(Onze
heures douze minutes)
Le
Président (M. Reid) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
la Commission des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à toutes les personnes dans
la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques, téléphones surtout, ce que je suis en train de faire.
La
commission est réunie afin de poursuivre les auditions
publiques dans le cadre des consultations particulières sur le document de consultation
intitulé Cible de réduction d'émissions de gaz à effet de serre
pour 2030.
Mme la secrétaire, y a-t-il
des remplacements?
La Secrétaire :
Non, M. le Président, il n'y a aucun remplacement.
Auditions (suite)
Le
Président (M. Reid) :
Alors, voici l'ordre du jour pour cet avant-midi. Nous entendrons deux
groupes : l'Association de l'aluminium du Canada et Écotech.
Alors,
bienvenue d'abord à nos invités de l'Association de l'aluminium. Vous avez
10 minutes pour faire votre présentation,
nous allons ensuite procéder à une période d'échange avec les membres de la commission.
Je vous demanderais de vous présenter et présenter la personne qui vous
accompagne pour les fins de l'enregistrement. À vous la parole.
Association de l'aluminium du Canada (AAC)
M. Simard (Jean) : Bonjour, M. le Président. Je vous remercie. Je me présente : Jean
Simard, président et chef de la direction de l'Association
de l'aluminium du Canada. Je suis accompagné d'Anik Dubuc, qui est
vice-présidente au développement durable au sein de l'Association de
l'aluminium du Canada.
M. le Président, M.
le ministre, MM. les députés, madame, nous apprécions l'occasion qui nous est
offerte de faire valoir la position de
l'industrie de l'aluminium primaire, dont 90 % des effectifs sont
localisés dans la province de Québec.
L'industrie compte neuf usines au Québec, une en Colombie-Britannique. Nous
sommes à 100 % hydroélectricité en
termes d'intrants énergétiques pour le procédé d'électrolyse. Nous comptons
près de 10 000 employés et sommes répartis, comme vous le savez sans doute, dans l'ensemble
des régions ressources du Québec où se trouve de l'hydroélectricité pour
aider ou accompagner la production d'aluminium primaire.
L'invitation
qui nous est faite comme industrie vise à se prononcer sur la cible qui est
proposée par le gouvernement du
Québec dans le cadre des engagements à venir dans le cadre de COP21. Comme vous
avez probablement pu le constater à
la lecture de notre mémoire, nous ne nous prononçons pas sur la cible, parce
que nous ne pouvons y contribuer dans le cadre de nos opérations, et on pense qu'il est plus conséquent de notre
part d'expliquer la situation dans laquelle notre industrie se trouve et de suggérer des pistes parmi lesquelles le gouvernement pourrait bâtir une position ou des engagements qui seraient
conséquents pour l'industrie de l'aluminium du Québec. Et je m'explique.
Par
rapport à 1990, alors que nous avons doublé la capacité de production
d'aluminium primaire, nous avons réduit de 30 % en CO2 équivalent, en termes absolus, nos émissions de gaz à effet de serre. C'est la plus grande contribution de tous les secteurs
confondus dans l'atteinte de la cible de réduction de gaz à effet de serre.
Puis en fait on aimerait certainement aller plus loin, mais on ne peut pas, parce que
nous avons atteint la limite du seuil technologique du procédé d'électrolyse
qui est la façon aujourd'hui, à travers la planète, dont on produit de
l'aluminium.
Nous produisons aujourd'hui
l'aluminium à plus faible empreinte carbone sur la planète, nous sommes à deux tonnes équivalent CO2 par tonne d'aluminium produite. Pendant ce temps, ailleurs dans le
monde, en Chine, où on produit plus
de 50 % de tout l'aluminium produit sur la planète, on le fait à hauteur
de 17 tonnes équivalent CO2 par tonne d'aluminium produite.
Ça
veut dire qu'au lendemain de la fin de nos engagements pour 2020, et pour la
période subséquente, dans la mesure
où notre industrie serait soumise à des cibles de réduction supplémentaires
quant à ses émissions, on se retrouverait à taxer la performance d'une industrie plutôt que de l'inciter à réduire
ses émissions, du fait qu'il n'y a plus de marge de réduction possible. On se trouverait donc à alourdir l'économique de nos
usines d'une façon telle que de plus en plus de l'aluminium provenant d'autres
régions de la planète, à plus forte empreinte carbone, prendrait
progressivement notre place sur nos marchés.
C'est d'ailleurs ce
qui se produit présentement alors qu'aux États-Unis la demande croissante,
tirée par le développement de l'industrie automobile, creuse le déficit de
matériaux disponibles à hauteur de 3 millions de tonnes en 2017. Donc, ça veut dire qu'en Amérique
du Nord, en 2017, on va devoir
importer de l'extérieur du continent 3 millions
de tonnes, c'est-à-dire l'équivalent
de tout ce qui est produit au Québec. Cet aluminium-là va provenir en grande
partie de régions utilisant des
combustibles fossiles et donc à très forte empreinte carbone. On parle ici de
la Chine et du Moyen-Orient.
Alors que la
demande croissante en Amérique du Nord, en Europe et ailleurs dans le monde va
occasionner un accroissement de
l'empreinte carbone de l'industrie mondiale de l'aluminium, nous pensons, nous
vous soumettons qu'une des plus grandes contributions que le Québec peut faire à l'effort
mondial de réduction des gaz à effet de serre, c'est au contraire d'assurer la croissance de l'industrie
de façon compétitive en tenant compte, en tenant compte de sa performance
au niveau des émissions de GES. C'est pour
ça que, dans notre mémoire, nous soulignons... nous vous invitons à valoriser
l'expérience et l'excellence de l'industrie
québécoise de production d'aluminium pour apporter cette contribution à
l'effort planétaire, parce qu'on parle, on le sait tous, d'un enjeu
global qui ne connaît pas de frontière. Et donc on a une carte maîtresse au
Québec pour contribuer à cet effort global, et c'est la production d'aluminium
primaire.
On vous
invite à protéger notre production actuelle d'aluminium plutôt que de s'en
priver. Si demain matin on fermait
nos usines et qu'on transférait cette capacité de production en Chine, le
résultat, puis on le mentionne à la page 12... Il y a une petite erreur, puis ça me fait plaisir
de la corriger ce matin. On dit que ça «équivaudrait à un ajout de GES de
l'ordre de la cible totale de réduction du
Québec à l'horizon 2020». On a refait nos calculs en s'en venant ce matin pour
constater que ce serait deux fois, deux fois
la cible totale de réduction du Québec à l'horizon 2020, si on transférait
cette capacité-là vers la Chine, qui
est l'endroit dans le monde, je vous le rappelle, où on connaît le plus fort
taux de croissance, d'ajout de capacité de production d'aluminium
primaire.
Finalement, on vous soumet qu'il serait plutôt
pertinent de favoriser l'expansion de la capacité, comme le gouvernement du Québec l'a cadré dans la Stratégie
québécoise de développement de l'aluminium, où on a pris un engagement de société à assurer la croissance de
cette industrie en tenant compte entre autres, entre autres de sa faible
empreinte carbone et du rôle qu'elle peut
jouer dans le développement de notre économie tout en contribuant à l'atteinte
des cibles de réduction planétaires.
J'invite
maintenant Anik, notre vice-présidente au développement durable, à parcourir
les recommandations de notre mémoire pour ensuite échanger avec vous.
• (11 h 20) •
Le Président (M. Reid) : Je
veux juste vous avertir qu'il vous reste 1 min 30 s à votre
présentation.
Mme Dubuc
(Anik) : Oh! d'accord. Alors, bon, comme il a été mentionné, suite aux
travaux et aux réflexions que l'AAC a faits suite à la proposition de la cible
du gouvernement du Québec, on a formulé quatre recommandations.
Donc, la
première, elle s'appuie sur le chemin parcouru par l'industrie québécoise de
l'aluminium. Donc, on a atteint des
performances qui sont enviables au niveau mondial, entre autres par notre
situation géographique, mais aussi par les
investissements majeurs qui ont été effectués, et aussi l'excellence
opérationnelle dans nos installations. Alors, pour ces raisons-là, l'AAC soutient que les demandes
futures soient limitées au maintien de la performance de faible intensité GES,
ce qui relève... qui est un défi en soi, en
fait, puisque plusieurs facteurs peuvent détériorer ces performances-là, des
facteurs externes.
La deuxième
recommandation, elle est basée sur le fait que les contributions directes du
secteur ont déjà... sont passées,
alors c'est plutôt une contribution indirecte qui pourrait être faite par
centrer les efforts entre autres sur le secteur des transports en
introduisant l'aluminium pour l'allègement des véhicules.
La troisième recommandation : L'AAC propose
que le gouvernement reconnaisse l'industrie de l'aluminium comme un atout stratégique dans le positionnement
sur l'échiquier mondial. On a tout avantage à produire ici pour réduire
globalement les GES.
Et la
quatrième en est une, recommandation, de prévisibilité, donc de fixer
maintenant pour le long terme les règles du jeu post-2020 afin qu'on puisse garder la pérennité de l'industrie et
qu'on puisse garder notre avantage concurrentiel sur les marchés
internationaux. Voilà.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Alors, nous allons passer maintenant à la période d'échange. Nous allons
commencer par le côté du gouvernement. M. le ministre, vous avez la parole.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Simard,
Mme Dubuc. Merci pour votre présentation ainsi que votre mémoire.
J'aimerais
d'abord approfondir. Quand vous dites que les processus d'électrolyse utilisés au
Québec, disons, sont à la fine
pointe, là, de la technologie, ça, c'est vrai pour l'ensemble de toutes les
installations d'aluminium au Québec? Tout le monde est à la fine pointe
et au dernier cri?
Mme Dubuc (Anik) : ...mondial, oui,
c'est la technologie, c'est le processus chimique d'électrolyse.
M.
Heurtel : Ce n'est pas ça, ma question, c'est : Est-ce que toutes
les installations en aluminium au Québec sont à la fine pointe, toutes?
Mme Dubuc (Anik) : Ils ont fait des
modernisations pour intégrer, justement, les technologies, les dernières
technologies, oui, sur le marché.
M. Heurtel : Donc, toutes, toutes,
toutes les installations au Québec. C'est ça, ma question. Je veux savoir si chacune d'entre elles... Je comprends que vous parlez
pour l'ensemble de l'industrie, mais est-ce qu'on est vraiment, là,
partout au Québec à la fine pointe?
M. Simard
(Jean) : Avec le retrait des
dernières cuves Söderberg qui s'est fait, là, on est dans le premier quartile
mondial des technologies. Et ce dont on
parle, quand on parle de la limite, du seuil technologique, c'est que, le
procédé d'électrolyse
comme le moteur à combustion, à un moment donné on atteint l'optimisation
totale des procédés, on n'est pas capable d'aller plus loin, il faut
passer à autre chose. Puis l'autre chose, dans notre cas, n'existe pas.
M. Heurtel : Dans le processus de
fabrication de l'aluminium, il y a plusieurs étapes de transport, j'imagine.
M. Simard (Jean) : De?
M.
Heurtel : Transport. Il faut
transporter la bauxite notamment. Ça, il faut... Puis ensuite le produit fini, il
est transporté également.
M. Simard (Jean) : Oui.
M. Heurtel : Bon, alors, ça, ce
transport-là, il se fait comment?
M. Simard (Jean) : Mais ça, c'est
des sources non fixes qui contribuent...
M.
Heurtel : Non, je comprends,
mais je veux juste comprendre le transport lié à la fabrication de l'aluminium.
M. Simard (Jean) : Dans certains cas...
M. Heurtel : Le transport qui est
relié à la fabrication de l'aluminium, il est fait comment?
M. Simard
(Jean) : Bien, dépendant des
sites, il peut y avoir du camionnage, il peut y avoir du train, puis il peut
y avoir du bateau.
M.
Heurtel : Puis ces trois
modes de transport là se font de façon conventionnelle, là, avec des moteurs à
combustion, ou est-ce qu'il y a des nouvelles technologies qui sont
utilisées?
M. Simard
(Jean) : Ça dépend. Il y a
des camions qui vont travailler... C'est des flottes. Alors, il peut y avoir
des camions qui sont au GNL, il peut y avoir
des camions qui sont plus conventionnels, au diesel ou des trucs comme ça.
Mais simplement
pour vous dire que, dans l'enveloppe totale d'utilisation d'énergie, dans
l'enveloppe totale des émissions, le volet de non-fixe, c'est très peu,
c'est comme 6 %, à peu près.
Mme Dubuc (Anik) : Même pas.
M. Simard (Jean) : Même pas.
Mme Dubuc (Anik) : Même pas. On ne
l'a pas considéré.
M. Simard
(Jean) : C'est infinitésimal
dans tout ce qu'on a. Puis tout le monde travaille sur ça, on est dans le
top de l'écoefficience au niveau de
l'utilisation d'énergie chez Hydro-Québec, par exemple, toutes les usines.
Alors, partout, là, on est au maximum de la performance.
M.
Heurtel : O.K. Alors là, maintenant, au niveau... Puis ça, on en avait
parlé lorsque vous êtes venus, mais je ne crois pas que c'était à titre de représentant de l'Association de
l'aluminium, c'était peut-être plus comme représentant de l'alliance
Switch, quand on a fait la commission sur... je crois que c'était sur le livre
vert... non, ce n'était pas sur le livre
vert, c'était une commission parlementaire précédente, l'idée de faire plus au
niveau... Vous parliez beaucoup de l'exemplarité
de l'État puis de faire plus au niveau de la consommation d'aluminium, bon,
puis ça, vous venez d'y faire référence
également. J'aimerais ça qu'on approfondisse ça au niveau de qu'est-ce qu'on
devrait faire plus, tant comme gouvernement mais aussi comme société,
pour justement faire plus au niveau de l'aluminium puis voir l'aluminium comme un outil, comme un allié de la lutte contre
les changements climatiques. Alors, ça, j'aimerais ça qu'on approfondisse ça.
• (11 h 30) •
M. Simard
(Jean) : C'est une question
qui est très intéressante parce que, pour nous, c'est là où pour l'avenir
se situe peut-être le levier le plus intéressant pour contribuer comme
industrie à la lutte aux changements climatiques.
À l'instar de
ce qui se fait ailleurs dans le monde, de plus en plus il y a une quête
incessante d'allégement du poids des
véhicules pour obtenir des gains de réduction de combustible, d'émissions
provenant de sources de combustible, dans un premier temps. Ça veut dire que, par exemple, une compagnie comme la
compagnie Ford, aux États-Unis, a décidé stratégiquement d'utiliser l'aluminium pour alléger de façon
considérable les émissions de sa flotte totale en fabriquant le véhicule le plus vendu et le plus lourd de sa
catégorie, qui est la camionnette Ford 150, en aluminium. Ce faisant, ils sont
en train de fixer un même type de conception et de fabrication pour leurs
autres véhicules, ce qui va leur permettre d'atteindre la norme CAFE, qui prévoit une réduction considérable de
l'ensemble du parc de véhicules nord-américain en 2025 ou 2027.
Or, la même
chose vaut pour le matériel roulant pour le transport de masse. On parle de
train léger sur rail pour le pont
Champlain, on parle d'autobus, de renouvellement puis d'expansion des flottes
d'autobus urbains. Il n'y a pas de raison, aujourd'hui au Québec, pour qu'on aille
vers l'électrification des transports sans accompagner l'électrification
des transports par l'allégement du poids des
véhicules. Parce qu'entre autres l'équation de l'électrification fait en sorte
que la charge embarquée, la charge
morte, c'est-à-dire les batteries, et ainsi de suite, force à aller vers des
matériaux plus légers pour compenser l'ajout de poids, de poids mort
hors passager. Ailleurs dans le monde, la stratégie, c'est d'utiliser l'aluminium, qu'on soit en Chine, en Europe. Ici,
on n'est pas capable de faire le passage encore, on est encore dans des matériaux composites puis dans de l'acier. Puis on
a toute la capacité, toutes les compétences et toutes les entreprises de
transformation pour livrer le produit. Il y
a quelque chose qui n'est pas
logique dans ça. Puis on prend l'argent du Fonds vert qui provient des efforts de réduction pour financer des flottes de
transport, entre autres, pour amener des changements de comportement, puis on continue de faire des autobus
qui sont plus lourds qu'ils pourraient l'être en réalité. Il y a
quelque chose qui ne
fonctionne pas.
Alors, nous,
ce qu'on dit : C'est sur ça qu'il
faut travailler. Si on parle
d'électrification des véhicules automobiles, de flottes de taxis, d'autobus scolaires, tout ça pourrait puis devrait
être en aluminium. On créerait de la richesse au Québec, au Saguenay,
partout où est-ce qu'il y a des entreprises de transformation, et on
contribuerait à chaque dollar qu'on met sur la table à la cible de réduction.
M. Heurtel : Merci.
Le Président (M. Reid) : M.
le député de Dubuc.
M. Simard
(Dubuc) : Merci, M. le Président. M. Simard, Mme Dubuc, bienvenue. Ça me
fait plaisir de vous voir, de vous rencontrer.
Une question,
je reviens un petit peu sur ce que le ministre vous a posé comme question
tout à l'heure : Est-ce que
vous avez fait l'analyse, la nomenclature de l'émission de CO2 par tous vos membres? Parce
que, oui, on est d'accord que
l'industrie de l'aluminium, chez nous, est une industrie qui est très
performante au niveau de l'émission des gaz à effet de serre. La raison, c'est que beaucoup
de vos membres ont investi énormément d'argent, bon, des nouvelles usines qui sont très performantes, etc. Mais est-ce que tout le monde est à la même hauteur? Est-ce qu'il n'y a pas dans vos
membres des entreprises
qui pourraient faire, avec des nouvelles technologies, des avancées importantes
par rapport à leurs émissions? Est-ce que véritablement vous
avez analysé ça, comme organisation — parce que vous êtes une association — au niveau de l'émission de chacun de
vos membres et puis leur faire des recommandations pour diminuer leurs
émissions?
M. Simard (Jean) : Je vais demander
à Anik de répondre.
Mme Dubuc
(Anik) : Oui. En fait, il y a
la reddition de comptes, elle est faite chez nous comme elle est faite au niveau du gouvernement par chacun de nos membres. Et c'est certain qu'il y a
des membres qui sont plus performants que d'autres, mais, quand on dit
«plus performants», ce n'est pas à des lieues l'un de l'autre, donc il y a des
petites variations. Et il y a
une communauté de partage où justement on essaie d'optimiser et le mécanisme et les
techniques, les moyens techniques, mais aussi il y a beaucoup d'humain
en arrière du technique, et là ça fait une différence.
Alors, c'est
certain que ceux qui sont moins performants peuvent quand même
avoir une petite amélioration, mais ce
n'est pas notable si on compare aux gains qu'on a déjà
faits par le passé. Donc, on va aller chercher quelques tonnes, tout
simplement, mais ce n'est pas notable.
Donc, on se
situe à un niveau qui est autour de deux tonnes par tonne, certains peuvent
être à 2,2 tonnes, 2,3 tonnes et cherchent toujours... il y
a des efforts qui sont déployés pour
s'améliorer, mais, de voir à avoir un gain, une réduction considérable,
tous sont pas mal à la limite.
M. Simard (Jean) : Puis, si vous me
permettez d'ajouter, on s'est soumis d'entrée de jeu au programme gouvernemental
d'établissement de l'empreinte carbone de produits manufacturés au Québec, on
est le seul secteur industriel, à l'époque, qui s'est soumis à ce programme-là.
Et on vient de compléter une deuxième passe, une mise à niveau pour tenir compte du retrait des dernières cuves Söderberg qui
étaient en usine, qui ont été enlevées et remplacées, et on est passés de 2,3 à l'époque à deux en
moyenne. Alors, le parc, là, il est «lean, lean, lean», comme on dit en romain,
là, on ne peut pas aller plus loin.
Et puis chaque usine a été étalonnée dans le cadre de ce programme-là, qui est
un programme gouvernemental.
M. Simard (Dubuc) : Est-ce que je
peux y aller encore, M. le Président?
Le Président (M. Reid) : Oui.
M. Simard
(Dubuc) : Tout à l'heure... Je vais faire encore du chemin un petit
peu par rapport à ce que le ministre vous
a posé comme questions. Moi, j'habite dans une région d'aluminium, il ne faut
pas se conter des peurs, là... Puis le ministre
vous a posé des questions tantôt par rapport au transport, par
rapport au transport par train,
transport par bateau, transport par
camion. Moi, j'en vois beaucoup, de transport, là. Et puis pensez-vous — je
vous pose la question suivante — pensez-vous
qu'étant donné que l'objectif, c'est de diminuer... Parce qu'on sait que les gaz à effet de
serre sont beaucoup
réalisés par le transport lourd, puis je ne pense pas que vous transportez ça
avec des Toyota, vos affaires, là, ça me
surprendrait. Et, à partir de là, pensez-vous que l'industrie québécoise de l'aluminium pourrait poser un geste
particulier par rapport à son transport par camion avec du GNL pour
diminuer, autant que faire se peut, l'émission, la trace carbone, quoi?
Et
également je vois que vous avez des gros trains, là. Je ne
sais pas s'il y a véritablement de la recherche là-dessus.
Est-ce
que ça pourrait se faire? Est-ce que
les moteurs prendraient du GNL également? On le sait, c'est des génératrices qui sont à
l'intérieur des trains, mais je ne le
sais pas, moi, je ne suis pas... je suis un néophyte par rapport aux technologies à ce niveau-là.
Mais également,
par bateau, on sait pertinemment que le Québec, lui, aujourd'hui, avec ses traversiers, essaie de poser un geste particulier, c'est-à-dire d'avoir des bateaux qui... Je pense que la Norvège ou quelque chose comme ça, là, pose des gestes particuliers à ce niveau-là.
Est-ce que
vous pensez que l'industrie de l'aluminium pourrait faire, disons, un plus
grand effort là-dessus? Je vous pose ça comme question.
M. Simard
(Jean) : La question
est d'autant plus intéressante qu'en fait c'est une question
de politiques publiques, d'entrée de
jeu. Des chiffres? Quand on regarde
la totalité des réductions d'émissions de gaz à effet de serre de tous les secteurs industriels confondus
par rapport à 1990, c'est l'équivalent pratiquement tonne pour tonne de la
croissance des émissions du secteur des
transports au Québec pour la même période. O.K.? On a dit que le secteur
industriel et, à l'intérieur du
secteur industriel, le secteur de l'aluminium ont contribué de façon
considérable, pendant cette période-là, à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. L'équation nous
semble assez simple que le fruit mûr qui reste à cueillir, c'est le secteur des transports, parce qu'il n'y a
rien qui s'est fait, à toutes fins utiles, sauf certaines exceptions. La flotte
de Transport Robert qui est passée au GNL,
la route bleue, et ainsi de suite, c'est de très beaux exemples de ce qui peut
être fait quand on s'y met. Mais
l'industrie de l'aluminium, elle produit de l'aluminium, ce n'est pas
l'industrie du transport. Demain
matin, ce n'est pas vrai qu'on peut s'investir, nous, à faire ce qui n'est pas
notre métier de base, qui est de produire de l'aluminium.
Comme
utilisateurs et comme producteurs dans une chaîne de valeur, il y a un rôle
qu'on peut jouer, puis on le joue
déjà à travers AluQuébec, à travers la SQDA, c'est d'habiliter, à
travers nos centres de recherche, nos experts, les aluminiers, d'habiliter le secteur de la
transformation à pouvoir accélérer le virage vers l'aluminium dans la mesure où
les politiques publiques incitent les fournisseurs de services, les
transporteurs par train, les transporteurs par camion, et ainsi de suite, à alléger leur empreinte carbone.
Alors, si Transport Robert, demain matin, décidait que ses remorques étaient
en aluminium parce qu'en faisant ça il
réduirait de, je ne sais pas, 15 %, 20 % son utilisation, sa
consommation d'énergie et de x % ses émissions de gaz à effet de
serre, le tour est joué.
Puis je peux
vous dire qu'au Québec il y en a, des fabricants de remorques en aluminium. La
recherche est faite. Le CQRDA, au
Saguenay, a financé pendant des années la recherche et développement de
remorques en aluminium chez Alutrec.
Au niveau des wagons de chemin de fer, pour faire le Plan Nord, on pourrait
très bien faire des wagons en aluminium, il y a des projets
présentement. Mais tout ça, ça dépend d'une chose, c'est un signal
gouvernemental.
Vous
savez — puis je
vais terminer mon intervention sur ça — au Québec on a un désavantage considérable
qui s'appelle une faible masse
critique, on n'est pas un marché comme tel. Ça fait qu'un fabricant
d'automobiles électriques ne viendra
pas s'implanter au Québec pour fabriquer des automobiles électriques parce
qu'on a de l'hydroélectricité, il va s'implanter
là où il y a un gros marché, des économies d'échelle puis où est-ce qu'il peut
livrer ses voitures, aux États-Unis, en Europe ou en Chine.
Mais on a
un avantage par rapport à ça, c'est qu'on a développé une culture très forte d'intervention
gouvernementale pour compenser à
notre faible masse critique. Le gouvernement achète annuellement
30 milliards de biens et services au Québec, c'est un levier considérable pour opérer des changements dans un
marché qui est trop petit pour absorber des innovations seul. Le jour où le gouvernement dit : Dans le Plan
Nord, les projets de... la troisième voie, dans le Plan Nord, il va
falloir maximiser l'utilisation de matériaux comme l'aluminium, les choses vont
commencer à se matérialiser.
Je pense que c'est dans cette optique-là qu'il
faut le voir. On va contribuer, à travers une plateforme comme AluQuébec, comme industrie, à travers nos centres
de recherche, à faire en sorte que ça arrive, mais à partir de notre expertise.
Le
Président (M. Reid) : Il ne reste pas vraiment de temps pour
une autre question, malheureusement. Nous allons passer...
M. Simard (Dubuc) : Je n'ai pas
d'autre question, M. le Président.
Le
Président (M. Reid) : Oui, il y avait un député qui en avait
une autre, par contre. Alors, nous allons passer maintenant à
l'opposition officielle. M. le député de Terrebonne.
• (11 h 40) •
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, M. Simard. Merci, Mme Dubuc.
Alors, j'ai lu avec attention votre
mémoire. Je comprends le message et le cri du coeur que vous lancez à la commission
aujourd'hui, vous dites que, dans le
fond, l'industrie de l'aluminium a
fait déjà un bon bout de chemin dans la lutte aux gaz à effet de serre et vous plaidez, dans le fond, aujourd'hui qu'en faire plus serait compliqué sans risquer de
compromettre peut-être la compétitivité ou du moins la rentabilité de certaines de vos entreprises.
Donc, ça, je laisse, dans le fond, aux experts, là, peut-être de déterminer, là, toute la fine pointe de la technologie que comportent vos industries à
l'heure actuelle, mais, de ce que j'ai cru
comprendre suite à l'intervention du ministre, c'est que, selon vous, vous avez
atteint un plafond de verre où aller plus loin n'est présentement plus
possible.
C'est quand même assez drôle parce que, bon,
vous êtes représentants d'aluminium Canada, les gens qui représentent, là, leurs industries respectives
trouvent toujours la façon, donc, d'amener une solution pour lutter contre
les gaz à effet de serre par le biais de
leurs produits. Hier, l'association gazière et pétrolière est venue nous dire
que, pour diminuer les gaz à effet de serre, il
fallait exploiter davantage le pétrole au Québec. Aujourd'hui, vous nous dites
que l'aluminium pourrait être une solution.
Et vous
faites un parallèle entre l'allègement du produit que vous pouvez fournir puis
peut-être l'accélération du processus de l'électrification des transports... ou
en tout cas, du moins, l'efficacité que ça pourrait engendrer. J'aimerais
que vous m'en parliez davantage parce que
c'est un axe important qui est défendu par le gouvernement puis par les
oppositions, pour bien comprendre
tous les avantages que, dans le fond, une plus grande place accordée à l'aluminium
pourrait nous amener dans le développement rapide, là, de ce programme
d'électrification.
M. Simard
(Jean) : Merci. C'est une
question qui est fondamentale parce que, pour l'industrie de l'aluminium
en Amérique du Nord, dont la croissance est
tirée littéralement par le marché automobile qui vise à répondre à ce nouveau
standard qu'on appelle le standard CAFE — l'acronyme, c'est CAFE — qui
impose une réduction considérable des émissions
de la flotte des manufacturiers, l'aluminium devient un incontournable parce
qu'il procure l'avantage de réduire le
poids du véhicule et donc d'atteindre la norme de réduction de consommation
d'énergie, mais, qui plus est, il fournit de par ses caractéristiques ce qu'on appelle une spirale vertueuse.
C'est que, quand on commence à designer un véhicule avec de l'aluminium, on arrive à obtenir des gains
de réduction de poids strictement parce qu'on utilise l'aluminium. Alors,
si on prend le Ford 150, par exemple, on a
atteint 700 livres de réduction par véhicule. C'est considérable, là,
quand on multiplie ça par
800 000 vendus par année en Amérique du Nord année après année, après
année. Et, parce qu'il est plus léger,
on a moins besoin d'essence, donc le réservoir à essence réduit. Comme le
réservoir à essence réduit, ce qui est périphérique
au réservoir à essence n'a pas besoin d'être aussi gros, d'être aussi lourd, et
ainsi de suite, donc on a des gains supplémentaires
de réduction de poids. Le même constat se fait pour des autobus, le même
constat se fait même pour des avions. Partout où on designe, où on
conçoit dès le départ avec l'aluminium, on va chercher des gains de réduction.
S'ajoute à ça
le fait que c'est un matériau qui ne corrode pas. Lorsqu'on utilise les bons
alliages de la bonne façon, on
obtient donc une durabilité encore plus grande des véhicules. On peut faire la
même perspective, si vous voulez, dans l'utilisation
de l'aluminium pour des ponts et des passerelles piétonnières. Aujourd'hui,
quand on se promène dans les campagnes,
au Québec, et qu'on voit des ponts, des petits ponts de campagne où est-ce que
la circulation est fermée pour six mois parce qu'il faut les refaire...
On refait le béton, on refait le tablier en acier, et ainsi de suite, on
utilise des méthodes traditionnelles, alors
qu'ailleurs en Amérique du Nord on ferme la circulation pendant trois semaines
parce qu'on a préusiné un tablier de
pont en aluminium qui va permettre de résoudre la situation très rapidement et
d'éviter les émissions de gaz à effet de serre de détournement de
circulation pendant de très longues périodes de temps.
Donc,
l'aluminium, en Amérique du Nord, est convié à jouer un rôle stratégique dans
la réduction des gaz à effet de
serre. On a la capacité de l'utiliser en termes de fabrication manufacturière.
Ici, au Québec, on a des entreprises comme Verbom, qui est originaire des Cantons-de-l'Est, de l'Estrie, qui
aujourd'hui devient un fournisseur de Tesla pour faire des composantes
très importantes de ces véhicules-là.
Je termine en
vous disant que tout ce qui s'en va électrique nécessite une conception allégée
de l'habitacle pour compenser le poids des batteries, qui excède ce
qu'un concept normal de véhicule permet.
M. Traversy : Et, pour en
arriver à accélérer, dans le fond, la place de ce matériau dans la fabrication
de nos véhicules ou du moins dans l'effort
que nous voulons de diminuer, dans le fond, nos gaz à effet de serre... Vous
proposez donc de concentrer les
efforts, mais vous le percevez comment? Est-ce que vous souhaitez, toujours en
cohérence avec la Stratégie québécoise de développement de l'aluminium,
avoir des incitatifs pour amener, bon, les décideurs à être tentés d'aller davantage vers l'aluminium?
Expliquez-moi un peu quelle serait votre stratégie pour mettre davantage en
valeur, là, donc, cette possibilité que vous nous faites part.
