(Onze heures vingt-sept minutes)
La
Présidente (Mme St-Pierre) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des transports et de
l'environnement reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la
salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission
est réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 102,
Loi visant principalement à renforcer l'application des lois en matière
d'environnement et de sécurité des barrages, à assurer une gestion responsable
des pesticides et à mettre en oeuvre certaines mesures du Plan pour une
économie verte 2030 concernant les véhicules zéro émission.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. M. Caron (Portneuf) est remplacé par M. Thouin
(Rousseau); M. Lamothe (Ungava) est remplacé
par Mme Hébert (Saint-François); M. Fortin (Pontiac) est remplacé par
M. Benjamin (Viau) et M. Arsenault (Îles-de-la-Madeleine) est
remplacé par M. Gaudreault (Jonquière).
Étude détaillée (suite)
La Présidente (Mme St-Pierre) : Lors
de l'ajournement de nos travaux, hier soir, le ministre venait de faire la
lecture de l'article 35 de la loi édictée à l'article 1 du projet de
loi. Est-ce qu'il y a des interventions relativement à cet article? Mme la
députée de Verdun.
Mme Melançon : Bien, on reprend
un peu là où on était hier. Simplement pour... afin qu'on puisse bien saisir,
là, à partir du moment où «le ministre peut, pour tout ou [en] partie d'un
projet assujetti à une autorisation en application
[...] modifier cette autorisation, refuser [...] renouveler, la suspendre, la
révoquer ou l'annuler», puis là il y a des cas, en quoi est-ce qu'il y a
une grosse différence avec l'article 34?
Mme Grignon (Karine) : Oui.
Karine Grignon, avocate au ministère de la Justice.
En fait, là, c'est vraiment des situations par
rapport à l'autorisation, une fois qu'elle est délivrée. Donc, le titulaire
doit respecter certaines obligations, que ce soit prévu à l'intérieur de
l'autorisation elle-même, ou par la loi, ou
les règlements qui s'appliquent. Donc, s'il y a une contravention à ces
obligations-là, c'est un motif pour intervenir sur l'autorisation qui a
été délivrée.
Mme Melançon : Je fais juste
regarder, là, puis je mets les deux un peu côte à côte, dans le fond, là, parce
qu'à 34 on allait tout de même à dire que le ministre peut refuser de délivrer,
de modifier, de renouveler une autorisation requise, la modifier, la suspendre,
la révoquer ou l'annuler. Donc, la révoquer, ça veut dire qu'elle a été...
l'autorisation a été faite. Je ne comprends toujours pas la différence,
pardonnez-moi.
• (11 h 30) •
Mme Grignon (Karine) : Oui, en
fait, c'est des motifs... C'est toujours les mêmes interventions qui sont
visées dans tous les articles à partir de 31 jusqu'à 36, là, qu'on va voir un
petit peu plus loin. Donc, c'est toujours les mêmes interventions :
refuser de délivrer, annuler, révoquer, suspendre, là. Donc, c'est toujours par
rapport à une situation particulière qui est mentionnée dans l'article en question,
à 34, c'est l'inscription au RENA, là, au Registre des entreprises non
admissibles, tandis qu'à 35 c'est vraiment des actes que le titulaire lui-même
va poser à l'égard de son autorisation, là, ne respectera pas une condition à
l'intérieur de son autorisation. Donc, c'est ces situations-là qui sont visées
à 35, là, mais toujours les mêmes actes, là, que le gouvernement ou le ministre
peut prendre.
Mme Melançon : Ah! c'est vraiment
sur le titulaire, oui. D'accord. Je vois. Pourquoi... Puis là je comprends que
c'est repris de l'article 115.10, mais «le titulaire n'a pas débuté une
activité dans le délai prévu à l'autorisation ou, à défaut, d'un délai prescrit
dans l'autorisation, dans les deux ans de sa délivrance», le deux ans, il
est... Donc, je comprends que ça vient, comme je le dis, là, de 115.10.
Cependant, pourquoi deux ans? Est-ce qu'on sait pourquoi le délai de deux ans
est prescrit déjà dans le 115.10?
Mme Grignon
(Karine) : À l'époque... En fait, ça prend quand même un certain
temps, on a des climats hivernaux au Québec,
tout ça. Le temps que la personne puisse débuter ses travaux... donc on a fixé
un délai de deux ans pour lui permettre de bien planifier ses activités.
Mais, si, à l'intérieur du délai de deux ans, elle n'a pas débuté ses travaux, bien, une nouvelle autorisation, en fait, sera
requise, là, si elle est révoquée en vertu de l'article 35, pour
poursuivre... pour débuter, en fait, les travaux qui seront à compléter.
Mme
Melançon : Merci.
La Présidente (Mme
St-Pierre) : Est ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de
Jonquière.
M.
Gaudreault : Oui, merci, Mme la Présidente. Bonjour à tous et à
toutes. Je connais la réponse, là, mais je veux poser la question quand même
pour être sûr que ça reste dans le Journal des débats. Les trois cas qui
sont nommés, évidemment c'est l'un ou l'autre, là, ce n'est pas additionnel,
là. Donc, le ministre peut, pour tout ou en partie d'un projet, modifier
l'autorisation, refuser, etc., si un ou deux ou trois, ou un et deux, pas
trois, un et trois, pas deux... en tout cas, je pense que vous comprenez bien
ce que je veux dire, là.
Mme Grignon
(Karine) : Oui, tout à fait, votre compréhension est bonne.
M.
Gaudreault : C'est bon.
La Présidente (Mme
St-Pierre) : Est ce qu'il y a d'autres interventions? Est-ce que
l'article 35 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme
St-Pierre) : Alors, M. le ministre, s'il vous plaît,
l'article 36. L'article 35 est adopté.
M. Charette :
Merci, Mme la Présidente.
Donc :
«36. Lorsque le ministre est d'avis qu'une activité qu'il a autorisée en vertu
de l'une des lois concernées est susceptible de causer un préjudice
irréparable ou une atteinte sérieuse aux espèces vivantes, à la santé de l'être
humain ou à l'environnement en raison d'informations nouvelles ou
complémentaires devenues disponibles après la délivrance
de cette autorisation, ou à la suite d'une réévaluation des informations
existantes sur la base de connaissances scientifiques nouvelles ou
complémentaires, il peut limiter ou faire cesser cette activité ou fixer à son
égard toute norme particulière ou toute condition, restriction ou interdiction
qu'il estime nécessaire pour remédier à la situation, pour la période qu'il
fixe ou de façon permanente.
«Le
ministre peut exercer le pouvoir prévu au premier alinéa au regard d'une
activité autorisée par le gouvernement en vertu d'une loi concernée, le
cas échéant. Toutefois, une telle décision est valide pour une période [d'au
[moins] d'au plus — c'est-à-dire — 30 jours.
«Le ministre peut
également, pour les mêmes motifs et dans la même mesure que ce qui est prévu au
premier alinéa, limiter ou faire cesser toute activité ayant fait l'objet d'une
déclaration de conformité ou qui peut être réalisée sans qu'une autorisation
préalable soit requise en application de la Loi sur la qualité de
l'environnement. Il peut aussi soumettre une telle activité à toute norme
particulière ou à toute condition, restriction ou interdiction qu'il détermine.
«Une décision prise
en vertu du présent article ne donne lieu à aucune indemnité de la part de
l'État et [prévoit] sur toute disposition inconciliable d'une loi, d'un
règlement ou d'un décret.»
Le commentaire. Cet
article reprend le contenu des articles 115.10.1 et 115.10.3 de la Loi sur
la qualité de l'environnement. Il vise à prévoir différentes situations pour
lesquelles le ministre serait justifié d'intervenir sur une autorisation déjà
délivrée en raison de nouvelles informations portées à sa connaissance et
lorsqu'un préjudice irréparable ou une atteinte sérieuse est susceptible de se
produire.
Le quatrième alinéa
précise, au surplus, qu'une mesure prise par le ministre en vertu de cet
article prévaut sur toute autre disposition qui pourrait être considérée comme
inconciliable et qu'elle ne donne pas droit à une indemnité de la part de
l'État.
La Présidente (Mme
St-Pierre) : Commentaire, Mme la députée de Verdun.
Mme
Melançon : Commentaire et quelques questions, Mme la Présidente, bien
sûr, pour le ministre, mais aussi pour l'équipe qui l'accompagne. Lorsqu'on
parle de préjudice irréparable... Puis là je comprends bien que cet article-là,
c'est un copier-coller de ce qu'on retrouve dans la LQE, et qui va donc se
retrouver dans le tronc commun pour les six
lois sur lesquelles nous avons, à l'article 1, là, déjà déterminé... Dans
les préjudices... Puis moi, j'aimerais savoir : Est-ce qu'on
utilise souvent cet article-là, d'abord?
M. Charette :
Pour l'application, avec le consentement, on pourrait s'en remettre au
sous-ministre adjoint. Je vais enlever le masque, ce sera déjà plus facile,
mais, déjà, permettre le consentement.
M.
Rousseau (Michel) : Michel Rousseau, sous-ministre adjoint.
