(Neuf heures trente-quatre minutes)
Le Président (M. Reid) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission
des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à toutes les personnes
dans la salle de bien vouloir éteindre la
sonnerie de leurs téléphones cellulaires, ce que je viens de faire moi-même. Je
voudrais en profiter pour souhaiter
aux personnes à qui je ne l'ai pas fait une bonne année. Nous commençons cette
année pour la commission, c'est notre première rencontre.
Alors, la commission est réunie afin de procéder
à des auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet
de Stratégie gouvernementale de développement durable révisée 2015-2020.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Soucy (Saint-Hyacinthe)
sera remplacée par M. Surprenant (Groulx).
Le
Président (M. Reid) : Merci. Alors, voici l'ordre du jour de ce
matin. Nous allons débuter par des remarques préliminaires. Par la suite, nous entendrons les groupes suivants :
le Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement — les
gens sont déjà présents — l'Institut
de l'évolution du transport, Fonds d'action québécois de développement durable,
et nous terminerons avec le groupe Vivre en ville.
Remarques préliminaires
Alors, nous
allons commencer par les remarques préliminaires, et je cède la parole au
ministre du Développement durable, de
l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques pour ses
remarques préliminaires. M. le ministre, vous disposez de six minutes.
M. David Heurtel
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Alors, je tiens à vous saluer, ainsi
que Mme la secrétaire, mes collègues de la députation libérale, les collègues des partis de l'opposition. Je voudrais
vous informer, je suis accompagné de la sous-ministre du ministère du Développement durable, de l'Environnement et de
la Lutte contre les changements climatiques, Mme Christine Tremblay, du
sous-ministre adjoint à l'état de l'environnement, à l'écologie et au
développement durable, M. Patrick
Beauchesne, et du directeur du Bureau de coordination du développement durable,
M. Luc Vézina. Je suis également accompagné de mon conseiller politique,
M. Jacques Martineau.
Alors, vous
me permettrez, étant donné que la convention... Je ne sais jamais c'est quoi,
la bonne, là, mais jusqu'à quelle date on peut se souhaiter bonne année,
mais je me dis que 23 janvier...
Une voix : ...
M. Heurtel : On fait une résolution
là-dessus, j'ai... De consentement? Alors, je tiens à souhaiter à toutes et à
tous une bonne année 2015, une année très importante qui commence avec un sujet
fondamental, d'échanger — et
j'espère véritablement d'avoir une véritable conversation — sur
la prochaine stratégie de développement durable du gouvernement du Québec.
Je tiens à
souligner que nous allons, dans les prochains jours, entendre plus de 40
groupes qui vont venir présenter leur
position sur cette stratégie. Et je tiens également à préciser que tous les
mémoires — parce qu'on
a reçu, évidemment, plus d'une quarantaine de mémoires — tous
les mémoires auront été lus, et analysés, et considérés dans l'élaboration des
suites de cette commission.
Comme je le disais également, nous, ce qu'on
recherche avec cette stratégie, c'est véritablement avoir un échange avec les représentantes et représentants
de la société civile qui viendront présenter leur point de vue ainsi
qu'avec les collègues pour voir comment on peut bonifier ce document. Ce
document a été conçu principalement en 2013, et il faut comprendre que, depuis
ce temps-là, il y a eu beaucoup, beaucoup, beaucoup d'événements, d'échanges,
de réflexions qui ont été faites en matière
environnementale, beaucoup de dossiers, et la notion de développement
durable évolue rapidement. Et je crois qu'on
a ici une véritable opportunité d'ensemble voir comment l'État québécois, à
travers ses ministères, ses organismes, peut
aller de l'avant au cours des prochaines cinq années et véritablement avoir une
stratégie de développement durable qui
intègre véritablement et concrètement les meilleures pratiques qui illustrent
les trois grands piliers que constitue le développement durable, soit,
évidemment, la protection de l'environnement, l'équité sociale et le
développement économique.
Et donc ce
que nous proposons, c'est véritablement un échange qui va non seulement se
concentrer sur l'état actuel des
choses, mais voir comment, pour les générations à venir, nous pouvons avoir un
ensemble d'orientations, d'objectifs et de mesures qui vont nous permettre non seulement
pour les générations actuelles de s'assurer que le gouvernement s'assure
d'adopter et d'intégrer véritablement les meilleurs principes possible en
matière de développement durable, mais qu'également
pour les générations futures on puisse avoir une véritable évolution par
rapport à la dernière stratégie et mettre la table, évidemment, pour les stratégies à venir. Et ça, ça va vouloir
dire fondamentalement de commencer à intégrer encore plus, je crois, la notion de changements climatiques à la notion
de développement durable, et c'est de voir... Et j'espère qu'à partir
d'aujourd'hui et durant les prochaines semaines nous aurons l'occasion
d'échanger davantage sur comment on va
pouvoir véritablement intégrer tout ce qui s'est fait et tout ce qui se fait de
façon continuelle et de façon très rapide en matière de changements
climatiques, étant donné l'urgence fondamentale d'agir, et comment on peut
intégrer ce qu'on fait déjà et ce qu'il reste à faire en matière de changements
climatiques à, justement, ce qui a déjà été fait et ce qu'il reste à faire en
matière de développement durable.
Alors, M. le Président, je vous souhaite et je nous souhaite tous une excellente commission, et je vous remercie.
• (9 h 40) •
Le
Président (M. Reid) :
Merci, M. le ministre. J'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle
à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de
3 min 30 s.
M. Sylvain Gaudreault
M. Gaudreault : Oui. Merci,
M. le Président. Alors, à mon tour de vous saluer, saluer les gens qui vous accompagnent, de la commission, une heureuse année.
Les gens du ministère également, Mme la nouvelle sous-ministre, nouvelle sous-ministre à l'Environnement, une sous-ministre d'expérience. Mais bienvenue, puis merci de se
joindre à ce travail. Je voudrais
saluer les collègues qui sont ici, autour de la table, collègues
de la deuxième opposition, collègue de Québec solidaire et, évidemment, mon collègue de Matane-Matapédia, les gens qui m'accompagnent, un
recherchiste et un boursier de la Fondation Jean-Charles-Bonenfant.
Écoutez,
je vais essayer d'aller rapidement, évidemment — j'ai
peu de temps — pour
dire que c'est, effectivement, essentiel
de faire ce travail, cette consultation. Moi, je veux vous dire tout de suite cinq priorités sur lesquelles, là, j'entends travailler, et questionner,
et bonifier la stratégie.
Vu que c'est
une deuxième stratégie, je souhaite que, premièrement, nous soyons
capables d'examiner davantage un plus
grand élargissement de la stratégie de développement
durable en dehors des ministères
et organismes du gouvernement du Québec, donc comment on peut arriver à
ce plus grand élargissement.
Deuxièmement, c'est toute la dimension des ressources financières, dimension budgétaire.
On est dans une période, évidemment, d'atteinte de l'équilibre budgétaire avec
des coupures importantes un peu partout. Je veux m'assurer que
les ressources financières suivront les ambitions de cette stratégie de développement
durable.
Troisièmement — et
je suis heureux d'entendre le ministre là-dessus dans ses remarques
préliminaires — intégration
des enjeux de lutte aux changements climatiques. Vous savez qu'évidemment tout le défi des
changements climatiques nous interpelle tous comme élus. Nous avons devant
nous une stratégie qui vise à aller jusqu'en 2020, ce qui
correspond aux cibles de réduction des gaz à effet de serre du gouvernement.
Alors, il faut intégrer la lutte aux changements climatiques dans la stratégie
de développement durable.
Quatrième
élément — et
c'est transversal comme l'est la stratégie de développement
durable — c'est l'accès à l'information. La transparence, pour moi, est un critère de ce développement durable. On
s'aperçoit qu'au ministère de
l'Environnement c'est un, sinon le ministère où il y a le plus de demandes
d'accès à l'information, mais où il y a un «backlog»,
je dirais, si vous me permettez l'expression, dans le traitement des demandes
d'accès à l'information. Je
pense que c'est important de traiter de cette question-là aussi.
Cinquièmement, tout le lien extrêmement porteur
de l'aménagement du territoire et des transports. Donc, ces deux volets-là, on ne peut plus les considérer en
vase clos, l'aménagement du territoire et les transports. Il faut intégrer davantage
dans une optique de développement
durable... Vous me permettrez de
dévoiler mon intérêt là-dessus, ayant été ministre de ces deux ministères,
mais ce qui donnait des résultats, à mon sens. Alors, nous aurons à travailler là-dessus.
Donc, ça,
pour moi, c'est les cinq piliers. Ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas de choses qui vont décliner de cela, mais ça m'apparaît les cinq piliers. J'aurai également
un souci toujours d'exemplarité, hein? Si on veut une stratégie de développement durable qui
s'adresse principalement au gouvernement, bien, il faut que le gouvernement soit exemplaire. Ça, ça veut dire être exemplaire dans ses
pratiques, être exemplaire dans l'application des plus hauts standards de développement
durable et dans une obligation de résultat.
Alors, là-dessus, merci. Puis surtout j'aurai
une très grande écoute à l'égard de la quarantaine de groupes qu'on va
recevoir.
Le Président (M. Reid) : Merci,
M. le député de Jonquière. Je passe maintenant la parole au représentant du deuxième
groupe d'opposition, le député de Nicolet-Bécancour.
M. Donald Martel
M.
Martel : Merci,
M. le Président. D'abord,
j'aimerais saluer tous mes collègues parlementaires et remercier nos invités d'avance pour
leur apport à nos travaux et aux réflexions qui vont permettre d'améliorer le
projet de stratégie gouvernementale du ministre.
Le développement durable, c'est une façon de s'assurer de notre avenir à
tous en reconnaissant et en respectant les capacités de notre environnement,
cette terre qui nous nourrit et répond à nos besoins. Nous devons tous y
participer, notamment en réduisant notre consommation, en
réutilisant et en recyclant pour s'assurer de ne pas compromettre la capacité
des générations futures à répondre à leurs propres besoins.
Mais l'administration gouvernementale doit également jouer un rôle et montrer l'exemple. Pour moi,
c'est clair, voyant que les défis qui
nous attendent dans les années à venir... Ne serait-ce que la réduction des
émissions de gaz à effet de serre,
nous devons renforcer et améliorer les pratiques de gestion écoresponsables
ainsi que la prise en compte des principes de développement durable dans l'administration publique québécoise, dans l'attribution des contrats publics par exemple.
C'est
pourquoi la Coalition avenir Québec voit cette stratégie révisée d'un bon
oeil. Elle est cependant
incomplète et comporte un certain nombre de lacunes. Notamment, elle prétend
que les résultats qualitatifs ou quantitatifs sont établis pour chaque objectif à la page 25 et 28. Or, elle ne fixe pas de
résultats quantitatifs précis pour la plupart d'entre eux, puis les cibles quantitatives énoncées sont
vagues. Nos travaux auraient été beaucoup plus constructifs s'ils avaient porté sur
les indicateurs et objectifs, qui seront seulement connus en décembre 2015.
Puis, malgré
ce qui est écrit, la stratégie révisée oublie de prendre en compte plusieurs
constats et recommandations contenus
dans le rapport quinquennal de mise en oeuvre de la stratégie
2008-2013 et le rapport sur l'application de la Loi sur le développement durable
d'avril 2013.
Je suis donc
heureux de pouvoir questionner et entendre les remarques et recommandations de nos invités, ainsi que les réactions du ministre à leurs
propos. Le but, c'est de rendre un meilleur produit final, et je crois que nous
avons invité les bonnes personnes pour le faire. Merci, M. le Président.
Auditions
Le Président (M. Reid) : Merci,
M. le député de Nicolet-Bécancour. Nous allons passer maintenant à la conversation avec notre premier groupe. Alors,
nous avons avec nous le Regroupement national des conseils généraux de l'environnement. Alors, je vous souhaite la bienvenue, évidemment, et je vous demande
de bien vouloir, d'abord, vous
présenter et présenter la personne qui vous accompagne. Et je vous rappelle que
vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, et je vous avertirai peut-être
dans la dernière minute si vous voulez. La parole est à vous. Ensuite, nous
procéderons à un échange.
Regroupement national
des conseils régionaux
de l'environnement du Québec (RNCREQ)
M. Lessard (Guy) : Merci bien, M. le
Président. M. le ministre, Mmes, MM. les commissaires, mon nom est Guy Lessard. Je suis président du Conseil régional
de l'environnement Chaudière-Appalaches, juste de l'autre bord de la rivière en face, ici, et je suis également
président du comité pour le développement durable au regroupement. À ma
droite, Philippe Bourke, qui est le
directeur général du regroupement. Et, à ma gauche, ce n'est pas le vilain,
mais c'est la place qui restait, c'est Cosmin Vasile, le directeur
général du Conseil régional de l'environnement.
Écoutez, à
mon tour, j'aimerais vous transmettre les meilleurs voeux de nouvelle année.
Elle sera probablement très, très, très occupée, alors je vous la
souhaite bonne et fructueuse.
Écoutez, je
vous dis un petit mot sur les conseils régionaux de l'environnement. Au départ,
vous les connaissez, les conseils régionaux contribuent à harmoniser
développement économique, durabilité écologique et équité sociale dans les régions. On est présents dans les 16 régions
du Québec, sauf le Nord, tandis qu'au niveau du regroupement on a pour
mission de contribuer à la définition d'une vision nationale du développement
durable au Québec, de représenter l'ensemble
des conseils régionaux de l'environnement et d'émettre des opinions publiques
en leur nom. Alors, c'est un groupe de bénévoles appuyés d'un
encadrement minime, mais nous essayons de défendre des valeurs fondamentales
comme la solidarité, l'équité et le respect.
J'aimerais
vous dire un petit mot aussi sur notre engagement vis-à-vis le développement
durable. Lorsqu'en 2006, à l'unanimité des membres de l'Assemblée nationale,
on avait adopté la Loi sur le développement durable, ça faisait déjà plusieurs
lunes que nous, au Regroupement national, on fréquentait assidûment les
politiciens du Québec, les administrateurs
pour lancer cette idée de l'importance, pour le Québec, d'intégrer les
principes du développement durable dans
la gouvernance de l'État. Et on s'est impliqués par la suite dans les
nombreuses consultations qui ont été menées sur la stratégie, sur les indicateurs de développement
durable, et, à chaque fois qu'on s'est présentés en commission
parlementaire, ici ou encore au BAPE, on a toujours bâti notre argumentaire sur
les principes du développement durable.
Une des belles réussites qu'on met un petit peu
à notre crédit, si vous le permettez, c'est lorsqu'on a proposé au BAPE n° 1 sur les gaz de schiste
d'intégrer l'évaluation environnementale stratégique dans le processus de prise
de décision. Ça a été retenu par le BAPE, ça
a été réalisé par la commission. Et il y a eu le deuxième BAPE qui,
finalement, a recommandé au ministre et au
gouvernement de faire une évaluation environnementale stratégique sur les gaz
de schiste, et, à mon humble avis, ça a aidé beaucoup à une prise de
décision éclairée de la part du gouvernement du Québec.
• (9 h 50) •
Alors, dans
le chapitre 3 de notre mémoire, on vous fait une liste complète — ou presque — de notre implication dans les dossiers du développement durable. Je ne
vous en ferai pas la lecture parce qu'on va revenir avec des recommandations
précises avec mes deux collègues tout à l'heure.
Je voudrais aussi
vous dire que, dans le chapitre 4 de notre mémoire, on a essayé de faire un
survol de toute la littérature qu'on
retrouve dans les trois rapports que le ministre a mis à notre
disposition en prévision de la commission parlementaire. Alors, c'est un
travail important qui s'est fait à l'interne au niveau du ministère. C'est évident qu'on
ne peut pas traiter de toutes les dimensions
de ces rapports-là ici en 10 minutes, mais nous avons accordé une attention
particulière à l'analyse de la performance des ministères
et des organismes, particulièrement les mécanismes de mise en oeuvre, les réalisations et les résultats où on a des
recommandations très précises. Et on a extrapolé un peu l'avenir d'ici
2020 en parlant de la mise en oeuvre du développement durable dans la société
québécoise. Alors, d'emblée, je laisse la parole à Philippe pour la suite des
choses.
M.
Bourke (Philippe) : Merci beaucoup. Donc, Philippe Bourke, directeur
du regroupement des CRE. D'abord, je voudrais souligner... Bien, pour
ceux qui ont déjà eu l'occasion de parcourir notre mémoire, effectivement on a
fait plusieurs recommandations très
importantes, et il ne faudrait pas vous laisser dans l'impression qu'à cause de
ça on est très négatifs. Au contraire,
je pense qu'on le fait dans le même esprit qu'on intervient généralement, les
CRE et le regroupement, avec des remarques constructives. Notre
objectif, c'est vraiment d'aider le gouvernement à atteindre ses objectifs
parce qu'on considère que ce qu'il poursuit, le gouvernement, à travers cette
stratégie-là, c'est essentiel, nécessaire et même urgent.
Et, en ce sens-là, je
voudrais dire... puis je paraphrase un peu M. Lessard, mais on est extrêmement
fiers du leadership du gouvernement du
Québec dans le développement durable. On est fiers de l'expertise qui s'est
construite puis qui continue à se construire
au ministère du Développement durable. Puis dans les autres ministères aussi,
parce qu'il y avait une volonté de
transférer cette expertise-là. On est fiers des mécanismes qui ont été mis en
place comme la loi et la stratégie.
En
ce qui concerne la présente stratégie, bien, c'est sûr... Je pense que c'est
important, on a des recommandations, mais globalement on est satisfaits
de voir les enjeux, les objectifs, les orientations qu'il y a là. On voit
l'effort qui est fait pour davantage de
cohérence, d'intégrer davantage les grandes orientations du gouvernement. Entre
autres, l'enjeu des changements climatiques, donc on est contents de voir
que c'est bien inscrit dans cette volonté-là. Et donc je pense qu'on a quand
même une base très, très solide.
Là-dessus,
je voudrais quand même juste, avant de laisser la parole à mon collègue,
mentionner que oui, c'est sûr qu'on a
des recommandations importantes. Mais, si je paraphrase un peu, vous savez, Ban
Ki-moon, qui est le secrétaire général de l'ONU, qui disait récemment, à
l'intention des changements climatiques, qu'on était à peu près la dernière génération
à avoir le privilège de pouvoir agir, après nous, probablement que ça ne sera
pas possible de stopper cette menace, et donc ça nous impose une très grande
responsabilité... À mon sens, la chose prévaut aussi en matière de développement durable. On ne peut plus juste se
contenter d'essayer, on doit se donner les moyens de réussir, et c'est
en ce sens-là que, nos recommandations, on
pense qu'elles vont nous aider à réussir l'objectif que le gouvernement
poursuit. Donc, Cosmin, tu peux y aller.
M. Vasile
(Cosmin) : Cosmin Vasile, directeur général du Conseil régional de
l'environnement Chaudière-Appalaches puis coprésident du comité développement
durable du regroupement national. Je veux faire juste une remarque. C'est que M. Lessard disait que je suis
à gauche, mais, d'une autre perspective, je considère que je suis à
droite, alors, concernant...
Je
vais commencer avec les recommandations de notre mémoire. On les a partagées en
deux, en recommandations stratégiques et recommandations spécifiques. On
considère que les recommandations stratégiques sont vraiment des recommandations qui doivent absolument être
intégrées dans la nouvelle stratégie de développement durable, tandis
que les recommandations spécifiques sont des recommandations qui, même si elles
sont importantes, portent surtout sur la forme de la stratégie.
Alors, je vais
commencer à lire les stratégies, compte tenu du peu de temps qu'on a, et je
vais donner le mot à la fin à Philippe pour finir avec un dernier set de
stratégies.
Donc, le regroupement
national, bien, notre première recommandation stratégique, c'est que notre
organisme considère que l'objectif de renforcer la prise en compte des
principes de développement durable par les ministères et organismes représente
l'une des pierres d'assise du virage nécessaire pour intégrer le développement
durable dans les actions structurantes qui entraîneront des changements
positifs dans la société.
Nous
sommes d'avis que, tel que stipulé par la Loi sur le développement durable, les
ministères et organismes doivent
obligatoirement utiliser des outils d'analyse, de planification et de mise
en oeuvre qui prennent en
considération tous les principes du développement durable.
Ce
qui nous amène vraiment à la deuxième stratégie. M. Lessard a fait
référence à l'évaluation
environnementale stratégique, qui est un des outils d'analyse et de
planification. Donc, on recommande d'intégrer dans la stratégie 2015-2020
l'évaluation environnementale stratégique comme mécanisme obligatoire d'analyse
lors de l'évaluation d'enjeux sociétaux
d'envergure. On a quelques enjeux devant nous, alors ça serait important
d'intégrer cet élément dans notre façon de faire autant au niveau
gouvernemental qu'au niveau de l'Assemblée nationale.
Le
Regroupement national des conseils régionaux recommande au gouvernement aussi
d'identifier et de préciser les rôles
et les responsabilités des unités régionales des ministères et organismes dans
la mise en oeuvre de la stratégie 2015-2020.
On sait très bien qu'en fonction d'un ministère on a une application de la loi
qui est à géométrie variable. Alors, on trouve que c'est très important
d'intégrer ça dans les ministères et organismes au niveau régional.
Le
Regroupement national recommande au gouvernement de créer de nouveaux forums
régionaux permettant aux instances municipales, sociétales et
entrepreneuriales d'échanger, de se concerter et de planifier le développement
de manière complémentaire et dans l'esprit de la stratégie de développement
durable.
On demande aussi au
gouvernement d'inclure les instances municipales dans la stratégie 2015-2020 de
façon à les assujettir aux mêmes exigences
que celles des ministères et organismes en ce qui concerne le respect des
principes de la Loi sur le développement durable pour ce qui concerne le
développement régional.
On
recommande également de prévoir des mécanismes qui interpellent la société dans
son ensemble dans le but de bonifier
la compréhension et la mise en oeuvre du développement durable au sein de la
population en plus de favoriser la participation publique lors de
l'établissement et de la mise en oeuvre des politiques et mesures
gouvernementales.
Le
Président (M. Reid) : Je dois vous arrêter. Normalement, donc,
les 10 minutes sont dépassées. Est-ce que, M. le ministre, vous...
M. Heurtel : Est-ce qu'ils peuvent
terminer, M. le Président?
Le Président (M. Reid) : Sur
le temps du gouvernement?
M. Heurtel : Oui, oui, certainement.
Le Président (M. Reid) : Oui,
allez-y.
M. Heurtel : Si ce n'est pas 17
minutes, là.
Des voix : Ha, ha, ha!
Le Président (M. Reid) :
Allez-y.
M. Bourke (Philippe) : Merci
beaucoup. Ça va être très bref. Comme je disais tout à l'heure, évidemment, pour nous, c'est important de se donner les moyens
de réussir. Donc, on a toute une section dans le mémoire qui concerne la
mise en oeuvre, et je rappelle certains
éléments que nous, on juge fondamentaux si on veut se donner les moyens de réussir.
D'abord,
permettre au ministère qui est
responsable de cet important chantier gouvernemental, qui est le
ministère de l'Environnement, d'avoir les
ressources nécessaires, suffisantes pour faire son travail en développement
durable, mais aussi en protection de l'environnement.
Mettre en
chantier une réforme, une mise à jour de la Loi sur la qualité de
l'environnement. Dans son état actuel, elle
n'est ni bonne pour l'environnement ni bonne pour l'économie, c'est un
instrument qui, malheureusement, cause des difficultés et doit être mis
à jour, au goût du jour.
Un meilleur soutien aux organisations de la société
civile comme les nôtres qui font leur travail jour à jour justement
pour essayer d'amener cette transition de la société vers une économie
plus durable, une société plus durable. Et c'est, à notre avis,
fondamental, on en fait une recommandation spécifique, donc, de l'ajout d'un
objectif.
Et enfin, au niveau de la gouvernance de la
stratégie, on pense qu'il est temps maintenant que le ministère du Développement durable transfère certaines autorités, leadership, imputabilité à certains ministères qui ont des responsabilités énormes à
l'égard de certaines orientations de la stratégie. On donne l'exemple de la mobilité durable. À notre
sens, il faudrait que le ministère responsable de la mobilité durable, qui
est le MTQ, prenne un leadership et une imputabilité à l'égard de la mise en
oeuvre de tout ça. Sinon, on n'y arrivera jamais.