M. Simard
(Jean) : Elle serait à
différents niveaux. La première chose, c'est de donner ouverture, dans les
appels d'offres gouvernementaux, à
l'utilisation de l'aluminium. Au moment où on se parle, qu'on parle de
véhicules de transport de masse,
qu'on parle de ponts, qu'on parle d'ouvrages d'art, on fait des appels d'offres
avec spécifications de matériaux. Ce
faisant, on exclut l'aluminium. Alors, si vous regardez les appels d'offres
pour des autobus, c'est spécifié acier de tel type. Il y a un seul fournisseur qui peut faire ça, c'est Nova Bus.
Pourquoi on ne fait pas des appels d'offres de performance où est-ce qu'on dit qu'on a besoin d'un véhicule
qui va transporter 30 personnes sur tant d'années, qui doit avoir une
durée de vie x et dont l'empreinte carbone, pour la majorité des
composantes, doit être d'un facteur y? Et, dans la carte de pointage,
quand on évalue les soumissions, les
propositions, bien, plus on réduit l'empreinte carbone au stade manufacturier
et au niveau de l'utilisation, pendant la durée de vie, et le recyclage
subséquent, ce qu'on appelle une analyse cycle de vie, plus on tient compte de l'ensemble des coûts non seulement d'achat, mais
d'utilisation et de disposition finale, plus on va donner ouverture à une utilisation innovante,
ingénieuse et performante de matériaux comme l'aluminium, ce qui n'est
pas le cas aujourd'hui.
Alors, si vous
regardez les appels d'offres pour des ponts puis des passerelles... Une
passerelle, là, c'est un ouvrage aérien
qui se veut léger. On les fait en béton et en acier, c'est surdimensionné puis
ça ne dure pas. Pourquoi? Parce qu'on spécifie
du béton et de l'acier parce qu'on a toujours fait ça. Alors, il y a de
l'éducation à faire auprès des personnes qui rédigent les appels d'offres au gouvernement. Il faut rendre accessibles des outils d'aide à la
décision comme l'analyse cycle de vie, l'analyse du coût total de
possession pour qu'on prenne les décisions sur une base plus substantielle que
ce qu'on a fait jusqu'à maintenant.
L'industrie de l'aluminium s'est investie. On a développé des cours de formation, on a fait une vigie internationale,
on a transféré toutes ces informations à la
grappe AluQuébec qui aujourd'hui devient la plateforme
stratégique pour réunir tous
les acteurs de la chaîne de valeur du Saguenay, de la Côte-Nord, du
Centre-du-Québec et de Montréal autour de chantiers qui permettent d'aligner les chaînes
d'approvisionnement sur les appels d'offres. Ce qu'il reste à faire, c'est
d'aligner maintenant les appels d'offres sur
la chaîne d'approvisionnement. Et ça, je reviens toujours à la même
chose : Il y a un guichet
unique, puis ça s'appelle le gouvernement du Québec, soit parce qu'il rédige
lui-même ses propres appels d'offres
ou parce qu'il finance les appels d'offres pour de l'achat d'équipement pour
des sociétés de transport, pour de l'architecture institutionnelle, et
ainsi de suite.
Donc, si on
se résume : des appels d'offres qui donnent ouverture à la considération
de l'aluminium — ce qui
n'est pas le cas présentement — de la formation, des outils d'aide à la
décision chez les personnes au gouvernement qui sont impliquées dans ces processus-là et l'utilisation, dans le cadre de
la SQDA, d'AluQuébec pour aligner les décideurs, les influenceurs, les
prescripteurs pour livrer la solution.
M. Traversy : Merci beaucoup.
Le
Président (M. Reid) :
Merci. Nous passons maintenant au deuxième
groupe d'opposition. M. le député de Masson.
• (11 h 50) •
M. Lemay : Merci, M. le Président.
Merci d'être avec nous aujourd'hui. Vous savez, quand on regarde votre document et puis qu'on entend les questions des
autres, il y a de nouvelles questions qui arrivent, mais je veux
juste avoir une précision sur ce qui a été mentionné tout à l'heure par
d'autres collègues.
On sait, le
Règlement sur la qualité de l'atmosphère qui est dans la LQE, ça vous impose, à
votre industrie, un niveau
d'émissions de fluorure par tonne d'aluminium produit. Donc, quand on parle
d'une nouvelle installation, on a une cible de 1,45 kilogramme,
pour les nouvelles, puis on a une cible de 2,5 kilogrammes pour les
alumineries existantes. Peut-être ça pourrait répondre au questionnement des
autres, là : Est-ce qu'on sait si nos alumineries existantes sont à 2,5 kilogrammes de fluorure par tonne ou si
elles sont plus près du 1,45 qu'on exigerait pour les nouvelles alumineries?
Mme Dubuc
(Anik) : Je n'ai pas les
données exactes pour chacune des alumineries, mais toutes nos alumineries
sont conformes à la réglementation qui est présentement en vigueur, que ce soit
pour l'aluminium ou pour les autres paramètres.
Cependant, le lien entre les différents contaminants dont
on parle et les GES, ce n'est pas les mêmes ratios d'émissions, donc il
faut être clair là-dessus.
M. Lemay : On comprend, c'est des CO2
équivalent, là, mais...
Mme Dubuc
(Anik) : On parle de CO2 équivalent. Donc, on produit des CO2, on produit
aussi d'autres gaz qui sont des gaz à effet de serre. C'est pour ça qu'on parle de CO2 équivalent, donc. Et ça n'a pas de lien avec les
ratios des autres contaminants qui sont émis à l'air.
M.
Lemay : Alors, à ce moment-là, ça m'amène en 2012, quand il y a eu le dernier recensement, là. On
sait, pour votre secteur,
l'aluminerie, les émissions liées à l'utilisation de combustibles fossiles, c'était très minime,
là, tu sais, c'était comme 0,36
mégatonne, qui est, pour tout le Québec, là, 0,46 %
des GES, ça fait que c'est minime. Puis, quand on parle des émissions provenant du procédé, ce que vous
avez mentionné que vous êtes déjà rendus au sommet de... c'est 5,4 mégatonnes,
tu sais, qui contribue pour 6,95 % des GES.
En 2015,
j'imagine... Est-ce que vous avez vu une amélioration ou c'est pas mal
similaire? Puis, tu sais, quand on
regarde ces chiffres-là, le 0,36, puis l'additionne au 5,4 mégatonnes, ça
équivaut à ce que vous avez mentionné tantôt dans votre mémoire, là,
qu'on fait deux tonnes de GES par tonne de... puis, bon, ça fait que, si on
regarde, tous ratios confondus, là, ces chiffres-là, en 2012, ils semblent
bons. Est-ce que c'est encore le cas en 2015?
Mme Dubuc (Anik) : En fait, on a les
données pour 2014 qui sont présentement disponibles et on voit une progression.
Comme je le disais tantôt, on était aux alentours de 2,2, 2,3 tonnes de CO2
équivalent par tonne produite d'aluminium.
Maintenant, avec la fermeture des dernières Söderberg, on voit une
amélioration, en 2014, qui nous amène au niveau de deux tonnes par
tonne. Donc, on voit une nette amélioration.
Mais on se
situe toujours à la marge de deux tonnes, aux alentours de deux tonnes, alors
qu'en 1990 on était plutôt aux
alentours de 6,2, 6,3 tonnes par tonne d'aluminium. Donc, on a eu des
réductions considérables, de 2,5 millions de tonnes, total, entre
1990 et 2014.
M.
Lemay : O.K. Donc, si on prend le Règlement sur la qualité de
l'atmosphère puis qu'on remplace, exemple, une aluminerie ou des cuves
qui ont été fermées, puis on déciderait, demain matin, qu'on veut accroître la
production d'aluminium au Québec puis faire
une nouvelle installation, votre chiffre de deux tonnes de CO2 par
tonne d'aluminium produit, il réduirait à cause des standards existants?
Mme Dubuc
(Anik) : Quand on parle de technologie, on voit des améliorations, on
parle de modernisation de technologie, la modernisation est surtout sur
l'efficacité énergétique du procédé. On l'expliquait tout à l'heure : Le procédé de base, on est rendus à sa limite. Donc,
si on construit une nouvelle usine, on va quand même avoir un ratio de deux tonnes par tonne d'aluminium produite, donc
il n'y aura pas d'amélioration de ce côté-là, puisque la technologie,
elle est vraiment à la fine pointe de ce côté-là.
M.
Lemay : Ça fait qu'à ce moment-là je prends votre mémoire, je prends
le document de consultation que le ministère
a produit à la page 18, dans la portion de l'industrie, Portrait du
secteur, puis on parle de perspectives de réduction, exactement ce que vous venez de mentionner, on
dit : «La réduction des émissions de GES dans le secteur industriel passe
principalement par l'amélioration de la conception des nouveaux projets, par
l'instauration de mesures d'efficacité énergétique et par la substitution des
combustibles fossiles par des sources moins émettrices de GES.» Puis là on mentionne votre mais, tu sais : «Quant aux
possibilités de réduction d'émissions de GES dans le domaine des procédés
industriels — comme le vôtre — elles sont limitées puisque ces émissions résultent
directement des procédés de fabrication.»
Donc, si je résume, dans le fond, ce que vous
dites aujourd'hui, c'est que vous êtes aux limites, le ministère reconnaît qu'il
y a certains procédés qui sont aux
limites, donc vous dites : On ne devrait pas devoir acheter des crédits
en Californie parce que justement
on a déjà fait notre part. Et puis même, voire, mieux, on devrait nous aider justement à
s'en aller dans les marchés mondiaux pour justement faire de la
réduction de GES à l'extérieur, puisque c'est là-bas qu'ils ont une
empreinte carbone plus élevée. C'est le résumé, dans le fond, de ce que vous
nous présentez.
Mme Dubuc
(Anik) : Exactement. C'est ça. C'est favorable de produire l'aluminium
ici, puisqu'on a atteint des performances
qui sont vraiment très, très bonnes. C'est le benchmark de l'industrie au
niveau de l'empreinte carbone. Alors, on a tout avantage à produire ici.
On en a parlé
tout à l'heure, il y aura un déficit du matériau. On aurait avantage à le
produire ici et à conserver la
production actuelle, donc, et ne pas taxer, justement, les performances qu'on a
atteintes, parce qu'on a été proactifs sur la question des GES depuis
plus de deux décennies.
M.
Lemay : Parfait. Bien, je crois que le ministre et son ministère vous
entendent. Donc, merci beaucoup. Je n'ai pas d'autre question.
Le Président (M. Reid) :
Alors, Mme Dubuc, M. Simard, merci pour votre contribution à nos
travaux.
Je lève la séance durant quelques instants pour
permettre à nos prochains invités de prendre place.
(Suspension de la séance à 11 h 57)
(Reprise à 11 h 59)
Le
Président (M. Reid) :
Alors, nous reprenons nos travaux. Je souhaite la bienvenue aux représentants
d'Écotech. Vous avez une dizaine de
minutes pour faire votre présentation, par la suite nous aurons une période
d'échange. Je vous demanderais, dans
un premier temps, pour les fins de l'enregistrement, de vous présenter et
présenter les personnes qui vous accompagnent. À vous la parole.
Écotech Québec
M. Leclerc
(Denis) : Merci beaucoup. Alors, je suis Denis Leclerc, le président et chef de la direction
d'Écotech Québec. Et aujourd'hui je suis accompagné de deux valeureux membres de
la grappe industrielle en technologies propres. Alors, je vais vous
laisser le soin de vous présenter.
M. Drouin (Guy) : Alors, je suis Guy
Drouin, je suis président de la commission... plutôt coprésident de la
commission de fiscalité et de réglementation d'Écotech Québec et également
président et chef de la direction de Biothermica
Carbone, actif dans le marché du carbone en faisant des projets depuis le
Protocole de Kyoto, donc depuis 15 ans.
M. Nolet (Jean) : Alors, je suis
Jean Nolet, P.D.G. de la Coop Carbone et membre d'Écotech.
• (12 heures) •
M. Leclerc
(Denis) : Alors, merci,
merci à la commission pour l'invitation. Alors, bien sûr
qu'on salue l'initiative d'établir des consultations sur la cible pour
2030. Nous n'avons pas comme objectif de parler du chiffre, de la cible comme telle, parce que ce qui nous intéresse, chez
Écotech Québec, c'est de parler du plan d'action, comment on va se rendre à cette cible-là, et c'est avec cette
orientation que nous avons travaillé dans l'élaboration du mémoire. Et je vais,
sans plus tarder, demander à M. Drouin de nous donner quelques
recommandations, vous en avez 12 ou 13 dans votre document, alors de
nous expliquer brièvement quelques-unes de ces recommandations.
M. Drouin
(Guy) : Alors, je vous remercie. Les recommandations qui découlent ici
proviennent de l'expérience des
membres d'Écotech Québec, principalement la grappe des technologies propres,
donc des «doers», des gens qui sont ici pour faire du développement économique,
développement de nouvelles technologies. Et, pour nous, évidemment, le marché du carbone est un incitatif extraordinaire
pour déployer les entreprises de technologie verte au Québec de manière à ce qu'on puisse développer des nouveaux procédés
qui vont permettre la réduction de gaz à effet de serre pas uniquement
pour les besoins du Québec, mais évidemment pour les besoins du marché
canadien, américain et international.
Comme vous le
savez, développer des technologies demande beaucoup de capitaux, plusieurs
millions de dollars, et j'en suis le
témoin puisque mon entreprise est dans ce domaine-là depuis 28 ans, depuis
1987. Et évidemment, pour amortir les coûts de développement de telles technologies, il faut avoir
un marché beaucoup plus important que le seul marché québécois. Alors, nous, on a pris cette opportunité-là. C'est que
le marché du carbone, qui a été mis en place d'une manière extrêmement avant-gardiste par le
gouvernement du Québec... On est réellement un précurseur avec la Californie.
Et, pour nous, ça recèle énormément
d'opportunités, puisqu'on est en avant de tout le monde actuellement. Et c'est
un marché, et, croyez-moi, j'ai
expérimenté le marché de Kyoto, le marché volontaire... c'est un marché très
bien designé, où les législateurs ont pris ce qui était le mieux dans
Kyoto et ils ont fait un «branding» de ce marché-là qui a permis véritablement
de mettre en place un marché extrêmement performant.
Par ailleurs,
le rôle de l'entreprise privée, c'est de créer et de produire des crédits
compensatoires. Alors, du côté de
l'offre, actuellement au Québec on a trois protocoles, alors qu'en Californie
il y en a six. Alors, il est important qu'on augmente le nombre de protocoles, qui permet d'enregistrer des crédits
compensatoires dans différents domaines d'activité, donc, et qui peuvent être basés, évidemment, sur
différents procédés nouveaux, sur lesquels est basée la génération de ces
crédits compensatoires là.
Alors, je
salue... D'ailleurs, lorsqu'on a rédigé le document ici, c'était la semaine
dernière. On vient d'annoncer lundi
que le gouvernement du Québec, avec le gouvernement de l'Ontario, va en appel
d'offres pour créer 13 nouveaux protocoles,
et c'est réellement une très bonne nouvelle. Par ailleurs, on croit qu'il y a
de la place à même d'autres protocoles.
Deuxièmement, ces crédits compensatoires là, on
peut les générer au Québec, on peut également les générer, comme mon entreprise a fait, en Californie, dans
le cadre du marché américain, et donc ramener l'argent chez nous, mais également il ne faut pas oublier la possibilité de
générer ces crédits-là à travers des ententes internationales que le Québec
peut faire, donc les générer dans d'autres
pays, de manière à pouvoir, nous, en termes d'entreprise de technologie,
amortir les coûts du développement de
notre technologie en allant ailleurs. De là deux recommandations : c'est
de poursuivre et d'initier des
ententes de partenariat avec d'autres marchés à l'extérieur du Western Climate
Initiative, donc du marché Québec-Californie,
aller vers d'autres marchés, soit en Europe, en Asie centrale ou ailleurs, et
de poursuivre également des ententes
de partenariat avec des gouvernements étrangers afin d'accroître le potentiel
de génération de crédits compensatoires.
Pourquoi
c'est important? C'est que, dans la cible 2030, vous indiquez que
9,8 millions de tonnes d'équivalent CO2 vont provenir de projets faits à l'extérieur du
Québec. Il ne faudrait pas que ce soit uniquement fait par des Américains
en Californie et qu'on achète ces
crédits-là, il faut que ce soit fait par des entreprises du Québec, qui,
certes, peuvent aller faire des projets aux États-Unis mais également
ailleurs dans d'autres pays.
Enfin, du côté de
la demande, puisque, pour nous, il est important que l'offre de
crédits soit plus importante, donc, la
demande de crédits va devenir plus importante, compte tenu qu'on a des gens
très créatifs au Québec.
Actuellement, il est prévu que
8 % des gaz à effet de serre sous forme de crédits compensatoires proviennent
de l'entreprise privée, alors que
92 % provient de par les encans que le gouvernement fait de manière
trimestrielle ou par des projets de réduction faits par les grands émetteurs eux-mêmes. Alors, évidemment,
si on crée des nouveaux protocoles, c'est sûr qu'il faut augmenter cette cible de 8 %. C'est à vous à la
déterminer, on n'a pas mis un chiffre. C'est-u 15 %? C'est-u 12 %?
Mais il faut quand
même
penser qu'actuellement le marché est un marché presque oligopolistique,
donc c'est un marché où le grand acteur, c'est le gouvernement, et l'entreprise privée, dont je fais part, on ne
représente que 8 % potentiellement des crédits qui peuvent être mis
en marché à travers le mécanisme actuel du marché.
Un dernier
point fort important — et
Dieu sait, on l'a vécu : Il est important que le gouvernement communique que le système
de marché de carbone doit être pérein dans le temps. Actuellement, il y a des entreprises privées comme la mienne qui ont perdu des
millions de dollars avec pas la fin de Kyoto mais avec les incertitudes qui actuellement
prévalent dans le marché du carbone. Il est
très complexe actuellement de financer des projets dans le marché du
carbone, compte tenu des expériences malheureuses que plusieurs
banquiers ont subies, notamment avec le marché de l'Australie, où le gouvernement a voté, avec le gouvernement précédent, un
marché de crédits de carbone, et le gouvernement après a cancellé
ce marché-là, et alors il y a des entreprises qui ont développé des projets pour rien.
Développer un projet demande en général trois à quatre ans, même cinq
ans, et par la suite le financer peut prendre un an, six ans. Alors, il faut
que le marché soit pérein dans le temps. Et il est important que le gouvernement
du Québec — ça
fait partie d'une de nos recommandations — communique
clairement avec les institutions financières que le marché du carbone est là pour
rester. Je vous remercie.
M. Leclerc (Denis) : Merci, Guy.
Jean.
Le Président (M. Reid) : Il
reste...
M. Nolet (Jean) : Pardon?
Le Président (M. Reid) :
1 min 30 s.
M. Nolet
(Jean) : Alors, pour ma
part, je vais mettre l'accent sur deux recommandations : faciliter l'harmonisation des protocoles et le positionnement des filières industrielles
québécoises avec la Californie et l'Ontario
et puis soutenir la mise en place de
structures d'agrégation permettant aux petits projets d'accéder à des économies
d'échelle et leur entrée sur le marché du carbone.
Alors, sur le
premier point, moi aussi, je voulais féliciter le ministre
pour le travail qui a été fait en partenariat avec l'Ontario sur le développement de protocoles, tel qu'annoncé lundi. Alors, il y a beaucoup
de progrès donc qui se sont faits
dans la bonne direction. Il y a peut-être certains progrès qui peuvent encore être faits
avec la Californie, on pense particulièrement ici au protocole sur les halocarbures développé
par la Californie qui, contrairement au Québec, ne permet pas les projets... la destruction d'halocarbures dans les
deux juridictions. Alors, ça, ça devient une contrainte pour les industriels
québécois, dans ce secteur d'activité là, qui pourrait peut-être
être adressée de façon à favoriser le développement de l'industrie, au Québec, d'un secteur industriel prometteur.
Sur le
deuxième point, visant la mise en place de structures d'agrégation, on vous
fait cette recommandation-là parce
qu'on constate qu'au Québec
les projets sont petits et font face à des coûts de transaction importants,
proportionnellement importants, et
que, pour que ces projets-là lèvent, ça prendrait de l'accompagnement, de la
standardisation et de la mise en commun de ressources.
M. Leclerc
(Denis) : Alors, vous voyez,
c'est un outil de développement
économique extraordinaire. Alors, on est prêts à répondre à vos questions.
Le
Président (M. Reid) :
Excellent. Merci. Alors, nous passons maintenant à la période d'échange avec le côté gouvernemental.
M. le ministre, vous avez la parole.
• (12 h 10) •
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Merci pour votre
présentation ainsi que votre mémoire. M. Leclerc
plus particulièrement, je voudrais vous remercier pour votre
participation au Comité-conseil sur les changements climatiques. Merci
beaucoup pour cette importante
contribution, qui n'est pas terminée, qui va continuer, évidemment, et qui est très appréciée.
D'abord,
un des rôles d'Écotech et de la grappe, c'est justement de travailler avec
les entreprises pour justement
les aider à adopter des nouvelles technologies, et justement les technologies propres, dont vous êtes un promoteur essentiel
et un développeur. Qu'est-ce qu'on doit faire de mieux ensemble pour justement
développer davantage le réflexe, particulièrement dans les PME, pour justement s'assurer que nos
entrepreneurs incorporent les technologies propres, et vous comprennent, et développent justement ce changement de
comportement qui des fois... Une nouvelle technologie propre peut
apparaître plus chère, parce que le coût d'achat peut paraître plus élevé qu'une technologie conventionnelle, mais, bon, à
la longue on s'aperçoit rapidement que c'est plus rentable à bien des niveaux.
Alors, qu'est-ce qu'on doit faire pour changer ces comportements
ou faire davantage pour intégrer ce réflexe?
M. Leclerc
(Denis) : C'est une bonne question
parce que c'est un grand défi. C'est un grand défi non seulement au Québec, mais aussi
ailleurs. Il faut rapprocher l'utilisateur potentiel, c'est-à-dire des
entreprises industrielles ou manufacturières,
avec nos PME innovantes, alors il faut pouvoir les rapprocher. Et une des
façons dont Écotech... On a développé une formule qui s'appelle Inno+,
c'est tout simplement de mettre de l'avant l'innovation par rapport à une
problématique bien définie, et à ce moment-là le maillage se fait
particulièrement bien.
Je vous donne
un exemple, M. le ministre. Il y a quelques semaines, on a fait un événement
dans l'est de Montréal, et la thématique était la décontamination des
sols. Dans la salle, il y avait une centaine de détenteurs de terrains ou
gestionnaires de terrains contaminés, et ils ont entendu 10 entreprises
présenter leurs innovations, une nouvelle... une façon innovante de décontaminer les sols. Bien, je peux vous dire que ça
a donné d'excellents résultats. Aujourd'hui, on voit déjà des propriétaires de terrain qui vont accélérer la
décontamination de leur sol parce qu'ils viennent d'apprendre une
nouvelle façon de décontaminer plus rapidement et à moindre coût.
Alors, ce
sont des activités du genre où on peut mettre dans la même salle des
innovateurs avec des utilisateurs potentiels.
Et il va falloir faire tourner cette roue-là, je vous ai parlé de Montréal,
mais également dans l'ensemble des régions
du Québec. Et je pense qu'il faut aussi faire la promotion, la promotion des
succès engendrés par nos entrepreneurs d'ici,
qui font affaire avec des entreprises commerciales, industrielles et
manufacturières du Québec et aussi de l'étranger, parce que vous avez
ici un entrepreneur qui fait des choses au Québec, oui, mais également à
l'étranger.
Alors,
finalement, le message, c'est que nos technologies propres du Québec permettent
au Québec de réduire ses émissions de gaz à effet de serre, mais
également à plusieurs autres juridictions à travers le monde.
M.
Heurtel : Maintenant,
j'aimerais parler au niveau de mesures en écofiscalisté, j'aimerais voir... De
votre côté, bon, il y a déjà des
mesures en place, le Fonds vert investit dans le développement des technologies propres. On a parlé des
protocoles de crédits compensatoires, vous avez souligné, là, la volonté claire
du gouvernement d'aller plus loin dans le développement de
protocoles. On le fait avec notre partenaire, l'Ontario, mais on est très
ouverts à aller encore plus loin. Mais, du
côté de l'écofiscalité plus particulièrement, quelles sont les mesures que vous préconisez,
que vous nous conseilleriez de mettre
de l'avant pour justement favoriser davantage le développement de l'industrie des technologies propres?
M. Leclerc
(Denis) : Merci, M. le ministre. Oui, l'écofiscalité, pour nous, c'est une des
façons d'accélérer le virage vers une
économie plus verte. Vous savez, il y a toujours
deux aspects, on appelle ça de la réglementation, ou de l'écofiscalité, ou de l'incitatif, des fois c'est la carotte puis
le bâton. Alors, on adore beaucoup les carottes, nous, c'est-à-dire de pouvoir permettre aux
entrepreneurs, de façon positive, de déployer davantage
de technologies. Alors, au
niveau de l'écofiscalité, il y a
différentes mesures qu'on a identifiées, entre autres avec nos
collaborateurs chez Switch, Switch qui est L'Alliance pour une économie verte. Je vais laisser mon collègue Jean Nolet
ici vous donner quelques exemples de ce que ça pourrait
représenter.
M. Nolet
(Jean) : Bien, un exemple
qui me vient à l'esprit, c'est celui de l'écocondionnalité. Par exemple, on sait que le gouvernement soutient les entreprises de différentes façons dans leur développement, et puis certaines fois il y
a des
incohérences dans les façons d'intervenir auprès des entreprises dans le sens
où on peut voir des entreprises qui ne respectent pas certains standards
environnementaux être soutenues par des ministères qui n'ont pas pour mission
le développement durable. Alors, s'il
y avait une meilleure cohérence de ce
côté-là, du côté des politiques gouvernementales,
de façon, par exemple, à ne soutenir que les entreprises qui ont des
comportements, d'un point de vue développement durable, qui est acceptable ou reconnu, à ce moment-là, bien, on aurait
un incitatif supplémentaire, du côté des entreprises, à adopter ces
comportements-là. C'est un exemple.
M. Leclerc
(Denis) : Bien sûr qu'on
entend ici aussi d'autres exemples. Le fameux bonus-malus qu'on entend souvent, c'est-à-dire de récompenser le bon geste
par rapport au moins bon, on a toujours l'image du véhicule moteur. Il y a aussi... On pourrait l'extrapoler à
l'utilisation de l'énergie dans chacune de nos entreprises, dans chacune de nos
organisations. Puis, quand je dis «organisations»,
c'est que le gouvernement gère aussi plusieurs organisations, les hôpitaux,
les écoles, le Palais des congrès, ce sont
des sociétés publiques, parapubliques, alors il y a aussi un devoir
d'exemplarité de l'État à ce niveau-là.
M. Heurtel :
Maintenant, au niveau des technologies dont vous faites la promotion, vous
n'êtes pas sans savoir que justement,
bon, la cible de 37,5 % est ambitieuse, elle va demander des efforts
fondamentaux en termes de changement de
comportement, de façons de faire, vous y faites allusion tant dans le cadre de
votre mémoire, votre présentation que vos
réponses, parce que, bon, certains illustrent ça comme étant... Le gros du
travail, du travail facile, a déjà été fait, les gains les plus faciles ont déjà été faits, donc là le travail va être
encore plus intense, plus difficile pour se rendre ultimement à une
société qui est complètement indépendante du pétrole. Puis ça, on vise ça, bon,
plus vers des horizons de 2050.
Mais l'idée, c'est... Au niveau des technologies
que vous voyez, là, de votre côté, quelles sont les nouvelles technologies les plus prometteuses? Quels sont les
projets, les initiatives que vous voyez ou les domaines qui vont nous permettre
d'aller chercher les plus importants gains? Et, en corollaire avec ça, bien,
quelles sont les mesures qu'on doit prendre...
ou s'il y a des gestes qui ne sont pas posés présentement qui doivent être
posés pour encourager le développement de ces technologies ou de ces
domaines?
• (12 h 20) •
M. Leclerc
(Denis) : Si on regarde
l'inventaire des émissions de gaz à effet de serre du Québec, on s'aperçoit d'abord
qu'au niveau du transport ça correspond à à peu près 45 % des émissions de
gaz à effet de serre. Alors, vous voyez là une opportunité, une occasion, une
occasion d'affaires aussi de développer certaines composantes, certaines innovations qui vont permettre d'accroître
l'efficacité de nos véhicules. On parle d'électrification des transports, mais
ça peut aller bien au-delà de ça. C'est de
savoir quelle est la meilleure façon de véhiculer non seulement des personnes,
mais également des colis. Alors, tout le transport lourd, c'est un aspect à
développer.
Je salue la
nouvelle stratégie du gouvernement du Québec au niveau de l'électrification des
transports. Dans le document qui nous
a été présenté il y a deux semaines, on voyait très bien qu'il y avait une
composante pour inciter le développement de nouvelles innovations.
Alors, là-dessus, bravo!
Maintenant,
bravo mais en autant également qu'on puisse trouver une façon d'accélérer ce
développement-là, et la mise à
l'essai, et les vitrines technologiques. Et, vous vous souvenez fort bien,
j'étais présent à quelques reprises à la commission, on parlait beaucoup
d'exemplarité de l'État. Alors, je pense, c'est un élément hyperimportant.
L'autre
élément, rapidement, c'est encore en lien avec ce qui se développe en ce
moment, c'est-à-dire la stratégie énergétique.
Stratégie énergétique, on parlait de cohérence au niveau des politiques de
l'État. C'est encore, ça sera encore,
nous l'espérons, un outil extraordinaire pour inciter au développement mais également
à l'application des nouvelles technologies propres qui permettent de réduire la
consommation d'énergie fossile.
Mais ça, c'est si on regarde l'inventaire au
niveau des gaz à effet de serre, mais je peux vous dire qu'il y a deux autres secteurs qui sont vraiment
en progression pas seulement au Québec, mais également à travers le monde : chimie verte, chimie verte, c'est-à-dire le remplacement des hydrocarbures avec d'autres substances plus
végétales. Le deuxième aussi qu'on voit, où on voit une très grande
demande, c'est l'agriculture, l'alimentation. Alors, dans ce secteur-là, on
voit qu'il y a une poussée pour le
développement et l'utilisation de nouvelles technologies qui vont permettre un
accroissement, évidemment, de la récolte mais aussi de réduire l'impact
négatif sur les terres.
M. Drouin voulait rajouter quelque chose.
M. Drouin
(Guy) : Au niveau énergétique, il y a deux grands domaines d'avenir
dans lesquels le Québec a des attributs naturels.
On sait qu'au
Québec on a d'immenses territoires forestiers et on a d'immenses forêts
dégradées, on a beaucoup de biomasse
excédentaire. Alors, au début de ma carrière, au début des années 80,
j'étais un des premiers pionniers dans le domaine de la bioénergie pour une société qui s'appelait Nouveler, qui
était à l'époque une société contrôlée par la Société générale de financement, la SOQUEM, la SOQUIP et
la Banque Nationale pour développer des nouvelles technologies propres, suite au premier choc pétrolier de 1979,
et on a mis en place, à ce moment-là, un grand projet de démonstration qui était l'utilisation de la biomasse
excédentaire, donc les résidus qu'on jetait dans le temps, pour faire du
méthanol, pour faire un carburant
alternatif. Alors, d'un côté, on a de vastes réserves de carbone sous forme de
forêts dégradées, on a des travailleurs forestiers qui cherchent de
l'ouvrage parce qu'on ferme des usines de pâtes et papiers. Pourquoi ne pas avoir un plan pour générer du carburant à partir
de nos forêts dégradées de manière, d'une part, à conserver nos emplois forestiers et, d'autre part, à substituer
l'importation de pétrole qu'on paie en devises sur les marchés étrangers avec
du carburant vert fabriqué chez nous? Alors, ça, c'est le premier grand
domaine. Et il y a énormément à faire. Il y a une société qui est déjà active
dans le domaine. Et on peut même, en couplant un électrolyseur... Hydro-Québec,
dans les années 80,
était à l'avant-garde de la technologie d'électrolyser l'eau, donc séparer H2O, l'hydrogène d'un côté, l'oxygène, et coupler un électrolyseur avec une unité de
gazéification de la biomasse pour être encore plus efficace. Donc, c'est une
manière de valoriser deux sources excédentaires,
l'électricité qu'on a en surplus avec de la biomasse forestière qu'on a
également en surplus sous forme de forêts dégradées.
