(Onze
heures onze minutes)
Le
Président (M. Reid) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
la Commission des transports et de
l'environnement ouverte. Je demande à
toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie
de leurs appareils électroniques.
La
commission est réunie afin de procéder à des auditions
publiques dans le cadre des consultations particulières sur le document
de consultation intitulé Cible de réduction d'émissions de gaz à
effet de serre du Québec pour 2030.
Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La Secrétaire :
Non, M. le Président, il n'y a aucun remplacement.
Le
Président (M. Reid) :
Alors, voici l'ordre du jour pour cet avant-midi. Nous allons débuter par des remarques
préliminaires. Par la suite, nous entendrons les groupes suivants : Comité-conseil
sur les changements climatiques et Équiterre.
Remarques
préliminaires
Alors,
je cède maintenant la parole au ministre
du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte contre les
changements climatiques pour ses remarques préliminaires. M. le ministre, vous
disposez de six minutes.
M. David Heurtel
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Mme la secrétaire, collègues de la députation, je salue également
les membres de mon cabinet qui sont
ici et aussi les membres du ministère
du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte contre les
changements climatiques. Mesdames et messieurs, bonjour à tous.
Je vous souhaite la
bienvenue à cette première journée des consultations particulières sur la proposition
de Cible de réduction d'émissions de gaz à effet de serre du Québec pour l'horizon 2030. Comme vous le savez, les
impacts des changements climatiques sont
bien réels sur notre santé, notre environnement et nos infrastructures. Il y a urgence
d'agir. Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a clairement
dit : «Il n'y a pas de plan B, parce qu'il n'y a pas de
planète B.»
Le Québec est partie
prenante de la solution et entend demeurer un chef de file en matière de lutte
contre les changements climatiques. Nous en sommes au début de la fin de l'ère
des hydrocarbures et, conséquemment, nous sommes au début du début de l'ère
post pétrodépendante, une ère basée sur une nouvelle économie propre et verte.
Récemment,
nous avons proposé une cible québécoise ambitieuse et crédible de réduction des
émissions de GES pour 2030 de l'ordre
de 37,5 % par rapport à 1990. Je tiens d'ailleurs à souligner le travail
réalisé par le Comité-conseil sur les changements climatiques dont les
recommandations ont grandement contribué à la réflexion gouvernementale.
Aujourd'hui, nous
entamons une étape importante. C'est à votre tour d'alimenter et d'enrichir les
réflexions. Ensemble, nous devons déterminer
une cible pour 2030 qui apportera un effort équitable à l'effort mondial,
améliorera la santé, la sécurité et la
qualité de vie des Québécoises et des Québécois, favorisera la relance et le
développement durable de notre
économie. Notre intention est d'annoncer notre cible de réduction pour
l'horizon 2030 en vue de la 21e conférence des parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements
climatiques de Paris en décembre 2015. Cette conférence arrive à grands pas. Tous les membres de la communauté
internationale sont appelés à prendre des engagements ambitieux de
réduction de leurs émissions de GES pour la période post-2020. L'objectif est
d'arriver à un accord international sur le
climat afin de limiter le réchauffement climatique mondial à moins de
2 °C. À l'aube de cette importante conférence, jamais le rôle des
États fédérés n'aura été aussi important pour notre avenir et celui de nos
enfants.
La lutte contre les
changements climatiques est une priorité pour le gouvernement du Québec depuis
plus de 10 ans. Nous sommes parmi les
États fédérés les plus actifs en la matière en Amérique du Nord. Plus de
1,5 milliard de dollars ont été investis pour réduire l'empreinte
carbone du Québec, verdir son économie et renforcer notre capacité d'adaptation
aux impacts des changements climatiques. Le marché du carbone est le fer de
lance de notre approche en matière de
changements climatiques. Il constitue un puissant outil de croissance
économique verte. Lié à celui de la Californie depuis le
1er janvier 2014, il représente un bel exemple de ce que peuvent accomplir
les États fédérés qui unissent leurs forces
pour favoriser l'émergence d'une économie sobre en carbone. Rappelons que
l'Ontario a signalé, en avril
dernier, son intention de se joindre au marché du carbone de la Western Climate
Initiative dont font partie le Québec et la Californie. Déjà, huit ventes aux enchères ont été tenues à ce jour,
dont quatre conjointement avec la Californie.
Elles ont généré des revenus de 755 millions de dollars pour le Québec. 100 %
des revenus du marché du carbone sont réinvestis dans la mise en oeuvre du Plan d'action 2013‑2020 sur les changements
climatiques. D'ici 2020, le Québec bénéficiera de plus
de 3,3 milliards de dollars pour soutenir les entreprises, les
municipalités et les citoyennes et citoyens dans leur transition vers une
économie sobre en carbone.
Les plus récentes données de l'inventaire
québécois des émissions de gaz à effet de serre indiquent que les émissions de
GES du Québec en 2012 ont diminué de 8 % par rapport à leur niveau de
1990, surpassant ainsi de 2 % l'objectif
de réduction que l'on s'était fixé. Pour 2020, le Québec s'est donné l'objectif
de réduire ses émissions de GES de 20 %
sous le niveau de 1990. Cela représente tout un défi pour un État où près de
100 % de l'électricité est déjà produite à partir d'énergies
renouvelables.
La cible que nous établirons pour 2030 se doit
d'être ambitieuse. Elle devra constituer une étape vers l'atteinte de
l'objectif identifié par le GIEC pour les pays industrialisés et repris dans le
protocole sur le leadership climatique mondial auquel le Québec a adhéré en
juillet dernier, lors du sommet des Amériques sur les changements climatiques,
soit une réduction de 80 % à 95 % d'ici 2050.
En août
dernier, le Québec s'est aussi engagé, avec les 10 autres États et provinces
partenaires de la conférence des gouverneurs
de la Nouvelle-Angleterre et des premiers ministres de l'Est du Canada, à
contribuer à une cible régionale de réduction
d'émissions de GES de 35 % à 45 % sous le niveau de 1990 d'ici 2030.
Rappelons que nos partenaires dans le marché
du carbone, soit la Californie et l'Ontario, ont annoncé des cibles de
réduction de 40 % et 37 % respectivement pour 2030 par rapport
à 1990.
Le défi est
grand, mais il est réalisable, à condition que l'ensemble des Québécoises et
des Québécois se mobilisent. L'engagement
des dirigeants politiques, des entreprises, des citoyens et de la société
civile est également indispensable pour réduire notre empreinte carbone.
C'est donc avec le plus grand intérêt que nous écouterons vos suggestions et
vos réflexions. Ce sera l'occasion
d'échanger sur les opportunités qu'offre la lutte contre les changements
climatiques sur les plans du développement social et économique, sans
compter ses impacts positifs sur notre qualité de vie.
Je tiens à
remercier tous les intervenantes et intervenants qui participeront à cette
commission parlementaire, de même que
tous ceux et celles qui nous transmettront des mémoires. Ensemble, nous pouvons
lutter contre les changements climatiques afin d'assurer une qualité de
vie à nos enfants. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Reid) :
Merci, M. le ministre. J'invite maintenant le porte-parole de l'opposition
officielle, M. le député de Terrebonne, à faire ses remarques préliminaires
pour une durée maximale de 3 min 30 s.
M.
Mathieu Traversy
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais tout
d'abord saluer le ministre de l'Environnement, toute l'équipe
gouvernementale qui l'entoure, nos collègues députés ainsi que la deuxième
opposition, M. le député de Masson, et Mme
la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, qui est avec nous dans mon angle mort, mais on
s'est croisés, là, quand même, là, juste avant de rater, évidemment, le coche.
Donc, je
voulais vous dire, M. le Président, à quel point le Parti québécois est fier de
participer à ces consultations sur un enjeu qui est aussi important que
celui de la cible de réduction d'émissions de gaz à effet de serre au Québec pour 2030. On compte beaucoup sur les
consultations pour, évidemment, nous diriger sur cette cible ambitieuse que
le ministre nous a annoncée il y a quelques
semaines, soit de 37,5 % en 2030, là, comparativement à 1990, voir,
évidemment, donc, toute l'audace qui est derrière cette proposition mais voir
aussi sa faisabilité.
Combien de
fois, M. le Président, ne nous sommes pas dits au Québec : Nous voulons
atteindre tel objectif, aller dans
telle direction, et combien de fois, M. le Président, avons-nous été obligés,
par différentes conjonctures ou différentes situations, de reculer?
Donc, il est important de savoir, évidemment, de quelle façon on peut atteindre
ces cibles qui, aussi ambitieuses
soient-elles... puissent être accomplies et arriver, là, de manière concrète à
se réaliser de par les redditions de
comptes, de par les mesures qu'on peut voir mettre en place, là, pour y
parvenir, évidemment toujours travailler à faire en sorte que le Québec
puisse être un chef de file en matière de développement durable et dans
l'optique, également, toujours en filigrane de la COP21, qui s'en vient aux
mois de novembre et décembre à Paris.
Donc, sur
cette trame de fond, le Parti québécois est très fier d'être associé et de
participer à ces consultations, et nous avons bien hâte de vous écouter.
Le Président (M. Reid) :
Pardon?
M. Traversy : C'est tout.
Le Président (M. Reid) : Ah!
merci.
M. Traversy : Il devait
rester une minute environ.
Le Président (M. Reid) : Oui.
M. Traversy : Bon, bien,
c'est ça, c'est tout.
• (11 h 20) •
Le
Président (M. Reid) : Bon, d'accord. Je n'avais pas saisi qu'on
était à la fin de votre intervention. Alors, merci de votre
intervention, M. le député de Terrebonne. Je passe maintenant la parole au
porte-parole du deuxième groupe d'opposition pour ses remarques préliminaires
pour une durée de 2 min 30 s.
M.
Mathieu Lemay
M.
Lemay : Merci, M. le Président. J'aimerais tout d'abord saluer le
ministre et les députés formant le gouvernement et les députés de
l'opposition qui sont ici présents. Vous savez, à l'issue des consultations que
nous amorçons aujourd'hui, il va y avoir des conclusions qui vont émaner. Puis
cette proposition, bien, elle devra être approuvée par le Conseil des ministres
avant sa présentation à la convention des Nations unies sur les changements climatiques de Paris en décembre 2015, tel
que M. le ministre l'a mentionné un peu plus tôt. Donc, ce n'est pas
définitif et c'est justement pour ça que nous tenons des consultations.
Vous
savez, la réduction des GES est impérative et elle ne peut pas se faire à coût
nul, certes, mais elle doit être opérée
de façon responsable sur tous les plans, notamment ceux économiques. Selon
l'étude d'impact microéconomique sommaire qui a été réalisée par le
gouvernement et qui nous est présentée dans le guide sur la cible de réduction
des gaz à effet de serre, vous savez,
l'atteinte de cette cible de 37,5 % aura notamment pour effet d'augmenter
le prix du litre d'essence d'au moins
0,04 $, de réduire la richesse du Québec d'au moins 600 millions de
dollars et d'induire une perte de 2 800 emplois ou plus.
Donc, nous prenons
acte des défis relatifs aux changements climatiques et on reconnaît la
nécessité pour le Québec de se fixer une
cible ambitieuse de réduction des gaz de GES pour assurer un avenir propre,
sain et sécuritaire pour nos générations futures. Or, en contrepartie,
on croit que le gouvernement du Québec a été incapable d'atteindre sa cible de réduction de 6 % en 2012 par
rapport au niveau de 1990, il traîne la patte quant à l'atteinte de sa cible de
2020. Donc, on doit mettre des mesures en
oeuvre pour que notre économie prenne un virage axé sur les technologies
propres et innovantes, ce qui est très important pour nous, pour que l'atteinte
de cette cible ne se fasse pas au détriment de notre bien-être économique.
Cela dit, le
gouvernement a beaucoup de preuves à faire. La phase II du plan d'action
sur les changements climatiques de 2013‑2020
n'est pas encore connue, donc on compte sur l'expertise des groupes que nous
rencontrerons ces prochains jours afin de
déterminer ensemble quelle serait la cible la plus responsable à adopter pour
le Québec. Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Reid) : Merci, M. le député de Masson.
Auditions
Alors, je souhaite la
bienvenue maintenant à nos invités du Comité-conseil sur les changements
climatiques. Je vous rappelle que vous...
Une voix :
...
Le
Président (M. Reid) : Oh! pardon. Non, il n'y a pas de temps
prévu pour les députés indépendants. Désolé. Vous aurez l'occasion, à la
période de questions, d'échanger, évidemment. On va protéger votre temps.
Alors,
je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour faire votre présentation.
Par la suite, nous aurons une période d'échange. Je vous demanderais,
pour les fins d'enregistrement, de vous présenter et présenter la personne qui
vous accompagne. À vous la parole.
Comité-conseil sur les
changements climatiques
M. Guilbeault (Steven) : Merci beaucoup, M. le Président. M. le ministre,
Mme, MM. les députés, merci beaucoup de nous donner l'opportunité de
vous présenter rapidement le fruit du travail du Comité-conseil sur les
changements climatiques du gouvernement du Québec.
Mon nom est Steven Guilbeault, je suis coprésident de ce comité-là. Je
suis accompagné de Philippe Bourke, qui en est également membre.
D'abord,
je dois vous dire que les membres du Comité-conseil — et je ne vais pas les nommer tous, vous les
avez dans l'annexe 2 du document — ont été nommés à titre personnel. Alors,
nous ne sommes pas des représentants de
nos secteurs ou de nos organisations, bien que nous en soyons évidemment issus. Nous sommes ici, Philippe et moi, pour
vous présenter un peu le fruit des travaux
du comité et non pas nos opinions personnelles ou même
celles de nos organisations, ce que nous aurons tous les deux le loisir
de faire un peu plus tard dans le courant de la journée.
Le Comité-conseil a
été créé à l'été 2014 avec quatre mandats, dont l'un des mandats était de
fournir un avis au gouvernement du Québec sur une cible à l'horizon 2030, ce
qu'on appelait, nous, post-2020. Il y a eu environ une douzaine de rencontres du comité au cours de la dernière année et quelques
mois à raison d'une demie à une journée pour chaque rencontre. Ce qu'on
a essayé de faire, c'est de regarder d'abord qu'est-ce qui se faisait autour de
nous, quels étaient les objectifs de nos
voisins et de d'autres pays, soit au Canada, aux États-Unis ou ailleurs dans le
monde, donc de regarder un peu ce qui
se passait à ce niveau-là. On a entendu des experts de plusieurs secteurs, que
ce soient des gens qui ont fait du
travail de prospective pour d'autres États sur la question de plans d'action ou
de cibles potentielles de réduction. Nous
avons entendu... Évidemment, on a travaillé de très près... et on remercie la
précieuse collaboration des fonctionnaires du ministère du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte
aux changements climatiques. On a entendu les représentants du ministère
des Transports, le ministère des Ressources naturelles et de l'Énergie. Et donc
c'est avec l'ensemble de ces informations-là
que le comité a regardé quelles pourraient être différentes cibles pour le
Québec en fonction de différents paramètres, que ce soient des
paramètres économiques, sociaux, environnementaux, les coûts-bénéfices de la
réduction. Et je laisserais à Philippe le soin de présenter la recommandation
du comité.
M. Bourke
(Philippe) : Merci, Steven. Donc, effectivement, je vous rapporte à
l'annexe 2 du document de consultation
sur la cible, où on présente en détail la recommandation du comité. On précise,
comme vient de le mentionner Steven,
quels ont été les éléments qui ont été pris en compte dans notre réflexion.
Donc, il y a toute une série de considérants que je ne répéterai pas
ici, mais évidemment ça a été fort utile pour nous de se pencher sur le
contexte, les tendances, ce que font nos
voisins, quelles sont les particularités du Québec, les risques. Donc, ça a été
le fruit de cette réflexion-là qui a
mené à notre recommandation, et donc je vais vous la lire parce qu'en fait le
choix des mots est important. Dans un comité comme celui-là, évidemment,
c'est important qu'on nomme les choses correctement. Donc : «Le
Comité-conseil recommande :
«Que le
Québec adopte un objectif minimal de réduction de 80 % de ses émissions de
GES sous le niveau de 1990, à l'horizon 2050;
«Que le Québec adopte une cible minimale de 37,5 %
de ses émissions de GES sous le niveau de 1990, à l'horizon 2030, assortie d'un objectif ambitieux et mesurable de
réduction de la consommation de combustibles fossiles, au premier chef
le charbon et les produits pétroliers;
«Que des objectifs sectoriels soient adoptés
pour assurer la mise en oeuvre de mesures structurantes visant la réduction des émissions domestiques de GES — donc, on parle ici des réductions
internes — et
qu'ils soient révisés, sur une base
quinquennale, notamment, pour prendre en compte l'évolution de la science, les
avancées techniques, le niveau réel de réductions obtenues, le coût de
l'énergie, le prix carbone et les bénéfices [de] réductions;
«Qu'un mécanisme de reddition de comptes et
d'évaluation d'impacts soit mis sur pied suivant les meilleures pratiques afin
de suivre la réalisation des objectifs sectoriels et de contribuer aux
ajustements quinquennaux;
«Que le
Québec poursuive son engagement envers le marché du carbone et qu'il encourage
son expansion tant sectorielle que géographique dans le but de se doter
d'une plus grande flexibilité dans l'atteinte de sa cible; et enfin
«Que les différents programmes et politiques en
matière de lutte contre les changements climatiques, dont le PACC — donc, le plan d'action sur les changements
climatiques — soient
suffisamment financés pour atteindre la cible et les objectifs.»
Alors, voilà,
c'est la proposition... en fait, l'avis que fait le Comité-conseil au ministre
pour l'établissement de la cible pour 2030.
Le Président (M. Reid) :
Est-ce que ça termine votre présentation? Merci de votre présentation. Nous
allons passer maintenant à la période d'échange. M. le ministre, la parole est
à vous.
M. Heurtel : Merci, M. le Président.
M. Guilbeault, M. Bourke, je tiens d'abord à vous remercier en tant
que représentants de l'ensemble des membres
du Comité-conseil sur les changements climatiques, vous remercier
infiniment pour le travail colossal que vous
avez accompli. Pendant plus d'un an, vous et l'ensemble du groupe qui compose
une quinzaine d'experts dans une série de
domaines, les groupes environnementaux, le monde de l'économie, de
l'industrie, du transport, de la santé, du
bâtiment, et j'en passe, ont tous travaillé et ont laissé de côté un peu
leur... chacun leur domaine particulier,
leurs oeillères particulières, puis ont engagé dans une discussion très
productive qui a donné un travail qui a beaucoup aidé le gouvernement
dans l'élaboration de sa proposition.
Alors, je
tiens à vous remercier infiniment pour ce travail-là, qui va continuer,
d'ailleurs, parce que notre travail ne s'arrête
pas avec la cible après ça, et c'est le sens de mes questions parce qu'après
une cible c'est le comment on y arrive, le vrai travail commence aussi.
Alors, on a déjà commencé avec le plan d'action
sur les changements climatiques 2006‑2012, nous sommes présentement dans l'application du 2013‑2020. Mais, par rapport à votre
travail — et
j'aimerais bien faire le lien aussi avec les cibles sectorielles, en préambule, là — d'abord et avant tout, concrètement, sur
quoi devrions-nous concentrer nos énergies en termes de moyens concrets
pour atteindre cette cible? Quels sont les secteurs, les gestes qui pourraient
faire le plus pour contribuer à l'atteinte de cette cible?
• (11 h 30) •
M.
Guilbeault (Steven) : Je
pense que, dans le cadre de nos discussions, il y a un certain nombre
d'éléments qui sont ressortis et sur lesquels l'ensemble des membres du
comité s'entendent de façon consensuelle et même souvent de façon unanime. L'importance du secteur des
transports, clairement, quand on lit le document que vous avez
présenté, on voit très bien que, là où d'autres secteurs ont réduit depuis
1990, c'est un secteur qui est en expansion au niveau des émissions. Et je pense que tous les acteurs
autour de la table s'entendent pour dire qu'il faut mettre beaucoup d'efforts du côté des transports et, comme le spécifie d'ailleurs
la recommandation, du côté de la réduction de notre
consommation de combustibles fossiles, le
pétrole, évidemment, qui occupe la part du lion de la consommation
des combustibles fossiles au Québec, mais aussi encore un peu de charbon. Alors, clairement,
ces deux éléments-là étaient les deux qui ressortaient le plus. Je ne
sais pas si...
M. Bourke (Philippe) : Bien, moi,
j'ajouterais peut-être quelque chose. D'abord, évidemment, on n'a pas la
capacité, aujourd'hui, de se livrer complètement pour répondre à cette question-là.
Vous nous avez confié, au comité, un autre important chantier, qui est celui
d'élaborer une proposition pour une stratégie sobre en carbone, et on est en train d'attacher les derniers cordons, et on ne
voudrait pas faire de scoop, surtout pas, évidemment, parce que,
d'abord, vous devez le voir. Ceci dit, bon, comme dit Steven, il y a des choses
là-dedans qui sont de l'ordre d'unanimité, celui des transports en est un.
J'ajouterais,
parce qu'on parle de sectoriel, une autre unanimité. C'est justement que ça en
prend et qu'il faudra une réflexion assez fouillée là-dessus pour
éviter, justement, de faire porter sur certains secteurs un fardeau qui ne serait pas approprié
compte tenu du contexte socioéconomique, par exemple des efforts déjà réalisés,
par exemple, donc... Et, pour ça,
bien, il y aura besoin de fouiller. Il y a des analyses qui sont possibles de
faire dans ces secteurs-là, des analyses prospectives, qu'on appelle, pour évaluer les tendances et justement
mesurer quels sont les risques. Donc, ça aussi, c'est quelque chose que vous allez retrouver dans
l'avis. Mais on ne pourrait pas aller beaucoup plus loin que ça, vous
comprenez, là, pour ne pas manquer de respect à nos collègues, là, du comité.
M. Heurtel : Mais déjà, justement,
ça met bien la table sur au moins les secteurs, les domaines. Lorsqu'on a
annoncé la proposition de cible... et je suis sûr que vous avez entendu ces
commentaires-là puis je suis sûr qu'on va les
entendre durant les travaux de la commission. Il y a certains qui vont dire que
c'est une cible qui non seulement est ambitieuse,
mais peut-être un peu trop ambitieuse parce qu'étant donné que le Québec, déjà,
produit un pourcentage très élevé
d'énergie renouvelable, alors... bon, presque 100 % d'énergie
d'électricité produite au Québec provient de sources renouvelables. Et, déjà dans notre portefeuille
énergétique, c'est près de 50 %. Alors, le mixte, là, on a 53-47
hydrocarbures, à peu près, là.
Et donc, par rapport... Alors, ce qu'on entend
comme commentaires, souvent, il y a certains qui disent : Bien, cette cible-là, on est déjà en
avance par rapport à d'autres juridictions autour de nous. Alors,
nous, on a déjà fait le gros du travail. Ce qui reste à faire pour atteindre ce genre de cible là va
être titanesque — encore une fois, là, ce n'est pas mes mots, c'est ce que j'entends — et
ça va nous désavantager d'un point
de vue compétitif par rapport à d'autres juridictions qui,
elles, bon, pourraient facilement atteindre des cibles ambitieuses en éliminant
le charbon, par exemple, en éliminant des sources d'énergie basées
sur les hydrocarbures.
Alors, comment réagissez-vous à ce genre de proposition
là?
M. Guilbeault (Steven) : Peut-être
deux choses là-dessus. D'abord, évidemment, le fait que le Québec ait déjà
fait des efforts fait en sorte que notre niveau d'émissions, soit per capita ou
même au total, est très bas si on se compare à nos voisins. Donc, en pourcentage, lorsqu'on fait le pourcentage de nos réductions
d'émissions en termes de
mégatonnes, par exemple, si on regarde ce que l'Ontario
devra faire en termes de réduction ou même l'Alberta, c'est peu de
tonnes. Évidemment, comme on a déjà
fait des efforts, ces tonnes-là, elles sont plus dures à aller chercher, mais
on en a beaucoup moins à aller chercher que nos voisins, l'ensemble des
gens qui nous entourent, d'une part.
D'autre part,
quand je présentais un peu le processus que nous avons utilisé, encore une fois, lorsqu'on regarde autour de nous, bon, l'Ontario : une
cible de 37 %. Pour atteindre cette cible-là, l'Ontario ne pourra pas
fermer ses centrales au charbon, elle les a déjà fermées. Alors, on commence,
là aussi, à entrer, chez nos voisins ontariens, dans des réductions d'émissions dans des secteurs où les réductions faciles,
il n'y en a pas énormément non plus. Donc, plus on va avancer dans le
temps, plus nos voisins vont commencer à nous ressembler. Le Vermont, avec une
réduction de 50 % d'ici 2025... Bon, je
veux bien croire que le Vermont, ce n'est pas la Californie, ce n'est pas la
septième économie au monde, mais il reste que le portrait qui se dessine
autour de nous, c'est que de plus en plus d'États, de provinces adoptent des cibles ambitieuses, et plus on va
avancer dans le temps, plus l'effort va commencer à se ressembler d'un
État, d'une province à l'autre.
M. Bourke (Philippe) : Moi,
j'ajouterais un élément très important par rapport au point que vous soulevez, M. le ministre, parce que c'est vrai que ça va
être un enjeu qui va servir de fil des discussions durant toute la
commission, l'enjeu des impacts économiques de ce choix-là. C'est sûr qu'il y a
un travail qui a été fait par le ministère des Finances. On peut dire du bien ou du mal de ça, je pense qu'il faudra
peut-être le regarder de façon plus spécifique. Je ne suis pas convaincu que le ministère des Finances
est nécessairement super bien équipé pour faire une bonne mesure de tout
ça. En même temps, c'est utile d'avoir cet indicateur-là, mais je pense qu'il
faut le prendre pour ce qu'il est.
J'en prendrais un autre que je vous suggérerais
tous de lire, c'est l'extrait d'un discours qui a été fait hier en Angleterre par Mark Carney, qui est le gouverneur
de la Banque d'Angleterre, qui est l'ancien gouverneur de la Banque du Canada. À mon avis, ce discours-là va rester dans
les annales comme un point tournant de l'éveil du secteur financier,
économique par rapport aux risques climatiques. C'est bien fouillé comme
discours, c'est bien rendu, c'est bien exposé.
Et justement ça me permet de dire que lui, il voit trois risques, puis celui
qu'on vient d'exposer, là, qui est ce que j'appellerais le risque économique de la transition, qui est souvent
pointé pour dire : Ah! oui, mais ça va nous coûter cher ou pas cher
ou il y a des risques dans tout ça, oui, il est important, mais il y en a deux
autres qu'on oublie, c'est le risque physique,
c'est-à-dire il y a les impacts qu'on subit et les bénéfices qu'on peut avoir
des actions. Ça, c'en est un. Et l'autre, c'est un autre risque qu'on voit poindre de plus en plus, qui est le
risque réputationnel, celui où s'exposent les acteurs économiques pour
ne pas avoir agi. On le voit poindre dans le secteur du tabac, par exemple, en
ce moment, dans l'industrie automobile avec des choses comme ce qui... sont
passées avec certaines compagnies allemandes.
Donc, ces
risques-là aussi, il ne faut pas les oublier. Et je pense qu'à ce moment-là ça
prend une grande ouverture d'esprit.
Il faut aller voir aussi la recherche qui se fait un peu partout. La science
économique sur le climat est large, et de plus en plus établie, et va
beaucoup plus loin que l'analyse qu'a faite, en tout respect, le ministère des
Finances.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Monsieur le... Oui, M. le ministre? Oui, d'accord.
M.
Heurtel : ...une autre question, s'il vous plaît, M. le Président. Sur
ce point-là, bon, encore une fois, certains groupes, certaines personnes qui ont des doutes sur la capacité
d'atteindre une cible ambitieuse comme la nôtre... Je soulève le point. Bon, d'un côté, c'est que le post-2020,
les pressions sur le coût de la tonne par rapport au marché du carbone risquent d'être à la baisse si, justement, on
atteint nos objectifs puis on continue à limiter nos émissions. Donc, les
crédits carbone risquent de valoir moins selon certaines
personnes. Conséquemment, étant donné que c'est notre principale source de financement pour nos mesures d'atteinte
de cible, on risque de manquer peut-être de revenus pour, justement,
financer les actions nécessaires pour atteindre la cible, mais on risque de
créer une espèce de cercle vicieux de ce côté-là. Est-ce que, un, vous
souscrivez à cette proposition-là? Puis, deuxièmement, est-ce que ça veut dire
que, pour atteindre nos cibles, il faut
regarder un plus large éventail de mesures que les mesures actuelles? Bon, il y
a le marché du carbone, mais il y en a d'autres. Mais est-ce que ça veut
dire d'aller beaucoup plus loin en matière d'écofiscalité, par exemple? Alors,
je voudrais vous entendre là-dessus.
M.
Guilbeault (Steven) : Je
pense que les membres du comité ne souscriraient pas à l'énoncé que vous avez
fait, essentiellement pour quelques raisons,
mais le Québec et la Californie ont eu la bonne idée d'apprendre des erreurs
des autres dans l'élaboration de leur
marché, on pense notamment au prix plancher pour la tonne. Je pense que les
Européens auraient été très heureux d'avoir
un prix plancher au cours des dernières années, compte tenu des grandes
fluctuations et même de l'effondrement des
prix, d'une part. D'autre part, la réserve qu'on peut mettre de côté, qui
permet d'avoir un certain contrôle sur l'évolution des prix...
Et je pense
que la plupart des experts s'entendent sur le fait qu'en fait le prix de la
tonne va augmenter dans le temps et
non pas diminuer et que, même, plus on va aller, plus ça va coûter cher, plus
les incitatifs à ne pas dépendre de ça vont
devenir importants, donc d'investir en amont plutôt que d'attendre, finalement,
très loin en aval avant
d'intervenir.
L'autre
élément qui a fait l'objet de beaucoup de discussions au sein des membres du comité,
c'est que la bourse du carbone est un
des éléments importants de l'action gouvernementale au Québec
ou ailleurs mais qu'il y a énormément
d'autres outils à notre disposition. Vous avez parlé d'écofiscalité. C'est une des choses dont on a beaucoup
discuté, la réglementation, que ce soit sur l'efficacité énergétique des
voitures, le bâtiment, ces éléments-là ont également été abordés. Veux-tu en
ajouter, Philippe?
• (11 h 40) •
M. Bourke
(Philippe) : Oui. Moi,
j'ajouterais simplement... comme a dit Steven, je ne pense pas que les
membres du comité perçoivent un risque important face aux outils qu'on a mis en
place, comme le marché du carbone. Ceci dit,
on est conscients qu'il y a un risque perçu. Il n'est peut-être
pas réel, mais il est perçu, comme vous l'avez dit, et c'est pourquoi on
a mis, dans nos recommandations, cette idée de révision quinquennale. Et donc,
là, je sais qu'une fois qu'on a dit ça, ça
exige des enjeux en termes de logistique, là, comment on gère ça, parce qu'on veut en même temps
dire aux marchés vers où on s'en va... on veut être le plus transparents et, en
fait, responsables et leur offrir le plus de prévisibilité
possible, mais, en même temps, je
pense qu'il faut se donner les
moyens. Puis même, en fait, comme la cible qu'on propose, c'est après 2020, il nous reste
encore du temps pour réfléchir. On n'est pas obligés d'attendre en 2025,
par exemple, pour réviser, là. Si, au début de la prochaine décennie, on constate
des écarts, bien, il y a toujours lieu, là... Je pense que c'est une belle
garantie qu'on s'est donnée en proposant ça.
M. Heurtel : Merci.
Le Président (M. Reid) :
Merci. M. le député de Maskinongé, il vous reste deux minutes à l'échange.
M.
Plante : Oui. Bon, bien, merci, M. le Président. Merci
beaucoup de votre présentation. Écoutez,
j'ai écouté attentivement et j'ai bien aimé quand vous avez parlé des
trois risques : le risque de transition, le risque physique puis le risque réputationnel, je pense
que c'est comme ça que vous l'avez mentionné. J'ai apprécié d'entendre ça
parce qu'on entend beaucoup parler du risque de transition, l'impact économique,
et tout ça. Par contre, pour que le Québec demeure un leader et reste... comment je dirais, qu'on reste
sur l'impulsion de nos bonnes actions et qu'on continue à faire mieux,
quels seraient pour vous les meilleurs
moyens que le Québec demeure le leader inconditionnel, je crois, pour
le Canada mais aussi un leader
mondial au niveau des GES, des émissions des GES?
M.
Guilbeault (Steven) : Sincèrement, le comité n'a pas vraiment abordé le travail qu'il y avait à faire sous
cet angle-là du rôle de leadership. On a vraiment regardé, bon, bien, sur
l'horizon 2030, au niveau des cibles. Philippe parlait du travail qu'on fait sur une société sobre en carbone, donc
à plus long terme, sur l'horizon 2050. Il
y a d'autres recommandations qu'on va faire sur un chantier spécifique, je
pense, aux technologies propres, par exemple, mais l'aspect spécifique du rôle du Québec comme leader, là, de mémoire, ça n'a pas fait
partie de nos discussions au sein du comité. Alors, je me sens mal à
l'aise de vous répondre quelque chose qui serait le fruit de mon imagination.
M. Bourke
(Philippe) : Sauf le
souhait, comme il est exprimé dans l'avis, de cette volonté de maintenir la
tendance qu'on a déjà prise, donc de continuer à exprimer ce leadership. La
manière de le faire, ça, par contre, on ne s'est pas penchés autrement que sur
la cible à choisir, effectivement.
Le
Président (M. Reid) :
Merci. Je comprends que vous aurez peut-être d'autres réponses aujourd'hui parce qu'on va vous revoir
encore chacun votre tour pour autre chose que le comité.
Alors, nous
passons maintenant au groupe de l'opposition officielle, et je donne la parole
au porte-parole, M. le député de Terrebonne.
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, j'aimerais
remercier M. Guilbeault et M. Bourke pour leur présentation, de leur participation toujours aussi
active à nos travaux, hein? Il faut rappeler que, depuis quelques
semaines, l'environnement appelle à la mobilisation
beaucoup le secteur. Et, pour en rajouter, je tiens à mentionner que ce n'est pas la dernière fois que nous risquons de voir
M. Bourke et M. Guilbeault à cette même consultation d'aujourd'hui.
Donc, ils sont très polyvalents, et je tiens à leur lever mon chapeau pour
toute l'énergie qu'ils déploient dans cette lutte aux changements
climatiques...
M. Guilbeault (Steven) : C'est de
l'énergie renouvelable.
