(Quinze heures une minute)
Le Président (M. Reid) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à toutes les personnes dans
la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones
cellulaires.
La commission
est réunie afin de poursuivre les consultations
particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 36, Loi modifiant diverses
dispositions relatives concernant principalement le transport collectif.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. Bolduc (Mégantic) est remplacé par M. Hardy (Saint-François).
Auditions (suite)
Le
Président (M. Reid) :
Merci. Alors, voici l'ordre du jour pour cet après-midi : nous entendrons
le Regroupement des propriétaires de taxi de la Capitale, ensuite la
Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec et Uber Québec.
Alors, je
souhaite d'abord la bienvenue à nos invités du Regroupement des propriétaires
de taxi de la Capitale. Je vous
demande de bien vouloir d'abord vous présenter. Je vous rappelle que vous avez
10 minutes pour faire votre exposé. Par la suite, nous procéderons
à une période d'échange avec les membres de la commission. Alors, à vous la
parole.
Regroupement des propriétaires de taxi de la Capitale
M. Nadji (Hamid) : Merci. M. le
Président, MM. les députés, distingués membres de cette commission, je m'appelle Hamid Nadji, je suis propriétaire de
taxi et président du Regroupement des
propriétaires de taxi de la
Capitale, le RPTC. Je suis accompagné de M.
Hicham Berouel, président de Taxi Lévis. Je m'adresse à vous aujourd'hui à
titre de représentant des intérêts et positions de ce regroupement.
Créé
récemment, le RPTC est un organisme à but non lucratif dont le mandat est de
donner de l'information à la population,
de défendre les droits des professionnels de l'industrie du taxi de la région
de la Capitale et de veiller à ce que la
sécurité et la qualité du transport offert soient maximales. Il va sans dire
que le RPTC se fait ici le porte-parole de ses membres et l'allié de tous les intervenants de l'industrie du taxi, une
industrie très inquiète par les temps qui courent et fortement désireuse
de participer par le biais de ses représentants aux discussions entourant le
projet de loi n° 36.
Les présentes consultations nous donnent
l'occasion de saluer d'entrée de jeu les initiatives du ministre des
Transports, M. Robert Poëti, et les efforts de son ministère afin de rendre les
services de transport de personnes plus efficaces,
plus modernes et mieux adaptés aux réalités de la société d'aujourd'hui. Nous
regroupons des travailleurs et des entrepreneurs
oeuvrant en toute légalité, qui sont tournés vers l'avenir et qui ont confiance
en la démocratie. Le RPTC est ouvert
à tout changement qui est équitable. Depuis quelques mois cependant, nous nous
sommes vus forcés de prendre un ton ferme et critique et d'adopter une
attitude défensive à la suite de l'arrivée d'un nouveau joueur illégal.
Dans
l'industrie du taxi, la position du RPTC et celle de l'industrie du taxi en
général a toujours été la même : cohérente
et honnête face aux activités de tout service de transport de cette nature. Et
elle s'exprime de la façon suivante : les travailleurs légaux du taxi subissent une concurrence malsaine et déloyale
de la part de transporteurs illégaux, ce qui leur porte préjudice, sans compter que ces organisations profitent d'un
passe-droit fiscal et mettent à risque la sécurité des personnes en se soustrayant aux normes
s'appliquant aux véhicules servant au transport de personnes. D'ailleurs, M.
le ministre Poëti a confirmé à plusieurs fois par des correspondances écrites
et des déclarations aux médias que toute personne
qui contrevient aux règles de la Loi concernant les services de transport par
taxi commet une infraction. Et les nouvelles entreprises ou les
individus effectuant du transport rémunéré de personnes par l'entremise de
moyens technologiques n'y échappent pas.
Nos demandes
dans le dossier de transport illégal sont connues. Les journalistes les ont
relayées, les dirigeants gouvernementaux concernés ont été avisés. Nos
protestations et nos manifestations publiques ont également été couvertes par
les mass médias. Cela dit, un concurrent illégal poursuit toujours son
expansion en sol québécois.
Avant d'aborder le point central de mon exposé, à savoir
la position du RPTC concernant le projet de loi n° 36, permettez-moi de faire un autre commentaire qui
traduit à la fois la déception et l'incrédulité de nos membres à
l'endroit de certaines façons de faire du gouvernement dans ce dossier.
Nous trouvons
inconcevable qu'Uber est dans la liste des participants à la présente
consultation. Dois-je rappeler que Uber Québec n'est enregistré ni au Québec ni
au Canada, que cette organisation n'a aucun numéro de téléphone, ni adresse, ni local au Québec s'il s'agit d'une organisation
illégale et qualifiée d'illégale par le ministre des Transports lui-même? Oui, messieurs les députés,
nous jugeons inconvenant le fait que des représentants d'une
organisation qui ne respecte pas les lois en vigueur,
votées démocratiquement, soient invités à donner leur point de vue en cette
enceinte. C'est prêter à Uber une légitimité indue.
D'autre part, il nous
a été tout aussi désagréable d'apprendre qu'un projet de loi visant à modifier
diverses dispositions législatives
concernant le transport collectif, notamment la Loi concernant les services de
transport par taxi, venait d'être
déposé, et ce, à notre plus grand étonnement. En fait, le dépôt du projet de
loi n° 36 nous a pris par surprise. Jamais n'avons-nous été invités à collaborer, de
près ou de loin, à sa préparation, un comble en quelque sorte puisqu'une
des problématiques qu'il induit à
l'article 11, comme nous le verrons à l'instant, nous concerne au premier
chef. En somme, pendant que nos partenaires demandaient en vain une
audience auprès du ministère des Transports pour qu'il prenne pleinement la mesure de l'injustice frappant
l'industrie du taxi, le ministre préparait un projet de loi en faisant
l'économie de nous consulter.
Dans
sa forme actuelle, le projet de loi n° 36 ne nous satisfait pas et nous nous y opposons
essentiellement en raison de
l'article 11, qui concerne la Loi des services de transport par taxi,
laquelle loi serait dès lors modifiée par l'insertion de l'article 89.1. Par cet ajout, le ministre
des Transports pourrait, je cite, «autoriser toute personne ou tout organisme à
offrir un service selon des normes et des
règles qu'il édicte, différentes de celles prévues par la présente loi et ses
règlements».
Le RPTC demande le
retrait pur et simple de l'article 11 du projet de loi n° 36 pour les
raisons suivantes : Le RPTC ni aucune autre association de taxis n'ont été
consultés durant la phase préparatoire de ce projet de loi, de son article 11
en l'occurrence, ce qui nous semble un non-sens.
L'article 11
donne au ministre des Transports un pouvoir discrétionnaire trop important.
Parfois les intentions sont bonnes,
les expériences instructives, mais, dans la vie réelle, les conséquences ou les
effets secondaires peuvent être désastreux.
Par le biais de l'article 11, il suffit que l'actuel ministre des
Transports ou son successeur ait l'idée d'un projet pilote à tester dans l'industrie du taxi pour que
celui-là soit mis en vigueur, et ce, peu importe sa nature, son ampleur,
ses impacts. Le ministre ne serait pas tenu
de consulter les représentants ou les travailleurs du taxi au préalable, une
possibilité que nous refusons de considérer.
L'article 11
est vague quant à son objet et à son application. Si «le ministre peut, en tout
temps, modifier un projet pilote ou y
mettre fin», il n'y a rien qui précise dans quelle direction vont aller ces
projets ni quels sont leurs buts, leur cohérence,
leur marge exploratoire. Techniquement, cet article pourrait par exemple
permettre au ministre des Transports de rendre temporairement légal, aux
fins d'étude, tout transport illégal de personnes.
Il
y a là un risque que le RPTC ne peut accepter. Imaginons qu'un transporteur
illégal comme Uber soit intégré à l'offre
légale des services de transport rémunérés de personnes par automobile, comment
le gouvernement et ses fonctionnaires
pourront-ils, après trois ou cinq ans d'opération de ces autres joueurs faire
cesser leurs activités, remettre le couvercle
sur la marmite et convaincre leurs usagers que tout s'arrête là? L'article 11
risque d'ouvrir une brèche que nous croyons
impossible à colmater, d'ouvrir une boîte de Pandore, dont un des maux est non
seulement la baisse drastique de la valeur des permis de taxi, mais
aussi l'incubation d'un modèle de déréglementation malsaine pour plusieurs
secteurs industriels et commerciaux, une régression sociale aux retombées
déstabilisatrices et désastreuses.
• (15 h 10) •
Le RPTC n'est pas
contre les mesures d'amélioration des services de transport par taxi ou de la
sécurité et de l'efficacité. Au contraire,
nous serions heureux d'apporter nos idées et notre contribution à tout projet
porteur, équitable et innovant, que ce soit l'intégration de voitures
électriques à nos flottes, l'installation de caméras, l'amélioration de la formation
des chauffeurs, l'établissement des règles concernant les heures de conduite et
de repos des chauffeurs, etc.
D'ailleurs,
nous faisons preuve d'innovation et nous avons amélioré la qualité du service
aux clients. En effet, depuis une
dizaine d'années déjà, 98 %
des taxis de la région de la Capitale-Nationale acceptent le paiement
électronique des courses; nous avons pris le
virage vert vers les flottes composées plus de 50 % de véhicules hybrides;
l'âge moyen de nos véhicules est de
trois ans; ils sont munis d'un système de réfrigération par GPS; une
application mobile pour téléphone intelligent
a en outre été mise à la disposition des usagers, laquelle couvre tout le territoire
de la capitale avec ses deux rives. Tous
ces changements... j'insiste que ces points ont été faits dans le respect des
lois et de la réglementation en vigueur. Nous sommes conscients que les
règles et les normes contribuent fortement à augmenter la sécurité des usagers
et à assurer la fiabilité et la qualité du service.
Or,
compte tenu de la situation actuelle, où un géant milliardaire, Uber, fait fi,
voire se moque partout des lois établies régissant l'industrie du taxi,
nous nous serions attendus à ce que le ministre des Transports commence par imposer des mesures claires pour stabiliser
l'industrie. Et cette base solide, selon nous, elle aurait dû prendre la
forme d'un projet de loi ayant permis
notamment et prioritairement de sanctionner sévèrement et efficacement tous les
individus ou organisations qui font illégalement du transport rémunéré
de personnes par automobile.
Le Président (M.
Reid) : En terminant. Rapidement.
M.
Nadji (Hamid) : O.K. En terminant, distingués membres de cette
commission, permettez-moi de rappeler que
ce qui nous motive en ce que nous croyons, au RPTC... Nous sommes ouverts à
l'amélioration continue du service de taxi, nous sommes prêts à collaborer avec les instances concernées, nous
souhaitons à nouveau être entendus et consultés par les intervenants
gouvernementaux. Nous allons continuer d'innover dans le respect des lois et
nous nous engageons à...
Le Président (M.
Reid) : Le temps est terminé.
M. Nadji (Hamid) :
Et merci de votre attention.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Alors, merci de votre
présentation. Nous allons passer maintenant à la période d'échange. M.
le ministre, vous avez la parole.
M. Poëti :
Merci, M. le Président. Bonjour, M. Nadji et M. Berouel. Écoutez, je ne peux
pas vous dire que je ne suis pas
étonné du ton de vos propos, mais il y a sûrement des choses aussi sur
lesquelles vous n'êtes pas au courant, et c'est vrai que ce projet de
loi est un projet de loi qu'on appelle omnibus, qui traite du transport
collectif, et qu'il y a beaucoup de sujets dans le projet de loi qui ne sont pas
que spécifiques au taxi. En fait, s'il y avait quelque chose à dire, c'est qu'il n'y en a qu'un seul, article, qui
touche le taxi, c'est de donner l'opportunité au ministre de pouvoir faire
des projets pilotes.
J'ai été très clair, dès l'ouverture de cette commission,
avec les oppositions, autant la première opposition officielle, que la deuxième
opposition, que les gens de Québec solidaire, il n'est pas de l'intention
d'aucune façon de légaliser par un projet pilote du transport illégal, il y a quelque
chose pour moi qui est inconcevable dans ça. Mais il y a eu une perception. À vous
entendre, les perceptions sont plus vraies que la réalité; c'est faux. Je
m'inscris en faux sur les perceptions. Moi, je travaille sur des faits.
L'autre chose
que je dois vous dire, vous avez dit que vous aviez demandé une rencontre avec
moi. Si vous avez la date, c'est
assez... tout à fait récent. J'ai rencontré plusieurs représentants de
taxi depuis que je suis en poste, à plusieurs occasions, et ça me fera
plaisir de rencontrer votre association également.
De dire cependant
que le monde du taxi est parfait, que vous êtes ouverts à de l'amélioration, je veux juste vous dire que cette concurrence déloyale que vous
avez actuellement, illégale, et je l'ai répété à plusieurs égards, va et a déjà
commencé à bousculer un peu la qualité du service que plusieurs citoyens
avaient, et plusieurs citoyens n'étaient pas satisfaits
des services de taxi, et on a encore des exemples tous les jours, monsieur.
Alors, je veux juste vous dire que c'est peut-être une mauvaise
nouvelle, cette chose-là, mais moi, je vais la prendre positivement en vous
disant qu'éventuellement peut-être que l'industrie du taxi va aussi
s'améliorer. Je suis content d'entendre que vous avez innové en matière de technologie, que vous avez innové en matière de paiement de carte de crédit, que
vos chauffeurs ont des véhicules qui sont
propres, qu'ils savent où ils doivent aller et qu'ils offrent un service de
qualité à tous leurs clients. J'espère que tous vos taxis font ça. Malheureusement,
ce n'est pas le cas partout au Québec.
L'autre chose
que je veux vous dire : De demander, dans un projet de loi, à avoir la possibilité de faire des projets pilotes pour améliorer le service et la sécurité
n'est pas en soi une menace; d'installer des caméras dans les taxis, il
faut que j'aie un projet pilote pour pouvoir faire ça. Alors, ce que vous me
dites, vous... et, si je pensais que... Vous savez, si demain on a une agression d'un chauffeur de taxi, parce qu'il y en a,
des agressions de chauffeurs de taxi, et, qui plus est, si, par malheur, on avait un décès, va encore revenir
sur le sujet la possibilité de fermer l'arrière du taxi, comme on
retrouve à plusieurs endroits au travers le
Canada et dans le monde entier. Comment on peut faire pour tester ça? C'est un
projet pilote. Il ne faut pas attaquer cette
possibilité-là d'améliorer le monde du taxi parce qu'il y aurait un doute de
votre part que nous allons utiliser
les projets pilotes pour légaliser quelque chose d'illégal. Je veux au moins
vous rassurer là-dessus. Soyez assurés de ça, ce n'est absolument pas
l'intention.
Quant au
permis de propriétaire-chauffeur de taxi, moi, je comprends que vous êtes
inquiets, mais la réalité — parce que je reviens aux
faits, et ça, c'est ma nature — sur la valeur totale des permis de taxi au
Québec, c'est 1,3 milliard de dollars.
Il y a, à Montréal, 4 794 titulaires de permis. La valeur moyenne des
permis est 191 000 $, le nombre de chauffeurs, 11 600;
région de Québec, 640, valeur des permis, 161 000 $, nombre de
chauffeurs, 1 600. À ce jour, il n'y a pas de baisse d'évaluation du prix ou de la valeur d'un permis. Est-ce que ça
pourrait se produire si on ne fait rien? La réponse, c'est oui, ce pourquoi j'ai aussi, d'emblée, à
l'ouverture de cette commission, demandé d'organiser un comité, un
forum, un regroupement des gens du taxi pour qu'on puisse discuter vraiment de
quelle façon on peut faire mieux et de quelle façon
on peut travailler ensemble. C'est dans cet esprit d'ouverture que je le fais.
Vous avez évidemment cette grande inquiétude
sur le projet pilote, mais moi, j'ai aussi assuré les oppositions qu'on va
offrir un amendement, dès le début du volet article par article, pour
vous rassurer sur ce sujet-là.
Quant à la
démocratie, c'est ce qui m'a amené en politique, c'est la démocratie, et, à
l'Assemblée nationale, la démocratie
s'exprime par le parti au pouvoir, les partis d'opposition et les partis de la
deuxième opposition, et c'est mes collègues
de la première opposition qui ont demandé d'entendre Uber. C'est de la
démocratie, et, si vous croyez que c'était une très mauvaise idée, bien ma collègue de Vachon pourra vous expliquer
les raisons pour lesquelles ils l'ont demandé.
Alors, à partir de là, moi, je veux juste vous
dire que j'ai de l'ouverture pour améliorer la situation du taxi à Montréal, qu'il est faux que nous n'avons rien
fait. Il y a plusieurs véhicules qui ont été saisis, autant à Montréal
qu'à Québec, et à partir de là je dois vous
dire que les saisies parlent d'eux-mêmes, et à partir de là il y a eu aussi...
et ce n'est pas sous l'autorité du
ministère des Transports, mais aussi des interventions, à travers d'autres
ministères, sur la légalité d'Uber, et il y a eu des saisies de faites.
Alors, je
veux juste vous dire qu'il faut travailler dans un esprit de collaboration, et
il faut travailler dans un esprit d'ouverture, et ne pas imputer des
intentions qui ne sont pas les miennes à travers ce projet de loi, je veux vous
rassurer là-dessus.
Le Président (M. Reid) :
Merci, M. le ministre. M. Nadji, est-ce que vous voulez commenter?
M. Nadji
(Hamid) : Merci, M. le ministre. Je vous informe qu'on a déposé notre
mémoire hier avant de vous écouter,
mais, après vous avoir écouté toute la journée hier, on a suivi vos
interventions, nous avons plus confiance, mais on dit que les écrits
restent et les paroles s'envolent. Donc, on a besoin des écrits qui balisent
tout ce qui est supposé interprétable dans
le futur. C'est pour ça, notre inquiétude, elle est dans ce sens. Et je vous
informe qu'on a plus confiance depuis qu'on vous a écouté, depuis hier jusqu'à aujourd'hui,
donc, parce qu'on n'a pas eu occasion dans le passé de vous écouter en
direct et par voix officielle. Donc, c'est pour ça, notre inquiétude.
On est
agressés dans le terrain, et de façon farouche — comment dirais-je? — impitoyable, et on ne peut pas se
protéger s'il n'y a pas l'intervention des autorités. C'est vrai que vous êtes
en train de faire des choses dans la route, à
travers le contrôle routier, mais ça, ça revient à traiter les symptômes de la
maladie, mais ça ne suffit pas, il faut traiter la source de la maladie, l'origine. On dit :
Prévoir mieux que de guérir. Si on veut arrêter l'alimentation de cette
maladie, il faut traiter l'origine.
L'origine, c'est Uber, et vous êtes les seuls capables de l'arrêter. Nous, on
n'est pas capables, c'est pour ça, on vous fait appel.
• (15 h 20) •
M. Poëti : Mais vous avez
raison, mais en fait surtout UberX, parce que je dois vous rappeler quand même qu'il y a un certain nombre de chauffeurs de taxi
légaux qui utilisent Uber, pas UberX,
Uber, l'application d'Uber et font partie du service d'Uber, des taxis identifiés, plaqués, enregistrés
avec leur plaque d'identification, qui utilisent Uber, monsieur. Ça, ça, vous devriez leur parler, par exemple, puis leur dire de cesser ça immédiatement.
Parce que des chauffeurs de taxi actuellement utilisent l'application d'Uber au Québec. Ça, ça me déçoit, je suis
obligé de vous le dire. Mais, à partir de
là, je comprends qu'il n'y a personne de chez vous qui fait ça. Est-ce que
vous avez la connaissance des gens de votre entreprise qui utilisent
la plateforme Uber?
M. Nadji (Hamid) : Non.
M. Poëti : Parfait. Mais je
dois vous dire qu'il y en a qui le font. Alors, ça, c'est la première chose.
UberX, je m'inscris en faux. Je l'ai dit
depuis le début, je n'ai jamais nuancé mes propos. Et je vous assure qu'on va
travailler contre le transport illégal, c'est certain, mais en même
temps on doit travailler en collaboration.
Et l'objectif
du projet pilote, on a eu une
présentation aussi hier... Si on veut mettre des véhicules électriques,
si le groupe qui est venu nous voir nous ont
parlé d'acheter des permis, ils
voudraient qu'on ait une ouverture sur éventuellement peut-être une location de permis, moi, je pense
que, si on veut améliorer le transport de taxi, il faut être ouvert à des
choses nouvelles, de la modernisation, de ce que les clients veulent, de la
capacité de le faire.
Alors, à
partir de là, ce que je demande, c'est que... Je vais vous rassurer dans le
projet de loi, j'ai déjà rassuré les collègues des oppositions, mais
j'ai l'intention et je voudrais vraiment qu'on puisse travailler avec une
ouverture de modernisation beaucoup plus rapidement, que ce soit une situation
qui a forcé, à tort ou à raison, l'industrie du taxi à se moderniser.
Le Président (M. Reid) :
Est-ce que vous souhaitez commenter, M. Nadji?
M. Nadji
(Hamid) : Sur ce point, je passe la parole à M. Hicham Berouel
concernant nos craintes vis-à-vis d'Uber.
M. Berouel (Hicham) : Oui. Donc,
nous, là, surtout, notre position vis-à-vis du projet de loi, c'est sûr qu'on n'est pas contre moderniser ou essayer de faire
des projets pilotes, etc. Bien sûr, nous sommes ouverts à ça. Et
d'ailleurs c'est ce qui a bloqué peut-être
dans le passé l'industrie à se moderniser. Que ce soit pour mettre des GPS dans
les véhicules ou quoi que ce soit, c'était toujours plus difficile de
changer la loi pour essayer de suivre un peu la technologie.
Mais, dans
les circonstances actuelles, depuis l'arrivée d'UberX, l'industrie du taxi est
comme déstabilisée. Les chauffeurs,
sur le terrain... Je vous raconte ce qu'ils disent, les chauffeurs sur le
terrain. Pour eux, ce n'est pas une priorité de mettre aujourd'hui une caméra dans leur véhicule ou de changer leur
véhicule pour une voiture électrique. Si vous allez sur les postes de
taxis, vous posez la question aux chauffeurs de taxi, la vraie priorité
aujourd'hui, c'est d'arrêter UberX.
Donc, nous,
on conseille qu'un projet de loi — peut-être qui est en préparation — il est dans ce sens-là, plutôt, de resserrer les règlements pour aider un peu les
contrôleurs routiers à faire leur travail. Parce que les amendes qui sont
données ne sont pas suffisantes, ce n'est
pas... L'effet dissuasif n'est pas là, et ils sont payés par Uber, puis ils ont
les moyens pour le faire. On pensait
que les efforts du ministère vont être mis plus vers ce côté-là, puis c'est ce
que nous avons espéré, plutôt que de travailler sur des projets pilotes
que, pour nous, oui, c'est qu'ils sont importants, mais il faut agir là où
c'est prioritaire au début.