Bien, cet article n'a
pas encore été utilisé, est assez récent quand même, adopté en 2017, c'est-tu
ça? Oui, c'est ça. Donc, c'est un article qui n'a pas été encore utilisé, qui
va éventuellement l'être, c'est certain, mais qui demande aussi une bonne documentation, puisqu'on parle ici de révoquer
une autorisation qui... lorsqu'il y a des éléments nouveaux, donc, les
éléments nouveaux seraient à documenter. Mais c'est un article qui, pour ma
part, m'apparaît très utile mais qui n'a pas encore fait l'objet de cas qui
nécessitaient cette utilisation-là.
Mme Melançon : J'aimerais
ça vous entendre, justement, sur le fait que c'est utile comme article.
Pouvez-vous... Vous être très bon dans les exemples. Si vous étiez en mesure,
peut-être, de nous éclairer avec un exemple, une possibilité? Comment est-ce
qu'on peut... justement, comment est-ce que ça va pouvoir aider au ministère?
Et j'aimerais, en même temps, peut-être voir,
parce qu'avec vos 30 années, vous le disiez hier, là, d'expérience... vous
avez commencé bien jeune, je ne l'avais pas dit dans le micro, mais là je me
permets, avec vos 30 années d'expérience au ministère, des cas où ça
aurait pu justement faire la différence.
M. Rousseau (Michel) : Je dirais que cet article-là arrive à un moment aussi où la
science évolue plus que jamais, là. Si on prend l'exemple des pesticides, si on
prend l'exemple des milieux humides, là, sans revenir dans le temps, mais, tu
sais, c'est des... la connaissance des milieux humides, des rôles qu'ils
peuvent jouer, tout ça a évolué beaucoup
dans les dernières années. C'est là l'intérêt qu'il y a, c'est qu'il fait
référence au fait qu'il y a des informations nouvelles, il y a une
évolution.
Donc, je ne sais pas, on est dans un milieu
où... on pensait que ce milieu-là n'était pas sensible. Tout d'un coup, les
études démontrent qu'il y a des espèces vivantes, dans ce milieu-là, qui,
finalement, sont sensibles à tel type de rejet. Mais, lorsqu'on l'a autorisé,
on n'avait pas cette info-là. Je vous donne un exemple, une vieille... exemple,
vraiment, qui recule dans les années 90, mais, à l'époque, on autorisait
des piscicultures sans se soucier des rejets en phosphore. Là, à un moment
donné, on s'est rendu compte que toutes les autorisations qui avaient été
données dans le domaine des piscicultures, bien, il y avait des sérieux problèmes
parce que les poissons, ça génère beaucoup de phosphore. Mais ce n'était pas
dans les guides de l'époque, là, je parle début des années 90. C'est un
exemple loin, mais c'est dans cette optique-là.
Ça pourrait être un milieu humide où il y a eu
une autorisation de travailler dans le milieu humide avec toutes les
compensations, et, tout d'un coup, il y a une espèce qui apparaît, ou, encore,
un niveau de connaissance du milieu qui n'existait pas. C'est vraiment associé,
cet article-là, à la capacité, aujourd'hui, de l'évolution rapide, je dirais,
des connaissances. Puis, nos autorisations, bien, comme elles peuvent durer
très longtemps, bien, ça évite qu'une autorisation vieillisse mal, je dirais ça
comme ça. Donc, c'est dans ce sens-là que je pense que c'est un article qui va
être très utile dans les années qu'on vit, où les connaissances évoluent
beaucoup.
Puis les problèmes émergents, bien, c'est... à
chaque année, il y a de quoi de nouveau. À l'époque, si vous vous rappelez de
la fracturation hydraulique, c'était tout à fait nouveau. Donc, s'il y avait eu
des autorisations dans ces dossiers-là, deux ou trois ans plus tard, les enjeux
n'étaient plus les mêmes. Donc, c'est dans cette optique-là que je crois que
l'article est intéressant.
Il n'a pas encore été utilisé parce qu'il est
quand même assez récent puis demande quand même une bonne documentation, là. On
ne détermine pas ça sur le coin de la table, que tout a évolué puis que
l'autorisation n'est plus appropriée, là.
• (11 h 40) •
Mme Melançon : Donc, si je comprends
bien, à partir du moment où quelqu'un a une autorisation entre les mains, on
sait, avec la science, finalement, qu'il y a une façon de faire qui était
autorisée préalablement, il y a des transformations, on va réévaluer. C'est ce que
je... C'est ce que je lis à l'intérieur de l'article 36. Il y aura donc
réévaluation. Ça, c'est par le ministère que c'est fait, j'imagine, la
réévaluation?
M. Rousseau (Michel) :
L'information peut venir de différentes sources. Par exemple, ça peut être un groupe écologique, un document scientifique qui
est sorti, quelque chose. Donc, le ministère a une certaine veille là-dessus.
Il pourrait décider qu'à la lumière de ces... Ou un citoyen, tout simplement,
qui nous demande, si c'est un cas qui se prête à cet article-là, de réévaluer
parce qu'il y a des nouvelles informations. Et, oui, c'est le ministère qui le
ferait, avec ses experts. Au besoin, comme on le fait dans certains dossiers,
on peut même consulter des experts externes. Mais
éventuellement c'est la responsabilité des gens du ministère de faire cette
recommandation-là au ministre, ce qui est encore un pouvoir, là, du même
type que ce qu'on a vu, là, c'est-à-dire : il doit être exercé de façon
exceptionnelle, puis bien documenté pour que le ministre comprenne bien pour
quelle raison on arrive à exercer cet article-là.
Mme Melançon : Donc, à partir du
moment où il y a réévaluation, donc, que ce soit du ministère ou d'un groupe
environnemental, ce que je comprends, c'est que le ministre va pouvoir limiter,
voire même faire cesser complètement les travaux qui étaient autorisés par une
autorisation, bref, qui étaient autorisés par le ministère. Et, moi, ce que
j'ai... où je reste quand même un peu surprise, c'est que le ministre peut
exercer le pouvoir prévu au premier alinéa sur une décision qui est valide pour
une période d'au plus 30 jours. Moi, la période d'au plus 30 jours, moi,
je pensais que... l'autorisation, donc, ne tombe pas à jamais, à ce moment-là.
M. Rousseau (Michel) : ...mais par contre je comprends que c'est l'autorisation
gouvernementale, donc c'est les autorisations qui sont émises suite aux
évaluations environnementales. C'est pour celles-là que le ministre a un délai
de 30 jours, tandis que, pour les autres autorisations du ministère, ce
délai-là n'existe pas — c'est
ça? Donc, le 30 jours, c'est vraiment lorsque le dossier, il a été
autorisé par le gouvernement suite à un décret, suite à une évaluation
environnementale.
Mme Melançon : D'accord. Et, au
dernier paragraphe, il est inscrit qu'«une décision prise en vertu du présent
article ne donne lieu à aucune indemnité». Est-ce que de dire que ça ne donne
lieu à aucune indemnité de la part de l'État, ça veut aussi dire pas de
possibilité de recours judiciaires contre le gouvernement?
Mme Grignon
(Karine) : Bien, c'est en partie, là, l'effet, effectivement. Le
gouvernement ne pourra pas se faire poursuivre en dommage, là, pour une
modification... une autorisation déjà délivrée quand il y a démonstration,
effectivement, qu'il y a eu évolution des connaissances, là. C'est l'effet du
dernier alinéa, effectivement.
Mme Melançon : Parce que j'imagine
quelqu'un qui est vraiment de bonne foi, là, puis qui a reçu une autorisation
du ministère, je vais reprendre l'exemple de la pisciculture, si vous
permettez, bien, il peut y avoir quand même des investissements qui ont été
faits par la personne qui est détentrice de la pisciculture, et, du jour au
lendemain, s'il se fait retirer complètement l'autorisation, je comprends qu'il
vient de perdre ses billes au jeu malgré l'autorisation qu'il détenait et qui
était valide jusqu'à une certaine date.
M. Charette : Je suis désolé, j'ai
demandé un complément d'information, donc je n'ai pas entendu la dernière
portion de l'intervention de la collègue...
Mme Melançon : Pas de problème, pas
de problème. Je reprends, je disais que, s'il y a une pisciculture puis, du
jour au lendemain, il se fait retirer... la personne se fait retirer
l'autorisation qui avait été préalablement autorisée, donc, par le ministère,
la personne détentrice, donc, va perdre ses billes, parce que c'est possible
qu'il y ait eu des investissements majeurs en lien avec sa pisciculture. Donc,
qu'est-ce qui va arriver avec cette personne-là, on arrête, puis il perd ses
billes au jeu, dans le fond?
M. Charette : Deux petites choses à
ce sujet là, et c'est la raison pour laquelle je demandais un complément
d'information. Lorsqu'on parle d'absence de recours, c'est pour un
dédommagement, mais le promoteur peut quand même faire appel de la décision. Si
jamais il pense être lésé, là, ce recours-là existe, mais il n'y a pas de
recours pour ce qui est d'un dédommagement. Ceci dit, il y a des subventions,
au niveau de la mise aux normes, qui peuvent être accessibles. Une autorisation
qui est donnée à une date x ne signifie pas que le promoteur ou le projet
pourra continuer d'exister sans tenir compte de l'évolution de la connaissance
si on se rend compte... l'exemple de la pisciculture
est très, très d'adon, mais si on se rend compte qu'une technique, au fil du
temps, ne livre pas les résultats escomptés ou, au contraire, on apprend
que la connaissance a évolué et que cette technique-là n'est plus appropriée,
on ne peut pas se priver d'un recours et on ne peut pas se priver d'une
démarche pour corriger la situation.
