J'ai parlé tantôt, dans
l'allocution, de réduction de la taille du parc de véhicules. Donc, si on est
dans des principes de réduction, et ma collègue a parlé, bon, de la question de
la consommation, de la circularité, de la réduction à la source, si on est dans
cette logique-là d'action gouvernementale à la suite de la stratégie, on va
arriver à l'objectif. Le problème, c'est que, si on reste à l'état de
stratégie, si on reste... si on ne plonge pas dans les actions, si on ne prend
pas les mesures qui sont nécessaires, on n'arrivera pas au résultat dont on a
besoin.
Mme McGraw : Parfait. Merci.
Et peut-être on va... Ah! madame, oui.
• (12 h 10) •
Mme Thorpe (Colleen) : Si je
peux me permettre, l'orientation 5, qui parle de créer un état exemplaire,
on parle d'un sous-objectif d'évaluer la durabilité des interventions
gouvernementales. Donc, c'est un sous-objectif. C'est un point majeur, à mon
sens, parce qu'il évalue la cohérence et il faut trouver une façon de mesurer
ça, parce que, comme on l'a mentionné, il y a des actions gouvernementales
actuellement qui ne sont pas en cohérence avec la stratégie.
Mme McGraw : Parfait. Merci.
Vous avez aussi... Vous avez parlé de mesures ou de solutions écofiscales, et
vous avez dit que... je ne veux pas mettre des mots dans... mais que le
gouvernement s'éloigne un peu de ça, tandis qu'en 2015 le gouvernement libéral
avait mis sur pied, justement, un groupe de travail sur l'écofiscalité. Et,
dans ce contexte-là... Donc, vous avez une bonne section en transport et
mobilité. Dans votre mémoire, vous indiquez qu'on omet de discuter de la...
Mme McGraw : ...taille des
véhicules individuels, c'est de l'actualité, évidemment, d'en parler. Est-ce
que vous pouvez élaborer sur les solutions écofiscales qui sont en lien avec le
transport et surtout le transport individuel?
M. Viau (Marc-André) : Il y
en a énormément, là, des options, des possibilités, toutes ces options et ces
possibilités-là, tous... le ministère des Finances, le ministère des
Transports, tout le monde les a, tout le monde a les analyses sur les principes
d'écofiscalité, que ce soit pour les... une surtaxe sur les émissions de GES,
d'avoir un principe de redevances remises également à l'achat de véhicules plus
polluants, que ce soit de la tarification kilométrique. Toutes ces options-là
sont disponibles, ont été discutées, ont été débattues. Maintenant, c'est le
temps d'en faire quelque chose.
Mme McGraw : Vous avez parlé
aussi de la consommation responsable et de circularité. Vous seriez content
d'apprendre qu'aujourd'hui on a apporté une motion sur l'obsolescence,
justement. Évidemment, ça n'a pas été retenu, mais on va continuer sur ce
front-là. Plusieurs groupes ont mentionné le manque de cibles et d'objectifs de
type Smart, dont la Commissaire du développement durable. Vous proposez entre autres,
une cible d'indice de circularité ambitieuse et le plan de mise en œuvre.
Pourriez-vous commenter sur l'importance d'inclure les producteurs et non pas
seulement mettre la responsabilité sur les consommateurs?
Mme Thorpe (Colleen) : Évidemment,
tout changement systémique passe par toute la chaîne et les consommateurs sont
au bout de la chaîne et donc il nécessaire de sensibiliser ces
consommateurs-là. On s'est penché un peu sur la circularité ou le plan de
circularité des Pays-Bas, et Recyc-Québec a quand même étudié ce pays-là aussi.
Puis l'étude qui s'est faite au Québec a conclu qu'on était quand même assez
loin de la moyenne nationale de circularité, donc 3,5 au Québec, et je pense
que la moyenne est à 8 ou à 9 %. Et donc un pays comme les Pays-Bas qui
est très différent peut-être du Québec quand même, pas beaucoup de ressources
naturelles, mais qui a quand même fait un plan ambitieux pour réduire la
consommation des matériaux. Et ce discours, on est au tout début au Québec et
il doit s'amplifier et il doit s'amplifier de différentes façons. Donc, oui,
des lois sur la... obligeant la réparation, mais aussi toute la gestion des
matières résiduelles sur les chantiers de construction. Et à cet effet-là, le
langage utilisé dans l'orientation 5, c'est vraiment d'améliorer la
performance de la gestion des matières résiduelles de l'État. Je pense que la
sémantique est importante ici et on devrait beaucoup plus miser sur un
vocabulaire qui parle de diminution de l'empreinte, diminution de l'utilisation
des matériaux. Et je répète, il est temps qu'on change le nom de Recyc-Québec.
Ça envoie le mauvais message.
Mme McGraw : Oui, vous avez
parlé de Reduc Québec. Je pense, Reduc Québec, très intéressant.
M. Viau (Marc-André) : Juste
pour compléter rapidement. Vous avez fait référence à l'absence d'indicateurs.
Effectivement, le fait qu'ils seront définis dans la première année après la
sortie de la stratégie, ça nous semble également problématique. Ça devrait
s'accompagner, la stratégie et les indicateurs devraient aller de pair et non
pas attendre de sortir une stratégie, surtout qu'elle a deux ans de retard,
avant de développer des indicateurs.
Mme McGraw : Merci. Je pense
qu'il me reste quelques secondes, même pas.
Le Président (M. Ciccone) : Une
minute.
Mme McGraw : Une minute.
Donc, il y a des groupes qui ont parlé d'un secrétariat à l'économie verte ou
un mécanisme pour faire en sorte qu'il y a plus de coordination et d'ambition
entre les ministres puis que ça ne soit pas juste l'Environnement, mais tous
les ministres, les ministères qui sont impliqués. Est-ce que vous avez des
observations ou des recommandations dans ce sens?
M. Viau (Marc-André) : Bien,
la gouvernance climatique demeurera... est et demeurera un défi constant dans
l'avenir. Quelle sera la meilleure façon d'y arriver...
M. Viau (Marc-André) : ...on
est ouverts à discuter des différentes propositions. Ce qu'il ne faut pas
perdre de vue, c'est l'importance de s'assurer qu'il y ait une adhésion, et
donc une participation publique, comme on le suggère dans le cas de ce qui se
fait en matière énergétique en ce moment. Pour l'instant, c'est réservé à
certains ministres et à la présidente d'Hydro-Québec dans le cadre d'un comité.
On doit arriver à établir des mécanismes de gouvernance plus transparents.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup. Merci beaucoup. Ceci termine les échanges. Donc, je cède maintenant
la parole au deuxième groupe d'opposition. M. le député de Taschereau.
M. Grandmont : Oui. Merci.
Madame Thorpe, monsieur Viau. C'est un plaisir de vous recevoir. Merci pour
votre contribution importante à ce débat. Très intéressant mémoire. J'en
retiens, là, si je veux dégager une impression générale, c'est que les
orientations, le diagnostic est très bon, mais qu'on doit avoir des documents
ou des orientations très claires et avec plus de mordant au gouvernement du
Québec, là, pour être capables de mettre en œuvre les mesures qui s'imposent,
aujourd'hui, en 2023. J'aimerais vous entendre plus particulièrement sur un
élément qui m'apparaissait intéressant. Vous le nommez, on dirait, à demi mots.
Il s'agit du test climat sur les projets d'infrastructure. Est-ce que vous êtes
favorable à l'instauration d'un tel test climat qui nous permettrait de mesurer
l'impact climatique des projets d'infrastructures au Québec?
M. Viau (Marc-André) : Oui.
La réponse est simple, là : oui. D'ailleurs, je pense que c'est à
l'objectif. Est-ce que c'est à l'objectif 5, dont on... orientation 5, donc :
«Placer le développement durable au centre des décisions du gouvernement et
évaluer la durabilité des interventions gouvernementales.» On pourrait penser,
par exemple, à évaluer la durabilité du troisième lien.
M. Grandmont : D'accord. Et
est-ce que... Comment ce genre de test climat pourrait, rapidement, là, dans
les grandes lignes, se mettre en opération? Comment ça pourrait se déployer
dans le cadre de processus d'élaboration de constructions éventuelles, là, de
projets d'infrastructures?
M. Viau (Marc-André) : Bien,
il faut que le test climat... Bien, je veux dire, je ne pense pas que c'est la
commission sur le mécanisme d'évaluation ou le mécanisme de test climat, là.
Donc, on pourrait avoir des discussions ou on pourrait même vous faire parvenir
certaines... ou un test climat que notre organisation a réalisé. Mais donc il
faut que, dans le processus de prise de décision, on doit arriver à tester par
rapport aux impacts environnementaux, par rapport aux conséquences, actuelles,
mais également futures, les conséquences du développement de tel ou tel projet
d'infrastructure.
M. Grandmont : Parfait.
Merci. À la recommandation. 1.1, vous parlez de «renforcer la stratégie en y
ajoutant des objectifs et des sous-objectifs quantifiables, mesurables et
obligatoires, dont un cadre de référence du bien-être». J'imagine que vous
faites référence un peu à l'indice de bien-être, là, auquel plusieurs groupes
ont fait référence également. Mais peut être juste confirmer ou, en tout cas,
comprendre ce que vous entendez concrètement par un cadre de référence du
bien-être.
Mme Thorpe (Colleen) : On
fait référence à la présentation du G15+, dont on fait partie, donc un
paradigme nouveau qui, finalement, mesure les impacts. Donc, on peut avoir des indicateurs
de résultats et, par exemple, mesurer la connaissance du développement durable
dans la fonction publique, qui serait un indicateur de résultats pour nous.
Mais on peut aussi avoir des indicateurs plus macro, des indicateurs d'impact.
Et la présentation qu'a faite le G15+ élaborait sur ces aspects-là.
• (12 h 20) •
Le Président (M. Jacques) : Merci.
Je cède maintenant la parole au député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : Merci beaucoup,
M. le Président. Alors, merci à madame Thorpe, monsieur Viau. Je vais aller
directement droit au but. Vous avez parlé d'alimentation, puis je voulais juste
savoir si vous pensez que le Québec en fait suffisamment pour le gaspillage
alimentaire, par exemple. Est-ce que c'est un élément que vous voyez comme un
élément sur lequel on devrait travailler, adopter des politiques, une loi?
Mme Thorpe (Colleen) : Plusieurs
groupes travaillent sur le gaspillage alimentaire. Équiterre travaille sur la
notion du gaspillage nutritionnel, donc un petit peu plus complexe, mais, quand
même, je vais vous l'expliquer, cette idée-là qu'on prend des récoltes, donc on
utilise des ressources à qu'est le sol et des engrais, différents...
Mme Thorpe (Colleen) : ...ressource
pour produire ces aliments qui deviennent des aliments ultratransformés,
ultraemballés, donc qui sont vides de nutriments, et non seulement ils sont
vides de nutriments, mais ils font en sorte que ça nuit à la santé humaine. Et
donc on est assez élevés, assez loin des objectifs du Guide alimentaire
canadien qui recommande...
M. Arseneau : Mais est-ce que
vous êtes favorable à l'adoption d'une loi par le gouvernement pour réduire le
gaspillage alimentaire? C'est ça, ma question. Est-ce qu'on pourrait aller
plus... Ou le gaspillage, ce n'est pas votre rayon? C'est quoi?
Mme Thorpe (Colleen) : Bien,
oui, on pourrait adopter une loi pour réduire le gaspillage alimentaire, mais
j'irais plus loin que le gaspillage alimentaire. Encore faut-il... Si on
gaspille des chips, ce n'est pas... ça ne solutionne pas la problématique,
c'est-à-dire qu'il faut aller un peu plus loin que le gaspillage alimentaire,
mais je suis en accord avec.
M. Arseneau : Je comprends.
Mobilité et transport, maintenant. Vous avez parlé, tout à l'heure, dans la
présentation, des véhicules de transport de marchandises. Puis, dans le
mémoire, à la page 9, vous parlez aussi, là, de l'auto solo, mais je
voulais savoir, est-ce que vous pensez que, justement, le gouvernement en fait
suffisamment assez pour favoriser le transfert modal pour appuyer le transport
collectif à l'heure actuelle? Et puis, quand on parle d'électrification, c'est
bien, mais, si on électrifie des autobus qui sont vides, on n'avance pas
beaucoup. Quel est votre point de vue là-dessus?
M. Viau (Marc-André) : Il n'y
a pas assez de transfert modal, ça, c'est clair. S'il y avait assez de
transfert modal, on ne verrait pas une croissance du parc automobile comme on
la voit actuellement. Est-ce que le gouvernement doit en faire plus? Oui. Il doit
financer les opérations du transport collectif, pas simplement les
infrastructures, doit travailler sur l'offre de services interrégional
également de façon à ce que le transport collectif ne soit pas qu'une réalité
urbaine et doit aussi s'assurer d'un meilleur partage de l'espace public qui
est destiné à la mobilité. De cette façon-là, si on partage mieux l'espace
public destiné à la mobilité, on n'aura pas le choix que d'avoir un meilleur
transfert modal.
M. Arseneau : Merci.
Le Président (M. Jacques) : Merci
à vous deux pour votre contribution aux travaux de la commission.
Et nous allons suspendre quelques instants
pour recevoir le prochain groupe.
(Suspension de la séance à 12 h 24)
(Reprise à 12 h 25)
Le Président (M. Jacques) : Nous
reprenons nos travaux. Je souhaite la bienvenue aux représentants du Centre
d'études et de recherches intersectorielles en économie circulaire, MM.
Normandin et Laplatte. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre présentation, après quoi, nous procéderons à la période d'échanges
avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter puis à
commencer votre exposé.
M. Normandin (Daniel) : M. le
Président, membres de la commission, d'entrée de jeu, merci de nous avoir
invités, mon collègue et moi, à commenter cette nouvelle mouture de la SGDD. Je
vais laisser mon collègue, Benjamin, donc, amorcer nos réflexions sur la
stratégie.
M. Laplatte (Benjamin) : Alors,
bonjour. Alors, évidemment, on accueille la proposition de nouvelle SGDD comme
telle, c'est-à-dire une proposition. Et, comme toute proposition, bien, on
estime qu'il s'agit d'un cadre qui est, évidemment, perfectible, mais on ne
voudrait pas manquer de saluer le travail des personnes, dont certaines
personnes sont ici aujourd'hui...
M. Laplatte (Benjamin) : ...dans
la salle qui vont travailler à la rédaction d'un document qui est véritablement
colossal, dense puis qui représente le fruit d'un gros travail.
Évidemment, comme plusieurs groupes qui
nous ont précédés et pour reprendre sensiblement les mêmes mots que la
commissaire au développement durable hier, il est évident que nous aurions
souhaité avoir en main un portrait le plus récent possible de l'état de la
progression de la dernière LGDD et surtout une proposition d'indicateurs et de
cibles renouvelées. Parce qu'en effet, c'est une LGDD qui couvre large, on le
sent. Elle cherche à répondre au plus d'ODD possible, et c'est une prémisse en
soi qui est tout à fait louable.
Cela dit, ça ne devrait pas priver le
gouvernement de faire des choix forts parmi tous ces objectifs, et on va
revenir pourquoi. Parce qu'il faut accélérer la cadence et identifier avec
précision ce qui est attendu des ministères et organismes comme actions
concrètes le plus rapidement possible.
Donc, à cet égard, on estime que les
travaux, on le comprend, qui vont poursuivre ces prochains mois et qui doivent
s'intéresser à tous ces aspects représentent l'opportunité, justement, de
peut-être prendre un petit peu de hauteur par rapport à tous ces tableaux de
bord, tu sais, parfois un peu complexes, puis ça a été avoué par d'autres
groupes avant nous.
Prendre de la hauteur, pour nous, ça veut
dire préciser nos ambitions collectives, en tant que gouvernement, mais
également à toutes les autres parties prenantes de la société civile ainsi que
les partis d'opposition. Parce qu'on l'a vu pendant la pandémie. Je pense que,
par rapport à des grandes crises et des grands défis qui nous animent
collectivement ou mondialement, on est capables de faire preuve de solidarité.
De certains de ces objectifs qui
pourraient être les plus intégrateurs possibles afin de concentrer nos efforts
au maximum, on pense, évidemment, particulièrement à la réduction de
l'empreinte carbone de toutes nos activités économiques, sociales, la
préservation de la biodiversité, dont on dépend, et surtout l'accroissement de
la circularité du Québec, un enjeu sur lequel mon collègue Daniel reviendra.
Comme vous l'avait dit hier le Comité
consultatif sur les changements climatiques, auquel participait notre
directrice scientifique, face à la double crise écologique et climatique qui
s'emballe, il y a réellement urgence d'agir sur certains éléments plus que
d'autres. Il faut donc trouver le courage de faire des choix, les assumer et
mobiliser l'ensemble de l'appareil de l'État en partant de sa tête.
À cet égard, la LGDD parle beaucoup de
l'exemplarité de l'État. C'est une occasion de faire en sorte que, comme on le
dit souvent, les babines suivent les bottines, ou les bottines suivent les
babines. Mais surtout ce qui est important, c'est que la LGDD puisse servir de
cadre de référence pour influencer ultimement tout projet de loi, règlement ou
politique. Et on doit passer par là, nous n'avons plus le choix, parce que le
modèle économique actuel, majoritairement linéaire, depuis 200 ans, nous a
menés à une situation qui est insoutenable sur le plan de l'exploitation des
ressources. On ne peut pas aujourd'hui parler de modèle de développement
durable ou soutenable en l'état actuel des choses.
À cet égard, notre mémoire s'accompagne
d'une infographie qui explique beaucoup en quoi le modèle qu'on vous propose,
sur lequel on propose la commission de s'intéresser, le modèle d'économie
circulaire, est en mesure de répondre à plusieurs défis.
À cet égard, on a parlé d'urgence, là,
puis de mobilisation, et afin d'éviter que vous ayez à nous poser la question,
oui, nous sommes en faveur de l'assujettissement des municipalités, organismes
et réseaux qui actuellement ne le sont pas parce qu'on estime que, face au défi
qui nous concerne tous, chacun doit faire sa part. On l'a vu pendant la
pandémie. Ça se fait. Et, si on avait à citer le premier ministre, on
dirait : On est capables.
Donc, en conséquence de ce préambule, nous
allons annoncer nos couleurs tout de suite. Et, comme le prouve largement notre
mémoire, nous sommes ici pour vous parler d'économie circulaire et nous
espérons avoir la chance d'échanger avec vous dans les minutes qui suivront.
• (12 h 30) •
M. Normandin (Daniel) : Merci,
Benjamin. Vous m'entendez bien? Oui. Alors donc, par rapport à la stratégie
précédente, je dirais que l'économie circulaire occupe une place importante
mais encore largement insuffisante. D'ailleurs, j'étais en 2015... j'étais invité
par la commission à commenter la version antérieure de la stratégie, et on
avait plaidé pour une économie circulaire forte au sein de la stratégie.
En fait, il faut savoir que l'économie
circulaire est le modèle économique qui permet une mise en œuvre concrète du
développement durable. En fait, l'économie circulaire est reconnue par la
plupart des grandes organisations telles que le Programme des Nations unies,
l'OCDE, le Forum économique mondial, pour ne nommer que ceux-là. Et je dirais
que son déploiement sur le plan mondial est en pleine progression. En fait, je
suis en train de participer à un ouvrage collectif sur l'économie circulaire,
puis j'ai eu le privilège de regarder un petit peu l'état de la situation sur
le plan international, et je peux dire qu'il n'y a aucun...
