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Version finale

37e législature, 1re session
(4 juin 2003 au 10 mars 2006)

Le jeudi 8 décembre 2005 - Vol. 38 N° 58

Consultations particulières sur le projet de loi n° 118 - Loi sur le développement durable


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Table des matières

Journal des débats

(Onze heures vingt-quatre minutes)

Le Président (M. Dubuc): ...la Loi sur le développement durable. Donner lecture du jour, inviter les personnes à se présenter et à éteindre leurs téléphones cellulaires, s'il vous plaît. Demander au secrétaire d'annoncer s'il y a des remplacements, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président: M. Bernard (Rouyn-Noranda?Témiscamingue) remplace M. Soucy (Portneuf).

Le Président (M. Dubuc): Merci. Inviter les représentants de l'organisme de prendre place, à se présenter et à faire un exposé de 15 minutes.

Auditions (suite)

L'Union des municipalités du Québec, si vous voulez bien vous présenter, M. le président et vos deux collègues.

Union des municipalités du Québec (UMQ)

M. Lapointe (Denis): Alors, je suis Denis Lapointe. Je suis maire de Salaberry-de-Valleyfield et président de la Commission permanente de l'environnement de l'Union des municipalités, et je suis accompagné de M. Jean-Guy Breton, qui est maire de Lac-Etchemin et aussi membre de l'exécutif de l'Union des municipalités, et enfin Mme Marieke Cloutier, qui est la responsable, coordonnatrice aux politiques de l'Union des municipalités en ce qui a trait spécifiquement à l'environnement.

Le Président (M. Dubuc): Merci. Puis vous avez 15 minutes, puis 15 minutes de chaque côté de la Chambre. Allez-y, on vous laisse la parole.

M. Lapointe (Denis): Merci. Alors, l'Union des municipalités tient à saluer l'engagement du premier ministre en présentant son projet de loi sur le développement durable, le 13 juin dernier. Nous félicitons également le ministre Thomas Mulcair d'abord d'avoir pris l'initiative d'enclencher un mécanisme de stratégie de développement durable par le dépôt simultané d'un document de consultation comprenant un échéancier accompagné d'un avant-projet de loi et d'avoir mené à bien les consultations publiques. Nous y voyons enfin l'émergence de l'amorce d'un changement en termes de philosophie d'action et de grandes orientations réunissant les pôles social, économique et environnemental du développement.

Avant d'entrer dans le vif du sujet, j'aimerais vous rappeler que l'Union des municipalités du Québec représente depuis sa fondation, en 1919, les municipalités de toutes les tailles dans toutes les régions du Québec. La structure de l'Union des municipalités, par ses caucus d'affinité, est le reflet de la mosaïque municipale québécoise avec ses communautés métropolitaines, ses grandes villes, ses villes d'agglomération, ses municipalités de centralité, ses municipalités locales et ses MRC. La mission de l'Union des municipalités du Québec consiste à contribuer au progrès et à la promotion des municipalités démocratiques, dynamiques et performantes dédiées au mieux-être des citoyens.

Vous avez pris connaissance de notre mémoire, qui apporte des précisions quant à la position de l'Union des municipalités dans la continuité des propos tenus dans son précédent mémoire en date du 15 février de cette année, qu'elle considère toujours représentatif des enjeux interpellant les municipalités dans ce domaine. Nous pourrons discuter plus à fond lors de la période de questions. La santé des collectivités locales est tributaire des services rendus par les écosystèmes qui assurent la qualité de l'air, de l'eau et du sol. De nombreux programmes ont vu le jour depuis les deux dernières décennies pour tenter d'actualiser ces visions plus globales du développement durable sur les territoires d'appartenance des collectivités locales, tels Villes et villages en santé, Communautés viables, Coalition des communautés en santé, Agenda 21 local, et d'autres encore.

De ce fait, les décideurs locaux sont interpellés tant par l'existence des politiques publiques que par les revendications de leurs propres commettants. Le cadre de vie, naturel et bâti, est un des facteurs prédominants sur lequel il est possible d'agir pour assurer l'équilibre des écosystèmes qui maintiennent les processus de vie, d'agir pour minimiser les inégalités de santé et enfin d'agir pour maximiser la qualité de vie des collectivités locales. Dans cette foulée, l'Union des municipalités est heureuse de participer à la commission parlementaire sur le développement durable.

Ce que nous tenons à mettre en évidence dès le départ, c'est que, par rapport à l'avant-projet de loi, le projet de loi n° 118 ajoute une nouveauté intéressante pour le monde municipal et qui va dans le sens des suggestions de notre mémoire, c'est-à-dire qu'avant d'adopter un tel décret les municipalités et les organismes municipaux doivent être consultés directement ou par l'entremise de leurs associations.

Voilà qui démontre, sur papier à tout le moins, une réelle volonté de partenariat. Nous applaudissons à cet ajout au projet de loi qui garantit désormais aux municipalités qu'elles seront consultées. Il restera à déterminer les modalités de la consultation afin de s'assurer que les municipalités seront suffisamment informées sur les enjeux et qu'elles auront suffisamment de temps pour se préparer et se faire entendre. L'Union des municipalité va plus loin et recommande d'inscrire au projet de loi que cette consultation se fasse par l'entremise de la Table Québec-Municipalités, la TQM, une instance de concertation reconnue où les représentants du gouvernement et du milieu municipal discutent des dossiers concernant la place, le rôle, les responsabilités et l'administration des municipalités.

Un autre lieu à privilégier dans le cadre du projet gouvernemental de décentralisation vers les instances municipales est le Comité permanent de liaison Environnement-Munipalités, le COPLEM, qui constitue le comité de la TQM où sont analysées les avenues possibles de nouvelles répartitions des fonctions environnementales. Remarquant depuis un certain temps l'effritement du rôle du COPLEM, en fait puisqu'on n'est pas informé à temps des différentes modifications sur différents projets de loi, l'Union des municipalités propose la révision du mandat de celui-ci afin qu'il se réapproprie sa fonction originelle dans le but de contribuer efficacement à la démarche de développement durable. Enfin, toujours dans une perspective de partenariat, nous recommandons aussi que les municipalités soient collaboratrices avec le ministre Mulcair de même qu'avec les autres ministres concernés à l'élaboration du contenu de la stratégie de développement durable.

Je laisse maintenant la parole à M. Jean-Guy Breton, le maire de Lac-Etchemin et membre de l'exécutif de l'union, qui abordera de façon plus précise les termes environnementaux d'actualité pour les municipalités.

n (11 h 30) n

M. Breton (Jean-Guy): Alors, merci, Denis. M. le Président, mesdames et messieurs, avant d'effectuer un rapide survol de certaines thématiques ayant des incidences environnementales pour les municipalités, j'aborderai l'épineuse question des fonds dédiés au développement durable.

La lecture de l'article 15.2, qui est clairement relié au projet de redevances sur l'eau du ministère, nous amène à déduire qu'un des objectifs est de garantir par un fonds dédié à l'intérieur du Fonds vert l'utilisation de sommes provenant de ces redevances sur l'eau. L'UMQ recommande d'aller un pas plus loin en ajoutant un article à l'effet que le financement des mesures qui s'appliqueront aux municipalités, comme les éventuelles redevances à l'élimination ou sur l'eau, dont je parlerai dans quelques instants, soit garanti et que les sommes qui y sont affectées soient véritablement dédiées.

En fait, ces dernières ne pourraient pas être rapatriées au fonds consolidé sans le consentement municipal par l'entremise de la Table Québec-Municipalités. Nous sommes conscients que les notes explicatives au projet de loi n° 118 énoncent que ce fonds vise à permettre au ministre, dans le cadre prévu par la loi, d'octroyer un soutien financier notamment aux municipalités et aux organismes sans but lucratif oeuvrant dans le domaine de l'environnement, mais nous demandons tout de même que cette garantie fasse partie intégrante du projet de loi.

Dans le même ordre d'idées, à l'article 15.4, nous demandons qu'il soit clairement spécifié au projet de loi que les revenus provenant de la taxe de vente provinciale accumulés suite à la perception de tous types de redevances soient obligatoirement compris à l'intérieur des sommes constituant le Fonds vert. Par «tous types de redevances», l'union entend également l'inclusion de sommes de la TVQ associées à la perception de redevances sur l'eau et sur l'élimination, qui impliqueront indubitablement les municipalités, ainsi que les intérêts afférents.

Plusieurs enjeux auront assurément des impacts à terme sur le déroulement de la démarche gouvernementale de développement durable et ils doivent être tous pris en considération. Nous pensons ainsi à la gestion des matières résiduelles, à la gestion de l'eau, à la protection des bandes riveraines, à la gestion durable des territoires agricoles, aux changements climatiques, à la qualité de l'air ou encore à la production d'énergie.

Puisque le temps qui nous est imparti s'écoule rapidement, je me limiterai à aborder certains éléments reliés à la gestion des matières résiduelles et à la gestion de l'eau. Dans le premier cas, le projet de règlement sur les redevances exigibles pour l'élimination des matières résiduelles et des sols contaminés découlant de la loi n° 130 et prévoyant une redevance de 10 $ la tonne à l'enfouissement ou lors de l'incinération de matières résiduelles continue à faire l'objet de discussions intensives au niveau des permanents entre le milieu municipal et le ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs. Il serait essentiel que les élus soient rapidement mis à contribution pour conclure une entente.

L'union a rappelé dans ses représentations que cette taxe à l'élimination devait permettre de générer de nouvelles sources de financement afin de soutenir les municipalités dans la mise en oeuvre de leurs plans de gestion des matières résiduelles. Cependant, ces sommes redistribuées aux municipalités ne constituent qu'une proportion des ressources supplémentaires nécessaires dès maintenant au monde municipal et dans les années à venir pour les activités comprises dans les plans de gestion des matières résiduelles.

Dans ses revendications en matière de gestion des matières résiduelles, l'Union des municipalités du Québec a toujours demandé une compensation pour la totalité des services municipaux de collecte sélective ainsi que l'application du principe pollueur-payeur au moyen de la responsabilité élargie des producteurs. L'union participe activement aux négociations entourant le financement de la collecte sélective et le projet de redevances à l'élimination. Plusieurs résolutions ont d'ailleurs été acheminées au ministre du Développement durable à cet égard. Il s'agit là d'un dossier prioritaire pour notre union et nous entendons continuer à veiller aux intérêts des municipalités du Québec.

En matière de gestion de l'eau, l'union a réitéré dans son mémoire portant sur les orientations gouvernementales en développement durable de février 2005 qu'il est difficile pour les municipalités québécoises de financer les multiples obligations auxquelles elles sont assujetties en matière de gestion de l'eau par le biais de lois, de normes et de règlements. Parmi ces obstacles, citons, entre autres, le maintien et le renouvellement des infrastructures d'aqueduc et d'égout, les exigences du règlement sur la qualité de l'eau potable, du règlement sur le captage des eaux souterraines, du règlement sur l'évacuation des eaux usées des résidences isolées, de la gestion des cours d'eau, de la politique de protection des rives du littoral et des plaines inondables, ainsi que de la mise en oeuvre de la gestion par bassin versant.

La gestion des matières résiduelles et la gestion de l'eau ne sont là que deux exemples qui démontrent que les municipalités et les MRC québécoises sont à plusieurs égards déjà engagées sur la voie du développement durable. Mais il reste encore beaucoup à faire. Ainsi, l'harmonisation des plans politiques et programmes du gouvernement est une pierre angulaire de la réussite du développement durable au Québec. Afin d'effectuer un pas dans cette direction, l'UMQ recommande la coordination des requêtes à implication financière visant les municipalités. En effet, ces dernières sont écrasées par les normes imposées à leurs services par le gouvernement du Québec. Les domaines concernés, à l'image du développement durable, sont multiples et dépendent de plusieurs ministères, entre autres: la gestion des matières résiduelles, la réorganisation policière, l'environnement, la politique de l'eau, les schémas de couverture de risque incendie, la signalisation routière, etc.

Sans remettre en cause le bien-fondé de ces normes, leur coût met en exergue la capacité des municipalités de les assumer. C'est pourquoi l'Union des municipalités du Québec a entrepris plusieurs démarches visant à chiffrer précisément quels sont les coûts de ces normes pour les municipalités. Précisément, l'union demande l'inclusion dans la nouvelle politique fiscale municipale d'un engagement du gouvernement à mettre en place un mécanisme permanent de suivi et d'élaboration en partenariat avec le milieu municipal, des nouvelles normes sectorielles et de leur impact financier pour les municipalités afin que le ministère des Affaires municipales et des Régions en soit avisé et puisse lui-même les chiffrer.

Dans cette foulée, lorsqu'un ministère édicte une nouvelle norme ayant une incidence légale ou fiscale sur les municipalités, le dossier devrait être référé à la TQM avant toute adoption de projet de loi. Une fois l'an, la TQM examinerait l'ensemble de ces normes et de leurs effets financiers sur les municipalités. Strictement en ce qui concerne l'environnement, le COPLEM détient un rôle de premier plan, à jouer en amont en ce qui a trait à la consultation des associations municipales et au suivi législatif environnemental.

Je redonne maintenant la parole à M. Lapointe afin qu'il puisse conclure notre présentation.