M. Traversy : ...et d'énergie
renouvelable. Oui, vous êtes clairement des énergies renouvelables et sûrement
compostables aussi, je n'ai aucun doute là-dessus. Donc nous sommes tous très
biologiquement...
Bon, bref,
j'aimerais donc vous remercier et commencer par vous poser quelques questions
concernant les objectifs ambitieux que le ministre nous a proposés dans
le cadre de cette discussion, des mesures, donc, qui sont atteignables, sont réalistes pour vous, à écouter vos paroles,
mais dans quelle mesure et de quelle façon, là? Lorsque vous nous dites
que ça prend des mesures de réduction et de
consommation de combustibles fossiles, j'aimerais vous entendre sur les
moyens qu'on va prendre pour atteindre ces
objectifs. Vous en avez tracé quelques lignes tout à l'heure, mais, d'une façon
plus concrète, là, si vous vous sentez rassurés de la démarche qui
est entreprise ou si vous aviez des redditions de comptes ou des mécanismes qui pourraient rendre plus, peut-être,
concrète l'atteinte de ces cibles qui nous sont proposées. Et on est
ouverts à toutes vos suggestions, là, autour de cette table.
M.
Guilbeault (Steven) : Vous
comprendrez qu'au niveau de la cible il y en a, au sein du comité, qui
auraient aimé une cible plus ambitieuse et
d'autres, une cible moins ambitieuse. Comme Philippe le rappelait, la cible que
le comité a proposée au ministre, c'est donc une cible qui a fait
l'objet d'un consensus.
Sur les
moyens, bien, spécifiquement, alors, on a ciblé le transport, la réduction de
la consommation d'hydrocarbures, principalement le pétrole. Il y a eu beaucoup
de discussions au sein du comité, et peut-être que des recommandations plus précises viendront autour de la question du
transport collectif, transport actif, notamment au
niveau, par exemple, des coûts-bénéfices pour la
santé. Alors, ce sont des éléments dont nous avons discuté, électrification des
transports...
On a discuté
aussi un peu... on a regardé des secteurs un peu plus précis, je pense
au transport des marchandises, mais
là-dessus, bon, on a commencé à regarder différents éléments, mais il n'y a pas
de proposition, là, qui émane du comité ou qu'on est en mesure de vous
présenter présentement.
M. Traversy : Mais vous avez
ciblé le transport. Dans la présentation également, là, du document, vous avez vu que c'était, là, un des secteurs prioritaires
sur lesquels il fallait s'attaquer. Moi, je creuse avec vous, messieurs, là,
pour voir certaines avenues. Vous me parlez
de l'électrification des transports comme étant, exemple, un excellent moyen
de parvenir à nos objectifs. Je sais qu'il y
a un plan d'action concernant l'électrification des transports qui devrait
arriver incessamment de la part du gouvernement. Est-ce que vous auriez des
recommandations à nous faire, dans le cadre de cette mesure, qui touchent
directement les cibles qui sont visées par nos discussions? Est-ce que vous
auriez des messages ou des attentes
importantes à l'égard de ce plan d'action qui s'en vient? Je pense que c'est
tout à fait d'adon.
M. Bourke
(Philippe) : La meilleure réponse qu'on peut vous donner aujourd'hui,
c'est qu'on en a. À travers les travaux qu'on a faits pour le Québec
sobre en carbone, on a identifié une série de mesures qui vont assurément nous
amener à réaliser cet objectif-là et nous donnent confiance de l'atteindre.
Ceci dit,
comme on a expliqué tout à l'heure, on ne peut pas aujourd'hui vous les pointer
du doigt parce que les travaux ne sont pas terminés, mais on peut
assurément vous dire qu'on s'est déjà pas mal entendus sur les mesures qui vont nous amener là. Et vous pouvez avoir
confiance en nous là-dessus, là. On a les moyens, au Québec, de réaliser
ces ambitions-là et on va le démontrer prochainement avec nos travaux.
M.
Guilbeault (Steven) : Et
peut-être que, de façon un peu plus globale... Je pense qu'il y avait aussi un
consensus au sein des membres du comité sur le fait que l'atteinte des
objectifs ne relève pas, par exemple, seulement du plan d'action sur les changements climatiques ou du travail du ministère du
Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte aux changements climatiques mais que ça doit être un objectif
gouvernemental et même sociétal. Et ça, je pense que tout le monde... Alors, je comprends que ça ne
répond pas spécifiquement à votre question, mais, de façon un peu plus
large, tout le monde s'entend pour dire qu'on
peut... La tâche ne peut pas revenir que, par exemple, au ministère de
l'Environnement, il faut que ce soit quelque chose de beaucoup plus
large. Si on fait ça, les membres du comité ont confiance qu'on peut atteindre
des cibles ambitieuses et que c'est possible de le faire.
M. Traversy : Et c'est ça que
j'aimerais éclaircir avec vous parce que, bon, dans ma brève présentation de tout à l'heure... Vous savez qu'on est toujours
pleins de bonnes intentions lorsqu'on décide de s'attaquer à des problèmes
comme celui dont nous traitons aujourd'hui. Puis vous êtes, à mes yeux, là, des
experts, là, tout à fait crédibles, puis, lorsqu'on
me dit : 37,5 %, c'est une cible audacieuse, c'est une cible qui
semble réaliste, j'aimerais savoir comment vous pouvez... Peut-être expliquer aux gens qui écoutent comment cette cible
vous satisfait. Puis, encore là, j'ai vu que c'était une cible minimale, hein, dans votre document. Donc,
37,5 %, c'est minimal, mais je ne suis pas capable de comprendre,
là, sur quels mécanismes ou sur quelles façons de calculer vous dites que c'est
le minimal atteignable et qu'on pourrait peut-être aller plus loin. Faites
juste nous aider à bien éclaircir ce chemin qui vous amène à conclure que
37,5 %, c'est le minimum puis qu'on pourrait peut-être faire plus. Comme
ça, on serait sur la même longueur d'onde. Il manque ce petit élément
là.
M.
Guilbeault (Steven) :
Pourquoi une cible minimale? D'abord, parce
que les travaux du comité sont
beaucoup guidés par les exigences de la communauté
scientifique internationale. Le fait que le Québec ait adhéré à un certain
nombre d'objectifs internationaux, soit
au niveau de limiter l'augmentation des températures sous le
seuil de 2 °C ou encore comme l'accord que le Québec a
signé en juillet dans le cadre du Sommet des Amériques sur le climat avec la
Californie et l'Ontario,
donc sur la réduction, à l'horizon 2050, de l'ordre de 80 %
à 95 %... Or, quand on regarde
où on devrait être en 2020 et où on
veut être, minimalement, en 2050, plus tous les autres éléments dont nous avons
parlé, Philippe et moi, alors c'est
comme ça qu'on est arrivés à dire : Bien, si on veut espérer atteindre une
cible minimale de moins 80 % en 2050, bien, il faut qu'on soit autour de moins 37,5 % en 2030 parce que,
sinon, après ça, ce que ça veut dire essentiellement, c'est qu'on laisse aux générations futures un effort de
réduction très, très, très important. Si on décide de beaucoup prendre
notre temps au départ, bien, eux vont devoir courir très rapidement si on veut
arriver à ces cibles-là. Donc, c'est un peu comme ça qu'on a regardé ça.
• (11 h 50) •
M. Bourke
(Philippe) : Moi, j'ajouterais quelque chose sur la question de notre
capacité à atteindre nos objectifs. Puis effectivement les membres du
comité sont, comme vous, conscients que c'est toujours un défi de réaliser nos intentions. On se donne des objectifs, puis c'est
extrêmement difficile de les mettre en oeuvre, et, si vous regardez
comme il faut notre avis, on a pointé quelques mesures qui, pour nous, sont des
moyens d'y arriver, dont une cible sur la consommation des combustibles
fossiles, dont des cibles sectorielles, dont une cible domestique, dont des...
réaliser des réductions ici, au Québec, et non pas uniquement sur les marchés
extérieurs. Donc, c'est des éléments qu'on a pointés — on a parlé, à la fin, aussi de bien financer
les mesures — donc,
c'est des pistes qu'on a mises comme étant des moyens à mettre en oeuvre
pour s'assurer de réaliser notre intention.
M.
Traversy : Donc, vous nous dites que, si la Politique
énergétique ne tient pas compte de ces cibles-là, il y a des chances,
évidemment, qu'on ne risque pas de l'atteindre.
M.
Guilbeault (Steven) : Je ne
pense pas que c'est ce que nous avons dit. Sincèrement, je l'ai dit tout à
l'heure, pour les membres du comité, la cohérence de l'action gouvernementale
est importante et névralgique pour l'atteinte des
cibles. Le comité n'a pas émis d'avis spécifiquement sur la Politique
énergétique du gouvernement ou encore
celle sur l'électrification des transports. Alors, vous pouvez tirer,
évidemment, vos propres conclusions, là, mais ce ne sont pas celles
auxquelles le comité est arrivé.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Alors, nous avons terminé pour le bloc de l'opposition officielle. Je
passe maintenant la parole au porte-parole du deuxième groupe d'opposition. M.
le député de Masson.
M.
Lemay : Merci, M. le Président. Merci, M. Bourke, merci,
M. Guilbeault, d'être avec nous aujourd'hui. Vous savez, vous avez fait les six recommandations du
comité-conseil, et puis je voudrais regarder avec vous tout de suite la recommandation n° 5, là. Quand vous
mentionnez que le Québec doit poursuivre son engagement envers le marché
du carbone puis que vous dites que, dans le
fond, on devrait se doter d'une plus grande flexibilité dans l'atteinte de sa
cible, juste savoir un petit peu
précisément : Est-ce que ça voudrait dire que, dans le fond, vous
suggérez, par cette mesure-là, qu'on assujettisse des entreprises, tu
sais, de moins de 25 000 tonnes par année, un peu comme ce que vous aviez
mentionné la dernière fois dans le livre vert?
M. Guilbeault (Steven) : Je rappelle
que, quand j'étais ici pour le livre vert, j'étais ici, évidemment, pour
Équiterre. Je serai ici pour Équiterre dans quelques minutes, alors vous
pourrez me reposer la question, mais, non, la recommandation
n° 5 ne vise pas spécifiquement d'inclure des entreprises qui ne sont pas
inclues. Ça n'a pas fait partie des discussions du comité. Évidemment,
pour le secteur privé, l'avantage de la bourse du carbone, c'est que ça offre
une grande flexibilité dans l'atteinte des objectifs. C'est d'ailleurs pour ça
que ça a été inclus dans le Protocole de Kyoto parce que plusieurs pays et plusieurs représentants du secteur privé à
l'échelle mondiale... Je veux dire, c'est une mesure qui favorise
l'atteinte de réduction d'émissions au plus faible coût possible. Alors, je
pense que c'est vraiment dans cet esprit-là.
M. Bourke
(Philippe) : Oui, puis effectivement je pense que, quand on parle de
plus de flexibilité, c'est qu'on s'attend
à ce que, s'il y a plus de joueurs qu'uniquement le Québec et la Californie,
bien, évidemment, on va aussi gagner en
flexibilité. Puis là-dessus il faut reconnaître le travail qui a été fait,
entre autres, par le ministre de l'Environnement, mais le gouvernement
du Québec depuis les derniers mois, pour essayer, justement, de convaincre
d'autres joueurs, dont l'Ontario, à se
joindre au marché. Et on pense que ça va être bénéfique si on arrive à aller
chercher des nouveaux joueurs. C'est évident que tout le monde va y
gagner, là.
M. Lemay : Parfait.
M.
Guilbeault (Steven) : On
note notamment la volonté de l'État de Washington.
Le gouverneur a clairement identifié...
On est à l'élaboration, là, des lois et règlements pour que l'État de Washington...
Donc, tout à coup, on était très seuls, là, nous et la
Californie, et là il y a l'Ontario, l'État de Washington, des conversations
avec les États du Nord-Est. Alors, ça
commence à ressembler à un marché un
peu plus vaste, et donc qui va offrir
plus de possibilités que seulement avec deux partenaires.
M. Lemay : Merci. Pour avoir plus d'éclaircissement, dans votre
recommandation n° 6,
là, vous dites : «Que les différents programmes [puis] les
politiques en matière de lutte contre les changements climatiques, dont le
PACC, soient suffisamment financés pour atteindre la cible et les objectifs.»
Quand vous parlez de «suffisamment financés», est-ce
que vous parlez justement du Fonds vert? En fait, ma question, c'est... On sait
qu'entre 2006 à 2012, là, ça a coûté un peu plus de 1 milliard pour réduire de 2 millions de tonnes de
GES en huit ans. Là, présentement, le Fonds vert, il rapporte quoi, à
peu près? On prévoit de 500 à 700 millions par année. Dans le fond, est-ce
que c'est là que vous dites «soient suffisamment financés» ou vous avez
envisagé un autre mécanisme?
M. Guilbeault (Steven) : Non, on n'a pas envisagé d'autre mécanisme. Je pense
que cette recommandation-là, elle ne visait pas nécessairement le
Fonds vert, quoique le Fonds vert est un des outils importants pour le plan
d'action de lutte aux changements climatiques, mais simplement, simplement de
dire que, si on veut atteindre des réductions dans
des secteurs précis, bien, il faut s'assurer, là où les investissements sont nécessaires, que l'argent est au rendez-vous si on veut pouvoir atteindre
ces objectifs de réduction là.
M.
Lemay : O.K. À
ce moment-là, ça m'emmène à la page 28, là, du rapport, rapport de cibles
de réduction à la page 28. On dit que... bien, en fait, on annonce,
à cet endroit-là, qu'on veut réduire de 15 millions de tonnes. On a un 10 millions
de dollars qu'on pense qu'on peut aller chercher, là, dans les programmes de réglementation
en matière d'efficacité énergétique, des
programmes d'aide financière, mais il y a un autre 5 millions de tonnes
qu'on dit qu'on peut envisager des
«bonus-malus sur les véhicules légers, une hausse de [...] tarification [de]
stationnement, l'implantation de péages
routiers ou encore [la] modulation de la tarification énergétique». Est-ce que
ce qui est dans ce paragraphe-là, pour ce 5 millions de tonnes,
c'est en lien avec votre recommandation n° 6?
M.
Bourke (Philippe) : Malheureusement, non, le comité ne s'est pas
penché... Dans le fond, ce document-là a été produit suite à ce qu'on a... mettre notre avis sur la cible, mais on
n'a pas discuté du tout des éléments qui sont proposés dans ça, là, mais par contre, évidemment, ça fera
partie de nos réflexions futures, c'est évident. Déjà, on s'est penchés
sur ce genre de chose dans le chantier dont
je parlais, sur un Québec sobre en carbone. Mais, dans le cas de la cible,
malheureusement, on n'a pas de discussion sur ces mécanismes-là et ni
sur les chiffres qui sont proposés ici en termes de mégatonnes évitées, là.
M.
Lemay : O.K.
Mais là je comprends que vous ne vous êtes pas penchés là-dessus,
mais admettons que je vous dis, là : Bien, une des propositions du gouvernement,
c'est la modulation de la tarification énergétique. Ça, ce que je comprends de là, ça veut dire : En fonction des heures de la journée, le prix de l'électricité va varier, bon, entre autres. Vous, là, est-ce que vous
pensez que c'est une mesure qui est quand même importante, qui a un incitatif
sur la population à économiser leur consommation d'énergie?
M. Guilbeault (Steven) : Ce n'est pas un élément que le comité a abordé ou
a étudié, alors ce n'est pas possible pour nous de répondre à cette question-là.
M. Lemay :
Parfait. Merci. Merci beaucoup.
M. Guilbeault
(Steven) : Merci.
Le
Président (M. Reid) :
Peut-être, rendez-vous dans quelques instants. Alors, nous passons maintenant
au temps réservé aux députés indépendants, et je donne la parole à Mme
la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
• (12 heures) •
Mme
Massé : Merci, M. le Président. Bonjour, collègues. Bonjour, collègues. En fait,
je vais prendre un petit peu de ce
temps-là pour faire mes remarques
préliminaires parce que
je trouve important aussi qu'on puisse exprimer comment, pour ma formation politique, on sent bien qu'on en est à une étape majeure et
que la communauté internationale n'a pas le choix. On doit réussir, on ne peut pas échouer sur celle-là. Qu'il n'y ait pas de deuxième planète, c'est un état de fait, mais des gens en santé, des gens qui peuvent bénéficier
comme le font les humains depuis des milliers et des milliers d'années,
je pense qu'on a une responsabilité. Dans ce sens-là, le Québec doit bien sûr
avoir des objectifs ambitieux.
On est aussi
inquiets... Bon, ça fait plusieurs années qu'à Québec solidaire on dit que 2050
devrait être 95 %, et 2100, ça devrait être
la disparation complète des énergies fossiles, des hydrocarbures. Ceci étant
dit, nous sommes très inquiets par
rapport à 2020 parce que, des chiffres, on peut en enligner sans arrêt, mais il
y a des choix qui se font par après. Qu'on
pense, par exemple, à Anticosti, à la mégacimenterie et à d'autres
projets, on est inquiets que même 2020 ne nous permette pas d'atteindre
nos objectifs que nous nous sommes fixés.
Mais
par contre on n'a pas le choix. On n'a pas le choix. On n'a pas le choix parce
que, sinon, quel espoir on peut garder
et surtout quel espoir on peut donner à nos enfants, à nos petits-enfants, à
nos arrières-petits-enfants? Alors, il vous restera peu de secondes,
mais, puisque vous allez revenir, j'aurai la chance de vous requestionner.
2020,
est-ce que, pour vous, le comité, lorsque vous avez réfléchi, vous vous êtes
dit : 37... 37,5, pardon, réaliste ou, à tout le moins, au minimum, réaliste pour 2030? Mais est-ce que vous
vous êtes dit : Mais là, absolument, il faut avoir atteint le 20 % pour
2020, là? Est-ce que c'est à partir de là que le 37,5 % devient
réalisable?
M.
Guilbeault (Steven) : Oui,
je pense que tout le monde a pris pour acquis que nous allons atteindre nos objectifs en
2020. C'était implicite dans les travaux du comité.
M.
Bourke (Philippe) : Oui,
oui. C'était dans l'un des premiers considérants. On prend pour acquis qu'il y
a déjà des choses qui se font et qui vont se faire, effectivement.
Mme Massé : C'est bien. Je pourrai
vous requestionner lorsque vous reviendrez.
Le Président
(M. Reid) : Alors,
merci pour votre contribution, jusqu'à maintenant, aux travaux de la commission, parce que
vous n'avez pas fini aujourd'hui.
Alors, la commission
suspend ses travaux quelques instants, le temps de permettre à au moins une
personne de plus de se joindre pour le prochain groupe.
(Suspension de la séance à 12 h 3)
(Reprise à 12 h 8)
Le
Président (M. Reid) :
Alors, nous retournons à nos travaux. Alors, bienvenue aux représentants d'Équiterre. Évidemment, M. Guilbeault, qui était avec nous tout
à l'heure, et M. Ribaux.
Alors, vous
connaissez la routine. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation.
Je pense que nous avons votre présentation d'acétate sur papier, donc nous allons suivre sur
papier. Et, à la suite de votre 10 minutes, nous allons avoir une
période d'échange.
Et je vous
passe la parole. Je vous demanderais de vous présenter, pour les fins de l'enregistrement, et présenter la personne qui vous accompagne.
Équiterre
M. Ribaux
(Sidney) : Alors, bonjour.
Donc, Sidney Ribaux. Je suis le directeur
général du groupe Équiterre,
et mon collègue, Steven Guilbeault, qui est le directeur principal au Choix
collectif.
On va aller rapidement à notre présentation. Je
vous souligne qu'on vous a déposé quelques documents qui sont à la base de ce qu'on va vous expliquer...
vous présenter, pardon, aujourd'hui et qu'on vous déposera un mémoire plus
complet dans les semaines qui suivront.
Steven va faire une première partie de la
présentation, puis je reviendrai à la fin pour vous faire une deuxième partie.
• (12 h 10) •
M. Guilbeault (Steven) : Alors,
j'aimerais attirer votre attention — donc, rebonjour — sur
l'acétate qui est issu d'une donnée de
Bloomberg, qui montre que, pour les États-Unis — mais,
quand on regarde au Québec, au Canada, la tendance est la même — la
consommation de pétrole diminue depuis plus d'une décennie. Dans le cas du Québec,
nous consommons moins de pétrole aujourd'hui qu'on le faisait en 2002.
Alors, bien avant la crise économique et
financière, nous avions commencé à prendre un virage ici comme ailleurs. C'est vrai, en fait, pour l'ensemble des
pays industrialisés, ça l'est moins pour certains pays en voie de développement
et économies émergentes. C'est simplement
pour montrer que ce que nous proposons et que ce dont nous allons
discuter est tiré, en fait, et repose sur une analyse d'un mouvement qui s'est
déjà amorcé.
Ensuite,
l'autre acétate, qui est, celle-là aussi, issue de Bloomberg mais New Energy
Finance, qui nous montre qu'en fait depuis 2013 il s'investit, à chaque
année, plus pour la production d'énergie à partir des renouvelables que des combustibles fossiles. On peut questionner le
fait que Bloomberg ait décidé de mettre le nucléaire dans les énergies propres, là, mais, même au-delà de ça, ce qu'on
voit, c'est que les projections sont pour une réduction d'à peu près la
moitié des investissements dans les combustibles fossiles d'ici 2030, alors qu'ils
vont doubler dans les énergies propres. Alors, il y a une tendance très
claire qui est amorcée au niveau international.
Je passe rapidement, vous l'avez dans le
document, là, mais Équiterre, avant de voir que vous l'aviez fait dans le document, on avait, simplement pour
illustrer, à la deuxième acétate, le rythme de réduction d'émissions qui
sera nécessaire pour atteindre les objectifs en 2020, 2030 et 2050.
Je vous
amènerais à l'acétate qui est intitulé Aménagement et transports, qui
est issu d'un rapport de mon collègue qui
était ici tout à l'heure, Philippe Bourke, du Regroupement national des
conseils régionaux de l'environnement,
qui nous montre qu'au niveau du solde commercial québécois ce qui plombe le plus notre solde commercial,
c'est l'achat de véhicules et l'achat de pétrole, pétrole brut, pétrole
brut et essence. C'est vraiment les deux éléments qui viennent vraiment
plomber le déficit commercial québécois. Il en va de même au niveau plus personnel. Donc,
du côté des ménages, le poste Transports est le deuxième poste budgétaire
le plus important pour les ménages québécois.
Alors, avec ces quelques éléments là de
contexte, j'aimerais attirer votre attention sur l'acétate suivant, donc, qui s'appelle également Aménagement et
transports, où on présente un tableau de différentes mesures qui sont
issues d'un document qu'on vous a
distribué, qui s'appelle Changer de direction, que nous avons fait en collaboration avec l'organisation Vivre en ville, qui viendra également, un
peu plus tard, présenter un mémoire dans le cadre de cette commission, où on a regardé un certain nombre de
mesures autour des questions d'aménagement du territoire, transport collectif, transport actif et aussi technologies qui nous permettraient à la
fois de réduire, donc, notre
consommation de pétrole, les émissions de gaz à effet de serre et qui
représenteraient des économies importantes pour le Québec.
Bon, pour ce qui est de la dernière colonne sur les économies de pétrole en dollars, il y a plusieurs
scénarios qui ont été faits dans le
document. On vous en présente un à 150 $
le baril sur l'acétate. Évidemment, on est conscients que nous sommes très loin de
150 $ le baril. Évidemment, on parle d'un horizon, ici, de 2030. Alors, l'idée, ce n'est pas seulement
de regarder ce qui se passe présentement, mais c'est de regarder comment les choses pourraient évoluer au cours
des prochaines années. Et ce qu'on a
regardé dans Changer de direction, c'est un ensemble de mesures. Donc, il n'y a pas une mesure mais vraiment plusieurs,
à la fois dans l'aménagement du territoire, dans l'offre de transport collectif
et actif, dans des meilleures normes sur l'émission des véhicules.
L'introduction de plus
en plus importante de véhicules
électriques nous permettrait donc d'atteindre des réductions d'émissions de gaz à effet de serre très
importantes tout en économisant beaucoup, beaucoup d'argent dans des secteurs où le Québec est en déficit commercial : on ne fait pas
de voiture puis on ne fait pas de pétrole. Et, si on devait faire du
pétrole un jour — et on est quand même assez loin de cet
échéancier-là — à notre
avis, le statu quo est inacceptable. On peut mettre en place des mesures, présentement... Bon, mettons
entre parenthèses le fait qu'on pourrait peut-être faire du pétrole, un
jour ici, en quantité importante. Il y a
quand même plein de choses qu'on peut et, à notre avis, qu'on doit faire
rapidement pour minimiser l'impact de notre dépendance au pétrole et à
la voiture.
Alors, je m'arrêterais là et je passerais la
parole à Sidney.
M. Ribaux
(Sidney) : Donc, vous aurez
compris que le sens de l'introduction de Steven est de dire que, plus on aura une stratégie ambitieuse de réduction des gaz à effet de serre, mieux ça sera pour le développement
économique du Québec. Et je pense qu'on ne peut pas le dire assez souvent
parce qu'évidemment on a tendance à
mettre l'emphase sur les mesures, et évidemment il devra y avoir des
mesures qui seront restrictives qui devront être mises en oeuvre pour atteindre
ces cibles-là.
Mais, à chaque fois qu'on réduit la consommation
d'énergie fossile au Québec, il y a un gain pour le PIB. Pourquoi? Parce que,
quand on n'exporte pas de l'argent en Ontario pour acheter une voiture, c'est
de l'argent qu'on dépense ici, dans
l'économie locale. Lorsqu'on n'achète pas du pétrole pour faire fonctionner nos
voitures, c'est de l'argent qui est
réinvesti ici, dans l'économie locale. Donc, il y a un gain économique à toute
stratégie de réduction des gaz à effet de serre, puis c'est là-dessus qu'on veut mettre l'emphase. Moi, je
voudrais vous parler... Et donc, dans ce sens-là, Équiterre favorise une cible, la cible la plus ambitieuse
possible. Dans le cas qui nous concerne, ça serait moins 40 pour...
pour...
M. Guilbeault (Steven) : Maximiser.
M. Ribaux (Sidney) : ...pour
maximiser ces retombées à la fois environnementales et économiques.
Je vous
dirais... je voudrais mettre l'emphase... On vous a distribué aussi un document
qui est un mémoire qu'on a déposé
devant la Commission des finances il y a quelques semaines et qui propose une série
d'écotaxes. La proposition a été
faite dans le cadre de la réforme présentement pilotée par le gouvernement, et
donc elle est faite dans le cadre d'un revenu
nul ou neutre pour le gouvernement dans le même sens de la réforme qui est
présentement préconisée, donc baisse d'impôt.
Plutôt que d'augmenter, comme le préconise la réforme actuelle, la TVQ, on propose d'introduire des écotaxes
et on propose notamment de taxer les véhicules neufs. La seule taxe qu'on
propose, c'est une taxe modeste lorsqu'on la compare
à ce qu'il se fait dans d'autres juridictions. Une taxe de 7,6 % sur les véhicules neufs, au Québec,
pourrait rapporter à peu près le même montant que l'augmentation d'un
point de la TVQ.
L'avantage, c'est qu'on réduirait la
consommation de véhicules neufs — évidemment, on parle de véhicules neufs à essence et diesel — pour favoriser notamment les alternatives à
la voiture et aussi l'achat de véhicules électriques. Et toute diminution qu'entraînerait cette taxe-là
d'achat de véhicules aurait, encore une fois, un effet bénéfique sur les
émissions de gaz à effet de serre et sur le
développement économique; ça générerait des ressources, de l'argent à
l'interne.
On a proposé
d'autres écotaxes dont je ne veux pas nécessairement prendre tout le temps
présentement pour vous énumérer,
mais, pour faire une longue histoire courte, l'objectif initial de ce mandat
qu'on a donné à une firme économique était
de voir si on peut, avec des écotaxes, remplacer l'augmentation d'un point de
la TVQ qui est proposée dans la réforme fiscale. On en a identifié pour 2,7 milliards. Donc, on pourrait
réduire de presque... en fait, on pourrait réduire la TVQ, dans le cadre de la réforme fiscale, plutôt que de
l'augmenter en introduisant ces taxes à la fois dans le secteur du
transport, sur les contenants de plastique,
sacs de plastique et pesticides, donc tous des produits qui ont un impact
négatif à la fois sur les émissions de gaz à effet de serre.
Alors, on s'arrêterait ici pour les fins de la
présentation et on serait disponibles pour les questions.
Le
Président (M. Reid) : Merci pour votre présentation. Nous
passons maintenant à la période d'échange. M. le ministre, vous avez la
parole.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour à nouveau, M. Guilbeault. M.
Ribaux, bonjour. Merci pour votre présentation
ainsi que l'ensemble des documents. En effet, vous aviez fait sensiblement le
même genre de présentation concernant
les mesures d'écofiscalité à la commission à laquelle participait mon collègue
le ministre des Finances. Je crois... c'est la semaine dernière ou il y
a deux semaines? On pourrait peut-être prendre quelques minutes justement pour
approfondir ces mesures-là.
La question
qui revient, parce qu'évidemment lorsqu'il y a un... Dans un des documents,
bon, à la page 5, bien, on voit un
tableau, puis c'est : taxes, taxes, taxes. Alors, d'un point de vue...
Vous comprendrez que, dans le monde actuel dans lequel on vit, où,
justement, bon, le fardeau fiscal des Québécoises et des Québécois est déjà
très élevé, je comprends qu'il y aurait une
espèce de compensation, là. Elles seraient à effet neutre, ces mesures-là,
parce que le point de la TVQ permettrait
de compenser, d'une certaine façon, ces mesures-là, mais, en même temps, à ceux
qui diraient : Bon, bien, les quatre premières taxes que vous
proposez... non, excusez, les trois premières que vous proposez visent
l'automobile directement,
alors... Puis je pense particulièrement aux gens qui habitent en région, où il
y a des grandes distances — monde rural, monde agricole — où on a besoin de véhicules. Puis, souvent,
des véhicules, ce n'est pas juste des petites voitures, là, il faut des pick-ups puis des véhicules qui
peuvent faire un travail important. Ces gens-là vont se sentir pénalisés
davantage. Et donc, dans cette mesure-là, qu'est-ce que vous avez à répondre à
ça? Je comprends que c'est à revenu neutre, mais il va y avoir des gens, il va y avoir une partie de la population qui va
sentir qu'on en remet davantage sur leurs épaules, alors qu'eux tout ce
qu'ils essaient de faire, c'est de travailler puis d'exister, là.
• (12 h 20) •
M. Ribaux
(Sidney) : Bien, je vous
répondrais à différents niveaux. Premièrement, c'est clair que, présentement, la proposition fiscale, c'est d'augmenter la TVQ. La TVQ va avoir un impact sur tous
les commerces, sur l'ensemble
des entreprises au Québec. Évidemment, tu sais, on pense, par exemple, à des entreprises
touristiques, justement, dans toutes les
régions du Québec. Réserver un hôtel va coûter 1 % plus cher, aller au restaurant va coûter
1 % plus cher, et ainsi de
suite. Donc, on va faire mal à l'ensemble de l'économie du Québec en augmentant
la TVQ. Ça, c'est clair, c'est un fait accepté par les économistes. Ce
qu'ils disent, c'est que ça va faire moins mal si on fait ça puis qu'on baisse
l'impôt que l'inverse.
Alors, nous,
ce qu'on dit, c'est : Pourquoi mettre une mesure qui nous fait mal, alors
qu'on peut mettre une mesure qui va
chercher le même revenu et qui, d'un point de vue macroéconomique, nous fait du
bien, a un impact positif et, en plus,
vient atteindre un des objectifs les plus ambitieux qu'on s'est donnés au
Québec, donc, de réduire les émissions de gaz à effet de serre?
Premièrement.
Deuxièmement,
je pense qu'il faut faire attention, il y a effectivement un mythe. Steven et
moi, on a, les deux, grandi en
région. Ce n'est pas nécessaire d'avoir un énorme véhicule lorsqu'on se promène
en région. Il y a certains besoins qui
existent, effectivement, mais il faut comprendre que l'industrie de
l'automobile a eu, dans les dernières décennies, des stratégies très agressives publicitaires pour
faire la promotion de gros véhicules. Pourquoi? Parce qu'il y avait
justement une exception, dans les lois
d'efficacité énergétique aux États-Unis, pour permettre à des véhicules d'une
certaine catégorie, donc les pick-ups, les... le mot ne me vient pas,
là, pour les...
M. Guilbeault (Steven) : Utilitaires
sport.
M. Ribaux
(Sidney) : ...les
utilitaires sport, et ainsi de suite, pour faciliter... En fait, l'idée était de
faciliter... d'avoir une mesure
fiscale d'allègement pour les agriculteurs à l'époque. Bien, les manufacturiers
ont utilisé ça pour faire en sorte qu'on
est passés d'une société, en Amérique du Nord, qui achetait des voitures à une
société qui achète maintenant des véhicules sport utilitaires, des
sept-passagers, et ainsi de suite.
Alors, c'est sûr que... Le point que je veux
faire, c'est qu'il faut adopter des normes en fonction des objectifs sociétaux qu'on vise. L'industrie va s'adapter
pour offrir les meilleurs produits aux bonnes personnes au bon moment,
et, dans le cas où les gens ont besoin de
gros véhicules — parce
qu'on est d'accord avec vous, ça existe — ils seront toujours disponibles, et
il y aura moyen de se les procurer. L'idée n'est pas d'empêcher qu'on vende ces
véhicules-là.
M.
Guilbeault (Steven) : Et
peut-être ajouter que, si on regarde les propositions d'écotaxes, par exemple,
dans l'ensemble de nos propositions sur l'amélioration des normes en efficacité
énergétique, bien, on pourrait avoir une augmentation
de taxe qui serait absorbée par l'augmentation de l'efficacité énergétique du
véhicule. Et donc, même pour ceux qui
en ont besoin, ça pourrait se faire à coût nul ou à peu près nul si on a des
véhicules de plus en plus efficaces. Même si on augmente les taxes, les
gens... Donc, je pense qu'il faut faire la distinction entre le coût
d'acquisition et le coût d'opération de ces véhicules-là.
Le Président (M. Reid) : Oui.
M. le député de Maskinongé.
M.