Pour le moment, on pense que les chauffeurs de
taxi attendent d'abord d'être rassurés et stabilisés, d'arrêter UberX, parce qu'actuellement on pense que c'est
toléré encore, parce qu'ils sont encore sur le terrain. Puis nos
observations, on voit qu'il y a des
chauffeurs qui s'inscrivent chaque semaine, des nouveaux chauffeurs UberX qui
se rajoutent sur le chemin. Donc, on
pense que le gouvernement doit être ferme et d'aider les contrôleurs routiers.
On n'a pas, je pense, besoin d'un
changement de loi, c'est seulement une décision ministérielle pour augmenter
les amendes, comme ce qui a été fait ailleurs dans le monde. Si les
amendes augmentent, c'est sûr que ça va donner un bon coup de pouce au travail
des contrôles routiers dans ce sens.
Ça, ce n'est pas seulement aussi pour protéger
l'industrie du taxi et ceux qui gagnent leur vie avec ça, mais aussi la sécurité des usagers. Les usagers ne sont
pas au courant des dangers qu'ils encourent lorsqu'ils embarquent avec
un transporteur illégal. C'est souvent des jeunes qui utilisent cette
application et ils trouvent ça cool, une nouvelle chose, on va essayer une nouvelle chose, c'est surtout ça qui les
amènent à utiliser ça, ce n'est pas parce que c'est plus propre ou quoi que ce soit. Est-ce qu'on doit attendre qu'un
problème de sécurité arrive, un malheur arrive pour qu'on agisse pour
changer la loi et resserrer les choses, comme ce qui est arrivé dans... il y a
quelques années pour le «car surfing»? Malheureusement,
il a fallu qu'il arrive des décès pour que la loi change et que les amendes
soient augmentées à des milliers de dollars au lieu de 50 $ ou
60 $. Est-ce qu'il faut attendre? C'est sûr que c'est une question de
temps. Il arrivera des
malheurs avec des transporteurs illégaux, qui... que ça soit des agressions ou
des accidents, c'est sûr, à ce
moment-là, ça va devenir plus sérieux. Mais moi, je pense, c'est mieux de
prévenir que d'attendre que ces problèmes-là arrivent.
Donc, c'est pour
ça qu'on pense que c'est urgent d'abord de régler ce problème. Puis le ministère
a tout à fait les moyens pour
le faire et, après ça, on pourrait bien sûr regarder tous les projets pilotes,
on est ouverts à tout, on n'est pas fermés,
on veut juste que la situation actuelle, les inquiétudes que les chauffeurs ont
en allant travailler tous les jours, que ça soit dissipé, cette
inquiétude. Donc, c'est ça.
Le Président (M. Reid) :
Merci. M. le ministre.
M. Poëti : Il reste combien
de temps?
Le Président (M. Reid) : ...
M. Poëti : Bien, j'entends ce que vous dites, et on le fait.
Je vous rappelle que le problème d'UberX, Uber, est un problème mondial actuellement.
J'ai rencontré la ministre de la Colombie, il n'y a pas tellement de temps, et
la deuxième question, c'est : «What
about UberX»? C'est un problème mondial, et il faut s'inspirer de ce qui
se passe ailleurs, des meilleures
pratiques, pour contrer l'illégalité, et on le fait actuellement avec nos lois, nos règlements. Mais je vous dis, en tout respect : Une des bonnes façons de
contrer UberX, c'est d'offrir un service supérieur à UberX, c'est offrir un
service de qualité pour l'ensemble de vos taxis, et vous allez peut-être
contrer davantage ces choses-là.
Et, quand
vous parlez de sécurité, c'est à mon arrivée, il y a moins d'un an où j'ai
mis en place, parce que le projet de loi existait depuis 2002...
où il n'y avait aucune vérification d'antécédents criminels pour
tous vos chauffeurs de taxi. C'était
dans la loi et non appliqué. Il n'y a pas eu d'initiative des organismes de taxis,
dire, bien nous, on va le faire parce qu'on veut rassurer les gens. Vous
ne l'avez pas fait. Moi, je me suis assuré que la loi soit respectée, et nous
sommes maintenant, et vous le savez, après vérifier l'ensemble
des antécédents criminels des chauffeurs de taxi. Ça, c'est une raison de sécurité, vous avez raison. Mais, honnêtement et encore en tout respect, vous ne l'avez pas fait naturellement.
C'était dans la loi et ça n'avait pas été
appliqué, mais ce l'est maintenant, aujourd'hui. Alors, ce que moi, je vous dis, c'est
qu'on ne va pas tolérer des choses
illégales, mais une façon de contrer ça, c'est aussi de donner un service de
qualité et que les gens soient capables d'évaluer aussi la qualité du
service qu'ils ont eu, au-delà de dire : C'est cool.
Mais il y a aussi une problématique de prix, parce
qu'effectivement, si les prix ne sont pas normalisés et il n'y a pas d'équité dans les prix, bien, quand vous
allez... et, si vous êtes à la même qualité ou supérieurs, bien, la
façon de vous contrer, ça va être de baisser
les prix. Et, à ce moment-là, bien, les citoyens ont une option. Ce n'est pas
ce qu'on veut.
Et on va vous
appuyer dans la démarche, soyez assurés de ça, mais je demande quand même une
forme d'ouverture de votre part pour
permettre au ministère d'être capable, dans des projets pilotes, je pense à
celui de l'électrification des transports,
dans des projets pilotes où la sécurité des usagers ou des chauffeurs de taxi
est impliquée, de pouvoir permettre ce
type de projet pilote là. Et d'aucune façon, et je le réitère encore une fois,
et ça sera inscrit dans le projet de loi dans un amendement...
D'utiliser un transport illégal et de le rendre légal par un projet pilote,
honnêtement, moi, je n'y aurais pas pensé, et il y a personne qui pense à
quelque chose comme ça. Mais je sais que votre inquiétude est là, donc on va la
régler à travers le projet de loi.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Est-ce qu'il y a une autre intervention du côté ministériel?
M. Poëti : Non, c'est bon.
Merci.
Le
Président (M. Reid) : Alors, je vais passer maintenant à la
députée de Vachon, porte-parole de l'opposition officielle.
Mme
Ouellet :
Merci, M. le Président. Bien, bienvenue, M. Nadji, M. Berouel. Ça fait plaisir
de vous entendre en commission
parlementaire et je peux vous dire que je comprends tout à fait les craintes
que vous avez, parce que nous avions
exactement les mêmes craintes. Nous avons entendu hier le ministre nous dire
que ce n'était en aucune façon l'amendement prévu pour permettre UberX,
mais nous allons nous assurer... parce que ça, c'est des paroles, mais nous
allons nous assurer — il y avait de l'ouverture de la part du ministre — qu'il y aura des amendements pour changer le
libellé, parce qu'il faut que ces
intentions-là se transposent dans le libellé du projet de loi. Alors, nous
allons travailler dans ce sens-là.
Et,
concernant Uber, étant donné la formulation de l'article 11, la façon dont il
est formulé actuellement pourrait se prêter à Uber, c'est pour ça que
nous avons demandé des ententes et nous pensons que c'est important qu'ils
puissent s'exprimer. Nous voulons comprendre aussi pourquoi ils ont une si
grande volonté d'agir illégalement, parce que, le ministre l'a dit, pas de tolérance pour les choses illégales, mais
malheureusement UberX est encore en fonction, donc pas toléré mais en
activité depuis déjà le mois d'octobre.
Effectivement,
vous le dites, que les amendes qui sont mises en place ne sont pas suffisamment
importantes pour être dissuasives
puis on l'a vu dans les journaux, qu'UberX paie l'amende et prend en charge
l'ensemble de la poursuite. Moi,
j'aimerais ça vous entendre sur les moyens supplémentaires que vous
souhaiteriez que le ministre ou le ministère des Transports prenne pour
bloquer UberX.
• (15 h 30) •
M. Nadji
(Hamid) : Nous avons des
propositions, bon, on s'est inspiré de ce qui se passe ailleurs. Comme je
viens de le dire à M. le ministre, lorsqu'on traite une maladie, il ne faut pas traiter les symptômes, parce que,
si on traite que les symptômes, elle va continuer
à arriver, parce que l'alimentation, elle est là. Donc, il faut aviser, il faut
viser dans le traitement la source de la
maladie. Nous, les moyens existants actuels, parce qu'ils datent depuis des années, c'est tout à fait normal
qu'il faut s'adapter par rapport aux changements et aux symptômes des nouvelles
maladies. Donc, il faut augmenter les
amendes, de telle façon qu'elles soient dissuasives. Ils conseillent même à
toute personne qui encourage l'illégalité... les chauffeurs qui
encouragent l'illégalité, est-ce qu'ils vont passer à enlever des points sur le
permis, peut-être retirer le permis illégalement, comme ça se passe dans
d'autres infractions? Les vendeurs d'alcool de façon illégale, etc., il y a des
amendes consistantes.
Donc, nous
voulons que la loi soit homogène pour dissuader la souche de la maladie en elle-même,
en même temps, jusqu'à ce qu'il y
aura peut-être même une application ou bien une ordonnance ministérielle
officielle d'arrêter l'application Uber
dans tout le Canada si on arrive à faire ça. Et certains pays l'ont fait, et
c'est arrivé après un certain moment, ça s'est avéré, c'est le seul
moyen pour arriver à des fins pareilles.
Mme
Ouellet : Donc,
vous nous proposez des augmentations d'amendes. Je ne sais pas jusqu'à quel
niveau vous suggérez.
M. Nadji
(Hamid) : Ça, je préfère qu'il y aura une commission qui va discuter
autour de ça et que ça ne se passe pas
à la dernière minute et donner des chiffres comme ça, et je pense qu'il faut un
groupe sérieux qui discute autour de ça pour donner toutes les
propositions qui vont être dissuasives et définitives pour arrêter ce fléau. Et
je passe la parole concernant ce point à M. Hicham Berouel.
M. Berouel
(Hicham) : Je peux citer des exemples, comme ce qui est arrivé
ailleurs dans le monde, comme en France,
les amendes ont été augmentées à 10 000 €, avec possibilité d'un an de
prison pour quelqu'un qui fait du UberX. Là-bas, on appelle ça UberPop. C'est le nom différent, mais c'est le
même service. En Allemagne... pas en Allemagne... oui, en Allemagne, les amendes sont de
200 000 € par infraction. Là, Uber, ils ont été obligés d'arrêter leur
UberX, parce qu'ils ne peuvent pas
vraiment payer toutes ces amendes. C'est vraiment... ça a été un point fort.
Puis Uber, dans ce pays, il a commencé à penser de s'intégrer dans le
système et respecter les lois.
En Espagne
aussi, il y a eu des amendes. Je n'ai pas de chiffre. Il y a un pays en
Amérique latine qui a bloqué l'application.
Aussi, en Inde, l'application a été bloquée aussi sur Internet. On ne peut pas
l'utiliser. Mais ça prend, bien sûr, l'intervention du gouvernement dans
ce cas-là.
Mme
Ouellet :
Et je voyais dans votre mémoire, parce que dans l'industrie du taxi...
D'ailleurs, quand j'ai fait le point
de presse, la première question que je me suis fait poser : Oui, mais vous
êtes contre le progrès, comme si l'industrie du taxi n'avait pas progressé depuis plusieurs années. Donc, j'aimerais
ça vous permettre de nous exposer un peu plus, et je vois dans votre
mémoire, où vous nous dites, bon : 98 % des taxis ont le paiement
électronique; 50 % des véhicules hybrides; l'âge moyen de trois ans, mais
il y a deux éléments que j'aimerais ça que vous nous expliquiez un peu plus. Vous dites : «...tous sont munis d'un système
de répartition [...] GPS», ça fait que peut-être nous expliquer un peu
plus c'est quoi, cette répartition GPS là et
l'application pour téléphones mobiles intelligents que vous avez pour la région
de Québec. J'aimerais ça que les gens puissent savoir qu'effectivement,
dans l'industrie du taxi légal, il y a aussi des avancées technologiques.
J'aimerais ça que vous nous les présentiez.
M. Nadji
(Hamid) : Oui, l'application GPS, elle existait, elle existe. C'est le
système de répartition par appel... L'appel, il ne vient pas via le
téléphone. Une tablette électronique reçoit les appels par des intermédiaires,
et c'est les intermédiaires qui dispatchent
ça. Ça, c'est une nouveauté qui est donc là, et ça explique la transition de
l'ancien système de radio, l'ancienne
onde, au système électronique. Nous sommes dans le fonctionnement dans ce sens.
Et pour plus de détails, je passe la parole à M. le président de la
compagnie, qui ajoute sur ce point.
M. Berouel
(Hicham) : Oui, bon, le système de GPS existe déjà depuis plusieurs
années ici, au Québec. À Québec, en
particulier, la ville de Québec, on était parmi les premiers à l'utiliser.
Plusieurs intermédiaires ici, ils ont opté pour ce système, parce que l'avantage, ce n'est pas
seulement le fait que le client n'a plus le son dans le véhicule de la radio,
qui se... entendre le «dispatch» parler, mais aussi la simplicité de... le
confort du travail du chauffeur. C'est-à-dire, il y a des tablettes qui sont sur le véhicule, sur laquelle
ils reçoivent déjà l'adresse avec le nom du client, et il peut
utiliser aussi le système de GPS Google Maps sur la même tablette
pour se rediriger, pour faire une recherche. Exemple, si un client demande au chauffeur un hôtel qu'il ne connaît
pas, il a la possibilité de chercher sur Google Maps, il a tous les
moyens qui vont l'aider pour offrir un bon service. Aussi, ce système, il
permet de localiser tous les véhicules par GPS. Donc, la centrale, ils peuvent savoir tous les véhicules,
où est-ce qu'ils sont, et ainsi envoyer les véhicules les plus
proches. Ça aussi, ça aide pour ne pas faire de kilométrage mort, pour
ce qui est des taxis.
Pour l'application, l'application mobile, c'est une particularité, comme je vous ai
dit ici, à la ville de Québec. On comprend
que la force des concurrents comme Uber, bien, c'est une application partout dans le monde. C'est ça, sa force. Mais ici, à Québec, on a été capables
d'offrir une seule application pour toute la clientèle. Que ce soit à la Rive-Sud ou à la Rive-Nord,
le client n'a pas besoin de dire : Ah! est-ce que je suis dans
l'agglomération de Sainte-Foy ou l'agglomération de Charlesbourg? pour choisir l'application qui va avec tel territoire ou celui-là. On a
été capables de regrouper tous les intermédiaires
et les territoires dans une même application. Et ainsi le client peut demander le taxi via l'application, il peut voir le taxi, le
numéro de taxi qui vient le chercher, combien de temps ça va
prendre, etc. Et ici, c'était l'initiative de la compagnie
coop 5191. Puis il y a une possibilité, ils sont en train de proposer ça aussi à
l'échelle provinciale s'il y a
d'autres compagnies. Il y a
d'autres compagnies, il y a Chicoutimi qui l'utilise actuellement, mais à Montréal
il y en a aussi qui sont ouverts à utiliser ça. Donc, s'il y en a, une application, aussi, qui regroupe toute la province, ça va avoir encore plus
de force, c'est plus facile pour le client
de l'utiliser. Mais c'est la même technologie. Ce n'est pas vraiment quelque chose de sorcier que les
concurrents illégaux sont venus avec, c'est une application que nous avons déjà
et que plusieurs ont développée. Puis le client, il est vraiment satisfait,
surtout les clientèles jeunes, ils sont satisfaits d'utiliser cette
application. Ils n'ont pas besoin d'appeler et d'attendre sur la ligne
téléphonique, ils sortent un numéro de téléphone puis ils commandent avec un
seul clic, puis le service se fait.
Mme
Ouellet : Vous êtes en train de me dire que, dans le fond,
les plateformes technologiques en arrière desquelles se cachent Uber, bien, vous les avez déjà, et
elles sont déjà fonctionnelles, à peu près équivalentes de ce qu'Uber
offre, en toute légalité.
M. Berouel
(Hicham) : Exactement. C'est en toute légalité, mais on n'est pas
capables, nous, de baisser, par exemple, les tarifs...
Mme
Ouellet :
Non.
M.
Berouel (Hicham) : ...ou de ne pas charger les taxes sur les tarifs.
On n'est pas capables aussi d'augmenter les tarifs selon les heures de pointe, il y a trop d'achalandage; on est
régi par des lois. Et je comprends que ces lois-là sont là pour protéger plus la clientèle que pour protéger
les taxis. En protégeant la clientèle, le client est satisfait, puis ainsi
la pérennité du service de taxi, elle va continuer.
Mme
Ouellet : Ça fait que vous me dites que, dans le fond, UberX
ne respecte pas les tarifs fixés par la Commission des transports du
Québec.
M. Berouel
(Hicham) : Effectivement. Pour ce qui est des taxis, il y a une
audience annuelle que tous les citoyens sont
invités à venir et donner leur point de vue, s'ils pensent que le taxi est trop
cher, peuvent venir et donner leur
point de vue. Les taxis aussi et les chauffeurs peuvent venir et dire qu'on
pense qu'on est sous-payés ou on pense... Dernièrement, la dernière consultation, la Commission des transports a
proposé une augmentation, mais l'industrie du taxi a refusé. On s'est dit : Non, dans le temps actuel, on pense
qu'avec la récession, et tout, on va faire une concession, on ne va pas accepter l'augmentation, on va la reporter
peut-être à une autre fois. Mais, pour ce qui est d'Uber, il peut utiliser
tous les prix qu'il veut en suivant un... ils ont des algorithmes qui calculent
le prix selon l'offre et la demande, selon il y a combien de clients qui demandent des taxis versus combien de taxis sont
prêts à offrir le service, et c'est avec ça qu'ils calculent leurs tarifs. Une course qui coûte...
Exemple, une personne qui est habituée d'aller à l'hôpital et qui paie
20 $, ça se peut, une journée, le
matin, une journée de tempête, elle se réveille puis, pour prendre un Uber, ça
va lui coûter 200 $, parce qu'il n'y a pas de voiture qui offre ce
service. Donc, c'est ça la différence pour ce qui est de la tarification.
• (15 h 40) •
Mme
Ouellet : Puis, si j'ai bien compris, UberX fixe les tarifs
au départ, et je pense que vous, vous êtes obligé d'avoir les tarifs en
fonction du kilométrage et du temps, tel qu'indiqué par la Commission des
transports du Québec. Est-ce que c'est exact?
M.
Berouel (Hicham) : Nous, effectivement, c'est le tarif qui est fixé
par le ministère des Transports, c'est le kilométrage et le temps plus un tarif de départ. Pour ce qui est d'Uber,
c'est variable. Ils affichent un prix pour faire de la publicité qu'il est moins cher, un prix de départ,
mais il n'est pas tout le temps moins cher. Pour les petites courses,
c'est beaucoup plus cher que le taxi, c'est sûr.
Le système dans les taxis, lorsque le véhicule est
en mouvement, en haut d'un certain nombre de kilométrage — si je
ne me trompe pas, 10 kilomètres à l'heure — c'est seulement le kilométrage qui compte. Le
temps ne compte pas. Par contre, le
compteur d'Uber, d'après ce que nous avons su, le temps se calcule tout le
temps, malgré que le véhicule est en mouvement.
C'est pour ça qu'il y a des journalistes qui ont fait un test en comparant des
taxis et des Uber, et ils ont vu que le taxi est souvent moins cher,
pour les courses en bas de 12 $, qu'un Uber, par exemple.
M.
Nadji (Hamid) : Est-ce que je peux ajouter quelque chose vis-à-vis de
votre question, qui est... Le problème qu'on
est contre le progrès, ce n'est pas vrai. C'est que nous, avant de faire quoi
que ce soit... on ne peut pas adopter une nouvelle technologie si on n'a pas l'approbation de la Commission des
transports. Et, comme il l'a dit, M. le ministre, hier, le changement dans la loi, il est très
lourd, le mécanisme, il est très lourd. Et nous-mêmes, on ne peut pas
adopter ou bien épouser une nouvelle
technologie sans qu'on puisse avoir l'approbation, parce que c'est une flotte
très importante. Donc, c'est pour ça qu'on a ce retard dans les choses.
Et
il y a beaucoup de choses pour lesquelles nous sommes en train de penser pour
le moment, et on a beaucoup d'exemples, mais on ne pourra jamais les
adopter tant qu'il n'y a pas l'approbation de la Commission des transports. C'est une autre étape, qu'il faut tenir compte que
ça fait partie des choses qui freinent l'avancement des compagnies qui
veulent respecter les lois.
Le Président (M.
Reid) : Il reste une minute, si vous avez encore des
commentaires.
Mme
Ouellet : Bien, il me reste une minute. Donc, je ne sais pas
si vous avez des commentaires supplémentaires à faire ou des
recommandations supplémentaires à nous faire.
M. Nadji
(Hamid) : Parmi nos recommandations, c'est qu'il y a un stress énorme
au niveau de cette industrie, et c'est
pour ça que vous avez commencé à voir des petites manifestations qui vous font
appel que cette industrie demande de l'aide énormément. Et les méthodes
existantes des contrôleurs routiers sont vraiment insuffisantes. Et on demande
de considérer cette industrie comme vos
enfants, et vous devez les protéger à la source, pas en traitant les symptômes
de la maladie, et l'unique moyen,
c'est l'intervention du gouvernement, d'agir dans ce sens par l'augmentation
des amendes, le retrait des permis
des gens qui participent dans cette illégalité et même s'il faut arriver à
l'arrêt complet de cette application au niveau... que ce soit provincial
ou bien national.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Alors, nous allons passer
maintenant au deuxième groupe d'opposition, et je passe la parole au
député de Groulx.
M. Surprenant : Merci, M. le
Président. Alors, messieurs, bonjour, bienvenue parmi nous. Tout d'abord, je voudrais vous féliciter pour les avancées
technologiques, là... innovantes, plutôt, que vous avez faites au cours des 10
dernières années, telles que ma collègue, là, a citées tantôt. Je trouve ça
important. Souvent, on a l'impression que l'industrie traditionnelle du taxi
n'a pas fait grand-chose et est restée un peu un dinosaure. Mais, contrairement
aux prétentions que... aux perceptions qu'on
pouvait avoir... Je lis, dans votre mémoire, qu'effectivement il y a plusieurs
choses que vous avez faites au niveau des avancées technologiques, dont, entre
autres, au niveau du GPS.
Maintenant, pour faire face à la compétition...
En fait, nous, on encourage évidemment de la compétition, on favorise l'innovation, mais on veut s'assurer
quand même que tout le monde fonctionne en toute légalité. On évaluera
au niveau de la légalité tantôt.