M. Lapointe (Denis): Alors, M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs de la commission, en guise de conclusion, rappelons que tous les acteurs de la société, incluant le gouvernement du Québec, auraient avantage à souligner le nécessaire recours à une analyse multidisciplinaire et interdisciplinaire dans la résolution des problématiques environnementales de notre époque. Les mémoires sur l'avant-projet de loi émanant du milieu municipal, dont le nôtre, ont fait ressortir la contribution et l'implication municipales par des exemples d'actions entreprises par les municipalités et les MRC québécoises, les montants qu'elles ont déjà engagés de multiples manières sur la voie du développement durable. Toutefois, il reste encore beaucoup de travail à accomplir avant d'atteindre un véritable développement durable à l'échelle du gouvernement du Québec et du monde municipal. Rome ne s'est pas fait... ne s'est pas construit en un jour.

Nous n'insisterons jamais assez sur le caractère transversal des problématiques du développement durable liées à l'occupation et au développement du territoire, que ce soit en matière de transport, de la gestion de l'eau, les matières résiduelles, des infrastructures de voirie, d'aqueduc et d'égout, tout en faisant référence aux activités humaines dans toutes ses dimensions et à la problématique de l'étalement urbain. L'intégration des valeurs du développement durable commandera l'utilisation accrue de mécanismes de concertation ou d'harmonisation des usages. Saisissons l'opportunité offerte par les idéaux ressortant du présent projet de loi sur le développement durable d'oeuvrer à une collaboration fructueuse entre le monde municipal et le gouvernement du Québec.

Dans cette optique, on doit procéder à un arrimage stratégique qui considère le rôle central des municipalités en matière de services directs aux citoyennes et aux citoyens du Québec. Ce partenariat vise à établir une concertation de tous les instants avec la sphère municipale. De cette manière, il sera plus facile de faire la part des choses entre les objectifs visés et la réalité quotidienne des municipalités.

Traitées comme les authentiques gouvernements locaux qu'elles représentent, les municipalités et les MRC se révéleront des précieuses alliées dans la réalisation du Plan de développement durable, dans la mesure où elles disposeront des ressources législatives, humaines, financières et matérielles à la hauteur de leurs ambitions.

Les gouvernements municipaux demeurent les chefs de file pour résoudre les problématiques spécifiques à leurs collectivités. Toutefois, ils ont nécessairement besoin de la coopération de tous les paliers du gouvernement pour mettre en oeuvre des solutions durables. Le partenariat devient donc une pierre angulaire, et c'est dans cet esprit que l'Union des municipalités offre sa collaboration au gouvernement du Québec tout au long de sa démarche de développement durable. Nous devons examiner ensemble l'élaboration de la stratégie de développement durable et des indicateurs de suivi qui s'y rattacheront. L'union doit être partie prenante de ce processus pour donner l'assurance de la recevabilité des mesures proposées auprès des municipalités québécoises.

Comme nous en avions fait état dans notre premier mémoire, deux chantiers incontournables doivent se poursuivre conjointement: celui du développement durable, la nouvelle politique fiscale municipale et la politique de décentralisation, et ce, en vertu du principe de subsidiarité.

M. le Président, mesdames et messieurs, voilà l'essentiel des propos que nous voulions partager avec vous aujourd'hui. Nous vous remercions de votre attention. Nous sommes maintenant disposés à répondre à vos questions.

n (11 h 40) n

Le Président (M. Pinard): Alors, merci, MM. les maires et Mme Cloutier. Immédiatement, je céderai la parole au parti ministériel. M. le ministre.

M. Mulcair: Merci beaucoup, M. le Président. M. le Président, il me fait extrêmement plaisir de souhaiter la bienvenue à M. Breton, M. Lapointe et Mme Cloutier, d'autant plus que j'habite non loin de Salaberry-de-Valleyfield, mais surtout que j'ai été très content d'aller récemment au Lac-Etchemin pour une belle annonce avec des groupes du coin. C'est vraiment un endroit où on est en train de faire des choses formidables. On a 1 million de lacs au Québec, plusieurs milliers qui sont occupés, surtout dans le sud, par des résidences. Mais, il y a des endroits où ça va plus ou moins bien, mais, dans le coin du Lac-Etchemin, on est vraiment en train de montrer le modèle de ce qu'il faut faire pour garder la pérennité de ces étendues d'eau.

Je voulais aussi profiter du départ, M. le Président, pour présenter les gens qui m'accompagnent aujourd'hui. D'abord, Me Françoise St-Martin, qui est avocate à notre direction des affaires juridiques, Mme Naomi Verdon, qui est analyste au bureau de coordination du développement durable. Et je tiens à préciser que Mme Verdon à réussi à nous suivre presque tout le temps de notre tournée sur le développement durable, où on a rencontré près de 400 groupes, et toujours gardé le sourire et montrer de la patience. Et M. Pierre Bertrand, qui est le directeur au même bureau; aussi, très heureux d'être accompagné de notre sous-ministre au développement durable, première personne à occuper une telle fonction au gouvernement du Québec, M. Léopold Gaudreau; et, de mon cabinet, M. Cody Barker-Greene.

Alors, bienvenue, messieurs. Et je vais prendre la balle au bond, parce que c'était dans votre toute dernière phrase, M. Lapointe, quand vous avez parlé de subsidiarité, qui est un principe tellement important pour nous qu'on propose de l'inscrire comme un des principes fondateurs de notre analyse du développement durable pour élaborer notre stratégie. Et je voulais vous demander, un, si vous étiez d'accord et, deux... Parce que, d'abord, je sais qu'on a eu votre mémoire lors de la tournée, mais vous n'avez pas pu le présenter, donc je suis ravi que vous soyez là aujourd'hui. Parce que le monde municipal est extrêmement important, vous l'avez mentionné tantôt, pour l'eau, pour les matières résiduelles. Nous, on fait beaucoup de politique, mais «you're the business end», hein, vous êtes le bout pointu de notre fer de lance, et, sans vous, bien on peut générer et générer des politiques, mais, si on n'a pas d'application de ça, ça ne peut pas marcher. Donc, l'application passe par vous autres.

Mais, peut-être par des cas concrets, j'aimerais que vous nous parliez de subsidiarité, de l'idée de laisser des décisions au niveau local, mais peut-être de nous illustrer par des exemples que vous connaissez là où ça pourrait être amélioré par rapport à ce qui existe à l'heure actuelle.

Le Président (M. Pinard): M. le maire.

M. Lapointe (Denis): Écoutez, dans un premier temps... En fait, je pense que votre introduction nous amène effectivement à dire que dans le fond les premiers interlocuteurs, lorsque les citoyens, les citoyennes s'adressent à quelqu'un pour gérer, peu importe la problématique, dans le milieu de vie qu'ils ont choisi, c'est aux élus municipaux qu'ils s'adressent. Si vous avez vécu des expériences municipales, effectivement pour tous les problèmes, c'est chez nous que ça s'amène. Donc, les problèmes environnementaux, mais comme les problèmes de gestion courante de la vie de chacun des individus sur notre territoire, c'est vers nous que ça retombe.

Donc, il y a une logique dans toute la démarche gouvernementale qui est de mettre en place des réglementations, de mettre en place des politiques particulières, mais de faire en sorte qu'elles puissent être appliquées, gérées par le personnel qui soutient le fonctionnement municipal. Des exemples, on peut en retrouver au niveau de la gestion des sites d'enfouissement sanitaire, au niveau de la mise en place, par exemple, de sites de compostage, toutes les idées ou tous les projets que les villes mettent en place pour finalement améliorer les conditions de vie sur leurs propres territoires. J'en parle au niveau de la qualité des sols, la qualité... non pas la qualité des déchets, mais la gestion des déchets, mais la qualité d'eau potable, puisque c'est une préoccupation qu'on a aussi, la qualité des eaux usées, donc le contrôle et la gestion du traitement des eaux usées. Ce sont tous des éléments dans lesquels on intervient, et dans bien des cas on a les obligations... on a une réglementation qui nous supporte. On a une réglementation qui nous est imposée, aussi. Mais, dans tous les cas, chaque fois qu'on a une modification ou des améliorations à apporter, on a des obligations de remonter dans le système gouvernemental, et bien des fois la mise en application de mesures correctives et d'amélioration de tous les systèmes, même s'ils répondent à des exigences gouvernementales, il faut obtenir les autorisations gouvernementales, et, dans une grande partie, on pourrait le faire sur des bases locales avec les outils qu'on a sur l'ensemble de notre territoire. Soit que, pour les plus petites municipalités, ça se fasse via les MRC, mais, pour les plus grandes municipalités, il existe déjà des services à l'interne qui sont en mesure de respecter les conditions imposées par les règles gouvernementales dans différentes applications. Je ne sais pas si vous voulez...

M. Breton (Jean-Guy): J'aimerais rajouter, M. le ministre, un élément. La question de subsidiarité, c'est dans le fond régler au niveau où c'est le plus efficace. C'est une question d'efficacité. Je vais vous donner des exemples. Par exemple, l'année dernière, votre ministère a mis en force un règlement sur le contrôle des allocarbures, le 23 décembre. Depuis ce moment, les municipalités ne peuvent plus récupérer ça de façon anarchique comme ça se faisait auparavant. Il n'y a eu aucune formation, il n'y a eu aucune information des municipalités. Votre ministère n'est aucunement prêt à nous aider dans ce domaine-là, et ce qu'on dit, c'est: Ayons donc d'abord le principe du pollueur-payeur. Faisons comme les pneus. Je veux dire, ayons, si on veut récupérer les allocarbures... qu'il y ait, si vous voulez, une implication des producteurs à la base.

Vous êtes en train, dans votre ministère, de faire la même chose au niveau des équipements de chauffage au bois, où vous dites, là, vous avez... Des gens dans votre ministère ont proposé que l'inspecteur municipal aille contrôler si le chauffage au bois utilisé était le bon. Nous, ce qu'on dit, c'est qu'il faut d'abord commencer par fermer le robinet avant de chercher à éponger l'eau qui sort du bain, donc d'abord s'assurer que les gens qui fabriquent ces équipements-là ne fabriquent que des équipements homologués, que les gens qui en vendent ne vendent que des équipements homologués. Et, ensuite, on parle de partenariat public-privé. Lorsqu'il y a une transaction immobilière et qu'une maison est chauffée au bois, les compagnies d'assurance interviennent immédiatement et s'assurent que les cheminées respectent les normes. Alors, pourquoi ne s'assureraient-elles pas également que les équipements de chauffage respectent vos normes? Et à ce moment-là on va, je dirais, du côté des gens directement intéressés, l'entreprise privée qui couvre déjà ces choses-là et on va du côté des fabricants. À partir du moment où on a fermé le robinet, qu'on sait que l'eau ne débordera pas plus du bain, peut-être que nos inspecteurs, lorsqu'ils seront formés, qu'ils auront les connaissances nécessaires, pourront intervenir.

Mais, comme je vous dis, une approche globale, ce n'est jamais de dire: Bien, on va s'assurer que la place où le contrôle peut se faire au niveau du citoyen, bien on va transférer ça là. Il y a parfois d'autres approches beaucoup plus efficaces. Et vous l'avez démontré au niveau des pneus, par exemple. Je veux dire, il faut regarder dorénavant, dans une approche de développement durable, les problèmes de cette façon-là.

M. Mulcair: Merci beaucoup, M. Breton, puis vous me volez le sujet, parce que j'allais justement vouloir vous parler des poêles à bois. Je ne sais pas si vous êtes au courant des chiffres, mais, dans les grandes régions urbaines, l'année dernière, lors des redoux, on a connu des smogs ici, à Québec, ce qui est assez rare; à Montréal, moins rares mais assez intenses à deux reprises, puis ça remonte même à l'Action de grâces 2003, et on a fait des mesures puis on avait plus de 40 % des particules fines qui étaient du bois. Moi, j'ai l'impression que ça va se compliquer encore cette année, parce qu'avec l'augmentation du prix du mazout il y a des gens qui peuvent faire du chauffage d'appoint en brûlant du bois, qui vont le faire de plus en plus, surtout dans les centres urbains.

Par ailleurs, on a une problématique assez particulière, parce que, même quand ce n'est pas pour du chauffage en tant que tel mais pour fins esthétiques, contrairement à d'autres grandes villes où un appartement, par exemple, où un bloc de condos ne peut faire autrement que de mettre du gaz naturel ou du propane, chez nous, on permet le bois, et vous avez des places dans le coeur même, dans le centre de Montréal où on a beaucoup d'unités de condos, Laval, c'est la même chose, qui ont tous... vous passez devant les condos, vous voyez, chaque balcon a une couple de cordes de bois sur le balcon. Ça, ce n'est pas pour du chauffage, ça, c'est pour agrémenter le plaisir de l'endroit et avoir le confort que ça peut représenter jusqu'à un certain point... l'ambiance ? et c'est peut-être le mot que je cherchais dans ce cas-là ? parce que personne ne va jamais avoir la velléité d'enlever à quelqu'un sa seule source possible de chauffage.

Mais ce que j'aime le plus dans ce que je viens d'entendre, c'est un vibrant appel à de la collaboration, de ne pas édicter une norme théorique, en tout cas peut-être une norme réelle, mais une application théorique... si le monde n'est pas prêt à prendre ça de nous autres, de travailler mieux avec vous autres.

n (11 h 50) n

Pour le bois, est-ce que je devrais ? vous avez été quand même consulté, c'est pour ça qu'on est en train d'en parler ? est-ce que vous souhaitez que j'y aille au moins avec la première publication sur... parce qu'effectivement c'est la première chose qu'on veut faire, c'est de fermer pour la vente de choses qui ne sont pas homologuées ACNOR ou US EPA, comme la Colombie-Britannique l'a déjà fait, est-ce que je suis mieux de faire ma première publication là, là, quitte à prendre une bonne période de consultation et recevoir les observations plus détaillées, ou vous ne voulez même pas que j'aille en première publication tout de suite? Quel est votre...