L'autre
grand domaine, c'est le chauffage urbain. Je porte mon chapeau, je suis
également maire de Val-Morin, et on a un projet. Pourquoi ne pas
chauffer nos villes et villages avec des systèmes de chauffage urbains
alimentés à la biomasse ou avec comme source
d'énergie la chaleur de nos rivières, avec des pompes à chaleur? Ça se fait
couramment en Europe. Au Québec, on a un vaste domaine.
Et là on tombe dans
le côté des bâtiments. On a énormément de bâtiments municipaux. Je regarde dans
mon petit village, ça nous coûte une
fortune, chauffer ça. On est entourés de biomasse puis on a une rivière qui
passe à travers le village. On peut
aller chercher l'énergie dans ces deux sources-là pour mettre de côté du
pétrole, donc diminuer l'empreinte carbone de nos villes et villages.
Voilà deux grands
domaines dans lesquels on a des attributs naturels, nous, les Québécois.
M. Heurtel :
Merci.
M. Leclerc
(Denis) : Si on avait plus de temps, on a aussi d'autres idées.
M. Heurtel :
Et nous voulons toutes les entendre.
Le
Président (M. Reid) : Il ne reste pas beaucoup de temps, mais
vous avez 1 min 30 s, M. le député d'Abitibi-Est.
M. Heurtel :
Allez-y, allez-y.
M.
Bourgeois : Je vais me permettre... Justement, vous avez allumé en
moi, là, une flamme. Au niveau de la biomasse,
c'est quoi, le frein actuel pour la mise en place? Parce que, là, tout le monde
y pense, mais pourquoi concrètement elle ne se réalise pas?
M.
Drouin (Guy) : J'ai commencé ma carrière dans la biomasse, et le
problème, c'est les contrats d'approvisionnement à long terme. Moi, j'ai essayé de mettre en place un projet de biomasse urbaine à Montréal,
une centrale à biomasse, c'est d'aller
chercher un approvisionnement de 25 ans. En général, ceux qui génèrent
la biomasse, ils ne sont pas capables de donner ce genre...
Par contre,
sur les terres publiques, là il y a possibilité d'avoir des ententes, mais, au moment où je
développais mes projets de biomasse,
au début des années 80, aller chercher une allocation de bois puis faire
un deal avec le gouvernement qui dure 25 ans, ce n'était pas possible, on
donnait les allocations de cinq ans en cinq ans, parlez-en à l'industrie forestière. Je ne sais pas si ça a changé. La clé, c'est d'avoir un
approvisionnement à long terme de
manière à être capable de financer
les projets, parce que c'est des projets très intensifs en capital, puis
il faut donc amortir la dette pas sur cinq ans mais au moins sur 15 puis
20 ans.
M. Leclerc (Denis) : Si on avait plus de temps, on pourrait passer une heure à parler du
régime forestier aussi.
Le
Président (M. Reid) : D'accord. Alors, nous allons passer, en attendant, au groupe de l'opposition officielle. M. le député de Terrebonne.
M.
Traversy : Merci beaucoup,
M. le Président. Merci beaucoup, messieurs, pour cette présentation. J'ai compris
d'entrée de jeu que vous aviez encore bien d'autres idées, alors on va essayer
d'aller décortiquer ça ensemble.
Tout d'abord, vous
dire bravo pour votre mémoire. Et vous amenez une perspective qui est très
différente des groupes qui vont ont précédés
et très intéressante. Donc, on sent qu'il
y a une volonté, qu'il y a
un appétit, de votre côté, à voir
une accélération dans la démarche qui a été entreprise par le ministre,
notamment dans l'électrification des transports, vous en parliez tout à l'heure. Vous parliez
aussi des incitatifs qui peuvent être réfléchis pour impliquer, dans le fond, les entrepreneurs à embarquer
dans cette démarche avec nous. Mais vous mettez aussi beaucoup l'accent sur
l'exemplarité de l'État. Et même,
l'exemplarité de l'État, puis on pourra même revenir sur l'exemplarité des
villes peut-être un petit peu plus
tard, mais j'aimerais que vous puissiez nous démontrer un peu plus quelle est
votre vision par rapport à cet exemple que
l'État devrait donner. Je comprends le concept de fond, mais, concrètement,
est-ce que vous avez des attentes plus précises à cet égard?
M. Leclerc (Denis) : Merci pour votre question. L'exemplarité de l'État, d'abord, l'État
gère, possède différents types
d'infrastructure, hein, il y a des sociétés publiques et parapubliques. Je
faisais état de quelques-unes au niveau... Que ce soit du Palais des congrès, ou du Centre des congrès, ou la Société
des établissements de plein air, vous savez, ce sont tous des endroits
qui pourraient être mis à profit comme banc d'essai des innovations développées
au Québec.
Les
entrepreneurs me disent souvent qu'ils ont de la difficulté à mettre dans une
situation réelle leur innovation pour
deux choses : un, la peaufiner, l'améliorer, la perfectionner et,
deuxièmement, pour montrer les impacts positifs pas seulement au niveau de l'environnement, mais
également au niveau financier pour l'utilisateur. Ça, c'est très important
pour nous, l'aspect financier et environnement.
Alors, lorsqu'on parle de l'économie et de l'environnement, ce sont les
technologies propres, finalement, qui...
Alors, un, utiliser les sociétés publiques et parapubliques comme banc
d'essai. Et savez-vous qu'est-ce qui va arriver par la suite? Ils vont devenir d'excellentes vitrines technologiques
pour, entre autres, le secteur privé, qui pourra, après ça, aller voir, valider, apprécier, mieux
apprécier les innovations du Québec. Quand les entrepreneurs me disent qu'ils
essaient de vendre à l'étranger, puis les clients étrangers leur disent :
Tu l'as mis en application où au Québec?, et l'entrepreneur
a de la difficulté à trouver ce banc d'essai, je trouve que ce serait une
excellente poussée pour développer davantage les technologies propres
qui vont nous être utiles ici mais également à l'international.
M.
Traversy : Et donc je
comprends, dans les interventions que vous avez faites, que l'électrification
des transports est une vitrine que le
gouvernement, évidemment, peut exploiter pour en faire une exemplarité
dans ses différentes institutions.
Vous avez
glissé un mot sur la question des infrastructures, des bâtiments. Est-ce que vous avez aussi
d'autres secteurs qui mériteraient
d'être mis en évidence ou en vitrine technologique,
là, selon vos termes, là, pour le gouvernement ou les institutions
parapubliques?
M. Leclerc (Denis) : Oui, Jean.
• (12 h 30) •
M. Nolet
(Jean) : Alors, si vous permettez, un peu dans le même sens que ce
que Guy mentionnait un peu plus tôt
dans une des recommandations, là où le gouvernement pourrait peut-être faire
preuve d'exemplarité, c'est en prenant, à l'image de ce que Denis vient de dire, certains risques, et un des
endroits possibles où ça pourrait faire une différence, c'est dans le
secteur financier, notamment avec les institutions que le gouvernement du
Québec contrôle, comme Investissement
Québec. Donc, si les enjeux qu'on rencontre au niveau du financement des
entreprises, dans le cadre du marché
du carbone, parce qu'il y a une incompréhension du marché du carbone dans le
secteur financier de façon générale... bien,
si, en premier lieu, les institutions qui sont contrôlées par le gouvernement
du Québec, comme Investissement Québec, avaient une meilleure compréhension et pouvaient avancer de ce côté-là,
bien ça pourrait faire une différence pour les entreprises de notre
secteur.
M. Drouin (Guy) : J'ajouterais
également que, dans le cadre d'appels d'offres publics, on pourrait peut-être ajouter... Évidemment, bon, historiquement on y va
le plus bas soumissionnaire conforme en termes de coût. Par contre, on
pourrait ajouter dans les appels d'offres probablement une pondération où on
regarde l'empreinte carbone de technologies
que le gouvernement est appelé à acheter. Souvent, le gouvernement, il dépense
des milliards de dollars sur certains
produits où l'impact de la consommation énergétique est important. On pourrait,
dans le cadre du pointage de la meilleure
technologie qui devrait être choisie par le gouvernement du Québec, mettre
également un élément relié à l'émission des gaz à effet de serre.
Mais je
reviens également sur ce que mon ami Nolet disait au niveau du financement,
bien important, extrêmement important.
Il faut comprendre qu'entre 2005 et 2012 il y a eu 7 000 projets de
crédits compensatoires qui ont été mis en place dans le cadre du mécanisme de développement propre du Protocole de
Kyoto par des entreprises privées, dont mon entreprise, un projet de réduction de biogaz dans un site
d'enfouissement au Salvador. Avec le collapse de Kyoto, il y a eu des multiples faillites d'entreprises privées,
de multiples mauvaises créances avec les banques parce que, tout d'un coup, tout ce marché-là est tombé, avec le
retrait, entre autres, du Canada, de la Russie et du Japon, etc. Et je peux vous
dire que, dans le milieu bancaire, tout le
monde se parle, et, lorsqu'on approche des institutions financières,
canadiennes, européennes, anglaises ou américaines, c'est un secteur qui
a besoin de se rehausser à nouveau. Et, dans ce cadre-là, j'appuie totalement M. Nolet que notre
institution financière de chez nous qui est contrôlée par le gouvernement du
Québec, qui est Investissement
Québec, devrait nous accompagner dans des projets, à tout le moins des projets
de réduction en Amérique du Nord.
Lorsqu'on a besoin d'une dette à être amortie sur 10 ans, il ne faudrait
pas que, lorsqu'on regarde, ils
disent : Bien, nous, on y va uniquement «by the book»; le marché du
carbone peut se terminer en 2020 ou en 2000, et on arrête le financement selon ces dates butoirs là. C'est très
compliqué, actuellement, financer des projets, à cause de la mauvaise
expérience que les banquiers et le marché international ont vécue les
10 dernières années.
M. Leclerc (Denis) : 30 secondes?
J'aimerais vous donner un autre cas concret.
Depuis 1962,
au Québec, il y a ce qu'on appelle le 1 %, au niveau des oeuvres d'art,
lorsqu'il y a de la construction, le
financement de l'État dans un bâtiment. Alors, nous, on trouve que c'est une
bonne mesure, mais, vous savez, quand je
regarde les innovations en technologies propres, c'est aussi des oeuvres d'art.
Et c'est pour ça que, ce 1 %, on pense que ça serait une mesure similaire pour les technologies propres,
c'est-à-dire que, lorsque l'État a des projets majeurs, bien l'équivalent... Je dis 1 %, ça pourrait
être 0,1 % aussi, mais ce que je veux dire, c'est qu'il pourrait à chaque
fois... Prenez le CHUM, là. Il y a
des oeuvres d'art au CHUM, très bien, c'est super beau. Mais est-ce qu'on
aurait pu aussi garder une partie
comme vitrine technologique ou comme banc d'essai pour les innovations qui sont
développées ici, au Québec?
Alors, ce
principe-là du 1 %, je pense que ça pourrait être une excellente mesure
pour aider nos entrepreneurs en technologies propres.
M. Traversy : Évidemment,
sans déshabiller la culture, on est d'accord?
M. Leclerc (Denis) : Évidemment,
évidemment.
M. Traversy : Évidemment.
Bon, parfait. Écoutez, j'ai mis le doigt sur un sujet qui vous a animés
beaucoup, messieurs. Je vais donc être très bref, parce qu'il doit me rester
peut-être deux minutes.
Le
Président (M. Reid) : Une minute.
M.
Traversy : Une minute? Bon, rapidement, le Fonds vert, vous
voyez ça comment, vous, de votre point de vue, comme utilité pour les
projets qui peuvent intéresser les entrepreneurs?
M. Leclerc (Denis) : Le Fonds vert, c'est outil extraordinaire pour le développement
économique du Québec. C'est comme
dans tout. Chaque outil, il faut savoir l'utiliser, mais il faut surtout savoir
l'optimiser, maximiser les bénéfices. Alors,
pour nous, le Fonds vert qui a été mis en place, c'est un outil qui vient
pousser l'innovation, qui viendrait inciter l'adaptation et l'adoption
de technologies propres.
Et, M. Drouin, vous
voulez dire...
M.
Drouin (Guy) : Non, tout simplement, le Fonds vert, comme on l'a
souvent dit, l'électrification des transports est importante. Il est clair que le transport en commun doit être
augmenté, amélioré, notamment dans la région métropolitaine de Montréal. Donc, le Fonds vert devrait également
servir à financer des projets d'infrastructure au niveau de l'élargissement
du métro, au niveau, évidemment,
d'incitatifs auprès des contribuables pour se doter de moyens... de véhicules
électriques et autres.
On
a une opportunité actuellement, au Québec, de faire en sorte que notre secteur
des transports puisse devenir plus
vert, et en même temps on économise des précieux dollars qui vont à l'achat de
pétrole qui n'est pas produit sur notre territoire et qui permet, à ce
moment-là, d'améliorer notre balance...
Le Président (M.
Reid) : Je dois protéger le temps du deuxième groupe
d'opposition. Alors, nous passons maintenant au deuxième groupe d'opposition.
M. le député de Masson.
M. Lemay :
Merci, M. le Président. Merci, messieurs, d'être avec nous. Bien heureux de
vous revoir.
Alors,
vous savez, j'ai bien entendu tantôt, dans votre première période de
10 minutes, que vous nous mentionnez, là, au niveau des crédits
compensatoires... Et vous avez même fait... Dans vos recommandations à la
page 8, votre quatrième recommandation,
vous mentionnez, dans le fond, là, qu'on devrait permettre que la couverture
maximale des GES par les crédits compensatoires soit augmentée à plus de
8 % des émissions d'un établissement assujetti pour la prochaine période,
2020‑2030.
J'ai
entendu des chiffres tout à l'heure, vous avez mentionné : Peut-être ça
pourrait être 12 %, ça pourrait être 15 %, il faudrait qu'il y ait une étude, mais vous, personnellement...
Je comprends que le WCI a mentionné que c'était 8 %, puis nous, on s'est alignés à 8 %, mais est-ce que vous
avez une recommandation à faire ou c'est simplement que ça devrait être
plus que 8 %, puis là, après ça, vous nous laissez la décision?
M.
Drouin (Guy) : Moi, comme entrepreneur, c'est évident que j'avais un
chiffre en tête, 15 %, étant donné que je crois énormément au fait qu'avec les 13 nouveaux protocoles qui
s'en viennent, à tout le moins, et d'autres protocoles on va être là pour
livrer la marchandise, on va être là pour aller combler notre part du marché en
termes de crédits compensatoires, d'une part
parce que c'est bon pour nos entreprises, ça nous permet de nous développer, de
développer des technologies, de créer
des emplois d'ingénieur et de technicien dans nos entreprises et surtout, en
ayant ces protocoles-là, de se
projeter à l'international. Donc, à tout le moins, je parlais de 15 %,
mais évidemment on laisse la cible finale à être établie par les experts
à l'intérieur de vos ministères.
M. Lemay :
O.K. À ce moment-là, pourquoi, d'abord, il semble y avoir des réticences, au
ministère, à aller plus haut que 8 %,
tu sais, dans le sens que... Est-ce que c'est parce que les nouveaux crédits
compensatoires ne sont pas encore... protocoles ne sont pas encore
élaborés, puis là il y a réticence de vouloir aller plus que 8 %?
M.
Drouin (Guy) : Je n'ai pas senti de réticence. C'est tout simplement
qu'on est tous verts, là, dans ce marché-là, là, c'est depuis 2013. Il faut dire qu'au Québec il y a eu à peine
170 000 tonnes enregistrées, alors qu'en Californie on est rendu à 24 millions de tonnes équivalent CO2
de crédits compensatoires, dont moi, j'en ai vendu 80 000 tonnes au
mois d'avril dernier pour un projet
que j'ai réalisé en Alabama, mais on commence, là. Et, avec les crédits qui
s'en viennent, c'est sûr qu'on va
dépasser, évidemment, le nombre qui a déjà été enregistré, et je fais
énormément confiance autant aux entrepreneurs du Québec pour aller
chercher notre part de marché là-dedans.
• (12 h 40) •
M.
Lemay : Vous mentionniez aussi la filière de... la gestion optimale
des halocarbures. Ça me faisait penser, on a un écofrais pour les télévisions, tu sais, quand on... Bon, est-ce
qu'on parle, là, comme ça, une idée... Est-ce qu'on pourrait penser à un frigofrais, tu sais, pour nos
réfrigérateurs, pour justement
reprendre le processus qui avait été entamé un peu sans le vouloir par Hydro-Québec, dans le temps, quand ils disaient : Remplacez votre
frigo, puis on va s'occuper de le récupérer
d'une façon adéquate, puis là, par la bande, ça aide pour les halocarbures?
Mais est-ce que vous pensez qu'un frigofrais pourrait être intéressant?
M. Nolet
(Jean) : Ça pourrait être intéressant. Là, dans le contexte actuel, on
est dans une logique marché du carbone et on
pense crédits compensatoires, et c'est dans cette optique-là qu'on se présente
devant vous. La préoccupation qu'on
manifeste dans notre mémoire, c'est à l'effet que la Californie a des règles
différentes du Québec. Dans leur cas, ils ne reconnaissent pas la destruction
d'halocarbures à l'extérieur des États-Unis, et au Québec on reconnaît la
destruction d'halocarbures à la fois
au Québec... en fait au Canada et aux États-Unis, ce qui fait en sorte,
concrètement, que ce n'est pas
possible, pour une entreprise québécoise, de détruire des halocarbures
américains en sol canadien, qui donnerait lieu à des crédits compensatoires reconnus dans le marché commun, et on trouve
qu'il y a là, finalement, un frein à l'expansion d'entreprises québécoises dans ce secteur d'activité là. Et, si c'était
possible, si ça pouvait être négocié avec les Californiens pour qu'ils adoptent, finalement, la contrepartie
de la réglementation québécoise pour reconnaître également chez eux ce que nous, on reconnaît chez nous pour eux, bien ça
ferait une différence pour notre secteur d'activité, qui pourrait se
développer.
M.
Lemay : Eh bien, ça semble
être une mesure, somme toute, une fois qu'on fait les négociations, quand même qui n'implique pas beaucoup de capitaux, là, c'est
simplement, là, le bon vouloir de tous et chacun. Merci de l'idée, j'espère
qu'elle sera bien retenue.
Ou sinon on parle...
Je ne sais pas, M. le Président, il me reste...
Le Président (M.
Reid) : 1 min 30 s.
M.
Lemay : 1 min 30 s. En fait, vous parlez de la
valorisation des matières résiduelles, puis vous en avez parlé aussi la
dernière fois qu'on s'est rencontrés, sur les consultations du livre vert. Et
puis, dans le fond, vous autres, quel type
d'initiatives seraient les plus rentables qu'on pourrait faire, là, tu sais,
comment ça coûte versus la tonne de GES qu'on peut éviter? Tu sais, on fait juste parler. Le plan
d'électrification des transports, c'est à peu près 500 $ la tonne,
en pâtes et papiers, 300 $ la tonne, puis, dans le marché du carbone,
33 $ la tonne. Mais, tu sais, vous, là, coût-tonne, matières résiduelles,
est-ce que vous avez une idée, là, de wow! celle-là, elle ne coûte pas cher,
elle vaut la peine?
M.
Nolet (Jean) : De façon générale, du côté des matières résiduelles, ça
ne coûte vraiment pas cher. On a vu des projets à l'échelle internationale, et Guy y a participé, il y a des
coûts qui ont varié, qui ont été aussi bas qu'autour de 5 $ US la tonne. L'enjeu qu'on a au Québec,
et en fait c'est un bel enjeu, c'est que, comme on a réglementé, il n'y a plus
beaucoup à faire de ce côté-là, du moins dans la récupération du méthane.
Donc,
c'est une réponse assez globale. Guy, je ne sais pas si tu as quelque chose à
ajouter, mais... La réglementation n'a pas fait une bonne job de ce
côté-là au Québec.
M. Drouin
(Guy) : Par contre, pour les matières résiduelles qu'on veut valoriser
à des fins de biocarburant, évidemment, ces
matières-là n'iraient pas dans un site d'enfouissement. On pourrait faire un
protocole qui permet de pouvoir établir en termes de tonnes équivalent en CO2
le méthane évité, le fait que ces matières-là ne vont pas dans un site d'enfouissement, puisque, un site d'enfouissement,
capturer 100 % du méthane, ça ne se fait pas, il y a une valeur par
défaut. De mémoire, dans Kyoto, je pense,
c'était 10 % ou 15 % qui allait à l'atmosphère. Donc, il y aurait un
protocole de manière à encourager nos
entreprises qui ont des technologies de transformation des matières résiduelles
en éthanol, ou méthanol, ou autres.
M. Leclerc
(Denis) : Et le bénéfice là-dessus serait...
Le Président (M.
Reid) : Je dois... Le temps est écoulé.
M. Leclerc
(Denis) : Il y a plein de bénéfices pour les technologies propres, M.
le Président.
Le
Président (M. Reid) : Parfait, ça rentre dans le temps qu'il ne
restait plus. Alors, merci beaucoup, M. Nolet, M. Drouin,
M. Leclerc, de votre contribution à nos travaux.
La commission suspend
ses travaux jusqu'à 15 heures, cet après-midi.
(Suspension de la séance à
12 h 44)
(Reprise à 15 h 7)
Le Président (M.
Reid) : Alors, nous reprenons nos travaux.
Je vous rappelle que
la commission est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le
cadre des consultations particulières sur le
document de consultation intitulé Cible de réduction d'émissions de gaz à
effet de serre du Québec pour 2030.
Cet
après-midi, nous débuterons avec la Fédération
des chambres de commerce du Québec,
nous poursuivrons avec l'association des Manufacturiers et exportateurs
du Québec, puis le Regroupement des organismes de bassins versants du
Québec, et nous terminerons avec l'Association canadienne du ciment, région du
Québec.
Alors,
j'aimerais souhaiter la bienvenue à notre premier groupe d'invités, la
Fédération des chambres de commerce du
Québec. Vous avez une dizaine de minutes pour faire votre présentation, par la
suite nous aurons une période d'échange. Je vous demanderais, pour les fins de l'enregistrement, de vous
présenter et présenter la personne qui vous accompagne. Vous avez la
parole.
Fédération
des chambres de commerce du Québec (FCCQ)
M. Forget
(Stéphane) : Merci beaucoup.
Alors, merci beaucoup de nous recevoir aujourd'hui. Stéphane Forget, je suis vice-président Stratégie et affaires
économiques à la fédération. Et je suis accompagné de Dany Lemieux, Dany
qui, comme on le dit chez nous, là, est un
consultant en résidence à la fédération, donc très impliqué, et notre
expert-conseil dans le domaine du développement durable depuis de
nombreuses années.
La fédération s'est prononcée plusieurs fois au
cours des dernières années sur la question des changements climatiques et sur les cibles de réduction des
émissions de GES. Ce mémoire est le fruit d'une réflexion et de commentaires
de 10 comités de travail de la
fédération, dont notamment ceux du développement durable, du secteur
manufacturier, de l'énergie et de
l'économie verte, des infrastructures et du transport. La FCCQ souhaite faire
part de ses commentaires et de ses
recommandations, qui portent principalement aujourd'hui sur quatre éléments,
donc : l'état des lieux, les cibles de réduction des GES au Québec, l'impact économique de la hausse de cette
cible sur les entreprises et sur la société québécoise en général et les
conditions gagnantes que nous souhaitons vous proposer pour une diminution
optimale des GES.
D'entrée de jeu, la fédération tient à souligner
qu'elle appuie les initiatives gouvernementales en matière de réduction des émissions de GES. Cela dit, nous
croyons qu'il importe de rappeler quelques éléments de contexte importants
qui touchent directement les entreprises québécoises et qui doivent être
considérés dans la réflexion que vous menez présentement.
• (15 h 10) •
Le Québec
affiche déjà une très bonne performance en matière d'émissions par rapport à
d'autres provinces et territoires, présentant le meilleur bilan
d'émissions de GES par habitant au Canada. La nécessité de maintenir, voire même d'accroître la compétitivité des entreprises
québécoises est primordiale pour créer de la richesse au bénéfice de tout le Québec; être vert sans une économie
vigoureuse ne sera pas à l'avantage de l'ensemble de la collectivité. Comme cela
est mentionné et à juste titre dans le document de consultation, le gouvernement doit tenir compte des particularités géographiques, énergétiques, économiques et
sociales avant de confirmer sa nouvelle cible. Enfin, par rapport à 1990, plus de la moitié de la réduction nette des GES au Québec
résulte malheureusement de fermetures d'usines grandes émettrices de GES et
aussi — et
ça, c'est plus positif — des
efforts des entreprises, surtout du secteur industriel.
Bien que la cible de 6 % pour 2012 a été
atteinte, deux éléments sont, à notre avis, importants à mentionner. Seulement trois mégatonnes sur les 6,7 de réduction de GES équivalent depuis 1990 sont
une conséquence directe des programmes
du plan d'action 2006‑2012 et du plan d'action 2013‑2020 contre
les changements climatiques, évidemment, qui
vient de s'amorcer. 93 % des
montants du PACC 2006‑2012 étaient
dépensés, mais seulement 14,8 %
de la cible de réduction de GES était
atteinte. Ces chiffres sont inquiétants, comme l'a souligné à juste titre le
Commissaire au développement durable deux fois plutôt qu'une.
Comme nous ne
souhaitons pas, à cet égard, que le passé soit garant de l'avenir, la
fédération s'inquiète du fait que la
plupart des nouveaux programmes promis au PACC 2013‑2020 ne sont pas toujours
connus ou conçus — en tout cas, s'ils sont conçus, ils ne sont pas encore
connus — et ce,
depuis plus de deux ans après le
début de la mise en place du plan d'action. Si nous maintenons cette vitesse de croisière actuelle, des correctifs
doivent être apportés à ce chapitre, autrement comment sera-t-il
possible que cette cible puisse être atteinte d'ici 2020? Et, sans vouloir être
pessimiste, comment atteindre un objectif aussi ambitieux que celui de 2030
dans ce contexte?
Pendant que cette cible ambitieuse de
37,5 % d'ici 2030... Excusez-moi. Parlant de cette cible, après avoir
examiné le document de consultation,
la fédération croit que le gouvernement doit se présenter à la conférence de
Paris avec un plan crédible et
réaliste de réduction des émissions de GES pour atteindre la cible. Il serait
dangereux d'établir un objectif sans
avoir préalablement identifié l'ampleur des moyens concrets pour l'atteindre,
s'être assuré de la collaboration de tous,
de même qu'avoir évalué les sommes et les efforts qui devront être investis
pour y parvenir, idéalement par secteur d'activité économique, ainsi que les incidences probables de ces
actions. Sans ce plan, le Québec devrait plutôt y aller avec des objectifs intermédiaires, trois ans, cinq
ans peut-être; des objectifs ambitieux, certes, mais plus réalistes pour
atteindre ces cibles. La performance du Québec pourrait alors être perçue comme
un gage de crédibilité.
Même s'il y aura
des opportunités d'affaires liées à l'économie verte, avec la réduction des cibles, il ressort
de l'analyse de l'impact d'une nouvelle cible que les effets sur l'économie
québécoise seront globalement négatifs. À cet
égard, le Fonds vert doit être vu et considéré comme un outil de développement
économique pour les entreprises. Les entreprises
québécoises sont inquiètes des répercussions qu'aura cette nouvelle cible sur
leur compétitivité d'ici 2030, et cela doit être abordé dans le cadre
des discussions actuelles, abordé de façon franche et directe.
Même si
l'Ontario a annoncé sa récente adhésion au marché du carbone, les entreprises québécoises feront tout
de même face à un nouveau signal de prix
relatif dans leur environnement d'affaires dont la majorité de leurs
concurrents au sud de la frontière
n'auront pas à tenir compte. Les actions gouvernementales doivent être
cohérentes à la fois pour la réduction
des GES et pour la croissance économique du Québec. Le Québec doit se
préoccuper de l'érosion de son secteur manufacturier
quant à l'établissement de sa cible, car il est certain que l'Ontario le fera.
La recherche et développement québécoise ne doit pas être oubliée aussi
dans ces discussions.
L'effort demandé pour atteindre la nouvelle
cible pourrait varier entre 22 et 27 mégatonnes de réduction des émissions de GES pour l'année 2030, selon la cible
qui sera choisie. À titre indicatif, les 69 grands émetteurs industriels
de GES réglementés sous le système
de plafonnement et d'échange émettaient en 2012 environ 19 mégatonnes de
GES. Le gouvernement doit indiquer dès maintenant la façon dont il
entend procéder et la contribution nette que chacun des secteurs d'activité
aura à fournir.
La
fédération a beau l'avoir maintes
fois répété, il n'existe toujours pas d'étude complète sur l'incidence
économique sur les divers secteurs d'activité économique et les
entreprises. Ces dernières veulent pouvoir travailler avec un cadre législatif et réglementaire clair. Une fois celui-ci
déterminé, les entreprises pourront prendre leurs décisions en toute
connaissance de cause.
Tel que mentionné précédemment, la fédération
appuie les initiatives gouvernementales en matière de réduction de GES. Si le Québec veut demeurer en avant de la
parade, il faudra travailler fort, certes, mettre les bonnes mesures en place,
assurément, mais surtout démontrer que l'on doit agir mais aussi qu'il y a des
avantages à le faire tant sur le plan environnemental que sur le plan
économique.
Donc, peu importe la
cible, qu'elle soit de 35 %, 37 % ou même de 40 %, nous croyons
qu'une telle cible est atteignable si et seulement si les conditions gagnantes
suivantes sont réunies — alors
je vais me permettre de vous en nommer
quelques-une : tout d'abord, en allant chercher d'autres partenaires pour
participer au marché du carbone, en priorité les autres provinces
canadiennes et d'autres États américains — la fédération, d'ailleurs,
s'est appliquée cette fin de semaine, lors
du congrès de la Chambre de commerce du Canada, à faire en sorte que ça
devienne une priorité de la Chambre
de commerce du Canada d'essayer d'attirer d'autres partenaires dans le marché
du carbone; en s'assurant de devenir imputable, avec des évaluations
systématiques et indépendantes des programmes et avec une reddition de comptes
incluant des indicateurs de performance
chiffrés; en faisant preuve de réalisme, de pragmatisme et de cohérence dans le
choix des mesures et des programmes; en
réallouant les sommes vers les programmes qui produisent le plus de réduction
de GES au meilleur coût possible en dollars
la tonne de GES évité, dont, et c'est important de le mentionner, en transport
collectif; en facilitant la desserte de gaz
naturel, un hydrocarbure qu'il faut considérer quand on veut réduire les GES;
en admettant aussi qu'il sera plus difficile d'aller chercher des
réductions d'émissions au Québec par rapport à d'autres juridictions, étant donné que la province a déjà le plus bas taux
d'émissions de GES par habitant au Canada; sans remettre en cause le travail effectué par le ministère du
Développement durable, nous croyons qu'il faut, à cet égard, confier le centre de décision en matière de réduction de GES
à l'instance la plus élevée au gouvernement du Québec, soit le Conseil exécutif; en offrant davantage de protocoles de
crédits compensatoires au Québec et en ouvrant la porte à des projets dans
d'autres provinces canadiennes; en
modernisant et en faisant respecter la réglementation sur l'efficacité
énergétique et la réglementation
environnementale dans les bâtiments, sur les appareils et en transport — nous fondons beaucoup d'espoir aussi dans les suites au livre vert, que nous
avons eu l'occasion de discuter récemment; en ne négligeant pas l'innovation
ainsi que l'usage de technologies avancées
plus vertes qui peuvent avoir un effet positif sur l'accroissement de la
productivité et sur les occasions d'affaires à l'international; et en
jouant pleinement son rôle de leader dans la sensibilisation de la population sur la question de l'importance des
changements climatiques en soulignant les efforts des uns qui sont malheureusement cachés dans le bilan global par la
mauvaise performance d'autres. Sans ces conditions gagnantes, la
fédération croit que le Québec ne pourra atteindre cette cible.
