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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le mardi 4 octobre 2016 - Vol. 44 N° 82

Interpellation du député de Terrebonne au ministre du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques sur le sujet suivant : Les ratés de la gestion du Fonds vert


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Table des matières

Exposé du sujet

M. Mathieu Traversy

Réponse du ministre

M. David Heurtel

Argumentation

Conclusions

M. David Heurtel

M. Mathieu Traversy

Autres intervenants

M. Pascal Bérubé, vice-président

M. Ghislain Bolduc

M. Guy Bourgeois

M. Mathieu Lemay 

Journal des débats

(Dix heures deux minutes)

Le Président (M. Bérubé) : À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de procéder à l'interpellation du député de Terrebonne au ministre du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques sur le sujet suivant : Les ratés de la gestion du Fonds vert.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Non, M. le Président, il n'y a aucun remplacement.

Le Président (M. Bérubé) : Je vous rappelle brièvement le déroulement de l'interpellation. Dans un premier temps, l'interpellateur, M. le député de Terrebonne, aura un temps de parole de 10 minutes, suivi de M. le ministre pour également 10 minutes. Par la suite, des périodes de cinq minutes seront allouées selon la séquence suivante : d'abord, un député de l'opposition, ensuite le ministre, puis un député du groupe formant le gouvernement, et ainsi de suite. Il a été convenu que le deuxième groupe d'opposition interviendra lors de la troisième et de la sixième intervention. 20 minutes avant midi, j'accorderai 10 minutes de conclusion à M. le ministre et un temps de réplique égal à M. le député de Terrebonne.

Enfin, je vous rappelle que le débat ne peut, à moins d'un consentement, dépasser midi. Ainsi, comme la séance a débuté à 10 h 2, y a-t-il consentement pour poursuivre nos travaux au-delà de midi, jusqu'à 12 h 2?

Une voix : Consentement.

Le Président (M. Bérubé) : J'entends le consentement.

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Bérubé) : Consentement. Sur ce, M. le député de Terrebonne, vous avez la parole pour 10 minutes.

Exposé du sujet

M. Mathieu Traversy

M. Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, tout d'abord, il me fait plaisir d'être avec vous en ce mardi matin pour parler du Fonds vert. Nous voulons donc questionner le ministre aujourd'hui en ce qui concerne, donc, l'atteinte de ces objectifs de diminution d'émissions de gaz à effet de serre au Québec, le Fonds vert étant évidemment le vaisseau amiral pour être capable d'y parvenir.

Vous savez, M. le Président, ce n'est pas la première fois qu'on entend parler du Fonds vert dans l'actualité politique cette année. Nous avons eu la chance de rencontrer beaucoup d'acteurs au cours des dernières semaines et des derniers mois qui nous ont parlé du Fonds vert, de certaines problématiques, de choses qu'on pourrait faire pour améliorer la situation et nous voulons donc aujourd'hui voir avec le ministre où on en est, dans quelle direction évidemment nous allons et voir aussi l'état de la situation en ce qui a trait aux émissions de gaz à effet de serre.

Alors, avant de commencer, j'aimerais tout d'abord expliquer aux gens qui nous écoutent un peu ce à quoi ressemble le Fonds vert, parce que ça peut paraître peut-être un peu abstrait pour les gens qui nous écoutent à la maison. Donc, le Fonds vert a été créé en juin 2006 dans la foulée de la Loi sur le développement durable et c'est un fonds qui, d'ici 2020, pourra contenir près de 3,3 milliards de dollars, soit l'équivalent d'un budget annuel de 10 ministères à l'heure actuelle au Québec. 96 % des revenus qui sont à l'intérieur de ce fonds proviennent de la vente des droits d'émission des gaz à effet de serre, communément appelée le marché du carbone, et d'autres parcelles notamment avec les redevances sur l'eau. Donc, 100 % du financement de ce fonds doit être utilisé pour lutter contre les changements climatiques. Les deux tiers doivent aller au secteur des transports pour être capable d'y parvenir.

Le Fonds vert sert principalement à financer le deuxième plan d'action sur les changements climatiques, communément appelé dans le jargon parlementaire, M. le Président, le PACC 2013‑2020, et nous aurons l'occasion d'en discuter avec le ministre un petit peu plus amplement au cours des prochaines minutes. Nous avons également parlé, donc, du Fonds vert et de l'ensemble de ses partenaires, le Fonds vert, donc, qui est géré par le ministère de l'Environnement mais qui touche au total plus de 12 autres ministères, M. le Président, donc qui sont partenaires également, notamment le ministère des Transports, le ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles, que nous aurons l'occasion de cibler un petit peu plus peut-être, là, au cours des prochains échanges avec le ministre.

Actuellement, le Fonds vert ne va pas bien. Vous avez vu le Commissaire au développement durable en faire des critiques assez évidentes dans ses derniers rapports. L'Actualité et La Presse aussi nous ont commenté certains dérapages qui ont pu se produire avec le Fonds vert. Et, malgré l'ensemble des moyens qui y sont mis, jusqu'à présent, M. le Président, on est incapables encore de bien quantifier, de bien mesurer et de bien visualiser où nous en sommes avec la réduction de nos GES au Québec et savoir aussi surtout si nos cibles, celles du gouvernement, sont atteintes.

Alors donc, depuis le début du Fonds vert, on a vu que plusieurs projets ont été soumis, certains plus questionnables que d'autres. Le ministre pourra donc nous dire un peu où on en est et dans quelle direction on s'en va, au cours des prochaines semaines, sur la question. Je vous rappellerais qu'au début de l'année le premier ministre du Québec nous a demandé, comme parlementaires... et spécifiquement à son ministre de l'Environnement de réformer celui-ci. Je sais que c'est dans ses cartons. Et, d'ici à ce que l'ensemble de la réforme soit complété... j'imagine que déjà des actions ont été posées, on est très intéressé à savoir lesquelles. Depuis, donc, les dernières années, nous sommes toujours en attente de savoir où nous en sommes par rapport à la cible de moins 20 % de réduction de gaz à effet de serre pour 2020. Sommes-nous dans la bonne voie ou non? Nous aurons l'occasion d'éclaircir la situation dans quelques minutes.

Au niveau donc du Fonds vert, l'information disponible est un des éléments sur lesquels nous allons tabler aujourd'hui, M. le Président, pour essayer de faire un peu plus de transparence et essayer de voir où nous en sommes dans cette dynamique, qui a été soulevée par les acteurs au cours des derniers mois. Nous allons mettre l'accent aussi sur l'efficacité, sur les méthodes qui sont utilisées par le ministère de l'Environnement afin de rendre les critères plus clairs, afin de voir aussi de quelle façon la sélection est faite pour les mesures retenues dans le cadre du plan d'action. On va donc utiliser le temps de parole que nous avons, à l'opposition, pour essayer d'avoir quelques réponses sur ces questions.

Et finalement, M. le Président, je vous dirais que, dans le cadre des échanges que nous souhaitons avec le ministre, c'est d'en arriver, donc, à avoir l'heure juste sur l'état de la situation actuelle mais surtout aussi sur ses projections, donc, des prochaines années sur les émissions de gaz à effet de serre et d'avoir des points de repère clairs sur lesquels les parlementaires peuvent se baser pour savoir si le Québec est, oui ou non, dans la bonne direction. Et à l'heure actuelle, présentement, je dois vous avouer qu'on est un peu dans la grande noirceur en ce qui a trait, donc, à l'état réel de la situation. Plusieurs données ont été rendues publiques par le gouvernement fédéral, notamment au niveau des émissions qui sont faites par l'ensemble du Canada mais aussi des estimés en ce qui concerne le Québec. On aimerait aussi avoir l'heure juste sur la situation québécoise. Le ministre a peut-être des données avec sa large équipe de plusieurs fonctionnaires et de plusieurs collaborateurs dans son ministère. Donc, nous sommes intéressés à avoir un peu l'état de la situation.

Et les cibles, pour nous, sont importantes, M. le Président, parce qu'elles sont garantes d'un travail cohérent mais surtout d'un travail efficace, optimal et qui apporte des résultats souhaités, si nous voulons que, suite à la COP21, où le ministre a pu participer, et l'opposition officielle aussi, nous puissions réussir à contribuer, nous aussi, à notre façon, à cette lutte aux changements climatiques et que le Québec puisse continuer à y apporter sa contribution, une contribution qui est appréciée, mais une contribution qui peut toujours faire mieux, M. le Président.

• (10 h 10) •

Le Président (M. Bérubé) : Merci, M. le député de Terrebonne, Je cède maintenant la parole à M. le ministre pour une période de 10 minutes.

Réponse du ministre

M. David Heurtel

M. Heurtel : Merci, M. le Président. À mon tour de saluer les collègues.

En matière de lutte contre les changements climatiques, le leadership du Québec a été reconnu à plus d'une reprise au Canada et à travers le monde notamment par l'Organisation de coopération et de développement économiques, la commission canadienne sur l'écofiscalité, l'ancien vice-président des États-Unis et prix Nobel de la paix, M. Al Gore, ou encore le New York Times.

Au cours de la dernière décennie, nous avons mis en oeuvre des politiques novatrices qui campent une vision cohérente et intégrée d'une société innovante et décarbonisée.

Le Québec s'est notamment doté, en 2006, d'un plan de lutte contre les changements climatiques d'envergure, le Plan d'action 2006‑2012 sur les changements climatiques, le PACC 2006-2012, auquel a succédé le Plan d'action 2013-2020 sur les changements climatiques, le PACC 2013‑2020, lancé en juin 2012. Pour la première étape, 2006‑2012, le Québec a réussi à atteindre et même surpasser la cible de réduction des émissions de GES qu'il s'était fixée pour 2012, soit une réduction de 6 % par rapport au niveau de 1990. En effet, le dernier inventaire des émissions de GES du Québec démontre que nous avons réduit nos émissions de 8,5 % en 2012. Si nous avons été capables de concrétiser de telles réductions, c'est parce que nous nous sommes donné les moyens de nos ambitions notamment en créant le Fonds vert et en déployant le Plan d'action 2006‑2012 sur les changements climatiques.

Pour la deuxième phase, soit celle de 2013 à 2020, l'essentiel des revenus du Fonds vert proviendra du marché du carbone, l'outil préconisé par le Québec pour contribuer directement à l'atteinte de ses cibles ambitieuses de réduction d'émissions de GES pour 2020 et 2030. Notre marché est considéré comme l'un des plus efficaces au monde. Lors de la conférence de Paris, le secrétaire général de l'OCDE, M. Angel Gurria, a observé que le marché du carbone Québec-Californie constituait un exemple à suivre dans le domaine de la tarification carbone et de la réduction d'émissions de GES. De plus, dans son éditorial du 19 janvier dernier, le New York Times a confirmé le leadership et le statut de pionnier du Québec en matière de lutte contre les changements climatiques en faisant état du système de plafonnement et d'échange de droits d'émission de gaz à effet de serre qu'il a instauré et lié à celui de la Californie.

Lié à celui de la Californie depuis le 1er juin 2014, il le sera bientôt à celui de l'Ontario, qui a adopté un projet de loi en ce sens au printemps dernier. Nos deux provinces regroupent plus de 50 % de l'économie canadienne et plus de 60 % de la population du Canada. Rappelons que le Mexique, l'Ontario et le Québec ont signé, à la fin août, une déclaration commune afin d'accroître leur coopération en matière de lutte contre les changements climatiques. Par cette déclaration, les trois partenaires souhaitent approfondir leur collaboration sur les systèmes de plafonnement et d'échange de droits d'émission de gaz à effet de serre. Cette signature démontre que les gouvernements choisissent de plus en plus cet outil pour garantir des réductions d'émissions de GES.

Qui plus est, la Chine, forte de ses sept projets pilotes, a annoncé la mise en place de son marché pour 2017, et le Québec et les partenaires chinois envisagent une entente de partenariat. De plus, leurs représentants sont venus deux fois déjà au Québec pour s'enquérir de notre expérience. La rencontre entre le premier ministre du Québec, Philippe Couillard, et le premier ministre du Conseil des affaires d'État de la République populaire de Chine, Li Keqiang, le 23 septembre dernier a été l'occasion de réaffirmer l'intérêt des deux gouvernements pour une collaboration climatique.

Au Québec, la totalité des revenus du marché du carbone est versée au Fonds vert et entièrement réinvestie dans la mise en oeuvre du PACC 2013‑2020. En effet, lutter contre les changements climatiques ne veut pas seulement dire réduire les émissions de GES à court terme, mais aussi investir dans la recherche et le développement de projets qui mèneront à des réductions de GES à plus long terme. Cela veut dire assurer la résilience de notre société aux impacts des changements climatiques, ce qui ne peut se faire sans améliorer nos connaissances et agir de manière à mieux protéger l'environnement naturel. D'ici 2020, nous prévoyons des revenus de l'ordre de 3,3 milliards de dollars pour soutenir nos efforts de lutte contre les changements climatiques. Le PACC 2013‑2020, qui se décline en plus de 150 actions mises en oeuvre en collaboration avec 12 ministères et organismes du gouvernement du Québec, pose certes un défi du point de vue de sa gestion.

À la question : Est-ce que la gestion du Fonds vert peut être améliorée?, la réponse est : Certainement. Le 5 février dernier, le gouvernement annonçait ses intentions de proposer une révision en profondeur de la gestion du Fonds vert, qui est un levier très important pour le développement durable du Québec, et il doit respecter les trois grands principes de gouvernance, qui sont la rigueur, la transparence et la reddition de comptes. Le 7 juin dernier, j'ai présenté à l'Assemblée nationale le projet de loi n° 102, loi modifiant... sur la qualité de l'environnement afin de moderniser le régime d'autorisation environnementale et modifiant d'autres dispositions législatives notamment pour réformer la gouvernance du Fonds vert, qui propose notamment la création du Conseil de gestion du Fonds vert.