Mais, au
niveau de l'innovation ou des avancées, au niveau de la voiture électrique, on
a eu un groupe qui est venu hier puis
qui parle de faire quelque chose au niveau de l'électrification de l'industrie
du taxi. Il peut y avoir un impact important
sur les revenus des chauffeurs de taxi parce que le coût de l'essence, donc, le
coût du carburant va être moins élevé.
Et puis donc comment vous voyez ça, en ce qui vous concerne, pour vous rendre
plus compétitifs au niveau, là, de vos coûts puis de permettre aux
chauffeurs d'avoir des revenus décents ou, sinon, plus élevés?
M. Nadji
(Hamid) : En ce qui concerne ce point, je pense que la Commission des
transports, via le ministère... Je ne
sais pas si vous le savez ou non, c'est que le ministère, il ne peut pas donner
un permis dans une zone d'une façon... suite à une simple demande. Il a un quota réservé pour chaque membre de
population. C'est comme le phénomène de député. Chaque membre de population, c'est un député, donc chaque membre de
population, ils ont un permis attribué pour le besoin de transport, etc. Donc, si un nouveau opérateur arrive, qu'il
soit le bienvenu, il faut être ouvert à tout, mais il faut qu'il
s'intègre dans le moule des lois déjà existantes. Le moule déjà il est là, il
faut qu'il respecte le quota ministériel. Premièrement,
il faut qu'il s'intègre dans ça parce que, le ministère, jusqu'à maintenant, il
a des quotas dans chaque zone. Tu ne peux pas venir lui dire :
Donnez-moi un autre permis en dehors du quota attribué. Donc, la demande, elle
doit s'intégrer dans ces quotas qui sont
déjà attribués par le ministère. Donc, il ne va pas influencer dans ce sens.
Et, concernant les prix, ce n'est pas
à lui de fixer les prix, les prix devant être fixés, comme ça se passe
maintenant, par la Commission des
transports. Maintenant, lui, ça va lui revenir à un coût moins élevé concernant
son utilisation de carburant, etc., mais les tarifs devront être fixés
comme toujours par la Commission des transports.
M. Berouel
(Hicham) : Pour ce qui est des revenus des ces chauffeurs, est-ce
qu'ils vont augmenter si on adopte des
véhicules électriques? Oui, c'est possible, mais à condition que les coûts
fixes ou les coûts d'opération diminuent. Le modèle, je l'ai su un peu dans le congrès dernièrement, le projet de
Taxelco, qui ont présenté hier, ici, devant vous, leur projet, comme quoi leur projet prévoit de baisser
les coûts d'opération, donc ils vont permettre d'augmenter les salaires des chauffeurs. C'est possible, puis je pense que,
pour nous aussi actuellement on est capables de le faire si nous avons
les mêmes moyens. Si actuellement le
gouvernement puisse m'accorder, moi personnellement, une subvention de
20 % tel qu'il est accordé à
Taxelco pour acheter un véhicule électrique et d'avoir des bornes de recharge,
je suis intéressé, oui, à changer mon
véhicule que j'ai actuellement, qui est hybride, pour un véhicule totalement
électrique. Oui, je suis ouvert à ça,
ça pourrait m'aider à garder les chauffeurs qui travaillent pour moi en augmentant
leurs salaires, puis ça va permettre aussi à redorer l'image de
l'industrie.
M.
Surprenant : Je vous écoute puis vous dites que pourriez tout ça, mais
ça ne semble pas être une direction précise
que vous voulez prendre. Quand on parle, là, de l'article 11, on parle, encore
là, de Taxelco, qui pourrait peut-être venir
tester des choses un peu. Mais je pense que vraisemblablement on s'en va vers
l'électrification des transports, et donc,
si un le part et que vous, vous ne le faites pas en même temps, mais vous êtes
là dans une situation éventuellement concurrentielle
difficile. Alors donc, ma question était tantôt : Qu'est-ce que vous
entendez faire pour vous assurer d'être compétitifs pour vous, pour vos chauffeurs, en regardant des projets
comme celui-là de Taxelco, dont peu de gens nient la légalité alors?
M. Nadji
(Hamid) : C'est tout à fait normal, il faut suivre le changement,
mais, le changement, il faut qu'il soit
équitable. On ne peut pas donner trop d'avantages à un projet pour lui donner
toute les pulsations de réussir et priver un autre, c'est-à-dire les mêmes avantages qui vont être donnés à des
sociétés pareilles, on les donne aux sociétés ou bien aux
compagnies existantes si comme ça ils veulent adopter, ou bien il y a des gens
qui veulent l'adopter, mais je dis qu'on est
freinés par la loi dans pas mal de choses. Il y a des gens qui veulent adopter.
Si les mêmes avantages seront donnés des
deux côtés, que ça soit à un nouveau opérateur ou bien aux anciens, je pense
que les gens, ils vont épouser la situation la plus rentable, même s'ils
sont en dehors des nouveaux opérateurs.
M. Berouel
(Hicham) : Pour ce qui est véhicules électriques, actuellement, à
Sainte-Foy, il y a un véhicule électrique,
une Tesla, puis moi, j'ai eu l'occasion de lui parler. Le problème, pour lui,
c'est surtout les bornes de recharge. S'il
y avait un grand réseau de bornes de recharge rapide, ce que je dis «rapide»,
c'est-à-dire une recharge rapide en moins de 30 minutes, s'il y avait un réseau déjà existant, beaucoup de
taxis, et je suis sûr qu'ils vont prendre l'initiative d'investir
eux-mêmes sans peut-être avoir même besoin d'une subvention ou quoi que ce
soit, dans ce mode de transport parce qu'ils
économisent beaucoup sur le carburant. C'est la seule chose qui peut-être
bloque les chauffeurs de faire ce virage, parce que c'est un calcul qu'ils font... On fait des calculs :
Est-ce que c'est plus rentable de garder un véhicule à essence ou
d'avoir un véhicule électrique? Donc, c'est ça.
M.
Surprenant : Maintenant, dans le même paragraphe, on parle, là, de
vous seriez ouverts en cas où l'installation des caméras et
l'uniformisation de la couleur des véhicules, et il y a autre chose. Mais, au
niveau de la couleur des véhicules, on
entend que Taxelco, entre autres, veut avoir une couleur uniforme au niveau des
véhicules. Puis, si vous voulez...
vous dites que vous seriez ouverts à ça, puis vous voulez peut-être donner une
image. Pourquoi ne le faites-vous pas
maintenant, uniformiser la couleur des véhicules, pour vous donner une image?
Pourquoi vous attendez d'être forcés de faire des choses?
• (15 h 50) •
M. Berouel
(Hicham) : Oui. Pour la couleur des véhicules, bien sûr, ça prend le consentement
de tous les propriétaires de taxi. Moi, personnellement, quand j'ai fait cet exercice-là avec les propriétaires de taxi, il y en a plusieurs qui utilisent leur
véhicule comme véhicule personnel. Donc, il est le seul, il est propriétaire,
chauffeur de taxi, puis il utilise,
lorsqu'il finit son chiffre de travail, normalement, il enlève le dôme du taxi
puis il utilise ce véhicule comme voiture personnelle pour aller
chercher ses enfants, etc. Et c'est souvent ces personnes-là qui ne veulent pas
vraiment que le taxi soit vraiment identifié
«taxi» ou une couleur spécifique. Mais je vous dis que sérieusement on a commencé à penser à ça, peut-être,
premièrement, pas d'avoir une couleur uniforme pour commencer,
mais d'avoir seulement une identification, que ce soit un trait qui est vu de loin, comme des
carreaux, quelque chose pour identifier le taxi de loin. Ça, on a
commencé à penser à ça, mais ce n'est pas encore en vigueur.
M.
Surprenant : Je vais revenir
au niveau des tarifs que vous avez parlé tantôt,
là, Uber le fait en fonction de l'achalandage,
ce n'est pas conforme à la réglementation actuelle. Mais, dans une perspective
où il y aurait une ouverture au niveau de la modification,
là, des règles, et puis qu'actuellement, si les gens vont sur Uber, c'est parce
qu'ils aiment peut-être ça avoir cette
modulation des tarifs là, seriez-vous ouverts à une modulation des tarifs?
Est-ce que vous pensez que ce serait une belle façon... ce serait une
façon intéressante d'orienter l'industrie?
M. Nadji
(Hamid) : Oui, on est ouvert à la modification des tarifs, mais il
faut que vous aurez une vision d'ouverture
de modification dans tous les sens, pas à sens unique. La preuve,
comme vient de dire mon collègue, l'année passée, au niveau de la Commission
des transports, l'industrie, elle-même, elle s'est opposée à ça malgré qu'on
est convaincus que nous méritons l'inverse.
Dans toutes les professions, il y
a un minimum d'augmentation en fonction de l'inflation,
autour de 2 % par année. On a
accepté de se sacrifier vis-à-vis de la situation actuelle provisoirement,
sans parler de d'autres cas qui sont encore plus flagrants, parce que cette
industrie, elle a besoin de se revaloriser. Déjà, jusqu'à maintenant et en date
d'aujourd'hui, dans toutes les fonctions sans exception, si, chez vous, vous
avez un plombier qui va arriver la nuit, il
va vous facturer autrement, alors que, nous, la tarification est toujours la
même. Et non seulement ça, l'année
passée, on était contre l'augmentation, sans parler de la tarification de nuit,
parce que ça, c'est un facteur, c'est un coefficient spécial, et, dans
le monde entier, on tient compte de ça.
Donc,
nous sommes plus ouverts que la... c'est-à-dire, nous sommes en train de payer
pour la situation actuelle vis-à-vis
de laquelle on n'arrive pas à se défendre. En ayant cette ouverture, on ne
demande pas le droit... malgré qu'on est convaincus qu'on mérite plus,
et on se sacrifie pour le moment dans ce sens pour qu'on puisse gérer le
problème.
Le
Président (M. Reid) : Merci, c'est le temps que nous avions.
Alors, M. Nadji, M. Berouel, merci pour votre participation à nos
travaux.
Je suspends la séance
quelques instants pour permettre à nos prochains invités de prendre place.
(Suspension de la séance à 15
h 53)
(Reprise à 15 h 55)
Le Président (M.
Reid) : Alors, nous allons reprendre nos travaux. Je souhaite
la bienvenue à nos invités. Nous recevons maintenant
la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec.
Alors, je vous demande, évidemment, au
début de votre présentation, de vous présenter, même si on vous connaît, et de
présenter les gens qui vous accompagnent. Et je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre exposé, à la suite de quoi nous aurons
un échange avec les membres de la commission. Alors, à vous la parole.
Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec (FTQ)
M. Boyer
(Daniel) : Bien, d'abord,
merci. J'aimerais remercier les membres de la Commission des transports et de l'environnement de nous recevoir pour entendre nos
recommandations et nos suggestions sur le projet de loi n° 38.
Je me présente... n° 36, c'est-à-dire.
Je me
présente, Daniel Boyer, président de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec. La FTQ, c'est la plus importante centrale syndicale au Québec, c'est 600 000 membres, oeuvre dans toutes les
régions du Québec et dans tous les secteurs d'économie. Je suis
accompagné de Colin L'Ériger, du service de la recherche de la FTQ, et de Benoît Jugand, responsable du développement
stratégique et affaires publiques du haut Regroupement des travailleurs autonomes Métallos. Le RTAM représente près de
5 000 travailleurs autonomes issus principalement de l'industrie
du taxi, mais aussi du camionnage et
l'immobilier. Ce regroupement intervient régulièrement sur les enjeux
économiques et sociaux ainsi que sur des projets de politiques publiques liées
à l'amélioration des professions. Aujourd'hui, vous comprendrez, si vous avez eu la chance de regarder le mémoire — est-ce qu'on l'a fait parvenir? Non,
peut-être, oui?
Une voix : Plutôt tard.
M. Boyer
(Daniel) : Plutôt tard — on s'est attardés aux dispositions
concernant l'industrie du taxi. En ce qui a trait aux dispositions
concernant l'ensemble du transport collectif et entre autres des sociétés de
transport public, le Syndicat canadien de la
fonction publique, le SCFP, qui est aussi affilié à la FTQ, devrait vous faire
parvenir, là, leurs commentaires.
Un mot
d'abord sur l'industrie du taxi. Cette industrie emploie, bon an, mal an,
18 000 personnes au Québec. Si cela était une seule et même entreprise, ce serait le cinquième plus gros
employeur au Québec. Il importe donc de protéger des emplois qui font vivre beaucoup de familles
québécoises et de s'assurer que l'État du Québec perçoive sa juste part
de redevances et de retombées économiques.
Maintenant,
en ce qui a trait au projet de loi n° 36, nous croyons que des
modifications importantes doivent être apportées, et ce,
particulièrement pour l'instauration de projets pilotes dans le transport
rémunéré de personnes. Nous sommes
extrêmement inquiets par l'arrivée de ces projets pilotes. Et là ce n'est pas
qu'on est contre des projets pilotes qui visent l'amélioration des services de taxi, mais on est inquiets parce
que... On est favorables aux innovations technologiques, leur
introduction doit s'effectuer de concert avec tous les acteurs de l'industrie
du taxi et dans le respect de nos lois existantes, puis on espère que la
commission tiendra compte de nos recommandations et de nos suggestions visant à
améliorer le projet de loi n° 36.
Pour la FTQ,
la concertation et le dialogue social sont très importants dans une société
démocratique comme la nôtre. Le
gouvernement ne semble malheureusement pas toujours de notre avis. Le projet de
loi n° 36 s'inscrit dans cette tendance
que depuis longtemps nous déplorons. En effet, rien dans le projet de loi
n'assure que la Table de concertation de l'industrie du transport par
taxi sera consultée et qu'elle continuera de jouer son rôle-conseil auprès du
ministre des Transports pour la mise sur
pied de projets pilotes. Le projet de loi ne donne aucune assurance aux acteurs
de l'industrie et aux membres de
cette table de concertation contre toute décision arbitraire ou unilatérale des
ministres successifs. C'est pourquoi
nous demandons à ce que la table de concertation puisse pleinement jouer son
rôle-conseil pour la mise sur pied de projets-pilotes en transport
rémunéré de personnes.
Aussi, nous
sommes préoccupés par l'instauration du deux poids, deux mesures dans
l'industrie du taxi. Dans sa forme
actuelle, le projet de loi va permettre aux projets pilotes de fonctionner à
l'extérieur du cadre législatif en place. Alors que les acteurs de
l'industrie du taxi sont tenus de respecter à la lettre les lois et règlements,
on verrait émerger les projets pilotes qui n'auraient pas de telles
obligations. Cela ouvre donc la porte à une réglementation à deux vitesses.
Rappelons au
ministre que les lois et règlements qui encadrent l'industrie du taxi
conservent toute leur pertinence. Si
des tarifs uniformes existent, c'est dans le but de concilier l'intérêt du
consommateur et du chauffeur de taxi. Si le Québec s'est doté de normes de sécurité, d'entretien et
de formation sur tout son territoire, c'est pour assurer la sécurité des
usagers et la confiance du public. Si le souhait de tous est que l'industrie
retrouve paix et stabilité, l'instauration d'un régime à deux vitesses est un
pensez-y-bien.
• (16 heures) •
Et j'ajouterais, M. le ministre, parce que je
vous ai entendu tantôt, concernant la problématique d'UberX, mais je parle d'UberX, mais je pourrais parler de
toute autre tentative d'offrir du
transport par taxi de façon illégale, on pense qu'on devrait avoir des
amendes plus salées concernant les infractions aux dispositions légales.
Afin de protéger les emplois pour justement
dissuader toute entreprise ou tout individu qui voudrait agir dans l'illégalité... afin de protéger les emplois
actuels, nous estimons que le ministre
des Transports doit porter une
attention particulière aux dangers de
multiplication du nombre de véhicules pouvant offrir du transport rémunéré de
personnes par taxi. Rappelons que les
chauffeurs et les chauffeuses propriétaires doivent se procurer les permis à
fort prix, bien souvent autour de 200 000 $. Une installation
de tels projets pilotes ne doit en aucun cas mettre en péril le gagne-pain des chauffeurs et des chauffeuses de taxi ou les
économies de toute une vie en faisant diminuer la valeur des permis.
Plusieurs questions restent en suspens et
nous croyons qu'il faudrait davantage de précisions quant aux modalités de ces
projets pilotes, rappelons qu'il est du
devoir de l'État québécois, comme arbitre du jeu économique, de concilier
innovation et protection de l'emploi ainsi que création d'emplois et
respect de la loi. Je cède la parole à Benoît.
M.
Jugand (Benoît) : Merci. En matière de tarification, nous croyons
qu'il faut faire preuve de prudence. Au Québec,
c'est la Commission des transports du Québec qui est responsable de
fixer le prix des courses de taxi pour tout le Québec. Est-ce que les projets pilotes seront tenus de respecter cette grille tarifaire? Uber
opère selon une structure de prix
dynamiques aussi connue sous le nom de «surge pricing». Les tarifs varient donc
en fonction de plusieurs paramètres ou circonstances, ce qui menace à la
fois le modèle tarifaire établi par la CTQ et pose plusieurs risques
économiques. Avec les projets pilotes, est-ce que le ministre va laisser à
l'entreprise privée la possibilité de fixer la tarification, et ce, au quotidien ou selon les circonstances, alors
qu'une réglementation sur la tarification existe déjà? En effet, en
laissant le marché complètement libre, on ouvre la porte à plusieurs abus; par
exemple, les tarifs d'Uber ont fortement augmenté lors des attentats
terroristes à Sydney, en Australie, et lors du passage de l'ouragan Sandy.
Est-ce que le
ministre prévoit des mécanismes afin de protéger les consommateurs contre la
spéculation des prix? Par exemple, quel type
de protection sera offerte dans les cas où les chauffeurs d'un projet pilote
enregistré sur un territoire donné
décident de fermer leurs applications mobiles, le temps de faire monter les
prix dynamiques, jusqu'à ce qu'ils
décident de reprendre des passagers, par exemple aux heures de pointe. Si le
gouvernement du Québec va de l'avant avec
de tels projets pilotes, la structure tarifaire nécessitera une réglementation
rigoureuse à la fois pour protéger les emplois existants contre une concurrence déloyale et pour protéger la clientèle
contre la spéculation circonstancielle de tels prix.
Nous
sommes très inquiets de l'impact d'Uber sur la sécurité et des usagers et des
usagères. Afin d'éviter le plus possible des situations pouvant avoir
des conséquences graves, il faut appliquer les mêmes normes que l'on retrouve déjà dans l'industrie du taxi. La FTQ et le RTAM
recommandent donc que seuls les chauffeurs ayant rempli les exigences de formation prévues à la Loi concernant les
services de transport par taxi et possédant un permis de conduire avec
une classe 4C de même qu'un permis de travail dûment délivré par la Société de
l'assurance automobile du Québec ou du Bureau du taxi de Montréal puissent
poser leur candidature dans de tels projets pilotes.
Pour
terminer, il apparaît important de sonner l'alarme concernant la protection des
données personnelles et de la vie
privée. Avec la plus récente mise à jour de l'application, Uber peut connaître
la position géographique d'une personne, peu importe si l'application fonctionne en arrière-plan ou au premier
plan. Pour nous, la protection des renseignements personnels et de la vie privée constitue une
préoccupation majeure. C'est pourquoi nous recommandons que les
entreprises souhaitant déposer un projet pilote soient soumises à un processus
de sélection rigoureux tenant entre autres compte du respect de la vie privée
et de la protection des données personnelles des citoyens du Québec. Merci
beaucoup.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Alors, nous allons procéder
maintenant à la période d'Échange. M. le ministre, vous avez la parole.
M. Poëti :
Merci, M. le Président. Bien écoutez, c'est sûr que chaque groupe qui vient
n'est pas tenu d'avoir entendu le groupe
précédent puis de ne pas avoir suivi l'ensemble de la commission, puis je le
convient facilement, alors je vais le
répéter encore une fois : D'aucune façon, il n'était, et il est, et il
sera de l'intention du ministère d'utiliser un projet pilote pour légaliser quelque chose d'illégal. Pour moi, ça va de
soi, mais je comprends qu'il y a une perception, il y a des inquiétudes face à
ça, alors je veux vous rassurer là-dessus.
D'aucune façon on ne veut aller là et d'aucune façon je ne permettrais
ça. L'autre chose que je vais vous dire, c'est que, depuis le jour 1 de la
première question que j'ai eue sur UberX, j'ai été clair et je n'ai jamais
modulé, modifié ou diminué mon opposition au transport illégal.
Alors,
maintenant, de quelle façon faire pour éviter que ça se produise? Tantôt, j'ai
entendu que, s'il y avait des grosses
amendes, on réglerait l'affaire. Il y a un code criminel au Québec, qui est à
peu près ça d'épais, et puis il y a des sentences à vie, c'est 25 ans. Il y a encore des bandits. Alors, je veux
juste vous dire qu'il faut peut-être... vous savez, la répression peut, dans plusieurs cas, être une
solution téméraire, mais la prévention peut être aussi une bonne façon de
le faire, et la qualité du service offert par nos chauffeurs de taxi est aussi
importante.
Et, vu que vous avez
soulevé que vous représentez — et dites-moi si je me trompe — une
bonne partie des indépendants...
Une voix :
...
M. Poëti :
Des indépendants?
M. Boyer
(Daniel) : Chauffeurs, chauffeuses, pas nécessairement indépendants.
M. Poëti :
O.K. Parce que ce qu'on entend souvent des organismes très structurés, comme
ceux qui vous ont précédé, ils ont des
règles, des règlements, ils ont un suivi de leurs chauffeurs, formation,
encadrement. Puis on dit : Bien, les
mauvais, c'est les indépendants. Tu sais, c'est ce qu'on... je ne vous dis pas
que c'est ça, ce que je vous dis, c'est ce qu'on nous rapporte : les mauvais, c'est des indépendants. Il y a
des cas, là, récents, là, sans les personnaliser, là... la semaine dernière, là, des affaires inconcevables qui se
sont produites avec un chauffeur de taxi. Ah! mais c'est un indépendant.
Alors, vous avez
raison de dire que, si l'ensemble des chauffeurs de taxi des organismes, du
regroupement... je pense qu'on a tous
intérêt à s'asseoir ensemble pour pouvoir être plus forts. Et j'ai
demandé — et je
l'ai dit, c'est une discussion que
j'avais eue avec le député de Mercier — pour avoir une table pour s'asseoir avec
tout le monde ensemble, puis regarder
de quelle façon on peut offrir davantage de services. Puis, pour contrer
l'illégalité, bien, nous, on fait notre travail puis on va continuer de
le faire, soyez assurés de ça.
Le Président (M.
Reid) : Allez-y.