Je
termine là-dessus en une phrase : L'économie est tout aussi importante que
l'environnement et l'acceptabilité sociale.
Le Québec doit donc maximiser les opportunités d'affaires liées à une économie
plus verte et durable. À cet égard, vous
pouvez compter sur la fédération et ses membres pour contribuer à l'atteinte
des cibles que nous allons nous fixer collectivement. Merci
Le
Président (M. Reid) : Merci. Alors, nous allons passer à la
période d'échange avec le côté gouvernemental. M. le ministre, vous avez
la parole.
• (15 h 20) •
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Merci pour votre
présentation ainsi que votre mémoire. C'est
intéressant parce que, là, ça fait à peu près un an et demi qu'on a une
conversation en continu sur ce dossier-là. Il y a quand même beaucoup de
chemin qui a été parcouru déjà, et il reste en effet du chemin à faire.
Vu que le temps nous
manque, je vais essayer d'aller droit au but quand même, avec le moins de
préambule possible, mais il reste que, la
décision de l'Ontario de se joindre au marché du carbone Québec-Californie, il
ne faut pas la minimiser, on parle
quand même de... puis ça va donner un résultat qui fait en sorte que plus de
50 % de l'économie canadienne et
plus de 60 % de sa population vont être soumis à un même marché du
carbone. Il y a l'Oregon et l'État de Washington
qui ont des projets de loi présentement, devant leurs assemblées législatives,
qui envisagent la création d'un marché
du carbone et une liaison avec le marché Québec-Californie. Il y a deux semaines
à peu près, le gouverneur de l'État
de New York, Andrew Cuomo, a annoncé, avec le vice-président Gore, l'intention
de l'État de New York d'élargir son
marché du carbone actuel et d'éventuellement regarder... d'envisager une
liaison avec le marché Québec-Californie. Le gouverneur du Vermont a déjà indiqué son intention. Le premier
ministre Couillard est revenu du
Mexique avec une entente signée en
main indiquant que le Mexique avait l'intention de mettre en place un marché du
carbone d'ici 2017 et avait également
l'intention d'envisager une liaison avec le marché Québec-Californie.
Ce matin même, j'ai rencontré une délégation de la Chine qui vient voir qu'est-ce qui se passe au Québec pour établir son
propre marché national du carbone. On
s'entend qu'il y a quand même une mouvance vers l'établissement d'un plus vaste
marché du carbone. Ça, je crois qu'on
peut s'entendre là-dessus. Je crois que c'est important de le souligner pour
quand même rassurer, parce que certaines personnes, certaines organisations pensent encore qu'on... ou véhiculent
l'idée qu'on est tout seuls puis que c'est une espèce de système particulier
que personne d'autre n'adopte. Je crois que c'est important de quand même
préciser le fait qu'il y a vraiment une mouvance vers, au contraire, plus
de partenaires, plus de joueurs, puis il y a d'autres provinces canadiennes qui
étudient sérieusement l'établissement de marchés du carbone.
Ceci
dit, si je vous comprends bien, une de vos principales préoccupations, c'est
qu'il y a... — puis là
je ne veux pas mettre des mots dans
votre bouche, mais je veux juste être clair — vous avez une crainte que, malgré ce que je
viens de vous dire, le système actuel et les cibles ambitieuses qu'on se donne,
de réduction, risquent de nuire à la compétitivité des entreprises
québécoises?
M.
Forget (Stéphane) : Ce qu'on
dit, c'est que, sans les conditions gagnantes réunies qu'on vous a proposées,
on pense qu'il peut y avoir un impact pour
certaines entreprises, effectivement que pour la compétitivité de certaines entreprises
il peut y avoir un impact.
Deuxièmement, il faut considérer aussi — puis
je vais laisser Dany peut-être l'expliquer davantage — la
préoccupation sur le déplacement de capitaux vers d'autres juridictions qui
vont bénéficier du marché du carbone. Et ça aussi, c'est une préoccupation que
nous avons.
Et, troisième élément, et je vais laisser Dany
l'expliquer, il y a des entreprises au Québec qui sont rendues à une étape où ils ont fait beaucoup pour améliorer
leurs cibles de... leur réduction de GES, et là ils sont rendus à une étape
où ça coûterait tellement cher de le faire
qu'on préfère se retirer. Et ça, on a une inquiétude par rapport à ça.
Peut-être Dany est plus...
M. Lemieux
(Dany) : Donc, en termes de
compétitivité, bon, vous l'avez souligné, il y a des intentions. Présentement, nous, ce qu'on dit, c'est qu'il faut
regarder quels sont nos principaux partenaires commerciaux et de voir si
ces partenaires commerciaux là naturels du
Québec, ce sont eux qui se joignent au marché, parce que, si ce n'est pas le
cas, c'est à ce moment-là que la compétitivité des entreprises peut être
davantage à risque.
Donc, oui, il
y a des intentions. Nous, ce qu'on dit : C'est une meilleure nouvelle si
les partenaires naturels, au sud de la frontière notamment, embarquent
les premiers dans un système, plutôt que plus tard. C'est ce qu'on dit.
M. Forget
(Stéphane) : Mais nous avons
appuyé depuis le début le marché parce qu'on pense que c'est une... pour
l'avenir, c'est souhaitable.
M.
Heurtel : Oui, oui. Non, je comprends, mais l'affaire, c'est que...
Puis d'emblée, puis ça, je veux dire, c'est... puis le Québec n'est pas
la seule juridiction, sur la question des indicateurs puis l'intégration dans
les mécanismes de projections financières,
même le calcul du PIB, c'est notoire, là, que la façon dont on mesure une
économie intègre mal les risques
climatiques, intègre mal, justement, les impacts des changements climatiques et
aussi intègre mal les réactions, les
mesures, justement, pour lutter contre les changements climatiques. Ce n'est
pas juste moi qui le dis, le gouverneur de la Banque d'Angleterre, Mark Carney, l'a dit lors d'un discours il y
a deux semaines, je ne sais pas si vous l'avez lu, mais je vous invite à
le lire parce que, justement, quand vous parlez d'indicateurs économiques...
puis c'est l'ancien gouverneur de la Banque
du Canada, qui a donné un discours très important il y a à peu près une dizaine
de jours à Londres, lors d'un gala, à
des assureurs, ça fait que... à la Lloyd's. Alors, on comprend que c'était
vraiment un discours économique, mais il parlait de l'importance d'avoir
des meilleurs outils de mesure, des meilleurs outils d'intégration.
Alors, on
travaille là-dessus, mais en même temps ça ne nous empêche pas de, justement,
vouloir agir. Puis, vu l'urgence
d'agir, il faut agir vite, il faut se donner des cibles. C'est la mécanique qui
est mise sur pied par les Nations unies, de se donner des cibles, de se faire
des plans pour pouvoir arriver à ces cibles-là, puis c'est un des objectifs de
l'exercice actuel devant cette commission.
Moi, ce que
je veux savoir, c'est que... Puis juste ça, c'est juste quelques études ici,
là, qu'on prend, puis il y en a
plusieurs autres, que ce soit la Commission de l'écofiscalité du Canada, l'organisme
américain Risky Business, le rapport Calderón
qui a été remis aux Nations unies cet été, plus tôt cet automne le rapport de
Citigroup. Tous ces rapports-là nous
disent clairement... Puis ça, c'est
des rapports très économiques, faits par des gens très sérieux en économie qui nous disent unanimement que
d'avoir une position très agressive en matière de lutte contre les changements
climatiques apporte des bénéfices
économiques. Alors, qu'est-ce que vous répondez à ces rapports-là puis ces
données-là, là, qui sont basés sur des études crédibles, rigoureuses et
sérieuses en matière d'économie?
M. Forget
(Stéphane) : Ce qu'on répond
à ça, c'est qu'on ne vit pas dans un monde isolé, la compétitivité se fait
en fonction de nos compétiteurs et de la
vitesse à laquelle nous allons avancer. Si, par rapport aux autres
juridictions, on va tellement vite
que ça apporte des contraintes importantes sur les entreprises d'ici, il va y
avoir un impact négatif sur le développement économique du Québec.
Notre préoccupation est à l'égard de la
compétitivité par rapport aux autres juridictions avec lesquelles nous sommes en compétition, c'est là la préoccupation.
Le milieu des affaires n'en a pas pour est-ce que la cible est juste ou pas mais sur les moyens qu'on va mettre en place
par rapport à notre compétition pour être capables de demeurer, justement,
dans le marché, ne pas être exclus parce
qu'on a tellement un souhait d'être en avant de la parade que ça a des
conséquences sur le développement économique du Québec. C'est là
essentiellement la préoccupation du milieu des affaires.
M.
Heurtel : J'essaie de réconcilier cette préoccupation-là... Puis je
comprends qu'elle existe, là, puis c'en est une, préoccupation.
Une voix : ...
M.
Heurtel : Non, non, mais ça, je comprends que la préoccupation existe.
Ça, je ne remets pas en question qu'elle existe ou pas, là, je comprends
qu'elle existe.
Ce matin,
Écotech Québec, qui est la grappe industrielle de l'économie verte, donc c'est
des acteurs économiques de l'économie
verte, et il y a d'autres acteurs qui sont venus nous voir, issus du monde
économique, ils viennent nous dire,
eux : Bien, bien au contraire, d'avoir une cible agressive, d'être
ambitieux, de développer davantage le marché du carbone comme on le fait, d'avoir des programmes du Fonds vert qui
investissent dans le développement de l'économie verte, bien ça, c'est justement un moteur de
développement économique puis ça nous donne un avantage compétitif dans
ce domaine-là, tu sais.
Alors, si on
prend des exemples, grâce au Fonds vert, bien, on investit justement dans des
entreprises... Bon, par exemple,
l'exemple récent, c'est Lion, par exemple, qui a développé un autobus scolaire
entièrement électrique. Bon, bien là il roule, il est déjà à l'essai au
Québec, dans les commissions scolaires, mais il y a des marchés extérieurs qui
sont intéressés à l'acheter.
Vous parlez
des juridictions. Là, il y a des juridictions concrètes, puis on parle d'horizons...
L'Ontario, c'est 2016, ce n'est pas
dans 10 ans, là. New York aussi, là, ce n'est pas des horizons lointains.
Le Mexique, c'est 2017. L'Oregon puis
Washington, c'est des horizons 2016, 2017, 2018. Alors, moi, j'essaie juste de
comprendre. Quand on regarde l'ensemble
de ces préoccupations-là que vous nous partagez, bien en même temps il y a
d'autres acteurs économiques qui nous
disent : Bien, d'être en avant de la parade... Puis encore une fois ce
n'est pas juste moi qui le dis, là, il y a des experts internationaux et
nationaux qui nous le disent, que ça peut au contraire être un avantage de
développement économique. Alors, j'essaie de réconcilier ces deux positions-là,
là.
M. Forget
(Stéphane) : La beauté de la
fédération, c'est qu'on a des entreprises de tous les secteurs. Vous l'avez
bien dit, les entreprises qui sont membres
chez nous et qui sont membres de notre comité Économie verte sont bien excitées
avec ce qu'on est en train de faire.
D'autres dans le secteur énergétique, il y en a qui sont très excités, d'autres
qui le sont beaucoup moins, parce
qu'ils sont dans un autre secteur économique. Alors, la position que nous
avons, là, c'est le même défi que le
gouvernement a d'essayer de réconcilier les positions de ceux qui sont très
excités et de ceux qui sont très inquiets.
Et, je vous dirai — puis je vais laisser
Dany, après, vous parler — lorsqu'on
a réuni tous les comités pour en discuter,
très rapidement la question de la cible a été tassée. La préoccupation des
gens, c'est quelles sont les mesures, les
moyens, les outils qu'on va mettre en place pour contribuer à l'atteinte de
cette cible-là. L'enjeu majeur était sur les moyens, qui ne sont pas, à
ce moment-ci, évidents pour plusieurs. Dany.
• (15 h 30) •
M. Lemieux
(Dany) : Puis, pour répondre
à votre question, concrètement les entreprises veulent des mesures. Ce qui arrive dans la vraie vie, c'est que, quand
il y a un programme, après trois mois, le début de l'année financière, qui est
fermé pendant neuf mois, mais que
l'entreprise, elle a tout fait son développement, elle a convaincu ses
actionnaires à l'extérieur du pays de
mettre de l'argent là-dedans, puis
que, là, on retourne voir le «chief financial officer» pour lui dire :
Bien, finalement, ça va être l'année
prochaine ou dans deux ans, lui, il va dire : Bien, écoutez,
moi, je vais aller mettre l'argent dans une autre usine, c'est ce qui...
M.
Heurtel : ...je vous
interromps, là, parce que c'est important, ce que vous dites là, là. Je
veux juste comprendre. Donc, ce que vous
nous dites, c'est dans le fonctionnement de programmes du Fonds vert, c'est ça?
Alors, c'est quoi, le vrai problème?
Le problème quand vous dites qu'ils ouvrent puis ils ferment, c'est quoi, là? Parce que
ça, c'est important de savoir ça, là.
M. Lemieux
(Dany) : Le problème, c'est
qu'il y a certains programmes qui ont des coûts de réduction la tonne relativement
faibles comparativement à d'autres programmes. Ces programmes-là sont très
populaires et réduisent beaucoup les GES.
Le but du
Fonds vert, à moins que... vous me reprendrez si je ne suis pas correct, là, le
but, ce n'est pas de dépenser de l'argent, c'est de réduire les GES.
Est-ce que... Je ne me trompe pas, là?
M. Heurtel : Bien, les deux.
M. Lemieux
(Dany) : Bien, les... Oui.
Mais, oui, ça va créer de l'activité économique, mais on va pouvoir créer beaucoup plus
d'activité économique et de retombées économiques par dollar investi si on
priorise des programmes où il y a beaucoup
de demande, où c'est un succès et où le coût de revient en dollars la tonne est
beaucoup plus faible que d'autres programmes que pour d'autres raisons il n'y a pas demande,
et qu'on va donner des subventions jusqu'à 750 $ la tonne, par exemple, et où il n'y a pas de demande, et un
programme à 125 $ la tonne de plafond qui aurait énormément de demande. À ce moment-là, peut-être que les argents
seraient beaucoup mieux utilisés, et on créerait beaucoup plus d'activité
économique, et on améliorerait beaucoup plus la compétitivité des entreprises
si on priorisait ces programmes-là qui performent.
M.
Heurtel : O.K. Alors, c'est intéressant, ça. Quels sont les exemples,
quels sont les programmes particuliers qui,
de votre côté, là, selon vos membres, sont les plus performants, sont les plus
populaires, sont les plus sollicités puis, de votre côté, là, selon
votre analyse, ont un meilleur retour sur l'investissement?
M.
Lemieux (Dany) : Bien, nous,
il y a des membres qui nous ont parlé du programme ÉcoPerformance, du
programme, également, Écocamionnage
que les listes d'équipements admissibles n'étaient pas mises à jour
régulièrement. Donc, ils avaient des
projets mais avec des technologies qui étaient, selon eux, tout à fait
admissibles, mais parce que c'étaient des nouvelles technologies elles n'étaient pas sur la liste des équipements
admissibles, c'est très long avant de faire changer les listes. Donc, ce sont tous des exemples où les
entreprises ont retardé, ou carrément annulé, ou acheté des équipements moins efficaces parce qu'il n'y avait pas
possibilité d'avoir les aides financières pour ce qu'ils voulaient faire comme
type de projet. Donc, c'est des exemples très concrets que nos membres
nous ont amenés.
M. Heurtel : Bien, ça, ce
serait important... Peut-être vous pouvez envoyer ça à la commission,
justement, là, s'il y a une liste
plus exhaustive, justement, c'est quoi, les meilleurs... les plus grands
succès, puis c'est quoi, les moins grands
succès, puis pourquoi ça ne fonctionne pas. Ce serait intéressant d'avoir ce
feed-back-là de la part de la fédération.
M. Lemieux (Dany) : D'ailleurs, Philippe Bourke, du Regroupement national des conseils
régionaux en environnement, il vous a suggéré d'avoir une étude sur les
coûts de revient des différents programmes pour que ce soit transparent et qu'on ait l'heure juste, et, à ce moment-là, en
toute connaissance de cause, vous pourrez prendre les décisions de réallouer l'argent vers les
programmes les plus performants. Et à l'heure actuelle ça n'existe pas, puis
c'est une des choses qu'on vous recommande également.
M.
Heurtel : ...d'accord, puis ça, je le dis, on a besoin de mieux s'équiper
au niveau des mécanismes de mesure puis d'intégration des résultats de
ce qu'on fait avec le Fonds vert.
Le Président (M.
Reid) : ...
M. Heurtel :
On a terminé? Déjà?
Le Président (M.
Reid) : Oui.
M. Heurtel :
Merci, M. le Président. Merci.
Le
Président (M. Reid) : Alors, si vous avez quelque chose à nous
faire parvenir, vous l'envoyez au secrétariat de la commission, qui va
le distribuer à tous les membres de la commission.
Alors, nous passons
maintenant à l'opposition officielle. M. le député de Terrebonne.
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. M. Lemieux, M.
Forget, merci beaucoup d'être avec nous cet après-midi. Alors, un mémoire très bien construit. Vous avez réussi à
allumer notre ministre, là, de l'Environnement, là, sur toutes sortes de questions. J'essaierai de ne
pas être répétitif, là, pour aller dans des secteurs qui n'ont pas encore été
explorés, mais j'ai écouté avec attention, là, certaines préoccupations, là, du
gouvernement.
Vous
êtes évidemment, bon, motivés dans cette lutte de diminution de nos gaz à effet
de serre. Vous êtes quand même assez
prudents sur la nécessité de garder en tête l'économie et de trouver ce juste
équilibre, donc vous venez rajouter votre voix à celles de bien d'autres
groupes qui vous ont précédés.
Première
question que j'aimerais vous poser, c'est concernant, et M. le ministre était
en train de vous en parler quelques
instants plus tôt... concernant les fameux PACC qui ont été mentionnés à
l'intérieur de votre mémoire. Il y a quand
même une déception, là, qui est palpable, lorsqu'on lit vos commentaires, vous
avez l'impression que les résultats autour
de ces fonds n'ont pas livré la marchandise et que la gestion des fonds à
l'intérieur de celui-ci pourrait être améliorée de façon considérable. J'aimerais que vous puissiez m'élaborer d'une
façon un peu plus claire, là, la distinction entre le premier modèle du PACC, le deuxième que vous
mentionnez. Et qu'est-ce qui devrait être fait pour améliorer sa gestion?
M. Lemieux
(Dany) : Par rapport à cette question-là, nous, on a pris
connaissance, là, de deux rapports du Commissaire
au développement durable à cet égard-là. Donc, nous, on vient d'en parler, on
pense que l'évaluation de chacun des
programmes devrait être réalisée, qu'on devrait avoir les coûts de revient des
différents programmes. C'est sûr
qu'il y a des programmes qui vont avoir des coûts de revient supérieurs, je
pense, par exemple, au programme Technoclimat que le but, c'est de faire... on est plus dans la précommercialisation.
Il faut qu'il y ait des argents aussi dans ces domaines-là, mais il faut qu'on ait aussi des indicateurs.
Est-ce qu'on atteint l'objectif pour lequel le programme a été créé ou est
financé par le Fonds vert?
M. Traversy :
Ce qu'on discutait tout à l'heure, là, donc.
M. Lemieux
(Dany) : Oui, tout à fait.
M.
Traversy : Et, pour avoir, bon, un peu plus de transparence à
l'intérieur de ce fonds-là, est-ce que vous pensez qu'il devrait y avoir des mécanismes de reddition
de comptes ou d'efficacité sur les résultats que ça peut occasionner?
Peu importent les programmes qui sont ciblés, avec le Fonds vert, dépendamment,
là, de l'optimisation que vous nous en faites,
là, aujourd'hui, est-ce qu'il ne devrait pas y avoir quelque chose qui nous
permet, là, d'évaluer l'impact que ça peut avoir ou du moins d'évaluer
l'efficacité, vous qui êtes représentants, là, des chambres de commerce?
M. Forget (Stéphane) : Bien, c'est une constante. On l'a mentionné aussi
à l'occasion de la commission Godbout et
de la commission Robillard, sur l'importance... Et c'est vrai dans le domaine
environnemental, mais c'est vrai aussi dans
bien d'autres secteurs, que, lorsqu'on met en place des programmes, ou des
mesures fiscales, ou autres... qu'on se donne des objectifs, qu'on mette en place des indicateurs de
performance, qu'on donne une durée de vie dans le temps, qu'on soit capable de les mesurer, de les évaluer,
qu'on soit capable par la suite de voir si on ne devrait pas concentrer
davantage de sommes sur les programmes ou les mesures qui fonctionnent.
Et l'autre élément important aussi, c'était
celui de la transparence, qu'on soit capables d'avoir les résultats de l'évaluation des programmes pour qu'on puisse,
nous aussi, être capables d'apporter notre contribution à leur efficacité.
M. Traversy : Vous
parlez de transparence. Plusieurs groupes aussi sont venus nous mentionner
autour de cette table, par rapport au
Fonds vert, leurs inquiétudes par rapport à... Bon, certains ont utilisé des
mots forts, là, de détournement de
fonds, entre guillemets, là, pour notamment le transport collectif, où des fois
on a l'impression que les sommes qui sont
engagées pour des secteurs primordiaux, pour la lutte aux gaz à effet de serre,
puissent être utilisées à d'autres fins que de créer des nouveaux projets ou d'en arriver aux objectifs pour
lesquels il a été créé. Est-ce que vous partagez également cette
inquiétude? Je parlais évidemment du FORT, là, dans ce cas-ci. Donc, je voulais
vous entendre là-dessus.
M. Lemieux (Dany) : Bien, la compréhension de la fédération, c'est à l'effet que les
montants au Fonds vert, c'est pour faire des choses additionnelles pour
atteindre une cible, donc, en dehors du scénario de référence, des pratiques
courantes. Donc, s'il y avait déjà des programmes qui servaient à financer
certaines choses, bien, dans un scénario de pratique
courante, ils devraient continuer à le faire, et donc, nous, de ce qu'on
perçoit, de ce qu'on comprend, c'est que les sommes du Fonds vert devraient servir à faire des actions
supplémentaires pour réaliser davantage par rapport aux scénarios
courants.
M. Traversy :
Effectivement, je partage votre opinion. Et je l'ai bien noté, on fait un petit
recensement.
Il
y a des gens d'Écotech qui sont venus ce matin nous parler, bon, évidemment,
aussi d'entreprises et d'entrepreneurs motivés
à vouloir participer également à cette lutte aux changements climatiques. Il y
a un aspect qui a attiré mon attention sur
l'une de leurs propositions, c'est d'essayer de rendre plus accessibles les
appels d'offres dans des domaines où... bon, l'aménagement du territoire
ou — on
a rencontré l'Association de l'aluminium — donc dans des domaines où il
peut y avoir des impacts significatifs pour
la lutte aux gaz à effet de serre, donc d'avoir une plus grande ouverture de la
part de l'État québécois à ce genre de
prérogative. Est-ce que vous pensez, vous, comme représentants des chambres de
commerce du Québec, que ça pourrait être un élément positif pour
l'atteinte des objectifs?
M. Lemieux (Dany) : Tout à fait. Un exemple patent, c'est dans le cas des bâtiments verts,
dans le cas des bâtiments durables.
Donc, souvent, on... Bien, en fait, au Québec, un des grands drames, c'est
qu'on y va toujours par le plus bas soumissionnaire, donc, même si on a
une technologie qui coûte un peu plus cher mais qui pourrait... Parce qu'il y a
deux choses, il y a le prix de construction
puis il y a le coût d'opération d'un bâtiment. Donc, il faut arrêter de regarder
en termes de coût de construction mais de
regarder le coût complet de la vie du bâtiment, incluant son coût d'opération.
Donc, le bâtiment peut peut-être
coûter 2 %, 3 %, 5 %, 10 % de plus à la construction, mais,
si on économise 20 %, 30 % sur les coûts d'opération, donc, on vient diminuer notre consommation d'énergie
dans le temps, et donc tout ça va s'autofinancer. Le problème, c'est qu'on est pris avec des règles
toujours du projet le plus bas coût, donc avec des composantes souvent
moins efficaces.
• (15 h 40) •
M.
Traversy : Et donc ça, ça... Donc, quand vous parlez de cette
analyse globale, là, c'est l'analyse de cycle de vie, à la fois, bon,
O.K., des... Parfait. C'était juste pour être sur une terminologie similaire.
Plusieurs
nous ont parlé aussi — et vous en parlez également dans votre mémoire — de l'exemplarité de l'État. J'aimerais donc bien comprendre, là, ce que vous
concevez, comme association, en termes d'exemplarité. On connaît le concept, évidemment, de fond, là, qui souhaiterait
de voir l'État emboîter le pas peut-être, là, d'une façon plus proactive
dans ses exemples et dans ses institutions
publiques et parapubliques, mais est-ce qu'il y a un créneau en particulier qui
intéresse l'association des chambres de commerce
du Québec en termes d'exemple que l'État pourrait faire dans sa lutte
aux changements climatiques?
M. Lemieux (Dany) : C'est vraiment en général. Donc, l'État, selon nous, a le devoir de
montrer l'exemple, donc ça va au
niveau de la démonstration de technologies, bon, on a parlé d'acquisition de
véhicules électriques, il y a des choses qui sont déjà en marche. On y va plutôt au niveau général, au niveau de
l'exemplarité de l'État, mais toujours en priorisant les mesures qui ont
un coût de revient en dollars la tonne économique.
C'est
sûr qu'il va toujours y avoir des projets de démonstration ou de
précommercialisation de technologies qui vont avoir des coûts de revient
supérieurs parce que... il ne faut pas laisser ça pour compte non plus, mais il
faut être balancé dans les sommes qu'on a et il faut avoir du rendement parce
que, comme je le disais tantôt, le but premier du Fonds vert, c'est de réduire
les GES, ce n'est pas uniquement d'investir de l'argent.
M.
Traversy : ...parce que je sais que le temps doit presque être
terminé, je vois les yeux... C'est ça. Quand je vois les yeux de mon président comme ça, il y a
toujours une mauvaise nouvelle qui s'en vient. Donc, rapidement, la cohérence
semble être aussi un élément phare, là, tu
sais, de plusieurs arguments et de propositions de groupes qui sont venus avant
vous. La cohérence, pour vous, dans cette
lutte aux changements climatiques, elle doit s'appliquer de quelle façon dans
les politiques gouvernementales du Québec?
M. Forget (Stéphane) :
La cohérence est dans le fait où on veut effectivement réduire nos GES de façon
importante, mais il faut être capable de
regarder aussi, comme on le disait précédemment, du point de vue économique. Donc, il faut que, d'un côté, le Développement durable
fasse son travail, que le ministère
du Développement économique soit aussi bien impliqué, à certains
égards les Finances, évidemment, si on parle d'écofiscalité. Donc, la cohérence
de l'État, c'est que cette cible-là a des avantages et peut avoir des
conséquences, donc il faut que l'ensemble du gouvernement soit impliqué dans les impacts et les opportunités
d'atteindre ces cibles-là.
Le Président (M. Reid) : Merci. Nous passons maintenant
au deuxième groupe d'opposition. M. le
député de Masson.
M.
Lemay : Merci, M. le Président. Merci, messieurs, d'être ici avec nous. Bon,
vous savez, en fait vous n'êtes pas
les seuls à mentionner ce que vous mentionnez. Je prends par exemple, à la page 11 de votre mémoire, là, dans le point 3, les impacts économiques, vous mentionnez, là, la
fuite de capitaux liée à la quantité de réduction des GES achetée, là, parce qu'on sait, dans le document de consultation, peu importe si c'est 35 %,
37,5 % ou 40 %, le gouvernement a des plans
pour faire des réductions de 15 mégatonnes d'ici 2030, et puis l'excédent,
si on veut, il va aller sur le marché du carbone. Donc là, vous mentionnez... Puis il y a un autre groupe aussi
qui a mentionné un peu la même chose, que dans le document on ne tient pas compte du taux de change, ça fait que ce n'est pas 327 millions. Vous autres,
vous dites que vous arrivez plus à 436 millions pour le
9,8 mégatonnes.
Ceci étant dit, ça...
Puis vous avez aussi un regard de dire : Bien, on a des doutes qu'on va
atteindre les cibles qu'on s'était fixées
pour 2020. Alors, si je prends ça en considération, moi, j'ai une nouvelle
question : Est-ce qu'on ne devrait
pas plutôt dire, pour 2030, comme cible, tu sais, dans le fond, qu'on voudrait
juste aller faire le 15 mégatonnes que le gouvernement propose, donc, si on additionne ce
15 mégatonnes à ce qu'on est supposé d'être en 2020, ça donnerait à
peu près 26 % de réduction de GES, puis dire : Bien, coudon, on va mettre une
cible de 26 % de réduction des
GES du niveau de 1990, puis, si on réussit
à faire mieux, ça sera du bonus? C'est-u
un peu ça que vous voulez mentionner dans votre proposition?
M. Forget (Stéphane) : Comme je le mentionnais précédemment, la cible,
pour nous, ça n'a pas été la discussion. Est-ce que c'est 26 %,
30 %, 35 %, même 40 %?
On pense qu'une fois que la roue va être bien démarrée, les cibles, on
va être capables de les atteindre.
La
préoccupation que nous avons, c'est la nomenclature que j'ai faite un peu plus
tôt, les conditions gagnantes qu'on
doit réunir pour atteindre la cible, peu importe quelle elle sera. On pense que...
Ça, pour nous, c'est plus important, les
conditions gagnantes, que la cible. Je comprends, là, qu'il y a des enjeux avec
Paris puis qu'il faut arriver avec une cible; je n'en suis pas là. Je ne
sais pas si, Dany, tu veux ajouter là-dessus.
M. Lemieux (Dany) : Oui, bien en fait c'est ça. C'est que, peu importe la hauteur de la
cible, il faut qu'on fasse les pas
dans la bonne direction pour être capable de s'enligner pour atteindre une
cible, quelle qu'elle soit. Et, nous,
c'est ce qu'on vient vous livrer
comme message parce que, si on ne fait pas ces ajustements-là,
on pense qu'il n'y aura pas de chance d'atteindre les cibles.
M.
Lemay : À ce moment-là, les pas qu'on doit faire, moi, si je me fie juste au document de consultation, je vois qu'on a des pas pour
des réductions de 15 mégatonnes, tu sais. Le reste, tu sais, on va faire
des achats de crédits à l'extérieur.
