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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le mardi 27 octobre 2020 - Vol. 45 N° 78

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 65, Loi modifiant principalement la Loi sur la qualité de l’environnement en matière de consigne et de collecte sélective


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Table des matières

Auditions (suite)

Conseil québécois des entreprises adaptées (CQEA)

Association des détaillants en alimentation du Québec (ADA)

Mémoires déposés

Intervenants

Mme Joëlle Boutin, présidente suppléante

M. Benoit Charette

M. Richard Campeau

M. Frantz Benjamin

Mme Ruba Ghazal

Mme Méganne Perry Mélançon

M. Carlos J. Leitão

*          M. Raymond Gouin, CQEA

*          M. Jean-Sébastien Daigle, idem

*          M. Pierre-Alexandre Blouin, ADA

*          M. Miguel St-Pierre, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Dix heures quatre minutes)

La Présidente (Mme Boutin) : Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre les sonneries de leurs appareils électroniques.

Alors, la commission est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 65, Loi modifiant principalement la Loi sur la qualité de l'environnement en matière de consigne et de collecte.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. Mme Grondin (Argenteuil) sera remplacée par Mme Boutin (Jean-Talon); Mme Charbonneau (Mille-Îles) par M. Leitão (Robert-Baldwin); et M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine) par Mme Perry Mélançon (Gaspé).

Auditions (suite)

La Présidente (Mme Boutin) : Merci, Mme la secrétaire. Alors, aujourd'hui, nous entendrons le Conseil québécois des entreprises adaptées et l'Association des détaillants en alimentation du Québec.

Nous allons débuter avec... Je souhaite la bienvenue, d'ailleurs, aux représentants du Conseil québécois des entreprises adaptées, M. Raymond Gouin, directeur général, et M. Jean-Sébastien Daigle, membre du conseil d'administration, directeur général de La Société VIA.

Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter, ainsi que la personne qui vous accompagne, et à procéder à votre exposé. Même si je vous ai déjà présentés, je vous invite à vous représenter. La parole est à vous.

Conseil québécois des entreprises adaptées (CQEA)

M. Gouin (Raymond) : Bien, merci, Mme la Présidente. Merci aux membres de la commission.

Alors, je suis Raymond Gouin, le directeur général du Conseil québécois des entreprises adaptées, donc le CQEA. Et je suis accompagné de Jean-Sébastien Daigle, qui est membre du conseil d'administration du CQEA et président-directeur général de Société VIA, une importante entreprise adaptée de notre réseau.

Alors, commençons d'abord par parler un peu de nous. Le CQEA, c'est le regroupement de 39 entreprises adaptées actives dans 61 places d'affaires différentes, réparties un peu partout à travers le Québec. Les entreprises adaptées, ce sont des entreprises d'économie sociale dont la principale mission est de créer et maintenir des emplois adaptés dans des milieux de travail de qualité pour les personnes handicapées. Notre réseau crée près de 5 200 emplois, dont plus de 4 000 sont occupés par des personnes handicapées.

Les entreprises adaptées sont reconnues et accréditées par Emploi-Québec et elles reçoivent un soutien financier du Programme de subventions aux entreprises adaptées, essentiellement pour compenser la faible productivité de leurs travailleurs handicapés et pour leur garantir un encadrement et un milieu de travail répondant à leurs besoins spécifiques.

Enfin, les entreprises adaptées, ce sont bien plus que des milieux de travail, c'est des milieux qui permettent aux personnes handicapées de s'intégrer socialement, de développer leur confiance et leur autonomie et surtout de contribuer au développement de leurs communautés.

Parmi nos membres, cinq entreprises adaptées de notre réseau, donc, opèrent des centres de tri depuis la mise en place de la collecte sélective au Québec. Elles traitent annuellement près de 240 000 tonnes métriques de matières, soit près de 25 % des quantités traitées dans tout le Québec. Ces entreprises-là regroupent 714 travailleurs, dont plus de 500 sont des personnes handicapées. Les centres de tri qu'elles opèrent ont fait leurs preuves et sont parmi les plus innovants et les plus performants au Québec. Elles sont en effet des leaders dans l'implantation d'innovations technologiques, comme les lecteurs optiques et les séparateurs balistiques. Elles ont investi plus de 55 millions de dollars, au cours des 10 dernières années, pour améliorer leurs procédés et ainsi produire une qualité d'extrants répondant aux plus hautes attentes des marchés.

De plus, on constate que les centres de tri opérés par les entreprises adaptées obtiennent des prix de vente nettement plus élevés pour leurs matières une fois triées que le prix moyen obtenu pour l'ensemble des centres de tri. On considère que plus le prix obtenu est élevé, plus la matière est de qualité, donc plus les centres de tri sont performants.

Alors, notre position sur le projet de loi et sur la modernisation. D'entrée de jeu, nous tenons à signifier que nous sommes favorables à la modernisation de la collecte sélective et de la consigne. Bien que le Québec ait fait des pas de géant dans la dernière décennie, nous croyons que nos résultats en matière de recyclage des matières résiduelles sont perfectibles et donc que le système actuel nécessite certaines améliorations.

Pour nous, au-delà de ses visées environnementales, la gestion des matières résiduelles a été, est toujours et continuera toujours d'être un important vecteur de développement local et d'inclusion sociale. D'ailleurs, en 2010, le gouvernement du Québec, par l'entremise du ministère des Affaires municipales de l'époque, reconnaissait ce fait en précisant clairement qu'il est souhaitable de favoriser les entreprises d'économie sociale, notamment les entreprises adaptées accréditées par Emploi-Québec oeuvrant dans le domaine de la gestion des matières résiduelles pour soutenir le développement de l'économie sociale au Québec.

Sous l'impulsion de cette volonté gouvernementale affirmée, les entreprises adaptées se sont développées, elles ont innové, investi et se sont positionnées comme des leaders de leur industrie. Ce faisant, elles ont certainement contribué à améliorer la performance du Québec en matière de collecte sélective, mais elles ont également généré des retombées très significatives dans leur communauté en intégrant des centaines de personnes handicapées en emploi et surtout en réinvestissant 100 % de leurs profits pour améliorer leur productivité.

• (10 h 10) •

Pour que la modernisation donne les résultats escomptés, il sera nécessaire de redonner confiance aux citoyens. Les citoyens sont en effet très critiques lorsque les matières s'empilent dans la cour des centres de tri ou que les matières ne sont carrément... Il est très important de ne pas perdre de vue que les contenants, emballages et imprimés, une fois payés par les consommateurs et placés dans le bac de récupération, deviennent une ressource collective. Les citoyens sont en droit d'exiger qu'ils demeurent une ressource collective et que leur traitement se fasse en s'assurant de maximiser les retombées locales. Qui plus est, lorsqu'on peut dire au citoyen qu'en plus de participer à la lutte contre les changements climatiques, chaque matière qu'il met dans son bac de recyclage peut permettre de faire travailler des personnes handicapées, l'effet est alors carrément décuplé.

La modernisation de la collecte sélective s'organise autour de la responsabilisation accrue des producteurs de contenants, emballages et imprimés. Nous sommes d'accord, les producteurs doivent assumer leurs choix et contribuer à la gestion des matières résiduelles qu'ils génèrent. Toutefois, l'expertise acquise depuis 35 ans en matière de collecte sélective par les autres parties prenantes, notamment les entreprises adaptées qui opèrent des centres de tri, est importante et doit être mise à contribution de façon pérenne dans le processus décisionnel entourant la collecte sélective.

Actuellement, en collaboration avec l'ensemble des centres de tri non privés du Québec, nous sommes impliqués dans les comités de travail qui feront évoluer et avancer l'imposante démarche de modernisation. Nous souhaitons que notre implication dans le processus de gestion de la collecte sélective ne soit pas que temporaire. Nous considérons que notre expertise de gestionnaires de centres de tri est incontournable et essentielle.

Il est aussi probable que plusieurs contenants consignés, malgré la modernisation de la consigne, se retrouveront dans le bac de recyclage puis directement au centre de tri. Il sera nécessaire que les centres de tri soient compensés financièrement pour le traitement de ces matières. Par ailleurs, l'information et la sensibilisation devront nécessairement être coordonnées entre les deux systèmes, de collecte sélective d'une part et de consigne d'autre part, pour simplifier les messages et en optimiser l'efficacité.

En conclusion, on tient à dire que les entreprises adaptées qui opèrent des centres de tri tiennent à ce que la modernisation de la collecte sélective atteigne ses objectifs. Elles tiennent d'ailleurs aussi à exprimer clairement qu'elles veulent y contribuer. Les entreprises adaptées opérant des centres de tri ne craignent pas les objectifs de performance, ni la transparence, ni la reddition de comptes. Bien au contraire, elles tiennent à l'établissement de standards de qualité dans leur industrie.

Le modèle d'affaires des entreprises adaptées a fait ses preuves depuis plus de 35 ans et il est un véritable atout pour supporter le déploiement de la modernisation de la collecte sélective mais aussi pour en maximiser les retombées tant environnementales qu'économiques et sociales. C'est assurément également le modèle le plus respectueux des objectifs de développement durable et des fondements de l'économie circulaire.

Nous considérons donc que la modernisation de la collecte sélective et de la consigne constitue une occasion unique de déployer un important réseau d'entreprises d'économie sociale qui, en plus de pouvoir assurer efficacement la gestion des matières résiduelles, pourrait favoriser l'inclusion sociale et générer d'importants impacts sociaux dans les communautés. Nous recommandons donc que le projet de loi annonce clairement l'intention du législateur de soutenir ce modèle.

Plus concrètement, nous recommandons que le règlement qui découlera de la loi établisse des modalités applicables à la conclusion des contrats entre l'OGD et les fournisseurs de services qui incluraient la nécessité de tenir compte des impacts sociaux du fournisseur de services dans sa communauté locale.

Nous recommandons également que le règlement prévoie la mise en place d'un mécanisme permanent de consultation des centres de tri avant la prise de décision sur des sujets ayant une incidence sur leur opération, leurs intrants ou leurs extrants.

Nous recommandons aussi d'assouplir les dispositions transitoires du projet de loi pour permettre que les contrats liant une organisation municipale à un centre de tri arrivant à échéance avant le 31 décembre 2024 puissent être renouvelés pour une période maximale de cinq ans afin de justifier des investissements qui s'avèrent nécessaires pour maintenir le haut niveau de qualité des extrants qu'on produit actuellement.

On souhaite aussi assouplir les dispositions transitoires afin d'inclure la possibilité de prolonger les ententes de gré à gré entre les centres de tri et les organismes municipaux actuellement en cours advenant que l'échéancier du projet de modernisation de la collecte doive être retardé.

Nous recommandons de s'assurer évidemment d'une complémentarité entre les deux systèmes de collecte sélective et de consigne.

Et enfin nous recommandons de voir à ce que les entreprises adaptées puissent participer de façon pérenne aux discussions entourant la planification et l'opérationnalisation de la modernisation de la collecte sélective.

Alors, voilà, en résumé, notre position. Merci de votre attention. Et, bien sûr, on est prêts à échanger avec vous sur différents sujets.

La Présidente (Mme Boutin) : Je vous remercie, M. Gouin, pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. Alors, M. le ministre, la parole est à vous. Vous disposez de 16 min 30 s.

