(Dix heures deux minutes)
Le
Président (M. Reid) :
À l'ordre, s'il vous plaît! À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant
constaté le quorum, je déclare la
séance de la Commission des
transports et de l'environnement
ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
La commission
est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations
particulières sur le livre vert intitulé Moderniser
le régime d'autorisation environnementale de la Loi sur la qualité de
l'environnement.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Gaudreault (Jonquière) sera remplacé par M. Traversy (Terrebonne)
et M. Jolin-Barrette (Borduas) par M. Lemay (Masson).
Auditions (suite)
Le Président (M. Reid) :
Merci. Voici l'ordre du jour de cet avant-midi. Nous entendrons deux
groupes : l'Association québécoise pour
l'évaluation d'impacts et la Chaire de recherche du Canada en droit de
l'environnement de l'Université Laval.
Alors donc,
bienvenue à nos invités de l'Association québécoise pour l'évaluation
d'impacts. Vous avez une dizaine de minutes pour faire votre
présentation. Par la suite, nous aurons un échange avec les membres de la
commission. Et j'aimerais que vous commenciez par vous présenter, présenter la
personne qui vous accompagne pour les fins de l'enregistrement. À vous la
parole.
Association québécoise
pour l'évaluation d'impacts (AQEI)
Mme
Fecteau (Louise) : Bonjour. Je suis Louise Fecteau, présidente du
conseil d'administration de l'Association québécoise pour l'évaluation d'impacts, et je suis accompagnée
aujourd'hui par M. Pierre Vaillancourt, qui est membre du conseil
d'administration.
Alors, tout
d'abord, merci de nous donner l'opportunité de contribuer à cet exercice.
D'entrée de jeu, nous saluons le
travail qui a été réalisé par les intervenants qui a mené au dépôt du livre
vert. Il s'agit d'un excellent travail. Mentionnons, d'autre part, que nous retrouvons dans ce document
le fruit de nombreux travaux réalisés par l'AQEI ou ses membres au fil
des années.
L'Association québécoise pour l'évaluation
d'impacts regroupe depuis près de 25 ans des professionnels du domaine de
l'évaluation d'impacts. Quelque 200 représentants des organismes régulateurs,
donc du ministère de l'Environnement, de
l'Agence canadienne d'évaluation environnementale, du Bureau d'audiences
publiques, de différents ministères aussi, de promoteurs, de
gestionnaires, consultants, chercheurs, organismes autochtones et groupes de
sensibilisation y sont représentés. Nous échangeons sur des expériences et des
problématiques reliées à l'évaluation d'impacts
et souhaitons améliorer la qualité professionnelle de l'évaluation d'impacts.
Ce sont là nos principaux objectifs.
L'AQEI est
active à l'échelle canadienne et internationale, en particulier grâce à notre
affiliation avec l'International Association for Impact Assessment,
IAIA, et aussi avec le Secrétariat international francophone pour l'évaluation environnementale, qui a son siège
social à Montréal et avec lequel on partage nos bureaux, d'ailleurs,
juste en passant, depuis le début de
l'année. Donc, nous sommes très liés avec les associations internationales dans
le domaine.
Au départ, en
ce qui a trait à la vision qui est exprimée dans le livre vert, à la page 7,
les éléments suivants sont en droite
ligne avec nos interventions passées, donc actualiser le régime d'autorisation
sans, pour autant, réduire les exigences environnementales, rendre les
processus plus efficaces, plus prévisibles pour les initiateurs de projets et
la population concernée par les projets, et
inscrire la modernisation dans une perspective de cohérence, de simplification
et d'efficience.
Notre intervention porte essentiellement sur
deux thèmes du livre vert, soit l'évaluation environnementale stratégique, qu'on va appeler EES pour le reste de
la discussion pour circonscrire le temps, et l'accessibilité de l'information.
Donc, le
premier point, l'évaluation environnementale stratégique, pour dire que les
mesures qui sont proposées dans le
livre vert concernant les EES, les stratégies, plans et programmes, soit
l'encadrement législatif et l'arrimage avec le processus d'autorisation des projets, ça correspond exactement à nos
recommandations principales au cours des 10 dernières années. Donc, les
objectifs et les avantages qui sont énoncés dans les pages 22, 23 du document
du livre vert font l'objet de larges consensus dans la littérature, à notre
avis. Il nous apparaît donc non seulement indispensable, mais également prioritaire que l'EES fasse l'objet d'un
encadrement législatif au Québec. Les objectifs d'efficacité, de
prévisibilité, de cohérence en dépendent.
Les sujets qui seraient potentiellement visés
sont l'agriculture et l'aquaculture, l'aménagement du territoire, l'énergie et ses filières, la forêt, la gestion
des déchets et de l'eau, l'industrie, les mines, le tourisme. Et ce qui
n'apparaît pas dans le
mémoire, on va vous envoyer un addendum, c'est évidemment le secteur des
transports. Les plans de transport, à travers le monde, font l'objet
d'évaluations environnementales stratégiques depuis des années.
Les EES peuvent être sectorielles, ou
régionales, ou les deux. Pour l'AQEI, les EES régionales sont aussi fondamentales dans le processus. Nous avons
présenté des références en cette matière à la Commission de
l'aménagement du territoire en avril 2011 dans le contexte de la refonte de la
Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. On a présenté dans le mémoire qui vous a
été déposé les différentes références en question, qui sont importantes, à
notre avis.
À l'occasion
de la commission de l'aménagement et de l'urbanisme, on avait présenté la
conclusion suivante à la commission :
«L'aménagement du territoire est au coeur du développement durable. Les [...]
dispositions [qui sont] prévues dans
l'avant-projet de loi — celles qui portent, entre autres, sur l'évaluation des incidences
sur l'environnement, le social et l'économique
au moment de réviser des schémas d'aménagement ou des plans d'urbanisme — [vont permettre] une prise de décision mieux documentée et, donc, plus
éclairée. [Ça va venir] combler des lacunes importantes [...] à une
échelle plus grande que celle des projets [pour les] effets cumulatifs.»
Bref, on dit
qu'un cadre législatif est indispensable aux EES à la fois pour la procédure
d'évaluation environnementale, mais
aussi dans le contexte municipal pour l'aménagement du territoire. Puis le rôle
du ministère dans la réalisation des EES,
en plus d'être un accompagnateur, comme il est mentionné à la page 23 du
document, il devrait aussi s'assurer de la qualité des rapports et du
suivi des engagements qui auront été pris par les ministères initiateurs des stratégies,
plans ou programmes.
Pour la deuxième partie, je cède la parole à
Pierre.
• (10 h 10) •
M. Vaillancourt (Pierre) : Alors,
accroître l'information disponible sur les autorisations et les occasions
d'intervenir pour le public. Les deux premières mesures présentées pour cette
orientation, à savoir la création d'un registre
pour regrouper l'ensemble de l'information et des documents relatifs aux
projets et la consultation du public en amont de la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement,
ont été maintes fois documentées et identifiées par l'AQEI comme étant
indispensables.
L'efficacité,
la prévisibilité et la rigueur pour tous les acteurs concernés. L'AQEI a
réalisé de nombreux travaux plus spécifiquement sur la question... sur
des suivis, dont une étude intitulée Stratégie de diffusion des résultats de
suivi environnemental. Les avantages de la connaissance des résultats
de suivi y sont présentés. On les retrouve d'ailleurs dans notre
mémoire.
Au fil des
discussions au sein de notre association, il a souvent été mentionné que la publication
des résultats de suivis environnementaux commande certaines précautions.
Les rapports de suivi ne sont pas uniformes, présentent parfois des résultats
sans introduction, peuvent être mal interprétés et sujets à de mauvais usages.
Il faudra donc se demander, se poser la question : Comment diffuser cette information? On peut, par exemple, penser à l'ajout
de fiches synthèses qui présentent le contexte et les faits saillants.
En 2011, dans le cadre de la révision de la Loi
canadienne de l'évaluation environnementale, on avait déjà imaginé l'effet levier de mesures similaires à
celles présentées dans le livre vert dans l'hypothèse où elles seraient
intégrées et déployées. Nous avions écrit
alors : «Les plans et programmes gouvernementaux, incluant les filières énergétiques, doivent faire l'objet d'évaluations environnementales stratégiques rigoureuses,
pilotées par les ministères concernés, soit au moment de leur adoption
ou de modifications significatives.
«Les
instances responsables de l'aménagement du territoire doivent réaliser des
évaluations environnementales stratégiques
régionales, préalables aux révisions ou aux modifications importantes de leurs
schémas d'aménagement ou de leur plan d'urbanisme.
«Les
informations issues de ces évaluations, nécessairement publiques, seraient
accessibles aux promoteurs et amélioreraient
significativement la qualité de leurs analyses. [Et, à l'autre bout du
spectre], différentes données des études d'impact de projets ainsi que du suivi[...], [pourraient] être compilées
de telle façon [que leur analyse pourrait [supporter] l'analyse plus
globale [...] d'évaluations stratégiques.
«Avec ces
trois paliers d'évaluation, incluant l'évaluation par projet, le gouvernement,
les décideurs [...] ainsi que les promoteurs auraient à leur disposition
l'éclairage nécessaire à leurs responsabilités respectives et enrichiraient
mutuellement [les] travaux. Graduellement, de nombreux paramètres et
considérations de portée générale, analysés au
bon moment et au bon niveau, assureraient l'efficacité de tout le système
d'évaluation et permettraient des décisions bien avisées.»
À ce moment,
nous avions recommandé que l'Agence canadienne d'évaluation environnementale
développe et entretienne une banque
de données géoréférencée, accessible sur son site Internet, en lien avec le
registre pour colliger les données
provenant des évaluations environnementales. Cette même recommandation pouvait
être répétée dans le cadre de cette présente consultation.
Autre mesure importante prévue dans cette
orientation, c'était la consultation en amont. Puis cette question a fait l'objet de notre congrès en 2014, qui était
de repenser les études d'impact pour améliorer la crédibilité et l'efficacité.
Un congrès où il y avait 225 participants,
et les délégués avaient cité le malaise qu'ils avaient face à des rapports de
plus en plus détaillés et volumineux
qu'on qualifiait d'encyclopédiques au moment même où on avait à traiter de
questions de plus en plus complexes.
Alors, la consultation sur les enjeux offre autant de potentiel d'efficacité et
de pertinence... présente des défis pour tous les acteurs concernés. En
effet, cette nouvelle façon implique que des enjeux prioritaires puissent être
détaillés et approfondis, alors que le traitement d'autres éléments jugés moins
ou non pertinents pourrait être analysé de façon plus générale.
L'orientation
5, portant sur la simplification des processus d'analyse et l'objectif de
réduire les allers-retours entre les ministères et les promoteurs, c'est
intimement lié aussi à cette condition. Louise, je te cède la...
Mme Fecteau (Louise) :
Donc, en terminant, on a aussi ajouté un point sur les mécanismes de révision
périodique. Dans la mise en contexte du livre
vert, il est souligné le fait que le régime d'autorisation environnementale n'a
fait l'objet d'aucune modification en profondeur depuis près de 40 ans.
C'est beaucoup trop long. Dans les faits depuis la fin des années 80, des constats et recommandations précis
ont été posés, ça a continué au fil des années sans interruption. Le
livre vert prévoit un mécanisme de révision périodique spécifiquement pour la
liste des projets à la page 30. À notre avis, l'ensemble du régime devrait
faire l'objet de telles révisions périodiques. De nombreux changements sont
prévus qui devraient être évalués et
éventuellement ajustés. Donc, on propose qu'aux 10 ans il y ait une révision
systématique du régime. Donc, le
caractère prévisible, même du régime en tant que tel, serait présent. On se
retrouverait donc en 2024 avec un
ministère de l'Environnement qui amorcerait sa réflexion sur la révision du
régime, préparerait une consultation comme celle qui nous réunit
aujourd'hui et, en 2025, on aurait un régime toujours aussi efficace et branché
sur les enjeux de son temps.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Alors, nous allons passer
maintenant à la période d'échange, et je donne la parole au ministre.
M. Heurtel :
Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Fecteau, M. Vaillancourt. Merci
beaucoup pour votre présentation ainsi que
pour votre mémoire. Ma première question, vous nous avez présenté une série de
recommandations très intéressantes et qui impliquent — puis
ça, on l'a vu au cours de nos travaux — énormément de travail pour le
ministère, et je me demande si vous avez
pensé au niveau organisation du travail et, plus particulièrement,
financement de ces étapes que vous proposez.
Avez-vous pensé comment on pourrait financer ça, au niveau de l'organisation du
travail quel genre d'impact, ça pourrait avoir sur les opérations du ministère
telles qu'on les comprend aujourd'hui?
Mme Fecteau
(Louise) : Une chose est sûre, là, on pense essentiellement au travail
lié à la supervision des évaluations
environnementales stratégiques, au rôle de l'accompagnateur. Il y a quelque
chose qu'on n'a pas écrit là-dedans, mais
personnellement, moi, ce que je voyais dans les autres sections du livre vert,
là, sur la question des tarifications des actes, disons, là, il y a une recherche d'optimisation du remboursement
des coûts réels qui sont dédiés aux demandes de certificat d'autorisation, en tout cas de toute demande de permis ou de
qu'importe, là. Donc, on est à un taux de financement qui est
relativement faible, je crois qu'on vise l'augmentation du taux de financement
des différents actes.
Une chose est sûre, il va donc y avoir des
ressources qui vont être libérées, ce faisant, au ministère de l'Environnement.
C'est peut-être un souhait, là, il ne faudrait pas que ce soit envoyé au fonds
général du gouvernement, il faudrait le conserver
au sein du ministère de l'Environnement pour deux choses. D'une part, il y a
des responsabilités qui sont élargies. Le
rôle d'accompagnateur pour les différents ministères, il est sérieux, mais il
va y avoir un besoin de toujours garder une veille constante puis de formation. C'est tellement important, là, je
veux dire, il y a tellement de solutions qui se trouvent partout ailleurs dans le monde, qui nous
aideraient à être plus efficaces, qui rendraient le travail même des autres
ministères plus efficace. Donc, il y a des
coûts aussi rattachés à ça, puis on sait qu'on est en période où on réduit les
dépenses de formation des
professionnels au sein du gouvernement. Dans le contexte où on parle d'un
régime moderne d'autorisation environnementale
qui vise à faciliter la job pour les promoteurs, pour les municipalités, tout
ça, on peut s'imaginer qu'au ministère de l'Environnement il va falloir
renforcer les capacités pour être capable de faire le travail, effectivement.
M.
Heurtel : Lorsque vous parlez des EES, vous parlez qu'il faut
s'assurer de la qualité des rapports et du suivi des engagements des
organismes et ministères du gouvernement. Vous en avez parlé dans votre présentation,
j'aimerais vous entendre davantage sur la
question qualité, là, qu'est-ce que vous voulez dire exactement. Puis, au
niveau des suivis, encore une fois, concrètement, qu'est-ce que ça veut
dire?
Mme
Fecteau (Louise) : Bien, les évaluations environnementales
stratégiques, ça se présente un peu comme nos évaluations d'impact, nos études d'impact traditionnelles. C'est-à-dire
qu'on va y retrouver de manière assez systématique une description de la portée de l'étude puis différentes
évaluations à une échelle plus macroscopique. Mais une chose est sûre, il y a quelqu'un quelque part qui doit
s'assurer de la qualité du rapport de la même manière qu'un promoteur
passe à travers un filtre d'avis ministériels.
À titre d'exemple, si le ministère des Transports
présente un plan de transport avec une évaluation environnementale stratégique, présente des incidences peut-être sur
le tourisme ou le... il va y avoir éventuellement une démarche similaire
à celle des études d'impact, puis il faut
que ça soit piloté par le ministère de l'Environnement. Puis, de la même
manière, il y a des degrés de qualité
d'études variables, on retrouve ça aussi à travers le monde. C'est d'ailleurs
un problème parce que, dans les
endroits où c'est obligatoire... À titre d'exemple, en Europe, il y a une
directive européenne qui fait en sorte que
les 27 États membres ont l'obligation de faire des EES sur un paquet de
secteurs. Il y a un problème qui est décrit par plusieurs intervenants comme étant le phénomène de la check-list,
c'est-à-dire qu'il y a des gens qui le font parce qu'ils ont à le faire, point, puis c'est n'importe quoi, là.
Je veux dire, ils peuvent déclarer... donc, rendre des comptes à l'effet
qu'ils ont réalisé l'exercice, mais c'est de piètre qualité. Puis, quand on
entend les intervenants de ces États-là faire leurs évaluations de la qualité des études, bien, ils nous disent qu'il y a un
risque à être trop procédural. À un moment donné, il faut laisser une certaine souplesse, mais, en même
temps, s'assurer de la qualité des rapports. Donc, c'est un équilibre,
on est à la recherche d'un équilibre.
M. Heurtel :
Encore, bon... Oui, allez-y, monsieur.
M.
Vaillancourt (Pierre) : Bien, je voulais juste faire un lien avec...
Vous parliez de budget et de programmes de suivi. Le fait de colliger les informations ou de rendre publiques
les informations, les résultats des programmes de suivi, pour les
promoteurs qui ont à travailler sur des projets, justement, de nature
similaire, ils peuvent aller chercher beaucoup
d'information. Ça réduit l'envergure des études, des efforts d'analyse même du
ministère, il y a là peut-être un gain,
justement, les données étant disponibles. Ça permet en même temps également,
d'une certaine manière, de sécuriser sur
d'éventuels impacts. Soit que, justement, ça nous conforte dans l'idée, ou ça
peut, justement, accentuer des craintes, ou — comment
je dirais ça, donc? — permettre
de mieux cibler les mesures d'atténuation parce que, là, on comprend
mieux l'envergure des impacts en rendant les suivis disponibles.
• (10 h 20) •
M. Heurtel : Encore sur les suivis,
vous nous amenez une suggestion très intéressante, là, celle de la fiche synthèse. Il y a certains groupes qui sont venus devant cette commission
nous parler de la difficulté au
niveau des suivis environnementaux,
par rapport au type d'information qui est diffusé, plus particulièrement le
défi par rapport à de l'information qui serait jugée comme étant un secret commercial, de l'information qui nuirait à la compétitivité d'une entreprise, surtout qu'il y a des compétiteurs qui se servent de ces
procédés-là pour obtenir de l'information sur l'entreprise qui diffuse. Quelle est
votre réaction à ce genre de commentaire là?
Mme
Fecteau (Louise) : Oui. Ça,
on a eu beaucoup de discussions au fil des années là-dessus,
là. Une chose est sûre, la notion
d'équité est super importante. Ça fait qu'à partir du moment où il y a des
promoteurs qui se disaient disposés à
rendre leur suivi public, il fallait que ça soit obligatoire de manière
simultanée pour tout le monde. C'est-à-dire que la notion
de secret commercial, en fin de compte, elle rentre en jeu souvent quand il y
en un qui va avoir ses données rendues publiques,
alors que l'autre peut les conserver pour lui. Pour des projets similaires, à
partir où il y a un décret ministériel qui oblige la reddition de comptes, ça l'est, de nature publique. On est
dans le domaine public. C'est certain, comme on disait dans la présentation, les rapports d'analyse, là,
les rapports de suivi, souvent c'est des rapports de laboratoire, là.
S'ils sont présentés tel quel, c'est du
charabia, là. Je veux dire, pour le commun des mortels, on ne comprend rien. On
peut extraire une donnée complètement
hors de son contexte, puis c'est vrai qu'il y a un risque. Puis, au-delà du
secret commercial, il y a beaucoup
plus un risque à la réputation parce qu'on peut démolir royalement une
entreprise à partir d'une information qui a été mal interprétée.
Donc, l'idée
de la fiche, on n'est pas rendus à se poser la question à savoir si les
rapports de laboratoire doivent être
intégralement rendus publics ou si l'information qui en résulte doit l'être. Mais, une chose est
sûre, cette information-là est nécessaire
pour enlever l'inquiétude, l'insécurité des communautés qui entourent les
projets... Tu sais, ce n'est pas normal
que des gens se demandent pour le reste de leurs jours si l'eau qu'ils boivent
est potable ou s'il y a de quoi dans l'air
qu'ils respirent. À un moment donné, les décrets prévoient des suivis, il faut que
les résultats de ces suivis-là soient, d'une manière ou d'une autre,
rendus publics.
M. Heurtel : Merci.
Le Président (M. Reid) : M.
le député de Mégantic.
M. Bolduc : Merci, M. le Président.
Bonjour, madame. Bonjour, monsieur. Il me fait plaisir de vous avoir ici aujourd'hui.
Écoutez, on va continuer un peu dans cette veine-là de risque commercial et — comment
je dirais ça? — d'information et désinformation, parce que,
comme vous dites, les rapports techniques, c'est souvent du charabia. Je
n'ai pas de problème avec ça, mais, les
experts, eux, ce n'est pas du charabia. Donc, le risque commercial, moi, je le
vois comme une réalité, l'ayant fait
moi-même dans plusieurs États
américains pour toutes sortes de raisons. Mais l'analyse de
compréhension a vraiment une importance vitale pour la compétition. Ça, c'est
mon premier point, puis je veux vous entendre là-dessus.
Le deuxième
point, c'est que je voudrais aussi parler un peu du risque de désinformation.
On peut envoyer une tonne de
littérature, mais un picogramme de plomb, ça ne veut pas dire, pour beaucoup de
gens, grand-chose, mais ça peut générer
une tempête même pas dans un verre d'eau, mais dans une goutte d'eau pour le
dire littéralement. J'aimerais vous entendre
sur ces deux contradictions-là par rapport à la publication de l'information
dans son sens large. Ce que j'approuve aussi
pour recommander qu'on retienne l'information en dossier, par exemple, au
ministère, pour que l'information, on l'ait analysée sans dire : On
remet tout ça, là, au public, puis on ne sait pas trop ce qui va arriver avec
ça.
Mme Fecteau
(Louise) : Une chose est sûre en ce qui a trait au secret commercial,
comme on disait, il y a probablement certaines catégories d'information,
au-delà des résultats sur la qualité de l'air, et tout ça, des catégories d'information quant à la production qui peuvent
être de nature commerciale. Le point est que, s'il est décidé que
certaines catégories d'information doivent
rester confidentielles, il faut qu'elles le soient pour tous les projets
similaires, ça ne peut pas être du
cas par cas. C'est là l'importance de l'équité entre les promoteurs. Un
promoteur ne peut pas se faire obliger à rendre ses données publiques,
alors qu'un autre, deux ans plus tard, aurait le privilège d'avoir certaines
informations qui demeurent confidentielles. L'idée, c'est vraiment d'avoir le
même traitement pour tout le monde.
Quant à l'avalanche de données que le registre
pourrait occasionner, ce qui est constaté ailleurs, là où ce l'est vraiment, de nature publique, là où toutes les
informations, tout au long de la procédure, sont rendues publiques,
c'est qu'une donnée spécifique prend
beaucoup moins d'importance si elle est mise en relation avec les 25, 50 ou 1 000 données précédentes qui auraient, par
exemple, été conformes. À titre
d'exemple, si on fait des suivis environnementaux au mois puis que, pendant des années, les résultats sont parfaitement conformes
partout, puis, tout à coup, il arrive une donnée qui dépasse une norme dans un
contexte précis, au lieu d'avoir cette donnée-là, qui, pour une raison ou une
autre, ferait l'objet d'une fuite ou
serait rendue publique puis qui provoqueraient une panique générale, là, à
partir du moment où les gens deviennent
plus familiers avec l'information qui leur est rendue disponible puis qu'on a le
reste de l'information pour avoir une bonne perspective de ce qui nous arrive
à un jour J, on a un éclairage plus approprié de la situation. Parce que, d'une manière ou d'une autre, il
y a une information qui peut être difficile à gérer, mais elle peut être rendue
publique en tout temps, de toute façon.
M.
Vaillancourt (Pierre) : Je
voudrais juste rajouter quelque chose. Les programmes de suivi, ça s'étire souvent très loin dans le temps, puis je pensais un peu
aux... L'analogie que je vois, c'étaient les brevets pharmaceutiques, où
le secret a une durée de vie dans le temps. Autrement dit, le gouvernement,
avec l'accord du promoteur, pourrait retenir l'information
pendant un certain temps, je ne sais pas, là, de cinq ans, 10 ans, je ne
sais pas. Une fois que le projet, par exemple,
atteint sa rentabilité ou peu importe les motivations, à ce moment-là
l'information devient publique au même titre que certaines autres
informations de... Peut-être que c'est quelque chose qui pourrait être
envisagé.
M.
Bolduc : Et vous parlez aussi d'un élément ici, à la page 9, vous
parlez de grand nombre d'enjeux complexes en regard de... par exemple, l'évolution des écosystèmes et des impacts
cumulatifs. Je vais faire une petite référence, puis je voudrais vous entendre comment on va gérer ça.
C'est, par exemple, l'effet du DDT sur les oiseaux insectivores qui a
fait que, 30, 40 ans plus tard,
beaucoup de nos oiseaux ont disparu ou les problèmes avec les abeilles
actuellement, etc. La plupart du
temps, on arrive avec des produits qui ne sont pas documentés sur le plan
réglementaire, donc qui sont peu connus
sur l'impact environnemental, et c'est la tradition où on passe d'un produit
réglementé à un produit non réglementé,
etc. Comment vous entrevoyez cette espèce de gestion environnementale là à
chaque fois qu'on passe à un produit non réglementé où la connaissance
n'est pas vraiment là, puis elle va prendre un temps très, très long à se préciser? De l'autre côté, les entreprises ne
peuvent pas dépenser 25 millions de dollars à chaque élément pour
déterminer, finalement, la potentialité, si on veut, d'un risque.
Mme
Fecteau (Louise) : Bien, c'est exactement une des raisons pour
lesquelles les évaluations environnementales stratégiques sont si déterminantes, parce que ça, c'est le genre de
situation — là, on
parle du domaine de l'agriculture — où on traite d'une question à une
échelle vraiment macroscopique. On a eu le même phénomène, à titre d'exemple,
avec quelque chose de plus concret, là,
qu'on a tous connu, avec les éoliennes. Il y a un paquet de questions, là, par
rapport à la... je ne sais pas, moi, de
manière générale, à la valeur des propriétés, aux effets des pales sur les
oiseaux. En tout cas, quand c'est apparu dans notre paysage, c'était
complètement nouveau. Les premiers projets qui se sont installés, les questions qui ont été soulevées par les
différentes communautés sur les retombées, les redevances, la proximité
qu'on devait avoir avec les lignes
électriques, et tout ça, c'est des questions qui sont tellement générales
qu'elles se sont répétées dans tous les projets.
Dans le
domaine de l'agriculture, à titre d'exemple, le ministère de l'Agriculture
pourrait avoir dans ses cartons un
programme de subvention ou d'évaluation de différents produits à homologuer...
ou à la Santé, à titre d'exemple, puis on pourrait avoir envie de se poser des questions sur les incidences sur
l'environnement, mais sur les autres ministères aussi, puis c'est à ça que ça sert, les évaluations
environnementales stratégiques. C'est vraiment une portée qui est
complètement différente, qui se fait au
niveau des ministères eux-mêmes, mais auxquels les experts, dans un premier
temps au niveau de la portée... Quand
on fait l'évaluation de la portée de l'étude, on invite des experts — comment je dirais ça? — à valider notre première évaluation de l'étude, puis ensuite il y a éventuellement
des consultations publiques. Ça fait qu'on se donne le privilège d'aller chercher l'opinion de toutes
les personnes concernées avant même d'adopter le programme en question.
Ça fait qu'on aurait un ministère de
l'Agriculture qui, à titre d'exemple, des fois, pense qu'il met en place un programme qui va réjouir tous les intervenants
concernés, mais il a en tête ses intervenants du milieu agricole en
particulier. Souvent, traditionnellement,
c'est comme ça qu'on fonctionne. Mais, tout à coup, il se trouve à avoir...
Comment je dirais ça? Dans un premier
temps, c'est un peu dérangeant parce que ça change notre manière de
fonctionner, on a l'impression qu'on ralentit le processus un petit peu,
mais, à terme, on a des stratégies, des plans, des programmes qui ont une
meilleure acceptabilité sociale non seulement pour les populations, mais aussi
pour les autres ministères concernés.
• (10 h 30) •
Le
Président (M. Reid) : Merci. C'est tout le temps que nous avons
du côté gouvernemental, ministériel. Alors, nous allons passer
maintenant au porte-parole de l'opposition officielle, M. le député de
Terrebonne.
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, Mme Fecteau,
M. Vaillancourt, merci beaucoup pour la présentation de votre mémoire.
J'étais tellement excité à l'idée de venir vous rencontrer ce matin, que j'ai
réussi à m'entailler en me rasant. Alors, si je vous regarde en saignant du
nez, prenez-le pas personnel. Alors, j'aimerais, tout d'abord, vous poser une première question concernant le plan... Ça
permet de détendre un peu l'atmosphère en même temps, M. le Président.
J'ai une photo officielle à faire tout à l'heure aussi. Alors, j'aimerais...
Une voix : ...profil de
gauche.
M.
Traversy : ... — profil de gauche, très bonne idée — donc vous poser une première question
concernant les études
environnementales. Vous avez parlé de l'application des EES dans le domaine des
transports et son application à l'échelle
internationale. On avait une question pour vous, on voulait vous
demander : Pouvez-vous nous expliquer un peu de quelle manière vous voyez s'opérationnaliser, là,
ce genre d'EES pour les projets de transport du Plan Nord, par exemple, ou pour les projets de
planification régionale et locale pour le développement des infrastructures? Je
voudrais juste vous entendre préciser un peu plus cet aspect-là de votre
discours.
Mme Fecteau (Louise) : Ce qu'on
retrouve de manière assez typique, là, par exemple, en Angleterre, où ça fait quand même... Je pense qu'ils en sont à leur
deuxième génération de plans de transport qui font l'objet d'EES. Il y a
des méthodologies qui ont été développées de la même manière que pour nos
études d'impact, c'est-à-dire qu'il y a des grilles
d'analyse typiques pour les plans de transport. Donc, les plans de transport
couvrent, normalement, une région ou un secteur géographique quand même bien défini, puis le promoteur, donc le
ministère des Transports, doit passer à travers une série de tamis. Autrement dit, il y a des
questions qui se posent par rapport au plan spécifique qu'il présente, et on
cherche à faire émerger, justement,
les enjeux prioritaires. Donc, un
plan de transport, à titre d'exemple, dans la région de Montréal n'a pas les mêmes enjeux qu'un plan de transport
dans la région de la Côte-Nord ou de la Montérégie. Ça fait que, selon les plans, il faut, dans un premier temps,
faire — comment
je dirais ça? — une
démarche de recherche d'enjeux prioritaires par rapport au plan en tant que tel puis, ensuite, bien, faire des
évaluations de toute la documentation disponible par rapport aux effets du plan sur différents éléments tant
environnementaux, sociaux qu'économiques. Et là, bien, on se retrouve un
peu dans une procédure qui ressemble à celle
de l'évaluation d'impacts pour le promoteur, mais le promoteur, dans le
cas dont on parle, c'est un ministère.
M.
Traversy : Parfait. J'aimerais vous poser également une
question... Bon, quand vous dites, par exemple, là, que vous souhaitez
transposer ceci à l'échelle régionale pour les EES, je voudrais voir comment
vous voyez, bien, l'uniformisation, dans le
fond, de cette pratique-là au niveau du Québec, là, dans sa totalité. Parce que
vous nous parlez des particularités,
vous nous dites qu'il y a des grilles spécifiques ou, en tout cas, des moyens
spécifiques. Est-ce que c'est possible d'uniformiser un peu ou ça va
être assez hétéroclite, là, comme façon de faire?
Mme
Fecteau (Louise) : C'est certain que, dans le secteur municipal, il
faut être réaliste. En fonction des capacités, selon la taille des différents organismes municipaux qui sont
responsables de la planification du territoire, dans le contexte de la refonte de la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme, ce qu'on émettait comme proposition, c'est que ça ne prenne
pas nécessairement la forme d'une évaluation
environnementale stratégique au sens scientifique où on l'entend, là,
avec des rapports volumineux qui ressemblent
à des rapports d'étude d'impacts, mais il faut faire au moins une évaluation
des incidences sur l'environnement du développement qui est envisagé.
Dans l'aménagement du territoire, là, les
municipalités ont des effets potentiels avec les développements domiciliaires, ou commerciaux, ou industriels sur
leur territoire, qui peuvent avoir des impacts substantiels. Puis, si on
ne fait pas un genre d'exercice semblable, bien, on peut avoir des sérieux
problèmes ou des impacts significatifs sur l'environnement. En termes
d'harmonisation, ce n'est pas nécessairement souhaitable qu'à la fin les
exercices soient similaires à l'échelle du
Québec, mais il y a une démarche qui devrait être la même, mais qui peut être,
je dirais, ajustée en termes de profondeur selon les organismes auxquels
ils s'adressent.
Puis, dans
les évaluations environnementales stratégiques régionales, on les qualifie de
sommaires ou approfondies. On peut
réaliser des évaluations environnementales stratégiques sommaires. Encore là,
on a des exemples ailleurs dans le monde,
il y a des pays qui sont quadrillés d'EES régionales. C'est une obligation
depuis des années, entre autres dans les pays européens, les schémas d'aménagement font l'objet d'EES. On a eu
une intervenante qui provenait de la France à notre séminaire du mois de mai, et elle nous a exposé
les différents outils qui sont à la disposition des communautés de la
France, puis, honnêtement, c'est
hallucinant. Ils ont vraiment développé les outils les plus utiles avec les
communautés, puis, encore là, ça fait des années qu'ils sont à les
réviser. Donc, on aurait intérêt à s'inspirer de...
M. Traversy : Avez-vous un
exemple quand vous parlez de la France, là, avec un outil qui vous a marqués
particulièrement?
Mme Fecteau (Louise) : Bien,
justement, les outils d'aide à la réalisation d'EES à l'échelle des communes.
M.
Traversy : Et j'ai besoin de vos lumières également pour
éclairer ma lanterne, étant donné que j'ai été nommé, il y a environ une semaine, à cette commission. Vous
nous dites que chaque ministère, dans le fond, devrait être responsable des EES dans les secteurs d'activité auxquels, là,
il est affilié. D'autres groupes nous ont dit souhaiter que le
ministère, dans le fond, de l'Environnement
puis du Développement durable soit le responsable — comment je pourrais dire? — attitré
de la chose. Est-ce que vous pouvez nous expliquer un peu ce qui vous a amenés
à réfléchir à cet élément?
Mme Fecteau (Louise) : Tout d'abord,
premièrement, j'ai oublié de vous féliciter pour votre nomination.
M. Traversy : Merci beaucoup.
Mme
Fecteau (Louise) : Bienvenue dans le club de l'environnement. Le
ministère de l'Environnement ne peut pas
être à la fois juge et partie, là, ça prend un organisme régulateur de la même
manière qu'on le retrouve dans les autres catégories d'activités. Le ministère de l'Environnement, ici, doit être
l'accompagnateur, celui, justement, qui élabore les outils, les guides
et qui, éventuellement, va les évaluer, les propositions d'évaluation stratégique.
On a un bon
exemple avec le ministère des Ressources naturelles, qui a lancé les
évaluations environnementales stratégiques pour la mise en valeur des
hydrocarbures dans le golfe Saint-Laurent. C'est le ministère des Ressources naturelles qui a fait le
cahier de charges, qui a supervisé l'étude, qui a piloté les consultations. Les
consultations publiques, maintenant,
peuvent être tenues avec le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement si
ça devient plus généralisé, mais on a
un ministère, donc, qui est responsable de la question des ressources
naturelles qui commande les études et qui les présente à la population, à ses collègues ministres autour de la table.
Honnêtement, c'est comme ça ailleurs. C'est comme ça qu'on présente les
évaluations environnementales stratégiques ailleurs dans le monde.
M.
Traversy : Ça me donne des bons éléments, donc,
d'éclaircissement — je vous
remercie énormément — et ça nous permet de faire l'équilibre avec
ce qu'on a entendu aussi avec d'autres groupes.
Sur la
question des informations, pensez-vous qu'on devrait définir la notion
d'information environnementale dans...
et celle du secret commercial à l'heure actuelle? Vous en avez parlé un petit
peu tout à l'heure, pensez-vous que le ministre
devrait également revoir, là, dans les articles concernés dans la Loi de la
qualité de l'environnement, bon, quelle est... les pertes sur la portée ou l'accès à l'information sur certaines
informations émises? Est-ce que vous pensez que ça devrait faire partie,
là, intégrante, là, de la discussion, mais surtout d'une modification
prioritaire, là, à votre égard?
Mme
Fecteau (Louise) : Bien, ici, on peut se référer... On a des
collègues... Enfin, j'ai pris un peu de temps pour nous présenter parce qu'on a des collègues qui se
sont présentés devant vous pour toutes sortes de... On a des collègues avocats spécialisés en droit de l'environnement,
d'autres qui sont... Bien, c'est justement dans les différents
ministères ou dans des groupes. Mais, plus
spécifiquement sur la question du droit de l'environnement, il y a eu un
excellent mémoire du conseil
québécois du droit en environnement qui réfère beaucoup à la Convention
d'Aarhus en Europe et du droit absolu d'accès
à l'information des citoyens pour la connaissance de l'environnement dans
lequel ils vivent. Ça fait que c'est certain que, dans ce contexte-là,
on aurait intérêt à s'en inspirer. Puis ce qu'on retrouve là-dedans
essentiellement, c'est que l'information qui
est liée aux procédures d'évaluation environnementale, a priori, elle devrait
être publique. Si on veut la rendre
confidentielle, il faut qu'il y ait une bonne démonstration de la nécessité de
conserver une information confidentielle, à défaut de quoi, bien, son caractère est public. Mais cette question-là
est bien documentée dans la Convention d'Aarhus, qui s'applique, encore là, depuis des années, puis qui circonscrit bien
le droit de l'accès à l'information et à la justice aussi, le droit à la
justice.
M. Traversy : Je termine en
vous remerciant puis en disant qu'on a pris bonne note également de votre suggestion sur la révision périodique, qui a
permis, dans le fond, la conclusion de votre présentation. C'est très
intéressant puis c'est porteur pour l'avenir.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Alors, je passe la parole maintenant au représentant du deuxième groupe
d'opposition, porte-parole qui a été, lui aussi, récemment nommé. À vous la
parole, M. le député de Masson.
• (10 h 40) •
M. Lemay : Merci, M. le Président.
Bonjour, Mme Fecteau, M. Vaillancourt. Content de vous rencontrer aujourd'hui, ce matin. Vous savez, plusieurs bonnes questions précédemment, mais
moi, j'aimerais quand même
poser peut-être deux, trois questions si on a le temps.
Vous parlez, à
la page 2 de votre mémoire, là, en entrée de jeu, que... En fait, c'est un
souhait, là, du gouvernement aussi,
là, de rendre le processus plus efficace et plus prévisible pour les
initiateurs de projets et la population
concernée par ces projets. On a entendu plusieurs groupes venir nous parler en commission,
entre autres, de guichet unique, de qu'est-ce
qui se passe avec les directions régionales, de voir que le ministère
soit un partenaire. Est-ce que vous, là, vous pourriez m'en parler un
peu plus, là, c'est qu'est-ce que vous auriez comme propositions à faire au
niveau de rendre le processus plus efficace, plus accessible en particulier?
Mme
Fecteau (Louise) : Bien, en
fait, les solutions, elles se trouvent pas mal dans le livre vert, là, il y a...
Je ne peux pas vous citer les pages en particulier, mais toute la notion
d'accompagnement du ministère, dès le début du processus, là, ça, ça a fait
l'objet, justement, de discussions à notre congrès sur l'efficacité de la
procédure. Il y avait beaucoup d'insatisfaction par rapport aux allers-retours
au fil du temps entre le ministère de l'Environnement et les promoteurs ou les demandeurs, quels que soient les
sujets à l'étude, et une des propositions par rapport à ça, c'est qu'il
y ait vraiment une bonne compréhension des
enjeux dès le démarrage d'une étude ou d'une demande. Ça, c'est la
première des choses.
Puis aussi on a vu aussi plusieurs groupes, là,
réclamer une meilleure uniformisation de la compréhension à travers les directions régionales. Ça, je pense,
c'est un enjeu. Ce n'est pas nécessairement écrit comme tel dans le
document, mais c'est quelque chose sur lequel il faut travailler, c'est clair,
là.
M.
Lemay : Alors, seriez-vous en faveur de l'instauration d'un guichet
unique si jamais ça pouvait passer par là, la résolution de ce
problème-là?
Mme
Fecteau (Louise) : Bien, je pense qu'on ne peut pas être contre l'idée
d'avoir un seul passage pour aller chercher le maximum d'information.
M. Lemay : O.K. Merci.
M. Vaillancourt (Pierre) : On aurait
une harmonisation aussi, d'une certaine manière.
M.
Lemay : Oui, super. Un peu plus loin, vous mentionnez, à la page 4 de
votre document, que, dans le fond, il y
a «une unanimité [qui] émerge aujourd'hui quant au besoin de l'assujettir à une
approche explicitement régionale et stratégique...»
Bon, vous en avez parlé amplement précédemment, mais vous mentionnez aussi les
effets environnementaux cumulatifs.
Puis ça, bien, on comprend, là, que ça relève, là, des évaluations d'impacts,
là, mais, tu sais, pouvez-vous dire à la
commission pourquoi, plus spécifiquement, on devrait tenir compte des effets
cumulatifs? Parce que je ne crois pas que ça soit le cas si on n'en tient pas compte. Donc, votre proposition,
est-ce que vous avez quelque chose à rajouter sur les effets cumulatifs?
Mme
Fecteau (Louise) : Oui. Ça, c'est une obligation qui est faite au
promoteur de projet de faire, justement, une évaluation des impacts cumulatifs. Mais, quand on y pense, c'est
pratiquement impossible pour un promoteur avec un projet spécifique de faire ce genre d'évaluation
là parce que, là, la question qui se pose, c'est sur quelle portée, dans
quel horizon de temps, et tout ça. Ça ne
peut pas se faire autrement — comment je dirais ça? — pour avoir une évaluation de qualité,
que de le faire à l'échelle régionale.
Puis, à titre
d'exemple, si on prend l'exemple de la Côte-Nord, où on a des projets qui se
sont ajoutés les uns après les
autres, on est arrivé à un point où, à un moment donné, on a demandé à un
prometteur de faire une évaluation sectorielle de son projet sur la santé des populations pour des années à venir.
Bien, le promoteur, il va le faire parce que c'est demandé, puis,
éventuellement, il veut aboutir avec son projet. Mais on s'entend que, dans les
évaluations de suivi, la santé de la
population, elle dépend d'un paquet d'autres projets sur le même territoire que
du sien. Ça fait que ce qu'on écrivait aussi dans le mémoire, c'est que, quand on y pense deux secondes, là, si on
pouvait à la fois avoir des évaluations au bon niveau, donc stratégiques par les ministères, régionales
par les organismes municipaux responsables de la planification du
territoire, par projet par les promoteurs, puis que toutes ces informations-là
seraient rendues disponibles, il y ait une fluidité de l'information, là on
aurait les informations à la bonne place par les bons émetteurs de données qui
pourraient rendre l'ensemble plus efficace.
