(Quatorze heures une minute)
La Présidente (Mme Doyer): Alors, ayant constaté le quorum, je vais ouvrir la séance. Je déclare la séance de la Commission des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
Je vais vous donner lecture du mandat pour lequel nous sommes réunis: La commission, elle est réunie avec de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques à l'égard du document intitulé Le Québec et ses changements climatiques ? Quelle cible de réduction d'émissions de gaz à effet de serre à l'horizon 2020? M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?
Le Secrétaire: Il n'y a aucun remplacement, Mme la Présidente.
Auditions (suite)
La Présidente (Mme Doyer): Alors, à l'ordre du jour, nous recevons ? et je vous souhaite la bienvenue, ainsi qu'à tous les collègues et le personnel qui nous accompagnent aujourd'hui ? nous recevons des représentants de l'Association minière du Québec. Alors, je vais demander au directeur, M. Belles-Isles, de se présenter et de présenter les personnes qui l'accompagnent. Vous avez 10 minutes pour nous présenter votre exposé. Bienvenue.
Association minière du Québec (AMQ)
M. Belles-Isles (Jean-Claude): Bien. Merci, Mme la Présidente. Je... Mon nom est Jean-Claude Belles-Isles, je suis directeur Environnement à l'Association minière du Québec. Et, à ma droite, j'ai M. Joël Pagé, qui est directeur Développement durable à la mine Raglan, dans le Katinik, et M. Gilles couture, qui est directeur Environnement et qualité chez ArcelorMittal Mines Canada, à Port-Cartier.
La Présidente (Mme Doyer): Bonjour.
M. Belles-Isles (Jean-Claude): Alors, Mme la ministre, MM. et Mmes membres de la commission, merci de bien nous recevoir aujourd'hui pour nous présenter... pour nous permettre de vous présenter notre mémoire.
L'Association minière du Québec est l'organisme provincial qui est le porte-parole de l'industrie minière québécoise. Elle est formée de compagnies minières en opération sur le territoire québécois, de producteurs de minéraux industriels, d'entreprises minières en voie d'entrer en production et d'entrepreneurs miniers. L'Association minière représente environ une quarantaine d'entreprises.
L'industrie minière est un levier important du développement économique au Québec. La valeur de ses expéditions s'élève à près de 5 milliards de dollars annuellement, et elle consacre chaque année près de 2 milliards de dollars en achat de biens et services au Québec. Notre industrie représente plus de 50 000 emplois dans une trentaine de municipalités. Dans plusieurs de ces municipalités, l'industrie minière constitue d'ailleurs le principal, pour ne pas dire le seul moteur de développement économique.
Comme l'indique votre document de consultation, l'industrie minière est très vulnérable à la mise en place d'un système de plafonnement et d'échange ainsi qu'à la hausse de la redevance sur les carburants et les combustibles. Vous comprendrez donc que ce dossier soulève un intérêt particulier pour notre industrie, et nous sommes par conséquent heureux d'avoir l'opportunité de pouvoir échanger avec les membres de la commission.
Nous sommes venus ici avec l'idée de travailler à la recherche de solutions qui permettront au Québec de réduire ses émissions de GES tout en maintenant une industrie minière forte. L'AMQ reconnaît en effet l'importance pour les pays industrialisés de réduire de façon importante leurs émissions de GES, comme le recommande le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat dans son quatrième rapport. Elle reconnaît aussi que, même si les émissions québécoises de GES ne représentent que 0,2 % du bilan mondial, le Québec doit poursuivre ses efforts de réduction des émissions de GES et montrer son leadership en la matière. Nous sommes toutefois d'avis que, dans l'établissement de cette cible de réduction pour la province, le gouvernement doit considérer le bilan du Québec en termes d'émissions de GES et les potentiels réels de réduction dans chacun des secteurs.
Le Québec est la province canadienne qui présente le plus faible taux d'émissions de GES par habitant, soit 11,1 tonnes de CO2 équivalent, comparativement à 25,6 tonnes pour le reste du Canada. Pour atteindre des résultats similaires, les autres provinces canadiennes devraient réduire en moyenne de 56 % leurs émissions. De la même façon, les émissions québécoises de GES par habitant sont 30 % plus faibles que celles de la moyenne des partenaires de la WCI. Enfin, le Québec, de l'aveu même du gouvernement, est l'une des provinces et l'un des partenaires de la WCI dont le coût marginal de réduction des émissions de GES est le plus élevé.
Devant ce constat, l'AMQ est surprise de constater que le gouvernement propose des cibles de réduction aussi ambitieuses que 15 % et 20 % par rapport à l'année de référence 1990, alors que la plupart des partenaires où les opportunités de réduction sont moins coûteuses se contenteront de maintenir, en 2020, les niveaux d'émissions de 1990.
L'AMQ considère que la réduction des émissions de 15 % ou 20 % au Québec d'ici 10 ans est un énorme défi, surtout lorsque l'on considère que, dans le domaine du transport, les émissions ont toujours été à la hausse depuis 1990 et qu'elles représentent maintenant 40 % des émissions de la province. De plus, comme le potentiel de réduction dans le secteur industriel est relativement limité à l'horizon 2020, tel que le souligne d'ailleurs le document du ministère, il nous semble illusoire de croire que le secteur industriel puisse atteindre d'ici 10 ans des réductions additionnelles aussi importantes que celles proposées dans le rapport, à moins bien sûr qu'il y ait fermeture d'usines ou réduction importante de production.
En somme, l'AMQ estime qu'il est hasardeux de se fixer une cible trop ambitieuse en se basant uniquement sur l'analyse macroscopique qui a été présentée dans le document de consultation, et ce, sans connaître ni les réductions qui ont été obtenues depuis 2006, suite à la mise en place du premier plan d'action sur les changements climatiques, ni les potentiels de réduction dans les différents secteurs ou les détails du prochain plan d'action et les mécanismes qui pourraient contribuer à atteindre les cibles de réduction. L'exercice auquel nous convie le gouvernement nous paraît donc précipité, et nous ne nous considérons pas en mesure, sur la base des informations disponibles, d'entériner des cibles de réduction ambitieuses à l'horizon 2020.
À notre avis, le gouvernement devrait moduler les interventions selon les secteurs, en fonction non seulement des réductions déjà réalisées et des potentiels de réduction futures, mais également en fonction de l'impact potentiel des mesures proposées sur la compétitivité de nos entreprises. Je pense qu'il est inutile de vous rappeler ici que l'industrie minière est à cet égard particulièrement vulnérable.
L'AMQ considère également essentiel que la cible et le cadre réglementaire que développera le Québec tiennent compte des règlements, cibles et mécanismes de conformité qui seront mis en place au Canada et aux États-Unis. Les cadres réglementaires fédéral et provincial en matière de lutte aux changements climatiques doivent être compatibles pour éviter de nuire à la compétitivité de nos entreprises.
Pour l'industrie minière, les potentiels de réduction à l'horizon 2020 sont relativement limités, et il est donc essentiel d'investir dès à présent en recherche pour permettre le développement de technologies écoénergétiques. Notre industrie travaille actuellement sur le développement de chargeuses-navettes hybrides, qui pourraient être disponibles d'ici quelques années, et sur le développement d'une pile à hydrogène qui permettra de faire fonctionner nos équipements mobiles sans diesel. D'autres avenues de recherche peuvent être envisagées, comme la conversion des fours de cuisson des boulettes de fer vers les fours à résistance électrique, qui permettrait de réduire de façon importante les émissions de GES des usines de bouletage. Ce type de recherche pourrait même se faire dans nos centres de recherche au Québec, puisque nous avons l'expertise et les infrastructures nécessaires pour le faire. Pour l'AMQ, la recherche est un élément fondamental à toute stratégie de réduction des gaz à effet de serre dans notre secteur et probablement dans l'ensemble des secteurs industriels. Notre association recommande donc que le gouvernement mette en place des mesures pour inciter l'innovation technologique.
Par ailleurs, notre industrie est de plus en plus présente dans le Nord-du-Québec, puisque plusieurs projets miniers pourraient d'ailleurs y voir le jour d'ici quelques années. Or, les régions nordiques sont très éloignées des réseaux énergétiques et se caractérisent en général par la dépendance aux dérivés de pétrole pour générer la puissance électrique nécessaire aux opérations minières. L'AMQ est donc d'avis que le gouvernement devrait, dans son plan Nord, intégrer une stratégie visant à encourager la diversification des sources d'énergie dans ces régions éloignées. Ce développement pourrait se faire en partenariat avec l'industrie minière.
Je voudrais maintenant céder la parole à M. Pagé, qui nous donnera un exemple plus concret des défis et des opportunités que l'on peut envisager pour le développement du secteur minier et des communautés locales dans le Nord.
La Présidente (Mme Doyer): M. Pagé, peut-être que vous pourriez nous dire votre titre au complet.
M. Pagé (Joël): Oui. Mon nom est Joël Pagé. Au niveau des fonctions remplies chez Xstrata Nickel, mine Raglan, je suis directeur au développement durable de la minière,
La Présidente (Mme Doyer): Merci.
M. Pagé (Joël): La minière, pour l'information de la commission, est située au Nunavik, région arctique du Québec.
La Présidente (Mme Doyer): À vous la parole.
n(14 h 10)nM. Pagé (Joël): Comme vous le savez sans doute, mine Raglan est sans doute l'un des rares établissements industriels, sinon le seul actuellement qui vit et qui expérimente ni plus ni moins les premiers soubresauts des changements climatiques que vit le Québec, un, de par sa proximité septentrionale, mais également de par... parce que les zones arctiques sont précisément les zones les plus identifiées pour vivre les effets des changements climatiques, selon les experts internationaux. Donc, nous le vivons, nous en vivons les premiers soubresauts, et c'est pourquoi d'ailleurs ça nous interpelle plus particulièrement. D'ailleurs, la commission sur les... en fait, votre commission, la Commission sur l'environnement et le transport est venue à Raglan en septembre 2006, et certains d'entre vous ? je reconnais d'ailleurs les visages de certains d'entre vous ? vous êtes venus spécifiquement à Katinik, au site minier central, où on vous a fait la démonstration des enjeux de changements climatiques sur notre territoire ainsi que les mesures de mitigation que nous envisagions à l'époque et qui sont toujours d'actualité aujourd'hui pour mitiger les risques des changements climatiques dans cette contrée isolée du Nunavik.
Donc, comme vous le savez, mine Raglan, c'est une mine qui est isolée géographiquement, mais le particularisme de son isolement géographique tient aussi par son isolement énergétique ? j'oserais dire même monoénergétique ? de telle sorte que mine Raglan est dépendante d'un dérivé... un hydrocarbure, un dérivé pétrolier qu'on appelle le diesel, et tout son bilan énergétique, qu'il soit électrique, qu'il soit pour le transport, quelle qu'en soit la vocation, est destiné... dérive des dérivés du pétrole. Donc, toute imposition de cible de GES, oui, nous interpelle, et c'est ce pourquoi ça nous pousse à réfléchir davantage sur l'enjeu que pose un tel défi pour une minière telle que la nôtre, même si je ne suis pas assujetti au WCI, au Western Climate Initiative, parce qu'on parle d'énergie électrique générée et on parle également de transport, lequel transport va être assujetti dans un avenir plus éloigné. En fait, le sort de mine Raglan n'est pas différent des 14 autres communautés du Nunavik qui, elles aussi, sont séquestrées monoénergétiquement pour remplir leurs besoins énergétiques particuliers.
Nous pensons donc qu'une diversification énergétique du territoire, qui intégrerait mine Raglan, d'autres futurs établissements industriels, sur le territoire, qui pourraient venir s'y établir éventuellement ? et c'est à la lumière des résultats d'exploration qu'on voit que le Nord est vraiment l'Eldorado minier futur pour la province de Québec ? et également, en complément de d'autres besoins de communautés inuites qui sont à tout le moins, là, limitrophes au site minier ? on parle de Salluit et du village inuit de Kangiqsualujjuaq ? déjà là, pourrait partir, à notre avis, un certain pôle de développement d'écoénergie, d'énergie verte ou d'énergie alternative qui permettrait non seulement de répondre à des besoins industriels qui nous propulsent dans les 30, 40, 50, sans doute, prochaines années.
Pourquoi pas? Les réserves que nous avons chez nous nous amènent à croire que nous serons là au moins ? au moins ? avec ce qu'on connaît actuellement, au moins 25 ans. On découvre à toutes les années... notre équipe d'exploration découvre à toutes les années des réserves, de sorte que cette minière-là est là pour durer. Donc, on pense qu'un partenariat sous le chapeau du plan Nord pourrait...
La Présidente (Mme Doyer): Monsieur, excusez-moi de vous interrompre.
M. Pagé (Joël): Allez-y, madame.
La Présidente (Mme Doyer): Le temps qui vous était imparti est terminé. Peut-être quelques secondes pour conclure, et, à travers les échanges, vous allez pouvoir avoir l'opportunité de préciser un certain nombre de choses, c'est sûr.
M. Pagé (Joël): Absolument. Pour conclure, donc, simplement, sous le chapiteau... sous l'égide du plan Nord, mine Raglan serait intéressée à s'impliquer stratégiquement avec les partenaires du milieu, avec le gouvernement du Québec. Voilà. C'est une stratégie, je pense, qui serait sociétalement très bénéfique pour le Nord ainsi que... ainsi qu'évidemment l'économie du territoire, le Nunavik plus particulièrement.
La Présidente (Mme Doyer): Alors, messieurs, merci de votre présentation. Et je vais donner la parole à Mme la ministre pour un échange de 25 minutes.
Mme Beauchamp: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Et je tiens à saluer nos invités puis aussi les membres de cette commission et vous souhaiter, donc, un bon après-midi.
Messieurs, je pense que je vais commencer en vous proposant qu'on ait une petite pensée pour les familles, les collègues des trois personnes manquantes à l'appel à Desmaraisville. Je pense, c'est une... c'est des circonstances... je ne sais pas si, au moment où on se parle, si on peut les... si on doit les qualifier de tragiques, mais en tout cas, assurément, extrêmement inquiétantes et préoccupantes. Et, à travers vous, je pense qu'on peut se dire que les membres, ici, de cette Assemblée tiennent à exprimer, comme je dis, à votre industrie, à leurs collègues, bien sûr aussi à leurs familles vraiment que nos pensées les accompagnent. Et on souhaite toujours que ça puisse... qu'on puisse avoir, nous l'espérons, de meilleures nouvelles au cours des prochaines heures.
Je dois aussi vous dire que votre présence ici, elle est extrêmement importante, puisqu'en page 32 de notre document de consultation nous allons... nous avons voulu illustrer, à l'aide de la modélisation réalisée par le ministère des Finances et le ministère des Ressources naturelles, on a voulu modéliser des impacts possibles, sur certains secteurs industriels, de la stratégie... de la modélisation des différents facteurs intégrés dans la modélisation des différents scénarios de réduction de gaz à effet de serre d'ici 2020. Et, de façon indéniable ? et c'est assez frappant lorsqu'on regarde les graphiques, là ? on voit bien que votre industrie, elle est très interpellée par ces enjeux de réduction de gaz à effet de serre pour 2020.
Peut-être, ma toute première question, c'est: Lorsque vous voyez les chiffres que, nous, on a... qu'on a déposés pour votre secteur, quel est votre réaction? Est-ce que vous croyez que... Est-ce que c'est des chiffres qui, selon vous, au mieux de votre connaissance, reflètent... devraient refléter la réalité attendue? Est-ce que vous voulez les commenter plus spécifiquement, là, les chiffres qui sont en page 32? Je pense que vous savez à quoi je fais allusion, hein, bien sûr. Peut-être qu'on pourrait vous entendre un peu plus faire vos commentaires sur ces chiffres, pour débuter.
La Présidente (Mme Doyer): M. Belles-Isles.
M. Belles-Isles (Jean-Claude): Oui. Je vous avoue que les chiffres qui sont présentés là, bon, évidemment, on n'a pas tout le détail de ce qui a été... la modélisation qui a été faite, mais ça ne nous a pas réellement surpris. Ça ne nous a pas surpris: parce que le secteur industriel... notre secteur industriel, c'est un secteur qui... à haute intensité énergétique, on a besoin d'énergie pour fonctionner; parce qu'on est dépendants beaucoup du prix des métaux, les métaux sont... les prix des métaux sont fixés sur le marché international; on est aussi à la limite de notre technologie; on est très performants, ici, au Québec, au niveau... sur le plan technologique. Donc, tous ces facteurs-là aussi feront en sorte qu'on est relativement vulnérables. On a aussi mentionné tantôt le fait qu'on travaille... on est obligés de travailler... «obligés»... disons que l'endroit où on travaille est dicté, en fait, par le gisement, où le gisement se trouve, donc on se trouve souvent à travailler dans des régions éloignées où les sources alternatives d'énergie sont limitées. Donc, tout ça mis ensemble fait en sorte qu'on n'est pas très surpris de voir les chiffres qui sont présentés dans le tableau, dans la figure, en fait.
M. Couture (Gilles): Si je peux me...
La Présidente (Mme Doyer): M. Couture.
M. Couture (Gilles): Si je peux me permettre un commentaire additionnel, quand on... Évidemment, on n'a pas, évidemment, tous les paramètres du modèle économique qui a été utilisé pour sortir ce chiffre-là, mais vous avez raison, Mme la ministre, ça nous a beaucoup préoccupés en le voyant.
Une autre réalité, si on veut donner une image concernant les mines, c'est qu'une mine, c'est un endroit qui requiert beaucoup d'énergie pour extraire le minerai et qui, lorsqu'on le projette dans le temps, en demande de plus en plus. C'est facile à comprendre lorsqu'on imagine que le minerai est souterrain ou bien dans une mine à ciel ouvert. Le travail qu'on doit faire pour aller chercher les tonnes au fil des années requiert toujours de plus en plus d'énergie pour le... parce qu'il est plus profond, il est... le matériel est situé plus loin. Donc, si ces paramètres-là ont été tenus en compte dans le modèle, c'est bien certain qu'on... comme disait M. Belles-Isles, on n'est pas réellement surpris par les résultats qu'ils ont donnés.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Un autre de nos...
La Présidente (Mme Doyer): Ah!
M. Pagé (Joël): Si je pourrais me permettre un complément complémentaire à mes collègues, l'industrie minière, également, de par la réalité ou la géographie, impose d'opérer là où le gisement se trouve, tel que dit par Jean-Claude. Toutefois, ça implique également le fait que le fardeau du transport de la matière du concentré produit ou du minerai prétraité vers les sites de deuxième et troisième transformation, donc les coûts de transport pour acheminer la matière première vers ces sites industriels là sont également fort considérables.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Oui. Dans votre mémoire, vous prenez la peine... Si je ne me trompe pas, là, je ne voudrais pas mal vous citer, mais, si je vous cite, vous dites: «...il nous semble illusoire de croire que le secteur industriel ? j'imagine que vous parlez du vôtre, là ? puisse atteindre, d'ici 10 ans, des réductions additionnelles de [...] 15 à 20 % par rapport à 1990».
De cette affirmation découle une série de questions. Vous avez dit que, dans votre secteur, que vous jugez que vous êtes performants lorsqu'on compare à vos compétiteurs ailleurs dans le monde. Pouvez-vous nous dire un peu comment vous voyez ce positionnement, nous décrire en quoi, notre industrie minière, vous la considérez... Ça m'a donné l'impression que vous la considériez dans un peloton de tête, quant aux technologies employées sur notre territoire. Mais surtout ça entraîne la question... Si vous dites qu'il est illusoire d'avoir des objectifs de moins 15 % à moins 20 %...
Peut-être, je le comprends pour votre secteur, ça, c'est la cible... c'est des scénarios de cible globale pour le Québec, qui ne concernent pas nécessairement directement votre secteur, mais ça entraîne la question: Quelle est la marge de manoeuvre, quel est le potentiel de réduction, par ailleurs, que vous êtes en mesure d'identifier dans votre secteur? Et je ne veux pas vous faire dire ce que vous n'avez pas écrit, mais, si c'est illusoire de penser à moins 15 %, moins 20 %, c'est tentant de conclure que vous dites qu'il y a de la marge pour, avec vous, penser à moins 10 %, moins 12 %.
La Présidente (Mme Doyer): M. Couture ou M. Belles-Isles. M. Couture, pour commencer, je crois.
n(14 h 20)nM. Couture (Gilles): Bien, je peux répondre, disons, pour mon industrie, si vous voulez. Peut-être que Jean-Claude pourra compléter pour le secteur plus général. Mais qu'est-ce qui nous fait dire qu'on peut prétendre être parmi les plus performants, c'est que, vous savez, les gaz à effet de serre, pour nous... Entre autres, on discute avec le gouvernement fédéral depuis environ cinq ans maintenant, concernant cette question-là. Ça nous a amenés à faire des études de toutes sortes, des démonstrations, dont... quoi, du «benchmark», de l'étalonnage, je pense, pour se comparer aux autres entreprises comparables. Et chez nous, si on prend l'usine de bouletage qui est la source des trois quarts de nos émissions de gaz à effet de serre dans nos opérations globales, ce qui est un peu particulier pour une opération minière, là ? l'usine de bouletage est un fait particulier ? nous amène à dire que, pour un minerai d'hématite comme celui qu'on a, au moment où on s'est adressés, par exemple, aux fabricants de fours tels qu'on les utilise et qu'on leur a demandé quelles étaient les meilleures pratiques, eh bien, les chiffres qui nous ont été fournis correspondaient à nos propres performances, à quelques pour cent près. Donc, ce que ça nous indiquait, c'est qu'on était déjà à un certain niveau de «benchmark», si vous voulez, là, par rapport à la compétition.
Il y a des faits qui expliquent ça. On parle d'innovation, de recherche. L'usine de bouletage qu'on possède maintenant a démarré ses opérations en 1977. On a été la première usine à utiliser le charbon dans la fabrication des boulettes sur une base industrielle, au monde. Aujourd'hui, je ne connais pas d'usine qui utilise le minerai comme la nôtre, qui ne le fond pas. Donc, on a marqué le pas avec ça. Quand on a fait ça, on a réduit du même coup de 25 % l'énergie requise... en fait, on a réduit d'un peu plus que ça, mais de 25 % les émissions de gaz à effet de serre rattachées à la cuisson des boulettes, et par le fait même on a aussi augmenté notre capacité de production, qui nous a assuré une survie par la suite. Mais tout ça a contribué à diminuer de façon très importante l'émission, sur une base d'intensité et même en absolu, sauf que ce qu'on dit aujourd'hui, c'est que ces «breakthroughs» là, ces percées-là qu'on a faites au niveau technologique, avec des bonds de 20 %, 25 % après 30 ans d'opération, sont beaucoup plus difficiles à livrer.
On a des projets de R & D, on a des idées. On parle, dans le mémoire, d'installer des résistances électriques plutôt qu'utiliser du mazout lourd pour cuire nos boulettes, mais ces résistances-là, avec les projets qu'on a avec le COREM, un centre de recherche ici, à Québec, ou Hydro-Québec, commandent la mise en place de résistances électriques de l'ordre de 1,4 mégawatt, par exemple.
Juste pour donner une image, là, des résistances de 1,4 mégawatt, vous ne retrouvez pas ça dans les tablettes des quincailleries, là, au Québec. C'est énorme, et, technologiquement parlant, c'est des défis technologiques à relever. La faisabilité, l'intérêt est là, mais on ne peut pas prétendre que, d'ici 10 ans, on peut avoir un grand degré de confiance qu'on va être capables de livrer ça et avoir les... bénéficier des réductions d'émissions associées. Donc, c'est un peu la situation dans laquelle on se trouve actuellement, chez nous.
La Présidente (Mme Doyer): M. Pagé, vous voudriez compléter?
M. Pagé (Joël): Bien, en guise de complément, chez nous, la situation est, telle que décrite tout à l'heure, particulière en ce sens que, bon, tout vient du diesel. Maintenant, ce n'est pas dit qu'on ne fait rien. Au contraire, on a une équipe. À peu près toutes les industries de classe mondiale, je pense, au Québec, ont des comités d'efficacité énergétique en place et travaillent d'arrache-pied pour vraiment livrer le maximum de rendement du kilowattheure qu'elles consomment ou qu'elles génèrent. Chez nous, entre autres, c'est... on le génère. Donc, par défaut, pour chaque litre de diesel qui sert à faire cette électricité-là, on veut vraiment avoir un rendement optimal. Et tous les gains qu'on fait en temps réel, dans ces campagnes-là, et dans cette réflexion-là, et dans ces optimisations technologiques là sont fréquemment, pour ne pas dire quasi toujours grignotées par la hausse de production, c'est-à-dire pas nécessairement une hausse de production, mais en fait l'industrie minière, lorsqu'elle grandit, lorsqu'elle prend de la maturité, il faut aller plus profond, il faut transporter plus, donc le gain systémique de ces... de cette réflexion-là technologique est accaparée par ces... par ces besoins énergétiques là supérieurs.
Recherche et développement, mine Raglan, actuellement, un ingénieur bourlingue dans tout l'Arctique occidental ? on parle des pays scandinaves, la Finlande, la Suède, l'Alaska, le Canada arctique ? pour vraiment aller «benchmarker» la meilleure technologie d'éolienne qui peut être déployée en milieu arctique. Et, croyez-moi, ce n'est pas encore une technologie qui est apte à pouvoir livrer du gros mégawattage, dans l'état actuel qu'on en connaît de cette technologie-là. Donc, il y a, encore là, une notion intéressante de recherche et développement à voir se déployer pour faire ce qu'on appelle, dans le jargon, du «fuel displacement» dans des sites isolés tels que les nôtres.
Et, bon, de la recherche et développement dans ce domaine-là, mine Raglan en supporte, deux chaires de recherche, que j'ai en mémoire: ici même à l'Université Laval et une chaire de recherche UQAT-Polytechnique. L'industrie minière est vraiment, je crois, à l'agenda de la recherche et développement de l'industrie moderne d'aujourd'hui. Elle n'y échappe pas, et je pense que ça va un peu à l'encontre de l'image traditionnelle que les gens se font de l'industrie minière, et il faut justement... nous sommes ici aussi pour détruire un peu ce mythe-là, cette légende urbaine là. L'industrie minière, détrompez-vous bien, elle est... elle est vraiment à l'aube du IIIe siècle, elle y est de plain-pied.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Je veux juste savoir si je résume bien, là. Est-ce que je comprends ce que vous me dites? C'est que vous, c'est une industrie qui, au fil des années, est toujours plus intensive en termes de consommation énergétique, puis c'est un peu comme si le portrait que vous me dressiez, c'est-à-dire même avec des investissements en termes de recherche et développement ou avec des solutions de type énergétique... Puis j'y reviendrai, là, vous y faites allusion dans votre mémoire. Ce que vous me dites, c'est: Les gains en termes, donc, de nouvelles technologies, les gains que ça nous apporterait viendraient tout simplement compenser l'augmentation énergétique qu'il faut prévoir dans votre industrie. Est-ce que je... Malheureusement, des fois, il faut trop... il faut trop résumer et trop réduire, mais c'est un peu ce que j'ai compris.
C'est comme si vous disiez: Avec des investissements supplémentaires et de la recherche et développement, l'objectif qu'on a, c'est pratiquement d'essayer de maintenir la consommation énergétique qui, si on ne faisait rien, irait toujours en s'accroissant, parce que vous disiez carrément: Il faut aller chercher plus creux puis il faut donc transporter sur de plus grandes distances. Est-ce que je résume trop courtement, ou c'est ce qu'on devait comprendre, là, de... quand, moi, je vous posais la question: C'est quoi, le potentiel de...
La Présidente (Mme Doyer): M. Belles-Isles.
Mme Beauchamp: ...de réduction?
M. Belles-Isles (Jean-Claude): Oui. En fait, je pense que ce qu'il faut comprendre, c'est que les mesures d'efficacité énergétique, simplement les mesures d'efficacité énergétique, ça, c'est quand même relativement limité, et le fait qu'il faut aller chercher plus loin notre minerai, c'est compensé par ça, mais on a mis des pistes de solution.