M. Charette : Merci, Mme la Présidente. Un temps que je partagerais avec mon collègue de Bourget. Messieurs, merci d'être avec nous ce matin, mais merci également pour le travail que vous accomplissez. Vous êtes accompagnés notamment, là, du D.G. des centres VIA. Vous n'avez aucune inquiétude à avoir avec l'implantation de la réforme que l'on veut implanter tout simplement parce que vous êtes déjà premiers de classe, en quelque sorte, en termes, justement, de services rendus, en termes de qualité produite, en termes de transparence, et autres. Donc, aucune inquiétude à y avoir de votre côté, vous êtes une de nos sources d'inspiration.

Et, vous l'avez mentionné, les règlements feront foi de tout par la suite, une fois le projet de loi adopté. Le projet de loi est essentiellement habilitant, ce qui fait que les éléments que vous souhaiteriez voir confirmés le seront davantage dans les règlements que dans le projet de loi lui-même. Mais déjà, merci de l'appui que vous signifiez à cette réforme au niveau de la modernisation de la collecte sélective, également de la réforme au niveau de l'élargissement de la consigne.

Vous avez naturellement abordé davantage le premier volet, c'est votre quotidien. Mais en quoi l'élargissement de la consigne pourrait-il être également favorable pour vos différents partenaires membres de votre association?

M. Gouin (Raymond) : Bien, merci, M. le ministre, de vos encouragements d'abord. Merci pour votre question aussi, puis je laisserai Jean-Sébastien compléter la réponse, mais on a déjà signifié aux organisations qui travaillent actuellement à la modernisation et de la collecte et de la consigne le fait qu'on est intéressés par évidemment la collecte, compte tenu de ce qu'on vient de vous exposer, mais aussi de la consigne parce qu'on est un réseau d'entreprises d'économie sociale qui est déjà présent à travers tout le Québec. Et on pourrait, comme réseau d'entreprises, être mis à contribution dans le cadre éventuellement du déploiement de certains centres de récupération des contenants consignés, donc de dépôt des contenants consignés. Nos entreprises voient des opportunités d'affaires également dans ce domaine.

Pour ce qui est de la complémentarité, évidemment, je l'ai mentionné tout à l'heure puis je vais laisser Jean-Sébastien donner un élément de réponse, mais il y a évidemment des contenants consignés, là, qui sont traités dans les centres de tri, alors donc un impact, évidemment, la modernisation de la consigne. Est-ce que, Jean-Sébastien, tu veux réagir à ça?

M. Daigle (Jean-Sébastien) : Au niveau de la question au niveau de la complémentarité des deux systèmes, en fait, je suis déjà persuadé que vous l'avez pris en ligne de compte et que vous allez le prendre en ligne de compte, c'est tout simplement qu'il y a des flux d'argent, des contenants, en fait, qui sont actuellement récupérés dans le bac bleu qui vont davantage transiter vers la consigne. Donc, c'est important pour nous que ce soit pris en ligne de compte dans l'équation puis dans toute cette transition-là, parce que c'est sûr que c'est des... ces contenants-là qu'on aura en moins, bien, c'est des revenus en moins. Donc, c'est juste de voir comment tout ça va pouvoir être travaillé, là, de façon à ce que ce soit complémentaire et efficace, tout simplement.

M. Charette : Et actuellement avez-vous une idée, dans vos centres, ce que ça représente comme source de revenus, les contenants qui sont consignés mais qui transitent vers vos installations plutôt que vers les centres de dépôt ou les fameuses... Pour vous, est-ce que c'est une source de revenus importante?

M. Daigle (Jean-Sébastien) : En fait, oui, c'est une source de revenus. C'est sûr que, si on parle de, par exemple... que ce soit l'aluminium ou, par exemple, les bouteilles d'eau, c'est des matières dont les prix de vente sont les plus élevés dans ce qui rentre dans le bac. On est présentement à l'étude, justement, à mesurer l'impact un peu plus concret, selon différents scénarios, de ce que ça pourrait représenter, mais je n'ai pas de chiffre à vous donner pour le moment.

M. Charette : Parfait. Parce qu'essentiellement les réformes qui ont été annoncées en début d'année visent à passer d'un petit peu plus de 2 milliards de contenants consignés par année à 4 milliards. Donc, on peut penser, oui, il y a certains éléments, qui sont à valeur ajoutée, qui ne transigeront plus de façon automatique vers vous, mais vous avez certainement un flot quand même assez important de contenants consignés qui vont quand même se retrouver dans le bac bleu, qui vont quand même passer par vos installations et qui pourraient constituer une source de revenus, là, non négligeable, là, pour vos installations et pour vos opérations.

M. Daigle (Jean-Sébastien) : Tout à fait. On en est conscients, exactement. On est conscients de ça.

M. Charette : Excellent. Et au niveau de la collecte sélective, maintenant, avec un centre de tri, effectivement, vous êtes plus directement interpelés. Là aussi, pour vous, il y a des opportunités intéressantes. Le fait qu'on établisse des standards de qualité, qu'on établisse des critères de transparence, ce sont des éléments avec lesquels vous êtes confortables?

• (10 h 20) •

M. Daigle (Jean-Sébastien) : On est très à l'aise. Dans les faits, on a toujours travaillé de cette façon-là avec nos partenaires municipaux, avec RECYC-QUÉBEC, Éco Entreprises Québec, etc. Puis, en même temps, bien, on trouve ça pertinent, justement, autant pour le citoyen qu'entre les centres de tri, d'être en mesure de connaître l'information. Puis souvent, tu sais, au niveau des médias, souvent, bien, il peut sortir des nouvelles qui sont plus négatives, et tout ça, on n'a pas toujours accès à l'ensemble de l'information.

Donc, cette transparence-là, je pense qu'elle est importante. Le citoyen le réclame, puis nous, on est très à l'aise avec ça.

M. Charette : Et pour ne pas accaparer tout le temps de parole, peut-être une dernière question. Pour ma part, j'ai le plaisir, naturellement, là, de suivre vos opérations, mais peut-être nous les résumer, pour celles et ceux qui vous connaissent moins. Dans combien de régions êtes-vous installés? Combien... Et la question s'adresserait à vous de VIA, mais également au président de votre association, voir un petit peu quelle est la répartition de vos effectifs à l'échelle du Québec, pour démontrer, là, qu'il y a déjà un réseau d'économie sociale qui est très, très actif au niveau de la collecte sélective et de tous les dérivés, là, des opérations.

M. Daigle (Jean-Sébastien) : En fait, je vais laisser M. Gouin répondre.

M. Gouin (Raymond) : Bien, en fait, je commencerais la réponse, mais Jean-Sébastien pourra compléter. Je l'ai mentionné tout à l'heure, il y a cinq entreprises de notre réseau qui sont des gestionnaires de centres de tri, mais plusieurs ou certaines de ces entreprises-là gèrent plusieurs centres de tri. Alors, on est...

M. Charette : ...les régions, s'il vous plaît. Dans quelles régions sont-elles établies?

M. Gouin (Raymond) : Oui, bien, on est particulièrement concentrés dans le centre et dans l'est du Québec, donc Drummondville, Thetford Mines, Lévis, Québec, Rivière-du-Loup, Saguenay, également Dégelis, Port-Cartier, aussi dans la région de la Mauricie à Saint-Étienne-des-Grès, qui est l'opérateur du centre de tri qui couvre toute la Mauricie. Alors donc, je vous dirais que tout ce qui est à partir du Centre-du-Québec vers l'Est-du-Québec, on est très présents dans cette région-là, un peu moins dans l'ouest. Mais ça fait partie des possibilités d'éventuellement étendre les opérations de gestion de centres de tri dans la région de Montréal, évidemment, puis dans l'ouest du Québec.

M. Charette : En fait, je vous posais la question... j'avais une bonne idée de la réponse, mais je vous posais la question parce que plusieurs se sont inquiétés, à travers les consultations, sur l'offre de services différenciée qu'il doit y avoir dans les régions plus éloignées des grands centres. Donc, vous êtes en quelque sorte l'incarnation de cette possibilité-là. Vous avez, comme organisation, eu la possibilité de vous établir, de pérenniser vos activités, non pas sans difficulté par moment, et c'est bien normal dans tout type d'industrie, mais vous occupez quand même bien le territoire, vous êtes en mesure de composer avec les différentes spécificités, là, des différentes régions du Québec.

M. Gouin (Raymond) : Oui, absolument. Puis c'est important que les gens sachent qu'ils existent déjà, les centres de tri, hein? Nos centres de tri sont dans les plus performants, les plus innovants du Québec et ils sont déjà installés un peu partout en région, nos centres de tri. Alors, on souhaite que les retombées soient maximisées dans les régions et dans les localités où on est. C'est dans notre ADN, comme entreprises d'économie sociale, de favoriser, optimiser les retombées dans nos collectivités, là. Alors, on est bien présents puis on souhaiterait l'être davantage.

M. Charette : Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Boutin) : M. le député de Bourget, il vous reste sept minutes.

M. Campeau : Merci. M. Gouin, M. Daigle, bonjour. Moi, quand je vous entends, M. Gouin, dire qu'on n'a pas de crainte de transparence, on n'a pas de crainte pour la reddition de comptes, ça fait tellement du bien d'entendre ça. Parce que ça ne se veut pas méchant, ces choses-là, ça se veut juste... pouvoir partager l'information. J'apprécie énormément ça.

Puis une autre chose que vous pouvez commenter, si vous voulez, mais moi, j'ai juste un autre commentaire, c'est... On a souvent entendu, en particulier la députée de Mercier, parler d'une transition juste, quand des emplois changeraient, etc. Et je me demande toujours, moi, mais je veux bien... mais c'est quoi, exactement, que ça veut dire, une transition juste? Et parfois c'est difficile. Et je trouve que, quand vous expliquez ce que vous faites et que vous tenez compte de l'aspect social, c'est comme si vous mettez la chair autour de l'os de ce concept de transition juste, et ça, je trouve ça extrêmement intéressant.

Vous mentionnez que vous voulez être consultés tout le temps, continuellement, et c'est très bien, mais, si je comprends bien, vous voudriez que ce soit dans la loi. Est-ce que j'ai bien compris?

M. Gouin (Raymond) : Bien, on souhaiterait, en fait... notre recommandation serait à l'effet que le règlement prévoie un système permanent de consultation. On comprend bien que l'organisme de gestion désigné sera majoritairement constitué de représentants des producteurs, donc de l'industrie, qui produisent les emballages et la matière à recycler, mais on ne veut pas que ces gens-là perdent de vue l'expertise qu'on a développée dans les centres de tri dans les 30, 35 dernières années, et qu'il y a donc une façon de s'assurer, sur une base permanente, par l'entremise du règlement, qu'un système de consultation soit mis en place pour s'assurer que, quand ils ont à prendre des... qui auront des impacts sur nos intrants, sur nos extrants, sur notre façon d'opérer, qu'on puisse être consultés et donner notre avis sur ces questions-là.