M. Lapointe (Denis): Moi, je vous dirais une chose, c'est, l'année dernière, on a eu une présentation, à la Commission permanente de l'environnement de l'union, on a eu justement une présentation sur l'impact justement du chauffage au bois. Je vais vous dire que, pour tous ceux qui étaient là, c'était la surprise, parce qu'en fait ce qu'on réalisait, une des plus des grandes causes ? ce n'est pas la seule ? de production de gaz à effet de serre au Québec, c'était aussi ce chauffage au bois là. Donc, on a eu la surprise, et puis la surprise allait plus loin que ça, dans le sens où on se dit que traditionnellement, je pense, dans presque toutes les maisons, particulièrement dans les milieux ruraux, mais dans les zones urbaines plus retirées des grands centres, c'est encore une tradition, le chauffage au bois. Donc actuellement peu de gens ou presque peu de gens... il y a très peu de gens qui savent quel est l'impact de ce chauffage-là.

Et, moi, à mon avis, personnellement, j'y vais d'une expression personnelle, à mon avis on devrait commencer à sensibiliser les gens à cette problématique-là avant même de dire: On se lance dans un projet de loi. Je pense qu'il y en a plusieurs qui vont tomber en bas de leur chaise si on commence justement à les informer sur les problématiques que ça présente, sur l'effet justement, l'effet de production de gaz à effet de serre, sur en fait la nécessité de réglementer tout ça. Moi, je pense que c'est une première étape. Et ça n'empêche pas de commencer à travailler sur des projets de loi, sur des façons de procéder. Mais, comme le disait tout à l'heure M. Breton, il y a plusieurs éléments à mettre en parallèle, il y a plusieurs actions à entreprendre; une des premières serait justement une information publique.

Parallèlement à ça... Vous pouvez commencer à travailler sur un projet de loi, mais, parallèlement à ça, aussi il faut sensibiliser et travailler avec les manufacturiers de façon à ce qu'on arrive ? ça ne se fera pas dans un mois, dans deux mois, mais probablement dans une année ou une année et demie ? à une démarche concertée où tous les intervenants, bien, les poêles ou les fours homologués, nous serons au rendez-vous au moment où on sera prêts à mettre en application ce projet de loi là, et les gens auront été sensibilisés à toute cette contrainte-là, à tout cet impact environnemental que ça représente comme tel.

Alors, moi, je pense qu'il y aura moins de ressac et pour le gouvernement et pour les autorités municipales, qui vont éventuellement devoir appliquer ça par le biais de leur réglementation d'urbanisme là-dessus.

M. Mulcair: Formidable! Sachez une chose, M. Lapointe: je vais accepter votre invitation de travailler avec vous lors de phases, de l'annonce, et tout ça. On va vous revenir là-dessus, parce que je pense que vous mettez le doigt sur quelque chose de crucial en termes de démarche.

De là à savoir si on est mieux de lancer un projet et consulter, et faire les annonces et la sensibilisation, quitte à prendre un petit peu plus de temps... Parce qu'il faut commencer quelque part. Parfois, une amorce nous aide, ça peut être sous forme d'une première publication, mais, quand viendra le temps d'annoncer c'est quoi, cette première publication, qu'est-ce qu'on vise, j'aimerais bien que vous soyez assis à côté de moi.

Le Président (M. Pinard): M. Breton.

M. Breton (Jean-Guy): Je voudrais rajouter, s'il vous plaît, M. le ministre. Je suis une personne qui chauffe au bois, qui a toujours chauffé au bois, je chauffe exclusivement au bois, à 98 %, donc je m'y connais, je ne parle pas à travers de mon chapeau, et il y a des équipements qui sont beaucoup plus performants que d'autres, j'en conviens. Vous êtes venu à Lac-Etchemin, vous avez vu la disposition de la municipalité: c'est une cuvette, et nous avons des épisodes de smog aussi.

Alors, cet automne, dans le cadre de la campagne de promotion pour la prévention des...

M. Mulcair: Je veux juste comprendre: vous me dites que vous avez des épisodes de smog au Lac-Etchemin?

M. Breton (Jean-Guy): Ah oui! Oui, oui. Lorsqu'il n'y a pas de vent, lorsque le temps est mort, si vous voulez, ça vient bleu sur le lac, c'est... Alors, ce problème-là n'est pas que propre à la ville de Montréal. Vous arrivez, nous, on vous... Vous avez vu lorsque vous êtes venu à Lac-Etchemin, on est sur des buttons. Quand on arrive dans la Beauce, on descend dans la vallée, vous arrivez le matin, tôt, souvent dans la vallée, lorsqu'il n'y a pas de vent, il y a un nuage bleu. Je veux dire, donc ce n'est pas propre seulement au milieu urbain. Ça, c'est mon premier commentaire. Mais vous allez toucher à peu près tout le monde.

L'élément, cette année, que j'ai demandé à mes pompiers lors de la Semaine de sécurité incendie: de cibler plus particulièrement les résidences qui chauffaient au bois, et je leur ai demandé de ramasser de l'information. Et ce que j'ai ramassé comme information, c'est qu'on touche souvent, en tous les cas dans les milieux ruraux comme le mien... les gens qui chauffent au bois sont habituellement des gens dont les moyens financiers sont les moins importants. Alors, quand on va obliger, il faut très bien comprendre qu'on va s'attaquer à des gens qui n'ont souvent pas beaucoup de moyens. Je suis d'accord avec vous, la personne qui a déjà du chauffage électrique puis a un foyer, ça, c'est une chose, mais, la personne qui, comme chauffage, n'a que le chauffage au bois, et qui demeure en milieu rural, et qui n'a pas beaucoup de sous, pour elle, vous touchez des choses essentielles. Et, le développement durable, c'est toujours l'équilibre entre ce que les gens sont capables d'endurer financièrement et socialement et la qualité de l'environnement.

Le Président (M. Pinard): Je regrette, c'est tout le temps imparti. Merci. Nous allons maintenant céder...

M. Tremblay: Bien, ça m'intéresse, ça, ça m'intéresse de continuer...

Le Président (M. Pinard): ...le temps au critique officiel de l'opposition, le député du Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Ça m'intéresse de continuer sur cette question-là, je trouve ça intéressant. Mais comment fait-on comme société pour amener les plus démunis à faire cette conversion? Est-ce que vous pensez que l'État devrait intervenir? C'est la même affaire avec les programmes d'inspection des véhicules usagés, où c'est ceux qui sont les moins fortunés qui ont les vieilles minounes finalement et qui sont les plus pollueurs. Alors, avez-vous, dans votre réflexion, pensé à des mécanismes de l'État pour... Parce que je vous entends bien, vous dites: Il faut qu'il y ait obligation, lorsqu'un marchand vend un poêle, hein, qu'on ait la certitude qu'il y ait une bonne norme pour faire en sorte qu'il n'y ait pas d'émanations. Mais, le problème, c'est qu'il y a des gens qui ont leur poêle à bois pendant toute leurs vies, puis, hein, on ne le change pas à tous les deux ans. Alors, avez vous fait une réflexion à cet égard ou ça s'est arrêté au niveau que vous l'avez dit?

M. Breton (Jean-Guy): Vous savez, le problème qu'on a en ce moment devant les yeux, ce n'est pas un problème qui date de l'année dernière, ça fait des dizaines et dizaines d'années. Qu'on ne pense pas régler, surtout dans une approche de développement durable, un problème en un an ou deux ans lorsque ça fait des dizaines d'années que le problème s'est créé. Je pense qu'il faut d'abord fermer le robinet, il faut d'abord s'assurer au moins qu'on ne grossit pas le problème, et qu'on prenne ensuite les mesures appropriées. Vous savez, dans d'autres domaines, quand l'Hydro-Québec a décidé, par exemple, de subventionner des thermostats, dans des stratégies d'économie d'énergie... On est capables, je pense, d'être suffisamment imaginatifs pour trouver des solutions.

Je pense qu'encore une fois ce n'est pas en changeant une loi, en promulgant un règlement puis en agissant de manière policière qu'on arrivera à des choses. Tout ce qu'on va faire, on va braquer les gens puis on va perdre les élections. Moi, je dis: Peu importe qui est au pouvoir, nous, au niveau municipal, je pense, on a tout intérêt à travailler avec la population. Le développement durable, c'est ça fondamentalement, c'est avoir la possibilité de travailler avec les gens. Il faut savoir que, dans certaines circonstances, effectivement ça va être plus long à faire des gains. Dans d'autres circonstances, ça peut être plus court. Mais l'important, c'est d'avoir un objectif et ne jamais en dévier.

Vous savez, il y a 15 ans, quand André Bélisle a dit: Il va y avoir du saumon dans la rivière Etchemin, tout le monde rigolait, on disait: C'est impossible, tout ça. Maintenant, il y en a. Mais, pendant 15 ans, il y a eu de petites actions; M. le ministre aurait été à même de le constater, je veux dire... Et ce n'est pas une question d'argent. Je veux dire, comme j'ai dit à M. le ministre, les bassins versants, ce n'est pas une question d'avoir de l'argent, c'est la capacité qu'ont les gens de s'asseoir ensemble et de travailler, on a en fait la preuve. Moi, je crois beaucoup à cette approche-là, parce que maintenant ce n'est plus à la mode de polluer, et les gens qui savent qu'ils polluent, je veux dire, se sentent coupables de ça. Je pense que c'est là-dessus qu'on doit jouer.

Les compteurs d'eau ne sont pas nécessaires dans une municipalité où on a rendu conscients les gens de l'importance d'économiser l'eau. On est à 225 litres par habitants, je pense, à Lac-Etchemin, ce qui est la moitié de la moyenne provinciale, pas parce qu'on a des lois, des règlements, tout ça, parce qu'on a conscientisé les gens. Ça a pris peut-être sept, huit ans, mais maintenant les gens font attention, et c'est le festival du gazon jaune sur le bord d'un beau lac, l'été. Ça, c'est du développement durable et c'est du changement durable de mentalités. C'est vers là qu'il faut aller.

M. Tremblay: Hein, c'est très intéressant.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Tremblay: O.K. Bien, je trouve que c'est très enrichissant, votre réflexion, et encourageant.

Si on revient davantage au projet de loi, c'est quoi que vous pensez que ça va amener à changer dans le monde municipal, ce projet de loi là. Je vous entends bien, là, au niveau de vos recommandations, là, sur le plan du Fonds vert, mais, pour le reste, est-ce que vous sentez que ça va percoler à travers les municipalités, ou il devra y avoir une intervention du ministère pour... parce que déjà il va devoir le faire à travers tous les ministères du gouvernement. Mais, par la suite, de quelle façon vous vous sentez liés avec ce projet de loi là?

n (12 heures) n

Le Président (M. Pinard): M. Lapointe.

M. Lapointe (Denis): Si vous permettez, je pense qu'en fait une politique de développement durable, à quelque part, il faut que... on peut imaginer que les politiques viennent d'en haut puis retombent en bas; moi, je pense que dans le contexte... Et ce que mon collègue a exprimé tout à l'heure, la volonté des individus qui vivent dans un milieu de vie, il faut pouvoir arriver à faire en sorte que la véritable politique ou les véritables enjeux, ils émergent de la population. Puis je pense que ce qu'a dit mon collègue tout à l'heure, c'est que des gens sont capables d'être conscients. Je pense qu'on vit dans une société où l'information circule, on est capable d'absorber l'information, on est capable de réaliser qu'on pose des gestes à chaque jour qui sont des gestes polluants, ne serait-ce que de vivre dans un milieu urbain ou dans un milieu rural à chaque jour, dans les gestes qu'on pose, on est à quelque part des pollueurs.

Ce qu'on recherche, c'est un équilibre, puis il faut réussir dans la mise en place d'une politique... non pas seulement que d'une politique, mais d'une façon de vivre en développement durable, il faut trouver le moyen de faire émerger cette volonté de population là, cette volonté des individus dans le fond de sauver leur milieu de vie, d'améliorer la qualité de vie, mais en le faisant chez eux puis en faisant que les voisins le fassent, mais que ça lève et que cette volonté d'un développement durable, ce soit une volonté de toute la population. Dans le fond, cette politique du développement durable là, elle est une orientation, c'est une orientation de l'État, c'est une démarche de vie de tout le Québec qui est en train de se préparer, à mon avis, puis dans ce sens-là il faut réussir impliquer les citoyens dans chacune de ces démarches-là.

Être coercitif dans chacun des règlements ? on a donné des exemples tout à l'heure ? on continue constamment à taper sur la tête des gens, puis les gens n'aiment pas ça, se faire taper sur la tête, ils préfèrent plutôt essayer de comprendre c'est quoi, les véritables situations, les véritables enjeux. Ils espèrent toujours d'être consultés, de devenir des partenaires d'une démarche. Chaque fois, dans une municipalité, qu'on rend le citoyen partenaires d'une démarche pour solutionner un problème, ça marche tout le temps.