Et donc je
termine là-dessus, et on vous remercie du délai supplémentaire, M. le ministre, que vous nous accordez.
Le Président (M. Reid) :
Alors, merci, messieurs, de votre présentation. Nous allons procéder à la
période d'échange par blocs. Nous allons commencer par le bloc gouvernemental. M.
le ministre.
M. Heurtel : Merci, M. le Président.
Je tiens à saluer la qualité de votre mémoire, tout d'abord. Ça a été très agréable à lire, et ça soulève des questions très
importantes, et je crois que ça va contribuer à l'exercice, là, de
bonification, là, de la stratégie.
Vous citiez, M. Bourke, Ban Ki-moon. Je commencerais aussi par une autre citation de
Ban Ki-moon, qui dit, à propos de l'importance et même l'urgence d'agir en
matière de changements
climatiques : «Il n'y a pas de plan B parce qu'il n'y a pas de
planète B.»
Et je me plonge tout de suite dans le mémoire et
votre première recommandation spécifique, à la page 4 : «Le regroupement
recommande d'identifier la lutte contre les changements climatiques comme l'une
des activités incontournables des ministères et organismes.»
Ma première question, j'aimerais vous entendre davantage, vous
pourriez approfondir là-dessus? Évidemment, je trouve ça très intéressant et même fondamental de soulever cette
question-là, mais je me demande même si on ne devrait pas aller plus
loin qu'«activités incontournables».
Puis la
deuxième partie de ma question, ce serait de vous demander, voir est-ce qu'on
ne pourrait pas voir la lutte contre
les changements climatiques comme une partie intégrale du développement durable
et comme devant être intégrée complètement à travers l'ensemble de la
stratégie. Alors, si vous pouviez là-dessus... s'il vous plaît.
• (10 heures) •
M. Bourke
(Philippe) : Là-dessus, je pense que vous soulevez un bon point. Et
vous êtes sans doute la personne la mieux
placée pour parler, disons, d'interaction entre, à la fois, la stratégie de
développement durable et l'action gouvernementale en changements
climatiques parce que c'est deux responsabilités du ministère de
l'Environnement. C'est clair que, de notre
point de vue externe, on n'est pas, justement, familiers avec tout l'arrimage
qui se fait entre les ministères dans
ces deux politiques-là, mais on constate, par l'effet externe, qu'il semble y
avoir de l'incohérence dans l'action. C'est-à-dire qu'on peut se donner
certaines cibles, certaines orientations, des objectifs gouvernementaux,
mais, quand on regarde les décisions qui se
prennent, les orientations de certains ministères, on se dit : Bien là, il
me semble qu'on fait tout et son contraire en même temps. Donc, on
cherche des solutions pour l'intégrer mieux.
Déjà, on l'a
souligné, on le sent, que les changements climatiques sont... on sent qu'il y a
une volonté de l'étendre à travers la
stratégie de développement durable, on se dit : Il faudrait aller
possiblement un peu plus loin. Formaliser les objectifs par ministère, peut-être que c'est un moyen. Est-ce qu'on peut
aller plus loin? Ça, je ne saurais pas dire comment, après ça, là, ça devrait être encore plus
transversal, mais... Je ne connais pas assez les mécaniques gouvernementales.
La plus appropriée, je pense que c'est vous, en tant que gestionnaire,
administrateur de ces politiques-là, qui êtes à mieux de... Mais sans doute qu'il y a moyen de mieux faire puis... Mais je ne
saurais pas dire personnellement. Je ne sais pas si mes collègues ont
quelque chose à dire, mais...
M. Vasile (Cosmin) : Je considère
qu'il y a un enjeu important aussi en ce qui concerne l'adaptation aux
changements climatiques. On n'a pas l'habitude d'être proactif dans ce sens-là.
On commence à avoir cette vision au niveau
du ministère du Développement durable, de l'Environnement et de la Lutte contre
les changements climatiques, sauf qu'il ne faut pas se retrouver avec
des situations extrêmes où on doit vraiment interagir, où on doit avoir
vraiment une concertation des ministères
concernés suite à un désastre naturel. Puis on a vécu dans les dernières
décennies certains grands événements
majeurs qui ont demandé une cohésion des ministères pour, vraiment, résoudre un
problème évident, qui est vraiment l'adaptation aux changements
climatiques. Et je me réfère vraiment aux derniers débordements de la rivière Richelieu où on a vu vraiment que... Il
faut commencer à réfléchir sur l'adaptation aux changements climatiques.
Mais ça, c'est encore un autre volet de ce qu'on propose dans notre mémoire.
Le Président (M. Reid) : Merci.
M. Heurtel : Est-ce que vous voulez
ajouter quelque chose?
Le Président (M. Reid) : M.
le ministre...
M.
Lessard (Guy) : Oui.
Le Président (M. Reid) : Ah!
M. Lessard (Guy) : En fait, il
existe déjà des mécanismes qu'on peut utiliser à travers la stratégie de mise
en oeuvre en utilisant les plans d'action,
les PADD des ministères. Ça pourrait devenir des actions obligatoires,
transversales qui permettraient aux ministres concernés de pouvoir suivre
l'évolution des interventions et des actions des différents ministères par rapport à la lutte aux changements
climatiques. Mais ce n'est peut-être pas suffisant, il faudrait peut-être
aller un petit peu plus loin au niveau des
orientations prioritaires, et il faudrait vraiment la camper à ce niveau-là.
Et, compte tenu de l'envergure de
cette problématique-là, comme ça a déjà été fait historiquement au Québec dans
des dossiers comme la gestion des
matières résiduelles, la gestion de l'eau, il devrait y avoir peut-être un
«task force», un groupe d'experts qui alimente les travaux des
ministères concernés sur la base scientifique. Je pense que c'est important. On
a Ouranos au Québec qui est très bien reconnu. Donc, je pense qu'on a tous les
outils pour le faire, il manque la volonté politique maintenant d'y donner
suite.
Le Président (M. Reid) :
Merci, M. Lessard. M. le ministre.
M.
Heurtel : Je dirais, je
crois que la volonté est là, c'est plus dans... Puis c'est justement la raison
pour laquelle on est ici aujourd'hui puis dans les prochaines semaines,
c'est de trouver un meilleur comment-le-faire. Et le sens de ma question,
c'était de, justement, voir comment on peut mieux intégrer la notion de
changements climatiques à la notion de développement durable, et plus particulièrement
à la stratégie.
Puis on peut déjà dire qu'au niveau scientifique...
Vous avez mentionné Ouranos, il y a un travail continu. On a réinvesti dans Ouranos grâce au Fonds vert, qui fait partie de
notre plan d'action sur les changements climatiques. Il y a le Comité-conseil sur les changements climatiques qui
a été réinstitué en juillet dernier par le gouvernement. M. Bourke, d'ailleurs, siège sur ce comité-là. On a une quinzaine d'experts de plusieurs,
différents domaines qui sont là, justement, pour conseiller le gouvernement par
rapport à son approche. Mais je suis
d'accord avec vous qu'il doit y avoir un travail de meilleure
intégration de toutes les mesures de lutte contre les changements climatiques à
la stratégie.
Et donc, si
on va plus précisément encore, on pourrait parler notamment de mobilité
durable. Si on peut aller à la recommandation
10 de votre mémoire, là c'est recommandation stratégique, j'aimerais vous
entendre davantage par rapport, justement... Alors, dans cette
conception de meilleure intégration de lutte contre les changements climatiques
à la stratégie de développement durable, je
veux vous entendre davantage sur, de votre point de vue, comment... Parce
que vous parlez, justement... pour la mise en oeuvre des responsabilités
accrues, vous nommez plusieurs ministères, Transport, Affaires municipales, des
agences comme l'AMT, la SAAQ, la CPTAQ, bref tout l'alphabet y passe.
Quand on parle de mobilité durable, on parle,
évidemment... ça touche l'aménagement également. De voir dans les processus décisionnels du gouvernement...
Puis, encore une fois, je comprends que vous n'êtes pas dans l'État,
puis je comprends ce que vous dites, M. Bourke, vous n'êtes pas dans la
mécanique, là, la fine pointe de la mécanique, là, décisionnelle gouvernementale, mais, de votre point de vue, de ce que
vous voyez, est-ce que, justement, d'intégrer des critères plus spécifiques de considération, des
principes de lutte contre les changements climatiques en amont du
processus décisionnel, de l'intégrer comme
étant des incontournables, des conditions, c'est quelque chose que vous voyez
comme étant un pas dans la bonne direction
ou est-ce que vous avez d'autres façons de voir ça pour s'assurer que ces
principes-là soient pris en compte par ces
organismes-là dans un contexte de concertation, évidemment, mais que ça soit
beaucoup plus intégré, là, dans le processus décisionnel?
Le Président (M. Reid) : M.
Bourke.
M. Bourke
(Philippe) : Oui. Je vais partir d'un exemple très concret pour
illustrer après ça comment je vois ça. On a eu récemment, à la fois dans la communauté de Montréal et de Québec,
les résultats des enquêtes origine-destination. Donc, malgré la stratégie de développement durable, malgré le plan
d'action sur les changements climatiques, malgré les intentions de
plusieurs municipalités de contrôler l'étalement, ce genre de choses là, le
résultat, c'est qu'on continue à augmenter
la part de l'automobile dans la mobilité, sachant très bien qu'en plus ça crée
des problèmes de congestion, ça coûte
énormément cher à l'État, c'est... Vraiment, donc, c'est un problème de
développement durable clairement. Ce n'est pas une affaire environnementale. C'est clair qu'économiquement ce n'est
pas gagnant, socialement. Il y a les pertes de temps. Les personnes qui
perdent du temps là-dedans, ça coûte cher, c'est...
Vous les connaissez, les problématiques de
transport, on les connaît tous. Malgré tout, il n'y a personne qui a le leadership de dire : C'est ma responsabilité
de régler ce problème-là. Donc, on a une loi sur le développement
durable ou une politique de gaz à effet de serre qui dit : Il faut que
tout le monde agisse pour réduire ça, mais le ministère responsable, lui, il est encore dans un mode accommodation des besoins,
et donc là il y a des projets autoroutiers qui ne font aucun sens, c'est de l'argent public qui s'en
va dans des prolongements d'autoroutes, alors que nos réseaux de
transport collectif souffrent d'un manque de
financement. Donc, est-ce que, justement, ça ne devrait pas être la
responsabilité du ministère des
Transports d'avoir l'imputabilité de veiller à ce que des indicateurs comme le
taux de motorisation, comme les gaz à
effet de serre dans le transport, la consommation de carburant aient des
objectifs clairs, et elle a l'imputabilité, à la fin du compte, de dire : On a réussi à atteindre
ça. C'est sa responsabilité, puis c'est lui qui va devoir en répondre si
jamais, au contraire, ça progresse.
Donc, il faut
qu'il s'approprie ces nouvelles réalités là dans ces ministères-là. Je parle du
MTQ, mais le MAMROT, c'est la même chose. Je nomme la SAAQ parce que,
des fois, il y a des contraintes à permettre l'électrification tout simplement par... Tu sais, il faut que tout le
monde mette l'épaule à la roue pour dire : On s'en va dans cette
direction-là, qu'est-ce que je peux faire,
moi, pour qu'on s'en aille dans cette direction-là? C'est ça qu'on a besoin,
et, peut-être, avec des bons indicateurs ciblés sur ces grands leaders
de l'action gouvernementale que sont ces gros ministères là, ça aiderait
beaucoup, à mon sens, qu'on s'approche de quelque chose de plus...
Le Président (M. Reid) : M.
le ministre.
M. Heurtel : M. le Président, il me
reste combien de temps?
Le Président (M. Reid) : Deux
minutes.
• (10 h 10) •
M. Heurtel : Deux minutes? Merci.
Donc, si je suis votre exemple, donc, ce serait véritablement d'intégrer... puis une obligation d'intégrer des principes, bon,
de lutte contre les changements climatiques qu'on intègre, justement, au
principe de développement durable et d'avoir
une approche intégrée pour, justement, en amont d'une décision, que ça soit...
On peut prendre un exemple, une route, ou un projet d'aménagement urbain, ou
quoi que ce soit, puis d'avoir tous les
intervenants à la même page, et donc d'appliquer ces principes-là, et que ça
soit nécessairement appliqué, puis que ce n'est pas une forme
discrétionnaire, là, ce n'est pas quelque chose qui peut ou ne peut pas. Je
vous comprends bien?
M. Bourke (Philippe) : Oui, absolument.
Mais, sur la mécanique finale, par contre, c'est ça, là...
M. Heurtel : Non, non, non. Ça,
c'est notre magnifique défi.
M. Bourke (Philippe) : Oui, c'est
ça.
M. Heurtel : Non, mais c'est de bien
comprendre la nécessité. Parce que vous, vous le voyez de votre point de vue,
de votre expertise à vous, là, qui est reconnue et que je reconnais. Et, de
l'autre côté, je vous dirais en terminant là-dessus, je crois que, bon, en planification, en développement, en
transport, en développement d'infrastructures notamment, là, puis on pourrait parler, évidemment,
puis on en parlera... malheureusement, le temps manque pour moi aussi, mais,
bon, de finance, d'écofiscalité, de santé également, une... L'idée pour aller
chercher les meilleures connaissances, tu sais, essayer de voir est-ce que l'idée d'une table sur les
meilleures pratiques, c'est quelque chose qui pourrait répondre à ce dont
vous parliez, là, tout à l'heure.
Le Président (M. Reid) : M.
Bourke, 30 secondes.
M.
Bourke (Philippe) : Rapidement, là-dessus, un peu comme vous avez dit
tout à l'heure, on a... on manque... c'est-à-dire on a la détermination,
c'est juste qu'il faut trouver les moyens. Moi, je pense qu'on n'a pas besoin
de nous dire quoi faire, on le sait, quoi faire. C'est la
même chose, là. Les meilleures pratiques, il y a des colloques, ça circule
abondamment, on a de la misère à tous les suivre. Là, il faut tomber dans le...
on sait quoi faire, dans l'action.
M.
Heurtel : Donc, on a les connaissances. Là, il faut intégrer, il faut
mettre en oeuvre d'une façon concertée et intégrée les principes pour
qu'ils soient appliqués dans le concret.
M. Bourke
(Philippe) : C'est peut-être les connaissances dans l'application
qu'on a besoin.
Le
Président (M. Reid) : Merci, M. Bourke. Merci, M. le ministre.
Nous allons maintenant passer au bloc de l'opposition officielle, M. le
député de Jonquière.
M. Gaudreault :
Oui. Merci, M. le Président. Dans un premier temps, je voudrais saluer un des
premiers phénix de l'environnement, membre
du Cercle des Phénix, M. Lessard, 1996. Donc, vous étiez un pionnier des
phénix. Alors, comme le phénix, je vois que
vous vous reconstituez d'année en année, vous êtes toujours là. Alors, c'est
inspirant, en tout cas, puis ça démontre que vous étiez un pionnier.
Je veux tout de suite
passer, justement, à l'action. Vous venez de dire, M. Bourke : Bon,
on a déjà beaucoup d'information, maintenant
il faut passer à l'action. Il y a deux recommandations dans vos recommandations
stratégiques, là... Bien, il y en a
plusieurs, mais je veux attirer l'attention sur deux qui m'interpellent. La
n° 2, qui recommande d'intégrer dans
la stratégie 2015-2020 les EES, les évaluations environnementales stratégiques,
c'est très gros, ça, c'est une grosse recommandation.
Ensuite, à la recommandation 4, vous dites de créer de nouveaux forums
régionaux pour permettre aux instances municipales, sociétales,
entrepreneuriales d'échanger, de se concerter, etc. Et, comme je le disais dans
mes remarques préliminaires, moi, je suis
aussi très interpellé par l'accès à l'information, par la transparence, entre
autres du côté du ministère de l'Environnement.
Et là, dans une
approche intégrée, cohérente et responsable, vigoureuse, je veux vous faire un
lien avec la recommandation n° 8, où,
là, vous dites que la Loi sur la qualité de l'environnement étant un outil
essentiel pour assurer la mise en oeuvre du développement durable, vous
recommandez de procéder à sa modernisation. Donc, comment vous voulez modifier la Loi sur la qualité de
l'environnement dans cet esprit-là? Serait-ce en intégrant, justement, dans la
loi les évaluations environnementales stratégiques,
des données sur l'accès à l'information, les forums régionaux, dont vous
parlez à la recommandation 4? J'essaie de faire le plus efficacement possible,
donc voilà.
Le Président (M.
Reid) : M. Lessard.
Une voix :
Je te laisser aller. Toute une question!
M. Lessard
(Guy) : C'est une question... c'est la question qui tue, en fait, que
vous posez là. Quand on parle de la Loi sur
la qualité de l'environnement, bien sûr c'est la bible au Québec, là, de toutes
nos actions. Je vais débuter avec l'évaluation environnementale
stratégique. Nous, on n'est pas des juristes, et on pense que la stratégie étant quand même dans le vocabulaire et le langage
de la loi a quand même une valeur, une certaine valeur légale.
Et, dans la description des mécanismes de la stratégie, je pense que ça serait
possible d'y intégrer l'obligation de faire une évaluation environnementale
stratégique lorsqu'on veut étudier de nouvelles filières ou des enjeux
importants pour le Québec. Je pense que ça
peut se faire là sans toucher à la Loi sur le développement durable. Et
laissons à Philippe le soin de parler de la Loi sur la qualité de
l'environnement tout à l'heure.
L'autre aspect que
vous mentionnez, c'est qu'au Québec, depuis des décennies, on a réussi à
développer des structures de solidarité dans des régions comme
l'Abitibi-Témiscamingue, la Côte-Nord, peut-être le Saguenay—Lac-Saint-Jean aussi, que je connais moins,
Chaudière-Appalaches. On n'a pas des structures de développement
économique comme à Montréal puis à Québec, c'était notre structure de
développement économique. C'est là que se rejoignaient,
si vous voulez, les politiciens des municipalités, que se rejoignaient les
représentants régionaux. Que ce soit dans
le domaine de l'agriculture, de la forêt, le développement durable — moi, j'étais là — le réseau scolaire, tous les représentants décideurs de la région sont là, ce
qui nous permet, à moyen puis à long terme, de développer une culture de
développement dans une région administrative.
Dans un premier
temps, le r est disparu du MAMROT, avec qui on travaillait. Maintenant, c'est
regroupé au niveau d'un ministère économique
qui est un petit peu plus loin de nous autres, malheureusement. La conférence
régionale des élus disparaît. Alors, nous,
ce qu'on dit : Peut-être que, dans les grandes municipalités, on a déjà
des structures de développement
économique importantes, on peut prendre ces dossiers stratégiques qui
existaient au niveau des CRE, même l'expertise
qui était là, et on peut les tasser tranquillement du côté de la Communauté
urbaine de Québec ou, à Montréal, dans une autre instance. Mais
qu'est-ce que vous faites chez nous? Moi, j'ai un projet important de
développement de ma région. Pas la ville de
Thetford, là, ma région de Chaudière-Appalaches. Pouvez-vous me dire, là, à qui
je m'adresse demain matin pour faire cheminer ce projet-là? Il y a un
point d'interrogation important. C'est dans ce sens-là qu'on dit : Il faudra trouver une façon d'avoir un
forum régional pour que les entrepreneurs de ma région, les responsables
des différents organismes publics... Les
représentants des ministères se réunissent déjà au sein de la CAR, mais ce
n'est pas un groupe qu'on peut aller rencontrer fréquemment, vous le
comprendrez. C'est le sens de notre recommandation.
Maintenant,
comment tout ça pourrait se transformer dans des modifications au niveau de la
loi? Mon valeureux directeur général du RN va essayer de répondre à ça.
M. Bourke (Philippe) : Ça
va être très bref. La Loi sur la qualité de l'environnement, à mon sens, elle
doit être réformée pour mieux
protéger l'environnement. Oui, profitons-en pour régler des enjeux, dont
l'accès à l'information, qui est un
grave problème. Et ça fait partie déjà des problèmes qui doivent être corrigés
avec la mise à jour de la loi, mais il ne faut pas non plus se dire : Ah! bien, on va en profiter pour tout
inclure le développement durable là-dedans, etc. Je pense qu'il y a d'autres instruments, puis on peut
passer par d'autres véhicules. Il ne faudrait pas complexifier déjà ce
dossier-là, qui l'est déjà énormément. Je pense qu'en soi la Loi sur la qualité
de l'environnement doit être réformée pour aider le ministère à mieux faire son
travail, aider même le développement économique à mieux se faire. Ceci dit, il
y a des améliorations, c'est clair, en
termes — on en
parle dans le mémoire — d'accès à l'information, participation publique qui sont
liées à ça, mais globalement il y a d'autres approches qu'il faudra adresser en
termes de révolution structurelle, là, pour le développement durable en
général.
Le Président (M.
Reid) : ...
M.
Gaudreault : O.K. Alors, je comprends que vous nous appelez
quand même à la prudence. Vous dites : D'une part, il y a le développement durable, la
stratégie. Il faut y intégrer les évaluations environnementales stratégiques.
D'autre part, modification nécessaire de la
loi, modernisation nécessaire de la Loi sur la qualité de l'environnement. Il
ne faut pas nécessairement faire un
genre de grand tout parce que la Loi sur la qualité de l'environnement a sa
mission spécifique sur l'environnement. O.K. Je comprends les nuances
que vous faites.
Je
vous amène... Parce que le temps file — j'aimerais beaucoup même poursuivre sur ce
que vous venez de dire, mais j'ai d'autres choses qui m'interpellent
beaucoup — puis
qu'il me reste deux minutes, que m'a dit le Président, alors la recommandation 7 sur les ressources financières. Évidemment, je
n'ai pas le choix de vous amener à votre tableau très instructif de la page 19 où vous dites que le ministère doit
compter sur des ressources suffisantes. Et là vous faites ressortir que, par rapport à Santé, Éducation,
Culture, si on prend ces exemples-là,
le seul ministère où il y
a une variation négative,
c'est le ministère de l'Environnement. J'aimerais vous entendre un petit peu
plus sur le côté budgétaire. Comment vous
pensez qu'on pourrait contrôler ça? Parce que ça devient toujours facile pour
un gouvernement de dire : Bon, bien, c'est au ministère de
l'Environnement qu'on va sabrer.
• (10 h 20) •
M.
Bourke (Philippe) : Écoutez, moi, évidemment, ça fait longtemps que...
ça fait 18 ans, comme M. Lessard aussi, qui est là depuis
longtemps, on a vu passer toutes sortes de réformes, de transformations dans la
société. On a vu augmenter les préoccupations en environnement, on a vu
augmenter la charge, les attentes de la population. Et ça, en ce sens-là, là, je suis obligé de lever mon
chapeau au ministre de l'Environnement, c'est, à mon sens, un peu la
tâche la plus ingrate du gouvernement que de devoir... avec si peu de
ressources, et de si grandes responsabilités, et avec des attentes qui sont
quatre fois supérieures, être capable de faire son travail.
À un moment donné, ça
prend un peu de recul pour dire : Bien là, il y a quelque chose qui ne
marche pas, puisqu'entre autres on le sait
que, si on protège mieux notre environnement, on va éviter de faire gonfler
notre facture en santé. Puis on sait
très bien que, là, elle a augmenté de 60 %, mais ce n'est rien comparé à
ce qui nous attend parce qu'on n'a pas réglé nos problèmes de qualité de
l'air, on n'a pas réglé nos problèmes de pollution diffuse agricole, on n'a pas
réglé nos problèmes de qualité de l'eau. On
a vu ce qui s'est passé récemment à Longueuil, on n'est pas à l'abri de
certaines problématiques graves. À un moment
donné, si on veut faire du développement durable, ça veut dire anticiper des
coûts énormes en termes de santé publique,
et, éventuellement, donc, fondamentalement, ça prend plus de ressources.
C'est un investissement un peu comme dans n'importe quoi, c'est de
l'investissement dans la prévention.
À un moment donné...
Et, en ce sens-là, quand je dis que le ministère est obligé de se conformer à
des mêmes règles que tous les autres du
type : Bien, on ne renouvelle pas une ressource sur deux ou, tu sais... À
un moment donné, il y a des limites,
là. Quand tu es déjà dans un budget famélique comme celui-là, d'être obligé en
plus de te contraindre à des règles comme celles-là, ça n'a aucun sens,
ça n'a vraiment aucun sens. Je pense que, là, il faut regarder ce portrait-là
puis se dire : Ça ne marche pas.