Mme Melançon : Mais cela n'exclut
pas tout de même, parce que... puis là je n'ai pas d'exemple qui me vient en
tête, c'est possible qu'à un moment donné on dise : Bien, ça, là, avant,
ça se faisait, maintenant ça ne se fait plus. Puis, malheureusement, on ne
trouve pas de façon de contourner, c'est devenu inacceptable, donc on va cesser
une activité complètement. Ça pourrait être le cas, ça pourrait exister.
M. Charette : C'est un cas qui n'a
pas d'expérience vécue, là, comme telle, mais, à travers l'exemple de la
pisciculture, ça permet de mentionner... ça, on est en communication avec le
MAPAQ, parce qu'on a des projets justement de pisciculture, là, qui sont à
l'étude actuellement. Et le MAPAQ a des programmes d'aide, des programmes qui
peuvent être à la disposition des promoteurs, des programmes qui peuvent servir
à la mise aux normes, en quelque sorte, ou une mise à niveau. Donc, la
contrainte, elle est là, mais ça ne veut pas dire que le promoteur est laissé à lui-même, là, sans recours
pour autant. Et en même temps tout investisseur sait que son industrie n'est pas garantie à vie, il y a tout le temps des
aléas dans le marché, et les investisseurs savent qu'il y a des investissements,
par moments, qui sont nécessaires pour des
mises à niveau s'ils veulent que leurs industries puissent continuer à
performer.
Mme Melançon : Je veux simplement,
tout de même, rappeler, en tout respect au ministre, qu'à un moment donné c'est
plus qu'une mise à niveau lorsqu'il y a une transformation majeure ou lorsqu'il
y a une découverte scientifique, parce que, parfois, ce ne sera même pas le
ministère qui va avoir découvert le tout, là, c'est ce qu'on vient d'apprendre,
ça peut être un groupe environnemental, ça peut être la science sur un plus
large consensus qui peut arriver... qui peut, justement, nous éclairer
différemment, donc. Mais pas de possibilité de recours. Je comprends qu'il y a
une possibilité de recours de la décision lorsqu'elle est prise, mais une fois
que le tribunal ou le bureau du sous-ministre... Parce que j'imagine que c'est
là aussi où on peut faire appel, j'imagine que c'est le même... est-ce que
c'est la même chose?
Mme Grignon (Karine) : La
contestation, la décision devant le Tribunal administratif du Québec.
Mme Melançon : O.K. Donc, ce n'est
pas la même chose que ce dont on parlait hier matin, de mémoire, où on se disait que, lorsqu'il y avait une certaine
contestation, avant d'aller au TAQ, on pouvait aller au ministère
directement.
Mme Grignon (Karine) : Non, exact,
ça, c'est pour les SAP et les avis d'exécution, mais, pour ce qui est de ces
décisions-là, qui sont beaucoup plus exceptionnelles, là, c'est un recours
directement au Tribunal administratif du Québec. On va le voir un petit peu
plus loin.
Mme Melançon : Parfait. Ça va pour
moi, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme St-Pierre) : M.
le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui.
Alors, c'est extrêmement intéressant, la discussion que nous avons sur
l'article 36. Je veux juste bien comprendre le 30 jours, là, parce
que je relis également... j'ai devant moi l'article 115.10.1 de la LQE,
c'est vrai que c'est, en bonne partie, du copier-coller. Donc, la décision du
ministre est valide seulement sur 30 jours, c'est ce que je comprends?
Mme Grignon (Karine) : Oui, étant
donné que c'est une décision du gouvernement, donc le décret, en fait, qui
autorise, là, suite à l'évaluation environnementale, donc on permet au ministre
d'intervenir en lieu et place du gouvernement, mais seulement pour une période
limitée de 30 jours. Puis, après ça, s'il y a d'autres interventions à
faire, on va le voir, là, l'article qui suit, le gouvernement va pouvoir
intervenir également, là.
• (11 h 50) •
M. Gaudreault : Mais ce que je veux
dire, c'est qu'admettons que le ministre se prévaut de cet article, parce qu'il
y a une évolution des connaissances, puis là il dit : Oups! Je retire...
j'essaie de trouver le bon terme, il fallait cesser les activités en vertu de
l'autorisation, puis là il se sert du futur article 36 pour faire cesser
les activités, cette décision ne sera valide que 30 jours...
Mme Grignon (Karine) : ...par
rapport à une décision du gouvernement, étant donné que c'est le ministre qui
intervient. Donc, c'est un petit peu pour pallier au caractère urgent, là. Ça,
ça prend un certain temps avant d'obtenir une décision du Conseil des
ministres, donc, en attendant, le ministre peut intervenir pendant
30 jours pour faire cesser l'activité ou toutes les autres possibilités.
Puis après une réévaluation va être faite si la mesure doit être maintenue, puis là le gouvernement va pouvoir
intervenir, là, en vertu de l'article 37, là, qui... Le gouvernement va
posséder des pouvoirs similaires, là, à l'article 37.
M. Gaudreault : O.K.,
donc, c'est... une fois que le 30 jours est passé et que... Admettons que
le gouvernement décide de poursuivre l'interdiction ou d'en faire une
interdiction permanente, là, ça va être via la mécanique de 37, c'est ce que je
comprends?
Mme Grignon (Karine) : Exactement,
étant donné que c'est l'autorité, en fait, qui a pris la décision, on va rester
avec le même niveau d'autorité pour une décision plus finale, là.
M. Gaudreault : Parfait.
Maintenant, 115.10.3 de la LQE est repris dans le dernier alinéa de 36. Aucune
indemnité... bien, on en a discuté tout à l'heure avec la députée de Verdun,
puis je vois aussi qu'à 37 ça sera effectivement le cas, donc aucune indemnité,
ça veut dire qu'une personne ou une entreprise... ou personne physique qui a
une... ou personne morale qui a une autorisation, un CA, un... bien, en tout cas,
une autorisation du ministère et que le ministre se prévaut de 36, il ne pourra
pas réclamer aucune indemnité en vertu des investissements qu'il a faits sur la
base de sa première autorisation.
Mme Grignon (Karine) : Oui,
exactement, l'effet de l'alinéa sur.... ne donne lieu à aucune indemnité, là,
aux deux endroits, et à 36 et à 37, c'est ce que ça a comme effet, là.
M. Gaudreault : O.K.
Bien, c'est intéressant parce qu'il y a beaucoup de débats à l'heure actuelle
sur un enjeu semblable en lien avec
des permis qui sont accordés en d'autres matières. Est-ce qu'il y a de la
jurisprudence sur 115.10.3?
Mme Grignon (Karine) : Non, pas
spécifiquement, comme il n'a jamais été utilisé, mais c'est quelque chose qu'on retrouve quand même assez... pas fréquemment,
mais qu'on retrouve dans les autres lois du gouvernement pour des
matières où on ne veut pas indemniser, justement, là. Parce qu'il n'y a pas de
droit acquis, là, donc ça se retrouve dans différentes lois, là, au Québec,
effectivement.
M. Gaudreault : Qu'est-ce que
vous voulez dire : «Parce qu'il n'y a pas de droit acquis»?
Mme Grignon (Karine) : Bien,
exemple, il y a eu une loi qui est venue limiter les travaux exploratoires dans
le fleuve Saint-Laurent à laquelle il y a ce genre de clause. Donc, dans des
cas circonscrits, là, ce type de loi là, là, c'est les libellés qui sont
utilisés, là, c'est un libellé standard.
M. Gaudreault : O.K.
Quand on dit : «Sur la base de connaissances scientifiques nouvelles ou
complémentaires», donc, on a donné l'exemple de la pisciculture, là, mais il
peut arriver plein d'autres circonstances où on a autorisé des permis, puis là,
tiens, on s'aperçoit que l'évolution de la connaissance scientifique fait en
sorte qu'on ne peut plus aller de l'avant, là. C'est un peu comme, je ne sais
pas, moi, je fais une comparaison boiteuse, mais si on avait donné un
certificat d'autorisation pour fumer la cigarette, puis on s'est aperçu, dans
les années 80, que la cigarette avait un lien très fort avec le cancer du
poumon, puis on autorise... on retire l'autorisation de la cigarette parce
qu'on a... on s'est aperçu qu'il y avait une évolution scientifique, c'est un
peu le même genre de... Je sais que ma comparaison est boiteuse, là, mais, je
veux dire, il y a des choses qui sont autorisées à un moment donné, mais on
s'aperçoit, avec l'évolution de la science, que ce n'est plus bon ou que ça a
des conséquences néfastes.
Mme Grignon (Karine) : Oui,
exactement.