M. Boyer (Daniel) : Si je peux me
permettre, écoutez, M. le ministre, j'apprécie que vous me dites que vous n'irez pas de l'avant avec des projets qui sont
illégaux, ce serait un peu fou que vous me disiez le contraire, mais on
est inquiets. On est
inquiets parce qu'il ne faut pas de contenter de dire qu'UberX est à l'échelle
planétaire puis qu'il y a plein de
pays qui ne savent pas quoi faire avec. On pense qu'il faut agir. On pense
qu'il faut agir, mettre notre pied à terre. Si c'est illégal, c'est
illégal. Donc, on se doit de combattre cette illégalité-là.
Écoutez, vous
me parlez d'UberX, mais, en même temps, notre inquiétude concernant un projet
pilote, elle va plus loin que ça. Même si le projet est légal, puis je
suppose qu'il va être légal, puisque c'est vous qui allez le mettre en application, notre inquiétude va plus loin que ça.
On peut comprendre que, si c'est vous qui le mettez en application, que vous allez avoir un souci de la qualité des
services à la population, vous allez avoir un souci de santé puis de sécurité
de la population. Ça, on sait ça. Mais il ne
faut pas aussi que ça ait pour effet de diminuer les conditions de travail des
chauffeurs et des chauffeuses, il ne faut
pas que ça constitue aussi une concurrence déloyale, il ne faut pas que ça ait
un effet sur une augmentation, qui n'a pas de bon sens, des prix non
plus, il faut qu'il y ait un certain contrôle des prix, et il ne faut pas non
plus que ça ait un effet sur une diminution de la valeur des permis.
Écoutez, il y a du monde, ils investissent leurs
vies en achetant un permis, ces chauffeurs de taxi là, tu dis, 200 000 $... j'en ai vu, même à
Montréal, à 230 000 $, là. Écoutez, c'est le prix d'une maison. C'est
le prix d'une maison. Donc, quand on
investit pour travailler à ce point-là, il ne faudrait pas que notre permis
perde la moitié de sa valeur le lendemain
matin parce qu'on a introduit des projets pilotes pour essayer des nouvelles
affaires. On est très ouverts à essayer de nouvelles affaires, mais il
faut tenir compte de certains... il y a des acteurs dans le milieu et il faut
tenir compte qu'il y a des emplois, des enjeux, du monde qui ont investi dans
le taxi.
• (16 h 10) •
M. Poëti : Oui, j'entends ce
que vous dites et je le reçois, mais, en même temps, ça ne doit pas empêcher
les chauffeurs de taxi de suivre l'évolution de la demande, de suivre
l'évolution de la société, de suivre l'évolution de la technologie, de suivre l'évolution du marketing relié, si vous me
permettez à ça, mais surtout de la qualité du service qui est donné. Et il n'y a pas un organisme de taxi,
pas un, que j'ai rencontré qui ne m'ont pas dit qu'il fallait vraiment
que l'industrie se retrousse les manches,
qu'ils se repositionnent à bien des égards et qu'ils avaient du travail à
faire. Ils ont été honnêtes,
critiques envers eux-mêmes, et je pense que... Je ne pense pas que c'est une
bonne affaire du tout ce qui se passe actuellement.
Mais, si ça aura permis aux chauffeurs de taxi de dire : Là, nous, on va se prendre en main puis on va prouver
aux citoyens du Québec que c'est nous, les meilleurs, bien, il y aura quelque chose. Mais je pense toujours qu'on fait notre partie légale, c'est-à-dire qu'on saisit des véhicules à tous les jours, que
l'amende qui est donnée est là, alors... puis ce côté-là.
Mais, pour le
bout du projet pilote, écoutez, je suis un peu surpris des hypothèses, là,
machiavéliques qu'un projet pilote pourrait avoir sur votre industrie,
là, ce n'est pas ça du tout qu'on veut faire, là. S'il y a une affaire, là,
c'est de protéger les citoyens
puis vos propres chauffeurs, là, que vous représentez. Si je voudrais installer
des caméras, il faut toujours
bien qu'on le fasse d'une certaine façon. Je vais-tu décréter que, par la loi, tout
le monde va en avoir? On va avoir l'opinion des chauffeurs, on doit savoir
comment ça se gère, on doit être capables d'avoir l'efficacité de ça.
Lorsqu'il y a un meurtre d'un chauffeur de taxi,
cinq minutes après, la première question que vous avez partout dans les médias : Pourquoi qu'ils ne sont pas
séparés d'avec l'arrière? On a ça à chaque fois qu'il y a un crime. Ça
me désole, parce que, quand la semaine
passe, la deuxième semaine, ce n'est plus la nouvelle, puis ça passe. Alors, si
on voulait l'essayer avec les
récriminations positives ou négatives... ça ne fait pas l'unanimité chez les
chauffeurs, ça, quand à Toronto tout
le monde en a. Alors, moi, ce que je dis : Est-ce qu'on pourrait faire un
projet pilote? Rien de méchant là-dedans, il n'y a pas rien qui va venir influencer le permis, il n'y a rien qui
influence... je n'ai pas l'intention de jouer, d'aucune façon, avec les taux qui sont organisés par la CTQ, je
veux dire... D'ailleurs, c'est une bonne nouvelle que ça soit comme ça. Donc, c'est égal et, s'il y a de la compétition,
bien il faut qu'elle soit loyale, pas déloyale, pire, illégale. Je veux vous
rassurer là-dessus. Je l'ai dit aux oppositions : On va travailler sur le
projet de loi pour vous rassurer à ce sujet-là.
Et moi, je ne
demande pas mieux d'avoir la collaboration de l'ensemble des organismes de taxi
et des syndicats qu'ils représentent
pour faire avancer davantage l'industrie du taxi au Québec puis leur permettre
à eux et permettre aux citoyens aussi d'avoir une amélioration du
service en toute sécurité.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Est-ce que vous voulez commenter, M. Boyer?
M. Boyer (Daniel) : Pour moi, ça va.
Benoît, tu veux-tu...
Le
Président (M. Reid) : Est-ce que j'ai d'autres... Oui? Est-ce
que j'ai d'autres interventions du côté ministériel? Alors, nous allons
passer maintenant du côté de l'opposition officielle, et je donne la parole à
la députée de Vachon.
Mme
Ouellet :
Oui, merci, M. le Président. Je regarde votre recommandation n° 1,
donc, demander que la table de concertation soit consultée. Est-ce
qu'elle a été consultée pour le projet de loi n° 36?
M. Jugand (Benoît) : Non. Le RTAM
est un des membres de la table de concertation. L'article 72.1 et l'article 72.2 prévoient que la table de
concertation du Québec recommande au ministre ou peut recommander
diverses possibilités au ministre. Et on a
eu, mercredi dernier, lors de la table de concertation, l'annonce du projet de
loi n° 36. On n'avait pas été
avisés à l'avance et je vous dirais que l'ensemble des membres de la table de
concertation se sont posé des questions, et de là la présence, entre
autres, du CPCDIT, qui est venu déposer, je crois, hier, et la présence du RTAM
aujourd'hui. On a beaucoup de questionnement et il n'y a pas de réponse.
Et,
en fait, il y a déjà un organe qui existe, qui est créé par le ministre, qui,
normalement, devrait ramener ces projets pilotes là à la table. En fait, c'est la recommandation qu'on fait,
c'est que l'ensemble de la clientèle... il y a des représentants des clientèles, des représentants de l'industrie
du taxi, il y a aussi les organisations réglementaires : Contrôle routier
est là, Bureau du taxi
de Montréal est là, on a des gens de la Société de l'assurance automobile du
Québec qui sont là, le MTQ est là.
Alors, pourquoi ne pas ramener ces idées projets pilotes là à la table de
concertation afin qu'on puisse au moins les commenter? Et ça n'empêche pas le fait que ces projets pourraient voir
le jour, mais, au moins, on pourrait les commenter. Puis ça nous permettrait également, en tant
qu'organisation qui représente l'ensemble des chauffeurs de taxi et
propriétaires du Québec, de ramener
l'information puis d'informer les membres également au lieu d'arriver puis
d'avoir la nouvelle dans les journaux.
Mme
Ouellet : Et,
selon vos connaissances, est-ce que,
par exemple, pour faire un projet pilote avec des caméras dans les
taxis, est-ce que ça prend un changement législatif ou ça serait possible de le
faire avec la loi actuelle?
M.
Jugand (Benoît) : Tout à fait. On peut y aller sans avoir un changement législatif. Dans une ancienne
vie, j'ai participé à une étude
internationale sur la différence entre les caméras de sécurité versus les
partitions, avec le NIOSH, le «national
institute of safety, of occupation and health» de Washington et... c'est ça, on
aurait pu implanter demain matin des caméras
de sécurité. Il n'y a rien qui l'empêche. Si la loi est muette, en
fait, il n'y a rien qui empêche d'introduire un projet.
On n'a pas besoin d'un décret ou d'un arrêté ministériel pour faire un projet
pilote.
Mme
Ouellet :
Donc, si je vous comprends bien, si on a une modification de la loi actuellement,
c'est pour permettre des choses que la loi ne permet pas actuellement?
M. Jugand
(Benoît) : Exactement. Le meilleur exemple : Taxelco. Taxelco, il
y a une volonté... On parle de véhicules
électriques. Est-ce que c'est une bonne idée? Le projet semble
hyperintéressant. On parle d'économie verte, ainsi de suite. Par contre, ce qu'il
y a en arrière de ça, c'est qu'on
demande aussi à lever des barrières concernant le nombre de permis : maximum 20 permis de taxi. On
sait que la volonté, si on lit un peu ce que M. Taillefer a présenté, sa
volonté, c'est d'avoir 4 000 permis de taxi à Montréal. On parle d'un
monopole à Montréal. Est-ce que c'est la volonté à long terme qu'on veut avoir? On va demander aux gens de
pouvoir louer leur permis. La location de permis, il y a beaucoup de
gens qui ont ambitionné de ça. Alors, un
beau projet comme celui de M. Taillefer et Taxelco pourrait se transformer en
un mauvais projet si ce n'est pas bien encadré et si on n'a pas les
bonnes personnes aux bonnes places pour au moins s'assurer qu'il y a des chiens
de garde qui viennent encadrer tout ça. Et ça, c'est un exemple.
Autre
question qu'on a, c'est : Qu'est-ce qui arrive si, demain matin, on fait
un copier-coller du projet de M.
Taillefer, on enlève deux, trois phrases, on enlève le nom en haut et on
présente nous-mêmes, RTAM ou une autre organisation
privée, le même projet? Est-ce qu'on va avoir droit aux mêmes possibilités? On
se pose la question. Il y a 80 millions, je crois, d'argents publics qui
vont être investis là-dedans pour un privé qui va venir déposer. Alors,
naturellement qu'on se pose des questions.
Mme
Ouellet : Donc, si je comprends bien, l'amendement au projet
de loi n° 36 qui vient modifier la Loi sur les taxis, c'est pour
rendre légal sur un projet pilote seulement ce qui serait illégal ailleurs que
dans le projet pilote?
M. Jugand
(Benoît) : Effectivement.
Mme
Ouellet : J'aimerais
ça, revenir sur UberX, parce que l'intervenant précédent en a parlé aussi. Parce qu'on sait, là, oui, on dit que c'est illégal, mais ça continue, ça
continue. Ça n'a même pas de l'air d'avoir ralenti, ça semble même être en croissance malgré, là, les saisies. Les
amendes, ça n'a pas d'effet. Qu'est-ce
que vous suggéreriez, vous, au
ministre qui soit réalisé? Vous parliez des
amendes. À quel niveau vous les mettriez? Puis est-ce qu'il y a d'autres
moyens que ces amendes-là que vous auriez à suggérer au ministre?
M.
Jugand (Benoît) : J'ai
participé à la mise en place d'une stratégie nord-américaine pour contrer
Uber avec l'ensemble des régulateurs de taxi.
M. Boyer
(Daniel) : Vous avez compris que c'est lui, le spécialiste en taxi,
puis ce n'est pas moi, hein?
M.
Jugand (Benoît) : Alors,
oui, il y a des stratégies qui peuvent être adoptées. M. le ministre a raison en disant
que, si on fait juste augmenter les amendes,
est-ce que ça va venir, dans le fond, contrer Uber? La réponse est non,
c'est un ensemble de facteurs qui va venir
contrer Uber. Entre autres, on parle de l'Agence de revenu du Québec, qui a
mené une perquisition.
On
a aussi le service à la clientèle. Ce
qu'il faut comprendre, c'est qu'une compagnie comme Uber a un créneau, a
un modèle d'affaires qui est important, mais ils sont centrés sur des gens qui
habitent le centre-ville, qui ont certains moyens,
qui ont une carte de crédit. Qu'est-ce
qui arrive avec des personnes qui n'ont pas de carte de crédit, qui font
partie d'une classe un peu plus pauvre ou
qui n'ont pas l'argent pour payer à l'avance leur course, qui sont à mobilité
réduite? Comment est-ce qu'on fait pour
venir protéger ces personnes-là? C'est toutes des questions qu'on a, et il faut
s'assurer que, s'il y a un projet pilote qui
est présenté, on tient compte des clientèles à mobilité réduite, des personnes
qui n'ont pas les moyens, qui n'ont
pas de carte de crédit pour faire en sorte que ça soit inclusif. Le droit
d'avoir un permis de taxi, c'est un privilège
que le gouvernement donne à quelqu'un pour exploiter un véhicule sur un
territoire donné. Mais ce privilège-là vient
avec des obligations. Les obligations, c'est le gouvernement qui fixe ces
obligations-là. S'il n'y a pas d'obligation, bien, à ce moment-là, on
peut critiquer vertement l'industrie du taxi de ne pas avoir de paiement
électronique à bord de tous ses véhicules, mais la loi ne prévoit pas que c'est
obligatoire.
Alors,
c'est sûr et certain qu'on peut avoir des chauffeurs qui vont exiger d'avoir de
l'argent comptant, et ça,
c'est une problématique. Ça ne veut pas dire que les gens de l'industrie du
taxi, les chauffeurs, les propriétaires ont raison. Il y a eu des avancées
technologiques qui ont été faites, mais, à un moment donné, il y a
un pas à faire aussi. Et on se fie aussi...
Si quelqu'un analyse la loi puis, si c'est écrit : Bien,
tu peux faire A, B, C, D, E, bien, c'est ce que les gens vont faire, ils
vont s'obliger envers ça.
Mme
Ouellet : Et est-ce
qu'il y a des choses de plus que ce qui se fait actuellement pour essayer de
bloquer UberX au Québec?
• (16 h 20) •
M. Jugand (Benoît) : Actuellement,
je ne pense pas. Je sais qu'il y a des saisies qui sont faites, je sais qu'il y a des
campagnes qui sont faites par différentes... il y a des sites qui
sensibilisent la population. Par contre, il n'y a pas de campagne
publicitaire, il n'y a absolument rien où on vient mentionner à la population :
Écoutez, là... La population trouve ça l'fun,
c'est cool, c'est une application, on pèse sur un piton puis on a un véhicule
qu'on pense qui est un taxi, mais
finalement ce n'est pas un taxi. Mais parce que ça ne nous touche pas, on s'en
fout. Il y a du monde en arrière de ça, là.
Alors, il y a
un travail, il y a une démarche à faire pour sensibiliser la population,
un peu comme l'ARQ l'a fait pour le
travail au noir. Auparavant, il y a eu des campagnes de publicité qui se sont faites
contre le travail au noir. Bien, je pense que ça a porté certains
fruits. Alors, pour l'industrie du taxi, il y a des choses qui peuvent être
faites également. Est-ce que tout est fait? La réponse est non.
Mme
Ouellet : Dans votre recommandation 2, donc, vous essayez
d'encadrer les projets-pilotes avec
des critères, que ce soient les
chauffeurs, là, qui remplissent les exigences de formation... possédant un
permis de conduire, une classe 4, de
même qu'un permis de travail dûment délivré par la Société d'assurance
automobile ou le Bureau du taxi. Quand vous parlez du permis de travail,
c'est ça, le permis du taxi?
M. Jugand (Benoît) : Oui.
Mme
Ouellet : O.K.
Donc, le 200 000 $, là, c'est ça?
M. Jugand (Benoît) : Non.
Mme
Ouellet : Non.
O.K. Et, est-ce que, dans ces éléments-là, vous ajoutez qu'ils détiennent le
permis de taxi aussi?
M. Jugand
(Benoît) : En fait, il y a deux choses. Il y a un permis, un privilège
pour exploiter un véhicule-taxi, c'est ce
qu'on appelle un permis de propriétaire de taxi. Ça, c'est ce qui coûte
200 000 $. C'est l'offre et la demande. Ensuite, pour conduire un véhicule taxi, on peut être un
propriétaire sans conduire son véhicule. Alors, pour conduire le
véhicule, c'est la Société de l'Assurance
automobile du Québec ou le Bureau du taxi de Montréal qui émet ce permis à un
chauffeur, là, et c'est suite à un examen,
une formation. À Montréal, on parle de 150 heures de formation; Québec, je
crois que c'est 90 heures de formation.
Mme
Ouellet :
Sans rentrer dans les détails, parce que là, vous avez un certain nombre
d'exigences, est-ce que dans ces exigences-là, du côté des projets
pilotes, vous souhaitez qu'on rajoute... parce que moi... On va réfléchir à des
amendements à l'article 11. Est-ce que vous souhaitez qu'on ajoute également
que les taxis soient détenteurs d'un permis de propriétaire de taxi?
M. Jugand
(Benoît) : Oui, en fait, oui, tout à fait. Tout à fait. Peu importe le
projet pilote, il faut que ça soit délégué à un chauffeur de taxi qui
détient un permis en règle ou à un détenteur d'un permis d'exploitation en
règle.
Mme
Ouellet : Est-ce
qu'il y aurait d'autres éléments à ajouter pour l'encadrement des projets
pilotes?
M. Boyer
(Daniel) : Bien, moi, j'en
ai mentionné quelques-uns tantôt, là, quelques éléments tantôt. Je veux
dire, il ne faut pas que ça ait pour effet
de diminuer les conditions de travail des chauffeurs, chauffeuses de taxi. Il
ne faut pas que ça provoque une
concurrence déloyale. Et là c'est parce que je ne le sais pas quel genre de
projet pilote, c'est pour ça qu'on suppose
bien des affaires, mais on ne sait pas quel genre de projet pilote qui peut
être mis en branle. C'est sûr que, si c'est comme un projet comme UberX, là, on vient de créer une concurrence déloyale,
on vient de diminuer les conditions de travail
des chauffeurs, des chauffeuses. Si c'est d'ajouter une vitre protectrice, là,
c'est une tout autre chose. Mais moi, je pense... on pense qu'il ne faut pas diminuer les conditions de travail
des chauffeurs, chauffeuses, il ne faut pas créer une concurrence
déloyale, il ne faut pas que ça ait pour effet d'augmenter les prix d'une façon
faramineuse, et il ne faut pas non plus que ça diminue la valeur des permis.
Le Président (M. Reid) : Mme
la députée de Vachon.
Mme
Ouellet :
Oui. Et donc je m'en vais à votre recommandation n° 3. Lorsque vous
parlez d'un processus de sélection rigoureux, comment vous le voyez, ce
processus de sélection là?
M.
Jugand (Benoît) : Il faut que ce soit des entreprises premièrement qui
soient enquêtées, parce que l'entreprise qui va venir déposer un projet, rien ne nous garantit, ou le
gouvernement n'a pas de garantie, à moins qu'il puisse l'obtenir, mais
il n'y a rien dans le projet de loi qui prévoit une garantie au gouvernement
que les données personnelles, les informations de la clientèle et des citoyens
du Québec seront protégées. On sait qu'Uber vend ces informations-là, justement, à Google. Pourquoi ils ont
investi tant d'argent que ça dans le système Uber? C'était simple, c'est qu'on
pouvait «tracker»... excusez l'anglicisme... on pouvait suivre une personne.
Et, en plus, ils ont annoncé, la semaine dernière, justement, qu'ils étaient pour, même, vous suivre off-line, mais on...
Il y a beaucoup d'argent dans les habitudes
d'achat, les habitudes des personnes, et je
pense qu'il faut garder ou il faut s'assurer que la vie privée des gens soit
conservée. Là, on va avoir des
citoyens qui vont embarquer dans des véhicules-taxis où on ne sait pas qu'est-ce qui
va arriver avec les données
personnelles. Je pense que le gouvernement devrait se poser des questions
par rapport à ça ou au moins s'assurer qu'on vient
encadrer et que les données qui seront recueillies lors d'un projet pilote n'auront
pas de possibilité d'être envoyées ailleurs ou qu'il n'y aura pas de fuite vers
l'extérieur de ces informations-là.
Le
Président (M. Reid) :
Merci, Mme la députée de Vachon. Alors, nous passons maintenant
au deuxième groupe
d'opposition. Et je donne la parole au député de Groulx.
M. Surprenant : Merci, M. le
Président. Alors, je vais continuer sur la même discussion au niveau, là, de la
cueillette de données. Pourriez-vous nous expliquer un peu où se situe Google
actuellement — nonobstant,
là, Uber — leur capacité de cueillir des données, puis ce
qu'ils peuvent faire avec? Et comment vous voulez différencier Uber de
ce que fait Google peut-être et d'autres aussi?
M. Jugand
(Benoît) : En fait, j'ai
assisté l'année passée à une conférence justement où on traitait de
l'information personnelle. Ce qui vaut cher, ce n'est pas nécessairement de
prendre l'application, puis peser sur le bouton, puis de commander son véhicule. Si, en plus de ça, Uber
est capable de recueillir de l'information sur vous, sur vos habitudes d'achat, sur vos allées et venues, ils sont
capables de les vendre à des entreprises, qui, eux, vont être capables de
vous cibler de l'information. Meilleur exemple : vous allez vous présenter à l'aéroport JFK à New York,
bien, si vous êtes suivi justement
par vos applications, vous avez acheté tel ou tel produit, ça m'est arrivé il y a
deux mois, je reçois un courriel : Hé! salut, j'ai un rabais sur tel, tel, tel
produit, es-tu intéressé à ça? À un
moment donné, il faut se poser des
questions. Il y a quelqu'un qui a vendu cette information-là. Et ce n'est pas parce
que je l'ai autorisé personnellement à vendre cette information-là, c'est parce que
j'ai accepté de «downloader» ou de télécharger une application qui, dans les
termes de l'application, prévoit que
cette compagnie-là peut vendre votre information à une tierce personne. C'est inquiétant,
là.
M. Surprenant : Puis est-ce qu'il y
a une différence au niveau d'une application où que, lorsqu'on va sur un
ordinateur, un PC traditionnel, on a les capacités d'aller chercher ces
données-là?
M. Jugand (Benoît) : Je m'excuse, je
vais répondre facilement, c'est que l'ordinateur, normalement, il ne vous suit
pas.