Le Président (M.
Reid) : Merci, M. Bourke. Nous allons passer maintenant au bloc
du deuxième groupe d'opposition, et je passe la parole au député de
Nicolet-Bécancour.
M.
Martel : Merci, M. le Président. Bon matin à vous trois.
Moi, j'aimerais ça, savoir un peu comment vous voyez le rôle des
conseils régionaux en environnement dans la prochaine stratégie
gouvernementale. Je m'explique. En tout cas,
depuis plusieurs années, là — moi, ça fait 20 ans que je suis
là-dedans, ça fait plus longtemps que ça — il y a toujours eu une instance de
concertation régionale qui s'appelait les CRCD, qui s'appelait les CRE. On
assiste maintenant à l'abolition des
conseils régionaux d'élus. J'imagine qu'il y avait, entre autres, il y avait
une partie de votre financement qui venait de là, dans les CRE, il
devait y avoir des ententes spécifiques. Mais, au-delà du financement, vous
aviez un interlocuteur régional. Je parle,
dans chacun des conseils régionaux en environnement. Maintenant, il n'y a plus
d'instance de concertation régionale. Il
peut y avoir une table des préfets ou des choses comme ça, mais il n'y a plus
une structure formelle de concertation régionale.
Moi,
j'essaie de voir, premièrement, votre rôle. Comment vous voyez le rôle des CRE
dans l'avenir? Comment vous voyez
votre financement s'il y a des CRE qui dépendaient du financement des CRE? Et
qui sera votre interlocuteur au niveau régional? Vous comprenez, là, on
donne beaucoup de rôles aux MRC. C'est un territoire plus petit, il y a des chances que les MRC se dotent d'un organisme à la
grandeur de leur territoire. Mais, moi, les conseils régionaux... Puis
je sais que vous jouez un rôle important
dans chacune des régions du Québec. Là, j'essaie de voir à qui vous allez
parler, qui vont être vos interlocuteurs au niveau régional.
Le Président (M. Reid) :
M. Lessard.
M. Lessard
(Guy) : J'imagine que la
nature a horreur du vide et que, tôt ou tard, quelqu'un va imaginer
l'existence d'un forum dans nos régions pour
qu'on puisse, par équité, pouvoir défendre nos besoins en matière de
développement vis-à-vis des villes comme
Québec, Montréal et ces grands regroupements là. Et c'est normal que ça se
passe comme ça, sauf qu'il faut nous donner les outils pour le faire.
Jusqu'à
maintenant, on avait cette table-là au niveau des conférences régionales des
élus, où, d'abord, on se connaît, on
se connaît mieux, on s'apprivoise. Chez nous, moi, les gens, ils n'ont plus
peur de l'environnement puis du développement
durable, c'est intégré dans notre plan quinquennal, et puis on avait des
actions concertées avec différents secteurs
d'activité, des ententes avec l'UPA, des ententes avec le milieu forestier,
avec le milieu scolaire. Ça nous permet de réaliser des actions de développement
durable dans un territoire régional et ça nous permet de venir donner un
éclairage au niveau provincial sur les possibilités d'action dans la
population. Ça nous permet aussi de faire des recommandations pour des
changements au niveau des lois, des encadrements, des programmes, et le reste.
Le financement, ça n'a jamais été une chose
facile pour nous autres. On a beaucoup de bénévolat. Quelques conseils régionaux ont réussi à aller chercher des
budgets avec les CRE, mais ce n'est pas quelque chose qui était étendu énormément non plus. On le fait beaucoup par des
programmes spécifiques à l'intérieur du ministère de l'Environnement, que ça soit sur les changements climatiques, la
gestion des matières résiduelles. Et, si jamais il n'y avait pas de
plateforme, de forum au niveau régional...
Eh bien, c'est ce qu'on a commencé à faire présentement en attendant qu'il se
passe quelque chose, c'est qu'on va
discuter avec l'UPA, on prend des ententes avec l'UPA. On vient de le faire,
là, au niveau d'un forum sur les matières organiques.
Chaudière-Appalaches, les matières organiques, on en a un peu. Donc, c'est une
priorité pour la région. On fait une autre
démarche avec l'UPA sur l'adaptation aux changements climatiques parce qu'il va
être concerné par ça. On le fait beaucoup en
gestion des matières résiduelles avec ceux qui ont des équipements puis qui
sont dans les opérations de récupération des matières résiduelles.
Donc, là, ça
nous oblige maintenant, avec le milieu municipal, d'aller travailler MRC par
MRC. Il y en a neuf chez nous, dans Chaudière-Appalaches. Alors, c'est certain
qu'on n'aura jamais, avec les ressources qu'on a présentement, on n'aura
jamais la possibilité de travailler sur une base statutaire régionale. Il va
falloir faire des projets spécifiques avec des gens, ce qui représente, à mon
avis, un recul important par rapport à ce qu'on a réussi à gagner au cours des 15, 20 dernières années.
Donc, je suis
un petit peu comme vous, on se pose des questions. Comment va évoluer notre
rôle? Présentement, on a un rôle de protection de l'environnement, on le
fait avec le plus d'intelligence possible. On a un rôle de mise en oeuvre durable. Nous autres, on a trois stratégies
présentement dans Chaudière-Appalaches — je vais parler de ce que je connais. On en a une au niveau de la gestion des
matières résiduelles, alors tous ceux qui sont concernés par la gestion
des matières résiduelles font partie d'une
stratégie avec nous autres. On a une priorité sur les matières organiques,
comme je l'ai mentionné tout à l'heure. On
en a une sur l'adaptation de l'énergie et les changements climatiques. Alors,
on a une table régionale présentement qu'on est allés chercher des gens
compétents et représentatifs de leur milieu, on multiplie la table, là, par 10,
là. C'est, en fait, ça, le problème...
Le Président (M. Reid) : Il
reste à peine 30 secondes si vous voulez poser une question.
M.
Martel : O.K.
Le Président (M. Reid) : Je
pense que M. Vasile voulait parler également. C'est votre choix.
M.
Martel : Bien,
allez-y, allez-y.
M. Vasile (Cosmin) : Je voulais
souligner aussi, parce qu'on parle souvent juste des CRE, puis comme organisme régional qui disparaît... Puis on voit
que le volet régional commence à... on commence à avoir de la misère à
voir de quelle manière on s'intègre dans ce volet régional. Un des éléments
qu'on fait ressortir, entre autres, dans notre mémoire, dans les recommandations spécifiques, c'est la gestion intégrée
des ressources et du territoire parce que c'est... quand on parle de gestion intégrée, juste pour
prendre l'exemple de l'exploitation forestière, quand on parle
d'intégration des projets énergétiques,
comme des parcs éoliens qui visent plus qu'une MRC ou qui visent vraiment une
plus grande superficie, on a... les aires protégées, c'est la même
chose. On a vraiment un objectif très intéressant dans la stratégie de
développement durable...
Le
Président (M. Reid) : Merci, M. Vasile. Je dois vous
interrompre. Alors, nous passons maintenant au dernier bloc, qui est
réservé aux députés indépendants. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Massé : Combien de minutes, M.
le Président?
Le Président (M. Reid) :
Trois minutes.
Mme Massé : Trois minutes.
Bonsoir... bonsoir... bonjour, voyons! Je suis déjà rendue à ce soir, moi, là. Bonjour, mes collègues. Écoutez, merci beaucoup
pour votre contribution, effectivement, très étoffée, beaucoup
d'éléments. Vous avez pris, comme
d'habitude, votre responsabilité au sérieux. Beaucoup de questions, déjà, ont
été posées, j'aimerais attirer votre attention peut-être sur quelque chose de plus spécifique.
Vous dites dans vos recommandations stratégiques... Et vous en avez fait
un petit peu mention, j'ai envie de vous entendre plus longuement là-dessus,
comme quoi vous recommandez que le
gouvernement identifie et précise les rôles et les responsabilités de chacune
des unités régionales des MO, mais
voire même — et vous
en avez fait état — de
chacun des ministères, et etc. Je sens dans cette préoccupation de dire :
Ça ne peut pas reposer exclusivement sur le ministère, qui a vu son financement
diminuer dans les 10 dernières années, et en plus sur une stratégie qui
touche tout le monde, mais dont seulement le ministère, entre guillemets,
quasiment le moins financé a la responsabilité de voir l'application.
Moi, dans cette vision d'imputabilité dont vous avez
parlé, est-ce que vous avez réfléchi à qu'est-ce que ça pouvait... Puis vous
l'avez un peu amené tantôt, qu'est-ce que ça pouvait vouloir dire, par exemple,
par rapport à un ministère ou un conseil comme celui du Conseil du trésor? Parce que, vous le soulevez, ça nous prend les moyens, ça
nous prend... Est-ce que vous voyez que quelque chose comme ça devrait être
aussi applicable au Conseil du trésor?
• (10 h 30) •
M. Bourke (Philippe) : Bien, rapidement,
parce qu'il ne reste beaucoup de temps.
Le Président (M. Reid) : ...1 min 30 s.
M. Bourke (Philippe) : C'est ça. On
le mentionne — puis
c'est le fun que vous parliez du Conseil du trésor — on fait la recommandation que l'esprit de la
Loi sur le développement durable et de la stratégie doit aussi rejoindre
des exercices comme la préparation d'un
budget. Et, entre autres, en ce moment, aussi il y a des évaluations de
programmes, comment le développement durable est pris en compte dans
l'évaluation des programmes? On l'a suggéré. Je ne le sais pas, si c'est pris en compte, mais fondamentalement c'est tellement
déterminant, ce genre d'élément là, dans l'État qu'il faut que le
développement durable se trouve là aussi.
Mme Massé : Une question de
cohérence.
M. Bourke (Philippe) : Exactement.
Mme Massé : Merci.
Le Président (M. Reid) :
Est-ce que ça va? Alors, merci beaucoup, M. Lessard, M. Vasile, M. Bourke.
Je vais
suspendre la séance pendant quelques instants, le temps que nous recevions nos
prochains invités. Merci.
(Suspension de la séance à 10 h 32)
(Reprise à 10 h 34)
Le
Président (M. Reid) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons
reprendre les travaux. Alors, j'invite nos invités à s'asseoir, les représentants de l'Institut de
l'évolution du transport. Alors, je vais vous laisser la parole pour une
dizaine de minutes, et ensuite nous
procéderons à des échanges avec les membres de la commission. Alors, je vous
demanderais de commencer par vous présenter et de présenter les
personnes qui vous accompagnent et, ensuite, de procéder à votre exposé. Et je
vous avertirai lorsqu'il restera environ une minute.
Institut de l'évolution
du transport
M. Arcoragi (Jean-Pierre) : Bonjour.
Bonjour, M. le Président, chers membres du comité. Au nom de l'Institut de
l'évolution du transport, nous aimerions vous remercier de nous avoir invités.
Je me présente, mon nom est Jean-Pierre
Arcoragi. Je suis docteur en physique et je suis également président de
l'institut. Je suis accompagné, à ma droite,
de M. Pierre Ducharme, président de MARCON et membre du C.A. de l'institut. Et
également, à ma gauche, j'ai M. Christian Lévesque, qui est en charge
des relations gouvernementales pour l'institut.
La mission de notre institut est d'anticiper les
changements liés à l'évolution de la mobilité, de développer des stratégies afin de promouvoir notre intérêt
collectif et d'agir comme instrument
de leur mise en oeuvre. La mission de l'institut prend vie dans l'action, et, depuis sa fondation en 2013, nous avons déjà
élaboré un projet d'envergure dénommé HERVE, pour Halte d'essai routier
pour véhicules électriques, et un second projet d'étude, soit celui des impacts
des véhicules autonomes sur la société québécoise. M. Ducharme vous parlera
plus en détail de ces deux projets.
Le Québec
présente un déficit commercial de l'ordre de plus de 10 milliards de
dollars par année dans le secteur pétrolier.
À l'heure actuelle, les Québécois s'approvisionnent surtout en pétrole
d'origine sud-américaine. Certains projets contemporains visent à
procurer au Québec un approvisionnement canadien à moyen terme, mais cela ne
changera rien au fait que l'essentiel de nos
émissions de gaz à effet de serre seront toujours attribuables à l'utilisation
de carburants à base de pétrole.
L'institut
prône une utilisation rationnelle de l'énergie par l'emploi de la meilleure
source d'énergie disponible pour chaque
utilisation et par une maximisation de l'efficacité énergétique de la source
utilisée. Par «meilleure», on entend celle
qui est environnementalement responsable et économiquement rentable lorsque les
cycles de vie complets sont considérés.
Ce n'est que si ces deux conditions sont remplies que l'on peut prétendre avoir
une solution véritablement durable.
Il
est évident que le monde entier doit décarboniser son économie le plus
rapidement possible. Dans le cadre de ce défi planétaire, les Québécois jouissent d'un avantage stratégique
important, soit la disponibilité d'énergie renouvelable en abondance
provenant de notre filière hydroélectrique. Le mémoire que nous déposons veut
mettre l'emphase sur le parc de véhicules
légers pour passagers, puisqu'il constitue la cible avec le plus fort potentiel
de réduction de nos émissions de GES dans la période visée par la
stratégie de développement durable du Québec.
Maintenant, M. Ducharme va nous parler de
l'électrification des véhicules pour passagers.
• (10 h 40) •
M.
Ducharme (Pierre) : Merci. La plupart des véhicules pour passagers
servent moins de 4 % du temps, et plus de 90 % des trajets qu'ils parcourent se font à l'intérieur d'un rayon
de 50 kilomètres de la résidence de leur propriétaire. Notons que la
majorité des modèles de voitures totalement ou partiellement électriques sont
déjà commercialement disponibles sur le
marché québécois. Bien que plus élevés que ceux de leurs véhicules jumeaux
motorisés à l'essence, les prix de
ces véhicules sont à la portée de la majorité des propriétaires de voitures
grâce au généreux soutien financier du gouvernement
du Québec. Ce soutien financier a été déterminant dans le processus d'adoption
des véhicules électriques à date et doit être maintenu jusqu'à la fin du
terme de la stratégie proposée ici. Les résultats obtenus de maintes autres
juridictions américaines et européennes démontrent clairement que ce soutien
financier a un impact important sur les taux d'adoption de véhicules
électriques.
Mais le
Québec jouit en surcroît d'une situation énergétique qui rend l'adoption des
véhicules électriques encore plus
attrayante. L'écart le plus grand en Amérique du Nord entre le prix de
l'essence à la pompe et le prix du kilowatt-heure à la maison, là où se fait la grande majorité des
recharges de ces véhicules. Malgré cela, seulement environ 5 000
véhicules électriques sont immatriculés au
Québec en dépit de l'objectif de 300 000 véhicules fixé en 2008 par le
gouvernement Charest. Dans un contexte où un
véhicule électrique est à la fois
économiquement et
environnementalement avantageux pour
plusieurs foyers québécois, comment explique-t-on le faible pourcentage des
ventes de voitures vendues au Québec qu'il
représente? Trois raisons : d'abord, le faible degré de connaissance des
consommateurs; deuxièmement, le peu de promotion
dont jouissent ces véhicules; et, troisièmement, le manque d'inventaire de
véhicules électriques au Québec jumelé à un délai de livraison trop long
pour les consommateurs qui aimeraient le commander.
Le véhicule
électrique est encore une nouveauté à laquelle les consommateurs s'intéressent,
mais dont ils se méfient au même
titre que toutes les nouvelles technologies. La plupart des Québécois savent
qu'ils existent, mais ne sauraient les reconnaître parmi les autres
véhicules qui circulent sur nos routes. Il n'y a qu'une faible proportion de
nos citoyens qui ont fait l'essai de ces
véhicules tout simplement parce qu'il y a eu peu d'occasions de le faire. Un
événement tenu au printemps dernier
sur le Circuit Gilles-Villeneuve constituait le plus grand ralliement de véhicules électriques jamais vu au
monde, et, pendant deux jours, presque 600 automobilistes ont fait l'essai de
véhicules électriques. Les essais routiers commandités par le Circuit
électrique en janvier dernier dans le contexte du Salon de l'automobile de Montréal
ont soulevé le même intérêt.
Certes, les consommateurs peuvent se rendre chez
des concessionnaires automobiles et demander de faire un essai routier dans la mesure où l'un des véhicules
est disponible, ce qui n'est pas toujours le cas, malheureusement. Mais,
à moins d'avoir l'intention d'en acheter une
dans un laps de temps rapproché, peu de gens opteront pour cette option.
Enfin, côté client, beaucoup de temps est requis pour faire le tour de
plusieurs concessionnaires avant d'avoir un échantillon intéressant de l'offre
disponible sur le marché.
Malgré les
efforts des fabricants au chapitre de la formation, plusieurs vendeurs
de voitures n'ont pas encore les connaissances et les compétences
suffisantes pour être crédibles auprès des consommateurs. En fait, plusieurs
autres facteurs les démotivent à promouvoir les véhicules électriques.
Depuis maintenant
deux ans, les membres de l'institut élaborent et sollicitent la contribution de
l'industrie et des gouvernements à un projet nommé HERVE, un acronyme pour Halte
d'essai routier pour véhicules électriques. HERVE a été engendré pour
rehausser le degré de connaissance des consommateurs et combler le déficit
promotionnel dont il souffre. L'institut a
conçu un programme de sensibilisation et d'information à partir de quatre centres de
démonstration multi-marques équipés de
logiciels permettant de diriger chaque client vers la voiture électrique qui
lui conviendrait le mieux. Les
experts en recherche commerciale de MARCON, une firme reconnue pour les
performances de ses programmes promotionnels
en matière d'efficacité énergétique, prévoient une augmentation des ventes de l'ordre de 50 000
véhicules additionnels en trois ans grâce à
ce projet à coûts partagés entre l'industrie et les divers paliers de
gouvernement. Une fois ce niveau atteint, les subventions à l'achat de
véhicules électriques pourront être progressivement éliminées.
L'électrification
de ces véhicules dans des proportions similaires à celles de leurs ventes en
2014 représenterait une diminution de
nos émissions de gaz à effet de serre de l'ordre du dixième de mégatonne par
année, soit environ l'équivalent des émissions de tous les véhicules de
transport collectif qui circulent présentement sur nos routes.
Plusieurs fabricants de produits et fournisseurs
de produits périphériques pour véhicules électriques se sont engagés à
supporter financièrement ce projet. Les plus importants mouvements associatifs
du milieu tels Mobilité électrique Canada,
l'Association des véhicules électriques du Québec et l'Institut du transport
avancé du Québec s'engagent à épauler
ce projet et offriront leurs services pour en assurer le succès. Enfin, une
institution d'enseignement s'est déjà engagée à former le personnel
requis aux centres de démonstration. Quelques autres nous ont approchés, et
nous continuerons notre enrôlement sous peu.
Pour ce qui est des fabricants de véhicules
automobiles qui offrent présentement des véhicules hybrides ou entièrement électriques, ils ont aussi été
sollicités. Ceux qui prévoient le faire sous peu le seront aussi. Deux
fabricants seulement ont refusé de se
joindre au projet, soit Kia et Mitsubishi, les firmes qui ont les plus petites
parts de marché au Québec. Les autres ont démontré un intérêt et
proposent de légères modifications d'ordre pratique au concept, mais généralement ils attendent le signal du
gouvernement du Québec pour s'engager fermement ou pour s'abstenir de
participer.
L'institut
croit que, si les fabricants d'automobiles se rallient à ce programme et le
supportent au niveau requis, ils démontreront
ainsi leur désir sincère d'appuyer la stratégie de développement durable du
gouvernement du Québec. Le succès du
programme ferait en sorte qu'il serait inutile d'imposer des quotas de vente de
véhicules de type zéro émission. L'institut
croit fermement aussi qu'il sera nécessaire de lancer des initiatives
pragmatiques et soutenues de cette nature pour assurer l'atteinte de
l'objectif 7,2 de la stratégie de développement durable proposée ici à
l'intérieur des délais fixés. Faute d'une
participation adéquate de l'industrie à un programme comme HERVE pour démontrer
son intention sincère d'appuyer le
gouvernement dans son effort de réduction des gaz à effet de serre, l'institut
conclut que ce dernier n'aura, malheureusement, d'autre choix que
d'imposer rapidement une législation de type ZEV Mandate au Québec.
Le
Président (M. Reid) : Je dois vous interrompre,
malheureusement, à moins que quelqu'un... Je ne sais pas si, M. le
ministre, vous voulez donner du temps...
M. Heurtel : Pour conclure.
Le
Président (M. Reid) :
Pour conclure, oui. Alors, veuillez conclure dans l'intervalle d'une minute, si
vous voulez.
M. Arcoragi (Jean-Pierre) : Le
développement exponentiel des technologies numériques permettra sous peu la commercialisation de voitures entièrement
autonomes. Loin de tenir de la science-fiction, les grands constructeurs
automobiles prévoient qu'ils seront commercialement disponibles entre 2020 et
2025. L'institut croit que le Québec
doit harnacher cette nouvelle technologie comme vecteur de développement
économique durable, et non se la
laisser imposer par les forces du marché.
Le rapport du Conference Board du Canada publié
cette semaine estime qu'il y aura des retombées de l'ordre de 65 milliards de dollars par année au Canada suite à l'introduction
de la voiture autonome sur nos routes. Les véhicules autonomes
permettront la convergence du transport privé et du transport public. En effet,
une voiture autonome peut être facilement
partagée par de nombreux utilisateurs, un peu comme les taxis d'aujourd'hui. La grande différence entre un taxi
et une voiture autonome réside dans le fait que les coûts d'opération d'une
voiture autonome seront bien inférieurs à ceux d'un taxi. Ces voitures autonomes seront vertes, partagées et
permettront une plus large inclusion sociale. En effet, les voitures autonomes accroîtront la mobilité des personnes âgées, des personnes handicapées et des jeunes tout en libérant de tâches d'accompagnement
les aidants naturels et les parents de jeunes enfants.
Le Président (M. Reid) : Je
dois vous interrompre, M. Arcoragi. Vous aurez peut-être l'occasion, dans la période de questions, de pouvoir conclure
sur des éléments que vous n'avez pas pu mentionner. Je vais passer la
parole maintenant au ministre pour le premier bloc, qui est un bloc gouvernemental.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Je tiens à vous remercier pour votre
intervention et votre mémoire. Vous soulevez des questions puis vous
avancez des propositions vraiment très intéressantes.
Ma première question... Puis je vais faire un
court préambule, alors ce que vous proposez rejoint directement, comme vous le dites, l'objectif
7.2 de la stratégie et également s'intègre bien aussi avec les mesures du plan d'action sur les changements climatiques, c'est-à-dire de poursuivre le soutien et le développement de véhicules électriques, mettre sur pied des mesures financières
pour soutenir à nouveau soit l'acquisition ou favoriser le développement du véhicule
électrique au Québec. D'ailleurs, on voit que ça fonctionne parce que, bien
qu'encore on n'est pas satisfait du nombre de véhicules électriques qui
circulent au Québec, ce nombre-là augmente de façon exponentielle. On
voit des augmentations, là, de 50 % et même de 100 % dans des
périodes de six mois, un an, là, ça... On voit qu'il y a un mouvement dans la
bonne direction.
Or, ma
première question, c'est... Encore une fois, vous l'avez dit, mais j'aimerais
ça, si vous pouviez prendre un peu
plus de temps pour approfondir, voir comment vous voyez le lien nécessaire
qu'il doit y avoir d'intégrer les actions en matière de changements climatiques, de lutte contre les changements
climatiques, et la stratégie de développement durable, plus
particulièrement par rapport aux véhicules électriques.
Le Président (M. Reid) : M.
Arcoragi?
Une voix : ...répondre à la
question.
Le Président (M. Reid) : M.
Ducharme.
M.
Ducharme (Pierre) : Bien, puisqu'une est la conséquence de l'autre,
l'institut se réserve le secteur du transport. Seulement, on n'est pas là pour
commenter sur l'ensemble des stratégies gouvernementales, mais le
transport représente quand même 40 % de
nos émissions de gaz à effet de serre. D'ailleurs, si on veut s'adresser
sérieusement au milieu du transport, on regarde, dans un contexte où, quand
même, les ressources sont limitées, des stratégies qui vont avoir le plus grand impact sur la période de temps
que vous vous êtes réservée. Il y a toutes sortes d'autres bonnes
stratégies qu'on pourrait utiliser.