12 h 30 (version non révisée)
M. Normandin (Daniel) : ...qui
est épargné dans notre transition de l'économie circulaire, sauf peut-être l'Antarctique,
là, parce qu'il n'y a pas grand monde qui y vivent. Mais on pourrait dire qu'au
jour d'aujourd'hui à peu près la moitié des pays de la planète ont des
politiques publiques qui touchent à l'économie circulaire. Donc, il y a eu ces
dernières années une accélération dans l'appropriation, si on veut de la
transition à l'échelle internationale, l'Europe étant le continent, je dirais,
de tête.
Selon nous, en fait, le cadre économique
que représente l'économie circulaire devrait constituer la colonne vertébrale
de la stratégie parce que ça permet de concilier à la fois les enjeux
économiques dont, entre autres, une plus grande résilience des chaînes d'approvisionnement,
on en a été victime, tout le monde, évidemment, durant la pandémie, également
les défis environnementaux, dont la réduction des GES, dont la préservation de
la biodiversité, mais également sociaux, avec une meilleure justice sociale, un
plus grand bien-être collectif et individuel.
Pour faire ça, je dirais que le Québec, et
j'en suis très fier, en fait, est extrêmement bien positionné depuis 2014, sous
l'impulsion initiale de l'Institut de l'environnement, du développement durable,
économie circulaire du campus de l'Université de Montréal, que je dirigeais à l'époque.
Le Québec a développé au fil du temps une posture de leader nord-américain, je
dirais, reconnue, au moins, sur le plan canadien en matière d'économie
circulaire. On a des initiatives qui se déroulent en ce moment aux quatre coins
du Québec. On possède un écosystème de recherche en économie circulaire le plus
développé, le plus diversifié, je dirais, non seulement en Amérique du Nord,
mais, selon certains commentaires, au Monde. On doit en être fier, là, on a un
réseau de recherche qui regroupe plus de 180 chercheurs, seize
universités, neuf collèges qui participent aux efforts de recherche de l'économie
circulaire. On a également une plateforme dédiée à l'économie circulaire, une
plateforme Web qui s'appelle Québec circulaire.
Ceci dit, le Québec demeure,
malheureusement, un des plus grands consommateurs de ressources et un des plus
grands producteurs de déchets des pays industrialisés, en tout cas, per capita.
Le point positif, c'est que notre marge d'amélioration est très grande. Alors,
je dirais, pour maintenir notre posture de leader puis bénéficier de retombées
très positives qu'amène l'économie circulaire puis qui nous permettrait
également d'exporter notre savoir-faire, nos technologies dans le reste du
Canada, dans le reste du monde, on doit effectivement se doter d'une feuille de
route ambitieuse et investir massivement pour la déployer. Comme le disait
Benjamin, en fait, je dirais, tous les acteurs de la société sont interpellés
par l'économie circulaire, que ce soit des ministères, les entreprises, les
citoyens. Alors, on espère vivement que cette nouvelle stratégie, en fait, soit
la feuille de route pour la mise en œuvre de cette économie circulaire ambitieuse
qui nous permettrait, encore une fois, de nous positionner, de conserver notre
position de leader nord-américain. Alors ,merci.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup, Messieurs, pour votre présentation. Est-ce que j'ai le consentement pour
permettre à la députée de Verdun de remplacer le député de Taschereau pour le
reste de la séance? Consentement. Merci. Je cède donc la parole au député de
Masson pour le début des échanges.
M. Lemay : Merci, M. le
Président. Merci, Monsieur Normandin, M. Laplatte, d'être avec nous aujourd'hui.
Alors, moi, j'aimerais vous entendre davantage sur le premier chantier de la
SGDD, justement, le chantier sur la stratégie... la feuille de route en
économie circulaire. Vous avez mentionné un peu dans votre présentation
initiale, mais j'aimerais avoir un peu plus de détails. Parce que, lorsque vous
mentionnez que ça devrait constituer la colonne vertébrale sur laquelle s'attachent
les quatre autres chantiers... donc un peu plus d'importance, là. Puis j'ai cru
comprendre aussi que vous aviez défini sept jalons pour y arriver. Donc, si
vous pourriez nous donner plus de détails, ce serait apprécié.
M. Normandin (Daniel) : Bien,
en fait, oui, l'économie circulaire, c'est un modèle de production, consommation,
hein? Donc, ça touche, éventuellement, non seulement la vie des entreprises,
mais des citoyens. Donc, si ça devient... en fait, comme le disait tantôt
Benjamin, si on est aujourd'hui à parler de développement durable, c'est que ce
développement durable n'était pas intégré dans le modèle économique, en fait,
qui est en œuvre en ce moment, qui est le modèle d'économie linéaire, en fait,
qui existe depuis le début de l'ère industrielle. Donc, on doit renverser la
vapeur. Ça fait que si... en fait, si la durabilité n'est pas au rendez-vous à
cause du modèle économique, c'est le modèle économique qui doit rendre,
évidemment, notre société plus durable. Donc, c'est pour ça que ce qu'on
propose nous, c'est que l'économie circulaire, qui est le modèle économique ou
le modèle de production, consommation est reconnu à travers la planète comme
étant durable, permettant d'opérationnaliser le développement durable, soit la
colonne vertébrale de cette stratégie.
Alors, au niveau des jalons,
effectivement, on en a proposé plusieurs dans notre mémoire, là, que je vous
invite évidemment à parcourir. Le premier, évidemment, c'est de faire un
exercice, comme le Québec a fait, RECYC-QUÉBEC, donc où est-ce qu'on en est au
niveau de la circularité de l'économie québécoise. Puis on a vu,
malheureusement, que cette circularité était plutôt faible, donc à 3,5 %.
Ce n'est pas du «rocket science», là, je dirais...
M. Normandin (Daniel) : ...c'est
une estimation, et par rapport à la moyenne mondiale qui a été dévoilée il y a
quelques semaines lors du Forum de Davos qui est à 7,2 %, on est quand
même la moitié évidemment de la moyenne mondiale en matière de sécularité de
notre économie.
Le Canada? Bon, j'ai participé à un groupe
d'experts pour déterminer également la circularité de l'économie canadienne. On
n'a pas utilisé les mêmes... les mêmes indicateurs en tant que tel, mais on
avait une moyenne de 6 % environ pour le Canada. Moi, je pense que le
Canada est à peu près au même niveau que le Québec. Donc, là-dessus, on se compare.
Par contre, comme je disais tantôt Colleen Thorpe d'Équiterre, il y a des
champions, entre autres les Pays-Bas. Les Pays-Bas, évidemment, ont une cible
très, très ambitieuse. Ils sont actuellement à plus de 24 % de circularité
de leur économie. Ils visent 100 % pour 2050. Ceux qui connaissent la
thermodynamique, vous alles me dire, ça ne se peut pas, là, mais ils tendent à,
là on va le dire, 100 % et ils ont un plan très ambitieux. C'est vraiment
un peu la locomotive sur le plan européen, et je pense qu'on doit s'en servir
comme... comme exemple.
Donc, première chose l'état de la
situation, on l'a fait. 3,5 %, ça ne va pas très bien. Deuxièmement, se fixer
une cible ambitieuse. Une cible ambitieuse, ça veut dire quoi? Bien, je pense
que pour le terme couvert par la stratégie, on pourrait peut-être doubler, en
fait, notre taux de sécurité au Québec, ce serait déjà ambitieux, et viser
peut-être quelque chose, de le tripler ou de le quadrupler d'ici 2040, par
exemple, pour rejoindre peut-être les Néerlandais. Alors, ça, ça serait des
cibles ambitieuses. Évidemment, pour être capable de faire cette... de
rencontrer, en fait, cette cible-là, il faut, je dirais, mobiliser, en fait,
l'ensemble des chaînes de valeur pour qu'ils y participent. Il n'y a pas de secteurs
économiques qui doivent être épargnés dans la démarche.
Donc, tous les secteurs économiques
doivent participer, mais on doit quand même prioriser ceux qui, en ce moment,
consomment peut-être le plus de ressources et celles... et les secteurs économiques
qui génèrent le plus de déchets. Donc, on doit prioriser, en fait, ces
secteurs-là. Mais, in fine, on doit couvrir l'ensemble des secteurs
économiques. Et pour ce faire, il ne faut pas le faire par une approche top
down, il faut le faire par une approche horizontale, donc essayer de mettre...
d'asseoir à la même table tous les acteurs des chaînes de valeur concernés,
identifier les freins à la circularité, cocréer les solutions et les mettre en
œuvre ensemble pour être capable justement de faire en sorte qu'on avance
rapidement.
Alors ça, c'est l'approche que le CIRIEC,
en fait, a commencé à mettre en œuvre. On a d'ailleurs un dispositif de
recherche au CIRIEC qu'on appelle les laboratoires d'accélération en économie
circulaire. Et le premier... la première filière qu'on a investie, c'est la
filière de la construction qui est le plus gros utilisateur de déchets et le
plus gros générateur... le plus gros consommateur de ressources et le plus gros
générateur de déchets. Et on a assis à la même table 200 intervenants de toute
la chaîne de valeur de 100 organisations depuis un an et demi. Et on est en
train de tester les solutions que ces organisations-là ont codéveloppé avec les
chercheurs du CIRIEC et d'autres universités. Donc, c'est un peu l'approche qu'on
amène, et on pense que, donc, cette feuille de route devrait être la, je
dirais, l'agenda, si vous voulez, principal de cette nouvelle stratégie
gouvernementale de développement durable.
M. Lemieux : O.K.
Merci. C'est intéressant. Puis je pense que j'ai une collègue qui va justement
vous poser des questions sur ce que vous venez d'apporter sur le volet
construction. Mais je reviendrai un peu. Ça veut dire... Dans le fond, ce que
je vois, c'est que, dans vos sept jalons, vous voyez d'une façon positive, là,
qu'on mette sur pied un comité conseil justement pour aller avec... D'accord,
de ce côté là et, dans le fond, le comité conseil externe, là, dans le fond, ce
que vous voyez, c'est que ça doit impliquer notamment des gens universitaires,
collégiaux, chercheurs, experts... puis, tu sais, experts provinciaux, je veux
dire. Puis c'est ça, en fait, tous ensemble, on met en place les sept jalons
puis on y arriverait...
M. Normandin (Daniel) : Tout
à fait.
M. Lemieux : ...si je fais un
résumé de votre votre explication.
• (12 h 40) •
M. Normandin (Daniel) : Absolument.
Benjamin.
M. Laplatte (Benjamin) : En
fait, si on peut, si on peut, si on peut développer un petit peu là-dessus, ce
n'est pas une idée qui vient de nulle part, c'est que, de un, il faut
prendre... acte, pardon, que depuis 2014, c'est une transition qui s'est
organisée, là, je dirais par l'entremise de plusieurs acteurs représentant à la
société civile et auquel participent certains représentants gouvernementaux et
de ministères à travers le Pôle de concertation en économie circulaire. C'est
un groupe qui pourrait tout à fait être mise à profit en l'occurrence. Et
pourquoi est-ce qu'on parle d'un comité conseil, tu sais, qui pourrait, tu
sais, éclairer le gouvernement sur certaines orientations et aussi participer
au suivi et à l'amélioration continue de cette de cette feuille de route? C'est
d'une part parce que, bien, il y a beaucoup d'expertise qui s'est développée au
sein de ce pôle et, d'autre part, c'est parce qu'on l'a vu dans certaines
autres politiques qui ont des cadres assez larges. Si on fait référence, par
exemple, à la politique québécoise de mobilité durable, cette dernière avait
été élaborée et visait justement à être évaluée en continu par l'entremise d'un
comité qui représentait toutes les parties prenantes possibles issues de la
société civile. Donc, on s'appuie sur ce modèle pour faire cette proposition
là...
M. Laplatte (Benjamin) : ...parce
que, bien, le gouvernement n'ait pas tout ça.
M. Lemay : Très bien. Merci.
Donc, je cède la parole à mes collègues qui vont vous entretenir sur d'autres
sujets, notamment sur les laboratoires d'accélération, ça semblait intéressant.
M. le Président.
Le Président (M. Jacques) : Merci,
M. le député de Masson. Je cède maintenant la parole à la députée de
Châteauguay.
Mme Gendron : Merci, M. le
Président. Bonjour, Monsieur Laplatte, bonjour Monsieur Normandin. C'est un
plaisir de vous voir ce matin. Et hier, vous étiez ici aussi hier. Je tiens à souligner
la qualité de votre mémoire, vraiment, les chemins, tout ça, rendent ça très
agréable. En fait, je vais vous amener un peu... là, on a frôlé un sujet. J'ai
deux questions. La première étant justement la responsabilité de l'État. En
fait, par rapport aux constructions. Comme vous le savez, l'État est
propriétaire d'un des plus grands... en fait, plan de constructions ou en fait
d'immobiliers au Québec.
Une voix : ...
Mme Gendron : Exactement. Je
voulais savoir : De quelle façon... vous avez des laboratoires
d'accélération, de quelle façon... quelles pistes de solutions peut-on avoir
par rapport au parc immobilier du Québec? Première question. La deuxième
question est encore en lien avec les laboratoires d'accélération. Je veux
savoir sur quel sujet vous vous penchez et j'aimerais savoir... on a rapidement
posé la question hier par rapport aux surplus de l'industrie textile. Est-ce
que c'est quelque chose que vous semblez aller aussi vérifier pour ça?
M. Normandin (Daniel) : Bien,
par rapport... en tant que propriétaire d'actifs immobiliers, entre autres,
d'infrastructures, de façon générale, l'État doit effectivement être exemplaire
au niveau de la circularité de ses infrastructures. Donc ça veut dire
travailler sur... dès la conception des infrastructures, à ce qu'elles soient
constituées de matériaux qui soient les plus circulaires possible, faire en
sorte que la fin de vie, en fait, soit déjà prévue, même si les bâtiments ou
les infrastructures peuvent durer jusqu'à 150, voire au-delà. S'assurer que ces
infrastructures-là sont construites, sont élaborées pour la circularité. Donc,
ça veut dire que ce qui est déjà bâti, on doit s'assurer que lorsqu'on démolit,
on... en fait, on ne devrait pas démolir, on devrait déconstruire, on récupère
le maximum de matériaux et qu'on peut remettre dans l'économie par la suite. Et
au niveau des nouvelles infrastructures, c'est qu'elles répondent à des
critères de circularité qui soient les plus rigoureux possible.
Ces critères-là sont en élaboration en ce
moment. Juste pour vous mentionner, l'ETS est en train de mettre sur pied un
institut qui va se pencher exclusivement là-dessus, environnement bâti,
circulaire et résiliants aux changements thématiques. Parce que les
infrastructures actuelles ne sont pas résilientes aux changements climatiques,
puis le sont peut en tant que tel. Donc, pour toute nouvelle construction,
s'assurer qu'elle le soit. Donc, on va développer ce savoir-faire-là au cours
des prochaines années. Mais on a déjà une expertise en place qui peut être mise
à contribution là-dessus. Votre deuxième point, c'était?
Mme Gendron : C'était par
rapport à l'industrie du textile, en fait, si vous avez...
M. Normandin (Daniel) : Oui,
textile. Bien, en fait, on a un chantier là-dessus. Bon, le textile, en fait,
c'est un peu, je dirais, un élément mal connu au niveau des impacts
environnementaux. Mais l'impact du textile à l'échelle internationale est
extrêmement important. Donc, on a effectivement pour objectif de monter un
laboratoire d'accélération sur ce sujet-là, même si au Québec, on a quand même
perdu au niveau de notre industrie textile, notre capacité de manufacturer de
façon large, de façon importante, en fait, des vêtements, mais ça reste que les
gisements de cette industrie-là, on les a ici au Québec, donc il faut faire
quelque chose avec. Donc, on a effectivement pour objectif de lancer un lab
d'accélération sur le textile. La, troisième question, c'était?
Mme Gendron : Il n'y en avait
pas.
M. Normandin (Daniel) : Ah!
d'accord.
M. Laplatte (Benjamin) : Bien,
il y avait peut-être une sous-question. J'avais... c'est par rapport au
dispositif. Évidemment, on s'intéresse à d'autres filières, tu sais, telles que
les systèmes bioalimentaires, le déploiement territorial de l'économie
circulaire, la foresterie. Un qui est extrêmement important, là, parce qu'on
parle beaucoup de transition énergétique, mais les minéraux critiques et
stratégiques, ce sont des ressources finies. Il ne faudrait pas faire avec les
minéraux critiques et stratégiques ce qu'on a fait avec les hydrocarbures et
s'imaginer que... c'est une ressource qui est là et la consommer sans
lendemain, ça présente des enjeux environnementaux qui sont énormes. Voilà
donc, c'est des thématiques auxquelles évidemment on s'intéresse puis on essaie
de faire écho le plus possible aux grandes priorités et préoccupations
gouvernementales.
M. Normandin (Daniel) : D'ailleurs,
juste, peut-être pour compléter, sur la question des métaux critiques et
stratégiques, il faut changer notre façon de voir ce que c'est une mine. En
fait, l'extraction de ces métaux-là est extrêmement impactant sur
l'environnement parce que pour récupérer les faibles concentrations de métaux
et de minéraux qu'on recherche, il faut extraire énormément de matière à grand
coup d'impacts sur l'environnement évidemment, et sur la biodiversité de façon
particulière. Alors, il faut changer notre façon de voir les mines et
considérer les mines urbaines comme étant une source importante. Les mines
urbaines, en fait, c'est tous nos produits en fin de vie qui contiennent des
métaux critiques et stratégiques et qui malheureusement prennent la voie du
site d'enfouissement. Alors ça, c'est une pratique qui devrait être stoppée. Et
avant même d'exploiter, en fait, des gisements sous-sol, il faudrait exploiter
correctement nos gisements hors sol. Donc, c'est le message que je voulais ici
passer.
Mme Gendron : Merci.
Le Président (M. Jacques) : Merci...
Le Président (M. Jacques) : ...Merci,
Mme la députée. Je cède la parole à la députée d'Argenteuil.
Mme Grondin : Merci,
messieurs, c'est rafraîchissant de vous entendre. Merci, merci. Je retiens des
mots-clés : préciser nos ambitions collectives, faire des choix. Donc, je
suis vraiment contente que vous ameniez toute cette question-là de l'économie
circulaire parce qu'à mon avis ça répond à des grands principes qu'on s'est
donnés collectivement. Puis aussi vous n'êtes pas sans savoir que, chez nous,
en termes de revitalisation, dans mon comté, c'est le choix qui a été pris de
faire de l'économie circulaire, en fonction des matières recyclables notamment.
Donc, c'est de la musique à mes oreilles, ce que vous dites.
Petite question. En fait, vous proposez de
travailler, ou d'unir, ou de faire des liens entre les différents chantiers.
Pouvez-vous nous en parler un peu plus?