M. Surprenant : Oui.
M. Jugand
(Benoît) : Il est à la
maison ou il ne fait pas de suivi. L'autre, on est branché tout le temps. Et, si j'avais l'application Uber, Uber saurait présentement
que je suis à l'Assemblée nationale présentement.
M.
Surprenant : Donc, Google,
présentement, ils peuvent le savoir... partout où on est à
l'heure actuelle. Donc, ils peuvent avoir toutes ces données-là. C'est
juste qu'en prenant une position dans Uber ça permet d'aller chercher plus de données simplement. Mais tout ce qu'ils peuvent
faire, ils le font déjà, Google, à mon avis, au niveau
de la quête de données. Et donc ma question, au bout du compte,
c'est : Comment on peut s'assurer de contrôler ça et de légiférer là-dessus,
à la rigueur? Parce qu'ils peuvent tous le faire à l'insu des gens puis...
M. Jugand (Benoît) : Bien, à partir
du moment où... excusez...
Une voix : Non, vas-y,
parfait.
M. Jugand
(Benoît) : À partir du
moment où le gouvernement se positionne à l'effet qu'on ne peut pas
vendre de l'information ou transférer à une tierce partie, si la personne le
fait quand même, à ce moment-là, j'imagine qu'il y a des pénalités qui peuvent arriver, puis ça sera justement
aux organisations qui appliquent ces lois-là à s'assurer que
ça ne se produisent plus. Mais, au moins, on vient mettre une balise pour
protéger la vie privée des gens.
M.
Surprenant : Une balise,
d'accord, mais, en pratique, après ça, pour déterminer s'il y a
eu infraction ou pas, ça peut être
assez complexe quand même, parce
qu'ils peuvent prétendre avoir eu l'information d'ailleurs, puis tout ça,
puis que, tu sais, beaucoup de moteurs
peuvent le faire aujourd'hui, là. Ce n'est facile, dans la vraie vie, de
contrôler ça, à mon avis. Mais, en tout cas, à la rigueur, c'est sûr que
je suis en faveur de ça, d'un certain contrôle.
Maintenant, je voudrais parler au niveau de
modulation des tarifs. Tantôt, un groupe précédent a parlé qu'il pouvait y avoir des tarifs de jour à l'heure
actuelle et des tarifs de nuit. Mais, au-delà de ça, on comprend qu'Uber a
une approche plus
dynamique au niveau des tarifs, qui, parfois, ce que vous dites, ça peut créer
des excès. Mais, nonobstant les
excès, est-ce que vous seriez ouvert à ce qu'il y ait une nouvelle approche qui
soit plus dynamique au niveau de la tarification si c'était mieux
contrôlé?
• (16 h 30) •
M. Jugand (Benoît) : Non. Fixer les
tarifs via la Commission des transports du Québec en établissant une tarification de soir, de nuit... La Commission des
transports du Québec a la confiance du RTAM dans son processus, qui est un processus qui est rigoureux. Mais d'arriver
et de faire du «surge pricing», de la modulation de tarifs en fonction
de l'offre et de la demande, c'est le
citoyen qui va être pénalisé. M., Mme Tout-le-monde qui a les moyens de se
payer un taxi la veille du jour de l'An avec Uber, qui paie
6,5 fois le montant, et qui est avisé, puis qui décide d'appuyer sur le
bouton parce que ça lui tente, parfait, sauf
que le principe du taxi étant un privilège qui est conféré par la loi doit
s'appliquer à l'ensemble de la
population. Et c'est ce principe-là... Ou qu'est-ce qui arrive s'il y a
des organisations ou des regroupements à
l'intérieur même d'Uber, et ça s'est vécu ailleurs, où on décide de fermer
l'application, parce que ce n'est pas assez payant pour nous, puis on
l'ouvre une demi-heure plus tard et là le prix a monté à 1,4 fois, bien
c'est le citoyen qui est floué.
M.
Surprenant : Mais le gouvernement pourrait intervenir dans le cas où il y aurait de la collusion, quand
même, là. Alors, en dehors de la collusion, bien, ça pourrait permettre une
efficience au niveau des prix, finalement.
M. Boyer
(Daniel) : Bien là, je vais
vous amener sur le terrain que vous nous avez amenés tantôt, là, quand
vous nous disiez que Google peut nous
suivre partout, quand vous me parlez de lutte contre la collusion, ça, c'est
pas mal plus difficile que de dire
qu'UberX n'existera pas puis n'exercera pas sur notre territoire. Ça, il me
semble que c'est la solution la plus simple, parce qu'il y a une
concurrence déloyale puis parce que c'est illégal.
M. Surprenant : ...d'UberX, si tout
le monde offrait...
M. Boyer (Daniel) : Non, bien UberX
ou quelqu'un d'autre.
M.
Surprenant : Oui. Si tout le monde offrait un «pricing» dynamique, puis dans un cas où une offre...
chargerait six fois le prix, bien il y en
aurait toujours un qui arriverait à un prix plus raisonnable,
puis, à un moment donné, l'efficience fait qu'on aurait une structure de
prix qui tiendrait la route, sans jeu de mots, là.
M. Jugand
(Benoît) : Je vais vous
donner mon opinion personnelle. Présentement, c'est prématuré de passer
à de la fluctuation des prix. Le meilleur exemple, c'est que jusqu'à tout
récemment il n'y avait aucune donnée réelle qui existait sur l'industrie du taxi. Aucune. On se fie juste au folklore, à
ce que les gens vont venir vous rapporter. Et il y a une étude qui est
lancée par la polytechnique de Montréal en collaboration avec divers membres de
l'industrie du taxi, ça va être la
première fois dans deux ans qu'on va avoir l'état de l'offre et de la demande
pour le taxi à Montréal, et ça
pourrait être mis après pour l'ensemble de la province du Québec. À partir de
ce moment-là, on saura quel est l'état de l'offre et de la demande, et, s'il y a des fluctuations de prix à avoir, je
pense que la question pourrait être ramenée à ce moment-là, puis regarder, voir si effectivement il y a moyen
d'inciter des gens à se déplacer dans des zones qui sont sous-affectées.
Peut-être, mais, pour l'instant, je vous dirais que c'est vraiment prématuré.
M. Surprenant : Je passe la parole à
mon collègue, M. le Président.
Le Président (M. Reid) : Oui.
M. le député de Borduas.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le
Président. Bonjour, messieurs. Quelques questions. Tout à l'heure, on a parlé... vous souhaitez augmenter les amendes, le
quantum des amendes associées aux infractions, le ministre, tout à
l'heure, a dit : Bon, bien, il y a
plusieurs crimes qui sont déjà prévus, puis on constate qu'il n'y a pas moins
de criminels. Par contre, souvent, on
constate que lorsque... c'est la chance d'être pris qui fait en sorte que le
taux d'infraction diminue. Est-ce que, selon
votre connaissance, le nombre d'inspecteurs ou les ressources qui sont
affectées, supposons au Bureau du taxi de Montréal ou ailleurs dans la
province de Québec, c'est suffisant pour assurer le respect de la
réglementation qui est déjà en vigueur?
M. Jugand
(Benoît) : Je ne voulais pas porter mon ancien chapeau, où j'étais
directeur général du Bureau du taxi de
Montréal, mais je vais répondre à cette question-la. Les effectifs, c'est sûr
qu'il n'y en a pas assez. Au Bureau du taxi, je ne sais pas à combien
ils sont rendus puis je ne veux pas répondre pour le Bureau du taxi. Est-ce
qu'il y a assez d'inspecteurs sur la route?
La réponse est non. Est-ce qu'il y a moyen d'en faire plus? Oui. Est-ce qu'il y
a des stratégies qui peuvent être
mises en place? Oui, mais l'aspect coercitif est très important. On parle
d'augmenter les amendes, je pense que ça,
ça fait consensus auprès des différentes personnes qui sont venues vous faire
des présentations. Par contre, la suspension du permis de conduire, la suspension ou la saisie avec une durée
prédéterminée d'un véhicule, d'un transporteur illégal...
Parce que oui, on parle d'Uber, mais il s'agit
juste d'aller sur Kijiji. Le phénomène Uber, ce que ça fait, le
phénomène Uber, là, ça fait en sorte que, sur Kijiji, n'importe qui
s'affiche comme chauffeur. Et là Uber est peut-être structuré jusqu'à un
certain point, mais, quand c'est M., Mme Tout-le-monde qui fait des
transports... Je vais vous donner une petite anecdote. J'ai participé, moi, à
des transports illégaux, où on embarquait dans des véhicules. Bien, écoutez, à
un moment donné, il y a un camion qui est venu me chercher, j'étais assis sur
une caisse de lait en arrière. J'ai fait du centre-ville jusqu'à l'aéroport. On le savait, là, parce
que, là, je travaillais pour le bureau, c'était correct, mais imaginez, là... Écoutez, ce n'est pas tout le
temps des beaux véhicules super propres qui viennent vous chercher, là;
c'est des gens qui veulent faire une piastre sur le dos d'une autre personne.
Alors, suspension de permis de conduire, saisie
de véhicule avec une durée déterminée, Uber aura beau payer l'amende, le char ne sortira toujours
pas de la fourrière. Sur une deuxième offense, des périodes plus prolongées,
des points de démérite... ça fait
mal, des points de démérite, parce
que là c'est le conducteur qui va y
penser à deux fois avant de penser faire du transport illégal.
Le
Président (M. Reid) :
Alors, merci beaucoup. C'est le temps que nous avions. Alors, M. Boyer,
M. Jugand, M. L'Ériger, merci de votre contribution à nos travaux.
Je suspends les travaux jusqu'à l'arrivée de nos
prochains invités.
(Suspension de la séance à 16 h 36)
(Reprise à 16 h 42)
Le
Président (M. Reid) :
Alors, nous reprenons nos travaux. Je voudrais souhaiter la bienvenue à nos
invités, il s'agit d'Uber Québec. Je vous souhaite la bienvenue, et donc je vous
demande de bien vouloir, d'abord, vous présenter lorsque vous aurez la
parole, et je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre
présentation. Et, par la suite, nous aurons des échanges avec les membres de la
commission. Alors, à vous la parole.
Uber
M. Guillemette (Jean-Nicolas) :
Parfait. Écoutez, premièrement, chers membres de la commission, M. le ministre,
on vous remercie de nous donner l'opportunité
de nous présenter devant vous aujourd'hui pour qu'on discute du sujet
d'Uber. Mon nom est Jean-Nicolas Guillemette, je suis le directeur général
d'Uber pour le Québec. Je suis accompagné de M. François Crête, qui est
vice-président chez Cohn & Wolfe et qui nous aide sur le dossier d'Uber.
Premièrement,
j'aimerais... dans les prochaines minutes, je vais avoir la chance de vous
expliquer un peu ce qu'est Uber, préciser certaines choses. On va avoir
également une période de questions, je vais pouvoir répondre à vos questions. Et ce que je veux vous expliquer, c'est
pourquoi Uber apporte des bénéfices au Québec, pourquoi il y a des dizaines de milliers de personnes qui l'utilisent
sur une base de demandeurs, pourquoi il y en a des centaines de milliers
qui ont téléchargé l'application depuis
notre lancement. Et je vous demanderais aussi de... Je sais qu'on entend
plusieurs choses sur Uber, autant dans les médias, un peu partout, mais aujourd'hui
je vais vous présenter un autre côté de la médaille
que vous n'avez peut-être pas encore eu l'occasion d'entendre, c'est-à-dire les
bénéfices également, pourquoi les gens utilisent notre application.
Donc,
premièrement, vous donner un peu l'historique sur Uber. Uber a été fondée en
2009 à San Francisco par un Canadien
et un Américain qui trouvaient ça bizarre qu'en 2009 ils ne soient pas toujours
capables d'utiliser leur téléphone intelligent pour avoir une course.
Donc, ils ont lancé Uber. Ils l'ont fait pour leurs amis à la base, mais c'est
devenu de plus en plus populaire et,
finalement, ils ont décidé de lancer l'entreprise avec un produit qui était le
«black car», donc des autos noires, là, Lincoln Town Car, comme on voit
ici, puis, au fil des années ça, s'est démocratisé, puis on a lancé la
plateforme, là, on a lancé le service UberX.
La manière
dont la plateforme fonctionne, je pense que c'est important de l'expliquer. Je
vais aller vite là-dessus, parce que je sais qu'on n'a pas beaucoup de
temps. Mais, simplement, l'utilisateur va créer un compte. Donc, il va
télécharger sa carte de crédit, se créer un compte, et par la suite il a
l'application sur son téléphone, il l'ouvre, il va voir les véhicules qui sont alentour de lui, va sélectionner le type de
service qu'il veut obtenir, il appuie, et, à partir du moment où il y a une connexion qui se fait entre
l'utilisateur et le chauffeur, il y a de l'information qui est partagée.
Donc, l'utilisateur va avoir la photo de son
chauffeur, son nom, la marque de son véhicule ainsi que sa plaque
d'immatriculation. Donc, il sait exactement
dans quel véhicule il va embarquer. Le véhicule arrive, le client embarque, il
fait la course. À la fin de la
course, il débarque sans avoir à payer, parce que ça charge automatiquement sa
carte de crédit. Donc, il n'y a pas d'échange
d'argent comptant avec le service Uber. Également, il va devoir donner une note
sur cinq étoiles à son chauffeur. La raison est fort simple, c'est qu'on
cherche à s'assurer d'avoir toujours un très grand niveau de qualité de service
au sein d'Uber. Donc, on demande aux
utilisateurs de noter leur chauffeur sur cinq étoiles et on demande aux
chauffeurs de conserver une moyenne de 4,5
sur cinq étoiles. Ils peuvent également laisser un commentaire en tout temps.
Donc, ça, c'est la manière dont l'application fonctionne.
Ensuite,
les produits. Je pense que c'est important de le spécifier ici, Uber, c'est le
nom de l'entreprise; après ça, c'est
également le nom de l'application. Donc, c'est la même application partout à
travers le monde — on est
présents dans 57 pays — la même application, et, sur l'application,
il y a différents types de services qui sont offerts, dépendant des villes. Au Québec, si on prend par exemple
Montréal, on a Uber taxi. Donc, Uber taxi, ce que c'est, c'est des
chauffeurs licenciés de la ville de Montréal
qui utilisent Uber pour générer davantage de revenus. Et ensuite on a UberX, UberX, c'est des gens comme vous et moi qui décident de
s'inscrire, d'utiliser un actif qui est important, c'est-à-dire leur voiture, pour générer davantage
de revenus. C'est des gens qui le font majoritairement
à temps partiel pour essayer d'arrondir leurs fins de mois. Donc, on a des professeurs qui n'ont pas
des charges de cours complètes, on a des travailleurs saisonniers,
disons cet hiver, des gens qui travaillent dans la construction, dans
l'aménagement paysager, qui ont une crèmerie ou autre qui utilisaient Uber pour générer des revenus
pensant cette période-là. On a des gens qui viennent de perdre leur
emploi, mais qui ont encore un actif important, leur automobile, qui décident
de l'utiliser pour générer des revenus.
Et ensuite toutes ces
personnes-là, pour pouvoir embarquer sur la plateforme Uber, mais surtout pour
pouvoir entrer le service UberX, il faut qu'ils passent à travers un processus
rigoureux, donc, notamment, vérification des antécédents
criminels, on recule jusqu'à la majorité de l'individu, donc son 18e
anniversaire; vérification du dossier de conduite auprès de la SAAQ, on s'assure que l'individu à un bon
comportement derrière le volant; inspection du véhicule; également il y
a une police d'assurance qui est offerte, de 5 millions de dollars, qui couvre
chacune des courses sur la plateforme UberX.
Uber,
c'est un succès planétaire, on est présents dans 312 villes à travers le monde.
On est l'entreprise avec la plus forte
croissance de l'histoire. On est présents dans 57 pays et on fait aujourd'hui, environ,
plus de 400 millions de courses par année. Ça, ça veut dire qu'à
chaque seconde, il y a 12 personnes à travers le monde qui ouvrent
l'application, qui appuient sur un bouton
pour demander une course. Et la raison pourquoi c'est si populaire, c'est parce
qu'on répond à un besoin au sein des
populations où on s'installe. Ce besoin-là, il est situé dans obtenir, avoir
accès à plus d'options dans les transports, être capable de délaisser sa
voiture personnelle, l'auto solo, qui est la chose qu'on combat, nous, donc de se dire : On a une opportunité de délaisser
l'auto parce que j'ai d'autres options. Ça fait partie du cocktail des
transports au même titre que l'autobus, le
métro, Bixi, les voitures en libre partage comme Car2Go, Communauto, le taxi
traditionnel, la marche; tout ça, c'est une option supplémentaire qu'on ajoute
là-dedans et qui permet de combattre l'auto solo.
Il
y a une problématique dans les transports, on le voit. Si on prend l'île de
Montréal, l'enquête origine-destination, on a constaté qu'au cours des cinq dernières années... donc de 2007 à
2013, pardon, il y a eu une augmentation de 15 % des déplacements automobiles sur l'île de
Montréal. Il y a également eu une hausse de 11 % du nombre de
propriétaires d'autos. Ça contribue, un, à la congestion, qui est de plus en
plus grande, mais, deux, à la pollution atmosphérique aussi. Donc, il faut trouver des solutions pour pouvoir combattre l'auto
solo, UberX et la plateforme Uber est une de ces solutions-là. Et
au-delà de ça, en 2014, pour la première fois de l'histoire, les familles
québécoises ont dépensé plus pour se
déplacer que pour se nourrir. C'est une aberration totale de se dire que les
gens au Québec doivent payer plus pour se déplacer que pour se nourrir
parce que se nourrir, c'est vital, se déplacer, ça ne l'est pas.
Donc,
il faut être en mesure de développer plus d'options pour permettre aux gens de
se déplacer autrement qu'avec leur
véhicule, autrement qu'avec l'auto solo, ce qui va leur permettre d'économiser.
UberX, c'est 45 % moins cher qu'une course de taxi traditionnel. Donc, c'est un des incitatifs majeurs pour
les gens qui l'utilisent. Il y a également le fait qu'ils se sentent en
sécurité pour les raisons que je l'ai expliqué, parce qu'il n'y a personne
d'inconnu sur la plateforme, on sait avec
qui on embarque, le chauffeur également a le nom de son client, donc il sait
qui est le passager. Également, c'est fiable.
Au centre de Montréal, en trois minutes en moyenne, c'est trois minutes de
temps d'attente pour pouvoir obtenir un véhicule, donc, ça remplace
facilement la voiture solo parce que c'est fiable également.
Tout ça nous a permis
au cours des derniers mois, des sept derniers mois, depuis octobre 2014,
d'ajouter des milliers de partenaires
chauffeurs sur la plateforme, sur UberX, et ça, ça nous a permis de créer plus
de 500... l'équivalent de 500 emplois à temps plein. Donc, quand on
prend toutes les heures cumulées des gens qui sont sur la plateforme UberX et qu'on les divise par 35, on arrive à plus
de 500, et l'objectif qu'on s'est fixé pour 2015, c'est d'être en mesure
de générer plus de 2 500 emplois à temps plein sur la plateforme UberX.
Je
vais passer rapidement, c'était dans le rapport que je vous ai remis, mais
l'économie du partage, on fait partie de l'économie du partage, c'est une économie qui est en pleine expansion.
On n'a qu'à penser à Airbnb, qui fait également partie de ça. Airbnb, c'est des gens qui louent leur appartement et
autre sur ce site-là. La ministre Dominique Vien, la ministre du Tourisme, a annoncé, il y a trois
semaines, qu'elle voulait créer une nouvelle réglementation pour
encadrer ça, et c'est ce qu'on demande
également. Ce qu'on souhaite, c'est que le gouvernement crée une nouvelle
réglementation dans le but d'encadrer ce
type de service là que la population demande. Vous savez, ça s'est fait dans
plus de 40 juridictions aux États-Unis.
Donc, on n'a qu'à penser à des États comme l'Illinois, la Virginie, l'Arizona,
la Californie, des villes comme Denver,
Dallas, San Francisco, Los Angeles, Chicago, Washington, D.C., qui ont créé de
la nouvelle réglementation dans le but
d'encadrer ce service-là parce qu'ils constataient que ça répondait à un besoin
de la population, mais qu'au-delà de ça c'était bon pour l'économie
locale et pour les payeurs de taxes.
Donc, nous, c'est ce
qu'on demande au gouvernement, on souhaite être réglementé. Vous savez,
Philippe Couillard, lors du lancement de la stratégie numérique du
gouvernement, à l'automne dernier, a déclaré que ça soit Uber avec les voitures partagées ou Netflix avec
la vidéo en ligne, ce sont des phénomènes de société irréversibles. On
est ici pour rester, on est ici pour travailler avec les gouvernements pour
créer de la nouvelle réglementation, comme ça s'est fait partout ailleurs.
Et
aujourd'hui, quand on se présente
devant vous, ce que j'aimerais que vous reteniez, c'est que vous n'avez
pas à faire un choix entre l'industrie du
taxi et Uber. Ça vit dans 312 villes en commun accord, on est capables de
travailler ensemble et d'offrir plus de
services à la population. Ce qu'on demande, c'est que vous créiez une nouvelle
réglementation pour encadrer une innovation qui offre plus d'options dans les
transports et qui est demandée et utilisée par des dizaines de milliers de
Québécois. Merci.
• (16 h 50) •
Le
Président (M. Reid) : Merci, M. Guillemette. Alors, nous
commençons notre période d'échange, et je donne la parole au ministre.
M.
Poëti : Merci, M. le Président. J'ai une question pour vous.
Vous venez de dire : On ne demande pas mieux que d'être
réglementés. C'est ce que vous avez dit.
M. Guillemette (Jean-Nicolas) : Oui.
M.
Poëti : Je vous ai invité. Lorsque vous êtes venus à mon
bureau, je vous ai écrit pour que vous vous réglementiez. L'avez-vous fait?
M. Guillemette
(Jean-Nicolas) : C'est bon, je peux répondre?
Le Président (M.
Reid) : Oui, allez-y.
M. Guillemette
(Jean-Nicolas) : Excellent. Donc, écoutez, M. Poëti, en effet, on vous
a rencontré au mois de décembre dernier, on
a discuté, et ce que vous nous avez... On a déposé, vous savez, au ministère des Transports, une ébauche
de projet de loi, donc un peu les principes directeurs qui ont été
utilisés dans 40 juridictions ailleurs pour encadrer ce type de service là, qui est une ébauche, qu'on a reçue de la part du ministère des Transports. En effet, on l'a reçue il y a
trois semaines, je crois. C'est une demande de prendre une licence dans l'industrie du taxi. Vous savez, la plateforme Uber taxi, c'est une chose, mais il y a également...
on a, pardon, le service Uber taxi, mais il y a également le
service UberX, c'est le service qui
est le plus populaire, c'est ce qui, également, révolutionne, apporte une innovation dans cette
industrie-là du transport. Et nous, c'est là qu'on souhaite être réglementés.