M. Campeau : ...déjà le cas, et vous voulez juste que ce soit maintenu, si je comprends bien.

M. Daigle (Jean-Sébastien) : Exactement. Exactement. On est impliqués actuellement, comme le disait M. Gouin tantôt, dans les comités, et tout ça, puis on l'apprécie énormément. Puis, tu sais, souvent, bien, les centres de tri, bien, on est plus près des citoyens. Puis, tu sais, on le répète souvent, un centre de tri, on peut faire des miracles, mais ça reste que ce n'est pas une boîte magique, c'est-à-dire qu'il y a des choses qui se font, mais il y a des choses que l'impact collatéral peut être plus grand, d'accepter ou de trier une matière que de ne pas le faire, sur les autres matières triées, par exemple. Donc, c'est tout simplement de pouvoir trouver un système qui permette de boucler cette boucle-là de façon pérenne dans le futur.

M. Campeau : Bien, je suis content d'entendre ça, parce que, dans le fond, au niveau des gouvernements, faire des règlements, c'est beau, mais, si on ne consulte pas, le règlement ne servira pas, il ne sera pas applicable. Alors, c'est important que vous soyez consultés.

L'autre chose, et c'est peut-être à moitié relié, mais vous avez mentionné que vous obtenez un prix de vente plus élevé. Si je me fie au mandat d'initiative sur le verre, c'est parce que vous avez des matières plus propres, c'est tout, c'est juste ça que ça veut dire, là, parce que... j'imagine. Est-ce que j'ai raison de dire ça?

M. Gouin (Raymond) : Bien, vous avez raison. En fait, ce qu'on a voulu illustrer par les prix qu'on obtient, c'est qu'évidemment plus on obtient des prix élevés sur la matière qu'on trie, donc sur nos extrants, plus ça démontre qu'on fait un travail de qualité, hein? La matière est de meilleure qualité, donc on est un centre de tri qui est plus performant que la moyenne.

Alors, oui, puis Jean-Sébastien pourra compléter sur la réponse, ce qu'on a comparé dans notre mémoire, c'est des chiffres qui concernent les fibres, donc les papiers, cartons, puis on a comparé les prix moyens à la tonne qu'on obtient pour les fibres dans nos centres de tri qui sont gérés par des entreprises adaptées versus la moyenne québécoise. Et on constate qu'on arrive à des prix moyens beaucoup plus élevés pour la fibre et on prétend que c'est la même chose pour les autres matières. Ça reste à comparer, il faudrait faire des comparaisons de chiffres.

D'ailleurs, on espère que la réforme ou la modernisation va nous amener à avoir beaucoup plus d'informations sur comment on peut bien comparer le niveau de performance des centres de tri les uns par rapport aux autres. L'accessibilité des données là-dessus n'est pas si bonne actuellement, c'est pour ça qu'on se rabat sur cette donnée-là. Mais, oui, on considère que nos centres de tri donnent de meilleurs produits finis, en bout de course, par rapport à la moyenne du Québec.

M. Campeau : Mais, quand vous parlez du prix de la fibre qui est plus élevé, est-ce que ça veut dire que le niveau de qualité est suffisant pour que ce soit recyclé au Québec?

• (10 h 30) •

M. Daigle (Jean-Sébastien) : Pour compléter, je répondrai à votre question, puis, pour compléter à ce qui a été dit précédemment, pourquoi on a choisi les deux dernières années et la fibre, simplement parce qu'on a parlé beaucoup de la crise du papier journal, la fermeture des marchés chinois, puis c'était beaucoup associé au papier mélangé, papier journal et carton. Ça représente quand même 60 % de ce qu'on met dans le bac bleu. Donc, c'est pour ça qu'on a comparé ces éléments-là, puis on juge que la crise était beaucoup associée à...

Est-ce que, là, on est en mesure de développer des marchés locaux? La réponse, c'est oui. On vend déjà beaucoup localement, là, que ce soit... Bien, les entreprises adaptées, là, à ma connaissance, tous les plastiques, verres, métaux, c'est vendu localement, cartons aussi. Au niveau du papier, effectivement, il y a une portion qui est exportée, une portion qui est faite localement. Nous, on est très ouverts à travailler localement.

Puis les marchés, bien, ça prend la bonne qualité puis ça prend des marchés qui sont prêts à prendre le type de matières qu'on a aujourd'hui, c'est-à-dire que, si on remonte il y a 10 ans, il y avait beaucoup plus de papier journal dans la matière qu'aujourd'hui. Donc, aujourd'hui, on doit travailler avec une matière où le papier journal est en diminution. Il y a beaucoup plus de carton. Donc, les transformateurs ou les papetières s'adaptent énormément de ce côté-là, puis nous, on collabore avec eux, puis je suis confiant qu'on va continuer à vendre localement de plus en plus dans les prochaines années.

M. Campeau : O.K. Je pense que mon temps est quasiment terminé. Alors, je trouve que c'est très inspirant comme présentation. Merci beaucoup pour votre présentation de ce matin.

La Présidente (Mme Boutin) : Merci, M. le député. Nous allons maintenant céder la parole à l'opposition officielle. M. le député de Viau, à vous la parole. Vous disposez de 11 minutes.

M. Benjamin : Merci, Mme la Présidente. Donc, bonjour, collègues membres de la commission. Donc, c'est un plaisir de vous retrouver ce matin. Donc, merci pour votre présentation, donc, et ainsi que votre mémoire aussi.

Écoutez, j'ai le goût de commencer à parler, avant de parler de la réalité des entreprises adaptées, de commencer à parler des personnes qui travaillent dans ce secteur-là puisque, donc, comme député de la circonscription de Viau, j'ai dans mon secteur, dans ma circonscription, j'ai beaucoup de personnes, notamment des personnes sourdes, et ce sont des personnes que j'ai déjà rencontrées, dont, pour eux, l'enjeu d'accès à l'emploi, à des emplois adaptés, c'est important. Comment se porte ce secteur-là actuellement, le secteur des entreprises adaptées, notamment en regard de la crise que nous vivons actuellement et pour les personnes vivant avec un handicap?

M. Gouin (Raymond) : Bien, écoutez, le réseau des entreprises adaptées est en perpétuelle croissance. Notre réseau se développe de plus en plus, puis on souhaite intégrer le plus possible de personnes avec des limitations dans nos entreprises. Écoutez, à chaque année depuis cinq ou six ans, il y a environ une centaine de nouveaux postes qui sont soutenus financièrement par le Programme de subventions aux entreprises adaptées, donc, qui nous permet d'intégrer plus de personnes dans notre réseau.

Mais c'est un domaine qui est complexe, l'intégration des personnes handicapées en emploi. Il y a différents programmes qui permettent à des personnes qui ont des handicaps de s'intégrer en milieu de travail. Nous, ce qu'il faut comprendre, c'est que notre programme vise à intégrer des gens qu'on considère ayant des contraintes sévères à l'emploi, donc des gens qui sont considérés comme ayant une certaine productivité, mais ils sont aussi considérés comme non compétitifs sur le marché régulier de l'emploi, donc des gens qui peuvent très difficilement s'intégrer sur le marché régulier de l'emploi. C'est pour ça qu'on crée les entreprises adaptées. Et on doit, nous, développer des secteurs d'activité dans lesquels on peut intégrer ces personnes-là de façon souple et adaptée, donc, des gens qui ont une capacité de travail mais auxquels il faut s'adapter en fonction de leurs capacités, de leurs types de limitations.

Je le disais tout à l'heure, nous, on considère qu'on pourrait toujours faire davantage. On intègre actuellement, je vous l'ai dit tout à l'heure, autour de 4 000 emplois qui sont accessibles à des personnes handicapées dans notre réseau. On aimerait faire beaucoup plus. On sait qu'il y a encore autour de 120 000 personnes qui vivent avec des contraintes sévères à l'emploi et qui sont bénéficiaires d'assistance sociale au Québec, donc d'aide financière de dernier recours. On pense qu'il y a certainement une certaine proportion de ces 100 quelque mille personnes là qui pourraient être réintégrées dans des emplois adaptés. Donc, on travaille dans ce sens-là, on souhaite en faire le plus possible, et le domaine de la collecte sélective est peut-être un domaine dans lequel... est sûrement un domaine dans lequel on pourrait en intégrer davantage.

M. Benjamin : Donc, est-ce que je comprends qu'au niveau de tous les secteurs que vous couvrez, le secteur de la récupération... Vous couvrez aussi le secteur de l'entretien ménager, de l'emballage. Vous êtes dans l'alimentation aussi, je crois, la manutention. Est-ce que c'est le secteur de la récupération qui est le secteur qui génère le plus d'emplois ou, du moins, est-ce que c'est le moins faible?

M. Gouin (Raymond) : Bien, je vous dirais que l'ordre dans lequel on vous les a présentés dans notre mémoire est l'ordre de priorité ou l'ordre d'importance. L'entretien ménager est nettement le secteur qui accapare le plus de notre main-d'oeuvre actuellement dans le réseau. La manutention et l'emballage, ou la sous-traitance industrielle, ou les activités spécialisées de diverses natures, c'est notre deuxième plus grand secteur d'activité en termes de nombre d'individus. La récupération vient ensuite avec 700 emplois, comme je disais tout à l'heure, et 500 qui sont des gens qui ont des limitations. Nos autres secteurs d'activité sont un peu moins importants en proportion.

M. Benjamin : À la page 8 de votre mémoire, donc, dernier paragraphe, vous dites qu'«il est primordial pour la réussite du processus de modernisation de la collecte sélective et de la consigne que le projet de loi qui en découlera annonce clairement la volonté gouvernementale». Sur l'enjeu de la modernisation des centres de tri, le segment technologique de cette modernisation-là, comment vous vous situez? Et faites-moi un portrait de la situation par rapport au fait que c'est un secteur... vous représentez un secteur qui crée des emplois pour des personnes qui ont des difficultés à accéder à l'emploi, parfois. Comment vous voyez les enjeux de modernisation technologique?

M. Daigle (Jean-Sébastien) : Je peux peut-être répondre à cette question-là. Dans le fond, comment fonctionne un centre de tri... toujours, je le diviserais comme en trois, mais il y a tout le temps une portion qui est ce qu'on appelle le prétri. C'est qu'on va enlever tout le matériel qui est hors normes, soit une matière qui ne devrait pas se retrouver dans le centre de tri, une matière qui est trop grosse, trop volumineuse ou qui pourrait briser les équipements. Donc, ça, c'est un tri qui est manuel, qui va toujours devoir rester manuel dans le futur.

Après ça, tu sais, comme on le disait, dans les 10 dernières années, on a investi 55 millions de dollars dans nos centres de tri. À chaque fois qu'on innove, on améliore la qualité. Les lecteurs optiques, les robots qu'on installe vont faire une super qualité, mais ça reste des robots, ce n'est pas intelligent. Ça veut dire, ça va travailler bien à 85 %, à 90 %, mais on a toujours besoin d'un contrôle de la qualité. Surtout, quand on veut élever nos attentes, élever notre niveau de qualité de tri, bien, c'est encore plus important. Donc, on va toujours avoir besoin de contrôleurs qualité. Ça, c'est des postes qui sont... c'est des tâches qui sont simples, répétitives puis adaptées à notre type de clientèle.

