(Quatorze heures quatre minutes)
Le Président (M. Ouellette): Bonjour, tout le monde. Après avoir constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des transports et de l'environnement ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le document intitulé Le Québec et les changements climatiques ? Quelle cible de réduction d'émissions de gaz à effet de serre à l'horizon 2020? M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme L'Écuyer (Pontiac) est remplacée par M. Lehouillier (Lévis).
Auditions (suite)
Le Président (M. Ouellette): Nous recevons en ce beau lundi après-midi, qui fait changement un peu avec notre dernier jeudi, la Chaire de recherche industrielle en technologies de l'énergie et en efficacité énergétique, M. Yvan Dutil, qui est chercheur associé à la chaire. M. Dutil, vous aurez 10 minutes pour faire votre exposé, et par la suite autant la ministre que les députés du parti ministériel que les députés de l'opposition officielle chercheront à en savoir un peu plus sur votre présentation qui permet... qui promet d'être passablement animée. Donc, je vous laisse la parole, M. Dutil.
Chaire de recherche industrielle
en technologies de l'énergie
et en efficacité énergétique
M. Dutil (Yvan): Merci, M. le Président. Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, je tiens à vous remercier de... me permettre de m'exprimer sur les... lors de la discussion sur les cibles qu'on devrait observer au Québec pour les... les gaz à effet de serre.
Je vais faire une brève présentation de la chaire de recherche. La chaire de recherche n'existe que depuis le 23 septembre dernier, donc on n'a pas de locaux et on n'a que deux chercheurs. Et, pour juste mettre ça clair, «chercheur associé», dans la «parlance» universitaire, veut dire «bénévole», parce que je n'ai pas encore reçu mon premier chèque de paie.
Donc, le mandat de la chaire est d'appuyer les entreprises qui désirent développer ou améliorer des technologies de l'énergie, les appuyer aussi, s'ils le désirent, à améliorer leur efficacité énergétique et à appuyer des partenaires quand il s'agit de réaliser des études et des analyses énergétiques pour le compte de tiers, donc, d'autres... des entreprises qui seraient spécialisées dans le domaine de l'efficacité énergétique. Et, comme c'est une chaire universitaire, le premier objectif est toujours de former du personnel hautement qualifié pour contribuer à l'économie du Québec et aussi produire du savoir des nouvelles technologies.
Donc, le titre de ma présentation s'appelle Le Québec ne peut être qu'un leader! C'est quelque chose que j'ai appris par un de mes maîtres à penser, et fondamentalement, quand on... dans mon genre de travail, on est les meilleurs ou on n'existe pas. C'est aussi bête et méchant que ça. Donc, je vais commencer là-dessus.
J'ai lu le document, la brochure qui a été présentée sur les objectifs du Québec, et je dois dire que j'ai été passablement déçu. D'une part, le document se réfère au rapport du GIEC de 2007, ce qui veut dire qu'il ne contient pas d'informations scientifiques passé l'année 2005, et, comme il va être... il va servir à décider de l'objectif du Québec en 2013, à ce moment-là, on va avoir des données vieilles de sept, huit ans pour notre plan.
Le graphique que je présente ici, c'est un article qui a été publié dans Nature, cette année, et le consensus, à l'heure actuelle, dans la communauté scientifique, c'est qu'on ne doit pas dépasser une certaine quantité finie de carbone, 1 billion de tonnes de carbone, 3,7 billions de tonnes de CO2, là, dans la «parlance». Chaque tonne qu'on dépense de plus, c'est une tonne de moins qu'on va pouvoir faire dépenser à nos enfants puis à nos petits-enfants. Sinon, on dépasse le 2 °C, ça, c'est garanti. Donc, pour arriver à ça, il faut descendre le plus vite possible dans notre consommation de carbone, et la limite, vers 2050, c'est 1,6 tonne par habitant sur la planète, ce qui veut dire que, si on passe du niveau actuel au Québec à cette cible-là en 2050, ça fait une réduction de 84 %, qui correspond à, justement, ce que vous avez dans la littérature actuellement. On dit: 80 % de réduction de production de CO2 mondiale. Dans notre cas, ça veut dire 40 % d'ici 2020, si on fait une projection... on ramène le... en étant équitable pour les générations futures.
Et d'ailleurs j'ai été surpris que le document cite le rapport du GIEC, qui dit 25 % à 40 %, et qu'on n'a même pas modélisé les impacts économiques sur ce domaine de requis technique, ce qui serait... pour avoir été ingénieur des systèmes pendant longtemps, c'est la base du métier. Donc, je suis un petit peu... à ce niveau-là, je suis un peu traumatisé.
L'autre chose qui m'étonne aussi, c'est qu'à peu près tout le monde s'entend qu'à l'heure actuelle, dans les 10 à 20 prochaines années, il va y avoir un sérieux problème d'approvisionnement en pétrole; la production mondiale de pétrole ne pourra pas suivre la demande de l'économie. Alors, il y a deux choses qui vont se passer: soit on consomme moins de pétrole, soit l'économie va prendre le bord, c'est un des deux. Et, à ce niveau-là, c'est carrément une gestion de risques: vouloir réduire la production de gaz à effet de serre, c'est vouloir réduire notre consommation de pétrole dans le cas du Québec parce qu'on fait... on n'utilise pas de charbon.
Et là, encore là, il y a quelque chose qui m'a chicoté énormément. Dans le document, on fait les modèles économiques avec un pétrole à 60 $ le baril. Je ne sais pas d'où ça sort, là... en fait je sais d'où ça sort. J'ai fouillé, la référence était inexacte, en passant, dans le document. C'est des données qui viennent de l'Energy Information Administration, du Department of Energy des États-Unis, et le 60 $, effectivement il est dans leur modèle, c'est le plus bas prix de pétrole prévu. Le prix de référence du pétrole pour 2015 est d'environ 100 $ le baril. Le 20... le 40 $ de différence change complètement l'impact du modèle économique. Donc, c'est pour ça aussi qu'avec une analyse de règle de pouces, avec un 40 % de réduction, ça devient vraiment neutre économiquement au lieu d'être très coûteux.
n(14 h 10)n Un petit point technique. Le Québec, c'est l'endroit dans le monde où on a le plus... on consomme le plus d'énergie par habitant. Ce n'est pas parce qu'on gaspille l'énergie, c'est parce que c'est l'endroit où on fait l'énergie de façon primaire, alors qu'ailleurs c'est toujours une énergie secondaire. On n'est même pas sur les graphiques, en fait, vous voyez, le graphique arrête à 16 000 kWh par année, nous, on serait une demi-page plus loin, on est à 28 000 kWh par année. Donc, on a tellement d'énergie au Québec qu'on pourrait probablement se passer du pétrole puis on serait capables de tout faire fonctionner si on électrifiait tout. Donc, ce n'est pas... ce n'est pas à ce niveau-là qu'est le problème.
Juste un petit rappel des objectifs du développement durable. Le but, c'est de protéger l'avenir et de jouer... et c'est un problème de gestion des ressources, le développement durable. L'environnement fait partie du problème, mais c'est essentiellement un problème économique de gestion des ressources. Le but, c'est de réduire la trace environnementale, en tout cas, dans le cas du Québec, la réduire et de l'amener à un niveau où c'est soutenable pour des périodes très prolongées, donc je fais une trajectoire ici d'où est-ce qu'on est au Québec et, sans affecter le niveau de vie des gens, nous ramener à une trace environnementale bien en bas de ce qu'elle est actuellement par un facteur 3 ou 4.
Donc, c'est juste un petit commentaire rapide, juste montrer... Ça, c'est les exportations du Canada en termes d'énergie: pétrole, gaz naturel, et le petit rectangle dans le coin en bas, c'est l'électricité. Il y a une différence fondamentale entre le pétrole puis le gaz naturel, c'est que l'électricité, c'est difficile à exporter, et dans des proportions complètement différentes, là. On peut faire un peu d'argent avec ça, mais ce n'est pas ça qui va transformer le Québec en Alberta.
Des modèles qu'on pourrait suivre. Parce que, là, on s'entend, là, c'est un objectif agressif que j'ai proposé là, c'est faisable, c'est difficile. Les modèles que suivent... C'est la Suède qui a fait un plan en 2005, quelques mois après que j'ai fait... proposé un projet semblable au Québec, qui, eux, veulent devenir indépendants des matériaux fossiles en 2020 et carboneux en 2030: 40 % de réduction des CO2 pour 2020 par rapport à 1990.
Pourquoi la Suède sont si agressifs que ça? Deux raisons. Bon, ils sont sensibles à l'environnement. L'autre raison: sécurité nationale, approvisionnement d'énergie. Personne ne se cache en arrière de ça, c'est le premier ministre de la Suède qui a monté le comité, puis c'était son objectif. Il a perdu ses élections. C'est un petit peu mis de côté, mais c'est, encore là, sous-jacent.
L'École polytechnique fédérale de Zurich a fait une analyse. Eux, ils ont regardé la Suisse: Est-ce qu'on peut réduire notre consommation de façon considérable? Ils ont dit oui. Encore là, ce n'est pas facile, mais ça se fait. J'ajouterais que l'Agence internationale de l'énergie, dans son rapport qu'elle a remis pour les conférences de Copenhague, dit exactement la même chose: C'est faisable, c'est difficile, ça se fait si on commence maintenant. C'est ça, faire preuve de leadership, c'est de prendre des risques.
Ici, on produit trop de carbone pour ce qu'on devrait faire. Il ne faut pas se leurrer, là, on chauffe nos maisons à l'électricité, on fait notre électricité directement à partir de ressources renouvelables, on devrait avoir une trace en carbone, là. On est très bons en Amérique du Nord, mais on devrait même être très bons par rapport aux Européens. Il faut s'entendre, là, et une des raisons, c'est parce que, il ne faut pas s'en cacher, le système de transport au Québec n'est pas du tout adapté, c'est un gros bloc qu'il reste à compresser.
Au niveau de l'industrie, je vous dirais que ce n'est pas Alcan et ces autres... ces grandes industries là qui sont les plus inefficaces, mais on a beaucoup de PME qui ne sont pas des miracles de gestion et d'efficacité, là, et là il y a probablement un gros gain, et un gain économique... Parce que, là, c'est clair, là ? je pense que les gens des entreprises sont passés la semaine dernière: si on veut gagner en efficacité énergétique, il va falloir modifier les procédés industriels. Et ça, c'est... les deux côtés en même temps, là, c'est gagnant.
Et, il ne faut pas se leurrer, là, Kyoto, on va faire moins 6 % en 2012. L'objectif de Kyoto, c'était moins 6 % sur la moyenne de 2008 à 2012. Donc, encore là, on a fait un effort par rapport aux autres, mais c'est parce que les autres n'ont fait aucun effort. Tu sais, il ne faut pas non plus désespérer.
Et dernier commentaire général et très important. Étant... étant un scientifique, étant quelqu'un qui travaille dans le domaine de la technologie... n'espérez pas de miracle de la technologie. C'est une espèce de maladie qu'on a actuellement d'espérer qu'une technologie miraculeuse va tomber du ciel puis va régler tous les problèmes de tout le monde en même temps. Ça n'arrivera pas. En efficacité énergétique, tout a été inventé dans les années quatre-vingt. On en a des nouvelles, là, que... je fais de la recherche encore, on s'entend, là, mais le gros de ce qu'on peut faire a été déjà inventé dans le passé. Je vais conclure là-dessus.
Le Président (M. Ouellette): Merci, M. Dutil. Vous entrez amplement dans votre temps. Merci beaucoup. Mme la ministre, à vous l'honneur d'ouvrir la période de questions.
Mme Beauchamp: Merci beaucoup, M. le Président. En premier lieu, je veux saluer aussi mes collègues parlementaires réunis ici, à Québec, en ce lundi après-midi, puis les remercier de leur collaboration. Je vous souhaite un bon après-midi. Bienvenue, M. Dutil, et merci pour cette contribution.
Je pense qu'à travers vous ça nous permet de saluer bon nombre de membres de la communauté scientifique québécoise qui... Vous le disiez avec peut-être un brin de sarcasme, vous parliez de bénévolat, mais prenons le temps, à travers vous, de souligner, donc, la contribution de plusieurs membres de notre communauté scientifique, notamment universitaire, à travers différentes chaires de recherche qui, peut-être trop souvent, sur des bases bénévoles... mais qui consacrent de leur passion, de leur temps, de leur talent à approfondir les questions liées à la lutte aux changements climatiques, qui... On peut le voir à travers votre mémoire, les réponses ne sont pas toujours évidentes, ne sont pas toujours faciles. Et j'en profite pour vous dire jusqu'à quel point on a besoin, notamment comme représentants du peuple, jusqu'à quel point on a besoin d'un éclairage, je dirais, permanent provenant de la communauté scientifique et notamment, bien sûr, de la communauté scientifique québécoise. Donc, je suis très heureuse de vous accueillir ici.
Vous avez, dans... J'ai différentes questions à vous poser, mais peut-être la première. Si vous avez... Dans un des acétates que vous avez utilisés, parce que votre mémoire couvre beaucoup d'autres... d'autres champs, mais vous en profitez pour faire des comparaisons puis vous parlez de la Suède. Je me demandais si vous aviez eu le temps, et je le dis avec un sourire, peut-être toujours sur une base bénévole, et je le regrette... Mais avez-vous eu le temps de vous pencher sur, par exemple, la proposition de l'administration Obama aux États-Unis, le projet de loi Waxman-Markey qui a traversé la Chambre des représentants? Et donc, dans le contexte nord-américain, pouvez-vous commenter, si vous le pouvez, là, mais commenter ce que... ce que le gouvernement américain... en tout cas, à tout le moins, la proposition de l'administration Obama, puisque l'on sait, là, à travers le Sénat, peut-être qu'il y aura de nouvelles modifications au nouveau projet de loi déposées notamment par M. Kerry? Mais donc pouvez-vous, s'il vous plaît, nous aider dans ce cheminement-là? Vous avez parlé de la Suède, mais nous parler, s'il vous plaît, des États-Unis?
M. Dutil (Yvan): Je vais essayer de vous éclairer, mais je ne suis pas un expert dans la législation américaine. Je sais qu'ils ont un marché du carbone qui est dans leurs projets, ce qui est une bonne chose de façon générale. Je sais aussi que les États-Unis, dans leur package de redémarrage économique, ont débloqué 121 milliards de dollars dans la recherche sur les énergies renouvelables, et la Chine 221 milliards de dollars. Donc, c'est... moi, avec mon 1,5 million par année, il va falloir que je me positionne à travers tout ce monde-là, ça va être un petit peu difficile.
Les États-Unis bougent, ce qui est une bonne affaire, là, parce qu'avant ça, c'était un gros problème. Parce qu'on ne peut pas demander à la Chine de réduire sa production de carbone, qui est rendue le plus gros pollueur au monde dans ce domaine-là, si, nous, les riches, les gens bien nantis, on ne donne pas l'exemple. Ça, c'est un principe de base. Puis d'ailleurs, du point de vue de l'équité, là, parce que le carbone c'est un phénomène cumulatif, techniquement tous les pays occidentaux ne devraient plus émettre de carbone à partir de 2025 pour être équitables. Ce que j'ai présenté comme modèle, c'est contraction et convergence, là, donc on va tendre vers tous la même chose dans 50 ans, mais ce n'est pas équitable, c'est juste acceptable.
Donc, les États-Unis bougent, ils vont réduire d'un petit pourcentage leur consommation. Comment ça va se faire? Entre autres, eux aussi... Obama, ce qu'on en sait, c'est que lui aussi est au courant des problèmes d'approvisionnement en pétrole et fait tout ce qu'il peut pour diminuer la consommation d'énergie aux États-Unis. Le gros malheur des États-Unis, c'est le charbon. En fait, c'est le malheur de la planète parce qu'il n'y a pas assez de pétrole puis de gaz naturel. Pour vraiment détruire le climat, c'est le charbon puis le pétrole lourd, les sables bitumineux, le gaz de schiste qui peuvent être problématiques. Et ils font des efforts en ce sens-là. Ils vont... Et eux... pour eux autres, c'est sûr que c'est le morceau facile, de fermer les centrales au charbon ou de les remplacer par des centrales de deuxième ou troisième génération plus efficaces. C'est sûr que ces options-là, pour nous, ne s'appliquent pas. Par contre, dans le marché du carbone, on peut peut-être leur offrir des choses qui, pour eux, sont difficiles et jouer comme ça avec eux autres. C'est tout ce que je peux vous dire actuellement, de ça, le détail du plan américain, là.
Le Président (M. Ouellette): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Est-ce que... est-ce que je comprends de votre commentaire sur... Vous dites: Ce n'est pas équitable, à peine acceptable, là. Le fait que, pour Copenhague, il y ait des discussions nous amenant aussi, on le sait de plus en plus, là, vers une démarche nous amenant non seulement vers 2020, mais 2030, 2050, et tout ça... Est-ce que votre commentaire s'applique à la position américaine? Parce qu'au moment où on se parle, dans le projet de loi américain, et il est tellement complexe que c'est difficile d'établir un chiffre, mais on nous dit que... on semble nous dire que le total de l'effort dans le projet de loi qui a traversé la Chambre des représentants, si on calcule leur marché du carbone plus les efforts de lutte à la déforestation, plus des crédits à l'étranger... on estime que le projet de loi Waxman-Markey est aux alentours de moins 18 % comme cible pour 2020. Comment vous le commentez, cet effort-là, de notre... de notre voisin américain?
n(14 h 20)nLe Président (M. Ouellette): M. Dutil.
M. Dutil (Yvan): Bon. Les Américains font un effort, font au moins 18 % après n'avoir rien fait pendant que les autres pays du monde progressaient, là. C'est ça qui est le... Tout le monde est heureux de ça, là, c'est clair que c'est un pas dans la bonne direction.
Mais il faut savoir que la phrase que je vous ai dite, que j'ai mentionnée, c'est une phrase d'un négociateur chinois qui a dit: On sait très bien que c'est un effet cumulatif, le CO2, et que, vous, les Occidentaux, depuis le XIXe siècle, vous avez produit 70 % des effets des changements climatiques à vous tout seuls. Donc, nous, si on calcule ce qu'on est rendus à faire, actuellement on est à quelques pour cents du total. Ne venez pas nous donner de leçons, surtout que la moitié de ce qu'on produit sert à vous... c'est de vos... c'est pour vos consommations personnelles. La moitié des croissances du gaz carbonique en Chine, c'est ce qu'ils vendent aux États-Unis puis dans le monde occidental. Ça fait qu'on est comme un petit peu malaisés d'aller leur dire quoi faire.
Ils acceptent, hein, les Chinois font des gros efforts pour réduire leur production de carbone pour des raisons tout à fait évidentes: ils ont de la misère à déplacer le charbon en Chine pour les rendre aux usines... aux centrales thermiques. C'est à ce niveau-là, là, ils sont tellement en croissance, ils ont de la misère à gérer. Puis, ils ne veulent pas mourir asphyxiés non plus dans leur pollution, donc ils font des gros efforts de leur côté.
Les normes de consommation d'essence en Chine sont plus élevées qu'aux États-Unis, donc, tu sais, je veux dire ils font leur part. Sauf que, quand on est à 9 % de croissance par année, c'est comme un peu difficile de limiter sa consommation de carbone, la ralentir, là. Il faudrait avoir une augmentation d'efficacité 9 % par an, puis ça, je ne pense pas que ça ait été fait nulle part dans le monde, là.
Le Président (M. Ouellette): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: J'aimerais vous entendre, parce que, dans votre présentation, d'ailleurs elle apparaît encore devant nous, là, le dernier acétate, c'était: N'espérez pas de miracle technologique. Je pense que ça amène un peu la question dans votre... dans votre vision des choses. Dans quel secteur doivent porter les efforts de l'État québécois? Parce que vous n'êtes pas sans savoir que, lorsqu'on va rencontrer des gens provenant, par exemple, de secteurs industriels, ils vont nous raconter une histoire qui est le fait que, depuis 1990, il y a eu des efforts importants de faits du point de vue du secteur manufacturier et industriel au Québec. Puis ensuite, il y a le secteur des transports où plusieurs vont venir nous parler par contre de développement technologique, en parlant des efforts à faire pour l'arrivée de la voiture électrique, par exemple.
Vous commentez dans votre mémoire rapidement, mais vous commentez le secteur agricole. Enfin, je vous pose une belle grande question ouverte. Ça va vous permettre de peut-être de compléter l'information sur le contenu de votre mémoire. Mais, une fois que vous nous dites: Il ne faut pas espérer de miracle technologique, je me dis: Bon, bien, à partir d'une telle phrase: Dans quel secteur vous pensez qu'on peut aller... on peut aller chercher les gains?
M. Dutil (Yvan): Je vais vous donner un exemple.
Le Président (M. Ouellette): M. Dutil.
M. Dutil (Yvan): Je vais vous donner un exemple tout à fait par hasard... pas par hasard, mais choisi judicieusement: les hybrides branchables, qui est probablement le truc le plus simple à mettre sur le marché, qui va arriver d'ici deux ou trois ans, on pense à 30 % de pénétration, 2020. C'est ce que j'ai lu, ce qui m'a l'air raisonnable. Mais, à 30 % de pénétration en 2020, ça nous fait à peu près 15 % de la flotte qui va être en hybrides branchables, qui consomme à peu près... donc, à 15 % de la flotte, ça va nous donner une baisse de 10 % de la consommation d'essence du parc automobile, ce qui correspond à peu près à 5 % de la consommation d'essence totale de tout le système de transport. C'est une partie de la solution peut-être, mais ce n'est pas une solution magique.
Le danger, c'est que, là, on n'a pas beaucoup de temps. Si on veut faire quelque chose d'ici 2020, on a neuf... neuf années ? très mauvaise liaison ? neuf ans devant nous. Et partir une nouvelle technologie, la développer... la déployer en 10 ans, là, ça relève du miracle; à moins d'avoir des choses comme une guerre, là, ce n'est pas quelque chose qui se fait en temps normal. Les gens voient le progrès technologique, mais ce qu'ils voient, c'est le projet technologique dans un domaine particulier qui est le domaine de l'informatique et de l'électronique. Dans les autres domaines, comme le domaine du génie mécanique, les progrès sont extrêmement lents. La raison est que c'est une connaissance qui date du XIXe siècle et que, là, exploitée au XIXe siècle.
Améliorer l'efficacité énergétique d'une maison, c'est: tu augmentes l'isolation, tu mets des bonnes fenêtres puis tu orientes tes fenêtres côté sud. Il n'y a pas... je n'ai pas besoin de faire des recherches pendant 15 ans pour ça. Nous, on travaille sur des procédés pour essayer de mieux stabiliser thermiquement des maisons, ces choses-là. C'est de la recherche, mais ça ne révolutionnera pas la conception des maisons. Il y a des gens aux États-Unis qui font des nouvelles fenêtres hyperisolantes avec des aérogels. Ça, c'est des choses qui vont aider. Mais n'espérez pas qu'il va arriver quelque chose, deus ex machina, là, genre l'hydrogène, ou la fusion nucléaire ou... dans le temps qui nous est alloué pour faire ces changements-là, on ne l'aura pas.
Il va falloir changer, vous l'avez dit vous-même, la deuxième auto; probablement il va falloir qu'elle prenne le bord. Mais, si, la deuxième voiture, les gens s'en débarrassent, ça veut dire qu'il faut qu'il y ait une alternative à la deuxième voiture. Et là, encore là, si on veut faire des trains électrifiés, il n'y a pas d'invention à faire, là, en Europe, ils en ont depuis 70 ans. Je pense qu'on peut même en commander chez Bombardier sans aucune difficulté. Par contre, ils vont venir d'Europe, parce qu'ils n'en ont pas ici. C'est le genre de choses... Il y a un paquet de solutions.
L'Agence internationale de l'énergie a dit la même chose dans son dernier Outlook. On peut le faire. Il y a plein, plein de solutions technologiques déjà en place qui ne sont pas déployées pour toutes sortes de raisons, des raisons de conservatisme industriel, parce qu'il faut savoir que le problème de tous ces changements-là, c'est que ça affecte les infrastructures. J'en mentionne un petit peu dans mon mémoire. Il y a une inertie à cause que c'est les infrastructures. Une infrastructure, c'est long, c'est gros, ça prend du temps à fabriquer, ça se défait avec beaucoup de temps. On ne les remplace pas souvent.
Donc, si vous arrivez avec une nouvelle technologie, il faut rebâtir de nouvelles infrastructures tout en maintenant les anciennes pendant un certain temps, et ça, ce genre de jonglage-là est extrêmement difficile à faire. Ce n'est vraiment pas... pas simple, là. Donc, c'est pour ça que l'avantage de l'électrification, c'est qu'on a déjà une infrastructure de réseau électrique qui est robuste au Québec relativement par rapport à d'autres endroits dans le monde, et ça, c'est déjà un gros, gros avantage qu'on a. Parce que, s'il fallait rebâtir un réseau de distribution de l'hydrogène, par exemple, bien là c'est des dizaines, des centaines de milliards à mettre en Amérique du Nord, entre autres, alors qu'on a déjà un réseau qui nous a coûté des dizaines, des centaines de milliards qui, lui, est fonctionnel et qu'on peut... on peut solliciter. Donc, c'est le genre de choses, là... C'est pour ça que je vous dis: Si on arrive avec une nouvelle technologie, là, regardez comment ça s'insère dans l'ensemble du système parce qu'il ne faut pas voir...
Le problème est souvent que les gens voient un petit élément, ils voient un petit élément de l'ensemble qui est beaucoup, beaucoup plus grand, et il faut insérer ces technologies-là dans la société, dans le système économique, et ça, ça demande beaucoup plus de réflexion que d'arriver avec une solution miracle, genre un monorail ou une chose comme ça, là.
Le Président (M. Ouellette): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Je comprends un peu mieux votre affirmation, mais ça m'amène quand même à reposer la question: Est-ce qu'à travers votre réponse je dois comprendre que, pour vous, un objectif pour le Québec se situerait à moins 40 %? Est-ce que je crois déduire de votre réponse que ça passe avant tout par l'électrification de nos moyens de transport? Mais je vais vous laisser compléter, parce que je veux aussi vous entendre sur...
Donc, je repose un peu ma question: C'est sur quel secteur que doit porter l'effort? Et notamment ? parce que vous savez qu'après vous, au cours des prochaines journées, on va recevoir des représentants de secteurs industriels, c'est intéressant d'avoir votre éclairage ? eux, lorsqu'ils vont entendre des cibles comme celles que vous suggérez, ils vont dire: Si vous demandez au secteur industriel québécois d'appliquer une telle cible... Ils vont sûrement dire qu'ils pensent que ce ne sera pas possible, parce qu'ils ont déjà fait des efforts.