Pour ce qui est au
niveau du taxi, c'est quelque chose qu'on évalue. En ce moment, la
réglementation qui est présente dans l'industrie du taxi ne nous permet pas... on n'est pas capables de la respecter. Il y a
certaines clauses, dans cette
réglementation-là, qui dit par
exemple : Ça prend quelqu'un
24 heures sur 24, sept jours sur sept, assis dans un bureau, qui répond aux appels. Bien, on ne peut pas faire ça.
Une compagnie technologique, nos serveurs, on n'a pas de téléphone, on ne peut pas répondre au téléphone, nos serveurs
sont dans le cloud, ils sont situés en Californie, donc ce n'est pas quelque
chose qu'on est en mesure de respecter. Il y a plusieurs
autres étapes là-dedans. Ça demande d'abord un dôme
identifié à Uber, mais les chauffeurs de
taxi ont déjà des dômes identifiés. Donc, nous, on est en train
de regarder ça, on continue à travailler là-dessus. Comme je vous l'ai
dit, on a reçu la demande il y a trois semaines.
À
Toronto, on a fait cette demande-là. Si on est capables de continuer à
travailler avec le gouvernement dans le but
d'être encadrés et qu'on est capables de faire, peut-être, une modification au niveau de la loi présente dans
l'industrie du taxi, c'est peut-être quelque
chose qu'on serait en mesure de faire aussi. À Toronto, la décision qu'on a
prise, de faire une demande
là-dessus, elle est de concert avec le fait que le maire, John Tory, supporte
Uber et demande aux fonctionnaires de créer, justement, de la nouvelle
réglementation pour encadrer Uber au complet.
Uber ne peut pas être
séparé entre Uber taxi et UberX. C'est la même application, c'est la
plateforme. Après ça, il faut créer une
réglementation qui encadre tout ça. La section du taxi, on est prêts à
collaborer, on va travailler puis on va
voir ce qu'on peut faire. Mais on demande également au gouvernement de se
pencher sur la situation au niveau de UberX.
Le Président (M.
Reid) : ...M. Guillemette. M. le ministre.
M. Poëti :
La question était claire. Est-ce que vous êtes allés chercher un permis
d'intermédiaire de taxi pour vous réglementer?
M. Guillemette
(Jean-Nicolas) : La réponse : On est en train d'évaluer cette
situation-là, comme je l'ai mentionné.
M. Poëti :
Non, mais là, je vous la pose aujourd'hui. C'est : Est-ce que oui ou non?
M. Guillemette
(Jean-Nicolas) : Écoutez, non.
M. Poëti :
Parfait, merci.
M. Guillemette
(Jean-Nicolas) : Mais ce que je vous dis, c'est qu'on est en train de
l'évaluer.
M.
Poëti : Non, non, mais... Écoutez, je vous pose une
question : Est-ce que vous êtes allés... La réponse, c'est non,
vous n'êtes pas allés.
M. Guillemette
(Jean-Nicolas) : Non.
M.
Poëti : Vous venez de dire, cependant, quelques minutes
avant : Nous, on voudrait vraiment se réglementer. Nous, là, on veut, on est allés vous voir,
M. Poëti, puis on vous a demandé : Est-ce qu'on peut se réglementer?
Moi, je vous dis : Oui, vous
pouvez. Vous allez acheter et vous allez devenir... avec un permis
intermédiaire de taxi. La réponse, c'est non, vous ne l'avez pas. Est-ce que, si vous continuez à faire du Uber
ou du UberX, selon vous, vous êtes illégal, selon la loi au Québec?
M. Guillemette
(Jean-Nicolas) : Deux choses, M. le ministre.
M. Poëti :
Oui ou non?
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) : Deux choses, je vais répondre, s'il vous
plaît, laissez-moi répondre. Deux choses. La première, c'est important
de faire la distinction, ce n'est pas Uber et UberX, c'est Uber taxi et UberX.
Uber, c'est la
plateforme, c'est l'application, c'est l'entreprise. Bon, il faut faire cette
distinction-là, et je pense que c'est important de le préciser ici.
Deuxième
chose, nous ne sommes pas une compagnie de taxi, nous sommes une compagnie
technologique qui a développé une application là-dedans. Et les lois qui
sont présentes un peu partout à travers le monde qui encadrent l'industrie du
taxi sont modifiées dans le but qu'on puisse s'y conformer. Nous, ce qu'on
demande...
M. Poëti :
Vous ne faites pas de taxi?
Le Président (M.
Reid) : Un instant...
M. Guillemette
(Jean-Nicolas) : Je vais terminer ma réponse, s'il vous plaît, je
pense que j'ai le droit.
Le Président (M.
Reid) : Un instant, M. le ministre.
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) : Ce qu'on vous demande, c'est de créer une
réglementation pour encadrer le service UberX. Est-ce qu'on est prêts à
continuer à travailler avec le gouvernement au niveau du taxi? C'est ce que je vous dis : Oui, on est en train de l'évaluer.
On a reçu votre demande il y a trois semaines, M. Poëti, on vous avait
rencontré au mois de décembre. Donc, ça a
pris six mois avant que vous envoyiez cette demande-là. Bien entendu, on va la
regarder, on va prendre le temps de l'analyser. On continue d'évaluer ce que
qui est écrit dans la loi. Ce que je vous dis, c'est qu'il y a des principes qui sont dans la loi qu'on ne peut pas
respecter. Et ça, quand on a rencontré le Bureau du taxi en juin l'année
passée, on a spécifié ces aspects-là. On ne peut pas respecter le fait que vous
demandez dans la loi, textuellement, d'avoir quelqu'un assis 24 heures sur
24 qui répond à un téléphone. Une compagnie technologique, ce n'est pas la
manière de fonctionner.
Deuxième
chose, vous avez mentionné : Est-ce que
vous êtes illégal? J'aimerais spécifier une chose extrêmement importante,
ici, aujourd'hui : il n'y
a aucun juge au Canada
qui a statué aujourd'hui sur la légalité ou l'illégalité d'Uber. Donc, il est faux de dire que c'est un service qui
est illégal. Non réglementé, oui, illégal, c'est faux. Il n'y a
personne au Canada qui a parlé de ça. Donc, jusqu'à temps qu'il y
ait un juge qui statue là-dedans, je pense qu'il faudrait rectifier la
façon dont on présente UberX.
Deuxième chose, nous, ce qu'on demande, c'est
d'être réglementés, on demande de créer la nouvelle réglementation. Et je pense que c'est clair, en
ce moment, si on regarde ce que le
Bureau de la concurrence du Canada a
dit. Le Bureau de la concurrence du Canada s'est penché sur ce qui se
passe dans l'industrie du taxi, sur la venue d'innovations comme UberX, et ce qu'ils disent, et je vais citer, là,
ils soulignaient, à l'automne dernier, que «l'interdiction de services
novateurs [comme Uber] réduit
[considérablement] la concurrence» et procure un monopole aux compagnies de
taxi. Ils affirmaient également que
la réglementation en place devrait principalement servir à protéger le
consommateur et non pas l'industrie du taxi.
Lorsqu'on demande au gouvernement d'être réglementé, on le demande au nom des
dizaines de milliers de personnes qui
l'utilisent sur une base hebdomadaire et aux centaines de milliers de personnes
qui ont téléchargé l'application. Ce sont des citoyens québécois qui
désirent pouvoir avoir accès à ce service-là.
Le Président (M.
Reid) : Merci. M. le ministre.
M. Poëti :
Alors, ce que vous me dites, c'est que vous travaillez illégalement et vous
êtes confortables avec ça, et les
20 000 chauffeurs de taxi du Québec, l'ensemble de tous les gens qui ont
pris des permis de taxi au Québec, ça, vous, ce n'est pas important. Ce
qui est important, c'est que vous voulez une réglementation pour vous. En fait,
vous voulez que je rende légal ce que vous faites illégalement. C'est ça que
vous nous demandez? C'est ça que vous nous demandez? Vous voulez une loi pour
légaliser l'illégalité dans laquelle vous travaillez?
Et,
quand vous dites que ça a pris six mois pour vous répondre, quand vous avez été
assis dans mon bureau, je vous l'ai
dit : Si vous devenez un intermédiaire de taxi, il n'y aura pas de
problème avec Uber. Je vous ai dit ça il y a six mois, monsieur.
Qu'est-ce que vous avez fait depuis six mois? Rien. Alors, arrêtez-moi la
morale parce que... Prenez-la sur votre
côté. Et, si vous voulez vous comparer à travers le monde, regardez les impacts
que vous avez, regardez de quelle façon
vous fonctionnez et regardez de quelle façon vous venez faire une concurrence
tout à fait déloyale. Mais ça, vous êtes
à l'aise avec ça, et ce que vous voulez faire, c'est défier la légalité. Bien,
ça ne se produira pas, on ne fera pas une législation pour vous,
monsieur, ce n'est pas vrai. La législation existe pour tout le monde.
Et,
quand vous dites que vous demandez d'être légalisé, je m'excuse, c'est faux. Je
vous ai donné l'occasion de le faire et vous l'avez refusée.
M. Guillemette
(Jean-Nicolas) : Je pense que...
Le
Président (M. Reid) : Merci, M. le ministre. Alors, je vais
vous donner... je pense qu'on va... je vais vous donner la parole un
après l'autre, et, de préférence, normalement, on essaie plutôt de s'adresser à
la présidence.
M. Poëti :
Je m'excuse.
Le Président (M.
Reid) : Oui. Alors, je vous donne la parole, c'est à votre
tour.
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) : Parfait, M. le Président. Donc, je pense
qu'il faut vraiment, aujourd'hui, faire une distinction entre Uber taxi
et UberX encore une fois. Nous, ce qu'on demande, c'est UberX. C'est le service
qui est le plus populaire, c'est le service
qui est utilisé par la population québécoise. Et ce qu'on explique aujourd'hui,
c'est qu'il n'y a pas un choix entre
l'industrie du taxi et UberX. Il y a un choix de réglementer un service qui est
nécessaire pour la population. On offre un
service supplémentaire à la population. On combat l'auto solo en faisant ça.
Vous savez, au Québec, les voitures sont
stationnées 96 % du temps. Il faut trouver des manières de changer ça.
UberX fait partie de la solution. Ce n'est pas l'unique solution, mais
ça en fait définitivement partie, et c'est pour ça que c'est si populaire.
L'autre chose qu'il ne faut pas perdre de vue
ici, aujourd'hui, puis que je voudrais m'assurer que ce soit clair, l'industrie du taxi est une industrie privée qui,
oui, est réglementée. Et est-ce qu'elle est trop réglementée? Ça, ce
n'est pas à moi aujourd'hui à vous répondre
par rapport à ça. Mais nous, ce qu'on demande, c'est qu'il y a un service
novateur qui vient d'arriver, qui n'existait
pas il y a six mois au Québec et qui n'est pas encadré par aucune
réglementation précise. Et nous, ce
qu'on dit : Pouvons-nous nous asseoir et travailler ensemble pour créer
une réglementation? L'État du Maryland a passé une réglementation qui a
été saluée autant par Uber, Lyft et Sidecar, qui sont les compétiteurs à nous
aux États-Unis qui viennent s'installer ici
que par l'industrie du taxi, parce qu'on a été en mesure de s'asseoir à la même
table, de discuter et de trouver un terrain
d'entente. C'est un service qui est demandé par la population et je pense que
c'est la raison pour laquelle il se doit d'être réglementé.
Le Président (M. Reid) :
Merci. M. le ministre, voulez-vous prendre la parole?
M. Poëti :
Écoutez, moi, dites-moi, est-ce que la façon de travailler actuellement de vos
gens d'UberX et d'Uber est légale avec nos lois, ici, au Québec? Est-ce
qu'elle est légale?
M. Guillemette (Jean-Nicolas) :
Comme je le disais, M. le Président...
M. Poëti : Oui ou non?
M. Guillemette (Jean-Nicolas) :
...il n'y a aucun juge au Canada qui a statué sur la légalité. Il y a un flou juridique par rapport à cette loi-là. Et
également, la même chose au niveau du covoiturage, il y a un flou juridique.
C'est ce qui fait que, dans l'émission de La
facture du 10 février dernier, on a vu une dame qui croyait offrir du
covoiturage qui s'est fait saisir sa
voiture et qui a reçu une amende à la hauteur de 900 $. Je pense qu'il
faut s'asseoir, revoir la manière dont c'est réglementé et s'assurer
d'encadrer les choses de la bonne façon un service qui est nouveau, qui
n'existait pas.
Vous savez,
l'innovation, quand ça arrive, les lois suivent dans la majorité des cas. Je n'ai jamais vu, dans l'histoire du Québec, une innovation
qui est arrivée, que les lois étaient déjà existantes. Il faut les modifier, il
faut les bonifier, il faut les revoir
ou en créer de nouvelles pour encadrer une nouvelle innovation, un nouveau type
de service qui est offert.
• (17 heures) •
Le Président (M. Reid) :
Merci.
M. Crête (François) : M. le
Président, est-ce que je peux, juste 30 secondes?
Le Président (M. Reid) : Oui,
si vous voulez, M. Crête.
M. Crête
(François) : Je me demande, parce qu'Airbnb fait partie du même genre
d'économie, qu'on appelle l'économie
du partage, et la ministre du Tourisme, Dominique Vien, qui a, ici même, là, je
pense, dans la salle ici, a dit qu'il
fallait réglementer Airbnb, et les gens d'Airbnb, dans un reportage télévisé,
la journée même, ont dit qu'ils étaient d'accord avec ça. Donc, pourquoi qu'au gouvernement... il y a une
ouverture du côté d'Airbnb, qui est un peu dans un flou juridique. C'est des gens qui louent leurs
maisons, une partie de leurs maisons, qui sont en compétition contre une
industrie qui peut être les hôtels, les
auberges, les «bed-and-breakfast». Pourquoi c'est bon pour le domaine
d'Airbnb, mais que ce n'est pas bon pour le domaine du... Et je comprends, là,
que le... Je rajoute que l'hôtellerie est aussi réglementée. Donc, pourquoi,
d'un côté, c'est bon? Pourquoi, de l'autre côté, ça ne l'est pas? Tout
simplement pour lancer la question.
Le Président (M. Reid) : Oui.
M. le ministre.
M. Poëti :
Écoutez, M. le Président, quand on pose une question claire, si c'est légal ou
illégal, et on sait que la réponse est : illégal, mais qu'on pense
encore qu'il faudrait qu'un juge nous le dise, si ça, c'est de la bonne foi, M.
le Président, je ne le crois pas. Quand on
sait très bien la définition... et là honnêtement, quand vous me dites que vous
avez inventé quelque chose, vous avez innové un transport de personnes
rémunéré... c'est ça que vous avez fait, vous avez innové, parce que vous
amenez une personne et c'est rémunéré. Bravo. Vraiment bravo. Mais vous avez
manqué une grande partie de la vie, parce
que ça existe depuis longtemps, parce qu'il y a des travailleurs qui, depuis
longtemps, le font, parce que c'est
réglementé parce que, s'il fait beau, une journée, ou on a un incendie ou une
catastrophe, ça ne coûte pas 200 $ tout d'un coup avoir une course,
et vous le savez très bien.
Alors, quand vous me dites que vous ne
connaissez pas la loi, je vous invite à la relire, et c'est très clair, la Loi concernant
les services de transport par taxi. Et, si vous avez inventé quelque chose,
bien, honnêtement, le matin, regardez-vous
comme il faut, là, puis je pense que vous vous mentez à vous-même. Vous n'avez
rien inventé, ça s'appelle du transport rémunéré, monsieur, sauf que vous le faites d'une façon
illégale. Alors, si vous vous flattez de ça puis vous vous trouvez
innovateur, ma réponse à moi, c'est non, et on ne travaillera pas dans ce
sens-là. Merci, M. le Président.
Une voix : ...
Le Président (M. Reid) : Oui.
Alors, merci, M. le ministre.
M. Crête (François) : M. le
Président, j'ai assisté à beaucoup de commissions parlementaires...
Le
Président (M. Reid) : Mais attendez que je vous passe la
parole, M. Crête, si ça ne vous rien, ça va calmer le jeu un petit peu.
Alors, c'est à vous la parole.
M. Crête
(François) : Parfait, merci. J'ai assisté à énormément de commissions
parlementaires dans ma vie, je trouve qu'on est sur un ton où... On est
ici pour répondre à des questions du mieux qu'on peut, il faudrait que le ton demeure quand même à un niveau quand même de...
pas d'insultes ou de suppositions par rapport à mon client ici. Donc, si
c'est possible, là, de garder un ton qui est plus cordial, s'il vous plaît.
Le Président (M. Reid) :
Merci de votre commentaire. M. le ministre.
M. Poëti :
M. le Président, je suis bien d'accord avec les tons cordiaux. La seule chose,
là, on ne peut pas non plus se faire
dire en pleine face qu'on a inventé une innovation du transport rémunéré. Non,
mais vraiment, là. Là, moi, je veux
bien garder le ton. Si vous voulez que je vous dise ça en souriant, je peux le
faire, mais vous ne pouvez pas rire des citoyens qui nous écoutent. Il ne faut pas faire accroire aux gens que
vous avez inventé quelque chose, là, il faut arrêter. Parce que ça, ça existe et c'est légal, parce
qu'il y a une façon de travailler légalement en faisant du transport de
personnes rémunéré. Alors là, quand vous
dites qu'il y a un GPS, qu'il y a ci, qu'il y a ça, bien, vous faites tout ça
en dehors de la loi, mais c'est
illégal, et vous le savez illégal. Alors, arrêtez de me dire que vous voulez
que ce soit un juge qui vous légalise C'est ça que vous voulez? Pas de
problème, on va travailler là-dessus.
Le Président (M. Reid) :
Est-ce que vous voulez commenter, M. Guillemette?
M. Guillemette (Jean-Nicolas) :
Écoutez, M. le Président, je pense que, si on s'adresse aux Québécois aujourd'hui, la question que j'aimerais poser aux
gens qui sont ici, c'est : Comment ils expliquent que ce service-là
soit si populaire, non seulement au Québec,
mais également partout à travers le monde? Comment ils expliquent
qu'aujourd'hui il y a des milliers de personnes qui utilisent un actif
important? Quand je disais que les familles québécoises dépensent énormément au niveau du transport, il faut trouver
des solutions. Les solutions, elles viennent parfois de la
démocratisation d'une certaine industrie, et
c'est... Ce qu'on a innové, c'est là qu'on a innové, on a permis à des gens
d'avoir un actif, qui est leur automobile, et de s'en servir pour
générer davantage de revenus. Il y a énormément de personnes au Québec aujourd'hui qui comptent sur Uber non seulement
pour se déplacer, mais également pour générer plus de revenus dans des
situations difficiles. Et je pense que ces gens-là ont également le droit au
respect.
Le
Président (M. Reid) : Merci, M. Guillemette. Est-ce que j'ai
encore des interventions du côté gouvernemental? Pas d'intervention. Alors, nous allons passer à l'opposition officielle,
et je donne la parole à Mme la députée de Vachon.
Mme
Ouellet :
Oui. Bonjour, M. Guillemette et M. Crête. Quelques petites questions pour
commencer, parce que c'est assez nouveau. Est-ce que vous pouvez nous
donner un peu une évolution... On va parler juste d'UberX, là, on va faire ça
simple, là. Est-ce que vous pouvez nous donner une évolution de votre nombre de
chauffeurs d'UberX, là, entre octobre et aujourd'hui?
M. Guillemette (Jean-Nicolas) :
Bien, écoutez, on est partis avec zéro chauffeur, dans le fond, quand on a commencé. Aujourd'hui, on en a plusieurs milliers. On ne donne pas nécessairement de chiffres très précis par
rapport à ça, mais il y a plusieurs
personnes qui viennent s'inscrire à toutes les semaines, dans les centaines.
Donc, à chaque semaine, il y a une centaine de personnes ou un peu plus
qui viennent s'inscrire sur la plateforme.
Mme
Ouellet :
...total, là, on peut-u avoir des chiffres, là, parce que...
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) : Malheureusement, on est une entreprise privée, c'est des
chiffres qu'on souhaite demeurer
confidentiels. Par contre, ce que je peux vous dire, il y a
deux choses qui donnent une idée de ça, c'est que, un, c'est des milliers de personnes à Montréal
qui se sont inscrites sur la plateforme qui utilisent UberX à toutes les
semaines, puis, après ça, lorsqu'on cumule
toutes ces heures-là et qu'on les divise par 35, on génère plus de 500 emplois
à temps plein. Je m'excuse de ne pas pouvoir être plus précis par rapport
à ça. Malheureusement, on est limité.
Mme
Ouellet : Ce n'est pas une excuse, c'est un choix que vous
faites, mais ça vous appartient. Vous avez décidé de ne pas être
transparent et ça vous appartient.
Est-ce qu'il et exact, pour les chauffeurs qui
se prêtent à UberX, que vous payez l'amende de la saisie?
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) :
Oui, il est exact que, lorsqu'un chauffeur, en partant, un chauffeur UberX
voit son véhicule saisi, on le supporte pleinement dans ce processus-là.
Mme
Ouellet : Est-il
exact que vous preniez également en charge la cause, la poursuite?
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) :
À vrai dire, ce n'est pas Uber qui prend charge de ça, c'est simplement
un avocat qui représente le chauffeur en partant, un chauffeur qui a eu
son véhicule saisi, et nous, on aide à couvrir les frais par rapport à ça.
Mme
Ouellet : Et donc vous couvrez les frais. Donc, vous prenez
la charge financière des frais qu'impose ce genre de transport là.
M. Guillemette (Jean-Nicolas) : Oui.
Mme
Ouellet : On parlait de la loi un petit peu plus tôt. On va vous faire une petite lecture. Ce n'est pas trop
long. Donc, l'article 117 de la loi, que
vous devez très bien connaître, mais on va la lire pour votre bénéfice
et le bénéfice de tous les citoyens... Donc : «Commet une
infraction et est passible d'une amende de 350 $ à 1 050 $ — et
d'ailleurs tous les intervenants nous ont
dit que ce n'était pas assez et que, dans d'autres pays, suite à votre venue,
ils ont augmenté l'amende jusqu'à 15 000 $
et même, ils nous disaient, en Allemagne, 200 000 $, là, ça serait à
valider — [donc] :
sans être titulaire d'un permis de propriétaire de taxi, offre ou effectue un
transport rémunéré de personnes à l'aide d'une automobile.» Donc, la loi exige
d'avoir un permis de taxi. Vous êtes conscient de ça?
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) : Écoutez, ce que la loi dit par rapport à
ça... Nous ne sommes pas une compagnie de taxi, là, ça, c'est...
