(Quinze heures une minute)
Le
Président (M. Reid) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
la Commission des transports et de
l'environnement ouverte. Je demande à
toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie
de leurs appareils électroniques, téléphones en particulier.
La commission
est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre de
consultations particulières sur le document de consultation intitulé Cible
de réduction d'émissions de gaz à effet de serre du Québec pour 2030.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire : Non, M. le
Président, il n'y a aucun remplacement.
Auditions (suite)
Le
Président (M. Reid) : Alors, voici l'ordre du jour pour cet
après-midi. Nous entendrons les groupes suivants : l'Union des
producteurs agricoles, consortium Ouranos, la Fondation David-Suzuki Québec et
Alliance Transit.
Alors, je souhaite la bienvenue à nos premiers
invités, les représentants de l'Union des producteurs agricoles. Vous
connaissez la routine, vous avez 10 minutes pour faire la présentation. Par la
suite, nous aurons une période d'échange. Je
vous demande de vous présenter et présenter la personne qui vous accompagne
pour les fins de l'enregistrement. À vous la parole.
Union des producteurs agricoles du Québec (UPA)
M. Caron (Martin) : Merci bien! Merci bien, M. le Président, et merci
bien à tout le monde. Tout d'abord, je me présente, Martin Caron. Je suis deuxième vice-président de l'UPA
provinciale. Je m'occupe, entre autres, des dossiers au niveau de l'environnement et des transports ainsi
que d'autres dossiers, mais, avant toute chose, je suis producteur
laitier et céréalier avec du boisé à Louiseville, en Mauricie. Et je vais
laisser à Daniel le soin de se présenter.
M. Bernier
(Daniel) : Oui. Donc, Daniel Bernier, je suis agronome à la
Direction recherche et politiques agricoles à l'UPA.
M. Caron
(Martin) : Ça fait que, sans
plus tarder, M. le Président, nous allons commencer. L'union souhaite remercier la Commission des transports et de
l'environnement de l'opportunité de présenter le point de vue des
agriculteurs et agricultrices du Québec en ce qui concerne la cible projetée de
réduction des émissions québécoises de gaz à effet de serre pour 2030.
Les
changements climatiques représentent une menace majeure pour l'équilibre
des écosystèmes en plus de constituer
des enjeux des plus préoccupants à
l'échelle planétaire. À partir de ces constats, il faut conclure à l'impérative
nécessité de réviser nos façons de procéder et tendre vers une économie plus
sobre en carbone.
Le Québec a choisi d'assumer un certain
leadership en s'imposant une cible de réduction parmi les plus ambitieuses à l'échelle internationale. C'est très
certainement louable, mais il faut mesurer les impacts du plan
économique. Une cible trop ambitieuse
pourrait ne pas avoir les effets escomptés en favorisant la délocalisation de
certaines activités vers des pays aux normes plus permissives.
Il est difficile de se prononcer au sujet de la pertinence de
cette cible, elle nous a été présentée comme le résultat d'un juste
compromis. Nous présumons que c'est effectivement le cas tout en gardant à
l'esprit que les prévisions économiques sur un horizon aussi lointain
comportent une large part d'incertitude. Nous vous présentons donc des éléments de risque pour le secteur agricole
associés à une cible trop ambitieuse ou inadéquatement appuyée par des
mesures visant à minimiser les impacts économiques.
Nous proposons également des mesures destinées à favoriser la participation
du secteur
agricole au marché de carbone et
ainsi qu'à des politiques et des programmes qui contribueraient à réduire les gaz à
effet de serre d'origine agricole.
Selon
l'inventaire québécois des gaz
à effet de serre, le secteur agricole
a produit 6 440 000 de tonnes équivalent de CO2 en
2012, soit 8,3 % des émissions québécoises. La gestion des sols agricoles
et la fermentation entérique sont responsables
de la plus grande part des émissions, soit respectivement 46,2 % et
35,8 % de la production totale du secteur. La gestion du fumier à diffuser,
quant à elle, représente 18 % des émissions.
Ces émissions
sont le résultat de phénomènes biologiques sur lesquels nous avons relativement
peu de contrôle. Une bonne partie du carbone émis est aussi réabsorbée
par la culture, qui est en croissance. La part de ces émissions agricoles devrait donc être relativisée en tenant
compte des cibles biotiques du carbone. Quoi qu'il en soit, il est
néanmoins possible, dans certains cas,
d'atténuer les gaz à effet de serre au niveau de l'origine agricole, et on va
vous amener les principales
opportunités de réduction qu'on pourrait faire : dans un premier temps, la captation et la destruction des biogaz
qui émanent des lieux
de stockage des fumiers; deuxième point, la réduction du méthane produit par
les ruminants par une modification du
régime alimentaire et un ajout de certains additifs; la réduction du protoxyde
d'azote provenant des champs cultivés par une optimisation de la
fertilisation azotée — qu'est-ce
qu'on veut dire par là, c'est une meilleure utilisation de l'azote; la séquestration du carbone dans les
sols agricoles par l'adoption de pratiques culturales favorisant
l'augmentation de la matière organique du sol; et, en dernier lieu, le
boisement de terres agricoles marginales ne représentant plus d'intérêt pour la
pratique de l'agriculture.
Chacune de
ces interventions présente un certain potentiel de réduction des gaz à effet de serre. En vertu du marché du carbone, des projets de
réduction de cette nature sont théoriquement admissibles à des crédits
compensatoires. La réalisation d'un projet
de crédits compensatoires doit cependant être encadrée par un protocole
reconnu. Il n'en existe toutefois qu'un seul en agriculture, qui vise en le
recouvrement d'une fosse à lisier et à la destruction du méthane qui, autrement, s'en échappe. Quelques dizaines de
projets de ce type verront bientôt le jour au Québec après de longs
délais pour l'obtention de l'autorisation par rapport au ministère.
Il reste maintenant à voir s'il serait rentable
d'obtenir les crédits compensatoires associés à de tels projets de réduction. Pour obtenir ces crédits, il faut
réaliser un rapport qui doit notamment démontrer la quantité de gaz à effet de serre réduit. Cela présuppose l'instrumentation du site
pour mesurer la manière fiable de la réduction réalisée. Le rapport du
projet doit faire l'objet d'une vérification
par une tierce partie indépendante et accréditée. L'ensemble du processus
engendre des coûts qui sont, dans le contexte d'une entreprise agricole la
plupart du temps, supérieurs au revenu espéré.
Selon les
règles en vigueur, le système des crédits compensatoires s'avère inadapté au
contexte agricole. Il y aurait lieu de revoir ces règles, par exemple,
en prévoyant des dispositions permettant l'agrégation des projets agricoles de réduction des gaz à effet de serre et la
vérification d'un échantillon représentatif des projets agrégés. Ceci
contribuerait à réduire les coûts de transactions sur le marché, qui,
autrement, sont trop élevés.
Malgré les
contraintes actuelles, la participation du secteur agricole au marché du
carbone par une amélioration de l'acceptabilité
aux crédits compensatoires demeure sans doute la meilleure façon de faire
évoluer les pratiques. La voie réglementaire,
c'est-à-dire l'imposition de mesures visant la réduction des gaz à effet de serre, serait vraisemblablement ingérable.
En outre, le
coût marginal de réduction est très élevé par le secteur agricole. Une
obligation de réduire les gaz à effet de
serre agricoles serait donc très
coûteuse pour l'État et pour les agriculteurs. Aussi bien, dans ce contexte,
favoriser la participation volontaire
du secteur agricole au marché du carbone en facilitant la réalisation de
projets admissibles à des crédits
compensatoires. Ces crédits pourraient devenir un incitatif à l'innovation et à
l'adaptation de pratiques agricoles plus sobres en gaz à effet de serre tout en générant des réductions de gaz à effet de
serre utiles aux entreprises québécoises visées par le système de
plafonnement et d'échange des droits d'émission.
Les carburants fossiles. Une forte proportion
des besoins énergétiques du secteur agricole est comblée par les énergies
fossiles. Selon les données de Statistique Canada, les agriculteurs québécois
en ont consommé pour près de 394 millions en 2014. Ce montant inclut les combustibles pour le chauffage et les
carburants pour les machines. C'est toutefois sans compter tout le
carburant nécessaire au transport par camion des intrants et des produits
agricoles qui parcourent chaque année plusieurs centaines de millions de
kilomètres. C'est donc dire que les agriculteurs subissent, depuis le 1er janvier dernier, la hausse du coût
des carburants attribuable au marché de carbone et que cela se répercute
sur leurs coûts de production.
• (15 h 10) •
Il faut
bien comprendre que, de ce côté-là, bien que la hausse des coûts unitaires des
combustibles et des carburants fossiles
résulte du marché du carbone... puisse sembler dérisoire, l'impact peut
s'avérer majeur au final parce que la plupart des gens ignorent que certains des marchés se gagnent et se perdent en
raison de quelques sous le kilogramme de denrées. Lorsqu'on ajoute cela
aux coûts et qu'on respecte la réglementation environnementale, qui est
généralement plus exigeante au Québec que
chez nos compétiteurs, l'impact devient véritablement significatif.
Cette situation est d'autant plus préoccupante dans le secteur agricole parce qu'il ne dispose pas de
solution de rechange aux énergies fossiles pour un bon nombre d'usages. Si le citadin pourrait faire le
choix du transport en commun ou d'un véhicule électrique, l'agriculteur
sera contraint au moteur à explosion pour la
majeure partie des travaux faits... d'une alternative économique abordable. C'est pourquoi le gouvernement devrait impérativement
investir pour aider le secteur agricole à réduire les impacts du marché
du carbone sur les coûts de production. Il
faudrait offrir aux producteurs agricoles des programmes favorisant une plus
grande efficacité énergétique ainsi que la substitution aux énergies
renouvelables lorsque possible, naturellement.
Considérant
le montant consacré par les agriculteurs à l'achat de l'énergie fossile et
compte tenu du coût additionnel résultant du marché du carbone, le
gouvernement dispose d'un montant substantiel qui devrait être réinvesti aux programmes d'aide et aux autres mesures
structurantes favorisant l'adoption du secteur agricole... Les agriculteurs
ont d'ailleurs toujours bien répondu à ce genre d'opportunités lorsqu'elles
leur ont été offertes.
Je vais y
aller avec la conclusion. La cible de réduction des gaz à effet de serre
proposée est ambitieuse et aura sans contredit
un impact sur les coûts des carburants fossiles et, par conséquent, sur les
coûts de production des entreprises agricoles.
Ces dernières sont très dépendantes des sources énergétiques, et des solutions
de rechange sont souvent absentes. Des
investissements de la part du gouvernement seront nécessaires pour amoindrir
l'impact du marché du carbone sur les exploitations agricoles.
En
contrepartie du coût additionnel attribuable au marché du carbone que doit
désormais assumer le secteur agricole pour
l'achat des énergies fossiles, l'État devrait investir dans des programmes
d'efficacité énergétique et de substitution des énergies fossiles par
des sources renouvelables destinées au secteur agricole.
Le Président (M. Reid) : En
terminant...
M. Caron
(Martin) : En outre, l'État devrait aussi investir...
Le Président (M. Reid) : En
terminant rapidement parce qu'il reste quelques secondes.
M. Caron (Martin) : Oui. En
terminant, je vous dirais qu'au niveau des mesures structurantes déployées il
faudrait optimiser les possibilités de participation des producteurs au marché
de carbone tout en regardant au niveau du contrôle et au niveau des
investissements.
Le
Président (M. Reid) : Merci beaucoup pour votre présentation.
Nous allons maintenant passer à la période d'échange. M. le ministre,
vous avez la parole.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, MM. Caron et Bernier. Merci
beaucoup pour votre présentation ainsi que votre mémoire.
Plusieurs
questions, mais, en commençant, je peux tout de suite vous dire qu'au niveau de
la question des crédits compensatoires,
bon, il y en a déjà, il y a déjà un protocole qui existe pour le monde
agricole. Puis on travaille d'ailleurs sur
une série d'autres protocoles puis on a tout à fait la volonté de poursuivre le
travail avec l'UPA et le monde agricole pour poursuivre le développement de divers protocoles pour justement
refléter la réalité bien particulière de l'agriculture au Québec. Alors, je tiens tout de suite à vous
sécuriser là-dessus, puis qu'il va y avoir des annonces très bientôt en
termes de protocoles, de crédits
compensatoires, notamment le travail qu'on fait avec l'Ontario. Parce que vous
savez que l'Ontario s'est joint au
marché du carbone, et on travaille déjà ensemble sur une série de protocoles
conjoints, dont certains dans le domaine agricole.
Mais il y a
également le fait que c'est sûr qu'il va falloir travailler. Puis on travaille
avec d'autres groupes, d'autres regroupements pour voir comment on peut
justement peaufiner les mesures du plan d'action sur les changements climatiques 2013‑2020 puis mieux les adapter à la
réalité agricole, notamment en matière d'efficacité énergétique, puis surtout
au niveau des carburants parce que, en tout cas, je ne crois pas qu'il y ait
encore beaucoup de moissonneuses-batteuses
électriques ou à l'hydrogène, mais, d'ici là, il faut qu'on fasse un travail,
puis je veux juste vous communiquer qu'on
est très conscients de cette réalité-là et qu'on y travaille, et il y a une
réelle volonté de la part du gouvernement d'avoir des mesures qui
s'adaptent à cette réalité-là et à investir des revenus du Fonds vert dans
diverses mesures qui vont permettre justement à vos membres et à vous, en tant
que producteurs, de mieux profiter, justement, de nos mesures d'adaptation en
matière de changements climatiques.
Rapidement,
donc, au niveau... Je trouvais très intéressant votre mémoire parce que, bien
que court, il est très dense, puis il
y a beaucoup de mesures concrètes. Puis ça, ça nous aide beaucoup, d'avoir des
exemples très concrets, parce que, là, on
peut tout de suite se mettre au travail là-dessus. À la page 4 de votre
mémoire, vous proposez donc des opportunités de réduction d'émissions de
GES dans le monde agricole. D'après vous, parmi ces cinq-là, est-ce que vous
pourriez les classifier et les mettre en
ordre d'importance? D'après vous, si on avait à prioriser pour obtenir un
maximum de réduction, d'après vous, lesquelles ou laquelle a le plus de
potentiel de réduction?
M. Caron
(Martin) : C'est une très
bonne question, puis je me souviens de la dernière
interrogation, vous m'aviez demandé
des choses concrètes, tout ça. De mettre ça en priorité, je pense qu'il y a quelques
éléments qui sont là. Entre autres, je pense que, quand on parle au niveau
de l'énergie puis de l'électricité, tout le système triphasique qu'on
parle puis qu'on n'a pas accès en tant que
producteurs, ça, ça en est un qu'on pourrait vraiment rapidement
aller chercher différentes économies. Puis il y a des tendances qui s'en
vont là-dessus parce qu'on est rendus avec des nouveaux moteurs, des nouveaux systèmes qu'on pourrait utiliser, mais ça
nous prend vraiment le courant triphasique. Ça fait que ça, je
pourrais dire que ça en est un.
Je peux laisser peut-être Daniel aller sur
d'autres exemples, mais, moi, ça m'amène rapidement à dire qu'on pourrait faire
un bout de chemin de ce côté-là.
M. Bernier (Daniel) : Oui. Effectivement,
si on regarde, dans le fond, les deux plus gros blocs en termes d'émissions pour le secteur agricole, c'est la
gestion des sols — donc, toute la gestion de la fertilisation
azotée — et
les émissions par les ruminants. Donc, si on s'attaque à ces deux sources-là,
qui expliquent le plus fort pourcentage des émissions agricoles, probablement
que c'est là qu'on pourrait faire des gains intéressants aussi. Donc, si on
avait un protocole qui vient déterminer
quelles sont les meilleures pratiques en termes de gestion de la fertilisation
azotée puis un protocole qui viendrait encore préciser certaines bonnes
pratiques en matière de régie alimentaire pour les ruminants, il y a
probablement des gains à faire de ce côté-là.
M.
Heurtel : Moi, il y a deux semaines à peine, j'étais aux
Îles-de-la-Madeleine, j'ai visité une ferme avicole qui a mis en place des procédés vraiment très
intéressants au niveau, justement, de l'efficacité énergétique. Bon, dans le
cas de la ferme avicole, bon, c'est des
poules. Ils avaient 10 000 poules. Bon, bien, la chaleur, toute la chaleur
qu'il y a dans la ferme, bon, bien, elle est réutilisée, puis justement,
en hiver, ils baissent leur facture d'énergie de façon très importante.
Est-ce que vous pensez que c'est quelque chose
qui pourrait être exploré également, là?
M. Caron (Martin) : Oui, absolument. Puis vous avez vu un exemple là, puis on en a dans
différentes régions, que des
personnes ont soit un système de récupération de chaleur ou, sinon, un autre
système pour chauffer à la biomasse, entre autres. Je vous dirais que ce qui est important là-dessus, c'est qu'à
différents endroits on avait commencé à faire des audits, des audits au niveau de l'énergie. Et ça permettait à chacun
des producteurs de voir un peu les impacts, à quel endroit qu'ils pourraient
sauver. Et, si on avait travaillé un projet... mais, vu le manque un peu
peut-être au niveau de l'argent, tout ça, ça a été arrêté. Mais chacune des
entreprises devrait avoir un audit au niveau de l'énergie et de voir un peu à
quels endroits qu'il peut faire des changements pour améliorer la condition.
Il
y a l'amélioration, oui, efficacité énergétique, baisse au niveau des coûts,
mais ça, je vous dirais, c'est quelque chose
qu'il faudrait peut-être aller un petit peu plus loin là-dedans, là, parce que
ça nous amène même sur les pratiques agricoles
parce que, vous savez, quand on arrive pour les pratiques agricoles, qu'on
prend soit une sous-soleuse ou un vibro, tout ça, il faut le mettre à
une profondeur. Mais, si on le met à la profondeur adéquate, bien, on dépense
moins de carburant, naturellement. Et ça,
bien souvent, il y a de l'éducation à faire sur ce portrait-là. Et, quand on
fait un audit, ça va jusque-là.
M.
Heurtel : Donc, si je vous entends bien, présentement — et ça, ce serait quelque chose qu'il
faudrait qu'on améliore au niveau du plan d'action sur les changements
climatiques — pour
le secteur agricole, c'est d'avoir des ressources
financières pour aider les agriculteurs à pouvoir faire justement les audits, à
mesurer puis à bien déterminer, pour leur
type de production, quelles seraient les meilleures mesures à mettre en oeuvre.
Parce que, bon, d'un côté, je comprends que vous voulez des protocoles puis des programmes mieux adaptés, mais,
en même temps, il faut des ressources pour que les plus petits producteurs — parce que, quand même, il y a quand même une
bonne collection de plus petits producteurs au Québec, là — ça
serait d'avoir des ressources aussi pour permettre à ces petits producteurs de
bien identifier quelles mesures mettre en oeuvre dans leurs fermes.
• (15 h 20) •
M. Caron (Martin) : Oui, exactement. Puis je rajouterais un petit peu... c'est peut-être un
point, entre autres, que Daniel a
amené, c'est qu'au niveau des audits, tout ça, quand on parle de ça, c'est que,
présentement, on regarde avec le côté azote,
selon nos plantes. Là, présentement, il y a quelque chose qui est en train d'être travaillé pour amener un concept. Ça devrait arriver d'ailleurs, je pense... Daniel,
c'est en 2017 que ça devrait arriver pour dire : Le fractionnement de
l'azote, est-ce qu'on est capables d'avoir un protocole sur le fractionnement
d'azote, que ce soit pour le maïs, tout ça, selon le type de sol, selon toute une séquence pour dire qu'on aurait un
modèle et qu'on peut l'emmener? Et, dans un audit, ceux qui font, exemple, du maïs grain, bien ils
seraient capables de se servir de ça. Ça fait que c'est des outils qu'on a
besoin pour vraiment l'application
technique. Ça fait qu'on ne compromet pas la croissance de la plante, mais on
optimise notre résultat. Donc, on
optimise aussi des pertes réelles qu'il pourrait y avoir, on récupère cet
élément-là. Mais c'est tout le temps gagnant
d'avoir des outils puis d'accompagner les producteurs parce qu'il y a beaucoup
de nouvelles technologies, mais on sent que ça n'aide pas
nécessairement, il faudrait être capables de le propager.
M. Heurtel :
Merci.
Le Président (M.
Reid) : M. le député de Maskinongé.
M.
Plante : Merci, M. le Président. Donc, M. Caron, M. Bernier, bonjour
et bienvenue. J'ai écouté avec attention votre présentation, et on sait tous... J'ai bien aimé que vous posiez
des solutions claires, précises. On sait tous que... Et, vers la fin de
votre présentation, vous avez mentionné que ce n'est pas par la coercition que
ça encouragerait plus les producteurs à
embarquer avec nous et embarquer vers la cible de réduction. On sait et on a
compris, depuis le début des auditions,
puis, je pense, vous allez dans ce sens-là aussi, que la cible, on va pouvoir
l'atteindre si on suscite l'adhésion, l'adhésion des différents groupes,
des différentes personnes et des différents milieux.
Moi,
je regardais dans les éléments que vous avez proposés, que vous avez énoncés, et
j'aimerais savoir, puisque vous êtes quelqu'un de terrain, vous
connaissez bien vos membres... mais j'aimerais savoir le niveau d'adhésion des membres et le niveau de compréhension qu'on n'a
plus le choix de faire attention puis plus le choix d'aller vers une
cible de réduction et de travailler
ensemble, dans le fond, à faire une meilleure planète puis à faire des
meilleures pratiques. Donc, j'aimerais
savoir, selon vous, le niveau d'adhésion et quels seraient les moyens, outre
des moyens financiers, là, mais les meilleurs
moyens pour susciter un plus grand nombre d'adhésions ou pour permettre aux
gens d'adhérer plus facilement à ces nouveaux moyens-là.
M. Caron (Martin) : C'est une bonne question. Puis je vous dirais que les producteurs, si
on regarde dans le temps, voilà
peut-être tout près de 30 ans, les producteurs ont décidé de mettre en place
les clubs agros. Les producteurs sont membres
de ces clubs agros là, et on en est... le souci de l'innovation et de la
technique, qu'est-ce qu'il fait, c'est que ces agronomes-là accompagnent les producteurs, entre autres. Mais qu'est-ce
qu'on voit dans chacune des localités ou des régions, il y a une
mobilisation qui se fait.
Si
on va prendre l'exemple chez vous, dans votre région, M. Plante, on sait qu'on
a des producteurs de volaille qui ont été avec une production de
biomasse pour chauffer le poulailler. Il y a eu deux journées qui ont été
faites pour démontrer ça à travers toute la
province pour expliquer le processus puis qu'est-ce que le producteur y retrouve.
C'est la façon de faire bien souvent. C'est
qu'on peut amener des projets, et ça suscite l'intérêt, et on amène les autres
producteurs à venir voir directement. Puis
il n'y a rien de mieux qu'un producteur pour expliquer à nos producteurs; c'est
intéressant, c'est gagnant. Puis je vous
dirai qu'en tant que producteurs on vise tout le temps le développement
durable. Ça fait que c'est important
pour nous puis ça va le rester, mais il y a une mobilisation de ces
personnes-là. Ça fait que, donc, si on a de l'argent au niveau des audits puis de faire un petit peu plus loin ces
projets-là, il faut s'en servir. Puis il y a une bonne collaboration aussi qu'on fait avec le bureau au
niveau de l'efficacité énergétique, là, mais il s'agit d'avoir les sous
aussi pour les réaliser.
