(Dix heures deux minutes)
Le Président (M. Reid) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des transports et de l'environnement
ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission
est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des
consultations particulières sur le document de consultation intitulé Cible
de réduction d'émissions de gaz à effet de serre du Québec pour 2030.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire : Non, M. le
Président, il n'y a aucun remplacement.
Le
Président (M. Reid) : Alors, voici l'ordre du jour pour ce
matin : le Conseil patronal de l'environnement du Québec, d'abord,
et, ensuite, la ville de Montréal avec son maire.
Auditions (suite)
Alors, vous
connaissez la routine : vous avez 10 minutes pour faire votre
présentation, ensuite nous aurons une période d'échange avec les membres
de la commission.
Je vous demanderais de vous présenter et
présenter la personne qui vous accompagne, pour les fins d'enregistrement. À
vous la parole.
Conseil patronal de
l'environnement du Québec (CPEQ)
Mme Lauzon
(Hélène) : Bonjour, M. le
Président. Bonjour, M. le ministre. Bonjour, MM. les parlementaires — je regardais
s'il y avait une dame — MM. les parlementaires. Merci de nous permettre de nous prononcer
aujourd'hui sur la nouvelle cible à l'horizon 2030.
Je suis
Hélène Lauzon, la présidente-directrice générale du Conseil patronal de
l'environnement du Québec, le CPEQ,
pour les fins de la discussion d'aujourd'hui, et je suis accompagnée,
aujourd'hui, de M. Jean-Luc Allard, vice-président Environnement chez SNC-Lavalin et également vice-président du
conseil d'administration du CPEQ. Donc, vous avez sûrement eu, jusqu'à maintenant, des gens qui sont venus vous dire qu'il pouvait y
avoir une cible plus ambitieuse, d'autres
personnes qui vous diront qu'elle est trop ambitieuse, et, nous, ce que nous
tenterons aujourd'hui de vous dire, c'est que cette cible, qui est proposée par le gouvernement, de 37,5 % n'est pas adaptée à la réalité du Québec, elle
est très, très exigeante, elle sera peut-être trop exigeante, elle sera très
coûteuse et, selon nous, inatteignable en termes de réduction au Québec.
Donc, nous
vous ferons part des réalités, impacts économiques,
environnementaux, sociaux, mais aussi du peu de potentiel de réduction que nous estimons pour le secteur industriel,
l'effort colossal qui sera requis du secteur des transports, puis on va
quand même essayer d'imaginer peut-être des solutions pour amenuiser les
impacts.
Alors, je
vous ai fait préparer un PowerPoint qui va vous permettre de suivre. J'ai
essayé de faire des tableaux aussi
pour vous permettre... parce que ce n'est quand même pas un sujet si facile,
mais espérons qu'on a réussi à vous présenter quelque chose de plus
simple.
Pour vous
former une opinion pour savoir quelle devrait être la cible à l'horizon 2030,
il faut d'abord se demander où on en
est, en ce moment, à l'horizon 2020. À l'horizon 2020, vous le savez, c'est une
cible de réduction de 20 % que l'on
doit atteindre, 20 % par rapport à nos émissions telles qu'elles étaient
en 1990, et, cet objectif-là, on doit l'atteindre d'ici 2020. Donc, nous avions, au total,
84,4 mégatonnes en 1990 et, en l'horizon 2020, nous devons avoir
66,7 mégatonnes, ce qui correspond à une réduction de 17,7 — presque
18 — mégatonnes.
Quand on
regarde les informations à jour — donc, le gouvernement a des informations à
jour sur les émissions de gaz à effet
de serre — nous
sommes, en 2012, à moins 8 % sur moins 20 %, donc nous sommes rendus,
à 78 mégatonnes, à seulement 6,4 mégatonnes. Donc, vous voyez
qu'il y a un écart, il nous manque moins 12 % pour respecter notre cible.
Ce moins 12 % correspond à un effort additionnel de 11,3 mégatonnes à
atteindre d'ici 2020. Si on regarde l'évolution
du prix, d'ici 2020, du coût carbone, le prix carbone est à 17,16 $, ce
qui nous permet de penser que, d'ici 2020, nous serons obligés de sortir du Québec 193 millions de dollars
vers les États-Unis. Pourquoi? Parce qu'on ne pourra pas faire nos réductions ici. Donc, nous devrons
financer des réductions qui vont être faites à l'extérieur du Québec — pour
l'instant, c'est la Californie, aux États-Unis — et on ne voit pas le
potentiel de réduction additionnelle d'ici 2020, parce que, si vous prêtez attention à plusieurs graphiques qui se
retrouvent dans le document de consultation — et, dans notre mémoire, je vous l'ai précisé — le gouvernement lui-même semble reconnaître
que, d'ici 2020, il n'y a pas vraiment un potentiel additionnel de
réduction. Donc, on resterait à moins 8 % ou à 77,7 mégatonnes d'ici
2020, lorsque vous regardez les graphiques.
Maintenant,
comment on doit regarder la cible 37,5 %? Vous avez les mêmes chiffres que
tantôt, mais on a ajouté à... à l'horizon 2030, vous avez un
24,8 mégatonnes d'additionnel qu'on nous demande comme effort. Ce que le
gouvernement mentionne dans son document de consultation, c'est que
15 mégatonnes pourra être réalisé au Québec puis 9,8 mégatonnes devra être acheté, là aussi, pour l'instant, à
l'étranger, là, tant que l'Ontario et d'autres provinces ou États ne se seront pas officiellement joints au
SPEDE — Système
de plafonnement et d'échange de droits d'émission de gaz à effet de serre. Vous me permettrez de douter
qu'on puisse réduire de 15 mégatonnes au Québec en 10 ans, alors
qu'en 30 ans on aura réussi à réduire de seulement de 6,7 mégatonnes.
Alors donc,
même si on est optimistes puis qu'on croit ce que le gouvernement dit, à moins
15, il reste que, si on doit aller acheter 9,8 mégatonnes, on doit
les acheter au prix mentionné dans le document de consultation, puisque le document de consultation prévoit autour de
33 $ mais, malheureusement, le coût du taux de change n'a pas été pris
en compte. Donc, nous, on a pris en compte
le taux de change à 1,30 $, on s'est placés au 14 octobre pour
dire : Le taux de change à
1,30 $ fait en sorte que le coût carbone devrait être, d'ici 2030,
minimum, à 43,38 $. Pourquoi minimum? Parce que minimum, c'est si le coût monte de façon linéaire. Mais, si les prix
se mettent à augmenter considérablement parce qu'il va y avoir une
demande importante sur le marché, ça pourrait être plus. Donc, c'est un exode
appréhendé de 425 millions de dollars de capitaux. Les réductions ne
seront pas faites au Québec, elles seront faites à l'extérieur du Québec, parce que ce sont des coûts que l'on devra
assumer pour des réductions ailleurs parce qu'on ne sera pas capables de
les faire ici. Le gouvernement reconnaît que
le maximum qu'il pourrait peut-être faire, c'est moins 15, même si on en
doute, et c'est moins de... c'est-à-dire,
3 000 pertes d'emploi. Donc, vous voyez — on vous a reproduit le graphique, je vais
essayer d'y aller avec le petit pointeur, là — ici, vous voyez, là, en 2012
où nous étions, à, à peu près, 78 mégatonnes, et regardez comment la courbe avance tranquillement jusqu'en 2030. On
n'augmente pas. Le gouvernement reconnaît dans son document de
consultation qu'il n'y a pas beaucoup de marge de manoeuvre pour l'instant, là,
à baisser d'ici 2020 et encore moins 2030.
Donc, ce qu'on
vous dit, c'est que c'est une cible qui n'est pas adaptée à la réalité du
Québec. Pourquoi? Parce qu'au Québec
on produit déjà notre énergie renouvelable à 99,5 %. Ce n'est pas comme la
Californie ou d'autres États qui pourraient éventuellement se joindre
qui ont du charbon, qui ont du mazout. Ils ont seulement à fermer des
centrales, ils vont pouvoir réduire
considérablement leurs émissions. Ce n'est pas le cas au Québec. Aussi, au
Québec, nos émissions per capita,
c'est les plus basses, à peu près, parmi les pays industrialisés, donc ce
serait encore plus difficile pour nous que pour quiconque. Donc, c'est
une difficulté, ça, je l'ai déjà mentionné.
Donc, en
2020, le Québec n'aura pas réussi à réduire plus que 8 % de ses émissions
sur une cible de 20 %. En 30
ans, on pense que le Québec n'aura réduit que de 6,7 mégatonnes sur son
territoire, puis, en 10 ans, le Québec croit pouvoir réduire de 29,5 % ses émissions, c'est-à-dire
24,8 mégatonnes, quatre fois plus que ce qu'il aura réalisé en 30
ans, alors que ce qui reste à parcourir, ce
qui reste à faire, ce sont les réductions les moins manifestes, les moins
évidentes. Celles qui ont déjà été faites, c'étaient les plus manifestes, les
plus... oui, les plus manifestes, alors que ce qui reste à faire, c'est plus
difficile.
• (10 h 10) •
Là, le
document de consultation le dit, ce qui reste à faire, c'est le plus difficile. Donc, en d'autres termes,
presque quatre fois plus de réduction de GES
qui est demandé en deux fois moins de temps pour des réductions supplémentaires
de plus en plus onéreuses, d'où le questionnement : Est-ce que c'est
réaliste?
Pour ce qui
est du secteur industriel, je veux vous mentionner que, le secteur industriel,
il y a peu de potentiel de réduction.
Comment fonctionne le tout? Les industries, elles émettent soit des émissions
de procédés soit des émissions de combustion. Les émissions de procédés,
c'est votre recette. Elle ne peut pas changer, la recette. Donc, on ne peut pas
compresser les émissions de procédés, on a
fait ce qu'on pouvait. Les émissions de combustion, ce sont les
combustibles fossiles que vous utilisez pour alimenter vos fours, entre autres.
Beaucoup pourraient changer avec des technologies, effectivement, nouvelles, mais
à des prix très, très, très importants. Pour ce qui est de certains secteurs,
cimenterie, par exemple, ou aciérie, les technologies n'existent pas,
alors, même si on voulait le réduire, on n'y arriverait pas. Donc, ce
qu'on s'est dit, c'est que le maximum que le secteur industriel pouvait faire,
c'était 5,50 % de réduction, et je vous ai illustré la formule à
l'intérieur de notre mémoire.
Faute de
pouvoir réussir à réduire ses émissions au Québec, le secteur industriel, lui
aussi, sera contraint d'aller acheter
des crédits carbone sur le marché. Donc, un exode massif de capitaux, une
augmentation massive de la demande, donc
du prix aussi, avec un impact du taux de change. Il y a, par contre, des
mesures d'atténuation possibles, et ça, je crois que vous pourrez être
d'accord avec nous que ça pourrait être des idées intéressantes.
Le Fonds
vert. Le Fonds vert, il pourrait y avoir un pourcentage important de l'argent
du Fonds vert qui reviendrait à l'industrie. Après tout, c'est
l'industrie qui alimente le Fonds vert, principalement. Donc, ça serait intéressant
qu'il y ait un pourcentage important qui
retourne à l'industrie afin qu'on puisse moderniser les procédés industriels,
qu'on puisse moderniser les équipements, qu'on puisse financer des
projets en efficacité énergétique majeurs, parce que tous les projets ont été
faits. Les projets en efficacité énergétique qui restent à faire, ce sont les
plus dispendieux. On pourrait élaborer de
nouveaux protocoles, sauf que tous conviennent que les protocoles qui restent à
élaborer ne nous procureront pas tant
que ça de réduction, parce que le potentiel de réduction, si on comprend bien,
n'est quand même pas si élevé.
Il pourrait
être prudent pour le gouvernement de se préparer, de se prévoir un mécanisme de
sortie du SPEDE au cas où, un jour,
on s'aperçoive que pour notre économie ça pose des difficultés ou ça fait en
sorte qu'on a des difficultés sur le plan économique. Donc, un mécanisme
de sortie ou même un mécanisme de révision d la cible si c'était possible.
Alors...
Le Président (M. Reid) : En
terminant. Il reste quelques secondes.
Mme Lauzon (Hélène) : Il ne reste que quelques secondes qu'on pourra
continuer? Parce que l'effort colossal, c'est le transport. Le gouvernement estime que c'est
neuf mégatonnes. Nous, de notre côté, comme l'industrie ne peut pas
faire beaucoup plus, on estime que c'est
13 mégatonnes qui sortira là aussi, parce que, le transport, il ne faut
pas se leurrer... ce n'est pas
l'industrie, le transport, là, seulement, c'est tous, c'est M. et Mme
Tout-le-Monde, on devra complètement transformer
nos modes de vie, mais à quel coût?, puisque — je termine avec cette phrase — le plan d'action d'électrification qui nous a été annoncé prévoit
100 000 véhicules sur la route dans les cinq prochaines années,
150 000 de réduction de GES, mais, quand on fait le calcul, ça revient à
666 $ la tonne. Alors, si on veut éventuellement tout électrifier le
Québec, il faut quand même aussi s'assurer qu'on ne dépasse pas les coûts
raisonnables.
Je vous remercie de
votre attention et je suis prête à répondre à vos questions.
Le Président (M.
Reid) : Merci. Alors, nous allons commencer notre échange avec
le côté gouvernemental. M. le ministre, vous avez la parole.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, Me Lauzon,
M. Allard, merci pour votre présentation ainsi que votre mémoire. Et je tiens quand même à reconnaître
le travail de Me Lauzon au sein du Comité-conseil sur les changements climatiques. Vous avez assuré la
coprésidence de ce comité-là jusqu'à maintenant, et ça continue, d'ailleurs,
alors je tiens à vous remercier infiniment pour cet important travail.
Concernant votre
présentation aujourd'hui, est-ce que vous reconnaissez l'impératif qui a été
mis de l'avant notamment par le GIEC qu'il
faut absolument limiter le réchauffement planétaire à 2 % d'ici... à 2°,
pardon, d'ici 2050? Est-ce que c'est quelque chose que vous reconnaissez
comme factuel?
Mme Lauzon (Hélène) : Oui, bien sûr. Nous ne sommes pas des... Comment on les appelle, ceux
qui ne croient pas, là? Les climatosceptiques? Bien sûr, nous ne sommes
pas de cette catégorie.
M. Heurtel :
Non, non, mais je veux juste établir certains faits.
Mme Lauzon (Hélène) : Oui. Oui, mais, par contre, il y a des pays qui vont devoir faire
davantage de réduction, mais nous, on en a fait déjà beaucoup compte
tenu d'un choix historique qu'on a fait en hydroélectricité. Mais, oui, on le
reconnaît.
M. Heurtel :
Alors, on comprend que c'est l'affaire de tout le monde, ce n'est pas juste la
responsabilité d'un pays, ou d'une
population, ou d'une certaine classe de citoyennes ou de citoyens ou d'une
certaine classe d'entreprises. Alors,
conséquemment, le mouvement global, si on suit la tendance scientifique
actuelle, puis une tendance très, très lourde, il faut qu'on réduise sur
une base planétaire l'émission per capita à deux tonnes. Ça, est-ce que vous
reconnaissez ça comme étant factuel également?
Mme Lauzon
(Hélène) : De le réduire à deux tonnes?
M.
Heurtel : Per capita, pour se rendre à l'objectif de limitation.
Alors, ce que le GIEC dit — puis ça, ce n'est pas moi, là, c'est le GIEC : Il faut
réduire d'au moins 80 % à 95 % sur une base planétaire, d'ici 2050,
pour atteindre l'objectif de moins 2°, et ça, ça se revient...
M. Allard (Jean-Luc) :
...
M.
Heurtel : Bien, excusez-moi, monsieur, mais ça, c'est ce que le GIEC
dit. Et une des conséquences de ça, et ça, c'est la Californie qui le
dit, le Bade-Wurtemberg; des États fédérés à travers le monde disent que, pour atteindre ce 80 % à 95 % d'ici 2050, il
faut notamment se limiter à deux tonnes per capita. Alors, ce que je veux
savoir : Est-ce que c'est quelque chose auquel vous souscrivez également?
M. Allard (Jean-Luc) : Dans un monde idéal, c'est évident que oui. Et ce
qui nous inquiète actuellement, et c'était indiqué dans vos documents,
en fait, c'est l'aspect compétitivité du Québec par rapport aux autres États et
provinces. Actuellement, on est deux en
Amérique du Nord : en fait, le Québec et la Californie. Évidemment, l'année
prochaine, probablement que l'Ontario va se
joindre à nous. Mais, si on regarde les émissions per capita, on est déjà
beaucoup plus bas, on est à la moitié
de la moyenne canadienne, on est au tiers ou au quart de l'Alberta. On n'est
pas en train de dire qu'on va prendre
le modèle albertain au niveau des émissions. Par contre, ce qu'on aimerait,
c'est qu'il y ait une proportionnalité, dans le sens que, si tout le monde, demain matin, visait le deux tonnes
par habitant, on serait absolument d'accord que ce n'est certainement pas au Québec qu'on ne veut pas
faire notre part là-dedans. On l'a déjà démontré, qu'on en fait plus que
la moyenne, et à ce moment-là ce qui nous inquiète, c'est beaucoup plus le fait
que, compte tenu qu'on est déjà en hydroélectricité, on a déjà des véhicules
qui consomment moins que la moyenne en Amérique du Nord, ce qu'on est en train de faire, c'est de dire qu'on en fait
déjà plus et qu'on veut continuer à en faire toujours plus, et, dans la
mesure où les autres suivent — les autres États, les autres
provinces — on
ne verrait pas de problème. C'est : dans la mesure où il y a peu de
joueurs en Amérique du Nord dans le domaine, là on s'inquiète du volet
compétitivité.
Donc, on n'est
certainement pas en train de dire qu'on ne veut pas faire des choses.
M.
Heurtel : Bien, ce que j'ai du mal à suivre dans votre raisonnement,
c'est que, de un, quand vous dites qu'on est seuls... bien, l'Ontario, ça va faire plus de 50 % de
l'économie canadienne puis plus de 60 % de la population canadienne
qui va avoir un marché du carbone. Puis, si
on ajoute la Colombie-Britannique, qui a déjà une taxe carbone, c'est
près de 75 % du Canada qui va avoir un système... un, ou un autre système
de mécanisme de marché sur un prix carbone. Alors,
votre notion de solitude, j'ai du mal à la suivre, surtout quand également le
gouverneur Cuomo, de New York, a annoncé
la semaine dernière son intention d'élargir l'implication de l'État de New
York, qui a déjà un marché du carbone qui vise à peu près 20 % de
ses émissions. Il a fait ça avec le vice-président Gore et il a mentionné
nommément son intention d'explorer un lien avec le marché du carbone
Québec-Californie. Puis on voit qu'il y a déjà un marché du carbone en Europe.
La Chine en met un sur pied le 1er janvier prochain, la Corée du Sud... Alors,
je crois que, d'ici le 1er janvier prochain, il va y avoir plus de 40 % de
la planète qui va avoir une forme de marché de carbone, là.
Et, sachant
qu'ultimement on doit éliminer nos émissions, il y a beaucoup de joueurs qui
soutiennent la thèse qu'au niveau économique il y a un avantage de
prendre les devants. Puis, encore là, ce n'est pas juste moi. Quand on lit les discours, par exemple, du gouverneur de la Banque
d'Angleterre, un ancien gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, qu'il a donnés il y a deux semaines à
Londres, le rapport aussi de Citigroup sur justement la nécessité d'agir
de façon agressive puis qu'il y a des
avantages économiques, la commission canadienne d'écofiscalité, qui dit qu'il y
a un avantage économique à aller de
l'avant puis à être agressif, le rapport Calderón, remis aux Nations unies, qui
dit encore une fois qu'il y a plutôt
un avantage économique à avoir une posture offensive en matière de la lutte
contre les changements climatiques, comment concilier toutes ces
données-là avec votre position?
• (10 h 20) •
M. Allard
(Jean-Luc) : C'est assez
simple. Personnellement, ça fait plus de 15 ans, 20 ans que je... bien, ça
fait 35 années que je travaille en environnement, ça fait plus d'une quinzaine
d'années que je pousse et que j'aide mes clients
à réduire leurs émissions de gaz à
effet de serre. Et, en pratique, si
on retourne à ce qu'on voyait tantôt au
niveau des émissions per capita, ça fait 30
ans que les pays, les États ont de bonnes intentions par rapport aux gaz à effet de
serre. Malheureusement, si on regarde et qu'on fait l'historique des objectifs
que les gens ont eus depuis les années 90, ils ne les ont jamais
atteints. Et donc, dans ce sens-là, on n'est pas en train de dire qu'il ne faut
pas atteindre les objectifs, on est en train
de dire qu'en pratique, si on regarde les émissions per capita, si tout le monde signe et s'aligne pour aller vers le deux tonnes par habitant,
on est tout à fait d'accord qu'on aimerait bien que le Québec y arrive dans les
premiers. En pratique, les chiffres qu'on
voit là, ce n'est pas ça, là, ce n'est pas ce que les gens promettent depuis 30
ans. Donc, on fait juste s'inquiéter
que... Qu'on veuille aller là, aucun problème. Est-ce
qu'encore une fois on va y aller tout
seuls ou avec peu de joueurs? C'est
l'inquiétude qu'on a. Et la constatation depuis 30 ans, c'est que les gens
promettent beaucoup de choses et atteignent peu d'objectifs, malheureusement.
Le Président (M. Reid) : M.
le député de Mégantic.
M.
Bolduc : Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames, bonjour, monsieur. Il me fait plaisir de vous voir ce matin et
d'entendre, comment je dirais ça, une certaine incertitude par rapport à l'atteinte des objectifs. Ce que moi, j'aimerais vous entendre, parce que vous parlez ici de quelque chose qui m'interpelle directement, qui est le cas de la tordeuse, puis vous parlez qu'il devrait y avoir une façon de
regarder ça, là... Je voudrais juste comprendre ça, parce que — et
je vous donne le tableau général — on
a 750 000 kilomètres carrés de
forêt au Québec, ce qui représente à peu près, si on a un taux de
croissance faible, là... d'à peu près 16 millions de tonnes de
carbone, la tordeuse, en éliminant les parties qui sont endommagées, naturellement, on replante et on réabsorbe le carbone.
Donc, je ne comprends pas un peu votre commentaire ici. Je voudrais vous
entendre là-dessus.
Mme Lauzon
(Hélène) : Alors, la façon
d'essayer de reprendre le tout, puis je vais laisser M. Allard... mais
c'est un protocole. Parce que, vous savez,
il existe trois protocoles en ce moment au Québec, et on pourrait essayer
d'imaginer un nouveau protocole qui viendrait aider à régler cette
problématique-là puis à générer des crédits pour le dossier de la forêt. Mais
là je vais laisser M. Allard expliquer plus techniquement ce que ça veut dire
pour la tordeuse d'épinette.
M. Allard
(Jean-Luc) : Ce qu'on
souhaite, en fait, c'est qu'il y ait des protocoles additionnels qui
permettraient de donner une certaine
reconnaissance à ceux qui seraient proactifs au niveau de la séquestration du
carbone. Et essentiellement la
tordeuse de bourgeons d'épinette, c'est un exemple, mais il y en a d'autres au
niveau de la foresterie. Et essentiellement il n'y a pas de protocole
actuellement, au niveau des systèmes compensatoires, qui donne une
reconnaissance des réductions ou de la
séquestration de carbone. Et ça donnerait un signal, en fait, si on pouvait
avoir un protocole forestier ou des
protocoles forestiers qui encourageraient, en fait, des intervenants, que ce
soit public ou privé, mais, enfin, qu'on puisse aller de l'avant avec ce
volet-là au niveau de la réduction des émissions.
M.
Bolduc : Merci. Et vous nous parlez que, sur le plan industriel, il
n'y a pas beaucoup de possibilités. Je vais vous en nommer une couple,
là, pour le plaisir de la chose. Mais il y a, en fait, le procédé
Fischer-Tropsch — je
suis sûr que vous avez déjà entendu parler
de ça — qui, en
fait, récupère le carbone pour en reproduire des hydrocarbures. On a eu
une usine qui a été bâtie dans le sud des États-Unis en 2012. Il semble y avoir
un élan qui est en démarrage à ce chapitre-là. Le deuxième, c'est l'hydrogène.
Je nomme seulement que ces deux-là, il y en a d'autres.
Mais est-ce
que vous ne croyez pas qu'on devrait prendre des énergies considérables à faire
le tour de ces questions-là et de
voir, si c'était juste pour l'exercice académique, à partir de quel prix le
pétrole rend ces procédés-là très rentables, etc., ce qui aurait une
image complètement différente du baril de pétrole à 43 $? Je voudrais vous
entendre là-dessus.
M. Allard (Jean-Luc) : Oui. Bien, écoutez, vous avez absolument raison.
Quand on dit qu'il n'y a pas de solution, c'est plus qu'il n'y a pas de
projet à des coûts de revient au coût du carbone actuel. C'est évident que, si
le prix du pétrole augmente, si le coût de la tonne de CO2 augmente,
il y a plein de nouveaux projets. Un exemple extrêmement concret : l'Alberta a annoncé récemment
qu'ils augmentaient leur coût carbone de 15 $ à 30 $ la tonne, et il y a plein de projets qui sont en train d'être établis, mis en
place, en fait, parce qu'à 30 $
il y a de nouveaux projets qui sont possibles.
Donc,
à mesure que le coût carbone va augmenter, vous avez absolument raison, ce
n'est pas que ça ne peut pas... on ne
peut pas réduire. Un bel exemple de ça, en fait, une centrale au charbon à
SaskPower, SNC-Lavalin a construit le plus gros système de captage
commercial au monde au niveau du CO2, plus de 1 million de
tonnes par année.
Donc,
des solutions, il y en a. Le coût est de 60 $, 75 $, 100 $ la
tonne. Et c'est pour ça que, dans nos solutions, un des derniers acétates, on disait : Si une
partie du Fonds vert était réinjectée par un fonds technologique ou un
programme d'investissement ou un programme d'amélioration d'efficacité
énergétique, ça permettrait aux industries... Juste pour donner un exemple : actuellement, une
industrie, si le coût de revient ne se finance pas en deux ou trois ans, les
gens n'iront pas de l'avant à cause de plein de facteurs, de
l'incertitude, etc. S'il y avait un programme financier qui assistait les
compagnies à prendre un projet qui est à deux ou trois ans et de l'amener jusqu'à
six ans, bien, il y a déjà toute une série de projets qui seraient possibles.
Et donc ce n'est pas
qu'il n'y a pas de solution, c'est toujours un rapport avec le coût.
M.
Bolduc : Donc, vous nous dites puis vous confirmez qu'il y a une
sensibilité extrêmement élevée au prix des hydrocarbures ou du pétrole,
sur une base large.
M. Allard
(Jean-Luc) : Le coût carbone en général, vous avez raison.
M. Bolduc :
O.K. Donc, ça, c'est un point.
Le
deuxième point, pour moi, c'est que, si on regarde... fait la comparaison, en
fait, entre l'Amérique et l'Europe sur
les récupérations d'énergie, en fait, en Europe, on le sait très bien, les
entreprises, dans le sens large, sont généralement très intégrées avec leurs pertes énergétiques, même ce
qu'on appelle la basse densité, là, O.K., puis ça, ça crée des
opportunités qui, en Amérique du Nord, sont
très peu développées. Est-ce que vous ne voyez pas, là aussi, une espèce de...
comment je dirais ça, de mine d'opportunité pour, surtout dans les milieux
urbains, où on a 80 % de la population, commencer à penser dans une
nouvelle direction?
M. Allard (Jean-Luc) : Encore une fois, je peux juste vous donner
raison. Et, en fait, je peux même donner un exemple. La Suède, qu'on voit, qui est, en deçà du Québec, à
6,3 tonnes — et donc,
bien, c'est dans le bon sens — a, depuis les années 90, des programmes d'efficacité énergétique, subventionne des
audits d'efficacité énergétique, etc. Donc, on met en place des
programmes qui motivent, en fait, puis qui incitent soit au niveau fiscal ou
autre et qui donnent des incitatifs pour que les compagnies, les individus, les
commerces, etc., soient de plus en plus efficaces.
Même
chose au niveau du coût de l'essence quand on donne un signal carbone en
augmentant le coût des carburants. Ça
aussi, si on donnait un signal d'augmentation du coût de carburant pour les
prochains cinq, 10, 20 ans et continuellement
à la hausse, c'est évident que les gens, avant de choisir un véhicule qui
consomme beaucoup, feraient des choix probablement différents.
M.
Bolduc : Merci. Donc, juste à suivre l'exemple de la Suède, vous nous
donnez une opportunité de 30 %, là. Vous avez amélioré notre
situation considérablement dans le débat, donc ça, c'est très bien.
Le Président (M.
Reid) : Il reste quelques secondes, M. le député de Mégantic.
M. Bolduc :
Écoutez, je vous remercie pour le point de vue, c'était enrichissant, puis je
vous souhaite une belle journée.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Alors, nous passons maintenant à
l'opposition officielle et à son porte-parole, M. le député de
Terrebonne.
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, Mme Lauzon,
M. Allard, merci d'être avec nous en cette commission.
Vous avez dû avoir
des bonnes discussions au niveau du comité-conseil, là. C'est ce que je me
rends compte à force de voir les
intervenants passer autour de cette table. Vous nous tracez un portrait quand
même relativement très sombre de ce
qui, dans le fond, s'en vient pour nos cibles en termes de réduction de gaz à
effet de serre. Vous êtes, je vous dirais,
le groupe le plus... je n'ose pas dire «pessimiste», mais le plus prudent sur
la question, jusqu'à présent. Vous nous dites que le Québec se dote
d'une cible trop ambitieuse. Certains recommandent au gouvernement du Québec
d'aller jusqu'à 50 % de réduction d'ici 2030, évidemment, 100 % d'ici
2050, 90 %.
Et donc vous trouvez
que c'est trop ambitieux, mais, en même temps, avez-vous une proposition
réaliste, pragmatique à nous faire? Je n'ai pas entendu une cible ou peut-être
que ça a passé rapidement.
• (10 h 30) •
Mme Lauzon (Hélène) : Oui. Alors, oui, ça a peut-être passé rapidement. Une proposition
réaliste est de dire : Compte tenu de ce qu'on sait du secteur
industriel, il y a un potentiel peut-être maximal de réduction de 5,50. Mais
les suggestions que l'on vous fait, c'est qu'il y a un pourcentage...
À l'instar du transport,
peut-être que vous savez qu'en ce moment deux tiers des revenus qui proviennent
des enchères doivent être consacrés au
transport, nous, ce qu'on dit, c'est qu'il y a un autre pourcentage important
qui doit être consacré au secteur
industriel provenant du Fonds vert pour permettre au secteur industriel de moderniser
ses procédés, comme je le
mentionnais, ses équipements, les projets en efficacité énergétique majeurs avec des retours sur investissement.
On se faisait même dire il y a
deux semaines par les entreprises : Maintenant, nos sièges sociaux, ce qu'ils nous
demandent, c'est : retour sur investissement en moins de deux ans, ce qui
est très, très rapide. Donc, on a besoin de financement important pour des projets comme ceux-là, l'élaboration de nouveaux
protocoles, mais il y a sûrement des nouvelles, là... éventuellement, puis, bon, un mécanisme de sortie, mais ça, c'est plus pour la
prudence. Ça, c'est pour le secteur industriel.
Pour le
secteur de transport, je vous amène ici, là aussi, donc, sur le deux tiers des
sommes qui proviennent des enchères
et qui doit être consacré au transport, on croit qu'il y a un pourcentage de ce
deux tiers qui doit aussi être retourné aux entreprises pour leur
permettre, là encore, là, dans ce cas-là, à moderniser leurs parcs automobiles,
favoriser le développement de biocarburants, convertir des véhicules lourds
vers le gaz naturel, intégrer la fameuse logistique verte, qui
fait qu'on a des parcours qui sont moins...
qu'on consomme moins d'essence, on a des kilométrages évités, on
améliore l'intermodalité puis on peut créer,
avec l'intermodalité aussi, des synergies : plutôt que des camions
repartent vides, ils pourraient repartir pleins en créant des synergies
entre entreprises.
Donc, c'est
des solutions que l'on propose autant pour le secteur industriel
par rapport aux émissions du secteur industriel que par
rapport à leurs émissions provenant de leurs transports.
M.
Traversy : Oui, puis
j'ai lu effectivement, donc, dans vos conclusions et dans votre
présentation aussi, ces recommandations. C'est intéressant notamment
au niveau, là, des nouvelles technologies, des retombées,
de la prudence aussi avec laquelle
vous amenez le gouvernement à dire : Écoutez, il faudrait penser à
des mécanismes de révision ou encore possiblement de sortie. Donc, vous
explorez toutes les alternatives. Vous êtes le premier groupe qui nous en fait
part.
Est-ce que vous avez donc une cible qui serait
réaliste et pragmatique à vos yeux, au-delà de toutes ces recommandations?
Mme Lauzon
(Hélène) : Alors, pour nous,
pour le secteur industriel, c'est, maximum, 5,50 %. Et puis je peux vous amener à la page du mémoire, là, où on fait notre formule de calcul. Pour
l'ensemble du Québec, je crois que ça serait difficile de se
prononcer, mais au moins, comme on représente le secteur industriel, on peut
vous dire, si la cible est à 37,5 %, ce
qu'on fait comme calcul : on part de 37,5 %, on déduit 21 %,
puisque le secteur industriel a déjà réduit, lui, de 21 % — il a atteint la cible, il l'a même
surpassée, il est à 21 % — ce qui nous amène à 16,5 %, et on
multiplie par 31,6 %, qui est la
part du secteur industriel selon l'inventaire des émissions de gaz à effet de
serre, pour une réduction maximale, pour le secteur industriel, pour
nous, de 5,50 %. C'est ce qu'on pense que le secteur industriel devrait
assumer, au maximum.
M.
Traversy : Parfait. Merci beaucoup. Maintenant, c'est beaucoup
plus clair. Je vois que vous mettez, donc, beaucoup l'emphase, là, sur la transformation de biocarburants, se
tourner vers le gaz naturel pour les transports lourds. Par contre, je
n'ai pas entendu beaucoup parler de l'électrification des transports dans votre
présentation.
Est-ce que vous êtes motivés aussi par cette
avenue, qui a été amenée par plusieurs groupes, par le ministre lui-même, là, dans votre cahier de propositions et
qui, dans le fond, là, fait l'objet de plusieurs débats au niveau de la
loi zéro émission, bon, de différentes recommandations? Je voulais vous
entendre également là-dessus.
Mme Lauzon
(Hélène) : Pour ce qui est
de l'électrification, oui, on ne peut pas être contre. Au contraire, je
crois que c'est un début.
Ce qui nous préoccupe, c'est le coût carbone qui
vient avec le plan d'électrification. On a vu, comme on le mentionnait, qu'il y a une estimation de 150
000 tonnes par année de réduction potentielle des émissions de gaz à
effet de serre avec le plan
d'électrification qui a été déposé. Nous, ce que l'on fait, c'est... si
l'investissement du gouvernement ou l'investissement
qui est escompté pour le plan d'action est de 500 000 $ avec des
réductions projetées de 150 000 tonnes par année, ça représente seulement 1,6 % de
l'objectif gouvernemental, ce qui est très, très peu, et ça équivaut à
666 $ la tonne, selon nos
calculs. Si on voulait ramener le coût de la tonne à 33 $, là — le gouvernement pense que le prix carbone
sera à 33 $ en 2030 — si on voulait ramener le coût des véhicules
à ce coût-là, ça nous prendrait 1 million de véhicules électriques
sur la route par année. C'est très, très ambitieux. Donc, c'est pour ça qu'on
incite le gouvernement à la prudence, parce qu'on dit : Oui, il faut y
aller, mais est-ce réaliste de penser qu'on peut y arriver aussi rapidement?
M. Allard
(Jean-Luc) : En fait, on
n'est certainement pas contre l'idée d'électrification des véhicules dans
la mesure où le Québec, en fait, a des
émissions carbone extrêmement faibles à cause de son hydroélectricité. Et, dans
ce sens-là, bien le plus d'électrification des transports il y a, le mieux.
Notre seule
inquiétude, encore une fois, ou la contrainte qui est associée à ça, c'est le
coût par tonne de réduction des
émissions. Donc, essentiellement, pour un budget donné qui est essentiellement
le Fonds vert ou plus, on aimerait avoir le plus de réduction possible.
Donc, premièrement, commencer par trouver les réductions qui sont à moindre
coût, dans la mesure où c'est possible.
M.
Traversy : Alors, je
vois votre intervention aujourd'hui
comme une espèce de signal d'alarme,
de cri du coeur. Vous êtes des
sonneurs de cloches, autrement dit, vous voulez ramener un peu le balancier en équilibre.
Je comprends que, dans votre message, votre
introduction, vous semblez laisser sous-entendre que le gouvernement n'est pas nécessairement dans
le déni mais qu'il y a beaucoup de... qu'il est très optimiste, là, donc, dans sa
façon de voir les choses, et vous sentiez donc le besoin de les ramener
un peu plus au ras des pâquerettes. C'est donc le fond du message que vous nous
lancez ce matin.
Mme Lauzon (Hélène) : Oui, on l'incite
à la prudence, à la grande prudence.
M.
Traversy : Je vous remercie beaucoup pour toutes ces réponses et pour votre présence aujourd'hui à Québec.
Le
Président (M. Reid) :
Merci. Nous passons maintenant au deuxième
groupe d'opposition avec son porte-parole M. le député de Masson.
M.
Lemay : Merci, M. le Président. Merci d'être ici avec nous aujourd'hui. Vous savez, dans votre présentation, j'ai très apprécié vos
commentaires, parce qu'effectivement à la lecture, dans le fond, du document de
consultation je trouvais personnellement que
les moyens pour atteindre, faire la réduction, au Québec, des
15 mégatonnes semblaient insuffisants.
Mais, bon, vous semblez dire qu'on devrait en faire plus. On fait juste
regarder l'état du Fonds vert, vous en avez
parlé, il y a des surplus mais qui ne sont pas encore... des sommes qui ne sont
pas encore allouées. Donc, on voit dans vos pistes de solution un peu où
on pourrait allouer les sommes.
Quelque chose qui m'intéresse particulièrement,
vous en avez déjà discuté auparavant, c'est concernant les transports. Bon, vous en avez parlé beaucoup,
l'électrification des transports, c'est trop peu... tu sais, ça coûte trop
cher pour trop peu de réduction. On a eu
d'autres groupes qui sont venus nous rencontrer qui nous ont dit : Bien,
on devrait aussi, si on veut y aller
dans la conversion des véhicules lourds au diesel, les convertir vers le gaz
naturel comprimé. Vous semblez mentionner
que ça pourrait être une avenue intéressante. Moi, je fais juste penser, à
Terrebonne, on a le groupe Enviro Progressive solutions, qui d'ailleurs
ont gagné un Griffon d'Or en fin de semaine pour leur projet de leur usine de biométhanisation. Ils sont en mesure de fournir
pour l'équivalent de 35 000 résidences en gaz naturel puis ils
produisent même quatre mégawatts
d'électricité, donc c'est un modèle à suivre. J'imagine que, si on avait
quelque chose à faire, avec nos sites d'enfouissement, comparable au
Québec, une alternative serait d'y aller dans cette idée-là et d'en profiter pour convertir les flottes des municipalités, bon,
en fait, tous les camions, là, qui ont à faire du transport régional et,
donc, de l'intermodal, là, j'imagine aussi. Ça peut être dans cet ordre
d'idées.
M. Allard
(Jean-Luc) : Ça ferait
certainement partie... En fait, il y a déjà un programme au niveau
réutilisation ou valorisation des matières
résiduelles, et c'est un excellent programme. Malheureusement, on ne voit pas
autant de projets qu'on aurait pu
l'anticiper il y a plusieurs années. Et, dans ce sens-là, une des approches,
c'est peut-être de faire un appel d'offres de réduction de gaz à effet
de serre où à peu près n'importe quel serait projet serait invité, et un des
critères serait le coût carbone, donc le coût par tonne de réduction, et, à ce
moment-là, ça inciterait des intervenants avec de l'imagination où... Au Québec, on a toujours eu un faible pour créer ou
améliorer des technologies. Bien, à ce moment-là, ça permettrait à quiconque qui a une bonne idée de
la faire valoir et de voir dans quelle mesure, en fait, son projet
pourrait contribuer à réduire les gaz à effet de serre mais à un coût de
revient intéressant... plus intéressant, en fait.
M.
Lemay : Bon. Parfait. Ça fait que, dans le fond, on va revenir à la
perspective économique, parce que, dans le fond, dans votre message, c'est simplement de dire : Si nous, on y
va de l'avant de façon trop ambitieuse, on va avoir un impact négatif sur notre économie, puis ça va
avoir un impact sur les entreprises. C'est un peu le message que je
comprends. Dans le fond, dans le document
d'analyse, on sait... puis vous l'avez mentionné dans votre présentation, là,
tu sais, il y a des impacts, là,
négatifs sur l'économie, là, tu sais, moins 600 millions sur notre PIB,
vous l'avez mentionné aussi, et des pertes d'emploi, environ
3 000 emplois, qui est associé à la réduction de 37,5 %.
Maintenant, ça, c'est un portrait négatif pour l'économie.
Là, vous avez
mentionné dans votre réponse précédente le facteur innovation technologique.
Ça, c'est quelque chose qu'en fait je
crois qu'on doit mettre de l'avant dans le développement de nouvelles
technologies et créer de nouvelles occasions
d'affaires. Ça fait que, selon vous, là, c'est quoi, là, les perspectives
positives sur l'économie, là, dans le fond, qu'on devrait focusser?
• (10 h 40) •
Mme Lauzon
(Hélène) : C'est certain
qu'on pourrait avoir un facteur d'attraction pour des entreprises en
disant : Les entreprises les plus performantes sur la planète pourraient
être incitées à venir s'installer ici, et c'est ce qu'on tente de faire, d'ailleurs. Je crois qu'à chaque
fois qu'on tente d'attirer de nouvelles entreprises au Québec on le
vend, entre autres, en fonction de nos coûts d'énergie. Et là ça pourrait être
un message de dire : Bon, bien, on tente d'attirer des entreprises
performantes. Mais on va encore recevoir, je pense, des demandes pour avoir des
entreprises qui vont s'installer ici qui
vont utiliser l'énergie fossile, et c'est un des commentaires que l'on formule
dans le mémoire en disant : Ne serait-ce que pour se stabiliser aux
émissions actuelles, il va falloir travailler fort parce qu'il y a des
nouvelles entreprises qui vont venir
s'installer et qui vont générer des émissions additionnelles. Alors, juste ça,
c'est un défi, mais il faut aussi
continuer à attirer des entreprises innovantes, des entreprises qui vont venir
favoriser l'apparition de nouvelles technologies pour venir aider les
entreprises avec des nouveaux procédés.
M. Lemay : Alors, selon vous, est-ce
que ça serait par le Fonds vert qu'on pourrait le faire ou Investissement Québec? Admettons, on prend, par exemple, on
dit... on donne un exemple, là, c'est fictif, là, mais, admettons, je
parle de Tesla, en
Californie, puis on dit : Bien, nous autres, on est prêts à les accueillir
en sol canadien, au Québec, leur tout premier centre d'innovation technologique, tu sais, création des batteries, tout
le kit. Est-ce qu'on devrait ouvrir le tapis rouge puis dire : Venez-vous-en, parce que justement
vous allez contribuer à l'atteinte de cibles de nos réductions de gaz à effet
de serre?