Plante : Oui. Bien, je vais revenir sur la même question que le
ministre, que vous avez effectué la réponse. Et je vous rejoins dans le choix de, quand on vit en
région, on n'est pas tous obligés d'avoir un gros pick-up pour se
véhiculer. Je suis d'accord avec vous. Par contre, je représente un comté où
l'agriculture est prospère. Bon, on a 527 exploitations agricoles dans ma circonscription, et j'ai comme l'impression, en tout
cas, que l'orientation des écotaxes pourrait cibler en particulier une industrie qui est l'agriculture.
Parce que là, tantôt, vous avez dit : Oui, on a le choix. Et je suis
d'accord. Moi, je suis seul avec ma conjointe, donc j'ai le choix d'avoir un
petit véhicule ou un gros véhicule. Et ça, ça reste un choix personnel.
Par contre, j'aurais comme l'impression, en...
puis moi, j'irais jusqu'aux quatre premières... aux taxes, là, en incluant les
pesticides, qu'on cible premièrement une économie qui est l'agriculture en
région. Puis on sait que, parallèlement à
ça, on fait beaucoup d'efforts de vitalisation des milieux. Veux veux pas,
l'agriculture a changé. Le visage de
l'agriculture a changé. Les terres sont de plus en plus grandes, les
machineries agricoles sont de plus en plus performantes, pas toujours écoperformantes. Puis ça, je suis
d'accord avec vous à ce niveau-là. Par contre, on sait que c'est un
besoin essentiel, là. Ils ne peuvent pas...
Et je ne croirais pas que, demain matin, l'industrie, même du véhicule
électrique, serait prête à compenser
les besoins, mettons, des agriculteurs en machinerie ou en véhicules, véhicules
de route, tout simplement.
Puis, d'une
autre partie, quand vous avez parlé des sept-passagers, bien, ça serait
peut-être vu plus aussi comme une taxe aux familles, aux jeunes
familles, parce qu'on sait que ce type de véhicules là, c'est souvent les
jeunes familles qui les ont ou qui achètent,
qui ont de nombreux enfants. Donc, j'aimerais savoir... Parce que vous
dites : Oui, ça peut être compensé
par la performance du véhicule, mais j'aimerais vraiment que vous m'expliquiez
ce concept-là parce que je ne suis pas convaincu, je dois vous avouer.
M. Ribaux
(Sidney) : Bien, bon, premièrement... Ça fait qu'il y a plusieurs
éléments dans votre question. Premièrement, sur la question des pesticides,
vous dire que les pesticides représentent entre 1 % et 2 % des frais d'exploitation des producteurs agricoles. Vous
dire que le taux qu'on a mis dans la proposition est de 50 %, ce qui
peut sembler élevé comme taxe; c'est le taux
de taxation qui a été mis au Danemark, et ça n'a pas eu d'impact sur la consommation de pesticides, ce qui veut dire que
les agriculteurs l'ont absorbée assez facilement. Ce qu'on a proposé et
ce qu'on continue à proposer, c'est que, si
on ferait ça au Québec, on devrait moduler la taxe en fonction du niveau de
toxicité des pesticides. Et le ministère de
l'Environnement a cette information. Ça permettrait d'envoyer un signal de prix
aux agriculteurs pour qu'ils utilisent les
pesticides les moins nocifs. Je vous dirais, ça encouragerait aussi les
agriculteurs à avoir une conversation avec les agronomes, qui seraient
sensés, à notre avis — parce
qu'on travaille beaucoup en agriculture,
soit dit en passant — recommander
les pesticides qui ont le moins d'impact. Ce n'est pas toujours le cas.
Et ultimement l'objectif, c'est de diminuer
la consommation de pesticides, ce qui va avoir un impact positif pour les
agriculteurs parce que c'est un intrant
qu'ils paient. Ça fait que, s'ils peuvent réduire cette consommation-là, à la
fin de la journée, c'est un bénéfice.
Sur la question des véhicules, bon, évidemment,
la taxe qu'on propose sur les véhicules neufs ne vise que les véhicules... soit les voitures, soit les véhicules
utilitaires, là. Donc, on ne vise pas la machinerie, tracteurs, etc. Il
faudrait peut-être réfléchir à si on doit
s'y attaquer d'une autre façon. Mais, dans un premier temps, ce n'est pas ce
qu'on vise.
Et finalement, sur la question des coûts, bien,
c'est certain, c'est démontré assez clairement — on a beaucoup
d'information là-dessus sur notre site Web — un consommateur, par exemple,
qui achèterait une voiture électrique, la
rentabilité, elle est immédiate, au moment où on se parle, avec les rabais
gouvernementaux en place. Plus le temps va passer... Peu importe le prix de l'essence, là. Parce que le prix de
l'électricité, ça coûte tellement moins cher que le prix de l'essence
que l'économie de carburant vient rapidement rentabiliser l'achat d'un véhicule
électrique.
Évidemment,
au moment où on se parle, il y en a peu, mais là on parle d'une politique
sur... on parle de 2030, ça fait
qu'on veut se donner des objectifs à moyen et long terme. Et l'idée, c'est
d'envoyer encore une fois un signal de plus au consommateur pour qu'il
fasse les bons choix à court et long termes. Quand le prix de l'essence a
diminué l'année passée, là, les ventes de
véhicules utilitaires ont soudainement augmenté au Québec parce que, bon, c'est
la nature humaine, on fait des choix
à court terme souvent, on fait tous ça, et là les consommateurs s'achètent un
véhicule qui va entraîner une
augmentation de leur consommation d'essence pendant plusieurs années. Alors,
l'idée, c'est d'envoyer des signaux de prix qui viennent moduler un peu
ça puis encourager les gens à faire de meilleurs choix. C'est juste ça.
M.
Guilbeault (Steven) : C'est
beaucoup l'approche qu'a utilisée la Norvège, qui est le champion mondial
de l'utilisation de la voiture électrique.
Alors, une voiture sur quatre, une voiture sur cinq qui est vendue en Norvège
présentement est un véhicule électrique, pas parce qu'il y a des incitatifs
importants pour les véhicules électriques. Il n'y
a pas d'incitatif direct à l'achat de véhicules électriques en Norvège, un pays
nordique, moderne comme le nôtre, avec un secteur de l'agriculture, et
ainsi de suite. Donc, pourquoi est-ce que ça fonctionne bien en Norvège? Parce
que l'achat de véhicules à essence est plus taxé. On veut donc inciter des
choix.
Et Sidney le disait,
là, la technologie évolue très, très, très rapidement. On a des véhicules
hybrides, maintenant, utilitaires sport. Il y a des voitures entièrement
électriques utilitaires sport qui vont faire leur apparition sur le marché vers
2017. Alors, l'offre va devenir beaucoup plus intéressante que... Là,
présentement, en fait, c'est quand même curieux qu'on parle souvent de choix
quand il est question de pétrole, alors que les gens sont prisonniers du
pétrole, ils n'ont aucun choix. Nous, ce qu'on propose, c'est d'augmenter
l'offre de choix pour les individus.
Le Président (M. Reid) :
Merci. M. le député de Dubuc.
• (12 h 30) •
M. Simard : Merci, M. le Président. D'abord,
bonjour, messieurs. Merci de votre présence.
Je vais prendre les paroles, je pense, d'une
bonne partie de la population qui sont préoccupés par justement la capacité de payer toutes ces nouvelles façons de
faire dont vous venez de nous parler, là. D'abord, premièrement, je vais vous poser la question
suivante : Ne croyez-vous pas que l'environnement devrait mettre à profit le même principe
qu'un sauveteur? Si on veut sauver quelqu'un, il faut... Puis il y a un
principe qui dit : Sauve ta vie, après ça, tu vas être capable de sauver
l'autre, O.K.? C'est ça, le principe d'un sauveteur. Ceux-là qui ont leur carte
de sauveteur, c'est la première chose qu'ils doivent respecter.
Maintenant, j'entends très souvent... Tout à
l'heure, j'ai sursauté. Je m'excuse, avec toutes les taxes que vous voulez mettre
en place, là, et que le commun des
mortels est rendu qu'il n'a plus la capacité de payer justement
parce qu'il se trouve surtaxé à tout et à rien, là... Et la
préoccupation que j'ai, moi, comme une grande partie de la population, c'est : Est-ce que l'environnement est devenu une industrie autonome et indépendante des gens? Et c'est ce
que les gens posent très souvent
comme question. La raison, c'est qu'on sort toutes sortes de
choses, mais on ne s'occupe pas de la capacité
de payer des gens, la capacité de rester à l'emploi, la capacité de se
développer, d'être compétitifs en
fonction d'aujourd'hui et de demain. Et, oui, on nous amène à des réflexes,
mais est-ce qu'on a la capacité de le faire?
Donc, est-ce qu'on ne pourrait pas avoir une
préoccupation? Le développement durable en est une, mais, lorsqu'il y a un projet qui est déposé, on a
toutes sortes d'interventions négatives sur le projet, pas pour le développement
durable, strictement sur l'environnement.
Et les gens qui veulent des emplois,
les gens qui veulent gagner leur vie, les gens qui veulent faire vivre
leur famille n'ont pas cette galerie-là pour être en mesure de dire : Aïe!
Je suis là, moi, là, là. Je suis là, là.
Pouvez-vous m'écouter un peu, là? Je veux gagner ma vie. J'aimerais vous
entendre là-dessus. Est-ce qu'il y a une écoconditionnalité
pour protéger l'environnement versus le monde qui ont besoin de gagner leur
vie? J'aimerais vous entendre là-dessus.
Le
Président (M. Reid) : Oui.
M. Ribaux
(Sidney) : Oui. Je vais peut-être commencer, puis Steven pourra
compléter. En fait, plusieurs éléments aux questions plurielles que vous
soulevez, là. Je vais commencer par la dernière.
Le Président (M.
Reid) : Oui. Essayez de synthétiser, vous avez une minute à
peu près.
M. Ribaux (Sidney) : D'accord. On a évalué qu'en réduisant notre consommation de pétrole,
sur six ans, de 16 %, on pourrait créer 130 000 emplois au Québec.
C'est des économistes qui ont fait ces calculs.
L'objectif
de nos propos est justement de dire qu'en réduisant nos gaz à effet de serre on va créer des emplois au Québec. Lorsqu'on n'achète pas de
pétrole, si on économise 2 000 $ en achat de pétrole puis qu'on
dépense en achat d'électricité et qu'il nous
reste de l'argent pour acheter d'autres choses pour se promener au Québec
ou pour encourager les commerces au Québec, on vient créer des emplois
au Québec.
Donc, le propos que
nous avons va tout à fait dans le sens des préoccupations que vous avez. Alors,
on ne fait presque que ça, je vous dirais,
proposer comment on peut faire à la fois de la création d'emplois et du développement
économique tout en réduisant nos gaz à effet de serre. Pour nous, l'un n'est
pas contradictoire avec l'autre du tout.
Le
Président (M.
Reid) : Juste bon dans le temps. Alors, nous passons maintenant
à l'opposition officielle. Et je donne la parole à M. le député de Terrebonne.
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, encore une fois, j'aimerais saluer nos
deux intervenants qui sont avec nous, M. Guilbeault, M. Ribaux. Merci
beaucoup d'être toujours fidèles au poste.
Donc, à la lueur de
vos recommandations, on comprend très bien, et je ne veux pas surenchérir avec
ce que le gouvernement a déjà dit, mais que, selon votre point de vue, pour en
arriver à des résultats concrets dans la lutte aux changements climatiques et
pour inciter les citoyens à diminuer leur consommation dans toutes sortes de
secteurs, il faut aller les toucher là où
c'est le plus sensible, là où ça fait mal, et ça passe par le portefeuille.
Donc, je constate que, pour vous, il
y a donc une logique, là, implacable sur le fait qu'il faut que le gouvernement puisse avoir, dans ses mesures et ses mécanismes pour atteindre ses objectifs, des contraintes qui touchent aux finances ou
aux... en tout cas, au portefeuille des gens en général.
Donc, est-ce que je vous ai bien entendus aujourd'hui?
Une voix :
Oui.
M. Traversy :
C'est donc pour vous très important?
M. Guilbeault (Steven) : Bien, est-ce que je peux... En fait, ce qu'on
propose, c'est une approche du bâton et de la carotte. C'est-à-dire
qu'on ne veut pas toucher les gens là où ça fait mal, mais on veut leur
permettre d'avoir des choix et de faire des choix plus éclairés. On parlait
d'électrification tout à l'heure, bien, si vous achetez une voiture électrique présentement au Québec...
Prenons un exemple très concret, la Honda Civic, 18 000 $, grosso
modo, modèle de base, la Nissan Leaf,
32 000 $, modèle de base. Là, les gens vont dire : Mon Dieu! Ça
coûte bien trop cher, les voitures électriques, en gardant en tête que, présentement,
50 % des Québécois achètent une voiture qui coûte au-dessus de 40 000 $, mais mettons ça de côté. En
l'espace de trois ans, grâce aux économies de carburant, économie sur
l'entretien, rabais à l'achat soit des
fabricants ou du gouvernement du
Québec, vous allez rembourser le surcoût d'achat de la voiture électrique, la voiture électrique qui peut
répondre aux besoins de 80 % des gens, dans à peu près 90 % du temps,
avec les technologies actuelles. Donc, en trois ans, vous remboursez le surcoût
et après ça vous sauvez 1 500 $ par année.
Alors, pour répondre
à votre question, monsieur, moi, je pense que la plupart des consommateurs
aimeraient ça avoir 1 500 $ de plus dans leurs poches plutôt que le
donner aux pétrolières. Je pense que c'est beaucoup ça, notre approche. Donc,
il faut avoir des mesures qui vont attirer les gens à faire certains
comportements et les décourager à poser certains autres comportements.
M.
Traversy : Puis c'est très bien expliqué. Donc, comme on vous
entend, donc, il y a un impact, là, qui serait recherché à avoir ce genre de mesure dans les recommandations, là, donc,
du ministère... donc dans l'application, plutôt, des mécanismes pour atteindre les cibles que le
ministre s'est fixées. Vous avez d'ailleurs parlé d'une cible de 40 %,
c'est bien ça? Pourquoi plus élevée que ce que le ministre propose?
M. Guilbeault (Steven) : Bien, comme on a tenté de le démontrer dans la
présentation, plus on réduit les émissions de gaz à effet de serre — au
Québec, ça se traduit énormément par une réduction de notre dépendance au
pétrole, dépendance au pétrole qui plombe l'économie québécoise, qui plombe le
revenu disponible des ménages — donc, plus
on va de l'avant rapidement dans la réduction des émissions de gaz à effet de
serre, plus l'économie québécoise va s'en porter mieux, plus on va
pouvoir créer d'emplois au Québec et plus les gens vont avoir de l'argent
disponible pour faire autre chose que d'acheter de l'essence.
M.
Traversy : Merci beaucoup. Est-ce que, dans les... Je vois que
vos mécanismes sont clairs pour ce qui est des taxes sur l'achat de
véhicules neufs, les taxes annuelles sur les véhicules de 10 ans et plus. Vous
voulez également, donc, que le ministre adopte une loi zéro émission. Est-ce
que vous faites référence au projet de loi n° 392, là, qui a déjà été
déposé en cette Assemblée?
M.
Guilbeault (Steven) : Oui,
la loi zéro émission qui vise les fabricants automobiles à fournir un
pourcentage, qui évolue généralement dans le
temps, donc, de véhicules électriques. Un des enjeux présentement, c'est qu'il
y a plusieurs États autour de nous
qui adoptent ce genre de loi là. Et, comme l'offre de véhicules électriques est
encore passablement modeste, bien,
ces États-là vont drainer le plus de véhicules électriques et nous allons avoir
finalement un peu les restes, alors
qu'on pense que plus l'offre de véhicules électriques va être intéressante pour
les consommateurs, plus les consommateurs
vont se tourner vers ça. Soit dit en passant, ça ne coûte rien au gouvernement
d'adopter une loi comme ça, il n'y a
pas de coût à ce qu'on mette en place... Et ça ressemble beaucoup à ce qu'on a
fait, au Québec, avec les standards californiens sur les émissions
polluantes des véhicules alors que Mme Beauchamp était ministre de
l'Environnement, premier État à l'extérieur
des États-Unis à les adopter. Donc, je pense que le parallèle est assez
frappant entre les deux.
M.
Traversy : Cette recommandation, je la trouve très intéressante
pour ce qui est de la loi zéro émission. Dans le cahier de consultation que vous avez vu, vous avez compris que le
ministre a ciblé certaines pistes, là, de mécanismes et d'actions pour être capable d'atteindre son
objectif. Il parlait, bon, de révision de la fiscalité, bonus, malus. Bon, il y
a différentes propositions. Il y en a deux
en particulier dont je voulais avoir votre opinion, sur les tarifs de
stationnement, donc augmenter la
tarification des stationnements, et le retour des péages routiers. Donc, je
voulais voir si vous aviez une opinion quant à ces pistes qui nous sont
lancées dans la réflexion.
M. Ribaux
(Sidney) : Donc, sur la question
des péages routiers, on pense que, oui, ça fait partie de l'idée d'envoyer un signal de prix. Quand on parle des péages, on est davantage sur
l'utilisation que d'autre chose, d'une part, et, d'autre part, on est
sur des stratégies de réduction de la congestion routière. Bon, évidemment,
dans la région de Montréal, dans la région
de Québec, ce sont des grands enjeux. On sait que, par exemple, là, à l'heure
de pointe, il y a entre 5 % et 10 % des gens qui sont sur la route, qui sont pris dans la
congestion routière, qui n'ont pas besoin d'être là parce qu'ils s'en
vont magasiner, ils s'en vont visiter un
ami; ils auraient pu se déplacer à d'autres moments. La tarification via un
péage, qui envoie un signal de prix
différencié dans le temps, évidemment, maintenant, là, vient régler non
seulement des enjeux d'émission de gaz
à effet de serre, mais aussi des enjeux de congestion routière, donc encore une
fois des enjeux économiques, parce qu'il y a des camions qui sont pris
dans la congestion routière, etc.
Donc, là-dessus,
oui, on pense que c'est une mesure qui devrait être dédiée au financement du transport en commun, donc, versus les autres mesures qu'on proposait tantôt
où on disait : Vous voulez réduire l'impôt, bien, allez chercher
le revenu vers ces nouvelles écotaxes là,
donc c'est neutre pour le gouvernement. Le péage, on pense que les revenus
devraient être réinvestis directement dans le transport en commun pour offrir
une solution aux gens parce que, dans le fond, on veut améliorer l'offre de transport en commun. Celui
qui se voit imposer 3 $ au péage, bien, il se fait aussi offrir un
service d'autobus rapide, ou un métro, ou d'autre chose.
Sur la
question du stationnement, oui, c'est une mesure qu'on a proposée dans le
passé. Le diable est dans les détails concernant le stationnement.
Comment on le fait? Comment on le fait bien? Ça, ça pourrait faire l'objet
d'une autre commission parlementaire. Mais, sur le principe, oui.
• (12 h 40) •
M.
Traversy : Alors, je vous remercie de cette franchise. Je vais
profiter de votre expertise, messieurs, pour vous demander si vous
trouveriez à propos que le Commissaire au développement durable, là, puisse
avoir un rôle à jouer dans l'atteinte des cibles
de par l'évaluation de la performance, exemple, du marché du carbone ou du
Fonds vert. Est-ce que vous voyez,
dans le fond, une participation, là, de notre Commissaire au développement
durable dans cette lutte aux changements climatiques? Et, si oui,
expliquez-nous comment vous voyez sa contribution.
M.
Guilbeault (Steven) : On n'a
pas regardé spécifiquement, par exemple, le rôle du commissaire, mais je
pense qu'on est d'accord sur le fait qu'on a
besoin d'un mécanisme de reddition de comptes qui est efficace et transparent,
une mise à jour annuelle de la performance
du... ou de ce que, par exemple, le Fonds vert à fait, le déploiement des
mesures du Plan d'action sur les changements
climatiques ou même, plus largement, à quel rythme le gouvernement du
Québec avance-t-il pour atteindre les cibles
qu'il s'est fixées, que ce soit sur l'horizon 2020, 2030 ou même 2050. Est-ce
que c'est le Commissaire à
l'environnement ou un autre mécanisme, je pense qu'on n'a pas vraiment d'idée
là-dessus présentement.
Le Président (M. Reid) : Il
reste quelques secondes.
M.
Traversy : Merci.
Bien, en tout cas, je vous remercie, donc, de votre clarté et je
vous invite à réfléchir à cette proposition pour la suite de nos
consultations et de nos travaux.
Le
Président (M. Reid) :
Nous passons maintenant au deuxième groupe d'opposition. M. le député de Masson.
M.
Lemay : Merci, M. le Président. Merci, M. Ribaux, M. Guilbeault. Bon! Alors, autre sujet, autres
questions, mais, bref, vous savez, vous avez parlé beaucoup de transport dans
votre présentation. Ça fait qu'on sait le transport, c'est 44,7 %
de toutes les émissions. Ça fait qu'on va rester dans ce sujet-là plus
particulièrement.
Vous avez
déjà répondu au député de Maskinongé, au ministre, même au ministre Dubuc, là,
en termes, là, de pourquoi la nouvelle taxe sur les véhicules neufs.
Moi, j'ai juste une question pour vous, là, au niveau des véhicules neufs. Est-ce que vous avez considéré que
certaines personnes vont décider de ne pas acheter un véhicule neuf mais
plutôt se tourner vers le marché de l'usagé
pour éviter cette taxe-là? Puis est-ce que vous l'avez considéré dans votre
presque 1 milliard, là, que vous auriez, supplémentaire ou pas?
M.
Ribaux (Sidney) : Oui. Oui, donc, on a fait des... Effectivement,
l'économiste qui a fait les projections a présumé
qu'il y aurait un impact sur les ventes, d'une part. Et, d'autre part, c'est
aussi pour ça qu'on propose une taxe sur les vieux véhicules, dans le fond, pour s'assurer qu'on ne vienne pas
augmenter la pollution en augmentant le nombre de véhicules qui sont
vieux sur les routes.
M. Lemay :
O.K. Mais la taxe, c'est pour les véhicules de plus de 10 ans.
M. Ribaux
(Sidney) : Oui.
M.
Lemay : Quand on fait la supposition que le concessionnaire
automobile, pour accommoder son bon client, va dire : Bien, moi,
j'achète un véhicule neuf puis je le mets à la disposition de mes vendeurs,
puis, dans trois mois, le véhicule, il aura,
quoi, une couple de... tu sais, peut-être 1 000 kilomètres, je ne sais
pas, au compteur. Puis là il décide de dire :
Bien là, ce véhicule-là, finalement, je le rends disponible à mon bon client.
Donc là, est-ce qu'on considère que le véhicule,
il est neuf? Tu sais, disons qu'il a juste 1 000 kilomètres, là, il n'est
plus neuf. Tu sais, il y a-tu une définition qui dit véhicule neuf?
M. Ribaux (Sidney) : Bien, je vous dirais, on ne s'est pas rendus à ce niveau-là des règles
fiscales. Je veux dire, quand la TVQ
s'applique, la TVQ s'applique à la vente d'un véhicule neuf, elle ne s'applique
pas à la vente en particulier. Là, à
quoi s'appliquerait exactement une taxe comme ça, on a fait des présomptions,
je vous dirais, économiques, mais on ne s'est pas rendus dans les règles
fiscales d'application, là.
M.
Lemay : D'accord. Non, je faisais juste essayer de voir, là, jusqu'à
quelle ampleur... Mais, tu sais, on s'entend que certaines personnes
vont peut-être décider d'acheter un véhicule d'un an, deux ans d'usure, là, tu
sais...
M. Ribaux
(Sidney) : C'est ça.
M. Lemay :
...justement pour éviter...
M. Ribaux
(Sidney) : C'est certain.
M. Lemay :
Bref, vous avez mentionné aussi qu'un de vos objectifs ça serait que, d'ici
2020, on ait 25 % des véhicules qui
sont vendus qui soient électriques. Par contre, je ne l'ai pas vu dans votre
présentation. C'est peut-être un élément
nouveau, mais on sait que, dans les transports, il n'y a pas juste les
voitures, il y a aussi les véhicules lourds. Puis, si on regarde entre 2006 puis 2012, au niveau des
voitures, c'est quand même stable, tu sais, les émissions de GES versus
les camions lourds, même les camions légers,
que ça a doublé, tu sais. Ça fait que, là, on voit qu'il y a une progression
au niveau des transports. On le voit, là. Le
marché mondial de transport fait même qu'on a un projet de pipelines,
d'oléoducs pour apporter l'énergie fossile un peu partout dans le monde. Donc,
bref, les transports de longue distance, il y en a.
Moi,
je me disais : Pourquoi que... Tu sais, selon vous, là, pourquoi se
concentrer uniquement sur les véhicules électriques? Pourquoi ne pas faire la conversion ou l'achat de nouveaux
véhicules de transport lourds au gaz naturel? On comprend que ce n'est pas zéro émission, mais, tout de même, ça
représente 30 % de tous les GES émis par le secteur du transport,
les véhicules lourds, tu sais. Puis on sait qu'un véhicule lourd ça a une durée
de vie d'environ 10 ans, là. Ça fait que, de faire en sorte qu'aujourd'hui
on aurait un incitatif pour que les... ne serait-ce que les municipalités, ne serait-ce que les camions de vidange. Puis même il
y a plusieurs compagnies de transport, là, qui ont déjà commencé à le faire. Mais, tu sais, il y a la route bleue qui
existe, là, entre Mississauga puis Québec. On projette de l'extensionner.
Je ne sais pas si vous voulez parler un peu de cet aspect-là.
M. Ribaux
(Sidney) : Peut-être rapidement, puis Steven va compléter. Mais juste
vous dire : Vous avez raison, il y a
tout un chantier à ouvrir sur le transport des marchandises. Vous avez
mentionné quelques initiatives. Il y a le carburant de ces véhicules-là.
Il y a des stratégies de transfert vers le train, vers le maritime pour
certains trajets, qui vont réduire
grandement les émissions de gaz à effet de serre. Il y a des stratégies de
transfert en milieu urbain vers des véhicules plus efficaces, même vers
des véhicules électriques. Donc, le transport des marchandises en milieu
urbain, dans certains cas, pourrait se faire, de façon électrique, avec des
plus petits véhicules.
Donc,
il y a tout un chantier, il y a toute une série de mesures qu'il faut
effectivement appliquer dans le transport des marchandises, qui passent, oui, par, dans certains cas, un signal de
prix fiscal ou autre mais aussi par la réglementation et une meilleure
organisation, dans certains cas, des transports.
M. Guilbeault
(Steven) : On a concentré nos efforts sur la voiture puisque c'est
encore 67 % des émissions du secteur
des transports. Or, vous avez raison de dire que le secteur du transport des
marchandises est en forte croissance. On a d'ailleurs salué l'initiative
de Gaz Métro et de Transport Robert, salué l'initiative du gouvernement qui
venait appuyer fiscalement... une déduction fiscale accélérée, si ma mémoire
est bonne, pour l'achat de ces camions-là.
Mais, comme Sydney le
disait, il y a beaucoup d'autres mesures qu'on n'a pas abordées dans le cadre
de la présentation aujourd'hui mais qui
pourraient être intéressantes : la livraison en milieu urbain par des
véhicules électriques plutôt que
par... On n'a pas de camion semi-remorque électrique, mais il y a des véhicules
de livraison. Donc, il y a plusieurs villes,
dans le monde, qui sont allées vers cette voie-là. Or, on réduit la pollution
en milieu urbain, ce sont des plus petits véhicules, plus adaptés au
monde urbain que... Donc, il y a effectivement des pistes intéressantes, vous
avez raison.
M.
Lemay : Merci. M. le Président...
Le Président (M.
Reid) : Il reste 10 secondes, si vous voulez faire une
dernière déclaration.
M.
Lemay : 10 secondes? Bien, merci beaucoup, très intéressant. On
aura la chance de discuter plus amplement en soirée.
M. Guilbeault
(Steven) : Merci.
Le Président (M.
Reid) : Merci. Alors, nous passons maintenant au bloc réservé
aux députés indépendants. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Massé :
Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Donc, pour faire suite à mon
collègue, ce que je comprends dans votre
document lorsque vous dites de réduire le kilométrage parcouru de 20 %, on
parle des individus, on ne parle pas de tout ce qui est le transport des
marchandises.
M. Guilbeault
(Steven) : Oui, effectivement.
• (12 h 50) •
Mme
Massé : Donc, un autre espace quand on parle d'aménagement du
territoire, l'importance d'aménager pour faire en sorte que tu n'aies pas 80 kilomètres à parcourir pour
aller faire ton épicerie, hein? C'est un peu... C'est parce qu'on a
beaucoup parlé de taxes, et tout ça, mais votre document évoque aussi d'autres
leviers que je voulais porter à notre attention collective.
Quand
on parle d'aménagement, ce matin, je lisais, dans Le Devoir,
quelque chose qui m'a profondément dérangée, et c'est en lien avec ces grands objectifs qu'on a. Nous, dans
l'ensemble, s'attaquer à la question du pétrole, les taxes, bon, on
pourra en rejaser, mais, globalement, 2030 est un bel objectif. Mais, quand
j'ai vu, par exemple, en matière d'aménagement,
que, malgré nos bons objectifs — parce qu'il y a des coupes, parce que
l'austérité agit ailleurs et pas seulement
en matière de développement durable — par exemple, une école doit mettre de côté
son projet... puis je vais le lire, là : «...pour se
conformer aux contraintes fixées par le gouvernement [d'épargner]
3 millions, la commission scolaire de
Montréal ait dû renoncer au toit vert, à l'atrium central, aux exigences LEED
et à la géothermie pour la nouvelle école [de] Saint-Gérard...»
Alors,
dans le fond, vous avez dit, d'entrée de jeu, «cohérence». Dans le probablement
30 minutes qu'il vous reste, j'aimerais que vous nous parliez de
cette...
Le Président (M.
Reid) : Pas 30 minutes, une minute. Il vous reste une minute.
Mme Massé :
Une minute de...
Des voix :
Ha, ha, ha!
Mme Massé :
J'ai-tu dit 30 minutes? Ah! le rêve.
M. Guilbeault
(Steven) : Vous êtes généreuse, madame.
Mme
Massé : ...une minute qu'il
nous reste, que vous nous parliez de cette nécessaire cohérence pour
atteindre nos objectifs.
M. Guilbeault
(Steven) : Bien, je pense que c'est un exemple intéressant où, de
façon générale, en tant que consommateurs,
on a tendance... on achète un... Que ce soit pour une maison ou un véhicule, on
va acheter le prix sans se poser la
question sur le coût d'opération. Et je faisais le parallèle avec la voiture
électrique. Bien, si on fait le calcul du coût d'opération sur plusieurs
années, on se rend compte rapidement que l'électrique est beaucoup plus
intéressant.
Si, dans la
construction d'un édifice comme une école, tout ce qu'on regarde, c'est le coût
de construction mais qu'on ne regarde pas le
coût d'opération sur 50, 60, voire, dans le cas d'écoles montréalaises, presque
100 ans, bien, il nous manque une
partie importante de l'équation. Or, nous, on le vit à tous les jours dans la
Maison du développement durable, où
nous économisons, à chaque mois, quelque... c'est autour de quoi, 3 000 $,
4 000 $ par mois sur notre facture d'énergie. 3 000 $
à 4 000 $ par mois. Or, si tout ce qu'on avait tenu compte quand on a
construit la bâtisse, c'est combien ça
va coûter à construire et pas à opérer sur 50, 60 ans, on passerait à côté
d'économies annuelles, donc, de quelque chose comme 45 000 $, 50 000 $. Bien, imaginez ça
reproduit sur l'ensemble du parc des écoles au Québec. Si on commence à faire ce genre de calcul là dans le temps plutôt que simplement au
niveau de la construction d'un édifice, bien, on va se rendre compte
qu'on prend peut-être les mauvaises décisions.
Le Président (M.
Reid) : Merci.
Mme Massé :
Donc, ça pourrait nous coûter moins cher.
Le
Président (M. Reid) :
Merci. Bon, le temps est terminé. Alors, M. Ribaux, M. Guilbeault, merci pour
votre contribution à nos travaux.
La commission suspend ses travaux jusqu'à 15
heures. Il est recommandé de ne rien laisser dans cette salle puisqu'elle
servira à un autre groupe entretemps.
(Suspension de la séance à 12 h 52)
(Reprise à 15 h 7)
Le Président (M. Reid) :
Alors, nous reprenons nos travaux. Je vous rappelle que la commission est
réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations
particulières sur le livre vert intitulé Moderniser le régime d'autorisation
environnementale de la Loi sur la qualité de l'environnement.
Cet après-midi, nous entendrons d'abord Réseau Environnement,
suivi de Coop Carbone, de Gaz Métro et du Regroupement national des conseils
régionaux de l'environnement du Québec.
Alors, je souhaite bienvenue à nos invités du
Réseau Environnement. Vous avez — vous connaissez la façon de faire — 10
minutes pour faire votre présentation. Par la suite, nous aurons un échange
avec les membres de la commission. Je vous demanderais, pour les fins d'enregistrement,
de vous nommer et de nommer les gens qui vous accompagnent. À vous la parole.
Réseau Environnement
M. Lacroix
(Jean) : Bonjour. Merci beaucoup, M. le Président. M. le
ministre, mesdames... bien, j'allais
dire mesdames messieurs, mais MM.
les députés, merci de nous
accueillir. Mon nom est Jean Lacroix, je suis le président-directeur
général de Réseau Environnement. Je suis accompagné, à ma droite, de M.
Christian Perron, qui est le vice-président du secteur Air et Changements climatiques chez
nous, et M. Laurent Pilon, qui est le coordonnateur technique du même
secteur.
Brève introduction de Réseau Environnement, de
se rappeler que nous sommes la plus grande association de spécialistes et
d'experts en environnement, qui existe depuis 52 ans, près de 2 700
membres. Essentiellement, le membership se
sépare... c'est 50 % du côté public et 50 % du côté privé, ce qui la
rend très particulière dans son approche parapluie et diversifiée de ses membres. Cinq secteurs sont
couverts : matières résiduelles, eaux, sols et eaux souterraines, air et changements climatiques et biodiversité.
Essentiellement, nous sommes beaucoup sur le terrain en action, tant par
les utilisateurs que les différents
fournisseurs, beaucoup dans le développement de contenus et le développement de
programmes.
Je prends la
peine de vous souligner ici aujourd'hui, nos habitudes sont de déposer un
mémoire d'avance. Les délais étant
très courts, au jour où l'annonce a été faite par le ministre de cette
consultation, nous avons envoyé à nos instances... Vous comprendrez que la force de notre réseau est
sa représentativité, de parler de nos parties et d'avoir des
interactions. Le mémoire est en rédaction.