M.
Plante : En sous-question... Oui, c'est correct, M. le Président? Je
n'ai pas attendu votre accord.
Le Président (M.
Reid) : Oui, allez-y. Allez-y. Non, je... Quand ça va bien, on
laisse aller, là.
M. Plante :
En sous-question, vous avez proposé, là, le dernier item, là : «...le
boisement de terres agricoles marginales ne
présentant plus d'intérêt pour la pratique de l'agriculture.» J'aimerais que
vous m'expliquiez si on a la même compréhension,
là. Moi, je comprends de façon que c'est des bouts de terre agricole qui ne
sont plus cultivables, mais il y a
aussi peut-être le fait que des terres, le sol a perdu sa qualité puis que...
J'aimerais ça que vous m'expliquiez vraiment c'est quelles parties puis
quelles terres vous voulez parlez par ça, là.
M. Caron (Martin) : Bien, je pense qu'il y a des exemples. Je parlais des groupes... on
peut parler des OBV, des organismes
de bassins versants, entre autres, à différents endroits où est-ce qu'il y a
des rivières, où il y a des coulées, où ce n'est pas cultivable. Et là il y a eu déjà des projets, à travers toute
la province, de reboiser ces secteurs-là pour aller chercher une
captation au niveau du carbone, tout ça. Ça fait que c'est des choses logiques
qu'il faut qui soient mises en place là-dessus,
mais il y a un certain aménagement du territoire. Et, quand on parle de ces
terres-là, bien, c'est plus de cette façon-là parce qu'il faut tout le
temps se laisser une porte de sortie parce qu'on sait que notre territoire
agricole, c'est 2 %, et il faut
l'utiliser au maximum. On se le fait gruger un petit peu, ça fait qu'il faut
être capables de regarder différentes autres
productions, même si le type de sol est bon. L'exemple qu'on mentionne, là,
c'est plus au niveau des coulées, des endroits, là, que,
stratégiquement... et ça va dans une option aussi des corridors fauniques,
qu'on parle avec d'autres ministères, tout ça.
M.
Plante : La bande riveraine,
là, que vous êtes obligés de respecter, là, pas de culture, donc, dans le fond, tant qu'à la laisser en
jachère ou ne pas s'en occuper, vous proposez de le boiser, ce qui contribue
doublement : en plus, ça va permettre un effet filtrant pour les
cours d'eau aussi, là.
M. Caron
(Martin) : Oui, puis exactement. Puis, je vous dirais même, on a
différents arbres ou arbustes qui amènent un côté aussi économique. Je peux
prendre un producteur d'arbustes de noisetier, tout ça, qui, lui, regarde pour faire peut-être un projet puis dire au
producteur : Bien, je pourrais mettre ça, les cultiver, une certaine
rentabilité, mais il y a tout le temps aussi
l'aspect entretien qui se fait aussi. C'est ça qui est intéressant. Ça prend un
maillage, ça prend un réseautage pour partir ces projets-là.
Le Président (M.
Reid) : Oui, M. le député de Mégantic.
M.
Bolduc : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Il me fait plaisir de vous
avoir ici aujourd'hui. Vous avez parlé tout à l'heure du fractionnement de l'azote. Est-ce qu'à votre
opinion il y a des secteurs où on utilise de l'ammoniac directement
ici, sur les fermes, au Québec?
M. Caron
(Martin) : Ça, je vais laisser Daniel répondre à ça.
M. Bernier
(Daniel) : Oui, ça fait partie des formes d'azote qui peuvent être
employées, oui.
M.
Bolduc : Mais est-ce qu'il y en a qui l'utilisent actuellement puis est-ce qu'il y aurait moyen de
propager ça parce qu'il y aurait une économie substantielle, un, et,
deux, une efficacité accrue et moins de pertes?
M.
Bernier (Daniel) : Ça fait
trop longtemps que je ne travaille plus précisément pour faire
des recommandations de fertilisation, mais, oui, l'ammoniac est utilisé,
là. À quel point il y a intérêt à le substituer... En fait, vous, votre questionnement,
c'est... vous pensez que ce serait...
M. Bolduc :
En fait, on parlait de fractionnement. En fait, on irait carrément à
l'absorption puis on éviterait, finalement, des pertes d'azote et d'émissions.
M.
Bernier (Daniel) : O.K. Parce qu'en fait l'idée de fractionnement, c'est
de... plutôt que de mettre en une dose la quantité nécessaire à la
croissance, on va la fractionner...
M. Bolduc :
L'étaler.
M.
Bernier (Daniel) : ...puis ça va nous permettre... on réduit les
pertes, c'est ça, l'idée, peu importe la forme d'azote, par ailleurs.
M.
Bolduc : O.K. Ça me va. Maintenant, vous parliez, un peu plus tôt, du
courant triphasé et de l'efficacité. La différence entre l'efficacité mécanique des deux, elle n'est pas si
grande que ça, là, parce que, là, vous parlez du biphasé ou triphasé. Je
comprends mal la recommandation de cet élément-là. Vous pourriez me clarifier
ça?
M. Caron (Martin) : Du côté du triphasé, c'est que ça permet vraiment,
au démarrage des moteurs, une moins grande
demande. Ça fait que ce que ça fait, ça demande moins grand. Et l'autre aspect,
c'est que, c'est sûr, on a beaucoup de tracteurs puis on parle, dans le mémoire...
exemple, on a des systèmes de pompe, entre
autres, au niveau
du purin ou du fumier, qu'on utilise,
qu'on met un tracteur là, puis ça peut prendre deux jours, et là le tracteur,
il marche, tout ça. Mais il commence à y avoir des systèmes électriques,
puis c'est beaucoup moins dispendieux parce que le moteur est tout le temps en
continu. Ça fait que, bien souvent, un moteur, c'est au démarrage qu'il prend,
mais après ça, ça ne coûte quasiment plus rien. Et là on va à des endroits, les
kilomètres ne sont pas si longs que ça, mais, vous avez vu, dans le mémoire, on
explique le coût que ça revient du kilomètre, c'est quand même dispendieux.
Puis,
je vous dirais, j'ai eu la chance de visiter, exemple, l'Île-du-Prince-Édouard l'été passé, et je voyais que le courant triphasé était partout. Puis là je me
disais : Il me semble, on est au Québec, ici, là. On devrait avoir ça puis amener
un petit plus d'éléments là-dessus.
M.
Bolduc : Vous avez parlé qu'il y avait
394 millions dans l'achat de carburant fossile. Est-ce que
vous avez évalué ce que l'économie
potentielle... le fait de changer les fosses à purin, les fans pour monter, par exemple, le grain ou l'ensilage dans les silos, etc. Est-ce que vous
avez fait une évaluation de 20 %, 30 %, 40 %? Qu'est-ce qu'il y
avait comme substitution potentielle des hydrocarbures à l'électricité?
M. Caron
(Martin) : Je vais laisser Daniel un petit peu...
M. Bernier
(Daniel) : Non. Ça, ce n'est pas fait, ça reste à faire, mais, oui, ça
pourrait s'estimer.
M.
Bolduc : Ce n'est pas fait. O.K. Ce serait intéressant, ça, parce que
moi, je figure que c'est à peu près 250 000 $ par cultivateur pour refaire les circuits
triphasés, là. Juste le chemin, là, je parle, puis sans compter vos
installations. Il faut qu'il y ait une justification économique
significative.
Le Président (M.
Reid) : En terminant, M. le député. En terminant parce qu'il ne
reste plus de temps. Est-ce que ça va?
M. Bolduc :
Allez-y.
Une voix :
Bien...
Le
Président (M. Reid) : Alors, nous allons... Oui, bien, vous
aurez peut-être l'occasion de revenir là-dessus. Nous passons maintenant
au groupe de... pardon, à l'opposition officielle et M. le député de
Terrebonne.
• (15 h 30) •
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, M. Caron,
merci, M. Bernier, de cette présentation tout à fait dynamique, et claire, et transparente. Moi, j'aime ça, la clarté.
Il n'y a pas d'ambiguïté dans vos propos puis il y a des mesures concrètes, comme disait la ministre, qui
nous sont proposées. Et ça, je dois vous lever mon chapeau à cet égard. C'est très bien reçu dans le cadre des consultations
qu'on fait. Donc, je vous remercie des efforts qui ont été déployés dans
le bref laps de temps que vous avez eu pour probablement le rédiger.
J'avais
plusieurs questions qui touchent le
monde agricole. Vous comprendrez que je suis un bleu en la matière. Vous allez pouvoir être, donc, une source d'information privilégiée pour pouvoir m'aiguillonner dans ce secteur. Je
voulais voir un peu la question
des... à la page de votre mémoire... attendez, je vais le trouver. La question
des biomasses, biomasses forestières.
Vous dites que «malheureusement, il ne semble pas y avoir de réelle volonté gouvernementale [afin] de favoriser cette
filière», probablement parce
que vous trouvez qu'il n'y a pas
assez d'argent ou il n'y a pas assez de mesures qui sont
mises en place pour la valoriser.
Vous
nous dites que vous êtes associés avec un groupe qui se nomme Vision Biomasse Québec,
que ce groupe viendra éventuellement nous faire ses recommandations. Je tenais à ce que vous puissiez quand même
dès maintenant nous préparer.
Pouvez-vous développer un peu plus, là, sur cet aspect qui vous semble manquant
dans la politique gouvernementale
afin qu'on puisse s'en inspirer?
M. Caron
(Martin) : Daniel, tu vas y aller, je vais compléter.
M.
Bernier (Daniel) : O.K.
Bien, en fait, c'est qu'il y a, pour... Si on veut faire de la substitution,
puis tasser de l'huile à chauffage, puis le remplacer par de la
biomasse, il faut donner un coup de pouce pour construire une filière.
Alors,
d'une part, il faut qu'il y ait des utilisateurs, donc des gens qui acceptent
d'investir des sommes puis changer leur
système de chauffage, et donc, d'une certaine manière, d'innover, et prendre
certains risques, et de devoir amortir ces équipements-là sur un certain
laps de temps. Puis, d'autre part, ça prend des fournisseurs qui vont alimenter
ces nouveaux clients là. Et donc, là, il y a
forcément une période, là, d'incertitude de part et d'autre, là. Est-ce que,
comme producteur de biomasse, bien, je peux faire des investissements puis produire
à grand volume? Est-ce que j'aurai des clients? Puis, à l'inverse, les clients
se demandent : Est-ce que je convertis mes installations?
Alors,
c'est un peu la poule et l'oeuf dans cette histoire-là, et c'est pour ça que ça
prend un coup de pouce parce qu'on
est en compétition avec de l'huile à chauffage, qui est très, très bien
organisée. Alors, le camion, on l'appelle, puis, une heure après, il est
arrivé, là. Donc, c'est pour ça que ça prend un coup de pouce gouvernemental
pour construire cette filière-là.
M.
Traversy : Dans l'état actuel des choses, est-ce que, dans
chaque région présentement, il y a des fournisseurs de disponibles?
Juste à titre informatif en termes, là, évidemment, de biomasse?
M. Bernier (Daniel) : Alors, il
faudrait que je... Dans... oui, bon...
M. Caron
(Martin) : Oui, bien, je
pourrais y aller. Sur cet aspect-là, ce n'est pas dans chacune des régions,
mais une région peut appeler puis avoir un
fournisseur directement. Il y a tout
le temps le délai, et puis il y a tout le temps aussi la variabilité au
niveau de la biomasse aussi. Ça fait que c'est un peu ça. Puis faire du pouce
un peu sur la première question, c'est juste de dire qu'il y a des grosses
entreprises, c'est peut-être rentable. Comment qu'on peut adapter ce système-là
au niveau de nos entreprises qui sont peut-être dans une moyenne, c'est là
qu'est le défi parce que, bien souvent, ces
projets-là ont parti parce qu'il y
avait une subvention rattachée pour dire que ça revenait un petit peu
moins cher au producteur. Mais comment... Le
concept, pour s'assurer qu'il y ait une pérennité dans ce domaine-là, puis
c'est un peu qu'est-ce que Daniel mentionnait, il faut que, vraiment, la
filière se pose la question.
M. Traversy : Et donc ce que
je retiens, c'est que vous souhaiteriez que le ministre ait une préoccupation spécifique, là, donc au domaine de la biomasse en
matière forestière et peut-être même qu'il y ait des objectifs ou des
cibles qui soient fixés en matière d'efficacité
énergétique de par ce secteur-là. Et je vais vous laisser, donc, l'occasion
d'en parler un peu pour évidemment alimenter notre discussion.
J'avais également vu, dans votre mémoire, qu'au
niveau des carburants fossiles vous dites que, dans le fond, «le gouvernement devra impérativement investir
pour aider le secteur agricole [évidemment pour] réduire l'impact du marché du carbone sur les coûts de production».
Vous dites, bon, que cette efficacité énergétique là est essentielle
ainsi que la substitution aux énergies renouvelables.
Je me posais
la question : Dans le cadre d'une préoccupation sur les carburants
fossiles, est-ce que vous pouvez nous
dire si vous voulez avoir des mesures financières ou économiques pour y
parvenir ou à quel genre de mesure ou de moyen concret vous pensiez
lorsque vous écriviez ce genre de réflexion?
M. Bernier
(Daniel) : En fait, ça peut prendre plusieurs formes, mais on pourrait
d'abord s'attaquer à... en fait, offrir, autant que possible, des
alternatives aux énergies fossiles. Donc, on a vu qu'il y avait quand même
quelques possibilités. Si on pouvait faciliter la disponibilité du courant
triphasé, ça donne des opportunités de conversion à l'électricité. Et donc c'est ça. Donc, efficacité énergétique et
conversion, donc ça prend des programmes de cette nature-là. Éventuellement, si ce n'est pas suffisant, on
pourra considérer autre chose, là, mais on pourrait d'abord commencer
par ça.
M. Caron
(Martin) : Peut-être un
ajout que je pourrais faire, c'est que tantôt, quand j'ai parlé d'audit au
niveau des fermes, c'est selon les fermes.
Il y a un cas, peut-être, que la biomasse va avoir une rentabilité rapidement.
Ça fait que c'est ça qu'il faut être
capable de voir. Puis je pense que, votre première question, il faut être
capables de développer, tout le monde
ensemble au niveau de la filière et au niveau des gouvernements, sur une
vision, une vision, puis il faut peut-être segmenter un petit peu nos
marchés. Il y a différents endroits, oui, on pourrait faire des gestes concrets
qui iraient rapidement. Ça fait qu'on ne
peut pas nécessairement dire que c'est juste une chose, mais il faut être
capable de segmenter tout ça. Je
pense qu'avec la mobilisation qu'on peut mettre sur le terrain, on est capables
de faire de très belles choses dans ça.
M.
Traversy : Je profite de votre présence parce que vous êtes des
gens qui ont des réponses claires, précises, concrètes, comme beaucoup
d'intervenants, mais dans un parler, je vous dirais, plus accessible que
peut-être certains chercheurs scientifiques, là, qui ont des théories plus
poussées et plus pointues. Donc, je profite de votre présence pour vous demander : Pensez-vous qu'on
gagnerait peut-être à proposer des cibles climatiques par secteur, avec des
moyens et des mesures qui sont classifiés,
là, selon les objectifs que le ministre voudra se donner, là, pour la suite des
choses? Pensez-vous que ça serait bien d'avoir une loi de transition
énergétique, là, où on pourrait voir, de façon plus précise, là : Voici ce qu'on attend dans tels
secteurs, voici les mesures et les cibles qu'on veut se fixer puis les moyens
d'y parvenir? Est-ce que vous trouveriez ça intéressant comme
suggestion?
M. Caron
(Martin) : Bien, ça revient
un petit peu à l'élément que je mentionnais par rapport à la vision.
Entre autres, je pense qu'il faut se doter,
tout le monde ensemble, d'une vision claire et je pense qu'à travers ça on veut
optimiser toutes nos ressources, que ce soient les ressources au niveau des
gouvernements, que ce soient les ressources aussi au niveau des producteurs. Et
on a besoin grandement aussi des scientifiques là-dedans, même si, des fois, on
veut les ramener au pratico-pratique.
Mais je pense
qu'il faut avoir ce portrait-là. Et, oui, il faudrait peut-être cibler des
exemples et de l'accompagnement qu'on
peut faire là-dedans. Mais il faut vraiment aussi penser que ça ne se fait pas
en claquant des doigts et du jour au lendemain.
Il faut regarder sur une étape selon un volet, peut-être, de trois à cinq ans
puis comment qu'on peut s'adapter.
Mais je
ramène encore des outils qu'on a peut-être sur des audits qu'on est capables de
faire sur nos entreprises... nous
permet rapidement de déceler ou de faire un geste concret qui va amener un
résultat assez rapide pour l'ensemble de la population du Québec.
M.
Traversy : Donc, je sens que vous êtes ouverts à l'inscrire
dans la Politique énergétique. Et j'ai lu également, bon, à la fin de
votre mémoire ou peut-être plus à l'intérieur de celui-ci, que vous ameniez
quand même une certaine nuance quant à l'objectif d'aller évidemment diminuer
nos gaz à effet de serre. Vous dites : Le côté économique doit quand même rester sur les
écrans radar. Vous voulez, dans le fond, que le ministre garde un pouls du
cardiogramme, là, des fluctuations qu'une telle action peut peut-être
provoquer dans votre secteur agricole.
Avez-vous, de
façon plus précise, des craintes dans... Avez-vous un exemple à nous donner ou
c'est seulement un rappel de mise en garde? On sent que vous voulez vous
garder une porte de sortie. J'aimerais vous entendre un peu là-dessus.
M. Caron
(Martin) : Bien, je pense
que, là-dessus, puis c'est une des demandes qu'on fait, je pense, à
chaque fois qu'on a l'invitation de venir ici, c'est de parler de réciprocité.
Il faut bien se rappeler qu'on est dans un climat de nordicité ici,
comparativement si on regarde en Californie ou dans d'autres pays, Nouvelle-Zélande.
On sait que, présentement, on est en train
de parler d'un partenariat transpacifique, mais les producteurs élevés, là...
Et, quand on prend les producteurs de fraises ou de framboises, bien,
quand on arrive, qu'il y a des produits de la Californie qui arrivent ici... On est capables de produire des fraises ici
de bonne qualité puis aller jusqu'au mois d'octobre, mais ça a un coût.
Le Président (M. Reid) : En
terminant.
M. Caron
(Martin) : Et, si je pense
au niveau des serres, entre autres, les producteurs, les acériculteurs,
c'est la même affaire, là.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Alors, nous allons passer
maintenant au bloc du deuxième groupe d'opposition. M. le député de
Masson.
M.
Lemay : Merci, M. le Président. Merci, M. Bernier et M. Caron, d'être
avec nous. Il y a quelque chose... Je sais qu'on a déjà abordé la question un peu plus tôt, mais je veux revenir un
peu sur le fait que vous avez mentionné que les crédits compensatoires étaient inadéquats. Hier, on a eu un groupe, Coop
Carbone, qui sont venus. Ils nous ont parlé aussi, là, qu'en fait il
devrait y avoir plus de protocoles.
Vous, quand
vous dites que les crédits carbone sont inadéquats, est-ce que vous suggérez
que, dans le fond, on ajoute des protocoles? Et, si oui, lesquels?
• (15 h 40) •
M. Bernier (Daniel) : En fait, oui,
il faudrait ajouter des protocoles parce qu'actuellement il n'y en a qu'un, il y en a un seul pour le secteur agricole. M. le
ministre de l'Environnement mentionnait tout à l'heure qu'il y en a
d'autres qui s'en viennent; donc, tant mieux!
L'autre
problème qu'on a avec les crédits compensatoires, c'est qu'actuellement pour
des projets agricoles il est très coûteux de mener à terme une
transaction. Et, comme, à l'échelle d'une ferme, on peut espérer quelques
centaines de tonnes de réduction, donc quelques milliers de dollars de revenus
en termes de crédits carbone, bien, les coûts de la transaction, la plupart du temps, sont plus élevés que les revenus. Donc
là, vous comprendrez qu'il y a peu d'intérêt d'aller de ce côté-là. Donc, c'est pour ça qu'on
propose... Puis probablement qu'hier Coop Carbone vous a parlé
d'agrégation puis d'essayer de voir comment
on pourrait rendre les crédits compensatoires plus intéressants pour le secteur
agricole parce qu'actuellement on fait le constat qu'il y a des coûts de
transaction plus élevés que les revenus.
M. Lemay : Parfait. Donc, je
retiens, là, que les protocoles d'agrégation pourraient être quelque chose
qu'on pourrait regarder du côté du ministre. Merci.
Vous avez aussi mentionné... mon collègue en a
parlé tout à l'heure, là, on a parlé de biomasse. En fait, c'est un sujet, là, qui est très d'actualité. Vous
mentionnez dans votre mémoire, là, qu'avec la biomasse, là, vous
l'utiliseriez pour de la chaleur dans divers
procédés agricoles, mais on sait qu'on peut aussi l'utiliser, là, pour générer
de l'électricité ou même alimenter les tracteurs, les véhicules
agricoles sur les terres. Je n'ai pas vu ça dans votre mémoire. Est-ce que vous seriez... En fait, moi, je me dis : La
biomasse, c'est oui, mais pourquoi ne pas l'utiliser à toutes les fins
possibles afin de réduire au maximum notre empreinte?
M. Bernier
(Daniel) : Oui. Bien, en fait, c'est que ça n'exclut pas ces
utilisations-là éventuellement, mais la façon la plus performante, la plus efficace d'utiliser la biomasse, c'est de
la transformer en chaleur. Si vous la transformez en électricité, bien, vous avez une perte. Chaque
fois qu'on la retransforme en une autre source d'énergie... Ça ne veut
pas dire qu'il n'y a pas une pertinence dans certains cas, mais là où on a le
maximum d'efficacité au plan énergétique, c'est lorsqu'on la transforme en chaleur. Et, comme, au Québec, on a un grand
besoin de chaleur avec les hivers qu'on connaît, pourquoi ne pas en
profiter pour substituer de l'huile à chauffage?
M. Caron (Martin) : Oui. Moi, je me
permettrai, c'est peut-être quelque chose qu'on n'a peut-être pas
nécessairement écrit, mais on sait qu'à différents endroits il y a des
biodigesteurs. On voit beaucoup ça en Europe et en Allemagne, entre autres. Ça
fait qu'il y a peut-être des choses là. Puis vous comprenez que, quand on prend
cette méthode-là, bien, on va un petit peu
plus loin, puis c'est pour chauffer au niveau de la communauté, tout ça. Il y a
peut-être des projets collectifs, mais il faut prendre le temps d'y penser. Il
faut aller chercher une espèce de développement durable là-dedans.
M.
Lemay : O.K. Je trouve ça intéressant, ce que vous mentionnez. Moi, je
suis allé, cet été, jusqu'à Manawan, au nord de Saint-Michel-des-Saints,
puis j'ai remarqué effectivement qu'il y a une industrie forestière, là, quand
même florissante. Et
puis je me disais... Est-ce que vous êtes au courant s'il y a un projet de
biomasse qui pourrait s'installer dans le
coin de Saint-Michel-des-Saints ou même à Manawan, ne serait-ce que pour la
communauté attikamek qui est à cet endroit,
et puis de pouvoir utiliser justement les résidus forestiers sur place pour les
besoins de la communauté? Est-ce que vous êtes au courant de quelque
chose? Non?