M. Allard (Jean-Luc) : Dans la
mesure où on crée de la richesse et on amène des volets technologiques peu émetteurs, c'est 100 % compatible avec
l'objectif dont on discute aujourd'hui. Il y a des cas où ce seront des
industries qui sont émettrices, mais, dans
la mesure où ils utilisent la meilleure technologie au niveau planétaire, les
meilleurs combustibles au niveau planétaire, on est d'avis qu'il ne
faudrait pas nécessairement leur dire non, parce qu'en fait au niveau... Moi, ce que j'ai bien aimé du document, en fait,
qui expliquait les objectifs, c'est qu'on rappelait, en fait, que c'est
un enjeu planétaire. Et donc on enlevait le
fait de dire : Est-ce qu'il faut juste regarder le Québec comme un tout?,
et la réponse, c'est non. C'est
que, si un projet, au Québec, augmente les émissions du Québec mais réduit
celles au niveau planétaire, je pense
qu'on devrait le considérer comme projet. Et, dans ce sens-là, si on a des
projets avec Tesla qui sont peu émetteurs, bravo. Si on a des projets
qui sont les meilleurs au monde mais qui sont quand même émetteurs, il ne
faudrait pas nécessairement dire non, et, dans ce sens-là, il faut se donner
une flexibilité.
C'est pour ça
que ça devient difficile, à un moment donné, de dire : Notre objectif est
de réduire les émissions à deux
tonnes par habitant dans un contexte où tous les États, tous les pays ne vont
pas dans le même sens, d'une part, et, d'autre
part, dans le sens que, si on réduit nos émissions considérablement, en fait,
on ne veut pas s'empêcher d'avoir des projets qui pourraient être
émetteurs.
M. Lemay : Merci beaucoup.
Le
Président (M. Reid) : Alors, Mme Lauzon, M. Allard, merci
beaucoup pour votre contribution à nos travaux.
Je suspends
les travaux pour quelques instants, le temps de permettre à nos prochains
invités de prendre place.
(Suspension de la séance à 10 h 43)
(Reprise à 10 h 45)
Le Président (M. Reid) :
Alors, nous reprenons nos travaux. J'attends le...
Une voix : ...
Le Président (M. Reid) : Oui.
Alors, nous pouvons reprendre nos travaux.
Je souhaite
la bienvenue au maire de Montréal et aux personnes qui l'accompagnent. Vous
connaissez la routine : vous
avez une dizaine de minutes pour faire votre présentation, par la suite nous aurons un échange avec les
membres de la commission. Je vous demande,
pour les fins d'enregistrement, même si tout le monde vous connaît, de vous
présenter et de présenter les personnes qui vous accompagnent.
Ville de Montréal
M. Coderre
(Denis) : Merci, M. le Président. Alors, je suis en compagnie de M.
Lionel Perez, membre de mon comité exécutif, et M. Roger Lachance,
membre du Département d'environnement à la ville de Montréal. Ça va?
Le Président (M. Reid) : Oui.
M. Coderre (Denis) : Merci beaucoup.
Alors, M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs de la commission,
merci de m'accueillir parmi vous ce matin.
À l'aube de la 21e Conférence des parties de la
Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, il importe plus que jamais d'établir des mécanismes de
collaboration efficaces entre les différents acteurs de la société québécoise afin que nous puissions, à
Paris, en décembre prochain, porter un message commun relativement à l'importance d'agir pour lutter contre les
changements climatiques. La discussion d'aujourd'hui est également
propice pour aborder les principaux aspects
qui rendront possible et surtout efficace cette collaboration entre le
gouvernement du Québec et la métropole en matière de lutte aux
changements climatiques.
La ville de Montréal appuie la cible de
réduction de 37,5 % d'ici 2030 proposée par le gouvernement avec la recommandation du Comité-conseil sur les
changements climatiques. Cette cible est à la fois ambitieuse et réalisable
et elle s'inscrit en cohérence avec les actions que la ville de Montréal a
elle-même entreprises en ce sens depuis maintenant plus d'une décennie.
Comme vous le
savez, la ville de Montréal est proactive en matière de lutte contre les
changements climatiques. En fait,
toute son action est guidée par les principes de développement durable, ce qui
inclut évidemment la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Plus particulièrement, l'île de Montréal s'est dotée d'objectifs clairs en
matière de réduction d'émissions de GES. Au
niveau corporatif, c'est-à-dire les actions de la ville et des villes de
l'agglomération elle-même, elle avait déjà
en 2009 atteint une réduction de 28 %. Cela dit, les émissions
corporatives comptent pour seulement 2 % du total des émissions de
la collectivité montréalaise. L'agglomération a beau dépasser ses propres
objectifs, le vrai défi
est ailleurs. Dans ce domaine, nous avons avancé, mais il reste du chemin à
faire. En 2009, les émissions de la collectivité montréalaise avaient
été réduites de 6 %, ce qui est encourageant, mais nous sommes encore loin
de notre objectif de 30 % visés d'ici
2020. On doit maintenant travailler à influencer les comportements afin d'agir
sur la collectivité. Ceci ne pourra se faire sans un partenariat étroit
avec le gouvernement du Québec. Cela va au-delà d'un réflexe Montréal. En matière de lutte aux GES, la Québec
ne peut se passer de la contribution de la métropole, et la métropole ne
peut se passer de l'appui du gouvernement. L'atteinte de nos objectifs communs
en dépend.
Montréal, je
le mentionnais plus tôt, a pour objectif de réduire d'ici 2020 ses émissions de
GES de 30 % par rapport à leur
niveau de 1990. Aujourd'hui, nous discutons d'une cible québécoise de réduction
de 37,5 % d'ici 2030. Certains discutent même de cibles pour 2050.
Le fait de fixer des cibles de meure, en ce qui me concerne du moins, la partie
la plus facile de l'exercice. Il est
maintenant temps de faire un pas de plus, c'est-à-dire qu'il faut se concentrer
sur l'atteinte des résultats. Pour y
arriver, toutes les parties prenantes devront mettre l'épaule à la roue et
s'entendre sur des actions communes. Montréal est proactive, mais encore
faut-il avoir les moyens de nos ambitions.
Ce n'est pas
un secret, le secteur des transports est le principal émetteur de CO2
dans l'agglomération montréalaise. C'est
donc dans ce domaine où nous devons agir le plus rapidement et le plus
efficacement, puisque c'est là que les résultats seront les plus importants. Pour diminuer de manière substantielle les
émissions du secteur des transports, il est impératif de procéder à des
changements structurels et d'inverser la tendance qui consiste à développer nos
milieux de vie en fonction de l'automobile. Montréal s'est également engagée,
notamment avec la mise en oeuvre du PMAD, le Plan métropolitain d'aménagement et de développement, dans la voie du TOD,
c'est-à-dire le Transit-Oriented Development, un aménagement du
territoire qui s'effectue désormais dans le sens d'une densification des
quartiers autour des pôles de transport
collectif. De plus, la ville souhaite travailler de concert avec le gouvernement
du Québec afin de poursuivre sur la voie
de l'électrification des transports. Montréal compte s'appuyer concrètement sur
la stratégie québécoise d'électrification des transports notamment en migrant sa flotte corporative vers des
véhicules électriques, en mettant en place un vaste réseau de bornes de
recharge, en plus de développer l'électrification des autobus de la STM.
• (10 h 50) •
En matière de transport collectif, je le
rappelle, les besoins sont criants. Le MTQ évalue que, d'ici 2031, la croissance combinée de la population et des
emplois dans la région métropolitaine se traduira par une augmentation
de près de 1 million de déplacements
quotidiens. Ceux-ci ne pourront s'effectuer selon le mode traditionnel de
l'auto solo. Le réseau routier est déjà saturé. Heureusement, le nouveau
modèle de gouvernance du transport en commun qui sera bientôt proposé pour la
région métropolitaine permettra aux élus de la région d'avoir les coudées
franches pour faire avancer le transfert modal vers le transport collectif et
le transport actif.
De plus, les
projets d'envergure qui seront financés par la Caisse de dépôt et placement du Québec nous permettent d'entrevoir l'avenir avec optimisme. Ceux-ci
auront, bien évidemment, des bénéfices environnementaux concrets, mais ils contribueront également
à l'essor économique de la métropole
ainsi qu'à l'amélioration de la qualité de vie des citoyens. La contribution de la métropole à la
réduction des émissions de GES passera principalement et nécessairement
par le développement du transfert modal de l'auto solo vers les autres modes de
transport.
Il est clair
que la cible de réduction des émissions de GES fixée pour 2030 pour le Québec
ne pourra être atteinte sans cette
contribution de la métropole. Nous devons donc dès à présent concentrer nos
efforts vers l'atteinte de ces résultats.
La ville de
Montréal a entrepris de poursuivre la transition vers une économie sobre en
carbone, c'est-à-dire, en conjuguant
la réduction des émissions de GES à une croissance économique responsable avec
une stratégie que nous avons baptisée
Transition Montréal 21. En misant sur l'innovation et la mobilisation des
acteurs, Montréal entend soutenir le déploiement
d'une économie circulaire où les rejets et les sous-produits des différents
secteurs économiques alimentent et servent
d'intrants à d'autres activités de production. Ainsi, la mise en place de notre
réseau d'usines de biométhanisation permettra
de réintroduire le biogaz dans le réseau Gaz Métro. Cette même approche
permettra également de développer un nouveau secteur de la chimie verte
qui pourra bénéficier d'étroites synergies avec le secteur plus traditionnel de
la pétrochimie, basé dans l'est de Montréal
et en Montérégie. Encore là, une action concertée du gouvernement du
Québec, de la ville de Montréal et de
l'industrie a le potentiel de donner des résultats probants à la fois au plan
environnemental et à celui de la diversification économique.
La
mobilisation des citoyens. Par ailleurs, si le partenariat entre le Québec et
la métropole est un élément nécessaire d'une lutte efficace contre les
changements climatiques, la mobilisation citoyenne l'est tout autant.
L'atteinte de nos objectifs de réduction des
émissions de GES passe nécessairement par l'évolution des comportements
individuels. Ceci demeure une
condition centrale de la réussite. Voilà pourquoi la ville de Montréal accorde
une si grande importance à la consultation
publique sur la réduction de notre dépendance aux énergies fossiles qui s'entamera
sous peu sous l'égide l'Office de consultation publique de Montréal.
Cette démarche, issue d'une initiative citoyenne, vise à mobiliser les
Montréalais quant aux choix qu'ils posent quotidiennement.
M. le Président, en tant que président moi-même
de la Communauté métropolitaine de Montréal, j'ai aussi demandé à notre
commission de l'environnement de tenir des consultations sur le Projet
d'oléoduc Énergie Est de la compagnie
TransCanada, consultations qui viennent de se terminer et dont le rapport sera bientôt
déposé. Au total, près de
160 organisations, municipalités et citoyens se sont exprimés sur le
projet d'oléoduc, et huit séances publiques ont eu lieu dans l'ensemble de la région métropolitaine.
Ce rapport sera porté au BAPE ainsi qu'à l'Office national de l'énergie.
C'est toute la question du transport de pétrole et de notre dépendance aux
énergies fossiles qui est en jeu dans cette consultation.
Par ces démarches, la ville souhaite connaître les préoccupations des citoyens
pour ensuite être à même de jouer son
rôle de gouvernement de proximité et de porter leur parole. Je compte le faire
auprès du gouvernement du Québec comme
je le fais aujourd'hui. Je le fais également à l'échelle fédérale avec mes
collègues du caucus des maires des grandes villes du Canada et aussi à
l'échelle internationale en tant qu'ambassadeur de Metropolis à la COP21 en
décembre prochain.
En
guise de conclusion, permettez-moi de vous soumettre trois recommandations qui,
à mon avis, offrent une contribution concrète pour rendre possible l'atteinte
de la cible fixée par le gouvernement du Québec en matière de réduction des
émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030.
Un,
d'abord, que le gouvernement du Québec et la métropole portent un message
commun dans le cadre de la COP21 et
que ce message reconnaisse le rôle des villes comme chefs de file dans la lutte
aux changements climatiques.
Deux, ensuite, qu'au
retour de la COP21 soit conclu un partenariat entre le gouvernement du Québec
et la métropole autour des enjeux relatifs
au transport de personnes. Ce partenariat aura pour pivot une stratégie
conjointe en matière
d'électrification de transport. Montréal souhaite également saisir pleinement
les possibilités de développement qui
seront générées par la réforme de la gouvernance du transport collectif et par
les projets financés par la Caisse de dépôt et placement du Québec.
Finalement, trois,
que des dispositions soient incluses dans le statut de métropole pour soutenir
les stratégies de transition de l'économie
montréalaise vers une économie sobre en carbone, incluant le développement
d'une économie circulaire, le
développement d'un secteur de la chimie verte, le soutien à un centre-ville
vert et d'autres initiatives visant à réduire les gaz à effet de serre
occasionnés par la production de biens et services dans la métropole.
Sur ce, je vous
remercie puis je suis prêt à répondre à vos questions. Merci beaucoup.
Le
Président (M. Reid) : Merci, M. le maire. Nous commençons notre
échange avec le côté gouvernemental. M. le ministre, vous avez la
parole.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, M. le maire, M. Perez, M.
Lachance, merci beaucoup de vous être déplacés personnellement pour cet
échange très important et merci pour votre mémoire également.
Première
question. Je sais que vous êtes ici en tant que maire de Montréal, mais vous
avez mentionné la CMM également. J'aimerais ça, d'entrée de jeu, avoir
votre sentiment... puis je comprends que vous ne parlez pas au nom de la CMM, mais quand même un sentiment, en tant
que président de la CMM, un sentiment... le sentiment que vous avez ou
l'impression que vous avez de la position de l'ensemble des membres de la CMM
par rapport à ce dont vous avez parlé ce matin.
M. Coderre
(Denis) : Merci pour la question. On en discute continuellement,
évidemment, au niveau de la CMM. Le fait
qu'on a le PMAD, le fait qu'on protège les milieux humides, le fait qu'on pose
des gestes très concrets au niveau de
la trame verte et la trame bleue, je pense que ça va de pair qu'on doit
nécessairement combattre les gaz à effet de serre. Donc, pour moi, c'est
réaliste, et, déjà depuis très longtemps, même mes prédécesseurs, quand on
parlait au niveau de la CMM, là, c'était quelque chose où on avait une
sensibilité.
Aujourd'hui,
je pense qu'en ayant des objectifs réalistes et le fait qu'on tire tous dans le
même sens ça va nous donner une capacité de résultats encore plus
grands. Donc, c'est pour ça que je vous parle des gouvernements de proximité. On a un gouvernement du Québec qui a
une entente de partenariat avec les municipalités. Ça doit se faire
aussi au niveau d'une stratégie verte, donc, nécessairement tant en termes de
densification, en termes de planification de la mobilité, le cocktail de transports collectifs, puis on le sait, là,
l'impact au niveau des gaz à effet de serre, le plus grand impact, ça va être sur la question des transports.
Donc, nécessairement, toute cette gouvernance, avec le ministre Poëti,
qu'on est en train de redéfinir, on a comme objectif évidemment de réduire la
capacité de la voiture, augmenter donc le
transport collectif et d'avoir un impact direct sur le gaz à effet de serre.
Donc, que ça soit de la couronne nord, Laval, Longueuil ou de la
couronne sud avec l'agglomération de Montréal, je pense qu'on est tous dans le
même sens.
M.
Heurtel : Parce que, dans ce sens-là — puis vous l'avez dit, puis, bon, on l'a vu,
vous avez parlé de ce que mon
collègue le ministre des Transports veut faire avec, justement, les
municipalités de la grande région de Montréal — il y
a également le tout récent pacte fiscal aussi qui traite d'une réforme ou d'une
révision assez fondamentale de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et de la stratégie d'aménagement, puis
nécessairement, si on parle d'une stratégie agressive pour, justement,
revoir la façon dont on pense les transports dans la grande région de Montréal,
ça va nécessairement passer par une réflexion en profondeur sur l'aménagement
aussi.
M.
Coderre (Denis) : Totalement. Puis je dirais qu'il y a un élément qui
est important dont vous avez contribué, c'est toute la notion de cran
d'arrêt, je dirais, là, sur la relation entre le ministère de l'Environnement
versus les municipalités, parce
qu'évidemment, quand on parle au niveau de la CMM comme à Montréal, il y a une
réalité agricole, il y a une réalité de boisés publics, il y a une
réalité aussi de la gestion des transports, et tout ça. Donc, c'est pour ça qu'on ne peut plus parler... Si on veut combattre
les gaz à effet de serre, c'était nécessaire qu'on puisse avoir le
transport qui est de facto avec
l'aménagement du territoire. Donc, cette relation, cette simplification, je
dirais, entre le gouvernement de
proximité et puis le gouvernement du Québec est nécessaire, mais elle est aussi
nécessaire dans une nouvelle culture de gouvernance en termes, je dirais, de processus sur le plan décisionnel,
parce que, bien souvent, là, quand on se renvoie la balle et qu'on
n'aboutit pas, bien ça peut avoir un impact autant au niveau de la trame bleue,
de la trame verte au même titre que dans certains secteurs qui touchent le
transport ou bien au niveau de l'occupation du territoire.
Donc,
c'est pour ça que, que ça soit avec le ministre des Affaires municipales et de
l'Occupation du territoire — ça le dit, l'occupation du territoire — avec le ministre des Transports puis avec
votre aide, en se parlant tous ensemble, en ayant ce réflexe de cran d'arrêt sur certaines décisions pour qu'on
puisse s'assurer qu'on est tous à la même page puis en simplifiant le processus, ça nous permet d'être
beaucoup plus efficaces. Bien souvent, vous le savez, l'administratif,
la gestion en termes administratifs, c'est des irritants supplémentaires qui
peuvent provoquer plus de problèmes que de réaliser
des objectifs. Et puis je pense que vous êtes dans la bonne mouvance au niveau
de votre réforme présentement.
M. Heurtel : Alors, sur ce
point-là, puis nous sommes tout à fait à la même page au niveau de la
collaboration puis justement d'arrimer tant au niveau des messages que des
stratégies, puis je crois qu'on est déjà sur cette voie-là concrètement, on a fait une commission
parlementaire très récemment, justement, sur la... bien, plus tôt cette année,
sur la prochaine stratégie de développement
durable du gouvernement, et d'ailleurs votre responsable de l'environnement
au comité exécutif, Réal Ménard, est venu
présenter la position de la ville de Montréal lors de cette commission
parlementaire.
• (11 heures) •
On a parlé beaucoup,
durant cette commission parlementaire, de l'exemplarité de l'État et de la
nécessité que l'État change ses façons de faire pour démontrer une cohérence.
Vous avez parlé de moyens concrets que la ville de Montréal est en train de
mettre en place ou a mis en place pour justement s'arrimer, là, dans une optique de
cohérence. Moi, ma question
serait plus sur... Parce qu'on a entendu beaucoup parler, bon, des
choix que le gouvernement fait en
termes d'investissement, dans les choix de dépenser, dans les choix de
subventionner. La ville est un acteur important, elle subventionne, elle est un
partenaire économique, elle est un entrepreneur, elle construit.
Qu'est-ce que la ville envisage faire ou a déjà
fait pour justement s'assurer qu'il y ait une cohérence dans l'ensemble
des actions? Parce que vous êtes un acteur important tant en transport qu'en
construction d'infrastructures, qu'en choix d'investissement. Parce que nous,
on se dirige vers ça comme gouvernement, d'amener une cohérence dans l'ensemble. On l'a fait avec la politique
d'électrification des transports. La prochaine politique énergétique va
également témoigner d'un objectif de
cohérence avec la cible de réduction, puis l'ensemble de l'action
gouvernementale va vouloir le faire. Alors,
de ce côté-là, j'aimerais vous entendre davantage — vous avez donné quelques exemples — mais davantage, j'aimerais ça en entendre plus sur les exemples
concrets où la ville s'inscrit vraiment dans une démarche concrète dans
ses actions à elle.
M. Coderre
(Denis) : En termes de principes, je vous dirais qu'on ne peut plus
parler de développement durable sans parler de développement économique et de
développement social puis on ne peut pas parler de développement
économique sans parler de développement durable, et le reste. Donc, tout ça,
c'est interrelié.
Dans un premier temps,
je pense que la ville doit montrer son exemple : on est en train de
changer le matériel roulant; si on pense à l'électrification, on veut augmenter
le nombre de bornes, on est en train de se donner une stratégie du
centre-ville, on croit à un institut de l'électrification de l'autre
gouvernement auparavant, là, qu'il voulait mettre
de l'avant. C'est de se donner une stratégie de recherche et d'innovation sur
le plan concret, que ça soit en matière de politique du stationnement,
que ça soit au niveau de l'électrification, les taxis électriques, que ça soit
les voies réservées pour... et
l'électrification des autobus, parce qu'on est là-dessus également. Ça, c'est
un élément. Vous avez toute la
question de la chimie verte. Donc, c'est de le développer aussi, parce qu'on a
fait quand même un travail énorme en termes de biométhanisation, et puis
vous avez vu, avec le Complexe environnemental Saint-Michel, que vous connaissez bien — c'est dans votre comté — récupération des biogaz pour des fins
énergétiques mais revitalisation du quartier en même temps. Ça, c'est
des gestes qui sont concrets. Mais on peut développer en même temps un secteur comme la chimie verte, le fait qu'on va avoir une
autre usine de biométhanisation dans l'est de Montréal, prendre ça au
vol et de développer un secteur économique
en matière de chimie verte. Il y a toute, aussi, la question de la
décontamination, évidemment la revalorisation des parcs industriels qu'on doit
prendre en considération.
Tout ça — puis
je vous ai parlé des plans tantôt, là, des programmes qui existaient déjà, là,
pour atteindre des objectifs — tout ça, je pense, aussi dans un cadre de
gouvernance où on négocie présentement un statut de métropole, et ce
statut de métropole va nous permettre une plus grande efficacité, je le fais sur
le plan interne. Exemple, on a 19 arrondissements,
on n'a pas besoin de 19 politiques en matière de gestion de matières
résiduelles. On se donne des coudées
franches et une politique avec une sensibilité, évidemment, par quartier, mais
ça se fait quand même dans une cohérence.
Ça va être vrai aussi dans la négociation du statut de métropole, le
partenariat entre le gouvernement du Québec et sa métropole. Donc, ça, c'est des gestes qui vont, je dirais,
compléter notre capacité de réaliser des objectifs. Donc, vous allez avoir des secteurs tant en matière de
développement économique — je vous ai parlé de décontamination, recherche et
développement, électrification et chimie verte — qu'en matière de
développement social aussi, parce qu'il y a des gestes qu'on doit poser qui vont avoir un impact sur non seulement le
comportement, mais sur la qualité de vie des gens.
Donc,
ça, là, c'est des choses qui sont très concrètes ou bien qui sont déjà en
marche ou dont l'objectif pour 2016... comme le statut de métropole, où
on devrait déposer un projet de loi dans votre processus législatif, selon
l'entente de partenariat signée entre les
municipalités et Québec pour le statut de métropole et de la capitale, qui va
avoir lieu dès février 2016, et, pour l'ensemble de l'autonomie
municipale, pour les autres municipalités, qui auront un rôle à jouer aussi sur
le plan du développement durable concrètement, d'ici l'automne 2016.
M.
Heurtel : Un autre point que vous avez souligné dans votre
présentation, puis on a beaucoup discuté de ça avec d'autres organisations, c'est la nécessité de
faire un meilleur travail pour influencer les changements de
comportement. J'aimerais voir avec vous, bon, quelles sont les mesures
actuelles que la ville met en place et plus particulièrement voir, pour l'avenir, qu'est-ce que vous
voyez comme étant les moyens les plus efficaces, parce qu'on se retrouve
devant certains paradoxes. Parce que, d'un côté, si on regarde la STM, on
fracasse des records d'utilisation, d'achalandage, mais en même temps on achète
de plus en plus de véhicules, puis ces véhicules ont des grosses cylindrées.
Alors, on semble, tant d'un côté, vouloir
faire plus en matière de transport collectif, puis il faut investir davantage,
et, d'un autre côté, par contre, on semble aussi utiliser notre voiture.
Puis ça, c'est un exemple parmi tant d'autres, là.
Qu'est-ce
qu'on peut faire davantage puis qu'est-ce qu'on peut faire ensemble davantage
pour justement changer les comportements comme vous le préconisez?
M.
Coderre (Denis) : Bien, évidemment, je pense que vous avez déjà une
oeuvre utile et une sensibilité en matière
de développement durable. Il y a une pédagogie puis une campagne de sensibilisation
qui va se faire. Vous avez les
écoquartiers, je pense, qui jouent un rôle de premier plan en ce sens. Le fait
qu'on est passé à une autre étape... puis, de façon très concrète, le
projet de loi avec la Caisse de dépôt nous permet d'avoir d'autres projets
structurants qui vont avoir un impact sur la qualité de vie des gens.
L'autre
élément que je veux vous dire, c'est que je vais mettre de l'avant, d'ici
quelques semaines, une politique du stationnement. Ça a l'air de rien
comme ça, mais d'avoir une politique de stationnement permet justement d'avoir
un impact direct sur la gestion du mobilier
roulant, là, la gestion des voitures. On peut se donner un centre-ville
beaucoup plus convivial où, comme dans
certaines grandes villes comme Boston ou les autres, vous pouvez mettre votre
voiture à un endroit puis passer la journée dans le centre-ville. Le
centre-ville, déjà, trois transports sur quatre, c'est du transport collectif. Donc, il y a des gestes à réorganiser,
je dirais, en ce sens-là. L'autre élément, c'est la question aussi de la
science. Il faut aussi qu'on envoie des messages, parce qu'il y a des images
qui peuvent frapper, mais il y a la contribution du milieu institutionnel, du
milieu académique avec la population, et, de passer des campagnes de
sensibilisation, ça, je pense que c'est
important. Je ne vous cacherai pas que, la question des eaux usées, là, il y a
des gens qui ont eu des images à gauche
puis à droite, là, mais, quand on s'en tient à la science, puis on a dit
beaucoup de choses qui ne sont pas exactes... Alors, si on se sert de la
science puis qu'on explique aux gens que, oui, peut-être la symbolique... ou on
se donne une symbolique forte quand en réalité il y a des gestes qui doivent
être faits, mais tout ça ne doit pas rester lettre morte. C'est dans un contexte où on va augmenter un plus
grand traitement ou bien on va poser des gestes encore plus grands. Et
le dernier point mais non le moindre, c'est la question des infrastructures. Il
faut qu'on se donne aussi des outils, parce que tout ça va avoir un impact sur
la qualité de vie environnementale en termes de développement durable.
Mais
c'est sûr que je pense qu'à notre niveau la question de la décontamination, la
possibilité d'avoir, en même temps,
des campagnes de sensibilisation, de pédagogie puis des gestes concrets, c'est
une question de culture également. À l'époque,
on mettait tout dans une poubelle, puis on ramassait les vidanges comme ça.
Maintenant, plus personne ne peut pas
penser qu'on ne peut pas faire du recyclage. Puis on travaille maintenant au
niveau du compost également. Donc, tout ça mis ensemble, là, je pense que ça va nous donner une stratégie globale
où chaque petit geste dans la quotidienneté va faire aussi une différence. Mais, en termes de gaz à effet
de serre, le gros problème présentement, c'est au niveau des transports,
donc il faut vraiment gérer la question de l'automobile.
M. Heurtel :
Donc, pour continuer là-dessus, si je comprends bien, on pourrait explorer,
justement, des campagnes de sensibilisation communes, parce que je crois qu'une
des problématiques, c'est que le message est très diffus puis tout le monde fait son affaire. Il y a beaucoup de joueurs
qui ont beaucoup de bonne volonté, mais, en même temps, si on rassemblait nos ressources puis qu'on faisait un message
qui serait, d'abord et avant tout, basé sur des faits et basé sur la
science, je crois qu'on pourrait commencer avec ça.
• (11 h 10) •
M. Coderre
(Denis) : Un des éléments, M. le ministre, c'est de se dire... Ban
Ki-moon a dit quelque chose d'assez
exceptionnel, c'est qu'il n'y a pas de plan B à la planète, O.K.? Ça,
c'est une réalité. La deuxième, c'est que les Anglais disent : «Think global, act local.» Ça veut dire qu'on est
dans un grand village global et que présentement tous les gestes sont
importants, il doit y avoir une synergie puis une communion dans l'action, dans
les gestes et dans la sensibilisation.
Ça, ça veut dire
aussi que les gouvernements de proximité que constituent les villes ont un rôle
extrêmement important à jouer. Pourquoi?
Parce que, d'ici les 20 prochaines années, 75 % de la population
mondiale va se retrouver dans les
villes. On n'a peut-être pas la même réalité dans certains secteurs, mais,
qu'on soit à Dakar, qu'on soit à Paris, qu'on soit à Hiroshima, qu'on
soit à Montréal ou à Québec, il y a des objectifs qui doivent être communs, il
y a des enjeux qui sont communs, puis la
question du développement durable va se régler aussi par la quotidienneté.
Donc, où est-ce qu'on peut aller pour
avoir le plus d'impact? Donc, on a besoin de politiques nationales, on a besoin
de politiques macros qui vont envoyer le message global, mais il faut
aussi, en même temps, avoir une relation d'action, sur le terrain, qui va nous
permettre d'augmenter l'efficience et d'assurer une plus grande efficacité.
Donc,
nécessairement, ces partenariats, je dirais, entre les municipalités, entre les
villes et les gouvernements sont nécessaires.
C'est pour ça que je serai là comme ambassadeur de Metropolis. Metropolis est l'organisme
qui représente 141 métropoles à travers le monde. Vous avez le
CGLU, qui est un regroupement des gouvernements locaux. Avec Anne Hidalgo, on arrive de l'AIMF, à Tunis, où on
se dit : Il va y avoir un sommet de 1 000 maires à Paris en même
temps que la COP, dans le cadre de la COP,
avec Bourget, et tout ça. Donc, il va y avoir comme une communion entre les
États membres, parce que c'est l'ONU, donc, nécessairement, les pays, les États
qui seront présents. Mais on doit avoir un «one–two
punch», permettez-moi l'expression, là, entre les municipalités et puis les
gouvernements pour que ce traité et cette Déclaration de Paris... si on
veut qu'elle soit réaliste et réalisable, il faut nécessairement s'assurer
qu'on puisse, à tous les niveaux, poser des gestes concrets.
M. Heurtel :
Merci, M. le maire.
M. Coderre
(Denis) : Merci, M. le ministre.
Le Président (M.
Reid) : Merci. Nous allons passer maintenant à l'opposition
officielle avec M. le député de Terrebonne.
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, M. le maire,
merci à votre équipe d'être présents à Québec avec nous aujourd'hui.
Vous nous lancez un message assez fort de
résultats tangibles, d'actions immédiates et concrètes, vous parlez effectivement qu'il n'y a pas de plan B à la
planète et qu'il y a une obligation de résultat dans le débat qui nous
concerne. Vous avez également, donc, parlé
beaucoup, là, d'exemples qui se passent au niveau de la communauté
internationale. On a eu l'occasion de se
rencontrer à quelques reprises. Vous êtes beaucoup inspirés par ce qui se passe
dans d'autres villes, dans d'autres métropoles un peu partout à travers
la planète. Vous nous avez donné quelques exemples tout à l'heure.
Est-ce qu'il
y a un exemple sur lequel Montréal se penche plus particulièrement dans le
cadre du débat qui nous concerne pour la réduction des gaz à effet de
serre? Est-ce que vous avez une inspiration plus spécifique à travers...
M. Coderre (Denis) : ...tous
gouvernements confondus. C'est pour ça que j'ai salué Mme Marois lorsqu'on parlait de l'institut de l'électrification.
98 % de notre énergie, c'est de l'énergie renouvelable. Tu sais, Montréal,
c'est un peu la capitale de l'hydroélectricité. On serait bien fous de ne pas
l'utiliser. Et nécessairement il faut commencer par montrer l'exemple.
Donc, cette stratégie d'électrification,
nonobstant ce que j'entendais des témoins auparavant, cette stratégie d'électrification est un changement de culture. La
voiture, elle peut toujours exister. C'est par quoi qu'elle est mue?
Est-ce qu'on a vraiment besoin que ça
soit... on parle de gaz naturel ou on passe à l'électricité? Nous, on a cette
capacité électrique. Donc, dans une
reconfiguration d'aménagement de territoire... parce que, comme j'ai dit au
ministre... puis le ministre en parle également, que l'aménagement du
territoire va de pair avec le transport, alors, si on se donne une politique de
stationnement mais avec des voitures plus
électriques, qu'on montre l'exemple à partir de notre propre matériel
roulant, hein, deuxièmement, que, si on parle de voitures libres-services, je
suis bien d'accord, mais venez avec des voitures électriques, tu sais, ça va
contribuer, là. Le parc de matériel roulant, je pense, ça va avoir un impact.
L'autre
élément, c'est que toute la maximisation de l'exploitation de notre
hydroélectricité ou des moyens d'énergie renouvelable, bien ça aussi, c'est une source de développement
économique important, là. On le sait, l'impact d'Hydro-Québec, mais c'est plus que ça, là. Quand je vous
parlais, en plus, d'économie circulaire, de la récupération de certains
moyens pour renouveler notre propre énergie, ça, c'est aussi une autre façon de
faire pas juste au niveau des voitures, mais au niveau de notre propre énergie
pour nos chaumières. Tu sais, il y a des choses qu'on peut faire en ce sens-là.
Donc, on est
inspirés par plusieurs, mais je dois vous avouer que, depuis que je suis maire
de Montréal puis que j'ai signé plusieurs ententes, puis on a des
ententes avec plusieurs grandes villes... J'arrive de Dakar, ils sont là-dessus
aussi. Tout le monde est là-dessus. Puis
nous, on a une chance, c'est qu'on a cette ressource. Donc, on s'inspire des
autres, mais on peut être inspirants, c'est ça que je veux dire. Et puis Anne
Hidalgo, Gérard Collomb à Lyon, ils font tous exactement
la même chose. Il y a un phénomène de métropolisation, de réaménagement du
territoire, de redéfinition du
partenariat, parce que la gouvernance est
tout aussi importante que le choix de société que tu veux faire, et en même temps, bien, on se donne des
balises puis des paramètres très précis.
Alors, quand tout le monde embarque dans le même bain... L'électrification, je dois vous dire que
c'est ce qui pogne le plus, que ça
soit à Los Angeles, Indianapolis. On connaît tous Bloomberg, évidemment,
à New York, qui a fait exactement la même chose.
Donc, ça, ça nous permet justement d'avoir un impact direct sur les gaz à effet
de serre.
M. Traversy : Génial! Écoutez,
vous avez tout à fait raison que Montréal peut être un exemple dans bien des domaines pour d'autres villes à travers le monde,
puis c'est intéressant aussi de voir que vous prenez la peine de
vous inspirer de certaines pratiques qui
existent déjà. Vous voulez donc sortir le Québec, là, de... bien, en fait, Montréal,
pas de sa dépendance au pétrole, mais vous voulez diminuer, donc, la
consommation d'énergies fossiles sur votre territoire de municipalité.
D'ailleurs,
ce n'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd, je vais porter une attention
particulière à votre rapport, qui
devrait sortir prochainement, sur TransCanada. Vous savez que c'est un dossier
qui touche beaucoup de gens de la Communauté métropolitaine de
Montréal. J'ai senti, donc, que vous...
M. Coderre (Denis) : Je salue votre
maire de Mascouche.
M.
Traversy : Oui, mon
maire voisin, effectivement, de Terrebonne, de Laval.
Donc, vous savez que c'est ça préoccupe
beaucoup de gens et... Alors, nous serons pendus, évidemment, à vos lèvres pour
voir les résultats de toutes ces...
M. Coderre
(Denis) : Si vous le
permettez, M. Traversy, là-dessus,
là. La CMM a fait un combat de titan
sur la question du transport des matières dangereuses en appui
avec le gouvernement du Québec, quel qu'il soit. Il y a la réalité d'Enbridge puis il y a la réalité d'Énergie
Est. Enbridge avait déjà un pipeline, on parlait d'inversement. C'est
grâce à la CMM s'il y a eu une entente avec l'Office national de
l'énergie. On a la politique du «oui, mais», mais le «mais» est mauditement important. Ça veut dire qu'il y a
un monitoring, il y a une grille d'analyse puis, si vous ne
vous y soumettez pas, bien vous n'aurez pas notre appui.
Donc, oui, puis c'est
plus qu'une question de développement économique, c'est une question
d'intégrité des structures, c'est une question
aussi... puis c'est là que le bât blesse avec TransCanada, parce qu'on parle de trajet, on parle d'utilisation de techniques, on parle de clauses
de confidentialité. Enbridge a vu la lumière; pour une première fois,
vous avez un citoyen corporatif qui ne gère
pas son dossier puis ne nous regarde pas comme s'ils étaient des propriétaires.
On a fait sauter les ententes de
confidentialité, on s'est assuré qu'il y a des plans de contingence, on a fait
notre devoir, puis en plus l'Office
national de l'énergie... Puis je suis un ancien gars du fédéral, je sais ce que
certaines institutions fédérales de l'Ouest...
comment ils nous traitaient. Bien là, en plus, on a une franchise à Montréal
avec une expertise puis un plan de com. Donc, autrement dit, tout le monde se
parle.
Alors,
moi, ce que j'ai voulu faire, comme président de la CMM, deux choses. Un, comme
maire de Montréal, j'ai provoqué une commission, à l'Office de consultation publique de Montréal, sur les énergies
fossiles. C'est important. Au lieu d'avoir des
pétitions, j'ai dit : Oui, je suis d'accord, on le fait, on va arrêter de
s'embarquer dans le processus. Deuxièmement, au niveau de la CMM, au niveau de
la commission de l'environnement, on a dit à la population : Parlez-nous concrètement de comment vous voyez ça,
TransCanada. Je peux vous dire qu'il n'y a pas grand monde qui sont d'accord, en passant, mais on va attendre le
résultat final. Mais, encore une fois, on se donne une grille d'analyse, et
c'est là qu'on peut être un plein partenaire
comme municipalité avec le gouvernement du Québec, puis avec le ministère,
puis avec tous partis confondus. Ce n'est
pas grave, là. Il n'y a pas de partisanerie en environnement, en autant que je
suis concerné.
Donc,
c'est ce genre de geste là concret qui nous permet justement de démontrer qu'on
est au ras des pâquerettes et qu'on
peut devenir un plein partenaire et jouer un rôle de premier plan dans cette
foulée d'un nouveau partenariat qui émane aussi de la signature de
l'entente Québec avec les municipalités. Donc, en termes de développement
durable, c'est le genre de choses concrètes qu'on peut faire.
M.
Traversy : Bon. Je trouve que ça vous va bien, le message un
peu du Maîtres chez nous, et en même temps j'ai hâte de voir le
rapport, là, que...
M.
Coderre (Denis) : ...M. le député, moi, je suis maître chez nous, peu
importe d'où je viens, tant d'Ottawa que de Montréal.
M. Traversy :
Mais tout à fait, tout à fait. Vous êtes un incontournable, ça, je pense que
les gens le savent très bien.
Au niveau de votre politique
de stationnement, vous ne voulez pas évidemment nous vendre tous les punchs aujourd'hui, c'est ce que j'ai compris, mais, déjà là, vous nous lancez quelques
indices pour inspirer peut-être le gouvernement
dans ses décisions qui s'en viennent. Vous
savez que nos auditions se terminent cette semaine. Est-ce qu'il y a
quand même certains éléments
majeurs sur lesquels vous voulez qu'on se penche? J'ai compris que votre
approche n'est pas celle de la carotte et du
bâton, là, en ce qui concerne cette politique. Plusieurs sont venus nous parler de péage, de hausse
de tarification de stationnement. Vous êtes dans une autre dynamique.
• (11 h 20) •
M.
Coderre (Denis) : Quand on
parle en termes de... puis c'est une des raisons que je suis très
heureux du résultat des élections,
j'imagine qu'il n'y aura pas de poste de péage sur le pont Champlain, là, on ne
doit pas parler de péage pour payer des infrastructures... en fait, ça
doit être pour des infrastructures, c'est pour ça que j'étais contre.
Si
on parle en termes de comment on doit financer les transports collectifs, ça
faisait trois ans que... Moi, je suis président
de la CMM depuis deux ans, puis ça faisait trois ans qu'on n'avait même pas de
cadre financier pour diviser
la facture. Je veux dire, avant de se donner
comment on va financer le transport en commun, on peut-u s'entendre
comment que... qui paie quoi? Donc, au niveau
de la CMM maintenant, on a une entente qui a été signée avec la
couronne nord, la couronne sud, Laval, et Longueuil, et Montréal.
À
partir de là, on doit réfléchir sur comment on doit financer le transport en
commun. Et c'est l'affaire de tous, hein? Je veux dire, le gouvernement
canadien a un rôle à jouer là-dedans, le gouvernement du Québec met déjà de l'argent dans son PQI. Donc, on a à développer une
façon de faire, mais, avant de commencer à parler de l'utilisateur-payeur... je sais que Montréal
en a payé pas mal, alors, il faut juste s'entendre sur un cadre financier pour
que les gens, par exemple, des couronnes qui viennent, et tout ça...
comment on s'organise. Alors, je pense que la prochaine étape, c'est ça.
On pourra parler de financement, mais, quand je parle en termes de politique de
stationnement, c'est un peu dans la gestion
du territoire. Donc, en gérant le territoire,
en en assurant un plus grand achalandage, ça, tu as un impact économique,
mais tu es là aussi en même temps pour gérer
les congestions. Ça fait qu'au lieu d'avoir une voiture qui tourne en
rond vous allez avoir un endroit, vous la
laissez là. Je pense à une nouvelle réglementation, on pourrait faire des
condos-stationnements, là, par exemple, dans le Vieux-Montréal. Tu
marches dans le Vieux-Montréal, mais tu as un endroit stratégique à périmètre, parce que, s'ils font des emplettes, ils ne
peuvent pas se promener avec les sacs tout le temps, là, donc, à proximité puis qui nous permet de mieux
gérer le territoire. Tu sais, c'est le genre de chose que... ça, ce
n'était pas caché, là, je l'ai dit depuis le début, mais ça s'en vient.
Le Président (M.
Reid) : Merci. Il reste quelques secondes.
M.
Traversy : Bien, je vous remercie, M. le maire, et j'ai des
idées pour votre usine de biométhanisation, je vous en reparlerai dans
un autre contexte.
Le Président (M.
Reid) : Merci. Alors, nous passons maintenant au deuxième
groupe d'opposition. M. le député de Masson.
M. Lemay :
Merci, M. le Président. Merci, M. le maire, d'être ici, merci, messieurs,
d'être avec nous. Bien, justement, en
parlant d'usine de biométhanisation, moi, c'est un sujet qui m'intéresse
particulièrement. Vous en parlez à la page 5 de votre mémoire. Vous
savez, au gouvernement, on a repoussé les exigences en 2022 au lieu de 2019.
M. Coderre (Denis) : À notre demande.
M.
Lemay : Bon. Parfait. Ça
fait que, dans le fond, vous, là, à votre demande, qu'est-ce que ça implique,
là, en termes d'investissement, d'attendre 2022?
M. Coderre
(Denis) : C'est-à-dire — puis
là je vous parle un peu comme membre de l'UMQ puis de la Fédération québécoise
des municipalités — c'était
que... comment on peut trouver un équilibre, sans dire que ce n'est pas pour
fuir de nos responsabilités
environnementales, mais en ayant une plus grande capacité d'efficacité puis de
réalisation? En fait, c'est ça. Évidemment,
moi, j'ai hérité de quelque chose, là, dans les plans. On avait un problème, par exemple, à Saint-Michel, où ça n'avait pas de bon sens, la réglementation
faisait que la biométhanisation était presque à proximité des résidences. Il fallait changer ça, les changer. On
a trouvé une autre place dans l'est de Montréal en expliquant tout, mais c'est sûr qu'en termes de réalisation, parce qu'on
parle de quatre usines, dont deux de biométhanisation, le fait de dire «2022» peut nous donner plus de chances pour tout
finaliser, là, je dirais. Peut-être que, Roger, tu voudrais rajouter à ça?
M. Lachance (Roger) : Bien, au mois
d'août, il y a eu une stratégie, je dirais, d'implantation au niveau de la collecte des matières organiques qui a été
annoncée. Donc, même si l'échéance, je dirais, là, du programme de
financement a été, je dirais, déplacée en
2022, il y a quand même des gestes qui se posent dès maintenant pour desservir
la population puis d'implanter,
justement, là, la collecte de matières organiques, je dirais. Il y a déjà
100 000 portes à Montréal qui sont desservies, et, d'ici 2019,
on prévoit en implanter 100 000 portes additionnelles par année.