Notre désir est que la nouvelle gouvernance du Fonds vert permette une reddition de comptes plus complète et une communication centralisée, en plus d'assurer une plus grande cohérence et une plus grande coordination des projets soutenus par les différents ministères. Le Conseil de gestion, dont la gouvernance reposera sur une gestion par projets axée sur les meilleurs résultats liés directement à l'atteinte des cibles de réduction d'émissions, aurait comme mission de conseiller le ministre sur les programmes, les projets ou les activités financés par le Fonds vert, d'évaluer leurs performances en fonction de chacun des volets du fonds et de recommander au ministre les ajustements requis pour favoriser une meilleure performance. Au final, nous devrons avoir l'assurance préalable que ce sont les projets qui auront le plus grand impact qui seront mis en oeuvre.

Sur le seul plan de la réduction des émissions de GES, les objectifs du Québec sont ambitieux : réduire nos émissions de 20 % sous le niveau de 1990 d'ici 2020, de 37,5 % d'ici 2030 et de 80 % à 95 % d'ici 2050. Nous avons certes fixé la barre haute et nous en sommes conscients, mais nous n'avons plus le choix, nous devons agir. Nous avons tous les outils en main pour les atteindre. Merci, M. le Président.

Argumentation

Le Président (M. Bérubé) : Merci, M. le ministre. On va maintenant entamer la période d'échange. M. le député de Terrebonne, vous avez la parole pour un maximum de cinq minutes.

M. Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, j'aimerais tout d'abord commencer, donc, l'échange avec le ministre en ce qui a trait donc au Fonds vert sur notamment les actions qui ont été ciblées dans le cadre, donc, du rapport du Commissaire au développement durable, et dans lequel aussi l'opposition officielle a fait des recherches au cours des dernières semaines, donc des actions dans lesquelles plusieurs interrogations restent toujours sans réponse, des actions dont l'absence d'indicateurs et le manque de transparence sont au rendez-vous, M. le Président.

Donc, nous aimerions tout d'abord vous mettre un peu la table en vous disant que nous avons évalué donc quatre ministères, particulièrement celui... du ministère des Ressources naturelles, donc, de l'Agriculture, des Transports et également le ministère de l'Environnement, avec différents programmes qui sont gérés par le Fonds vert. Dans ces programmes, certaines actions, certaines critiques ont été émises. Nous avons des actions qui, malheureusement, n'ont pas d'indicateur ou que les indicateurs sont caviardés, à l'heure actuelle, ou à déterminer, les données sont insuffisantes pour suivre les indicateurs. On a également des actions, M. le Président, qui n'ont pas de cible, 40 % des actions qui n'ont pas de cible, ou qui n'ont pas de réduction d'émissions de gaz à effet de serre ou qui est dite impossible ou inefficace — c'est comme ça qu'on les a qualifiées — à calculer ou à répartir au niveau du territoire québécois ou hors Québec. On a 35 % des actions qui ont des programmes soumis à l'incertitude causée par la situation économique ou encore que le prix du carburant, la possibilité de fermeture d'entreprise, la participation aux programmes... ou de l'incertitude quant à savoir si la mesure sera maintenue, budgétée suffisamment ou tout simplement si le budget sera entièrement octroyé. On a également des actions en ce qui a trait, donc, à l'absence d'indicateurs qui nous donnent, dans le fond, des données qui sont difficiles de fournir des projets structurés ou novateurs ou encore les projets acceptés ne sont pas commencés ou que l'atteinte des objectifs environnementaux semblerait retardée. Nous avons aussi 15 % des actions, M. le Président, qui ont été ciblées comme ayant des modalités qui permettent, à l'occasion, des situations abusives en regardant des dépenses présentées ou dont la facture pour le financement du fonds est refilée aux consommateurs lorsque possible.

Donc, au niveau des problématiques, on a une absence d'indicateurs et on a des commentaires négatifs qui sont assez parlants.

Au niveau du manque de transparence, de rigueur et de contradiction dans les redditions de comptes, M. le Président, on a notamment noté qu'au MAPAQ, le ministère ayant le moins complété les fiches de suivi... dispose du moins de données, donc, sur 535 pages obtenues par loi de l'accès à l'information, que le ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles est le ministère le plus opaque, avec un caviardage qui semblerait systématique des fiches de suivi en particulier pour la réduction des gaz à effet de serre. Donc, encore là, incapable de mesurer ou de quantifier les résultats de ces cibles. Et les cinq motifs les plus évoqués pour le refus justement de cette reddition de comptes sont souvent les renseignements commerciaux, l'avis ou recommandation par un membre du personnel ou un consultant ou encore l'analyse prédécisionnelle...

Nous avons aussi 20 % des actions, donc quatre actions sur 22, qui ont des données budgétaires qui se contredisent ou qui... où il existe des écarts budgétaires allant jusqu'à plus de 10 millions de dollars entre les données des fiches de suivi et les sources d'information publique sur le site du ministère de l'Environnement. Donc, des fois, on sent qu'il y a un manque de concordance ou peut-être c'est une question de calcul comptable. 25 % des actions ont des fiches de suivi qui ne précisent pas la date de leur mise à jour. Donc, on a, M. le Président, beaucoup de pain sur la planche.

Alors, j'ai quelques questions pour le ministre afin de démêler un peu tout ça. J'aimerais savoir tout d'abord : Comment le ministre explique-t-il que, deux ans après le rapport de juin 2014, 40 % des 22 actions évaluées n'aient toujours pas d'indicateur à déterminer ou que les données sont insuffisantes pour déterminer les indicateurs? Et finalement, M. le Président, pourquoi autant de cibles de GES sont caviardées dans les documents que nous pouvons consulter, alors que la réforme de la gestion du Fonds vert vise principalement la transparence? Et, puisqu'il me reste encore quelques secondes, bien, j'irais avec une troisième question pour le plaisir : Comment le ministre peut-il expliquer aussi que 40 % des 22 actions évaluées n'ont pas de cible ou... dont la réduction d'émissions de gaz à effet de serre est dite impossible ou inefficace? Alors, comment on peut corriger cette situation?

• (10 h 20) •

Le Président (M. Bérubé) : Merci. Et, M. le ministre, vous avez le loisir de répondre pour cinq minutes.

M. Heurtel : Merci, M. le Président. D'abord, le député a mentionné, là... j'ai pris en note rapidement, là, plusieurs différents pourcentages, là — j'en ai noté : 40 %, 35 %, 15 %, 20 %.

M. le Président, je m'interroge sur : De quoi on parle exactement? Sur quels documents on fonde ces pourcentages-là? Et est-ce qu'on peut les avoir, M. le Président? Parce que c'est très difficile pour nous de répondre premièrement à la question telle qu'elle est formulée parce que ça semble être basé sur une analyse qu'a faite le député ou l'opposition officielle. Moi, je ne l'ai pas vue, cette analyse-là, alors c'est très difficile pour nous d'arriver, à brûle-pourpoint... parce que je comprends qu'il semble y avoir eu énormément de travail qui a été fait dans cette analyse-là. Ce qui aurait été peut-être utile, c'est qu'on reçoive cette analyse-là, qu'on reçoive les documents qui sont le fondement des affirmations du ministre pour qu'on puisse... pas du ministre, pardon, du député pour qu'on puisse les analyser nous-mêmes, les valider et pouvoir, justement, dans un esprit de transparence, pouvoir répondre aux questions.

Alors, M. le Président, c'est ma première interpellation, alors je ne sais pas si c'est un échange continu ou il faut que je remplisse mon cinq...

Une voix : ...

M. Heurtel : O.K. Bon. Alors, je comprends de vos symboles et de vos signes que je dois remplir mon cinq minutes. Je vais continuer.

Une voix : ...

M. Heurtel : Je vais continuer.

Ce qu'il faut bien comprendre, M. le Président, c'est que, dans le contexte, la mécanique actuelle de la gestion du Fonds vert, c'est que le ministère de l'Environnement perçoit l'argent et ensuite l'argent transite par le ministère des Finances et est distribué ensuite aux 12 ministères. Et il y a des ententes de gestion qui sont convenues entre le ministère de l'Environnement et les différents ministères et, dans ces ententes-là, il y a des livrables, il y a des objectifs de réduction d'émissions de gaz à effet de serre. Et donc c'est dans ce contexte-là qu'on tente de gérer le Fonds vert avec la structure actuelle.

Au niveau des résultats de cette gestion-là, il y a des rapports annuels. Alors là, il y a eu un rapport final sur le premier plan d'action sur les changements climatiques, le PACC 2006—2012, il y a eu le tout dernier rapport annuel et le 2013-2014 qui a été rendu public, tout ça dans un objectif de transparence et de faire un suivi sur les résultats qui ont été obtenus par les différents projets qui ont été financés par le Fonds vert, mais il faut bien comprendre que, dans la structure actuelle du Fonds vert, chaque ministère est responsable ultimement de la gestion de son enveloppe sectorielle. Alors, quand le député me parle de gestion au MERN, de gestion MAPAQ, de gestion en Transport, des projets précis, je vais lui dire tout de suite qu'il va falloir qu'il s'adresse directement à ces ministères-là, parce que, la façon que la structure actuelle de la gestion du Fonds vert est conçue, ce sont ces ministères-là qui prennent les décisions, font les choix en vertu des orientations du plan d'action sur les changements climatiques et en vertu, ultimement, des ententes de gestion qui sont convenues sur le travail qui est fait sur la base de l'enveloppe sectorielle qui est envoyée aux différents ministères.

Puis je rappellerai au député aussi que les rapports du Vérificateur général... il y en a eu deux, là, il y a eu celui de 2014 et celui de 2016, ces deux rapports-là couvrent une période qui comprend la période de septembre 2012 à avril 2014, alors que le Parti québécois formait le gouvernement. Et il faut bien comprendre aussi que le cadre de gestion actuel, que nous sommes en train de réformer avec le projet de loi n° 102, bien, ne semblait pas du tout déranger le Parti québécois lorsqu'il était au pouvoir, parce qu'il n'a fait aucun effort pour réformer la gouvernance du Fonds vert, contrairement à nous, qui avons fait le choix de moderniser la gouvernance du Fonds vert avec le projet de loi n° 102. Alors, il va falloir comprendre aussi pourquoi, aujourd'hui, ça choque le PQ mais que ça ne le choquait pas lorsqu'il était au pouvoir. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bérubé) : Merci, M. le ministre. On passe à un représentant du parti ministériel. Je reconnais le député de Mégantic.

M. Bolduc : Merci, M. le Président. Je voudrais tout d'abord reconnaître le ministre, vous, M. le Président, et mon collègue et les collègues de l'opposition pour nous permettre, ce matin, d'avoir un débat sur les soi-disant ratés de la gestion du Fonds vert.

Je pense qu'à première vue, d'après ce que j'entends du ministre, le premier raté qu'il y a eu là-dedans, il a été au PQ, durant les années 2013‑2014, lorsqu'ils ont été au pouvoir et qu'ils n'ont rien fait. Il y a un problème de synchronisation, je pense, à prime abord, puis je pense que c'est bien important de le faire.

Je vais, à prime abord, aussi mentionner que nous avons, à l'automne 2015, avec le ministre, eu des rencontres et des discussions très intéressantes sur un livre vert qui s'appelle Moderniser le régime d'autorisation environnementale. Il s'est fait un travail, là, où on a eu et reçu énormément de consultations, d'avis d'experts. Et le contenu de ce document-là, que les membres de l'opposition ont en main, a permis de nous donner une direction globale qui va nous servir dans l'élaboration du projet de loi n° 102, qui s'en vient, mais nous a servi aussi à faire une mise en situation qui est très importante. Puis c'est le gouvernement actuel qui a fait ça. Donc, je crois que le gouvernement n'a pas attendu que les oppositions se lèvent pour nous dire que la gestion des systèmes n'est pas parfaite et qu'elle a certains éléments, et on est d'accord avec ce principe-là, mais le point le plus important qui doit être fait ce matin, c'est que nous sommes en action.

Nous sommes en train de faire avancer les dossiers et de développer un ensemble de paramètres qui va nous permettre d'avancer. Et, à ce chapitre-là, je voudrais parler d'un cas bien spécifique qui me tient à coeur, puisqu'il concerne mon comté. Nous avions ici un programme d'aide gouvernementale à l'amélioration des services en transport collectif qui a eu lieu en Estrie, une aide financière de 3,7 millions de dollars. Ce n'est pas insignifiant. Pour nos régions, c'est très, très important. Et la société de transport, les centres de gestion ont fait ce projet-là. La nature du projet qui est en cours ici, c'est : favoriser le développement et l'utilisation des transports collectifs régionaux. Plus précisément, les projets visent à améliorer les services, l'exploitation des services de transport collectif, à la mise en place de nouveaux services d'autocar interurbain, le maintien d'un service de transport par autocar et le fonctionnement d'un centre de gestion. L'utilisation de ce transport collectif permet, naturellement, de réduire les émissions polluantes de GES, la congestion en périmètre périurbain et de réduire les dépenses associées à la possession et l'utilisation de l'automobile. Les critères établis selon ce type de projet étaient : la subvention est établie selon la participation de l'organisme admissible, l'étude des besoins de faisabilité, le dépôt d'une résolution de la MRC et de soumettre un plan financier détaillé devant être approuvé par le MTMDET, donc, le ministère des Transports, pour les gens qui ne sont pas familiers.

Donc, comme vous le voyez, ce plan-là était très bien structuré, ce 3,7 millions, parce que moi, à l'époque, j'étais déjà maire et je participais au travail dans les MRC. Dans le comté de Mégantic, on a la MRC du Granit, la MRC du Haut-Saint-François, une partie de la MRC du Val-Saint-François. Et je sais très bien que, dans le secteur qui me concerne, de Chaudière-Appalaches, ils avaient eu, eux aussi, des projets en regard du transport collectif qui ont permis à des centaines d'individus de bénéficier de ce transport collectif, surtout des gens âgés, des gens handicapés qui ne pouvaient se déplacer d'un secteur rural pour accéder soit à un rendez-vous chez le médecin ou à du magasinage ou des besoins essentiels au développement de leurs activités hebdomadaires.