Puis finalement, bien, il y aura toujours des produits émergents. À tous les jours, le bac bleu évolue, c'est-à-dire ce que vous mettiez dans votre bac hier puis ce que vous allez mettre demain, ça va être différent en fonction de ce que vous allez consommer puis des nouveaux matériaux et emballages qui vont être mis sur le marché. Les centres de tri doivent s'adapter à cette réalité-là. Puis souvent, le tri manuel permet de s'adapter temporairement pour une nouvelle matière qui émerge ou des flux de matière qui évoluent dans le temps.

Donc, on ne peut pas, du jour au lendemain, dire : On installe un robot. Mais, demain matin, j'ai plus de pellicule plastique, de pellicule souple, par exemple, bien, j'ai la possibilité d'ajouter un, deux, trois, quatre trieurs. Oui, peut-être que, dans un an ou deux, là, je vais installer un robot pour le remplacer, mais, à ce moment-là, il y aura une nouvelle matière émergente qui va arriver. Donc, le tri manuel sera toujours important si on veut assurer un tri personnalisé de qualité.

M. Benjamin : Merci pour la réponse. Donc, l'autre question, c'est sur les enjeux des entreprises d'économie sociale. Donc, avant vous, donc, on a reçu des groupes qui sont venus nous rappeler, comme vous d'ailleurs, l'importance de l'économie sociale dans cet écosystème. Et, sur les enjeux, sur les questions d'économie circulaire, j'étais curieux à l'idée... est-ce qu'il existe une réflexion au niveau des entreprises d'économie sociale par rapport à l'économie circulaire, afin de créer un écosystème d'entreprises d'économie sociale sur les enjeux, sur les questions d'économie circulaire?

• (10 h 40) •

M. Gouin (Raymond) : Oui, bien sûr, il y a de la réflexion qui se fait. Le Chantier d'économie sociale du Québec, qui est au coeur de ces réflexions-là avec d'autres partenaires, bien sûr que l'économie circulaire est au coeur des réflexions. C'est une façon de maximiser les retombées et de mettre en place des entreprises d'économie sociale pour répondre aux enjeux de l'économie circulaire. Ce faisant, bien, évidemment, on maximise les retombées tant économiques, sociales qu'environnementales. Alors, les entreprises d'économie sociale, c'est dans notre ADN de faire de l'économie circulaire, de voir comment on peut réutiliser, comment on peut maximiser nos retombées dans nos communautés.

Et bien sûr que les grands partenaires du développement de l'économie sociale au Québec font des réflexions entourant l'économie circulaire, parce qu'on y voit des opportunités d'affaires. En économie sociale, il faut s'enlever de la tête que les entreprises d'économie sociale, sans vouloir être péjoratif, là, c'est des organismes communautaires qui sont dans les sous-sols d'édifice. On est des grandes entreprises qui font de l'entrepreneuriat, mais ce qu'on cherche à faire, c'est de maximiser les retombées de ce qu'on fait. Et on est sans but lucratif, donc on réinvestit l'ensemble de nos profits dans les communautés dans lesquelles on travaille. C'est ça, notre ADN et notre objectif. Alors, la collecte sélective et le système modernisé de consigne, pour nous, est une opportunité historique de déployer des entreprises d'économie sociale partout au Québec pour maximiser ces retombées-là.

M. Benjamin : Merci. À la page 14 de votre mémoire, donc, pour ce qui est des dispositions transitoires, en fait, vous demandez la possibilité d'assouplir les dispositions transitoires du projet de loi afin d'«inclure la possibilité de prolonger les ententes conclues de gré à gré entre les centres de tri et les organismes municipaux». J'aimerais peut-être avoir peut-être quelques explications par rapport à cette demande.

M. Gouin (Raymond) : Bien, en fait, je me limiterais en vous disant qu'on considère que l'échéancier de mise en place, de mise en oeuvre de la modernisation est un échéancier serré, hein? On a écouté des gens qui sont intervenus en commission avant nous qui disaient : C'est réaliste, mais serré. On est de la même opinion. On pense que c'est réaliste et serré et on a juste demandé qu'on inclue cette possibilité de prolonger les ententes de gré à gré advenant le cas où on serait obligé de retarder la mise en place définitive, essentiellement.

M. Benjamin : Merci beaucoup. Merci.

La Présidente (Mme Boutin) : Merci, M. le député. Nous allons maintenant donner la parole au deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de Mercier, vous disposez de 2 min 45 s.

Mme Ghazal : Merci, Mme la Présidente. Merci, messieurs, pour votre présentation. Ce que vous nous dites, dans le fond, c'est que l'économie sociale doit être... faire partie intégrante, dans le fond, de la réforme, de la modernisation du système de récupération et de recyclage. Il y a eu aussi, avant vous, Les Valoristes qui nous ont beaucoup... qui ont sensibilisé le ministre aussi à cette question-là.

Puis un peu partout dans ce que vous dites puis ce que je lis, il y a comme... ce que je vois, c'est que vous appelez à ce qu'on tienne compte puis qu'on vous écoute. Par exemple, vous dites : «Nous tenir à l'écart serait une perte d'expertise importante», et tout ça. J'aimerais savoir si, en ce moment, vous êtes suffisamment écoutés, réellement, pas juste dans les paroles mais dans les actions, et c'est quoi, votre principale crainte, là, avec cette réforme-là. Vous en avez nommé quelques-unes, mais principalement...

M. Gouin (Raymond) : Bien, écoutez, on est actuellement présents, comme je disais, avec l'ensemble des centres de tri, sur des comités de travail, parce que les entreprises adaptées comme telles ne sont pas ciblées pour avoir des représentants spécifiquement pour notre réseau à nous sur les comités de travail. Donc, on est dans le groupe des centres de tri non privés, donc, qui incluent aussi les régies intermunicipales et les autres modèles. Et la répartition des représentations s'est faite dans ce groupe de centres de tri non privés pour pouvoir être présents sur différents comités de travail. Donc, on y est. On n'y est peut-être pas autant à la hauteur qu'on souhaiterait y être. On espère que nos messages pourront être entendus sur les comités de travail les plus importants, mais, bon...

Puis je vous dirais que notre principale crainte, c'est qu'on ne tienne pas compte du fait que les entreprises... donc, qui étaient là dans les premières heures, où il n'y avait aucune rentabilité dans ce genre d'opérations là puis qu'aucune entreprise privée ne s'intéressait au tri à l'époque, bien, qu'on rejette du revers de la main cette expertise et ce travail acharné depuis 30 ans, et qu'on n'en tienne plus compte, et qu'on en vienne à donner des contrats pour gérer de la matière au plus offrant ou au moins cher, sans tenir compte de l'expertise qui a été développée puis de l'impact qu'on a eu dans les 35 dernières années dans l'ensemble du Québec.

Mme Ghazal : Merci. Puis, dans le fond, vous, vous dites...

La Présidente (Mme Boutin) : Merci beaucoup, Mme la députée. Je suis vraiment désolée.

Mme Ghazal : Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Boutin) : Nous allons laisser la parole au troisième groupe d'opposition. Je laisse la parole à Mme la députée de Gaspé.

Mme Perry Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, messieurs. Merci d'être là avec nous ce matin. Effectivement, tout ce qui est... le volet économie sociale ne semble pas être un réflexe pour les gouvernements nécessairement, là, de mettre en valeur... Moi, je le vois, dans la crise actuelle, à quel point elle joue un rôle important en matière de santé, qui pourrait être mis, disons, à contribution encore plus. Alors, je suis contente qu'on en parle dans le cadre de ce projet de loi là.

Justement, chez nous, en Gaspésie, c'est Actibec, et on a déjà eu, au bureau de comté, à faire affaire avec eux, là, pour le déchiquetage de dossiers, bon, à la passation des dossiers en 2018. Ça avait été une belle expérience. Et, de ce que je comprends, vous souhaitez qu'on consolide le réseau et qu'on puisse même développer le service là où ça pourrait être possible dans d'autres régions. Alors, ça, c'est un message qui est entendu.

Et je voudrais maintenant vous entendre sur vos relations, disons, avec les municipalités, là, où vous êtes déjà situés et comment on peut s'assurer d'une bonne coordination des opérations avec tous les acteurs, là, qui seront à contribution dans les deux systèmes.

M. Daigle (Jean-Sébastien) : Bien, je dirais, actuellement, les relations avec les municipalités vont très bien. Il y a beaucoup de municipalités qui sont très impliquées, en fait, dans la gestion des matières résiduelles. Pour nous, ce qui est important dans cette transition-là, c'est qu'actuellement, bien, les municipalités sont très près du service aux citoyens. Les centres de tri aussi collaborent dans la sensibilisation, là, disons, plus régionale, tout ça.

Puis il y a un point qui est important pour nous, c'est justement la qualité des matières entrantes, tu sais, dans toute cette modernisation-là, tout ça, s'assurer de faire le lien entre l'OGD, le citoyen, la municipalité qui procède à la collecte porte-à-porte et le centre de tri, parce qu'au final, peu importe la charte de matières qui sera acceptée et qui sera uniformisée, ça ne veut pas dire que la matière qui est sur la charte et la matière qu'on reçoit au centre de tri sera la même. Donc, pour nous, c'est hyperimportant. S'il rentre de la matière de qualité, bien, ça va être beaucoup plus simple d'en sortir de la matière de qualité.

Ça fait que, quand on parlait d'implication plus tôt, bien, on est super heureux d'être impliqués dans les comités de modernisation, comme le mentionnait Raymond, puis on souhaite que ça se poursuive par la suite et dans le futur parce que les matières vont continuer à évoluer et les défis vont être encore là. Après la modernisation, il y aura d'autres défis. Donc, c'est dans ce sens-là que, nous, c'est vraiment important, là. La municipalité, pour nous, c'est vraiment le lien avec le service aux citoyens, et tout ça, et, c'est ça, on souhaite maintenir une collaboration avec les municipalités dans tout ça.

La Présidente (Mme Boutin) : Merci beaucoup. Malheureusement, c'est tout le temps qu'on a. J'aimerais vous remercier, M. Daigle et M. Gouin, pour votre contribution aux travaux de la commission. C'est très apprécié.

Je vais maintenant suspendre les travaux quelques instants afin de permettre aux prochains représentants de prendre place.

(Suspension de la séance à 10 h 48)

(Reprise à 10 h 52)

La Présidente (Mme Boutin) : Alors, je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de l'Association des détaillants en alimentation du Québec. Alors, je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter ainsi que la personne qui vous accompagne et à procéder à votre exposé. La parole est à vous pour 10 minutes.

Association des détaillants en alimentation du Québec (ADA)

M. Blouin (Pierre-Alexandre) : Bonjour, Mmes et MM. membres de la commission. Merci, Mme la Présidente, de nous accueillir dans le cadre des travaux de la CTE sur le projet de loi n° 65. Je suis Pierre-Alexandre Blouin, président-directeur général de l'ADA. Je suis accompagné d'un de nos membres, Miguel St-Pierre, propriétaire du IGA Extra Saint-Pierre de Granby.