On
a eu plusieurs groupes qui sont venus nous rencontrer, puis il y
a eu plusieurs propositions de solution qui ne se retrouvent pas dans le 15 mégatonnes que le gouvernement, il avait ciblé avec son comité-conseil au début. Ça veut-u dire, à ce moment-là, qu'on devrait réunir le comité-conseil puis dire : Suite aux consultations, voici toutes les propositions
qui ont été faites en commission, on
les met dans une grille d'analyse, puis là on se fait un Pareto, puis on
détermine c'est quoi, le
coût-bénéfice sur toutes les solutions puis est-ce qu'on est capable de faire
mieux que les premières 15 mégatonnes qu'on avait ciblées?
Peut-être que c'est ça qui devrait être fait, je ne sais pas, je parle à voix
haute.
Puis, tu sais, vous
avez mentionné qu'il y a des mesures qui sont plus efficaces que d'autres. On
regarde les mesures en transport,
l'électrification des transports, c'est à peu près 500 $ la tonne. En
pâtes et papiers, c'est 300 $. Le marché
du carbone, c'est... Bien, vous l'avez... Dans le document, ils le mettent à
33,67 $, mais ils ne tiennent pas compte du taux de change. Tu sais, il y a des mesures... Tantôt, Écotech nous
ont dit : Bien, nous, on aurait des mesures à 5 $ la tonne. Il n'y a
pas un peu cette analyse-là qu'on doit faire pour savoir c'est où qu'on
investit notre argent pour avoir le meilleur rendement sur notre
investissement?
M. Lemieux (Dany) : Comme on a proposé, il faudrait que cette analyse-là soit faite des
mesures qui existent déjà. Une
analyse similaire pourrait être faite des prochaines mesures. De ce que je comprends,
le comité consultatif, c'est un travail en continu, ce n'est pas
terminé, de ce que je comprends.
Donc,
pour ce qui est de la mécanique, de revoir, là, ce n'est pas à nous de... c'est
M. le ministre avec le comité consultatif,
là, qui doivent travailler ces choses-là. Nous, on a fait des propositions,
puis ça nous fera plaisir de contribuer si on nous le demande, mais
c'est une voie, c'est une façon de...
M. Forget
(Stéphane) : Évidemment, à chaque fois qu'on a l'opportunité de voir
les analyses coût-bénéfice, lorsqu'on décide
de prendre... de mettre des mesures en place, c'est quelque chose qui rassure
beaucoup la fédération et ses membres, assurément.
M. Lemay :
Puis je ne sais pas si... C'est terminé?
Le Président (M.
Reid) : Il reste quelques secondes pour faire un commentaire,
si vous voulez.
M. Lemay :
Merci beaucoup de participer aux travaux.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Nous passons maintenant au bloc réservé aux députés indépendants. Mme la
députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Massé :
Merci, M. le Président. Merci, messieurs, d'être là. Bonjour.
Écoutez,
j'ai bien entendu que, dans le fond, pour vous, la cohérence, c'est le levier
fondamental d'atteinte de n'importe
quelle cible, c'est qu'il faut que ça se tienne, il faut que ce soit un projet,
un plan, je dirais même un projet de société,
si je peux me permettre. Et, dans ce sens-là, vous avez même suggéré que toute
la question de la lutte aux changements
climatiques relève plutôt de l'Exécutif que d'un ministère qu'on n'a pas arrêté
d'appauvrir depuis les 20 dernières... les 15 dernières
années.
Ce
que je me demandais, c'est : Vous avez fait... Et là je vais y aller de
façon pointue, j'ai très peu de temps, donc nous avons très peu de temps. Vous avez évoqué notamment la question des
règles d'appel d'offres, inévitablement c'est toujours au plus bas
soumissionnaire. Et on avait un exemple dernièrement dans une école où la
commission scolaire avait des plans pour de
la géothermie, et que finalement on a construit l'école sans la géothermie, et
ça va nous coûter collectivement plus cher. J'aimerais ça... Est-ce que
vous avez des exemples de règles que vous aimeriez, que vous trouveriez que ça
ferait du sens qu'on trouve dans nos appels d'offres, dans notre objectif de
réduction?
M. Lemieux (Dany) : Bien, d'autres juridictions emploient d'autres indicateurs, par exemple
la qualité du devis par dollar, il y
a d'autres indicateurs qui existent. On pourrait exiger également des
technologies, puis, à ce moment-là, bien,
les compagnies pourraient soumissionner sur les technologies, donc obliger de
regarder des solutions technologiques lors d'appels d'offres, c'est
d'autres façons.
Mais
il y a des indicateurs qui existent, d'autres types d'indicateurs, pour décider
des soumissionnaires gagnants, que
seulement le prix le plus bas. Au gouvernement fédéral, il y a d'autres règles.
Ailleurs sur la planète, nous, on soumissionne dans 130 pays, puis
il y a des règles d'indicateurs différents de soumission.
Mme
Massé : ...je comprends que vous invitez à ce qu'on regarde vraiment
de ce côté-là. O.K. On ne s'entend pas toujours, mais sur celle-là on
s'entend.
Le
Président (M. Reid) : Merci beaucoup. Alors, merci,
M. Lemieux, M. Forget, de votre présence et de votre
contribution à nos travaux.
Je lève la séance
quelques instants pour permettre à nos prochains invités de prendre place.
(Suspension de la séance à
15 h 50)
(Reprise à 15 h 53)
Le
Président (M. Reid) :
Alors, nous reprenons nos travaux. Je voudrais souhaiter la bienvenue à nos
invités de l'association des Manufacturiers et exportateurs du Québec. Vous avez 10 minutes
pour faire votre présentation, par la
suite nous aurons une période d'échange avec les membres de la commission. Pour
les fins d'enregistrement, je vous demanderais de vous présenter et présenter
la personne qui vous accompagne. Vous avez la parole.
Manufacturiers et exportateurs du Québec (MEQ)
M.
Tetrault (Eric) : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je me
présente : Eric Tetrault, président des Manufacturiers et exportateurs du Québec. À ma gauche,
Mme Véronique Proulx, qui est directrice, Communications, stratégies et
partenariats, chez les Manufacturiers et exportateurs du Québec.
Puisque
mon mémoire est un peu plus court, je vais prendre 15 secondes pour nous
présenter, M. le Président. Et ce n'est pas inutile, dans le cadre de la
discussion qu'on a, de savoir au juste qui on représente.
Les
Manufacturiers et exportateurs du Québec, nous représentons l'industrie, en
fait, au Québec, et nous représentons autant l'industrie lourde que les
PME. Alors, je peux représenter autant, par exemple, la minière ArcelorMittal
sur la Côte-Nord qu'un fabricant de portes
et fenêtres à Saint-Jean-sur-Richelieu. Tous ceux qui manufacturent et/ou qui
exportent des denrées, des biens et
des services à l'extérieur du Québec sont représentés chez nous. Nous sommes
une association qui compte à ce jour 840 membres.
J'aurais
pu intituler... Je n'ai pas donné de titre à mon mémoire, M. le Président,
mais, si j'avais eu à donner un titre,
en y songeant, en m'en venant ici, je l'aurais intitulé ainsi, je l'aurais
intitulé De la contrainte à l'opportunité. Vous allez voir un peu où on va comme ça. Et ce n'est
pas un «timeline» qu'on se donne, vous allez voir que, pour les patrons,
il y a des choses qui sont très, très
réalisables à court, moyen et à long terme. Il s'agit, dans l'ensemble, de
trouver des façons de le faire.
Alors,
il existe au Québec à peu près, au moment où on se parle, près de 10 000
dirigeants d'entreprise manufacturière, et très franchement, M. le Président, M. le ministre, je n'en connais pas
un seul qui ne veut pas collaborer avec le gouvernement et contribuer à l'effort de réduction des émissions. Il
faut bien voir que l'époque où les gens le voyaient strictement comme une contrainte est bel et bien
derrière nous, les patrons cherchent une manière de mieux faire les choses
également.
Évidemment,
la clé pour associer ces dirigeants aux efforts qui seront consentis dans les
prochaines années consiste, pour eux,
à réduire nos émissions de GES sans nuire ou nuire le moins possible,
évidemment, à l'économie. Le gouvernement doit
donc, dans notre esprit, pouvoir identifier les bonnes politiques afin
d'élargir au maximum son appui auprès des dirigeants que nous représentons. Le
marché du carbone, pour nous, est un excellent exemple. L'industrie doit faire preuve d'ingéniosité et investir davantage dans
l'efficacité énergétique, si elle veut s'en soustraire, ce qui est profitable
à tous : le gouvernement, la population et l'organisation.
Cela
amène, M. le Président, notre première recommandation au gouvernement : il
faudra s'assurer — et c'est
très clair pour les patrons que nous avons
consultés — s'assurer
que les sommes prélevées seront bel et bien réinvesties dans le Fonds vert. Les dirigeants perdraient
confiance dans le processus s'il s'avérait que le gouvernement utilise les
sommes autrement.
Notre
deuxième recommandation est à l'effet qu'une gouvernance adéquate doit être
mise en place pour s'en assurer,
justement. Nommément, une association comme la nôtre souhaiterait être
impliquée afin de pouvoir faire rapport aux dirigeants. Les patrons,
comme vous le savez, sont toujours curieux de, comme on dit en bon québécois,
savoir par où passe l'argent. Ils seraient
un peu découragés de voir qu'il y a beaucoup d'argent qui est prélevé, par
exemple, à travers le marché du
carbone, ça peut être autrement aussi, par les moyens que trouvera le
gouvernement, et que ça s'en va au
consolidé pour d'autres initiatives dans le gouvernement. Ils aimeraient bien
voir cet argent réinvesti dans l'économie, sous forme de technologies
vertes ou quoi que ce soit, mais, enfin, qu'il y ait un mécanisme qui fait en
sorte que les patrons gardent confiance dans
le flux de l'argent. Ils sont encouragés, ces patrons-là, par le fait que le
marché du carbone est justement une
initiative du gouvernement qui contribue à l'économie plutôt que d'être
strictement une sanction. Il est important
pour eux de voir que les efforts consentis ne se limitent pas aux propositions
des groupes militants, mais que ça embrasse plus largement.
Bref, pour les
entreprises que nous représentons, les chances sont bien meilleures d'en
arriver à des objectifs ambitieux pour le
gouvernement si la logique économique et les objectifs du gouvernement sont
complémentaires, et cela est d'autant
plus important pour nos membres que l'objectif du gouvernement, il faut bien le
dire, est assez ambitieux à leurs
yeux. Le Québec avait comme objectif, comme on le sait, de réduire les émissions
de 20 % pour 2020 par rapport à
1990. 8 %, selon nos calculs, ont été atteints, ce qui nous laisse, selon
les calculs que l'on peut faire, 12 % en huit ans ou 29,5 % dans les 15 prochaines années.
Nous ne contestons pas ces cibles ambitieuses. Ce que nous disons, c'est
qu'elles sont supérieures,
actuellement, au taux de croissance des économies. C'est donc, dans l'oeil des
gens d'affaires, quelque chose qui sera toujours vu comme étant très
ambitieux; pas irréalisable, ambitieux.
L'industrie, M. le Président,
sera dans la solution. Puisqu'elle est directement responsable de 28 % des
émissions de GES, elle fera partie de la
responsabilité collective. De ce 28 %, nous calculons que 55 % est de
l'ordre de la consommation
énergétique pure, 43 % vient des procédés industriels et 2 % de ce
qu'on appelle les émissions fugitives et les emplois de solvants et autres choses. L'industrie a au moins, donc,
trois leviers importants sur lesquels elle peut agir, puis on peut en ajouter
un quatrième qui est plus indirect, le transport des marchandises effectué par
l'industrie contribue, on le sait,
largement à l'émission de GES au Québec, mais voilà un secteur qui réalise des
gains, alors que la hausse se fait sentir plutôt du côté des véhicules
de promenade depuis quelques années.
En
d'autres mots, pour nous, l'industrie fera sa part mais a l'impression qu'elle
ne pourra, à elle seule, régler le problème,
elle cherche une appropriation collective au Québec de ces cibles-là. Il ne
faudra pas, pardonnez-nous l'expression, perdre le contrôle sur nos transports. Les avenues sont multiples pour
le gouvernement, on le sait. Les plus acceptables sont l'électrification des transports — qui suscite un grand engouement, comme on le
sait — un plus
grand investissement dans le transport en commun ou encore le support
aux consommateurs qui choisissent un véhicule moins énergivore, mais il y en aura d'autres qui sont certainement
moins faciles, moins populaires et qui seront peut-être nécessaires, comme
une surtaxe sur les VUS, inspection
obligatoire pour les véhicules anciens, augmentation du prix de l'essence pour
les consommateurs et les entreprises,
ce qui pourrait entraîner, évidemment, une augmentation pour le mazout et le
propane pour les propriétaires également, pour ne rien dire, M. le Président,
de la pédagogie qui sera nécessaire puisque, selon un sondage récent, enfin, le sondage le plus récent
qu'on a pu consulter, une majorité de Québécois tiennent à prioriser les
énergies renouvelables, mais ils refusent de
payer pour les investissements que cela nécessitera, la quadrature du cercle
que vous connaissez tous, chacun d'entre
vous, en politique. Loin de nous, M. le Président, l'idée d'amorcer
aujourd'hui, en ce mercredi, le vaste
débat sur ces questions. Ce que nous cherchons à exprimer aussi, c'est qu'il y
a nécessité, pour les industriels, que chacun fera sa part au Québec.
• (16 heures) •
L'industrie
manufacturière souhaite également que le gouvernement fasse preuve de la plus
grande cohérence possible dans ses
actions. Comment, par exemple, s'attaquer aux émissions par le transport
collectif sans remettre sur la table la question de l'étalement urbain? Est-ce
que la voiture électrique risque même de le favoriser? Question légitime
pour nous. Combien de temps refusera-t-on
aux écoles l'argent nécessaire pour se transformer et être plus efficaces sous
prétexte qu'il n'y a pas un sou dans la
caisse cette année, alors qu'on voit que les projets sont porteurs sur une
période de cinq, huit, 10 ans? Combien de temps allons-nous attendre pour
acheminer le gaz naturel liquéfié sur la Côte-Nord, ce qui
aurait permis l'an passé, pas cette année, en raison de la baisse du prix du
mazout, mais qui aurait permis l'an passé au gouvernement... à l'industrie
lourde de réduire de façon appréciable ses coûts en plus de réduire de 30 %
ses émissions de GES? On parle d'industrie
lourde, industrie minière. On parle donc, en termes clairs, de grands pollueurs
au Québec.
Les
manufacturiers québécois veulent faire partie de la solution, mais ils veulent
aussi que les conditions d'affaires ne se détériorent pas au Québec.
Avant d'aller plus loin, je crois utile de rappeler, puisque c'est notre
travail, que les entreprises sont fortement
taxées, au Québec, et que la lourde réglementation constitue une entrave au bon
fonctionnement des organisations. Il
faut donc, pour s'assurer leur confiance, que les stratégies qui seront mises
en place pour atteindre les cibles
d'émission de GES ne viennent pas détériorer davantage le climat d'affaires au
Québec, sous peine de le voir, comme je le disais dans mon introduction,
comme strictement une contrainte, ce qui serait un échec.
Dans
un premier temps, et c'est notre troisième recommandation, nous souhaitons
recevoir des rapports réguliers du
gouvernement sur les sommes récoltées par le marché du carbone. Ces
3 milliards qui ont été ciblés et qui devraient être atteints d'ici 2020, nous voulons les voir
investis dans les nouvelles technologies et dans les opportunités de marché,
comme on dit en affaires.
Notre quatrième recommandation est à l'effet
d'utiliser ces sommes pour permettre la création d'entreprises émergentes, si la chose est possible. Mettons
l'économie en marche et voyons-le comme une opportunité, je reviens encore
à mon titre.
Notre cinquième recommandation ne constitue pas
la surprise de la journée : Que des mesures de transition adéquates soient prévues. Dans un premier temps,
si, comme le prévoit l'étude microéconomique, le Québec réduit sa
richesse collective de 600 millions et perd quelques milliers d'emplois
dans son action pour réduire les GES, il faut prévoir
réinjecter ces sommes dans l'économie. Et, dans un deuxième temps, nous
souhaitons des mesures d'aide pour favoriser
la transition vers d'autres formes d'énergie pour les entreprises. Je parle
spécifiquement des PME. L'industrie lourde — c'était le cas d'ArcelorMittal, à qui j'ai
parlé encore il y a quelques instants — va trouver des façons d'échapper peut-être à la bourse du carbone en travaillant
sur des projets d'efficacité énergétique, mais, par expérience, ce que je peux
vous dire, c'est que plus une entreprise est
grande, plus il y a des moyens de travailler sur l'efficacité énergétique. Ce
n'est pas aussi évident dans les PME
qui comptent une vingtaine, une trentaine d'employés, ils n'ont pas
nécessairement les ressources ni le
temps pour s'y attaquer, même si la volonté est là. L'industrie lourde, par
exemple, aura comme premier réflexe,
je viens de le dire, d'implanter de nouvelles technologies pour réduire sa
consommation d'énergie. Donc, il faudra penser en termes de taille des
entreprises.
Voilà, M. le
Président, vous me faites signe, donc je vais terminer. Les Manufacturiers et
exportateurs appuient le gouvernement dans cette ambition de réduire les
émissions de GES. Si la création du marché du carbone a été perçue comme un geste coercitif par certains, on voit
très bien aujourd'hui, avec l'adhésion de l'Ontario, le Clean Power Plan américain et même l'annonce d'une proposition
chinoise pour 2017, que le gouvernement a fait preuve de vision, et nous
l'en félicitons. Nous l'encourageons même à aller plus loin parce que, pour
nous, nous faisons partie d'une économie nationale.
Allons-y pour l'Alberta, là on parlera d'une vraie stratégie canadienne
nationale. Mais, pour nous, la question va toujours demeurer : Comment concilier économie et réduction des
GES pour que chacun en bénéficie, dans un contexte, comme on le sait, où le gouvernement ne peut pas
compter sur toutes les ressources financières dont il devrait et dont il
souhaiterait bénéficier pour les prochaines années?
Le Président (M. Reid) :
Merci. 10 minutes pile, félicitations! Nous allons passer maintenant à une
période d'échange avec le côté gouvernemental. M. le ministre, vous avez la
parole.
M. Heurtel :
Merci, M. le Président. Bonjour, M. Tetrault. Bonjour, Mme Proulx. Merci
pour votre présentation ainsi que
votre mémoire. Je peux vous dire, l'Alberta, en tout cas, déjà il y a une
conversation qui a commencé, alors c'est déjà une amélioration par
rapport à il y a un an.
Vous avez
parlé de pédagogie, j'aimerais ça commencer avec ce concept-là. De votre point
de vue, du point de vue de vos
membres, ce serait quoi, les mesures, ou qu'est-ce qu'on devrait faire
davantage, ou quelles nouvelles méthodes devait-on mettre en place pour
justement faire plus, faire mieux en termes de sensibilisation, de pédagogie?
M.
Tetrault (Eric) : En fait, les entrepreneurs sont comme la population
en général. Je pense qu'ils sont très prêts à collaborer, en autant qu'ils
comprennent quel est l'horizon. Comme je l'ai dit, je ne rencontre aucun
entrepreneur aujourd'hui, en 2015, qui voit ça strictement comme une
contrainte, ils cherchent des manières de collaborer.
Mais ce
qu'ils cherchent surtout, ce sont des opportunités d'affaires. La question qui
me revenait souvent, lorsque je les
consulte, c'est : Qu'entend-il faire du 3 milliards? Est-ce qu'il y
aura des opportunités d'affaires là-dedans? Il s'agit au préalable de les identifier, de les informer de
ça, et ensuite ils feront le reste des choses. Les entrepreneurs sont des
gens créatifs, qui ont de l'ambition, ils vont trouver les opportunités.
Alors, ce serait dommage, par exemple,
que les 3 milliards soient strictement compris de programmes gouvernementaux, que ce ne soient que des programmes gouvernementaux. Il faudrait, pour eux, avoir des opportunités
d'affaires, des opportunités non seulement de lancer des
entreprises, mais de lancer des projets de passage vers les technologies
vertes. À ce moment-là, ce serait une excellente pédagogie à faire avec eux,
puis vous allez aller chercher davantage d'ambassadeurs
au Québec pour ce grand projet qui est, comme je le rappelle, pour les
entrepreneurs comme pour les gens, quelque chose qui doit être considéré
comme collectif à ce stade-ci.
M. Heurtel : Parce que... Donc, ce
que j'entends, c'est qu'il y aurait une méconnaissance des mesures du Fonds
vert destinées aux entreprises? Est-ce que la phrase est exacte?
M. Tetrault (Eric) : Oui, je vais
aller plus loin que ça.
M. Heurtel : Plus loin?
M. Tetrault
(Eric) : Vous l'avez dit en termes polis. Moi, je vais le dire en
termes... Chacun son travail, effectivement, M. le ministre.
Ils ne savent
pas du tout où le gouvernement s'en va avec ça, avec ces sommes-là. La
perception générale des entrepreneurs est un peu comme celle de la
population, les gens nous disent : C'est 3 milliards qui vont aller
dans les poches du
gouvernement, puis la tentation va être grande de réduire le déficit avec ça ou
de, bon, payer les comptes courants ou l'épicerie. Il ne faudrait pas en
arriver là parce que, là, les entrepreneurs vont vous lâcher, à ce moment-là.
M.
Heurtel : Donc, il n'y a pas de connaissance chez vos membres du fait
qu'il y a une disposition législative dans
la Loi sur la qualité de l'environnement qui prévoit spécifiquement où l'argent
doit aller puis que justement c'est impossible de dépenser l'argent du Fonds
vert dans d'autres mesures que des mesures visant à mettre en oeuvre les
programmes du Fonds vert.
M.
Tetrault (Eric) : Il n'y a pas de connaissance de cette disposition
législative pour la simple et bonne raison que ce sont des gens qui n'ont pas beaucoup le temps de s'informer, hein?
Il faut voir que les manufacturiers, le manufacturier type au Québec, là, il est président de... il est en
charge de la production, il est en charge de l'expédition, il est en
charge des ressources humaines, il est en charge de l'innovation, il a de la
misère à faire sa journée. Lire les dispositions
législatives du gouvernement, là, ça vient probablement en queue de liste pour
lui, il n'est probablement même pas
au courant qu'il pourrait y avoir des opportunités d'affaires, et, à mon avis,
si vous me permettez l'expression, ce serait la meilleure vente à faire
pour cet objectif très ambitieux que le gouvernement a.
M.
Heurtel : Donc, est-ce qu'en termes... Donc, je comprends, j'entends
très bien ça, puis je ne m'attends pas non plus à ce que chaque entrepreneur ait dans son dossier les dispositions
de l'article 46.1 et suivants de la LQE. Ce que je me dis, c'est que donc... J'essaie de trouver
justement des pistes de solution. C'est une meilleure diffusion des programmes
du Fonds vert, une meilleure publicité
auprès des entrepreneurs, auprès de vos membres? Est-ce que c'est quelque chose
avec lequel... Ce qu'on peut faire, c'est faire ça à travers des associations
comme la vôtre?
M.
Tetrault (Eric) : On peut le faire à travers une association comme la
nôtre, dont c'est le travail, et on sera un collaborateur là-dedans, mais je vous suggérerais fortement de venir
les rencontrer sur le terrain. Ce sont des gens qui ne sortent pas beaucoup, comme on dit en bon québécois,
et il n'y a rien comme un contact direct. Mettez vos bottes, venez les voir sur le terrain, expliquez-leur quelle est
votre ambition, votre projet, expliquez-leur quel est l'horizon général du
gouvernement, donnez-leur des opportunités de faire des affaires, et ils vont
embarquer.
M. Heurtel :
Ah! avec plaisir. Vous nous donnerez des dates, mes bottes sont prêtes.
Alors,
sur, maintenant... Vous parlez aussi... vous avez mentionné les mesures, les
mesures à prendre. Alors, dans les
mesures existantes, méconnues, ou des nouvelles mesures, qu'est-ce qu'il
faudrait faire davantage ou quel genre de proposition... Puis je sais que vous en avez parlé dans votre mémoire,
mais j'aimerais justement peut-être vous faire parler davantage sur
quelles mesures concrètes vous voudriez nous voir, mettons, intensifier ou
créer.
M.
Tetrault (Eric) : En fait, ne réinventons pas la roue. Ce qui
fonctionne le mieux, pour les manufacturiers, ce sont les programmes de
crédit accélérés.
Par
exemple, je prends le... Je prends, par exemple, le crédit d'impôt fédéral pour
paiement accéléré pour ce qui est de l'innovation. Je n'ai pas les
termes exacts, mais, enfin, pour fins de compréhension entre nous, il s'agit,
pour les manufacturiers, de pouvoir compter sur un capital au départ qui leur
permettrait de faire de la transition vers leurs technologies, c'est-à-dire de se doter d'équipements. Souvent, la
volonté est là, mais le capital n'est pas présent pour eux, ce ne sont pas des gens qui roulent sur un capital
de plusieurs millions, dans le cas des petites entreprises. Si on leur permet
au départ de pouvoir avoir accès à ces technologies-là, sous réserve de pouvoir
avoir ce qu'on appelle un «return on investment»,
un ROI, de deux ans, trois ans, cinq ans, moi, je pense que la chose est
possible avec les manufacturiers. Si on
y va avec un crédit d'impôt ou des mesures plus timides, à mon avis, ils
n'embarqueront pas, puis c'est une question de capital, pour eux, ce ne sera pas une question de volonté. Puis ça
serait dommage de rater ça parce qu'il nous manque 200 000 $
ou 300 000 $ par industrie... par PME, vous savez.
M. Heurtel :
Je comprends. Moi, ça me va, M. le Président. Merci.
Le Président (M. Reid) :
Oui. Alors, il n'y a pas d'autre question du côté gouvernemental. Nous passons
à l'opposition officielle. M. le député de Terrebonne.
• (16 h 10) •
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, j'aimerais
remercier Mme Proulx, M. Tetrault d'être avec nous cet après-midi. Vous avez fait une belle
présentation un peu du contexte dans lequel l'association des Manufacturiers
et exportateurs du Québec se positionne.
Vous êtes... bon, vous êtes partie prenante de cette belle aventure, mais en
même temps vous amenez quand même
certains éclairages ou en tout cas, du moins, certaines inquiétudes que vous
gardez en filigrane des discussions que nous allons avoir aujourd'hui.
J'aimerais
avoir tout d'abord votre point de vue de représentants de groupes
manufacturiers pour savoir si d'entrée de jeu des solutions comme,
exemple, une loi zéro émission a un appétit, a un vent favorable dans les gens
que vous côtoyez, du milieu manufacturier.
C'est une proposition qui nous a été amenée par plusieurs groupes, que nous
affectionnons particulièrement, à
l'opposition, alors je voulais voir si vous aviez une opinion favorable pour
une telle mesure dans le cadre, là, des défis qui nous attendent.
M.
Tetrault (Eric) : À mon avis,
aussi louable que soit l'intention, et c'est une intention très louable... À mon avis, ça va être difficilement
jouable pour la plupart des manufacturiers.
Je parlais d'ArcelorMittal tout à l'heure parce que je la connais bien, j'y ai déjà
oeuvré : une loi zéro émission remet
en question l'investissement futur d'une multinationale au Québec parce que
ça devient beaucoup plus coercitif que d'autres endroits dans le monde. Alors, pour les multinationales, à un moment donné, le choix devient facile à faire. C'est dommage, mais c'est
comme ça. Je ne dis pas que je l'endosse, mais je l'ai vécu comme réalité.
Par contre, lorsqu'on
y va plus doucement, avec certains incitatifs, on a vu l'entreprise, qui, avec
son usine à Port-Cartier, soit dit en passant, a déjà été un des grands pollueurs au Québec,
être l'entreprise au Québec qui faisait preuve du plus d'ingéniosité pour trouver des nouveaux procédés d'efficacité énergétique, si bien qu'ils ont accumulé suffisamment de crédits pour éviter le marché du carbone probablement pour les trois, quatre ou cinq prochaines années. Voilà la façon
de travailler avec l'entreprise,
y aller, je dirais, de manière
suffisamment coercitive pour qu'elle comprenne qu'elle doit faire partie de la solution. Si on devient trop
coercitif, à ce moment-là ce sont les analystes financiers qui s'emparent du
dossier. Là, on le perd, en quelque part, le dossier change de main. Je ne sais
pas si vous voyez ce que je veux dire.
M.
Traversy : Oui, oui. Donc, vous me dites qu'avec des
obligations un peu trop fermes ça manque de souplesse puis ça peut, selon votre avis, là, donc nuire
peut-être, donc, à l'économie ou à la... je m'en allais dire au côté sexy, mais
du moins à l'attirance que certaines entreprises pourraient avoir de venir
s'installer.
M.
Tetrault (Eric) : ...terme exact qui est suffisamment, à mon avis,
prudent et réaliste, ça devient une contrainte à l'investissement.
M. Traversy :
Alors, merci pour votre opinion sur ce point.
Vous
avez parlé aussi beaucoup du Fonds vert, c'est un enjeu sur lequel nous
discutons depuis plusieurs jours, plusieurs semaines. Vous avez une
volonté de transparence dans la façon dont les fonds du... en fait dont
l'argent du Fonds vert est utilisé. Vous
avez des craintes qu'en fin de parcours, dans le fond, le fruit de tous ces
revenus ne soit pas utilisé à bon escient et que, bref, on perde le sens
même, là, de l'objectif que le fonds devait réaliser.
Je
voulais voir avec vous s'il y avait des solutions pour y arriver. Vous nous
dites, bon, plus de transparence, être capable
d'avoir des suivis beaucoup plus serrés, je pense que c'est votre quatrième
recommandation. Par contre, vous n'avez
pas de suggestion concernant l'efficacité des fonds qui sont investis dans les
différents secteurs, bon, qui seront choisis
pour aider à lutter contre les gaz à effet de serre. Pensez-vous qu'en plus de
la transparence il faudrait également des redditions de comptes sur les
retombées et l'efficacité qu'un tel fonds peut apporter?
M. Tetrault
(Eric) : C'est une suggestion qui pourrait se retrouver entre les
lignes.
D'abord,
soyons clairs, je n'ai pas exprimé de crainte, j'incite à la prudence. Je n'ai
pas de raison de penser que ce sera
mal dépensé. Ce que je disais, c'est que, pour les patrons, le lien de
confiance avec l'État est quand même assez ténu, ce n'est pas un lien de confiance qui peut être... je vous dirais,
qui est durable, peu importe ce qu'on fait. La confiance des
entrepreneurs, c'est une chose qu'il faut savoir gagner. Puis je rappelle qu'on
est lourdement taxés puis qu'il y a beaucoup de réglementation au Québec. On
est déjà dans la contrainte, du côté des gens d'affaires.
Ce
que je suggère, en fait, puis je n'ai pas voulu faire de suggestion précise, je
suppose que la conversation va se poursuivre, mais dans chaque
entreprise sérieuse il y a ce qu'on appelle un comité aviseur. C'est important
pour les entrepreneurs de savoir ce qu'on fait avec l'argent, ce sont des gens
qui vivent comme ça dans leur logique, il faut comprendre. Alors, si on devait en arriver, par exemple, à la
création — c'est
une suggestion que je fais — d'un comité aviseur qui se penche sur les meilleures façons d'investir cet argent,
mais qu'on s'entend tous, par contre, sur un horizon commun, cet horizon étant de dépenser cet argent en faveur des
technologies vertes ou qui soutient un virage vers une économie verte, à
ce moment-là, vous allez avoir la collaboration des patrons.
M.
Traversy : Merci pour
ces précisions. Vous avez parlé également beaucoup, là, de la transition vers l'efficacité énergétique pour les petites et moyennes entreprises, ça semble être une préoccupation qui vous touche particulièrement, c'est
ça, pour les plus petits joueurs, là,
donc, de votre association. Quel incitatif ou quel avantage pourrait être mis
en place pour justement
aider ces joueurs à suivre le pas et à être capables, eux aussi, de contribuer,
dans le fond, à l'atteinte des cibles qui nous
intéressent dans le cadre des discussions d'aujourd'hui?