Mme
Ouellet : Non,
non, je viens juste de la lire, là. Je vous parle du point A au point B.
M. Guillemette (Jean-Nicolas) : Les
personnes...
Mme
Ouellet :
Donc, pour qu'une personne que... Pour que vos chauffeurs d'UberX puissent
faire le travail, ils doivent être
titulaires d'un permis de propriétaire de taxi pour faire un transport
rémunéré. Parce que vos chauffeurs UberX sont rémunérés, et d'ailleurs c'est vous qui faisez payer, à travers la carte de crédit, qui faisez payer le
transport. Donc, la personne qui fait le transport doit être détenteur
d'un permis de taxi, vous êtes conscients de ça.
M. Guillemette (Jean-Nicolas) :
O.K., écoutez, le 10 février dernier, à La Facture, il y a eu un
reportage sur une personne qui a offert une course jusqu'à Champlain — laissez-moi
juste terminer ça — qui
a offert une course jusqu'à Champlain en échange d'argent
et qui a vu son véhicule saisi par le Bureau du taxi. Elle faisait du
covoiturage et elle a quand même vu son véhicule saisi...
Mme
Ouellet : Je ne
parle pas de covoiturage.
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) :
Non, non, mais laissez-moi terminer là-dessus. Ce qu'on dit, c'est qu'il y a un flou par rapport à ça...
Mme
Ouellet : Oui.
Mais je ne vous parle pas de...
M. Guillemette (Jean-Nicolas) : ...il
y a un flou par rapport à cette loi-là, il y a un flou par rapport à...
Le Président (M. Reid) : Mme
la députée de Vachon, on va le laisser parler.
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) :
...et le point, c'est de dire : Nous, ce qu'on souhaite... Pourquoi
les autres États, villes ont créé de la réglementation pour encadrer ce
type de service là, c'est de dire : C'est les gens qui utilisent leurs actifs? Et cette loi-là a été créée en 2001.
On se doit de les analyser, de les revoir comme ça a été fait. Et le flou
par rapport à la personne, qui, elle, a vu son véhicule saisi... Pourquoi est-ce
qu'elle a vu son véhicule... Est-ce qu'elle commettait quelque chose d'illégal
au moment où elle a vu son véhicule saisi?
Mme
Ouellet : On a bien compris que vous demandez de changer la
loi, on a compris ça. Moi, ce que je vous dis, c'est qu'il y a une loi qui est là et que la loi exige, et donc
vous ne voulez pas le reconnaître, mais la loi, elle est très claire que, pour faire une course d'un point A à un point
B... et là on ne parle pas de covoiturage, il y a des règles qui
encadrent le covoiturage, on parle d'un
point A à un point B, qui est rémunéré, et vos chauffeurs d'UberX ne font pas
de covoiturage parce qu'ils ne se déplacent pas pour leurs propres besoins
de ce point A à un point B, ils vont chercher des courses, et vous
l'avez dit vous-même dans la présentation, que c'était pour effectuer des
courses. Donc, ce n'est pas du covoiturage.
Est-ce que
vous êtes conscients que vous vous exposez également à l'article 120 de
la loi sur le taxi? Donc, «une personne
qui accomplit ou omet d'accomplir — et,
quand on parle de personne, c'est une personne morale également, là — quelque
chose en vue d'aider une personne à commettre une infraction à la présente
loi»... Donc, avec votre plateforme d'UberX,
vous encouragez des honnêtes citoyens à être illégaux en faisant un service
taxi sans permis de taxi. Est-ce que vous êtes conscients que c'est ce
que vous faites actuellement?
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) :
Écoutez, un, l'illégalité, encore une
fois, je vais revenir là-dessus,
il n'y a aucun juge qui a
statué là-dessus. Je pense, c'est un...
Mme
Ouellet : ...
M. Guillemette (Jean-Nicolas) : ...mais,
attendez un petit peu, il n'y a aucun juge...
Mme
Ouellet : Non,
non, on le sait, ça.
• (17 h 10) •
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) :
Et la raison pourquoi... Il y
avait une injonction contre nous à Toronto lundi, mardi, qui a été débattue, il va avoir une décision qui va être rendue,
je vais vous encourager fortement à regarder cette décision-là. On a aucune idée de quel côté ça va
pencher, mais le point par rapport à ça, c'est de dire : La
réglementation qui est en place, ce qu'on
constate aujourd'hui, c'est qu'il y a besoin d'une évolution.
Le Bureau de la concurrence du Canada... Et je vais revenir là-dessus
parce qu'il y a des instances qui demandent également aux autorités de changer
la réglementation. Les réglementations... et
ici, là, je vais le lire, je vais citer ce qu'ils disent : «De façon traditionnelle, les municipalités ont soumis les
services de transport urbain reposant sur l'utilisation de véhicules
automobiles pour le transport des
personnes, dont les taxis, à une réglementation étroite. Toutefois, les
nombreuses préoccupations exprimées par les municipalités, les intervenants et les clients témoignent de
l'importance de s'assurer que les responsables de la surveillance réglementaire relative aux permis et à d'autres
critères concurrentiels importants mesurent adéquatement l'incidence de
leurs règles et de leurs politiques sur la
concurrence et, en fin de compte, sur les prix, les choix et la qualité des
services qui sont offerts aux consommateurs.»
Ce qui est
expliqué ici, et ce qu'on demande, puis je sais que c'est long, mais c'est dans
le rapport, vous pourrez le retrouver...
ce que le Bureau de la concurrence demande, c'est de dire : Il y a
de la réglementation qui est en place dans l'industrie du taxi
qui ne s'applique pas aux nouvelles technologies et qui se doivent d'être
revues.
Après ça, on
peut parler de sémantique durant les prochaines heures, puis je comprends le
point que vous soulevez ici. Nous, ce qu'on demande, c'est de
dire : Est-ce qu'on peut revoir la réglementation qui est en place dans le
but d'encadrer un nouveau type de service et
de le permettre? Pourquoi cette réglementation-là interdit aux honnêtes citoyens d'être
en mesure...
Mme
Ouellet : Donc, je comprends, là, on a tout entendu votre
argument. On comprend tout à fait que, dans
le fond, vous offrez actuellement un service illégal et vous souhaitez que le gouvernement le rende légal. On comprend tout à fait votre demande. Mais le
service, il est illégal, et c'est une concurrence déloyale. Et vous avez posé
la question un peu plus tôt : Comment ça se fait que le service est
si populaire? Bien, je m'excuse, lorsque vous n'avez pas de permis de
taxi à payer, lorsque vous n'avez pas de
TPS, lorsque vous n'avez pas de TVQ, c'est sûr que vous pouvez arriver moins
cher. Vous ne respectez pas les lois, c'est
un service qui est illégal. Et il faut faire attention avec l'innovation technologique. Il y a des
innovations technologiques également dans le milieu du taxi. Il ne faut pas se cacher
en arrière des innovations technologiques pour être illégal.
Et donc, moi,
ce que j'entends de votre présentation aujourd'hui, c'est que vous êtes en train de nous dire
que, comme un juge n'a pas statué sur la
loi, que vous ne voulez pas appliquer la loi. Ça fait que vous êtes en train de
dire au ministre du Transport d'aller tout
de suite au juge, parce que
toutes les saisies qu'il fait, puis tout ça, ça ne va rien donner. Vous allez continuer à payer les amendes pour les
chauffeurs que vous incitez dans l'illégalité. Ça, c'est quelque chose, là, vous incitez des honnêtes citoyens à devenir illégaux et vous êtes en
train de dire au ministre du
Transport : Nous, on va continuer dans ce sens-là, parce qu'on s'en fout des lois du Québec — et vous pouvez bien me parler du Canada,
mais, dans ce cas-ci, c'est une loi
québécoise qui s'applique — on s'en fout des lois du Canada, on va continuer. Et vous
dites au ministre : La seule façon de nous arrêter, c'est d'aller devant
un juge.
Donc, on vous
entend ici, en commission parlementaire, et vous pouvez être certain que je
vais réfléchir, et qu'on va avoir une
discussion pour savoir comment, au plus sacrant, on peut aller devant un juge
pour faire en sorte que vous ne mettiez pas en péril l'ensemble de
l'industrie du taxi au Québec.
Et, lorsque
vous dites : Ça se fait partout dans le monde, mais aussi, à plusieurs
places dans le monde, vous êtes illégaux.
À plusieurs places dans le monde, ils ont augmenté les amendes pour faire en
sorte de bloquer ce qui se passe. Et, à
d'autres places où vous êtes présents, et là on parle de San Francisco, la
perte de travail des chauffeurs de taxi, elle est très grande. Et c'est certain que, lorsqu'on
s'introduit, et vous avez la capacité financière de vous introduire dans une
industrie pour faire baisser les prix pour
être capables de prendre le marché... On le sait c'est quoi, ça. C'est de
prendre le marché pour, après ça,
être capable de pouvoir imposer vos prix. Ça ne veut pas dire qu'à long
terme... les prix bas actuellement sont là. De toute façon, à un moment
donné, TPS, TVQ, ça n'a pas de bon sens que ça ne soit pas payé.
Donc,
je trouve ça un peu dommage de vous entendre, mais je sais qu'ailleurs... et ça
serait le fun que vous puissiez avoir ce genre d'attitude là aussi au
Québec, vous pourriez peut-être nous expliquer ce que j'ai lu dans les journaux, et là vous connaissez probablement mieux
que moi, qu'à New York, à New York, UberX et Uber a accepté de se conformer aux règles. Donc, au lieu de les
changer — ce que
j'ai compris de ce que j'ai lu, mais vous nous informerez — a accepté de se conformer aux règles.
Pourquoi, ici, vous ne faites pas la même chose? Pourquoi vous n'acceptez pas de vous conformer aux
règles et que vous ne travaillez pas avec des chauffeurs qui ont des permis de
taxi, et que, du côté d'Uber, vous ne
preniez pas un permis d'intermédiaire? Et là je comprends, là, votre personne
24 heures, là, si c'est juste ce détail-là,
ça, on peut le regarder. Mais pourquoi vous n'acceptez pas de fonctionner dans
les règles et avec des gens qui ont
des permis de taxi? Vous le savez,
c'est une valeur de près de 200 000 $. Les gens ont souvent investi
leur retraite là-dedans, et ce que vous êtes en train de mettre en
péril, c'est la retraite des chauffeurs de taxi au Québec. Et même, à une certaine époque, ils ont racheté les permis
pour être capables d'avoir des revenus décents ici, au Québec, à Montréal
en particulier. Et vous êtes en train de
mettre en péril l'ensemble de cette industrie-là et des gens qui ont investi de
leur argent pour se faire une retraite.
Pourquoi est-ce que
vous n'acceptez pas... Parce qu'une plateforme technologique restera toujours
une plateforme technologique, là, mais ce
qui est en arrière de cette plateforme technologique là, ou je devrais même
dire en avant, c'est le transport du point A au point B. Et c'est ça, le
service que vous offrez à partir de votre plateforme technologique. Que la
plateforme technologique soit Internet, cellulaire ou qu'elle soit
téléphonique, elle est toujours l'intermédiaire
pour faire en sorte d'offrir, entre deux personnes, un service du point A au
point B, donc quelqu'un qui offre le
service et quelqu'un qui reçoit le service. Et, au Québec, on a décidé que la
personne qui offrait le service devait détenir
un permis de taxi et avoir tout un certain nombre de permis, de droit de
conduire un taxi, formation, sécurité, etc. Pourquoi vous voulez passer à côté de ces règles-là, et que, malgré que
le ministre des Transports affirme, et à plusieurs reprises, que vous êtes illégaux, vous continuez,
vous faites comme si ça n'existait pas et vous défiez la loi clairement
et simplement? Moi, je ne comprends pas cette attitude-là.
Le Président (M.
Reid) : Mme la députée, si on veut laisser une chance à nos
invités de répondre, il reste deux minutes. Allez-y, M. Guillemette.
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) : Écoutez, il y a plusieurs points. Merci,
Mme Ouellet, pour l'intervention. Je vais
essayer de répondre à la plupart des questions que vous avez posées. Si j'en
oublie, il me fera plaisir d'y revenir. La première : écoutez, avant même de lancer la plateforme UberX, on a
rencontré le ministère des Transports et on leur a soumis une ébauche. Ce n'est pas un projet de loi,
ce n'est pas un projet réglementaire, c'est une ébauche pour commencer
les discussions, que nous n'avons toujours pas eues par rapport à la plateforme
UberX et que nous souhaitons avoir.
Deuxièmement,
vous savez, si je me présente devant vous aujourd'hui, là, en tant qu'individu,
au-delà d'Uber, là, je savais à quoi je m'attendais. Je savais que je
m'en venais ici puis que j'aurais des questions difficiles, qui se doivent d'être répondues, et je pense que ça démontre
clairement la bonne foi que nous avons à vouloir collaborer avec vous,
parce que j'aurais pu ne pas venir
aujourd'hui, et je l'ai fait. Je suis papa depuis moins de deux semaines, je ne
dors pas beaucoup, mais je suis ici
quand même. Donc, j'aimerais, s'il vous plaît, au moins qu'on reconnaisse qu'on
a un intérêt à travailler avec les autorités, et l'objectif n'est
vraiment pas d'aller devant la cour et de dépenser de l'argent autant du côté
du gouvernement que du nôtre. On souhaite pouvoir s'asseoir et continuer à
discuter. Ce ne sera pas nécessairement des discussions
faciles, mais ce sont des discussions qui sont nécessaires, et on est ouverts à
discuter, pas par l'intermédiaire de papier,
en s'assoyant et en discutant, et surtout pas par l'intermédiaire des médias
non plus. Donc, ça, c'est la première chose.
La deuxième, au
niveau de la valeur des permis, je pense que ça, c'est important de regarder ça
également. Lorsque vous dites : Les
gens ont investi là-dedans, vous savez, les licences de taxi qui ont été
émises, je prends Montréal, par
exemple, dans les années 70, 80, 90, avaient des valeurs entre
30 000 $ et 50 000 $. Et, grâce à la spéculation
dans l'industrie, donc entre les chauffeurs... parce que, vous savez, pour
acheter une licence de taxi aujourd'hui, il faut aller sur Kijiji ou sur des sites de vente comme ça, ne passez
pas par le gouvernement, c'est une industrie privée. Et, grâce à la spéculation qui s'est faite entre les
différents chauffeurs propriétaires de taxi, ils ont été en mesure d'augmenter
la valeur de ces licences-là entre
50 000 $ à 200 000 $ aujourd'hui, et ils ont généré des
revenus. Il y en a qui en achètent aujourd'hui, la majorité des gens qui
ont acheté ces licences-là ont généré des profits intéressants par rapport à
ça.
Autre chose, c'est
qu'on ne demande pas au gouvernement...
Le
Président (M. Reid) : En terminant, parce qu'il ne reste pas
beaucoup de temps. Il reste quelques secondes.
M. Guillemette
(Jean-Nicolas) : Écoutez, en terminant, je vais essayer de conclure à
beaucoup de questions, il y a plein de points que je trouve intéressants, mais
par rapport à la valeur des licences, vous avez mentionné San Francisco. L'industrie du taxi, en 2009, à San
Francisco, c'était 140 millions de dollars. On est arrivés avec des
compétiteurs comme Lyft et Sidecar, on s'est établis, et il y a de la
réglementation qui a été créée par rapport à ça. En 2014, cette industrie-là du taxi, plus Sidecar, Lyft et Uber,
valait 500 millions de dollars. On a pris la tarte qui était grosse
comme ça et on l'a augmentée. L'industrie du
taxi ne sera pas détruite par leur présence, et les citoyens ont le droit
d'avoir un choix entre différents modes de transport...
Le Président (M.
Reid) : Merci.
M. Guillemette
(Jean-Nicolas) : ...mais, pour ça, il faut créer de la nouvelle
réglementation.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Alors, nous passons maintenant au
deuxième groupe d'opposition, et je passe la parole au député de Groulx.
• (17 h 20) •
M.
Surprenant : Merci, M. le Président. Alors, écoutez, la concurrence a
toujours permis aux entreprises de s'adapter,
de s'ajuster puis de devenir compétitives. Au niveau technologique, le secteur
du transport du taxi traditionnel a fait des efforts importants, on a réalisé, par
les groupes qui sont venus, depuis une dizaine d'années, ils ont innové
aussi puis ils ont implanté des nouvelles
choses. Vous arrivez avec une innovation qui est différente également. Mais,
par contre, dans tous les cas jusqu'à maintenant,
le côté légal est très important, d'opérer au niveau de la légalité, et
puis donc j'ai quelques questions à vous poser à cet égard-là en particulier. Mais ma première question, qui est plus
ou moins question de légalité... je vous poserais la question de façon
candide : Pourquoi n'êtes-vous pas enregistrés au Québec?
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) :
Écoutez, la plateforme... l'entreprise au Canada s'appelle Uber Canada inc. et elle est gérée à partir de Toronto.
Nous, on est un centre d'affaires, donc un centre, entre guillemets, marketing,
qui vise à recruter des chauffeurs
partenaires, également des utilisateurs. Donc, c'est la raison pour
laquelle on n'est pas enregistrés ici.
M.
Surprenant : Mais ma
compréhension, c'est qu'il y a plusieurs entités et puis que... Je vais poser la
question : Est-ce que vos entreprises
opérantes sont enregistrées au Canada, voire au Québec? Parce que là, moi, ce
que je lis, c'est qu'il y a une entreprise
qui fait du marketing, qui est enregistrée au Canada, mais, au niveau des
opérations en tant que telles, ça ne
le serait pas. Voulez-vous m'expliquer votre structure effectivement
corporative en ce qui concerne le Québec?
M. Guillemette
(Jean-Nicolas) : Écoutez, je ne suis pas nécessairement la meilleure
personne pour répondre à cette question-là.
Je vais faire de mon mieux, mais il me fera plaisir de vous revenir peut-être
avec plus de détails par après. Moi,
je gère ici le centre, là, je n'ai pas nécessairement une compréhension totale
de toute la structure qu'il y a en arrière
d'Uber. Mais, comme je vous le disais, ici, nous, le but, c'est du marketing.
Les opérations sont situées à l'extérieur, la plateforme, donc, tout ce qui est sur le cloud n'est pas situé au
Canada. Également, les transactions ne sont pas faites ici.
Mais un point
important que je tiens à souligner par rapport à ça, parce que ça a été soulevé
auparavant, et je souhaitais y répondre, au
niveau de la TPS, TVQ, au niveau de l'impôt, vous savez, tous les partenaires
chauffeurs qui sont sur la plateforme
Uber sont des travailleurs autonomes, O.K.? Ils ont l'obligation formelle de
déclarer 100 % des revenus qui sont générés en tant que
travailleurs autonomes. Ils ont une exemption de 30 000 $ par rapport
à la TPS, TVQ en tant que travailleurs
autonomes et, s'ils font plus de ça, ils ont l'obligation de payer de la TPS et
de la TVQ. Nous, on leur dit clairement ça et, au-delà de ça, on a créé...
M.
Surprenant : Je vous arrête tout de suite.
M. Guillemette
(Jean-Nicolas) : Oui.
M.
Surprenant : Ce que les citoyens et les conducteurs vont faire, là,
c'est un autre débat.
M. Guillemette
(Jean-Nicolas) : O.K.
M.
Surprenant : Mais ma question, c'est : Vous, qu'est-ce que vous
faites? Alors, vous faites des revenus, vous faites des profits, et
qu'en est-il de ces profits-là? Sont-ils imposés ici? Sont-ils réinvestis ici?
Je voudrais juste avoir une précision, là, à cet égard-là.
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) : Donc, vous savez, depuis notre lancement
en octobre 2013, en novembre 2013, pardon, Uber, la plateforme à
Montréal par Uber taxi et ce qui a suivi en octobre 2014 par UberX, on est
passés de deux employés à 12, on a investi
énormément puis on a fait plus de 1 000 partenariats avec différents
organismes de charité, avec
différents événements à travers le Québec, surtout concentrés à Montréal et à
Québec, parce que c'est là qu'on est présents.
Et, dans ces événements-là, on a réinvesti énormément, que ce soit en dons, que
ce soit en courses gratuites qu'on a offert
dans ces événements-là pour que les gens rentrent en sécurité, il y a un
investissement massif. On déménage dans des nouveaux bureaux d'ici le mois d'août, 6 000 pieds carrés, on va se
ramasser probablement à peu près entre 25 et 30 employés à temps plein
pour Uber à Montréal d'ici la fin de l'année 2015. Donc, il y a un
réinvestissement massif aujourd'hui qui est
fait, que ce soit au niveau du marketing ou que ce soit au niveau de
l'investissement auprès d'organismes, d'événements ou des employés.
M.
Surprenant : O.K. Alors, je comprends que vous dépensez au niveau du
développement de vos affaires, mais qu'au
niveau, par contre, de taxation vous n'y répondez pas, mais indirectement il
peut être sous-entendu que vous ne payez pas d'impôt ici, là.
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) : O.K. Écoutez, on respecte toutes les lois
fiscales canadiennes et québécoises. Ça, je peux vous l'assurer. Donc,
c'est ça, la réponse à la question par rapport à notre structure.
M.
Surprenant : O.K. Maintenant, vous disiez tantôt, au niveau du
covoiturage, vous dites que ce n'est pas encadré,
qu'il n'y a pas de réglementation présentement et que donc il y a un
«loophole», là. Alors, mais, par contre, est-ce que vous êtes conscient que l'article 36 de la Loi sur les transports
dit qu'il y a deux critères qui définissent le covoiturage? Et un, qui est le principal, le conducteur fixe la
destination. Donc, est-ce que vous pensez que, ce que vous faites avec
UberX, c'est effectivement du covoiturage dans l'esprit où c'est le conducteur
qui fixe la destination? Je voudrais vous entendre là-dessus.
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) : C'est une bonne question. Deux points, si
je peux répondre précisément à ça. La définition du covoiturage, il y a
cette définition-là qui est dans la loi, en effet, et il y a également celle
contre rémunération. Et c'est une
problématique qu'on a vue dans... vous le visionnerez, là, le reportage, au
niveau de La Facture, une problématique de dire :
Qu'est-ce que la rémunération? Donc, si on prend les per diem, qui sont au
niveau du gouvernement, c'est 0,51 $ du kilomètre, je pense. Si on prend
CAA-Québec, ça devient 0,23 $ si on prend le type de covoiturage. Donc, à
ce niveau-là, une clarification à avoir, et ça, je pense que c'est demandé par
tous les gens qui effectuent ça.
L'autre
chose, c'est que, écoutez, je pense qu'on est un mix au niveau du transport.
