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Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le vendredi 9 décembre 2005 - Vol. 38 N° 59

Consultations particulières sur le projet de loi n° 118 - Loi sur le développement durable


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Table des matières

Journal des débats

(Onze heures vingt-sept minutes)

Le Président (M. Dubuc): On peut commencer nos travaux. Je rappelle que le mandat de la commission pour cette séance est de compléter les consultations particulières à l'égard du projet de loi n° 118 sur le développement durable.

Auditions (suite)

Bon, l'ordre du jour ce matin, je demande à l'Ordre des ingénieurs du Québec de bien vouloir se présenter.

M. Samson (Gaétan): Nous y sommes, M. le Président. Donc...

Le Président (M. Dubuc): Si vous voulez présenter vos collègues aussi qui vous entourent.

Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ)

M. Samson (Gaétan): Alors, je vous présente donc mes collègues: l'ingénieur Denis Isabel, ici, qui est un spécialiste en environnement; l'ingénieur Jean-Pierre Trudeau, qui est sur le comité des affaires publiques de l'Ordre des ingénieurs et qui est un recherchiste qui fait les travaux de fond à l'ordre, les travaux sur les dossiers; ainsi que Me Mario Dusseault, qui est notre juriste à l'Ordre des ingénieurs et qui a examiné donc l'aspect juriste du document, du projet de loi.

Le Président (M. Dubuc): Merci. Vous avez 15 minutes pour présenter votre mémoire, 15 minutes pour le côté ministériel puis 15 minutes pour l'opposition. On vous laisser aller.

M. Samson (Gaétan): Alors, merci, M. le Président. M. le ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs, Mmes et MM. les membres de la commission, je tiens tout d'abord à remercier la commission d'avoir invité l'Ordre des ingénieurs du Québec.

D'entrée de jeu, permettez-moi de saluer la pertinence d'un plan de développement durable pour le Québec. C'est un projet fondamental, d'autant plus que le concept de développement durable, qui englobe les aspects environnementaux, sociaux et économiques, doit s'appliquer à tout ce qu'entreprend un gouvernement et une société. Il doit également répondre ? et j'insiste ? aux aspirations, aux valeurs qui animent les hommes et les femmes d'un pays.

n (11 h 30) n

Comme notre temps est compté, nous irons immédiatement à l'essentiel. De prime abord, comme citoyen corporatif responsable, l'ordre constate avec satisfaction que le projet de loi est basé sur les grands principes qui soutiennent le concept de développement durable. Cependant, il comporte peu d'éléments contraignants, fixe peu d'obligations et ne prévoit pas de sanctions. Aucune stratégie ou plan d'action ne l'accompagne, si bien qu'il est difficile de juger des intentions et de l'engagement du gouvernement à l'égard d'un projet intégré de développement durable.

L'ordre comprend que l'intention du législateur est de poser les principes du développement durable et de confier aux différents acteurs de l'administration publique la responsabilité de dresser des plans d'action qui seraient soumis à l'évaluation d'un commissaire au développement durable, une approche évolutive donc fondée sur la portée universelle du concept de développement durable, sur la dimension globale des changements et sur le caractère forcément progressif de tels changements.

Cette approche est légitime sur le plan conceptuel. Cependant, nous jugeons qu'elle n'est pas suffisamment orientée vers l'action et les résultats. Elle ne donne ni orientations ni lignes directrices aux divers acteurs chargés d'élaborer les plans d'action. Elle ne définit pas non plus les modalités d'implication de la société civile. Elle ne permet pas aux divers acteurs de se prononcer, elle ne leur permet de se prononcer que sur des principes et des structures générales. Voilà. Enfin, elle ne soumet les plans d'action en développement durable qu'à un pouvoir de vérification, et ce, en aval de l'action, en aval de la décision plutôt qu'en amont du processus décisionnel.

Ce pouvoir est nécessaire ? j'entends ce pouvoir de vérification ? c'est sûr, mais il n'est pas suffisant, à notre avis. Afin d'affirmer son leadership, le gouvernement doit prévoir un pouvoir décisionnel en amont et de très haut niveau pour appliquer un cadre et procéder aux nécessaires arbitrages entre les divers intérêts en présence. Ces arbitrages seront de toute évidence nombreux et délicats, car le développement durable engage l'ensemble des institutions gouvernementales et repose sur un équilibre entre le social, l'économique et l'environnemental. Pour l'ordre, de tels arbitrages ne peuvent dépendre que du bureau du premier ministre, soutenu bien sûr par l'expertise du ministère du Développement durable. Ce pouvoir décisionnel en amont devrait être affirmé et défini dans le projet de loi. Il devrait être également balisé pour déterminer la portée et assurer la cohérence des divers plans d'action.

Par ailleurs, le projet de loi actuel n'implique que très peu la société civile. Le virage vers le développement durable ne pourra se négocier qu'avec la participation des citoyens et citoyennes, des entreprises et des organismes privés. L'ordre estime que la société québécoise est prête à concrétiser rapidement son engagement collectif en matière de développement durable. Les Québécois sont à la recherche d'une qualité de vie globale qui passe forcément par cet équilibre entre le développement économique, protection des ressources et équité sociale. C'est ce qui constitue donc la définition du développement durable.

Il est important que les entreprises et les acteurs économiques sachent rapidement à quoi s'en tenir afin d'intégrer ce développement durable à leurs modes d'opération, de fonctionnement organisationnel ainsi qu'à leurs plans de développement, le tout en demeurant concurrentielles. Il en est de même pour les citoyens. Dans cette perspective, la loi doit préciser en quoi consiste la contribution des citoyens, des entreprises, des organismes privés, ainsi que les mécanismes qui favoriseront et baliseront cette contribution.

Le virage vers le développement durable est un processus évolutif qui requiert l'acquisition, le développement et l'application d'un vaste ensemble de connaissances scientifiques et organisationnelles. Tout ce volet du savoir, évoqué à l'article 6 du projet, est primordial. L'ordre croit que le ministère doit l'affirmer dans le projet de loi et élaborer des outils qui le soutiendront concrètement.

À court et moyen terme, la société doit développer des connaissances sur l'application du développement durable dans divers environnements organisationnels et technologiques, par exemple l'analyse selon le cycle de vie des produits, l'analyse exergétique, l'évaluation des investissements, etc. Le Fonds vert, dont l'ordre approuve le principe, pourrait servir en priorité à l'établissement et à l'application de telles connaissances. À moyen et long terme, l'ordre soutient l'établissement d'un ambitieux programme de recherche, d'innovation, de transfert technologique axé sur le développement durable. L'ordre s'est penché sur les paramètres d'un tel programme.

L'innovation est un élément essentiel. L'innovation scientifique et technologique bien entendu, mais également l'innovation sociale et organisationnelle. Un exemple: le transfert des connaissances entre les générations de travailleurs dans la fonction publique. L'innovation est un processus continu qui requiert des investissements privés et publics à toutes ses étapes: recherche, prototypage, mise à l'échelle, homologation, commercialisation.

Dans son avis sur le développement durable présenté au ministre lors des audiences de mars 2005, l'ordre a déjà souligné au gouvernement l'importance d'adopter comme partie intégrante du Plan de développement durable un programme d'innovation, de recherche et de transfert technologique comportant des programmes de recherche locaux et la participation à des programmes nationaux et internationaux. L'objectif général de ce programme est de développer des connaissances et des moyens dans différents domaines du développement durable. Il vise, entre autres, la réduction des impacts sur les activités humaines, par exemple les émissions des gaz à effet de serre, et l'adaptation aux changements climatiques. À plus long terme, sur un horizon de quelques décennies, il faut impérativement mettre un terme à notre dépendance à l'égard des énergies fossiles. Un tel programme tourné vers l'avenir facilitera l'atteinte des objectifs d'une stratégie de développement durable.

Il doit être bien encadré afin de générer un maximum de retombées économiques. Pour ce faire, trois éléments apparaissent primordiaux: la disponibilité du capital de risque à vocation technologique, l'accompagnement des chercheurs et entrepreneurs ainsi que l'établissement de liens plus étroits entre les organismes de recherche et les entreprises. L'ordre souligne que ce programme constitue un élément essentiel de toute stratégie gouvernementale de développement durable et offre au gouvernement toute sa collaboration pour le définir et le mettre en oeuvre. Par ailleurs, le projet de loi en lui-même n'est pas suffisant, à notre avis, pour entreprendre de mobiliser les acteurs du développement durable. L'ordre invite le gouvernement à publier le plus rapidement possible une stratégie de développement durable qui fera état des priorités et des grands choix de développement que le gouvernement entend mettre de l'avant.

Les principes actuellement énoncés à l'article 6, comme l'ajout proposé à la Charte des droits et libertés de la personne, prévu à l'article 19, sont bienvenus, mais, n'étant pas encadrés par une réglementation ni accompagnés d'une stratégie, ils peuvent largement prêter à interprétation. Pour favoriser la cohérence et la synergie entre les différents acteurs, il est important à notre avis de définir des orientations claires.

En mai dernier, l'Ordre des ingénieurs a déjà défini un certain nombre d'orientations, notamment en ce qui concerne la politique énergétique, un élément fondamental du développement durable en raison du fait que l'énergie est à la base du développement économique. Inutile de rappeler que la consommation d'énergie est également à la base des émissions des gaz à effet de serre, dont la réduction s'annonce comme l'un des plus formidables défis que l'humanité aura à relever.

n (11 h 40) n

L'ordre a également fait part de ses orientations en ce qui concerne la politique de l'eau, de gestion du territoire, de réhabilitation des sols contaminés, de transport et de gestion des matières résiduelles. Des orientations de ce niveau applicables à un vaste ensemble d'activités et de comportements contribueront à clarifier et à concrétiser les attentes du gouvernement à l'égard de l'ensemble des acteurs du développement durable autant dans l'administration publique, les organisations que les citoyens. Il y va de l'héritage que nous léguons aux générations futures du Québec.

En conclusion, le projet de loi n° 118 est une base de travail très intéressante, mais il doit être plus explicite et plus complet. L'ordre insiste notamment sur l'importance d'un pouvoir décisionnel et d'arbitrage en matière du développement durable, relevant du bureau du premier ministre, ainsi que sur la nécessité de directives favorisant la cohérence de l'ensemble des plans d'action. Nous restons donc dans l'attente d'un projet de loi remanié accompagné d'une stratégie intégrée de développement durable. Voilà donc pour l'essentiel le contenu du mémoire que nous présentons à la commission, et nous sommes maintenant disponibles à répondre à vos questions. Je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Pinard): Alors, merci, M. Samson. Alors, sans plus tarder, pour une période de 15 minutes, alors M. le ministre.

M. Mulcair: Bonjour. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. Isabel, plaisir de vous avoir là. M. Isabel a joué un rôle de premier plan pour nous dans un très important dossier récemment, et on a tous été en mesure de constater l'extraordinaire étendue de son expertise et de son expérience. Plaisir de vous avoir ici avec nous aujourd'hui. Me Dusseault, plaisir de vous revoir également, et M. Trudeau.

Sachez qu'en partant, pour nous, votre présence est très importante, et l'éloquence et le contenu de votre mémoire vont sans doute nous aider beaucoup. On a eu l'occasion, hier, de rencontrer l'ordre avec lequel vous êtes appelés à travailler d'une manière soutenue aussi, qui est l'Ordre des architectes, et, lors de cette rencontre, ils nous ont mis beaucoup d'emphase ? et mon collègue du Lac-Saint-Jean et moi en avons mis beaucoup ? sur un des sujets qui a été soulevé le plus souvent lors de la tournée, qui est la construction verte. J'ai eu l'occasion de partager une liste d'une soixantaine de références qui ont été faites dans la tournée à travers le Québec à ce sujet-là, en provenance d'une trentaine de groupes et d'individus. Donc, ça vous montre que c'est une grande préoccupation, puis les gens le voient comme faisant partie d'un ensemble de solutions. Ici, au Québec, on a peut-être eu un certain laisser-aller vu... Peut-être qu'on est très choyés en termes d'énergie bon marché historiquement. Donc, on faisait peut-être un petit peu moins attention, mais ce qui fait aussi de nous des gloutons, au niveau planétaire, en termes de consommation d'énergie. Donc, il y a beaucoup à faire à cet égard-là.

Au niveau résidentiel, on carbure à un rythme qui tourne dans les 50 000, 60 000 unités de logement par année depuis les quatre, cinq, six dernières années. Ça commence à être beaucoup. Puis, comme l'a démontré l'analyse des architectes, il y a beaucoup de ces maisons-là qui vont peut-être coûter, oui, quelques milliers de dollars de moins à vendre dans les banlieues, mais c'est sûr que ça va coûter à terme beaucoup, beaucoup, beaucoup plus et plusieurs fois plus que ça en termes de coûts d'énergie notamment, qui deviennent à la limite des coûts de société. Quand vous évoquez les gaz à effet de serre, et la production énergétique, et sa consommation, ça va tout ensemble. Même quand notre énergie électrique est très propre, comme au Québec, il y a quand même un lien entre tout ça.

Donc, je vais me permettre, si vous voulez bien, de commencer en vous référant à la page 11 de votre mémoire, où vous mentionnez qu'«il convient, en matière de développement, d'adopter des pratiques de conception et de construction durable», et vous demander de nous donner une perception d'où, selon vous, nous sommes, au Québec, dans le domaine de la construction plus verte et au niveau de la formation des ingénieurs à ces techniques. Je sais qu'on avait quelqu'un ici, hier, qui travaillait dans le cycle de vie. C'était un centre interuniversitaire de recherche, interdisciplinaire en cycle de vie, puis, eux, ils nous ont expliqué que dorénavant, au premier cycle, à l'Université de Montréal, en ingénierie, on allait avoir un cours obligatoire en développement durable pour que les gens maîtrisent les notions de base. Moi, je trouve ça très intéressant. Donc, c'est en train de faire son chemin, mais peut-être que vous pourriez nous en parler un petit peu davantage puis peut-être, si vous voulez bien, en même temps nous parler des objectifs que vous pensez que, nous, on pourrait se fixer dans ce domaine.

Le Président (M. Pinard): M. le président.

M. Samson (Gaétan): Oui, merci. Alors, je pense que c'est effectivement une question qui intéresse beaucoup la population, on en entend parler de plus en plus. On s'est croisés dernièrement au gala Énergia, qui était justement sur la mise en valeur de l'efficacité énergétique, et c'était impressionnant de voir les centaines de projets qui nous étaient présentés. Ces centaines de projets là ont été présentés et ont nécessité, pour chacun, l'implication de solutions technologiques et de solutions d'ingénierie qui vont au-delà des façons de faire habituelles. Je pense que c'est intéressant de voir ça. Il y avait là des compagnies privées qui allaient tout à fait dans le sens... Je pense que la population est prête, que les ingénieurs sont prêts à mettre ça en oeuvre. Et puis, les bâtiments verts, c'est un de ces types de bâtiments qui a été... Un des prix a été remis pour la construction d'un bâtiment vert effectivement ? on en a encore entendu parler dernièrement ? et il y a vraiment, là, une tendance qui se dessine vers ça. Donc, oui, nous sommes tout à fait favorables à ce genre de recherche, à ce genre de développement, à la réalisation de ce genre de projet. Je pense que c'est tout à fait logique dans le contexte de l'efficacité énergétique.

Je demanderais à mon collègue, Jean-Pierre Trudeau, de vouloir ajouter des éléments de réponse.

Le Président (M. Pinard): M. Trudeau.

M. Trudeau (Jean-Pierre): M. le Président, M. le ministre, nous avons déposé, en février, un mémoire sur l'énergie au Québec dans lequel on accordait beaucoup d'attention à l'efficacité énergétique. Il y a effectivement, en matière de bâtiment, beaucoup de travail à faire. Il y a des initiatives qui sont très intéressantes. On voit maintenant, par exemple, le nouveau pavillon de Polytechnique, le pavillon Lassonde, alors qui est un bâtiment qui est certifié LEED, qui est un programme qui a été adopté par le gouvernement fédéral. À l'origine, c'était un programme américain. Il y a la salle de la Tohu, il y a le magasin de Mountain Co-op Equipment également. Ce sont encore des exemples, effectivement.

On commence à travailler quand même beaucoup maintenant sur des éléments qui auparavant ne recevaient pas toute l'attention qu'ils devaient, justement parce qu'on était dans un pays où l'énergie est quand même à bon marché. Comme, par exemple, dans les arénas, les supermarchés, il y a un potentiel énergétique extrêmement important à aller chercher. Alors, comme dans un aréna, par exemple, on fabrique de la glace, on a des rejets thermiques et on doit chauffer les gradins. Dans bien des cas, ce sont des systèmes qui sont complètement séparés. Dans un supermarché, c'est encore une fois la même chose, c'est-à-dire qu'on a beaucoup d'étagères réfrigérées, des congélateurs, tous des systèmes qui rejettent de la chaleur, et dans certains cas, bien, en été, cette chaleur-là est récupérée par un système de climatisation plutôt que d'être rejetée directement à l'extérieur, et, en hiver, on ne la récupère pas suffisamment pour chauffer. Alors, il y a beaucoup de travail qui se fait au niveau des bâtiments industriels et commerciaux, au niveau des récupérations, par exemple, de procédés industriels.

Au niveau des unités de logement comme telles, c'est souvent un domaine qui est un petit peu le parent pauvre de ça, parce que c'est... Bon, il y a peu d'ingénieurs qui travaillent là-dedans. La Loi sur les ingénieurs nous limite. Alors, dans bien des cas, c'est conçu par d'autres professionnels, mais qui ne sont pas nécessairement ingénieurs. On n'est pas tellement impliqués là-dedans. Il y aurait énormément de travail à faire au niveau de l'enveloppe thermique des bâtiments, effectivement. Par contre, c'est un marché dans lequel on a peut-être un petit peu moins de prise, je dirais, parce que les ingénieurs sont assez rarement impliqués là-dedans, sauf quand il s'agit de grands projets ou encore d'immeubles comme des condominiums.

Alors, oui, il y a beaucoup de travail à faire. Nous, en matière de pratique professionnelle, on travaille par la sensibilisation.

Par exemple, en janvier, février, on va avoir un numéro thématique de notre revue Plan ? c'est le journal des ingénieurs ? qui va porter entièrement sur les changements climatiques. Là-dedans, il va y avoir quelques articles sur des bâtiments verts. On va avoir des portraits d'ingénieurs qui travaillent là-dedans, ceux qui ont conçu, entre autres, les bâtiments dont on a parlé précédemment.

Au niveau de la formation, on travaille avec le Bureau canadien d'accréditation des programmes d'ingénierie pour définir les normes de formation qui sont applicables aux ingénieurs. Alors, on est réunis là-dedans avec les 11 autres associations provinciales et territoriales du Canada. Alors, il y a du travail qui se fait aussi à ce niveau-là, on est en contact avec les universités.

Alors, je dirais que c'est une sensibilisation qui est quand même assez récente. Maintenant, elle est assez encadrée, on a des programmes comme le programme LEED. Alors, on a bon espoir que ça va progresser de plus en plus rapidement.

Le Président (M. Pinard): Merci.

M. Mulcair: Je vais accorder un peu de temps à mon collègue du Lac-Saint-Jean et revenir. Merci beaucoup.

Le Président (M. Pinard): Alors, M. le critique officiel de l'opposition, M. le député du Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Vous êtes des gens de décision. Si vous aviez à voter pour ce projet de loi là tel qu'il est, vous voteriez pour ou contre? Il n'y a pas de nuance, c'est oui ou non.

M. Samson (Gaétan): Moi, je voterais pour. Alors, je pense que la première chose...

Une voix: ...

n (11 h 50) n

M. Samson (Gaétan): Je voterais pour effectivement, parce que ce qui est important, c'est de vraiment mettre le développement durable au premier plan. Ça fait, je dirais, des années et des années, ou enfin des dizaines d'années que les groupes environnementaux...

Le Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. le président. Dans cette salle, il n'y a aucune utilisation de cellulaire. S'il vous plaît, monsieur, veuillez sortir, aucune utilisation de cellulaire en cette salle. Nous poursuivons, tout en sachant, M. le président, que le député ne vous confiera sûrement pas une délégation pour voter pour et en son nom.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Pinard): Alors, M. le président.

M. Samson (Gaétan): Alors, je pense que ce qui est important dans le projet de loi actuel, c'est justement que ce projet-là met à l'avant-scène le développement durable. C'est quelque chose qui est attendu par les groupes environnementaux, c'est quelque chose qui est attendu par tous les ingénieurs. Tous les ingénieurs qui travaillent, par exemple, en mécanique, électricité du bâtiment doivent réaliser les plans pour se conformer à des règles qui sont dictées par nos codes de construction, et tout ça, et puis l'encadrement qu'on leur donne définisse le niveau d'implication, le niveau de recherche qu'ils doivent mettre en oeuvre pour réaliser. Donc, si on ajoute au cadre actuel des règles qui fixent les obligations à respecter par les ingénieurs pour, par exemple, des systèmes de chauffage ou de climatisation, si on ajoute à ça le volet développement durable, on va inévitablement aller vers un développement de technologies, des applications encore plus poussées et une efficacité énergétique encore plus grande.

Alors, c'est sûr que la venue de ce projet de loi est à saluer, c'est sûr qu'il faut mettre ça de l'avant. Ça fait longtemps que c'est attendu par les ingénieurs, c'est sûr, et par la population en général, à mon avis.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Tremblay: Vous savez, ce n'est pas le ministre de l'Environnement qui a inventé le développement durable, il a été là au bon moment où il y avait vraiment... je ne dirais pas une mode, mais une prise de conscience, hein? Quand on est...

Une voix: ...

M. Tremblay: Parce que, vous savez, votre mémoire reflète exactement ce que je pense, c'est que, oui, c'est correct, mais on pourrait tellement faire plus. Et je pense que les ingénieurs ont un rôle central à jouer dans la révolution dans laquelle nous pourrions embarquer, et j'ai l'impression d'avoir un grand jardin et d'en cultiver juste un petit morceau, parce qu'effectivement l'objectif que nous devrons réaliser dans l'avenir, c'est l'optimisation des ressources. Ce n'est pas juste les bâtiments verts, c'est autant dans les modes de production de nos entreprises. C'est qu'avec une particule matérielle énergétique, aquatique ou autre, on devra faire quatre fois plus, donc faire beaucoup plus avec beaucoup moins, et ça, c'est dans tous les domaines d'activité, hein, transport, habitation, industrie. Et, en plus, c'est rentable, c'est extrêmement rentable.

Et, moi, en tout cas, je suis entièrement d'accord avec votre position. Et c'est sûr qu'on a un projet de loi, qu'on a devant nous, qui est un départ, mais c'est peut-être un départ timide, compte tenu que c'est... Là, on commence par l'administration. Est-ce que l'administration va être en mesure de contaminer toutes les sphères d'activité de la société? J'espère. Enfin, c'est ce que nous verrons.

Mais quand vous dites que vous voudriez que ça aille plus loin... Parce qu'en fait c'est un projet de loi qui est déclaratif, hein, on souhaite faire du développement durable. Il y a même des phrases, là, il y a un endroit où vous citez un bon exemple, qu'on n'a pas besoin d'une loi pour souhaiter quelque chose. Mais, bon, si vous aviez à dire: Bonifions ce projet de loi là, allons plus loin, par où passeriez-vous, par quoi commenceriez-vous?

Le Président (M. Pinard): M. le président, ou un de vos invités.

M. Samson (Gaétan): Oui. Alors, bien, je dirais que la première chose à mon avis qui pourrait bonifier... la chose la plus efficace, c'est que les décisions, que toutes les décisions gouvernementales ? et je vous dirais, vraiment toutes ? soient soumises... ou enfin ? j'aime mieux ? soient inspirées du développement durable. Là, présentement, ce projet de loi là, si on le comprend, là, consiste à faire établir par chacun des ministères et acteurs donc un plan de développement durable ou un plan d'action au sein de son ministère ou au sein de son organisme. Mais il y a de nombreux... enfin la plupart des projets font intervenir plusieurs ministères. Donc, il va y avoir un arbitrage entre les différents plans de développement durable ou les différentes actions qui sont toutes faites dans le but du développement durable. Et on pense que le développement durable, le principe même du développement durable, c'est que dans chaque prise de décision on doit tenir compte de tous les facteurs. C'est le principe. Alors, si on a plusieurs plans qui ne convergent pas nécessairement, autrement dit si on n'a pas qu'un seul plan, bien on risque justement d'avoir de la difficulté à atteindre le développement durable. On pense que plus le niveau de... je dirais, plus la responsabilité de l'application du développement durable est haute dans les niveaux de décision, plus l'atteinte du développement durable sera efficace.

Une voix: Est-ce qu'il y a...

Le Président (M. Pinard): M. le député... Excusez-moi, vous voulez rajouter?

Une voix: Non, c'est...