Alors, dans un plus vaste territoire, au Québec, par exemple, si on implique le citoyen puis si on lui dit que la véritable démarche de développement durable, c'est lui qui la fait, moi, je pense qu'on va pouvoir, avec des réglementations, avec une politique qui nous donne des objectifs à plus long terme, on va pouvoir arriver à faire quelque chose et faire en sorte que la population adhère là-dessus. Moi, je pense, c'est ça qu'est le véritable enjeu, faire en sorte que ce soient les gens qui la réalisent, cette politique-là, plutôt que ce soit une démarche tout à fait imposée. On est conscient de tous ces enjeux problématiques. On est conscient qu'en conduisant une minoune on pollue. On est conscient, on va être conscient plus tard que, quand on fait le chauffage au bois, on peut polluer. Cherchons ensemble un équilibre, mais faisons-le en partenariat avec les citoyens de chacun des milieux. Et, de cette façon-là, ça va nous amener à avoir du succès, j'en suis convaincu.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Tremblay: Merci. Un des articles qui mentionnent les organismes municipaux du projet de loi n° 118, c'est l'article 4, où il est écrit que:

«Le gouvernement peut déterminer à compter de quelles dates ou selon quel échéancier et, le cas échéant, avec quelles adaptations, ? en fait... un instant... donc, oui, O.K. ? une ou plusieurs des dispositions de la présente loi, applicables à l'administration, s'appliquent également:

«1° à l'un ou plusieurs des organismes [...] visés par l'article 5».

Est-ce que vous avez analysé cet élément-là? Et qu'est-ce que vous en pensez, si vous avez une opinion?

M. Lapointe (Denis): Je n'ai pas vraiment saisi, là, la...

Le Président (M. Pinard): Voulez-vous recommencer, M. le député? Voulez-vous reformuler pour que...

M. Lapointe (Denis): En fait, vous parlez de... Je suppose que vous parlez de consultation, là, c'est...

Le Président (M. Pinard): Un instant. M. le député, est-ce que vous... Voudriez-vous, s'il vous plaît...

M. Tremblay: Vous pouvez passer au député de Beauce, puis je reviendrai.

Le Président (M. Pinard): Non, mais reformuler votre question.

M. Tremblay: Non, mais je vais...

Le Président (M. Pinard): O.K. D'accord. Alors, M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Alors, moi, je vous écoutais parler des poêles... parce que, moi aussi, je suis dans le milieu agricole, alors je connais bien ça, les poêles. Mais on sait qu'aujourd'hui, là, la technologie, là, il y a des poêles... Moi, je me suis fait offrir, il y a peut-être un mois de ça, là, pour ma sucrerie, une bouilleuse au bois qui brûle 98 %, 97 % du bois. Il ne sort rien au bout. C'est une économie de bois énorme puis avec le même rendement. Alors, la technologie, elle est là. C'est juste de, comme vous dites un peu, quand tous les nouveaux qui vont acheter une maison... ou même essayer d'impliquer l'industrie dans les nouvelles technologies, juste là, on fera un grand pas.

C'est sûr qu'il y a des familles, on sait très bien qu'il y a du monde, comme vous expliquez, qui n'ont pas les moyens, mais, s'ils vont chercher une économie... Parce qu'hier les personnes qui ont passé ici disent toujours... ils nous disaient: Le développement durable, ce n'est pas toujours une dépense. Si on investit dans quelque chose de performant, on va aller chercher une économie. Moi, je suis persuadé qu'on va aller chercher une grosse économie. Parce que, dans le fond, qu'est-ce qu'on rejette dans l'atmosphère, c'est des gaz, alors, si on les utilisait à la base, on en rejetterait moins. Et, les gaz, ça produit de l'énergie. Alors, je pense, moi, que, quand on va ouvrir la porte un peu à nos universités, à nos chercheurs pour trouver des méthodes pour utiliser ces gaz-là, d'après moi, on va faire un grand pas, puis on va en trouver, on trouver notre économie tout en respectant le projet de loi.

Moi, il y a un article du projet de loi, comme ancien maire, là, que je vois, puis je me dis: Ça ouvre-tu la porte, on va-tu passer notre vie en cour, là? Quand, l'article 46... bien c'est dans l'article 18, je pense, en tout cas, que toute personne a droit à un environnement sain et respectueux de la biodiversité, là, ça veut-u nous dire, ça, dans cet article-là, que, si ton voisin fait quelque chose que tu n'aimes pas, fait brûler n'importe quoi ou a une porcherie, si tu ne l'aimes pas, tu poursuis? Est-ce qu'on ouvre une porte à tout genre de poursuite?

C'est une... je ne sais pas, comme... vous êtes un maire, vous, encore, monsieur? Comment est-ce que vous voyez cet article-là? Est-ce qu'on ouvre une porte?

Le Président (M. Pinard): M. le maire.

M. Breton (Jean-Guy): Moi, je pense que c'est une porte qu'on doit ouvrir. C'est un choix qu'on a fait, en tous les cas, chez nous, à Lac-Etchemin, c'est un choix qu'on a fait, on a un parti pris en faveur de l'environnement. Je pense qu'effectivement ça pourra donner lieu à des revendications. Je pense que ce qui est important, c'est que ça permette aux municipalités d'être responsables par rapport à toutes les questions environnementales. Elles le sont déjà, la plupart se sont conformées. Je dirais, du développement durable et de la protection de l'environnement, lorsqu'on regarde ce que les municipalités ont fait dans les 25 dernières années, il y a énormément de travail qui a été fait.

Une municipalité qui aujourd'hui dirait: Moi, c'est du développement économique à tout prix, là, puis l'environnement, «shit» l'environnement, rapidement il y aurait peut-être des entreprises qui s'installeraient là, mais il n'y aurait plus de citoyens, il n'y aurait plus de résidents. Les résidents choisissent de demeurer dans des endroits où l'environnement est de qualité.

Je m'en suis aperçu. Depuis les dernières années, la construction domiciliaire chez nous croît d'une façon exponentielle, et les gens nous disent: On va rester chez vous parce que vous avez une qualité de l'environnement et vous nous le garantissez.

Lorsqu'on dit qu'on doit vivre dans un environnement sain et respectueux de la biodiversité, vous savez, l'environnement qu'on a aujourd'hui, c'est ça qu'on va céder à nos enfants. La seule véritable richesse qu'on va être en mesure de léguer à nos enfants, ça va être l'environnement. On emprunte l'environnement actuel à nos enfants. Et ça, si on se le répétait sans cesse, que l'environnement qu'on a en ce moment, c'est quelque chose qu'on emprunte à nos enfants, ça pourrait faire un beau slogan pour mettre en place une approche de stratégie de développement durable: On a soin de ce qu'on vous emprunte, les jeunes. Et ça, c'est l'approche qu'on a chez nous.

Je veux dire, à partir de ça, là, je veux dire, si on légalise puis qu'on joue dans les poursuites, je veux dire, c'est clair qu'on va se perdre rapidement. Et on peut facilement utiliser, les municipalités, le principe de précaution, et on pourrait contrôler à peu près tout ce qu'on pourrait contrôler; il y a même des jugements de la Cour suprême qui le démontrent. Je pense qu'on l'utilise de plus en plus, les municipalités, le principe de précaution, mais la légalisation ou la judiciarisation n'empêchera jamais des gens de contourner la loi et de faire des procès. Allons-y plutôt par la conviction.

M. Grondin: Je suis d'accord avec vous. Écoutez, moi, je ne conteste pas, parce que, moi aussi, je suis en faveur du développement durable. Mais je sais très bien qu'aujourd'hui on a toujours un ou deux citoyens dans une municipalité qui nous emmènent en cour puis que ça n'en finit jamais, on se ramasse 10 ans après puis on est encore en cour puis le problème n'est pas réglé. Parce que notre système de justice est comme ça, aussi, là. Alors, est-ce que, je ne sais pas...

Le Président (M. Pinard): Un instant, M. le député de Beauce-Nord, parce que vous prenez le temps de l'opposition.

M. Grondin: ...je ne sais pas qu'est-ce qu'on pourrait mettre dans la loi pour dire qu'il n'y en a pas, de choix.

n (12 h 10) n

M. Lapointe (Denis): Moi, je peux vous dire, là, on vit, on accepte, comme citoyens et citoyennes, de vivre en communauté, de vivre en société. Il y a évidemment des règles qui sont mises en place, puis il y a des moyens pour faire en sorte qu'on puisse appliquer... que ces règles-là puissent s'appliquer là. On ne peut pas repousser du revers de la main que... ou dire qu'il n'y aura jamais de poursuites qui vont se faire, puis il y aura toujours une partie de la population ou des gens marginaux qui décideront de confronter ou d'affronter les lois ou les règlements à ce niveau-là, puis je pense que le choix de vivre en société nous amène dans le fond dans ces situations-là.

Mais j'aimerais brièvement vous donner un exemple d'application. Chez nous, on a mis, depuis cinq ans... on a développé, l'été en particulier, un programme d'économie d'eau potable. Et, à l'origine, c'était... notre objectif était de réduire non pas la consommation, mais d'abaisser la crête de consommation dans une journée. On est une ville d'eau, chez nous, puis les gens imaginent que l'eau, ils peuvent en avoir tant qu'ils en veulent, et on a, pour permettre aux gens de comprendre ce qu'était cette politique-là, on a fait de l'information, mais on a engagé une personne, et à chaque année elle est engagée pour justement rencontrer les citoyens, lorsqu'il y en a un qui arrose au mauvais moment, puis lui dire: Écoutez, ce n'est pas comme ça qu'on fonctionne. Croyez-le ou non, à l'intérieur de ce cinq ans là ? dans le fond, on a encore cette personne-là qui vient, ce jeune étudiant là qu'on engage ? bien il n'a presque plus de travail à faire parce que ce sont les voisins, entre eux, qui ont commencé à dire: Écoute, ce n'est pas ton jour ? puis, ce n'est pas grave, ils ne se tapent pas sur la tête; ce n'est pas ton jour ? d'arroser, c'est le jour du voisin d'en face. C'est simple, puis finalement les gens sont capables de se gérer eux-mêmes. Quand on leur donne l'occasion de se gérer eux-mêmes, avec des règles qui ne sont pas nécessairement trop compliquées, je pense qu'ils peuvent faire un sacré bon bout de chemin, et ça, ça évite justement qu'on ait à se confronter à la cour.

On en fait... comme maire, je suis convaincu que mon collègue, comme maire, a à faire de l'arbitrage, mais il faut vivre dans ça.

Le Président (M. Pinard): Merci. Une dernière question du côté de l'opposition, et à la suite de ça nous allons conclure avec M. le ministre.

M. Tremblay: M. le Président, je ne peux pas m'empêcher de souligner ce qu'on est en train de vivre dans cette commission en termes de changement d'habitudes grâce aux pressions que vous avez faites...

Le Président (M. Pinard): Alors, santé tout le monde.

M. Tremblay: ...puisque nous avions l'habitude de consommer notre café dans du styromousse, maintenant on le fait dans la vaisselle. Ce sera encore meilleur, en plus. Alors, bravo, M. le Président.

Vous savez, le projet de loi dit: L'administration publique doit se doter d'une stratégie de développement durable, et l'article 4 dit que le gouvernement peut déterminer à partir de quelle date... Et certains organismes municipaux... Il peut dire aux organismes municipaux, et bien entendu sous consultation, d'en faire de même pour les municipalités. L'article 4... Et, dans votre mémoire, vous en parlez, à l'article 2. Donc, à quoi ça pourrait ressembler, un délai raisonnable? Est-ce que vous, vous êtes déjà prêts à dire: Bien, pendant que le gouvernement le fait, nous, dans les municipalités, on est déjà prêts aussi à emboîter le pas? On n'a pas besoin que le gouvernement nous dise: O.K. Vas-y. Fais-en, du développement durable?

M. Lapointe (Denis): Bien, écoutez, on en fait... Ça nous prend une stratégie de base, à la tête, qu'on nous dise: Écoutez, voici les grandes orientations. On veut participer à la définition de ces grandes orientations là. L'encadrement temporel, dans tout ça, moi, je pense qu'on ne peut pas faire du mur-à-mur. Vous avez vu tout à l'heure qu'il y a des problématiques particulières à Lac-Etchemin. Il y en a, des problématiques particulières, à Valleyfield. Donc, il faut trouver le moyen que, dans un cadre de référence temporel, on puisse éventuellement mettre en place ou développer des politiques, se donner des outils pour développer des politiques ou des façons de faire, ou faire le changement... faire en sorte que nos citoyens changent d'habitudes puis adhèrent à une démarche de développement durable là-dessus.

Moi, je pense que de toute façon, s'il y a une stratégie qui est développée, s'il y a un cadre temporel qui est défini aussi, on sait qu'on peut le faire bouger, ce cadre temporel là, puis dire: Écoute, on n'est pas arrivé à l'étape où on devrait appliquer d'une façon drastique cette réglementation-là. Bien, qu'on fonctionne de cette façon-là. Qu'on implique le citoyen, qu'on le consulte, qu'on consulte les villes et qu'on fasse en sorte de se définir un cadre d'application qui est réaliste là-dessus.

Tout à l'heure, mon collègue M. Breton me disait que ce n'est pas des choses qu'on va réussir à changer en un an, deux ans, trois ans, quatre ans. Ce qu'on est en train de préparer, c'est l'avenir du Québec dans 20 ans, dans 30 ans. Moi, je pense qu'il faut donner le temps au temps puis faire en sorte que la démarche soit absorbée par la population, que les gens y adhèrent véritablement. Ça prend du temps des fois, mais ça vaut la peine d'attendre et de bien faire passer ou de bien... d'avoir un bon plan puis de bien le réaliser, non pas le plus lentement possible, mais avec un cadre de temps qui est réaliste là-dessus. Je ne peux pas en dire plus long là-dessus.

Le Président (M. Pinard): Merci. M. le ministre.

M. Mulcair: Merci. C'est beaucoup de matière à réflexion pour nous. Votre expérience nous aide énormément. Et on va se redonner des nouvelles, parce qu'on va travailler ensemble. Merci.