Donc, ce transport collectif là leur a permis vraiment de se déplacer à des coûts très faibles, d'assister à leurs activités d'âge d'or et de permettre toutes sortes d'interactions et de retombées, ce qui a permis à nos communautés de se dynamiser et d'aider les plus démunis de notre société. Merci, M. le Président.

• (10 h 30) •

Le Président (M. Bérubé) : Merci, M. le député de Mégantic. C'est maintenant au tour du député de Terrebonne pour cinq minutes.

M. Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, dans la foulée du Fonds vert, nous parlions, tout à l'heure, de réduction de gaz à effet de serre et nous parlions également, donc, de programmes déficients à l'intérieur de ce fonds.

Nous avons eu la chance d'étudier, comme le ministre le mentionnait tout à l'heure, là, quelques programmes des 150 programmes dans lesquels le Fonds vert investit pour en arriver à des résultats. Nous avons étudié neuf programmes au ministère des Ressources naturelles, six programmes au niveau du ministère de l'Agriculture, cinq autres au niveau du ministère des Transports, ces programmes-là peuvent être comme Branché au travail ou encore le programme Prime-vert, volet 1, ainsi que deux programmes au niveau du ministère du Développement durable, donc, Programme, exemple, de traitement des matières organiques par biométhanisation et compostage, et on a fait des constats pour voir où en était la situation et s'assurer si le fonds s'en allait dans la bonne direction.

Tout à l'heure, je vous ai parlé du manque d'indicateurs et de transparence. Il y a également au niveau des budgets non dépensés que l'opposition officielle s'inquiète, M. le Président. Sur 95 %, donc, des programmes que nous avons étudiés, c'est-à-dire 21 des 22 programmes — on appelle ça des actions — 50 % de leurs budgets ne sont pas encore dépensés, et 70 % de ces programmes-là ont dépensé même moins de 20 % de leurs budgets, qui doivent se terminer au mois de mars 2017, M. le Président. Donc, il reste moins d'un an pour que plusieurs programmes finissent par dépenser l'ensemble de leurs enveloppes budgétaires et donc d'atteindre les résultats et la mission pour lesquels cet argent-là a été octroyé.

Pour vous donner un portrait plus global, sur les 22 programmes que nous avons étudiés, qui totalisent près de 726 millions de dollars, seulement 57 millions ont été dépensés en date d'aujourd'hui, soit seulement 23 % du budget total, à moins d'un an du 31 mars, donc à mi-chemin aussi du PACC 2013-2020, ce qui nous semble tout à fait inquiétant. On a un autre constat aussi, M. le Président, c'est que les programmes, c'est ça, donc, arrivent bientôt à échéance. Donc, au 31 mars 2016... 31 mars 2017, on trouve que le laps de temps pour l'ensemble des poches budgétaires disponibles semble très restreint. Et on peut présumer d'ores et déjà que plusieurs objectifs ne seront pas atteints.

Je vais vous donner quelques exemples. Je me suis forcé. J'ai fait un tableau didactique. Est-ce qu'on a le droit d'avoir des tableaux didactiques dans cette salle, M. le Président? C'est une façon pour moi de vous demander la permission. Bon. Alors, je voulais vous démontrer... exemple, au niveau du programme Écocamionnage, nous avons des objectifs qui ont été fixés par le gouvernement pour l'atteinte des cibles, en 2017, donc, de réduction de gaz à effet de serre. Aujourd'hui, nous en sommes, en 2015-2016, ici, au point noir, donc à peine un peu plus de la moitié du chemin de fait, et rien ne nous laisse présager, par exemple, dans ce programme qu'à l'heure actuelle nous atteindrons nos cibles. Nous avons également plusieurs programmes qui, à l'heure actuelle, sont à zéro, M. le Président, dans lesquels des statistiques n'ont pas encore commencé à évoluer, et donc ça nous inquiète pour la suite, et on voudrait que le ministre corrige notre anxiété, nous aide à essayer d'améliorer un peu la situation de notre bilan de GES. Donc, c'est pour vous donner un exemple un peu visuel de la chose. Je pourrais vous montrer aussi d'autres tableaux didactiques, mais il faut quand même que je vous pose des questions, parce que sinon vous allez trouver que je fais beaucoup de paroles mais que je ne questionne pas assez.

Alors, j'ai deux questions pour le ministre. Comment explique-t-il qu'autant de programmes évalués aient dépensé moins de 50 % de leurs sommes à moins d'un an de la fin de leurs budgets 2013‑2017 et que 70 % des programmes que nous avons regardés dans l'échantillonnage que nous avons eu le temps d'évaluer aient dépensé moins de 20 % de leurs enveloppes budgétaires qui tombent à échéance l'année prochaine, donc, ce qui est signe d'inquiétude notoire? Et une question aussi pour le ministre : Puisque beaucoup de programmes arriveront à échéance d'ici six mois, que compte-t-il faire pour que ces programmes soient mieux conçus et dépensent leur argent le plus vite possible afin d'atteindre la réduction de gaz à effet de serre ciblée par son ministère?

Le Président (M. Bérubé) : Merci. M. le ministre, pour cinq minutes.

M. Heurtel : Merci, M. le Président. Encore une fois, le député nous lance des pourcentages, nous montre des tableaux basés sur des analyses qu'il a faites. Nous n'avons rien vu. Alors, nous n'avons pas les analyses, on n'a même pas reçu les tableaux avant, alors il est très difficile pour nous de se prononcer sur une analyse. Et je crois que, si le député avait été véritablement intéressé à un échange constructif, il aurait pu avoir la décence de nous transmettre ses études, ses analyses, sur quoi il se base pour affirmer ce qu'il affirme, pour qu'on puisse faire les vérifications puis qu'on puisse répondre avec des faits en main. On ne les a pas. Alors, c'est très difficile pour nous de répondre précisément à ses questions, puisqu'on n'a pas les données sur lesquelles il se base pour y répondre.

Bon. L'autre point, le Fonds vert, quand même, et même le député l'a dit dans ses remarques introductives, c'est depuis 2006. Bien, pour le PACC 2006‑2012, le Fonds vert était en place. Ça a été 1,6 milliard de dollars qui ont été investis dans nos cibles de réduction d'émissions de gaz à effet de serre. Et notre objectif pour 2012, M. le Président, c'était 6 % de réduction par rapport à 1990, et non seulement a-t-on atteint cet objectif-là, mais on l'a dépassé. Et, aujourd'hui, on en est à avoir les chiffres de 2013, les chiffres de 2013 basés sur les analyses faites au Québec, parce que la méthode d'analyse fédérale est différente de la méthode québécoise. Nous, nous en sommes à évaluer les émissions de GES, nous en sommes à 2013 et, en 2013, on en est à 8,6 %. J'invite le député à la prudence lorsqu'il clame que le Québec est en péril de ne pas atteindre ses objectifs. En termes de données que nous avons factuelles, publiques, nous en sommes à 2013 et, selon les cibles de réduction de 2013, nous sommes à 8,6 %. Il nous reste donc sept ans, par rapport à 2013, pour se rendre à 2020 et la cible de 2020. Et, à date, nos chiffres ne tiennent pas compte de l'entrée en vigueur du marché du carbone et du système de plafonnement et d'échange des droits d'émission, qui est directement lié à des cibles qui doivent être atteintes. Donc, attention quand on dit que le Québec n'atteindra pas ses cibles.

Nous avons mis plusieurs éléments en oeuvre, dont le plan d'action sur les changements climatiques 2013‑2020, la politique d'électrification des transports, le Plan d'action sur l'électrification des transports, la Stratégie gouvernementale de développement durable — la semaine dernière, on a terminé ensemble l'étude article par article du projet de loi établissant une norme zéro émission au Québec — le projet de loi n° 102 sur la réforme et la modernisation de la Loi sur la qualité de l'environnement, qui établit notamment un test climat. Il y a plusieurs mesures qui sont en place pour justement nous aider à atteindre nos cibles.

Et, si ces cibles et si la gestion du Fonds vert étaient si importantes pour le Parti québécois, je le répète encore, M. le Président, pourquoi le Parti québécois, lorsqu'il était au pouvoir, de 2012 à 2014, n'a pas mis en place une seule réforme de la gouvernance du Fonds vert? Et, encore plus, M. le Président, le Parti québécois, au pouvoir, n'a à peu près mis en place presque aucun projet ou action lancés, alors que le PACC 2013‑2020 était déjà en place depuis juin 2012.

Or, moi, j'ai le goût de renverser la question : Pourquoi le Parti québécois n'a à peu près rien fait, au pouvoir, pour mettre en oeuvre des actions du PACC 2013‑2020 si l'atteinte de cibles de réduction était si importante? Je me rappelle, à l'époque, ils voulaient des cibles de 25 %. 20 %, ce n'était pas assez. Mais, lorsqu'au pouvoir, ils n'ont rien mis en oeuvre... ou à peu près, en vertu du PACC 2013‑2020, rien, puis la gouvernance du Fonds vert n'avait aucun problème à ce moment-là. Alors, c'est étonnant qu'aujourd'hui on parle de gouvernance et de gestion.

Puis le dernier point, puis on va en parler davantage, nous, avec le projet de loi n° 102, on fait une réforme en profondeur de la gouvernance du Fonds vert, on modernise le Fonds vert pour justement éviter qu'on se retrouve dans des situations où il y a des projets qui soient financés par le Fonds vert qui soulèvent trop de questions. Et je pourrai, justement, je suis sûr, à la prochaine période, parler davantage de la modernisation nécessaire de la gouvernance du Fonds vert. Merci.

• (10 h 40) •

Le Président (M. Bérubé) : Merci, M. le ministre. Toujours de votre côté, on passe au député d'Abitibi-Est. C'est à vous. Cinq minutes.

M. Bourgeois : Merci, M. le Président. M. le ministre, collègues, membres de l'opposition officielle et de la deuxième opposition.

Effectivement, M. le ministre, je m'abreuve de vos paroles sur une partie qui était un fait très clair dans notre région, particulièrement en Abitibi, c'est effectivement tout le laxisme qu'il y a eu de 2012 à 2014. On peut dire que, chez nous, l'effet, effectivement, de la réduction des gaz à effet de serre a été tout le ralentissement économique qui s'est vécu sous le règne du gouvernement péquiste et que nous avons pris charge de raviver, de relancer la machine économique.

Et là-dessus vous me permettrez de vous amener sur un projet plus directement, un projet qui découle du programme Action 24.1, qui est le soutien au développement des bioénergies pour réduire les émissions de GES à court terme, un programme de biomasse forestière résiduelle.

Dès notre venue en place au mois d'avril 2014, j'ai été interpelé premièrement par les représentants syndicaux d'une grande entreprise importante chez nous dans le domaine forestier, Uniboard, où les travailleurs sont venus nous voir pour dire : Écoutez, on a eu une rencontre avec les propriétaires, il y a un enjeu majeur, il y a des normes gouvernementales qui font en sorte que, pour pouvoir répondre à ces normes-là, il doit y avoir des investissements importants qui doivent être réalisés. Et là, M. le Président, vous le savez, en région, on ne peut pas se permettre d'avoir des acteurs comme ça, qui, du jour au lendemain, disparaissent de la structure industrielle, parce qu'il y a une interaction avec l'ensemble des autres acteurs dans la même filière, la filière forestière. Donc, rapidement, on a interpelé l'entreprise, qui a effectivement confirmé l'enjeu qu'elle vivait, c'est-à-dire à la fois devoir rejoindre une norme gouvernementale mais aussi admettre la désuétude de ses installations. Et, dans le fond, notre rôle à nous, c'est de travailler avec eux pour tourner des situations qui sont identifiées comme étant désastreuses ou, à tout le moins, périlleuses et de pouvoir en faire des défis qu'on veut relever ensemble. Et rapidement on a été capables d'obtenir la collaboration de la compagnie et de regarder des alternatives. Et, justement, à la lumière de ce qu'offrait le Fonds vert, on a été capables de regarder une alternative qui fait que maintenant on parle d'un projet qui va permettre le remplacement de cinq séchoirs et deux chaudières. On parle d'un projet de 26 millions, M. le Président, et à l'intérieur duquel il y a une contribution du Fonds vert, de 4,6 millions.

Donc, c'est un effet de levier majeur dans une région comme la nôtre par rapport à des enjeux comme ceux-là, M. le Président, et on doit pouvoir utiliser à bon escient ces sommes-là. On a une preuve concrète que, chez nous, ça va faire une différence. On va maintenir en emploi plus de 350 travailleurs et on a une usine qui, dès 2017, va être une des plus performantes à travers le monde et qui permet à cette entreprise-là maintenant de regarder pour réaliser d'autres investissements en utilisant, parce qu'on va transformer ce qui était avant utilisé... Donc, on va passer d'une réduction de gaz à effet de serre de 9 144 tonnes par année, soit l'équivalent de 2 615 véhicules annuellement de moins sur le réseau routier, et... on va donc transiter, avec l'utilisation, dans l'opération... avec du gaz naturel ainsi que les poussières de bois, qui avant étaient un résidu qui n'était pas valorisé.

Donc, M. le Président, ce programme-là démontre clairement non seulement son potentiel, mais sa valeur ajoutée pour des régions comme chez nous. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bérubé) : Merci. On passe maintenant à la deuxième opposition, et je reconnais M. le député de Masson.

M. Lemay : Merci, M. le Président. Donc, en fait, pourquoi on est ici aujourd'hui?

Bien, en fait, ça a commencé en juin 2014, alors qu'il y a eu une première vérification du Commissaire au développement durable, M. Jean Cinq-Mars, puis, en novembre 2014, on avait le ministère des Transports et le ministère de l'Environnement qui étaient audités et, en novembre 2015 de l'année suivante, là, on faisait le suivi du Fonds vert, puis pour se rendre en février de cette année, février 2016, où c'est qu'il y avait une présentation, à la CAP, à la Commission de l'administration publique, des travaux du Commissaire au développement durable et de la Vérificatrice générale dont on a eu un suivi et une audition, le 7 avril 2016, de cette année, avec les fonctionnaires des deux ministères respectifs, là, des Transports et du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte aux changements climatiques.