Donc, je veux vous entendre sur... Parce que vous savez qu'à travers les principes internationaux il y a ce que dit le GIEC, mais il y a aussi un principe, qui est au coeur des débats actuellement pour le mois de décembre, qui est le principe, donc, de la responsabilité commune mais différenciée. Et quand... même à l'échelle d'un État québécois, quand on reçoit les gens devant nous, ils plaident pour le même principe en disant: Ça devrait être différencié selon l'effort déjà fait, notre historique, etc.
Donc, je vous repose un peu la question: Votre cible, vous la... vous pensez... est-ce qu'elle s'applique de façon égale à tous les secteurs? Est-ce qu'elle s'applique de façon différenciée, selon vous, à des secteurs? Sur quels secteurs ces efforts-là doivent porter d'ici 2020 au Québec?
Le Président (M. Ouellette): M. Dutil.
M. Dutil (Yvan): Effectivement, il faut avoir une approche différenciée. C'est un principe de base, là, de gestion des problèmes techniques, là. Mais il faut regarder qu'est-ce que chaque secteur peut nous donner et il faut regarder... pas juste entendre ce qu'on nous dit. C'est clair que, moi, les alumineries, là, leur production de SF6, je ne pense pas qu'ils peuvent la comprimer indéfiniment. Ils ont fait de gros efforts. Pour une raison bête et méchante, l'hexafluorure de soufre coûte une fortune, c'est extrêmement coûteux. En plus d'être un gaz à effet de serre monstrueux, là, c'est extrêmement coûteux. Donc, eux, ils ont tout intérêt à diminuer. Ils ont diminué, puis je pense qu'il va être près, là, du minimum, là, plancher. Ils vont peut-être réduire encore un petit peu, mais, à un moment donné... Il y a ce qu'on appelle en technologie, là... en anglais, on dit «diminishing return», c'est-à-dire que le retour sur l'investissement est de plus en plus en plus faible. Mais là où...
Donc, dans les transports, on sait qu'en utilisant... si on avait une flotte de voitures comme en Europe, on découperait déjà de 20 %, 30 %, je pense, dans les voitures, là. Et le camionnage, c'est plus difficile, il y a quand même des gains à aller chercher là avec des systèmes aérodynamiques sur les camions, modifications au contrôleur de vitesse, des choses comme ça, on peut peut-être aller chercher un autre pourcentage significatif. Et il y a le ferroroutage, ou ces choses-là, le cabotage. Il faut voir dans chaque domaine.
n(14 h 30)n Dans l'industrie, moi, ce que je pense, la grosse industrie lourde ne pourra pas contribuer énormément pour une raison bien simple. Ils ont des ingénieurs en efficacité énergétique, ils ont des gros moyens technologiques. S'ils dépensent beaucoup d'énergie... si c'est ton principal pôle de dépenses, tu t'arranges pour le réduire au maximum. Là où est-ce qu'on peut gagner, je pense, et je pense que les gens du Réseau Environnement vous ont dit la même chose, c'est les entreprises, les petites, moyennes entreprises qui, eux, n'ont pas toutes ces infrastructures de recherche et développement, cette capacité d'innovation aussi grande, eux vont gagner en efficacité en modifiant leurs procédés industriels.
Il y a des... Et des fois ça ne demande pas énormément de choses. On peut juste penser à la conception des produits. J'écoutais, cette semaine, le responsable du développement durable chez... à la SAQ. Ils ont demandé à leurs fournisseurs de réduire de 15 % à 20 % la... de réduire la masse de leurs bouteilles de vin. Bien, ils ont réduit de 15 % à 20 % la masse de leurs bouteilles de vin. Ça veut dire qu'en France la compagnie de Bordeaux qui fait les bouteilles, bien, ils viennent de réduire de 15 % à 20 % leur trace environnementale. Donc, c'est un gros problème de gestion de la queue logistique. C'est encore là du gros génie mécanique bête et méchant, là. Mais ça, au Québec, ce serait quelque chose qui aurait un effet important sur la productivité des entreprises, parce que beaucoup d'entreprises n'ont pas, justement, fait ces efforts-là, là, d'optimisation de leur queue logistique, pour toutes sortes de raisons: parce que c'est des petites PME, puis, je veux dire, on vivote, on n'a pas le temps de tout explorer ça, on n'a pas toujours l'expertise, c'est des domaines dans lesquels on ne travaille pas, donc on ne va pas chercher l'expertise là-dedans.
Donc, je pense que c'est vraiment au niveau des petites, moyennes entreprises que le gros du gain est possible. C'est sûr que ces gens-là vont vous dire: On ne peut pas rien faire, mais, quand on rentre dans une entreprise, souvent on est surpris du... Mon Dieu! Qu'est-ce que c'est, ça? Vous faites encore ça de même! Des fois, là, on peut avoir des... Puis les gens vont être contents, après ça, de dire: Ah oui! On ne savait pas qu'on pouvait faire ça comme ça au lieu de comme ça. Je pense que c'est là qu'on devrait jouer. On va en profiter pour refaire... ça nous permet de refaire notre base industrielle puis de réduire nos gaz à effet de serre en même temps.
Le Président (M. Ouellette): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Oui. M. le Président, je ne veux pas vous remplacer, mais je veux juste dire à M. Dutil: Moi ? il nous reste cinq minutes du côté gouvernemental ? j'ai une question puis je voulais permettre à notre économiste, Jean-Yves Benoit... Si tout le monde était d'accord, je demanderais à M. Benoit, notre économiste, de venir avoir un échange... en tout cas, de vous expliquer, pour... selon eux, qui ont écrit le document, d'où vient le 60 $ du prix du pétrole que vous avez commenté, là, dans le scénario. Ça fait que je voudrais garder une minute. Donc, je prends 30 secondes, je vous laisse une réponse de deux minutes, puis après ça, si vous le permettez, on pourra avoir l'éclairage de notre économiste, M. Benoit.
Dans votre mémoire, vous parlez, dans les pièges qu'il faut éviter, vous parlez de la question que les cibles adoptées entraînent... Et on voit ces commentaires-là dans plusieurs États qui, en ce moment même, adoptent leurs cibles, qu'on doit éviter d'exporter le problème. On le sait, là, le spectre que plusieurs dessinent, c'est un spectre négatif, là, cauchemardesque, là, mais où le monde disent: Bien, vous allez entraîner la fermeture d'usines, par exemple en territoire nord-américain, qui vont aller choisir d'aller s'établir ailleurs. Je voulais que vous commentiez cela en disant qu'est-ce que vous nous recommandez, avec une cible ambitieuse, qu'est-ce qu'il faut mettre en place, par ailleurs. Quand vous dites en plus que ça porte beaucoup sur la PME au Québec, qu'est-ce qu'on doit mettre en place, comme gouvernement, pour éviter l'effet pervers que, vous-même, vous mentionnez dans votre mémoire?
Le Président (M. Ouellette): C'était un gros 30 secondes, Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Oui, je sais. O.K., O.K.
Le Président (M. Ouellette): M. Dutil.
M. Dutil (Yvan): Je vais répéter la même chose que j'ai dite: C'est une opportunité de refaire les procédés industriels des entreprises. Il faut le voir comme ça. Il y a beaucoup d'entreprises au Québec qui ont 20 ans de retard, technologiquement, sur les autres. Donc, je pense qu'on peut en profiter justement pour renouveler notre parc industriel de la même façon.
Le Président (M. Ouellette): Puisqu'il y a consentement des membres de la commission pour entendre M. Benoit, je vais vous demander de vous identifier, M. Benoit, et de répondre à...
Mme Beauchamp: Peut-être juste auparavant... Bien, je voulais juste remettre en contexte, parce que vous avez dit que la référence n'était pas correcte, etc. Moi... Ce n'est pas moi qui ai choisi la référence, ça fait que je voulais juste que M. Benoit puisse commenter cela, et on verra si ça vous satisfait comme explication.
M. Benoit (Jean-Yves): Oui. Jean-Yves Benoit, du Bureau des changements climatiques, ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs.
J'ai effectué une vérification auprès de nos homologues, au ministère des Ressources naturelles, qui, eux, ont roulé le modèle. Le 60 $ US le baril, prix de 2015, est effectivement le scénario de référence utilisé par l'Energy Information Administration en 2008. Vous avez raison quand vous dites qu'en 2009 le 60 $ correspond un peu plus au scénario de... au scénario bas. En 2009, le scénario bas serait de 60 $ US, en dollars de 2007, en 2020, tandis que le scénario de référence, cette année, serait de 107 $ US en 2015, selon nos experts du ministère des Ressources naturelles.
Le Président (M. Ouellette): Un commentaire, M. Dutil?
M. Dutil (Yvan): Oui. J'ai ici les chiffres, je suis allé chercher le document hier soir, il est disponible sur Internet. J'ai 115,45 $ en 2020 et 95 $ en 2010, scénario de référence. C'est parce que le roi Abd Allah, d'Arabie saoudite, a fait savoir que, lui, il ne baisserait pas en bas de 75 $ le baril, c'était son objectif. Et ils ont dit ce matin, l'OPEP, qu'ils ne monteraient pas la production de pétrole tant que le baril de pétrole ne dépasserait pas 100 $. Je pense que personne... 60 $, c'est le prix le plus bas que vous pouvez produire du pétrole, dans le monde, à l'heure actuelle. Il y aurait... il y a plein de projets qui ne se font pas en bas de 75 $, actuellement. Donc, j'ai beaucoup de doutes sur cette cible-là.
Mme Beauchamp: Bien, je pense qu'on a...
Le Président (M. Ouellette): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: On a démêlé les choses en disant tous les deux... Vous faites référence... Le chiffre utilisé dans la modélisation qui a commencé à la fin de l'année 2008, il y a eu deux étapes de modélisation dans... derrière la modélisation que vous avez, donc, une modélisation au MRNF et une modélisation ensuite au ministère des Finances, rentrant d'autres variables. Donc, le chiffre, à partir de la fin de 2008, était bien sûr le chiffre disponible en 2008, mais vous avez raison de dire qu'en 2009... Le document auquel vous faites référence existe maintenant, et d'autres intervenants viendront sûrement nous dire la même chose, mais je ne voulais pas qu'on laisse sous-entendre que, dans le document, il y avait... qu'il y avait une erreur, puisque c'est les chiffres de 2008 qui étaient à notre disposition quand la modélisation a été faite. Mais on pourra avoir cette discussion aussi avec plusieurs autres intervenants, mais je voulais juste quand même clarifier la référence utilisée et le chiffre utilisé, qui était donc le chiffre de 2008. Ça nous illustre de très belle façon jusqu'à quel point les choses changent vite et changent vite aussi dans la négociation internationale. Est-ce qu'il me reste encore du temps?
Le Président (M. Ouellette): Ah! Il vous resterait 30 secondes, Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Peut-être juste un mot sur ce que vous nous dites quant aux possibilités dans le secteur agricole, je voudrais peut-être vous entendre.
M. Dutil (Yvan): Oui, bien, c'est parce que j'avais...
Le Président (M. Ouellette): M. Dutil, pour 45 secondes, pour le mot de la fin.
M. Dutil (Yvan): Oui, excusez-moi. J'ai couvert très rapidement le... Parce qu'il y avait... J'ai remarqué dans le document qu'on disait qu'il y avait peu de gains à faire dans le secteur agricole, et en fait il y a certaines possibilités, en modifiant les pratiques agricoles, de couper la consommation de carburant, ce qui peut être avantageux pour l'agriculteur. L'autre chose, c'est: en modifiant les pratiques agricoles, il y a moyen de séquestrer du carbone dans le sol, qui... C'est une nécessité; si on ne veut pas trop briser le climat, il va falloir le faire. Donc ça, c'est deux choses qu'il faut regarder, mais c'est en dehors de mon domaine de compétence, là, professionnelle, là.
Le Président (M. Ouellette): Merci, M. Dutil. Nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle, et la parole est au député de L'Assomption.
M. McKay: Merci, M. le Président. Bonjour, M. Dutil. Merci pour votre présentation qui, je crois, arrive à point nommé au cours de cette consultation, puisque je pense que votre présentation permet de remettre les pendules à l'heure, de nous ramener un peu à des réalités concrètes par rapport à plusieurs... plusieurs mythes, je vous dirais, qui ont été entretenus par le gouvernement du Québec depuis quelques années, à grands frais de publicité. D'ailleurs, on nous a vanté que le Québec était en avance à tout point de vue, par rapport au développement durable, que nous étions... que nous allions être les Arabes de l'électricité, et je pense que... en tout cas, vous pourrez toujours revenir un peu si vous souhaitez élaborer sur ces aspects-là, mais je pense que... en tout cas, moi, je vous dis que, de ce côté-ci, on... nous recevons très positivement ces commentaires, et de façon constructive, je vous dirais, parce que la première... la première chose à faire pour pouvoir s'améliorer, pour pouvoir changer les choses, c'est au départ d'être capable de regarder la réalité en face, de faire des constats exacts, hein? Peut-être que la réalité ne nous plaît pas. Moi, je préfère, et de loin, comme Québécois, me dire que, oui, on est... nous sommes en avance parce qu'on consomme beaucoup moins d'énergie que d'autres. Mais, quand je me compare avec d'autres pays qui ont des hivers à peu près aussi rigoureux que nous, bien, j'ai tendance à déchanter un petit peu puis je me dis: Bien, il me semble que, nous aussi, au Québec, on devrait être capables, et on a été capables, dans les années soixante, soixante-dix, de développer les grands chantiers hydroélectriques, de développer, bon, dans le fond, ce qui était des percées technologiques à l'époque.
Je rappellerais que le choix de l'hydroélectricité, au départ, était... Ce n'était pas l'électricité, la moins chère, lorsque le Québec s'est engagé dans cette voie-là. Et aujourd'hui, bien on a tendance à... on a tendance à écarter d'autres sources d'énergie sur la base simplement qu'elles sont plus chères, là, je pense... bien, en tout cas au niveau de l'électricité, au niveau du photovoltaïque, puis c'est probablement la même chose au niveau des transports.
n(14 h 40)n Je rappellerais... Dans votre présentation, la dernière page effectivement parle d'une politique suggérée pour le Québec. Et vous mentionnez là-dedans... Premièrement, je vous félicite aussi de nous rappeler à l'ordre sur la question de la nécessité, donc, de réduire nos émissions de gaz à effet de serre de moins 25 % à moins 40 %. On peut tergiverser, on peut étudier Waxman-Markey et toutes les autres législations tant qu'on veut, sauf qu'il est... Et le fait que vous nous... sur lequel vous nous ramenez, c'est que, si on ne veut pas... si on veut éviter le risque d'un emballement climatique, il ne faut pas avoir un réchauffement de plus de l'ordre de 2°, et, si on veut avoir ça, bien, ça nous prend ces réductions-là, et d'une façon ou d'une autre, éventuellement, on va devoir y arriver.
Vous nous dites que le coût d'un tel plan, donc, pour réduire de 40 % les émissions de gaz à effet de serre au Québec, selon vous, serait de l'ordre de 30 milliards de dollars, soit le double du plan... du coût pour l'objectif proposé... maximum, là, proposé par le gouvernement, de moins 20 %. À partir de quoi est-ce que vous estimez le coût, donc, de ce plan-là? Et, avec un tel coût, est-ce que les... est-ce que l'impact sur l'économie québécoise et sur les finances publiques serait quand même acceptable, ou si on parle, là, vraiment d'étrangler, d'étouffer, là, l'économie du Québec?
Le Président (M. Ouellette): M. Dutil.
M. Dutil (Yvan): N'ayant pas accès au modèle économique du gouvernement, j'ai fait juste une régression linéaire sur les chiffres que le gouvernement me donnait, donc j'arrivais à un coût de 2 milliards par année, avec 40 %. Donc, c'est bêtement... c'est tout ce que j'avais en main, là. Comme c'est une petite perturbation, ça peut peut-être être acceptable. Et tout dépend du prix du pétrole, tout... Le nerf de la guerre, là-dedans, c'est le prix du pétrole. Il faut savoir qu'on consomme 135 millions de barils de pétrole par année au Québec. 10 $ du baril de pétrole, c'est 1 350 000 000 $. Donc, si vous ajoutez 20 $ du baril de pétrole, vous avez un 2,5 milliards par année qui disparaissent de l'économie du Québec pour aller engraisser le Venezuela puis l'Algérie, principalement... en fait, l'Algérie, maintenant, qui est notre principal partenaire commercial. Donc, c'est là que le jeu... tout le nerf de la guerre se joue. Si vous prenez un pétrole un petit peu plus haut, ça devient intéressant de réduire beaucoup plus votre consommation de pétrole. Donc, en prenant... Moi, j'ai regardé avec un pétrole à 80 $ le baril, qui est le prix d'aujourd'hui, qui est un prix qui m'a l'air tout à fait raisonnable, qui est le prix de l'OPEP, que veut tenir l'OPEP, et j'arrive à ce résultat-là. Donc... Mais ça, je veux dire, ce n'est pas d'analyse économique plus qu'au premier ordre, là.
L'autre chose, c'est que, si vous relisez le rapport de Stern, de Nicholas Stern, il parle de 1 % à 2 % du PIB. 1 % du PIB, au Québec, c'est 2,5 milliards de dollars par année, multipliés par 10 ans, vous arrivez à 25 milliards. On est encore dans l'ordre de grandeur. Donc, c'est le genre de chose, là...
Et on parlait du sacrifice économique. Je vous rappellerais qu'une des conséquences de faire le choix du développement durable, c'est que peut-être que la croissance économique va être un petit peu moins haute que dans d'autres... que des États qui ne font pas ce choix-là, mais qu'à long terme on est supposé se reprendre. Si vous avez une forêt puis vous la bûchez toute dans un an, vous allez faire plus d'argent cette année-là que si vous bûchez 10 % de la forêt pendant 10 ans, et, après 10 ans, il va encore vous rester une forêt pour pouvoir continuer. Donc, c'est... Et ça, c'est le prix à payer si on décide de faire du développement durable, ça fait partie du débat public qu'il faut tenir, là. Il n'y a pas... on n'en sort pas.
Moi, ce que j'avais regardé, c'est que le modèle économique... Ce qui m'avait surpris du modèle économique, c'est que les coûts étaient minimes. Même à 20 %, là, on parlait de 1 000 emplois perdus, à peu près, là, parce que j'ai vu 0,04 % sur l'emploi, 0,4 % sur le PIB, je veux dire, c'est en dedans des... Je ne le sais pas, là, mais la capacité de prédire des modèles économiques sur un an est inférieure... est nettement inférieure à ces... à ça, donc ça m'avait l'air insignifiant, comme coût à payer, là. Donc, probablement qu'avec un pétrole à 80 $ ce serait tout à fait neutre économiquement, là.
Le Président (M. Ouellette): M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Oui. Vous avez... vous avez déploré le fait ? et encore une fois ce que vous mentionnez reçoit beaucoup d'échos de ce côté-ci de la table ? vous avez déploré le fait qu'il n'y ait pas eu de modélisation qui ait été effectuée par le gouvernement au-delà, donc, de 20 % de réduction. Donc, est-ce que vous demandez à ce qu'on puisse bénéficier d'une telle modélisation pour, je ne sais pas, moi... Qu'est-ce que vous pensez qui serait nécessaire, là, pour des gens comme vous, dans la communauté scientifique, puis éventuellement des gens comme nous, comme parlementaires, ici, à Québec? Qu'est-ce que ça nous prendrait, comme outils supplémentaires, de façon à pouvoir vraiment juger la situation de façon adéquate?
Le Président (M. Ouellette): M. Dutil.
M. Dutil (Yvan): Normalement, quand on fait un choix de design en ingénierie, on explore l'espace du possible puis on regarde... on essaie de trouver l'endroit où il y a un point d'inflexion, où, à partir d'un certain point, ça devient horriblement coûteux de continuer, et l'autre chose, c'est qu'on regarde... on part de la spécification qui nous est donnée à haut niveau. Si on vous demande qu'un camion doit transporter 15 tonnes de briques, bien on fait les calculs autour de 15 tonnes de briques, et non pas autour de 5 tonnes de briques. Normalement, si la spécification scientifique est de 25 % à 40 %, on regarde... j'aurais commencé à 10 %, j'aurais fini à 50 % puis j'aurais fait rouler le modèle.
L'autre chose, c'est qu'on fait une étude de sensibilité au prix du pétrole, qui a l'air assez important dans les impacts économiques. On a pris 60 $; on aurait pu prendre 60 $, 80 $, 40 $, et on aurait pu voir une... on aurait pu voir, dans l'espace du possible, qu'est-ce qui s'offrait à nous. Là, malheureusement, le domaine est extrêmement restreint, c'est entre 10 % et 20 %, donc j'avais de la misère à extrapoler, entre autres parce que le domaine est très restreint. L'autre chose: les cas de 10 % et 12 % qui sont explorés sont, à mon avis... Comme on est supposés faire moins 6 % en 2012, c'est essentiellement insignifiant, là, comme décroissance par la suite. Il aurait dû y avoir un petit peu plus d'exploration de faite. Et une étude de sensibilité sur le prix du pétrole aussi, ça aurait été important pour éclairer le... Parce que, si on veut faire un débat public, il faut quand même avoir une bonne description du problème, là.
Le Président (M. Ouellette): M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Oui, merci. Donc, pour vous, pour avoir un débat public effectivement éclairé sur cette question-là, nous devrions avoir en main une modélisation avec... entre moins 25 % et, au moins, moins 40 %, là, peut-être. Vous avez mentionné moins 50 %. En fait, ce que je comprends, c'est que ce que vous suggérez au gouvernement, c'est, dans le fond, de pouvoir augmenter la cible de façon à ce qu'on puisse... jusqu'au point où on puisse voir une augmentation importante dans les coûts associés ou dans les impacts économiques, donc, à partir du moment où le coût marginal, là, d'augmenter la cible devient... augmenterait de façon significative, ce qui ne semble pas être le cas dans les données que nous avons devant nous, parce que, même, il y a certains impacts qui sont positifs lorsqu'on augmente... lorsque la cible de réduction est augmentée. Et l'autre chose que vous nous... donc, une modélisation de moins 25 % à moins... potentiellement moins 50 %, mais qui pourrait arrêter là où il y aurait une augmentation des coûts importante si jamais ça arrivait.
Et l'autre aspect: Est-ce que c'était bien, donc, d'avoir une analyse de sensibilité aux coûts du pétrole? Déjà, on a compris que les données présentées, donc, en fin 2009 par le gouvernement utilisent les données de 2008 et que des données de 2009 sont disponibles, là, depuis quelque temps, donc on est déjà en retard d'un an, ne serait-ce qu'au niveau des données. Donc, vous nous suggéreriez d'avoir une analyse de sensibilité et peut-être de mettre les données à jour?
Le Président (M. Ouellette): M. Dutil.
M. Dutil (Yvan): Oui. Effectivement, travailler avec les données à jour. L'annuaire, l'Energy Outlook de l'EIA américain a été publié en mars 2009. Ils vont en publier un autre en février 2010, et l'Agence internationale d'énergie sort le rapport le 10 novembre. Donc, ils sont dans le domaine temporel, et je ne pense pas que ça prenne plus que quelques jours, rouler un modèle économique déjà écrit, en changeant les paramètres de base dedans, là. Donc, je pense qu'on pourrait... pour le débat public, on pourrait avoir ça d'ici la fin des audiences, une mise à jour. Je ne pense pas que ça demande tant d'efforts que ça à faire, là.
Le Président (M. Ouellette): M. le député de L'Assomption.
n(14 h 50)nM. McKay: Oui, merci. Maintenant, en ce qui concerne les gains de productivité industrielle qui pourraient être acquis, disons, avec un plan plus agressif en matière d'efficacité énergétique, est-ce qu'il existe, à votre connaissance, des données qui nous permettraient, comme parlementaires, de pouvoir évaluer quels seraient les gains de productivité et les... potentiellement les coûts, donc genre de potentiel technicoéconomique, là, de gains de productivité industrielle? Parce qu'on sait, et mon ex-collègue François Legault l'avait rappelé notamment au moment de son départ mais aussi à différentes occasions, notamment lorsqu'il commentait le dernier budget du gouvernement du Québec, le Québec accuse un retard en matière de productivité de son économie ? c'est le cas dans la plupart des secteurs industriels ? un retard en productivité par rapport au reste du Canada et un retard encore plus important si on le compare avec les États-Unis. J'imagine qu'il y a toutes sortes de différentes raisons à ça, là, mais une étant le fait qu'on a quand même bénéficié, au niveau de nos exportations, d'un dollar assez bas, ce qui ne nous demandait pas nécessairement de faire des gros efforts en termes de... en termes de productivité pour pouvoir quand même vendre à un prix raisonnable aux États-Unis. Puis d'autre part, aussi, je pense que les choix en matière de fiscalité n'ont pas toujours favorisé l'innovation technologique. On peut espérer que ces choses-là sont modifiées.
Mais donc est-ce que vous pensez qu'une cible comme celle que vous nous proposez d'adopter aurait simplement des impacts négatifs au niveau industriel, ou on peut imaginer, on peut potentiellement chiffrer des impacts positifs?
Le Président (M. Ouellette): M. Dutil.
M. Dutil (Yvan): J'ai un petit peu de difficultés à vous répondre de façon précise là-dessus parce que je ne suis pas dans le marché, là, de l'analyse des entreprises en énergie depuis longtemps, donc, on n'a pas encore eu notre premier client. Ce que je vous dirais de façon générale, mon expérience de gens que je connais qui travaillent dans l'industrie, c'est qu'au Québec on a plein de gens compétents, mais souvent, pour toutes sortes de raisons, il y a des problèmes de génie industriel parce que la taille des entreprises n'est pas très grande. Je l'expliquais tout à l'heure, ce n'est pas très grand, on n'a pas une grosse équipe de R&D, on n'a pas énormément de gens pour régler les problèmes.