Ça fait que c'est un peu ça, dans le fond, l'idée d'avoir des évaluations régionales
pour avoir au bon endroit l'évaluation des effets cumulatifs.
L'autre chose, c'est que les promoteurs ne
connaissent pas tous les projets sur un territoire. Il y en a qui ne sont même pas publics, ça fait que comment il
fait, lui, là, pour avoir une évaluation de qualité à partir du moment où
il n'a même pas accès à toute l'information
disponible sur un territoire donné? Ça fait que c'est pour ça qu'on dit que
tout est lié, l'ensemble des éléments qui
sont inclus dans le livre vert doivent pratiquement se réaliser de manière
simultanée pour que l'ensemble soit efficace puis soit satisfaisant pour
l'ensemble des parties.
M.
Lemay : Bien, merci. Donc, on en prend bonne note. Et l'effet
simultané de toutes les mesures, effectivement, ça sera tenu en
considération. Merci beaucoup.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Et merci pour votre contribution à nos travaux.
Alors, je lève la séance quelques instants pour
permettre à nos prochains invités de prendre place.
(Suspension de la séance à 10 h 45)
(Reprise à 10 h 48)
Le
Président (M. Reid) :
Alors, je souhaite maintenant la bienvenue à nos invités de la Chaire de
recherche du Canada en droit de l'environnement de l'Université Laval. Alors, vous connaissez la routine, vous avez 10 minutes. Nous
allons, par la suite, procéder à un échange avec les membres de la commission.
Et je vous demande de vous présenter et présenter la personne qui vous
accompagne pour les fins de l'enregistrement, et à vous la parole.
Chaire de recherche du
Canada en droit de
l'environnement de l'Université Laval
Mme Halley
(Paule) : Merci. Bonjour, M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs, membres de la commission. Mon nom est Paule Halley. Je suis
professeure de droit de l'environnement à l'Université
Laval et titulaire de la Chaire de recherche du Canada
en droit de l'environnement. Je suis accompagnée d'Aurélie-Zia Gakwaya. Elle
est chercheure associée à la chaire et elle a participé à la rédaction du
mémoire.
C'est avec beaucoup
de plaisir et beaucoup d'intérêt que nous participons à la consultation sur le livre vert. Cette participation cadre parfaitement avec
les objectifs de la Chaire de recherche du Canada en droit de l'environnement, qui est de participer au développement d'un droit de l'environnement qui soit efficace, légitime et effectif et qui
s'inscrive dans la mise en oeuvre du développement durable. Donc, le mémoire qui a été préparé a été réalisé
de manière à appuyer le gouvernement
du Québec dans son projet de modernisation
de même qu'à mettre l'expertise que
nous avons développée en droit de l'environnement au service de ce
projet.
Dans un
premier temps, le mémoire attire l'attention sur les importants développements
qu'a connus le droit de l'environnement
sur la scène internationale, dans la jurisprudence canadienne ainsi que dans
des lois qui ont été adoptées récemment,
la Loi sur le développement durable, la Loi affirmant le caractère collectif
des ressources en eau et la Loi sur l'aménagement durable du territoire
forestier. Ces développements, qui ont eu lieu depuis les 40 dernières années,
sont absents de la LQE et de ses régimes d'autorisation environnementale, qui
ont été adoptés en 1972 et 1978, et ils devraient être
introduits dans une loi sur la qualité de l'environnement modernisée. Nous
avons donc examiné les propositions du livre
vert en ayant à l'esprit ces développements du droit de l'environnement et nous
avons formulé nos observations et suggestions dans cette perspective.
Dans
un deuxième temps, le mémoire s'arrête de manière plus significative sur deux
orientations, l'orientation 2 et l'orientation 3.
Je vais céder la parole
à Aurélie-Zia.
• (10 h 50) •
Mme
Gakwaya (Aurélie-Zia) :
Donc, d'abord, quant à l'orientation 2, nous tenons à saluer la proposition de doter le Québec d'un régime encadrant spécifiquement les évaluations environnementales stratégiques.
Par contre, pour ce qui est des principes du développement durable, nous
croyons que la proposition, telle que formulée, apparaît insuffisante pour intégrer le développement
durable ainsi que ses principes dans la Loi sur la qualité de
l'environnement. Nous suggérons, à l'instar
des récentes lois québécoises sur le développement durable, sur l'eau ou sur
les forêts, que la LQE soit dotée d'un préambule, d'objectifs clairs,
ainsi que des principes directeurs du développement durable.
Quant
à ce dernier aspect, nous proposons spécifiquement l'introduction dans la LQE
de sept principes, soit le principe
de prévention et de correction, le principe de précaution, celui du
pollueur-payeur, celui d'accès à l'information, celui de participation du public, celui de conservation de la diversité
biologique, ainsi que celui du respect de la capacité de support des écosystèmes. Vous pouvez aller voir
aux pages 7 et 8 de notre mémoire si vous voulez avoir plus de détails
spécifiquement sur ces principes.
Mme Halley
(Paule) : Alors, je poursuis avec l'orientation 3, qui est relative à
la modulation des régimes d'autorisation en
fonction du risque. Il nous apparaît qu'il n'est pas certain que la notion de
risque soit la plus appropriée si on souhaite que la législation
québécoise soit compatible avec les conventions internationales et les autres
droits nationaux qui retiennent la notion
d'impact sur l'environnement pour moduler les régimes d'autorisation. À ce
sujet, le mémoire souligne les
différences importantes à faire entre la notion d'impact et de risque et
suggère fortement de retenir la terminologie admise en matière
d'évaluation environnementale, à savoir fonder la modulation sur les impacts.
La
dernière partie du mémoire est consacrée aux commentaires plus particuliers sur
les autres orientations du livre vert.
Nous appuyons la première orientation du livre vert, consacrée à la prise en
compte de la lutte contre les changements climatiques, et le mémoire souligne l'importance de prendre en compte
les enjeux entourant l'adaptation aux changements climatiques dans
l'évaluation environnementale des projets.
Nous
appuyons l'orientation 4, consacrée à l'amélioration de l'accès à l'information
environnementale. Et, dans le mémoire,
nous faisons certaines propositions entourant le principe de participation
publique afin de retenir les meilleures pratiques en la matière. Et le mémoire de la chaire met en évidence que
la médiation et la participation du public sont de nature différente et qu'elles visent des objectifs
et des personnes différentes, et, par conséquent, elles ne peuvent pas
se substituer une à l'autre. Il nous
apparaît que la médiation est un mécanisme volontaire et complémentaire à la
participation du public. Le mémoire met également en évidence que l'accès à
l'information ne peut pas se substituer à la période d'information du public qui accompagne la consultation, car il s'agit de
droits distincts. Enfin, nous suggérons, par équité, d'élargir les
règles de participation du public appliquées aux autorisations de forage dans
le shale et aux fracturations hydrauliques à l'ensemble des autorisations
environnementales de l'article 22.
Quant
à l'orientation 5, nos observations se concentrent sur la proposition consacrée
à l'encadrement du pouvoir du ministre
d'imposer des conditions, et nos observations suggèrent de s'inspirer fortement
des articles 31.76 à 31.78 de la LQE qui encadrent actuellement les
pouvoirs d'autorisation en matière de prélèvement des eaux. Ce régime est très
explicite, et les autres autorisations environnementales de la LQE gagneraient
à être encadrées de cette façon. Nous suggérons également dans le mémoire que
les autorisations soient révisées de manière périodique et que, lorsqu'elles
sont délivrées, elles aient une période de validité à l'expiration de laquelle
elles deviendraient caduques.
Sur le thème des
responsabilités à partager entre le ministre et les initiateurs de projets, le
mémoire aborde les propositions de manière
plus technique, en termes juridiques, afin de voir de quelle manière la loi
pourrait énoncer de manière claire qui fait quoi à chacune des étapes du
processus décisionnel, c'est-à-dire la demande, l'évaluation et la décision. Et on trouve dans la littérature des exemples qui illustrent qu'on
peut, dans les termes de la loi, s'assurer de faire supporter le fardeau
de preuve à l'initiateur du projet, et de persuasion et de fiabilité de l'information,
il s'agit que la loi soit libellée de cette façon afin que ça ne soit pas sous
silence et que les fardeaux soient correctement partagés.
Enfin,
le mémoire commente la priorité accordée
à la prestation de service auprès des initiateurs de projets, et nous
soumettons à votre attention nos commentaires à ce sujet.
Voici
l'essentiel des observations que nous souhaitions partager à l'occasion
des consultations sur le livre vert. Nous vous remercions
de votre attention et sommes à votre disposition pour répondre à vos questions.
Le
Président (M. Reid) :
Merci beaucoup pour votre présentation. Nous allons maintenant
passer à la période d'échange et nous allons commencer avec le côté ministériel.
Je donne la parole à M. le ministre.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, Pre Halley, Mme Gakwaya. Ça fait
plaisir de vous revoir. Dans le cas
de la professeure, vous nous avez fait part, dans le cadre de
représentations d'un autre groupe la
semaine dernière, notamment de vos préoccupations par
rapport à la proposition, là, sur la catégorisation basée sur le risque environnemental. Je vais y revenir un peu plus tard,
je voulais d'abord parler de votre proposition de
préambule en matière
d'intégration des principes de développement
durable. Vous nous faites une proposition de préambule basée sur sept énoncés,
alors que l'article 6
de la Loi sur le développement durable prévoit 16 énoncés de principe en termes
de développement durable. Ma première
question, ça serait de vous demander comment vous conciliez... Parce qu'il y a
évidemment... dans votre proposition,
il y a des absents par rapport à la Loi sur le développement durable, comment
avez-vous choisi d'exclure certains principes de développement durable
et en favoriser d'autres dans votre élaboration de préambule?
Mme Halley
(Paule) : Pour nous, il est
évident que la Loi sur le développement durable va continuer à exister
puis à s'appliquer à l'ensemble de
l'Administration, mais les principes qui sont formulés dans la Loi sur le
développement durable sont formulés en
termes très peu contraignants, ce sont des énoncés généraux. On a vu que, pour
la Loi sur l'eau, le législateur a introduit des principes qui sont
similaires, mais qui sont formulés en termes de droits et de devoirs, donc qui
ont une portée juridique beaucoup plus précise et qui peuvent donc même fonder
des demandes et des recours.
Quant aux
choix que nous avons faits, c'était difficile. Évidemment, on n'avait pas de
projet de loi. Nous avons visité des
législations, comme la législation française par exemple, et nous avons aussi
visité la Loi sur l'eau pour retenir des principes qui sont plus particulièrement des principes qu'on va dire
sous le volet environnemental plus que les principes qui seraient sous
le volet économique ou le volet social. Ça a été de cette façon dont on a
retenu, là, les principes. Puis, suivant
notre étude que nous avons faite, là, du droit international, des
développements des 40 dernières années, là, en matière de protection
environnementale, et, vu que c'est la mission de cette loi, qui est d'assurer
la protection de l'environnement, on a pensé
que ces principes-là gagneraient à être introduits puis à être formulés en
termes de droits et de devoirs, et
non pas en termes d'énoncés généraux, plus interprétatifs, comme dans la Loi
sur le développement durable.
Et ce sont
des principes qu'on retrouve dans les législations des pays européens, et le
principe de précaution devient très
important lorsqu'on veut introduire les changements climatiques, la question
d'adaptation. On le voit même avec les prélèvements en eau dans la Loi
sur la qualité de l'environnement. Pollueur-payeur, bien, c'est un principe qui
date de 1972 et qui est maintenant bien
intégré dans... le fait d'intégrer... le fait le prélever, là, sur
l'environnement... ou d'ajouter à l'environnement des charges
polluantes.
M. Heurtel : ...vous ne craignez
pas... Pardon, voulez-vous ajouter quelque chose?
Mme Gakwaya (Aurélie-Zia) :
J'ajouterais peut-être un...
M. Heurtel : Oui, oui, pardon.
Mme Halley (Paule) : Excusez-moi,
j'ai oublié de passer la parole.
Mme Gakwaya (Aurélie-Zia) :
J'ajouterais peut-être un petit quelque chose, simplement le fait que, dans la manière dont on a formulé nos suggestions, il s'agirait
de doter la LQE à la fois d'un préambule, à la fois d'objectifs clairs et de principes. Donc, les principes que nous
proposons, qui sont vraiment... nous avons choisi sept principes que
nous trouvons fondateurs, seraient indépendants du préambule.
• (11 heures) •
M.
Heurtel : Je comprends. Mais, encore une fois, vous ne trouvez pas
que, si on suit votre suggestion, il y aurait un risque de créer une hiérarchisation par rapport à la Loi sur le
développement durable? C'est parce que le développement durable, veux
veux pas, puis la protection de l'environnement, il y a un aspect économique.
Dans les travaux de la commission, on a entendu plusieurs groupes qu'on
pourrait catégoriser comme étant plus à vocation économique qui sont venus nous parler aussi de la nécessité de tendre
vers un équilibre entre les trois grands principes de développement durable, et donc ce que j'entends, c'est que, là, le législateur s'est exprimé en 2006 en établissant
16 principes. Là, si je comprends bien
votre proposition, c'est qu'on en prend quelques-uns, et on crée une
hiérarchisation, il y en a certains qui sont plus importants que
d'autres.
Mme Halley (Paule) : C'est des lois
qui n'ont pas la même fonction, ils n'ont pas le même objectif. La Loi sur le
développement durable vise les actes de l'administration publique, et la Loi
sur la qualité de l'environnement vise la
protection de l'environnement contre des activités économiques. Ça fait que
c'est évident que les gens qui ont des droits
de propriété, etc., veulent avoir les autorisations, mais la vocation de cette
loi-ci, c'est de protéger l'environnement. C'est ça, sa fonction, son
mandat, et il y a d'autres lois qui vont être à vocation de développement.
Alors, dans
cette loi-ci, on ne s'adresse pas à l'administration publique. L'administration
publique, elle va l'avoir, sa Loi sur
le développement durable, elle va devoir continuer à avoir des plans, à voir le
gouvernement développer une stratégie. Mais là ces principes et ces
droits vont s'appliquer aux promoteurs aussi, vont s'appliquer aux citoyens en
général et vont être porteurs de décisions qui vont pouvoir être revues, être
contestées. Ça va encadrer la discrétion administrative
en matière de protection de l'environnement. C'est la mission de cette loi, il
y a d'autres lois qui sont à vocation
de développement économique. Je trouve qu'il est important que cette loi-cadre
de protection de l'environnement ait des dents, et soit outillée, et ait
la terminologie de ce qu'on retrouve à travers le monde aujourd'hui dans les
États développés.
M. Heurtel : ...bien vous
comprendre. Vous avez dit : La Loi sur la qualité de l'environnement est
contre le développement économique?
Mme Halley (Paule) : Non, elle n'est
pas contre.
M. Heurtel :
C'est parce que je vous ai entendue dire ça.
Mme Halley
(Paule) : Non, mais c'est parce qu'elle, son mandat, sa mission, c'est la
protection de l'environnement, et, en fait, on veut que le développement
économique se fasse dans le respect de cette loi-là pour assurer que le développement soit durable. Donc, ça prend au
moins des instruments... À un certain moment, on s'arrête plus
d'intégrer dans les projets de développement
économique les aspects environnementaux et les impacts de ceux-ci par le biais
de cette législation. Donc, cette législation, elle est faite pour
accompagner le développement en s'assurant d'intégrer dans le développement les
questions environnementales, et il est important d'avoir des principes qui
guident les décideurs. Ça va permettre de moderniser la loi et d'avoir plus de
garanties juridiques et de certitudes en matière de protection
environnementale.
M. Heurtel : Donc, bon, sur les
16 principes, au niveau des évaluations environnementales, donc, si je
vous suis bien, on ne devrait pas tenir compte de l'article 6d de la Loi
sur le développement durable, qui parle d'efficacité économique — puis je
le cite : «L'économie du Québec et de ses régions doit être performante,
porteuse d'innovation et d'une
prospérité économique favorable au progrès social et respectueuse de
l'environnement» — ni de
6p : «"Internalisation des
coûts" : la valeur des biens et des services doit refléter l'ensemble
des coûts qu'ils occasionnent à la société durant tout leur cycle de
vie, de leur conception jusqu'à leur consommation et leur disposition finale.»
Alors, ça, vous trouvez que, pour la LQE... Ça,
c'est deux exemples, là, je pourrais en citer d'autres, mais ces deux
principes-là, on ne devrait pas en tenir compte dans le régime d'évaluation
environnementale?
Mme Halley
(Paule) : Ce n'est pas ce
que je souhaite souligner. Le principe d'internalisation des coûts,
pollueur-payeur est un exemple. C'est des principes
qui sont, somme toute, similaires, sauf pour l'internalisation des coûts,
c'est un principe plus général.
Pour le
pilier du développement durable, le développement économique, moi, je suis tout
à fait en accord que les demandes de
projets soient des projets qui soient porteurs de développement économique qui
soit soutenable au Québec. Mais, le
moment où on s'arrête pour examiner ce caractère de durabilité, bien, on espère
que le projet va être économiquement
viable, mais on va demander à certaines autorités publiques de regarder
certains volets particuliers d'un développement pour qu'il soit viable,
qu'il soit durable, notamment sur les questions d'écologie et de respect des générations futures. Et ça, c'est probablement le mandat de ce ministère qui est responsable de cette loi sur la
protection de la qualité de l'environnement.
M.
Heurtel : À la page 10
de votre mémoire, vous considérez que — puis
là je cite — «la
modulation des régimes d'autorisation
en fonction du risque pourrait élever le niveau d'assujettissement des projets
et représenter un recul par rapport à la situation actuelle». Pourriez-vous nous donner des exemples
concrets quand vous dites «recul»? Alors, sur quoi vous basez-vous pour affirmer que ça serait un
recul? Puis je chercherais à obtenir des exemples concrets entre le
régime actuel puis ce que vous prévoyez par la suite si on va de l'avant avec
le régime basé sur le risque.
Mme Halley
(Paule) : Je pense
que la première... On a eu cette discussion-là avec le régime nordique, là, de
la Convention de la Baie James.
Pour le sud, on peut penser que, s'il
y a des activités qui sont aujourd'hui classées comme étant
assujetties à l'évaluation, l'examen des impacts et à une autorisation du gouvernement, possibilité de faire intervenir le BAPE, que, s'il y a une activité qui est là, et compte tenu qu'on considère qu'on contrôle bien, là, les risques de cette activité, on va la sortir de la liste pour la
soumettre à une déclaration de conformité ou à une autorisation de 22. Bien
là, cette notion-là, ce niveau-là de risque,
dire : Bien, ça, c'est un risque, somme toute, qui est bien puis qui est
mineur, ou léger, ou moyen... les
risques moyens, donc on va le faire descendre à la catégorie de 22, bien là ça,
c'est qu'on recule, là. Une activité qui, peut-être ailleurs à
travers le monde... peut-être que le Canada s'est engagé aussi à ce que cette activité-là soit soumise à une évaluation des
impacts, et non pas à une évaluation du risque, et qu'elle soit
accompagnée ou pas d'une participation du
public, bien là on sent que, pour ce projet-là, on a eu une perte au niveau du
projet, là, de participation du
public et de participation, là, des parties prenantes au développement général,
développement... et local.
M.
Heurtel : Encore sur ce point, vous ne pensez pas, justement, qu'en
ayant une notion de risque, justement, ça nous permettrait d'aller un peu plus loin, puis notamment, sur certains
petits projets, justement, ça nous permettrait de considérer notamment
la notion d'effets cumulatifs et nous permettre, justement, de peut-être
considérer un risque plus grand?
Je comprends
que vous le voyez d'un côté négatif, mais moi, il me semble que la notion du
risque peut nous donner plus de
flexibilité également et nous permettre, justement, de prendre un projet qui
pourrait, vu en silo, comme étant mineur à sa face même... mais justement, si on regarde l'ensemble du risque
puis on intègre la notion d'effets cumulatifs, bien là on pourrait,
justement, trouver là un risque plus important.
Mme Halley
(Paule) : En fait, ça dépend
toujours comment on définit la notion de risque. La notion de risque, dans ce que nous avons trouvé comme définition
dans les documents plus de nature juridique et dans les dictionnaires,
les risques visent un danger, alors qu'actuellement, dans les conventions
internationales, dans les droits nationaux, la modulation des autorisations
environnementales se fait au niveau des impacts. Et les impacts, on peut
toucher à des impacts sociaux, des impacts
environnementaux que, même s'il y a un risque qui est plutôt faible suivant où
l'activité a été entreprise...
Donc,
c'est des notions qui sont différentes et qui, somme toute... On gagnerait au
Québec à utiliser les expressions, les
terminologies utilisées. Ça va dans le sens de l'harmonisation des
législations. Ça fait aussi en sorte qu'on se comprenne mieux, qu'il n'y ait pas des débats sur ces
notions. Et, comme nous le soulignons à la page 10, hein, «la notion
d'"impact," [qui] est retenue dans
la terminologie du droit international, a une portée différente que celle
proposée par [...] la notion de "risque". Dans le domaine
juridique, le risque est, entre autres, défini comme la "mise en danger ou
en péril", [...] un "événement
dommageable dont la survenance est incertaine quant à sa réalisation ou la date
de cette réalisation"», etc.
Donc, c'est
plus la sécurité, ce sont des... vise la sécurité comme concept, notion, alors que, parmi les
impacts, il peut y avoir des enjeux de
sécurité. Donc, quand on évalue puis qu'on examine les impacts d'un projet, on
tient compte d'un des éléments. Donc,
ce n'est pas les impacts qui sont inclus dans l'évaluation du risque, c'est le
contraire. Et je crois que c'est important que la loi utilise des
terminologies qui sont connues, qui sont utilisées de cette façon-là et
qu'on... Je comprends, par ailleurs, que, des technologies qui soient très connues, qu'on veuille les
retirer des évaluations qui sont plus lourdes pour le ministère,
mais il faudrait quand même faire attention aux vocables qui seront utilisés
dans la loi et au fait que même des risques faibles...
Vous le
savez, le Commissaire de l'environnement de l'Ontario, qui a suivi les
modifications similaires apportées dans
la législation ontarienne, le soulève, il est très mystérieux de savoir comment
vont être pris les impacts cumulatifs lorsqu'on
fait la modulation des autorisations par le risque pour les projets à faible
risque, pour les effets cumulatifs. Puis, quand on est venu pour le CCEK, on a souligné que ça ne devrait pas
s'appliquer dans le Nord parce qu'il y a des milieux qui sont vraiment fragiles, le pergélisol, il
fond, etc. Donc, il y a des questions de lieu qui sont très importantes
lorsqu'on développe, là, des activités.
• (11 h 10) •
Le
Président (M. Reid) : Merci. M. le député de Mégantic, vous
avez une minute, un peu plus d'une minute.
M.
Bolduc : Ah, mon Dieu! Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames. Ça
me fait plaisir de vous avoir ici. Moi, je voudrais juste avoir un petit résumé simple, parce qu'on n'a pas
beaucoup de temps, sur vraiment quelle est la distance qu'on a à franchir entre notre situation actuelle
et le droit... ou l'environnement international auquel vous nous
demandez de se rapprocher. Est-ce qu'il y a beaucoup de travail à faire ou si,
dans l'ensemble, ça ne devrait pas être trop difficile?
Mme Halley
(Paule) : Nous sommes très
heureux, comme juristes, de voir les dernières législations qui ont été adoptées par l'Assemblée législative du Québec.
Pour ce qui est de la Loi sur le développement durable, la loi sur l'eau
et la loi sur la foresterie, le développement durable de...
Mme Gakwaya (Aurélie-Zia) :
Aménagement durable du territoire forestier.
Mme Halley (Paule) : Je te remercie.
Alors, on voit qu'il y a des choses qui peuvent être faites. L'ajout d'un
préambule, des objectifs clairs, des principes, ce serait déjà une bonne façon
de moderniser la loi puis peut-être, à l'occasion, là, ajouter des mots qui ont
fait leur apparition depuis son adoption, «biodiversité»... «Développement
durable», il n'apparaît qu'une seule fois dans la loi si on enlève la
référence au nom du ministère. Donc, de s'assurer, là, qu'on lui fait, mettons,
une petite rénovation de fond, là, pour la mettre à l'heure, là, du droit
international, je ne crois pas que ce soit une tâche qui soit si colossale.
M. Bolduc : Merci.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Alors, nous allons passer maintenant à M. le député de Terrebonne pour
l'opposition officielle.
M. Traversy : Merci beaucoup,
M. le Président. Merci, mesdames, de cette présentation exhaustive et très
rigoureuse de la LQE.
Je vais
commencer avec la question des principes parce qu'il semblerait que c'est un
aspect important de votre mémoire,
cette réduction de 16 à sept principes. Le ministre vous a posé quelques
questions, j'en aurais aussi également. À savoir, comment vous voyez la cohabitation? Tu sais, on parlait tout à
l'heure, là, d'efficacité économique versus, par exemple, le principe de précaution. Et là on voit qu'il y en a certains
qui disparaissent, et, même dans ceux qui restent, je voulais juste m'assurer avec vous, est-ce que vous
avez réfléchi à l'espèce d'équilibre dont on parle depuis le début pour
voir si la cohabitation entre ces principes-là vous semble harmonieuse ou s'il
y en a qui prédominent sur d'autres? Visiblement, je vois que l'économie est
peut-être un petit peu moins visible, là, qu'elle l'était auparavant. C'est
donc volontaire de votre part, et je voulais
vous entendre plus spécifiquement là-dessus. Je pense que Mme Halley en a
parlé un peu tout à l'heure, mais je voulais
que vous approfondissiez pourquoi le côté économique ne devrait pas
disparaître, mais, disons, laisser plus de place à d'autres principes à
l'intérieur de ce dit projet de loi.
Mme Halley (Paule) : En fait, les
principes qui sont là, pour plusieurs, ils s'appliquent déjà en matière de protection de l'environnement. Le principe de
prévention et de correction est déjà appliqué, c'est la raison pour
laquelle on fait des autorisations environnementales préalables. Et il y a donc
aussi dans le projet de modernisation des propositions
qui se fondent sur des principes comme l'accès à l'information. Il est déjà
présent dans le livre vert. Le principe de participation publique l'est également. Il est dans la Loi sur la
qualité de l'environnement depuis 1978, mais il n'est pas énoncé clairement. Mais il est présent avec
les audiences du BAPE, avec les registres, avec l'accès à l'information environnementale. C'est
simplement le révéler. C'est peut-être plus facile de le lire aussi pour le
citoyen quand il voit sa Loi sur la qualité de l'environnement, c'est
déjà présent.
Et la capacité de support du milieu puis de
conservation de la diversité biologique, écoutez, c'est ça, protéger
l'environnement, s'assurer que les espèces menacées ne le soient pas davantage
et que les écosystèmes ne soient pas détruits.
Puis je pense que ça, si ça n'est pas respecté, les décisions seraient
illégales, elles seraient en dehors du mandat de la LQE. Ça fait que ça, c'est déjà présent, mais c'est juste que ça
l'affirme et ça guide l'interprétation législative, ça guide le
processus décisionnel.
Là, il y a,
évidemment, le principe de précaution qu'on peut peut-être interroger, mais on
l'a déjà introduit dans la LQE pour
les prélèvements en eau. Puis on est très préoccupés, dans le livre vert, des
changements climatiques, ça va ensemble.
Quand on lit les travaux du GIEC, il faut travailler dans l'incertitude. Moi,
je l'ai travaillée, la question des changements climatiques avec les
questions hydriques, puis c'est ça, le message, il faut travailler dans
l'incertitude. Donc, ça m'apparaît qu'une décision aujourd'hui en matière
environnementale dans un contexte de changements climatiques va avec.
Puis
pollueur-payeur, il est déjà présent aussi, exprimé fortement par les tarifs,
par les responsabilités qu'il leur impute. Ça aussi, c'est présent, mais
c'est simplement révélé davantage.
Et je suis
d'accord qu'il y a... les autres principes de la Loi sur le développement
durable ne vont pas être effacés, ils
vont continuer à s'appliquer à l'administration publique lorsqu'elle va prendre
des décisions, lorsqu'elle va élaborer des projets de modification de
lois comme... On pourrait penser à la suite du livre vert, elle a sa mission de
faire cela.
Et, si j'en
ai oublié, je m'en excuse. Et on s'est basés sur ce qu'on a vu ailleurs pour
s'arrêter puis comme avoir un... se
garder des idées aussi pour le projet de loi qui va être déposé à un certain
moment donné. Et nous avons notamment consulté
le code de l'environnement français. Et nous avons commencé avec ça, et ensuite
on est allés voir les principes, on s'est
assurés de notre cohérence. Et, somme toute, ils sont déjà présents dans la
protection juridique de l'environnement qu'on retrouve dans la LQE, mais ils seraient mentionnés, et c'est une
façon moderne de... Quand on travaille plus sur des objectifs, hein, de
protection, d'amélioration de l'environnement, ça fait un cadre qui guide le
processus décisionnel.
M.
Traversy : Donc, je vous remercie pour ces précisions. On
comprend la préséance, là, à l'intérieur de votre volonté, du livre.
J'aimerais
vous poser une question concernant les études environnementales stratégiques.
Vous avez, dans le cas concernant,
bon, l'encadrement des études environnementales stratégiques, fait mention que
vous pourriez peut-être nous illustrer
les balises ou l'importance que vous voulez y accorder. Je voudrais juste que
vous nous... On a reçu, dans le fond, avant
vous le groupe de l'Association québécoise pour l'évaluation d'impacts, et
j'aimerais que vous nous mettiez un peu plus clairement, dans le fond,
votre proposition sur les EES, là, concernant un peu les balises que vous
voulez voir encadrées. Vous en parlez un peu dans votre mémoire, mais je
voulais vous entendre là-dessus.
Mme Halley (Paule) : En fait, nous
n'avons pas travaillé en profondeur cette orientation. Nous savons que d'autres groupes sont venus puis qu'ils ont des
approches bien définies, comme l'association québécoise d'évaluation environnementale. Et, dans notre mémoire, on le
salue parce qu'on est contents de l'idée de doter le Québec d'un cadre formel pour en faire, et qu'il y a toutes sortes
de façons d'en faire, des évaluations environnementales stratégiques,
puis on recommande que ça soit fait avec les
meilleures pratiques puis que ça soit fait aussi en amont, en amont des
projets.
Mais, sur l'architecture particulière, on a
préféré vous renvoyer, la commission, au mémoire du Centre québécois du droit de l'environnement, que nous
avons eu l'occasion de prendre connaissance de leur mémoire, et, les suggestions qu'ils ont formulées à cet effet-là,
nous souhaitons donc les appuyer. Mais certainement que nous sommes très
heureux, là, de savoir qu'on va avoir une procédure d'évaluation
environnementale stratégique dans la loi.
• (11 h 20) •
M.
Traversy : En ce qui concerne la notion de risque et impact, vous avez discuté tantôt avec le gouvernement,
vous dites dans votre mémoire
que c'est non conforme au droit international ou, du moins, c'est... Vous n'êtes pas le
premier groupe à venir nous manifester votre
inquiétude sur la subjectivité de ce qui pourrait être une notion de risque.
Vous qui êtes en droit, j'aimerais ça
encore que vous nous expliquiez d'une façon concrète les avantages d'y aller davantage
avec une notion d'impact plutôt qu'une notion de risque juste pour la
compréhension du public qui nous écoute et moi-même.
Mme Halley
(Paule) : Bon, il peut y
avoir des avantages, des désavantages suivant... Les avantages de quelle
nature? On les cherche, là, économiques ou... Mais nous, on est des juristes de
l'environnement, donc on voit ces notions-là
dans un cadre qui existe déjà. Donc, il
y a déjà beaucoup
d'information sur l'évaluation environnementale des projets.
Ça fait 40 ans que le Canada signe des conventions, prend acte de déclarations. Le Québec est très volontaire aussi derrière ces
signatures. Et on retrouve dans ces textes des notions. Et la notion qui a été
retenue pour moduler les autorisations
environnementales, c'est la notion d'impact. Et là, lorsqu'on
les définit et qu'on définit la notion de risque, on voit que ce sont des notions distinctes et que
la notion de risque est généralement incluse dans une évaluation des impacts
d'un projet, et donc on trouve que ce serait préférable que la législation soit
conforme à ce qu'on retrouve dans ces engagements, hein, ces engagements et
que, donc, on recommande en droit d'utiliser les concepts, les terminologies
qui sont retenus.
Et, par ailleurs, on voyait bien que, la modulation qui était proposée par le livre vert,
le seul nouveau régime, c'est le régime
de déclaration de conformité. Est-ce que, si ce seul régime
là était basé sur la notion de risque... Bon, peut-être qu'il n'y aurait pas
d'impact sur les engagements qui ont été pris, par ailleurs, à évaluer des
impacts. Il faudrait s'assurer que, dans ces activités, elles ne sont
pas visées par ces textes internationaux dans lesquels on s'engage à évaluer
leurs impacts. Et, si
c'est le cas, bien, ce serait quand même important de définir qu'est-ce que
c'est que cette notion de risque faible
et les conditions qui vont encadrer... Nous avons mis dans le mémoire des
préoccupations qui étaient ressorties du Commissaire à l'environnement de l'Ontario, s'assurer, là, que la loi
encadre ce processus de déclaration de conformité de manière à ce que ça
soit prévisible, qu'est-ce qui va se retrouver dans les règlements, dans ces
listes.
M. Traversy : Alors, je vous
remercie énormément. Je pense qu'il nous reste une seconde, n'est-ce pas?
Le Président (M. Reid) : 20
secondes.
M.
Traversy : Bien, je vous remercie. Et j'ai pris note pour la
question de la révision périodique, la validité et l'aspect caduc passé
une certaine date.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Alors, nous passons maintenant à M. le député de Masson, du deuxième
groupe d'opposition.
M.
Lemay : Merci, M. le Président. Mme Halley, bienvenue encore à
l'Assemblée. On vous a vue la semaine dernière
dans le cadre de comité consultatif environnemental de Kativik. Mme Aurélie-Zia,
bonjour... de vous avoir avec nous aujourd'hui.
Alors, vous
savez, bien, tout d'abord, j'ai bien entendu tous vos propos concernant la
notion d'impact. Plusieurs groupes nous ont parlé d'impacts.
Effectivement, il y a une nuance à voir entre le risque, qui évalue
généralement la probabilité d'occurrence
puis qui a des enjeux, tu sais, primaires sur la sécurité, alors que l'impact,
bon, va beaucoup plus loin. On peut
aller au niveau des impacts cumulatifs, impacts sur l'environnement. Bien content
d'entendre vos propos aussi
concernant que la LQE ne devrait pas être un régime d'autorisation, mais
devrait plutôt être un régime de protection de l'environnement. Vous l'avez si bien dit tout à l'heure, là, c'est
quoi, la mission première de cette loi. Donc, ça, on vous rejoint de ce
côté-là aussi.
Je regardais
les questions précédentes, toutes des très bonnes questions. Vous avez des très
bonnes réponses aussi, mais peut-être
un sujet qu'on a moins parlé, c'est dans l'orientation 4 au niveau, là, d'accroître
l'information disponible pour le
public. Vous savez, on en avait discuté aussi la semaine dernière, mais il y a
des différences entre le Nord et le Sud.
Bon, ça, c'est ça, mais, au niveau du droit, si vous aviez un souhait le plus
cher qui devrait être inclus au niveau de pouvoir... tu sais, qu'est-ce que vous mettriez dans la réforme pour
dire : Bien là, avec ce processus-là pour entendre le public...
Est-ce que ça serait le processus d'appel, peut-être, pour les citoyens que
vous désireriez le plus voir ou ce serait une autre facette?
Mme Halley
(Paule) : C'est sûr que,
sans moi, s'il fallait choisir le gâteau que je veux, ça peut être long,
mais, bon, on peut penser que ça peut varier
quand on module les autorisations, donc, d'un régime d'autorisation à l'autre et que, lorsque les
impacts sont plus importants, il
faudrait que le public soit informé le plus tôt possible, hein? On vous
a parlé de la convention d'Aarhus, je crois qu'on doit référer à ça. Même si le
Canada ne l'a pas signée, c'est considéré comme
un standard international à l'heure actuelle. Donc, on peut s'en inspirer pour
faire harmoniser nos législations.
Donc, si
c'est un projet à impact important, avant même de déposer sa demande,
l'initiateur du projet devrait déjà aller
voir les gens qui vont être impactés, les tiers impactés qui vont être les
personnes concernées. Donc, ça aussi, on pourrait introduire dans la LQE le concept de personnes concernées qui
devraient être informées, là, des autorisations qui sont émises puis qui
vont avoir des impacts sur elles.
Il peut être
intéressant aussi d'avoir un processus qui n'est pas fermé, donc d'avoir des
processus de pétition. Ça peut
dépendre peut-être des régimes d'autorisation, mais, si on peut faire ce qu'on
veut, bien, on pourrait les mettre pour tous, tous les régimes de pétition. Donc, lorsqu'il y a une liste qui
reçoit tant de signatures, ça peut soumettre un projet à audiences
publiques, par exemple, même s'il serait dans une autre des catégories. Donc,
ça, ça permet au public de dire : Bien
là, nous, ici, là, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas, puis il faut
qu'on vous explique, vous manquez d'information.
Ça peut être une façon aussi de mettre en veilleuse un peu les déclarations de
conformité et de permettre pendant un
certain temps des oppositions pour informer, justement, le décideur que, dans
ce coin-là, bien, il y a tels et tels éléments qu'il faut prendre en
considération qui font que l'activité n'est plus à risque faible, par exemple.
Donc, un
mécanisme pour que le public puisse... Un peu comme la pétition qu'on retrouve
en droit fédéral, où le public peut
poser des questions, et les ministères sont tenus de répondre. Et c'est le
commissaire à l'environnement fédéral qui administre les correspondances
du public avec les ministères, et donc ça permet d'éclairer aussi
l'administration publique, qui n'a pas les yeux partout, là, sur le territoire.
C'est les citoyens qui sont les premiers gendarmes de la protection environnementale parce qu'ils sont des
yeux partout, même si, des fois, il y a des substances qu'on ne peut pas
voir à l'oeil puis qu'il faut quand même que le ministère passe à l'occasion,
là. Donc, d'avoir des mécanismes où il peut
y avoir un partenariat. Donc, parmi les parties prenantes, il y a le public qui
pourrait chercher à pouvoir faire valoir ou partager son information
avec les décideurs.
Mme
Gakwaya (Aurélie-Zia) : Si je peux peut-être ajouter quelque chose, je
pense que, outre les trois volets qui sont
vraiment spécifiquement identifiés dans la convention d'Aarhus, il serait
peut-être important de bonifier l'accès à l'information environnementale, donc l'article 118.4 de la LQE. On n'en
a pas parlé spécifiquement dans notre mémoire, mais, encore une fois, on
renvoie au mémoire du CQDE, du Centre québécois du droit de l'environnement, et
nous appuyons vraiment tout ce qu'ils ont à dire sur ce point-là.
M.
Lemay : Merci. En fait, c'est très bien. J'aurais pensé que vous
m'auriez parlé du droit d'appel, mais, bon, ce que vous me mentionnez, c'est quand même très important. Vous savez,
dans les processus, moi, je l'imagine, si je me vois d'un côté plus technique, je me dis : Bon, bien, d'abord, ça
prend comme un tableau de bord, un outil Web. Moi, je suis plus technique, là, formation d'ingénieur,
désolé, mais je veux juste essayer de voir comment que ça se concrétise.
Comme si, moi, je suis le citoyen puis je
veux intervenir sur mon projet, je comprends qu'on veut rendre la
formation accessible, disponible. On peut pouvoir intervenir avec ce que vous
avez mentionné, peut-être même un processus de pétition, mais je voyais... j'imagine, il devrait y avoir un gros outil
informatique de développé pour rendre l'information comme en temps réel.
Mme Halley (Paule) : Évidemment,
aujourd'hui, l'accès à l'information environnementale... On souhaite vivement que le projet de modernisation soit
l'occasion de moderniser la LQE parce que l'information environnementale
est difficilement accessible. Ça demande
beaucoup d'accès à l'information, alors qu'avec les outils, le
développement des technologies des
communications, les Québécois devraient avoir accès, là, à l'information
environnementale directement et
pouvoir aussi peut-être en transmettre. En recevoir, de l'information, mais
pouvoir aussi en transmettre. Est-ce que c'est par une contestation
devant le TAQ? Là, il faudrait voir, régime par régime d'autorisation, quelle
serait la meilleure formule pour que ça arrive à point nommé parce que, quand
tout est attaché aussi, c'est un peu tardif.
Le
Président (M. Reid) : Alors, merci. Alors, Mme Halley, Mme
Gakwaya, merci de votre contribution à nos travaux.
Alors, je lève la séance jusqu'à cet après-midi.
(Suspension de la séance à 11 h 30)
(Reprise à 16 h 24)
Le Président (M. Reid) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite la bienvenue à nos invités de
l'Association de l'exploration minière du
Québec. Vous avez une dizaine de minutes pour faire votre présentation. Par la
suite, nous aurons une période d'échange avec les membres de la commission.
Je vous demanderais, pour fins de
l'enregistrement, de vous nommer et nommer les personnes qui vous accompagnent.
Et vous avez la parole.
Association de
l'exploration minière du Québec (AEMQ)
M. Mariage (Frank) : Certainement.
Mon nom est Frank Mariage, président du conseil de l'Association de
l'exploration minière du Québec. À ma droite, M. Mathieu Savard,
administrateur de l'AEMQ; à ma gauche, Valérie Fillion, directrice générale de
notre association; et, à ma gauche toujours, Alain Poirier, directeur de projet
au sein de notre association.
Bon. Alors, M. le Président, membres de cette commission, chers participants et collègues, au nom de
l'Association de l'exploration minière du Québec, je désire remercier la Commission
des transports et de l'environnement de nous accorder l'occasion de faire part
de nos positions relativement au livre vert.
Mon nom est Frank Mariage. Je suis avocat
spécialiste en droit minier au sein du cabinet d'avocats Fasken Martineau et
président du conseil d'administration de l'AEMQ. Je suis accompagné,
aujourd'hui, à ma gauche, de Mme Valérie
Fillion, géologue et directrice générale à notre association; à ma droite, M.
Mathieu Savard, géologue et membre du conseil; et, à ma gauche toujours,
M. Alain Poirier, directeur de projet au sein de notre association.
M. le Président, la filière minérale québécoise
est aujourd'hui le fer de lance d'une industrie qui contribue grandement à
l'économie du Québec et de ses régions ressources. De récentes données
provenant de l'Institut de la statistique du
Québec nous indiquent que 85 % des travaux d'exploration hors site,
c'est-à-dire hors d'un bail minier, sont effectués par des PME d'exploration minière. Notre filière maintient,
selon les cycles, entre 2 000 et 3 000 emplois en recherche et en développement du sous-sol québécois.
Notre expertise est internationalement reconnue pour sa rigueur, son
savoir-faire et sa volonté d'oeuvrer de manière responsable.