Nous vivons des temps pour le moins particuliers. La pandémie nous réserve des hauts et des bas depuis le début mars. On sent une grande dichotomie entre les entités gouvernementales qui peuvent se permettre de maintenir leurs échéanciers ambitieux pré-COVID et les groupes de la société civile comme le nôtre qui ne savent pas trop encore combien de temps ils pourront tenir le rythme. Impossible pour nos membres de faire abstraction de la pandémie. Ils sont constamment ramenés à leur réalité terrain. Évidemment, ils font figure de privilégiés face à d'autres secteurs comme la restauration qui, eux, sont littéralement aux soins intensifs.

Nous étions déjà face à une pénurie de main-d'oeuvre, mais, depuis la deuxième vague, nos membres doivent maintenant faire face à des plans de contingence. En l'absence de plusieurs employés, souvent en attente de résultats de dépistage, ils n'ont d'autre choix que de délaisser certaines tâches plus périphériques pour répondre à nos priorités opérationnelles qui sont les suivantes : bien entendu, l'approvisionnement en denrées, le service sous toutes ses formes pour pouvoir faire entrer et sortir les clients le plus rapidement possible, et puis l'application des mesures sanitaires, qui est bien plus que l'obligation de suivre les directives de santé publique. C'est avant tout une priorité pour protéger notre personnel, notre clientèle et la survie de nos entreprises. Nos établissements n'ont pas le droit à l'erreur, ils sont surveillés de toutes parts. Les détaillants en alimentation jouent un rôle crucial dans la société québécoise. Ils permettent aux citoyens de combler un besoin vital, se nourrir. Ils sont sur la première ligne durant cette pandémie, directement en contact avec les consommateurs et tous les risques qui y sont associés.

Nous avons pris acte des orientations prises par le gouvernement relativement à la collecte sélective et la consigne. Nous avons collaboré aux différents travaux de modernisation auxquels on nous a permis de participer soit directement par notre personnel à l'association soit par l'entremise de membres ou détaillants qui se sont portés volontaires malgré leurs opérations perturbées.

Nous sommes préoccupés par le fait que l'article 4 du projet de loi va à l'encontre du principe de responsabilité élargie des producteurs. Il donne au gouvernement le pouvoir, par règlement, de définir tous les paramètres des deux systèmes. Avec son approche de REP partenariat, la réforme de la collecte sélective nous semble adresser correctement les enjeux opérationnels du système modernisé. Cependant, dans la consigne modernisée, le principe de responsabilité élargie des producteurs semble, à certains égards, glisser de plus en plus vers une responsabilité élargie des détaillants. Il nous semble que le gouvernement doit s'assurer, dans la loi et non à travers les règlements ultérieurs, que la responsabilité de financer, opérer et l'atteinte des objectifs ne soient pas refilées à d'autres intervenants qui n'ont, au demeurant, pas droit de cité dans le principe de REP.

Aucun autre groupe au Québec n'est mieux placé que nous pour identifier les enjeux opérationnels reliés à la reprise de la consigne dans des commerces alimentaires. Nous consacrons plusieurs pages de notre mémoire à en expliquer les détails et offrir des alternatives plus efficaces. Pendant que de nombreux gérants d'estrade disent pouvoir identifier les opportunités de ce mode de collecte, ce sont nos membres qui ont littéralement les mains dans les rouages du système actuel.

Pour la vaste majorité des dépanneurs, des épiceries de plus petite surface, l'ensemble de la récupération s'effectue aujourd'hui manuellement. L'achat d'une machine, même partiellement subventionnée, n'est même pas une option, faute d'espace où l'installer dans l'aire de vente. Tout faire à la mitaine réduit l'efficacité, nécessite plus de temps, d'espace et coûte plus cher. L'élargissement annoncé de la consigne fera exploser le nombre et les formats de contenants à récupérer, trier, entreposer et manutentionner. La seule optique logique est l'automatisation maximale de tous les processus.

Les clients sont généralement bien contents de se débarrasser de leurs contenants dans un site où le service est efficace. D'autres préfèrent faire fi de la consigne et de déposer tous leurs contenants dans le bac de recyclage. C'est un gros avantage de notre système québécois, car, contrairement à bien d'autres provinces, la collecte sélective nous offre ici deux choix efficaces, soit aller récupérer le montant de la consigne ou encore l'offrir aux centres de tri, qui ne se priveront certainement pas de ces matières payantes. C'est pourquoi il faudra bien arrimer les deux systèmes et qu'il serait intéressant d'envisager un seul et même organisme de gestion qui puisse encadrer les deux systèmes.

Ensuite, il faut réfléchir aux 2,3 milliards de contenants supplémentaires. Les problèmes d'entreposage, de manipulation des contenants vont exploser. Nous ne voyons tout simplement pas comment il serait possible de classer, piler, empiler tous ces contenants de verre, Tetra Pak et autres contenants divers dans un environnement de détail alimentaire. Faut-il rappeler que la SAQ elle-même ne croit pas possible de récupérer ses contenants entre ses murs?

Mme la Présidente, nous invitons le gouvernement à envisager des sites dédiés indépendants des opérations de détail pour améliorer l'efficacité du système modernisé de la consigne et l'expérience des consommateurs. Pour paraphraser un de mes homologues de mardi dernier, le retour dans des sites de collecte dédiés spécialisés est, selon nous, la clé de voûte de l'avenir de la consigne au Québec. C'est d'ailleurs le cas dans la majorité des provinces canadiennes, et on vous invite à regarder ce qu'on a mis dans les annexes de notre mémoire à cet effet. Je cède la parole à mon collègue épicier, Miguel St-Pierre, qui abordera les derniers mois menant à la situation que l'on connaît aujourd'hui. Miguel.

• (11 heures) •

M. St-Pierre (Miguel) : Alors, bonjour à tous. Au plus fort de la première vague, l'ensemble du détail alimentaire avait arrêté la collecte des contenants consignés en magasin pour des raisons évidentes. La crise remettait en question l'ensemble de nos opérations. Je dois dire que les clients ont été très compréhensifs. Je n'ai eu que très peu de commentaires sur la consigne en dehors de ceux des producteurs.

Puis, sous les hauts cris de nos partenaires d'affaires brasseurs et embouteilleurs, au printemps, mes collègues détaillants et moi, de toute affiliation, avons commencé à organiser des collectes solidaires dans des stationnements, des arénas... des bénévoles, des partenaires communautaires et notre personnel. Certaines étaient organisées par plusieurs détaillants de même ville. Dans mon cas, j'ai fait une grande collecte sur trois fins de semaine en récupérant plus de 1,2 million de contenants consignés, ce qui nous a permis de remettre 60 000 $ à trois fondations de ma ville, à Granby.

Après tous les efforts déployés, c'est avec énormément de surprise que j'ai réalisé que mes partenaires qui manquaient pourtant de contenants refusaient de venir récupérer le fruit des efforts de notre communauté. Ils exigeaient que je transporte ces contenants à l'intérieur de mon commerce pour les récupérer. On parle de plus de 15 remorques de 53 pieds pleines à craquer. Ces corvées solidaires se sont multipliées. Certaines ont graduellement pris la forme de kiosques extérieurs disponibles selon des horaires étendus dans des stationnements de différents commerces.

Suite à votre appel pour un retour à la normale, M. le ministre, il était, pour moi, impensable de revenir à la normale à l'intérieur de mon magasin avec toutes les mesures en place pour assurer la distanciation sociale et les règles sanitaires imposées par la Santé publique. Je cherchais déjà, depuis plusieurs mois, une solution pour aider les consommateurs de mon coin à se départir facilement de leurs contenants consignés. Je n'avais ni l'espace dans l'entrée ni dans mon entrepôt. J'ai décidé, d'un coup de tête, d'aménager un site de collecte dédiée, un point de dépôt que j'ai complètement aménagé à mes frais, dans un local vacant de l'autre côté de mon stationnement. Le dépôt est entré en opération le 22 mai, soit deux jours après votre appel, M. le ministre. Encore une fois, malheureusement, j'ai eu droit à une collaboration chancelante de mes partenaires d'affaires. J'ai souvent dû les menacer de refuser des livraisons pour qu'ils acceptent d'aller récupérer les vides qui s'accumulaient, faut-il le rappeler, leurs contenants.

RECYC-QUÉBEC et mon député, le ministre François Bonnardel, ont visité mes installations, tout comme des milliers de Granbyens qui ont manifesté leur satisfaction de l'efficacité des installations. Depuis l'été, j'ai aussi été invité à travailler sur des comités techniques pour aider à l'élaboration des concepts des pilotes nécessaires pour évaluer la faisabilité de différents scénarios dans la consigne modernisée, pilotes qui ne sont toujours pas confirmés. On me dit que mon site pourrait être un des pilotes, mais je n'ai eu aucune nouvelle depuis le mois d'août, pour des raisons que je ne saurais expliquer. Je ne vois pas comment ceci, ce qui concerne mon site... il pourra être opérationnel, avec tous les équipements prévus, avant au moins deux mois, et on arrive aux fêtes, donc on devrait dire trois mois.

Sans être un pilote reconnu et ne bénéficiant que des machines standards à service frontal, je récupère présentement cinq fois plus de volume qu'en 2019, alors que mes ventes de l'autre côté du stationnement sont légèrement à la baisse par rapport à l'an passé. Les bénéfices commerciaux du modèle ne se sont, pour le moment, pas manifestés, au contraire. J'arrive à peine à couvrir les frais de main-d'oeuvre et d'électricité. Par contre, la convivialité et l'efficacité du modèle du dépôt ne font pas de doute. À ce jour, les clients répondent positivement à ce site dédié.

M. Blouin (Pierre-Alexandre) : Merci. Nous ne sommes pas dans le statu quo, Mme la Présidente, nous sommes à la recherche d'une réelle modernisation, pas un copier-coller des conditions d'exploitation désuètes de 1984. Peu importe l'exploitant éventuel de ces sites, qu'il soit un entrepreneur privé, une coopérative comme Les Valoristes, les écocentres, le Jour de la Terre ou je ne sais quelle autre organisation qui pourrait être tentée de récupérer la consigne, elle ne va la faire que sur la base d'un modèle d'affaires crédible. On n'a malheureusement ni modèle ni analyse économique. C'est ce à quoi il faut s'attarder et rapidement. Merci de votre attention. Il nous fera plaisir de répondre à vos questions.

La Présidente (Mme Boutin) : Merci beaucoup pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter le temps d'échange. M. le ministre, à vous la parole, vous disposez de 16 min 30 s.

M. Charette : Merci, Mme la Présidente. Temps de parole que je partagerai avec mon collègue de Bourget. Messieurs, merci d'être avec nous ce matin. Merci de réitérer que le statu quo n'était pas une option. On se place déjà dans un bel esprit de collaboration lorsqu'on évoque cette réalité-là. Vous allez me permettre de commenter quelques éléments, là, de votre présentation.

Vous avez fait référence à la SAQ, SAQ qui, effectivement, pendant longtemps, s'était opposée à la consigne, SAQ qui, aujourd'hui, est partenaire de la démarche avec enthousiasme. Je ne compte plus le nombre de fois où sa P.D.G. parle maintenant d'enthousiasme au sein de ses équipes pour parler de la consigne. Vous avez dit que la SAQ se refusait de récupérer sur place dans une majorité de ses... pas de ses franchises mais de ses succursales. En fait, sa P.D.G. nous a dit essentiellement le contraire, lorsqu'elle est passée devant notre comité, il y a quelques jours à peine. Sur leurs 400 succursales, elle a identifié essentiellement 300 succursales qui seraient en mesure de recevoir les contenants. Donc, trois quarts, 75 %, c'est quand même une proportion qui est non négligeable.