Alors, tout ça est attaché, tout ça est cohérent.
M. Coderre (Denis) : Il y a des
gestes qui se font entre-temps, pareil.
M.
Lemay : O.K. Merci beaucoup. Et puis vous avez parlé tantôt du pont
Champlain, puis on parle beaucoup de l'électrification
des transports puis on dit : On veut se doter d'un réseau. Mais, vous
savez, tout récemment encore, il s'est formé une coop pour le monorail,
là, communément appelé le TransQuébec, là. Vous, votre positionnement sur le TransQuébec, c'est-u un projet que vous
disiez : Bien, écoutez, si on veut vraiment se doter d'une infrastructure
électrique, allons-y de l'avant avec le
monorail, ou vous rejetez cette idée? Parce qu'il me semble que, quand on
regarde le projet...
M. Coderre
(Denis) : Vous parlez du monorail entre la couronne nord et Montréal?
Vous n'avez pas un train de l'Est, vous autres?
M. Lemay : Bien là, principalement,
c'est sur la couronne sud, là, plus, là.
M. Coderre (Denis) : Oui, oui, je
sais.
M. Lemay : Mais, je veux dire, il
faut commencer à quelque part, donc...
M. Coderre
(Denis) : J'ai bon espoir. En termes de projets structurants, on s'est
tous entendus pour le système léger sur rail, donc, un dans l'ouest,
pour faire finalement une navette entre l'aéroport puis le centre-ville, mais
très certainement au niveau de la couronne
sud. Le fait qu'on avait un projet structurant, qui était le Train de l'Est,
c'était... il fallait revitaliser, en
quelque part, la... c'est-à-dire, il fallait, dans un premier temps,
revitaliser la couronne sud, mais
aussi assurer une fluidité jusqu'au centre-ville. Donc, à la lumière de ce que
je comprends, parce que, comme diraient les Anglais,
avec la Caisse de dépôt, ça va être «on budget, on time», alors, on va avoir un
système léger sur rail. Donc, on parlait de monorail, mais je pense que,
déjà, leur choix en termes de SLR s'est fait. Je dois vous avouer que j'aime autant quelque chose de réalisé que commencer à
repartir d'autres projets. Et puis ça, à mon avis, non seulement ça va
fonctionner, mais ça a déjà fait ses preuves ailleurs, comme à Vancouver par
exemple.
M.
Lemay : O.K. Donc, ce que vous dites, c'est : On a fait notre
choix, on va y aller avec le SLR, il faudrait...
M. Coderre
(Denis) : ...aussi, là, je veux dire, la question de
l'électrification, elle est là, elle va se faire au niveau des voitures,
et tout ça, puis même en termes... je parlais de stationnement, tantôt, on
donne des vignettes pour les voitures
libres-services si elles sont électriques. Mais le SLR est essentiel, là, dans
le transport des personnes, mais on a aussi
le SRB, le système rapide par bus, pour Pie-IX. Tu sais, il y a quand même...
quand on parle de cocktail de transports collectifs, là, vous en avez
des exemples, là.
M.
Lemay : Et puis, au niveau des autobus électriques à Montréal, est-ce
que vous... J'ai entendu parler, là, de bornes de recharge, là, de, genre, 10 secondes, là, pendant qu'on
est en train de faire l'embarquement, débarquement des passagers. Ça,
vous prévoyez...
M. Coderre (Denis) : ...ça
là-dedans.
M. Lemay : C'est en R&D
présentement ou vous avez un échéancier pour un déploiement?
M. Coderre
(Denis) : Ça, il faudrait demander à la STM, mais il y a déjà des
échéanciers, là, qui sont prévus au niveau de l'électrification des
autobus. Mais, nous aussi, il va y avoir des... Quand on parle en termes de
bornes de recharge, ce n'est pas strictement pour les
taxis ou bien les voitures libres-services, c'est qu'avec le gouvernement du Québec on a fait une annonce et on va en faire
d'autres pour assurer... on parlait de 1 000 bornes, je crois, électriques
pour le centre-ville et les environs, là. Donc, ça, c'est des gestes qui sont
très, très concrets et à court terme.
M. Lemay : Merci beaucoup, M. le
maire. Très apprécié de pouvoir avoir des éclaircissements.
M. Coderre (Denis) : Merci.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Alors, M. le maire, nous avons
bien travaillé. Si jamais vous voulez faire un commentaire de quelques
instants, je vous laisse la parole.
M. Coderre (Denis) : Bien, je veux
vous remercier. Je pense que, déjà, d'avoir la capacité, comme maire de Montréal et président de la CMM, de pouvoir venir
m'exprimer encore une fois sur les enjeux importants, le message que je vous envoie, c'est cette volonté de travailler en
partenariat et que les municipalités font partie de la solution. Et je
retiens : communion d'esprit, stratégie commune, et puis travaillons
ensemble pour assurer qu'on puisse faire ce qu'on doit faire pour la COP21,
mais on est d'accord avec les objectifs et on veut les réaliser pleinement.
Le Président (M. Reid) : M.
le maire, M. Perez, M. Lachance, merci pour votre contribution à nos
travaux.
La commission suspend ses travaux jusqu'après
les affaires courantes cet après-midi.
(Suspension de la séance à 11 h 28)
(Reprise à 15 h 9)
Le
Président (M. Reid) :
Alors, nous reprenons nos travaux. Je vous rappelle que la commission
est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations
particulières sur le document de consultation intitulé Cible de réduction de
gaz... d'émissions — pardon — de
gaz à effet de serredu Québec pour 2030.
Cet
après-midi, nous entendrons d'abord Vision Biomasse Québec,
suivi du Conseil de l'industrie forestière du Québec et de l'Association
canadienne de l'énergie éolienne.
Alors, bienvenue à nos invités de Vision
Biomasse Québec. Vous avez une dizaine de minutes pour faire votre présentation. Par la suite, nous aurons un
échange avec les membres de la commission. Je vous demande, pour les fins
de l'enregistrement, de vous nommer, au
départ, de vous présenter et de présenter les personnes qui vous
accompagnent, et c'est à vous la parole.
Vision Biomasse Québec
Mme St-Laurent Samuel (Amélie) :
Parfait. Bonjour, M. le Président. Bonjour, M. le ministre. Bonjour, Mmes et MM. les députés. Je me présente, mon
nom est Amélie St-Laurent Samuel, je suis chargée de projet forêt-biomasse
chez Nature Québec. Je suis aussi coordonnatrice du regroupement Vision
Biomasse Québec.
Je vous
présente donc, directement à ma gauche, M. John W. Arsenault,
directeur du Groupe granules au Bureau de la promotion des produits du bois du Québec, aussi appelé QWEB;
directement à ma droite ou plus loin, Mme Marie-Paule Robichaud,
qui est conseillère en recherche et développement au Conseil québécois de la
coopération et de la mutualité; et
directement ici, à ma droite, M. Eugène Gagné, qui est directeur adjoint et
directeur du développement à la Fédération québécoise des coopératives
forestières. Il est aussi co-porte-parole de Vision Biomasse Québec.
• (15 h 10) •
Je tiens
d'abord à vous remercier de l'opportunité qui nous est offerte aujourd'hui de
présenter notre mémoire. Nous
apprécions beaucoup, nous avons beaucoup de choses à vous dire. Vision Biomasse
Québec, tout d'abord, c'est un regroupement
d'organisations de tous les horizons, donc organisations issues des milieux
coopératifs, des milieux municipaux, des affaires, de l'environnement et
du développement rural. L'objectif du regroupement, qui a été créé
officiellement il y a un peu plus d'un an, est la promotion d'une filière
exemplaire et performante de chauffage à la biomasse forestière résiduelle.
Petit point de mise en contexte : filière du chauffage à la biomasse,
donc, on parle de chauffage des bâtiments, on parle aussi de production de
chaleur pour les procédés industriels; «biomasse forestière résiduelle», un
autre terme important, donc les résidus de récolte forestière, effectivement, les
résidus de l'industrie forestière et aussi
tout ce qui est résidu postconsommation, le bois notamment à la construction,
rénovation et démolition.
Donc, le
regroupement compte, au jour d'aujourd'hui, 16 membres, 16 membres
assez importants, je vous les nomme — je pense que c'est intéressant pour la mise
en contexte, donc : le Bureau de promotion des produits du bois du Québec... D'ailleurs, vous pouvez me suivre, en
annexe du mémoire, à l'annexe 1, vous allez trouver la brochure... à
la fin de la brochure, vous trouverez nos
membres, qui ont été actualisés depuis. Donc : le Bureau de promotion des
produits du bois du Québec; le Conseil
québécois de la coopération et de la mutualité; la Coop Carbone; La Coop
fédérée; la Fédération des
producteurs forestiers du Québec; la Fédération québécoise des coopératives
forestières; la Fédération québécoise des municipalités; Fondaction CSN; le Fonds Biomasse Énergie; Innofibre,
centre de recherche; Nature Québec; le Regroupement
national des conseils régionaux de l'environnement du Québec; le Réseau
d'expertise et de valorisation en biomasse forestière; Solidarité rurale
du Québec; l'Union des municipalités du Québec; et l'Union des producteurs agricoles. Comme vous
pouvez voir, on a un éventail assez important puis une diversité aussi
d'organisations qui nous appuient, là, dans cette promotion de la
filière.
Donc, à
travers le temps, les partenaires ont développé une vision commune du
développement de la filière à un horizon
2025. Cette vision-là a été basée sur des études, puis les études
technicoéconomiques du Québec ont été aussi basées sur des avis
d'experts mais aussi sur des consultations qui ont été nommées avec des
partenaires et acteurs du milieu, notamment
les acteurs environnementaux et sociaux. Donc, on s'est assurés d'avoir le réel
pouls au Québec et puis la situation,
là, plus précise. La vision qu'on vous présente, la vision Biomasse 2025, elle
est aussi dans le document, la brochure, en annexe, elle est basée sur
sept cibles dont je vais vous donner les plus importantes dans notre contexte aujourd'hui : la production de
4 000 gigawattheures d'énergie renouvelable, comme je vous disais,
pour le chauffage des bâtiments et
puis pour les procédés industriels; la substitution de 400 millions de
litres de combustibles fossiles — ici, on parle de mazout lourd, on parle de mazout léger et
de propane; la réduction de 1 million de tonnes de CO2 équivalent;
la création de 16 000 emplois
notamment en construction et en opération, dont le quart serait récurrent, donc
non négligeable; et puis l'amélioration de la balance commerciale du
Québec à hauteur de 225 millions de dollars.
Très rapidement, les acteurs de la filière ont
montré un désir de s'engager aussi envers l'environnement et les communautés, c'étaient des conditions
d'acceptabilité qui étaient incontournables, donc, pour baliser le
développement de la filière. Ces
engagements-là sont aussi dans la brochure, concernent les émissions de GES, la
santé, la qualité de l'air, les écosystèmes forestiers mais aussi l'intégration
dans les communautés d'accueil. Notre participation d'aujourd'hui, plus spécifiquement, vise à démontrer que la
filière du chauffage à la biomasse forestière peut contribuer
significativement à la cible qui sera
retenue par le Québec, parce qu'on croit que c'est une réelle perspective de
réduction des émissions de gaz à
effet de serre dans différents secteurs : oui, le secteur de l'industrie,
mais aussi celui du bâtiment, de l'agriculture, des matières résiduelles
et de la production d'électricité — on parle ici de réseaux
autonomes, plus particulièrement.
Rappelons que la filière a été vraiment
identifiée d'un point de vue scientifique comme outil de contribution à la
lutte aux changements climatiques notamment par le GIEC à l'international mais
aussi par un comité scientifique au Québec en 2012.
Développée
selon le principe de la bonne énergie au bon endroit, c'est-à-dire
l'utilisation de la biomasse forestière résiduelle qui crée un maximum de bénéfices, c'est-à-dire la filière de
la chauffe, la filière se démarque non seulement par la création des 16 000 emplois dont on
vous a parlé un peu plus tôt mais aussi par sa maturité, qui lui confère un
excellent bilan GES et un excellent bilan
énergétique, des économies générées pour les utilisateurs liées au bas coût du
combustible, la flexibilité, qui permet de répondre au gros enjeu des pointes
hivernales connues au Québec, et la consolidation des activités forestières.
Pour sa part, Nature Québec a très rapidement
joint le regroupement... en fait, a participé à sa création, parce qu'elle croit que la filière du chauffage à la
biomasse forestière résiduelle est structurante pour le Québec, c'est une
énergie qui est renouvelable, qui est locale et qui permet de contribuer à
réduire la dépendance du Québec aux combustibles fossiles lorsque développée
selon les critères élevés, innovateurs des critères environnementaux, ce qui
est le cas ici.
Je laisse la parole à Mme Robichaud, qui va
nous parler du point de vue du CQCM.
Le Président (M. Reid) : Il
vous reste un peu moins de trois minutes.
Mme Robichaud Villettaz (Marie-Paule) :
D'accord. Donc, je vais être brève. Le Conseil québécois de la coopération et
de la mutualité, nous — Marie-Paule
Robichaud — on
appuie nos membres, la Fédération québécoise des
coopératives forestières et La Coop fédérée, dans le développement de la filière biomasse depuis plusieurs années. En fait, là, ça s'inscrit directement dans notre plan stratégique. On croit que la biomasse va avoir des retombées
financières importantes pour le Québec,
elle a un effet de consolidation aussi au niveau des emplois en région, et ça
consolide la filière forestière pour le Québec. Donc, c'est un projet
d'avenir, de notre point de vue.
Mme St-Laurent Samuel (Amélie) : Je
passe la parole à M. Arsenault.
M.
Arsenault (John W.) : Oui.
Je représente l'ensemble des producteurs de granules au Québec,
qui sont répartis géographiquement dans plusieurs régions, du Pontiac à
aller sur la Côte-Nord. Il existe déjà une infrastructure pour produire des
granules en quantité. Actuellement, nos producteurs sont tous exportateurs, on
cherche à développer des marchés à
l'interne, on fait profiter actuellement le reste du monde des avantages de réduction de gaz à effet de serre des granules puis on
se fait à l'idée qu'il y aurait un marché local qui devrait être preneur de ça
aussi.
Mme St-Laurent Samuel (Amélie) : M.
Gagné.
M. Gagné
(Eugène) : Bien, merci, M. le Président. Je comprends qu'il n'y a pas beaucoup de temps. Je devais vous présenter le
mémoire, je vais essayer de faire ça très vite.
La Fédération
québécoise des coopératives forestières, on est dans le
dossier depuis 2008. On a plusieurs
projets de réalisés avec nos coopératives.
On travaille beaucoup sur l'approvisionnement en plaquettes forestières et, en fait, on
a contribué, avec Fondaction et Investissement Québec, à la mise en place du Fonds Biomasse, que votre
gouvernement a appuyée. On vous en remercie.
Alors, pour ce qui est de nos recommandations sur les quatre questions, je vais aller tout de suite à la principale. On a
compris... en fait, on apprécie, là, que le gouvernement ait cette
initiative-là de réduction puis d'avoir une cible, là, 2030. On
l'appuie. Par contre, on est un peu déçus, on doit vous avouer, de voir que,
dans le document de consultation, la biomasse était quasi
absente, sauf à la page 40, où elle faisait partie d'une possibilité de
réduction pour l'industrie. Nous, on veut
vous porter le message qu'on peut faire beaucoup plus que ça, comme
l'a dit Amélie, dans le bâtiment, dans
l'agriculture, dans les réseaux autonomes d'Hydro-Québec. D'ailleurs, le ministre Lessard nous a confié un mandat de trouver des solutions dans le cadre du Plan Nord.
Les minières ont des besoins énormes en énergie, on peut faire quelque
chose. Et puis on invite finalement le gouvernement à faire sienne notre
première recommandation, qui est la vision Biomasse
2025. On a la capacité de réduire d'au moins 1 million de tonnes... puis
ça, c'est juste 1 million de tonnes de biomasse utilisées. On en a 4 millions de disponibles. Ça fait
que je veux juste vous dire qu'il y a un potentiel important à ce niveau-là.
Dans le document, on vous a parlé de quelques
initiatives intéressantes. On pense qu'il faut des cibles pour chaque secteur d'activité
puis idéalement aussi par région. On a des exemples. Comme dans les producteurs
en serre, il y a eu vraiment beaucoup de développement dans l'utilisation de la biomasse dans les producteurs en serre,
puis ça fait boule de neige. Tous les
gens qui produisent en serre savent que ça existe puis ils veulent poursuivre
dans cette veine-là. C'est possible
avec les minières — on
a un beau projet dans le Nord-du-Québec — puis c'est possible dans le bâtiment
aussi — il
y a plusieurs projets dans les hôpitaux. Alors, voilà.
Le
Président (M. Reid) : On aura l'occasion d'en parler, puisqu'on
a une période d'échange. Alors, nous
allons passer au côté gouvernemental. M. le ministre, vous avez la parole.
• (15 h 20) •
M. Heurtel : Merci, M. le Président.
Bonjour, mesdames, bonjour, messieurs. Merci beaucoup pour votre présentation ainsi que votre mémoire. Filière très
intéressante que celle de la biomasse forestière. Notre gouvernement, vous l'avez souligné, notre gouvernement a déjà soutenu, et par le biais du Fonds vert, le développement de cette filière puis entend certainement en faire plus.
Première question. Les objectifs que vous nous
proposez en termes d'utilisation de la biomasse forestière sont très ambitieux, puis ça, on n'a aucun
problème avec l'ambition, loin de là. Cela dit, est-ce qu'au moment où on
se parle on a l'infrastructure, on a les granules pour justement couvrir toute
cette demande-là qui serait générée, là, par le genre de cible que vous
proposez?
M. Gagné
(Eugène) : En termes de
ressources, là, on a vraiment toute la ressource disponible, ce n'est pas un problème.
C'est sûr qu'il y a une question de structuration de la filière.
Nous, on le répète, puis on le dit dans notre
document de vision et dans ce document-ci, c'est important de mettre les énergies qu'il faut pour bien
structurer la filière, puis ça, ça part, pour nous, du début à la capacité de
préparer un combustible de qualité pour des
équipements performants pour obtenir des performances dans différents projets. Il y a eu plusieurs
projets qui se sont réalisés au Québec. Il y a de grands succès, il y a des petites difficultés à certains endroits puis
souvent associées au fait qu'il y a un projet, généralement petit, quelque part
puis il n'y a pas la structure, la chaîne d'approvisionnement,
qui a la capacité de faire le travail. Le plus bel exemple qu'on a, c'est dans
La Matapédia, un beau projet qui
a débuté avec l'hôpital et la coopérative forestière du coin. Il doit y avoir
au moins 10 projets actuellement de concentrés dans la vallée de la
Matapédia, avec une entreprise qui s'est spécialisée à préparer un combustible.
Si la chaudière demande 20 %
d'humidité, il livre le combustible à 20 %. Si c'est une chaudière
industrielle qui peut prendre du 40 %, c'est possible.
Vous voyez, en fait, ce qu'on tente de vous
recommander, c'est qu'il y a un potentiel énorme, il faut faire un petit effort
pour décoller la roue. On pense que le programme, c'est très bien, il devrait
être là pour plus de sous. On remercie aussi
le ministre Leitão, qui a remis 10 millions l'an passé dans la mise à jour
économique. Mais il y a énormément d'engouement pour ça, puis on se
distribue peut-être un peu trop, ça fait que... On a l'exemple des producteurs
en serre, on vous en a parlé; on a l'exemple
des hôpitaux, ça fonctionne bien. Dans les écoles, on a très peu de projets
de réalisés. Dans les commerces, c'est à peu
près zéro. On a identifié dans des études qu'il y avait 375 millions de
litres de consommés de mazout et de propane dans le bâtiment
institutionnel et commercial au Québec, une étude qui a été réalisée d'une
façon indépendante. Ça fait qu'il y a vraiment du potentiel pour faire des
choses.
Dans les
minières, c'est un peu la même affaire. On a un beau projet actuellement avec
Alouette à Sept-Îles. Eux, ils veulent utiliser de la poudre de bois
pour refondre les résidus d'aluminium, ils veulent l'utiliser peut-être dans
les anodes. Bien, si ça décolle, ça, on pense
qu'Alcoa ou Rio Tinto peuvent faire leur cette technologie-là, cette avancée-là.
Moi, je pense qu'il y a la possibilité, il y
a le potentiel puis il y a des entreprises qui sont prêtes à le faire. Puis
nous, on est là pour les appuyer. On a plusieurs coopératives impliquées
là-dedans, on a le cas de Groupe Forestra à Saguenay, là, qui a un beau projet
avec une minière aussi, qui ont une infrastructure de préparation de la
biomasse.
Pour ce qui est des granules, il y a plusieurs
producteurs puis, si on structure ça bien, il y a de l'intérêt. John vous l'a dit, il y a vraiment de l'intérêt pour
faire de l'approvisionnement en vrac, mais ça prend une masse critique
de projets, ça prend un effort, disons, concentré. Puis là, dans les
initiatives, on vous a suggéré que des crédits d'impôt à l'investissement pourraient être une solution dans
la partie industrielle et aussi pour des fournisseurs d'énergie comme
nos coopératives. Nos coopératives, elles sont prêtes à le faire, parce
qu'entre nous c'est plus compliqué un peu... un peu pas mal, opérer une chaudière à la biomasse qu'un truc électrique qu'on
fait «on-off». Les gens ont un petit peu peur de ça, tu sais, donc il faut démystifier ça. Puis il y a
des gens qui vont dire : Ce n'est pas notre business. Nous, on est prêts
à le faire avec l'appui du Fonds Biomasse, c'est pour ça qu'il est en place.
Alors, je dirais, les portes sont grandes
ouvertes, il y a de la volonté de la part du milieu, des entreprises. Ça prend un petit coup de pouce. Puis, dans le mémoire,
on vous dit que simplement prendre une cible pour de la biomasse forestière, de la part de votre gouvernement,
déjà, ça, c'est énorme : même s'il n'y a pas de moyens financiers énormes
qui vont l'appuyer, on
va dans cette direction-là. Ça envoie un signal aux gens qui sont des
fabricants d'équipement, des gens qui
sont des entreprises pour donner des services que, oui, on veut aller à
développer cette filière-là, puis ça change la dynamique immédiatement.
Votre collègue le ministre Lessard nous a confié
un mandat de trouver des solutions pour le Nord avec une enveloppe,
somme toute, restreinte, de 5 millions. Puis, juste d'avoir dit ça, dans les communautés
nordiques, il y a plein de
projets qui veulent se mettre en branle, tu sais, c'est comme : Le gouvernement
veut nous soutenir, bien nous, on va regarder qu'est-ce qu'on peut faire.
J'espère de vous avoir convaincus.
M. Heurtel : Bien, encore une fois,
notre gouvernement n'a pas besoin d'être convaincu sur l'importance de développer la filière de la biomasse forestière. Je crois
qu'on l'a démontré. Vous en faites état. Là, ce qui est intéressant, alors,
un, nous, de notre côté, on est convaincus qu'il faut la développer, on a déjà
investi des sommes importantes pour justement la développer. Vous venez
de dire, bon...
M. Gagné (Eugène) : Oui, oui, absolument.
M. Heurtel : Parce que mon collègue
le ministre des Forêts a justement lancé un signal très clair puis a financé un projet pour développer, dans le Nord,
la filière, vous voyez l'effet de levier que ça crée, vous décrivez
l'effet de levier. Là, vous me parlez, vous
utilisez... bon : On a besoin de mieux structurer. Moi, c'est simplement...
Moi, je suis dans le comment, là, vraiment, là, parce qu'encore une fois
on a vu des cas concrets, vous en avez fait état, vous en parlez également dans votre mémoire. Des fois, on a un
frein, par exemple, en région éloignée. Des fois, la ressource ne se
rend pas nécessairement au projet ou c'est un obstacle pour faire en sorte
qu'on utilise la biomasse.
Puis, vu que le temps est limité, je voudrais
juste vous entendre plus concrètement sur quels sont les gestes concrets, là,
qu'il faudrait poser. Vous dites, bon : Plus d'argent. J'ai entendu ça,
mais, en termes de moyens, là, plus concrets,
qu'est-ce qu'il faudrait faire pour mieux structurer, comme vous le demandez,
la filière? Puis, également, quand vous
parlez de mesures fiscales... bon, vous avez parlé d'un crédit d'impôt,
j'aimerais ça vous entendre davantage sur ça au niveau de la fiscalité
qui devrait entourer le développement de la filière.
M. Gagné
(Eugène) : D'accord. Juste
pour illustrer peut-être davantage, là, qu'est-ce que ça peut vouloir
dire, structurer la filière... Bon, ça fait
longtemps, je vous ai dit, que je suis dans le domaine. On est dans des
endroits comme Saint-Tite-des-Caps ou
Mont-Laurier. Nous, de notre point de vue, on est au milieu du bois. Les gens,
ils se demandent s'ils vont en avoir,
de la biomasse. Ça fait que, tant qu'il n'y a pas une concentration de projets...
C'est pour ça que nous, on vous dit, on vous recommande d'avoir des
mesures adaptées à chaque secteur d'activité.
Je vais prendre un exemple concret. Par exemple,
les producteurs acéricoles, il y a beaucoup d'intérêt de leur part, ils utilisent énormément l'huile encore.
Tous les gros producteurs, ils sont à l'huile. Il y a des évaporateurs
développés pour fonctionner aux granules, il y a de l'intérêt des producteurs.
Ça fait qu'un programme qui serait ciblé sur ce besoin-là permettrait rapidement d'avoir 10, 15, 20 projets, puis
là la démonstration est vraiment concrète. Puis on réduit, jusqu'à un
certain point, la fabrication de ces équipements-là, parce que, dès qu'il y a
une volonté d'aller quelque part, il y a plus de marché; plus de marché, on est
plus structurés, on est moins coûteux. Puis c'est la même chose à toutes les
échelles.
Je vous ai
donné l'exemple de Matapédia. Bon, eux, bon, c'est normal, ils se battent avec
le Québec pour avoir des sommes du 50 millions, qui avait été
promis sur quatre ans, maintenant qu'il y en a 10 de plus. Mais là ils ont des beaux projets, tu sais, ils ont un projet avec
Natrel, par exemple. Il n'y a pas d'enveloppe, bon, là, ils sont en attente.
Puis, bon, s'il y avait le crédit d'impôt,
on est moins dépendant de programmes, on a moins de structures administratives.
Puis, actuellement, le crédit d'impôt à
l'investissement, on l'a expérimenté, là, avec... le gouvernement fédéral a des
critères, notre projet avec la minière du Nord s'est qualifié pour le crédit
d'impôt fédéral et provincial. L'interprétation du provincial a été difficile,
mais on l'a accepté.
Donc, cette
mesure-là, qui serait adaptée ou adéquate, là, actuellement, il y a des régions
qu'il n'y en a pas ou on a réduit beaucoup. On pourrait cibler un crédit
d'impôt spécifique pour la production d'un produit manufacturé qui est de l'énergie renouvelable puis on pourrait faire
un grand bout de chemin avec ça puis être beaucoup plus efficaces.
On a eu le crédit d'impôt en tant qu'entreprise qui vend de l'énergie à
quelqu'un. Les entreprises elles-mêmes pourraient aussi en bénéficier si elles
veulent réaliser le projet elles-mêmes.
• (15 h 30) •
M. Heurtel : Merci.
Le Président (M. Reid) : M.
le député de Maskinongé.
M. Plante : Merci beaucoup. Écoutez,
j'écoute attentivement les réponses aux questions de mon collègue, et il y a quelque chose que je vais revenir sur sa
première question, O.K., sur la disponibilité de la ressource ou de la
matière, parce que vous expliquez, avec brio et connaissance, le fait que, tout
dépendant dans quels domaines ou dans quelles industries
ou institutions la technologie est utilisée, la matière est différente. Donc,
vous parliez tantôt de 20 %, 40 %, etc.
La question, et où je
n'ai pas eu de réponse complète, là, c'est : Vu le nombre de diversités de
technologies, vu la différence de besoins
d'adaptation de la matière pour répondre aux besoins soit de l'industrie ou des
institutions, est-ce que et comment,
outre... Parce que, là, vous venez de faire la démonstration qu'en mettant un
crédit d'impôt spécifique on va aider un secteur particulier, oui, mais
on n'aidera pas les autres, puisque la technologie peut être très différente, puis
l'adaptation des technologies peut ne pas fonctionner dans certains cas. Selon
vous, quel serait le meilleur moyen
de susciter l'adhésion d'un plus grand nombre, de permettre le développement de
technologies, bien, plus ou moins uniformes
mais qui pourraient servir dans plusieurs cas où on pourrait dire : Bien,
c'est tel cas, voici ce que tu as besoin, et comment ça coûte et comment
ça te redonne? Quelle serait, selon vous, la réponse à ces deux questions?
M. Gagné
(Eugène) : C'est une grande question, on va essayer de faire ça court.
Les technologies
varient, puis c'est adéquat que ce soit ainsi. Dans du petit bâtiment, on doit
aller dans des équipements, disons, d'une
conception plus commerciale, puis c'est différent dans l'industriel, alors on
est équipés plus robustement, je vais
dire, pour être capables d'accepter une plus grande variabilité de combustibles
biomasse. Bon. Alors, comment on peut
répondre à ça, si j'ai bien saisi votre question? Nous, après avoir analysé ça,
on a dit : Il faut mettre en place des centres de transformation et
de conditionnement de la biomasse forestière, il faut faire ça au Québec. Puis d'ailleurs, le Fonds Biomasse, sa principale
raison d'être, elle est là. Puis, pour être capables de faire ça, ça prend des
projets. C'est comme la poule et l'oeuf : pas de projet, pas de centre;
pas de centre, pas de projet.
Donc,
la technologie, elle est connue. On a fait beaucoup de recherche. On travaille
encore avec le CRIQ pour des
techniques de séchage actif, des techniques de séchage biologique, séchage
naturel, dimension des copeaux. Ça existe, on sait comment faire. Ce n'est pas ça, le problème. Puis il faut vraiment
faire le petit copeau, puis, à un moment donné, le copeau, il ne fait plus la job, c'est la granule.
Puis la granule, elle est bien spécifique, là, elle a telle densité, elle a
telle humidité. C'est plus facile à opérer
avec une granule. Il y a des conditions que c'est le combustible, mais, vu
qu'il est un peu plus cher, on essaie
d'aller vers le copeau ou la plaquette, qu'on appelle dans le jargon, puis il
faut vraiment faire le produit...
D'ailleurs, les normes environnementales pour les émissions, les bons
fabricants, ils disent : Moi, je garantis ma machine en termes de performance technique,
efficacité et environnementale avec le bon combustible dans la machine. Puis, pour mettre le bon combustible dans la
machine, ils ont leurs spécifications en termes d'humidité et de
granulométrie, de taux de cendres, etc. Bien, il faut qu'on spécialise la
production du combustible.
Dans
certaines conférences, je m'amusais à dire : Les gens qui consomment du
pétrole dans leur auto, ils font la différence entre le mazout lourd, le
diesel puis l'essence. Il faut réussir à faire ça. Dans un centre, ce n'est pas
aussi sophistiqué qu'une raffinerie, mais
quand même on a de la matière brute, il faut la préparer adéquatement pour
fournir le bon combustible dans l'équipement performant qui est sur le marché.
M. Plante :
Oui. On a encore du temps? Oui. Donc, si je comprends bien ce que vous nous
expliquez, c'est que les technologies sont développées, la matière est adaptée aux différentes technologies. Parce que, là, vous avez dit : Si on a les bons fabricants — oui, vous avez mentionné «les bons fabricants» — avec la
bonne matière, on atteint les objectifs, si on veut, voulus. Dans ces cas-là, donc dans tous les cas différents,
vous nous dites que, peu importent l'appareil ou la technologie installés dans l'institution, si on a
le bon combustible ou la bonne technologie, ça répond aux objectifs de
réduction des gaz à effet de serre mais aussi aux objectifs énergétiques qu'on
demande. C'est ce que vous nous dites.
M. Gagné (Eugène) : Bien, je dirais, peu importe l'équipement des bons fabricants, on peut
faire ça sans problème, on peut atteindre des hauts rendements en termes
d'efficacité et de conversion, parce qu'on vise à atteindre peut-être
80 %. D'ailleurs, plus la matière est sèche, plus le taux d'efficacité de
l'équipement est élevé, donc on a un meilleur rendement.
Autrement dit, on va être meilleurs en GES aussi, parce qu'on prend moins de
matières, donc on émet moins de CO2. Alors, oui, c'est
possible, absolument.
Mme
St-Laurent Samuel (Amélie) : En fait, un centre de transformation va
être capable de connaître les besoins très spécifiques de ses clients,
va être organisé de manière à gérer l'approvisionnement de chacun et de livrer
aussi selon les besoins. Donc, à la demande,
la biomasse, dans les conditions souhaitées, est apportée tout simplement,
c'est simplement un bon service à la clientèle. Donc, en ayant cette
structure-là de centre d'approvisionnement, on arrive à bien faire rouler la
filière, finalement. Donc, c'est effectivement un point très important.
M. Gagné (Eugène) : C'est un peu la même chose pour les granules, si vous me permettez. Il
y a beaucoup de potentiel de faire
des projets avec les granules. La difficulté, c'est qu'au Québec on travaille
avec les sacs puis, pour être efficaces, il faudrait être en vrac. Et
puis, pour être efficaces en vrac, bien, ça prend des camions adaptés, ça prend
des systèmes de livraison pneumatiques. Mais, quand on a un projet de 100
tonnes, bien c'est difficile de justifier l'investissement du camion en
question. Ça fait que c'est là que ça prend un petit effort, une petite
poussée, là, un peu d'énergie pour mettre en
place toute la chaîne de services et d'approvisionnement. Puis je pense que la
filière est capable de se débrouiller
par la suite, parce que le coût de la biomasse n'est réellement pas cher :
on parle de 0,025 $, 0,03 $ du kilowattheure dans la
plaquette, le coût du combustible, puis peut-être 0,05 $ dans la granule,
environ. Donc, on est capables de
compétitionner même le gaz, c'est le coût d'investissement qui nous nuit. Puis
c'est un peu, dans le fond, la même
logique dans le gaz : si on n'investit pas pour amener le tuyau, le gaz,
il coûterait cher, là, tu sais, il faut se rendre.
Donc,
le combustible, il est capable de faire son chemin seul, mais il faut lancer la
question. Puis les Européens ont quand même réussi à le faire, là, dans
des conditions peut-être plus favorables, vu leur coût d'énergie, mais, enfin,
c'est un autre...
Le Président (M.
Reid) : Merci. Alors, nous allons passer au groupe de l'opposition
officielle avec M. le député de Terrebonne.
M. Traversy : Merci
beaucoup, M. le Président. Merci, M. Gagné, M. Arsenault, Mme Robichaud et Mme St-Laurent Samuel. Merci d'être avec nous aujourd'hui.
Vous avez une belle délégation pour venir nous rencontrer en cette commission,
et j'apprécie le travail que vous avez fait dans le cadre de votre mémoire. On
a de la couleur, des détails, des recommandations, bref, assez pour
avoir des bonnes discussions avec vous au cours des prochaines minutes.
Vous posez tout d'abord une question des
échanges qui est venue avec le gouvernement. M. Arsenault, vous sembliez nous dire tout à l'heure que le marché
local pour les granules était peut-être actuellement moins important
qu'au niveau international. J'aimerais ça,
juste à titre d'information, savoir c'est quoi, les chiffres, à l'heure actuelle, du marché local et international, à ce niveau-là.
M.
Arsenault (John W.) : Le
marché local pour les granules de bois est d'environ 100 000 tonnes, 110 000 tonnes de
consommation locale. Nos producteurs en produisent 350 000, comme je
disais, réparties un peu partout dans la province, et par conséquent on exporte
au-dessus de 200 000 tonnes actuellement, principalement vers le marché du
nord-est des États-Unis, en remplacement de l'huile à chauffage, justement.
Il faut
comprendre que le problème de la biomasse, ce n'en est pas un
d'approvisionnement, il y a des millions de tonnes, comme Eugène l'a
mentionné, et l'industrie forestière a déjà démontré qu'elle était capable de
manipuler des millions de tonnes de biomasse en faisant du papier, en faisant
du bois. Ce n'est pas l'approvisionnement qui pose problème, c'est : on n'a pas assez de brûleurs pour consommer la
biomasse dans nos commerces, dans nos industries, dans nos institutions. On a besoin d'encouragement pour
créer une masse critique de demande qui va faire sortir les entrepreneurs
pour remplir cette demande, pour combler cette demande-là.
Les
producteurs de granules du Québec ne demandent rien de mieux que d'avoir deux
fois plus de consommateurs au Québec
puis de les desservir. Ça les protégerait des aléas des taux de change, etc.,
qui leur ont fait vivre des montagnes russes au fil des derrières
décennies.
• (15 h 40) •
M. Traversy : Excellent. Merci
beaucoup pour cette information. Vous nous avez, donc, parlé, dans le cadre de
votre présentation, des retombées financières importantes que votre industrie
peut apporter au Québec, donc des retombées
financières significatives. J'ai lu à l'intérieur de votre mémoire, là, qu'on
parlait même de création d'emplois, là,
assez intéressants, des emplois qui seraient récurrents, dans la plupart des
cas. Je pense que, de mémoire, c'est autour de 16 000 emplois dont
vous nous faisiez référence. Juste pour bien figurer — c'est
des emplois qui peuvent aller, j'imagine, là, dans toutes sortes, là, de
professions — on
parle de quel genre d'emplois, plus précisément?
M. Gagné
(Eugène) : Bien, il y a une
portion qui est dans la construction des chaufferies puis la préparation
des équipements. Donc, ça, c'est la partie importante, là. Le chiffre, je ne me
souviens pas exactement si c'est 12 000 ou 13 000 dans la
construction, puis c'est 3 000 environ qui est le chiffre, là, qui sont
récurrents. Donc, dans ce qui est récurrent,
c'est les services, parce qu'il y a plus d'entretien. Tantôt, je vous ai dit
que le combustible ne coûtait pas cher, mais l'entretien est plus cher que dans les autres filières, et il y a
toute la biomasse qu'il faut préparer. On vous a parlé d'un centre de transformation et de
conditionnement de biomasse, préparation du combustible, mais il faut le
récolter en forêt. Donc, tout ça
vient ajouter, là, la partie récolte. Bien, 1 million de tonnes, c'est
l'équivalent d'à peu près 2 millions de mètres cubes, là, si on met ça en bois. Ça fait que récolter
2 millions de mètres cubes, c'est quand même pas mal d'emplois, là.
C'est associé à ça.
M.
Traversy : C'est bien noté. Donc, entre 12 000 et
13 000 pour la construction, 3 000 récurrents en lien avec
l'entretien et la gestion, donc, des biomasses.
Vous avez
parlé, tout à l'heure, du financement qui provient du Fonds vert. Je sentais
que c'était une préoccupation que
vous aviez. D'ailleurs, le ministre a mentionné dès le départ, là, qu'il était
prêt à en faire plus, d'ailleurs qu'il y avait des actions mais qu'il était prêt à aller un peu plus
loin. Certains groupes sont venus nous voir à l'intérieur de cette
commission pour lancer peut-être quelques
signaux par rapport à la gestion du Fonds vert. Vous, est-ce que je comprends,
de votre côté, que vous êtes
satisfaits de la manière dont les choses se déroulent, qu'il y a de la
transparence, simplement que vous aimeriez y voir un peu plus de
financement du côté de votre secteur? C'est ça que j'ai entendu?
M. Gagné
(Eugène) : Bien, c'est plus
que ça, mais c'est sûr que le financement, c'est le nerf de la guerre,
comme on dit. L'enveloppe... en fait, à la
fin du PACC I, puis le PACC II, là... on a été pratiquement un an, un
an et demi avec l'expectative de
sommes dans le PACC II, mais ce n'était pas là, il y a eu le changement de
gouvernement. Tout ça, ça a traîné très longtemps.
Bon, on a
annoncé l'enveloppe... Mme Marois avait fait l'annonce à Saint-Félicien, de
mémoire, en novembre 2013. Bien, le
budget de l'année en cours et de l'année qui suivait, là, dans le fond, 2014‑2015... Attends.
C'est-u bien ça? Non, c'est 2013‑2014.
Il était épuisé complètement au mois de septembre. En fait, depuis septembre
dernier, pas septembre qui vient de passer, l'autre d'avant, le
programme est suspendu, parce que le gouvernement veut revoir les normes, les paramètres de l'allocation du programme. Puis
nous, on l'appuie à 100 % là-dessus, parce qu'on avait une enveloppe
de 10 millions annuellement puis le
programme permettait d'attribuer jusqu'à 5 millions par projet, 75 %
de financement du projet. Vous
comprenez que deux projets, ça règle le problème. Puis on ne structure pas une
filière avec ça. Nous, on pense que les paramètres du programme doivent
être bâtis de façon à favoriser la structuration du programme en visant des
secteurs, des programmes adaptés aux secteurs et en visant peut-être des
régions... peut-être moins de régions, c'est peut-être...
En tout cas, nous, on ne se met pas dans la peau du gouvernement, là, mais on
vous dit qu'à saupoudrer partout, des fois, ça ne fonctionne pas
vraiment, tu sais.
M.
Traversy : Donc, vous, vous êtes plus dans le ciblage, vous en
avez parlé tout à l'heure, donc industries, bâtiments...
en tout cas, vous en avez déployé quelques-uns. Ces paramètres-là qui sont à
revoir, donc, depuis, là, que vous êtes
en train de les étudier avec le gouvernement, est-ce que vous continuez à
recevoir au moins certains fonds ou c'est de là, dans le fond, votre cri d'urgence, là, où vous nous dites : Le
temps qu'on trouve les nouveaux paramètres, là, pour cette négociation,
on aimerait recevoir davantage de fonds pour accomplir notre mission?
M. Gagné
(Eugène) : On aimerait que le programme, qui est suspendu, soit annoncé
le plus tôt possible. On espérait que ce
soit avec le nouveau budget du 1er avril dernier. Bon, bien, pour toutes sortes
de raisons que je ne connais pas les
explications, ce n'est pas fait encore, au moment où on se parle. Alors, on
souhaiterait connaître ces paramètres-là, parce que ça aussi, ça fait un frein, on ne sait pas trop à quoi s'en tenir. De là l'idée d'aller sur
des crédits d'impôt, qui est beaucoup
plus souple qu'un programme où c'est plus difficile. Tu sais, un crédit d'impôt ciblé sur certaines industries ou qui donne une certaine souplesse, les gens dynamiques, ils vont de
l'avant, puis c'est plus facile à travailler. Ça ne veut pas dire qu'il
faut enlever l'autre, là, mais on
pourrait travailler sur les deux plans puis il me semble qu'on avancerait
plus positivement pour atteindre les objectifs.
Mme
St-Laurent Samuel (Amélie) :
J'ajouterais que, du point de vue de la création
d'emplois dont on a parlé tantôt, on parlait de l'importance de... en fait, de l'économie verte,
des nouveaux emplois verts, des nouveaux emplois à valeur ajoutée, on a peut-être peu parlé de tout
ce qui était emploi, les équipementiers. Oui, il y en a, on parle
beaucoup de la technologie européenne, mais
il y a des équipementiers au Québec, de bons équipementiers. On parlait aussi
des gens qui s'occupent... en fait,
les consultants qui s'occupent de concevoir les projets, qui s'occupent de
concevoir des projets qui sont justement efficaces, qui sont
performants. Donc, il y a un secteur qui s'est bâti et qui s'est bâti justement
avec le fameux programme de financement, qui
a été un peu victime de son succès, finalement. Pour être en contact,
justement, avec les acteurs de cette
filière-là, c'est très difficile pour eux d'avoir à surpasser toutes ces
montagnes russes, finalement, ces
arrêts et ces retours du programme. Bon, à chaque fois, l'annonce d'argent
nouveau est célébrée, je dirais, mais quand même, entre-temps, il y a des périodes où les entrepreneurs — c'est souvent le cas — doivent finalement avoir les reins
très solides et ils doivent passer à travers ces périodes-là.