Pour nous, 2020, c'est demain matin, là. C'est dans 10 ans, mais, si on veut atteindre des cibles encore plus contraignantes après 2020, il faut commencer tout de suite, il faut des percées technologiques. On a présenté dans notre mémoire certaines avenues qui nous permettraient d'avoir des diminutions beaucoup plus substantielles, et on pense que c'est vers ça qu'il faut s'en aller, et il faut commencer dès à présent avec des mesures incitatives pour favoriser l'innovation technologique.
Pour nous, l'innovation technologique, c'est un élément essentiel à un plan de lutte contre les changements climatiques. Donc, tantôt, ce que... ce dont parlait M. Pagé, c'était davantage la question d'efficacité énergétique qui donne des gains beaucoup plus marginaux.
La Présidente (Mme Doyer): M. Couture.
M. Couture (Gilles): Si je peux juste ajouter, effectivement, en tout cas en ce qui nous concerne, non, on n'est pas résolus à accepter le fait qu'on va continuer à consommer autant d'énergie qu'actuellement. Ce n'est pas le message. En fait, on est même condamnés, pour des raisons, oui, environnementales, mais aussi économiques, à continuellement s'améliorer, du point de vue compétitivité, pour survivre.
Maintenant, j'ai écouté un petit peu la commission, là, pour le temps que j'ai eu de disponible, puis j'ai bien aimé votre analogie concernant un coureur de marathon qui part avec un temps de 7 heures et un autre qui est avec 3 h 30. C'est bien clair que la difficulté, pour celui qui fait déjà son marathon en 3 h 30, de s'améliorer de façon importante est beaucoup plus limitée. Sans prétendre être des champions coureurs de marathon, je vous... ce que j'aurais le goût de vous dire, c'est qu'on est peut-être plus près actuellement du 3 h 30 que du 7 heures, et ça rend le défi d'autant plus difficile, à ce moment-ci.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Il me reste combien de temps, Mme la Présidente? Parce que j'ai deux autres questions.
La Présidente (Mme Doyer): 10 minutes.
Mme Beauchamp: Ah! Bon, c'est parfait. Je voudrais vous entendre peut-être un peu plus de vive voix sur les possibilités que vous voyez sur le territoire québécois. Lorsque, dans votre mémoire, vous faites référence à des projets possibles, vous dites «en partenariat avec le secteur privé». Par rapport à l'approvisionnement énergétique de votre industrie, vous faites allusion à différents projets qui... Et je voudrais savoir, ces projets-là auxquels vous faites allusion, si vous les voyez sur un horizon d'ici 2020.
Et l'autre dimension... Parce que votre mémoire est bien intéressant, et je comprends que la situation n'est pas facile, puis en même temps vous montrez de l'ouverture, là, à certaines possibilités justement de gains, de... en tout cas, d'éviter des émissions de GES. Je voudrais peut-être en même temps vous entendre un peu plus sur la dimension transport parce que j'ai... ça m'a donné l'impression, à la lecture de votre mémoire, que vous êtes capables d'identifier d'un point de vue, par exemple, de l'approvisionnement à partir de sources hydroélectriques, de connexions sur le territoire du Grand Nord, etc.
Mais, d'un point de vue transport, j'aimerais ça que vous nous parliez des enjeux devant vous sur ces questions liées plus sur le... au transport du minerai sur le territoire québécois.
La Présidente (Mme Doyer): M. Belles-Isles.
M. Belles-Isles (Jean-Claude): Est-ce que tu...
La Présidente (Mme Doyer): M. Pagé.
M. Belles-Isles (Jean-Claude): Je vais demander à M. Pagé de commencer.
n(14 h 30)nM. Pagé (Joël): Je peux... je peux immédiatement sauter dans l'arène. Au niveau du transport, par exemple, mine Raglan effectivement, comme son minerai sort par... bon, pour faire un exemple très concret, sort par un brise-glace... un vraquier brise-glace, donc ça... on transporte pendant 100 kilomètres par voie de camion de la mine Katinik jusqu'à un port qui s'appelle Baie-Déception, après quoi un vraquier brise-glace vient prendre en charge le concentré et l'achemine ici même à Québec au Port de Québec pour un transbordement ferroviaire jusqu'à notre fonderie de seconde transformation à Sudbury, en Ontario. Là, on parle ici seulement du transport de la matière première, mais le transport lui-même des passagers de certains... des nombreux employés, en fait, se fait par voie aérienne, et tout ce fuel-là également est intégré dans notre SCOPE 1, là, ce qu'on appelle le SCOPE 1, le premier SCOPE, l'avion est utilisé par la minière à 100 %. Donc, les émissions de fuel avion sont également considérées dans notre bilan.
Maintenant, vous me parlez d'énergie alternative...
Mme Beauchamp: Est-ce que... est-ce que vous me permettez, juste...
La Présidente (Mme Doyer): Oui, oui
Mme Beauchamp: Pardonnez-moi, je veux juste...
La Présidente (Mme Doyer): Oui, Mme la ministre, parce que je pense que...
Mme Beauchamp: ...juste sur la dimension de transport, est-ce que la situation de mine Raglan est... est un bon exemple? C'est-à-dire, quand vous décrivez ça, vous dites donc transport... en tout cas, au niveau du transport de la marchandise, là, du minerai, vous nous dites: 100 kilomètres par camion, puis ensuite vous décrivez une situation d'intermodalités, là, bateau et train, je veux juste savoir: Quand on écoute votre exemple, honnêtement on se dit: Bien, donc, ce n'est pas si pire. Je dis que ce n'est pas si pire dans le sens que c'est déjà une situation d'intermodalités, puis ça en vient... on en vient presque à conclure que, là aussi, il n'y a peut-être pas un si fort potentiel de réduction de GES.
Mais ma question est plus: Est-ce que vous êtes un bon exemple des... de l'industrie sur le territoire québécois? Est-ce que c'est vraiment assez largement une situation comme ça d'intermodalités avec bateau, train et camion?
M. Pagé (Joël): Je vous dirais que l'industrie minière, actuellement, telle qu'elle est structurée sur le territoire, utilise beaucoup l'intermodalités pour, on parle de minerai, de concentrés qui sont... qui sont denses, qui sont lourds, donc le transport ferroviaire est passablement sollicité. Le transport par camion également par des vraquiers... bon, surtout si on parle de l'Abitibi, bon, il y a beaucoup de transport par voie routière qui s'effectue jusqu'aux fonderies de seconde transformation, après quoi les dérivés métallurgiques qui sont générés là sont acheminés souvent par voie ferroviaire jusqu'à des affineries dans le Sud, qu'on parle de l'affinerie de zinc à Valleyfield ou l'affinerie de cuivre CCR ici, à Montréal-Est. Donc, voyez-vous, c'est un peu la plateforme.
Maintenant, je pense que les minières font... travaillent vraiment de façon efficace avec les ressources de transport qui existent actuellement. Je pense qu'elles font un travail d'arrache-pied vraiment pour que l'intermodalités soit la plus efficace possible, la moins dispendieuse possible et, oui, elles doivent composer avec cette réalité-là, parfois même l'expédier outre-mer lorsque... lorsque la transformation finale doit être effectuée lorsque la technologie n'est pas existante au pays, ici.
La Présidente (Mme Doyer): M. Belles-Isles et M. Pagé, je crois que vous voulez compléter... M. Couture, c'est-à-dire.
M. Belles-Isles (Jean-Claude): Bien, moi, je vais simplement rajouter: Il y a beaucoup de variabilité d'une mine à l'autre évidemment. Il y en a d'autres, comme sur la Côte-Nord, M. Couture va vous parler, qui ont quand même 400 kilomètres, je pense, à faire entre la mine et l'usine de Port-Cartier, et ensuite le transport se fait par bateau. Mais il y a aussi... Dans les mines souterraines, on utilise aussi beaucoup de diesel pour nos équipements, nos chargeuses-navettes et... nos chargeuses-navettes, et il y a de la recherche qui se fait actuellement pour justement développer des chargeuses-navettes hybrides et évidemment aussi sur une pile à hydrogène qui nous permettrait d'utiliser des équipements sans diesel. Mais ça, dans le cas de l'équipement hybride, on pense que ça pourrait être commercialement disponible d'ici peut-être quatre, cinq ans; pour les autres, bien c'est encore au début, là, des travaux de recherche là-dessus. Donc, il y a aussi du travail qui se fait pour réduire nos consommations de diesel sur nos... dans nos mines.
La Présidente (Mme Doyer): M. Couture, et j'aviserais la ministre qu'il reste un peu moins de cinq minutes.
Mme Beauchamp: O.K.
M. Couture (Gilles): O.K. Rapidement, juste pour illustrer, peut-être pour appuyer le propos de mes collègues, là, c'est que je suis d'accord pour dire que la plupart des entreprises minières, la situation géographique est un peu unique pour chacune d'elles, mais, de façon générale, l'optimisation des coûts de transport, c'est fait jusqu'à un certain point parce qu'au départ, peut-être pas autant pour des raisons environnementales, soyons francs, les gaz à effet de serre, il y a 20 ans, 30 ans, c'était moins une préoccupation mais, de plus en plus, ça le devient, mais, en même temps, le coût d'achat des hydrocarbures est très grand.
Chez nous, on a, comme Jean-Claude le disait, on a 400 kilomètres de voie ferrée entre Fermont et Port-Cartier où on... par laquelle on fait transiter environ 14 millions de tonnes de concentré à toutes les années. Et un exemple de... on parlait de R&D tantôt, on a dû, pour optimiser nos choses, optimiser le profil du rail de notre voie ferrée en fonction du transport qu'on faisait. Le Conseil national des recherches nous a aidés là-dedans, et on a réussi jusqu'à un certain point à optimiser notre coût de transport ferroviaire de cette façon-là. Les locomotives qu'on a maintenant ont été achetées récemment. C'est des technologies récentes. C'est un peu pour vous dire que, quand on regarde ce qui s'est fait, d'aller chercher des tranches de 5 %, 10 % ou 20 % additionnelles à tout ce travail-là, c'est ce qui nous paraît très challengeant, si vous voulez.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la ministre, trois minutes.
Mme Beauchamp: Merci. Donc, dernière question. Je veux revenir sur les potentiels que vous décrivez dans votre mémoire de sources d'énergie plus propre et plus verte sur le territoire du Grand Nord qui pourraient être bénéfiques pour votre industrie. Je voudrais que vous les décriviez sommairement, mais surtout que vous nous parliez donc de quel est l'horizon de temps que vous voyez pour l'établissement de ces partenariats avec le secteur privé, le potentiel que ça confère, cette vision-là que vous avez de possibilité d'énergie plus verte et plus propre sur le territoire du Nord québécois.
Puis, s'il nous reste du temps, je voudrais aussi savoir si vous avez eu des discussions avec le gouvernement fédéral canadien par rapport à leur projet de fonds technologique et également avoir vos commentaires. Souvent, à partir d'ici, on a un peu l'impression que, lorsqu'il est question d'un fonds technologique, s'il doit exister un cadre réglementaire fédéral, qu'il est beaucoup question de projet de séquestration de carbone qu'on associe vraiment à l'industrie des sables bitumineux. Mais qu'en est-il de vos discussions avec le gouvernement fédéral par rapport au projet de fonds technologique?
Je finis en disant que vous savez que, dans notre actuel plan qui est sur une base volontaire, notre plan d'action sur les changements climatiques comprend un volet d'innovation technologique avec 135 millions consacrés à ce volet-là. Donc, on reconnaît l'importance, bien sûr, d'accompagner les secteurs industriels manufacturiers en recherche et développement. Mais voilà. Donc, les sources d'énergie verte et plus propre sur le territoire du Nord et le fonds technologique.
La Présidente (Mme Doyer): M. Belles-Isles, en deux minutes et demie.
M. Belles-Isles (Jean-Claude): Comme il reste seulement deux minutes, pour la question du fonds technologique, le gouvernement fédéral nous a dit qu'ils étaient... qu'ils prévoyaient un fonds technologique. On leur a demandé de reconnaître s'il y avait un fonds technologique au Québec. Ils nous ont dit: Si c'est possible, oui, on va le reconnaître. Alors, c'est à peu près l'information qu'on a du fédéral là-dessus.
Pour ce qui est de l'horizon de développement, c'est... il y a... On a nommé certains projets miniers qui devraient voir le jour d'ici 10 ans maximum, notamment dans le secteur des monts Otish. Je pourrais laisser M. Pagé peut-être ajouter dans le cas de la minière Raglan, mais, au sud de Raglan, il y a aussi une autre compagnie minière qui pourrait voir le jour d'ici 10 ans, c'est la compagnie Canadian Royalties, qui est une mine qui est aussi grosse que celle de mine Raglan.
La Présidente (Mme Doyer): M. Pagé, en quelques secondes.
M. Pagé (Joël): Oui. Le portfolio énergétique d'énergie alternative qui pourrait être... qui pourrait vraisemblablement venir à l'esprit de tout promoteur, ou de toute minière, ou de tout groupe qui voudrait voir déployer ce type de technologie verte là, on pense à l'éolien. Bon, le vent est résolument une ressource très abondante dans le Nunavik, dans l'Arctique. Donc, il y a un potentiel là à aller chercher.
On parle aussi de l'hydraulique à petit... de petits projets hydrauliques pourraient également... hydroélectriques, j'entends bien, pourraient également être intéressants à considérer pour des minières qui ont des besoins modestes comme 20MW, 30 MW. On pense, par exemple, le projet à Inukjuak dans le Nunavik, qui va bon train et qui devrait amener bon an, mal an son... 13MW à 15 MW par année.
On pense peut-être un couplage de ces deux technologies-là: l'éolien avec l'hydraulique. C'est encore des choses à considérer. Bref, tout ce qui peut permettre... On ne pourra pas totalement enlever le diesel, mais toute technologie qui va permettre à tout le moins de déplacer... permettre la minimisation de la consommation du diesel, qui peut aller jusqu'à un pourcentage intéressant, de l'ordre de 20 %, un réseau de notre grandeur pourrait absorber jusqu'à sans doute tout près de 20 % d'énergie verte.
La Présidente (Mme Doyer): Merci, messieurs. Nous allons passer au groupe formant l'opposition. M. le député de L'Assomption.
n(14 h 40)nM. McKay: Oui. Merci, Mme la Présidente. Bonjour, bon après-midi à vous. Bien, je voudrais aussi partager les... exprimer les meilleurs voeux de l'opposition officielle aussi par rapport aux événements tragiques qui se déroulent dans l'industrie. Je sais que c'est... Malheureusement, ça fait partie un peu du lot de l'industrie minière de temps à autre, mais on sait que vous faites des efforts considérables pour ne pas que ça se produise, mais, malheureusement, ça se produit. Alors, on va espérer que tout ça vire, tourne pour le mieux.
À mon tour, j'étais un peu... bien, enfin, pas vraiment surpris que vous vous surpreniez de l'ampleur des différentes cibles, là, qui étaient étudiées dans le... qui sont envisagées dans le document gouvernemental. C'est vrai que, lorsque... On voit bien que la modélisation montre que, le secteur qui aurait le plus important impact, c'est celui de l'extraction minière. Donc, c'est certain que l'industrie minière va voir ces données-là avec beaucoup de circonspection et nous appeler à la prudence.
Par contre, dans la loi n° 42, la réglementation, vous savez qu'au mois de juin on a voté à l'unanimité la loi qui va mettre en place le cadre législatif pour un système de plafonnement et d'échange au Québec dans le modèle, là, de la Western Climate Initiative, la WCI. Ces règles-là prévoient déjà différentes mesures pour protéger la compétitivité de certains secteurs qui sont particulièrement vulnérables d'un point de vue énergétique et au point de vue de la compétition.
Alors, moi, je voudrais que vous nous expliquiez votre réticence à ce que le gouvernement adopte une cible ambitieuse globale pour le Québec par rapport à la cible qui pourrait être différente, là, pour l'industrie minière. Parce que... j'imagine, vous êtes tous des gens qui oeuvrez dans le secteur de l'environnement, vous êtes conscients du fait que le consensus scientifique international pour éviter les pires conséquences des changements climatiques, pour éviter ce que personne d'entre nous, et certainement d'entre vous aussi, ne veulent pas qu'on assiste à un dérèglement du climat, et donc, lorsque les scientifiques nous disent qu'il faut réduire à un certain point, bien, on nous dit plutôt de moins 25 % à moins 40 %. Donc, déjà à moins 15 % et moins 20 % pour 2020, ce n'est pas nécessairement suffisant.
Alors... Donc, ma question, c'est: Est-ce que vous avez examiné justement les... Est-ce que votre message, c'est surtout que vous estimez que le secteur ou l'industrie minière n'a pas la capacité, compte tenu de tous les éléments que vous avez mis en lumière, d'atteindre cette cible-là pour 2020, mais que, par ailleurs, vous reconnaissez... vous pensez que les moyens qu'on a mis... qu'on propose, qui ont été proposés par le gouvernement pour moduler la hauteur de la cible selon les secteurs industriels et les mesures pour protéger la compétitivité, est-ce que c'est parce qu'elles ne sont pas suffisantes ou vous voudriez voir des améliorations? Ou est-ce que vous estimez que, pour l'ensemble de la société québécoise, là, 15 % et 20 %, c'est vraiment trop?
La Présidente (Mme Doyer): M. Belles-Isles.
M. Belles-Isles (Jean-Claude): Je pense que, dans notre mémoire, on reconnaît l'importance de réduire les émissions de gaz à effet de serre, je pense qu'on le dit clairement. Ceci dit, on a l'impression qu'on n'a pas l'information pour pouvoir se prononcer là-dessus. On pense qu'on le regarde peut-être du mauvais côté. Il faudrait peut-être savoir qu'est-ce qu'on est peut-être capables d'atteindre plutôt que de dire: Voici la cible, puis voici... En fait, on ne sait pas exactement les mécanismes qui vont être mis en place. Donc, c'est un peu ça qu'on dit, on dit: On n'a pas l'information, on considère qu'on n'a pas l'information pour se prononcer sur la cible qui est atteignable.
Mais soyons prudents, prenons en considération que nos coûts marginaux pour réduire sont plus élevés que dans les autres, et ce n'est pas parce qu'une province a pris une cible qu'il faut nécessairement montrer notre leadership en prenant la cible la plus contraignante. Je pense que, pour nous, le leadership en matière de changements climatiques, c'est un leadership d'action. On salue ce qu'a fait le gouvernement la semaine passée, en fait Hydro-Québec, en annonçant l'achat de Nouveau-Brunswick Power. On trouve que c'est ce genre d'initiative là, des initiatives en innovations technologiques, des initiatives en intégrant un plan stratégique de développement énergétique aussi dans le plan Nord, pour nous, c'est ça aussi, du leadership, c'est du leadership d'action. Et il faut être prudent avant de prendre une cible; si on n'est pas capable d'atteindre cette cible-là, je ne pense pas que ce soit non plus au bénéfice de... de nous tous.
La Présidente (Mme Doyer): M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Et il y a des gens qui nous ont mentionné, au cours des consultations, qu'ils préféraient que... préféreraient que la... que le gouvernement du Québec n'adopte pas de cible avant Copenhague de façon à attendre pour voir quels seront les résultats et les mécanismes. C'est l'approche que semble avoir retenue le gouvernement fédéral. Est-ce que c'est... c'est un peu ce que vous nous dites, là: On devrait attendre d'en savoir plus?
M. Belles-Isles (Jean-Claude): Essentiellement, ce qu'on dit, on dit: Il faut avoir le portrait complet des coûts et de ce qui peut être fait avant de pouvoir déterminer une cible. Comme on dit, on a l'impression qu'on le regarde peut-être du mauvais sens: on prend une cible parce que d'autres provinces ont déterminé une cible. Alors, oui, j'ai l'impression qu'il est peut-être prématuré ou l'exercice est peut-être précipité un peu.
La Présidente (Mme Doyer): M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Oui. Bien, en fait, vous savez que la conférence de Copenhague, il y a déjà eu plusieurs rencontres préparatoires. Et même le Canada a accepté le fait que les conférences... les discussions de Copenhague devaient mener à un objectif de... de limiter le réchauffement de la planète à un objectif de 2 oC. Et donc c'est ça, là, qui... c'est... Je pense que c'est de là que part la fixation d'une cible, donc on part de l'objectif de... on part de la réalité... en tout cas du consensus scientifique qui s'est établi jusqu'à maintenant.
Alors, il y a toujours... on trouve toujours quelques voix discordantes, mais, en gros, il y a un consensus, là, assez large sur cette question-là, et c'est... à ma compréhension, c'est de là dont on part. Et si on veut que les discussions à Copenhague aboutissent à l'objectif pour lequel la réunion a lieu au départ, bien, en quelque part il faut que... il faut qu'on arrive avec... avec des cibles puis, effectivement, mais on verra... il va falloir déployer peut-être un peu plus tard les façons d'y arriver.
Mais, moi, je me demandais... Aussi, la semaine dernière, parce que le gouvernement du Québec n'a pas jugé bon de... de retenir justement l'objectif, le consensus de la communauté scientifique internationale d'au moins 25 % de réduction et n'a pas modélisé le moins 25 %. Par contre, même à moins 20 %, il ne semble pas y avoir d'impact économique. On parle d'impact économique global, là, négatif à moins 20 %, en tout cas pas... Il y en a une... Lorsqu'on regarde les variations en pourcentage sur le PIB, il y en a un dans l'extraction minière, mais, au global, c'est neutre. Il y a certains secteurs qui bénéficient, donc il y a des gagnants et des perdants.
La semaine dernière, il y a... il y a une étude qui a été commanditée notamment par la Banque Toronto-Dominion, qui a été faite pour l'ensemble du Canada, et qui arrive à peu près aux mêmes conclusions, même avec un objectif de moins 25 %. Donc, même si le gouvernement du Québec n'a pas jugé bon de le faire, il y a d'autres gens qui s'en sont un peu chargés. Naturellement, c'est plus global, c'est pour l'ensemble du Canada, et on arrive aussi avec un objectif de moins 25 % à un impact global à peu près neutre, là. Par contre, on intègre des... on intègre et on accepte le principe qu'il pourrait y avoir une aide financière à certains secteurs manufacturiers pour prévenir toute baisse absolue de production. Et en fait on mentionne même, à la page 8 de ce petit document-là, que, «dans le cas de l'objectif de 2 oC, les secteurs des minéraux industriels et de la fusion des métaux bénéficient de cette aide».
Donc, je voudrais savoir: Est-ce que, premièrement, vous avez pris connaissance de cette étude-là? Est-ce que vous êtes... c'est une mesure de compensation qui vous semblerait soit juste ou efficace pour votre industrie, et on parle, là, dans le... en dollars de 2005, on parle quand même d'aide financière de l'ordre de 1,8 milliard de dollars?
n(14 h 50)nLa Présidente (Mme Doyer): Alors, M. Couture, et je crois que... bien, tous les trois veulent intervenir. Alors, M. Couture, ensuite M. Pagé, ensuite M. Belles-Isles et, comme Mme la députée de Rosemont m'a demandé, on va essayer de... que tout le monde puisse avoir le temps de s'exprimer et que Mme la députée de Rosemont puisse poser une question. Il reste environ neuf minutes.
M. Couture (Gilles): D'accord. Je pourrais peut-être amener un exemple en même temps qui référait à votre première question, M. McKay, mais je pense que c'est dans la même ligne de pensée que votre deuxième intervention.
Je disais tantôt que, chez nous, on a des données qui nous indiquent qu'on est les... ou, en tout cas, parmi les meilleurs parce que ces choses-là sont dynamiques, là, les compétiteurs eux autres aussi ne sont pas immobiles dans notre monde, mais on est parmi les meilleurs en termes d'émissions de CO2 par tonne de produits qu'on génère à l'usine.
Vous savez, je vais juste vous ramener en 2002. En 2002, on a trois ministres du gouvernement libéral qui sont venus chez nous faire une opération sauvetage: le ministre Hamad, Audet et Béchard qui étaient venus chez nous. Ils avaient injecté 20 millions de dollars pour nous aider à passer à travers une crise très, très intense chez nous. Et une des choses qui avait ressorti de la conférence qu'ils avaient faite, c'était qu'ils reconnaissaient l'excellence opérationnelle de plusieurs de nos aspects. Je ne dis pas qu'on était parfait partout, mais ils reconnaissaient ça. Ils ont investi 20 millions. On en a peu parlé, mais, quelques années plus tard, je pense que le gouvernement a récupéré quelque chose comme 140 millions de cette aventure-là. Donc, ce n'est pas toujours négatif, ce genre d'intervention là, et ça a été bien.
Mais, le point que je veux faire ici, c'est qu'on reconnaissait un certain niveau d'excellence dans nos opérations. Vous parliez tantôt des résultats du GIEC, puis, Jean-Claude le disait, on y croit, à la réalité du phénomène de changement climatique. Je pense qu'aujourd'hui le consensus est quasi complet. Mais imaginez que cette opération-là qu'on a ici n'existerait plus aujourd'hui considérant le besoin du marché en minerai de fer, qu'est-ce qui se passerait? Ça veut dire qu'il y aurait une mine ailleurs dans le monde, une usine de bouletage qui se créerait pour pallier la production qu'on ne fait pas avec possiblement des taux d'émissions plus élevés que ce qu'on fait ici. Alors, est-ce que la planète est mieux servie de cette façon-là? C'est une façon de le voir que je vous soumets là tout simplement, qui fait partie de nos préoccupations aussi.
La Présidente (Mme Doyer): M. Pagé, ensuite M. Belles-Isles.
M. Pagé (Joël): Et oui, en complément du préambule fort intéressant que vous avez amené à la connaissance de la commission, oui. Je pense que l'AMQ et un de ses membres, en l'occurrence Xstratra Nickel, mine Raglan, vit vraiment les soubresauts du changement climatique. C'est par le biais du bulletin de nouvelles, mais c'est bel et bien par l'expérimentation du terrain, par le savoir des Inuits puis par le fait que nous sommes en opération là depuis 15 ans. Et oui, effectivement, le gel de l'eau plus tardif en hiver, des hivers plus doux, un printemps plus précoce, des phénomènes de fonte accélérée générant des avalanches parfois, des sorties de lit de rivières. C'est des phénomènes qui surviennent aujourd'hui pendant que je vous parle, au Québec.
Donc, l'industrie minière se place ici un peu à nu, mais également se place également... veut se positionner comme un leader dans le domaine. Et on me pose la question: Est-ce qu'on peut faire 20 %? Je peux vous dire, structurellement et énergétiquement comme nous le sommes actuellement, nous aurions une difficulté systémique à rencontrer une telle cible, à moins qu'il y ait une innovation technologique, à moins qu'il y ait des argents neufs injectés pour amener vraiment une énergie complémentaire au portfolio unique dont on dispose dans le Nord et dans l'Arctique québécois. Et, par ce fait-là, du partenariat qui permettrait de diversifier le portfolio énergétique constituerait vraiment une vision et une stratégie d'action par lequel on inviterait le gouvernement à s'investir en partenaire avec l'industrie minière, en partenariat peut-être moins, mais avec les gouvernements territoriaux, les villages, les communautés autochtones également qui tireraient un gain sociétal et de compétences intéressantes pour le bénéfice de tous les acteurs du territoire.
La Présidente (Mme Doyer): M. Belles-Isles.
M. Belles-Isles (Jean-Claude): Oui. Bien, pour conclure, nous, nous saluons l'approche du gouvernement de vouloir être un leader dans la lutte aux changements climatiques. C'est très clair. Ce qu'on dit, c'est: Soyez prudents, soyez prudents parce que évaluons comme il le faut les impacts des cibles qu'on va se donner, et n'oublions pas qu'après 2020 nous allons devoir atteindre des objectifs encore plus contraignants que ceux qu'on est en train de se fixer, et commençons dès à présent à bâtir pour le post-2020 parce que, 2020, c'est dans 10 ans.
La Présidente (Mme Doyer): Merci. Je demanderais le consentement des membres de la commission pour que Mme la députée de Rosemont puisse poser une question.
Mme Beauchamp: C'est une visite?
La Présidente (Mme Doyer): Il reste encore du temps
Mme Beauchamp: Ah, c'est parce qu'elle n'est pas membre de la commission?
La Présidente (Mme Doyer): Elle n'est pas membre de la commission, voilà.
Mme Beauchamp: Je viens de comprendre.
La Présidente (Mme Doyer): Consentement? Merci. Mme la députée de Rosemont.