Il n'est pas dit cependant que ce sera directement dans le commerce lui-même, mais tantôt dans leur stationnement, tantôt dans le commerce, et c'est ce qui sera possible aussi aux membres de votre association. Le but n'est pas de contraindre, que la récupération se fasse à l'intérieur des murs, mais dans un environnement le plus rapproché possible.

Tout à l'heure, votre collègue, M. St-Pierre, disait qu'il avait eu des difficultés avec les partenaires qui doivent récupérer. Ça, c'est une autre problématique qui a été vécue dans la foulée de la pandémie, j'en conviens. Cependant, c'est un partenariat entre le détaillant et le producteur ou le récupérateur. Ce dernier doit pouvoir avoir accès à ce gisement-là. Effectivement, lorsque j'ai eu quelques cas comme ça, lorsque la matière est entreposée dans des 53 pieds — c'est l'expression qui a été retenue — pour le récupérateur, c'était parfois difficile, avec la machinerie habituelle, de pouvoir récupérer ce gisement-là.

Donc, le secret, que ce soit dans les centres de dépôt dédiés, que ce soit chez les détaillants eux-mêmes, ce sera d'avoir... et il y a déjà un protocole qui est établi à ce niveau-là, c'est-à-dire des spécifications qui doivent être respectées pour que vous, comme détaillants, puissiez favoriser la récupération de ce matériel-là.

Ceci dit, concernant les projets pilotes, M. St-Pierre, bonne nouvelle, vous faites partie des projets qui seront retenus comme projets pilotes. C'est vrai qu'il y a un petit retard sur l'échéancier que l'on se proposait au départ, mais c'est... bon, c'est... on va beaucoup à la vitesse des comités qui ont été mis sur pied, mais, oui, les efforts qui ont été faits par vous sont soulignés et constituent certainement une réponse possible au défi qui est devant nous.

Vous avez parlé également des corvées communautaires. Je sais que plusieurs détaillants, commerçants, auraient souhaité que l'on pérennise cette formule-là. Cependant, les constats sont assez clairs, on ne pouvait pas récupérer la même quantité de contenants, malgré les efforts de tous, à travers une corvée communautaire versus la façon régulière de collecter. Et il ne faut pas oublier que le citoyen a payé sa consigne. Donc, le citoyen a droit à être remboursé. Si le citoyen fait le choix de ne pas récupérer ce montant-là, c'est son choix à lui, mais on ne peut pas l'empêcher, par contre, de le récupérer. Donc, c'est ce qui nous empêche de miser, là, uniquement sur les corvées communautaires.

Vous avez fait référence à un des articles du projet de loi qui vous inquiète. Vous voyez, à travers le projet de loi, un non-respect du principe de responsabilité élargie des producteurs pour ce qui est de la consigne. Je vous rassure, à ce niveau-là, c'est un projet de loi qui est habilitant. Donc, il donne des pouvoirs au ministre de l'Environnement, mais pouvoirs qui ne seront pas forcément, dans chacun des cas, mis en pratique. Dans le cas de la consigne, oui, on a insisté sur ce volet parce que, s'il devait ne pas y avoir d'entente avec les détaillants, c'est là où on pourrait forcer le jeu, mais ce n'est pas notre intention. C'est la raison pour laquelle les comités sont mis en place, mais nous, c'est une réforme qui va continuer d'avancer. Donc, si éventuellement, et je ne dis pas que c'est le cas de votre association, loin de là, mais éventuellement, si la collaboration n'était pas au rendez-vous, c'est là où le pouvoir serait donné au ministre.

Et enfin, un dernier petit élément, parce que j'aimerais bien vous entendre sur les quelques précisions que j'ai apportées, les délais d'implantation. C'est une réforme qui est ambitieuse, oui, mais la très, très grande majorité des gens qui se sont prononcés devant nous, à travers cette commission, ont dit que c'était tout à fait réaliste. C'était le cas de l'intervenant tout juste avant vous. Serré, dans certains cas, c'est ce qu'ils ont dit, mais tout à fait réaliste. Il y a quelques joueurs qui, pour différentes raisons, voient ces délais-là comme étant trop serrés, mais je vous assure, là, qu'ils ont été établis de façon tout à fait consciente et en sachant la teneur du défi, là, qui s'offre à nous.

Donc, c'étaient les quelques points que je souhaitais aborder avec vous. Libre à vous d'y répondre. Sinon, j'ai mon collègue de Bourget qui sera intéressé à échanger avec vous, mais je trouvais important, là, qu'on apporte ces quelques précisions.

• (11 h 10) •

M. Blouin (Pierre-Alexandre) : Bien, en fait, vous avez fait beaucoup de commentaires. Merci, M. le ministre. Je vous dirais que la grande difficulté qu'on entrevoit, c'est qu'on est en train de développer un nouveau modèle. On a une ambition très grande au niveau du gouvernement, je pense, à améliorer les processus, à améliorer aussi l'expérience du consommateur à travers ce processus-là.

Ce qu'on vous dit aujourd'hui, c'est que, pour développer un modèle d'affaires, bien, il est très important de pouvoir avoir différents paramètres de disponibles. On comprend les pouvoirs que le gouvernement se donne, mais il faut comprendre que, pour un exploitant, il doit être assuré qu'il va être en mesure de supporter le modèle d'affaires qui est déployé. Ce n'est pas juste d'entrer une machine dans un établissement, de mettre en place des modèles en particulier, c'est d'être capable de l'exploiter. Il faut trouver la main-d'oeuvre nécessaire, il faut avoir les espaces nécessaires, il faut que les processus soient bien implantés. Il faut qu'à la fin le modèle d'affaires se tienne, que ce soit un entrepreneur privé, comme dans certains cas, c'est possible que ce soit mis en place, que ce soit un organisme communautaire. Il y en a certains qui ont manifesté, dans le cadre des consultations, leur intérêt à pouvoir exploiter des sites. On a même entendu les écocentres... les municipalités qui parlaient que les écocentres pourraient possiblement être des lieux qui pourraient s'équiper pour gérer les contenants consignés. C'est toutes des bonnes idées, mais encore faut-il les tester. Si on n'a pas testé ces éléments-là puis qu'on vient tout simplement dicter qui va récupérer les contenants, on va se retrouver avec beaucoup de sable dans l'engrenage du mécanisme.

Puis l'objectif, comme je vous le dis, M. le ministre — je ne sais pas si Miguel veut compléter au niveau de l'expérience de son site — c'est très important que l'expérience des opérateurs soit favorable. Parce que jusqu'à preuve du contraire on voit une bonne collaboration de la population dans ce premier site, mais est-ce que ce sera le cas dans l'ensemble des modèles? Il faut le tester.

M. Charette : ...à une autre intervention de ma part, ce qui nous aide beaucoup au Québec, c'est que ça a été implanté dans bon nombre d'autres régions au monde, et, au Canada, on est dans les derniers à suivre cette voie-là. Donc, on sait que les possibilités sont là, on sait que les débouchés sont là pour la matière en autant qu'on arrive à faire un bon tri à la source, et c'est le but de la réforme en question. Donc, on ne part pas de rien, au contraire.

Et, sur les délais, les comités sont en place depuis quelques mois, les projets pilotes vont voir le jour dans les prochaines semaines, et ça va nous laisser encore un minimum de deux ans avant l'implantation d'un premier volet de la réforme et quatre ans, sinon cinq ans pour ce qui est de d'autres types de contenants.

Donc, on ne vous lance pas dans le vide, on ne vous lance pas seuls avec ce défi-là. C'est un réseau qui est bien intégré. Autant le producteur aura un rôle à jouer, autant le détaillant aura un rôle à jouer, autant le conditionneur, par la suite, aura un rôle à jouer, mais on se laisse, en quelque sorte, quelques années pour y parvenir.

Et non, effectivement, ce n'est pas que d'installer une gobeuse dans un magasin, on en est bien conscients, mais l'expérience... Certains de vos membres ont justement, dans les autres provinces, ces obligations-là de récupérer certains types de contenants. Est-ce que c'est quelque chose qui vous met en confiance ou vous avez le sentiment que vous partez de rien malgré tout?

M. Blouin (Pierre-Alexandre) : Bien, en fait, je me sens obligé de corriger un peu, M. le ministre. Dans l'ensemble des provinces, il n'y a que la Colombie-Britannique où les détaillants alimentaires ont un rôle dans la collecte des contenants. On en parle dans les annexes de notre mémoire. Dans la très vaste majorité des provinces, ce sont des sites qui sont dédiés. Donc, on a bâti un modèle d'affaires pour récupérer les contenants consignés, offrir une expérience rapide, efficace et satisfaisante aux consommateurs.

Ce qui nous préoccupe, M. le ministre, vous l'avez dit tout à l'heure, s'il n'y a pas d'entente, donc, si l'une ou l'autre des parties refusait d'apporter des solutions, vous auriez la possibilité d'imposer, par exemple, le retour en magasin. Puis c'est la chose qu'on ne peut pas se permettre parce que, dans l'état actuel de nos opérations... puis on parle de la COVID, mais, au-delà de la crise de la COVID, on a des enjeux structurels de main-d'oeuvre dans nos magasins, on a des espaces qui sont toujours plus importants pour gérer ne serait-ce que la consigne actuelle. Il faut absolument qu'on trouve une solution pour arriver à mieux gérer toutes ces matières-là. Puis on pense que, pour l'expérience du consommateur, ce n'est pas d'imposer à des détaillants de faire le tri manuel de contenants, l'entreposage manuel de contenants, comme on a fait dans les corvées.

Parce que, quand vous disiez tout à l'heure que les détaillants... les récupérateurs avaient des difficultés à les récupérer, bien, ce que ça a voulu dire, c'est que les détaillants ont dû prendre ces remorques-là, dépiler les cargaisons puis refournir tout ça par l'entremise du magasin. Donc, ça a été manipulé trois ou quatre fois, puis c'est ce genre de situation là qu'il faut s'assurer de corriger dans la future modernisation.

M. Charette : Effectivement, je suis d'accord. Mais, en procédant de cette façon-là, vous saviez d'entrée de jeu que vous procédiez de façon non conforme pour la collecte et de façon non conforme pour que le conditionneur ou le récupérateur puisse récupérer tous ces contenants-là. Donc, vous le saviez que vous étiez en situation de non-conformité, à ce moment-là.

Autrement, pour ce qui est du retour en magasin, moi, je veux être bien, bien clair, ça a été dit à plusieurs reprises, pour ce qui est des nouveaux contenants consignés, non, il n'y aura pas d'obligation, mais plusieurs de vos membres trouveront certainement intérêt à récupérer ces contenants-là. Mais il ne faut pas penser que les contenants qui sont déjà consignés, qui sont déjà récupérés chez vous ne le seront plus par la suite. Cette responsabilité-là, vous allez la maintenir. Donc, tout ce qui est consigné et récupéré chez vos membres actuellement continuera de l'être par la suite.