M. Gaudreault :
O.K. Qu'est-ce qu'on entend par «susceptible»? Je ne parle pas du
comportement de quelqu'un, là, qui est susceptible, là, ce n'est pas de ça que
je parle mais quand on dit : «Lorsque le ministre est d'avis qu'une
activité qu'il a autorisée en vertu de l'une des lois concernées est
susceptible de causer un préjudice». Alors, comment on évalue la susceptibilité
de causer un préjudice irréparable ou une atteinte sérieuse? Tu sais, je veux
dire, c'est quand même une grande expression, là. On l'avait déjà dans 115.10.1,
là... je ne me souviens plus de la discussion qu'on avait eue à l'ancien projet
de loi n° 102, là, probablement qu'on en avait parlé à ce moment-là, il
faudrait retourner dans le Journal des débats. Mais qu'est-ce qui est
susceptible? Jusqu'où on tire une ligne, là, on dit : Ah! là, ce n'est pas
susceptible, puis, tout d'un coup, ah! pouf, ça tombe susceptible de causer un
préjudice irréparable ou une atteinte sérieuse aux espèces vivantes, etc.?
Mme Grignon
(Karine) : Bien, c'est sûr,
c'est subjectif, là, mais c'est une notion qui existe déjà à l'intérieur
de la Loi sur la qualité de l'environnement, notamment à l'article 22. Il
y a comme un résiduel, là, toute activité qui est susceptible d'avoir un impact
sur l'environnement, là. Donc, c'est sûr qu'il y a une démonstration qui devra
être faite sur c'est quoi, l'impact à l'environnement, c'est quoi, qui est
susceptible de causer le préjudice irréparable,
en quoi c'est irréparable, c'est quoi, le préjudice. Donc, il va falloir
documenter tous ces aspects-là, là, pour démontrer le susceptible de...
M. Gaudreault : O.K. Donc, ça
veut dire que le ministre, avant de se prévaloir de l'article 36... ce
n'est pas qu'il se lève un bon matin puis il dit : Tiens, moi, je trouve
que c'est susceptible de causer un préjudice. Il va avoir été, avant, se
chercher de l'info soit auprès de ses propres spécialistes au sein du
ministère, peut-être au sein même du Comité consultatif sur les changements
climatiques, par exemple, ou d'autres spécialistes qui vont pouvoir dire :
Bien, là, M. le ministre, telle autorisation, là, que vous aviez donnée comme
ministre il y a quelques années, bien, on s'est aperçus qu'avec l'évolution de
la science il risque d'y avoir plus de dommages que d'avantages, donc c'est susceptible
de. Alors, ce n'est pas un pur discrétionnaire, là, c'est vraiment sur la base
d'infos qui lui ont été communiquées ou partagées.
Mme Grignon (Karine) : Oui,
tout à fait, effectivement. C'est des balises qui viennent encadrer le pouvoir discrétionnaire, là. Donc, il y a cette
démonstration-là à faire. Il faut que ça soit aussi des connaissances
nouvelles, là. Donc, tout ce qu'il y
a dans l'article, là, c'est des balises pour exercer le pouvoir
discrétionnaire, et ça devra être démontré parce qu'après ça, s'il y a
un appel devant le Tribunal administratif du Québec, bien, on va devoir
justifier la décision.
M. Gaudreault : O.K. Et, pour
mettre en oeuvre la mécanique qui est prévue à l'article 37 que nous
allons étudier tout à l'heure... je veux dire, si le ministre recommande au
gouvernement de prolonger ou de maintenir le retrait de l'autorisation, c'est
sûr qu'il va falloir que la recommandation du ministre, en vertu de 37, soit
également appuyée sur ce qui l'a justifié de dire que c'est susceptible de
porter préjudice.
Mme Grignon (Karine) : Oui,
tout à fait.
M. Gaudreault : O.K. Ça va pour
l'instant, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme St-Pierre) : Oui,
M. le ministre.
M. Charette : Oui, juste parce
que le commentaire du collègue de Jonquière était très pertinent concernant la
portée du projet de loi, mais je ne voudrais pas qu'on lui donne une portée
qu'il n'a pas par rapport à un projet de loi qui sera déposé éventuellement sur
les hydrocarbures. On parle ici d'autorisation environnementale donnée. La
plupart des enjeux liés à ce futur projet de loi là font référence à des claims
pour lesquels les autorisations environnementales n'ont pas été données. Donc,
je dis juste qu'on ne peut pas prendre cet article-là et dire : On va le transposer dans l'application d'un autre projet de
loi. Donc, simple information, éventuellement le projet de loi pourra
donner les indications qui s'appliqueront. Mais c'est un simple commentaire par
rapport au questionnement du collègue, qui était très, très légitime dans les
circonstances.
M. Gaudreault : Oui, mais en
même temps, Mme la Présidente, quand on a adopté cet article-là en 2017, il
pouvait avoir un effet rétroactif, dans le sens qu'il s'applique... puis là
c'est encore le cas avec 36, parce que je suis toujours sur cet article, Mme la
Présidente, dans le fond, il peut s'appliquer à toutes les autorisations qui
ont été données, pas juste celles à partir du moment de l'adoption de la loi.
Je ne sais pas si le ministre peut répondre.
M. Charette : Mon point est
surtout que, dans le cadre de ce qui sera discuté dans un autre projet de loi,
on parle de claims qui n'ont pas fait l'objet d'autorisation environnementale,
dans une majorité de cas, parce qu'ils ne sont pas rendus à cette étape-là.
Donc, c'est uniquement la nuance que je voulais apporter.
• (12 heures) •
M. Gaudreault : Je suis
d'accord. Mais moi, je ne suis même pas là-dessus, à la limite, là. Ce que je
veux dire, c'est que je reviens juste au concept des autorisations et au
pouvoir exceptionnel qui est donné ici avec l'article 36 qui reprend
115.10.1. Je veux juste être sûr de bien comprendre que, quand on a adopté
115.10.1, puis là on le fait avec 36, ça s'applique à toutes les autorisations
qu'on a dans le bagage des autorisations à ce jour.
M. Charette :
Des autorisations environnementales.
M. Gaudreault : Oui,
oui, oui. Je ne parle pas des droits miniers. Je suis sur les autorisations
environnementales. Ça s'applique à tout le
lot des autorisations environnementales. Ça veut dire que quelqu'un qui détient
une autorisation environnementale depuis 20 ans peut se voir
toucher par une décision ministérielle parce que l'évolution de la connaissance
scientifique, même s'il a son autorisation... C'est dans ce sens-là que je dis
que c'est rétroactif. Ce n'est pas juste pour les autorisations à partir du
jour où on a adopté la loi ou qu'on adoptera cette loi-ci. Donc, c'est vraiment toutes les... le bagage — je
ne sais pas comment l'appeler, là — toutes
les autorisations qu'on a par le passé, là.
M. Charette : Effectivement,
parce qu'une technologie qui était jugée adéquate...
M. Gaudreault : Exact.
M. Charette : ...à une certaine
époque peut devenir désuète au fil des ans, en fonction de l'évolution de la
connaissance.
M. Gaudreault : O.K. C'est là
que... Parce que le ministre a parlé des hydrocarbures puis de la future loi
éventuelle qui sera déposée. C'est là que... Je comprends que ce n'est pas des
autorisations, mais on peut quand même s'inspirer de ce qu'on a fait en 2017 et
qu'on est en train de faire avec 36 pour autre chose, en termes d'effet
rétroactif. C'est ça que je veux dire.
M. Charette : Le futur projet
de loi abordera ces questions-là, mais ça va au-delà de la portée de
l'article 36 aujourd'hui.
M. Gaudreault : Je suis
d'accord. O.K. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme St-Pierre) : Mme
la députée de Verdun.
Mme Melançon : Bien, c'est
intéressant. Puis justement je m'en allais exactement là où le député de
Jonquière s'en allait. Parce que, quand il a dit : C'est intéressant, on
le voit actuellement, je pense qu'il faut le dire dans le micro, là, je pense
que c'est vraiment sur les hydrocarbures. Puis on sait très bien qu'il y a un
groupe qui est venu nous voir, justement, ici lors des consultations
particulières, pour le... le groupe pour le droit à l'environnement, et qui ont déposé, justement, quelque chose en
juin dernier, je crois, et c'était sur les hydrocarbures, là, en disant,
justement, selon eux... ils ont fait une analyse de tout ça. Mais est-ce que
c'est nouveau qu'on puisse révoquer? Puis j'ai compris le ministre, là, qui
dit : Bien là, on n'est pas dans les hydrocarbures, on n'est pas dans les
puits, parce qu'il n'y avait pas
nécessairement d'autorisation gouvernementale. Mais est-ce que c'est nouveau
pour le gouvernement du Québec de
pouvoir révoquer une autorisation donnée par le gouvernement du Québec sans
qu'il n'y ait une compensation?
M. Charette : Le sous-ministre
adjoint le mentionnait un petit peu plus tôt, ça a été intégré en 2017-2018,
lors de la réforme de la LQE. Donc, on vient... Puis ça le dit, là, d'ailleurs
dans le commentaire, on vient reprendre le contenu, là, des
articles 115.10.1, 115.10.3. Donc, c'est dans la législation, oui, mais on
n'a pas eu recours à cette disposition-là jusqu'à maintenant, mais ce n'est pas
nouveau, là, dans la législation.