Donc,
c'est ça, d'un point de vue, là, d'économie verte ou de création d'emplois
porteurs à valeur ajoutée, je pense que ça peut être difficile aussi.
M.
Traversy : Donc, d'avoir aussi un peu plus de stabilité pour
avoir plus de prospérité, c'est le message que vous nous lancez
aujourd'hui. Je vous remercie beaucoup d'avoir répondu à ces quelques questions
et je laisserais maintenant la parole à la deuxième opposition. Merci.
Le
Président (M. Reid) : Alors, nous allons passer au deuxième
groupe d'opposition. M. le député de Masson, c'est vous qui prenez la
parole?
M. Lemay :
Oui.
Le Président (M.
Reid) : À vous la parole.
M. Lemay :
Merci, M. le Président. Merci d'être avec nous aujourd'hui. Vous savez, dans la
région de Lanaudière, on a un beau projet,
là, qui est toujours en discussion, là, le projet de La Granaudière. J'imagine,
vous en avez entendu parler, puis ça, comme vous l'avez mentionné, c'est
un projet qui est principalement pour l'exportation vers l'Europe à cause du manque de brûleurs sur place
au Québec. Donc, j'imagine que, pour vous, là, ça fait juste démontrer que, dans le fond, la biomasse est quelque chose
qui est là et qu'on devrait utiliser davantage au Québec. Donc,
j'imagine que vous êtes totalement favorables à l'installation d'une nouvelle
usine.
M. Arsenault (John
W.) : En fait, le problème, ce n'en est pas un, comme je le
mentionnais, de capacité de production ou de
livrer la marchandise, c'est : on n'a pas de marché local. Mais il y a
plusieurs projets européens qui ont été annoncés dans plusieurs régions, dans le Bas-Saint-Laurent aussi, dans
Lanaudière, mais actuellement les taux de change ne sont pas favorables pour ces affaires-là. Et eux
aussi font face à un problème de marché européen qui plafonne, jusqu'à
un certain point. Donc, de là l'intérêt pour les producteurs locaux de se développer
un marché local et beaucoup plus substantiel que celui-là qui est là
actuellement, alors qu'on a un potentiel énorme en termes d'approvisionnement.
Mme
St-Laurent Samuel (Amélie) :
J'ajouterais que le marché local ou l'utilisation locale de biomasse permet aussi de maximiser les réductions d'émissions de gaz à effet de serre. On fonctionne le plus
possible en circuit court, c'est le souhait
des gens aussi autour... en fait, des membres du regroupement, ce qui crée... donc, avoir un circuit court,
avoir un maximum d'emplois, finalement, dans les régions
ou un peu partout au Québec. Donc, c'est de là, toute l'importance, effectivement,
de consolider l'utilisation locale, comme on a déjà beaucoup de défis au Québec.
M. Arsenault (John W.) : Je voudrais aussi souligner le fait que les projets
d'exportation sont très intéressants parce qu'ils amènent de l'argent
neuf au Québec, mais les projets de biomasse ont l'effet semblable en réduisant
les importations de produits pétroliers qui
sont à l'extérieur du Québec.
Donc, une consommation qu'on crée à l'intérieur du Québec a le même effet que d'exporter, dans le
sens qu'on n'importera pas de l'huile, on va dépenser cet argent-là ici.
En termes de balance commerciale, on a parlé de centaines de millions de
dollars, un potentiel.
M.
Lemay : Centaines de millions. Est-ce que vous savez combien coûte la
tonne de CO2 évité, là? Parce que vous parlez, là, que, dans le fond, on remplace le combustible par la biomasse. Est-ce que
vous avez chiffré un peu le coût qu'on pourrait mettre au CO2
là-dessus?
• (15 h 50) •
M. Gagné (Eugène) : Bien, on a regardé un peu le document de consultation, là, on a fait une projection avec le système
de plafonnement, il y a une valeur de la tonne de CO2 qui est
appliquée à ça. Les programmes actuellement
sont basés, dans les grands consommateurs, à
50 $ la tonne de CO2. Le prix, actuellement, selon le système
de plafonnement, c'est 15 $,
16 $ la tonne. Puis, dans les plus petits projets, plus petits
consommateurs, le programme donnait 125 $ la tonne de CO2 évité. Bon, est-ce que c'est
adéquat? Moi, je pense que 50 $ la tonne, dans la grande industrie, c'est
adéquat, tu sais, il n'y a pas de problème avec ça.
M.
Lemay : Merci. Je veux juste
vous demander, vous en parlez à la page 11 de votre mémoire, au niveau de la production d'électricité,
puis là je pense à un cas précis : la communauté attikamek à Manawan, qui
ont souvent des pannes électriques. Je
comprends que la biomasse forestière, c'est principalement pour la génération
de chaleur, bon, on s'entend, mais vous en parlez vous-mêmes, qu'on peut
faire de la cogénération ou de la microcogénération.
Est-ce
que c'est quand même une communauté assez éloignée, selon vous? Tu sais, là,
vous parlez de réseaux autonomes plus
dans le Grand Nord, mais, tu sais, je veux dire, il me semble, un projet...
bien, admettons, on parle qu'on veut faire de quoi dans Lanaudière, La
Granaudière, mais, proche de là, il y a la communauté attikamek à Manawan, il n'y aurait pas moyen de pouvoir aller faire là
la génération de chaleur, utiliser la cogénération? Je ne sais pas si on
peut vous entendre un peu à cet effet.
M. Arsenault (John W.) : Effectivement, là, les réseaux autonomes sont une
opportunité pour utiliser la biomasse. Il
y a des technologies européennes qui y sont développées maintenant pour faire
de la microcogénération, c'est-à-dire qu'on fait de l'électricité en termes de
kilowatts plutôt qu'en termes de mégawatts et on produit aussi de la chaleur
qui peut être utilisée pour le
chauffage. Et on a peut-être des opportunités, par exemple, pour faire des
démonstrations de cette nature-là aux
Îles-de-la-Madeleine avec des projets qui nous permettraient l'accès. Et le
transport de la biomasse peut se faire par des voies navigables ou par le train dans certaines communautés
dans le Nord — je pense
aux mines, par exemple — ou par camion.
Je
vais vous donner un exemple qui est typique, là : dans l'Ouest canadien,
dans les Territoires du Nord-Ouest, il y
a des communautés qui sont isolées, qui ont seulement des chemins d'hiver et
qui se chauffent maintenant aux granules, en transportant les granules sur les chemins de glace, durant l'hiver.
Et ils ont remplacé, de façon efficace, l'utilisation de gaz naturel, qui s'était épuisée sur leur site, et
d'huile à chauffage. Ça fait qu'il y a moyen d'utiliser la biomasse dans
ces applications-là et ça crée encore une
consommation interne : on cesse d'importer des produits qu'on ne produit
pas ici.
M. Lemay :
Parfait.
M. Gagné
(Eugène) : Un élément important dans les réseaux autonomes, c'est
qu'Hydro-Québec, dans plusieurs communautés
des Premières Nations... c'est des communautés en croissance, puis elles sont
au maximum de leur capacité de
fournir avec leurs génératrices, qui
fonctionnent au diesel. Alors, si on installe, comme le disait John, des
unités qui produiraient et de l'électricité et de la chaleur, on vient donner
une chance à Hydro, qui n'est pas obligée de faire une nouvelle installation, d'une part; d'autre part, dans tous ces
réseaux-là, Hydro subventionne l'huile, parce qu'il faut que les citoyens restent à l'huile, là : on n'est pas pour
leur fournir l'électricité faite à partir de l'huile, avec une perte
d'efficacité. Ça fait que la génératrice,
elle est efficace à 30 %, puis la chaudière dans... pas la chaudière, mais
la fournaise dans la maison, elle est efficace peut-être à 70 %,
75 %. Donc, ça serait illogique de fonctionner à l'électricité.
Donc,
on gagne deux fois, là : on gagne sur le chauffage, on gagne sur l'électricité,
c'est bon pour Hydro-Québec,
c'est bon pour les communautés, elles sont moins dépendantes, donc...
Une voix :
Il y a moins de risques environnementaux.
Mme St-Laurent Samuel (Amélie) : C'est ça, exactement. J'ajouterais qu'il y moins
de risques environnementaux beaucoup. On connaît les déversements, là,
beaucoup dans le Nord. Plus il y a de transport, plus il y a de risques de
déversement. Comme on s'amuse à le dire, un déversement de granules, c'est
beaucoup moins problématique qu'un déversement de combustible fossile.
Le Président (M.
Reid) : Alors, merci à tous les quatre pour votre contribution
à nos travaux.
Les travaux de la
commission sont suspendus quelques instants pour permettre à nos prochains
invités de prendre place.
(Suspension de la séance à
15 h 55)
(Reprise à 15 h 58)
Le Président (M.
Reid) : Alors, nous reprenons nos travaux. Je souhaite la
bienvenue à nos invités du Conseil de
l'industrie forestière du Québec. Vous avez une dizaine de minutes pour faire votre
présentation. Par la suite, nous aurons une période d'échange.
Je vous demanderais, pour
les fins de l'enregistrement, de vous présenter et présenter les personnes qui
vous accompagnent. Vous avez la parole.
Conseil de l'industrie
forestière du Québec (CIFQ)
M. Tremblay (André) : Bonjour, M. le
Président. Merci de nous recevoir. Je suis accompagné de M. Pierre Gingras, de
la compagnie Arbec, qui est aussi président du comité environnement au CIFQ et
membre du conseil d'administration, ainsi
que de M. Pierre Vézina, qui est responsable des dossiers environnement au sein
de notre association.
On a déjà
déposé notre mémoire, mais, sommairement, j'aimerais peut-être vous dresser les
grandes lignes, là, de ce que nous
croyons important dans le cadre de la présente consultation, d'abord, vous
rappeler que le secteur forestier est un
secteur important : on parle de 60 000 emplois, dont à peu près
23 000 dans l'industrie spécifique des pâtes et papiers. On
génère autour de 8 milliards de chiffre d'affaires, dont 5 milliards
d'exportation, donc des revenus intéressants pour le Québec. Secteur
dans lequel — le
secteur des pâtes et papiers — il se fait encore des investissements.
Malgré les
perceptions qu'on peut avoir, c'est un secteur dans lequel il y a encore
beaucoup d'avenir. Et, à titre d'exemple, je pourrais citer l'usine de
Thurso, qui appartient à Fortress, qui a été modernisée récemment; l'usine de Tembec au Témiscamingue; l'usine de Kruger : le gouvernement du Québec vient d'annoncer
un partenariat avec Kruger récemment,
il y a à peu près deux ou trois semaines. Toutes des usines qui sont situées
dans des régions, des régions qui... et souvent des régions éloignées, là, et où l'industrie crée des emplois,
des bons emplois, des emplois rémunérateurs. Il y a aussi d'autres investissements qui se font par des
compagnies québécoises ailleurs, dans d'autres juridictions, mais tout
ça pour dire qu'il s'investit encore plusieurs centaines de millions dans la
modernisation, dans la recherche de nouveaux procédés et de nouveaux produits
dans cette industrie-là.
• (16 heures) •
Toutefois, c'est un secteur qui est extrêmement
compétitif, c'est un secteur où les entreprises se battent au quotidien pour conserver leurs parts de marché. On
est sur des marchés internationaux où ce n'est pas en dizaines de
dollars, c'est souvent en dollars et même en cents que les commandes vont
s'arracher d'un client à l'autre. Donc, la notion de compétitivité pour nos
entreprises est absolument essentielle. Ça fait que vous comprenez que ce qui
nous préoccupe beaucoup, c'est notre
structure de coûts, comment s'assurer d'avoir une structure de coûts qui nous
permette d'aller sur ces marchés et de pouvoir vendre nos produits, vous
rappeler aussi que l'énergie représente, grosso modo, dépendant des procédés que les pâtes et papiers utilisent, de
15 % à 30 % de nos coûts. Donc, vous comprenez que cet aspect-là
nous interpelle au plus haut point.
Ce n'est pas d'hier que l'industrie des pâtes et
papiers a commencé à faire ses devoirs en ce qui concerne le réchauffement de la planète. Si on regarde le
bilan de notre industrie depuis 1990, on a réduit de près de 70 % nos
émissions de gaz à effet de serre. Vous
allez me dire : Il y a des usines qui ont fermé. M. Tremblay, vous vous
appropriez des mérites qui ne vous
appartiennent pas. Je vais dire : Oui, vous avez raison, en partie. Mais
la grande partie des réductions qui se sont produites, c'est des réductions qui sont dues au changement, à
l'amélioration de nos procédés, à l'utilisation plus efficace de notre énergie dans nos usines. Ce qu'on appelle
notre intensité carbone, là, a été... ce qu'on émet par tonne de carbone
produite... excusez, par tonne de papier
produit a diminué aussi de 67 %. Donc, pour faire une même tonne de
papier, on émet 67 % moins de
carbone, de CO2. Et c'est venu en grande partie dû au fait de
l'utilisation de la biomasse à des fins énergétiques puis, comme je vous disais tout à l'heure, à l'économie
d'énergie. Donc, on a fait nos devoirs, on a fait nos devoirs au point où, aujourd'hui, on est assez
fiers de dire que, par rapport à l'objectif qui est dans votre document
de consultation, que le gouvernement a
dévoilé, de 37,5 %, vous voyez qu'on a à peu près fait, comme secteur
industriel, le double de diminution d'émissions de carbone. Mais ceci nous
amène à avoir quelques inquiétudes sur comment cette performance-là passée va être reconnue dans la réflexion puis dans le
futur et, deuxièmement, comment aussi on devra assumer le fardeau des réductions prochaines qui s'en viennent. Est-ce
que vous comprenez que, ce qui était... en vertu de la règle du
80 %-20 %, là, ce qui était facile à faire comme réductions, on les a
faits?
Les
réductions qu'on peut faire maintenant dans nos usines, c'est des réductions
qui demandent des investissements importants,
très importants. On a fait faire des études par FPInnovations — Pierre pourra donner plus de détails s'il y
a des questions là-dessus — mais qui démontrent que c'est toujours la
courbe, hein, que, de façon exponentielle, là, le dernier 20 % a un coût exponentiel par rapport à ce
qu'il en a coûté de faire les réductions du premier 80 %. Donc, tout
l'exercice qu'on est en train de voir, vous comprenez que ça nous interpelle
beaucoup.
À partir de
là, il y a un élément plus spécifique sur lequel je voudrais attirer votre
attention, qui est toute la question de
la taxe, des coûts qui sont inhérents à la mise en place du système.
Actuellement, vous savez que le secteur forestier est un secteur où on
utilise beaucoup de transport. De la récolte de l'arbre jusqu'à la livraison de
nos produits, il y a une partie de notre
processus industriel qui est intimement liée à des activités de transport, au
point où on calcule, grosso modo, là,
qu'on doit, juste dans les activités de récolte, de transport du bois de la
forêt à l'usine, les transports des sous-produits, dépenser à peu près
300 millions de litres, comme industrie, comme secteur industriel. Ça,
depuis qu'on a institué la redevance sur le
carburant, ça nous impute une facture autour de 14 millions de dollars,
comme secteur industriel, puis là je
ne compte pas les coûts de construction de chemins, je ne compte pas les coûts
de livraison de nos sous-produits de l'usine
chez le client. Donc, c'est une facture, là, autour de 0,047 $ le litre, grosso
modo, qui fait en sorte que, quelque part, ça a un impact sur notre capacité d'aller sur des marchés américains
compétitionner des entreprises qui sont déjà installées.
Donc,
selon nous, ce que l'on vous soumet, c'est que le gouvernement doit se
préoccuper de cette situation-là, pour
laquelle on est particulièrement affectés en raison de la nature de nos
opérations. Il nous apparaît aussi un peu illogique qu'au moment où le gouvernement du Québec vient de
mettre en place une cellule d'intervention pour réfléchir sur la situation de l'industrie forestière, sur les
moyens qu'on doit utiliser pour aider sa transformation, d'un côté, cette
cellule-là réfléchisse
sur des moyens pour aider l'industrie et que, d'un autre côté, par une
législation différente, on vienne imposer une facture, des coûts
additionnels, de l'ordre de 15... enfin, de l'ordre d'à peu près 15 à
20 millions, là, si on compte l'ensemble
des activités reliées au transport qui sont générées par l'industrie. Donc, on
reconnaît la nécessité d'agir puis on désire le faire de manière
responsable, dans la mesure de nos capacités financières.
Malgré
ses succès passés, l'industrie forestière possède encore un certain potentiel
de réductions de GES, mais, comme je
vous disais tout à l'heure, celles-ci vont être onéreuses. C'est pourquoi on
pense qu'on devrait, si on veut réussir à les réaliser, avoir accès à des programmes, à un support financier via
des programmes d'efficacité énergétique et via des programmes d'aide
relativement au transport de marchandises.
Il
y a cet aspect-là puis il y a aussi l'aspect, je vous dirais, de politiques
publiques. J'entendais, tout à l'heure, les conférences des coopératives
parler...
Le Président (M.
Reid) :...si vous voulez, rapidement, terminer.
M. Tremblay (André) : O.K. Excusez-moi. Donc, je vous disais que toute la question des
politiques publiques est importante.
Si on veut avoir une filière du biocarburant au Québec, je pense qu'il va
falloir qu'il y ait une volonté politique de nous amener là.
Donc, écoutez, oui,
on encourage le gouvernement à maximiser la séquestration du carbone. On est
aussi une solution. Là, je vous ai parlé de nos problèmes, mais on est aussi
une solution...
Le
Président (M. Reid) : Très rapidement, parce qu'on pourra
prolonger au niveau des échanges, mais je dois protéger le temps des
membres de la commission.
M. Tremblay (André) : Parfait. Merci, M. le Président. J'arrête. Au niveau des solutions, le
bois, la fibre est une réponse à nos problématiques. On pourra exposer
comment tout à l'heure. Merci de votre attention.
Le
Président (M. Reid) : Merci beaucoup. Alors, nous passons au
bloc gouvernemental. M. le ministre, vous avez la parole.
• (16 h 10) •
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Merci pour votre
présentation ainsi que votre mémoire. Bien,
parlons-en, des solutions. Alors, lorsque vous parlez d'investissements
importants pour entamer la prochaine phase de réduction d'émissions puis que vous parlez, bon, d'investissements
importants, vous parlez qu'il faut des programmes, juste comprenons déjà, dans le cadre du plan
d'action sur les changements climatiques, qu'il existe déjà des
programmes puis des fonds pour justement
investir puis aider les entreprises à opérer une conversion vers soit des
nouvelles technologies, au niveau des transports également.
Alors, j'aimerais ça
approfondir, quand vous parlez, là, justement de la prochaine phase qu'il
faudra faire au niveau de l'industrie
forestière, quels sont ces moyens-là. Alors, tu sais, vous parliez du
transport, qui coûte cher, mais l'idée de
soumettre les distributeurs de carburants fossiles au marché du carbone, c'est
justement pour créer l'incitatif économique justement aux entreprises, au secteur industriel à investir dans
d'autres types de combustibles, d'autres modes de transport, puis, de l'autre côté, bien, le plan d'action sur
les changements climatiques finance des mesures pour faire ça. Alors,
déjà dans le secteur du transport, ça commence,
on le voit au niveau de l'utilisation du gaz naturel, on le voit dans
l'utilisation de technologies au niveau électrique.
Je
comprends que ce n'est pas encore au point nécessairement dans votre industrie,
mais j'aimerais savoir quelles sont les solutions que vous envisagez et
comment on peut travailler ensemble pour arriver à les mettre en oeuvre.
M. Tremblay
(André) : ...répondre rapidement peut-être dans un premier temps, puis
je vais laisser Pierre compléter ma réponse.
Si
je reviens au niveau des programmes d'efficacité énergétique, je pense qu'on a
déjà bénéficié de programmes intéressants,
et je vais donner un simple exemple : on avait un programme de
coordonnateur à l'énergie qu'on faisait en collaboration avec Gaz Métro et qui, dans chacune des usines, permettait
à une personne désignée d'être responsable et de s'assurer que l'usine était optimale en termes d'utilisation énergétique
sous toutes ses formes; ça allait de la modernisation au chauffage de l'usine. Et ces programmes-là, qui
étaient des programmes peu coûteux, ont donné des succès absolument très
intéressants en termes de résultats. Ce n'est plus disponible. C'est un
exemple.
Mais
ce qu'on constate de façon plus générale, c'est que les programmes de
transformation énergétique... Je vais vous donner un exemple. On avait
un programme qui était financé à hauteur de 5 millions pour chacun des
projets de transformation qui amenait une
réduction de l'utilisation énergétique, qui aujourd'hui a été réduit de...
l'enveloppe a été réduite de
5 millions à 1 million pour chacun des projets. Donc, c'est ce genre
de chose là auquel on n'a plus accès qui, je pense, pourrait être remis
en place et nous permettre, là, d'améliorer notre bilan énergétique.
Pierre, si tu veux
compléter?
M. Vézina
(Pierre) : Oui, j'aurais peut-être, si vous permettez, quelques
pistes.
M. Heurtel :
Bien sûr.
M.
Vézina (Pierre) : Alors, bien, du côté des usines, hein, je pense
qu'il faut différencier, il y a deux aspects, hein, l'aspect de l'opération, je dirais, industrielle de l'usine
elle-même. Dans le cas des programmes qui existent, bien, ils sont relativement
limités. Ce qu'on observe, c'est que les budgets diminuent continuellement. On
en a fait état dans le mémoire :
nos membres se présentent pour faire une demande, et puis, rendus au mois de
juillet, les budgets sont épuisés. L'approche,
souvent, est «premier rentré, premier servi», et on ne cherche pas toujours la
plus grande, je dirais, efficacité ou le meilleur rendement dollar-tonne
de carbone. Donc, il y a peut-être des aspects de ce côté-là. Je pense qu'André
a mentionné... la gestion de l'énergie est
un élément quand même important, et il faut continuer à travailler sur,
naturellement, le volet biomasse.
Par
ailleurs, du côté des opérations forestières elles-mêmes, ce n'est pas simple,
puisqu'on dépend d'un ensemble de
décideurs là-dedans, dont tout ce qui touche la planification, quel peuplement
on va aller couper. Les opérateurs qui font
ce travail-là sont des petites entreprises qui sont sous contrat avec nous
autres, sauf que, naturellement, les conditions des dernières années ont été difficiles, et ils n'ont pas été en mesure
d'investir là-dedans. Donc, il faut trouver des moyens qui vont faire en
sorte qu'on peut les inciter à investir dans des meilleures technologies.
Vous l'avez
mentionné, il y a certaines avenues qui commencent à poindre dans le transport,
je dirais, des marchandises, produits finis. Hein, quand on va sur des grands
axes, oui, le gaz naturel, l'électricité, c'est peut-être intéressant; quand on est dans le fin fond du
bois, par exemple, c'est pas mal plus compliqué. Donc, on a beaucoup de difficultés à comprimer ces coûts-là. Donc, c'est
là un petit peu, là, que c'est difficile pour l'industrie. On se retrouve
avec une facture de 14, 15 millions par année, et, pour nous autres, elle
est pratiquement incompressible.
Alors, oui, vous
donnez un signal de prix, peut-être, en théorie. Sur le plan économique, oui,
ça marche, ça fonctionne, mais, quand ça
n'arrive pas à descendre, là, au point des entreprises... parce qu'elles ne
peuvent pas faire des changements
dans, je dirais, tout le mode de gestion de la collecte en forêt puis du
transport vers l'usine, alors on est un petit peu coincés là-dedans, là.
En termes de potentiel de réduction, là, ce n'est pas simple.
M. Heurtel :
Merci.
Le Président (M.
Reid) : M. le député de Dubuc.
M.
Simard : Merci, M. le Président. J'aimerais savoir, M. Tremblay — je ne sais pas si vous, vous allez être
en mesure... mais il y a peut-être un de vos
invités avec vous qui va nous donner
ça — combien
d'usines à papier ou autre, dans le domaine, je vous dirai, forestier
fonctionnent, au moment où on se parle, totalement à la biomasse. Est-ce que
vous savez ça?
M. Tremblay (André) : Bien, c'est-à-dire qu'il n'y
a pas d'usine qui fonctionne à la biomasse en totalité. Dans le cadre du programme de cogénération, il y a beaucoup
d'usines qui ont installé des bouilloires importantes avec lesquelles
ils font la vapeur puis, souvent, elles
turbinent une partie de mégawatts, là, qui va de 12, 13, 14, 15 mégawatts.
Mais c'est sûr qu'au-delà de ça il y a une consommation qu'ils sont sur
le «grid» d'Hydro-Québec, là, pour une grande partie.
Pierre, je ne sais
pas si tu as les chiffres plus précis.
M. Vézina
(Pierre) : Oui. Bon, c'est sûr qu'il faut différencier l'énergie
thermique de l'énergie électrique. Naturellement, on est des très gros consommateurs électriques.
Je pense qu'on consomme à peu près 13 térawattheures, ce qui représente à peu près 8 % de l'énergie produite par Hydro-Québec. Donc, c'est significatif. Par
contre, si on regarde vraiment,
là, où on peut changer du côté des gaz
à effet de serre, des usines qui
opèrent presque exclusivement, je dirais, là, à la biomasse, il y en a probablement,
à peu près, une quinzaine sur 35.
M. Tremblay
(André) : Pour la vapeur.
M.
Vézina (Pierre) : Pour ce
qui est de la production d'énergie thermique, c'est ça. Donc, il y a à la fois
celles qui ont, comme a mentionné André, des
centrales de cogénération, mais d'autres aussi qui ont essentiellement de très grosses chaudières industrielles qui opèrent à la
biomasse avec des écorces principalement puis des résidus, là, de bois de
déconstruction, des choses comme ça.
M. Simard :
Je peux continuer, M. le Président?
Le Président (M.
Reid) : Oui.
M.
Simard : Merci. Croyez-vous
que, si — je
mets ça entre guillemets, là — il
y avait des aides gouvernementales pour essayer tout au moins de
maximiser la transformation de l'utilisation de la biomasse dans les
différentes usines, question de diminuer les
gaz à effet de serre, parce que c'est de ça qu'on parle ici, là, et
puis par la même occasion, ça pourrait
permettre à des travailleurs forestiers, à des travailleurs dans le domaine de
la forêt, là, justement de maximiser les retombées soit par des
granules spéciales... Parce que, on sait, on parle même d'exporter de la
granule industrielle à l'extérieur, mais peut-être
qu'on pourrait l'utiliser dans nos usines. Pensez-vous honnêtement qu'on pourrait nécessairement développer
une expertise au Québec qui pourrait servir véritablement à l'industrie
forestière et bien sûr être en mesure de diminuer d'une façon importante... Parce que tantôt les gaz à effet de serre... c'est-à-dire, le prix du carbone va être tel qu'il faut se trouver des moyens de, là. Et
pensez-vous que cette façon de travailler là pourrait nécessairement nous aider à plus de compétitivité lorsque le prix du carbone
sera exorbitant?
M. Tremblay
(André) : On est convaincus que la filière de la biomasse est une
filière qu'il faut qu'elle soit développée
au Québec. On a la ressource. Tout à l'heure, les gens des coops l'ont expliqué, ils l'ont donné en détail, je
pense. On a la ressource, et c'est une filière qui n'a pas de raison qu'on ne
soit pas en mesure de la développer. Il faut la développer
intelligemment, il faut la développer dans le respect de la structure
industrielle dans laquelle on évolue actuellement. Vous savez qu'il y a des... certains d'entre
vous ont des usines de panneaux dans leurs comtés, et, des fois, on se bataille pour le même approvisionnement. Il
ne faut donc pas avoir de programmes qui vont indûment créer une concurrence artificielle, mais des programmes qui
vont supporter l'ensemble de la filière, l'ensemble du développement
de ces filières-là de façon conjointe.
Donc, en
allant peut-être plus à la source, c'est-à-dire en aidant les
gens qui récoltent la biomasse en forêt, je pense que c'est là qu'on devrait intervenir : au niveau
de la récolte en forêt et non pas au niveau de la mise en place des immobilisations, où, là, je pense
qu'il y a un jeu de libre concurrence qui doit se jouer. Donc, ça, c'est assez
important en termes de vision. Mais vous avez parfaitement raison, M. Simard, qu'une fois ça dit on a, comme société,
à réfléchir et à mettre des énergies nécessaires pour développer cette
filière-là.
• (16 h 20) •
M. Vézina (Pierre) : Bien, je peux
peut-être juste ajouter un commentaire. Il faut comprendre que ce que les usines de pâtes et papiers utilisent, ce sont des
résidus de transformation des scieries, donc, principalement, les
écorces, et la valeur de cette biomasse-là est quand même relativement faible.
S'il
s'agissait de développer des programmes de récupération de biomasse en forêt,
il faut faire attention. Ce qu'on a observé...
Déjà, on a tenté ces expériences-là dans l'industrie, et, malheureusement, en tout
cas, pour l'instant, l'économique
n'est
pas là. Alors, pour l'industrie de pâtes et papiers, cette approche-là ou cette
avenue-là, là, ne présente pas, dans le contexte économique qu'on
connaît actuellement, là, de l'intérêt.
M.
Tremblay (André) : Mais, si
on la fait de façon intégrée, avec des opérations de sciage... donc, on
récolte la biomasse en même temps qu'on récolte le bois qui est destiné à
l'usine de sciage, à l'usine de panneaux, etc., là on commence à avoir une
équation de business qui tient la route.
M.
Simard : Donc, si je
comprends vos propos, c'est que, si on travaille en fonction justement
d'une chaîne de production qui nous amène à l'utilisation et, par la
même occasion, à des économies concurrentielles versus le prix du carbone, on va être nécessairement... puis toutes ces équations-là sont calculées, on serait en mesure,
nécessairement, de développer un marché intéressant par rapport à la biomasse.
M. Tremblay (André) : On pense que
oui, effectivement.
M. Simard : Bon. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Reid) : Oui.
M. le député de Mégantic.
M. Bolduc : Merci, M. le Président.
Bonjour, messieurs. Il me fait plaisir de vous voir aujourd'hui.
Vous mentionnez à la page 4 que, pour les usines
de papier émettant plus de 100 000 tonnes, les coûts pour réduire de
15 % les émissions dépassent les 45 millions, soit un coût de
233 $ la tonne, et vous parlez d'un potentiel additionnel qui vous
coûterait 120 millions, et donc un coût de 315 $ la tonne.
Est-ce que
vous pourriez élaborer un peu sur ce potentiel-là? Parce que je ne le vois pas,
là, mais vous devez le connaître mieux que moi.
M. Vézina (Pierre) : Oui, je pense
que je peux essayer d'expliquer un peu plus en détail.
En fait, ces études-là sont des études vraiment
globales de l'ensemble du fonctionnement de l'opération de l'usine. Ce qu'on fait principalement, ce sont des
analyses de pincement qui étudient l'ensemble des flots de circulation
de l'énergie dans l'usine de manière à ce
qu'on puisse mettre en place des échangeurs de chaleur qui permettent
d'optimiser l'utilisation de la chaleur dans
tous les réseaux de l'usine. Donc, ce sont des approches quand même, là, qui
sont, je dirais, très exigeantes en capital comparativement à des
approches, je pense, qui sont plus privilégiées aujourd'hui, dans les programmes de support, qui visent plutôt la
gestion de l'énergie. On est à deux approches complètement différentes.
Donc, pour obtenir quand même des gains
importants, structurels, il faut faire des investissements importants. Je pense
que c'est à peu près ça qu'on peut retirer, là, de la démarche.
M. Bolduc : Et vous nous parlez du
0,047 $ le litre. J'imagine que c'était l'équivalent de la taxe de
carbone, ça, hein? C'est ça que vous avez calculé.
Une voix : Oui.
M. Bolduc : Je voulais juste être
certain que c'est bien ça. O.K.
M. Vézina
(Pierre) : Oui, oui. On l'a calculé puis on a fait même plus que ça,
on a demandé à nos membres de faire
le tour... on a fait le tour de nos membres pour savoir qu'est-ce que ça
représentait. Ce qu'on observe, là, c'est qu'il y a un calcul théorique
en disant : Bon, bien, une tonne de carbone... c'est-à-dire qu'un litre de
mazout n° 6, ça émet... ou du diesel, là, ça émet telle quantité de carbone puis ça vaut tant
dans le régime, sauf que les distributeurs, eux, approchent ça différemment dans le marché, hein? Il faut
comprendre qu'il y a un marché dans lequel ici le joueur dominant, c'est
Valero, puis il prend toutes ses décisions
au Texas, principalement sur le marché de la Californie. Donc, ses
stratégies d'achat, il va couvrir une partie
de ses émissions de cette année, mais possiblement qu'il va acheter aussi des
millésimes des années ultérieures, et ce qui
fait en sorte que, la valeur globale au net qui nous est refilée, là, on la
voit sur notre facture, mais elle
n'est pas exactement celle qui est calculée à partir, là, de l'émission de
carbone, de la valeur du CO2 elle-même.
M. Bolduc : Donc, la valeur de ces
émissions-là, vous dites, elle est totalement hors de votre contrôle.
M. Vézina
(Pierre) : Bien, c'est-à-dire que ce qu'on reçoit effectivement comme
facture, on n'est pas capables...
Une voix : On n'a pas
d'impact dessus.
M. Vézina (Pierre) : ...de la
réduire, je vous dirais, là.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Alors, nous allons passer
maintenant au groupe de l'opposition officielle avec M. le député de
Terrebonne.
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, M. Tremblay,
M. Vézina et M. Gingras, d'être avec nous cet après-midi pour ces
discussions qui touchent la lutte aux changements climatiques, et évidemment l'industrie
forestière a sa part de discussions à faire
avec nous sur le sujet. Vous avez fait une belle présentation, et je vous
remercie pour ce mémoire bien ficelé. J'y
reviendrai dans quelques instants, parce
que vous avez quand même
des questionnements très légitimes, à l'intérieur de ce document, que
j'aimerais éclaircir avec vous.
Je vais sauter
tout de suite à la conclusion, parce que, bon, d'entrée de jeu, vous nous dites que c'est une cible, celle qui est proposée par le
gouvernement, à l'heure actuelle, de 37,5 %, «une cible trop ambitieuse et
aux risques de [...] surenchère des cibles de réduction». Vous semblez
être prudents sur les objectifs que le gouvernement propose dans sa démarche pour lutter contre les changements
climatiques. Je voulais vous entendre un peu sur cette prudence, parce
que, lorsqu'on lit votre mémoire, on sent que vous plaidez pour un équilibre,
là, entre environnement et économie puis qu'il y a une sensibilité importante à
cet égard. J'aimerais que vous puissiez nous la clarifier. Il y a le Conseil du
patronat qui est venu également lancer,
évidemment, un signal d'inquiétude à ce niveau-là. Je voulais savoir si c'était
du même ordre et un peu ce qui vous agace plus particulièrement avec une cible
que certains disent très audacieuse, que d'autres trouvent très modeste. Alors,
je tenais à vous entendre plus particulièrement à ce sujet.
M.
Tremblay (André) : Écoutez,
si on peut essayer de résumer notre pensée là-dessus, je pense qu'on est
aussi, comme secteur industriel... comme secteur industriel, on vit sur une
planète et on est confrontés aux mêmes types de problèmes que l'ensemble de la
société. Donc, le réchauffement de la planète, le réchauffement climatique nous
préoccupent, et on est conscients qu'il faut faire un effort collectif pour
réussir à trouver des solutions.
Ce qu'on dit
par contre, c'est que, comme secteur industriel, on a déjà fait beaucoup, on a
déjà réduit de façon importante, et je l'ai dit en début de
présentation, nos émissions de plus du double... près du double de la cible que
le gouvernement veut se donner. Donc, la
question qui nous préoccupe, quand on parle d'un 37,5 % : Quelle est
la portion que nous, comme secteur
industriel, on devra assumer dans le futur, et quels seront les coûts, et quel
impact ça aura sur notre capacité de
compétitionner des entreprises qui ne sont pas assujetties à ce genre de
règles? Parce qu'on compétitionne sur l'ensemble
des marchés, autant américains qu'internationaux... que tout autre pays. On
vend dans au-delà de 132 pays à travers le monde. Donc, c'est un
peu le questionnement qu'on a, M. le député, par rapport aux problématiques que
vous soulevez.
M.
Traversy : Donc, sans proposer une autre cible, vous émettez
ces inquiétudes. Vous, bon, plaidez, dans le fond, la question de la compétitivité, qui est effectivement une
question primordiale, dans le secteur qui vous alimente. Et à cet égard, donc, j'ai cru voir en lisant votre
mémoire qu'il y a beaucoup d'incertitudes sur déjà plusieurs enjeux dans
votre industrie. Vous rappelez probablement
qu'il y a des négociations à avoir au niveau de l'accord du bois
d'oeuvre. J'ai vu également, dans votre mémoire, à une autre page — je
pense que c'est la page 6 — que
vous attendiez avec impatience le résultat
des élections fédérales d'hier pour être capables d'éclaircir aussi certaines
prises de position quant aux enjeux qui vous touchent.
Quel message vous voulez lancer au gouvernement
du Québec par rapport à ce qui s'en vient autour du marché du carbone et de la
compétitivité de votre entreprise? J'aimerais vous laisser la chance de faire
ce plaidoyer, parce que vous l'avez un peu
mentionné, mais, je pense, ça mériterait d'être plus clair, dans les
circonstances, maintenant libérés de toute campagne fédérale.
• (16 h 30) •
M. Tremblay (André) : Écoutez, je
pense que le message fondamental qu'on veut livrer, c'est que, comme secteur
industriel, on veut comprendre et bien mesurer les impacts que l'engagement du
Québec peut avoir sur nos opérations et sur notre capacité industrielle et
quelles seront les conséquences financières qui nous seront imputées.
Et, à partir
de modèles, là... et il y a des modèles économétriques qui sont dans le
document gouvernemental, et c'est sûr
que, ça, on est sur des projections de 15, de 20 ans, on est sur des
projections à long terme. C'est toujours, je dirais, un peu dangereux... ou on se méfie toujours un peu des
évaluations qui sont sur de longues périodes de temps, parce que les hypothèses, des
fois, qu'on prend au départ, si elles varient quelque peu, ça donne de drôles
de résultats à l'autre bout. Ça fait
que, ça aussi, il y a des choses qu'il faut... Il faut se donner des mécanismes
de révision et des mécanismes de
suivi et de contrôle qui vont nous permettre de faire des ajustements dans le
temps pour s'assurer qu'on est toujours capables, comme société,
d'assumer ce genre de processus. Pierre, je ne sais pas si tu veux...
M. Vézina
(Pierre) : Bien, peut-être
un commentaire complémentaire par rapport à des enjeux
fédéraux, je dirais, puisqu'on en a mentionné deux. C'est sûr que, bon, il
y a eu effectivement conclusion hier. Maintenant, lorsqu'on a écrit ça, on avait trois... bien, en tout cas, dans le cas des principaux partis, on avait trois plateformes qui
étaient quand même assez différentes l'une de l'autre. Donc, il y avait
là, je dirais, une certaine méconnaissance, là, de l'avenir.
Le Parti
libéral a avancé un petit peu certaines choses, mais il faut bien comprendre
qu'actuellement on est déjà en discussion avec des
fonctionnaires fédéraux pour un encadrement réglementaire particulier, au
niveau des GES, complètement différent de
celui-là du Québec, et là on fait face à ça, et je vous avoue que ça nous
désarme un peu, d'une part. D'autre part, c'est pour ça qu'on mentionne
que c'est important qu'il faut qu'il y ait des ententes fédérales-provinciales, et, par ailleurs, il faut que le
Québec aussi, même s'il a une cible très ambitieuse... c'est intéressant de
voir l'Ontario, qui est à peu près à la même
place, puis probablement que la Colombie-Britannique y sera également,
mais que le fardeau soit réparti quand même,
aussi, équitablement entre les provinces et ceux qui ont le plus de croissance
et les émissions les plus importantes, pour ne nommer que l'Alberta,
fassent leur part eux autres aussi, là, tu sais.
M.
Traversy : ...concordance, là, entre les différents paliers de
gouvernement. Vous voulez évidemment éviter les dédoublements, qui
pourraient être coûteux, qui pourraient amener, donc, à de la paperasserie
inutile ou à des coûts contre-productifs — je pense que c'est comme ça que vous le
mentionnez dans votre cahier — et ça, c'est par rapport au marché du carbone, notamment, des cibles qui nous
sont fixées. Puis, par rapport à l'Accord du bois d'oeuvre, ce que je comprends, c'est que vous êtes inquiets aussi de
voir peut-être, là, des situations où des quotas ou des taxes puissent
avoir un impact négatif sur vos industries ou, en tout cas, du moins, au niveau
de votre compétitivité avec vos employeurs. Donc,
je voulais souligner le fait qu'il fallait avoir un dialogue rapide sur cet
effet et je vous remercie d'avoir pris le temps de le mentionner.
Il y avait également un point intéressant à
l'intérieur de vos recommandations, mais, premièrement, je dois mentionner que
vous aussi, vous trouvez que le Fonds vert manque un peu de transparence. C'est
une autre critique qu'on retrouvait à
l'intérieur de votre mémoire. Vous n'êtes pas le premier groupe à nous le dire.
Il y a une particularité par rapport à votre regroupement, vous vous
questionnez sur la provenance, dans le fond, de certains fonds.
Est-ce que
vous pouvez nous parler de votre recommandation à cet égard-là, puisque
plusieurs groupes semblent partager également, là, cette inquiétude?
M. Vézina
(Pierre) : D'abord, oui, effectivement, mais on n'est pas les
premiers, comme vous avez mentionné, même
le vérificateur du Québec l'a quand même mentionné. Mais notre principale
problématique, puis elle est en lien avec...
On a parlé beaucoup du transport puis des coûts qu'on associait au transport.
Vous savez, il y a quand même 40 % de la facture du transport, là, où... c'est-à-dire 40 % des émissions
du transport qui sont du transport de marchandises. Nous autres, on est quand même des émissions assez
significatives, on parlait de 300 millions de litres, plus certaines
autres émissions associées. Et ce qu'on
observe, c'est qu'il y a eu des choix faits par le gouvernement où les deux
tiers quand même du Fonds vert, des revenus, s'en vont vers le fonds des
transports et sont dédiés, exclusivement pratiquement, au transport en commun.
Je n'ai rien contre le transport en commun, sauf que nous, on se retrouve à
payer, on met 14 millions là-dedans, à
toutes fins pratiques. Et ce que je comprends, c'est que cet argent-là s'en va
essentiellement pour les fins de supporter le transport en commun ou le
développement de nouvelles filières.
Je pense que,
dans le document, vous mentionnez un certain nombre d'entreprises qui ont vu le
jour puis qui sont dans le
développement de nouvelles technologies, mais le problème, c'est que, si on
déshabille Jean pour habiller Paul, bien là nous, on perd sur notre
compétitivité puis — on
est des exportateurs — on
perd des parts de marché.
M. Traversy : Je vous
remercie beaucoup.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Nous allons passer maintenant au
deuxième groupe d'opposition, et je donne la parole à M. le député de
Groulx.
M.
Surprenant : Merci, M. le Président. Alors, bonjour, messieurs.
Effectivement, la... voyons, excusez-moi, la compétitivité est un
élément très important, là, au niveau du secteur manufacturier, et puis, donc,
je voudrais un petit peu parler de ça
tantôt. Donc, en fait, vous, en fait, vous critiquez le fait qu'une part
majeure du Fonds vert finance des programmes de transport en commun
alors que les transports de marchandises, vous venez d'en parler un petit peu
tantôt, sont la plus grande source d'émissions.
Alors, vous
avez raison, le plan d'action sur les changements climatiques 2013‑2020 prévoit
des investissements de 1,64 milliard pour le transport en commun
d'ici 2020, donc, et seulement 109 millions pour le transport de marchandises, donc 3 % des sommes pour
35 % des émissions. Alors — vous avez commencé à en parler un petit
peu tantôt, là — pouvez-vous
élaborer un petit peu plus là-dessus, qu'est-ce qui pourrait être fait?