Si vous voulez une idée de qu'est-ce que c'est, une entreprise traditionnelle, on ne parle pas de la haute technologie, une entreprise traditionnelle québécoise très performante, très innovante, c'est Teknion Roy & Breton, ici, sur la rive sud de Québec, qui est une institution remarquable, à mon avis, et ils font des meubles. Bête et méchant, ils font des meubles, mais ils font des meubles avec faible trace environnementale. Puis une des choses qu'ils m'ont dites, c'est qu'à un moment donné on a réalisé qu'on déplaçait de l'air avec nos camions, parce que les meubles étaient envoyés assemblés, et ils ont réalisé que, bon, écoute, ça coûte un prix, envoyer un camion pratiquement vide, parce que tu transportes de l'air. Ils ont reconçu tous leurs meubles. Maintenant, ils sont comme chez IKEA, assemblés... pas envoyés non assemblés, mais ils s'assemblent sans tournevis, de façon très simple, puis ils sont en partie faits avec des matériaux recyclés et fortement recyclables, et eux, ils ont une plus-value pour ce genre de concept là, et c'est parce qu'ils ont une équipe de R&D d'une vingtaine de personnes, qui est tout à fait incroyable pour une entreprise de meubles.
Et je pense que c'est là qu'on... Moi, je ne vois pas... il y a beaucoup d'entreprises qui n'ont pas fait d'effort ou pas eu besoin de faire d'effort. Ce n'est pas que les gens ne sont pas capables, c'est juste qu'ils n'ont pas été poussés à, pour toutes sortes de raisons. Et ce n'est pas qu'on n'a pas l'expertise au Québec; on a le plus grand centre de recherche en transenvironnemental au monde, ici, au Québec, on a d'excellents concepteurs de... des ingénieurs industriels très compétents. Mais souvent, pour toutes sortes de raisons, ce n'est pas utilisé dans la petite, moyenne entreprise parce qu'il y a un ou deux ingénieurs, puis ils font rouler l'usine, ils n'ont pas le... Puis, quand on fait rouler une usine, là, on n'a pas de temps pour développer des nouvelles affaires, pas le temps d'expérimenter, pas le temps d'essayer des choses, surtout que souvent votre patron va vous demander de ne pas vous tromper, donc il faut que ça marche du premier coup, il ne faut pas risquer.
C'est très difficile, ce genre d'environnement là. Je pense que c'est pour ça que, si on pouvait arriver, soit par des programmes gouvernementaux qui forcent un peu tout le monde à se botter le derrière, et là on peut en prendre... Les gens généralement sont très contents des résultats quand ils ont refait une phase, là, d'amélioration des procédés, mais souvent il y a beaucoup d'entreprises, ça fait 20 ans qu'elles n'ont pas modifié leurs trucs, là, et ça, c'est la structure industrielle du Québec.
L'autre chose pourquoi les États-Unis sont plus efficaces, c'est parce que c'est une industrie extrêmement lourde. J'ai un des mes beaux-frères qui est dans la fabrication de fournaises à l'huile, justement, et il disait qu'ici, au Québec, on a des robots. Nos machines, c'est des machines programmables, alors qu'aux États-Unis c'est des machines... des presses hydrauliques géantes qui vous plient la tôle. La différence, c'est que la presse hydraulique géante, pour la changer, ça va vous coûter x millions de dollars, alors qu'ici on reprogramme l'ordinateur. On fait des plus petits volumes, des plus petites quantités, des plus petites séries. C'est un gros avantage quand vient le temps de se revirer, parce que là on peut redesigner beaucoup plus facilement les équipements. On n'a pas besoin de se racheter une deuxième usine pour faire les nouvelles pièces, on peut reprogrammer les machines. Et là je pense que ça, c'est un avantage que, nous, on a par rapport aux Américains ou à l'Ontario, qui avait une industrie automobile gigantesque. C'est qu'on est capables de bouger vite parce qu'on est petits. Il faudrait l'utiliser, cet avantage-là, dans ce cas-là, justement.
Le Président (M. Ouellette): M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Oui. Vous nous avez aussi rappelé... vous nous avez rappelé le rapport Stern, d'un ancien économiste en chef de la Banque mondiale, qui a été mandaté par le gouvernement du Royaume-Uni pour évaluer les impacts économiques du réchauffement climatique, et vous nous rappelez, donc, que le budget... vous nous avez rappelé que les estimations de M. Stern, donc, c'est... Lui évaluait le coût pour s'attaquer aux changements climatiques, là, pour éviter les pires conséquences des changements climatiques, à environ... entre 1 % et 2 % du PIB.
Est-ce que vous pouvez nous rappeler aussi quels sont les coûts de ne rien faire? Donc, qu'est-ce que M. Stern... à quelles conclusions est-il arrivé, aussi, lorsqu'il a regardé les coûts finalement de ne pas faire les gestes suffisants, de se donner des cibles un peu comme ce que le gouvernement du Québec nous propose encore aujourd'hui?
Le Président (M. Ouellette): M. Dutil.
M. Dutil (Yvan): De mémoire, je pense que sir Stern avait estimé à 30 % du PIB mondial les coûts dus à la dégradation de l'environnement et autres phénomènes. J'ai vu cette semaine des coûts de l'ordre de 100 milliards de dollars dans le monde entier, juste pour la protection côtière. Extrapolez à partir de ce que ça coûte à l'heure actuelle pour protéger les côtes des Pays-Bas. Ça, c'est sûr que, là, les problèmes ne sont pas encore apparus. Ici, par exemple, on va perdre la moitié... le quart des Îles-de-la-Madeleine, ce siècle-ci. Les dunes de sable des Îles-de-la-Madeleine, on va les perdre, là, ça, c'est... Elles sont à un mètre au-dessus du niveau de la mer, on va les perdre à un moment donné, dans une tempête. Et, bon, le problème n'est pas tellement... le problème, c'est que c'est les gens les plus pauvres qui vont être le plus dans la misère. On est dans un des endroits où on va être le moins pénalisés par ces choses-là, là. Ce qui va probablement être le problème, c'est qu'il va falloir gérer des afflux de réfugiés épouvantables. Et donc c'est ça, Stern parlait de 30 %.
Donc, c'est difficile à dire. Je pense qu'ici, au Québec, le consortium Ouranos a fait des estimations de coûts et des conséquences. Entre autres, il va peut-être falloir faire un barrage sur le fleuve, pas loin de Trois-Rivières, pour maintenir le lac Saint-Pierre à flot. C'est le genre de chose, là, qu'il faut commencer à planifier maintenant, là. Donc, c'est sûr qu'il y a des milliards qui se mettent là.
L'autre chose aussi qu'il faut faire attention, c'est que, quand vous faites des modifications comme ça, c'est qu'il y a des gens qui... Une façon de faire, c'est des gens très gros qui ont des... qui vont être affectés, mais il y a un transfert d'argent et de ressources vers des gens... une nouvelle façon de faire. Donc, ce n'est pas clair, au final, quelles sont les conséquences économiques. Par exemple, si... On réduit notre production de CO2, on diminue notre consommation de pétrole, puis à un moment donné, jusqu'à un certain point, ça s'équilibre. Donc, ce n'est pas si simple.
L'autre chose, aussi, c'est qu'il va y avoir un... On parle toujours d'acheter des crédits de carbone dans les pays en voie de développement. Ça fait partie de la justice sociale, là, toutes ces choses-là, ça fait qu'on les aide à se développer sans qu'ils sabotent leur environnement. Ça retourne les choses de l'autre côté.
Mais c'est clair que, si on ne fait rien... Et là c'est surtout... l'effet est permanent, là. C'est ça, le gros problème, c'est que ce n'est pas un truc qui va durer... comme les pluies acides, là, quand on va arrêter d'en produire, ça va se nettoyer. C'est un effet permanent. Dans le prochain 1 000 ans, là, ça ne va pas baisser, à moins qu'on capture le carbone qui est dans l'atmosphère. Les processus naturels ne le feront pas. Donc, on va être pris pour vivre avec un monde à 2 °C de plus, peut-être. Si on continue comme ça, ce n'est pas 2 °C, c'est 3 °C. Puis le danger, c'est que, si ça dure trop longtemps... et ça, c'est certain... Les gens qui font la promotion du 350 parties par million, c'est ça qu'ils ont en tête: si ça dure trop longtemps, il y a certains mécanismes naturels qui sont actuellement des absorbeurs de CO2 qui vont devenir des émetteurs de CO2.
L'exemple le plus frappant, c'est vraiment la forêt boréale qu'on a au Québec. C'est que, quand on la chauffe, le sol se met à se décomposer puis libérer du gaz carbonique ou le pergélisol qui contient beaucoup de méthane. Et ça, c'est ce pourquoi les scientifiques disent: Jamais plus que 2°, c'est qu'on ne veut pas essayer de voir qu'est-ce que ça fait, 3° puis 4°, O.K.?
Il y a un principe de base, là: N'essayez pas de modifier la planète sur laquelle vous vivez, là. Si on avait fait ça sur mars, ce ne serait pas si pire, mais, sur la terre, ce n'est peut-être pas la meilleure des idées, là.
n(15 heures)nLe Président (M. Ouellette): Merci, M. Dutil, M. Dutil qui représentait la Chaire de recherche industrielle en technologies de l'énergie et en efficacité énergétique.
Nous allons suspendre quelques minutes pour permettre aux gens de la ville de Québec de venir prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 1)
(Reprise à 15 h 3)
Le Président (M. Ouellette): Nous reprenons nos travaux en recevant les gens de la ville de Québec: M. Raymond Dion, M. Jacques Grantham et Mme Sylvie Verreault. Je présume que, M. Grantham, vous allez nous indiquer qui est qui, là. Mme Verreault, c'est assez facile. Et M. Dion probablement à votre gauche?
Ville de Québec
M. Grantham (Jacques): Non, le contraire.
Le Président (M. Ouellette): O.K., c'est vous.
M. Grantham (Jacques): C'est M. Dion puis c'est M. Grantham.
Le Président (M. Ouellette): O.K. Donc, c'est M. Dion qui va prendre la parole? Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation et, par la suite, il y aura échange avec les députés du côté ministériel et les membres de l'opposition officielle. Donc, à vous la parole.
M. Dion (Raymond): Merci, M. le Président, de nous recevoir, Mme la ministre, distingués membres de la commission. Alors, je suis donc accompagné de M. Jacques Grantham, qui est directeur du Service de l'environnement, et de même que Mme Sylvie Verreault, qui est conseillère en environnement au Service de l'environnement.
Alors, dans le cadre de la consultation particulière sur le document intitulé Le Québec et les changements climatiques ? Quelle cible de réduction de gaz à effet de serre?, la ville de Québec salue l'initiative du gouvernement du Québec et remercie la Commission des transports et de l'environnement de lui donner la possibilité d'exprimer son point de vue sur cet enjeu majeur qu'est la lutte aux changements climatiques.
La ville de Québec s'est toujours engagée formellement en faveur du Protocole de Kyoto, notamment en demandant au gouvernement du Canada de le ratifier en 2002, en participant également au programme Partenaires pour la protection du climat de la Fédération canadienne des municipalités et en participant au programme ÉcoGESte du Bureau des changements climatiques en adoptant, en 2004, un plan de réduction des gaz à effet de serre touchant les activités corporatives de la ville. Et je peux vous souligner que nous étions la première ville québécoise à adopter un plan de réduction des gaz à effet de serre.
Alors, depuis l'adoption du plan, une série de mesures étaient mises de l'avant et touchaient la gestion des matières résiduelles, des immeubles, des équipements, des véhicules de la ville, du réseau de transport RTC. Divers projets ont été également réalisés au niveau de la sensibilisation des citoyens quant à l'adoption de comportements écoresponsables. À ce jour, les efforts de la ville ont permis de les réduire de plus de 116 000 tonnes de CO2 entre 2004 et 2007.
Par exemple, la ville de Québec est devenue la ville comptant le plus de voitures hybrides dans son parc automobile, c'est-à-dire 42 véhicules hybrides. Le personnel de la ville et celui du réseau des transports ont été sensibilisés à une conduite économique et écologique. Un programme ambitieux d'efficacité énergétique a été mis en place pour nos principaux immeubles municipaux. Un règlement: tout récemment, en juin dernier, nous avons adopté un règlement sur la mise au ralenti, la marche au ralenti des moteurs de véhicules. De plus, un plan de réduction des émissions de gaz à effet de serre visant la communauté est actuellement en préparation. Donc, non seulement la ville veut se doter elle-même, mais elle veut également inclure sa propre communauté dans cet effort de limitation des gaz à effet de serre.
Donc, notre façon de faire... Et c'est la ville qui se doit d'être porteur de ce flambeau, et ça démontre aussi que la principale source d'émission des gaz à effet de serre, sur notre territoire, c'est le transport routier, celui des personnes et des marchandises. Alors ça, c'est un élément important dans la compréhension. La ville de Québec reconnaît les défis que comporte la réduction des gaz à effet de serre. Elle y voit une responsabilité fondamentale appartenant à tous les paliers gouvernementaux qui ont un rôle de leaders dans les changements de comportement et de pratique que dicte l'urgence des changements climatiques. Nous profitons de l'occasion qui nous est donnée de nous exprimer en répondant aux cinq interrogations présentées dans le document soumis à la consultation.
Alors, en ce qui concerne notre position sur les changements climatiques, nous voulons rappeler que l'objectif de l'horizon 2020 n'est pas une finalité de la lutte aux changements climatiques, mais il faut travailler dans une perspective d'un avenir où on sera carbone neutre. Alors, la ville de Québec considère que la façon de moduler les interventions... sont les meilleures dans les différents secteurs sera un exercice important qui doit être planifié de façon à ce que l'économie québécoise ne soit pas pénalisée. Alors, il ne faut pas que les cibles soient trop contraignantes pour les industries. Les réalités régionales doivent être aussi prises en compte parce qu'évidemment, pour certaines économies régionales, ce sera plus difficile, alors que dans d'autres il sera possible d'atteindre facilement, dépasser même, ces objectifs.
L'importance du rôle des municipalités dans la réduction des GES est également non seulement à considérer, mais davantage à prendre comme cible importante parce que, lorsqu'on dit que les émissions de gaz à effet de serre se font sur le territoire du Québec, elles se font sur les municipalités, dans les municipalités, et les municipalités sont des pouvoirs qui sont locaux donc près des citoyens. Alors, s'il y a une culture à changer, c'est à ce niveau qu'il faut intervenir et axer le développement de nos efforts. Comme l'inventaire québécois des GES le démontre, le secteur des transports doit faire l'objet d'une intervention particulière. On va en reparler.
En ce qui concerne la cible pour 2020, alors, la ville de Québec souhaite que le gouvernement du Québec maintienne sa position de leader nord-américain dans le domaine de la lutte aux changements climatiques et se fixe une cible de réduction des gaz à effet de serre de moins 20 % à l'horizon 2020 par rapport à 1990.
Alors, si on veut se fixer un moins 20 %, c'est essentiellement qu'il ne faut pas viser des petites performances parce qu'on sait tous que, si on vise moins, on paiera plus à la fin de l'exercice. Alors, il faut moins 20 %, puisque le rapport du GIEC nous suggérait de moins 25 % à moins 40 %. Nous considérons que la position de moins 20 % est certainement une cible souhaitable pour le Québec. Alors, néanmoins, le document soutient que les quatre scénarios présentés sont réalistes et auront un impact mineur sur les finances publiques.
Alors, la cible donc pour nous, et on y reviendra aussi pour la ville de Québec, mais, nous, nous considérons que la cible de moins 20 % doit être adoptée par le gouvernement du Québec et qu'elle ne doit pas être en deçà parce que, nous aussi, nous nous fixons à la ville de Québec, c'est une de nos hypothèses, et probablement celle qui est la plus probable... c'est celle de moins 20 % que nous nous fixons également pour réduire nos gaz à effet de serre.
n(15 h 10)n Alors, c'est ce que je mentionnais tantôt. Alors, la ville de Québec travaille à la planification de la version post-Kyoto dans son plan de réduction des gaz à effet de serre, lequel touchera non seulement les activités corporatives, mais également l'ensemble de la communauté de l'agglomération, ce que je vous mentionnais tantôt. Nous sommes en période de réflexion pour notre propre cible et ? donc de moins 20 % ? et c'est celle que nous retenons le plus facilement actuellement, sans en avoir fait le choix définitif.
Toutefois, la ville de Québec pourrait difficilement considérer une telle cible si le gouvernement du Québec lui-même se fixait une cible moindre. En effet, plusieurs des actions de réduction engendrées par le gouvernement provincial auront des répercussions directes et indirectes sur les futurs inventaires de GES dans l'agglomération de Québec.
Alors, évidemment, ce que je voudrais qu'on retienne aussi, c'est ? parce que je sais que j'ai seulement 10 minutes ? quand on disait qu'il y a des impacts au niveau local, vous savez, la ville de Québec est non seulement un leader québécois, canadien et nord-américain en termes de développement durable, mais nous avons, nous-mêmes, déjà préparé non seulement un plan de réduction des gaz à effet de serre, mais nous avons fait une première démarche qui est aussi un plan d'adaptation aux changements climatiques, et nous l'avons fait pour notre propre Service de l'environnement et actuellement nous sommes... D'ailleurs, nous avons demandé, dans le cadre du projet de Climat Municipalité... de demander également une subvention pour l'étendre à l'ensemble de nos activités, comme corporation municipale.
Ce qu'il faut retenir, c'est que les changements climatiques, ils ne s'en viennent pas, ils sont là. Alors, les changements climatiques, on les voit maintenant: la récurrence des pluies, les changements climatiques rapides, notamment en hiver. Alors, on s'aperçoit qu'il y a de plus en plus, pour être bien terre à terre, de plus en plus de nids-de-poule, on voit que nos réseaux pluviaux ne fournissent plus, nous sommes obligés en ce moment de surdimensionner. C'est des coûts pour les municipalités et ça ne fait que commencer ? ça ne fait que commencer. Et on s'aperçoit qu'on aura probablement, à la ville de Québec, des hivers de plus en plus chauds mais aussi des hivers qui auront des écarts de température beaucoup plus grands. Pour nous, ce sera l'utilisation de fondants, pour nous, de plus en plus, de façon considérable.
Alors, c'est toutes sortes de mesures ? d'accord, pour terminer ? toutes sortes de mesures. Et, nous, nous avons fait, comme vous avez pu le voir dans le cadre du mémoire... on a pris différentes mesures pour d'abord contrer les GES, pour les diminuer, mais aussi on est en mode d'adaptation, et on travaille notamment sur... Vous avez vu la question de nos écoquartiers, vous avez vu toutes les mesures que nous avons prises également: avoir, par exemple, l'écolobus; nous sommes la seule municipalité en Amérique du Nord à avoir un service d'autobus totalement électrique, celui de l'écolobus. Nous avons 10 véhicules. Alors, il y a différentes mesures qu'on a déjà adoptées pour effectivement diminuer les gaz à effet de serre et travailler sur cette question.
Alors, malheureusement... Alors donc, évidemment, je souscris totalement à l'initiative du gouvernement. Et, pour conclure, nous, nous recommandons au gouvernement... nous souhaitons en fait que le gouvernement établisse cette barre à moins 20 %. Merci.
Le Président (M. Ouellette): Merci, M. Dion. Il est sûr que Mme la ministre et sûrement le député de Vanier vous feront préciser certaines choses que vous n'avez pas eu l'opportunité... ou pour lesquelles vous avez manqué de temps dans votre mémoire. Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Bienvenue, M. Dion, et avec vos partenaires. La semaine dernière, on a eu l'occasion de recevoir également un élu de la ville de Montréal. C'était au nom de la Société de transport de Montréal. Et, des deux côtés de la table ici, on a pris le temps de remercier chaleureusement cette personne qui est venue se présenter devant nous en pleine campagne électorale. Et, M. Dion, je prends le temps également de vous remercier très sincèrement de votre présence parmi nous. Vous êtes un petit peu plus proche de l'Assemblée nationale du Québec que ne l'était notre ami de la ville de Montréal, mais néanmoins je tiens ici de nouveau à vous dire que, par votre seule présence, dans le dernier droit d'une campagne électorale importante, par votre seule présence, il y a là vraiment un témoignage de l'engagement de l'ensemble des élus de la ville de Québec et de vos équipes dans cette question de la lutte aux changements climatiques.
Votre mémoire... et, dans votre présentation, vous avez réussi à faire allusion à l'ensemble des gestes posés par le passé, faire allusion à vos projets puis... Et je tiens, moi, vraiment à témoigner ici, là, de la question du leadership exercé par la ville de Québec. Et je vous dis avec un sourire que votre demande dans Climat Municipalité, c'est une très bonne demande. Et on est heureux de voir que des villes aussi importantes que notre capitale nationale est un partenaire et voir aussi que vous allez pouvoir... vous êtes rendus à l'étape de ce plan d'adaptation aux changements climatiques, et c'est vraiment très important.
Peut-être, moi, d'entrée de jeu... premièrement aussi, je veux vous remercier de vous commettre, de prendre position sur cette question de la cible. C'est aussi extrêmement important, Puis j'espère que l'ensemble des intervenants qui vont se présenter devant cette commission vont le faire. C'était, parmi les questions posées, la question peut-être la plus simple et la plus difficile à répondre, mais je vous remercie de prendre une position aussi claire sur cette question de la cible.
Maintenant, il y a un élément sur lequel je veux plus vous entendre, qui n'est pas clair pour moi, sur comment on doit voir ça comme organisation de notre société, c'est lorsque vous plaidez pour qu'on tienne compte des réalités régionales. Et je vous dis cela parce que, comme moi, vous savez qu'en ce moment, dans les outils, je pourrais dire des outils avec des impacts financiers à mettre en place pour tenter de faire bouger les choses dans la lutte aux changements climatiques, il y a la question du marché du carbone, donc d'avoir un système de plafonnement et d'échange de crédits carbone; ensuite, comme autre mesure, il y a une taxe ou une redevance sur le carbone qui a son reflet dans plusieurs autres États. Vous savez qu'on parle de cette taxe sur le carbone qui a donc un reflet sur les prix à la pompe de l'essence. Il y a le fait qu'on puisse aller chercher des efforts à l'international, quand ça en vaut la peine, dans une certaine proportion de l'effort à faire au Québec.
Mais quand je regarde... Et puis ensuite vous le dites vous-même dans votre mémoire en page 12, vous dites: Il faut donc qu'il y ait toute cette mise en place des systèmes qui ont une portée économique, là, et financière sur la question donc de la valeur d'une tonne de carbone évitée. Vous dites: Il faut comprendre que l'effort ensuite ? que l'effort mis, par exemple, pour que le prix de l'essence à la pompe soit plus élevé ? doit être un effort redistribué auprès des ménages québécois. Vous avez bien compris ça.
Mais ensuite, quand je regarde donc la mise en place de ces grands systèmes, je vais appeler ça des systèmes mais je pourrais appeler ça des outils financiers, un système de plafonnement et d'échange de crédits carbone, une redevance qui serait augmentée, et qu'on utilise cet argent pour faire des investissements publics importants, notamment ? c'est écrit ? dans le domaine du transport, du transport collectif, et qu'on redistribue cet argent aux ménages québécois, quand vous me demandez de tenir compte de réalités régionales, de quoi on parle au juste ou, plus concrètement, quel est votre état de réflexion par rapport à cela?
Parce que, moi, je suis devant des systèmes ou des outils qui, pour le moment ? mais je suis intéressée de vous entendre ? sont plutôt des systèmes qu'on imagine sur une base territoriale québécoise, hein, un système de plafonnement et d'échange de crédits carbone, un système de redevances sur les hydrocarbures. Donc, comment vous m'invitez à tenir compte des réalités régionales lorsque je parle d'une cible de moins 20 % pour le Québec?
Le Président (M. Ouellette): M. Dion.
n(15 h 20)nM. Dion (Raymond): D'abord, nous, on a retenu évidemment le principe de pollueur-payeur. Alors, c'est sûr qu'on se doit évidemment, que ce soit le marché ou la taxe, l'effort à l'international, tout ça nous permet d'abord de focusser sur des réalités que je qualifierais de réalités régionales.
Par exemple, la ville de Québec, on a, sans vouloir nous vanter tout le temps, là, on a déjà une position privilégiée d'abord par l'adoption de notre plan de lutte aux gaz à effet de serre et on a aussi des entreprises qui sont capables... qui sont déjà lancées dans l'économie verte, on a des entreprises qui sont capables d'exporter sur notre territoire vers les marchés étrangers, qui sont capables de négocier des crédits carbone. On a des entreprises, tout ça sur notre territoire. Alors que, dans d'autres réalités, si on en augmente, par exemple, le prix de l'essence, qu'est-ce que... qu'adviendra-t-il, par exemple, des régions éloignées, là où on a une mono-industrie qui est peut-être... où ce sera difficile d'aller chercher facilement des crédits de carbone ou de transiger... ou un transfert de technologie à l'étranger? Alors, c'est pour ça qu'il y a des réalités économiques ou dans certaines villes comme Québec ou peut-être comme chez nous, nous, nous pensons, comme par exemple tout ce qui s'appelle le transport routier à la fois de personnes mais aussi de marchandises, c'est certes un des éléments auquel il faut s'attaquer, mais on veut être aussi, nous...
Et peut-être chaque réalité est, je dirais, territoriale... sera accompagnée. Parce que, nous, on suppose que maintenant le gouvernement fera en sorte que, par exemple, notre transport sera... Écoutez, il y a 120 000 voitures qui franchissent les deux ponts chaque jour. Alors ça, c'est une réalité que, nous, on connaît et qui, en termes de gaz à effet de serre, est un élément important.
Un autre élément que vous allez probablement voir demain dans Le Devoir sur la question du trafic maritime, c'est que, par exemple, pour un litre... une tonne, un bateau va franchir 241 km, alors qu'un train, ce sera 90 km, et, pour un camion, ce sera 28 km. Alors là, il y a des réflexions à faire parce que, nous, on peut se servir donc d'un levier, par exemple du transport maritime, pour éviter... diminuer des gaz à effet de serre chez nous.
On pourra également travailler par exemple au niveau... on est en train de réfléchir beaucoup sur la mobilité durable. Nous avons ? ça, on peut l'ajouter ? la ville de Québec a développé une entité qui travaille sur le développement durable. Mais au niveau des...
Pour revenir à cette question donc des marchés et de la taxe, nous sommes persuadés que, nous, nous sommes en très bonne position et que les argents ou les... ce que vous pourrez percevoir d'abord de l'utilisation payeur... pollueur-payeur, il faut à ce moment-là qu'elle soit redistribuée dans l'ensemble du système. Alors, ça va donc demander au gouvernement d'agir pour réguler ce système-là parce qu'il est évident que certaines entités régionales ne pourront pas facilement suivre. Est-ce que ça répond à votre question?
Le Président (M. Ouellette): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Je vois que vous avez bien lu votre Guide d'autosoins.
M. Dion (Raymond): ...
Mme Beauchamp: J'ai dit que vous aviez bien lu votre Guide d'autosoins.