M. Bernier (Daniel) : Non. Je ne
suis pas au courant.
M. Caron (Martin) : Non, on n'est
pas au courant.
M.
Lemay : J'imagine que ça reste dans l'esprit, là, de ce que vous
proposez. C'est un genre de projet comme ça qui serait intéressant. O.K.
M. Caron (Martin) : Bien, qu'est-ce
que je peux mentionner, c'est qu'il y a un exemple qui me vient en tête,
Gaspésie—Les
Îles, entre autres, il y a des producteurs de tomates, entre autres, puis qui
sont dans un système comme ça, qui chauffent
avec la biomasse puis qui ont un lien, là. C'est une coopérative qui s'est
installée là. Et puis c'est quelques producteurs qui se sont mis
ensemble au niveau des serres pour ce chauffage-là.
M.
Lemay : Et puis, si on regarde au niveau du budget 2015‑2016, là,
c'est mentionné qu'on prévoit une réduction de la taxe spécifique sur l'essence dans les régions frontalières, tu
sais, justement en fonction de la distance, là, puis de l'impact du
marché du carbone. Bon, là, c'est correct, l'Ontario va se joindre à notre
marché du carbone, mais moi, je me
disais : Est-ce qu'au niveau de l'agriculture — vous avez mentionniez tantôt que le prix du
carburant, c'est quelque chose qui
était quand même élevé pour vous — il ne devrait pas y avoir une réduction pour
l'agriculture dans les fermes, justement, où les agriculteurs qui ont
des projets qui contribuent à la lutte au changement climatique... pour pouvoir
leur permettre de bénéficier un peu, là, d'une économie sur le carburant?
M. Caron (Martin) : C'est sûr que
c'est peut-être quelque chose à regarder. Ça pourrait être une possibilité intéressante de dire : Ça fait la promotion
des gestes ou des impacts pour la mobilisation des producteurs, entre
autres. En même temps qu'on fait ça, bien, il faut réaliser aussi que
le projet, il faut qu'il soit rentable au bout de la ligne aussi. Ça
fait que c'est peut-être une option de promotion de ces événements-là, mais il
faut aller plus loin.
Puis je
reviens un petit peu sur l'exemple de l'Ontario. Vous dites : Là,
on arrive avec une entente. Mais tantôt, quand je parlais de ça, des
autres produits qui viennent d'ailleurs, bien, c'est un élément, là. Puis, tu
sais, en tant que producteurs, on a de la
misère à réaliser que des pommes ou des fraises viennent d'ailleurs. Ça arrive
ici et elles sont moins chères, à
quelque part. Pourtant, on sait que ça ne se fait pas, là, mais tout le trajet
qu'ils ont fait... Ça fait que juste la notion au niveau du développement durable là-dessus, il y a des questions à se
poser, là. Puis là je lance peut-être la question au public, pas juste... je pense à notre société. On
fait des choix de société, on veut avoir une acceptabilité sociale, mais
il va falloir avoir des gestes concrets
aussi. Et comment qu'on pourrait aller? Bien, ça, je laisse ça aux mains du
gouvernement.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Merci de votre contribution à nos
travaux.
Alors, je
suspends la séance pendant quelques instants pour permettre au prochain
groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 15 h 46)
(Reprise à 15 h 48)
Le Président (M. Reid) : Nous
reprenons nos travaux. Je souhaite maintenant la bienvenue à notre prochain invité, le consortium Ouranos. Vous connaissez évidemment
la routine. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation. Par la suite, nous aurons une période d'échange.
Je vous demanderais de vous nommer pour les fins de l'enregistrement. À
vous la parole.
Ouranos inc.
M. Bourque
(Alain) : Bonjour! Mon nom
est Alain Bourque. Je suis directeur général du consortium Ouranos. Alors, c'est un plaisir d'avoir encore une fois
l'opportunité de venir présenter dans le cadre des activités de la
commission.
Alors,
rapidement, juste un petit rappel d'Ouranos. On est à la fois un centre de
recherche appliquée sur la science des
changements climatiques, les impacts, l'analyse des risques, mais nous
travaillons davantage sur la portion d'apprendre à vivre avec les changements climatiques qui sont en cours et vont se
poursuivre dans le temps. Ceci étant dit, les scénarios d'émission de gaz à effet de serre sont
fondamentaux pour nous pour déterminer quelle va être l'ampleur des
changements climatiques, les impacts, les risques. Et donc c'est pour ça qu'on
pensait que c'était pertinent de venir donner une présentation. Nous n'avons pas eu le temps, compte tenu des délais,
malheureusement, de déposer un mémoire. Par contre, s'il y a l'opportunité, on pourra le faire par la
suite, là, et ce sera essentiellement le résumé de ce que je vais mentionner
ici.
Et donc, à
quelque part, j'imagine qu'hier ou au cours des prochaines journées vous allez
avoir des présentations de différents
acteurs qui vont venir donner leur opinion sur des choix de société à faire.
Naturellement, nous, le rôle d'Ouranos ici, c'est beaucoup plus de
présenter ce que la science dit par rapport au combat contre les changements
climatiques.
Alors,
comme vous le savez, les tendances sont claires, les GES vont en augmentant à
l'échelle planétaire, et même dans plusieurs pays développés qui
devraient pourtant être à l'avant-scène d'une réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il est cependant quand même
rafraîchissant de voir que la science est de plus en plus tenue en compte
dans la prise de décision. Et d'ailleurs on a remarqué que, dans le document de
consultation, il y avait beaucoup d'aspects scientifiques pour orienter les
décisions. Et on pense qu'effectivement c'est une très bonne idée de se baser
sur les faits, sur la science, pour pouvoir
orienter ce qu'il y a à faire. C'est assez difficile de négocier avec les faits
pour tenter de réduire l'impact des changements climatiques.
• (15 h 50) •
Et donc notre
rôle ici, on le sent, c'est vraiment de venir un peu donner le portrait, de
venir répondre aux questions
qui étaient dans le document dans une perspective scientifique.
Ceci étant
dit, comme je l'ai dit tout à l'heure, notre rôle est surtout autour de la
science du climat, des impacts, de l'adaptation. On est beaucoup moins
dans les moyens de réduction d'émissions de gaz à effet de serre et on est beaucoup
plus dans les moyens pour gérer les risques climatiques qui se pointent à
l'horizon. Et d'ailleurs cette science-là, elle a d'ailleurs permis de définir ce fameux seuil de 2 °C à l'échelle planétaire, qui, selon moi,
détermine un peu l'agenda, là,
c'est-à-dire qu'est-ce qu'on veut atteindre au niveau planétaire pour réduire
les émissions de gaz à effet de serre. Et il faut bien comprendre que,
pour le Québec, le 2 °C planétaire, ce que ça veut dire, c'est plutôt un
3 °C, 4 °C pour le sud du Québec
et un 4 °C à 6 °C pour le nord du Québec. Et donc je pourrais vous
énumérer toute la ribambelle d'impacts sur l'environnement naturel, l'environnement bâti, les activités
socioéconomiques, la santé, la sécurité, mais je ne le ferai pas, inquiétez-vous pas. Alors, simplement, j'ai amené
un genre de «one pager» recto verso qui est essentiellement la synthèse
de notre bilan des connaissances. Et il y a un site Web aussi associé avec ça,
qui vous donnera accès à un résumé de deux pages, un résumé de 12 pages et,
lundi prochain, un document de 450 pages pour, naturellement, les praticiens.
C'est la clientèle cible, là, qui est visée avec ce genre d'information, type
d'information là.
Le point
important ici, c'est de dire que le seuil du plus 2 °C est passablement
important à l'échelle planétaire. Au-dessus
du 2 °C, ce qu'on dit, c'est que les changements climatiques vont avoir
des impacts majeurs, parfois irréversibles et généralisés pour l'ensemble de la société, qui vont avoir des
impacts, d'ailleurs, pour les décennies à venir. On pense au rehaussement du niveau de la mer où tous les
scénarios indiquent que, même si on réduit les émissions de gaz à effet
de serre au cours des deux prochaines décennies, le changement des niveaux de
la mer se poursuit pour encore plusieurs décennies additionnelles, d'où une
certaine urgence d'agir, hein? Les changements climatiques, ce n'est souvent
pas tellement associé à l'urgence, mais je pense que, de plus en plus, on
comprend qu'il est important d'agir le plus tôt possible pour limiter l'ampleur
des changements climatiques et s'adapter, donc apprendre à vivre avec le reste.
Tel qu'il est
souligné dans le document de consultation, la science du Groupe de travail III
sur le GIEC autour des moyens de
réduire les émissions de gaz à effet de serre estime que la planète doit
réduire ses émissions de gaz à effet de serre, d'ici 2050, de l'ordre de 40 % à 70 % et devenir carboneutre,
voire même moins, à l'horizon 2100. Quand on dit moins, ça veut dire
qu'on espère que, par exemple, la forêt, les océans, etc., vont pouvoir
continuer à absorber des émissions de gaz à effet de serre pour nous stabiliser
vers, donc, ce 2 °C là que l'on veut tant éviter.
Ceci étant
dit, par rapport à ce que le GIEC a dit, il faut bien réaliser qu'il y a
plusieurs experts, plus des sciences sociales,
qui parlent de l'aspect éthique de la répartition de la réduction des émissions
de gaz à effet de serre. Et c'est sûr que c'est bien différent de demander à un pays développé, qui a déjà émis
beaucoup d'émissions de gaz à effet de serre, de réduire de 40 % à 70 % versus, par exemple, un pays africain
qui a essentiellement très peu contribué au problème à date et qui,
naturellement, fait un rattrapage économique pour se rattraper de la pauvreté.
Et donc ça nous fait dire, en fait, que, pour la question n° 1, bien que
les cibles du gouvernement du Québec sont parmi les plus ambitieuses, souvent
similaires aux cibles que se sont données plusieurs pays, plusieurs États
d'Europe, et c'est clairement beaucoup plus ambitieux
que plusieurs des États de l'Amérique du Nord, l'information scientifique
combinée aux avis sur ce partage d'équilibre
là entre pays riches et pays pauvres pointe vers la nécessité d'avoir des
objectifs plus ambitieux que la moyenne mondiale pour un État comme le Québec. Et d'ailleurs le comité
consultatif qui est mentionné identifie plutôt ça comme un minimum à atteindre de réduction d'émissions de
gaz à effet de serre. Il faudrait être dans une perspective, ici,
purement factuelle et scientifique, tenter de réduire même possiblement un peu
plus que ça.
Il faut aussi se rappeler, en fait, que
l'objectif de 2030 va certainement être déterminant pour l'atteinte d'un objectif en 2050. Alors, pour un pays développé
qui a déjà émis beaucoup de gaz à effet de serre, la différence entre
80 % de réduction d'émissions de gaz à effet de serre en 2050 et 95 %
d'émissions de gaz à effet de serre, c'est quand même substantiel quand on le
compile à l'échelle de la planète et quand on pense que tous les pays
développés pourraient aussi moduler leurs efforts entre 80 % et 95 %.
Et donc, encore une fois, le message ici, c'est de dire que, oui, cette cible-là, de 37,5 %, est probablement un
minimum requis, et celle de 2050 est particulièrement cruciale, compte tenu
que certains pays plus pauvres, eux, ne pourront pas, fort probablement,
réduire les émissions de gaz à effet de serre de 37,5 % d'ici 2030. On
prend juste la Chine, par exemple, qui se sont déjà engagés — puis
il y a plusieurs personnes qui félicitent la Chine de faire ça — à un
statu quo de leurs émissions de gaz à effet de serre à l'horizon 2030. Alors, ça illustre, là, ce débalancement ou ce défi entre
pays industrialisés, qui ont largement contribué aux émissions de gaz à
effet de serre, versus les pays qui n'ont pas vraiment encore contribué, qui
ont un rattrapage à faire, même sur une base d'émissions de gaz à effet de
serre per capita. Et donc ça, ça doit être considéré.
D'ailleurs, les scientifiques... puis ça, je
pense, les décideurs ne l'ont pas encore pleinement intégré, mais les scientifiques du Groupe de travail III, dans le
rapport du GIEC, parlent de moins en moins de cibles à atteindre en
émissions de gaz à effet de serre, surtout
que les cibles font toujours référence à ce qui a été émis par le passé, O.K.,
et font de plus en plus référence à un quota d'émissions de gaz à effet
de serre que la planète a de disponible présentement pour tenter d'éviter un 2 °C. Donc, présentement, on peut
déjà quantifier la valeur de gaz à effet de serre que l'on a à crédit, là,
que l'on peut dépenser pour réussir à minimiser le changement climatique
à 2 °C. Et ça, ça nous donne
peut-être davantage une idée sur comment devrait-on stratégiquement
utiliser ces quotas d'émissions de gaz à effet de serre pour pouvoir atteindre
des objectifs quand même passablement ambitieux de réduire, par exemple, de
95 % nos émissions de gaz à effet de serre à l'horizon 2050.
Ainsi, à la
question n° 2, compte tenu que, comme je le mentionnais tout à l'heure,
Ouranos est moins dans les moyens
pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, on n'a pas de réponse
précise à donner à cause qu'on n'a pas, justement, ce mandat-là autour
des moyens stratégiques pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Par
contre, on croit que les réponses devraient se baser sur des
analyses scientifiques solides. Alors, la science est là pour faire des
analyses comparées pour pouvoir déterminer quelles sont les façons les plus
efficaces.
Finalement, j'aimerais conclure en disant que — et
ça, ça va être valide pour les quatre questions, et là c'est beaucoup moins
scientifique, en fait, puis c'est beaucoup plus pratique et stratégique, je
dirais — c'est
le fait que le Québec est probablement l'une
des régions du monde qui est la mieux équipée pour pouvoir réduire ses
émissions de gaz à effet de serre : très grand territoire, beaucoup
de ressources énergétiques renouvelables, l'eau, le vent, etc. Et c'est clair que ça nous donne la possibilité de non seulement
pouvoir atteindre des objectifs ambitieux au Québec, mais aussi d'aider
nos voisins à atteindre des objectifs ambitieux, que ce soient nos voisins
immédiats ou même sur le continent nord-américain. Et donc on croit que...
Le Président (M. Reid) :
Merci.
M. Bourque (Alain) : ...ça devient
une opportunité puissante de plus.
Le
Président (M. Reid) :
O.K. Je vous arrête là. Vous aurez l'occasion, sans
doute, de continuer avec les
échanges. Nous passons à une période d'échange. M. le ministre, la parole est à
vous.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Bourque. Merci pour votre
présentation. Juste pour clarifier la notion
de quota, est-ce qu'elle est semblable...
moi, je... la notion de budget carbone? C'est ça, hein, si on parle de la
même...
M. Bourque
(Alain) : Oui, exact. Oui.
Bien, en fait, c'est qu'on a déjà émis dans l'atmosphère tant de gaz à
effet de serre qui ont expliqué un
0,85 °C, et là, pour le 1,2° restant, il nous reste une quantité à émettre
qu'on doit se partager entre pays parfois développés, parfois moins
développés.
M.
Heurtel : Je peux vous dire qu'il y a déjà des discussions là-dessus.
Nous, on a commencé à échanger sur la notion
de budget carbone. Il faut bien comprendre que la notion de cible, je sais que
vous le savez, mais, pour préciser, la notion
de cible, c'est quelque chose qui est quand même établi par la communauté
internationale. L'idée de la cible, c'est quelque chose qui, justement, est proposé puis était un prérequis pour
la conférence de Paris. Donc, tous les États devaient arriver avec une
cible. Et donc le Québec et d'autres États fédérés se sont également soumis à
cette pratique-là.
Mais je suis
tout à fait d'accord avec le fait que, là, la tendance va plus vers la notion
de budget carbone et de voir comment,
bon, bien, on a tant de carbone qu'il nous reste à pouvoir émettre pour
atteindre la cible. Alors, on essaie de voir comment on peut développer
cette notion-là, mais on est au début.
Moi,
j'aimerais vous entendre davantage. D'après vous, si on regarde sur un
horizon... Donc, on est sur un
horizon de 2015‑2030 présentement. D'après vous, quels sont les enjeux les plus
pressants, là, de votre côté, vos constats? Parce que ça évolue constamment,
hein? Dans les dernières années, c'est presque exponentiel, l'accumulation des connaissances, vos travaux. C'est dans quels
secteurs, quels domaines? Qu'est-ce qui est le plus criant, au Québec,
d'après vos travaux?
• (16 heures) •
M. Bourque (Alain) : On parle...
Bien, en fait, si je reviens même par rapport aux questions, là, le Québec
devrait-il se doter de cibles ou d'objectifs spécifiques, etc., si on parle
purement non pas de secteurs, mais d'aspects scientifiques,
c'est clair que le méthane est un gaz
à effet de serre qui est particulièrement puissant, qui peut contribuer davantage aux émissions de gaz à
effet de serre. Et il y a même certains scientifiques qui regardent ce qui
s'est passé depuis 25 ans, c'est-à-dire une poursuite de la hausse des émissions de gaz à effet de serre, et il y en a même plusieurs qui soulèvent le fait que, si, peut-être,
que, dès le début, on avait simplement attaqué le méthane, bien, peut-être
qu'on aurait réussi, en bout de ligne, à
réduire davantage les émissions de gaz à effet de serre en
ciblant notre action. Bon, ce n'est pas ce qu'il s'est produit, mais ça,
c'est peut-être un aspect scientifique qui est important à dire.
L'autre aspect, puis nous, on le voit en
adaptation quand c'est le temps de faire des analyses coût-bénéfice de solutions d'adaptation, on voit que l'analyse
coût-bénéfice peut devenir particulièrement importante pour déterminer quels devraient
être les choix prioritaires. Donc, je ne sais pas s'il y a, en matière de
moyens d'émissions de gaz à effet de serre, des analyses coût-bénéfice. Encore une fois,
c'est du support de la science pour aider à prendre des décisions, pour
voir quelle filière devrait être priorisée.
L'autre aspect, naturellement, c'est la disponibilité
de la technologie. Alors, je pense que ça, c'est assez bien connu. On devrait fort probablement prioriser des domaines où la technologie
est déjà disponible ou presque disponible pour tenter de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Donc, il y a
un aspect d'investissement assez stratégique pour réduire l'ensemble des émissions de gaz à effet de serre, avec des aspects court
terme, moyen terme, long terme pour
développer des moyens technologiques soit
inexistants ou simplement pour donner un petit coup de pouce à des
moyens technologiques qui sont déjà passablement disponibles.
À
la quatrième question, par rapport aux obstacles qui sont à surmonter, si je
peux le mentionner aussi, on le voit encore
dans nos analyses coût-bénéfice — puis
je pense que ça va être un des gros défis pour réduire les émissions de gaz à effet de serre aussi pour l'aspect réduction, comme ce l'est pour l'adaptation — c'est
que, bien que, globalement, on fait des analyses coût-bénéfice qui
montrent que c'est bénéfique pour la société de s'adapter ou de réduire les émissions de gaz à effet de serre, en bout
de ligne, quand on regarde ça plus en détail, on réalise qu'il y a des
perdants et il y a des gagnants. Et c'est là, la dynamique entre les acteurs de
perdants et de gagnants, que ça devient très difficile d'avancer. Donc, naturellement, ceux qui sont perdants ont tendance à ne pas
faire avancer, ne pas être des moteurs de changement, alors que ceux qui sont gagnants, eux, pour eux, ce sont des
opportunités. Et, comme M. Bernier mentionnait tout à l'heure un peu le
contraste entre les biomasses versus une industrie qui est déjà bien implantée
et qui peut offrir des services très rapidement,
alors je pense qu'il va être là, un des gros défis de réduire les émissions de gaz à effet de serre, comme on le voit en
adaptation.
M. Heurtel :
Merci. Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Reid) : M. le député de Mégantic.
M.
Bolduc : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Bourque. Il me fait plaisir de vous
avoir ici. On va essayer de profiter
de votre expertise à fond de train. J'ai un problème de fond avec l'ensemble
des paramètres dont vous discutez, du
2 °C, en fait, puis je veux juste qu'on mette ça en
perspective avec la situation du Québec. On parle d'un trillion de tonnes de CO2
pour limiter à 2 °C. Là, on est à mi-chemin. Je pense que ça, c'est bien
clair pour tout le monde, 500 milliards de tonnes. On en produit 18 milliards par année, à peu près. Si on fait comme
le Québec puis on dit qu'on descend de 2 % par année
pendant les 30 prochaines années pour arriver à une cible tout près de
16 millions de tonnes en 2050,
ou à peu près, là, mais qu'on prend l'échelle planétaire puis qu'on fait ça, on
n'y arrivera pas du tout. Est-ce que vous pouvez m'expliquer qu'est-ce
qu'il faut changer dans notre objectif pour y arriver?
M. Bourque
(Alain) : Vous voulez dire par...
M.
Bolduc : Sur le global. Parce que
2 %, nous, au Québec, là, il
faut le faire pendant les 30 prochaines années. Puis admettons qu'avec notre technologie, puis tout ça, ça va bien, mais
il y a des pays, comme la Chine, qui vont continuer à monter avant de commencer à descendre. Il y a
des pays qui sont en émergence, qui vont continuer à accroître. Mais,
pour qu'on arrive, vers 2050... peut-être
même pas près de l'équilibre parce que, même si on réduit de 25 %,
30 %, il y a encore une
croissance phénoménale des gaz à effet de serre générés annuellement. O.K.? Ça
fait que, si j'assume que nous, on fait très bien avec toute l'énergie dont on dispose... mais il va y avoir des
gens qui vont être derrière ça. Comment on va faire pour rencontrer
notre objectif de 1 trillion de tonnes ou l'objectif du 2 °C pour
2050?
M. Bourque
(Alain) : Bien, en fait, c'est clair que c'est un travail commun entre
les États, de pouvoir se donner — notamment à Paris, là — des objectifs ambitieux pour pouvoir ne pas
aller au-delà du quota global disponible pour pouvoir maintenir le
changement climatique à 2 °C. Je prends comme exemple, là, la communauté européenne.
Il y a déjà plusieurs années, lorsqu'ils ont
défini leurs objectifs, ils ont déjà à l'interne, à l'intérieur de leurs pays,
négocié quelles étaient pour être les
réductions de chacun des pays, selon leurs capacités, etc., pour pouvoir
atteindre une cible globale. Alors, c'est un petit peu le même travail
qu'il faut faire à l'échelle planétaire.
Dans le rapport du
GIEC, on montre mathématiquement parlant que c'est tout à fait faisable de
respecter des scénarios d'émissions de gaz à
effet de serre qui vont nous maintenir sous le 2 °C, mais il y a
clairement aussi toute une autre
panoplie de scénarios où les États ne prennent pas des décisions de réduction
abrupte de réduction d'émissions de gaz à effet de serre, et donc ça
nous amène à des changements du climat supérieurs à 2 °C.
Donc,
la science, naturellement, surtout le Groupe de travail III, s'occupe de faire
des analyses purement mathématiques
et, en fait, même détermine que les moyens technologiques sont disponibles.