Mme Beaudoin (Rosemont): Oui, merci, Mme la Présidente. Merci aux membres de la commission de me permettre de poser une question.
Mais justement, depuis le début des audiences de cette commission, souvent est revenu un argument que vous avez employé tout à l'heure concernant Copenhague et concernant les cibles, donc, à atteindre et le fait que, oui ou non, le Québec doit s'en donner une avant la rencontre de Copenhague. Vous avez dit, je pense, tout à l'heure que c'était prématuré, peut-être précipité. Là, vous avez dit il y a deux minutes qu'en tout cas il fallait être extrêmement prudent.
Mais, moi, je me demande à ce moment-là, comment vous voyez la conférence de Copenhague si chacun attend l'autre, si je peux dire? Parce que, là, on attend quoi? Chacun se dit: Bon, bien, moi, il faut que je sois prudent, donc je ne peux pas évaluer la cible qui serait réalisable, compte tenu du contexte local, national, international. Mais, comme le dit le député de L'Assomption, il me semble avec beaucoup de raison, déjà il y a eu acceptation par la communauté internationale qu'il ne fallait pas qu'il y ait une augmentation, donc, de plus de 2 oC, et en découlent des conséquences de cette acceptation par la communauté internationale qui doit, à Copenhague en principe, prendre des décisions.
Mais, si je vous entends bien, dans votre perspective, ça ne sera pas le moment de prendre des décisions à Copenhague. Alors, ce serait quoi, à ce moment-là? Une grande messe pour s'expliquer les uns les autres, et puis qu'on s'informe mutuellement, qu'on échange quelque chose, mais qu'on ne prenne pas de décision puisque vous avez l'air de dire qu'on n'est pas prêts, en tout cas, ici au Québec, et j'imagine, donc, au Canada et ailleurs, à prendre une décision concernant une cible à atteindre, une vraie cible à atteindre, contraignante, avec des conséquences.
La Présidente (Mme Doyer): M. Belles-Isles.
M. Belles-Isles (Jean-Claude): Ce qu'on dit, c'est: Soyez prudents dans l'établissement. Ne prenez pas une cible qu'on ne sera pas capables d'atteindre. Allez-y par étapes si vous voulez. Mais on ne dit pas de ne pas établir de cible. On dit: Soyez prudents. Est-ce que vous avez toute l'information pour le faire? Peut-être que vous avez de l'information que, nous, nous n'avons pas. Mais, sur la base des informations qu'on a vues ici, pour nous, on a de la difficulté à appuyer, et ce qu'on dit dans notre mémoire, c'est qu'on ne se sent pas capables d'appuyer une cible contraignante sur la base des informations qu'on a ici. Si vous l'avez, l'information, nous, on ne l'a pas.
M. Couture (Gilles): Juste pour rajouter...
La Présidente (Mme Doyer): Oui M. Couture.
M. Couture (Gilles): Bien, simplement dire que, parce que je... on est, comme l'usine de bouletage, dans le dossier depuis un certain temps. On a eu des discussions pendant à peu près cinq années avec le gouvernement fédéral, échanges techniques de toutes sortes, pour essayer de mieux comprendre notre situation, etc. Au provincial avec la WCI, on a eu deux rencontres, une courte visite de nos installations, et, comme Jean-Claude dit: On ne connaît pas tout le contexte, là, stratégique ou politique, mais on a échangé énormément d'information avec un gouvernement qui se dit pas prêt à établir un objectif à Copenhague, et à peine deux rencontres avec un autre gouvernement qui, lui, va mettre un chiffre sur la table. On... Ça ne nous rassure pas. Je veux dire, en termes de prudence ou d'impacts possibles, là, c'est un peu ça qu'on... On parle au nom de l'industrie minière ici; on ne peut pas parler au nom de toute la société non plus.
Mme Beaudoin (Rosemont): Excusez...
La Présidente (Mme Doyer): Oui, et je vais donner la parole à Mme la député de Rosemont, et ensuite on va revenir à ces...
Mme Beaudoin (Rosemont): C'est peut-être le gouvernement canadien qui n'est pas rassurant, justement, après cinq ans de discussion, de ne pas être capable de conclure à un moment donné. Il est peut-être trop prudent dans son cas, puis peut-être qu'il ne veut pas, il y a peut-être un manque de volonté.
Ça ne vous a pas semblé être le cas, peut-être, mais disons que, vu de loin, là, puis avec ce qu'on peut savoir justement, d'ici, en regardant Ottawa, c'est la conclusion qu'on peut tirer.
M. Couture (Gilles): Très difficile de se prononcer à ce niveau-là.
La Présidente (Mme Doyer): On ne vous demandera pas d'avoir des opinions politiques si vous ne voulez pas en avoir, mais... Oui, M. Belles-Isles.
n(15 heures)nM. Belles-Isles (Jean-Claude): Permettez de compléter. Dans le fond, si on regarde un petit peu toute la tarte des sources d'émissions qu'on a, quand on regarde au niveau des transports, on a augmenté de 22 % depuis 1990, et là, on se dit: Bien, il faudrait atteindre 20 % de moins. C'est un immense défi, à notre sens. Je ne suis pas un expert dans le domaine des transports, mais ça me semble un défi énorme. Et ça, ça représente 40 % de la tarte des émissions au Québec. 30 %, c'est le secteur industriel, et ce que j'entends depuis le début de la commission, c'est qu'on ne sera pas capable de livrer... À court terme, on ne sera pas capable de livrer des réductions importantes. Alors, je me dis: 70 % de la tarte, est-ce que c'est vraiment compressible? Est-ce qu'on a vraiment possibilité de réduire de façon substantielle? Et c'est pour ça qu'on dit: Soyez prudents. Oui, on a une étude qui nous dit: Oui, il n'y a pas beaucoup... il n'y aura pas beaucoup d'impacts, mais j'ai... personnellement, j'ai des doutes un petit peu sur la capacité, une faisabilité de ça dans 10 ans, parce que 10 ans, encore une fois, 2020, c'est maintenant, là, c'est demain matin.
La Présidente (Mme Doyer): M. le député de L'Assomption, il vous reste un peu moins de quatre minutes.
M. McKay: Oui. Bien, en fait, en ce qui concerne l'information, je pense qu'effectivement c'était un peu notre lecture aussi, puis on... il y a suffisamment de gens qui sont venus, lors de nos travaux, nous dire qu'ils apprécieraient avoir davantage d'informations. Donc, c'est probablement... Je pense qu'à ce moment-ci c'est presque... on pourrait presque anticiper les conclusions de nos travaux, ce qui... Bon, après ça, on peut discuter: Bon, bien, est-ce qu'on peut quand même prendre une... établir un objectif à la hauteur de ce que la science nous commande et trouver les façons par la suite, là? Mais enfin... Donc, il y a cette partie-là qui demeure... je pense, qui peut faire l'objet d'encore de pas mal de discussions. Est-ce que c'est suffisant pour justifier le fait qu'on ne prendrait pas de... qu'on ne fixerait pas de cible à ce moment-ci? Mais je pense qu'il y a une chose qui est évidente, c'est qu'il va falloir continuer à travailler.
Et comme vous le mentionnez... Puis ça, je pense, c'est un autre... un autre constat que, nous, on fait, en tout cas de ce côté-ci de la table, c'est qu'il n'y a pas eu suffisamment de travail préparatoire avec les différents secteurs industriels, à la base, et on espère que le gouvernement va se rattraper, qu'on va mettre rapidement en place des tables sectorielles qui vont pouvoir se pencher sur... établir, là, c'est quoi, les potentiels technicoéconomiques dans les différents secteurs et demander quelles sont les mesures de soutien qui seront nécessaires pour mettre en place ces mesures-là. Donc, j'ose espérer que c'est une... c'est une première rencontre, c'est un début de processus et non... et non un aboutissement.
Et je vous dirais aussi... C'est un petit peu comme... Vous avez mentionné tout à l'heure des choses qui pourraient se retrouver dans le plan Nord. Bien, vous, vous disiez que vous n'aviez pas beaucoup d'informations et que, si on en a, on pourrait les partager. Vous, si vous l'avez vu, le plan Nord, vous pourrez nous le dire, parce que, nous, on ne l'a pas trouvé encore. Mais, sans blague, je pense que c'est un processus... on a compris à ce moment-ci qu'on parle d'une démarche, d'un processus, donc, qui va être évolutif, et donc vous pouvez être assurés que, je pense... Enfin, on peut parler seulement pour notre groupe, mais je pense que c'est évident que l'ensemble des parlementaires vont être très ouverts à continuer à travailler avec les représentants de votre secteur.
Et, en passant, je sais... Je ne sais pas pour M. Couture, mais M. Pagé, en ce qui concerne la mine Raglan, je peux vous transmettre les salutations du député d'Ungava qui me parle régulièrement, là, du modèle que représente votre mine, non seulement au niveau de vos opérations, mais aussi vos relations avec les communautés des premières nations avec lesquelles vous travaillez.
La Présidente (Mme Doyer): En 30 secondes, pour conclure.
Des voix: ...
M. McKay: Bien, le député d'Ungava est solidaire de... oui, de son caucus, et on parle d'objectifs de moins 25 %, avec... en mettant de l'avant... Parce que c'est ce qu'il faut faire, et on a tout ici, au Québec, pour le faire, incluant des mesures de soutien aux industries qui seront affectées plus négativement.
La Présidente (Mme Doyer): M. Belles-Isles, pour conclure, en à peine quelques secondes, il ne reste plus de temps.
M. Belles-Isles (Jean-Claude): En quelques secondes. J'ai entendu des choses qui me réjouissent, j'ai entendu que... Je pense que vous avez compris le message, que, nous, on est ouverts à aller vers des solutions à long terme, que c'est difficile actuellement, compte tenu de ce qu'on a déjà fait. J'ai entendu que vous êtes ouverts aussi et que vous suggérez ce qu'on suggère aussi, que les discussions se poursuivent avec le gouvernement pour trouver des solutions, pour comprendre les cibles qui devraient être fixées. Et ça, pour moi, c'est de la musique à nos oreilles, c'est vers ça... on veut s'en aller vers des pistes de solution, on veut s'en aller vers du partenariat. On est là, on est... on est là pour être vos partenaires dans cette lutte-là.
La Présidente (Mme Doyer): M. Belles-Isles, M. Pagé, M. Couture, je vous remercie...
Une voix: ...
La Présidente (Mme Doyer): Oui? Je vous remercie de votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends quelques minutes en attendant que le prochain groupe s'installe.
(Suspension de la séance à 15 h 5)
(Reprise à 15 h 10)
La Présidente (Mme Doyer): Alors, messieurs, bonjour. On a pris un petit peu de retard. Vous avez frappé un chevreuil sur la 20?
Une voix: ...
La Présidente (Mme Doyer): Ils se sauvent de la chasse. Alors, MM. Théorêt, Lefebvre et Rajaonson, du Groupe de recherche appliquée en macroécologie, bienvenue en commission. Et je vous donne la parole pour 10 minutes.
Groupe de recherche appliquée
en macroécologie (GRAME)
M. Théorêt (Jonathan): Merci beaucoup. Alors, tout d'abord, je voulais vous remercier de nous entendre, messieurs dames. C'est un privilège et un honneur d'être avec vous aujourd'hui pour vous présenter les différentes conclusions auxquelles on est arrivés, le Groupe de recherche appliquée en macroécologie, le GRAME.
Alors, tout d'abord, je vais vous présenter, là, mes collègues: donc, Juste Rajaonson, analyste au GRAME, qui est avec nous depuis quelques années; et Jean-François Lefebvre, économiste, qui est avec le GRAME depuis 1989, depuis la création; et moi-même, Jonathan Théorêt, directeur intérimaire du GRAME.
Donc, sans plus tarder, en fait, le GRAME est un organisme non gouvernemental à but non lucratif, un groupe de recherche indépendant. Et donc on va vous présenter sommairement, là, les conclusions auxquelles on va arriver. Je laisse immédiatement la parole à Juste Rajaonson, sur ce.
La Présidente (Mme Doyer): M. Rajaonson.
M. Rajaonson (Juste): Merci, Mme la Présidente. L'adoption d'une cible cohérente et réaliste de réduction de gaz à effet de... des émissions de gaz à effet de serre impliquerait des efforts soutenus de réduction dans tous les secteurs et serait clairement incompatible avec la poursuite des émissions observées dans le secteur des transports.
Alors, notre analyse s'est portée, bien entendu, sur le document de présentation. Nous avons évoqué 20 arguments qui répondent à deux questions que nous nous sommes posées. Parmi ces questions: Y a-t-il des éléments à considérer, susceptibles de modifier l'analyse coût-bénéfice des niveaux de réduction des émissions? Deuxième point: Y a-t-il des stratégies sous-estimées qui permettraient d'obtenir des réductions d'émissions additionnelles? Alors, nous ne passerons pas à travers les 20 arguments que nous avons évoqués dans notre mémoire. Par contre, nous attirons votre attention sur deux contextes essentiels.
Le premier est de nature environnementale, en lien avec les changements climatiques. Le Groupe intergouvernemental d'experts sur le climat avait suggéré des objectifs de réduction de 25 % à 40 % d'ici 2020 pour les pays développés, objectif requis, selon eux, pour limiter la vitesse du réchauffement au seuil de 2 degrés, qu'ils jugent acceptable.
Le deuxième contexte dans lequel s'inscrit notre mémoire est celui de l'épuisement du pétrole, que l'Agence internationale de l'énergie qualifie de fin du pétrole à bon marché, et que, selon nous, le scénario cours normal des affaires, qui a été présenté dans le document de présentation, serait inapproprié, avec l'hypothèse de 60 $, le prix du baril, en 2015. Selon nous, il serait fondamental que les scénarios de référence soient basés sur des hypothèses de plus de 200 $ le baril à l'horizon 2020 et que ce serait un scénario qui devrait être envisagé sérieusement.
M. Théorêt (Jonathan): Pour renchérir un peu sur ce que Juste vient de mentionner...
La Présidente (Mme Doyer): ...
M. Théorêt (Jonathan): Exactement.
La Présidente (Mme Doyer): Allez-y.
M. Théorêt (Jonathan): Donc, c'est... il est stratégique pour le Québec, qui est un exportateur... un importateur, pardon, de pétrole, de se positionner dans une optique d'indépendance énergétique, de faire en sorte que la fuite des capitaux qui est générée par cet achat massif de pétrole ne vienne pas grever, là, les capacités économiques du Québec pour les années à venir. Je laisse la parole maintenant à Jean-François Lefebvre pour...
La Présidente (Mme Doyer): M. Lefebvre.
M. Lefebvre (Jean-François): Oui, merci. Si... En fait, je vais faire référence au tableau qu'on a mis à la page 24, à l'annexe 2. On a évalué, en fait, différents scénarios, et ce qu'on constate, c'est que tout scénario avec un prix... un cours normal des affaires, donc scénario B ou C, où on met le cours normal des affaires à 160 $ ou 200 $, on se retrouve à avoir un impact négatif sur la balance commerciale, sur les recettes fiscales et sur les revenus disponibles des ménages, qui est très, très important. Donc, on parle jusqu'à 20 milliards de moins, par exemple, sur la balance commerciale à 200 $. Et ça, c'est un... donc un scénario cours normal des affaires.
Et, dans ce cas-là, on a fait des analyses de sensibilité, puis on a dit: Bon, qu'est-ce qui arriverait si effectivement on réussit à réduire? Et là on a pris deux variables, c'est-à-dire la consommation de pétrole et les dépenses automobiles. Donc, c'est un modèle quand même simplifié, mais, avec ces deux variables-là, on peut voir que, si on réduit les dépenses auto et pétrole, on peut réussir à avoir un impact qui devient positif sur la balance commerciale, dans ce cas-ci avec un scénario, par exemple, de 25 % moins de pétrole. Bon. Par contre, ça, c'est à l'hypothèse de 120 $ le baril. En d'autres termes, un des enjeux majeurs est de se dire que, même si le Québec à lui tout seul n'a pas d'impact sur les cours mondiaux du pétrole, si on a un scénario qui fait en sorte qu'à Copenhague ou quelques mois après il y avait effectivement une entente internationale qui fonctionnait et si les pays industrialisés réduisent donc significativement les gaz à effet de serre, ce serait suffisant pour faire une différence, au niveau... pour le Québec également, mais pour l'ensemble des pays, sur quel serait le cours du pétrole qui serait subi à ce moment-là. Et l'impact est énorme, dans le sens qu'on passe à ce moment-là d'un scénario... Même si on regarde le scénario D à 160 $ le baril, même si on réduit de 25 % notre consommation de pétrole, on a encore un impact négatif sur la balance commerciale.
Qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire que c'est moins de sous pour les... En fait, c'est comme la même situation qu'on a vécue en pleine récession, où le gouvernement a dû injecter des sous, mais dans un contexte que cette récession-là n'a pas de fin parce que la cause devient structurelle, alors que, là, la récession elle-même a entraîné une baisse, donc, du prix du pétrole.
Je vais arriver à quelques-uns des différents enjeux qu'on disait au niveau des solutions. Bon, on n'a pas, évidemment... on n'avait pas les outils puis l'ensemble des variables, ni le temps, ni les budgets pour refaire des simulations qui avaient été faites par le ministère, donc ce n'était pas notre but, mais c'était de regarder: Est-ce qu'il y a certains outils ou certains éléments qui n'ont pas été pris en considération?
Et notamment on mentionnerait le fait, au point 5, bon, rapidement, comme quoi qu'il y a des gains économiques à faire pour les contribuables, pour les citoyens, à partir du moment qu'on réduit la dépendance à l'automobile ? ça, j'y vais rapidement ? ensuite sur le fait qu'il y a... puis ça, on le mentionne notamment à partir du point 8, à la page 12, le fait de pouvoir jouer sur la fiscalité permettrait d'aller chercher des gains additionnels sans coût et même avec des bénéfices.
Notamment, au point 8, on parle notamment d'un transfert de la fiscalité automobile, dans ce cas-ci. On mentionne l'exemple des Pays-Bas qui viennent d'adopter la taxe kilométrique. Il y a 60 000 voitures en essai, et, à partir de 2012, ça va être implanté à l'ensemble du pays. Qu'est-ce que c'est? C'est: on abolit les frais d'immatriculation et on remplace par une taxe sur le kilométrage parcouru, qui va varier selon l'efficacité des véhicules. Donc, on vient d'aller avec... Juste un transfert, à ce moment-là, en lui-même, réussit à amener une réduction additionnelle.
Ensuite, bon, point 9, on dit qu'au niveau du marché automobile il y a des gains à aller chercher avec de tels incitatifs.
Mais, pour terminer, je vais vous... En fait, je vais vous amener au point 10, page 14. Il y a tout le concept de réforme écologique de la fiscalité, qui va encore un cran plus loin, donc ne pas seulement transférer de la taxation des automobilistes de la possession vers l'utilisation, mais faire des déplacements de la fiscalité, donc, vers des... en fait, des taxes qui actuellement sont plus sur le travail, sont plus sur l'investissement et les déplacer vers, bon, par exemple, l'achat de véhicules très énergivores, etc. O.K.? C'est dans cette optique-là d'ailleurs que le gouvernement Sarkozy vient d'adopter... est en processus d'adopter sa taxe carbone, donc, où l'argent est remis aux citoyens. Donc, on taxe et on remet aux citoyens. Donc, ce serait dans cette optique-là. Et donc cet élément-là nous semble fondamental. Ensuite, peut-être...
La Présidente (Mme Doyer): En conclusion, M. Lefebvre.
M. Lefebvre (Jean-François): En conclusion, il y a également quelques outils réglementaires et autres qui peuvent être mentionnés. Donc, au niveau de l'efficacité des véhicules, on peut faire beaucoup mieux, ce qu'on souligne au point 12, à la page 16.
Et ensuite, à la page 7, pour conclure, il y a certains moyens qui permettent... en fait, qui atteignent des seuils critiques. On en mentionne deux ici, en exemple: le vélo et l'autopartage. Donc, à partir du moment qu'on atteint un certain seuil critique, on a des gains quand même substantiels, là, qui peuvent... qu'on peut aller chercher. Il y a certains éléments comme ça qui ont fait partie de l'analyse du MDDEP mais certains autres, au niveau notamment de fiscalité, qui n'en font pas, ce qui nous fait dire qu'on peut aller chercher des gains additionnels et ce qui nous fait conclure qu'on devrait réduire de 20 % au moins les émissions à l'horizon 2020. Merci.
n(15 h 20)nLa Présidente (Mme Doyer): Merci, messieurs. Je vais donner la parole à Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bienvenue à vous trois. Très heureux de vous accueillir et... puis vous êtes pardonnés pour les quelques minutes qui nous ont permis de loger un appel ou deux en ces lendemains d'élections municipales. Donc, bienvenue.
Je vais tout de suite vous annoncer que je vais vouloir, avec vous, prendre le temps d'explorer ce que vous qualifiez, là, de régime fiscal écologique et en examiner différents aspects.
Peut-être, ma toute première... Peut-être, la première des choses que je veux indiquer, c'est que vous avez, dans la modélisation, vous avez les principes de base de ce que vous proposez. Ce que je veux dire par là, c'est que, dans la modélisation, ce qu'on a prévu, c'est un marché du carbone qui fixe donc des plafonds et qui entraîne une rentrée monétaire au gouvernement, puisque les industries doivent acheter un certain pourcentage de leurs droits d'émission dans un tel régime, plus ce qui est annoncé dans le document, la notion de l'augmentation de la redevance sur la distribution d'hydrocarbures. Et, comme vous voyez ensuite dans les autres séquences, il y a donc un impact que je vais appeler fiscal, et, dans la séquence ensuite de la modélisation, ce qu'on parle, c'est un retour d'argent en soutien à l'économie québécoise, qui peut prendre différentes formes. Mais bien sûr la forme la plus connue, vous y avez fait vous-mêmes allusion, c'est, par exemple, l'implantation d'un chèque vert par... sur le territoire français, l'initiative du président Sarkozy ou encore le modèle ici, plus près de nous, de la Colombie-Britannique, alors que nous, une partie de la redevance, au moment où on se parle, la redevance que l'on prend est remise en totalité dans des initiatives de soutien gouvernementales, notamment...
Comme vous le savez, là, les deux tiers de la redevance, le 200 millions de dollars par année va en soutien au transport, notamment au transport collectif, là, sur le territoire québécois, puis ça s'additionne aux efforts du ministère du Transport. Je voulais juste qu'on se mette d'accord en disant: Oui, il y a ici des bases. Et vous dites: On pourrait aller plus loin, mais je voulais juste vous souligner que les bases sont telles que, quand on va voir, par exemple, le revenu disponible réel dans la modélisation, on voit que les scénarios deviennent même positifs lorsqu'on est à moins 20 %, ce qui s'explique par le fait que ça fait plus d'argent collecté mais retourné sous avantages fiscaux, par exemple, vers les ménages... les ménages québécois. Mais plus fondamentalement que... La première question de toutes, si on veut parler d'un régime fiscal écologique, c'est carrément la notion qu'il y ait un prix sur le carbone. Et je veux juste, pour poser la question, parce que mes collègues d'en face, que je respecte beaucoup... Mais eux ont dit: C'est moins 25 %, puis ils ont dit: Ce n'est pas nécessaire que ça se reflète sur le prix à la pompe. La leader de l'opposition a dit ça. Moi, je ne vois pas de modèle, à travers le monde, où on a dit que ça pouvait être ça, mais peut-être que, vous, vous pouvez me répondre autrement. Je trouve que votre mémoire semble vraiment basé sur la notion de: ça prend un régime et de taxes et un régime fiscal pour atteindre des cibles ambitieuses.
Donc, est-ce que, pour vous, il y a d'autres façons de l'atteindre, ou si vous dites: Oui, le fait que ça se reflète sur le prix du carbone et notamment... À un moment donné, il faut parler du prix à la pompe, là, il faut dire: Bien, ça fait partie d'un régime que vous appelez le régime fiscal écologique.
La Présidente (Mme Doyer): M. Théorêt ou M. Lefebvre. M. Lefebvre.
M. Lefebvre (Jean-François): Oui, merci. La première chose, à votre remarque, permettez-moi juste de dire: Au point 7, donc à la page 12, on souligne qu'on appuie totalement la démarche du document du MDDEP, qui était d'appuyer par une taxe verte le fondement, là, du projet, de la stratégie. Bon. C'est bien indiqué comme quoi qu'il y a des éléments de réforme fiscale. Par contre, tout ce qu'on indiquait, au fond, c'est que les hypothèses et jusqu'où on va... Parce qu'il y a deux niveaux: il y a une taxe dédiée et taxe qui sert à une réforme fiscale écologique. C'est deux types d'intervention. Il y a une ouverture dans votre document, mais, dans votre document, on ne pouvait pas quantifier la portion qui servait à une réforme écologique de la fiscalité. Bon.
Ce qu'on mentionne, si on regarde la page 14 et page 15, donc, de notre mémoire, on voit à la page 14 les effets des réformes fiscales écologiques sur l'emploi pour plusieurs pays européens, et on voit donc sur le PIB également, à la page 15, et sur les gaz à effet de serre. Donc, on voit des impacts positifs pour l'emploi, positifs pour le PIB et très, très efficaces pour la réduction de gaz à effet de serre.
Et à votre question: Est-ce qu'on voit une stratégie pour atteindre un objectif de moins 20 % ou moins 25 % sans utiliser un prix carbone?, la réponse est non. Les pays européens qui ont réussi ont tous utilisé un prix pour le carbone. Et les objections... En fait, ça nous ramène à la fin, quand on vous parle qu'une des grandes problématiques est de surmonter les objections sociales. À ce moment-là, l'enjeu est de reconnaître que, pour l'efficacité des mesures, il faut un prix pour le carbone. Par contre, si l'objectif est de voir à s'assurer à ce que les ménages à faibles revenus, par exemple, ne soient pas négativement affectés, à ce qu'il y ait un impact positif pour l'économie, à ce moment-là, c'est là que c'est intéressant de regarder... C'est pour ça qu'on a mis, par exemple, le fait... les études qui montrent que, si on rend les gens moins dépendants, par exemple, de l'automobile... bon, c'est une étude américaine qu'on cite, mais on se retrouve à passer de 25 % de l'argent des ménages qui sert pour le transport à 9 %. Donc, c'est un gain, une réduction. Ensuite... Donc, c'est tout des moyens pour faire en sorte qu'on réduise l'impact à ce moment-là qui est social.
Mais la réponse est clairement non, il n'y a pas d'autre moyen. Il y a des mesures complémentaires, attention, ce n'est pas la seule mesure. On indique d'ailleurs qu'il y en a d'autres, réglementaires... qui sont complémentaires, mais, si on ne fait pas l'outil pour avoir un prix, c'est sûr que, là, ça va coûter très cher et être quasi impossible.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Je vous remercie pour la clarté de votre réponse. Vous-même, vous m'avez amenée à la page 14 de votre mémoire, puis je veux... je veux vous entendre un peu plus sur une ligne qui, moi, m'a fait sursauter, mais il faut que je prenne le temps de vous écouter. C'est le paragraphe... le numéro 10. Vous dites donc: On pourrait aller plus loin ? je vais dire ça ainsi, là ? que... par rapport à un régime fiscal écologique, là, qui pourrait mettre toutes les mesures en place pour diminuer la dépendance aux hydrocarbures, au carbone, au Québec. Mais vous dites donc que ça «permettrait de réduire le fardeau fiscal des contribuables, les charges fiscales»... «sociales ? pardon ? des entreprises», puis vous dites: «Une partie pourrait aussi servir à financer la survie du régime de retraite québécois...» Vous donnez l'exemple de l'Allemagne.