L'électrification des transports publics en est une, l'électrification de
certains transports de marchandises en est une autre. Il y a toutes sortes de
nouvelles technologies qui sont disponibles sur les marchés, alors c'est
excellent. Mais, à l'intérieur des cinq
prochaines années, qui est un délai relativement court, on croit qu'il faut
s'attaquer au secteur où il y a le plus fort
potentiel, et c'est celui de la voiture de particuliers, et c'est pour ça qu'on
met de l'emphase là-dessus.
Pour ce qui est du plus
long terme, on tentait de faire la relation entre le véhicule autonome puis le
véhicule électrique en vous disant que cette
technologie-là s'en vient, elle s'en vient très, très, très rapidement, et on a
le choix, comme gouvernement, de la
subir ou de se préparer adéquatement pour en tirer pleinement un avantage tant
au niveau du développement économique
qu'au niveau de la réduction des gaz à effet de serre et de l'appui à la
stratégie gouvernementale de réduction des gaz à effet de serre.
Si on veut
faire ça, il va falloir d'abord comprendre qu'est-ce qui va arriver tantôt. Il
y a certaines branches du gouvernement du Québec qui s'en occupent.
Notamment, la SAAQ est en train d'étudier la possibilité de permettre l'utilisation de ces voitures sur les routes. Mais
ça ne suffit pas parce qu'il va y avoir plein d'impacts sociaux : sur
les chauffeurs de taxi, les chauffeurs d'autobus, les chauffeurs de camions — c'est
facile — les
sociétés d'assurances, sur les taxes du gouvernement, sur les corps policiers,
etc. La liste est longue.
Et il y a
toutes sortes d'opportunités économiques qui se rattachent à ça aussi. C'est
pour le Québec une occasion de retourner dans le secteur de
l'automobile, qui, malheureusement, n'est pas notre plus fort secteur au Québec
suite à la... En tout cas, de
l'automobile — je ne
parle pas du camion ou de l'autobus, hein — où, avec la fermeture de GM, il y a déjà plusieurs années, à Sainte-Thérèse, on a
perdu presque nos dernières entreprises qui étaient impliquées dans ce domaine-là. Et là, puisque dans ces voitures-là,
les logiciels représentent la grande majorité du coût de la voiture,
tout ce qui s'appelle électronique et informatique, et qu'on a des forces vives
au Québec dans ces secteurs-là, il y a une grande opportunité de retourner dans l'industrie, et ça, de façon mondiale, pas
juste ici, au Canada, mais partout à travers le monde.
• (10 h 50) •
Le Président (M. Reid) :
Merci, M. Ducharme. M. le ministre.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Sur ces questions-là, tant le véhicule autonome que le véhicule
électrique encore conduit, là, par des êtres
humains, dans cette notion-là je comprends très bien que vous regardez cette
question-là d'une façon spécifique, mais est-ce qu'on peut voir aussi la
nécessité d'impliquer une vision plus intégrée, plus globale, qui implique nécessairement notre conception de
l'aménagement urbain, notre conception des transports et de la nécessité
d'avoir, justement, pour approfondir,
justement, cette filière-là... Vous parliez de développement économique,
évidemment, mais aussi la façon dont on envisage notre planification urbaine,
notre planification globale des transports. Alors, j'aimerais ça, vous entendre
là-dessus, s'il vous plaît.
M.
Arcoragi (Jean-Pierre) : C'est que le véhicule autonome, beaucoup plus
que le véhicule électrique, pourra nous apporter une chance de redéfinir
la ville, redéfinir l'urbanisation. En fait, un véhicule autonome peut
remplacer trois à huit véhicules ordinaires.
Et il y a la notion d'autopartage qui se dégage du véhicule autonome,
c'est-à-dire que le véhicule autonome
peut être stationné jusqu'à ce que quelqu'un l'appelle et, éventuellement, le
servir, servir plusieurs personnes et puis se ranger lorsqu'il n'est
plus utile. Donc, on peut imaginer une ville où les voitures ne sont plus garées le long des rues. On va pouvoir verdir les
villes beaucoup plus parce qu'il y aura beaucoup moins de véhicules
potentiellement dans nos villes. Notre système routier va être plus qu'adéquat
parce que les véhicules autonomes demandent
beaucoup moins d'espace entre les voitures, il y a beaucoup moins de voitures
qui vont être en circulation. Donc, ça va redéfinir toute l'occupation
du territoire.
Et il faut
ajouter aussi que, selon le Conference Board, le véhicule autonome, au Canada,
va générer des revenus de toutes
sortes de l'ordre de 65 milliards de dollars par année. À l'échelle
planétaire, on va même... Morgan Stanley dit que ça pourrait être de l'ordre de cinq billions,
5 000 milliards par année. Donc, ce n'est pas trivial. Et nous, ce
qu'on offre, c'est la chance que le Québec se positionne par rapport à
une industrie majeure qui est en train de s'élaborer.
Le Président (M. Reid) : M.
le ministre.
M.
Heurtel : Merci, M. le Président. Si on peut regarder davantage au
niveau... Parce qu'on vient de recevoir votre mémoire, alors je voudrais aussi qu'on parle de la norme ZEV. Et je
comprends que ce n'est pas votre premier objectif, évidemment, mais
j'aimerais ça, vous entendre sur ce que vous en pensez puis voir comment ça
peut être un outil qui peut nous aider dans
une stratégie globale pour... Parce qu'il va falloir inévitablement changer les
comportements. Là, nous sommes
programmés depuis au moins un siècle, sinon plus, là, à avoir une automobile,
et on voit, l'automobile, d'une certaine façon, ça a un rôle social,
c'est beaucoup plus qu'un moyen de transport pour beaucoup de gens, et donc j'aimerais ça, bon, qu'on parle de la norme ZEV et
de ce sur quoi on tend. Avez-vous réfléchi? Qu'est-ce qu'on fait en termes de pédagogie? Qu'est-ce qu'on fait en
termes de communications pour, justement, entamer... Parce que, là, on
parle de changer des habitudes fondamentales.
Et puis un
troisième point si on a le temps. Évidemment, notre relation à l'automobile en
ville est très différente par rapport aux régions. Alors, de voir
comment ce que vous proposez s'articule particulièrement en région, de... qui
est... Ça va nécessairement être vu différemment et exprimé différemment que
dans les grands centres urbains.
Le Président (M. Reid) : M.
Ducharme.
M. Ducharme
(Pierre) : Alors, d'abord, la norme ZEV, comme je l'ai lu... Je m'en
excuse, mais avec le temps qu'on a... Bien, comme je l'ai lu, la norme ZEV
devrait faire partie d'une stratégie carotte et bâton, hein? Les fabricants
d'automobiles ont présentement... — puis on les côtoie, là, de
façon très, très régulière — ont
vraiment la perception que ce qu'on essaie, c'est
simplement de faire une réduction des gaz à effet de serre, alors qu'ils ne
comprennent pas qu'au Québec on va plus loin
que ça, on essaie de faire l'électrification des transports. Et leur réponse à
l'électrification pour
l'instant, c'est de dire : Écoutez, regardez notre «track record», la
consommation énergétique de nos voitures, et donc les émissions de gaz à effet de serre de nos
voitures diminuent sans cesse depuis les 10, 12 dernières années. Pas de
leur propre chef, parce qu'on leur a tordu le bras. Il faudrait peut-être
l'ajouter. Mais c'est effectivement un cas, et ils ne comprennent pas que le
village de Gaulois que constitue le Québec leur dise : Non, vous ne
comprenez pas. On ne veut pas des véhicules à essence qui consomment moins d'essence,
on veut des véhicules électriques.
Alors, ça représente
pour l'industrie de l'automobile ce qu'on va qualifier d'un «retooling»,
c'est-à-dire un changement de leurs usines, de leurs infrastructures, pour
lequel ils ne sont pas encore prêts, et ils vont essayer de retarder, si vous
voulez, cette échéance d'un mandat ZEV le plus possible pour s'acheter le temps
d'amortir des équipements qui sont déjà en place. Et on ne peut pas les blâmer,
ils sont ce qu'ils sont, des fabricants d'automobiles. Cependant, s'ils démontraient, grâce à leur participation dans des
programmes comme HERVE — il y a peut-être d'autres solutions,
nous, on est là pour prôner la nôtre, évidemment — qu'ils comprennent, d'abord, l'objectif du
Québec et qu'ils veulent véritablement y participer... Et il y en a qui
le font déjà. L'exemple de Nissan, par exemple, qui contribue à l'installation
de bornes de recharge rapide sur nos autoroutes, en est un, mais c'est le seul,
malheureusement. Si jamais ils démontraient
une meilleure volonté en participant activement à des programmes comme celui
qu'on propose, je pense qu'on pourrait attendre, pour imposer une norme
ZEV, d'en voir les résultats parce qu'on est confiants que ça pourrait aller.
Ça m'amène au
deuxième point, qui est celui de la pédagogie et des communications. Notre
expérience sur le terrain à faire des essais
routiers et à discuter avec toutes sortes de gens de toutes les strates de
notre société démontre clairement que la pire réaction qu'on a de
quelqu'un qui sort d'un véhicule électrique après un essai routier, la pire réaction, c'est : C'est pareil comme une auto
ordinaire. Et la meilleure réaction qu'on a, c'est : Wow! on n'aurait
jamais pensé. Ce sont des autos
silencieuses, performantes et, à tout autre point de vue, aussi confortables,
sinon plus, que les voitures qu'on
construit présentement. Donc, si on veut les convaincre, il faut en faire plus,
de promotion. Il faut en faire connaître les avantages et il faut leur
donner l'occasion d'essayer sans être pressurisés par quelqu'un qui essaie de
leur vendre un véhicule. Et on ne peut pas blâmer le vendeur non plus, il est
payé pour vendre. Alors, on ne s'attend pas à ce qu'il fasse autre chose, quand
même.
La différence entre
les villes et les régions. Comme je le dis, même les gens en région parcourent
en moyenne 50 kilomètres par jour avec leur véhicule. Ils le prennent, ils vont
travailler le matin. Ils reviennent le soir, ils
vont aller faire quelques commissions pas très loin de leur patelin. Et ça, ça
prévaut pour 80 % de notre population au Québec. Le véhicule
électrique convient très bien à ces tâches-là. La plupart de ménages — on
parle de gens qui sont mariés, avec un ou deux enfants — ont
maintenant deux véhicules. Qu'est-ce qui les empêcherait d'avoir au moins un véhicule
électrique? Absolument rien. Et, économiquement, ça a du sens.
Alors, le véhicule
électrique, à notre opinion, convient à une très, très, très grande partie de
notre population dans ses besoins de tous les jours. Et, à la limite,
l'éducation qu'on doit faire, c'est de leur dire : Écoutez, si tu veux aller faire un voyage de pêche une fois par année
puis tu as besoin d'un gros VUS, bien, de grâce, fais-en la location, tu n'as pas besoin de le traîner
pendant toute l'année.
• (11 heures) •
Le Président (M.
Reid) : Merci. M. le ministre.
M. Heurtel :
Il me reste combien de temps?
Le Président (M.
Reid) : Deux minutes.
M. Heurtel :
Deux minutes. Bien, j'aimerais ça, justement, encore une fois sur la... si on
peut revenir sur... puis, rapidement, là, au
niveau de la séquence... Parce que, la pédagogie, j'aimerais ça qu'on
approfondisse encore. Parce que, là,
tout ce que j'entends, c'est : Bien, vous avez juste à l'essayer vous
allez l'adopter. Moi, j'aimerais ça, comprendre qu'il faut qu'on fasse...
Qu'est-ce qu'on doit faire en termes de changement d'habitudes, là? Parce que,
là, je veux dire, on a tous... Moi, le
premier, je veux dire, moi, j'ai grandi, puis, bon, j'ai ma voiture. Puis c'est
vrai que ma voiture, quand je ne l'utilise pas, bien elle est dans un
stationnement, puis bon... Puis on a tous été habitués comme ça. Quel genre de mécanique... Puis je comprends qu'il n'y a pas beaucoup de temps,
mais, je veux dire, qu'est-ce que ça prend en termes de changements structurels, en termes de communications, puis
qu'est-ce qu'on peut faire comme gouvernement pour appuyer, ça, là?
Parce que, là, on parle d'un changement, véritablement, de façon de faire, de
façon d'être.
M.
Ducharme (Pierre) : Bien, déjà, il y a une génération derrière la
mienne — pas la
mienne, malheureusement, ou pas la nôtre, pour la plupart d'entre
vous — qui
a compris ça, qui n'achète plus de véhicules, qui prend plus de permis de
conduire, qui se sert énormément des transports collectifs, qui fait du
covoiturage, et il faut continuer à l'encourager.
La réponse à votre question, c'est que ça prend plus de communications, des
campagnes de sensibilisation du style
de celle que la SAQ nous a servie et qui a très, très bien servi les Québécois
au niveau de la ceinture, par exemple, du port de la ceinture, ce genre
de choses là.
Mais il y a personne
qui va dépenser 15 000 $, 20 000 $, 30 000 $ sur un
véhicule sans avoir essayé. Et, quand ils
arrivent à ce point-là, il faut que déjà le véhicule électrique soit dans leur
tête, hein? Alors, il faut faire plus de communication, il faut leur
avoir donné la chance de l'avoir essayé, et ça prend aussi des témoignages de
la part des gens qui s'en servent de façon quotidienne pour dire :
Regardez, on n'est pas très différents de vous, on a les mêmes habitudes de vie
que vous. Vous n'avez pas besoin de les changer, vos habitudes de vie, en
passant, pour 95 %. Sauf le voyage de
pêche de tantôt ou aller voir grand-mère à l'occasion des fêtes, la voiture
électrique va convenir à tous vos besoins, soyez sans crainte.
Le
Président (M. Reid) : Merci, M. Ducharme. La secrétaire de la
commission, qui appartient à une jeune génération, me disait qu'elle n'avait
jamais eu d'automobile. Donc, c'est un exemple typique que vous mentionnez. M.
le député de Jonquière, pour le bloc de l'opposition officielle.
M. Gaudreault :
Oui. Moi, j'en ai une, voiture.
Une voix :
...
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Gaudreault :
Bon, je peux... À l'ordre, M. le Président! Alors, merci de votre présence.
Merci de votre présentation. Effectivement, on vous a bien écouté parce qu'on a
reçu le mémoire un peu à la dernière minute. Mais, encore une fois, ce n'est
pas un reproche, là, je sais qu'on a tous été pris dans des délais très, très,
très brefs.
Je veux revenir
vraiment à l'essence même du travail que nous avons à faire ici, qui est sur la
stratégie de développement durable du
gouvernement du Québec 2015-2020, une stratégie de développement durable qui
s'adresse en priorité au gouvernement. Moi,
je disais tout à l'heure : Il faut voir dans cette stratégie comment... vu
que c'est une deuxième stratégie, tenter de l'élargir vers d'autres
instances de la société, que ce soient les municipalités, etc., les entreprises privées, les individus. Vous avez,
évidemment, un propos très fort sur les transports électriques.
Évidemment, je suis favorable à cela, nous avons beaucoup travaillé pour
favoriser cela entre 2012 et 2014. Et, dans cette stratégie, le gouvernement dit : Bien, dans le fond, il
faut que l'État soit exemplaire. Si c'est une stratégie de développement
durable qui s'adresse à l'État, il faut
d'abord que l'État soit exemplaire. Je peux vous dire qu'il y a quand même une
certaine résistance du côté de l'État à la conversion de sa flotte de
véhicules en véhicules électriques. Hein, on pourrait parler même des services
de protection des ministres avec les véhicules de fonction...
Une voix :
...
M. Gaudreault :
Oui, mais je parle de la résistance de certaines institutions ou de certains
organismes de l'État à faire ce transfert-là pour toutes sortes de
raisons : le poids des véhicules, l'espace bagages dans les véhicules, l'autonomie quand on est un ministre, par
exemple, qui a beaucoup
de route à faire ou qui vient d'une région où il y a beaucoup de route pour se rendre dans le comté, bon, ainsi
de suite. Puis on pourra aussi, évidemment, parler de la très grande flotte du ministère des Transports pour l'entretien des routes, etc., même les
véhicules de la Sûreté du Québec. Vous
savez, quand on fait le tour, là, de la flotte du gouvernement du Québec, il y en a un puis deux, là, des véhicules.
Alors, moi, je
voudrais savoir comment on peut, via la stratégie, avoir quelque chose qui fait
en sorte d'être encore plus actif pour que le gouvernement soit encore plus
exemplaire dans la conversion de sa flotte en véhicules électriques? Je veux vous ramener vraiment sur l'exemplarité que
le gouvernement doit exercer en termes de transport électrique dans sa flotte.
Le Président (M.
Reid) : M. Arcoragi.
M. Arcoragi
(Jean-Pierre) : Je peux commencer. Effectivement, si le gouvernement
ne donne pas le ton, c'est difficile de
convaincre le citoyen si on n'a pas des exemples autour de soi. Pour ce qui est
des ministres, des gens qui ont des
fonctions supérieures, il existe quand même... je pense que Tesla a démontré
qu'on ne fait pas de compromis dans la qualité
du véhicule. L'autonomie des véhicules de luxe électriques, je ne crois pas
qu'on fasse de compromis. Évidemment, je peux concevoir que, pour un
ministre, il ne faut pas avoir un véhicule de bas de gamme, mais je pense
qu'avec des véhicules comme le Tesla il y a moyen de répondre à la demande.
Pour ce qui est de...
Bon, est-ce que, Pierre...
M. Ducharme
(Pierre) : Dans les petits véhicules... Je pense qu'il faut distinguer
les classes de véhicules. Dans les véhicules
lourds, style les charrues pour déneiger nos autoroutes, on n'a encore pas de
solutions électriques qui sont techniquement acceptables. Ne perdons pas
de temps avec ça pour l'instant, le marché va nous rattraper tôt ou tard.
À l'autre extrême, le
gouvernement du Québec et ses sociétés d'État représentent la plus grande
flotte au Québec, il n'y a
aucun doute là-dessus, et il faut commencer par électrifier cette flotte avec
les véhicules de passagers. Et, tant que les politiques gouvernementales
vont laisser au chauffeur le choix du véhicule pour son ministre plutôt que la
politique gouvernementale de le faire, vous n'y arriverez pas. La plupart de
vos conducteurs... Pour ceux qui ont été ministres ou qui ont des voitures de
fonction maintenant, demandez à vos chauffeurs s'ils ont essayé un véhicule
électrique, je serais prêt à parier avec vous qu'ils ne l'ont pas encore fait,
ils ne sont même pas intéressés à le faire.
M. Gaudreault, je
suis convaincu qu'une Volt, par exemple, de GM — et je n'essaie pas de
faire de promotion, là — peut facilement vous amener dans votre
région aller-retour. Et je sais qu'il
y a beaucoup de camps de pêche dans votre région. Si vous voulez avoir une
Mitsubishi 4x4 hybride électrique, elle s'en vient sur le marché cette
année. Il y a un véhicule qui convient dans le cas des véhicules légers et un
véhicule pour à peu près toutes les applications. Il n'y a pas d'excuse pour ne pas
avoir de véhicule électrique. Et, tant que les appels d'offres du gouvernement pour des véhicules n'exigeront pas ou n'avantageront pas le
véhicule électrique, ça ne se passera pas non plus.
M.
Gaudreault : Bien, effectivement, puis je ne veux pas... J'ai donné l'exemple des véhicules de fonction,
mais je ne veux pas que ça détourne l'attention pour juste parler de ça, là,
c'est parce que... J'ai pris ça comme exemple, mais il
y a tellement d'autres types de
véhicules. Le ministère des
Transports, par exemple, a beaucoup de véhicules d'entretien, des pick-up, des
camionnettes. Le ministère de l'Environnement a beaucoup de véhicules sur la
route, on en croise souvent. Et je comprends tout ça, là, que les... je le
sais, là, que je peux vivre au Saguenay puis avoir un véhicule électrique sans
problème, puis traverser le parc pour venir ici, au Parlement, avec sans aucun
problème.
Ma question est plus de voir comment vous voulez
qu'on modifie la stratégie de développement durable pour arriver à ça. Est-ce que vous voulez, par exemple, que, dans un chapitre, ou dans un plan d'action, ou dans un
indicateur, on arrive avec un objectif, un
échéancier concret de conversion, que ce soit, par exemple, en tenant compte
des appels d'offres? Est-ce que vous interpellez le Conseil du trésor?
Alors, j'aimerais voir ce que vous proposez sur la modification de la stratégie
que nous avons devant nous. Par exemple, sur les critères d'appels d'offres,
ainsi de suite, comment ça peut se faire? Et
est-ce que le gouvernement devrait se donner un échéancier pour ce faire?
Est-ce que le fait, par
exemple, que le développement durable relève
du ministre de l'Environnement confine, au fond, le développement durable, envoie un message de développement
durable juste sous l'angle environnement? Est-ce que le développement
durable ne devrait pas être, par
exemple, encore plus transversal et que ça ne pourrait pas aider à votre
souhait?
Donc, je veux vous amener spécifiquement sur la stratégie
de développement durable parce qu'on est ici... Moi, je veux arriver à la fin
des auditions, là, avec un certain nombre de recommandations. Parce qu'on n'est
pas dans un projet de loi où on aura à voter, là, il faut arriver à des recommandations
que moi, je vais soumettre au gouvernement ou sur lesquelles on va s'entendre
ici, en commission, et j'aimerais qu'on arrive à quelque chose, là, de précis.
• (11 h 10) •
Le Président (M. Reid) : Dans
une minute, M. Ducharme.
M. Ducharme (Pierre) : Je pense que
toutes les mesures que vous avez mentionnées sont nécessaires. C'est-à-dire qu'il
faut se fixer un objectif qui est quantifié et qui est déterminé dans le temps
en disant : Tel pourcentage de la
flotte du gouvernement du Québec devra être totalement électrique avant
telle date. Sans objectif quantifié, on ne pense même pas qu'on va
arriver à quoi que ce soit. Il faut que, dans les appels d'offres, il y ait des
critères précis sur les exigences d'émission
ou d'électrification des transports. Il
faut qu'à l'intérieur des ministères il y ait un pourcentage
qui soit fixé, à dire : Si le ministère des Transports a tant de véhicules légers, on sait qu'ils sont
disponibles, d'ici cinq ans il
faut qu'ils soient tous électriques. Dans
les véhicules lourds, il n'y en a pas, d'option. Je m'excuse, ça ne donne rien de
les mettre, les critères, il n'y en a pas. S'ils deviennent... Il faut que la stratégie
soit flexible, soit adaptable, pas coulée dans
le ciment et permettre au ministre qui en sera responsable, que ça soit le ministre de l'Environnement, des
Transports ou le Conseil du trésor, d'évoluer avec le marché, qui évolue excessivement rapidement.
Ça, c'est les trois recommandations, à mon avis, les plus urgentes pour le gouvernement.
Le Président (M. Reid) :
Merci, M. Ducharme. Vous avez bien résumé en une minute, je pense. Alors, nous
allons passer au bloc du deuxième groupe d'opposition, je donne la parole au député
de Groulx.
M. Surprenant : Merci, M. le
Président. Alors, messieurs, vous faites état dans votre mémoire qu'on ne peut pas compter beaucoup sur... donc, on ne
peut compter sur une contribution substantielle du transport collectif pour
réduire à court terme les GES. Alors, dans
votre document, vous misez beaucoup sur l'électrification
des véhicules pour passagers, donc de particuliers. Alors, à la page 3
de votre mémoire, vous dites, là, qu'il y a trois raisons qui expliquent le
faible pourcentage des ventes de voitures : alors, le faible degré de
connaissance des consommateurs, le peu de promotion et puis le manque
d'inventaire et la livraison trop longue. Alors, sur un autre point, par
contre, là, je pense qu'il y en a peut-être un quatrième : le retour sur l'investissement,
le «payback», comme on dit dans le jargon.
Alors, moi,
c'est ce que j'entends souvent des gens à qui je parle de voitures électriques,
c'est qu'ils présument que le coût, encore, est trop élevé, donc le
retour ne se réalise pas sur l'investissement. Ce que j'entends, c'est que
c'est des gens qui vont se servir beaucoup
de leur véhicule, qui vont faire des très longues distances, là il va y avoir
un intérêt financier de le faire. Mais ça ne concorde pas, il y a une
dichotomie par rapport à ce que vous écrivez, que les gens... 90 %
des trajets se font à l'intérieur d'un rayon de 50 kilomètres de la résidence.