Au cours des
dernières années, notre secteur a été contraint d'évoluer avec un long cycle
économique baissier, un fonds de
charges réglementaires accru, un encadrement environnemental parfois aléatoire
et un niveau de débat public émotif
qui ont collectivement nui aux efforts de nos entreprises d'exploration à
recueillir sur les marchés internationaux les fonds requis pour assurer
le développement de cette filière.
L'association
souscrit à l'objectif d'améliorer le processus de délivrance d'autorisation aux
entreprises, et plus particulièrement
aux sociétés minières opérant au Québec, et ce, sans réduire les exigences environnementales.
Cependant, toute modification apportée au cadre législatif et réglementaire
doit viser à ne pas introduire de nouveaux éléments d'incertitude et
d'imprévisibilité qui caractérisent notre environnement d'affaires depuis de
nombreuses années. Le gouvernement a une
opportunité avec cette consultation de suggérer des modifications législatives
et réglementaires qui doivent contribuer à améliorer l'attractivité du
secteur minier et stimuler son développement.
Nous
demeurons toutefois prudents en ce qui a trait aux suggestions proposées. On ne
retrouve pas dans ce livre vert des
indications concrètes qui mèneraient à cette simplification annoncée et surtout
à l'atteinte d'une efficacité dans l'application de la Loi sur la
qualité de l'environnement. On y retrouve également des indications où le livre
propose d'accroître
les pouvoirs discrétionnaires du ministre. De tels changements conduiront à
accroître l'imprévisibilité de notre environnement d'affaires en
élargissant notamment les occasions de consultation, qui entraîneront
automatiquement plus de délais, plus de
lourdeur et un accroissement des coûts d'opération de nos PME. On est donc loin
de retrouver la simplification annoncée du livre vert.
L'association est
préoccupée par certains des voeux exprimés dans le livre vert, notamment celui
d'encadrer davantage ces modifications
autour du concept d'acceptabilité sociale. Nous rappelons qu'il n'y a toujours
pas de définition claire de ce
concept, qui est largement utilisé pour stimuler l'opposition à des projets de
développement. Le gouvernement devrait
plutôt privilégier l'établissement de meilleurs mécanismes de conseil et de
consultation entre les experts et auprès des parties pertinentes concernées
tout en assurant que le grand public soit bien informé des enjeux. Les
conditions d'acceptation d'un projet
mériteraient d'être définies, précisées et encadrées afin de réduire,
justement, les interventions aléatoires.
L'association
est également d'avis que le ministre doit élargir la consultation actuelle afin
de lui permettre de revoir en
profondeur l'ensemble de l'encadrement environnemental de l'État. Cela doit
inclure le mandat et le fonctionnement du BAPE. Le BAPE nous a largement démontré au cours des dernières années
ses limites et surtout, malheureusement, le côté biaisé de son processus consultatif. On n'a qu'à penser à son rapport
sur le projet de Mine Arnaud à Sept-Îles et son rapport générique sur notre filière uranifère. Nous
croyons que l'objectif doit être la mise en place d'un processus
transparent, et non partisan, permettant de
poser les conditions de mise en oeuvre d'un projet dans le respect des
principes fondamentaux du développement durable.
• (16 h 30) •
Nous souhaitons
attirer votre attention à des enjeux plus précis, notamment la question de la
gestion des délais, qui est critique pour
nos entreprises d'exploration minière. Les saisons propices à l'exécution de
nos travaux sont particulièrement
courtes, notamment dans le Nord-du-Québec. Chaque retard dans l'émission
d'autorisations a un effet direct sur
la viabilité de nos projets. L'AEMQ croit que cet enjeu serait amoindri si
toutes les demandes de certificat étaient canalisées vers un seul guichet dédié au traitement uniforme et homogène
des demandes. L'efficacité de dédier une équipe permanente n'est pas à
démontrer. Cela ne peut être que bénéfique pour une gestion plus efficace des
demandes.
De
nombreuses incohérences existent entre les lois et règlements encadrant notre
secteur. Ces différences exercent un
effet nuisible à nos activités. Les mêmes activités sont soumises au même
moment, par exemple, à la Loi sur les mines, la Loi sur la qualité de
l'environnement, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et la loi sur la protection
des terres agricoles. Il existe dans notre corpus législatif autant
d'interprétations et de mesures différentes ou superposées, souvent superflues, qui génèrent des délais coûteux à
l'émission des certificats et qui ne contribuent aucunement à une meilleure
protection de l'environnement. Les
demandeurs de certificat devraient connaître au préalable les conditions et
obligations à rencontrer. La réduction des
dispositions discrétionnaires dans l'application et l'interprétation du processus d'autorisation est
essentielle. Il faut de plus chercher à instaurer davantage de cohérence dans
nos lois et règlements.
L'AEMQ
s'interroge sur la pertinence d'intégrer la lutte aux changements climatiques
et les principes de la Loi sur le développement durable dans les
processus d'autorisation, surtout que le livre évoque très peu l'importance du développement économique dans la recherche de l'équilibre en matière de développement durable. Les
deux approches vont complètement à l'encontre de l'objectif de
simplifier le fardeau administratif.
La suggestion
d'augmenter les tarifs se doit d'être regardée dans son ensemble, et non pas
seulement dans la perspective de recherche
de nouvelles sources de revenus. Cela passe immanquablement par une
amélioration du processus de gestion du ministère lui-même. Il y a des
gains d'efficacité importants à réaliser avant de conclure que seule une augmentation de frais va régler la situation. Le
gouvernement ne doit donc pas s'engager sur la voie d'une telle réforme
sans accorder un effort sérieux et précis à l'harmonisation de l'ensemble du
cadre juridique affectant notre secteur.
En conclusion, nous
sommes en accord que le gouvernement souhaite moderniser son régime
d'autorisation environnementale et alléger
le processus d'autorisation en le modulant en fonction des risques.
L'association croit que le gouvernement doit aussi profiter de cette
occasion et revoir en profondeur la mise en oeuvre complète de sa mission
environnementale. Pour réussir une telle initiative, cette réforme doit aussi
inclure une réflexion d'ensemble sur le développement
durable et sur l'acceptabilité sociale tout en actualisant le concept de
consultation publique, situé au coeur de
ces enjeux. Au nom de l'AEMQ, nous vous remercions, M. le Président, de
l'intérêt porté à nos propositions et sommes à votre disposition pour
répondre à vos questions. Merci.
Le
Président (M. Reid) : Merci à vous. Nous allons procéder à
notre période d'échange et nous commençons par le côté ministériel. M.
le ministre, vous avez la parole.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonjour, madame, messieurs. Merci pour votre mémoire ainsi que votre présentation aujourd'hui. Je vais tout de suite commencer avec votre opposition — en tout cas, je la perçois comme ça, là — au niveau d'explorer l'idée de mieux
internaliser les coûts qui sont
générés par des projets provenant de promoteurs.
Ma
première question sur ce point-là, c'est... Il y a deux principes de développement durable qui sont reconnus dans la Loi sur le développement durable, qui
reconnaissent l'idée d'internaliser les coûts puis, également,
qui reconnaissent le principe de
pollueur-payeur. Alors, comment vous juxtaposez ces principes-là à votre opposition,
à ce qui semble être un peu, je dois vous dire, du gros bon sens?
C'est-à-dire s'il y a un projet qui nécessite un travail important d'évaluation
environnementale ou de vérification de
processus de suivi, pourquoi le promoteur ne devrait pas contribuer à sa juste
part aux frais que génère ce travail de suivi environnemental là?
M. Mariage (Frank) :
Premier élément de réponse, comme nous l'avons expliqué, on pense qu'évidemment
il y a un processus, à l'intérieur du
ministère, qui doit être fait d'évaluation de vos ressources avant de justifier
l'imposition de tarifs
additionnels qui sont déjà existants dans le processus de révision
environnementale. Et nous croyons que mettre de l'avant un guichet unique pour la délivrance de permis va permettre au
ministère aussi d'économiser au niveau des coûts. Alors, nous, c'est
notre raisonnement.
M.
Heurtel : Dans votre présentation ainsi que dans votre réponse, ça
fait deux fois, là, que vous mentionnez les processus de gestion. Pouvez-vous nous donner des exemples concrets de
comment on devrait améliorer les processus de gestion à l'intérieur du ministère? J'ai compris la question du guichet
unique, là, je veux bien... Revenez-moi pas, s'il vous plaît, avec la
question du guichet unique, ça, j'ai compris. Je veux des exemples concrets
d'amélioration aux processus de gestion du ministère, s'il vous plaît.
M. Mariage (Frank) :
Je vais passer la parole à mon collègue Alain Poirier.
Une voix :
...
M. Mariage (Frank) :
Oui, Mathieu, pardon. Mathieu.
M. Savard
(Mathieu) : On peut vous donner des exemples. Concrètement,
l'industrie s'est habituée lors... Évidemment,
on fait toutes sortes de CA, et puis de plus en plus... Puis il y a deux points
à la réponse que je vais vous donner.
Le premier point, c'est l'utilisation des ressources. D'abord, il y a beaucoup
d'analyses à plusieurs dossiers... Quand on parle de gestion des
risques, il y a plein de dossiers qui demandent des autorisations dont le
risque est minime qu'il y a beaucoup de
délais de traitement là-dedans, souvent qui peuvent retarder des programmes
d'exploration. Entre autres, on parle
d'une saison. On sait qu'au Québec... disons que la saison d'exploration est
assez courte. Et puis, si les délais
seraient plus rapides et qu'il y aurait plus d'inspecteurs, probablement que ça
serait beaucoup plus efficace. Moins de délais, moins de traitement puis
plus de gens au niveau des inspections, ça, on serait pour ça. Parce que, là, à
l'heure actuelle, il n'y a pas beaucoup d'inspections qui se font.
L'autre
point, au niveau des délais, on a constaté que, quand on fait des demandes au
niveau de CA, même si la demande est complète, on se retrouve deux,
trois semaines plus tard avec des questions souvent contenues dans le document initial. Donc, il y a une tendance qui se
fait, c'est que les gens retirent volontairement des éléments de réponse
ciblés parce que, justement, on sait
exactement qu'il va y avoir un délai, on ne sait pas pourquoi, puis ensuite on
a le retour des questions, puis on
les renvoie tout de suite pour éviter des délais. Autrement, on se retrouve
avec des questions qui n'ont rien à
voir avec la demande de CA. Des fois, on a l'impression que c'est seulement
pour le bénéfice de poser des questions pour étirer le processus. Ça,
c'en est un, exemple concret que nos intervenants vivent pratiquement à chaque
jour au niveau des CA.
Le Président (M.
Reid) : Merci. M. le député d'Abitibi-Est.
M.
Bourgeois : Bien, si vous me permettez... Bonjour, madame, messieurs.
Pour faire un peu plus de millage là-dessus,
dans vos processus, bon, vous nous dites : C'est important que ça se fasse
dans des délais rapides parce que nos saisons
sont courtes. On vous demande : O.K. Comment on peut faire en sorte,
au-delà d'un guichet unique, de trouver des solutions? L'imposition d'un délai fixe, est-ce que ça peut être une
solution appropriée? Et, à la lumière de ça, comment on fait pour la
gérer? Parce que, de part et d'autre, il peut y avoir des omissions volontaires
pour ne pas être pris avec le carcan.
Et,
en complémentaire, quand vous dites : Si on a des travaux, bien, ça
prendrait plus d'inspecteurs, bien, avant qu'il y ait des inspecteurs sur le site, il faudrait que les permis
étaient émis, là. Donc, il y a dichotomie, là, vous ne pouvez pas faire des travaux si vous n'avez pas eu vos
permis. Donc, je comprends que le processus, lui, dans ce cas-là, il a été fait.
• (16 h 40) •
M. Poirier (Alain) : Globalement, une des plus grosses lourdeurs qu'on peut avoir au niveau
administratif, c'est le fait qu'il
n'y ait pas d'harmonisation entre les différentes lois et règlements. Exemple,
on est encadrés par la Loi sur les mines
et par la Loi sur la qualité de l'environnement, et les deux ne se parlent pas
nécessairement. On peut avoir la même définition
dans les deux cas, mais elle va être interprétée de façon différente. Ça, ça
nous pose déjà un problème. On n'est pas
tellement dans l'allégement réglementaire, on est plutôt sur la concordance
réglementaire. On pense qu'il y a des gains importants d'efficacité à
obtenir si les ministères se parlent mieux, ont une meilleure collaboration.
Quand on fait des demandes, il faut accélérer ces dits processus là.
Pour
qu'est-ce qui est des délais fixes, oui, c'est effectivement intéressant. On
note aussi que, dans le livre vert, il
y a des éléments, des catégories qui sont beaucoup plus légères, qui
permettraient d'avoir une autorisation beaucoup plus rapidement. Nous,
on souhaite que la plupart des travaux d'exploration minière avant la mise en
valeur ne soient pas obligés d'obtenir le processus d'autorisation.
On sait aussi que,
dépendamment du bureau régional dans lequel vous allez faire votre demande, ça
peut être deux semaines, deux mois ou un délai supplémentaire. Il n'y a pas
d'uniformité, là, à ce niveau-là. Le fait d'avoir plus d'inspecteurs, nous, ce qu'on dit, c'est : Regardez, on perd beaucoup
de temps à analyser, à traiter les demandes papier de ces autorisations-là, qui sont souvent assez
les mêmes, les projets sont souvent les mêmes,
les mêmes types de travaux. Donc, au lieu de passer beaucoup de temps là-dedans, bien, le ministère devrait passer plus
de temps à s'assurer que, sur le terrain, ça soit réalisé de la bonne
façon.
Le Président (M. Reid) : M.
le député de Dubuc.
M. Simard : Je
vous ai entendu, puis vous avez fait une suggestion qui m'apparaît, en tout cas,
tout au moins intéressante parce
que vous avez expliqué que les
délais, pour vous, c'était extrêmement important en raison que vous deviez aller sur les marchés les marchés internationaux pour aller chercher des fonds, c'est très clair.
Maintenant, vous faites une
proposition à l'effet de centraliser les demandes dans une équipe dédiée.
Est-ce que vous voulez parler d'une équipe
dédiée à l'industrie minière ou encore... Bien, j'aimerais que vous expliquiez
ça un peu parce que je pense que c'est important, là.
M. Mariage
(Frank) : Oui,
effectivement, dont le mandat spécifique est de traiter ce type de demandes là.
Je pense qu'il y a un parallèle
intéressant à faire avec l'équipe qui a été formée au ministère du Revenu pour
traiter les demandes au niveau de
l'impôt minier. Il y avait des gros problèmes dans la machine au niveau des
délais. Et, pour nous, ça, c'est un
excellent exemple, un parallèle à faire avec une équipe spécifiquement dédiée
aux demandes venant de l'industrie, de tout centraliser les
connaissances et les délais à cet effet.
M.
Simard : Parce qu'il faut bien se le dire, là, dans un ministère il y
a des gens qui sont vraiment spécialisés dans un domaine, il y en a d'autres qui pognent des dossiers puis qui...
Oui, c'est des dossiers environnementaux, mais ce n'est pas nécessairement dans leurs connaissances
pointues. Mais ce que je comprends dans votre proposition, c'est que vous dites : Écoutez, ça serait intéressant
que les inspecteurs ou encore les gens qui analysent nos demandes, eux,
aient une connaissance pointue de
l'industrie minière qui va nous permettre d'accélérer nécessairement l'analyse
et d'avoir des réponses rapidement. C'est ce que j'ai compris. J'espère
que j'ai bien compris.
M. Mariage (Frank) : Vous
avez bien compris.
M.
Simard : Bon. Ça m'amène à vous poser une autre question maintenant.
Vous avez parlé dans votre mémoire que
le ministre devrait élargir sa consultation, entre parenthèses le BAPE.
J'aimerais — pour les
gens qui nous écoutent, tout au
moins — que vous
expliquiez c'est quoi, le fondamental de votre préoccupation ou encore de votre
affirmation.
M. Mariage (Frank) : La
raison derrière ça est la tendance observée dans les dernières années au niveau
du processus du BAPE, où on semble vouloir
mêler les faits, les données scientifiques avec l'émotif, avec le côté émotif
de l'implantation d'un projet. Et on pense
que, compte tenu de ça et de cette tangente du BAPE, les rapports qui ont été
soumis, ce que ça occasionne pour notre
industrie, je crois... En tout cas, on l'a mentionné, le BAPE, sur la filière
uranifère, fait mal à notre
industrie. C'est un processus qui mérite donc dans ces circonstances, compte
tenu de ces faits et de cette tendance lourde qu'on observe au sein du
BAPE... que le moment est opportun pour réviser son mandat et de s'assurer
qu'il se concentre sur son mandat, justement.
Le Président (M. Reid) : Oui,
merci. M. le député d'Abitibi-Est.
M.
Bourgeois : Toujours
dans l'optique de ce que vous souhaitez voir, un processus plus simple, plus
rapide, mais aussi simplifié, directement en ligne avec vos besoins, au
niveau de l'étude environnementale stratégique, vous ne semblez pas en faveur,
mais est-ce que ça ne serait pas un moyen de simplifier aussi le processus par
rapport à l'ensemble de l'industrie?
M. Poirier
(Alain) : Une des problématiques qu'on peut avoir, c'est qu'au
niveau de l'exploration il n'y a pas un projet qui est le même. Dans une étude stratégique globale... Puis on l'a vu dans l'étude
du BAPE sur la filière uranifère, il a étudié globalement ça. En fait,
il a étudié l'ensemble du secteur minier plutôt, mais chaque projet est
différent. Dépendamment du type de minerai
et des conditions dans lesquelles tu te retrouves, si tu es plus dans le Nord,
plus dans le Sud, il y a beaucoup
d'éléments, et on croit que c'est faire du mur-à-mur au niveau de l'exploration
minière de vouloir adresser ces questions-là. O.K.?
Et même on se
demande : Puisque ce sont des travaux d'acquisition de connaissances et
que l'impact sur le sol est soit
négligeable ou nul... M. le ministre faisait référence à pollueur-payeur, bien,
quand on quitte le terrain, le terrain est entièrement restauré. O.K.? C'est la règle qu'on a. Il y a même des
garanties financières qui sont données en exploration et aussi des plans
de restauration dépendamment des types de travaux. Donc, on voit mal de quelle
façon on pourrait appliquer ce genre d'étude
là, qui va être très vaste, très vague et qui ne va pas adresser chacun des
projets un à un. Et on sait que, si
un projet d'exploration va de l'avant, il va y avoir un BAPE ou une
consultation qui va être fait avant que le bail minier soit donné à
l'entreprise. Donc, on trouve qu'il y a déjà assez d'éléments sans en rajouter
par-dessus.
Le Président (M. Reid) : M.
le député d'Abitibi-Est.
M. Bourgeois : Toujours dans
l'optique de simplification ou d'amélioration du processus, l'intégration d'un processus de médiation, vous ne semblez pas non
plus, de ce côté-là, être plutôt en faveur. Pourtant, on pourrait
croire, à prime abord, que ça faciliterait certaines réalisations.
M. Poirier (Alain) : Le problème, c'est qu'on est contre le fait qu'il soit au BAPE. On
pense que les ressources... Bien, on
ne pense pas, les ressources minérales appartiennent à tous les Québécois, le
gouvernement en est le gestionnaire, et, s'il y a une médiation à faire
ou un arbitrage, ça relève du gouvernement du Québec, et non pas du BAPE. C'est
pour ça qu'on
préférerait que ça soit adressé directement au gouvernement du Québec, comme
c'est déjà le cas à l'heure actuelle.
M.
Bourgeois : Si je vous comprends bien, à ce moment-là ce que vous me
dites, c'est que vous n'êtes par réfractaires
à la médiation, c'est avec le mécanisme pour la faire, la médiation, que, là, à
ce moment-là, vous jugez que ça ne serait pas le bon véhicule. Il
reste-tu encore un peu de temps, M. le Président?
Le Président (M.
Reid) : À peine pour un commentaire.
M.
Bourgeois : Un commentaire?
Le Président (M.
Reid) : Oui.
M.
Bourgeois : Au niveau de votre financement, est-ce que les frais qui
sont générés par les études pour l'obtention
des permis sont admissibles? Et, s'ils le deviendraient par rapport au
processus de financement, est-ce que ça pourrait être quelque chose qui
vous permettrait d'être un peu plus ouverts au niveau des frais à assumer en
lien avec ces études-là?
Une voix :
Veux-tu que je réponde?
M. Poirier (Alain) : Non, non. O.K. Il y a dans le dernier budget fédéral et dans le dernier
budget provincial une allocation de
15 % sur les études environnementales. Malheureusement, le fédéral a été
surpris parce qu'on ne sait pas encore,
à date, qu'est-ce que ça va contenir. Donc, on ignore, au moment où on se
parle, qu'est-ce qui pourrait être déduit ou pas ou qu'est-ce qui pourrait être demandé au niveau de crédits. Ça
fait qu'on va demeurer prudents sur ce qui devait arriver, mais il y a
un montant...
Le Président (M.
Reid) : Je dois vous interrompre pour protéger le temps qui est
réservé pour les groupes d'opposition
également. Alors, je passe la parole au porte-parole de l'opposition
officielle, M. le député de Terrebonne.
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Alors,
M. Mariage, Mme Fillion, M. Savard et M. Poirier,
merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui.
Je ne dirai pas que vous êtes les casseux de party de la journée, mais disons
que vous avez un regard très sévère dans
votre mémoire par rapport au livre vert du ministre avec des termes assez
colorés pour, j'imagine, attirer l'attention
et susciter des bonnes réflexions de la part des parlementaires. Vous nous avez
fait part de vos inquiétudes dans
votre présentation sur les délais, la viabilité, les impacts que cela peut
avoir, là, sur votre milieu. Vous avez
parlé des nombreuses lois sur lesquelles vous êtes assujettis, Loi sur les
mines, loi sur l'environnement, la protection du territoire agricole,
etc. Je comprends qu'il y a une inquiétude qui est sincère, mais j'avoue que
vos prises de position aujourd'hui vont dans
une tout autre direction que bien des groupes que nous avons rencontrés avant
vous, et, là-dessus, je compte sur vous pour essayer de nous éclaircir
un peu.
Et là je vais
utiliser votre mémoire pour qu'on puisse suivre ensemble, vous dites que votre
association est inquiète pour la réputation
du Québec sur les marchés internationaux. Vous dites qu'à partir de collages
d'opinions tels que l'introduction de
l'évaluation environnementale stratégique il est évident qu'une telle approche
a un effet contraire à ce que propose
le livre vert. Donc, vous dites que les études environnementales stratégiques
sont, en quelque sorte, des collages d'opinions,
et là je voudrais vous laisser expliquer un peu votre opinion. J'ai plein
d'autres exemples pour démontrer un peu votre «crunchy», votre sévérité
et votre couleur dans cette discussion.
• (16 h 50) •
M. Poirier (Alain) : On ne pense pas avoir été «crunchy» dans ce qu'on a écrit. On débute le
mémoire en disant qu'on est en faveur
que le gouvernement révise la façon dont il attribue les certificats d'autorisation. On a des
inquiétudes par rapport à la façon de le
faire. On a parlé des études environnementales tout à l'heure, on a parlé du
BAPE. Je pense, les gens qui ont eu
l'occasion d'assister à une seule séance sur le BAPE sur la filière uranifère
ont été un peu découragés.
Vous
savez, ce n'est pas facile d'aller sur les marchés et d'obtenir des sommes
d'argent pour explorer au Québec. D'ailleurs,
l'argent ne vient pas du Québec, il vient principalement de l'extérieur du
Québec et même du pays. L'objectif, c'est
que plus il y a d'étapes... Les investisseurs choisissent dans quelle
juridiction ils vont faire affaire. O.K.? Nous, on a des projets ici qui sont en compétition avec
l'Afrique, avec le Chili, avec l'Australie, c'est comme ça que ça
fonctionne. La planète minière est uniforme, les gens prennent des décisions
par rapport à ça. Et on pense que la façon dont les autorisations sont données
et, surtout, de la façon dont elles pourraient être données, ça va permettre de
protéger l'environnement de la même façon
qu'il est protégé là, sinon plus, mais ça va donner de la flexibilité et de la
rapidité aux entreprises, et l'un n'est pas incompatible avec l'autre.
Et,
comme on vous l'a dit tout à l'heure, on n'a pas demandé d'avoir un allégement
réglementaire ou d'enlever des règlements,
on veut juste que ça fonctionne bien et qu'on soit en mesure d'avoir un système
qui est prévisible, qui est stable et
est connu d'avance. Nos entreprises fonctionnent dans ces paramètres-là et
veulent s'assurer, quand ils rencontrent des gens pour financer leurs projets, qu'ils peuvent leur dire : Nous,
on pense sincèrement que, dans six mois, on peut faire tels types de travaux à tel moment dans tel secteur
parce qu'on a la conviction que, la façon dont le gouvernement donne ses
autorisations, on va être capables de le faire à ce moment-là. Ça fait que
c'est juste ça, c'est de mettre de l'huile dans l'engrenage et s'assurer que le
système fonctionne bien. Et, si le système fonctionne bien, ça va coûter moins
cher à l'industrie, mais ça va coûter moins cher au gouvernement aussi.
M. Traversy : Donc,
je comprends que vous êtes dans l'amélioration du mécanisme, vous voulez une
certaine stabilité pour être capables,
justement, là, de rassurer peut-être certains investisseurs ou, du moins,
essayer de garder une sécurité dans
le cadre du marché. Je sens quand même qu'il y a une certaine... pas
exaspération, mais on a l'impression, peut-être, que votre secteur a été
ciblé plus que d'autres, là, au cours des dernières années, et je vous sens
plus sur la défensive, peut-être, que d'autres associations.
Je
vais donc vous poser une autre question. Dans le cadre toujours de votre
réflexion, vous nous dites que vous vous
questionnez également sur la logique d'intégrer la lutte aux changements
climatiques et, surtout, les principes de la Loi du développement durable dans les processus d'autorisation. Il y
a beaucoup de groupes qui sont venus nous dire, évidemment, le contraire en saluant, là, cette initiative pour imbriquer
le tout dans le processus. Rappelez-nous un peu, là, ce qui vous inquiète là-dedans. Est-ce que c'est
toujours par rapport au mécanisme et à l'instabilité? Est-ce que ça
tourne toujours autour du même critère?
M. Poirier (Alain) : Oui. Bien, d'ailleurs, il existe déjà un système, et il fonctionne
bien. L'inquiétude qu'on peut avoir,
c'est par rapport à nos travaux au niveau de l'exploration. On est assez
convaincus qu'on ne fait pas partie de ce groupe-là, mais on se verrait mal se faire imposer des études pour le
prouver et que ce soit de façon récurrente dans le temps. O.K.? Donc, ce
qu'on essaie d'éviter, c'est justement d'avoir à produire des études, qui,
encore là, coûtent de l'argent et augmentent les délais. On ne comprend pas
pourquoi que ça devrait être intégré dans la Loi sur la qualité de l'environnement, puisque ça existe déjà et ça
semble assez bien fonctionner. Si le gouvernement juge utile de
descendre le niveau de
25 000 tonnes à 15 000 tonnes ou 20 000 tonnes,
bien, ça, il n'y a pas de problème, mais il faut prévoir que les entreprises qui n'auront pas à se soustraire à ce
processus ne doivent pas, elles, produire étude par-dessus étude, et ça,
à tous les deux ans, trois ans, quatre ans
ou cinq ans. Parce que, nous, nos travaux sont évolutifs. On peut partir d'un
prospecteur sur le terrain. Après ça, on peut avoir d'autres types de travaux,
des forages, avant de se rendre à la mise en valeur, où est-ce que, là, les forages de délimitation, il y a beaucoup plus
d'employés sur le terrain, etc. Ça fait qu'on a différents niveaux
d'intensité de travaux sur le terrain, et on veut s'assurer qu'on n'ait pas à
produire moult études.
M.
Traversy : J'aurais également une question par rapport aux
membres, dans le fond, que vous représentez. Juste pour me donner une
idée, parce qu'évidemment vous êtes les professionnels et les mieux placés pour
le savoir, est-ce qu'il y a beaucoup des
membres de votre association qui seraient soumis, dans le fond, au marché du
carbone, là, pour les gaz à effet de serre, notamment, advenant la mise
en application? Il y a-tu beaucoup de monde ou c'est marginal?
Mme Fillion (Valérie) : Je vais répondre. Bien, c'est nos membres
producteurs, ceux qui opèrent des mines qui le seraient, dans notre perception. Le prospecteur, la compagnie junior
d'exploration, toutes les entreprises de services qui font les travaux pour les compagnies d'exploration,
c'est des compagnies de forage, des laboratoires d'analyse, des choses comme ça, ça fait qu'on ne pense pas que... Donc,
c'est pour ça qu'une liste d'assujettis ou non, ce serait intéressant,
parce que, selon nous... bon, peut-être les
producteurs, nos membres producteurs, mais il y a quand même le SPEDE, là,
donc...
M. Traversy :
Donc, je prends bien note de ce que vous venez de nous rappeler.
M. Mariage (Frank) :
Parce qu'on représente l'ensemble de la filière en exploration, donc,
forcément, des producteurs sont aussi membres chez nous, puisque les
producteurs font aussi de l'exploration minière.
M. Traversy :
Et rapidement, parce que je sais que le temps passe vite, mais vous avez aussi
parlé beaucoup du Bureau d'audiences
publiques, le BAPE, et vous avez, là, mentionné plusieurs qualificatifs aussi
poignants, le fait que, des fois,
c'était une opinion biaisée, que le BAPE était un outil partisan. Ça m'a surpris
parce qu'on a cette volonté, il me semble,
lorsqu'on fait appel au BAPE, de dépolitiser, justement, le choix ou, en tout
cas, la décision, et donc je voulais juste bien comprendre votre fond en
disant au ministre aujourd'hui que vous souhaiteriez voir une modernisation. Est-ce qu'une proposition comme, exemple, nommer
les membres du BAPE de façon apartisane à l'Assemblée nationale pourrait être une solution envisageable pour
redonner de la crédibilité au BAPE à vos yeux ou... Qu'est-ce qui
pourrait être fait pour essayer de rehausser un peu, là, sa crédibilité à votre
égard? Parce qu'elle semble être atteinte.
M. Mariage (Frank) :
Comme je l'expliquais tantôt, la tangente qu'on voit dans les dernières années,
effectivement, était un processus beaucoup
plus politisé où on mêle un ensemble de faits pour en arriver à une
conclusion qu'on ne comprend pas toujours. Améliorer le processus de
nomination, je crois, est, définitivement, une avenue à explorer. Si on regarde le BAPE sur la filière uranifère, autant
l'industrie, je crois, on n'aurait pas accepté que le BAPE soit présidé par un président de société d'exploration
dans l'uranium, on trouve un peu particulier que, parmi les
commissaires, se retrouvent des gens qui ont
pris position ouvertement dans le passé contre l'industrie minière. Et, pour
nous, ça met un doute sur
l'impartialité de l'institution, doute que nous avons fait valoir, et on n'a
pas accepté notre mémoire au BAPE à cause de ça. Merci.
M. Traversy :
Je vous remercie de votre franchise aujourd'hui.
Le Président (M.
Reid) : Merci. Alors, nous passons maintenant au deuxième
groupe d'opposition, et je donne la parole au député de Groulx.
M. Surprenant :
Merci, M. le Président. Alors, M. Savard, M. Mariage, Mme Fillion, M. Poirier,
bienvenue. Alors, je vais commencer par une
question à M. Savard. Tantôt, vous avez fait état qu'il y a beaucoup de
questions qui seraient posées pour
étirer le processus. Alors, ça m'interpelle. Alors, on aime bien quand on
allège les processus, et non pas
quand on les alourdit. Alors, à quel genre de questions faisiez-vous allusion?
Et puis peut-être nous aider un peu en nous éclairant, peut-être qu'on
pourrait peut-être ramener les processus...
M. Savard
(Mathieu) : Sans aller dans les détails, écoutez, il y a différents
processus, évidemment, puis on en fait
référence. Et, quand les critères sont clairs puis qu'ils ne donnent pas place
à plusieurs interprétations dépendamment des gens au dossier puis de leur niveau d'expérience, normalement tout
promoteur va tenter de faire une demande la plus complète possible. Par contre, quand tu reçois ensuite un avis comme de
quoi, bon, on a besoin de plus de renseignements, vous lisez les questions, les réponses sont déjà
contenues dans la demande initiale, vous vous demandez : C'est quoi,
le bien-fondé, d'abord, de ces questions-là
qui sont déjà clairement exposées? Donc, pour accélérer les processus, tu
t'organises pour que les questions qui vont revenir — parce
qu'il va en revenir, de toute manière — tu les choisisses,
finalement. Puis ça, bien, évidemment, c'est un petit peu décourageant, là, en
tant que promoteur. Je veux dire, si ton document,
il est complet puis il est méritant, pourquoi poser des questions qui sont déjà
contenues? C'est un non-sens à notre avis, je ne peux pas répondre plus
loin que ça.
M.
Surprenant : Vous avez probablement déjà indiqué, là, cette
problématique-là, puis on ne vous a pas rien répondu, il n'y a pas eu
d'ajustement.
• (17 heures) •
M. Savard
(Mathieu) : Ça semble être un modus operandi. Je ne suis pas du côté
du ministère, je ne peux pas vous répondre
là-dessus. Est-ce qu'il y a des commandes ou est-ce qu'on se doit... Est-ce
qu'il y a une pression d'absolument poser des questions, sans quoi on
donne une impression que le dossier n'a pas été étudié? Je n'en sais pas plus.
M.
Surprenant : C'est important,
ce que vous mentionnez. Puis je vous félicite pour votre franchise, puis
j'espère que vous êtes bien entendu par le ministère pour essayer d'améliorer
les processus.
Donc, dans
votre conclusion, justement, vous faites état de votre encouragement au niveau de l'allègement des processus
par le livre vert au niveau de... Par
contre, vous mentionnez un peu plus
loin... vous suggérez la création d'une entité distincte du ministère
appelée à exécuter les responsabilités administratives. Donc, ce serait une
autre entité. J'aimerais que vous parliez un
peu de ça puis avec, en arrière-scène, pourquoi vous ne semblez pas d'accord
d'un transfert de responsabilités au niveau de municipalités pour être
plus proches de vous à certains égards, pour améliorer, donc, l'efficacité.
J'aimerais que vous nous parliez un petit peu de tout ça, s'il vous plaît,
votre position.
M. Mariage
(Frank) : Le pouvoir
de déléguer envers les municipalités... pour nous, l'État a un devoir
fiduciaire de gestion des ressources pour le bien-être de tous les Québécois.
Et nous, on croit que, de par ce devoir fiduciaire là, la gestion des ressources, encore une fois, pour
l'ensemble des Québécois, c'est important qu'elle garde, elle conserve
la possibilité au niveau de l'évaluation du
processus. Et, encore une fois, nous, ce qu'on veut, c'est un processus
uniforme. D'ailleurs, encore une fois, c'est pour ça qu'on propose un guichet
unique, parce qu'on ne veut pas 1 200 différents processus avec... on pense que le processus doit être uniforme pour
pouvoir maximiser les délais, les procédures, les coûts pour les compagnies, tout en — l'État — s'assurant de maintenir son rôle qui est
celui de fiduciaire au niveau de la gestion des ressources pour le bien
commun de tous les Québécois.
M.
Surprenant : Mais je comprends qu'au niveau du rôle c'est important,
son rôle de fiduciaire. Par contre, on est conscients que l'argent ne
pleut pas au sein du ministère. Et, si ça amenait plus d'efficacité de
transférer certaines responsabilités à des municipalités pour amener de
l'efficacité, pourquoi vous y opposeriez-vous?
M. Poirier
(Alain) : On est loin d'être
ceux qui y voient des gains d'efficacité. Le fait de suggérer qu'il
pourrait y avoir une seule équipe qui traite
l'ensemble des dossiers, probablement, apporterait des économies. Le contraire,
c'est demander à plusieurs centaines de
municipalités de se doter de systèmes pour pouvoir émettre des autorisations.
Ça peut devenir assez compliqué et
assez lourd aussi au niveau des municipalités. Un, on va être sûrs de ne pas
avoir d'uniformité. Ça, c'est sûr. On
va être aussi certains d'avoir des délais et on ne voit pas en quoi ça va
améliorer la protection de l'environnement à la fin de la journée. Nous,
ce qu'on souhaite, c'est avoir les autorisations, pouvoir aller faire les travaux et que le gouvernement puisse s'assurer
que ça a été bel et bien fait dans les bonnes conditions. C'est aussi
simple que ça. Et on pense que la façon la
plus facile, c'est qu'il y ait le moins de monde, le moins d'intervenants
possible qui soient responsables dans ce dossier-là.
M.
Surprenant : Donc, la notion, en fait, que vous faisiez état tantôt,
M. Mariage, c'était un processus uniforme. À mon avis, on pourrait
instaurer peut-être des gabarits puis que les municipalités, en fait, aient un
modus operandi pour accélérer quand même le
processus puis que ça demeure uniforme. Mais voilà pour mon petit point
là-dessus. Il me reste combien de temps?
Le Président (M. Reid) : Il
ne reste plus de temps.
M. Surprenant : Ah bon!
Le
Président (M. Reid) : Bien, 10 secondes. 10 secondes, si vous
voulez faire un commentaire, là, mais...
M. Poirier (Alain) : Bien, en conclusion, c'est que ça existe déjà au niveau des directions
générales, et on n'a justement pas d'uniformité, et c'est issu du même
ministère. Donc, on serait assez inquiets que ça soit distribué à d'autres
types de gouvernement.
Le Président (M.
Reid) : Merci beaucoup pour votre contribution à nos travaux.
Je lève la séance
quelques instants pour permettre à nos prochains invités de prendre place.
(Suspension de la séance à
17 h 4)
(Reprise à 17 h 6)
Le
Président (M. Reid) :
Alors, nous revenons. Étant donné les décalages d'heure, j'ai besoin d'un consentement
des membres de la commission pour poursuivre au-delà de l'heure qui était
indiquée, autour de 18 h 30. Est-ce que j'ai consentement?
M. Traversy :
Consentement.
Le Président (M.
Reid) : Consentement.
Une voix :
...
Le Président (M.
Reid) : Sinon, on annule les travaux, là. Alors, bienvenue. Je
souhaite la bienvenue à nos invités de
l'Université du Québec à Chicoutimi, la Chaire en éco-conseil. C'est ça? Alors,
vous connaissez la routine, vous avez
10 minutes, nous allons procéder à un échange par la suite. Et je vous
demanderais de vous nommer et nommer la personne qui vous accompagne
pour les fins de l'enregistrement. À vous la parole.
Chaire en éco-conseil de l'Université du Québec à
Chicoutimi (Chaire en éco-conseil de l'UQAC)
M. Villeneuve (Claude) : Merci beaucoup, M. le Président. M. le ministre,
mesdames messieurs, je vous remercie de
nous accueillir. Mon nom est Claude Villeneuve. Je suis professeur titulaire,
directeur de la Chaire en éco-conseil de l'Université du Québec à
Chicoutimi. Ma compagne est Mme Hélène Côté, qui est coordonnatrice à la
recherche et écoconseillère diplômée de notre université.
Donc,
aujourd'hui, la Chaire en éco-conseil, pour rappeler aux membres du comité qui
l'ignoreraient, est une unité de
recherche qui a été créée par l'Université du Québec à Chicoutimi en 2003.
C'est une unité de recherche qui est unique au monde parce qu'il
n'existe que trois écoles d'écoconseillers dans le monde, et nous sommes l'une
d'elles, et nous sommes la seule qui a une mission de recherche universitaire.
Nous
avons réalisé de nombreux mandats sur des projets qui concernent la Loi sur la
qualité de l'environnement et la Loi sur le développement durable. Et
nous nous situons à l'échelle nationale comme leader dans le domaine des changements climatiques, comme leader
international, avec la Francophonie, dans le domaine du développement
d'outils pour l'analyse systémique de développement durable. Et nous avons
comme principe que les connaissances qui sont générées par la recherche chez
nous sont immédiatement mises à la disposition des professionnels du
développement durable, dont les écoconseillers que nous formons à l'université.
Nous
avons pris connaissance du livre vert et nous sommes d'accord avec l'idée de la
nécessité de revoir la Loi sur la qualité de l'environnement. C'est une
loi qui a connu peu d'innovations à l'intérieur des 43 dernières années. À l'instar du Commissaire au développement
durable, on se pose la question à savoir quels sont les gains d'efficacité
parce qu'on n'a pas de mesure de
l'efficacité de la loi, mais on suppose que l'hypothèse du ministre, c'est que
l'allègement va améliorer
l'efficacité de la loi dans son objectif d'assurer, comme la Charte des droits
le dit, un environnement de qualité, respectueux de la biodiversité pour
tous les citoyens du Québec.
Alors,
nous voulons quand même insister sur l'importance pour le Québec de se situer,
par rapport à l'évolution du développement
durable, à l'échelle internationale. Actuellement, la Loi sur la qualité de
l'environnement et la Loi sur le développement
durable ne sont pas particulièrement harmonisées, et vous avez reçu des
collègues de la Chaire TERRE qui vous
ont expliqué des travaux qu'on avait faits ensemble sur combien il fallait de
lois pour être capable d'installer une hydrolienne. Alors, il y a très
certainement, dans le corpus législatif, un ménage qui doit être fait pour
simplifier l'application de la Loi sur la qualité de l'environnement.
• (17 h 10) •
Et
nous pensons que la réforme, elle doit permettre non seulement d'alléger la
procédure, mais aussi de favoriser une
harmonisation des lois, favoriser la
reddition de comptes et le suivi des orientations ministérielles et s'inscrire
dans la mouvance internationale des
objectifs de développement durable qui seront adoptés à New York dans une
dizaine de jours, donc 26, 27, par l'Assemblée générale des Nations
unies.
Nous
avons traité dans notre mémoire de trois orientations, les trois premières, qui
interpellent plus spécifiquement notre compétence. Nous souscrivons,
bien sûr, à l'importance de la lutte aux changements climatiques, mais on se pose la question sur la
partie des émissions qui ne sont pas déjà touchées par le mécanisme de SPEDE,
de S-P-E-D-E, et la procédure
d'évaluation des impacts sur l'environnement, qui permettent déjà au ministre
de réclamer des mesures sur les
évaluations de gaz à effet de serre et des déclarations de gaz à effet de
serre, et on se pose la question s'il n'y aurait pas lieu, dans l'émission de certificats
d'autorisation, de s'assurer que les promoteurs démontrent qu'ils ont pris en
compte les changements climatiques et donc
que, dans le futur... Je prends, par exemple, un projet minier, puisqu'on avait
des gens qui étaient des mines tout à l'heure, les derniers projets
miniers qu'on a étudiés ne prenaient pas en compte dans leurs infrastructures le climat de 2030 ou de 2040,
alors que ça risque d'avoir des impacts sur la résistance de leurs digues
ou d'autres éléments de leurs installations.