Pourquoi je vous dis que j'ai sursauté? Parce que... Et c'est là que je veux vous entendre, c'est que... Jusqu'où va, pour vous, la logique, là, je dirais, qui sous-tend la notion d'«on doit imposer une taxe», que vous appelez la «taxe verte», donc un ensemble de régimes... un régime fiscal qui pénalise l'utilisation d'hydrocarbures et de carbone? Mais jusqu'à quel point, pour vous, ça peut servir à financer, je vais dire ça comme ça, mais des missions de l'État? Parce qu'autant vous dites que, nous, on était... qu'on vous a laissés sur votre appétit quant à la proportion qui sert à utiliser... à financer les... par exemple, le transport en commun, les initiatives de recherche et développement, et on dit aussi: Il y a un retour d'argent dans l'économie québécoise qui, sous-entendu, veut dire le retour en termes fiscal, vous, vous ouvrez la porte à ce que le régime fiscal écologique que vous proposez puisse servir à financer ce que, moi, je vais appeler certaines missions de l'État. Certains vont pouvoir vous dire: Bien, d'abord, on s'en va vers un déficit... on a un déficit assez important; est-ce que, pour vous, la taxe verte pourrait servir à financer, sur certains principes, le régime de santé, d'éducation?
Je veux vous entendre parce que vous avez comme ouvert là une porte, et je me demande sur quels principes la taxe verte peut servir à financer un régime de retraite. Et est-ce que vous seriez d'accord pour que ça finance aussi le régime de santé au Québec, le régime d'éducation? Est-ce qu'on se rapproche ou on s'éloigne des principes qui, selon vous, doivent sous-tendre ce que vous appelez le «grand régime fiscal écologique»?
La Présidente (Mme Doyer): M. Lefebvre.
n(15 h 30)nM. Lefebvre (Jean-François): Bon, d'abord, la réponse... je vais répondre oui, dans le sens que toutes ces réponses sont possibles, O.K.? Je vais quand même donner un exemple très concret en parlant de ce qui s'est fait en Allemagne. Il y a eu une hausse de plus que 50 % des prix de l'énergie, suite, en fait, à la coalition entre les verts et les sociaux-démocrates, et 88 % des recettes additionnelles ont servi à financer la sauvegarde du régime de pension, dans ce cas-là ? je vous donne un exemple.
Par contre, vous avez d'autres exemples où... Par exemple, le péage à Londres et celui à Stockholm sont entièrement dédiés à financer le transport public. Donc, il n'y a pas une recette unique. Donc, il y a eu en fait un débat et une problématique en Allemagne, et leur conclusion, c'est-à-dire: Si on augmente les charges sociales encore des entreprises, on vient de plomber la chance de croissance économique; allons à ce moment-là vers une taxe verte. Dans ce cas-là, ça a été une réforme spécifique pour un cas spécifique.
Considérant que l'État québécois doit faire face à plusieurs défis, probablement que la logique va être multiple, c'est-à-dire d'avoir une partie des fonds qui sont vraiment dédiés à fournir les alternatives. Parce que pénaliser l'usage du carbone, par exemple, s'il n'y a pas d'investissement suffisant dans les transports collectifs, si on n'offre pas d'alternative, effectivement c'est un problème, et là ça devient un coût social, alors que ça peut devenir un bénéfice, un investissement qui peut devenir un bénéfice si ça permet à nombreux... à de nombreux ménages, par exemple, de se passer d'une deuxième ou d'une troisième voiture, bon, parce qu'ils ont eu... dans certains cas d'une première, parce qu'ils ont eu un cocktail transport qui devient suffisant pour répondre aux besoins.
Donc, il faut le voir comme étant une partie qui serait sous forme de taxe dédiée, une partie dédiée à financer des alternatives, une autre partie sous forme de réforme fiscale. Et, dans ce cas-là, la réforme peut être soit pour baisser un impôt ou pour éviter un impôt, dans le sens que, comme par exemple pour la Régie des rentes, c'est une hausse d'impôt... en fait, c'est une hausse des charges sociales des employeurs, qui devient la seule alternative actuelle, pour le gouvernement, pour sauver le régime de retraite pour les prochaines générations. Donc, c'est d'offrir une deuxième alternative. Et là, à ce moment-là, l'enjeu n'est pas de dire: Quel est l'impact de taxer de 0,01 $, par exemple... ou de 1,00 $ le carbone?, c'est de dire: Quel est l'impact d'avoir substitué, donc, un impôt additionnel, qu'on ferait parce qu'on n'a pas le choix, à cet axe environnemental là? Et là il va falloir voir sur plusieurs plans. Et, si on... et, si on fait la somme de tout ça, on réussit à avoir des réductions très, très fortes dans les réductions de gaz à effet de serre tout en ayant réglé un ensemble d'autres problèmes auxquels on se serait attelés de façon systématique. Et c'est là, dans cette mesure-là, qu'on va un peu plus loin, bien qu'on dit: Votre document est très intéressant pour l'approche, mais qu'on allait un peu plus loin dans les possibilités.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Bien, je veux juste faire un commentaire puis ensuite, Mme la Présidente, je vais vous demander de céder la parole au député de Vanier.
La Présidente (Mme Doyer): Parfait.
Mme Beauchamp: Mais je vais juste faire un commentaire en disant: Votre contribution est intéressante, à notre réflexion. En même temps, il faut quand même réaliser que ça entraînerait d'autres types de conséquences qu'il faudrait mesurer. Parce que le scénario que vous avez devant vous, c'est donc des investissements en termes d'infrastructures publiques, recherche et développement... là, je n'en nomme que quelques-uns, là, mais qui fait partie du tableau, notamment dans la section II, qui représente environ 5 milliards... 5 milliards d'investissement, la proportion? Et quand ça dépasse 5 milliards... C'est 5 milliards? Je le disais de mémoire. C'est 5 milliards. Et, quand la levée d'argent, je vais dire ça ainsi...
Par exemple, dans le scénario de moins 20 %, ça sous-entend qu'on va chercher environ 14 milliards, tout près de 15 milliards, là. Excusez-moi, ça irait mieux si je retrouvais ma page où c'est écrit. On est à la page 29 de notre tableau. Donc, le scénario moins 20 %, c'est environ un total de 15,3 milliards sur neuf ans. Ça sous-entend que c'est environ 10 milliards qui sont retournés auprès des ménages, et ça...
Je voulais juste prendre le temps de dire: C'est ce qui explique ensuite le résultat de nos tableaux sur l'impact, par exemple, sur le revenu des ménages. Tout autre scénario, comme vous le proposez, mérite qu'on le regarde mais veut dire d'autres types d'impacts sur le revenu disponible des ménages. Je voulais juste prendre... qu'on s'entende bien sur cela.
Et là, si vous permettez, je vais demander... Bien, Mme la Présidente, je vous demanderais de reconnaître le député de Vanier.
La Présidente (Mme Doyer): N'oubliez jamais le rôle de la présidente.
Mme Beauchamp: Non, tout à fait.
La Présidente (Mme Doyer): Non, non, parfait, Mme la ministre. Alors, M. le député de Vanier, à vous la parole.
M. Huot: Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue. J'aimerais, moi, vous entendre un petit peu plus... Vous l'avez abordé rapidement. Je comprends qu'en 10 minutes vous n'avez pas le temps de tout présenter ce que vous voulez présenter, mais la taxe kilométrique aux Pays-Bas, j'aimerais ça mieux comprendre le fonctionnement. Là, je comprends qu'il y avait une expérience pilote, qu'on veut l'adapter un petit peu partout aux Pays-Bas. Je voudrais comprendre un petit peu mieux le fonctionnement de ça. Et vous dites que le Québec pourrait aller de l'avant dans cette approche-là. Je veux bien comprendre.
Par la suite, là, comment appliquer une telle approche au Québec, quand on connaît l'immensité du territoire et, disons, la différence de territoire et de... juste d'aménagement? On ne peut pas comparer Montréal et Gaspé, par exemple, en termes de déplacements, d'offre de transport en commun. Donc, de voir une certaine équité dans l'application de cette taxe kilométrique là... Comment... Compte tenu de l'expérience qui est faite aux Pays-Bas, comment on pourrait adapter ça au Québec? Et comment ça se traduirait?
La Présidente (Mme Doyer): M. Théorêt.
M. Théorêt (Jonathan): Je vais laisser rapidement la parole à mon collègue, mais simplement au niveau de l'équité, il y a quand même un principe qu'il faut se rappeler, c'est le fait que un litre d'essence brûlé qui émet tant de gaz à effet de serre émet un même litre... le même litre émet autant de gaz à effet de serre à Montréal qu'à Rimouski. Puis c'est quand même important de... à partir de quand on se rapproche d'un principe pollueur-payeur, de se souvenir que ce n'est peut-être pas via ces taxes sur l'essence, par exemple, qu'on devrait favoriser l'équité. Mais je vais laisser mon collègue compléter.
La Présidente (Mme Doyer): M. Lefebvre.
M. Lefebvre (Jean-François): On a fait l'expérience, aux États-Unis, de demander à 25 économistes de choisir, parmi une panoplie d'une quinzaine... une vingtaine de politiques différentes, celles qu'ils privilégiaient, et il y a une seule qui a fait l'unanimité dans tout ce groupe d'économistes disparates, c'était une augmentation de la taxe sur l'essence. Bon. Par contre, on sait qu'en même temps c'est une des mesures qui est moins populaire, qui est beaucoup plus difficile à vendre. Pourquoi? Parce que justement la taxe sur l'essence ne permet pas de nuances: tout le monde la paie de façon... quelle que soit la région que vous êtes, par exemple.
La taxe kilométrique permet d'aller un petit peu plus loin. Et je ne dis pas qu'il faut renoncer aux taxes sur l'essence à court terme, parce qu'à court terme c'est ce qui serait le plus facile à implanter. Par contre, ce qui serait intéressant, c'est d'envisager un scénario où on va à plus long terme, et la taxe kilométrique permet de faire en sorte que les gens sont facturés au kilomètre, mais qu'il peut y avoir une variante qui peut tenir compte de l'efficacité ou du niveau de pollution du véhicule, par exemple. Et vous pourriez avoir une autre variante, vous pourriez rajouter le fait que quelqu'un qui est en région, en Gaspésie, aurait droit à un rabais additionnel, par exemple. Vous pourriez faire en sorte que les premiers kilomètres soient gratuits pour une personne âgée qui a un véhicule qu'elle utilise pendant 500 kilomètres par année puis qui ne roule pas. Tout est possible. Avec une taxe kilométrique, vous avez toute cette facilité-là, bon, donc, de faire une flexibilité. Par contre, il y a un coût d'implantation, et c'est ça qu'ils sont en train de roder. Il faut imaginer que tous les véhicules vont être équipés d'une sorte de GPS qui vont être capables de calculer automatiquement, donc, les trajets. C'est la formule qu'eux envisagent.
En Oregon, il y a un autre système qui est étudié, donc, mais l'Oregon est moins avancé, là, c'est plus un projet pilote, alors qu'aux Pays-Bas l'opération est vraiment lancée. Quand on parle de 60 000 véhicules en phase d'implantation, ce n'est plus un projet pilote, c'est juste pour préparer à ce que le système soit rodé avant qu'en mars 2012 l'ensemble du parc commence à être implanté.
M. Huot: ...êtes-vous en mesure d'identifier la différence par rapport aux droits d'immatriculation versus la taxe kilométrique pour un utilisateur moyen? Est-ce qu'on... est-ce qu'on parle de... Est-ce qu'on a doublé, triplé les coûts... les coûts d'immatriculation, finalement? Avez-vous ces données-là?
n(15 h 40)nM. Lefebvre (Jean-François): Pas dans le détail. Par contre... De toute façon... En fait, dans ce cas-là, ce qui est intéressant, c'est le principe, parce qu'à partir du moment que vous avez... Le principe, c'est de dire: Au lieu d'avoir un coût fixe qui ne donne pas signal de prix... J'arrondis: vous devez payer 300 $ par année, un coût fixe. Bon, si on enlève ce coût fixe là mais qu'on vous fait payer à chaque kilomètre, à ce moment-là, le choix de prendre le transport en commun ou l'auto, le choix de faire du covoiturage, etc., la question se pose autrement, avec le même coût global, parce que, dans celui-là, on a juste parlé d'un transfert, ce qui n'empêche pas qu'on peut aller plus loin, là.
On a parlé de réforme de la fiscalité, tout à l'heure. On peut aller plus loin, mais ce qu'on indique, c'est que, juste en faisant des transferts de la fiscalité actuelle, on peut aller chercher des gains supplémentaires, parce que, dans vos scénarios, vous aviez des frais d'immatriculation, vous n'aviez pas un scénario où ils étaient abolis puis on augmentait au kilomètre, bon, par exemple. Donc, juste là, on a un gain additionnel.
La Présidente (Mme Doyer): Alors, il reste une minute, M. le député de Vanier.
M. Huot: Vas-y.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Merci, Mme la Présidente. Donc, très rapidement. Vous avez fait allusion, dans votre présentation, à la notion de la fuite de capitaux au Québec. Je veux entendre vos commentaires par rapport à notre modélisation qui prévoit qu'une partie des efforts à faire, dans le scénario de moins 20 %, par exemple, c'est pratiquement le quart des efforts qui doivent être faits sur d'autres territoires que le territoire québécois. Quelle est votre réaction quant aux efforts à faire à l'international?
La Présidente (Mme Doyer): M. Théorêt? M. Lefebvre? M. Lefebvre.
M. Lefebvre (Jean-François): O.K. D'abord, il faut faire une grosse distinction en termes de développement durable, le fait d'importer un pétrole, qui est une ressource épuisable, O.K... Puis ceux qui ne sont pas convaincus, vous regarderez la figure qu'on a mise au début du mémoire, je pense qui parle beaucoup, donc à la page 8. Ça, c'est une chose. Par contre, financer des projets de développement durable dans d'autres pays puis en récolter les crédits, ce n'est pas la même chose. Dans un cas, on épuise une ressource collective et il va y avoir un coût social, et, dans l'autre cas, on aide à faire un développement qui réduit les risques de conflits sociaux et autres qui auraient des répercussions chez nous.
Cela étant dit, puisqu'avec notre conclusion on arrive à dire qu'on peut faire des gains additionnels avec certaines mesures que vous n'aviez pas dans vos scénarios, ça voudrait dire que, même avec le scénario moins 20 %, on pourrait être capables d'atteindre le moins 20 % en réduisant fortement l'achat de crédits à l'extérieur. Nous sommes pour ce type d'investissement là, durable, nous ne sommes pas contre, O.K.? Par contre, ce qu'on dit, c'est que, dans votre tableau, c'est un scénario pessimiste que vous avez mis, parce qu'on vient de démontrer qu'il y a d'autres mesures qui sont rentables, qui vont permettre de réduire davantage les émissions sans que ça coûte d'argent et sans avoir besoin d'acheter de crédits. Donc, on va pouvoir réduire la portion à acheter. C'est pour ça qu'on dit que réduire de 20 % à 25 % nous semble dans un objectif raisonnable.
La Présidente (Mme Doyer): Alors, merci, M. Lefebvre. Je vais passer au groupe du parti de l'opposition officielle. M. le député de L'Assomption, à vous la parole.
M. McKay: Merci. Merci, Mme la Présidente. Et... Bien, je vous souhaite la bienvenue, d'autant plus que, je pense, c'est la première fois où nous nous retrouvons face à face, parce que la plupart du temps nous sommes... nous avons été plutôt côte à côte.
Je vous... je profite de l'occasion pour vous féliciter pour les 20 ans... Vous célébrez cette année les 20 ans de votre organisme, du GRAME. Ça ne me rajeunit pas moi-même, parce que vous pourrez deviner, Mme la Présidente, avec lequel de ces trois jeunes hommes j'ai eu l'occasion d'étudier. Mais effectivement votre slogan pour célébrer vos 20 ans, si j'ai bien compris, c'est 1989-2009, 20 ans d'avance!, et je pense que vous faites la démonstration aujourd'hui que, 20 ans plus tard, vous êtes toujours, je dirais, à l'avant-garde des idées puis des propositions pour réconcilier l'environnement et l'économie. Je pense que c'est votre credo. Et... Bien, je pense que, dans les idées qui sont assez novatrices, quand vous nous parlez de taxe au kilométrage, et de réforme écologique de la fiscalité, et tout ça, ce sont sûrement des idées qui sont encore assez neuves, assez nouvelles et novatrices. Et l'emballage politique de telles mesures est... je pense, ne saute pas nécessairement aux yeux, à première vue, mais je pense que, comme les autres mesures... comme il y a 20 ans, lorsqu'on parlait des émissions de gaz à effet de serre puis du réchauffement de la planète, même, je pense qu'il n'y avait pas... on ne trouvait pas nécessairement beaucoup preneur du côté politique, en tout cas, puis certainement pas du côté économique. Et, 20 ans plus tard, les choses ont évolué de façon très significative, pas suffisante probablement, mais significative quand même.
Moi, je vous demanderais peut-être, dans un premier temps... Parce que vous avez souligné le fait que le document présenté par le gouvernement et la modélisation qui a été effectuée avaient... Puis je pense que ce n'était pas un reproche que vous faisiez, là, mais une critique. Moi, je l'ai vu comme une proposition constructive d'ajouter certains éléments, de compléter le modèle. Donc, c'est un commentaire qu'on a reçu aussi de d'autres personnes de façon à améliorer, disons, le... et à poursuivre le travail qui a été fait jusqu'à maintenant et à le bonifier.
Donc, quels sont, d'après vous, là, les éléments qu'il faudrait prioritairement inclure? Je pense que, bon, vous avez parlé notamment du dollar... du baril de pétrole à 60 $. Donc, pouvez-vous faire la liste, là, de ces éléments-là que, vous, vous recommanderiez au gouvernement de poursuivre l'analyse de ces... de ces éléments-là?
La Présidente (Mme Doyer): M. Théorêt.
M. Théorêt (Jonathan): D'abord, bien, merci beaucoup d'avoir souligné, là, les 20 ans du GRAME. Je vous avouerai que ce n'est pas, évidemment, moi qui est là depuis le plus longtemps.
Mais il y a... il y a, parmi les différentes analyses que j'ai faites des travaux du GRAME antérieurs, des commentaires, comme par exemple la position sur des péages urbains, qui, dans la campagne électorale qui vient de se terminer, a fait l'unanimité à Montréal dans les différents partis municipaux, alors que c'était une mesure qui était proposée par le GRAME il y a déjà...
M. Lefebvre (Jean-François): En 1995.
M. Théorêt (Jonathan): ...en 1995, ce qui n'était pas particulièrement populaire à ce moment-là. Donc, merci de le souligner.
Sinon, quand on parle du prix du pétrole dans la modélisation, en fait, j'ai été surpris déjà de voir, là, que c'était à 60 $ le baril, là, les modélisations qui étaient là, qui est une cible... Bien, en voyant même... Même à ce prix du baril du pétrole, les impacts avec un scénario moins 20 % sont quand même... ne sont pas particulièrement néfastes sur la population, voire bénéfiques dans bien des cas. Je pense que c'est un élément clé, là, de la modélisation que de réévaluer ce prix-là. Jean-François...
La Présidente (Mme Doyer): M. Lefebvre.
M. Lefebvre (Jean-François): Oui. Donc, en plus, oui, il y a le prix du pétrole. Ça, c'est une chose, c'est qu'à ce moment-là, à partir du moment qu'on met comme scénario deux choses: un prix plus élevé comme scénario de référence et... premièrement, et, deuxièmement, s'indiquer le fait que, s'il y a une entente réussie à Copenhague ou après... Je dis bien «après», là, parce que la planète n'est pas à six mois près, là. Donc, s'il n'y a pas entente à Copenhague, ça va être tout simplement partie remise pour quelques semaines après. Mais s'il y a entente dans la prochaine année et qu'il y a effectivement un effort de réduction tel que demandé, donc aux alentours de moins 20 % dans les pays industrialisés, ce qui amènerait une pression notamment sur les pays en développement comme la Chine et l'Inde pour ralentir leur croissance, ça aurait un impact sur le prix qu'on va payer, aussi, donc... et ce n'est pas rien.
Juste pour vous donner un exemple, la Chine, depuis 1990, a doublé sa consommation de pétrole, mais ils ont multiplié par six leurs importations. Donc, ce n'est pas pour rien que le prix du pétrole était en hausse en 2008, et c'est une situation qui n'est pas résolue et qui va se reproduire dès que la reprise économique va se refaire partout.
Donc, c'est fondamental, comme situation, on ne peut plus analyser le passé... le futur avec les données du passé. Là, il faut regarder nos options pour le futur avec des vraies prévisions pour le futur. À partir de là, bien le reste découle, dans le sens que, pour l'ensemble des instruments... Bon, les différentes hypothèses qu'on a regardées... On a parlé du transfert de la fiscalité, on a parlé d'ajouts, bon, fiscalité automobile, possession vers utilisation. Juste le fait d'avoir des péages au niveau municipal, à Montréal, par exemple, risque d'avoir un impact mesurable, là, donc, ce qu'on mesure d'ailleurs à Londres et Stockholm, notamment. Donc, c'est l'ensemble de ces mesures-là plus...
On ajoute aussi qu'il y a quelques mesures réglementaires pour lesquelles on entend moins parler mais qui seraient simples, par exemple le fait qu'un propriétaire de bloc-appartements soit obligé de respecter certaines normes d'efficacité énergétique pour pouvoir vendre son bloc sur le marché. Ça réglerait le problème des incitatifs partagés qu'on a dans le cas des logements locatifs, en grande partie. Donc... Puis il y a des villes, dans le monde, qui l'appliquent, cette mesure-là. Ce serait très simple, ça ne coûterait à peu près rien.
n(15 h 50)n Donc, il y a beaucoup d'éléments comme ça qui seraient à... et c'est normal, parce que c'est une modélisation sommaire que le MDDEP a fait. Le seul reproche qu'on pouvait faire, c'est que ça donnait un peu l'impression de dire: Vous allez payer un coût additionnel, il va être limité mais il serait acceptable, selon nous. Donc, c'est comme si la position du gouvernement, en tout cas en arrière du rapport, est celle-ci, alors que la position aurait dû être: Si, par exemple, on oblige à faire une maison Novoclimat, oui, elle coûte 4 000 $ de plus, sur une maison de 150 000 $; mais réduis de 25 % les coûts de chauffage, bien... d'énergie, bien, ça se récupère.
Bien, c'est la même chose pour les investissements en transport: il ne faut pas voir ça juste comme un surcoût. C'est impossible d'investir des milliards dans le transport en commun puis de se retrouver avec les mêmes coûts en usage privé de l'auto. C'est impossible parce que vous allez avoir une portion importante des gens qui vont pouvoir utiliser cette meilleure offre, à ce moment-là, et c'est toujours une réduction globale des coûts, à ce moment-là.
Donc, c'est dans ce sens-là qu'il y a des lacunes non pas sur le... je dirais, le fond, mais sur la forme dans le document, dans le sens que... je dirais que le document ne vend pas assez bien les bénéfices qu'on peut aller chercher. C'est pour ça qu'on a voulu en illustrer quelques-uns. Donc, on peut aller chercher des bénéfices importants, et on n'a pas nécessairement à se comparer. C'est normal même au Québec, dans le contexte du marché québécois, de faire 5 % de plus d'efforts, entre guillemets, que l'Ontario, par exemple, en visant le secteur des transports qui serait... qui devrait faire un effort additionnel. On a un intérêt beaucoup plus grand à le faire, par exemple, que nos voisins.
La Présidente (Mme Doyer): M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Oui. Bon, nous recevons ici, à la commission, plusieurs... des représentants de plusieurs secteurs industriels qui viennent plaider le fait qu'il y a déjà des efforts importants qui ont été faits au cours des dernières années par plusieurs secteurs industriels québécois et qui nous disent aussi du même souffle que, lorsqu'ils regardent du côté des secteurs d'émissions... des sources d'émissions qui.. dont le contrôle relève plus particulièrement du gouvernement du Québec, comme le transport, que, dans ces secteurs-là, on a vu des augmentations. Dans le transport, on a vu une augmentation quand même très significative et non pas une baisse, depuis... avec le niveau de 1990.
Donc, est-ce que vous... Qu'est-ce que vous répondez aux gens de l'industrie qui disent: Bien, nous, on a déjà fait notre effort, mais on regarde du côté du transport, où le gouvernement n'a rien fait et continue même d'investir dans des augmentations... dans des infrastructures de façon à augmenter la capacité de circulation de ces infrastructures-là? Même dans le cas du pont de la 25, on a même poussé jusqu'à amener une voie de covoiturage jusqu'au pont, alors qu'il n'y en a pas du tout sur le pont. Avec l'échangeur Turcot, on propose aussi d'augmenter la capacité, donc, de ces infrastructures routières là. Alors, qu'est-ce que... qu'est-ce que vous dites aux gens de l'industrie lorsqu'ils disent: Bien, au Québec, là, on devrait peut-être faire attention, on est déjà allés pas mal loin, on est meilleurs que nos voisins, et donc il ne faut pas se donner de fardeau supplémentaire?
La Présidente (Mme Doyer): M. Lefebvre.
M. Lefebvre (Jean-François): O.K. Un vrai, un faux, une priorité. Bon.
Le vrai, c'est qu'effectivement les entreprises québécoises, notamment dans le secteur des alumineries, mais d'autres aussi, ont fait des réductions importantes et des efforts, et on a tenu compte, dans notre analyse, là, comme quoi que les réductions pourraient être beaucoup moins fortes là, tout comme dans la production d'électricité, notamment. Bon. Ça, c'est le vrai.
Le faux. Si je regarde à la page 16, par exemple, de notre document, au point 12, on montre les constructeurs européens, incluant GM, là, Europe, O.K., l'efficacité des véhicules qu'ils ont accepté de livrer pour l'Europe mais qu'ils considéraient comme impossibles à livrer en Amérique du Nord. Donc, ça veut dire que... Puis là ça fait un pont entre la question industrie versus transport, là. Donc, il y a des efforts effectivement qui peuvent être faits encore dans certains secteurs.
Et, si je ramène ça avec la priorité, oui, ce n'est pas pour rien qu'on a insisté beaucoup sur les transports, et il faut être conscient que, si le gouvernement s'engage dans un objectif ambitieux ? puis on espère que ça va être un appui le plus unanime possible de l'Assemblée nationale derrière cet objectif ? bien, c'est certain que le domaine, le secteur des transports va devoir réduire, mais ce n'est pas impossible.
J'ai parlé de l'Allemagne, tout à l'heure. L'Allemagne a réduit de 14 % les émissions dans les transports grâce à la réforme écologique de la fiscalité qu'on a parlé, alors que partout ailleurs elle augmente puis elle semble incontrôlable. Donc, ça fonctionne, mais il faut avoir les bons outils.
La Présidente (Mme Doyer): M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Oui, merci. J'apprécierais si vous pouviez faire suivre au secrétaire de la commission la référence plus spécifique à ce que vous venez d'affirmer, là, une réduction de 14 %, donc, des émissions de gaz à effet de serre dans les transports en Allemagne. Est-ce que c'est possible?
M. Lefebvre (Jean-François): Oui.
M. McKay: Oui? O.K. Parce que j'étais un peu préoccupé par le fait qu'un intervenant précédent était venu nous dire que nulle part à travers le monde avait-on réussi à juguler les émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports, que ça augmentait partout. Alors, vous... On va être très intéressés à pouvoir vérifier parce que... Bon, probablement que cette personne-là était assurément de bonne foi, là, je ne remets pas ça en cause, mais je pense qu'effectivement on doit reconnaître que le secteur des transports, même si c'est là qu'est le gros potentiel, que, quand on regarde autour de nous, ce n'est quand même pas évident, là, c'est relativement récent, le fait que...
Par exemple, aux États-Unis, dans certaines villes, on déconstruit des autoroutes urbaines. Même, je pense que les ingénieurs, au ministère des Transports du Québec, ne sont même pas au courant encore de ces faits-là ou en tout cas, d'après leurs agissements, ils ne semblent pas l'être et... Alors donc, c'est possible de nous faire suivre cette information-là?
La Présidente (Mme Doyer): M. Lefebvre, on compte sur vous?
M. Lefebvre (Jean-François): Oui.
La Présidente (Mme Doyer): C'était une étude, une recherche qui avait été faite?
M. Lefebvre (Jean-François): C'est tout simplement une donnée sur les rapports... sur les suivis de ce qu'ils font en Europe, notamment.
La Présidente (Mme Doyer): D'accord.