M. Dion (Raymond): Oui, oui.
Mme Beauchamp: Je veux juste bien comprendre. Je vais résumer ce que j'ai compris, M. Dion. J'ai compris que vous dites: Sur le territoire de la capitale nationale, de la ville de Québec, il y a plusieurs opportunités de réduction. Et vous me dites: Bien, l'argent que le gouvernement va colliger, il va falloir qu'il y ait une répartition régionale qui fasse en sorte que, sur le territoire de la ville de Québec, on puisse aller chercher le maximum de réduction. Quand je compare sur le territoire d'une ville plus éloignée qui serait, par exemple, mono-industrielle et plus loin du fleuve, en tout cas, mettons tous les exemples, et qu'il y a moins de possibilités de réduction, donc il va falloir qu'on tienne compte de ça.
Mais ma vraie question, c'est: Êtes-vous en train de dire que vous pensez qu'il faut endosser une démarche en fixant des cibles régionalisées? Et à ce moment-là, si je vous écoute, ça veut donc dire que la cible pour le territoire de la ville de Québec devrait être supérieure à 20 %, puisque vous m'avez fait la démonstration qu'il y a plein de possibilités de réduction par rapport à d'autres territoires plus éloignés sur le territoire québécois. Mais pourtant vous me dites: On s'enligne sur moins 20 %. Ça fait que, si un territoire comme la ville de Québec, c'est moins 20 %, mais que vous admettez avec moi qu'il y a d'autres territoires où ce serait moins facile, ça ne marche plus, là.
Donc, je veux juste essayer de bien vous comprendre. J'ai compris que tout l'argent ramassé, vous disiez que, vous, vous seriez capables de bien l'utiliser. J'ai compris cet argument-là. Mais pour une cible de moins 20 % alors que vous admettez vous-même qu'ailleurs ils ne seraient pas capables de l'atteindre?
M. Dion (Raymond): Oui.
Le Président (M. Ouellette): M. Dion.
M. Dion (Raymond): Ce qu'il faut comprendre, c'est que, d'abord, vous comprendrez qu'il y a d'abord... c'est que, nous, on est bien organisés. D'abord, on a un service du développement durable, on a même une section qui s'appelle une Direction générale associée au développement durable. Dans l'ensemble des villes du Québec, ce n'est pas le cas. Alors, c'est sûr que cette préoccupation-là, de développement durable, elle n'est pas là. Il n'y a pas beaucoup de municipalités qui ont développé cette approche-là. Mais, pour en revenir à une répartition, c'est sûr que, nous, nous sommes bien équipés en termes de... à cause de l'université, à cause de tout le développement technologique. On va aller facilement, je le pense ? je suis optimiste ? aller chercher notre moins 20 %. Alors, nous devons nous fixer ces...
Mais, ce que je veux vous dire, c'est que ce ne sera pas, comme on dit si bien, le concept mur à mur. Ça va être difficile dans certaines régions de pouvoir appliquer cette norme-là. Alors, évidemment, vous devez aller sur une note globale de moins 20 %, et c'est sûr qu'il y en a qui vont être en bas puis d'autres qui vont être, disons, plus élevés. Parce que, comme je vous mentionnais, peut-être dans certains secteurs de mono-industrie, ce sera plus difficile d'avoir des gains ou même des transferts technologiques ou même avoir l'achat de carbone. Alors, il en demeurera... la mécanique, appartiendra au gouvernement de l'établir.
Ce qui est intéressant... Parce que, de toute façon, vous savez que les gains... Pour contrer les gaz à effet de serre, on doit... on s'est aperçu que ce n'est pas juste dans les pays industrialisés, c'est qu'il faut collaborer avec les pays en voie de développement. C'est aussi une clé. Alors, c'est la même chose dans notre économie québécoise, il va falloir qu'il y ait des villes qui soient plus performantes que d'autres. Et, moi, je le vois comme ça, c'est-à-dire que tout le monde doit fixer un moins 20 %, mais il y en a certainement qui vont dépasser. Et peut-être que certaines villes ou certains municipalités, petites municipalités de région, auront besoin des efforts plus considérables du gouvernement, alors que d'autres, ce sera moins évident de le faire.
Le Président (M. Ouellette): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Moi, je suis très heureuse d'entendre ? c'est un commentaire, je vais céder la parole ensuite, M. le Président, à mon collègue député de Vanier ? je suis très heureuse d'entendre la ville de Québec me parler d'une cible de moins 20 %, mais vous comprenez que je me dis: Si vous dites vous-mêmes qu'il y a des villes qui ne pourront pas atteindre ça, puis des villes vont devoir atteindre donc un niveau supérieur à moins 20 %, mais qu'une des grandes villes du Québec, qui est la capitale nationale aussi bien équipée, tu sais, dit «c'est moins 20 %», vous comprenez un peu le questionnement que j'ai par rapport à cette notion de répartition régionale de l'effort.
Mais, si vous permettez, M. le Président, je vais passer la parole... bien, je vous demande de passer la parole au député de Vanier, s'il vous plaît.
Le Président (M. Ouellette): Je l'avais prévu, Mme la ministre. J'ai déjà prévenu M. Dion que le député de Vanier aurait une question sûrement à lui poser. Donc, la parole est à vous, M. le député de Vanier.
M. Huot: Merci, M. le Président. Est-ce que vous avez lu dans mes pensées? Connaissez-vous la question? Non?
Le Président (M. Ouellette): Je vais vous laisser lui poser la question parce que...
M. Huot: Je vais y aller. Bien, M. le Président, merci de me céder la parole. Vous savez, je suis un ancien conseiller municipal de la ville de Québec, donc je suis très heureux de recevoir la ville de Québec aujourd'hui, donc j'en fais une fierté. On est très fiers de notre ville, à Québec, et je dois dire aussi que vous avez mentionné que la ville de Québec est souvent... est un pionnier en matière d'environnement mais a gagné de nombreux prix aussi en matière... notamment au niveau efficacité énergétique, plusieurs... environnemental tout court, donc peut-être faire... sans faire la nomenclature, mais je pense que c'est important de le mentionner, que la ville de Québec est un leader dans le domaine.
Moi, je voulais vous entendre parce que, dans votre mémoire, vous n'avez pas pu l'aborder, là, de façon très spécifique, mais peut-être un peu sur la question finalement d'aménagement du territoire. Bon. M. Dion, vous avez parlé de la question des écoquartiers, on en entend parler depuis quelque temps. Et vous avez parlé... vous abordez la question aussi des voitures électriques, des voitures électriques en libre-service qui pourraient être faites, des infrastructures de recharge. L'intervenant avant vous nous parlait de la question des hybrides branchables. Donc, finalement, c'est toute la question un peu des réseaux intelligents qu'on pourrait appeler ou, en bon français, des «smart grids» qu'on pourrait...
Mme Beauchamp: En bon latin.
M. Huot: En bon latin , oui, en bon latin. C'est une question d'échange d'énergie, de facturation entre les bâtiments. On peut inclure la question du transport dans ça. Et vous insistez dans votre mémoire sur l'étroite collaboration nécessaire entre les municipalités et le gouvernement du Québec.
Comment tout ça peut se traduire concrètement? C'est quoi, le rôle que le gouvernement peut jouer? Parce qu'on est rendus, là, dans la question d'aménager des écoquartiers, on s'en fait parler de plus en plus. Donc là, il va falloir inclure, avec les voitures qui s'en viennent, il va falloir inclure quelque chose, repenser notre façon un petit peu d'aménager notre territoire. Comment peut être faite la collaboration entre le gouvernement du Québec et les villes? Avez-vous une idée là-dessus? Comment on peut pousser ça?
Le Président (M. Ouellette): M. Dion.
n(15 h 30)nM. Dion (Raymond): Alors, ça me fait plaisir, M. le député Huot de... Vous me permettrez, juste pour répondre à la ministre, si vous permettez, c'est que, pour nous, 20 %, c'est un minimum. Alors, pour nous, là, ce n'est pas l'objectif ultime. Alors, c'est un minimum.
Pour revenir à la question de M. Huot, c'est... Nos écoquartiers. Alors, évidemment, toute la question... Quand on regarde, nous, notre propre bilan, on s'aperçoit que 50 %, c'est le transport, ou approximativement. On dit qu'une quarantaine de pour cent des gaz à effet de serre viennent du transport. Évidemment, la meilleure façon de faire, c'est de faire des écoquartiers, c'est faire, là où on... Des écoquartiers, ça devient des milieux de vie. Alors, c'est cette notion-là souvent qu'on dit: Des écoquartiers, qu'est-ce que c'est? Mais, dans le fond, c'est des milieux de vie. Alors, les gens demeurent, travaillent, font leurs courses sur place, et tout est développé dans ce pôle-là.
Alors, la meilleure façon, bien, évidemment, nous, on souhaite que, par exemple, dans le cas de Pointe-aux-Lièvres, que le gouvernement nous aide à décontaminer. Alors, on cherche... Et ça, c'est une des bonnes façons pour nous, c'est de demander au ministère de l'Environnement, par son programme de décontamination, de nous supporter dans ce programme-là, parce qu'on évalue entre 7 et 10 millions les coûts pour décontaminer Pointe-aux-Lièvres. C'est la même chose quand il s'agit de notre autre écoquartier qu'on veut démarrer, c'est D'Estimauville.
Vous avez tout à fait raison aussi de mentionner qu'il faut axer sur la question d'énergie liée à aussi le développement des écoquartiers. J'ai visité en juillet dernier des installations, à Vienne, où l'incinérateur produisait de l'énergie pour un quartier environnant. Nous, on le fait, par exemple, avec notre incinérateur, actuellement: on vend, pour 10 millions de dollars, la vapeur à une entreprise qui est la White Birch. Alors, c'est sûr qu'on évite à la White Birch d'utiliser des énergies qui pourraient être nocives pour l'environnement, donc, en utilisant notre propre vapeur qu'on produit à même l'incinérateur. Alors, l'incinérateur, donc, on s'aperçoit... Et c'est ce qu'on veut tenter aussi, c'est que, D'Estimauville, il y ait une possibilité également qu'il y ait une production d'énergie à même des installations villes ou autres et que ce quartier-là soit, comme on retrouve ailleurs, dans d'autres communautés européennes, à partir donc... L'énergie est fournie à partir du gouvernement municipal, et donc il y a des efforts.
En ce qui concerne évidemment la question des autos électriques, moi, je pense qu'on a une opportunité. Nous avons développé... L'IREQ, récemment, a fait une découverte sensationnelle pour des piles à longue durée, donc l'Hydro-Québec a en main quelque chose qui... ces fameuses piles rechargeables de longue durée. Je pense que c'est, là aussi, un créneau. Il faut nous... Je voyais récemment, là, Nissan et Renault. Donc, Renault a développé sa voiture entièrement électrique, et ça, c'est un filon que le gouvernement du Québec devrait regarder de plus près pour développer chez nous des... une production de voitures électriques ou à tout le moins des composantes, ce qui serait totalement en conformité avec nos capacités d'Hydro-Québec, d'alimenter ce genre d'étude là.
M. Huot: Sur la question...
Le Président (M. Ouellette): M. le député de Vanier, pour deux minutes.
M. Huot: Oui, oui. Bien, rapidement, sur la question des... Je me demande si vous vous êtes penchés là-dessus, ou peut-être M. Grantham, sur la question des réseaux intelligents, là, vraiment la question informatique, qu'on réussit à créer un réseau intelligent d'échange d'information où est-ce que... question de la facturation sur l'utilisation de l'énergie, des choses comme ça, qu'on pourrait inclure dans notre aménagement du territoire. C'est-u quelque chose sur quoi vous vous êtes penchés? Parce que vous le mentionnez, vous l'abordez rapidement dans votre mémoire, que certaines municipalités, certains endroits se sont penchés sur la question. Est-ce que la ville de Québec a une position là-dessus?
Le Président (M. Ouellette): M. Dion.
Mme Verreault (Sylvie): En fait, avec...
Le Président (M. Ouellette): Mme Verreault, vous identifier avant de donner la réponse, s'il vous plaît, pour les besoins de l'audio.
Mme Verreault (Sylvie): Oui. Sylvie Verreault, conseillère en environnement.
Bien, pour la question des bornes à double sens, on a une collaboration avec l'Université Laval. C'est plus eux qui ont le projet, là, avec... le projet, là, de transformer la Prius en Prius branchable. Toute cette notion-là a été abordée, puis on a accepté d'être... pour être un projet pilote, donc eux... qu'ils puissent tester ces bornes-là sur notre territoire, là. Donc, c'est des bornes intelligentes pour vendre... les autos puissent vendre au réseau public, et vice versa, l'énergie. C'est la seule collaboration pour l'instant. Sinon, dans notre plan de réduction de gaz à effet de serre, qui est en élaboration, c'est un sujet qui est abordé aussi.
Le Président (M. Ouellette): Pour le mot de la fin, Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Merci. Mot de la fin. Vous faites référence aussi, dans votre mémoire... On n'aura pas eu beaucoup de temps de discuter transport avec vous, mais, dans votre mémoire, néanmoins, vous parlez du groupe des C40, donc ce regroupement de villes. À des fins de comparaison, pouvez-vous nous en parler un peu? Pouvez-vous nous dire ce que vous connaissez des engagements pris par d'autres grandes villes, particulièrement nord-américaines? Et pouvez-vous comparer l'effort qu'entend faire la ville de Québec par rapport à ce regroupement C40?
M. Dion (Raymond): Mme Verreault.
Le Président (M. Ouellette): Une minute et demie, Mme Verreault.
Mme Verreault (Sylvie): Oui. Bien, le C40... Il y a la ville de Toronto, au Canada, qui est très, très avancée. D'ailleurs, le maire fait des présentations au regroupement du C40 pour tout ce qui est de l'action aux changements climatiques. Ils ont fait énormément d'actions au niveau de la rénovation des bâtiments en bâtiments moins énergivores. C'est... Il y a... La plupart des grandes villes, celles qu'on entend souvent, c'est comme, exemple, Copenhague ou plusieurs villes en Europe qui sont très avancées au niveau de plans d'action sur les changements climatiques. On s'en est inspirés pour créer notre propre plan qui touche la collectivité, parce qu'eux... comme des cibles de moins 20 % comme on souhaiterait se fixer, il y a quelques villes qui ont exactement cette cible-là à l'horizon 2020. Donc, je ne sais pas si ça va répondre un peu à la question.
Le Président (M. Ouellette): 30 secondes. Non? C'est beau?
Mme Beauchamp: Oui. Bien, voilà, donc, je voulais juste savoir si vous aviez des points de comparaison en Amérique du Nord. Est-ce qu'à votre connaissance il y a donc des villes qui ont adopté des cibles et qui ont influencé votre... votre position? Je connaissais les actions prises par Toronto, mais je parle plus en termes de cibles pour 2020.
Le Président (M. Ouellette): En 15 secondes, Mme Verreault.
Mme Verreault (Sylvie): Oui. Le consultant qui a fait... qui a fait notre plan a fait une étude sur le territoire nord-américain. Je ne l'ai pas devant moi présentement, mais il y avait énuméré deux ou trois villes qui avaient une cible de moins 20 %.
Mme Beauchamp: O.K. Merci.
Le Président (M. Ouellette): Merci, Mme Verreault. Maintenant, du côté de l'opposition officielle, M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Merci, M. le Président. Bien, bonjour et bienvenue. Je vais aussi vous remercier, M. Dion, d'avoir pris... vous féliciter d'avoir pris du temps dans votre campagne électorale qui est sûrement très active, là; on est dans le dernier droit, cette semaine. Alors, ça démontre effectivement le niveau élevé de votre engagement. Je vous en félicite. Je pense qu'on doit aussi féliciter la ville de Québec pour les différentes initiatives qui ont été mises en oeuvre.
Je sais que, bon, la ville, la municipalité a quand même beaucoup souffert, dans le passé, des politiques de transport, là, des années soixante, soixante-dix, parce que les gens ont profité de vos bonnes infrastructures de transport pour quitter la ville, et je pense que ça s'est stabilisé depuis. Enfin, je le souhaite. Et, malgré le fait que le gouvernement du Québec semble encore vouloir perpétuer et continuer d'appliquer, dans ses politiques de transport ou en tout cas dans les politiques d'infrastructures, ses façons de faire, là, qui devraient être périmées, je pense que, dans ce contexte-là et dans quelques autres... Je retiens votre phrase, là, qui est un peu en conclusion de votre document, où vous souhaitez «que soit améliorée la cohérence de l'action gouvernementale dans les objectifs de réduction des gaz à effet de serre, et ce, dans tous les programmes, politiques et décisions du gouvernement». Alors, espérons en effet que ce type de discussions, comme nous avons aujourd'hui, les consultations publiques sur les objectifs de réduction de gaz à effet de serre vont amener notre bon gouvernement à essayer d'être un peu plus cohérent, là, en matière de politiques environnementales.
n(15 h 40)n Je voudrais vous remercier aussi pour l'engagement que vous prenez sur la cible, parce qu'en effet, je pense, ce n'était pas facile d'arriver à un niveau de confort suffisant, là, pour pouvoir prendre position sur ces cibles-là avec... Bon, je sais qu'on a mis en évidence... quelques personnes ont mis en évidence que c'était... que les délais avaient été peut-être un petit peu courts et qu'effectivement on allait se retrouver, au sortir de ces consultations-là, assez proches de Copenhague. Et aussi, compte tenu des limites, là, des documents qui nous ont été présentés... Je pense, ça a été mis en lumière avec l'intervenant précédent, que les projections pour le prix de pétrole... les prix du pétrole qui ont été utilisés dataient de 2008, donc ce n'étaient pas les données les plus récentes qui ont été utilisées. Et aussi d'autres ont mentionné qu'il n'y avait pas de... il n'y a pas de modélisation disponible au-delà de la cible de moins 20 %, donc c'est difficile à dire que, si on... quel serait l'impact de moins 25 %, moins 30 % ou plus. Mais en tout cas on a bien compris que, vous, vous êtes déterminés à appliquer cet engagement-là de moins 20 %.
Et peut-être je voudrais aussi, dans les fleurs, peut-être vous féliciter aussi pour le projet de la Cité verte, là. Je ne connais pas suffisamment Québec pour savoir lequel des deux écoquartiers ça concerne ? vous pouvez peut-être nous le rappeler. Mais juste vous mentionner que nous recevions ici, en commission parlementaire, une autre commission parlementaire sur le plan stratégique d'Hydro-Québec, le P.D.G. d'Hydro-Québec, M. Vandal, il y a quelques semaines, et, dans tout le plan stratégique d'Hydro-Québec, croyez-le ou non, la seule initiative en matière de production distribuée qui est dans leur planification, c'est celle de la Cité verte de Québec. Alors, effectivement, M. Huot, qui mentionnait, là, comment c'était important, la question des réseaux intelligents et donc d'implanter des compteurs intelligents pour permettre non seulement de connaître son niveau de... bien connaître son niveau de consommation ? même, éventuellement, on va pouvoir connaître en temps réel les niveaux de consommation de nos différents appareils électriques ? mais ces compteurs intelligents aussi permettent, dans une... peuvent permettre, dans une certaine mesure, d'échanger avec le réseau de distribution électrique, donc de pouvoir, si vous avez un toit solaire ou une auto électrique, puis c'est dans un moment où le réseau a besoin d'énergie... qu'il puisse venir puiser cette énergie-là. Donc, je pense que, dans les trois prochaines années, on va en implanter quelque 400, compteurs intelligents, au Québec, alors que l'exemple que j'ai... citait M. Vandal, Duke Energy, dans le sud des États-Unis, va en implanter 500 000 pendant ce temps-là. Alors, bon, Québec est... la ville de Québec est un précurseur, mais espérons qu'effectivement ça va encourager les instances gouvernementales à peser un peu plus sur l'accélérateur.
Je voudrais donc... J'aimerais ça que vous nous parliez un peu de cette Cité verte. Qu'est-ce qui, dans ce projet-là, pourrait inspirer justement le gouvernement du Québec et d'autres municipalités à travers le Québec pour pouvoir réduire les émissions de gaz à effet de serre? Donc... Puis j'imagine qu'il y a des choses en matière énergétique, il y en a aussi par rapport aux transports.
Le Président (M. Ouellette): M. Dion.
M. Dion (Raymond): Oui. En fait, la Cité verte, en fait, c'est déjà quelque chose qui est... en fait, c'est sur le chemin Sainte-Foy, en fait, c'est dans le quartier Saint-Sacrement. Alors, d'abord, il y a récupération d'un vieux bâtiment et il y a... on va y retrouver en fait... Notamment, toute la gestion des matières résiduelles dans ce secteur-là, tout va se faire par un système... D'ailleurs, on est... on devrait théoriquement recevoir l'implantation de cette... d'une compagnie européenne. Alors, tout ça va se faire par un système de succion, si on veut, et tout ce qui s'appelle matière résiduelle, donc... C'est un petit peu novateur, puisque maintenant vous n'aurez plus... tous les habitants de ce secteur-là vont avoir toutes les matières... À la fois le compost, les matières recyclables et les déchets ultimes seront donc, par un système de vacuum... Et ensuite de ça, bien, il y a toute la question de... il va y avoir des toits verts, il va y avoir tous les éléments LEED de construction d'édifices. Ensuite de ça, il va y avoir des fossés écologiques, rétention de l'eau dans des fossés écologiques, bref, tous les éléments. Et évidemment ça, c'est proposé par le promoteur immobilier SSQ.
Alors, ce projet-là, il se veut aussi un projet novateur parce qu'il y aura une partie, sur son site, de logement social qui va être aussi sur place. Il va y avoir évidemment, sur place aussi, des services qui vont être proposés aux gens, ça va être même relié... Ils vont vendre... La production d'énergie, ça va être la biomasse. Cette énergie supplémentaire là, ils sont en discussion actuellement avec le Jeffery-Hale, qui est le voisin immédiat, pour vendre de l'énergie. Bref, à peu près toutes les... je dirais, toutes les composantes d'un développement vert s'y retrouvent. Alors ça, c'est le premier. Actuellement, il est déjà en marche, et on a deux... ce qu'on pourrait appeler deux écoquartiers beaucoup plus larges, qui sont ceux de D'Estimauville et Pointe-aux-Lièvres, dont on se propose évidemment de développer.
Parce qu'évidemment toute la question, c'est: plus on se retrouve près du centre... et aussi d'utiliser des terrains qui sont déjà là, où les services sont déjà rendus, parce que toute la question des gaz à effet de serre, c'est d'éloigner les citoyens du développement central, mais aussi toute la question donc qu'on évite les transports inutiles, et aussi on a un milieu de vie... ce que je mentionnais tantôt, c'est que ça devient un milieu de vie, donc on demeure, on travaille, et tout est possible. Et ça va être même relié aussi, éventuellement, avec les services qui vont être... dans le cas de la Cité verte, avec le réseau hospitalier qui est tout juste à côté.
Le Président (M. Ouellette): M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Bien, merci. Je me demande... Parce que, bon, j'ai été, moi aussi, conseiller municipal, et il y a toujours... on est toujours très... Le terme ne me vient pas à l'esprit, mais en tout cas on défend toujours avec beaucoup d'ardeur le principe de l'autonomie municipale et donc que le gouvernement du Québec ne devrait pas nécessairement être trop... trop directif ou trop contraignant par rapport à ses relations avec les municipalités. Mais, si on veut vraiment... Parce que vous le mentionnez dans votre document: Les municipalités... Vous dites: Il ne faudrait plus que les municipalités soient en concurrence les unes avec les autres, parce que... Bon, avec vos projets de Cité verte et d'écoquartiers, je crois déceler que vous misez sur le potentiel d'attractivité de ces projets-là pour garder les citoyens dans le réseau urbanisé. Mais par contre on voit, ailleurs au Québec, les gens se déplacer de plus en plus loin, et, on le constate, on a de plus en plus de voitures, et chacune de ces voitures-là fait de plus en plus de kilomètres. Donc, il y a quelque chose, dans nos politiques urbaines, nos politiques d'urbanisation, qui ne semble pas fonctionner. En tout cas, il y a une tendance très, très lourde, depuis plusieurs années, pour aller dans ce sens-là, et il ne semble pas y avoir rien pour l'inverser.
Je ne sais pas comment, vous, vous voyez ça. Est-ce qu'on devrait avoir davantage, du côté du gouvernement du Québec... quand même être plus contraignants par rapport aux objectifs d'aménagement et d'urbanisme? Est-ce qu'il devrait y avoir des incitatifs? Est-ce que vous avez, vous-même, envisagé des modifications à la Loi, par exemple, sur l'aménagement et l'urbanisme dans ce sens-là?
Le Président (M. Ouellette): M. Dion.
n(15 h 50)nM. Dion (Raymond): Bon, écoutez, je peux vous dire qu'il y a eu un bout de chemin aussi qui a été fait par le ministère des municipalités... des Affaires municipales. Et récemment ? je pense, c'est au mois de mai ? le MAMR a défini comme étant... le transport collectif et le développement durable comme étant des valeurs que dorénavant les municipalités...
Je me souviens, à l'époque, la ministre Normandeau avait bien explicité. Et il s'agit ici de, comme dans la question de recyclage, réemploi, il s'agit d'une question de culture. Alors, évidemment, il va falloir que certaines municipalités... Et je pense que maintenant, pour avoir participé aux ateliers de l'Union des municipalités et tous les efforts que les deux organismes, que ce soit l'Union des municipalités ou le FQM, les deux organismes, comme le ministère maintenant... c'est devenu une valeur. Alors, c'est la diffusion de ces valeurs-là qui est en train de se faire, et, moi, je pense que c'est une question de temps. Comme aujourd'hui on ne peut plus penser ne pas faire de recyclage. Pourtant, il y a 25 ans, on n'était pas là, et maintenant on a... le principe du bac bleu, ça devient un incontournable, maintenant.
Alors là, maintenant, il faut penser aussi ? puis j'en profite pour peut-être le relancer, quand on parle de gaz à effet de serre ? il faut penser à réemploi. Ça, c'est une valeur qu'il faut remettre de l'avant. La REP, la responsabilité élargie des producteurs, parce que, comme par exemple... et aussi d'avoir une politique pour les ICI, parce que tout ça, c'est aussi des gains non seulement pour le recyclage, pour l'ensemble des matières résiduelles, mais ce sont des gains au niveau de l'évitement des gaz à effet de serre. Alors, il faut retaper là-dessus, et ça, ce sont les municipalités qui peuvent les faire. Et, moi, je pense que le ministère, autant de l'Environnement que le ministère des Affaires municipales, se doivent d'accompagner les municipalités dans ça.