Il ne faut pas voir, dans cet engagement-là, une possibilité de se décharger, en quelque sorte, d'un volet de vos responsabilités. C'est une responsabilité qui va vous revenir même après la pleine implantation de la réforme. Donc, c'est une petite précision que je souhaitais aborder, mais je sais que mon collègue a aussi un souhait d'intervenir, donc je lui passe la parole. Mais merci de votre présence avec nous ce matin.

La Présidente (Mme Boutin) : Allez-y, M. le député de Bourget. Il vous reste 3 min 30 s.

M. Campeau : Ce que vous mentionniez tantôt me faisait penser, quand j'ai demeuré au Texas, là-bas, quand on leur dit collecte sélective, tout ça, ça n'existe pas. Ils ne peuvent pas imaginer que ça existe. J'ai l'impression que c'est un modèle qui évolue, puis on est rendu là, on a... les citoyens le demandent, puis il faut trouver une solution pour y aller. Mais, après avoir visité certains arrières de magasins qu'on appelle les back-stores, j'avoue que c'est facile, assis autour d'une table où il n'y a pas de contenants, de dire aux autres quoi faire. Il faut donc vous écouter et voir que ce soit efficace.

J'aimerais vous rappeler que Reloop, la semaine passée, nous disait que la consigne et la collecte sélective ensemble, c'est la façon d'aller de l'avant. Ils ont mentionné aussi que le retour des contenants doit se faire près du lieu d'achat, question d'efficacité. C'est la meilleure façon de le faire. Je pense que vous avez un immense rôle à jouer là-dedans en rapprochant un de l'autre, et c'est à votre avantage. Parce que quelqu'un qui dirait : Bien, moi, je n'en veux pas, des contenants, risque de voir les consommateurs aller ailleurs. Alors, je pense que vous avez un avantage. J'imagine que vous avez regardé cet aspect-là.

M. St-Pierre (Miguel) : Je vais prendre parole. Pour commencer, juste pour répondre à M. le ministre concernant le refus de prendre les consignes par rapport aux brasseurs embouteilleurs, je tiens juste à préciser que, dans mon centre de dépôt, j'ai vécu la même chose. Même si on s'est assuré d'avoir une place à la réception, qu'il y ait un dock de réception qui respectait toutes les normes, ça a été difficile d'avoir une collaboration.

Ensuite de ça, pour ce qui est... ce que vous me posez comme question par rapport à... c'est sûr que d'avoir un site près où est-ce qu'il y a beaucoup de gens, où les gens vont être portés à aller, un centre-ville ou un centre d'achats, oui, je suis d'accord avec ça qu'il faut que ça soit avec... où que les gens... que ça soit accessible, mais de dire que ça soit absolument près d'une épicerie... Si je prends comme exemple mon centre de dépôt, je ramasse cinq fois plus de consignes que l'an dernier, mais mon chiffre d'affaires est légèrement à la baisse. Donc, de dire que ça apporte un avantage sur mes concurrents, j'ai la preuve avec mes statistiques que non, ça ne m'a pas apporté une plus-value, mais les gens, les citoyens répondent grandement au site dédié, adorent l'expérience. C'est rapide, ils repartent puis ils vont faire leurs commissions. Donc, je voulais juste vous répondre par rapport à mon site.

M. Campeau : Je comprends. Je pense qu'il me reste à peu près une minute. C'est drôle, je vais vous surprendre, mais je vais vous parler des circuits courts, parce que... On parle de L'Association des brasseurs, qui est citée en exemple en disant : Ils récupèrent les mêmes bouteilles, c'est du réemploi, et on a réussi là-dedans vraiment à avoir un système très performant.

Je vais vous parler de sensibilisation. Moi, j'ai toujours dit, puis le ministre le sait que je suis fatigant avec ça, qu'on n'atteindrait pas facilement nos cibles de baisse de gaz à effet de serre sans le support de tous. J'ai l'impression que vous en faites partie à ce moment-ci...

• (11 h 20) •

La Présidente (Mme Boutin) : M. le député, je suis vraiment désolée, je dois vous interrompre. Nous allons maintenant céder la parole à l'opposition officielle. M. le député de Robert-Baldwin, à vous la parole pour 11 minutes.

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, à mon tour de souhaiter la bienvenue... de vous souhaiter la bienvenue, MM. Blouin et St-Pierre, ainsi qu'à tous les collègues de la commission.

Donc, si je résume un peu ce que vous nous avez mentionné, c'est que vous... bon, il y a des enjeux en ce qui concerne la collective sélective, mais, pour vous, l'enjeu principal, c'est l'élargissement de la consigne, et donc comment on va faire pour récupérer tous ces contenants, il y a plusieurs milliards de nouveaux contenants qui vont devoir être récupérés, donc comment ça va se faire.

Un des plus grands, en termes de volume, détaillants au Québec de produits qui vont être consignés, la SAQ, donc les bouteilles de vin, est maintenant en faveur de la consigne élargie, mais ils ont aussi émis beaucoup, beaucoup de réticence quant à l'obligation de récupérer tous les contenants, question d'espace. Même s'il y a 300 succursales qui semblent être capables d'accueillir ces nouveaux contenants, ça ne se fera pas physiquement dans l'immeuble de la succursale, ça se fera probablement dans le stationnement, c'est encore à être défini. Donc, la SAQ est prête à collaborer, mais on est loin encore d'une solution de ce côté-là.

Vous avez soulevé aussi la question, et j'aimerais vous entendre un peu là-dessus, je ne dirais pas de cette contradiction, mais de cette tension qu'il y a entre une responsabilité élargie des producteurs pour leurs contenants et l'obligation des détaillants de récupérer les contenants qu'ils mettent en vente sur le marché. Je pense que cette tension est inévitable. Comment est-ce que vous pensez qu'on pourrait minimiser cette tension-là? Nous sommes tous d'accord qu'il faut aller vers une consigne élargie, mais il y a énormément de problèmes, d'obstacles opérationnels. Donc, comment est-ce que vous pensez qu'on pourrait minimiser cette tension inévitable entre responsabilité des producteurs et responsabilité des détaillants?

M. St-Pierre (Miguel) : Bien, idéalement, ça serait d'avoir une coopération des brasseurs embouteilleurs, être ouvert à aider les pilotes. Bien sûr, mon site n'est pas encore un pilote officiel. J'ai eu des réticences à faire récupérer mes contenants. Puis nous, les détaillants, depuis le début, on veut travailler à améliorer le système, on veut faire partie de la solution, et puis ce n'est pas en se faisant mettre des bâtons dans les roues qu'on peut arriver à faire avancer les choses. Donc, c'est sûr que ça prendrait une plus grande ouverture, puis on est conscients que les brasseurs, comme tous les autres producteurs, ont des... il y a des enjeux financiers qui sont rattachés à ça. C'est normal qu'ils soient réticents. Nous, ce qu'on veut, c'est... on veut juste participer à la solution, puis on est là pour donner un coup de main.

M. Leitão : Vous avez...

M. Blouin (Pierre-Alexandre) : Peut-être un petit ajout, M. le député, excusez-moi, je vais vous laisser du temps.

M. Leitão : Allez-y, oui.

M. Blouin (Pierre-Alexandre) : On a eu plusieurs autres types d'exemples. Je vous donnerais, par exemple, sur Le Plateau—Mont-Royal à Montréal, on a eu un détaillant qui voulait collaborer avec Les Valoristes pour implanter quelque chose à l'extérieur de son site. Donc, Les Valoristes allaient être le bras opérationnel de sa reprise de contenants, sauf qu'on lui a exigé de récupérer à l'extérieur et à l'intérieur du magasin en même temps parce que c'est la loi. Bien, c'est exactement le genre de chose qu'il faut arrêter. Il faut briser ces silos-là puis s'assurer que l'objectif, en bout de ligne, c'est de récupérer les contenants de la façon la plus efficace possible. Puis on ne veut plus avoir des situations comme ça. Merci.

M. Leitão : Très bien, merci. Et, quand vous dites qu'on lui disait que, bon, c'est la loi, il faut que tu fasses ça comme ça, ça vient d'où, ça? Donc, c'est quelle loi? Qui force ou qui voudrait forcer ce détaillant à faire ces choses-là d'une façon qui ne serait pas optimale?

M. Blouin (Pierre-Alexandre) : Dit de façon claire : Qui vend reprend. Donc, tout détaillant qui vend des contenants consignés est tenu de récupérer les contenants similaires dans son établissement. Ceci dit, il y a une géométrie variable déjà dans le système puisqu'il y a une foule de joueurs dont on parle dans le mémoire, que ce soient des magasins du dollar, des pharmacies, des centres de rénovation, des grands «big-box stores» qui ne récupèrent pas leur dû, puis tout ça revient dans la cour du détaillant alimentaire. C'est la raison pour laquelle on vous disait : On a besoin de prévisibilité, on a besoin d'analyses sur les modèles qui seront mis en place, parce qu'on ne peut pas, encore une fois, s'attendre que les détaillants d'alimentation vont faire l'ensemble du travail, notamment pour la SAQ.

M. Leitão : Donc, c'est un peu ce que vous craignez, que le poids de cette consigne élargie, la plus grosse partie du poids tombe sur vos épaules, en tant que détaillants alimentaires, pendant que les grandes bannières... on n'a pas besoin de les nommer, on sait tous qui sont les Costco et les Walmart de ce monde, que ces grandes bannières là puissent, donc, passer à côté ou ne pas subir le même genre de pression que vous subissez. C'est ça?

M. Blouin (Pierre-Alexandre) : En fait, il faut regarder le système dans son ensemble. On a actuellement à peu près 8 000 sites qui récupèrent des contenants pour la peine, on a 1 200 sites qui ont des machines récupératrices, mais on parle d'une consigne qui est récupérée avec un certain nombre de contenants. Là, on augmente de milliards de contenants le volume, les formats, les types d'équipements qu'il va falloir, l'espace qu'il va falloir pour aménager tout ça. Je pense que c'est l'opportunité de repenser le système dans son entièreté puis de mettre en place des vrais processus des années 2000, pas faire une pâle copie du modèle de 1984 où un petit dépanneur en région est obligé de tout trier à la main. Puis ça, c'est un système qu'on ne peut pas reproduire. Ça n'avancera pas le système.

Puis, encore une fois, l'expérience du client, s'il doit faire la file dans un magasin qui n'est pas équipé pour le faire, va être particulièrement exécrable. Donc, l'objectif, ce serait de multiplier des exemples comme le dépôt qui a été développé à Granby, mais on en a d'autres ailleurs, là, qui sont en attente de pouvoir être mis de l'avant, puis par la suite, bien, s'assurer que le modèle économique tient la route.

M. Leitão : Donc, vous préféreriez, bon, après analyse et après projet pilote concluant... mais vous semblez pencher vers une solution où il y aurait des sites dédiés où les consommateurs viendraient, donc, avec l'équipement et le personnel nécessaire, des sites dédiés pour accueillir les contenants consignés. C'est ça?

M. Blouin (Pierre-Alexandre) : Bien, je ne sais pas si Miguel voulait ajouter, mais je pense que son exemple est assez parlant.