Une voix: Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Pinard): Alors, je tiens à vous remercier au nom des membres de la commission. Vos propos ont été très enrichissants, et sûrement que ça va nous aider au niveau de la préparation du projet de loi n° 118.

Alors, permettez, avant de suspendre les travaux sine die, je vais... Alors, d'abord, je tiens à remercier le courrier parlementaire concernant la demande que nous avons transmise à l'Assemblée nationale. Voyez-vous, nous avons eu une réaction très vive et très rapide. Alors, je pense que nous allons maintenant favoriser le fait que... soit dans de la vaisselle ou dans des verres de carton biodégradable.

Alors, madame messieurs, permettez, je vais tout simplement suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures, cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 17)

 

(Reprise à 15 h 4)

Le Président (M. Dubuc): On reprend nos travaux. Le centre universitaire de référence en analyse, interprétation et gestion du cycle de vie des produits, procédés et services. Monsieur, si vous voulez vous présenter. Vous avez un temps de 15 minutes, puis 15 minutes chaque côté. Merci.

Centre interuniversitaire de référence
sur l'analyse, l'interprétation et la
gestion du cycle de vie des produits,
procédés et services (CIRAIG)

M. Samson (Réjean): Bien, moi, mon nom, c'est Réjean Samson, je suis directeur général du CIRAIG, professeur titulaire à l'École polytechnique de Montréal, et à mon côté j'ai Dr Gontran Bage, qui est coordonnateur scientifique du centre de recherche en question, de CIRAIG.

Alors, ça me fait plaisir de venir vous présenter le mémoire du CIRAIG. En fait, comme base de présentation, on va reprendre essentiellement les éléments du mémoire qu'on vous a remis, un court mémoire en fait, avec un petit avant-propos, un historique et présentation de qu'est-ce que le CIRAIG, brève explication sur l'intérêt que porte le CIRAIG au sujet du développement durable, notre position par rapport au projet de loi n° 118 et des recommandations spécifiques.

Alors en fait le présent mémoire déposé à la commission parlementaire a deux objectifs: dans un premier temps, le CIRAIG souhaite, par ce mémoire, soutenir le gouvernement du Québec dans son initiative d'intégrer la recherche d'un développement durable dans ses politiques, programmes et action; et, dans un second temps, suite à la réception favorable du premier mémoire que nous avions déposé en février 2005, le CIRAIG souhaite continuer à contribuer au raffinement du projet de loi n° 118 sur le développement durable.

Alors, l'historique, présentation du CIRAIG. On veut vous dire que, dans un contexte où le nombre... Vous savez probablement que, dans un contexte où nombre de ressources naturelles renouvelables sont prélevées à un rythme qui est souvent incompatible avec leur regénération, où les ressources non renouvelables se retrouvent plus souvent qu'autrement dans un site d'enfouissement une fois leur vie utile terminée plutôt que d'être recyclées ou réutilisées, où les externalités ne sont pas prises en compte dans le prix réel des biens et services, où encore les paramètres sociaux sont souvent ignorés dans la prise de décision, il importe que la société québécoise, tout comme les autres sociétés dans le monde, prenne rapidement la voie du développement durable afin de perpétuer un héritage qui soit à la hauteur des attentes des générations qui nous succèdent.

Vraisemblablement, le gouvernement du Québec a senti cette urgence, et le projet de loi n° 118 constitue en ce sens un premier pas. Toutefois, pour que ce projet de loi puisse se traduire en actions concrètes et cohérentes, il faut lui enjoindre des moyens et des outils. C'est ici que l'approche cycle de vie joue un rôle de premier plan.

L'approche cycle de vie ? je dois vous en faire une brève description ? est une démarche qui intègre l'ensemble des stratégies de consommation et de production existantes, par opposition à une démarche fragmentaire. De cette approche découle ce qu'on appelle la gestion du cycle de vie des produits et services, soit un ensemble d'outils des plus performants permettant à une entreprise ou à un gouvernement d'opérer dans un contexte de développement durable.

Parmi ces outils, l'analyse du cycle de vie, l'ACV ? à ne pas confondre avec les accidents cérébrovasculaires ? des produits et services, dont la méthodologie est régie par les nomes ISO 14040 et des suivantes, permet d'évaluer les impacts environnementaux d'un produit, d'un service et même d'une réglementation en considérant toutes les étapes relatives à ce service ou à ce produit, soit de l'extraction des matières premières jusqu'à la disposition en fin de vie utile. Par contre, l'ACV doit en parallèle être complétée par une analyse des impacts socioéconomiques pour orienter le développement durable. Ainsi complétée, l'ACV devient un puissant outil d'aide à la décision, permettant d'identifier de meilleurs compromis possibles entre les aspects environnementaux, sociaux et économiques relativement au choix d'un produit, d'un service, d'une politique ou même d'une réglementation.

Plusieurs équipes de recherche à travers le monde, dont le CIRAIG, travaillent actuellement à développer ces nouvelles approches complémentaires. L'approche du cycle de vie permet également de donner un cadre de mise en oeuvre et de suivi d'un certain nombre de conventions multilatérales internationales, tels, par exemple, le Protocole de Kyoto sur les changements climatiques, la Convention de Vienne, le Protocole de Montréal pour la protection de la couche d'ozone, la Convention sur la biodiversité, la Convention de Rotterdam et la Convention de Stockholm, pour ne nommer que ceux-ci.

Prônée par le Programme des Nations unies pour l'environnement, le PNUE, l'approche cycle de vie prend de plus en plus d'ampleur au sein des entreprises ici même, au Québec, et des gouvernements sur le plan international. C'est pourquoi, en avril 2002, le PNUE, en collaboration avec le SETAC, a créé l'Initiative internationale sur le cycle de vie, laquelle regroupe des gouvernements, dont le gouvernement du Canada et antérieurement celui du Québec, des entreprises, des associations industrielles et des centres de recherche et de diffusion qui s'intéressent à l'approche cycle de vie. Cette initiative vise à stimuler l'adoption de l'approche cycle de vie par les gouvernements et les entreprises à l'échelle internationale et harmoniser les recherches et les pratiques dans ce domaine.

n (15 h 10) n

Pour ne pas demeurer en reste sur les plans de la recherche et de l'application, l'École polytechnique de Montréal, en collaboration avec l'Université de Montréal et les HEC, a fondé, en 2002, avec le support, entre autres, du Fonds d'action québécois de développement durable et Valorisation-Recherche Québec, le CIRAIG. Le CIRAIG regroupe actuellement près de 100... une centaine de chercheurs, associés de recherche et étudiants aux cycles supérieurs issus de huit universités et constitue le plus important centre de recherche en cycle de vie au Canada. Ainsi, en plus des trois institutions fondatrices, le CIRAIG regroupe des chercheurs de l'Université Laval, l'Université du Québec à Montréal, l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, l'Université du Québec à Chicoutimi, l'Université du Québec à Trois-Rivières. Par la pluridisciplinarité de ses membres, le CIRAIG, dans son programme de recherche, couvre les trois piliers du développement durable. Le CIRAIG est aussi membre de l'Initiative du cycle de vie des Nations unies et plusieurs de ses chercheurs font partie de groupes de travail de cette Initiative.

Le CIRAIG est donc aussi un membre du GALAC, le Global Alliance for Lifecycle Assessment Centers, un regroupement international de centres de recherche et de diffusion impliqué dans le développement et la promotion de l'approche cycle de vie. En fait, le CIRAIG, pour votre information, travaille... opère sous trois axes: centre de recherche, avec un programme de recherche et de développement orienté sur des aspects méthodologiques des outils du cycle de vie; le centre de formation, avec un programme de formation interne pour la clientèle étudiante et externe destiné aux secteurs privé et gouvernemental; et aussi un centre de référence, avec un centre de documentation sur les outils du cycle de vie, de logiciels d'analyse et des banques de données. Et aussi un point intéressant, c'est que le cycle de vie est un regroupement stratégique reconnu et supporté conjointement par le FQRNT, le Fonds québécois de recherche sur la nature et les technologies, et le FQRSC, le Fonds québécois de la recherche sur la société et la culture.

Donc, le CIRAIG a été expressément mis sur pied en 2002 pour contribuer au développement des outils de développement durable en rassemblant les forces vives du Québec et en établissant un réseau de collaboration avec les plus importants centres de recherche sur le sujet au Canada et à travers le monde. Et la mission du centre est la suivante: à titre de centre de référence interuniversitaire, générer, intégrer et interpréter des connaissances pertinentes dans le domaine de l'analyse et de gestion du cycle de vie des produits dans le but de supporter les efforts des entreprises et des gouvernements en matière de développement durable.

Donc, à l'instar du Programme des Nations unies sur l'environnement, le PNUE, le CIRAIG est convaincu que le développement durable ne peut être mis en place sans une approche holistique des dimensions environnementales, sociales et économiques. Or, au sens pratique, cette vision holistique se traduit par l'approche du cycle de vie; c'est pourquoi tous les efforts de recherche du CIRAIG sont consentis vers cette approche. Je vais demander maintenant au Dr Bage de présenter la position du CIRAIG sur le projet de loi n° 118.

M. Bage (Gontran): Donc, le CIRAIG salue la décision prise par le gouvernement québécois de faire du développement durable une de ses priorités. En introduisant le concept de développement durable dans les actions et les décisions du gouvernement, ces dernières permettront un juste équilibre entre les aspects économiques, environnementaux et sociaux conduisant à une amélioration des conditions d'existence actuelles et futures également.

Le CIRAIG porte un jugement favorable dans la démarche entreprise par le gouvernement dans sa recherche de cohérence de ses actions en matière de développement durable. Aux yeux du CIRAIG, cette démarche démontre que le gouvernement est conscient des bénéfices tant environnementaux, sociaux, qu'économiques qui découleront à terme de l'implantation d'une telle perspective intégraliste au sein même de ses sphères d'intervention. De plus, le gouvernement québécois donnera l'exemple à suivre aux entreprises, industries et consommateurs afin qu'à leur tour ils intègrent le concept de développement durable dans leurs activités. En adoptant ce projet de loi, le gouvernement du Québec se positionnera comme chef de file canadien en matière de respect de l'intégrité environnementale, sociale et économique des projets et des actions qu'il entreprendra.

La structure du projet de loi n° 118 démontre aux yeux du CIRAIG que le gouvernement du Québec maîtrise le concept de développement durable. Le CIRAIG est conscient que, bien que la définition inclue les trois pôles du développement durable, c'est-à-dire environnemental, social et économique, l'accent est mis principalement, dans ce projet de loi, sur le pôle environnemental. Ceci est en accord avec la vision du CIRAIG, qui soutient qu'en dernière analyse c'est la biosphère qui supporte le cadre économique et social.

Les points majeurs de ce projet de loi qui méritent d'être soulignés ici sont l'établissement des 16 principes qui serviront de guide aux actions du gouvernement. La combinaison de ces principes permet d'établir un cadre d'application de la loi équilibré autour des trois axes du développement durable. De plus, la nomination d'un commissaire au développement durable relevant directement du Vérificateur général donne force à ce projet de loi. En effet, puisque l'application de cette loi touchera l'ensemble des ministères et de leurs activités, il va de soi que l'évaluation d'un tel exercice relève d'un acteur indépendant de ces ministères, et donc du Bureau du Vérificateur général. Le succès de la mise en application de ce projet de loi résidera notamment dans le pouvoir d'action qui sera confié au commissaire au développement durable.

Conscient que le mode d'application de ce projet de loi repose sur la stratégie du développement durable qui est à venir, ce projet évoque néanmoins les bases sur lesquelles les indicateurs devront être développés et avec quels outils ils le seront. Par exemple, le principe 8 recommande de considérer les impacts d'une action de manière globale; le principe 14, quant à lui, évoque le concept d'écoefficience; et le principe 16 fait mention du concept de cycle de vie dans l'internalisation des coûts. Ces trois principes intègrent les notions de la pensée cycle de vie. L'approche cycle de vie est actuellement la seule connue qui fasse consensus sur le plan international et qui permet de s'assurer que toute mesure mise en place dans une perspective de développement durable en respecte les fondements. Pour le CIRAIG, qui est né d'un besoin pour les entreprises et les gouvernements de développer des outils dans le but de faire une gestion responsable s'inscrivant dans un contexte de développement durable, il est clair que ce projet de loi doit inclure la pensée cycle de vie.

Fort de ces éléments se retrouvant dans le projet de loi n° 118, le CIRAIG ne peut que donner son appui et souhaite une adoption le plus rapidement possible dans le but d'en voir son application à court terme. Néanmoins, le CIRAIG souhaite profiter de l'occasion qui lui est offerte aujourd'hui pour faire quelques recommandations supplémentaires au texte du projet de loi n° 118.

Alors, au sujet de ces recommandations. Pour les principes, nous voudrions apporter, premièrement, une modification au principe 16, puisque, dans la logique d'une pensée cycle de vie, l'évaluation des impacts sur l'environnement d'un produit ou d'un service ne peut s'arrêter à sa consommation et doit prendre en considération sa vie, c'est-à-dire sa disposition finale. C'est pour cela que le CIRAIG propose de modifier la proposition 16 de la sorte ? je me permets de vous lire la proposition 16 telle qu'elle est écrite actuellement: «Le coût des biens et des services doit refléter l'ensemble des coûts...»

M. Mulcair: Tant qu'à y être, est-ce que je peux poser une question à M. Bage juste pour clarifier son dernier point?

Le Président (M. Dubuc): Allez-y, M. le ministre.