Autre élément qui
nous apparaît important dans cette section, l'orientation, c'est
vraiment de voir comment est-ce qu'on
pourrait avoir des méthodologies québécoises pour la réduction des émissions ou
pour l'absorption du carbone parce
qu'actuellement on est très, très, très limités dans la possibilité d'émettre
des crédits compensatoires. Nous avons quelques idées sur ce sujet et
nous les partagerons s'il y a des questions à ce sujet.
Pour
l'orientation 2, c'est-à-dire d'intégrer les principes du développement durable
dans l'émission des certificats d'autorisation,
ça nous pose un certain problème pas parce qu'on est contre, bien au contraire,
mais c'est qu'actuellement l'application
de la Loi sur le développement durable ne s'adresse qu'à l'appareil
gouvernemental. Dans une précédente comparution
devant cette commission, nous avons souligné qu'il faudrait qu'on élargisse la
Loi sur le développement durable de
telle manière que cette loi-là puisse couvrir l'ensemble des réseaux de la
santé, des réseaux municipaux, des réseaux
de l'éducation, et, à ce moment-là, on pourra aller imposer éventuellement aux
entreprises ou aux demandeurs de certificats d'autorisation de se
conformer au développement durable aussi, aux principes du développement
durable.
Et
ce qui est extrêmement important, il me semble, c'est qu'on devrait, d'ores et
déjà, établir une correspondance entre les objectifs et les cibles des
objectifs de développement durable des Nations unies et les principes de la loi
québécoise sur le développement durable et se doter d'un modèle dynamique du
développement durable parce que le modèle qu'on a à l'heure actuelle est un
modèle statique qui date de 25 ans, minimum, comme ont dit certains grands
poètes chez nous.
Alors, la troisième
orientation, c'est une orientation avec laquelle... On trouve que c'est une
bonne idée de moduler le certificat
d'autorisation, mais on tient à souligner l'importance, pour le ministre, de ne
pas confondre dans le même processus
de gradation le risque et la perception du risque. Nous avons donné dans le
mémoire quelques exemples du fait que
la perception du risque est quelque chose qui est complètement différent et que
la perception du risque doit être gérée
avec un processus politique, alors que le risque est un processus scientifique.
Nous avons recommandé que le risque soit
évalué d'une manière qui est normative par les promoteurs dans le cadre de leur
travail, mais que la perception du risque soit examinée par des tiers indépendants et crédibles ou par le
ministère et que, lorsque le ministre ressent le besoin de faire évoluer
un projet vers une procédure qui soit plus rigide, qu'il le fasse, mais qu'il
le fasse en reconnaissant que c'est un geste politique de le faire.
Et finalement on
indique que, pour éviter un fractionnement des projets, il faudrait obliger les
promoteurs à situer leurs projets dans le cycle de vie, ce qui nous permettrait
de beaucoup mieux saisir qu'on ne creuse pas une mine sans faire un port pour sortir les produits. Encore un exemple
qu'on a donné dans le projet. Et on propose qu'il y ait une procédure
«fast track» pour des projets d'innovation ou pour des projets de réduction des
émissions de gaz à effet de serre, mais qui auraient fait déjà l'objet
d'une analyse de développement durable avant parce qu'un qui est bon pour
l'environnement peut avoir des impacts qui sont négatifs sur d'autres
dimensions. Donc, une analyse plus large que simplement l'analyse
environnementale.
Finalement,
les projets gouvernementaux, les projets municipaux devraient montrer un
caractère d'exemplarité, donc pas de procédure allégée, parce que ça va
vous amener à avoir des amis qui vont dire : Oui, pourquoi eux, ils se
passent des procédures allégées, alors que ce sont les mêmes firmes
d'ingénieurs qui construisent les devis?
En
conclusion, nous voulons offrir la collaboration de la recherche en éco-conseil
aux instances ministérielles. Nous
avons la prétention de pouvoir éclairer la prise de décision avec des données
pertinentes. Par exemple, nous avons déterminé
quelle était la perte de puits de carbone du réservoir Eastmain, publiée cette
année. Nous avons déterminé les émissions de gaz à effet de serre liées
à la disposition des biosolides de papetières. On a aussi la capacité de
générer des approches innovantes...
Le Président (M.
Reid) : ...
M. Villeneuve
(Claude) : ... — je
termine, j'en ai pour une seconde, si vous permettez — donc,
générer des approches innovantes comme, par
exemple, la gestion des matières résiduelles en milieu nordique, identifier et
quantifier des potentiels de réduction des
gaz à effet de serre et développer les outils pour opérationnaliser le
développement durable.
Alors,
ça me fera plaisir, ainsi que Mme Côté, de répondre à vos questions. En
m'excusant, M. le Président, d'avoir dépassé d'une minute.
Le Président (M.
Reid) : Alors, merci de votre présentation. Nous allons passer
maintenant au groupe gouvernemental, et passe la parole à M. le ministre.
M. Heurtel :
Merci, M. le Président. Bonjour, M. Villeneuve, Mme Côté. Tout d'abord, nos
excuses pour le problème d'horaire, c'était
hors de notre contrôle. Un peu ironique, on parlait à l'Assemblée nationale
aujourd'hui de trouver une façon la
plus efficace, et le résultat, c'était que nous nous trouvions en retard.
Alors, nos plus plates excuses.
Dans votre mémoire — je vais tout de suite
à la recommandation 10 —vous
privilégiez l'utilisation de l'analyse
systémique de durabilité par rapport... Bien, vous l'opposez... en tout cas,
vous semblez le préférer, ce système-là, par rapport à ce qu'on appelle l'évaluation
environnementale stratégique. Pourriez-vous aller plus loin ou décrire ce
que vous proposez par ce concept-là et en quoi il se différencie ou est une
meilleure option que l'EES?
M.
Villeneuve (Claude) :
L'évaluation environnementale stratégique, c'est un élément prospectif. O.K.?
C'est un élément prospectif qui nous permet d'examiner un secteur et de
déterminer, dépendant de ce qu'on y met comme conditions, de déterminer quels
seront les impacts appréhendés, y compris les impacts potentiellement cumulatifs
d'une filière.
On a parlé de
la filière uranifère tout à l'heure, mais on peut parler aussi de
l'exploitation du pétrole dans le golfe du Saint-Laurent. Ce sont des
exemples d'évaluations environnementales stratégiques. Ces évaluations-là
nourrissent l'information nécessaire pour
éventuellement prendre des décisions de développement durable, mais ce ne sont
pas des analyses qui étudient les
interactions entre les différentes composantes du développement durable et
l'aspect systémique de ces composantes-là,
ce que l'analyse systémique de durabilité, qui est un champ émergent dont...
J'ai été invité par les Nations
unies, là, du 14 au 16 octobre à Genève pour aller présenter, donc, à l'UN
DESA, donc les Affaires économiques et
sociales des Nations unies, ces travaux que nous faisons et que nous
expérimentons avec la Francophonie un peu partout dans le monde. On a déjà une douzaine de pays à
l'heure actuelle qui ont eu à travailler avec nos outils et qui les ont
trouvés extrêmement efficaces et utiles pour
être capables de planifier le développement durable, mesurer le développement
durable et prioriser les éléments de durabilité à l'intérieur d'un champ des
possibles. Alors, on pourra détailler ces choses-là.
Vous savez,
vous avez ouvert une porte à un chercheur, je peux être intarissable là-dessus.
Mais ces outils-là sont des outils qui, pour certains, ont déjà
plus de 25 ans d'expérimentation, mais l'ensemble est reconnu actuellement comme un besoin, avec les objectifs
de développement durable, de les considérer non pas comme une série de silos,
mais bien comme un réseau d'interaction avec
des cibles et qu'il faut étudier quels sont les ajustements mutuels. Mais,
comme je vous dis, ça serait fastidieux pour l'assemblée que j'aille
plus dans le détail, surtout que je n'ai pas de tableau puis pas de PowerPoint.
• (17 h 20) •
M. Heurtel : Quoi, un académique
sans tableau? Qu'arrive t-il?
M. Villeneuve (Claude) : Ha, ha, ha!
Mme Côté
(Hélène) : ...vous dire
rapidement, là, aussi, c'est que l'évaluation environnementale stratégique, c'est dans un temps précis, c'est sur une longue
période. Pendant ce temps-là, les projets s'accumulent. C'est sectoriel, ce
n'est pas par projet, tandis que des outils
comme on a dans l'ASD, comme la grille d'analyse de développement durable, ça s'applique autant
à un projet de garderie —caricaturons, là — jusqu'à...
en passant par une mine, comme on a
fait à Mine Arnaud, un projet de
stabilisation des berges de RTA au Saguenay—Lac-Saint-Jean ou une stratégie nationale de
développement d'un pays. Donc, ça fait tout ça. Puis ça permet d'avoir, avec un
modèle dynamique, une performance, puis équilibre des différents pôles,
puis de voir vraiment les interrelations.
M.
Heurtel : Merci. Au niveau
de la question de la perception sociale du risque, vous y avez
fait allusion tout à l'heure, vous
recommandez dans votre mémoire que... Puis là je paraphrase, là, je ne veux pas
vous mettre des mots dans la bouche,
mais vous semblez suggérer presque qu'un pouvoir discrétionnaire soit accordé
au ministre, s'il y
a une perception sociale d'un risque, bien, d'assujettir le projet
à la procédure d'évaluation, d'examen des impacts sur l'environnement. Alors, là-dessus, j'aimerais vous entendre comment
on détermine ça, comment on détermine qu'il y a une perception
sociale du risque, comment on mesure ça,
surtout dans un contexte où un des objectifs du livre vert, c'est d'essayer de donner
une meilleure prévisibilité au régime d'évaluation environnementale.
M.
Villeneuve (Claude) : Je
vais vous donner trois exemples, un qui est historique. Un de vos
prédécesseurs, M. Pierre Paradis, en 1992,
avait soumis, alors que le chapitre de la loi n'était pas en vigueur, avait
soumis l'agrandissement du site
d'enfouissement sanitaire de Saint-Tite-des-Caps, à Saint-Joachim, à la
procédure d'examen et d'évaluation
et au BAPE, alors que ce n'était pas prévu.
À tel point que j'étais commissaire
là-dessus, donc je m'en souviens, et on a été obligés, pratiquement, d'écrire l'étude d'impact dans le rapport, que je
vous recommande de lire, qui était très intéressant à l'époque.
M. Heurtel : Je l'ai déjà lu.
M.
Villeneuve (Claude) : Par
ailleurs, la perception du risque, ça peut varier énormément. Prenons les
dispositions des biosolides municipaux. Ça
prend un certificat d'autorisation pour étendre des biosolides municipaux, et,
en principe, il n'y a pas
d'évaluation qui soit... ça ne passe pas par la PEEIE. Donc, oui, nous avons au
Saguenay depuis presque 25 ans une utilisation complète des biosolides
municipaux sur les terres agricoles sans avoir de problème de perception du risque qui est associé avec ça. Et, lorsque le
film Tabou(e) est sorti, par exemple, ça a fait patate au Saguenay parce
que les gens n'avaient pas de problème avec
ça, alors que, si vous allez en Estrie ou en Montérégie, vous allez avoir une
réaction totalement différente. Donc, à
quelque part, pour rassurer les populations ou pour leur permettre
d'exprimer... et d'être dans un
mécanisme qui leur donne une indépendance et une crédibilité qui est le
mécanisme du BAPE — quand
même, une certaine indépendance — bien, ça vous permet de
dire : Je n'obligerai pas tous les projets d'épandage de biosolides municipaux. Mais, si j'arrive devant un refus
d'acceptabilité sociale à cause d'inquiétudes, comme ministre je prends
la décision de l'imposer. Alors, notre
recommandation est de distinguer les deux éléments de manière à ce que la décision, qui est de nature politique, ne devienne pas une
décision de nature technique parce que la décision de nature technique
devrait s'appliquer partout de la même façon.
Mme Côté (Hélène) : C'est
scientifique, ça se calcule.
M. Heurtel : Pardon?
Mme Côté (Hélène) : J'ai dit :
C'est scientifique, ça se calcule. Puis, en plus, bien, à l'inverse, vous avez l'exemple, qui est mentionné dans le mémoire, de
Récupère Sol, où les gens étaient inquiets, le ministre a choisi de ne
pas intervenir, puis ça a créé des problèmes pendant des années.
M. Villeneuve (Claude) : Ça a créé
des très gros problèmes...
M.
Heurtel : Mais, sur ce
point-là, justement, les gens sont inquiets. Malheureusement, notre système, il est très imparfait, mais il faut que le
ministre soit capable de justifier sa décision.
M. Villeneuve (Claude) : Oui.
Mme Côté (Hélène) : C'est pour ça
qu'on suggère...
M. Heurtel : Et donc les gens sont
inquiets, c'est un critère, vous en conviendrez, un peu...
Mme Côté (Hélène) : Ah! là, vous
parlez de la méthode de mesure...
M. Villeneuve (Claude) : Là, c'est
la méthode de mesure de l'acceptabilité sociale.
Mme Côté (Hélène) : Je vais vous
donner un exemple où c'était prouvé qu'il y avait une inquiétude, là.
M. Heurtel : Non, mais c'est parce
que... Mais c'est justement, je comprends qu'il puisse y avoir inquiétude, il y
a de l'inquiétude, c'est souvent et presque toujours justifié, mais, encore une
fois, on doit, malheureusement ou heureusement, dépendant, là, d'où est-ce qu'on se situe, avoir
un certain niveau de critères pour déterminer c'est quoi, qu'est-ce que
ça veut dire, «les gens sont inquiets». Alors, c'est là-dessus qu'on aurait
besoin de votre aide, là.
Mme Côté (Hélène) : C'est un beau
projet de recherche.
M.
Villeneuve (Claude) : Il y a
des projets de recherche qui doivent être faits. D'ailleurs, le fonds québécois de recherche sur la nature et la technologie a actuellement des subventions pour des recherches sur l'acceptabilité sociale
dans le milieu minier. C'est un exemple.
L'acceptabilité sociale, c'est encore un champ d'expertise qui a beaucoup
de croûtes à manger avant de devenir quelque chose, mais il y a quand
même, jusqu'à un certain point, des indicateurs qui vont ressortir à travers les médias, à travers... Mais
vous avez ce même genre de problème là quand vient le temps de décider
si vous allez soumettre un projet à la
médiation, au BAPE ou si vous allez le soumettre aux procédures d'examen des
impacts. Alors, ce sont des éléments qui
existent déjà. Puis on ne veut pas vous dicter une conduite, c'est simplement
de dire : Il faudrait distinguer ce qui est de nature politique de
ce qui est de nature scientifique.
M. Heurtel : O.K. Merci.
Le Président (M. Reid) : M.
le député de Mégantic.
M.
Bolduc : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Villeneuve, Mme Côté. Vous
avez dit quelque chose de très intéressant
tout à l'heure, puis je voudrais que vous élaboriez parce qu'on
parle ici d'un modèle dynamique permettant de mettre en évidence les interrelations. On s'embarque dans un gros jeu où
on passe d'une culture statique à une culture dynamique, ça implique un changement de personnel, de technologie,
d'approche, etc. Vous nous avez parlé du cycle de vie avec le climat futur, les modifications, puis
là, bien, ça implique, par exemple, une dynamique au niveau des gaz à effet de serre, l'effet des océans,
le dégel des sols, le méthane, etc. Pour l'ensemble des mortels, là, ça devient
un peu compliqué de dynamiser un système de
cette envergure-là, puis comment nous suggéreriez-vous de procéder en
passant de statique à dynamique et d'inclure l'ensemble des grands paramètres?
M. Villeneuve (Claude) : La
recommandation que nous avons faite de prendre en compte les objectifs de développement
durable est d'ajuster la vision du développement durable du Québec à ces
nouveaux objectifs de développement durable qui sont beaucoup plus modernes que
les principes auxquels on fait référence et d'adopter un modèle dynamique. Le modèle est simplement un
modèle... Ça s'enseigne dans l'espace de trois heures, et tout le monde est capable de travailler
avec. On l'enseigne en Afrique, et les Africains sont très brillants là-dessus.
Donc,
le gouvernement du Québec a déjà toutes sortes de politiques, toutes sortes
d'éléments qui permettent de répondre
aux ODD. Mais ce que le gouvernement
du Québec n'a pas nécessairement, ce sont les ponts entre les silos. Et c'est là que les enjeux du modèle dynamique
rentrent en ligne de compte aussi, et c'est là que les enjeux des ODD
qui disent : Bien, regardez, on a telle
cible, telle cible, telle cible... Par
exemple, on a la cible de fournir de
l'énergie à coût relativement faible
et à tout le monde, bien, ça peut avoir des implications à certains
endroits sur les émissions de gaz à effet de serre.
Vous avez eu la
présentation par la Chaire TERRE qui vous expliquait, pour les pourvoiries, le
problème qui était là. Donc, les ODD, la
façon de concevoir les modèles dynamiques, c'est très simple, ça s'explique à
des gens qui sont des professionnels
qui travaillent, de toute façon, déjà avec des politiques qui sont bien intégrées
puis qui sont bien complexes. Bien, ça permet de faire ces ponts-là et
d'éviter d'arriver à des choses qui sont incompatibles au bout du compte ou qui
viennent contreproductives, même si ce n'était pas la volonté du législateur au
point de départ.
• (17 h 30) •
M. Bolduc :
Merci. Je comprends bien ce que vous nous énoncez là, mais moi, je pense que je
ne suis pas là tout à fait là, je suis ailleurs, dans le sens où le développement d'un modèle dynamique comme la fonte, par exemple, du pergélisol, ce n'est pas quelque chose qui est absolument...
M. Villeneuve
(Claude) : Ce n'est pas ça.
M. Bolduc :
Non, non, mais je vous donne cet exemple-là à titre particulier.
M. Villeneuve
(Claude) : Oui. O.K.
M. Bolduc :
Et, en fait, l'autre débat, qui est l'absorption des gaz à effet de serre par
les océans, qui suit, elle aussi, des effets
très, très aléatoires dépendant de la température de l'eau et d'un paquet
d'autres paramètres, c'est cette dynamique-là, moi, que je ne vois pas
comment vous allez l'intégrer dans une modélisation qui va nous permettre
d'avoir — comment
je dirais ça? — les
bons effets, là.
M. Villeneuve (Claude) : C'est parce
que ce n'est pas cette dynamique-là
qui nous intéresse. La dynamique, c'est la dynamique de l'interaction entre les dimensions et les objectifs
du développement durable. Donc, c'est un modèle qui se travaille
sur un fichier Excel.
Par contre, ce que
vous mentionnez est déjà couvert par des spécialistes du ministère de l'Environnement,
ou d'Environnement Canada, ou d'autres scientifiques dans les universités qui
s'intéressent à creuser cette recherche-là. Mais ce n'est pas du tout le même
genre de modèle dynamique. Ici, il s'agit d'une représentation dynamique du développement
durable.
M. Bolduc :
Merci. Dans le...
Le Président (M.
Reid) : ...commentaire...
M. Bolduc :
Bien, je vous remercie beaucoup. Puis j'aurais aimé aussi qu'on parle un petit
peu de l'étendue, finalement, de l'applicabilité du développement durable via les municipalités, les organismes paramunicipaux, etc., là,
pas rien que ministères et organismes.
Le Président (M.
Reid) : 15 secondes.
M. Villeneuve (Claude) : O.K. 15
secondes? Le développement durable, ça s'applique à tout le monde, y
compris à mon petit-fils de deux mois et demi.
M. Bolduc :
Merci.
Le
Président (M. Reid) :
Alors, merci. Alors, nous allons passer maintenant... La raison pour
laquelle on suit le temps, c'est pour
protéger le temps des membres de l'opposition aussi. Nous allons passer au député de
Terrebonne, qui est le porte-parole de l'opposition
officielle.
M. Traversy :
Merci, M. le Président, de protéger mes droits.
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Traversy :
Alors, M. Villeneuve, Mme Côté, merci beaucoup de la présentation de votre mémoire,
très volumineux et surtout bien détaillé. Il
est bien détaillé, mais, comme vous parlez un langage de chercheurs et que je
parle le langage de parlementaire, il faut échanger pour se comprendre. Vous allez pouvoir
m'aider à éclaircir certaines de mes interrogations puis, en même temps,
peut-être aussi certaines prises de position.
Votre recommandation n° 1
est très intéressante. Elle y va d'une recommandation qui nous amène à vouloir régulièrement faire des mises à jour, là, concernant les objectifs
et les cibles, là, qui sont donnés dans
le cadre, là, de la Loi sur la
qualité de l'environnement. Je voudrais vous entendre là-dessus
en nous suggérant sur quels genres d'indicateurs, là, on pourrait se baser pour, justement,
là, collecter, là, l'ensemble des mises à jour disponibles puis établir les
objectifs et les cibles que vous nous décrivez.
M.
Villeneuve (Claude) : Il
existe des milliers et des milliers d'indicateurs. Dans le domaine du développement durable, les Nations unies ont un «task force»
spécial qui va amener, au début 2016, des propositions aux États
d'indicateurs de développement durable qui
vont être à suivre et qui vont permettre la reddition de comptes par rapport
aux ODD. Bien sûr, ce sont des
indicateurs qui ne s'appellent pas nécessairement uniquement indicateurs de
développement durable, c'est une
combinaison d'indicateurs dans plusieurs champs qui vont vous permettre de
dire : Je vais ou je ne vais pas vers le développement durable,
j'ai des effets contre-intuitifs ou pas.
Si on prend
un exemple comme — très,
très simple — les
aires protégées, O.K., les aires protégées peuvent être considérées comme un indicateur, c'est un
indicateur de superficie. Mais les aires protégées protègent-elles
vraiment? Ça, c'est autre chose. Parce que,
par exemple, une superficie peut être protégée, mais pas contre les changements
climatiques, et là, bien, on a besoin
d'aller plus en détail et de voir quelles sont les espèces, quels sont les
facteurs qui vont déterminer si on a ou pas une protection effective du
territoire. Vous me suivez?
M. Traversy : Tout à fait.
M. Villeneuve (Claude) : Bien,
merci. J'ai...
M.
Traversy : Je vous suis dans l'exemple que vous m'avez donné,
mais je vois la complexité de la sélection d'indicateurs. Donc, ce que
je trouve clair, c'est que c'est compliqué.
M.
Villeneuve (Claude) : On a
la chance d'avoir des spécialistes dans les gouvernements, on a la chance
d'avoir des gens dans les universités, les
ONG qui peuvent travailler à répondre à ces questions-là et à s'entendre sur
des indicateurs. Si vous regardez
votre aiguille d'essence puis vous essayez de savoir dans quelle direction vous
allez avec votre aiguille d'essence, vous avez le mauvais indicateur.
Alors, c'est ça, le principe. Si tout le monde s'entend que l'aiguille d'essence nous dit jusqu'où je peux
aller en sachant ma consommation, bien là tout le monde sait que
l'aiguille d'essence sert à ça, hein? Alors, c'est aussi simple que ça.
M.
Traversy : Parfait.
Je vous remercie de la précision. Vous avez également suggéré dans votre
recommandation n° 3 d'essayer de faire une liste des organismes ou,
du moins, des personnes concernées par, vous dites, les SPEDE, là, le marché du
carbone, donc ceux qui sont assujettis à cette nouvelle règle. C'est quelque
chose d'important pour vous?
M. Villeneuve (Claude) : C'est déjà
fait. C'est déjà fait, c'est que tous les émetteurs qui font plus que 25 000 tonnes sont soumis au SPEDE, et ça, la
déclaration est obligatoire. Moi, la question que je pose à ce sujet,
c'est beaucoup plus quelle est la proportion
des gens qui ne sont pas déjà touchés qui seraient touchés par l'intégration
dans les certificats d'autorisation d'une obligation de déclarer les gaz à
effet de serre.
Par exemple, je reviens avec l'exemple des
biosolides, si des agriculteurs veulent utiliser des biosolides de papetières ou des biosolides municipaux sur leurs
terres, ils doivent avoir un certificat d'autorisation. Est-ce qu'ils
doivent déclarer les émissions de gaz à
effet de serre à éviter? Est-ce qu'ils doivent déclarer les émissions de gaz à
effet de serre attribuables à ça?
Bon, dans ce cas particulier, c'est bien parce que nous, on a fait des études
sur les émissions de gaz à effet de serre, on peut vous répondre. Mais,
pour l'agriculteur, ça devient peut-être quelque chose qui... Si vous avez 50 tonnes de gaz à effet de serre qui sont émis
par année, c'est un peu tannant de garder ça... S'il y a une
proportion... Nous, on a évalué brutalement, là, à peu près à 5 % ce qui
n'était pas couvert par les mécanismes déjà existants. Alors, peut-être que
c'est prendre un canon pour tuer une mouche que d'ajouter ça.
Je pense à mon
beau-frère qui a une carrière, là, une carrière sablière, il est obligé d'avoir
un certificat d'autorisation, mais
est-ce qu'il est obligé de déclarer les 80 tonnes de gaz à effet de serre qu'il
fait par année? Sur le total du Québec, on s'entend que 25 000
tonnes, c'est une limite qui est raisonnable et à laquelle les gens peuvent
fonctionner.
M. Traversy : Et, à la lueur
de cette démonstration, est-ce que vous avez une piste de solution à nous
proposer pour...
M. Villeneuve (Claude) : Je me...
M. Traversy : Vous nous
faites un constat, mais est-ce qu'il y a...
M.
Villeneuve (Claude) : Je me
questionne sur l'utilité d'ajouter ça comme contrainte, tout simplement parce
qu'on a tellement peu de territoire qui n'est pas couvert que ça devient
peut-être une...
Mme Côté (Hélène) : Une contrainte.
M.
Villeneuve (Claude) :
...contrainte supplémentaire, alors qu'on veut simplifier les choses, tu sais.
Parce que mon beau-frère, qui a une
carrière sablière, ses émissions viennent du carburant qu'il utilise. Ça fait
que, là, ce carburant, il est couvert par le SPEDE, là, c'est...
M.
Traversy :
L'Association de l'exploration minière, avant vous, là, questionnait la logique
de vouloir imbriquer toute la question
de la lutte aux changements climatiques, là, dans l'octroi des certificats
d'autorisation, dans le processus dont
nous discutons dans le livre vert. Est-ce que vous partagez cette opinion? Et,
sinon, pouvez-vous nous dire votre point de vue là-dessus pour
équilibrer peut-être les divergences qui peuvent nous être données?
M.
Villeneuve (Claude) : La
lutte aux changements climatiques dépasse la question des certificats
d'autorisation. À la limite, les questions qu'on doit se poser, c'est :
Quelle est l'équité, par exemple? Quels sont les mécanismes qui pourraient être utilisés pour l'imputabilité de nouvelles industries qui sont des grands émetteurs finaux? Je
prends, par exemple, la cimenterie McInnis, qui va être un nouveau grand
émetteur final, ou encore l'usine d'engrais qui est à Bécancour, qui va être aussi un nouveau grand émetteur final. En
acceptant ces projets-là, le ministère vient d'imposer, s'il veut respecter sa cible de réduction absolue, vient d'imposer une
charge supplémentaire de réduction à toutes les autres entreprises qui
sont soumises au SPEDE.
Donc, il y a
comme des éléments... Et je n'ai pas de réponse à vous donner particulièrement, mais je soulève cette question qui dit : Peut-être qu'on
devrait penser plus loin que... et c'est là peut-être que l'objectif de développement
durable n° 13 des Nations unies
pourrait nous servir à se donner des outils pour vraiment savoir où on veut
s'en aller avec ça et les moyens pour mettre en oeuvre les cibles qu'on
s'est données. On a dit qu'on allait réduire de 20 % en 2020. Bien, si on accepte de plus en plus de grands
émetteurs finaux, on est dépendants du marché du carbone et, en même
temps, on n'a pas de méthodologie pour créer
des crédits compensatoires. Alors, tu sais, il faut avoir une certaine logique
dans tout ça et... Bien, on ne se doute pas qu'il existe une logique, mais on
n'a pas nécessairement...
• (17 h 40) •
Mme Côté (Hélène) : Il faut que vous
voyiez le mémoire comme une continuité, une recherche de cohérence dans l'administration publique générale puis tous
les processus qui se branchent et les savoirs qu'on a des évaluations environnementales, le bilan de la LQE dans le
passé, l'harmonisation des lois pour que ça ne soit pas le bordel. Après
ça, la mesure de l'efficacité. Puis, après
ça, les ODD avec les objectifs, puis la reddition de comptes au niveau
international, les projets, justement, qui
s'ajoutent. Là, tu dis : Youpi! Des jobs, ça va être beau. Mais oui, mais
le bilan de gaz à effet de serre de
la province, lui, il s'en va où? Ça fait que tout ça, là, c'est un continuum,
il faut le voir avec un besoin de cohérence.
M. Traversy : Vous venez de
m'achever, Mme Côté. C'est donc très, très large.
Le Président (M. Reid) :
Bien, le temps est terminé.
M.
Traversy : C'est-u déjà fini? Déjà? Bon, bien, je vous remercie
au moins des bonnes réflexions que vous nous lancez pour le livre vert.
Merci.
Le Président (M. Reid) :
Alors, je passe maintenant la parole au député de Masson pour le deuxième
groupe d'opposition.
M. Lemay :
Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup d'être ici avec nous
aujourd'hui. Vous savez, le système,
le SPEDE, là, on est très à l'affût de ce... Le marché du carbone, on va
poursuivre sur ces questions. Ça m'intéresse grandement, autant que mon
collègue député de Terrebonne.
Vous savez,
je lisais votre mémoire, j'ai écouté votre présentation et puis j'essayais de
me faire une idée sur un thème qu'on a vu la semaine dernière par
plusieurs groupes qui sont venus nous parler du fameux test climat, qu'ils
voudraient voir en fonction. Et puis je regardais votre mémoire, puis je me
disais : Mais c'est comme si, dans le... Est-ce
que c'est moi, peut-être, qui ai mal compris l'essence, mais c'est comme si
vous êtes en train de dire : Il y a déjà un marché du carbone, ça ne sert à rien de faire un test climat? Est-ce que
c'est le résumé, là? Est-ce que je comprends bien? Est-ce que je suis
sur la bonne voie?
M.
Villeneuve (Claude) : Bien,
c'est-à-dire que, si on n'a pas de mesure... Parce que peut-être que je me
suis trompé, mais profondément trompé en
faisant mon évaluation des émissions qui sont non couvertes, mais faites-moi
la démonstration que ce n'est pas vrai. Et là je n'ai pas d'outils pour avoir
la démonstration de quelle serait la portion supplémentaire
qui serait couverte et quelle serait l'efficacité de la couvrir par rapport à
la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Moi, si vous
me dites... Bien, vous ouvrez une nouvelle carrière sablière ou vous ouvrez un
terrain de mine, bien, vous devez me
prouver que le changement d'usage des terres a fait perdre tant de puits de
carbone, bien, c'est sympathique. Mais,
si on m'arrive avec : Bien, on a déboisé un hectare, on a perdu quatre
tonnes de puits de carbone forestier par année pour la durée de vie de la mine, bien, écoute, un pick-up normal fait ça
dans à peu près, tu sais, six mois. Alors, il y a des choses sur lesquelles les individus doivent agir,
mais il y a des choses sur lesquelles le bénéfice d'imposer une nouvelle
mesure n'est pas nécessairement démontré. Si vous nous démontrez que ça va nous
permettre de mieux connaître vraiment nos
émissions, ça va nous permettre de mieux réduire nos émissions, ça va nous
permettre de mieux contrôler et d'avoir un impact qui n'est pas négatif
sur l'économie, bravo, moi, j'achète. Mais, pour le moment, bien, dans ma connaissance des changements climatiques, des
mécanismes, ça fait quand même quelques années que je joue dans ces
terrains-là, je ne le vois pas.
M. Lemay : Parfait.
M. Villeneuve
(Claude) : Mais peut-être que je me trompe, là.
M.
Lemay : Non, c'est correct. En fait, ce que je comprends, c'est que
tout l'effort et puis les coûts engendrés pour aller faire une déclaration de quelques dizaines de tonnes n'en
valent peut-être pas la peine, il n'y a pas de rentabilité alors que
c'est déjà couvert ailleurs.
M.
Villeneuve (Claude) : C'est
ça. Par le carburant, entre autres. Vous savez, quand on dit, là : Chaque
litre de carburant comporte une
mesure de réduction qui est imposée aux distributeurs puis aux importateurs de
pétrole ou de gaz naturel, bien, ça, c'est déjà couvert. Donc, quand
même que... là, il faut chercher qu'est-ce qu'on émet au Québec qui n'est pas
des litres de carburant. Puis, dans le cas de l'électricité, on n'en émet à peu
près pas. Puis, dans le cas des changements d'affectation des terres, ce n'est
pas nécessairement non plus des très grosses émissions.
Mme Côté
(Hélène) : D'où l'intérêt des méthodologies supplémentaires parce
qu'au Québec ce qui est facile à aller
chercher, on ne peut pas aller le
chercher, donc il faut aller chercher d'autre chose. Mais il faut avoir les
méthodologies pour que ça soit reconnu sur le marché du carbone, et qui
n'existent pas.
M.
Villeneuve (Claude) : Par exemple, on a proposé au ministre de
l'Environnement un million de tonnes,
là, au minimum, là, qui pourrait être lié à
la gestion des biosolides de papetières. Bien, c'est un beau potentiel. Ça, je
pense, ça vaut la peine de mettre quelques cents pour aller voir.
M.
Lemay : Bien sûr.
Donc, au niveau des méthodologies, on aurait un beau travail à
faire, puis en espérant qu'on soit bien entendus... Je crois qu'on
arrive au bout de mon temps, hein, M. le Président?
Le Président (M. Reid) :
Trois minutes et quelque chose.
M.
Lemay : Oui? Bon, parfait. Rapidement, tout à l'heure, vous avez mentionné qu'il ne fallait pas
confondre le risque puis la perception du risque. Moi, je voulais juste savoir
si j'avais bien compris l'essence de votre discussion. En fait, dans mes mots à
moi, là, c'est comme si vous disiez que le BAPE devrait gérer la perception du
risque.
M. Villeneuve (Claude) : Non.
M. Lemay : Non?
M. Villeneuve
(Claude) : Le ministre
devrait gérer la sensibilité des exigences dans son certificat
d'autorisation en fonction de la perception
du risque des populations. Par
exemple, je peux ne pas avoir peur
d'une scie ronde parce que je travaille dans une scierie depuis des années. Le
risque demeure quand même et, peut-être même, grandit parce que je n'ai pas peur de la scie ronde. O.K.? Et
je peux avoir peur de quelque chose que je ne connais pas, et là on aura besoin
soit d'information, soit d'un processus qui va permettre à ce que je puisse
exprimer ma peur et que quelqu'un de crédible puisse
me donner des éléments pour me gouverner en conséquence de ce qui est réel
comme risque. Mais c'est comme un enfant qui a peur d'avoir un monstre
en dessous de son lit, vous ne pourrez jamais lui évacuer cette peur-là. Alors
là, il y a un enjeu, que le ministre soulevait tout à l'heure, qui est celui
de dire : À quel moment est-ce que je pense que, tu sais, il n'y en a pas, de monstre en dessous du
lit? Alors là, ça, c'est un geste politique. À un
moment donné, c'est : On
ferme la lumière, tu dors.
M. Lemay : Merci pour tout, M.
Villeneuve.
Le Président (M. Reid) : Merci
beaucoup pour votre contribution à nos travaux.
Alors, je suspends quelques instants la séance
pour permettre à nos prochains invités de prendre place.
(Suspension de la séance à 17 h 47)
(Reprise à 17
h 49)
Le
Président (M. Reid) :
Alors, je souhaite maintenant la bienvenue à nos invités de la coalition
meilleure mine... C'est bien ça, Québec meilleure mine. Alors, vous avez
une dizaine de minutes. Vous avez vu un peu la dynamique, vous la connaissez.
Par la suite, nous aurons un échange avec les membres de la commission, y
compris une députée indépendante. Et je vous
demanderais de vous nommer et nommer les personnes qui vous accompagnent pour
les fins de l'enregistrement, et vous avez la parole.
Coalition Pour que le
Québec ait meilleure mine!
Mme Bernier (Dominique) : Parfait.
Donc, je m'appelle Dominique Bernier. Je suis coordonnatrice de la Coalition
Pour que le Québec ait meilleure mine! Je suis accompagnée aujourd'hui par Mme
Denise Boileau, qui est vice-présidente du Syndicat de la
fonction publique et parapublique, et par M. Ugo Lapointe, qui est coordonnateur
du programme canadien à Mining Watch Canada, qui est aussi cofondateur et
coporte-parole de la coalition.
• (17 h 50) •
Alors, la coalition, en fait... Bien, tout
d'abord, bonjour, M. le Président. Bonjour, M. le ministre, MM. et Mmes les commissaires. La Coalition Pour que le Québec
ait meilleure mine! est très heureuse d'avoir la chance de vous présenter ses recommandations dans le cadre
de cette importante consultation qui vise à moderniser la Loi sur la
qualité de l'environnement et, en particulier, son régime d'autorisation.
On a eu l'occasion, par le passé, de participer
à plusieurs reprises à des consultations d'importance au niveau politique et
réglementaire. Je pense en particulier à la Loi sur les mines. On a participé à
des consultations à ce sujet à quatre reprises, entre autres.
La coalition, c'est une trentaine
d'organisations réparties partout au Québec qui représentent en tout plus de
250 000 membres. On compte plusieurs syndicats comme la CSQ, le SFPQ,
le Conseil central CSN de l'Abitibi-Témiscamingue et du Nord-du-Québec. On compte aussi de nombreux groupes citoyens qui
s'opposent... ou qui essaient d'améliorer des projets miniers locaux et
on compte aussi des associations de médecins et un grand nombre d'autres organisations.
Mme Boileau, qui m'accompagne... En fait, le
SFPQ, on le sait, regroupe en particulier les technologues du MDDELCC et du MERN qui sont chargés de
l'application de la loi. Et, en fait, ils sont très bien placés pour avoir
une vue privilégiée sur le fonctionnement
interne de l'organisation, c'est pour ça qu'on est très contents d'être
accompagnés par Mme Boileau aujourd'hui.
Alors, tout d'abord, en fait, on voulait mentionner qu'à notre avis le livre vert
propose plusieurs
améliorations qui nous paraissent très
intéressantes à l'actuel régime. Les recommandations qu'on va vous présenter dans notre
mémoire... Vous avez reçu une copie papier
et vous recevrez une copie électronique. Je suis désolée du délai pour la
réception du mémoire, mais vous allez
voir que les recommandations qu'on y présente visent à bonifier les propositions gouvernementales, en
particulier en ce qui a trait à l'encadrement du secteur minier, qui est notre
champ d'activité. C'est pourquoi la première partie de notre mémoire traite d'éléments qui sont absents du livre
vert, mais qui nous paraissent absolument incontournables pour moderniser le régime
d'autorisation pour répondre de manière efficace aux défis environnementaux
actuels, en particulier ceux qui sont posés par le secteur minier.
On va donc
traiter en particulier de la nécessité
de transformer la directive 019 en un règlement et d'en renforcer les
normes. Ça nous paraît vraiment incontournable.
On demande
aussi d'assujettir davantage de projets à l'autorisation ministérielle que ce
qui est prévu par le livre vert et on
pense en particulier à certains travaux d'exploration minière de même qu'à
certains types de carrières et sablières.
On souhaiterait aussi mettre fin à
l'autorégulation qui sévit actuellement dans le monde minier en raison de
l'affaiblissement du MDDELCC. Et on aimerait vraiment voir ce ministère
renforcé pour qu'il puisse remplir son mandat plus efficacement.
Enfin, on
souhaiterait voir offrir aux citoyens davantage de recours juridiques pour faire
valoir leur droit à la santé et à un environnement sain, tel que garanti
par la charte québécoise des droits et libertés de la personne.
Dans la
seconde partie du mémoire, vous allez le voir, on fait un survol des
orientations gouvernementales et on apporte des commentaires sur la
plupart des orientations.
Concernant la
directive 019, c'est vraiment une de nos recommandations centrales. C'est une
revendication qu'on a de longue date
à la coalition. On pense que, comme pour d'autres secteurs industriels
d'importance comme l'agriculture, comme la forêt, comme les pâtes et
papiers, il est vraiment temps que le Québec se dote d'un règlement réellement contraignant en matière de mines. Avec le
développement du Plan Nord, le nombre de projets miniers qui se multiplient,
ça nous apparaît vraiment incontournable.
D'ailleurs, vous allez peut-être en être surpris, mais l'industrie minière est
en accord avec cette proposition parce
qu'ils souhaitent un cadre plus clair, et ça serait l'occasion pour eux d'avoir
un cadre normatif plus clair, plus de stabilité et de prévisibilité pour
eux.
Nous, on considère que l'adoption d'un tel
règlement, en plus de rendre les choses plus claires, permettrait de resserrer les normes, dont plusieurs sont
désuètes, elles datent de plusieurs dizaines d'années. On pense qu'il est
temps de les adapter en lien avec les
nouvelles découvertes scientifiques sur le sujet pour s'assurer qu'elles
rencontrent les plus hauts standards possible. Et ça permettrait aussi
de les moduler en fonction du projet. Donc, on pense ici notamment aux
mégamines à ciel ouvert qui se situent en milieu habité ou à proximité de
milieux sensibles. Donc, on pense que ce processus-là permettrait de développer
un cadre réglementaire mieux adapté à la situation actuelle. Donc, nos
recommandations vont dans ce sens-là, vous allez pouvoir les voir dans le
mémoire.
On souhaite
aussi assujettir davantage de projets à l'autorisation ministérielle, en
particulier, comme je le disais, des travaux
d'exploration, de même que des carrières et des sablières. C'est très important
pour nous parce qu'actuellement plusieurs projets d'exploration ne sont
absolument pas couverts par la législation, n'ont pas de comptes à rendre pratiquement, et même le gouvernement ne sait pas
ce qui se passe sur son propre territoire. Le fait d'assujettir
l'exploration minière — ou, du moins, une partie de l'exploration
minière — à la loi
permettrait de s'assurer qu'on puisse tenir des registres de ce qui se
passe et intervenir là où c'est nécessaire.
Dans le même
sens, la question des carrières et sablières, ça nous pose problème parce
qu'avec le nouveau système de
classification probablement qu'elles se verraient classifiées arbitrairement
comme étant de risque faible si elles sont de moins de 10 hectares, alors que ça dépend vraiment des caractéristiques
du milieu récepteur, l'impact de l'industrie peut être très important.
J'ai en tête
un cas actuel sur lequel je travaille avec la coalition, c'est le cas du projet
de carrière qui a débuté ses activités
à Saint-Tite-des-Caps récemment. Bien, c'est un projet qui a reçu tous les
permis, tout était conforme. Par contre, c'est un territoire enclavé dans un territoire qui
a été soustrait à l'activité minière pour ses qualités récréotouristiques
parce que c'est entre Charlevoix et la
Côte-de-Beaupré, dans un secteur récréotouristique majeur. Il y a un sentier
qui passe là, qui est primé partout dans le monde, pour l'activité
récréotouristique, et c'est de ça dont les gens vivent, de l'aspect récréotouristique, dans cette zone-là. Tout le
monde est contre, les élus locaux, les préfets, les citoyens, mais, comme
la carrière a ses permis, il y a peu de
possibilités d'agir, à part le pouvoir discrétionnaire du ministre à l'heure
actuelle. Donc, on pense que des situations comme ça, ça doit vraiment
être évalué à la pièce et qu'on doit s'assurer que la bonne carrière ou la bonne sablière est établie au bon
endroit puis qu'il n'y a pas de conflit d'usage majeur. Donc, c'est pour
ça qu'on souhaite qu'il y ait un regard spécifique qui soit porté sur ces
activités-là.