Mais c'est sûr que, par la suite, ça prend une volonté assez
impressionnante. Puis on parle d'un projet de société, là, vraiment majeur, de
réduire ces émissions de gaz à effet de serre là et de faire un transfert de
systèmes d'énergie.
M.
Bolduc : Est-ce que, dans ce bilan-là dont vous parlez, on a... Vous
avez parlé brièvement du méthane tout à l'heure. Est-ce que vous avez mesuré l'impact potentiel de l'effet des
pergélisols qui vont dégeler et le dégagement de ce méthane-là qui va avoir un impact direct pour au
moins un siècle, là, dans l'atmosphère? Puis est-ce que ça, c'est inclus
là-dedans ou c'est ce que je qualifierais des variables qui ne sont pas
incluses dans les paramètres de réchauffement climatique?
M. Bourque (Alain) : Dans les premiers rapports du GIEC, c'étaient très clairement des
paramètres qui n'étaient pas inclus.
De plus en plus, ils sont inclus, mais c'est ce qui fait dire à beaucoup de
gens, en fait, que les rapports scientifiques
du GIEC sont plutôt conservateurs parce que, lorsqu'il y a des inconnus, on les
cite, on donne des ordres de grandeur,
mais on est plutôt conservateurs. Donc, tant qu'on n'a pas les études... Puis
c'est en général pour ça que, d'un rapport à l'autre, on voit qu'il y
a... En fait, puis même quand on voit les gammes d'incertitude liée aux
changements climatiques, il y a davantage
d'incertitudes vers des changements plus importants qui sont possibles que des
changements moins importants parce que la science a tendance à être assez
conservatrice dans ses prévisions.
M. Bolduc :
Merci. On a parlé de deux éléments négatifs, on va parler d'un élément très
positif, celui de l'absorption des... en
fait, des gaz à effet de serre dans les océans, qu'il y a 10, 12 ans, on
qualifiait d'autour de 60 %, que, là, on a ralenti à 30 % à cause des absorptions et de l'acidification.
Est-ce que vous pourriez nous parler un peu aussi de ce paramètre-là
puis comment ça va évoluer?
M. Bourque
(Alain) : En Fait, moi,
malheureusement, je ne suis pas spécialiste dans ce domaine-là. Quand on
a développé nos notes pour notre intervention, il y avait notamment le
chercheur Damon Matthews de l'Université de Concordia,
qui est d'ailleurs un des chercheurs du Québec qui est à la fois dans le Groupe
de travail numéro I et le Groupe de travail numéro III, qui
lui, malheureusement, aurait pu être ici pour répondre plus en détail. Mais le
point, c'est simplement de rappeler qu'effectivement plus le changement
climatique se concrétise, moins l'environnement est capable d'absorber ce supplément d'émissions de gaz à effet de serre.
Alors, pour l'instant, on peut dire merci aux océans d'avoir absorbé une
partie du CO2, mais plus le temps avance, moins c'est le cas, puis
c'est bien documenté.
M.
Bolduc : O.K. Maintenant, pour moi, l'effet des changements
climatiques s'accélère dans le Nord de façon beaucoup plus dramatique. Est-ce que vous croyez qu'il va y avoir, pour
la province de Québec, une grande partie de son territoire au nord, des
effets dévastateurs sur les changements puis est-ce que vous avez évalué ça?
• (16 h 10) •
M. Bourque
(Alain) : En fait, c'est
quand même une prévision assez difficile à faire, de demander s'il va y
avoir des impacts dévastateurs. Juste pour
vous montrer que la science évolue aussi, il y a à peu près 15 ans, avant
la création d'Ouranos, on
s'inquiétait beaucoup de la dégradation du pergélisol et la possibilité de voir
des glissements de terrain extrêmement
importants qui pourraient emporter des villages et des choses du genre. Avec la
science, on a réalisé qu'avec de la bonne
surveillance, un bon suivi des conditions de pergélisol dans le sol, etc., oui,
il peut y avoir des risques, des
glissements de terrain, des impacts négatifs, etc., mais que, si on faisait un
bon suivi, on pouvait réussir à anticiper ces risques-là et, si on
changeait nos règles d'aménagement du territoire, on pouvait quand même réussir
à s'adapter ou à réduire une certaine partie de ces risques-là.
Mais, encore une fois, c'est là que... ce qui devient important, c'est que, si les changements du climat atteignent les valeurs supérieures de changements climatiques, le
changement climatique se fait beaucoup plus vite, et là il y a beaucoup
plus de surprises. Et ça, plus, donc, les changements du climat seront
importants, plus les risques de surprises seront importants. Puis, même à 2 °C, là, les risques de surprises sont
significatifs. Je donne l'exemple, en Colombie-Britannique, du dendroctone du pin qui a essentiellement, là,
détruit une partie de la forêt de pins de Douglas de la Colombie-Britannique.
Alors, ça, c'est considéré comme une
surprise parce que c'est le genre de scénarios pour lesquels on
s'attendait peut-être à... scénario
catastrophe pour certains secteurs de l'industrie, là, qu'on croyait pouvoir se
produire en 2020, 2030, 2040, mais finalement
ça s'est produit beaucoup plus rapidement. Donc, il
y a cette notion de surprises là, qui
sont connues mais qui sont toujours...
qui font partie des scénarios mais pour lesquelles vous allez avoir
difficilement un scientifique qui va vous dire : En 2025, il va se
passer telle catastrophe.
M.
Bolduc : Est-ce que
c'est la raison fondamentale pour laquelle vous nous dites que le 37,5 % ou le 40 % est une valeur minimale et qu'il faudrait maximiser les
réductions de nos cibles, de façon générale, tous ceux qui peuvent y gagner quelque chose devraient le faire absolument
pour minimiser, justement, ce qu'on qualifierait... ces inconnues-là?
M. Bourque
(Alain) : Bien, tout à fait.
Comme je le mentionnais dès le début, GIEC parle du seuil de plus 2°
parce que plus on va au-dessus du 2 °C, plus on a d'impacts irréversibles,
majeurs et largement étendus.
Le Président (M. Reid) :
Quelques secondes.
M.
Bolduc : Quelques secondes. Bien, écoutez, M. Bourque, je vous
remercie beaucoup de nous avoir éclairés, puis merci beaucoup pour
l'information technique.
M. Bourque (Alain) : Ça me fait
plaisir.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Nous passons maintenant à
l'opposition officielle. M. le député de Terrebonne.
M. Traversy : Merci beaucoup,
M. le Président. M. Bourque, merci d'être avec nous encore une fois en cette
Assemblée nationale du Québec, qui est probablement votre deuxième maison
depuis quelques semaines. Et on dit : Jamais
deux sans trois. Fort probable que nous aurons la chance de se revoir. Bon, je
constate malheureusement que nous n'avons
pas de mémoire, mais nous avons une mémoire vive qui est avec nous aujourd'hui.
Donc, je vais tenter d'extirper toutes les réponses possibles qui vont
pouvoir nous aider à éclaircir un peu nos débats. Je tenais tout d'abord à vous
remercier, donc, comme je viens de le faire
d'entrée de jeu, pour votre contribution au débat sur les changements
climatiques. Il n'y a pas beaucoup
d'organismes... en fait, je pense que vous êtes peut-être même le seul
organisme scientifique, là, qui se préoccupe des changements climatiques
de façon aussi pointilleuse. Vous me faites signe de la tête, oui. En tout cas,
il n'y en a pas des tonnes. Vous êtes celui que je connais le mieux.
Alors,
j'entame donc cet échange avec vous sur la question de la cible fixée par le
gouvernement. D'entrée de jeu, vous nous avez rappelé que, bon, certains
comités-conseils avaient spécifié que 37,5 % était un minimum à atteindre
pour le Québec. Vous avez, dans votre présentation, mis aussi la table en
disant que le Québec est le mieux équipé pour travailler sur les changements climatiques de
par ses richesses naturelles, de par ses sources diversifiées d'énergies
renouvelables qui sont potentielles.
Alors, je vous pose
la question simple : 37,5 %, êtes-vous satisfaits? Et, sinon, quelle
aurait été une cible plus audacieuse mais réaliste à vos yeux?
M. Bourque (Alain) : Bien, enfin, encore une fois, comme on l'a mentionné déjà auparavant à
une précédente réponse, c'est sûr que
les cibles se font dans un cadre planétaire. Alors, la planète intègre toutes
les émissions de gaz à effet de
serre. Et c'est sûr que davantage les pays peuvent en faire, plus rapidement on
peut atteindre des objectifs qui sont quand même passablement ambitieux.
Notre
point, c'est de dire que c'est clair que le Québec est en position pour se
donner les cibles les plus ambitieuses, compte tenu des ressources et
des possibilités qu'ils ont à la disposition, et que, si le Québec ne prend pas
ce saut particulièrement audacieux là, il
est clair que d'autres régions du monde vont avoir aussi très clairement un
argumentaire pour dire : Bien, écoutez,
le Québec ne le fait même pas, même
s'ils ont beaucoup de ressources pour pouvoir atteindre ces objectifs-là.
Alors, je ne peux pas
vraiment vous donner une valeur précise. Je sais que Damon Matthews a déjà
publié un ouvrage scientifique qui déterminait que, par exemple, pour le Canada,
des réductions d'au moins 40 % et de 95 % pour 2050 seraient requises lorsqu'on fait un partage par rapport à l'ensemble des contributions des pays de la planète. Donc, on voit qu'on est quand même
assez proches de ces cibles-là mais qu'il faut rappeler naturellement que, si,
plutôt que d'atteindre un 40 %, on atteint un 35 %, ce 5 % là
devient de plus en plus difficile à récupérer avec le temps. Un petit peu comme
lorsque vos planificateurs financiers vous parlent d'accumuler de l'argent pour
la retraite. Ils vous disent certainement qu'il est mieux d'économiser, de débuter à
économiser le plus tôt possible pour pouvoir allonger la période de
réduction, d'avoir une période de réduction la plus longue possible et pour que
ce soit beaucoup moins difficile au cours des dernières années. Alors, c'est un
peu la même chose au niveau des émissions de gaz à effet de serre.
M. Traversy : Bien, je vous
remercie de cette pédagogie qui est très imagée et qui permet donc à ceux qui
nous écoutent, présentement à la maison, de se faire une idée. J'avais bien écouté votre présentation. Vous aviez parlé d'équité
entre les différents pays, d'éthique, en fait, là, selon la présentation que
vous nous avez proposée. Et de ce que je comprends,
c'est qu'on n'est pas loin de l'idéal, mais 40 %, ce ne serait pas non
plus inatteignable, ça pourrait... Et d'ailleurs il y a des groupes
avant vous qui sont venus nous témoigner du fait qu'une cible de 40 %
pourrait être peut-être plus audacieuse et plus représentative des efforts que
le Québec peut apporter.
Je
comprends que vous n'êtes pas déçu de la position de départ du gouvernement, mais
vous n'êtes pas fermé non plus à
l'amélioration de celle-ci. Par contre, c'est très intéressant, vous nous dites
qu'avec le temps un certain nombre de pourcentage
peut rendre plus difficile l'atteinte de notre cible de réduction de gaz à
effet de serre. Selon les informations que
nous avons reçues, on nous dit que, pour atteindre le 37,5 % actuel fixé
par le ministre de l'Environnement, il faudrait diminuer, d'ici 2030, de 1 % nos gaz à effet de serre par année
pour pouvoir y parvenir et puis, par la suite, 4 % par année pour
atteindre une cible de 80 % de réduction d'ici 2050.
Alors, vous qui êtes
notre sommité en matière de changements climatiques, pouvez-vous nous dire, et
ça va rejoindre un peu mon collègue de Dubuc
et de Mégantic : Croyez-vous que c'est réaliste? Croyez-vous qu'on a le
potentiel d'être capables de tenir une telle cadence?
M. Bourque (Alain) : Mais en fait, comme le l'ai mentionné d'entrée de jeu, Ouranos n'est
pas spécialisé dans l'analyse des
moyens pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. On est beaucoup
plus, là, autour de la science du changement
climatique, les impacts des différents scénarios et d'émissions de gaz à effet
de serre. Et donc nous ne sommes pas
en position, nous n'avons même pas les spécialistes scientifiques dans nos
réseaux et à l'intérieur d'Ouranos pour faire ces analyses-là de faisabilité de réduction des gaz à effet de serre.
Nous, ce qu'on fait, c'est qu'on prend les différents scénarios d'émissions de gaz à effet de serre, qui
vont du plus optimiste au plus pessimiste, et on fait des analyses de
risques pour les conséquences que ces
différents scénarios-là vont générer pour le Québec. Et donc nos constats,
c'est, par exemple, que, si on continue avec un scénario «business as
usual» d'émissions de gaz à effet de serre, le climat du Québec se réchauffe, par exemple, dans les régions nordiques
jusqu'à 10, 12 °C, là. Donc, ça, c'est des changements absolument
impressionnants que l'on ne veut pas atteindre.
Donc,
notre expertise scientifique se situe surtout au niveau de la science et de
l'adaptation. Le GIEC fonctionne comme
ça, hein? Il y a un groupe de travail I sur les bases scientifiques, un groupe
de travail II sur les impacts et l'adaptation
et un groupe de travail III sur les moyens pour réduire les émissions de gaz à
effet de serre. Nous sommes spécialisés principalement dans le groupe
qui travaille I et II, mais pas dans le III.
• (16 h 20) •
M.
Traversy : Donc, M. Bourque, je retiens que, si vous aviez plus
de moyens, plus de ressources et un mandat plus élargi, vous pourriez être encore plus à même de nous répondre à ce
genre de question. Mais je comprends la spécificité de votre organisme et de votre mission. Donc, je
vais m'en tenir plus à la science et à l'adaptation pour vous garder
dans votre zone de confort.
Donc, le plan
d'action sur les changements climatiques est doté d'un plan d'environ
80 millions de dollars d'ici 2020 pour
tenter justement de lutter contre ces changements climatiques, contre les gaz à
effet de serre, notamment les
érosions, adapter nos infrastructures, etc. Certains groupes nous disent que
l'utilisation de ces argents n'est pas nécessairement optimale pour l'instant,
ou, du moins, qu'on est un peu tièdes ou timides, ou on a de la difficulté à la
dépenser pour atteindre peut-être le maximum de potentiel, là, que ces investissements-là
pourraient offrir sur la lutte aux changements climatiques.
Je voulais avoir votre avis sur cette situation.
Est-ce que vous pensez qu'on devrait accélérer le pas en ce
qui a trait à l'utilisation de l'argent disponible pour le plan d'action
sur les changements climatiques?
Le Président (M.
Reid) : En 30 secondes.
M. Bourque (Alain) : En fait, on pense que toute politique de combat contre les changements climatiques
doit inclure de la réduction, doit inclure
de l'adaptation. Je pense que, présentement, c'est de l'ordre du 7 % du plan d'action Changements
climatiques qui est dédié à l'adaptation. Est-ce que c'est un montant suffisant
ou pas? C'est difficile à dire. En tout cas,
c'est clair que le dossier de l'adaptation, avec le temps, prend
continuellement de l'ampleur. Et je pense qu'il ne faut pas penser que c'est une enveloppe fermée que de
dire : Il y a de l'argent pour les changements climatiques. Il y a
une partie pour la réduction puis une partie pour l'adaptation. Je veux dire,
au Québec puis, en fait, partout dans le monde depuis des décennies, on gère
des risques naturels, on gère des inondations, on fait des constructions en
intégrant les changements...
Le
Président (M. Reid) : Merci! Merci! Je dois vous interrompre
pour protéger le temps qui est dédié aux autres députés. Alors, je passe
la parole au député de Masson pour le deuxième groupe d'opposition.
M.
Lemay : Merci, M. le Président. Merci, M. Bourque, d'être avec nous
encore une fois. Alors, vous savez, on parlait
justement, là, du pacte, là, 2013‑2020, là. Il y a 30 actions concrètes
dans ce pacte-là. D'ici la fin 2015 le ministre, il est supposé de nous
sortir la phase II pour les prochaines étapes.
Selon vous, là,
est-ce que vous êtes en mesure d'avoir des actions... Qu'est-ce qui devrait
être revu, modifié, corrigé? Est-ce que vous pensez qu'il y a des ajustements à
faire, qu'on devrait voir dans la phase II?
M. Bourque (Alain) : Ouf! Bien, en fait, je pense qu'il faut... Si on veut atteindre des
objectifs de 37,5 % au niveau de
la réduction, nous, notre avis, naturellement, c'est que la science devrait
jouer une contribution maximale pour tenter d'atteindre ces objectifs de réduction de l'émission de gaz... avec des
coûts-bénéfices qui sont les plus complets possible. On pense aussi qu'il faut continuer à investir en
adaptation aux changements climatiques parce que je pense qu'il faut
s'enlever l'idée que la réduction des émissions
de gaz à effet de serre va régler la totalité du dossier des changements
climatiques. Il y a une partie des impacts
qui est déjà bien amorcée, qui va se poursuivre. Et donc il faut poursuivre des
investissements en adaptation aux changements climatiques.
Encore
une fois, je pense qu'il faut que ça percole dans tout le fonctionnement de la
société. Je pense que, tout comme on
voit tous les ministères, toutes les organisations intégrer le changement
démographique dans les politiques publiques...
mais dans les façons de fonctionner, je pense qu'il faut aussi intégrer la
question du changement climatique dans
un peu tous les aspects, tous les ministères. Les municipalités sont de plus en
plus intéressées à revoir l'évaluation de leurs risques par rapport aux changements climatiques, compte tenu que
l'histoire n'est plus tout à fait représentative de ce qu'ils voient sur le terrain et de ce qui s'en
vient pour l'avenir. Donc, il faut continuer, je pense, à faciliter ce
transfert-là.
Pour
le volet adaptation, alors, c'est clair qu'Ouranos joue un rôle majeur en
sciences et en adaptation depuis un bout
de temps, mais il ne faut pas qu'Ouranos fasse ça tout seul, là. Il faut qu'il
y ait des partenaires, il faut qu'il y ait des gens, sur le terrain, qui puissent faire de la recherche-action puis du
transfert technologique pour innover en adaptation. Alors, c'est
peut-être ce que je peux dire, là, par rapport à votre question.
M.
Lemay : Merci bien. En tout cas, il y a plusieurs éléments. Donc, assurément,
c'est intéressant. Mais j'ai cru comprendre, en regardant le ministre,
que peut-être qu'il n'y aurait pas la phase II, finalement. C'est possible?
Non? Il ne l'a plus? O.K., bon.
M. Heurtel :
...ça n'a jamais été prévu qu'il y avait une phase II.
M.
Lemay : ...pourtant, c'est ce qu'on voit dans la documentation, là, du
MDDELCC, là. Donc, bref... En tout cas, on reviendra. On va continuer
avec monsieur ici.
Alors,
vous nous avez mentionné tout à l'heure le rôle de toute l'économie mondiale
puis vous avez dit : Il faut qu'à quelque
part on puisse aider nos voisins, compte tenu de la superficie de notre
territoire puis toutes les mesures concrètes qu'on est en mesure de
faire ici, au Québec, pour la réduction des GES.
Dans
le plan, le ministre cible deux activités bien distinctes, là, une activité qui
pourrait réduire de 10 mégatonnes puis
une autre, tu sais, qu'on peut réduire de 5 mégatonnes. Ça fait que, peu
importe c'est quoi, la cible qu'on prend, là, que ce soit 35 %, 37,5 % ou 40 %, là, tu sais, au
ministère, on pense qu'on est capables de réduire de 15 mégatonnes.
Mais là ce que vous êtes en train de me
dire, c'est qu'aider nos voisins, compte tenu de notre territoire... Moi, ce
que je comprends, c'est que, dans
le fond, on ne devrait même pas aller acheter des crédits carbone, on devrait
faire une réduction de 25 mégatonnes,
sinon plus, puis même... après ça, de pouvoir aider nos voisins. C'est ça
que vous voulez dire, dans le fond, qu'il y a un potentiel aussi, au Québec,
pour économiser les 25 mégatonnes?
M. Bourque
(Alain) : Je ne faisais pas référence aux moyens spécifiques pour
réussir à soit avoir des crédits ou ne pas
avoir des crédits. À titre de scientifiques, tout ce qui nous intéresse dans
les faits, là, c'est les données qui nous disent qu'il faut réduire les émissions de gaz à effet de serre. Honnêtement, qu'elles soient émises au Québec, ou en Ontario, ou dans d'autres pays, ça
importe peu en bout de ligne pour le climat. Il faut simplement réussir à faire
un effort collectif pour réduire ces
émissions de gaz à effet de serre. Et donc je vais donc laisser plutôt les
spécialistes autour des moyens les plus stratégiques, ou les plus
rentables, là, ou les façons socioéconomiques de le faire conclure là-dessus.
M. Lemay : Parfait! Vous avez
mentionné au tout... D'abord, il me reste combien de temps?
Le Président (M. Reid) : Un
peu moins qu'une minute.
M.
Lemay : Moins d'une minute.
Au tout début, vous avez mentionné la méthode de calcul avec le GIEC.
Puis nous, pour cet exercice-là, on a pris
notre calcul à nous au Québec. Donc, il va y avoir une différence entre comment
que le GIEC a calculé et comment que nous,
on l'a calculé. Vous voyez ça comment, là, dans le fond? Tu sais, comme,
si moi, je me fie aux chiffres du GIEC, là, puis je regarde où c'est
qu'on était en 1990, ça voudrait dire qu'à la fin il faudrait qu'on atteigne 56,1 mégatonnes et non 52,9.
Vous dites quoi là-dessus? On continue de viser le 52,9 ou on convertit
aux chiffres du GIEC, et, bien, ça sera ça, les nouveaux chiffres?
M. Bourque
(Alain) : C'est parce qu'en fait les rapports du GIEC, ils
n'offrent pas des chiffres pour le Québec spécifiquement, là. Le GIEC offre des chiffres pour la planète en
général, et, naturellement, reste aux négociateurs, dans des événements comme celui de Paris, d'ensuite
déterminer la juste part de chacun des pays pour atteindre ces objectifs-là.
Donc, il faut quand même faire attention
entre l'utilisation des chiffres du GIEC et de l'application spécifique à des
régions. Nous, ce qu'on a dit d'entrée de
jeu dans notre présentation, c'est qu'on était quand même assez heureux, en
fait, même très heureux de voir l'importance de la science dans ce
document-là. Puis d'ailleurs, je veux dire, il y a beaucoup...
Le Président (M. Reid) :
Rapidement.
M. Bourque
(Alain) : ...de régions du
monde qui font des choix politiques autour des émissions de gaz à effet
de serre avec, en apparence, une certaine absence de science. Alors, ça nous
rend souvent perplexes.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Nous passons maintenant au temps
réservé aux députés indépendants. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Massé : Merci, M. le Président.
Merci, M. Bourque, de votre présentation. Ce que je comprends, pour poursuivre un petit peu la réflexion de mon
collègue : certes, que c'est un effort collectif, mais le Québec a une
posture, une position intéressante de par comment notre territoire est
constitué. Mais vous avez aussi parlé tantôt qu'il y a une dimension éthique dans le partage de l'atteinte
des objectifs planétaires. Et c'est sûr que, bon, je trouve ça fort
important et intéressant parce que, dans les
faits, si on part du principe que ce serait le fun que tout le monde sur la
planète mange à sa faim, on sentirait peut-être une responsabilité aussi
de jouer un plus grand rôle de notre propre réduction de gaz à effet de serre.