Par exemple, quand il faut accompagner les municipalités pour l'achat, nous, on va le faire. On consacre 500 000 $ pour ? vous le retrouvez dans le mémoire ? pour acheter des véhicules qui sont moins énergivores, notamment des voitures hybrides. Alors, nous, on consacre... dorénavant, ça va être 500 000 $ qui vont être inscrits dans notre budget pour nous permettre, par exemple, d'«upgrader», parce qu'on sait que... Mais on aimerait que le gouvernement nous accompagne davantage et avoir des incitatifs pour que toutes les autres municipalités également embarquent et emboîtent le pas à ce type de formule là.
Alors, si vous me posez la question: Est-ce que le ministère doit être incitatif?, bien, moi, je pense que dans... en ce qui concerne le Programme Climat Municipalité, moi, je pense que ça, c'est un exercice extraordinaire que le gouvernement a fait en donnant la possibilité à des municipalités d'avoir des subventions pour se doter de plans de lutte aux gaz à effet de serre et aussi d'adaptation aux gaz à effet de serre. Ça, c'est une excellente initiative. Et je salue l'initiative de la ministre, dans ce cadre-là, qui est venue justement la présenter ici, à Québec, pour le lancer, ce programme-là. Ça, ce sont des types de programmes qui... Pour répondre à la question d'une cible de moins 20 %, c'est justement dans ce cadre-là qu'on peut atteindre... justement avec ce type de programme là.
Le Président (M. Ouellette): M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Oui, merci. Oui, effectivement, il faut aussi signaler les bons coups du gouvernement et les encourager à continuer dans ce sens-là. Mais effectivement c'est le... je pense, la question de cohérence, là, souvent, la main droite défait ce que la main gauche a fait, ou vice versa, ce qui n'est certainement pas le cas pour l'administration de la ville de Québec.
Je voudrais juste... Peut-être un certain commentaire par rapport à la discussion qu'on a eue tout à l'heure... bien, que vous avez eue avec la ministre, concernant le fait que, bon, Québec, une ville qui a justement... qui assume un certain leadership, qui a les moyens de pouvoir avoir des personnes comme les deux personnes qui sont assises de chaque côté de vous, aujourd'hui, pour pouvoir imprimer, là, ce changement... Et vous mentionniez que les petites villes, elles, n'ont pas nécessairement ces ressources-là.
Donc, je voudrais juste quand même qu'on puisse se dire, entre nous, que, dans certains cas, il y a des petites villes que, parce qu'elles sont petites, justement, elles ont la capacité de pouvoir se revirer de bord un peu plus facilement puis un peu plus rapidement. Donc, je pense qu'on ne peut pas nécessairement préjuger, là, que, parce qu'elles ont moins de moyens, qu'elles vont nécessairement être... traîner de la patte, là, dans notre objectif collectif d'avoir des réductions de gaz à effet de serre significatives pour pouvoir éviter, hein... Il faut se le rappeler, si on fait tout ça, ce n'est pas pour le plaisir de se fixer des cibles et de les atteindre ou non, c'est parce qu'on veut éviter à nos... bien, à nous en premier... au premier chef, mais aussi les futures générations, de vivre avec un climat complètement déréglé. Donc, il y a cet aspect-là.
Je voulais aussi mentionner que... On parle beaucoup des efforts pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, mais il y a quand même beaucoup de pratiques qui peuvent être implantées dans des municipalités peut-être un peu plus petites ? dans le cas de Québec, ça peut certainement se faire ? mais il faut comptabiliser aussi le captage de carbone qui se fait. Je pense qu'au cours d'une autre commission parlementaire qui se déroulait voilà pas longtemps, sur le cadre forestier, certains ont mis en lumière le fait que, si on a une gestion plus écosystémique, là, de la forêt québécoise, on pourrait avoir des gains en matière de captage de gaz à effet de serre. Puis récemment, dans ma circonscription, j'assistais à un colloque de l'organisme de bassin versant, là, de la rivière L'Assomption, et quelqu'un de... venait nous parler d'agroforesterie, donc qu'il y a moyen d'intégrer la culture d'arbres finalement avec l'agriculture, comme façon de protéger les terres, de les mettre en valeur mieux, tout ça. Donc, je veux juste en profiter pour mentionner qu'il y a aussi ces outils-là qui sont peut-être accessibles à des municipalités moins urbaines que celle de Québec et qui donc pourraient leur permettre même d'avoir des performances encore plus élevées.
En ce qui concerne la mobilité durable, c'est un concept dont vous nous avez entretenus aussi. J'aimerais ça peut-être que vous puissiez nous en dire davantage. Puis, à Québec, est-ce que... Bon, on a des objectifs justement pour pouvoir réduire la circulation automobile, réduire la consommation de carburant sur le territoire, s'assurer que... donc que l'économie va bien rouler mais avec moins de transports et en tout cas moins de carburant.
Le Président (M. Ouellette): En 2 min 30 s, M. Dion.
M. Dion (Raymond): Tout d'abord, je voudrais dissiper évidemment tout malentendu sur le fait que ce n'est pas parce qu'on assume un certain leadership qu'on ne considère pas ce que toutes municipalités de petite ou de moyenne taille peuvent faire. Alors ça, je veux dissiper ce malentendu-là. Tout simplement, ce que j'ai voulu dire, c'est que, nous, nous étions très bien outillés.
Et ça me ramène aussi à la question de mobilité durable, parce que nous avons un service... Nous sommes déjà, nous, en 2030, on réfléchit déjà en 2030, sur notre aménagement. Nous sommes déjà à regarder où vont être les prochaines installations de nos prochaines maisons et de quelle façon, de quel type de développement urbain on parle. Alors, c'est pour ça qu'on parle maintenant d'écoquartiers; on en est là. Alors, nous sommes en train de regarder la question aussi de nos prochains terrains industriels, comment on va les desservir, les kilomètres qu'on doit faire pour les desservir en eau potable, les desservir également sur le réseau des égouts et des eaux pluviales, toute la question des bassins de rétention, tout ça. Maintenant, on est en mode développement durable, alors c'est... On est déjà... pour les 20 prochaines années, on est déjà en termes de planification là-dessus.
Alors, c'est pour ça que la mobilité durable, le... M. le maire a lancé un projet colossal, qui est un projet de réflexion mais aussi de proposition, avec des personnes hautement qualifiées, sur la question des transports, sur la question de l'aménagement. Alors, il y a plusieurs personnes qui constituent ce... Et c'est un chantier de 18 mois qui va réfléchir comment, nous, l'agglomération de Québec, on doit penser la mobilité durable pour les 20 prochaines années. Alors, ça fait évidemment... Toute la question de mobilité durable, c'est... ça regarde évidemment l'emploi, ça regarde les déplacements, ça regarde également l'aménagement, quel type d'aménagement. Est-ce que... On parle déjà depuis quelques années de densification, à la ville de Québec, mais maintenant on va au-delà de ça, on est maintenant dans les écoquartiers, et tout ce qu'on va faire maintenant, ça va être en fonction d'un développement durable.
Alors, la mobilité durable... Puis c'est ce que je vous mentionnais un petit peu en entrée de scène. Quand je vous disais qu'il y a 120 000 déplacements de véhicules par jour sur les ponts, c'est parce qu'en quelque part il y a beaucoup de gens qui sont sur la rive sud qui viennent travailler à Québec, et donc on regarde aussi toute cette question-là. Actuellement, les ponts sont saturés, et on ne peut pas envisager un... il faut se parler de façon... des deux côtés de la rive parce que notre mobilité durable, ça fait partie aussi de ça. D'ailleurs, on a invité Mme Marinelli. Elle fait partie du groupe sur la mobilité durable. Alors, c'est là-dessus... on travaille ensemble, puis c'est une question de philosophie d'aménagement, de développement, et donc, pour nous, le développement durable, ça passe aujourd'hui pour les 20 prochaines années.
n(16 heures)nLe Président (M. Ouellette): Et, sur ces bons mots, M. Dion, je veux vous remercier, M. Raymond Dion, M. Jacques Grantham et Mme Sylvie Verreault, représentant la ville de Québec, d'être venus nous rencontrer aujourd'hui.
Nous allons suspendre quelques minutes pour permettre au Centre de droit international du développement durable et M. Sébastien Jodoin de prendre place.
(Suspension de la séance à 16 h 1)
(Reprise à 16 h 4)
Le Président (M. Ouellette): Nous reprenons les travaux de la Commission des transports et de l'environnement, recevant le Centre de droit international du développement durable et M. Sébastien Jodoin, qui est chercheur à cet endroit. Vous avez 10 minutes, M. Jodoin, pour nous partager les fruits de votre réflexion, et par la suite autant les députés du côté ministériel que du côté de l'opposition officielle échangeront avec vous pour avoir un peu plus d'informations sur le fruit de vos recherches. À vous la parole, M. Jodoin.
Centre de droit international du
développement durable (CDIDD)
M. Jodoin (Sébastien): Merci beaucoup. Merci aux membres de la commission pour l'invitation de venir présenter sur ce sujet.
Le Centre de droit international du développement durable, c'est un centre de recherche juridique, académique, et qui étudie les liens entre le droit de l'environnement, le droit international du commerce et les droits de la personne. Et donc, ma réflexion étant de nature académique et surtout juridique, j'espère que vous me pardonnerez de ne pas avoir pris de position précise sur la cible.
Je voudrais aussi féliciter le ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs pour le document de consultation qui est, à bien des égards... l'analyse qui est présentée est très bien faite. Et par contre, évidemment, je vais me concentrer sur les améliorations que je crois qui pourraient y être apportées au niveau de l'analyse.
Alors, d'abord, pour mentionner que le document de consultation contient une analyse assez complète des efforts des autres pays occidentaux, mais, pour ajouter à l'analyse, pour donner un peu plus d'informations aux membres de la commission, j'ai mis en annexe les plus récentes propositions des pays occidentaux pour leurs cibles de réduction. Donc, à titre comparatif, ça ajoute à ce qui est dans le document et ça montre clairement que ça donne... que la cible de moins 20 % par rapport à l'année de référence de 1990 donnerait au Québec une cible comparable ou supérieure à celles de plusieurs autres pays occidentaux, une cible qui serait parmi les plus avancées au niveau nord-américain mais pas, par contre, au niveau mondial, alors qu'on a des propositions de la Norvège et la Suisse. Et d'ailleurs l'information ici pour la Norvège, c'est moins 30 %, alors... Ils ont commencé... ils ont commencé à parler de moins 40 % tout récemment à Bangkok, donc...
Alors, il y a deux conclusions principales que je fais dans mon analyse. D'abord, je parle du fait que le document de consultation ne prend pas assez en compte l'ensemble des conséquences économiques, sociales et environnementales soit des changements climatiques et de celles découlant des réductions ou limitations des émissions. Et, deuxièmement, je parle de manière assez... assez approfondie du fait que le document ne considère pas, en fait, les perspectives des pays en voie de développement dans la négociation internationale.
Alors, je vais passer ma présentation par les recommandations qui sont à la fin du mémoire. Donc, ma première recommandation, c'est de clarifier la pertinence d'un critère qui se retrouve à l'article 46.4 de la Loi sur la qualité de l'environnement, qui faisait référence à l'évolution des connaissances scientifiques et technologiques en matière de changements climatiques. Alors, ce n'est pas clair pour moi... Peut-être que j'ai manqué quelque chose, mais ce n'est pas clair pour moi pourquoi, à la page 33, le document ne fait référence qu'à trois des quatre critères qui sont dans l'article 46.4 de la Loi sur la qualité de l'environnement.
Ma deuxième recommandation, c'est qu'il faudrait que le document de consultation tienne plus compte de l'ensemble des conséquences économiques, sociales et environnementales des changements climatiques, et notamment en liant les différents types de réduction des émissions de GES à différentes conséquences. Alors, à part une brève discussion des impacts des changements climatiques, qui sont à la page 6, le document de consultation ne va pas en détail dans les différentes conséquences et ne les lie pas aux différents scénarios d'émissions de GES. Et l'avantage de... en fait, de prendre compte de ces conséquences-là dans la discussion des différentes cibles, ce serait justement de placer les avantages et désavantages des différentes cibles dans un contexte plus large. Et notamment un exemple, c'est: quand on parle des impacts économiques des quatre scénarios de réduction, il serait évidemment intéressant d'accompagner cette analyse-là avec l'analyse des conséquences des changements climatiques sur l'économie québécoise dans un scénario où... du cours normal des affaires, c'est-à-dire des conséquences découlant des changements climatiques.
n(16 h 10)n Ma troisième recommandation, c'est de tenir compte de l'ensemble des conséquences économiques, sociales et environnementales, cette fois-ci, au niveau des mesures qui vont être prises pour réduire les émissions de GES. Et j'insiste notamment sur le fait de tenir compte des besoins des populations vulnérables et marginalisées à ce niveau-là. Alors, le document de consultation, aux pages 29 et 30, il fait état des impacts financiers sur les ménages québécois, il fait aussi également référence à des différentes mesures qui pourraient atténuer ces impacts-là, mais il serait souhaitable que l'analyse tienne compte des impacts des scénarios de réduction d'émissions d'une perspective plus large. Alors, il pourrait y avoir évidemment des conséquences environnementales aussi qui devraient être prises en compte. Mais, ici, j'insiste surtout sur les importantes dimensions socioéconomiques de toute mesure qui affecte l'utilisation d'énergie et le transport. Et il serait notamment important de déterminer l'impact de ces mesures sur les populations les plus vulnérables, évidemment orienter les mesures d'atténuation en tenant compte de ces populations.
Ma quatrième recommandation... Et d'ailleurs je note que, dans ma hâte de vous... parvenir le document, j'ai eu un problème de numérotation, mais il y en a six, pas cinq. Ma quatrième recommandation, c'est de tenir compte de la situation des pays en voie de développement. Et notamment, bon, pour répondre à la question précise: Quels autres principes pourraient être utilisés dans l'exercice de la détermination de la cible?, alors j'en nomme deux et je les explique: le principe de l'équité et le principe des responsabilités communes mais différenciées.
Donc, le principe de l'équité vise l'éradication de la pauvreté. C'est un principe qui est notamment reflété dans plusieurs articles de la Convention-cadre de l'ONU sur les changements climatiques. Alors, je les ai cités, donc, dans mon mémoire. Mais je vais vous lire l'article 4.7, où l'on dit: «La mesure dans laquelle les pays en développement [...] s'acquitteront effectivement de leurs engagements [...] dépendra de l'exécution efficace par les pays développés parties de leurs propres engagements en ce qui concerne les ressources financières et le transfert de technologie ? et, bon, le mot clé ? et tiendra pleinement compte du fait que le développement économique et social et l'éradication de la pauvreté sont les priorités premières et essentielles des pays en développement...» Le principe des responsabilités communes mais différenciées est, en fait, le principe qui est sous-jacent au régime international sur les changements climatiques, et on le retrouve partout. On le retrouvait notamment dans le Protocole de Kyoto, dans le sens que seulement les pays développés avaient des cibles contraignantes de réduction d'émissions de GES. Alors, à l'article 3.1, on dit qu'«il incombe aux parties de préserver le système climatique dans l'intérêt des générations présentes et futures, [et] sur la base de l'équité en fonction de leurs responsabilités communes mais différenciées et de leurs capacités respectives. Il appartient, en conséquence, aux pays développés parties d'être à l'avant-garde de la lutte contre les changements climatiques et leurs effets néfastes.» Alors, ce qui ressort de ces deux principes-là, c'est que le Québec, dans sa détermination de la cible, doit tenir compte de ses responsabilités en tant que société industrialisée et influente et tenir compte de sa position relative à celles des pays en voie de développement. J'ai inclus certaines figures dans le mémoire qui donnent une idée des défis qui sont liés au niveau des possibles conflits entre la nécessité pour les pays en voie de développement d'assurer un accès à l'électricité à leurs populations, et l'évolution de l'utilisation des différentes sources d'énergie qu'ils pourraient utiliser pour faire cela, et comment, en fait, il pourrait y avoir conflit entre ces objectifs-là. J'ai aussi une figure qui explique notamment l'apport mondial des différents groupes, des pays, en matière d'émissions de GES... du PIB et la population. Et ce qu'on voit évidemment, c'est que les pays en voie de développement ont une population beaucoup plus élevée... une part beaucoup plus élevée de la population que leur part de GES, et l'inverse est vrai pour les pays industrialisés. Et, quant au Québec, alors il est dit, dans le document de consultation, que le Québec ne produit que 0,1 % des émissions... 0,2 % du bilan mondial mais ne représente que 0,1 % de la population mondiale. Donc, on produit deux fois plus que notre part de la population.
Ma quatrième recommandation, c'est d'établir un lien plus clair entre les cibles de réduction des émissions de GES à l'horizon 2020 et la trajectoire de réduction des émissions menant à un horizon 2050, et donc tout cela dans le but de pouvoir clarifier comment cette cible-là va permettre à la stabilisation éventuelle du climat.
Et ma dernière recommandation, c'est d'exprimer les cibles de réduction des émissions de GES non seulement au niveau de la quantité, mais également en quantité des émissions de GES par habitant dans l'optique d'un scénario de convergence des émissions, donc tout ça ressortant d'une idée qu'il est important que la répartition du droit d'émettre des GES soit équitable. Alors, je note tout simplement que les émissions des GES du Québec par habitant sont, aujourd'hui même, trois fois plus importantes que la Chine, sept fois plus importantes que l'Inde. Et, en fait, si on prend le scénario de convergence le plus commun, il faudrait qu'elles soient réduites de sept fois pour que chaque pays ait le droit à la même quantité.
Alors, en conclusion, je vous remercie. Et j'ajouterais juste que je vous invite à me poser des questions sur les aspects internationaux. Je sais qu'il y a eu des questions sur le droit international du commerce, alors je suis prêt à prendre les questions sur ça et, évidemment, sur l'utilisation des mécanismes flexibles, même si ce n'est pas couvert dans mon mémoire. Merci.
Le Président (M. Ouellette): Merci, M. Jodoin. Mme la ministre, pour ouvrir cette période d'échange.
Mme Beauchamp: Merci beaucoup, M. le Président. Bienvenue, M. Jodoin, puis merci pour cette belle porte ouverte à la fin de votre présentation. Vous nous invitez même à aborder d'autres sujets que ceux que vous abordez dans votre mémoire. Je suis sûre qu'on va profiter de cette invitation.
M. Jodoin, votre centre de droit international, d'après les informations que m'a fournies le ministère, vous présidez un partenariat pour le droit international du développement durable.
C'est bien le cas? Ici, on me dit: C'est une initiative mise sur pied en collaboration avec l'Organisation internationale de droit du développement, le Comité du droit international du développement durable de l'Association de droit international, et que c'est sous l'égide du Programme des Nations unies pour l'environnement et le Programme des Nations unies pour le développement, donc le PNUE et le PNUD et la Banque mondiale. Je voulais le souligner, parce que ça nous invite à prendre avec d'autant plus de considérations vos commentaires.
Ma première question, elle sera très large et très ouverte: À travers ce partenariat d'organisations très éminentes du point de vue du droit international, est-ce que vous pouvez commencer... On va commencer nos échanges avec une question très ouverte. Je voudrais que vous commentiez, selon vous, là, l'état des discussions et des négociations nous menant vers Copenhague. Et quel est, à travers votre partenariat... Quel est l'éclairage que vous pouvez donner à cette commission sur... Selon vous, dans la mesure de votre analyse et de vos capacités, là, selon vous, comment vous voyez la situation pour Copenhague d'un point de vue international? Selon vous, qu'est-ce qui va se passer? À quoi ressemblerait un futur traité post-Kyoto?
Le Président (M. Ouellette): M. Jodoin.
M. Jodoin (Sébastien): Oui. Alors, c'est sûr qu'il y a des débats importants sur les cibles. Entre les pays occidentaux, il y a un débat sur quel pays va faire quoi, et là on rentre dans un débat de compétitivité. Aucun pays européen, aucun pays occidental... les pays occidentaux sont réticents à prendre des cibles importantes si d'autres pays ne vont pas prendre des cibles comparables. Alors, c'est pour ça qu'on a, dans les discussions, par exemple, l'Union européenne qui se dit: On va faire 20 %, mais, s'il y a des cibles comparables, on va prendre 30 %. Donc, on voit cet aspect-là, la compétitivité.
Il y a aussi une préoccupation encore au niveau des cibles par rapport aux pays en voie de développement les plus avancés, donc la Chine, l'Inde, le Brésil et... bien, ce n'est pas un pays en voie de développement, mais la Russie, donc on les met souvent ensemble, le BRIC.
Alors, les États-Unis, le Canada, et le Japon surtout, et l'Union européenne dans une moindre mesure sont très préoccupés à l'idée d'avoir des cibles dans une seconde période, après Kyoto, alors qu'il n'y aurait pas de cibles similaires... pas les mêmes, mais une certaine... ce qu'on appelle une déviation substantielle du cours normal des affaires. Donc ça, c'est le premier débat. Ça, c'est au niveau des chiffres au niveau des cibles.
Le débat, je dirais, où on a encore plus une difficulté qui fait obstacle ? et je crois que les chances d'avoir un accord à Copenhague ne sont pas très bonnes en ce moment ? et ça, ce débat-là, c'est sur la forme que va prendre l'accord post-Kyoto. Et, sur cette position-là, le G77, la Chine sont d'un côté et les États-Unis, le Japon, le Canada et, dans une moindre mesure, l'Union européenne, qui sont un peu plus conciliants, sont d'un autre côté. Et la question, c'est: Est-ce que le prochain protocole va ressembler à Kyoto? Est-ce qu'il va y avoir des règles similaires à Kyoto ? ce que le Canada, les États-Unis et le Japon ne veulent pas? Et ce que le G77 et le Japon, pardon, et la Chine veulent, ils veulent que ça ressemble à Kyoto, ils veulent qu'il y ait un nombre... c'est assez compliqué, mais plusieurs mécanismes. Et alors on a, en ce moment, un manque d'entente sur la forme même que va prendre le protocole et tous les principes sous-jacents qui vont en faire partie. Et je dirais que...
Bon, en plus, à six semaines ou cinq semaines de la convention, on a un document de négociation de 108 pages. Ce n'est pas... disons, je ne veux pas être pessimiste, mais il va falloir qu'il y ait des développements assez importants au niveau de la prochaine session à Barcelone, qui est la seule autre session avant Copenhague, pour que le processus débloque. Et, comme je vous dis, puisqu'il y a un malentendu fondamental sur ce qui devrait arriver, je dirais qu'il risque que, plutôt qu'avoir un protocole mis en place après Copenhague, on va avoir une déclaration qui va peut-être mener à des négociations postérieures.
Et enfin j'ajouterais que le gros problème, évidemment c'est que les États-Unis ne sont pas... Bon, j'ai donné une liste des différentes propositions, vous verrez que les États-Unis ne sont pas là. Alors, les États-Unis refusent de prendre une position internationale avant qu'ils aient un... au niveau du concret, un projet de loi, et alors on ne sait pas... on ne sait pas si ça va arriver avant Copenhague. Le projet de loi par ailleurs varierait entre des réductions de 13 % à 18 %, en deçà de 11 % et 18 %, je crois. Et la question à savoir, c'est: Est-ce que l'Union européenne va accepter ça? Quel prix est-ce que l'Union européenne va payer pour que les États-Unis s'engagent dans le protocole? Est-ce qu'ils vont accepter une cible américaine beaucoup plus basse que celle de l'Union européenne?, donc je dirais que ça, c'est les problématiques les plus importantes à ce moment-ci.
n(16 h 20)nLe Président (M. Ouellette): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Juste à des fins de bonne compréhension pour la suite de nos débats, quand vous dites que, vous, votre évaluation de l'impact du projet de loi qui a traversé la Chambre des représentants aux États-Unis est de l'ordre moins 11 % à moins 18 %, est-ce que vous pouvez juste me donner juste un petit peu plus d'informations? Parce que, moi, j'ai une note qui m'informe de l'impact du principe du plafonnement et d'échange de crédits carbone à l'intérieur de la loi, mais s'additionnent à ça des notions de lutte à la déforestation et s'additionnent à ça des efforts faits sur d'autres territoires que le territoire américain. Et donc, nous ? d'ailleurs, je crois qu'on l'indiquait dans le document de consultation ? là, on juge que l'effort américain au moment où on se parle, tout en étant conscients que la loi n'a pas traversé le Sénat, là... Mais celle qui a traversé la Chambre des représentants nous place à peu près à moins 18 %.
Mais je voudrais vous entendre, vous, si c'est possible, nous commenter plus en détail le positionnement des États-Unis, selon vous, quand vous me parlez de moins 11 % à moins 18 %.
Le Président (M. Ouellette): M. Jodoin.
M. Jodoin (Sébastien): Oui. Bien, je dirais que le projet de loi, il est assez compliqué, mais ce que je pourrais dire, par... Pourquoi il y a une sorte de marge de manoeuvre? C'est que ça dépend si... tout cela dépend de qu'est-ce qui va compter dans la prochaine période, donc c'est à ce niveau-là. C'est sûr que, si tout rentre... comme vous y avez fait référence, donc ce serait 18 %. Si, au niveau du L... Je connais l'acronyme en anglais, là: LULCF. Si ça ne rentre pas, donc là on baisse un petit peu, donc... C'est pour ça que, de manière générale, on... Je sais que, dans certains documents de l'Union européenne, ils font toujours référence à une cible de 11 % à 18 %.
Le Président (M. Ouellette): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Et encore, avec l'éclairage que vous nous offrez de cette perspective, là, un peu plus internationale, on va en profiter. À la fin de votre présentation, vous nous invitiez à vous poser des questions, et notamment sur l'avenir, je dirais, là, des mécanismes de développement propre à l'intérieur des négociations qui ont lieu actuellement. Vous commentez cet aspect, dans votre mémoire, lorsque vous abordez les questions d'équité et les questions, donc, de responsabilités communes mais différenciées. À l'intérieur, donc, du Protocole de Kyoto, il y avait cette notion de mécanismes de développement propre, et il y a différentes opinions, hein, sur la... je dirais même, le bien-fondé de ce mécanisme de développement propre où il y a donc une notion économique derrière ces mécanismes. Ce ne sont pas des mécanismes où c'est de la bienfaisance vers des pays en voie de développement, c'est bel et bien des mécanismes qui permettent à des États ou à des entreprises d'aller chercher leur diminution d'émissions à travers ces mécanismes de développement propre.