On souhaite
aussi mettre fin à l'autorégulation qui sévit dans le monde minier. On sait que
le Commissaire au développement durable, M. Jean Cinq-Mars, a dressé un
bilan très critique de l'application de la Loi sur la qualité de
l'environnement. En 2011, il déplorait un suivi et des conditions déficientes,
et, en fait, c'est quelque chose qui est confirmé
par les membres du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec.
C'est démontré, en fait, que la cible
de suivi des autorisations est passée à 25 %... Elle était de 50 % il
y a quelques années. Ensuite, elle a passé à 25 %. Et maintenant seulement environ 10 % des projets
qui sont soumis à des restrictions ou à des conditions en lien avec leur
autorisation peuvent être réellement suivis. Ça nous apparaît hautement
problématique, et il ne suffit pas d'avoir des lois et des règlements solides,
mais il faut aussi que le ministère de l'Environnement soit en position de les
appliquer. Donc, pour ça, on souhaite, en fait, que ce gouvernement puisse être
doté des ressources financières suffisantes.
Finalement,
on souhaite offrir aux citoyens davantage de recours juridiques pour assurer la
protection de leur droit à la santé
et à un environnement sain. On est très soucieux de cette dimension-là et on
recommande... En fait, c'est une recommandation qui vient du Centre
québécois du droit de l'environnement. On recommande d'élargir le droit de contestation prévu à l'article 96 de la LQE à tous
bénéficiaires du droit à la qualité de l'environnement afin qu'ils
puissent en fait contester une décision du
ministre qui serait basée, selon eux, sur la foi d'informations erronées ou
incomplètes. Donc, on pense qu'un recours est nécessaire pour éviter des cas où
les citoyens se sentent laissés pour compte et ont l'impression que la décision
a été prise arbitrairement. Donc, ça fait un peu le tour de nos
recommandations.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Alors, nous allons passer
maintenant à la période d'échange. M. le ministre, vous avez la parole.
• (18 heures) •
M.
Heurtel : Merci. Bonsoir, Mme Bernier, Mme Boileau, M. Lapointe. Merci
pour votre présentation ainsi que votre
mémoire. Vous comprendrez, on l'a reçu... Puis ce n'est pas un reproche, là,
mais on l'a reçu quelques minutes avant votre présentation. Alors, j'ai
pu le parcourir diagonalement.
Sur l'évaluation environnementale stratégique,
qui est une orientation, là, dans le livre vert, on cherche à encadrer législativement
cette pratique. L'AEMQ puis l'AMQ sont venues précédemment nous expliquer
qu'elles n'étaient pas d'accord avec
cette procédure-là et qu'ultimement ça nuirait au développement de l'industrie
minière. J'aimerais avoir votre
réaction à ça et votre opinion par rapport à l'établissement, là, d'un
encadrement plus rigoureux, là, pour les EES.
Mme
Bernier (Dominique) : Nous, vous ne serez pas surpris, on est en
faveur d'un encadrement des EES. On pense
que c'est nécessaire pour, en fait, assurer une certaine forme de coordination.
Notamment, dans le domaine minier, il
y a plein de projets qui poussent sur le territoire. Il faut pouvoir harmoniser
tout ça, ne serait-ce qu'au niveau du transport du minerai. On a des cas
où il faut construire un port par mine parce qu'il n'y a pas de coordination.
Donc, ça, c'est des éléments qui posent
problème. Dans d'autres cas, ça va en prendre pour évaluer des filières au
complet. Comme on pense à la filière
du lithium, des terres rares. C'est des éléments sur lesquels on aimerait voir
le gouvernement se pencher dans le
cadre d'une EES. Par contre, selon nous, c'est nécessaire, justement, pour
permettre aux citoyens de questionner les orientations de fond aussi, ce qui ne peut pas être fait dans le cadre
d'un BAPE, où les citoyens doivent se concentrer sur un projet précis et les impacts très précis. Donc,
pour nous, l'EES est très importante. Elle doit continuer, elle doit
être encadrée de façon législative, mais elle ne doit pas servir de «fast
track», si on veut, pour des projets par la suite nécessairement. C'est-à-dire que ça permet de discuter des orientations,
de la meilleure façon de coordonner les choses, mais ça ne doit pas
constituer une préapprobation nécessairement pour des projets spécifiques, par
contre.
Et, dans le
même sens, on a une autre recommandation qui porte, à notre avis, en fait, sur
le fait que le BAPE est l'organisme
officiel de consultation publique tout désigné pour s'occuper des consultations
dans le cadre des EES. Il a l'expertise, on souhaite qu'elle demeure au
BAPE. Donc, on pense que ça devrait lui être confié.
M.
Lapointe (Ugo) : Oui. Si je
peux compléter, c'est qu'à quelque part, si on fait une... on pense que c'est
une mesure très intelligente et souhaitable,
là, dans un contexte de développer des politiques durables pour le Québec, mais, à quelque
part, si on procède à une EES pour une filière ou pour une région, au contraire
l'industrie devrait y voir un avantage parce
que ça va stabiliser la compréhension des enjeux, ça va offrir une feuille de
route, soit oui, soit non, mais au moins ça va être clair. Si c'est oui,
voici les grandes balises, il va falloir suivre. Et, dans ces balises-là,
pourront s'inscrire ensuite d'autres évaluations projet par projet plutôt que
de laisser aller les choses.
Et
je pense qu'il y a un cas concret ces dernières années, c'est le cas de
l'uranium. Et puis l'uranium, nous, on l'a vu évoluer, le dossier de l'uranium.
Chaque fois qu'un projet arrivait dans une région, que ce soit l'Outaouais, la Baie-des-Chaleurs, ensuite Sept-Îles,
la Basse-Côte-Nord et maintenant la Baie-James, les municipalités, les communautés, les
élus locaux, la population s'opposaient à ça. Il y a des régions minières qui
vivent de l'industrie minière, mais qui comprennent
que les mines d'uranium ont une particularité particulière qui est celle des
résidus radioactifs. Et là on laissait aller
les choses. À un moment donné, on a dit : Bien là, ça suffit, on va faire
une EES sur l'enjeu, on va regarder c'est quoi. Maintenant,
les élus ont entre les mains un rapport qui leur dit : Voici les risques,
voici les dangers. Qu'est-ce qu'on fait comme société? Est-ce qu'on ouvre la porte ou on ferme la
porte? Mais, au moins, ça a l'avantage d'être clair, la décision qu'on
va prendre, et c'est basé sur un processus démocratique, intelligent,
exhaustif.
M.
Heurtel : Merci. Plusieurs
autres groupes avant vous nous ont proposé un test climat. J'aimerais avoir
votre opinion là-dessus.
M. Lapointe
(Ugo) : Un quoi?
M.
Heurtel : Un test climat.
Alors, d'intégrer au processus d'évaluation environnementale un test climat. Alors, en aval, on a déjà le SPEDE, le marché du carbone,
mais on nous parle... justement, une façon d'intégrer la lutte contre les changements climatiques au processus
d'évaluation environnementale, comme nous le proposons dans le livre
vert, ce serait d'intégrer un test climat,
donc d'évaluer un projet à la lumière, notamment, de nos cibles de réduction d'émission de gaz
à effet de serre, de l'impact en matière de changements climatiques du projet.
Alors, votre opinion là-dessus, s'il vous plaît.
Mme
Bernier (Dominique) : Oui.
Nous, on pense que c'est très important. Vous comprendrez qu'on ne s'est pas concentrés sur cette question-là
dans le mémoire parce qu'on avait beaucoup de matière juste avec les dossiers qui
sont nos dossiers principaux. Par contre,
c'est sûr que la question des changements
climatiques, c'est préoccupant, et,
oui, on a intégré une recommandation à l'effet de faire en sorte qu'il y ait un bilan carbone
de fait, projeté. Ce n'est pas le terme «test climat» parce qu'on est
moins, peut-être, familiers avec ça, mais, effectivement, ça devrait être fait.
On pense notamment
souvent à ce qu'on a vu dans des évaluations. Je pense notamment au cas
d'Arianne Phosphate, pour en nommer un. On
calcule... En fait, le promoteur fait beaucoup d'efforts pour s'assurer que la machinerie
sur le site minier soit au biodiesel, que ça
produise moins de GES, tout ça. Par
contre, le minerai est transporté par
camion sur plus de 200 kilomètres. Et
on parle d'un grand nombre de camions par jour, donc... Puis ça, ce n'est pas
évalué. Donc, c'est des éléments, bien, qu'on trouve problématiques et
qui, effectivement, devraient tenir compte de l'ensemble du transport, là, dans le secteur minier, surtout
qu'on parle de plus en plus de très grandes distances et, très souvent, par
camion parce que, bon, le train, c'est plus
cher puis c'est souvent... bon, il n'y a pas de «minéraloduc», nécessairement,
là. Donc, pas toujours... pas rendu
là. Alors, c'est un élément qu'il faut prendre en compte, mais on ne s'est pas
attardés beaucoup là-dessus dans le mémoire.
M. Heurtel :
Merci. Allez-y.
M. Lapointe
(Ugo) : Pour ajouter à ça rapidement, la facture énergétique des
mines, la principale facture énergétique...
En fait, il y en a deux. C'est le broyage, concassage de la roche en
fines particules pour en extraire le métal. Ça, c'est très énergivore.
Donc, dépendamment où tu te situes au Québec, tu vas utiliser l'électricité ou, si tu es dans
le milieu du Nord-du-Québec, tu vas
utiliser du diesel actuellement. Donc, voilà un cas de gaz à effet de serre important. Et l'autre facture, c'est vraiment
le transport, comme Mme Bernier le soulignait. Donc, oui, ça nous apparaît tout à fait logique d'inclure ça à partir
de maintenant dans l'analyse des projets et l'autorisation des projets.
M. Heurtel :
Merci.
Le Président (M.
Reid) : Merci. Maintenant, je passe la parole au député
d'Abitibi-Est.
M. Bourgeois : Bonsoir, mesdames, monsieur. Moi, j'aimerais...
Quand je regarde dans une de vos recommandations, enfin, on parle, entre autres, de faire en sorte
que l'allègement administratif n'entraîne
d'aucune manière l'affaiblissement réglementaire,
mais, bon, comment on peut allier le fait de simplifier le processus — puis
je regarde les autres recommandations où on veut s'assurer qu'il n'y a pas rien qui peut passer entre les mailles du filet — et,
en même temps, emmener une
qualité de réalisation avec des coûts qui n'exploseront pas, là? J'aimerais
comprendre un peu comment vous voyez la réalisation de cet objectif-là.
Mme Boileau (Denise) : D'abord, je suis du syndicat de la fonction publique. Je suis contente de participer avec la coalition parce que
nous, nous avons été refusés d'être entendus à la commission, mais nous avons
déposé notre mémoire quand même.
Bon, quand on parle
de l'allègement, c'est la façon dont on veut faire la gestion du risque en
disant : On veut essayer de simplifier.
Mais, par cette gestion de risque là qui va être par secteur au lieu d'être par
projet, bien, on va affaiblir parce
que l'ensemble des projets, quand on
les regarde à la pièce, on peut mieux voir c'est quoi, les impacts, tandis
que, si... Bon, dans son programme, le ministre,
dans le projet de loi, dit qu'il va y avoir une réglementation qui va définir quels secteurs pourraient être mis à l'abri...
M. Heurtel :
Ce n'est pas un projet de loi.
Mme Boileau
(Denise) : Une réglementation?
M. Heurtel : Le livre vert.
Mme Boileau
(Denise) : Ou le livre vert. Mais qu'il y aurait d'autres éléments qui
suivraient pour définir si on exclurait des
secteurs d'activité qui seraient à risque faible. Ça fait que, dans ce sens-là,
nous, ce qu'on dit, c'est qu'il ne
faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain, de dire : On veut simplifier,
mais, en simplifiant, il ne faut pas perdre le sens des vérifications
avant de donner les autorisations, tout ça
• (18 h 10) •
M.
Lapointe (Ugo) : Si je peux
me permettre aussi de complémenter la réponse de Mme Boileau, le livre
vert est très large. Il s'adresse, en fait,
à tous les secteurs d'activité économique, industrielle du Québec, et nous, on
est mal placés pour avoir une vue
d'ensemble sur tout ça. Vous êtes les mieux placés, là, particulièrement le
ministre et son équipe, mais nous, notre
intervention aujourd'hui, c'est vraiment dans le contexte du secteur minier,
qui est une des tranches à laquelle s'adresse
le livre vert. Dans cette tranche-là, un des messages qu'on veut vous livrer,
c'est que l'activité minière au Québec a doublé, voire triplé depuis 10 ans. Oui, on connaît un ralentissement
actuellement, là, ça ne va pas très bien, mais c'est ponctuel. Les analystes prédisent que ça va
repartir, puis le Plan Nord, dans les prochaines décennies, c'est plus de mines. Dans ce contexte-là, d'une industrie qui est en expansion, pour nous ça nous apparaît fondamental qu'on y accorde une attention particulière. Je ne peux pas me
prononcer sur les autres secteurs d'activité, les autres volets économiques,
mais, dans ce secteur-là, il faut une attention particulière à ces
activités-là.
Et là, actuellement, ce qu'on constate, c'est
que, oui, on a fait des gains ces dernières années, notamment avec la réforme de la Loi sur les mines, qui
prévoit maintenant que des mines de 2 000 tonnes et plus seront
assujetties à une évaluation
environnementale, donc le plus haut niveau de votre grille, là, PEIE, mais les
autres projets, très peu. Et, pour
nous, on donne un exemple dans le mémoire. Vous savez, on a une mine, par
exemple, de 1 000 tonnes qui produit des déchets miniers hautement
toxiques dans un milieu très sensible. Ça peut être plus dommageable qu'un
projet de 5 000 tonnes de déchets miniers peu toxiques dans un milieu peu
sensible. Donc, à ce moment-là, je pense qu'il faut vraiment prévoir dans ce qui va suivre, le projet de loi, là, je pense,
qui est la prochaine étape, au moins, peut-être, d'abord, un pouvoir au ministre, là, qui peut dire :
Bien, dans certains cas, il faut que je puisse intervenir dans des cas
particuliers comme ça où il y a des déchets
toxiques, il y a un milieu sensible. C'est beau, ma grille, là, initiale, là,
mais il faut que je puisse aussi
intervenir dans des cas comme ça parce que, sinon, comme le disait un peu notre
prédécesseur, M. Villeneuve... Il
vous interpelait en disant : Donnez-vous des outils pour intervenir
lorsque... Surtout qu'il y a une population qui perçoit ce risque-là
aussi de façon légitime souvent, il faut que vous puissiez intervenir.
La grille va offrir une certaine prévisibilité,
c'est bien, mais là aussi ce qu'on propose dans le mémoire, c'est d'élargir cette grille-là pour le secteur minier à
aussi des projets d'exploration qui, actuellement, échappent
complètement ou presque complètement à des CA, certificats d'autorisation, dans
la grande majorité. Les statistiques qu'on a, c'est à la Baie-James, territoire des Cris. Dans les dernières années, moins
de 10 % des projets d'exploration ont des CA. Mais l'exploration, ça peut être petit comme ça peut
être très grand. C'est ça, l'enjeu. C'est du forage, c'est des drilles,
c'est du décapage mécanique. Quand tu as un
forage, c'est une chose. Quand tu en as 10, 20, 30, 50, c'est une autre chose.
L'Ontario a changé ça dans les dernières années. L'Ontario s'est donné une
grille d'analyse pour l'exploration à trois niveaux, puis les deux niveaux
supérieurs, ils exigent des permis ou des CA.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Alors, nous avons utilisé le temps
qui était réservé au groupe gouvernemental. Nous allons passer
maintenant à l'opposition officielle, M. le député de Terrebonne.
M. Traversy : Merci, M. le
Président. Combien de temps disposons-nous?
Le Président (M. Reid) : Huit
minutes.
M.
Traversy : Huit minutes. Parfait, excellent. Bien, écoutez,
tout d'abord, merci beaucoup de nous avoir amené, finalement, le mémoire. J'ai pu le zieuter aussi
également et je vais m'attarder tout de suite à la recommandation n° 1
de votre document. Vous avez, dans votre
présentation, annoncé une caractéristique très exceptionnelle, c'est-à-dire
qu'il semblerait que vos prises de position
soient également partagées par des partenaires qui, historiquement ou
habituellement, peut-être, ont tendance à ne pas nécessairement être toujours
en accord, et je voudrais donc que vous nous expliquiez davantage, là, les raisons qui pourraient nous emmener à essayer de
créer une nouvelle réglementation pour remplacer la directive 019,
particulièrement dans le secteur minier, puisqu'il semble y avoir consensus ou,
du moins, une certaine relative entente sur la question.
M. Lapointe (Ugo) : Oui. Je dirais
que c'est une bonne question et j'aimerais profiter de l'occasion pour dire que, juste parce que c'est rare qu'on a l'occasion
d'être devant vous, la Coalition Pour que le Québec ait meilleure mine!,
sa mission fondamentale, c'est pour que le
Québec ait meilleure mine, non pas pour que le Québec n'ait plus de
mines. Bon, souvent, on nous étiquette un
groupe antimines, comme étant un groupe antimines. C'est vrai que, parfois, on
va s'opposer à des projets qu'on juge
problématiques, mais, à d'autres occasions, on a soutenu des projets ou on
parle de façon favorable à certains
projets. Et on pense qu'il y a des enjeux réglementaires, politiques qui
doivent être améliorés, c'est pour ça qu'on existe.
Dans
le cas de la nécessité d'un règlement environnemental spécifique au secteur
minier, comme il en existe pour d'autres industries au Québec, c'est
vrai que c'est une rare fois que l'industrie et nous disons la même
chose : Ça prendrait ça. Probablement
pour des raisons différentes. Probablement qu'eux ont une vision différente de
ce que ça serait, un règlement
environnemental que nous, on l'a, mais on est d'accord sur le principe qu'un
règlement environnemental, ça donnerait
une clarté, ça donnerait une prévisibilité, ça donnerait une feuille de route
beaucoup plus claire pour l'industrie. Mais, pour nous, pour les citoyens qui sont
affectés, ça établirait aussi des normes beaucoup plus claires, beaucoup
plus restrictives. Et, si jamais il y a dépassement, bien, il y a des sanctions
qui s'appliquent.
Vous
le savez, vous avez peut-être été saisis ces dernières années, là, de
situations où... Par exemple, dans le cas d'une décision de la Cour supérieure du Québec, puis je ne me demande
pas si c'est une cour d'appel du Québec... avait invalidé une décision ministérielle parce qu'elle était basée sur une
directive dans le secteur des atocas, donc la production de canneberges.
Une voix :
...
M. Lapointe
(Ugo) : Pardon?
Une voix :
...
M. Lapointe (Ugo) : Supérieure, voilà. Donc, nous, avec Nature Québec puis une stagiaire à
la Faculté de droit de l'Université
Laval en 2013-2014, on a produit une analyse qui pèse les avantages et les
désavantages d'une directive versus
un règlement et on arrive à la conclusion que les avantages sont plus nombreux
pour un règlement au point de vue de la protection de la santé et de
l'environnement des municipalités, des citoyens qui sont affectés.
M.
Traversy : Donc, vous me dites que les avantages d'un règlement
environnemental sont axés sur la... vous paraissent plus intéressants
pour les critères... Excusez-moi, j'ai échappé le dernier.
M. Lapointe (Ugo) : Pour la protection de la santé, la qualité de vie et l'environnement,
qui sont, entre autres, inscrites
dans la Loi sur la qualité de l'environnement, mais aussi dans la charte des
droits de la personne du Québec. Et on
sait que le ministère avait commencé un travail à ce niveau-là, il y a... je
pense, en 2013 ou si ce n'est pas avant, de commencer à plancher, à
transférer cette directive vers un règlement, mais là on ne sait pas où en est
le projet. Puis je discutais avec, justement, un représentant de l'industrie
hier, là, avant de venir devant vous, puis eux non plus, ils ne savent pas. Donc, on a l'impression que c'est
tabletté actuellement. On aimerait que ça soit remis à l'avant-scène
comme priorité gouvernementale, puis on trouve que le livre vert s'y porte pour
amener ça.
M.
Traversy : Alors, je suis convaincu que vos paroles sont bien
entendues autour de cette table. Et, effectivement, je voulais le souligner parce que je trouvais ça
intéressant. Bien que ce n'est pas nécessairement si exceptionnel, c'est
quand même bien de voir qu'il y a une volonté commune, là, entre différents
groupes autour de cette question.
Je
voudrais aussi vous amener — parce que, là, le temps file — sur le droit d'appel aux citoyens pour
contester les décisions ministérielles, là.
Donc, plusieurs groupes sont venus nous voir en disant... le but, évidemment,
étant d'alléger, de rendre moins
complexe. Vous n'avez pas peur que ça fasse perdurer, dans le fond, là, les
délais, que ça alourdisse, que ça rende
plus compliqué le processus? Et donnez-moi des exemples, là, qui
justifieraient, là, la création d'un nouveau droit d'appel, là, pour les
citoyens.
Mme Bernier (Dominique) : Je vais commencer. Bien, en fait, ça nous
apparaît fondamental parce
qu'actuellement comment ça se passe, c'est qu'il y a un processus
d'étude d'impact, ensuite les audiences publiques, les citoyens ont l'occasion d'exprimer leur opinion, mais, dans
certains cas... Habituellement, ça donne des bons résultats, bon, il y a
des modifications qui sont faites au projet
puis qui font en sorte que le projet peut devenir acceptable aux yeux des
citoyens. Dans certains cas, par
contre — et on
l'a vu récemment avec Mine Arnaud, pour ne nommer que ce projet-là — il y a des projets qui sont reconnus par le BAPE clairement comme étant
inacceptables dans leur forme actuelle pour plein de raisons, tant du point de vue de la sécurité que de la
santé publique, que de la protection de l'environnement. Alors, par la
suite, ce qui peut se passer et ce qui est
arrivé dans ce cas-là, c'est que ce projet-là a obtenu son autorisation
ministérielle, tout de même, sans
qu'il n'y ait eu aucune étude ou aucune nouvelle information de fournie aux
citoyens par rapport à comment le
projet avait été amélioré ou changé. Et ça, ça pose problème pour les citoyens
parce qu'ils n'arrivent pas à comprendre sur quoi se base la décision, comment le projet qui était inacceptable
il y a un an, sans qu'il n'y ait rien de produit pour soutenir la chose,
est, tout à coup, devenu acceptable.
Donc,
nous, on pense que, dans des situations comme celle-là, il faudrait
nécessairement... Et c'est ce que pense le CQDE, là, le Centre québécois du droit de l'environnement, ça ne
vient pas de nous, cette recommandation-là, mais on la trouve excellente parce qu'on pense que, dans des
cas exceptionnels comme celui-là ou d'autres du même type, il serait souhaitable que les citoyens aient une forme de
droit d'appel. On fait confiance aux tribunaux pour rejeter des demandes
qui seraient frivoles parce qu'ils ont le
pouvoir de le faire. Notre système juridique est ainsi fait qu'une demande qui
ne serait pas fondée en droit ne pourrait
pas être acceptée, mais on pense que, dans certains cas, si le projet,
manifestement, ne respecte pas la loi, ne
sera pas capable de respecter la réglementation dans sa forme actuelle, les
citoyens devraient avoir un recours quelconque.
M. Lapointe (Ugo) : C'est un petit peu délicat de se parler de ce dossier-là avec le
ministre ici présent, mais, disons, si on recule un peu, là, puis on ne
s'attarde pas nécessairement juste à ce cas-là, je pense que le mémoire du
Centre québécois du droit de l'environnement
était assez bien à cet effet-là. Un des aspects qu'on soutient, c'est venir
préciser dans la LQE les droits et
obligations du ministre lorsqu'il... Dans ce cas-ci, aujourd'hui, c'est
monsieur ici, le ministre, là, mais, dans 10 ans, ça pourrait être
quelqu'un d'autre. Donc, de venir préciser les droits et les obligations du
ministre au moment d'une décision, et que, cette décision-là, on vienne ajouter
certaines précisions, là.
Le
CQDE proposait notamment de considérer certains éléments qui ne sont pas
inscrits dans la loi actuellement. Un
élément qui nous apparaît intéressant, c'est qu'une décision ministérielle doit
être basée sur... je ne me souviens plus exactement des mots qu'ils utilisaient, mais sur une information
complète et au meilleur des connaissances scientifiques. Donc, dans ce
cas-là, si, par exemple, il y a une situation — et ça se peut, cette
situation-là, ça se pourrait, ça se peut maintenant,
ça se peut dans le futur — où il y a une décision ministérielle pour différents facteurs,
mais que ce n'est pas basé sur une
information complète ou aux meilleures connaissances scientifiques, quel est le
recours d'une municipalité qui est affectée ou une collectivité, quel
est le recours d'un citoyen?
• (18 h 20) •
M. Traversy : Je vous
remercie beaucoup du temps que vous nous avez accordé... bien, pour
l'opposition.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Nous passons maintenant au deuxième groupe d'opposition. M. le député de
Masson.
M.
Lemay : Merci, M. le Président. Merci d'être avec nous aujourd'hui.
Vous savez, la semaine dernière, on a rencontré
le Regroupement d'organismes des bassins versants, puis là ils nous parlaient
plus d'eau, je voyais... Bon, je regardais les sujets qu'on a déjà
discutés puis j'ai dit : Bien, on n'a pas discuté vraiment de qualité
d'eau. Vous avez mentionné tantôt qu'avec la
directive 019, là, ils devaient être revus afin de les adapter aux
connaissances scientifiques d'aujourd'hui puis de mieux protéger les
milieux aquatiques affectés. Vous notiez tout à l'heure qu'il y a moins de 12 contaminants qui sont actuellement identifiés
par la directive 019. Selon vous, vers quoi qu'on devrait s'en aller? Je
ne sais pas si vous voulez élaborer un peu plus, là, sur ce sujet.
M. Lapointe (Ugo) : Oui. Bien,
d'abord, je pense que ce qu'on souhaite vraiment, c'est que les élus soient sensibilisés au fait que beaucoup de l'encadrement
environnemental des mines, actuellement, dépend de ce qu'on appelle la
directive 019, qui est une directive, puis qu'on souhaiterait que ce soit un
règlement. Si on va vers un règlement, une discussion
qu'on aimerait avoir dans ce contexte-là, c'est de revoir certaines des normes
et des critères de protection qui sont actuellement
dans la directive, qui seraient éventuellement dans un règlement. Et certains
de ces critères-là concernent l'eau, comme vous dites, et actuellement,
dans la directive 019, c'est moins d'une douzaine de contaminants qui sont... — comment dire? — pas réglementés parce que ce n'est pas un
règlement, mais dont la directive 019 exige une attention, alors que, dans d'autres juridictions, que ce soit au Canada
ou aux États-Unis... Par exemple, l'Environmental Protection Agency
exige un monitoring de plus de 40 contaminants.
M. Lemay : 40. On ne parle pas de
centaines ou...
M.
Lapointe (Ugo) : Non. Même,
je pense que ça va jusqu'à 60. 40, c'est conservateur, là, mais je pense que
ça va jusqu'à 60. Mais le fait est qu'il y a
un paquet de contaminants auxquels on devrait s'intéresser aujourd'hui qu'on
ne s'intéressait pas hier. Et, en toute
honnêteté, pour quand même connaître le secteur minier, ayant moi-même
travaillé dans le secteur minier, connaissant beaucoup de gens dans le
secteur minier, je pense que beaucoup seraient favorables à ça aussi, avoir des grilles d'analyse beaucoup plus
claires puis des cibles beaucoup plus claires au niveau d'un paquet de
contaminants. D'autres vont s'y opposer, là, mais je pense qu'il y a quand même
un bassin, là, qui soutiendrait ça.
Puis c'est la
même chose pour la qualité de l'air, les émissions de contaminants de l'air ou
la qualité des sols, le bruit, le bruit aussi, surtout pour les grands
projets dans des milieux habités. Je pense que l'Institut national de santé publique, actuellement, s'intéresse à cette
problématique-là et aimerait que le politique bouge là-dessus aussi pour
revoir les normes actuelles.
M. Lemay : Oui, allez-y.
Mme Bernier (Dominique) : Oui.
Peut-être ajouter brièvement qu'en fait, par exemple, un exemple très concret, quand on a analysé le projet de mine
Arianne Phosphate, on se rend compte que, par exemple, en agriculture,
les producteurs agricoles sont tenus de
faire un bilan phosphate qui tient compte de la charge totale de phosphate qui
est déversé dans l'environnement sous
forme d'épandage, et puis c'est nécessaire parce qu'en fait, le phosphate, on
sait que ça a des impacts quand même
importants sur les cours d'eau, ça cause la prolifération des algues. Par
contre, une mine de phosphate n'est
pas soumise à la même réglementation, ça va être une simple directive qui va
faire en sorte qu'ils doivent respecter un taux dans l'effluent, là, un
taux de phosphate de... Je ne m'avancerai pas sur le chiffre parce que je ne
l'ai pas en tête nécessairement, mais, en fait, ils ne sont pas tenus...
M. Lapointe (Ugo) : ...même pas dans
la directive.
Mme
Bernier (Dominique) : ...il n'y a pas de taux en tant que tel d'écrit
dans la directive, puis, en fait, ils ne sont pas tenus de tenir compte de la charge annuelle ou de la charge
mensuelle de phosphate qui est déversé dans l'environnement alors qu'ils déversent... ça se déverse directement
dans un cours d'eau, à même l'effluent minier, là. S'ils respectent la norme qui a été fixée dans leur certificat
d'autorisation, bien, à ce moment-là, ils n'ont pas à tenir compte de
l'ensemble du phosphate déversé, ce qui est une aberration selon nous. Donc, il
y a des choses comme ça qui... On ne comprend pas pourquoi ça serait beaucoup plus sévère pour un exploitant agricole qui
a 100 vaches que pour une mine de phosphate, là. Ça ne fait pas tout à
fait de sens.
M.
Lemay : Non, je comprends. C'est, comme vous avez dit, aberrant. C'est
une incohérence, là, qui fait que... En
réalité, c'est à la source, là, on doit aller... Si on dit : On veut réglementer, on doit réglementer sur tout le
cycle de vie du produit, effectivement.
Je pense que... M. le Président, combien de
temps? Une minute?
Le Président (M. Reid) : Une
minute.
M.
Lemay : Une minute. Très rapidement,
là, en une minute. Vous avez mentionné que vous constatiez que les promoteurs miniers sont contraints de présenter des modélisations d'impact peu ou pas du
tout réalistes. Puis là vous dites que,
s'ils veulent pouvoir obtenir leur certificat d'autorisation, ils n'ont pas le choix de... puis, une fois que
l'autorisation est obtenue, bien, tu sais,
les normes sont dépassées. Bien, moi, en
tout cas, c'est un constat qui est quand même troublant. Vous avez peut-être
20 secondes.
M.
Lapointe (Ugo) : Oui.
Là-dessus, ça vise vraiment spécifiquement un secteur en particulier, c'est celui des
grandes mines à ciel ouvert en milieu habité
ou en milieu sensible. Il y a un phénomène relativement nouveau au Québec
qui est celui des grandes mines à ciel ouvert. Il y en a une seule actuellement
en exploitation, c'est Malartic, mais Mine
Arnaud vient d'être autorisée et Mine Launay vient d'être autorisée. Et, dans
tous ces cas-là, les BAPE ont reconnu qu'ils
ne seraient pas capables de respecter les normes, et on se rend compte que,
pour présenter des projets passables, ils sont obligés de présenter des
modélisations qui ne tiennent pas trop la route.
Le
Président (M. Reid) :
Merci. Alors, nous passons maintenant... nous terminons avec le groupe de
députés indépendants. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme
Massé : Bonjour, tout le monde. Si on continue dans ce sens-là, entre le moment où le projet est passé
au BAPE et ce qui va se passer après, des fois il s'écoule du temps, il y a des
changements de projets, et là on n'a pas de poigne, et ce pourquoi on se
dit : Bien, peut-être qu'il faudrait se donner d'autres leviers. Dans une
vision où on veut vraiment améliorer la Loi sur la qualité de
l'environnement, il faudrait se donner des moyens, notamment
de contester, et tout ça.
Je vois plus
que jamais l'importance que la directive 019 prenne un autre statut. C'est une
vision, c'est une vision à long
terme. Je pense que le ministre a eu le courage de mettre sur la table sa vision
en disant : Voilà... et, dans ce sens-là, je pense que la directive
019 est un morceau du casse-tête essentiel.
Il y a
un autre élément, je le sais que ça ne relève pas nécessairement de la Loi sur la qualité de l'environnement, mais c'est toute la question des garanties
financières. Moi, je n'avais que trois minutes, alors je ne veux pas aller plus
loin, j'aimerais ça... Parce que, dans une vision d'environnement, c'est sûr
que cette industrie-là peut faire du dommage environnemental important.
Qu'est-ce que vous avez à nous dire sur les garanties?
M.
Lapointe (Ugo) : Les
garanties financières, en quelques mots, il y a eu un resserrement dans
la dernière Loi sur les mines pour
les nouveaux projets. Par contre, malgré ce resserrement-là, ça ne règle pas le passif
qui existe déjà, qui est de 1,2 milliard et peut-être plus avec la faillite récente... ou, en fait, la
quasi-faillite de d'autres projets qui s'en viennent peut-être.
Et donc, nous, ce qu'on propose depuis des années, en fait, c'est de mettre en
place un fonds consolidé auquel l'industrie contribuerait au moins à
hauteur de 50 % pour, justement, s'attaquer à ce lourd passif là et que ça
ne soit pas seulement les contribuables, les citoyens, M. et Mme Tout-le-monde
qui paient ça, mais que l'industrie fasse également sa part.
D'autre part,
il va falloir surveiller de près cet automne, pour la première fois, on va voir
les données mine par mine des
redevances minières, mais également des garanties financières versées mine par
mine. Ça, c'est important de s'assurer un suivi là-dessus pour être sûr
que l'appareil administratif est capable d'appliquer la nouvelle réglementation
puis s'assurer que les compagnies ont bien
versé les montants des garanties financières qu'on leur exige maintenant. C'est
ce qu'avait, entre autres, dénoncé le Vérificateur général il y a quelques
années, là.
Mme
Massé : D'où l'importance de ce que notre collègue du SFPQ disait,
c'est-à-dire il faut avoir les moyens de nos ambitions. Et ça, c'est un
autre endroit où il faut avoir les moyens de nos ambitions.
Mme Boileau (Denise) : Peut-être,
j'en profiterais...
Le Président (M. Reid) :
Bien, vous ne pouvez pas en profiter longtemps, il reste 10 secondes.
Mme
Boileau (Denise) : 10
secondes. Bien, en tout cas, au niveau des inspections, il y a eu une baisse
beaucoup au niveau des effectifs, puis il faut que le ministère ait les moyens
de s'assurer que ce qu'il met en place est vérifié.
Le
Président (M. Reid) : Alors, Mme Bernier, M. Lapointe, Mme
Boileau, merci de votre contribution à nos travaux.
La commission suspend ses travaux jusqu'à
19 h 30.
(Suspension de la séance à 18 h 30)
(Reprise à 19 h 31)
Le
Président (M. Reid) :
Alors, nous reprenons nos travaux. Je vous rappelle que la commission
est réunie afin de poursuivre les
auditions publiques dans le cadre des
consultations particulières sur le livre vert intitulé Moderniser le
régime d'autorisation environnementale de la Loi sur la qualité de
l'environnement.
Ce soir, nous
entendrons le Réseau Environnement, l'Association des producteurs de tourbe
horticole du Québec et le Regroupement des récupérateurs et recycleurs
de matériaux de construction et de démolition du Québec.
Alors,
bienvenue aux représentants du Réseau Environnement. Vous avez une dizaine de
minutes pour faire votre présentation. Par la suite, nous aurons un
échange avec les membres de la commission. Je vous demanderais de vous nommer
et nommer les personnes qui vous accompagnent pour les fins de
l'enregistrement, et vous avez la parole.
Réseau Environnement
M.
Desjardins (Marc-André) : Merci, M. le Président. Mon nom est
Marc-André Desjardins. Je suis président du conseil d'administration de Réseau Environnement. Je suis accompagné
ce soir du P.D.G. de réseau, M. Jean Lacroix, à ma droite, et également de M. Pierre-Olivier Charlebois, avocat qui est
également membre du comité de réseau qui a élaboré le mémoire qui a été
déposé dans le cadre des travaux de la commission.
Très
rapidement, permettez-moi de prendre même pas une minute pour présenter Réseau
Environnement. Réseau Environnement,
c'est la plus grande association de spécialistes de l'environnement au Québec.
Notre membership compte près de
3 000 membres distribués à parts égales entre le secteur public et le
secteur privé. Nous sommes présents dans les secteurs de l'eau, de l'air et des changements climatiques, des matières
résiduelles, des sols et de l'eau souterraine, et aussi de la
biodiversité. Nous sommes aussi présents, à travers nos régionales, partout au
Québec, et c'est forts de cette représentation que nous nous adressons à vous
ce soir.
D'entrée de
jeu, permettez-moi de vous dire que réseau est bien content et salue ce
chantier de modernisation de la LQE
parce que, avouons-le, la LQE avait bien besoin d'une cure de rajeunissement
afin de s'adapter au contexte social, économique
et environnemental actuel. On est globalement en accord avec les grandes
orientations qui se dégagent du livre vert
qui a été déposé, ces orientations visant une optimisation législative et
réglementaire qui, à notre avis, était nécessaire.
Comme on l'a mentionné dans notre mémoire, on
parle ici d'une optimisation, et non pas d'un allègement réglementaire. Pour nous, ce processus-là n'a pas
comme finalité de permettre d'obtenir des autorisations à rabais, loin
de là. En fait, notre positionnement, vous l'avez vu en prenant connaissance de
notre mémoire, a comme toile de fond trois
grands principes, trois mots : équité, collaboration, simplification. On va
revenir sur ces principes-là au cours de notre exposé, mais, au niveau de l'équité, en fait ce qu'on cherche, c'est de
favoriser le même traitement pour tous. Peu importe le demandeur, qu'il
soit du secteur public ou du secteur privé, on pense que la même loi doit
s'appliquer pour tous.
Collaboration
dans l'optique de la présentation des demandes d'autorisation aux instances
régionales. C'est qu'on souhaite et
on aimerait que s'installe une culture de collaboration dans le cadre de l'examen des projets. On pense
qu'en cette nature il y a
possiblement place à amélioration dans l'optique d'une meilleure coopération entre
les demandeurs et les fonctionnaires qui sont chargés de l'examen des
projets qui leur sont soumis.
Finalement,
simplification. Simplification, dans le sens de favoriser des normes législatives et réglementaires claires plutôt que des guides ou des directives qui
ouvrent la place à l'interprétation. On souhaite aussi que cette
modernisation du régime d'autorisation aille
vraiment dans le sens d'une simplification du processus pour obtenir ce qu'on
vise en termes de résultat final.
C'est d'avoir un régime simplifié, non pas allégé, mais dans le sens d'une
meilleure efficacité, d'un traitement optimal des projets et, surtout,
d'avoir des projets qui vont dans le sens du développement durable.
À ce
stade-ci, je vais demander à M. Jean Lacroix d'énumérer un certain nombre
d'aspects de notre mémoire qui nous tiennent plus particulièrement à
coeur.
M. Lacroix
(Jean) : En fait, ce que j'aimerais souligner auprès de vous, en
complément au mémoire qui a pu être déposé à la commission, on veut
faire un renforcement de ce qui a pu être dit dans les positionnements des
acteurs municipaux et de l'innovation. Six
points, essentiellement, qu'on tient à vous soulever au-delà de ce qu'on a pu
écrire.
La nécessité
d'un encadrement législatif pour les évaluations environnementales stratégiques
et prise en compte des projets évalués dans le cadre d'une EES pour
diminuer les délais d'analyse subséquents, ça, c'est le point 1.
Le point 2, évidemment, on vient d'en parler,
l'objectif de simplification des processus, en fait ce qu'on ne recommande
pas... c'est de ne pas mettre l'intégration des principes de développement
durable dans les démarches d'autorisation, mais les considérer plutôt dans
l'étude d'évaluation environnementale.
Le troisième
aspect, sur le regard sur la prise en compte des GES d'un point de vue de cycle
de vie, dans la même logique, Réseau Environnement défend la prise en
compte du contexte technologique, une technologie versus une autre plus
efficace, et de la résilience des projets face aux variations climatiques à
venir.
Le quatrième
aspect, s'assurer que les guides et autres directives soient utilisés en tant
que référence, et non à titre de
règlement. Réseau favorise l'adoption de normes législatives ou réglementaires
précises au détriment des documents de nature administrative.
Cinquième
point, un processus pour faciliter les projets pilotes afin de favoriser
l'innovation. Une des façons de tester le progrès technologique, entre
autres, qu'on peut y voir.
Et un élément assez fondamental qui nous
apparaît à souligner, c'est l'uniformisation pour éviter la disparité entre les bureaux régionaux. Vous l'avez entendu à
plusieurs reprises par plusieurs acteurs avec de nombreux exemples, on dit la même chose de tous nos acteurs privés et
publics qu'on peut voir. On le constate, proposent à cet effet
d'instaurer une synergie interrégionale et
multisectorielle en mettant en place des mécanismes favorisant le transfert de
l'analyse des demandes d'autorisation à la direction régionale ou la direction
sectorielle ayant développé l'expertise pertinente à l'analyse de l'ensemble ou
d'une partie d'un projet, toujours dans un esprit d'équité dans le traitement
qu'on peut faire à travers le Québec.
À cet effet, je laisserais, en conclusion et en
bonification, à Me Charlebois la conclusion.
• (19 h 40) •
M. Charlebois (Pierre-Olivier) :
Merci, Jean. Alors, quelques mots d'un point de vue plus juridique. Je vais revenir avec vous sur les orientations 3, 5 et 6.
Sur l'orientation 3, bon, évidemment, Réseau Environnement est favorable
à ce que le livre vert propose à l'égard
d'une modulation de l'analyse des projets en fonction du risque. C'est une
bonne approche que l'on privilégie, il s'agirait maintenant de l'appliquer
correctement.
À l'égard des projets à risque élevé,
l'établissement d'une liste exhaustive de projets est une bonne approche, d'autant plus qu'elle va pouvoir bénéficier déjà
d'un certain nombre d'acquis qui découlent de l'application du Règlement
sur l'évaluation d'examen des impacts. Alors, à cet égard-là, c'est une bonne
approche.