M. Laplatte (Benjamin) : Alors,
on est conscient qu'il s'agit d'une proposition audacieuse, mais on estime que
c'est aussi peut-être notre rôle de challenger. Mais c'est parce que, quand
vous regardez la définition de ces chantiers et quand on a une compréhension
réelle de ce qu'est l'économie circulaire et de sa portée, vous allez vous
rendre compte que les objectifs qui vont être visés par ces différents chantiers
convergent. Et, à cet égard-là, on estime que la feuille de route en économie
circulaire, tu sais, pourrait être un chantier intégrateur. Et, en disant ça,
on ne remet absolument pas en question la pertinence de ces autres chantiers,
ce qu'on est en train de dire, c'est qu'on aurait peut-être lieu de faire une
espèce de hiérarchisation, de sorte que, par exemple, un chantier tel que celui
sur la finance durable est extrêmement important, il faut intégrer les normes
ESG, etc., mais, de plus en plus, la finance durable est en train de
s'intéresser à l'enjeu de l'économie circulaire. Donc, pourquoi, à ce
moment-là, ne pas faire converger ces forces pour tenter de les faire
travailler sur le même agenda?
Il y a un chantier qui vise la
numérisation, tout à fait légitime, mais là encore, il y a des enjeux énormes
par rapport à la traçabilité des matériaux ou de ce qu'on consomme, par rapport
à l'utilisation de la science des données pour pouvoir prendre des décisions
éclairées. On n'arrête pas de le dire, on a besoin de la science, on a besoin
de la science pour que les gouvernements puissent prendre les meilleures
décisions possibles en regard des défis qui nous occupent. Cette contribution
de la science des données, dans un cadre comme celui de l'économie circulaire,
est fondamentale.
Donc, c'est là quelques exemples
d'intégration qui, pour nous, seraient tout à fait légitimes. Ça ne prive pas
que ces autres chantiers ou ces sous-chantiers puissent s'intéresser aussi à
d'autres agendas, mais on essaie d'être conséquents avec ce qu'on a dit
d'entrée de jeu : on n'a plus le temps, il faut faire des choix. C'est
difficile, mais on n'a plus les moyens de se disperser tous azimuts. Donc, à un
moment donné, travaillons à essayer de faire concentrer les forces, les énergies
et les compétences le plus possible. C'est le sens de notre message.
Mme Grondin : ...merci, M. le
Président.
Le Président (M. Jacques) : Merci,
Mme la députée. Je cède maintenant la parole à la députée d'Iberville.
Mme Bogemans : Bonjour. Il me
reste juste une minute, donc ça va être bref. Je voulais savoir, parce qu'à la
page 20 de votre rapport, à la... au jalon trois, finalement, vous disiez qu'on
avait vraiment des filières prioritaires au niveau de l'économie circulaire. Ça
serait quoi?
M. Normandin (Daniel) : Ben,
en fait, c'est celles qui, comme je le disais tantôt, consomment le plus de
ressources et génèrent le plus de déchet. Donc, je pense que, dans les
priorités, il y a le secteur de la construction, qu'on a commencé à... je
dirais à... on a entamé, à travers notre laboratoire d'accélération, mais le
bioalimentaire aussi. Les systèmes alimentaires sont également des grands
consommateurs de ressources et également des grands générateurs de déchets. On
pense au gaspillage alimentaire, mais il n'y a pas que, en fait, tout
l'équipement qui est utilisé en agroalimentaire peut être davantage optimisé au
niveau de l'usage. Donc, ce serait un autre des grands chantiers. Le troisième,
en fait, c'est tout ce qui touche les métaux critiques et stratégiques, mais ça
vise en même temps une série de filières différentes. Donc, quand on parle
d'électrification des transports, on a besoin de certains types de matériaux,
de métaux et minéraux, lorsqu'on parle par exemple des électroménagers ou des
produits électroniques, on a d'autres types de minéraux. Alors, il faut faire
un ensemble... il faut adresser... c'est un anglicisme, là, mais il faut
investir un ensemble de filières qui sont des grands consommateurs de ces
métaux critiques et stratégiques. Donc, ce seraient les trois premiers que je
dirais, au départ, mais textile doit venir aussi, foresterie aussi. En fait,
bref, toutes les filières doivent y passer les unes après les autres.
• (12 h 50) •
Mme Bogemans : C'est ça,
mais, en priorité, la construction puis le bioalimentaire.
M. Normandin (Daniel) : Construction,
bioalimentaire, métaux critiques et stratégiques seraient mes trois premiers,
oui. Voilà.
Mme Bogemans : Parfait.
Le Président (M. Jacques) : Merci.
Ça met un terme aux échanges avec la partie gouvernementale. Je cède maintenant
la parole à la porte-parole de l'opposition officielle, la députée de
Notre-Dame-de-Grâce.
Mme McGraw : Merci, M. le
Président, et merci d'être avec...
Mme McGraw : ...ce matin, pour
votre mémoire et votre présentation. Il y a beaucoup de contenu très
intéressant. Vos collègues, vous savez, les professeurs Webster et Levasseur
étaient ici hier, au sein du Comité consultatif sur les changements
climatiques. Et on comprend que... vous l'avez dit très bien, qu'un pont doit
être fait entre la recherche. Puis il me semble, si je comprends bien, le
Québec, on a vraiment tous les outils au niveau de la recherche, mais il y a un
pont qui doit se créer entre cette recherche et l'application. Il y a comme une
déconnexion, sinon, et presque une contradiction avec, tu sais, la recherche au
Québec mais d'être vraiment très en arrière dans nos cibles.
Donc, selon vous, est-ce que la stratégie
gouvernementale sur le développement durable qui est proposée... est-ce qu'elle
ne permet pas cette application ou de créer ce pont-là? Puis qu'est-ce qu'on
pourrait ajouter pour créer ce pont essentiel entre la recherche et
l'application?
M. Laplatte (Benjamin) : Oui,
merci pour la question. Peut-être qu'avant de laisser parler mon collègue,
Daniel, là-dessus on nuancerait peut-être un peu, parce qu'au Québec on est
chanceux, il y a un fort dialogue social, il y a plusieurs forums qui existent
pour favoriser ça, et c'est valable aussi en recherche et innovation. Donc, on
ne dit pas, dans notre mémoire, qu'il y a une déconnexion, là, tu sais, entre
la recherche, innovation d'abord et les milieux utilisateurs. En fait, quand on
parle d'économie circulaire, c'est tout le contraire. Parce que, depuis
certaines années, au contraire, il y a beaucoup de dispositifs
d'accompagnement, d'initiatives qui se font au niveau local, que ce soit au
niveau entrepreneurial ou que ce soit au niveau industriel, à échelle locale ou
dans différents secteurs d'activité économique. Je dirais, le pont est là.
Ce qui manque, en revanche, c'est une
direction, une vision et du support pour encourager ce maillage le plus
possible qui, actuellement, se fait grâce à l'aide de financement qui peut revenir
de Recyc-Québec, par exemple, ou de certains programmes du ministère
économique, mais, quand on regarde objectivement les moyens qui sont assortis à
ça, ce n'est pas énorme comparativement à ce que le gouvernement peut investir
dans d'autres chantiers au niveau économique, là. Donc, c'est plutôt un
problème de moyens qu'un problème de dispositifs.
M. Normandin (Daniel) : Si je
peux me permettre aussi, en fait, oui, il y a quand même de la recherche qui
reste sur les tablettes, là, il ne faut pas se le cacher, mais ce que nous on
propose souvent, c'est de faire de la recherche collaborative. Donc,
d'impliquer les acteurs du milieu avec les chercheurs pour co-créer, justement,
les solutions de manière à optimiser, si on veut, l'appropriation de ces solutions-là.
C'est sûr qu'historiquement l'université,
bon, évidemment, on en est, on faisait de la recherche un peu dans notre tour
d'ivoire, et après ça, bon, on essayait... on publiait puis on essayait de la
pousser, en fait, de temps en temps dans la société civile, mais, bon, avec un
succès relativement mitigé. Cette approche de recherche collaborative ou
recherche-action, elle est essentielle dans la mise en œuvre d'une stratégie
comme celle-là. Si on veut accélérer les choses, comme l'a dit Benjamin, on n'a
plus le temps, on n'a plus le temps de... on n'a pas le loisir du temps, en
fait, pour rencontrer nos cibles de développement durable.
Mme McGraw : Donc, c'est ça,
vous avez parlé... au tout début, vous avez parlé de courage, de faire des
choix peut-être difficiles, parce que, justement, il faut accélérer, il faut
faire des choix difficiles, on n'a pas le loisir du temps. Donc, dans ce
contexte-là, est-ce que vous... Donc, au niveau de la gouvernance, O.K. pour
accélérer, justement... Parce que là, si je comprends bien, c'est une question
de volonté, entre autres, politique et de moyens qui vont supporter cette
vision politique puis cette volonté politique. Là, donc, vous parlez, au niveau
de la gouvernance, d'un comité interministériel du développement durable et un
comité directeur. Est-ce que vous pouvez élaborer là-dessus? Parce
qu'évidemment la gouvernance est très importante là-dedans?
M. Laplatte (Benjamin) : En
fait, il vous faut distinguer deux choses. La proposition qu'on fait de mettre
en place, là, puis on ne l'appelle pas nécessairement comité directeur, là, tu
sais, ça, on laisse cette prérogative-là au gouvernement, mais c'est plutôt un
comité-conseil et un comité de suivi spécifiquement, tu sais, pour la feuille
de route en économie circulaire. Ça, c'est un fait, parce que, tu sais, on
estime que, si on veut se rendre efficace collectivement, il faut mettre toutes
les forces à profit et éviter que le gouvernement travaille de son bord pendant
que le milieu travaille du sien. On souffre un peu trop souvent, là, justement,
de ne pas être capable de créer ces synergies-là. Les pôles de concertation en
économie circulaire est un bel exemple d'initiative où on peut, en fait, faire
converger ses forces.
Par contre, ce qu'on dit un peu plus...
M. Laplatte (Benjamin) : ...de
notre mémoire. Et là ça touche vraiment à la structure de gouvernance de la
SGDD, qui vise à mettre en place, effectivement, un CIDD pour suivre
l'évolution des résultats des différents ministères et organismes. Ça, c'est un
petit peu différent. Ce qu'on dit par rapport à ça, c'est que, si le
gouvernement va de l'avant avec ce dispositif spécifiquement pour suivre la
SGDD, il faut absolument qu'au sein de la SGDD on développe des indicateurs et
des cibles qui concernent la circularité de l'économie québécoise. Et, à cet
égard, on pense que le CIDD ne peut pas faire l'économie des travaux des
groupes qui existent déjà. Il y a un groupe de travail interministériel qui
s'appelle le Groupe de travail interministériel en économie circulaire, qui est
animé notamment par Recyc-Québec puis le Bureau de coordination du
développement durable. Il est clair que, d'ici là, il y a un forum qui devrait
définitivement venir influencer les travaux du Comité interministériel sur le
développement durable.
Cela dit, quand on a dit tout ça, on
trouve qu'au niveau de la gouvernance il y a peut-être un peu de complexité,
puis dans le système. On n'a pas toutes les solutions, mais, une chose est
certaine, la direction, la vision doit venir de la tête. Donc, ultimement, ça
doit interpeller le Conseil exécutif. Et, à cet égard, on estime qu'il y a
peut-être un maillage ou un resserrement des liens entre... à faire entre
tantôt le Comité de l'économie et de la transition énergétique, tantôt le
Comité ministériel sur l'économie et l'environnement, le Conseil du trésor, le
Secrétariat aux priorités, tu sais, qui va avoir la charge désormais de veiller
à ce que tous les plans stratégiques des ministères et organismes aient une
orientation... bien, des orientations de développement durable. Quand on vient
de dire tout ça, là, je pense, je vous ai déjà écrasés, c'est peut-être
inutilement complexe. On pose la question, en toute naïveté, s'il n'y aurait
pas lieu d'optimiser tout ça. Mais, s'il y avait une chose à retenir : il
faut amener l'économie circulaire au niveau de la gouvernance, au plus haut
niveau.
M. Normandin (Daniel) : On
parle d'un changement de société quand même, hein, un projet de société qui est
important, de réformer un modèle économique. Donc, il faut que ça soit porté
effectivement, comme le dit Benjamin, au plus haut niveau possible dans le
gouvernement.
Mme McGraw : Merci. Une autre
question. C'est une de vos propositions, c'est le déploiement d'une feuille de
route pour accélérer la transition vers un modèle économique circulaire au
Québec nommé FREC. C'est dans le jalon numéro deux, je crois. Alors quel type
d'échéancier et de ressources, puis à quelle fréquence ces objectifs
deviendraient... devraient être placés pour l'atteindre dans nos buts? Alors,
est-ce que vous pouvez nous parler plus de la FREC et qu'est-ce que ça va
prendre pour faire en sorte que ça devienne une réalité.
M. Normandin (Daniel) : Bien,
il y a déjà une réflexion qui est amorcée sur la FREC. Il faut accélérer le
mouvement, effectivement. Il faut se donner une structure pour être capables de
la piloter, comme on vient de parler. Montréal vient de sortir la sienne, hein,
aujourd'hui. En fait, c'est une annonce de ce matin, là, Montréal a sorti sa
feuille de route pour commentaires. Montréal, c'est quand même... L'île de
Montréal, là, c'est le quart de la population du Québec. Donc, ça va
probablement avoir un effet d'entraînement pour le reste. Je pense que c'est
important, évidemment, de prendre en compte les travaux de la ville de Montréal
dans les propres travaux du Québec par rapport à cette feuille de route. Mais
au niveau de l'échéancier, c'est maintenant. Ce n'est pas dans dix ans, c'est
maintenant qu'on doit la mettre en œuvre. On a tout ce qu'il faut pour le
faire. On a... Les acteurs sont déjà mobilisés à l'échelle du Québec, en tout
cas, beaucoup d'entre eux, autant les citoyens, les entreprises. On a fait une
tournée avec la Fédération des chambres de commerce, on a rencontré plus de
800 entreprises dans 17 régions du Québec. Donc, il y a déjà un
travail qui est amorcé, de sensibilisation. Il faut le poursuivre, ce n'est pas
tout. Mais je dirais que le plus tôt, le mieux. Moi, ce que je... en fait, ce
que j'ai dit tantôt, c'est que, si on se fixe une cible, par exemple, de
doubler la circularité du Québec d'ici la fin de la stratégie actuelle, ça veut
dire qu'il faut faire vite. Donc, moi, mon échéancier, ce serait ça, donc
doublons en la circularité d'ici les cinq prochaines années.
• (13 heures) •
M. Laplatte (Benjamin) : Puis
peut-être un complément au bénéfice des membres de la commission, si je peux,
très vite, un 30 secondes. La feuille de route, en fait, qui est une
proposition de la ville de Montréal pour son agglomération, contient des
éléments qui sont vraiment intéressants, soit dit en passant. L'objectif, c'est
une conciliation qui s'amène à terme jusqu'en septembre. De pair, si on a bien
compris l'agenda du ministre, les prochains mois vont être consacrés à définir
ici les cibles et les indicateurs dont on va vouloir se doter au niveau de la
SGDD. On pense qu'il y a vraiment un momentum très intéressant en l'état actuel
des choses pour pouvoir dire : O.K., là, dans les prochains mois, on les
met à profit, là, on a un an pour faire le travail et le faire correctement.
Le Président (M. Jacques) : Merci.
Nous allons poursuivre nos discussions avec la porte-parole du deuxième groupe
d'opposition, la députée de Verdun.
Mme Zaga Mendez : Merci, M. le
Président...
13 h (version non révisée)
Mme Zaga Mendez : ...Merci
pour la présentation. J'aimerais vous entendre un peu plus sur votre
recommandation concernant l'écofiscalité. Hier, on entendait des experts en
sciences climatiques, notre comité consultatif qui nous disait qu'on a un
retard à rattraper. Je voulais vous entendre si vous partagez le même avis.
M. Normandin (Daniel) : L'écofiscalité,
en fait, c'est essentiel dans une économie circulaire, en fait, c'est essentiel
dans toute économie. En ce moment, on ne paie pas le vrai prix des ressources,
donc les impacts environnementaux et sociaux ne sont pas intégrés, internalisés
dans le coût des ressources, et ça fait en sorte qu'on les gaspille, hein, ce
qu'on ne paie peu ou ce qu'on ne paie pas, en fait, penser à l'eau, là, on a
tendance à la gaspiller, donc l'idée de l'écofiscalité, c'est justement, c'est
d'internaliser le coût social, le coût environnemental en plus du coût
économique dans le prix des ressources. Il y a plusieurs experts, en fait, qui
pensent que si on le faisait, en fait, l'économie deviendrait probablement
automatiquement circulaire. Bon, évidemment, c'est un immense chantier, là, d'intégrer
ou d'internaliser ces éléments-là dans le coût des ressources parce que ça...
évidemment, on n'est pas autarciques au Québec, là, on a des chaînes de valeur
qui dépassent nos frontières, donc, avec des accords commerciaux avec le reste
du Canada, mais aussi le reste du monde, donc il faut prendre en compte ces
éléments-là, mais, ceci étant dit, je pense que l'écofiscalité doit être un
chantier, en fait, faire partie du chantier, en fait, donc, je dirais que ça
doit être un travail qui s'effectue en parallèle de l'établissement de la
feuille de route pour faire en sorte qu'éventuellement on arrête de mettre des
patchs pour essayer de séculariser l'économie, mais qu'on a vraiment des
signaux très forts qui nous proviennent, donc, de ce qu'on consomme, donc des
ressources éventuellement qui sont transformées en produits puis éventuellement
en ressources en fin de cycle qu'on peut remettre dans le système économique.
Alors, oui, la question, c'est écofiscalité? Absolument.
Mme Zaga Mendez : Puis, en
lien avec mettre au centre le principe de circularité, mais aussi la contrainte
climatique, quel est votre avis par rapport à avoir des analyses climatiques
pour des projets gouvernementaux ou des analyses de circularité?
M. Laplatte (Benjamin) : C'est
une question intéressante parce que c'est sûr que le temps passe, puis il y a
eu la pandémie, puis on oublie, là, mais, lors de la révision de la Loi sur la
qualité de l'environnement, cette question-là s'est posée, là, à savoir , bien,
est-ce qu'on n'est pas rendus à devoir faire un examen objectif, là, de l'empreinte
carbone de certains de certains projets industriels, ou autres? Il y a eu
des... bien, bien, bien des débats là-dessus, mais pour dire : Bon, tu
sais, si on investit là-dedans... je veux dire, tu sais, c'est... Oui, tu sais,
il y a un retour sur investissement qu'on mesure à grands coups d'indicateurs
socioéconomiques, et tout, mais on oublie, dans le calcul, là, le coût
environnemental de cet investissement, ça fait qu'il y a définitivement de la
place pour ça, et on a, grâce à la science aujourd'hui, là, la capacité de
faire ces évaluations-là, c'est quelque chose qui véritablement devrait être
systématisé, le plus possible.
M. Normandin (Daniel) : Peut-être
juste en complément, dans les études d'experts, en fait, il est impossible de
rencontrer nos cibles climatiques et de préserver la biodiversité si on ne
sécularise pas l'économie. Impossible.
Mme Zaga Mendez : Impossible.
Bien, je vous remercie.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup. Je cède maintenant la parole au député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : Merci, M. le
Président. Merci, messieurs Normandin et Laplatte. Vaste programme, celui que
vous nous présenter aujourd'hui, surtout qu'on part à 3,5 %, c'est un peu
décourageant. Ça me fait un peu penser à la nouvelle de la semaine dernière où
lorsqu'on parlait de la politique de gestion des matières résiduelles, bien,
plutôt que de se rapprocher de notre objectif, mais c'est l'inverse qui se
produit. Alors, j'aimerais savoir si vous demeurez optimistes, et c'est tout à
votre honneur, on veut partager cet optimisme-là... Mais je veux revenir sur
une question précise où vous dites que c'est l'occasion, en adoptant une
feuille de route, de corriger plusieurs lacunes du Plan pour une économie
verte, est-ce que vous voulez élaborer un peu là-dessus?