M. Trudeau (Jean-Pierre): Bon, écoutez, je pense que ça couvre assez bien. Effectivement, notre principale recommandation, ce serait effectivement de prévoir un pouvoir de décision et également d'arbitrage entre les éléments environnementaux, économiques et sociaux, qui vont inévitablement finalement se refléter dans les différents plans d'action, d'avoir également des critères d'encadrement des plans d'action pour qu'on se retrouve avec des modèles qui sont assez convergents.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. Trudeau. M. le député.

M. Tremblay: Est-ce que dorénavant... comment l'État pourrait encourager l'Ordre des ingénieurs, les ingénieurs pour faire en sorte qu'à chaque fois qu'un ingénieur au Québec est placé devant une problématique où il rentre dans une entreprise pour faire un diagnostic de procédés... que nos ingénieurs au Québec aient le réflexe de faire ce que je vous ai dit tout à l'heure, l'optimisation des ressources dans tout? Est-ce que, ça, vous êtes déjà... Parce qu'hier, bon, on avait la chance d'avoir l'Ordre des architectes, puis le président, il est déjà «mindé» là-dessus, mais est-ce que les ingénieurs, ils ont déjà, là, ce réflexe-là de voir partout comment on peut faire pour optimiser les ressources et, de surcroît, les rendre rentables? Est-ce que, par exemple... Parce que, chez nous, le Centre québécois de développement durable, une quarantaine d'entreprises ont passé à travers le processus, puis c'est un de vos collègues, qui est ingénieur, qui, lui, rentre dans l'entreprise, regarde les procédés, suggère telle modification, ça coûte 100 000 piastres, retour sur l'investissement deux ans plus tard, puis, après ça, tu augmentes ton revenu. Ça, moi, je pense que c'est tout le Québec qui devrait passer au peigne fin comme ça.

Le Président (M. Pinard): M. Samson. Ou M. Trudeau. M. Samson.

M. Samson (Gaétan): ...s'il vous plaît. C'est très intéressant. En fait, actuellement on peut dire que les décisions qu'on appelle de développement durable qui sont prises, si je prends, par exemple, tous les projets qui ont été présentés au gala Énergia, hein ? M. le ministre était là, mais la salle était bondée, là ? tous ces projets-là regardent un retour sur l'investissement. Donc, c'est uniquement, dans la balance, deux choses, c'est: combien ça coûte puis combien on sauve. Et puis ils regardent le retour sur l'investissement sur une période très courte, donc on parle de quatre ans. Le développement durable, c'est beaucoup plus que quatre ans. Le développement durable, il faut regarder beaucoup plus loin que quatre ans, et puis je pense qu'on doit définir par une stratégie justement quels seront ces éléments qui devront être priorisés.

n (12 heures) n

C'est la loi qui va définir ça et également les stratégies de chacun des ministères, auxquelles devront se conformer les ingénieurs dans l'application des lois et règlements. C'est une obligation de l'ingénieur de respecter les lois et règlements en vigueur. Donc, à partir du moment où vous aurez sanctionné une loi qui contiendra des précisions et ainsi que les plans d'action des différents acteurs de développement durable, les différents ministères, si ça a force de loi, à partir du moment où ça a force de loi, les ingénieurs vont les mettre en application. Une des difficultés, c'est que ça demande beaucoup plus d'ingénierie pour un même projet, faire ces solutions qui innovent, mettre en application des découvertes ou des nouvelles technologies, ça prend plus de génie, plus d'efforts, plus d'honoraires.

Il y a une tendance, je dois vous le dire... Ce n'était pas mon but de parler de ça aujourd'hui, mais actuellement la tendance est à demander des prix et à sélectionner les ingénieurs sur la base du plus bas soumissionnaire. À mon avis, ça va à l'encontre du développement durable, puisque les ingénieurs devront, pour travailler dans le sens du développement durable, devront donc mettre plus d'honoraires encore à la réalisation de ces travaux-là. Mais la loi va régler ça, d'une certaine façon, puisqu'en fixant les cadres les gens vont dire: Maintenant, il faut travailler davantage, et puis vont fournir les efforts qu'il faut. Donc...

Le Président (M. Pinard): Le message corporatif passe bien ce matin!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Samson (Gaétan): J'aimerais ça répondre, M. le Président, à ce que vous dites. Je comprends que c'est une blague, là, mais c'est... Ici, on parle d'intérêt public. L'ordre n'est pas du tout un organisme corporatif qui défend les droits des ingénieurs; il y en a d'autres qui s'en chargent. Nous, c'est l'intérêt public qui nous intéresse et évidemment la protection du public. On croit sincèrement, à l'Ordre des ingénieurs, que les ingénieurs sont au centre du développement durable. Ils ont les connaissances, ils sont les mieux placés ou parmi les mieux placés, je devrais dire, pour évaluer les impacts des décisions, pour évaluer les conséquences, pour évaluer tout ce qu'on doit entreprendre maintenant pour mitiger les impacts ou enfin les effets négatifs. Ils sont vraiment au coeur de ça. On ne peut pas le faire en n'ayant pas d'ingénieur qui travaille sur un projet. Jean-Pierre, est-ce que tu veux bonifier?

Le Président (M. Pinard): M. Trudeau.

M. Trudeau (Jean-Pierre): Bien en fait peut-être juste rajouter un point, dont on a discuté d'ailleurs, c'est la question de l'internalisation des prix. Les décisions économiques se prennent en fonction d'une analyse comptable, d'une analyse économique, d'une analyse financière, et dans bien des cas les coûts qui sont pris en ligne de compte n'intègrent pas tous les éléments, n'intègrent pas, entre autres, ce qu'on appelle les externalités, alors des coûts sociaux, des coûts environnementaux qui sont liés à une utilisation d'une technologie, par exemple, ou bien encore à un choix de système énergétique.

Dans la mesure où les coûts reflètent le plus possible la réalité économique, incluant, par exemple, les gaz à effet de serre, c'est certain que les choix économiques, qui vont dicter dans bien des cas la décision d'un maître d'ouvrage et qui vont orienter le travail de l'ingénieur, vont refléter davantage les intérêts de la société. Alors, s'il y a une action que le gouvernement peut prendre pour faciliter le travail, je dirais, c'est de faire en sorte que les prix soient le plus possible enlignés avec les intérêts de la société.

Le Président (M. Pinard): M. le député du Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Bien, je pense que vous voulez poser une question...

Le Président (M. Pinard): Oui, mais je vais le prendre sur...

M. Tremblay: ...mais je vais juste faire un commentaire que notre collègue de Beauce, aujourd'hui, aurait dit s'il avait été là: Est-ce que vous êtes des ingénieurs ou des ingénieux?

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: ...

Le Président (M. Pinard): Alors, est-ce que vous êtes des ingénieurs ou des ingénieux? Question pour le député de la Beauce.

M. Tremblay: Non, non, c'était une blague.

M. Samson (Gaétan): Certainement les deux.

M. Tremblay: Oui, on l'espère.

Le Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député du Lac-Saint-Jean. Alors, comme, moi, j'ai un temps infini comme président, je vais maintenant céder la parole au ministre.

M. Mulcair: Oh, la, la! C'est juste vous qui avez du temps infini. Je voulais vous ramener... Vous êtes un des seuls groupes à avoir amené une précision à quelque chose de très spécifique. À l'article 16 du projet de loi, nous, on avait prévu de dire que «le gouvernement peut préciser les conditions et les modalités suivant lesquelles s'exerce l'obligation prévue à l'article 15», c'est-à-dire la mise en oeuvre de la stratégie. Donc, à 15, on a dit, pour «centrer ses priorités et [...] planifier ses actions de manière à tendre vers un développement durable en conformité avec la stratégie[...], chaque ministère [...] identifie dans un document qu'il doit rendre public les objectifs», et ainsi de suite. Donc: «Il peut notamment donner des directives sur la forme ou le contenu que doit prendre l'exercice de planification envisagé, la fréquence ou la périodicité des mises à jour exigées.»

Puis, on voit la culture de chaque profession ressortir par votre suggestion, vous nous dites: Il faudrait avoir une référence à la cohérence. Est-ce que vous pouvez en parler un petit peu plus?

M. Samson (Gaétan): Alors, je passe...

Le Président (M. Pinard): Me Dusseault.

M. Samson (Gaétan): Oui, s'il vous plaît.

M. Dusseault (Mario C.): Bien le bonjour.

Le Président (M. Pinard): Bonjour.

M. Dusseault (Mario C.): Alors évidemment c'est un commentaire qui est pris dans la globalité du projet de loi, qui s'enchâssait d'une certaine façon avec le commentaire de grandes généralités, de grands principes énoncés, mais qui manquaient d'éléments plus directifs, dans le fond.

Alors, si on regarde le commentaire qu'on formulait, on dit: «Cet article prévoit que le gouvernement "peut" préciser les conditions», bien sûr. «Comme ces conditions et modalités s'adressent ? et on devrait dire peut-être "principalement" ? à l'administration, ne suffirait-il pas que le gouvernement émette une directive pour atteindre le même but?»

Essentiellement, ce qu'on soutenait, c'est que le projet de loi, comme tous les projets de loi ? et ce n'est pas à vous bien sûr qu'on va l'apprendre; mais, comme tous les projets de loi ? il a une finalité de structure sociale. Il doit donner des balises, il doit faire en sorte que les gens sachent à l'avance vers quoi ils vont aller. Et, dans ce contexte-ci, lorsqu'on laisse au gouvernement la possibilité de façon aussi globale de préciser les conditions et les modalités dans un avenir et non pas tout de suite, on se trouve à voter pour un projet de loi qui manque de ? comment pourrions-nous dire; qui manque de ? visée immédiate et tangible.

Alors, c'est un peu ce commentaire qu'on faisait pour l'article 16 et un petit peu pour l'ensemble du projet de loi. C'est que la base, comme nous l'a dit M. le président tout à l'heure, la base est excellente, personne ne peut nier que le développement durable soit un but à atteindre et le plus rapidement possible, mais en même temps on ne peut pas faire autrement que de constater que les moyens qui sont énoncés sont très peu nombreux. On parle plus de buts à atteindre que de moyens, et c'est dans ce contexte-là, je crois, que notre commentaire s'inscrivait.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Mulcair: Et, si on vous interprète bien ? parce que, nous, on était prêts à tendre vers ce sens-là, parce qu'il y a des tentatives d'intégrer certaines suggestions qui se font en ce moment; si, nous, on vous interprétait bien, puis c'est là-dessus que je voulais vous entretenir ? vous êtes en train de nous dire qu'à l'article 16 il faudrait introduire carrément une notion de cohérence entre les plans, juste le mentionner? Est-ce qu'on vous interprète bien?

M. Samson (Gaétan): Une cohérence entre les plans d'action, c'est bien sûr. Une des plus grandes craintes, là, c'est que les différents plans qui vont être mis de l'avant, s'il n'y a pas de cohérence, on n'atteindra pas le développement durable.

M. Mulcair: À la page 6 de votre mémoire, d'une manière reliée, vous soulignez l'importance de baliser l'élaboration même des plans d'action des ministères et organismes par l'établissement de lignes directrices, d'ordre méthodologique cette fois-ci, pour assurer que ces plans comportent les mêmes éléments. Donc ça, c'est une sorte... L'autre, c'était cohérence des plans entre eux, puis là ça, c'est une sorte d'harmonisation de qu'est-ce que c'est, un plan. Parce qu'il ne faudrait pas arriver avec un ministère qui fait un truc d'un quart de page puis un autre ministère avec un truc en quatre volumes, très étoffé. C'est ça?

M. Samson (Gaétan): Exact. C'est exactement ça, ça vise de la cohérence.

M. Mulcair: Comme j'ai eu l'occasion de vous le dire, M. le président, j'ai maintenant un ingénieur à la maison. Notre plus jeune a fini à McGill l'année dernière, puis il vient de transférer, il va finir sa maîtrise à Poly, et il a tellement aimé ça. Alors, moi, j'apprécie de plus en plus de première main la structure de pensée des ingénieurs. Ça m'impressionne beaucoup. Ça nous a aidés beaucoup, votre présence ici aujourd'hui, et vos suggestions, et on va en tenir compte dans la mesure du possible. Mais ça va enrichir notre réflexion et ça nous a aidés beaucoup dans nos débats. Merci.

Le Président (M. Pinard): Alors, comme le président a un temps infini, il peut lui-même poser des questions, n'est-ce pas? Tout à l'heure, j'ai suivi avec énormément d'attention votre présentation, et, tout à l'heure, vous nous avez parlé d'un programme ou encore d'un concours qui se tient annuellement, par l'Ordre des ingénieurs, et vous honorez, là, les récipiendaires parmi les vôtres. Mais ce qui m'a surpris un peu, ça a été le fait que vous exigez qu'il y ait un retour... Tous les projets qui sont montés, qui sont bâtis, qui sont présentés doivent avoir un retour sur l'investissement, de quatre ans. J'aimerais que vous soyez plus explicite face à cela, parce qu'on sait très bien que, si on s'en va... Comme vous l'avez mentionné tout à l'heure, M. le président, on s'en va dans un inconnu. Il y aura du génie créatif, il y aura possiblement des déboursés additionnels qui vont être exigés pour ceux et celles qui devront ou qui voudront se diriger vers ce type de construction où toute la notion d'effet durable, de durabilité est là, et Dieu sait... comme, le député du Lac-Saint-Jean, la construction de sa maison doit sûrement y voir...

M. Mulcair: ...

n(12 h 10)n

Le Président (M. Pinard): C'est ça. Alors, moi, là, voyez-vous, moi, c'est cette question-là que j'aimerais avoir plus de détails. Parce que cette loi-là qui s'en vient, qui va être décidée par les membres de la commission, qui va être votée par le législateur, éventuellement c'est évident que, si on croit au développement durable, il y aura possiblement un certain prix à accepter, un investissement monétaire à injecter, mais est-ce que, pour vous, c'est une balise, une normalité que tous les projets devront avoir cette vie de quatre ans avant d'avoir un retour sur notre investissement? M. le président ou un de vos collègues.

M. Samson (Gaétan): Alors...

Le Président (M. Pinard): Mon temps était fini.

M. Samson (Gaétan): Tout d'abord, le colloque que j'ai mentionné tantôt, cette remise de prix, qui s'appelait le gala Énergia, n'est pas organisée par l'Ordre des ingénieurs, c'est organisé par l'Association québécoise pour la maîtrise de l'énergie. Donc, c'est des gens du milieu, mais ils avaient invité, cette année, l'Ordre des ingénieurs, l'Ordre des architectes et l'Ordre des technologues à être le jury. Donc, nous étions le jury et nous choisissions parmi les finalistes ceux qui méritaient de gagner le premier prix dans chacune des catégories. Bon.

Quand je parle retour sur l'investissement, il y avait parmi les clients à ce... Parce que ce gala-là réunissait des gens, par exemple, d'Hydro-Québec, de quelques ministères certainement et du privé également, des propriétaires de centres commerciaux, et, je vous dis, même les propriétaires de centres commerciaux réalisent des projets d'efficacité énergétique. Comment se fait-il que ces gens-là réalisent ces projets-là? C'est qu'il y a un retour sur l'investissement, il y a un retour sur quelques années. Quand je dis quatre ans, ce n'est pas une exigence du concours, ce n'est pas... c'est que ces gens-là, ils voient leur avantage parce qu'ils sont propriétaires pendant une longue période de l'édifice en question. Il y a eu une centaine de projets, puis je vous assure que les projets étaient vraiment extraordinaires. Et on en a de toutes les sortes, et ça touche la vie des gens à tous les niveaux, ils avaient...

Donc, ce que je voulais vous dire tantôt, et puis je me permets de le rajouter, c'est que, si on ajoutait, par exemple, à la nécessité pour un promoteur privé d'avoir un retour sur l'investissement... Actuellement, c'est juste les économies que les différents programmes génèrent, des programmes, par exemple, d'Hydro-Québec qui font profiter... Donc ça, c'est des bonnes, c'est des bonnes mesures qui permettent d'aller vers l'efficacité énergétique. Si on ajoute à ça, par exemple, une bonification ou une subvention qui va à la réduction des gaz à effet de serre, si on prend ça, par exemple, alors ce ne sera pas 100 projets qui vont être présentés, ça va être 200 projets qui vont être présentés automatiquement l'année prochaine. Alors, il faut arriver donc à encadrer, à donner des directions, et, nous, dans notre mémoire, ce sont justement ce qu'on appelle les stratégies à développer, les stratégies qui doivent accompagner le projet de loi pour fixer aux différents intervenants qui ont à faire des plans d'action, donc développer des plans d'action... bien pour que tous convergent vers une même stratégie.

Le Président (M. Pinard): Une dernière question, puis je vais vous demander une réponse plus rapide, là. C'est que, dans tous les programmes qui ont été mis de l'avant par le ministère et autres organismes de l'État, par exemple, au niveau des diminutions de coûts, il y a eu des programmes de fenestration, de... Enfin. La norme qui était attaquée pour faire en sorte, là, de vendre vraiment le programme, selon votre travail dans le milieu, est-ce que le retour sur l'investissement devait se faire entre zéro et cinq ans ou entre zéro et 10 ans? Quelle était, là, la norme qui était vraiment retenue par le client?

M. Samson (Gaétan): Bien, je ne peux pas vous répondre à ça, chaque client est différent. En fait ? je ne sais pas, Denis, si tu veux ajouter ? sur les moyens actuellement qui sont mis en oeuvre, c'est qu'on bonifie donc une telle approche, par exemple changer les fenêtres et, etc., on bonifie ça, ensuite, tu as un spécialiste qui évalue les économies annuelles, et puis le propriétaire prend la décision finale selon sa bonne volonté et ses intentions. Mais il n'y a pas d'incitatifs, je dirais, de développement durable qui sont... Ça va tout dans le sens du développement durable, mais il pourrait y avoir des incitatifs additionnels qui ressortiraient de la présente loi.

Le Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le Président. Merci, messieurs, de vous être déplacés. Vos propos ont été très bien retenus par les membres de la commission et nous serviront pour l'élaboration du projet de loi n° 118. Merci beaucoup.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Pinard): S'il vous plaît! À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Considérant que le président a pris quelque peu du temps d'antenne, alors j'inviterais immédiatement la ville de Québec de bien vouloir s'installer. Alors, les règles sont fort simples, vous présentez le mémoire, votre mémoire, 15 minutes. Ensuite de ça, il y aura échange du côté ministériel, 15 minutes; opposition officielle, 15 minutes. Et je demanderais à celui ou à celle qui va présenter le mémoire de s'identifier pour les fins de l'enregistrement et également de présenter ses collègues.

Ville de Québec

M. Viau (Serge): Merci, M. le Président. Mon nom est Serge Viau. Je suis le directeur général adjoint au développement durable à la ville de Québec. Je vous prie d'excuser M. François Picard, qui est le nouveau deuxième vice-président du nouveau comité exécutif de la ville de Québec, qui a été obligé de se désister à la dernière minute pour toutes sortes de considérations. Vous savez qu'à l'heure actuelle on fonctionne, à la ville, avec deux systèmes, deux comités exécutifs, deux conseils de ville. Et M. Picard étant aussi un fonctionnaire municipal, employé du ministère de l'Environnement, doit aussi terminer un certain nombre d'engagements avec le ministère, alors, pour lui, ça devient très difficile. Mes collègues sont d'abord M. Michel Lagacé, directeur du Service de l'environnement, et Mme Louise Babineau, spécialiste en environnement et auteur du mémoire qui vous est présenté.

Je voudrais aussi m'excuser pour le cellulaire, tout à l'heure. Le cellulaire devient parfois une deuxième nature qui nous fait oublier les bonnes manières.

Le Président (M. Pinard): Malheureusement. Malheureusement.

M. Viau (Serge): Voilà. Je n'ai pas l'intention de lire le mémoire au complet, il est assez substantiel. Je vais reprendre certains éléments de ce mémoire qui nous semblent peut-être les plus importants à mettre de l'avant ici, en commission. Je voudrais d'abord vous remercier de nous recevoir et je voudrais aussi souligner l'importance de ce projet de loi et notre accord à peu près total avec l'ensemble des intentions et des prescriptions qu'il contient. Nous étions intervenus en février dernier avec un mémoire, et on s'est aperçus qu'effectivement le projet de loi a tenu compte de beaucoup des aspects que nous avions mis de l'avant à ce moment-là, et nous en sommes très reconnaissants. Je voudrais aborder...

Le Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. Viau, est-ce que vous avez des copies du mémoire? La commission n'est pas en possession de votre mémoire.

Mme Babineau (Louise): Nous avons fait parvenir 20 exemplaires papier à M. Robert Jolicoeur mercredi, et il les a reçus.

Le Président (M. Pinard): Alors, M. Jolicoeur? Très bien. Vous pouvez poursuivre.

M. Viau (Serge): Bon! Donc, je comprends qu'on ne l'a pas lu, alors je vais essayer d'être le plus clair possible. Les points sur lesquels on voudrait insister, c'est d'abord certains éléments qui nous interpellent davantage, qui nous inquiètent un petit peu plus, le reste étant, comme je l'ai dit tout à l'heure, à notre satisfaction: la protection du patrimoine naturel et la conservation des paysages naturels ? alors ça, j'y reviendrai ? le processus de consultation des municipalités; la mise en place d'un système d'évaluation stratégique de durabilité; et surtout ? et je pense que c'est là peut-être la partie la plus importante de notre mémoire ? le Fonds vert.

n(12 h 20)n

Je dois dire aussi que ce mémoire-là a été entériné par le nouveau comité exécutif de la ville, alors donc il représente la position à la fois de l'administration et du politique.

Ensuite, nous avons convenu, comme la loi nous en donne la possibilité, le projet de loi nous en donne la possibilité, de nous assujettir volontairement à ce projet de loi, même avant la promulgation de tout décret, parce que nous avons effectivement amorcé une démarche de développement durable depuis très, très, très longtemps, à la ville. Déjà en 2001, avant la fusion municipale, le comité de transition avait élaboré avec l'aide de nos spécialistes une stratégie de développement durable que le conseil municipal, par la suite, a adoptée. On a créé une structure de développement durable, que j'ai le bonheur de diriger, qui comprend les services qui sont les plus directement impliqués dans le développement lui-même, développement économique, comme environnement, comme aménagement du territoire, etc. Et on a aussi élaboré un certain nombre d'instruments et adopté un certain nombre d'instruments, que ce soient le plan stratégique, le plan directeur d'aménagement et de développement, le plan de gestion des gaz à effet de serre, etc., qui vraiment sont dans le même esprit et qui précisent davantage la stratégie. On est aussi en voie d'élaborer un plan directeur des milieux et espaces naturels, incluant les milieux humides. Ce sera déposé incessamment au comité exécutif et au conseil pour adoption.

Alors donc, on est vraiment dans le coeur d'une stratégie dans laquelle on s'est embarqués et qu'on poursuit, là, de façon très, je dirais, sérieuse et avec beaucoup, je dirais, d'appui de l'ensemble de l'appareil politique, que ce soit l'ancien conseil ou même le nouveau.

La protection des paysages. Il est écrit effectivement dans les principes du projet de loi que les paysages culturels seront protégés, comme le patrimoine, etc., j'en suis fort aise. C'est une préoccupation que nous avons beaucoup à la ville de Québec, la protection du patrimoine culturel. Mais, la protection des paysages naturels, c'est une question beaucoup plus difficile à résoudre, je pense, mais qui est, je pense, discutée par l'ensemble des intervenants dans le domaine de l'aménagement du territoire, et il me semble qu'on pourrait... le projet de loi devrait aussi inclure le principe de la protection des paysages naturels de grande valeur. C'est peut-être plus facile de définir ce qu'est un paysage culturel, mais, définir un paysage naturel, j'admets que c'est beaucoup plus difficile. Cependant, il y a au Québec et dans nos municipalités des paysages naturels qui sont extraordinaires, et qu'il faut protéger à tout prix, et qu'il faudrait intégrer dans cette problématique de développement durable.

Deuxièmement, le système de suivi, nous sommes favorables bien sûr, d'accord avec la mise en place d'un processus de suivi et de vérification et la création du poste de commissaire au développement durable, mais on s'interroge sur la manière de faire, un peu comme les intervenants précédents. Nous ne sommes pas contre la définition d'une liste de critères généraux ou d'indicateurs généraux. Je pense que ça prend des indicateurs généraux, mais je pense qu'on doit aller plus loin et définir des critères qui sont adaptés aux contextes différents de chacun des intervenants. Que ce soient les municipalités, les commissions scolaires ou autres, on doit pouvoir tenir compte de ces contextes-là dans l'élaboration des critères, et c'est pour ça que nous proposons plutôt la mise en place d'un processus a priori, c'est-à-dire un processus d'évaluation a priori qui permettrait de définir une sorte de protocole d'évaluation pour chacun des programmes, des politiques de l'ensemble des intervenants, des ministères, des organismes, etc., et à ce moment-là un suivi continuel de ce protocole d'évaluation, plutôt que d'attendre à la fin puis de voir si telle politique vient rencontrer les critères généraux, qui souvent sont difficiles d'adaptation pour des situations particulières.