Mme Melançon : Moi, dans le
fond, ma question est la suivante : Est-ce qu'il y a, ailleurs, au
gouvernement du Québec, des possibilités de révoquer des autorisations données
sans qu'il n'y ait compensation?
M. Charette : Dans des domaines
autres que l'environnement?
Mme Melançon : Oui.
M. Charette : Pour ma part, je ne
pourrais pas mentionner de réponse.
Mme Grignon (Karine) : Je n'ai pas
fait de recherches exhaustives, mais, oui, ça existe. Si je pense au régime
forestier qui a été réformé en 2010, notamment, on a révoqué l'ensemble des
autorisations pour en délivrer de nouvelles,
différentes, là. Donc, il y avait ce genre de clause qui était prévu, là, pour
ne pas indemniser, là, suite à la révocation.
Mme Melançon : Il serait
intéressant, peut-être — puis
je pose la question au ministre — de faire quand même juste les
vérifications, autres que le régime forestier, dans les lois du gouvernement du
Québec, s'il y a d'autres... bien, d'autres
cas similaires, parce qu'on va devoir se pencher, à un certain moment donné,
sur cette question qui est tout à fait d'actualité. Et ça va quand même
en droite ligne. Je sais que ce n'est pas la même chose, mais je veux quand
même faire le parallèle au ministre. À partir du moment où le GIEC, où les
scientifiques du monde entier nous disent, justement, qu'avec l'augmentation
des GES la planète est mise à mal... puis je pense qu'on le voit, puis j'ai lu
avec attention ce que le ministre a donné comme information, hier à QUB, sur le
fait que les GES ne vont pas en diminuant, malheureusement, on a cette
malheureuse lecture là, là, tout le monde ensemble, bien, qu'on doit bouger. Puis, à partir du moment où, justement, les scientifiques...
alors là, on est là dans la réévaluation, qui ne vient pas nécessairement du
ministère, quoique le ministère est bien au fait. Je pense que de révoquer
certains permis, certaines autorisations, puis là de voir que c'est fait
sans... sans compensation à certains endroits, je pense qu'on doit se pencher
là-dessus tous ensemble pour qu'il y ait aussi... Puis c'est là où je ne
connais pas la réponse, là, puis ce serait intéressant s'il était possible
d'obtenir une réponse. Si ce n'est pas au courant de la journée, là, ça peut
aller à demain, parce que, demain, on a le bonheur d'être ensemble jusqu'à 22 h 30.
Alors, ça nous donne du temps pour trouver la réponse. Mais je pense qu'il
serait intéressant pour tout le monde d'obtenir cette réponse-là, pour pouvoir
voir aussi qu'est-ce qu'il est possible de faire. Et plus ça va, plus il y a
des demandes qui sont faites par les différents groupes environnementaux à ce
sujet.
Alors, je voulais simplement mettre la table.
Puis je pense qu'on va pouvoir se faire une tête, tout le monde ensemble, à ce
sujet-là.
La
Présidente (Mme St-Pierre) :
Est-ce qu'il y a d'autres
interventions relativement à l'article 36? Oui, M. le député de
Jonquière.
• (12 h 10) •
M. Gaudreault : Bon, on a
discuté tantôt de la définition de susceptible, qu'est-ce qui est susceptible,
puis comment on construit la décision du ministre, bon, par le fait qu'il est
informé, par exemple. Puis là on le dit quand même... on le dit quand même dans
l'article, là : «...à la suite d'une réévaluation des informations
existantes sur la base de connaissances scientifiques, nouvelles ou complémentaires»,
et là on dit : «il peut limiter ou faire cesser cette activité». On
revient avec le fameux débat, là, du «peut» et du «doit». À partir du moment où
la science nous dit : Feu rouge, telle activité cause des problèmes, «est
susceptible de causer un préjudice irréparable ou une atteinte sérieuse aux
espèces vivantes, à la santé de l'être humain» — ce n'est quand même
pas banal, là, puis là c'est la science qui nous dit ça — comment
ça se fait que le ministre ne devrait pas déclencher automatiquement, et pas
que ça soit un «peut» mais que ce soit une obligation?
Autrement dit, dans un souci de prévention,
hein, on le sait, là, c'est même une des conditions d'une autre loi sous la gouverne du ministre, qui est la Loi sur
le développement durable, il y a ce qu'on appelle le principe de
précaution. Donc, en vertu de 36, s'il y a
un assez large consensus scientifique qui nous dit : Telle émanation,
c'est clair que ça cause des problèmes à la santé humaine, le ministre
devrait retirer l'autorisation pendant 30 jours. Toc! Ça s'enclenche
automatiquement. De toute façon, et là je reste sur le principe de précaution,
de toute façon, 37 va prévoir que le prolongement
ou pas va dépendre d'une recommandation du ministre au gouvernement, puis là le
gouvernement aura le pouvoir de
prolonger ou pas ou de rendre permanent le retrait de l'autorisation ou pas.
Mais au moins, dans un premier temps, en vertu du principe de
précaution... Si la science nous dit : Ça ne marche pas, c'est dangereux
pour la santé humaine, par exemple, donc le
ministre devrait, en vertu du principe de précaution, dire : Je limite ou
je fais cesser cette... De toute
façon... Pour moi, ce que je veux dire, c'est que son pouvoir discrétionnaire
ne devrait pas être dans est-ce que je prends une décision ou pas.
C'est : à partir du moment où la science me dit qu'il y a un danger, je
prends la décision. Et là le pouvoir discrétionnaire est plutôt dans «limiter,
faire cesser ou fixer toute norme particulière ou toute condition». Autrement
dit, il y a comme deux niveaux d'intervention. Ce n'est pas dans le... ce n'est
pas dans est-ce que j'écoute la science ou pas. Il doit écouter la
science. Son pouvoir discrétionnaire est plus dans le deuxième niveau,
sur comment je le fais. Je limite. Je demande à l'entreprise XY de
modifier sa captation de gaz, peu importe. Mais, à partir du moment où la
science dit : C'est grave, c'est susceptible de porter atteinte à la
santé, disons, bien, il faut que le ministre agisse. Donc, pour moi, ça serait
plus une obligation qu'il doit limiter, ou faire cesser, ou fixer une norme
particulière. Parce que, là, on se donne une période tampon de 30 jours,
puis après ça le gouvernement prendra une
décision à plus long terme. Ça, ça va être 37. Alors, je ne sais pas comment le
ministre réagit par rapport à ça.
M. Charette : ...principe de
gradation que la collègue juriste pourra expliquer, là, sans problème.
M. Gaudreault : O.K.
Mme Grignon (Karine) : Bien,
gradation de sanctions, vous l'avez dit, là, effectivement, ce n'est pas juste
de limiter, là, mais peut prendre aussi d'autres types de mesure, là. Donc, on
va y aller, évidemment, en gradation. Ce n'est pas nécessairement de limiter
qui va être la solution, là, mais ça prend quand même une marge de manoeuvre,
je vous dirais, pour aller de l'avant, là, parce que le «doit», en fait, peut
mener à des situations un peu... un peu absurdes, là. Si on n'a pas le choix
d'intervenir dans une situation où il y aurait des circonstances, il faut quand
même interpréter selon le contexte, encore là.
Puis la notion de «susceptible de» a fait ses
preuves avec l'article 20 et l'article 22. Et c'est dans la même
logique, là, que l'article 36 est inséré, là. Puis ce qu'il faut bien
comprendre, c'est que, pour ce qui est du deuxième alinéa, là, le délai de
30 jours, ça vaut pour les décisions du gouvernement, mais, pour le
premier alinéa, la décision, elle peut être permanente, là. Donc, le fait
d'arriver tout de suite avec la mesure permanente sans indemnités, tu sais, ça
doit quand même demeurer des cas exceptionnels, là. Le «doit», c'est peut-être
un peu... un peu abusif, intrusif, là, comme pouvoir, là, en fait.
M. Gaudreault : O.K. Je veux
juste bien comprendre, Mme la Présidente. Quand Mme Grignon nous
dit : Le 30 jours, il est juste sur la décision... Mais la décision,
c'est ça, c'est : admettons que le ministre prend la décision de limiter
une activité, cette décision-là est bonne 30 jours.
Mme Grignon
(Karine) : Pour une décision qui émane du gouvernement, mais, si c'est
une autorisation délivrée par le ministre en vertu de l'article 22, c'est
le premier alinéa, puis il n'y a pas de délai à ce moment-là. Il n'y a pas de
délai de 30 jours.
M. Gaudreault : O.K., mais,
dans le deuxième alinéa, on dit : «Le ministre peut exercer le pouvoir».
Mme Grignon (Karine) : Mais à
l'égard d'une décision autorisée par un gouvernement.
M. Gaudreault : Ah! «au
regard d'une activité autorisée par le gouvernement». O.K., O.K., O.K.
Mme Grignon (Karine) : C'est
parce que ce n'est pas le même palier décisionnel, là.