Donc, ce n'est pas des gens qui s'en servent beaucoup que l'on veut
inciter à avoir une voiture électrique et pour lesquels le retour n'est pas là.
J'aimerais ça, que vous commentiez un peu
plus à ce sujet-là. Puis, à la limite, est-ce que vous pensez que les
incitatifs gouvernementaux sont suffisants ou devraient être autres?
M.
Ducharme (Pierre) : Écoutez, il y a deux législations aux États-Unis
qui ont des performances supérieures à la nôtre en termes de
l'électrification des transports, et ces deux législations-là offrent des
subventions légèrement supérieures à la nôtre. Statistiquement, je pourrais
faire le lien, là, mais je ne le ferai pas parce qu'il y a peut-être toutes
sortes d'autres raisons environnementales pour lesquelles on le fait. Quand
vous me dites que les gens vous disent qu'il
n'y a pas de «payback», je vous soumets respectueusement qu'il y en a plusieurs
qui n'ont jamais fait le calcul, ils répètent simplement ce qu'on leur
dit de la part du vendeur d'automobiles, qui, lui, avait une promotion... en
promotion à passer un véhicule à essence ordinaire ce mois-là, puis a poussé
là-dessus sous ce prétexte-là.
Le programme
qu'on vous propose, avec un logiciel qui est conçu pour étudier cas par cas
s'il y a un véhicule qui est rentable pour le client, permettra
d'établir là où ça l'est et là où ça ne l'est pas, rentable. C'est faux de dire
que c'est les véhicules de longue distance, d'ailleurs, qui produisent le plus
de rentabilité parce qu'en fait, pour vous dire toute la vérité, c'est ceux qui font de courtes distances, mais qui en
font beaucoup, ceux qui restent en ville, qui tournent en ville. Parce que, sur les autoroutes, vous avez
remarqué que votre automobile consomme beaucoup moins d'essence que quand elle est en ville.
Le véhicule électrique, là où il va chercher son efficacité, c'est en ville,
hein? Alors, si vous faites beaucoup de millage en ville, c'est plus
payant. Et c'est ce que je disais tantôt, c'est pour ça qu'on se concentre sur les gens qui ont des véhicules qui font 50 kilomètres
et moins par année, ce qui est la plupart d'entre nous. Vous, vous êtes probablement
les exceptions, ici, autour de la table, la plupart des Québécois habitent très
près de leur travail.
Le Président (M. Reid) : M.
le député de Groulx.
M. Surprenant : Ce que je comprends,
c'est que votre logiciel dirige chaque client vers la voiture qui lui conviendrait le mieux. Et ça tient compte non seulement du modèle, mais du millage qu'ils font, votre logiciel. O.K. Bon, je vous félicite, c'est un bon
logiciel.
M. Ducharme (Pierre) : Ce n'est pas
notre logiciel, en passant, c'est un de nos partenaires dans le projet qui
fournit le logiciel.
M. Surprenant : O.K. Le partenaire,
d'accord. O.K. Maintenant, l'autre question que les gens se posent, c'est les
inquiétudes au niveau de la batterie puis même, au niveau environnemental
aussi, la disposition de ces batteries-là. Alors donc, actuellement, les gens
ont leur propre batterie dans leur véhicule, et là on installe... il y a un déploiement au niveau des bornes. Alors,
les gens ne vont pas gazer, mais électrifier leur auto, là, en cours de route,
et puis... Mais les gens... Je ne sais pas comment ça fonctionne au niveau de
la disposition des batteries, est-ce qu'elles ne sont plus bonnes par après?
Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu... Je sais qu'il
y en a un de vous qui est ingénieur.
On m'a lancé une idée, peut-être que les stations-service, finalement,
remplacent les batteries pour accélérer le délai de remplissage. Bien, en fait,
il n'y aurait pas de remplissage, ce serait un remplacement. Alors que les gens
achètent leur voiture, de créer un standard. Ça fait que le gouvernement pourrait intervenir puis exiger qu'il y ait
des standards, que tout le monde ait le même modèle de batterie et que des stations-service... au lieu
que les gens attendent encore au
minimum une demi-heure, sinon quelques heures, que rapidement, en trois,
quatre minutes, on change de batterie et on continue. Et il y aurait, à ce
moment-là, peut-être une façon plus sécurisée au niveau environnemental d'un
contrôle des batteries qui ne sont plus bonnes et de la disposition de ces
batteries-là. En tant qu'ingénieur, qu'est-ce que vous pensez de cette
option-là?
M.
Ducharme (Pierre) : C'est un système qui a été essayé à plusieurs
endroits et qui a échoué pour plusieurs raisons. D'abord, convaincre l'ensemble des fabricants d'automobiles
d'avoir la même configuration de batterie, c'est de rêver en couleurs,
ça n'arrivera pas, ça n'arrivera simplement pas. La batterie représente
50 % du coût de la voiture. Alors, vous
achetez une voiture flambant neuve, vous arrivez après la première recharge,
puis on vous refile la voiture de votre
voisin qui a été utilisée pendant les six dernières années. Ça ferait votre
affaire? Je ne suis pas sûr que vous seriez prêts à partager vos
batteries comme ça. Il y a toutes sortes de raisons techniques pour lesquelles
c'est difficile de le faire.
Et, pour les
longues distances, je vous souligne qu'on peut recharger 80 % des batteries en moins de cinq
minutes. Alors, c'est le temps de rentrer,
aller prendre un café, ressortir, puis de débrancher le truc, puis votre auto
est rechargée. La plupart des recharges, les études démontrent qu'entre
85 % et 95 %, dépendant d'où on regarde, se font à la maison la nuit,
alors qu'on a plein d'énergie à donner au Québec à nos concitoyens parce qu'on
est en période hors pointe. Alors, je dois, malheureusement, être en désaccord
avec votre idée.
Le Président (M. Reid) :
Quelques secondes, M. le député de Groulx.
M. Surprenant : ...question, vous
passez de l'électricité des véhicules comme modèle d'avenir à succès à la
voiture autonome. Entre les deux, il y a peut-être l'hydrogène aussi. Alors,
avez-vous une opinion de ce côté-là, au niveau de l'évolution qui pourrait en
être et...
M.
Ducharme (Pierre) : J'ai personnellement passé 10 ans de ma carrière
dans le secteur de l'hydrogène. Le problème qu'on avait il y a 10 ans,
on l'a toujours aujourd'hui, c'est un problème de déploiement du ravitaillement
en hydrogène. Je ne suis pas certain que
vous aimeriez avoir un réservoir d'hydrogène dans votre garage. Je ne suis
pas certain qu'on est prêt à subventionner
l'installation de réservoirs d'hydrogène un peu partout. Alors, c'est la
production d'hydrogène qui... c'est là où le bât blesse, si vous voulez. Mais
dans notre sens...
Le Président (M. Reid) :
Merci, monsieur...
M. Ducharme (Pierre) : ...dans notre
sens, il faut le comprendre qu'une voiture à hydrogène, c'est une voiture électrique. Le carburant, au lieu d'être
une batterie, est de l'hydrogène. Pour moi, là, ça ne fait pas de
différence, on est prêts à en faire la promotion au même titre que les...
Le
Président (M. Reid) : Merci. Merci, M. Ducharme. Nous allons
passer maintenant au dernier bloc dédié aux indépendants. Alors, Mme la
députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme Massé : Merci, M. le Président.
Merci. Je suis désolée d'avoir dû quitter, mais j'avais mes oreilles ici et mes
yeux. Mais j'ai bien écouté votre présentation. Je trouve que ce qui est
intéressant dans ce que vous amenez, encore là on est à la jonction des piliers
essentiels d'un développement durable, c'est-à-dire l'économie, le social et,
bien sûr, l'environnemental. Québec solidaire, on voit assez bien cette
nécessité, voire même exigence d'arriver à court terme. Et, pour ça, vous le dites, il doit y avoir toutes sortes
d'actions posées très clairement, puis le gouvernement peut jouer un
rôle, comme administration publique, de leader, les municipalités, pareil. On
est en train de revisiter un pacte avez eux en... Ça, ça va.
Mais on a un défi, c'est-à-dire que... et particulièrement
vous en avez fait état, c'est la question du degré de connaissance des
consommateurs, mais je dirais aussi parfois d'une espèce de double discours
dans l'espace public, puis actuellement je trouve qu'on est là-dedans de façon
assez importante. On voit, avec l'augmentation du prix de l'électricité, hein... C'est-à-dire que nous, les concitoyens, on a vu dans la dernière année, les
dernières années, de façon assez substantielle, notre facture
d'électricité augmenter. Alors, de rajouter un véhicule là-dessus, on a un peu
peur. Et en même temps, paradoxalement,
le prix de l'essence a diminué. Alors, vous avez dit qu'il y a
de la formation... vous avez répondu
au ministre en disant qu'il y a une éducation
à faire, il y a de la formation. Est-ce que vous pourriez
nous pister pour améliorer la stratégie, pour dire : Mais comment qu'on
fait... Dans un contexte où notre électricité augmente, il y a une partie de la
population qui s'appauvrit, dont notamment les aînés, dont vous avez fait
mention, comment on peut arriver à faire ça?
• (11 h 20) •
Le Président (M. Reid) : M.
Ducharme, je vous demanderais de faire ça en une minute, s'il vous plaît.
M. Ducharme (Pierre) : Ah! en fait,
c'est bon. D'abord, je pense qu'un des manques d'éducation de nos concitoyens, c'est le fait qu'on a l'électricité quand même
la moins dispendieuse presque au monde, hein? Il y a l'Islande qui est une exception à ça, là, mais on ne paie
pas cher pour l'électricité. Et recharger un véhicule électrique, si on parle de recharge, ça coûte moins de 2 $, alors que remplir un réservoir d'essence
pour faire les mêmes 100 kilomètres équivalents, par exemple, vous
coûterait facilement 15 $ à 20 $, dépendant du type de véhicule que
vous conduisez. Alors, je veux dire, on n'a
pas besoin... Mais il faut leur dire, ils ne le savent pas. Ils ne le savent
pas. Alors, 2 $ de plus par jour ou 15 $ de plus par jour? Tu
sais, je veux dire, à vous de faire le choix.
Évidemment, il y a des gens qui sont plus
crédibles que d'autres pour le faire. Je pense que le gouvernement du Québec et Hydro-Québec ont une excellente
crédibilité auprès des concitoyens. C'est votre job de le faire, c'est
votre signature que ça prend dans le bas de la page.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Merci de votre présentation.
Je suspends maintenant les travaux pour quelques
instants, le temps que nos nouveaux invités s'installent.
(Suspension de la séance à 11 h 22)
(Reprise à 11 h 25)
Le
Président (M. Reid) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Bienvenue aux représentants du Fonds
d'action québécois pour le développement durable. Vous avez une dizaine
de minutes pour faire votre présentation. Ensuite, nous aurons un échange avec les membres de la commission. Alors,
je vous demande, dans un premier
temps, de vous présenter et de
présenter les gens qui vous accompagnent.
Fonds d'action
québécois pour le
développement durable (FAQDD)
Mme Levert (France) : Oui. Alors,
bonjour, M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs de la commission. Je me présente, France Levert. Je suis
présidente du conseil
d'administration du Fonds d'action
québécois pour le développement durable et également présidente du conseil
d'administration du Réseau québécois des femmes en environnement, ce qui
explique ma présence au conseil d'administration. Les personnes qui
m'accompagnent sont Mme Véronique Jampierre,
qui est la directrice générale du fonds — je vais continuer en utilisant le terme «fonds»,
ça va être un petit peu plus court — donc, directrice générale du fonds; Nicolas
Girard — tous les
deux à ma droite — qui
est directeur de programmes; et Guillaume Plamondon, qui est conseiller
stratégique au sein du fonds.
Alors,
d'abord, en mon nom, au nom de l'équipe et au nom des membres du conseil
d'administration, merci de nous accueillir pour nous permettre
d'exprimer notre point de vue sur la stratégie en projet pour 2015-2020, la
deuxième stratégie, qui est vraiment un outil extrêmement utile et très
nécessaire pour le Québec dans son évolution vers le développement durable. Et,
avant de céder la parole aux gens de l'équipe en termes de recommandations, je
voudrais simplement livrer un message de la part des membres du conseil
d'administration, alors vous dire rapidement qui sont ces membres-là sans les
nommer tous. Alors, ce sont des représentants de groupes environnementaux, dont
moi-même, M. Bourke, que vous avez entendu il n'y a pas longtemps, un autre
représentant de groupe, des représentants gouvernementaux — d'ailleurs,
Mme Tremblay a déjà siégé sur le conseil d'administration du fonds — donc,
des représentants aussi du secteur de l'économie sociale, du secteur municipal
et de l'entreprise, donc une représentation des grands secteurs de la société.
Alors,
pour nous, l'expertise et l'expérience du fonds depuis 15 ans, sa contribution,
c'est un atout certain pour poursuivre
l'implantation du développement
durable à travers le Québec et pour la mise en action aussi de la
stratégie dont on discute
actuellement. Et je vous souhaite aussi une suite de travaux très enrichissante
et très utile. Alors, je cède la parole à Mme Jampierre.
Le Président (M.
Reid) : Mme Jampierre.
• (11 h 30) •
Mme
Jampierre (Véronique) : Bonjour. Ça fait que je vais continuer sur la
description de notre organisation, qui est
assez particulière en soi. Donc, comme le disait France, l'initiative de
création de notre organisation a été prise par le gouvernement en 2000, le but étant de créer une
organisation à but non lucratif non gouvernementale, volontairement, qui
aurait un rôle en lien avec le soutien à
toute initiative en développement durable au Québec. Et ce rôle-là se voyait
ou était associé à une vision qui était
transversale à l'échelle du gouvernement. Donc, on ne faisait pas partie du gouvernement, mais on venait en appui à toutes les démarches gouvernementales. N'importe quel ministère, par
exemple, qui avait à faire une
démarche en développement durable, on devait apporter une expertise. Cette
expertise-là, elle s'est développée à la
fois par rapport au financement... Donc, on était comme le bras qui pouvait
distribuer l'argent du gouvernement dédié à des initiatives en développement durable, des initiatives de
sensibilisation en développement durable. Je vais y revenir.
Et, en même temps, le
rôle de notre organisation, je dirais, s'est élargi. Au-delà de savoir comment
octroyer à des projets, les meilleurs
projets en développement durable... on a aussi développé l'expertise de savoir
auprès de qui donner cet argent-là, comment suivre ces personnes-là qui
ont à agir sur le terrain pour pouvoir sensibiliser, justement, la population québécoise au développement durable et
faire en sorte de savoir aussi comment ces actions de sensibilisation peuvent avoir des résultats. Donc, on a eu un rôle
important de pouvoir encadrer la mesure des résultats des actions posées pour pouvoir remonter ça auprès du gouvernement
et les instruire des avancements, justement, en matière de sensibilisation auprès
de la population.
Alors,
vous me voyez venir, dans les interventions précédentes, on a vu qu'il y a
eu, justement, des interrogations quant à la capacité de pouvoir changer des comportements, pouvoir... je
ne dirais pas influencer parce que, dans notre milieu, c'est un petit peu péjoratif, mais disons pouvoir amener, guider des
changements de comportements, des changements de pratique professionnelle. Alors, c'est pas mal dans cette
expertise-là que nous nous sommes développés, et c'est surtout sous cet
angle-là que nous voulons intervenir dans le cadre de la stratégie en
développement durable. On sait que vous allez
avoir beaucoup, beaucoup de commentaires de spécialistes, d'organisations qui ont leurs
vues sur certains sujets liés au développement
durable ou des sous-sujets, comme on vient de le voir, comme les voitures
électriques. Pour nous, là, c'est important, c'est plus de vous commenter comment on peut
aider, quelle est notre vision par
rapport à la stratégie dans la mise en oeuvre de la stratégie.
Voilà.
Puis
simplement peut-être vous rappeler qu'étant donné qu'on a été créé en
2000 on a souvent eu aussi... Est-ce
que
c'est un avantage? On ne le se sait pas, mais, en tout cas, de pouvoir
précéder beaucoup de mises en place d'outils en développement durable qui ont été mis en place par le gouvernement comme la loi en 2006, la première stratégie et, maintenant, la deuxième. Donc, souvent, on a comme préparé le
terrain à ce qui pouvait être demandé à la population par rapport à
certains outils que le gouvernement a mis en place.
Je pense
que ce qui est important, c'est donc aussi de marquer notre appui par rapport à la démarche, hein? Ça s'inscrit dans la continuité. Le
développement durable et la transformation sociale par rapport au développement
durable, c'est un exercice qui va s'inscrire
dans la durée aussi, c'est une transformation sociale. Alors, il ne faut surtout pas arrêter, il faut maintenir l'effort. Puis, dans ce
que nous, nous appelons un projet de société, nous souhaitons vraiment continuer à
appuyer tout du long le gouvernement par rapport à ça.
Alors, concernant
plus précisément la mise en oeuvre de la stratégie, je dirais que, vraiment,
notre position, c'est de faire valoir le fait que c'est un projet dans lequel
la mobilisation, la capacité de mobilisation et la capacité de communication
vont être des incontournables pour pouvoir assurer le succès de la stratégie.
La première stratégie
était essentiellement tournée vers une première sensibilisation des parties
prenantes du gouvernement. Elles sont nombreuses, et c'est surtout... il
fallait qu'on arrive à... Enfin, je dis «on», là, vous voyez, mais que le gouvernement arrive à s'organiser pour toucher à la fois tous les organismes,
impliquer toutes les organisations du gouvernement et leur faire comprendre c'était quoi, les enjeux
derrière l'environnement, derrière le développement durable.
Aujourd'hui, avec la
nouvelle stratégie, on passe à la vitesse supérieure. Les parties gouvernementales
sont déjà sensibilisées, ont déjà posé des actions, et, en même temps, bien, il
va falloir... Comme l'a dit M. Gaudreault tout à l'heure, c'est effectivement
encore un exercice interne au gouvernement, mais nous, on le voit aussi comme
un exercice beaucoup plus difficile dans sa deuxième période, qui est celle de
se tourner beaucoup plus vers l'externe, de s'adresser beaucoup plus à un large
public pour le préparer à pouvoir contribuer aux objectifs du Québec.
Alors,
je dirais, dans cette perspective-là, on s'est amusés, dans le mémoire qu'on
vous a livré, à vous exposer certaines
bases des principes qui peuvent accélérer, en fait, des exercices de
mobilisation ou de communication vis-à-vis du grand public. On a pris pour modèle...
Si vous vous rendez à la page 8 de notre mémoire et puis la page 9, on a
essayé, tenter d'expliquer à l'échelle individuelle quelles sont les
différentes étapes par lesquelles chacun d'entre nous, on passe quand on est
sensibilisé à un sujet.
Le Président (M.
Reid) : Il vous reste une minute.
Mme Jampierre
(Véronique) : C'est vrai?
Le Président (M.
Reid) : Oui.
Mme Jampierre
(Véronique) : Et, par rapport à ces principes-là... Ça fait que je
vais tout de suite aller au deuxième schéma de la page 9. Le constat que l'on
fait en lisant les résultats de la première stratégie, c'est que la population en soi... Suite aux sondages qui ont été faits par le gouvernement, on constate que la population, par le biais des entreprises, par le biais des municipalités,
est, en grande partie, déjà sensibilisée aux enjeux de la stratégie. Sauf
qu'on arrive à un moment où on a à peu près atteint un 20 % de la
population et des personnes, les intervenants les plus à même à accepter des
changements, et là, aujourd'hui, on est amené à devoir convaincre le reste de
la population à faire ces changements-là.
Alors, je résumerais les recommandations qui s'ensuivent par rapport à ce
constat-là. Vous verrez que notre mémoire et chacune des recommandations
sont articulées autour d'une analyse du contexte qui amène à chacune des
recommandations. Ces recommandations-là sont articulées par rapport à...
Le Président (M. Reid) : ...
Mme Jampierre (Véronique) : Pardon?
Le Président (M. Reid) :
Mme Jampierre, le temps est écoulé.
Mme Jampierre (Véronique) :
D'accord, on...
Le
Président (M. Reid) : Vous aurez peut-être l'occasion de faire
valoir ces points-là lors des questions parce qu'on va avoir un échange
de 35 minutes. Je commence par le bloc gouvernemental, M. le ministre.
M.
Heurtel : Merci. Et merci beaucoup pour votre intervention ainsi que
votre mémoire, très beau travail. Quand on lit les recommandations, on lit le mémoire, il y a vraiment une
thématique qui ressort, là, l'importance de communiquer, sensibiliser, poursuivre le travail, là, comme
vous venez de le dire. Dans cette optique-là, encore une fois, j'aimerais
ça, commencer le bloc de questions par rapport à comment vous voyez l'arrimage
entre la stratégie de développement durable
et les besoins qu'on a de poursuivre les efforts de communication puis de les
intensifier avec le fait qu'on doit, je crois, faire la même chose au niveau de la lutte contre les changements
climatiques. Alors, j'aimerais ça, d'abord... Puis la première question,
c'est de vous demander si vous voyez là une priorité, est-ce qu'on ne devrait
pas commencer par réfléchir comment on doit arrimer, justement, tant les
efforts de communication et de sensibilisation au niveau du développement durable... mais d'arrimer ça aussi
avec le même genre d'effort, le même genre de stratégie qu'on devrait
mettre en place au niveau de la lutte contre les changements climatiques.
Mme
Jampierre (Véronique) : Oui. En fait, il y a beaucoup d'efforts qui
ont été faits de la part du gouvernement pour, justement, s'adresser à la population et les inviter à contribuer
à la cible du gouvernement. On a été mandataires d'un des programmes,
qui s'appelle Action Climat, pendant six ans, on a financé des projets de
sensibilisation strictement liés, justement,
à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et on a eu le plaisir de
voir qu'on a réussi, en mettant bout à
bout les actions de sensibilisation sur le terrain, de pouvoir atteindre la
cible de 50 000 tonnes de gaz à effet de serre réduites juste
par les actions des citoyens. Ça fait que ça, c'est un premier point, les gens
sont prêts à agir.
Si vous sensibilisez, si vous arrivez à trouver
le moyen de sensibiliser la population à agir sur une thématique aussi pointue que les changements climatiques,
vous allez être capables de les faire bouger aussi sur le développement
durable. C'est le comment qui va être très important. Et la question des
changements climatiques, si elle est entourée d'une
très bonne campagne de communication, si elle est entourée des outils qu'on a
cités dans notre mémoire, elle va pouvoir créer, effectivement, un effet
d'entraînement qui va sensibiliser beaucoup plus rapidement la population par
rapport à la question du développement durable.
Mme Levert (France) : Et moi, je
vais vous donner un point de vue plus de la base, donc d'un organisme qui a profité à plusieurs reprises, effectivement,
du soutien des programmes du FAQDD. Donc, une intégration d'approches de
sensibilisation, de communication changements climatiques avec une vision
développement durable plus large, oui, ça
peut énormément faciliter les choses, puisque c'est très, très près, en fait,
comme préoccupation, et souvent on peut faire des liens qui vont être évidents pour convaincre les gens à
évoluer puis à changer leurs comportements. Et ça peut être plus facile d'arriver avec une perspective un
petit peu plus large où on a les changements climatiques, mais travailler
sur les volets sociaux aussi avec les gens.
Ils comprennent très bien, puis ça permet d'avancer quand on a des liens.
Alors, plutôt que d'être uniquement changements climatiques, des fois la
perspective plus large, ça aide. En tout cas, c'est ce qu'on a vécu.
• (11 h 40) •
M. Heurtel : Merci. Sur ce point-là,
c'est parce que... C'est pour ça que c'est important de souligner que, le
2 décembre dernier, nous avons annoncé 6,7 millions, justement,
spécifiquement pour sensibiliser la société, pour développer des activités de communication,
particulièrement en changements climatiques. Mais je vois là aussi une opportunité de se servir de ces fonds-là,
justement, pour voir comment on peut avoir une perspective plus globale,
plus intégrée et de voir comment on peut, justement, dans une période où,
évidemment, les fonds sont plus difficiles à obtenir...