Par ailleurs,
la proposition visant à permettre au gouvernement d'assujettir de manière
exceptionnelle à la procédure d'évaluation
environnementale certains projets qui n'auraient pas été visés par la liste
n'est pas une approche que l'on privilégie,
considérant que, ce faisant, on créerait clairement un climat d'incertitude
pour les promoteurs de projets qui, par ailleurs, ont des
investissements très importants à faire dans un climat à long terme. Alors, ce
n'est pas une approche que l'on privilégie.
Maintenant, à
l'égard des projets qui devraient se retrouver dans la liste pour des projets à
risque élevé, faible et négligeable,
il est difficile, dans le cadre de cette commission, de vous préciser quel type
de projet devrait se retrouver dans quelle
liste. C'est clairement un exercice qui va devoir être fait sur la base d'une
grille d'analyse avec des risques clairement identifiés qui va devoir être mise en place sur la base d'une
consultation. Donc, tout le monde devrait se baser sur cette grille
d'analyse là et, par la suite, identifier quels projets vont se retrouver dans
quelle liste.
Maintenant,
au niveau de l'orientation n° 5, sur la simplification des autorisations
et des processus, il est évident que de
réduire le nombre de projets soumis à l'obtention d'une autorisation et de
regrouper différents types d'autorisations liées à un même projet sont
clairement des propositions très bonnes, très pertinentes en vue de réduire la
longueur et la complexité des processus en
place. À ce titre, soulignons d'ailleurs que la proposition de mettre en place
une autorisation évolutive est clairement une bonne orientation à cet
égard-là, donc une avenue à privilégier. Elle devrait permettre de diminuer
substantiellement la complexité du processus en place.
Par ailleurs, une des questions posées par le
ministère dans le cadre de l'orientation 5 réfère à la possibilité d'accorder le pouvoir exceptionnel au gouvernement
de réviser une autorisation après 10 ans. Réseau Environnement
estime qu'une telle proposition serait
contre-productive et alourdirait le processus administratif. Le ministère
possède déjà des pouvoirs très larges
d'inspection et d'enquête dans la Loi sur la qualité de l'environnement telle
qu'elle est actuellement, et ceux-ci, s'ils sont appliqués correctement,
avec les bonnes ressources, pourraient facilement permettre de rejoindre
l'objectif qui est visé par cette orientation-là.
Le
Président (M. Reid) : Alors, je dois vous arrêter. Alors, nous
allons passer à la période d'échange, vous aurez l'occasion de
poursuivre. M. le ministre, à vous la parole.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Alors, bonsoir, M. Desjardins, M.
Lacroix, Me Charlebois. Merci pour votre présentation ainsi que votre
mémoire.
Ma première question... Ah! en passant,
félicitations pour votre récente nomination, M. Desjardins, nouveau président
du conseil d'administration.
Sur la
modulation de l'encadrement par le risque, vous vous montrez assez favorables à
cette démarche. J'aimerais vous donner la chance de nous expliquer
davantage votre raisonnement, pourquoi vous appuyez cette démarche-là, s'il
vous plaît.
M.
Charlebois (Pierre-Olivier) : Bien, si je peux me permettre,
premièrement, on la privilégie dans un contexte où il existe déjà
plusieurs choses qui sont proposées dans le livre vert. Je m'explique. La liste
pour les projets à risque élevé existe déjà
dans le règlement sur l'évaluation des impacts. Donc, cette liste-là existe
déjà, et on pourrait bâtir sur ces acquis-là
qui existent. Maintenant, il faudrait la réviser parce que ça fait un certain
nombre d'années qu'elle n'a pas été révisée. Et donc cet exercice-là est
nécessaire, mais, au moins, on a une base sur laquelle on peut partir.
Par la suite,
pour ce qui est des projets à risque faible, on parle d'une déclaration de
conformité et on parle d'un régime
qui existe déjà également dans la Loi sur la qualité de l'environnement aux
articles 95.1. Par ailleurs, régime qui n'a jamais été appliqué, mais qui existe déjà dans la Loi sur la qualité de
l'environnement. Donc, encore une fois, on part d'un élément qui existe
déjà, sur lequel on peut construire.
Au niveau des
projets à risque modéré, on comprend qu'on se référait également à une liste
qui existe déjà, c'est celle du
règlement sur l'application de la Loi sur la qualité de l'environnement, donc
les projets qui sont actuellement assujettis à l'article 22. Encore
une fois, on part d'un certain nombre d'acquis sur lesquels on peut construire.
Et finalement
les projets à risque négligeable, donc qui seraient soustraits à une
autorisation, également un certain nombre
de ces projets-là existent déjà parce qu'ils sont soustraits en vertu du
règlement sur l'application de la Loi sur la qualité de l'environnement.
Donc, le
point ici, c'est qu'on a un certain nombre d'acquis, et ces acquis-là devraient
permettre de construire un régime, cette modulation-là qui pourrait bien
fonctionner.
M.
Heurtel : Donc, juste pour poursuivre sur votre réponse, vous avez
parlé de l'article 95.1 de la LQE, alors un article qui... un article et les articles qui le suivent permettent au
gouvernement d'adopter un règlement sur le concept de l'attestation de
conformité environnementale. Est-ce que vous avez réfléchi davantage à quels
types d'autorisations, quels types de projets pourraient être soumis à 95.1 et
suivants?
M.
Charlebois (Pierre-Olivier) : Comme on a dit dans le cadre de notre présentation, il est difficile pour
nous de se positionner sur quels types de
projets plus spécifiques qui seraient assujettis à cette déclaration-là. Par ailleurs, je suis convaincu qu'il existe au sein du ministère de
l'Environnement déjà non pas une liste, mais, quand même, un certain nombre de
projets qui seraient...
Une voix : Types.
M. Charlebois (Pierre-Olivier) :
...types qui pourraient être assujettis à ce mécanisme-là de 95.1. Donc, évidemment,
Réseau Environnement se montre disponible et serait enchanté de participer à
des consultations à l'égard de cette
partie-là, mais il est difficile pour nous de vous dire d'emblée quels types de
projets, là, pourraient être assujettis à cette déclaration-là.
M.
Heurtel : Vous vous montrez
défavorables à l'allègement des procédures pour les projets d'intérêt public
ou financés par les fonds publics. Alors, j'aimerais vous entendre davantage là-dessus,
le pourquoi.
M. Lacroix
(Jean) : En fait, la base
première — et c'est pour ça qu'on a insisté sur la notion des
principes, sur une équité, une équité pour tous — je
dirais présomption d'une application par une approche, je dirais, à une vitesse
variable du côté municipal. C'est qu'on peut
imaginer qu'il pourrait y avoir une forme de détournement par des
sociétés mixtes créées via... Je peux
imaginer un promoteur qui a le goût de ne pas avoir à émettre... de passer par
le processus normal, et il voit un
processus simplifié via une municipalité, fait une entente avec une
municipalité et trouve une façon détournée d'accélérer un processus.
Je ne fais
pas des procès d'intention, je donne le genre de danger. Ça fait que c'est pour
ça que la base, le principe fondamental,
pour nous, de cette équité-là, on veut... Parce qu'après ça pourquoi plus une
municipalité? Après ça, pourquoi pas
d'autres standards? Pour nous, déjà, à mon avis, le balisage, le concept
général de mettre faible émission, moyenne émission, haute émission vient déjà mettre un encadrement. Et, je vous
dirais, notre premier souci à nous, c'est d'optimiser le processus dans l'émission des certificats
d'autorisation, et on ne voudrait pas avoir des systèmes, par exemple, à
des vitesses variables qui pourraient
potentiellement avoir comme conséquence, en mettant une vitesse plus vite d'un
côté, décélérer davantage d'autres projets.
Donc, c'est ce qui nous a guidés au
départ sur le principe, et c'est pour ça qu'on a pu embarquer sur... Je
ne sais pas si tu voulais ajouter un...
M.
Desjardins (Marc-André) :
Bien, d'autant plus, M. le ministre, qu'en bout de ligne, quand on regarde,
les impacts d'un projet découlent du projet,
ne découlent pas de son initiateur. Prenons l'exemple des... On parle beaucoup
de projets de biométhanisation actuellement, on sait que les projets de
biométhanisation peuvent être soumis par des entités publiques ou par des
entités privées. En bout de ligne, c'est le même projet, et on trouverait, effectivement,
un peu troublant qu'un promoteur privé, pour
se sauver d'un processus éventuellement plus lourd, puisse dire : Bien, je
vais me trouver un partenaire public, je
vais créer une société d'économie mixte puis je vais passer sous le
couvert d'une entité publique pour
bénéficier d'un certain allègement. Je
pense que ça, ce serait une manoeuvre
qui pourrait donner lieu à des dérapages importants.
M.
Charlebois (Pierre-Olivier) :
Et j'ajouterais juste en terminant qu'il existe actuellement dans la Loi sur
la qualité de l'environnement l'article 124.1 qui indique que cette loi-là est applicable
à toute personne, incluant tout corps public
et tout ministère, tout organisme. Alors, il faudrait alors modifier
l'article 124.1. Il y a une raison pour laquelle cet
article-là est là, c'est qu'il y avait une volonté de s'assurer que la LQE
allait s'appliquer de manière uniforme à l'ensemble des citoyens du Québec.
M. Heurtel : Une de vos recommandations
parle d'assurer — et
je cite — «une
synergie interrégionale et multisectorielle».
Alors, ça, ça vise à favoriser les transferts, les demandes d'autorisation aux
ressources ayant développé une
certaine expertise dans des secteurs particuliers. J'aimerais ça que vous
alliez un peu plus loin, question d'approfondir cette notion-là. Et, si possible, j'aimerais ça, avoir des exemples
concrets de ce que vous avez vu de problématique dans le régime actuel
et en quoi ce que vous proposez améliorerait le régime actuel.
• (19 h 50) •
M. Lacroix
(Jean) : En fait, peut-être introduire, et mes collègues vont
poursuivre. Je vous dirais, le fondement de base qu'on a pu constater et voir, c'est que manifestement, par la
nature des projets, qui sont parfois reproductibles dans une région, développent une expertise... Cette
expertise-là peut être vouée à, par exemple, une région qui a développé
cette approche-là versus le central.
Pour nous, ce
qui nous apparaît... en termes d'efficience, il serait bon — on croit, du moins — d'essayer, dans l'optimisation des ressources qui sont comptées au
ministère de l'Environnement, d'essayer d'identifier les forces de
chacun et, surtout, d'assurer qu'en ayant une
approche multisectorielle ou interrégionale, de s'assurer d'une conformité
d'application d'un même projet. On constate — puis là je vais laisser mes
collègues aller dans les exemples — des différences dans des traitements d'émission de
certificat d'autorisation pour des projets similaires. Et on croit qu'en
ayant cette interaction-là qui va demander,
on s'entend... Il y a comme une philosophie en arrière qui s'appelle un
changement de culture dans la façon de faire
les choses. C'est pour ça qu'on parle de collaboration. C'est sûr que ça va
redemander à l'appareil du ministère
de l'Environnement une façon de coordonner les activités très différente que ce
qu'on voit. L'idée, ce n'est pas
d'enlever des pouvoirs aux régions. L'idée, ce n'est pas de donner du pouvoir
au central. C'est de donner le pouvoir où il se trouve en fonction des
compétences. Et des exemples...
M.
Desjardins (Marc-André) : Bien, en fait, il y a deux choses, là. La
souplesse qu'on aimerait voir dans les régionales,
c'est que, si moi, je suis un promoteur d'un type de projet qui est assez
particulier, qui n'a jamais été fait dans une région x, mais qui a été soumis par une autre de mes filiales dans
une autre régionale, j'aimerais que l'analyste qui a fait l'analyse dans cette autre régionale là soit mis à
contribution dans l'analyse du dossier qui est déposé dans la régionale qui reçoit le projet pour pouvoir bénéficier de
l'expertise acquise par l'analyste qui a analysé le dossier dans l'autre
région. Ça, cette souplesse-là serait
intéressante dans une optique d'utilisateur-payeur. Les promoteurs doivent
payer pour l'analyse de leurs
dossiers et s'attendent à avoir des analystes qui sont compétents, et, faute
d'avoir la compétence dans la régionale qui reçoit le projet, est-ce que ce serait possible, pour un collègue
d'une autre régionale, de venir appuyer le receveur de la demande pour
l'analyse d'un dossier donné?
L'autre élément qui nous surprend et qui est un
peu en lien avec ce manque de cohérence là qu'on observe parfois dans les régionales, c'est que, pour un
même type de projet, le traitement que l'on reçoit n'est pas
nécessairement le même d'une région à l'autre, et je suis convaincu qu'on n'est
pas le premier intervenant à vous dire ça.
Mais je peux
vous donner... Je ne nommerai pas de nom, mais je vais parler, exemple, d'un
projet de traitement d'eaux,
traitement d'eaux usées, exemple, où, dans une régionale x, on me demande un
plan concept avec un rapport de l'ingénieur
qui certifie que ça va rencontrer les exigences que le ministère a mises en
place, et, dans l'autre régionale, l'analyste,
pour le même type de projet, me demande de spécifier les marques et les modèles
de tous les équipements qui vont être
installés, puis, quand je lui dis : Oui, mais c'est parce que, là, on n'a
pas fait l'appel d'offres encore, ah! bien là, moi, je ne peux pas recevoir ta demande, je ferme le dossier. Ça fait
que ça, ça occasionne des frustrations, d'autant plus qu'on se dit : En bout de ligne, comme
ingénieur, on est imputable du résultat. Pourquoi l'analyste me demande
quelque chose qui, à notre avis, va au-delà
de ce qui est raisonnable, et son collègue, dans l'autre régionale, de toute
façon, ne m'a pas demandé la même
chose? Donc, ce genre d'incohérence là, on pense qu'il doit être corrigé, puis
ça va être de nature à faciliter le processus pour tout le monde,
finalement.
Le Président (M. Reid) : M.
le député de Mégantic.
M.
Bolduc : Merci, M. le Président. Bonsoir, messieurs. Il me fait
plaisir de vous avoir ici avec nous ce soir. J'ai juste un petit commentaire sur l'extension des
pouvoirs de refus où la loi prévoit déjà comme motif de ne pas délivrer
une autre autorisation s'il y a déjà des manquements qui ont été faits par
l'entreprise soit à la même place ou ailleurs, là. Mais est-ce que vous avez une mécanique pour recrédibiliser une entreprise?
Mettons, elle a eu deux manquements, il y a 10 ans, ce n'est pas
comme il y a eu deux manquements la semaine passée, là. Comprenez-vous?
On met un
jugement rationnel qui fait que, oui, il y a eu des problèmes, mais ces
problèmes-là semblent être réglés, et puis comment on se donne, si on
veut, une mesure, que ces mesures... On pourrait le dire, parler de robustesse
du système ou je ne sais pas comment vous
voulez y arriver, là, mais je vous pose
cette question-là pour... Comment on fait ça?
M. Charlebois (Pierre-Olivier) : Je
vais tenter de répondre à votre question, là. Il existe déjà dans la LQE l'article...
je pense que c'est l'article 115.10, paragraphe
2°, quelque chose comme ça, qui prévoit, justement,
la possibilité où le promoteur ou le
titulaire d'un certificat d'autorisation ne respecte pas les dispositions de la loi ou un règlement, et ceci
permet à un inspecteur d'émettre un avis de non-conformité ou ultimement,
si on ne remédie pas à la non-conformité, d'émettre des constats pénaux,
et tout s'ensuit.
Alors, dans
la mesure où il y aurait non-conformité dans le cadre d'un autre projet et que le
promoteur ne s'est pas conformé, le
ministère devrait aller de l'avant avec des mesures pénales et, ultimement,
chercher à ce que le problème soit
réglé à l'égard de ce projet-là. Et, s'il ne le fait pas, pourquoi
pénaliserait-il ce même promoteur là, d'un autre côté, pour un autre
projet qui débute? Alors, s'il y a un problème à l'égard d'un projet, à l'égard
d'un certificat d'autorisation, utilisons les articles de loi qui permettent de
remédier à ce problème-là via des pouvoirs d'inspection, des pouvoirs
d'enquête, des sanctions administratives pécuniaires et des constats pénaux
pour régler le problème.
M.
Bolduc : O.K. J'avais une autre question qui... Quand vous nous
dites : Il faut déterminer le passif environnemental potentiel en
amont afin de déterminer correctement les conditions des garanties financières,
certains projets, c'est très quantifiable. Il y a d'autres projets où c'est, je
dirais, très nébuleux dans le meilleur des cas.
Donc, est-ce
que vous avez ici un peu un guide de direction? Par exemple, on débute une mine
de terres rares, on a une idée du contenu, mais les dosages et les
concentrations varient d'un point à l'autre. On peut se ramasser, comme à Thetford Mines, entre 1 milliard et
10 milliards de tonnes de déchets, là, ça a duré 100 ans. Voyez-vous ce
que je veux dire? Comment on arrive à
être rationnel et intelligent dans la détermination de certains passifs environnementaux
potentiels?
M. Lacroix (Jean) : Mais, tu sais,
si je prends l'exemple que vous donnez, les passifs environnementaux, à la base, vont demander une attention particulière
pour un meilleur balisage. Une fois que j'ai dit ça, évidemment, dans ce
qui est connu au moment de l'émission de la
certification et du tonnage visé, ce que moi, je veux m'assurer...Et, je
pense, peut-être, qui
a fait défaut à certains égards, c'est qu'on connaissait une envergure qui
était connue — évidemment,
si on découvre de nouvelles, c'est une autre
histoire — mais qui
a été très souvent sous-estimée, les garanties n'y étaient pas. Donc, la prévisibilité du passif
environnemental à déterminer pour la société, à la base, est fondamentale. Si
on fait une petite recherche à l'international,
à peu près tout passif environnemental, sur l'ensemble des sujets couverts par
la LQE, a un historique sur lequel on peut
se baser pour faire des projections. Peut-être que le Québec n'aura pas
connu, hein... Les terres rares, je ne pense
pas que c'est notre, hein... on n'a pas une expérience vaste, mais, ailleurs
dans le monde, il y en a et il y a des gens qui ont fait l'exercice.
Donc, au
moins, se servir de la science connue, de l'expérience connue et appliquer
progressivement ce qui est là. C'est
un peu le regard que je vous dirais, c'est l'intention du texte qui est écrit.
On ne veut pas être devins, on ne veut pas être dans la machine à
inventer des choses, mais il y a des choses très factuelles, là, qu'on néglige
parfois dans ce passif-là. Puis peut-être le
plus grand enjeu, c'est la question des sols contaminés, où, là, on vit cette
réalité des passifs environnementaux qu'on découvre jour après jour.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Nous allons passer maintenant à l'opposition officielle. M. le député de
Terrebonne.
M.
Traversy : Merci, M. le Président. Alors, M. Lacroix, M.
Desjardins, M. Charlebois, félicitations pour cette présentation. Merci d'être avec nous en ces heures
tardives à l'Assemblée nationale pour discuter du livre vert. Vous
parlez de plusieurs aspects du livre,
évidemment, dans votre mémoire. Vous avez des passages qui parlent du Bureau
d'audiences publiques. Vous nous dites dans
votre mémoire que le BAPE est un processus qui est rendu bien rodé à l'heure
actuelle, il y a plusieurs groupes qui sont venus avant vous qui avaient des
nuances peut-être un peu plus poussées à cet égard. Donc, je voulais vous
entendre parler sur le BAPE, si vous trouvez qu'effectivement il est rendu à
maturité ou si on peut l'améliorer.
Et je voulais
vous entendre, par rapport au BAPE toujours, sur votre opinion en ce qui
concerne la procédure des études
environnementales stratégiques. Parce que je ne dis pas qu'il y a une
contradiction, mais j'étais curieux de savoir, vous dites, d'un côté, que le BAPE est bien rodé, qu'il semble être
rendu à maturité ou, en tout cas, du moins, qu'il livre la marchandise, mais, de l'autre, vous n'êtes pas
contre le fait que le ministre puisse garder, exemple, un
discrétionnaire dans l'application ou non
d'une étude environnementale stratégique par un BAPE ou par un autre moyen. Donc, je voulais voir un peu, là, quelle était votre opinion sur ce
mécanisme et pourquoi garder un pouvoir discrétionnaire si vous
trouvez qu'il est si bien avancé.
• (20 heures) •
M. Lacroix
(Jean) : Dans un premier
temps, je vais juste répondre sur la question du BAPE. La modernisation de la LQE est en
soi un chantier fort vaste, à laquelle il y a passablement — et le
livre vert le démontre bien — une amélioration
à y avoir au cours des 40 dernières années qui ont pu passer. Donc, notre
priorisation est là-dessus, et notre regard à l'égard du BAPE était de mettre en perspective par rapport aux priorisations des autres chantiers du livre vert.
Évidemment,
si vous me demandez : Est-ce
qu'il y a des améliorations à amener
au BAPE? Bien sûr. On a dit ce commentaire-là pour non pas banaliser, mais mettre en perspective. Si
vous me posiez expressément la question sur le BAPE,
j'aurais beaucoup de commentaires à vous faire, mais, je vous
dirais, j'aimerais mieux qu'on parle des autres aspects qui me
paraissent encore plus fondamentaux parce que c'est l'architecture de ce qu'on
veut faire pour le Québec de demain. Et le
BAPE sera, je dirais, un porte-étendard, mais ce porte-étendard-là sera aussi
fort que la LQE pourra être forte. Un
est déterminant de l'autre. Et ce qu'on pourrait dire et ce que j'ai entendu du
BAPE fait partie, entre autres, de ce qu'on a pu voir dans, je dirais, les adaptations, avec le temps des dernières
décennies, qu'on a faites. Le BAPE fait avec le cadre législatif dans
lequel il est. Ça fait que c'est un peu ce commentaire-là. Bien, je te
laisserais peut-être plus sur la question discrétionnaire, d'ouverture.
M. Charlebois
(Pierre-Olivier) : Juste
pour terminer sur la question du BAPE, le commentaire, oui, on pense que
le BAPE est un organisme qui est bien rodé et qu'on devrait
construire sur l'expérience qu'il a acquise depuis plusieurs années. Par ailleurs, petite réserve en ce qui
concerne le mode de nomination des commissaires, qui devrait être revu,
voire même intégré législativement pour
s'assurer que c'est fait de manière correcte, sur la base des compétences, et
de s'assurer qu'on a une palette de compétences qui couvre l'ensemble
des sujets que le BAPE doit couvrir dans le cadre de ses évaluations. Donc,
c'est juste une petite réserve à cet égard-là.
Maintenant,
en ce qui concerne la discrétion, on a eu un certain nombre d'exemples
d'évaluations environnementales stratégiques qui ont été réalisées par
d'autres instances que le BAPE, qui ont donné, ma foi, de bons résultats, voire
même d'excellents résultats parce que
l'organisme ou l'entreprise qui avait été mandaté pour réaliser ces études-là
avait une flexibilité d'opération qui
permettait de se rendre dans plusieurs régions du Québec pour aller consulter
directement les gens sur le terrain, d'ouvrir des bureaux de manière
sporadique pour aller chercher l'information directement auprès des gens, ce que le BAPE, qui est une structure
peut-être un peu plus... du moins, moins flexible, n'aurait pas
nécessairement. Donc, on voudrait accorder
cette flexibilité-là, cette discrétion-là au ministre pour permettre de
mandater une partie de l'EES à une
entreprise, à un groupe, un organisme quelconque qui aurait une flexibilité
additionnelle pour optimiser le processus de consultation, notamment.
M. Lacroix (Jean) : Évidemment, dans
un cadre très rigoureux, scientifique, et éviter qu'on...
M. Charlebois (Pierre-Olivier) :
Évidemment, toujours sur la base des compétences de...
M. Desjardins (Marc-André) :
La question de la crédibilité du meneur de l'activité reste fondamentale,
mais ça, on en est tous témoins. Et le
ministre n'a pas le champ totalement libre à cet égard, mais je pense qu'il
faut faire confiance aux pouvoirs discrétionnaires du ministre, au
niveau de ce choix-là en particulier.
M.
Traversy : C'est intéressant. Et vous comprenez qu'on a des
opinions qui nous arrivent de d'autres groupes, qui sont, des fois, en
accord avec les vôtres. Donc, ça fait du bien d'avoir vos précisions.
Est-ce
que j'ai bien compris que les 16 principes, là, de développement durable
ne seraient pas nécessairement, là...
Comment je pourrais dire? Pas utiles, mais, en tout cas, utiles d'intégrer dans
le processus de demande d'autorisation ou même dans la loi, là, de la
qualité de l'environnement? Je veux juste comprendre pourquoi ces
16 principes, qui sont pourtant consensuels généralement lorsqu'on en discute,
là, ne sont pas nécessaires, à vos yeux, là, à additionner à l'intérieur, là,
dudit projet.
M. Lacroix
(Jean) : Je dirais, à la base, les 16 principes sont déjà dévolus
dans d'autres fonctions, à d'autres égards,
et c'est pour ça qu'on les amène dans ces fameuses études d'évaluation. On
pense que l'exercice rendrait l'émission du certificat d'autorisation
avec, je dirais, une lourdeur qui aurait déjà été vue au préalable.
Ça fait que, je ne
sais pas, sais-tu, concrètement, Pierre-Olivier...
M. Charlebois
(Pierre-Olivier) : Bien, les 16 principes de développement
durable sont déjà, vous le savez... Probablement,
vous vous l'êtes déjà fait dire, à partir d'aujourd'hui, là, que ces
16 principes là sont intégrés dans la Loi sur le développement durable, ils sont applicables à l'Administration,
et donc, dans le cadre de l'analyse d'un dossier de certificat d'autorisation, l'Administration, les
fonctionnaires doivent en tenir compte dans l'analyse. Donc, ils doivent
regarder ces 16 principes là pour rendre une décision.
Maintenant,
de les imposer en termes de devoirs et d'obligations dans la Loi sur la qualité
de l'environnement à tout promoteur,
à tout citoyen, on pense que ça viendrait alourdir inutilement le processus
d'autorisation, alors que, si on a bien
compris l'objectif que poursuivait le livre vert, c'était d'optimiser et de
faire accélérer le processus. Alors que de venir imposer
16 principes qui, par ailleurs, sont déjà intégrés dans une loi qui est
applicable à l'Administration, on viendrait, en quelque sorte, alourdir le
processus.
M.
Desjardins (Marc-André) : En fait, on ne voyait pas la plus-value. On
ne la voit pas, la plus-value d'intégrer ces principes-là dans la loi
dans la mesure où l'analyste qui traite les demandes soumises par les promoteurs
est déjà imprégné de ces principes-là. Est-ce qu'à la limite on verrait ces principes-là
dans un préambule de la loi? Je ne suis même pas sûr que c'est nécessaire. Mais notre lecture à nous, c'est que les
analystes ont, dans leur travail, la couleur du développement durable qui transcende leur activité. Est-ce qu'il faut
maintenant prendre ces principes-là et les ajouter à la LQE? Pas sûr.
M. Traversy :
À vos yeux, il y a une espèce de dédoublement ou, en tout cas, du moins, là,
une lourdeur, là, possible à ajouter dans le processus qui n'est pas
nécessairement nécessaire. C'est ce que je déduis.
M.
Lacroix (Jean) : Bien, en
fait, on soulevait, tu sais, dans les sept orientations, on mentionnait,
à notre malheur, deux des sept orientations n'allaient pas dans le sens de trouver une simplification, mais bien
un alourdissement. Donc, une majorité
de ceux-là étaient dans ce sens-là. Ça fait qu'encore là revenons sur les principes de
base, l'idée, ce n'est pas de faire
un «fast track», on s'entend bien, l'idée, ce n'est pas de passer à côté de la
notion de développement durable, qui est
imprégnée dans la société dans laquelle on est, l'idée, c'est peut-être
qu'on ne la retrouve pas à chaque détour, à chaque élément dans un cadre qui amène en plus, à mon avis,
là, bien humblement, une ouverture à l'interprétation de l'analyste du certificat d'autorisation, d'autant plus que,
ces principes-là, on peut leur dire et leur faire valoir beaucoup
de choses.
M.
Traversy : Et, en
terminant, je vais vous laisser simplement nous indiquer... Vous avez trois
principes généraux, là, sur lesquels vous vous appuyez dans votre
mémoire à la toute fin. En une minute, pouvez-vous juste nous résumer l'importance
de ces trois principes à vos yeux? Parce que c'est une particularité de votre
mémoire qu'on ne retrouve pas ailleurs.
M.
Desjardins (Marc-André) :
J'en ai parlé un peu tantôt. J'ai résumé ça en trois mots : l'équité, la
collaboration, la simplification.
L'équité,
on en a parlé. J'ai donné l'exemple de mon projet en traitement d'eau, où je me
fais fermer le dossier au nez parce que
je n'ai pas encore les plans et devis et je choisis les équipements, alors que,
dans l'autre régional, mon plan concept et le rapport d'ingénieur
étaient suffisants. Moi, je considère que je n'ai pas eu l'équité dans ce
dossier-là. O.K.? Donc, l'équité aussi entre les demandeurs. Que ce
soit un demandeur public ou un demandeur privé, ils vont le traiter de
la même façon, il n'y aura pas de passe-droit d'un côté ou de l'autre.
La collaboration,
bon, on en a parlé. Actuellement — et rapidement, j'arrête là-dessus — il y
a peut-être un changement de culture qu'il
faut installer, dans le sens que, les analystes, on ne doit pas les voir comme
des gens qui sont contre les projets,
mais ce sont des partenaires qui vont faire que les projets vont être
meilleurs. Et comment qu'on peut collaborer
avec le ministère pour faire qu'on va avoir des projets qui vont s'inscrire
dans une logique de développement durable, c'est dans cette optique-là
qu'on voit le principe de collaboration.
Le
Président (M. Reid) : Je vous arrête pour protéger le temps du
deuxième groupe d'opposition. M. le député de Masson.
M. Lemay : Merci, M. le Président.
Merci, messieurs, d'être avec nous ce soir. Vous savez, l'allègement, la
simplification, l'équité, collaboration, ça ne date pas d'hier. Vous avez
d'ailleurs déposé un mémoire en juin 2013 au Comité
consultatif sur les processus administratifs en matière environnementale. Donc,
les thèmes retrouvés ici, on les retrouve encore aujourd'hui. Alors,
espérons qu'on puisse aboutir éventuellement.
M. Lacroix (Jean) : J'espère que
vous avez vu qu'on était concordants.
• (20 h 10) •
M.
Lemay : Et voilà. Bien, vous
avez une rigueur. Je suis d'ailleurs un ingénieur, donc je peux voir la belle
rigueur que vous avez dans votre mémoire. Merci de votre attention.
Vous savez,
je vais vous amener tout de suite à la page 14 de votre mémoire. Dans la
conclusion, au niveau des émissions de gaz à effet de serre, vous
apportez un point que je n'ai pas entendu encore par les autres groupes qui
sont passés en commission, vous recommandez «d'évaluer les projets dans leur
contexte national [...] — bon,
O.K. — en
comparaison des technologies disponibles sur
le marché», puis là vous venez rajouter : «...en termes de leur
performance au sein du marché actuel.»
Si je prends
un exemple, bon, mettons, je prends la cimenterie McInnis , qu'on sait que
c'est 1,75 million de tonnes de GES par année, que ça fait en sorte que... Tu sais, on prend toujours
le contexte que, d'ici 2050, on veut réduire, si on l'adopte, là, de 80 % à 95 % notre niveau de 1990. Là, ce que vous dites par
cette phrase-là, c'est comme de dire : Bien, tu sais, on ne regarde pas que c'est
1,75 million de tonnes, mais on regarderait par rapport à qu'est-ce qui se
fait ailleurs sur la scène mondiale
dans une cimenterie, puis dire : Est-ce que cette cimenterie-là, elle est
vraiment meilleure que les autres, puis
c'est... Est-ce que c'est ça que vous voulez dire? Puis là, basé là-dessus, on
pourrait dire : Ah! bon, bien, c'est une cimenterie performante, ça
vaut la peine, on peut y aller de l'avant.
M. Lacroix (Jean) : Bien, vous
m'amenez dans un... On va comme très politique. Je vais essayer d'être très
factuel, vous me permettrez.
M. Lemay : D'accord.
M. Lacroix
(Jean) : Le concept qu'on a
voulu amener ici, c'est d'être capables, dans la question des émissions de GES, de regarder... On répond à une demande, et
cette demande-là, elle est locale, nord-américaine, internationale, mondiale. Dans cette perspective-là, ce qu'on dit
dans l'évaluation de l'innovation technologique, à sa face même, si on rentre une innovation technologique, un procédé industriel ou autre qui
présente une amélioration de gaz à effet de serre de 20 % par rapport au meilleur projet qu'il
peut y avoir, mais que, dans... à sa face même, au brut... parce que je
vous rappelle que les GES, c'est planétaire,
je n'ai pas à nous le dire, mais qu'au brut on voit que c'est 1 million
qu'on injecte... Puis là c'est pour
ça que je vous dis que je ne veux pas faire de politique, parce que McInnis
avait un enjeu de... est-ce que la
demande était là, est-ce qu'elle ne répondait pas... Bon, bref... Mais c'est à
cet égard-là, c'est le comparable technologique sur la plus-value, l'amélioration nette pour une même tonne produite
d'un produit x par rapport à une émission donnée. C'est dans cette perspective-là que ce commentaire
était fait là, dans une approche évolutive de l'innovation, et non pas
sur la ligne nette, en bas, d'émissions. C'est en ce sens-là, et non pas à
l'égard de 95 % ou... Est-ce que la pensée...
M.
Lemay : Ça fait du sens parce que, dans le fond, c'est des... Dans
l'exemple que vous donnez, le caractère d'innovation permettrait de dire : L'entreprise a fait son effort
de réduire au maximum ses émissions. Donc, ça vaut la peine de dire : On va donner un certificat
d'autorisation, quitte à fermer une entreprise plus polluante ou la
moderniser.
M. Lacroix
(Jean) : Sans trop entrer
dans le détail du marché du carbone, c'est exactement l'esprit d'un
marché de carbone ou d'un prix carbone, ça va dans cet esprit-là.
M.
Lemay : C'est exactement
pour ça que je voulais poser les questions, pour m'assurer qu'on était tous
dans la même longueur d'onde.
Je vais y aller directement à la page 9 de
votre mémoire, on parle de rendre publics tous les renseignements contenus dans les demandes d'autorisation, excepté
les secrets industriels et renseignements financiers. Et puis là on
vient mentionner que, dans le cas d'un
désaccord, une mésentente, on devrait se référer à la Commission d'accès à l'information pour pouvoir régler le différend. Alors, on sait
que les délais sont de quelques mois à la Commission d'accès à l'information. Est-ce que, selon vous, là,
s'il y a eu mésaccord, les points qui sont en accord devraient être publiés automatiquement? Les points qui sont en désaccord,
ça empêche-tu d'émettre le certificat d'autorisation, puis là ça rajoute
des délais, donc ce qui fait que ça ne simplifie pas le processus, ou ça peut
se faire en parallèle?
M. Lacroix
(Jean) : Je pense qu'on est
à la recherche, comme on dit, de l'information la plus pertinente possible, puis on veut éliminer toute subjectivité dans l'interprétation de ce qu'est un secret
industriel. Parce qu'un secret
industriel, ça peut être en ouvrant la porte puis en fermant la porte, hein, on
peut aller loin dans l'interprétation du secret industriel. Je pense qu'on ne doit pas mettre un système
à plusieurs vitesses, on doit... Dépendamment de l'importance, les
secrets industriels doivent être préservés, on sait pour quelle raison. S'il y
a un litige...
Et la question des délais,
vous comprendrez que, quand on écrit un mémoire de cette nature-là, je dois
faire abstraction d'une réalité de délai d'application parce que, là, je n'y arriverai pas, là. Je vais mettre des
conditions à, mais on espère qu'en venant
avec ça qu'on améliorera cette réalité-là. Mais, pour moi, je pense qu'un n'est
pas sine qua non à l'autre, c'est-à-dire qu'on peut trouver des modulations pour... Parce qu'on ne veut pas retarder à l'infini les
certificats d'autorisation en raison d'un litige, on doit exécuter, mais, évidemment,
on doit se conformer à la décision de la Commission
d'accès à l'information, on lui a dévolu ces pouvoirs-là. Donc, il ne faut pas
que ça soit un frein à faire avancer. L'idée, c'est qu'on veut
simplement... il y a déjà des outils de disponibles puis qu'on veut qu'elle
s'exerce dans ces outils-là. Je ne sais pas si ça fait le point.
Le Président (M. Reid) : Vous
avez le temps d'un commentaire.
M. Lemay : Bien, merci beaucoup,
très apprécié de toutes vos réponses.
Le
Président (M. Reid) : Alors, M. Lacroix,
M. Desjardins, M. Charlebois, merci pour votre contribution
aux travaux de la commission.
Je suspends les travaux quelques instants, le
temps de laisser nos prochains invités prendre place.
(Suspension de la séance à 20 h 16)
(Reprise à 20 h 17)
Le
Président (M. Reid) : Alors, je souhaite maintenant la
bienvenue à nos invités de l'Association des producteurs de tourbe horticole du Québec. Vous avez eu
l'occasion de voir un petit peu la mécanique. Alors, vous avez
10 minutes pour faire votre
présentation. Par la suite, nous aurons un échange avec les membres de la
commission. Je vous demanderais, pour
les fins de l'enregistrement, de vous présenter et de présenter la personne qui
vous accompagne. Vous avez la parole.
Association des
producteurs de tourbe
horticole du Québec (APTHQ)
Mme Potvin (Geneviève) : Bonjour.
Mon nom est Geneviève Potvin. Je travaille pour l'Association des
producteurs de tourbe horticole du Québec. Je suis accompagnée de
M. Alexandre Brisson, qui est administrateur de l'association.
Bien,
bonsoir, M. le Président, M. le ministre, Mme et MM. les parlementaires.
L'Association des producteurs de tourbe horticole du Québec remercie le
gouvernement pour l'opportunité offerte à ses membres d'exprimer leurs commentaires sur le livre vert Moderniser le
régime d'autorisation environnementale de la Loi sur la qualité de
l'environnement.
Le secteur de
la production de tourbe horticole représente une clientèle du ministère du
Développement durable, de l'Environnement
et de la Lutte contre les changements climatiques, et ce, dans plusieurs
régions du Québec. Les activités d'aménagement de tourbières, de récolte
de tourbe et de transformation sont assujetties à l'obtention de certificats d'autorisation pour l'ensemble de leurs
opérations. L'émission des certificats d'autorisation étant fréquemment un
facteur qui régit l'avancement des projets
de développement de la filière, l'APTHQ salue l'initiative du gouvernement de
revoir certaines orientations du régime
d'autorisation actuel afin de le rendre plus clair, plus prévisible et plus
efficace tout en maintenant,
naturellement, les plus hautes exigences en matière de protection de
l'environnement. Par contre, à la lecture du livre vert proposé, nous, on avait quelques propositions qui nous ont
apporté un questionnement, puis on veut les partager avec vous ce soir.
Premièrement,
l'orientation 1, inclure la lutte contre les changements climatiques dans
le processus d'autorisation, l'APTHQ
tient à souligner que la première proposition, là, de concevoir des outils afin
de renforcer la capacité de prise en compte des risques climatiques dans
l'ensemble des processus d'autorisation, selon nous, ça va à l'encontre d'un
des objectifs de la modernisation, donc
d'alléger et de clarifier le traitement des demandes et des démarches
d'autorisation.
En effet, le
processus d'analyse et de traitement des demandes d'un certificat
d'autorisation, pour notre secteur... Donc,
on va parler plus de notre secteur, on ne parlera pas en général, on ne veut
pas prendre de position sur le processus en général. Mais, en tout cas, ce qui nous concerne, il est déjà lent, il
retarde souvent les projets. Ici, on parle de délais, là, qui varient entre deux et trois ans, là, pour une
demande de certificat d'autorisation. Il s'avère que le développement
d'outils est justement un facteur qui, à notre perception, là, ralentit le
processus de traitement des demandes. Par exemple, on a un exemple concret, là, donc on collabore avec le ministère, là, pour un
guide qui soit vraiment spécifique pour notre secteur d'activité, donc un guide, là, qui est devenu un
formulaire avec le temps, là, pour les demandes d'autorisation de projets
de tourbière, et ça fait plus de quatre ans, puis on est encore dans l'attente
dudit document, là.
• (20 h 20) •
Donc,
d'ajouter le calcul des gaz à effet
de serre, on a peur que ça vienne vraiment
ralentir le processus. Nous, on constate que, pour faire un bon bilan
des gaz à effet de serre et d'avoir une opinion sur est-ce que les objectifs
sont réalistes, est-ce qu'ils sont assez ambitieux, etc., ça demande une
analyse très pointue et spécifique pour chacun des secteurs industriels. On pense que ça alourdirait beaucoup
les demandes de certificat d'autorisation, le processus, en général, là,
d'autorisation.
Également, dans le secteur des ressources
naturelles plus spécifiquement, le calcul des gaz à effet de serre,
c'est très complexe. On travaille avec le
CIRAIG, le centre de recherche à Montréal, la Polytechnique, qui est spécialisé dans
les analyses de cycle de vie, et on n'a pas
encore trouvé le chiffre magique, là, pour déterminer quelles seraient les
émissions de gaz à effet de serre pour certains éléments de notre industrie. Donc,
on pense que ça serait vraiment difficile, là, d'intégrer ça comme
procédure régulière dans les demandes d'autorisation.
Également, comme beaucoup
de groupes l'ont souligné dans leur mémoire, le Québec s'est déjà doté d'un
mécanisme pour encadrer les émissions de gaz à effet de serre, là, le Système
de plafonnement et d'échange de droits d'émission
de gaz à effet de serre du Québec, puis le gouvernement lui-même
déclare que ce système de plafonnement et d'échange est le moyen le plus efficace pour atteindre les objectifs
de réduction que le Québec s'est
fixés. Donc, je me permets de
rementionner, là, le commentaire de M. Villeneuve, qui disait tout à
l'heure que, déjà, les plus grands émetteurs sont bien encadrés, donc de
mettre de l'énergie sur des petites quantités de gaz à effet de serre, ça
n'irait pas dans le sens de l'allègement réglementaire.
Au niveau
de l'orientation 2, l'intégration des 16 principes de la Loi
sur le développement durable, l'APTHQ trouve qu'il serait judicieux et même nécessaire d'encadrer le processus d'évaluation environnementale stratégique afin que les évaluations soient
plus uniformes et que l'intégration des 16 principes aux études environnementales
stratégiques pourrait être un bel endroit
pour les intégrer. Pas nécessairement dans les demandes de certificat
d'autorisation, mais plus en amont au niveau des études d'évaluation
stratégique.
Pour
ce qui est d'adapter les processus d'autorisation environnementale aux projets découlant d'une stratégie, d'un programme ou d'un plan qui aurait fait l'étude
d'une étude environnementale stratégique, oui, si c'est pour profiter
des connaissances acquises. Mais encore on rappelle qu'il ne faut
pas que ça devienne un prétexte pour ralentir le traitement des demandes
parce que, de toute façon, chaque fois qu'il y a un nouveau projet, chaque
critère est revu en détail, donc d'attendre une évaluation stratégique, parfois
ça peut alourdir le développement de certaines filières.