Puis, on a connu évidemment toutes les discussions possibles et imaginables sur les critères d'évaluation des cégeps, des hôpitaux, des municipalités, etc., c'est toujours très, très, très difficile d'essayer d'élaborer une liste de critères uniformes pour tout le monde. Alors, je pense que le processus d'évaluation a priori, avec l'établissement d'un protocole d'évaluation pour chacune des politiques et des programmes, nous permettrait de mieux rendre compte de la réalité, d'évaluer de façon beaucoup plus efficace les stratégies ou les résultats de ces politiques et de tenir compte évidemment de chaque particularité de chaque intervenant. Cette évaluation-là nous permettrait aussi de tenir compte davantage des éléments, je dirais, plus intangibles, comme les données sociales, les données économiques du développement, à l'intérieur de la méthode d'évaluation.

Nous avons aussi posé quelques questions sur le mécanisme de consultation pour les organismes soumis au décret, en particulier les municipalités. Peut-être qu'il est... C'est mentionné dans le projet de loi, mais, en plus de l'inscription à l'article 4 du projet de loi, on pense que, dans les autres articles, 7, 8, 12 par exemple, on devrait beaucoup plus faire mention de cette obligation de consultation pour les organismes qui sont soumis au décret. Nous souhaitons que le monde municipal soit fortement associé à la fois à l'établissement des critères, à la fois à l'établissement des processus de vérification environnementale, de manière à ce qu'on partage vraiment cette espèce de problématique puis qu'on soit vraiment d'accord avec l'ensemble des mécanismes qui sont mis en place.

Enfin, je voudrais intervenir sur le dossier du Fonds vert, qui nous semble... qui est excellent. On souligne évidemment l'abolition du Fonds de l'eau, mais le regroupement finalement de tout ça dans un seul et unique fonds vert, dont on souhaiterait cependant qu'on définisse mieux, je dirais, les critères de gestion. Sans aller dans les détails, il nous semble qu'il y a un certain nombre d'ambiguïtés dans le projet de loi qui nous inquiètent un petit peu. À moins que vous nous rassuriez, là, sur divers aspects. Par exemple, est-ce que le fonds a un caractère de pérennité? Est-ce qu'au 31 mars tout ça, ça ne retourne pas au fonds consolidé? Comment on fait pour que ce fonds se développe d'année en année et que, s'il y a des sommes qui ne sont pas dépensées au 31 mars, bien sûr elles sont versées à l'année suivante et elles sont donc disponibles pour la mise en oeuvre des programmes?

Il y a aussi une phrase dans le projet de loi qui nous... Je ne pense pas que ce soit l'intention du législateur, mais elle peut être ambiguë, on dit: «Est institué le Fonds vert.

«Ce fonds [vert] est affecté au financement de mesures ou d'activités que le ministre peut réaliser dans le cadre de ses fonctions.»

Alors, on ne souhaiterait pas que le fonds serve aux frais de fonctionnement du ministère mais vraiment à des programmes dédiés qui sont élaborés dans le cadre de la stratégie de développement durable. Alors ça, est-ce qu'on comprend mal ou du moins est-ce qu'on va trop loin, dans cette interprétation-là? Je laisse ça à votre interprétation, mais on voulait signaler peut-être cette petite ambiguïté là.

Deuxièmement, on voudrait, on souhaiterait aussi que le fonds soit géré de manière en partie dédiée. C'est-à-dire que les fonds, par exemple, qui viennent de l'eau... Et ça, c'est dit dans le projet de loi, que les redevances de l'eau servent à la gestion ou à la gouvernance de l'eau. Ça, je pense que c'est clair. Est-ce que les autres redevances, par exemple les redevances sur l'élimination des déchets, est-ce qu'elles seront versées au fonds? Ce n'est pas dit, mais est-ce qu'elles seront aussi dédiées à la gestion des déchets? Il me semble qu'on devrait le préciser. Si on le précise pour l'eau, pourquoi ne le précise-t-on pas pour les déchets? Il peut y avoir aussi une partie du fonds qui est ouverte à toutes sortes de programmes, d'innovations, particulièrement au niveau de la recherche, ou des choses comme ça. Ça, nous sommes à l'aise avec ça.

n(12 h 30)n

Comment les municipalités pourront bénéficier de ce fonds? Je ne veux pas qu'on... Évidemment, le projet de loi détermine les mécaniques de tout ça, mais est-ce que les municipalités qui ont déjà fait des pas en avant, qui ont déjà établi des stratégies durables seront pénalisées? C'est souvent un peu... souvent le cas, hein, des gens qui font les choses à l'avance, quand arrivent les programmes, ils ne sont jamais rétroactifs. Alors, nous voulons peut-être voir s'il n'y a pas une manière de récompenser les bons élèves, si vous voulez, et de faire en sorte que celles qui ont déjà implanté des stratégies, ont fait beaucoup de choses dans le domaine de l'environnement, bien puissent bénéficier aussi du fonds au même titre que les autres.

La perméabilité aussi, bien sûr, la perméabilité du Fonds vert, de sorte qu'on peut faire un emprunt au fonds consolidé, de même que le fonds consolidé peut faire un emprunt au Fonds vert. Mais, je veux dire, les modalités de remboursement ou les délais de remboursement ne sont pas indiqués. Et on ne voudrait pas qu'il y ait des ponctions pour divers objets dans le fonds par le Conseil du trésor, par exemple, ou le ministère des Finances, et que le remboursement s'effectue à une date indéterminée, et donc que finalement... On a déjà vu des ponctions comme ça dans divers fonds accumulés, au fédéral comme au provincial, et ça, ça nous inquiète un petit peu. Je pense qu'il faut que le fonds soit géré avec des critères. Je veux bien croire qu'il y a un commissaire à l'environnement qui va aussi commenter et qui est rattaché au bureau du Vérificateur, ce qui est très bien d'ailleurs, et donc...

Le Président (M. Pinard): En conclusion, maintenant.

M. Viau (Serge): ...mais, quand même, je pense que c'est important qu'on précise ces éléments-là.

Le Président (M. Pinard): En conclusion, s'il vous plaît.

M. Viau (Serge): Voilà. Je pense que c'est à peu près tous les éléments que je voulais signaler. Bien, en conclusion, vous voyez, nous sommes tout à fait favorables et nous apprécions beaucoup le pas en avant que fait le gouvernement en proposant ce projet de loi, en souhaitant que, dans sa version finale, on ait des mécanismes qui soient un petit peu plus concrets quant à l'applicabilité de certains éléments de ce plan-là.

Le Président (M. Pinard): Alors immédiatement nous allons débuter l'échange. Alors, M. le ministre.

M. Mulcair: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, il me fait extrêmement plaisir de souhaiter la bienvenue et de remercier M. Viau, de dire bonjour aussi à M. Lagacé et Mme Babineau. Merci pour votre présence ici, aujourd'hui, de la part de la ville de Québec. Je vais essayer de répondre dans un premier temps à quelques-unes de vos préoccupations sur le Fonds vert, puis je sais qu'il y a des discussions techniques qui ont été offertes pour en face. Mais il va y avoir un conseil d'administration spécifique pour le Fonds vert, en dehors du ministère; donc, lui, il verrait à établir cette procédure. Ça, c'est une chose. Donc, c'est externe pas juste au ministère, externe au gouvernement.

Par ailleurs, pour ce qui est des déchets spécifiquement ? c'est le projet de loi n° 130, la redevance sur l'enfouissement dont vous venez de parler ? il est spécifiquement prévu que cet argent-là doit servir à des fins reliées aux déchets. Mais la partie carotte et bâton là-dedans, c'est l'adoption ou non d'un PGMR conformément à la politique québécoise 1998-2008. Donc, vous, vous y êtes déjà, comme la vaste majorité des municipalités au Québec. J'en ai un bien identifié que je mentionne souvent, qui est la CMM, qui est toujours un gros problème pour nous parce qu'ils n'en ont toujours pas. Mais... Puis ils ne pourront pas, eux, bénéficier de ces fonds-là. Ça, c'est évident que, si quelqu'un n'a pas un plan de gestion correspondant à la politique, bien ils n'auront pas un sou de cet argent-là, mais qu'ils vont être appelés à verser. Alors, tôt ou tard, comme on dit en anglais, «I am going to get their attention». Puis, c'est ça, il faut avoir des outils, hein, économiques et autres.

Donc, je voulais vous dire que, pour les déchets, c'est clair, aussi clair que pour l'eau, que ce sera affecté à ces fins-là. Mais, pendant qu'on parle d'eau, je suis sûr que vous auriez été surpris que je ne vous aborde pas là-dessus, ayant été briefés sans doute par Mme Bourget, à qui je vous demande de transmettre mes salutations. Bien, à notre dernière rencontre qu'on avait eue ici, dans notre capitale nationale, au printemps, je veux vous citer, à la page 3 de votre mémoire d'aujourd'hui ? puis je vous remercie de l'avoir rafraîchi pour nous ? les principes du développement durable: «On aurait souhaité voir le gouvernement énoncer clairement qu'il aura le devoir de respecter les 16 principes du développement durable qu'il propose dans le projet de loi. Au lieu de cette obligation, il se donne la possibilité de ? on peut comprendre «seulement» ? prendre en considération les principes.» Donc, un vibrant plaidoyer pour ne pas seulement réciter et prendre en considération, mais obliger au respect de ces principes.

Mais voyons, voir, deux de mes préférés, production et consommation responsables, 14e alinéa, et internalisation des coûts, 16e alinéa, qui sont tous les deux autour du 15e évidemment, pollueur-payeur, qui a une incidence quand même sur les deux autres, mais je vais me concentrer surtout sur 14° et 16°.

Qu'est-ce qu'on voit à 14°? «Des changements doivent être apportés dans les modes de production et de consommation en vue de rendre ces dernières plus viables et responsables sur les plans social et environnemental, entre autres par l'adoption d'une approche d'écoefficience, qui évite le gaspillage et qui optimise l'utilisation des ressources».

16°, internalisation des coûts, ce qu'on appelait avant utilisateur-payeur, qui se retrouve aussi énoncé en toutes lettres comme politique majeure dans la politique nationale de l'eau, que nous appuyons. C'est fait par un gouvernement antérieur, mais je m'efforce de le mettre en application, même quand l'opposition n'en veut plus, comme dans le cas des redevances sur l'eau. «Le coût des biens et des services doit refléter l'ensemble des coûts.» Dans le premier cas, je crois avoir un consensus, on va retenir la suggestion d'un des groupes qui trouvait que c'était une polysémie de mauvais aloi. On aurait plutôt tendance à dire: Le prix des biens et services doit refléter l'ensemble des coûts qu'ils occasionnent à la société durant tout leur cycle de vie, de leur conception jusqu'à leur consommation ou disposition finale.

La seule manière de faire ça, internaliser le coût, est de savoir combien on a utilisé. En ce moment, dans la ville de Québec, vous avez la seule manière connue pour l'eau, qui est un compteur. La seule manière qu'on a de connaître combien on a consommé d'électricité, c'est un compteur. On pourrait facturer l'électricité selon la taille de la maison et sa valeur foncière. On pourrait le faire, c'est tout à fait possible, mais ça n'aura aucun reflet sur la consommation réelle d'électricité dans cette maison-là. Si vous aviez un couple à la retraite qui faisait une consommation rationnelle de l'énergie, puis l'autre qui a mis, comme on a vu à la télé hier soir, 25 000 W de lumières de Noël, c'est les voisins qui font attention à l'électricité qui sont en train de payer les 25 000 W de l'autre, hein? C'est vraiment ça. Transposé à l'eau, si on a toujours mon couple à la retraite qui fait une consommation rationnelle de l'eau puis, à côté, j'ai la famille Gratton, Elvis de son prénom, avec trois VUS, puis un «sprinkler» automatique, puis une énorme piscine creusée, bien c'est toujours mon pauvre petit couple à la retraite qui paie pour remplir la piscine d'Elvis, parce qu'ils sont seulement basés sur la valeur foncière.

Alors, puisque vous nous interpellez ce matin pour ne pas seulement évoquer la prise en compte, vous voulez l'obligation de suivre, comment ça se fait que je lis, aujourd'hui même ? ça tombe bien mal, mais; je lis, aujourd'hui même ? dans le journal Le Soleil, ici, dans la capitale nationale, la chose suivante: «En ce qui concerne les services résidentiels d'aqueduc et d'égout, Mme Boucher ? la nouvelle mairesse, donc ? propose une tarification par logement pour les dépenses relatives à la gestion et à l'entretien des réseaux assumés en grande partie ? 80 % ? par la ville locale, et pour les dépenses relatives à l'assainissement de l'eau potable et [du] traitement des eaux usées assumées par l'agglomération ? vous comprenez qu'on vient de décrire le cycle de vie de l'eau, le cycle de l'eau, de la prise, du traitement, de la distribution, de l'utilisation, de la purification et du retour ? ainsi que l'élimination de toute tarification à même les compteurs d'eau déjà en place dans le secteur résidentiel.» Les faits saillants, en pleine page, dans l'infographie du Soleil: «Élimination des compteurs d'eau sur tout le territoire».

Aidez-moi à comprendre comment vous pouvez me dire ces deux choses-là en même temps, que vous voulez non seulement que je tienne compte de ces facteurs-là, mais que je les applique obligatoirement, qu'un des principes, c'est production et consommation responsables, l'adoption d'une approche qui évite le gaspillage, et l'internalisation du coût pour le cycle de vie, et qu'on enlève la seule manière d'y arriver, on enlève les compteurs d'eau. Moi, je n'arrive pas à comprendre la ville de Québec, ici, aujourd'hui, très sincèrement.

Le Président (M. Pinard): M. Viau, s'il vous plaît.

n(12 h 40)n

M. Viau (Serge): D'abord, on doit dire que la ville a pris une position double. Tout ce qui n'est pas résidentiel, nous allons installer des compteurs d'eau partout, pour tout ce qui n'est pas résidentiel. À l'heure actuelle, dans l'ancienne ville de Québec comme dans les nouvelles qui avaient déjà des compteurs d'eau, les gros consommateurs d'eau sont déjà facturés au compteur, bon, les hôtels, les lave-autos, etc., les buanderies, tout ça, les industries. Donc, pour ce qui est du secteur non résidentiel, il y aura des compteurs d'eau partout. On les implantera au fur et à mesure, et puis, bon, ça va prendre quelques années, bien sûr.

Pour ce qui est du résidentiel, la discussion a été longue, vive, tant sous l'ancien conseil qu'actuellement, et finalement on a choisi de ne plus facturer au compteur d'eau, tout en maintenant les compteurs d'eau pour fins de monitoring, de vérification, etc., pour diverses raisons. Vous savez, on a beaucoup considéré le rapport Beauchamp là-dessus, son avis sur le fait que, bon, ce n'était peut-être pas le meilleur instrument pour, je dirais, économiser de l'eau au niveau résidentiel, toujours. Les piscines, il y a une taxe spéciale sur les piscines. Il y a aussi un règlement qui interdit ou qui, je dirais, réglemente l'utilisation de l'eau à l'extérieur, le lavage des autos, l'arrosage des gazons, des entrées d'auto, etc. On a un règlement qui est assez sévère et on engage des équipes à chaque année pour faire le suivi de tout ça. Je pense qu'il y a là une manifestation d'une volonté de contrôler.

Quant à l'utilisation à l'intérieur du logement, on a convenu que... Parce qu'on a quand même un rôle, je dirais, sans que ce soit un grand rôle à cet égard-là, mais un rôle de redistribution de la richesse, et l'eau étant, je dirais, un bien essentiel, très important, le fait de facturer ça au compteur ne tenait pas compte des caractéristiques socioéconomiques de chacune des familles. Vous savez, une famille qui est riche, qui a effectivement une grande maison avec toutes sortes de trucs, de toute façon elle peut se payer... Qu'il y ait compteur ou pas, elle va utiliser l'eau de façon presque inconsidérée. Ce n'est pas le compteur qui va changer quelque chose, d'autant plus que le niveau de facturation ou la tarification est tellement peu élevée que finalement la différence n'est pas très grande. Mais, pour une famille qui est socioéconomiquement faible, qui a beaucoup d'enfants, bon, etc., ça, ça peut représenter une difficulté importante, et je pense qu'on a tenu compte de ça en disant: Bien, en moyenne, finalement il n'y a pas tellement de gaspillage à l'intérieur de la maison comme telle, et ne pas charger au compteur mais simplement par rapport à une tarification au logement, ça équilibre, si vous voulez. Autrement dit, les riches paient pour les pauvres, on établit une tarification générale pour l'ensemble des divers logements. Et ça internalise tous les coûts, parce que cette tarification-là tient compte de tous les coûts, y compris les coûts de disposition.

On a vraiment refait toute la tarification, comme on l'a fait, on va le faire, on le fait pour les déchets, etc., on a vraiment refait toute l'analyse du coût de la gestion de l'eau pour l'intégrer dans une tarification au logement, et c'est un peu la voie donc que le nouveau conseil de ville ? et c'était l'esprit de l'ancien aussi ? a adoptée.

M. Mulcair: Merci pour cette explication, mais elle ne répond pas à la question. Mais je vais quand même en tenir compte. Je comprends que vous n'êtes pas non plus... C'est difficile, et je comprends. Mais je vais quand même tenter avec vous d'aller au fond de votre explication.

Vous m'affirmez que selon vous les riches paient pour les pauvres. Je ne suis pas convaincu de ça, même avec votre modèle. Je vais tenter de m'expliquer. Ça fait la fausse prémisse... Votre affirmation, à mon point de vue, c'est faux. Je peux me tromper, mais il me semble que ça fait une fausse prémisse, que les pauvres qui sont dans les logements que vous évoquez ne paient pas l'eau. Or, ils paient l'eau, mais ils ne paient pas l'eau selon leur consommation, ils paient l'eau selon la valeur de leur immeuble, parce que le propriétaire a le droit de l'intégrer dans le coût de leur loyer, puis, même s'il y a des augmentations de taxes municipales, en enlevant les compteurs, puis en leur envoyant une taxe spécifique sur l'eau, et en l'envoyant sur la masse, sur la valeur générale des terrains et des bâtiments, c'est payé là. Donc, c'est une erreur qu'on fait souvent de croire que l'eau n'est pas payée parce qu'il n'y a pas une facturation. L'eau, elle est payée, elle est payée à 100 %. Sauf qu'elle n'est pas payée sur une base d'utilisateur-payeur, elle est payée sur la base de la valeur de la maison, de la valeur mobilière.

Le Président (M. Pinard): Immobilière.

M. Mulcair: Immobilière, pardon. Oui, merci, M. le Président. Donc, à Québec, on peut quand même, encore aujourd'hui, dans certains secteurs, se trouver une maison modeste pour 125 000 $, 130 000 $. Je regarde le prix. Du peu que je connais du marché immobilier à Québec, un six logements ou un huit logements à Québec, on n'est pas si loin de ça, de prix par logement pour un six et demie ou un truc comme ça à Québec. Donc, je ne suis pas persuadé par votre argument, votre affirmation, qui m'a l'air d'être un peu intuitif, que les riches paient pour les pauvres. Je crois que, sur une base de la valeur, dans les deux cas, on a juste à enlever tout incitatif à faire une consommation rationnelle de l'eau, et que vos pauvres, dont vous me parlez comme étant protégés par ce système, dans un six et demie qui a une valeur immobilière qui est la même qu'une maison modeste mais avec une... Vous me parlez d'une taxe spéciale pour les piscines mais qui ne fait aucun cas de l'eau. Pas sûr que votre argument tient, M. Viau. Je ne suis pas sûr.

Le Président (M. Pinard): Un commentaire, M. Viau?

M. Viau (Serge): Bien, c'est-à-dire que c'est une tarification par logement, ça n'a rien à voir avec la valeur foncière, là. En fait, l'ensemble des coûts de l'eau ont été, je dirais, globalisés et redivisés par le nombre de logements, et c'est une tarification par logement, au même titre que le coût des matières résiduelles; les vidanges, il y a une tarification par logement. Ça permet d'établir une moyenne générale pour tout le monde, bien sûr, mais ce n'est pas en fonction de la valeur foncière.

M. Mulcair: Je vous remercie beaucoup pour la clarification. Est-ce que cette tarification par logement est facturée directement au locataire ou au locateur?

M. Viau (Serge): Bien, elle est facturée sur le compte de taxes du propriétaire.

M. Mulcair: Du propriétaire, et redistribuée ensuite. Elle se situe à peu près à quel niveau?

M. Viau (Serge): Oup! Là, je ne pourrais pas vous dire ça par coeur, là, les données.

M. Mulcair: Peut-être que vous pourriez nous apporter de l'information écrite en marge et...

M. Viau (Serge): Oui, bien sûr. Bien sûr.

M. Mulcair: Quand je la reçois, je me fais un devoir et un plaisir de la partager avec l'opposition.

M. Viau (Serge): Oui, tout à fait.

M. Mulcair: J'aimerais beaucoup aller au fond de ça. C'est une question importante.

Le Président (M. Pinard): M. Corbeil devra faire la même chose.

Une voix: D'accord.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. Viau, M. Mulcair. Alors, nous cédons maintenant la parole au critique officiel de l'opposition, le député du Lac-Saint-Jean. M. le député.

M. Tremblay: Oui, merci, M. le Président. Vous écrivez, à la page 4 de votre mémoire: «Tout en reconnaissant l'importance du suivi des progrès du développement durable, la ville de Québec recommande plutôt la mise en place d'une procédure d'évaluation de la durabilité au lieu d'une liste d'indicateurs applicables à tous.» Qu'est-ce que ça mange en hiver, une procédure d'évaluation de la durabilité?

Des voix: ...

Le Président (M. Pinard): Comme il y a un peu de neige, madame.

Mme Babineau (Louise): D'accord. Alors, bon, merci d'avoir posé la question. Ça me fait plaisir d'y répondre, d'ailleurs. Alors, peut-être que le titre est pompeux et ronfleux ou ronflant, hein? Dans le sens qu'un système d'évaluation de la durabilité, M. Viau l'a présenté un petit peu tantôt, en disant qu'au lieu d'appliquer une liste d'indicateurs, parce que ce n'est pas facile de trouver des indicateurs qui soient réalistes, donc qui collent à une réalité qui s'applique autant à différents ministères, à des commissions scolaires, à des organismes... Donc, c'est dans ce sens-là, d'accord? Ce n'est pas facile d'élaborer des listes d'indicateurs qui soient réalistes. Donc, si on y va dès le départ, au niveau du processus décisionnel, un peu comme l'Ordre des ingénieurs en a parlé tantôt... L'ordre parlait d'un cadre méthodologique, d'accord? Alors, si vous élaborez des critères qui respectent et qui sont traduits par une démarche méthodologique à appliquer dans le processus décisionnel, ça vous fait un système d'évaluation de la durabilité. Mais, dès le départ, a priori, à ce moment-là, vous êtes plus proches des missions des différents organismes, vous êtes plus proches de leurs activités et de leur réalité. Est-ce que ça répond un peu à votre...n(12 h 50)n

M. Tremblay: Oui. Mais j'essaie de voir comment, sur le plan législatif, ça pourrait s'intégrer dans ce projet de loi. Ou bien donc ce sera la stratégie qui sera développée après le projet de loi qui devra tenir compte de vos commentaires, finalement. Et d'ailleurs, moi, en tout cas, je salue votre volonté, votre offre volontaire, hein, de participer à la démarche de développement durable. C'est à la page 2, là: «La ville de Québec veut signifier au gouvernement son intention de s'assujettir sur une base volontaire, avant la promulgation du décret...» Ça, voulez-vous dire que vous le faites par vous-mêmes avant que le ministre va vous le demander? C'est bien ça?

Le Président (M. Pinard): Madame... M. Viau ou madame.

M. Viau (Serge): Non. La chose simple qu'il y aurait à faire, c'est que, quand on dit, bon: Chaque ministère va devoir établir sa stratégie, ou chaque organisme, chaque municipalité, etc., établir sa stratégie de développement durable, mettre en place des programmes pour viser l'application, établir un plan d'action, etc., l'idée, c'est toujours, préalablement à ça, d'élaborer, comme on fait dans n'importe quel processus d'évaluation de programme, d'élaborer un protocole d'évaluation, avec des définitions, des critères particuliers qui s'adaptent bien à la fois à la réalité puis à la fois aux objectifs spécifiques qu'on veut poursuivre par chacun des programmes. À partir du moment où ça c'est fait préalablement, c'est beaucoup plus facile par la suite d'évaluer le résultat ou l'efficacité de la stratégie ou du programme.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Tremblay: Pas d'autre question.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre, avez-vous des questions?

M. Mulcair: Bien, sauf pour dire, en terminant, que je tiens à féliciter la ville de Québec d'avoir fait l'effort tout à fait louable de retravailler avec nous, et vous faites des très bonnes choses, à la ville de Québec, en matière de développement durable, d'une manière générale. Je tenais à le dire même si, les deux fois que j'ai eu l'immense plaisir de vous rencontrer, le sujet de l'eau a pris pas mal plus de notre temps. Mais c'est un sujet pour nous extrêmement important, et, si je ne peux pas en discuter avec la deuxième plus grande ville, Québec, qui a maintenant détrôné Laval qui avait ce titre-là pendant très longtemps, avec qui vous êtes bien placés... J'attends avec impatience votre information économique que vous allez me donner, je vais la faire mesurer. Je pense que vous avez raison de dire qu'on doit prendre très au sérieux les indicateurs puis les critères et les principes du projet de loi, c'est pour ça que j'aime bien les mesurer à l'aune de leur application pratique et pas dans une théorie.