Alors, ce que
je voulais voir avec vous, c'est... Vous avez dit tantôt : Si on poursuit
«business as usual», on risque de se
retrouver dans de mauvaises postures. Non. En fait, je n'aurai pas le temps de
vous amener cette question-là. Je veux aller... J'ai juste trois
minutes. J'en aurais 25...
Le Président (M. Reid) : Il
en reste une.
Mme Massé : Vous avez... Oui, il en
reste deux, à part de ça. Vous...
Le Président (M. Reid) : Une
minute.
Mme
Massé : Vous avez mentionné l'importance du rapport, comment la science est
apparente. Je dirais, même le comité-conseil conseille qu'il est
nécessaire de revoir à tous les cinq ans notre cible pour s'assurer que,
justement, la science ne nous apprend pas
que ce n'est peut-être pas 37,5 % mais 42,8 % qu'il faudrait plutôt s'enligner
si on voulait atteindre notre grand
objectif. Est-ce que vous considérez que cette révision est nécessaire aux cinq
ans? Est-ce que vous trouvez que cinq ans, comme le comité-conseil,
c'est assez? Ça devrait être plutôt aux trois ans? Qu'est-ce que vous pensez de
ça?
• (16 h 30) •
M. Bourque
(Alain) : En fait, on pense
surtout que c'est une excellente idée que d'avoir une certaine
flexibilité puis des marges d'ajustement au fur et à mesure que, justement, la
science fait des mises à jour de l'information. On est quand même... On parle ici de scénarios pour 2030, 2050. Bien, en
fait, je veux dire, on n'a pas fait d'analyse là-dessus, mais on pense que cinq ans, c'est probablement
tout à fait raisonnable, là, de pouvoir ajuster des cibles. Et
naturellement il y a de l'incertitude des
deux côtés. Peut-être que ça peut être ajusté un petit peu vers le 35 %,
si jamais on apprend que, finalement, le méthane en Sibérie, qui est en
train de se dégager, ce n'est pas si pire que ça ou des trucs du genre.
Donc, c'est
une bonne idée, d'avoir des mécanismes d'ajustement en cours de route. Ça donne
de la flexibilité, la capacité d'adaptation, etc.
Le Président (M. Reid) : Merci
beaucoup! Merci pour votre présence, votre contribution à nos travaux.
Alors,
je lève la séance pendant quelques instants, le temps de permettre à notre prochain
groupe, la Fondation David-Suzuki, Québec, de prendre place.
(Suspension de la séance à 16 h 31)
(Reprise à 16 h 34)
Le
Président (M. Reid) :
À l'ordre, s'il vous plaît! À
l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons
reprendre nos travaux. Nous recevons maintenant les représentants de la
Fondation David-Suzuki pour le Québec. Alors, vous connaissez la routine. Vous
avez 10 minutes pour faire votre présentation. Par la suite, nous aurons une
période d'échange. Je vous demande de vous présenter, de présenter la personne
qui vous accompagne pour les fins de l'enregistrement. À vous, la parole.
Fondation David-Suzuki
M. Mayrand (Karel) : Tout à fait.
Merci beaucoup. Alors, je m'appelle Karel Mayrand. Je suis directeur général
pour le Québec à la Fondation David-Suzuki, accompagné de Jean-Patrick
Toussaint, qui est chef des projets scientifiques à la fondation au Québec.
Alors,
d'entrée de jeu, bien, nous sommes très heureux de nous retrouver ici. Nous y étions en 2009. Nous avions soutenu le gouvernement dans l'établissement de la cible pour 2020. Encore
une fois, nous apportons notre
soutien à la cible qui a été
annoncée. Et évidemment, pour nous, cette cible-là, on considère que
c'est une cible qui est une cible ambitieuse. On peut faire encore plus, on peut faire encore mieux. Donc, on
encourage le gouvernement à regarder la possibilité d'aller jusqu'à moins 40 %,
mais ça peut se faire dans une étape ultérieure. C'est-à-dire, on appuie aussi
l'idée de réviser la cible en fonction des nouvelles connaissances
scientifiques.
Donc,
là-dessus, avant de passer la parole à M. Toussaint, ce qui est important
pour nous... Il n'y a rien de plus dangereux
qu'une cible qui est établie pour dans 15 ans ou dans 18 ans dans ce
cas-ci. Pardon. Dans 15 ans mais 18 ans à partir, donc, de 2012, l'année du dernier
inventaire qu'on a. Ça nous laisse peu de temps puis, en même temps, ça
nous laisse beaucoup de temps. Et ça serait
facile de dire : On va attendre puis on va voir, on va régler le problème
plus tard, on va le pelleter en avant.
Et, à notre sens, ça serait une erreur. Et, si on veut atteindre moins
37,5 % en 2030, il faut commencer dès maintenant à accélérer la
cadence. Et ça va être le sens de notre présentation aujourd'hui.
M. Toussaint (Jean-Patrick) : Donc,
bonjour à tous et toutes. Donc, je vais un peu reprendre ce que M. Bourque a mentionné avant nous. En fait,
la réalité de la lutte... des changements climatiques est bien présente, je
pense qu'on en est tous et toutes
conscients, puis ça représente un des plus grands défis du siècle. Donc, la
science y est, on a besoin de s'y
attarder. Et, comme Karel vient de le mentionner, je pense qu'il va falloir
bien faire nos devoirs maintenant plutôt que de pelleter le problème en
avant.
Et ce qui est encourageant, ce qu'on voit au
niveau national et, en fait, international, c'est qu'il y a beaucoup d'étapes
qui ont été mises en place pour justement... bien, pour agir sur la lutte aux
changements climatiques. On pense tout
récemment à la Chine, qui vient d'annoncer son intention de créer un marché du
carbone dès 2017, le Clean Power Plan
des États-Unis et l'Europe qui s'est engagée à réduire ses émissions de gaz à
effet de serre de 40 % par rapport au niveau de 1990 d'ici 2030.
Bien, même ici, plus près encore, là, il y a l'Ontario, là, qui envisage de se
joindre au marché du carbone. Donc, vraiment, je dirais, les astres sont
alignés pour qu'il y ait une action forte qui se passe au niveau de la lutte
aux changements climatiques.
Maintenant au Québec, on jouit d'une bonne situation,
c'est-à-dire que, comme vous le savez tous et toutes, on a réussi à réduire nos
émissions de gaz à effet de serre de 8 % depuis 1990, entre 1990 et 2012.
Donc, vraiment, il y a eu une bonne avancée, et c'est... comme je vais le dire
dans les prochaines minutes, la prochaine minute, on doit poursuivre le chemin.
Il y a peut-être un fait intéressant. On a fait
un sondage à la Fondation David-Suzuki, au niveau national, tout récemment, en fait, au mois d'août, et qui
indiquait que la plupart des Canadiens considèrent la lutte aux
changements climatiques comme un enjeu
crucial et que 70 % des Québécois appuient la signature d'une entente
ambitieuse sur le climat à Paris. Donc, c'est donc dire que la
population aussi supporte une action forte sur le climat.
Concernant
les défis du Québec, évidemment, je l'ai mentionné, on a réduit nos émissions
de gaz à effet de serre de manière
assez importante depuis les dernières années, et l'intensité des émissions de
GES par rapport au PIB a diminué de
40 % entre 1990 et 2012. Et donc, ce qu'on constate, c'est... le rythme
annuel moyen de l'intensité de carbone a diminué quand même d'environ
1 % de manière annuelle.
Pour
atteindre la cible minimale de moins 37,5 %, il va falloir poursuivre
cette route-là. La réalité est que la plupart de ces réductions-là, qui
ont été faites dans le passé, c'étaient, si vous me permettez l'expression, un
peu les «low hanging fruits». Donc, il va falloir maintenant s'attaquer aux
tendances lourdes d'émission, entre autres au niveau du transport puis de l'aménagement. Mais je vais laisser tout à l'heure la
parole à Karel pour qu'il puisse expliquer un peu à quel niveau on
aimerait que les gouvernements s'attardent.
• (16 h 40) •
Donc,
évidemment, une part des réductions de nos émissions de gaz à effet de serre
devra se faire par l'achat de crédits de carbone de l'étranger. Certains
pourront voir là-dessus une fuite de capital, mais ce qu'il faut prendre en considération, c'est aussi le gain net à aller chercher si
on considère réduire notre consommation de pétrole et notre importation de pétrole à l'étranger. Donc, à
chaque année, c'est environ une fuite de 12 à 14 milliards de dollars vers les marchés étrangers, une fuite de capitaux vers les marchés étrangers. Si
on compte réduire du tiers, tel qu'il est proposé dans le document de consultation, c'est environ de 4 milliards de dollars
qu'on va réduire cette fuite de capital. Donc, ça, c'est une notion qui est à prendre en considération. Et,
lorsqu'on compare ces chiffres à, disons, ce que pourrait coûter l'achat
de crédits de carbone, c'est quand même...
il y a une bonne différence. Donc, l'achat de crédits de carbone n'est pas si
cher, au bout du compte, par rapport aux gains qu'on va faire en perte de capitaux qui ne seront pas perdus
à travers la réduction de notre importation de pétrole.
Pour la suite, pour les mesures un peu plus
concrètes de ce qu'on envisage faire, ce qu'on propose dans notre mémoire, je
vais laisser la parole à mon directeur, Karel Mayrand.
M. Mayrand (Karel) : Oui. Alors, le
nerf de la guerre, évidemment, ça va être le secteur des transports, qui
représente maintenant près de la moitié de nos émissions de gaz à effet de
serre, les trois quarts, en tout cas, de notre consommation de pétrole. Il
faut rappeler aussi que le Québec a
un déficit commercial de 25 milliards qui est creusé par le couple pétrole, automobile. Ça nous coûte vraiment
une petite fortune. Et, en ce moment, le parc automobile, au Québec, augmente deux fois plus vite que la population.
Alors qu'il y a quelques décennies, en fait, il y a
15 à 20 ans, on vendait un véhicule utilitaire sport pour trois voitures
standard, aujourd'hui, on en est à un véhicule utilitaire sport, donc un
camion, pour chaque auto vendue.
Et, quand on regarde les chiffres de
l'inventaire du Québec, on se rend compte que la catégorie des véhicules utilitaires sport, les camions légers, ont
augmenté leurs émissions de 100 %
depuis 1990, alors que, chez l'industrie, on les a réduites de 21 %. Donc, ça vous donne une
idée de la préférence que nous avons, au Québec, pour l'achat de
véhicules plus énergivores, plus gros... vient grever nos objectifs de lutte
aux changements climatiques, réduction des gaz à effet de serre mais aussi l'augmentation du revenu... ça
vient grever le revenu annuel disponible des ménages parce que,
maintenant, les ménages consacrent 20 %
de leur revenu annuel aux transports comparativement à 15 % il y a 10 ans.
Donc, on est dans une mauvaise tendance autant au plan économique qu'au
plan environnemental. Le ménage moyen qui a un véhicule utilitaire sport paie
3 425 $ de plus qu'un ménage qui roule dans une auto compacte ou
intermédiaire.
Alors, la
fondation propose d'abord, et c'est une proposition qu'on a faite il y a
plusieurs années déjà, de mettre en place de façon urgente un
bonus-malus, c'est-à-dire un programme qui surtaxe les véhicules très
énergivores et qui subventionne l'achat de
véhicules moins énergivores. Ça va dans le sens des mesures d'écofiscalité qui
ont été mises de l'avant... en fait, l'idée de l'écofiscalité qui a été
mise de l'avant dans le rapport Godbout.
Aussi, un programme d'inspection obligatoire des
véhicules. Au Québec, il y a une minorité, une petite minorité de véhicules automobiles qui polluent pour à peu près 30 %
de la pollution automobile au Québec, même si on parle d'à peu près 5 % à 10 % du parc automobile. Ce n'est pas
normal que les Québécois dans leur ensemble doivent payer pour ça. Et le Québec est devenu un petit peu la
poubelle des autos usagées en Amérique du Nord parce qu'évidemment,
comme il n'y avait pas d'inspection ici, les Ontariens nous exportent leurs
voitures.
On mentionne la question des péages routiers du
bout des lèvres dans le document de consultation, et, à notre sens, je pense que c'est un débat de société qui
doit se faire parce que le péage routier, ce n'est pas seulement une
façon d'aller chercher des revenus, c'est un
outil de gestion de la demande en transport. Ça fait 50 ans qu'on ne fait que
gérer l'offre, c'est-à-dire on augmente
l'offre routière tout le temps pour répondre à la demande. Et les études
démontrent qu'en six ou sept ans,
quand on augmente, on fait une voie d'autoroute de plus, on allonge notre
route, le trafic vient remplir ça. Donc, c'est un peu comme si on avait toujours
une course par en avant puis on n'est jamais capables de régler le problème. Donc, le péage intelligent, bien fait,
pourrait aider dans une optique d'utilisateur-payeur et de pollueur-payeur.
Il faut
rehausser les investissements dans les transports collectifs. Il y a des fonds,
en ce moment, du Fonds vert qui dorment au ministère des Transports, et
la coalition transit va en faire mention tout à l'heure. Et, pour nous, c'est important de faire ces investissements-là
maintenant parce que ce qu'on veut, c'est offrir des alternatives aux
citoyens pour qu'ils puissent faire les choix qui sont économiques pour eux et
qui sont aussi dans le sens de la lutte aux changements climatiques. Rappelons
que les investissements en transport collectif au Québec génèrent 2,7 fois plus
d'emplois et 2,5 fois plus de retombées économiques que les investissements
dans le transport routier.
Finalement, et on va terminer là-dessus, on a...
C'est terminé?
Le Président (M. Reid) :
Bien, vous avez quelques secondes. Rapidement.
M. Mayrand
(Karel) : O.K. 30
secondes. Nous proposons d'élever la lutte aux changements climatiques au
rang de stratégie pangouvernementale, avec des objectifs, imputabilité pour
l'ensemble des organismes du gouvernement; ensuite,
d'identifier les mesures qui vont à l'encontre de l'atteinte de sa cible,
comme, par exemple, les subventions aux combustibles fossiles, et de faire en
sorte que l'ensemble des plans, des politiques, des stratégies gouvernementales,
programmes gouvernementaux puissent passer un test climat, c'est-à-dire quel est leur impact sur l'atteinte de la cible. Et je terminerai
là-dessus.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Alors, merci de votre présentation. Nous passons maintenant à la période
d'échange. M. le ministre, vous avez la parole.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Mayrand, M. Toussaint. Un plaisir de
vous revoir à nouveau si rapidement. Merci d'être là. Merci pour votre
présentation ainsi que votre mémoire.
Moi, le point que je trouve
qui ressort beaucoup de ce que vous nous présentez, c'est qu'il y a un travail
de sensibilisation important aussi à faire, sans minimiser le reste des mesures
concrètes dont vous avez parlé — puis on en avait parlé lors de la consultation
sur le livre vert, on avait parlé du test climat, entre autres — mais,
en termes de sensibilisation... Parce que, la Fondation David-Suzuki, il y a un
gros travail que vous faites en termes d'échange, de sensibilisation, de travail avec la population, avec les groupes. Bon,
il y a une grosse partie de votre action qui est là-dessus, puis en termes de changement de comportement, en
termes de travail, parce que vous parlez... Bon, manifestement, les consommateurs, bien que, d'un côté, les sondages
révèlent... Puis on a la même information aussi. Tout le monde est pour une position, je dirais, même agressive en matière
de lutte contre les changements climatiques, mais, en même temps, quand
on voit la consommation, quand on voit les chiffres, bien, on achète plus de
véhicules à grosse cylindrée.
Alors,
prenant cet exemple-là mais peut-être d'autres, d'après vous, en termes de
sensibilisation, en termes de travail d'éducation, de communication, un,
qu'est-ce qu'on devrait faire? Parce que ça va faire partie intégrale du plan d'action qui va accompagner l'atteinte de la
cible 2030. Quels groupes devrait-on cibler? Quel genre de message devrait-on porter ou encourager d'autres
organisations à porter? Mais, plus particulièrement aussi, quels genres de
groupes? Alors, il y a les consommateurs,
mais il y a aussi peut-être, au niveau... je ne sais pas, d'autres
associations, d'autres groupes, que
vous avez peut-être croisés déjà dans vos travaux, qui sont peut-être plus
réfractaires à une cible aussi ambitieuse.
M. Bourque
(Alain) : Oui, c'est une
excellente question. Bien, d'abord, j'aimerais apporter une précision
pour répondre à votre question par rapport au
sondage qu'on a réalisé. Ce qui est intéressant, c'est que 70 % des
Québécois, 75 % des Montréalais appuient une entente ambitieuse sur le
climat, même si cela implique des pertes d'emploi ou l'augmentation du prix des biens et services. Et c'est la province au
Canada où cette proportion-là est la plus élevée et la ville au Canada
où cette proportion-là est la plus élevée.
Mais on sait très bien que, quand on touche au
portefeuille des gens, hein, la résistance est... Comme ça, pour répondre à un sondage, c'est une chose mais, quand
on y arrive concrètement, c'est une autre chose, puis d'où le travail de
sensibilisation.
Je vous
dirais que — mon
expérience là-dessus — la plupart des gens savent que... ils veulent faire la bonne
chose, prendre la bonne décision, mais, quand arrive le temps de prendre une
décision... Si, par exemple, je vis à Blainville, en banlieue de Montréal, puis je n'ai pas d'option de transport
collectif, je ne vais pas commencer à y aller en vélo, au centre-ville,
ce n'est pas possible pour moi.
Donc, ce
qu'il faut faire, la sensibilisation doit être accompagnée de... On doit offrir
des choix, des alternatives aux gens.
La sensibilisation fonctionne. J'ai déjà eu l'occasion de parler avec le Dr
Louis Drouin, de la santé publique à Montréal,
qui disait : C'est impossible de changer les habitudes de vie des gens si
on ne change pas l'environnement dans lequel
ils prennent des décisions. C'est-à-dire qu'on ne peut pas éliminer la
malbouffe si, dans un aréna, on ne vend que des frites. On ne peut pas réduire nos émissions de gaz à effet de serre en
transport s'il n'y a que de l'offre d'automobiles, routiers, et tout ça. Donc, tout effort de
sensibilisation ne sera pas possible s'il n'y a pas les mesures qui
accompagnent pour donner des alternatives aux gens.
Maintenant,
là où je dirais que je travaillerais à faire de la sensibilisation le plus,
c'est évident... bon, les jeunes sont un
groupe porteur très important. Ils sont généralement plus favorables, mais, en
même temps... Puis c'est beaucoup pour eux
qu'on le fait. Puis ils deviennent des ambassadeurs, des messagers par la suite
dans leur communauté. C'est évident aussi
qu'il y a un effort qui va devoir être fait du côté des régions, au Québec,
parce que, dans les grands centres urbains, je pense qu'on voit qu'il y
a un appui très important; ailleurs, peut-être moindre.
• (16 h 50) •
Et finalement je pense que j'essaierais de
trouver une façon de communiquer — et c'est un défi pour nous aussi — avec les ménages de classe moyenne qui vivent
en banlieue, que ce soit à Montréal, à Québec ou dans d'autres villes, et qui, pour accéder à la propriété,
vivent loin de leur travail puis se retrouvent pris à payer 20 % de leur
revenu en transport. Ils sont un peu pris
là-dedans. J'aimerais ça, moi, voir des focus groupes de ces gens-là pour
savoir qu'est-ce qui serait
intéressant pour eux parce que je pense qu'on est capables de transformer la
façon dont ils voient leur transport dans
l'avenir. La proximité est un grand enjeu. Moi, quand je fais des conférences
sur le climat, je ne demande jamais aux gens : Voudriez-vous avoir des transports collectifs? Je leur
demande : Aimeriez-vous aller dîner avec les enfants le midi? Et vous voyez tout de suite les yeux s'allumer. J'ai
vu des gens pleurer dans mes conférences. Pourquoi? Parce que c'est la
proximité qui est le produit, ce n'est pas la lutte aux changements
climatiques.
M.
Toussaint (Jean-Patrick) : Je voudrais juste rajouter peut-être la
question de l'aménagement du territoire. Je ne sais pas si Vivre en ville a déjà présenté ou s'il compte présenter,
mais je pense que ça rejoint à ce que Karel vient de dire, c'est une
question centrale, et d'où la mention, dans notre mémoire, que la question des
cibles soit bien comprise à plusieurs niveaux de l'appareil gouvernemental
parce que le gros du défi, oui, c'est le transport, mais l'aménagement du
territoire va dicter justement aussi tout ça. Donc, ça, ça va être très
central. Donc, faire de la sensibilisation à ce niveau-là puis d'offrir des
choix aux gens, ça va être un bon défi.
M.
Heurtel : Même question, mais au niveau cette fois-ci... Là, on a
parlé plus, bon, des consommateurs, de la population en général,
citoyens, citoyennes. Même question maintenant, les groupes, je dirais,
secteurs industriel, économique, qui ont des
réserves ou, en tout cas, qui disent... Bon, par exemple, on a entendu déjà des
premières réactions à la proposition
de la cible, de dire : Bon, il faut agir avec prudence. Il faut faire
attention à notre compétitivité. Bon, des arguments qu'on entend, qu'on
a entendus pour la cible 2012, qu'on a entendus pour la cible 2020.
De votre point de vue également, de votre
expérience, quelle réponse offrez-vous à ce type de commentaire?
M.
Mayrand (Karel) : C'est une bonne réponse. J'ai oublié, dernière
question, de vous offrir... En fait, vous aurez toute la collaboration de la
Fondation David-Suzuki, je suis certain de d'autres collègues, pour faire ce
travail de sensibilisation là.
Mon
expérience de travail avec le monde des affaires, le milieu industriel, est
qu'au Québec le milieu industriel est très
progressiste en matière de lutte aux changements climatiques. Dans le cadre de
L'Alliance pour l'économie verte, l'alliance
Switch, on travaille avec des gens, par exemple, Gaz Métro qui est un
distributeur de combustibles fossiles et qui travaille à réduire la consommation lui-même. Donc, il y a des
joueurs très progressistes. Il y a d'autres joueurs, peut-être, qui sont
plus craintifs. Et je pense que le pari qui doit être fait, c'est de dire à ces
gens-là : Faites confiance à la capacité
que les politiques publiques vont pouvoir accommoder d'une certaine manière
parce qu'on a, par exemple, la bourse
du carbone. Le marché du carbone a été établi, et on a réussi à créer une zone
de confort pour des milieux qui se sentaient plus vulnérables, par
exemple, les cimenteries, des choses comme ça. C'est toujours possible de le faire,
et je pense qu'il y a de plus en plus...
Il
y a 10 ans, on se serait affrontés, il y aurait eu des gens d'affaires d'un
côté, les écologistes de l'autre. Ce n'est plus vrai. Et je pense que, là-dessus, le gouvernement peut compter sur
le fait qu'il y a peut-être des gens d'affaires qui vont pouvoir aider à
sensibiliser d'autres gens d'affaires et que ce n'est peut-être plus aussi
blanc et noir que par le passé. Je pense que
les groupes qui sont plus réfractaires peuvent faire le pari de la confiance, sachant
que, d'une manière ou d'une autre,
choisir de ne pas agir serait un échec complet. Je veux dire, on ne peut pas
penser laisser la dette climatique derrière nous, comme on ne peut pas
penser laisser une dette financière derrière nous.