C'est du covoiturage. On utilise le covoiturage. En anglais, on dit
«ride-sharing». Ce n'est peut-être pas le terme exact de covoiturage ici, on
utilise le covoiturage citoyen urbain ici,
mais il y a une forme à travers ça, c'est quelque chose de nouveau, donc... Et je comprends la situation qui est
soulevée ici, mais, si vous me permettez de répondre, ça n'existait pas ce
type-là, de prendre... De permettre à des gens d'utiliser leur véhicule pour
déplacer d'autres personnes, de générer des revenus à travers ça, ça n'existait
pas. Et dans les États ou dans les places...
Une voix : ...
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) :
Dans les États ou dans les places où ça a été réglementé, l'objectif
en arrière de ça, c'était de se
dire : Écoutez, il y a un service qui est offert, que la population
utilise, qu'elle aime et qui a un impact économique à avoir. Ils se sont dits : On a deux choix. On va
essayer de se battre et de bloquer ça jusqu'à temps qu'on réussisse à
les bloquer ou on va s'asseoir, on va créer de la réglementation.
Parce qu'on
n'a pas à choisir... encore une fois, comme je le dis, là, on ne détruira pas
l'industrie du taxi; notre compétiteur principal, c'est l'auto solo. On
a un impact majeur par rapport à ça. En Union européenne, on a pris
l'engagement de réduire de 400 000 voitures le nombre de voitures qui sont
présentes sur les routes, au niveau de l'économie
et autres. Et les gouvernements décident de se dire : Écoutez, c'est un
phénomène qui est présent, on va adopter, on va embrasser l'innovation et on va essayer de créer de la
réglementation pour l'encadrer et pour s'assurer que ça puisse opérer de
la bonne façon ici, et, nous, c'est ce qu'on souhaite.
M.
Surprenant : Vous vous
éloignez, par contre, de ma question, monsieur, là. Ma question était
spécifiquement à l'égard de : Est-ce que
vous considérez que le conducteur, dans le cas d'UberX, fixe la destination,
donc il respecte de cette façon-là la Loi sur les transports?
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) :
Écoutez, c'est une bonne question. Je ne pourrais pas vous dire s'il la fixe
ou s'il ne la fixe pas. Je pense que le client, lui, choisit la destination où
il veut aller, la rentre sur l'application.
M. Surprenant : D'accord, merci. Je
vais laisser parler mon collègue, M. le Président.
Le Président (M. Reid) : Oui,
M. le député de Borduas.
M.
Jolin-Barrette : Oui,
Bonjour, messieurs. Quelques questions. Vous avez parlé tout à l'heure que vous
aviez soumis une ébauche de réglementation
au ministère des Transports. Est-ce que vous pourriez
déposer cette ébauche de réglementation à la commission, ici?
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) :
Certainement, on l'a ici, on va la déposer, je ne sais plus c'est où dans tous
les papiers qu'on a sortis, là, mais on va la retrouver puis on va la déposer à
la fin.
M. Jolin-Barrette : Parfait, merci. Vous avez également
mentionné au niveau de la question de l'illégalité, sur la question
du ministre, qu'il n'y avait pas de juge qui avait tranché. Est-ce qu'il y a des recours qui ont été entrepris
à ce jour au Canada ou au Québec?
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) : Il y a des recours qui ont été entrepris
dans la ville d'Edmonton, il y a des recours qui ont été entrepris dans la ville de Toronto. À Edmonton, ça a été
rejeté, à Toronto, ça s'est passé lundi et mardi, et le juge est en
train de statuer par rapport à ça. Vous savez...
M. Jolin-Barrette : Mais juste une
sous-question à ça. Est-ce que Uber, pour le Québec, va entreprendre des
procédures judiciaires pour avoir un jugement déclaratoire pour savoir :
Est-ce que votre situation est conforme à la législation québécoise applicable?
Parce que vous invoquez beaucoup le fait qu'il n'y a pas de juge qui a déclaré
ça illégal, mais, pour vous, parce que vous
prétendez que la situation est conforme, vous avez un autre modèle
d'affaires. Est-ce que ça ne serait pas opportun d'aller chercher un jugement
déclaratoire pour savoir?
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) : C'est une excellente question. L'objectif
qu'on a partout à travers le monde, c'est d'éviter autant que possible les tribunaux parce que c'est coûteux,
autant de notre côté que du côté des autorités, et ce qu'on souhaite,
c'est d'essayer de collaborer.
Les
premières étapes, je pense... Vous savez, dans la ville de Toronto, le maire
John Tory qui a été élu a fait une campagne électorale juste avant son
élection... avant son élection bien entendu, mais a fait une campagne
électorale en novembre
dernier et il a rencontré les citoyens. Et l'opinion qu'il avait sur Uber et
sur la plateforme UberX a changé à la rencontre
des citoyens parce que ces derniers lui disaient : On veut plus d'options
et autres. Il a pris position à dire : On se doit de modifier la
réglementation, on se doit d'adapter ça.
Et
je pense que ce que ça démontre, c'est que, nous, ce qu'on fait... et on
travaille de concert avec le maire Tory, avec le conseil municipal à Toronto, dans le but d'essayer de créer de
la réglementation. Je pense qu'il se doit d'avoir, à la base, un dialogue. Aller en cour, ça ne réglera
pas... ça va peut-être régler le problème ou ça ne le réglera pas, parce
que finalement le juge va dire : Bien,
écoutez, je rejette l'injonction, ou je rejette telle affaire. Pourquoi est-ce
qu'on n'essaie pas de s'asseoir, au
minimum? Pourquoi est-ce qu'on ne fait pas au moins cette étape-là de se
dire : Pour le bénéfice de tous, pour
le bénéfice de la population québécoise, les citoyens qui veulent plus
d'options, est-ce qu'on peut, à la base, regarder ça? Essayer de se dire : Est-ce qu'il y a des
choses qu'on peut modifier dans la loi, est-ce qu'il y a des choses qu'on
peut créer? Est-ce qu'on peut faire avancer
les choses? Et, si on arrive devant un blocage, on arrivera devant un blocage,
mais nous, on souhaite le faire.
Le
Président (M. Reid) : Alors, merci. Le temps est écoulé. Alors,
nous en sommes maintenant au temps réservé aux députés de l'opposition. Normalement, c'est trois minutes.
Cependant, on me dit, ici, que le groupe gouvernemental pourrait
souhaiter permettre au député indépendant d'utiliser le reste de son temps, qui
est neuf minutes, à la condition essentiellement cependant, je ne peux pas
permettre ça moi-même, c'est... Ça ne peut se faire que si j'ai un consentement de tous les groupes parlementaires.
Est-ce que j'ai consentement? Est-ce que j'ai consentement? Oui, alors
M. le député de Mercier, vous avez, au total, 12 minutes. À vous la parole.
• (17 h 30) •
M. Khadir :
Merci, je veux remercier tous les députés du gouvernement pour cette, en fait,
ce geste magnanime. C'est apprécié.
M. Guillemette, vous
êtes un jeune, donc, père de famille et je suis sûr que vous êtes ici en étant
conscient qu'évidemment il y a une certaine
hostilité parmi les parlementaires et les responsables politiques à l'idée
qu'une compagnie, une grande
compagnie américaine, puisse, disons, se comporter de manière qui est en
dérogation par rapport à nos lois. Mais
ce n'est pas vraiment... je veux dire, parce que je n'ai pas
l'habitude de voir une telle unanimité chez les parlementaires contre un modèle d'affaires. C'est très rare. Habituellement, c'est moi qui soumets ce genre de critique et je suis le seul
et je suis obligé de ramer puis, en trois minutes, essayer de faire la
démonstration que ça ne marche pas, cette affaire-là. Et là, cette fois-ci, il
y a comme... Et je pense que vous devez saisir ce que ça signifie sur le plan
politique.
Bien
sûr, on peut me prêter, je veux dire, d'être... on peut alléguer que je suis en
conflit d'intérêts parce que j'ai déjà
été chauffeur de taxi de père en fils; ce n'est plus le cas. Mais c'est
sûr qu'il y a beaucoup, vous savez, de familles, de personnes issues de
l'immigration qui ont émigré au Québec dont le taxi est devenu, par la force
des choses... parce que, pour différentes
raisons, d'autres types d'emploi, leurs professions leur sont fermées, bien, se
rabattent sur le taxi et parfois c'est vraiment les économies de toute
une vie.
Alors,
je comprends que ça représente des problèmes d'équité, d'accessibilité et de
prix élevé. Par exemple, vous avez
parlé des permis. Je m'en désole. On aurait pu penser la faire autrement pour
que ça ne soit pas une spéculation, mais, pour le moment, ces
chauffeurs-là n'ont pas décidé du modèle d'affaires, c'est le modèle qui
prévaut en société, et ils y ont mis toutes
leurs économies avec énormément de travail — vous connaissez les heures de travail, je
peux vous les rappeler, mais je suis
sûr, vous les connaissez — avec la perspective qu'à long terme, bien, il va leur rester
quelque chose.
Donc, les députés
présents ici, je pense, leur souci, c'est qu'en acceptant un nouveau modèle
d'affaires, ils ne poussent pas à la ruine et ne dépouillent pas des milliers
de petits propriétaires. Parce qu'il s'agit d'une économie essentiellement d'artisans au Québec. Il existe
quelques grandes compagnies, des flottes à Montréal, mais, si vous
excluez ces quelques flottes où il y a énormément de permis dans les mains
d'une petite minorité de personnes, l'essentiel de l'industrie du taxi, c'est
une industrie d'artisans, de petits propriétaires, de petits entrepreneurs.
Or, vous avez raison
de dire que c'est au bénéfice des conservateurs... je dis «des
conservateurs» — non,
surtout pas!
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Khadir :
Pouvez-vous effacer ça? Effacez ça, s'il vous plaît. C'est au bénéfice des
consommateurs que vous aimeriez voir
les parlementaires agir. Je vous l'accorde. Moi, je n'ai rien contre l'économie
de partage, je suis tout à fait d'accord,
c'est dans la fibre de Québec solidaire. On appelle ça l'économie sociale ou
l'économie solidaire, c'est-à-dire que des individus et des citoyens en
société mettent en commun des ressources pour les utiliser en commun, hein? Certaines personnes nous reprochent d'être un peu
trop justement en commun et peut-être possiblement communistes. Mais c'est l'idée de dire : S'il y a moyen, sans
marchander tout, commercialiser tout, d'utiliser des ressources en commun,
nous, ça nous va très bien. On n'est pas en faveur de tout marchander, tout
commercialiser.
Or,
ce n'est pas le modèle Uber. Uber ne vient pas créer un environnement qui
favorise entre les citoyens le partage des ressources. Vous voulez en
fait puiser dans un potentiel commercial, le concentrer entre votre main. Bien
sûr, ça passe par une baisse des conditions
et aussi par la concurrence déloyale que ça introduit, par une baisse des prix,
donc ça favorise à court terme les citoyens,
ça favorise les consommateurs. Mais la réalité, c'est que c'est exactement avec
cet argument que Wal-Mart a fait son nid dans l'économie américaine. Mais, peu
à peu, dans des petites villes, dans des villages
tout entiers, des petits commerces, peu à peu... même si les citoyens, là, puis
c'était devenu très populaire, les consommateurs se sont rués parce que
ça offrait un service, un bien à faible prix. C'est sûr, c'était à leur
avantage. Mais nous, on est ici pour voir
les conséquences à long terme d'utiliser l'exemple Wal-Mart pour éviter de
tomber dans le même panneau.
Et
actuellement tout le monde reconnaît que Wal-Mart a nui considérablement à la
vitalité économique, à la survie de
plusieurs régions. Beaucoup de gens qui y trouvaient leur compte, par la suite,
ont vu qu'ils ont perdu des jobs, ils
ont perdu des vies, ils ont perdu des villages, ils ont perdu une économie
locale qui faisait leur richesse d'une autre manière. Donc, un profit à
court terme en allant acheter à faible prix ou en embarquant dans un taxi pour
prendre le modèle à faible prix... ils ont
ruiné une petite économie locale sur laquelle reposaient leur qualité de vie et
leur propre job. Donc, c'est ça qu'on
cherche à éviter. Ce n'est pas pour vous nuire. Et je pense qu'à long terme,
pour vos propres familles et l'économie du Québec, qui vous tient à
coeur, c'est important de faire ça.
Donc,
j'arrive à l'idée qu'il ne faut pas uniquement penser à l'intérêt à court terme
de celui ou celle qui prend le taxi,
il faut penser à la pérennité à long terme d'une économie dans laquelle les
artisans du taxi jouent un rôle important. Ils sont plusieurs milliers
au Québec.
Maintenant,
est-ce que vous pourrez répondre à une question que j'ai, qui rejoint la
question de mon collègue de la CAQ? Dites-moi si vous avez d'autres informations que moi. La société américaine Uber, donc véhicules de
tourisme avec chauffeur, a mis en place un système
complexe d'optimisation fiscale, qui est une manière d'éviter la fiscalité.
Ce n'est pas de l'évasion illégale, vous
avez raison, mais c'est d'essayer de trouver des entourloupettes pour éviter de
payer de l'impôt. Donc, un système complexe
d'optimisation fiscale qui lui permet de faire remonter successivement ses
bénéfices exonérés de l'impôt,
donc sans payer d'impôt, dans plusieurs paradis fiscaux jusqu'aux Bermudes, selon une
affirmation de BFM Business. Hein, ça, ce n'est pas Québec solidaire, là, c'est
le système prisé par les grandes entreprises. Il y en a d'autres, il n'y a pas
juste Uber. Et malheureusement...
Et sachez bien que je
ne vous accuse pas uniquement. Je suis peut-être le seul qui régulièrement
lance des accusations comme ça contre des entreprises
qui mettent dans l'embarras les députés des autres partis, parce que souvent ils sont liés à des... Bon. Je ne voulais pas rentrer dans ce détail,
mais... Je me suis même permis de déjà critiquer un des fondateurs de la CAQ qui
est dans les banques et qui fait la même chose dans des filiales dans les
Bermudes. Donc, ce n'est pas quelque chose qui se dirige uniquement vers vous.
Nous, on critique vraiment toute cette procédure d'évitement fiscal.
Or, Uber, par le
biais de sous-traitants, facture une partie de ses prestations à une filiale
basée à Amsterdam. Et un des utilisateurs
d'Uber à Montréal, que j'ai consulté, dit qu'effectivement la facture qu'il lui a remise porte le numéro d'une entreprise qui est située en Hollande, donc, autrement dit, des bénéfices vont là-bas. Ils ne paient pas d'impôt au Québec. Est-ce que vous avez d'autres informations que
ça? Est-ce que vous niez ceci?
Le Président (M.
Reid) : M. Guillemette.
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) :
Écoutez, donc, il y a plusieurs choses. Combien de temps j'ai pour
répondre?
Le Président (M.
Reid) : Vous avez quatre minutes et demie, à peu près.
M. Khadir :
Puis profitez-en pour répondre à d'autres choses, si vous avez...
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) :
Bien, à vrai dire, il y a plusieurs points que vous avez soulevés là-dedans,
puis je vais essayer de répondre à tous ces
points-là parce qu'il y en a, il
ne faut pas en oublier. Vous parliez
de l'industrie du taxi. Il faut
comprendre que ça ne détruira pas l'industrie du taxi. C'est un mythe de se dire que ça va
détruire l'industrie du taxi.
Vous savez, l'industrie
du taxi, quand on a lancé Bixi, à Montréal, ils ont sorti dans les médias, ils
ont dit : Ça va couper 30 % à 40 % de nos revenus. Quand on a
lancé l'autobus 747, qui relie le centre-ville à l'aéroport de Montréal, ils sont sortis dans les médias, ils ont
dit : Ça va couper 40 % de nos revenus. Quand on a lancé
l'autopartage avec Car2Go, Communauto, ils
ont dit : C'est des criminels qui vont couper 30 % à 40 % de nos
revenus. Toute forme de compétition
possible, l'industrie du taxi sort et dit : La concurrence déloyale, c'est
mauvais pour nous, ça va nous détruire.
La réalité, et je
pense que M. Poëti l'a souligné, ça fait sept mois qu'on est au Québec, la
valeur des licences de taxi n'a pas diminué.
Si on prend San Francisco — ça fait cinq ans qu'on est à San Francisco — je vous le disais tout à l'heure, le
marché de l'industrie du taxi, c'était 150 millions, c'est devenu
500 millions... 140 millions, pardon, c'est devenu 500 millions, et la part de l'industrie du taxi est restée
la même. Et pas juste ça : le 25 janvier 2015, il y avait un article qui rapportait qu'il y avait des nouvelles
licences qui avaient même été émises à San Francisco, parce qu'une des façons, ça a été de dire : Écoutez, on va
émettre plus de licences parce qu'il y a une demande. La raison pourquoi il y
a une forte hausse dans l'industrie du taxi, c'est qu'il n'y a pas assez
d'offre par rapport à la demande. Et ils ont émis plus de licences, et elles se
sont vendues, ces licences-là.
Donc, ça ne détruira
pas l'industrie; les gens vont continuer d'être là. Et ils ont pris un risque.
C'est une entreprise privée. La personne qui
achète une licence de taxi, elle prend un risque d'entrepreneur. C'est vrai que
c'est un entrepreneur. Et elle doit
faire face à une certaine forme de concurrence des fois. Mais cette
concurrence-là est au bénéfice de
tous, comme dans toutes les autres formes d'industries. Il y a des gens qui se
sont acheté un HMV, il y a des gens qui se sont acheté un club vidéo : aujourd'hui, ils doivent faire face
à Netflix, à iTunes. Est-ce qu'on va arrêter ces innovations
technologiques là pour protéger ces gens-là? Je pense que la réponse, c'est
non. Mais l'industrie va préserver.
Et le gouvernement...
Aujourd'hui, ce qu'on demande, c'est de dire : Réglementez-nous.
Assoyons-nous. Créons de la réglementation
pour encadrer ça et permettre peut-être aux autres... Pourquoi, au Maryland,
tout le monde, Lyft, Sidecar, Uber et les taxis sont d'accord avec la
réglementation qui a été mise en place? Parce qu'ils considèrent que ça a été fait de la bonne façon, parce qu'on a
pris le temps de s'asseoir. Et, nous, c'est ce qu'on demande
aujourd'hui.
Deuxième
chose. Vous savez, la façon dont c'est réparti, 80 % des revenus d'une
course s'en vont directement au partenaire
chauffeur, 20 % s'en vient à nous. C'est le frais de service qui est
chargé pour l'application. L'application est en
effet basée à Uber B.V., c'est dans les nuages, donc c'est le numérique, et, en
effet, les courses sont chargées par Uber
B.V., c'est la structure fiscale
qu'on a mise en place, qui respecte les lois qui sont ici. Je ne suis pas la
bonne personne aujourd'hui pour
décider si, oui ou non, ces lois-là sont les bonnes et si elles devraient être
modifiées; nous, on est prêts à collaborer par rapport à d'autres
aspects.
Et l'autre
point par rapport à ça, c'est de dire : Cet argent-là, il reste, il s'en
va aux citoyens. Et, si on compare ça à ce qui se passe dans l'industrie
du taxi, il faut faire une énorme distinction entre l'intermédiaire de taxi,
qui sont des intermédiaires qui dispatchent
les appels, les propriétaires de licence, qui ont fait un investissement, et
les chauffeurs de taxi, qui, eux,
doivent payer 600 $ par semaine pour louer un véhicule, qui doivent payer
500 $ par mois pour avoir accès à un intermédiaire, qui doivent
payer 7 % de leurs courses lorsqu'ils paient avec une carte de crédit.
Donc, si on demande pourquoi les chauffeurs
n'acceptent pas les cartes de crédit, c'est parce que les intermédiaires
chargent 7 %. Ces gens-là...
• (17 h 40) •
M. Khadir : Contrairement à
d'autres, je ne vous ai pas souvent interrompu, mais laissez-moi une petite...
Une voix : Vas-y, vas-y,
vas-y.
M.
Guillemette (Jean-Nicolas) : Donc, c'est de dire : Ce système-là,
il est peut-être également malade. Ce n'est pas à nous de le dire
aujourd'hui, mais le chauffeur de taxi a ses... Pardon.
M. Khadir : Je suis d'accord avec vous qu'on a
besoin de changer un certain nombre de choses dans l'industrie du taxi, qui va mal... de nombreuses années. Et
effectivement il ne faut pas considérer les autres offres de transport
comme étant un problème pour le taxi, mais
intégrer le taxi dans des modifications, dans des changements de toutes natures
qu'il y a eus que vous avez nommés : Bixi, autobus vers l'aéroport et bien
d'autres que je pourrais nommer. Mais ce pas... il faut que vous fassiez partie de l'ensemble. Et, si vous voulez faire
partie de l'ensemble, il faut commencer par vous soumettre à l'exigence légale que vous propose le ministre. Je ne vois
pas d'autre solution. Et la première exigence légale et morale, c'est de
payer les impôts au Québec.
Donc, le
Québec pourrait être innovateur — je parle de Uber Québec — en forçant l'ensemble de Uber International à respecter les lois. La première
loi morale que toute entreprise devrait respecter, c'est-à-dire de payer
ses impôts dans les juridictions dans
lesquelles il tire ses profits... Est-ce qu'on peut s'entendre là-dessus, que
vous fassiez un effort de l'autre côté?
Le Président (M. Reid) :
Malheureusement, le temps vient de terminer, le temps est écoulé. Alors, je
vous remercie, M. Guillemette, M. Crête aussi, de votre contribution à nos
travaux.
Des voix : ...
Le Président (M. Reid) : S'il
vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Nous allons juste terminer.
Alors, M. Guillemette, si vous voulez faire parvenir le document que vous aviez
au secrétaire de la commission, on va le distribuer aux membres de la
commission.
Mémoires déposés
Je dépose
également, avant de terminer, les mémoires des organismes qui ont soumis des
mémoires et qui n'ont pas été
entendus en commission, donc c'est officiellement déposé. Et la commission a
accompli son mandat. Je lève donc...
Mme
Ouellet : ...
Le Président (M. Reid) :
Pardon?
Mme
Ouellet :
Juste avant, est-ce qu'on peut avoir la liste des gens qui ont déposé... je
sais qu'on va l'avoir par courriel, là, mais juste pour le bénéfice...
Le Président (M. Reid) : Mme
la secrétaire a peut-être ça, ce serait...
Mme
Ouellet :
Juste les nommer... C'est-u possible de les nommer, la liste de ceux qui ont
déposé sans venir?
Le Président (M. Reid) :
Alors, prenons quelques instants.
(Consultation)
Le Président (M. Reid) :
Alors, il y a deux groupes. Alors, l'Office des personnes handicapées du Québec
et la ville de Montréal.
Alors, la commission a accompli son mandat et
elle ajourne ses travaux sine die. Bonne soirée tout le monde!
(Fin de la séance à 17 h 43)