Bref, aujourd'hui, en septembre 2016, on se rencontre pour parler des ratés du Fonds vert. Bref, on n'a pas beaucoup de temps, j'ai quelques questions pour le ministre, mais, en fait, contrairement au député de Terrebonne, je vais utiliser les documents qui sont fournis par le ministre et son ministère, donc, et puis on va essayer de trouver un peu... Mes questions principales vont porter sur les délais que les entreprises québécoises peuvent avoir pour obtenir leurs certificats d'autorisation. Ça, ça serait ma question principale. Puis, en fait, j'ai compris tantôt dans une réponse du ministre qu'il allait y avoir, à travers le p.l. n° 102, qui est la révision complète, là, de la LQE, la Loi sur la qualité de l'environnement... qu'on allait pouvoir avoir des réponses pour stimuler l'innovation en sol québécois. C'est très bien, mais c'est sûr que mes questions vont porter plus sur ce principe-là.

Revenons un peu en arrière, en octobre 2015 : régime d'autorisation du MDDELCC et formulaire de demande qui est fait par le Développement durable, l'Environnement, Lutte aux changements climatiques. On nous dit, dans le processus, le bilan, combien de temps ça peut prendre avant d'avoir des réponses et puis on parlait qu'en 2015 on se rapprochait de près de 200 jours de délai pour obtenir un certificat d'autorisation. Cet été, j'ai eu la chance de faire plusieurs visites à différents endroits, là, à Mirabel, à Saint-Hyacinthe, à Québec, à Nicolet-Bécancour... bref, plusieurs entreprises pour lesquelles elles sont en attente d'avoir leurs certificats d'autorisation, pour lesquelles elles ont des innovations pour réduire des gaz à effet de serre en sol québécois et pour lesquelles elles se font carrément répondre : Bien, écoutez, selon les grilles que nous avons, ça ne rentre pas dans aucun critère. Donc, les démarches se multiplient, les délais s'allongent, et ça fait en sorte que certaines entreprises ne verront pas le jour, vont fermer boutique parce qu'elles ne parviendront pas à se rendre au bout du processus. Et pourtant ils ont des solutions pour réduire les gaz à effet de serre. On parle de solutions, là, un coût à peu près à 30 $ la tonne de réduction de gaz à effet de serre.

Donc, ça serait à considérer, d'autant plus que le ministre... on a fait une consultation, puis après ça il est allé à Paris pour... quand on voulait déterminer combien qu'on allait choisir comme cible pour 2030, puis finalement on a sélectionné la cible de 37,5 % de réduction. Puis, dans ce document-là, on nous annonçait qu'on avait des plans pour réduire de 15 mégatonnes en sol québécois sur les 25 que l'on devait réduire... et qu'on a un 10 mégatonnes qu'on prévoyait aller sur le marché du carbone. Ça, le marché du carbone, c'est avec la Californie. Maintenant, aussi, ça s'en vient avec l'Ontario. Mais pourtant, en sol québécois, on a des entreprises, pendant ce temps-là, qui sont prêtes à contribuer à la cible de réduction de 25 mégatonnes, par contre elles ne parviennent pas à obtenir leurs certificats d'autorisation.

Donc, ça, ça va être à savoir, comment que, le ministre, vous comptez faire, au sein de votre ministère, pour réduire les délais pour l'obtention des certificats d'autorisation et aussi comment vous allez faire pour stimuler l'innovation en sol québécois, parce que, dans le fond, ce qu'on veut faire, c'est : on veut encadrer pour mieux permettre... Puis ce que je crois, là, c'est que le soutien de la filière industrielle, là, c'est le chaînon manquant, dans le fond. Tu sais, il faut soutenir nos industries qui sont ici prêtes à faire des innovations technologiques vertes, et puis ça devrait être inclus à quelque part dans la stratégie du gouvernement.

Vous savez, le gouvernement, au printemps dernier, parce qu'on avait justement 10 années dans le Fonds vert, de 2006 à 2016, et qu'on stagnait toujours, on tardait à obtenir les réponses, ils sont sortis avec le cadre de gestion du Fonds vert. Et puis dans le cadre de gestion que... peut-être que le ministre pourrait nous...

• (10 h 50) •

Une voix : ...

M. Lemay : Oh! il me reste sept secondes. Ah! O.K. D'accord. On va se maintenir aux deux questions que j'ai demandées : réduction des délais puis comment qu'on va stimuler l'innovation.

Le Président (M. Bérubé) : Merci, M. le député. M. le ministre, pour cinq minutes.

M. Heurtel : Merci, M. le Président. Et je remercie le député de Masson pour ses questions, un point très important, parce que, dans sa question, il fait un lien qui est fondamental, c'est-à-dire le lien qu'il doit y avoir entre la protection de l'environnement et le développement économique. Ça va ensemble. Là, trop longtemps, on a essayé de les voir en opposition. Et il faut trouver une façon de mieux faire travailler ensemble l'environnement et l'économie.

D'ailleurs, les trois piliers du développement durable, c'est quoi? C'est la protection de l'environnement, c'est l'acceptabilité sociale et c'est aussi le développement économique. Alors, il faut trouver un équilibre. Et le projet de loi n° 102, non seulement il propose une réforme en profondeur de la gestion du Fonds vert pour s'assurer qu'on ne se retrouve pas dans des situations où il y a des projets qui soulèvent véritablement des questions valables sur leur véritable contribution aux objectifs de réduction d'émissions de gaz à effet de serre du gouvernement, mais, en même temps, c'est aussi une modernisation en profondeur de tout le régime d'autorisation environnementale que le projet de loi prévoit, et c'est de transformer, justement, le régime d'autorisation en le basant sur la notion de risque.

Alors, il y aurait quatre types de risque, les projets à risque élevé, risque modéré, risque faible et risque négligeable, et, dépendant de ce type de risque, bien, un projet aurait des étapes d'autorisation modulées en fonction du risque. Et donc un risque faible ou un risque négligeable n'aurait pas la même lourdeur en termes de processus d'autorisation qu'évidemment un risque élevé.

Il y a à peu près 5 000 autorisations environnementales qui sont données, au Québec, par le ministère chaque année. Avec le projet de loi n° 102, on prévoit alléger le système grandement, plus particulièrement au niveau des projets à risque faible ou négligeable, en soit les faisant passer par une mécanique d'attestation de conformité environnementale qui réduirait énormément les délais ou bien en éliminant tout simplement la formalité d'obtenir une autorisation environnementale. On veut travailler davantage avec les municipalités pour aussi voir comment on peut alléger les formalités tant pour les projets qui sont menés par les municipalités que, dans certains cas... il y a certaines responsabilités en matière environnementale qui n'ont pas à être dédoublées entre le ministère et les municipalités. Mais, en termes d'innovation, il y a une disposition particulière où on permettrait le développement d'un projet pilote. Alors, on n'aurait pas à faire toute une autorisation environnementale très lourde qui pourrait justement nous faire perdre des opportunités en innovation ou en nouveaux projets et on pourrait, justement, avec les dispositions prévues dans le projet de loi n° 102, les nouveaux régimes d'autorisation, permettre à un promoteur de développer un projet pilote pour tester une nouvelle technologie ou tester un nouveau concept qui, oui, soulèverait des questions au niveau environnemental, mais il pourrait y avoir une notion d'accompagnement du ministère qui pourrait réduire des délais.

Et ça, c'est une autre notion très importante au niveau de la réduction des délais qu'on vise, M. le Président, c'est que, un, on veut maintenir les hauts standards environnementaux, mais on croit qu'après 44 ans le processus d'autorisation environnementale a beaucoup évolué, a beaucoup changé. Il y a beaucoup de choses qui se sont ajoutées. Il y a des processus d'autorisation parallèles, en vertu d'autres régimes, qui se sont développés également. Nous croyons qu'on peut également aller chercher beaucoup des économies de temps à ce niveau-là et, justement, avec des exemples comme le projet pilote, un travail d'accompagnement, en amont, du ministère avec les promoteurs au niveau des directions régionales; pour justement éviter que le promoteur s'enlise trop dans les dédales du processus d'autorisation, bien, que le ministère, les directions régionales commencent à travailler dès le départ, identifient les enjeux, qu'il y ait des rencontres de démarrage.

Bref, en cinq minutes, c'est difficile d'aller dans tous les détails, mais il faut comprendre que la modernisation du régime d'autorisation environnementale va nous permettre de faire des économies substantielles au niveau des délais, prévoir aussi beaucoup plus de clarté et de prévisibilité pour le régime et justement, ultimement, réduire les délais tout en maintenant des hauts standards de protection de l'environnement.

Le Président (M. Bérubé) : Merci, M. le ministre. On passe au député de Mégantic. La parole est à vous.

M. Bolduc : Merci, M. le Président. Je suis un peu confus — d'habitude, je ne suis pas dur à mêler, mais là on m'a eu comme il faut — parce que le député de Masson nous a parlé de 200 jours de délai, il nous a parlé de Mirabel, Nicolet et plusieurs régions du Québec, de problèmes d'innovation et de développement d'entreprise pour réduire les GES : il y a plusieurs entreprises qui ne verront pas le jour. Il nous a parlé de 30 $ la tonne, la bourse de carbone, avec des objectifs de réduction de 37,5 % pour 2030, que l'objectif était de réduire de 15 millions de tonnes... l'objectif, j'imagine, et qu'on allait aller chercher 10 millions de tonnes sur le marché du carbone puis les entreprises sont prêtes à participer. C'est ce que je retire, là, un peu de l'information. Je suis plus mêlé que je l'étais avant.

Je vais essayer de démêler ça un petit peu, là, parce que c'est loin d'être clair. Puis, pour stimuler l'innovation, je pense qu'on a un ministère qui s'appelle le ministère de l'Économie, de la Science et de l'Innovation, qui a justement lancé une filière sur l'innovation. Donc, comme je dis, je suis mêlé un peu, mais on va essayer de démêler ça.

Premièrement, l'objectif de 37,5 %, si on se base sur les bourses de carbone de 1990, qui étaient à 85 millions de tonnes, donc, 37,5 %, on n'est pas loin de 30 millions de tonnes de réduction d'ici 2030. On est à peu près à 75 estimées actuellement, là. C'était 78. Donc, je ne comprends pas les deux chiffres puis je ne vois pas ce que ça a à voir avec les données qui sont publiées actuellement. Ça fait que c'est difficile pour moi de faire un rapprochement de tout ça. Je pense qu'il y a un raté dans l'opportunité de la CAQ pour parler du Fonds vert, là, je ne suis pas sûr. Donc, pour moi, il y a des éléments fondamentaux qui doivent être regardés, puis je pense que le ministre nous a fait avec une grande éloquence l'ensemble des outils qu'on est en train de développer pour en arriver à une gestion saine et équitable. Si on retient quelque chose ici ce matin, c'est exactement ça. Il vous a fait une liste relativement sommaire, mais ça vous donne une idée qu'il y a beaucoup de travail qui est en train de se faire et qui va continuer à se faire.

Et je reviens au livre sur la modernisation du régime environnemental, avec le livre vert, avec la loi n° 102, avec l'ensemble des interventions. On a eu des audits qui nous ont dit qu'il y a des améliorations à faire. Moi, je suis un peu emballé, dans le sens où je crois que le gouvernement est en train de structurer, organiser, de régler les problèmes de gestion, de simplifier sa gestion, de discuter avec le milieu, avec les acteurs. Et je vous ai parlé précédemment, et mon collègue d'Abitibi en a parlé aussi, de projets concrets qui se sont produits, à partir de la disponibilité du Fonds vert, pour réduire les gaz à effet de serre et dans un cadre de développement durable très bien défini. On a parlé, dans mon cas, de mobilité durable pour les gens des secteurs ruraux. Mon collègue nous a parlé d'un fonds de gestion d'investissement avec un levier qui dépassait cinq fois la mise initiale, donc c'est un beau levier de fonds, et qui permettait d'économiser plusieurs milliers de tonnes de gaz à effet de serre annuellement.

Donc, pour moi, ça, c'est des gestes concrets, pas une série de chiffres vides qui nous mêle bien plus qu'elle peut réussir à nous donner quelque chose de stimulant pour travailler.

Il est clair que, quand on travaille dans un segment comme l'environnement et qu'il y a 12 ministères d'impliqués, il est très important d'avoir à la base une façon systématique d'approcher le problème et, quand on regarde... qu'on parle d'un ministère, d'un dossier, d'un élément, de se baser sur des chiffres qui sont très solides et qui nous permettent de voir la progression temporelle du dossier. Ce n'est pas toujours évident, je suis le premier à l'admettre. L'ensemble des paramètres sur lesquels on travaille ne sont pas toujours simples, il y a beaucoup de variables, et l'ensemble des ministères ont des différences de projet qui sont appréciables, donc il faut prendre le sommaire de tout ça, le mettre de façon claire et directe et surtout s'assurer de bien faire comprendre le message. Merci, M. le Président.

• (11 heures) •

Le Président (M. Bérubé) : ...M. le député. On revient au député de Terrebonne.

M. Traversy : Merci, M. le Président. Donc, pour poursuivre notre discussion avec le ministre, on a fait la démonstration dans le cadre du dernier bloc que beaucoup d'argent a été investi dans des programmes, dans des actions. Ça fait partie de la stratégie du PACC du ministère de l'Environnement pour essayer de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Beaucoup d'argent est disponible, mais très peu semble être utilisé.