M. Lefebvre (Jean-François): Je pense que je ferais... Je reprendrais juste la phrase que les gens vous ont dite, c'est-à-dire qu'il n'y a aucune stratégie qui a fonctionné pour réduire les émissions de GES dans les transports, sauf lorsqu'il y a eu internalisation des coûts avec des incitatifs économiques. Bon. Et là-dessus, à Singapour, que j'ai... où j'ai présenté une conférence l'année dernière, bon, ils sont célèbres pour avoir eu le premier système de péage urbain, donc, en 1975, devenu électronique en 1998. Ils ont un système de vente aux enchères pour les plaques d'immatriculation, donc c'est... O.K. Ils ont... on estime qu'ils ont baissé de 76 % la consommation de véhicules par rapport à ce qu'elle aurait été. Et je peux vous dire qu'à Singapour, au centre-ville, à l'heure de pointe, vous avez l'impression d'être ici, le dimanche matin, à 7 heures du matin; il n'y en a aucune, congestion. Mais le transport en commun, il est extraordinaire là-bas. Et vous avez des pays comparables juste à côté, comme la Thaïlande, qui se retrouvent plus pauvres mais avec beaucoup plus de voitures, où tout est bloqué dans la congestion et toute l'économie est paralysée par cette inefficacité.
La Présidente (Mme Doyer): Merci, M. Lefebvre. M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Oui. J'aimerais en savoir plus aussi sur ce que vous proposez comme réforme fiscale écologique, parce que je me demande: Est-ce que ça touche vraiment exclusivement la question de taxe sur le carbone, ou est-ce que vous parlez aussi d'une réforme de la fiscalité avec des principes dont on a déjà entendu parler, là, comme l'écoconditionnalité?
Je vous donne un exemple. Dans le cadre du plan de relance économique du gouvernement du Québec, dans le dernier budget, il y a un programme de rénovation domiciliaire... de soutien à la rénovation domiciliaire, mais ce programme-là n'inclut pas d'écoconditionnalité, là, donc vous pouvez prendre cette subvention-là du gouvernement pour augmenter vos émissions de gaz à effet de serre, et on est très heureux de vous signer un chèque à même l'argent du public.
Alors, est-ce que... Pouvez-vous nous donner un peu plus de détails sur cette réforme-là, là, et jusqu'où ça va, ce que vous... ce que vous envisagez?
n(16 heures)nLa Présidente (Mme Doyer): M. Théorêt.
M. Théorêt (Jonathan): Oui. Si on peut faire ? on pousse un petit peu là-dessus. Les types de programmes comme ça qui offrent des subventions, par exemple, à la rénovation, les conditions... il devrait y avoir des conditions sine qua non d'atteinte de cibles environnementales dans chacune de ces mesures-là. C'est un précepte même du développement durable que de dire que toutes les différentes sphères devraient être regroupées. Donc, oui, effectivement, il devrait y avoir des cibles précises de... d'atteinte, là, en efficacité énergétique, par exemple, dans le bâtiment.
Au niveau des différentes possibilités comme ça, on a mené à travers les années différents projets de recherche, notamment sur l'acceptabilité... là, on est en train de travailler sur l'acceptabilité sociale de différentes mesures fiscales, de différentes mesures de tarification, notamment au niveau des transports, et c'est un projet de... un vaste projet de recherche qu'on mène depuis déjà...
M. Lefebvre (Jean-François): Quelques mois.
M. Théorêt (Jonathan): ...quelques mois, oui, avec l'appui de Transports Canada notamment et on... avec les différents partenaires qu'on a là-dedans, de trouver c'est quoi, les différents scénarios de combinaisons de mesures qui vont faire en sorte de maximiser l'acceptabilité sociale de ces mesures-là, est-ce que c'est en mettant deux mesures une à côté de l'autre qu'on va permettre de les bonifier plutôt que les deux séparément, qui doivent être présentées à la population, de sorte qu'elle les accepte parce que, si ce n'est pas accepté socialement, et ce ne sera pas accepté politiquement, et donc on va arriver avec des mesures qui ne sont pas aussi performantes. Je ne sais pas si, Jean-François, tu voulais compléter?
La Présidente (Mme Doyer): C'est parce qu'il reste... Mme la députée de Rosemont m'a demandé la parole.
M. Lefebvre (Jean-François): O.K. Bien, je vais juste compléter brièvement là-dessus...
La Présidente (Mme Doyer): Alors, très succinctement.
M. Lefebvre (Jean-François): ...si vous permettez...
La Présidente (Mme Doyer): Oui.
M. Lefebvre (Jean-François): ...mais je pense c'est important... très brièvement, mais c'est important. Comme M. Théorêt dit, on a un projet de recherche où on a réussi à aller chercher du financement, notamment fédéral, sur les transports durables. On devait avoir l'appui du gouvernement du Québec, on avait eu un avis favorable et on était même en train de... on avait même rédigé le contrat avec le ministère des Transports et on a appris il y a deux ou trois semaines que, finalement, quand c'est monté au bureau du Conseil des ministres, notre projet de recherche avait été coupé, avait passé au couperet, là, de la lutte au déficit, donc que notre... Ça fait qu'on nous pose des questions, mais, en même temps, on vient de se faire enlever les moyens qu'on avait pour essayer d'amener justement, être en avance pour aider à réussir à avoir des outils pour permettre l'acceptabilité de l'écofiscalité, alors qu'on vient de démontrer que c'est essentiel.
Ça fait que, là-dessus, je n'ai pas de réponse autre qu'une question: Est-ce que... est-ce qu'on peut avoir de l'aide peut-être pour réussir à... ce serait à voir ultérieurement, là, mais pour régler ce quiproquo.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la députée de Rosemont, quelques secondes votre question, et quelques secondes la réponse.
Mme Beaudoin (Rosemont): Bien, c'était justement sur l'acceptabilité sociale parce que vous avez dit, je pense, tout à l'heure, augmenter, bon, la taxe sur l'essence, ce n'est pas une mesure qui est nécessairement extrêmement populaire. Et, quand vous avez parlé de la taxe sur les kilomètres, est-ce que justement, d'après vos informations, que ce soit aux Pays-Bas ou dans l'Oregon où il y a eu des expériences en ce sens, est-ce que c'est acceptable socialement? Est-ce que la population est intéressée par ce type de mesure là? Est-ce que c'est vendable? Est-ce que... Bon. Je pense que c'est extrêmement important, vous en avez parlé assez longuement, là, je ne le savais pas, j'avais préparé ma question avant, mais cette notion d'acceptabilité sociale dans... Parce qu'on dit souvent: Ah, oui, tout le monde est pour la vertu, mais personne ne veut, quand le temps arrive, payer le prix que ça coûte, là, tu sais.
La Présidente (Mme Doyer): Merci. M. Lefebvre.
M. Lefebvre (Jean-François): En fait, une étude qu'on voulait, qu'on est en train de mener, puis pour laquelle il nous manque en fait du financement pour payer les... les «focus groups» et le questionnaire, le sondage, et justement, pour répondre à la question que vous nous demandez, donc, on ne peut pas préjuger. Tout ce qu'on peut dire à ce moment-là, c'est que nos études préliminaires semblent nous montrer que, pour réussir à faire accepter des incitatifs économiques, il faut réussir à avoir un ensemble de moyens pour pouvoir répondre à des préoccupations. Donc, plus c'est flexible, plus on peut répondre à des préoccupations.
La Présidente (Mme Doyer): Alors, messieurs, je vais vous remercier. M. Lefebvre, M. Théorêt, M. Rajaonson, merci de votre contribution aux travaux de la commission. Bon retour chez vous.
Et je vais inviter les personnes qui représentent la Fédération québécoise des coopératives forestières de prendre place. Je suspends pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 h 5)
(Reprise à 16 h 6)
La Présidente (Mme Doyer): Alors, M. Lessard, M. Gagné, M. Anderson, bienvenue à la commission. Et moi qui vous ai écoutés longuement lors de la loi n° 57 et à plusieurs lois, plusieurs lois forestières, je sais que ces choses qui questionnent l'environnement vous intéressent, et merci de vous être présentés aussi à pied levé parce que vous aviez demandé à vous faire entendre ? on a eu un groupe qui s'est désisté ? et vous le faites aujourd'hui. Alors, bienvenue d'autant plus. À vous la parole pour 10 minutes.
Fédération québécoise des
coopératives forestières (FQCF)
M. Lessard (Jocelyn): Alors, vous nous avez présentés, ce n'est pas nécessaire de recommencer. À ma droite, M. Anderson, qui est un conseiller en énergie à la fédération; à ma gauche, M. Gagné, qui est mon adjoint. Et notre président s'excuse, il aurait bien aimé être là, mais comme on sait depuis ce matin seulement qu'on a été invités, donc ça n'a pas été possible, mais on parle au nom de le fédération.
Donc, merci beaucoup de nous accueillir. Cette consultation est très importante pour nous. Là, on n'était pas dans les groupes ciblés, mais on s'est quand même prononcé. La Fédération québécoise, c'est une organisation qui regroupe des coopératives de travailleurs forestiers, présente dans le territoire depuis plus de 70 ans. On est les spécialistes de l'aménagement forestier, toute la gamme des travaux, et, depuis deux ans, la fédération fait la promotion d'une stratégie de développement des chaufferies institutionnelles pour permettre au Québec de profiter de cet avantage, et donc c'est dans cette direction qu'on va se prononcer.
On n'a pas les outils nécessaires pour faire des évaluations économiques macros et donc on ne peut pas se prononcer, on ne peut pas quantifier la cible que le Québec devrait atteindre, même si on comprend très bien que c'est ça, la question de la consultation. On prétend être dans le groupe de ceux qui pensent que la cible devrait être la plus ambitieuse possible, mais, en même temps, étant des opérateurs sur le territoire dans un très grand territoire, on sait que des contraintes liées à l'augmentation importante du coût de carburant pourraient nous être très néfastes, et donc on invite le Québec, en même temps que cette ambition, on l'invite à être très prudent pour ne pas créer des conditions défavorables au développement économique.
Par contre, le point sur lequel on veut beaucoup insister en passant ici, c'est l'avantage concurrentiel indéniable dont le Québec bénéficie pour contribuer à la lutte contre les gaz à effet de serre, c'est-à-dire que ce très vaste territoire forestier représente un potentiel qui, sous plusieurs facettes, pourrait aider le Québec à atteindre des objectifs ambitieux. Et donc, immédiatement, je passerais la parole à mon collègue, M. Gagné, qui vous présenterait plus spécifiquement ces points-là.
La Présidente (Mme Doyer): M. Gagné.
n(16 h 10)nM. Gagné (Eugène): Bon. En certaines grandes lignes, là ? parce que je ne veux pas vraiment faire le tour au complet ? on indique entre autres le potentiel de la biomasse forestière au Québec, qui a été évalué par le ministère des Ressources naturelles et de la Faune, qui se situe dans l'ordre de 6,5 millions de tonnes métriques anhydres, et que ça équivaut à 20 millions de barils de pétrole en termes d'énergie. Et donc, si on substituait du mazout léger ou lourd avec cette biomasse-là, c'est un potentiel de 9 millions de tonnes de CO2 que ça équivaut.
Bien entendu, on ne peut pas faire ça du jour au lendemain. Comme vous le mentionnait Jocelyn tout à l'heure, nous, on travaille sur la filière des chaufferies institutionnelles. Ce n'est pas pour rien. Donc, on vous détaille plusieurs raisons qui font qu'on devrait privilégier cette filière-là par rapport à d'autres.
Je donne un petit exemple rapide. Il est peut-être intéressant de produire de l'électricité en cogénération avec de la biomasse, mais si, à la fin, cette électricité-là est utilisée en chauffage, c'est inutile et c'est peu efficace parce qu'on perd tout le long de la chaîne beaucoup d'énergie. Donc, les raisons, j'en fais une nomenclature.
Aussi, on voit que, dans la stratégie énergétique du Québec, on a ciblé l'éthanol cellulosique, qui est une filière quand même intéressante, mais aussi beaucoup moins efficace que la combustion directe. Donc, sans vouloir dénigrer, toutes les filières doivent être appuyées et développées, mais simplement il y en a une qui devrait être en tête de liste en termes de développement et d'énergie qu'on y consacre.
Donc, on parle du meilleur bilan énergétique, bien entendu, en circuit court. Donc, on aurait besoin d'une unité d'énergie pour en produire 15 en combustion directe, comparativement à un pour 4,6 à six dans le cas de l'éthanol.
Un meilleur bilan carbone, en substitution du mazout, on parle, pour chaque tonne utilisée, de une à 1,4 tonne de CO2.
Compétitivité d'énergie. Ça, c'est très intéressant. Le coût de la biomasse livrée à l'institution, le coût du combustible est de l'ordre de 0,03 $ du kilowattheure. Quand on le compare à l'électricité, on parle de 0,08 $ au tarif M en moyenne. Ou, dans le cas du mazout, bien c'est un petit peu difficile parce que ça fluctue beaucoup, mais, sur les prix de l'hiver 2008, c'était 0,12 $ du kilowattheure. Ça, ça amène, en plus d'être compétitif, une très grande stabilité du coût de l'énergie pour les institutions. Donc, dans le cas de la biomasse, le coût du combustible représente entre 30 % et 40 % du coût total de la facture finale. Le reste, il y en a une proportion du même ordre qui va sur l'amortissement des investissements et le financement, et l'autre partie est sur les opérations et l'entretien. Donc, ça crée plus d'emplois, l'opération d'une chaufferie de bois, que les chaufferies aux produits pétroliers.
Donc, malgré qu'il peut y avoir une influence que, nous, on qualifierait de légère sur le prix de la biomasse, même si elle était grande, l'influence, c'est très peu dans le coût total. Donc, si on fait varier de 10 % le coût de l'énergie biomasse, ça va être 10 % de 30 % ou de 40 %, alors que, dans le cas du mazout, 10 %, c'est pratiquement 100 % de la facture immédiatement. Et puis vous savez que le mazout, c'est un marché international, tandis que, de la biomasse, on ne peut pas exporter ça, surtout quand elle n'est pas densifiée, sur de grandes distances. Donc, c'est un marché local de moins d'influence sur les prix internationaux.
Création d'emplois. Très intéressant. Des emplois locaux dans à peu près toutes les régions du Québec répartis un peu partout.
Disponibilité aussi d'une technologie performante, ça, c'est très important avec les problèmes qu'on a entendus l'hiver dernier à Montréal concernant les émissions atmosphériques. Des chaufferies bois automatisées à haut rendement énergétique sont très peu polluantes. En fait, on peut installer des systèmes, on peut contrôler la combustion... Finalement, c'est la meilleure option pour utiliser la biomasse par rapport au résidentiel, qui est plus difficile à contrôler avec les équipements qu'on a.
Donc, on vous indique là que, dans... En fait, dans le plan d'action du ministère des Ressources naturelles, on donne une très grande portion de l'utilisation dans les scénarios de planification qui ont été faits, une très grande portion de l'utilisation de la biomasse pour la chauffe. Bien sûr, pour mettre ces scénarios-là en place, ça prend des programmes... je dirais, on les qualifiait de dynamiques, puis il faut que les différents ministères s'y impliquent. Les gestionnaires de bâtiments. Ça prend une stratégie gouvernementale de conversion des systèmes de chauffe vers la biomasse.
Et aussi un autre élément important, c'est que, dans plusieurs programmes, on voit que la géothermie et le solaire font partie des mesures d'efficacité énergétique. On est tout à fait d'accord avec ça, il n'y a aucun problème, sauf que la biomasse, elle, ne l'est pas... reconnue. On considère ça comme si c'était une substitution. En fait, c'est un peu la même chose. Quand on produit de l'énergie avec... de l'énergie thermique avec la géothermie ou le solaire, bien on produit quand même de l'énergie. Le bâtiment n'est pas plus efficace avant qu'après. C'est simplement qu'on a changé le type d'énergie. Donc, dans le cas de la biomasse, c'est la même chose.
La Présidente (Mme Doyer): Il vous reste deux minutes.
M. Gagné (Eugène): Une minute?
La Présidente (Mme Doyer): Deux.
M. Gagné (Eugène): Deux? Bon. Merci beaucoup. Donc, on dit que... aussi, dans le contexte où se trouvent les finances publiques, on mentionne qu'il est important de souligner que les investissements nécessaires pour convertir à la biomasse forestière les systèmes de chauffage des bâtiments institutionnels se rembourseront à même les économies sur les coûts énergétiques à moyen terme et qu'ils contribueront à réduire ces coûts à long terme. Donc, c'est un élément très important.
Je passe rapidement sur la question de la substitution du bois dans les bâtiments parce que la Coalition Bois en a parlé abondamment. Nous appuyons totalement les propos qui ont été présentés, totalement avec certaines nuances, là, on n'a pas tout entendu, mais, en gros, c'est que la stratégie qui a été mise en place pour substituer le béton et l'acier, c'est excellent, puis ça a un effet important sur l'industrie forestière. Et aussi, s'il y avait reconnaissance à Copenhague de la séquestration dans les bâtiments du bois ? effectivement, il y a séquestration, mais c'est la question de le reconnaître ? ça aurait un impact, là, vraiment très positif.
Enfin, je vais rapidement à la question des puits de carbone. Vous savez que, par le reboisement des friches ou encore des landes forestières, c'est possible de séquestrer du carbone. Donc ça, c'est une mesure qui est à moyen terme. On ne peut pas penser à atteindre des objectifs à court terme dans l'horizon 2020, mais, si on commence tout de suite, on pourrait avoir des rendements très intéressants dans l'horizon 2020 et plus.
Et je ne saurais trop insister sur le dernier point, qui est la stratégie de mise en oeuvre. On vous mentionne des exemples, il y en a plusieurs en Europe qui sont documentés, qu'il y a des résultats. Ici, il y a des programmes très intéressants, entre autres sur le mazout lourd, et, récemment, sur le mazout léger, mais il manque, on pourrait dire, de cohérence entre les différents ministères, là. Il faut absolument qu'il y ait une stratégie d'ensemble pour avoir les bénéfices qu'on souhaite obtenir.
La Présidente (Mme Doyer): Alors, messieurs, merci de votre présentation. Je vais donner la parole à Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bienvenue et merci d'être parmi nous cet après-midi. Comme vous le savez ? vous y avez vous-mêmes fait référence ? on a reçu, avant vous, les gens de la Coalition Bois et également les gens de la fédération... est-ce que c'est la fédération des industries...
Une voix: ...
Mme Beauchamp: Conseil. Merci. Merci. Conseil de l'industrie forestière. En disant «fédération», je savais qu'il y avait quelque chose qui ne marchait pas. Le Conseil de l'industrie forestière.
Et je pense que j'ai juste besoin que l'on... et, vous-mêmes, vous nous l'indiquez, dans notre mémoire, qu'on distingue peut-être trois éléments du plaidoyer, qui est la question de la substitution du mazout grâce à la biomasse forestière; la question de la reconnaissance de la séquestration de carbone dans le bois au niveau des cadres bâtis, je veux dire, là, des bâtiments; et, troisièmement, toute la question de la quantification reliée à la question de la... je dirais, de la lutte à la déforestation, on va l'appeler comme ça, là, pour le moment. Donc, trois enjeux qui sont à des degrés différents de négociation d'un point de vue international.
Vous savez, je vais vouloir discuter des trois enjeux avec vous, mais, juste avant, juste pour qu'on revienne... parce que, là, on peut aller très loin dans les discussions au niveau international, mais, juste auparavant, on a aussi reçu ici, à notre table, les distributeurs de mazout, qui nous ont invités à être prudents en disant que la question de la distribution du mazout sur le territoire québécois demeurait une question importante en termes de sécurité énergétique du Québec, puis ils nous ont donné des éléments de démonstration, notamment par rapport au secteur agricole, et, vous, vous nous invitez aussi... tout en plaidant pour une mesure ambitieuse, vous nous invitez à la prudence ou, autrement dit, je le dis gentiment, là, mais on a souvent l'impression que le monde nous disent: Il y a bien des efforts qui peuvent être faits, mais, nous, il ne faudrait pas que ça nous touche.
Donc, je le dis gentiment. J'ai cru comprendre, de dire: Bien là, il ne faudrait quand même pas qu'il y ait une notion que ça se reflète trop sur le prix des combustibles fossiles parce que, là... C'est comme si je comprenais... peut-être vous allez pouvoir dire que j'ai mal compris, puis je vais le prendre, là, mais comme si vous disiez: Bien là, on a quand même des industries qui fonctionnent pendant ce temps-là, puis elles utilisent du mazout sur le territoire québécois, puis il faut faire attention que le choc économique ne soit pas trop important pour ces industries-là.
n(16 h 20)n Ça fait que je voudrais que vous nous racontiez... moi, j'utilise souvent l'expression «la vraie vie», là. Dans la vraie vie, j'ai des coopératives forestières, qui sont dans plusieurs régions du Québec. Quand vous nous invitez à cette notion de prudence par rapport à ce qu'il y ait un trop fort impact de la redevance ou d'un marché du carbone sur votre industrie, qu'est-ce que vous êtes en train de nous dire? Quelle est la situation actuelle d'utilisation d'hydrocarbures dans votre industrie? Comment vous voyez ça, d'ici 2020?
On a posé la même question, honnêtement, aux gens de l'Union des producteurs agricoles, qui nous disaient: Les possibilités d'innovation technologique, dans le type d'équipement qu'on utilise... est faible. Soyez prudents. Donc, je veux juste vous entendre sur cette question-là, très terre à terre, sur l'importance que ça prend ou pas, la question qu'il demeure une distribution de mazout dans les régions du Québec, par rapport à votre industrie.
La Présidente (Mme Doyer): M. Lessard.
M. Lessard (Jocelyn): Bien, d'une façon macroéconomique, vous savez... Si vous lisez le journal ou vous écoutez les nouvelles, vous savez que l'industrie forestière est en assez mauvaise situation en ce moment. C'est une situation qui est assez généralisée sur le continent nord-américain, puis même un peu partout dans le monde, mais si, dans la province de Québec, on a une taxe sur le carburant qui est plus élevée que tous nos compétiteurs, ça va se traduire dans le coût du mètre cube qui se rend à nos usines. Vous savez, on a des abatteuses qui consomment 30 litres à l'heure, puis, le territoire, il est immense. On a des heures et des heures de transport de bois; donc, notre activité économique, elle est très sensible au coût du carburant.
Si on fait tous le même effort, on est vraiment volontaires pour le faire, mais, si ça fait en sorte que notre industrie n'est plus compétitive par rapport aux États voisins, nous aurons des problèmes. C'est pour ça qu'on ne pouvait pas simplement dire: Vos objectifs les plus ambitieux, on y adhère totalement. Ça nous plaît, ça nous stimule beaucoup d'avoir des objectifs ambitieux. Tout ce que l'on dit, c'est: Quand même avoir un peu de prudence pour considérer l'ensemble du système économique dans lequel on doit interagir. Et le point le plus important, c'est que, selon nous, on peut atteindre une cible ambitieuse en misant, par exemple, sur la forêt pour atteindre des objectifs qui sont intéressants sans que le reste de l'économie en souffre trop.
C'est sûr que, si on a finalement raison et puis qu'on remplace beaucoup de mazout dans les... les chauffages institutionnels, ça va avoir un petit effet, mais ce n'est rien par rapport à une taxe qui est imposée à tout le monde. Donc... On parle peut-être des deux côtés de la bouche, là, mais on fait des efforts pour améliorer nos... l'efficacité de nos opérations: on est constamment sur des... la formation de nos opérateurs, et tout ça, mais c'est le cadre général. On ne peut pas dire qu'on peut augmenter sans se préoccuper, c'est vraiment par rapport à l'ensemble qu'il faut le considérer.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Et donc quels sont vos commentaires par rapport au fait que le Québec est membre du WCI avec d'autres États américains et d'autres provinces canadiennes et que nous avons adopté, ici à l'Assemblée nationale, ce projet de loi n° 42, qui va amener un marché du carbone et des... une notion de plafonnement des émissions, où on va tenir compte du... de l'étalonnage au niveau technologique, présent dans certaines industries, on va tenir compte des efforts précoces, on... C'est un système où on essaie d'avoir la souplesse, mais c'est quand même un système qui va s'appliquer à différents secteurs industriels manufacturiers.
Donc, je veux juste vous réentendre sur, par rapport à votre situation, votre situation économique, là, qui bien sûr est évidente, comment vous, chez... dans votre secteur, vous voyez votre capacité de réduction des émissions de GES, là, par rapport à votre activité propre?
Puis je vais garder du temps ensuite pour, bien sûr, parler de l'utilisation de la biomasse forestière comme type de combustible pour d'autres secteurs des activités économiques du Québec, mais, chez vous, c'est... quel est le potentiel de réduction par rapport au transport de la marchandise, par rapport à la technologie utilisée dans les coopératives forestières?
La Présidente (Mme Doyer): M. Gagné.
M. Gagné (Eugène): Bon, disons que, de façon générale, c'est mieux d'être dans le peloton de tête que dans le peloton de queue. Alors, le fait d'avoir adhéré au WCI, c'est sûrement une mesure intéressante pour le Québec. Mais de quelle façon ça impacte les opérations chez nous? Si vous parlez de... d'étalonnage par rapport à l'industrie, comme vous le mentionnait tout à l'heure Jocelyn, il y a des efforts qui sont faits dans ce sens-là depuis déjà plusieurs années. Le coût du carburant, dans l'exploitation des forêts actuellement, étant donné les distances de transport, c'est une préoccupation fondamentale. Il y a différentes stratégies qui ont été utilisées. Des cours de conditionnement pour transporter du bois plus sec pour diminuer la charge en poids et avoir plus de volume, des équipements qui sont plus légers. Il y a des travaux qui sont faits avec FPInnovations, division Feric, pour former les conducteurs, pour réduire les consommations. Il y a une série de mesures puis, si c'est dans ce sens-là, les coopératives vont être les premières à s'investir pour aller avec la technologie.
Mais, demain matin, c'est des gros consommateurs de carburant puis ça impacte les coûts rapidement, si c'est une mesure qui est appliquée, là, à la grandeur du Québec sans distinction. J'ai bien aimé ce qu'on a entendu précédemment, là, où il y avait des particularités, tu sais... Pour se déplacer à un camp forestier, ce n'est pas possible de prendre le transport en commun. Alors, peut-être que la façon de moduler la taxation ou d'autres mesures d'aide peuvent permettre de passer à travers une situation qui est plus difficile pour certaines industries.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Donc, je comprends de votre réponse que vous dites: Quand il y aura des possibilités, on va être bons joueurs et on va être là, mais je comprends, là... j'interprète, je vais le dire carrément, j'interprète vos réponses en disant que vous ne voyez pas beaucoup de dimensions, de secteurs ou... par rapport à votre production propre où vous voyez des possibilités de réduction, parce que vous dites: On est des grands consommateurs de mazout et, dans ces activités-là, il n'y a pas encore beaucoup à l'horizon, là, de l'innovation technologique qui ferait qu'on pourrait se dire qu'il y a des grands potentiels de réduction.
M. Gagné (Eugène): Bien, il y a plusieurs choses, tu sais, vous savez que... on l'a mentionné un petit peu dans le mémoire, mais il y a des travaux pour développer de la biohuile. On pourrait utiliser ça dans les équipements. Les équipements sont de plus en plus performants, alors des équipements... le parc d'équipements plus vieux... étaient des plus grands consommateurs que les équipements plus récents. Il y a... il y a vraiment beaucoup de mesures qui peuvent être prises pour réduire. Mais c'est sûr que ça prend un temps de réponse, là, pour permettre que ça se fasse et puis, dans le contexte actuel, les entreprises sont très affaiblies par la crise de l'industrie forestière. Donc, c'est ça, la réalité.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Bien, je vous posais la question parce que, avant vous, on a rencontré les représentants de l'industrie minière et, moi, je dis: Il faut appeler un chat un chat. Tu sais, il faut parler des vraies choses, et ça m'amène peut-être à vous demander de commenter le tableau à la page 32. C'est un tableau où, par secteur, on essayait de voir les impacts... J'admets que c'est des modélisations macroéconomiques, mais, dans le tableau, il y a le secteur de l'agriculture et de la forêt, et, ici, je dirais que, selon les scénarios, c'est des impacts positifs qui, graduellement, va vers un impact légèrement négatif avec une cible de moins 20 %.