M.
Heurtel : Je vous remercie puis je tiens à vous remercier
personnellement, M. Mayrand, pour votre travail au sein du Comité-conseil sur les changements
climatiques, un travail énorme. Je tiens à vous remercier de votre
participation et votre participation en continu également au sein de ce comité.
Merci.
M. Mayrand
(Karel) : Merci.
Le Président (M.
Reid) : M. le député de...
M. Plante :
Maskinongé.
Le Président (M.
Reid) : Ça y est, Maskinongé.
M. Plante :
Merci, M. le Président. J'ai eu peur que vous me changiez de comté, je me suis
empressé de vous le dire.
Écoutez,
j'ai bien compris votre réponse à la question du ministre. Vous savez, moi,
Maskinongé, justement, c'est un comté
rural. Je comprends bien tout l'aspect du transport collectif, la proximité du
travail au niveau des milieux urbains. Et,
dans votre réponse, il y a des éléments qui m'ont réjoui, il y en a d'autres
qui m'ont inquiété, surtout quand on parle d'occupation du territoire puis, si on veut, de qualité de vie parce
que, souvent, les gens choisissent de vivre en région plus éloignée du
milieu du travail pour, bon, une qualité de vie, proximité des aires de repos,
etc. Par contre, j'aimerais savoir... parce qu'il y a des initiatives qui se font. Moi, je prends exemple dans mon comté,
on a des stationnements incitatifs au covoiturage, en bordure des
autoroutes, qui permettent aux gens de se rassembler puis de covoiturer à
partir de ce point-là, ce qui n'est pas possible à partir du domicile parce que
les gens sont à 40 ou 50 kilomètres de distance entre chacune des
résidences.
Mais
j'aimerais savoir votre vision... cette vision-là, mais adaptée au monde rural
ou de région. J'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Mayrand
(Karel) : Bon, bien, encore une excellente question. Le gros du problème
du transport qu'on a au Québec,
c'est dans les grands centres urbains, notamment le Grand Montréal. Ailleurs, en région, je la comprends
bien, la problématique. Mon père restait la dernière maison sur le
rang 6 à Mont-Comi, près de Rimouski, qui était la dernière maison qui était déneigée en hiver. Ça fait que
vous vous imaginez bien qu'il y avait un camion, là, on avait un quatre roues motrices. Et donc cette problématique-là, elle est
bien réelle, O.K.? Mais il
y a aussi des gens qui arrivent en
Hummer sur la rue Crescent à Montréal, hein? Comment on fait pour équilibrer
ça?
Ce
que je vous dirais, moi, c'est que, pour les gens en région, si on améliore
l'efficacité énergétique des véhicules, ça leur remet de l'argent dans
les poches, puis ils peuvent quand même s'acheter un... Il y a des VUS qui sont
très énergivores, il y en a d'autres qui le sont moins.
Ensuite
de ça, l'inspection obligatoire des véhicules, encore là, c'est une chose que
des gens en région vont dire : Bien,
écoutez, on n'est pas riches, tout ça, mais, en même temps, ça coûte cher,
opérer une auto qui consomme deux fois, là, l'essence qu'elle devrait
consommer, et ça pollue l'air. Et donc il y a des mesures qu'on peut prendre.
C'est certain que les
transports collectifs dans des régions éloignées, où il n'y a pas de densité,
ça ne sera pas la solution.
L'électrification peut être une partie de la solution aussi. On a des voitures,
là, qui arrivent l'année prochaine ou dans deux ans, qui vont avoir
300 kilomètres d'autonomie. Donc, beaucoup de choses qu'on peut faire pour
offrir... Encore là, l'idée, c'est quoi?
C'est : Quelle est l'alternative qu'on peut offrir à quelqu'un
dans son milieu de vie? Si je suis dans
un milieu rural, ce n'est certainement pas un wagon de métro qui va venir me
chercher. Par contre, aujourd'hui, une personne, au Québec, peut s'acheter
une Ford Focus — je
vais prendre cet exemple-là — qui consomme 30 % moins d'énergie qu'il y a 10 ans. Alors, c'est
30 % moins de factures d'essence. Puis la Ford Focus coûte encore à peu
près le même prix. Alors, les normes jouent un rôle très important.
M. Plante : Je vous
rejoins à ce point-là quand vous parlez du choix des véhicules, puis tout ça.
Puis ça, je le comprends bien parce que tu as le choix de diverses gammes,mais
il y a aussi le choix style de vie, je pense, qui a contribué beaucoup à
l'achat des VUS ou des gros cylindrés.
Par contre, il y a tout de même une portion de
la population — puis
vous avez parlé de votre père, mais on pourrait parler des agriculteurs, on
pourrait parler des divers entrepreneurs — qui n'ont pas le choix
d'utiliser un gros cylindré ou un VUS. Et,
dans ces cas-là, au niveau du bonus-malus, vous en pensez quoi et vous le
feriez comment? Est-ce que vous compenseriez? J'aimerais ça vous
entendre.
M. Mayrand (Karel) : Je ne suis pas
un expert du bonus-malus, mais ce que je sais, par exemple, c'est qu'il y a des gens qui ont des camions, hein, qui sont
des camions qui sont déduits entièrement sur leurs frais d'entreprises,
hein? On leur dit : Vous avez besoin
d'un camion pour travailler, donc on vous dit : Ce camion-là, là, vous
pouvez le déduire de vos frais. Bon,
donc, on a déjà des régimes qui permettent à des gens qui en ont besoin pour
travailler de le faire. Je ne vois pas pourquoi ça ne pourrait pas
s'appliquer aussi au bonus-malus, mais on pourrait dire, par contre... on
pourrait favoriser que les véhicules qui
soient achetés soient des véhicules qui soient plus écoénergétiques.
D'ailleurs, on ne peut pas regarder
un match de hockey, en ce moment, sans entendre lequel des véhicules pick-up
qui est le plus écoénergétique que l'autre.
Donc, déjà,
les constructeurs automobiles se font concurrence là-dessus. Mais tout ça est
adaptable. Ça rejoint un peu la
question : Comment on fait pour les industries qui pourraient se voir
affectées plus directement que d'autres, par exemple, qui sont plus
polluantes?
Si les gens ont besoin d'avoir un camion pour le
travail, des gens dans le secteur de la construction, c'est très possible de les accommoder. L'objectif qu'on veut,
c'est d'éviter qu'il y ait un million de véhicules utilitaires sport au
Québec qui servent pratiquement juste à aller au centre d'achat.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Nous allons passer maintenant au
bloc réservé à l'opposition officielle. M. le député de Terrebonne.
• (17 heures) •
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président, merci beaucoup
également à la Fondation David-Suzuki d'être avec nous aujourd'hui,
donc, représentée par M. Mayrand et M. Toussaint.
Tout d'abord,
écoutez, j'ai écouté votre présentation avec beaucoup d'attention, vous avez
tracé un portrait, bon, du secteur
des transports qui est, bon, près de la moitié de la cause des gaz à effet de
serre au Québec. Vous avez parlé du parc
automobile du Québec de plus en plus qualifié de poubelle des autos usagées.
Donc, en tout cas, vous avez des mots durs et des qualificatifs colorés
pour faire entendre votre message.
Donc, vous
voulez évidemment vous attaquer à la bête directement en proposant certaines choses. Notamment, le péage routier, pour vous, est une avenue
envisageable. Vous avez tracé également, là, la corrélation entre, bon,
l'utilisation de nos routes versus le péage ou tout simplement l'augmentation
de la population qui en découle.
Ma question,
elle va être très simple, puis je l'ai posée à plein de groupes aussi avant
vous. Seriez-vous ouverts pour contribuer à diminuer peut-être les gaz à
effet de serre dans le secteur des transports par l'adoption d'une loi zéro émission qui vise davantage
à encourager l'achat de véhicules favorisant l'énergie renouvelable, électrique
dans ce cas-ci? Est-ce que c'est une position en laquelle vous seriez
favorables?
M. Mayrand
(Karel) : Oui, tout à fait. Ce n'est pas une position qu'on a amenée dans notre mémoire,
on n'est pas descendus à ce niveau-là, mais la loi zéro émission, si je
la comprends, c'est une loi qui impose un certain nombre de ventes...
M. Traversy : Aux
concessionnaires.
M. Mayrand
(Karel) : ...de véhicules,
donc, et ma compréhension aussi, c'est que les concessionnaires
résistent beaucoup à ça. Il y a toujours de la résistance au changement, mais,
vous savez, d'ici quelques années, les véhicules électriques vont devenir tellement
plus rentables que les véhicules à essence traditionnels que probablement
qu'ils vont courir pour rattraper. Alors, je pense
qu'une loi zéro émission, oui, serait une avenue à explorer, très certainement.
M.
Traversy : Merci beaucoup de votre franchise et de votre clarté. C'est bien noté. Puis on
accumule, là, toutes les réponses,
là, d'ici la fin des auditions et des prises de position... alors, pour pouvoir
enrichir les discussions qui s'en suivront.
Vous avez
parlé du Fonds vert également, de
l'argent qui doit être investi au niveau du transport en commun mais qui
dort actuellement. Auriez-vous des recommandations à faire sur le Fonds vert,
là, dans l'état actuel des choses? Parce que
certains sont très critiques à son égard. D'ailleurs, il y a
d'autres groupes qui s'en viennent tout
à l'heure, Alliance Transit, je
pense, qui va nous en parler également. Je voulais vous permettre de lancer peut-être
un cri du coeur ou, du moins, un signal lumineux à cet égard. Je voulais vous
entendre sur le Fonds vert.
M. Mayrand
(Karel) : Oui, alors, bien, tout d'abord, la Fondation David-Suzuki soutient le Fonds vert. C'est un outil qui est magnifique. Ça a été une très bonne
idée, la création du Fonds vert au Québec. Cependant, on trouve que, dans la mise en place des
mesures qui sont financées par le Fonds vert, il y a des délais, puis notamment
au ministère des Transports, et les gens de la coalition de Transit, qui vont
venir après nous, vont pouvoir mieux l'expliquer. En fait, la Fondation
David-Suzuki en est elle-même membre. Mais la crainte ou la préoccupation qu'on
a, c'est qu'une partie
de l'argent du Fonds vert permette au ministère des Transports du Québec de se
désengager relativement de certaines dépenses, dans le secteur des
transports collectifs, qu'il aurait autrement faites.
Donc, ce
n'est pas tellement qu'on a changé la mission du Fonds vert, c'est que, d'une
certaine façon, on fait porter sur
les épaules du Fonds vert le poids de certains investissements en transport
collectif qui seraient faits de toute manière, alors qu'on aurait
souhaité que le Fonds vert serve à faire des investissements...
M. Traversy :
Supplémentaires.
M. Mayrand (Karel) : Oui, pour
augmenter l'offre de service.
M. Traversy : Et voilà, c'est
enregistré, donc, aux galées de la commission.
Vous y allez
aussi d'une proposition assez audacieuse. Le ministre n'en a pas parlé, mais je
tenais quand même à le spécifier.
Vous proposez la création d'un secrétariat pour les changements climatiques,
relevant du ministère du Conseil exécutif et qui permettrait, selon
vous, de renforcer cette cohérence et cette imputabilité souhaitées dans l'action
gouvernementale. Vous vous empressez
immédiatement, bien sûr, de mentionner que cela n'a aucunement rapport
avec un désaveu par rapport au ministère de
l'Environnement mais, bon, plutôt une reconnaissance des limites de l'action
d'un ministère sectoriel sur l'ensemble de l'appareil gouvernemental. Donc,
est-ce que je dois comprendre que, pour vous, un
secrétariat aux changements climatiques, ça donnerait une plus grande impulsion
aux messages et aux actions que nous voulons faire pour atteindre ces cibles
de réduction de gaz à effet de serre?
M. Mayrand (Karel) : Le secrétariat,
c'est l'instrument. Ce qui est important pour nous, c'est qu'il y ait une stratégie globale pour l'ensemble du gouvernement
pour que la main gauche et la main droite aillent dans le même sens. On
a fait des progrès très importants depuis quelques années à ce point de vue.
Cependant,
mon expérience, autant dans le secteur... travailler avec des entreprises
privées que dans le secteur public,
les choses commencent à bouger vraiment quand c'est élevé au rang des priorités
soit du premier ministre ou du P.D.G.
d'une entreprise, et c'est donc une vision d'ensemble qui s'imprègne au
gouvernement. On a réussi à faire des choses assez impressionnantes avec
le modèle qu'on a dans le marché du carbone, le Fonds vert puis le plan
d'action aux changements climatiques, mais
ce que nous, on disait, la fondation, c'est qu'on va arriver rapidement aux
limites de ce modèle-là parce qu'on a
besoin de changer l'aménagement du territoire. On a besoin de changer la façon
dont le ministère des Transports
réalise ses investissements. On a besoin de changer notre stratégie
énergétique. On a besoin de faire tout un paquet de choses et on ne peut pas demander au ministre de
l'Environnement de changer toutes ces choses-là, de devenir le ministre
de tout.
Et où se fait l'intégration dans un gouvernement
comme le gouvernement du Québec ou n'importe quel gouvernement? Bien, évidemment, c'est à l'échelle du premier ministre,
du Conseil exécutif. Alors, si ce n'est pas un secrétariat, il peut y avoir une autre modalité, mais l'important est
que, dorénavant, l'ensemble du gouvernement fasse passer l'ensemble de ses actions à travers le
prisme de : Est-ce qu'on est capable ou non d'atteindre cette cible-là?
Parce que, sinon, très rapidement, on va se heurter aux limites de nos outils.
M. Traversy : Merci beaucoup.
Je suis certain que le ministre a pris bonne note, là, de cette proposition et
je comprends un peu mieux l'aspect qui vous
anime dans le cadre de cette recommandation. Je ne peux pas passer à
côté de la question du pétrole non plus, qui fait partie également de votre
mémoire. Et vous dites : Par souci de cohérence, le gouvernement devrait être interpellé par les
décisions à venir d'explorer, d'exploiter ou de voir être transporté le
pétrole en sol québécois. Vous dites que «ni
le gouvernement ni les promoteurs n'ont à ce jour démontré que leurs projets
étaient compatibles avec l'élimination quasi complète des gaz à effet de serre
à l'horizon [de] 2050».
Alors, pour
vous, il y a un enjeu de crédibilité dans la suite des actions qui vont être
proposées par le gouvernement. Est-ce
que vous voudriez, à ce moment-là, qu'une position claire au niveau, là, de la
politique d'hydrocarbures soit mise en évidence
avec la lutte aux changements de gaz à effet de serre? Je voulais vous laisser
exprimer de façon plus claire ce que vous entendiez par cette
incohérence.
M. Mayrand (Karel) : Ce n'est pas tellement
un enjeu de crédibilité qu'un enjeu de cohérence. J'essaie de retrouver ici mes notes là-dessus,
mais l'évaluation, c'est, par
exemple, l'oléoduc Énergie Est de
TransCanada va induire, parce qu'il
va transporter 1,1 million de barils par jour de sables bitumineux... En
ce moment, la production des sables bitumineux,
c'est 2 millions de barils par jour ou 2 point quelques. Donc, on va
augmenter la production pour remplir ce tuyau-là, et l'augmentation de cette production-là va générer 30 à 32
millions de tonnes de CO2 additionnelles par année. Et ça,
c'est deux fois toutes les réductions que le Québec va avoir faites entre 1990
et 2020.
Et là la
question qui se pose, c'est : Pourquoi le Québec demanderait à son
industrie de réduire ses émissions puis laisserait en même temps une passe gratuite, si on veut, à l'Alberta
pour augmenter les siennes, ce qui fait qu'au bout du compte on arrive
au net puis on n'a pas fait d'effort... on n'a pas fait, pardon, de gain? Et on
aimerait...
Le Président (M. Reid) : Je
dois vous arrêter...
M. Mayrand (Karel) : ...voir
l'Alberta faire la même chose puis on aimerait...
Le
Président (M. Reid) :
Je dois vous arrêter maintenant pour protéger le temps qui reste pour les autres
députés.
M. Mayrand
(Karel) : Tout à fait.
Le Président (M. Reid) :
Alors, nous passons au bloc réservé au deuxième groupe d'opposition. M. le
député de Masson.
M.
Lemay : Merci, M. le Président. Merci d'être avec nous aujourd'hui. Très intéressant, ce que vous étiez en train de mentionner, mais, quand même,
j'avais d'autres questions aussi. En fait, ce qui m'a marqué tantôt,
c'est... vous avez frappé mon
imaginaire quand vous avez parlé de péage routier parce qu'effectivement, là, dans la section 3.3,
le ministre fait mention qu'on pourrait faire l'implantation de péage
routier, entre autres, qui est comme le potentiel de réduction de cinq mégatonnes, là. Bon, il y a d'autres
mesures là-dedans, là. Puis vous avez mentionné qu'il faudrait que ce
soit fait intelligent, puis que ça devrait être bien fait, puis il devrait y
avoir un débat là-dessus.
Puis après ça
vous avez aussi mentionné, bon, d'avoir un bonus-malus pour les véhicules, là,
que ce soit léger, ou lourd, ou... bon, bref. Mais, moi, ce que je me
disais — c'est
une idée comme ça, peut-être que vous avez déjà pensé à cela : Mais, si on mettait péage routier, bonus-malus ensemble,
puis faire en sorte que, dans le fond, tu aurais un péage routier
seulement sur les véhicules à gaz, puis les véhicules électriques ou à faibles
émissions, eux n'auraient pas le péage routier. Est-ce que ça pourrait, à ce
moment-là, être une mesure intéressante? Puis, selon vous, comment on pourrait
le réaliser?
• (17 h 10) •
M. Mayrand
(Karel) : Savez-vous, on
pourrait même penser à ce que l'immatriculation soit faite en fonction du cylindré et du kilométrage parcouru par un véhicule. Et donc, à ce
moment-là, on a le péage kilométrique et on a le péage en fonction de la grosseur du véhicule en même temps.
Alors, toutes ces choses-là peuvent se faire. Et c'est évident que ce qu'on cherche à faire, c'est envoyer un signal de
prix à l'automobiliste ou au
consommateur, qui le dirige vers des bons choix, hein, de la même façon
qu'on taxe les cigarettes ou les choses comme ça, mais sans jamais prendre les
gens en otage. C'est-à-dire, il faut que les gens aient des alternatives et des possibilités, qu'ils puissent faire des choix. Par exemple, le péage peut être uniquement aux heures de pointe.
Et donc les gens qui peuvent ajuster leur horaire de travail en conséquence, c'est : On diminue la
congestion, on diminue la pression sur les infrastructures routières. Il y a beaucoup d'objectifs qu'on peut...
Un péage, hein, c'est un peu comme un tableau de bord qu'on met sur nos
transports.
M. Lemay : Là, vous apportez vraiment
beaucoup d'éléments intéressants. C'est pour ça que vous dites qu'il devrait vraiment y avoir un grand débat, là, sur cette question
parce que moi, j'avais une idée, vous venez de
m'éclairer sur une idée complètement différente mais qui fait tout
à fait du sens aussi. Donc, merci de
pousser la réflexion, en espérant qu'il y aura effectivement un débat
sur toute la question, là, de péage routier. Voilà, bon, merci.
Alors, vous
avez aussi mentionné... Mais en fait, lorsque
vous êtes venus nous voir pour le
livre vert, on a discuté de ça. Puis
là vous le ramenez dans votre mémoire aujourd'hui. Vous nous parlez, là, d'établir un
test climat. Bon, tu sais, ça, c'est une question qu'on a déjà vue dans
le livre vert, mais c'est la première fois qu'en fait depuis le début de cette commission
on parle de test climat. Donc, je voudrais juste revenir là-dessus.
Est-ce qu'encore une fois le test
climat que vous mentionnez, c'est
pour les entreprises qui ne sont pas assujetties présentement dans le cadre du
processus d'évaluation environnementale, donc les entreprises qui
émettent entre 10 000 à 25 000 tonnes par année?
Puis, selon vous,
là, si on y va de l'avant, avec un test climat, ça serait en mesure de
contribuer à quelle hauteur au final? Tu sais, ça serait-u comme une
mégatonne? On parle-t-u d'une mégatonne ou on parle de moins que ça?
M. Mayrand
(Karel) : En fait, dans notre
perspective, ici, le test climat s'appliquait au gouvernement puis à ses
propres politiques. Par exemple, je construis l'autoroute 15 à Montréal aujourd'hui, si je fais le test climat, je me dis : Ça c'est 1,5
million de voitures dans 20 ans. Là, je réfléchis différemment.
Alors, il y a
plein de décisions qui sont prises comme ça sur l'aménagement, sur le
transport, sur les politiques énergétiques.
Si on se fixe un test climat, bien, ça nous permet de regarder parce qu'en 2050 il faut qu'on soit presque
à zéro, hein, il faut qu'on soit à au moins 80 %. C'est dans 35 ans.
Hein, il y a des... Par exemple, quand on construit l'échangeur Turcot à Montréal, on le fait pour 70 ans; le nouveau
pont Champlain, 70 ans, 80 ans. Est-ce qu'on s'est posé la question : Est-ce que ça va être utilisable
dans... On fait l'oléoduc Énergie Est, 50 ans, 40 ans, 60 ans,
est-ce que c'est possible? Il est là, le test climat, il est vraiment
là.
M. Toussaint (Jean-Patrick) : Je
rajouterais à ça : Ça fait partie du... Lorsqu'on parlait de la création
d'un secrétariat des changements
climatiques, en fait, l'idée ici, c'est d'intégrer tout ça, donc de s'assurer
que, justement, on ait une vision
d'ensemble de la problématique puis de comment est-ce que chaque secteur,
chaque appareil gouvernemental va avoir
un impact, là. Donc, encore une fois, la question de l'intégration va être
cruciale, là, pour atteindre nos objectifs.
M. Lemay : Parfait, merci, M. le
Président.
Le Président (M. Reid) :
Court commentaire, si vous voulez.
M. Lemay : Court commentaire. Merci
beaucoup d'être avec nous aujourd'hui.
Le
Président (M. Reid) : Alors, nous passons maintenant au temps
réservé aux députés indépendants. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme
Massé : Merci. Bonjour, messieurs, merci de votre présentation, de
votre présence. En fait, moi, j'aimerais prendre le trois minutes que
j'ai pour réfléchir sur la dimension qu'il faut que... le secrétariat étant un
outil, mais que ce soit rattaché, que ça relève du ministère du Conseil
exécutif. Je pense que vous l'avez bien expliqué tantôt, c'est la nécessité de la cohérence qui fait ça, hein?
Malgré toute la bonne volonté d'un ministre sectoriel, il n'a pas de
pouvoir, il n'a pas de... Il peut avoir de
l'influence, certes, sur les autres ministères, et on le voit. Par exemple,
l'exemple que je prendrais, là, c'est
l'exemple qu'on apprenait hier, de l'école Saint-Gérard qui est obligée de
mettre de côté son projet de géothermie parce que le 500 000 $ nécessaire, qui va lui permettre de ne
plus payer une cenne dans 15 ans, bien, ce 500 000 $ là,
on ne l'a pas là. Et donc comment agir là-dessus? Ce n'est pas possible.
Donc, cohérence, interinfluence, leadership.