Ça m'intéresse d'avoir votre opinion en termes de droit international sur les mécanismes de développement propre, puis aussi que vous donniez de l'information aux membres de cette commission sur, selon vous: Quel est l'état des discussions, par rapport au post-Kyoto, sur cette notion même de mécanismes de développement propre?
Le Président (M. Ouellette): M. Jodoin.
M. Jodoin (Sébastien): Oui. Je dirais peut-être...je commencerais d'abord par dire que, oui, il y a beaucoup de problèmes avec le MDP. Ce qui va sortir des négociations, s'il y a quelque chose qui aboutit... un protocole qui aboutit à Copenhague, ça ne résoudra pas ces problèmes-là; les problèmes vont être résolus par des décisions par après, qui vont être prises par la Conférence des parties, comme ça a été le cas par le passé. Donc, le protocole de Copenhague ne va pas résoudre probablement les questions assez techniques au niveau de la comptabilité et autres débats comme ça.
Ce que je dirais, par contre, un des gros enjeux, c'est... c'est le suivant, et ça affecte évidemment beaucoup la possibilité pour le Québec de faire... d'avoir recours à ces mécanismes-là. Alors, l'argument, normalement, du point de vue d'un pays industrialisé, de participer au MDP, c'est que ça permet d'avoir des réductions qui sont à moindre coût qu'ici.
Mais, dans une optique où les pays en voie de développement ont à faire des réductions eux-mêmes, il est évident qu'ils vont choisir eux-mêmes de prendre les réductions à moindre coût. Alors, la question de si le MDP, dans le post-Kyoto, va, en fait, permettre à des pays industrialisés d'avoir des réductions à moindre coût, ce n'est pas... n'est pas révolue. Et il y a... dans ce concept-là, c'est le concept d'additionnalité. Donc, normalement, qu'est-ce qui arrive? C'est que le cours normal des affaires du... des émissions dans le pays en voie de développement... Et disons qu'il y a un projet qui réduit ça de 5 %, donc tout ce qui est réduit en bas du cours normal des affaires, le 5 %, par un projet de MDP, va aller... les crédits vont aller aux pays industrialisés. Mais, si le pays en voie de développement se donne une cible de moins 5 %, alors là les MDP vont devoir aller chercher ce qui est en bas de moins 5 % . Donc, disons qu'on fait quelque chose qui fait 5 % au-dessus de l'autre 5 %. Donc, ça peut devenir douteux, et ça, c'est quelque chose qu'il faut prendre en compte.
Je dirais, une autre chose importante à prendre en compte pour la position du Québec, c'est que seule une partie au Protocole de Kyoto ou une compagnie approuvée par une partie au Protocole de Kyoto peuvent participer aux mécanismes de développement propre. Qu'est-ce qui arrive dans un scénario où... qui est très possible, que le Canada soit suspendu... Bon, en fait, ce n'est pas si possible que ça, mais disons qu'il soit suspendu du Protocole de Kyoto parce qu'il ne rencontre pas ses obligations ? il pourrait déjà l'être ? alors la question: Est-ce qu'à ce moment-là... en fait, à ce moment-là, le Québec ne pourrait pas participer ou une compagnie québécoise ne pourrait pas participer aux mécanismes de développement propre? Si le Canada est exclu d'un futur accord international, il serait difficile de voir comment, à moins que le Québec passe par une autre partie, comment il pourrait avoir accès à certains de ces mécanismes-là.
Et c'est pour ça que le ministère des Relations internationales fait un travail assez important en ce moment, en essayant de s'assurer que le rôle des gouvernements infraétatiques soit reconnu dans le protocole ou dans la déclaration pour s'assurer que, dans des situations qui pourraient se produire comme ça ? puis ce n'est pas juste le Québec, tout partout autour du monde, il y a des entités infraétatiques qui font face à ces défis-là ? de s'assurer que leur capacité d'action ne soit pas réduite. Donc ça, c'est un autre débat assez important.
Le Président (M. Ouellette): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Oui, vous avez raison de dire: Il y a le Québec, mais il y en a d'autres. D'ailleurs, c'est pour ça aussi qu'il y a ce regroupement d'États fédérés notamment du Sommet des leaders... qu'il y aura une rencontre à Copenhague, le 15 décembre prochain, sur cette... porteur notamment de cette revendication de la reconnaissance du rôle et des responsabilités des États fédérés dans le protocole international.
Je veux juste continuer sur l'élément des mécanismes de développement propre, parce que vous faites référence à un risque qui est le fait de dire: Bien, si ces États-là prennent des engagements, donc endossent des cibles contraignantes, ça enlève de l'espace pour aller chercher... selon les scénarios des pays développés, pour aller chercher des réductions de GES à bon prix ? je vais dire ça comme ça ? sur ces territoires-là. Mais ça m'amène la... ça amène un peu la question... Par ailleurs, vous avez sûrement vu, comme moi, c'est tout récent, mais l'Inde et la Chine qui ont signé une entente ? c'était hier, si je ne me trompe pas, ou avant-hier ? qui ont signé une entente où les deux disent qu'ils n'endosseront pas de cibles contraignantes pour Copenhague. Donc, nous sommes dans un univers qui est en très, très grande mouvance, où on voit que les choses bougent, sans exagérer, presque de 24 heures en 24 heures.
Mais je voudrais que vous apportiez aussi un éclairage aux membres de cette commission, parce que lorsqu'on regarde... Et vous faites bien de nous donner une liste d'exemples à travers le monde d'États qui ont des cibles très ambitieuses, allant jusqu'à moins 40 % dans certains cas. Je voudrais que vous commentiez. Moi, j'ai demandé à mon ministère de vous fournir de l'information sur le degré d'effort qui était fait à ce moment-là sur d'autres territoires que le territoire national concerné.
Si je prends l'exemple de la Suède, c'est le tiers de l'effort qui est prévu sur d'autres territoires. Donc, ça ramène un peu la question... Je sais, là... On ne peut pas... Je ne vous demande pas d'être devin, je vous demande juste de commenter. On est... Est-ce qu'on peut s'entendre ? je vais dire ça ainsi ? pour dire qu'au moment actuel, n'empêche, donc, les pays industrialisés qui adoptent des cibles ambitieuses le font, je vais dire, en escomptant, en prévoyant qu'une partie de leur effort sera fait sur d'autres territoires que leurs territoires, et notamment par les mécanismes de développement propre? Et, à ce moment-là, je vais vous demander de commenter un peu plus ce qui est prévu dans notre document par rapport au type d'effort que le Québec pense devoir faire sur d'autres territoires que le sien.
n(16 h 30)nLe Président (M. Ouellette): M. Jodoin.
M. Jodoin (Sébastien): Par rapport à... Juste pour revenir au concept de l'additionnalité, ce n'est pas nécessairement additionnel à une cible contraignante. Donc, même si la Chine, l'Inde ont dit qu'il n'y aurait pas avoir de cibles contraignantes, ils pourraient tout de même, dans leurs propres plans, s'ils ont des plans pour réduire les émissions, même si ce n'est pas contraignant au niveau international, il faut que le projet MDP soit additionnel à ça. Donc, même s'il n'y a pas de cibles contraignantes, la question de l'additionnalité va se poser quand même.
Alors, oui, il y a beaucoup de pays qui misent sur les mécanismes flexibles internationaux. Est-ce qu'ils font... Est-ce que c'est dans la foi que ces mécanismes-là vont être fonctionnels? J'aurais peut-être... J'avais une autre figure peut-être à vous montrer, mais le fait est que, ce qui est ressorti à date, le mécanisme le plus flexible, le plus efficace, ça a été le marché de carbone européen qui a produit environ cinq fois plus de réduction d'émissions que le MDP puis 1 000 fois plus que l'application jointe.
Donc, ce qu'on voit, c'est qu'il y a des outils qui ne sont pas utilisés pleinement, des outils qui marchent beaucoup mieux que d'autres. Alors, je dirais que peut-être il y a un aspect... il y a un aspect peut-être plus économique dans votre question que je ne me sens pas nécessairement très confortable à y répondre. Mais ce que je peux dire, c'est que, depuis le début, il y avait des doutes sur ces mécanismes-là. C'est des doutes qui vont continuer, mais il y a des choses qui sont résolues aussi.
Alors, il y a des problèmes avec les MDP, mais ce n'est pas... ce n'est pas nécessairement... Je crois qu'avec le temps et les négociations c'est très possible qu'on puisse arriver à résoudre les problèmes. On a déjà eu... C'est ça un peu l'avantage, c'est qu'on a eu une expérience initiale, et les négociations, en ce moment, visent à améliorer ces mécanismes-là pour résoudre les problèmes qui se sont présentés durant la période initiale d'engagement. Donc, à ce niveau-là, je dirais juste qu'il faut... Je crois qu'on peut très légitimement essayer de prendre en compte ces possibilités-là au niveau international, mais il faut voir aussi qu'il y a des problèmes encore qui doivent être résolus, et le Québec a un rôle à jouer là-dedans dans les négociations en pouvant faire la démonstration que le mécanisme peut fonctionner.
Le Président (M. Ouellette): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Croyez-vous même qu'à Copenhague la question de, je dirais, d'un meilleur arrimage ou d'une ? comment je pourrais dire ça ? c'est presque une notion d'un meilleur design des mécanismes de développement propre pourrait être une des pistes de solution pour amener les différents pays plus sur une même longueur d'onde? Ce que je veux dire par là, c'est que, bon nombre d'États industrialisés, parfois très, très, très près de nous, vont dire qu'il n'est pas opportun d'avoir des cibles ambitieuses, parce qu'ils y voient une menace, hein, de délocalisation d'entreprises et qu'en plus il y a un transfert de capitaux vers d'autres pays à travers les mécanismes de développement propre.
Vous dites, vous-même, que les négociations sont un peu sur la base d'une expérience au cours des dernières années. Si vous aviez à nous donner des conseils sur... dans l'architecture d'un futur traité, cette question des mécanismes de développement propre, comment on assure un arrimage entre les pays industrialisés et les pays en développement. Là, vous en parlez dans votre mémoire, mais sous l'angle des principes, en disant il faut prendre le principe en compte d'une responsabilité commune mais différenciée. Comment vous pensez que ces mécanismes de développement propre peuvent jouer?
Le Président (M. Ouellette): M. Jodoin.
M. Jodoin (Sébastien): Oui. Alors, oui, alors à ce niveau-là, il faut vraiment différencier les pays les moins développés dans le G77 et la position de la Chine et de l'Inde. Donc, la Chine et l'Inde, même si en fait la Chine a été le grand bénéficiaire du MDP, environ 60 % des projets sont allés en Chine, leur position à la négociation, c'est que la très grande majorité des réductions d'émissions doivent être domestiques au niveau des pays industrialisés. Donc, à niveau-là, ce n'est pas clair que le MDP pourrait vraiment permettre à ce groupe-là à se concilier leurs positions.
Par contre, ce n'est pas le cas des pays en voie de développement qui, eux, voient souvent d'un bon oeil la possibilité d'avoir des fonds à travers le mécanisme MDP, sauf que la difficulté, c'est qu'ils ne se sont pas rendus parce que tous les projets sont allés en Chine. Pourquoi est-ce qu'ils se sont allés en Chine? Parce que... Alors, initialement, quand on a construit le MDP, on pensait que ça irait financer des produits... pardon, des projets qui augmenteraient l'efficacité énergétique, sauf, ce qui arrive, c'est qu'en fait, l'efficacité énergétique, ce n'est pas rentable au niveau des crédits parce que... bien, pour plusieurs raisons, mais parce que, premièrement, souvent les... si un produit... un projet d'efficacité énergétique, ça se paie soi-même, ça a des retours éventuels, alors ça ne génère pas autant de crédits. Et l'autre affaire, c'est que ce ne sont pas tous les gaz à effet de serre qui valent la même chose. Donc, un gaz CO2 , c'est un crédit. Il y a des gaz qui en vaut 216. Ça, c'est des...
Alors, ce qui est arrivé, c'est qu'il y a eu beaucoup de projets qui sont allés réduire, en fait, juste des gaz qui sortaient d'usines, et là, ils ont capté ces gaz-là et, ça, ça faisait 216 crédits. Donc, ça fait des énormes crédits, mais ça n'allait pas nécessairement dans une perspective de développement durable. Ça faisait juste enrichir des compagnies puis produire des crédits sans nécessairement ajouter au développement du pays concerné.
Alors, où est-ce que la solution se trouve? Ça va être... comme je vous dis, ça ne sera pas nécessairement, je crois, dans un protocole éventuel, parce que c'est trop technique pour ça. Ça va être dans les critères qui vont être adoptés par la Conférence des parties. Alors, il y a déjà eu des améliorations, et on parle encore d'autres améliorations pour s'assurer que... Ce qui arrive, c'est que pour qu'un MDP... un projet MDP soit approuvé par l'organisation, le comité exécutif qui approuve les projets MDP, ils ont certains critères. Alors, c'est là que ça se joue, c'est dans les critères qui vont être utilisés. Et, à ce niveau-là, oui, il peut y avoir une conciliation si le mécanisme est amélioré entre les pays en voie de développement puis les pays développés.
Le Président (M. Ouellette): Merci, M. Jodoin. Ça termine l'échange avec la ministre et les députés du côté ministériel. Nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle, en vous donnant la chance de prendre un petit verre d'eau. M. le député de L'Assomption.
n(16 h 40)nM. McKay: Merci, M. le Président. Alors, bonjour M. Jodoin, bienvenue à la commission. Bien, je vous remercie pour votre présentation. Effectivement, on n'a pas tous les jours l'occasion de pouvoir échanger avec des gens qui sont des observateurs de premier plan de tous ces mécanismes qui nous apparaissent un petit peu... enfin, un petit peu comme de la science-fiction à certains égards, un petit peu éthériques, en tout cas.
Je voudrais retourner à vos conclusions et recommandations. Premièrement, vous suggérez au gouvernement de clarifier la pertinence du critère de l'évolution des connaissances scientifiques et technologiques en matière de changements climatiques, tiré de l'article 46.4 de la Loi sur la qualité de l'environnement. C'est la loi n° 42, là, qu'on avait... qui a été qualifiée, dans les médias, ou dépeinte dans les médias comme étant la loi sur la bourse du carbone. En fait, c'était la loi qui donnait les pouvoirs habilitants au gouvernement du Québec d'établir le système de plafond et d'échange, et il y a différents intervenants, au cours ? peut-être juste pour clarifier comment ça s'est retrouvé là ? pendant les consultations particulières sur ce projet de loi, quelques intervenants étaient venus justement mentionner que, dans les critères que le gouvernement avait édictés dans le projet de loi, il n'y avait aucun critère qui référait à l'état des connaissances aux niveaux scientifique et technologique. Et c'est un point que, nous, de l'opposition officielle, nous avons repris donc à l'étude détaillée du projet de loi et qui a été accepté par le groupe gouvernemental, donc de pouvoir l'intégrer.
Ça, ça s'est fait au mois de juin, donc relativement récemment, et lorsque... bon, je pense que vous identifiez justement, à juste titre, que, dans le document de consultation, à la page 33, on nous parle de trois principes directeurs sous-jacents à la détermination de la cible de réduction, et aucun de ces trois-là n'est le critère que nous avons fait ajouter au mois de juin à l'étude détaillée du projet de loi.
Donc, j'ai un peu l'impression que le document est un peu... est un peu en retard, là, par rapport à ces ajouts-là que nous avons faits au projet de loi, ces améliorations. Et ça teinte un peu l'orientation du document puisque, si l'on se base sur l'évolution des connaissances scientifiques et techniques, bien, ce n'est pas un maximum de moins 20 % de réduction que ça nous prend, c'est quelque part entre moins 25 % et moins 40 %, et je pense que... enfin c'est peut-être une explication, là, qui fait en sorte que le document ne le retient pas. Soit qu'il avait été rédigé avant ou soit que, de façon... c'est un peu, ça devenait un peu difficile de justifier les cibles qui étaient là en mettant l'accent sur ce critère-là qui, pourtant, effectivement, vous avez raison, est inclus dans la loi.
J'aimerais, puisque vous nous avez parlé du fait que le Canada, parce qu'il s'agit un peu d'un... on pourrait quasiment le qualifier d'État voyou par rapport au Protocole de Kyoto. De la façon dont on a traité en fait le Protocole de Kyoto, avec le gouvernement fédéral actuel, on voit que, dans le document gouvernemental, même si ce n'est pas une très large part de la contribution des réductions de gaz à effet de serre du Québec qui serait réalisée à l'étranger dans la proposition, si le Canada devait être exclu des mécanismes de développement propre, donc quelle serait l'alternative, à ce moment-là, pour le Québec?
La ministre a mentionné qu'elle fonde certains espoirs dans la reconnaissance des États fédérés. La compréhension que, nous, on en a, à ce moment-ci, de la reconnaissance des États fédérés, c'est un peu comme la reconnaissance du rôle des villes qui avait reconnu, là, lors du Sommet de la Terre de Rio, en 1992. C'était le maire de Montréal de l'époque, Jean Doré, qui avait justement parlé, au Sommet de la Terre, au nom des grandes villes du monde. On avait reconnu ce rôle-là.
Dans le cas des États fédérés, à votre connaissance, jusqu'à ce moment-ci, est-ce que ça peut dépasser un rôle symbolique comme celui-là, qui est très important, là, on le... que soit reconnu le rôle des États fédérés? Bon, notre Constitution, ici, donne au Québec des pouvoirs en matière d'environnement. Donc, on s'attend à ce que ce soit un minimum, à ce qu'on reconnaisse ça, mais est-ce qu'on peut aller jusqu'à penser que ça pourrait être un contrepoids donc au fait que le Canada, avec ses agissements par rapport au protocole, puisse, bon, un, être exclu des mécanismes de développement propre et, deux, même avoir éventuellement à payer des pénalités à cause du fait qu'il ne respecte pas ses engagements?
Le Président (M. Ouellette): M. Jodoin, vous avez une longue question. Je présume que vous avez pris note des informations recherchées par le député de L'Assomption. À vous la parole.
M. Jodoin (Sébastien): Alors, dans l'état actuel des négociations, le dernier texte a... il y a 12 références aux États, aux entités infraétatiques en ce moment, dans le texte actuel, qui, bon, je ne veux pas nécessairement dire que... je ne veux pas... symboliques, elles sont dans des clauses opérationnelles, donc, est-ce qu'elles accordent des droits aux entités infraétatiques, ça reste à voir. Ça va être... Comme je vous dis, ce document-là, un protocole, les décisions sont tellement techniques que c'est vraiment après le protocole dans la Conférence des parties que les décisions vont être prises.
Ce qui est important dans le protocole, et ce à quoi le ministère des Relations internationales veille en ce moment, c'est de s'assurer qu'il n'y a pas de portes fermées dans le protocole. Puis, ensuite, les négociations reprennent au niveau de la Conférence des parties pour les règles spécifiques. Donc, je vous dirais qu'il y a des bonnes chances qu'il y ait plus qu'une référence symbolique au rôle des entités infraétatiques. Maintenant, ce qui va découler de ça, ça va être dans la Conférence des parties, c'est des décisions prises par cette entité-là qui va fixer ça.
Alors, oui, si le droit de participer au mécanisme flexible du Canada était suspendu, oui, le Québec ne pourrait pas participer directement à un projet MDP dans le sens qui... mais ce n'est pas nécessairement le cas qu'il ne pourrait pas acheter des crédits quand même. Donc ça, c'est la distinction à faire à ce niveau-là et, encore une fois, ce qui est important, c'est qu'on ne ferme pas de porte non plus à ce niveau-là dans la négociation pour s'assurer. Parce que ce n'est pas juste le Québec qui est dans une situation comme ça, il y a des États nord-américains... aux États-Unis qui veut, elle... eux aussi veulent la possibilité de participer à ces échanges-là, ces autres bourses là qui pourraient... sur lesquelles... qui pourraient permettre au Québec d'acheter des crédits. Et à ce niveau-là, encore une fois, je sais que le ministère des Relations internationales travaille étroitement avec des États américains parce que les Européens, eux, veulent que les États-Unis participent à n'importe quel mécanisme de... n'importe quel marché de carbone.
Alors, si le Québec parvient à avoir une compatibilité entre son marché et le marché américain, les chances qu'on puisse lier ces deux marchés-là au marché européen ? ça, c'est en l'absence de mécanisme international ? le scénario cauchemar, mais même dans ce scénario cauchemar là, il y a des bonnes chances que ce soit possible en fait de lier ces mécanismes-là, surtout si le Québec prend des cibles comparables à celle de l'Europe. Déjà, ça ajoute beaucoup de possibilités à ce niveau-là.
Enfin, vous... je ne sais pas si vous faites référence aux possibilités de barrière tarifaire au niveau du commerce international quand vous parlez de sanction. Alors, vous savez sans doute qu'il y a plusieurs projets depuis plusieurs années à l'Union européenne d'imposer une barrière tarifaire pour des produits qui, en fait, n'auraient pas été... qui ne tiendraient... pour, en fait, compenser des compagnies européennes qui, eux, seraient sujets à un système de plafonnement et échange qui serait différent d'un autre pays qui ne serait pas comparable.
Alors, c'est une question qui est encore... qui n'est pas résolue, mais ce que je dirais c'est qu'il y a deux choses. Si l'Union européenne... Parce qu'un des projets, un des projets en ce moment permettrait à l'Union européenne de poser un tarif pour des produits de n'importe quel... n'importe quel produit ou en fait certains secteurs mais venant d'un pays qui serait sur une liste, qui serait sur une liste qui serait composée sur la base de... ce pays-là n'a pas fait des efforts comparables au protocole... des efforts comparables à celui d'Europe. Donc, l'idée là-dedans, ce serait que le Canada a une cible de moins 3 %, alors on impose une barrière sur tous les produits qui viennent du Canada parce qu'ils n'ont pas des efforts comparables.
Par contre, il faudrait voir c'est quoi, l'état le plus récent des discussions, mais plusieurs sont d'avis que ça ne serait pas permis sous les règles de l'OMC parce que ce qu'on voit là c'est que ce n'est pas une barrière qui est légitimement prise pour des raisons environnementale, c'est une barrière qui est prise pour protéger l'industrie européenne. Et une mesure qui serait réellement prise pour des raisons environnementales, ce serait une mesure qui en fait s'attaquerait au processus même du produit et non au pays qui... dans lequel se trouve l'usine qui a produit le produit.
Donc, en droit commercial... en droit international du commerce, on parle de produits comparables. Alors, la question, c'est un produit qui serait produit au Québec, qui suivrait un processus décarbonisé, si je peux m'exprimer ainsi, qui serait similaire à celui européen, d'après moi, ce ne serait pas légitime pour l'Union européenne d'imposer une sanction, une barrière tarifaire sur ce produit-là sous le droit international du commerce.
Cela dit, ce n'est pas résolu, et évidemment, le défi, c'est qu'ils imposeraient la barrière et, là, il faudrait aller... ça prendrait plusieurs années pour résoudre la chose possiblement. Mais ce qu'on essaie de faire par contre, c'est d'éviter ce genre de problème là pour justement... encore une fois, tout cela dans le but que l'Union européenne ne punisse pas les États... pardon, les entités infraétatiques qui, elles, font des efforts comparables. Et il y a de la place encore, rien n'est joué à ce niveau-là, et même s'il y avait une barrière, ce n'est pas clair qu'elle serait en fait permise.
n(16 h 50)nLe Président (M. Ouellette): M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Merci. Oui. Bien, en fait, je parlais de... On a évoqué aussi des pénalités monétaires. Alors, je ne sais pas si... quel est l'état des discussions par rapport à cet aspect-là, là. Il y a des barrières effectivement, des pénalités sous forme de barrières tarifaires, mais j'ai cru comprendre que, pour ce qui est du Protocole de Kyoto, effectivement, ce sont probablement des discussions qui auront lieu après Copenhague parce qu'elles sont plus techniques. Mais est-ce que c'est toujours dans l'air, cette possibilité-là?
Le Président (M. Ouellette): M. Jodoin.
M. Jodoin (Sébastien): Oui. Les États-Unis sont farouchement opposés... Les États-Unis veulent retirer toute... La proposition américaine en ce moment retire toute sanction du prochain protocole, s'il y en a un, qui, en fait, dans la position américaine, remplacerait le Protocole de Kyoto. Ils sont appuyés dans cela par le Japon et le Canada. L'Union européenne semble vaciller à ce niveau-là. Je crois qu'ils penchent du côté américain parce qu'ils veulent s'assurer l'implication américaine. Et, comme je l'ai mentionné plus tôt, le G77... Et c'est un... En ce moment, c'est un des obstacles parce que le G77 puis la Chine refusent d'ouvrir. Ils ne veulent pas renégocier Kyoto, ils ne veulent pas renégocier des aspects de Kyoto, et ça, c'est un des aspects les plus importants en ce moment.
Alors, je ne peux pas vous dire s'il va y avoir un système de pénalités dans le prochain protocole ou dans le protocole qui va remplacer Kyoto, mais ce que je peux vous dire, c'est qu'en ce moment il y a vraiment deux camps. C'est une des questions qui divisent les deux camps, si je peux m'exprimer ainsi, en ce moment.
Le Président (M. Ouellette): M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Oui. Lorsque vous nous demandez ou suggérez d'exprimer les cibles de réduction des émissions de gaz à effet de serre non seulement en quantité absolue, mais également en quantité des émissions de gaz à effet de serre par habitant, dans l'optique d'un scénario de convergence des émissions de GES par habitant à l'échelle planétaire, je ne sais pas si vous pourriez élaborer davantage.
Bon, ce que j'ai compris, c'est... Bon, vous mentionniez effectivement, lorsqu'on remet les données du gouvernement sur les émissions de gaz à effet de serre du Québec puis lorsqu'on les remet sur un ratio par habitant, notre situation est quand même moins reluisante, là, puisque nous émettons, je pense, deux fois plus que la moyenne mondiale. Enfin, je vous laisse peut-être élaborer davantage.
M. Jodoin (Sébastien): Oui. Non, en fait, ce que...
Le Président (M. Ouellette): M. Jodoin.
M. Jodoin (Sébastien): Oui, ce que j'ai dit en fait, c'était qu'on est 0,1 % de la population, mais on est 0,2 % des émissions. C'est ça que je voulais dire.