Je vous remercie énormément. Mes salutations à la nouvelle mairesse, que je n'ai pas eu l'occasion de rencontrer depuis son élection, évidemment. Et merci beaucoup pour beaucoup de matière à réflexion, surtout pour vos bons mots à propos du projet de loi. Merci.

Le Président (M. Pinard): Alors, MM. Viau, Lagacé, Mme Babineau, merci infiniment. Vos propos ont su enrichir les membres de la commission dans la préparation du projet de loi n° 118. Merci.

Je suspends les travaux à cet après-midi, 15 heures. Vous pouvez laisser ici vos documents de travail, les portes seront fermées à clé.

(Suspension de la séance à 12 h 53)

 

(Reprise à 15 h 7)

Le Président (M. Pinard): ...et nous avons une décision à rendre concernant...

Décision de la présidence sur une question
de règlement concernant les motifs invoqués
par le ministre du Développement durable,
de l'Environnement et des Parcs pour
refuser de déposer un avis juridique
émanant du Procureur général

Je vais rendre ma décision sur la question de règlement soulevée le 2 décembre dernier par le député du Lac-Saint-Jean concernant la demande de dépôt d'un document qui aurait été cité par le ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs, en vertu de l'article 214 de notre règlement.

Cet article prévoit, et je cite: «Lorsqu'un ministre cite, même en partie, un document, tout député peut lui demander de le déposer immédiatement. Le ministre doit s'exécuter, sauf s'il juge que cela serait contraire à l'intérêt public.»

Un ministre qui cite un document est donc tenu de le déposer si un député le demande, sauf s'il juge que cela serait contraire à l'intérêt public. À cet égard, la jurisprudence a déterminé que le ministre devait avoir effectivement cité un document en totalité ou en partie pour qu'on puisse en exiger le dépôt. La jurisprudence a également précisé que le ministre est le seul juge de l'intérêt public qu'il invoque. Il ne revient donc pas à la présidence de juger de l'opportunité de l'invoquer. Ainsi, lorsqu'un ministre invoque l'intérêt public, la présidence n'a d'autre choix que d'accepter son refus de déposer le document cité.

En l'espèce, le ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs ayant invoqué l'intérêt public pour ne pas déposer l'avis juridique en question, je n'ai d'autre choix que d'accepter ce refus. Je tiens cependant à préciser que le fait que le document soit un avis juridique émanant du gouvernement ne change rien en l'espèce. En effet, rien dans le règlement et la jurisprudence ne permet de faire une distinction entre un avis juridique et tout autre document. Si un ministre cite un document, il doit le déposer, sauf s'il estime que ce serait contraire à l'intérêt public.

À ce propos, je vous réfère à la décision contenue sous le n° 214/8 du Recueil de décisions de l'Assemblée. Plusieurs avis juridiques émanant du gouvernement ont d'ailleurs été déposés à l'Assemblée sans que cela ne fasse l'objet d'une question de règlement, comme en font foi les procès-verbaux de l'Assemblée, notamment les 3 et 4 juin 1998.

M. le critique officiel de l'opposition.

M. Tremblay: Alors, si je comprends bien, si le ministre persiste à ne pas vouloir déposer l'étude qu'il a fait référence en commission, c'est parce qu'il juge que ça va à l'encontre des intérêts des Québécois. Donc, je ne peux que souligner le fait qu'il est très inquiétant qu'une analyse juridique sur un projet de loi sur le développement durable va à l'encontre des intérêts des Québécois, l'intérêt public. Donc, je persiste à dire que c'est très inquiétant, très inquiétant et très déplorable.

n(15 h 10)n

Le Président (M. Pinard): Alors, j'accepte les propos que vous émettez, mais il n'est pas du pouvoir de la présidence de vérifier si effectivement la décision du ministre de considérer que ça va à l'encontre de l'intérêt public est fondée ou pas.

Alors, le président ayant rendu sa décision, je vous prie de l'accepter telle que donnée. Et, à partir de ce moment-ci, je vous soumets humblement que nous allons suspendre quelques instants pour permettre au président de séance, M. Jean Dubuc, de bien vouloir prendre lieu et place à la présidence.

(Suspension de la séance à 15 h 11)

 

(Reprise à 15 h 12)

M. Mulcair: Maintenant ça y est. Je comprends la réaction de mon collègue du Lac-Saint-Jean, parce que c'était la mienne quand j'étais assis dans l'opposition. Ce que j'ai tenté de dire à lui et à son collègue de Masson l'autre jour était très clair, c'est que cette disposition permet à un ministre de refuser pour le motif qu'il vient d'indiquer. Mais ce n'est pas dans l'intérêt du public que les avis juridiques du Procureur général, qui risquent de compromettre la capacité de notre jurisconsulte de faire son travail, soient déposés. Ce que j'ai fait ? puis il peut relever les transcriptions ? je lui ai donné tous les éléments qui étaient pertinents pour l'étude de notre analyse de l'intérêt de l'ajout dans la Charte des droits. C'est plus qu'assez pour lui de se faire une idée, sinon il peut regarder ce que d'autres intervenants ont eu à dire sur la Charte des droits.

Mais la Charte des droits couvre aussi le secret professionnel, et c'est un des principaux motifs qui président à une interprétation constante depuis les 20 dernières années au sein du ministère du Procureur général, qui insiste auprès des ministres, qu'ils soient en commission ou en Chambre, de ne pas déposer les avis juridiques du Procureur général du Québec. C'est ce que j'ai fait. Je lui ai aussi référé une série de décisions par des ministres péquistes. Sa proche collaboratrice connaissait bien le ministre Bégin, qui a déjà eu à refuser à plusieurs reprises, en Chambre et ici, souvent en citant son sous-ministre. J'ai donné des exemples, l'autre jour, du ministre Bélanger et du premier ministre Bouchard qui avaient fait de même.

Donc, je comprends sa tentative, je comprends que c'est frustrant de dire: Bien, c'est cette clause-là qui permet à un ministre de ne pas déposer, mais c'est ça, l'état actuel du droit ici, au Québec.

Le Président (M. Dubuc): Merci, M. le ministre. Juste très peu, parce qu'on va commencer nos travaux. Allez-y, M. le député de Lac-Saint-Jean. Très court.

M. Tremblay: Je veux juste dire que je vous répondrai par la bouche du député de Masson.

M. Mulcair: ...de la bouche du député de Masson.

Des voix: Ha, ha, ha!

Auditions (suite)

Le Président (M. Dubuc): Merci. On va reprendre nos travaux du projet de loi n° 118. Nous avons les représentants de la ville de Montréal qui sont ici présents. Si vous voulez bien vous présenter et présenter votre invité, s'il vous plaît, M. le président.

Ville de Montréal

M. DeSousa (Alan): Alan DeSousa, membre du comité exécutif avec la ville de Montréal, responsable pour le développement durable et le développement économique. Et avec moi M. Martin Corbeil, qui est mon adjoint. Donc, on vous remercie pour l'occasion de vous adresser quelques mots.

Le Président (M. Dubuc): Vous avez 15 minutes pour présenter vos mémoires, 15 minutes sur le côté ministériel et 15 minutes sur le côté de l'opposition. On vous laisse la parole.

M. DeSousa (Alan): Merci, M. le Président. Merci, M. le ministre Mulcair, et merci à tous les membres de la commission pour cette occasion de partager nos commentaires sur la loi n° 118. Et merci pour l'invitation de participer sur cette étude sur la loi n° 118.

Je dois féliciter le gouvernement du Québec dans son engagement de faire du développement durable une réalité, M. le Président. Je pense que le développement durable du Québec et le projet de loi qui l'encadre démontrent que le gouvernement est sérieux et est vraiment engagé.

La ville de Montréal est, elle aussi, déterminée à assurer le développement durable sur notre territoire. Nous le prouvons à la fois par l'adoption de grands outils de planification et par la mise en place de mesures très concrètes. Par exemple, nous avons récemment adopté notre plan d'urbanisme, notre politique de protection et de mise en valeur des milieux naturels, notre politique de l'arbre, notre premier plan stratégique de développement durable de la collectivité montréalaise, et tous ces plans et ces politiques ont pour objectif principal de faire de Montréal une ville où il est agréable de vivre dans un environnement sain.

Notre plan stratégique de développement durable a été élaboré avec une centaine de partenaires, dont la Direction régionale de Montréal, Laval, Lanaudière et Laurentides du ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs, et ensemble nous avons identifié les enjeux de développement durable à Montréal, les orientations à privilégier et surtout les actions qui devraient être prises. Ainsi, 24 actions à court terme ont été identifiées. Elles se regroupent autour de quatre orientations prioritaires, et ces actions sont en voie de réalisation tant par la ville et aussi par ses partenaires. Pour vous donner un exemple des engagements que nous avons pris à court terme, nous avons amorcé récemment une vaste campagne de formation de nos employés et de sensibilisation des citoyens contre la marche au ralenti et inutile des véhicules. Et, pour nous assurer d'avoir un impact significatif sur la qualité de l'air, cet effort de communication est accompagné d'une réglementation. En effet, le projet de règlement sur la marche au ralenti et inutile sera prochainement transmis pour adoption à chaque conseil d'arrondissement.

Et c'est juste un des projets que nous mettons en place pour agir pour les changements climatiques. Comme vous le savez, à ce moment-là, nous avons la Conférence sur les changements climatiques, à Montréal, et je pense qu'on est partie prenante, on réalise l'importance de ce que la ville peut faire pour avoir un impact. La ville de Montréal s'est fixée comme objectif de réduire de 20 % ses émissions de gaz à effet de serre d'ici 2012 par rapport au niveau de 2002.

Dans la première phase de consultation portant sur le projet du Plan de développement durable du Québec, en mars 2005, la ville avait déposé un mémoire dans lequel nous faisions valoir plusieurs points qui nous semblaient importants. Nous sommes heureux de constater que certains de ces points ont été pris en considération et nous sommes particulièrement satisfaits de savoir que les municipalités devront être consultées avant la prise de tout décret d'assujettissement à la loi qui les concerne. Si une telle consultation devait avoir lieu, nous souhaitons évidemment avoir le temps nécessaire pour réagir et bien analyser la portée financière et politique d'un tel décret. Et j'insiste cependant sur le fait que, si Montréal se voit liée à la mise en oeuvre de la stratégie québécoise de développement durable, cela ne peut se faire sans harmonisation et sans les moyens financiers qui l'accompagnent.

Dans notre plan de développement durable, adopté en avril 2005, nous avons déjà déterminé nos priorités et débuté la mise en oeuvre des actions concrètes. Ainsi, il nous paraît essentiel que soit instauré un mécanisme de concertation entre la ville et le gouvernement du Québec sur le développement durable. Ce mécanisme viendra s'assurer de la cohérence des actions de développement durable. Et donc les responsabilités, les moyens de mise en oeuvre et les échéanciers seront connus et partagés.

Nous notons aussi que le principe de subsidiarité a été intégré au niveau du projet de loi. Nous sommes d'accord avec le principe, mais, je le répète, la délégation de pouvoirs et de responsabilités au niveau municipal n'est valable que si les moyens financiers accompagnent nos nouvelles charges. Comme vous le savez, on avait déposé le budget avant-hier pour la ville de Montréal, pour 2006. Nous vivons avec des contraintes financières significatives et pour être capables de respecter divers engagements que nous avons pris.

Comme vous le savez, le financement des mesures favorisant le développement durable constitue un élément central de ce projet de loi. Et d'ailleurs, lors de la consultation publique, au printemps dernier, la ville avait salué la création du Fonds vert pour soutenir les actions de développement durable. L'expérience montre que le financement de telles mesures contribue non seulement à stimuler l'innovation, mais aussi à générer des économies. On n'a qu'à penser aux mesures d'efficacité énergétique dans les bâtiments, qui s'amortissent au bout de quelques années.

n(15 h 20)n

Cependant, la ville demeure préoccupée sur le financement à venir des actions de développement durable qui relèvent des compétences municipales. Il y a tout lieu de croire qu'une bonne partie de l'argent du Fonds vert proviendra des redevances reliées à l'eau et à l'élimination des déchets, la loi n° 130, et la ville craint toutefois que les fonds ne couvrent pas la hausse appréhendée dans les dépenses dans ces deux secteurs.

Rappelons qu'en matière de gestion de l'eau la ville a lancé un plan d'investissement de 4 milliards de dollars étalé sur une période de 20 ans, et la ville avait l'intention d'avoir des dépenses de 20 milliards de dollars pour les prochains 20 ans pour mettre leurs infrastructures dans un état acceptable et s'assurer de leur pérennité. Le financement de ce plan nécessite la participation des gouvernements supérieurs pour environ 1 milliard de dollars. Pour sa part, la ville a introduit une tarification auprès des grands consommateurs ainsi qu'une contribution spéciale à l'ensemble des propriétaires résidentiels et non résidentiels, qui est versée dans un fonds municipal dédié à l'eau. Il apparaît donc illogique que Montréal contribue à un nouveau fonds dédié à l'eau alors qu'elle est en situation de manque à gagner.

Et, en matière de matières résiduelles, les revenus issus de la loi n° 102 sont administrés par RECYC-QUÉBEC. Celui-ci verra à verser aux municipalités les compensations pour la récupération des matières recyclables. Rappelons toutefois que le monde municipal s'attend à ce que 100 % des coûts de la collecte des matières recyclables soient assumés par les entreprises conformément au principe de responsabilité élargie des producteurs.

Quant à elles, les redevances provenant de la loi n° 130 seront vraisemblablement versées au Fonds vert. Nous estimons que les revenus prévisibles de la loi n° 102 et n° 130 ne pourront pas combler le manque à gagner des coûts municipaux supplémentaires en vue d'atteindre les objectifs de la Politique québécoise de gestion des matières résiduelles 1998-2008. Il apparaît donc injustifié que la ville ait à payer des redevances afin d'alimenter une partie des montants du Fonds vert destinés aux municipalités. Par définition, une redevance, c'est une forme de taxe ou de paiement qui est exigé en contrepartie de l'utilisation d'un service public, et ce sont les municipalités qui assument la gestion des matières résiduelles et l'eau.

En somme, bien que la ville accueille favorablement la création du Fonds vert, plusieurs éléments d'inquiétude persistent, en particulier sur la contribution des villes à ce fonds et sur les montants qui leur seront accordés.

Et, considérant notre rôle de leader en matière de développement urbain durable, nous souhaitons que le gouvernement reconnaisse et soutienne les actions en cours découlant de notre plan stratégique de développement durable ou de tout exercice similaire. Et à ce titre certaines de nos actions en matière de développement durable demandent des efforts s'étalant sur plusieurs années. C'est pourquoi la ville estime qu'il serait important d'obtenir un cadre financier clair et à long terme pour le soutien des actions qui auront été conjointement identifiées.

Nous nous attendons à ce que les sommes destinées au Fonds vert servent uniquement aux actions de développement durable et qu'elles ne puissent pas être versées au fonds consolidé. Et, malgré nos préoccupations, nous tenons néanmoins à féliciter à la fois le ministre et à féliciter le gouvernement pour avoir élaboré un plan de développement durable et pour être engagés à intégrer le concept au fonctionnement de l'État québécois. La ville réitère donc son offre de collaboration avec le gouvernement du Québec à titre de région laboratoire dans l'application de certaines des mesures qui feront l'objet de stratégies de développement durable.

Merci beaucoup pour votre attention, et il me fera plaisir de répondre à des questions.

Le Président (M. Dubuc): Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Mulcair: Merci beaucoup, M. le Président. Il me fait extrêmement plaisir de souhaiter la bienvenue aux représentants de la ville de Montréal, d'autant plus que j'ai eu l'occasion, très souvent au cours de l'année, de rencontrer M. DeSousa. Alors, on se côtoie très souvent parce qu'on est souvent dans les mêmes conférences, et je dois vous dire que je connais M. DeSousa depuis au-delà de 20 ans; c'est quelqu'un pour qui j'ai toujours la plus grande admiration pour sa droiture et son sens du travail.

Je vais commencer, M. le Président, en adressant une question qu'on a déjà été capables de discuter aujourd'hui avec la ville de Québec, et c'est l'application des principes 14 et 16, qui sont contenus dans le projet de loi, à l'égard de l'eau. Montréal a certes connu des défis de taille avec son système de distribution d'eau, notamment au niveau de sa porosité. C'est un beau mot, ça, hein, sa «porosité». Il y a beaucoup de trous, mais on est en train de s'y attarder. Mais, une des raisons pour lesquelles on est arrivé là, c'est qu'on n'a jamais donné une valeur pour la distribution. Je vais le dire autrement. M. DeSousa est un comptable agréé. Je suis sûr qu'il va apprécier mieux qu'on l'aborde sous l'angle purement économique.

À la fin de la Deuxième Guerre mondiale, quand l'avènement du nucléaire a été perçu comme étant une panacée pour la génération de l'électricité, au Congrès américain, il y a une citation assez célèbre d'un «congressman» qui disait: «It's going to provide electricity so cheap you won't even have to meter it.» C'était devenu une sorte de «buzzword» pour le monde nucléaire: «Electricity too cheap to meter».

Mais je vous parie que, si on donnait l'électricité comme on a tendance à donner l'eau, notamment au résidentiel, on risquerait fortement d'avoir un réseau de distribution qui serait analogue au réseau qui existe pour l'eau, plein de trous. Parce que celui qui donne a très peu d'incitatifs économiques de le rendre plus performant. Celui qui le reçoit n'a aucun incitatif pour protéger, respecter et être raisonnable avec la ressource.

Ça, c'est ce qui est contenu à l'article 14, et c'est pour ça que l'article 16 parle de l'internalisation des coûts. Et la Politique nationale de l'eau utilise une autre expression, qui est «utilisateur-payeur», mais il veut généraliser. Je sais, sauf erreur de ma part, que les anciennes villes de Saint-Laurent, de Saint-Léonard, de ville LaSalle et une autre que je n'arrive pas à trouver ? il y en avait quatre, si mon information est bonne ? étaient dotées de compteurs. Il y avait des compteurs, n'est-ce pas, M. DeSousa, au niveau résidentiel dans votre ville, dans la ville de Saint-Laurent?

M. DeSousa (Alan): Pas juste résidentiel, mais...

M. Mulcair: Industriel...

M. DeSousa (Alan): ...industriel...

M. Mulcair: ...commercial...

M. DeSousa (Alan): ...commercial...

M. Mulcair: ...et institutionnel.

M. DeSousa (Alan): ...et institutionnel.

M. Mulcair: O.K. Maintenant, tout en vous remerciant pour l'appui que la ville de Montréal donne à notre plan de développement durable ? et la ville s'est déjà dotée, grâce à vous, M. DeSousa, d'un important plan de développement durable aussi ? comment est-ce que vous conciliez votre appui pour notre projet de loi et les principes 14 et 16 avec le fait, maintenant que l'ancienne ville de Saint-Laurent va être intégrée à la ville de Montréal, que les compteurs résidentiels seront caducs?

Le Président (M. Dubuc): Allez-y, M. le président.

M. DeSousa (Alan): Bien, M. le ministre, merci pour votre accueil, puis aussi c'est un plaisir de vous voir assez souvent.

Je dois vous dire que vous avez raison, dans le sens que, pour des années et des années, les gouvernements antérieurs n'ont jamais eu ni l'intérêt ni le désir politique pour investir dans les infrastructures. Pourquoi? Pas nécessairement sur la question de l'utilisation; parce que l'eau était cachée. Quand vous creusez... Personne n'a eu la gloire de couper un ruban parce qu'ils ont fait une réparation d'un égout. Pas de gloire politique à ça, on comprend bien. Il y a beaucoup d'autres choses qui sont plus valorisantes, si vous avez une bibliothèque, un centre sportif ou autre.

Donc, dans un sens, sur une période de temps, l'état des infrastructures tombait en décrépitude. Et puis je vous avoue qu'arrivant en fonction c'était un des premiers défis auxquels j'ai dû faire face, pour voir par quels moyens on peut le faire.

Nous, on avait commencé en adressant les deux points principaux, mais encore c'était une raison comme gestionnaire. En gestionnaires, nous avons toujours des ressources limitées, et il faut faire des choix où on peut avoir le meilleur impact sur les citoyens ou le meilleur impact sur notre communauté.

Donc, je ne peux pas demander à des citoyens de faire un effort, si effectivement, comme, vous, vous avez dit tantôt, il y a 40 % de l'eau qui est perdue par les fuites. Et puis en effet le vrai danger pour ça, comme vous pouvez bien comprendre, c'est la question de réclamations qui viennent. On a eu le tuyau à Pie IX...

M. Mulcair: La question de réclamations?

M. DeSousa (Alan): Des réclamations, c'est ça. Ça, c'est le danger financier, parce qu'au bout de la ligne, avec Pie IX, où il y a le tuyau de 6 pi qui a pété, en 1992, août 1992... en 2002, excusez-moi, en 2002, les coûts pour la réparation du tuyau étaient de 500 000 $, mais les réclamations dépassent 12 millions. O.K.? Donc, ce n'est pas dans les coûts d'opération, mais c'est vraiment dans les risques que ça fait vis-à-vis la gestion.

n(15 h 30)n

Bon, nous, dans un sens, on avait consacré nos efforts en deux grands endroits. Le premier était pour s'assurer qu'on adresse la question de réparation sur une base récurrente, et, deuxièmement, les grands utilisateurs, parce qu'effectivement selon nos estimés, nous, nous avons déterminé que 62 % de l'eau produite à Montréal, sans compter la question des fuites, était utilisée par le secteur ICI, le secteur industriel, commercial et institutionnel ? 62 %. Pour mettre en place les compteurs, ça nous prendrait cinq ans, 23 000 compteurs, et un coût d'à peu près 35 millions de dollars.

Côté résidentiel, pour lequel vous avez raison... Dans certains secteurs, Saint-Laurent, LaSalle, Saint-Léonard, il existait des compteurs, mais, pour mettre les compteurs au niveau résidentiel, les coûts estimés, c'est 130 millions de dollars, pour les gens qui utilisent 38 % de l'eau produite. Donc, pour nous, c'était un genre de «no-brainer», dans la question que, si on avait de l'argent et tout le temps nécessaire pour le faire, et tout, on serait ouverts à le considérer. Mais, en faisant des choix avec de l'argent limité, on avait choisi d'aller régler le problème des fuites et, deuxièmement, de s'assurer, dans 21 des 27 arrondissements où il n'y avait pas de compteurs pour le secteur ICI, institutions, industries et commerces, qu'on pourrait commencer comme ça.

Chez nous ? je suis maire de Saint-Laurent ? et puis Bombardier, Canadair paient selon leur utilisation, mais je peux vous donner beaucoup d'autres exemples sur notre territoire où ce n'est pas le cas. Et je ne pense pas que les citoyens pourraient considérer les montants qu'eux vont payer, que le montant, c'est 38 % du total, quand effectivement le secteur industriel n'est pas considéré, et la ville elle-même n'a pas fait son devoir pour faire les réparations. Donc ça, c'est les raisons pourquoi, nous, on avait choisi par priorisation et pour avoir des ressources limitées.

Le fonds de l'eau qu'on avait créé dans la première année... Je l'ai dit tantôt, c'est 10 milliards de dollars qu'on va dépenser dans les prochains 20 ans, 6 milliards déjà viendront par les taxes, donc qui sont déjà reflétées dans le compte de taxes de la ville de Montréal, mais il y a un autre 3 milliards qu'on va demander à des citoyens de faire une contribution. Donc, 9 des 10 milliards, dans les prochains 20 ans, viendront des contribuables. Et, dans le contexte où on avait fait le fonds de l'eau, où, en 2004, c'étaient 25 millions, en 2005, c'étaient 45 millions, en 2006, 65 millions, donc, d'ici à 10 ans, il y aura 200 millions d'argent neuf qui doit être investi dans le système.

On ne peut pas vivre avec ça, mais on avait choisi l'harmonisation par le secteur industriel, toujours en tenant compte qu'il y a des bénéfices, comme dans certaines des autres villes qui vont être reconstituées ou dans certains secteurs que vous avez identifiés tantôt, où les compteurs existent, sur la question de l'utilisation dans le secteur résidentiel.

Le Président (M. Dubuc): M. le ministre.

M. Mulcair: Bien, je remercie M. DeSousa pour sa réponse détaillée, puis je comprends, j'étais au courant du choix d'aller avec l'ICI en premier pour l'harmoniser, je comprends bien aussi, le terme est bien choisi. Mais je veux poser une question très simple: Est-ce qu'il n'y a rien qu'on peut faire pour que, dans les quelques villes, les quelques anciennes villes qui feront dorénavant partie de la ville de Montréal, on ne prenne pas un pas en arrière vis-à-vis d'une démarche de développement durable? Est-ce qu'il n'y a vraiment rien à faire?