Et, pour le délice des yeux du ministre, on a préparé un autre tableau avec d'autres couleurs pour essayer toujours d'attirer son attention, donc, dans les programmes que nous avons eu la chance d'analyser. Mais on comprend que nous autres, on est l'opposition officielle, M. le Président. Le ministre, lui, il a toutes les informations de l'ensemble des programmes, il a tous les détails de tout ce qu'il souhaite avoir, il les a. Nous, on ne fait que lui donner des sons de cloche de la part de notre formation politique. On dit : Écoutez, dans 12 programmes, dans 12 actions que nous avons analysés, voici un peu l'état de la situation dans un budget qui se termine en mars prochain, donc dans moins d'un an. On voit que, sur le total des 12 programmes qui ont été analysés, ce qui est en rose, c'est ce qui devrait être dépensé en termes d'argent dans les programmes. Ce qui est en vert, c'est ce qui est réellement dépensé à l'heure actuelle. Donc, il y a un manque à gagner qui est significatif. Ça veut dire qu'il n'y a pas beaucoup de programmes qui sont en action. Ça veut dire que l'atteinte des réductions de gaz à effet de serre, les cibles que le gouvernement se fixe ne sont pas en train nécessairement de s'améliorer ou, du moins, l'argent qui est disponible pour être capable d'y parvenir ne semble pas être utilisé de façon maximale ou à bon escient.

Alors, ma question au ministre est très simple, c'est de dire : D'ici à ce qu'on fasse la réforme du Fonds vert... puis, oui, ça va se passer dans le projet de loi n° 102, puis on a hâte d'y aller puis on va être présents, puis on va discuter avec le ministre, puis ça va être du plaisir en barre, M. le Président, mais, d'ici à ce que ça se fasse — puis vous savez à quel point il y a des articles dans cette loi n° 102, c'est quand même un morceau important, la Loi sur la qualité de l'environnement — donc, qu'est-ce que le ministre compte faire à court terme, d'ici à ce que nos discussions commencent, d'ici à ce qu'on puisse être capables donc d'en arriver à trouver des ententes avec les différents groupes parlementaires pour s'assurer que l'argent qui est mis dans les différents programmes soit utilisé? Et qu'est-ce qui va arriver avec l'argent qui ne sera pas utilisé? Moi, je pose la question au ministre : Aussi, l'argent qui ne sera pas dépensé dans les programmes du Fonds vert, que va-t-il se passer avec cet argent-là? Est-ce qu'il est reporté? Est-ce qu'on le débloque de façon encore plus expéditive, là, pour les prochaines années? Donc, est-ce qu'on les envoie dans des programmes qui fonctionnent? J'aimerais que le ministre puisse nous l'éclaircir.

Et là le temps file, parce qu'il me reste déjà à peine la moitié de mon temps, M. le Président, après avoir fait ce préambule. J'aimerais qu'on puisse vous résumer, M. le Président, aussi certains constats que le Commissaire au développement durable a faits par rapport au Fonds vert, donc, des constats qui sont durs, qui sont significatifs. M. Cinq-Mars est venu nous dire en avril dernier que les progrès étaient insatisfaisants pour la plupart des recommandations qui ont été formulées au ministère de l'Environnement pour essayer de corriger la situation, puis au ministère des Transports aussi, également, le ministère des Transports, qui n'est pas représenté par le ministre aujourd'hui mais qui est également, de façon indirecte, très ciblé par le Commissaire au développement durable. Sur la principale recommandation du commissaire, la mise en oeuvre d'un nouveau cadre de gestion du Fonds vert axée sur les résultats, on note que les progrès sont toujours insatisfaisants. On dit qu'il y a des non-respects d'échéancier. On va plus loin que ça, on dit qu'il n'y a pas de projets nécessairement crédibles non plus qui sont toujours soumis au Commissaire du développement durable puis qu'on n'a toujours pas non plus déterminé des objectifs précis, mesurables et axés sur des résultats, sur les programmes financés par le Fonds vert.

Et là on vous a démontré, M. le Président, que l'argent est au rendez-vous, que, je suis convaincu, le gouvernement souhaite des résultats, souhaite, lui aussi, des objectifs.

D'ici à ce qu'on fasse la réforme en commission parlementaire de par le projet de loi n° 102, quelles actions le ministre s'engage-t-il à faire à court terme pour rendre disponibles ces sommes, peut-être, dans des programmes qui sont très populaires à l'heure actuelle? Et que va-t-il arriver avec ces crédits du Fonds vert si les programmes ne réussissent pas à les utiliser à bon escient? Donc, on veut savoir un peu ce qu'il en pense.

Et, au niveau des recommandations du Commissaire au développement durable, après deux ans de réforme du Fonds vert, est-ce que le ministre a un plan de match en vue du projet de loi n° 102, qui s'en vient, afin de corriger les insatisfactions du commissaire ou est-ce que ce sera une surprise sur place lorsque nous serons rendus en commission? Est-ce qu'il y a déjà des actions qui sont entreprises pour corriger ce qui a été déjà, au mois d'avril, décrié par le Commissaire au développement durable? On se rappellera que 85 % des recommandations avaient été jugées insatisfaisantes. Donc, on est en droit de savoir aujourd'hui : Est-ce qu'il y a déjà des actions qui sont faites ou est-ce qu'on attend toujours le projet de loi n° 102 pour corriger l'ensemble de la situation?

Le Président (M. Bérubé) : M. le ministre.

M. Heurtel : Merci, M. le Président. Alors, je crois qu'il ne faut pas minimiser l'impact du projet de loi n° 102. On parle d'une réforme en profondeur du cadre de gouvernance et de gestion du Fonds vert, mais évidemment nous prenons les recommandations de la Vérificatrice générale très au sérieux.

Et nous avons déjà commencé, autant que faire se peut, parce qu'il faut une modification législative pour pouvoir réussir à vraiment instaurer une gouvernance qui installe une gestion par projets, plus de transparence, s'assurer qu'il y ait un lien direct entre un projet et nos objectifs de réduction d'émissions de gaz à effet de serre. Donc, déjà, dans certains échanges que nous avons avec les ministères, avec les ententes administratives que nous avons avec les différents ministères, nous tendons vers les objectifs du projet de loi n° 102 et nous instaurons des mécanismes qui nous permettent d'avoir le contrôle le plus complet possible. Mais, à l'heure actuelle, la structure étant ce qu'elle est, puis c'est ça qu'on essaie d'améliorer, on reconnaît d'emblée qu'il faut améliorer la situation, mais il nous faut le projet de loi n° 102 pour ça. Et, de ce que j'entends du député, je serai heureux de compter sur sa pleine collaboration lors de l'étude du projet de loi, parce que, comme lui, j'ai très hâte qu'on modernise la gouvernance du Fonds vert, parce qu'on a besoin d'un fonds vert performant, mais il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain.

Le Fonds vert nous permet de faire des actions très fortes, puis là on a des fiches, on a des projets, que ce soient le projet de biométhanisation à Saint-Hyacinthe — j'ai fait une annonce là plus tôt cette année avec la députée de Saint-Hyacinthe, du deuxième groupe d'opposition, puis c'était une contribution du Fonds vert — les autobus eLion, les autobus électriques scolaires — c'est le Fonds vert; le 8 000 $ de rabais pour l'achat d'un véhicule électrique — c'est le Fonds vert. Je pourrais continuer, puis, oui, il y a des cibles de réduction rattachées aux divers projets. C'est important qu'on soit plus précis dans certains cas, puis on va l'être grâce au projet de loi n° 102.

Mais, encore une fois, il faut que je rappelle que, lorsqu'il était aux affaires, le Parti québécois n'a absolument rien fait pour toucher à la gestion du Fonds vert, c'était au beau fixe. C'est étonnant, encore une fois, M. le Président, que, de septembre 2012 à avril 2014, il n'y avait aucun problème avec le cadre de gouvernance du Fonds vert, ça allait très bien au gouvernement du Parti québécois, et là, maintenant, ah! tout à coup, là, il faut que ça change. Bien, nous, on ne fait pas juste passer, nous, on modernise, on transforme et on s'assure justement qu'il y ait un cadre de gouvernance moderne pour le Fonds vert, et c'est pour ça qu'on a le projet de loi n° 102.

Mais également, si les émissions de gaz à effet de serre sont si importantes pour le Parti québécois, bien, il faut que je parle d'Anticosti, parce que le gouvernement du Parti québécois voulait Anticosti. Le député de Terrebonne a appuyé la candidature de l'ancien député de Marie-Victorin pour la chefferie de son parti, et la pierre angulaire de toute la stratégie de l'ancien député de Marie-Victorin, c'était quoi? Anticosti. La députée de Vachon était ministre des Ressources naturelles. Elle a conclu l'entente pour développer Anticosti.

Deux autres candidats à la chefferie de son parti, dont celui qu'il appuie, étaient des ministres dans ce gouvernement-là, puis il n'y avait aucun problème, à ce moment-là, à propos des émissions de gaz à effet de serre.

Nous, on a fait une étude environnementale stratégique sur Anticosti et sur les hydrocarbures. La conclusion est claire, M. le Président : «Dans ce contexte, de manière générale, l'exploitation des hydrocarbures apparaît donc, à long terme, comme difficilement conciliable avec les objectifs du Québec en matière de lutte contre les changements climatiques.» Anticosti, c'est un projet qui va durer... durerait, parce qu'il n'est pas autorisé encore, 75 à 80 ans. Alors, encore une fois, je vois beaucoup de contradictions où ici le Parti québécois semble vouloir nous faire la morale, alors que nous, on met en place des plans d'action sur les changements climatiques, les cibles de réduction d'émissions de gaz à effet de serre les plus ambitieuses au Canada. Hier encore, le gouvernement fédéral a reconnu le marché du carbone du Québec et celui de l'Ontario comme étant un des deux moyens pour contribuer aux cibles de Paris.

Nous, on pose des gestes concrets pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre. Quand ils sont au pouvoir, le Parti québécois, la gouvernance du Fonds vert, ça va très bien, puis on développe Anticosti.

• (11 h 10) •

Le Président (M. Bérubé) : Merci, M. le ministre. C'est maintenant au tour du député d'Abitibi-Est.

M. Bourgeois : Merci, M. le Président. Et je vais effectivement inviter les collègues de l'opposition officielle et de la deuxième opposition à se joindre le plus rapidement à nous sur la suite des travaux dans le projet de loi n° 102. Je pense qu'on est tous anxieux, le plus rapidement possible, de voir l'adoption de cette loi-là avec la bonification qu'il y a eu au niveau des consultations. Je suis convaincu que, dans le cadre des travaux parlementaires, on pourra faire en sorte que cette loi-là nous amène à l'objectif, effectivement, d'avoir une loi qui est à jour, qui nous permet d'être, je dirais, clairement des leaders dans le domaine au niveau de toute la question de la lutte aux gaz à effet de serre.

Mais concrètement aussi, sur le terrain, M. le Président, ça se traduit par des gestes dans le quotidien avec des impacts majeurs à la fois, oui, sur la lutte aux gaz à effet de serre, mais aussi dans le quotidien des citoyens du Québec.

Puis je reviens un peu sur le projet que je vous ai entretenu au niveau de l'usine Uniboard à Val-d'Or. C'est 350 emplois qu'on a pérennisés pour le bénéfice de cette population-là, et on va beaucoup plus loin que ça, parce qu'on fait la valorisation de l'utilisation de la biomasse résiduelle. On enclenche des processus dans le monde industriel qui les convainquent de ce tournant-là pour dire : Bien, oui, effectivement, on peut faire une différence, il y a une plus-value, et le gouvernement nous accompagne là-dedans via le Fonds vert parce qu'il y a des programmes qui, malgré ce qu'en pense le député de Masson, s'arriment avec des besoins, des réalités et qui peuvent permettre de lever des fonds de façon substantielle par des collaborations et des programmes adaptés avec la réalité des besoins sur le terrain. Et là on lève des sommes, là, importantes par cet effet de levier là. Je le disais, dans le cadre du projet d'Uniboard, on parle de 26 millions d'investissement pour une contribution, à l'intérieur du programme, de 4,6 millions.

Et je vais vous parler d'un autre projet aussi qui, lui, touche les municipalités, parce qu'effectivement le rayonnement du Fonds vert, on l'a dit, c'est 12 ministères concernés, c'est plein de volets qui peuvent être mis à bon escient pour le bénéfice de la population, pour le bénéfice de l'environnement. Et je veux rapidement parler de ce projet-là parce que c'est un projet au niveau de la gestion des matières résiduelles au niveau de la MRC d'Abitibi. Encore là, on a dit : Qu'est-ce qu'on peut faire, comment on peut s'arrimer?, et là, directement dans les opérations du ministère, on a mis en place un programme pour le traitement des matières organiques par la biométhanisation et le compostage. Encore là, là, on va plus loin un peu plus dans toute la question de la gestion des matières résiduelles pour le bénéfice de la population mais aussi de l'environnement. Et, des fois, on a des gens qui nous interpellent et qui veulent mettre en opposition ces deux groupes-là, et je crois sincèrement qu'il y a toute une synergie qui doit plutôt être favorisée.

Et donc ce projet-là va permettre un soutien financier au niveau municipal et au secteur privé pour l'installation d'une infrastructure qui va permettre de traiter la matière organique par la biométhanisation ou le compostage. Donc, un enjeu, parce que, dans ce secteur-là, la MRC d'Abitibi a des cellules pour la gestion des matières résiduelles qui actuellement, au rythme où ça va, auraient dû être développées plus rapidement, mais, avec cette possibilité-là de développer ce projet-là, on parle d'un projet de plus de 3,4 millions qui est soutenu par le fonds avec un montant de 700 000 $. Encore là, un effet de levier de l'investissement qui nous permet de faire une différence, parce que c'est les citoyens de la MRC d'Abitibi qui vont en bénéficier, parce que l'ouverture de cellules supplémentaires, M. le Président, c'est des coûts importants, c'est des coûts qui, en plus, auraient fait en sorte qu'on aurait eu un effet sur les gaz à effet de serre beaucoup plus important. Donc, encore là, bravo au programme. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bérubé) : ...M. le député de Terrebonne.