En ce moment, on est, comme le document l'indique, dans la moyenne européenne, dans les tonnes de CO2 par habitant. Mais alors, moi, quand je parle de la nécessité d'exprimer les cibles dans ce sens-là, c'est dans une vision d'une équité... d'une application du principe de l'équité, qui vise éventuellement à ce que tous les habitants sur la planète émettent une tonne de CO2 qui soit équivalente donc, et la moyenne globale... Donc, si... Alors là, j'utilise les chiffres de lord Stern, qui a présenté, et je le cite dans le mémoire, c'est un document assez intéressant, c'est les éléments d'un Global Deal on Climate Change. Donc ça, c'est sa solution à lui. Qu'est-ce qui peut permettre à la Chine, à l'Inde, puis tout le monde à embarquer? Qu'est-ce qui est nécessaire? Puis qu'est-ce qui va permettre à tout le monde d'embarquer.
Et donc, lui, ce qu'il fait, c'est qu'il prend... c'est quoi le nombre de tonnes de carbone qu'on doit avoir, en 2050, pour stabiliser le climat? Il divise ça par le nombre... la population à ce moment-là, puis ça donne 2 tonnes de CO2 équivalent. Et alors c'est clair que, si on veut être équitables dans la façon qu'on utilise l'atmosphère, il faut que ce soit la moyenne globale. Alors, ça peut être un peu plus, un peu moins, mais il faut que ce soit la moyenne globale.
Alors, ce qui est intéressant, c'est que même au niveau chinois, ça impliquerait qu'ils réduisent de moitié ce qu'ils font en ce moment parce qu'en ce moment c'est cinq en Chine. Mais évidemment, la plupart des pays en voie de développement, c'est en bas de deux, et le Québec se situe environ à 13. Donc, ça nous permet... ça nous permet d'abord de voir c'est quoi, l'équité; la façon la plus simple mais aussi la plus forte d'exprimer le principe de l'équité, l'utilisation équitable de l'atmosphère, c'est ça. Puis ça nous permet de voir où on doit aller en 2050, d'une façon très claire, pour exprimer aux citoyens puis aux commerces qu'en fait, si on veut suivre ce principe-là, si on veut suivre le 2 CO2, alors il faut réduire d'un peu plus que... de sept fois notre impact environnemental atmosphérique actuel.
Donc, pour moi, ça ajoute beaucoup à l'analyse, puis je crois que ce serait intéressant de... Puis ça permet aussi de comparer. En ce moment, le document compare... compare le Québec aux autres au niveau de cet indice-là. Et, une fois qu'il va avoir ces cibles-là, ce serait intéressant de voir... ce serait sur la base des probabilités de... si les États réussissent leurs objectifs, mais il serait intéressant de voir, en 2020, si le Canada réduit de 3 % puis le Québec réduit de 20 %, où est-ce qu'on va être rendu par rapport au Canada, par rapport à l'Union européenne dans nos émissions par habitant.
Le Président (M. Ouellette): Pour une dernière question de trois minutes. M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Bien, moi, je n'avais plus de question vraiment à ce moment-ci. Je vous remercie.
Le Président (M. Ouellette): Donc, si vous n'avez plus de question, merci beaucoup, M. Sébastien Jodoin, représentant le Centre de droit international du développement durable.
Nous allons ajourner quelques minutes, le temps de permettre aux groupes de Greenpeace Québec et de QuébecKyoto de prendre place.
(Suspension de la séance à 16 h 58)
(Reprise à 17 h 1)
Le Président (M. Ouellette): La commission continue maintenant ses travaux en recevant le groupe Greenpeace Québec et le groupe QuébecKyoto. J'ai compris que M. Thomas Welt, représentant du groupe écologiste Stop, prendra la parole. Donc, M. Welt, pour une période de 10 minutes, après nous avoir présenté les personnes qui vous accompagnent, vous ferez part à la commission du résultat de votre mémoire et de vos recherches, et par la suite il y aura un échange avec les députés ministériels et les députés de l'opposition officielle. Donc, la parole est à vous, M. Welt.
Greenpeace Québec/QuébecKyoto
M. Welt (Thomas): Bonsoir. J'allais dire «bonjour» avant, mais c'est déjà le soir. Bonsoir, M. le Président, Mme la ministre du Développement durable, Environnement et des Parcs, Mmes et MM. députés de l'Assemblée nationale du Québec. Merci de nous donner la possibilité de présenter notre mémoire.
Tout d'abord, j'aimerais vous présenter les personnes qui représentent les organismes qui ont contribué à notre mémoire: M. André Bélisle, président de l'Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique, membre fondateur de la coalition QuébecKyoto; Mme Virginie Lambert-Ferry, responsable de la campagne Climat-Énergie à Greenpeace; M. Christian Simard, directeur général, Nature Québec; et M. John Burcombe, Mouvement Au Courant, vétéran de tous les combats des changements climatiques et énergie depuis plusieurs décennies; et finalement moi-même, Thomas Welt. Je suis membre de la coalition QuébecKyoto, je suis aussi membre du Groupe environnement Stop.
Quelques mots sur la coalition QuébecKyoto, notre mandat. Notre mandat est tout d'abord faire respecter, au Québec, les exigences du Protocole de Kyoto sur la période d'engagement 2008-2012, mais plus généralement de faire respecter les exigences de réduction des GES sur le moyen-long terme, et plus particulièrement sur la période 2013-2020, ainsi qu'à très long terme, en 2050. La coalition QuébecKyoto est la plus large coalition au Québec pour la lutte aux changements climatiques.
Ceci étant dit, quels sont les éléments essentiels de notre mémoire? Nous limiterons notre présentation aux recommandations essentielles, donc nous n'allons pas répéter tout ce qu'il y a dans le mémoire. L'audience actuelle est sur la cible qui est proposée, la cible de réduction des gaz à effet de serre à l'horizon 2020. C'est l'objectif des audiences. Eh bien, nous allons d'emblée vous donner notre proposition.
Notre mémoire... Notre mémoire a pour objectif de répondre à cette question fondamentale et de la justifier. Nous proposons une réduction à l'horizon 2020 de moins 25 % par rapport à l'année de référence 1990, sur la base des quatre principes suivants.
Principe n° 1: il faut respecter les recommandations du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution des climats qui préconise des réductions des gaz à effet de serre de 25 % à 40 % pour les pays industriels. C'est le principe fondamental qui sous-tend l'action de la communauté internationale. Évidemment, on peut argumenter que ce chiffre de 25 % à 40 % ne s'applique pas nécessairement à tous les pays industrialisés, il peut y avoir différenciation, mais cet aspect-là, nous pourrons en discuter, si vous le voulez, lors des échanges d'opinions.
Principe n° 2: il faut limiter les conséquences macroéconomiques. Or, selon le document gouvernemental, ces conséquences sont très faibles, voire peu signifiantes.
Principe n° 3 ? c'est finalement le principe que je voudrais développer le plus: une lutte contre les gaz à effet de serre peut présenter des bénéfices et avantages associés à cette réduction. Ces bénéfices peuvent être considérables: emploi, développement industriel, développement régional, commerce extérieur, réseau routier, santé. Rien que sur l'aspect du commerce extérieur, le Québec a dépensé, en 2008, 18 milliards de dollars pour importer le pétrole. Le Québec ne produit aucun combustible fossile ni de parc automobile, il doit donc tout importer. C'est donc... Quand il y aura nécessité de moins de pétrole, de moins de voitures, notre commerce extérieur se portera beaucoup mieux. Donc, nous avons, dans notre mémoire, donné un peu plus de détails sur les énormes avantages qu'il y a à diminuer les gaz à effet de serre au Québec. Nous pensons que cet aspect-là est un aspect très important, parce qu'il est non seulement environnemental, mais, sur la base purement économique, si on oublie totalement l'aspect environnemental, la lutte contre les gaz à effet de serre, la décarbonisation de la société québécoise peut avoir, si elle est bien comprise et bien menée, des énormes avantages. On peut revitaliser l'industrie québécoise et revitaliser les régions. C'est donc un principe fondamental que nous mettons devant vous pour considération.
Le principe n° 4: le principe n° 4, nous l'appelons solidarité et leadership. La solidarité. On nous parle toujours que le Québec est un pays solidaire. Solidaire avec qui? Avec ceux qui en ont le moins, les pays en développement les plus pauvres et les plus menacés par les changements climatiques. Sur le plan du leadership, le Québec voudrait être un leader dans ce domaine; on l'entend très souvent dans diverses interventions gouvernementales. C'est très bien, et nous appuyons cette volonté de leadership, mais il faut, pour être un leader, il faut au moins, dans son propre terrain, respecter le minimum qui est demandé par la communauté internationale, par les... Donc ça, c'est... Cette première partie de notre exposé, c'est donc la cible, c'est... nous proposons, encore une fois, un minimum de moins 25 %.
Le deuxième sujet qui est très lié à cela, c'est l'achat des crédits sur le plan international. Selon la coalition QuébecKyoto, la cible de réduction des émissions de gaz à effet de serre du Québec à l'horizon 2020 devrait être complètement atteinte par les réductions effectuées au Québec pour les raisons suivantes... Nous l'avons expliqué dans le mémoire. Cette réduction, ce n'est pas seulement pour montrer qu'on est un bon élève sur le plan international, mais surtout de profiter de cette réduction pour modifier les comportements de la société québécoise dans son ensemble.
Si on achète, admettons... Prenons un cas extrême. Ce n'est pas le cas extrême qui est proposé dans le document, mais prenons le cas extrême: si on achète tous les crédits à l'étranger au prix, je crois que vous nous avez dit, de 30 $ la tonne, admettons qu'on fait ça, alors ça, on aura atteint donc l'objectif et en payant environ 60 millions de dollars par an à titre d'importation des crédits. On importe, au fond, des crédits. Mais, si on fait ça, rien, rien n'aura changé: on fera toujours la même chose ici. La pollution qu'on génère, les gaz à effet de serre qu'on génère vont rester toujours les mêmes, donc on n'aura rien atteint. Ça, c'est une des raisons pour lesquelles il faudrait que tout se fasse sur place pour provoquer une modification du comportement.
D'autre part, il n'est pas certain...
n(17 h 10)nLe Président (M. Ouellette): Je vais vous faire conclure, M. Welt, je vais vous faire conclure; vos 10 minutes sont assez avancées. C'est que... En conclusion. Et je suis sûr que soit la ministre ou le porte-parole de l'opposition officielle vous permettront de compléter les choses que vous ne nous auriez pas mentionnées sur votre mémoire.
M. Welt (Thomas): Vous voulez que j'arrête?
Le Président (M. Ouellette): Je veux que vous... Oui, je voudrais que... En conclusion, là, je vous donnerais 30 secondes pour faire la conclusion de votre...
M. Welt (Thomas): Bon. Bon, bien, écoutez, la conclusion est très simple:
1° la cible doit être telle qu'on l'a exposée;
2° cette cible doit être atteinte uniquement par les réductions au Québec; et
3° pour les détails de ce qu'il faut faire, j'ai ici toute une description, mais je n'ai pas le temps de vous l'expliquer, mais nous voudrions surtout que le gouvernement institue une consultation sous forme de groupe de travail, qui a été déjà faite il y a de cela, je crois, une dizaine d'années, et qu'on devrait refaire pour voir quels sont vraiment les détails de cette réduction, quelle réduction il faudrait faire dans divers domaines. Donc, dans le fond, ce sont en gros les trois propositions.
Le Président (M. Ouellette): Merci, M. Welt. Et puis je m'excuse encore de vous bousculer; je veux permettre aux parlementaires d'avoir un échange des plus constructifs avec vous. Et, comme je vous ai mentionné, sûrement qu'on pourra vous faire... vous permettre de terminer votre... les choses de votre mémoire. Mme la ministre, à vous la parole.
Mme Beauchamp: Merci beaucoup, M. le Président. Je veux vous souhaiter la bienvenue, Mme Lambert-Ferry, M. Burcombe, M. Bélisle et M. Simard. Et des salutations toutes particulières à M. Welt.
M. Welt, ça ne nous rajeunit pas, là, mais, il y a 17 ans, on travaillait notre premier... premier dossier environnemental ensemble, c'était sur la qualité de l'air dans l'est de l'île de Montréal. Mais, il y a 17 ans, je ne vous aurais pas cru si vous m'aviez dit qu'on se retrouverait au salon rouge de l'Assemblée nationale. Ça fait que ça me fait très, très, très plaisir de vous accueillir.
Et je prends le temps, d'entrée de jeu, de vous dire que j'accueille avec beaucoup de respect votre recommandation que le Québec adopte une cible à moins 25 % de ses émissions en 2020, avec l'année de référence 1990. Et, pour témoigner du respect avec lequel j'accueille votre recommandation, je veux prendre le temps d'avoir, avec vous et les personnes qui jugeront bon de prendre la parole, d'avoir un échange de fond ? je vais dire ça comme ça ? sur l'enjeu relié à l'effort que le Québec devrait faire sur d'autres territoires que le sien. Donc, votre recommandation, dans votre mémoire, où vous dites, vous: C'est moins 25 %, et le Québec, vous dites carrément, ne doit pas envisager l'achat de crédits d'émission sur des marchés internationaux... Et, en page 6 de votre mémoire, vous faites allusion en... C'est-u en page 6? Non. Page 12, pardonnez-moi. Vous faites référence au fait que les mécanismes de développement propre... D'ailleurs, avec l'expert qui vous a précédés, on a eu des échanges là-dessus. Vous dites: Bien, ce n'est pas certain qu'ils seront reconduits, et donc faisons en sorte que le Québec fasse l'ensemble des réductions sur son propre territoire.
Moi, c'est une question qui m'interpelle vraiment beaucoup parce que ? puis c'est là que je veux commencer à avoir vos commentaires ? quand je regarde les États à travers le monde qui ont adopté les cibles les plus ambitieuses... Prenons l'exemple de la Suède, qui a endossé une cible de moins 40 %. La Suède, dans sa cible, elle, c'est très clair: le tiers de cet effort... ses prévisions, c'est que le tiers de ses efforts vont être faits sur d'autres territoires que le territoire suédois.
Si je prends le projet de loi américain Waxman-Markey et si je le prends englobant tout, là, donc, quand on dit qu'il est aux alentours de moins 18 % comme effort pour 2020, avec l'année de référence 1990, ça comprend nommément, c'est écrit, des efforts faits sur d'autres territoires, ça comprend même la participation des États-Unis dans des efforts de lutte à la déforestation, qui peuvent se faire sur d'autres territoires que le territoire américain. Là, le projet de loi, il est tellement complexe que c'est difficile d'arriver à un chiffre précis, mais nos experts estiment que c'est presque 50 % de l'effort du 18 % américain qui serait fait sur d'autres territoires que le territoire américain.
En tout cas, je vous donne ces deux exemples-là, l'exemple de l'État qui, depuis le plus longtemps, a pris une cible très ambitieuse, la Suède, ou encore le voisin américain, en disant: Quand on parle donc de cibles à cette hauteur-là, habituellement, il y a toujours un pourcentage dont l'effort est relié à l'utilisation des mécanismes de développement propre ou réalisés sur d'autres territoires. Personnellement, je ne connais pas d'exemple ? puis peut-être vous allez être capables de m'en donner ? je ne connais pas d'exemple donc d'effort à hauteur de moins 25 % qui ne comprend pas de recours aux mécanismes de développement propre, et c'est pour ça que ça m'interpelle, ça m'interpelle beaucoup. Et, en toute transparence, vous le savez, dans notre modélisation, donc, quand on en arrive à une cible comme de moins 20 %, c'est... chez nous, on estime que c'est le quart de l'effort qui pourrait être réalisé sur d'autres territoires que le territoire québécois.
Donc, je veux vous entendre sur le fait que vous disiez, moins 25 %, mais en plus avec le fait de dire que tout l'effort doit être fait sur le territoire québécois. Comment vous voyez ça, dans une perspective économique? Et à quoi c'est comparable en ce moment, par rapport aux engagements pris par d'autres États à travers le monde?
Le Président (M. Ouellette): M. Welt...
Une voix: ...
Le Président (M. Ouellette): M. Burcombe. C'est possible de vous identifier, pour les besoins de l'audio? Et je vous laisse la parole après.
n(17 h 20)nM. Burcombe (John): Oui, c'est John Burcombe, du Mouvement Au Courant.
C'est qu'on reconnaît tous que le secteur qui doit attaquer, c'est le secteur du transport, et c'est là qu'est l'utilisation la plus forte des carburants fossiles. Et je ne sais pas si vous êtes au courant du livre de M. Pierre Langlois, qui fait une estimation de ce qu'on peut faire dans le secteur du transport. Peut-être, on ne peut pas tout faire là, mais c'est que, pour lui, vers les années 2020, 2025, si on ne perfecte pas les voitures hybrides en particulier... Tous les moyens de transport routier, s'ils peuvent être convertis en systèmes hybrides, il y aura une tellement grande réduction de consommation que c'est possible que ce qui reste de l'utilisation de carburants fossiles pour les véhicules routiers pourrait même être alimenté par les biocarburants, biocarburants de deuxième, troisième génération, de sorte que, sa thèse... C'est dans le titre du livre: Rouler sans pétrole. Alors, pour lui, c'est tout à fait possible, et dans un horizon de 2020, 2030. Alors, je ne sais pas si le gouvernement... si vous avez pris connaissance de sa thèse, si vous avez regardé ça. Je recommande que vous le faites. Mais je ne sais pas jusqu'à quel point ça va venir à combler le 25 %, je ne peux pas... on ne peut pas tout faire avec ça, mais ça, c'est un grand pas dans la bonne direction.
Le Président (M. Ouellette): Mme la ministre... Woups! O.K. Monsieur...
Mme Beauchamp: On va... Moi, j'ai beaucoup de questions, ça fait qu'on va se...
M. Bélisle (André): ...
Mme Beauchamp: C'est ça. Je vous écoute. Je vais essayer d'être plus courte et...
M. Bélisle (André): O.K.
Le Président (M. Ouellette): Vous identifier, M. Bélisle, avant, pour les besoins de l'audio.
M. Bélisle (André): Oui. André Bélisle, de l'AQLPA et porte-parole de QuébecKyoto.
Alors, peut-être juste sur une question de principe, Mme la ministre. Alors, vous nous demandez de nous comparer au reste du monde, mais je pense qu'il faut voir qu'on est aussi presque uniques dans le monde, donc on ne peut pas se comparer aussi simplement. Et je pense qu'on doit aussi regarder avec une attitude audacieuse, qui était l'essence même du Québec dans les années soixante-dix, qu'est-ce qu'on peut faire de mieux. Et à partir de là il s'ouvre un univers qu'on n'a presque pas commencé à regarder.
Mon collègue John parlait, dans le secteur des transports... Il y a énormément à faire au Québec dans le domaine des transports, mais il y a aussi plein d'autres domaines. Je glisserais juste, comme ça, la géothermie, pour laquelle on n'a à peu près rien fait encore, qui pourrait nous permettre de libérer beaucoup, beaucoup, beaucoup d'énergie, non seulement en termes de combustible fossile, mais même d'hydroélectricité propre. Et il y a plein d'avenues comme ça... bien, en fait, «plein», disons... Il n'y en a pas des centaines, là, mais il y a plusieurs avenues importantes qui n'ont pas été considérées vraiment, qui ont été tout simplement comme discartées dès le départ.
Bien, le succès, c'est l'enfant de l'audace, et là on a fait le contraire. Alors, moi, je vous invite, Mme la ministre, à ce qu'on regarde des avenues qui ont été négligées et qui sont très prometteuses.
Le Président (M. Ouellette): Je permettrais à M. Simard de compléter.
M. Simard (Christian): Oui, juste pour les... sur les autres pays ou sur l'exemple, même si la Suède fixe à 40 % puis dit: Le tiers, je vais y aller à l'extérieur, ça lui fait quand même un objectif domestique de 27 %, là. Là, nous, on a un objectif domestique de 20 % dans le document, et là-dessus on se dit: Le quart à l'extérieur. Puis il y a aussi des nuances importantes, je pense, à accorder entre crédits d'émission puis mécanismes de développement propre, et on ne saurait pas trop où on s'en va dans les mécanismes de... Mais l'achat de crédits d'émissions, c'est la voie quand même qui serait la plus paresseuse, entre guillemets, là. Acheter des crédits d'émissions, ça n'amène pas de véritable réduction. Et, compte tenu que, nous, on recommande 25 % de réduction ? et on pourrait aller jusqu'à 40 %, parce qu'on dit «une fourchette entre 25 % et 40 %» ? on pense que le Québec est capable de le faire essentiellement de façon domestique, son 25 %, et à ce moment-là il se compare à l'effort suédois, là, qui est 27 % domestique et 13 %, qui est le tiers de 40 %, là, à l'extérieur. Donc, il y a certainement une grande possibilité. Et ça ne veut pas dire de ne pas aider au niveau exportations technologiques ou des projets au niveau... mais, dans l'objectif qu'on poursuit, de le faire essentiellement au niveau domestique, on en est capables, on a la possibilité, ça va nous donner des avantages de le faire. C'est pour ça qu'on en fait la proposition.
Le Président (M. Ouellette): Mme la ministre.
Mme Beauchamp: Si donc on retient votre proposition, il faut admettre qu'à ce moment-là les modèles de répartition économique que contient le document qui, lui, propose qu'il y ait une part d'achat... une part de l'effort fait à l'étranger, il faut donc admettre que les répercussions ne peuvent pas être les mêmes. Ce que je veux dire par là, c'est que le modèle endossé par plusieurs États qui ont des cibles ambitieuses mais qui disent: Une part de l'effort doit être faite sur d'autres territoires, à partir de mécanismes qui quand même sont contenus... jusqu'à maintenant ont été endossés par la communauté internationale, les mécanismes de développement propre, un principe endossé depuis... depuis assez longtemps, depuis Rio, si je ne me trompe pas, je pense que c'est là que ça a été endossé comme principe, donc, nous... Puis c'est pour ça que je disais: Ça prend une discussion de fond, parce que, nous, donc, on a dit: C'est un principe qui était reconnu par la communauté internationale. À ma connaissance, si je comprends bien... Puis c'est là, dans le fond, que je veux vous entendre. Vous dites: Il faut...
Donc, j'ai deux questions. Je vais essayer d'être claire, il commence à être tard. J'ai deux questions. Vous dites: Dans le fond, il faudrait plus, sous forme de soutien international, là, donner les technologies vertes aux pays en voie de développement. Est-ce qu'à travers un commentaire comme ça, dans votre document, il faut voir que, comme position, vous croyez qu'un prochain traité international pourrait ne pas faire référence à des mécanismes de développement propre?
Puis mon autre question, c'est: Donc, si je dis que tout l'effort doit être fait sur le territoire québécois, il y a une réalité incontournable, c'est que le coût marginal de la dernière tonne évitée... réduite sur le territoire québécois devient plus cher que dans le modèle que contient, là, la proposition où on dit que le quart de l'effort, quand on prend la cible de moins 20 %, que le quart de l'effort pourrait être fait sur d'autres territoires.
La semaine passée, quand on a débuté nos consultations, ça m'a permis de donner un éclairage, là, que je veux répéter ici. Quand on dit: Le quart de l'effort, c'est qu'on a estimé que, quand le coût marginal de la tonne qui est réduite, quand le coût dépasse 30 $ la tonne, on estimait qu'on pouvait aller sur d'autres... d'autres marchés. Et, si on faisait tout l'effort sur le territoire québécois, les estimations d'économistes, là... je ne suis pas une économiste, là, mais les estimations que l'on m'a fournies disent que le coût marginal de la dernière tonne va se situer entre 150 $ et 200 $ la tonne de réduction. Donc, une fois que je prends votre recommandation de dire: C'est à moins 25 %, et tout l'effort fait sur le territoire québécois, on doit refaire l'impact économique, on ne peut pas considérer qu'il va rester le même, là, que les scénarios montrés, par rapport à l'impact sur le produit intérieur brut, les emplois, etc.
Donc, je voulais juste voir si on avait la même vue, d'un point de vue économique, que c'est sûr, un peu comme donc la Suède le prévoit, et tout ça, que le coût marginal de la dernière tonne, si je fais tout ça sur le territoire domestique, il devient beaucoup plus élevé et a son impact économique par rapport à ce qu'une partie de l'effort soit fait sur d'autres territoires. Donc, ma question est une question sur le principe même, par rapport à un futur traité international, le principe même du Mécanisme de développement propre, si vous y êtes favorables ou pas. Puis ensuite une question sur: Est-ce qu'on est d'accord pour dire, bien, que la modélisation change complètement puis qu'on ne peut pas parler d'un... nécessairement d'un impact économique marginal, là, sur le Québec, avec un tel scénario?
Le Président (M. Ouellette): M. Welt.
n(17 h 30)nM. Welt (Thomas): Je vais répondre sur l'aspect de coût marginal. Il faudrait savoir qu'est-ce qu'on veut vraiment faire. Veut-on changer les comportements et, à long terme, décarboniser la société, ou est-ce que tout se réduit au coût? Si on dit que, quand on dépasse les 20 % avec un quart sur les marchés internationaux, ça nous coûte seulement 30 $ et que les 30 $, c'est la limite, à ce moment-là l'objectif fondamental n'est pas atteint. Un jour ou l'autre, il faudra aller plus loin, on ne va pas rester là. Plus vite on y va, mieux ça vaudra.
Donc, je pense que, même si le coût marginal, dans votre calcul, ça, c'est une chose à revoir ? ça dépend évidemment qu'est-ce qu'on fait exactement ? je pense qu'il faut voir à long terme, il faut un jour ou l'autre aller plus loin que les 20 % et importer des crédits. Je pense que ça, cette conception qu'il faut absolument s'en tenir à 30 $ sinon c'est la catastrophe, je ne pense pas que c'est, du moins à mon avis, la manière d'avancer, parce qu'il faudra avancer au-delà de cela, il n'y a pas moyen d'y rester.
La proposition du GIEC est 50 % en 2050, donc il faudra aller beaucoup, beaucoup plus loin. Plus vite on fera les changements sur place, mieux ça vaudra. Et, de toute façon, même si le coût marginal est de 150 $, ce sera uniquement sur une très faible portion. Ça ne changera pas fondamentalement les chiffres macro-économiques. Je ne sais pas, nous ne les avons pas vus, quelqu'un a peut-être fait la simulation, mais je ne pense pas qu'une augmentation de ce type-là, qu'on propose, aura un impact considérable. Et je reviens à ce que j'ai dit sur le principe n° 3: il faut croire que la décarbonisation amènera des grands bénéfices au Québec, qui seront beaucoup plus considérables que ce qu'on paiera donc pour le coût marginal.