M. Gaudreault : Je comprends.
Je m'excuse. Je n'avais pas... Je n'avais pas saisi la nuance. O.K. Mais ça
revient à ce que je disais tout à l'heure. Quand même, je demeure sur ma
position, dans le sens que je suis sensible au principe de la gradation, mais,
pour moi, la gradation est dans le type d'action. Est-ce qu'on limite? Est-ce
qu'on fait cesser? Est-ce qu'on fixe une norme particulière? Est-ce qu'on fixe
une condition? Une restriction? Une interdiction? C'est là, la gradation.
Moi, ce que je dis, c'est que c'est comme si, à
partir du moment où la science dit que ça n'a pas d'allure, le ministre n'a pas
le choix de grader. Puis après ça il choisit le niveau de gradation. Il peut
commencer par une norme. Après ça, il pourra peut-être limiter. Après ça, il
pourra peut-être faire cesser. La gradation est là.
Mais ce que je veux dire, c'est que, quand je
dis... La nuance entre le «peut» et le «doit», c'est que, pour moi, à partir du
moment où la science dit : Tel enjeu est dangereux pour la santé humaine,
disons, ou l'environnement, là, boom! ça déclenche immédiatement une action,
cette action étant en mode gradation. Je ne sais pas si vous comprenez bien ce
que je veux exprimer.
Donc, c'est pour ça que je dis : Le
problème n'est pas avec le limiter, le faire cesser, le fixer, la condition, la
restriction, l'interdiction, le problème est avec le «peut». Et c'est là que je
dis : Tant qu'à revoir puis à déplacer le 115.10.1 dans le 36, nous pouvons
nous poser la question à savoir si on ne doit pas mettre la coche un petit peu
plus haute et forcer le ministre à agir.
La Présidente (Mme St-Pierre) : M.
le ministre.
M. Charette : C'est des questions
qui sont toujours pertinentes, mais c'est un débat qu'on voit souvent dans un
projet de loi, et ce, peu importe le domaine, peu importe le ministère, le
débat «peut» ou «doit». Mais pourquoi la très grande majorité des textes
législatifs retiennent le «peut»? C'est que le principe aussi de la
responsabilité et de l'imputabilité ministérielle, derrière ça, il y a toute
l'expertise d'un ministère. Donc, on ne peut pas faire fi du cas précis qui est
devant nous. Il faut pouvoir évaluer un cas avec les particularités de ce
cas-là.
Et la réponse
ne peut pas tout le temps être la même dans toutes les circonstances. C'est
vrai en environnement, mais c'est vrai dans la très grande majorité des
circonstances. Et c'est la raison pour laquelle, dans bien des cas, c'est le
«peut» qui est retenu dans les textes législatifs. Il y a une distinction qui
doit être faite selon les particularités d'un dossier x et il faut savoir que
les dispositions, là, dans 36 demeurent extrêmement... c'est exceptionnel.
C'est des conséquences qui peuvent être graves. Donc, il faut avoir la
possibilité de l'évaluer au cas par cas et non pas systématiser une réponse,
là, qui serait donnée.
M.
Gaudreault : Je comprends. Je comprends, mais je demeure pas
convaincu. Je réfléchis à un amendement, Mme la Présidente, à ce
stade-ci. Mais peut-être que la collègue de Verdun peut prendre le relais, là.
La Présidente (Mme St-Pierre) : Mme
la députée de Verdun.
Mme Melançon : Bien, je suis plutôt
d'accord avec le député de Jonquière. Puis, bien que ce soit une décision qui
va être prise sur-le-champ, là, le devoir du ministre de l'Environnement, à
partir du moment où la science lui dicte
qu'il y a un événement nouveau qui créé ou qui cause des préjudices
irréparables pour l'environnement, son
devoir, son devoir, c'est de protéger l'environnement. Son devoir, c'est
justement de prendre les outils qui sont à sa portée et, bien entendu,
de pouvoir aller plus loin, puis de limiter, de faire cesser, d'interdire ce
qui est fait. Et je ne vois pas pourquoi il
peut, mais, si c'est son devoir, il doit. Je comprends, souvent, là, qu'il y a
ces tracas-là, lorsqu'on est au gouvernement, là, de dire, bon, «peut»,
«doit», mais, dans cet article-là, encore plus important, selon moi, comme il
s'agit d'un devoir du ministre... Et là je suis en train, moi aussi, là... on
est en train de regarder pour peut-être déposer un amendement ici. Je ne
vois pas comment le ministre, s'il est au courant qu'il y a préjudice
irréparable, ne bougerait pas. C'est son devoir, je le répète.
• (12 h 20) •
M. Charette : Il y a plusieurs
éléments là-dessus. Déjà un pour rassurer, là, le pouvoir d'ordonnance, il est
maintenu, là, et on peut le voir notamment à l'article 114 de la LQE. On va
aussi avoir l'occasion d'en discuter plus tard. Donc, le pouvoir d'ordonnance,
il est maintenu.
À partir du moment où
on n'a pas de prise en considération de circonstances ou de contexte, c'est là
où on peut amener un préjudice aussi qui est extrêmement important. La collègue
parle, à juste titre, des obligations que j'ai, mais j'ai
aussi l'obligation de faire en sorte que nos lois soient reconnues devant les
tribunaux. Et, si jamais on arrive avec un concept qui ne laisse pas place à
une prise en considération des éléments factuels à une cause, on sera déboutés.
Notre réglementation pourrait être remise en question.
Et là je vais
complètement, complètement à l'extrême avec un exemple bien précis mais qui
laisse entendre, là, que le manque de considération pour un paquet de facteurs
peut avoir des conséquences importantes au Québec. Une de nos principales
sources d'émissions, par exemple, en matière de GES, ce sont les alumineries.
C'est de nature connue, hein, c'est un de nos grands... ce sont nos grands
émetteurs. Mais, oui, la science nous le démontre, il y a une forte émission
qui émane de cette industrie-là, mais moi, autant à l'Environnement que... le
gouvernement ne peut pas, du jour au lendemain, dire : Bien, on ferme tant
que c'est une source importante de GES, on se dit plutôt : On travaille
avec l'industrie, qui est de très bonne foi dans le dossier, d'ailleurs, avec
de belles avancées, pour atténuer l'impact de ces émissions-là. Mais ça ne peut
pas être catégorique. Il y a un impact sur l'environnement. On empêche systématiquement
la poursuite de cette activité-là. Je donne un cas extrême avec les
alumineries, mais on pourrait le transposer à des milliers, des milliers
d'autres situations. Donc, c'est là où il y a plusieurs éléments.
L'ordonnance, là, le
pouvoir d'ordonnance, s'il est maintenu, je dois m'assurer qu'on a des lois qui
répondent au test des tribunaux puis
ultimement, à l'extrême, des exemples qui nous diraient : Bien, ma foi, on
va arrêter toute activité qui a un impact sur l'environnement, ce qui
n'a pas davantage de sens. Cependant, notre réglementation permet d'atténuer
ces impacts-là, mais, pour ça, il faut avoir la souplesse qu'il faut pour
considérer chaque cas pour ce qu'il est et avec les impacts qu'il a sur
l'environnement.
Mme
Melançon : Je m'excuse, Mme la Présidente, je suis en train de relire,
là, juste pour m'assurer... Et je comprends ce que le ministre dit, là. Je
pense que l'exemple est plutôt bon. Cependant, cependant, je pense qu'il peut
limiter à ce moment-là, parce qu'on est en train de trouver des solutions,
justement, pour les alumineries, je vais reprendre l'exemple des alumineries
là, où on sait qu'on peut faire maintenant de l'aluminium vert. Hein, on l'a
vu, ça a été... ça a été dit, ça a été
annoncé. Je pense que c'est une façon de limiter, ne serait-ce que d'octroyer,
justement, des subventions. Tout à l'heure, c'est ce que vous m'avez répondu,
c'est qu'il y a des subventions pour de la mise aux normes. Alors, je pense
qu'il y a des possibilités de faire de la mise aux normes.
Je crois tout de même
qu'à partir de nouvelles informations, et là je ne pense pas que ce soit
nouveau que de savoir qu'il y a une certaine... il y a des émissions avec nos
alumineries, je ne pense pas que... je ne pense pas que c'est de cela dont il
est question, c'est lorsqu'on apprend... Comme le disait tout à l'heure le
sous-ministre avec de la pisciculture puis qu'on ne savait pas qu'il y avait de
l'émission de phosphore à l'intérieur d'un cours d'eau, là, ça, c'est
totalement nouveau, c'est à ce moment-là où l'on doit faire cesser.
Et, écoutez, moi,
dans le devoir du ministre... Puis là on est en train de faire certaines
vérifications de notre côté aussi, principalement, je crois que c'est sur la
Loi du développement durable, là, je pense que le député de Jonquière avait vu
juste tout à l'heure, je pense qu'il y a un passage sur les devoirs du
ministre, et c'est ce que je suis en train de faire comme vérification.
Peut-être est-ce qu'on peut faire une proposition juste pour pouvoir aller un
peu plus loin? Alors, je peux aller plus loin et je dois aller plus loin aussi.