Mais je me demandais si vous vouliez le commenter un peu plus à la lumière de votre activité, de l'activité forestière. Parce qu'en fait... Ce que je veux... Ce que je veux juste vous entendre clairement, puis je vais essayer de me garder du temps pour parler des trois autres aspects. C'est que vous êtes en train de dire que, par rapport au scénario proposé, qui est un scénario qui dit: Il y aura un marché du carbone, donc un plafonnement, l'obligation d'acheter des crédits carbone pour rencontrer ce plafonnement et la modélisation qui dit qu'il y a une redevance qui est plus ou moins importante, mais il y a une augmentation de la redevance sur les hydrocarbures. Vous êtes en train de nous dire que ça a un impact sur votre industrie. Quand vous lancez l'appel à la prudence, c'est que vous dites: Nous, actuellement, on est des grands consommateurs de mazout, et ça, en soi, ça a un grand impact sur notre industrie.
La Présidente (Mme Doyer): M. Lessard.
n(16 h 30)nM. Lessard (Jocelyn): En fait, tout est question de compétitivité. Si le Québec, qui est déjà le principal contribuable aux efforts qu'on a faits au Canada depuis longtemps, continue d'être à l'avant-garde puis se fixe des cibles plus ambitieuses que toutes les administrations autour, il faut qu'on soit conscients des effets. Nous, M. Gagné l'a répété, on en fait, des efforts. On va optimiser le transport, on va encore regarder le territoire pour voir comment on peut faire mieux, mais on ne produit pas de pétrole au Québec. Puis, tant qu'on en aura besoin dans nos équipements, si le coût pour obtenir le carburant est plus élevé que chez nous, on est heureux de voir qu'il semble que ce ne soit pas nous les pires, mais ça peut avoir un effet.
Donc, c'est pour ça que, quand on a consulté nos membres avant de déposer le mémoire... Les coopératives forestières qui font des opérations forestières sur ce grand territoire sont préoccupées de cette question-là, c'est ce qui... et elles nous ont demandé d'être positifs dans notre contribution à la consultation, mais quand même de souligner cette dimension-là qu'on ne peut pas perdre de vue parce que, si, par les efforts qu'on fait au Québec, on n'est plus capables d'opérer en forêt... C'est déjà très difficile, notre mètre cube coûte déjà plutôt cher justement à cause des distances, mais... C'est pour ça qu'on devait au moins le mentionner, là.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la ministre, il vous reste un peu plus de sept minutes.
Mme Beauchamp: O.K. Je voudrais vous entendre, parce qu'à la fois la Coalition Bois et à la fois le Conseil de l'industrie forestière et vous, vous venez nous parler des potentiels sur la question de la reconnaissance de la séquestration de carbone lorsqu'on utilise le bois dans la construction, notamment, de bâtiments ou d'infrastructures. Est-ce que vous pouvez donner un éclairage aux membres de cette commission sur la... je dirais, les avancées qu'il y a dans la négociation internationale quant à cet enjeu? Parce que vous mettez ça en lumière, c'est extrêmement intéressant; en même temps, à ma connaissance, là, c'est des enjeux extrêmement complexes en termes de quantification et de calcul de la contribution de cela, sur qu'est-ce qu'on prend en compte. Est-ce qu'on doit tenir en compte ce que ça veut dire pour replanter des arbres qui... Vous-même, vous le... vous décrivez assez bien, dans votre mémoire, cette question de la... des différentes contributions en termes d'évitement de GES dans... pour une forêt selon son âge.
Donc, pouvez-vous donner un éclairages aux membres de cette commission sur l'état, selon vous, des discussions et un peu sur vos souhaits quant au leadership que le gouvernement du Québec pourrait prendre sur cette question de reconnaissance?
La Présidente (Mme Doyer): M. Gagné.
M. Gagné (Eugène): Oui. Bien, en fait, je vais essayer. Il y a des éléments qui sont acquis internationalement, par exemple la substitution. C'est reconnu, puis, selon la Stratégie d'utilisation du bois du Québec, en augmentant l'utilisation du bois en substituant des produits qui sont de grands émetteurs de gaz à effet de serre, comme l'acier et le béton, on a un gain automatiquement. La question de la reforestation aussi, c'est reconnu. Par contre, il faut absolument parler de sites, là, qui étaient déboisés, hein, on ne parle pas de sites, là, qui seraient... simplement augmenter la production.
Ce qui est nouveau ? puis, nous, on l'a appris la semaine dernière, là, en fait, de M. Beauregard, là, le doyen de la Faculté de foresterie ? ce sont les discussions qui sont en cours. Puis quand on parle à des spécialistes de la question... Nous, on ne prétend pas être spécialistes, mais ces discussions-là sont en cours depuis pratiquement Kyoto. Le dossier forestier est un dossier très complexe, et puis on n'était pas capables de le régler en 1992. Et puis les discussions se sont poursuivies, et puis il semble que la position européenne est excessivement intéressante pour le Québec. Ce qu'on souhaite, et on l'a indiqué dans le mémoire, c'est que le gouvernement du Québec appuie cette position-là, parce que le Québec, c'est un pays forestier, et puis on aurait des avantages concurrentiels très intéressants à ce que ce... cette reconnaissance-là, tant de la séquestration que de l'augmentation de la production forestière.
Donc, autrement dit, au Québec, là, si notre possibilité forestière est de 35 millions de mètres cubes, si on l'augmentait de 5 millions de mètres cubes, c'est pratiquement une tonne pour un mètre cube, donc on aurait 5 millions de tonnes de séquestrées de plus par année, tu sais, pour dire un chiffre. En plus, ce bois-là supplémentaire, ça crée de l'activité économique. Si on le réutilise après puis qu'on le met sur le marché, puis il est dans l'industrie des produits forestiers ? pas le papier, mais on parle des produits de bois ou des bois d'apparence, meubles, et tout ça ? bien, on a encore un gain en séquestration. Donc, on ne pourrait pas... on ne pourrait pas espérer mieux en tant qu'industrie forestière, qu'on obtienne cette reconnaissance-là.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Je voudrais savoir, à la fin de votre mémoire, quand vous parlez des potentiels de réduction liés à cette question, liés, donc, je pense... Je suis d'accord avec vous qu'il y a des intérêts québécois derrière cette question, mais on sait aussi, donc, que l'état des discussions pour Copenhague sont assez ardues, et cette question-là aussi, donc, elle est... elle est assez ardue. Mais vous chiffrez, donc, des potentiels de réduction.
Je veux juste savoir: Quand vous chiffrez ces potentiels-là, est-ce que ça... c'est-u des chiffres bruts ou ce sont des chiffres nets qui tiennent compte par ailleurs des contributions en CO2 que prend la reforestation ou la plantation d'arbres au Québec par la suite? Donc, autrement dit, quand vous me parlez que c'est 1,5 mégatonne de CO2, à la toute... en conclusion de votre mémoire, là, ça, c'est plus lié carrément à l'intégration du bois dans les nouveaux bâtiments. Quand vous mettez ce chiffre, est-ce que je dois par la suite, dans les calculs, déduire la question des nouvelles forêts, ou si vous dites que c'est un chiffre net?
La Présidente (Mme Doyer): M. Gagné.
M. Gagné (Eugène): ...chiffre qui est isolé de... En fait, ce chiffre-là est simplement pour... on parle de la substitution de l'acier puis le béton, 1,5 million de tonnes. Pour ce qui est des forêts, là, on a mis un chiffre pour la reforestation des landes forestières. Il y a 1,6 million d'hectares. On a mis un objectif de 30 %, là, parce que ça ne donne rien de penser qu'on peut tout faire, là, puis il y a des coûts associés à ça, puis c'est sur une période très longue. Donc, a mis 30 %. 30 %, on a calculé selon les chiffres, là, de Claude Villeneuve et son groupe, 4 mètres cubes, je crois, là, dans... En fait, il y a une production qui est indiquée, là, puis ça nous donnait... Attendez un petit instant que je le retrouve. C'est dans les puits de carbone. On a... c'est ça, 30 % de la superficie. Ça donnerait 2 millions de tonnes par année, à moyen terme.
La Présidente (Mme Doyer): 1 min 30 s, Mme la ministre.
M. Gagné (Eugène): 30 % de 1,6 million d'hectares reboisés...
Mme Beauchamp: Mais ma...
M. Gagné (Eugène): ...selon des rendements qui sont très... relativement faibles, là, parce qu'on est dans une zone nordique.
Mme Beauchamp: Tout à fait.
M. Gagné (Eugène): On aurait des meilleurs résultats en forêt plus méridionale, là, mais c'est la situation.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Mais ma question était liée par ailleurs aux activités de reboisement liées à l'exploitation forestière...
M. Gagné (Eugène): C'est net. C'est net.
Mme Beauchamp: ...de votre industrie, là. Je ne parle pas, effectivement, de la question de planter des arbres dans les landes qui sont souvent, là, au nord du lac Saint-Jean, et tout ça. Donc, je me... je voulais juste savoir si vos chiffres ici tenaient compte de la contribution en CO2 des nouvelles...
M. Gagné (Eugène): Des activités?
Mme Beauchamp: ...des nouvelles...
M. Gagné (Eugène): Oui.
Mme Beauchamp: O.K.
M. Gagné (Eugène): En fait, là, le calcul est basé sur les études de l'UQAC, là, et puis, eux, ils mettent toutes les dépenses pour préparer le terrain, toutes les pertes qu'on a en CO2 puis les gains, puis c'est le net, à la fin, qui est indiqué.
La Présidente (Mme Doyer): 30 secondes.
Mme Beauchamp: Puis, excusez-moi, mais juste pour être bien certaine de comprendre: Est-ce que, donc, la nouvelle forêt... c'est-à-dire la plantation de nouveaux arbres qui, eux, émettent des CO2, est-ce que ça aussi, c'est tenu en compte? Juste pour des fins de compréhension de votre mémoire.
M. Gagné (Eugène): Toutes... Oui.
Mme Beauchamp: Vous me dites oui.
M. Gagné (Eugène): Toutes les activités de reboisement, le transport des plants, la... toutes les activités sont incluses, et c'est le net selon l'étude de l'UQAC, là. C'est référence à cette étude-là.
La Présidente (Mme Doyer): Alors, je vais donner la parole au député de L'Assomption, qui représente l'opposition officielle dans ce dossier.
n(16 h 40)nM. McKay: Merci, Mme la Présidente. Bonjour. Bon après-midi, merci de vous être déplacés pour venir nous faire part de vos recommandations et vos observations. Je trouve votre intervention particulièrement... particulièrement intéressante et méritoire, dans la perspective où effectivement vous êtes... vous représentez une industrie qui est dans... qui connaît des difficultés économiques importantes, et vous... mais vous regardez quand même de l'avant les perspectives, les nouvelles avenues de développement. Et malgré, donc, ce contexte difficile, bien que vous nous appelez à la prudence, là ? et je pense que c'est important de le faire ? vous mettez quand même l'accent sur, justement, de nouvelles avenues et vous faites... lancez un appel aussi au gouvernement à la cohérence.
Puis une chose qu'on me faisait remarquer, c'est que, bon, vous êtes, je crois, le... on l'a dit, le troisième groupe représentant différents... différents secteurs de l'industrie de la... de la forêt qui venez nous voir, et vous faites preuve d'une remarquable cohérence, parce qu'effectivement on voit bien que, bon, il y a des discussions actives, vous vous parlez, à la différence, on dirait, de certains ministères, des fois, dans les différents gouvernements. Alors, de ce point de vue là, vous prêchez un peu par l'exemple, alors je pense que ça vaut la peine de le souligner.
Peut-être demeurer dans ce thème de la cohérence. Lorsque vous dites qu'il va falloir que le gouvernement mette en place une stratégie plus cohérente, bon, vous donnez certains exemples dans le mémoire. Je ne sais pas si vous pourriez expliciter un peu là-dessus. Quels sont les endroits, là, où le bât blesse, où vous avez un peu plus de résistance lorsque vous parlez de la conversion à la biomasse? Peut-être, si on veut avoir une approche un peu équilibrée, quels sont les endroits qui vont bien et les endroits où il y aurait de l'amélioration à apporter?
La Présidente (Mme L'Écuyer): M. Gagné.
M. Gagné (Eugène): La liste est un petit peu longue, mais je vais essayer de faire ça rapidement. Bon, il y a... il y a certains ministères... C'est une question de programmes, mais l'élément essentiel, c'est de reconnaître la biomasse comme une énergie renouvelable qu'on peut appliquer dans des programmes d'efficacité énergétique. Ça, c'est... C'est ça, la base de tout le problème.
Donc, au ministère de l'Éducation, on a un programme pour réduire la consommation d'énergie. On peut mettre de la biomasse, il n'y a pas de problème, mais en fait il faut que ça réduise le niveau de consommation de kilowattheures, niveau de consommation énergétique.
Donc, comme je vous ai expliqué un petit peu en présentation, si je fais de la géothermie, j'utilise le sol pour produire de l'énergie thermique à partir d'une pompe à chaleur, j'ai besoin d'électricité pour le faire, puis, bon, ça, on reconnaît que finalement ce n'est pas produire de l'énergie, on reconnaît que c'est de l'énergie qui est... qui est gratuite, on pourrait dire. Mais en fait on n'a pas amélioré le bâtiment, on n'a pas fait rien de particulier sauf substituer une énergie, l'énergie qui est contenue dans le sol, par... on a substitué d'autre chose qui était le mazout ou l'électricité.
Quand il est question de la biomasse, on ne peut pas voir ça comme ça, je ne sais pas trop pourquoi, parce qu'en fait la biomasse, c'est de l'énergie solaire qui est captée par la plante, puis qui est transformée en énergie chimique, puis qui est relibérée lors de la combustion. Donc, on pourrait dire: C'est de l'énergie solaire, puis là on serait correct. Ça fait que c'est simplement de la nomenclature. Et Hydro-Québec, tous ses programmes, Hydro-Québec va... a des programmes pour la géothermie puis a des programmes pour le solaire. La biomasse, oh, ça, ça, on ne peut pas toucher à ça, tu sais.
Le ministère de la Santé a un programme très intéressant, et lui aussi avait des cibles de réduction de consommation, d'efficacité énergétique, mais... je ne sais trop pour quelle raison, mais, eux, ils acceptent les projets de biomasse sans problème comme étant une mesure d'énergie renouvelable et puis qui permet d'avoir de l'aide pour le réaliser.
Les programmes fédéraux, il n'y a aucune adaptation pour produire de l'énergie thermique avec la biomasse. Il y a un programme pour de l'électricité. Comme je disais tantôt, donner une subvention pour faire de l'électricité avec de la biomasse puis, à la fin, utiliser l'électricité en chauffage, là, c'est... ce n'est pas une bonne idée. Mais faire de l'énergie direct avec la biomasse, c'est zéro. En écoénergie... un programme écoénergie sur la rénovation des bâtiments, quelque chose comme ça, il y a... encore, il faut réduire la quantité de gigajoules utilisés. Donc, le solaire, le thermique, c'est beau; biomasse, ce n'est pas bon.
Autre élément, malgré que les programmes... On est très satisfaits du programme mazout lourd, mazout léger, malgré qu'il y a des petites choses qui pourraient être rediscutées ultérieurement, mais pour les nouveaux bâtiments, encore une fois, c'est zéro, tu sais. Quand on arrive à un nouveau bâtiment, on pourrait faire le choix de dire: On est en région, puis il y a de la biomasse disponible. Ce n'est pas possible. Il faut aller vers... seulement en substitution. Donc, on pourrait le faire en solaire ou en... plus en géothermique, je dirais, il y a plus de possibilité pour ça, mais pour la biomasse, ce n'est pas le cas.
La Présidente (Mme Doyer): M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Oui. Donc, concrètement, finalement, vous nous dites: C'est... qu'il y a des facilités, par exemple, pour convertir un hôpital, la chaufferie d'un hôpital vers la biomasse, du mazout vers la biomasse. Ça, c'est reconnu par le ministère de la Santé et des Services sociaux. Par contre, si on veut faire la même chose dans une école, ce ne serait pas possible.
M. Gagné (Eugène): Oui. Bien, en fait, il y a un programme pour aider les commissions scolaires ou les institutions comme... collèges, universités. Le programme permet de financer les investissements à même la récupération, à même les économies. Donc, on peut utiliser de la biomasse avec les prix que je vous parlais tout à l'heure, on fait des économies, mais ce n'est pas applicable au ministère de l'Éducation parce que la biomasse n'est pas... on n'arrive pas à l'efficacité de moins 14 % ou 15 %. Dans le cas de l'hospitalier, en fait, ce sont les économies qui vont rembourser les investissements. Si c'est plus de sept ans, il va y avoir une subvention qui va être donnée à l'hôpital pour lui permettre de ramener sa période de retour à sept ans, puis il n'y a... il n'y a pas de problème, là, ça fonctionne.
La Présidente (Mme Doyer): Merci, M. Gagné. D'ailleurs, je vous donnerais un exemple, si vous me permettez, à titre de présidente...
M. Gagné (Eugène): Bien oui!
La Présidente (Mme Doyer): ...parce que j'ai un projet de biomasse, de chaufferie à la biomasse dans la vallée de la Matapédia, justement avec la coop forestière de la vallée, et l'hôpital d'Amqui est partenaire, et la commission scolaire des Monts-et-Marées était partenaire, mais elle s'est malheureusement retirée, probablement dans la... pour des raisons dont vous nous parlez.
M. Gagné (Eugène): C'est fort probable.
La Présidente (Mme Doyer): Voilà. M. le député.
M. McKay: Alors, bon, je pense que votre point a été établi assez clairement, là. Espérons que les éminents membres du Conseil des ministres qui écoutent, qui vous entendent aujourd'hui, sauront poser les gestes nécessaires pour corriger cette situation-là.
Je voudrais revenir sur un point où Mme la ministre de l'Environnement vous a demandé aussi un peu quel serait l'impact sur la distribution de mazout, mais, je suis désolé, je n'ai pas bien saisi la réponse. Alors, le point qui nous a été fait par les distributeurs de produits pétroliers, c'était le fait qu'en distribuant... le réseau de distribution, donc, des différents produits pétroliers en région repose en partie... en bonne partie sur ce qu'il reste, là, de la part de marché du chauffage résidentiel au mazout, qui est à peu près 11 % du marché résidentiel, donc du chauffage résidentiel qui se fait au mazout encore au Québec, et c'est quand même, si vous voulez, un peu la base qui permet aussi de faire vivre le réseau de distribution du diesel coloré pour l'agriculture et différents produits dont... que, vous, vous utilisez.
Donc, est-ce qu'advenant le cas où on encourage massivement la substitution du mazout vers la biomasse... Comment est-ce que vous voyez... comment est-ce que... Est-ce que vous ne craignez pas d'être... de devenir en manque, là, de d'autres produits pétroliers comme les lubrifiants puis le mazout ou le diesel que vous utilisez dans vos opérations?
La Présidente (Mme Doyer): M. Gagné.
M. Gagné (Eugène): Bien, en fait, c'est sûr que ça va... ça pourrait compliquer les choses. S'il y a moins de volume, il y a des points de service qui risquent de fermer, là. Par contre, il y a toujours de l'essence, le diesel... Puis en fait ça a un impact sur le coût, ça, hein? On va peut-être transporter sur une plus grande distance, là, mais le niveau de consommation des coopératives, si on prend le cas des coopératives, est quand même assez important pour qu'elles aient leurs propres réservoirs et puis que le camion vienne le remplir en pratiquement un seul transport, là. Donc, il part de... il part de Québec, là, chez Ultramar, puis il se rend... Je ne sais pas s'il y a des particularités, là, mais c'est sûr que plus on va diminuer, plus ça va avoir un impact sur le coût parce qu'on va être plus loin pour avoir un service, là.
n(16 h 50)nLa Présidente (Mme Doyer): M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Oui. Bien, vous avez parlé brièvement de l'éthanol cellulosique. Est-ce que quand même vous voyez un potentiel là? Parce qu'on parle...
Bien, entre autres, je ne sais pas si vous avez vu, il y a un livre dont on parle beaucoup puis dont on a entendu parler pas mal ici, c'est de Pierre Langlois, là, Rouler sans pétrole, où il nous prédit que, d'ici à 2025, nous pourrions, au Québec, complètement alimenter nos flottes de véhicules, la flotte actuelle en tout cas, strictement avec de l'électricité et du biocarburant de deuxième génération produit au Québec plutôt que d'importer les carburants. Est-ce que ce sont des perspectives vers lesquelles vous vous êtes... sur lesquelles vous vous êtes penchés?
M. Gagné (Eugène): Bien, on a étudié la filière, puis finalement elle comporte un intérêt certain. Par contre, on lui voit certains défauts, si on peut dire, là. En tout cas, c'est tout en comparant qu'on trouve quel qui... la meilleure option pour nous.
C'est sûr que la filière d'éthanol cellulosique qui utilise toutes sortes de déchets, là, organiques... Parce que cette filière-là peut transformer n'importe quel déchet organique en éthanol. Donc, si elle est près d'un dépotoir ou... En fait, là, actuellement, dans leur usine pilote, là, Enerchem, en Estrie, ils utilisent des poteaux d'Hydro-Québec, là, créosotés, puis ils sont capables d'utiliser ça sans problème, mais le coût de base est très, très faible.
Donc, nous, on est des opérateurs forestiers puis on ne voit pas le jour où il y aurait une rentabilité à utiliser de la biomasse forestière, qui a un coût quand même, pour la transférer en éthanol, avec les coûts, disons, actuels de l'essence. Ça ne peut pas être compétitif, tu sais. Donc, actuellement, il faut que la ressource de base, la matière organique qu'utilise le procédé d'éthanol cellulosique soit très faible pour avoir un produit, à la fin, qui est compétitif. Donc, c'est une filière que, nous, on trouve intéressante dans un contexte ou dans un cadre particulier, mais moins pour aller récolter de la biomasse en forêt.
La Présidente (Mme Doyer): M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Juste pour préciser, est-ce que vous parlez, quand vous parlez de récolter la biomasse, donc, de récolter des arbres au complet ou est-ce que vous parlez de tout simplement récupérer les résidus forestiers?
M. Gagné (Eugène): Bien, en fait, si c'étaient des arbres... Ça pourrait être aussi des arbres, là, qui n'ont pas de marché, mais, disons, actuellement, le coût de la biomasse qu'on évalue est basé sur la cime de l'arbre et les branches, puis il y a une partie du coût qui est absorbée par l'opération régulière de récolte du tronc pour l'industrie. Mais si on... Puis ça devient un coût, à la limite, un peu marginal, où, quand l'opération est intégrée, ça coûte moins cher, disons, que si on faisait une opération 100 %... disons qu'on utiliserait le bois pour, mettons, une opération simplement biomasse, ce serait plus cher que les prix que je mentionnais tout à l'heure, de 100 $ la tonne, parce qu'actuellement ça coûte plus cher que ça à l'industrie, 100 $ la tonne, livrée à son usine. Donc, si on faisait la même chose, ça coûterait aussi cher que livrer du bois à l'usine actuellement, puis ça coûterait très cher, l'éthanol, au bout de tout ça, c'est évident.
La Présidente (Mme Doyer): M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Puis à partir de quel prix du pétrole est-ce que ça pourrait devenir rentable? Est-ce que c'est vraiment...
M. Gagné (Eugène): Je ne suis pas... je ne suis pas en mesure de vous donner de chiffres, là, précis là-dessus, mais Enerchem, là, ils parlent de s'installer près des dépotoirs, là, puis, dans le fond, de se faire payer pratiquement pour... Tu sais, au lieu d'enfouir, on utilise le matériel. Donc, nous, on vous parlait de 100 $ la tonne, tantôt. Donc, si on met 100 $ la tonne puis ils font 400 litres, ça fait déjà 0,25 $ du litre pour la matière première. Ça fait qu'on ajoute ça au prix actuel.
La Présidente (Mme Doyer): M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Bien, en fait, je pense qu'on a eu... on a eu pas mal d'informations, là. Les questions que je voulais poser, certaines ont déjà été posées, alors...
La Présidente (Mme Doyer): Il reste quatre minutes.
M. McKay: Je pense qu'on est... on peut... on se considère suffisamment informés. Je vous remercie beaucoup.
La Présidente (Mme Doyer): Merci beaucoup, messieurs, de votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends pour quelques instants, le temps de donner la place à la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec.
(Suspension de la séance à 16 h 56)
(Reprise à 16 h 59)
La Présidente (Mme Doyer): Alors, M. Arsenault, M. Laliberté, bienvenue à la commission. J'aimerais que vous vous présentiez, ainsi que la personne qui vous accompagne.
Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec (FTQ)
M. Arsenault (Michel): Bonjour, madame. Merci. Au départ, merci pour l'invitation, Mmes et MM. les députés, Mme la ministre. Je suis Michel Arsenault, je suis le président de la FTQ, et je suis secondé par Pierre Laliberté, qui est conseiller politique à la FTQ.
n(17 heures)n Écoutez, on a eu votre invitation il y a quelques semaines seulement et, Pierre et moi, on était à l'extérieur du pays. Et je tiens à m'excuser du fait qu'on vous présente le mémoire seulement qu'aujourd'hui. Normalement, lorsqu'on vient en commission, on envoie ça quelques jours d'avance, quelques semaines d'avance, mais dans ce cas-ci, à cause du court délai, du fait qu'on était à l'extérieur, on a travaillé là-dessus toute la fin de semaine. Ça fait que c'est la raison du délai dans notre envoi du mémoire.
Vous savez, la FTQ, c'est une centrale syndicale de plus de 500 000 membres. Tous les secteurs économiques y sont représentés, autant industriels qu'énergiques... énergétiques, excusez-moi. On représente 60 %... c'est-à-dire 60 % de nos membres sont du secteur privé, 40 % du secteur public, parapublic. 33 % de nos membres sont des femmes. Puis on est également présents dans toutes les régions du Québec.
Écoutez, on approche le présent problème avec beaucoup d'humilité. On n'a pas la prétention de tout savoir puis de tout connaître. Puis vous devez admettre avec moi, aussi, que c'est une situation fort complexe. Les gaz à effet de serre, on le sait tous, là, sont responsables ? scientifiquement, en tout cas, c'est prouvé ? du réchauffement de la planète, puis les gaz à effet de serre sont également produits par les humains au niveau de la production puis de la consommation. Il y a bien sûr un lien de cause à effet entre notre consommation hydrocarbone plus les gaz à effet de serre et le réchauffement de la planète.
La FTQ, bien, on prend acte de la situation puis on est... on est bien sûr préoccupés. Puis d'ailleurs on va être présents dans... au début décembre, à Copenhague, avec notre affiliation internationale qui est la CSI, la Confédération syndicale internationale. Et Pierre Laliberté, qui m'accompagne aujourd'hui, va être là avec Louis Bolduc, qui est un des vice-présidents de la FTQ puis qui est également responsable du dossier de l'environnement, mais qui ne pouvait pas être... il ne pouvait pas être ici aujourd'hui.
En effet, à la FTQ, on pense que le temps est venu de donner un coup de barre, un coup de barre majeur, mais en même temps, au Québec on a l'opportunité de faire une pierre deux coups: on a l'opportunité de réduire nos gaz à effet de serre pour les générations futures. Je veux dire, c'est fort inquiétant pour ceux qu'on... ceux qui pensent aux générations futures. Puis ceux comme moi, qui ont des enfants, des petits-enfants, c'est encore plus inquiétant. Et en même temps l'autre coup, c'est qu'on a un potentiel de développement économique important. Je pense bien sûr aux ressources renouvelables qu'on a au Québec: l'hydroélectricité, les éoliennes, la biomasse ? je voyais que vous en discutiez tout à l'heure.
Et le document que vous avez présenté représente cinq questions. Dans le texte, là, je vous fais grâce de la lecture de tout ça, là, je vais résumer ce qui a... ma réponse des cinq questions que vous nous posez.
La première, c'est le principe directeur. Bon, bien, écoutez, je l'ai dit tout à l'heure, la science est notre guide. Et le GIEC, là, le groupe intergouvernemental en... les experts sur le climat, dit qu'on devrait avoir une réduction de 25 % à 40 %, et, de votre côté, vous avez modélisé les... jusqu'à 20 % en tenant compte, là, de la croissance économique, de l'emploi, du revenu, le revenu des ménages, revenu des individus. Et on se pose une question, là: Comment ça se fait que vous n'avez pas fait ça à l'ordre de 25 %, que vous l'avez fait jusqu'à 20 %? On aurait aimé voir ça, nous autres, à 25 %, voir de quoi ça a l'air, quand on tient compte que le GIEC parle d'une réduction de 25 % à 40 %.