M. Traversy : Merci, M. le Président. J'aimerais donc continuer dans cette interpellation avec le ministre pour lui parler du PACC, donc, du plan d'action pour la lutte aux changements climatiques 2013‑2020.

Bon. Vous savez, on parle beaucoup des programmes du Fonds vert qui sont dysfonctionnels ou dans lesquels l'argent dort et n'est pas utilisé, dans lesquels il pourrait y avoir, évidemment, des améliorations notoires. J'espère que le ministre, avec les quelques exemples qu'on lui a donnés depuis ce matin, va faire quelques vérifications pour s'assurer de l'état de la situation, bien que je sois convaincu qu'il a un tableau de bord avec les lumières et les signaux lumineux favorables ou défavorables à certains programmes.

Actuellement, je sais qu'il est au courant de tout ce qui se passe dans son ministère, mais, au-delà des programmes du Fonds vert qui sont à améliorer, M. le Président, et dans les signaux d'alarme que l'opposition a mentionnés aujourd'hui, il y a également l'objectif ultime, qui est de réduire nos gaz à effet de serre de 20 % d'ici 2020, parce que l'objectif des programmes financés par le Fonds vert n'est, somme toute, fait que pour ceci : pour être capables d'avoir un état clair de la situation. Le ministère de l'Environnement s'était engagé, avec le ministre, en avril 2016 dernier, donc, à la CAP, de déposer certains documents, trois documents en particulier qui étaient prévus pour le printemps 2016, qui, à ma connaissance, ne sont toujours pas déposés. Et je vois la dame qui accompagne le ministre. Elle me semble être, comment je pourrais dire, très proactive. Donc, je suis convaincu qu'elle peut peut-être nous aider, là, sur cette question.

Premièrement, est-ce que la diffusion du bilan 2014‑2015 des PACC va être déposée prochainement? C'était supposé d'être au printemps 2016, et nous n'en avons pas de copie. Est-ce que la publication du bilan final du PACC 2006-2012 sera bientôt déposée? On nous avait dit que ça serait prêt pour mai 2016. Je n'en ai toujours pas de copie. Est-ce que le dépôt du plan stratégique, qui est essentiel pour comprendre où se dirige le gouvernement avec sa réforme sur le Fonds vert, sera également déposé? De surcroît, la CAP a demandé à ce que le rôle et les objectifs du futur conseil de gestion du Fonds vert soient mieux définis. Donc, c'est dans le dépôt du plan stratégique. On m'avait dit : L'automne 2016. Nous sommes à l'automne 2016. Est-ce que ce document est présentement disponible? Et surtout — et surtout — nous attendons avec impatience... et, si le ministre l'a, bien, nous serions très heureux, comme l'ensemble du Québec, de pouvoir valider où nous en sommes dans l'Inventaire québécois d'émissions de gaz à effet de serre pour l'année 2014. Le gouvernement fédéral a déposé depuis avril 2016 son bilan d'émissions de GES pour l'année 2014. Celui du Québec est à venir. J'espère qu'il sera disponible bientôt. Peut-être que le ministre a déjà écho de ce document. Est-ce qu'il pourrait également nous le déposer? Et pourquoi je pense qu'il est important, M. le Président? C'est pour la suite, donc, du plan d'action sur les changements climatiques, vous savez.

Voici un exemple, un autre tableau didactique. On s'est amusé sur celui-là, mais un peu moins, parce qu'il a été fait par le gouvernement libéral de l'ex-premier ministre, M. Charest, en 2012. C'est le collègue du ministre de l'Environnement, le député de Mont-Royal, qui est aujourd'hui ministre des Ressources naturelles et de l'Énergie, qui en était le responsable à l'époque.

C'était le plan de match du gouvernement pour réussir à atteindre 20 % de réduction de gaz à effet de serre d'ici 2020, et on nous disait qu'il y avait, pour y parvenir... Et là je vais me rapprocher de mon micro pour qu'on continue de m'entendre. On avait prévu, pour y parvenir, donc, une phase 1 au PACC 2020 et une phase 2 avec des perspectives de nouvelles politiques, de nouvelles actions potentielles pour permettre d'atteindre justement ce 20 %. La phase 1, on la connaît, elle est en cours, puis on a démontré qu'avec certains... comment je pourrais dire, certains handicaps de programmes au Fonds vert certains secteurs sont plus mal en point que d'autres, on va dire ça comme ça, et il restait encore une phase 2 pour être capable d'atteindre ce moins 20 % de réduction de gaz à effet de serre.

Donc, ma question pour le ministre, c'est : Quel est le plan de match, en plus de réformer le Fonds vert, qui est sur la table pour être capable d'y parvenir? Est-ce que le ministre mise tout sur le marché du carbone pour atteindre sa réduction de cible de moins 20 % depuis 1990, donc, pour 2020? Et est-ce qu'il peut nous déposer les documents que nous avons mentionnés tantôt, le bilan 2014‑2015 pour les PACC, le bilan final du PACC 2006‑2012, le plan stratégique du ministère et l'inventaire des GES pour 2014, si bien sûr il en a le résultat final?

Et finalement, donc, pour répéter, parce qu'il me reste encore 15 secondes, puis, bon, je me donne un point d'honneur d'utiliser mon temps, quelle est la phase 2 du PACC qui est en cours présentement pour le ministère, s'il y en a un, pour atteindre son moins 20 % de réduction de gaz à effet de serre en 2020?

• (11 h 20) •

Le Président (M. Bérubé) : Merci, M. le député de Terrebonne. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Heurtel : Merci, M. le Président. Alors, concernant le dépôt de documents, l'ensemble des documents vont être déposés cet automne. Alors, ça, on a pris l'engagement de le faire et on va le faire, alors le député peut être rassuré là-dessus.

Sur les cibles, bon, encore, je l'ai dit plus tôt, l'Inventaire québécois comporte beaucoup plus de travail à faire que l'inventaire fédéral, parce que nous, on base nos chiffres, entre autres, sur les déclarations qu'on reçoit des entreprises, ce que ne fait pas le fédéral. Le fédéral ne va pas plus en profondeur. Ce n'est pas pour dire que le système fédéral est nécessairement mauvais, mais nous, on a plus de données à analyser, et ça prend un peu plus de temps. On en est à 2013. 2013, on en est à 8,6 %. 2014 s'en vient. Nous sommes confiants qu'on va avoir 2014 cet automne. Mais ça veut dire, au moment où on se parle, qu'il reste sept ans, là, en termes de données que nous avons par rapport à nos cibles de réduction pour 2020. Évidemment, le plan d'action sur les changements climatiques, on travaille évidemment tant au ministère qu'avec les autres ministères du gouvernement, les organismes. On a le Comité-conseil sur les changements climatiques également qui nous accompagne dans la démarche pour, s'il y a lieu d'avoir des ajustements... il y en aura. Et ça, ça revient à quelque chose que le député a mentionné, je crois, à deux reprises aujourd'hui, quand il essaie d'expliquer que, mars 2017, si l'argent n'est pas tout dépensé ou on est en retard... essaie de démontrer qu'on est en retard.

Mars 2017, c'est justement, c'est l'évaluation de mi-mandat. Il est inexact, M. le Président, de dire qu'en mars 2017 l'argent va s'évaporer, ou les programmes ne seront pas financés, ou il faut absolument que tout l'argent soit dépensé pour mars 2017. Ce n'est pas ça. Mars 2017, c'est justement, il faut qu'on fasse une évaluation, puis je suis sûr que, si on n'avait pas ça, le député serait en train de nous dire : Bien, il faudrait faire une évaluation à mi-mandat du Fonds vert. C'est ce qui est déjà prévu. Alors, ce qu'on va faire en mars 2017, c'est faire un constat justement d'où nous en sommes par rapport à l'argent qui est dépensé, voir la performance des ministères qui ont l'argent, de voir justement où nous en sommes et pourquoi justement l'argent n'est peut-être pas dépensé s'il ne l'est pas, voir aussi la performance de ces programmes-là justement à mi-chemin pour savoir si ça livre ce qui était prévu. Mais c'est ça, l'échéance de 2017, c'est de faire une évaluation à mi-chemin de la performance du plan d'action sur les changements climatiques 2013‑2020.

Puis, encore une fois, je reviens sur les données que le député cite, ses beaux tableaux et ses analyses, nous ne les avons pas reçus, M. le Président. Il est très difficile pour nous de répondre à des questions qui sont basées sur des analyses qu'on n'a pas reçues, qu'on n'a pas vues, et ça aurait peut-être permis une meilleure discussion, de meilleurs échanges si on avait reçu ce travail-là, puis on aurait pu trouver des réponses aux questions précises du député.

Mais, encore une fois, je vais le répéter, on a pleinement l'intention de déposer les documents qu'il faut puis respecter les engagements qui ont été pris à la CAP, mais également, je vais le répéter, nous, on est au travail justement pour moderniser la gestion du Fonds vert, pour moderniser la Loi sur la qualité de l'environnement. Lorsque le Parti québécois était au pouvoir, la gestion du Fonds vert ne comportait aucun problème. Et le gouvernement du Parti québécois n'a mis en oeuvre presque aucun projet pendant qu'il était au pouvoir. Alors, s'il était si préoccupé que ça avec le rythme, le débit de dépenses du Fonds vert, pourquoi n'a-t-il rien fait lorsqu'il était au pouvoir et pourquoi n'a-t-il rien fait sur la gouvernance du Fonds vert?

Le Président (M. Bérubé) : Merci, M. le ministre. On passe au député de Mégantic.

M. Bolduc : Merci, M. le Président. Moi, je voudrais revenir un peu sur des éléments que le député de Terrebonne a mentionnés précédemment.

En fait, il y a deux commentaires. Il nous avait parlé qu'il avait évalué quatre ministères, le MRN, le MAPAQ, le MTQ et l'Environnement, pour un total d'entre 29 et 32 programmes sur les 150 existants, ce qui nous donnerait une évaluation d'à peu près 20 % du total des programmes. Il nous a dit qu'il y avait 50 % des budgets non dépensés sur 22 programmes. Il en a évalué autour d'une trentaine, mais il en parle juste de 22. Je me demande pourquoi il n'a pas parlé des autres. Je serais curieux de comprendre pourquoi ça, ça n'est pas arrivé, là. Il devait y avoir des choses intéressantes là-dedans, j'imagine. Je n'ai pas vraiment eu l'information ou j'ai peut-être manqué de l'information vitale. Je comprends que le député de Terrebonne a beaucoup de choses à nous dire, mais il en a manqué une belle, opportunité, ici, puisqu'il en a sauté 25 %, de ce qu'il nous a parlé, puis il a oublié de mentionner ceux-là.

Donc, moi, je me sers de cette base-là pour revenir sur le fait qu'effectivement le ministre nous a mentionné que les documents qu'il a demandés seraient déposés cet automne, mais il y a des choses qui sont fondamentales, surtout quand il nous a parlé et qu'il a dit qu'on n'atteindra pas nos cibles.

Je vais prendre un exemple que je trouve assez intéressant : les ventes de voiture électrique. Pour ceux qui ont suivi les journaux en fin de semaine, le ministre des Ressources naturelles nous parlait de 11 600 véhicules. On va avoir augmenté d'un montant très substantiel en 2016. Il faut se rappeler que, dans les données que nous avons aujourd'hui, la plupart de ces véhicules-là ne sont pas inclus. Si on considère qu'un véhicule moyen, au Québec, a une production d'à peu près 2,4 tonnes de carbone, avec 11 000 véhicules, on vient d'aller chercher plusieurs dizaines de milliers de tonnes de réduction de gaz à effet de serre qui ne sont pas encore inventoriées. Et on voit clairement qu'avec la loi zéro émission et l'avancée que nous faisons dans les technologies vertes la croissance des gaz à... je dirais, pas des gaz, mais des réductions de gaz à effet de serre est exponentielle et cette croissance-là s'accélère pour une raison bien simple : plus on a de bornes de charge électrique, bien, plus il est facile pour les gens d'avoir des voitures et de les utiliser sur des territoires de plus en plus larges. Donc, il y a un effet d'infrastructure qui est en train de se mettre en place qui est, selon moi, très fondamental, et des sommes considérables d'argent sont mises en place pour cette infrastructure-là, qui permet, par la suite, d'avoir les économies substantielles à partir de l'implication des programmes qui sont mis en place.

Donc, de dire que les programmes sont dysfonctionnels, qu'ils n'atteindront pas leurs cibles dans un futur prochain et de faire une extrapolation linéaire qui n'est absolument pas linéaire, ça devient très compliqué de suivre ça puis de s'assurer que les gens comprennent bien les faits.

Donc, il faut s'assurer que nos programmes sont mis en place, il faut s'assurer que les politiques du gouvernement sont bien suivies. Il faut s'assurer qu'on enrichit la valeur de la documentation disponible, et le ministre y travaille et, comme il nous l'a déjà dit, il va déposer les documents. L'objectif ici est toujours de se servir d'une base actuelle pour bâtir notre futur. C'est très important de réaliser que le gouvernement, dans sa législation et dans son fonctionnement, ne travaille pas dans le passé, mais il travaille dans le futur. On est en train de bâtir une politique environnementale qui va réduire les gaz à effet de serre dans la cadre d'un développement durable qui va permettre à l'ensemble de notre législature de mettre les jalons nécessaires pour que le gouvernement, pour que les industries, pour que nos structures gouvernementales et institutionnelles puissent mettre en place une série d'actions qui vont nous permettre d'atteindre nos objectifs et de réduire les gaz à effet de serre grâce à un fonds vert qui a été développé par le gouvernement libéral, qui a été développé pour faire des économies, et investir dans le Fonds vert. Merci.

• (11 h 30) •

Le Président (M. Bérubé) : Merci, M. le député. Nous revenons au deuxième groupe d'opposition. Je reconnais le député de Masson.