M. Laplatte (Benjamin) : Oui.
Peut-être une réponse à deux volets, parce que vous avez fait référence à la
nouvelle qu'on a tous vue passer la semaine dernière, mais on vous inviterait
peut-être à reprendre connaissance, si vous n'avez pas eu la chance, là, mais
du rapport du BAPE sur les résidus ultimes qui amène vraiment des propositions
intéressantes à cet égard puis notamment à l'égard de la mission de
Recyc-Québec, etc., il y a des choses vraiment très intéressantes là-dedans, et
le rapport du BAPE positionne justement toute l'importance, là, de mettre en...
de prioriser le modèle d'économie circulaire spécifiquement sur cet enjeu.
Ensuite, par rapport aux autres politiques
publiques auxquelles vous faites référence, le PEV en est une, mais il y en a d'autres
qui sont listées dans notre mémoire. Ce qu'on voit depuis les dernières années,
c'est des ministères qui s'intéressent de plus en plus à l'économie circulaire,
et on le salue. Il y a des mesures dans ces différentes stratégies, programmes
et politiques, mais quand tu les analyses objectivement, c'est ce que je... on
disait plus tôt, les moyens ne suivent pas nécessairement en termes d'investissements.
Et dans le PEV, il y a des choses qui sont intéressantes, mais qui touchent par
exemple, là...
M. Laplatte (Benjamin) : ...j'y
vais un petit peu de mémoire, là, tu sais, mais les bioénergies, l'hydrogène
vert, la valorisation des matières organiques, c'est très intéressant, mais
souvent on va s'intéresser à des stratégies de fin de vie, c'est-à-dire qu'est ce
qu'on fait avec nos résidus, puis pour les réintroduire et leur donner une
valeur économique. C'est superintéressant, mais c'est très réducteur. Donc, on
pense qu'on peut être beaucoup plus ambitieux à cet égard-là, puis, comme ça a
été dit par la commission hier, l'économie circulaire fait partie intégrante
des solutions qui vont nous amener vers la décarbonisation de notre économie.
Donc, à cet égard, le PEV devrait en tenir compte.
M. Arseneau : D'accord. Mais
est-ce que vous n'avez pas l'impression qu'on utilise, là, justement
l'expression, là, «économie circulaire» un petit peu partout, là, on émaille
nos documents de ce thème-là, puis finalement c'est un mot à la mode, puis que
finalement on n'y travaille pas sérieusement? Et est-ce que la population
comprend vraiment, là, que, si on fait un parallèle par exemple aux changements
climatiques, à l'urgence climatique, que, bien, évidemment... l'économie
circulaire, il y a encore de la sensibilisation à faire?
M. Normandin (Daniel) : Absolument,
énormément, puis il y a des enjeux de dérive, absolument. On l'a vu avec tout
ce qui touche le vert, en fait, ou le développement durable en tant que tel. À
un moment donné, on plantait un arbre, on créait une job, on faisait du
développement durable. Donc, c'est devenu... Ça fait 30 ans qu'on en fait, du
développement durable, on n'a pas progressé, on n'a... oui, on n'a pas
progressé du tout. Alors, il faut effectivement faire attention avec ce genre
de dérive là, l'économie circulaire devient effectivement un thème qui est à la
mode. Je n'aime pas ce mot-là, là, mais... Donc, il faut faire attention aux
dérives. Et il y a effectivement encore une... puis on le propose dans nos
jalons, là, une vaste campagne de sensibilisation-formation pour évidemment
faire en sorte que tous les acteurs de la société soient impliqués dans la...
Le Président (M. Jacques) : Merci
pour votre contribution aux travaux, c'est fort intéressant, et nous suspendons
nos travaux jusqu'à 14 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 08)
13 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 14 h 1)
Le Président (M. Jacques) : Bonjour.
La Commission des transports et de l'environnement reprend ses travaux. Nous
poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le
projet de Stratégie gouvernementale de développement durable 2023-2028.
Cet après-midi, nous entendrons les
organismes suivants : Nature...
14 h (version non révisée)
Le Président (M. Jacques) : ...le
Fonds d'action québécois pour le développement durable.
Je souhaite la bienvenue aux représentants
de Nature Québec et je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé, après quoi nous procéderons à la période des échanges avec les membres
de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et faire votre
présentation, merci.
Mme Vallières-Léveillé (Emmanuelle) :
Bonjour, M. le Président, Mmes et MM. les députés et membres de la
commission. Nature Québec vous remercie de l'invitation à participer à la
présente commission. Je me présente, Emmanuelle Vallières-Léveillé, je suis
coordonnatrice des projets Biodiversité et Forêt chez Nature Québec. Je suis
accompagnée, aujourd'hui, de trois de mes collègues, que je présente rapidement :
Anne-Céline Guyon, chargée de projets experte Climat; Emmanuelle Rancourt,
également chargée de projets experte pour Énergie et biomasse; et Hubert Fortin
aussi, chargé de projets, programme Milieu de vie en santé.
Avant de vous présenter nos remarques et
recommandations concernant le projet de Stratégie gouvernementale de
développement durable 2023-2028, je vous présente mes excuses, au nom du
directeur général par intérim de Nature Québec, Cyril Frazao, qui ne peut
participer aux présentes auditions en raison d'un empêchement. De plus, face à
des délais serrés, nous n'avons pas fait parvenir de mémoire avant notre
participation. Cependant, nous ferons parvenir un résumé de nos commentaires
suite à notre passage aujourd'hui.
Donc, alors, pour commencer, nous
souhaitons souligner quelques éléments d'ordre général. Dans ses prises de
position, Nature Québec se base sur la science, et, concernant les changements
climatiques et la crise de la biodiversité, des scientifiques de l'IPBES et du
GIEC nous disent qu'il faut accélérer le pas, il faut opérer des changements systémiques
et adresser les causes profondes de ces crises. Malgré l'engagement du Québec
dans le programme 2030 de l'ONU, dont découle la Stratégie gouvernementale de
développement durable, nous devons, malheureusement, constater que le
développement durable n'a pas rempli toutes ses promesses. Malgré certains
efforts mis en place à l'échelle mondiale et domestique, il est clair que le
développement durable n'a pas permis de répondre adéquatement aux crises
environnementales et sociales, ces dernières continuant de s'aggraver,
remettant en cause la survie même de l'humanité.
Comme plusieurs d'entre vous, Nature
Québec était présent, en décembre dernier, à la COP15 et lors du lancement de l'Appel
de Montréal, afin d'appuyer l'importance de s'attaquer d'urgence aux causes
sous-jacentes qui sont communes à la crise de la biodiversité et celle du
changement climatique. Nous tenons, d'ailleurs, à souligner positivement le
fait que le gouvernement du Québec ait endossé cet appel et, par le fait même,
s'est engagé à poursuivre le dialogue quant aux causes sous-jacentes et aux
vraies solutions à mettre en œuvre pour y faire face. C'est dans cette
perspective que nous nous demandons si le projet de stratégie permet au Québec
de répondre à cette urgence. Nous croyons qu'il y a un réel besoin, en
parallèle d'une stratégie de développement durable, d'avoir une stratégie
nationale sur la biodiversité, afin d'adresser adéquatement cette crise, qui
met en péril notre qualité de vie, incluant notre économie. Nous tenons également
à saluer le lien entre la crise climatique et la crise de la biodiversité fait
dans le projet de stratégie, tout comme l'ajout du volet santé.
Ensuite, à l'instar des recommandations du
rapport du Commissaire au développement durable pour l'année 2020-2021, ainsi
que d'autres groupes qui ont participé aux présentes consultations avant nous,
les objectifs de la nouvelle stratégie devraient être précis et accompagnés de
cibles quantifiées ainsi que d'échéances. Par exemple, lorsqu'on parle de bonifier
et pérenniser le réseau d'aires protégées, on pourrait accoler la cible de 30 %,
puisque le gouvernement s'est déjà engagé à l'atteindre.
Ensuite, nous croyons que la stratégie
manque de références aux principes de la Loi sur le développement durable.
Plusieurs de ces principes sont pourtant très pertinents. Nous n'en nommerons
que trois. Le principe E, portant sur la participation et l'engagement, visant,
entre autres, à définir une vision concertée du développement. Le principe G,
portant sur la subsidiarité, qui vise, essentiellement, la délégation de la
prise de décision à l'autorité la plus appropriée, donc, souvent, plus près des
citoyens. Et, pour terminer, le principe M, portant sur le respect de la
capacité de support des écosystèmes. Il est pertinent de se rappeler ces
principes aujourd'hui, à la suite de l'entérinement des cibles de 30 % de
protection et de 30 % de restauration de la nature, et à la veille des
consultations sur la stratégie pour les caribous forestiers et montagnards.
Entre le respect de ses engagements en
faveur de la nature et son désir de développer les minéraux critiques et
stratégiques, en plus de devoir répondre à la demande grandissante en
hydroélectricité, nous croyons pertinent que les principes de développement durable
du gouvernement du Québec apparaissent dans la stratégie, afin de guider l'administration
publique et l'action politique.
Pour la suite de nos commentaires, je
laisserais la parole à Anne-Céline Guyon.
Mme Guyon (Anne-Céline) : Bonjour,
M. le Président et membres de la...
Mme Guyon (Anne-Céline) : ...Notre
premier commentaire porte sur la place de l'économie dans la présente
stratégie. Selon Nature Québec, le fait même que la première orientation soit
axée sur l'économie verte et l'innovation pour les entreprises fait en sorte
qu'encore une fois c'est l'économie qui est mise de l'avant, ayant préséance
sur tout le reste. Pourtant, c'est d'écosystème en santé dont dépend notre
qualité de vie. C'est pourquoi nous aurions aimé voir comme première
orientation la conservation de la nature et que l'économie soit ramenée à sa
place, soit comme un moyen et non comme une fin en soi. De plus, la stratégie
mériterait de se distancer du regard anthropocentrique que l'on pose sur la
nature et reconnaître sa valeur intrinsèque au-delà des bienfaits qu'elle nous
offre.
Aussi, si dans l'orientation trois est
nommé que la transition socioécologique réfère à un modèle au passage
nécessaire vers un modèle de développement respectueux de la capacité de
support des écosystèmes, il n'en demeure pas moins que la stratégie repose
encore trop sur un modèle de croissance économique où on parle de soutenir,
favoriser et encourager. Mais à aucun moment n'est évoqué le fait qu'il va
falloir urgemment entamer un travail de réduction, réduire notre consommation
énergétique, réduire l'apport de matières premières dans nos systèmes de
production et réduire notre niveau de consommation.
Deuxième commentaire, celui concernant le
processus de participation. Nous soulignons positivement la volonté d'assurer
une transition socioécologique juste en favorisant la participation de toutes
et tous au développement durable du Québec. Nous ne pouvons que souscrire au
fait que la transition écologique doit être porteuse de justice sociale. Et les
meilleurs moyens d'y parvenir sont : premièrement, de reconnaître les
impacts différenciés des crises sur les différents segments de la population,
entre autres les populations les plus vulnérables, les femmes, les premiers
peuples et les personnes issues de la diversité, deuxièmement, de permettre à
ces derniers d'être adéquatement représentés et de participer de façon pleine
et entière aux prises de décision concernant la transition socioécologique, et
enfin, concernant spécifiquement les travailleurs et travailleuses, il ne
suffit pas de les encourager à se diriger vers des emplois verts, mais aussi
d'accompagner ceux qui sont dans des secteurs problématiques à en sortir en les
incluant aux tables de discussion et de décisions, comme par exemple dans le
dossier du caribou et du secteur forestier.
En ce sens, il nous semble important de
dire que le processus de consultation de la présente stratégie a échoué à
favoriser cette participation pleine et entière de toutes et tous. Toutefois,
l'annonce par le premier ministre d'une consultation publique sur l'avenir
énergétique du Québec sera une occasion concrète de se reprendre et d'appliquer
ces principes. C'est pourquoi nous appuyons la demande faite par nos collègues
d'Équiterre de tenir un BAPE générique, seul processus qui permettra la
participation de tous les secteurs de la société civile québécoise sur un enjeu
aussi complexe et aussi structurant pour l'avenir du Québec.
Troisième commentaire sur le développement
des activités durables. Concernant le développement durable des collectivités,
tous les points abordés dans la stratégie sont évidemment intéressants, mais
rien ne bougera tant qu'on ne réformera pas la fiscalité municipale et tant
qu'on ne modernisera pas la loi sur l'expropriation. De plus, nous ne pouvons
nous empêcher de souligner que s'il est écrit noir sur blanc la volonté
d'accélérer la transition vers une mobilité durable en augmentant la part
modale des déplacements actifs et collectifs tout en réduisant l'intensité
énergétique du transport de personnes et des marchandises, nous sommes
présentement en train de faire exactement le contraire en continuant de
sous-financer ces modes de transport et en refusant de se doter d'outils tels
que des redevances sur les véhicules énergivores. Nous appelons donc le
gouvernement à davantage de cohérence.
Enfin, dernier commentaire sur
l'exemplarité de l'État. Nature Québec considère que viser l'exemplarité de
l'État est non seulement nécessaire, mais obligatoire, et doit commencer au
plus haut niveau de l'appareil d'État. En ce sens, nous sommes très inquiets
des constats déposés par la Commissaire au développement durable quant au
désengagement des hauts dirigeants envers leur participation aux différents
comités de la stratégie de développement durable. Nous ne pouvons donc
qu'enjoindre la Commission à prendre sérieusement en compte les avertissements
de la Commissaire avant l'entrée en vigueur même de la présente stratégie. Et
nous appuyons également la proposition d'assujettir les réseaux parapublics à
la Loi sur le développement durable.
• (14 h 10) •
Concernant l'objectif 5.3 sur
l'investissement durable, nous vous invitons aussi à ce que la stratégie aborde
également le retrait et l'interdiction dans des activités néfastes. En cela,
vous répondriez par le fait même aux cibles sept et 18 de l'accord
Kunming-Montréal et aussi de l'accord de Paris. Enfin, pour finir sur
l'exemplarité de l'État, sortir le gaz naturel du parti mobilier est non
seulement essentiel, mais devrait être obligatoire.
Conclusion. Nous voudrions souligner aussi
que les choix des mots est également important. Tout au long des actions
proposées, les verbes d'action choisis manquent de mordant. Au lieu de
formulation tel que «il est souhaité que», «nous invitons à», le temps est venu
d'exiger et d'obliger. L'urgence l'exige. Merci, Mesdames et Messieurs. Nous
sommes maintenant prêts à prendre vos questions.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup pour votre présentation. Nous allons maintenant débuter les...
Le Président (M. Jacques) : ...échange
avec la députée. Mme la députée d'Argenteuil.
Mme Grondin : Bonjour,
mesdames, monsieur. Merci pour votre contribution. Par rapport à tous les
autres, ou plusieurs autres intervenants, vous y allez assez fort. C'est tout à
votre honneur.
Moi, j'aimerais ça qu'on se concentre,
parce que vous avez retenu... dans le cadre des principes de développement
durable, là, des seize principes, vous nous amenez vers trois grands principes
que vous aimeriez... pour lesquels on devrait porter une attention
particulière, soit : la participation citoyenne, le principe de
subsidiarité, le respect de la capacité de support des écosystèmes.
Moi, vous allez m'excuser, mais je vais me
concentrer sur l'orientation deux, qui est la nature, nature Québec. J'ai
l'impression que c'est un peu aussi votre expertise. Évidemment, vous avez
mentionné des grands exemples qu'on connaît tous, l'histoire des caribous, le
secteur forestier. Outre ça, parce que je connais certains de vos projets que
vous pilotez, en termes de cibles et d'indicateurs, quand on tombe en termes de
participation citoyenne, de subsidiarité, donc, ce que vous pensez d'élargir la
stratégie au niveau des municipalités, l'exercice de comment on fait pour
respecter la capacité support des écosystèmes, est-ce que vous pouvez nous dire
si vous avez des cibles plus précises, outre le 30 % dans le Sud, de
protection? Est-ce qu'il y a des indicateurs que vous pourriez nous proposer
qui nous aideraient à atteindre les objectifs qui sont identifiés à
l'orientation deux?
Mme Vallières-Léveillé
(Emmanuelle) : Lors du présent exercice, on ne s'est pas penché dans
ce détail-là, au niveau des indicateurs. Cependant, peut-être un petit mot sur
la capacité de support des écosystèmes. Notre point, c'est que, quand on a des
grands choix de sociétés, comme, par exemple, on a mentionné le caribou, il
faut agir, pour le caribou, c'est clair, il faut des actions concrètes, je
pense que c'est assez un consensus, là. Par contre, l'idée, c'est parce que...
Actuellement, on voit que la première pression, c'est le secteur forestier, sur
les caribous. Quand on voit que les populations de caribou déclinent, on ne
peut pas dire qu'on respecte la capacité de support des écosystèmes, à ce
moment-là.
Puis on voulait amener le message qu'il
faut aussi accompagner dans une transition juste les communautés forestières,
par exemple, dans ce cas précis là. Donc, pour nous, c'est un point qu'on
voulait souligner, mais, pour les indicateurs, précisément, on n'a pas été dans
le détail, là.
M. Fortin (Hubert) : Si je
peux me permettre, je pense que c'est ça, on ne rentrera pas nécessairement
spécifiquement dans les indicateurs, mais, clairement, je regardais justement
l'objectif 4.3, qui est de bâtir des collectivités dynamiques et innovantes,
puis on calcule ça avec l'indice de vitalité économique, tu sais, c'est assez
réducteur. On parle d'un indice, mais qui est strictement économique.
Nous, ce qu'on ce qu'on dit, c'est que ce
qu'on doit faire, c'est plus prendre des indicateurs qui sont reliés au
mieux-être humain puis qui sont reliés à l'environnement, puis, dans le
mieux-être humain va peut-être s'intégrer l'économie, là, mais c'est vers ça
qu'on devrait s'orienter. Puis l'IRIS, par exemple, a proposé différents... qui
est l'Institut de recherche et d'informations socioéconomiques, en a proposé
différents, indicateurs. Il y a beaucoup de littérature à ce sujet-là.
Notamment, j'ai 15+, qui était là, à la commission, avant nous, aussi. Ça fait
partie un peu de ce qu'ils ont recommandé dans leur mémoire, je crois, donc que
la société québécoise soit une des premières en Amérique du Nord à être basée
sur le bien-être.
Donc, je pense que c'est vraiment ça,
l'idée. C'est plus ce qui ressort. Après ça, ce n'est pas vraiment à nous de
définir, je pense, lesquels sont... c'est plus à la science de voir, avec les
limites planétaires, jusqu'où on peut aller puis c'est quoi les indicateurs.
Mme Grondin : Merci, là,
parce qu'effectivement j'ai tendance à vouloir tenter... pour les gens qui nous
écoutent, mais pour la compréhension de tous puis susciter de l'intelligence
collective, j'essaie de rendre les choses un peu plus concrètes., tu sais. On
est beaucoup dans une stratégie, des orientations, mais concrètement ça mange
quoi en hiver? Mais je comprends que ce n'est pas le travail que vous avez
fait, de dire : On va identifier des cibles très concrètes ou des
indicateurs. Je suis contente d'entendre que vous ramenez la question du bien-être,
comme... peut-être visé, en termes d'indications, d'indicateurs.