Le gros de nos réflexions sont avec nous ici aujourd'hui, mais on devrait vous
déposer, au plus tard le 15 octobre, des propositions plus
circonscrites, détaillées de ce qu'on vous parle aujourd'hui.
Je vous
dirais, dans l'ordonnancement de notre intervention, le document de
consultation du ministère va faire guise de préambule à l'approche.
Donc, j'y vais avec des commentaires généraux. Ce qu'on tient à souligner très
fortement aujourd'hui, c'est le leadership et l'audace du gouvernement en
place, du ministre à sa gouverne pour mettre en place une cible aussi ambitieuse, que nous croyons réalisable avec une
mobilisation de l'ensemble des parties prenantes.
• (15 h 10) •
Ce qui nous
importe de ce leadership-là est qu'il doit s'incarner auprès des entreprises et
des entrepreneurs. Je vous dirais que ce qu'on doit s'assurer dans les
mois qui suivent, c'est d'avoir de nombreuses entreprises qui prennent ce virage-là et qu'elles se nomment et parlent. Et, à
cet effet-là, notre représentativité nous fait dire : Nous sommes
prêts, nous sommes là. Il y a des contextes
et des cadres dans lesquels on a des
incertitudes qui, peut-être, ne font pas l'accélération qu'on
désirerait.
Le Québec, je dirais, peut-être l'élément
fondamental, nous sommes dans une économie à faible empreinte carbone, à sobriété, ce qui impose inévitablement
un changement de culture et de modèle d'affaires. Et, quand je parle de changement de culture et de modèle d'affaires, je
parle tant du gouvernement que des parties prenantes ici aujourd'hui qu'on représente, ce qui m'importe de dire,
exemple, sur cette fameuse dualité qui est toujours présente et qui fait
cette particularité, c'est qu'on est à la fois à établir en place un nouveau
marché du carbone qui est florissant. Le cadre réglementaire et législatif est clair, le développement de marchés par
l'application de protocoles doit se développer, et, à cet effet-là, évidemment, tout ne peut pas se
faire en même temps, simultanément. Ce qu'on vous dit comme message, c'est : Aidez-nous à bien comprendre les
règles de ce qui devra s'appliquer dans les prochaines semaines, prochains
mois, prochaines années, et on sera, à ce moment-là, prêts et partie prenante.
Je vous donne
un exemple, deux métiers très particuliers. Le MDDELC et le MDEIE ont des
vocations essentielles, un dans un
cadre où le marché du carbone est établi et l'autre côté qui est, de tradition,
celui qui est dans le développement de
marchés. Ça fait que cette combinaison d'acteurs là, puis je pourrais parler de
d'autres ministères... Pour nous, les règles pour dynamiser le marché doivent être bien certaines. L'incertitude d'un
marché émergent comme on a amène, je dirais... ça peut tuer un marché si
les règles ne sont pas très clairement établies, et c'est le message fort qu'on
veut lancer.
Nous ne
sommes plus dans une confrontation économie-environnement, on est dans un
contexte où on pense que tout passe
par le territoire et tout passe par sa densification, et c'est un nouveau
marché qu'on doit établir. Et la dualité qu'on parle depuis les années 80, équilibre entre
l'économie et l'environnement, n'est plus pertinente dans un marché à
faible carbone.
Donc, les
éléments qu'on veut attirer à votre attention. Il y a urgence d'agir afin de
réduire les coûts engendrés par les
changements climatiques et l'adaptation. La question, pour nous, n'est donc pas
de savoir si des mesures novatrices et plus
vigoureuses doivent être mises en place mais plutôt quelles mesures et comment
elles doivent être mises en place. L'annexe
I en fait une démonstration dans le document de consultation. On pourrait vous
en nommer de très nombreuses. La question est une question de
priorisation avec des champs visés par le Québec. On a une occasion de
leadership incroyable et on pense qu'il faut les définir très rapidement.
Peut-être, ce que je peux regarder, qui est
une réaction souvent qu'on voit, dans le bilan économique, dans le fameux
document des cibles, on voit une remarque qui est faite par le ministère des
Finances du Québec qui laisse entendre un
coût et qui, par la suite, donne une impression, je dirais, de nuance. Mais, je
pense, ce n'est pas le vrai débat qu'on
veut faire. Pour nous, on est fondamentalement... et on croit fondamentalement
à une croissance économique, à une opportunité
de développement des affaires en lien avec cette sobriété carbone qui est
recherchée, et c'est à cet effet-là qu'on veut attirer l'attention du
gouvernement.
Peut-être vous dire, et ce qui est
important : Réseau Environnement soutient, à sa manière, des initiatives
visant l'atténuation des changements climatiques. Tout récemment, nous avons
signé l'entente sur le Pacte de Paris, qui a
été mis tout sur la relation au niveau des bassins versants et de l'approche de
territoire — Réseau
souscrit à cette approche-là — le pacte sur l'eau et l'adaptation aux
changements climatiques dans le cadre de COP21. Donc, on est très actifs, à notre manière, pour essayer de faire
avancer les enjeux et l'envergure de ce que veut donner le gouvernement
du Québec.
Question un
qui avait été posée : Accord avec une cible de 37,5 %. Réseau
Environnement appuie sans réserve cette
cible. Elle est cohérente avec l'engagement du CGNA-PMEC de réduire, à
l'horizon 2030, les émissions de 35 % à 45 %. Il est également
cohérent avec l'effort mondial de réduction nécessaire. Il faut être conscient
du contexte particulier québécois qui fait
que cette cible ambitieuse constitue un défi. Le Québec, qui fait déjà sa part,
fait partie des premiers de classe,
et on doit y conserver... et on a tous les outils pour y arriver. L'ouverture
des marchés, de l'Ontario en particulier, qu'il peut y avoir montre un
effet de cohésion et un effet d'action qu'on doit avancer.
Question
deux : les cibles particulières. Il nous apparaît important d'avoir
clairement les cibles qui sont identifiées. Les filières à cibler, je
pense qu'on les a définies, mais on prend la peine de les souligner :
transport, institutionnel, commercial et industriel au niveau du bâtiment, la
biomasse forestière et toute la question des matières résiduelles. Plusieurs de ces filières, dans la cible
identifiée par le gouvernement, montrent moins de réductions de gaz à effet de
serre qu'on pourrait l'imaginer de notre
côté, qui pourraient se faire. Donc, on a identifié des filières, puis on pourra
en parler tout à l'heure, sur toute la question de la
biométhanisation. Je sors d'une entente sur le PGMR, d'une consultation avec la ville de Montréal sur la fameuse vision que le
ministre... vous aviez exprimée, en 2020, élimination des matières organiques, qu'il n'y en ait plus. Donc, toute cette notion de valorisation là nous paraît un
élément assez fondamental et clé qui pourrait générer des réductions
jusqu'à 5 % des gaz à effet de serre avec un effort pas si substantiel
qu'on pourrait le croire.
Donc, dans le
secteur du transport, comment vous dire davantage qu'être capable d'amener
cette notion de dualité entre le
transport collectif et individuel? L'électrification des transports en soi est
une bonne idée, il ne faut juste pas oublier que le fondement de Réseau Environnement, dans son application, c'est le
3RV-E. Plus on se rapproche... Évidemment, dans un monde idéal, réduction à la source, on est dans un système
économique, on essaie de tendre vers ça, et on essaie de s'éloigner de
l'élimination, et on se dit toujours : Pour nous, à notre avis, réduction
à la source, c'est encore plus vrai dans de l'évitement de véhicules sur les
routes qu'une électrification des transports.
Donc, cette
dualité entre deux modalités de transport, vous comprendrez, je pourrais vous
l'amener dans une plus grande perspective. Si on fait un aménagement du
territoire qui simplifie et réduit à la fois le transport individuel et collectif vers un aménagement du territoire qui
amène la mobilité des individus par d'autres moteurs, comme marcher et
le vélo, on voit des exemples... et il faut
penser dans l'aménagement du territoire à le faire et à l'appliquer. Une
minute. C'est ça que je pensais, là. Il me reste trois pages, je vais y
arriver.
De façon générale, ce qui nous importe, c'est...
il faut s'assurer que les utilisateurs, ceux qui ont la capacité de réduire les gaz à effet de serre... il faut
mettre en place des approches soit de proximité ou d'accompagnement pour
aider la transformation parce que ce qu'on comprend, c'est que les gens sont
prêts à le faire, n'ont peut-être pas juste la manière et comment le faire, et la marche est très haute. Et là on peut
penser aux utilisateurs. Une des stratégies, c'est de regarder le financier de ces acteurs-là. Ces
acteurs-là ont un rôle essentiel dans le modèle de financement pour
amener une meilleure conscience puis une réduction des gaz à effet de serre.
Mettre en place des programmes de formation, mettre
en place des modèles de financement novateurs qui ne sont pas juste de l'État.
Pour nous, il est essentiel que le... qu'autre que l'État investisse et
croit à changer l'approche. On ne croit pas à une approche étatique uniquement
par programme, on pense qu'il peut y avoir une combinaison partenariat
public-privé dans les modèles de financement.
Le
Président (M. Reid) : Vous allez pouvoir continuer, je pense,
dans les échanges. Alors, nous allons commencer notre période d'échange.
Je donne la parole à M. le ministre.
M. Heurtel : Merci, M. le Président.
Bonjour, M. Lacroix. Bonjour, messieurs. Merci beaucoup pour votre
participation et votre mémoire que nous allons recevoir bientôt. Merci. Alors,
je comprends que les délais sont très serrés, les nôtres aussi, évidemment. Je
tiens à faire une petite parenthèse. Je vous remercie, M. Lacroix, pour votre participation au Comité-conseil sur les matières
résiduelles, très appréciée, en plus du travail constant et régulier que
vous faites à Réseau Environnement, qui
contribue toujours à nos travaux. Ce temps-là additionnel est très apprécié
dans un exercice très important qui contribue
justement à l'ensemble de notre lutte contre les changements climatiques.
Alors, merci.
Dans votre
présentation — puis là
j'ai pris en note, là — vous parlez d'incertitude liée à des règles pas clairement
établies. Pourriez-vous approfondir ça, donner des exemples concrets? C'est
quoi, votre préoccupation précise par rapport à ça?
• (15 h 20) •
M. Lacroix
(Jean) : Je vais introduire puis je vais laisser après... un exemple
donné. Évidemment, à partir du moment
où on met des cibles, on vient de les annoncer, le marché du carbone est actif.
Pour nous, au moment où on se parle, la question, c'est : Quelles sont les priorités
que le gouvernement veut, dans cette réalité-là, gouverner? Et, en ce sens-là, les acteurs, les parties prenantes réagissent
toujours en fonction d'une priorisation, puis en fonction d'un signal en
disant : Nous allons aller vers cette
approche-là, donc, entre guillemets, investissez-vous dans le développement
d'expertises, de technologies, de propriétés intellectuelles pour
atteindre ces cibles-là.
Donc, vous avez vu, dans l'annexe, il y a de
nombreuses, nombreuses, nombreuses priorités. On pourrait probablement doubler ces possibilités de mesure
là. Pour nous, on dit : Soyez juste clairs, concis, précis sur des
éléments, et, de ça, nous allons être en
interaction et vous donner des cas pratiques parce que je vous avouerais que
certains des membres chez nous, c'est
comme si on essaie d'improviser puis de deviner où la priorisation... Puis ce
n'est pas un reproche que je fais.
C'est plus un signal de... c'est normal où on est. Je ne suis pas surpris de la
précipitation dans laquelle on est, mais l'après COP21, pour nous, dès qu'on peut... Puis on lève la main pour
vous dire : Nos membres vont être à votre service pour essayer de vous permettre, dans cette priorisation complexe... de dire où est-ce
qu'on croit que les retombées, bien humblement, de notre côté, peuvent
se faire.
Puis, peut-être, je ne sais pas si tu veux
donner des exemples en lien avec ça.
M. Perron (Christian) : Oui.
Christian Perron. Je suis vice-président des changements climatiques. J'agis de
façon bénévole, comme les 2 700 membres de Réseau Environnement. Nous
avons créé, l'année dernière, 79 comités ad hoc qui se sont penchés sur
différentes politiques gouvernementales et différentes solutions.
Prenons
exemple sur différentes solutions, un comité ad hoc sur le transport. On salue
et on félicite le gouvernement de se
pencher vers l'électrification des transports. Cependant, il existe d'autres
solutions beaucoup plus faciles, moins dispendieuses et plus rapides
dans le temps pour apporter au moins 10 % d'économies dans les gaz à effet
de serre. Mais, en premier lieu...
M. Heurtel : Des exemples.
M. Perron
(Christian) : Exemple, la
formation et suivi. Des tests ont été faits avec FPInnovation et Camo-route,
des organismes sans but lucratif, auprès de compagnies de transport, et on a
vérifié qu'on avait 10 % avec formation et
suivi. Je dis bien suivi, c'est important parce que, quand il n'y a pas de
suivi, tu perds tout. Après trois mois, tu as tout oublié. Avec les
chauffeurs, on revient au même niveau. Quand il y a un suivi, on a 10 %,
11 %, 12 % d'économies. C'est énorme, d'accord?
Et je vais
vous poser une question avant, que je pose souvent dans mes conférences, et là
on va parler d'information. Savez-vous à quoi ça ressemble, une tonne de
gaz à effet de serre?
Une voix : ...
M. Perron (Christian) : Non. Ça a un
volume. Quand vous soufflez un ballon d'air, c'est une baloune qui se gonfle, on s'entend? Une tonne de gaz à effet de
serre, c'est 10 mètres par 10 mètres par 10 mètres, 30 pieds par 30
pieds par 30 pieds. C'est deux maisons de
gros. Une voiture qui roule 12 000 kilomètres par année, 10 litres aux
100, trois tonnes, six maisons. Un taxi à Montréal — j'ai
fait le programme taxi, on a participé pour les 4 668 taxis de Montréal,
programme Taxi vert — 17
tonnes par année, 34 maisons. Un camion qui fait la route 20, la 20
Montréal-Québec : 150 tonnes, 300
maisons. Un camion qui fait la neige ou les poubelles Québec, Montréal, dans
les villes, on s'entend : 150
tonnes, 300 maisons. On ne sait pas à quoi ça ressemble, on n'a pas d'idée.
Donc, on n'a pas de bonne information à livrer aux consommateurs.
C'est la formation et l'information. On informe
les gens, qu'est-ce que c'est, ils ont une image. Si on n'a pas d'image, on est dans le flou. Ça, c'est la
première chose qu'on doit faire : informer les gens de façon correcte,
donner des images concrètes. Comme, je pense, M. Heurtel, vous avez bien
vu nos amis de Forêt d'Arden, d'accord? Je suis un des ambassadeurs de Forêt
d'Arden.
M. Heurtel : Bravo!
M. Perron
(Christian) : Merci. Et
c'est là qu'on a amené l'image du ballon. Le petit ballon, là, c'est de là
que ça vient, O.K.?
M. Heurtel : ...
M. Perron
(Christian) : Merci. Donc,
on a donné une image aux gens, on forme les jeunes avec ça, et ça, c'est
la formation et l'information. Dans le transport, c'est la même chose.
On
va continuer dans le transport. Le deuxième problème, la gestion du transport,
le JITD, «just-in-time delivery» — excusez l'anglicisme, c'est de même que ça
s'appelle — la
livraison juste à temps. Savez-vous que dans un garage, à Montréal, quand le monsieur, il a besoin de trois pintes
d'huile, il appelle trois places différentes de livraison? Il arrive trois livreurs. Ce n'est pas des jokes, on
a fait l'étude. Trois livreurs, puis c'est la petite fille qui est la plus
cute dans la livraison qui va avoir la commande. Ça, c'est un exemple.
Les
camions qui rentrent à Montréal, 60 % des camions sont chargés à
50 %. C'est moins dur pour le pont, vous me direz, là, mais ça fait
du gaz à effet de serre en ville sur un méchant temps. Si on pouvait avoir une
meilleure gestion du temps... Il n'y a plus d'entreposage qui se fait dans les
entrepôts. On appelle : Livre-moi ça demain. Je donnais un exemple, tout à l'heure, très ridicule, vous me
direz, là, vous allez voir qu'est-ce que c'est. Des portes fabriquées en
Chine pour le métro de Bombardier. Elles
partent de Chine, s'en viennent à Vancouver par bateau, prennent le train, s'en
viennent à Montréal, prennent le camion,
s'en vont à Thetford, sont peinturées, s'en vont à Portland pour être
assemblées à un autre morceau, puis après ça elles s'en vont à Dublin
pour être assemblées pour être livrées en France. Est-ce que c'est logique? On est pris dans ce phénomène-là. Est-ce
qu'au Québec on pourrait améliorer notre transport? Juste ça, c'est un
autre 5 % à 10 %.
On
parlait de solutions, de peut-être mettre l'électrification des transports pour
condenser les transports urbains. Vous attachez aux trains urbains des
wagons de transport pour faire la livraison avec des véhicules électriques à
l'intérieur de la ville. Ce sont des solutions facilement adaptables,
contrairement à avoir des gros camions qui vont faire la route
Montréal-Vancouver. Sur l'électrique, ça nous prendrait des travaux à ce
moment-là.
M. Heurtel :
Si vous permettez...
M. Lacroix (Jean) :
Oui, si on vous laissait poser des questions, oui.
M.
Heurtel : Non, mais c'est parce que c'est très intéressant, là, votre
exemple, mais, justement, si on prend votre exemple, que ça soit l'exemple de la porte Bombardier ou l'exemple du
«just-in-time», évidemment, il y a des impératifs économiques, manifestement, qui conditionnent ce
comportement-là. Donc là, comment faire spécifiquement... Parce que, là, vous dites... Très bien, on comprend très
bien. Vous êtes très efficace. Vous nous avez expliqué. Bon, bien, oui, de la façon que vous le décrivez,
en effet, il y a des liens à faire, mais...
M. Perron
(Christian) : Énormes.
M. Heurtel :
...énormes, j'en conviens. Mais là le comment, comment on change ce
comportement-là?
M. Perron
(Christian) : À ce moment-là...
M. Heurtel :
Parce que, là, l'impératif économique, c'est d'agir de la sorte.
M. Perron (Christian) : Bien, c'est là que le Réseau Environnement va
vous aider en faisant un comité ad hoc pour trouver des solutions avec
vous autres.
M.
Lacroix (Jean) : Mais, si je
peux me permettre, au-delà de ça, je pense qu'à partir du moment où on
change le modèle d'affaires économiques, donc les paramètres dans lesquels on
donne les incitatifs, les messages qui sont lancés par un gouvernement
qui veut une cible audacieuse, il faut qu'il y ait une relation, dans son
message économique, qui va amener un
changement de comportement, qui va dire, par un mode de réglementation, par un
incitatif particulier... qui va faire
qu'ils ne le feront plus parce qu'économiquement parlant c'est mieux de faire
autrement parce qu'on réduit les gaz à effet de serre, et, de façon
équivalente, une opportunité d'affaires que ça devient.
Donc, une société
faible ou sobre en carbone, on change le «mindset» du concept. Vous avez
raison. Si on dit : Faites-le, ils ne
le feront pas parce que le modèle économique, tel qu'il est connu aujourd'hui,
n'est pas en adéquation. Ils le font
parce que c'est rentable de le faire. Donc, la prémisse et ce qui fait qu'il
est intéressant d'avoir des ententes bilatérales
avec plusieurs pays, provinces, États fédérés, c'est justement... Tous doivent
lancer un signal commun d'éviter ce déplacement.
Combien
de cas on a connu de déplacement de biomasse forestière de la Belgique vers
ici, d'ici à là-bas? Entre les régions
où il y a un déficit, on va importer de l'extérieur, alors qu'on pourrait
juste, entre provinces, échanger l'approche. Il y a une réalité
économique. Pourquoi ils font ça? C'est parce qu'il y a un dollar sur la tonne.
M. Perron
(Christian) : Si tu permets, Jean, je vais même rajouter. On va faire
un lien avec les matières résiduelles.
Est-ce que c'est normal que les déchets de Montmagny s'en aillent à Shawinigan?
Est-ce que c'est normal que les déchets
de Thetford Mine s'en aillent là-bas? Ça coûte une beurrée. Quand on regarde
les programmes... Puis référez-vous
aux études Climat municipalités. Toutes ces choses-là sont chiffrées à
l'intérieur des études Climat municipalités. Vous les avez. J'ai participé à des études Climat municipalités. On les
a sorties. C'est aberrant. C'est des sommes énormes pour le
contribuable. Mais qui en profite? Deux, trois acteurs.
M.
Lacroix (Jean) : Puis, si je peux me permettre, l'enjeu que vous avez
est un enjeu économique, est un enjeu d'allocation
des coûts à quel endroit? Si on le fait, c'est qu'à quelque part on vient faire
une ponction d'un coup et qu'on le déplace ailleurs.
Ça
ne rend pas l'exercice simple pour un gouvernement, on s'entend, parce que ça
vient comme changer l'échiquier. Mais, à
quelque part, si on veut tendre vers cette nouvelle réalité, le modèle
d'affaires devra aller aussi loin. Puis on peut y aller. Ce n'est pas de façon doctrinaire. On y va par des
projets pilotes. On teste, on a les résultats puis, après ça, on s'en
convainc que, comme société collective... Est-ce que c'est un investissement
intelligent? Tout ne sera pas des aberrations. Quelque chose d'intelligent,
mais de nombreuses en auront... Puis là-dessus, à mon avis, vous avez, à travers le Fonds vert, une opportunité
extraordinaire de tester cette approche-là, justement de dire : Comment je
peux faire, par rapport à ça, un
projet pilote qui va venir changer cette donne-là? Quel rapport? Comment on va
faire l'écofiscalité? Comment on va
mettre les incitatifs au bon endroit? Il y a 1 000 affaires qui me sortent
en même temps, j'ai juste une bouche pour l'exprimer, mais, tu sais,
c'est...
M. Perron
(Christian) : Mais, si tu permets, Jean, je vais rajouter quelque
chose. On parlait tout à l'heure de tout ça.
On va parler d'un autre aspect qui touche encore le transport mais qui touche,
exemple, les matières résiduelles ou autre.
Excusez l'anglicisme, «small is beautiful». Ici, au Québec, on a le défaut de
l'ingénierie, «Ing.». Je vous rappelle que «ing», des fois, veut dire «intelligence non garantie», d'accord? C'est
mon grand plaisir de le dire, puis je vous dis pourquoi. Parce que les ingénieurs, ils voient bien souvent
gros. Excusez, vous êtes peut-être ingénieur, je ne veux pas vous
insulter, mais je suis sûr que ce n'est pas votre cas. O.K.
M. Lacroix
(Jean) : Mais c'est le mien aussi, ça fait que...
• (15 h 30) •
M. Perron (Christian) : Oui. Ça, ce n'est pas grave, c'est toi. Si ça
vous insulte, c'est parce que vous êtes touché, hein? Ça ne me dérange pas. Mais dites-vous une chose : Dans
l'industrie... Je fais de l'industriel, on fait de l'industriel, on fait de l'efficacité énergétique, on fait des
choses. Dans les projets, tout ce qu'on voit, exemple, le traitement des
matières résiduelles, ce qu'on voit :
des gros projets tous centralisés, encore une fois, alors qu'il est très
facile, et on peut le prouver facilement, qu'économiquement parlant on
peut faire des petits projets.
J'ai
vu un projet qui s'est présenté à Chisasibi, en haut. C'est loin, là. Ce n'est
pas la porte à côté, là. C'est un peu plus loin que L'Ange-Gardien. Le
projet qui s'est présenté : biométhanisation des matières résiduelles, des
matières organiques, avec une serre pour
faire... Eux autres, ils ne voulaient pas avoir des légumes, ils voulaient
avoir des fleurs, ce qui est normal,
en haut, ils n'en ont pas. Après ça, on prenait le restant des matières
résiduelles pour l'incinération pour chauffer
la piscine. Zéro résidu. Maintenant, c'est comment qu'on le finance? C'est de
trouver un petit projet. Ce n'est pas tellement
dispendieux, quatre, cinq millions. Ça se finance bien, mais ça ne rentre pas
dans les cadres des programmes du gouvernement.
Ça ne rentre pas dans tel cadre, ça ne rentre pas dans tel cadre. On présentait, exemple... Il peut y
avoir des projets qui peuvent se présenter
pour Thetford, Montmagny, Lac-Mégantic. Pourquoi ne pas traiter
localement, faire de l'énergie de
quartier pour pouvoir développer ces choses-là? On n'est pas obligés de faire
des extras. Montréal, c'est normal, mais, même à Montréal, on suggérait l'autre jour : Pourquoi
vous ne faites pas quatre projets dans quatre niveaux de la ville au
lieu de tout centraliser à la même place? Ce n'est pas plus dispendieux.
Alors,
on n'est pas obligés de penser toujours gros, on peut penser décentraliser. Actuellement dans la biomasse forestière, il se fait des projets avec des
modules pour pouvoir aller directement en forêt prendre le résidu qu'il y a là.
Au lieu de transporter cinq voyages de bois, c'est un voyage d'huile puis un
lithique. C'est un exemple. Alors, la décentralisation
est importante. Et on vous demande de penser à cette chose-là. Les gens de
Réseau Environnement y ont pensé. Ils se sont penchés là-dessus.
Le
Comité de valorisation énergétique des matières résiduelles. Vous avez
22 professionnels qui se sont réunis pendant quatre réunions pour aider à améliorer les réglementations à l'intérieur de la valorisation énergétique des matières résiduelles. Si on
suivait les réglementations, la seule chose qui était permise, c'était de faire
du plasma, puis ça ne marche pas.
Comprenez-vous? Ça ne veut pas dire que le fonctionnaire qui est là, il n'est
pas incompétent et compétent, il n'a peut-être
pas toutes les connaissances. Alors, à
ce moment-là, en se penchant puis en
s'alliant avec des personnes du terrain pour avoir des idées de plus, on
peut aller vers une meilleure solution.
M.
Lacroix (Jean) : Peut-être,
vous avez posé la question de la nécessité
des règles du jeu et la prévisibilité. Puis je m'excuse, j'ai l'impression qu'on remplit, mais le manque de main-d'oeuvre, c'est un enjeu important. Dans le manque de main-d'oeuvre qualifiée,
il nous paraît important d'être capables de planifier de la croissance et de la
prévisibilité.
L'efficacité
énergétique a connu ces aléas qui ont été absolument mortels. C'est-à-dire qu'on a créé des attentes, des
objectifs très élevés, on a désorganisé les attentes. Ça fait qu'aujourd'hui on
repart l'efficacité énergétique. Je vous le dis,
on a un problème de main-d'oeuvre pour l'exécuter. Et ça fait partie du gros
potentiel de gaz à effet de serre. N'oublions pas que la main-d'oeuvre doit être au rendez-vous, la prévisibilité nous
le permet d'y être et de ne pas perdre notre expertise à cet effet-là,
d'où l'idée d'avoir une prévisibilité 5, 10, 15 ans sans changement de
programmation pour faire du «swing» d'expertises au Québec.
Le Président (M. Reid) : Merci. Nous allons passer
maintenant à l'opposition officielle. M. le député de Terrebonne.
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Wow! Quelle
présentation, messieurs, pour cette commission et pour la discussion qui nous anime, soit celle des
cibles de réduction! Je pense que vous vous automotivez. En fait, vous formez une très belle équipe. La synergie est là,
et ça nous permet de prendre plusieurs notes et évidemment de tirer, là,
toutes les leçons de votre expertise. Donc, je tenais à vous remercier d'être
là aujourd'hui.
Et vous allez devoir
m'aider parce que, bon, l'environnement est un sujet qui est complexe. Je vois
que vous avez beaucoup d'expérience, vous allez pouvoir m'aider à démystifier
certaines choses puis peut-être aussi m'aider à prioriser certains aspects, là, des discussions
que nous avons aujourd'hui parce que je pense que c'est monsieur,
tantôt, qui disait, bon, que c'était très large. On peut couvrir, là, tout un
ensemble de facteurs.
J'aimerais,
pour débuter, savoir quel est votre... vos priorités à l'intérieur des
différentes mesures ou propositions qui
sont faites par le ministre et dans notre cahier de discussion. Est-ce que
c'est le transport? Est-ce que c'est certains secteurs en particulier? Est-ce qu'il y a des mesures qui vous animent
plus que d'autres? Je voulais juste revoir avec vous, là, les quelques
priorités. Mettons cinq, maximum.
M.
Lacroix (Jean) : Oui. Écoutez, je pense que, dans... Et c'est déjà ce
que fait le gouvernement, à mon avis, c'est évidemment où se retrouve le
plus grand potentiel de gaz à effet de serre à réduire. Évidemment, toute la
question du transport, de l'efficacité
énergétique au sens large du bâtiment, c'est comme un incontournable. C'est un
des plus grands potentiels inexplorés. Et je vous rappelle qu'efficacité
énergétique est une adéquation directe entre compétitivité de nos entreprises
et productivité de nos entreprises. Ce n'est pas une histoire d'éclairage, ce
n'est pas une histoire de fenêtres, c'est une histoire de performance et de
concurrence par rapport à ce qui se passe dans notre écosystème nord-américain
et mondial.
L'aspect, évidemment,
de toute la biomasse, biomasse forestière, toute la question des matières
organiques, je pense qu'il y a un grand
potentiel de réduction de gaz à effet de serre. Il y a une mobilisation des
acteurs municipaux à cet effet-là, c'est des momentums qu'on ne peut pas
échapper et incontournables.
Tout
ça peut être associé à... Je vous rappellerais qu'on est dans un marché du
carbone qui a été stimulé par le Québec. Les crédits compensatoires sont
un instrument financier essentiel et important. Pour tout de suite, on achète
notre crédit compensatoire ou on tend à acheter ce crédit-là vers la
Californie. On a une grande capacité, au Québec, de renverser la vapeur en se
mobilisant pour essayer que ça soit chez nous qu'on développe du crédit. Et les
secteurs que je viens de vous parler
sont des protocoles. Je pense qu'il y
en a trois actuellement en cours ou en force d'être faits. Je pense que ça va être, dans
la suite des choses, une opportunité financière sans intervention de l'État
directement dans des programmes pour être capables de soutenir le développement
de filières.
M. Perron
(Christian) : D'élargir aussi le marché du carbone en allant vers, peut-être — une
simple suggestion — ce
qu'on appelle les compensatoires, les autres... pas seulement
les fermes, mais, justement, les efforts faits par le transport, les efforts faits par la biomasse, les traitements de
biomasse. Alors, il y a d'autres marchés qui sont dans le marché compensatoire normal, qui peuvent peut-être
s'appliquer et qui vont encore favoriser l'amélioration de l'empreinte carbone et l'amélioration surtout de la
productivité parce que n'oubliez pas qu'à chaque fois que vous réduisez une
tonne de gaz à effet de serre il est possible, par la mesure de l'empreinte
carbone, d'améliorer la productivité. On l'a testé en entreprise, et ça
fonctionne.
M. Lacroix
(Jean) : Et je vous dirais : N'oubliez pas les modèles de
financement privé. De plus en plus, les technologies propres sont une
opportunité extraordinaire. Les financiers privés désirent être partenaires
financiers dans l'aventure de la réduction
des gaz à effet de serre au Québec et sont prêts à mettre des capitaux. L'État le
dit : L'argent se fait plus rare
que jamais. Une combinaison de modèles d'affaires, de financement public-privé pour arriver à mettre en place des technologies, du développement, c'est quelque chose qu'on a trop négligé au Québec, puis c'est une grande opportunité de
levier, puis c'est ce qu'on entend beaucoup de nos partenaires financiers,
d'ailleurs.
M. Pilon (Laurent) : J'ajouterais... Bien, si vous me permettez aussi,
j'ajouterais : On nous a demandé cinq priorités, on est juste à trois. Donc, on pourrait peut-être
se permettre d'en rajouter, entre
autres, le transport électrifié.
C'est une de nos priorités aussi chez Réseau Environnement.
Je pense, entre
autres... M. Perron a déjà parlé du transport de marchandises avec
l'efficacité, justement, du «just-in-time»,
mais il ne faut pas oublier également l'élimination de l'enfouissement de la
matière organique, qui est une de nos
priorités également. On pense, entre
autres, que l'élimination de
l'enfouissement de la matière organique permettrait d'aller chercher une efficacité de 90 %, soit
de réduire, dans le fond, nos émissions de gaz à effet de serre de
5 % juste ce poste-là. Donc, voilà.
M.
Lacroix (Jean) : Et, quand
on fait ce commentaire-là, on le fait à partir de nos spécialistes, sur du
tangible, sur du terrain. Ce n'est pas une vue de l'esprit et une vertu. On le
sait que ça se fait, que les technologies sont là, que la connaissance du Québec
est là pour le réaliser.
M. Perron (Christian) : N'oubliez pas que l'enfouissement, c'est 2 milliards de dollars par année. C'est énorme pour mettre des
déchets dans un trou.
M. Traversy :
Bien, je vous remercie pour cette authenticité et surtout pour vos suggestions.
Le transport revient beaucoup
dans l'ensemble des affirmations, évidemment, parce qu'on a vu le pourcentage, là, de gaz à effet de serre qu'il représente. Je vous pose une question toute
simple parce que je veux rentrer aussi dans des détails peut-être
un peu plus concrets maintenant que vous nous avez tracé le portrait
plus global. Est-ce que, par exemple, l'adoption d'une loi zéro émission serait
vue positivement par votre organisation?
M.
Lacroix (Jean) : Bien, ça va
faire partie de notre mémoire. C'est un des sujets que je n'ai pas eu le temps
de vous parler, mais absolument,
c'est quelque chose qui nous apparaît un élément essentiel,
d'ailleurs qui a été souligné dans le document de consultation. On
appuie très ouvertement cette approche-là.
M.
Pilon (Laurent) : On formule
plutôt, nous, une loi favorisant l'achat des véhicules électriques. On n'est
pas tenus à une loi zéro émission comme...
qui a été proposée déjà par certains organismes. Nous, c'est vraiment
une loi qui favorise l'achat des véhicules électriques, tout simplement,
ou hybrides.
M. Perron
(Christian) : Nous suggérons
de faire l'utilisation de l'empreinte carbone comme GPS d'entreprise,
l'empreinte carbone ponctuelle; pas l'analyse de cycle de vie complète mais
l'analyse ponctuelle d'une action. À ce moment-là,
ça nous permet de vraiment calculer si on sauve ou pas. Il n'y a
pas de méthodes comptables qui peuvent le faire, seulement ça. Alors,
c'est une...