M. Lemay : Merci, M. le Président. Donc, le prochain bloc, on va parler de protocoles, dans le fond, pour les crédits compensatoires. Présentement, on a cinq protocoles qui sont en vigueur, là : recouvrement de fosses à lisier; pour les lieux d'enfouissement; ce qui concerne la couche d'ozone quand on récupère les mousses isolantes puis les réfrigérants; on en a pour les mines de charbon en exploitation puis les mines de charbon souterraines. Mais il y a seulement cinq protocoles qui sont admissibles présentement pour les crédits compensatoires dans le Fonds vert.

Et puis on parlait, tout à l'heure, d'entreprises innovantes, là, qui avaient des solutions pour réduire des gaz à effet de serre, mais, on peut juste regarder, il y a des entreprises, là, qui sont prêtes à réduire les gaz à effet de serre dans des cimenteries. Et puis, si on parle de cimenteries, prenons, par exemple, le projet de cimenterie McInnis, à plein régime, on s'entend que c'est 1,76 mégatonne de GES que la cimenterie McInnis pourrait produire annuellement. Mais, bref, si on pouvait avoir des protocoles supplémentaires pour rendre admissible la réduction des GES, ça permettrait à des entreprises québécoises de pouvoir justement faire la réduction à la source pour qu'il n'y ait pas d'émissions de GES d'une cimenterie.

Et puis, tout à l'heure, je parlais avec le député de Lac-Mégantic. Il mentionnait qu'il avait de la difficulté à suivre un peu. Mais ce que je voulais mentionner, c'est que présentement, si on veut réduire des tonnes de GES d'une cimenterie, le coût du procédé pour la réduction est d'environ 30 $. Mais on sait que, sur le marché du carbone, le coût d'une tonne se vend sous les 20 $ présentement, là, se vend aux alentours de 18 $, je n'ai pas le chiffre exact, mais ce qui fait en sorte que pour une cimenterie on a le choix : un, on achète des crédits, sur le marché du carbone, à 18 $ ou on investit 30 $ pour réduire des gaz à effet de serre à la source. Mais le choix est simple, c'est mathématique là : si j'étais le propriétaire de la cimenterie, je choisirais l'achat des crédits sur le marché du carbone, parce que ça me coûte seulement 18 $ versus le 30 $ si je fais la réduction à la source. Pourtant, si on a des protocoles supplémentaires, bien, ça permettrait à la cimenterie d'évaluer une prochaine solution. On pourrait dire : Ah! bon, d'accord. Si j'investis les 30 $ que ça me coûte pour réduire à la source puis que je suis capable, après ça, de revendre sur le marché du carbone parce que j'ai fait la réduction en sol québécois puis il y a quelqu'un qui veut aller le chercher, mon coûtant, il tombe à 12 $, là, pour faire la réduction de la tonne de GES. Puis c'est là que le ministère, il rentre en ligne de compte, parce que, via le Fonds vert, il pourrait même financer cette différence-là, et puis à ce moment-là on aurait des réductions en sol québécois puis on n'aurait pas de fuite de capitaux qui sortent à l'extérieur du Québec.

Bref, j'aimerais que le ministre puisse me parler de son cadre de gestion, parce qu'à l'intérieur du cadre de gestion j'ai n'ai vu en aucun endroit qu'on parlait de la possibilité d'inclure des nouveaux protocoles dans le futur qui permettraient justement aux entreprises de faire de l'innovation. C'est pas mal le sens de ma question. Ça ne sert à rien de continuer, je suis pas mal sûr que le ministre a bien compris cette question. Bref, je laisserais la parole au ministre pour qu'il puisse répondre.

Le Président (M. Bérubé) : Merci, M. le député. Alors, M. le ministre, en vous indiquant que votre groupe a à peu près cinq minutes et un peu plus.

M. Heurtel : Merci, M. le Président. J'apprécie la question du député parce que la question des protocoles de crédits compensatoires est une question importante, parce que c'est une composante essentielle du fonctionnement de tout le système du marché du carbone.

Présentement, il y a des protocoles. Est-ce qu'il pourrait y en avoir plus? Oui. Il faut bien comprendre qu'on ne peut pas juste se lever un matin et décider que le Québec met en place un protocole puis à la fin de la journée ça voit le jour. On est dans un marché. Il faut s'assurer de bien analyser les conséquences, les répercussions de la mise en place d'un protocole. Nous avons des partenaires dans le marché du carbone : on a la Californie, nous avons maintenant l'Ontario. Nous allons avoir le Mexique. Il y a d'autres États qui regardent des partenariats avec le marché du carbone Québec-Ontario-Californie, qui est déjà le plus important marché du carbone en Amérique du Nord. Et je suis certain qu'après l'annonce du gouvernement fédéral d'hier, qui reconnaît non seulement la compétence du Québec en matière de lutte contre les changements climatiques, mais reconnaît que le marché du carbone est l'un de deux systèmes qui peut véritablement réduire les émissions de gaz à effet de serre au Canada... je crois qu'il va y avoir plus d'engouement de la part même de certaines provinces canadiennes qui ne sont pas encore membres de notre marché du carbone.

Cela dit, il y a déjà du travail en cours pour le développement d'autres protocoles de crédits compensatoires notamment avec l'Ontario, mais ça prend du temps. Mais nous sommes d'accord que c'est un excellent outil. Le protocole sur le méthane, par exemple, a permis le développement d'une nouvelle technologie qui a été développée par une compagnie québécoise qui s'appelle Biothermica, et cette compagnie, en réussissant à développer cette technologie-là et en la vendant aux États-Unis, a réussi à recevoir des crédits compensatoires qu'elle a pu revendre. On a une autre entreprise québécoise en matière de gestion des réfrigérateurs usés qui également, présentement, bénéficie de protocoles de crédits compensatoires. Alors, c'est un tremplin à l'innovation, c'est un levier pour développer l'innovation québécoise en matière de réduction d'émissions de gaz à effet de serre. Et on veut en développer davantage, mais il faut faire attention, il faut le faire prudemment puis prendre le temps qu'il faut pour bien évaluer l'ensemble des impacts d'un protocole de crédits compensatoires.

Concernant la cimenterie, je suis content qu'on en parle parce que, justement, le Fonds vert, on voit un autre aspect de son utilité, parce qu'on a un projet comme Port-Daniel qui, oui, va émettre énormément de gaz à effet de serre. Mais, en même temps, qu'est-ce qu'on fait, grâce au Fonds vert, pour diminuer les impacts d'émissions de gaz à effet de serre dans les projets industriels importants pour l'économie québécoise comme Port-Daniel? Bien, on investit dans le développement de la biomasse forestière grâce au Fonds vert. On investit également dans les technologies de capture carbone grâce au Fonds vert. Et ce sont des entreprises québécoises qui reçoivent cet argent-là. Alors, ce qu'on développe, on essaie de voir si également le gaz naturel pourrait être une solution pour justement encourager la cimenterie Port-Daniel à ne peut-être pas dépendre à 100 % des carburants fossiles les plus nocifs de la planète pour alimenter son usine.

Alors, ce sur quoi on travaille présentement, c'est sur le développement de nouvelles technologies. Ça a déjà été annoncé dans le dernier budget. Le dernier budget, il y a des investissements en développement de technologies de capture carbone au Québec. Il y a, dans les deux derniers budgets, des investissements prévus en biomasse forestière. Même chose au niveau du gaz naturel, voir s'il n'y a pas des débouchés pour justement aider les entreprises québécoises à dépendre moins des carburants fossiles. Puis en même temps ça crée des opportunités de développement économique pour développer des nouvelles façons de faire, des nouvelles technologies. Puis ça, si on n'avait pas le Fonds vert, on ne serait pas capables d'investir, on n'aurait pas les reins assez solides financièrement pour investir pleinement dans la transition de l'économie québécoise vers une économie plus sobre en carbone.

Alors, ce sont des bons exemples pour justement qu'on s'assure que les entreprises québécoises qui polluent, bien, polluent moins puis, en même temps, développent des nouvelles technologies qui permettent justement non seulement de baisser notre bilan d'émissions de gaz à effet de serre, mais nous permettent aussi d'exporter ces technologies.

Conclusions

Le Président (M. Bérubé) : Merci, M. le ministre. Nous en sommes maintenant aux dernières interventions. Et, M. le ministre, à votre discrétion, vous avez encore un maximum de 10 autres minutes que vous pouvez prendre ou pas.

• (11 h 40) •

M. Heurtel : ...

Le Président (M. Bérubé) : Oui. En fermeture.

M. Heurtel : M. le Président, est-ce que je peux partager mon temps avec des collègues?

Le Président (M. Bérubé) : Non.

M. Heurtel : Non? Les 10 minutes?

Le Président (M. Bérubé) : On me dit que ce n'est pas possible à ce moment-ci.

M. Heurtel : Ah! là, ce n'est pas possible. Bon, bien, très bien. Merci, M. le Président. Alors, je comprends que ce sont mes 10 dernières minutes.

Une voix : ...

M. David Heurtel

M. Heurtel : Bon, de fermeture. Merci, M. le Président. Alors, malgré ce que peut en dire le député de Terrebonne, le Fonds vert, c'est un outil essentiel dans la lutte contre les changements climatiques. Et est-ce qu'il est parfait? Non. Et c'est pour ça qu'on a mis en place le projet de loi n° 102 et c'est pour ça qu'on propose dans ce projet de loi une réforme en profondeur de la gestion et de la gouvernance du Fonds vert.

Ce projet de loi là propose qu'on mette en place un conseil de gestion indépendant. Il va être composé de neuf membres; cinq de la société civile. On vise des experts et des expertes en gestion, en gouvernance, en administration, en finances, évidemment aussi en réduction d'émissions de gaz à effet de serre, puis ce qu'on veut, c'est que ce conseil de gestion là nous donne un cadre des gestion, un cadre de gouvernance du Fonds vert au-dessus de tout soupçon, nous permette justement qu'on ait un cadre réglementaire qui nous permette de suivre chaque dollar du Fonds vert du début à la fin, s'assurer que le choix de chaque projet s'aligne et s'arrime avec chaque élément de notre stratégie de lutte contre les changements climatiques, puis ici je parle évidemment du plan d'action sur les changements climatiques 2013‑2020, je parle de la Stratégie gouvernementale de développement durable, je parle également de la politique énergétique du Québec, du Plan d'action sur l'électrification des transports, je parle de la loi sur les véhicules zéro émission, que, la semaine dernière, nous avons ensemble, avec les collègues ici présents, terminé l'étude article par article. Le test climat qui est prévu dans le projet de loi n° 102 au niveau des autorisations environnementales en est un autre exemple.

Nous avons une infrastructure de lutte contre les changements climatiques qui va nous permettre d'atteindre nos objectifs, tant nos objectifs de 20 % par rapport au niveau de 1990 pour 2020 que 37,5 % pour 2030 encore par rapport au niveau de 1990. M. le Président, on a des objectifs même pour 2050, 80 à 95 % de réduction, ce qui va nous permettre, ces cibles et les moyens qu'on se donne grâce au Fonds vert, grâce au marché du carbone... bien, ces moyens-là vont nous permettre d'atteindre nos cibles. Puis on est déjà en route vers l'atteinte de nos cibles. Les chiffres que nous avons sont ceux de 2013, et nous sommes à 8,6 %. Il n'y a rien qui indique — rien qui indique — que, de 2014 à 2020, nous n'atteindrons pas ces cibles-là, justement, avec les moyens qu'on se donne. On s'est donné des moyens, je les ai nommés, mais également il faut voir que le marché du carbone est en train de se développer. On avait lié le marché du carbone, avec succès, avec la Californie en 2014. Maintenant, l'Ontario va se joindre au marché du carbone en 2017, faisant en sorte que plus de 50 % de l'économie canadienne et plus de 60 % de sa population vont avoir un même marché du carbone.

Et, hier, le gouvernement fédéral, en reconnaissant le marché du carbone comme étant un des deux seuls moyens qui peut efficacement nous permettre d'atteindre collectivement les cibles de réduction d'émissions de gaz à effet de serre qui ont été convenues lors des accords de Paris, ça renforce, justement, c'est un autre exemple qui prouve que le Québec a fait le bon choix en mettant en place un marché du carbone. L'entente que nous avons signée avec le Mexique au mois d'août, en vertu de laquelle le Mexique mettra en oeuvre un marché du carbone d'ici 2018 et qui veut explorer également une liaison avec le marché du Québec, de l'Ontario et de la Californie... Les États du Nord-Est américain, qui ont leur propre marché du carbone, également sont intéressés à discuter avec le Québec à propos d'un développement, ensemble, d'un marché du carbone. La Chine, la deuxième économie du monde, le premier pollueur du monde, va mettre en place un marché du carbone national d'ici 2017‑2018, va faire en sorte que près de 60 % du produit intérieur brut de la planète, M. le Président, va avoir une forme de marché du carbone, parce qu'on compte l'Europe, la Corée du Sud, qui en ont déjà.

Alors, le Québec a fait le bon choix, est un leader en matière de lutte contre les changements climatiques, et les revenus, déjà, du Fonds vert, 1,6 milliard dans la période 2006 à 2012, ont été investis et ont contribué à l'atteinte et au dépassement de nos objectifs durant cette période-là. Ça, c'est indéniable. Puis là on a 1,2 milliard de dollars de revenus, grâce au marché du carbone, pour la phase 2013‑2020, et ces revenus-là sont entièrement investis dans l'économie québécoise pour justement permettre l'électrification des transports, la transition énergétique, une gestion plus efficace de nos déchets, entre autres, des énergies renouvelables. Mais évidemment l'électrification des transports est centrale à notre stratégie parce que les transports, c'est notre première source d'émissions de gaz à effet de serre.