M. Tremblay (André) : Ça nous donne... si on revient à la discussion qu'on avait d'entrée de
jeu tout à l'heure quand M. le
ministre nous a demandé comment on pouvait améliorer et quelles étaient les solutions
qu'on pouvait trouver pour améliorer le rendement
énergétique de nos parcs d'équipements, entre autres, des équipements routiers,
bien, il faut faire de la recherche, il faut
travailler sur les nouvelles technologies, et ce qu'on voit actuellement, c'est
qu'on n'a pas les sources de
financement nécessaires qui nous permettraient d'aller vers ces nouvelles
avenues-là, qui sont déviées vers des avenues plus de transport en
commun.
Je
pense qu'essentiellement, si on veut réussir à migrer vers des technologies
moins polluantes, entre guillemets, là, il faut avoir un support qui va
nous permettre d'y accéder. Et on voit que les argents qu'on met dans le fonds
ne nous reviennent pas pour permettre d'aller vers ces avenues, qui demandent
de la recherche et du développement.
M.
Surprenant : Est-ce qu'en fait la recherche et le développement
seraient trop lourds pour arriver à des solutions?
Qu'est-ce que vous pensez qui justifie le fait que l'argent ne va pas là où il
y a le plus de pollution? Est-ce que c'est parce qu'il y a une
problématique au niveau de trouver des solutions ou...
M. Tremblay
(André) : Bien, écoutez, essentiellement — ce n'est pas moi qui
fais les choix politiques — je
pense qu'il y a clairement un choix, au Québec, là, qui était d'aller
vers l'électrification des transports et je pense que, quand on parle
d'électrification des transports, il m'apparaît évident qu'on pense plus au transport en commun puis au transport de personnes, des voitures que des
camions en forêt qui... Parce que, tu sais, il me semble que, quand on
parle d'implanter une nouvelle technologie puis qui est basée sur
l'électrification, on vient de choisir le secteur dans lequel on devrait
investir.
M.
Surprenant : Mais ma question est : Est-ce que vous pensez qu'il
y a une... peut-être pas une impossibilité, mais une grande difficulté d'en arriver à des solutions qui soient...
peut-être pas complètes, mais qui soient importantes au niveau de la
réduction des gaz à effet de serre au niveau du transport de marchandises? En
fait, si le gouvernement décide d'aller vers
l'électrification des transports de particuliers au lieu d'investir là où ça
pollue le plus, au niveau des marchandises, est-ce que vous, vous voyez
là un constat qu'il y a peu à faire pour trouver des solutions qui soient
économiquement viables au niveau du transport de marchandises ou...
M. Tremblay
(André) : On pense qu'il y a des...
M.
Surprenant : ...d'allouer l'argent là où ça pollue le plus. Y a-tu quelque
chose qui fait que ça...
M. Tremblay
(André) : Non. On pense qu'il y a des moyens simples, et je vais vous
donner l'exemple des biocarburants : les technologies existent, les
biocarburants de deuxième génération, on peut les mettre en production, il y a des usines pilotes qui le font actuellement. Donc, on pourrait, avec une aide, là, puis une vision, réussir à
développer... et des politiques publiques qui obligent la consommation d'un
pourcentage de biocarburant dans nos équipements actuels, on pourrait déjà avoir un impact relativement important
sur la consommation d'énergies fossiles et évidemment d'émissions de CO2.
C'est un exemple, là, où je pense qu'avec une volonté d'aller... qui pourrait
venir soutenir, évidemment, l'effort d'électrification des transports, du
transport en commun, etc., mais qui, parallèlement à ça, pourrait s'appliquer dans des endroits où on ne peut, malheureusement, pas parler demain matin de transformer à l'énergie électrique
l'ensemble de son parc d'équipements. Je pense que ça pourrait être une
solution alternative et parallèle intéressante.
• (16 h 40) •
M.
Surprenant : Donc, si je
regarde du côté de la Côte-Nord en particulier,
on... bon, vous êtes très conscients qu'il y a la tordeuse d'épinette
qui fait ses ravages.
Alors, ce que j'en
fais comme lecture, c'est qu'il y aurait à peu près 7 millions de tonnes
qui seraient là qui vont être en décrépitude éventuellement, là, donc qui
pourraient être utilisées pour faire des copeaux, pour servir de biomasse, mais
que les technologies ne sont pas encore à point au niveau de brûler les
biomasses, en fait, pour faire peut-être du chauffage au niveau institutionnel,
disons.
Est-ce que vous
pensez que ça serait quelque chose où il faudrait investir? Avez-vous entendu
des choses à cet égard-là, au niveau de problématiques pour en arriver à une
finalité au niveau de l'utilisation de ces matières-là?
M. Tremblay
(André) : Si on parle, de façon plus spécifique, de la Côte-Nord, on a
un de nos membres, Pierre le connaît bien,
Arbec, qui a déjà une usine pilote ou un projet pilote de
biocarburant qui produit déjà à une échelle plus que... pas commerciale, mais à une échelle importante des
biocarburants utilisés à des fins industrielles, non pas à des fins de transport, mais à des fins industrielles.
Donc, il y a déjà là un projet qui est très concret qui utilise une
partie de la biomasse disponible.
Il y a
eu, je pense, des discussions pour utiliser une partie de la
biomasse à des fins industrielles de chauffage, de remplacement de «bunker» lourd soit dans des
alumineries ou dans des... et je
pense que c'est une filière qui
devrait être regardée à nouveau, parce qu'il y a un potentiel là
intéressant.
Le Président (M.
Reid) : Merci. C'est terminé. Alors, M. Tremblay, M. Vézina, M.
Gingras, merci pour votre contribution à nos travaux. Je suspends les travaux
quelques instants pour permettre à nos prochains invités de prendre place.
(Suspension de la séance à
16 h 42)
(Reprise
à 16 h 43)
Le Président (M.
Reid) : Alors, nous reprenons nos travaux. Je souhaite la
bienvenue à nos invités de l'Association canadienne
de l'énergie éolienne. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation.
Par la suite, nous aurons une période
d'échange avec les membres de la commission. Je vous demande de commencer par vous
présenter, pour les fins de l'enregistrement, et de présenter la personne qui
vous accompagne. À vous la parole.
Association canadienne de l'énergie éolienne (CANWEA)
M. Nolet
(Jean-François) : Excellent. Merci, M. le Président. M. le ministre,
Mmes, MM. les députés du gouvernement et des groupes d'opposition, bonjour.
Très heureux d'être ici avec vous aujourd'hui. Mon nom est Jean-François Nolet, je suis vice-président de l'Association canadienne de l'énergie éolienne et je suis accompagné
ici par Jean-Frédérick Legendre, qui est directeur de l'association pour le Québec.
Avant de débuter,
j'aimerais brièvement présenter l'organisme pour lequel je travaille et ainsi
que l'industrie éolienne au Québec.
CANWEA représente
plus de 250 membres partout au Canada. Nous représentons l'ensemble de la
chaîne d'approvisionnement : manufacturiers,
fabricants de pièces et composantes, fournisseurs de services. Donc,
l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement
est représenté chez nous. Plus spécifiquement, l'industrie éolienne au Québec
est issue de la volonté de
diversifier les sources d'approvisionnement en électricité, alliée à une vision
de développement industriel et régional.
Aujourd'hui, près de
3 000 mégawatts sont en service, et un objectif de
4 000 mégawatts sera atteint d'ici quelques années. Une étude récente
de KPMG-Secor a démontré que l'industrie a créé 5 000 emplois au
Québec et provoqué des investissements de
10 milliards de dollars. Le Québec compte maintenant sur la chaîne
d'approvisionnement la plus développée au
Canada. De ces 5 000 emplois, environ 1 200 se retrouvent en
Gaspésie grâce à trois pôles industriels établis à Matane, Gaspé et New Richmond. Et, fait moins connu, près de
1 000 emplois se situent dans la grande région de Montréal.
Montréal est aujourd'hui un pôle d'importance en Amérique du Nord dans
l'industrie éolienne, et c'est sûrement le plus important dans le Nord-Est.
C'est là aussi qu'on y retrouve une concentration de sièges sociaux et d'expertises dans le développement, la
construction et l'opération de parcs éoliens. Donc, l'industrie éolienne est
bien implantée au Québec, elle est
structurante pour notre économie, elle offre une électricité abordable et
complémentaire à notre hydroélectricité.
Traitons maintenant
du sujet qui nous préoccupe aujourd'hui. Donc, CANWEA est d'avis que le Québec
doit poursuivre les plus hauts standards en
termes de lutte aux changements climatiques. Tout objectif doit être basé sur
la science et les faits. C'est pourquoi
CANWEA suggère que le Québec poursuive un objectif de 40 % de réduction de
ses émissions de gaz à effet de serre à l'horizon de 2030.
Bien
sûr, nous ne sommes pas sans savoir que le Québec fait face à des défis
uniques. À bien des égards, le Québec se
retrouve déjà dans une position dans laquelle plusieurs économies envisagent de
se retrouver en 2030, puisque plus de 98 %
de notre électricité provient de sources renouvelables. C'est pourquoi nous sommes
d'avis que le Québec doit assumer son
rôle de leader en Amérique et qu'il doit se doter des outils qui lui
permettront d'atteindre ses objectifs en aidant les voisins également à atteindre les leurs. Ainsi,
nous invitons le gouvernement du Québec à démontrer un souci de
cohérence dans son action, une cohérence entre ses politiques climatiques et
environnementales, sa politique énergétique, sa politique industrielle.
Nous
sommes donc très fiers d'amener certaines propositions à cette commission dont
vous pourrez trouver le détail dans le mémoire qui vous a été remis.
Premièrement, inclure
l'éolien dans les exportations d'électricité québécoise. Dans tous les
scénarios décrits dans le document de
consultation, peu importe la cible qui sera adoptée, une portion significative
des réductions du Québec devra être
réalisée dans le cadre du marché du carbone ou grâce à des mesures
additionnelles à déterminer. Le constat est donc simple : le Québec
devra établir des partenariats avec ses voisins pour atteindre son objectif.
L'énergie éolienne peut y contribuer grandement. L'ajout d'éolien aux produits
offerts par le Québec à l'exportation ne peut que relever l'intérêt des juridictions voisines envers
l'électricité québécoise. Rappelons-le, la grande hydroélectricité ne se
qualifie pas comme énergie renouvelable dans la plupart des États américains.
C'est donc dire que, pour l'instant, l'importation d'électricité en provenance
du Québec n'aide pas les États américains à atteindre leur objectif en matière
d'énergies renouvelables ou potentiellement
de réduction de gaz à effet de serre. L'association américaine de l'énergie
éolienne évalue à plus de
20 000 mégawatts le potentiel éolien créé par les initiatives des
différents États. À ce chiffre il faut ajouter le marché de quelque 100 000 mégawatts
susceptibles d'être créés par le Clean Power Plan du président Obama. À ce
sujet, la version finale du texte proposé
par l'agence environnementale américaine mentionne spécifiquement la
possibilité d'inclure de l'électricité importée du Canada pour atteindre
les objectifs.
Alors
que le Québec cherche des marchés pour son électricité et que la Conférence des
gouverneurs de la Nouvelle‑Angleterre
et des premiers ministres de l'Est du Canada s'est dotée d'un objectif régional
de réduction des GES, le gouvernement du
Québec doit tout faire en sorte pour bonifier l'intérêt de nos voisins envers
notre électricité. Inclure de l'éolien dans l'électricité exportée ne
peut qu'avoir des effets bénéfiques sur cet intérêt.
Deuxièmement,
des opportunités de substitution se situent également dans d'importants
secteurs de l'économie québécoise. Pensons évidemment au secteur des
transports, qui compte à lui seul pour près de 45 % des émissions au
Québec et 80 % des importations de pétrole. L'électrification des
transports représente un avantage économique et environnemental pour le Québec, et CANWEA soutient les objectifs du
gouvernement émis dans le cadre du Plan d'action en électrification des
transports en octobre 2015.
D'importantes
opportunités d'électrification s'offrent également au secteur du chauffage de
bâtiments, de l'industrie. Les bâtiments
sont responsables à eux seuls de 9,7 % des émissions de GES sur le
territoire du Québec. Les énergies
fossiles représentent encore une source d'énergie très utilisée dans la
production de la chaleur pour les immeubles commerciaux, institutionnels et industriels. Il y a encore un potentiel
important d'électrification dans ces secteurs. C'est pourquoi CANWEA
recommande que le gouvernement du Québec se dote de cibles sectorielles en...
pardon, en termes de substitution de sources d'énergies fossiles dans les
secteurs de l'économie du Québec. Enfin, CANWEA recommande que de telles cibles
soient également incluses pour les réseaux autonomes d'électricité. Si la
production d'électricité ne compte que pour
0,3 % des émissions de GES sur le territoire du Québec, d'importants
progrès peuvent être encore réalisés
dans les communautés et chez les industries qui ne sont pas desservies par le
réseau principal d'Hydro-Québec. Le potentiel de remplacement par les
énergies renouvelables y est donc important, et l'éolien peut y jouer un rôle
majeur.
Le
remplacement de combustibles fossiles par l'énergie éolienne représente un
avantage non seulement environnemental, mais également économique.
L'installation d'une éolienne à la mine Raglan, par exemple, dans le Nunavik,
permet à la société Glencore d'économiser des millions de litres de diesel et
de diminuer drastiquement son bilan carbone.
Ce projet spectaculaire suit celui de la mine Diavik, aux Territoires du Nord-Ouest, où quatre éoliennes ont été intégrées en
2012 au réseau autonome de la mine.
En
juillet dernier, Hydro-Québec annonçait son intention de lancer un appel de
propositions pour un parc éolien de six mégawatts aux Îles-de-la-Madeleine.
L'énergie ainsi produite serait couplée à celle de la centrale au diesel et permettrait de réduire autant les coûts globaux de
production d'électricité que leur empreinte environnementale. CANWEA se réjouit de cette ouverture d'Hydro-Québec et est convaincue que cet appel de propositions générera un intérêt
substantiel qui démontrera la fiabilité, la faisabilité et la rentabilité d'un
tel projet.
En conclusion, nous
désirons réitérer l'appui de l'industrie envers les efforts soutenus du gouvernement
pour diminuer les émissions de GES et
rappeler l'importance que la cible choisie soit accompagnée de politiques
cohérentes qui seront appliquées par tous
les ministères. La prochaine politique énergétique du Québec doit s'insérer dans
cette vision cohérente de réduction des GES, et nous souhaitons que le
gouvernement du Québec saisisse l'opportunité qui lui est offerte par cette politique
énergétique. L'industrie éolienne québécoise est prête à relever le défi.
Merci.
• (16 h 50) •
Le
Président (M. Reid) :
Merci. Alors, nous allons passer maintenant à la période d'échange avec les membres de
la commission. Nous commençons par le bloc gouvernemental. M. le ministre, vous
avez la parole.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Merci pour votre
présentation ainsi que votre mémoire.
Évidemment, un des
grands enjeux qui revient à chaque fois qu'on parle d'énergie éolienne, c'est
la question de l'acceptabilité sociale des
projets. J'aimerais vous entendre là-dessus, parce que, bon, nous, on en voit
beaucoup, surtout au ministère de
l'Environnement. Et donc, au cours des dernières années, j'aimerais avoir votre
son de cloche, de votre côté, là, de
la clôture, pour voir qu'est-ce qui se fait mieux peut-être qu'il se faisait
avant, et qu'est-ce qui reste à faire, et quels sont les principaux arguments qu'on peut mettre de l'avant lorsque des
populations ont des réticences qui, dans bien des cas, souvent,
paraissent justifiées.
Quels
sont les principaux arguments que vous avez vus sur le terrain qui
fonctionnent? Ou qu'est-ce qu'on ne voit pas ou sur quoi devrait-on
mettre plus d'accent?
M. Nolet
(Jean-François) : En fait, évidemment, on entend parler des projets auxquels
il y a une plus grande réticence, d'une
part. Les citoyens ont des préoccupations qui sont tout à fait légitimes, je
pense, et on a appris beaucoup, comme industrie, depuis les 10 dernières
années. Je pense que les promoteurs, les développeurs de projet engagent les communautés bien en amont des projets, et ça,
on le voit de plus en plus au Québec mais également au Canada, parce que
les joueurs, les industries et les entreprises qui développent des projets ici
développent ailleurs également.
Je pense que, dans
les grands progrès qu'on a faits, ce sont d'impliquer les communautés également
dans le développement de ceux-ci et
également dans différentes formes de partenariat qu'il peut y avoir entre les
développeurs et les communautés. On l'a vu dans le dernier appel d'offres, où
les communautés d'accueil, dans l'appel d'offres de 450 mégawatts, vont contrôler à un minimum de 50 % du projet.
Plusieurs d'entre elles seront impliquées financièrement également dans les projets, et on voit là des
avancées importantes où à la fois l'industrie et les communautés ont
appris à travailler encore plus ensemble. Je
pense qu'il est important de mentionner également qu'il y a 10 ans
l'énergie éolienne était considérée alternative, un peu marginale,
c'était assez récent, assez nouveau pour le Québec. 10 ans après, on peut dire qu'on fait partie du paysage dans
plusieurs régions et, une fois le projet construit et développé, on voit que
la population soutient encore plus ce type de développement.
M.
Heurtel : Vous avez parlé, tout à l'heure, de l'exemple du projet
éolien qui fournit de l'énergie à la mine Raglan. En effet, ça, c'est
clairement un bel exemple d'approvisionnement, de projet, là, en territoire
nordique.
J'aimerais
vous entendre davantage sur comment l'industrie éolienne verrait son
développement dans le Nord, parce
qu'il y a la question, oui, de lier ça à un projet industriel important, mais
on a un gros enjeu dans le Grand Nord, qui, malheureusement, doit, pour le moment, être approvisionné presque
entièrement par des carburants fossiles pour tous les besoins en
énergie. Alors, je me demande si, de votre côté, vous avez réfléchi à ça et à
quel genre de piste de solution l'éolien pourrait apporter dans un avenir rapproché.
M. Nolet
(Jean-François) : En fait, il y a
deux éléments. Donc, d'une part, le projet Raglan, dans le Nunavik, le
projet de la mine Diavik, en Territoires du Nord-Ouest, je pense, sont deux
exemples probants où on peut réduire la consommation de diesel sur place, donc là où on a des
infrastructures industrielles qui ne sont pas connectées au
réseau d'Hydro-Québec, d'une part, et ce, avec grand succès. Je pense
qu'une première leçon, c'est d'entamer la discussion avec le secteur minier, notamment dans ce cas-ci, bien
en amont des projets, parce que ce sont des projets qui se développent sur
une longue période. Il faut s'assurer de faire partie de la solution
énergétique de la mine, en fait, bien en amont. Je pense qu'avec le cours des prix des métaux, qui... c'est un petit peu
plus difficile, c'est plus ralenti, je pense que c'est une bonne période
pour engager cette conversation-là, d'une part.
Il y a
d'autres défis qui s'ajoutent au développement en milieu nordique, notamment
dans le cas du Québec, où on a le
secteur minier qui est dans des régions plus au Nord, où il y a des
investissements qui seront nécessaires à faire en recherche et développement pour s'assurer, par
exemple, de la gestion du givre sur les pales des éoliennes, la
construction en terrain plus complexe, en terrain peut-être où on peut avoir
des conditions de gel, dégel, et autres. Et là on a une expertise proprement québécoise, notamment avec le Technocentre éolien,
où on fait la recherche en développement au niveau de l'éolien nordique,
en climat nordique, donc, pour se développer dans ces contextes-là.
Donc, à la
fois travailler avec l'industrie bien en amont, travailler également en
recherche et développement pour s'assurer que la technologie demeure la
plus productive possible pour ces entreprises-là.
M. Heurtel : Merci.
Le Président (M. Reid) : M.
le député de Mégantic.
M.
Bolduc : Merci, M. le Président. Bonsoir, messieurs. Ça me fait plaisir de vous
recevoir ici puis d'entendre, finalement,
des commentaires que je trouve à la fois intéressants et un peu,
je dirais, innovateurs dans le sens où vous nous dites que, fondamentalement, on pourrait produire de l'énergie au Québec
qui pourrait être exportée et servir à réduire, si on veut, la consommation de gaz à effet de serre à l'extérieur du Québec. La problématique que j'ai avec ça, c'est :
si on ne sait pas trop ce qui se
passe avec le transfert, si l'on veut, là... si on l'envoie exactement
en transfert d'hydrocarbures, ça va relativement
bien, par exemple, une centrale thermique ou des choses comme ça,
mais, si on l'envoie dans des segments d'opération
où il y a déjà des consommations électriques ou des procédés qui
consomment de l'énergie électrique puis la source de ces électricités-là
est, disons, là, mixte, ça peut nous créer des problèmes.
Est-ce que
vous avez réfléchi à ce genre de schéma là, comment on contrôle ça, là,
puis comment on se donne des crédits qui sont réels et non des crédits
fictifs où qu'on se met à se discréditer nous-mêmes?
M. Nolet (Jean-François) : Bien,
d'une part, dans un marché, tout comme le marché de carbone, hein, c'est
l'émetteur, donc, qui souhaite avoir les crédits qui les achète. Donc, d'une
part, c'est lui qui dirige l'électricité là où doit être dirigée.
On se
rappelle que le Clean Power Plan du président Obama, à l'heure actuelle, demande, de façon générale, aux États-Unis que le secteur
d'électricité réduise ses émissions de 32 % par rapport au niveau de 2005
d'ici 2030. C'est colossal, ça représente, en équivalent éolien,
100 000 mégawatts. Donc, c'est les centrales au charbon à travers les
États-Unis qui devront trouver d'autres
modes de production, de relève, donc, d'une part. En exportant notre
électricité, donc, à valeur ajoutée,
c'est-à-dire on exporte l'éolien avec l'hydroélectricité — donc, on vend l'électricité et on a
un prix pour cette électricité-là — on peut avoir un prix pour les crédits
environnementaux qui sont donnés à cette électricité-là et on peut aller chercher des crédits également de
réduction de gaz à effet de serre, donc, qui sont bénéfiques pour le
Québec qu'on aura besoin pour réduire nos
propres émissions, mais qu'eux devront se procurer quelque part également,
parce que les objectifs au sud de la frontière sont colossaux.
Donc, le marché va dicter où l'électricité va
aller et où elle permettra de réduire les émissions.
M.
Bolduc : Pour moi, le président Obama a fait un bon calcul, parce que,
si vous considérez qu'on doit changer nos centrales de charbon ou de
pétrole au gaz naturel, rien que ce changement-là va générer une économie de
30 %. Donc, son
100 000 mégawatts, il a juste dit : Je fais un transfert du
charbon et hydrocarbures au gaz naturel, donc je suis aussi bien de prendre les crédits tant qu'à le
faire, de toute façon ils s'en vont tous au gaz naturel. Donc, il faut faire
attention sur la traduction, là. Comment vous voyez ça?
• (17 heures) •
M. Nolet (Jean-François) : En fait,
si on parle d'un horizon de 2015‑2030, donc l'horizon qu'on couvre ici, c'est très tentant d'aller vers un futur tout gaz,
hein, parce que le prix du gaz, évidemment, alléchant à l'heure
actuelle, pour l'instant permet des réductions qui sont substantielles, vous
l'avez mentionné. Cependant, lorsqu'on regarde les prévisions et les projections des émissions du secteur de l'électricité,
si on va dans un futur tout gaz, dans une région qui est, à l'heure actuelle, au charbon, on va à une
réduction rapidement, dans les premières années, substantielle des
émissions, vers les 30 %, mais, avec la
croissance économique, au fil des années, on peut se retrouver dans une
situation où on est en deçà du niveau
actuel, et c'est là que le plan américain a certaines dispositions qui
empêchent justement d'aller chercher une situation dans ces
situations-là où on pourrait se retrouver en 2030 avec un niveau d'émissions
supérieur au niveau actuel en étant dans un futur tout gaz.
C'est pour ça qu'il y a certaines dispositions,
justement, pour inclure des énergies renouvelables et permettre l'importation
d'électricité propre du Canada.
M. Bolduc : Maintenant, vous nous
avez parlé, en fait, de certaines utilisations d'éoliennes dans le Nord. Un des problèmes qu'on rencontre, en fait, c'est
l'arrimage entre le vent pour produire de l'électricité et l'utilisation de
la mine ou des opérations qui sont en place. J'aimerais
vous entendre sur la possibilité, par exemple, de prendre cette électricité-là, de la mettre en hydrogène, de la
compresser et, donc, une fois qu'on a un réservoir, on peut le
consommer, disons, au fur et à mesure des
besoins. Donc, on découple, autrement dit, la production et la consommation par
un inventaire entre les deux.
Est-ce que
c'est quelque chose que vous avez regardé? Est-ce que c'est quelque chose, pour
vous, qui n'a aucun sens? Je voudrais vous entendre là-dessus.
M. Nolet (Jean-François) : C'est quelque
chose sur lequel il y a énormément d'effort de recherche et développement qui
est mis, à l'heure actuelle. Que ce soient des batteries ou du «storage» à
hydrogène ou autre, c'est quelque chose qui
se fait beaucoup dans d'autres juridictions du monde. La Corée du Sud, par
exemple, a l'équivalent de 3 500 mégawatts, donc, en
batteries, là, à grande échelle. Donc, c'est quelque chose qui est fait
ailleurs et qui peut être fait ici.
Ce qu'il est important de savoir, c'est que le
système électrique mondial, incluant celui d'Hydro-Québec, va changer plus dans
les cinq à 10 prochaines années qu'il a changé dans les 100 dernières années.
Les innovations technologiques
d'accumulation d'électricité, de batteries, et autres, d'arrimage d'énergies
renouvelables intermittentes avec les différentes possibilités
techniques vont amener des changements colossaux, et c'est pour ça que c'est
important d'y penser maintenant, d'investir
en recherche et développement dans ces secteurs pour être capables de faire
bénéficier nos industries.
M.
Bolduc : Merci. Dans un autre ordre d'idées, à la page 6 de votre
mémoire, vous avez un graphique qui nous dit... qui nous donne le vent, en fait, et le coût des éoliennes en fonction
du temps, qui nous donne une pente de réduction, typiquement, que vous
avez décrite comme étant linéaire, à 18 $ par année en fonction du volume
qui est produit. Est-ce que vous avez évalué où la droite se redresse et
finalement qu'on atteint ce que j'appellerais le seuil minimal?
M. Nolet
(Jean-François) : C'est une
excellente question. Le dernier appel d'offres au Québec a donné lieu à
un appel d'offres historiquement compétitif,
là, à 0,063 $. On produit, à l'heure actuelle, de l'énergie éolienne, dans
certains États américains, à 0,022 $,
0,025 $, donc c'est très compétitif. Où ça va arrêter? On ne le sait pas.
C'est sûr que ça va arrêter avant le
zéro, c'est bien clair. Mais ce qu'on voit, c'est qu'il s'est installé plus
d'énergie éolienne aux États-Unis l'an dernier
que n'importe quel type de forme de production d'électricité, et ça, ça parle,
et c'est le marché qui parle, c'est ce vers où les utilités des
différents États américains vont parce que c'est là où est l'électricité la
moins chère, la plus compétitive et qui émet zéro de gaz à effet de serre.
Donc, c'est là que le marché va.
M.
Bolduc : C'est absolument un élément critique que vous nous mentionnez
là, parce que, si on peut descendre à 0,02 $,
0,03 $, en fait, on est très compétitifs avec les centrales hydrauliques
et on en arrive à un point où finalement les éoliennes pourraient faire partie de notre réseau sur une base large.
Actuellement, le problème qui nous tue, c'est le facteur de charge puis l'utilisation. Tant qu'on a
suffisamment de barrages électriques pour absorber l'inventaire, ça va bien,
mais, on le voit en Europe, il a atteint un niveau d'instabilité où le réseau
s'effondre.
Est-ce que vous avez fait des évaluations?
Est-ce que vous pouvez nous dire à quel niveau ça se situerait, ce problème-là?
M. Nolet (Jean-François) :
Premièrement, on n'a vu en aucun temps, là, des réseaux s'effondrer à cause des
énergies renouvelables et de l'éolien. On a
des taux de pénétration en Europe sur des réseaux hyperrigides, donc des
réseaux thermiques, là, jusqu'à 35 %.
Il faut
savoir qu'au Québec on a 40 000 mégawatts
de capacité installée d'hydroélectricité. C'est probablement la plus grande batterie... à part la Chine, la plus
grande batterie au monde. On est capables d'intégrer, au Québec, de
l'énergie éolienne beaucoup plus même qu'on en a besoin. On a fait une étude
récente qui démontre qu'on peut intégrer 8 000 mégawatts
d'énergie éolienne supplémentaire, donc, en ajout des 4 000 qu'on a, sans
aucun problème et sans aucune difficulté.
Donc, on n'est absolument pas dans ce cas de figure au Québec et ni même nulle
part au Canada à l'heure actuelle.
M. Bolduc : Est-ce qu'il me reste du
temps, oui?
Le Président (M. Reid) : Il
vous reste deux minutes.
M. Bolduc :
Deux minutes? O.K. Donc, ma dernière question, elle se situe au niveau du
37,5 %, puis je reviens à ma
question originale : Est-ce qu'il y aurait moyen, selon vous, de
réduire... ou d'atteindre nos objectifs de 37,5 % de réduction de
gaz à effet de serre d'ici 2030 sans recourir à l'exportation et au
déplacement, si on veut, de bourses de carbone
à l'extérieur du Québec ou, si, d'après votre évaluation, là — c'est un peu le thème de votre mémoire — il va falloir absolument exporter
pour aller chercher des crédits à l'externe?
M. Nolet
(Jean-François) : Je pense
qu'un des objectifs de la cible de réduction de 37,5 %, c'est d'aller
chercher les réductions au meilleur coût, je pense que tout le monde s'entend,
d'en faire bénéficier l'économie.
Le message qu'on
souhaite passer également, c'est que la réduction de gaz à effet de serre,
c'est bon pour l'économie, ça permet de
transformer l'économie en économie du XXIe siècle. L'énergie éolienne fait
partie de la solution, l'électrification des transports fait également
partie de la solution. Maintenant, les gens qui étaient ici avant nous... donc, on peut électrifier
les transports : transports publics, transports personnels; transport
routier lourd, c'est sûrement faisable,
à quel coût?, et c'est là qu'il faut voir où sont les réductions à meilleur
coût. Et on pense, nous, qu'il y a un avantage pour le Québec d'exporter notre électricité renouvelable, notamment de
l'éolien avec de l'hydroélectricité, pour, d'une part, aller chercher les crédits, donc se faire payer
pour, mais également vendre notre électricité avec la plus-value
environnementale qui est donnée aux États-Unis. Donc, ce seront des décisions
politiques qui seront faites, et on pense qu'une partie des réductions à bon
coût se fera également en vendant notre électricité aux Américains.
M. Bolduc :
Merci.
Le Président (M.
Reid) : Merci. Alors, nous allons passer maintenant au groupe
de l'opposition officielle avec M. le député de Terrebonne.
M. Traversy :
Merci beaucoup, M. le Président. Merci, M. Legendre, merci, M. Nolet,
d'être avec nous aujourd'hui. Vous êtes donc
enthousiastes dans votre présentation pour les discussions qui touchent, là,
donc, à la lutte aux GES, là, dans
les prochaines semaines, dans les prochains mois. Vous vous voyez comme un
partenaire d'avenir, là, pouvant contribuer, à votre façon, à nous aider
à atteindre ces objectifs.
Vous
parlez beaucoup de cohérence, et pas sans être en contradiction avec les
groupes qui vous ont précédés, mais je
dois vous avouer que, si certains étaient craintifs des objectifs ambitieux du
Québec, vous nous dites que, loin de là, ces objectifs sont réalistes, et vous poussez même un peu l'audace en
disant : Écoutez, on devrait même être cohérents avec ce qui se
passe en Europe et dans d'autres pays du monde et plutôt suggérer une cible de
40 %.
Qu'est-ce
que vous dites à ceux qui sont un peu frileux? Pourquoi qu'on devrait aller un
petit peu plus haut que la proposition initiale?
M. Nolet (Jean-François) : Je pense que ce qui est important de
rappeler — c'est la
raison pour laquelle on est ici à
regarder les possibilités de réduire les émissions de GES — je pense qu'il y a une nécessité
scientifique de réduire les émissions
et ultimement il faut arriver à l'objectif de 2050, d'avoir réduit à 80 %,
95 %, et ultimement, vers 2100, donc, à une économie zéro carbone. Donc, on pense que de commencer le plus tôt
possible permet de nous donner un avantage économique comparatif aux autres régions, de transformer notre économie
et d'être capables d'en faire bénéficier également nos entreprises pour aider d'autres régions, là,
qui n'auront pas été aussi rapides que les nôtres. On pense également
que le Québec a un rôle à jouer de leader en Amérique tant avec son marché de
carbone mais également auprès des autres juridictions, que ce soit au niveau de
la fédération, mais des États américains également.
• (17 h 10) •
M. Traversy :
Donc, pour réussir à être performants puis, donc, à atteindre les objectifs
qu'on se fixe, vous, vous dites : Vaut
mieux prendre plus d'avance que trop de retard, ce qui est tout à fait logique.
Vous mentionnez, donc, que, pour y parvenir, ça prendrait des cibles
claires.
Dans
différents secteurs, vous avez beaucoup parlé, avec le gouvernement, des marchés
d'exportation ou d'une politique de
marché d'exportation, donc, qui est ambitieuse, mais il y a également deux
autres secteurs que vous ciblez, qui est
celui des... bon, le secteur industriel et des réseaux autonomes. Puis là je feuilletais dans votre mémoire, puis,
bon, vous donnez des cibles quand même
assez précises, là, pour les marchés d'exportation d'électricité, mais, pour
les deux autres secteurs que vous ciblez, on sent qu'il n'y a pas encore
vraiment, là, de point déterminant ou, en tout cas, il n'y a pas de point
définitif.
Est-ce que
vous pouvez nous donner quand même un certain aperçu des cibles que vous aimeriez
voir établies dans ces secteurs : industriel et réseaux autonomes?
M. Nolet (Jean-François) : Dans la cible industrielle, on a fait des études
avec une firme qui s'appelle ÉcoRessources et on avait un potentiel de réduction qui allait jusqu'à...
on en discutait tantôt, on pourra vous donner le chiffre, mais on a, en termes de mégatonnes, donc, les possibilités, également
en nombre de térawattheures, les possibilités que ça peut amener également
au niveau de la nouvelle demande d'électricité. Donc, on peut
vous fournir ces chiffres-là, on va les trouver dans nos documents, mais on a identifié ces chiffres-là avec des
différents scénarios à pénétration «faible», «moyenne» et «forte». Donc, on a ces cibles-là également
au niveau du transport avec un objectif du gouvernement d'ici 2020. Et, si on se porte vers un objectif de 2030, un objectif
très agressif, par exemple, à 1 million, 1,2 million de véhicules,
or, combien de mégatonnes on va chercher en réduction et combien de nouvelle
électricité on a besoin pour alimenter ces nouveaux secteurs là... Donc, on va
être capables de vous les donner dans quelques instants. Donc, je suis désolé,
je n'ai pas les chiffres sous la main, mais on a identifié ces cibles-là également.
M.
Traversy : Super.
Excellent. Vous parliez également de l'électrification des transports avec notre
collègue de Mégantic, donc, qui est une voie à suivre, évidemment, de
prédilection, pour vous. Vous voyez les avantages que ça peut nous apporter,
là, dans le cadre, là, du sujet qui nous concerne. Est-ce que vous seriez
favorables à... Plusieurs groupes sont venus avant vous nous faire la proposition
de mettre en place une loi zéro émission au Québec. Est-ce que vous pensez que,
dans le cadre de l'électrification des transports, ce seraient des recommandations
acceptables?
M. Nolet (Jean-François) : En fait, ce qu'on dit, nous, c'est que le
plan-cadre qui sera déterminé ici, l'objectif 2030 qui sera identifié doit... on doit s'assurer qu'il y a
une cohérence de la part de tous les ministères, et des différentes politiques
qui sont mises en place, et des différentes lois qui sont appliquées également
au Québec, donc, pour tendre vers... bien, en fait, vers la rencontre de l'objectif.
Je
vous dirais, ce qui est le plus difficile pour un secteur comme le nôtre, ce
qu'on souhaite, c'est à la fois une cohérence,
mais également une prévisibilité et une stabilité dans les politiques
publiques en place. Donc, si on se donne un objectif ambitieux de
réduction de 37,5 %, on doit
s'assurer que cet objectif reste le même sur la période pour s'assurer d'attirer les capitaux. Donc, si ça passe par une
loi pour les véhicules zéro émission, et autres, je pense que ce sont
des messages nécessaires et des signaux
nécessaires à envoyer à l'industrie, qui va permettre d'attirer les capitaux,
d'attirer les investissements et de créer les emplois dans le secteur
approprié. Donc, que ce soit cette loi-là ou une autre loi qui permettrait d'atteindre l'objectif, je pense que
ça fait partie des signaux dont le secteur industriel, au Québec, a
besoin.
M. Traversy : Pour atteindre
les cibles d'émissions de GES que le gouvernement veut se fixer, vous nous rappelez qu'il serait précieux d'avoir également
en main, peut-être, une politique énergétique pour les prochaines
années. Ça nous permettrait, donc, d'avoir peut-être, là, une certaine
perspective sur ce qui s'en vient. Vous dites que ça pourrait concrétiser nos
ambitions par des mesures concrètes pour l'industrie que vous représentez.
Est-ce que
vous pouvez, donc, nous préciser davantage, là, cette importance de vouloir
mettre en commun, dans le fond, ces deux objectifs et pourquoi ils sont,
dans le fond, conciliables, là, dans l'atteinte, là, des motivations qui font
l'objet de nos débats?
M. Nolet
(Jean-François) : Je vous
donnerais un exemple. Je vous parlais, au début, des possibilités au
niveau de l'exportation d'électricité et
d'inclure l'énergie éolienne dans l'exportation pour atteindre les objectifs de
réduction de gaz à effet de serre
mais également permettre aux États américains d'atteindre les leurs. Si cette
option était adoptée, elle doit nécessairement se retrouver quelque part
dans la politique énergétique, parce que c'est ce document qui
enverra... je parlais
justement des signaux aux investisseurs, donc, pour attirer des
entreprises ici, pour permettre le développement de projets éoliens mais également de pièces et
composantes du secteur manufacturier. Donc, les deux documents doivent
se parler, doivent être nécessairement
reliés pour assurer une cohérence, en fait, que ce soit avec la stratégie
énergétique ou avec la politique industrielle. Donc, ce sont des documents
qui font un tout et qui permettent, ultimement, d'attirer les investissements
et de permettre de réaliser réellement les économies et les réductions de GES.
M. Traversy : Rapidement, parce
que mon temps passe assez vite. J'aimerais, dans le fond, vous demander : Lorsque vous aurez les chiffres des cibles du
secteur industriel et des réseaux autonomes, si vous voulez juste
nous les faire parvenir à la commission, je pense que ça serait très
apprécié, ça serait pris en considération.
Et mon autre question, c'est un peu ce qui
touche un peu les discussions de la journée. Il y a eu beaucoup de personnes qui ont parlé du Fonds vert. Je voulais
voir si vous, vous aviez une opinion par
rapport à ce fonds et si ça
pouvait être une utilité intéressante dans le cadre, là, de l'éolienne, si vous y êtes,
dans le fond, là, affiliés d'une quelconque façon.
M. Nolet (Jean-François) : Ce n'est
pas les discussions que nous avons eues avec nos membres. Donc, évidemment, on
soutient le Fonds vert, mais on n'a pas de position particulière sur les
questions du Fonds vert.
M.
Traversy : Sur la question comme telle. Bien, je vous remercie
beaucoup pour ces réponses puis je vous laisse continuer avec la
deuxième opposition.
Le Président (M. Reid) :
Merci.
M. Nolet (Jean-François) : ...faire
parvenir les chiffres sur...
Le
Président (M. Reid) : D'accord, les faire parvenir à la
secrétaire de la commission. Alors, nous allons passer maintenant au
deuxième groupe d'opposition, et je donne la parole à M. le député de Groulx.
M.
Surprenant : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Alors, tantôt,
le ministre a parlé, en début, là, de tour de table, d'acceptabilité
sociale. C'est un élément qui est très important lorsqu'on parle d'éoliennes.
Alors, on a eu connaissance, par le passé,
de projets qui étaient plus ou moins acceptés et certains d'entre eux ont quand
même eu lieu. Pourriez-vous d'abord refaire une perspective un peu de
cette notion d'acceptabilité sociale et comment ça en est aujourd'hui dans les
projets qui ont été mis en place? Est-ce qu'il y a encore des échanges à ce
niveau-là? Est-ce que tout va bien?
M. Nolet
(Jean-François) : En fait,
un projet d'énergie éolienne n'est pas différent que n'importe quel type
de projet dans une communauté. Vous le
savez, vous êtes impliqués dans votre milieu, auprès de vos communautés.
Certaines personnes, à juste titre, peuvent
avoir des préoccupations ou des questions par rapport notamment au
développement éolien.
Je pense que
ce qu'on voit au Québec, c'est qu'on a une quarantaine de projets, à l'heure
actuelle, développés et en opération, à terme... à terme, de la
politique énergétique actuelle. Je pense que c'est un nombre assez important. Effectivement, il y a certaines tensions dans
quelques projets, mais la vaste majorité des projets, ça va quand même
très bien au niveau de la communauté.
Ce
qu'on voit et selon certains sondages qu'on a faits par le passé : plus
les gens habitent près des éoliennes, plus ils les apprécient parce que plus ils les connaissent. Donc, c'est normal
que les gens aient des préoccupations, souvent avant que le projet arrive dans leur communauté, parce
que c'est quelque chose qui est méconnu, c'est quelque chose qu'ils
n'ont pas nécessairement vu avant. Mais je pense que, de plus en plus que les
projets font... et que les éoliennes font partie du paysage québécois, l'acceptabilité de ces
projets-là et le fait que l'industrie... et je dois le mentionner, l'industrie
a appris beaucoup à engager la
discussion et à engager et à encourager la participation des communautés dans
le développement de projets. Donc, je pense qu'on peut dire qu'on a fait
des progrès là-dessus et on a appris beaucoup. On ne développe plus des projets
éoliens au Québec en 2015 comme on le faisait au début des années 2000, ça,
c'est certain.
M.
Surprenant : Au niveau, là, des besoins énergétiques du Québec, ce
qu'on entend, c'est que les projets d'éoliennes, finalement, ne sont pas
nécessairement essentiels aux besoins énergétiques du Québec, donc, c'est de l'énergie qui est produite en surplus. Alors,
c'est l'énergie... donc, en fait, ce qu'on essaie de faire, c'est de la vendre
à l'extérieur. Mais pourriez-vous me dire,
au niveau de l'impact ici, au niveau de l'émission des GES, qu'est-ce qu'il
est réellement, finalement?
M. Nolet
(Jean-François) : En fait, il y a deux aspects peut-être à votre
question. On a parlé beaucoup de la question
des surplus à ce moment-ci, donc : Est-ce que l'énergie éolienne que l'on
produit au Québec... est qu'elle était nécessaire
ou est superflue, et comment on se situe à ce niveau-là, et comment l'énergie
éolienne permet de réduire les GES, à l'heure actuelle?
Je laisserais
peut-être mon collègue répondre sur la question des surplus, qu'on a entendue
beaucoup dans les derniers mois au Québec.