M.
Traversy : Il me
reste seulement deux minutes? Mon Dieu! O.K. Alors, en gros, écoutez,
il y a tellement de choses dont
j'aimerais vous parler, mais le temps file. Deux dernières questions. Bon,
tantôt, vous avez mis beaucoup l'accent
sur le fait de l'importance d'avoir des règles claires, que vous avez consulté
vos membres, que c'était quelque chose qui venait de façon répétée. J'aimerais juste que
vous nous disiez si vous avez vécu des expériences, par le passé, qui
vous amènent à marteler que la clarté est importante, que, donc, par votre
expérience, peut-être que certaines consultations ont mal fini, étant donné ce manque de clarté. Et j'aimerais que vous
mettiez encore un peu l'accent sur l'après COP21 parce que ça aussi, ça semblait être une de vos préoccupations
importantes. Je vous laisse. Il reste environ une minute?
• (15 h 40) •
M. Lacroix
(Jean) : Je vous dirais, ça
va me permettre de nuancer. Quand je dis l'absence de clarté, je vous
dirais, c'est plus la nouveauté d'un marché
émergent du carbone où, de plus en plus, il y a une transformation du
marché qui se fait et, inévitablement, il y a un écart entre cette transformation-là,
qui est faite, puis la compréhension du marché.
Moi, je vous
dis qu'on a une maturité, une opportunité extraordinaire, dans le cadre de COP21, de faire des cibles, des annonces, de créer un momentum.
Ce qui va être important très rapidement, c'est, par la suite, que les signaux...
Puis je pense que c'est en ce sens-là puis je pense que le gouvernement est probablement le premier à vouloir annoncer un certain
nombre de mesures qui vont suivre l'application de... Ce qu'on dit à nous de
notre côté, c'est : On n'a pas de prédisposition particulière à qu'est-ce
que c'est. C'est : Dites les règles, établissez-les. Si vous voulez nous
consulter au préalable, on est ouverts, à
l'écoute, puis on lève la main. Mais, une fois que ça sera fait, on sera
capables de vous dire bien humblement
ce qu'on est capables de faire et de ne pas faire et quels sont les instruments
nécessaires pour arriver à cette cible-là qui est visée.
On vous a
donné les matières organiques. Pour nous, c'est clair, on le sait, on a cette
capacité-là d'aller chercher le 5 %
de réduction de gaz à effet de serre. En ce sens-là, c'est clair, il y en a
d'autres dans le transport qu'on peut faire. Dans le cas du transport,
c'est plus complexe parce que ça amène beaucoup d'investissements significatifs
pour y arriver.
M. Perron
(Christian) : Je me permets
d'apporter un bémol sur le transport. Commençons par la formation et le suivi, donnons les outils faciles. Et les organismes gouvernementaux actuels, dont je vais en nommer un... le PEIE, a un excellent
programme, à l'intérieur, de formation en conduite. Alors, commençons par ça.
M.
Traversy : En conclusion, je compte sur vous pour nous décrire, là, «formation
et suivi», là, tout ce que ça représente pour vous dans votre mémoire.
Merci beaucoup, messieurs, de votre temps.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Alors, nous passons maintenant au deuxième groupe d'opposition. M. le
député de Masson.
M.
Lemay : Merci, M. le Président. Merci d'être avec nous aujourd'hui,
MM. Perron, Lacroix et Pilon, c'est ça? Effectivement. Bon, bien, parfait. Alors, vous savez, on a parlé de
biomasse, vous avez parlé, par rapport à la question 2, là, qui est dans
le livre, là, pour nos cibles, là, vous avez parlé de certaines
priorités : transport, bâtiment, biomasse puis gestion de matières résiduelles. Mais la biomasse, on sait que, bon, on
avait un objectif d'arriver pour 2019 au niveau des municipalités, là.
Ça a été repoussé au 31 décembre 2022. Donc, j'imagine que vous ne voyez
pas ça d'un bon oeil.
Si on fait juste penser à la ville de
Saint-Hyacinthe, qui ont vraiment un beau projet, il y a un autre projet qui, peut-être, va voir le jour, là, sur la Rive-Sud de
Montréal, là, Châteauguay, je ne sais pas, en tout cas, Beauharnois, je
ne me rappelle plus de la ville exactement.
On a aussi, je pense, Rivière-du-Loup qui veut faire de quoi avec le nouveau
traversier. Tu sais, ils veulent faire une usine de biomasse. Mais vous, là,
vous voyez ça d'un mauvais oeil, dans le fond, qu'on repousse les échéanciers
au niveau des municipalités, j'imagine.
M. Perron
(Christian) : Le repousser,
oui parce que c'est de nous enfoncer, tout simplement. Ce qu'on
préconise, je vous l'ai expliqué tout à l'heure, ce sont les projets locaux, le
développement local. Pourquoi faire encore des mégacentres? Pourquoi encore
favoriser les grosses compagnies? Ne serait-ce que l'enfouissement, posez-vous
la question : À combien de personnes ça
profite? Combien de compagnies profitent de l'enfouissement, O.K.? Il n'y en
a pas beaucoup. Ces personnes-là ne sont pas intéressées à perdre leur marché.
Cependant, on peut transformer cette chose-là
dans un mot très beau que le Réseau Environnement supporte, l'économie
circulaire, l'économie que l'on fait dans la région, développer dans la région.
On n'est pas obligés, si on fait, exemple...
Je vais vous donner un exemple, Chisasibi. Si on faisait une serre, que je la
fasse à Thetford ou que je la fasse n'importe
où, je fais une serre à côté, je ne suis pas obligé de faire pousser des
tomates. En Finlande, ils font pousser des bananes. Ça vous donne un exemple? On peut créer d'autre chose. Il faut
être créatif. Sortons des sentiers battus. Et c'est là que l'expertise
totale de Réseau Environnement peut amener à avoir des nouvelles solutions.
M.
Lacroix (Jean) : Tu sais, quand j'avais fait un parallèle avec la
prévisibilité, ce que je vous disais, une prévisibilité, quand elle est
repoussée, ce que ça lance comme signal dans le marché, c'est que ça dit :
Les prochaines fois, est-ce que ça va aussi
arriver? C'était en ce sens-là quand je disais : La prévisibilité de ce
qui s'en vient, si on bouge ces prévisibilités-là,
ça amène juste des incertitudes, ça amène juste à penser qu'on va toujours
faire des représentations pour déplacer les agendas. Puis c'est en ce
sens-là qu'on dit : Essayons. Puis ce n'est pas toujours simple, il y a
plein de considérants. On est conscients
qu'il y a des particularités puis on est conscients qu'il y a des villes... Et
l'approche mur à mur, en passant, je
ne suis pas un dogmatique là-dessus. Je le sais qu'il y avait des villes qui
avaient des problématiques en lien
avec ça, et probablement que ça a fait écho à ça, même des membres chez nous,
c'est le cas. Il n'en reste pas moins qu'il peut y avoir une
prévisibilité anticipée avec des modules d'opération sur des particularités
régionales qu'il peut y avoir de certaines villes, de certaines applications.
M.
Lemay : Bon, bien, c'est très bien. En fait, en entreprise, ça nous
prend des certitudes pour pouvoir faire des modèles économiques.
Effectivement, ça, on comprend bien.
Moi,
je veux savoir, vous n'êtes pas les seuls à nous parler d'électrification des
transports, mais, vu que vous nous parlez
de biomasse en particulier, je me dis : Dans le réseau des transports, il
n'y a pas juste la voiture électrique, là, tu sais. Vous nous l'avez
totalement indiqué pourquoi que, depuis 2006 versus 2012, il y a une
augmentation des transports lourds sur nos routes. C'est à cause du phénomène
de «just-in-time». Ça, ce n'est pas un phénomène qu'on va voir disparaître, surtout avec toutes les hausses de
taxes qu'on a sur les terrains, les bâtiments. Donc, les entreprises
construisent plus petit puis elles optent
pour le «just-in-time». Ceci dit, pourquoi, alors, si vous mettez l'emphase sur
la biomasse, vous ne nous parlez pas
du fait qu'on devrait convertir nos véhicules lourds au gaz naturel pour
justement faire la réduction des...
M.
Lacroix (Jean) : ...qu'on n'a juste pas eu le temps de vous le dire.
C'est un autre sujet qu'on peut vous parler.
M. Lemay :
O.K. Bien, allez-y.
M. Lacroix
(Jean) : Évidemment, on est conscients... Peut-être que la technologie
évoluera, mais toute la question du gaz naturel liquéfié, du gaz naturel de
compensation qui est de plus en plus développé à moindre coût, il y a plein de
projets actuellement en développement au Québec. C'est clair qu'il y a une
conversion parce que, dans l'efficacité énergétique, il y a le modèle de
conversion, de substitution de filière. C'est un bel exemple où on peut avoir des réductions de gaz à effet de serre juste
par une conversion parce qu'il y a un rapport économique de gens qui ont
intérêt à le faire.
M. Perron (Christian) : Mais, cependant, j'ajouterais le point
suivant : Utiliser le gaz naturel liquéfié ou le gaz naturel, c'est
très bien, on réduit de 30 % les gaz à effet de serre. On conforte encore
un monopole.
M. Lemay :
Bien, pas si on a les petits projets locaux.
M. Perron
(Christian) : Ah! là, oui, c'est ça, mais c'est parce qu'il y a un
problème dans cette histoire-là, c'est :
quand on met du gaz naturel puis que tu fais de la biométhanisation, ça coûte
plus cher de le purifier pour le mettre qualité gaz naturel que de faire
ta biométhanisation. C'est ça, le plus gros problème. Il existe d'autres
solutions. Tu peux faire du «dual-fuel», il existe des technologies où est-ce
que tu peux mêler du biogaz moins purifié mêlé à 60 % biogaz, 40 % diesel. Puis, si tu manques de
biogaz, tu marches juste sur le diesel, comme le propane. Mais on est
partis sur la tangente que ça doit être gaz
naturel liquéfié. On est partis sur la tangente que c'est Gaz Métro. On est
partis sur la tangente que ça doit être pur puis plus beau que tout le
monde. Bleu, Bleu et bleu. C'est bleu.
M. Lacroix
(Jean) : Mais il y en a plein, oui, c'est ça.
M. Perron
(Christian) : Il y en a plein, tu sais.
M. Lemay :
Ça peut être du gaz naturel comprimé.
M. Perron (Christian) : Mais ça peut être du gaz naturel... Mais il
existe encore d'autres alternatives. Tantôt, on parlait de biomasse. Il
y a d'autres biomasses : résiduelles et forestières, exemple.
M. Lemay :
C'est terminé?
M. Perron
(Christian) : D'accord, je m'excuse. Merci.
M. Lemay :
Parfait. Bien, merci.
Le Président (M.
Reid) : Bon, je m'excuse...
M. Lemay :
Très appréciés, nos échanges.
M. Perron (Christian) : Merci
beaucoup.
Le
Président (M. Reid) : Alors, merci de votre contribution à nos
travaux.
M. Perron
(Christian) : Merci d'avoir supporté mon enthousiasme.
Le Président (M.
Reid) : La commission suspend ses travaux pour quelques
instants.
(Suspension de la séance à
15 h 48)
(Reprise à 15 h 50)
Le Président (M.
Reid) : Alors, nous reprenons nos travaux. Je souhaite maintenant
la bienvenue à nos prochains invités...
notre prochain invité, en fait, de Coop Carbone. Vous avez 10 minutes pour
faire votre présentation, et ensuite on aura une période d'échange.
Je vous demande de
vous nommer pour les fins d'enregistrement. À vous la parole.
La Coop Carbone
M.
Nolet (Jean) : Très bien.
Je suis Jean Nolet, alors, directeur
général de La Coop Carbone. Je
désirerais, dans un premier temps, vous remercier, M. le Président, M. le ministre, les députés, mesdames et messieurs, ainsi que Mme Moisan et Mme Chiasson de me recevoir
aujourd'hui, d'avoir eu la souplesse, en fait, d'aménager votre
agenda pour recevoir La Coop Carbone. C'est très apprécié.
Alors,
d'entrée de jeu, peut-être que je prendrais un moment pour présenter La Coop
Carbone. Alors, La Coop Carbone existe déjà depuis quelques années. Elle
a été fondée par quelques grands joueurs corporatifs du Québec intéressés par la coopération et intéressés par le
développement durable et le marché du carbone en particulier. On parle ici principalement de Fondaction, de Desjardins et de
La Coop fédérée, et également de l'Association québécoise de maîtrise de l'énergie et du Centre d'excellence en
efficacité énergétique, qui sont les
fondateurs de La Coop Carbone. Alors, ces
joueurs-là ont voulu se donner une organisation, un fer de lance pour faire en
sorte de bien saisir ce qui se passait avec le marché du carbone et en faire, si on veut, une locomotive pour favoriser
un développement économique vert au Québec.
Alors, pour vous situer, donc, comme le nom le
dit, on est une coopérative. La mission de La Coop Carbone — et c'est très important de l'avoir à
l'esprit — c'est
de générer des projets qui réduisent les émissions de gaz à effet de serre au
Québec parce qu'on veut faire en sorte qu'autant que possible les
outils qu'on s'est donnés au Québec, avec les objectifs ambitieux qu'on
s'est donnés au Québec, donnent des retombées économiques, au Québec,
avec le développement de technologies au Québec.
Alors,
les membres de La Coop Carbone sont d'abord des consommateurs d'hydrocarbures qui ont un
potentiel de réduction de gaz à effet de serre et qui seraient intéressés à
réaliser des projets chez eux.
Et
dernièrement, il y a à peu
près un an, La Coop Carbone s'est
dotée d'une capacité opérationnelle importante en acquérant
ÉcoRessources, une entreprise dont j'étais le président-directeur général. Ce
faisant, La Coop Carbone et ÉcoRessources,
ensemble, ont passablement d'expérience sur le marché du carbone, et je pense
que ça vaut la peine de le mentionner. En fait, au total, ça fait une
douzaine d'années qu'ÉcoRessources a été créé et est actif sur le marché du
carbone au Québec et à l'échelle internationale.
On a été un
originateur de projets importants à l'échelle internationale en travaillant en
Amérique latine et en Europe, où on a
originé un bon nombre de projets. À un certain moment donné, on avait, dans
notre pipeline, environ un million de
tonnes de crédits compensatoires reconnus dans le cadre du Protocole de Kyoto.
On a travaillé à la construction de protocoles, notamment en Colombie-Britannique,
dans le secteur forestier.
Six années de suite,
on a été mandatés par l'Institut de l'environnement et de l'énergie des pays
francophones pour rédiger le Guide du
négociateur francophone à chacune des COP. Donc, on a la COP de Paris au
mois de décembre. Il y en a une, comme vous le savez, à chaque année,
une conférence des parties. Alors, pendant six années d'affilée, ÉcoRessources
a eu le mandat de produire un guide pour les négociateurs francophones.
Par ailleurs, on a eu le mandat, pendant six années également, du MEIE de donner
des formations sur le marché du carbone
au Québec aux entreprises. On a également eu un mandat du MEIE qui visait à quantifier le
potentiel de crédits compensatoires
au Québec; un autre mandat qui visait à regarder c'était
quoi, l'intérêt de créer un fonds d'investissement, un fonds d'achat de carbone au Québec.
On a de l'expertise en évaluation des impacts économiques, et je devrais
dire qu'on offre du service-conseil aux grands émetteurs au Québec et aux
promoteurs de projets depuis une douzaine d'années.
Donc,
on est présents, sur le marché, à l'échelle internationale mais aussi à
l'échelle québécoise depuis longtemps. À ça s'ajoute le fait qu'on a travaillé passablement à l'adaptation aux
changements climatiques également de par notre expertise parce qu'on
regroupe à la fois des économistes et des ingénieurs.
Alors, aujourd'hui,
si on revient au présent puis qu'on regarde ce qu'est La Coop Carbone — j'ai
mentionné la mission qui vise à générer des
projets de réduction de gaz à effet
de serre au Québec — eh bien, on travaille sur un aspect de
nos activités qui est la conformité carbone et, dans ce
cadre-là, on accompagne les grands émetteurs et les distributeurs de carburant qui cherchent à se conformer à la réglementation qui les oblige à obtenir des droits d'émission pour pouvoir émettre
au Québec. Alors, on est avec eux dans cette logique-là, et, carrément, ce
qu'on fait, c'est qu'on achète des droits
d'émission ou des crédits compensatoires qu'on leur revend. On ne s'en cache
pas, on vise par là à faire un profit qui est ensuite utilisé pour notre
mission qui vise à générer des projets de réduction de gaz à effet de serre au Québec.
Alors, c'est un élément important.
On travaille par ailleurs,
actuellement, à créer, avec Fondaction, un fonds d'investissement carbone qui
vise à investir dans des projets de
réduction de gaz à effet de serre au Québec et en Amérique
du Nord. Et puis on travaille
à des projets de réduction de gaz à effet de serre au Québec et on vise deux secteurs d'activité
en particulier, l'agroalimentaire et puis
les villes, avec, en premier lieu, la ville
de Montréal. Donc, c'est ce sur quoi
on se concentre du côté de La Coop Carbone.
Alors, prenant connaissance du document de consultation,
qu'on a bien apprécié d'ailleurs, on a cherché à répondre aux questions que vous nous posiez, et puis on commence avec
la première question sur la cible. Et d'abord, de ce côté-là, je
pense que ça vaut la peine de mentionner que le Québec s'est doté d'une cible
ambitieuse, pour 2020, en choisissant de
réduire ses émissions de 6 % par
rapport aux émissions de 1990. Alors, c'était très ambitieux. Et ça vaut
la peine de mentionner que notre partenaire
principal, dans le cadre de la Western Climate Initiative, la Californie, avait
un objectif, quand on utilise l'année de
référence de 1990, de 0 %. Donc, le Québec s'est doté d'un objectif plus
ambitieux que la Californie, alors qu'on a
une structure économique quand même différente, avec des plus petites
entreprises et avec un potentiel de réduction de gaz à effet de serre
moindre que la Californie. Donc, je pense que, si on devait se lancer des
fleurs, on pourrait s'en lancer pour cet objectif ambitieux là qu'on s'est
donné.
Maintenant,
si on regarde la cible qui est suggérée dans le cadre du mémoire de la
commission, alors on parle d'une cible de 37,5 % sous le niveau de
1990 pour 2030. Alors, on juge, du côté de La Coop Carbone, que c'est une cible
ambitieuse mais tout à fait cohérente avec,
d'une part, les objectifs qu'on se donne à long terme à l'échelle
internationale, et tout à fait cohérente également avec celle de nos
partenaires dans le cadre de la Western Climate Initiative, et tout à fait
cohérente avec des cibles adoptées dans les pays développés. Je pense ici
principalement à l'Union européenne.
Donc, on est tout à fait à l'aise, on appuie la
cible suggérée par le ministre dans le document de consultation. De ce côté-là, une suggestion, peut-être : il
pourrait être intéressant de se donner un indicateur ou une cible
intérimaire d'ici 2030 juste pour pouvoir vérifier la progression de nos
activités d'ici l'année 2030.
Pour la suite, on a choisi d'aborder la question
4 avant la question 3 du fait que, pour nous, la question des obstacles qu'on peut rencontrer dans l'atteinte de
nos objectifs risque de déterminer certaines des actions qui pourraient
être privilégiées dans la suite des choses.
Alors, je vous mentionnais que La Coop Carbone,
avec ÉcoRessources, est active sur les marchés depuis longtemps, et on a
cherché à identifier certaines des caractéristiques qui ne sont pas
facilitantes dans l'atteinte des objectifs
qu'on se donne au Québec. Et je me permets de les nommer ici. Vous les avez
devant vous, mais, concrètement, au Québec, on a peu d'expérience sur
les marchés environnementaux, et principalement sur les marchés du carbone, comparativement à la Californie, par exemple. Et
ça s'explique par le fait qu'en Californie on avait un marché volontaire
actif avant la décision d'aller de l'avant avec un marché réglementé. Et il y
avait des institutions sur place, le CAAR, notamment, qui avaient déjà
développé une expertise. On avait, donc, des promoteurs de projets puis une
expertise assez importante de ce côté-là.
Par ailleurs,
au Québec, je l'ai mentionné un peu plus tôt, quand on a parlé de la cible,
mais on fait... on est... Oui?
Le Président (M. Reid) : Il
reste une minute.
M. Nolet (Jean) : O.K. Est-ce que
vous me permettez de poursuivre avec ma présentation? Elle ne sera pas
tellement longue. Et puis je pensais que ça pourrait faciliter la conversation
ensuite.
Des voix : ...
Le Président (M. Reid) :
Est-ce qu'on est d'accord là-dessus? Ça va réduire les périodes d'échange.
M. Heurtel : Bien, qu'il termine en
une minute, puis les questions vont lui permettre de compléter.
Le Président (M. Reid) : Oui,
vous aurez l'occasion de continuer pendant la période d'échange.
• (16 heures) •
M. Nolet
(Jean) : D'accord.
Très bien. Alors, il
y a certaines caractéristiques du marché qui sont importantes. D'abord, le fait qu'on a beaucoup de petits joueurs au Québec,
et ça, c'est une caractéristique du marché québécois par rapport à d'autres marchés comme le marché
californien.
Par ailleurs, on a un manque de connaissance du
marché du carbone dans le secteur financier, et ça, ça se constate pour nous qui cherchons à travailler avec
certains joueurs du secteur financier. Donc, c'est un obstacle auquel on
est confrontés. Très concrètement, par
exemple, je cherchais dernièrement à voir si on pouvait financer un achat de
crédits carbone avec des partenaires financiers. Et alors, concrètement, quand
on connaît la réglementation, on sait qu'un droit
d'émission, c'est un actif qui pourrait être pris en garantie, mais les joueurs
financiers, au Québec, ne sont pas prêts à ça à ce moment-ci.
On a une difficulté à financer...
Le Président (M. Reid) : Je
dois vous interrompre, le temps est terminé.
M. Nolet (Jean) : D'accord.
Le
Président (M. Reid)
: Alors,
vous aurez l'occasion de reprendre certains thèmes pendant la période
d'échange. M. le ministre, à vous la parole, pour la première partie de
la période d'échange.
M. Heurtel :
Merci, M. le Président. Bonjour. Merci pour votre mémoire ainsi que votre
présentation. Moi, j'aimerais qu'on passe un
peu plus de temps, maintenant, sur ce qu'on appelle les initiatives à
favoriser, les moyens concrets que
vous préconisez. On parle évidemment de transport, on parle de cadre bâti, on
parle d'agroalimentaire. Ce sont des domaines,
là, entre autres, que nous préconisons. Ce sont trois sources importantes
d'émissions de gaz à effet de serre. Alors,
je voudrais vous entendre plus concrètement sur les moyens que vous
recommandez, dans ces trois secteurs-là, pour atteindre la cible.
M. Nolet
(Jean) : Très bien. Alors, d'entrée de jeu, je dois souligner, comme
vous l'avez remarqué vous-même, qu'on considère effectivement que ces priorités-là,
qui ont été identifiées par votre ministère, sont justes. C'est, il nous
semble, effectivement des secteurs d'activité où il faut agir de façon
prioritaire.
Il y a des défis à réaliser, dans l'ensemble de
ces secteurs d'activité là. Comme je le mentionnais, de par les obstacles, du fait qu'on a des petits joueurs...
et par ailleurs le fait qu'on ait des petits joueurs crée des enjeux
organisationnels pour faire en sorte qu'on arrive à réduire les émissions de
gaz à effet de serre en agroalimentaire, et dans
le transport, et dans le bâti, et on a des enjeux avec le manque de
coordination avec le secteur financier dans certains cas.
Donc, si on revient, par exemple, aux
initiatives à favoriser, bien, je vous dirais que, d'entrée de jeu, le gouvernement est sur la bonne voie, à notre avis,
en poursuivant avec le marché du carbone puis avec les programmes
complémentaires et réglementations qui sont adoptés.
Par ailleurs,
j'ai mentionné un enjeu du côté financier, on pense que la mise en oeuvre de
solutions de financement hybride pourrait aider au développement de
solutions efficaces dans ces secteurs d'activité là, et que ça va être nécessaire, et que ce serait intéressant que le
gouvernement utilise son levier, en termes financiers, pour aider à lever
du financement dans le secteur privé. Et on favorise de nouveaux modèles
d'affaires qui prennent en compte des enjeux d'innovation
sociale, donc qui font appel à la capacité citoyenne, aux petites organisations
coopératives pour lever des projets.
Dans le
transport, à notre avis, il y a des choses à envisager du côté transport
électrique des personnes, du transport électrique
des marchandises, et puis en faisant des liens entre les technologies vertes et
les technologies de l'information.
Très concrètement, si je reviens davantage sur
le transport électrique des marchandises, on a des technologies qui sont à peu près prêtes. On parle de
biberonnages, par exemple, dans le secteur du transport, qui permettent
d'alimenter des véhicules électriques dans
des petits réseaux. Et on peut très bien envisager, à brève échéance, que le
transport des marchandises sur l'île
de Montréal, par exemple, puisse se faire de façon électrique. On pourrait
imaginer de partager un réseau de
biberonnages entre le secteur du transport public et le secteur privé. Certains
joueurs montrent de l'intérêt de ce côté-là actuellement.
Par ailleurs,
quand on regarde du côté du transport des personnes, on voit des avancées
potentielles intéressantes avec le mariage des technologies de
l'information et puis les nouvelles technologies «cleantech», les technologies
de transport électrique. On a vu des
exemples déplorables, dans les derniers mois, avec Uber qui s'est développée et
puis qui a généré un lot de conséquences
néfastes, ce qui ne veut pas dire qu'une technologie ne peut pas être intégrée,
utilisée de façon intéressante. Et on pourrait imaginer des modes de
gestion ou de gouvernance qui viendraient permettre une collaboration entre le secteur coopératif, le secteur citoyen et puis le
transport public de façon à adresser des enjeux qu'on appelle du dernier
mille dans le transport en commun, qui fait en sorte que, souvent, les gens ont
un intérêt pour leur voiture ou le transport
privé du fait qu'ils ont le sentiment que le transport public sert mal leurs
intérêts. Alors, on pense que, de ce côté-là, il y a des gains qui
peuvent être faits.
Et la façon d'avancer concrètement avec ces
initiatives-là nous semble être de favoriser la rencontre entre des promoteurs
de projets, entre des acteurs sur le terrain, entre des financiers, de voir
avec eux, sur le terrain, qu'est-ce qui peut
être fait, c'est quoi, les obstacles, pour ensemble imaginer comment on
pourrait lever les obstacles et faire
en sorte que ces projets-là, très concrets, puissent se réaliser. Alors, on est
dans cette logique-là.
Du côté du
bâti, bon, on mentionne, dans le document de consultation, l'efficacité énergétique, la géothermie.
Ça nous semble des voies d'avenir également.
Alors, on est tout à fait d'accord avec les orientations suggérées. On pense que, de
ce côté-là, il y a un intérêt à sortir d'une logique individuelle et envisager
les choses d'une façon plus collective en
réseau, par exemple. Et là on peut imaginer des réseaux de chaleur, des réseaux
énergie qui permettraient de recourir à des énergies renouvelables, à la
géothermie, au solaire mais aussi à la récupération de chaleur. Et là il y a
toutes sortes de choses qui ont été mises en oeuvre, en Europe, dont on
pourrait s'inspirer au Québec.
Si on regarde
maintenant du côté de l'agroalimentaire, bien, ce que l'on constate, c'est que
des projets sont difficiles à mettre en oeuvre sur une base
individuelle, en agroalimentaire, du fait que les coûts de transaction sont
souvent élevés pour les producteurs
agricoles. Donc, si on veut arriver à lever des projets, ça pourra être
important, intéressant de penser à de
l'agrégation pour réaliser les projets. Je parle d'agrégation, mais je devrais
parler également d'accompagnement.
Enfin, on a
besoin de programmes qui visent des regroupements plutôt que les individus
seulement. Et, lorsqu'on regarde les programmes qui sont existants au
ministère de l'Agriculture actuellement, ce qu'on constate, c'est qu'un programme comme Prime-vert s'adresse aux
entreprises. Donc, chaque entreprise doit proposer un projet,
individuellement, qui sera éventuellement
accepté, ce qui est très bon, qui est très intéressant. Mais on sait que, s'il
y avait de la souplesse pour que des organisations puissent regrouper
des producteurs et proposer des projets en commun, ça pourrait sans doute être
porteur dans ce secteur d'activité là.
Des nouveaux protocoles, on sait qu'il y en a
qui sont en préparation, mais ça va être certainement une chose qui va être la bienvenue dans le secteur agricole.
Et je dirais que, de ce côté-là, les nouveaux protocoles auraient
intérêt à se baser sur la réalité québécoise. Je mentionnais que l'économie
québécoise est constituée de petites entreprises, c'est peut-être encore plus manifeste dans le secteur agricole, où on
constate, par exemple, que les fermes laitières moyennes sont
composées... ont un cheptel de 90 vaches, alors qu'en Californie on parle
plutôt de 900 vaches.
Je
voyageais... je veux dire, j'étais dans un État du Midwest américain cet été justement
avec un groupe qui réfléchissait au potentiel de réduction de gaz à effet de
serre en agriculture. Il nous a amenés visiter une ferme de 15 000 vaches pour nous montrer comment cette
ferme-là s'y prenait pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Mais inutile de dire qu'un modèle
15 000 vaches, c'est absolument inimaginable au Québec, et puis c'est
assez loin du consensus social sur ce qu'on cherche à atteindre, au
Québec, en termes de respect et de protection de la ferme familiale. Donc, il y a des choses à réfléchir, de ce côté-là, pour
que nos petites entreprises puissent profiter, comme les grandes
entreprises, du potentiel qui peut se manifester suite à la mise en oeuvre d'un
marché du carbone.
Et
enfin j'ai parlé passablement, là, de... je me suis trouvé à parler de la
réalité des fermes, donc du côté agricole, mais, quand on parle de
l'agroalimentaire, c'est plus que l'agriculture; c'est aussi la transformation,
c'est aussi la distribution. Et il y a intérêt à réfléchir le secteur agricole
comme un tout pour voir s'il n'y aurait pas possibilité, en mettant les acteurs ensemble, des différents
maillons de la chaîne, en ajoutant le transport à ces différents maillons
là, pour voir comment ces différents
maillons là pourraient s'accompagner et s'aider dans un objectif commun de
réduction de gaz à effet de serre. On
pourrait imaginer, par exemple, que du méthane de fosse à lisier soit utilisé
pour le transport du lait ou des porcs jusqu'aux abattoirs. Bon, c'est
un exemple, honnêtement, qu'on n'a pas mesuré, dont on n'a pas vérifié la
possibilité de mettre en oeuvre, mais c'est le genre de chose qui pourrait
éventuellement être envisagée.
Alors, c'est ce qui
me vient à l'esprit, M. Heurtel, à première vue, pour répondre à votre question.
• (16 h 10) •
M. Heurtel :
Merci.
Le Président (M.
Reid) : 3 min 30 s.
M. Plante :
Trois minutes?
Le Président (M.
Reid) : Alors, M. le député de Maskinongé.
M. Plante :
Merci beaucoup, M. le Président. Écoutez, j'écoutais attentivement votre
réponse à la question du ministre.
Par contre, il y a un point au
niveau de l'agroalimentaire puis au niveau des moyens. J'ai entendu beaucoup de choses puis je sais que vous auriez sûrement beaucoup
de choses à nous dire. Par contre, concrètement, là, des moyens simples,
concrets qui nous permettraient soit de convaincre, aider ou favoriser pour
atteindre nos cibles, j'aimerais entendre
des moyens concrets qui permettraient vraiment de dire aux gens du domaine de l'agroalimentaire,
de l'agriculture aussi, quels
seraient les moyens à prendre, quelles seraient les nouvelles pratiques et qu'est-ce que nous, comme gouvernement
ou ensemble, on peut faire pour favoriser ces pratiques-là.
M.
Nolet (Jean) : Très bien.
Alors, très concrètement, on a un protocole en place, actuellement au Québec, qui vise les fosses à lisier, la récupération du méthane,
et donc la transformation du méthane en CO2 ou
l'utilisation des méthanes à d'autres fins énergétiques. Ça, c'est un
moyen qui est déjà prévu dans le cadre du pacte actuel.
Par ailleurs, on peut parler de fertilisation, de fertilisation sur une base
différente, de façon à réduire les émanations d'azote dans l'atmosphère. À
ce moment-là, on parle également
de réduction des labours. Alors, ça, ça permet de réduire la quantité
d'azote qui se retrouve dans l'atmosphère. Et puis, une autre possibilité, on
parle de fermentation entérique des
aliments. Donc, concrètement, on sait que, dépendamment de ce qu'une vache
mange, par exemple, il y aura
plus ou moins de méthane qui va être
émis au cours de sa croissance. Donc, on peut mieux contrôler l'alimentation
des animaux pour faire en sorte qu'ils émettent moins de méthane en
s'alimentant. Ça, c'est des choses qui peuvent être faites.
Alors,
vous me demandez ensuite qu'est-ce qui... Ça, c'est du concret qui peut être
fait. Il reste à le favoriser. On pense que ça peut être favorisé via
des protocoles, des quantifications qui seraient développées au gouvernement ou
dans le secteur privé et qui, ensuite, bon, reconnaîtraient finalement ces
formes de réduction de gaz à effet de serre.
Au-delà de ces
pratiques-là agricoles, bon, il y a certainement des gains qui peuvent être
faits du côté du transport des aliments de
façon à les faire de façon plus efficace. Donc, une logistique de transport
plus efficace pourrait permettre des gains. Et, quand on parle
agroalimentaire, on parle aussi de réfrigération parce que les aliments doivent
être conservés au froid d'un bout à l'autre
de la chaîne de valeur, depuis la ferme jusqu'à la distribution. Et là, bien,
quand on parle de réfrigération, on parle de
gaz à effet de serre puissants. On parle de gaz qui peuvent, dans certains cas,
être remplacés par des gaz à effet de serre... en fait, des gaz qui ont beaucoup
moins d'impact en termes de changements climatiques. Ça peut être le CO2
dans certains cas. Et donc, ça, transport, réfrigération, travail à la ferme du
côté de la culture des sols, c'est des choses qui peuvent être faites.