Mais ce qui est intéressant dans l'échange d'aujourd'hui, c'est qu'il est clair que la gouvernance du Fonds vert doit être améliorée. Puis, encore une fois, on va s'assurer avec les modifications proposées dans le projet de loi n° 102 qu'on soit plus transparents, qu'on soit plus rigoureux, qu'on ait une gestion par projets, qu'on ait une reddition de comptes et qu'on soit capables de plus efficacement bien comprendre que chaque projet, de son évaluation initiale à la décision pour investir dans ce projet-là, à son déroulement et sa mise en oeuvre ainsi qu'à la fin la validation et la vérification que le projet a livré les objectifs qu'il devait livrer... on va s'assurer que ça soit fait selon les plus hauts standards de gouvernance et de gestion possible. Et c'est ça, la modernisation qu'on propose dans le projet de loi n° 102. Alors, nous, on s'y attaque. On s'est attaqués aux commentaires, aux recommandations de la Vérificatrice générale dans ses deux derniers rapports et on va livrer pour s'assurer d'avoir la meilleure gouvernance possible du Fonds vert.

Mais un autre fait très important qui est relevé aujourd'hui, c'est que, la gouvernance actuelle, le Parti québécois, lorsqu'il était aux affaires, de septembre 2012 à avril 2014, c'était le même cadre de gouvernance qui reçoit toutes les critiques et tous les beaux tableaux didactiques de la part du député de Terrebonne, c'est exactement la même gouvernance. Et, lorsque le Parti québécois était aux affaires, qu'est-ce qu'il a fait pour moderniser le cadre de gouvernance qui reçoit toutes ces foudres de la part du Parti québécois aujourd'hui? Rien, zéro. Ça allait très bien au Fonds vert durant les années... les 18 mois, pardon, de gouvernement du Parti québécois. Rien n'a été modifié. Le chef de l'opposition officielle, qui était ministre des Affaires municipales et des Transports, il critique aujourd'hui la gouvernance du Fonds vert, mais, lorsqu'il était ministre, il n'a absolument rien fait, il n'a rien dénoncé. Ça lui allait très bien.

Mais, si on va encore plus loin, puisque le fond des interventions du député de Terrebonne, c'est pour nous démontrer toute sa préoccupation quant à l'atteinte de nos cibles de réduction d'émissions de gaz à effet de serre, bien, qu'est-ce que le gouvernement du Parti québécois a fait en termes de développement de projets financés par le Fonds vert? Presque rien. Et non seulement il y a eu très peu de projets qui ont été développés, lancés, financés par le Fonds vert dans le cadre du gouvernement du Parti québécois, mais ils sont allés encore un peu plus loin : ils sont tellement préoccupés par les gaz à effet de serre que le gouvernement du Parti québécois a fait une entente pour développer Anticosti et pour nous lier, pour les 75 à 80 prochaines années, à un projet qui a comme seul objectif d'augmenter notre bilan d'émissions de gaz à effet de serre et qui est incompatible avec la lutte contre les changements climatiques.

Et le député de Terrebonne était pour ce projet-là. Son candidat préféré à la chefferie du Parti québécois, l'ancien député de Marie-Victorin, c'était la pierre angulaire de son projet. Même chose pour le chef de l'opposition officielle, qui a appuyé le député de Marie-Victorin. Et trois des quatre candidats à la chefferie du Parti québécois étaient des ministres dans le gouvernement du Parti québécois qui ont non seulement appuyé le projet, mais l'ancienne ministre des Ressources naturelles était à l'annonce.

Alors, aujourd'hui, le député de Terrebonne et le Parti québécois prétendent nous faire la morale sur l'atteinte de cibles de réduction d'émissions de gaz à effet de serre? Soyons clairs, M. le Président, on convient qu'on doit améliorer la gestion du Fonds vert. On a mis en place déjà des mécanismes. On doit faire mieux, et c'est pour ça que le projet de loi n° 102 va livrer un cadre de gouvernance moderne pour le Québec.

• (11 h 50) •

Le Président (M. Bérubé) : Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole au député de Terrebonne, qui a également un temps de parole de 10 minutes.

M. Mathieu Traversy

M. Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, tout d'abord, vous dire que, pour le Parti québécois et l'opposition officielle, il est certain que le suivi de la bonne gestion du Fonds vert va faire partie de nos priorités au cours des prochaines semaines et des prochains mois. Elle l'est depuis déjà deux ans. Vous avez vu avec combien de conviction et de passion nous avons assuré les suivis à la Commission de l'administration publique, avec lequel nous travaillons aussi avec le Commissaire au développement durable pour essayer d'aller chercher davantage de solutions et dans lequel aussi nous mettons la pression sur le gouvernement pour donner le maximum de réponses. Nous saluons la volonté du gouvernement de vouloir réformer le fonds. Nous voulons nous assurer que, d'ici à ce qu'il soit réformé, les programmes soient enlignés dans la meilleure direction.

Et ce qui nous préoccupe beaucoup avec le fonds, évidemment, parce que le fonds, c'est le vaisseau amiral pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, c'est beaucoup l'atteinte de la cible, comme le ministre vient de vous le mentionner, de réduction de 20 % des gaz à effet de serre au Québec d'ici 2020. Il reste quatre ans. Et je vais vous expliquer, M. le Président, en six constats pourquoi j'ai des grosses craintes en ce qui a trait à l'atteinte de cet objectif par le gouvernement et pour laquelle aussi j'ai parlé du Fonds vert aujourd'hui.

Mon premier constat, c'est au niveau des émissions qu'émet le Québec à l'heure actuelle. Le Québec stagne, M. le Président. Les dernières données, le ministre nous l'a mentionné, datent de 2013 en ce qui a trait aux émissions de gaz à effet de serre. On est à 8,5 %, 8,6 % de réduction depuis 1990. Mais ce qu'on constate quand on regarde la progression, entre 2012 et 2013, de nos émissions de gaz à effet de serre, c'est qu'elles n'ont diminué que de 0,1 %, donc que les émissions au Québec ne sont pas en train de diminuer d'une façon considérable. Au contraire, elles stagnent. Et ce que le premier bilan préliminaire du gouvernement fédéral, qui nous a été déposé en avril dernier, semble nous démontrer, c'est que les émissions au Québec pourraient même avoir remonté entre 2013 et 2014. Et donc on a hâte de voir le dépôt du bilan. Je comprends que le ministre doit prendre le temps de bien calculer la chose, qu'il doit prendre bonne foi des déclarations des partenaires pour être capable de quantifier le nombre d'émissions qu'on peut émettre au Québec. J'ai compris ses explications. Mais quand même les signaux sont très inquiétants.

Le financement aussi qui est dédié à l'électrification des transports nous amène un son de cloche inquiétant, M. le Président. Lorsque nous étions au gouvernement, pendant les 18 mois où nous étions au gouvernement, M. le Président — il faut quand même rappeler que ça a été un très, très, très long mandat, 18 mois — je dois vous...

Des voix : ...

M. Traversy : Mais, quand on écoute le ministre, on a l'impression que ça a été quasiment deux décennies. Mais 18 mois, c'est quand même non négligeable.

Je dois vous mentionner que l'ancienne première ministre, Mme Pauline Marois, voulait débloquer 516 millions de dollars sur quatre ans pour l'électrification des transports. Or, l'annonce que le gouvernement actuel nous fait au cours des derniers mois est de 420 millions sur cinq ans, donc un investissement de 85 millions par an beaucoup moindre que celui du gouvernement péquiste de l'époque, qui était de 130 millions par an. Alors, cet argent, qui n'est pas au rendez-vous dans le cadre de l'électrification des transports, nous donne aussi un signal inquiétant quant à l'atteinte de l'objectif de moins 20 % de nos réductions de gaz à effet de serre d'ici la fin de la décennie.

Nous avons aussi discuté, avec le ministre, de la loi zéro émission, et là, évidemment, toute la pression est sur le ministre de l'Environnement, parce que, dans la loi zéro émission, tout est à la discrétion du ministre, c'est des détails qui seront votés par règlement après l'adoption. La loi zéro émission est un bon outil. Nous espérons que les modalités qui seront incluses à l'intérieur de la réglementation de ce projet de loi soient à la hauteur de la volonté des Québécois de vouloir procéder à cette transition énergétique et transiter vers les véhicules zéro émission. Mais, malgré toute la bonne volonté, et si la réglementation est au rendez-vous, il faut quand même mentionner que cette loi ne règle pas en totalité l'atteinte de la cible que le ministre s'est fixée, c'est-à-dire 100 000 véhicules électriques sur les routes du Québec d'ici 2020. Il y a à peu près 80 % de cet objectif qui peut être rempli avec la loi zéro émission si elle est dotée d'une réglementation qui est coriace ou, du moins, qui est stimulante, mais il reste toujours un 20 % à trouver. Donc, de ce côté-là aussi, nous avons des inquiétudes, M. le Président.

Un autre constat que nous avons fait, c'est au niveau de la mobilité durable, et particulièrement au niveau du transport en commun. Et là je sais que le ministre de l'Environnement en mène large, mais il y a toujours bien des limites, dans le sens où il faut qu'il dialogue avec l'ensemble de ses collègues ministériels pour être capable, j'imagine, de les encourager toujours à mettre en importance, notamment dans le cadre du MTQ, l'importance du transport en commun. Et certains chercheurs... d'ailleurs, l'Institut Pembina nous faisait un bulletin des provinces canadiennes et dit ceci du Québec, M. le Président, dans son plus récent rapport de fin septembre, il dit : «Malgré [les] multiples engagements envers le climat, le Québec avance lentement dans le domaine des transports — particulièrement sur le plan du transport en commun. En conséquence, [le niveau] d'achalandage du transport en commun [voit] une décroissance qui a commencé [depuis] l'année 2015. La prise d'action dans les éléments clés du secteur des transports demeure alors essentielle afin de permettre au Québec de réaliser des objectifs à long terme sur le plan climatique. À cette fin, la province doit investir dans les transports en commun et accélérer les mesures additionnelles en transport.» Donc, de ce côté-là aussi, M. le Président, on sent qu'il y a des signaux inquiétants qui allument sur le tableau de bord du ministre de l'Environnement pour l'atteinte de ces objectifs.

Le marché du carbone à lui seul ne peut pas régler non plus l'ensemble de la problématique. On le sait, on en a parlé pendant plusieurs heures depuis la COP21 et depuis la mise en place de ce nouveau marché, on sait que l'achat de crédits carbone à lui seul n'est pas une solution pour atteindre les objectifs que le gouvernement s'est fixés. On a également, au niveau, M. le Président... un autre constat, qui est la gouvernance sectorielle de la transition énergétique, qui nous inquiète particulièrement. Le gouvernement est voué à une stratégie perdante en matière de transition énergétique parce qu'il se limite à des stratégies sectorielles. La création du futur organisme Transition énergétique Québec est un exemple flagrant du manque de coordination gouvernementale qu'il peut y avoir dans la gestion des sommes du Fonds vert. À moins évidemment qu'il y ait des ententes plus concrètes qui seront mises en place entre les différents ministères concernés, on sent qu'on est plus en silo plutôt qu'avoir une vision, comment je pourrais dire, globale avec des voies de passage qui sont convergentes.

Les conséquences des déboires du Fonds vert, que nous avons parlé aujourd'hui également, nous font craindre que l'atteinte des cibles de réduction de gaz à effet de serre pour 2020 ne soit pas atteinte. Nous avons relaté ce que le Commissaire au développement durable est venu nous dire au cours des derniers mois concernant ce fonds. Notamment, dans son dernier rapport, avant d'être remplacé, le commissaire avait dit ceci : La réduction moyenne des émissions de gaz à effet de serre au Québec est «de 0,4 % par année. [...]L'atteinte [des] cibles exigera une réduction moyenne de plus de 1,6 % par année. La tâche est énorme et [est] pressante, surtout si l'on compare à ce qui a été fait jusqu'à maintenant.»

D'ailleurs, un de nos spécialistes qui vient souvent en commission parlementaire à l'invitation du ministre, M. Pierre-Olivier Pineau, professeur titulaire de la chaire de gestion sur l'énergie, résume le problème ainsi, il dit : Selon les chiffres les plus récents — toujours ceux de 2013, parce que nous attendons les données de 2014 — nous avons pris 23 ans, au Québec, pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre de 8 % — 8,6 %, selon les dernières données. «Dans les quatre [années] qui nous séparent de 2020, nous devons couper de 12 %[...]. [...]Ces objectifs sont d'autant plus ambitieux que les Québécois sont déjà ceux qui émettent le moins de GES par habitant au Canada : [soit] 10,2 tonnes, contre 20,7 en moyenne [dans le reste du pays].»

Autrement dit, M. le Président, c'est très mal parti, et on a toutes les raisons de croire que l'atteinte de cette cible est compromise si le ministre de l'Environnement ne met pas les bouchées doubles au cours des prochaines années pour être capable d'y parvenir. Après la cible ratée du Protocole de Kyoto, une question est simple : Le Québec respectera-t-il ses engagements à l'international, notamment au niveau climatique, pour la cible de 2020? Rien ne semble être sûr suite aux déboires du Fonds vert, au manque de financement de l'électrification des transports, en l'absence du virage majeur dans le transport, notamment le transport en commun et le transport collectif, au niveau de sa solution du marché du carbone, qui est bien mais ne semble pas être suffisante, et au niveau aussi de sa vision sectorielle, et non intégrée, de la transition énergétique que le Québec est en train de prendre notamment avec la création des nouveaux organismes qu'on vous a mentionnés tout à l'heure, M. le Président, le TEQ.

• (12 heures) •

Alors, au-delà du discours vert, il est important que le gouvernement du Québec arrive aussi aux résultats. C'est le fameux adage : Il faut que les bottines suivent les babines. Dans le cas de la réduction des gaz à effet de serre au Québec, de diminuer de moins 20 % depuis 1990 me semble très mal parti, l'avenir nous le dira, et vous pourrez compter sur le Parti québécois pour veiller au grain, M. le Président.

Le Président (M. Bérubé) : À la bonne heure, alors merci. Je lève donc la séance.

Et la commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 1)

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