Parlez-moi de... Il y a plusieurs
intervenants qui...
Mme Grondin : ...ils nous ont
parlé à travers l'économie, même si c'est la première orientation, on pourra en
débattre pendant des jours, mais il reste que c'est... et vous l'avez dit,
c'est au cœur aussi d'une société, là, toute la question économique. Parlez-moi
de ce que vous pensez des mesures fiscales. Est-ce que c'est quelque chose...
Mme Guyon (Anne-Céline) : Bien,
l'écofiscalité, évidemment, c'est certain qu'il faut mettre en place des
mesures fiscales, mais il faut absolument les compléter, en fait, faire en
sorte qu'elles soient justes, donc une fiscalité notamment progressive pour
s'assurer, encore une fois, de remplir le pôle social du développement durable.
On a trop tendance à l'oublier. Donc, pour nous, c'est essentiel de faire en
sorte que les mesures d'écofiscalité, qu'on sous-estime de manière générale au
Québec, alors qu'on pourrait avoir énormément de pouvoir en les mettant en
place, se fassent de manière véritablement aussi à ce qu'elles permettent de
réduire les inégalités sociales au Québec et non pas qu'elles les accentuent.
Parce que des mesures d'écofiscalité mal pensées pourraient véritablement venir
accentuer les problématiques sociales plutôt que de venir y répondre. Donc, ça,
c'est essentiel, à notre avis, d'avoir la notion d'écofiscalité juste.
Mme Grondin : Intéressant.
Merci. Peut-être, dernière question. Je ne sais pas, M. le Président, est-ce
qu'il y a... Oui. Dernière question. Il y a plusieurs intervenants... Et je
vous avoue que je suis un peu d'accord avec cette... pas cette tendance, mais
on a une urgence en termes de changement climatique. On a de grands défis dans
tous les domaines, que ça soit au niveau de la santé, la pénurie de
main-d'œuvre, l'éducation, la nature. Et donc le constat est qu'on a une
stratégie, une loi depuis 2006, une stratégie, on est à la troisième version,
là, si je me rappelle bien, et le constat du commissaire est qu'on n'avance
peut-être pas aussi vite qu'on voudrait tous faire, arriver. Et donc une des
approches qui est proposée dans cette stratégie-là, c'est d'en faire des... de
faire des choix. C'est ce que plusieurs intervenants nous ont dit. On ne peut
pas tirer sur tous les lapins, là, on va choisir. Et donc c'est l'exercice qui
a été fait dans le cadre de la stratégie.
Je nous ramène aux orientations. Est-ce
qu'à travers les échanges qu'on a et la lecture de certaines positions que vous
prenez... est-ce qu'on peut s'entendre que les orientations qui sont choisies
dans cette stratégie-là sont intéressantes? Certes, peut-être qu'on n'exige pas
tellement, mais est-ce qu'au moins en termes d'orientation on s'entend que
c'est des bonnes orientations?
• (14 h 20) •
Mme Guyon (Anne-Céline) : Je
pense que les orientations sont bonnes, mais ne se sont peut-être pas
développées... certaines sont peut-être déficientes par rapport à d'autres.
Encore une fois, on voit, dans la première orientation, une vraie volonté de
nous amener vers une économie plus durable et responsable, mais, encore une
fois, on le fait malheureusement trop en incitant, en voulant déplacer des
choses, des capitaux, par exemple, etc., mais on oublie complètement le côté de
dire : Il va falloir qu'on se pose les réelles questions en tant que
société québécoise, qu'est-ce qu'on doit développer, puis qu'est-ce qu'on doit
arrêter de développer, voir même, des fois, qu'est-ce qu'on doit complètement
changer en termes de paradigme, tu sais. Cette réflexion-là, on ne l'a pas. Or,
c'est celle-là qui est essentielle.
On sort d'une COP15 qui est venue nous
mettre vraiment en pleine face le fait qu'on n'est pas juste en la crise
climatique, mais on est aussi en crise de la biodiversité. Et là on se trouve
face à un momentum où on se rend compte que ce n'est pas juste une question de
switch énergétique, notamment, de passer des énergies fossiles aux énergies
renouvelables, mais que les énergies renouvelables aussi peuvent avoir des
impacts au niveau de la crise de la biodiversité. Et on a des vrais enjeux à
venir faire en sorte que les réponses à l'une ne viennent pas aggraver l'autre.
Et c'est notamment le cas dans le secteur minier notamment, où il va falloir
qu'on se pose des vraies questions et qu'on prenne peut-être un pas de recul
avec un moratoire, le temps...
Mme Guyon (Anne-Céline) : ...de
revoir certains éléments de la loi sur le régime minier. Donc, c'est le genre
d'éléments qu'il faut regarder et travailler. Je suis complètement d'accord sur
le fait de travailler de manière structurante et d'y aller, peut-être avec des
premières mesures où on sait qu'on va poser les bons gestes et pas qu'on ne
sera pas à rétropédaler par la suite en corrigeant des erreurs qu'on aurait
très bien pu éviter dès le départ. Parce qu'on sait, à l'heure actuelle, ce
qu'il faut faire, on n'en est plus trop à se poser des questions. On en est
beaucoup à l'action.
Mme Grondin : Les
intervenants, avant vous, qui sont spécialisés dans tout ce qui est économie circulaire,
nous proposent justement de mettre l'emphase sur ce grand défi là de l'économie
circulaire. Parce que dans le fond, le message qui est derrière, ça rejoint un
peu... est-ce que je me trompe, de réduire la consommation, de profiter de ce
qu'on a déjà produit avant d'aller chercher du nouveau. C'est un peu ça, en
gros, là, je résume pour les enfants, mais je pense que c'est important. Et
donc est-ce que c'est le genre de proposition qui, à travers l'orientation
économique notamment, est quelque chose qui vous intéresse?
Mme Guyon (Anne-Céline) : L'économie
circulaire, oui, c'est certain. Maintenant, l'économie circulaire, il va
falloir faire attention à ce qu'elle ne vienne pas verrouiller aussi la
production de certains déchets des uns pour être obligé de fournir d'autres qui
vont s'en servir. Vous me voyez venir, évidemment, avec toute la question du
gaspillage alimentaire, par exemple, qui alimenterait d'éventuelles usines de
biométhanisation, pour produire du GNR, pour venir chauffer ou alimenter des
processus industriels. Il y a des limites à ça, c'est-à-dire qu'on ne va pas
faire exprès de produire trop de déchets alimentaires pour pouvoir après venir
produire du GNR. Et c'est vrai pour beaucoup de choses. C'est vrai aussi pour
les ressources naturelles.
C'est pour ça qu'encore une fois, il va
falloir qu'avant tout, on se pose la question de qu'est-ce qu'on veut continuer
à développer au Québec versus ce dont on peut se passer. Et surtout, qu'est-ce
qu'on peut réduire? Il faut réduire tout à la source, à la base. Et ce
travail-là, malheureusement, on ne le fait pas encore assez dans notre
réflexion.
Mme Grondin : ...des
collègues qui souhaitent poursuivre? Oui, merci. Je vais laisser la chance à
mes collègues d'intervenir.
Le Président (M. Jacques) : Merci
Mme la députée. Je cède maintenant la parole à la députée d'Iberville.
Mme Bogemans : Merci
beaucoup, M. le Président. Moi en fait, au niveau du gaz naturel, vous avez dit
que vous, vous souhaitiez vraiment une transition complète dans le but de
l'éliminer à 100 %. Donc ça veut dire que vous n'êtes pas nécessairement
en faveur des GNR?
Mme Guyon (Anne-Céline) : GNR,
malheureusement, à l'heure actuelle, beaucoup utilisé pour justifier
l'accroissement du réseau gazier au Québec. Et encore une fois, on est face à
une forme de verrouillage de son utilisation. Or, concrètement, la science nous
le dit, la production de GNR au Québec, ce sera très difficile de dépasser un
5 %, grand maximum, peut-être un 10 % d'utilisation de GNR dans les
gazoducs. Et pendant ce temps-là, tout le reste, ça va être du gaz, et pour la
plupart du gaz issu de fracturation, issu des États-Unis. Donc, le GNR... et je
pense que c'est une vision qu'on doit avoir. Et ma collègue Emmanuelle pourra
compléter... de manière générale l'énergie, et je ne parle pas juste du GNR,
l'énergie, il va falloir de la penser de manière locale. Ça va être des sources
de production locales, à petite échelle, et surtout proche de leurs sources de
consommation. On est plus... et ça va être la bonne énergie au bon endroit.
Certaines sources énergétiques vont peut-être... vrai pour certaines régions
puis pas pour d'autres. Donc, c'est là aussi où ça va être extrêmement
important d'avoir des dialogues sociaux à l'échelle régionale pour inclure tous
les acteurs locaux autour des transitions écologiques et sociales régionales.
Mme Bogemans : O.K. Puis vers
quelle source de transition d'énergie vous voudriez? Parce que, là, si on
n'utilise pas le gaz naturel, qu'est-ce qu'on utilise en ce moment?
Mme Rancourt (Emmanuelle) : Oui,
bien, nous, on travaille quand même beaucoup dans le domaine de la biomasse
forestière résiduelle, qui est un des intrants qui est mentionné quand même
souvent, là, pour le GNR. Par contre, quand on l'utilise pour la chauffe
directe, il y a moins de transformation, il y a moins de besoins d'apports
énergétiques, donc le rendement énergétique est toujours plus élevé. Donc,
comme ma collègue disait ...
Mme Bogemans : Excuse-moi,
c'est juste... dire : Comme le brûler en granules par exemple? Est-ce que
c'est ce que vous voulez dire?
Mme Rancourt (Emmanuelle) : Comme
des granules, comme des plaquettes, c'est ça, mais nous, on parle vraiment à
une échelle locale circulaire...
Mme Rancourt (Emmanuelle) : ...tu
sais, on parle, une municipalité qu'il y a quelques bâtiments reliés à un
système de chaleur central, ils s'alimentent de la petite série du coin, tout
ça, là. Donc, on parle d'une échelle vraiment locale, régionale. Je sais que ça
se fait beaucoup des granules, tout ça, pour l'exportation, puis on a vu,
vraiment, là, aussi, ce qui s'est passé... je ne sais pas si... en
Colombie-Britannique, il y a eu un peu une polémique de ce côté-là. Donc, on
n'est pas à cette échelle-là du tout. Nous, on parle des petits projets où
est-ce que, un peu la circularité, là, les résidus forestiers d'une industrie
peuvent ensuite être valorisés d'une autre façon. Donc, c'est souvent pour des
bâtiments institutionnels. Pour certaines industries, il y a quand même
beaucoup d'applications à cette énergie-là. Donc, c'est un peu vers ça qu'on
veut recommander, là, en remplacement de gaz.
Mme Bogemans : Bien, c'est
certain que ça fait beaucoup de sens dans un... parce qu'en fait on n'utilise
pas non plus de l'électricité pour chauffer quand on utilise ces granules-là,
là. C'est quelque chose à considérer définitivement. Mais, au niveau de la
création de GNR, comme par exemple avec la transformation... tu sais, tantôt on
parlait carrément de vidanges ou de lisiers de fumiers par exemple, ça... Parce
que, là, en ce moment, on est à peine à 1 % de GNR, là, tu sais, puis, en
2030, on est 10 %, puis, au taux de croissance actuel, on ne se rend même
pas au10 %, là. Donc, est-ce que vous pensez que ça serait bon quand même
de continuer à essayer d'atteindre de 10 % ou ça ne vaut même pas la
peine?
Mme Guyon (Anne-Céline) : À
condition que ce soit encore dans une production locale, dans un réseau local.
Là, ce n'est pas du tout ce qui est en train de se passer. Nous avons une
entreprise, qui est Énergir, qui, sous prétexte de développer le GNR, est en
train de venir verrouiller l'utilisation du gaz naturel non conventionnel au
Québec.
Le Président (M. Jacques) : Ceci
met fin aux échanges. Donc, je cède maintenant la parole à la porte-parole de
l'opposition officielle, Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, pour 12 min 23
s.
Mme McGraw : Ah! encore plus
de temps aujourd'hui. O.K., parfait. Merci, M. le Président, et merci beaucoup
à Nature Québec d'être avec nous aujourd'hui. On a bien écouté la présentation
et on a bien hâte de recevoir aussi la mémoire pour pouvoir vraiment tout
digérer. Alors, merci encore. Il y a beaucoup de contenu dans votre allocution.
Et j'ai donc plusieurs questions, mais je veux vous laisser faire des
commentaires et vraiment vous donner la chance d'élaborer.
Alors, à la lecture de la stratégie, je...
les collègues le savent parce que je l'ai dit à plusieurs reprises, vous avez
parlé du fait que le développement durable n'a pas rempli toutes les promesses,
surtout en termes d'environnement et de société, les enjeux environnementaux et
sociaux. Et mes collègues m'ont dit : Je suis ça depuis le Sommet de la
Terre à Rio, ça fait plus que 30 ans, même, on parle de développement
durable, 1987 avec la commission Brundtland, et, oui, je suis d'accord, on a
l'impression qu'on n'avance pas assez, et je parle même souvent de
procrastination planétaire. En tout cas. Donc, on est dans une situation d'urgence.
Et, moi aussi, j'avais l'impression... j'avais fait aussi... de mots un peu
plus exécutant, qui urge et qui crie à l'action. Alors, dans quelle section?
Est-ce que c'est la stratégie en général ou est-ce qu'il y a des sections en
particulier où vous auriez voulu voir en particulier plus de vigueur, et plus
d'ambition, peut-être, et d'action, des mots d'action?
• (14 h 30) •
Mme Guyon (Anne-Céline) : Bien,
c'est sûr que, de manière générale, on aurait voulu voir beaucoup plus de
verbes d'action et de niveaux d'exigence dans l'ensemble de la stratégie. Moi,
c'est vraiment ce qui m'est venu... ce qui m'a sauté aux yeux en premier lieu.
Quand je lisais des verbes, genre, «on souhaite que», on va enfin avoir des
attentes envers les ministères et les organismes, je suis tombée en bas de ma
chaise, ça aurait dû être là depuis le début. Tu sais, vous le dites très bien,
ça fait 30 ans qu'on en parle et ça fait 30 ans que la crise
environnementale continue de s'aggraver. Il y a, je pense, et vous... je vais peut-être
vous faire rire, là, mais je pense qu'il y a des limites à penser qu'avec les
mêmes ingrédients et les mêmes recettes on va goûter un gâteau différent. Tu
sais, à un moment donné, s'il faut changer de paradigme... Et il faut y aller
de manière beaucoup plus radicale. Je pense que c'est rendu que l'ensemble de
la communauté scientifique nous le dit et insiste, le GIEC, l'IPBES, ils ont
fait même des rapports communs pour le dire, c'est d'un changement systémique
dont on a besoin, de revoir le paradigme économique, qui est beaucoup trop axé
sur la surexploitation des ressources naturelles. Tant qu'on n'osera pas
adresser la question des...
14 h 30 (version non révisée)
Mme Guyon (Anne-Céline) : ...causes
sous-jacentes aux crises environnementales, on n'y arrivera pas. Et, oui, ça va
demander du courage politique, mais je pense qu'au Québec particulièrement, la
société québécoise est présente, elle est là, elle est mobilisée autour de ces
enjeux-là, on peut s'appuyer sur elle pour aller beaucoup plus loin. Ne
sous-estimons pas les citoyens et citoyennes du Québec.
Mme McGraw : Et, justement,
là-dessus, vous avez parlé que la stratégie témoigne d'un manque d'écoute ou d'un
manque de communication, ou le principe, justement, parmi les trois principes,
trois des principes que vous avez cités au sein de la Loi sur le développement
durable, vous avez parlé, bon, participation puis engagement au niveau des
citoyens. Est-ce que vous avez des exemples de politiques publiques, de
stratégie où ça a été bien réussi? Quelles sont les meilleures pratiques au
niveau de l'engagement et de la participation citoyenne qui pourraient nous
donner des indices?
Mme Guyon (Anne-Céline) : Bien,
écoutez le processus qui s'est déroulé autour, notamment, de la réflexion pour
mettre en place le plan d'économie verte était un processus très intéressant.
Il y a eu une consultation, on est parti en région, il y a eu des sous-comités
de travail qui ont regroupé différents thèmes avec différents acteurs
représentant différents secteurs de la société civile. C'est à ce type de
consultation là dont on fait référence. Et, encore une fois, tu sais, là, on
vient de nous annoncer qu'il y aura une consultation publique sur l'avenir
énergétique du Québec. C'est un enjeu beaucoup trop gros, beaucoup trop
structurant pour l'ensemble de l'avenir du Québec pour juste laisser ça dans
les mains d'une commission parlementaire. Avec tout le respect que j'ai pour le
travail des commissions, c'est un véritable débat de société dont on a besoin,
et d'inclure les acteurs régionaux, parce que c'est au niveau régional que la
transition, elle se fait, c'est au niveau local, et on a besoin d'avoir tout le
monde autour de la table pour arriver avec des visions communes. Et, on le
sait, c'est quand on engage les gens, qu'après ils passent à l'action et qu'ils
se sentent concernés et qu'ils veulent y aller. Si on impose des choses, ça ne
fonctionnera pas. Au contraire, on a un vrai sérieux risque de «backlash» dans
la population.
M. Fortin (Hubert) : Je
ferais du pouce sur ce que tu disais par rapport à inclure toutes les... à
inclure les régions. Donc, les municipalités ont un énorme rôle à jouer aussi,
là, dans la crise au niveau... sur la lutte aux changements climatiques et le
déclin de la biodiversité, puis actuellement elles n'ont pas les leviers, elles
n'ont pas les ressources. Elles sont vraiment basées sur... Leurs revenus
proviennent principalement de la taxe foncière. Dans plusieurs pays de l'OCDE,
dont les pays scandinaves qui sont des leaders en termes environnementaux, la
majorité des revenus des municipalités proviennent du revenu sur les impôts...
de l'impôt sur le revenu, pardon, oui, c'est ça, excusez-moi. Donc, est-ce que
c'est ça notre modèle? Je ne sais pas, mais il faut avoir... il faut discuter
de ces modèles-là. Il faut réformer en profondeur notre système fiscal. Il faut
aider les municipalités à avoir plus de pouvoir. C'est eux qui gèrent nos
matières résiduelles, c'est eux qui aménagent notre territoire. Il y a la Loi
sur l'expropriation, aussi, qu'on demande qui soit réformé, justement, parce qu'on
travaille au quotidien, nous, avec des municipalités, et, ce qu'elles nous
disent, c'est qu'elles veulent acquérir des terres pour les protéger, mais
elles n'ont pas les moyens, elles ont peur de se faire poursuivre. Donc, c'est
important de... Ce n'est pas de faire n'importe quoi avec l'expropriation, là,
il faut l'encadrer, mais il faut moderniser la loi aussi.
Mme McGraw : Donc, ça, ça
nous fait penser où vous avez mentionné un deuxième principe au sein de la Loi
sur le développement durable et c'est celle de la, et j'ai toujours de la
difficulté avec ce mot-là, subsidiarité. Ah! je l'ai dit. C'est une première. C'est
une première. Donc, est-ce qu'il y a d'autres choses que vous voulez ajouter
sur ce principe-là en termes de... Je vous laisse...