M.
Tetrault (Eric) : En fait,
comme je le disais à M. le ministre, il
s'agit de pouvoir leur permettre financièrement de faire la conversion au départ, quitte à la repayer sur plusieurs
années. À mon avis, les crédits
d'impôt et les programmes gouvernementaux vers la
transition qu'on a eus jusqu'à maintenant sont trop timides, ce ne sont pas des incitatifs
assez robustes pour permettre aux
gens d'affaires d'avoir les moyens de leurs ambitions, si je puis dire. Et,
comme je l'ai dit, c'est un problème de capital souvent, c'est un
problème d'argent.
Alors, il y a
plusieurs entreprises au Québec qui hésitent déjà à s'endetter, par exemple,
pour faire davantage d'innovation, fabriquer
de meilleurs produits puis conquérir de nouveaux marchés. Imaginez-vous s'il faut
s'endetter puis des fois davantage pour ce qui est perçu au départ comme
une contrainte. Ça peut être difficile.
Mais
le dialogue est très possible si on permet aux entrepreneurs de procéder à ces changements-là puis s'ils voient
un gain, évidemment, comme on dit en bon québécois, pour leur business.
M. Traversy :
Puis dernière question, après je laisserai mes collègues...
M.
Tetrault (Eric) : ...en passant, je veux dire, on renégocie
actuellement des ententes parallèles pour l'accord de libre-échange avec l'Europe, on pense même
inclure des clauses de responsabilité sociale d'entreprise. Alors, il y aura
peut-être des choses,
à un moment donné, à faire, du côté des entrepreneurs, qui vont devenir des
obligations, il faudrait que le
Québec soit dans une position où on met l'entrepreneur confortable face à ces
nouveaux marchés là. À un moment donné, il va falloir y penser.
M.
Traversy : Le message est entendu. Puis en terminant je voulais
simplement vous demander, parce que vous avez discuté avec le ministre tout à l'heure : Est-ce que, pour
vous, la sensibilisation qui est faite présentement aux acteurs des... au niveau de la population mais aussi des
entreprises est problématique ou déficiente? Est-ce que c'est ce que je comprends un peu à lueur des échanges, qu'elle
pourrait être davantage améliorée et que ce serait une priorité intéressante
pour votre association?
M. Tetrault
(Eric) : Bien, trois choses.
D'abord, de façon
générale, les entrepreneurs comme les gens dans la population comprennent très
bien que l'environnement est sur l'agenda du
gouvernement et, comme on dit, un des premiers items à l'agenda. On s'en rend
compte à tous les jours, on le voit bien.
Les gens voient bien
qu'il y a nécessité également, pour l'avenir, de procéder à ces changements-là
et ils sont heureux de voir la position de
leadership qu'occupe le gouvernement, je dirais qu'en général la perception est
très positive, mais ce sont les... tu
sais, comme on dit, «the proof is in the pudding», ce sont les détails qui
tuent. Et les gens ne savent pas qu'on
va récolter de l'argent avec ça, ils n'ont aucune idée comment fonctionne le
marché du carbone, certains entrepreneurs
nous posent des questions là-dessus. Alors, il y a énormément de pédagogie à
faire au départ pour mieux comprendre...
Le Président (M.
Reid) : Merci. Je dois vous interrompre...
M.
Tetrault (Eric) : ...l'agenda du gouvernement puis éventuellement
s'assurer de la participation des entrepreneurs avec des opportunités...
Le Président (M.
Reid) : Je dois vous interrompre parce qu'il faut que je
protège le temps réservé aux autres groupes d'opposition.
M. Tetrault
(Eric) : Je m'excuse. Je m'excuse, M. le Président.
Le Président (M.
Reid) : M. le député de Masson, pour le deuxième groupe
d'opposition.
M.
Lemay : Merci, M. le Président. Merci d'être avec nous aujourd'hui.
Vous savez, quand on vous écoute et puis on lit votre mémoire, dans le fond, vous avez des inquiétudes à savoir
ça va être quoi, l'utilisation du Fonds vert, puis vous voulez vous assurer que ça va revenir dans
l'économie pour stimuler l'innovation puis aider nos exportateurs et nos
manufacturiers. Ça, c'est très bien.
Moi,
j'ai une question pour vous. Si je regarde l'électrification des transports, le
420 millions qui a été annoncé, là,
d'ici 2020, là-dessus il y a une somme qui a été allouée pour soutenir la
commercialisation et l'exportation des produits novateurs, puis cette somme-là, c'est 4 750 000 $ sur le
total de l'enveloppe, là, qui est à peu près 1,1 % de l'enveloppe. Est-ce que, selon vous, là, ça voudrait dire, dans
le fond, que c'est trop peu, tu sais, pour... qui revient aux manufacturiers
et exportateurs?
• (16 h 20) •
M.
Tetrault (Eric) : Bien oui, c'est évident. Mais en même temps il ne
s'agit que d'un programme. Là, on parle d'une bourse du carbone qui devrait aller chercher quelque chose comme
3,3 milliards, on parle de sommes beaucoup plus imposantes, puis surtout on a le temps de le définir à partir de
maintenant. Je ne pense pas que l'électrification des transports, pour
les manufacturiers en général, au Québec, ça ait été vu comme des opportunités
d'affaires jusqu'à maintenant. Je pense que
ça a été plus perçu comme étant une volonté gouvernementale et que ça fait
partie de l'agenda du gouvernement,
mais ça n'a pas été vu comme un marché possible pour les entrepreneurs. Je prends exemple de ce qui a été annoncé, ce qui a été promis par ce qui est maintenant
le nouveau gouvernement en place à Ottawa pendant la campagne électorale. Le programme d'infrastructure
n'a pas été nécessairement vu comme une opportunité d'affaires pour les entrepreneurs, mais ils ont promis 300 millions pour l'innovation et la conversion dans les technologies vertes, et ça, les entrepreneurs l'ont très bien compris parce
que c'était extrêmement clair, c'était nommé comme tel, et l'ensemble du programme
s'adresse à eux.
Peut-être
qu'au sein du Fonds vert, au sein d'une enveloppe de 3,3 milliards, la solution est peut-être de dédier une enveloppe à ça et de faire la pédagogie, comme je dis
depuis le début, autour de ça. Là, ils vont comprendre ce qui est réservé pour eux puis ils vont comprendre que
ça, c'est pour développer le marché. Au sein d'un grand programme,
au sein, je dirais, d'une grande politique gouvernementale, c'est toujours plus
dur à décortiquer, malheureusement.
M.
Lemay : Bien, vous savez,
quand on regarde le PACC, là, 2013‑2020,
là, on regarde dans les mesures, là,
c'est 130,5 millions qui... pour soutenir l'innovation, la recherche et le développement, la démonstration et la commercialisation de technologies visant la réduction des émissions de GES. Ça
veut-u dire que le... Sur le 3,3 milliards,
est-ce que vous pensez que le 130 millions devrait être bonifié, au
Québec, à ce moment-là?
M. Tetrault (Eric) :
Bien, moi, je prends pour acquis que, le 3,3 milliards n'étant pas dépensé
jusqu'à maintenant, on a le temps
d'avoir une conversation là-dessus. Alors, on prête plus ou moins d'attention
aux chiffres pour l'instant.
M. Lemay : Parfait. Puis, dans votre
mémoire... Il me reste encore au moins une minute, là?
Le Président (M. Reid) : Oui,
oui, deux minutes.
M.
Lemay : O.K., parfait. Vous dites, dans le fond, que l'effort qu'il
nous reste à faire d'ici 2030, là, c'est 29,5 %, vous l'avez mis à peu près à 2 % par année,
puis vous dites que, dans le fond, dans le contexte actuel, il n'y a même pas
ça dans l'inflation, tout le kit, tu
sais, c'est un peu difficile à atteindre. Mais, si on regarde... Je reviens
toujours au document de consultation,
où c'est que le ministère nous annonce qu'il y a des plans de réduction pour
15 mégatonnes au Québec, puis la
balance va se faire sur le marché du carbone. Ça veut dire, si on enlève, là,
le 9,8 mégatonnes qu'on achèterait à l'extérieur, là, dans le fond, on enlève un 11,8 %, ça fait que ça
veut dire que c'est... mettons on le met à 17,7 % sur les 17 ans qu'il reste, là, ça veut dire c'est
1 % par année, c'est moins que ce que... Est-ce que ça vous... Tu sais,
est-ce qu'on peut le voir de même
puis dire : Bon, si on fait un effort de 1 %, c'est quand même
acceptable, puis, la balance, on va sur le marché du carbone?
M.
Tetrault (Eric) : Moi, je ne vois pas pourquoi on ne serait pas aussi
ambitieux que le gouvernement puis que les
autres gouvernements dans le monde. Je pense que la chose est réalisable. Je ne
sais pas si j'ai les bonnes méthodes de
calcul, mais j'ai calculé 8 % par rapport à 1990. Si on veut atteindre
37,5 % en 2030 par rapport à 1990, bien 37,5 % moins 8 %, pour moi, ça fait 29,5 %. Je
l'ai utilisé comme exemple parce que, les entrepreneurs étant des gens de
chiffres, ils vont vous dire tout de
suite qu'on a des cibles qui sont plus ambitieuses que notre taux de croissance
en ce moment, donc c'est clair que ça va être vu comme un grand effort à
faire pour eux.
M.
Lemay : Parce que, tu sais, dans le fond, on fait un effort au Québec,
mais, la balance, on va sur le marché du
carbone, ça fait que ça veut dire, dans le fond, qu'on fait... tu sais, on fait
de l'évasion, là, tu sais, on envoie nos capitaux à l'extérieur. Donc, la question qui se pose,
c'est : On veut-u vraiment faire ça ou on veut plutôt stimuler localement
puis aider nos entreprises?
M.
Tetrault (Eric) : Je ne vois pas pourquoi on ferait une chose aux
dépens de l'autre. Je veux dire, l'environnement, pour moi, ça n'a pas de frontières, puis les
entrepreneurs, ce sont des gens qui n'ont pas beaucoup de frontières non plus.
Il s'agit de... On s'entend tous pour faire
des efforts pour sauver la planète, comme on dit, alors pourquoi ne pas y aller
avec ça?
M. Lemay : Excellent. Merci
beaucoup.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Nous passons au bloc réservé aux
députés indépendants. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Massé : Alors, merci, M. le
Président. Merci. Bonjour.
Je continue
là-dessus, l'environnement n'a pas de frontières. Vous disiez un petit peu plus
tôt qu'il vous arrive d'être en
discussion sur des accords de libre-échange. Une des choses qu'on observe dans
les dernières années, c'est que, dans
les négociations de nos accords de libre-échange, on se retrouve à mettre des
contraintes qui font en sorte que les États comme le Québec qui
souhaitent aller de l'avant se retrouvent par après poursuivis par les
entreprises privées. Qu'est-ce que vous avez à me dire là-dessus? Parce que je
veux bien qu'on l'atteigne, je veux bien qu'on se dise : Investissez de l'argent, on va se transformer, na,
na, na, mais, en bout de ligne, si d'une main on se dit ça puis de l'autre main
on signe des accords de libre-échange qui
nous attachent la démocratie jusqu'à nous étouffer... Comment qu'on fait ça,
là?
M.
Tetrault (Eric) : Vous savez, les accords de libre-échange, d'abord,
ce sont des textes qui ne sont pas connus. Il faut s'entendre sur une chose, le Partenariat transpacifique est un
accord de principe. J'espère que je ne vous dévoile pas de scoop
aujourd'hui.
Mais je vais
être bien franc avec vous, M. le Président, je n'ai pas pu lire les textes,
puis il y a bien des gens qui sont
dans des postes de décision ou qui représentent des gens d'affaires comme moi
qui n'ont pas pu avoir accès aux textes actuellement parce qu'on est en train de les réviser, il y aura une
traduction qui va être nécessaire, puis ensuite ce sera le tour des
avocats. Moi, j'ai compris que je ne verrai pas les textes avant l'an prochain.
Mais de plus en plus...
Mme Massé : ...avant nous, les
parlementaires.
M.
Tetrault (Eric) : Je ne sais pas. Non, je ne crois pas, enfin, je ne
le souhaite pas non plus. Ce sont des textes qui doivent être, à mon avis, livrés à un bon débat collectif, on ne
veut pas signer des choses juste pour le plaisir de les signer.
Mais
ce que je peux vous dire, c'est que de plus en plus on inclut dans les
négociations des obligations environnementales envers les entreprises qui vont
faire partie du marché. Il ne faudrait surtout pas, parce qu'on signe des
ententes de libre-échange, en arriver à un
point où le Québec serait obligé de perdre un peu d'ambition parce qu'il a pris
du leadership dans la question. Nous, on ne supporterait
pas ça nécessairement. Et, si notre avis était demandé, ce qui n'est pas le cas, mais, si notre avis était demandé, et
probablement qu'en quelque part dans le processus il va l'être, nous allons
être assez fermes sur ces questions-là, tout
simplement parce qu'on ne veut pas désavantager les entreprises québécoises
face aux entreprises qui se retrouvent
ailleurs dans le monde. Une chance qu'on a l'Ontario dans le marché du carbone
parce qu'on était déjà dans une situation où
il y avait davantage de contraintes au Québec. Nous, on a applaudi lorsque
l'Ontario a rejoint le marché du carbone parce
que, pour nos entreprises, ça voulait dire qu'on peut être concurrentiels
avec notre marché naturel.
Mme Massé :
Bien, c'est parce que...
Le Président (M.
Reid) : Un court commentaire.
Mme Massé :
Bon, on pourra s'en reparler.
M. Tetrault
(Eric) : Bien sûr, bien sûr.
Le Président (M.
Reid) : Alors, Mme Proulx, M. Tetrault, merci de
votre contribution aux travaux de notre commission.
La
commission suspend ses travaux quelques instants, le temps de permettre à nos
prochains invités de prendre place.
(Suspension de la séance à
16 h 27)
(Reprise à 16 h 29)
Le
Président (M. Reid) :
Alors, nous reprenons nos travaux. Je souhaite la bienvenue maintenant
aux représentants du Regroupement des
organismes de bassins versants du Québec. Vous connaissez, vous avez l'habitude, là :
10 minutes pour faire votre
présentation, par la suite nous aurons une période d'échange. Je vous
demanderais de vous présenter et présenter la personne qui vous
accompagne pour les fins de l'enregistrement. Vous avez la parole.
Regroupement des organismes de bassins
versants du Québec (ROBVQ)
Mme
Leclerc (Marie-Claude) : Mmes et MM. les commissaires, tout
d'abord, je vous remercie de permettre au
Regroupement des organismes de bassins versants du Québec de présenter son
mémoire sur la cible de GES 2030. Je suis
accompagnée de M. Jean-Paul Raîche, premier vice-président du ROBVQ,
président du COGESAF et professeur associé
à l'Université de Sherbrooke. M. Raîche est docteur en philosophie de
l'environnement et d'écologie politique. Quant à moi, je suis Marie-Claude Leclerc, directrice générale du ROBVQ
depuis 10 ans, titulaire d'une maîtrise en analyse des politiques
publiques.
• (16 h 30) •
Ce
mémoire est le fruit d'une concertation auprès de notre réseau des organismes
de bassin versant, les OBV, et représente
notre position concertée. Vous avez en votre possession notre mémoire, aussi je
vais me permettre de souligner les recommandations qui nous tiennent particulièrement
à coeur et d'en préciser le contexte.
Donc, nous comprenons
que le Québec souhaite présenter sa cible de réduction de GES dans le cadre de
la 21e Conférence des parties de la Convention-cadre des Nations unies sur
les changements climatiques de 2015. Cette rencontre
devrait permettre de conclure un nouvel accord international sur le climat,
applicable à tous les États, afin de maintenir
le réchauffement mondial en deçà de 2 °C. Lors de cet événement, le Pérou,
appuyé par la France, prépare une journée
sur le thème de résilience, eau et adaptation aux changements climatiques qui
se tiendra le 2 décembre. La conclusion de cette journée est l'endossement politique des engagements pour
l'adaptation et le renforcement des capacités de résilience aux
changements climatiques dans les bassins versants et la signature du pacte de
Paris. Ce pacte est un engagement à prendre des actions concrètes et assurer un
suivi lors des prochains événements internationaux dans le domaine de l'adaptation et de la résilience aux changements
climatiques. Le ROBVQ et plusieurs OBV sont signataires de ce pacte comme de nombreux autres intervenants de partout
dans le monde, dont plusieurs États. Nous vous invitons d'ailleurs à
signer ce pacte.
Notre mémoire a donc
été rédigé avec cela en tête que la réduction de nos émissions de GES n'est
qu'un des éléments à présenter lors de la
COP21. Les conséquences des changements climatiques sur les petits et grands
cycles de l'eau, sur la sécurité et
sur la santé de la population sont largement documentées, aussi, plutôt que de
vous présenter ces éléments connus et
acceptés largement, nous proposons plutôt des éléments pour prendre en
considération ces conséquences par les collectivités.
En ce qui concerne la
cible de réduction, le ROBVQ est heureux de voir que le Québec est prêt à
s'engager internationalement, pour la
réduction de ses émissions de gaz à effet de serre pour 2030, de 37,5 %
moins élevé qu'en 1990 et félicite le gouvernement pour la qualité du
document de consultation.
Cependant, le ROBVQ invite plutôt le
gouvernement à visiter... à viser, pardon, l'atteinte de la cible de 40 %
minimum proposée par le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du
climat, et ce, afin de réussir à atteindre la cible de 2050. Le ROBVQ se rallie à l'avis du RNCREQ et de
la FTQ à l'effet que le Québec devrait limiter le recours à l'achat des
crédits carbone à l'étranger. Le ROBVQ est favorable au marché du carbone mais
invite le gouvernement à mettre en oeuvre un
maximum d'actions de son PACC afin d'atteindre sa cible élégamment plutôt qu'en
ayant recours à un outil économique qui demande moins d'efforts.
Plusieurs
éléments proposés pour réduire les émissions de GES nous semblent justes et
appropriés, notamment en transport et
en aménagement du territoire. Cependant, au moment même où nous participons à
cette consultation sur la réduction
des GES, des décisions sont prises, donc nous interrogeons la cohérence — le projet de transport de 400 millions
de barils de pétrole annuellement d'Énergie
Est, la permission de détruire un milieu humide à Laval qui a été donnée sans
compensation en septembre, l'exploration des hydrocarbures à Anticosti. C'est
pour développer une cohérence que le ROBVQ
invite le gouvernement à adopter une politique nationale d'aménagement du
territoire et de l'urbanisme. Nous vous référons à l'alliance Ariane.
D'autre part,
toujours dans les mesures de réduction des GES, plusieurs mesures concrètes
pour l'eau pourraient être
entreprises, comme la conservation, la restauration et la création des milieux
humides qui agissent comme puits de carbone,
sans considérer le rôle important en adaptation. C'est pourquoi le ROBVQ
rappelle gentiment au gouvernement la nécessité d'adopter rapidement une
loi sur les milieux humides.
D'autres
mesures de réduction des GES qui ne concernent pas l'eau sont proposées dans
notre mémoire. Un exemple parmi eux, la réduction des besoins en
transport, nous semble une avenue intéressante en assurant le déploiement de réseaux de télécommunications fiables et efficaces
partout au Québec pour la formation à distance, les webinaires, des
rencontres, etc.
Tel que
mentionné précédemment, pour le ROBVQ, la COP21 est aussi l'occasion de
présenter non seulement notre cible
de réduction des GES, mais également, et comme plusieurs autres pays, les
orientations d'un plan d'adaptation et
de résilience aux changements climatiques. Dans son document de consultation,
le gouvernement semble très enthousiaste quant à la rapidité qu'auront pour effet les changements de comportement
et d'habitudes sur la réduction des gaz à effet de serre. Le ROBVQ ne partage pas cet enthousiasme et se range plutôt du
point de vue de l'ONU à ce sujet. Dans un rapport, l'ONU stipule que les tentatives pour atténuer les effets des
changements climatiques ont commencé mais que leur action est trop lente pour produire des résultats rapidement. Il
est donc à la fois urgent et plus efficace sur le plan des coûts de
commencer à s'adapter dès maintenant.
Au-delà de l'hydraulicité, des crues
printanières et des pluies torrentielles, des problématiques d'étiage et de l'augmentation de la température, on doit d'abord
et avant tout comprendre et outiller les collectivités du Québec afin de développer leur capacité de résilience face à
ces situations. Elles doivent aujourd'hui être en mesure d'agir concrètement
et promptement, et ce, malgré le contexte
d'incertitude quant aux impacts précis du changement climatique pour eux. C'est
pourquoi le ROBVQ demande que le plan
gouvernemental permette non seulement l'adaptation aux changements climatiques,
mais également le renforcement de la résilience des collectivités.
Concernant le financement des plans, donc,
présentement le Fonds vert recueille entre autres les revenus du marché du carbone, dont l'utilisation est prévue
pour financer le PACC deux. 93 %
des actions de ce PACC concernent la lutte aux changements climatiques.
Le ROBVQ recommande au gouvernement de financer également et de façon
importante un plan d'adaptation et de résilience aux changements climatiques à
même le Fonds vert.
Le ROBVQ
rejoint l'avis de l'avis de la FTQ concernant le remboursement de la dette qui
nuit à l'environnement. Le Fonds des
générations, qui vise à réduire la dette fiscale des Québécois, devrait être
mis à contribution, car un déficit environnemental se traduira
nécessairement par des impacts importants sur l'économie et les conditions de
vie des générations futures. C'est pourquoi
le ROBVQ recommande qu'un pourcentage à définir du Fonds des générations soit
versé pour le financement des actions du plan d'action sur les changements
climatiques et du plan d'adaptation et de résilience aux changements
climatiques.
Le ROBVQ
recommande également de créer rapidement des programmes de lutte, d'adaptation
et de résilience aux changements
climatiques de façon à financer dès maintenant les actions définies dans ces
plans. Nous recommandons en particulier de renouveler le programme Climat
municipalités du MAMOT. Ce programme devrait également financer non seulement l'élaboration, mais aussi la mise en
oeuvre des actions des plans d'action, de lutte et des plans d'adaptation
et de résilience aux changements climatiques des municipalités.
Une alliance
pour l'adaptation aux changements climatiques. Le ROBVQ travaille à la création
d'une alliance sur l'adaptation et la
résilience aux changements climatiques qui aurait pour objet de faire émerger
et consolider des mesures d'adaptation de tous les secteurs d'activité
pour contrer les impacts des changements climatiques dans une économie résiliente et équitable et un environnement
propice à la santé des populations et des écosystèmes. Une telle alliance
aurait entre autres pour mandat d'assurer une veille sur les mesures
d'adaptation et de résilience aux niveaux international, régional et local, de favoriser l'échange
d'expertise et de bonnes pratiques, d'accompagner des projets et des opérations
à caractère novateur et expérimental. Le
ROBVQ fait actuellement le démarchage auprès d'organismes afin de créer cette
alliance dont l'arrimage avec le plan
d'adaptation et de résilience aux changements climatiques est primordial. Le
ROBVQ souhaite l'appui du gouvernement dans la création de cette
alliance pour l'adaptation et la résilience.
L'évaluation
environnementale stratégique et l'adaptation aux changements climatiques. Le
PACC un a permis l'acquisition de
connaissances importantes dans les domaines hydrique et climatique, entre
autres. Cependant, il serait pertinent
d'utiliser l'évaluation environnementale et stratégique pour combler les
lacunes d'information sur l'eau et les changements
climatiques, notamment en ce qui concerne la gestion des barrages, les
inondations, les eaux souterraines et tous les aspects sociaux
nécessaires pour développer les capacités de résilience et d'adaptation des
collectivités. Le ROBVQ recommande donc au gouvernement de réaliser une série
d'études dans le cadre d'une EES sur l'eau et les changements climatiques qui permettrait de faire le point sur la
situation et d'éviter les problèmes de cohérence dans les décisions
gouvernementales soulevées précédemment. Les EES sont utilisées dans plusieurs
pays afin de tenir compte des
changements climatiques sur l'eau, comme au Vietnam et en France. L'EES partage
de nombreuses caractéristiques avec
la gestion intégrée des ressources en eau comme l'intégration des
considérations environnementales et sociales dans les décisions multisectorielles, le suivi et l'évaluation des
résultats et les approches participatives. L'évaluation environnementale
stratégique peut donc appuyer la gestion de l'eau tout en tenant compte des
changements climatiques.
Au Québec, la
mise en oeuvre de la gestion intégrée des ressources en eau a été
confiée aux organismes de bassin versant
que nous représentons, les OBV. C'est donc dire que les OBV pourraient jouer un
rôle crucial dans l'adaptation aux changements climatiques pour les
usages de l'eau au sens large. Étant donné que l'adaptation aux changements
climatiques est une responsabilité non seulement du secteur de l'eau, mais
aussi des divers autres secteurs apparents, l'EES
est un véhicule qui peut aider à mettre en oeuvre les principes de la gestion
intégrée des ressources en eau. Il y a tout intérêt à réfléchir plus avant à la valeur ajoutée que pourrait apporter
la combinaison de la gestion intégrée des ressources en eau et de l'évaluation environnementale
stratégique lorsqu'on travaille à la mise en oeuvre de l'adaptation aux
changements climatiques, nous dit l'ONU. Le ROBVQ recommande d'inclure
la démarche de la boîte à outils pour l'intégration
de la variabilité climatique dans les plans directeurs de l'eau des OBV. Confier
ce mandat et les ressources appropriées permettrait d'obtenir un
portrait de la vulnérabilité des collectivités.
En
conclusion, cette consultation est, pour le ROBVQ, une première étape menant à
d'autres échanges concertés sur les
moyens à mettre en oeuvre afin d'atteindre cette cible de réduction de
40 % en deçà de 1990, et d'adapter nos usages de l'eau, et de renforcer la résilience des
collectivités aux changements climatiques. Le ROBVQ souhaite poursuivre sa
collaboration avec le gouvernement à ce sujet. Je vous remercie de votre
attention.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Nous allons passer maintenant à la
période d'échange. Du côté gouvernemental, M. le ministre, vous avez la
parole.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Leclerc. Bonjour,
M. Raîche. C'est toujours un plaisir de vous revoir. Merci pour
votre présentation ainsi que votre mémoire.
Est-ce que
j'ai bien compris que vous avez affirmé, Mme Leclerc, que nous n'avions
pas, au gouvernement, une stratégie d'adaptation à la lutte contre les
changements climatiques?
Mme Leclerc (Marie-Claude) : Non, ce
n'est pas ça que j'ai dit.
M. Heurtel : O.K. Pouvez-vous
préciser votre pensée, s'il vous plaît? Parce que c'est ça que j'ai compris.
Mme Leclerc (Marie-Claude) : Est-ce
que tu veux y aller, Jean-Paul?
M. Raîche
(Jean-Paul) : Oui, si vous me permettez. Non, on connaît la stratégie,
la stratégie a été adoptée en même temps que le PACC deux...
M. Heurtel : Bien, c'est une mesure
du PACC. C'est plusieurs mesures, d'ailleurs, du PACC.
• (16 h 40) •
M. Raîche
(Jean-Paul) : C'est ça. Sauf que, les actions, il n'y a pas un plan
d'adaptation. Il y a un plan de changements
climatiques, et 93 % du plan porte sur la lutte aux changements
climatiques, puis il y a un 7 % qui porte sur l'adaptation aux changements climatiques. Donc, la réalisation de la
stratégie se fait par les dernières priorités du plan, et ça représente
à peu près 7 % du budget qui a été alloué.
M. Heurtel : Bon, O.K.
M. Raîche
(Jean-Paul) : On est conscients qu'il y a une stratégie puis on est
conscients qu'il y a quelques actions qui
sont reliées à l'adaptation. Cependant, la majorité des actions, ce sont des
actions d'acquisition de connaissances surtout.
M. Heurtel : O.K., bon, je n'ai pas
le temps de faire le débat plus longtemps, mais disons que...
Une voix : ...
M. Heurtel : Pardon?
M. Raîche (Jean-Paul) : On peut vous
citer le document qui a été produit par le...
M. Heurtel : Moi aussi, moi aussi.
M. Raîche (Jean-Paul) : D'accord.
M. Heurtel : J'aimerais revenir,
bon, particulièrement aux bassins versants et plus particulièrement pour l'atteinte tant de la cible 2020 que celle de
2030, que celle de 2050. On convient qu'on doit considérer les bassins versants,
les milieux humides comme étant, justement, des actifs à développer davantage
parce qu'ils contribuent à réduire nos émissions. Qu'est-ce qu'on devrait faire d'abord
au niveau de la sensibilisation? Parce que je crois que c'est méconnu, ce fait-là. Alors, de votre côté... Parce que vous
êtes très actifs dans le domaine, mais, veux veux pas, force est de constater
que la question des bassins versants, les
milieux humides puis leur contribution à la lutte contre les changements
climatiques, ce n'est pas connu. Et
donc j'aimerais ça voir, de votre côté, qu'est-ce que vous proposez de faire
davantage pour mieux sensibiliser
puis qu'est-ce qu'on peut faire, nous, comme gouvernement, pour mieux faire un
travail de sensibilisation dans ce domaine-là.
M. Raîche
(Jean-Paul) : Vous comprendrez que la question, elle est assez vaste.
Les OBV font un travail avec les
différents acteurs du territoire, donc avec les municipalités, avec les
agriculteurs, les forestiers. On fait ce travail de sensibilisation par
le truchement de nos PDE, de nos plans directeurs de l'eau. On n'a pas, je vous
dirais... on n'a pas les moyens actuellement de faire une sensibilisation grand
public, dans ce contexte-là, mais quand même, auprès des principaux décideurs,
on le fait. Quand je parle de milieux humides avec l'ensemble des associations
forestières, par exemple, qui siègent...
Parce que les associations forestières siègent sur les OBV. Alors, à ce
moment-là, on les rencontre; indirectement, de cette façon-là, on les
sensibilise.
Donc, ça,
cette dimension-là, il y a un travail qui se fait par l'ensemble des organismes
de bassin versant quand ils font la
promotion de leurs plans directeurs de l'eau, et c'est d'ailleurs un des
éléments de leur mission, fixé par la loi, de faire la promotion des actions auprès des acteurs. Ça, c'est un élément
important. Mais on n'a pas les moyens actuellement pour faire une
sensibilisation à grande échelle auprès de l'ensemble du public.
Sauf que vous l'avez remarqué avec les
déversements à Montréal. Quand il y a un élément symbolique qui se présente, bien là, la sensibilisation, les gens
sont plus à l'écoute, alors à ce moment-là il se fait... il y a une
sensibilisation indirecte. Puis ça a été
le cas, entre autres, avec la situation des lacs avec les cyanobactéries. Ça
fait qu'actuellement, par rapport aux
milieux humides, on n'a pas ce symbole important, cette situation qui
permettrait de conscientiser davantage.
Mme
Leclerc (Marie-Claude) : Peut-être si je peux compléter... Tout à
l'heure, vous parliez aussi du rôle que vous pouvez jouer et que nous, nous pouvons jouer. Lors de notre mémoire
sur la LQE, on parlait d'avoir une cartographie détaillée du Québec concernant les milieux humides. Déjà de savoir où
ils sont, ça peut aussi aider à la sensibilisation, parce que déjà, si on sait où est un milieu
humide, on est plus portés à pouvoir en prendre soin, à pouvoir faire attention,
versus si on ne sait pas ce qu'est un milieu
humide. Donc, déjà, d'avoir une cartographie détaillée d'où sont nos milieux
humides, les milieux humides d'intérêt, etc., permettrait de pouvoir réaliser
une partie de ça.