M. DeSousa (Alan): À date, M. le ministre, on n'a créé aucune... Moi, je suis maire de Saint-Laurent, où il y a des compteurs; chez moi, j'en ai. Si j'avais une fuite silencieuse dans la toilette, je vais bien avoir la réponse rapidement avec le compteur, comme vous avez mentionné tantôt, mais...

M. Mulcair: Mais vous n'allez plus relever, vous n'allez plus faire de relevé des compteurs?

M. DeSousa (Alan): Non, non. Actuellement, les compteurs sont là, les compteurs sont fonctionnels. J'ai reçu mon compte de taxes ce mois-ci, que je dois payer pour la ville de Montréal, et puis je vais le payer, basé sur le relevé qui était là, que je vais fournir, et, à toutes fins pratiques, en 2006, on va faire la même chose. Donc, à date, les compteurs sont là, ils sont fonctionnels. Vous avez soulevé la question de LaSalle? LaSalle aussi, c'est un autre coin où les gens tiennent fort à avoir les compteurs.

M. Mulcair: C'est une information importante, donc. Si je vous comprends bien, vous êtes en train de me rassurer, que ma perception était carrément erronée, que la ville de Saint-Laurent va continuer à faire le relevé de ses compteurs d'eau au résidentiel et que les citoyens de votre arrondissement seront facturés toujours selon leur utilisation de l'eau.

M. DeSousa (Alan): Parlant aujourd'hui... À chaque année, il y a... Chaque citoyen qui recevait la facture, le relevé, où on remplit le montant... Et ça ... la facturation est basée. Il y a des tests où les inspecteurs de la ville vont faire les vérifications. Et, je dois vous dire, je souligne la question qu'en 2007, dans la loi que le gouvernement a proposée, il y a une harmonisation qui est exigée par le conseil d'agglomération. J'ai entendu que le décret pour le conseil d'agglomération a maintenant été adopté ou qu'il est en voie d'être adopté. Et, si cette date de 2007 est toujours maintenue, c'est sûr et certain, dans le contexte d'harmonisation des tarifs, les villes ou les arrondissements seront forcés de considérer par quels moyens ils harmonisent leur taux de taxe, soit en 2007 selon la loi ou à l'intérieur de l'autre loi, qui va jusqu'en 2021. Donc, cette analyse dépend du contenu du décret que le gouvernement est en train de promulguer.

Le Président (M. Dubuc): M. le ministre.

M. Mulcair: L'harmonisation donc, pour conclure là-dessus, pourrait aller dans le sens d'une généralisation de cette bonne pratique dont vous étiez un modèle, à Saint-Laurent, vis-à-vis les autres. Pour reprendre le terme qui est souvent utilisé par le député de Lac-Saint-Jean, vous allez contaminer. Avec une bonne pratique, c'est tout à fait possible. C'est la bonne pratique qui peut se répandre.

M. DeSousa (Alan): À ce moment-là, tout est sur la table, M. le ministre.

M. Mulcair: O.K. Bien. Merci.

Le Président (M. Dubuc): Merci. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Le ministre, ça fait deux ans et demi qu'on sent qu'il est fortement favorable aux compteurs d'eau et... Mais qu'est-ce qu'un compteur d'eau aurait pu changer comme situation, à la ville de Montréal, compte tenu que les fuites d'eau sont dans les tuyaux partout à travers la ville?

Parce que je comprends le raisonnement quand... Ce qu'on ne paie pas, on peut le dépenser. Et je vais prendre le terme du ministre ce matin: Il y a des Elvis Gratton qui lavent leur VUS, puis remplissent leur piscine, puis consomment beaucoup d'eau comparativement à d'autres qui y font attention.

Mais, qu'il y ait compteur d'eau ou pas, tout à l'heure, ce que vous avez dit, c'est que, si le système de tuyauterie de la ville de Montréal est en si mauvais état, c'est parce qu'on ne le voit pas. Alors, est-ce que vous pensez que... Si, depuis 20 ans, il y avait eu des compteurs d'eau partout à travers la ville, dans les habitations, est-ce que ça aurait changé quelque chose aux tuyaux sous la terre?

M. DeSousa (Alan): Bien, il faut comprendre que, nous, on est dans une situation où, aujourd'hui parlant, on a une très bonne appréciation pour les ressources que nous avons à gérer.

J'arrive de Changements climatiques, à Montréal, la grande conférence, et je dois vous dire que toutes les villes étaient là, et toutes les inquiétudes par nos citoyens et par les villes pour être capables de faire un effort.

Dans ce contexte, on est en train de changer une culture, on est en train de changer une mentalité. On est en train de changer la façon de le faire. Et dans un sens je dois dire que le ministre, aussi dans son effort, essaie de faire la même chose dans sa façon propre. Mais c'est important que les gens réalisent que, quand vous parlez de l'environnement, c'est des ressources importantes qui vont être pas juste pour nous, mais pour les générations à venir.

Donc, en parlant de la question de l'état des infrastructures, oui, en 30 ans... J'en parlais parlé avec Sid Stevens qui était là dans le temps de Jean Drapeau. Il m'a dit: Alan, dans mon temps, on faisait le patchage. Et je vous avais déjà expliqué pourquoi il n'y avait jamais eu une gloire politique pour vraiment focusser sur ça.

Sur la question du compteur, oui, les compteurs sont importants. Et puis ça, c'est la raison pourquoi, nous, on avait déjà commencé avec les grands utilisateurs. Avec les industries, commerces et institutions, on avait déjà commencé tout cet effort pour mettre 23 000 compteurs, pour qu'au moins les industries qui en bénéficient soient immédiatement capables d'en réaliser la valeur.

Un restaurant peut-être va être un des... qui va payer plus, mais peut-être un autre type de magasin qui vend des souliers, par exemple, ne dépense pas autant dans l'eau. Donc, dans ce sens, on veut s'assurer que les industries, les institutions, les commerces réalisent l'importance. Si Molson va utiliser de l'eau, bien à ce moment-là c'est important, dans le sens du ministre, où ils vont payer le plein coût de l'eau, mais c'est important que ça se reflète dans son produit.

Et je dois vous dire... Puis je ne veux pas mettre le blâme du passé, mais les vrais coûts de l'eau n'ont jamais été comptabilisés, ni dans les commerces et les institutions qui ont utilisé l'eau pour leurs produits. Donc, dans ce sens, pour nous, il faut être capables de marcher en parallèle, en même temps faire les réparations nécessaires, mais en même temps s'assurer que nous avons un système de gestion qui nous permettra de gérer l'eau comme une ressource précieuse, comme elle est actuellement.

Le Président (M. Dubuc): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: J'aimerais changer de sujet. Si on parlait de vos objectifs en matière de gestion des matières résiduelles, qu'il semble que vous ayez beaucoup de difficultés à atteindre. Quelles sont les perspectives d'avenir en la matière?

n(15 h 40)n

M. DeSousa (Alan): Bien, moi, je suis un homme d'action, un homme assez réaliste. Et je sais que les objectifs qui sont là, dans la politique québécoise pour les déchets 1998-2008, sont des objectifs importants pour notre société. Mais en même temps je dois vous dire que, travaillant sur le terrain, il faut qu'on s'assure que, oui, ça devienne un projet de société. Je viens de gagner mon élection, il y a un mois, et, je dois vous dire, ça va être, pour moi personnellement et puis, je présume, pour beaucoup de mes collègues, un des dossiers majeurs pour nous vis-à-vis des citoyens du Québec dans nos municipalités respectives. Nous avons fait un effort, et puis on va continuer de faire des efforts, mais en même temps je pense que, pour changer les choses et atteindre les objectifs nécessaires, il faut qu'il y ait un cadre financier qui permette aux municipalités où la volonté politique est là d'atteindre ça.

Dans chaque dossier que j'avais traité à date pour l'environnement, puis j'ai fait ça depuis quatre ans, politique de milieu naturel, la ville de Montréal a consacré l'argent nécessaire, 36 millions. Dossier de l'eau, on avait consacré, pour les prochains 10 ans, 3 milliards de plus. Le règlement des pesticides, un des règlements les plus sévères au Québec, était attaché avec le financement. Et même notre politique de développement durable, qui a été lancée en avril, a été intégrée avec nos budgets propres, pas de l'argent neuf, mais le budget propre, toujours en repriorisant les divers dossiers en question. Donc, pour nous, c'est une question de s'assurer que ce message passe.

Mais c'est sûr et certain qu'avec les moyens que nous avons les déchets deviendront... Non seulement on avance, et j'ai le rapport ici qui va être divulgué la semaine prochaine, sur l'état pour 2004 pour toute la ville de Montréal. Et, nous, on avait déjà lancé non seulement le plan de la CMM, qui a été adopté en juin 2004, mais, à la ville de Montréal, en avril 2005, notre planification pour notre plan directeur des matières résiduelles. Donc ça, c'est une des premières étapes. Et, la deuxième étape, de s'assurer, avec l'agglomération qui va maintenant arriver en fonction, avec les villes reconstituées et les arrondissements, qu'on peut continuer d'avancer. Mais, pour les programmes neufs, pour les infrastructures, c'est sûr et certain, le cadre financier doit être là. Et je suis comptable, comme M. Mulcair a dit tantôt. Et puis, si on accorde la priorité à un dossier, il faut aussi s'assurer que l'argent est aussi priorisé pour ça.

Le Président (M. Dubuc): Merci. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Je change de sujet encore. Pensez-vous que le pont de la 25, c'est du développement durable?

Le Président (M. Dubuc): ...

M. DeSousa (Alan): Bien je pense que... Encore, je pense que vous avez entendu le mot que je vais utiliser souvent, le mot de «priorisation». O.K.? Puis je pense que, dans notre... Parlant aujourd'hui de l'état où on est, je pense qu'il existe un consensus, à tous les divers niveaux, pour le transport en commun. On a fait un effort considérable pour s'assurer que, pour des raisons de qualité de l'air, qualité de l'environnement et autres, les questions du transport en commun deviennent la priorité numéro un. Dans ce sens, oui, la population supporte ça, oui, la plupart des élus supportent ça, et en même temps je pense que, les autres niveaux du gouvernement, on avait entendu ça.

Le pont de la 25, ça se situe et ça tombe dans le plan d'urbanisme de la CMM, donc où je siège. Et on réalise que, dans le développement de la CMM, avec les 63 villes, il y a une possibilité, dans le cadre de développement ultime, que, oui, le pont puisse se situer là-bas. Mais, pour le court terme et sur le moyen terme, qu'on comprenne bien qu'il y a des ressources limitées, et on va offrir aux citoyens a priori de prendre le transport en commun. On pense que les projets de transport en commun doivent être priorisés. Et encore c'est une question de priorisation, donné que l'argent est limité. Si l'argent est illimité, bien à ce moment-là on peut faire tout, réaliser tous ces projets. Donc, ce n'est pas une question de... Est-ce que le pont de la 25 est priorisé? Nous, on pense, avec tout le respect, que le transport en commun doit avoir la priorité.

Le Président (M. Dubuc): M. le député de Lac-Saint-Jean? M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Bonjour à vous. Dans la ville de Montréal, là, est-ce que le coût, j'imagine, pour chaque résidence pour l'alimentation en eau, il est établi? Le coût pour l'eau. Le coût pour les vidanges, est-ce qu'il est établi? Mettons, chaque résidence, ça coûte combien par année pour recueillir les vidanges, les traiter? Est-ce que vous avez... Est-ce que ça fait partie de la taxe foncière ou si c'est une...

M. DeSousa (Alan): Actuellement, je dois vous dire que ? je vais répondre à votre question en deux volets ? sur la question de l'eau, à présent, comme je vous ai dit tantôt, pour nous, il faut qu'on commence à faire un genre de «full costing», il faut s'assurer que tous nos coûts sont reflétés. Dans le passé, on a vu souvent que les actifs ont été dépréciés. En conséquence, il n'y avait pas un coût de remplacement attribué à ces actifs, et en conséquence les prix de l'eau ne reflétaient pas le vrai coût. Je vous donne des exemples. L'usine d'Atwater, qui était là, dans Verdun, qui est une des deux grosses usines qui alimentent 85 % de la population de Montréal, bien, cette usine était construite en 1912. La valeur de ça, ce n'est même pas reflété. Donc, nous, il faut que ce soit reflété dans notre cadre financier, il faudrait s'assurer pour tous les investissements qu'on va le faire, soit au niveau des usines d'eau potable, soit au niveau de toute la tuyauterie des égouts et des aqueducs qui sont dans les rues.

Et, troisièmement, plus que 1 milliard, le traitement des eaux usées avec les usines qui sont dans l'est de Montréal. Ça, ça fait partie de ces coûts pour qu'au moins les Montréalais vont payer pour ça. On a déjà commencé, comme je l'ai expliqué tantôt, toute la question d'harmonisation dans le secteur ICI, les grands consommateurs et le secteur industriel, commercial et institutionnel. Et l'objectif de ça, d'être capables d'harmoniser non seulement l'utilisation, mais aussi les coûts en question pour que les gens paient selon leur utilisation. Donc, dans ce sens, oui, notre modèle commence à inclure tous ces coûts.

Sur la question des déchets, je dois vous dire que le modèle n'est pas si avancé que ça. Nous avons actuellement, sur l'île de Montréal, plusieurs personnes qui paient selon leur montant produit. Il y a des tarifs dans certains des arrondissements où il y a des montants forfaitaires. Mais je suis persuadé que, si on accorde la même importance sur la question des déchets, le traitement et la valorisation des matières résiduelles, on va arriver avec une formule qui est non seulement équitable pour la population, mais qui reflète aussi les coûts ultimes, pas juste les coûts de transport, la collecte des transports, mais aussi la valorisation et la disposition ultime.

M. Grondin: Je vous emmenais là-dessus parce que j'ai une propriété à Montréal, j'en ai une à Saint-Jules de Beauce, qui est une petite paroisse de 600 habitants, puis ça me coûte plus cher de taxes à Saint-Jules que ça me coûte à Montréal.

M. DeSousa (Alan): Mais je dois vous dire qu'il faut comprendre qu'en même temps qu'on... Ce n'est pas une question de taxes, c'est une question de s'assurer où est-ce que vos déchets sont envoyés. Souvent, c'est des coûts de transport, souvent, c'est la question du coût de l'essence, parce que ça a augmenté cette année, mais ça, c'est des éléments qui sont reflétés dedans. Et en même temps je dois vous dire que, sachant très bien que dans le futur ça deviendra un enjeu important avec les sites d'enfouissement qui vont être réduits, je suis certain que ça va être un des éléments importants. La question deviendra toujours: Par quels moyens est-ce qu'on s'assure que les gens paient pour ce service? Parce qu'en même temps qu'on parle des taxes à la consommation ? et je parle maintenant avec un chapeau de comptable ? en même temps on sait que les taxes municipales, les taxes foncières sont régressives, et ça affecte les personnes qui sont les plus démunies de notre société, dans le sens qu'elles les frappent le plus. Donc, on essaie de toujours trouver des solutions fiscales pour s'assurer que soit les gens sont capables de payer soit sur leur capacité de payer ou, d'autre part, au moins, il y a des mesures basées sur la consommation, qui permettent d'avoir un effet incitatif pour réduire leur consommation de cette ressource ou contribution aux déchets.

M. Grondin: Je vais vous apporter sur un autre sujet.

Le Président (M. Dubuc): M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Avez-vous déjà envisagé avec... parce qu'il y a plusieurs intervenants qui ont passé ici, là, depuis quelques jours, et puis... avec les matières résiduelles, la récupération, et tout ça, de transformer ça en énergie? Plusieurs nous ont apporté des solutions. Puis je vois la ville de Montréal avec les tonnes de recyclage qu'ils peuvent produire, toute l'énergie qu'ils pourraient produire. Alors, au lieu d'être une dépense, ce sera une économie.

M. DeSousa (Alan): Je peux vous répondre ça en deux volets. Le premier volet était qu'on vit dans l'ombre d'une cause qui a impliqué la compagnie Foster Wheeler, qui avait un certain temps prévu un incinérateur dans l'est de Montréal, que la population à l'époque, en 1993, avait refusé. C'est passé au BAPE, et même le BAPE avait... L'Ordre des ingénieurs, partout, tout le monde était contre. Donc, cette notion d'énergie par incinération a été considérée par un bon nombre de municipalités, dont, je pense, 26 des 28 municipalités sur l'île de Montréal, à l'époque. Et encore la cause n'est pas finie encore.

n(15 h 50)n

Ayant dit ça, à la ville de Montréal, oui, on allait toujours voir par quels moyens on peut convertir ces ressources pour une certaine valeur. Et je vous donne l'exemple du centre environnemental Saint-Michel qui existe sur Montréal, qui est un ancien dépotoir, où on est capable de capturer le méthane qui normalement va aller dans l'atmosphère et qui va contribuer aux gaz à effet de serre. Donc actuellement 83 % des gaz à effet de serre de la ville de Montréal, entre 1990 et 2002, ont été capturés et convertis en électricité par la compagnie Gazmont qui a une usine là-bas. Ça nous a permis, comme vous avez dit tantôt, de rentabiliser le méthane pour quelque chose qui est bénéfique, de réduire notre contribution aux gaz à effet de serre. Et, deuxièmement, aujourd'hui, quand je vais parler aux gens à la Conférence sur les changements climatiques, ils disent: Wow! La ville de Montréal est avant-gardiste dans leur décision, qui à l'époque peut-être n'a pas été considérée pour des raisons environnementales, mais maintenant, aujourd'hui, apporte des résultats.

Le Président (M. Dubuc): En concluant, M. le maire.

M. DeSousa (Alan): C'est bon.

Le Président (M. Dubuc): C'est bien. M. le ministre.

M. Mulcair: Il ne me reste qu'à remercier les gens de la ville de Montréal pour cette présentation des plus intéressantes. Je vais joindre ma voix à celle du député de Lac-Saint-Jean en souhaitant que, notamment à l'égard de la gestion des matières résiduelles, on puisse ensemble travailler très fortement et obtenir de meilleurs résultats.

Je souhaite, si je peux me permettre d'exprimer un souhait tout simplement, que vous nous aidiez à infléchir le blocus qu'on subit à la CMM pour l'adoption d'un plan de gestion des matières résiduelles conforme. Ça commence à être embarrassant pour tout le monde, en ce sens que j'ai des municipalités à travers le Québec, des grosses municipalités, comme la ville de Québec, et des petites municipalités qui n'ont aucun problème à faire adopter un plan de gestion des matières résiduelles conforme à la politique 1998-2008. Je souhaite que, vous et moi et les autres intervenants, on agisse rapidement là-dedans. Il n'y a pas de raison que ça reste là.

Mais il va y avoir des outils économiques, puis les outils économiques vont aller à ceux qui rencontrent la politique; puis ceux qui ne la rencontrent pas vont payer dedans, mais ils ne vont pas pouvoir en profiter. J'espère que ça avoir l'effet voulu. C'est ce que j'appelais, pour l'eau, tantôt un outil économique aussi. Il va falloir que cette situation change, c'est la loi qui l'exige.

M. DeSousa (Alan): M. le ministre, merci pour l'offre. Comme je vous dis, j'avais toujours pensé que je n'étais pas partie du problème, je suis partie de la solution.

Le Président (M. Dubuc): Merci, M. le maire, merci, M. Corbeil. Je demanderais au Réseau québécois des groupes écologiques de bien s'avancer, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Dubuc): On reprend les travaux. M. le député de Beauce-Nord... Mme la présidente, si vous voulez bien vous présenter ainsi que votre invité.

Mme Pelletier (Gabrielle): J'appuie ici?

Une voix: ...

Réseau québécois des groupes
écologistes (RQGE)

Mme Pelletier (Gabrielle): Bon, j'appuie nulle part. Oui, bonjour, je suis Gabrielle Pelletier, présidente du Réseau québécois des groupes écologistes. Mon collègue.

M. O'Narey (Ronald): Ronald O'Narey, directeur du Réseau québécois des groupes écologistes.

Le Président (M. Dubuc): Merci. Vous avez 15 minutes pour présenter votre mémoire, 15 minutes de chaque côté. On vous laisse la parole.

Mme Pelletier (Gabrielle): D'accord, merci. On est bien contents de pouvoir parler aujourd'hui. Nous sommes déjà venus une première fois, et ça n'avait pas été fructueux, mais là nous sommes contents de pouvoir au moins vous dire notre point de vue sur le projet de loi n° 118.

Tout d'abord, j'aimerais quand même présenter le Réseau québécois des groupes écologistes, qui est un réseau qui est actif depuis plus de 22 ans maintenant et qui a pour mission la protection de l'environnement par la promotion, la mise en relation des groupes, la défense des dossiers des groupes environnementaux de base, la recherche et la divulgation d'informations environnementales au Québec.

Le Réseau québécois soutien les groupes de défense de l'environnement dans leurs luttes et travaille pour qu'ils soient bien reconnus et aussi soutenus financièrement. À ce jour, on compte à peu près 90 groupes membres, qu'ils soient des groupes nationaux, régionaux ou locaux.

On siège aussi à différents endroits et on participe aussi à la création de différentes coalitions. Entre autres, on est membres de la Coalition Québec-Vert-Kyoto et aussi du Réseau de vigilance, et aussi, depuis le tout début, on siège au comité aviseur de l'action communautaire autonome, qui, comme vous le savez, a permis d'avoir une politique de reconnaissance et de soutien pour l'action communautaire.

On travaille sur différents projets, différents dossiers. On est très actifs actuellement sur la protection de la forêt boréale et la création d'aires protégées au Québec, actuellement. On espère arriver, à un moment donné, à voir les aires protégées suffisamment présentes au Québec pour protéger les zones sensibles. Et on travaille aussi sur toute la question du répertoire des groupes environnementaux, permettant en fait à l'ensemble de la population mais aussi aux groupes de savoir qui fait quoi au Québec en termes d'environnement.

Bon, vous le savez, il y a eu une première consultation sur un plan de développement durable. Bon, les libéraux avaient promis un plan vert, on a eu un plan de développement durable. On avait dit, à ce moment-là, M. Mulcair, lorsqu'on s'était présenté à la consultation, qu'on avait eu peu de temps pour s'exprimer, lors de la consultation du plan, et que, bon, tout de suite, maintenant, on passe en commission parlementaire sur un projet de loi.

Je pense que, pour un débat aussi crucial que le développement durable au Québec, il aurait peut-être fallu avoir une commission en tout cas qui nous aurait permis, un, de pouvoir s'exprimer plus longuement, mais, deux, d'avoir aussi plus de renseignements, parce que le plan de consultation n'avait pas la stratégie et le plan d'action concrets qui nous auraient permis de voir exactement où veut aller le gouvernement dans son développement durable. Alors, il nous manquait quand même des éléments assez importants. Je pense qu'il nous en manque encore. Bien que le projet de loi précise certaines choses, il reste qu'on ne comprend pas où vont être... en tout cas les moyens qui vont être donnés pour l'application de ça. On ne comprend pas non plus, stratégiquement, l'échéancier, comment tout le monde va être partie prenante de ce projet de loi là, à part peut-être l'appareil administratif, mais, pour le reste, il nous manque encore des précisions.

Pour le projet de loi comme tel, bon, que ce soit un projet de loi qui s'adresse principalement à l'appareil administratif, c'est une chose, je veux dire, c'est toujours bon qu'un gouvernement se dote d'une stratégie de développement durable. Le problème, c'est que ça aurait été peut-être bien aussi que ça s'adresse à l'ensemble de la collectivité et, entre autres, peut-être à l'ensemble des institutions et des industries aussi, pour ne pas que ça fasse simplement une stratégie dans les organismes gouvernementaux. Donc ça, c'était peut-être une première chose qu'on voulait signaler.

La deuxième chose. Bon, on a regardé tous les principes qui ont été retenus. Bon, il y a des principes qui évidemment rejoignent tout ce qui avait été retenu lors du Sommet de Rio, et aussi à la commission Brundtland, sauf qu'on ne comprend pas trop la hiérarchisation, où est-ce qu'un principe va être prédominant ou va passer avant, entre autres toute la question du principe de précaution, bon, pollueur-payeur, et tout ça. Donc, on voudrait comprendre qui aura préséance sur qui. Ça, c'était peut-être une de nos remarques.

L'autre remarque aussi, c'est qu'on est beaucoup axé sur la question peut-être environnementale, mais, dans la question du rapport Brundtland et dans le Sommet de Rio, on parlait aussi de tous les aspects sociaux et, entre autres, de la place des peuples autochtones et la place des femmes, qui, vous savez, sont très, très présents dans le réseau communautaire, bon, évidemment, toute l'action locale et les jeunes. On ne comprend pas trop où eux vont se situer dans tout ça. Donc, moi, je pense que ça aurait été peut-être bien de retenir au moins ces principes-là dans l'ensemble des principes qui ont été énoncés dans le projet de loi n° 118.

n(16 heures)n

Dans la question des mécanismes de suivi et des indicateurs, je pense que c'est mentionné, mais on veut réitérer la question de s'assurer que, lorsqu'on va déterminer les indicateurs et lorsqu'on va évaluer les stratégies, que les groupes environnementaux soient présents, soient invités à y participer et soient partie prenante des démarches. Je pense qu'on a beaucoup plus de succès à adjoindre les groupes qui sont directement sur le terrain, qui agissent directement en amont pour la protection de l'environnement, de les adjoindre dès le début dans les processus. Je pense que l'atteinte des objectifs se fait beaucoup mieux et va beaucoup plus rapidement lorsqu'on est partie prenante de ça.