M. Fortin (Hubert) : Tantôt,
on parlait de l'écofiscalité. C'est sûr que les municipalités peuvent aussi
maintenant mettre des mesures écofiscales, puis elles ont un rôle aussi à jouer
à ce niveau-là. Ça doit venir de tous les paliers, là, que ce soit au niveau de
la mobilité durable. Donc, c'est très important. Puis ça peut être une source
de revenus aussi de plus pour celles-ci, là. Donc, peut-être que la stratégie
pourrait donner des incitatifs aux municipalités pour mettre de l'écofiscalité.
Ça a été mentionné aussi dans la stratégie, l'écofiscalité, mais je ne l'ai pas
vu vraiment détaillée à différents endroits, là, c'est que ça reste un concept
global. Ça fait que ça serait intéressant aussi qu'on propose des mesures
concrètes au provincial.
Mme Vallières-Léveillé (Emmanuelle) :
Peut-être pour compléter, quels sont les pouvoirs et responsabilités qui
peuvent être délégués au niveau plus régional, par exemple, un peu comme Céline
le disait, ça va beaucoup, pour nous, avec...
Mme Vallières-Léveillé (Emmanuelle) :
...engagement des citoyens. Quelle est la vision concertée en région pour
le développement? Parce que là on arrive... Par exemple, là on assiste à un
véritable boom minier. Plusieurs projets miniers, probablement, vont vouloir
voir le jour au courant des prochaines années. Là, on crée des fois des
situations inconfortables en région aussi, en disant : Bon, là, il y a une
compagnie qui veut exploiter à cet endroit. Mais on n'a jamais la réflexion
plus globale de dire : Bon, il faut accueillir des projets industriels, où
ça peut être possible puis où, au contraire, on doit dire : Non, ça, c'est
un milieu très important pour la région, on le conserve. Donc...
Mme Guyon (Anne-Céline) : Surtout
en regardant les impacts cumulatifs des différents projets. Parce que, si on
regarde projet par projet, on ne s'en sortira pas. Là, on s'aperçoit qu'à
l'heure actuelle, c'est que, dans une même région, il y a cinq, 10 projets
proposés, puis, tu sais, les uns... chacun s'ajoute à l'autre. Donc, il faut
absolument prendre en compte les impacts cumulatifs des projets.
Mme McGraw : Vous avez
mentionné le... je ne sais pas si ça va être une commission parlementaire ou...
mais sur l'avenir énergétique au Québec. Nous, on avait proposé une commission
itinérante qui irait directement dans les régions parler avec les experts, les
groupes, les autochtones, et cetera. Mais est-ce que vous... Parce que là vous
parlez d'êtres systématiques et systémiques quand même aussi, si je comprends
bien. Est-ce que ça serait l'avenir énergétique? Comment encadrer ça? Est-ce
que... Selon vous, est-ce que ça serait... L'avenir énergétique, ça serait le
développement durable, l'économie circulaire? Il y a beaucoup de... Si vous
aviez... vous pouvez faire le choix vous-mêmes, comment est-ce que vous... Ce
serait quoi, votre vision de comment procéder, puis comment expliquer un peu
aux gens pour leur faire impliquer? Je ne sais pas si ma question est claire,
mais comment présenter ça aux...
Mme Guyon (Anne-Céline) : Bien,
je pense qu'il faut tout simplement dire aux gens que... Tu sais, puis je
reviens d'Europe, là, puis je peux vous le dire, là, tout le monde a sur toutes
les lèvres, là, le fait que le temps de l'abondance, c'est fini, en termes
d'énergie, là, et comment on fait pour résoudre ce problème-là tout en voulant
continuer à vouloir se développer. Et je pense que... Avec le même niveau de
croissance, même, voire l'augmenter. Et le problème, il est là. Et ça, ça va
avoir des impacts sur l'ensemble de nos vies dans tout, tu sais, dans notre
manière de nous nourrir, dans notre manière de nous vêtir, dans notre manière
de nous transporter.
Je pense que, justement, il faut expliquer
aux gens à quel point, quand on parle d'énergie, c'est absolument tous les
aspects de notre vie quotidienne qui sont touchés et que c'est pour ça qu'ils
doivent absolument pouvoir participer à cette conversation-là, parce que, tu
sais, chacun a son mot à dire, chaque secteur a ses réalités différentes, et on
a besoin d'y aller vraiment dans un processus de dialogue social, encore une
fois, pour être sûrs qu'une fois qu'après la stratégie va sortir, les gens y
adhèrent en ayant conscience qu'ils ont participé à l'entièreté de la chose. Et
j'insisterai sur le fait de : consulter, c'est bien, mais il faut prendre
en compte ce que les gens vous disent aussi.
Mme McGraw : Je pense, il
nous reste...
Le Président (M. Jacques) : Quelques
secondes.
Mme McGraw : Quelques
secondes. Je vais juste dire que j'ai beaucoup apprécié le point qu'on ne peut
pas créer d'autres problèmes sociaux, environnementaux en essayant de résoudre
même la crise climatique. Je pense que cette manière de penser nous a amenés où
on est rendus aujourd'hui. Donc, je pense que c'était le point que je retiens.
Alors, merci beaucoup. À moins... je vous laisse... M. le Président, quelques
secondes, en tout cas...
• (14 h 40) •
Le Président (M. Jacques) : Il
reste très peu, très, très peu.
Mme McGraw : Est-ce que vous
avez d'autre chose à ajouter avant que ma collègue... Alors, merci.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup pour l'intervention. Je cède maintenant la parole à la porte-parole du
deuxième groupe d'opposition, Mme la députée de Verdun, pour quatre minutes
huit secondes.
Mme Zaga Mendez : Super.
Merci, M. le Président. Merci beaucoup pour votre exposé puis pour cet échange.
On a parlé rapidement des ressources naturelles. En regardant la stratégie du
développement durable, qui a comme objectif, on va se le dire, avoir une
cohérence en termes d'orientations ministérielles, sentez-vous... quel est
votre avis... Est-ce qu'il y aurait, selon vous, des contradictions entre où
est-ce que la stratégie veut nous amener ou devrait nous amener et des visions
en termes d'exploitation des ressources naturelles au Québec?
Mme Guyon (Anne-Céline) : Oui,
des contradictions, il y en a, encore une fois, parce qu'on dit qu'on veut...
Mme Guyon (Anne-Céline) : ...prend
en compte les limites biophysiques des territoires et en même temps, on dit
qu'on veut continuer à se développer, à innover, etc., sans avoir une réflexion
en profondeur sur justement jusqu'où on peut aller là-dedans. Donc, pour moi,
c'est la grande contradiction dans la stratégie. Et encore une fois, c'est quand
on lie les enjeux, crise climatique, crise de la biodiversité, qu'on comprend
véritablement la complexité du problème. Et sincèrement, là, je ne dis pas
qu'il y en aura de facile, mais il serait peut-être temps, justement, de le
reconnaître, qu'on ne fera pas face à ces crises-là avec des réponses faciles.
Et qui dit complexité dit justement, encore une fois, d'inclure le plus de
monde possible autour de ces réflexions-là pour permettre justement à tout le
monde d'exprimer leur réalité et de se rendre compte des différents liens qui
s'opèrent. Hein, tout est interpellé aujourd'hui, puis on ne peut plus se
permettre de vouloir résoudre des problématiques en silo. Il faut absolument
que tout le monde se parle.
Mme Zaga Mendez : C'est un
peu... En fait, je me lance là-dessus, là, parce que c'est un peu ce qu'on a
entendu tantôt par rapport aux minéraux critiques pour l'exploitation minière.
Vous voyez, là aussi, un enjeu pour la lier avec la cohérence de la stratégie.
Mme Guyon (Anne-Céline) : Pourtant,
écoutez, on... Pour que le Québec ait meilleure mine, la coalition a fait
sortir les chiffres, un peu juste avant les fêtes, là, pendant la COP15. C'est
dantesque, le boom minier dans lequel on se trouve à l'heure actuelle sans
véritable encadrement. Encore une fois, ce qu'on demande, c'est un pas de
recul. Prenons le temps de bien y penser. Sinon, on va se retrouver avec un
Québec qui va véritablement être un fromage suisse, là, un véritable gruyère,
là. Puis tu sais, aussi, c'est toute la concurrence entre les différents usages
des territoires dont on parle, là, parce qu'il y a des régions, tu sais... Puis
on le voit avec la sortie, notamment, des MRC, tu sais, qui nous disent :
Mais, écoutez, nous, on est en train de développer des projets, de récréotourisme.
On a beaucoup de monde. Les acteurs locaux sont mobilisés autour de ces
choses-là depuis des années. On met en place des projets. Et là, du jour au
lendemain, parce qu'il y a une compagnie qui, à cause du fait que c'est juste
grâce à un clic qu'on peut venir claimer un territoire, bien, du jour au
lendemain, tout ça, ça part en fumée.
Il y a quelque chose qui ne fonctionne
pas. Encore une fois, c'est une question de cohérence, une question de faire
les choses de la bonne façon avec les bonnes étapes. On ne dit pas qu'il faut
arrêter le développement minier. On dit juste qu'il faut le faire correctement,
en respectant les limites biophysiques des territoires. Le fait qu'on n'est pas
juste dans une crise climatique, on est dans une crise biodiversité, et donc
c'est essentiel de le prendre en compte.
Mme Zaga Mendez : Puis en
termes de prise en considération des communautés.
Le Président (M. Jacques) : En
terminant, en terminant.
Mme Zaga Mendez : En
terminant, vous avez parlé de transition juste puis rôle des travailleurs.
J'aimerais vous entendre un peu plus là-dessus.
Mme Vallières-Léveillé
(Emmanuelle) : Oui, en fait, pour donner un exemple plus concret,
c'était en lien avec la future stratégie Caribou. Évidemment qu'il y a des
actions à poser, il y a des territoires à protéger. Par contre, il faut
absolument accompagner les travailleurs. On ne peut pas juste leur dire :
Bien, on protège puis arrangez-vous. Comment les MRC ont diversifié...
Le Président (M. Jacques) : Ceci
termine les interventions. Merci pour votre contribution aux travaux de la
commission. Je suspends quelques instants pour se préparer pour le prochain
groupe. Merci.
(Suspension de la séance à 14 h 45)
(Reprise à 14 h 51)
Le Président (M. Jacques) : La
Commission des transports et de l'environnement reprend ses travaux. Je demande
le consentement pour permettre au député de Taschereau de reprendre ses
fonctions à titre de membre et donc de mettre fin à son remplacement. Est-ce
qu'il y a consentement?
Des voix : Consentement.
Le Président (M. Jacques) : Consentement...
Le Président (M. Jacques) : ...Donc,
je souhaite la bienvenue aux représentants du Fonds d'action québécois sur le
développement durable. Je vous rappelle que vous disposez de dix minutes pour
faire votre exposé, après quoi, nous procéderons à la consultation avec les
membres de la commission. Donc, je vous donne la parole.
M. Girard (Nicolas) : Merci.
Merci de nous accueillir pour cette consultation parlementaire importante. En
fait, une stratégie 2023-2028 de développement durable qu'on attendait, en
fait, depuis deux ans avec impatience, une stratégie qui est importante de par
le caractère transversal qu'elle a et l'impact qu'elle a sur l'ensemble des
ministères et organismes, en fait, du gouvernement du Québec.
Il y a 20 ans, en fait, 22 ans
plus précisément, le gouvernement du Québec mettait en place le Fonds d'action
québécois pour le développement durable. Puis, à l'époque, l'écosystème de développement
durable au Québec était vraiment, vraiment très différent. En fait, on avait eu
la chance d'arriver au tournant des années 2000 où là on finançait le
développement d'expertise, en fait, comment on intègre le développement durable
en aménagement du territoire, en matière d'investissement responsable,
d'approvisionnement. Et on développait les premières formations en
développement durable dans les universités. Donc, une période... Puis on
sensibilisait beaucoup. Donc, on a fait un bout de chemin. C'est intéressant.
En fait, j'ai envie de lancer ce message-là en ouverture. Je sais qu'on est en
commission parlementaire, il y a beaucoup de commentaires, quand même, il y a
beaucoup de critiques constructives sur la stratégie et la... Mais, en même temps,
on a fait un bout de chemin, et je tiens à le souligner.
Un bout de chemin, en fait, qu'on a la
chance nous de voir, en fait, puis de percevoir, au FAQDD, notamment par des
collaborations qu'on a avec différents ministères et organismes. Puis, dans les
dernières années, on voit que les ministères et organismes vont de plus en plus
loin dans l'intégration, en fait, ou dans leur volonté d'intégrer, en fait, des
critères de développement durable. On a eu la chance, nous, de collaborer, par
exemple, avec la Caisse de dépôt et de placement du Québec, qui, en plus de
développer toute une stratégie pour verdir ses investissements, nous demande de
travailler à aider des organisations qui sont, dans leur portefeuille
philanthropique, à intégrer des critères de développement durable, des contrats
avec le ministère du Tourisme, qui a lancé un premier plan d'action en tourisme
durable l'an dernier et également qui a travaillé à l'intégration de critères
écoresponsables dans des programmes d'infrastructures en tourisme, qui
n'intégraient pas, en fait, là... Qui ne devraient pas, en principe, intégrer
de critères de développement durable. Donc, il y a des avancées intéressantes.
Pour l'exercice aujourd'hui, on a fait un
mémoire qui est un peu plus complet, qui touche à différents aspects, en fait,
là, bien, en fait, de la stratégie. Par contre, on va, pour le bien de
l'exercice, en dix minutes, là, on va «wrapper» autour peut-être, là, de
l'orientation un, qui est de faire, en fait, du Québec un pôle en économie verte.
Pourquoi on veut mettre l'accent, en fait, sur cet aspect-là de notre côté,
c'est quand on a travaillé, nous, en collaboration avec le ministère de
l'Économie dans les cinq dernières années à un projet qui s'appelle le Fonds
Écoleader et qui vise à aider les entreprises québécoises à intégrer des
pratiques écoresponsables des technologies propres. Je tiens à en parler
aujourd'hui parce que l'initiative est mentionnée dans le mémoire. En fait,
dans le projet de stratégie de développement durable, il est référé en exemple.
Et c'est une initiative qui émerge, en fait, de la stratégie gouvernementale de
développement durable 2015-2020. Donc, lorsque je parlais tantôt de
l'impact de cette stratégie-là, il y a un impact, bien entendu, sur les
ministères et organismes, mais il y a un effet levier aussi sur la société
civile. Il y a des mesures qui amènent à des avancées au niveau de la société
civile. Cette mesure-là, du Fonds Écoleader, elle est importante parce qu'elle
a joué un rôle clé pour aider les entreprises québécoises à intégrer des
pratiques écoresponsables dans les dernières années.
Le défi d'un entrepreneur qui veut
intégrer le développement durable aujourd'hui. Puis les entrepreneurs qui
veulent le faire, il y en a de plus en plus. Les entrepreneurs vivent dans le
même monde que nous, voient la crise climatique, la crise de la biodiversité,
on parle de transition verte. On parle de dix ans, en fait. On parle que les
dix prochaines années vont être importantes, en fait, pour faire la transition.
On veut... les entrepreneurs le reçoivent, ce message-là. Et le un niveau de
sensibilisation, il augmente.
En parallèle, on voit que l'étau se
resserre autour des entrepreneurs aussi. L'investissement responsable est en
croissance à chaque année. On a des grands donneurs d'ordres qui ont développé
des politiques d'approvisionnement responsable. On a également que ce soient
des employés, en fait, de la main-d'oeuvre, la main-d'oeuvre qui arrive, on a
une pénurie de main-d'oeuvre et donc on a des jeunes employés qui arrivent sur
le marché du travail, qui veulent partager des valeurs avec leurs employeurs,
puis des pressions de la clientèle. Un étau qui se resserre. Pourtant, le tissu
entrepreneurial au Québec est composé à 88 % d'entreprises de moins de 20 employés...
M. Girard (Nicolas) : ...donc
des petites entreprises. Et donc là on a affaire à des chefs d'orchestre qui
doivent maîtriser un paquet d'enjeux, et là on leur demande de faire du
développement durable. Il y a la conscience, mais comment on les amène à se
mettre en action? Lorsqu'on leur pose la question, souvent le message... la
réponse qu'on a... Il y a plusieurs sondages qui nous amènent... tu sais, qui
nous ont amené aussi cette information-là. Les entrepreneurs nous disent qu'ils
manquent de temps, manquent de ressources puis manquent d'expertise pour se
mettre en action. Donc, il faut leur donner un coup de main.
La stratégie du Fonds Écoleader, en fait,
c'est trois grands chantiers qu'on a mis en place pour aider les entrepreneurs
à se mettre en action. Le premier, c'est une plateforme Web qui répertorie les
programmes de financement, les experts... l'expertise qu'il y a au Québec, il y
a plus de 450 experts qui peuvent aider les entreprises à se mettre en
action. Des exemples d'entreprises qui sont... qui ont implanté des pratiques
écoresponsables, des fiches techniques pour vulgariser les technologies
propres.
Mais on le sait, cette plateforme-là, ce
n'est pas suffisant, tu sais, pour créer le passage à l'action. Tu sais, peu
importe l'outil, c'est un moyen plus passif. Donc, pour s'assurer vraiment que
ces outils-là soient utilisés puis qu'il y ait de l'impact, le deuxième grand
chantier qu'on a mis en place, c'est la création d'un réseau d'agents qui est
présent dans les 18... dans les 17 régions du Québec. On en a un aux Îles
de la Madeleine, c'est un peu là, la déformation. Donc, on a 18 agents et
un peu plus sur le territoire, on en a deux dans certaines régions, qui
agissent comme développeur d'affaires et qui aident les entrepreneurs à
identifier les bonnes sources de... les sources de financement, les experts qui
peuvent les aider à se mettre en action.
La troisième grande stratégie, c'est un
programme de financement qui permet aux entreprises d'embaucher un expert pour
avoir un diagnostic, construire un plan d'action, avoir de l'accompagnement
pour implanter des pratiques écoresponsables ou se préparer, en fait, à avoir
une étude préalable à l'intégration de technologies propres. Parce que, du jour
au lendemain, je peux, comme propriétaire d'entreprises, dire : Bien, je
veux m'installer un mur solaire. Est-ce que c'est la bonne technologie, le bon
contexte? Ça coûte combien? C'est quoi, la période de retour sur
investissement? C'est ce que les entreprises... c'est ce que les entrepreneurs
se posent comme question. Et, sans études, on est devant de l'inertie.
Donc, on a... on s'est lancé, dans les
dernières années, vraiment pour aider les entrepreneurs. Et cette stratégie-là,
donc, nous a permis de financer plus de 800 projets dans les cinq
dernières années, 1 205 entreprises soutenues, mais plus de
50 000, en fait, qui ont été rejointes, là, d'une part ou d'autres, par le
réseau d'agents, les stratégies de communication qu'on avait, puis plus de
20 000 qu'on a enregistrées dans un CRM, donc qu'on a accompagnées, avec
qui on a une relation d'affaires. Donc, il y a une volonté de la part... puis
on le sent, que le timing est bon. Donc, que cette orientation-là de faire du
Québec un pôle en économie verte soit présente dans la stratégie, on trouve ça
judicieux, et je crois qu'au niveau du timing c'est un bon moment pour
renchérir sur ce message-là.