Les
protocoles en développement sont certainement une voie qu'on encourage. On sait
qu'il y a des efforts qui sont faits
de ce côté-là. Ça vaut également pour les gaz réfrigérants parce qu'il y a un
protocole qui a été développé dans ce
sens-là. Il y a sans doute des ajustements qui peuvent y être apportés pour
faciliter son application au secteur agroalimentaire.
Le
Président (M. Reid) : Je dois vous interrompre, le temps
réservé au côté du gouvernement est épuisé. Alors, je passe la parole
maintenant à l'opposition officielle. M. le député de Terrebonne.
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. M. Nolet, merci
d'être avec nous aujourd'hui. Merci de nous affronter seul devant toute cette troupe parlementaire qui vous écoute,
là, attentivement depuis le début de cette consultation.
J'ai
plusieurs questions à vous poser concernant votre présentation, puis je vais
utiliser vos lumières pour éclairer un petit peu nos lanternes. J'y vais
vraiment sur la pointe des pieds parce que je ne suis pas certain d'avoir bien
compris, là. Vous avez parlé d'un concept de biberonnage.
M.
Nolet (Jean) : Oui. En fait, l'idée, c'est que... Bien, en fait, quand
on parle de transport électrique, il y a des gens, sans doute, qui connaissent ça mieux que moi encore ici, dans la
salle, je n'en doute pas. Mais, très concrètement, l'enjeu avec le transport électrique, c'est les
distances qu'on peut parcourir ou la puissance qu'on peut déployer. Et
puis, bon, il y a beaucoup de travail qui
est fait sur les batteries de façon à avoir des batteries plus puissantes, de
façon à pouvoir aller plus vite, plus
loin. Ça, c'est une chose. Et il y a aussi la possibilité d'utiliser des
sources d'alimentation... en fait, des sources d'alimentation
ponctuelles définies sur un trajet et sur lesquelles les camions s'alimentent.
Alors, quand on parle de biberonnage, on fait référence au fait qu'un camion
s'arrête à un endroit...
M. Traversy : S'abreuve.
M. Nolet (Jean) : ...s'abreuve et
puis peut poursuivre sa route ensuite.
M. Traversy : Génial! Non,
mais j'avais bien compris, mais je voulais être certain que la terminologie
était bonne. Je trouve que c'est tout à fait justifié. Et, à cet égard-là, vous parlez de mode de transport
collectif plus flexible. Ça, c'est un exemple de système qui existe.
Vous dites, dans votre présentation, qu'il y a des exemples à Boston, à San Francisco, en Finlande. Vous prenez la peine de
spécifier ces trois lieux géographiques. Est-ce que vous pouvez nous
dire un peu quelle est la particularité qui vous amène à vouloir les spécifier
dans votre mémoire?
M. Nolet
(Jean) : En fait, ces
modèles-là sont à différents stades, et puis, quand on regarde un peu la
littérature ou quand on regarde un peu ce
qui s'est fait — effectivement, la documentation sur le sujet — ce qui est intéressant, c'est qu'on constate que,
dépendamment des promoteurs de projets des régions, il y a une intégration plus
ou moins intéressante qui est faite entre le public et puis ces
nouvelles initiatives là.
Concrètement, quand on regarde, par exemple, du côté
de Boston, il y a eu, avec Bridj, une confrontation, au départ, entre l'intérêt privé, si on veut, puis l'intérêt
collectif ou avec le transport public. Et, au fil du temps, il y a une compréhension qui s'est développée de façon à
faire en sorte d'harmoniser les intérêts des différents joueurs, de sorte qu'aujourd'hui
le transport public, à Boston, est partie prenante des développements avec Bridj
pour faire en sorte que les intérêts des citoyens soient le mieux servis
possible. Alors, c'est un exemple que je peux donner.
M. Traversy : Donc, Bridj,
c'est le nom de la compagnie? C'est ce qu'on comprend?
M. Nolet (Jean) : C'est le nom de
l'initiative, effectivement.
M. Traversy : O.K., le nom de
l'initiative.
M. Nolet (Jean) : Oui. C'est ça.
M.
Traversy : Parfait. Écoutez,
j'ai regardé vos trois priorités, soit le transport, les cadres bâtis,
l'agroalimentaire. Vous nous donnez des pistes de solution intéressantes. Bon,
transport électrique, il y a beaucoup de modalités qui reviennent. Vous ne
semblez pas être axé vers la tarification ou la taxation.
Il y a des
groupes, ce matin, qui sont venus nous faire des propositions du style un peu plus la carotte et le bâton, comme ils ont aimé, dans le fond, le présenter.
Est-ce que vous pensez que ce genre d'écotaxe ou de mesure tarifaire,
là, pourrait être également envisagée, là, pour atteindre les cibles qui sont
celles du 37,7 %, que vous jugez audacieuses et que vous semblez saluer,
là, haut la main?
M. Nolet
(Jean) : Tout à fait. Bien,
en fait, l'idée d'une tarification, normalement, c'est de mettre un prix sur
le carbone. Et c'est ce qu'on fait avec le système
de plafonnement et d'échange, on met un prix sur le carbone, sauf qu'on
le fait différemment, on met en place un quota et on laisse le marché fixer le
prix.
Alors, on peut imaginer une tarification
supplémentaire, mais ça revient à une double taxation sur un même élément à ce
moment-là. Je n'ai pas assisté aux présentations qui ont été faites ce matin. Peut-être
qu'on parlait de taxation autre que sur le
carbone pour encourager des initiatives encore plus que ce qui est encouragé
via le système de plafonnement et d'échange. Ce n'est pas à exclure,
mais il faut quand
même avoir à l'esprit qu'il y a déjà
une tarification, une taxation indirecte qui est imposée via le système
de plafonnement d'échange. Et donc c'est à considérer avec doigté, je vous
dirais.
M.
Traversy : C'est très
intéressant. Donc, vous, vous
craignez une espèce de dédoublement. Donc, c'est... Donc, c'est entendu.
Évidemment, pour la loi émission zéro, vous êtes favorable également à
l'adoption d'un tel projet?
M. Nolet
(Jean) : Oui, tout à fait. En fait, ça va dans le sens de mesures
complémentaires qui peuvent accompagner le système de plafonnement et
d'échange. Par exemple, quand on regarde la réalité du côté de la Californie,
où ils atteignent des objectifs, c'est vrai, moins ambitieux, mais, quand même,
ils atteignent des objectifs intéressants, une des raisons pour lesquelles ils atteignent leurs objectifs, c'est qu'il
y a une bonne complémentarité entre leur système de plafonnement et
d'échange et les mesures complémentaires et les réglementations qu'ils mettent
en place également pour y arriver. Donc, cette mesure-là va dans le même sens,
je dirais.
• (16 h 20) •
M.
Traversy : Excellent! Le regroupement avant vous, qui est
Réseau Environnement, semblait mettre beaucoup d'espoir, là, sur l'après-COP21. Je voulais savoir si, dans le cadre des
discussions que nous avons sur les cibles de gaz à effet de serre, vous aviez également peut-être une
espérance à lancer au gouvernement quant à la suite et aux démarches qui
s'en viennent. Est-ce que vous avez des attentes particulières?
M. Nolet
(Jean) : Bien, honnêtement, je ne vois pas qu'est-ce qu'on pourrait
demander de plus au gouvernement du
Québec relativement à cette question-là, étant donné que le Québec est très
présent sur la scène internationale, est très présent pour faire en sorte que d'autres juridictions se joignent au
Western Climate Initiative, prend un objectif ambitieux pour la COP21 et est partie prenante à plusieurs
initiatives internationales. M. Heurtel est très visible de ce côté-là.
Bien, en fait, honnêtement, je pense que c'est difficile de demander au Québec
de jouer davantage un rôle de pionnier que ce qu'il fait là, de donner plus
l'exemple que ce qu'il fait actuellement avec les objectifs ambitieux qu'il se
fixe.
M. Traversy : Mon Dieu! Vous
m'avez l'air d'un homme comblé.
M. Nolet (Jean) : Honnêtement, je
travaille, depuis des années, sur le marché du carbone. Je l'ai mentionné, ça fait 12 ans. Je considère que, quelque part,
on... Je me mets dans la peau d'un entrepreneur qui travaille sur le
marché du carbone. Quelque part, je suis
chanceux qu'en cours de route le Québec soit une des juridictions où on a
décidé d'aller de l'avant avec un
système de plafonnement et d'échange. Et là je suis en conflit d'intérêts
vis-à-vis peut-être un paquet de monde,
mais je veux juste... c'est une réalité quand même non négligeable, le fait
qu'au Québec on est allés de l'avant.
M.
Traversy : Bon, bien, je vous remercie de ce positivisme, ça
fait du bien. Alors, on se rejase dans d'autres circonstances?
Le Président (M. Reid) :
Merci. Nous passons maintenant au deuxième groupe d'opposition. M. le député de
Masson.
M.
Lemay : Bonjour. Merci, M. le Président. Merci, M. Nolet, d'être avec
nous. Vous venez de le mentionner, vous
êtes fort d'une expérience sur le marché du carbone depuis un certain bout.
Vous avez même réalisé une étude pour le
MEIE sur le potentiel de crédits compensatoires au Québec. Vous avez mentionné,
en fait, dans votre document, sur la question
3, que, tu sais, il devrait y avoir des réglementations complémentaires, puis
c'est là-dessus que j'aimerais avoir un peu plus d'information, là, tu
sais, en lien... J'imagine, c'est en lien avec les crédits compensatoires.
On sait — aujourd'hui même, on l'a vu passer dans un décret
du gouvernement — que le
gouvernement a ratifié une entente avec le gouvernement de l'Ontario
pour développer de nouveaux protocoles de crédits compensatoires. Actuellement, il y a trois protocoles qui sont
actifs. Selon vous, là, ça devrait être quoi, ces nouveaux protocoles? Là,
tu sais, on essaie de trouver des protocoles qui sont autres que la destruction
du méthane ou le reboisement, mais est-ce que vous avez des idées sur ce que
devrait être un nouveau protocole?
M. Nolet
(Jean) : C'est une très bonne question. En fait, je vous dirais que...
Tantôt, j'ai mentionné un potentiel dans
le secteur agricole. Alors, il y a des protocoles supplémentaires qui a priori
pourraient sans doute être développés, dans le secteur agricole, pour générer des crédits compensatoires de ce
côté-là. Et, autrement, bien, comme il faut s'en tenir aux secteurs qui
ne sont pas couverts par le système de plafonnement et d'échange, je dirais
qu'il y a des avenues à regarder principalement du côté du secteur forestier.
M. Lemay : Forestier?
M. Nolet (Jean) : Forestier.
M. Lemay : Puis qu'est-ce que vous
voyez dans le forestier, là, autre que le reboisement?
M. Nolet (Jean) : Alors, je ne suis
pas personnellement un expert du secteur forestier, j'ai des gens, dans mon équipe, dont c'est la spécialité, mais il y a
des avenues, en termes de gestion de la forêt, qui peuvent être
imaginées. Là, on est confrontés à certains
enjeux, au Québec, du fait que la forêt est gérée publiquement. Donc, il y a
des aménagements qui peuvent peut-être être envisagés de ce côté-là,
mais il y a une complexité là.
Et par ailleurs il y aurait peut-être une
possibilité, du côté de la lutte aux insectes ravageurs, qu'on pourrait envisager, par exemple, que la lutte aux
changements climatiques... des crédits carbone permettent de financer la
lutte à la tordeuse de bourgeons d'épinette
et, de ce fait, préserver une capacité de séquestration dans la forêt. Mais je
m'avance un peu, là, mais c'est le genre de chose qui mérite d'être regardée.
M. Lemay : Bien, merci. On cherche
justement tout le temps des innovations parce que c'est par là qu'on va réussir
à atteindre nos objectifs.
Vous savez,
au niveau des crédits compensatoires, il y a une limite, pour une entreprise,
de détenir un maximum de 8 % de
crédits compensatoires par rapport à leurs actions. Est-ce que, selon vous,
dans... Parce que, dans le fond, j'imagine, l'objectif de la limite de 8 %, c'est de dire à l'entreprise :
Bien, faites des actions concrètes pour réduire au lieu d'aller acheter
des... Est-ce que vous avez quelque chose à dire sur cette limite de 8 %?
M.
Nolet (Jean) : Bien, je pense que vous avez raison. Je pense que
c'était l'objectif initial avec la limite à 8 %.
Ce qu'on constate sur le marché, c'est que la quantité de crédits
compensatoires disponible est très loin du maximum de 8 % qui serait alloué aux entreprises, en
supposant que toutes les entreprises se prévalent de cette opportunité-là.
Donc, s'il y avait une ouverture pour les entreprises qui désirent aller
au-delà du 8 %, ce serait sans doute une souplesse qui serait appréciée de
certains joueurs dans le marché. Puis probablement que ça n'aurait pas d'impact
réel, en bout de ligne, sur cette volonté-là du gouvernement de faire en sorte
qu'il y ait une grande partie des réductions qui ait lieu à l'interne des
entreprises.
M.
Lemay : Alors, merci, M. Nolet, c'est intéressant. Donc, j'imagine, ça
pourra faire partie des recommandations au ministre pour avoir une
souplesse au niveau de la limite des crédits compensatoires.
M. le Président?
Le Président (M.
Reid) : Il reste 40 secondes.
M.
Lemay : 40 secondes. 40 secondes. Vous avez parlé, là, dans votre
initiative à favoriser le bâti, de recours aux énergies renouvelables,
dont la géothermie. Il vous reste 20 secondes. Vous pensez qu'au Québec, là,
c'est prêt pour quand? 2015, 2020, 2025? On est-u prêts maintenant? On a-tu
beaucoup d'innovation à faire?
M.
Nolet (Jean) : Bien, il y a des choses qui peuvent être faites
maintenant, ça, c'est clair, qui... Le 40 secondes me gèle un peu.
Le Président (M.
Reid) : ...
M. Nolet
(Jean) : Pardon?
Le Président (M.
Reid) : Il reste du temps pour un cri du coeur seulement.
M. Lemay :
On en rediscutera.
M. Nolet
(Jean) : On en rediscutera.
Le
Président (M. Reid) : O.K. D'accord. Alors, nous passons
maintenant au bloc réservé aux députés indépendants. Mme la députée de
Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Massé :
Merci, M. le Président. Bonjour, M. Nolet.
M. Nolet
(Jean) : Bonjour.
Mme
Massé : Moi, j'ai trois minutes, alors on va aller droit au but.
J'entends, vous êtes d'accord avec la cible qui est proposée là. Vous êtes un spécialiste des droits d'émission, et tout
ça. Alors, j'aimerais vous lire un petit extrait du document pour que
vous preniez le temps qui reste pour essayer de me l'expliquer. Or, ça
dit :
«À cet égard, il
convient de noter que plus la cible de réduction choisie sera ambitieuse, moins
élevés seront les revenus générés par le
marché du carbone en raison de la baisse des plafonds d'émission de GES et, par
conséquent, des droits d'émission disponibles pour [la vente] aux enchères
tenues par le gouvernement.»
Je n'arrive pas à
saisir le rapport entre les deux et voire même les trois.
M. Nolet
(Jean) : Bien, en trois... en deux minutes...
Mme Massé :
Faites votre possible.
Une voix :
...
M. Nolet
(Jean) : En fait, à la base, il faut comprendre que la logique
gouvernementale, c'est de dire aux entreprises :
Vous pouvez émettre autant de gaz à effet de serre que vous voulez, tant et
aussi longtemps que vous avez un droit d'émission pour couvrir cette
émission-là.
Le gouvernement crée
les droits d'émission et choisit ensuite la façon dont il distribue ce droit
d'émission là aux entreprises. Alors, il
attribue une partie de ces droits d'émission là aux entreprises gratuitement,
les entreprises qui sont en compétition avec l'étranger, de sorte que ce
qu'il lui reste à vendre aux enchères ensuite, c'est le restant.
Alors,
si on réduit notre objectif... Autrement dit, si on augmente notre objectif, ce
qu'on va se trouver à faire, c'est à réduire la quantité de droits
d'émission qu'on rend disponible dans l'économie. On va continuer, si le
système de plafonnement et d'échange ne
change pas, à donner autant de droits d'émission aux entreprises gratuitement,
et l'écart qui va rester et qui pourra être vendu aux enchères va être
réduit du fait qu'on a réduit nous-mêmes la quantité de droits d'émission
disponible dans l'économie.
Mme Massé : C'est ce que j'avais cru
comprendre. Merci.
M.
Nolet (Jean) : Bon.
Le Président (M.
Reid) : Merci pour votre contribution à nos travaux.
Alors,
je lève la séance pour quelques instants pour permettre à notre prochain groupe
d'invités de prendre place.
(Suspension de la séance à
16 h 29)
(Reprise à 16 h 32)
Le
Président (M. Reid) :
À l'ordre, s'il vous plaît! J'aimerais maintenant souhaiter la
bienvenue à nos prochains invités. Il s'agit des représentants de Gaz
Métro.
M. le député de Mégantic,
s'il vous plaît! M. le député de Mégantic!
Des voix :
...
Le
Président (M. Reid) :
Alors, j'aimerais souhaiter la bienvenue à nos invités de Gaz Métro. Vous
connaissez la dynamique : 10 minutes pour faire votre présentation.
Ensuite, nous aurons une période d'échange.
Je
vous demanderais de vous nommer et nommer la personne qui vous accompagne, pour
les fins de l'enregistrement. À vous la parole.
Gaz Métro
Mme Trudeau (Stéphanie) : Clairement. Merci, M. le Président. M. le ministre, membres de la commission, je vous remercie de nous accueillir.
Je suis Stéphanie Trudeau. Je suis vice-présidente, Stratégie, communication et
développement durable chez Gaz Métro. J'ai le plaisir, aujourd'hui, d'être en
compagnie de Vincent Pouliot, chef de service,
Marché du carbone et efficacité énergétique chez Gaz Métro. Donc, merci de nous
accueillir pour entendre notre point de vue quant à la cible, bien sûr,
de réduction mais aussi et même, je dirais, surtout quant aux moyens que l'on
privilégie pour les atteindre.
Je
précise aussi que je fais partie du comité consultatif sur les changements climatiques, du ministre Heurtel. Je suis aussi
membre du comité consultatif de l'alliance Switch qui, je crois,
vous savez, regroupe tant des gens d'affaires que les groupes
environnementaux. Nous nous sommes engagés ensemble à faire une économie plus
verte. Je pense que ça vous dit déjà un peu à quelle enseigne loge Gaz Métro,
soit à celle de la collaboration.
Pour
nous, gaz naturel, pétrole, électricité, énergie renouvelable ne sont pas des
adversaires au même titre que gouvernement, groupes environnementaux et
entreprises ne le sont pas non plus. Si nous voulons avancer, on croit sincèrement qu'on doit rompre les antagonismes et
travailler ensemble. C'est donc avec beaucoup d'intérêt,
vous vous douterez, que nous avons
pris connaissance du document de consultation. D'emblée, nous reconnaissons la
volonté du gouvernement du Québec de fixer une cible de réduction de GES — très
ambitieuse — se
situant entre 35 % et 40 %
par rapport au niveau de 1990.
Plusieurs
organismes internationaux s'entendent pour dire que, pour lutter contre les
changements climatiques, il y a trois
choses importantes : un, réduire de façon significative la consommation
d'énergie, donc redoubler d'efforts en matière
d'efficacité énergétique, quelque soit la source d'énergie consommée. Ensuite,
intégrer un maximum d'énergie renouvelable
et puis utiliser des énergies plus propres, dont le gaz naturel, en lieu et
place du charbon et des produits pétroliers.
Et
c'est exactement ce sur quoi on mise chez Gaz Métro. Donc, pour arriver à
consommer mieux puis à réduire nos émissions,
il faut collaborer parce qu'une chose est claire : selon nous, la solution
unique et la solution parfaite n'existent malheureusement pas. Et, soyons francs, que ça soit à titre de citoyen
ou d'entreprise, on fait tous partie du problème, et donc la beauté de la chose, c'est qu'on fait aussi
tous partie de la solution. C'est donc dans cet esprit de collaboration
et de responsabilité partagée que j'aurai le plaisir, avec Sophie Brochu et
d'autres partenaires du Québec, de participer à la COP21, la Conférence de Paris sur le climat, en décembre prochain.
J'espère sincèrement qu'à cette occasion on va pouvoir parler d'une voix cohérente et se rallier définitivement
au camp de ceux qui font la lutte aux changements climatiques.
Vous me permettrez
maintenant de dire quelques mots sur Gaz Métro parce que, des fois, on pense
que les gens nous connaissent bien, ce n'est
pas toujours le cas. Vous devez savoir qu'on est le principal distributeur
gazier au Québec, qu'on exploite un réseau de quelque
10 000 kilomètres pour desservir environ 200 000 clients
situés dans 300 municipalités. On
développe le potentiel de gaz naturel comprimé et liquéfié pouvant être utilisé
comme carburant ou être acheminé vers des sites plus éloignés. On
travaille aussi à la valorisation du biométhane. On contribue donc à transformer des rebus en gaz naturel
renouvelable — je crois
que vous en avez déjà parlé aujourd'hui — et nous sommes copropriétaires du
plus grand parc éolien du Québec juste ici, à l'est de Québec, avec Boralex,
soit les Parcs éoliens de la Seigneurie de Beaupré.
Chose
un peu moins connue — peut-être
que, là, vous allez en prendre connaissance avec notre nouvelle campagne
corporative — mais
Gaz Métro est aussi présente au Vermont. En fait, on a maintenant plus de
clients américains que québécois. On a
350 000 clients à qui on distribue 100 % du gaz naturel consommé au
Vermont et 70 % de l'électricité. On produit une large part de
l'électricité qu'on distribue là-bas, notamment de sources hydraulique,
solaire, éolienne et, vous le verrez, j'imagine, peut-être, de Cow Power, donc
qui vient des fermes laitières du Vermont.
Donc, je pense qu'on
est à même de prouver que Gaz Métro a évolué. De son métier de distributeur
gazier, on est devenu, je pense humblement, une entreprise énergétique
diversifiée et novatrice. On est d'ailleurs le premier distributeur d'énergie au Québec, avant
Hydro-Québec, à s'être doté d'un plan global en efficacité énergétique.
C'était en 2001, et, depuis, nous sommes
très fiers, sous la gouverne de Vincent avec ses équipes, on a réussi à faire,
avec nos clients, 107 000
projets d'efficacité énergétique — je vous rappelle qu'on n'a pas 200 000
clients — et ça
leur a permis de faire des économies
annuelles récurrentes de 100 millions de dollars et de contribuer à des
réductions cumulatives de plus de 722 000 tonnes de GES évités.
Quand on se fait
aujourd'hui les promoteurs de la collaboration et de la fin de l'antagonisme,
c'est que nous avons fait de cette main
tendue carrément le principe premier de notre développement. Cet esprit de
collaboration doit maintenant
s'étendre afin de nous rapprocher de nos objectifs communs de réduction de GES.
Clairement, pour nous, le gaz naturel
est un allier de choix pour le Québec et une solution disponible dès maintenant
pour aider le Québec à faire figure
de leader dans la scène internationale, notamment dans le domaine du transport
lourd, maritime et des industries.
Je dois dire
malheureusement que je trouve que cette réalité ne ressort pas tout à fait très
bien du document de consultation du
gouvernement dans lequel on parle presque exclusivement d'électrification — pardon, le 10 minutes m'amène à parler
vite —
sachant que, du côté du transport, un seul camion lourd converti au gaz naturel
peut réduire l'équivalent en GES de neuf
voitures à essence qui passeraient à l'électricité; un pour neuf. Et, pour le
secteur industriel, il faut se
rappeler qu'il y a des procédés qui ne peuvent carrément juste pas être faits à
partir de l'électricité en raison de besoins
techniques de haute chauffe, donc de flamme, qui peuvent actuellement n'être
comblés que par des combustibles.
Le gaz naturel, bien
sûr, c'est un hydrocarbure, mais c'est celui qui pollue le moins et qui émet le
moins de GES. On enraie la quasi-totalité
des polluants et des particules fines responsables du smog, et, ça tombe bien,
son prix est extrêmement concurrentiel depuis quelques années.
Le gaz naturel
représente donc un atout majeur sur lequel le gouvernement du Québec a misé en
prenant une participation il y a un an jour
pour jour, le 30 septembre 2014, via Investissement Québec dans l'accroissement
des capacités de l'usine de liquéfaction de Gaz Métro située dans l'est
de Montréal.
Conformément
aux engagements du gouvernement dans le budget 2014‑2015, ça nous permettra
donc, dès 2016, d'acheminer du gaz naturel au Nord-du-Québec et sur la
Côte-Nord.
Le
passage au gaz naturel des entreprises industrielles qui utilisent encore du
mazout est une solution économique et écologique.
Pardon, je me suis
trompée. J'ai perdu un peu le fil, vous me pardonnerez.
Bon.
Par ailleurs, même en considérant la chute des prix du pétrole, le gaz naturel
demeure la source d'énergie la plus abordable comparativement à toutes
les formes d'énergie.
J'ai
évoqué, il y a quelques instants, le gaz naturel liquéfié et le gaz naturel
comprimé. Ils permettent de faire des gains
dans le domaine du transport, principale source de gaz à effet de serre au
Québec. Au Québec, les véhicules lourds, peut-être que vous ne le savez pas, ça représente seulement 4 % des
véhicules, mais ils émettent plus du tiers de tous les GES. Or,
lorsqu'un camion passe du diesel au gaz naturel, les GES diminuent de
25 %. C'est comme carrément si on enlevait un camion lourd sur quatre sur
nos routes.
On
peut faire les mêmes avancées dans le domaine du transport. Vous n'êtes pas
sans savoir que la STQ a pris livraison
du premier traversier à gaz naturel en Amérique du Nord et deux autres sont à
venir. Donc, en plus des gains économiques
et écologiques, il faut compter aussi sur une plus grande sécurité en cas d'un
accident, ce qu'on ne souhaite jamais, mais le gaz naturel liquéfié, ne
créant pas de nappe, ne crée aucun dommage ni à la faune ni à la flore, qu'elle
soit marine ou côtière.
Le gaz naturel
liquéfié peut être transporté vers des régions éloignées et des sites isolés
comme des mines. D'ailleurs, on le fera très bientôt à la mine de diamants
Stornoway, au nord de Chibougamau. Qui l'aurait cru? C'est à 300 kilomètres, mais, si on peut y livrer du
diesel, on peut y livrer du gaz naturel, il n'y a pas de raison. C'est ce
qui signifie que c'est une solution pour les
communautés autochtones aussi, au Nord, dont l'énergie électrique provient
de génératrices au diesel. Et il n'y a plus de raison, à nos yeux, de fabriquer
de l'électricité à partir de diesel au Québec.
• (16 h 40) •
Donc, dans notre
marche commune vers le développement durable, le gaz naturel présente des
avantages indéniables. Il fait partie de la
solution. Ce n'est pas la seule solution, et ça, c'est clair, mais il est le
moins émissif des hydrocarbures.
C'est la forme d'énergie la moins dispendieuse, il est abondant, ce qui implique
une stabilité sur le plan tant des approvisionnements que du prix.
Le
Québec s'est donné pour objectif de réduire ses GES de 20 % d'ici 2020. Il
s'est aussi engagé, plus tôt cet
été, à réduire au minimum de 80 % ses émissions à l'horizon 2050 et nous
consulte, aujourd'hui, en privilégiant une cible de réduction de 37,5 % pour 2030. Comme nous le savons tous, il en
a été question, le Québec est partie prenante d'un marché du carbone
avec la Californie. Bonne nouvelle, l'Ontario sera bientôt parmi nous. Au Canada,
l'Alberta et la Colombie-Britannique sont
aussi engagées dans des démarches consistant à mettre un prix sur le carbone
par un mécanisme ou par un autre.
C'est donc un mouvement clair qui est lancé. À nous de montrer l'exemple et de tout
mettre en oeuvre pour appuyer nos entreprises et nos citoyens afin que
nous puissions donner toutes les chances d'atteindre ou de se rapprocher de nos
ambitieuses cibles.
La
roue de la lutte aux changements climatiques a clairement commencé à tourner et
elle s'accélérera. On paie déjà le prix des changements
climatiques : l'érosion des berges, inondations, sécheresses, fonte du
pergélisol en plus d'événements de météo extrême. C'est une réalité qu'on ne
peut nier. On a donc le devoir de faire mieux, de faire différemment, de le
faire ensemble. Nous sommes ainsi la première génération à subir les impacts
des changements climatiques et on est peut-être la dernière qui peut y
remédier. Il faut donc se préparer à faire plus.
Les cibles envisagées par le gouvernement sont extrêmement ambitieuses mais sont en ligne avec les recommandations du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du
climat, le fameux GIEC, et aussi avec les cibles fixées par une multitude de
pays européens et d'États américains.
Chez
Gaz Métro, on travaille déjà à
préparer la suite. On est favorables à la lutte aux changements
climatiques, on appuie le gouvernement du
Québec dans sa démarche de fixer des cibles ambitieuses à l'horizon 2030, à condition que nous nous donnions dès maintenant tous les moyens
pour tenter de les atteindre, que nous visions une évolution immédiate et non une révolution
utopique. Comme leader de l'industrie, notre choix est de le reconnaître et de travailler
ensemble ou de se braquer. Clairement, chez Gaz Métro, on a fait le choix
de collaborer et de passer à l'action. Merci.
Le
Président (M. Reid) :
Merci. Alors, merci pour votre présentation.
Nous allons passer maintenant à la période d'échange. M. le ministre.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Trudeau,
M. Pouliot. Merci beaucoup pour votre présentation. Puis j'en profite pour vous remercier,
Mme Trudeau, pour votre travail au sein du Comité-conseil sur les
changements climatiques, travail très important qui se poursuit, mais votre
contribution a été très appréciée. Merci beaucoup.
Pour ce qui
est... Bon, vous avez fait état de certains projets, de la participation du
gouvernement du Québec, de la volonté
du gouvernement du Québec de développer le gaz naturel, le réseau ainsi que la
filière du gaz naturel liquéfié. Et on
voit tout à fait d'un bon oeil le gaz naturel comme un carburant et un
combustible de transition essentiel pour nous permettre d'atteindre nos
cibles.
Là, l'enjeu... Puis j'aimerais ça vous entendre
davantage, avec peut-être des solutions plus concrètes. Dans certains cas, genre d'obstacles... puis, bon, on
essaie d'y remédier, mais, bon, c'est les limites du réseau de
distribution, il ne se rend pas partout.
Alors, j'aimerais vous entendre sur comment on peut remédier à cette
situation-là parce que, par exemple, quand je pense aux communautés
nordiques, quand je pense à des communautés comme les Îles-de-la-Madeleine, ou des projets industriels majeurs qui utilisent des
combustibles plus nocifs... Quel genre d'éléments de solution voyez-vous,
là? Là, on parle pour les 15 prochaines années. Qu'est-ce qu'on peut entrevoir
concrètement pour faire en sorte que, peut-être, le gaz naturel, sa forme en
gaz ou en liquéfié, soit un élément de solution?
Mme
Trudeau (Stéphanie) :
Premièrement, il faut savoir qu'à l'échelle mondiale la question se pose aussi.
Le réseau gazier n'est pas nécessairement
partout. Je pense que c'est à l'horizon... je pourrais vérifier, mais, je
pense, 2035, l'utilisation du gaz naturel sous sa forme liquéfiée va
dépasser son utilisation traditionnelle qu'on connaît par réseau à travers le monde. Donc, clairement, là où il y a
une rentabilité envisageable, le gazoduc est toujours favorisé parce que
le coût est moindre pour le client.
Par contre,
la réalité — on l'a
vu avec la Côte-Nord — des fois, le gazoduc n'est pas une option à privilégier
pour les volumes qui sont au bout. À ce moment-là, si on est à proximité...
bien, en fait, à proximité, pas si loin, on peut le compresser. Donc, à ce moment-là, on peut quand même entrer un volume
plus intéressant dans le camion, mais ça, c'est pour peut-être une
grosse PME. C'est des choses qu'on regarde à faire présentement.
Ensuite, si
on parle de gros volumes, si on parle de Stornoway, si on parle de volumes
miniers, etc., de transformation, à
ce moment-là, c'est le gaz naturel liquéfié. Le seul hic, c'est qu'il est plus
cher parce qu'il y a eu une action qui est celle de le liquéfier, mais, techniquement, c'est extrêmement simple. Ça fait déjà quatre ans qu'on en
distribue. Nous, on en vend présentement aux États-Unis. Tous les jours,
on a des camions qui partent vers les États-Unis. On en a qui partent
maintenant vers Matane. Donc, ce n'est absolument pas sorcier. On a déjà les citernes.
Technologiquement, il n'y a aucun problème, ça se fait partout à travers le
monde. On peut ensuite le caboter, on peut le transporter par navire, on le
voit en Australie.
Donc, moi, je
pense que, techniquement, il n'y a aucun enjeu, il n'y a aucune raison pour
laquelle on n'enverrait pas du gaz
naturel — exemple,
au Nord — et faire
du couplage avec l'éolien parce que le gaz naturel n'est pas la seule...
Ce qui se fait à Raglan avec l'éolien est
exceptionnel. On a travaillé là-dessus un peu avec TUGLIQ. Alors, il y a ça. Il
y a une très belle initiative du gouvernement. L'enveloppe de
38 millions, c'était un superbeau départ. Maintenant, on a fait
Bellechasse, je pense qu'il y en a d'autres qu'on peut faire.
Donc, on peut
l'atteindre soit par réseau gazier compressé ou, si les volumes sont vraiment
importants, du GNL, que ça soit
acheminé de façon routière ou maritime, mais, clairement, il n'y a pas de
raison technique et même économique, même si le baril du pétrole a
baissé, d'utiliser du charbon ou du pétrole au Québec.
M.
Heurtel : D'accord.
Maintenant, sur la question des véhicules, la conversion véhicule. Alors, il y a déjà...
Puis je sais que vous travaillez très
activement, puis il y a des exemples, là, notamment avec Transport
Robert, et puis, bon, la conversion de flottes de camions. Qu'est-ce qui
est le frein ou qu'est-ce qui doit être fait pour faire davantage, là, en
termes de conversion de flottes de véhicules?