L'orientation 3, donc accentuer la modulation du régime d'autorisation, bien,
l'APTHQ est absolument favorable
à la modulation du régime en fonction du
risque environnemental, bien
sûr. Les projets d'amélioration de procédés qui ont un impact
positif, par contre, devraient bénéficier d'une procédure très
allégée parce qu'on vient améliorer
l'environnement. Et, pour les projets à
risque élevé, on considère que la liste devrait être revue de façon périodique
et s'assurer qu'elle est la plus
précise possible pour mieux encadrer ces grands projets là. Et le gouvernement
devrait produire un registre public des activités et projets à risque
faible et risque négligeable. L'objectif là-dedans, ça fait un mandat de
sensibilisation pour vraiment... pour voir quel genre d'activités qui seraient
régies par le système d'autorisation. Surtout dans les projets à moindre
impact, des fois les gens ne savent même pas que ce serait assujetti à une
demande ou à une autorisation du ministère.
L'APTHQ
tient également à mentionner que les catégories de projets devraient être
évaluées en fonction de leur impact,
et pas en fonction de leur secteur d'activité, là. On a un exemple concret pour
illustrer ça, c'est que nous, dans le secteur
de la production de tourbe, on vient faire des travaux de drainage dans les
tourbières, donc l'industrie doit demander un certificat d'autorisation pour drainer les tourbières. Mais, jusqu'à
récemment, le gouvernement du Québec donnait des subventions à l'industrie forestière pour drainer ces mêmes tourbières
là. Ça fait que, donc, nous, on pense que ça, c'est vraiment des
éléments qui sont importants, puis de ne pas y aller avec les secteurs, mais y
aller plus au niveau des catégories d'impacts. Ça fait que, nous, on est
absolument en accord avec cette orientation-là.
Puis
on a un autre exemple, là, c'est un récent rapport qui a été produit pour le
ministère, qui s'intitule Analyse de la situation des milieux humides au Québec et recommandations à des fins
de conservation et de gestion durable. En fait, un des constats majeurs
des gens qui ont fait l'étude, c'est que la majorité des milieux humides qui
ont été affectés par des activités
anthropiques n'ont pas fait lieu d'une autorisation du ministère. Donc, on
pense que l'important, c'est vraiment de faire plus de sensibilisation sur différentes catégories d'impacts pour
éviter, justement, qu'on se retrouve avec, oui, des utilisateurs qui
font les choses dans les règles de l'art au niveau des demandes de certificat
d'autorisation, mais que, parallèlement, on
vient affecter l'environnement, mais sans avoir... Plusieurs secteurs, soit
qu'ils ne le savent pas ou peu importe
la raison, mais qu'il n'y a même pas de processus. Donc, à la fin, le Québec se
ramasse avec moins de milieux humides,
par exemple, peu importent la rigueur, ou la sévérité, ou les critères qui sont
dans les demandes de certificat d'autorisation s'il n'y en a pas qui est
demandé.
L'orientation 4,
accroître l'information disponible sur les autorisations et les occasions
d'intervenir pour le public, l'APTHQ est favorable sur le principe, en général,
de cette orientation-là, mais deux éléments qu'on tient à souligner. Consulter la population vraiment au
tout départ, avant même d'avoir engagé les processus avec le ministère,
ça pourrait devenir nuisible et créer des attentes au niveau de la population.
Nous, on souhaiterait que les... On tient à mentionner
qu'il y a des consultations publiques qui sont déjà demandées pour tous les
secteurs. Donc, le secteur de la tourbe, il y a des consultations
publiques avant l'émission du CA. Donc, déjà, il y a une consultation qui va se
faire, puis on va avoir des éléments concrets à présenter.
Et, au niveau de...
Le Président (M.
Reid) : Quelques secondes.
Mme Potvin (Geneviève) :
Quelques secondes. Donc, bien, je vais conclure. Je vais conclure en disant
que, de manière générale, on est d'accord avec les mesures proposées dans le
livre vert. On tient juste à mentionner que l'intégration
de critères pour la lutte aux changements climatiques serait superflue et
nuisible, il y a déjà un processus qui est
en place. Puis, au niveau des publications de données, d'être prudent sur la
publication de documents confidentiels.
Le
Président (M. Reid) : Merci beaucoup de votre présentation.
Nous allons passer à notre période d'échange, je donne la parole à M. le
ministre.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Bonsoir, Mme Potvin,
M. Brisson. Merci beaucoup pour votre présentation ainsi que votre mémoire. Merci d'être avec nous ce
soir. Ma première question, ça serait peut-être plus concrètement dans, justement, la vie de tous les jours, là, de vos
membres. Est-ce que vous avez des exemples parce qu'on cherche,
justement, à comprendre mieux la réalité,
là, des intervenants, là, sur le terrain puis voir comment on doit améliorer?
Tu sais, c'est un peu ça, le livre
vert, tu sais, comment améliorer le processus d'évaluation, mais aussi c'est
avec des exemples concrets qu'on peut aussi mieux informer la démarche,
là, de la commission. Alors, de votre côté, dans l'industrie de la tourbe horticole, c'est quoi, les principaux enjeux que
vous avez rencontrés, que vos membres ont rencontrés dans les processus
d'autorisation qu'une modernisation pourrait améliorer?
Mme Potvin
(Geneviève) : Bien, tout d'abord, d'avoir une liste de critères pour
l'analyse du dossier qui soit claire, précise
et déposée dès le départ du processus. Donc, dans votre livre vert, il y avait
une suggestion, là, d'une rencontre de démarrage.
C'est fantastique, il faut ça, je crois, là, et d'avoir une liste claire parce
que, souvent, la liste s'allonge avec le temps. Donc, il y a certaines études qui sont demandées. Après ça, il y
a d'autres études qui viennent s'ajouter après un an de traitement ou d'analyse. Puis parfois, bien, si
c'est un inventaire floristique complémentaire ou supplémentaire à ce
qui avait déjà été demandé, bien, si c'est
au mois de juin, puis on est au mois de novembre, bien, il faut attendre au
mois de juin. Donc, on vient de décaler de pratiquement neuf mois,
10 mois le processus.
Autre point
aussi, ce qu'on a pu voir, c'est que l'expertise est très variable selon les
régions. Donc, on a entendu ici, là, la proposition d'un guichet unique.
Peut-être que ça serait une bonne solution pour avoir une expertise qui se
bâtisse puis que les analystes qui s'occupent d'un secteur puissent traiter
bien les demandes.
(Interruption)
M. Brisson (Alexandre) : Oui. Oui,
bien, j'abonde dans le même sens.
Une voix : ...
• (20 h 30) •
M. Brisson
(Alexandre) : Non, non,
c'était juste pour me dérhumer. Alors, il
n'y a pas de problème.
Bien, c'est ça, c'est d'avoir une synchronisation dans le traitement des
analyses, qu'on se trouve dans une régionalité, sur la Côte-Nord, au Bas-Saint-Laurent, dans... Je peux comprendre qu'il y a une optique de régionalité dans
le traitement des dossiers, mais
souvent il n'y a pas de directive claire pour ce qui est des traitements directement des tourbières. Ça fait que
ce qu'on subit au fil des années... Puis je recule juste de cinq ans, les
protocoles d'inventaire pour redonner les études faites pour
l'acceptabilité de notre application étaient standard, mineurs, Mais, au fil du
temps, on subit non pas par transparence initiale au dépôt de notre demande ou
à la demande du protocole qui doit s'ensuivre pour donner aux consultants pour aller faire les inventaires, mais
on le subit à la deuxième série de questions, suite au dépôt de
ce qu'on pensait être l'étude
complète : Retournez nous vérifier cette association végétale. Je peux
donner un exemple... Mais on est en
droit de se demander d'où est-ce que ça peut sortir, cette nouvelle demande là.
Qu'on traite un dossier en Abitibi puis en Côte-Nord, on se fait
demander complètement le contraire. Je prends les deux exemples, c'est facile.
Donc, c'est un peu où est-ce qu'on joue...
Tantôt, je pense, c'est les gens de l'exploration minière qui mentionnaient... Je ne me souviens peut-être
pas comme il faut, mais ils mentionnaient que, tu sais, la deuxième série
de questions... ils se retenaient à déposer vraiment les informations complètes
dans la demande initiale pour être sûrs de manager
ce retour de questions là. Mais, dans notre cas, on est parfois beaucoup
transparents, on met tout sur la table, tout est déposé, mais on a toujours
un petit... Un délai de traitement, là, présentement pour un CA de tourbe, là,
c'est minimum trois ans.
M. Heurtel : Trois ans?
M. Brisson
(Alexandre) : Trois ans.
Trois ans, puis les cas... Tous nos membres, tout l'inventaire des CA
qui ont été demandés au cours des cinq
dernières années, je pensais... Je pense, ce ne sera pas un exemple concret.
Bien, vous voulez un exemple concret?
M. Heurtel : S'il vous plaît.
M. Brisson
(Alexandre) : Je vais vous
en donner un. Je vais vous en donner un. On s'est fait soumettre une
idée de coordination entre la demande de BEX et la demande de CA, puis il y a
toute la schématique qui s'ensuit. C'était au stade
de projet, mais, déjà un an et demi avant ce dépôt-là
du premier prototype d'harmonisation, on était soumis à des directives internes qui amenaient vers cette
idéologie-là, si vous voulez. Donc, une demande sur la Côte-Nord,
le BEX a été obtenu. La demande de CA, les protocoles d'inventaire ont
été faits en collaboration avec le... Mais où est-ce que ça bloque, ce n'est même plus rendu à l'Environnement, c'est revenu au BEX parce que c'est toute une question de la nouvelle mode du retrait de jalonnement minier
pour préserver des zones de compensation ou quoi que ce soit. Ça fait que... Et, en revenant au BEX, mais oui, c'est un
voeu pieux parce que la mécanique légale n'est pas en place pour retirer
ça de cette manière-là.
Ça
fait qu'on est pognés, là, en plus, à court terme, présentement, dans une boucle de... une nouvelle directive, nouvelle orientation pas tout à fait en place, mais qui s'en vient. Ça fait que c'est très, très ardu pour nous de
naviguer à travers ça, qui est... On
s'entend, on n'est pas des multinationales aussi, tu sais. Ça fait
que c'est de l'expertise, de notre part, qu'on s'acquiert, mais ça prendrait... il faudrait qu'il y ait quelque
chose qui est vraiment, vraiment transparent. Le guide si attendu, là,
depuis quatre, cinq ans, je pense, c'était le but puis c'était reconnu. Donc,
c'est un peu ce flou-là de l'analyse régionale. On semble voir que c'est à la
pièce quelquefois.
M. Heurtel : Donc, si je résume
bien, je vois, un, que vous ne savez pas trop à quoi vous attendre.
Mme Potvin (Geneviève) : C'est
variable.
M. Heurtel : C'est variable.
M. Brisson (Alexandre) : C'est
variable.
M.
Heurtel : Donc, vous vous
faites poser une série de questions, puis là ça paraît être sans fin. C'est ça?
Il y a d'autres questions qui suivent, d'autres questions qui suivent,
d'autres questions.
M. Brisson (Alexandre) : Sixième
série de questions.
M. Heurtel : Sixième dans certains
cas?
M. Brisson (Alexandre) : ...je vous
parle, le cas de Côte-Nord...
M. Heurtel : Ensuite de ça, ça
semble différer d'une région à l'autre. C'est ça?
M. Brisson (Alexandre) : Oui.
M.
Heurtel : De
l'interprétation encore. Alors, encore
une fois, comme on a vu dans le
groupe précédent puis dans d'autres
groupes aussi lors d'autres journées d'audiences. Puis là vous me dites que ça
prend en moyenne trois ans, mais là on parle d'opérations de quelle
taille, là? On parle de... qui prennent trois ans, là. Qu'est-ce qui...
M. Brisson (Alexandre) : Des
opérations de quelle taille?
Mme Potvin (Geneviève) : 200, 300
hectares, là.
M. Brisson
(Alexandre) : 300 hectares.
On est soumis à une... à l'article 145 sur 300 hectares. Donc, si c'est un projet entre 300 et 400 hectares
de récolte de tourbe, ça paraît impressionnant, la superficie, mais c'est...
Mme Potvin (Geneviève) : C'est un
petit projet.
M. Brisson (Alexandre) : ...c'est un
petit projet. C'est un petit projet.
M.
Heurtel : Toute la question, là, de la lutte contre les changements
climatiques, j'essaie de comprendre parce que vous mettez beaucoup d'accent sur votre... j'allais qualifier d'opposition,
là, à l'orientation. L'objectif de l'orientation, c'est vraiment
de se donner un outil en amont pour, justement, nous permettre de mieux évaluer l'impact sur la
lutte contre les changements
climatiques d'un projet. Alors, là
j'essaie de comprendre... Bon, je ne suis pas un expert en tourbe
horticole, là, mais je ne vois pas un projet
comme ça avoir des impacts majeurs, là, à moins que je me trompe. Alors, j'ai
du mal à comprendre cette
résistance-là de votre côté. C'est quoi, la crainte ou la peur, là, qui
sous-tend ça? Parce que vous n'êtes pas des grands émetteurs, là, je ne crois pas que vous ayez des membres qui
soient soumis au marché du carbone, alors j'essaie de comprendre d'où
vient cette opposition.
Mme Potvin
(Geneviève) : C'est que ça
demande une connaissance pointue, puis on a peur que ça... Ce n'est pas qu'on a honte de nos émissions de carbone, c'est
que c'est quelque chose qui est pointu. On a travaillé en analyse de
cycle de vie depuis plusieurs
années, puis on est encore dans le processus, on a collaboré
avec la Polytechnique à bâtir même la base
de données québécoise... nord-américaine au niveau de certains éléments parce
que c'est une industrie très pointue, qu'il y avait moins d'information.
Puis on voit des questions qui ont l'air banales dans un certificat
d'autorisation qui prennent beaucoup de temps
à argumenter, à expliquer aux analystes, ça fait qu'on se dit : Si on
arrive avec une question comme les gaz à effet de serre, qui sont assez
complexes quand on touche aux ressources naturelles, si on parle de l'occupation des terres, il n'y a pas encore de
chiffres qui sont reconnus, c'est assez complexe, ça fait que ça va
retarder tous les projets pour quelques données des gaz à effet de serre.
Puis, en
plus, c'est qu'il y a beaucoup de données qui sont incompressibles, il y a
beaucoup de facteurs qui sont incompressibles
parce que c'est le changement d'usage des terres. Donc, on ne voit pas le gain,
tu sais, que le Québec ferait, il n'y aurait pas... On ne voit pas le
gain au niveau de la réduction d'émissions, on voit plus un alourdissement au niveau
administratif... technique, au niveau technique, là, de comprendre, de
cibler... O.K. Cette cible-là, est-ce qu'elle est adéquate ou pas? Parce qu'un plan de réduction il faut fixer des
cibles, il faut définir si elles sont pertinentes ou non pertinentes. Nous, à l'association, on travaille
encore activement, là, sur l'analyse du cycle de vie puis aussi une
certification en gestion environnementale.
Ça fait que, cette question-là, on l'aborde de façon volontaire à travers une
certification en gestion durable, ce qui est très intéressant, les
entreprises se fixent des objectifs, travaillent. Mais de le voir comme étant un critère pour l'obtention d'un certificat
d'autorisation, ça fait pas mal d'années qu'on travaille dans ce
secteur-là, puis on voit que les chiffres, ce n'est pas superprécis, ça dépend
de l'angle sous lequel on prend les données. Donc, ça pourrait devenir une
raison pour bloquer plusieurs projets, puis il n'y aurait pas vraiment de gain
au niveau environnemental.
M. Heurtel : Donc, si je comprends
bien votre position, c'est plus au niveau administratif. Vous voyez là...
Mme Potvin (Geneviève) : Absolument,
oui, oui.
M. Heurtel : Surtout après l'exemple
que vous m'avez donné, vous voyez ça ajouter une autre année à votre trois ans,
là.
Mme Potvin
(Geneviève) : On parle juste de qualité d'eau, c'est des choses qui
sont relativement connues au Québec, puis c'est un enjeu majeur dans les
demandes de certificat d'autorisation. Puis on n'épand pas de pesticides,
l'industrie, il n'y a aucun ajout de produits dans l'environnement, puis c'est
un enjeu majeur. Ça fait que je...
M.
Heurtel : Je comprends votre crainte, mais, en même temps, ça ne
pourrait pas devenir un positif, surtout avec l'information que vous venez de nous donner, là? Vous avez fait
manifestement du travail en matière de cycle de vie, vous êtes
conscients de vos responsabilités du début à la fin de l'utilisation de votre
produit. De mettre de l'avant ce genre d'information
là au départ, ça ne pourrait pas justement, en quelque sorte, alléger le
processus parce que, justement, on aurait
toute cette information-là d'emblée, puis on verrait peut-être même que le
projet que vous proposez, hypothétiquement, serait avantageux?
Mme Potvin
(Geneviève) : Je continue à rester craintive. Je comprends l'idée, je
suis d'accord avec vous, mais je continue à rester craintive puis je
pense qu'il faudrait, en tout cas, personnellement, mettre l'énergie sur les
points où est-ce qu'il y a vraiment un
impact, où est-ce qu'il y a une différence qu'on peut faire. Puis je pense que,
pour les petits émetteurs, ce n'est pas là le...
M. Heurtel : Je comprends.
Mme Potvin (Geneviève) : Puis c'est
une science qui évolue aussi, puis ça demande beaucoup d'expertise pour
statuer.
M. Heurtel : Merci.
• (20 h 40) •
Le Président (M. Reid) : M.
le député de Mégantic, il vous reste 3 min 30 s.
M. Bolduc : Trois minutes?
Le Président (M. Reid) : Et
30 secondes.
M.
Bolduc : Merci, M. le Président. Bonsoir, madame. Bonsoir, monsieur. Écoutez, première question,
c'est : De quelle superficie
d'opération on parle ici, Bas-Saint-Laurent, Côte-Nord? Est-ce qu'on parle d'un 1 000 acres,
10 000 acres, 50 000 acres? De quoi on parle?
Mme Potvin (Geneviève) : Il y a
8 200 hectares au Québec qui ont été ouverts...
M. Bolduc : En opération?
Mme Potvin (Geneviève) : ...qui ont
été ouverts depuis les années 30.
M. Bolduc : O.K. Depuis les années
30.
Mme Potvin
(Geneviève) : Depuis 1930,
on parle d'à peu près 8 200 hectares. Et, de cette
superficie-là, il y a un 1 000 hectares
qui a eu une nouvelle vocation, certaines portions restaurées en tourbières,
d'autres, plantations forestières, etc.
M. Brisson (Alexandre) : Je peux-tu ajouter? On parle quand même d'une
espérance de vie d'une exploitation de tourbière de 300 hectares
environ, là, de 40 à 50 ans. Ça fait que, tu sais, il faut le voir en
volume, et non pas... Tu sais, je sais que la réglementation est faite en superficie, mais on ne
récolte pas une superficie, on récolte un volume. Ça fait que tout
dépend du dépôt comme tel.
M.
Bolduc : Si je comprends bien la nature de votre opération,
généralement, au départ, vous êtes dans un milieu humide. Au départ.
M. Brisson
(Alexandre) : Absolument.
Mme Potvin
(Geneviève) : Tourbières. Oui, dans les tourbières.
M.
Bolduc : Donc, c'est là qu'est toute la problématique par rapport à
l'environnement, je présume? Oui? Non?
Mme Potvin
(Geneviève) : Bien, ça demande un certificat d'autorisation parce
qu'on est en milieu humide, oui, tout à fait.
M.
Bolduc : O.K. Maintenant, vous avez parlé de vieux sites qui sont
restaurés, dans le sens où vous avez retiré la tourbe qu'il y avait à
retirer puis vous l'avez retournée en forêt...
Mme Potvin
(Geneviève) : En tourbière.
M. Bolduc :
En tourbière.
Mme
Potvin (Geneviève) : Oui. Quand on parle de restauration écologique,
c'est qu'on va redonner les fonctions initiales
de l'écosystème. Donc, le système de drainage est bloqué, on va réensemencer de
la sphaigne, puis, au fil du temps, la sphaigne va redominer le couvert
végétal, puis il va y avoir de nouveau captation de carbone.
M.
Bolduc : O.K. Un autre petit commentaire, parce que je sais qu'il ne
nous reste plus beaucoup de temps, c'est le fait que de devoir revenir avec des prolongations ou de refaire des
périodes de validation, vous semblez opposés à ça, là. En fait, vous dites : Il y aura une perte
d'efficacité dans le régime. Mais, si on révise aux 10 ans parce que la
nature des équipements, de votre
technologie, de votre productivité, etc., tout ça change, est-ce que vous ne
croyez pas qu'une mise à jour... Je
dis une mise à jour, là, je ne parle pas de recommencer le permis, là, juste
pour... Par exemple, vous avez des équipements plus efficaces, etc.,
est-ce que vous ne trouvez pas que ça serait peut-être bénéfique pour tout le
monde d'être à jour?
Mme Potvin
(Geneviève) : Si on parle d'une mise à jour. Mais, si on demande de
refaire une demande de certificat d'autorisation, c'est sûr que, là, ça
demande...
M. Bolduc :
C'est ça qui vous gêne, là.
Mme Potvin
(Geneviève) : Oui, c'est ça parce qu'on parle du même milieu, du même
endroit, puis la durée de vie d'un site, comme M. Brisson le disait, ce n'est
pas juste 10 ans, là, c'est plus long que ça.
M. Bolduc :
Donc, il faudrait bien différencier «mise à jour» et «nouvelle demande».
Mme Potvin
(Geneviève) : Oui, absolument.
M. Bolduc :
Puis c'est ça que vous voulez absolument éviter.
M. Brisson
(Alexandre) : Je pense qu'on serait tous à gagner à avoir un système
dynamique.
M. Bolduc :
Absolument. Absolument. Vous n'êtes pas contre la mise à jour d'informations.
M. Brisson (Alexandre) :
Non.
M. Bolduc :
O.K.
Mme Potvin
(Geneviève) : Pas du tout.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Nous passons maintenant à
l'opposition officielle, M. le député de Terrebonne.
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, Mme Potvin,
merci, M. Brisson, de votre présence. Merci d'être là à cette heure
aussi tardive. Comme on l'a dit tout à l'heure, vous pourriez être en train
d'écouter la nouvelle saison d'Unité 9,
par exemple, à cette heure, aujourd'hui, mais vous avez décidé de participer
plutôt à une discussion sur la modernisation du régime d'autorisation
environnementale de la Loi sur la qualité de l'environnement, et je vous en
remercie grandement.
Je dois vous dire que j'en apprends
beaucoup avec vous aujourd'hui parce que, le secteur des tourbières, je
vais vous avouer que c'est très pointu. Et
j'en ai dans ma circonscription, puis vous me faites découvrir, là, plusieurs
aspects auxquels je ne m'attendais pas.
D'entrée
de jeu, j'aimerais que vous nous parliez, juste avant d'aller en profondeur,
là, dans les recommandations de votre
mémoire, sur ce petit secret que vous nous avez lancé, là, autour de la table,
là, en début de présentation, là. Il semblerait
que vous avez travaillé depuis un bon nombre d'années, là, sur une grille
d'évaluation, là, pour les tourbières avec
le gouvernement ou avec les ministères, puis là c'est toujours en attente. Je
veux juste profiter de ce lien privilégié qu'on a pour me situer, quel
est cet élément qui vous est si cher? Parce que vous l'avez souligné en
caractères gras dès le départ, là.
Mme Potvin
(Geneviève) : En fait, pour faciliter les traitements de demandes de
certificat d'autorisation, les fonctionnaires
du ministère ont dit : On va développer un guide, donc un guide pour aider
les promoteurs à déposer leurs projets.
Au fil du temps, le guide est devenu plutôt un formulaire. Donc, actuellement,
c'est sous forme d'un formulaire. Donc, on collabore de façon active
avec les fonctionnaires du ministère pour donner l'avis sur des questions. Oui,
technologiquement, est-ce qu'on peut faire
ça? Ou est-ce que ça se fait? Est-ce que ça ne se fait pas? Donc, on
collabore avec le ministère sur ce formulaire-là. Par contre, le formulaire, ça
fait quatre ans, donc...
M. Traversy :
Bien, c'est ça. Donc...
Mme Potvin
(Geneviève) : Mais on comprend que... Tu sais, je vais...
M. Traversy :
Ça fait quatre ans, mais vous n'avez pas perdu espoir de le voir...
Mme
Potvin (Geneviève) : Non, on n'a pas perdu espoir parce qu'on est des
gens très positifs et optimistes. Mais on
comprend qu'il y a sûrement des enjeux politiques qui font que le... je ne sais
pas, des enjeux autres qui font que le formulaire ne sort pas parce
qu'on s'entend que ça ne se peut pas que ça prenne quatre ans, là.
M. Traversy :
Mais avez-vous une hypothèse du pourquoi ça prend autant de temps ou c'est...
Mme Potvin
(Geneviève) : Bien, je pense que je vous inviterais à demander aux
employés du...
Une voix :
...
Mme
Potvin (Geneviève) : ...de voir parce que je ne veux pas présumer de
choses. N'étant pas à l'interne, c'est dangereux de dire...
M. Brisson
(Alexandre) : Mais il y a un bruit de fond.
Des voix :
...
M. Traversy :
Ça reste encore très petit.
M. Brisson
(Alexandre) : Exactement, exactement.
M.
Traversy : ...on ira investiguer la chose, là, si ça vous
tente, là, pour m'aider à visualiser. Mais je trouvais important de le mentionner parce que je suis
convaincu qu'il y a beaucoup de gens qui nous écoutent sur le sujet et
qui vont peut-être revalider l'état de la situation, là, dans les prochains
jours pour entendre le bruit de fond, le bruit de fond qui persiste.
Alors donc, je vais
vous poser quelques questions plus sur, bon, le livre vert que nous étudions.
Je comprends qu'une tourbière, ça émet des
gaz à effet de serre. C'est donc quelque chose auquel je ne m'attendais pas
nécessairement. Je pensais que ça en émettait un peu, mais est-ce qu'il y en a...
dépendamment de la grosseur de la tourbière, là, on peut avoir, là, tu sais — comment je pourrais dire? — peut-être des tourbières ou des producteurs
de tourbe qui peuvent être assujettis au marché du carbone? Avez-vous
des membres qui sont... Ce n'est pas assez gros pour ça?
Mme
Potvin (Geneviève) : Non, on n'est pas assujettis. En fait, les
projets de nos membres pourraient devenir des projets pour l'émission de
crédits, je crois. C'est plutôt l'inverse, oui, projets d'amélioration pour
être...
M. Traversy :
Parfait.
M. Brisson
(Alexandre) : Je peux-tu enrichir une seconde?
M. Traversy :
Bien oui, allez-y. Moi, je suis en plein apprentissage avec vous, hein, je suis
très humble.
M. Brisson
(Alexandre) : Je comprends qu'on a parlé de superficies, mais ne pas
oublier que l'industrie de la tourbe, bon, la majorité des joueurs, des grands
joueurs se sont donné comme mission d'y aller d'une façon de développement sectionné, en fin de compte. Ça fait
qu'on voit un grand secteur qui est, exemple, 300 hectares morcelés en
huit secteurs temporels qui vont être ouverts subséquemment et fermés un à la
suite de l'autre. Ça fait qu'on ne rouvre pas... on ne permet pas l'émission de
400 hectares parce que ce n'est pas notre modus operandi d'aller opérer de
cette façon-là.
M. Traversy :
C'est comme des terres en jachère, là, qui sont...
M. Brisson (Alexandre) : On divise, exemple, 300 hectares, six hectares de
50 hectares, dépendamment de la position
stratégique qu'on veut donner. Le secteur 1 va être restauré, une fois que le
secteur 3... et ainsi de suite, tout se suit à la queue leu leu. Ça fait
que...
M. Traversy :
Parfait.
M. Brisson
(Alexandre) : Oui, il y a un impact, il y a une émission, mais elle
n'est pas à l'ensemble de toute la tourbière.
M.
Traversy : Au niveau des informations disponibles sur les
autorisations et les occasions d'intervenir pour le public, vous dites dans votre mémoire que vous
trouvez essentiel de préserver les informations à caractère
confidentiel. Avec d'autres groupes, on a eu des discussions à savoir, bon,
évidemment, que c'est important de préserver le secret commercial, mais qu'il y aurait peut-être idée à réfléchir à rendre plus
disponibles des informations environnementales. Est-ce que, quand vous dites «préserver les informations à
caractère confidentiel», vous voyez une ouverture à la transparence sur
certaines données qui pourraient être dites, particulièrement
environnementales, ou ça serait une fermeture?
Mme
Potvin (Geneviève) : C'est sûr que les données qui vont pouvoir
informer et rassurer les gens sur des impacts environnementaux, c'est intéressant. C'est seulement qu'il y a certaines
informations... Exemple, l'estimé des volumes, la destination des marchés, qui sont demandés à
l'heure actuelle dans les certificats d'autorisation, on souhaiterait que
ça ne soit pas public parce que ça n'aide
pas la population à savoir si le projet peut avoir un impact ou pas pour leur
localité. C'est ça. Ça fait que c'est
vraiment précis, les informations, là, on parle de volumes et de marchés, de
qualité aussi de la ressource. Parce que c'est un enjeu majeur dans
notre secteur, donc de dévoiler ces informations-là, c'est...
M. Traversy :
Ça fait comme un peu... pas risqué, mais, je veux dire, ça vous dévoilerait
beaucoup.
Mme Potvin
(Geneviève) : Oui, exactement.
• (20 h 50) •
•
(20 h 50) •
M. Traversy :
Vous voulez vous garder quand même une petite gêne, là, dans tout ça. Bien, je
comprends la complexité, là, de départager quelle information, là, peut être
rendue publique, mais je tenais quand même à vous le demander parce que c'est
des interrogations qui nous sont lancées autour de la table.
Vous
avez également, là, donc, tout comme votre prédécesseur, là,
mentionné que les consultations dès le départ n'étaient pas a priori
votre recommandation, là, comme association pour ce qui est du processus d'évaluation
du BAPE, là. On semblait comprendre dans
votre présentation que consulter la population dès le départ alourdirait un peu le
processus, vous préféreriez plutôt attendre, dans le fond, l'évaluation
d'impact avant de pouvoir offrir, dans le fond, cette possibilité d'intervenir
pour le public, là.
Mme
Potvin (Geneviève) : O.K.
Pour notre secteur, il n'y a pas de BAPE. Donc, c'est un processus qui se
fait... une demande sur les terres
publiques, là, un BEX, là, un bail d'exploitation exclusif pour la
tourbe, jumelé à ça avec une demande
de certificat d'autorisation auprès du ministère
de l'Environnement. Les deux
processus se font actuellement relativement de façon parallèle, puis il y a
un processus de consultation publique qui est déjà prévu dans le
mécanisme avant l'émission du BEX et du CA.
Ça fait qu'il y a déjà une consultation publique pour un projet de
tourbière qui est prévue. Il y
a un nouveau cadre réglementaire qui entoure la Loi sur les mines. Donc, à
l'intérieur de ça, il y a un règlement, puis le règlement stipule qu'il y a une
consultation publique qui doit avoir lieu avant l'émission du BEX et du CA.
M. Traversy :
Vous nous dites que c'est un BEX qui s'applique pour la tourbe...
Mme Potvin
(Geneviève) : Qui est émis, oui.
M.
Traversy : Excusez. Écoutez,
moi, j'en apprends aussi avec vous. Donc, vous êtes un cas plus particulier.
Donc, voilà, c'est noté, il n'y aura plus d'ambiguïté là-dessus. M. le
Président, il me reste combien de temps?
Le Président (M.
Reid) : Une minute.
M.
Traversy : À peine une minute, déjà? Ça va très, très vite. Je
termine avec une dernière question. Vous avez mis beaucoup d'emphase sur le guichet unique pour
essayer de maximiser les expertises, là, de partout à travers l'ensemble
du territoire, mais, en même temps, vous
semblez vouloir respecter aussi le caractère régional, là, des différents
milieux au Québec. Juste pour nous
donner, dans le fond, une motivation, rappelez-nous, le guichet unique, c'est
quoi, le principal avantage que vous y voyez.
Mme Potvin (Geneviève) :
C'est la question de connaissances au niveau du personnel du ministère. Donc,
ça, je pense que ça, ça peut rendre le système plus efficace et plus
économique.
M. Traversy :
Vous trouvez qu'il n'est pas assez uniformisé, là, dépendamment des régions?
Mme
Potvin (Geneviève) : En tout cas, dans notre secteur, il ne l'est pas toujours. Donc, ça, ça
pourrait être un très bon point, là.
Puis, au niveau de prendre en compte les disparités régionales,
c'est sûr que les consultations publiques vont venir aider à tenir en
compte ces différenciations-là.
M. Traversy :
Je vous remercie énormément.
Le Président (M.
Reid) : Merci. Nous passons maintenant au deuxième groupe d'opposition,
M. le député de Masson.
M.
Lemay : Merci, M. le Président. Merci, Mme Potvin, M. Brisson, d'être avec nous aujourd'hui. Vous savez, nouvellement porte-parole en matière
d'environnement, donc je dois vous avouer qu'avant aujourd'hui j'avais une connaissance très limitée. Mais bref, ceci étant
dit, vous représentez plutôt la tourbe horticole. J'ai vu tout à l'heure
en consultant qu'il y avait aussi de la
tourbe de sphaigne. Qu'est-ce qu'il y a de différence, là, juste pour ma
compréhension, là?
Mme
Potvin (Geneviève) : Sphaigne, c'est la mousse qui va se décomposer,
et la partie décomposée est la tourbe horticole.
Donc, le produit fini, c'est de la tourbe horticole qui sert pour la croissance
des plantes, des végétaux. Puis la mousse de sphaigne, c'est la mousse
qui va produire.
M.
Lemay : J'ai remarqué aussi que, l'industrie de la tourbe horticole,
vous adhérez déjà à la norme VériFlora, qui est la gestion responsable des tourbières. J'imagine qu'en étant déjà...
Est-ce que, dans le fond, la norme VériFlora, est-ce qu'elle est déjà
reconnue par le ministère?
Mme Potvin
(Geneviève) : Bien, il n'y a pas de reconnaissance de la certification
par le ministère, c'est une certification
sur une base volontaire qui est basée sur ISO 14001, qui sert d'outil de
reconnaissance des bonnes pratiques des producteurs au Québec, au niveau international, au niveau de la
clientèle puis au niveau de différentes parties prenantes, là,
journalistes en horticulture, etc.
M. Lemay :
O.K. Donc, dans le cadre d'une évaluation environnementale stratégique ou une
étude d'impact environnemental, d'énoncer la
norme VériFlora, ça ne pourrait pas, pour votre domaine spécifique, tu sais,
faciliter un processus, simplifier,
alléger, de dire : Voilà, l'industrie, on est déjà reconnus dans un souci
de développement durable? Parce qu'on
le sait, cette norme-là fait en sorte que vous allez restaurer les sites. Comme
vous mentionnez, vous êtes déjà... on ne va pas mettre un
300 hectares contigus, on va y aller en morcellement puis on va... Tu
sais, donc, ça ne devrait pas déjà être pris en considération par le ministère?
Mme Potvin
(Geneviève) : Je souhaiterais, oui, ardemment...
M. Lemay :
Vous le souhaitez, hein?
Mme Potvin
(Geneviève) : ...parce qu'on a travaillé fort sur cette
certification-là, oui.
M. Lemay :
Bon, c'est le premier constat qui me venait à l'idée de dire : Bien,
voyons! Comment cela se fait-il? Mais bref...
Bien,
j'ai très apprécié la question de mon collègue député de Terrebonne.
D'ailleurs, j'avais remarqué ce fait-là, vous nous l'aviez mentionné subtilement dans votre... les quatre années
que ça prend pour attendre un
formulaire. Donc, dans votre
conclusion, ça a cet effet-là au
niveau des gaz à effet de serre, puis on a compris... Vous avez cité M.
Villeneuve tout à l'heure aussi parce que vous avez assisté aux travaux une
bonne partie de la journée. Grosso modo, ce que je comprends, c'est que vous êtes contre un test climat, basé sur la
rentabilité de la démarche, parce que, pour votre industrie, c'est négligeable.
Mme Potvin
(Geneviève) : Pour tous les petits émetteurs, même. Je pense qu'on
peut parler au nom de pas juste l'industrie
de la tourbe, mais aussi d'autres plus petits émetteurs. Donc, c'est de ralentir
complètement le processus puis d'y aller sur une base d'incitation volontaire. En tout cas, nous, ça marche super bien, là, on voit des beaux gains au niveau
de notre industrie, puis on pense que c'est une belle voie, plus que d'ajouter
ça dans les demandes de certificat d'autorisation.
M. Brisson
(Alexandre) : De façon systématique.
M. Lemay :
M. Brisson?
M. Brisson (Alexandre) : J'ai juste
ajouté «de façon systématique». J'ai complété la phrase de Mme Potvin.
M. Lemay :
Parfait. Vous savez, vous avez mis l'emphase beaucoup sur les GES dans votre
document, alors qu'une partie de... En fait,
vous êtes dans des milieux humides. Bon, il me semble, moi, j'aurais regardé un
peu plus côté qu'est-ce qui fait, au niveau du ministère, dans un milieu
humide, que vous allez faire des prélèvements qui retardent l'émission d'un
certificat d'autorisation.
Je reviens encore à la norme VeriFlora, je ne
sais pas pourquoi, il me semble, tu sais, de dire : On fait un prélèvement, on n'ajoute aucun contaminant, à la
fin de la journée on va restaurer le site... Je ne sais pas, il me
semble, vous avez... Est-ce que vous vouliez
rajouter un petit commentaire à cet effet? Parce qu'il me semble, moi, je tombe
là-dessus pour la première fois ce soir, je dois vous avouer, mais ça
fait plein de bon sens pour moi.
Mme Potvin
(Geneviève) : Ah bien! Nous, aussi, on pense qu'on est une industrie
exemplaire, oui. Au niveau de pourquoi
le processus est lent avec nous, bien, je pense qu'il y a en général au Québec
et dans plusieurs endroits dans le monde
une certaine pression sur les milieux humides. Puis, au Québec, ce n'est pas
dû... Tu sais, on a les statistiques à jour
au Québec, on sait que ce n'est pas l'industrie de la tourbe horticole qui a
mis en péril les milieux humides au Québec, là, il y a d'autres secteurs
qui sont amplement plus... Puis on vous invite à aller voir notre site Web,
c'est tout là.
Donc, on ne
pense pas que c'est notre secteur qui vient mettre une pression, mais je pense
qu'il y a une pression générale, puis
on peut comprendre qu'il y a une... ça demande une analyse plus poussée. Ça, on
peut comprendre ça. Mais aussi c'est
un secteur pointu, donc ça demande certaines connaissances plus spécifiques.
Donc, on pense qu'il y a ça aussi qui
vient jouer en jeu, là, d'être dans un secteur... Au niveau agricole, par
exemple, les connaissances sont plus acquises au niveau de tous les
ministères, là. Pas juste le ministère de l'Environnement, dans tous les
ministères. Donc, la tourbe, souvent, les
gens, c'est la première fois qu'ils sont en contact avec ce secteur-là. Ça fait
qu'il y a un processus d'éducation qui se fait beaucoup avec les
analystes.
M.
Lemay : Vous avez mentionné que vous... au total, c'est à peu près
8 200 à 8 400 hectares au Québec qui ont été exploités à date, mais sur... Puis vous estimez à
environ 11,6 millions d'hectares la superficie du Québec qui serait
des tourbières, soit 8 % de tout le territoire. Ça fait que, moi, ma
question, c'est : Mais pourquoi c'est long d'obtenir un certificat d'autorisation? Alors, pourquoi on ne
peut pas dire : Bien, si ça ne marche pas avec ce site-là, ça peut-u
marcher avec ce site-là? Tu sais, il
pourrait-u y avoir un processus genre, ça c'est mon plan A, mais voici mon plan
B? Parce que mon plan B, il me
coûterait plus cher, plus de déplacements, plus de voyagement. J'imagine, tu
sais, ça ne doit pas être un problème de trouver un nouveau site, là. Il
me semble qu'il y a des sites en masse, là, si on se fie à vos statistiques.
Mme Potvin
(Geneviève) : C'est sûr que les sites ne sont pas répartis
équitablement, là, à la grandeur du Québec, là, il y en a plus dans le Nord-du-Québec. Et, souvent aussi, c'est une
décision d'affaires. Parce que, si on a un site de transformation, si on s'éloigne de 300 kilomètres
ou de 400 kilomètres, on ne vient pas favoriser l'environnement si on
occasionne plein de transports, beaucoup mieux d'aller vers un site qui est
plus proche. Donc, c'est souvent... Puis aussi la qualité de la ressource...
Le
Président (M. Reid) : Mme Potvin, je dois vous interrompre
parce que le temps est terminé. Mme Potvin, M. Brisson, merci beaucoup
de votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends la séance pendant quelques instants,
le temps d'inviter nos prochains invités à prendre place.
(Suspension de la séance à 20 h 59)
(Reprise à 21 h 1)
Le Président (M. Reid) :
Alors, je souhaite maintenant la bienvenue à nos invités du Regroupement des récupérateurs et des recycleurs de matériaux de
construction et de démolition du Québec. Vous avez vu la mécanique, vous avez une dizaine de minutes pour faire votre
présentation. Par la suite, nous aurons un échange avec les membres de la commission. Je vous
demanderais, pour les fins d'enregistrement, de vous présenter et présenter les personnes qui
vous accompagnent, et vous avez la parole.
Regroupement des
récupérateurs et des
recycleurs de matériaux de construction
et de démolition du Québec (3R MCDQ)
Mme
Pellerin (Ginette) :
Bonsoir, M. le Président, M. le
ministre, Mme, MM. les députés.
Alors, je suis Ginette Pellerin, la directrice générale du Regroupement
des récupérateurs et des recycleurs de matériaux de construction et de démolition du Québec. Maintenant, on va parler
de 3R MCDQ, et vous allez tous comprendre, ça va être plus court.
Alors, je vous présente Gilles Bernardin. Gilles
est le président du conseil d'administration. Il est également président de Valorisation Bernardin. Et je vous
présente également la vice-présidente de l'association, Sara-Emmanuelle
Dubois. Elle est aussi présidente de sa compagnie, Novaxia.
Alors, notre regroupement veut, tout d'abord,
vous remercier, veut remercier la Commission des transports et de l'environnement pour nous permettre de faire
valoir les points de vue de nos membres sur la modernisation du régime. Pour votre connaissance, le 3R MCDQ est une
petite association de 250 membres et il représente l'ensemble des
valeurs de la chaîne
des matières résiduelles issues de la construction, de la démolition et de la, j'oublie...
rénovation, CRD. On dit toujours CRD,
mais je veux éviter les acronymes pour le début. Et ces matières-là, c'est le
tiers des matières récupérées au Québec, les deux autres tiers étant, le
tiers, la collecte sélective et, l'autre tiers, les matières qui proviennent
des industries, commerces et institutions.