M. Mulcair: Si, à la dernière ligne de 16, on changeait le «ou» pour «et», est-ce qu'on est couvert?

M. Bage (Gontran): Exactement.

M. Mulcair: O.K. On n'aura pas de problème.

M. Bage (Gontran): Parfait. Merci pour...

Le Président (M. Dubuc): Vous pouvez continuer.

M. Bage (Gontran): Merci pour cette modification. Je me permets maintenant de vous présenter un nouveau principe que nous aimerions ajouter... voir ajouté aux 16 principes, donc le principe 17. Afin d'assurer que la recherche de la minimisation des impacts d'une action ou d'un produit ne résulte pas en un simple transfert d'impacts, le CIRAIG propose d'inclure au projet de loi un 17e principe, et je vous en fais la lecture. Le 17e principe porte sur la pensée cycle de vie: «Dans un contexte de développement durable, tout projet ou action doit se faire en s'appuyant sur le concept de cycle de vie afin d'éviter tout transfert d'impact sur l'une ou l'autre des phases de vie du projet ou de l'action.» Fin de la citation.

Finalement, au niveau de la mise en application, nous aimerions apporter quelques recommandations. Afin d'assurer une application efficiente des principes de développement durable, ce dernier doit être bien connu et maîtrisé de celles et ceux qui devront l'appliquer devant les différents ministères et organismes gouvernementaux. Ainsi, le ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs devra s'assurer que la formation offerte au personnel de l'administration soit adéquate, pertinente et sérieuse. Pour ce faire, il est essentiel de former une main-d'oeuvre compétente et de transférer les connaissances vers les utilisateurs.

À cet égard, le gouvernement du Québec peut compter sur l'expertise de pointe développée dans ses universités et dont les principaux acteurs se sont regroupés au sein du CIRAIG. Le gouvernement du Québec est assuré de l'appui de ces chercheurs de calibre international pour l'établissement des indicateurs de développement durable ou tous autres critères qui seront prévus à la stratégie.

Le Président (M. Dubuc): Merci. Merci, M. le ministre.

M. Mulcair: Merci. Je tiens à non seulement remercier, mais à féliciter M. Samson et M. Bage pour vos présentations ici aujourd'hui. Le CIRAIG est en train de faire un travail vraiment d'avant-plan dans un sujet... Je parlais de ça avec mon collègue informellement aujourd'hui, qu'il y a des notions qui aujourd'hui ? comme cycle de vie, comme parler de l'internalisation des coûts ? sont encore à un niveau peut-être d'un public un peu restreint. Mais la remarque a été faite hier par un des avocats qui étaient ici pour le Barreau, et il a dit que ? c'est quelqu'un qui travaille en environnement depuis longtemps ? il a juste mentionné en passant, il a dit: Vous savez, la Loi sur l'environnement, ça date d'il y a 33 ans. Quand c'est arrivé, il y a 33 ans, il y avait plein de choses là-dedans qui étaient des notions assez nouvelles pour la plupart des gens, mais des spécialistes travaillaient à ça aux États-Unis, au Canada, en Europe occidentale, puis il y avait des idées là-dedans qui étaient un peu justes à leur époque, et ça a pris une génération.

Moi, je pense que la loi du début des années soixante-dix était le reflet de son époque, et c'était la phase que j'aime appeler ? pour manque d'un meilleur terme ? la phase de nettoyage. On s'est rendu compte qu'on avait continué avec les mêmes modes de production que pendant la Deuxième Guerre mondiale. Tout de suite après la guerre, les mêmes lignes de production qui fabriquaient les engins de guerre avaient été transformées pour faire des produits de consommation de masse, notamment le véhicule automobile. Fin des années cinquante, début des années soixante, on commence à utiliser des termes... Dans le livre Silent Spring, de Rachel Carson, elle commence à utiliser des termes comme «écosystème», comme «biodiversité». «Écosystème», elle l'utilise, «biodiversité», elle utilise des termes pour dire exactement ça, mais le terme lui-même n'était pas encore consacré, et c'est intéressant de voir ça historiquement.

Donc, on rentre, dans les années soixante, dans le mouvement. Des gens commencent à dire: Bien, on ne peut pas continuer comme ça. On n'utilisait pas le terme «durable», on disait: Ça ne se peut pas, on ne peut pas avoir des rivières qui prennent feu... puis commencer à passer à cette phase de nettoyage. Et c'est ça, le reflet de ces lois de cette époque-là. Ça ne veut pas du tout dire qu'il faut arrêter la phase nettoyage, mais c'est consolidé largement, on sait comment mesurer, réduire, donner des programmes pour les rejets industriels. Cette partie-là... Il y a encore beaucoup à faire, hein, notamment au niveau de la qualité de l'atmosphère. Mais, le sol, on apprend de plus en plus à réhabiliter des erreurs du passé puis à ne pas les recommettre. L'eau, incomparable aujourd'hui; prenez le secteur des pâtes et papiers pour un exemple concret.

n(15 h 20)n

Donc, vous maniez tellement bien... et je vous remercie beaucoup, parce que non seulement vous êtes des experts, mais vous êtes des «plus que» parce que vous savez rendre simples des idées compliquées. C'est ça, l'art de maîtriser bien.

Et, pour revenir donc à ma conversation informelle avec mon collègue de Lac-Saint-Jean, il y a des termes là-dedans, comme «cycle de vie», comme «internalisation des coûts», je crois que dans 30 ans, là, tout le monde va savoir de quoi on parle, mais aujourd'hui on est dans les débuts, donc j'accueille très... Évidemment, je ne ferai pas de fausse modestie. J'aime beaucoup la réaction que vous avez à notre projet de loi ? parce que je veux que ce soit le projet de loi de tous les Québécois et de tous les côtés de l'Assemblée nationale ? puis c'est encourageant pour nous. Vous savez, en politique, ce n'est pas souvent que les gens regardent notre travail et nous disent: Bravo! Ça, c'est quelque chose qui est attendu de la société. Et c'est d'autant plus valable, ce que je viens de dire, que ça vient de gens comme vous, de très haute qualité. Alors, merci beaucoup.

Je veux revenir sur votre deuxième suggestion, donc d'ajouter un 17e principe. Je veux en débattre un petit peu. La première est facile à corriger. Je pense que c'était assez clair que la réelle intention, c'était que ce «ou» soit «et». Et on va proposer aisément... J'ai déjà offert de collaborer avec mon collègue de Lac-Saint-Jean, de lui transmettre le plus tôt possible. Puis, s'il veut une rencontre avec les gens, comme il l'a déjà fait dans d'autres dossiers, qu'il prenne pour acquis qu'il va l'avoir. On offre cette collaboration si ça peut aider à l'avancement de nos travaux.

Mais, pour le 17e, il y a au moins quatre des principes qui contiennent déjà la pensée cycle de vie. Donc, je veux vraiment discuter avec vous, si vous êtes convaincus que ça ne peut pas aller sans une référence spécifique. Je ne dis pas que je suis contre, hein, mais je dis juste que je ne suis pas convaincu que le fait que c'est déjà tissé, si je peux dire, à l'intérieur de plusieurs autres recommandations ne suffit pas. Alors, peut-être juste discuter un peu davantage avec vous, là-dessus.

Le Président (M. Dubuc): M. Samson.

M. Samson (Réjean): Bien, d'accord, je vais prendre quelques minutes pour vous expliquer un peu la vision du CIRAIG à ce sujet.

Pour nous, la pensée cycle de vie, en fait, je dirais que c'est sous-jacent et que les principes de développement durable émergent de la pensée cycle de vie. Parce que, si on... Donc, la pensée cycle de vie, en fait, c'est ce qu'on appelle la notion d'interdépendance. C'est la notion d'interdépendance entre les systèmes économiques, les systèmes technologiques, les systèmes sociaux, parce qu'en fait il y a toujours un entrant et un sortant. Alors ça, c'est ce qu'on appelle, ce principe d'interdépendance, c'est ce qu'on appelle le «life cycle thinking», la pensée cycle de vie.

À partir de cette... Si on établit ce principe comme base de travail, alors, après ça, c'est beaucoup plus simple selon nous de mettre en place des approches, des politiques, des outils qui intègrent nécessairement une vision plus large des problèmes.

L'inverse peut amener de la confusion, en ce sens qu'on va quelquefois amener une décision, par exemple, environnementale, prendre une décision environnementale, mais, si on n'a pas intégré dès le départ la partie cycle de vie, cette décision environnementale peut se répercuter en une mauvaise décision dans une autre partie du cycle de vie. Le but, c'est vraiment d'éviter des transferts, des transferts d'impacts, pas juste d'impacts environnementaux, impacts économiques et impacts sociaux. Donc, en partant avec la vision cycle de vie dès le départ, comme étant la prémisse de départ, alors selon nous on ne peut pas faire les erreurs d'oublier ces éléments-là en cours de chemin puis avoir des incohérences au point de vue gouvernance et au point de vue décisionnel. C'est le principe qu'on utilise, c'est le principe... ce n'est pas mon principe nécessairement à moi, c'est le principe du CIRAIG et aussi de toute la communauté qui travaille dans ce secteur-là, aussi.

M. Mulcair: O.K. Logiquement, si jamais on décide d'ajouter ce qui serait un 17e, moi, j'aurais tendance à le mettre 16e et mettre le 16e 17e. Parce qu'on parle, dans ce qui est actuellement le 16e, de cycle de vie, donc il faudrait que je l'aie évoqué avant. O.K. Est-ce qu'on peut essayer avec un modèle, un problème concret dont, mon collègue et moi, on parle souvent? Les bouteilles d'eau, en ce moment, les 18 litres sont en plastique très épais, qui est réutilisable six à huit fois environ avant d'être broyé, et le plastique lui-même peut être réutilisé. Il y a des projets de remplacer ça avec du PET, ramener ça peut-être à du 15-16 litres.

Mais, si on ne met pas une consigne dessus, ça va se ramasser ou dans les sites d'enfouissement ou dans le bac de recyclage. Comme la bouteille d'eau que j'achèterais demain matin, une bouteille de 500 ml, si je la consomme chez moi, il y a des bonnes chances qu'elle se ramasse dans un bac; si quelqu'un la consomme sur une piste cyclable ou un sentier pédestre, les chances sont que ça va se ramasser ou dans une poubelle ou dans un sentier. Mais c'est compliqué, parce que la consigne elle-même s'applique au contenu au moment où on se parle. Donc, j'ai des boissons gazeuses, mais, si j'ai tout à côté la même bouteille, même plastique, de la même compagnie, Coca-Cola avec Dasani... PepsiCo a une eau embouteillée qui s'appelle Aquafina. Même... dans le cas de Dasani, c'est légèrement différent, le plastique est coloré un peu, l'autre, c'est rigoureusement la même bouteille. Il y en a une qui a une consigne, l'autre pas. Paradoxe parce que... mais c'est intuitif, et peut-être que la personne qui aime consommer de l'eau ne veut pas se prendre une shot de sucre, a peut-être une meilleure pensée pour son propre écosystème, hein?

Mais le problème qu'on a, c'est que, si vous allez dans un dépanneur aujourd'hui, regardez les étagères, de plus en plus de thé glacé en bouteille. Quelqu'un le consomme, donc, si ce n'est pas à la maison, il consomme là et il se retourne, il y a quoi? Il y a une poubelle. That's it. S'il y a une bouteille qu'il vient d'acheter de Coca, il va la boire, mais il a au moins son 0,05 $ qu'il peut récupérer, ou quelqu'un d'autre va l'avoir, parce qu'il y a des gens qui récupèrent quand il y a une consigne.

Intégrer la vision cycle de vie dans la problématique que mon collègue de Lac-Saint-Jean et moi on regarde en ce moment, avec ces bouteilles de 15, 16 litres en PET et mes petites bouteilles d'eau: Comment je fais pour ne pas nuire à la collecte sélective? Si j'ajoute la consigne, il y a des gens qui vont me dire: Non, non, la collecte sélective peut ramasser ça. Ma réponse, c'est qu'il n'y en a pas, de collecte sélective, dans les ports, dans les aéroports au Québec, il n'y en a pas proche des dépanneurs. Alors, intégrer... si vous voulez bien faire l'exercice avec nous, aidez-nous, comment cette vision cycle de vie va s'intégrer? Parce que, nous, on doit faire une analyse économique, parce que c'est largement économique, l'analyse, mais avec un fort effet environnemental.

M. Samson (Réjean): C'est un bon exemple, dans lequel justement la pensée cycle de vie, l'approche cycle de vie s'applique tout à fait très bien. En fait, ici, ce qu'il faut vraiment mettre en perspective, c'est la fonction. Donc, au lieu de regarder la bouteille ou le produit, il faut regarder la fonction, c'est-à-dire: qu'est-ce qu'on veut faire? Ici, dans ce cas-là, c'est distribuer de l'eau. Donc, on veut distribuer de l'eau à un consommateur pendant une période de temps donné. Donc, on va avoir une fonction, donc c'est la distribution d'eau par des bouteilles de plastique de 16 litres, disons. En mettant en place cette fonction-là, on doit regarder... pour remplir cette fonction-là, quelles sont les unités d'énergie, les unités de masse qui doivent être impliquées dans ce secteur-là. Et là on va faire ce qu'on appelle des bilans. On va prendre un bilan à toutes les étapes, de la production de la bouteille, du remplissage de la bouteille d'eau, du transport de la bouteille d'eau chez les dépanneurs, de l'utilisation par le consommateur, leur réutilisation, le recyclage, et là on va avoir une image complète du scénario possible par une série de consommateurs. Et là on va pouvoir identifier très clairement où sont les parties sensibles du côté environnemental et du côté économique. Est-ce que c'est au niveau vraiment du recyclage ou de la réutilisation ou c'est au niveau du transport de l'eau ou de la disposition finale? On ne le sait pas.