À la... La position syndicale. Je vous ai dit tout à l'heure: On est membres d'une association internationale. Et la raison de notre absence du Québec il y a 15 jours, justement, on était en rencontre en Allemagne avec ce groupe-là, la CSI. Et, écoutez, on va prêcher au Québec puis partout sur le globe, le monde syndical va prêcher une transition équitable. Et, moi, quand je regarde ce qui s'en vient au niveau des gaz à effet de serre... Puis je pense toujours ? mon expérience de syndicaliste ? il y a 25, 30 ans de ça, on se souviendra, quand on s'est mis à parler des changements technologiques, comment est-ce qu'on avait peur de ça et comment est-ce qu'on a dû s'adapter avec des programmes d'ajustement au niveau des changements technologiques, parce qu'on s'est rendu compte d'une chose: c'est que les industries qui ne voulaient pas changer au niveau technologique, tu étais voué à la fermeture. Et dans ce cas-ci, si tu ne veux pas changer au niveau des gaz à effet de serre, je veux dire, tu vas être voué à aller même jusqu'à la disparition de certains peuples puis la pollution de nos enfants, de nos petits-enfants, tout ça. Ça fait que ce qu'on dit, nous autres, c'est: Il faut... Ce qu'on dit, dans le fond, c'est que les consensus... les consensus, excusez-moi, ça amoindrit les résistances, et, comme on a fait il y a 25, 30 ans passés avec les changements technologiques, je pense qu'on va être obligés de faire pareil avec le sujet qui nous préoccupe.
Puis, quand je regarde les États-Unis, les Américains, ils ont ce qu'ils appellent le Clean Energy Security Act, qui contient un programme d'ajustement et de formation professionnelle pour les gens qui vont... qui vont perdre leurs emplois ou qui vont être affectés par les changements qui vont devoir s'imposer à travers les années, si on veut réduire les gaz à effet de serre. Et, nous autres, on pense que votre gouvernement pourrait, avec les outils que vous avez, faire des études d'impact plus fines sur le comportement, par exemple, des industries visées suite aux législations qu'on va passer.
La question n° 2, au niveau de la... ? excusez-moi ? priorité relative des secteurs émetteurs de gaz à effet de serre, on est, à la FTQ, pour une approche différenciée, c'est-à-dire secteur par secteur, en tenant compte du contexte. Vous savez, depuis 1990, le secteur manufacturier a fait son effort au Québec, et on reconnaît ça, et l'amélioration a ses limites. Je veux dire, quand tu es... quand tu es embarqué dans le processus depuis 1990, ce n'est pas comme quelqu'un qui embarque demain matin, et on pense que l'amélioration est plus limitée.
Et on cite en exemple, à la FTQ, par exemple, les alumineries. C'est probablement le secteur, au niveau mondial, le plus performant au monde en ce qui regarde l'amélioration qui a été faite en ce qui regarde les gaz à effet de serre. Et en même temps personne ne doit être absous, puis... mais ce qu'on vous dit, dans le fond: Il faut tenir compte de ce qui a été fait, il faut tenir compte de ce qui a été fait, et chaque secteur, quant à nous, devra ou pourrait être comparé avec ses pairs: les cimenteries avec les cimenteries ailleurs; la sidérurgie avec la sidérurgie ailleurs; les mines avec les mines d'ailleurs; les producteurs forestiers avec les producteurs forestiers d'ailleurs, etc.
Et on pense qu'un cadre réglementaire au Québec devrait être fait le plus vite possible, parce qu'on a une crainte, on a une crainte de votre grand frère d'Ottawa qui pourrait établir un cadre réglementaire qui ne tiendrait pas compte de ce qui a été fait au Québec depuis 1990, parce qu'eux n'ont pas tout à fait les mêmes problèmes que nous, avec les... avec les sables... bitumineux, excusez-moi, dans l'Ouest canadien. Et on est contre la... vous allez me permettre l'expression anglaise qui dit «one shoe fits all»; ça peut devenir dangereux. Et le Québec, on est en avance sur le reste du Canada, puis, moi, je pense... nous, on pense que le cadre réglementaire devrait être fait le plus vite possible, avant qu'on soit encarcané dans un cadre... un cadre canadien. Et faisons comme d'habitude, soyons plus vite qu'Ottawa.
Au niveau du secteur des transports, ça, c'est fort inquiétant. On a eu une augmentation de 22 % des gaz à effet de serre depuis 1990, contrairement à bien d'autres secteurs comme les alumineries, tout ça, puis il y aurait de l'amélioration à apporter, quant à nous, je veux dire... entre autres le transport en commun. Ça fait partie des politiques de la FTQ depuis de nombreuses années. Si on avait un transport en commun plus adéquat, électrifié, entre autres, par exemple. Moi, je demeure sur la Rive-Sud de Montréal; je pense à ça à tous les jours. Je prends mon auto à Varennes, je m'en vais travailler au centre... pas au centre-ville, mais sur Métropolitain, je reviens le soir. On est un par voiture. Ça n'a pas de maudit bon sens! Ça n'a pas de bon sens. Et là, tu sais, moi, je suis sur le tunnel, mais vous regardez ce qui se passe sur Jacques-Cartier puis toutes les autres entrées de Montréal... Puis quand tu vas à New York, bien, c'est encore pire. Mais, tu sais, vous allez me dire que ce n'est pas votre problème, ici, mais ça n'a pas de bon sens. Il faut absolument investir dans le transport en commun, un transport en commun électrifié qui ferait en sorte qu'on réduirait de façon importante les gaz à effet de serre dans le secteur du transport.
Et un autre point important aussi, c'est le... dans le transport individuel. Le transport individuel, les batteries rechargeables, moi, je pense qu'on pourrait investir là-dedans, le gouvernement, l'Hydro, donner les incitatifs pour la recherche, pour électrifier les véhicules de livraison, de taxi, etc. Des véhicules qui font moins de 100 kilomètres par jour dans les grandes... à Montréal puis à Québec, il y en a des centaines et des centaines, de ça. Puis on pourrait même un jour les produire avec notre aluminium, notre acier, la technologie. On avait un programme technologique, à l'Hydro, qui a été arrêté, là-dessus, il y a quelques années, malheureusement. Et ce serait une nouvelle source de revenus pour le Québec si on pouvait faire des avancées là-dedans, et on croit que le gouvernement pourrait inciter les gens à avancer là-dedans.
Vous savez, le cours actuel du pétrole, c'est 13 milliards par année, au Québec. C'est beaucoup d'argent, beaucoup d'argent. On se vante à raison... d'être capable de vendre... je pense, c'est 1 milliard par année d'électricité. Mais pensez à ça comme il faut, là, quand je pense à ça, on achète pour 13 milliards par année de pétrole, 80 %, 85 % de ça exclusivement dans le transport. Et, quand on regarde, nous, les chiffres de l'Agence internationale de l'énergie, on part... d'une façon très conservatrice, le baril de pétrole est à 70 $ aujourd'hui; il pourrait venir jusqu'à 110 $ dans les années à venir.
On est dans un virage. Il faut prendre ce virage-là parce que, si on ne le prend pas à un moment donné puis on continue à utiliser le pétrole dans le transport comme on fait au Québec, ça va mal aller au niveau économique tantôt. Je pense qu'on devrait faire la recherche nécessaire, on devrait investir dans l'électrification du transport en commun, encourager l'Hydro, le gouvernement, encourager aussi la recherche puis avoir un incitatif pour électrifier les véhicules de livraison, etc., comme je vous ai dit.
n(17 h 10)nLa Présidente (Mme Doyer): Excusez-moi, M. Arsenault, c'est parce que votre temps est terminé.
M. Arsenault (Michel): Oui. Deux minutes. Secteur du bâtiment.
La Présidente (Mme Doyer): Deux minutes? Allez.
M. Arsenault (Michel): Deux secondes, si vous me permettez.
La Présidente (Mme Doyer): Deux très petites...
M. Arsenault (Michel): Vous auriez dû me dire combien de temps j'avais.
La Présidente (Mme Doyer): Deux très petites minutes. 10 minutes, que vous aviez.
M. Arsenault (Michel): O.K. Ce ne sera pas long. Dans le bâtiment, écoutez...
La Présidente (Mme Doyer): Mais c'est correct, allez-y.
M. Arsenault (Michel): On pense qu'on pourrait amener des changements, si vous me permettez, au code du bâtiment. Les maisons énergétiques... On devrait utiliser tous les moyens, là, puis bénéficier aussi du solaire positif. On arrive d'Allemagne puis on a vu ça là-bas.
Au niveau des cibles... Là, vous m'avez tout énervé avec ça, là.
La Présidente (Mme Doyer): Allez-y, allez-y, prenez vos deux minutes.
M. Arsenault (Michel): Moi, je suis habitué à parler longtemps. Au niveau des cibles, écoutez, des groupes... Là encore, le GIEC parle de 25 % à 40 % en 2020, comme je disais au début. Votre étude d'impact tient compte de réductions de 10 % à 20 %. On aurait aimé voir l'impact à 25 %, comme je vous disais, puis il faut tenir compte du contexte nord-américain aussi.
Puis, à Copenhague, ce qu'on va faire au niveau syndical... puis la FTQ... puis la position qu'on va prendre dans notre centrale internationale, c'est: si les... si les États-Unis, pardon, bonifient, moi, je pense qu'il faut ajuster nos ambitions en tenant compte de ce qui se passe, parce qu'on n'est pas tout seuls en Amérique du Nord. Il faut se rendre compte de ce que les États-Unis vont faire.
Au niveau des crédits, deux mots. Écoutez, l'achat, sur les marchés internationaux, des crédits de carbone, on n'a pas d'objection de principe. On devrait privilégier par contre la baisse des gaz à effet de serre au Québec avant d'aller sur la planète acheter à la bourse.
Et finalement la bourse de carbone, là, bon, vous mentionnez deux mécanismes dans votre mémoire, là, la baisse du carbone puis les redevances sur les produits pétroliers. On est... on est ouverts, excusez-moi, aux deux mécanismes. Puis immédiatement, bien, c'est les redevances parce que la bourse, ce n'est pas prêt encore.
Ça fait que c'est un peu un résumé de... J'ai tenté de faire de mon mieux, parce que, là...
La Présidente (Mme Doyer): C'est bien beau, M. Arsenault.
M. Arsenault (Michel): ...je comprends que vous êtes à la fin de la journée, vous aussi.
La Présidente (Mme Doyer): Non, ce n'est pas ça, c'est que la... on essaie d'être justes avec tous les groupes. Mais, avec les échanges, vous allez pouvoir, je suis sûre, trouver la façon de vous faufiler et de dire encore des choses que vous voulez dire. Et c'est parfait comme ça.
M. Arsenault (Michel): Ça marche. On vous remercie.
La Présidente (Mme Doyer): Alors, Mme la ministre, à vous la parole.
Mme Beauchamp: Oui, merci. Et bienvenue à vous deux. On a donc l'occasion, la chance, je vais le dire, de pouvoir échanger avec des représentants québécois qui seront à Copenhague. Moi, j'ai besoin de vous entendre un peu plus sur votre travail fait auprès d'instances internationales, syndicales, le positionnement de ces instances syndicales internationales, le positionnement de la FTQ, carrément, à Copenhague.
Peut-être une des... Je vais vous le dire bien honnêtement, puis, moi... je vais utiliser votre terme, là, moi aussi, je vais dire ça avec humilité: j'ai beau beaucoup, beaucoup, beaucoup lire, là... Moi non plus, je n'ai pas la prétention d'être capable de... je ne me suis pas transformée en tout cas en une experte sur ces questions qui sont en... toujours, toujours en très grande mouvance. Mais je vais vous le dire comme ça. Et, M. Arsenault, je ne suis pas sûre que j'ai saisi le fond de votre message où vous dites que...
Je pense qu'un message, c'est que vous voulez une cible ambitieuse pour le Québec, puis je comprends bien ce message-là. Puis après ça vous dites: Oui, mais on va quand même plaider pour tenir compte du contexte nord-américain, puis, dans le fond, ça va dépendre du positionnement des États-Unis. Je résume sûrement ça trop courtement, mais, je vous le dis, là, ça... j'ai trouvé que ça pouvait ressembler à ça, comme message.
Puis j'ai besoin, là, de vous donner quelques instants pour pouvoir m'en dire un peu plus sur comment vous voyez ça, comment vous voyez les pistes de solution possibles au niveau international, comment vous voyez l'arrimage entre le leadership québécois... Parce que je pense que c'est ce pour quoi vous plaidez, le leadership québécois. Mais comment je dois interpréter votre message quant au contexte américain puis à la question du positionnement du gouvernement américain dans ce dossier-là?
La Présidente (Mme Doyer): M. Arsenault.
M. Arsenault (Michel): Je me rends compte que j'aurais peut-être dû vous lire ce que j'ai là-dedans, ça aurait été moins compliqué à essayer de l'expliquer. Si vous regardez à la page 9, en bas, le caractère gras, dans ce qu'on vous a remis tout à l'heure, je pense que c'est beaucoup plus clair que la façon que je l'ai expliqué après que je me suis fait dire de me dépêcher.
On dit: «La FTQ recommande qu'à l'instar de l'Union européenne, le Québec se fixe un objectif de 20 %, tout en se donnant une marge pour bonifier ses objectifs au sortir du sommet de Copenhague si d'autres grands émetteurs emboîtent le pas.» Ça veut dire que, si... Vous savez, on peut faire... on peut être plus catholiques que la Sainte Vierge, au Québec, mais si les États-Unis, puis l'Ontario, puis le reste ne font rien... Je veux dire, la pollution, ça ne s'arrête pas aux frontières. Et ce qu'on dit, dans le fond: Nous, on appuierait 20 %, mais, si nos voisins disent 25 %, bien on pense que le Québec devrait emboîter le pas puis aller à 25 % aussi. C'est ça que je voulais dire.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Ce message-là, il est clair. Je pense que beaucoup d'autres groupes sont venus nous dire: Soyez prudents, parce que qu'est-ce que vous allez faire si... Et là je vous amène l'autre scénario, qui est de dire: S'il n'y a pas d'accord à Copenhague, si les États-Unis ne prennent pas d'engagement, si... Vous comprenez ce que je veux dire, là? Parce que vous venez de me donner un scénario qui, comme ministre de l'Environnement, est un scénario qui me sourit, tu sais. On signe un accord, puis même les gens prennent des engagements supérieurs, puis là ça nous tire, puis... Bon. Mais beaucoup, beaucoup s'inquiètent d'un scénario où il y a peu d'engagements, puis notamment, je dirais, expressément, là, peu d'engagements de la part des États-Unis.
Et là je voudrais vous entendre. Votre position de la FTQ, qui est de dire: Si on sort, puis, dans quelques mois ? prenons la cible que vous nous proposez ? le Québec est à moins 20 %, mais, sur le continent nord-américain, on n'a pas constaté d'engagement de la part des États-Unis... Qu'est ce que c'est, votre position, à ce moment-là?
La Présidente (Mme Doyer): M. Arsenault.
M. Arsenault (Michel): Bien, notre position, c'est... Vous savez, on a salué, dans notre document, le fait que, depuis 1990, il s'est fait des efforts, au Québec, qui ne s'est pas nécessairement fait ailleurs, puis il faut continuer dans ce sens-là, mais il ne faut pas non plus être le seul qui a le pas dans l'armée, là, ça ne donne pas grand-chose. Mais un jour, quand on pense à la bourse du carbone, puis tout ça, si on continue à s'améliorer, on va être dans une situation extraordinaire, parce qu'un jour ou l'autre les grands de ce monde vont être obligés de se rendre compte de ce qui s'en vient puis de l'évidence. Vous savez, quand je regarde... Je regardais entre autres... Moi, j'ai eu la chance d'assister à la présentation d'Al Gore. Prenons-en juste 50 %, puis c'est déjà très inquiétant. Et ça s'en vient.
Puis, moi, je pense que tout ça, c'est toujours le «mood» politique aussi. Je peux vous dire qu'aux États-Unis on suit ça un peu, puis ce qui se passe cette année, c'est différent d'il y a deux ans passés. Les États-Unis avaient un président qui... créationniste, qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? Et aujourd'hui tu as Obama, le président Obama qui est préoccupé par ça. Par contre, au Canada, on a eu des gens au pouvoir qui étaient beaucoup plus préoccupés par l'environnement que le gouvernement actuel. Ça fait que c'est toujours une question de conjoncture économique, mais je pense que, nous, si on continue sur la voie de minimiser comme on fait depuis 1990, on ne peut pas se tromper, puis un jour on sera les gagnants avec toute l'histoire de la bourse du carbone, parce que ça va arriver une journée ou l'autre. Si ça n'arrive pas à Copenhague cette fois-ci, ça va arriver plus tard.
La Présidente (Mme Doyer): M. Laliberté.
M. Laliberté (Pierre): Oui. Juste pour ajouter, parce qu'il y avait une composante de votre question où vous faisiez référence à nos... à nos partenaires, là, de la Confédération syndicale internationale, puis, bon, au pronostic.
En fait, il faut constater que, comme vous le savez, bon, nos confrères, consoeurs japonaises, eux aussi on vu une différence marquante, parce que le Japon était dans le camp des branleux, là. Ils ne le sont plus. On a une présidente, à la CSI, qui est Australienne et qui a pris le leadership, là, sur cette question-là, en tout cas au sein de l'organisation. Et, pour nous, en fait, c'est une... je dirais que le mouvement syndical international a pris un peu... Pour nous, c'est une question de justice, si on pourrait dire, planétaire, et on... Donc, nous, on voit l'interaction à Copenhague comme étant... Bien, enfin, il y a deux... il y a deux composantes.
C'est-à-dire, d'une part, il faut arriver avec un degré d'ambition qui est crédible pour que les pays en développement voient que, bon, ce n'est pas de la frime, parce que de la frime, ils en ont déjà acheté dans d'autres processus comme ceux des négociations, là, d'accords de libre-échange, et on voit comment, maintenant, tout ça est paralysé à cause précisément des petites vites qui se sont passées. Alors, je pense qu'il y a un climat de confiance puis de... à établir, il y a un climat... En tout cas. Donc, une partie de l'équation, c'est ce que le Québec s'apprête à faire en se donnant des cibles, puis présumément, on l'espère, des cibles ambitieuses.
L'autre partie de la dynamique, évidemment, c'est d'essayer de jouer un petit peu, puis d'encourager, puis d'utiliser l'opinion publique pour faire pression sur les gouvernements récalcitrants. Bon, on constate qu'il y a des gouvernements qui n'étaient pas particulièrement ouverts à la question, comme la Chine. Bon, la Chine investit en ce moment. Ils ont beau être les plus grands émetteurs puis les plus délinquants à bien des égards, ils investissent des milliards de dollars, en fait, beaucoup plus que... toutes proportions gardées, que même, nous, on fait au Québec. Alors, il faut quand même aussi, je pense, constater qu'il y a une mouvance, puis, comme le disait M. Arsenault, je pense qu'on a tout à gagner d'être en avant de cette mouvance-là. En tout cas, nous, c'est comme ça qu'on le voit.
n(17 h 20)nLa Présidente (Mme Doyer): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Il y a un commentaire, dans votre mémoire, que je veux discuter plus à fond avec vous, c'est la notion de taxe à la frontière. Je suis en page... En fait, c'est que, moi, j'ai un mémoire qui... Je ne sais pas si c'est numéroté, mais je suis en tout cas dans la section Pour une approche différenciée, là. Puis à un moment donné vous commentez la notion de taxe à la frontière, et là je veux vous entendre plus, parce que vous dites carrément, dans le paragraphe précédent, qu'il ne faut pas qu'une production de type industriel ou... que tout ça entraîne un déplacement de la production, ce que certains vont appeler la fuite de carbone.
Puis là on est au coeur de ce qui sera discuté ou de ce qui est actuellement discuté, parce que, pour appeler un chat un chat, donc, plusieurs pays ont peur qu'avec des objectifs trop ambitieux ça entraîne des déplacements d'industries, notamment vers des pays en développement, comme la Chine, l'Inde, le Brésil, et ils disent: Là, on n'est pas gagnants. Puis, bien honnêtement, plusieurs secteurs industriels, ici, à notre table, sont venus nous dire ça, hein? Encore tantôt, un peu plus tôt, des gens sont venus dire: Bien, ça peut peut-être entraîner la fermeture d'une usine de bouletage et entraîner l'ouverture d'une mine en Chine, et on a-tu vraiment gagné, d'un point de vue environnemental? Puis on a perdu d'un point de vue économique.
Moi, j'ai eu la chance comme vous... Vous me parliez de votre séjour en Allemagne. Moi, récemment, j'ai eu l'autorisation d'aller faire une mission et j'ai rencontré le négociateur français, j'ai rencontré le négociateur bruxellois qui va présider l'Union européenne, Bruxelles, à partir... la Belgique, à partir de juillet 2010. Ma compréhension est que l'utilisation de... la notion de taxe à la frontière est utilisée, je dirais, un peu stratégiquement comme une menace en cas d'échec à Copenhague. Ici, pour moi, c'était plus ou moins clair, dans votre mémoire, comment vous le voyez.
Premièrement, je veux juste vous dire, c'est une menace qu'on prend au sérieux. Mais dans votre mémoire, tu sais, vous le... Est-ce que vous le voyez... Je voulais vous entendre un peu plus parce que ce n'était pas clair pour moi si vous le voyez de toute façon comme étant quelque chose de bon, de procéder à une taxe à la frontière sur des produits venant de pays qui n'auraient pas pris des engagements contraignants, ou si vous le voyez un peu comme moi, ce qu'on m'a expliqué, si vous le voyez dans une notion... s'il n'y avait pas d'accord, je dirais, international à Copenhague.
Vous comprenez aussi qu'on a toujours considéré, de notre côté... Mais en tout cas je pense que c'est assez largement établi, historiquement en tout cas, au Québec, qu'on a été gagnants avec des marchés ouverts. Et cette question, donc, de pénalité tarifaire, de pénalité à la frontière par rapport à quoi va ressembler l'économie mondiale dans 10 ans, 20 ans, 40 ans d'ici, il y a comme, pour nous, des éléments stratégiques assez importants. C'est ce qui fait qu'on est si préoccupés, qu'on souhaite tant qu'il y ait un accord à Copenhague.
Mais donc je veux... je veux vous entendre un peu plus sur ces... sur cette notion, comment vous le voyez. Et vous avez de nombreux travailleurs qui sont dans des secteurs qui sont venus défiler devant nous, où les gens sont exactement venus nous dire ça. C'était leur principale crainte, c'est que ça entraîne des fermetures sur le territoire québécois, avec du déplacement vers d'autres territoires.
La Présidente (Mme Doyer): M. Arsenault.
M. Arsenault (Michel): Je vais répondre. Un commentaire sur qu'est-ce que vous dites; ensuite, Pierre va compléter.
Je suis en désaccord avec vous quand vous dites qu'on est gagnants sur des marchés ouverts. Je veux dire, parlez-en aux milliers de travailleurs du textile qui ont perdu leurs emplois ou aux milliers de travailleurs du secteur manufacturier qui ont perdu leurs emplois, souvent victimes de dumping. Et, là-dessus, le gouvernement fédéral n'a définitivement pas fait ce qu'il aurait dû faire. Lorsqu'on se compare, par exemple... Quand je parle du tribunal, au niveau des emplois qui sont partis dans d'autres pays, on a été beaucoup plus protectionnistes aux États-Unis.
Puis, nous autres, quand on regarde... Dernièrement encore, on a été approchés par des gens d'un autre ministère de votre gouvernement pour essayer de redorer le blason du secteur manufacturier puis essayer de ravoir ce qu'on a perdu à travers les années, parce qu'on a été effectivement trop ouverts. Mais ça, c'est un autre débat. Sur votre question...
La Présidente (Mme Doyer): M. Laliberté.
M. Laliberté (Pierre): Oui. Bien...
Mme Beauchamp: ...conclure que vous souhaitez des pénalités tarifaires, peu importe ce qui se passe à Copenhague?
M. Arsenault (Michel): Moi, je pense qu'il ne faut pas être trop boy-scout, tu sais.
Mme Beauchamp: Pardon? Je n'ai pas bien compris.
M. Arsenault (Michel): Il ne faut pas être des boy-scouts, dans le sens que, tu sais... Puis je reviens au niveau de la libre circulation des marchés. Quand je regarde les autres versus nous autres, on perd des emplois ailleurs, où ces gens-là, eux, sont très scrupuleux. Par exemple, je pense au Buy American Act. Et, au Canada, on n'en veut pas, de ça. Au Québec, je présume que vous n'en voulez pas non plus, mais avec tout ce qu'on fait au niveau des infrastructures, le 40 milliards de dollars que vous allez mettre dans les infrastructures dans les prochaines années, moi, il me semble qu'on aurait pu faire profiter ça beaucoup plus au secteur manufacturier québécois en forçant les gens qui construisent nos routes, nos barrages, tout ça, à acheter un certain pourcentage de leurs biens manufacturiers au Québec. C'est ce qu'on fait aux États-Unis, mais on ne le fait pas ici. Mais c'est un autre débat, je ne veux pas m'embarquer là-dessus.
La Présidente (Mme Doyer): M. Laliberté.
M. Laliberté (Pierre): Oui. Bien, rapidement, écoutez, dans le mémoire... Bon, c'est écrit peut-être pas assez clairement, mais c'était plus dans une optique stratégique, je veux dire, plus que dans une optique de principe. N'empêche qu'au niveau des principes, si vous consommez une once de magnésium qui a été produite avec énormément d'émissions de GES, vous la consommez au Québec, mais elle a été produite en Chine, vous contribuez à l'augmentation des gaz à effet de serre à l'échelle planétaire et au... bien, peut-être pas au Québec comme tel. Alors, il y a un maquillage ici qui est aussi... enfin, qui est une question préoccupante également.
Bon, nous, on prend acte du fait que l'OMC a, avec des balises, donné un peu sa bénédiction au fait que ces taxes-là à la frontière ne seraient pas des barrières protectionnistes comme on les a entendues traditionnellement. Puis... Bien, on en est, parce que l'objectif est de faire en sorte que le consommateur paie le prix effectif du bien qu'il consomme, O.K.? Alors ça, c'est... si c'est ça, notre... qui est le principe qui guide notre politique, tout va bien.
On est conscients que le Vietnam n'est pas au même niveau de développement que le Québec ou les États-Unis. Ça, c'est clair. Est-ce que la Chine l'est? Absolument, O.K.? Alors, on n'aura pas de fiction ici que la Chine est un pays en développement puis a droit à... très longtemps à une période de flou, là, pour... Ça, là, c'est quelque chose qui... Là, comme disait M. Arsenault, on n'est pas... on n'est quand même pas... on n'a pas des poignées dans le dos, là. Et, là-dessus, on pense, nous, que d'une façon ou d'une autre, à terme, si, dans une économie décarbonisée, la chaîne de montage mondiale est appelée à disparaître, O.K., on ne pourra plus mettre tout dans des containers puis d'amener ça d'un bout à l'autre de la planète, parce que c'est un non-sens écologique. On va être... Ça va être... ça ne veut pas dire que ça va être tout fait en autarcie, dans notre cour, là, mais ça va amener une relocalisation, des repositionnements de la production, et c'est une bonne nouvelle pour tout le monde, dans le fond, tout ça. Alors, à terme, ce n'est pas demain matin, mais c'est une reconfiguration qu'on anticipe puis qu'on pense qui est une bonne nouvelle.