Est-ce que c'est donc une critique non pas au ministère, mais à comment ça se passe actuellement? Ça fait que vous
sentez que, oui, on a des beaux objectifs mais que, dans le fond, il y a
des choix qui se font qui ne nous emmènent pas à la bonne place.
M. Mayrand (Karel) : C'est une question
pelure de banane dans le sens où je connais peu d'endroits dans le monde qui ont réussi à faire cette intégration-là.
Par contre, on sait très bien que, si on veut réussir à atteindre les objectifs
qu'on s'est fixés, il va falloir le faire.
Et, au Québec par le passé, on a su faire ces innovations-là au
plan gouvernemental pour y arriver.
On a réussi à créer Hydro-Québec. Je
pense qu'on est capables de lutter
contre les changements
climatiques de la même façon avec le
leadership, avec la vision. Et donc, oui, le problème de l'intégration,
c'est un problème qui se pose dans des organisations aussi
petites que la nôtre, qui se pose un peu partout. Et donc, dans ce cas-ci, les changements
climatiques, ça touche l'ensemble des secteurs de la société. Très, très difficile
de naviguer le Titanic si on ne tient pas la barre. Et je ne veux pas dire qu'on va couler, là, mais, quand même, c'est un gros bateau, le Québec, et je
pense qu'on a besoin d'élever ça. Et
on entend des signaux, autant du premier
ministre que des premiers ministres
qui l'ont précédé, disant : Oui, le Québec va dans cette
direction-là. Et ça, c'est très positif. Maintenant, il faut que le message
passe dans la machine, partout.
Mme Massé : Puis la façon, ce serait
de l'amener au Conseil exécutif. On est d'accord.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Alors, merci de votre contribution à nos travaux.
Je lève la séance pendant quelques instants pour
permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 17 h 16)
(Reprise à 17 h 18)
Le Président (M. Reid) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux.
Alors, je souhaite la bienvenue à nos invités
d'Alliance Transit. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation. Par la suite, nous aurons une
période d'échange avec les membres de
la commission. Je vous demande
de vous présenter et de présenter les personnes qui vous accompagnent pour les
fins de l'enregistrement. À vous la parole.
Alliance Transit
M.
Cousineau-Morin (Philippe) : Merci, M. le Président. Alors, MM. les parlementaires... Donc, je
remercie la commission de nous recevoir à
l'occasion de cette consultation fort importante qui porte sur la vision à long terme du Québec en développement durable. Je suis
Philippe Cousineau-Morin. Oui, je suis le coordonnateur à Transport 2000 Québec. Ça fait qu'on vous présente évidemment
une alliance. Et donc je suis accompagné d'Yves Jalbert, de
l'Association pour la santé publique du Québec, et, à ma gauche, de Christian
Savard de Vivre en ville.
Simplement,
l'Alliance Transit, donc, formée en 2011, rassemble une cinquantaine d'organisations de la société civile partout au Québec, de divers milieux,
ainsi qu'un comité d'experts. Puis notre mandat, c'est de présenter les meilleures avenues de financement pour les transports collectifs au gouvernement, aux divers
paliers de gouvernement, qui permettront
d'atteindre les objectifs de mobilité durable qui sont fixés par les
différents milieux et ainsi d'obtenir toutes sortes de cobénéfices aussi
en santé durable, en économie, en environnement, etc.
Alors, pourquoi
il est très important pour nous de commenter la cible à long terme en matière de réduction de GES? Raison assez simple : Vous le savez, le
secteur des transports représente près de la moitié du bilan carbone, mais je précise aussi que les efforts fournis dans ce
secteur, notamment pour le transport des personnes, ont été
insuffisants dans les deux dernières décennies. On l'a entendu plus tôt,
le bilan s'alourdit encore dans le secteur, alors que, dans d'autres, il y a des
grands efforts.
• (17 h 20) •
Quant
à la cible fixée, nous estimons qu'il faudrait être plus ambitieux — donc,
à l'instar de plusieurs membres de notre
alliance — que
la proposition présentée. Mais ce qui appert surtout
primordial, c'est de fixer des objectifs sectoriels, c'est une question qui a été
posée et de façon très succincte. Nous recommandons une cible transports qui
vise plus spécifiquement le transport des
personnes et qui serait à formuler en termes de réduction des kilomètres totaux
parcourus en voiture au Québec. Donc, c'est un terme dans le jargon, les
véhicules-kilomètres parcourus, les VKP — donc, il ne faut pas confondre — et on propose un 20 % de réduction,
mais ça peut aussi être formulé sous forme de réduction de la
consommation de pétrole en transport. L'équivalent serait, grosso modo, de
60 %. Et ce sont là des indicateurs qui sont intimement liés, donc, à la cible GES à long terme et qui collaborent à l'atteinte de
visées spécifiques au secteur de la mobilité durable et les différents
enjeux qui y sont liés, dont celui de la santé publique, sur lequel je passe la
parole à mon collègue.
M.
Jalbert (Yves) : Bonjour. L'Association de santé publique du Québec appuie Transit et désire porter à votre
attention l'absence de l'impact sur la santé de la population des gaz à effet
de serre dans le document de consultation. C'est-à-dire que le secteur de la santé publique est comme disparu, là, de ce
document-là ou vous l'avez complètement occulté. Par ailleurs, l'Association pour la santé publique veut soulever le lien
existant entre la santé et les changements climatiques occasionnés par ces derniers. Il y a actuellement une reconnaissance croissante, dans la littérature
scientifique, liée au fait que la santé et
les changements climatiques sont étroitement associés entre eux et ont des
causes et des solutions communes. Les
effets du changement climatique sur la santé publique, sur l'environnement et sur les activités humaines préoccupent de plus en plus les
pays occidentaux, dont aussi le Québec.
Les conséquences de
nos choix en matière d'urbanisation et de transports ont des impacts sur la
santé, sur les changements climatiques et le
développement durable. Les causes et les solutions efficaces pour freiner les
problèmes de santé et les changements
climatiques occasionnés par les gaz à effet de serre sont en lien direct avec
l'organisation du territoire, les
systèmes de transport et le design urbain. À titre d'exemple, on sait que
l'automobile est la technologie la plus polluante, la plus obésogène et
la plus fréquemment utilisée pour les déplacements domicile-travail.
L'augmentation continuelle des coûts de transport et son accessibilité
soulèvent des questions d'équité de plus en plus préoccupantes pour les gouvernements, et ce, particulièrement pour les populations qui résident dans des zones de désert de
transports collectifs. Favoriser
le transport actif par la modification des habitudes de déplacement liées au travail, à
la formation, à la santé, aux achats
ou aux loisirs permet des gains considérables pour la santé physique et
mentale, la qualité de vie, les finances personnelles, les dépenses
publiques, l'environnement et la société.
L'aménagement du
territoire profite à toute la population, peu importe l'âge, le sexe, les
aptitudes physiques, l'origine ethnique et la situation économique. L'amélioration
de la mobilité a un impact positif sur l'économie des municipalités, autant en
facilitant les déplacements des travailleurs qu'en améliorant l'accessibilité à
tous les secteurs géographiques. L'étalement
urbain, développé en périphérie des grandes villes, favorise la prévalence
d'excès de poids et accroît l'usage
de l'automobile, contribuant à la pollution de l'air et sonore ainsi que les
traumatismes routiers. Bref, en matière
de mobilité durable, l'utilisation du transport collectif réduit significativement les émissions de gaz à effet de serre, incite les individus
à être plus actifs et à diminuer les risques d'obésité.
M. Cousineau-Morin
(Philippe) : Donc, avec l'angle qui est apporté par mon collègue et plusieurs
autres, eh bien, on voit bien qu'il y a toute urgence à
investir dans le développement des transports collectifs. C'est d'ailleurs
reconnu, là, comme une priorité d'action dans cette version du plan d'action
sur les changements climatiques et dans le précédent.
Alors,
sur les initiatives pour accélérer la mise
en oeuvre et surmonter les obstacles,
les questions 3 et 4 qui nous ont été
soumises, Transit répond que le gouvernement est soumis à un test de crédibilité dans la reddition de comptes dans la lutte aux changements climatiques. Alors, je
m'explique. Non seulement il a pris du retard dans l'utilisation du Fonds vert pour soutenir
le développement des transports collectifs, mais il y a
une certaine opacité qui règne sur l'utilisation
des sommes, comme il a été révélé par le Vérificateur général du Québec.
Donc, en faisant écho
à ces préoccupations-là, celles du vérificateur, Transit note une certaine
lacune dans la transparence sur l'affectation des sommes du Fonds vert qui sont
affectées aux mesures de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Et, à titre d'exemple, je vous soumets un cas,
là, qui est détaillé dans notre mémoire. Il nous est aujourd'hui
impossible — et
je dis aujourd'hui, mais ça fait presque deux ans que nous suivons le
dossier — de
déterminer l'utilisation précise que fait le
ministère des Transports du Québec de près de 500 millions de dollars qui
lui sont transférés sur la durée du plan d'action sur les changements
climatiques du Fonds vert. La seule chose qu'on sait, c'est qu'il les verse au
Fonds des réseaux de transport terrestres, qui est un fonds qui est
essentiellement destiné au financement des emprunts servant à la réfection et
le développement des réseaux autoroutiers et de transport collectif, les deux
ensemble.
Je
détaille un peu. Donc, à l'annonce du plan actuel sur les changements
climatiques, en 2012, on destinait, sur la durée du plan, 1,7 milliard
de dollars aux mesures de transport
collectif et alternatif, comme je l'ai dit, c'est une très bonne chose, une grande priorité, mais, depuis, Transit
soulève des questions afin de connaître précisément les mesures en
place mais aussi les objectifs,
les moyens et les indicateurs de succès, hein, parce qu'on parle d'une cible à long terme, mais on veut connaître les
étapes pour s'y rendre. Or, actuellement, il y a une partie de la somme qui est retraçable, mais il y a encore un 500 millions sur lequel on
se questionne au MTQ. Et je précise aussi que, dans la troisième année, donc, d'application du plan d'action, qui est de huit ans, il n'y a,
dans le volet transports, pas de cible
précise, pas de politique, d'objectif
ou de nouveau budget en matière de soutien à l'augmentation de l'offre de services
en transport collectif, et ce, malgré une augmentation des revenus
annualisés du Fonds vert.
Toujours dans ce cas
qui vous est soumis, ne sachant pas à quel programme l'argent est destiné, il
nous appert, là, en vertu des informations
qui sont publiques actuellement, qu'il n'est pas possible de déterminer si le
MTQ utilise ces sommes directement pour la lutte aux changements climatiques
aux fins qui sont prévues, de diminution des
GES, ou si ces sommes soulagent plutôt le fonds consolidé du gouvernement d'un
montant équivalent qui serait ainsi consacré
à d'autres fins. Dans ce dernier cas, il s'agirait d'un détournement, à des
fins autres que celles prévues par la loi, de fonds dédiés au
financement de mesures de réduction des émissions de GES.
Alors, c'est détaillé
dans notre mémoire, mais ce que je veux surtout que vous reteniez, le principal
obstacle ou le fait que le principal obstacle que nous percevons afin que le
gouvernement, et ses partenaires institutionnels, et la
société civile soient en mesure de collaborer et d'accélérer la mise en oeuvre
de mesures de lutte aux changements climatiques, c'est d'accroître la
transparence dans la reddition de comptes pour cet enjeu aussi transversal pour
la société québécoise.
Et évidemment, donc,
afin d'écarter — c'est
mon objectif — le
scénario dont je vous ai fait part et de donner suite aux recommandations du Vérificateur général, le gouvernement doit
répondre à un certain nombre de questions sur la gestion du Fonds vert. Donc, ça serait ma dernière section. Pourquoi il
y a une certaine absence de transparence dans les sommes au Fonds verts? Et, à cet égard, nous avons
une recommandation, que les documents budgétaires gouvernementaux comprennent l'état des résultats et les prévisions
du Fonds vert et du FORT. Ça a déjà été le cas dans l'ancien document...
Le Président (M.
Reid) : Il vous reste une minute.
M. Cousineau-Morin
(Philippe) : Une minute, merci. Voilà une autre question. Alors que
les revenus du Fonds vert augmentent et que les dépenses dans les programmes de
transport collectif sont stables, à quoi servent les surplus? Finalement, pourquoi les sommes expédiées au MTQ sont intégrées
au Fonds des réseaux de transport terrestre? Et, dernière question, quand le gouvernement compte-t-il
bonifier les programmes de soutien au transport collectif, alors
que, selon les données du Fonds vert, il en a actuellement les moyens?
Alors, ma dernière recommandation,
c'est donc que le gouvernement annonce dès maintenant, pour le reste de la durée du PACC, les programmes qui seront en
place. Et, selon nous, ça devrait se faire à l'intérieur d'une nouvelle politique
québécoise de transport collectif qui inclura un cadre financier, des moyens et
des indicateurs.
En conclusion, la
discussion sur la cible à long terme est importante et témoigne d'engagements
concrets du gouvernement du Québec en lutte aux changements climatiques. Il faut, à
notre avis, compléter cet engagement par la mise en place des objectifs et des outils qui y font actuellement défaut, notamment par des engagements sectoriels concrets et
précis en transport et par une transparence accrue dans les moyens actuels de
la lutte aux changements climatiques. Je vous remercie.
Le
Président (M. Reid) :
Merci. Alors, merci de votre présentation. Nous allons passer maintenant
à la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Merci pour votre présentation ainsi que votre
mémoire. Juste pour commencer, je ne sais
pas, peut-être que j'ai mal compris le commentaire que vous avez fait, M. Jalbert, mais, quand vous dites que le document de consultation occulte complètement la santé...
Bon, alors, j'ai extrait les pages où on parle de santé dans le document, je ne sais pas si on a lu le même document,
mais le comité-conseil sur les changements climatiques, qui fait la proposition de la cible qui est à la base de la proposition du gouvernement, est composé d'un expert du milieu de la santé, le Dr François Reeves. Dans
l'introduction, à la page 3, il y a un paragraphe complet sur les risques pour la santé. On cite même une étude Ouranos sur la
santé. À la page 19, on parle également des impacts sur la santé. À la page 36, on parle des effets sur la santé d'une
réduction de GES. À la page 37, on parle de l'Organisation mondiale de
la santé et de ses conclusions sur la réduction des GES puis en annexe du document,
à la page 50, on met en annexe un rapport
d'une commission du Lancet intitulée Health and Climate
Change : Policy Responses to Protect Public Health. Donc, quand vous dites que le document
occulte complètement la santé, je peux peut-être comprendre que vous n'êtes peut-être pas
satisfait qu'on ne soit peut-être pas allés aussi loin que vous voudriez qu'on y
aille, mais de dire qu'on occulte complètement, je ne crois pas.
Maintenant, sur votre
présentation, le point sur les transports collectifs et puis aussi
l'automobile, on en a parlé beaucoup,
avec la Fondation David-Suzuki, au
niveau de la sensibilisation et le changement de comportement parce qu'on voit — encore une, fois puis on en a parlé tout à l'heure — que, d'un côté, il y a
une volonté de la population
de lutter contre les changements climatiques, mais, en même temps, les chiffres
de consommation ne mentent pas, on semble être
en amour avec nos véhicules puis nos véhicules à grosse cylindrée. Alors, pour
atteindre nos objectifs et pour atteindre ce que vous proposez, il va falloir certainement aussi faire un
gros travail de sensibilisation parce
qu'il y a beaucoup de choses que vous proposez, c'est du gros bon sens puis c'est d'aller plus
loin, justement, dans l'application de ces mesures-là. Mais comment
proposez-vous changer ces comportements-là, changer ces attitudes-là par
rapport aux véhicules?
• (17 h 30) •
M.
Savard (Christian) : Je vais
parler ici comme un vétéran qui a connu l'ancien plan d'action sur les changements
climatiques en me concentrant effectivement sur la question du changement de
comportement parce qu'on a fait des gains
avec le dernier plan d'action sur les changements climatiques. Ça a été une...
En 2006, lorsqu'il a été annoncé, le
premier plan, une semaine après, le plan sur les transports collectifs a été
annoncé, et on a mis en place une augmentation de l'offre de service à
cette époque-là. Et il s'en est suivi immédiatement une augmentation de l'achalandage comme le Québec n'avait jamais connu
depuis avant la Deuxième Guerre mondiale. Je veux dire, c'était... On a réatteint des niveaux qu'on avait avant la
Deuxième Guerre mondiale en transport en commun, et ça a été beaucoup
grâce au plan d'action sur les changements climatiques parce qu'on est venus
aussi aider les sociétés de transport en ce qui concerne la promotion au niveau de l'image. La Société de transport de
Montréal, vous savez, le Mouvement collectif, le logo qu'on voit partout, ils ont pris vraiment beaucoup plus de... Au
niveau de l'image, du marketing, on sait que c'est important dans un changement de comportement; même
chose au Réseau de transport de la Capitale, où est-ce que ça avait l'air d'une société de transport un peu
bringuebalante, ils ont revu leurs aires d'attente. Et c'est ça. Tout ça, c'est
grâce à des fonds qui sont venus du plan d'action sur les changements
climatiques.
Et
le point qu'on dit aujourd'hui, c'est que, là, on a une occasion, il y a plus
d'argent qu'avant, mais on s'est limités aux programmes qui étaient là en
2006, qui, là, ils sont rendus un peu à bout de souffle. Ils ont donné leurs
résultats, et il y a de l'argent disponible
pour en faire, pour redonner un nouveau coup, pour redonner un nouveau
renouveau, comme on a fait à partir
de 2006, et qui a un peu stagné depuis 2012. Donc, il y a une opportunité
maintenant de le faire. C'est un peu ça qu'on veut lancer.
Et, en ce
moment, comparativement à 2006, où, une semaine après, il y a eu une annonce
sur qu'est-ce qu'on était pour faire avec l'argent en transport
collectif, là, il y a de l'argent supplémentaire, puis on ne sait pas
exactement. On le croit, que ça va aller au
transport collectif, mais on espère que ça va aller au transport collectif pour
en faire plus et pas pour juste garder la situation actuelle, comme ça a
été fait en 2006. Ça fait qu'on veut répéter les bons coups qui ont eu lieu en
2006. C'est un peu ça, le sens du message.
M. Heurtel : O.K. Je comprends.
Merci.
Le Président (M. Reid) : Oui,
M. le député de Mégantic...
M. Jalbert (Yves) : Juste un point,
en passant...
Le Président (M. Reid) : Ah!
pardon.
M. Jalbert (Yves) : ...concernant ce
que j'ai dit par rapport au fait que c'était occulté dans votre document. Le document traite des gaz à effet de serre, donc
de la réduction des gaz à effet de serre sur le changement climatique,
et ça a un impact énorme et épouvantable sur
la santé de la population. Il faut comprendre que, nous, c'est sur
l'automobile qu'on visait, qu'on ciblait
notre objectif et sur le transport collectif. Donc, il y a des données
importantes là-dessus, qui sont dans la littérature scientifique, qu'on
ne retrouve pas dans votre document. C'est dans ce sens-là.
M. Heurtel : Mais on s'entend qu'on
n'occulte pas la santé du document.
M. Jalbert
(Yves) : Vous occultez un peu la santé publique. Vous effleurez la
santé sans aller en profondeur sur les problèmes réels que ça
occasionne, les gaz à effet de serre et les changements climatiques, sur la
santé publique. C'est plus que qu'est-ce qu'il y a dans le document.
M. Heurtel : On comprend que c'est
un document de consultation. S'il fallait...
M. Jalbert (Yves) : Oui, oui, c'est
un document de consultation.
M.
Heurtel : J'espère que vous
comprenez que, s'il fallait aller en profondeur, dans le genre de profondeur
que vous suggérez, dans chacun des domaines
que touche la lutte contre les changements climatiques, on n'aurait pas
assez de la pièce, ici, pour le document que ça donnerait.
M. Jalbert
(Yves) : Non, mais je
comprends. Mais, quand on fait des politiques comme ça, il faut s'attendre que ça a un
impact sur la santé des gens.
M. Heurtel : Bien, c'est ce que le
document dit.
M. Jalbert (Yves) : Et c'est ce
qu'il faut regarder aussi.
M. Heurtel : C'est ce que le
document dit.
M. Jalbert (Yves) : Et c'est le
secteur de la santé publique qui est un peu mis de côté dans ça.
M.
Heurtel : Le document
explique clairement qu'il y
a un impact sur la santé, sur les
changements climatiques. C'était ça, mon point. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Reid) :
Merci. M. le député de Mégantic.
M.
Bolduc : Merci. Moi,
j'aimerais vous entendre un peu plus sur vos VKP, vos véhicules de kilomètres
parcourus. Vous parlez d'une réduction de 20 %. Moi, tant que les gens
sont à Montréal, se déplacer de Laval au centre-ville de Montréal, j'ai moins de problèmes que quand mon
ami Serge part du Lac-Saint-Jean pour descendre à Québec. Il y a une problématique fondamentale à l'intérieur de la
structure urbaine vs la ruralité. Puis je voudrais vous entendre là-dessus :
Comment on va faire cet équilibre-là en travaillant sur un paramètre qui est un
peu aveugle par rapport aux réalités urbaines vs rurales?
M. Cousineau-Morin (Philippe) : ...vraiment dire que c'est... Cette
recommandation-là, c'est une recommandation, donc, sectorielle. Après ça, bien sûr, elle aura à être déclinée dans
différents programmes. Puis c'est le niveau, en fait, qu'on dit qu'il faut ajouter
entre une grande cible de l'ensemble des secteurs et des cibles par les
secteurs mais avant d'arriver au programme directement, avant d'arriver
à un programme, par exemple, d'augmentation de l'achalandage qui pourrait être dans le métro de Montréal, ou dans un autre
réseau d'autobus, ou en transport collectif rural, quelque chose comme
ça. Donc, c'est un niveau moyen, et ensuite
il se décline de différentes façons. Je suis très conscient qu'il ne va pas
s'appliquer de la même façon partout au
Québec et je suis heureux que ce ne soient pas tous les travailleurs, comme
votre collègue, qui aient à faire Saguenay-Québec à tous les matins pour
le transport parce que, là, effectivement, on aurait un problème encore plus
criant.
Alors, c'est
simplement pour dire que c'est dans la littérature, une façon qu'on explique
pour... une cible qu'on souhaite viser pour dire : Il y a, dans les
transports, à faire des efforts. Et on a indiqué clairement dans notre mémoire qu'il y a une approche derrière ça, qui
est l'approche éviter, transférer, améliorer. Donc, éviter — je parle des déplacements — d'avoir
un déplacement, si c'est possible, sinon le transférer ou voir à en améliorer
l'efficacité énergétique.
Alors, on vous en avait
parlé un petit peu, lors de l'intervention précédente avec la Fondation
David-Suzuki, justement sur les milieux
ruraux et sur l'élément de proximité qui a été nommé. Alors, bien sûr, du
moment où quelqu'un peut... et ça, ça
vaut dans toutes les tailles de milieux au Québec. Du moment qu'une personne
n'a plus à prendre sa voiture pour
aller acheter une pinte de lait au dépanneur, c'est un déplacement qui est
évité, et ça compte sur le portrait total. Alors, on n'est pas rentrés à faire des cibles précises
pour chacun des milieux, mais il y a des façons de décliner après ça
dans les différents programmes de l'État. Et c'est une cible globale pour
l'ensemble du parc automobile du Québec.
M.