M. Raîche
(Jean-Paul) : À cet effet-là, s'il y avait... Il n'y a pas de budget
actuellement. Nous, on travaille dans l'Estrie
avec Canards illimités, je rencontre les préfets et les maires pour réussir à
avoir un financement de leur part. C'est difficile parce qu'ils nous
disent : Nos priorités, dans le contexte budgétaire actuellement, n'est
pas d'élaborer cette cartographie. Et la
première question qu'ils me posent, c'est : À quoi va me servir d'avoir
cette cartographie-là, surtout que
peut-être que ça ne me serait pas utile de l'avoir? Alors, vous voyez, déjà là
il y a... C'est toujours une question de financement.
M.
Heurtel : Donc, le seul obstacle que vous voyez à la sensibilisation,
c'est de l'argent. Il n'y a rien d'autre, il n'y a pas d'autre moyen à
adopter, tous les moyens existent, c'est juste de l'argent qui manque.
M. Raîche (Jean-Paul) : ...des
programmes d'abord.
M. Heurtel : Quel genre de
programme?
M. Raîche
(Jean-Paul) : Bien, des programmes... Si on prend, par exemple, au
niveau du ministère de l'Éducation, il pourrait y avoir des programmes
de sensibilisation, éducation par rapport à l'environnement, et ces
programmes-là n'existent pas. À
l'intérieur des institutions scolaires, il existe des programmes permettant cette information-là, mais ça
n'existe pas pour aider des organismes
bénévoles, justement, à faire ce travail de sensibilisation et d'éducation parce
que ça ne fait pas partie de la mission directe du ministère de
l'Éducation et des institutions scolaires.
M.
Heurtel : Avez-vous calculé
la contribution en
termes de séquestration de carbone, justement,
des milieux humides, des tourbières, tout ça? Est-ce que vous avez fait
cet exercice-là?
M. Raîche (Jean-Paul) : Non.
M.
Heurtel : Quels seraient, de
l'autre côté, les... Quels seraient les genres d'incitatif? Si
on regarde d'un côté d'écofiscalité, avez-vous réfléchi au niveau des incitatifs qu'on pourrait mettre
en place pour justement
favoriser, tant auprès des municipalités, des propriétaires privés... des incitatifs pour
justement favoriser la conservation puis peut-être même le développement des milieux
humides?
M. Raîche
(Jean-Paul) : Si je prends
le point de vue actuellement des agriculteurs et des forestiers, c'est qu'eux
disent : Si on protège ces milieux-là,
on aimerait être financés pour le faire, c'est un bien-être
collectif. Alors, ça, ça revient régulièrement. On peut toujours mentionner l'idée de ce qui existe actuellement au niveau agricole pour financer, cependant les montants sont peu élevés et ne
permettraient pas de financer les agriculteurs pour cette protection-là directement.
Il y a aussi des moyens financiers au niveau de la
réduction de taxes, des éléments semblables pour cette clientèle en particulier,
agricole et forestier.
Puis comme on l'a déjà mentionné puis... Le
rapport Pellerin que vous avez demandé indique très bien que la majorité
des agriculteurs, des forestiers ne font pas de demande de certificat
d'autorisation par rapport aux milieux humides. On intervient, mais
pas de demande.
Puis en plus
de cela on ne sait pas, comme Marie-Claude l'a dit tout à l'heure, on ne sait même pas où ils sont situés, et cette cartographie-là, pour nous, elle est fondamentale. On sent, nous, le besoin des OBV, les aménagistes sentent le besoin, mais ça ne veut pas dire que les élus municipaux
en sentent le besoin, de cette cartographie-là, surtout s'ils ont à la
financer.
Et, en
passant, pour couvrir l'ensemble de l'Estrie, pour la cartographie de l'ensemble
de l'Estrie, c'est 700 000 $.
Ce n'est peut-être pas beaucoup par
municipalité, mais c'est quand même un montant appréciable. Et, dans ce cas-là,
on compte sur le fédéral à 50 % avec leur programme.
M. Heurtel : Merci. Merci, M. le
Président.
Le Président
(M. Reid) : Ça va? Alors, nous passons à l'opposition
officielle avec M. le député de Terrebonne.
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, j'aimerais
remercier, évidemment, nos intervenants qui sont avec nous aujourd'hui, M. Raîche, Mme Leclerc. On se
croise quand même assez souvent, là, ces temps-ci, là, à force d'inviter les gens à venir en commission, alors
j'imagine que vous connaissez la formule, depuis tout ce temps. J'aimerais
donc commencer dès maintenant avec une question assez simple.
Vous avez parlé, tout à l'heure, de 93 % du
PACC qui était, dans le fond, utilisé pour le volet changements climatiques, seulement 7 % pour l'adaptation.
J'ai senti une hésitation dans votre dialogue avec le ministre, j'aimerais
éclaircir ça avec vous tout de suite.
Pourquoi, selon vous, 7 %, ce n'est pas suffisant dans le cadre du plan
qui a été mis en place?
• (16 h 50) •
M. Raîche
(Jean-Paul) : D'abord, les actions qui sont mises en place, comme je
disais tout à l'heure, c'est des actions
d'acquisition de connaissances. On parlait tout à l'heure, entre autres, de
renouveler Climat municipalités. Climat municipalités, c'était pour rédiger des plans, on a engagé des firmes,
entre autres, pour rédiger ces plans-là, mais il n'y avait pas de somme qui devait être allouée pour la mise
en oeuvre des actions de ces plans-là. Ça, c'était clair, c'était même
indiqué à l'époque dans le document de Climat municipalités. Alors, ce n'est
pas suffisant.
Puis en même
temps, écoutez, juste en adaptation, si on se fie aux documents de l'ONU, c'est
au-delà de 85 milliards qu'il
faudrait mettre, dans certains cas, pour juste l'adaptation, pour qu'on ne vive
pas des conditions... Parce qu'il faut s'entendre. On est d'accord avec
la réduction, ça, c'est bien important, parce que la réduction va faire qu'il va y avoir moins de conséquences, mais il n'y a
malheureusement pas de mur qui empêche la situation des tempêtes au Québec, et, à ce moment-là, on va devoir vivre
nécessairement les conséquences des changements climatiques. Et, ces
conséquences-là, il faut aussi les prendre en considération pour aller vers
l'adaptation.
Alors, si on
regarde actuellement les actions qui sont... 70 millions à peu près qu'il
y a eu dans les plans, ça a l'air énorme,
70 millions, là, mais on n'est pas dans les milliards. Alors, dans ce
cadre-là, le budget étant limité, centré sur les actions et
connaissances, il est temps qu'on passe à des actions concrètes, beaucoup plus
concrètes d'adaptation.
Et à ce moment-là, écoutez, je peux vous donner
des exemples. Dans le milieu municipal, la gestion des eaux pluviales, juste la gestion des eaux pluviales...
Puis, en passant, si on faisait une meilleure gestion des eaux pluviales puis
en même temps une sensibilisation — on
la fait actuellement sur la consommation d'eau potable — bien
on éviterait une petite partie des surverses. C'est des mesures
d'adaptation.
Les bassins
de rétention, ils jouent un rôle, mais, si on aménageait les milieux humides et
on les conservait, mais les milieux humides joueraient un rôle sur le
bassin versant qui ferait que... puis même dans les municipalités, qui ferait qu'il y aurait moins de conséquences aussi
sur les surverses puis on ferait moins de bassins de rétention. Vous voyez,
ça, c'est de l'adaptation, mais c'est des budgets importants.
M.
Traversy : Si je comprends bien, ce que vous êtes en train de
nous dire, c'est que, bon, évidemment, la lutte aux changements climatiques est très importante, mais qu'il ne faut pas
oublier non plus que, pendant qu'on fait cette lutte aux changements climatiques, il y a quand même des
réalités auxquelles il faut faire face puis il y a des infrastructures ou il y a des installations qu'il faudrait
adapter, là, davantage pour mieux correspondre à la réalité d'aujourd'hui, de
2015. Est-ce que j'ai bien compris?
Mme
Leclerc (Marie-Claude) : Oui, tout à fait. Il y a cet élément-là par
rapport à l'adaptation, mais il y a aussi tout l'élément résilience qui est très important aussi, donc d'aller... — il y a un mot qui va là, là — de faire en sorte que les
collectivités puissent se prendre en charge lorsqu'il arrive des
événements x, donc d'avoir la capacité de faire de la veille par rapport,
par exemple, aux inondations, quand ça s'en vient, de pouvoir savoir, dans une
rue, qui sont les personnes à mobilité
réduite, combien il y a de jeunes enfants, pour faire en sorte, si on doit
avoir un plan d'évacuation, qu'on le
mette en oeuvre mais qu'on n'oublie personne dans un fond de garage, là, qu'on
n'oublie personne dans un sous-sol. Donc,
ça, c'est pour faire en sorte que les collectivités puissent se prendre en main
pour faire face aux intempéries, pour faire
face aux changements... pas aux changements climatiques, faire face à un
événement climatique. Donc là, on est dans la résilience, puis on a
besoin aussi d'avoir des fonds pour ça.
Donc, des fonds qui vont à la
recherche, c'est hyper important, extrêmement important, c'est nécessaire pour
savoir où on s'en va, quels sont les éléments qui nous préoccupent, mais
on doit également mettre des fonds pour faire de l'accompagnement directement à
la population, aux Québécois et Québécoises.
M.
Traversy : Vous parlez beaucoup, là, de résilience. Là, je
prends la balle au bond. Vous avez, à l'intérieur de votre mémoire, là, mis en évidence l'importance
de plans d'adaptation et de résilience par rapport aux changements climatiques, vous parlez d'une alliance, là, avec
le milieu, là, ou avec le gouvernement qui pourrait être en soutien. J'aimerais
ça que vous puissiez nous expliquer un peu
comment vous voyez le mandat d'une telle alliance puis quels seraient les
bénéfices possibles, là, d'avoir une telle concertation.
M.
Raîche (Jean-Paul) : Oui. Au niveau de l'alliance, vous savez, il
existe plusieurs alliances dans le monde, mais la majorité des alliances sont centrées sur la lutte aux
changements climatiques, M. Gore pourrait vous parler de son alliance, mais il y a très peu... J'ai fait le
tour de la question, j'ai essayé de trouver des alliances centrées sur
l'adaptation, c'est-à-dire qu'on regroupe l'ensemble des différents
acteurs de la société, et c'est surtout une mission de veille, d'éducation, de sensibilisation, de diffusion de
bonnes pratiques avec des webconférences, etc. Et donc cette alliance-là
regrouperait l'ensemble des acteurs au
niveau québécois. Ça ne veut pas dire qu'il n'y aurait pas des liens avec
d'autres alliances, si jamais il y
avait des alliances qui ne sont pas dans le même domaine, mais... Je donne un
exemple. L'alliance Saint-Laurent—Grands Lacs, il y a un secteur changements
climatiques dans l'alliance qui est en place justement pour sensibiliser les élus municipaux dans le cadre de
l'alliance, on peut travailler avec eux. Et donc cette alliance-là a surtout
une mission de coordination, d'information, de veille, de sensibilisation avec
l'ensemble des acteurs.
Puis
qu'on ait des bonnes pratiques qui se réalisent autant au niveau international,
parce qu'il y en a, des bonnes pratiques.
Nous, par exemple, il y a un plan d'adaptation aux changements climatiques qui
a été fait par un organisme de bassin
versant en France. Alors, on le connaît, ce plan-là, on sait ce qu'il y a
dedans, on sait les actions qu'il propose et on connaît d'autres
organismes qui élaborent ce genre de plans avec des actions très concrètes,
alors ce qui fait que l'alliance permettrait
justement de mettre en commun l'ensemble des acteurs dans ce contexte-là. Et on
espère qu'on sera appuyés par le ministère de l'Environnement et le
gouvernement dans la mise en place de cette alliance-là.
M. Traversy :
Un soutien, j'imagine, moral mais aussi financier.
M. Raîche
(Jean-Paul) : Si possible.
M.
Traversy : Si possible. Vous me parlez donc beaucoup de
concertation avec les différents acteurs, ça me semble être un élément fondamental de votre argumentaire
pour ce qui est de s'adapter et d'adapter les collectivités aux changements climatiques. Vous êtes vous-mêmes, là,
les OBV, des experts dans le domaine. Pouvez-vous nous expliquer un peu, là, quel rôle vous pourriez jouer pour
être mis à profit peut-être davantage, justement, là, dans ces défis, là, qui
nous attendent au niveau des cibles à atteindre pour le gouvernement dans les
changements climatiques? Vous avez sûrement
une expertise, vous avez... La dernière fois qu'on s'était rencontrés autour de
la table, vous m'aviez dit : Mathieu, on est rendus un organisme mature, on est prêts à travailler, là, sur plusieurs
fronts. Dans celui-ci particulièrement, dans ce cas-ci, qu'est-ce que
vous pourriez apporter davantage?
M. Raîche
(Jean-Paul) : Nous...
Mme Leclerc
(Marie-Claude) : Tu permets?
M. Raîche
(Jean-Paul) : Oui.
Mme
Leclerc (Marie-Claude) : Le ROBVQ a travaillé à développer, avec le
MDDELCC et Ouranos, une boîte à outils pour l'intégration de la
variabilité climatique dans les plans directeurs de l'eau. On a travaillé
également avec l'Alliance de recherche universités-communautés sur les défis
des changements climatiques pour ce faire.
Cette
boîte à outils là sur l'intégration de la variabilité climatique dans les plans
directeurs de l'eau permet à un OBV
de pouvoir voir quels sont les endroits où il y a de la vulnérabilité sur leur
territoire et de pouvoir déterminer quelles mesures peuvent être mises en place afin de diminuer cette
vulnérabilité-là, effectivement. Donc, si on avait un mandat qui nous permettait de pouvoir intégrer de façon
officielle, disons, parce que ça prend aussi des ressources pour ce faire,
évidemment, donc la variabilité climatique dans les plans directeurs de l'eau,
ça permettrait à tous les acteurs qui participent aux plans directeurs de l'eau
de pouvoir prendre des décisions éclairées pour l'avenir en ce qui a trait aux changements
climatiques et donc, entre autres, éviter des erreurs.
Le
Président (M. Reid) : Alors, nous allons passer maintenant au
deuxième groupe d'opposition. M. le député de Masson.
Une voix :
Censure!
Le Président (M.
Reid) : Je lui ai fait un petit signe puis... Oui, la
directrice est très attentive.
M. Lemay :
Alors, merci, M. le Président. Merci de se revoir en commission.
J'ai juste
une petite question de précision. À la page 14, là, de votre mémoire, vous
en avez parlé tout à l'heure dans
votre introduction, dans vos recommandations, vous invitez le gouvernement à
viser l'atteinte d'une cible de 40 % sous le niveau de 1990, puis tout de suite en dessous vous invitez aussi
le gouvernement à limiter l'utilisation du marché du carbone pour atteindre sa cible de réduction
des GES au Québec. Or, on le sait, le gouvernement, pour sa cible de
37,5 % de réduction, il a visé
15 mégatonnes, et puis il y a un 9,8 % qu'il avait l'intention
d'aller sur le marché. Vous, de dire : Je veux 40 %, puis en plus limiter sur le marché, est-ce que... Tu
sais, ce n'est pas juste par les milieux humides qu'on va y parvenir,
là. Est-ce que vous avez des propositions concrètes pour appuyer ce souhait?
M. Raîche (Jean-Paul) : Oui, c'est
sûr que ce ne sera pas juste par les milieux humides. Ça, c'est évident.
Cependant,
j'ai lu quelques rapports qui ont été présentés ici, puis il y a beaucoup de
personnes qui ont suggéré des
éléments comme l'électrification du transport, etc., donc on ne reprendra pas
ces éléments-là, mais il y en a un qui n'a pas été présenté et qui est
présenté dans notre mémoire, ça n'a l'air de rien, mais tout ce qui est les
réseaux de télécommunications pour ce qu'on
appelle la réduction des obligations de transport, des besoins de transport au
niveau du travail, le télétravail.
Vous savez, quand vous avez deux autos dans votre cour, mais elles ne sortent
pas de la cour pour la journée, pour
aller faire... parce que vous n'avez pas besoin de les utiliser... Ça
représente beaucoup, le télétravail. Ça représente beaucoup aussi, tout
ce qui est les téléconférences, tout ce qui est fait à distance.
Cependant,
les réseaux, au Québec, même nous, au niveau du conseil d'administration, quand
on veut faire une rencontre de tous
les membres puis que les gens viennent du Lac-Saint-Jean, puis qu'ils viennent
de la Gaspésie ou ailleurs, on ne
peut pas le faire parce qu'il n'y a pas les réseaux appropriés pour qu'on se
réunisse à distance de cette façon-là. Donc, ça prend des réseaux.
Écoutez, j'étais à 25 kilomètres, lundi,
avec un préfet... à 25 kilomètres de Sherbrooke. Je voulais lui montrer quelque chose, j'ai sorti mon cellulaire pour
brancher mon iPad pour lui présenter quelque chose : pas de réseau
cellulaire. C'est un non-sens.
Alors, tout
ça pour vous dire que ça n'a l'air de rien, mais ce sont des actions qui
permettent de limiter le transport. Ça
fait que, sans reprendre tout ce qui vous a été dit sur l'électrification du
transport, et autres, on dit : Est-ce qu'on pourrait peut-être
regarder cet élément-là quand même? On veut apporter un élément nouveau, si on
veut.
M.
Lemay : Parfait. Merci de la précision. Effectivement, je n'avais pas
entendu cette solution depuis le début des consultations.
Permettez-moi
d'aller à votre annexe 1 que vous avez mise en page 24. On a parlé de
ça la dernière fois qu'on s'est
rencontrés, puis moi, j'en ai aussi parlé avec le COBAMIL, je vous le
mentionnais, au niveau... quand j'ai eu mes rencontres, si on veut, dans
la dernière année, et puis on parlait, là, des points de débordement qu'il y a
dans tous nos points d'eau. Puis vous
mentionnez ici, dans votre section Modification du régime pluviométrique,
comme quoi qu'il y a des problèmes de
débordement des réseaux d'égout, que... bon, il y a plusieurs... la qualité
microbienne affectée, en tout cas il
y a plusieurs points, mais, cette annexe-là, vous mentionnez... c'est des
impacts des changements climatiques sur les régimes de crue, d'étiage et d'hydraulicité à l'horizon 2050.
Qu'est-ce que concrètement ça peut faire pour réduire les GES?
• (17 heures) •
M. Raîche (Jean-Paul) : Ce n'est pas
dans ce sens-là. C'est de montrer qu'il y a des conséquences, il y a des
impacts des changements climatiques, entre autres sur le régime et entre autres
sur les surverses. Vous savez que les surverses
ici, au Québec, elles se présentent en temps de pluie puis elles
se présentent au moment de la fonte des neiges, puis il faut être
conscient que, dans certaines régions du Québec, il va y avoir de plus en plus
de situations, avec les changements
climatiques, où il y aura beaucoup plus d'eau à traiter, puis il y
aura donc des conséquences augmentées.
Puis, en
passant, le fleuve Saint-Laurent a peut-être un débit permettant une dilution
assez importante, mais ce n'est pas
le cas de la majorité des rivières du Québec où il y a des surverses ou des
déversements, puis les conséquences sont quand même importantes. Le débit étant
moins important, vous comprendrez que ça a des conséquences importantes.
Et, si vous regardez la ligne de tempête de
l'Atlantique, là — je
travaille aussi avec Ouranos — vous avez... La ligne de tempête, on a été chanceux dernièrement, Coaticook
y goûte, là, mais, dans l'Estrie, la Gaspésie, etc., aussitôt qu'il y a une tempête, il n'y a pas une haute pression qui
empêche la tempête d'entrer dans les terres, là, bien elle rentre dans les
terres, puis il y a des conséquences.
Alors, dans
ce sens-là, il va y avoir des conséquences, on va vivre avec. Il faut le savoir
et intervenir adéquatement.
M. Lemay : Parce qu'on parlait d'à
peu près 45 000 points de débordement répertoriés de façon annuelle
au Québec. Ça, c'est ceux qui sont
répertoriés. C'est quand même un chiffre que vous dites : Oui, c'est un chiffre,
effectivement, qui est réaliste?
M. Raîche
(Jean-Paul) : C'est un chiffre... Mais j'ajoute à cela qu'on n'a pas
les débits. Il y a très peu d'endroits où
il y a la possibilité pour la municipalité de savoir combien de litres ont été
envoyés à la rivière, on n'a pas... et très peu ont des instruments de débit actuellement pour l'évaluer. Il devrait y
avoir nécessairement des instruments, à mon avis, pour évaluer les
débits qui sont envoyés au moment des surverses, au moins cela.
M.
Lemay : Tout à l'heure, vous mentionniez au ministre que, dans le
fond, vous aviez besoin de financement pour
des programmes pour justement sensibiliser la population, sensibiliser les élus
municipaux à prendre action dans les plans directeurs de l'eau qui sont établis par
vos organismes de bassin versant. C'est un souhait, en fait, qui est plus
que criant, je crois que ça fait déjà
plusieurs années qu'on est en retard sur nos plans directeurs de l'eau.
Concrètement, dernier cri...
Le Président (M. Reid) : Le
temps est écoulé, alors rapidement.
M. Lemay : Ah! écoutez, j'aimerais
bien pouvoir discuter avec vous encore sur ce sujet. Merci.
Le
Président (M. Reid) : Alors, c'est un rendez-vous. En
attendant, nous allons... Je me demande si on n'est pas arrivés au vote,
parce qu'il y a trois minutes on était... Le vote est appelé, alors, écoutez...
Des voix : ...
Le
Président (M. Reid) : Écoutez, le vote est appelé. Moi, je
pense qu'on va aller voter. De toute façon, on garde votre temps, Mme la
députée.
Mme
Massé : Oui, mais c'est juste trois minutes, là, M. le Président, on
pourrait régler ça et libérer les invités.
Une voix : ...
Mme Massé : On ne le dira pas. On va
dire que c'est de ma faute, O.K.?
Le
Président (M. Reid) : Écoutez, si la commission, d'une façon
unanime, veut qu'on fasse ça, on va le faire. Mme la députée, vous avez
la parole.
Mme Massé : Merci, M. le Président.
En fait, c'est ça, ce n'est que trois minutes.
Alors,
plusieurs mesures ou éléments que vous avez amenés sont intéressants parce que
c'est complètement un nouvel angle,
et tout ça. J'aurais tellement de questions, notamment sur la question de la
bourse du carbone, sur la question du Fonds vert, le Fonds des
générations, mais ce qui touche mon coeur... Parce qu'on a... la planète
elle-même s'est occupée de séquestrer son
carbone dans les milieux humides, et j'entends qu'on n'a pas encore de loi au
Québec sur les milieux humides. Je
présuppose que, si on n'en a pas encore, malgré les gouvernements qui sont
passés de façon successive, c'est que
probablement ils ont des pressions en quelque part qui fait que ça n'arrive
pas. Si en plus ça nous aide à lutter contre l'augmentation... En tout
cas, ça séquestre une certaine partie.
J'aimerais ça... Pour vous, cette loi-là,
qu'est-ce qu'il y a le plus important d'y retrouver?
M. Raîche
(Jean-Paul) : Bien, d'abord, dans la loi, je pense, il doit y avoir...
très important d'avoir une cartographie des milieux humides, mais qu'il y ait une obligation, dans les schémas
d'aménagement, qu'on intègre justement l'ensemble des milieux humides au
moins de 0,5 hectare, ça, c'est au moins fondamental, là, une intégration
dans les schémas d'aménagement puis dans les plans d'urbanisme.
Puis ensuite
ce qui est important, nous, c'est toute la dynamique pour aller jusqu'à la
compensation, de manière à ce qu'il
n'y ait pas de milieu humide d'intérêt qui soit affecté, utilisé puis surtout
qu'il n'y ait aucune perte de milieu humide, et donc qu'il y ait
compensation. On a parlé du cas de Laval. Écoutez, on vient de lire... Lisez
les journaux actuellement. À Laval, le
ministère a permis sans compensation de détruire le milieu humide, une partie
de milieu humide. Ça ne devrait plus se faire, cette dynamique-là, quel que
soit l'endroit. Donc, dans la loi, on devra nécessairement avoir des principes puis des éléments qui permettent
d'empêcher cette destruction des milieux humides par des compensations,
par de la création.
Vous savez, un ministre a dit, à un moment
donné, en me rencontrant : Oui, mais on peut-u créer des milieux humides? J'ai
dit : Les castors le font. Oui, il est possible de le faire, mais, pour
ça, il faut savoir où le faire. Et les OBV ont cette connaissance actuellement de leurs territoires, ils travaillent avec les municipalités, et, à ce moment-là, on sait où on doit
intervenir, qu'est-ce qu'on doit protéger et où on pourrait en créer et
compenser pour la création de milieux humides.
Je m'excuse d'être aussi enflammé, mais, vous
savez, c'est un sujet qui me tient à coeur.
Le
Président (M. Reid) :
Alors, nous allons terminer. Merci
beaucoup, Mme Leclerc,
M. Raîche, de votre présence et votre contribution à nos travaux.
La commission suspend ses travaux pour le temps
que ses membres puissent participer à un vote.
(Suspension de la séance à 17 h 6)
(
Reprise
à 17 h 22)
Le Président (M. Reid) :
Alors, nous reprenons nos travaux. Je souhaite la bienvenue à notre dernier
groupe d'invités pour la journée, il s'agit
de l'Association canadienne du ciment, région du Québec.
Alors, vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, nous allons par la
suite procéder à une période d'échange avec les membres de la commission. Et je vous demanderais de vous nommer et de nommer la personne qui vous
accompagne pour les fins d'enregistrement. Vous avez 10 minutes, à vous la
parole.
Association canadienne
du ciment,
région du Québec (ACC‑Québec)
M. Binette
(Michel) : Merci, M. le Président. M. le
ministre, Mmes, MM. les députés. Je m'appelle Michel Binette, je
suis vice-président aux affaires juridiques, publiques et gouvernementales de
l'Association canadienne du ciment. Et je
suis accompagné de mon collègue d'Ottawa, Rene Drolet, qui nous supporte techniquement,
là, dans nos travaux. Donc, merci de
nous permettre d'être ici aujourd'hui, et c'est un grand plaisir de pouvoir vous
présenter, je dirais, un petit résumé condensé de notre mémoire.
Alors, l'Association canadienne du ciment représente au Canada
huit multinationales qui opèrent 15 cimenteries, dont quatre cimenteries actuellement au Québec. Alors, le document qui a été déposé a une cible,
on dirait, ambitieuse, et l'Association canadienne du ciment, d'abord et
avant tout, souhaite vous dire qu'elle n'est pas contre cette cible ambitieuse mais vous met en garde de l'impact que
pourrait avoir cette cible sur la compétitivité de nos industries,
de nos membres. Nous l'avions faite,
cette représentation, en 2009, lors de cette commission parlementaire pour
les premiers balbutiements du système
de plafonnement et d'échange, et nous avions, à l'époque, dit : Si nous ne
sommes pour être qu'avec la
Californie, soyons prudents parce que ça pourrait impacter, d'autant plus qu'on
aimerait qu'il y ait d'autres joueurs
qui soient là avec nous. L'Ontario a enfin annoncé qu'elle se joindra à nous. De
façon ambitieuse, on pense que ça n'arrivera
pas avant au moins 2017, donc il faut garder ça à l'esprit. Et je pense
aussi que le gouvernement le réalise, parce qu'à la page 18 de
son document il dit : Il faudra s'assurer de ne pas nuire à la compétitivité
et de ne pas nuire à l'économie du Québec avec ces cibles-là.
Comme premier commentaire, nous aurions à vous
dire qu'outre le fait que l'on propose des cibles, on a l'impression que, dans ce document, on n'a pas beaucoup de moyens qui sont
proposés pour atteindre cette cible. Pour se remettre en contexte, le secteur industrie a fait son effort. Jusqu'à maintenant,
le secteur industriel, tous secteurs confondus, comme vous le savez — vous l'avez sûrement déjà
entendu, j'en suis convaincu — a
réduit ses émissions de GES de 21 %
depuis 1990, et ça, c'étaient des chiffres
qui datent de 2012. Du côté des cimenteries, de nombreux efforts et plusieurs
millions de dollars ont été investis pour
améliorer notre efficacité énergétique, qu'on a évidemment améliorée de
21 %, et nos GES ont diminué d'approximativement 11 % à
12 % depuis 1990 et selon les chiffres que l'on a de 2013.
Ce qu'il faut savoir et ce qu'il faut
comprendre, c'est que les cimenteries émettent... 60 % de leurs émissions
proviennent des émissions de procédé, des émissions de fabrication, de la façon
dont on fabrique le ciment, 60 % de nos émissions sont donc
incompressibles. 40 % de nos émissions proviennent... sont des émissions
de combustion. Ce qu'il faut que vous
sachiez aussi, c'est qu'on prend du calcaire, on le chauffe à
1 500 °C, 1 600 °C, donc c'est énergivore, et les fours sont chauffés avec des combustibles
fossiles. Et là je dis «sont» parce qu'historiquement c'est ce qui était le
cas. Donc, on chauffe avec du pétrole de coke, on chauffe avec du
charbon, ce qui est extrêmement polluant.
Le Québec est
avant-gardiste, les cimentiers québécois sont avant-gardistes, puisqu'ils
utilisent des combustibles alternatifs,
ils substituent le combustible fossile pour du combustible alternatif. Et notre
taux de substitution est un des plus
élevés, en fait le plus élevé au Canada, à environ 30 % à 35 % de
substitution, ce qui est excellent. Et ça, c'est un peu aussi grâce au ministère de l'Environnement
ici, au Québec, puisqu'ils nous permettent d'utiliser... via les certificats
d'autorisation, ils nous permettent d'utiliser ces combustibles alternatifs. Un
des combustibles alternatifs les moins connus
et les plus utilisés, ce sont les pneus usés. Plusieurs d'entre vous ne savent
pas qu'il n'existe plus de dépotoir de pneus
usés au Québec grâce aux cimentiers. La moyenne d'une tonne de ciment produite
était, à une certaine époque, de un pour
un, une tonne de CO2 pour une tonne de ciment produit. La beauté,
c'est qu'on est maintenant... selon notre dernier rapport sur le
développement durable, on est à 0,74. Donc, on a fait de très gros efforts pour
réduire nos émissions.
Alors, je
saute directement au comment maintenant on peut faire, parce qu'outre le fait
que nous nous sommes questionnés, allons-nous
dire qu'on demande de réduire cette cible, allons-nous demander de ne pas être
assujettis comme d'autres l'ont fait, on s'est plutôt questionnés à savoir
qu'est-ce qu'on peut faire pour améliorer notre performance et qu'est-ce
que le ministère et le gouvernement peuvent faire pour nous aider à améliorer
notre performance.
Alors, la
première chose : faciliter l'utilisation accrue des combustibles
alternatifs. Alors, il faut qu'on augmente ce pourcentage de 30 % à 35 %, il faut qu'on l'augmente. L'Association
canadienne du ciment — et ses membres — a des embûches au ministère pour obtenir nos certificats d'autorisation, et on
l'a dit dans notre mémoire sur le livre vert, on l'a répété et on l'a dit, il faut favoriser, il faut faciliter
l'obtention des certificats d'autorisation. N'oublions pas qu'à la fin
de tout, ce que ça va faire, c'est que ça va réduire les émissions de GES.