Mais là on a une enveloppe pour, justement, faire de la communication, faire de
la pédagogie. Et ce que je me demande,
c'est si on peut, justement, voir cette enveloppe-là comme une enveloppe qui nous
aide, justement, non seulement à
parler et faire la pédagogie nécessaire puis le travail de communication
nécessaire qui doit être fait dans le changement climatique, mais de
voir ça d'une façon plus large, dans une perspective globale de développement
durable.
Et, dans cette perspective-là, quand
vous parlez d'une approche horizontale... Parce qu'il faut revenir aussi
dans le contexte de la stratégie elle-même,
qui, oui, doit se tourner vers l'extérieur, ce n'est pas juste l'État, là, on
doit parler de l'ensemble de la
société, mais elle affecte directement, d'abord et avant, tous les ministères
et les organismes. J'aimerais ça,
vous entendre sur l'idée que, justement, il y ait au sein des ministères et
organismes l'idée que, justement, l'approche communicationnelle doive intégrer, justement, cette perspective-là.
Alors, quand on communique, qu'il doit y avoir une perspective de
communication, qu'on tienne compte dans les communications, peu importe le
ministère, peu importe l'organisme, de la perspective de l'action qui est
communiquée, qu'on tienne compte, justement, d'un élément soit pédagogique,
mais l'explication du lien qu'il faut faire entre ce qui est communiqué et la
stratégie de développement durable et les gestes en développement durable ou,
plus particulièrement, le lien avec les changements climatiques.
Le Président (M.
Reid) : Mme Jampierre.
Mme
Jampierre (Véronique) : Je ferai du pouce sur ce qui a été dans la
présentation précédente. Si vous voulez que les ministères et organismes du gouvernement puissent, justement,
bien communiquer cette volonté-là, cet engagement vis-à-vis du
développement durable, je pense qu'il faut qu'il y ait un lien à faire avec
l'imputabilité, qu'on a abordée tout à
l'heure. Si on sent en tant que citoyen, si on sent en tant que partenaire du
gouvernement pour n'importe quel projet qu'il y a... chaque ministère et organisme comprend les enjeux de
développement durable sous leur lorgnette, même si ce n'est pas de façon complètement transversale, et
qu'ils ont à coeur, pour la mission de leur propre organisme, d'arriver
à des objectifs bien précis liés au développement durable ou aux changements
climatiques, si on le sent, on n'aura pas le choix.
En fait, je dirais qu'il y aura un effet de communication et une mobilisation
qui va être beaucoup plus forte. Si on sent,
a contrario, qu'un ministère parle de développement durable à côté de ce que
lui, il a à faire, ça ne marche pas. Pour ma part, aujourd'hui, c'est
beaucoup plus souvent la deuxième option que l'on sent.
M. Heurtel :
Donc, pour mettre en place... Comme vous dites, comme vous écrivez à la page 3
quand vous parlez d'insister sur l'importance de se doter d'une stratégie de
communication nationale — alors,
très intéressante recommandation — l'idée, c'est véritablement d'avoir une
approche globale, cohérente, rigoureuse et intégrée qui, justement, fait en sorte que chaque ministère,
chaque organisme doit absolument intégrer dans ses communications tous
les aspects de développement durable ou les
principaux fondements de développement durable et de lutte contre les
changements climatiques de son action. Ça, je crois que je comprends bien en
disant ça.
La
prochaine étape, c'est de dire... bon, c'est de vous faire parler davantage sur
le comment de ça et comment ça s'articule. Bon, évidemment, à
l'intérieur de la machine, je comprends, c'est une chose. Mais, quand on est
dans une perspective où on veut, justement, sortir, aller vers les gens,
j'aimerais ça, vous entendre davantage — envers les organismes, la société civile, la population — vous entendre davantage sur le comment ça
s'articule, comment vous voyez ça s'opérationnaliser, là.
Mme Jampierre
(Véronique) : En fait, que ce soit par rapport aux parties prenantes
du gouvernement ou la population, je vous dirais que les principes sont les
mêmes. Les facteurs de succès pour une mobilisation puis des changements de comportement sont très naturels,
là. Je vous les énumère. Vous allez me dire : Bien, ça coule de
source. Sauf que de les mettre en oeuvre,
c'est autre chose. Alors, tout simplement, si je vous demande d'arrêter de fumer, vous allez me dire : Bien, présente-moi les
avantages d'arrêter de fumer. Si je vous demande d'acheter une voiture
électrique, vous allez me dire : Bien,
visiblement, là, tout de suite, je
veux voir quels sont les avantages aussi d'avoir une voiture électrique,
est-ce que c'est simple. Il faut que ce soit simple. Il faut aussi que chaque
individu, pour changer ses comportements, ait la capacité de pouvoir essayer,
mettre le pied dans la porte par rapport à un nouveau comportement.
Donc, le
développement durable, très clairement, là, si je veux en faire du jour au
lendemain, bien, il faut que j'arrive à savoir quel genre d'actions, comment ça
s'illustre et comment ça peut venir s'intégrer dans mon quotidien simplement, sans remettre en question beaucoup de
choses. D'ailleurs, je pense que le développement durable n'est plus
tant de... la part de beaucoup d'alternatives, là, c'est juste de revoir un
petit peu comment on fonctionne au quotidien. Mais ça, c'est un aparté.
Et
puis je dirais aussi, ce qui va être très, très entraînant pour un changement
de comportement, c'est de se sentir dans
un tout, se sentir dans un mouvement. On a beaucoup insisté là-dessus dans le
mémoire, c'est de vous demander de changer votre comportement comme
chacun le fait, comme la société le fait, donc de s'inscrire dans un mouvement.
J'y vais de façon orale et un petit peu désordonnée, mais c'est vraiment les principes
qui assurent des changements de comportement.
Mme
Levert (France) : Et puis
moi, j'aurais envie d'ajouter : Il
y a dans la société civile des gens
qui travaillent très fort depuis des années à des actions en environnement
social et que la mixité, donc, en développement durable... Alors, continuons à travailler avec eux, comme on
le fait depuis des années. C'est un atout, c'est des ambassadeurs très,
très convaincus déjà. Alors, je parle pour notre paroisse, là, mais je trouve
ça important de le dire parce que moi, je vois aller les gens qui sont impliqués là-dedans, ils sont vraiment...
il y a des missionnaires, des gens qui mettent énormément de coeur, et
ils sont très convaincants aussi. Voilà.
Le Président (M.
Reid) : Merci, Mme Levert. M. le ministre.
M.
Heurtel : C'est indéniable,
puis il y a des organismes, bon, comme le vôtre, d'ailleurs,
je le reconnais d'emblée, là, qui font un travail énorme. Là, l'idée,
c'est justement... c'est voir comment on peut faire plus. Alors, il y a déjà un
travail colossal qui a
été fait, puis, ce travail-là, le crédit doit revenir en grande partie aux
organismes de la société civile qui ont fait un travail, comme je le
dis, colossal.
La question, c'est justement de dire : Il y
a encore un travail à faire. Et souvent, bon, on travaille tous... on a tous cette volonté-là, mais... Puis ce n'est pas vraiment
une volonté, là, explicite ou exprimée, mais, des fois, il y a un travail en silo qui se fait. Là,
moi, ce que j'aime bien dans la proposition d'une stratégie nationale, c'est
voir comment on peut mieux intégrer ça.
C'est de dire : Bon, là, il y a des sous, là, on doit passer à une autre étape,
on parle, là, on parle, tu sais, on
est à... On a passé l'étape de sensibilisation, comme vous l'avez dit. Là, on passe à une étape
encore plus complexe qui est celle de
véritablement changer des comportements, des habitudes, des
habitudes programmées, puis parfois de génération
en génération, là. Alors, quand on parle d'une stratégie nationale de
communication, c'est de voir, de votre point de vue, justement, si vous
pouvez approfondir, de voir comment... Parce que c'est clair que, dans ce type
de stratégie là, c'est clair que les
organismes, les joueurs importants dans la société civile vont jouer un rôle. Ce n'est
pas seulement le gouvernement qui va faire ça.
Mais, si je
peux juste terminer, c'est simplement de dire... c'est comment on articule cette stratégie
nationale là pour que, justement,
on réussisse à rejoindre... Parce
qu'on est en train de le faire, il
reste beaucoup de boulot à faire. Mais, si on parle, par
exemple, le marché du carbone, le Fonds vert, c'est encore des outils qui sont
méconnus de la population, des outils
essentiels pour développer... Puis justement, en matière
de développement durable, en matière de lutte contre les changements climatiques, c'est de voir comment
on peut, justement, développer cette stratégie nationale là. Alors, oui,
il faut l'intégrer à l'intérieur du gouvernement. Mais, au-delà de ça, comment
vous voyez ça?
• (11 h 50) •
Mme Levert (France) : Bien, juste
très rapidement — et
je vais laisser Véronique continuer — je pense qu'il y a plusieurs
recommandations, éléments dans le mémoire qui parlent de l'importance de la
concertation, donc de lieux de concertation,
et ça peut être quelque chose que le gouvernement favorise à divers niveaux
pour permettre de passer à un autre niveau.
Mme
Jampierre (Véronique) : Au niveau des communications, je pense qu'un
message fort qui pourrait être donné,
qui est soit que... Et puis n'en prenez pas ombrage, mais que ce soit,
justement, des représentants du gouvernement au niveau du premier ministre qui disent : Il y a un engagement du
Québec par rapport au développement durable. Et c'est très important, à partir de la nouvelle stratégie,
c'est très important de garder un ministère qui répond des engagements
du gouvernement en matière de développement durable, mais je pense que c'est
très important aussi de faire en sorte de donner beaucoup plus d'appui à ce ministère-là
et expliquer que tous les ministères ont un engagement à avoir dans cette direction-là et que le message doit venir de
beaucoup plus haut. Là, à partir de là, on va rejoindre la population.
Et la population, c'est aussi les individus
qui composent le gouvernement. Donc, là, quand je vous parlais d'un
mouvement, c'est vraiment ça. Ça, c'est déjà un élément essentiel.
M.
Heurtel : Je peux vous dire, d'ailleurs, que la loi prévoit,
justement, que la personne qui dépose le produit final, la stratégie de développement durable, c'est le
premier ministre du Québec. Alors, déjà, le porteur ultime et le produit
final de nos réflexions et la personne qui
va déposer la stratégie de développement durable sera le premier ministre.
Donc, le premier ministre du Québec
est déjà, de par la loi, le porteur du dossier, et donc d'où l'importance,
justement, je crois, de bien comprendre que, surtout dans l'époque dans
laquelle on vit puis pour les cinq prochaines années, là — parce
qu'on parle d'un document qui va être la
base de notre action pendant les cinq prochaines années au moins, peut-être
même sept ans — qu'il y ait véritablement une communication
intégrée au sein de l'ensemble de l'appareil gouvernemental. Donc, oui, je comprends, j'entends que ça doit
être porté par le premier ministre, les ministres, l'ensemble des
ministres, pas seulement le ministre de
l'Environnement. Je n'en prends pas ombrage, je crois que ça aiderait
grandement mon travail, et donc... Mais aussi que ça vienne d'une
source, ça serait une stratégie de communication globale et intégrée.
Mme Jampierre (Véronique) : Oui. En
même temps...
Le Président (M. Reid) :
Pardon, le temps est écoulé.
M. Heurtel : Oui. J'ai eu le oui.
Le Président (M. Reid) :
Merci, M. le ministre.
M. Heurtel : Vous dites oui.
Le
Président (M. Reid) : Alors, je passe maintenant au bloc de
l'opposition officielle. Je passe la parole au député de Jonquière.
M.
Gaudreault : Oui. Merci, M. le Président. Alors, bienvenue.
Merci de votre présence et de votre mémoire extrêmement intéressant,
mais aussi extrêmement concret quant au processus de changement de
comportements. C'est vraiment le volet que j'ai retenu le plus.
Je disais tout à
l'heure, d'entrée de jeu, que, pour moi, il y a un élément important, c'est
que, dans cette deuxième génération de la
stratégie, qu'on puisse passer à une application plus large, là, au-delà du
gouvernement, du ministère, des organismes. Bon, c'est important, mais
envoyer un signal aussi envers les autres acteurs de la société, que ce soient les municipalités, que ce soit la population
ou les entreprises, etc. Est-ce que je vous comprends bien si je dis que vous
considérez que la stratégie de développement durable 2015-2020 telle que
présentée ne va pas assez loin à cet égard?
Le Président (M.
Reid) : Mme Jampierre.
Mme Jampierre
(Véronique) : En fait, les intentions que l'on voit à l'intérieur de
la stratégie s'adressent... Nous, on lit que
ça s'adresse à la population. Maintenant, si on est là, c'est parce qu'on veut
s'assurer que ça s'adresse correctement à la population. Alors, le
comment, c'est... Comme on le disait tout à l'heure, là, on n'est pas là pour discuter d'une loi. Ça fait qu'on ne sait pas
précisément comment tout ça va être décliné. Alors, à notre niveau à
nous, on veut s'assurer qu'il y ait une préoccupation axée sur les changements
de comportement. Comment ça va être fait? On s'offre
de pouvoir, justement, y travailler par la suite quand il va y avoir beaucoup
plus de détails autour de la stratégie pour pouvoir vérifier si le
gouvernement va assez loin.
M. Girard
(Nicolas) : Peut-être que je pourrais rajouter quelque chose,
justement, par rapport à ça.
M. Gaudreault :
Oui, allez-y.
M. Girard (Nicolas) :
Dans le fond, on a parlé beaucoup, je pense, du contexte externe, qui est
extrêmement important pour l'engagement des organisations de la société dans
une démarche de développement durable. Le rôle clé que le gouvernement a en tant que décideur de lancer le message que
le développement durable, c'est important,
c'est extrêmement important aussi.
Par contre, pour vraiment
que ça percole à l'intérieur de la société, c'est important qu'il y ait des
initiatives qui viennent de la société
qu'on puisse supporter également et qui puissent, justement,
venir créer un effet d'entraînement. Tout
ce qu'il y a d'approches sectorielles, des approches territoriales de mise en
oeuvre de développement durable, c'est des approches qui nous donnent des résultats extrêmement intéressants qu'on
a faites dans le passé et qu'on doit multiplier pour, justement, créer
un contexte d'effet d'entraînement très, très fort dans les prochaines années.
On est autour du point de bascule quand on
parle d'un engagement de 20 %
des municipalités dans une démarche de développement durable. On est
autour de 20 % au niveau des entreprises également. Donc, si on prend un
peu des courbes de changement de comportement,
on dit : Bon, bien, les entreprises qui sont les plus innovatrices vont
avoir déjà entrepris une démarche de développement
durable. Les adoptants précoces, qui sont le deuxième groupe, vont avoir déjà
fait un peu aussi, entrepris... vont
déjà avoir entrepris le mouvement. Là, autour du 20 %, le point de
bascule, les gens vont changer les comportements, mais oui, la pression
sociale va devenir importante. Il faut que les solutions apparaissent simples,
peu coûteuses, que ce soit facile de mettre en application. Donc, c'est un peu
ce mouvement-là aussi qu'il faut s'assurer de supporter.
M. Gaudreault :
Oui, vous avez raison, s'assurer de supporter ce mouvement. D'ailleurs, le
ministre disait lui-même tout à l'heure qu'une des raisons qui expliquent, par
exemple, les réussites passées ou les succès passés, c'est en raison du travail colossal — je vais prendre ses expressions, puis je
suis d'accord avec lui — sur les organismes, là, de
soutien dans le milieu, les organismes comme vous, comme d'autres, comme le
Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement, qu'on a
eu tout à l'heure.
Mais, justement, il
existe des programmes, le Programme de soutien à la mission des organismes
nationaux. Il existe le programme de soutien
à la mission des organismes d'action communautaire autonomes en
environnement. Est-ce que vous pensez qu'on
devrait, nommément dans la stratégie, par exemple, cibler davantage des
programmes ou, en tout cas, au moins,
mentionner qu'il faut maintenir le soutien à ces organismes? On ne peut pas
arriver et continuer de faire un travail colossal sans avoir les sommes
nécessaires.
Puis je veux faire un
peu de pouce sur le mémoire du Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement, qu'on a reçu avant vous, et, à sa
recommandation 9, il dit qu'il veut ajouter un objectif à l'orientation
3 de la stratégie de développement
durable : «Appuyer et mettre en valeur les activités des organismes
communautaires et des entreprises d'économie sociale qui contribuent à
la protection de l'environnement, à la préservation de la biodiversité et à la gestion responsable des ressources
naturelles.» Donc, j'imagine que vous appuyez une telle recommandation
aussi du RNCREQ, qui était ici avant vous, là.
Mme Jampierre
(Véronique) : Tout à fait. Veux-tu continuer?
Mme Levert
(France) : Tout à fait, oui
Mme Jampierre
(Véronique) : Pleinement. Je fais du pouce tout à l'heure...
Le Président (M.
Reid) : On cherche le meilleur mot.
Mme Jampierre
(Véronique) : Un des succès pour...
Une voix :
...tout ce beau monde là...
Mme
Jampierre (Véronique) : Un
des succès pour pouvoir s'assurer aussi, comme disait Nicolas tout à l'heure, que les principes de développement
durable percolent, ça va être aussi
de multiplier les... je dirais, la manière d'atteindre la population
aussi. Autant de programmes il y a associés à des thématiques, autant ces
programmes-là peuvent être utilisés pour
faire en sorte qu'à l'intérieur il y
ait des critères liés au développement durable qui fassent en sorte qu'on amène les gens, concrètement, dans leurs actions...
à leur faire comprendre comment l'action liée à la mobilité durable, à
la mobilité, peut devenir un vecteur de développement durable aussi.
Ou on peut
aller dans un autre secteur. Dans notre équipe, on se consacre beaucoup
à des thématiques liées à... On essaie
de créer des exercices de concertation pour, justement, savoir, sur le
terrain, qui est prêt à appuyer, par
exemple, des thématiques ou à faire avancer
la consommation responsable, l'économie verte, la mobilité durable. C'est nous qui
prenons cette initiative-là parce que
les personnes sur le terrain ont besoin de se parler, ont besoin de savoir
comment intégrer le développement
durable à l'intérieur de leurs
actions de promotion. Tout à l'heure, M.
Heurtel disait : Si on arrive à
inclure dans les programmes de changements climatiques une sensibilisation au développement durable,
est-ce que c'est bien? Oui, mais idéalement il faudrait des programmes beaucoup
plus élargis sur la promotion du développement durable.
• (12 heures) •
M.
Gaudreault : Sans
nommer les programmes, parce qu'on parle d'une stratégie 2015-2020, c'est les principes, c'est les valeurs, c'est les grandes
lignes horizontales, là, qui doivent s'appliquer à chacun des ministères,
du gouvernement et éventuellement
d'autres instances de la société, est-ce que le principe, par exemple, d'un
financement prévisible, asseoir le principe d'un financement prévisible... Je
pense que ça, c'est quand même un élément... c'est une valeur importante. Est-ce que vous vous retrouvez dans la
stratégie présentement sur ce principe-là d'un financement prévisible?
Mme Jampierre (Véronique) : Tout à
fait. Toutes les...
M. Gaudreault : Mais
présentement, dans la stratégie, est-ce que vous trouvez qu'elle est là?
Mme Levert (France) : Si c'est
présent suffisamment ou non dans la stratégie, là?
M. Gaudreault : Exact.
Mme Jampierre (Véronique) : Je vous
dirais que, sur ce point-là... Est-ce que...
Mme Levert (France) : En fait...
Mme Jampierre (Véronique) : Je pense
qu'au-delà de...
Mme Levert (France) : On n'a pas
traité de ça.
Le Président (M. Reid) :
Allez-y.
Mme Jampierre (Véronique) : C'est un
principe à défendre, effectivement, c'est...
M.
Gaudreault : Mais
est-ce que ce principe, selon vous, se retrouve suffisamment mentionné dans la
stratégie?
Mme Levert (France) : Bien, moi,
j'aurais envie de vous répondre que de pouvoir avoir devant soi une prévision
possible pour... enfin, savoir où on s'en va sur une certaine période de temps,
pour n'importe quelle action, ça permet de
la planifier puis de la mener plus facilement à terme. Donc, oui, dans ce
sens-là, et que ça soit présent à la bonne
place à l'intérieur de notre gouvernement, c'est ce qu'il faut, là. Et c'est sûr que, pour
toutes sortes d'organisations, c'est fondamental.
M. Gaudreault : On a-tu du
temps?
Le Président (M. Reid) :
30 secondes.
M.
Gaudreault : O.K.
Bien, c'est parce que le président me dit qu'il me reste 30 secondes. Ce que je
veux dire, c'est que c'est bien beau d'avoir une stratégie, c'est
important de passer à l'action. Vous avez un rôle important pour sensibiliser puis amener les gens à changer leurs
comportements, mais, si on veut arriver à ça, il y a un principe du...
En tout cas, il y a un principe pour arriver à ça, c'est le financement prévisible, la prévisibilité des ressources financières. Bon.
Mme Jampierre (Véronique) : C'est
essentiel.
M. Gaudreault : C'est beau,
je retiens ça.
Mme
Jampierre (Véronique) :
C'est essentiel. On s'adresse à des groupes qui ont, la plupart du temps, plus
la préoccupation de pouvoir survivre que de poser l'action qu'ils ont à poser.
M.
Gaudreault : C'est beau.
Le Président (M.
Reid) : Merci. Nous allons passer maintenant au bloc du deuxième
groupe d'opposition, M. le député de Nicolet-Bécancour.
M.
Martel : Dans les
milieux, les municipalités, les groupes d'action communautaire, les... il y a beaucoup de gens qui ont des projets à
présenter, hein? Je vous donne un exemple. Tantôt, on lisait que la ville de Montréal
va investir 11 millions pour les
terrains de balle dans les trois prochaines années, ce que je trouve une très
bonne idée. Mais, à partir de ça, les
gens, ils vont dire : Est-ce qu'il
y a des fonds qui peuvent
subventionner, hein? Ça fait qu'on va faire des recherches, on va regarder, puis on va arriver, puis on va
dire : Ce fonds-là, est-ce qu'il s'applique? Oui, si on met tel type de
pelouse ou des choses comme ça, on va
arrimer le... Est-ce qu'il y aurait moyen de faire un peu l'inverse? Plutôt que
ça soit à partir de projets qu'on a
établis puis regarder quel genre de fonds qui pourraient être associés à ça,
est-ce qu'il pourrait y avoir, je ne
sais pas, une façon d'inciter les gens à s'en aller dans ce type de projets là
pour arriver à atteindre des résultats qu'on souhaite, là? Je ne sais si
vous comprenez ce que je veux dire.
Mme Jampierre
(Véronique) : Je peux faire le lien par rapport à notre souci, qui est
justement... Parce qu'il y en a de moins en
moins, des fonds et des programmes aussi, en développement durable. Donc,
lorsque les personnes, effectivement, comme vous le dites, ont un
projet, elles essaient de le financer, elles se disent : Bon, bien, là, il
y a un fonds en développement durable, on va
essayer de rentrer dans le moule pour pouvoir aller chercher de l'argent par
rapport à ça. Quelque part, ce n'est pas une
mauvaise chose parce que, du coup, ça les force à s'intéresser au développement
durable, et puis nous, on est capables de les accompagner, justement, à faire vraiment
du développement durable, même si leur première intention, c'était plus d'avoir
un centre sportif.
Mais, en
contrepartie, je pense qu'on a aussi la... en réaction à ce contexte-là, on a
pris l'initiative dans notre organisation
d'aller rejoindre... sans même avoir des octrois à pouvoir distribuer, de
pouvoir rejoindre les gens sur le terrain et à mieux comprendre quelles sont leurs préoccupations et celles qui
pourraient se rapprocher le plus du développement durable, et c'est dans ce sens-là que je parlais tout à l'heure des initiatives de concertation.
Dans les sujets qui, pour nous, sont les plus à même de pouvoir
supporter le développement durable dans l'avenir du Québec, l'énergie verte,
les grandes tendances, là, à chaque fois on
essaie de créer des exercices de concertation par rapport à ça et savoir quels
sont les intervenants sur le terrain qui pourraient contribuer à ces
dynamiques-là. Je ne sais pas si je réponds à votre question.
M.
Martel :
Oui, oui. Absolument, absolument, absolument.