Mme
Trudeau (Stéphanie) : Je
vais commencer par peut-être ce qui est moins connu, le gaz naturel
compressé, qui est celui qui a le plus de
véhicules présentement. On a des entreprises comme Gaudreau,
que vous connaissez sûrement, qui est
dans la gestion des matières résiduelles, EBI, Waste Management. Il y a
C.A.T., une entreprise qui a
maintenant 100 camions à GNC. Il y a des
entreprises de courrier qui sont à GNC — gaz naturel compressé. À ce moment-là, là
où on a un obstacle, mais on y travaille, c'est à créer des infrastructures
parce que, c'est comme n'importe quoi, il faut qu'il y ait des infrastructures
pour se ravitailler. Quand on regarde en Europe, il y a 3 000 quelques
stations de GNC, mais on y arrive.
Alors,
ce qu'il faut continuer à faire, c'est continuer la subvention à l'achat de
camion parce que, malheureusement, avec
le taux de change, il y a encore un surcoût entre un camion à gaz naturel et un
camion à diesel, et, avec le taux de change,
ce surcoût-là est encore plus important. Avec la baisse du coût du baril de
pétrole, malheureusement, l'incitatif pour avoir
un carburant au gaz naturel est un peu moins intéressant par le camionneur.
Donc, c'est superimportant qu'on continue le programme Écocamionnage, qu'on
continue les mesures en écofiscalité. Pour l'amortissement accéléré, les
entreprises de camionnage disent que c'est très important parce qu'ils
continuent à compétitionner avec toutes les entreprises de camionnage autour.
Pour ce qui est du
GNL, il y a un petit ralentissement pour une question de moteur qui reste à
être développé parce qu'au Québec
nos camions transportent un petit peu plus lourd qu'ailleurs. Donc, ça prend un
moteur un peu plus puissant, mais on
travaille là-dessus. Donc, la
même chose dans le domaine maritime.
Mais ce qui est important, c'est que les programmes soient là, soient accessibles, qu'il y ait des programmes qui ne sont, pour des bonnes ou des
mauvaises raisons, pas accessibles pendant
un certain nombre de mois... Et puis, quand on parle de camions, l'entreprise qui a son camion, il est dû, il doit l'acheter maintenant. Si le
programme n'est pas disponible, la fenêtre, c'est dans huit ans ou 10 ans parce
qu'il change, lui, ses camions aux huit à 10 ans. Donc, c'est important,
vraiment, que les gens puissent acquérir les camions dès maintenant.
M. Heurtel :
Ça veut dire... Excusez-moi, mais ça veut dire quoi, quand vous dites : Si
le programme n'est pas accessible?
Mme Trudeau
(Stéphanie) : Bien, il y a eu des moments où il y a eu soit des quotas
qui étaient atteints, des moteurs qui n'étaient pas listés, des petits problèmes
techniques comme ça avec des programmes comme ça. Et puis là il y
a aussi une autre chose qui est importante
pour tout type d'entreprise, pas juste dans le camionnage, c'est la
pérennité des mesures. Là, il est discuté
que, sur le plan de la mesure fiscale et non, donc, pas du Fonds vert, du côté des
finances, je pense qu'il y a un requestionnement sur la mesure d'amortissement
accéléré pour l'achat de camions à carburant plus
vert. Et ça, ça insécurise le marché. Ils ont besoin de savoir que les règles
vont rester telles qu'elles sont pendant un certain temps. Ça, c'est très,
très important, la stabilité aussi.
M. Heurtel :
Merci.
Mme Trudeau
(Stéphanie) : Merci.
Le Président (M.
Reid) : Merci. M. le député de Mégantic.
M.
Bolduc : Merci, M. le Président. Moi, j'aurais un point de vue intéressant. Ce que vous êtes en train de nous dire, c'est que le gaz naturel va se rendre à 2020, peut-être
jusqu'à l'horizon de 2030, dans les conditions actuelles parce qu'on
parle de 20 % à 30 % d'économie, dépendant de l'application.
Maintenant, vous allez devoir travailler sur des solutions alternatives pour
pouvoir aller plus loin, en termes d'économie de gaz à effet de serre, avec le
gaz naturel.
Je
vais vous en donner une pour le fun, je veux juste vous entendre là-dessus. Par
exemple, si vous prenez votre gaz naturel,
vous le transformez en hydrogène pour aller dans les véhicules à hydrogène,
vous pouvez aller à 60 %. Est-ce que ces types de technologie là ou
des développements technologiques de cet ordre-là sont dans votre compas?
• (16 h 50) •
Mme Trudeau (Stéphanie) : Ce n'est pas des choses qui sont matures, mais
c'est des choses que l'on regarde. Exemple, un jour, on aimerait bien
ajouter de l'hydrogène dans notre réseau gazier. Donc, c'est des choses qui
sont regardées. Mais, comme j'ai dit si
souvent, je ne veux pas avoir l'air de me répéter, mais
on devrait commencer par ce qui est
disponible. Et puis ça va être évolutif. Il faut que la roue se mette à
tourner. Et ensuite ça va
s'améliorer, mais il faut commencer en quelque part.
Moi, j'ai commencé
chez Gaz Métro en 2001, puis on disait que les voitures à hydrogène, ça s'en
venait. Malheureusement, ce n'est pas encore arrivé. Est-ce que ça veut dire
que ça n'arrivera pas? Non, ce n'est pas ce que je dis. Mais là, maintenant, c'est disponible maintenant. Donc,
utilisons les technologies qu'on a et continuons à travailler. Nous, on n'a pas une grosse équipe de recherche et
développement, mais, oui, on suit, on fait de la veille, on a un petit
incubateur pour regarder ce genre de choses.
M.
Bolduc : Est-ce qu'il y a des applications — comment je dirais ça, donc — où l'efficacité est très, très, très élevée?
Je sais qu'aujourd'hui on a des fournaises, par exemple, où on n'a pratiquement plus besoin de cheminée parce qu'il n'y a plus de résiduel... l'énergie qui est
évacuée. Où vous en êtes, dans ces utilisations-là, en
termes d'efficacité? Puis est-ce qu'il y a encore de l'espace pour
l'amélioration?
Mme Trudeau
(Stéphanie) : Je vais laisser Vincent, comme c'est son sujet de
prédilection.
M.
Pouliot (Vincent) : Bonjour, M. le Président. Bonjour, M. le ministre.
Bonjour, membres de la commission. Effectivement, depuis maintenant 15
ans, Gaz Métro suit le marché de l'efficacité énergétique, est très impliqué, a
une vingtaine de programmes d'efficacité
énergétique pour le marché résidentiel, affaires, la grande entreprise.
Aujourd'hui, il existe des applications, ce
qu'on appelle les applications d'appareils à condensation, qui permettent
d'atteindre au-delà de 95 % d'efficacité énergétique. Donc, on est
maintenant rendus là. Il y a des programmes accessibles, il y a de la technologie qui est accessible, maintenant au
niveau des appareils de chauffage de l'air et de l'eau, avec des
pourcentages d'efficacité qui dépassent facilement les 90 % et 95 %.
Mme
Trudeau (Stéphanie) : Puis
d'ailleurs, si vous me permettez, c'est clairement là qu'il y a le plus à
faire, hein? Je l'ai dit tout à l'heure,
j'ai eu la chance d'écouter Philippe Benoît, qui est de l'Agence internationale de l'énergie,
au Conference Board la semaine dernière, puis, selon lui, au niveau mondial, 30 %
des réductions de GES vont venir de l'efficacité
énergétique. Ce n'est pas marginal. Vous avez raison qu'il y a une large part
de la solution qui va venir de là.
M. Bolduc : Est-ce qu'on a encore du
temps?
Le Président (M. Reid) : Oui,
M. le député de Mégantic.
M. Bolduc : O.K. Tu avais une
question, vas-y.
M. Simard : M. le Président, d'accord?
Le Président (M. Reid) : M.
le député de Dubuc. Bon, on va savoir enfin c'est qui.
M. Simard : J'ai une question qui
est... Tout à l'heure, je vous écoutais, vous dites que, malgré le marché du carbone, malgré les programmes, ce n'est pas
avantageux, au moment où on se parle, pour une compagnie de transport de
faire le changement du mazout... bien, du mazout, du diesel vers le gaz
naturel. C'est ce que vous dites.
Mme
Trudeau (Stéphanie) : Bien,
ce l'est, mais ça pourrait l'être plus. Ça s'améliore. C'est comme le
véhicule électrique, hein? Au début, il
était très cher; maintenant, il y
en a des beaucoup
plus abordables. Il y a un surcoût, pour un camion à gaz naturel comprimé, d'environ 40 000 $ comparé à un camion équivalent.
Pour un camion à GNL, ça peut
aller jusqu'à 60 000 $, 70 000 $ de plus. Donc, c'est sûr
que, quand le prix du baril était plus élevé, comme le prix du combustible, du gaz naturel, était plus bas — il l'est toujours, mais la marge s'est
considérablement réduite — la rentabilité pour le
transporteur... Comme son camion, il le garde juste huit ans, on ne regarde pas
sur des horizons de 30, 40 ans comme un
bâtiment ou autre. Donc, je vous dirais qu'avec cette marge-là, qui s'est
rétrécie sur le prix du combustible, comme il y a un surcoût pour le
camion, si on ne l'aide pas au départ, c'est un petit peu difficile. C'est
moins évident avec les prix actuels du baril, je vous dirais, là. Ça prend plus
d'incitatifs.
M. Simard : Par camion — je ne
sais pas si j'ai encore du temps, mais rapidement — comment vous... Avec le marché du carbone, combien un propriétaire d'entreprise peut sauver par camion en diminuant le gaz à effet de serre? C'est-à-dire le carbone qui diminue par
rapport à sa consommation, combien il peut sauver par rapport aux
60 000 $ ou aux 40 000 $ supplémentaires qu'il doit
payer? Avez-vous une idée?
Mme
Trudeau (Stéphanie) : Je ne peux pas vous faire le calcul comme ça, rapidement,
mais, assurément, donc, il doit
payer... s'il émet 25 % moins,
il doit payer, grosso modo, 25 % moins de système de plafonnement et
d'échange, mais je ne voudrais pas... Je
pourrais vous revenir avec le calcul. Mais, à 15 $, 16 $ la tonne, il
y a un incitatif, mais ce n'est pas
comme si c'était plus élevé, là. Ce n'est pas ça, je pense, qui va devenir la grosse différence. Mais nos
camionneurs, au Québec, veulent être compétitifs sur le plan économique,
mais ils veulent être verts, aussi. Ça fait que, si on leur présente une solution
qui est rentable, relativement un bon retour sur investissement, disons, un an,
deux ans, trois ans sur un camion de huit ans, bien, je suis sûre qu'ils vont
embarquer.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Nous passons maintenant à l'opposition officielle avec M. le député de Terrebonne.
M.
Traversy : Merci, M. le Président. Mme Trudeau, M. Pouliot, très belle présentation.
Je voudrais juste vous redemander une
information qui vient d'être lancée par le député de
Dubuc. Vous nous avez dit que la différence de coût, là, pour la
transition d'un camion de diesel à celui de biogaz, c'était autour de 40 000 $
à 60 000 $? Je voulais juste...
Mme Trudeau (Stéphanie) : Oui,
environ 40 000 $ pour un camion à gaz naturel compressé, ça, ça
serait, exemple, pour une benne à ordures, puis allant jusqu'à peut-être
65 000 $ pour un camion, comme un 53-pieds, là, de transport lourd, grosso
modo. C'est un ordre de grandeur.
M. Traversy : Donc, il y a
encore...
Mme Trudeau (Stéphanie) : Mais c'est
comme toute technologie : plus il y aura une demande, plus ils en fabriqueront, plus le prix... Le surcoût a déjà
baissé. Pour le GNL, il y a trois ans, c'était 80 000 $. Donc, on
voit qu'on est dans la bonne voie, là.
M.
Traversy : Tout à fait. Puis vous avez fait le parallèle avec
les voitures électriques qu'on voit également, là, devenir de plus en
plus accessibles. Donc, le principe peut s'appliquer à vous également. Et je
vous comprends aussi de prêcher pour votre paroisse parce qu'il est vrai qu'on
parle beaucoup des voitures électriques, mais il y a aussi une alternative intéressante, là, dans le cadre de ce
que vous nous proposez. En termes d'infrastructures disponibles, là,
pour ce genre de véhicules, ça représente quoi, au Québec, là, dans un portrait
plus global?
Mme
Trudeau (Stéphanie) : Il y a
quelques stations de compression publiques, notamment celles qui
appartiennent à EBI. La bonne nouvelle, en plus, c'est que ces stations-là sont
un mélange de gaz naturel et de gaz naturel
renouvelable parce que ça vient aussi de leur site d'enfouissement. Donc, il y
a du biométhane d'intégré. C'est très intéressant.
Nous, on a des stations publiques; quelques-unes. Pour l'instant, il y a
beaucoup de stations privées. Exemple, un
transporteur qui a 100 camions, ça vaut la peine qu'il ait une station de
compression chez lui. Quand c'est du gaz naturel compressé, ce n'est pas
très cher. C'est juste d'installer une petite station dans la cour et, à ce
moment... On en a une, chez Gaz Métro, pour
nos camions. Donc, à ce moment-là, il y a plus de stations privées que
publiques, mais le dilemme des
infrastructures est moins important, surtout en termes de gaz naturel
compressé. Si le marché démarre, l'investissement va suivre, les entreprises publiques vont le faire...
privées, pardon, vont le faire, les stations vont ouvrir. Dans le cadre
du GNL, c'est un petit peu plus difficile
parce qu'il y a moins de camions à GNL, mais, lentement mais sûrement, ça se
développe.
M. Traversy : Juste pour un
petit informatif. Donc, on a rencontré différents regroupements de voitures électriques. On a, évidemment, là, bon, été
sensibilisés au fait qu'on voulait qu'il y ait davantage de voitures
électriques pour le gouvernement du Québec. Peut-être même, un jour, les
voitures de fonction ministérielles seront-elles 100 % électriques. La technologie avance, elle l'est
peut-être déjà. Et je ne sais pas si vous avez une Tesla, M. le ministre.
Non, même pas? Donc, on a déjà quelque chose ici, la Ford Fusion. La commandite
est faite. Alors, là-dessus...
Donc, est-ce
qu'on a des véhicules, au niveau de... Combien de véhicules au biogaz on a au
niveau du gouvernement du Québec ou
de... Est-ce qu'on a quand même une flotte intéressante ou c'est simplement
dans le privé que ça se retrouve?
Mme Trudeau (Stéphanie) : Bien, pour
l'instant, ça s'est amorcé avec le privé. Je suis convaincue que le gouvernement suivra. Présentement, par contre, il
y a un premier parc municipal, avec la ville de Saint-Hyacinthe, qui
s'est converti à gaz naturel. Donc, il y
aura un mélange de gaz naturel et de biométhane. Donc, je pense qu'au niveau
municipal aussi on va voir de plus en plus de parcs de véhicules à gaz naturel
apparaître.
Je vous
dirais que, si on dit qu'il y a environ — puis on peut me corriger ici — quelque 6 000 véhicules
personnels rechargeables électriques sur nos routes en peut-être comme 10 ans
d'existence, en trois ans, on est rendus à plus de 500 camions. Donc, si on regarde le prorata, quand je vous dis que ça
représente juste 4 %, c'est sûr que c'est naissant, mais,
clairement, c'est en croissance. C'est à coups de 25, 50, 100 camions que les
transporteurs les achètent.
M. Traversy : Excellent!
Merci pour ces quelques données.
Vous avez
terminé votre présentation, tout à l'heure, avec des termes quand même assez
forts. Vous avez dit que vous étiez,
évidemment, très collaborateurs avec la démarche mais que... bon, à condition
de mettre tous les moyens dans la balance
et d'avoir des effets immédiats. Vous avez peur de sombrer dans l'utopisme.
Bref, je voulais que vous puissiez nous éclaircir un peu sur ces termes bien choisis de votre part et évidemment
nous aiguillonner, là, pour ce que vous jugez être le mieux pour la
suite.
Mme
Trudeau (Stéphanie) : Bien,
pour la suite, chez Gaz Métro, on a fait le calcul qu'on pense
humblement pouvoir réaliser une dizaine de pourcentages, juste à nous, de
l'objectif de 37,5 %, donc, en injectant un minimum de biométhane dans
notre réseau, en substituant, par exemple, 20 % des camions lourds en les
faisant passer du diesel au gaz naturel, en
continuant nos efforts en efficacité énergétique — on est la seule filière qui a atteint les
objectifs fixés par le gouvernement,
85 % des argents qu'on a dans nos programmes vont aux clients, ce qui est
vraiment bon comparativement à ce qui se fait ailleurs au Canada et dans
le monde — et
en continuant à convertir les industries.
On pense que,
par exemple, une des avenues, ça pourrait être de développer — qui pourrait être quelque chose de rassembleur — notre Plan Nord avec du GNL et du renouvelable
seulement, donc d'avoir un développement futur qui est plus durable. On pense... Donc, comme je vous
disais, gros, gros efforts en efficacité énergétique. Au niveau du
transport électrifié, les véhicules légers,
le gaz naturel dans le transport lourd, dans le transport maritime, augmenter
la fréquentation du transport en commun, les inspections des véhicules,
l'écofiscalité. On a des opinions sur beaucoup de choses.
Au niveau de l'industrie, comme je vous dis, il
y a des places où on peut électrifier, il y a d'autres places où c'est techniquement impossible. Et donc il faudra
aussi se pencher sur l'aménagement du territoire. Ce n'est pas quelque
chose qui nous concerne particulièrement, mais je pense que c'est important de
le faire.
Le Président (M. Reid) : Mme
Trudeau, je vous arrête. Retenez votre souffle. Nous devons aller faire notre devoir de vote comme parlementaires et nous
revenons aussitôt que c'est terminé. Ne vous éloignez pas parce qu'on a
un horaire assez serré.
Mme Trudeau (Stéphanie) : Parfait.
(Suspension de la séance à 17 heures)
(Reprise à 17 h 21)
Le Président (M.
Reid)
: À
l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous allons reprendre nos travaux. Je vous rappelle que nous étions dans le bloc de
l'opposition officielle, et le député de Terrebonne était en train de poser ses
questions. Il lui restait deux minutes. Alors, M. le député de Terrebonne, à
vous la parole.
M. Traversy :
C'était pour mélanger le technicien au micro. Je vais rester ici.
Des voix : Ha, ha, ha!
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, nous étions en train de discuter
concernant l'acceptation, le volontarisme
de Gaz Métro dans la stratégie
gouvernementale qui est proposée, à condition, bien sûr, que tous les
moyens soient mis en oeuvre pour y parvenir.
De ce que j'ai pu écrire rapidement, nous avions
donc énuméré un certain nombre de points, donc, sur le développement, les
véhicules, la conversion, et donc le biométhane, etc. Donc, il y a plein de
suggestions qui nous ont été mentionnées. Je
vais laisser terminer peut-être Mme Trudeau, s'il y avait un dernier mot à
rajouter. Je sais que ça a fini de façon assez sèche ou, si vous
étiez...
Mme Trudeau (Stéphanie) : On avait fait
le tour. Je vous dirais juste peut-être simplement qu'il ne faut surtout pas dire : Est-ce qu'il faut faire a,
b, c, d, e? Dans la majorité des cas, c'est toutes ces réponses. Et c'est juste
ça qu'on voulait dire quand on dit : Il faut se mettre en action
maintenant. Il y a plein de petits liens à faire, il n'y a pas de solution
miracle.
M.
Traversy : Parfait! Et je terminerai avec une question
traditionnelle venant de l'opposition officielle et du Parti québécois, M. le Président. C'est sur la
proposition de voter une loi sur les émissions zéro. Est-ce que Gaz
Métro serait en accord avec cette initiative?
Mme Trudeau (Stéphanie) : Est-ce que vous
parlez de la loi d'émission zéro pour les constructeurs de véhicules? Ou sinon,
je vous demanderais juste de nous clarifier pour être sûre que je me...
M.
Traversy : Oui. Bien, le... Oui, effectivement. Donc, la loi
émission zéro, qui est le projet de loi n° 394, qui est un projet de loi qui vise justement à essayer,
là, de faciliter, là, je pense, la diminution de gaz à effet de serre.
Donc, je sais que ça a été dans les
propositions d'Équiterre ce matin. C'est aussi une loi qui est envisagée par
d'autres associations. Je voulais voir si vous étiez en accord avec ce
principe de base.
Mme Trudeau (Stéphanie) : Pour ne pas
l'avoir lue depuis un certain temps, je ne me prononcerai pas précisément là-dessus, mais c'est sûr que, tout ce
qui encourage l'utilisation d'un véhicule à tout le moins rechargeable,
on ne peut pas être contre ça. Là, maintenant, contre ce projet de loi spécifiquement,
je ne le possède pas, alors je ne me prononcerai pas.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Alors, nous passons maintenant au deuxième groupe d'opposition. M. le
député de Masson.
M. Lemay : Merci, M. le Président.
Et, merci, Mme Trudeau, M. Pouliot, d'être avec nous aujourd'hui en commission. Vous savez, tout d'abord, je voulais
juste préciser un point que le ministre a mentionné tantôt en
mentionnant que ça serait peut-être une
bonne idée d'utiliser le gaz naturel comme une transition, alors que, moi, ça
m'a juste chatouillé.
Tu sais, dans mes impressions, le gaz naturel
n'est pas une transition à une énergie alternative. Ça devrait être une énergie qui est là pour rester dans le
sens qu'au niveau des procédés industriels il y a plusieurs procédés.
Qu'on pense juste aux sources de chaleur,
justement. On a besoin d'une énergie autre que l'énergie hydroélectrique, là.
Donc, est-ce que vous voulez préciser, au niveau du terme, là, selon
vous, là, le gaz naturel, c'est-u une énergie de transition ou c'est-u une
énergie qui est là pour remplacer les énergies fossiles?
Mme Trudeau (Stéphanie) : Bien, c'en est
une, énergie fossile, mais...
M. Lemay : Bien oui, mais, tu sais,
pétrole...
Mme Trudeau (Stéphanie) : Mais oui,
puis...
M. Lemay : Moins polluante.
Mme Trudeau (Stéphanie) : Je pense qu'on
a tous des notions différentes de ce que peut être une transition. Une transition, dans certains cas... Par exemple,
les produits pétroliers ont été une transition au charbon, puis on va
avoir eu du pétrole pendant 50, 60, 80 ans.
Donc, est-ce que, dans certains secteurs, la transition va être plus courte
pour le gaz naturel puis qu'elle sera
peut-être remplacée par, par exemple, de l'électricité? Peut-être. Dans
certains, je pense que le mot «transition» peut durer 30 ans, 40 ans.
M.
Lemay : Alors, merci de la précision. Vous avez mentionné, tout à
l'heure, qu'effectivement une des choses qui seraient importantes c'est d'avoir, si on veut, du financement pour
avoir des bornes de recharge de gaz naturel comprimé, d'aider davantage l'industrie du camion lourd pour
être plus compétitifs pour justement convertir... Compte tenu que vous
avez mentionné, tantôt, que c'était à peu près huit années, la durée de vie
utile d'un camion lourd...
Moi, je regardais ce qui s'est fait en
2014, puis il y avait 22 millions qui étaient accordés pour les voitures, alors qu'il y
avait juste 3,2 millions qui est allé pour les camions. Vous mentionniez,
tout à l'heure, que les camions, ça représentait
un tiers de tous les GES du secteur des transports. Mais, selon vous, dans le
fond, ce que je comprends, c'est qu'on devrait bonifier l'offre sur...
quoi, que ça soit la route bleue, que ça soit l'achat de nouveaux camions de
gaz naturel comprimé.
Mme Trudeau
(Stéphanie) : Je vais commencer puis je laisserai Vincent, si Vincent veut
ajouter.
Essentiellement,
je vous dirais que ce n'est pas Gaz Métro qui a besoin d'aide ou les gens qui
veulent ouvrir des stations, c'est
vraiment d'aider les utilisateurs. Les utilisateurs, c'est nos entreprises, et
donc c'est vraiment les aider, comme je
disais, avec le surcoût du camion, les aider avec l'amortissement du coût de ce
camion-là. Et je crois qu'ensuite quand il y aura un nombre suffisant les infrastructures vont suivre. Donc, Gaz
Métro ne demande pas d'argent au gouvernement pour ouvrir des stations de service. Puis, surtout dans le gaz naturel
compressé, tout ça, il va y avoir une saine compétition. Puis il peut y avoir une concurrence. Il y a
différents joueurs qui peuvent décider d'être dans ce marché-là. On ne
veut pas se réserver quelque marché que ce soit.
Mais c'est sûr que,
comme je disais, ça a tardé pour... Je ne dis pas que c'est des mauvaises
raisons, mais, par exemple, au début, on pensait nous autres mêmes que le gaz
naturel liquéfié serait, dans le transport lourd, ce qui débuterait le plus vite. Finalement, il y a eu un
petit problème avec un moteur 15 litres, et finalement c'est le gaz
naturel comprimé. Donc, ça prend un certain
temps. C'est lourd, les processus gouvernementaux. Puis on comprend parce
qu'ils veulent bien faire les choses, mais
ça prend un certain temps avant d'ajouter, par exemple, le moteur à gaz naturel
compressé.
Est-ce
qu'on voudrait éventuellement ajouter ce qu'on appelle — excusez l'anglicisme — les kits de conversion, donc un camion actuel qu'on convertirait? Parce
que, présentement, on s'adresse aux camions neufs. Donc, il y a
plusieurs choses comme ça qu'on pourrait regarder pour accélérer l'entrée, sur
nos routes, d'un maximum de camions à gaz naturel. Et puis voilà.
As-tu des choses à
ajouter?
M.
Pouliot (Vincent) : En fait, ce que je pourrais rajouter : il y a
le gaz naturel de forme traditionnelle, que le monde connaît, mais il y a également le gaz naturel renouvelable. Donc,
mettons, par exemple, la ville de Saint-Hyacinthe avec son projet de biométhanisation. Imaginez, si
on avait plusieurs projets comme ça au Québec, on serait en mesure
peut-être de remplacer ou de substituer peut-être de 5 % le gaz naturel
disponible dans le réseau au Québec. Donc, on pourrait, à ce moment-là,
alimenter non seulement nos maisons, nos résidences, nos bâtiments avec du gaz
naturel renouvelable, mais également tout le secteur du transport, donc, avec
des émissions totalement nulles dans ce cas-là.
Mme Trudeau (Stéphanie) : Bien, présentement, le biométhane qui est fait chez EBI, celui de
Saint-Hyacinthe et celui de Rivière-du-Loup, du site régional, va être
mis dans une station de service dans laquelle Gaz Métro va venir bonifier, pour
s'assurer d'avoir des volumes stables, avec du gaz naturel liquéfié de notre
usine de liquéfaction.
Donc,
effectivement, présentement dans l'industrie naissante du biométhane, au
Québec, il y a une large part qui va dans le transport, ce qui est une
très bonne nouvelle. C'est une forme de biocarburant qui est très intéressante.
M. Lemay :
Merci.
Le Président (M.
Reid) : Merci. Nous allons passer au bloc réservé aux députés
indépendants. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme
Massé : Merci, M. le Président. Bonjour! Heureuse de vous accueillir
ici, à Québec, et peut-être d'aller vous rencontrer sous peu à Montréal.
Écoutez,
quelques préoccupations, déjà, ont été soulevées. Heureuse d'entendre que, dans
le fond, vous voyez comme nous que ça ne peut pas être une action
unique, ça va venir de différentes sources. Et, dans ce sens-là, il faut
travailler main dans la main, et je pense que ça tombe sous le sens.
C'est
sûr que, pour nous, une des préoccupations par rapport à la question du gaz
naturel, c'est toute la question de sa
provenance. Avant qu'il arrive chez nous... Bon, bien sûr, le gaz conventionnel
qu'on a historiquement... qui a donné un peu naissance à Gaz Métro, mais, de plus en plus, parce qu'il est moins
loin, il est moins cher... Il y a aussi tous les gaz de schiste que... bien, on le sait parce qu'il y a
des enjeux environnementaux, là, importants, ne sont pas nécessairement
aidants.
Alors, si on le voit
comme étant un combustible de transition, est-ce que, dans le fond, on peut
imaginer qu'éventuellement on abandonne ce qui est le plus populaire... bien,
le plus disponible actuellement, qui est le gaz de schiste, pour s'en aller quasi exclusivement vers la biométhanisation ou
d'autres technologies qui viendront plus tard?
• (17 h 30) •
Mme Trudeau (Stéphanie) : De par le monde, il y a de plus en plus de bassins dits non
traditionnels, donc de bassins de
schiste qui sont mis en exploitation. Est-ce qu'il y aura une part croissante
de biométhane, de gaz de deuxième génération? Éventuellement, on
pourrait prendre des résidus du forestier puis, au lieu d'en faire de la
biomasse, on pourrait en faire du gaz naturel.
Est-ce
qu'on pourrait injecter... On aimerait bien travailler à injecter
éventuellement de l'hydrogène dans notre réseau, donc à faire en sorte que le gaz naturel qui est distribué ici,
au Québec, soit de plus en plus écologique. C'est sûr qu'on va travailler à le faire. On est préoccupés
par la provenance du gaz, mais, quand on regarde le gaz, il faut
regarder aussi le transport, vous avez
mentionné le transport. Quand on s'approvisionne plus près, tel qu'on le fait
ici, au Québec, bien, on sauve 4 000 kilomètres de compression
quand on l'acheminait... Donc, il n'y a pas de situation parfaite.
Et
puis ce qui a été décidé au niveau mondial puis ce avec quoi on se gouverne,
c'est les émissions à la combustion, les
émissions chez nous. Ce n'est pas que ce n'est pas important d'où ça vient,
mais, partout à travers le monde, même si on parle de bassins non
traditionnels, le gaz naturel est reconnu comme étant une des solutions au
remplacement des produits pétroliers, que ça
soit par l'Agence internationale de l'énergie, même par WWF — on ne peut pas tout à fait dire qu'ils sont un groupe d'affaires — qui a dit que vite, dans l'Arctique, il fallait
mettre des navires à gaz naturel et plus des navires à diesel marin. Donc, je pense que, même de source non
traditionnelle, ça demeure un combustible qui est plus souhaitable que le pétrole. Et on va tout faire ce
qui est techniquement possible et avec le moindre impact économique pour
les consommateurs de gaz naturel pour verdir notre réseau, bien sûr.
Le
Président (M. Reid) : Bon. Malheureusement, le temps est
terminé. Alors, je vous remercie, Mme Trudeau, M. Pouliot, pour votre
contribution aux travaux de la commission.
La commission suspend ses travaux pour quelques
instants.
(Suspension de la séance à 17 h 31)
(Reprise à 17 h 32)
Le
Président (M. Reid) :
Alors, nous reprenons nos travaux. Je souhaite la bienvenue à nos invités. Il y en a un qu'on a vu il n'y a pas si longtemps,
ce matin, en fait. Alors, vous
connaissez la routine : 10 minutes pour votre présentation.
Ensuite, nous aurons un échange.
Je vous
demande de vous présenter et présenter la personne qui vous accompagne pour les
fins de l'enregistrement. À vous la parole.
Regroupement national
des conseils régionaux de
l'environnement du Québec (RNCREQ)
M. Bourke (Philippe) : Merci
beaucoup. M. le ministre, Mme la députée, MM. les députés. Donc, je suis accompagné de M. Cédric Chaperon, qui est
responsable de dossier changements
climatiques et énergie au regroupement.
Et donc, moi, mon nom, c'est Philippe Bourke, directeur.
Donc, je vais
aller assez rapidement pour limiter le temps de notre présentation. Je
ne vous présenterai pas nos organisations, je
pense que vous les connaissez bien,
on vient régulièrement ici, mais je voudrais juste peut-être insister sur le fait qu'évidemment vous allez entendre
beaucoup d'organisations qui vont venir présenter ici. Ça serait quand même important de retenir, je
dirais, la nature particulière de
notre réseau. On a le privilège de pouvoir représenter l'ensemble des régions du Québec, d'avoir des organisations qui
sont bien implantées dans le milieu, et donc ça nous donne une vision
tout à fait particulière.
Ce qui est
aussi particulier dans notre approche, évidemment, c'est qu'on... évidemment,
on est préoccupés par les enjeux
environnementaux dans les régions, mais aussi on a le souci d'un bon
développement des territoires. Et donc on arbitre déjà, à l'intérieur de
nos organisations et avec nos partenaires, cette dualité de développement et de
protection de l'environnement. Donc, ça ajoute aussi à notre vision
particulière.
Et finalement
je dirais que ce qui nous distingue, c'est aussi notre approche vraiment
constructive, qui est axée sur les
solutions. Donc, on est là pour proposer, pour conseiller, pour faire avancer
les choses. Et c'est sur la base de cette expertise-là, en particulier dans le domaine des changements
climatiques, parce qu'on a développé, effectivement, une large expertise
là-dessus, qu'on vous présente nos recommandations aujourd'hui.
On vous a
fait parvenir un résumé de notre mémoire. Le mémoire complet viendra par la
suite, mais ça vous permet déjà de
comprendre les principales recommandations que l'on fait. On a utilisé les
quatre questions qui étaient posées à la fin du document de consultation
justement pour être le plus ciblés possible dans notre intervention.
Donc, si je
prends la première question, qui concerne le choix ou la proposition par
rapport à la cible, dans notre cas,
on propose que la cible de réduction soit d'au minimum 40 % sous le niveau
de 1990 pour 2030. On recommande qu'il y
ait une révision statutaire de cette cible-là vers 2022. Et enfin on spécifie
l'importance d'accorder beaucoup d'efforts à la réduction des gaz à effet de serre mais aussi de ne pas négliger les
enjeux d'adaptation aux changements climatiques parce que ces
changements sont déjà présents et nécessitent des interventions pour s'y
adapter.
Concernant la deuxième question, qui nous
demande si on devrait adopter, au-delà de la cible principale, des objectifs particuliers, on répond oui, d'une part,
parce qu'on souhaite qu'il y ait, dans ce cas-ci, une cible de réduction
domestique, donc une obligation, pour le
gouvernement, de respecter une réduction de ses émissions internes. Et on
pense que la meilleure façon d'y arriver,
c'est de se doter d'une stratégie nationale visant la transition vers une
société sobre en carbone, un peu à l'image de ce qui se fait en France
actuellement, et que cette stratégie s'articule autour de cibles sectorielles
qui relèveraient du Conseil exécutif.
À la troisième question, qui est très
intéressante et qui nous pose la question à savoir comment accélérer le rythme des réductions et comment aussi maximiser
les bénéfices ou les cobénéfices de la réduction des émissions, on a une
série de recommandations, la première étant : si on veut accélérer le
rythme, c'est d'abord de mettre en oeuvre notre plan d'action actuel sur les
changements climatiques qui, malheureusement, souffre d'un délai dans son
déploiement.