Pour ce qui est du secteur industriel, juste pour dire que, dans le fond, le principe que, nous, on pense qui est important, c'est, dans le fond, de baliser les efforts, et donc que, dans le fond, nos industries se comparent à la fine pointe de leurs industries à l'échelle planétaire, c'est-à-dire... et qu'on les accompagne dans ce processus-là, donc qu'on se dise: Bien, dans 10 ans ou dans 12 ans, il faut être rendu là, mais on s'attend à ce que vous soyez dans le premier décile, rendus au bout. Et donc on peut... Une industrie, comme on parlait des alumineries, qui est déjà rendue à la fine pointe, bon, on sait qu'il n'y a pas beaucoup d'efforts, mais il y a des industries, au Québec, qui peuvent le faire et, je pense, qui, s'ils sont accompagnés de façon intelligente, vont se prêter au jeu parce qu'il y a un gain économique pour eux, là, en bout de piste. Ils ne gagneront pas à rester inefficaces sur le plan de la consommation énergétique, d'une façon ou d'une autre. Et si on peut trouver au Québec, nous autres, des façons de convertir beaucoup d'opérations à des sources renouvelables comme l'hydro ou l'éolien, on a plus à y gagner parce qu'en bout de piste il va y avoir un gain de produire, finalement, à partir de ces sources d'énergie primaire là.
La Présidente (Mme Doyer): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Combien de temps, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Doyer): Huit minutes, sept à huit minutes.
n(17 h 30)nMme Beauchamp: O.K. Je vais avoir deux questions, juste pour que vous me donniez du temps pour ma deuxième.
Vous avez abordé dans votre mémoire, bien sûr, le secteur du transport qui indéniablement, là ? les statistiques le prouvent ? est le secteur où on a beaucoup d'efforts à faire au Québec. Vous insistez à juste titre aussi sur la notion des incitatifs, hein, le développement du transport collectif, les investissements nécessaires, l'électrification des transports, et je prends bonne note de tous ces commentaires-là.
Maintenant, toujours au niveau des principes, il y a plusieurs groupes qui ont défilé devant nous, et peut-être plus particulièrement au niveau des groupes environnementaux, qui ont dit: Ça prend des incitatifs. Puis certains ont parlé... Donc, ça prend la carotte, ça prend une offre, mais ça prend le bâton, donc ça prend aussi des mesures pour décourager l'utilisation de la voiture solo. Et donc je veux plus vous entendre sur ça. Donc, plusieurs sont venus ici en disant... donc ce qu'il y a dans le mémoire, où on parle de donner un prix au carbone, donc cette notion de redevance sur le carbone, mais qui a ses impacts notamment sur le prix à la pompe.
Je veux vous entendre, parce que vous ne commentez pas cette dimension-là, et je veux... je voulais plus vous entendre sur ça. Parce que la modélisation qu'on propose, il y a un prélèvement dans l'économie québécoise, parce qu'on prélève un coût en imposant un marché du carbone puis une redevance sur le carbone et on reprend cet argent-là, en tout et en... et en partie, là, mais notamment pour des investissements, et notamment, on l'indique, des investissements dans le transport collectif, et un retour dans l'économie québécoise, recherche et innovation, soutien technologique des entreprises, puis bien sûr retour fiscal. Mais je voulais vous entendre sur l'importance que vous accordez ou pas à cette notion de dire: Oui, ça prend les incitatifs de transport collectif sur des bases plus durables. Mais qu'est-ce que vous pensez de la nécessité qu'il y ait aussi ce que certains, là... Je pense notamment au Conseil régional en environnement de Montréal, là, qui clairement disait: Bien, ça prend le bâton également.
La Présidente (Mme Doyer): M. Arsenault.
M. Arsenault (Michel): On est dans une société qui ne croit pas à la répression, la société québécoise. On a juste à regarder, par exemple, les peines de prison. Contrairement aux autres provinces, tout ça, on croit à la réhabilitation et non à la répression.
Vous savez, la semaine passée, quelqu'un est venu à mon bureau; il voulait me faire signer une pétition, il voulait avoir de l'argent de la FTQ pour passer un règlement pour empêcher les parents de fumer dans l'auto quand il y a un enfant. Moi, je suis contre ça. Je veux dire, ce n'est pas... Tu sais, c'est rendu, là, que... S'il faut que l'État commence à légiférer qui a le droit de fumer dans une auto puis qui n'a pas le droit en présence de telle, telle personne, à un moment donné, ce ne sera pas administrable, et c'est la même chose au niveau du transport en commun. Moi, je suis profondément convaincu. Et je ne sous-estime pas l'intelligence des gens puis des Québécois et des Québécoises.
S'il y avait un moyen de transport entre Boucherville et le centre-ville de Montréal, parce que je vis dans cette région-là, qui ferait que, dans 15 minutes, on serait au centre-ville, je suis convaincu qu'il y aurait moins d'embouteillages dans le tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine. Les gens ne sont pas dupes. Quand c'est... Tu sais, la... C'est toujours une question de temps. Si tu donnes un bon service, si tu donnes un service efficace, à l'heure, les gens vont prendre le transport en commun parce que c'est moins de problèmes. C'est quoi que tu aimes mieux dans la vie? Passer 1 h 15 min dans ton char, un en arrière de l'autre, ou bien donc te rendre au centre-ville dans 15 minutes? Moi, je pense que, si tu as un service fiable, on n'a pas besoin de répression, puis de pénaliser les gens, puis de...
Tu sais, les histoires, plus de char au centre-ville puis plus d'auto à nulle part, moi, je ne suis pas... à la FTQ, on n'est pas très à l'aise avec ça. On croit à... Donnons des services de transport en commun adéquats, efficaces, et les gens vont l'utiliser.
Et on n'a qu'à aller en Europe, dans ces pays-là, puis on le voit bien. Je veux dire, tu vas dans les grandes villes d'Europe, à toutes les 10 minutes tu as un train qui part pour tel endroit, ça fait que tu n'as pas le goût de prendre ta voiture.
Mme Beauchamp: Bien, parce que, dans les grandes villes d'Europe puis dans tous les modèles qu'on a étudiés, il y a une notion de taxe sur le carbone. Parce que, quand je vous écoute... Puis c'est ça, c'est pour ça que je disais: Il y a une question de principe. Quand je vous écoute, je me dis: Est-ce que je dois comprendre de vos propos que, dans le modèle que, nous, on propose, vous êtes à l'encontre de la hausse de la redevance sur le carbone?
M. Arsenault (Michel): Pardon? Je...
Mme Beauchamp: Est-ce que je dois comprendre de vos propos que vous êtes contre, dans la modélisation qu'on a faite, dans la proposition que l'on fait, que vous êtes contre la hausse de la redevance sur le carbone? Parce que ma question était vraiment sur cette notion de: Est-ce qu'il doit y avoir, selon vous, un reflet d'un coût carbone sur l'utilisation de mazout et d'hydrocarbures sur le territoire québécois?
La Présidente (Mme Doyer): M. Laliberté.
M. Laliberté (Pierre): Merci, Mme la Présidente. Pas de problème, là, pas de problème. C'est... écoutez, c'est une question d'incitatif aussi. Je pense qu'on parlait ici de mesures qui... un petit peu plus punitives, là. C'est sûr que...
M. Arsenault (Michel): Vous parlez du bâton, je parlais de punir les gens, moi.
Mme Beauchamp: ...dans les propos de certains, le bâton ? puis je reprends l'expression utilisée par le Conseil régional en environnement de Montréal ? c'était le fait qu'il faut décourager l'utilisation de l'automobile solo avec le fait qu'il y ait un reflet du prix, notamment, à la pompe.
M. Arsenault (Michel): Ah! O.K.
Mme Beauchamp: C'est ça qu'ils appelaient le bâton, mais ça revient à commenter le fait que: Est-ce qu'il peut y avoir une hausse de la redevance ou pas? Parce que c'est ça que ça veut dire, là, à un moment donné, là. À la fin, là, concrètement, c'est ça que... C'est ça que ça veut dire.
M. Arsenault (Michel): Tout se paie.
Mme Beauchamp: Je vais... Si vous permettez ? puis vous pourrez compléter ? je veux juste vous entendre... Et je regrette qu'on ait moins de temps, tant mieux si jamais la conversation se poursuivait là-dessus. Mais vous commentez le fait que, dans le projet de loi américain Waxman-Markey... et je crois que, dans le nouveau projet de loi qui est devant le Sénat, Kerry-Boxer, qu'il y a une dimension de fonds de transition pour les secteurs qui seraient plus affectés. On me disait, là, qu'à l'intérieur du WCI, dont on est membre, il y a eu des rencontres avec les... au niveau nord-américain, avec les instances syndicales et que vous êtes autour de la table.
Je pense, ce serait très utile qu'on vous entende un petit peu plus encore sur cette question-là, l'importance que vous lui accordez, et peut-être nous informer un peu mieux du design que ça prend dans le projet de loi américain, là, ce fonds.
La Présidente (Mme Doyer): M. Laliberté, en terminant.
M. Laliberté (Pierre): Oui. Bien, brièvement, tout simplement pour vous dire qu'effectivement, oui, on est un peu en consultation avec nos... enfin, nos confrères et consoeurs, là, de l'ouest, là-dessus, quoiqu'on n'a pas vraiment la capacité d'y aller très, très souvent, la distance étant ce qu'elle est, pour une réunion de... en tout cas. Mais, ceci dit, oui, effectivement, on a eu l'occasion d'échanger là-dessus. Et nous, notre compréhension, c'est vraiment qu'il y ait une prise en charge explicite des... justement des gens qui travaillent dans ces... dans les secteurs qui vont être affectés par la transition. Évidemment, aux États-Unis, ça prend une forme qui est un peu plus... qui est différente parce que, comme vous savez, le filet social est beaucoup, beaucoup plus minimal. Alors, du coup, bon, il faut... il faut des couvertures d'assurance, etc., des choses qui ici sont un petit peu plus, déjà... font partie de ce qu'on reçoit déjà, là, par les programmes gouvernementaux. Mais il n'en demeure pas moins qu'on parle ici surtout des mesures d'adaptation pour les travailleurs, donc d'essayer de les replacer dans des secteurs en croissance, de formation professionnelle surtout, d'aide à la relocalisation, parce que ce qu'on constate, au Québec comme ailleurs, c'est que souvent tu es dans une communauté mono-industrielle qui est déplacée et, bon, tu es un peu otage, là, de ton milieu. Alors, je m'arrête, parce que la présidente me fait signe.
La Présidente (Mme Doyer): C'est ça, je suis... c'est mon rôle. Alors, merci, messieurs. Nous allons passer au représentant du parti de l'opposition officielle, M. le député de L'Assomption.
n(17 h 40)nM. McKay: Merci, Mme la Présidente. Et bon après-midi, bienvenue à cette commission. Merci de vous être déplacés.
Bien, d'abord, moi, je vous dirais: Vous vous êtes excusés un peu d'amener... d'avoir distribué votre mémoire à la dernière minute et vous mentionnez aussi que vous n'êtes pas des experts dans le domaine, et tout ça, donc vous avez mis beaucoup de bémols, là, mais, moi, je vous dirais que, moi, je vous félicite, parce que jusqu'à maintenant, je dirais, c'est dans les mémoires qu'on a entendus qui sont les plus... qui est le plus... le mieux assis, je vous dirais, sur des faits puis sur l'information, là. Je pense que vous connaissez bien l'environnement législatif puis un peu toute la mouvance qu'il y a récemment autour de cette question-là des changements climatiques et notamment, bien, le fait que justement la réglementation québécoise qu'on a adoptée au mois de juin, qui est basée sur le Western Climate Initiative, il y a toutes sortes de mesures de flexibilité qui sont là et que vous venez appuyer, donc, notamment, l'approche par secteur, là. Je pense, c'est important de le rappeler, parce qu'il y a beaucoup de secteurs industriels qui sont venus ici plutôt inquiets, et les choses qu'ils nous soulevaient, bien, dans beaucoup de cas, ce sont des choses qui sont déjà... il y a des provisions qui sont déjà faites dans ce qui a été prévu dans la réglementation.
Et je pense qu'une de vos recommandations viendrait effectivement probablement éteindre beaucoup de ces... ou atténuer beaucoup de ces inquiétudes-là, quand vous demandez au gouvernement de livrer le cadre réglementaire concernant les grands émetteurs, au plus tôt. Bien, c'est effectivement... On ne peut pas mettre la charrue devant les boeufs, puis il faut attendre un peu que toute cette réglementation-là se développe aussi avec nos partenaires de la WCI, mais je pense qu'il faut... ça vaut la peine de ramener le fait qu'il faut... il faut peut-être peser un petit peu sur le gaz, là, accélérer un peu la démarche, en tout cas le plus possible.
Moi, je pense... je fais partie des gens qui pensent que... bon, qui reconnaissent, premièrement, que le mouvement syndical à travers le monde ? ça a quand même pas mal débuté en Amérique du Nord ? a réussi à forcer le système capitaliste à prendre compte, bon, de toute une série de contraintes qui n'étaient pas si évidentes au départ, là, qui a permis de créer les conditions qui ont fait en sorte que les droits des travailleurs ont été respectés. Ça a amené toute une série de lois, d'institutions locales mais aussi à travers le monde, qui ont fait en sorte que le système capitaliste a été... a dévié de sa trajectoire, là, de départ, qui était un certain capitalisme sauvage, puis on est arrivés à un système où, bien, on a pu créer une classe moyenne et créer des conditions de prospérité économique qui ont... qui sont un peu mises à mal aujourd'hui.
Mais, moi, je pense que le prochain défi qu'on a, c'est d'intégrer dans ce système-là les... toutes les contraintes environnementales puis les grands défis qu'on a par rapport à, bon, les émissions... les changements climatiques, avec les gaz à effet de serre, la biodiversité et tous les enjeux qui font en sorte que nos enfants, comme vous l'avez mentionné, et vos petits-enfants, dans votre cas, pourront vivre dans un monde meilleur que celui qu'on... ou au moins aussi bon que celui qu'on connaît aujourd'hui.
Alors donc, c'est une... je pense, c'est une grande responsabilité aussi qui incombe au mouvement syndical, avec sa force puis avec ce qu'il a déjà démontré comme capacité, dans le passé, d'être capable d'arriver à forcer ce système-là pour l'amener dans une direction où... Puis c'est un peu paradoxal parce que certains accusent le mouvement syndical de vouloir quasiment briser ou éliminer le système, alors que, dans les faits, la négociation collective, c'est quelque chose qui amène tout le monde à travailler ensemble puis à finalement amener les... à faire les choses de façon, je pense, plus efficace, là, ou plus optimale. En tout cas... Donc ça, c'était ma partie un peu philosophique. Vous pourrez toujours commenter dessus si ça vous plaÎt.
Je voulais peut-être continuer à mentionner certains points, dans votre présentation, je pense, qui viennent appuyer des choses qui ont déjà été dites ici, notamment la modélisation à 25 %. Tu sais, si, à 20 %, il n'y avait pas d'impact négatif et puis il y avait même des impacts positifs sur les avoirs des ménages, pourquoi on n'a pas continué un peu plus haut? Il me semble que ça aurait été intéressant. Et donc ce que je comprends de votre présentation, c'est: Vieux motard que jamais. C'est une vieille... Mieux vaut tard que jamais. Donc, c'est possible encore de pousser cette information-là, donc livrer le cadre réglementaire des grands émetteurs au plus tôt, développer des études d'impact plus fines pour mieux alimenter la réflexion collective. Je pense aussi qu'on en est rendu là.
Et c'est certain que, nous aussi, on déplore la position attentiste. On a l'impression, avec ce gouvernement-là, qu'on est... qui a une position un peu dogmatique ou... sur la question de laisser les forces du marché faire leur travail, là, il n'y a pas beaucoup de... On attend encore une stratégie industrielle un peu plus avant-gardiste, plus robuste, qui ferait en sorte qu'au Québec on mettrait en valeur, donc, notre grand potentiel. Là, je pense, vous l'avez mentionné à juste titre, on peut être dans le peloton de tête, on peut faire mieux, on peut innover. Alors... Bien, c'est un assez grand préambule, mais je vous demanderais peut-être...
La Présidente (Mme Doyer): De sept minutes.
M. McKay: Pardon?
La Présidente (Mme Doyer): De sept minutes.
M. McKay: Il reste sept minutes?
La Présidente (Mme Doyer): Non, vous avez fait un préambule de sept minutes. Juste pour vous dire.
M. McKay: Ah! Bon. Bien, alors il en reste encore la majorité, pour nous dire comment...
La Présidente (Mme Doyer): Jusqu'à 24.
M. McKay: ...peut-être comment à Copenhague, effectivement... quelles sont les actions... comment vous intégrez la FTQ dans le mouvement syndical international et les actions que vous prenez puis à laquelle vous souscrivez, et peut-être comment vous voyez la suite des événements par rapport à développer l'indépendance énergétique du Québec.
Est-ce qu'il y a des gestes concrets ou est-ce qu'il y a une démarche, dans le cadre de la FTQ, pour peut-être amener le gouvernement, là, à forcer un petit peu plus les choses pour pousser dans la direction d'une stratégie industrielle avant-gardiste?
La Présidente (Mme Doyer): M. Arsenault.
M. Arsenault (Michel): J'aimerais... j'aimerais peut-être réagir un peu à votre préambule. Ça va être moins long. Écoutez, on a eu du chemin à parcourir chez nous aussi. Moi, je... On ne se cachera pas de ça, les membres de ma génération, souvent, étaient très inquiets quand tu leur parlais de l'environnement, puis c'était l'inquiétude de toujours perdre ton emploi, puis souvent ils ne voulaient pas en entendre parler. Ça fait que ce qu'on a fait, on a fait plusieurs colloques chez nos principaux... nos plus grands affiliés. Et on a aussi, dans bien des cas... Vous savez, dans chaque usine, chaque mine, etc., il y a toujours un comité de santé et sécurité, puis on a rajouté «environnement» au bout pour sensibiliser nos gens aussi, tu sais. Rien ne sert de gagner l'univers si, l'année d'après, tu meurs étouffé parce que ta région est trop polluée. Et là on a...
Cette étape-là est faite, les gens de... un peu plus vieux que ma génération, bien, partent, les baby-boomers quittent, les jeunes arrivent. Chez les jeunes, il y a beaucoup plus d'inquiétude, tu sais, les jeunes de 30 ans sont beaucoup plus inquiets de l'environnement que ceux de 60, 70 ans, puis là on retrouve une mentalité différente et on se fait pousser dans le derrière par notre monde pour s'occuper de l'environnement puis d'être préoccupés par ça. Mais en même temps tu as toujours la crainte de perdre ton emploi.
Et c'était... Puis c'est pour ça que je comparais ça, tout à l'heure, aux changements technologiques il y a 20 ans passés. Je veux dire, tout le monde est pour la vertu, mais, si tu perds ton emploi parce que ton patron s'est amélioré, ça ne donne pas grand-chose, et c'est pour ça qu'on dit: Il faut le regarder secteur par secteur, et si...
Je donne un exemple: le secteur des alumineries. Si, aux États-Unis, il ne se fait rien puis ici on est à la fine pointe, bien, à un moment donné, si on investit trop pour être à la fine pointe, il y a des chances qu'il y ait des emplois ici qui se perdent. Ça fait qu'il faut toujours équilibrer ça puis balancer ça d'un pays à l'autre.
Bon, bien, on fait partie d'une grande centrale syndicale internationale, et ça, c'est un débat où la... c'est un... c'est un forum dans lequel on joue un rôle important, la FTQ. Et à Copenhague, moi, je ne pourrai malheureusement pas y aller, c'est Pierre qui va être responsable du dossier là, ça fait qu'il va répondre à l'autre volet de votre question.
La Présidente (Mme Doyer): M. Laliberté.
M. Laliberté (Pierre): Oui. Bien, écoutez, le... Première des choses, il y a les grands principes qui sont débattus évidemment, là, par les... bien, enfin, les instances, là, décisionnelles de la CSI, et il y a un comité de travail qui a été constitué, là, sur cette question-là, à laquelle... Enfin, c'est un comité assez flexible, là, auquel on peut... qui a un genre de membership fixe mais auquel, là, d'autres peuvent se joindre. Alors, c'est ce qu'on fait.
Sur les grands principes, bien, écoutez, c'est la même... un peu la même chose que ce que je vous disais... on vous disait, là, tout à l'heure, c'est-à-dire on... nous, on part du cadre que le GIEC nous donne. On a, parmi les membres de la CSI, des fédérations ou en tout cas des pays où ça va aller mal assez vite, là. On avait, par exemple, un communiqué de presse, pas plus tard que la semaine dernière, de la centrale au Bangladesh qui, eux autres, bon, ça monte de deux mètres, là, puis c'est fini, là, le Bangladesh disparaît de la carte, quasiment. Alors, c'est sûr que, pour eux, la question a une immédiateté qui... en tout cas, qu'elle n'a peut-être pas pour nous.
n(17 h 50)n Donc, nous, donc, au départ, c'est d'essayer de faire monter le degré d'ambition des joueurs autour de la table et de trouver des mécanismes de compensation pour les pays en développement. Et ça, je vais vous dire que, là-dessus, il y a beaucoup de pistes qui sont envisagées, et ça ne passe pas nécessairement par l'octroi de... ou l'achat de crédits sur les marchés internationaux, soit dit en passant. Il y a, par exemple, une taxe sur les produits financiers, qui pourrait être... qui a été mise de l'avant, là, comme une idée, là, pour justement servir de base, là, à des transferts. Bon. Alors, je vous épargne les détails, là, mais c'est juste simplement pour vous dire qu'il y a quand même... Bon, c'est ça, les deux grands principes directeurs.
Puis, une fois qu'on est sur place, bien, écoutez, on porte plusieurs chapeaux, hein? On vient d'une délégation nationale, donc on va essayer d'influer auprès de Mme la ministre, pendant qu'elle va être là, pour augmenter son degré d'ambition qu'on sait par ailleurs très, très... bien, enfin, élevé, là, puis ce n'est pas... Je suis sûr que c'est le cas. Mais évidemment, aussi... bon, évidemment, il y a le gouvernement canadien qui va être présent et aussi, évidemment, dans la mesure où on peut essayer d'influer sur d'autres joueurs, bien, on va essayer de le faire, hein? C'est un peu... On peut passer des messages. En tout cas, il y a ce genre de dynamique là.
Sur la question de l'indépendance énergétique et, bon, toute la stratégie industrie que, bon, enfin, vous avez évoquée, je n'irai pas très longtemps en détail, mais il semble ici qu'il y a quand même une opportunité, puis je pense qu'on est probablement les centièmes, là, que vous avez entendus qui ont dû vous le mentionner, c'est-à-dire qu'on fait tous le constat qu'on sort d'un paradigme d'hydrocarbures à bas prix, O.K., puis ce paradigme-là, c'est le paradigme qui a mené à tout notre aménagement urbain en Amérique du Nord, depuis la fin de la Deuxième Guerre. Donc, de changer ces... enfin, de restructurer tout ça, ça ne se fait pas en criant ciseau; ça va demander qu'on change les lois d'aménagement du territoire, ça va demander qu'on change le code du bâtiment, ça va demander des changements de mentalité de nos entrepreneurs, de recycler puis de former à des nouvelles technologies, nouvelles techniques, nos travailleurs.
Donc, c'est un chantier qui est énorme, et ce qu'on... ce qui nous frustre un petit peu... puis ce n'est pas... puis je le dis, là, pas méchamment, là, mais c'est que... parce que, tout à l'heure, Mme la ministre nous renvoyait à la question des moyens, là, des redevances, puis tout ça. Bien, nous, c'est sûr qu'on n'est pas contre, parce qu'il nous en faut, des moyens. On ne peut pas... on ne peut pas envisager de faire le genre de virage qu'on anticipe, sans se donner les moyens de le faire. Et là il y a... Et, je veux dire, là... Donc, il faut... Mais il faut qu'on ait les signaux que, bon, on embarque. Et... Mais, moi, je pense que... en tout cas, personnellement, c'est que la société québécoise est rendue là, les plus jeunes sont certainement rendus là, et il y a un beau chantier là qui n'attend que qu'on l'attaque, là, de façon ambitieuse.
La Présidente (Mme Doyer): M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Oui. Bien, vous savez, moi, je représente la circonscription de L'Assomption, qui est dans la région de Lanaudière, et, au niveau de la FTQ, bien, c'est le regroupement régional Laurentides-Lanaudière. Et j'ai eu déjà un petit peu l'occasion de parler avec certains de vos représentants, mais... Donc, ce sont les syndicats aussi qui représentaient les travailleurs de GM à Sainte-Thérèse et donc qui ont perdu beaucoup de membres. Je me demandais, comme vous avez... Puis, je pense, vous représentez aussi les gens de Paccar. Donc, il doit y avoir une réflexion, chez vous, par rapport à toute la question de développer des modes de transport électriques au Québec. Bon, au Parti québécois, on a déjà proposé un genre de fonds en partenariat où il pourrait y avoir de l'industrie, et les gouvernements, puis les syndicats aussi qui pourraient, dans le fond, former un genre de consortium pour développer les choses de ce côté-là.
Est-ce que vous avez une réflexion là-dessus? Est-ce qu'il y a des... même des propositions qui ont... qui ont été développée dans... soit à la FTQ, au niveau national, ou dans certains de vos syndicats locaux?
La Présidente (Mme Doyer): M. Arsenault.
M. Arsenault (Michel): Vous parlez au niveau du changement technologique que ça pourrait apporter si on viendrait... par exemple, au lieu que les autobus soient au fuel, qu'ils deviennent à l'électricité, tout ça?
M. McKay: Ou développer une auto électrique québécoise ou, tu sais... ou des composantes de tout ça, mais en tout cas, tu sais, de compenser pour la perte du secteur automobile au Québec puis d'essayer de miser sur...
M. Arsenault (Michel): Mais bien sûr qu'on est...
M. McKay: Je ne sais pas lesquels... quels atouts vous voyez de ce côté-là.
M. Arsenault (Michel): Bien, la perte du secteur automobile au Québec, je veux dire, c'est un vieux débat, tu sais. Il y en a qui ont décidé que ça se passerait en Ontario, et on avait une usine, dans votre... dans votre région, qui est disparue. Maintenant, on a des groupes de réflexion, au niveau du Fonds de solidarité, qui pensent à ça, quand on regarde les différents secteurs économiques. On a mis beaucoup dans l'aérospatial, dans les dernières années, parce que l'aérospatial doit être au Québec ce que l'automobile était en Ontario. Disons que, ces années-ci en tout cas, on aime mieux être dans l'aérospatial que dans l'automobile. Mais, oui, on réfléchit à ça, on a des groupes de réflexion au Fonds de solidarité aussi et on...
Vous savez, nous, l'année passée... Vous parlez de l'industrie au Québec. On est... L'institution financière qui s'appelle le Fonds de solidarité de la FTQ, on a mis 1,3 milliard de dollars dans l'industrie québécoise pour maintenir, créer des emplois, puis bien sûr c'est ce qui nous a... c'est ce qui nous préoccupe le plus, les emplois. Et, comme dans l'aérospatial, s'il y a des changements importants qui s'en viennent au niveau de la voiture électrique, on va être là, on va sûrement être intéressés à encourager des partenaires québécois, puis des producteurs, puis des innovateurs québécois à s'embarquer là-dedans. C'est sûr qu'on surveille... on surveille ça de près. Puis c'est l'avenir, hein?
Du pétrole, les réserves connues, on sait ce que c'est. On connaît notre consommation annuelle au niveau du globe, on en consomme plus qu'on sait qu'il... que les découvertes qui se font. Et les penseurs, chez nous, d'ici 15, 20, 25 ans, ils vont être obligés de trouver une autre façon de se mouvoir que par le moteur à gaz. On est rendus là. Ça fait que c'est sûr qu'on y pense.
La Présidente (Mme Doyer): M. le député de L'Assomption, il vous reste cinq minutes. Alors, est-ce que vous auriez...
M. McKay: Bien, moi, je voudrais remercier nos invités. Je pense que je... on a eu beaucoup d'informations, il y a beaucoup de questions et d'échanges qui ont eu lieu, et je me déclare tout à fait satisfait.
La Présidente (Mme Doyer): Satisfait. Bon.
M. Arsenault (Michel): Merci.
La Présidente (Mme Doyer): Alors, M. Arsenault, M. Laliberté, je vous remercie de votre contribution aux travaux de la commission.
Et, comme il est 6 heures, la commission ajourne ses travaux au mardi 3 novembre 2009, à 10 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques à l'égard du document intitulé Le Québec et les changements climatiques ? Quelle cible de réduction d'émissions de gaz à effet de serre à l'horizon 2020? Mesdames messieurs, merci.
(Fin de la séance à 17 h 58)