M. Leitão : Oui. Et, M. Blouin, avant de... pardon, M. St-Pierre, avant de répondre, peut-être, j'ai trouvé ça assez intéressant, quand vous avez mentionné qu'avec votre initiative vous aviez récupéré, je pense, c'était cinq fois plus de contenants que l'année précédente, mais votre chiffre d'affaires n'a pas bougé, même légèrement diminué. Donc, en fin de compte, beaucoup de contenants qui ont été vendus ailleurs se sont retrouvés chez vous, ont été retournés chez vous. C'est ça?

M. St-Pierre (Miguel) : Oui, c'est ça. C'est ça. Bien, ça prouve l'efficacité du modèle. Et puis les gens, ce qu'ils aiment dans l'expérience client, c'est que c'est un endroit qui est propre. On a des machines, plusieurs machines à la disposition du consommateur. Il arrive, c'est très rapide, il est reparti. Puis ce n'est pas... il n'y a pas de file d'attente dans un hall d'entrée de magasin, quatre personnes en ligne à chaque machine pour déposer les consignes ou attendre au kiosque de courtoisie pour rapporter les bouteilles de verre, parce que présentement il n'y a pas de gobeuse qui gobe le verre, donc c'est tout trié à la main à l'arrière.

Donc, l'expérience client, elle est là, puis quand l'expérience client, elle est là, bien, les clients reviennent. Puis c'est cinq fois plus de clients qui passent dans le centre de dépôt qu'il en passait l'an dernier dans mon magasin. Ils ne viennent pas nécessairement plus chez nous, mais le modèle fonctionne.

M. Leitão : Donc, le modèle de récupération fonctionne, mais ça ne se traduit pas nécessairement par une augmentation de l'achalandage dans votre magasin. Les gens ne viennent pas nécessairement acheter plus dans votre magasin, même s'ils vont juste à côté pour déposer les contenants. C'est ça?

M. St-Pierre (Miguel) : Non, c'est ça.

M. Leitão : Très bien. Parce que ça a été mentionné qu'il y aurait... il pourrait y avoir là une bonne opportunité pour des détaillants d'aller chercher une clientèle additionnelle en installant ces facilités de dépôt. Mais je pense que ce que vous faites, c'est très bien, et il faudrait continuer, et vous avez raison, là, il faudrait... et je pense que le ministre l'a aussi clarifié, que votre projet pilote va devenir un projet pilote officiel. Donc, c'est tant mieux, et, si ça peut être répété ailleurs, très bien.

Peut-être une dernière question, parce que je vois que le temps file. Votre recommandation n° 6, vous souhaitez désigner un seul OGD, un seul organisme de gestion pour coordonner et opérer les systèmes de consigne et collecte sélective. Pouvez-vous nous dire, rapidement, parce qu'il ne reste pas beaucoup de temps, pourquoi vous pensez que ça serait...

• (11 h 30) •

M. Blouin (Pierre-Alexandre) : C'était dans le mémoire. Comme on expliquait dans le mémoire, M. le député, il y a déjà beaucoup de consommateurs qui utilisent le bac de recyclage pour récupérer leurs contenants. Donc, il va y avoir nécessairement, dans les habitudes des consommateurs, un certain nombre, un pourcentage qu'on ne peut pas évaluer encore de gens qui vont laisser, par exemple, leurs pintes de lait — bon, ils étaient à plus de 80 % — dans le bac aujourd'hui. Est-ce qu'on va réussir à amener 60 % ou encore l'entièreté de ces contenants-là sous consigne ou, encore, il va en rester dans l'autre système? Le fait d'avoir un même organisme de gestion pourrait beaucoup simplifier l'interrelation entre les deux systèmes, puis on invite le gouvernement à analyser ces scénarios-là. On comprend que, dans une responsabilité élargie, c'est la responsabilité des producteurs de décider de leur organisme de gestion...

La Présidente (Mme Boutin) : Merci, M. Blouin. Malheureusement, je dois vous interrompre et laisser la parole à la députée de Mercier pour le deuxième groupe d'opposition. Vous disposez de 2 min 45 s.

Mme Ghazal : Merci. Merci beaucoup pour votre présentation. Écoutez, vous avez raison quand vous dites que la loi actuelle n'est pas respectée, et essayer de rapporter un contenant consigné dans une pharmacie, vous l'avez dit dans votre mémoire... ce n'est pas le cas, et aussi pour la SAQ quand vous dites que... comment ça se fait que nous, on nous impose de ramasser tous les contenants, alors qu'on ne l'impose pas pour la SAQ, même si la P.D.G. a dit qu'il y en aurait 100 qui n'en ramasseraient pas? Moi, je me mets à la place des gens qui trouveraient ça dommage de dire : Bien, comment ça se fait que la SAQ, la mienne, n'est pas obligée de les ramasser, alors que dans d'autres, ailleurs, c'est le cas? Donc, il faut toujours se placer aussi du point de vue des consommateurs.

Mais moi, je pense que ce qui est important aussi, c'est de ne pas avoir un système mur à mur. Parce que, là, le gouvernement pense mettre en place 400 centres de dépôt. Ils ne pourront pas remplacer ces 400 points de dépôt, tous les dépanneurs et les épiceries qui sont en train d'en ramasser, qui sont des milliers à travers le Québec. Ça ne serait pas viable, c'est impossible. Il y a certains de vos membres qui veulent les ramasser parce que ça leur apporte un avantage concurrentiel, d'autres moins, comme monsieur vient de le dire. Donc, ce n'est pas d'avoir un système mur à mur mais un système beaucoup plus agile. Puis l'exemple des Valoristes est très, très parlant à cet effet. J'avais d'ailleurs déjà interpelé le ministre par rapport à cette situation, vu que je suis aussi députée du Plateau.

Moi, je voudrais vous amener à... Là, je ne sais pas s'il me reste beaucoup de temps, probablement pas. Pour votre recommandation 5, où vous dites que c'est important d'uniformiser la récupération des CRM, des CRU, on a eu le représentant d'ABQ qui nous a dit que les CRM, là, sont très importants, puis leur survie est en danger. C'est ce qu'ils nous ont dit. Et je voulais peut-être plus que vous nous expliquiez, je l'ai lu un petit peu dans votre mémoire, mais cette recommandation-là, ce que vous voulez dire par ça.

M. Blouin (Pierre-Alexandre) : Bien, il faut comprendre qu'on a, oui, la bière, donc la BSI, la bouteille standard d'industrie, mais on a aussi une foule d'autres contenants réutilisables en verre et contenants non réutilisables en verre. Puis actuellement on doit, par exemple, trier une foule de contenants debout. Entreposer tout ça côte à côte dans des caisses différentes, ça prend des espaces absolument démentiels. On vous expliquait tout à l'heure que le petit dépanneur qui doit faire ça à la mitaine, bien, le gros supermarché aussi doit faire ça à la mitaine.

Si on veut vraiment moderniser ce système-là, il faut penser à un autre modèle pour gérer tout ce qui est CRU de verre, par exemple, puis il faudra limiter le nombre de CRM qui peuvent être mis en marché. Ce n'est pas normal que, dans une même catégorie de produits, on se ramasse avec plusieurs dizaines de types de contenant différents. Puis ce n'est pas une question de volume. Il suffit qu'on ait quatre bouteilles d'un fabricant puis il va falloir qu'on parte une caisse quand même pour gérer ces contenants-là. Puis ça, ça devrait faire des années. Il y a quelques initiatives des microbrasseries pour arriver avec certaines ententes entre eux, des brasseurs, pour utiliser le même contenant. Mais là, il faut légiférer là-dedans, parce que c'est la récréation... ça oblige...

La Présidente (Mme Boutin) : Merci, M. Blouin. Je suis vraiment désolée, je vous ai laissé même plus de temps. Nous devons maintenant laisser la parole au troisième groupe d'opposition. Mme la députée de Gaspé, vous disposez également de 2 min 45 s.

Mme Perry Mélançon : Merci. Bonjour, monsieur. En fait, ce que vous nous dites, bon, le principe de ne pas appliquer de façon uniforme, aller dans la modulation, finalement, on l'a entendu. En fait, il y a une consultante qu'on a entendue ici, en commission, qui a une expertise, disons, à l'international, et qui connaît d'autres modèles, et qui parlait d'une façon de... un peu que l'obligation, pour un commerce ou un détaillant, de recevoir les contenants puisse être transférable, bon, à un commerçant, ou à un détaillant, ou à un centre de dépôt qui est à proximité — donc, il y a comme un périmètre d'établi — et qu'on puisse avoir des ententes de partenariat pour que ça se fasse, mais vraiment dans des petits secteurs. Alors, d'une façon, ça permet à ceux qui le souhaitent de pouvoir continuer à faire la récupération, la consigne, et ceux qui ne peuvent absolument pas, faute d'espace, faute de capacité, peuvent transférer ça avec, bon, un détaillant à proximité.

Alors, moi, je trouve qu'en région il y a quelque chose de vraiment intéressant à analyser cette possibilité-là. Et je voudrais vous entendre, si c'est une option qui serait envisageable pour vous. Parce que, bon, comme la SAQ, il y a 300 points qui pourraient le faire. Ça permettrait de garder un peu, là, cette pression-là ou de demander la participation, la contribution à ceux qui le peuvent, donc, d'avoir un effort de plus, et ceux qui ne le peuvent vraiment pas, bien, pouvoir transférer ça. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Blouin (Pierre-Alexandre) : Bien, ça mérite d'être analysé. Par contre, je vous pose la question : À ce moment-là, est-ce qu'on est dans une responsabilité élargie du producteur ou du détaillant?

Moi, je vous dirais que la grande inquiétude que j'ai, c'est qu'on se ramasse avec une modernisation à deux vitesses. On va avoir une modernisation automatisée dans les grands centres, là où on décide de mettre les capitaux, puis en région, on va faire une modernisation à la mitaine comme en 1984. On va dire aux petits commerçants ou on va dire à des établissements : Vous, vous allez faire le tri à la main puis vous vous arrangerez avec les troubles. Puis je pense que ce n'est pas acceptable pour la population du Québec qui vit en région, qui vit en ville, qui vit dans les centres périurbains. Il faut que la modernisation ait le même objectif à la grandeur du Québec puis que ce soit réellement une modernisation.

Mme Perry Mélançon : Bien, je vous entends, là. Je suis députée de Gaspé, alors je comprends bien les réalités des régions, je vous en assure, puis le contexte est le même. À Montréal, par exemple, une petite succursale de la SAQ, on l'a entendu, c'est le même problème, donc ce n'est pas... je ne veux pas qu'on parle de deux vitesses ici, mais plutôt de responsabilité qui peut être partagée. Alors, voilà mon opinion, puis j'entends votre commentaire sur cette option-là, parce que vous parlez de ne pas maintenir un statu quo mais de vouloir participer, alors ce serait une façon pour vous. Merci.

La Présidente (Mme Boutin) : Merci, Mme la députée. Malheureusement, c'est tout le temps dont nous disposons. J'aimerais vous remercier, M. Blouin et M. St-Pierre, pour la contribution aux travaux de la commission.

Mémoires déposés

Avant de terminer, je dépose les mémoires des personnes et des organismes qui n'ont pas été entendus durant ces consultations.

Et la commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die. Merci à tous.

(Fin de la séance à 11 h 37)

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