Bolduc : Je vais vous donner un exemple pratique de ce genre de
politique là qui peut être assez compliquée. Vous savez qu'à Mexico City, par exemple, lundi, mercredi, vendredi,
c'est seulement que les licences qui finissent par un chiffre pair, puis mardi, jeudi, c'est les autres.
En fait, les gens, ils s'arrangent pour que le... un du couple a un
numéro pair, et l'autre a un numéro impair, puis on change d'auto puis on se
promène à tous les jours, pareil comme avant. Puis j'illustre cet élément-là.
Si on veut mobiliser ou créer des politiques efficaces, il faut avoir des
outils qui atteignent l'objectif, qui ont une robustesse par rapport aux
objectifs finaux. J'ai un peu de difficulté à concevoir, dans ma tête, comment on va définir des éléments sectoriels qui
vont être très efficaces pour les gens urbains et qui vont permettre, si
on veut, aux secteurs ruraux... De la même
façon qu'on a parlé plus tôt que le contracteur ou que le gars qui demeure
dans un rang avec un véhicule SUV parce
qu'il ne pourra pas retourner chez eux s'il n'a pas ça et celui qui vit en
ville avec son Hummer... on retrouve
la même espèce de contradiction. Pour moi, si vous pouviez nous apporter des
éléments de concept qui vont nous donner des idées, comment on peut
gérer ces paramètres-là pour en arriver à une façon de faire.
On
a aussi mentionné précédemment les péages. Je ne suis pas sûr que ça marche
tout le temps bien, mais moi, je suis
préoccupé sur le plan politique par le fait qu'une jeune famille qui veut aller
vivre en campagne pour que les enfants puissent
jouer dehors, on leur dit : Bien non, c'est de valeur, mais tu ne peux
plus faire ça. Paie 200 000 $ de plus pour ta maison,
puis «too bad». Donc, si vous pouviez m'éclairer sur tout ça, là, ça m'aiderait
un peu.
• (17 h 40) •
M.
Savard (Christian) : D'abord, c'est sûr qu'il y a des choses à moduler
dans les actions en fonction des milieux. Mais moi, je vais aussi... Vous avez parlé de Mexico. Moi, je vais parler
de ma copine qui vient d'une ville de 5 000 habitants
qui s'appelle Princeville. Je ne sais pas s'il y a un député de ce coin-là. Et
sa famille est une des familles les moins autodépendantes que je connais
parce que, bien, le village est relativement concentré, hein, autour de
l'église, autour de l'épicerie, et ils travaillaient tous les deux dans des
usines. L'usine n'était pas trop loin, c'était marchable.
Donc, il y a moyen
aussi, dans la manière qu'on construit nos villes et nos villages, de faire en
sorte qu'on n'a pas besoin de toujours se
déplacer. Mais c'est sûr que, dans certains secteurs, ce n'est pas obligatoire.
Mais il ne faut pas oublier que c'est
un peu... Réduire la demande en besoin de se déplacer est un peu incontournable
parce que nos autos sont plus
efficaces. Depuis des années, hein, les autos sont plus efficaces. Elles
prennent moins de litres au kilomètre, mais ils sont toujours plus gros, puis on roule toujours plus. Ça fait que, si on
ne commence pas à s'attaquer à cet aspect-là — c'est
un des aspects systémiques — on
n'y arrivera pas.
Il y a d'autres
législations à travers le monde, je pense à l'État de Washington, où vient
l'objectif de réduire le véhicule-kilomètres
parcouru, qui ont adopté ce genre de cible là. Donc, ce n'est pas quelque chose
non plus, là, qui... Et ce n'est pas
pour rien qu'on l'a proposé, on a vu que ça se fait ailleurs. Donc, c'est un
peu de réduire de manière systémique notre manière de se déplacer. Donc,
c'est un peu ça, l'idée d'où se donner cet objectif-là.
M. Bolduc :
Je comprends bien le principe, mais moi, j'ai une difficulté entre nos régions,
là, où on fait du... une obligation, là.
C'est ça, la problématique que j'ai. Il y a des gens qui ont choisi de rester
dans les rangs, dans les secteurs ruraux. C'est ça qui m'agace un petit
peu.
Mais on va revenir à
un autre élément qui est celui du transport de marchandises. Je suis un peu
étonné, par exemple, que vous ne nous disiez
pas de refaire nos réseaux ferroviaires puis d'envoyer ça sur des rails, ou de
faire de la conversion à l'hydrogène, ou au moins transférer nos camions
au propane, etc., là. Je voudrais vous entendre sur... Il y a toute une partie
d'opportunités qui est considérable, mais vous ne le mentionnez pas là-dedans.
M.
Cousineau-Morin (Philippe) : Effectivement. Bien, ce n'est pas
spécifiquement notre champ d'action, mais je suis convaincu qu'il y a des gains à faire, là, dans le transport des
marchandises puis dans ce que vous avez parlé. Puis je pense que vous
avez entendu d'autres intervenants aussi qui en ont parlé plus précisément.
Simplement dire qu'on a constaté que le
secteur du transport des personnes a quand même... et je ne vise pas
spécifiquement les gens du milieu rural versus le milieu urbain, mais, de façon générale, ce secteur-là a
beaucoup d'efforts à faire. Il y en a qui sont faits dans le secteur de transport des marchandises, qui doivent
continuer à être faits, mais notre spécialité étant plus sur la
possibilité de donner des alternatives de transport collectif aux gens qui le
souhaitent, bien, en fait, là, en transport des personnes...
M.
Bolduc : Est-ce qu'on a encore du temps? Une minute? O.K. Bon, je vais
essayer d'y aller rapidement. Dans la question du Fonds vert, ce que
vous nous indiquez, c'est que vous voudriez qu'on évite de mettre de l'argent
dans les infrastructures de transport
général et plutôt de les orienter vers le transport collectif systématiquement
pour favoriser le transport collectif dans son sens. Est-ce que j'ai
bien compris votre intervention là-dedans?
M.
Cousineau-Morin (Philippe) : Bien, en fait, ce que nous disons, c'est
que l'esprit de la lutte aux changements climatiques, c'est de faire des
actions qui vont s'ajouter aux actions de l'État. Ils vont dire : On va en
faire plus pour s'approcher plus rapidement de la cible d'une société
décarbonisée. Alors, il est certain qu'il ne faudrait pas que les
investissements viennent remplacer des activités qui auraient eu lieu sans
l'engagement du Québec en lutte aux changements climatiques.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Nous allons maintenant passer à
l'opposition officielle. M. le député de Terrebonne.
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. M. Morin, M.
Jalbert, M. Savard, merci de cette présentation tout à fait claire et limpide. Vous avez réussi, je
pense, à réveiller les instincts du ministre de l'Environnement, qui, par
votre échange, a pu peut-être éclaircir certains points mais, en tout cas, du
moins participer d'une manière très dynamique. Je n'avais pas vu ça, là, depuis le début de la journée, là. Vous avez
gardé le meilleur pour la fin, on va dire ça comme ça. Alors, vous avez réussi à mettre en lumière
certains aspects du document de consultation qui peuvent être encore
bonifiés et peuvent s'améliorer pour la
suite. Et, bon, bien, je vous remercie, donc, de cet apport et de cette
transparence à notre égard.
Premier point
que je veux discuter avec vous, la cible proposée par le gouvernement. Vous
n'êtes pas le premier groupe
aujourd'hui qui vient nous voir en nous disant : Écoutez, 37,5 %,
c'est bien, mais le Québec pourrait faire mieux. Alors, je voudrais voir avec vous si une proposition de 40 % vous
semblerait acceptable ou si vous aviez un chiffre plus précis, mais on
sent que vous avez de l'appétit pour aller beaucoup plus loin.
M. Cousineau-Morin
(Philippe) : Bien, en fait, nous n'allons pas chiffrer aujourd'hui la
cible idéale à engager, mais nous
avons voulu parler de santé. On aurait pu parler d'économie, on aurait pu
parler d'autre chose. Je voudrais ajouter que, sans la nécessité d'agir
contre les changements climatiques, les propositions que nous faisons pour la
mobilité urbaine, pour l'économie et le
transport des travailleurs, des étudiants, sont des propositions qui sont très
valables, même sans le contexte de la
lutte aux changements climatiques. Alors, d'être très ambitieux et de viser
très haut aura des bénéfices économiques
qui sont démontrés par ailleurs et des bénéfices en santé et en environnement,
donc, qui seront très larges. Alors, sur la... voilà pourquoi, en fait, on
exige, on demande que ça pourrait être plus ambitieux.
Puis je
voudrais dire aussi que la démonstration de l'engagement du gouvernement sur la
cible à long terme, elle ne dépend
pas simplement de la cible en elle-même, mais elle dépend aussi de la transparence
à toutes les étapes, puis donc des mesures
à court et à moyen terme qui sont en place, donc à toutes les étapes, là :
à l'étape de la vision, de la planification, de la mise en oeuvre, de la reddition de comptes, de l'évaluation des
résultats. Il y a là, selon nous, un effort de transparence
supplémentaire à faire.
M. Savard (Christian) : Si je peux
compléter, le document est un... il y a une page, dans le document, où on voit
l'intensité carbone par habitant, où on voit qu'il y a des pays — exactement,
c'est mes deux pages favorites, personnellement — où est-ce qu'on voit
que le... On dit souvent : Au Québec, hein, on n'est peut-être pas
capables d'en faire tant que ça, hein, parce
que nous, on est tout hydroélectrique. Mais on se rend compte qu'il y a
d'autres pays, qui sont des sociétés
développées comme la Suède, les pays européens... ont des mixes énergétiques
pas comme le nôtre mais qui ont aussi
des gaz à effet de serre par habitant plus bas que nous. Donc, on se dit qu'on
serait capables de s'approcher des meilleurs. Donc, c'est pour ça qu'on
serait à l'aise avec un gouvernement qui adopterait une cible encore plus
élevée.
M.
Traversy : Donc, si je résume, 37,5 %, c'est bien, mais on
peut encore faire mieux. Vous n'allez pas jusqu'à le préciser d'une façon concrète, vous laissez une
marge de manoeuvre au gouvernement, au ministre, à ses experts, mais
vous faites sentir votre appétit à cet effet-là. D'ailleurs, vous êtes bons
pour faire sentir vos préoccupations, là. Vous avez les mots, vous avez
l'attitude pour le faire valoir. Et j'apprécie. Ça met un peu de piquant dans
cet après-midi.
Alors, en
gros, vous avez parlé aussi de cibles globales de réduction, bon, de gaz à
effet de serre avec des mesures et des
objectifs qui étaient sectoriels. On a parlé avec d'autres, groupes avant vous,
d'une loi sur la transition énergétique. Je voulais voir avec vous si
amener une loi de la transition énergétique qui apporterait des objectifs
sectoriels fixés, ou qui préciserait davantage, peut-être, le rôle du Fonds
vert, ou qui amènerait peut-être des suivis plus précis pour l'atteinte à la
réduction des gaz à effet de serre, vous verriez ça d'un oeil positif ou les propositions
qui vous ont été émises présentement vous satisfont... vous satisfassent... voyons! vous satisfont...
satisferont... en tout cas, bref, vous rendent heureux, voilà.
Des voix : Ha, ha, ha!
M. Traversy : Il commence à
être tard, là. Il est bientôt 6 heures.
M.
Cousineau-Morin (Philippe) : Je pense avoir compris l'essentiel de
votre question. Alors, je ne sais pas si vous faites référence spécifiquement à, à l'étranger, les lois sur la
transition énergétique, mais je pense qu'on a fait connaître notre préférence assez spécifiquement, dans une bonne
portion du secteur des transports, pour, comme nous l'avons dit, une politique des transports collectifs comme il y en a
eu une, comme mon collègue l'expliquait, en 2006, à la suite de l'annonce du plan d'action. Ce serait,
selon nous, déjà une part importante si elle avait son cadre financier, ses objectifs
et ses indicateurs. Ça serait déjà un
gros morceau. Après cela, pour couvrir l'ensemble du secteur des transports, certainement, il
y a moyen d'agir, d'autre part, sur le plan législatif.
M.
Traversy : Parfait! Une petite question rapide que je pose à
tout le monde. Puisque vous êtes spécialisés dans le milieu des transports, vous êtes, j'imagine, en
faveur d'une loi zéro émission au Québec. Est-ce que ce serait quelque
chose de positif dans la stratégie pour diminuer
les gaz à effet de serre? Avez-vous une position officielle là-dessus, vous
qui représentez un large éventail d'organismes sensibilisés au domaine de
l'environnement?
M.
Cousineau-Morin (Philippe) : Nous n'avons pas de position officielle,
mais je pourrais tout de même me prononcer personnellement de façon
assez favorable. Simplement, nous avons inscrit à notre mémoire aussi, en complément de l'objectif sur le kilométrage
parcouru par les voitures, un objectif d'électrification des transports. Et
je pense que le projet d'une loi zéro émission fait partie ou répond en partie
à un tel objectif d'électrification.
• (17 h 50) •
M. Traversy : Vous avez
également parlé de transparence du Fonds vert. C'est un élément fort de votre présentation aujourd'hui. Vous connaissez donc le
PACC 2013... oui, c'est ça, 2013‑2020, qui est dédié au développement des transports collectifs, dans lequel, bon, de
l'argent a été engagé. Je voulais
savoir si, présentement, vous trouvez qu'on devrait accélérer la cadence
ou si les efforts qui sont mis à l'intérieur du PACC vous satisfont présentement.
M. Savard
(Christian) : Les sommes
pourraient être encore plus grandes, mais, de manière générale, ce qu'on attend,
c'est de savoir comment elles peuvent être dépensées. Et, comme il est écrit
dans le mémoire, il y a un 500 millions, actuellement, qui est encore pas clair. On nous rassure tout le
temps : Ça va être dans le transport en commun, mais on ne sait pas
comment dans le transport en commun. Et on est rendus fin 2015, puis les
sociétés de transport ont besoin de connaître
qu'est-ce qu'ils peuvent faire, eux. Et une société de transport, là, ça prend
du temps avant de mettre en place des nouveaux
services, avant de pouvoir bouger. Donc, il y a là une espèce de flou, et c'est
sur ce clou-là qu'on tape depuis l'ancien gouvernement puis avec le
gouvernement actuel pour en savoir un peu plus.
Puis je vais
vous donner un exemple de bon coup qui a été fait sous l'ancien gouvernement et
qui a été reconduit de manière quand même assez forte avec le présent
gouvernement, c'est les subventions aux voies réservées qui sont à 100 % subventionnées par le gouvernement du
Québec pour accélérer les projets à travers le Québec. Ça a fait en
sorte... Et il a notamment été prolongé dernièrement, là, pour donner plus de
temps aux sociétés de transport pour mettre en place plus de projets. Ça, c'est assez clair, c'est un signal fort.
C'est une enveloppe relativement limitée, mais qui fonctionne très bien. Et on sait que, là, on a de l'argent en
réserve pour mettre en place ce genre de mesures précises qui font
bouger les choses plus vite, très rapidement
pour les citoyens. Et il y a beaucoup encore de questions. Puis plus que le
temps avance, moins que les sociétés
de transport vont pouvoir dépenser leur argent dans ce genre de choses là.
Donc, c'est ça qu'on aimerait voir, on a hâte d'avoir des réponses.
Le Président (M. Reid) : Ah!
excusez. Une minute.
M.
Traversy : Il reste une minute? Bien, écoutez, je vais vous
abréger de toutes ces questions pour l'opposition officielle, mais je
voulais juste vous dire que je vais passer un peu plus de temps pour analyser,
évidemment, votre proposition par rapport au
Fonds vert et toutes les recommandations qui en découlent au niveau
de la transparence, au niveau de
l'utilisation des fonds. Vous utilisez des termes qui sont très
préoccupants. Vous parlez de
«détournement», ce qui n'est quand même pas
anodin. Alors, là-dessus, je tenais à vous remercier de ces éclaircissements à
l'égard du Fonds vert.
Le Président (M. Reid) : Merci.
Nous passons maintenant au deuxième groupe d'opposition. M. le député de Masson.
M.
Lemay : Merci, M. le Président. Merci, messieurs, d'être avec nous aujourd'hui. Alors, vous nous avez parlé que vous aimez bien, là, les deux
pages, là, dans le guide, là, les pages 14 et 15, parce que c'était très
graphique, très visuel. Mais je vais y aller
tout de suite sur le baromètre d'ambition en matière de lutte contre les changements
climatiques où est-ce qu'on voit que le Québec constitue à l'équivalence de 9,6
tonnes par habitant, alors que l'Ontario, c'est 12,4 tonnes. Vous avez parlé
tantôt, l'Union européenne, qu'est-ce qu'il se passe en Europe. Mais, si on se
compare à l'Ontario, qui, eux, se sont fixé une cible de réduction de 37 %,
puis, nous, quand on analyse, est-ce que la cible de 37,5 % serait adéquate pour le Québec? Est-ce que, si on compare à
l'Ontario, vous dites : On n'est pas assez ambitieux, trop ambitieux, c'est eux qui ne l'ont pas, c'est...
tu sais? Ou est-ce que vous avez une idée? Dans le fond, on pourrait
faire plus. Dans le fond, c'est ce que vous mentionniez un peu tout à l'heure.
M. Cousineau-Morin
(Philippe) : Entre autres choses, ce qui me vient à l'esprit, en fait,
ce sont les investissements très importants que fait l'Ontario dans le
renouvellement et le développement de son secteur des transports collectifs. Alors, je n'ai pas nécessairement fait la
comparaison si on devrait être plus ambitieux, mais je reviens sur
l'idée que j'ai exprimée un peu plus tôt, que, nonobstant la cible, il y a
tellement de cobénéfices à apporter aux propositions que l'on fait de donner
des alternatives de mobilité pour les travailleurs de toutes les régions
urbaines ou moins
urbaines qu'il y a avantage à aller de l'avant avec les mesures qu'on parle et
à accélérer les investissements dans le transport collectif.
Puis je voudrais
juste... je m'excuse, je voudrais juste compléter sur ce qu'a dit le député de
Terrebonne. En fait, nous avons émis une
hypothèse, bien sûr, sur laquelle nous voulons être rassurés, mais je précise
que c'était bien une hypothèse, en fait, sur le détournement.
M. Lemay :
Et puis, si on retourne dans votre mémoire, vous mentionnez... dans le fond,
là, vous avez une certaine inquiétude par
rapport aux revenus du Fonds vert qui augmentent puis que les dépenses sont
stables, puis là vous posez la
question : À quoi servent les surplus du Fonds vert? Bon, on regarde...
Mettons, on prend une mesure parmi toutes les mesures qui sont en place, on parle des véhicules électriques. On
sait qu'en 2014, là, on a financé pour 22 millions de dollars au
programme Roulez électrique, ça a été dans l'achat de... bien, pour les bornes
puis, bon, pour les véhicules électriques. Mais ça, ça va prendre fin, ce
programme-là, au 31 décembre 2016. Là, vous nous dites : Mais là on a de l'argent en surplus. Ça fait que, là, la question
se pose, c'est : Est-ce qu'on doit mettre l'argent de surplus dans les
véhicules électriques ou on devrait même regarder, dire : Bien, pourquoi
se limiter aux véhicules électriques? Pourquoi on ne regarderait pas les véhicules lourds? On pourrait avoir des véhicules au
GNC, gaz naturel comprimé, qui, eux autres aussi, pourraient contribuer, alors que, présentement, eux autres, c'est financé... je crois que c'est 3,2 millions, là, tu sais, en comparaison
à l'électrique qui est de 22 millions. Est-ce que vous pensez qu'on
devrait utiliser les surplus du Fonds vert puis bonifier l'offre au niveau du
camionnage aussi?
M.
Savard (Christian) : Je pense qu'il apparaît assez évident qu'il y a
des efforts à faire en matière de transport des marchandises, hein, après
le secteur du transport... avant le secteur... en fait, c'est pratiquement le
pire secteur. Donc, on pourrait aller dans
le sens de faire... on peut juste appuyer les efforts qui sont à faire
là-dedans. Par contre, il ne faut pas
oublier que, si on change... Les impacts pour M., Mme Tout-le-monde, là, de
changer les voitures, les transports des marchandises, c'est peu fort.
Donc, nous, on dit : La lutte aux changements climatiques doit aussi être
une manière d'améliorer la qualité de vie
des gens, des citoyens. Et la question du transport des personnes, notamment du
transport collectif, plus dans les grandes
villes, effectivement, est très importante, ça donne beaucoup de possibilités,
ça donne des options aux citoyens.
Donc,
c'est pour ça qu'on pense qu'il faut que ça demeure une priorité pour,
évidemment, le PACC actuel, à la hauteur
de ce que c'est actuellement, mais aussi dans les prochains efforts parce qu'il
ne faut pas oublier qu'on se projette à l'horizon 2030.
M. Lemay :
D'accord. Vous nous mentionnez, dans le fond... Dans la majorité de vos
mesures, dans le fond, vous optez pour une
densification de la population puis d'éviter l'étalement urbain. Quand on
regarde... Moi, j'aime bien la section
3.3 du guide, à la page 28, où c'est qu'on nous mentionne qu'on a un potentiel
de réduction de cinq mégatonnes puis
on parle de quelques objectifs, comme, exemple, installation d'un bonus-malus
sur les véhicules électriques légers, une hausse de la tarification de
stationnement, l'implantation de péage routier ou encore une modulation de la
tarification énergétique.
Au
niveau de la modulation de tarification énergétique, est-ce que vous pensez
que, dans le fond, c'est une mesure intéressante qui pourrait aller avec
ce que vous préconisez comme mode de vie?
M.
Savard (Christian) : Ce
n'est pas un aspect qu'on a vraiment traité dans le mémoire, je crois, là.
Donc, je ne me sentirais pas à l'aise de répondre. Il ne faut pas
oublier qu'on représente une alliance d'organisations. Là, on dépasse nos compétences.
Désolé.
M. Lemay :
Donc, si on regarde le même paragraphe, si vous préconisez, dans le fond, le transport
collectif, j'imagine que, dans le fond, vous
êtes totalement en faveur d'une hausse de la tarification de stationnement
parce que ça va inciter les gens à aller vers le transport collectif.
M.
Cousineau-Morin (Philippe) :
C'est certain que ça va prendre des mesures de type la carotte et le
bâton. Donc, effectivement, il y a à avoir des mesures, si on peut dire,
coercitives, ou réglementaires, ou budgétaires qui vont faire l'incitatif.
Puis je voudrais peut-être
aussi rappeler, en terminant sur vos deux questions, qu'il y a une étude de
l'agence américaine de l'environnement qui rappelait que le mode de vie axé sur le transport collectif est
celui qui est, au niveau individuel, le plus grand facteur de réduction des
émissions par personne, bien devant les efforts qu'on peut faire dans le
bâtiment durable ou les voitures
électriques. Et je ne veux pas minimiser ces efforts-là, là, mais il y a là des
gains très, très importants à faire.
Puis c'est pour ça que je recentre aujourd'hui sur l'essentiel de notre
mission. C'est donc l'amélioration de la desserte en transport en
commun.
M. Lemay :
M. le Président.
Le Président (M.
Reid) : Merci. Le temps est écoulé.
Alors, merci pour la
contribution que vous apportez à nos travaux.
La commission ajourne
ses travaux jusqu'à demain matin, le vendredi 2 octobre, à 10 h 15.
(Fin de la séance à 17 h 59)