Les retombées, on a des retombées
intéressantes, là. Juste, je vous en parlais tout à l'heure, là, il y a des
retombées à différents égards d'une mesure comme ça, puis ça démontre un peu
l'importance de l'économie verte au Québec. Au niveau des entreprises, on
constate que les entreprises qui travaillent à intégrer des pratiques
écoresponsables vont chercher des gains en économies de coûts beaucoup, vont
développer souvent des nouvelles opportunités de marché. Donc, développement
durable, ça peut être payant, c'est intéressant, ça peut être rentable pour les
entreprises.
Pour l'économie du Québec, bien, on a des
entreprises qui évaluent l'opportunité d'intégrer des technologies propres qui
prévoient des projets d'investissements dans les prochaines années puis qui ont
investi aussi... Parce que, lorsqu'on offre une aide financière avec le Fonds
Écoleader, on paie un expert, mais les entreprises ont, après ça, des dépenses
en équipements, et d'autres honoraires, et autres, donc on est des leviers
financiers. Puis surtout, on a aussi contribué pour près de 30 millions à
l'écosystème d'expertise en développement durable au Québec, donc des gens qui
travaillent en développement durable, qui aident des entreprises, donc, dans
les dernières années.
• (15 heures) •
Des retombées environnementales aussi qui
sont intéressantes. On commence... On a un peu moins, on est rendu à
350 projets de terminés sur les 800, mais déjà on voit... on sait qu'on a
des retombées vraiment, vraiment intéressantes sur le plan environnemental, là,
vous les avez, là, qui sont projetés, là, qui sont là, donc qui sont donc un
levier vraiment important de ce côté-là.
Je voulais parler du Fonds Écoleader
aujourd'hui parce qu'il est là, on veut faire du pôle... on veut faire, en
fait, du Québec un pôle en économie verte. C'est important de lancer le
message. On arrive d'une période de transition où la première phase du Fonds Écoleader
est terminée. On doit... on veut se lancer... on se lance... On veut se lancer
dans une deuxième phase. On est en train de se préparer à se lancer dans une
deuxième phase. Donc, c'est important de répéter le message, là, vraiment que
le Fonds Écoleader est une mesure extrêmement importante pour faire du Québec
un pôle en économie verte.
Au niveau des... Il me reste
30 secondes, là. Plus largement, au niveau, peut-être, du... si je veux
peut-être rajouter quelques messages au niveau de la stratégie gouvernementale.
Elle est ambitieuse...
15 h (version non révisée)
M. Girard (Nicolas) : ...parce
qu'elle couvre très large. Si on veut la rendre plus efficiente et efficace, je
pense que ce qu'il manque, et ce qui va être important de faire dans les
prochaines années, du financement. On n'a jamais financé aucune mesure, aucune
stratégie en développement durable au Québec. D'avoir du financement... Parce
qu'il y a des mesures... on comprend qu'il y a certaines mesures qui sont
financées par des plans de certains ministères et d'autres, il y a des mesures
qui sont... et qui tombent entre deux craques. D'avoir du financement pour
mettre en place cette stratégie-là, ce serait important, d'avoir les ressources
nécessaires, des objectifs plus clairs, cibles et indicateurs. Moi, je pense
que c'est les ingrédients. Si... le tour général, il serait important d'ajouter
à la stratégie pour s'assurer qu'elle atteigne ses objectifs.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup pour votre présentation. J'invite maintenant pour débuter la période
de questions avec le député de Masson... Oh! le député de Côte-du-Sud.
M. Rivest : Oui, bonjour,
merci beaucoup. Je me réjouis de vous rencontrer parce que dans mon ancienne
vie, je fais partie d'un organisme d'économie sociale qui a profité du fonds...
qui a mis sur pied un plan d'action sur le développement durable et qui a
réalisé une stratégie complète de mise sur pied, là, de nouvelles pratiques
écoresponsables. J'aurais 1000 choses à vous partager, peut-être tout à l'heure,
pour parler vraiment de cette stratégie-là puis du fonds Écoleader. Mais j'aimerais
ça peut-être justement au bénéfice de tout le monde ici, de la Commission, d'avoir
peut-être un éventail... parce que vous parlez beaucoup de PME, puis c'est
parfait. On était un organisme d'économie sociale. On parle aussi peut-être des
autochtones. Pouvez-vous nous faire une catégorisation un peu du type d'entreprises
qui sont sollicitées pour faire des projets à l'intérieur des actifs puis du
fonds Écoleader?
M. Girard (Nicolas) : Je vais
y aller de mémoire, là, mais dans les grandes lignes, il y a des éléments
importants dans ce que vous mentionnez. La clientèle première qui vient vers
nous, vers le fonds Écoleader, à 33 %, là, c'est des entreprises du
secteur de la fabrication dans le secteur manufacturier. On s'entend que l'entreprise
manufacturière, qui ne fait pas de développement... en tout cas, qui ne s'intéresse
pas aux enjeux de développement durable aujourd'hui, dans dix ans, ça va
être... Ça risque d'être plus difficile. Dans le secteur manufacturier, pratiques
écoresponsables égalent souvent amélioration des processus, amélioration de l'efficacité
énergétique. Qu'est-ce qu'on fait? C'est réduire les extrants de production. Qu'est-ce
qu'on fait avec les extrants de production, en fait? Donc il y a des gains
importants.
Au niveau de l'économie sociale, parce qu'on
cherche à créer de l'inclusivité, et on a eu ce souci-là dès le départ au
niveau du fonds Écoleader, on estime qu'il y a 11 % des entreprises qui
viennent vers le fonds Écoleader qui sont des entreprises d'économie sociale.
Ça, on en est bien fiers. Donc, il y a eu une ouverture puis un souci d'avoir
des critères, tu sais, qui permettaient dès le départ d'accueillir des
entreprises d'économie sociale.
Au niveau des communautés autochtones, c'est
un défi puis ça a toujours été un défi parce que l'enjeu, c'est d'aller
chercher les entreprises. Et on travaille vraiment à adapter les critères. On a
des projets dans le Nord du Québec, en communauté autochtone. Je n'ai pas le
pourcentage. C'est sûr qu'il est modeste, mais il y a toujours un défi d'adapter
les critères des programmes gouvernementaux pour accueillir en fait des projets
des communautés autochtones. Puis le tissu entrepreneurial est différent et
tout, mais on y travaille. On a déjà fait des modifications et même dans la
relance, c'est des choses qu'on aimerait bien améliorer aussi.
M. Rivest : ...vous avez
aussi mentionné l'idée d'être un chef d'orchestre à l'intérieur des projets que
vous faites, donc ça me réjouit de savoir qu'on fait face à la musique
ensemble, en se disant que lorsqu'on met sur pied cette stratégie-là, puis l'arrêt
comme entreprise d'être financé pour mettre sur pied des nouvelles stratégies
de développement durable, il y a certains freins qui se mettent... qui peuvent
mettre quelques grains de sable dans l'engrenage. Est-ce que vous pouvez me
parler un petit peu de votre expérience justement avec les entreprises, de voir
quels freins il peut y avoir à l'intérieur, soit de la promotion finalement de
la stratégie ou du plan de développement durable, des diagnostics qui sont
faits de rassembler les conseils d'administration, de rassembler l'ensemble de
l'équipe avec cette vision-là? Quels sont les principaux freins qu'on peut
retrouver à la mise sur pied de...
M. Girard (Nicolas) : Le
principal frein, c'est le manque d'information. On s'entend que les
entreprises... l'enjeu de la compétitivité est extrêmement important aussi. Ça
reste un élément qui est majeur. Donc, puis là ce qu'on dit notamment, par
exemple, on parlait des technologies propres tout à l'heure, il y a une volonté
de vouloir bouger, mais c'est quoi le retour sur investissement? Est-ce que ça
vaut la peine, et tout? Donc il y a des enjeux... les enjeux financiers sont
toujours importants. Il y a la question des débouchés, même si au niveau des
débouchés, on sait que la clientèle demande de plus en plus en fait des
produits écoresponsables...
M. Girard (Nicolas) : ...par
rapport à ça, de s'assurer d'avoir des débouchés, je pense que c'est important.
D'ailleurs, au niveau de la stratégie gouvernementale, on parle des marchés, de
l'accès aux marchés publics. C'est un élément qui est majeur, majeur, majeur.
Nous, on en entend parler, ça fait depuis des années, ça prend des incitatifs
pour les entreprises qui vont implanter des pratiques écoresponsables. Puis je
pense que l'État, un gouvernement du Québec, a un devoir d'exemplarité. Les
cibles qu'on a atteintes jusqu'à maintenant ne sont pas suffisantes, puis là je
pense qu'elles sont de 15 % en ce moment dans la stratégie. Donc, c'est
sûr qu'idéalement, pour aider les entreprises qui veulent, tu sais... je pense,
qui font... qui implantent parce que c'est écoresponsable, d'augmenter cette
cible-là, de jouer un rôle... Que l'État joue un rôle en matière d'exemplarité
au niveau des marchés publics, ça serait important.
Mais, au niveau des défis, c'est
toujours... sinon, c'est toujours d'avoir l'air d'avoir les ressources
nécessaires, l'engagement de la haute direction qui est là, le profil qu'on a.
C'est sûr que, quand on a des projets en PME, c'est assez rare qu'on ne voie
pas la haute direction, qui est impliquée dès le départ. Mais c'est sûr que le
plan de match qui est déposé, s'il n'est pas rentable, ça devient difficile.
Puis comment il peut être rentable? Est-ce que c'est en matière de
positionnement pour l'entreprise, d'amélioration de son offre de services ou
encore réduction de coûts? Mais c'est vraiment... La question économique est...
elle reste... elle demeure importante quand même.
M. Rivest : Merci. Peut-être
pour terminer, pouvez-vous nous dire qu'est-ce que vous pensez... tu sais, là,
on parle du Fonds Écoleader, mais, dans la stratégie, actuellement, qui traite
particulièrement d'une mise sur pied de cette stratégie-là, il y a des
objectifs à l'intérieur des propres ministères. Mais, au niveau des PME, pour
terminer, pouvez-vous me dire si vous voyez d'autres leviers, qu'ils soient
techniques ou financiers, que le gouvernement du Québec pourrait mettre sur
pied pour améliorer l'efficacité des PME?
M. Girard (Nicolas) : Il y a
beaucoup... Comme je le mentionnais tout à l'heure, il y a un écosystème pour
venir en aide aux entreprises au Québec. Le Fonds... je vous parlais, avec le
Fonds Écoleader, d'un répertoire de programmes de financement, répertoire
d'experts. Il y a beaucoup d'expertise, il y a de l'aide financière. Ce que le
Fonds Écoleader a amené dans l'écosystème, ce n'est pas un... je n'aime pas
utiliser le mot guichet unique, mais, tu sais, on a travaillé ce projet-là depuis
le départ en partenariat. On est 18 partenaires. On a Écotech Québec qui
travaille avec nous pour nous aider à vulgariser les technologies propres, on a
un partenaire qui nous aide à travailler avec le réseau régional, le Centre
québécois développement durable, puis 18 partenaires régionaux. Et ce
qu'on... On a développé une solution qui amène les entreprises dans la boucle à
contribuer à l'économie verte. Il y a 77 % des entreprises qui sont venues
vers nous, vers le Fonds Écoleader, qui implantaient des pratiques
écoresponsables pour la première fois lorsqu'ils sont venus au programme de
financement. Ça fait que ce qui manque dans l'écosystème, c'est ça, c'est cette
rampe d'accès, parce qu'après ça, du financement, il y en a pour... tu sais,
pour des projets d'investissements en technologies propres et autres. Tu sais,
comme par exemple, chez, anciennement, Transition énergétique Québec,
maintenant, je pense, au ministère de l'Environnement, il y a des programmes
pour investir dans les... Investissement Québec avec Compétivert offre du
financement aussi. Mais il faut amener les entreprises à se rendre à ces
programmes d'investissements là, c'est pour ça qu'on voulait vraiment rappeler
l'importance du Fonds Écoleader aujourd'hui.
M. Rivest : Merci à tous les
deux.
Le Président (M. Jacques) : Merci.
Je cède maintenant la parole au député de Masson.
M. Lemay : Merci, M. le
Président. Merci d'être avec nous aujourd'hui. Alors, vous avez mentionné tout
à l'heure, là, l'importance du financement, d'avoir des cibles, les
indicateurs, puis, à la page neuf de votre mémoire, justement, dans le cadre de
l'orientation 5, on parle des objectifs 5.3, 5.4, là, de la SGDD, là,
qui est d'«investir de façon durable au profit des Québécois» et d'«utiliser
les marchés publics comme levier de croissance durable».
Moi, j'aimerais savoir, là, considérant
que, dans le SGDD, là, les pistes d'action envisagées, là, c'est d'«appuyer
efficacement le développement économique du Québec selon les principes de la
finance durable»... bon, tu sais, on mise sur trois leviers, donc
l'investissement, finance durable, les obligations vertes puis le soutien
financier durable. Puis on a aussi le chantier trois, qui est justement
d'établir, là, une feuille de route pour développer le nouveau système de la
finance durable au Québec et la pousser sur la scène internationale. Donc,
considérant ça, moi, ma question, ça serait de savoir avec vous, là, si...
quels seraient, selon vous, les critères, là, écoresponsables à prioriser pour
accélérer le verdissement des modèles d'affaires dans nos PME, puis ça, bien,
tu sais, tout en minimisant aussi les impacts économiques sur les activités de
ces PME-là? Ça fait qu'est-ce que vous pouvez nous entretenir un peu sur ce
sujet?
• (15 h 10) •
M. Girard (Nicolas) : Sur
les... Excusez-moi, les indicateurs?
M. Lemay : Alors, ça
serait... Dans le fond, ça serait : Selon vous, c'est quoi, les critères
écoresponsables qu'on devrait prioriser pour accélérer le verdissement, mais,
en même temps, on veut aussi minimiser les impacts économiques sur les
activités de nos PME?
M. Girard (Nicolas) : Donc,
l'idée, c'est de : Quels critères d'écoresponsabilité on peut... on
pourrait fixer? Donc, l'idée, c'est d'intégrer les critères d'écoresponsabilité
pour obtenir du financement, ce que je comprends...
M. Girard (Nicolas) : ...c'est
bien votre question, juste être sûr?
M. Lemay : Oui. Oui,
exactement, parce que c'est ça que vous mentionnez à la page neuf de votre
mémoire, vous dites que vous... comment... Je vous cite : Nous commençons
à voir apparaître des notions d'écoresponsabilité dans certains programmes
gouvernementaux... Ça fait que j'aimerais vous entendre un peu sur, selon vous,
ce serait quoi?
M. Girard (Nicolas) : O.K.
Mme Caron (Geneviève) : ...
M. Girard (Nicolas) : Oui,
non, non, mais c'est ça. Bien, nous, ce qu'on a vu, par exemple, avec... puis
je pense que c'est une initiative, puis c'est des initiatives isolées qui
commencent à émerger, là, des différents ministères. Nous, on l'a fait, par
exemple, avec le ministère du Tourisme, par exemple, je peux vous donner
l'exemple, en fait, là, de... donc, de... Avec le ministère du Tourisme, on
avait un programme d'aide à la relance de l'industrie touristique qui était un
programme d'infrastructures qui devait... L'idée, c'était vraiment de donner un
coup de pouce à l'industrie touristique après la COVID, post-COVID. Puis là,
bien, le ministère a décidé d'offrir une bonification de 10 % pour des projets
qui allaient intégrer, en fait, des éléments de développement durable.
Maintenant, c'est un défi, toujours, est-ce que... Et là, comment on le fait?
Est-ce qu'on le met en écoconditionnalité, ou est-ce qu'on le met en... un peu
en écoresponsabilité à intégrer des critères écoresponsables dans les
programmes? Je pense que les deux outils sont différents, l'écoresponsabilité,
donc, l'idée, c'est... Et là, avec le ministère du Tourisme, on était vraiment
au niveau d'une bonification, donc on y allait par la positive, donc, d'offrir,
en fait, un critère. Donc, là, les critères, c'est est-ce que, par exemple...
Donc, on regardait la performance environnementale dans un... comme ça, donc
des... Donc, le choix des matériaux, quelles étaient les solutions d'infrastructure
choisies, les choix énergétiques, et tout, donc des critères qui sont là.
Maintenant, à l'échelle des programmes en général, donc c'est... je pense que
c'est de voir un peu quels sont les critères, je n'ai pas... on n'a pas de
réflexion, là, sur tel, tel, tel critère doit absolument être dans les
programmes, dans tous les programmes, là, ça, je n'ai pas de réponse pour ça,
là.
Mme Caron (Geneviève) : Il
faut peut-être aussi juste casser le mythe comme quoi avoir des critères
d'écoresponsabilité, ça peut nuire à la rentabilité. Nous, c'est ce qu'on
observe beaucoup dans le Fonds Écoleader, c'est qu'il y a une augmentation de
la rentabilité, de la profitabilité, quand on intègre des critères de
développement durable. Dans «développement durable», il y a développement, là.
M. Lemay : Merci. Mme la
députée pourrait poursuivre sur un autre sujet.
Le Président (M. Jacques) : Merci,
monsieur...
M. Lemay : ...
Le Président (M. Jacques) : M.
le député de Masson, c'est terminé?
M. Lemay : Oui.
Le Président (M. Jacques) : Oui?
Donc, je cède la parole à Mme la députée d'Argenteuil.
Mme Grondin : M. Girard,
Mme Caron, merci. J'entends des... J'aime beaucoup ce que je viens
d'entendre en termes de démonstration qu'en intégrant des critères de
développement durable, on atteint certains objectifs de rentabilité, c'est de
la musique à mes oreilles parce que c'est du concret, c'est... Bon.
M. Girard, merci d'avoir rappelé le chemin parcouru du FAQDD, je trouve ça
important parce que je trouve que c'est un indicateur du cheminement qu'on a
fait comme société dans nos besoins, notamment de leviers économiques, ça fait
que je trouve ça important parce que, quand on se rappelle, moi, j'ai déjà
demandé de l'aide du FAQDD il y a très longtemps sur la question de l'eau. Puis
je voudrais revenir un peu... parce que vous avez mis l'accent, puis je
comprends, en 10 minutes, on ne peut pas tout couvrir, puis je trouve ça
très intéressant toute la question du Fonds Écoleader, là, puis le temps qu'on
a mis sur... le temps qu'on doit mettre sur l'accompagnement, c'est un mot que
je retiens beaucoup, qui est fondamental au niveau de nos entreprises,
notamment nos petites PME. Ma question s'en va sur l'orientation deux, nature,
est-ce que... en fait, comment le FAQDD pourrait contribuer aux objectifs qui
sont identifiés dans l'orientation deux en matière d'accès, de protection à la
nature et à l'eau aussi?
M. Girard (Nicolas) : Oui.
Pour l'instant, en fait, on a, nous, entamé des... Il y a des programmes qui
sont récents, là, qu'on a mis en place, qui s'inscrivent un peu dans la lutte
contre le déficit nature, en fait, on sait qu'il y a un enjeu, hein, on protège
ce qu'on connaît. Donc, un jeune qui grandit à Montréal, qui ne sort pas de
l'île de Montréal avant 18, 20 ans, ne développe pas nécessairement une
sensibilité envers la nature et il ne développe pas cette... en fait, ce
besoin-là ou cette sensibilité-là à vouloir protéger des écosystèmes. Donc,
on...