Et finalement c'est un des reproches ? ce n'est peut-être pas les mots, enfin ? qu'il n'y a pas, dans les documents qu'on a proposés, des calculs, des simulations sur les avantages. Combien, en faisant des hypothèses, certaines hypothèses, par exemple, une diminution de l'importation du pétrole ou l'émergence d'une industrie verte quelque part en Gaspésie? Ce sont juste des exemples qu'on pourrait concevoir. Il faudrait aussi faire des simulations du côté positif. Et il se peut que, dans ces conditions, si on fait tout ça, peut-être que le coût marginal n'est pas du tout plus grand, peut-être même il est nettement inférieur. Je ne sais pas si ça vous a convaincus, mais enfin j'ai essayé.
Le Président (M. Ouellette): Mme Ferry, vous vouliez rajouter. Vous vous identifiez avant, pour les besoins de l'audio.
Mme Lambert-Ferry (Virginie): Virginie Lambert-Ferry, de Greenpeace Québec, responsable de la campagne Climat-Énergie.
C'est juste pour rajouter, par rapport à ce que Thomas disait, et puis peut-être que mes collègues pourront vous répondre sur la question des mécanismes de développement propre précisément. Effectivement, ce document qui a beaucoup d'intérêt a aussi celui de ne pas modéliser malheureusement les impacts bénéfiques. Et je pense que c'est très important, puis je vais le redire, Thomas Welt vient de le dire, c'est important. On nous présente un document dans lequel on modélise le coût économique, le fardeau économique, mais la question des avantages, des bénéfices, n'a pas été modélisée. C'est un peu dommage, aujourd'hui, d'être devant un scénario comme celui-là.
Donc, c'est important de... là-dessus puis sur la question du coût marginal évidemment, ça va avec. Effectivement, peut-être que dans vos calculs le coût marginal sur la tonne de carbone augmente, mais les avantages n'ont pas été modélisés, donc on peut toujours parler en termes purement économiques. Et par ailleurs, dans votre document, l'impact sur les finances publiques ? c'est écrit ? est neutre ou positif. Donc, voilà. C'est juste pour répéter sur ce sujet-là parce que c'est important.
Le Président (M. Ouellette): Comme il ne reste que trois minutes à Mme la ministre pour compléter la partie ministérielle, je vais lui permettre...
Mme Beauchamp: Oui, bien... En fait, c'est parce que, c'est ça, il est neutre ou positif avec le scénario où on achète le quart de l'effort environ à 30 $ la tonne et non pas à 150 $ la tonne. Dans un scénario de moins 20 %, j'ai 16 Mt à réduire, c'est 4,4 Mt, c'est peut-être la différence entre payer 30 $ la tonne ou payer 150 $ la tonne. C'est quand même quelque chose d'assez majeur.
Et juste voir, peut-être qu'on n'a pas lu le document de la même façon, quand vous dites «modéliser les impacts positifs», la modélisation, on la décrit via la notion de développer les technologies vertes, il y a la notion de substituer le mazout par l'électricité et la géothermie, il y a soutenir l'économie québécoise, donc éviter que l'impact soit trop fort sur les ménages québécois. Donc, vous le voyez, dans la modélisation, on prend compte de cela, et d'ailleurs ça explique pourquoi, effectivement, sur le PIB, l'effet est plutôt marginal. C'est parce qu'on tient compte de l'impact du développement des technologies vertes, du remplacement du mazout, etc., je voulais juste prendre le temps de le préciser, sinon on n'arriverait pas avec ce type de résultat comme impact sur le PIB.
Il reste peu de temps et je veux vous entendre sur une autre question importante. J'aurais eu plein de questions, mais c'est... Vous avez, dans votre mémoire, un commentaire en page 15 où vous dites: On devrait bonifier substantiellement le système de redevances, et je pense qu'on le voit bien dans le document, là, qu'on passe d'environ, je le dis de mémoire, là, mais de scénarios où on ramasse, grâce à l'augmentation de la redevance, c'est le système de «cap-and-trade», excusez l'anglicisme, mais on passe de 4,2 milliards à 15,3 milliards de dollars ramassés dans l'économie québécoise et réinjectés de différentes façons. Mais vous ajoutez: «ou le convertir en système de taxe sur le carbone», et je veux vous entendre sur, dans le fond, l'importance que vous accordez à cette question.
Est-ce que vous nous recommandez la taxe sur le carbone? Quelle est l'importance que vous accordez au fait qu'il y a un reflet sur le prix, en fait? C'est un peu ça, l'objet de ma question. Une redevance, on sait qu'en partie il y a un reflet sur le prix à la pompe. Et est-ce que vous voyez un avantage vraiment à parler d'une taxe sur le carbone plutôt que le système de redevances qu'on a au Québec?
Le Président (M. Ouellette): En une minute. Qui va prendre la réponse? M. Simard, vous prenez la réponse?
M. Simard (Christian): On n'a pas de préjugé protaxe, là. Ce n'est pas la... Je pense qu'on a un ensemble d'instruments économiques les plus efficaces possible, que ce soient des incitatifs, des désincitatifs, redevances ou éventuellement, dans certains cas, taxes. Là, je pense qu'il faut être le plus efficient possible en termes de gestion et le plus efficient en termes de résultats. Donc, on n'a pas...
Si on a dit dans... C'est, par exemple, parce que c'est des façons de faire, mais il faut quand même qu'il y ait un juste prix pour inciter à des comportements différents. Donc, il faut qu'il y ait des justes prix, à un moment donné, à l'énergie, il faut qu'on puisse aussi recueillir de l'argent.
Dans un esprit global, quand on parle, dans le document, de modélisation, plus globalement, le rapport Stern disait: Pour un coût estimé pour régler la question à un niveau... à l'échelle internationale, qui pourrait être jusqu'à 1 % du PIB, pour lutter contre les changements climatiques, on va éviter des coûts au PIB de destruction de milieux naturels, pertes de production agricole, pertes de productivité des écosystèmes jusqu'à l'équivalent de 20 points de PIB.
Donc, il est extrêmement important, si on parle... je reviens un peu sur la question précédente, au niveau de modélisation, que le document modélise aussi le coût énorme de ne pas agir, pour la société québécoise. Par exemple, on parle de réduction de 25 % du débit d'eau dans le Saint-Laurent. Là, ce n'est pas anodin, en termes de coûts sur la navigation, de coûts sur l'environnement et la pollution. Si on revient aux instruments de type économique, on pense qu'il peut y avoir une panoplie de... On ne s'est pas prononcés contre les redevances, mais il faut qu'ils soient suffisants pour permettre d'atteindre l'objectif qui, selon nous, devrait être de 25 % en termes d'incitatifs.
Mme Beauchamp: M. le Président.
Le Président (M. Ouellette): Mme la ministre, c'est...
Mme Beauchamp: Bien, en terminant, j'ai un petit peu de difficultés, honnêtement, à bien comprendre votre réponse puis à l'interpréter. Vous semblez dire... Vous avez répondu: On n'est pas protaxes; puis, après ça, vous prenez le temps de dire: Bien, on n'est pas contre nécessairement la redevance.
Ma question est fondamentale: Est-ce que vous croyez, pour atteindre l'objectif que vous nous demandez d'endosser, de moins 25 % fait entièrement sur le territoire québécois, est-ce que vous pensez que l'effort doit se refléter dans le prix de l'essence à la pompe ou pas?
M. Simard (Christian): Il faut qu'il se reflète, je pense, sur le prix du carbone en général dont... C'est clair. Je pense qu'au niveau... Je pense que de parler de redevances... Vous savez, on peut jouer avec... puis il peut y avoir beaucoup de populisme là-dedans, puis c'est toujours dangereux. Je me souviens, puis là je parle...
Le Président (M. Ouellette): On va vous demander de conclure, M. Simard, parce que je veux donner la...
M. Simard (Christian): Oui, oui. Je comprends. Mais, très rapidement, là, c'est sûr, à un moment donné, qu'on doit faire l'effort. Puis, si on veut se débarrasser de l'énergie fossile au Québec puis encourager l'électrification, il faut trouver des revenus, puis il faut décourager l'utilisation du carbone sous toutes ses formes.
Donc, de dire: Est-ce que ça veut dire, à la pompe, une taxe à la pompe ou une redevance qui doit se refléter à la pompe? Bien sûr que ça va se refléter à la pompe quelque part, là. C'est sûr que ça va se refléter à la pompe quelque part, que ce soit redevances ou taxes. Mais il y a d'autres éléments, il y a des façons d'encourager avec ces revenus-là pour... Vous l'avez d'écrit dans le document.
Le Président (M. Ouellette): Merci, M. Simard. Déjà, j'ai abusé de la bonté de l'opposition officielle qui nous a permis que vous rendiez cette réponse, M. Simard. Je laisse la parole au député de L'Assomption.
n(17 h 40)nM. McKay: Oui. Merci, M. le Président. Bien, bonjour, tout le monde, et je vous remercie d'avoir... et je vous félicite d'avoir pris le temps et d'avoir fait l'effort de vous regrouper comme ça. Bien, dans le fond, c'est probablement tout naturel pour vous, puisque vous oeuvrez déjà depuis un petit bout de temps ensemble, là, au sein de la coalition QuébecKyoto ? et je sais que certains des intervenants vont revenir aussi ? mais il y a toujours un effort particulier qu'on doit faire lorsqu'on doit s'entendre sur un document commun, et je vous félicite donc d'avoir fait cet effort-là.
Bien, peut-être on pourra continuer un petit peu sur les sujets qui n'ont pas pu être abordés suffisamment, là, dans votre présentation, mais quand même, comme commentaire général, je mentionnerais que, bon, lorsque vous parlez d'un objectif de moins 25 %, et qui est donc le minimum, là, dans la brochette qui fait l'objet du consensus scientifique international de moins 25 % à moins 40 %, donc vous êtes quand même dans la partie la plus basse, là, et j'imagine que ça tient compte du fait que le Québec a effectivement déjà fait des efforts. mais lorsque...
Comme commentaire général, moi, je vous dirais: Effectivement, comme ce moins 25 % là n'a pas été modélisé, bien, on peut poser beaucoup de questions. Le fait est que, à moins que la ministre, elle, ait eu accès à ces chiffres-là, bien, le fait est qu'on peut bien poser des questions, ce sont des questions qui vont rester dans l'air, puisque nous n'avons pas les outils pour effectivement mesurer ou jauger quel serait l'impact économique au Québec, puisqu'on s'aperçoit qu'à moins 20 % il y a un effet à peu près neutre, hein? Donc, on voit qu'il n'y en a pas, d'impact.
Alors, jusqu'où on pourrait monter avant qu'il y en ait un? Ça demeure une énigme pour l'instant. Donc, je pense qu'un des points où notre commission devrait... sur lequel notre commission devrait se pencher pour la suite des événements serait probablement justement de pousser l'analyse un petit peu plus loin. Et, à ce titre-là, moi, je pense que votre recommandation, pour qu'on puisse poursuivre le travail avec des... bon, sur le plan d'action donc qui va dépasser 2012, le plan d'action, le plan de réduction de gaz à effet de serre du Québec, qu'on puisse poursuivre ça en consultation par groupes de travail. Et, sur ce point de vue là, j'aimerais ça que vous m'expliquiez, que vous nous expliquiez davantage ce que vous entrevoyez, là, comme consultation par groupes de travail.
Et je pense que vous semblez vous référer à une expérience qui a eu lieu dans le passé. Je crois, moi aussi, avoir vu des documents qui ont été pondus par certains groupes de travail, notamment le groupe de travail sur les transports, mais qui n'ont jamais été rendus publics, là, qui n'ont jamais trouvé de finalité.
Le Président (M. Ouellette): M. Bélisle, vous avez la réponse?
M. Bélisle (André): Oui. En 1997-1998, le Québec a convié beaucoup d'organisations de toute vocation ? que ce soient des groupes écolos, des groupes qui venaient de secteurs industriels, secteurs économiques ? à produire un premier jet, si on veut, de mesures, d'initiatives qui pourraient être mises en oeuvre pour atteindre des objectifs le plus efficacement possible mais en même temps audacieux. Et l'AQLPA a participé. Il y avait 11 tables, on a participé aux 11 tables, on n'était pas les seuls, là, il y a d'autres groupes qui ont participé. Curieusement, je n'ai jamais compris encore pourquoi, tout ce travail-là est disparu, oups, éliminé, et ce n'est pas parce qu'on a changé de gouvernement ? parce que c'est arrivé sous le gouvernement précédent ? que tout ça est comme disparu.
Par contre, certains d'entre nous en ont gardé des copies, et il y a encore là-dedans plein de mesures qui pourraient être évaluées et qui pourraient servir à redémarrer une consultation ou une réflexion nous amenant peut-être à actualiser nos connaissances. Parce qu'il y a bien des choses qui se sont passées, depuis 1998; même si ça semble très court, il y a bien des affaires qui se sont passées. Alors, reprendre un processus semblable en accéléré par rapport à l'après-Kyoto, certainement, pourrait nous permettre d'identifier de nouvelles mesures, de réaliser que le contexte a changé et qu'il y a beaucoup de possibilités encore devant nous que, malheureusement, par la force des habitudes, on a tout simplement mises de côté il y a longtemps, et on n'est pas revenus là-dessus.
Alors, pour moi, je pense qu'il y a beaucoup de possibilités à faire évoluer notre pensée et nos connaissances encore. Et, comme on parle de l'objectif après 2012, bien c'est le temps de commencer, et cette réflexion-là, quant à moi, pourrait nous surprendre.
Le Président (M. Ouellette): M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Bien, suite à ce que vous venez de dire, je me demande: Est-ce qu'il y aurait moyen de déposer aux membres de la commission un des documents auxquels vous faites référence, là, les tables de discussion?
M. Bélisle (André): Certainement qu'on...
Le Président (M. Ouellette): M. Bélisle.
M. Bélisle (André): Excusez, M. le Président, des fois, quand je sors du bois, je suis un peu moins protocolaire. Voilà. Oui, avec grand plaisir. Par contre, je sais qu'à l'AQLPA on en a cinq, des 11 tables, mais, si je vérifiais avec les autres groupes... Parce que je sais que chez Stop on en a gardé beaucoup aussi. On pourrait probablement reconstituer le tout. Mais un des administrateurs de l'AQLPA, qui était responsable de ces tables-là, peut aussi nous aider beaucoup. C'était l'ancien responsable au ministère de l'Environnement à l'époque. Donc, je pense qu'on pourrait reconstituer l'affaire assez bien.
Le Président (M. Ouellette): Merci, M. Bélisle. Surtout que vous avez l'habitude des commissions parlementaires. M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Oui. C'est une bonne habitude, hein?
Le Président (M. Ouellette): Oui.
M. McKay: Oui. Bien, peut-être qu'on pourrait aussi adresser... bien là, ce n'est pas une période pour adresser des questions à la ministre, là, mais peut-être que la ministre pourrait voir si c'est possible de remettre la main sur ces travaux-là, parce que je pense qu'il y a une demande qui a été faite par la loi d'accès à l'information dans le cadre des travaux de la Régie de l'énergie, puis je pense que ça n'avait pas nécessairement porté fruit. Mais peut-être que, si ça vient de l'intérieur du ministère, on ne sait jamais, peut-être qu'on pourra retrouver trace de ces documents-là. Vous nous avez parlé de...
M. Welt (Thomas): ...
Le Président (M. Ouellette): Ne bougez pas. M. Welt, je m'excuse, c'est parce que je veux permettre au député de L'Assomption... Vous aurez sûrement l'opportunité de compléter.
M. Welt (Thomas): C'était au sujet de ce qui a été dit précédemment.
Le Président (M. Ouellette): Ah! Si monsieur...
M. McKay: Bien oui, certainement.
Le Président (M. Ouellette): Bon, bien, en complément, M. le député de L'Assomption vous permet de compléter la réponse de M. Bélisle.
M. Welt (Thomas): Je remercie le député de L'Assomption. Je pense qu'il faudrait, dès à présent, comme on le dit dans le mémoire, que les ministères de l'Environnement et du Développement durable, dès à présent, tâchent de formuler un plan d'action sur la période 2013-2020, un plan d'action similaire qu'on a fait sur la période 2006-2012. Et, à l'occasion de ces travaux, il faudra alors à ce moment-là faire aussi une consultation sous forme de groupes de travail peut-être similaire à celle qui a été faite il y a environ 10 ans. Et là on pourrait voir quelles sont les mesures les plus appropriées pour la diminution. Mais on pourrait aussi peut-être également voir quelles sont les mesures ou quels sont les bénéfices qu'on peut obtenir de manière raisonnable par la réduction des gaz à effet de serre. On pourrait donc faire peut-être l'aspect négatif et l'aspect positif du processus qui seraient la base peut-être d'un nouveau plan d'action 2013-2020.
Le Président (M. Ouellette): M. le député de L'Assomption.
n(17 h 50)nM. McKay: Oui. Bien, j'ai bien fait de vous laisser continuer parce que vous m'avez amené justement un peu à mon prochain sujet, parce que, lorsqu'on dit que la modélisation qui a été faite n'évalue pas les bénéfices, on aura compris avec notamment les interventions de la ministre qu'effectivement le modèle qui a été utilisé intègre des impacts positifs mais intègre des impacts positifs par rapport à un certain nombre de postulats que le gouvernement a posés. Et donc il y a un certain scénario qui a été établi, et donc on répond à un certain nombre, bon, de conditions. On a mentionné déjà: il y avait le prix du baril de pétrole. Donc, quelle est la sensibilité du modèle par rapport à l'évolution du prix du pétrole? Bien, ce sont probablement des choses qu'on pourrait examiner plus à fond dans le futur.
Mais je voulais mentionner que, même s'il y a de la rétroaction positive dans le modèle, il n'y a pas de... l'exercice n'a pas permis d'établir de scénario alternatif notamment, bon, bien, si on montait tout un scénario autour d'éliminer la dépendance au pétrole pour un certain objectif de temps, bon, on arriverait possiblement à toute une série de mesures et d'impacts, et tout ça, qui seraient significativement différents du modèle qu'on a établi là.
Donc, moi, je me demandais si vous partagez un peu cette idée-là que, finalement, il serait peut-être important dans le cadre de l'établissement d'un prochain plan d'action, et de le prendre en compte déjà, que le gouvernement le prenne en compte déjà suite aux audiences publiques, qu'on s'achemine vers un objectif un peu plus ambitieux que ce qu'il y a ici, tout en prenant acte du fait que ça va probablement demander justement qu'on développe des alternatives dans des domaines où, comme M. Bélisle le disait tout à l'heure, il y a tout un nouveau monde peut-être qui s'ouvrirait à nous, là, qui n'est pas le monde de tout ce qu'on connaît déjà puis qu'on est capables de modéliser mais le monde de ce qui a commencé à s'établir et ce qui s'en vient.
Le Président (M. Ouellette): M. Welt.
M. McKay: Point d'interrogation.
M. Welt (Thomas): Non, non, mais je suis... Je pense que je peux parler ici au nom de tous les organismes qui sont à cette table. Non, non, votre proposition est tout à fait non seulement acceptable, mais très utile à l'avancement de toute cette action. Donc, au fond, je pense que nous sommes certainement pour ça. Donc, je peux par contre résumer qu'on va faire, pour bien comprendre... on pourrait attaquer, dès à présent, la formulation d'un plan d'action 2013-2020 et, à ce titre, on pourra aussi créer des groupes de travail qui vont actualiser et apporter plein de nouvelles actions qui ont déjà été évaluées, il y a 10 ans de cela, et on pourra aussi analyser quels sont les avantages, bénéfices qu'on pourrait tirer d'une lutte ambitieuse aux changements climatiques. Est-ce que c'est bien? Nous nous comprenons, donc nous sommes tout à fait d'accord avec une telle approche.
Le Président (M. Ouellette): M. Bélisle voulait rajouter, M. le député de L'Assomption. M. Bélisle, en complément d'information.
M. Bélisle (André): Bien, juste porter à votre attention quelque chose qu'on mène de ce temps-là à l'AQLPA et qui est comparable, et peut-être qu'on pourrait s'en inspirer. Nous, on a toujours cru que, si on s'adressait aux gens, M. et Mme Tout-le-monde, et qu'on les conviait à une consultation où leur idée serait bienvenue, qu'on pourrait trouver toutes sortes de trucs et de choses intéressantes et, en même temps, on pourrait sécuriser la participation des gens dans la mise... bien, l'identification de mesures et dans la mise en oeuvre de ces mesures-là. Et ça ne trompe pas.
On a recommencé à faire ça dans le cadre du Chantier québécois en efficacité énergétique. On est à la deuxième municipalité où on est allés et, à toutes les fois, on apprend par M. et Mme N'importe-qui, illustre inconnu, des petits trucs qui permettent de faire de grands pas en avant. Alors, c'est dans ce sens-là qu'une consultation large pourrait certainement servir de base solide sur laquelle on peut bâtir un plan qui va permettre d'aller au-delà de ce qu'on a retenu pour le moment.
Le Président (M. Ouellette): Je vois le sourire du député de L'Assomption. Sûrement qu'il apprécie votre réponse. M. le député de L'Assomption.
M. McKay: Oui. Bien, je l'apprécie parce que ce n'était certainement pas l'objectif de M. Bélisle, mais ça me permet... je saisis la balle au vol pour rappeler que, dans une autre commission parlementaire, les membres de mon groupe parlementaire ont proposé une commission itinérante sur l'indépendance énergétique qui, je crois en tout cas, dans notre esprit avait beaucoup d'apparence, là, avec ce que M. Bélisle vient de décrire, mais ce n'était pas aussi élaboré sûrement. Donc, je pense que c'est peut-être un concept que les membres de la commission ici, que ce soit sous forme de commission itinérante ou sous n'importe quelle autre forme, là, je pense que la mécanique importe peu. Mais, comme on a accepté l'idée, le fait que l'ensemble de la société québécoise devrait être mobilisée pour atteindre les objectifs de réduction de gaz à effet de serre, bien je pense que ce serait logique qu'on se questionne sur qu'est-ce qu'on veut avoir, comment on pourrait voir cette mobilisation-là, cette large adhésion de la société se développer.
Ce n'est certainement pas simplement avec les consultations particulières que l'on tient ces jours-ci, bien que ce soit un pas certainement dans la bonne direction, mais il faudra aussi, je pense, quand on parlait de consultation avec des groupes de travail, c'est un peu plus technique puis un peu plus fouillé. Quand on parle de commission itinérante ou de toute autre structure, là, qui irait rencontrer directement les gens sur le terrain et en cherchant à les mobiliser puis chercher leur adhésion, je pense que ça pourrait être une piste de travail sur laquelle les membres de notre commission devraient se pencher certainement.
Le Président (M. Ouellette): ...
M. McKay: Oui. Bien, je pense que vous me faites signe que ça se termine bientôt. Alors, une autre balle saisie au vol: je vois dans le document, à la page 13, que vous reprenez un exemple qui est assez cher à mon coeur, et j'aimerais vous donner l'opportunité de peut-être élaborer un peu sur le projet de réfection du complexe Turcot telle que présentée par le ministère des Transports. La ministre de l'Environnement est ici, et je crois comprendre que, suite aux consultations du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, le ministère et le gouvernement sont à se pencher sur l'analyse du projet et des recommandations, donc je pense qu'il n'est peut-être pas trop tard pour faire des changements, faire des améliorations, là, au projet.
Alors, je ne sais pas comment vous voyez ça, vous, ce projet actuel. Il y en a une partie, on s'entend, il y a une partie, de l'autoroute, qui est en train de tomber en morceaux, alors il faut sécuriser ça. Mais est-ce qu'il faut, en faisant ça, en améliorant la sécurité, est-ce qu'on est obligés aussi d'augmenter la capacité de circulation de cette infrastructure-là, et donc d'aller dans le sens inverse de ce que le gouvernement, le document gouvernemental, nous propose?
Le Président (M. Ouellette): M. Simard, pour le mot de la fin, pour deux minutes.
M. Simard (Christian): Oui. Là-dessus, je vous inviterais à voir les positions extrêmement intéressantes du Conseil régional de l'environnement de Montréal, vous le connaissez. Il y a des mesures alternatives à Turcot. C'est-à-dire de le remplacer avec le même objectif, ou d'augmenter, ou d'intensifier, ou de permettre une fluidité du transport automobile individuel, il me semble que ça ne va pas dans le bon sens. C'est l'essentiel de notre... Mais il y a des alternatives à Turcot tel que présentées par le ministère des Transports. Mais un investissement de cette nature-là, selon nous, est un investissement du type qui est ? le projet qui est proposé par le ministère des Transports ? d'un autre âge, et ça nous apparaît incompatible avec l'objectif de l'après-Kyoto. Donc, on voulait souligner ça.
Au même titre qu'on dit dans la recommandation, je crois que c'est la dernière recommandation, celle qui... la 6.12 où on dit que «l'opportunité que représente l'exploration gazière et pétrolière devrait être analysée sous l'angle de la lutte aux changements climatiques de même que la décision de rénover Turcot». C'est fondamental de regarder ça. Essentiellement, d'autres groupes et d'autres coalitions ont proposé des choses extrêmement intéressantes. On n'a pas développé.
Ce qui est important pour nous, je pense, en mot de la fin, là, le Québec a dit qu'il voulait être ? et c'est un objectif magnifique contenu dans le document ? leader au niveau canadien et leader au niveau international. Pour être leader, il faut au moins aller à l'objectif minimal des experts du GIEC, on l'a dit, 25 %; il faut convier les Québécois à un chantier pour ça, qui peut être passionnant, et l'aspect bricoleur, innovateur, intéressant, là, en efficacité énergétique, convier à battre notre facture d'énergie, à remplacer l'huile où c'est possible, à rénover les bâtiments. On a un maudit beau chantier. Si on va les voir, ils vont nous aider à le réaliser. Je ne dis pas que c'est facile, mais c'est certainement un objectif extrêmement intéressant et passionnant. Merci.
n(18 heures)nLe Président (M. Ouellette): Merci, M. Simard, pour le mot de la fin. M. Thomas Welt, M. John Burcombe, M. Christian Simard, M. André Bélisle et Mme Virginie Lambert-Ferry, représentant Greenpeace Québec et le groupe QuébecKyoto, merci de vous être déplacés aujourd'hui.
Compte tenu qu'il est maintenant 18 heures, la commission ajourne ses travaux au mardi 27 octobre 2009, à 10 heures, afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques à l'égard du document intitulé Le Québec et les changements climatiques ? Quelle cible de réduction d'émissions de gaz à effet de serre à l'horizon 2020? La commission est ajournée.
(Fin de la séance à 18 h 1)