Là on part, comme hypothèse de départ, que la problématique est au niveau de la consigne. Mais ça, ce sont des pures suppositions. On ne le sait pas. Personne n'est capable de nous dire la quantité de gaz à effet de serre réduite à cause de cette opération-là si on ne l'a pas mis dans une forme de bilan. Et l'approche cycle de vie fait exactement ça, que ce soit pour une bouteille d'eau, une auto électrique, une centrale de biodiesel, c'est de mettre sur une ligne tous les entrants, tous les sortants et de mettre en correspondance les impacts. Que ce soient des impacts gaz à effet de serre, des impacts santé humaine, écotoxicologiques, on a tous les modèles pour faire ça, et là on peut vraiment faire des simulations et identifier exactement la vraie pertinence d'une action.

Et dans ce cas-là, ça s'applique très, très bien. On pourrait effectivement déterminer quel est le meilleur scénario à prendre, en fonction des différentes régions. Parce que les bouteilles n'ont pas le même voyage. Si la bouteille part, par exemple, la bouteille d'eau part remplie d'Abitibi-Témiscamingue, puis elle s'en vient à Montréal, il y a une charge polluante associée à ça, mais ce n'est pas la même chose si vous la consommez là-bas. Même chose pour le... C'est très dépendant des conditions géographiques et technologiques impliquées. Alors, c'est ça, le point, c'est que l'approche, la pensée cycle de vie en fait et les outils permettent d'aller chercher l'élément. Donc, je ne peux pas vous répondre exactement...

M. Mulcair: Correct.

M. Samson (Réjean): ...parce qu'il faut faire, il faut mettre, appliquer la pensée.

n(15 h 30)n

M. Mulcair: Non, non, je me méfie de ce genre de question moi-même aussi, parce que c'est un peu comme ça. Et, je me souviens, au tout début, le Centre québécois du développement durable nous avait dit que très souvent ça leur est demandé: Mais, tel projet, est-ce que ça représente du développement durable? Puis, avec un soupir puis beaucoup de patience, ils essaient d'expliquer: Mais, le développement durable, ce n'est pas un projet, ce n'est pas une réponse, oui ou non, ce n'est pas une annonce Familiprix: Ah! Ha!, c'est compliqué de regarder dans son ensemble. Mais c'est la même chose que ce que vous étiez en train de nous dire ici. Mais j'aime bien votre manière de réfléchir. Et ça illustre bien votre propos de tantôt. Ne soyez pas surpris que vous recevez un appel de mon cabinet. Je pense qu'on va avoir du travail à faire ensemble. Bien, je vais passer peut-être à mon collègue du Lac-Saint-Jean, quitte à revenir. Merci.

Le Président (M. Dubuc): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Est-ce qu'il serait possible un jour de voir des étiquettes... Quand on achète un produit, et là j'ai l'information de sa valeur économique, mais une étiquette qui serait assez uniforme, qui ferait en sorte qu'à chaque fois que j'achète un produit le consommateur est en mesure de voir les externalités, donc de sa propre volonté est capable de faire le choix: bon, bien, oui, lui, il coûte moins cher, mais il a un impact sur l'environnement. Donc, est-ce que c'est quelque chose qui se réfléchit, d'être en mesure d'établir un étiquetage d'un produit qui ferait en sorte que le consommateur facilement, là, est capable de rapidement prendre une décision sur l'impact environnemental d'un produit?

M. Samson (Réjean): La réponse est oui. En fait... et ça existe déjà. En fait, ça existe déjà en Europe, nécessairement, et on appelle ça des déclarations environnementales de produits. Alors, il est possible maintenant de soumettre un produit avec une étiquette qui permet de statuer sur le degré d'effort environnemental que notre entreprise a pris pour développer son produit. Alors, c'est comme ça qu'on peut le mettre en place. Il y a des recherches qui se font en étiquetage. Il y a même des normes ISO en train de se mettre en place sur l'écoétiquetage, qui font aussi référence à la pensée cycle de vie. C'est oui, effectivement, oui, puis il faut tendre vers ça effectivement. Parce qu'on peut parler d'un produit équitable, mais est-il correct du côté environnemental? Donc, il y a tout ça ensemble. Il faut que ce soit combiné.

M. Tremblay: Mais, quand vous dites qu'en Europe ça se fait, est-ce que c'est parce que le manufacturier du produit décide de l'assumer lui-même, donc, en donnant l'information, il se donne un élément de compétitivité supérieure, mais est-ce qu'un jour un gouvernement pourrait obliger, pour certains produits, l'étiquetage obligatoire des produits?

M. Samson (Réjean): Actuellement, ce sont les... Bon. Je n'ai pas les connaissances exactes, là, mais je sais qu'il y a beaucoup d'entreprises qui le font sur une base volontaire, pour des raisons de stratégie commerciale. Ça, c'est évident. Il y a de plus en plus d'entreprises qui font cette approche-là, même les grandes sociétés. Daimler-Chrysler, d'ailleurs, maintenant, toutes leurs superbes voitures Mercedes, elles viennent avec des déclarations environnementales pour donner une plus-value à leurs produits. Volvo fait pareil. Beaucoup d'entreprises... Même dans les petites entreprises, dans les PME, il y a beaucoup d'entreprises qui adoptent cette approche-là pour... comme une...

Peut-être un point que je peux mentionner là-dessus qui est très intéressant, il faut voir aussi qu'il faut penser ça en termes de compétitivité aussi. C'est un avantage d'utiliser le côté environnemental pour aider la compétitivité des entreprises. Parce que je sais très bien qu'à l'extérieur du Canada, au Japon entre autres, ils sont en train de développer des barrières à l'importation basées sur des critères environnementaux, et ça, c'est une réalité. C'est très essentiel. Puis, comment ils établissent leurs barrières? Ils font des «life cycle assessment» puis ils disent: Ton produit, il n'a pas de valeur, on ne le prend pas, on va prendre l'autre à la place. Et ça, c'est vraiment critique, il faut vraiment rentrer dans le jeu, parce qu'un de ces jours on va se ramasser, on va dire: Ah! là, on n'est pas... Ça, c'est un élément important.

M. Tremblay: Comment peut-on s'assurer justement... Bien, en fait vous avez parlé d'une norme, je pense, hein? Parce que, moi, admettons que je produis quelque chose, et je colle une étiquette puis je dis: Je l'ai faite, l'analyse du cycle de vie. Mais ça prend un organisme indépendant de certification. C'est la même affaire avec mon projet de loi sur les sacs de plastique, où on dit: Bon, bien, on parle de sacs biodégradables, mais, «biodégradable», ce n'est pas... On a un sac, moi, qui s'est biodégradé dans ma filière, puis j'en ai un autre que ça fait cinq mois qui est dehors, dans ma corde de bois, puis il n'a pas encore bougé. Alors, qu'est-ce qui est biodégradable? Alors, là, c'est là que le ministre s'est engagé ? et ça, je suis bien content qu'il ait bougé là-dessus ? à établir une norme. Donc, là, à ce moment-là on pourra savoir qu'est-ce qui est biodégradable ou pas, et donc il y ait un organisme comme ça.

Mais donc, à ce moment-là, si des entreprises qui fabriquent des choses et veulent avoir une analyse de cycle de vie, où on se réfère? Est-ce qu'on se réfère à un organisme comme le vôtre, ou c'est un nouveau métier qui va apparaître dans le futur, où on va avoir l'établissement de certification?

M. Samson (Réjean): J'adore votre question! Bien, premièrement, on est issus du milieu universitaire. Notre rôle premier, c'est de créer cette génération, évidemment cette génération de nouveaux ingénieurs, nouveaux scientifiques, nouveaux économistes qui vont avoir ces outils-là. Actuellement, concrètement, pour réaliser les analyses de cycle de vie, le CIRAIG est le seul centre québécois vraiment qui a atteint le niveau, là, pour le faire. Mais vraiment notre objectif, c'est de fournir des jeunes... D'ailleurs à ce sujet-là, juste pour vous mentionner, l'École polytechnique va offrir, à partir de l'automne prochain, aux étudiants de deuxième année du bac en ingénierie un cours qui va s'appeler Conception environnementale et cycle de vie. C'est-à-dire que tous les nouveaux ingénieurs, dans trois, quatre ans, vont avoir eu déjà ces notions-là. Ils vont être capables de les mettre en place dans leurs entreprises où ils vont travailler. Puis ça, c'est très, très important, c'est la clé. La clé va passer par la jeunesse, ça, c'est définitif.

M. Tremblay: Est-ce que... Je suis en train de me construire une maison, puis régulièrement je dois choisir des produits, et là il y a des fois que j'ai deux produits qu'on me dit environnementaux, mais des fois il y en a un qui, pour la production, va nécessiter plus d'énergie et un autre, pour la disposition dans l'environnement à la fin de sa vie, va avoir plus d'impacts. Alors là, à un moment donné, j'ai l'impression que c'est comme des thermomètres, hein, qui montent puis qui descendent. Puis, à un moment donné, est-ce que, quand on regarde une analyse de cycle de vie, c'est toujours évident, ou bien donc, d'autres fois, bien, tu sais, tu as des pour, des contre, puis on vient qu'on est tout mêlé, dans le fond? Ça peut-u être clair en fin de compte?

M. Samson (Réjean): Ça aussi, c'est une super bonne question. Oui. En fait, c'est la problématique actuelle; la problématique actuelle, elle est là. C'est là le besoin de la recherche et c'est exactement là, c'est... D'ailleurs, Gontran est en charge d'une équipe de recherche sur l'analyse des incertitudes dans le cycle de vie, à cause justement... la différence entre ça puis ça, elle est-u vraie ou n'est pas vraie, tu sais? Il faut... Oui, effectivement, les outils actuellement nous permettent de faire des avis de très bonne qualité, mais, dans le futur, ils vont devenir encore de qualité encore supérieure. Ce qui nous a aidés beaucoup actuellement, c'est ISO, les normes ISO. Déjà, en 1997, quand les normes sont sorties, ça a mis un cadre extrêmement bien défini qui permet de faire des analyses de qualité. Parce qu'avant ça c'était vraiment incohérent, et maintenant on est rendus à faire des analyses encore de plus grande qualité. Il y a des bases de données internationales qui existent, qui sont de très bonne qualité.

Donc, on peut dire maintenant que les entreprises québécoises ou canadiennes peuvent maintenant se lancer là-dedans avec... puis sortir des résultats montrables. C'est parce que c'est vrai, hein, si les résultats ne sont pas montrables, bien là tu es pris à te défendre: Pourquoi que j'ai fait ci, pourquoi que j'ai fait ça? C'est parce que c'est essentiel. Oui.

Le Président (M. Dubuc): M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Écoutez, moi, vous m'avez piqué tout à l'heure au vif, là, quand on dit... Ce projet de loi là sur le développement durable, je pense que tout le monde l'aime bien, là, mais il va falloir avoir une... je ne sais pas si on peut appeler ça une barrière, mais, si les produits qui rentrent des autres pays ne sont pas contrôlés à nulle part, on va avoir l'air de quoi, là? On va exiger de nos compagnies, on va exiger de toute l'industrie québécoise d'avoir des normes puis d'être... puis on va en être fiers, mais, de l'autre côté, si la porte est grande ouverte puis que tout rentre, on va avoir l'air de quoi?

M. Samson (Réjean): Il y a peut-être... Pour répondre à votre question, je peux dire qu'un des éléments intéressants aussi quand on fait de l'analyse de cycle de vie, en même temps on découvre ce qu'on appelle nos fuites, dans nos entreprises, des fuites en termes d'énergie, des fuites de matières, et tout ça. On peut améliorer la compétitivité à l'interne, puis nos compagnies canadiennes ou québécoises vont devenir bonnes à l'international si elles sont compétitives. On peut se servir de nos outils d'écoconception puis de cycle de vie pour rendre les entreprises encore plus compétitives. C'est comme le débat du CO2 qu'on entend à Montréal présentement. L'objectif final, c'est de rendre les entreprises... de fermer les robinets, de fermer les fuites pour être plus compétitifs. Alors effectivement on peut se protéger, mais on va être encore meilleurs si on est capables d'attaquer avec des meilleurs produits puis moins chers, en tout cas selon moi.

n(15 h 40)n

M. Grondin: C'est sûr que toute cette approche-là, il va y avoir juste une manière régler ça, ça va être par de la formation, par l'éducation, puis il faut partir à la base, là, et puis... Mais je pense que ça va être aussi une mentalité qu'on va avoir à développer aussi. Si on voit des produits qui sont... Comme, aujourd'hui on va voir un produit qui est équitable, on sait très bien qu'il a été fait par des gens qui ont été payés à juste prix, tandis qu'on achète... à coté, on peut avoir un produit qui est un petit peu moins cher puis qui a été fait par des enfants dans des pays sous-développés, là. C'est... Je pense qu'on va avoir une mentalité à développer, là, dans tout ça, là.

M. Samson (Réjean): Ça va prendre du temps effectivement, mais c'est la voie à prendre.

Le Président (M. Pinard): Alors, M. le député du Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Est-ce qu'un jour... bien, un jour, face à la montée des produits de la Chine, est-ce que, par exemple, un jour, un pays peut dire: Bien, si tu ne me fournis pas une analyse de cycle de vie... ou les produits que tu m'envoies, que tu me vends ne correspondent pas à des normes positives de cycle de vie... Et, à cet égard, est-ce que l'analyse de cycle de vie peut prendre en compte les aspects sociaux, comme la qualité de vie des gens qui fabriquent le produit?