Alors, depuis
19 ans, par nos actions, le regroupement a permis d'améliorer la condition de
développement de ses membres, mais
aussi à augmenter significativement les volumes de matières résiduelles
valorisées. Dans un passé pas si lointain,
la presque totalité des résidus de CRD prenait systématiquement le chemin de
l'élimination. Au cours de la période 1996-2006,
le volume des matières détournées de l'enfouissement est passé de 875 000
tonnes à 2 894 000 tonnes. Et, seulement deux ans plus tard, le bilan de RECYC-QUÉBEC donnait au
secteur des CRD... notre taux de récupération s'élevait à 75 %. C'était le meilleur taux, d'ailleurs, de tous les
secteurs. Alors, nos membres : 30 000 emplois,
3 milliards de chiffre d'affaires.
Je veux
répéter ce que j'ai dit en consultation préliminaire, le 3R MCDQ salue l'esprit
qui sous-tend le livre vert : cohérence,
simplification, efficience, culture de service et accompagnement accru de la
part des autorités gouvernementales.
Suite aux représentations faites depuis
plusieurs années à tous les niveaux du ministère, le regroupement est heureux
de constater que le gouvernement du Québec est déterminé à améliorer de façon
notable le régime. Nos préoccupations :
instaurer une flexibilité dans le processus pour assurer l'avancement du
secteur; assurer l'équité dans la mise
en application des règles et procédures; s'assurer de l'applicabilité et la
mise en oeuvre de toute nouvelle mesure; favoriser le dynamisme entrepreneurial — ainsi, le cadre administratif ne doit pas
être un frein au développement des entreprises,
mais plutôt un facilitateur dans l'évolution des projets; de mobiliser le
secteur et éviter le contournement des règles
en mettant l'emphase sur la mise en marché des matières issues du recyclage;
et, finalement, en favorisant l'innovation.
Mme Dubois
(Sara-Emmanuelle) : Merci. Alors, je souhaite remercier à mon tour les
membres de la commission de nous
donner cette opportunité de partager notre point de vue et celui de nos membres
et de s'impliquer dans ce processus de
modernisation de la Loi sur la qualité de l'environnement. À ce titre, les
membres de l'association du 3R MCDQ ont longuement évalué chacune des orientations proposées par le ministère.
Je procéderai donc de façon succincte à un bref résumé de certaines de
nos positions pour les orientations 3, 4 et 5.
En ce qui a trait à l'orientation 3, nous
reconnaissons la vision du ministère d'appliquer des barèmes dans la catégorisation des demandes de certificat
d'autorisation en se dotant d'un modèle basé sur la gestion du risque.
Cependant, nous entrevoyons difficilement
une pleine compréhension et une pleine adhésion des membres et des
entrepreneurs de notre industrie.
Pour ce faire, ce que nous recommandons, c'est le recours aux codes d'activités
économiques du Système de classification
des industries de l'Amérique du Nord, soit le SCIAN, qui est un système qui est
largement utilisé, reconnu par de nombreuses institutions et qui se
révèle être un outil d'identification efficace et objectif.
Nous sommes,
par ailleurs, d'avis que tous les projets à risque élevé devraient
systématiquement être référés à un BAPE,
que, compte tenu de la nature des activités de récupération et de recyclage,
qui consistent essentiellement à un traitement
mécanique des matières, elles devraient automatiquement être qualifiées de
risque faible ou modéré selon la nature
et l'ampleur de l'activité. Il demeure impératif de se rappeler que les activités
d'entreposage et de transport de nos membres ont peu d'impacts sur les
risques de contamination de l'air, de l'eau et des sols.
La loi
devrait, par ailleurs, faire référence à la notion de matériaux secs, qu'on
appelle matériaux aussi inertes, qui existait
dans l'ancien Règlement sur les déchets solides qui a été remplacé maintenant
par le Règlement sur l'enfouissement et l'incinération des matières
résiduelles.
Par ailleurs,
les mêmes règles devraient s'appliquer à tous, qu'on parle d'une municipalité
ou encore qu'on parle d'un parti privé, et ce, dans toutes les régions
du Québec.
La nature du projet, et non sa provenance ou son
initiateur, devrait déterminer le niveau de risque.
Finalement, reconnaissant que le Québec est
fertile en innovation et riche de connaissances scientifiques et
technologiques, nous recommandons d'accorder un statut particulier aux
institutions de recherche. Lorsque celles-ci demandent un certificat
d'autorisation pour des travaux de recherche et développement, il serait souhaitable
de les accompagner dans leurs travaux,
d'utiliser les résultats obtenus pour mieux définir et comprendre les limites
applicables dans les cas similaires et les libérer d'un processus habituel de
demande de certificat d'autorisation.
Je voudrais
juste mentionner, par ailleurs, qu'on cherche toujours la solution pour
assujettir les projets déjà en cours qui opèrent sans certificat
d'autorisation ou encore avec des droits acquis.
Passons à
l'orientation 4. Le 3R MCDQ est favorable à la tenue d'un registre
d'évaluation environnementale et à la diffusion des informations au grand public. Par contre, nous émettons des
réserves sur la nature des informations qui seront partagées. Nous comprenons l'intention ici, qui est d'être plus transparent sur les objectifs et les résultats à
atteindre afin d'accroître
l'acceptabilité sociale. Nous ne percevons pas les bénéfices rattachés à la
divulgation des moyens déployés pour atteindre ces objectifs. Ceux-ci
sont la propriété de l'industrie, des informations et des connaissances qui ont
été développées et acquises, qui sont le fruit de nombreux efforts et qui
représentent un avantage concurrentiel pour les entrepreneurs. Dans le même esprit, bien entendu, nous souhaitons que
les informations sur les projets pilotes ne soient pas divulguées, car c'est notre richesse au Québec. Il
faudrait, par ailleurs, être prudent dans les informations divulguées
pour protéger les renseignements
industriels, financiers et stratégiques. Toutefois, dans une même perspective,
nous croyons qu'il serait judicieux de rendre public le résultat des
suivis et des engagements contenus dans les certificats d'autorisation.
• (21 h 10) •
Finalement,
concernant l'orientation 5, nous trouvons également plus approprié de prévoir
une seule autorisation ministérielle qui serait évolutive tout au long
de l'exercice de l'activité, ce qui correspond adéquatement à la réalité de nos entrepreneurs
québécois qui oeuvrent dans une industrie
du recyclage jeune, dois-je vous le rappeler, dynamique et, surtout, en constante
évolution. Par
contre, nous craignons qu'une demande
de modification partielle à un certificat d'autorisation
mène à un réexamen complet de ladite autorisation, ce qui aurait pour impact
d'alourdir le processus et pourrait, par ailleurs, amener certains initiateurs
à renoncer à la réalisation de leur projet.
Nous sommes notamment
d'avis qu'il serait beaucoup plus constructif et économique que les analyses
soient axées sur le contrôle des
rejets dans l'environnement plutôt que de porter sur les opérations, les
procédés, les systèmes. Les analyses devraient s'adresser aux
externalités et s'intéresser aux résultats, c'est-à-dire les impacts sociaux et
environnementaux. Il n'y a pas de plus-value à mettre l'accent sur les processus,
sauf peut-être pour les mégaprojets.
Les éléments d'impact couverts par la réglementation
municipale devraient, par ailleurs, ne plus être traités par le ministère — tels
que le bruit — puisque
ces éléments sont déjà couverts par les attestations de conformité à la réglementation
municipale...
Le Président (M. Reid) : En
terminant, s'il vous plaît, quelques secondes.
Une voix : Quelques secondes.
Après, on va passer après à la période de questions.
Le Président
(M. Reid) : Oui. Puis on pourrait échanger après, de toute
façon, pendant la période de questions. M. le ministre, à vous la
parole.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Alors, bonsoir M. Bernardin, Mme
Dubois, Mme Pellerin. Merci pour votre mémoire
ainsi que votre présentation. Moi, ce qui m'a frappé dans votre présentation,
bon, vous avez parlé de flexibilité, d'équité, d'applicabilité, mais
vous avez également parlé que le cadre administratif ne doit pas être un frein.
Alors, là-dessus, j'aurais besoin d'exemples
concrets de ce que vos membres vivent présentement qui illustre cette
affirmation-là et qu'est-ce que vous proposez pour régler ça.
M.
Bernardin (Gilles) : Sans vouloir relancer les gens qui ont parlé de
demande qui prend trois ans, je vais vous parler d'une situation qui prend huit ans : la valorisation des
bardeaux d'asphalte postconsommation qui a été entamée en 2008 par une cimenterie, laquelle cimenterie
a dû obtenir, évidemment, un certificat d'autorisation pour pouvoir
valoriser ces matières-là. Le centre qui
reçoit ces matières doit, lui aussi, évidemment, obtenir un certificat
d'autorisation. Et ces centres-là
produisent essentiellement deux fractions, une fraction qui est utilisée à la
cimenterie, et la fraction fine, la petite pierre, qui est destinée à
être recyclée dans les usines d'asphalte. Et, évidemment, ces usines d'asphalte
doivent aussi obtenir un certificat d'autorisation.
Parallèlement
à ça, il y a le ministère des Transports, qui, évidemment, s'intéresse à sortir
un devis pour, lorsqu'on intègre ces
matières-là dans des enrobés bitumineux, s'assurer que les devis reflètent une
saine utilisation des ces matières-là. Donc, entre-temps, le ministère
des Transports, dont nous tenons à souligner le support dans cette démarche, a procédé en 2012 à la réalisation de planches
d'essai avec des bétons bitumineux qui incorporent le bardeau d'asphalte
afin d'en définir l'usage dans leurs devis,
et les résultats préliminaires de ces planches d'essai ont été divulgués cette
année.
Par contre,
au niveau des usines d'asphalte, le processus d'obtention des certificats
d'autorisation... Et ce que le ministère
de l'Environnement demande, c'est que chaque usine d'asphalte qui veut intégrer
ces matières-là doit faire une modélisation
de ses émissions. Faire une modélisation de ses émissions, c'est engager une
firme qui vient échantillonner, caractériser
des paramètres, verser ces paramètres-là dans une étude de modélisation, il y
en a pour 40 000 $. Ces usines d'asphalte là, avant d'investir
40 000 $, posent la question : Est-ce qu'il va y avoir un marché
pour ces matières-là vis-à-vis le devis que le ministère des Transports va
sortir?
En fait, on a
là tout un casse-tête au niveau... Un, ça prend un certificat pour recevoir...
Dans le cas de la cimenterie, ils ont
été l'initiateur, ils l'ont obtenu, mais vous comprenez que, là, là, pour que
tous les morceaux du casse-tête arrivent à la même place en même temps puis que personne n'investit inutilement
pour demander un certificat d'autorisation, par exemple les usines
d'asphalte, bien là les gens disent... Dans le cas des usines d'asphalte, ce
qui a été proposé par le regroupement,
c'est : On va tenter de faire une étude générique. En d'autres termes,
on... une usine et on va démontrer avec les résultats de cette usine le pire scénario que ça... les résultats
pourraient s'appliquer. On prévoit faire ça cet automne, de sorte que
les résultats vont être disponibles au printemps prochain. Mais là on parle de
2008, puis on va avoir les résultats en 2016.
Voici un
exemple de huit ans pour être en mesure de recycler du bardeau d'asphalte. Ça
prend des gens tenaces pour pouvoir
continuer dans cette histoire-là, puis je vous fais grâce des différentes
péripéties qu'on a vécues, au genre de questions qui nous ont été
demandées par le ministère lorsqu'on a déposé ce projet-là. Ils voulaient qu'on
fasse un inventaire de toutes les usines d'asphalte qui existent dans la
province de Québec. J'ai dit : Écoutez, je ne vois pas tellement la pertinence
de faire ça. De toute façon, adressez-vous donc au ministère des Transports,
ils ont la liste de toutes les usines d'asphalte qui existent, vous allez
l'avoir.
Donc, voici,
huit ans plus tard, là, on espère que, finalement, ça va se résoudre, cette histoire-là,
et on a retrouvé un marché et toutes
les installations pour être en mesure de recycler le bardeau d'asphalte. Ce qui
est vrai pour le bardeau d'asphalte,
c'est vrai pour le gypse et toutes ces autres matières là. La raison d'être de
nos entreprises, c'est de prévenir l'enfouissement,
conditionner ces matières-là pour les rendre acceptables pour être réintégrées
dans des produits finis. S'il n'y a
pas de marché, on n'avance pas. Puis, évidemment, il est hors de question
d'envoyer ça en Chine. Ce n'est pas ça, l'objectif, c'est de réutiliser ces matières à l'intérieur de notre
économie pour, effectivement, sauver des matières premières.
C'est tout ce
processus-là qu'on trouve extrêmement lourd, qui est mal adapté. Malgré qu'à ce
niveau-là le Québec, par rapport à
l'Ontario, dans certains points, est vraiment en avance par rapport à des
choses qui sont faites. Je pense, entre autres, en termes de valorisation énergétique dans les
cimenteries, et ainsi de suite. Donc, on peut se consoler par rapport au chemin qui a été fait, mais Dieu
que ça serait tellement agréable de pouvoir avoir un système qui est
plus allégé. Pas léger, mais plus convivial
pour arriver à des résultats plus rapidement. Est-ce que cet exemple-là vous
satisfait?
M.
Heurtel : Oui. Oui. Malheureusement, il me satisfait. Là, la deuxième
partie de ma question, c'est donc... Là, vous y avez fait allusion généralement à la fin de votre réponse, vous
dites plus convivial. Ça veut dire quoi concrètement? Alors, c'est quoi,
la solution?
M. Bernardin (Gilles) : Mais la solution... Comme j'ai dit, des gens qui
vont demander des certificats d'autorisation en cascade pour arriver au
produit fini, les gens vont dire : Bien, on peut-u savoir s'il y a un
marché pour ça? Est-ce qu'il y aurait moyen
de bâtir quelque chose, un vrai projet de démonstration à l'échelle
industrielle où les gens n'ont pas nécessairement...
pour faire la démonstration que le marché est là, que le produit est valable,
que les gens soient capables d'utiliser ça à long terme? Et, une fois
que ça, ça a été bien campé, on dit : Parfait, Là, vous allez faire les
démarches toutes dans la ligne, vous allez faire les demandes de certificat
d'autorisation de sorte à mettre ça en marche sur une base permanente.
M.
Heurtel : Donc, c'est parce que
vous comprenez qu'ultimement la suite des travaux de la commission,
c'est ultimement le dépôt d'un projet de loi. Bon, alors, j'essaie, avec votre exemple, de me dire... Bon, dans un
nouveau régime d'autorisation, là,
hypothétique, si on prend votre exemple, on remonte à il y a sept ans — parce que la huitième année, c'est l'an
prochain — bon,
si on remonte à il y a sept ans, donc 2008, est-ce que ça veut dire une évaluation environnementale
stratégique sur cette technologie-là? C'est le comment, là, que je recherche,
là.
M. Bernardin
(Gilles) : Vous savez, les solutions qui existent pour savoir trouver
des débouchés pour les matières, là, c'est le fruit de la passion des gens à
sortir des sentiers battus.
M. Heurtel :
M. Bernardin, je m'excuse, je me permets de vous interrompre, moi, ce que je
cherche, là, c'est qu'est-ce qui, dans un
nouveau régime ou un régime modernisé d'autorisation, change par rapport au
régime d'autorisation existant, qui fait en sorte que ça ne prend pas
huit ans pour autoriser le projet que vous me décrivez.
Mme Dubois
(Sara-Emmanuelle) : Gilles, est-ce que je peux...
M. Bernardin
(Gilles) : Vas-y.
Mme
Dubois (Sara-Emmanuelle) : Je pense qu'il faut que ces projets-là
soient traités vraiment comme des projets pilotes au même terme que les
instituts de recherche, qu'ils soient académiques...
M. Heurtel :
...
Mme Dubois
(Sara-Emmanuelle) : Exactement. Donc, un traitement...
M. Heurtel :
C'est ça. Donc, quand vous parlez d'innovation, là. Bon.
Mme
Dubois (Sara-Emmanuelle) : Exactement. Donc, un traitement différé qui
ne mettra, justement, pas un frein à
cette innovation-là ou à ce désir d'innovation là. Donc, comment est-ce qu'on
le met en place? Je pense qu'on peut déjà parler, dès le départ, d'une
collaboration avec le ministère. Je pense que, de toute façon, la société va
profiter de cette technologie-là aussi et... Bon, collaboration. Et l'autre
point que j'avais, c'était...
M. Bernardin
(Gilles) : L'information, sensibilisation, éducation.
Mme Dubois
(Sara-Emmanuelle) : Oui, aussi. Merci.
Le Président (M.
Reid) : M. le député de Mégantic.
• (21 h 20) •
M.
Bolduc : Merci, M. le Président. Bonsoir, mesdames. Bonsoir, monsieur.
Écoutez, c'est fascinant, ce que
vous faites. Puis la première question que
je vais avoir pour vous, sur le 2 millions et quelque 100 000 tonnes de déchets que vous recyclez,
quelle est la valeur... ou pas la valeur, mais le volume de ce qui se retourne,
finalement, en déchets? Parce qu'il faut en recycler,
là, une très grande partie, mais il y a une partie, là, qui finit pareil aux
déchets. On parle de 5 %, 10 %, 15 %, 20 %?
Est-ce que vous avez une idée de ça?
Mme
Pellerin (Ginette) : Tout à l'heure, je n'ai parlé que des matières récupérées, je n'ai pas parlé du tout
des matières qui vont à l'enfouissement.
M. Bolduc :
Non, mais vous avez des intrants, puis ce n'est pas tous ces intrants-là qui
sont recyclés.
M.
Bernardin (Gilles) : Malheureusement. L'expérience des centres de tri,
les entreprises qui reçoivent les conteneurs
qui viennent des chantiers de construction, et ainsi de suite,
dépendamment du genre de tri qui peut exister déjà sur le chantier...
M. Bolduc :
...
M. Bernardin
(Gilles) : ...dépendamment du type de tri qui peut déjà exister sur le
chantier... À savoir, une structure en
béton, on la casse, les gens enlèvent l'acier, et ainsi de suite. Donc, c'est seulement du béton, c'est facile de refaire des granulés avec ça. Mais, lorsque...
par exemple, la construction de maisons neuves, qu'il y a
un conteneur qui est là, bien, on va
voir les différentes étapes de construction de la maison où, dans le fond, on va avoir du bois, après ça on va avoir de l'isolant, et ainsi de suite, panneaux de gypse, et ainsi de
suite, dépendamment des techniques, des technologies qui sont utilisées
dans ces centres de tri, vous pouvez avoir 50 %... le retirer jusqu'à,
dans certains cas, 80 %. Donc, c'est quand même...
Et il y a une
problématique, justement, les matières qui ne sont pas retirées, qui sont
envoyées au site d'enfouissement, ces entreprises-là, qui ont chargé des tarifs
de réception sur la base que les matières pouvaient être recyclées doivent payer le plein prix pour
l'enfouissement. Donc, c'est une charge pour eux autres, puis,
évidemment, ils ont tout à gagner
d'optimiser ce qu'ils peuvent retirer de ces flux-là. Mais, dépendamment de la
technique qui est utilisée, je vous dirais, ça peut aller de savoir
retirer jusqu'à 70 % et au moins de 50 %.
M.
Bolduc : Maintenant, une autre question qui est un peu sur le contenu,
là. Dans ça, il peut y avoir beaucoup de
matériaux que je qualifierais — comment je dirais? — d'exotiques. Par exemple, vous pouvez vous
ramasser avec du stainless, mettons
le pire cas, du monel, puis là les gens ne connaissent pas très ça. Comment
vous gérez ces matériaux-là qui ne sont pas très connus?
M. Bernardin
(Gilles) : Soyez assuré que les recycleurs, quand ils voient du
stainless, ils savent très bien que c'est du...
M. Bolduc :
Non, mais du monel, du stainless, ils peuvent le mêler, là, mais...
M.
Bernardin (Gilles) : Le stainless, l'aluminium, et ainsi de suite...
Le 3R MCDQ a créé des groupes de travail qui se sont systématiquement attaqués à différents flux, le béton,
l'asphalte, la brique, le gypse, le bois, et ces groupes de travail
continuent à être à l'écoute de tout développement de marché qui peut exister.
M.
Bolduc : Est-ce que votre association distribue cette compétence-là à
travers votre réseau ou si c'est plus le résultat d'un travail
individuel? Comment ça...
M.
Bernardin (Gilles) : Non,
non, non. C'est les groupes de
travail, et, je vous dirais, depuis
19 ans, le 3R MCDQ tient des congrès annuels à chaque année où le
grand public est invité pour comprendre quelles sont les dernières technologies
pour pouvoir trouver des débouchés pour ces matières-là, ainsi de suite.
Mme
Pellerin (Ginette) : M. le député de Mégantic, je voudrais ajouter que le président du comité
du bois du 3R MCDQ provient de Tafisa Canada.
M.
Bolduc : O.K.
C'est une bonne idée, ça. Je suis bien d'accord. Écoutez, pour moi, il y a
toute une espèce de potentiel de développement. Comme vous le dites, il y a encore — puis
c'était l'origine de ma première question — un paquet
de matériaux qui se retrouvent dans l'enfouissement, donc il y a une
opportunité là-dedans, là, j'imagine, jusqu'à un certain point. Est-ce
que votre groupe regarde ça de façon systématique?
Mme
Dubois (Sara-Emmanuelle) :
Il faut comprendre qu'il y a de nouvelles matières qui arrivent à toutes
les années. Donc, le défi est constant, et c'est un peu pourquoi... Dans notre
mémoire, on le mentionne, premièrement, que l'industrie est très jeune. Il faut
se rappeler qu'il n'y a pas si longtemps les CRD n'étaient pas des matières qui
étaient considérées comme ayant un potentiel
ou une valeur, et, en ce sens-là, bien, c'est
ça, c'est d'ajuster le
quotidien des gestionnaires de centres de tri, de les accompagner là-dedans
pour...
M.
Bolduc : Dans le contexte
d'une industrie dynamique — parce qu'il y a un dynamisme, il y a une
évolution continuelle de votre... — quels seraient les éléments clés ou les
variables sur lesquels le ministère devrait tabler pour pouvoir suivre, s'ajuster, continuer à vous aider sans
créer de délais? Parce qu'à chaque fois qu'on crée des délais on enfouit
des déchets si je comprends bien, hein? Donc...
Mme Pellerin
(Ginette) : Ou on décourage les gens de faire des projets.
M.
Bolduc : Exactement.
Est-ce que vous avez des règles ou des critères que vous
voudriez nous donner, qui nous permettraient de qualifier ou de caractériser
notre façon d'opérer pour éviter ces délais-là?
Mme Dubois
(Sara-Emmanuelle) : Bien, un entrepreneur qui décide d'ouvrir un
centre de tri, rarement, va l'ouvrir avec un portefeuille de 10 millions
puis avoir le centre de tri le plus performant, le plus mécanisé ou le plus technologique. Donc, ce qu'on trouve important,
c'est d'avoir un accompagnement du ministère qui permet d'évoluer dans le temps, justement, de considérer qu'au jour
1 on a un centre de tri ou des processus d'une manière x, mais que, dans le temps, ils vont être... et qu'ils vont
évoluer dépendamment des développements technologiques, dépendamment des nouvelles matières, et qu'il ne faut pas que
ces développements-là soient un frein parce qu'ils ne sont pas nécessairement
écrits noir sur blanc dans une demande de certificat d'autorisation ou dans un
certificat d'autorisation.
M.
Bernardin (Gilles) : Un
complément d'information. Le nerf de la guerre ici, c'est vraiment,
lorsqu'on a une matière
qu'on dit résiduelle... c'est de savoir dire : Il y a
un débouché pour ça. À partir du
moment où on sait qu'il y a un débouché,
qu'il y a un marché, que quelqu'un est prêt à payer pour, là les choses
s'activent. À ce niveau-là, le ministère des Transports, par rapport au bardeau d'asphalte, on tient à souligner leur
support. Effectivement, ils ont été à côté de nous, ils nous ont aidés.
Au niveau de tout ce qui est béton, brique, asphalte recyclé, ça serait bien si
on avait encore plus d'encouragement au
niveau du ministère des Transports, si eux sortaient des devis qui pourraient
être copiés dans les villes, assurer
des sorties pour ces matières-là. C'est ça qui est le nerf de la guerre. C'est
beau de les concasser, ces matières-là, puis en avoir des tas... Puis, lorsqu'il y en a des tas, là les gens du
ministère viennent nerveux parce qu'ils disent : Ils vont mettre la
clé dans la porte. Donc, ce qui est important, c'est de trouver des débouchés
pour ces matières-là.
Mme
Pellerin (Ginette) : Mais un
rêve qu'on peut avoir aussi, c'est que le gouvernement du Québec
dise à toutes ses structures d'utiliser des matières recyclées. Ça peut
être bon pour les villes aussi.
Le Président (M. Reid) : Un commentaire
seulement, il reste 30 secondes.
M.
Bolduc : Écoutez,
pour moi, je trouve ça intéressant.
Puis ce que vous nous dites, c'est
que ça nous prend une dynamique, une
façon d'opérer qui va nous permettre de vous aider plus rapidement.
Vous avez mentionné la méthode expérimentale,
c'en est une. Peut-être qu'il y
a moyen de dynamiser aussi nos agents
de changement puis de suivre ce que vous faites, puis ça pourrait vous
aider et nous aider. Merci.
Le
Président (M. Reid) :
Merci. Nous passons maintenant à l'opposition
officielle. M. le député de Terrebonne.
M.
Traversy : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, M. Bernardin, Mme Dubois, Mme Pellerin,
d'être avec nous. Et merci de votre
franchise. Écoutez, moi, je trouve ça extraordinaire, depuis
quelques heures, on a le droit à des révélations,
à des confidences, cette espèce d'exemple de sept, huit ans, là, de marche de
Compostelle administrative qui
vous a amenés à devoir, là, tu sais, porter
votre projet à bout de bras. Soyez certains que c'est des exemples concrets
et parlants comme celui-là qui motivent nos
parlementaires à essayer d'améliorer nos processus, j'en suis convaincu, et
je suis certain que le ministre également
est de la même opinion. Il y a cette volonté, là, de vouloir essayer d'alléger
les structures, et là je pense que
vous avez démontré peut-être d'une façon plus réelle, là, qu'est-ce que le
labyrinthe administratif peut nous amener à faire de temps en temps.
Alors, je tenais à vous remercier de cette franchise.
J'ai
plusieurs questions. Je vais commencer par l'orientation n° 1, qui est la
lutte aux changements climatiques dans
le processus d'autorisation. Contrairement à d'autres groupes, j'ai senti une
ouverture de votre part. Écoutez, non, mais je vais lire une partie du
mémoire, écoutez-moi bien. Vous dites que vous n'êtes pas complètement fermés à
la délivrance d'autorisations, là, en matière de lutte aux changements
climatiques, à condition que ceux-ci s'appliquent principalement aux projets qui émettent entre 10 000 et 25 000
tonnes de GES annuellement et qui sont donc susceptibles de contribuer à une augmentation des gaz à effet
de serre. La plupart des gens qu'on a rencontrés dernièrement nous
disaient fermés complètement. Vous, vous nous dites, entre 10 000 et
25 000, vous trouveriez ça acceptable. Dites-nous un peu pourquoi. Et là vous nous parlez de... à
condition que ce soit sur une base réglementaire, j'aimerais juste avoir
une précision de votre position là-dessus.
• (21 h 30) •
Mme Dubois
(Sara-Emmanuelle) : Au niveau de la base réglementaire, c'est qu'en
fait les lignes directrices, à notre
avis, c'est un petit peu arbitraire. On est d'avis que, sur une base plus
législative, les règles sont connues et elles sont appliquées de façon
équitable. Je ne sais pas si tu veux parler...
M.
Bernardin (Gilles) : Pourquoi ces quantités-là? C'est que, finalement,
quand nous, on regarde les projets de l'ampleur
de nos membres, 10 000, 20 000 tonnes, c'est l'équivalent de
quelqu'un qui brûle l'équivalent de 10 000 tonnes de charbon par année. Donc, ça reste quand même un
certain niveau. Ce qu'on ne voudrait pas, c'est, lorsque quelqu'un demande un certificat d'autorisation pour ouvrir
un centre de tri, se payer l'écriture de l'impact au niveau CO2, et
ainsi de suite, de ça. À la face même de ce que nos membres font, il y a un
bénéfice au niveau environnemental, conserver les ressources et réduction des émissions de gaz à effet de serre, ces
matières-là n'étant pas envoyées dans des sites d'enfouissement. Je pense, on n'a pas besoin de calculer longtemps pour
se rendre compte du bénéfice de ça. Ce qu'on dit, c'est : À partir
d'une certaine valeur, là il y aurait peut-être lieu, effectivement, de
commencer à quantifier, mais n'imposons pas ça à des projets de l'envergure de
ce que nos membres mettent de l'avant.
M. Traversy : Et, juste pour
une question de clarification, dans vos membres, là, des projets en haut de 10 000 tonnes, là, d'émission de gaz à effet
de serre, en avez-vous beaucoup ou c'est... Pas vraiment? Juste à titre
d'information.
M.
Bernardin (Gilles) : Dans nos membres, il y a les cimenteries. Les
cimenteries utilisent du charbon. Et les
cimenteries, une façon de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre,
c'est, effectivement, d'utiliser de la biomasse, donc du bois, et ainsi de suite. On a une cimenterie ici, au Québec, où
le taux de substitution de combustible traditionnel est autour de 40 %. Donc, c'est une cimenterie
qui, normalement, à 1 million de tonnes de ciment, consommerait 150 000 tonnes de charbon. Donc, à substituer
40 % de ça, on n'est pas loin de 60 000 tonnes de combustible
alternatif, il y a un effet de réduction. Au
niveau d'une cimenterie qui voudrait faire ça, ça serait tout à fait normal
que, lorsqu'ils font une demande de CA,
de démontrer l'impact à utiliser de la biomasse par rapport à utiliser, mais...
Et, si cette cimenterie-là est alimentée par trois, quatre différentes
entreprises, laissons donc celui qui génère la réduction de CO2 en
faire la démonstration plutôt que chacun de nos membres.
M.
Traversy : Merci beaucoup pour l'information. Je vais faire du
pouce sur la dernière citation que vous avez dit souhaiter à la fin de
votre intervention avec le parti ministériel, que, bon, il faudrait utiliser
davantage de matières recyclées, de matières résiduelles, là, dans les
différents projets québécois. Dans un élan, là, de passion, vous n'avez, malheureusement, pas eu le temps de terminer votre
présentation, mais j'ai eu le temps, moi, de voir dans vos conclusions
qu'il y a quand même une question sensible à la question de l'interprétation de
la définition à avoir sur les matières résiduelles. Donc là, j'ai dit : Il
faut que je leur laisse l'occasion de nous dire quelle est leur inquiétude à
cet égard-là.
M.
Bernardin (Gilles) : Je reviens au dossier du bardeau d'asphalte. Le
centre de tri qui a produit les matières a envoyé ça dans des usines
d'asphalte de 2008 à 2013. Et, en 2013, le centre de tri s'est fait dire par
les gens du ministère : Vous envoyez
une matière résiduelle dans une usine d'asphalte, vous devez cesser ça. À la
lecture du certificat d'autorisation
du centre de tri, c'était clairement indiqué que les fines de bardeau iraient
dans des usines aptes à recycler le bitume. Donc, le ministère s'est
retiré par rapport à l'avis d'infraction, et là ils ont été voir les usines
d'asphalte pour dire : Vous ne détenez pas les certificats d'autorisation
pour utiliser une matière résiduelle.
Ces
matières-là, les usines d'asphalte paient le transport pour aller les chercher
au centre de tri pour les intégrer dans leurs matières. À la face même que quelqu'un est prêt à investir, à
payer pour aller chercher ces matières-là, on pense que ça ne rencontre
pas la définition de «matière résiduelle». Et, à partir du moment où on la
considère comme une matière résiduelle,
bien, normalement, toute la réglementation appliquée à une matière résiduelle
entre en force, alors que, si ça n'avait plus ce statut-là, sans vouloir
dire qu'automatiquement on passe directement à la finalité, il peut y avoir des
impacts à... mais qu'on les considère comme
une matière première traditionnelle, tout comme d'autres types de matières
premières traditionnelles.
M.
Traversy : Je trouvais important que vous puissiez au moins le
mentionner avant la fin de cette discussion, et maintenant c'est fait.
M. Bernardin
(Gilles) : Merci.
M. Traversy :
C'est parce que le temps passe très vite, mais je veux quand même poser aussi
une question concernant la transparence et
l'information. J'ai posé une question similaire au groupe précédent, donc, sur,
bon, toute la complexité de vouloir
être, c'est ça, le plus transparent possible, le plus ouvert, mais, en même
temps, protéger le secret commercial, protéger, évidemment,
les informations concurrentielles. Vous avez quand même ouvert une porte en
disant, je pense, Mme Pellerin, que vous étiez, par contre, ouverte à
rendre public le suivi des permis d'autorisation qui sont délivrés. Je voudrais
juste vous entendre là-dessus, sur...
Mme Pellerin
(Ginette) : Les conditions, c'est les conditions...
M. Traversy :
Les conditions? C'est quoi, ça, le suivi des conditions des autorisations?
Mme
Pellerin (Ginette) : Bien, normalement, il y a souvent une prise d'engagement
lors de la demande d'un certificat
d'autorisation. Donc, on va s'engager à faire des suivis, des caractérisations.
Et ce qu'on propose, c'est que ces conditions-là,
qui, dans le temps, feraient l'objet d'un suivi, puissent être rendues
publiques. Ce genre de suivi là contribuerait à l'acceptabilité sociale,
à notre avis.
M.
Traversy : Génial!
Et, comme il me reste très peu de temps, j'ai compris, dans votre discours, tout à l'heure... Et, bon, je me fais une tête, moi aussi, là, sur le livre vert, vous
avez dit qu'il y avait des autorisations qui bénéficiaient de
droits acquis au Québec?
Mme Dubois
(Sara-Emmanuelle) : Effectivement, il y a des entreprises qui
détiennent des autorisations avant la mise en place de la Loi sur la qualité...
M. Traversy :
En 1972?
Mme Dubois
(Sara-Emmanuelle) : Oui, oui.
M.
Traversy : Donc, O.K. Il n'y en a
pas beaucoup, j'imagine, ou c'est... Ça m'a surpris, je ne
pensais pas que ça existait, ce concept-là. Je n'étais pas là en 1972,
je vous le dis tout de suite, mais j'enregistre l'information.
Une
voix : ...
M.
Traversy : Mais il y avait
du monde avant moi, effectivement, là. Je ne suis pas, hein, l'inspiration de
grands livres populaires, là, qui ont marqué l'histoire.
Alors,
là-dessus, bien, écoutez, moi, je voulais vous remercier, donc, de vous être
déplacés. Puis je vous remercie aussi des suggestions que vous nous avez
faites, j'espère que la suite sera à la hauteur de vos attentes.
Le Président (M.
Reid) : Merci beaucoup. Nous allons passer maintenant au
deuxième groupe d'opposition, M. le député de Masson.
M.
Lemay : Merci, M. le Président. Merci d'être avec nous en cette heure
si tardive à l'Assemblée. Vous savez, ce
que vous avez mentionné dans votre mémoire à la page 9, là, moi, je suis
tout à fait en accord avec ça, là, que ça devrait être plutôt la nature du projet, et non sa
provenance ou son initiateur qui devrait déterminer le niveau de risque, là.
Parce qu'en réalité c'est comme si on
regarde aussi les impacts que ça a, tu sais, tel projet, pourquoi qu'un
promoteur x devrait avoir un
«fast track» versus un promoteur y? C'est le même projet, donc c'est le
même processus. Maintenant, si le projet a un bénéfice pour
l'environnement au final, ah! bien, peut-être que cette nature de projet là
devrait bénéficier d'un «fast track» parce qu'il y a bénéfice, un peu comme que
vous faites avec la valorisation des matières que vous...
En
fait, pour votre information, moi, avant d'être député, je travaillais dans une
entreprise de plastique, puis on fabriquait
des kayaks. Et puis, la matière résiduelle, on la remettait dans le kayak, dans
la couche du centre. Et puis la couche
qu'on pouvait... le surplus qu'on n'était pas capables, bien, on le revend
pour... ça va finir à faire des planches de fibre de bois et plastique qui deviennent des «decks», patios, tout le
kit. Donc, je comprends très bien ce que vous faites, c'est de l'innovation technologique à quelque
part. Et puis, quand on parle d'innovation au sein du ministère, on sait
que c'est une nouveauté, donc on n'a pas d'études, on n'a pas de données, on
est friand, on a de la difficulté.
J'ai
beaucoup aimé quand vous avez parlé... Puis moi, je l'ai résumé ainsi, là, vous
en avez parlé tout à l'heure, dans le
fond, ce que vous voudriez avoir, c'est des genres de bancs d'essai pour les
certificats d'autorisation pour de l'innovation pour un nouveau marché, à la mesure du possible que ça contribue à un
impact positif sur l'environnement. Sur ce, quand que vous parlez de votre exemple que vous avez
pris des bardeaux d'asphalte, bien, on a trouvé quelque chose, nous, je
ne sais pas si ça vous dit de quoi, là, Bellemare Recyclage, là, peut-être que
c'est...
M.
Bernardin (Gilles) : Oui, c'est une entreprise qui est membre, qui en
fait le recyclage, et eux aussi sont au point mort par rapport à trouver
des débouchés à cause, justement, de la problématique de recycler la fraction
fine dans des usines d'asphalte.
Il
y a trois entreprises. Vous avez mentionné, il y en a... Il y a deux autres
cimentiers qui, eux aussi, valorisent la portion papier, et les fines sont destinées dans les usines d'asphalte.
Et, si ces fines-là ne trouvent pas preneur dans les usines d'asphalte, au prix que ça coûte pour envoyer ça
dans un site d'enfouissement, ça anéantit la rentabilité pour les gens
qui essaient, dans le cas des cimenteries, d'en
faire de la valorisation énergétique. Donc, tout ça, ça se tient tout, ça, là,
là.
• (21 h 40) •
M.
Lemay : Parce qu'on le sait, juste l'industrie du bardeau d'asphalte,
bon, les statistiques disent que c'est environ entre 170 000 puis 200 000 tonnes par année. Donc, si on
regarde, vous n'êtes pas encore à huit ans, vous êtes à peu près à sept ans et demi, là, c'est comme 1,5 million
de tonnes, là, qui a été enfoui, alors qu'il aurait pu être réutilisé
autrement.
Ça
me permet de vous amener sur un autre sujet que vous n'avez pas mentionné dans
votre présentation, mais on est en
train d'analyser est-ce qu'on va faire une consigne sur le verre au Québec, et
puis alors qu'on a Tricentris qui ont sorti
le VERROX pour mettre dans le béton. Tu sais, c'est un peu dans votre domaine,
j'imagine. Est-ce que vous voulez mentionner un mot là-dessus? Je vous
ouvre une porte, là.
M. Bernardin
(Gilles) : Mes antécédents, j'ai été avec un cimentier pendant
25 ans, il y a toutes sortes de matières pour réduire la quantité de
ciment que vous allez mettre dans le produit fini qui est le béton, que ça soit
des cendres volantes, que ça soit des fumées
de silice, que ça soit du laitier de haut fourneau. Le verre recyclé est un
parmi tant d'autres. Chimiquement, à ma connaissance, ça n'a pas nécessairement des propriétés aussi exaltantes que, par exemple, les fumées de silice. Des fumées de silice, quand vous avez du béton à
40 mégapascals, si vous mettez des fumées de silice là-dedans,
vous allez atteindre des résistances de 60 mégapascals. Ça, c'est vraiment
fantastique en termes de
produit. Je doute que le verre puisse donner de tels résultats et... Enfin...
Mme
Dubois (Sara-Emmanuelle) :
Bien, je suis contente que vous parliez de cet exemple-là parce que c'est un exemple parmi des milliers au Québec. On parle de verre, mais, à nos yeux puis aux yeux
de nombreux entrepreneurs au Québec, les matières résiduelles, c'est une
richesse. Puis, dans un contexte où on entend parler beaucoup d'analyse de cycle de vie, bien, de plus en plus ce qu'on en
entend parler, c'est une... d'économie circulaire. Puis, dans ce
contexte-là, si on veut commencer à intégrer les concepts d'économie
circulaire, bien, nos matières résiduelles doivent devenir nos matières premières, et il y a, à quelque part
là-dedans, un mécanisme qui doit être mis en place pour ne pas mettre de
frein à cette revalorisation-là de nos
matières résiduelles. Donc, moi, s'il y a un mot que je veux que vous reteniez,
c'est que les matières résiduelles, à nos yeux, ne sont pas des matières en fin
de vie qui n'ont plus de valeur.
M. Lemay :
Si je peux rajouter, pour ma compréhension, en plus de ça, c'est que, parce
qu'on revalorise un produit, donc on a un
impact positif sur l'environnement, la nature de notre projet devrait faire en
sorte que c'est ce projet-là qui devrait bénéficier d'un allègement,
d'un processus accéléré d'autorisation.
Mme Dubois
(Sara-Emmanuelle) : En fait, bien, ce qu'on demande, c'est que oui, le
projet pilote qui vise à développer ce nouveau
procédé là ou ce nouveau produit là fasse, effectivement, l'objet d'un
processus... en fait, toute démarche de recherche et développement.
M.
Lemay : Pour ma part, tout a
été dit. Vous me semblez avoir fait une belle conclusion. Est-ce que vous
auriez quelque chose d'autre à rajouter?
M.
Bernardin (Gilles) : La
définition de «matières résiduelles». Si je vous disais quelqu'un
qui veut changer les fenêtres ici... Les fenêtres, c'est d'une bonne
qualité, mais quelqu'un qui dirait : On veut mettre des fenêtres plus...
la personne... on envoie une entreprise
enlever ces fenêtres pour les mettre dans un entrepôt pour essayer de les
revendre. Est-ce que vous
considéreriez que ces fenêtres-là sont des matières résiduelles? Je vous pose
la question. Là, on s'entend, là, les gens ont investi pour dépendre les fenêtres,
dépendre les portes quand on fait une déconstruction. Est-ce que, selon vous, ces matières-là, que quelqu'un
a quand même investi, est-ce qu'elles devraient avoir le
statut d'une matière résiduelle?
Le Président (M. Reid) : Deux
secondes pour donner la réponse, M. le député.
M. Lemay : Bien, très bien. Merci beaucoup
d'avoir assisté aux travaux de la commission.
Des voix : Ha, ha, ha!
Le Président
(M. Reid) : Je pense
qu'on a tous compris le message. Mme Dubois, Mme Pellerin,
M. Bernardin, merci beaucoup de votre contribution à nos travaux.
Mémoires déposés
Avant de terminer, je dépose les
14 mémoires officiellement, les 14 mémoires d'organismes qui n'ont
pas été entendus lors des auditions.
L'ordre du jour étant complété, la commission
ajourne ses travaux sine die. Merci et bonne fin de soirée.
(Fin de la séance à 21 h 44)