La question des indicateurs, vous le savez, même dans la communauté scientifique, bon, il y a toujours des indicateurs qui, bon, mesurent plus ou moins les choses. En termes de la protection de l'environnement, il va falloir être très prudent sur ce qui est retenu, ce qui peut être quantifiable ou pas, mais c'est surtout de s'assurer que, dans l'ensemble d'un système ou d'un écosystème, il y a plusieurs choses qui interagissent, et, si on n'est pas forcément capables de mesurer quelque chose, aller toujours dans le principe de précaution, de s'assurer que l'écosystème ne sera pas affecté d'une façon quelle que ce soit et pas forcément d'une façon irréversible, mais, dès qu'il y a atteinte à un écosystème, de s'en préoccuper.

Donc, c'est un petit peu les grandes lignes comme telles. Je vais laisser mon collègue poursuivre pour les autres aspects du projet de loi n° 118 et je reviendrai pour la conclusion.

Le Président (M. Dubuc): C'est bien.

M. O'Narey (Ronald): Alors, merci. Sur la question, particulièrement à l'article 13, là, qui parle de la fonction du ministre, évidemment, selon nous, le rôle qu'on accorde au ministre de coordonner et de conseiller, je pense qu'il est insuffisant. Parce que le ministre ne dispose pas, et même le ministère, ne dispose d'aucun pouvoir pour s'assurer que la stratégie de développement durable soit réellement et efficacement mise en place dans l'appareil public. Il ne peut que promouvoir le respect des principes du développement durable, particulièrement le volet environnemental. Évidemment, le ministère de l'Environnement ne contrôle pas l'ensemble des ressources naturelles du territoire. On a vu qu'au cours des dernières années le ministère a perdu son contentieux, sa police verte et une bonne partie de ses moyens financiers. Or, on se demande comment il va être en mesure maintenant de s'assurer que les autres ministères respectent les principes de développement durable si la loi ne lui donne pas de réels pouvoirs.

Nous pensons aussi que le ministère de l'Environnement, parce qu'il n'a pas de responsabilité directe à l'égard du développement économique ou du développement social, ne peut prétendre ou n'aura pas les moyens d'arbitrer les conflits entre ces différents aspects du développement durable sans diluer d'une certaine manière sa responsabilité première à l'égard de l'environnement.

Nous en concluons donc qu'il faudrait élever à un niveau plus important, au niveau de l'État, les responsabilités, jusqu'au premier ministre ou de toute autre instance située donc au plus haut niveau de l'État, et nous recommandons aussi de hausser de façon significative le budget du ministère de l'Environnement pour lui permettre justement de jouer ce rôle-là, au niveau de la défense, au niveau de l'environnement, mais à un niveau qui lui permet justement d'agir de façon concrète.

Sur la question de la Charte des droits et libertés de la personne, la modification qui est annoncée dans le projet de loi, on vous a remis quelques commentaires là-dessus, mais je vous dirais tout de suite qu'on a eu de la difficulté à avoir une expertise vraiment poussée sur les impacts qu'aura ce changement-là dans la Charte des droits et libertés. Et à notre avis on pourrait peut-être penser à reporter les amendements apportés à la Charte des droits, parce qu'à notre avis on n'a pas encore toute la capacité ou les moyens de vérifier, pour nous en tout cas, les conséquences qu'auraient ces changements-là.

Maintenant, pour ce qui est du Fonds vert, qui est à l'article 24 du projet de loi, évidemment, comme groupe environnemental ou comme réseau de groupes environnemental plutôt, nous appuyons évidemment la création du Fonds vert.

Dans de très nombreux mémoires présentés dans le cadre de la tournée de consultation sur le Plan de développement durable du gouvernement, des groupes réclamaient impérativement un fonds vert dédié au développement durable. Ils demandaient que les éventuels surplus du fonds restent au fonds pour assurer sa pérennité et son développement. Ils demandaient que le fonds serve prioritairement à assurer un financement adéquat, récurrent et stable des groupes environnementaux locaux, groupes de base régionaux et nationaux pour leur permettre de réaliser leur mission et ainsi soutenir la participation démocratique des citoyens.

Ils demandaient que les groupes aient accès à du financement pour continuer à faire ce qu'ils font le mieux, soit de la sensibilisation et de l'éducation. Ils demandaient aussi du financement pour continuer à développer leur expertise et leurs compétences. Plusieurs groupes environnementaux demandaient enfin, parce qu'ils étaient confrontés à l'abolition de presque tous les programmes de financement du ministère de l'Environnement, un fonds ou des programmes de transition dans l'attente de l'adoption du projet de loi n° 118 et, par le fait même, la création du Fonds vert. Et on ne voit rien actuellement à l'horizon qui nous indique qu'il y aura une solution à ce problème-là. Et, dans le projet de loi, évidemment il n'y en est pas question.

On a fait plusieurs tentatives au cours des six derniers mois, mais on n'a pas réussi à obtenir de rencontre avec le ministre de l'Environnement pour discuter justement du financement des groupes environnementaux pour l'année 2005-2006 et du financement des groupes dans le cadre du Fonds vert. Par contre, nous l'avons entendu présenter sur presque toutes les tribunes ou de nombreuses tribunes ses priorités de financement, soit les conseils régionaux de l'environnement et les comités de bassin versant, qui à notre avis ne sont, ni l'un ni l'autre, des groupes environnementaux mais des coalitions ou des... pas des coalitions mais plutôt...

Mme Pelletier (Gabrielle): Des tables de...

M. O'Narey (Ronald): ...des tables de concertation de différents acteurs au niveau de l'environnement qui touchent à tous les niveaux, beaucoup plus larges, soit des organismes publics-privés, des entreprises et des individus auxquels participent un certain nombre de groupes environnementaux, mais pour plusieurs qui se retrouvent sans financement pour y participer également.

De plus, le ministre affiche ouvertement qu'il a un préjugé favorable envers les groupes qui font du travail direct, du service direct sur le terrain et qui apportent quelque chose de concret et de mesurable, sans définir clairement ce qu'il entend par là, tout comme il affiche un préjugé, semble-t-il, défavorable envers ceux qui existent, dans son expérience, dit-il, pour émettre des avis et des commentaires sur tout ce qui bouge et qu'il appelle les moulins à vent. À notre avis, l'attitude du ministre est inacceptable, et le peu de précisions que contient le projet de loi nous inquiète et inquiète tous les groupes membres de notre réseau.

Nous voulons rappeler évidemment que c'est grâce à l'action des groupes environnementaux que le Québec s'est finalement engagé... ne s'est finalement pas engagé, pardon, dans la construction de la centrale du Suroît, ce que tout le monde reconnaît aujourd'hui comme étant le meilleur choix; qu'il a réduit également de 20 % la coupe forestière, invitant... évitant, pardon, ainsi d'exploiter la forêt au-delà de sa capacité de régénération.

Nous tenons aussi à rappeler au ministre qu'il a de toute évidence, semble-t-il, oublié que le gouvernement du Québec a adopté une Politique de reconnaissance et de soutien à l'action communautaire dans laquelle le gouvernement reconnaît l'importance du principe de la récurrence du soutien pour assurer la stabilité des organismes. En adoptant cette politique, le gouvernement s'est engagé à faire en sorte que le dispositif de soutien financier à l'action communautaire autonome soit généralisé, dans tous les ministères et organismes gouvernementaux, afin d'appuyer la mission globale des organismes communautaires autonomes. Il s'est aussi engagé à protéger les acquis de soutien financier en appui à la mission globale des organismes. Pour nous, en fait, l'importance que l'on accorde au financement des groupes environnementaux, c'est un excellent indicateur de la volonté réelle de s'inscrire et d'inscrire le Québec dans une approche de développement durable, parce que les citoyens sont des acteurs importants et les groupes qui les représentent sont aussi des acteurs importants dans la mise en oeuvre d'une stratégie de développement durable au Québec.

Nous proposons de modifier l'article 24 pour y préciser que le fonds vise à apporter en priorité un soutien financier aux organismes communautaires de base nationaux et régionaux oeuvrant dans le domaine de l'environnement, dans le respect de la politique gouvernementale de reconnaissance et de soutien à l'action communautaire, intitulée L'action communautaire: une contribution essentielle à l'exercice de la citoyenneté et au développement social du Québec, et dans le respect du plan d'action gouvernemental en matière d'action communautaire.

Le RQGE recommande également que le financement pour la mission des groupes environnementaux nationaux et de base soit assuré pour la période transitoire avant la fin ou la... pardon, avant la mise en place du Fonds vert, et ce, à hauteur du financement qu'ils recevaient l'an dernier, et que les critères et les nouveaux programmes de financement soient élaborés avec la participation des groupes, et qu'évidemment le financement soit révisé à la hausse, considérant les manques qu'il y a eu dans le passé.

Ces deux propositions sont d'ailleurs appuyées par le Comité aviseur de l'action communautaire autonome, qui représente 4 000 groupes d'action communautaire au Québec et que le gouvernement reconnaît comme un interlocuteur privilégié représentant le mouvement communautaire autonome pour la mise en oeuvre de la politique gouvernementale. Je ne sais pas si les gens, ici, l'ont tous reçue, mais j'ai des copies, ici, de la lettre qui nous a été remise par le Comité aviseur à l'action communautaire. Et je passerai la parole à notre présidente pour la conclusion.

Le Président (M. Dubuc): Si vous voulez conclure, il vous reste très peu de temps, Mme la présidente.

n(16 h 10)n

Mme Pelletier (Gabrielle): Bien, en tout cas, pour conclure, c'est certain que je peux juste réitérer le fait que, cette année, les groupes qui bénéficiaient du programme, là, au niveau du financement des groupes nationaux, du soutien à la mission, n'ont rien eu. Donc, depuis le 1er avril, l'ensemble des groupes qui étaient financés par le ministère n'a toujours pas reçu du financement en soutien à sa mission, que, par le temps que le Fonds vert soit adopté et mis en place et alimenté, il va se passer un an et plus sans qu'on ait reçu de financement, et ça, ça devient criant.

Aussi, pour conclure, je ne peux que réitérer le fait de l'importance du rôle des groupes écologistes dans notre société. Vous savez, depuis plus de 30 ans, ce sont les groupes qui ont alerté sur les problèmes de pollution importants. Les groupes, au cours des dernières décennies, ont développé une expertise, une crédibilité en termes des dossiers environnementaux. Et vous pouvez le voir même dans ce qui se passe actuellement à Montréal, dans la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques, l'expertise des groupes présents est énorme, et les groupes aussi agissent pour aussi résoudre les problèmes à un niveau local, régional et national. Et, sans l'apport des groupes, on ne serait pas en train de parler d'environnement. Alors, c'est important que les groupes continuent à jouer ce rôle-là dans la société évidemment en alliance et en concertation avec l'appareil étatique. Je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Dubuc): Merci, Mme la présidente. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Mulcair: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, dans un premier temps, permettez-moi de souhaiter la bienvenue à Mme Pelletier et à M. O'Narey. Je pense que pour leurs fins ça vaudrait la peine que je rappelle que, sur le site Web du ministère, ils peuvent consulter l'ensemble des 582 mémoires qui ont été présentés dans le cadre de notre tournée. Là-dedans, ils remarqueront qu'il y a 152 groupes environnementaux qui ont fait des mémoires écrits, dont 125 sont venus nous rencontrer, et que, tout en respectant beaucoup leur point de vue... Je ne le partage pas, parce que c'est un point de vue excessivement minoritaire, le point de vue que vous exprimez contre le projet de loi. Mais c'est correct. Vous avez le droit le plus strict à votre point de vue. Je le respecte, comme je dis, même si je ne le partage pas.

Je vais aussi me permettre de donner une autre perception que la leur en ce qui concerne ce qui s'est passé avec le Suroît et ce qui s'est passé avec la forêt. Pour ce qui est du Suroît, ça vaut la peine de rappeler que c'est notre gouvernement qui a eu le courage de référer cette question à la Régie de l'énergie. À mon sens, le rapport de la Régie de l'énergie, du 30 juin 2004, est un modèle de vulgarisation d'un sujet fort complexe qui nous a permis de conclure que, même si de l'avis de la régie le Suroît pouvait être souhaitable, il n'était pas essentiel, et ce qui a permis à notre gouvernement d'annuler le projet. Ce qui était à mon sens la meilleure décision.

Par ailleurs, pour ce qui est de la forêt, c'est notre gouvernement qui a créé la Commission scientifique et technique. Le gouvernement qui nous a précédés en avait parlé, mais on a créé la commission Coulombe. Le gouvernement antérieur n'avait rien fait. La commission Coulombe nous avait dit qu'il fallait réduire la coupe de 20 % parce que c'était un modèle classique de l'antithèse de développement durable, car, comme Mme Pelletier vient si bien de le dire, si on coupe les arbres plus vite qu'ils ne reviennent, même un enfant de troisième année du primaire est capable de comprendre que ce n'est pas soutenable, ce n'est pas viable, ce n'est pas durable. Mais on s'épargnerait une longue analyse des différences entre nous et l'opposition là-dessus, mais ça vaut la peine de vous référer à ce qui s'est dit en Chambre en ce qui concerne notre décision de respecter Coulombe... par l'opposition.

Mais j'aimerais revenir sur un fait que vous affirmez dans votre mémoire, parce que j'étais tout ouïe, tantôt, quand vous nous avez expliqué le rôle important que vous jouez dans les aires protégées. Et j'aimerais vous référer à la page 14 de votre mémoire, où vous affirmez ceci: «Actuellement, à peine 3,5 % du territoire québécois est protégé». Est-ce que je peux savoir d'où vous tenez ce chiffre, étant donné votre expertise dans la matière?

Le Président (M. Dubuc): Mme la présidente.

M. O'Narey (Ronald): À la page?

Le Président (M. Dubuc): 14.

M. Mulcair: 14...

M. O'Narey (Ronald): 14?

M. Mulcair: ...quatrième alinéa, la phrase qui commence avec: «Actuellement».

M. O'Narey (Ronald): Je ne pourrais pas vous dire. Je pourrais vous répondre par écrit là-dessus sur...

Mme Pelletier (Gabrielle): Non, mais c'est parce qu'on participe à la campagne Aux arbres citoyens!. C'était la question de l'île d'Anticosti, là, si on le comprenait ou on ne le comprenait pas.

M. Mulcair: Je vais me permettre, avec l'accord de mon collègue...

Mme Pelletier (Gabrielle): C'est parce que notre chargé de projet forêt n'est pas ici. C'est parce qu'on n'est pas au fait de tout, là, mais...

M. Mulcair: Je vais demander, avec la permission de mon collègue du Lac-Saint-Jean, à notre sous-ministre au Développement durable de donner des chiffres complets sur les aires protégées.

Le Président (M. Dubuc): Oui. On a-tu le consentement?

Des voix: ...

Le Président (M. Dubuc): Oui. Voulez-vous bien vous nommer puis nous présenter votre responsabilité?

M. Gaudreau (Léopold): Léopold Gaudreau, sous-ministre adjoint au Développement durable, au ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs.

Le Président (M. Dubuc): Merci.

M. Gaudreau (Léopold): En ce qui concerne les aires protégées, au Québec, en date de juillet 2005, on considère qu'il y a environ 90 000 km² d'aires protégées, ce qui fait à peu près 5,8 % du Québec en aires protégées. Ce pourcentage est passé de 2,8 en 2002 à 4,8 en 2003, et par la suite à 5,2 en 2004, et maintenant à 5,8, pour donc se rendre à 8 %. Tel que prévu dans les engagements gouvernementaux, en 2008, il nous faut encore quelque 40 000 km², qui seront essentiellement créés dans la forêt boréale et dans la forêt au nord du Saint-Laurent, dans la forêt mixte.

Le Président (M. Dubuc): Merci. Mme la présidente.

Mme Pelletier (Gabrielle): On ne fera pas une guerre de chiffres ici, mais la question effectivement, il y a peu d'aires protégées dans la forêt boréale commerciale. Effectivement, il y a eu un avancement dans la partie plus sud et méridionale du Québec. Mais c'est sûr que, nous, on peut revenir avec ces chiffres-là, parce qu'on est quatre organismes à travailler sur la campagne Aux arbres citoyens! et il y avait des nuances. Mais il en reste que... Bon, qu'on ne s'entende pas sur les chiffres, c'est une chose, mais on n'est pas rendus encore au 8 % et loin d'être rendus au 12 % d'aires protégées alors qu'on s'en vient en 2006. Donc, je pense que quelque part il va falloir continuer ensemble d'atteindre nos objectifs à un niveau canadien, mais aussi à un niveau mondial. Je pense qu'on est encore loin du compte, et vous savez que, où ça accroche beaucoup, c'est dans la forêt boréale. On peut se le dire, là, et on a des groupes qui travaillent très activement sur le terrain là-dessus. Il y a encore des processus d'ailleurs...

M. Mulcair: Étant donné votre...

Le Président (M. Dubuc): M. le ministre.

M. Mulcair: Étant donné la grande expertise de Mme Pelletier et de son groupe dans la matière, je pense que ça vaut la peine de rappeler qu'entre 2003 et 2005 c'est aux alentours de 40 000 km²...

Mme Pelletier (Gabrielle): Oui.

M. Mulcair: ...surtout en forêt boréale, qu'on a ajoutés. Alors ça, c'est un fait, ce sont les chiffres, et c'est ça qui vient d'être confirmé par M. Gaudreau.

Je laisserai à mon collègue le député de Lac-Saint-Jean le soin d'intervenir, quitte à revenir, M. le Président.

Le Président (M. Dubuc): Oui. Mme la présidente veut répondre?

Mme Pelletier (Gabrielle): Oui, c'est sur ce que M. Mulcair a dit. Je n'ai pas dit que nous étions contre le projet n° 118. Nous avions des points importants à signaler par rapport au projet de loi n° 118. Je n'ai jamais mentionné que nous étions contre. Nous avons dit que le projet de loi n° 118... J'ai même souligné que c'est un des premiers gouvernements qui parle d'un projet de loi de développement durable pour l'appareil administratif, ce qu'on a souligné. Mais il en reste qu'il y a encore des choses qui, pour nous, manquent dans ce projet de loi là. Si j'avais voulu dire contre, j'aurais dit je suis contre, et point à la ligne. Mais je pense qu'il y a encore place à amélioration, pour la protection de l'environnement, pour l'ensemble de la collectivité.

Le Président (M. Dubuc): M. le député du Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Oui, merci, bienvenue à l'Assemblée nationale. Écoutez, c'est clair qu'au niveau du Fonds vert on signe un chèque en blanc, dans le sens qu'on ne sait pas exactement comment seront utilisées les sommes de ce fonds. C'est sûr que c'est extrêmement frustrant, puis je l'ai dit à quelques occasions: Le ministre veut avoir son projet de loi avant les fêtes, en me disant que, si on fait de l'obstruction et que le projet de loi n'est pas voté, il n'y aura pas, de Fonds vert, et que, s'il n'y a pas de Fonds vert, on ne peut pas faire vivre les organismes environnementaux. Or, je n'ai aucune certitude que le Fonds vert vous amènera des sommes d'argent, compte tenu que vous faites dans le vent, selon l'opinion du ministre. En tout cas, je ne sais pas s'il va changer d'idée à ce niveau-là. Et ça, c'est un des aspects ennuyants, là, de ce projet de loi là, parce que c'est clair que tout le monde...

Nous sommes à une époque où la solution des problématiques environnementales, sociales et économiques se tourne vers l'aspect du développement durable, et il se trouve que ce gouvernement se trouve à être là au bon moment pour faire du développement durable. Et je pense que d'amener l'administration publique à se tourner... à établir des stratégies de développement durable, c'est une chose à laquelle je suis favorable. Cependant, j'ai l'impression que nous devons aller beaucoup plus loin, puisqu'au niveau des entreprises, au niveau des collectivités, on n'a pas encore aucune certitude qu'il y aura du développement qui se fera. Mais, bien entendu... Parce que le projet de loi dit, hein, un an pour développer des stratégies, une autre année pour faire des indicateurs de développement durable.

n(16 h 20)n

Donc, c'est dur d'être contre le projet de loi, mais c'est facile d'avoir beaucoup de questionnements et d'interrogations, et je pense qu'il va falloir continuer de surveiller le gouvernement de près dans ses actions. J'ai une attitude, je pense, très constructive à date, bien que j'aie des sérieux bémols et que j'aie plusieurs frustrations. Et, quand le ministre me dit qu'il faut passer ce projet de loi là pour que le Fonds vert puisse naître et que les groupes puissent avoir du financement, ça ne fait absolument pas mon affaire. Parce qu'en fin de compte, s'il avait voulu continuer l'entente financière qui avait été signée pour trois ans, il aurait très bien pu le faire, sauf que le ministre a en tête qu'il veut faire avec des organismes...

Enfin, c'est assez embêtant, la situation. Quand on est ministre de l'Environnement, bien souvent c'est les groupes environnementaux qui vous tapent sur la tête et vous disent d'aller plus loin. Donc, est-ce que ça a été une stratégie du ministre de couper le robinet à des organismes qui vont le critiquer, pour en avoir moins? Parce que je suis en contact avec plusieurs organismes qui me disent qu'ils ont dû fermer leurs portes carrément faute d'argent, donc c'est le côté obscur de la réalité du gouvernement actuel par rapport à l'environnement.

Donc, je n'ai pas d'autres questions. J'ai vu votre mémoire, et sachez que nous aurons plusieurs amendements où nous tenterons d'amener des éléments constructifs dans ce projet de loi là, et sachez-moi bien désolé de la situation qui se passe actuellement à l'égard du financement des groupes environnementaux.

Le Président (M. Dubuc): Mme la présidente.

Mme Pelletier (Gabrielle): En fait, je ne sais pas si, moi, je peux poser une question, mais j'aurais peut-être aimé que l'opposition la pose à M. Mulcair, mais qu'arrive-t-il pour cette année, qui est considérée effectivement une année de transition avant que le Fonds vert soit effectif?

Parce qu'il faut être réaliste, le Fonds vert peut être créé par un projet de loi, encore faut-il après qu'il ait des fonds, et que les critères soient élaborés, et que les groupes puissent soumettre une demande. Par le temps que la réponse arrive ? je veux dire, on est rendus, là, en 2006 ? est-ce qu'on peut savoir exactement... ça fait neuf mois que la nouvelle année financière est commencée, et nous n'avons aucune entente, aucune possibilité d'exprimer aussi où on en est en termes de survie de la plupart des groupes au Québec, des groupes de base. On n'arrive pas à pouvoir exprimer cette préoccupation majeure, et nous n'avons même plus le programme Action-Environnement pour avoir des fonds par projet. Le FAQDD, c'est très difficile de pouvoir y avoir accès, pour des petits groupes qui n'ont pas de permanence. Alors, je veux juste savoir exactement, cette année, qu'est-ce qu'on fait en attendant ce fameux Fonds vert. On s'est battus pendant des années pour avoir un fonds dédié à l'environnement, on s'est fait avoir avec la Fondation québécoise en environnement, le FAQDD n'a pas répondu à nos préoccupations; tout le monde peut aussi piger dedans. On voudrait comprendre qu'est-ce qui arrive avec l'avenir des groupes environnementaux qui sont là depuis pas mal longtemps, qui ont permis aussi la création d'un ministère de l'Environnement. Parce que j'ai des groupements chez moi qui existent depuis 30 ans, j'aimerais savoir qu'est-ce qu'on fait cette année, est-ce qu'on va tous fermer la porte? Bon. Je veux dire... ma question est précise parce que je n'arrive pas à la poser directement à M. Mulcair.

Le Président (M. Dubuc): M. le député de Lac-Saint-Jean, aviez-vous une autre question? M. le député de Beauce-Nord.

M. Mulcair: M. le Président, puisque la question m'était adressée...

Mme Pelletier (Gabrielle): Oui!

M. Mulcair: ...avec indulgence, mon collègue de Beauce-Nord...

Le Président (M. Dubuc): O.K. On va donner la parole... on revient à vous, M. le député. M. le ministre.

M. Mulcair: Oui. Il y a une partie de l'intervention de Mme Pelletier que j'ai du mal à m'expliquer: elle est en train de me poser la question, puis elle me dit qu'elle ne peut pas me la poser. Mais je vais répondre néanmoins, même si elle pense qu'elle ne me l'a pas posée, parce que je l'ai bien entendue.