M. Girard (Nicolas) : ...un
programme qu'on a lancé l'an dernier en collaboration avec le ministère de
l'Environnement qui s'appelle Destination nature, qui vise à amener des jeunes,
donc, et là on n'est pas dans les jeunes du primaire, mais secondaire, collégial
et universitaire, dans les espaces naturels, donc, pour justement être en
contact avec la nature. On sait qu'il y a des impacts. Oui, on développe la
sensibilité, mais je pense qu'il y a plein d'études qui démontrent les
bienfaits de la nature sur la santé, autant psychologique que physique. Donc,
c'est un programme qui est très intéressant aussi. On a aussi une collaboration
avec le... c'était le ministère des Forêts, maintenant c'est le ministère de
l'Environnement... atelier faunique qui est un peu complémentaire, où là on
travaille avec la SEPAQ puis le ministère des Forêts à amener justement les
jeunes vers les ateliers pédagogiques de la SEPAQ, là, on donne un... Donc, on
fait le lien, puis c'est beaucoup ça qu'on fait à la FAQDD, on met les gens qui
ont l'expertise en lien. Donc, il y a de l'expertise à la SEPAQ, puis ce qu'on
veut, c'est amener les jeunes qui... donc, qui veulent avoir ce contact-là à la
nature, ou on veut le provoquer, ce lien... donc on les amène vers les
activités pédagogiques, vers les services qui sont déjà existants.
Mme Grondin : Il y a déjà
beaucoup de travail à faire juste à ce niveau-là. Donc, ça serait notamment là
où vous voyez la contribution la plus efficiente en matière de nature de la
part du FAQDD?
M. Girard (Nicolas) : Absolument.
Puis je pense qu'on est là. Il y a des classes nature, tu sais, là, il y a
plein de choses... Je pense qu'il y a des choses qui peuvent se faire au
Québec, là, qui sont... tu sais, où on pourrait être un peu plus innovants, notamment
sur l'enseignement extérieur, des choses comme ça. Donc, c'est des thématiques,
nous, qui nous intéressent. Mais au niveau de la protection de la nature, on
est moins dans... il y a moins d'initiatives récentes, là, qui nous amènent à
intervenir dans ces créneaux-là.
Mme Grondin : Puis, si jamais
on a plein d'idées, on peut vous approcher.
M. Girard (Nicolas) : Oui,
absolument.
Mme Grondin : Parfait. Merci
beaucoup.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup. Je cède maintenant la parole à la porte-parole de l'opposition
officielle, à la députée de Notre-Dame-de-Grâce, pour son intervention.
Mme McGraw : Merci, M. le
Président. Et merci d'être avec nous aujourd'hui. Merci pour la présentation et
le mémoire. Donc, vous parlez de... Donc, le premier point des recommandations,
vous parlez de consacrer plus de budget et ressources humaines, nécessairement,
à la pleine réalisation de la stratégie. Quelle serait... Donc, est-ce que vous
pouvez donner plus de détails sur qu'est-ce que vous envisagez ou qu'est-ce que
vous proposez?
M. Girard (Nicolas) : En
fait, on n'a pas fait d'estimations budgétaires ou autre. Par contre, le
constat qu'on a, c'est que la stratégie roule depuis... Puis, comme je vous
dis, je pense que les dernières stratégies de développement durable ont amené
des résultats quand même intéressants, mais le constat est que, souvent, il n'y
a pas de financement, si on ne rentre pas dans un autre plan gouvernemental,
donc, il n'y a pas de financement. Il y a des mesures qui sont dures à mettre
en place parce qu'elles tombent entre deux plans gouvernementaux, entre la
mission de ministères et autre. Donc, de s'assurer qu'il y a un financement
pour... un premier financement pour mettre en œuvre la stratégie de
développement durable. Depuis deux... Ça, ça fait 17 ans, que la Loi sur
le développement durable a été mise en place. Il n'y a jamais eu de financement
pour la mettre en œuvre. Est-ce qu'on ne pourrait pas, pour la première fois,
mettre un peu un peu d'argent pour s'assurer que sa mise en application soit
plus rapide, déjà? Quand je parle des ressources aussi, c'est bien entendu...
c'est sûr que c'est la responsabilité de la Loi sur le développement durable,
c'est une responsabilité partagée entre les ministères et organismes, puis
chacun doit être mobilisé, doit être engagé. On a quand même un... On travaille
quand même étroitement avec des ministères. On voit, la pénurie de main-d'œuvre
touche tous les ministères, et autres. Je sais que le Bureau de coordination de
développement durable travaille, qui est à l'intérieur du ministère de
l'Environnement. Ce n'est pas une très grosse équipe de travail non plus. Donc,
il y a quand même des ressources limitées pour la mise en œuvre de cette
politique-là.
• (15 h 20) •
Mme McGraw : Au niveau des
ressources humaines... Donc là, vous avez parlé du groupe qui travaille au sein
du ministère de l'Environnement sur le développement... pour la stratégie,
coordination, etc. C'est le ministère de l'Environnement. On a eu des groupes
qui ont parlé un peu de plus collaboration à haut niveau interministériel,
parce qu'on sait très bien que le développement durable, ce n'est pas juste
l'environnement. Donc, est-ce que vous avez des recommandations ou des observations
à partager par rapport à la gouvernance?
M. Girard (Nicolas) : Oui.
C'est sûr que, par rapport à la gouvernance, plus on est capables de remonter
le développement durable dans les hautes instances, plus on va avoir des
résultats avec la stratégie, bien entendu, Moi, c'est assurément une
recommandation, là, que je vois pertinente, puis complémentaire avec celle que
je parlais au niveau des ressources, parce que, malgré tout, ça prend une
équipe de base qui la pousse, la stratégie, qui la mesure, qui...
M. Girard (Nicolas) : ...donc
ces deux recommandations-là peuvent s'emboîter l'une dans l'autre, là, assez
facilement.
Mme McGraw : Au niveau du
Fonds Écoleader, donc, vous avez parlé d'un véritable électrochoc, c'est le mot
qu'on utilise dans le mémoire, quand il y a eu une mise sur pause et la fin de
l'enveloppe du programme. Donc, ça, je n'étais pas au courant. Donc, est-ce que
c'est le cas présentement, qu'il n'y a plus le financement? Et vous étiez le
coordonnateur national, c'est-à-dire votre fonds a été le coordonnateur. Est-ce
que vous juste nous parler un peu plus de comment ça s'est passé, quand est-ce
que ça s'est passé? Parce que, là, vous recommandez, numéro deux, c'est
pérenniser le Fonds Écoleader, et que c'est un incontournable.
M. Girard (Nicolas) : Oui. En
fait, le Fonds Écoleader, c'est une mesure qui a été lancée six mois avant la
COVID. Donc, dans les deux premières années, là, on a roulé un peu en montagnes
russes avec des... quand il y avait des mesures de confinement, il y avait des
ralentissements, lorsqu'on on se déconfinait, on recevait des demandes, mais il
y avait des entreprises quand même qui étaient là, qui étaient au rendez-vous.
On en avait à peu près 200 demandes par année pendant les deux premières années,
vraiment, d'opération, du Fonds Écoleader. Lorsqu'on a vu un peu les mesures
sanitaires, puis la crise de la COIVD qui prenait... qui s'estompait, là, on a
eu un véritable raz de marée. Entre septembre 2021 puis mai 2022, on vous a mis
la courbe, là, du nombre de dépôts de projets, là. Écoutez, ça a été
exponentiel. On a reçu 700 demandes en six mois, alors qu'on en avait reçu
400 en deux ans. Les entreprises sont prêtes à passer à l'action. Il y en a de
plus en plus, des entreprises qui veulent passer à l'action. Là, on est juste
plus capables de les aider. Et donc c'est pour ça qu'on voulait quand même le
mentionner aujourd'hui. Je pense que c'est important. On est à une période de
renouvellement. Puis on n'est pas en train de dire que ça ne sera pas renouvelé,
mais la phase 1 du Fonds Écoleader est presque... se terminée
techniquement au 31 mars prochain.
Mme McGraw : Parfait. Bien,
pas parfait, mais je vous remercie d'avoir clarifié. Mais votre fonds, est-ce
que c'est pérennisé?
M. Girard (Nicolas) : Non. En
fait, le FAQDD a été mis en place par le gouvernement du Québec en 2000. Donc,
au départ, c'était un fonds de 45 millions, mais c'était un fonds de
subventions, pas un fonds de dotation. Donc, il y a un plan stratégique qui a
été mis en place dans les premières années. Puis, avec le temps, on a développé
davantage un modèle où on gère... on donne un coup de main, en fait, en gestion
de programme des partenaires gouvernementaux, publics, maintenant un peu privés
aussi. Donc, l'idée, c'est l'espèce de robe de neutralité qu'il y avait en...
qui est nécessaire en gestion de programme, gestion de fonds public qu'on a
développé, qui nous permet de... Donc, c'est du financement par mandat. Il n'y
a pas de financement de base, il n'y a pas de finance statutaire non plus, là,
rien de ce type-là.
Mme McGraw : Mais vous
recommandez de pérenniser le Fonds Écoleader, mais pas nécessairement votre
fonds.
M. Girard (Nicolas) : Ah!
puis ce n'est pas...
Mme McGraw : Pour avoir plus
d'indépendance ou de...
M. Girard (Nicolas) : Oui.
Bien, l'idée, c'était pérenniser le Fonds Écoleader, donc de s'assurer qu'au
moins on ait une stabilité de cinq ans pour le Fonds Écoleader. Nous, c'est ce
qu'on demande, là. Pour clarifier la demande, là, on a besoin d'avoir un cinq
ans. C'est la décennie où... Tu sais, on a dit on a dix ans pour... Il faut
donner un coup, il faut que la transition se passe, il faut que les... Les
entreprises sont là. On ne peut pas juste dire : O.K., on arrête, on fait
d'autres choses à côté. La structure est en place, il y a des partenaires, il y
a 20 partenaires autour. On a développé des tentacules partout en région
parce que les agents ont développé des comités de pilotage en région où ils
sont connectés sur toutes les organisations de développement économique local.
Donc, tout est là, toute la structure est là, donc il faut en profiter, là.
Mme McGraw : Avant que je
passe à mon collègue, est-ce qu'il y a... parce que j'ai encore du temps, mais
je n'ai pas besoin de tout utiliser le temps. Mais est-ce que, selon vous, s'il
y avait... évidemment, il y a cinq recommandations, mais s'il y avait... si
vous nous laisser avec un mot ou une recommandation, ou quelque chose qui, en
tout cas, que vous pensez qui est vraiment prioritaire, vous avez un peu de
temps, là, donc...
M. Girard (Nicolas) : J'ai
parlé beaucoup du Fonds Écoleader. Moi, je reviendrais sur la question du
financement, financement, puis objectifs et cibles et indicateurs plus clairs.
Donc, ça, je pense que c'est important, où est-ce qu'on veut aller.
Mme McGraw : Merci.
Le Président (M. Jacques) : Merci,
Mme la députée. Je cède maintenant la parole au député de la deuxième
opposition, députée de Taschereau.
M. Grandmont : Merci
beaucoup, M. le Président. J'ai combien de temps?
Le Président (M. Jacques) : Quatre
minutes, et un peu plus.
M. Grandmont : Parfait.
Merci. Monsieur Girard, Madame Caron, merci beaucoup d'être là aujourd'hui pour
cet important exercice. Je connais bien moi aussi le Fonds Écoleader, à
l'instar de certains de mes collègues...
M. Grandmont : ...je comprends
aussi que vous avez une vision large sur le développement durable,
l'environnement en général aussi. C'est toujours quelque chose que j'ai
considéré une force chez vous. Ayant cette vision très, très large. Est-ce que
vous... À la lecture de la stratégie qui est proposée par le gouvernement,
est-ce que vous voyez... est ce qu'il y a des incohérences qui vous sautent aux
yeux, si vous en avez une, ou deux, ou trois, là, qui vous sautent vraiment aux
yeux, là?
M. Girard (Nicolas) : Des
incohérences qui me sautent aux yeux? Pas nécessairement. Je trouve qu'on
embrasse large. Les objectifs, les cibles sont... J'ai vu ce que ça a donné
dans le passé puis je vois qu'il y a une amélioration continue dans chacun des
ministères. Tu sais, il y a... Au niveau des incohérences, non, pas
nécessairement.
Il faut dire, par contre, qu'on a eu dix
jours pour se préparer pour la consultation. Donc, c'est sûr qu'on a... Est-ce
que c'est un travail exhaustif? Je ne peux pas dire que c'est un travail
exhaustif non plus de la politique. On a ciblé en fonction un peu de notre
prisme à nous, là, puis des secteurs dans lesquels on est intervenus dans les
dernières années, là, oui.
M. Grandmont : Je vais
peut-être aller plus précis sur un sujet que je connais un petit peu plus là,
mais vous parlez, dans votre recommandation numéro 3, de miser sur le
contact avec la nature. Vous estimez qu'il y a un déficit nature important dans
la population québécoise, chez les jeunes, chez les moins jeunes. Vous demandez
à ce qu'il y ait des actions concrètes pour lutter contre le déficit nature.
Vous en avez nommé tantôt quelques-uns qui nous amènent beaucoup à déplacer les
gens vers là où il y a cette présence de la nature, finalement. Aussi, vous
avez parlé aussi, là, de possibilité de donner des cours à l'extérieur.
En même temps, ce qu'on remarque sur le
terrain, c'est que les espaces naturels sont un peu pris d'assaut de toutes
sortes de manières. Est-ce que vous ne pensez pas que, par exemple, l'étalement
urbain, la multiplication des infrastructures autoroutières pourrait être une
incohérence, finalement, dans le cadre d'une stratégie gouvernementale qui
ferait la place au contact nature?
M. Girard (Nicolas) : Est-ce
qu'il y a une incohérence là? Écoutez, bonne question. C'est sûr que, pour ce
qui est des... dans les grands centres, l'enjeu, la proximité des espaces
naturels est importante. Puis je pense qu'on doit préserver des... en fait, on
doit préserver des.... pas des Îlots de chaleur, là, mais on doit préserver des
îlots boisés en secteur urbain, c'est extrêmement important. On parle
d'enseignement extérieur, ça ne nécessite pas nécessairement d'amener les
jeunes en nature aussi. Des fois, quand il y a des boisés tout proches, c'est
possible de le faire sans nécessairement avoir trop de transport.
Mais la question de garder nos villes, de
garder des espaces verts en milieu urbain, effectivement, de lutter contre
l'étalement urbain, ça, on s'entend que, comme organisation de travail en
développement durable depuis 20 ans, on comprend très bien les enjeux liés à
l'étalement urbain, puis c'est sûr que c'est une préoccupation, mais je n'ai pas
regardé la stratégie sous cet angle-là.
M. Grandmont : Parfait,
excellent. Vous avez parlé tantôt, puis j'étais bien content de la question de
ma collègue tantôt sur qu'est-ce que ça prendrait, dans le fonds, pour
améliorer au niveau de la gouvernance. Vous avez nommé... j'étais content que
vous nommiez, là, en fait, les mécanismes de suivi, tu sais, d'avoir un comité
de suivi, par exemple. En tout cas, j'aimerais ça que vous élaboriez un petit
peu là-dessus. Vous avez parlé d'objectifs, d'indicateurs. Peut-être juste
élaborer sur les bonnes pratiques de gouvernance pour être sûr que la
stratégie, dans le fond, là, on puisse la suivre dans le temps puis qu'on soit
sûrs qu'on atteint les objectifs qu'on se fixe aussi.
• (15 h 30) •
M. Girard (Nicolas) : Bien,
moi, je vais y aller de façon très simple, je pense que la Loi sur le
développement durable prévoit des mécanismes vraiment intéressants. Il y a une
commissaire au développement durable, ce n'est pas rien, ce n'est pas toutes
les stratégies... pas toutes les lois au Québec qu'il y a un commissaire... tu
sais, qui sont suivies par un commissaire. Donc, il y a un commissaire qui suit
à chaque année. Les ministères sont... doivent faire des plans d'action aux
cinq ans. Maintenant, la commissaire a besoin d'avoir une structure pour suivre
l'état d'avancement de la stratégie. Puis ça prend des objectifs, ça prend des
cibles puis ça prend des indicateurs, ce qui manque un peu dans la stratégie en
ce moment, mais je pense que la structure de base est là pour faire le suivi.
Maintenant, c'est sûr que, si on ramène
puis qu'il y a une structure de gouvernance qui fait en sorte que cet enjeu-là
de développement durable est pris en considération par un comité ministériel...
Puis là on sait qu'on a quand même un ministre de l'Environnement, tu sais, qui
en mène quand même beaucoup plus large qu'historiquement quand même, donc...
mais d'avoir des ministères forts autour de la table, bien, ça peut assurer,
justement, l'atterrissage, en fait, des principes de développement durable dans
l'ensemble des ministères puis dans le déploiement des politiques puis des
programmes, oui.
M. Grandmont : Merci.
Peut-être une petite dernière. Si je peux me le permettre, oui? Il y a beaucoup
de groupes qui nous ont parlé de mesures d'écofiscalité, d'écoconditionnalité.
Peut-être juste vous entendre là-dessus. C'est revenu vraiment...
15 h 30 (version non révisée)
M. Grandmont : ...vraiment,
vraiment souvent. Qu'est-ce que vous pensez, là, de ces principes qui
pourraient, selon ces groupes-là, être mis en place pour s'assurer, dans le
fond, que, bien, ce qui est autorisé par le gouvernement, ou encore, les mesures
qui sont mises en place soient toujours un peu forcées d'être assujetties,
finalement, au principe du développement durable?
M. Girard (Nicolas) : Oui,
bien, ça fait plusieurs années qu'on parle d'écoconditionnalité. On était loin
il y a 20 ans. On commence à, je pense... on commence à être dans... On est
dans une période où je pense qu'on peut commencer à en parler davantage. L'écoconditionnalité
est quand même, je pense... En fait, c'est deux leviers importants, c'est deux
leviers extrêmement importants. Je pense que la société civile est de plus en
plus prête, donc il suffit de voir... Mais il faut cibler quand même des
mesures... Puis là je n'ai pas des exemples en tête, mais si on met l'écoconditionnalité
dans tous les programmes, peut-être que ça peut poser des enjeux, mais
assurément que ça peut être utilisé davantage. Puis d'avoir des cibles, en
fait, à cet égard, ce serait intéressant dans la politique.
Pour l'écoresponsabilité, bien, on est
par... moi, je suis un petit peu, là... l'exemple que j'avais tout à l'heure...
on est par la positive. Ça, bien, je pense que c'est intéressant, puis ça peut
se multiplier. Maintenant, effectivement, je pense qu'on est mûrs pour faire un
petit tour de roue, un autre tour de roue de ce côté-là.
M. Grandmont : Puis, s'il y
en a un des deux qui serait, disons, à mettre en place plus facilement, plus
rapidement, selon vous?
M. Girard (Nicolas) : L'écoresponsabilité
est plus facile à mettre en place. L'écoconditionnalité est plus contraignante et
plus... va amener plus d'impacts aussi à court et moyen termes, assurément.
M. Grandmont : Merci.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup, M. le député. Merci pour votre contribution aux travaux de la
commission.
Compte tenu de l'heure, la commission
ajourne ses travaux à mardi le 7 février, à 9 h 45. Merci.
(Fin de la séance à 15 h 33)