Alors, il faut supporter le financement du
secteur industriel via le Fonds vert. La plupart des industriels vous l'ont dit, on vous le répète. Il faut comprendre
qu'il y a beaucoup d'argent qui est dans ce «pot», si vous me permettez l'expression, à 3,3 milliards, là, c'est
l'objectif, mais il y a beaucoup d'argents qui sont là qui viennent de nos
membres. Et nous, on est rendus à une
étape où les efforts qu'on continue de faire portent fruit, mais il faudra
qu'on investisse d'autres argents pour changer les équipements, et on
aura certainement besoin d'aide financière de la part du gouvernement et
peut-être de la part de programmes qui seront mis en place pour soutenir notre
industrie dans le cadre du Fonds vert.
Tantôt, j'écoutais nos prédécesseurs vous dire : Ça,
c'est la première fois qu'on l'entend, mais celle-ci risque d'être aussi la première fois que vous l'entendez. Les
chaussées de béton, alors, au Québec, lentement et sûrement on progresse, il y a
des chaussées de béton qui se font. Saviez-vous que les chaussées de béton
permettent d'économiser 3 %
d'essence? Alors, on a des études à
la tonne, je pense qu'on est rendus à 17 ou 18. La dernière a été faite par le
MIT, le Massachusetts Institute of Technology, qui dit
que c'est prouvé que la chaussée de béton réduit les émissions de GES...
pardon, réduit la consommation d'essence, et, par le fait même, on
comprend que ça réduit les GES.
Alors, un des
points qui est dans notre mémoire : Inclure des analyses de cycles de vie
dans tous les programmes... les projets d'infrastructure du
gouvernement. Alors, il faut analyser les projets sur une durée de vie, sur une
analyse de vie et les laisser... faire en
sorte qu'il ne faut pas le faire sur le coût initial, il faut le faire sur
toute sa durée de vie. Alors, est-ce
qu'un bâtiment en béton comme celui de la Maison du développement durable, à
Montréal, est plus écoénergétique? Oui. Alors, pourquoi? Alors, il y a
des raisons, il y a des milliers de raisons pour ça.
Et finalement
on dit : Favoriser l'utilisation de matériaux locaux pour les projets
d'infra. Souvent, on oublie que le béton
et le ciment, c'est un produit local. Évidemment, le ciment, au Québec, il y a
quatre cimenteries, puis, des «plants» de
béton, il y en a des centaines, mais... Et il faut comprendre aussi que, pour
la mise en place, lorsque ça part du «plant» de béton, allant dans la bétonnière, on a deux heures pour le mettre en
place, ça ne peut pas être plus local. On ne peut pas exporter du béton par
bateau.
Alors, sur
ce, ça fait un peu le tour du mémoire qu'on a. Puis ça me fera plaisir
d'échanger avec vous si vous avez des questions. Merci, M. le Président.
• (17 h 30) •
Le
Président (M. Reid) : Merci. Merci beaucoup. Nous allons passer
à la période d'échange. Du côté gouvernemental, M. le ministre, vous
avez la parole.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Merci pour votre
présentation ainsi que votre mémoire.
Sur la
question de la compétitivité, vous parlez... Je vais recommencer. L'Ontario a
adopté une cible de réduction de
37 % par rapport au niveau de 1990, pour 2030, et, à moins que je me
trompe, votre pendant ontarien ou national, là, je ne sais pas trop, là, mais à
Toronto, en Ontario, l'Association canadienne de ciment, a été plutôt favorable
à cette cible de réduction là et n'a
pas soulevé le même genre d'objection que vous semblez soulever cet après-midi.
Alors, pouvez-vous expliquer cette, peut-être, apparente contradiction?
M. Binette (Michel) : Je pense que...
Et, effectivement, nos collègues de l'Ontario, on fait partie de la même association. Les collègues de l'Ontario,
présentement, sont à discuter et négocier des prochaines conditions qu'il y
aura dans le règlement sur les plafonnements et échanges.
Et je ne
pense pas avoir dit, à moins que je trompe, que nous n'étions pas favorables à
cette cible. On a dit qu'elle est ambitieuse, et je vous ai dit qu'on
n'avait pas l'intention de demander de la réduire, on n'avait pas l'intention
de demander de ne pas être assujettis. On
vous a donné même des suggestions et des pistes de solution pour tenter d'y
arriver. Outre le fait qu'on ait dit que c'était très ambitieux, on
n'est pas contre.
M. Heurtel : Bien, je n'ai pas...
vous ne m'avez pas entendu dire ça non plus.
M. Binette (Michel) : Bien, vous
venez de me dire...
M. Heurtel : J'ai parlé de
compétitivité, je n'ai jamais dit que vous étiez contre. J'ai...
M. Binette
(Michel) : O.K. Parce que
vous disiez qu'en Ontario ils étaient pour et que nous, on n'avait pas l'air
à avoir la même position...
M. Heurtel : Bien, c'est ça...
M. Binette (Michel) : ...mais on est
d'accord avec la cible.
M.
Heurtel : Vous êtes d'accord
avec la cible, bon. Alors là, de l'autre côté, vous parlez de moyens.
J'aimerais ça vous entendre davantage
sur les moyens que vous préconisez. Vous avez offert des pistes de solution. Je
me demandais si vous pourriez aller
plus loin en termes des moyens concrets, qu'ils soient des moyens qui
existent déjà qui devraient être développés davantage ou
des moyens qui ne sont pas mis en oeuvre présentement puis qu'on devrait
explorer.
M. Binette
(Michel) : Bien, en fait, ça
se résumait, dans le mémoire, en cinq points. Le premier point était de
faciliter l'utilisation accrue des
combustibles alternatifs. Donc, une des embûches qu'on a, par exemple, c'est que, quand on veut
s'approvisionner sur un matériau, par
exemple des matériaux de construction
qui pourraient, sans ça, s'en aller à l'enfouissement...
Donc, c'est un plus pour notre société, puisqu'au
lieu de s'en aller à l'enfouissement, ils s'en viennent chez nous, on s'en sert comme combustible parce qu'ils
ont une valeur calorifique qui est excellente. Alors, à chaque fois que quelqu'un
nous appelle, veut venir nous vendre ou nous donner certains matériaux pour
qu'on puisse les utiliser comme combustible, il faut venir chercher au ministère
un certificat d'autorisation. Et là, si on utilise, par exemple, dans un centre de tri, des plastiques qui sont non
recyclables, parce que le plastique a une valeur calorifique très forte,
bien là : C'est quelle sorte de
plastique? Puis là, si c'est différent d'un autre plastique, bien il faut
que tu redemandes un certificat d'autorisation,
accompagné de procédures, accompagné de dollars, accompagné de... il faut
faire des expériences pour démontrer que...
Alors, il y a quelqu'un
avec qui on travaille que vous connaissez bien, qui s'appelle Steven
Guilbeault, d'Équiterre — eh
oui, croyez-le ou non, on travaille avec ces gens-là, en collaboration avec eux — qui disait, et je prends toujours son exemple, et c'est
fort comme exemple : Arrêtons de nous soucier de ce qui rentre au four et
soucions-nous de ce qui sort à la
cheminée. Et je n'utiliserai pas les mots que j'ai eus comme conversation avec
Steven, parce que ce n'était
pas «soucier», c'était d'autre chose. Et il disait : Tu sais, on se soucie
trop de la valeur en souffre qui rentre dans le four, alors que, bon, à la cheminée en haut, là, ça sort-u mieux que
quand c'est du pétrole de coke ou quand c'est du charbon? C'est ça qu'il
faudrait...
Puis il faudrait
arrêter d'avoir à chaque fois à revenir au ministère pour avoir un certificat
d'autorisation. Faciliter l'obtention du
certificat d'autorisation, n'était-ce pas là l'objet ou l'objectif du livre
vert? Mais ça, on l'a déjà dit.
Les
autres choses, on a dit : Bien, il y a peut-être des investissements que
nous pourrions faire dans nos cimenteries, acheter de nouveaux
équipements, mais les chefs de direction de ces entreprises-là, qui sont des
multinationales, se questionnent s'ils
doivent faire des investissements ou s'ils doivent acheter des allocations
gratuites, puis souvent, bien, le calcul est facile à faire, ils
disent : En centaines de millions de dollars, qu'est-ce que ça nous coûte
d'acheter des allocations gratuites pour
compenser ce qu'on n'est pas capables de réduire? Alors, nous, on pense qu'il
faudrait un coup de barre et nous
aider, aider l'industrie cimentière à investir peut-être massivement dans
certaines de ses cimenteries pour faire en sorte qu'on améliore notre
performance, quoique plusieurs efforts ont déjà été faits à ce niveau-là.
Les
chaussées de béton, bien, évidemment, comme je vous ai dit, ça, c'était le
«punch». Le «punch», c'est que ça
fait cinq ans que je suis avec l'association, ça fait cinq ans qu'on promouvoit
la chaussée de béton, et ce n'est pas facile, ce n'est pas facile de convaincre le gouvernement d'aller de l'avant
avec des chaussées de béton qui, preuve à l'appui, durent beaucoup plus longtemps, preuve à l'appui
réduisent les îlots de chaleur. M. le ministre, la semaine dernière, vous
avez annoncé une aide financière au CRE de
Montréal pour 1,8 million sur les îlots de chaleur. On va communiquer avec
eux, c'est déjà fait, si ce n'est pas fait, alors... ça va venir, si ce n'est
pas déjà fait, alors...
Et,
la luminosité, la chaussée de béton, elle est blanche, la chaussée d'asphalte,
elle est noire, alors on a besoin de
moins d'éclairage. Alors, il y a un paquet d'avantages à la chaussée de béton
qu'on tente en vain, je dirais... pas en vain mais de convaincre les gens du gouvernement d'en faire plus. Il y a
déjà une orientation ministérielle qui prévoit que l'autoroute 20, par exemple, entre Montréal et Québec sera
entièrement refaite en béton. Le problème, c'est qu'à la vitesse qu'ils le font, vous et moi et tout le
monde ici, autour de la table, on va être morts avant que l'autoroute 20
soit entièrement refaite en béton, mais ça, c'est un autre...
Et
principalement, comme je l'ai dit tantôt, prouvé par une multitude d'études, il
y a une économie d'essence, parce que
ce n'est pas compliqué à comprendre, c'est que la chaussée souple, qui est
l'asphalte, fait une friction quand on
roule sur sa surface de roulement, puis la chaussée de béton, elle, elle est
rigide, donc il y a moins de friction. Donc, on économise de l'essence,
donc on émet moins de GES.
Et
tout ça, là, mis ensemble, on pense qu'on peut aller chercher, bon an, mal an,
au-delà de 1 million de tonnes de CO2
par année, qu'on peut économiser, si on favorise les propositions qu'on vous
apporte aujourd'hui, qui ne sont pas simples, qui ne sont pas faciles...
voyons, qui ne sont pas difficiles, pardon.
M. Heurtel :
Est-ce que votre industrie explore le développement de technologies de
captation de carbone?
• (17 h 40) •
M. Binette (Michel) : Je sais qu'en Ontario on a un de nos membres qui effectivement
travaille sur ça, oui, oui, un de nos
membres qui s'appelle Lehigh, Lehigh qui est une multinationale allemande,
voilà, et qui travaille sur ce dossier-là,
puis je sais aussi que Lafarge, je pense, travaille aussi sur ça. Donc, oui. Oui, ça fait partie, pour répondre à
votre question, du développement, de la recherche et du développement qu'on fait à ce niveau-là, oui, captation
de CO2.
M.
Heurtel : Sur le point
précédent, vous avez dit, bon, au
niveau du développement, de l'idée de faire les routes en béton... C'est
ça? Je vous suis?
M. Binette
(Michel) : Oui.
M.
Heurtel : Vous semblez dire que vous rencontrez une certaine forme de
résistance de la part du ministère des Transports,
à ce que je comprends, ou... J'essaie
de comprendre qu'est-ce qui semble
être les obstacles. Parce que vous semblez
dire : Bon, bien, c'est une solution qui pourrait directement avoir un
impact sur nos émissions. Alors, prenant pour acquis que ça, c'est vrai, écoutez, je n'ai pas les études, là, qui
confirment ça devant moi, là, mais, juste pour les fins de la
discussion, si ce que vous me dites est avéré, bon, qu'est-ce qui semble être
le frein ou qu'est-ce qui semble le blocage, d'après vous?
M. Binette (Michel) : Le blocage est fort simple, nous croyons, c'est qu'évidemment on
prolonge la durée de vie d'une
chaussée en y mettant un, deux pouces d'asphalte, et ça dure deux à trois ans
de plus, puis on prolonge... et ce qu'on
appelle... Vous avez déjà entendu parler de l'IRI, alors l'indice de la qualité
des routes au Québec. Donc, ultimement...
Je
vous donne un exemple, le meilleur exemple, puis je termine là-dessus. Moi,
j'habite dans les Basses-Laurentides. Entre Sainte-Thérèse et
Saint-Jérôme, ça a une vingtaine de kilomètres, ils ont refait, il y a une
douzaine d'années, la chaussée en béton, complète, des deux côtés, et ils sont
passés de six voies à huit voies de large. Et la mairesse de Sainte-Thérèse, entre le kilomètre 23 et 25, sur
deux kilomètres, trouvait que la chaussée de béton était plus bruyante et a
demandé au MTQ de mettre de l'asphalte
par-dessus la chaussée de béton, et il y a eu de la résistance, mais,
politiquement, ils ont décidé de le
faire puis de les écouter. Alors, depuis 12 ans que cette chaussée de
béton a été refaite, aucun dollar n'a été mis sur la chaussée de béton,
parce qu'elle est résistante, elle n'a pas de nid-de-poule, elle est en super
bonne condition, mais, depuis 10 ans,
ça fait trois fois qu'ils refont le resurfaçage d'asphalte par-dessus, sur le
deux kilomètres, ça a coûté plusieurs millions de dollars.
Alors,
il y a une réticence parce que tout le monde dit que ça coûte plus cher, et
nous, on tente de démontrer... Et la
DT de Chaudière-Appalaches a dernièrement fait une étude avec le petit bout
qu'ils ont fait à Saint-Apollinaire, les gens passent souvent sur la 20, il y a eu un petit bout, là, de chaussée
de béton qui a été fait, et il y avait un écart de 6 %. Mais, quand on parlait d'analyse de cycle de vie,
c'est que l'écart de 6 %, si ta chaussée, elle dure 30 ans,
35 ans, 40 ans, peut-être,
versus une chaussée d'asphalte... Elle a coûté 6 % moins cher, mais après
10 ans elle n'est plus bonne, là, c'est sûr, c'est sûr qu'elle
n'est plus bonne.
Alors, il y a cette réticence-là, et c'est à
nous de continuer de démontrer que c'est un bon produit, qu'on se rapproche
stratégiquement d'un prix qui ressemble à celui de l'asphalte, puis nous
pensons... Puis là on ne pense pas, demain
matin, que tout le Québec va être chaussé en béton partout, là, dans les rues
résidentielles. D'ailleurs, l'orientation ministérielle du MTQ identifie 1 542 kilomètres sur
30 000 kilomètres qui appartiennent au MTQ. Ça, là, ça a été fait
via les deux industries ensemble, on a
dit : C'est quoi, les endroits les plus passants? Bon, alors, on a
identifié la 20, on a identifié la
40, on a identifié sur l'île de Montréal plusieurs endroits qui sont déjà en
béton, et l'autoroute des Laurentides, et d'autres autoroutes, mais il y
a encore du travail à faire pour en faire plus, et ça, c'est notre message.
M. Heurtel : Merci.
Le Président (M. Reid) :
D'accord. Ça va?
M. Heurtel : Ça va, merci.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Nous passons maintenant à
l'opposition officielle. M. le député de Terrebonne.
M. Traversy : Merci beaucoup,
M. le Président. J'aimerais remercier tout d'abord, là, les représentants de l'Association canadienne du ciment, région du
Québec. Merci d'être avec nous, messieurs. Je vous ai dit tout à l'heure
qu'on gardait le meilleur pour la fin, alors on va terminer cet après-midi en
feu.
Vous nous
avez donc parlé des matériaux, de votre concept, là, du cycle de vie qui est
important à vos yeux. Vous n'êtes pas
le premier groupe à venir nous sensibiliser sur cet aspect qui pourrait nous
aider, je pense, à atteindre les cibles que le gouvernement veut se
fixer dans le cadre des luttes aux changements climatiques. Juste pour nous
donner une comparaison, parce que je ne suis
pas très... je ne suis pas aussi calé que vous, là, en matière d'asphalte et de
béton, la différence de prix, là, entre les deux matériaux, est-ce que
c'est significatif?
M. Binette (Michel) : Bien, c'est ce
que je viens de...
M. Traversy : ...de dire au...
M. Binette
(Michel) : ...de dire au
ministre, on parle d'un écart sur une reconstruction traditionnelle. Alors, on
a une chaussée qui n'est plus bonne, on arrache tout puis on recommence.
M. Traversy : Exact.
M. Binette
(Michel) : On parle d'un
écart, actuellement, qui tourne autour de 6 % d'écart, c'est-à-dire la
chaussé de béton est à peu près 6 % plus élevée que la chaussée
traditionnelle en asphalte.
M.
Traversy : Mais elle a les avantages que vous nous avez
mentionnés, là, à l'intérieur de votre mémoire. Ce que je veux juste savoir, c'est que ce 6 %
là, là, à vos yeux, est-ce qu'il est... Il n'est pas dithyrambique, il n'est
pas énorme à... ça ne discarte pas la possibilité, là, donc, évidemment,
d'axer vers le béton. Vous dites, bon, qu'au niveau de la consommation
d'essence, là, il y a une réduction qui est significative, de 3 %, je pense,
là, de mémoire, vous l'aviez mentionné tout
à l'heure, qui peut être économisé sur ce genre de route. Ce que je veux
comprendre, c'est que, le 6 % de plus
dont coûte, là, dans le fond, le béton... Vous lancez un message au
gouvernement en disant que cette alternative est plausible, vous voulez évidemment être soutenus financièrement, en tout
cas vous voulez probablement rendre ce matériau-là peut-être plus
accessible, plus alléchant dans le développement des projets d'infrastructure
qui peuvent nous amener à diminuer nos gaz à
effet de serre, donc, sur les routes du Québec. À part... Quel genre
d'incitatif financier trouvez-vous qu'il
serait intéressant d'avoir... ou est-ce que c'est juste une ouverture par
rapport aux appels d'offres? Qu'est-ce que c'est?
M. Binette
(Michel) : Non, je vous
dirais qu'il n'y a pas de soutien financier, nous ne faisons pas partie de ceux
et celles qui demandent des soutiens
financiers mais qui disent toutefois : Permettons... Et ce qu'on a proposé
du ministre des Transports, lors
d'une récente rencontre avec lui, on lui a parlé de la possibilité des
soumissions alternatives. Je vais rapidement
vous expliquer c'est quoi, une soumission alternative. C'est que, si on s'en va
en soumission avec un design pour une
chaussée en asphalte, bien, évidemment, on ne peut pas concurrencer, ils
demandent que... ça a été dessiné en fonction
d'une chaussée en asphalte. On demande au ministre : M. le ministre,
permettez-nous juste de soumissionner puis
de montrer qu'on est capables de compétitionner dans le prix de départ, et vous
allez voir que vous allez avoir des surprises. Et le ministre n'était
pas fermé à cette idée-là.
Alors donc,
c'est véritablement là, c'est-à-dire permettre, nous permettre, pour des
travaux faits par le MTQ... On sait
que le MTQ, c'est souvent sur des grandes artères, et c'est là que la chaussée
de béton peut être intéressante et pour toutes les
raisons, autant pour la durabilité. Puis là, en plus, on vient ajouter
l'élément GES. Quand même, c'est intéressant :
durabilité, longévité, réduction des GES, réduction des îlots de chaleur puis
réduction des éclairages nécessaires sur les routes parce que le blanc
fait moins... il fait en sorte qu'on a besoin de moins d'éclairage.
M.
Traversy : Donc, j'ai bien noté cette particularité que vous
venez d'énoncer, donc soumissions alternatives. Je viens de rentrer ça,
donc, dans mon livre de nouveaux concepts, là, à apprendre et à bien connaître.
Je
parlais tantôt de support financier. Donc, je me suis peut-être fourvoyé en
disant que c'était par rapport à la possibilité
de vous rendre plus compétitifs sur les appels d'offres. Dans le cadre de votre
mémoire, c'était davantage par le biais du Fonds vert, là, que vous
aviez ouvert des possibilités d'aide en la matière...
M. Binette
(Michel) : Oui.
M.
Traversy : ...le Fonds vert qui est... pas décrié, mais, je
veux dire, qui est questionné actuellement, dans le cadre de notre
commission, sur des fois des manques de transparence ou sur un manque de
résultats ou de preuves d'efficacité dans les domaines auxquels il est dédié.
J'aimerais
que vous puissiez nous expliquer un peu plus longuement qu'est-ce que vous
voyez comme avantage dans le cadre du
Fonds vert. Et est-ce que, selon vous, le concept dans lequel il est imbriqué
actuellement, là, est satisfaisant au niveau de la reddition de comptes,
de la transparence et de l'efficacité?
• (17 h 50) •
M. Binette (Michel) : Nous siégeons, l'Association canadienne du ciment, au Centre patronal
en environnement du Québec que vous
avez entendu hier, le CPEQ, et d'ailleurs on endosse les recommandations du
CPEQ dans son rapport. Et on a voulu, dans notre mémoire à nous, vouloir
individualiser un peu pour notre industrie, mais globalement, les commentaires faits
par le CPEQ, nous les endossons, parce que nous avons participé à la rédaction
du mémoire du CPEQ. Donc, on est membres de cette organisation.
Et, dans une
discussion qu'on a eue justement en préparation du mémoire, j'ai entendu des
collègues d'autres industries venir dire : On avait des programmes, ça
n'existe plus, on ne le sait plus, qu'est-ce qui se passe, c'est gelé, il n'y a
pas d'argent qui sort. Nous, ce qu'on veut juste dire et puis ce qu'on voulait
être positifs, on n'a pas de critique à faire sur le Fonds vert, on fait juste
dire : Il y a un pourcentage qui semble avoir été dédié pour le
transport, et c'est correct parce
qu'il faut s'attaquer à ce gros morceau, parce qu'il représente 40 % des
émissions de GES au Québec, mais, l'autre
portion du Fonds vert, ce serait intéressant de mettre en place des programmes
pour aider les différents secteurs industriels,
dont le nôtre, pour faire des investissements dans nos infrastructures, dans
nos équipements, dans nos usines au Québec, c'est... Et la recherche et
le développement, oui, Rene a raison, en effet.
M. Traversy :
Voulez-vous compléter?
M. Drolet
(Rene) : Oui. Peut-être juste pour compléter à ce sujet-là, M. le
ministre parlait tout à l'heure, un exemple,
de recherche sur le captage du carbone. Ce sont des projets qui sont énormes,
et l'industrie investit pour essayer de
développer des choses, mais c'est un exemple de projet de recherche et
développement qui pourrait être supporté par plus de fonds, et justement
on trouvait que le Fonds vert, c'est... Il y a un peu une inconnue
présentement à savoir quels sont les...
l'utilisation de cet argent-là et est-ce que ça pourrait aider à supporter non seulement
le secteur des transports, mais le secteur industriel.
M.
Traversy : Excellent,
merci. Parce que, bon, c'est ça, d'autres personnes avant vous avaient
dit : Souvent, les gens des
entreprises aiment savoir où l'argent se dirige et à quoi il sert. Donc, je
prends note de votre position à l'égard du Fonds vert. Puis donc, pour
les projets de recherche, effectivement, il y a des alternatives intéressantes
à réfléchir.
J'aurais
une dernière question concernant votre dernière proposition, parce qu'elle est très noble, bon, vous voulez
favoriser l'utilisation de matériaux locaux
pour les projets d'infrastructure, et évidemment le béton offre des avantages
significatifs, donc, à cet égard. Vous
valorisez donc l'acquisition de matériaux de proximité, donc le souhait est là,
mais maintenant, dans le concret, comment vous entrevoyez la mise en
place d'une telle favorisation pour l'utilisation de matériaux locaux ici, au Québec? Il y a une espèce de sentiment de
nationalisme économique qui ne me rend pas insensible du tout, mais je
voulais voir comment vous le traduisiez, là, dans une vision plus...
Le Président (M.
Reid) : Vous allez devoir le faire en une vingtaine de
secondes.
M. Traversy :
Ah non!
M. Binette (Michel) : Juste vous dire que le béton est le deuxième matériau le plus utilisé
au monde après l'eau et qu'il doit nécessairement être local, comme je l'ai expliqué tantôt. Puis il faut continuer à
l'encourager puis il ne faut pas faire venir du ciment de la Corée du
Sud ou de la Grèce par bateau ici, au Québec.
Le
Président (M. Reid) :
Merci. Nous passons maintenant au deuxième groupe d'opposition. M. le député de Masson.
M.
Lemay : Merci, M. le Président. Merci, messieurs, d'être avec nous ce soir pour
terminer cette belle journée.
Donc, vous
savez, en fait, plusieurs de mes questions ont déjà été répondues par vos
commentaires puis les questions des
autres collègues précédemment, mais, vous savez, si on y va d'abord... Bien,
j'aime beaucoup, là, le fait d'utiliser des chaussées de béton, là, puis ça réduit de 3 %, là, la consommation d'essence, ça, c'est
correct. Je veux juste qu'on parle, à
ce moment-là... Je ne sais pas, j'ai vu ça récemment, je pense que ça s'appelle
Topmix, de Lafarge, qui est un béton absorbant.
Est-ce que c'est quelque chose qui est dans les plans au Québec, de dire :
Ça, c'est une nouvelle solution novatrice qui en plus donne tous les avantages d'avoir des routes... Est-ce qu'on
pourrait utiliser... je ne sais pas si vous en avez entendu parler, mais pouvoir dire : En plus
de ça, on va pouvoir réduire l'eau qui s'en va dans nos égouts, puis de pouvoir
réduire le point de débordement parce qu'on va faire de l'absorption à la
source?
M. Binette (Michel) : Ce que vous me parlez, dans ce cas-ci, c'est ce qu'on appelle le béton
drainant. Alors, ça ressemble à un
Rice Krispies et ça sert à faire, certains endroits, des stationnements, qui
sont faits en béton drainant. Et ça sert
à, évidemment, le mot le dit, drainer l'eau, et évidemment, au lieu d'avoir à
faire... à traiter les eaux pluviales, bien les eaux retournent
directement dans le sol.
Alors,
oui, ça fait partie des produits dans lesquels nos membres investissent pour
améliorer et augmenter la pointe de tarte ou le créneau béton, ciment.
Et il y en a plein d'autres comme ça. Tu sais, on parlait tantôt de la chaussée
traditionnelle en béton; bien il y a aussi
ce qu'on appelle, en anglais, le «whitetopping». C'est que, quand le fond de la
route est bon, on peut ne seulement
qu'ajouter quelques pouces de béton, et voilà, c'est fait, alors on n'a pas
besoin de le reconstruire. Ça, ça a
été prouvé par la DT de Chaudière-Appalaches que c'est 15 % moins cher
qu'une reconstruction en asphalte.
Alors,
il y a d'autres produits comme ça qui peuvent s'adapter aux circonstances puis
aux endroits. Présentement, on est en
tournée, on fait une tournée des 50 plus grandes municipalités au Québec parce
que les municipalités sont rendues là,
sont rendues à se demander : Qu'est-ce qu'on peut faire pour que nos
citoyens et nos citoyennes en aient plus pour leur argent?, et c'est
notre objectif.
M.
Lemay : Tant mieux. Puis, si on regarde, vous parlez... 60 % de
vos émissions dans les cimenteries sont dues au procédé, puis un autre 40 %, c'est dû à l'utilisation des
combustibles fossiles. Et puis après ça vous mentionnez que généralement, dans vos cimenteries, il y a de
30 % à 35 % de substitution en autres produits, puis ça fonctionne
très bien, les pneus, là, je
travaillais chez Bridgestone Joliette, justement. Donc, effectivement, c'est un
très bon produit qui est utilisé par votre industrie.
Puis, j'imagine, ça
n'a pas changé, ça, le procédé du ciment, là, depuis les 15, 20 dernières
années, là, ça...
M. Binette (Michel) : Depuis toujours. En fait, on part de la prémisse qu'on retire du
calcaire d'une carrière, on le met
dans un four, on le chauffe à 1 500°. Et, oui, ce qui change, c'est qu'on
part... vu qu'on a besoin d'une haute intensité de chaleur, on part avec des combustibles fossiles,
puis l'idée, c'est de remplacer les combustibles fossiles tôt ou tard. Le
taux de substitution, en Europe, des
cimenteries qui sont... La plupart de nos membres sont des multinationales
européennes. Le taux de substitution en Europe est au-delà de 50 %,
donc ça veut dire qu'on est capables au Québec.
Mais
présentement, en Ontario, c'est 3 %. Au Québec, c'est 35 %. Donc,
hein, on a une longueur d'avance sur l'Ontario dans ce dossier-là.
M.
Lemay : On pourrait faire mieux si on avait le processus de certificat
d'autorisation qui était simplifié. Puis j'ai bien aimé ce que vous avez mentionné avec Équiterre tout à l'heure
parce que, dans le fond, après l'avoir chauffé, le calcaire, là, vous avez comme, si on veut, un grand baril, là,
rotatif avec de la brique réfractaire puis des chaînes en acier pour que toutes les particules puissent
retomber, puis à la fin c'est la cheminée, là, ce qui s'échappe, c'est ça qu'on
doit regarder. Ça fait que, quand on connaît
un petit peu le procédé, on peut, à ce moment-là, effectivement dire :
Bien, l'utilisation de produits de substitution va réduire mes GES. Donc, je ne
sais pas pourquoi que... En fait, je me pose la question à voix haute, là, mais il me semble que, si on se penche sur le
procédé, on devrait, à ce moment-là, là, pouvoir faciliter, comme vous dites, les certificats d'autorisation puis on ne
devrait pas attendre de faire une commission pour venir en discuter.
M.
Drolet (Rene) : Bien, en fait, je voulais juste mentionner que, pour
les certificats d'autorisation, ça pourrait se faire par catégorie de
produit, donc, parce que présentement même le même produit, s'il vient d'un
fournisseur différent, demande un nouveau
certificat d'autorisation. Donc, ça, c'est des choses faciles, je pense, à
régler pour faciliter...
M. Binette
(Michel) : ...l'obtention des certificats d'autorisation.
M.
Drolet (Rene) : On parlait des matériaux. Il y en a toutes sortes de
types, des plastiques non recyclables, des débris de construction, et il
y a du potentiel, là, pour en avoir beaucoup.
M. Binette (Michel) : Tout ce qui a une valeur calorifique élevée. Un bardeau d'asphalte,
évidemment, ça a une valeur calorifique élevée.
Donc,
tous ces matériaux-là, par exemple le plastique non recyclable, on les achète
en «bundle». Ils vont dans les
centres de tri, les centres de tri disent : On ne les prend pas, donc,
s'il n'y a pas personne qui les prend, ils s'en vont à l'enfouissement. Donc, c'est encore un autre
effort que fait l'industrie. Évidemment, on s'en sert, donc, pour réduire nos
GES, mais en même temps aussi pour réduire l'enfouissement, alors c'est
merveilleux.
M.
Drolet (Rene) : Et, étant donné la température très élevée dans les
fours, on est capables, avec les procédés chimiques, de contrôler la pollution. Donc, les gens, des fois, sont un
peu inquiets, si tu brûles des pneus, mais la température est tellement
élevée que ça ne produira pas de dioxine ou de furanne, des choses comme ça. Le
contrôle est là.
Le
Président (M. Reid) : Alors, merci. Merci, M. Drolet.
Merci, M. Binette, de votre participation et de votre contribution
à nos travaux.
La commission ajourne ses travaux à demain,
jeudi 22 octobre, après les affaires courantes.
(Fin de la séance à 17 h 59)