Le point le plus important à retenir, M. le Président, en regard de l'intervention du député de Lac-Saint-Jean, est le suivant: à mon point de vue, c'est que l'entente de trois ans qui était sur la table lorsque, nous, on a été élus, a été respectée. Deux des trois exercices étaient sur notre garde. Maintenant, le programme en question n'a pas été renouvelé, il n'existe plus, il va être remplacé par le Fonds vert.

Pour répondre à la question de Mme Pelletier, on n'est pas en 2006, on est en 2005. Si cette loi était adoptée lors de cette session, j'ai la certitude, avec les gens qui m'accompagnent ? et tout ce qu'on dit ici est enregistré ? on va être capables d'avoir du financement. Un de nos objectifs principaux, c'est le financement stable des groupes environnementaux.

Et je terminerai en disant ceci: Que le député de Lac-Saint-Jean chercherait en vain où dans mon intervention j'ai critiqué le groupe qui est devant nous aujourd'hui; encore plus, je n'ai jamais traité le groupe qui est devant nous aujourd'hui de moulin à vent. La seule personne qui a exprimé une opinion négative sur des groupes environnementaux aujourd'hui, c'est Mme Pelletier quand elle a parlé contre le rôle très important que, moi, je vois pour les organismes de bassin versant et les conseils régionaux en environnement.

Moi, je ne suis pas là pour décider et arbitrer des chicanes de groupes environnementaux. J'ai tenu compte, j'ai bien entendu l'appréciation qu'elle a pour ces groupes-là, comment elle les considère. Moi, je les considère de la plus haute importance. Moi, je pense qu'ils sont en train de jouer un rôle tout à fait moderne sur le terrain, dans les organismes de bassin versant, qui, rappelons-le, sont la clé de voûte de l'application de la Politique nationale de l'eau, pour ce qui est des conseils régionaux en environnement, en ce qui concerne la gestion locale.

Le meilleur exemple que je peux donner: je suis le ministre responsable des Laurentides, la CRE des Laurentides est le genre de modèle que je veux voir répandu à travers le Québec. Ils sont bien impliqués avec toutes les autres forces libres dans le milieu. Ils sont même à la table de la conférence régionale des élus. Pour moi, ça, ça augure très bien pour l'avenir, pour que l'environnement soit tenu en ligne de compte à toutes les étapes, dans toutes les sphères d'activité dans nos régions, M. le Président.

Le Président (M. Dubuc): Merci, M. le ministre. M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. En lisant votre mémoire, vous avez souligné tout à l'heure qu'il n'y avait aucun principe retenu pour les populations autochtones, les femmes, les jeunes. Mais, moi, j'ai un peu de misère avec ça. Si on commence à énumérer des personnes, si on commence à énumérer, normalement on en oublie toujours un. Alors, quand on dit que c'est un projet de loi pour les Québécois, on n'oublie personne, c'est pour tous les Québécois. Les autochtones qui sont au Québec sont Québécois, et, moi, c'est de même que je vois ça, là. J'ai peur, moi, qu'on aille faire l'erreur d'oublier une personne, puis, après ça, bien on se fait traiter de toutes sortes de choses. Qu'est-ce que vous voulez dire par ça que...

Mme Pelletier (Gabrielle): Non, ce n'est pas une question d'énumération, c'est les aspects sociaux du rapport Brundtland qui devaient être tenu compte. Lorsqu'on parle de développement durable, il faut regarder... lorsque l'État interagit soit avec la collectivité, alors soit pour le principe pollueur-payeur ou pour les collectivités, ou en termes de pressions sur l'environnement, il y a peut-être un respect ou une application particulière, parce que, sur le terrain, dans les collectivités, entre autres les femmes et les jeunes ? c'est l'avenir aussi ? jouent un rôle important. Ce n'était pas une question d'énumération, c'était une question que, dans le terme «développement durable», vous avez l'aspect environnemental, l'aspect social, l'aspect économique, et l'aspect social était peut-être moins présent dans le projet de loi.

Les autochtones, je m'excuse, mais on ne peut pas en faire fi non plus lorsqu'on prend des décisions de développement durable au Québec. Je pense que ce sont des peuples qui ont leur rôle aussi à jouer. Alors, c'était juste une question de retenir peut-être les principes que Rio aussi avait retenus.

Mais je voudrais juste revenir sur ce que M. Mulcair a dit. On est quand même le 8 décembre 2005. Je pense que, même si votre projet de loi était adopté avant la fin de cette session, je pense que le fonds ne serait pas effectif avant 2006. Donc, tout à l'heure, j'ai bien dit 2006, donc je ne me trompe pas dans les dates. Je ne pense pas que j'aurais un chèque le 25 décembre 2005.

Je ne pense pas que M. Mulcair a répondu à la question des fonds de transition, c'est important de le mentionner.

Et je veux aussi rappeler ? c'est pour ça que le Comité aviseur de l'action communautaire autonome nous appuie ? qu'actuellement c'est un des rares ministères qui ne respectent pas la politique et le plan d'action que le gouvernement s'est donnés en respect à la mission des organismes communautaires. Au ministère de l'Environnement, nous n'avons aucun programme qui peut recevoir et soutenir financièrement la mission des organismes, alors que la plupart des ministères vont dans le respect de la politique. Donc, je voudrais quand même mentionner ça.

Je comprends que le Fonds vert peut jouer un rôle important, encore faut-il qu'il réponde et qu'il soit dédié vraiment aux groupes environnementaux. Nous n'avons pas vu ni les montants ni d'où vont venir les montants, ni les critères, et tout ça. Mais il en reste qu'actuellement il n'y a rien, au ministère de l'Environnement, qui peut nous permettre d'aller jusqu'à ce fameux Fonds vert lorsqu'il sera effectivement en application. Alors, je voudrais quand même réitérer, réitérer ça.

Pour la question des tables de concertation, nous n'avons pas porté un jugement sur les tables de concertation. Nous avons des groupes membres qui siègent en région, ils ont de plus en plus de problèmes à y siéger parce qu'eux aussi manquent de fonds. Nous avons dit que notre perception, c'est qu'actuellement ces tables de concertation sont financées par le ministère. Il semble favoriser effectivement ces tables de concertation, nous n'avons pas à porter un jugement de valeur sur le fait que les tables jouaient, ne jouaient pas un rôle important, à ce niveau-là, surtout pas en termes des bassins versants, puisque nous avons travaillé avec des tables de concertation des bassins versants. Donc, il faudrait peut-être nuancer nos propos ou l'interprétation de nos propos.

Il en reste que je pose encore la question: Que faisons-nous, cette année financière, qui finit le 31 mars, où nous n'avons reçu aucun fonds, et que nous demandons au moins de savoir qu'est-ce qui s'en vient exactement, sur quoi on peut compter? Parce qu'actuellement le Fonds vert n'est pas en mesure d'y répondre, il n'est même pas encore existant.

Le Président (M. Dubuc): Merci, Mme la présidente. M. le ministre.

n(16 h 30)n

M. Mulcair: Pour qu'il n'y ait pas d'interprétation, je prends bonne note de l'admonition de Mme Pelletier de nuancer. Ce que je ferai, à ce moment-là, c'est que je prendrai le verbatim, lorsque disponible, de ses propos, puis je les transmettrai, tantôt, au regroupement des organismes de bassin versant du Québec et à la conférence nationale des CRE pour qu'ils puissent en faire part à leurs membres, et je les laisserai leur propre appréciation.

Pour ce qui est de l'affirmation de Mme Pelletier, qu'on est en train de faire fi des autochtones ? ça, c'était son terme de tantôt ? je l'invite de prendre connaissance du troisième alinéa de l'article 11 du projet de loi n° 118 qui est sur la table, qui est devant nous, et on dit que, pour ce qui est de «la première version de la stratégie de développement durable ? qui doit être adoptée par le gouvernement, troisième alinéa: [...] les moyens retenus pour viser une approche intégrée et la cohérence des différentes interventions en développement durable des autorités locales et régionales concernées, dont celles des communautés autochtones».

Moi, je n'appelle pas ça faire fi des communautés autochtones. Mon collègue de Lac-Saint-Jean et moi avons invité deux groupes représentatifs des communautés autochtones de venir nous rencontrer lors de cette partie de notre travail ensemble, ils ont décliné. On pensait les avoir à un moment donné, mais ils ont décliné. Mais je tenais juste à souligner à Mme Pelletier que, loin de faire fi, ils sont spécifiquement mentionnés dans une très courte énumération de priorités lors de l'élaboration de la première stratégie.

Sur ce, M. le Président, il me fait extrêmement plaisir de remercier Mme Pelletier et M. O'Narey d'avoir fait leur contribution à nos travaux.

Le Président (M. Dubuc): Merci, M. le ministre. Y a-tu autre question? Pas d'autre question? On vous remercie, merci de votre présentation.

J'appellerais la corporation régionale des élus de la Chaudière-Appalaches de s'approcher en avant, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Dubuc): On va débuter nos travaux. Je tiens à remercier la Conférence régionale des élus de la Chaudière-Appalaches de bien vouloir présenter ses mémoires... bien, c'est-à-dire, de vous présenter, avant, dès le début.

Conférence régionale des élus
de la Chaudière-Appalaches

M. Lampron (Laurent): Alors, M. le Président, merci beaucoup. Merci d'offrir cette occasion à la Conférence régionale des élus de la Chaudière-Appalaches pour soumettre, dans un esprit des plus constructifs et des plus positifs, ses quelques commentaires et observations vis-à-vis le cheminement du projet de loi n° 118.

Je tiens à saluer M. Mulcair... M. le ministre. On s'était rencontrés à l'occasion de la dernière Table Québec-Régions, à l'occasion de la rencontre du 24 novembre dernier. Et vous me permettrez de saluer tout particulièrement également le député de Beauce-Nord, qui est un député de la région de la Chaudière-Appalaches, M. Grondin; également Mme L'Écuyer, députée de Pontiac, avec qui j'ai eu l'occasion de collaborer à de nombreux dossiers en Outaouais dans le passé; également les autres membres de l'Assemblée nationale, M. Tremblay; et également M. Gaudreau, sous-ministre adjoint au ministère. Alors...

Le Président (M. Dubuc): Si vous voulez présenter les personnes qui vous accompagnent.

M. Lampron (Laurent): Oui. Alors, j'y arrive. Sur ma gauche, Mme Maryse Drolet. Maryse Drolet est employée à la conférence régionale des élus. Elle est agente de recherche et de développement à la conférence. Et, sur ma droite, Mme Julie Boudreau. Mme Julie Boudreau, elle est directrice générale du Conseil régional de l'environnement de la Chaudière-Appalaches et, à ce titre-là, compte tenu que le Conseil régional de l'environnement de la Chaudière-Appalaches est reconnu par la conférence régionale comme étant le groupe-conseil en matière de développement durable, elle nous assiste comme notre ressource experte en matière de développement durable et d'environnement, et elle est membre du groupe-conseil sur le développement durable de la conférence.

Le Président (M. Dubuc): Merci. Vous avez 15 minutes pour présenter vos mémoires...

M. Lampron (Laurent): Bien, merci beaucoup.

Le Président (M. Dubuc): ...15 minutes du côté ministériel puis 15 minutes sur le côté de l'opposition. Donc, vous avez la parole.

M. Lampron (Laurent): Alors, après ces quelques mots, je vous présenterai donc très rapidement les quelques principales particularités de notre région de la Chaudière-Appalaches, qui est la région juste au sud de la région de Québec, ainsi que je laisserai tantôt Mme Boudreau et Mme Drolet vous présenter les aspects plus techniques de la position de la conférence vis-à-vis le projet de loi n° 118. Et, pour la conclusion, je reviendrai un peu plus tard.

Alors, je vous rappellerai qu'à l'exception du secteur urbain de Lévis la Chaudière-Appalaches est une région principalement rurale, très agricole et recouverte à 75 % par la forêt. Une bonne partie de l'économie de la région est donc fondée sur l'exploitation et la transformation des ressources naturelles, ce qui a pour conséquence que la Chaudière-Appalaches, même si elle n'est pas reconnue région ressource en tant que telle, est également touchée par des enjeux environnementaux spécifiques, comme par exemple la pollution des eaux de surface et souterraines, d'origine urbaine et industrielle, de même que la pollution agricole reliée au développement des élevages intensifs.

Les défis de l'aménagement forestier, dans un contexte de forêt principalement privée, font également partie des enjeux environnementaux. D'autres problématiques environnementales spécifiques à notre région se retrouvent également dans les premières pages de notre avis.

Alors, la Conférence régionale des élus de la Chaudière-Appalaches, dès sa mise en place, en avril 2004, reconnaissait déjà le concept du développement durable dans son plan stratégique, un plan stratégique qu'elle avait mis en place à l'époque où elle était...

Bonjour, Norm... M. MacMillan, je m'excuse, également avec qui j'ai beaucoup collaboré dans le passé.

Alors, ce que je disais donc, la Conférence régionale des élus de la Chaudière-Appalaches a donc inscrit le souci du développement durable dans son cheminement à partir de la mise en place de la production, de la préparation de son plan stratégique régional 2002-2007. Ce souci à l'égard de l'intégration de la notion de développement durable se traduit donc dans sa structure organisationnelle par la création d'un groupe-conseil sur le développement durable. En effet, la Conférence régionale des élus de Chaudière-Appalaches a mis en place 11 groupes-conseils qui sont des forums représentatifs des principaux acteurs concernés dans la région par les secteurs d'activité en lien avec les priorités régionales. Donc, ces groupes-conseils agissent pour nous comme étant nos ressources expertes. Les groupes-conseils ont le mandat de soutenir la conférence dans la réalisation de ses mandats.

n(16 h 40)n

La conférence a reconnu le Conseil régional de l'environnement de la Chaudière-Appalaches comme étant son groupe-conseil en matière de développement durable. Sur celui-ci il siège des représentants de différents groupes environnementaux, de milieux socioéconomiques, municipaux, des affaires, des industries, de l'agroforestier, de la santé et de l'éducation, et des organisations membres.

Considérant l'importance de l'économie de la région fondée sur l'exploitation et la transformation de ressources naturelles, mais également son caractère rural, ses paysages naturels et leur potentiel récréotouristique, il est essentiel pour la qualité de son développement que la Chaudière-Appalaches adhère et adopte les principes du développement durable dans la planification de son développement. Et j'informerai également le sous-ministre éventuellement de l'intégration des principes et des concepts du développement durable dans notre planification stratégique. J'en ferai un point spécifique un peu plus tard.

Alors, nous croyons donc fermement que la qualité de l'environnement est fondamentale au développement d'une région. Elle affecte non seulement les individus, mais influence directement la qualité de vie des communautés et les activités menées à la grandeur du territoire. Cette préoccupation vient en quelque sorte transcender l'ensemble des actions en développement: en développement régional, en développement rural, en développement économique, en développement social et environnemental, bien sûr.

Les défis liés à la protection et à la mise en valeur de l'environnement sont donc cruciaux, et doivent faire partie des facteurs qui influencent nos décisions en matière de développement régional. Pour ce faire, le concept de développement durable guidera nos choix tant aux plans environnemental que social et économique.

Vous avez dans l'avis les priorités en matière de développement durable retenues dans le cadre de notre processus de planification stratégique. Je m'arrêterai donc ici pour inviter Mme Boudreau pour la présentation des points spécifiques à notre position vis-à-vis le projet de loi n° 118. Et, sur ce, je vous invite à vous rendre à la page 6 de notre mémoire. Alors, Mme Boudreau.

Mme Boudreau (Julie): Merci. Alors, je vais poursuivre. La qualité de l'environnement est fondamentale au développement d'une région. Elle affecte non seulement les individus, mais influence directement la qualité de vie des communautés et les activités menées, à la grandeur du territoire. Cette préoccupation vient en quelque sorte transcender l'ensemble des actions en développement. Les défis liés à la protection et à la mise en valeur de l'environnement sont donc cruciaux et doivent faire partie des facteurs qui influencent nos décisions en matière de développement régional. Pour ce faire, le concept de développement durable doit guider nos choix sur tous les plans, que ce soit aux plans environnemental, social ou économique.

À cet effet, voici les commentaires de la conférence visant à assurer une mise en oeuvre optimale de la Loi sur le développement durable dans le développement de nos communautés. Tout d'abord, la conférence souscrit à la définition de «développement durable» présentée dans le projet de loi. Cependant, il serait souhaitable que la définition soit complétée par l'ajout du concept de développement durable qui a été présenté dans le document de consultation, là, daté de novembre 2004.

À la page 10 de ce document, on dit: «L'environnement est la condition d'un développement durable, la société est la finalité pour laquelle se fait le développement, et l'économie est le moyen pour y parvenir.» En effet, cette phrase vient donner un sens dynamique à la définition, une logique d'application du concept lui-même. De plus, il est impératif que la définition retenue soit comprise par tous, en ne laissant aucune place à l'ambiguïté de sens ni d'interprétation.

La conférence souscrit aux 16 principes de développement durable énoncés dans le projet de loi. De plus, la conférence appuie l'adoption d'une stratégie de développement durable telle que décrite aux articles 7 et 8 ainsi qu'à l'adoption d'indicateurs de performance permettant d'en assurer le suivi et, si requis, d'apporter des changements à la stratégie afin de mieux promouvoir la viabilité du développement. Cependant, les indicateurs de performance devront permettre un véritable suivi des engagements. Aussi, la conférence souhaite que le gouvernement procède à une consultation des partenaires liés au développement durable pour l'identification des indicateurs. L'appropriation par les partenaires de la région d'une telle démarche est essentielle à sa réussite.

La conférence est en faveur de l'insertion dans la charte des droits et libertés du Québec d'un droit à un environnement sain et respectueux de la biodiversité. Cependant, la conférence propose de modifier l'article 19 du projet de loi, qui traite de l'insertion, à l'article 46 de la charte, du droit à un environnement sain et respectueux de la biodiversité. La Conférence régionale des élus de Chaudière-Appalaches propose que ce droit soit plutôt inscrit dans le chapitre I, Libertés et droits fondamentaux, à l'article 3 ou 6, sous l'inscription «Un environnement sain». Et il se lirait comme suit donc: «Toute personne a droit, dans la mesure et suivant les normes prévues par la loi, de vivre dans un environnement sain et respectueux de la biodiversité.»

Pour la conférence, ce droit touche les droits de la personne. Considérant que le choix de l'emplacement de ce droit dans la charte aura une incidence sur le processus de plaintes et les recours possibles, la compréhension de ce droit ne devrait pas être assujettie à des droits économiques et sociaux tel qu'il est proposé dans le projet de loi. Il faut reconnaître le droit à vivre dans un environnement sain et respectueux de la biodiversité comme un droit fondamental. Sur ce, je vais laisser la parole à Maryse Drolet.

Mme Drolet (Maryse): Merci. Bonjour. Alors, concernant le cadre de gouvernance, la conférence appuie l'objet de la présente loi et l'adoption d'un cadre de gouvernance fondé sur le développement durable. De plus, la conférence est favorable à la consultation, proposée au dernier alinéa de l'article 4 du projet de loi, à l'effet que les organismes et établissements soient consultés avant la prise de décret d'assujettissement.

Par ailleurs, la conférence propose de régionaliser la date d'application des dispositions du projet de loi pour les commissions scolaires, les municipalités, les établissements de santé et de services sociaux, contrairement à ce qui est indiqué à l'article 4. Ainsi, les régions pourraient reconnaître les initiatives des organismes qui auraient la volonté d'appliquer un cadre de gestion intégrant les objectifs de développement durable sans attendre un décret gouvernemental. Une région devrait pouvoir initier les consultations des organismes visés afin de contribuer à l'adoption de ce type de gestion et ainsi participer activement à la mise en oeuvre du développement durable au Québec.

En ce qui a trait au commissaire au développement durable, la conférence appuie la création d'un poste de commissaire au développement durable, annoncé à l'article 26. La conférence souhaite que le commissaire ait réellement les moyens d'assumer son mandat. La création de ce poste représente un élément majeur dans le processus de suivi de la mise en oeuvre de la stratégie de développement durable et de la reddition de comptes. La conférence propose toutefois que le commissaire ne soit pas sous l'autorité du Vérificateur général, qui, selon l'article 26 du projet de loi, est un poste de vérificateur général adjoint, mais qu'il relève plutôt de l'Assemblée nationale et y fasse rapport. Cela pourrait conférer au poste de commissaire une portée et une visibilité accrues, notamment par le fait de déposer directement à l'Assemblée législative le rapport annuel sur l'état de la situation de la mise en oeuvre de la stratégie de développement durable dans l'administration publique.

Pour ce qui est du Fonds vert, la conférence appuie la mise sur pied d'un fonds vert dédié au développement durable mais se questionne sur la répartition équitable entre les régions des sommes qui seront engagées. De plus, la conférence souhaite que la gestion de ce fonds soit adaptée aux réalités des régions afin de favoriser une plus grande cohérence entre les priorités régionales et gouvernementales, et que des partenaires régionaux soient impliqués dans le processus d'analyse des projets et demandes de subvention.

Le fonds devrait être surtout destiné à appuyer des initiatives des organismes voués à l'environnement et au développement durable et qui respecteront les priorités régionales. Dans le cadre du processus d'analyse, des modalités et critères devraient être prévus par voie de règlement afin de favoriser une répartition équitable de ce fonds entre les projets proposés par des municipalités et les autres organismes.

Par ailleurs, la conférence recommande que les sommes résiduelles demeurent disponibles et soient réservées aux fins de la mise en oeuvre de mesures et d'activités de développement durable, et ne soient pas retournées au fonds consolidé tel que le prévoit normalement la Loi sur l'administration financière à l'article 54. Alors, je redonnerai la parole ici à M. Lampron pour la conclusion.

M. Lampron (Laurent): Alors, c'est ça, en conclusion ? merci, Maryse; en conclusion ? donc, la Conférence générale des élus de Chaudière-Appalaches appuie très favorablement l'adoption d'une loi sur le développement durable. Le gouvernement marque ainsi à notre avis sa volonté de s'engager sur la voie d'un développement respectueux des générations qui nous suivent. Cet engagement nous invite tous à opter pour une approche qui respecte l'environnement tout en favorisant un développement social et économique résolument tourné vers l'avenir.

Et je résume les quatre grandes recommandations de la conférence: Que, dans le cadre de la gouvernance, les indicateurs de performance qui serviront à évaluer les résultats de stratégies de développement durable permettent un véritable suivi des engagements et soient la résultante d'une consultation des partenaires liés au développement durable; que le droit à un environnement sain et respectueux de la biodiversité soit considéré comme un droit fondamental dans la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, donc de le repositionner dans le cadre de la charte; que le commissaire au développement durable ait réellement les moyens d'assumer son mandat et relève directement de l'Assemblée nationale; et que le Fonds vert soit surtout destiné à appuyer les initiatives des organismes voués à l'environnement, et que la gestion de ce fonds respecte les critères d'équité interrégionale, et que les sommes résiduelles demeurent disponibles pour la mise en oeuvre du développement durable.

n(16 h 50)n

Enfin, la conférence est prête à s'engager plus encore, comme je le disais tantôt, sur la voie proposée et fait siens les principes du développement durable. Voilà.

Le Président (M. Dubuc): Merci, M. Lampron. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Mulcair: Merci. Merci, M. Lampron, Mme Boudreau, plaisir de vous revoir; Mme Drolet. Je m'en veux un petit peu d'avoir donné l'exemple des Laurentides tantôt, quand vous attendiez dans la salle. J'aurais dû parler de vous autres aussi, mais ça aurait pu être arrangé avec le gars des vues, j'imagine.

Je tiens à vous remercier pour votre présence ici aujourd'hui et pour l'extraordinaire apport que vous faites à notre travail. Je regardais mon collègue de Lac-Saint-Jean tantôt, puis le «side chat» que vous avez vu, c'était ça, ses critères d'équité interrégionale. Je le prends, je vais le retravailler. Parce qu'il y a un bout, un exemple de cet après-midi, si j'ai la CMM qui n'est pas à la page pour le PGMR, ce n'est pas vrai que je vais avoir un truc «boilerplate» qui va m'exiger de leur donner de l'argent, alors que tous les autres qui ont fait leur travail sont... Ils ne pourront pas plaider: Ah! bien, équité interrégionale, donne-moi, même s'ils ne sont pas... Donc, je vais essayer de travailler ça avec mes proches collaborateurs. Mais l'idée, je ne pense pas que je vais avoir beaucoup de problème avec ma collègue la ministre Normandeau en introduisant cette notion-là.

Toute blague à part, c'est une excellente suggestion. Vous êtes les seuls à l'avoir faite. Vous nous en avez parlé quand on s'est vus à Saint-Georges de Beauce, cet hiver. Ça a cheminé, et, moi, je vous avoue que ça me sourit beaucoup, parce que, moi aussi, comme ministre, c'est nouveau pour moi, depuis ce temps-là, de travailler... Laval est une région, je veux bien, mais ce n'est pas une région qui a exactement les mêmes défis territoriaux ou autres que mon collègue de Lac-Saint-Jean ou vous, dans Beauce-Chaudière-Appalaches, mais, depuis février, moi, je suis le ministre responsable de Lanaudière, qui est une région que je commence à connaître, l'étendue de ces régions-là, les Laurentides, que je connaissais pas mal mieux, mais quand même ça me sensibilise davantage à cette réalité-là.