Mme Jampierre
(Véronique) : Mais ça, ça se fait sans argent. Ça peut se faire.
M.
Martel : Oui. O.K. Moi, je suis assez d'accord avec vous,
là, par rapport à votre recommandation 8, puis j'en faisais mention dans mes remarques préliminaires,
là, comme quoi qu'on devrait être un peu plus précis sur les résultats
quantitatifs qu'on pourrait fixer pour atteindre les objectifs.
Dans votre
organisation — parce
que, moi, ce que je perçois, c'est que vous êtes une organisation au niveau national — est-ce que vous avez des critères, des
barèmes pour essayer d'obtenir une certaine équité ou est-ce que vous
avez un souci — je
devrais dire ça comme ça — d'équité
à travers les régions du Québec?
Mme
Jampierre (Véronique) : On a eu au-dessus de 500 projets, et, dans ces
projets-là, on a touché 17 régions. Je vous dirais qu'on essaie, à
travers les critères qui nous sont aussi demandés de la part du gouvernement,
on essaie de moduler les critères de nos programmes pour faire en sorte que
mêmes les... enfin, dans toutes les régions, on puisse déposer les projets dans ces programmes-là. En changements climatiques,
on a accepté des projets qui se passaient en région, et notre conseil d'administration a accepté d'appuyer ces
projets-là parce que, justement, on se doit de pouvoir essayer d'appliquer à des mesures de réduction de
gaz à effet de serre dans des régions où c'est beaucoup moins approprié,
beaucoup moins facile, beaucoup moins évident que dans des grands centres
urbains. On l'a fait.
M. Girard (Nicolas) : Mais, en même temps, il n'y a pas de montant réservé par région. Donc,
c'est vraiment la qualité du projet,
les retombées potentielles qui vont prendre vraiment le dessus dans
l'évaluation. Par contre, on essaie de voir
à ce que, justement, des organismes de toutes les régions puissent, justement,
avoir accès, et comprennent bien le programme, et puissent avoir
l'accompagnement nécessaire pour, justement, rencontrer les exigences du
programme. Donc, ça, ça fait partie, effectivement, de nos priorités,
absolument.
Mme Jampierre
(Véronique) : Et ils se sentent concernés par les enjeux de nos
programmes.
Mme Levert (France) : Et, moi, comme membre de conseil d'administration,
ce que je vis que je trouvais très bien, c'est qu'effectivement le fait qu'au fond on puisse voir un ensemble de
projets dans plusieurs régions, c'est qu'un bon coup qui se fait dans une région, l'équipe va mettre
les gens en lien avec des intervenants d'une autre région pour que ça
puisse profiter à plusieurs régions aussi. Donc, c'est intéressant dans ce
sens-là qu'il y ait un endroit où on a une vision d'ensemble puis qu'on puisse
faire profiter plusieurs régions d'initiatives qui peuvent s'appliquer ailleurs
aussi et qui sont très, très bien, là.
Le
Président (M. Reid) : Merci, Mme Levert. Le temps est écoulé,
nous allons passer maintenant au dernier bloc, réservé aux députés
indépendants. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Mme
Massé : Merci, M. le Président. Merci pour votre présentation et votre
mémoire. Beaucoup des interventions qu'on
entend ce matin parlent du développement durable dans une perspective
environnementale. On sait que tel n'est pas le cas, c'est beaucoup plus
large. Et d'ailleurs, à cet effet, une organisation de mon comté a été lauréate
d'un projet, Concours d'iDDées, qui est une
de vos... et qui est une coopérative, la coopérative des Valoristes, qui est
une coopérative dont l'objectif est
de permettre aux gens vulnérables qui récupèrent les contenants consignés de
pouvoir, donc, les valoriser. Vous avez considéré que c'était un très
bon projet de développement durable, puisque vous en avez financé un ou deux à travers le Québec cette année-là ou quelque
chose comme ça. Pouvez-vous nous expliquer, puisqu'une stratégie, c'est la mise en oeuvre d'une vision, c'était
quoi, votre vision de développement durable en donnant le prix à ce projet-là?
Mme Jampierre
(Véronique) : En fait, le volet social, effectivement, est minoritaire
dans les projets qu'on reçoit. On trouvait
ça aussi... Je pense que, derrière les principes qui étaient défendus par le
programme qui a financé le projet, on
voulait aller dans d'autres sphères, voir, mesurer comment le développement
durable, justement, peut s'appliquer au
sein de d'autres acteurs de la société que les organisations qui ont l'habitude
de nous solliciter, et ça a été un très bel exemple. Déjà, on a fait en sorte que le concours puisse être ouvert à
beaucoup, beaucoup de monde, et, quand on a vu Les Valoristes, par
exemple, proposer leur projet, on a été très contents de pouvoir défendre une
thématique et une problématique d'ordre essentiellement social.
Mme Massé :
Laquelle, par exemple, quand vous dites : Défendre une thématique?
Mme Jampierre
(Véronique) : Bien, par rapport aux Valoristes, là, c'était...
• (12 h 10) •
Mme Massé :
À la consigne...
Mme
Jampierre (Véronique) : Il y a
un lien très fort entre la consigne et, en même temps, l'itinérance ou
les personnes un petit peu plus marginales
ou ayant des faibles revenus. Ça, c'était très important de faire ce lien-là
parce qu'en matière de mobilisation, et de
communication, et de changement de comportement ce qui est important, c'est
de donner beaucoup, beaucoup d'exemples concrets. Celui-là venait nous
alimenter aussi de façon très intéressante, et le projet nous a donné raison
parce qu'il donne des résultats très forts.
Mme Massé :
Merci.
Le Président (M.
Reid) : Merci. Alors, merci de votre présentation.
Je vais maintenant
suspendre les travaux quelques instants pour permettre à nos nouveaux invités
de Vivre en ville de s'asseoir.
(Suspension de la séance à
12 h 11)
(Reprise à 12 h 13)
Le Président (M.
Reid) : À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!
J'invite les invités du groupe de Vivre en ville à prendre place, s'il vous
plaît.
Alors,
je dois, MM. et Mmes les membres de la commission, je dois vous demander
l'autorisation de procéder jusqu'à un petit peu plus tard, étant donné
que nous avons encore des invités pour 45 minutes. Et donc, oui, nous devions aller à 12 h 45, nous devrions
poursuivre jusqu'à 13 heures si on a consentement. Sinon, il faut réduire
le temps, évidemment, avec les invités. Est-ce qu'on a consentement?
Une voix :
...
Le Président (M.
Reid) : 15 minutes de plus. Alors, on y va. Nous allons y
aller sans tarder. Vous avez une présentation,
vous avez 10 minutes pour faire votre présentation. Je vais vous avertir quand
il restera une minute, et puis ensuite nous procéderons à l'échange. À
vous la parole.
Vivre en ville
M. Savard
(Christian) : Merci, M. le Président. M. le ministre, membres de la
commission, merci de l'invitation de venir
vous parler de développement durable. Vivre en ville, essentiellement, notre
mission, c'est travailler au développement
durable de nos collectivités, que ça soit à l'échelle de l'agglomération, de la
ville, du quartier ou même de la rue ou du bâtiment.
Mon nom est Christian Savard. Je suis directeur
général. Je suis accompagné de...
Mme
Boisclair (Catherine) : Catherine Boisclair. Je suis urbaniste et
conseillère stratégique à la direction générale.
M. Savard (Christian) : Donc, on est
une organisation, pour ceux qui ne nous connaissent pas, comme on dit, une organisation d'intérêt public qui oeuvre
partout au Québec. On a des bureaux à Montréal, Québec, Gatineau. Donc,
on travaille spécifiquement sur les questions qui concernent, justement, les villes,
les villages du Québec et comment on les construit.
D'entrée de jeu, pour nos commentaires en ce qui
concerne la stratégie, d'abord, premier point positif, on est satisfaits de l'ampleur, de l'angle plus large
qu'a pris cette politique de stratégie de développement durable révisée. À titre d'exemple, les questions d'aménagement du territoire
et de mobilité durable, dans lesquelles on intervient particulièrement,
sont mieux tenues en compte et sont mieux... on les voit. Donc, c'est un bon point
pour cette stratégie-là.
Un autre point intéressant qui était quand même
une force de l'ancienne stratégie, c'était la question de l'exemplarité de l'État, où est-ce qu'on insiste beaucoup, et c'est
probablement à cet endroit-là où... L'exemplarité de l'État, c'est ce qui est le plus abouti dans ce qu'on a pu
lire de la stratégie actuelle. Donc, c'est un point aussi intéressant.
On va avoir, d'ailleurs, à la fin de notre intervention une proposition pour
compléter cet élément-là.
En ce qui
concerne, par contre, les points qui nous amènent des interrogations, il y a
des mécaniques, peut-être, qu'on
pourra proposer ou qu'on pourra améliorer... concernent notamment toute la
question du fait de prendre en compte le développement durable dans la mission propre des ministères et
organismes. En fait, je parle ici de l'objectif 1.2, qui parle de renforcer la prise en compte des principes de
développement durable par les ministères et organismes. Selon nous, ça
devrait être l'objet même de la stratégie. Ça ne devrait pas être un
sous-objectif parmi les orientations, mais ça devrait être carrément le grand
principe de la stratégie de développement durable pour ne pas qu'elle se
limite, justement, à la question de
l'exemplarité de l'État. Donc, après ça, de 2 à 8, il y a tous les objectifs,
mais, dans tous ces objectifs-là, les principes
du développement durable et la stratégie devraient être pris en compte. Donc,
c'est un élément, là, de mécanique, mais
qu'on trouve peut-être à côté de la cible pour vraiment donner un sens à cette
stratégie-là. Donc, 1.2 qui deviendrait peut-être un chapeau à
l'ensemble de la stratégie.
Sinon, évidemment, on parle que peut-être il
faudrait avoir une plus grande imputabilité en identifiant plus spécifiquement
les organismes ou les ministères responsables des différentes orientations. Je
crois qu'il est temps également d'assujettir certains organismes comme les
municipalités et probablement certaines sociétés d'État ou organismes
parapublics.
Et également,
bien, un point important, on connaît tous l'importance de la lutte aux
changements climatiques, on sait les
outils que le Québec s'est donnés pour atteindre ces objectifs et participer à
la lutte globale, à cet enjeu important. Donc, on propose, justement, que la lutte aux changements climatiques
fasse partie d'un des enjeux de la stratégie et soit même priorisée. On sait qu'on ne pourra pas tout
faire qu'est-ce qu'il y a dans la stratégie, mais qu'est-ce qui concerne
les changements climatiques devrait être priorisé, et on devrait le dire
clairement dans les différents arbitrages qu'on aurait à faire éventuellement.
Mais qu'est-ce qui concerne les changements climatiques devrait être priorité,
c'est notre recommandation 4.
Sur ce, je vais laisser la parole à Catherine
pour continuer.
• (12 h 20) •
Mme Boisclair (Catherine) : Oui.
Donc, je vais vous parler principalement d'une de nos recommandations principales, en fait, qui est la cinquième, qui
est de faire de l'aménagement durable du territoire, qui est l'objectif
6.1, une activité incontournable. Donc, dans la stratégie, il a été identifié
cinq activités incontournables que vous retrouvez aux pages 21 et 22, et donc on recommande d'en ajouter une sixième.
Chacune des activités incontournables est liée à un des objectifs de la
stratégie. Donc, je vous les rappelle, il y a la gestion écoresponsable, il y a
la prise en compte des principes de
développement durable, le chantier d'intégration de la culture dans le
développement durable, l'accompagnement des entreprises privées et des
autres acteurs publics. Donc, vous avez identifié cinq activités
incontournables, et on croit que l'aménagement durable du territoire, qui est
l'objectif 6.1, mérite d'être une activité incontournable.
Donc, avant d'aller plus loin, peut-être vous
résumer ce qu'est l'aménagement durable du territoire. En 10 minutes, on
n'ira pas très loin, mais simplement vous souligner que l'aménagement du
territoire, actuellement au Québec, bien, en
fait, c'est de construire et de planifier les milieux de vie, et c'est une
compétence qui est partagée entre l'État
et les municipalités. Donc, l'État fait des orientations gouvernementales — elles sont présentement en révision — et, à travers ces orientations
gouvernementales, les MRC et les municipalités rédigent des documents de
planification et les appliquent par la suite sur le territoire. Donc, vous
connaissez les schémas d'aménagement, les plans d'urbanisme et, finalement, la
réglementation d'urbanisme, dont le zonage.
Donc, l'aménagement durable du territoire, c'est
de finalement, oui, de planifier et de construire nos milieux de vie, mais de façon à considérer l'ensemble des
enjeux qui nous préoccupent dans le développement durable. Donc, on vous a mis un graphique dans notre mémoire, qui se
trouve à la page 11 et qui résume tous ces enjeux-là. Donc, je ne vous
les énumérerai pas ici.
Donc, pourquoi l'aménagement durable du
territoire devrait être une activité incontournable? En fait, elle respecte tous les critères de choix qui ont porté
à... qui vous ont amenés, en fait, à déterminer cinq activités
incontournables. Donc, c'est un champ
d'action structurant qui a une grande portée sur la société québécoise et aussi
pour lequel un grand nombre de ministères et d'organismes peuvent avoir
une contribution. Donc, il s'agit carrément d'une préoccupation horizontale qui ne s'adresse pas seulement au
ministère des Affaires municipales. Donc, on parle notamment de, oui, la
localisation des activités, des infrastructures. Les ministères, oui,
construisent eux-mêmes des infrastructures, qu'on pense aux transports, mais aussi en financent énormément. Donc, toute
l'idée d'écoconditionnalité des infrastructures. Et également les ministères doivent considérer les
externalités qu'ont leurs activités sur le territoire. Je pense
notamment aux orientations
gouvernementales où l'État veut limiter l'étalement urbain, la dépendance à la
voiture. On pense aussi aux îlots de chaleur. Donc, les ministères,
malgré eux parfois, parce qu'ils ne prennent pas conscience de leurs actions
sur le territoire, ont un impact contraire,
finalement, aux orientations gouvernementales en matière d'aménagement du
territoire.
Donc, pour nous,
faire de l'aménagement durable du territoire une activité incontournable, c'est
un prérequis, finalement, à la cohérence des
actions étatiques, et Vivre en ville écrit fréquemment sur le sujet. Notamment,
vous savez, l'UMQ a identifié la fiscalité municipale comme un des
facteurs de l'étalement urbain, et donc il faut réviser cette fiscalité municipale. On a écrit des mémoires sur
le sujet, on vous y réfère dans notre mémoire. Et aussi revoir les
règles de financement des réseaux de transport. Il y prédomine un deux poids,
deux mesures où on finance, finalement, au Québec massivement le transport
routier, mais très peu le transport en commun. Donc, il y a de ces
incohérences-là, finalement, qui
contreviennent aux orientations gouvernementales rédigées par le ministère des
Affaires municipales. Et, malheureusement, ces orientations
gouvernementales s'appliquent uniquement aux municipalités — c'est
un outil de dialogue entre les municipalités et le gouvernement — et
non à l'entièreté des ministères et organismes. Donc, on croit que ce serait
une façon d'améliorer la cohérence de l'État.
M.
Savard (Christian) : Donc, effectivement, le rôle transversal...
Puisque la manière qu'on construit nos villes a une incidence sur un paquet d'enjeux de développement durable,
protection du territoire agricole, protection des milieux naturels, mais également nos modes de vie et
l'impact de nos modes de vie, on croit que c'est un enjeu
incontournable.
Et, pour finir,
j'ajouterais aussi un autre cas, un autre exemple où est-ce que l'exemplarité
de l'État pourrait être incluse, et on
propose de l'inclure dans la stratégie, c'est la question de la localisation
des équipements et activités portés par l'État. C'est notamment quelque
chose qui est mentionné dans le plan d'action sur les changements climatiques, où on dit qu'il faudrait faire ça et
faire en sorte que l'État ne contribue pas à l'éparpillement des
activités, ne contribue pas à l'étalement
urbain, contribue à améliorer le coeur de nos villes, nos artères déjà
existantes. C'est un enjeu très important parce que, l'État, on le sait
que c'est une grande partie de l'économie, et, s'il améliore ses pratiques en matière de localisation de ses propres activités,
ça, c'est un petit exemple, là, comment la prise en compte du
développement durable dans l'aménagement et
dans les actions de l'État peut améliorer... C'est vraiment quelque chose qu'on
peut faire et c'est déjà identifié au plan d'action sur les changements
climatiques. Donc, ça serait une manière de le réitérer.
Pour terminer,
puisqu'il me reste 10 secondes, je citerais l'ONU, qui, dans une citation que
je trouve bien tournée, a dit : «La ville — et son
aménagement — est
un atout pour le futur de la planète et pour poursuivre un développement durable. Notre façon de planifier,
de construire et de gérer nos villes aujourd'hui sera déterminante pour
notre avenir. [...]Le combat pour un avenir durable se gagnera ou [se perdra]
dans les villes.» Voilà.
Le
Président (M. Reid) : Merci. Nous allons maintenant passer aux
échanges. Pour le bloc gouvernemental, je vais passer la parole au
ministre.
M. Heurtel :
Merci, M. le Président. Merci. Encore une fois, je vous félicite pour votre
travail. Comme toujours, comme tous vos
écrits, un autre écrit de qualité qui va certainement être très utile dans nos
réflexions. Merci beaucoup. Et j'en
profite également pour vous remercier, M. Savard. Vous aussi, vous participez
au Comité-conseil sur les changements climatiques, j'apprécie énormément
votre contribution également à cette réflexion très importante. Puis j'étais
très content de voir dans le mémoire, justement, que vous faites le lien
vraiment, puis plus qu'un lien, là, vous intégrez,
puis là ça va être ma première question... Juste être sûr que j'ai bien
compris, mais, moi, de la façon que je reçois le message du mémoire puis de votre intervention aujourd'hui, c'est
vraiment d'intégrer les actions en matière de changements climatiques à l'ensemble de la stratégie et de
véritablement voir ça comme un tout, et non pas comme des compartiments séparés. Je vois ça, qu'il faut vraiment lier nos
efforts. Vous avez cité le plan d'action sur les changements
climatiques, mais moi, je vois ici une
opportunité de vraiment mieux intégrer ce qu'on fait en changements climatiques
et ce qu'il reste à faire, évidemment, mais ce qui est déjà sur pied
d'intéressant à la stratégie de développement durable.
M. Savard
(Christian) : Tout à fait. On sait que, de toute manière, les
ressources sont limitées, et on veut aussi... Un des principes, c'est
d'augmenter la cohérence. Si on veut justement, bien, mieux utiliser nos
ressources et augmenter la cohérence des actions, de rapprocher la stratégie
développement durable et la lutte aux changements climatiques, qui est
probablement la plus grande urgence qu'on peut avoir d'un point de vue
environnemental et de développement durable, ça nous apparaît, effectivement,
évident. Et ça, cette cohérence-là qu'on tente d'atteindre, il va falloir aussi
qu'elle fasse tache d'huile dans d'autres ministères.
Une voix :
...
M. Savard
(Christian) : Tache d'huile, oui.
Des voix :
Ha, ha, ha!
M. Savard
(Christian) : Qu'elle percole vers les autres plans qui peuvent y
exister, dans les autres ministères. On le sait, Catherine en a parlé, le
ministère des Affaires municipales est à revoir l'ensemble de ses lois, de ses orientations en matière d'aménagement du
territoire, bien, voilà une autre patte à attacher. Après ça, ça va être
le financement de la mobilité durable, où on
sait que le MTQ s'en vient avec quelque chose, on parle du courant de
l'automne. Il faut que
tout ça soit cohérent et se parle l'un à l'autre. Et c'est souvent ça, bien, on
peut souvent reprocher à l'action gouvernementale, hein, ce que... et
donc oui, effectivement, le plan d'action de changements climatiques, la
stratégie de mobilité durable, c'est deux qui semblent évidents dans un premier
temps.
M.
Heurtel : Alors, si on parle
plus spécifiquement d'aménagement... Puis vous avez profité de votre temps
pour préciser la notion d'aménagement, puis peut-être qu'avec ces questions-là
on pourra approfondir parce que je trouve ça
fondamental, la notion d'aménagement. Puis, évidemment, ça touche la mobilité,
le transport et plusieurs secteurs, vous l'avez très bien décrit, une foule d'organismes et de ministères qui
sont de près ou de loin impliqués, ce n'est pas juste l'affaire d'un ministère, puis il y a vraiment
besoin, comme vous dites, d'une cohérence puis d'une intégration. Je
crois qu'on a ici une opportunité avec la stratégie... Bon, un, on intègre la
lutte contre les changements climatiques, mais également de voir comment on
peut avoir une approche horizontale ou transversale, comme vous le proposez.
Ce que
j'aimerais faire pour les prochaines séries de questions, c'est vous lancer
quelques idées puis voir si on peut avoir
une réaction, bon, succincte. Puis j'ai plusieurs points, mais juste de voir,
là puis ça pourrait servir pour approfondir, là, ces notions-là... Un,
cette notion-là, combiner, là, stratégie développement durable, lutte contre
les changements climatiques, qu'on l'intègre
systématiquement aux différents procédés décisionnels gouvernementaux, que ça
soit d'emblée à la base des processus décisionnels, je vous fais réagir
là-dessus.
M. Savard (Christian) : Bien, en
fait, ce qu'on a pu constater dans la dernière stratégie, c'est que, très souvent, le développement durable s'est surtout
décliné sous l'écoresponsabilité des activités des MO — je
vais utiliser MO, là, pour aller... des MO — et c'est souvent plus
devenu une contrainte : Ah! bon, il faut faire un rapport pour la stratégie de développement durable, là, on va
faire deux, trois trucs, on va imprimer recto verso, puis ça va être
correct. Pour avoir des amis qui travaillent
dans des MO, parfois on donne ça au conseiller, là, en développement durable,
et ça ne percole pas dans le reste de la machine. C'est pour ça qu'on
dit qu'il faut que ça soit intégré carrément dans la planification stratégique de chacun des MO. Et ça, en étant juste... On le sent, qu'on
veut le mettre, mais c'est comme une activité comme une autre dans 1.2. Tu sais, ce n'est pas comme un
grand principe directeur de la stratégie, c'est une activité parmi
d'autres, et, en faisant ça, on ne lancera
pas le signal de monter le développement durable à un autre niveau. C'était
correct pour la première stratégie,
probablement, il fallait commencer quelque part. Mais, si on veut qu'elle ait
plus d'impact et qu'on dirige le
Québec plus vers le développement durable, il va vraiment falloir que ça soit
dans les missions, que ça se ressente dans les missions des
organisations.
• (12 h 30) •
M. Heurtel : Prochaine notion,
d'explorer la révision de l'ensemble des programmes gouvernementaux, que ça soit investissements, subventions. En tout cas,
toute forme d'intervention économique, de faire en sorte que justement,
encore une fois, les notions de développement durable et de lutte contre les
changements climatiques soient prises en compte
d'une façon, là, concrète, notamment pour faire face... pour être sûr qu'on ne
subventionne pas, par exemple, des mesures qui ont comme résultat
l'étalement urbain ou des subventions d'énergies fossiles. Votre réaction.
M. Savard
(Christian) : Bien, c'est effectivement le cas. Je vais prendre un
exemple assez classique qu'a mentionné Catherine. Actuellement, au
Québec, les routes à numéros sous la responsabilité du MTQ sont financées à 100 % par l'État, et ça fait en sorte, bien,
quand on élargit une autoroute, on fait une autoroute dans ta municipalité,
ça apporte du développement, mais ce
développement-là, son coût est venu... est à l'État. Donc, ça a donné un
étalement urbain. Oui ou non, on est
d'accord. Mais une chose est sûre, c'est l'État qui a payé. Pour d'autres types
de développement, si on veut se développer autour du transport en
commun, dans ce cas-là, bien, ça coûte de l'argent à la municipalité, c'est elle qui doit payer, et ainsi de suite.
Donc, il y a là un exemple d'incohérence — c'est un de ceux que je connais
bien — où,
bien, on sait qu'il faut favoriser le transport en commun, mais on met de la
pression sur les municipalités pour qu'elles paient, on veut faire en sorte...
Par contre, lorsqu'on favorise les déplacements autos, ah! bien là, c'est l'État qui paie. C'est un bel exemple où il y a
une incohérence dans le développement durable dans les pratiques de
l'État. Si, au moins, les règles du jeu étaient égales, par exemple, bien, ça
serait beaucoup plus facile pour les municipalités de faire des choix
probablement plus durables.