Alors, on va faire... on va faire nos vérifications, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
St-Pierre) : M. le député de Jonquière, vous m'aviez demandé la
parole, je pense?
M.
Gaudreault : Bien, je suis en réflexion sur la meilleure façon d'agir.
On regarde différents scénarios également de notre bord. Mais je ne suis pas en
mesure de... je ne suis pas en mesure de déposer, au moment où on se parle, un
amendement, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme
St-Pierre) : M. le député de Viau.
M. Benjamin :
Merci, Mme la Présidente. Donc, écoutez, j'arrive autour de cet article.
Peut-être que la question a déjà été posée, mais, pour mon éclairage, en fait,
au deuxième paragraphe, sur le délai de 30 jours, donc j'aimerais savoir,
en fait, pourquoi le 30 jours. Pourquoi pas 45, 60 jours? Pourquoi le
30 jours?
Mme Grignon
(Karine) : Le délai de 30 jours, c'est quand même un délai
standard, là, donc, notamment pour faire un appel devant le Tribunal
administratif du Québec, pour faire un appel devant le Bureau de réexamen. Donc, c'est le délai standard qui est retenu
généralement, là, pour prendre une action. Donc, c'est la raison du
30 jours.
M. Benjamin :
Donc, on comprend, à ce moment-là, que, donc, la décision, en fait, c'est
ce que je lis, la décision est valide, la décision du ministre est valide pour
30 jours. C'est un 30 jours qui est donné, à ce moment-là, au
promoteur, à l'entrepreneur pour pouvoir éventuellement... s'il songe à appeler
la décision du ministre?
Mme Grignon
(Karine) : Non. C'est la validité de la décision du ministre de
limiter l'activité ou d'imposer une condition. Donc, cette limitation-là va
s'appliquer pendant 30 jours. À la fin du 30 jours, il va devoir y
avoir une nouvelle décision du gouvernement pour faire perdurer la limitation,
en fait.
M. Benjamin :
Aussi, pour ce qui est de «ne donne lieu»... En fait, le dernier
paragraphe, M. le ministre, donc, «une décision prise en vertu du présent
article ne donne lieu à aucune indemnité de la part de l'État», est-ce que
c'est courant qu'il y a ce genre de formulation là dans des articles de loi?
M. Charette : ...question-là
tantôt, mais effectivement il y a d'autres cas d'espèce dans d'autres
ministères aussi. Donc, ce n'est pas du droit nouveau, ni par rapport à
l'environnement ni par rapport à d'autres ministères. Et,
l'article 36 qu'on a eu aussi l'occasion de mentionner tout à
l'heure, et on le voit dans le commentaire, là, on reprend le contenu des
articles qui sont déjà dans la LQE. Donc, ce n'est pas une notion, là, qui est
nouvelle.
M. Benjamin : Et, quand on dit,
toujours dans ce même paragraphe : «Prévaut sur toute disposition
inconciliable d'une loi», est-ce que
vous pouvez peut-être, M. le ministre, m'expliquer, en lien avec le paragraphe,
la portée de cette phrase?
M. Charette : Je sais que c'est une
terminologie davantage légistique. Avec consentement, on pourrait permettre à
la juriste de répondre.
M. Benjamin : Merci. Consentement.
Mme Grignon (Karine) : Donc, tout
simplement, tu sais, on peut le lire comme un moyen de disposition contraire,
là. Donc, c'est vraiment cette disposition-là, elle prévaut sur toutes les
autres, peu importe la lecture qu'on peut en faire, là. Donc, c'est cette
lecture-là : aucune indemnité qui va s'appliquer malgré tous les les
libellés qui existent dans toutes les autres lois.
M. Benjamin : Malgré qu'il ne
prévoie... En fait, à ce paragraphe, il n'y a aucune indemnité qui est prévue,
mais j'imagine qu'un recours, de la part d'un entrepreneur, au civil est
toujours possible, à ce moment-là.
Mme Grignon (Karine) : Oui, c'est
ça, c'est ce qu'on disait tout à l'heure. Ça n'empêche pas quelqu'un de
contester la décision même du ministre, là, de l'article 36, devant le Tribunal
administratif du Québec, là. On va le voir un petit peu plus loin, là, l'appel
est possible, effectivement.
M. Benjamin : Bien, en fait, ce que
je veux dire, ce n'est pas tellement la contestation, je veux dire, c'est le
recours civil pour demander des indemnités. Ce n'est pas tellement la
contestation.
Mme
Grignon (Karine) : Bien,
c'est ce que l'alinéa vise à empêcher, effectivement, le recours en
dommages.
M.
Benjamin : O.K. Donc, à ce moment-là, en adoptant ça, donc il
ne pourra pas y avoir de recours en dommages, donc, de la part d'un
entrepreneur, donc, qui s'estimerait lésé par une décision du ministre ou du
gouvernement.
Mme Grignon (Karine) : Exactement.
M. Benjamin : D'accord. Merci, Mme
la Présidente.
La Présidente (Mme St-Pierre) : Est-ce
qu'il y a d'autres interventions relativement à l'article 36? Mme la
députée de Verdun.
• (12 h 30) •
Mme Melançon : Bien, devant tout ce
qu'on vient de dire, tout ce qui a été discuté, moi, j'aimerais bien qu'on
puisse peut-être faire une proposition de quelque chose, mais ça va nous
prendre un peu de temps pour travailler de notre côté, là. Je veux bien tout
faire en parallèle, mais je ne veux pas faire n'importe comment, là. Qu'est-ce qu'on... Est-ce qu'on peut prendre un
peu de temps? Comment est-ce qu'on peut fonctionner à ce moment-ci?
La Présidente (Mme St-Pierre) : Dans
les possibilités, il y a de suspendre le temps que vous travaillez, ou on peut
suspendre l'article, ou... Je ne sais pas s'il y a d'autres possibilités, là,
je ne suis pas une grande, grande experte encore de la présidence. Mais vous
l'avez déjà fait, vous, la présidence, M. le ministre. Est-ce que vous suggérez
quelque chose?
M. Charette : Ce qu'on pourrait se
dire... J'aimerais mieux qu'on ne suspende pas parce qu'on a quand même un
travail... c'est-à-dire qu'on ne suspende pas les travaux, parce qu'on a un
travail tout de même colossal à faire. Mais, tant que c'est une petite gêne,
comme le collègue de Jonquière le disait, c'est-à-dire tant que ce n'est pas à
chaque article qu'on demande de le suspendre, je suis bien prêt de le
considérer. Donc, on pourrait suspendre cet article-là et passer aux suivants,
qui par contre, il faut s'y attendre, là, les subséquents, ont aussi une
incidence sur ce qui aura été dit dans 36. Donc, on ne peut pas tous les
suspendre indéfiniment, là, mais on pourrait passer à 37.
La Présidente (Mme St-Pierre) : Est-ce
qu'il y a consentement pour suspendre l'article 36? Consentement. Donc, M.
le ministre, l'article 37, s'il vous plaît.
M. Charette : Merci, Mme la
Présidente.
Donc : «37. Le gouvernement peut, sur recommandation
du ministre fondée sur les motifs prévus au premier alinéa de l'article 36,
pour des activités exercées dans le cadre d'un projet qu'il a autorisé en vertu
d'une loi concernée et pour la période qu'il fixe ou de façon permanente :
«1°
modifier les normes particulières ou les conditions, restrictions ou
interdictions régissant l'activité concernée;
«2° imposer toute nouvelle norme particulière ou
condition, restriction ou interdiction pour l'exercice de l'activité;
«3° limiter ou faire cesser l'activité.
«Une décision prise en vertu du présent article
ne donne lieu à aucune indemnité de la part de l'État et prévaut sur toute
disposition [irréconciliable] d'une loi, d'un règlement ou d'un décret.»
Le commentaire. Cet article reprend le contenu des
articles 115.10.2 et 115.10.3 de la Loi sur la qualité de l'environnement.
Il vise à prévoir différentes situations pour lesquelles le gouvernement serait
justifié d'intervenir sur une autorisation
déjà délivrée en raison de nouvelles informations portées à sa connaissance et
lorsqu'un préjudice irréparable ou une atteinte sérieuse est susceptible
de se produire.
Le deuxième alinéa précise au surplus qu'une
mesure prise par le gouvernement en vertu de cet article prévaut sur toute
autre disposition qui pourrait être prise... qui pourrait être considérée comme
inconciliable et qu'elle ne donne pas droit à une indemnité de la part de
l'État.
La Présidente (Mme St-Pierre) : Mme
la députée de Verdun.