• (17 h 20) •
M. Legendre
(Jean-Frédérick) : Oui. La première chose à mentionner sur les
surplus, c'est qu'on parle de prévisions
énergétiques. Présentement, il y a des projets éoliens qui entrent en ligne qui
sont issus d'appels d'offres émis en
2009, qui sont issus d'une situation économique qui était peut-être différente,
on l'admet. La demande a baissé... ou a stagné au Québec suite à la crise économique de 2008. Et ça, le Québec
n'est pas tout seul, je pense
qu'il y a plusieurs
juridictions en Amérique qui ont vécu la même situation. Cependant, donc, ce
que... et, encore la semaine dernière, le P.D.G. d'Hydro-Québec le mentionnait, comme quoi c'était une prévision
qui était faite à long terme, et à ce
moment-là il y avait des besoins en énergie clairement
identifiés, et l'éolien avait été identifié comme énergie parce qu'il était concurrentiel avec l'hydroélectricité. Ça a été mentionné
par le président d'Hydro-Québec la semaine dernière.
Donc,
quand on parle de planification d'énergie, il faut toujours
voir à long terme. Et ce qui coûterait très cher aux Québécois,
ça serait la situation inverse, c'est-à-dire d'être en déficit énergétique, où, là, il faudrait importer de l'électricité, possiblement de sources fossiles et à fort prix,
des juridictions voisines. Donc, une marge de manoeuvre, c'est toujours préférable, on s'entend, à un déficit. Et
là-dessus, la marge de manoeuvre, là, les dernières prévisions d'Hydro-Québec
ont un peu changé, mais on parlait un peu, là, de 3 % dans les 10
prochaines années. 3 %, ce n'est pas beaucoup. Je suis certain que vous
gérez votre budget personnel avec une marge de manoeuvre comme ça. 3 %,
c'est quoi? C'est une aluminerie au Québec.
Ça pourrait changer rapidement. Alors, ce qu'on invite toujours le
gouvernement, c'est de voir à long terme.
La situation énergétique, elle peut changer rapidement, et, franchement, la
planification énergétique, ce n'est pas en regardant demain matin, c'est
en regardant la prochaine décennie, la prochaine génération.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Vous avez encore une question? Rapidement. 1 min 30 s.
M.
Surprenant : O.K. Est-ce que vous ne pensez pas, donc, que, si on
parle que, pour l'instant, c'est de l'excédent par rapport aux besoins, ce qui peut être produit... est-ce qu'on ne
pourrait pas établir une mesure où on pourrait inciter le gouvernement à prendre une partie des revenus qui
sont générés par l'exportation de l'électricité qui provient de
l'éolienne à créer de l'emploi ici, à créer une économie qui est plus structurante?
Je ne suis pas convaincu qu'on crée beaucoup d'emplois
actuellement au niveau de l'éolienne. On est des distributeurs. Est-ce qu'on ne
pourrait pas investir, peut-être, dans le secteur manufacturier puis
créer un...
M. Nolet (Jean-François) : On investit déjà. Notre secteur a investi
10 milliards dans les 10 dernières années au Québec, a créé 5 000 emplois à plein temps, à
l'heure actuelle, et pas juste à Montréal, mais également en Gaspésie et
dans toutes les régions du Québec, des
emplois qui sont de haut niveau, très compétitifs avec les autres secteurs,
d'une part.
Vous
parliez d'investir et de créer des emplois. C'est exactement ce qu'on propose
de faire, donc, avec la politique énergétique,
mais également avec la politique, avec l'objectif de 2030, c'est de lancer ces
signaux à long terme. C'est la seule
chose que notre secteur a besoin, c'est de prévisibilité et de stabilité dans
les politiques publiques et dans les objectifs que le gouvernement
mettra en place. Donc, une fois ça fait, les investissements arrivent, et les
emplois sont créés, en lien avec le secteur, comme on a vu dans le passé avec
la politique énergétique 2006‑2015.
M.
Surprenant : Merci.
Le
Président (M. Reid) : Alors, merci, M. Nolet et M. Legendre.
Merci pour la contribution que vous apportez à nos travaux.
La commission suspend
ses travaux jusqu'à 17 h 30 ce soir. On peut laisser notre matériel...
Des voix :
...
Le Président (M.
Reid) : Pardon. 19 h 30. Pardon.
(Suspension de la séance à 17 h 24)
(Reprise à 19 h 36)
Le Président (M. Reid) :
Alors, nous reprenons nos travaux.
Je vous rappelle que la commission est réunie
afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations particulières
sur le document de consultation intitulé Cible de réduction d'émissions de
gaz à effet de serre du Québec pour 2030.
Ce soir, nous entendrons l'Association
québécoise de la production d'énergie renouvelable, Vivre en ville et
l'Association pétrolière et gazière.
Je souhaite
donc la bienvenue à notre premier groupe d'invités, l'Association québécoise de
la production d'énergie renouvelable.
Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation. Par la suite, nous
aurons une période d'échange avec les membres
de la commission. Je vous demanderais, pour les fins de l'enregistrement, de
vous présenter et de présenter la personne qui vous accompagne. Et vous
avez la parole.
Association québécoise
de la production
d'énergie renouvelable (AQPER)
M. Giguère
(Daniel) : Merci beaucoup,
M. le Président. M. le ministre, Mmes et MM. les députés, mon nom est Daniel Giguère, moi, je suis président du conseil
d'administration de l'association de la production d'énergie
renouvelable et je suis en compagnie du président-directeur général de notre
association, M. Jean-François Samray. Donc, on vous remercie beaucoup de nous recevoir en ce début de soirée. Je tiens
d'abord à remercier les membres de la commission et les parlementaires de nous offrir ainsi l'occasion
d'être ici pour cette importante consultation sur les cibles de
réduction d'émissions de gaz à effet de serre au Québec d'ici 2030.
L'AQPER,
comme on l'appelle sous son acronyme, a été fondée en 1991 à l'époque par des
opérateurs de petites centrales
hydroélectriques. Depuis 2010, elle a aussi intégré dans son champ d'action les
acteurs de la filière éolienne, du secteur
des bioénergies — biomasse,
biométhane, gaz naturel, également biocombustibles — ainsi que de l'énergie solaire. Porte-parole de l'industrie au Québec,
l'Association québécoise de la production d'énergie renouvelable regroupe
toutes ces filières sous une centaine d'intervenants du domaine des énergies
renouvelables.
M. le
Président, nous ne le répéterons jamais assez, la réduction des gaz à effet de
serre se doit d'être considérée comme
une urgence, et ce, pour tous les gouvernements de la planète, et nous sommes
heureux de voir que celui du Québec veut jouer un rôle de leader de
premier plan dans ce domaine, car, véritablement, on ne peut pas attendre.
L'AQPER réitère donc son appui à la cible de
réduction des émissions de gaz à effet de serre proposée par le gouvernement du
Québec, à savoir une baisse de 37,5 %
sous le niveau de 1990 d'ici 2030. Cette cible nous place parmi les sociétés
qui ont compris l'enjeu le plus
important du siècle actuel et qui veulent agir de façon positive et décisive
pour y parer. Pour y parvenir, la communauté
scientifique s'entend pour dire que ce sont les actions posées aujourd'hui, dès
maintenant, qui seront garantes de
notre succès et de l'avenir. D'ailleurs, une analyse préparée par le bureau du
président des États-Unis en juillet 2014 estime que chaque décennie pour laquelle nous reportons la mise en place
d'actions qui visent à limiter à 2° le réchauffement climatique augmente de 40 % les coûts qui y
sont associés. Donc, la remise à plus tard n'a pas sa place, et l'inaction
a un coût important.
Nous avons le
plaisir de vous déposer un mémoire, et, pour vous en présenter les grandes
lignes, je cède la parole à Jean-François Samray.
• (19 h 40) •
M. Samray
(Jean-François) : Oui.
Merci. Alors, bonsoir à toutes et tous. Alors, notre organisation est
d'avis que la réduction des gaz à effet de serre et la prochaine politique
énergétique du Québec sont indissociables.
Dans son
mémoire présenté dans le cadre de la prochaine politique énergétique du Québec,
l'AQPER présente sa vision 30-30, qui
propose 26 mesures pour réduire de 14 millions de tonnes équivalent de CO2
nos émissions de gaz à effet de serre et qui permettrait au Québec
d'accroître de 8 % la part de ses énergies renouvelables, dans son
portefeuille énergétique, pour la porter à
52 %. À ceux et celles qui douteraient de la viabilité d'un tel objectif
nous tenons à rappeler qu'entre 1978
et 1996 le Québec a réduit de 25 % son recours aux produits pétroliers
tout en ajoutant 19 000 mégawatts de puissance électrique.
C'est à la figure 3 de la page 11. Je vous invite à regarder cette image-là, ça
dit tout.
Alors, le
marché du carbone et des politiques de substitution des produits pétroliers par
des énergies renouvelables produites
localement permettront de réaliser une seconde phase de substitution au cours
des 15 prochaines années. En agissant
de la sorte, nous sommes convaincus que le Québec a tout ce dont il a besoin
pour rencontrer la cible de réduction proposée
par le gouvernement dans le cadre de la présente consultation. Dans cet effort
collectif, visant à contraindre le réchauffement
climatique sous la barre des 2°, des actions seront également requises dans
d'autres secteurs. Les actions préconisées
en efficacité énergétique réduiront de 48 térawattheures équivalent la
quantité d'énergie perdue et de 12 % la quantité d'énergie
consommée dans l'ensemble de l'économie québécoise. Pour ce faire, des
initiatives musclées en substitution énergétique seront requises afin de
réduire de 30 % la quantité de pétrole consommée, par exemple, en
électrifiant les transports ou en adoptant rapidement la norme «Zero Emission
Vehicle», appliquée notamment en Californie; en valorisant du biométhane, un
gaz naturel renouvelable, dans les transports et les procédés de chauffage
industriels; en utilisant de la biomasse pour répondre aux besoins de chaleur
au lieu d'avoir recours au mazout; en établissant
une teneur minimale en biocombustible produit au Québec dans l'essence et le
diesel consommés; en remplaçant les centrales et unités de production
encore alimentées au mazout lourd ou au diesel par des énergies renouvelables.
La
participation des consommateurs dans cette conversion de notre économie sera
essentielle. Leur procurer une information pertinente, compréhensible et
commercialement neutre le sera tout autant. Bien que le signal de prix soit le plus efficace moyen de communication, l'AQPER est d'avis
que le gouvernement du Québec devra cependant prévoir
des moyens d'accompagnement et de soutien pour les clientèles fragilisées s'il
décidait d'aller dans ce sens. Aucune conversion
ne se réalisera si les consommateurs et les contribuables ont l'appréhension
qu'il n'y ait pas suffisamment d'énergie
renouvelable pour répondre à leurs besoins ou que le coût de cette énergie soit
disproportionné par rapport à celle
qu'ils utilisent actuellement. C'est pourquoi nous encourageons fortement le
gouvernement à poursuivre ses initiatives fixant un prix pour le
carbone. Ne pas agir de la sorte reviendrait à laisser croire aux Québécois que
l'accumulation croissante du carbone dans l'atmosphère est sans impact et sans
coût et que cet effort est le problème des autres.
Finalement, l'AQPER estime à quelque
6 350 mégawatts la puissance additionnelle électrique requise pour répondre aux besoins de substitution du marché
local et de ceux des juridictions avoisinantes au cours des
15 prochaines années. Bien que cette nouvelle capacité ne représente que
le quart de celles installées durant les années 70 à 75 ou 80 à 86, elle devrait s'avérer suffisante, sachant
que les actions de conversion les plus faciles ont déjà été réalisées.
En réalisant la vision 30-30, le
gouvernement du Québec obtiendra des investissements non étatiques de l'ordre
de 30 milliards de dollars, le
maintien, voire l'accroissement des emplois dans le secteur des énergies
renouvelables ainsi que des retombées économiques
et financières pour l'ensemble des régions de la province. Nous avons donc le
pouvoir de vitaliser le Québec aux
niveaux économique, social et environnemental à long terme tout en rendant
possible l'atteinte des cibles de réduction de GES proposées par le
gouvernement du Québec.
Le Québec se distingue de nombreux États
comparables, particulièrement en Amérique du Nord, en raison de sa plus faible
empreinte carbone. Ceci tient principalement au fait que la quasi-totalité de
sa production d'électricité provient de
sources d'énergie renouvelable peu émettrices de GES, tels l'hydroélectricité,
l'éolien et la biomasse. Nous pouvons
être fiers de ce leadership, et nous devons continuer à être des précurseurs en
la matière en poursuivant notre substitution du pétrole par des énergies
renouvelables. Le temps n'est plus aux remises en question et aux débats sur les besoins d'intervenir drastiquement pour
réduire les GES. Nous devons agir immédiatement et éviter de payer le
prix économique, social et environnemental de la procrastination dans ce
domaine.
M. le Président, Mmes et MM. les députés, je
vous remercie pour votre écoute.
Le
Président (M. Reid) :
Merci. Alors, nous allons passer maintenant à la période d'échange. D'abord,
du côté gouvernemental, M. le ministre, à vous la parole.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonsoir, M. Giguère, M. Samray.
Merci pour votre présentation ainsi que votre mémoire. Le mémoire propose énormément de mesures à prendre pour
contribuer à atteindre l'objectif proposé par le gouvernement. J'aimerais ça si vous pourriez nous faire une hiérarchie.
En tout cas, parmi ces mesures-là, lesquelles il faudrait prioriser et lesquelles seraient les plus susceptibles d'aller
chercher un maximum de retour sur l'investissement en termes de
réduction?
M. Samray
(Jean-François) : Oui. Merci
pour la question, M. le ministre. Écoutez, je pense que, dans un premier
temps, il y en a dans les différentes
filières et que le Québec est choyé d'avoir tout ce potentiel dans toutes les
différentes filières. Je vous dirais que ça
peut aller de l'électrification des transports et la norme «Zero Emission
Vehicle» pour venir réduire la
quantité de produits pétroliers consommés. Votre document l'énonce très bien,
45 % des émissions de GES proviennent
de ce secteur-là. Mais il y a également l'établissement d'une norme de
biocarburants, donc biodiesel, éthanol de deuxième génération,
biométhane, qui doivent contribuer, qui ont un très grand potentiel de réduire
les émissions de GES, et, donc, la création
d'un marché québécois. Le PTMOBC, c'est bien, mais ça ne remplace pas la mise
en place d'un marché québécois mis en place et créé par une teneur
minimale dans les combustibles utilisés par les consommateurs et les
industriels. Donc, pour nous, ces deux mesures-là sont parmi les premières à
mettre de l'avant.
Par la suite,
il est évident qu'il reste encore beaucoup d'électrification à faire dans
l'économie, et la substitution du mazout
dans le chauffage, et également des actions sur le territoire du Plan Nord et
des réseaux autonomes non alimentés, notamment la centrale des
Îles-de-la-Madeleine avec ses 36 millions de litres de mazout lourd.
M. Heurtel : Donc, vous n'êtes pas
sans ignorer que, lors de l'annonce, par le gouvernement, de la politique d'électrification des transports il y a quelques
jours, j'ai eu le privilège d'annoncer notamment notre intention de
mettre sur pied une norme VZE, ce que vous appelez «Zero Emission Vehicle».
Alors, déjà ça, on est à l'oeuvre là-dessus.
Là, si je
comprends bien, une norme biocarburant, ça, dans votre liste de priorités,
c'est votre numéro deux. Puis, bon, remplacer, bon, dans les
habitations, dans les industries, le chauffage par le mazout. Alors, j'aimerais
ça vous entendre davantage sur ce que ça voudrait dire, dans un contexte
québécois, une norme biocarburant,
concrètement. Et, deuxièmement, au
niveau de remplacer les édifices qui sont chauffés au mazout... remplacer le
système de chauffage, pardon,
j'aimerais ça savoir, bien, par quel moyen. Parce qu'on a entendu les
représentants de la filière de la biomasse forestière dire que, pour épauler tout ce travail-là... ou presque tout
le travail qu'il y a à faire là-dessus, il y a d'autres options qui
s'offrent à nous. Alors, ça serait quoi, d'après vous, l'option à privilégier,
de ce côté-là?
M. Samray (Jean-François) : Je
pense, dans un premier temps, il faut que ça soit des mesures qui fassent du sens et qui sont socialement acceptées localement.
La biomasse fait partie des filières d'énergie renouvelable que
représente l'AQPER, et il est évident que,
dans une région forestière, l'utilisation et la valorisation de la biomasse
forestière dans le remplacement du mazout pour le chauffage va être une
mesure qui va faire du sens, puisque localement elle va créer une économie
circulaire. Donc, pour nous, c'est quelque chose qui va de soi, l'utilisation.
• (19 h 50) •
Donc, par la suite, à
votre autre question, sur : Comment est-ce qu'on le ferait?, il est
évident que le marché américain, lui, est
allé avec des RINs, donc des crédits verts pour les produits pétroliers, qui
ont facilité énormément... qui ont abaissé le coût aux consommateurs et
qui ont permis de valoriser les biocombustibles.
Je pense qu'au Québec, d'une part, en ayant le
marché du carbone, qui donne un signal clair et prévisible à l'industrie, c'est un élément fondamental, la prévisibilité donne un signal clair d'où s'en va le marché; en même temps, permettre la substitution de
ces biocombustibles-là par une norme d'une teneur minimale, donc un «blending»
de ces biocombustibles, ou du biogaz, le
biométhane, dans le réseau gazier va être une façon d'accroître le modèle. La
Suède, notamment dans la région de Göteborg, utilise autant le
biométhane que le gaz naturel produit à partir de biomasse qui est transformée en gaz naturel. Donc, tout ça a été
fait par une teneur minimale locale, et, donc, c'est une façon
d'accroître et de stimuler le marché. À l'AQPER, nous croyons fortement qu'un
marché créé va donner le meilleur signal, un signal prévisible et un signal sur lequel autant les décideurs que les
investisseurs vont pouvoir prendre des décisions éclairées, tout ça chapeauté par un marché du carbone qui, lui,
presse les gens d'agir et que les premiers acteurs sont les
bénéficiaires.
Le Président (M. Reid) :
...le député de Maskinongé.
M. Plante : Merci beaucoup. Donc,
bonsoir, messieurs. J'aurai une seule et unique question mais bien complexe ou très à développement. Écoutez,
on a entendu d'autres groupes qui avaient une crainte, sur le développement
économique, au niveau de la cible, qui la trouvaient trop élevée et ils
pouvaient considérer qu'il y aurait pu avoir des atteintes à l'économie du Québec en ayant une cible aussi élevée. Vous, bien au
contraire, vous trouvez que la cible est justifiée et que, contrairement
à ce que d'autres groupes disent,
elle va engendrer du développement
économique, et ce, dans toutes les régions du Québec, ce qui m'a
beaucoup plu et ce que j'ai bien aimé entendre de vous, et j'aimerais que vous nous donniez des exemples de type de
développement et dans diverses régions du Québec qu'il peut y avoir
grâce à l'émission d'une cible de 37,5 %.
M. Samray
(Jean-François) : Écoutez,
effectivement, nous, on croit que l'énergie et le développement, la vitalité des régions vont de pair. À titre d'exemple, la
grande région de Montréal ou la région de Québec a plusieurs attraits, plusieurs
attributs, mais elle a de la population, et donc des matières putrescibles. Ces matières
putrescibles là peuvent être transformées en biométhane et valorisées
dans des flottes de véhicules. C'est une des énergies. Tant qu'il y a des
humains, il y a des matières putrescibles, et, l'agriculture, il y a des
matières putrescibles.
D'autres
régions, on va avoir l'écoulement de l'eau qui va permettre d'avoir de l'hydroélectricité. Dans d'autres régions — j'étais,
M. Simard, justement dans votre région la semaine dernière — il y a de la foresterie, et, avec la foresterie, une foresterie
durable, on peut, également, avec les écorces, les résidus de coupe, et tout,
faire du chauffage, on peut également faire des biocombustibles qui peuvent être
utilisés localement et qui peuvent créer une économie circulaire également
dans la foresterie. Imaginez, le secteur de la foresterie québécois,
une certification durable qui, en
même temps, utilise des biocombustibles diesels durables, donc ça fait vraiment
une économie circulaire. Il y a l'utilisation du vent pour également la production éolienne. Il y a le soleil qui est là dans
toute la vallée du Saint-Laurent, c'est peut-être une chose qu'on oublie, mais il y a plus de
rayonnement solaire là qu'il y en a à Paris ou à Berlin. Et donc ce sont des
formes d'énergie qui sont présentes.
Donc, il y a
des énergies renouvelables sur l'ensemble du territoire québécois, et chaque
région, chaque municipalité, chaque MRC peut y trouver quelque chose qui
peut lui permettre d'avoir une économie locale dynamique et qui permet
d'également créer des emplois locaux et du développement économique durable.
Le Président (M. Reid) : M.
le député de Mégantic.
M. Bolduc : Merci. Vous nous montrez
un tableau, votre diagramme de Sankey, à la page 12, avec les économies, et, dans le bas de la page, on peut y
noter plusieurs changements significatifs, par exemple «l'énergie perdue
est réduite de 48 térawattheures», «l'énergie renouvelable représente
52 %», etc.
Est-ce que vous avez un estimé du coût et de
l'échéancier? Parce que, oui, on est bien d'accord, mais, premièrement, est-ce qu'on a les ressources
financières? Est-ce qu'on a les ressources humaines? Parce qu'il y a
beaucoup de projets dans l'affaire, là. Si
on regarde votre diagramme, là, on a beaucoup de projets. Est-ce qu'il est
humainement possible de réaliser l'ensemble
de ces paramètres-là, d'économiser les 48 térawattheures d'énergie perdue,
etc., et d'arriver, en 2030, avec le 37,5 %? Puis, si oui, est-ce
qu'on sait comment ça va nous coûter, tout ça, là?
M. Samray
(Jean-François) : On a fait
une simulation très poussée des actions qui sont là. La réponse, c'est
que, si on commence au 1er janvier
2016, si on a les politiques claires et les signaux clairs pour
l'investissement, la réponse, c'est : Oui, c'est possible, c'est
faisable. Et il s'agit d'un plan d'investissement de 30 milliards,
2 milliards par année, qui équivaut à environ 2 % de GES qu'il faut
réduire annuellement. Donc, ça, c'est une chose.
D'autre part,
bon nombre de ces énergies renouvelables là sont à coût compétitif avec la
grande hydroélectricité qu'on produit
aujourd'hui, mais il y a une chose qui est certaine qui est dans le mémoire
préparé par la Maison-Blanche pour le
président américain et qui induit que, le coût social du carbone, il ne faut
pas l'oublier. Donc, ne pas agir aujourd'hui, ça a un coût. Dire combien
ça va coûter, c'est une chose. Comme je vous dis, l'électricité est à coût
comparable. Pour les biocombustibles, 35 $ le gigajoule, c'est le prix
auquel doit sortir le biodiesel, et c'est faisable avec les technologies d'aujourd'hui dans la mesure où on peut obtenir
des approvisionnements de long terme sur la biomasse forestière, mais,
oui, c'est possible. Mais j'y reviens, là-dessus, quand on fait l'analyse du
coût — c'est
vraiment ce que le département de la Maison-Blanche identifie — c'est qu'il y a une dysfonction dans le marché
sur les combustibles fossiles qui enlève les externalités, donc le coût
sur la santé, le coût sur le climat, et tout ça est complètement retiré de
l'analyse.
Or, pourtant,
l'Assemblée nationale, le budget, et tout, le coût des infrastructures, la
politique de résilience, sur le long
terme, d'adaptation aux réchauffements climatiques, ce n'est pas gratuit. Il va
y avoir des programmes d'infrastructure pour refaire des égouts, des
aqueducs, des ponceaux. La région de Rivière-au-Renard, par exemple, en
10 ans, ils ont refait deux fois le pont, parce qu'il est parti par des
crues... une fois en 200 et une fois en 500 ans. Ils les ont eues deux fois en
10 ans. Donc, ça a un coût social, ça, également, et il ne faut pas le perdre
de vue.
Donc, la
réponse, c'est : ça se fait, ça se fait à coût compétitif, mais, dans
votre analyse de coûts, il faut également prendre en compte que
l'inaction n'est pas gratuite.
M.
Bolduc : Ce que vous nous dites, en français, c'est que 40 % du
PIB du Québec, c'est 150 milliards; retarder de 10 ans, c'est
15 milliards par année. Donc, pourquoi ne pas mettre 2 milliards puis
éviter le problème?
M. Samray
(Jean-François) : Ce que je
vous dis, c'est que, par le plan qu'on amène là, c'est faisable à des
coûts qui sont présents, ça stimule l'économie, et donc, oui, ça peut être
fait.
M.
Bolduc : Mais vous entendez ce que je dis. Vous dites qu'aux
États-Unis ils ont estimé à 40 % du PIB le coût d'un retard de 10 ans. Au Québec, le PIB est de
375 milliards, 40 %, c'est 150. Donc, c'est 15 milliards par
année, sur 10 ans. Donc, on choisit le 2 au lieu du 15.
Une voix : Oui. Voilà.
M. Bolduc : O.K. J'ai bien compris
ce que vous me dites, là? Oui? Non?
Une voix : Voilà.
M. Giguère
(Daniel) : Mais, si vous me
permettez, en complément à ce que Jean-François vient de
mentionner : les investisseurs, par définition, aiment pouvoir prévoir les
choses à moyen puis à long terme, donc, pour investir des sommes parfois
importantes, et, dans ce cadre-là, le domaine des énergies renouvelables est
prêt.
Les
producteurs privés d'énergie renouvelable de différentes filières sont prêts à
investir et à s'engager dans des plans dans la mesure où les cibles et
les engagements d'un gouvernement sont clairs en la matière. Et ça, vous allez
trouver des gens prêts à investir. D'ailleurs, la simple filière éolienne, au
cours des 10 dernières années, au Québec, a généré
plus de 5 000 emplois directs. Donc, ça, c'est des centaines de millions,
des retombées économiques locales et régionales très importantes.
L'énergie renouvelable, c'est à géométrie variable. On en a mentionné il y a
quelques instants. Que ce soit dans le
domaine de la forêt, dans le domaine de l'éolien, des petites centrales
hydroélectriques, du biométhane, du
biogaz, la beauté de ces filières renouvelables, c'est qu'elles s'adaptent à la
réalité communautaire et, avec des
investisseurs, permettent un développement durable qui, ma foi, a fait ses
preuves et le fait de plus en plus à différents endroits au Québec. Donc, ces investisseurs-là veulent être des
partenaires de la réussite des objectifs du gouvernement.
• (20 heures) •
Le
Président (M. Reid) :
Merci. Nous passons maintenant au bloc de l'opposition officielle.
J'invite M. le député de Terrebonne
à poser ses questions.
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup,
M. Giguère, M. Samray, d'être présents avec nous aujourd'hui, merci aussi surtout pour le
nombre de recommandations que vous avez à l'intérieur de votre mémoire.
C'est assez
exhaustif et c'est très intéressant. Certaines d'entre elles sont
surprenantes — on aura
l'occasion d'en parler dans quelques
secondes — d'autres
sont plus traditionnelles, en tout cas, si on constate, là, le nombre de
discussions que nous avons eues avec
d'autres groupes auparavant. Je suis très content de voir que vous accueillez
avec enthousiasme, là, une cible
audacieuse pour le Québec. J'ai compris que 37,5 % pour vous semblait
suffisant. Certains sont plus craintifs, d'autres, plus optimistes, et ça nous permet de nous faire une tête. Et
j'ai compris que vous étiez également, là, pour une loi zéro émission qui a été aussi largement discutée,
donc, pour que les concessionnaires automobiles puissent valoriser la
vente de véhicules électriques notamment, dans vos recommandations par rapport
au transport.
Ceci dit,
vous avez également d'autres propositions qui sont assez surprenantes. On a
dans votre mémoire une proposition qui m'a fait bien sourire, et
j'aimerais savoir s'il existe des comparatifs dans d'autres pays. Vous dites, à
la page 21, pour réussir à se
substituer de différents combustibles en matière de transport, que le Québec
pourrait se doter d'une politique afin de bannir certains combustibles
de ses eaux territoriales, donc de mettre comme objectif, dans la Stratégie maritime du Québec, bon, des politiques
qui pourraient, donc, interdire certains combustibles qui sont
polluants. Je voulais savoir sur quoi vous vous êtes basés pour faire une telle
proposition.
M. Samray (Jean-François) : Écoutez,
nous nous sommes basés une... d'étude que nous avons réalisée en Suède et la
Suède, qui, finalement, a énoncé qu'elle veut être libre de tout combustible
fossile pour 2050. Parmi ses actions, il y a
tout le secteur du maritime, où là on va remplacer le mazout lourd, le diesel
maritime, par du gaz naturel liquéfié. Et, quand on parle gaz naturel en
Suède, il faut réaliser que le pipeline arrête à la ville de Göteborg, tout le reste de la Suède n'est pas alimenté par le
pipeline, et donc tout ça pour stimuler la production de biométhane. Donc,
c'en est un exemple.
Dans
le mémoire qu'on a déposé au ministère des Ressources naturelles et de
l'Énergie, on indique qu'il y a une alliance des ports hanséatiques,
donc de la mer du Nord, qui a mis une série de politiques, de recommandations.
Une d'elles est fort simple, elle revient
également à faire en sorte que, lorsqu'un bateau arrive à quai, il est tenu
d'arrêter son moteur et d'avoir un
approvisionnement électrique directement de par le port. C'est meilleur pour
l'ouïe, on peut mieux entendre les
cornes de brume, mais c'est également meilleur pour la population locale,
puisqu'il n'y a pas les émissions de GES et les particules fines. Donc,
ce sont des exemples qui se font.
M. Traversy :
Merci. J'ai trouvé cette proposition très intéressante, puisque vous êtes la
première organisation qui nous la propose depuis le début de nos
conversations.
Également, une autre proposition que j'ai trouvé
fort intéressante, c'est à la page 20 de votre document. Vous parlez, dans le fond, des stations-services à fort
volume. Vous recommandez que... toujours en vous inspirant, je pense, de
la Suède, vous recommandez, donc, d'essayer
d'offrir davantage de diversité au niveau des carburants disponibles
dans ces stations-services à large volume.
Je voulais voir un peu de quelle façon vous voyez, dans le fond, l'implantation
de cette recommandation. Est-ce que c'est par projet de loi ou dans une
politique énergétique ou de... Je voulais voir un peu comment vous voyez
l'atterrissage d'une telle mesure.
M. Samray
(Jean-François) : Bien, en
Suède, ça s'est fait énormément dans la région Göteborg, qui est le fief
de Volvo. Il y a eu l'utilisation du
biométhane dans les transports et là il
y a eu un début avec trois
stations-services qui ont commencé à large volume. Quand on parle de
stations-services à large volume, on parle nécessairement de stations-services qui sont en bordure d'une autoroute et
d'un grand axe de parc de transports. Et là il y a été rapidement constaté que, pour qu'on nouveau combustible soit adopté, il
doit être disponible et il doit avoir également les bons incitatifs pour ce faire.
Mais la
disponibilité était d'abord et avant tout une préoccupation importante,
et donc ça a été le fait d'amener les stations-services
à fournir ces énergies-là. Donc, on va avoir autant de l'essence que du diesel,
que du biodiesel, que du gaz naturel et biogaz liquide et gazeux et également,
maintenant, on commence à y ajouter également des stations de recharge, parce que, l'autre élément des stations
de recharge, c'est bien d'avoir une borne quand on a 10 autos,
20 autos, 30 autos, mais, quand on en a 50, 100 ou 300 et qu'il n'y a
qu'une borne, c'est comme si on n'en avait pas. Vous comprenez qu'à un moment donné il faut ajuster l'offre de recharge énergétique
avec la demande et faire en sorte
qu'il y ait une adéquation, parce que, sinon, n'en avoir qu'une, c'est comme ne
pas en avoir.
M.
Traversy : Et donc
est-ce que c'est une obligation, dans l'exemple que vous me donnez, toujours
par rapport à la Suède, pour
ces stations-services à grand volume ou c'est des incitatifs qui sont donnés
aux commerçants pour diversifier le style de carburant qui est offert, là, sur
leurs lieux de travail?
M. Samray (Jean-François) : Ça a été incitatifs, mais également
ça a pris du travail du côté des municipalités, parce que comprenez qu'un chef-pompier, au tout départ, ça trouve que
son schéma de sécurité, il est toujours le plus parfait du monde, et, dès qu'on y
change quelque chose, c'est dangereux.
Donc, il y a
eu un travail de sensibilisation également avec l'ensemble des parties prenantes, et, derrière ça, la
sécurité civile a été présente pour
expliquer les nouvelles technologies, toutes les mesures de sécurité qui
étaient implantées. Mais il est clair
que, quand c'est énoncé dans une politique énergétique d'une nation, quand c'est présenté
comme étant un objectif de long terme, qu'on veut obtenir d'ici 2050 une
indépendance complète par rapport aux produits pétroliers, le signal est
donné, et l'industrie et les citoyens suivent.
M.
Traversy : Parfait.
Et j'ai compris que votre association aussi, bon, souhaitait voir le Québec
devenir leader en énergie
renouvelable, rien de moins, donc être un phare. J'ai senti l'enthousiasme, dès
le début de votre présentation, là, de cette volonté de vouloir peut-être
se diriger vers des efforts plus substantiels.
À l'intérieur de votre mémoire, vous nous parlez
d'instaurer une politique cohérente avec, bon, les autres engagements
qui peuvent avoir recours avec la lutte aux changements climatiques. Vous dites
que ça pourrait améliorer la balance
commerciale, ça réduirait, évidemment, les émissions de GES, ça tonifierait l'économie
en créant des emplois sur l'ensemble du territoire.
Cette politique cohérente, est-ce que vous
pouvez me la clarifier un petit peu juste pour qu'on puisse bien la visualiser?
M. Samray
(Jean-François) : Je vous dirais que, cette vision 30-30, les
diagrammes de Sankey la résument d'une certaine façon, là, mais, quand
on indique dans une politique que, d'ici 2030, on veut réduire de 30 % les
produits pétroliers, et que c'est tout ce
qu'on dit, et qu'il n'y a pas de mesure d'accompagnement, il n'y a pas de
marché du carbone, il n'y a pas de
teneur minimale en biocombustibles qui doivent être présents, bien on a émis un
voeu. Et, quand on parle de
cohérence, c'est-à-dire par le marché du carbone, par une politique
de l'électrification, par une politique qui va permettre la production d'énergie
renouvelable tant pour les besoins locaux que pour l'exportation, qui va rendre
les lignes électriques disponibles à l'exportation et également mettre un
marché pour les biocombustibles, voici une politique cohérente qui permet simultanément d'améliorer les réductions de GES
mais également d'améliorer la création d'emplois ainsi que la balance commerciale, parce que,
l'énergie, en 2012, c'était 54 % du solde négatif de la balance
commerciale, l'importation énergétique. Donc, la cohérence veut que tout se
tienne.
Le Président (M. Reid) : Il
reste 10 secondes.
M.
Giguère (Daniel) : Oui, puis
je peux rajouter rapidement que nos membres de l'association ont pris
l'exercice très au sérieux. Pour la première
fois de son histoire, les différents comités de l'association ont fait un
travail en profondeur dans chacun de leurs domaines d'activité pour
pousser au maximum la réflexion qui a donné la vision 30-30 de l'Association
québécoise de la production d'énergie renouvelable et tous ces comités-là sont
en concertation vers le même objectif qu'on vous présente. Donc, vraiment, vous
avez toute une filière renouvelable pas seulement dans un domaine, mais dans
différents domaines.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Nous passons maintenant au deuxième groupe d'opposition, M. le député de
Masson.
• (20 h 10) •
M.
Lemay : Merci, M. le Président. Merci, messieurs, d'être ici avec nous
ce soir. Vous savez, votre mémoire, il est
très bien construit, et puis vos 26 mesures sont très intéressantes les unes
des autres. En fait, je trouve qu'une approche scientifique, là, c'est quand même... Ce que vous avez fait, c'est...
bien, je dois vous dire, là, moi, j'achèterais ce plan-là.
Bref, ceci
étant dit, j'aimerais qu'on parle... On va aller vers la fin, tout de suite,
des mesures, la mesure 24. Vous avez
parlé, dans le fond, que vous aimeriez, là, qu'on regarde à avoir les normes
d'urbanisme afin de prévoir l'installation de concentrateurs solaires ou de panneaux photovoltaïques sur les toits
des édifices. J'imagine, vous n'avez pas chiffré chaque mesure
individuellement, là. Mais, je veux dire, ça, selon vous, au niveau du Québec,
c'est une priorité qui nous permet de... en fait, tu sais, cette mesure-là,
elle compte pour combien? Vous n'avez pas chiffré chaque mesure
individuellement ou...
M. Samray
(Jean-François) : On
pourrait vous revenir là-dessus, là, mais c'est faisable. On peut vous
revenir là-dessus. Mais ce qu'il faut
comprendre derrière ça, c'est que le rôle des municipalités va être très important
dans l'atteinte des réductions de GES
mais également dans la conversion de l'énergie au Québec, là. Et, dans
plusieurs municipalités, il y a des
règles qui font en sorte que la maison doit être présentée... la porte doit
être perpendiculaire à la rue ou qui
font en sorte que les panneaux solaires ne
sont pas permis sur les toits, parce
qu'il y a un schéma d'aménagement, et ainsi de suite. Et donc, là, il y a vraiment un travail de réflexion à faire. Et, quand on parle de
cohérence à votre collègue, c'en est un élément également, qu'il y ait une certaine cohérence, que, quand on
veut réaliser cet apport-là des énergies renouvelables, bien il va
falloir faire des ajustements à certains endroits. Ce ne sont pas des
ajustements qui coûtent quelque chose. Ça
n'a pas un coût pour l'État de dire : Nous permettons l'installation dans
telle et telle condition, mais par contre ça amène une formation
professionnelle, ça amène toute une grappe industrielle qui va se charger de
faire l'installation de ces panneaux-là,
l'inspection, et tout ça. Mais pour l'État ce n'est pas une mesure qui coûte
quelque chose, au contraire, c'est créateur d'emplois, c'est un effet
multiplicateur.
M.
Lemay : Parfait. Si je reviens aux transports puis à l'électrification
des transports, on le sait, présentement c'est 100 000 véhicules d'ici 2020, mais on veut aller jusqu'à
300 000 véhicules électriques d'ici 2026. Selon vous, là, est-ce
que c'est réalisable? Est-ce que ça prend absolument une norme zéro émission,
tu sais, comme la Californie a fait, un peu qu'est-ce que le ministre a dit
qu'il est dans son intention, qu'il veut instaurer ici, au Québec?
Pour
atteindre 300 000 véhicules, est-ce qu'on fait seulement l'électrification
des transports ou ça nous prend une norme zéro émission?
M. Samray (Jean-François) : Bien,
moi, je vous dirais que, quand on y va avec une telle norme, ce qu'on impose... et ça a fait l'objet de nombreuses
discussions en Californie par le Clean Air Group, mais, enfin, ce qu'on
impose, c'est l'obligation d'avoir des véhicules dans les salles de montre.
Et, quand il y a des véhicules qui sont dans les salles de
montre, ils sont vendus et, quand ils sont vendus, il y a... Ils vont briser à
un moment donné, et donc ça sous-entend qu'il
va falloir qu'il y ait des mécaniciens, mécaniciennes, de la formation
qui soit faite. Et donc c'est l'ensemble de cette économie
également qui doit se mettre en place, et ne pas avoir une
telle norme revient tout simplement à aller sur le bon vouloir mais n'amènera
pas de formation professionnelle, et, là encore, ce sont des nouveaux emplois
qui sont créés.
M. Lemay : Mais en Californie ce
n'est pas plutôt qu'ils ont imposé un quota de vente? Tu sais, vous autres, vous venez parler, là, d'avoir des véhicules
disponibles en salle de montre, et, il me semble, moi, je vois une nuance
ou une différence, en voulant dire : Si
on impose d'avoir certains véhicules disponibles, ça veut... dans le fond, on n'impose pas la vente, on
fait juste imposer un inventaire, puis, à ce moment-là, par le fait même, on s'entend que le commerçant, il va vouloir le vendre, parce qu'il ne veut pas supporter l'inventaire. Mais, je veux
dire, moi, je vois une nuance entre imposer un quota de vente et puis
imposer une disponibilité.
M. Samray
(Jean-François) : Je pense
que, dans un premier temps, il faut qu'il
y en ait pour les ventes, et
avoir un certain pourcentage de ventes, c'est également... mais, avec les bons
signaux, avec les bons incitatifs, avec le fait de... On a rendu disponible le jugement de la cour européenne par rapport à la Norvège sur la politique
d'électrification des transports. C'est un
document que je vous invite à lire qui est très éclairant. Je pense qu'avec des
politiques publiques qui sont sans véritable coût on rend attrayant le véhicule électrique, et
donc, ce faisant, on peut progressivement y mettre un quota minimal, tout comme la Californie, dans la
ville de San Francisco, a donné trois ans à l'industrie du taxi pour
virer au complet la flotte puis la rendre, la convertir électrique ou hybride,
là. Ils ont donné trois ans pour ce faire.
Le Président (M. Reid) : Il
reste quelques secondes.
M.
Lemay : Merci beaucoup.
Le Président (M.
Reid) : Alors, nous passons maintenant au dernier bloc.
J'invite la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques à poser ses questions.
Mme
Massé : Merci, M. le Président. Bonsoir, messieurs. Je pense que vous
avez été clairs d'entrée de jeu qu'on ne
peut plus se permettre d'attendre, hein, qu'il y a une nécessité d'agir dès
maintenant et que chaque année où on attend, c'est une année où soit nous, si on a la chance d'être encore là, ou nos
enfants vont se trouver à le payer pas mal plus cher. Cette urgence
d'agir là, je pense qu'elle est partagée par l'ensemble des gens qui viennent
nous rencontrer et je pense que vous proposez une multitude de solutions.
Vous avez parlé... et
vous avez des propositions sur toute la question des matières putrescibles. On
apprenait dernièrement qu'on va retarder
encore de trois ans les usines de biométhanisation, si je ne m'abuse. Est-ce
que, pour vous, ça fait partie de la cohérence que vous vous attendez?
M. Samray (Jean-François) : Je vous dirais que, derrière ça, notre recommandation,
elle est très claire sur le fait qu'il
faut établir un marché pour les bioénergies — et le biométhane en est un — et que de mettre un programme comme
le PTMOBC, qui subventionne la
capitalisation, c'est une chose, mais développer un marché qui va lui-même
permettre à l'infrastructure de
s'autofinancer et à la municipalité ou à l'opérateur d'assumer ses frais et ses
frais de financement, c'est la
solution idéale. La Suède a fait le virage à la biométhanisation en créant un
marché avec des sommes très peu importantes. Et donc l'important, c'est
de créer un marché.
Mme Massé :
...fait ça, au Québec? En deux secondes, j'imagine?
M. Samray (Jean-François) : On impose une norme pouvant aller jusqu'à 5 %
de biométhane, énergie renouvelable,
dans le gazoduc de distribution, on passe un règlement, et, lorsque les
distributeurs gaziers vont à la Régie de
l'énergie, ils vont être tenus de rencontrer cette norme-là et devront se
procurer à un prix d'appel ce gaz-là pour l'inclure dans leur réseau de
distribution.
Le Président (M.
Reid) : Merci beaucoup. Alors, merci pour votre contribution à
nos travaux.
Je suspends les
travaux quelques instants afin de permettre à nos prochains invités de prendre
place.
(Suspension de la séance à
20 h 18)
(Reprise à 20 h 19)
Le
Président (M. Reid) : Alors, nous reprenons nos travaux. Je
souhaite la bienvenue à nos prochains invités, il s'agit des représentants de Vivre en ville. Alors,
vous avez 10 minutes — vous connaissez la routine — ensuite, nous allons procéder à une
période d'échange. Et je vous demanderais de vous présenter et présenter les
personnes qui vous accompagnent pour les fins de l'enregistrement. À vous la
parole.
Vivre en ville
M.
Savard (Christian) : Bonsoir, M. le Président. Bonsoir à tous.
D'abord, merci de l'invitation de la commission pour cet important exercice. Mon nom est Christian Savard, je suis
directeur général de Vivre en ville. Je suis accompagné, à ma gauche, d'Alexandre Turgeon, président
exécutif et fondateur de Vivre en ville, et, à ma droite, de Jeanne
Robin, directrice générale adjointe chez nous.