Donc, il y a beaucoup de mécanismes de ce
type-là à l'intérieur de l'État qui font en sorte que, bien, on ne fait pas de développement durable, on ne prend pas
souvent la... on ne prend pas la décision la plus durable parce que les règles du jeu poussent vers une autre décision. Pourtant,
il y aurait d'autres manières de faire, mais, bon, à force... Puis il y a des fois où il y a une certaine inertie des
pratiques qu'on a eue dans les dernières décennies, mais, en appliquant
les principes du développement durable, on est capable de défaire ces mauvaises
pratiques là.
M. Heurtel : Ensuite, la notion,
bon, comment on intègre... bien, donc, l'idée d'intégrer, encore une fois, dans la planification la construction des
infrastructures, ces principes de développement durable, est-ce que, donc, à
la base, cette notion-là, là... Encore une fois, votre réaction.
M. Savard
(Christian) : La meilleure manière d'y arriver — c'est mon côté économique — c'est l'internalisation des coûts.
C'est pour ça que les acteurs qui bénéficient d'une nouvelle infrastructure
doivent en payer une partie des coûts. Dès
que l'État se paie 100 % pour un autre acteur, c'est évident que les
acteurs économiques vont faire des choix autres. On sait que
l'internalisation des coûts ou la prise en compte des externalités est un
principe fondamental du développement
durable, et ça, ça n'existe pas. Je vais vous donner un exemple assez classique
et qui... Je vais reprendre un exemple d'autoroute, la A-19, qu'on parle
d'élargir, il y a des débats là-dessus. La A-19 va profiter essentiellement à développer une partie de
la couronne nord. Moi, ce qu'on dit par rapport à ça, si on veut internaliser
les coûts, comme le dit le développement durable, il faudrait qu'une
partie de la couronne nord paie la note de la même manière que le renouvellement des wagons de métro à Montréal,
actuellement, est payé en partie par la ville de Montréal. Donc, il y a
comme là un exemple, là, d'incohérence où le développement durable n'est pas
considéré, tout simplement sur le principe d'internalisation des coûts.
M. Heurtel : Alors, sur la notion
d'internalisation des coûts, donc, là, encore une fois, dans un esprit de cohérence puis de vision horizontale ou transversale
de l'action, si on regarde au niveau de la planification financière du gouvernement, quand on prépare des budgets, quand
on est en train d'évaluer les choix financiers qu'on fait puis l'évaluation des risques, tout ça, est-ce qu'il y
a un travail de modernisation à faire, justement, pour intégrer... est-ce
que vous voyez, dans la façon dont on prépare nos instruments financiers, qu'on
internalise l'ensemble des coûts, justement, des choix qu'on fait?
M. Savard (Christian) : Bien, ça
m'apparaît assez évident que non. Il y a des manières de faire qui étaient bonnes il y a 50 ans et qu'on a continué à faire.
Il ne faut pas oublier que, par exemple, l'étalement urbain, bien, à l'époque, c'était quelque
chose qui était vu... de très bien,
hein, on donnait... il fallait donner... c'était un rêve qu'on avait. Et, ce
rêve-là, bien, on l'a financé, ça a
été quelque chose de planifié. Et on s'est rendu compte, bien, que peut-être
il fallait le limiter parce que ça coûtait très cher en infrastructures,
en nouvelles écoles, en nouveau système de santé. Pendant qu'on ferme à certains endroits, on en ouvre d'autres. Je
rappellerai à titre d'exemple qu'en banlieue de Québec il y a
une école qui a duré 10 ans parce que
la cohorte est arrivée toute en même
temps, parce qu'on a construit tout en même temps et on a construit du bon vieil urbanisme des années 50,
monofonctionnel. Et donc on se rend bien compte que, pour l'État, construire une école pour 10 ans, là, ce n'est pas
très payant. Donc, ce genre d'analyse là, effectivement, ne se fait
pas, et il y a beaucoup de choses à revoir.
M.
Heurtel : L'autre notion,
c'est au niveau des politiques d'achat, des critères d'appel d'offres. C'est une autre notion dont
on parle souvent. Donc, encore une
fois, votre réaction là-dessus.
Qu'est-ce qu'on aurait à faire au niveau, justement, de nos
critères d'appel d'offres ou de nos choix en termes de politiques d'achat pour,
justement, intégrer les notions, pour nous permettre de faire un
aménagement plus responsable?
M. Savard (Christian) : Appels
d'offres, je suis moins certain pour les appels d'offres parce qu'en ce qui concerne... Bien, il y a moins d'appels d'offres
dans le domaine que je connais bien, hein, il n'y a pas d'achats... Il y
a certains achats d'équipement, mais c'est quelque chose qui n'est quand même
pas trop... assez bien pris en compte. Si on
considère, à titre d'exemple, dans les questions de transport, bien, on
améliore beaucoup le matériel roulant, on parle d'hybrides, des choses
comme ça. Donc, les appels d'offres sont déjà quand même pas mal plus exigeants
dans les domaines que je connais.
Par contre,
je dirais qu'en matière de bâtiments... Je viens de trouver un angle. En
matière de bâtiments, souvent la Société québécoise des infrastructures,
dans ses appels d'offres pour trouver des terrains, a souvent des critères très
larges, qui fait en sorte que, bien, au lieu
de consolider la rue Principale à Alma ou l'artère commerciale du Sud-Ouest
de Montréal, bien, fait en sorte qu'on se retrouve à mettre le CLSC... à le
déménager sur le bord d'une route très loin où est-ce que les gens y ont moins accès, où c'est plus loin. Donc, par
exemple, les appels d'offres pour des bâtiments de la Société québécoise
des infrastructures, que ça soit pour des terrains ou des bâtiments, pourraient
être revus pour avoir une meilleure localisation qui vienne renforcer nos
villes, nos villages plutôt que les éparpiller. Donc, voilà un exemple — j'ai fini par le trouver — précis où est-ce qu'on pourrait revoir nos
appels d'offres. On a notamment travaillé un peu avec la SQI là-dessus,
ils ont commencé à évoluer là-dessus, mais je pense qu'on pourrait aller plus
loin avec une politique gouvernementale de localisation des équipements et des
activités qui sont assujettis au gouvernement.
M. Heurtel : Bon. Une fois qu'on les
a mieux localisés, après ça il faut soit les construire ou rénover. Encore là,
les matériaux, choix de matériaux, etc., là-dessus, peut-être, au niveau des
politiques d'achat, peut-être, parler, approfondir là-dessus.
M. Savard
(Christian) : Effectivement, il y a différents, je crois... Puisque
c'est des choses qu'on construit pour longtemps, qu'on construit pour...
C'est des institutions publiques, là, on ne les construit pas comme on
construit un Walmart pour 15 ans, 20 ans, on
les construit pour que ça dure 50 ans, il faut, effectivement, être plus
exigeant. Et, pour une petite
histoire, à un moment donné, je parlais à un directeur général de... quelque
part, d'une petite ville de Portneuf, qui travaillait justement à un CHSLD, et lui voulait mettre en place de la
géothermie. Il travaillait avec les gens... justement, qu'est-ce qu'on appelait à l'époque la Corporation
d'hébergement, qui est maintenant fusionnée avec la SQI, et il
disait : Ça va rentrer... En faisant de la géothermie, votre retour sur
l'investissement est de sept ans. Pour la durée de vie d'un CHSLD, c'est plutôt
intéressant. Ça serait le fun, ça va mettre notre municipalité... on va avoir
un beau CHSLD. Il était fier de ça, et, à l'époque, les gens lui avaient
répondu : Moi, je ne gère pas l'opération. Moi, je gère le coût que ça
nous coûte à bâtir, et mes objectifs sont que ça coûte le moins cher possible.
Que ça coûte moins cher au bout de sept ans,
ça ne m'importe pas. Je n'aurai pas de bonus à la fin de l'année parce que j'ai
bâti quelque chose qui va coûter moins
cher après sept ans, je vais avoir un bonus si mon bâtiment a coûté le moins
cher possible là, là. Donc, effectivement, il existe encore... ce genre
d'histoire là démontre que le développement durable n'est pas pris en
considération dans certaines activités de l'État.
M. Heurtel : Même, dans
cet exemple-là, on a un incitatif financier qui est lié à ne pas faire le
meilleur choix dans cette perspective-là.
• (12 h 40) •
M. Savard
(Christian) : Oui, exactement. Tout à fait, c'est ça.
M.
Heurtel : Donc, quand on parle de révision de même les incitatifs, de
ce qui est mis de l'avant en termes de politique d'investissement, ça
fait partie de l'équation.
M. Savard
(Christian) : Je pense que les choses commencent à évoluer, là — c'est
il y a deux ans, à peu près, cet
exemple-là — pour
avoir travaillé un peu avec les gens de la SQI, mais oui, effectivement, il y a
des choses à faire. Il existe, évidemment, des normes pour le bâtiment,
des choses comme ça qui peuvent être considérées.
M. Heurtel :
...normes pour le bâtiment, le code du bâtiment, là-dessus. Ça, encore une
fois, modifications?
M.
Savard (Christian) : Je pense que les spécialistes, notamment, du
Conseil du bâtiment durable diraient oui. On peut penser... Il y a des
choses qui sont... Il y a quand même des choses qui sont plus intéressantes
dernièrement, notamment au niveau du bois.
On a réduit beaucoup certains coûts. Notamment, on parle de densité urbaine,
densification. Si tu es obligé de construire
tout béton versus du bois, ça coûte beaucoup plus cher, et il y a des bâtiments
qui commencent à se faire dans ce sens-là. Merci.
Le
Président (M. Reid) : Merci, M. Savard. Je dois vous
interrompre. Alors, nous allons passer au bloc du groupe de l'opposition
officielle. M. le député de Jonquière.
M.
Gaudreault : Oui. Alors, merci beaucoup, M. Savard, Mme
Boisclair, d'être ici. Évidemment, je reconnais, moi aussi, votre très,
très grande contribution dans toute la réflexion, et ce, de façon constante,
là, vous avez toujours été présents. Et je
pense que l'ancien gouvernement, le précédent gouvernement avait envoyé un
signal important avec un même
ministre sous les Affaires municipales et les Transports, avec une stratégie de
mobilité durable aussi qui incluait pour
une première fois les préoccupations aussi importantes en matière d'aménagement
du territoire. Alors, je comprends très, très bien votre signal et la
préoccupation que vous soulevez et je souhaite, évidemment, que le gouvernement
actuel poursuive sur cette lancée du précédent gouvernement. En tout cas, on va
surveiller à l'usage.
Maintenant, justement
pour faire suite à cet élément-là, vous dites dans vos recommandations 5 et
8 : «Identifier l'aménagement durable
du territoire comme une activité incontournable de la stratégie.» Et 8 :
«Adopter des critères
d'écoconditionnalité dans les programmes de subvention en infrastructures.» Je
comprends que les critères d'écoconditionnalité
dans les programmes de subvention en infrastructures deviennent comme un
incitatif, si on veut, pour faire en
sorte que l'aménagement durable du territoire soit davantage pris en compte, si
on veut, dans les interventions gouvernementales. J'espère que la Caisse
de dépôt et placement, dans son nouveau rôle d'intervention dans les
infrastructures, tiendra compte de critères d'écoconditionnalité. En tout cas,
il faudra voir pour la suite des choses.
Bon,
vous avez eu un échange assez — comment je pourrais dire? — constant avec le ministre, là, un va-et-vient
intéressant dans la discussion. Maintenant,
j'aimerais que vous me disiez : Selon vous, là, court ou moyen terme, est-ce
que vous identifiez un certain nombre de
chantiers très concrets, là, à venir au niveau soit législatif, là... Je ne
parle pas de chantiers
d'infrastructures, là, de chantiers législatifs, ou de politiques, ou de
mesures, ou de stratégies, là. Êtes-vous capable de m'en identifier
quelques-unes, là, rapidement pour sortir un peu de la théorie qui dit :
Bien, il faut, justement, identifier l'aménagement durable du territoire comme
une activité incontournable de la stratégie?
M.
Savard (Christian) : Oui. Donc, à ce propos-là, il y a évidemment tout
ce qui concerne le chantier par rapport aux municipalités qui s'en
vient. On sait qu'il va y avoir une révision de la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme, il va y avoir le nouveau rôle
pour la métropole, la capitale nationale. On parle d'autonomie des
municipalités, de révision de tout
ça. Tout ce qui entoure ça, il y a trois, quatre lois qui sont impliquées par
ce chantier-là qui va être ouvert et qui, nous, nous préoccupe, effectivement, parce qu'on voit une certaine limite à
l'autonomie municipale en matière d'aménagement du territoire. On trouve
très important que les questions d'aménagement du territoire et d'urbanisme demeurent
une compétence et une responsabilité
partagée entre le gouvernement et les municipalités. On entend,
malheureusement, des municipalités
dire : Donnez-nous ça, le zonage agricole, là, c'est notre responsabilité,
autonomie en matière d'aménagement du territoire.
Pour nous, ça
équivaudrait à donner les clés de la bergerie au loup. On sait
qu'actuellement — et
il y a des professeurs qui l'ont dit
dernièrement dans un dossier dans la
région de Québec — les MRC, les municipalités n'ont pas
la maturité pour aller vers un aménagement
du territoire durable. On est encore pris dans les vieilles pratiques
d'étalement, d'aller chercher des taxes à court terme pour essayer de diminuer
les comptes de taxes, pour essayer de... mais ne pas faire des pratiques qui sont plus durables à long terme. C'est une
espèce de chaîne de Ponzi, là, et ça, si le gouvernement cède à la tentation de dire : O.K. J'en donne
aux municipalités parce que je les ai coupées, là, je vais leur donner un
peu de législatif parce que je leur ai enlevé du budgétaire, je suis assez
clair là-dessus, on va assurément avoir un problème encore plus grand dans cinq, 10 ans où est-ce qu'on va toujours revenir
avec des besoins en infrastructures toujours plus loin, toujours plus
coûteuses, qui est le modèle de développement des dernières années.
M. Gaudreault :
Est-ce que vous iriez jusqu'à dire que la stratégie doit nommer ses chantiers?
Quand on parle, par exemple, de la définition d'une nouvelle gouvernance dans
les municipalités, la révision de la Loi sur l'aménagement
et l'urbanisme, on sait qu'éventuellement le gouvernement va se diriger aussi
vers une révision de la gouvernance de la
gestion des transports dans la grande région métropolitaine, on pourrait
parler, bon, de la Loi sur la qualité
de l'environnement aussi. On pourrait parler même du pacte fiscal qui s'en
vient parce que, là, on a un pacte fiscal transitoire. Si on veut
parler, par exemple, de nouvelle fiscalité pour les municipalités ou sortir de
leur dépendance d'une seule fiscalité qui est la fiscalité basée sur le
foncier, est-ce que vous pensez qu'on devrait aller un petit peu plus loin dans
la stratégie à cet égard?
M.
Savard (Christian) : C'est exactement pour ça qu'on a proposé de la
mettre comme activité incontournable. Il y a tellement de choses qui
s'en viennent — puis
je vous dirais que ça fait travailler très fort notre équipe — dans
le domaine que, si on veut que le Québec se
dirige vers le développement durable, les questions de comment on
construit nos villes et nos quartiers doivent devenir une activité
incontournable de cette stratégie-là. Ça va être un signal de plus pour monter la barre dans les différentes...
dans les autres... dans les MO, notamment. Donc, oui, il faudrait que ça
en fasse mention explicitement, c'est une
bonne idée. Et nous, on va même plus loin, on propose que le Québec se dote
d'une politique d'aménagement durable du territoire carrément qui viendrait
être un peu la réflexion et la vision qui devrait guider les futures
interventions dans ce domaine-là, toutes celles que vous avez nommées :
pacte fiscal, révision de la loi, révision des pouvoirs des villes.
M. Gaudreault :
...
M. Savard
(Christian) : Exactement, oui, il devrait y avoir une espèce de
chapeau de ce type-là.
M. Gaudreault :
O.K.
Mme Boisclair
(Catherine) : Je rajouterais peut-être...
M. Gaudreault :
Allez-y.
Mme Boisclair
(Catherine) : ...que le chantier de réforme de la fiscalité municipale
est clairement un des chantiers... Vous
l'avez évoqué, mais je tiens à le redire, là, que ce chantier-là doit être
ouvert. Donc, là, c'est sûr, qu'il y a une renégociation du pacte
fiscal, mais on questionne vraiment les impacts qu'a la dépendance au foncier.
M.
Gaudreault : Exactement. O.K. Écoutez, j'aimerais aussi vous
entendre sur l'élargissement de la stratégie de développement durable
au-delà des ministères et organismes. On voit, bon, une volonté là-dessus.
Comment on pourrait faire pour l'élargir
davantage aux instances municipales de façon un peu plus peut-être
contraignante sans non plus décider ou faire à leur place? Et peut-être
ça va être ma dernière question parce que le temps file, puis je veux vous
laisser du temps pour répondre, mais je veux tout de suite vous dire que, tout
de suite après votre réponse, moi, je devrai
quitter parce qu'une autre commission m'attend en ce moment. Je ne veux pas que
vous le preniez mal, mais mon collègue de Matane-Matapédia va assumer la
présence, oui.
M.
Savard (Christian) : Effectivement, la loi, actuellement, permet au
gouvernement de décider d'assujettir, par exemple, les municipalités à
la stratégie. C'est quelque chose qui peut être fait de manière qui est déjà
prévue. On pense que c'est une bonne idée, effectivement, puisque, pour eux, ça
serait la première ronde. Puis il y a beaucoup de municipalités qui essaient, hein, puis qui essaient d'être proactives,
mais ça serait un signal à lancer. Nous, on aime bien l'approche
d'obligation de résultat, mais autonomie de moyens. Donc, on s'entend sur
l'objectif à atteindre, mais on ne donne pas
la recette à chacune des municipalités parce qu'on sait qu'il y a des
municipalités qui sont... et certaines sont plus petites, certaines sont dans des endroits plus ruraux, d'autre plus
urbaines, donc il faut garder une certaine flexibilité. On n'est pas là pour qu'il y ait un fonctionnaire
derrière chaque municipalité, mais de lancer le signal qu'il doit y
avoir des efforts de faits en matière de développement durable est une bonne idée.
• (12 h 50) •
M. Gaudreault :
Merci.
Le
Président (M. Reid) :
Merci. Merci, Nous allons passer maintenant au bloc du deuxième groupe d'opposition. M.
le député de Nicolet-Bécancour.
M.
Martel :
Merci, M. le Président. Bonjour à vous deux. Je veux continuer un peu dans la
même veine que vous étiez là. Moi, ce que je
lis — puis
je veux m'attarder plus au niveau des obligations des municipalités, ces choses comme ça — moi, je trouve que le
discours que vous avez, il est plein de logique, mais, à certains égards, au
niveau de la réalité, notamment
en milieu rural, là, j'ai de la difficulté à attacher ça correctement. Quand on regarde, là,
au niveau des municipalités, au
niveau des MRC, confectionner un schéma d'aménagement, là, déjà, actuellement,
là, sans la révision de la loi sur
l'aménagement du territoire, là, il faut tenir compte des orientations gouvernementales, il faut faire de la consultation auprès de nos populations, auprès des municipalités, il faut,
ensuite de ça, soumettre notre projet, qui passe sur le bureau de chacun
de nos ministères. De rajouter là-dedans, sincèrement, moi, je pense qu'on
complique beaucoup, là. Je ne dis pas que ce n'est pas nécessaire, je ne dis
pas... mais on complexifie beaucoup.
Je pense à la fiscalité. Vous en faites
allusion, mais c'est une réalité, la fiscalité. Je pense, entre autres... Par exemple,
vous dites : Ils veulent diminuer les taxes ou des choses comme ça, mais,
des fois, c'est des besoins. Je prends l'idée, là... On a aboli les CLD ou, à tout le moins, le financement au
niveau des CLD. Si les municipalités veulent continuer de faire du développement local, il faut
qu'ils embauchent, nécessairement ça va leur coûter plus cher. Si ça leur coûte plus cher, tu as deux options : tu
augmentes les taxes ou tu fais du développement. On parle de plus en plus de donner de
l'autonomie au milieu municipal. Quand j'entends votre discours, là, par
rapport à tout ce que je viens de dire, il me semble que ça ne peut pas
faire autrement que de faire un choc assez frontal, là.
M. Savard (Christian) : Bien,
effectivement, sur l'aspect de l'autonomie des municipalités, on est beaucoup
d'accord avec bien des choses avec les unions municipales, mais, cette
partie-là, on n'est pas d'accord.
Il y a une
chose que je veux rappeler. Une position de Vivre en ville, c'est qu'on ne peut
pas appliquer de la même manière, à chacun des types de municipalités au
Québec, de la même manière les lois. Par exemple, nous, on faisait la suggestion d'être plus exigeant, notamment lors
du renouvellement des schémas d'aménagement, avec les MRC à fort taux de
croissance. Quand il y a une MRC que la population est pas mal stable, tu n'es
peut-être pas obligé de revoir aux cinq ans
ton schéma d'aménagement, tel que le demande la loi actuellement, parce que ton
développement est plutôt stable.
Mais, lorsqu'il y a un taux de croissance de 10 %, peut-être qu'il faut
que tu regardes est-ce que tu fais bien les choses, est-ce que c'est le plus durable, ce que tu fais. Et donc des
MRC, par exemple, de couronne... comme de couronne de Montréal, à titre d'exemple, il y en a
beaucoup, c'est la moitié de la population du Québec dans ce secteur-là.
Donc, quand on vient à appliquer les choses au monde municipal, il faut,
effectivement, avoir une approche qui peut être à géométrie variable en
fonction de la réalité du terrain de chacun. Ça, c'est quelque chose qui est
important.
Mais actuellement on a besoin d'un leadership de
l'État. Si on veut faire mieux construire nos villes, nos quartiers, l'État
doit maintenir un certain leadership, que ça soit en incitatifs, donc en appui
financier, ou parfois en contraintes,
c'est-à-dire l'outil législatif. Mais idéalement tout le monde fait bien les
choses de manière complètement volontaire.
Mais il y a des signaux économiques et des vieilles manières de faire qui font
en sorte qu'on continue, des fois, à ne pas bien développer notre
territoire, pas durablement.
M.
Martel :
Si on partage l'objectif de l'occupation du territoire, là, comment vous
réagissez par rapport à ça? Parce
que, pour moi, là, c'est obligatoirement en contradiction. Si on veut faire une
occupation dynamique du territoire, ça
prend des stratégies pour garder les gens dans les municipalités. Si on ne le
partage pas, là il y a peut-être des mesures qui peuvent faire... puis
qu'on ferme des villages ou des choses comme ça, ça devient correct à ce
moment-là, là.
M. Savard
(Christian) : Non. Ça, tout à fait, on est tout à fait d'accord avec
la stratégie d'occupation du territoire et de garder la vitalité dans chacune de nos villes et villages, mais je
ne pense pas que l'aménagement du territoire est une contrainte. Souvent, tu sais, il y a du travail à
faire dans les coeurs de villages, il y a du travail à faire dans les artères
des villes moyennes, il y a de la place, là. Ce n'est pas vrai qu'on est tous
obligés d'aller habiter... Il y a beaucoup... une certaine ruralité... qui disent : Il faut ouvrir nos bois puis il
faut ouvrir des chalets partout, sinon on va se dévitaliser. Ce n'est
pas comme ça que vivait la ruralité québécoise, avec la «chaletisation» du Québec,
que moi, j'appelle. Donc, oui à l'occupation du territoire, oui à la vitalité
de nos villes et villages qui ont de la difficulté, mais je ne pense pas que
d'ouvrir le territoire soit la solution. Je pense que le développement
économique, l'arrivée de différents créneaux...
M.
Martel : Mais juste
une opinion, pour moi, les schémas d'aménagement, ce n'est pas une contrainte à
l'occupation du territoire, c'est justement de définir des stratégies et des objectifs
pour y arriver, là.
Le Président (M. Reid) :
Merci. Merci, Mme Boisclair, M. Savard, de votre présence.
La commission
ajourne ses travaux jusqu'au mercredi 28 janvier prochain, à 9 h 30, pour la poursuite de ce
mandat.
(Fin de la séance à 12 h 56)