On va travailler le «wording» dessus, puis on reviendra sans doute. Il y a des idées de se voir au début de la semaine prochaine pour travailler certaines suggestions qui ont été faites, mais je ne pense pas que je vais avoir du mal à convaincre mon collègue le député de Lac-Saint-Jean non plus de l'intérêt de ça. Moi, je trouve ça très, très bien, et c'est le reflet de votre expérience, d'où l'intérêt de notre travail ici ensemble. Merci pour ça.

Dans votre mémoire de l'hiver dernier, sur le plan et l'avant-projet, vous avez émis quelques réserves quant au libellé de certains principes. Est-ce que les modifications apportées au libellé des principes dans le projet de loi actuel répondent un peu mieux à vos attentes?

M. Lampron (Laurent): Sur ce sujet-là, bien vous me permettrez dans un premier temps, M. le ministre, d'accueillir très favorablement votre réaction vis-à-vis le principe de l'équité interrégionale. Nous sommes très heureux de vous voir aller dans ce sens. Pour la deuxième partie, bien j'inviterais Mme Boudreau à réagir.

Mme Boudreau (Julie): Oui. Les modifications qui ont été apportées au projet de loi, comparativement à ce qui avait été présenté, là, lors de la tournée, là, de consultation, rencontraient davantage, là, la position de la conférence régionale des élus, et c'est pour ça qu'on n'est pas revenus, là, aujourd'hui avec des suggestions à cet effet-là, parce que ça cadrait tout à fait, là, avec ce qu'on avait amené comme point de vue.

Le Président (M. Dubuc): M. le ministre.

M. Mulcair: Good!... Non, mais ça va. Je veux passer du temps à mon collègue du Lac-Saint-Jean.

Le Président (M. Dubuc): M. le député du Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: À l'article 4 de votre mémoire, vous dites de régionaliser la date d'application. Je ne veux pas... Oui, voilà. Alors, régionaliser la date d'application, qu'est-ce que vous voulez dire par ça?

Le Président (M. Dubuc): M. Lampron.

M. Lampron (Laurent): Oui. Alors, M. Tremblay, je vais inviter Mme Drolet à réagir sur cette question.

Mme Drolet (Maryse): Oui. Bien on se disait que, lorsqu'une région ou que certains organismes dans une région peuvent être prêts à déjà annoncer, même une région pourrait décider de se lancer dans cette belle aventure que d'adopter une stratégie de développement durable pour la région, on pourrait décider d'intégrer ça. Et on sait que certaines organisations pourraient être déjà prêtes à travailler avec nous, de ne pas attendre le décret, et de pouvoir déjà s'embarquer dans cette initiative-là. C'est dans ce sens-là qu'on apportait cette proposition-là.

Le Président (M. Dubuc): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Autre question. Vous parlez, à l'article 4: L'implantation d'un système de gestion environnementale en milieu agricole ISO 14001. Est-ce que vous pouvez nous parler de ça? Parce que je n'ai pas connaissance qu'il y a beaucoup de fermes qui sont certifiées ISO. Peut-être que c'est mon ignorance, là.

M. Lampron (Laurent): Alors, Mme Boudreau va pouvoir répondre à la question.

Mme Boudreau (Julie): Oui. L'information que j'ai relativement à ça, c'est un projet qui a été mis en place, je crois, vers 2003, tout d'abord en Estrie, et ensuite... là il y a maintenant des fermes en Chaudière-Appalaches qui sont aussi inscrites dans ce programme-là. Pour Chaudière-Appalaches, je crois qu'on parle de 11 entreprises agricoles. Je sais qu'en Estrie il y a déjà des fermes qui ont été certifiées ISO 14001. Ils fonctionnent avec une procédure en trois étapes pour donner la certification à ces entreprises-là. Mais c'est sûr que ce n'est pas, je veux dire, ce n'est pas le premier domaine où on a vu apparaître les certifications d'ISO 14001, mais il y a quand même des types d'exploitations agricoles qui se prêtent quand même bien à ça et qui vont en retirer les avantages aussi, là, éventuellement.

M. Tremblay: Merci.

Le Président (M. Dubuc): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Lampron (Laurent): Excusez...

Le Président (M. Dubuc): Allez-y, M. Lampron.

M. Lampron (Laurent): C'est parce que j'ai un élément additionnel d'information sur ce point. Ce projet s'appelle AGRISO, effectivement, et c'est un projet qui s'est réalisé dans une collaboration entre les deux conférences régionales des élus, entre autres, de l'Estrie et de la Chaudière-Appalaches, et plusieurs de ces fermes-là sont toujours en processus, là, d'obtenir les accréditations en question.

Le Président (M. Dubuc): Merci. M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Moi, je vois, là, à l'article 2, vous parlez d'implanter une gestion intégrée des matières résiduelles. Dans Chaudière-Appalaches, là, les sites d'enfouissement que, moi, je connais, en tout cas, là... C'est sûr que Chaudière-Appalaches, c'est grand, là; ça représente 78, je pense, municipalités, j'ai vu tout à l'heure, j'ai appris ça. Mais, dans mon coin, en tout cas, moi, il me semble que les sites d'enfouissement à l'heure actuelle, je pense, sont assez modernes, dans la Beauce en tout cas.

Le problème que vous identifiez, là, de gestion de déchets afin de mieux contrôler l'infiltration, lixiviat, et tout ça, je ne sais pas où il y en a qui font défaut, mais je sais où il y en a qui n'en font pas, de défaut.

M. Lampron (Laurent): Alors, M. Grondin, vous comprendrez que les éléments auxquels vous faites référence se retrouvent dans notre plan stratégique. Ce sont des objectifs à atteindre. C'est en cours. Bien, comme tout objectif, c'est un processus qui prend un certain temps. Là-dessus, Maryse, est-ce qu'il y aurait ? ou Mme Boudreau ? d'autres éléments?

Mme Boudreau (Julie): Bon, pour compléter, il y a aussi un plan de régionalisation des matières recyclables qui a été mis en oeuvre et qui est opérationnel actuellement en Chaudière-Appalaches, c'est-à-dire que certaines... en tout cas la majorité des MRC ont pris des ententes avec deux centres de tri et de récupération, là, de façon à pouvoir traiter les matières recyclables à coût zéro. Je n'ai pas toutes les spécifications concernant, là, ces ententes-là, mais c'est par ce programme-là, si on veut, que toutes les municipalités et les MRC ont embarqué, si on veut, dans le train, là, du recyclage et de la récupération.

Le Président (M. Dubuc): M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Je sais que dans les MRC de Robert-Cliche et de Nouvelle-Beauce, là, ils ont un plan, ça fait quelques années. Même, ils donnent des cours comment faire du compostage, comment recycler qu'est-ce qui est... Alors, je pense qu'ils sont assez avancés là-dedans. Ils ramassaient les déchets dangereux aussi. Ils faisaient, je pense, des temps spéciaux dans l'année, je pense que c'est deux fois par année, pour récupérer tous les déchets dangereux. Là, je sais que ça se faisait quand j'étais là, là, mais aujourd'hui je ne sais pas où c'est rendu. Ils ne doivent pas tout avoir lâché à cause que, moi, j'ai lâché.

Le Président (M. Dubuc): M. Lampron.

M. Lampron (Laurent): Et j'entendais récemment le préfet de la MRC de Lotbinière aussi nous parler de son plan de gestion des matières résiduelles, comme quoi ça progressait de façon très satisfaisante. Alors, tant mieux.

Le Président (M. Dubuc): M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Je ne sais pas si vous avez suivi aussi... Je sais que, dans Chaudière-Appalaches, c'est une zone agricole assez... on est en surplus à peu près dans toutes les municipalités. Est-ce que vous avez suivi les forums qu'ils ont faits dernièrement pour... comment traiter le lisier, pour essayer d'améliorer la performance des fermes? Est-ce que vous avez suivi ça?

Mme Boudreau (Julie): Vous parlez d'un événement qui a eu lieu à Scott...

M. Grondin: Oui.

n(17 heures)n

Mme Boudreau (Julie): ...un forum, là, sur les technologies de traitement de lisier, là. Bien, effectivement, il y a plusieurs promoteurs qui sont venus montrer les avancées, là, de ce côté-là, parce que c'est une région où on n'aura pas le choix, pour certains producteurs, là, de se tourner vers des technologies comme ça, parce que, sinon, l'autre chose à envisager, ce serait de réduire les cheptels, là, donc, et les producteurs ne sont pas enclins à ça. Donc, il va vraiment falloir qu'on pousse du côté des technologies de traitement, là, pour la Chaudière-Appalaches.

M. Grondin: Ce qu'on voit sur le terrain, c'est qu'il y a plusieurs agriculteurs et plusieurs compagnies qui en ont, des techniques pour améliorer ça, là. Moi, je parlais de ça à un moment donné ici, c'est que je pense qu'il va falloir donner un peu une chance au coureur là-dedans, parce, que pour avoir une technologie aujourd'hui approuvée, là, que ce soit en environnement, il faut qu'il y ait, je pense, un an d'essai. puis ça coûte une fortune, là. Mais il y a plusieurs techniques qui pourraient s'adapter direct sur le terrain qui ne coûteraient pas cher et puis qui amélioreraient énormément l'environnement, sans passer par un banc d'essai d'un an de temps.

Le Président (M. Dubuc): M. Lampron.

M. Lampron (Laurent): Bien ma réaction à cela, c'est: Oui, je pense qu'on est dans un secteur d'activité où il y a un certain bon sens, là, à vivre, mais en même temps il faut s'en remettre aussi à certaines expertises. Je ne suis pas en position personnellement, là... je ne sais pas si Mme Boudreau est en position de commenter, là, davantage?

Mme Boudreau (Julie): Ce que je pourrais ajouter là-dessus, c'est qu'à ma connaissance la façon dont ça fonctionne, dans une entreprise où on va installer une technologie de traitement, on doit avoir un certificat d'autorisation du ministère de l'Environnement pour une période de trois ans avant de pouvoir envisager d'avoir un certificat d'autorisation permanent. Actuellement, il y a une technologie, c'est en Montérégie, là, c'est la technologie qui est promue par Envirograin, là, ça s'appelle Biofertile. Eux ont obtenu un certificat d'autorisation permanent pour traiter le lisier. C'est cinq entreprises agricoles, je crois, qui se sont regroupées pour acheter la technologie puis les services qui vont avec. Et puis, à ma connaissance, ayant dans une vie antérieure travaillé dans ce domaine-là, c'est la technologie qui est la plus avancée et qui laisse espérer les meilleurs résultats, là, en tout cas pour ce qu'on a au Québec, là, présentement.

M. Grondin: ...que l'expérience est bâtie sur des erreurs, hein? C'est sûr, on essaie beaucoup de choses, on fait des erreurs, mais, à un moment donné, on trouve la bonne. Alors, c'est beau pour moi.

Le Président (M. Dubuc): Merci. Pas d'autres questions sur le côté de l'opposition? M. le ministre.

M. Mulcair: Je voulais juste poser une dernière question à nos invités, M. le Président, qui mentionnent dans leur mémoire l'importance de consulter la population sur le choix des indicateurs, et je voulais savoir si nos invités pensaient qu'une consultation par Internet pourrait être utile non seulement pour le choix de ces indicateurs dont je viens de parler, mais aussi pour le futur projet de stratégie de développement durable. Restons avec le thème des régions. Il nous semble que ça pourrait être bien, ça a tendance à rapprocher les gens. D'autres groupes ont exprimé une opinion dans ce sens-là, ça me tente de connaître votre opinion là-dessus.

Le Président (M. Dubuc): M. Lampron.

M. Lampron (Laurent): Mme Boudreau va...

Le Président (M. Dubuc): C'est bien.

Mme Boudreau (Julie): Certainement, là, Internet, hein, c'est une technologie qui est là pour servir la société. Et puis, une consultation par ce médium-là serait certainement bienvenue et permettrait vraiment d'avoir le plus grand nombre, là, de participants, de points de vue. Bon, en tout cas, on envisage aussi qu'il y ait des consultations par des gens plus centrés sur le domaine du développement durable, des experts, tout ça, mais il est intéressant probablement d'intégrer, là, le plus de citoyens possible à cette démarche-là, parce que, parmi les citoyens, il y a des gens qui sont très, très au fait de ce qui se fait en environnement, en développement durable. Sans que ce soient des professionnels du domaine, c'est une question qui préoccupe de plus en plus, là, l'ensemble de la société.

Le Président (M. Dubuc): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Ce n'est pas une question, c'est juste une réflexion qui s'est déjà faite ici, à l'Assemblée nationale, sur les consultations, et où, à l'instar d'Internet qui favorise la rapidité et la spontanéité des communications, les réponses fournies par les participants aux consultations sont généralement brèves, spontanées et peu détaillées. En fait, moins de 5 % des réponses contiennent le même degré de détail et la richesse d'information qu'un mémoire soumis dans une consultation publique traditionnelle. Élément de réflexion.

Le Président (M. Dubuc): Pas d'autres questions? À ce moment-là, je tiens à vous remercier, M. Lampron, Mme Boudreau et Mme Drolet. Merci de votre présentation. On va suspendre, deux minutes, nos travaux.

(Suspension de la séance à 17 h 5)

 

(Reprise à 17 h 13)

Remarques finales

Le Président (M. Dubuc): On reprend nos travaux pour les remarques finales. Le groupe parlementaire formant l'opposition, 10 minutes; le groupe parlementaire, 10 minutes. Ça fait qu'on commence par l'opposition. M. le député du Lac-Saint-Jean.

M. Stéphan Tremblay

M. Tremblay: Oui. Merci, M. le Président. Alors, j'ai été enchanté de cette consultation et je n'ai vraiment pas de regret d'avoir insisté auprès du ministre pour que nous puissions la faire. Je sais que le ministre avait fait une tournée auparavant, et il y a peut-être des choses qu'il croyait qui allaient se répéter, mais je suis persuadé que, pour lui et son équipe, somme toute ça va avoir été une expérience fort positive. Et je dis ça par les questions qui ont été posées, la qualité des débats que nous avons eus. Et, s'il avait fallu qu'on laisse seulement 20 minutes par groupe, huit minutes du côté du gouvernement, et de l'opposition, et des gens, je pense que ça n'aurait pas été un travail sérieux. Bien entendu, on aurait pu rencontrer encore quelques groupes, et je suis certain que nous aurions eu davantage d'éléments pour bonifier le projet de loi, mais, en tout cas, somme toute, malgré mes frustrations du fait que ce se soit passé en même temps que la conférence de Montréal, je crois que les dires et les suggestions des différents groupes sont certainement venus nous éclairer davantage et en tout cas vont nous éclairer, en ce qui nous concerne, pour apporter des amendements constructifs.

Je crois que depuis le début, dans ce projet de loi, nous avons eu une attitude extrêmement constructive. Nous ne sommes pas ici pour faire de l'obstruction mais pour faire avancer le Québec. Je crois que justement nous sommes rendus à cette étape d'emboîter le pas sur le développement durable. Je l'ai dit à plusieurs reprises, je vais continuer de le dire, j'aimerais que ce soit davantage, mais, bon, c'est un pas dans la bonne direction. Et ce que je vous dis là s'est reflété à plusieurs reprises et par plusieurs groupes, mais reste à voir le travail que nous aurons à compléter la semaine prochaine, en espérant qu'une attitude réceptive sera présente de la part du gouvernement et que nous pourrons apporter certains amendements qui bonifieront. Et par la suite, bien, on verra le reste des choses. Je vous remercie.

Le Président (M. Dubuc): Merci, M. le député du Lac-Saint-Jean. M. le député de Beauce-Nord.

M. Janvier Grondin

M. Grondin: Merci, M. le Président. Alors, moi aussi, ça va être assez court, mais je veux surtout remercier tous les intervenants qu'on a entendus pendant cette commission, M. le ministre, M. le critique officiel, les fonctionnaires, les employés puis tous les autres collègues, là, ça a été... Je dois vous dire que... Moi, ça fait deux ans et demi, là, ça s'en va sur trois ans, je suis un nouveau député de la dernière élection et je peux vous dire que c'est la commission que j'ai eue la plus intéressante. Ça a été le fun de travailler, c'était enrichissant d'entendre ce que les groupes nous apportaient. Puis je pense qu'il y avait une bonne chimie entre les deux côtés de la table, et ça a été, je pense, en tout cas fantastique.

Et puis ça nous a fait voir une chose, c'est que peut-être, en protégeant notre environnement, en mettant un projet de loi comme celui-là, ce n'est pas nécessairement des coûts supplémentaires, on va peut-être, à bien des égards, on va peut-être faire des économies. Et puis je pense que la plus belle économie qu'on doit se mettre dans la tête puis qu'on doit faire, là, c'est de penser qu'il n'y a pas juste nous autres sur cette planète-là, il va y avoir des générations qui vont nous suivre, puis il ne faut pas juste penser à nous, il faut penser à eux, il faut leur laisser de l'air pur et de l'eau propre. Et puis je pense qu'on a une responsabilité, et puis ça ne regarde pas un parti politique plus que l'autre, ça regarde tout le monde.

Alors, sur ce, je vous dis: J'ai été enchanté et je vous remercie, tout le monde, de ce qui s'est passé.

Le Président (M. Dubuc): Merci, M. le député de Beauce-Nord. Le groupe parlementaire formant le gouvernement. M. le ministre.

M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci. Alors, je tiens tout d'abord à remercier mon collègue le député de Lac-Saint-Jean et mon collègue le député de Beauce-Nord d'avoir été présents tout le long de ces consultations et de les avoir enrichies. Et merci, Charlotte et tout le monde, de... Je suis un peu déçu qu'on n'avait pas le National Film Board avec nous, comme d'habitude.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Mulcair: Mais ma collègue, comme on a vu avec les derniers intervenants qui venaient de Chaudière-Appalaches, c'est quelqu'un qui suit bien les dossiers de l'environnement, et elle me talonne très bien quand elle a des dossiers de l'environnement, parce qu'elle connaît ça, et j'espère que je réussis toujours à rendre service dans ces dossiers.

C'est très important ? je le dis sans hésitation à mon collègue le député de Lac-Saint-Jean ? qu'on ait fait ça. Et, oui, l'invitation a été lancée, plusieurs groupes n'ont pas pu venir, mais on a leurs anciens mémoires écrits, puis on peut les bonifier. Puis, quand on regarde toutes les autres étapes de consultation à venir, les gens auront l'occasion de mettre encore plus sur la table.

Mais, au terme de cette consultation, on a entendu donc une trentaine de groupes sur plusieurs jours: des organismes de protection et de défense de l'environnement; des organismes de savoir, de connaissance et de recherche ? et c'est très intéressant aussi de voir l'expertise qui s'est développée au Québec, que ce soit au Centre québécois du développement durable, que ce soit avec les gens qui s'occupent de cycle de vie, que ce soit avec cette jeune équipe extraordinairement brillante de juristes de l'Université McGill, qui sont la référence mondiale en droit de développement durable, dont on peut être vraiment fiers; des intervenants du monde des entreprises et des affaires ? ça montrait à quel point ce n'est pas toujours facile de s'entendre sur des choses comme l'internalisation des coûts...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Mulcair: ...les associations professionnelles ? un apport intéressant, que ce soit le Barreau, les architectes, les ingénieurs; donc, les intervenants en développement durable, bien entendu, et en éducation; et finalement, bon, les secteurs municipaux, agricole, forestier. Donc, un vaste éventail de préoccupations reliées au développement durable et un bon échantillon des groupes entendus en consultations publiques l'hiver dernier.

Je ne me souviens plus quel soir c'était, mais on avait fini une présentation, et j'ai regardé mon collègue ? »off the record» ? du Lac-Saint-Jean, puis j'ai dit: Tu vois, c'est pour ça que je suis content que tu... Puis il y avait quelques groupes que j'étais vraiment content qu'on puisse les entendre ensemble pour qu'il partage mon enthousiasme pour ce qu'on essaie de faire ensemble.

Un premier constat: Bien, la très grande majorité évidemment appuie fortement la démarche et le projet de loi sur le développement. Parlant d'ouverture et d'Internet, on a mis tous les mémoires sur l'Internet, depuis un bon bout de temps, puis ça se constate. Plusieurs ont même salué la nouveauté et la justesse, la qualité et les innovations de ce projet de loi.

n(17 h 20)n

Quand j'apprends, parce que je l'ai appris là, que McGill l'avait donné en Norvège puis à l'ONU... L'ONU, ça m'a surpris un peu moins parce que je sais qu'eux, ils travaillent en étroite collaboration avec les Nations unies, mais j'étais ravi d'apprendre, parce que, moi, je veux faire une tournée après le dépôt de l'avant-projet... J'étais allé surtout en Belgique et en France, où ça avait été salué, mais j'ignorais que d'autres pays étaient en train de prendre modèle. Et je ne prends pas ? je m'excuse, c'est un anglicisme; mais je ne prends pas ? le crédit pour ça, je n'essaie pas de dire que la facture est la mienne. Léopold et les équipes au ministère sont largement responsables de ça, parce que c'est le reflet de 30 ans d'expérience et de suivre de près et pour vrai le développement durable.

Deuxième grand constat qui se dégage de ces auditions, c'est que le projet de loi sur le développement durable devrait être adopté rapidement compte tenu du très peu d'ajustements et de bonifications nécessaires. En effet, on a grandement souligné les efforts du gouvernement pour incorporer dans le projet de loi sur le développement durable déposé à l'Assemblée nationale le 13 juin 2005 la presque totalité de nos préoccupations législatives véhiculées lors de la tournée de consultation réalisée à l'hiver 2005. Nous avons très souvent entendu une majorité d'entre eux remercier le gouvernement de l'écoute manifestée lors de cette consultation et des résultats concrets des engagements pris par le gouvernement.

Le troisième grand constat touche le plaidoyer répété d'impliquer plus largement les forces créatives expérimentées et volontaires de la société pour réaliser le Plan de développement durable. Les organismes et les personnes consultés veulent être impliqués, s'engager et participer aux étapes importantes qui constitueront la stratégie de développement durable, les indicateurs de développement durable, les plans d'action qui impliqueront les municipalités, MRC, les institutions d'enseignement et les établissements de santé. Nous avons débattu de divers modèles de consultation qui nous avaient été proposés, mais il ne s'est pas vraiment dégagé de consensus à ce moment-ci sur les meilleures formules à mettre en place. Disons juste qu'à chaque étape, si on veut que ce soit du réel, il faut que la consultation soit maintenue et soit continue. À cet égard, soyez assurés donc que nous ne nous priverons pas des expertises, des compétences et des solutions que l'ensemble d'intervenants externes au gouvernement pourraient nous apporter pour contribuer au succès de notre démarche de développement durable.

Enfin, le dernier constat que nous pouvons dégager de ces consultations particulières, c'est qu'il existe un consensus sur l'importance d'institutionnaliser le concept de développement durable dans une loi afin de nous donner un ensemble de nouveaux instruments pour réaliser les ambitions et les progrès recherchés, comme nous l'avons fait en 1972 en adoptant la Loi sur la qualité de l'environnement, le fait que le gouvernement doit donner l'exemple et qu'il est raisonnable que cette nouvelle législation puisse d'abord s'appliquer à lui sans négliger le développement de ce concept partout dans la société, et enfin l'urgence de mettre en place la loi et les outils qui vont en découler. Sans délai.

Merci à vous, M. le Président, et à mes collègues, et on se revoit dans quelques heures.

Le Président (M. Dubuc): Mme la députée de Pontiac.

Mme Charlotte L'Écuyer

Mme L'Écuyer: Deux minutes. C'est pour vous remercier, remercier aussi le ministre. En tout cas, j'ai encore beaucoup appris de cette consultation, parce que c'est un univers fascinant. C'est peut-être le ministre qui va nous permettre réellement de s'en aller vers le développement durable. Je sais que, chez nous, on commence à avoir plusieurs acres ou hectares d'aires protégées, et la communauté est prête à en avoir d'autres, j'ai d'autres demandes. Et on voit l'évolution qui se fait dans la société, qui est très, très rapide. Moi, je le constate dans un environnement rural où les gens coupaient du bois, où on était en train de déboiser complètement, puis aujourd'hui on a un temps d'arrêt, et les gens, même si ce n'est pas facile, réalisent qu'il faut le faire. Ça fait que je tiens à remercier M. le ministre parce qu'il y est pour quelque chose. Les commentaires, c'est que, si ce n'était pas de lui, peut-être qu'on ne serait pas rendus là en environnement. Merci.

Le Président (M. Dubuc): Merci, Mme la députée de Pontiac. Merci, M. le ministre. Merci, les deux porte-parole ? deux secondes ? MM. les deux porte-parole, de Lac-Saint-Jean et de Beauce-Nord.

Mémoires déposés

J'aimerais aussi... je dépose les mémoires des organismes qui n'ont pas été entendus. La commission ayant accompli son mandat, j'ajourne les travaux sine die. Merci. Bonne soirée.

(Fin de la séance à 17 h 24)


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