Je
ne sais pas si c'est bon signe ou mauvais signe quand vous me dites : Vous connaissez la routine. Je ne
sais pas si je suis trop souvent ici...
• (20 h 20) •
Le Président (M.
Reid) : ...cette commission.
M.
Savard (Christian) : Oui.
Donc, d'entrée de jeu, ce qu'on aimerait dire, c'est : Féliciter
le gouvernement et les différents derniers gouvernements pour le
leadership du Québec en
matière de lutte contre les changements climatiques. C'est quelque
chose qui a été débuté en 2006 et qui
se maintient maintenant depuis 10 ans. Donc, c'est quelque chose qu'on tient à saluer.
Sur
la question principale de la consultation, il semble qu'il y ait un consensus assez fort pour une cible ambitieuse. Vivre en ville propose, dans les trois options, de
prendre la cible la plus ambitieuse, qui nous mettrait à égalité avec
notre principal partenaire dans la bourse du
carbone, qui est la Californie, donc une diminution de 40 % des gaz à effet de serre à
l'horizon de 2030. Mais, puisque nous avons la chance d'être avec vous ici, on
aimerait vous parler de comment on peut y
arriver. C'est le gros de l'enjeu, parce que, quand on se donne une cible, il
faut voir si on est capables d'y arriver. On croit évidemment que oui et nous croyons qu'il y a différentes
stratégies qu'on peut mettre en place. Je passerais la parole à Jeanne
pour continuer.
Mme
Robin (Jeanne) : Merci. Alors, quand on regarde l'évolution des
émissions de gaz à effet de serre au Québec secteur par secteur, on
comprend tout de suite l'importance de travailler dans le secteur des
transports.
On n'est pas
les premiers à passer aujourd'hui, ça fait que j'imagine que ça a déjà été décrit
beaucoup, beaucoup pour vous, mais, rapidement, depuis 1990, les
émissions dans le secteur des transports ont augmenté de 26 %, et on a
néanmoins réduit nos émissions depuis 1990 à la hauteur d'à peu près moins
8 %. Ça veut dire que, si on avait ne serait-ce
que maintenu équivalentes les émissions dans le secteur des transports, on
aurait déjà atteint la cible que le Québec vise pour 2020. Donc, on pourrait être d'autant plus ambitieux pour
celle de 2030. Donc, ça donne une idée de l'ampleur des efforts à faire porter sur ce secteur-là,
d'autant plus que, selon ce qu'on a vu dans le document de consultation,
d'ici 2030, entre 2012 et 2030, ce qui est
proposé, c'est de réduire de 45 % les émissions dans le secteur des
transports. Donc, on voit que c'est énorme et c'est une évolution qui
est tout à fait inverse à celle qu'on a observée pour le moment.
Le portrait
des émissions de gaz à effet de serre en transport, il dépend, en gros, de
quatre déterminants : le mode de transport,
le kilométrage parcouru, la performance énergétique des véhicules et puis le
type d'énergie utilisé, bien sûr. Jusqu'ici,
ce qu'on voit, vous le savez, vous l'observez, c'est une prépondérance de la
voiture parmi les modes de transport utilisés
et de plus en plus de kilomètres parcourus en voiture. On roule de plus en plus
dans des véhicules qui sont de plus en plus lourds, donc de plus en plus
consommateurs, et, même s'il y a beaucoup d'ingénieurs qui travaillent très
fort à améliorer la performance énergétique
des véhicules, cette réelle amélioration de la performance ne suffit pas à
compenser l'augmentation du kilométrage
parcouru. C'est pour ça qu'on propose une diminution du kilométrage parcouru.
Pour le diminuer, il y a un consensus
sur le fait que c'est vraiment sur le mode de développement urbain qu'il faut
agir. On sait que la densité, la
mixité des activités, la perméabilité des rues, un meilleur accès au transport
en commun et de bons choix de localisation
sont tous des éléments qui permettent de réduire les besoins de transport et de
faire en sorte que les déplacements soient faits davantage en transport
en commun, à pied et à vélo.
Étant donné
l'ampleur des efforts à faire en matière de transport pour réduire les
émissions de gaz à effet de serre, on pense qu'il ne faut négliger aucun
de ces déterminants-là et travailler, au Québec, à les améliorer.
M. Savard
(Christian) : La stratégie principale qu'on propose, dans le document,
dans la section 4, c'est... on propose
une croissance... en fait, une croissance démographique, avec la croissance
économique, qui y est liée, qui a un faible impact climatique pour
inverser la tendance. On sait qu'actuellement, lorsqu'un nouveau ménage
s'installe au Québec, on va avoir une moyenne d'environ... par exemple, dans la
couronne de Montréal, pour ses transports, une moyenne de 4,5 tonnes de
gaz à effet de serre.
Nous, ce qu'on veut, c'est que les futurs
ménages... toute la future croissance économique du Québec, les croissances
urbaines se fassent à plus faible impact climatique. Et, juste pour vous donner
des chiffres, on parle, à l'horizon de 2030,
selon les chiffres de 2011 — c'étaient les plus récents qu'on avait — de 600 000 nouveaux
ménages. Donc, il y a là une croissance
urbaine à gérer. Comment cette croissance-là va agir, va émettre de gaz à effet
de serre? Et, nous, ce qu'on propose,
c'est d'essayer de diminuer immédiatement et de diriger immédiatement cette
croissance-là pour faire en sorte que
les émissions sont diminuées à la source. Et, en faisant ça, on contribue aussi
à réparer, à reconstruire la ville
sur la ville actuelle, donc également les ménages actuels vont voir également
leur bilan s'améliorer à travers une forme urbaine moins émettrice de
gaz à effet de serre. Donc, bref, grosso modo, c'est un développement économique
à faible impact climatique.
Cette approche-là est une approche, justement,
assez reconnue mondialement. Notamment, on peut penser à Michael Bloomberg, l'envoyé spécial des Nations
unies pour les villes et le climat, qui préconise justement une gestion
de l'urbanisation; on peut penser aussi à la
Global Commission of Economy and Climate, codirigée par Nicholas Stern
et Felipe Calderón. Leur première priorité,
c'est d'aller dans ce sens-là, puisque c'est nos villes qui sont les plus
grandes émettrices de gaz à effet de serre.
Donc, on n'est pas seuls à le dire, c'est vraiment une stratégie qui est
mondialement reconnue. Donc, Jeanne, je te laisse continuer.
Mme Robin
(Jeanne) : Oui. Le fait de développer une croissance à faible impact
climatique, ça a aussi l'avantage d'être la mesure de réduction des
émissions de gaz à effet de serre qui comporte le plus d'avantages, par
ailleurs. En construisant mieux les villes, en faisant en sorte que les
activités s'installent à des endroits où elles vont être bien desservies en transport en commun, plus proches de
la population, on va aussi améliorer la santé de la population, par exemple, en permettant aux gens de marcher
davantage — on sait,
c'est important, l'activité physique. Donc, en fait, on va aussi améliorer la protection de l'environnement,
faire en sorte que l'économie soit plus stable, plus solide, diminuer
les coûts de transport pour les ménages,
notamment, et également, bien sûr, diminuer le coût des infrastructures. En
faisant en sorte que les ménages
s'installent dans des endroits qui sont déjà partiellement urbanisés mais
sous-utilisés, on fait en sorte de
mieux utiliser les infrastructures existantes. Ça évite d'avoir à construire
des nouveaux réseaux d'aqueduc, d'eau, des infrastructures routières, donc c'est des économies qui sont à portée de
main pas seulement en émissions de gaz à effet de serre, mais aussi des vraies économies en argent
pour le budget du Québec et pour le budget des municipalités et des ménages.
Ça, ça veut
dire qu'en travaillant sur une croissance urbaine à faible impact climatique on
peut faire en sorte que les investissements qui sont nécessaires dans
l'atteinte de la cible de réduction des émissions de gaz à effet de serre, ce soient aussi des investissements dans l'amélioration
de la qualité de vie de la population en général et dans l'équilibre des
finances publiques.
M.
Savard (Christian) : C'est, selon nous, une des stratégies les plus
porteuses pour faire en sorte que les objectifs de réduction de gaz à
effet de serre et de développement durable du gouvernement se combinent. C'est
mutuellement bénéfique pour les deux objectifs comparativement à certaines
solutions technologiques qui sont importantes mais qui sont plus limitées en ce qui concerne les
retombées. D'ailleurs, à noter que les pays qui ont les meilleures
pratiques dans le domaine sont des pays qui
ont aussi une très grande compétitivité économique. L'Allemagne, la Suède, les
exemples que nous citons à Vivre en ville,
sont des pays qui sont très solides économiquement qui ont une très grande
résilience, et on pense que c'est parce qu'ils construisent bien leurs milieux
de vie, bien leurs villes et ils gèrent bien leurs territoires.
La
bonne nouvelle, c'est que c'est déjà une orientation qui a été prise par le
gouvernement. Dans le plan d'action sur
les changements climatiques, le PACC 2013-2020, l'aménagement du
territoire est identifié de manière très importante, très solide. Ça a été adopté il y a deux gouvernements.
On est dans le nouveau groupe parlementaire, on a tenu à revenir porter ce message-là, mais on a progressé, là, depuis
2009. Donc, la stratégie proposée, puis on aura le temps d'en discuter
un peu plus, repose sur trois piliers,
donc : éviter des déplacements notamment avec des mesures en aménagement
du territoire, transférer des
déplacements avec l'amélioration du transport collectif et améliorer
l'efficacité énergétique des véhicules à travers l'électrification.
Donc,
là-dessus, je vous remercie. J'aimerais prendre quelques instants pour
remercier l'équipe qui a travaillé sur le mémoire à Vivre en ville — ça
s'ajoute toujours à la pile — donc, merci à Jeanne Robin, Christian
Petit, Pierre-Yves Chopin, Catherine Boisclair et Alejandra De La Cruz. Je vous
remercie.
Le Président (M.
Reid) : Merci. Alors, nous allons passer à la période
d'échange. On va commencer avec le groupe gouvernemental. M. le ministre, vous
avez la parole.
• (20 h 30) •
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonsoir, M. Savard,
M. Turgeon, Mme Robin. Merci pour votre présentation ainsi que
votre mémoire. Prendre quelques minutes pour remercier M. Savard pour sa participation
aux travaux du Comité-conseil sur les changements climatiques, un travail très
apprécié et, j'espère, qui se poursuivra, d'ailleurs.
Sur la question de la gestion de
l'urbanisation, Vivre en ville a participé à l'annonce de la création de
l'Alliance Ariane, qui réclame, entre autres, une stratégie
nationale d'urbanisation... bien, d'aménagement et d'urbanisme, là, plutôt, et moi, j'aimerais ça faire un lien, parce qu'on en est à un point où on doit faire une
révision en profondeur de la Loi sur l'aménagement
et l'urbanisme, on doit revoir la stratégie, parce qu'il y a déjà une stratégie
d'urbanisme qui existe. On doit la revoir également. Puis ça, ça a été
mis de l'avant notamment dans le cadre du pacte fiscal qui a été annoncé
récemment par mon collègue le ministre des Affaires municipales et de
l'Occupation du territoire. Et donc, dans ce contexte-là,
concrètement, j'aimerais ça qu'on aille vraiment, là, dans des mesures, là, qui
illustreraient, là, qu'est-ce que ça
veut dire. Parce qu'on a discuté, ce matin, avec le maire de Montréal;
justement, on a parlé d'aménagement. Vous vous concentrez plus,
justement, sur les grands centres, les grandes villes.
Et donc qu'est-ce qu'on a à faire
concrètement, qu'est-ce qu'on doit changer dans la Loi sur l'aménagement
et l'urbanisme, dans nos façons de faire,
dans nos mécaniques de planification urbaine pour arriver, là, à des vrais
gains en termes de réduction d'émissions de gaz à effet de serre? Puis
est-ce que dans vos travaux vous avez été capables de quantifier? Est-ce qu'il y a des mesures qui sont capables... vous allez
être capables de dire : Bien, si on fait ça, on peut s'attendre à
aller chercher x en termes de réduction?
M.
Savard (Christian) : En ce qui concerne la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme, actuellement, cette loi-là est
conçue d'une manière... c'est assez procédural, qu'est-ce qu'elle fait. Elle
n'a pas beaucoup d'objectifs, elle n'a pas
beaucoup de vision, elle est faite surtout pour dire : Bon, bien, voilà
comment on doit faire les étapes administratives, d'adoption d'un
schéma, d'adoption d'un plan d'urbanisme, d'un changement de zonage, mais il
n'y a pas vraiment d'objectif à atteindre.
Lors d'une éventuelle réforme qui n'a pas eu lieu qui est morte au feuilleton
il y a quelques années de cela, par
exemple, l'objectif de diminuer les gaz à effet de serre était dedans, dans un
des projets. Ça n'a jamais été plus loin, mais, dans ce cas-ci... Donc, la loi en tant que telle n'est pas une fin
en soi, c'est pour ça que l'Alliance Ariane parle d'une politique
nationale d'aménagement du territoire et d'urbanisme pour donner une vision à
qu'est-ce qu'on veut faire.
On
a, dans le mémoire, quelques propositions notamment de mesures. Et justement,
en ce qui concerne les relations avec les
municipalités, nous, on considère que le gouvernement doit jouer un rôle
d'arbitre, par exemple, sur les périmètres
d'urbanisation. Il doit continuer à gérer, de manière assez serrée, les
paramètres d'urbanisation, sinon on va se lancer dans une espèce de fuite en avant ou de plus petit dénominateur
commun où est-ce que toutes les municipalités vont se battre entre elles pour aller chercher la croissance, vont
s'étaler à peu près, excusez-moi, mais n'importe comment, ça va allonger les distances, on va augmenter nos
gaz à effet de serre. Voilà une mesure : continuer à maintenir
l'arbitrage de l'État sur les périmètres d'urbanisation.
Je dirais qu'un autre exemple encore
plus concret, c'est les choix de localisation que l'État fait, par exemple,
à travers ses édifices publics. L'État,
c'est presque la moitié de l'économie au Québec si on prend toutes ces choses.
La ville de Sherbrooke s'est battue avec le
ministère du Revenu, parce qu'elle voulait mettre ses bureaux au centre-ville
pour faire en sorte que, bien, toute la
population soit proche, que ça soit lié au transport en commun. Le ministère du
Revenu tenait à aller mettre ça au nord de la ville, sur le bord de
l'autoroute. Ça coûtait un peu moins cher au pied carré. La ville de Sherbrooke
s'est battue avec le ministère du Revenu pour avoir une bonne localisation qui
diminuait les distances parcourues et les
gaz à effet de serre. C'est un deuxième exemple, il y en a beaucoup, mais la
première chose que je dirais, c'est :
Avoir une vision et que la diminution des gaz à effet de serre soit dedans. Après
ça, toute notre planification qui en découle va suivre.
En ce qui concerne
les indicateurs, je ne peux pas vous en dire un là, mais, par exemple, la
Communauté métropolitaine de Québec,
lors de la révision de son Plan métropolitain d'aménagement et de développement, avait fait des scénarios. Si
on prend tel scénario de développement — consolidation;
si on prend tel scénario de développement — étalement;
qu'est-ce que ça va faire sur les distances
parcourues, sur la part modale du transport
en commun? Vous avez ce
tableau-là en page 24. Ça démontre un peu, là, des exemples de mesures qu'on
peut y avoir.
On pourrait faire une
étude macroéconomique sur le Québec. Nous, on a quelques simulations qu'on
aimerait bientôt sortir notamment,
mais toute la littérature sur le sujet va dans le même
sens : une bonne gestion de l'urbanisation diminue les gaz à effet
de serre.
M. Turgeon
(Alexandre) : Si vous me
permettez, en complément, juste pour illustrer. Vous faites le lien avec
les négociations entourant le pacte fiscal. Moi, je vous dirais
que, d'un point de vue de réduction de gaz à effet de serre, il
faut être extrêmement vigilant, il faut certainement continuer, qu'il y ait une
responsabilité partagée, sur les questions d'aménagement du territoire, entre le gouvernement et les municipalités. Je dirais même qu'il faut
renforcer le rôle de gardien du gouvernement pour s'assurer d'un aménagement
durable du territoire.
Et — pour compléter également, si
vous demandez un exemple concret — il faut réussir à bâtir et à offrir des milieux de vie à la population où on les sort de
la dépendance à l'automobile. L'objectif, c'est de donner des choix à la population
en matière d'aménagement du
territoire. Aujourd'hui, bien souvent, un jeune ménage qui veut s'acheter
une maison pour la première fois, là, il est
obligé de s'en aller de plus en plus loin des centres urbains, et la maison qui
va être à la portée de leur
portefeuille va être une maison qui va les obliger à avoir au moins une, voire
deux autos pour satisfaire les besoins de la famille. Et c'est comme ça
qu'on rentre dans le cercle vicieux de la dépendance à l'automobile. Alors, il
faut faire exactement l'inverse, et on a plein de places sur nos territoires de
nos agglomérations pour réurbaniser et construire des milieux de vie de plus
grande qualité et qui nous permettent à la fois, en même temps, de réduire nos
émissions de gaz à effet de serre.
M.
Heurtel : En matière de transport maintenant, on a eu, bon, plusieurs
conversations avec plusieurs différents groupes, puis on revient
toujours à la question de changement de comportement. Vous y touchez, là, quand
on parle d'aménagement puis d'urbanisme. Bien là, en donnant ce choix-là,
évidemment ça conditionne un changement de comportement.
Mais j'aimerais aller plus loin que ça, dans le sens que, nécessairement, ce
changement de comportement va aussi
devoir être accompagné de mesures en écofiscalité, par exemple, qui ne sont pas
toujours, à prime abord, populaires, parce que ça veut dire un coût au
niveau du portefeuille. Et on a un travail — puis ça, nous sommes les
premiers à le reconnaître — de sensibilisation, d'éducation à
poursuivre. Parce qu'évidemment, puis ce n'est pas la première fois
qu'on a cette discussion-là, là — dans les derniers mois, dans la dernière
année, on s'est vus à plusieurs reprises dans le contexte des travaux de la commission et dans d'autres
contextes — je veux
dire, quand on lit vos travaux, je veux dire, c'est difficile d'être complètement contre, là, je veux dire. Il y
a une logique, c'est soutenu, c'est recherché, c'est fouillé, c'est
appuyé scientifiquement, il y a des bases, il y a des meilleures pratiques
internationales qui sous-tendent le travail également.
Comment on réussit à atteindre ce point de bascule
là pour vraiment qu'il y ait ce changement au niveau des mentalités? Parce que présentement on est encore
confrontés à une approche d'étalement urbain. On est encore confrontés à des projets de grandes autoroutes, on est encore
confrontés à créer, là, de plus en plus de banlieues, et les questions
de densité ne sont pas nécessairement en tête de liste quand on réfléchit, là,
au développement. Alors, dans l'ensemble, j'aimerais
ça avoir votre opinion sur comment on réussit à changer ces mentalités-là puis
qu'on puisse véritablement passer à une autre étape, là, dans notre
réflexion collective.
• (20 h 40) •
M. Turgeon
(Alexandre) : Je vous dirais
qu'à notre sens le problème n'est pas un problème de demande de la
population, mais un problème d'offre à la population pour des milieux de vie
différents. Offrons-les, ces milieux de vie
là un peu plus denses qui offrent des opportunités pour se déplacer à pied vers
des commerces de proximité, d'avoir accès à du transport en commun puis
de n'être pas obligé de posséder de véhicule, même, puis de se contenter d'une Communauto, une voiture de location pour des
besoins atypiques, et les gens vont sauter là-dessus, et la population
va y trouver son compte d'un point de vue économique, là.
Ça coûte cher
d'avoir une automobile. Ça coûte 10 000 $ par véhicule, c'est
l'équivalent d'une hypothèque de 150 000 $ par année. Ça coûte
cher aux municipalités et en infrastructures. Le mémoire l'aborde sur les
cobénéfices économiques. Mais la ville de
Québec nous a demandé, il y a quelques années, de comparer six quartiers de banlieue type de Québec à
un quartier modèle d'Allemagne, le quartier Vauban, à Fribourg, puis on est
arrivés avec des coûts de trois à sept fois inférieurs en infrastructures.
C'est majeur. C'est le citoyen qui le paie, ce coût d'infrastructure là, quand
il achète sa maison.
Alors, il y a
un incitatif économique extrêmement grand à mieux faire notre aménagement du territoire, et nous, on pense que le
défi, c'est juste de l'offrir. Quand il y a des milieux de vie de qualité, les
gens vont juste en demander encore et encore.
M. Savard
(Christian) : Le point de
bascule est, selon nous, prêt d'être atteint. Il y a un changement de
mentalité, et on le voit, je dirais, notamment dans la jeune génération, pour
qui, par exemple, la possession d'une voiture est moins intéressante, le fait d'avoir des services de proximité, de
pouvoir marcher est plus important. Également dans les mises
en chantier, dans les mises en chantier dans le Grand Montréal, le
multilogement, c'est à peu près 60 % à 65 %, année après année. On ne construit plus uniquement
de la maison unifamiliale comme on l'a déjà fait dans les années 70.
Dans le reste du Québec, on est pas mal à 45 %, 50 %. Donc, il y a là
une opportunité à saisir et à se servir de ce que fait le marché et de qu'est-ce que les mentalités ont pour atteindre ce
point de bascule là. Mais ce n'est pas quelque chose qui va être facile,
mais, dans la mesure où est-ce que les transports sont si importants, il faut
le faire.
La ville de
Copenhague n'a pas changé... n'est pas devenue la ville modèle qu'elle est maintenant.
Il y avait des autos partout, leurs
places publiques étaient des stationnements à ciel ouvert, mais ils ont pris
des mesures de manière déterminée,
une par une, année après année, de manière continue, et, oui, en plusieurs
années, le travail a été fait. Mais ça a pris plusieurs années. C'est un travail de
longue haleine, mais la lutte contre les changements climatiques, c'en est
un, aussi. Donc, c'est pour ça que plus tôt qu'on va commencer, plus tôt qu'on
va atteindre nos objectifs.
Le Président (M. Reid) : M. le
député de Maskinongé. Il reste deux minutes.
M. Plante : Merci beaucoup, M. le
Président. Écoutez, j'écoute attentivement vos réponses au niveau de l'aménagement du territoire ou, si on veut, de
l'aménagement urbain plus facilitant pour éliminer la pétrodépendance, O.K., et je comprends bien et je suis d'accord
avec vous, dans un milieu urbain dense où est-ce que ça s'applique beaucoup
plus facilement.
Je vais vous
poser la question un peu inversée. Vous vous imaginez bien que je suis député de
Maskinongé et ma circonscription
fait 3 h 15 min en voiture, et déjà les municipalités qui veulent densifier la population doivent répondre à des critères
différents, soit la CPTAQ, soit des milieux de zonage agroforestiers ou simplement
touristiques ou des zones inondables différentes tout le long de leurs territoires,
ce qui cause une certaine complexité de l'aménagement du territoire
en soi, en plus d'assurer des services de proximité dans chacune des municipalités. Et, je vous dirais, la partie la plus à l'ouest de ma circonscription devient une des banlieues de Montréal,
là. Quand on passe à Maskinongé, on est rendus dans des aménagements assez urbains où est-ce qu'il se construit à peu près
une quarantaine de maisons annuellement qui sont à des gens qui
travaillent à Montréal.
Quel serait, selon vous, l'effort que nous
pourrions faire pour contribuer sans non plus créer un facteur de
dévitalisation des milieux ruraux?
M. Savard
(Christian) : Merci de votre
question, parce qu'on y a pensé. Je vous amènerais à la page
22 du mémoire.
D'abord, la
bonne nouvelle, c'est qu'assez souvent, en région, les gaz à effet de serre émis par le transport des personnes
ne sont pas aussi grands que, par
exemple, dans les couronnes de Montréal.
Ça peut avoir l'air contre-intuitif, mais
la vérité, c'est que les choses ne sont souvent pas si loin que ça, il n'y a
pas de grande distance domicile-travail à faire. C'est moins une grande mégalopole de 4 millions comme Montréal,
où est-ce que, là, les gens se mettent à faire des très grandes distances. C'est pour ça que c'est
les couronnes excentrées de Montréal qui sont les plus émettrices de gaz à effet de serre. Je vous donnerais quand même l'exemple de la page 22, où vous avez — il
y a des solutions — un exemple de deux types de développement qu'il pourrait y avoir dans une petite
ville de 5 000 habitants. En haut à droite, vous avez le nouveau
développement excentré. Vous savez, on voit ça, hein, des fois, quand on passe
sur une route régionale, là : on voit
un panneau, là, avec «50 lots à vendre». Tu es au milieu du champ, tu ne sais
pas trop pourquoi, il n'y a rien à proximité, mais il y a 50 terrains à
vendre, tu n'es pas proche de l'épicerie, tu n'es pas proche de l'église...
Le Président (M. Reid) : En
terminant.
M. Savard
(Christian) : Oui, excusez. Et, si on revient, par contre, à proximité
du village, il y a souvent aussi des
terrains à vendre, et souvent, justement, dans les arbitrages qui se font à la CPTAQ, qui se font avec le ministère des Affaires municipales, c'est
souvent ça, la question, c'est : Bien, vous avez de la place près du
village, il faut prioriser cet endroit-là. En plus, en ce qui concerne
la dévitalisation, bien, tu rapproches des ménages.
Le Président (M. Reid) : Je
dois vous arrêter, vous aurez peut-être l'occasion de continuer. Alors, je
passe maintenant au porte-parole de l'opposition officielle, M. le député de Terrebonne.
M.
Traversy : Merci beaucoup,
M. le Président. Merci beaucoup d'être présents avec nous. M. Savard, on se
croise à quelques reprises, là, depuis quelques semaines, ainsi que toute votre
équipe.
Alors, nous
parlions justement des banlieues émettrices de la couronne de Montréal
nord-sud. Nous avons une certaine expertise ou connaissance du terrain,
et heureusement vous nous avez dit qu'il existe des solutions pour faire face aux défis, bon, du développement des régions en pleine croissance comme celle de la Rive-Nord, des
régions qui sont, vous le savez, de plus en plus fréquentées par des jeunes familles qui viennent s'établir, donc, sur
les couronnes. Vous avez parlé de solutions, vous avez parlé de votre
idée maîtresse, qui semble être un peu le vaisseau amiral, soit celle d'un
aménagement à croissance à faible impact, qui semble être... C'est donc la
pièce principale de votre mémoire. Il y a plusieurs aspects, mais, entre autres,
celui-là.
Donc,
parlez-moi donc des solutions que vous voyez pour les différentes couronnes.
Est-ce qu'il y a une priorisation à
faire? Et, de ce que je comprends de votre point de vue, c'est évidemment
dans une perspective de temps à moyen et long terme que vous voyez des
améliorations pour atteindre certains objectifs. J'étais curieux de voir votre
avis là-dessus.
M. Savard (Christian) : Il manque,
sur la couronne nord de Montréal, un solide plan de développement du transport
collectif, je suis obligé de le dire d'entrée de jeu. C'est plus jeune et ça a
été beaucoup structuré autour de la 640 et
de la 15, qui ont été et qui ont joué le rôle de vecteur de développement et sur lequel tout repose. Il n'y a pas de... à part quelques
boulevards, là, mais c'est plus structuré autour des autoroutes. Ça rend la situation
plus difficile. Donc, il commence à y avoir des éléments, par contre.
Il y a le train de banlieue, il y a les
deux trains de banlieue maintenant et il y a aussi des efforts. Je vous donnerais — vous êtes dans Terrebonne, si je ne me
trompe pas — ...
M. Traversy : Exact.
M.
Savard (Christian) : ...le projet Urbanova, qui a quand même beaucoup
de qualités et qui a encore quelques défauts.
À titre d'exemple, la concentration des emplois ne semble pas très proche du
transport en commun. Dans le projet, c'est une des choses qui auraient
été intéressantes.
Je vous donnerais l'exemple de Longueuil, plus
proche de Montréal, qui s'est articulée autour de quelques terminus de transport collectif, le métro
Longueuil : là, bientôt, ça va être le terminus Panama, à la frontière de
Longueuil et de Brossard, là où est-ce que
se concentrent des emplois, du développement économique. Des entreprises
s'installent là, et c'est très bien.
Ce n'est pas au centre-ville de Montréal, mais c'est desservable en transport
collectif. Il manque ce genre de pôle
là, qui vient à des noeuds urbains sur la couronne nord, qui pourrait faire en
sorte de réduire... On ne fera pas le détail de la couronne nord, mais
juste pour vous donner des exemples d'éléments qui viendraient structurer et
diminuer les gaz à effet de serre.
M. Traversy : Et donc, dans
cette perspective, bon, c'est ça, vous parlez, exemple, d'Urbanova, qui est un TOD, bon, il y a des améliorations qui se font
continuellement. Il y a également, donc, des incitatifs qui peuvent être
mis en place, vous en faites quelques
mentions à l'intérieur de votre mémoire. Vous parlez notamment, là, donc, de
différentes stratégies pour essayer, justement, de faciliter la reconstruction
de villes ou, en tout cas, de villages déjà existants. Évidemment, tout ça est
accompagné d'incitatifs financiers.
Est-ce que
vous avez une idée du type de financement que ça pourrait avoir et de quelle
façon vous compteriez peut-être le ramasser ou, en tout cas, du moins,
le distribuer?
M. Savard
(Christian) : Il y a actuellement une mesure prévue, au plan d'action
sur les changements climatiques, de
soutien aux municipalités, autant de soutien technique que de soutien à des
projets d'urbanisme durable, une enveloppe, si je me souviens bien, d'environ 90 millions. Elle pourrait être
plus importante, mais ça serait déjà un début, parce que, selon nous, on
est près du point de bascule dont on discutait avant, il y a une demande pour
ça. Et, souvent, les municipalités, on n'est
pas... On n'est pas habituées, les municipalités québécoises, à faire de la
reconstruction de la ville sur la
ville. Pourtant, on commence à en voir, des terrains en friche, là. Tu sais,
des anciens «strips» commerciaux du type boulevard Taschereau, il y en a aussi sur la Rive-Nord, avec des centres
d'achats un peu moribonds. Ça, c'est des endroits qu'on devrait
requalifier qui sont des terrains déjà viabilisés.
Mais nos
municipalités ne sont pas habituées de faire ça. Nos municipalités, qu'est-ce
qu'elles sont habituées de faire,
c'est d'ouvrir des lots dans des terres, dans du «greenfield», là, dans des
terres vierges, là, et de continuer comme ça avec une espèce de politique de la terre brûlée qui fait en sorte qu'on
s'éloigne tout le temps mais qu'on ne s'occupe pas de l'ancien. Donc, il faut reprendre ce réflexe-là,
de s'occuper de l'ancien, et des programmes incitatifs tels que celui
dans le PACC, qui pourrait être bonifié,
selon nous, seraient très bienvenus, parce que, si tu donnes la carotte aux
municipalités... Tu ne peux pas juste leur donner le bâton puis leur
dire : On va stopper vos périmètres d'urbanisation. Il faut aussi la
carotte, donc ce type d'incitatif là est important.
• (20 h 50) •
M.
Traversy : Merci. Bien, je vous posais la question sur le
financement, parce que, de l'autre côté, j'entends aussi des membres de
municipalités qui souhaitent améliorer, dans le fond, justement, la façon avec
laquelle ils font l'aménagement urbain de leurs territoires. Mais c'est une
question de coûts, bien souvent. Au lieu d'avoir des grands stationnements, certains seraient, exemple, très
ouverts à avoir des stationnements étagés qui utilisent beaucoup moins
de terrain, qui concentrent davantage, là,
donc l'utilisation du pied carré. Mais, bon, c'est des fonds et, des fois, ces
fonds ne sont pas toujours disponibles, alors j'étais curieux de voir les
solutions. Je comprends que vous seriez ouverts à une bonification de ce genre
de programme, qui pourrait faciliter un meilleur aménagement urbain, notamment
de TOD et d'autres.
Et je vous
pose la question d'un autre fonds que vous avez mentionné dans votre mémoire,
celui du Fonds vert, pour investir
dans le développement des transports collectifs. Je pense, M. Savard, vous
avoir croisé avec d'autres groupes auparavant.
Le Fonds vert, quand vous nous faites cette recommandation, c'est pour des
nouveaux projets ou c'est pour supporter des projets déjà existants?
M. Savard (Christian) : C'est pour
évidemment des nouveaux projets pour améliorer l'offre de services. En 2006 — c'est ma deuxième, hein, commission où
est-ce qu'on parle de ça, donc, j'étais là aussi en 2006, je commence à être un vétéran, comme je le disais — il y a eu une politique de transport
collectif. Elle a été annoncée une semaine après l'annonce du plan
d'action sur les changements climatiques 2006‑2012.
Actuellement, on est encore en attente de cette
politique-là, on ne sait pas comment on va faire pour encore améliorer l'offre de transport collectif. Et
l'ancienne politique a été relativement... en fait, pas relativement, a été un
grand succès, ça a relancé le transport en
commun. Il y a eu, la semaine passée, la politique d'électrification des
transports. Elle était claire, on voyait c'était quoi, c'est : il y
a telle mesure, telle mesure, telle manière, telle chose, et on la voit. En transport
collectif, la situation nous semble plus floue, et on ne comprend pas encore
comment on va arriver avec le 1 milliard quelques qui est mis en transport
collectif pour améliorer l'offre de services. Il y a encore des absences de
réponse, selon nous, dans ce domaine-là.
M.
Traversy : Donc, vous seriez ouverts à plus de transparence
aussi, donc, pour avoir davantage de réponses à vos questions.
M. Savard (Christian) : Oui. Il n'y
a pas de politique claire, en ce moment, dans ce dossier-là.
M. Traversy :
Parfait. Le message a été entendu. Il me reste combien de temps, M. le
Président?
Le Président (M. Reid) : Une
minute.
M.
Traversy : Une minute. Parfait. Rapidement, une dernière
question. En page 39, à votre recommandation n° 6, vous
demandez l'instauration d'une redevance au niveau du développement pour tout
projet qui induit une artificialisation... voilà,
artificialisation des sols. J'aimerais donc savoir un peu par rapport à cette
redevance comment elle fonctionnerait et est-ce qu'il y a des exemples
comparables dans le monde, là, sur une telle proposition.
M. Savard
(Christian) : Il y a des hybrides. Je n'ai pas toute la mécanique de
comment ça se ferait, mais j'allais venir à ça justement, vous dire
comment que les villes peuvent se financer. En voilà une, manière de comment
elles pourraient se financer pour faire certains aménagements.
L'artificialisation
des sols est un problème mondial probablement moins grand au Québec parce qu'on
a plus de territoire, mais le territoire
où est-ce qu'on est urbanisé, c'est du territoire agricole ou du très bon
milieu naturel. Ce milieu naturel là
ou ces territoires agricoles là, des fois, quand ils sont dans la zone blanche,
là, qu'ils sont dans la zone développable,
bien, on les développe, puis ça ne coûte rien. Il y a une valeur écologique à
ça, et, selon nous, on devrait donner une valeur écologique à ces
terrains-là pour aller chercher des revenus pour financer, justement, les
projets de requalification qui demandent davantage d'efforts de la part des
municipalités. Merci, M. le Président.
M. Traversy : Merci beaucoup.
Le Président (M. Reid) :
Merci. On se comprend bien par signaux. Alors, je voulais protéger le temps de
la députée indépendante de Sainte-Marie—Saint-Jacques. À vous la parole.
Une voix : C'est intéressant.
Le
Président (M. Reid) : Ah! excusez. Pardon. Je suis allé un peu
vite. Je voulais protéger votre temps, en fait. M. le député de Masson,
c'est à vous.
M. Lemay : Merci, M. le Président.
Donc, on va vous laisser du temps, inquiétez-vous pas.
Bien, en
fait, vous proposez, dans le fond, une cible plus ambitieuse que celle qui est
proposée dans le livre, en mentionnant
que vous vouliez avoir une cible de 40 % de réduction des GES. Parfait.
Donc, ce 2,5 % là supplémentaire, là,
ça représente, là, 2,1 mégatonnes de réduction supplémentaire. Puis, on le
sait, présentement, dans le plan, on inclut, là, de l'achat, là, pour à peu près 10 mégatonnes en crédits carbone.
Ça fait que ça, cet achat de 2,1 là, ça représente à peu près 70 millions en crédits. Est-ce que vous proposez, dans le fond, d'aller à 40 %
puis d'acheter des crédits ou, avec vos mesures, vous croyez qu'on
pourrait réduire de 2,1 mégatonnes en suivant vos recommandations?
M. Savard (Christian) : On pense
qu'on peut se permettre d'être ambitieux, parce qu'on a quand même davantage de temps. On fait l'exercice plus tôt
cette fois-ci et on pense qu'on est capables d'en faire encore plus à
l'interne, il suffit de prendre les mesures
tôt et d'être... effectivement, d'utiliser autant la carotte et le bâton. Donc,
on pense être capables d'en faire un
maximum à l'interne et même dépasser... On pense aussi que l'enjeu... mais
l'enjeu des changements climatiques mérite ce type d'objectif là.
M.
Lemay : Donc, ce que vous
dites, c'est qu'au lieu de faire des actions pour réduire à l'interne, au
Québec, de 15 millions de mégatonnes,
on devrait être en mesure de réduire de 17,1 millions de mégatonnes au Québec puis d'acheter le
reste, le 9,8, à l'extérieur. C'est ce que vous dites?
M. Savard
(Christian) : Il faut faire le maximum à l'interne. C'est pour ça que
nos stratégies sont relativement agressives
et sont relativement... On demande des changements qui sont des changements de
paradigme et qu'on pense qu'on est
capables d'aller plus loin dans nos réductions de gaz à effet de serre, mais ça
peut vouloir dire, à la fin, peut-être acheter davantage de crédits à
l'extérieur, mais on pense que l'enjeu mérite ce type d'objectif là.
M.
Lemay : Parce que, si je regarde d'autres groupes qui sont venus
parler avant vous, ils nous mentionnaient qu'on avait déjà pas mal fait
de mesures puis que, selon eux, ça serait plus par l'achat de crédits qu'on
réussirait à atteindre nos cibles. Ça fait que, quand vous dites : On
devrait être capables, est-ce que — d'abord, je vais pousser l'audace — ça veut dire... est-ce que, dans ce qui est
proposé, de réduire de 15 mégatonnes, dans le fond... Supposons
qu'on reste à 37,5 %, la cible, ce que
vous dites, c'est qu'on ne devrait pas acheter pour 9,8 mégatonnes à
l'extérieur, là. On devrait être capables, nettement, même avec une
cible à 37,5 %, de faire beaucoup mieux puis d'économiser à peu près
327 millions que ça coûte pour acheter des crédits à l'extérieur.
M. Savard (Christian) : Je pense que
tout le monde souhaite ça. J'aime souvent nous comparer. Il y a des gens, juste avant, qui nous comparaient à la
Suède. La Suède a un mixte énergétique moins favorable que nous et qui
ont, malgré tout, des émissions de gaz à effet de serre par personne moins élevées que nous. Donc, avec des mesures
volontaristes, je pense qu'il y a moyen de faire énormément de réduction de gaz
à effet de serre à l'interne, mais, s'il le faut, afin de remplir nos obligations, qui sont
autant morales que juridiques, bien, oui, ça peut vouloir dire acheter
des crédits à l'extérieur.
M. Lemay : O.K. Puis une dernière
question. J'aimerais savoir, votre mémoire, là, ou vos idées, là, parce que vous êtes venus aussi pour le livre vert,
là... est-ce que vous l'avez déjà présenté au MAMOT ou au ministre qui
s'occupe des Affaires municipales puis de
l'Occupation du territoire? Parce qu'il
y a beaucoup de choses là-dedans,
dans le fond, qui le visent directement, son ministère.
M. Savard (Christian) : Tout à fait.
C'est : Oui, on a des contacts fréquents avec le MAMOT. Évidemment, tout ce qu'on peut faire, on leur transmet. Et on
est sur des groupes de travail, notamment sur la révision des orientations gouvernementales
en matière d'aménagement du territoire. Donc, on est autour de la table, on est
consultés, puis je pense qu'on influence positivement.
M.
Lemay : Oui, parce que, dans le fond, quand on regarde le principe de
développement durable, là ce n'est pas juste
dans notre commission que ça se passe, là, tu sais, il faut impliquer tous les
acteurs, et puis, si tout le monde sont persuadés du plan, bien c'est
beaucoup plus facile de mettre en place les mesures. Mais merci beaucoup pour
votre présentation, c'est très enrichissant. Je vais céder la parole à ma
collègue.
M. Savard (Christian) : Merci.
Le Président (M. Reid) :
Merci beaucoup. Alors, maintenant, oui, c'est à votre tour, Mme la députée de
Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme
Massé : Merci, M. le Président. Merci d'avoir essayé que je passe
avant mon collègue, mais ça ne marche pas de même. Bonsoir. Merci d'être
là.
En fait,
j'aimerais vous entendre. La semaine dernière, le premier ministre, en Islande,
disait qu'il ne voyait pas, lui, de
contradiction entre l'étalement urbain et la réduction des gaz à effet de serre
puis, notamment, à cause de sa politique d'électrification. S'il était ici, qu'est-ce que vous aimeriez lui dire?
Parce que vous ne semblez pas du tout dire ça, vous.
• (21 heures) •
M. Savard
(Christian) : Bien, on est favorables à l'électrification des
transports et on propose, dans le mémoire, des mesures pour l'accélérer, parce qu'on considère qu'il va falloir
pousser un peu plus le marché pour que l'électrification des transports aille plus vite, notamment avec une
loi zéro émission, notamment avec le bonus malus. Donc, là-dessus, on
est tout à fait d'accord.
Par contre, effectivement, je dirais que le premier
ministre, dans sa déclaration, a sous-estimé le potentiel immense de la gestion de l'urbanisation afin de
réduire les gaz à effet de serre mais aussi afin de faire du Québec
une société plus durable avec tous
les cobénéfices qui viennent avec. Si c'étaient juste les gaz à effet de serre, peut-être qu'on pourrait se montrer un peu moins
enthousiastes, mais, à cause de tous les bénéfices qui viennent avec, c'est un
incontournable. Il ne peut pas y avoir une société
durable qui fait face à tous les enjeux qui sont devenus très importants sans
aller dans ce sens-là. Et les documents
que je vous ai présentés, qui sont faits par des grosses pointures de la scène
mondiale, ils ne font pas juste
mentionner ça, là. Comme dans le plan d'action sur les changements climatiques actuel du gouvernement du Québec, c'est souvent mis comme... on le met en numéro
un. On dit qu'il n'y a pas d'ordre, mais, quand on met quelque chose en
premier, là, et, quand on mentionne les villes en premier, quand on mentionne
la gestion de l'urbanisation en premier, c'est parce que c'est important
et c'est incontournable.
Les
cobénéfices sont tellement importants en termes de compétitivité économique,
en termes de réduction des coûts en infrastructures qu'il faut le faire
de toute manière, même au-delà des gaz à effet de serre. Donc, si on ne croit
pas à ce bout-là, il faut le faire pour les autres bouts. Donc, je pense que
c'est très important. Puis, dans le PACC, c'est bien identifié.
M. Turgeon (Alexandre) : Et, si vous
me permettez, je dirais que c'est notre défi de la prochaine année de convaincre le premier ministre de la
pertinence et de lui montrer comment on peut changer nos milieux de vie et
avoir des solutions qui sont extrêmement gagnantes non seulement sur la question des changements
climatiques comme Christian vient
de le dire, mais, sur le plan économique, les coûts astronomiques qu'on met en
infrastructures qu'on pourrait économiser en
faisant mieux nos milieux de vie. Sur les questions sociales, le mémoire parle
des cobénéfices en matière de santé, notamment.
Or, ce sont des mesures qui sont gagnantes,
gagnantes, gagnantes, et c'est notre défi de la prochaine année de convaincre
le plus grand nombre de décideurs possible que c'est la voie à suivre.
Mme Massé : On va vous aider.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Alors, Mme Robin, M. Savard, M. Turgeon, merci pour votre contribution à
nos travaux.