Mme Melançon : Merci, Mme la
Présidente. Je vais aller surtout sur le deuxième alinéa, dans le fond :
Une décision qui est prise «en vertu du présent article ne donne lieu à aucune
indemnité de la part de l'État et prévaut sur toute disposition inconciliable
d'une loi, d'un règlement ou d'un décret», ce qui vient donc... Et là on parle
d'une décision gouvernementale, on est comme... Si je reviens, donc, à 36, dans
le dernier... non, ce n'est pas vrai, dans le troisième paragraphe... non, dans
le deuxième paragraphe, donc : «Le ministre peut exercer le pouvoir prévu
au premier alinéa au regard d'une activité autorisée par le gouvernement en
vertu d'une loi concernée, le cas échéant. Toutefois, une telle décision est
valide pour une période de 30 jours.» Là, on s'en va au 37 : La
«décision qui est prise en vertu du présent article ne donne lieu à aucune
indemnité». Donc là, on est rendus à la décision, on est après le
30 jours, ce que je comprends, on est passé au TAQ, au tribunal
administratif... Non, ça, le tribunal administratif, c'est juste si quelqu'un
veut aller en appel. Mais, à partir du moment où la décision est prise, ça veut
dire que le ministère de l'Environnement vient chapeauter toutes les autres
lois et la décision qui est prise par le ministère de l'Environnement est
finale. C'est ce que je comprends?
Mme Grignon (Karine) : ...ça prévaut
sur toutes les autres lois, donc la décision vaut uniquement pour les autorisations environnementales, comme on l'a dit
tout à l'heure. Mais, par rapport à l'autorisation environnementale, peu
importe ce qui est dit dans une autre loi, la personne n'aura pas de recours en
dommage contre l'État par rapport à cette décision-là.
Mme
Melançon : Donc, parce qu'on l'a vu à quelques reprises
depuis les trois dernières années, parfois, il y a des décisions qui
sont, je vais dire, bloquées, là, par le ministère de la Forêt, par exemple.
Bien là, à ce moment-ci, quand il y a une
décision qui est prise par le ministère et par le ministre de l'Environnement,
c'est la décision qui prévaut sur les autres ministères, que ce soit
Ressources naturelles, Forêts, Économie, ou autres. C'est ce que je comprends?
Mme Grignon (Karine) : Pour ce qui
est de 36, pendant la durée de 30 jours, oui. Pour ce qui est de 37, bien
là, les différents ministères ont leur mot à dire, là, évidemment, quand le
gouvernement prend sa décision.
Mme Melançon : Bon, c'est là que je
voulais aller. «Une décision prise en vertu du présent article ne donne lieu à
aucune indemnité de la part de l'État et prévaut sur toute disposition
inconciliable d'une loi, d'un règlement ou d'un décret.» Moi, quand je le lis
comme ça, je vois que ça prévaut sur tout le reste.
Mme Grignon (Karine) : Oui, une fois
que la décision est prise, oui, oui, tout à fait.
Mme Melançon : Mais la décision qui
est prise en vertu du présent article, ce serait la décision prise par le
ministère de l'Environnement?
Mme Grignon (Karine) : Ce serait la
décision prise par le gouvernement par rapport à un projet autorisé au terme de
la procédure d'évaluation environnementale, de prévoir une condition
supplémentaire pour l'exercice du projet autorisé, par exemple.
Mme Melançon : Donc, la décision, ce
n'est pas celle nécessairement en lien avec l'environnement, ça va être la décision
prise en lien avec l'ensemble de l'oeuvre. Donc, c'est une décision qui
devenait gouvernementale. Donc, il est possible que nous ayons
l'article 37 qui semble costaud à la lecture mais qui, dans les faits...
qui, dans les faits, nous rappelle qu'il y a des ministères qui peuvent mettre
une forme d'arrêt, de cran d'arrêt à la volonté dédiée au ministère de
l'Environnement. C'est ce que je comprends?
M. Charette : Je vais répondre de
façon peut-être un petit peu plus politique. C'est le cas de tout gouvernement.
Il n'y a pas un ministère qui est ministère de tout. La collègue a été
ministre, donc elle sait fort bien, lorsqu'il y a un dossier qui est présenté,
pour que ça devienne une décision gouvernementale... Parce qu'il y a des décisions qui sont propres à l'environnement, qui n'ont pas
besoin de monter au Conseil des ministres, on s'entend. Mais, pour certaines
autres décisions, ce n'est pas le ministère de l'Environnement qui fait foi de
tout, ça doit être passé au Conseil des ministres. C'est la même chose avec le
ministère de la Justice, la même chose avec le ministère de l'Éducation, la
même chose avec tous, tous, tous les ministères, il y a de ces décisions qui ne
sont pas du domaine de l'exclusivité du ministère qui est responsable du dossier.
Tout gouvernement fonctionne comme ça, et tout ministère est assujetti à ces
principes-là également.
Mme Melançon : Dans le fond, là, de
la façon dont on devrait lire le dernier paragraphe de l'article 37, c'est
que ça prévaut sur toute autre loi mais pas sur toute décision?
M. Charette : Bon, en fait, c'est...
Moi, c'est un commentaire politique que je faisais, je le disais, je ne... et,
quand je dis «politique», là, d'application politique, pas de politique
partisane. Moi, je ne suis pas placé pour faire des remplacements de mots au
niveau juridique, où le poids de ces nouveaux mots là, en matière légistique...
Donc, je pourrais ne dire ni oui ni non à la collègue, là. Moi, j'exposais le
principe politique général.
Mme Melançon : Mais j'imagine que la
juriste peut me répondre, par contre.
• (12 h 40) •
Mme Grignon (Karine) : Bien, c'est
vraiment par rapport à la décision, donc il faut prendre la décision. Le
gouvernement est un organe décisionnel avec plusieurs ministères, donc il y a
consultation pour prendre la décision, mais, une fois la décision prise, ça
prévaut sur tout autre loi, règlement et décret.
Mme Melançon : Mais pas sur toute
décision. D'accord, c'est ce que je comprends. C'est parce qu'on est en train
de se dire, hein, qu'on vient renforcer, qu'on... hein, on est là-dedans, là,
puis on parle du tronc commun. Moi, très honnêtement, j'aime beaucoup l'idée.
Il faut juste qu'on se rappelle, quand même... puis à la lecture de ce qui est
fait. Puis c'est pour ça que je voulais poser la question sur ce dernier
paragraphe là principalement, parce que ça semble aller très, très loin, quand
on le lit comme ça, là, avec le recul que nous avons ici, là, tous ensemble,
mais, quand on pose la question puis quand on va voir plus en profondeur avec
ce qui nous est proposé... Puis je remercie, bien sûr, la légiste, à ce
moment-ci, là, de pouvoir nous éclairer.
Ce que je comprends ici aussi, c'est que
l'article est repris intégralement de l'article 115.10.2 et 115.10.3 de la
LQE et qu'on va l'attribuer à... D'accord. D'accord. Merci.
M. Charette : ...de rassurer les
collègues. Naturellement, on n'est pas obligés de s'en tenir uniquement aux
commentaires des groupes qu'on a reçus, on a droit à nos propres réflexions et à
nos propres commentaires, c'est bien évident. Mais il n'y a pas d'enjeu, là,
qui a été soulevé sur 36 ou 37, par rapport aux questionnements, là, qui sont, encore une fois, très légitimes. Donc, le
«peut» et le «doit», là, le débat ou le questionnement qu'on a entre
nous, ce n'est pas un questionnement qui a été soulevé, là, au moment des
consultations et, à ma connaissance, pas davantage dans les mémoires, là, qu'on
a pu recevoir.
Mme Melançon : Mme la Présidente,
puis je le dis vraiment en tout respect, là, ça fait deux ou trois fois, là,
que le ministre revient avec ce type de commentaire là. Puis, à l'inverse,
lorsque je reviens avec l'idée de guichet unique,
qui pourtant a été soulevée à deux ou trois, voire même quatre reprises par des
groupes entendus en commission, qu'on a entendus en consultations
particulières, ça, ça a été évoqué puis... quand on revient avec l'idée de
mettre sur pied un guichet unique, de façon plutôt claire, bien, le ministre
n'adhère pas pour autant à l'idée. Donc, je pense que ça peut aller de part et
d'autre.
Puis je le
dis très respectueusement, M. le ministre, je pense que, oui, on peut arriver,
nous, avec ce qui nous fait vibrer,
bien sûr, à l'intérieur. Non, les groupes n'ont probablement pas porté
nécessairement notre attention là-dessus, mais ça s'appelle une étude
détaillée, et je ne suis pas certaine que les groupes ont passé, jusqu'à
présent, autant d'heures que nous à étudier le projet de loi. Je veux juste
qu'on reste prudents là-dessus, là.
M. Charette : Je
partage tout à fait ce que dit la collègue. C'est d'ailleurs ce que moi, j'ai
dit. J'ai dit : Il n'y a rien
qui nous empêche de déborder des préoccupations qui ont été exposées par les
groupes. Je l'ai dit d'entrée de jeu.
Pour ce qui est du guichet unique, on a eu
l'occasion de s'en parler, le principe. On travaille dans cette direction-là
pour simplifier la communication entre le promoteur et son analyste, et le
ministère qui a à traiter un dossier. Mais
ce n'est pas un concept qu'on peut introduire dans une loi. C'est un petit peu
ce qu'on s'est dit, là, il y a quelques jours. Pour le reste, on dit la
même chose.
La Présidente (Mme St-Pierre) : Alors,
il reste 30 secondes à cette portion, là, aujourd'hui, donc je pense que
nous allons ajourner.
La commission va ajourner les travaux sine die.
Et je vous souhaite un bon appétit. Merci.
(Fin de la séance à 12 h 45)