On
recommande, entre autres, pour maximiser les coûts-bénéfices, de vivre des
réductions dans le secteur de la consommation du pétrole. Ça nous
apparaît être le secteur qui va générer le plus de cobénéfices et rapidement.
Enfin, on fait la
suggestion de certaines mesures qui, selon nous, sont peu coûteuses, et qui
sont prêtes à être déployées, et qui pourraient amener des bénéfices rapidement
en termes de réduction des émissions de GES et aussi des coûts-bénéfices sur la
santé et l'économie. Donc, on parle, entre autres, là, de la réglementation pour
l'achat de véhicules à faibles émissions, des réglementations pour, entre
autres, favoriser ou augmenter le nombre de personnes par véhicule, et
finalement la fameuse... j'ai entendu parler tantôt que c'était un sujet de
discussion déjà ici, là, mais une loi zéro émission.
Enfin, toujours pour augmenter ou accélérer le
rythme des réductions, on propose de continuer... c'est déjà entamé, mais on pense qu'il faut continuer à
susciter la mobilisation des acteurs à l'échelle territoriale. C'est
important que les acteurs, dans chaque
région... Ici, je le sais, c'est des députés qui viennent de chacune des
régions. Vous le savez que vous avez vos propres particularités, que ce
n'est pas des solutions mur à mur qui sont bonnes pour Montréal ou Québec. Ce n'est pas nécessairement la même chose
lorsqu'on est en région. C'est fondamental de donner l'occasion aux acteurs du milieu, aux élus, à la société civile,
de s'approprier la problématique et de proposer elle-même les solutions pour réduire les émissions de gaz à effet de
serre. Et c'est comme ça qu'on va garantir un meilleur succès dans notre
stratégie.
On parle
finalement aussi de certaines stratégies fondamentales qu'il faudrait mettre en
oeuvre pour structurer ou, en fait, pour avoir une base structurante de
nos interventions sur le territoire. On parle, entre autres, d'une politique
nationale d'aménagement du territoire et d'urbanisme qui fait cruellement
défaut ici, au Québec, une stratégie de mobilité
durable qui privilégierait le transport collectif et actif, et enfin,
évidemment, une politique énergétique, qu'on attend et qu'on espère
centrée sur la réduction de la consommation des énergies.
Finalement,
la dernière question, on parle des obstacles qu'il faut surmonter pour
augmenter ou renforcer l'action contre
les changements climatiques. On en cible plusieurs. D'abord, on pense que c'est
nécessaire de mieux prendre acte du
défi que représente la lutte contre les changements climatiques. On en arrive à
une nouvelle étape qui va exiger des transformations beaucoup plus
importantes et on pense que ce n'est pas acquis que les gens comprennent le
sérieux derrière des transformations aussi importantes.
On parle de
l'importance pour y arriver, entre autres, d'investir massivement dans les
campagnes de communication, de mieux
informer les gens sur la problématique des changements climatiques, sur les
solutions, sur l'action du Québec, sur comment ça peut être profitable.
À cet effet-là, évidemment, il faudra continuer à documenter ces
informations-là, entre autres, pour mieux montrer les bénéfices positifs que
l'action sur le climat a en termes économiques, sociaux et environnementaux.
On parle
d'éliminer les incitatifs, les décisions et les mesures qui, actuellement, ont
cours au gouvernement, qui, malheureusement,
nous éloignent d'une réduction des gaz à effet de serre. On parle d'un
gouvernement plus exemplaire aussi
dans ses choix, dans les appels d'offres publics, ce genre de choses là, et
finalement une mise en garde contre un des obstacles qui, selon nous,
est le mirage des supertechnologies qui, souvent, nous éloignent finalement de
l'action à court terme parce qu'on attend la solution miracle.
Donc, ça fait le tour. J'espère avoir été le
plus rapidement possible.
Le
Président (M. Reid) : Vous avez bien réussi. Merci beaucoup
pour votre présentation. Nous passons maintenant à la période d'échange.
M. le ministre.
M. Heurtel : Merci, M. le Président.
Bonjour, messieurs. Merci d'avoir écourté votre présentation, mais ma première
question va vous permettre d'élaborer davantage, plus dans les moyens concrets.
Alors, que ça soit transports ou autres, j'aimerais ça, votre avis en termes de
qu'est-ce qu'on devrait prioriser, là, en termes de mesures concrètes qui vont
nous rapporter le plus de réductions possible.
• (17 h 40) •
M. Bourke
(Philippe) : Moi, je le répète souvent, là, puis je sais que ça s'en vient, puis j'ai très hâte, mais il faut mieux
communiquer la problématique, il
faut mieux expliquer aux gens que
c'est un énorme défi mais, en même
temps, que c'est plein d'opportunités. Sans qu'on aurait ensuite à mettre des
mesures, il y a des changements qui vont venir uniquement de cette meilleure
prise de conscience là par rapport à la problématique.
Et la
deuxième chose, c'est : cette meilleure prise de conscience là va
faciliter ensuite la mise en oeuvre des actions parce qu'il y a plein d'actions qu'on mentionne ici, que certains
groupes vont mentionner, puis, souvent, je le sais, je me mets à votre place, vous dites : Oui, mais
les gens ne sont pas prêts à ça, ils vont refuser, on va avoir des gens qui
vont s'opposer. Alors, il faut construire...
en fait, il faut travailler tout de suite, je dirais, à éliminer ces
barrières-là parce que ça va être inévitable : ces mesures-là, on
le sait qu'elles sont performantes, mais on sait qu'en même temps c'est
exigeant en termes de... et donc, le plus
tôt possible on va mieux communiquer, on va mieux expliquer que c'est un défi
qui interpelle tout le monde, qu'on
va mieux expliquer qu'il y a des opportunités dans la transition, qu'il ne faut
pas en avoir peur, qu'au contraire ça
va être bénéfique, bien, le plus facile, ensuite, on va pouvoir mettre en
oeuvre des mesures. Ceci dit, on a insisté sur les mesures pétrole.
Pétrole, c'est aussi transports. Donc, je pense qu'effectivement le secteur des
transports nous apparaît comme le secteur le plus approprié pour agir à court
terme et obtenir des bénéfices rapides.
M. Heurtel : Merci.
Le Président (M. Reid) :
Merci. M. le député de Maskinongé.
M.
Plante : Merci, M. le Président. Dans votre présentation, vous avez
énoncé quelque chose qui m'a réjoui quand vous avez parlé des diversités
régionales et aussi des diversités d'action aussi, parce qu'on sait bien qu'un
modèle mur à mur ne peut pas fonctionner dans chacune de
nos régions. Puis ça, on l'a bien compris. Et j'aimerais que vous élaboriez, à
ce sujet-là, de quels seraient les moyens ou quelles seraient les différences
régionales qui permettraient d'atteindre tous le même objectif mais de façon
différente. Et j'aimerais beaucoup vous entendre à ce niveau-là.
M. Bourke
(Philippe) : Bien, écoutez,
il existe des outils pour y arriver. Tantôt, je donnais l'exemple français. C'en est
un intéressant dans la mesure où on a obligé chaque territoire à se donner un
plan, ce qu'ils appellent le Plan climat-énergie territoire. Donc, on réunit ensemble
les acteurs du milieu, on leur dit : Voici l'objectif que vous avez à
atteindre. Maintenant, entendez-vous sur comment, sur votre territoire, vous
pourriez y arriver. Donc, déjà, d'offrir l'opportunité aux acteurs d'être les
maîtres d'oeuvre dans le choix des... c'est déjà un excellent moyen.
Ici, au Québec, nous, on a fait cette démarche-là,
les Conseils régionaux de l'environnement, à travers une démarche qui s'appelle Par notre propre énergie, justement
dans l'objectif de faire en
sorte que les gens prennent
conscience de la problématique et, ensuite, se disent : Bien,
nous, de notre point de vue, sur notre territoire, quels sont les
meilleurs axes d'intervention qui vont nous
permettre de se positionner dans ça? Et ça a été vraiment intéressant parce
qu'évidemment tout de suite les gens ont un
attachement à leur territoire, donc ils ont le goût d'agir parce qu'ils se
disent : Bien, si j'agis, en plus,
ça va être bon pour mon territoire. Donc, déjà, c'est un facteur de motivation
très intéressant. Mais, en plus, ils sont effectivement capables de
rapidement dire : Ah! bien, nous, justement, on a des ressources
forestières résiduelles de disponibles. On
pourrait utiliser ces ressources-là pour remplacer le mazout puis fabriquer
des... en fait, de la biomasse résiduelle. Donc, certaines régions ont
tout de suite perçu... bon, en Abitibi, en Mauricie, en Gaspésie, ont tout de suite dit : Ça, c'est un créneau, chez nous,
sur lequel on va travailler parce que ça va nous permettre, à nous, une
région ressource, d'agir.
Maintenant,
évidemment, ils ont dit : Bien, on n'a pas les moyens d'agir pour avoir un
transport collectif comme à Montréal
et à Québec, mais, par contre, on a peut-être des ressources qu'on pourrait
mettre en commun. Les autobus scolaires pourraient servir, la fin de
semaine, pour déplacer des gens vers des activités. Ils sont très imaginatifs,
les gens, lorsqu'on leur pose ces
questions-là, et c'est ça qui est enrichissant. Donc, il faut... Moi, je pense
que... Pour répondre clairement à
votre question : Donnons-leur l'opportunité, eux, de planifier la façon
dont ils veulent agir sur leur territoire en matière de changements
climatiques et on va être surpris de voir le niveau d'enthousiasme puis
d'innovation qui s'en dégage.
M.
Plante : Donc, si je comprends bien, ce que vous nous dites,
c'est : Plus on implique les acteurs du milieu, plus on implique
les gens près des bases de décision, donc en région, plus la concertation, dans
le fond, et l'adhésion se font facilement.
M. Bourke (Philippe) :
Oui. Puis des idées viennent, hein? Au Saguenay—Lac-Saint-Jean récemment, on a mis en place
un réseau de stationnements incitatifs pour le covoiturage. Ça n'aurait pas été
possible si... C'est simple, mais ça a été
possible juste parce que les gens se sont réunis puis ils ont dit : Bien,
nous, effectivement, qu'est-ce que ça nous prendrait pour améliorer
les... Bon, ils ont dit : Bien, le covoiturage, ça pourrait marcher si on
aurait des points de chute, puis tout ça.
Donc, facilement, ils ont trouvé les espaces et ils ont déployé ce
réseau-là. Mais c'est tout
simplement... Ce n'est pas très coûteux, mais c'était simplement l'idée de se
rejoindre entre eux, puis de discuter, puis de prioriser cette activité-là.
Le Président (M. Reid) : M. le
député de Mégantic.
M.
Bolduc : Merci, M. le Président. Écoutez, vous parlez de régionalisation, mais un des problèmes...
Oui, on a des bonnes idées, puis
c'est le début des idées, là, mais on ne peut pas transporter... par exemple, faire de l'éthanol à partir de chaque région ou en fonction des
besoins, les usines sont de plus en plus grosses. Donc, ça nous limite un peu.
Comment vous
voyez cette espèce... Parce qu'on va devoir faire de l'intégration, à un moment donné, là, pour dire, bien, si on prend la route de l'éthanol ou si on
prend d'autres routes. Comment on pourrait développer, selon vous, ces technologies-là,
qui sont connues mais qui sont, je vous dirais, des échelles plus grandes que
ce qu'une région a spécifiquement besoin?
M. Bourke (Philippe) : Bien, c'est
un excellent point que vous soulevez. D'abord, évidemment, j'ai parlé de
l'enjeu de l'intervention au niveau régional, mais ça ne peut pas se faire sans
un arrimage avec des interventions à l'échelle
du gouvernement. C'est le gouvernement qui dicte les orientations, qui met en place
des programmes — on
parle des programmes du PACC, par exemple — qui
vont soutenir les innovations. Mais l'arrimage, justement, se fait au niveau où...
bien, si c'est la région de Sherbrooke qui a un pôle d'excellence en technologie
de type éthanol de deuxième génération, je pense à l'entreprise Enerkem
qui se retrouve là, par exemple, bien là ça ne sert à rien de démultiplier l'argent en soutien au développement de cette technologie-là dans toutes les régions. On va concentrer ça
vers ce secteur-là. Une fois qu'il va avoir émergé, bien, après ça, s'il
y a des... on peut répéter ces expériences-là ailleurs, ça peut être fait, mais c'est une... Dans le fond, l'idée,
c'est de bâtir sur les richesses puis les opportunités qu'il y a sur les
territoires. Mais vous avez tout à fait raison que ça ne peut pas être
désincarné des orientations puis d'une intervention de la part du gouvernement
à Québec.
M.
Bolduc : Maintenant, comme vous le savez, vous avez parlé d'Enerkem,
ils sont en train de développer des petites unités de biomasse pour les
régions isolées. Est-ce que vous avez déjà suivi cette partie de dossier là?
Parce que l'objectif à
la fin, c'est qu'on puisse utiliser les biomasses résiduelles dans des régions
isolées où il n'y a pas d'électricité, d'éliminer l'importation
d'hydrocarbures. Donc, on met du bois dans l'appareil, puis il nous sort de
l'électricité à l'autre bout, là.
M.
Bourke (Philippe) : Pas
spécifiquement la technologie que développe Enerkem, mais cet enjeu-là de
rapprocher la zone de production, disons,
d'énergie du lieu d'utilisation, c'est une prémisse de base en matière
d'énergie. On veut limiter les coûts de
transport. C'est la théorie des cycles courts, qu'on appelle. Puis effectivement, souvent, la problématique avec la biomasse, c'est l'éloignement
des centres d'utilisation, donc les coûts de transport, et tout ça. Donc, si on est capables de trouver des mécaniques
ou des technologies qui vont faire en sorte qu'on va se
rapprocher du lieu de collecte et du lieu d'utilisation, je pense que c'est tout à fait approprié. Puis je pense
qu'il y a des belles choses qui se font en ce
moment, justement dans les réseaux isolés. On a vu la mine Raglan, entre autres,
qui est en train d'expérimenter un système
éolien diesel. On sait qu'il y a d'autres idées qui poussent justement
pour ajouter la biomasse aussi dans cette équation-là.
Tantôt,
j'entendais... La question avait été posée aux gens de Gaz Métro, là,
c'est : Il faut garder le cocktail de
solutions. Il n'y en a pas, de
solution miracle, il n'y a pas de solution unique, il y a des solutions
adaptées à chacun des contextes. C'est ça, la beauté de l'innovation,
puis je pense qu'il faut l'encourager.
Le Président (M.
Reid) : Une dernière courte question, M. le député de Mégantic.
M. Bolduc :
O.K. Donc, rapidement, une des possibilités, par exemple, dans le cas des
éoliennes, ça serait de prendre
l'électricité et de la mettre en hydrogène — on peut la stocker — parce
que le problème des éoliennes,
c'est : il ne vente pas toujours
dans le bon moment, là, mais, en l'utilisant
localement, on a des très faibles coûts d'entreposage et d'utilisation.
Est-ce que ce genre d'analyse là a été fait par vous?
M.
Bourke (Philippe) : Nous, on n'a pas fait l'analyse, mais je vous
dirais que c'est la réponse qu'on donne à ceux qui nous disent :
Est-ce qu'on devrait faire de l'éolien encore au Québec?
M. Bolduc :
...
M.
Bourke (Philippe) : Nous, on dit : Je pense qu'il faut aller
ailleurs que des grands parcs éoliens en réseau, comme on a fait jusqu'ici, et aller chercher ces niches-là, intéressantes,
où on va aller coupler l'éolien avec remplacer du diesel, remplacer des énergies non renouvelables,
limiter les gaz à effet de serre de façon directe et en profiter ensuite
pour exporter ces technologies-là ailleurs parce que des réseaux isolés, il y
en a ailleurs dans le monde, là.
M. Bolduc :
Merci.
Le Président (M.
Reid) : Un commentaire seulement, si vous voulez. Il reste
quelques secondes.
M.
Simard : Mais, étant donné les changements climatiques, ne croyez-vous
pas que l'éolien, tantôt, va devenir une nécessité en raison que le
niveau des lacs, le niveau des rivières peut baisser?
• (17 h 50) •
M.
Bourke (Philippe) : Bien,
selon les rapports qu'Ouranos a produits... Parce qu'un des objectifs... Je ne sais pas si vous connaissez
l'organisme Ouranos. C'est un centre de recherche, au Québec, qui a été mis en
place pour étudier l'impact des changements
climatiques. Et, disons, un des premiers chantiers qu'ils ont eu à faire, c'est
d'évaluer l'impact du climat sur les
réserves hydroélectriques du Québec. En fait, tu me corrigeras, Cédric, mais,
de ce que j'en comprends, la tendance,
c'est qu'il n'y a pas de grand risque pour le Québec, j'entends, là, par rapport aux modifications des précipitations sur la gestion des barrages. La tendance serait
une hausse, même, du niveau de précipitations global. Et la chance qu'on
a, c'est d'avoir des réservoirs, justement.
Si on aurait seulement des centrales au fil de l'eau, là il y aurait un risque parce que les changements climatiques amènent des périodes de sécheresse, mais la force
du Québec, c'est d'avoir des réservoirs qui sont
capables de gérer des plus grandes variations de précipitations dans le temps.
Donc, ça, c'est une autre force...
Le Président (M.
Reid) : Merci.
M. Bourke
(Philippe) : ...qu'on a, au Québec, sur laquelle il faut bâtir.
Le Président (M. Reid) : Merci. Nous passons maintenant à l'opposition
officielle avec M. le député de Terrebonne.
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, j'aimerais remercier encore une fois M. Bourke pour sa participation à cette commission et M.
Chaperon qui l'accompagne aujourd'hui.
Donc,
j'ai noté quelques éléments de votre présentation sur la stratégie nationale
pour être sobre en carbone. Vous donniez
des références, là, par rapport à la France, je pense, sur certaines
modalités qui pourraient être explorées de la part du gouvernement du
Québec, c'est bien noté.
J'ai
compris aussi, également, que vous étiez plus... comment je pourrais dire,
audacieux encore que le ministre lui-même
en mettant la barre à 40 %.
Donc, ce matin, il y a des groupes qui sont venus nous voir en disant que
37,5 %, c'était une barre minimale. Alors, je vois que vous avez aussi,
donc, une certaine audace, à votre façon, à cet égard.
Vous avez parlé de politique de
mobilité durable également. Donc, là-dessus, je trouve que... C'est la
première fois que j'en entends parler, là, depuis le début de cette audition.
Donc, c'est bien noté.
Mais il y a un point,
dans votre rapport, qui a particulièrement attiré mon attention et c'est la
question du PACC 2013‑2020 qui, selon ce que j'ai pu comprendre, là, n'ait pas
dépensé à peine de plus de 10 % de son fonds, qui y est dédié, de 3,3 milliards de dollars d'ici 2020. Donc, très
peu de sommes ont été engagées, jusqu'à présent, pour les objectifs qui
sont ceux dont nous discutons aujourd'hui.
Ma
question pour vous en débutant, c'est : Pensez-vous que la mise en oeuvre
du pacte ait pris un trop gros retard à l'heure actuelle puis qu'il faudrait commencer à peser sur le gaz, comme
on dit sans jeu de mots dans le cadre de cette commission, mais qu'il
serait temps d'investir beaucoup plus d'énergie à cet égard?
M.
Bourke (Philippe) : C'est tout à fait les propos qu'on a mentionnés.
On profite de l'occasion de venir ici, en commission parlementaire, et
surtout du fait qu'on nous demande justement comment faire pour accélérer le
rythme pour répondre à cette question-là.
Donc, effectivement, c'est une préoccupation. Nous, on juge qu'il y a un retard
dans la... Bon, les chiffres exacts, là, je
ne les connais pas en date d'aujourd'hui. C'était 12 % de dépenses en date
du 15 février de cette année.
Donc, on est déjà à quelques mois, mais, à ma connaissance, il n'y a pas eu de
grandes dépenses qui ont été
annoncées dans le Fonds vert depuis. Et, ceci dit, donc, nous, on soulève cette
problématique-là. On n'est pas là, ici, pour chercher des coupables mais pour dire : Maintenant, il faut
accélérer, comme vous dites, parce que plus on prend du retard, plus on
s'expose à des risques.
M.
Traversy : Pensez-vous qu'il serait judicieux également,
peut-être, de mettre en place, là, des mécanismes de reddition de comptes indépendants? Pensez-vous que
c'est nécessaire dans cette optique-ci ou qu'on ait besoin peut-être d'une loi plus précise, là, pour les cibles et les
moyens qu'on veut entreprendre dans le cadre de nos discussions?
J'aimerais vous entendre également là-dessus.
M. Bourke
(Philippe) : Bon, pour ce qui est de la reddition de comptes, vous
m'ouvrez une porte ici. Moi, à mon avis,
c'est... en fait, c'est une hypothèse, mais, à mon sens, une des raisons qui
fait qu'on a du retard dans la mise en oeuvre, c'est qu'il y a un
surcontrôle un peu, je dirais même, inapproprié dans la façon dont on peut
dépenser ces sommes-là. Donc, c'est pour ça
que, des fois, on mélange reddition de comptes puis contrôle puis gestion, là.
Il faut faire attention. Il y a déjà des mécanismes de reddition de
comptes.
Le
Commissaire au développement durable a regardé ce que faisait le ministère, a
fait corriger les choses. Ils les ont corrigées, mais, à un moment
donné, là, il faut aussi se donner un peu d'espace, là, parce qu'à un moment
donné, à force de se donner des règles puis
des restrictions, etc., bien, ça explique probablement une partie du fait qu'on
est en retard. Et, pendant ce temps-là, puis là, si je continue sur le
Commissaire au développement durable, à mon avis, il devrait surveiller un peu plus les autres ministères qui,
eux, continuent à dépenser des sommes pour, par exemple, des autoroutes
puis des choses comme ça qui augmentent les gaz à effet de serre, et un peu
moins le ministère de l'Environnement et lui laisser la chance de mettre en
oeuvre ses actions qui réduisent les émissions de gaz à effet de serre.
Donc, je ferme la
parenthèse éditoriale, là, mais, ceci dit, à un moment donné, c'est parce que
la reddition de comptes est importante.
Puis, sur un point, par contre, je vous suis, et ça rejoint une de nos
préoccupations, c'est : Il faut se donner l'obligation d'avoir des
réductions domestiques. C'est-à-dire qu'actuellement on a une cible, par
exemple, en 2020, de 20 %, mais c'est assez flexible. Elle pourrait
être prise avec des achats de crédits à l'étranger dans une proportion qui... Donc, on n'a pas l'obligation d'atteindre
un minimum de réduction au Québec. Donc, nous, on trouve que ça, c'est
une chose qu'on devrait corriger pour la prochaine phase pour s'assurer qu'on
s'oblige, au Québec, à atteindre un minimum de réduction. Et ça, à ce
moment-là, il devrait y avoir des mécanismes de reddition de comptes
spécifiques pour cette nouvelle cible, par exemple.
M. Traversy :
Vous avez également parlé, dans votre présentation, d'une révision statutaire
en 2022, donc, j'imagine, pour
s'assurer — on parle
de reddition de comptes — des suivis, là, qu'il va être évidemment important d'avoir avec une cible aussi ambitieuse, qu'elle soit de
37,5 %, ou 40 %, ou peu importe la décision finale. Mais donc cette
révision statutaire, pour vous, est d'une importance capitale.
M.
Bourke (Philippe) : Elle est importante pour nous puis elle est
importante pour tous les autres intervenants impliqués dans le secteur de la lutte aux changements climatiques qui...
donc des secteurs qui sont plus impactés, là, je pense au secteur industriel ou tout ça, qui... Puis
effectivement vous l'avez dit, certains trouvent ces cibles-là assez élevées.
Et je pense que c'est de bonne guerre que de
se donner un rempart pour que, sur une période énorme... 15 ans,
aujourd'hui, c'est énorme, il y a des choses
qui peuvent se passer. On souhaiterait tous qu'en 2021 la science nous dise
que, finalement, 30 %, ça va être
assez, là, tu sais. Si on n'a pas besoin de 80 %, ça serait le fun, puis
là on pourrait dire : Bon, bien, on va faire d'autre chose. Mais
l'inverse pourrait être aussi possible. C'est-à-dire qu'en 2021 on nous
dise : Écoutez, c'est 2035 qu'il faut avoir zéro, là. Et on fait quoi?
Est-ce qu'on continue en se disant : Non, nous, on vise moins que
37,5 % ou moins 40 %? Alors, c'est
ça qu'on se dit, là. L'idée, c'est d'avoir la souplesse, sur une période aussi
longue, de pouvoir réviser un
engagement qu'on prend aujourd'hui pour dans 15 ans, là, basé sur des
prémisses, des fois, qui peuvent être très variables, comme le coût de
l'énergie, ce genre de choses là.
M. Traversy :
C'est-u déjà fini?
Le Président (M. Reid) : Oui.
Bon, bien...
M.
Traversy : Bien, je vous remercie beaucoup, M. Bourke.
Le
Président (M. Reid) : Alors, merci. Nous passons au deuxième
groupe d'opposition. M. le député de Masson.
M.
Lemay : Merci, M. le Président. Merci, M. Bourke et M. Chaperon,
d'être avec nous en commission. Vous savez,
vous venez de parler avec le député de Terrebonne, là, d'émissions domestiques.
Justement, là, dans le fond, vous mentionnez qu'on devrait limiter le
recours à l'achat de crédits à l'étranger. Si on regarde, dans le cahier, les
cibles, le gouvernement a projeté de faire
des réductions d'environ 15 millions de tonnes puis il prévoit, pour
atteindre la cible de 37,5 %,
d'aller acheter 9,8 millions de tonnes. Puis, si on regarde, là, il nous
avance même, là, que, selon les projections, là, de qu'est-ce que c'est, le marché du carbone, là, ça représenterait un
achat de 327 millions. J'imagine que vous, là, vous avez des mesures concrètes supplémentaires aux
15 millions de tonnes que le gouvernement a déjà ciblés pour
justement aller piger dans le 9,8 qu'on irait
acheter à l'extérieur pour le ramener presque à zéro. Donc, dans les mesures
supplémentaires, rapidement, j'imagine que vous avez déjà réfléchi à ce qui pourrait
être fait?
M.
Bourke (Philippe) : Tout d'abord, je ne peux pas dire quelles mesures ont été prises pour arriver à
15 millions de tonnes ou cinq. C'est
clair que, nous, ce qu'on propose, c'est des mesures pour aller plus loin. En même temps, on ne vise pas zéro, là.
Quand on dit : Éviter le recours au maximum, ça ne veut pas dire...
On a accepté d'aller dans un marché du carbone. Forcément, c'est qu'on
accepte le principe qu'il y a des mesures qui vont être moins coûteuses si on
les fait à l'étranger qu'ici. Donc, ça, on
ne veut pas renier ce principe-là, il est fondamental. C'est lui qui est
un peu l'ADN ou la colonne vertébrale
de notre action pour le moment, mais on est inquiets à ce que cette part-là
prenne une trop grande place parce qu'on
voit, nous, qu'on se prive de cobénéfices dans ce cas-là. Si les mesures sont
toutes prises à l'extérieur, bien, on se prive, ici, de faire des actions qui vont amener des bénéfices pour
la santé publique, qui vont faire en
sorte que les gens vont être
moins pris dans la congestion automobile, qui vont faire en sorte qu'il va y
avoir du développement qui va se faire en
région. Bien, si on prend tout notre argent puis on l'envoie à l'étranger, on n'aura pas ces
bénéfices-là. Donc, il faut un juste équilibre. Et nous, on pense qu'une
des manières de le faire, c'est, plutôt que d'y aller un peu «on verra qu'est-ce que ça va donner» puis «à peu
près 40 % à l'étranger ou pas», se fixer une cible. Ça serait l'idéal, et
donc on s'oblige à atteindre ce niveau-là.
Puis,
bon, oui, ça va prendre des mesures.
Bon, il y en a certaines qui sont mentionnées dans le document,
là, puis nous, on en propose déjà,
là. Donc, un système, par
exemple, de bonus-malus ou une loi
zéro émission. C'est des mesures qui
ne sont pas nécessairement prévues pour atteindre le 15 mégatonnes
mais qui permettraient d'aller plus loin, justement, et plus rapidement.
Une voix :
...
M. Lemay :
Si on revient sur... Ah! vous vouliez rajouter quelque chose?
• (18 heures) •
M. Chaperon
(Cédric) : Oui. Si je pouvais ajouter quelque chose, c'est que, dans
les trois scénarios qui sont proposés, la cible domestique est toujours la
même. En fait, c'est toujours 15 mégatonnes. Donc, si on veut faire plus d'efforts, bien, il faudrait faire un travail de
mieux renseigner les potentiels de chacune des mesures qu'on pourrait
mettre en place. Dans l'annexe I, il y a tout un éventail de mesures qui sont
proposées. Après, il faudrait voir, donc, c'est quoi, les potentialités là-dedans, lesquelles coûtent le moins cher et lesquelles
sont les plus faciles à mettre en place. Et on pense que ça, c'est un
travail qui devrait être fait pour justement se donner une cible qui soit peut-être
plus ambitieuse et puis qui soit aussi à la hauteur de ce qu'on est capables de
faire dès maintenant.
M. Lemay :
O.K. Parce que je prends...
Le Président (M.
Reid) : Une minute.
M. Lemay :
Une minute?
Le Président (M.
Reid) : Une minute.
M.
Lemay : Parfait. Je vais
revenir à l'élément de la réponse que vous avez mentionné, M. Bourke. Là, Gaz
Métro, tout à l'heure, nous mentionnait qu'à eux seuls ils pensaient
être capables de contribuer pour 10 %
de toutes les réductions, notamment avec le biométhane avec les
transports lourds. Vous avez parlé tout à l'heure de bonus-malus, mais, en fait, on sait, là... Puis là je vais juste
vous sortir une petite statistique, là. Il me semble que l'argent qui est
donné pour les véhicules électriques
est beaucoup plus élevé que qu'est-ce qui est donné présentement dans les
véhicules au gaz naturel comprimé, ce
qui fait en sorte que, dans le fond, si eux peuvent contribuer à eux seuls
10 %, il me semble qu'on devrait donner plus de financement pour
justement que ces actions-là voient le jour, j'imagine.
M.
Bourke (Philippe) : Bien,
Cédric a un bon point là-dessus. Je pense qu'on a un exercice, puis on le
propose, nous. Il y a
des études qu'il va falloir faire pour mieux documenter le coût-bénéfice des
mesures. Est-ce que c'est plus rentable d'investir dans l'électrification du transport individuel ou, à
court terme, on serait plus gagnants en mettant plus de sous dans le transport collectif ou en réduisant
l'impact du camionnage? Ça, je pense que c'est fondamental qu'on
fasse ces analyses-là, et ça va sécuriser tout le monde.
Ceci dit, la loi zéro
émission, elle, éviterait qu'on donne de l'argent à ceux qui veulent s'acheter
un véhicule électrique. Ce seraient les compagnies qui s'occuperaient de nous
fournir les véhicules.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Alors, merci. Nous passons maintenant au bloc des députés indépendants. Mme
la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme
Massé : Oui, puis la
question de la rentabilité, vous l'avez bien dit, c'est aussi une question
de territoire, de santé, d'agriculture. Ce n'est pas juste la rentabilité
de l'entreprise, c'est notre rentabilité collective.
Moi, j'en
suis, de communiquer le défi, je pense. Quand j'entendais mon collègue tantôt
dire : Mais là, tu sais, on a besoin
des gros trucks, nous autres, dans la région. Oui, oui, ça se peut, mais il y a
un défi collectif qui fait que, si tu as un gros truck mais, dans 25
ans, ton petit-fils ne peut pas l'utiliser parce qu'il n'y a plus de route à
cause des effets de changements climatiques,
on n'est pas avancés. Ça fait qu'il
y a quelque chose à communiquer, à
parler des opportunités. Ça, je trouve ça important. Et, depuis ce
matin, on entend comment ça peut être lieu d'opportunités, de création, de créativité et de solidarité sur une base
régionale, locale, etc. Peut-être que, dans le pacte des municipalités qui s'en vient sous peu, il y aurait quelque chose à s'inspirer
de la France.
J'en suis, de
la révision statutaire pour les raisons que vous avez évoquées, et déjà notre objectif
de 2020 devra nous servir de première
étape d'évaluation. Et j'en suis aussi, de se donner des cibles ici
même, domestiques que vous appelez, parce
que c'est sûr que je peux émettre des
grands objectifs, mais, si je me permets constamment de déconstruire ce
que je suis en train de construire, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas.
En quelques secondes, parce que c'est ce
qu'il va vous rester, vous avez mentionné différentes mesures qui ne coûtent rien — ça, je
pense que ça ne devrait pas tomber dans l'oreille d'un sourd — mais d'une politique nationale
d'aménagement du territoire et d'urbanisme. Dites-moi, en quelques secondes,
pourquoi il faut aller vers là.
Le Président (M. Reid) : Il
vous reste...
M. Bourke (Philippe) : Bien,
évidemment, on a la chance de pouvoir surfer sur une annonce hier qu'il y a eu d'une nouvelle alliance qui a été formée
justement pour promouvoir l'idée d'une politique nationale d'aménagement
et d'urbanisme, l'Alliance Ariane, mais on oublie tellement à quel point les
choix qui sont faits, de localisation sur un territoire, viennent ensuite
impacter considérablement notre mode de vie et nos obligations de déplacement
qui sont fondamentales dans la lutte aux changements climatiques.
Donc, si on est
capables de se planifier un territoire qui va réduire nos besoins de
motorisation, il me semble qu'on a fait déjà pas mal plus que la moitié
du chemin, et, après ça, le reste vient de soi. Mais malheureusement, à l'heure
actuelle, c'est plutôt un laisser-faire dans le modèle d'aménagement du territoire, ce qui fait que, malheureusement, on a tendance à s'étaler et ensuite, bien, on
dit : Bien là, moi, ça me coûte trop, il n'y a pas d'autobus chez
moi, etc. Bien, c'est sûr. Donc, tout est interrelié. Donc, en ce
sens-là, c'est important.
Le Président (M. Reid) :
Bien, merci, M. Bourke, M. Chaperon, de votre contribution aux travaux de la
commission.
Alors, la commission ajourne ses travaux jusqu'à
demain, à 8 heures, pour une séance de travail.
(Fin de la séance à 18 h 5)