Je suspends la séance quelques instants pour
permettre à notre dernier groupe d'invités de prendre place.
(Suspension de la séance à 21 h 2)
(Reprise
à 21 h 5)
Le Président (M.
Reid) : Alors, nous reprenons nos travaux. Je souhaite la
bienvenue à nos invités de l'Association
pétrolière et gazière. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation.
Ensuite, nous aurons une période d'échange avec les membres de la commission.
Je
vous demanderais, dans un premier temps, de vous présenter et présenter la
personne qui vous accompagne, pour les fins de l'enregistrement. La
parole est à vous.
Association pétrolière et gazière du Québec (APGQ)
M. Lefebvre (David
B.) : Merci, M. le Président. Je vous présente M. Mario Lévesque, qui
est sur le comité exécutif de l'Association
pétrolière et gazière du Québec. Je suis David Lefebvre, directeur des affaires
publiques et des communications de
cette même association. M. le
Président, Mmes, MM.
les membres de la commission, M. le
ministre, merci beaucoup de votre invitation.
Tout d'abord, je tiens à préciser que l'APGQ est d'avis que les ressources
énergétiques du Québec peuvent être développées de manière sécuritaire et dans le respect de l'environnement tout en contribuant à la croissance économique et au développement social du Québec. Nous saluons la
volonté du gouvernement de mener une consultation en lien
avec la réduction des gaz à effet de serre. L'APGQ se fait un devoir aujourd'hui
de vous présenter son avis sur le document proposé par le gouvernement. Je
pense que le mémoire vous a été transmis aujourd'hui ou hier.
Bon. Les
hydrocarbures au Québec représentent toujours environ 50 % de l'énergie
utilisée. Le Québec se dit souvent une
mégapuissance en matière d'hydroélectricité, ce qui est vrai, mais il reste que
la moitié de nos besoins sont encore
comblés principalement par le gaz et le pétrole. Et c'est comme ça, parce que
ce sont de bons produits mis en marché par
une industrie fiable et c'est des produits qui ont une utilité incomparable
pour les consommateurs, tant individuels, commerciaux, qu'industriels. Lors de la présentation du plan d'action
sur les hydrocarbures le 31 mai 2014, le ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles et le
ministre du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte aux
changements climatiques avaient annoncé les
grandes lignes des efforts du Québec en matière de lutte aux changements
climatiques.
Dans le document de
consultation, le Québec dit viser une réduction des GES de 37,5 % d'ici
2030, donc 37,5 % d'ici 2030. Entre
2003 et 2012, le Québec a réduit d'environ 11,6 % ses émissions de gaz à
effet de serre. Et donc l'ensemble de
l'effort, de 1990 à 2012, ça a été 11,6 %. Et on remarque que, jusqu'à
2003, il y avait principalement une augmentation,
à tout le moins, une stabilisation d'émissions de GES et que la diminution a
seulement commencé environ en 2003.
Et donc la diminution de 11,6 % représente, grosso modo, 1,3 % par
année. Ceci donne une idée de l'ampleur de la tâche qui est ici proposée. Et on tient à préciser aussi qu'une
partie de l'amélioration du bilan de réduction des gaz à effet de serre au Québec est survenue à la suite de la
fermeture d'usines ou d'installations qui étaient de gros émetteurs. On
peut penser à la raffinerie Shell dans l'est de Montréal ou encore à Norsk
Hydro à Bécancour. Et, de toute évidence, ce n'est pas une manière
économiquement viable à long terme d'atteindre les cibles qui sont proposées.
L'APGQ
considère que le Québec doit aller de l'avant en faveur de la réduction des gaz
à effet de serre et, par contre, qu'il y a peut-être certaines questions
sur la faisabilité de la chose dans le délai qui est prescrit.
Un concept qui a été introduit relativement récemment et dont il faut prendre conscience, c'est le dossier des
fuites de carbone, parce qu'on dit souvent que, bon, on veut avoir un
impact planétaire, on veut avoir un impact global au niveau de la lutte aux changements climatiques par la
diminution des gaz à effet de serre, mais il ne faudrait pas que le
projet devienne simplement une
délocalisation des émissions par une délocalisation de la production ou de
l'activité économique. On peut prendre un exemple très simple qui n'est
pas basé dans la réalité québécoise comme telle, mais une usine d'aluminium qui aurait une certaine quantité
d'émissions de gaz à effet de serre qui, en raison de cibles de réduction
ou quoi que ce soit, déciderait de délocaliser sa production, par exemple, au
Nouveau-Mexique, et nous, on rachèterait l'aluminium
en arrière comme produit fini qu'on utiliserait dans différents processus
industriels. Bien, à ce moment-là, c'est
sûr que le bilan du Québec en matière de réduction des gaz à effet de serre
s'améliorerait, mais l'impact planétaire ou sur les changements climatiques serait absolument neutre étant donné que
l'émission aurait simplement été exportée à l'extérieur, et, en plus, on doit rajouter à ça les coûts d'émissions de
gaz à effet de serre dus au transport, de réimporter le produit et de le
réacheminer au Québec.
Pour
l'Association pétrolière et gazière du Québec, une des parties de la solution à
la réduction des gaz à effet de serre,
c'est la production locale d'hydrocarbures. Dans le monde de la production et
de la distribution du pétrole et du gaz, un adage dit que l'énergie la plus efficace est l'énergie qui est
produite à proximité des marchés. Faire fonctionner les usines, les véhicules et l'ensemble de la production
du Québec demande des ressources énergétiques colossales.
Malheureusement, nous ne produisons ici
aucun de nos hydrocarbures, à l'heure actuelle, que nous consommons, ce qui
fait que le Québec importe, bon an,
mal an... Le document de consultation parle de 10 à 12 milliards de
dollars d'hydrocarbures. Dans certains cas, ça peut aller jusqu'à 14 à
18 milliards.
• (21 h 10) •
Donc,
on importe ces produits-là, et évidemment l'émission de gaz à effet de serre du
pétrole qu'on consomme et du gaz qu'on
consomme au Québec est faite à l'extérieur, donc il n'y a absolument aucune
réduction, là-dessus. Et, pire encore,
on augmente les distances de transport, on augmente les temps de transport, que
ce soit par oléoduc, que ce soit par train
ou que ce soit par bateau,
principalement en raison de notre dépendance aux hydrocarbures étrangers, et
ce, autant pour le pétrole que pour le gaz.
L'APGQ
tient à préciser que le Québec consomme beaucoup d'hydrocarbures — on a parlé d'à
peu près 50 % du bilan énergétique — et, même sous les
scénarios les plus optimistes de conservation et de substitution, continuera de
le faire encore pour de nombreuses années. Par exemple,
la Régie de l'énergie estime que la consommation de gaz au Québec va augmenter
d'environ 2 % en moyenne par année, jusqu'à environ 2035. Et on parlait
récemment de l'approvisionnement en gaz
naturel de certains villages, principalement, des Premières Nations dans le
Nord-du-Québec, qui pourrait
représenter une augmentation d'utilisation de gaz d'environ 6 %. Et c'est
un projet justement relié au Plan Nord aussi qui est important pour le
gouvernement du Québec. Simplement vous préciser, le mémoire le dit au haut de
la page 8, que la tendance générale est
à sous-estimer l'usage des hydrocarbures, que ce soient du pétrole et du gaz,
dans le développement des modèles. On peut
prendre les exemples des chiffres de consommation qui étaient projetés pour
2016, dans des travaux du ministère de
l'Énergie et des Ressources naturelles du Québec, qui ont été publiés en 2005,
qui avaient estimé, pour 2016, des
consommations au Québec à la fois en gaz et en pétrole qui ont été dépassées
ou, à tout le moins, atteintes aux alentours de 2012. Donc, c'est
simplement pour faire attention au fait que les modèles à long terme ne sont
pas toujours valables.
Autre
objectif : en plus d'avoir de la production locale qui permettrait de
réduire le transport des hydrocarbures, bien, aussi de dire qu'il y a beaucoup de processus d'usage de pétrole,
que ce soit de pétrole lourd ou de mazout brut, dans des usines où on pourrait avoir un impact direct
sur la réduction de l'émission de gaz à effet de serre en utilisant
plutôt du gaz naturel. Et d'ailleurs on sait que c'est un projet que le
gouvernement du Québec a à coeur, que ce soit à travers sa Stratégie maritime ou que ce soit à travers le
développement du Plan Nord. Donc, on considère que la conversion
d'usines ou d'autres installations de
production qui utilisent du mazout lourd vers le gaz naturel serait
définitivement un pas dans la bonne
direction et une mesure concrète que le gouvernement pourrait encourager. Bien
sûr — puis ça,
peut-être pour faire le lien avec les
gens de Vivre en ville qui ont fait la présentation précédemment — bien, effectivement, le gouvernement
a aussi toute une série de bâtiments qui utilisent différentes méthodes de
chauffage, et tout ça, ou d'électricité et qui pourraient améliorer leurs
processus.
L'Association
pétrolière et gazière du Québec est en faveur des programmes d'efficacité
énergétique. Nous-mêmes, en tant
qu'industrie, voulons utiliser l'énergie que nous produisons et que nous
consommons de la manière la plus efficace. Et sachez que pour l'industrie toute perte énergétique est également une
perte financière. Donc, il est absolument faux de dire que l'industrie
de l'énergie n'est pas une industrie qui est, sur le plan de l'énergie,
efficace.
Sur le plan de la
compétitivité économique, si je peux me permettre, le capital investi est de
plus en plus mobile, et la délocalisation de
la production est de plus en plus facile. On ne voudrait pas que, par des
cibles qui seraient... pas tellement
trop ambitieuses, mais peut-être trop ambitieuses sur le plan temporel, sur le
délai de temps qui est alloué... menacent des projets ou fassent en
sorte que des usines qui voudraient augmenter leur production, qui voudraient
développer leur compétitivité ou qui voudraient développer des nouveaux
produits soient ainsi pénalisées.
De plus, la plupart
des mesures législatives et réglementaires qui sont présentées sont à la merci,
pour leur pérennité, des décideurs
politiques. Donc, quand on parle d'un horizon de 2030, et même vous avez parlé
d'un horizon de 2050 dans certains...
le gouvernement en parle dans certains documents, ça serait intéressant aussi
de voir que le plan à long terme soit
aussi respecté et que ce ne soit pas quand il y a nécessairement des
changements au niveau de l'appareil administratif qu'il y a
automatiquement des changements de cibles ou des ajustements qui font qu'on
perd un peu de vue, des fois, les objectifs globaux.
Une voix :
...
M. Lefebvre (David
B.) : En terminant? Bien, en terminant, simplement vous remercier
d'avoir écouté l'Association pétrolière et
gazière du Québec. Vous pouvez aussi porter attention à certaines mises en
garde qu'on a faites à partir de la
page 12, que ce soient, par rapport aux entreprises, l'importance du fardeau
administratif, le fait de ne pas charger indûment une nouvelle industrie et de prendre en cause aussi qu'une des
demandes de l'association, c'est la nécessité d'une nouvelle loi sur les
hydrocarbures qui pourrait justement enchâsser différentes choses qui sont à la
fois importantes pour l'industrie et à la fois, aussi, importantes pour le
développement environnemental et social du Québec.
Le
Président (M. Reid) : Exactement 10 minutes, à la seconde près.
Merci. Alors, nous allons passer à la période d'échange. M. le ministre,
à vous la parole.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonsoir, messieurs.
M. Lefebvre, M. Lévesque, merci pour votre présentation ainsi que
votre mémoire.
Bon.
Alors, évidemment, si on parle d'énergies fossiles dans un contexte de
réduction d'émissions de gaz à effet de serre, c'est un peu l'éléphant
dans la pièce. Puis, durant votre présentation, je pensais, j'ai ressorti... je
ne sais si vous êtes familiers avec le
rapport qui a été produit par Citigroup, et qui a été rendu public au mois
d'août 2015, intitulé Energy Darwinism, mais, bon, c'est un
rapport qui a fait le tour de la planète et qui reprend, entre autres,
plusieurs conclusions, là. Il y a une espèce de consensus scientifique que, si
nous voulons atteindre, comme planète, une cible de réduction d'émissions d'ici 2050 qui va nous permettre de limiter le
réchauffement planétaire à 2°, ce qui est considéré, là, comme étant le minimum nécessaire pour
permettre à l'espèce de poursuivre sa lancée, il va falloir laisser les
énergies fossiles dans le sol, il va
falloir... Puis, bon, il y a certaines études qui disent qu'il faut laisser
70 % de tout ce qu'il y a dans
le sol en termes d'énergies fossiles, il va falloir les laisser là. Ici, on
parle que certaines études parlent... puis là je traduis, là, librement, là, mais on parle du tiers des réserves de
pétrole, de la moitié des réserves en gaz naturel, et plus de 80 % des réserves en charbon, entre
2010 et 2050, devront être inutilisés si on veut même avoir une chance
d'atteindre l'objectif de 2050.
Donc, ma question, c'est que... Dans ce
contexte-là, vous préconisez qu'on exploite davantage au Québec et qu'on fasse plus, donc, d'exploration et
d'exploitation d'énergies fossiles ici, au Québec. Comment ça peut être
conciliable avec un
consensus assez éloquent, scientifique qui nous dit qu'il faut plutôt aller
plus vers le développement d'énergies renouvelables,
de réduire notre dépendance aux hydrocarbures? Parce que, si on veut se donner
une chance d'y arriver, il faut de toute façon laisser la grande
majorité des énergies fossiles dans le sol.
M. Lévesque (Mario) : Je vais
répondre à la question. En partant du fait qu'on utilise les énergies fossiles,
on devrait avoir, comme société, l'objectif
de s'en aller vers l'élimination de l'importation de ces énergies-là. Ce
n'est pas parce qu'on ne les produirait pas
au Québec qu'on ne les utiliserait pas. Tant et aussi longtemps qu'on va les
utiliser... mais, en produisant localement, on aurait un effet direct et
immédiat sur les gaz rejetés, à cause du transport.
Je vous donne un exemple. On importe, grosso
modo, pour environ 2,5... excusez, 250 bcf de gaz naturel annuellement. L'importation de ce gaz-là, grosso
modo, ça coûte environ 2 %... pour les stations de compression, on
utilise 2 % de ce gaz-là pour le compresser pour l'envoyer dans le
pipeline. En produisant localement, en utilisant la même quantité de gaz, on aurait une réduction immédiate
de 2 %, ce qui équivaut à environ 5 bcf de gaz annuellement. Si
on transpose ça en nombre de véhicules, en
produisant localement ici, au Québec, ça serait l'équivalent, sans changer
nos habitudes de vie, d'ôter
70 000 véhicules de sur les routes du Québec. Ça fait que ça, c'est
déjà un pas. Quand on importe du pétrole
du Venezuela ou quand on importe du pétrole de l'extérieur, on n'a aucune
mainmise, on ne peut absolument pas savoir comment ça a été produit, on
ne peut pas mettre les standards de production. En le produisant ici,
localement, premièrement, ce serait
bénéfique pour notre économie, mais, pour notre environnement, on peut utiliser
les meilleurs standards.
Puis on
préconise aussi de s'en aller vers la réduction, au maximum, de l'utilisation
des hydrocarbures pour le transport, mais on va quand même avoir besoin
de cette molécule-là autant au niveau pharmaceutique, au niveau des plastiques, de la plasturgie. Dans la plupart des
industries, on utilise cette molécule-là. Pourquoi, en tant que société,
qu'on n'aurait pas le contrôle sur notre propre ressource en diminuant ces
importations-là puis, advenant même, un jour, en développant certaines... On
peut développer dans le pharmaceutique, après ça on peut vendre nos molécules à l'extérieur, mais on devrait tendre vers
s'en aller vers la production locale.
• (21 h 20) •
M.
Lefebvre (David B.) : Si je
peux me permettre, rapidement, effectivement, juste peut-être en complément à ce que M. Lévesque
disait : il n'y a pas de lien entre un État qui produit des hydrocarbures
et nécessairement son bilan d'utilisation ou quoi que ce soit.
Comme par exemple, au Québec, on importe 100 % des hydrocarbures qu'on consomme. La Norvège, qui est un
immense producteur essentiellement de pétrole et un immense exportateur de
pétrole, a un relativement bon bilan environnemental,
que ce soit sur les émissions de gaz à effet de serre, mais aussi sur la pollution
de l'air, sur la pollution de l'eau
sur son territoire. Et on pense effectivement qu'en ce moment le problème, du
fait de ne pas avoir de production locale,
c'est qu'on est tributaires des conditions dans lesquelles sont produits ces
produits-là. Et, en même temps, il faut bien comprendre qu'une tonne de
gaz à effet de serre qui est produite par l'extraction de pétrole qu'on utilise
et que le pétrole viendrait du Dakota du
Nord, par exemple, c'est exactement la même tonne qu'ici, et, à ce moment-là,
sur l'émission des gaz à effet de
serre et de la lutte aux changements climatiques, c'est ce qui s'appelle la
fuite de carbone, il n'y a aucune différence de base sur l'objectif du
2° C.
M. Heurtel : Je comprends votre
réponse, puis ça reprend essentiellement ce que vous avez présenté lors de
votre présentation principale.
Le point et
le but de la question, c'est de faire réagir au fait que le vaste consensus
scientifique, c'est qu'on est au début de la fin de l'ère pétrolière.
Personne ne dit que c'est demain, personne ne dit que c'est dans 10 ans,
tout le monde est d'accord pour dire qu'on a
plusieurs décennies devant nous à avoir à composer avec les énergies fossiles
mais que, si on veut... et ce n'est pas juste le Québec, là, si la planète veut
réussir à atteindre ce qui scientifiquement est un consensus, c'est-à-dire un taux de réchauffement inférieur à 2° d'ici
2050, il ne faut pas exploiter plus de pétrole, il ne faut pas exploiter plus de gaz, il ne faut pas
exploiter plus de charbon. Au contraire, ce qu'on connaît, il faut le laisser
dans le sol. Alors, j'ai du mal à
réconcilier cette idée-là, parce que, vous, ce que vous nous proposez, c'est
dire : Non, au contraire, on doit
aller plus loin dans l'exploitation. Je comprends l'argument, puis on le fait,
d'ailleurs. On dit dans certains cas... et, dans certains cas
d'exploitation d'hydrocarbures au Québec, l'argument qu'on utilise, dire :
Bien, c'est bien mieux d'exploiter ce qu'on
a ici plutôt que de l'importer, comme vous dites, de l'international, il y a un
argument de réduction de gaz à effet de serre.
Là où j'ai du
mal à réconcilier, c'est que vous semblez nous proposer de dire : Bien, il
faut aller encore plus fort puis en extraire encore plus, puis vraiment,
comme, de devenir presque, justement, un grand producteur de pétrole, ce qui... je ne suis pas sûr que c'est
prouvé qu'on a toutes les réserves, là, de un, alors que la tendance, c'est
plutôt dire : Bien non, au contraire,
oui, on comprend qu'on a des besoins maintenant, mais il faut aller vers une
réduction puis même s'empêcher d'exploiter du pétrole.
M. Lefebvre (David B.) : Si je peux
me permettre. Par exemple, produire du gaz naturel au Québec, même si c'était seulement — je dis des chiffres complètement au hasard,
là — 5 %
ou 6 % de notre consommation, plutôt que de faire venir ce 5 % de consommation là ailleurs, serait une
mesure d'efficacité énergétique d'autant plus utile qu'une conversion de bâtiments ou d'autre chose ou quoi
que ce soit, ça aurait un impact aussi sur le développement des gaz à effet de serre. Et, nous, à l'APGQ, ce qu'on dit,
c'est que la production locale permettrait, étant donné qu'on réduirait
les distances de transport, qu'on pourrait
avoir des mesures d'efficacité énergétique au niveau de la production qui
seraient beaucoup mieux ici, au Québec, que ce qui peut se faire ailleurs. Ce
qu'on dit, c'est que, pour la même utilisation du même nombre de pieds cubes de gaz, on aurait à
moins en produire avec moins d'émissions qu'en ce moment étant donné qu'on est obligés d'avoir ces immenses distances
là de transport pour 100 % de la consommation qui est faite au
Québec.
Le Président (M. Reid) : M.
le député de Mégantic.
M.
Bolduc : Merci, M. le Président. Bonsoir, messieurs. Il me fait
plaisir de vous recevoir et d'écouter un peu votre point de vue, qui, je
dirais, est un peu différent de ce qu'on a entendu dans le reste de la journée.
Une des
problématiques que je vois dans le développement de votre stratégie... je
comprends très bien l'économie et la
réduction de la charge de génération de gaz, mais une des problématiques que moi, je vois, c'est notre
capacité de transformation. Donc, actuellement, on a deux raffineries de pétrole au Québec, comme vous le savez très bien,
on importe beaucoup de produits que je qualifierais de raffinés.
Donc, il faudrait redévelopper toute une infrastructure en allant
dans ça, puis... peut-être
que oui, peut-être que non, là, mais je voudrais vous entendre sur
quels types d'investissement on devrait faire et est-ce que les technologies qu'on mettrait en place seraient beaucoup
plus efficaces que les technologies qu'on utilise actuellement ailleurs,
etc. Je voudrais vous entendre là-dessus.
M. Lévesque (Mario) : Au niveau des
technologies qui sont actuelles, on préconise beaucoup le transfert de l'utilisation
du diesel vers le gaz naturel. Pourquoi? Parce que la technologie est là et
efficace. Elle est facile à faire, puis on a
déjà les infrastructures de gaz naturel avec Gaz Métro, avec le gaz compressé
et avec le gaz liquide aussi. Le gaz compressé
est très efficace en milieu urbain pour remplacer le diesel dans les autobus,
dans les camions de livraison, dans les
camions de transport. Le gaz liquéfié est très efficace sur les longues
distances. Cette technologie-là est ici, immédiate, et on peut l'utiliser, elle est très efficace. Ça fait
qu'en encourageant les gens on n'aurait pas à investir dans des
infrastructures de raffinage. On est déjà
équipés pour pouvoir faire ça. Bien entendu, là, ça prendrait un réseau de
distribution peut-être un
petit peu plus élaboré pour, quand on va... Je viens de la Gaspésie, les
camions de chez Robert Transport ne peuvent pas nécessairement se rendre
là-bas, parce qu'on n'a pas
l'infrastructure, mais Rimouski pourrait être un endroit où on va en avoir. Puis, à regarder comment ça se développe
présentement avec des projets comme Bourque, avec des projets comme Haldimand, il va y avoir du gaz naturel qui va
être produit en Gaspésie, parce qu'on le voit avec qu'est-ce qui s'en
vient. Ça fait que ça devrait être une avenue vers où on s'en va. Tout le
transport maritime devrait s'en aller vers le gaz naturel aussi :
immédiat, on a de l'efficacité.
Puis, l'électrification des transports, on est
100 % en faveur de ça aussi. Au point de vue de l'utilisation de la molécule du pétrole, encore une fois, pour la
brûler dans des véhicules, c'est de plus en plus ridicule, puis l'industrie,
on est tout à fait conscients de ça, mais
cette molécule-là devra être utilisée pour les plastiques, on va encore en
avoir de besoin. Mais est-ce qu'on
doit continuer à brûler pour faire du transport du pétrole? Non. On doit
utiliser, dans les hydrocarbures, les
formes les moins polluantes pour avoir l'effet immédiat puis on doit s'en aller
de plus en plus vers des choses qui vont être propres, soit l'hydrogène soit l'électricité. Il y a différentes
méthodes de le faire. Puis je vois très bien, à court terme, changer les
parcs d'autobus, modifier les moteurs des autobus, dans les villes, pour
pouvoir s'en aller vers le gaz naturel puis
un gaz naturel qui serait produit au Québec, d'où on aurait, encore une fois,
une efficacité accrue à cause qu'on le produirait puis on n'aurait pas
le transport pour le faire.
M. Bolduc : Donc, vous nous dites
que...
Le Président (M. Reid) : Il
reste une toute petite minute, M. le député de Mégantic.
M. Bolduc : Combien?
Le Président (M. Reid) : Une
toute petite minute et... même pas.
M.
Bolduc : O.K. Bon. Donc, fondamentalement, vous nous dites que, si on
s'en va vers une orientation qui serait beaucoup plus gaz naturel local,
etc., les infrastructures nécessaires pour faire la distribution ne
représentent pas un changement significatif dans la direction dans laquelle on
est actuellement, si j'ai bien compris.
Maintenant,
est-ce que vous pourriez nous parler un petit peu de la croissance des parcs
automobiles mondiaux? Est-ce que la croissance du parc automobile s'en
va dans la mauvaise direction vs nos objectifs?
Le Président (M. Reid) : ...
M. Lefebvre (David B.) : En fait,
rapidement, si je peux me permettre. Il y a une étude du Pr Pierre-Olivier
Pineau, de HEC Montréal, qui mentionnait que, pendant que la population du
Québec, environ depuis 1990, a crû de 14 %, le parc automobile,
lui, a augmenté de 41 %. Donc là, c'est clair qu'il y a une adéquation
entre l'augmentation de la population et plus de voitures. Il parlait aussi de
véhicules avec une plus grosse cylindrée plus énergivores. Il y a une partie de ça qui est due à l'étalement urbain,
mais il y a une partie aussi qui est due aux comportements du
consommateur. Et on a longtemps pensé que
l'augmentation des prix ou que des pénalités sur les prix de l'essence auraient
une différence. Bien, quand le prix
du pétrole à la pompe était à 1,50 $, c'est l'année où il y a eu le plus
d'achats de VUS et de véhicules de grosse
cylindrée au Québec. Et aujourd'hui j'ai entendu un animateur de radio dire que
le prix de l'essence à la pompe était à 0,985 $ à Québec. Donc,
est-ce qu'on peut penser qu'on va augmenter le prix à la pompe de 0,50 $
puis, même là, il n'y aurait pas vraiment un immense changement?
Donc, nous, ce qu'on
invite à faire, c'est, oui, des changements au niveau de véhicules, transport,
mais aussi de réfléchir à des questions plus
macros, long terme, donc utilisation de meilleurs hydrocarbures dans certains
procédés et la production locale, qui pourrait aussi avoir un impact. Là, on ne
parle pas juste de 1,2 %, 1,3 %.
• (21 h 30) •
Le
Président (M. Reid) : Merci. Je dois vous interrompre. Nous
passons maintenant à l'opposition officielle. M. le député de
Terrebonne.
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Merci,
M. Lefebvre, merci, M. Lévesque, de votre présentation.
Si je comprends bien la position que vous lancez
au gouvernement, c'est que vous dites que vous êtes préoccupés par les émissions de gaz à effet de serre. Par contre, vous
semblez ne pas être très chauds à l'idée de vouloir se fixer une cible de 37,5 % dite audacieuse.
Vous avez beaucoup de craintes au niveau du développement économique. Vous nous
dites que des entreprises pourraient quitter le Québec,
qu'il peut y avoir du fardeau administratif supplémentaire, que le scénario qui est proposé à l'heure actuelle est quelque peu alarmiste, parce
que, selon ce que vous nous dites
dans votre mémoire, on pourrait
utiliser des données plus réalistes, et donc l'objectif temporel pourrait
être plus éloigné. Vous êtes donc surtout préoccupés au niveau de la
question économique.
J'essaie de voir un peu la proposition réaliste,
là, que vous voulez nous faire pour essayer d'atteindre une amélioration au niveau du Québec. Dans
le fond, la proposition que vous nous avez émise dans votre présentation, c'est de dire
qu'en créant, dans le fond, de l'exploitation locale on diminuerait les gaz à
effet de serre de par le transport d'exportation.
Mais là j'avais de la difficulté un
petit peu à vous suivre, et, comme
vous êtes les experts en la matière, vous allez peut-être pouvoir
m'éclairer un peu. Quand vous nous parlez d'un scénario d'exploiter du pétrole
au Québec localement pour sauver des gaz à effet de serre, c'est dans une optique où le pétrole ne serait utilisé qu'au Québec?
Ce pétrole-là ne pourrait pas être exporté à
l'étranger, ne serait pas soumis à une loi du marché ou à d'autres
exportations?
Et qu'est-ce qui nous dit que, dans votre scénario
également, parce que le Québec décide d'exploiter du pétrole, les autres
pays qui en exploitent actuellement ne feraient pas de l'exportation en Chine
ou ailleurs à travers le monde qui dégagerait autant de gaz à effet de serre
dans le transport pétrolier ou dans le transport de gaz? Je voulais avoir des
éclaircissements un peu sur votre exemple.
M. Lefebvre (David B.) : M. le
député, je vais essayer de répondre à votre présentation en peut-être trois
points principaux.
Premièrement, au niveau des modèles de prix de
choses, bien, on parle, dans le document, pour 2030, d'un prix du baril de pétrole à 148 $ US.
Donc, ça, c'est le triple d'en ce moment. Donc, en fait, techniquement — puis je vais utiliser un argument un
peu fallacieux — en
ce moment, on pourrait juste prendre l'argent, le placer dans du pétrole, le garder puis, en 2030, faire un «cash down»
complet pour justifier les émissions du Québec pour arriver à atteindre
nos objectifs, ce qui n'a, de toute
évidence, pas de sens. Donc, il faut
faire attention à ces modèles-là. Il
y a beaucoup de gens de l'industrie qui pensent qu'ils ont une boule de cristal au niveau des prix, et
c'est rarement vrai. Donc, on invite simplement à faire un peu attention
à ça.
On ne dit pas
qu'on est contre les cibles et contre les objectifs, absolument
pas, mais par contre qu'en tant que citoyens corporatifs responsables ou en tant que gouvernement il faut aussi voir, au niveau du délai de temps, qu'est-ce qui
est possible. Et il faut bien comprendre aussi que plus on avance dans la
réduction des gaz à effet de serre et l'atteinte de cibles, plus ça coûte cher. Au début, c'est quand
même relativement rapide. Mais nous, on pense qu'au Québec, malgré qu'on
soit un gros producteur d'hydroélectricité qui est très propre, il y a une
possibilité, par la production locale et aussi par la conversion de certaines
installations davantage au gaz naturel, de faire un pas, sur le plan
industriel, qui serait intéressant.
M.
Traversy : Je comprends donc que vous êtes plus nuancés par
rapport à l'objectif qui est proposé dans le cahier de consultation qui vous a été remis, vous
dites : On est d'accord pour essayer de diminuer... sauf que, bon, la
façon dont les cibles sont montées devrait tenir compte, donc,
d'alternatives, comme le gaz naturel par exemple.
M. Lefebvre (David B.) : Peut-être,
si je peux me permettre un dernier point aussi. Vous avez parlé de si d'autres
pays font des émissions ou produisent, et quoi que ce soit. C'est bien
mentionné dans le mémoire qu'on encourage le
Québec à continuer de travailler et à développer
les partenariats, qu'ils soient nationaux ou internationaux, justement, parce que, quand on a une émission de
gaz à effet de serre, on peut dire qu'elle est québécoise, on peut dire qu'elle est ontarienne, on peut dire qu'elle est
nigériane ou russe, mais, à la base, ça reste la même molécule qui se ramasse dans l'atmosphère, et le Québec pourrait
avoir un excellent bilan de gaz à effet de serre en exportant ses
émissions, en faisant produire — que ce soient des produits pétroliers,
gaziers ou autres produits industriels ou manufacturiers — ailleurs.
M. Traversy : Juste pour bien
comprendre. L'Association pétrolière et gazière, est-ce que vous représentez
toutes les compagnies corporatives ou juste les plus grosses, les plus petites?
M. Lefebvre (David B.) : Les entreprises
membres, ce sont des entreprises qui ont des intérêts au Québec, donc, communément appelés des claims, des entreprises
qui ont des claims d'exploration et/ou de production au Québec, qu'elles soient québécoises, canadiennes
de l'Ouest canadien. Et on a aussi à
peu près six ou sept entreprises de
services, que ce soient bureaux d'avocats, groupes d'ingénieurs, quoi que ce
soit. La liste complète est disponible sur le site Web de l'association.
M. Traversy :
Donc, c'est des entreprises de toutes tailles, là, il n'y a pas de...
M.
Lefebvre (David B.) : C'est
ça. Essentiellement, des entreprises qui sont intéressées par l'exploration et la
production d'hydrocarbures.
M. Traversy : Puis donc vous
nous mettez en garde également contre un système... pas hypocrite, parce qu'hypocrite, c'est un peut trop dur, mais vous
nous dites que l'achat de carbone pour se donner... Vous avez dit tantôt
qu'on pouvait mettre de côté l'argent pour réussir, pendant quelques années, à
cumuler un fond qui nous permettrait d'acheter un peu, là, notre pardon à la
fin du parcours puis qui, évidemment, là, ne réglerait pas l'émission des gaz à
effet de serre.
Vous trouvez
que ce genre de système n'est pas tout à fait au point. J'aimerais juste que
vous éclaircissiez un peu, là, cette mention que vous nous avez faite.
Là, je dis «des bons du pardon», mais on s'entend que, là, c'est le marché du
carbone.
M.
Lefebvre (David B.) : O.K. Première chose, ce n'est pas la spécialité
de l'association, là, de traiter de cette question-là, mais il est déjà évoqué à la fois dans le document et dans
certaines positions gouvernementales — mais aussi je pense qu'il y a des gens de l'opposition qui en ont parlé aussi — qu'une partie de l'atteinte de l'objectif
pourrait être faite par un achat de crédits. Ça, je pense que ça a déjà
été présenté.
L'autre chose
que je vous mentionnais, c'est simplement pour faire une illustration qu'il
faut faire attention avec l'extrapolation de ce que les prix seront en
2030, ou en 2040, ou en 2050. C'est vraiment pour dire que, si le prix du baril de pétrole était le triple de ce qu'il est
maintenant, bien, je veux dire, ça serait un autre calcul comme tel. C'est
juste de faire attention à comment les modèles sont construits. Je veux dire,
encore il y a quatre ans, au Canada, il y a des économistes très sérieux d'institutions réputées qui disaient que le
prix du baril de pétrole en 2020 serait de 200 $ US, et, en ce moment, je n'ai pas lu ce type de prédiction
là récemment. Donc, c'est simplement de faire une petite mise en garde.
M.
Traversy : Puis finalement, bien, je suis content de voir que,
dans votre cahier, vous dites que l'acceptabilité sociale est une responsabilité collective et
qu'elle fait partie, dans le fond, des équations pour vos projets. Donc, je
suis content de voir que vous la prenez en considération.
Je vous remercie, M. le Président, là, pour ce
temps de parole que vous m'avez accordé.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Alors, nous passons maintenant au
deuxième groupe d'opposition. M. le député de Masson.
M. Lemay : Merci, M. le Président.
Merci, messieurs, d'être avec nous ce soir. Vous savez, ce que vous proposez, c'est quand même audacieux puis ce n'est
pas quelque chose qu'on a entendu auparavant. Si je regarde d'autres groupes, là, comme Équiterre ou Greenpeace, ils
nous ont dit carrément, là, tu sais : Il faut... puis même le ministre
tantôt l'a dit, c'est le début de la fin de l'ère du pétrole.
Donc, moi, je
salue votre audace, là, puis j'aimerais avoir un peu plus d'informations, parce
que, quand vous dites que, si on
favorise la production locale de nos hydrocarbures, on va venir lutter aux
changements climatiques... Puis là, dans
le fond, ma question que j'ai aujourd'hui après avoir pris connaissance de
votre mémoire, c'est, je me dis : Bon, si on considère que l'électrification des transports,
là, pour les... chaque unité coûte à peu près 500 $, tu sais, si on regarde,
dans les pâtes à papier, l'achat d'unités,
tu sais, c'est à peu près 300 $,
les mesures pour réduire les gaz à
effet de serre... Bon, le système...
le SPEDE, là, dans le fond, on met dans notre guide qu'on le projette qu'il
va être à peu près à 33,67 $ l'unité. Ça veut-u dire, dans le fond, là, que, si on
produit notre propre pétrole puis notre propre gaz en sol québécois,
est-ce qu'on aurait assez d'argent,
si on veut, de retombées économiques pour s'acheter entièrement nos crédits
carbone en Californie pour compenser, dans le fond, l'émission qu'on va
faire quand on va faire l'extraction? Puis est-ce qu'on serait encore
rentables?
M. Lefebvre (David B.) : Ça, bien honnêtement,
puis je vais le dire devant vous, le calcul n'a pas été fait par notre association ou quoi que ce soit, mais c'est quelque chose qui
pourrait être intéressant à mesurer. On ne dit pas que c'est une des
solutions que le Québec devrait retenir, mais c'est un calcul qui pourrait être
fait et qui pourrait être amené au niveau de... Malheureusement, je n'ai pas la
donnée avec moi.
M.
Lemay : Si vous aviez cette
donnée-là puis que ça serait rentable, on pourrait dire : Ah! bien, dans
ce cas-là, nos 37,5 % de
réduction de GES, on va 100 % les acheter à l'extérieur, en Californie, on
va extraire notre propre pétrole local, on va réduire nos émissions de gaz
à effet de serre, puis toutes les
autres mesures qu'on va faire vont être du bonus. Mais là vous n'avez
pas le chiffre, ça fait que c'est difficile.
Extraire un
baril de pétrole ou de gaz de
schiste; est-ce que vous savez
combien de CO2 ça peut émettre, l'extraction d'un baril?
Est-ce que vous avez ça?
• (21 h 40) •
M. Lévesque
(Mario) : Quand on arrive au niveau du travail, ça va tellement dépendre des pratiques de l'entreprise qui va le faire
que, si tu fais de l'extraction en Asie, si tu fais...
M. Lemay : ...
M.
Lévesque (Mario) : Non, mais, c'est ça, mais, le chiffre exact, je ne
l'ai pas, parce qu'on ne fait pas d'extraction au Québec, on n'a pas de
production présentement.
M. Lemay :
O.K. Puis, si on se fie à ce qu'on fait en Alberta, est-ce que vous avec cette
donnée-là?
M. Lévesque (Mario) : Bien, même à ça, en Alberta, ils ne sont pas optimalisés comme qu'on
pourrait l'être.
M.
Lemay : O.K. Puis, si d'abord on se fie au gisement Utica, en
Pennsylvanie, là — on est
peut-être plus proches de ce gisement-là — vous n'avez pas cette
donnée-là non plus?
M. Lévesque (Mario) : Bien, en Pennsylvanie, si vous allez, les différentes compagnies vont
avoir des différents modèles de
production aussi. Ce qui est important au Québec, quand on va arriver à la
production, puis si on arrive à une production, c'est d'avoir des modèles
qui vont permettre de maintenir au minimum ces émissions-là.
M.
Lemay : O.K. Parce que moi, j'ai fait un calcul vite, vite, là,
pendant que vous parliez avec les autres, là, puis j'arrivais qu'à
chaque fois que tu produis un baril mon calcul disait que ça donne à peu près
une demi-tonne de GES que tu émets. Ça fait
que, là, dans le fond, à chaque deux barils, dans le fond, tu émets une tonne
de GES, tu sais? Ça fait que, là,
dans le fond, je me disais : Bon, bien là, c'est quoi, le prix du baril,
puis c'est quoi, le coût de l'extraction pour justifier que je vais acheter mes crédits, puis, dans le fond, je vais
être à nul, tu sais, je vais être à effet nul? Le carbone que j'émets,
je me le compense par des mesures qui sont faites ailleurs.
Ça fait que, là, moi,
j'essayais de visualiser un peu si c'était rentable, votre proposition.
Peut-être, si vous avez cette
information-là, je serais intéressé de l'obtenir. Je pourrais vous laisser ma
carte ou vous pouvez communiquer à la commission, il n'y a pas de
problème, là.
M.
Lefebvre (David B.) : Ça pourrait être intéressant, c'est quelque
chose qu'on pourrait développer. Puis, de toute façon, dites-vous qu'à procédé égal, dans une situation égale, en
sauvant le transport puis en sauvant le transport de la ressource, là il
va y avoir une efficacité au plan des émissions planétaires.
C'est sûr qu'on parle
ici des cibles du Québec, mais le Québec aurait beau émettre deux fois moins de
gaz à effet de serre, si ça fait en sorte
qu'il y en a six fois plus qui est émis par une autre juridiction, est-ce qu'on
est gagnants en bout de ligne pour l'objectif du 2°?
M.
Lemay : Puis, tu sais, rapidement, là, parce que je veux laisser le
temps à ma collègue, là... mais on n'a même pas parlé, en plus, de puits de carbone, de pouvoir après ça remettre
nos GES dans le sol, puis de... Parce que, si on décide qu'on fait de l'exploitation, bien on est aussi,
hein, capables de les retourner dans le sol. Donc, tu sais, il y a
plusieurs...
M. Lefebvre (David
B.) : Avec le captage de carbone, par différentes techniques.
M.
Lemay : ...il y a plusieurs mesures qui peuvent être faites qui
feraient qu'on réduit notre empreinte. Mais, bref, ça serait intéressant
d'avoir plus de détails.
M. Lefebvre (David
B.) : Ça nous fera plaisir.
M. Lemay :
Merci. Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Reid) : Merci. Nous passons maintenant à la dernière
intervention. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Massé :
Merci, M. le Président. J'étais contente d'entendre le ministre, qui soulevait
le consensus international sur la nécessité d'agir dès maintenant pour assurer
que nos petits-enfants vont avoir quelque chose à manger, quelque chose à vivre puis qu'ils ne vivront pas toutes les
intempéries qu'on commence à vivre de plus en plus.
J'entends
vos mots, j'entends ce que vous dites, que l'énergie est plus efficace, qu'il y
a moins de GES, mais, en même temps,
vous me permettrez, quand j'entends, d'une part, les scientifiques et, d'une
autre part, l'entreprise... oui, mais vous
êtes des représentants de ce type d'entreprises là qui n'hésitent pas à nulle
part à travers la planète à poursuivre les États parce qu'on met des
lois environnementales puis on met des cadres clairs. Alors, ce qui m'inquiète
dans votre présentation, et je pense
notamment à Lone Pine, là, qui poursuit pour la question de la fracturation de
l'estuaire... Je n'ai pas vraiment
une question, j'ai un sérieux malaise, parce que, dans les faits, ce que les scientifiques
nous disent, c'est qu'il ne faut pas que ça sorte du sol. Alors, je ne
vois pas comment vous arrivez... L'objectif que nous avons ici, c'est de dire
comment on va le réduire de façon durable, et, si on met une empreinte majeure
en l'exploitant... en l'exploitant, qui n'arrivera pas demain matin, entre vous
et moi, là, ça va arriver en cours de route, hein, le projet que vous avez
nommé, ça fait longtemps qu'ils sont sur la ligne de course...
Alors,
je veux vous transférer ce malaise-là, parce que c'est sûr que c'est difficile
pour des citoyens de voir qu'en même
temps que vous nous dites : C'est ça, le chemin, bien, de l'autre bord,
quand on ne le prend pas, vous poursuivez nos États. Je suis mal à
l'aise.
Le Président (M. Reid) : Il
vous reste une minute pour réagir.
M.
Lefebvre (David B.) : O.K. Rapidement, je veux dire premièrement qu'à
l'APGQ, nous, on a une approche collaborative et non une approche de
confrontation — c'est
une des raisons pour lesquelles on est ici ce soir — et on encourage tous
nos membres à avoir ce même type de comportement.
Maintenant,
c'est sûr qu'on parle en tant qu'association. Nous, on n'est pas responsables
des comportements de chacun des
membres comme tels dans différents dossiers. Et, nous, ce qu'on dit, par
exemple : Que ce soit le pétrole ou le gaz, tant qu'on en utilise, tant qu'il y a une utilisation qui est
faite, que ce soit au Québec ou ailleurs, et qu'on en sorte du sol, il pourrait être intéressant, sur le plan du
bilan des gaz à effet de serre et de la lutte aux changements climatiques,
d'en sortir davantage du sol québécois plutôt que de le faire sortir ailleurs,
et de l'importer, et de, justement, payer les gaz à effet de serre sur le plan
du transport.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Alors, M. Lefebvre, M. Lévesque,
merci pour votre contribution à nos travaux.
La commission
ajourne ses travaux au mercredi 21 octobre — demain — 2015, donc, après les affaires
courantes.
(Fin de la séance à 21 h 46)