M. Samson (Réjean): Ça aussi, c'est une excellente question, parce qu'en fait... C'est une de nos préoccupations importantes, c'est l'intégration des éléments sociaux à travers la chaîne du cycle de vie. Ça, c'est fondamental. Actuellement, il y a des efforts importants au niveau international pour intégrer ces éléments-là dans la procédure standardisée ISO. On fait partie d'ailleurs d'un groupe de travail aux Nations unies sur ce sujet-là et on a même des projets de recherche sur ce sujet-là. Actuellement, on le fait du point de vue qualitatif. On a même travaillé, le CIRAIG, avec le Fonds d'investissement en développement durable à développer des outils justement pour sélectionner des projets d'investissement qui tiennent à la fois compte du cycle de vie et des aspects sociaux.

Donc, ça se fait. Oui, ça se fait très bien. Mais, nous, on veut pousser ça plus loin, c'est d'aller même voir les aspects sociaux en dehors même, tu sais, du pays, voir les aspects équitables, tout ça. Il y a des banques de données qui sont est en train de se monter dans lesquelles il va y avoir des données spécifiquement sociales qui vont être intégrées. On commence à avoir des sociologues travaillant avec des données quantitatives qu'on va pouvoir aussi intégrer dans nos modèles. Oui, oui, ça s'en vient, ces choses-là.

M. Tremblay: Merci.

Le Président (M. Pinard): Autre question? M. le ministre.

M. Mulcair: Bien, je veux juste inviter mon collègue de Lac-Saint-Jean de ne pas perdre sa question, parce que, quand on va voir l'UPA, tantôt, ça, c'est un de leurs chevaux de bataille, avec des produits qui peuvent avoir été élevés avec des normes environnementales très différentes. Donc, il y a des choses qui se mesurent, d'autres pas. Et je pense, fort de le tournée et de deux ans et demi, maintenant, dans la fonction, je crois que c'est probablement le dossier environnemental le plus important des 10, 15 prochaines années, c'est-à-dire: jusqu'où on peut ériger une barrière contre la libre circulation des biens, malgré les ententes internationales, lorsque... parce qu'il y a du «child labor», du travail fait par des enfants, ou il y a quelque chose donc au niveau plus social ou au niveau environnemental qui cloche. Tout le mouvement de mondialisation vise à aplanir puis enlever les barrières non transparentes et non reliées à la protection du consommateur, des choses concrètes et mesurables. Mais là, on entre dans une autre phase. Le monde est en train de réagir, en train de dire...

Puis l'exemple du Japon est intéressant. Mes proches collaborateurs avaient de l'information là-dessus, mais, si vous pouviez nous documenter un peu plus là-dessus, ça nous intéresserait beaucoup, sur ce qui se passe. Toujours un peu méfiants, parce que ça devient facile à ce moment-là. Je me souviens des fameux... Vous connaissez le cas des skis Rossignol? On pensait que, nous, on avait des problèmes avec le bois d'oeuvre, ici. Les Japonais ont refusé de laisser rentrer les skis fabriqués en France, parce qu'ils expliquaient que leur neige n'était pas pareille que la neige en France. Alors, c'est un vrai, vrai cas. C'est une vraie... Oui, oui. Oui.

Alors, vous voyez que ce n'est pas facile. Donc, plus on ouvre à des choses, plus les gens peuvent utiliser ça comme prétexte aussi. Donc, c'est très compliqué, mais je pense que c'est une des plus... des fronts de bataille, ? peut-être trop fort comme mot, mais en tout cas ? de difficulté, de challenge le plus important des 10, 15 prochaines années.

Je ne peux pas vous remercier assez. Ce que vous faites est très important, ce que vous nous amenez est très important. On va reprendre contact sur la possibilité d'intégrer un autre principe ou de mieux l'expliciter. Mais, très, très fort apport à notre travail. Merci.

Le Président (M. Pinard): Alors, merci beaucoup, messieurs. J'inviterais maintenant le Réseau des ressourceries du Québec de bien vouloir s'approcher.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Pinard): Alors, À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je vous souhaite la plus cordiale des bienvenues aux travaux de la commission sur le projet de loi du développement durable, loi n° 118. J'apprécierais beaucoup que vous vous présentiez et que vous présentiez également les invités qui vous accompagnent, pour fins d'enregistrement.

Les règles du jeu sont fort simples, madame, c'est que vous nous présentez votre mémoire, vous avez un temps de parole de 15 minutes, et par la suite il y aura échange avec le côté ministériel pendant 15 minutes, et avec l'opposition officielle durant 15 minutes également. Alors, je vous cède la parole, madame.

Réseau des ressourceries du Québec (RRQ)

Mme Monfourny (Jacqueline): D'accord. Bonjour, mon nom est Jacqueline Monfourny, je suis la directrice générale du Réseau des ressourceries du Québec. Je suis accompagnée de M. Jacques Beaudet, qui est le président du conseil d'administration du réseau, et de Martial Desrochers, qui est conseiller en développement au réseau des ressourceries, donc qui fait partie de la permanence.

Je vais laisser la parole à M. Beaudet pour présenter le Réseau des ressourceries, puis ensuite je présenterais notre compréhension du projet de loi et nos interventions.

Le Président (M. Pinard): D'accord. M. Beaudet.

M. Beaudet (Jacques): Merci. L'invitation qui est faite au Réseau des ressourceries du Québec de participer à la présente consultation, représente une occasion privilégiée de partager notre expérience terrain de mise en pratique du développement durable avec vous.

Depuis sa création, en 1997, le réseau a contribué de façon notable au déploiement d'un secteur d'activité, le réemploi, un secteur qui cadre directement dans les principes généralement reconnus du développement durable. En voulant prendre en charge des pans entiers de la gestion des matières résiduelles qui étaient pour ainsi dire orphelins, les ressourceries ont rapidement réalisé qu'il fallait, pour que ça puisse fonctionner, tenir compte des aspects sociaux et économiques d'une gestion écologique des déchets. En d'autres termes, les ressourceries occupent des domaines d'activité qui sont généralement reconnus comme non rentables d'un simple point de vue économique. Pourtant, même si nous ne disposons pas des outils précis pour évaluer la rentabilité sociale et environnementale, nous pouvons tout de même affirmer qu'une activité qui semble économiquement marginale prend toute sa mesure quand on analyse les impacts de ses activités d'un point de vue environnemental et social. Nous croyons que le présent projet de loi saura nous donner des outils pour obtenir dans le temps une mesure beaucoup plus précise de la valeur globale des activités des entreprises d'économie sociale et environnementale.

Mme Monfourny (Jacqueline): Alors, je vais maintenant vous exposer un peu notre compréhension de ce projet de loi et puis les choses qui nous ont un peu plus interpellés en tant qu'organisme et tant que Réseau des ressourceries.

Alors, notre compréhension de ce projet de loi, on l'a prise à partir des notes explicatives du projet. Ce qu'on comprend, c'est qu'on veut instaurer un nouveau cadre de gestion, et à ce niveau-là c'est un objectif global qu'on considère très louable. Quand on parle des objectifs détaillés de la loi, on comprenait qu'il s'agissait de trois objectifs: la recherche du développement durable dans les politiques, programmes et actions de l'administration, la prise en compte d'un ensemble de principes et l'adoption d'une stratégie de développement durable. Ce qui nous interpelle plus en tant qu'organismes et entreprises qui sont à but non lucratif mais qui ont une vocation environnementale, ce sont les deux derniers objectifs. Je vais les détailler un peu plus loin.

Le troisième point de ce projet de loi, c'est le caractère indissociable des dimensions environnementale, sociale et économique des activités de développement. À notre avis, il s'agit d'un point important mais dont la mise en oeuvre peut être difficile. Et là, on se rapporte à notre expérience personnelle, puisque nous oeuvrons justement avec une mission triple, une mission économique, sociale et environnementale.

La nomination du vérificateur général adjoint, c'est le quatrième point des notes explicatives, et à notre avis c'est très intéressant, très important qu'on ait nommé ou qu'on va nommer un commissaire au développement durable. Ce qu'on lit, c'est que le message est: ce n'est pas seulement les chiffres, ce n'est pas seulement les dollars qui sont importants, mais il y a aussi des impacts autres qu'il faut pouvoir vérifier.

n(15 h 50)n

Le cinquième point, c'est le projet de loi qui y prévoit la création d'un Fonds vert. Cette initiative-là nous interpelle vraiment beaucoup. C'est un fonds qui nous semble très intéressant. On souligne cette initiative-là bien sûr dans les modalités. On espère être interpellés encore plus directement puisque ça touche les organismes et entreprises à but non lucratif.

Et enfin le sixième point qu'on avait noté, c'est le nouveau droit dans la section des droits économiques et sociaux de la Charte des droits et libertés de la personne. Il s'agit ici de quelque chose qui nous touche en tant qu'individus plus qu'en tant qu'organisme, et nous ne parlerons que peu de cet aspect-là.

Maintenant que j'ai résumé un peu les points, peut-être dans le détail, ce qui nous touche plus et ce qu'on voudrait voir aussi discuté un peu plus, en ce qui a trait, par exemple, à la prise en compte d'un ensemble de principes.

Le principe 7, de subsidiarité, nous parle des pouvoirs et responsabilités qui doivent être délégués aux niveaux appropriés d'autorité. Nous trouvons ça très important, mais notre souhait, c'est que ce ne soit pas seulement les pouvoirs et responsabilités. Souvent, on donne des pouvoirs, mais on ne donne pas nécessairement les ressources ou les moyens de trouver les ressources appropriées. On travaille beaucoup avec le local, avec le régional, dans nos entreprises, et on voit que parfois il y a un transfert de responsabilités mais qu'il n'y a pas nécessairement les ressources dans les communautés pour pouvoir gérer ça correctement. Alors ça, ça nous... ce serait notre souhait, qu'on ne transfère pas seulement les pouvoirs, mais aussi les ressources avec ou en tout cas les moyens de les trouver.

Un des principes, qui est le 14e, la production et la consommation responsables, on parle d'écoefficience. C'est un terme qu'on trouvait joli mais un peu difficile à gérer. Peut-être qu'on voudrait avoir un éclaircissement en ce qui concerne ce terme, parce que faire l'équilibre entre l'économique, le social et l'environnement, je l'ai dit en préambule, c'est ce qu'on fait tous les jours dans nos organismes, et c'est très, très difficile, il y a toujours un débalancement qui se fait. Donc, cet équilibre-là, cette recherche de cet équilibre nous semble... En tout cas, il va falloir mettre des balises ou en tout cas des mesures, des mécanismes pour y arriver. Alors, on voudrait peut-être un éclaircissement en ce qui concerne l'écoefficience.

Et finalement, toujours dans les principes, l'internalisation des coûts. Pour nous, l'entreprise ou l'organisme qui va calculer ses coûts va devoir aussi les traduire, traduire ce principe-là par des mécanismes de prise en charge de ses impacts. Donc, on pense par exemple à la responsabilité élargie des producteurs.

En ce qui a trait, maintenant, à l'adoption d'une stratégie de développement durable, qui était le dernier aspect, l'article 7 prévoit des mécanismes pour la stratégie, des mécanismes et des indicateurs pour assurer le suivi. À ça, on dit bravo. Dans cet article-là, ce qui nous a peut-être semblé un peu délicat ? et on met un bémol là-dessus ? c'est quand on dit que «la stratégie peut identifier certains moyens qui seront retenus». Pour nous, on pense que la stratégie doit retenir des moyens, donc qu'on doit être un peu plus catégorique, qu'on doit être un peu plus impératif. La stratégie, nous, on compte beaucoup sur celle-ci pour avoir un cadre très précis au niveau des actions. Et c'est d'autant plus important que, dans l'article 8, on parle de... «La stratégie et toute révision de celle-ci doivent faire l'objet d'une consultation publique dans le cadre d'une commission parlementaire.» On pense que le réseau des ressourceries va être, à ce moment-là, encore plus important, encore plus interpellé par ça, et c'est là que notre intervention va être la mieux positionnée. On aimerait souligner l'importance de la contribution de la société civile à ce niveau-là dès le départ et en processus continu.

Dans l'article 11, on parle des mesures d'information et de sensibilisation pour l'ensemble du gouvernement. Nous croyons qu'on devrait parler même de formation pour certaines catégories de membres du personnel. On a déjà dépassé, je pense, la sensibilisation et l'information. Pour certaines personnes, on devra parler de formation.

En ce qui a trait au Fonds vert, nous sommes extrêmement contents d'abord de la reconnaissance des organismes et entreprises à but non lucratif en environnement, mais aussi il faudrait qu'on voie à ce que le financement soit adéquat pour que ce soit une perspective à long terme de développement durable et non pas seulement le financement de projets ponctuels.

Et finalement bien on répète à nouveau que le vérificateur adjoint ou le Commissaire au développement durable, c'est très intéressant, c'est quelque chose qui montre une certaine crédibilité en ce qui a trait à l'environnement. Je vous remercie.

Le Président (M. Pinard): Merci beaucoup, madame. Alors, sans plus tarder, nous allons débuter l'échange avec vous et avec les gens qui vous accompagnent. M. le ministre.

M. Mulcair: Merci, M. Beaudet, et merci, surtout Mme Monfourny, d'avoir fait la présentation. Je dois vous dire, M. le Président, que le Réseau des ressourceries est en train de relever un vrai défi. On a commencé à travailler d'une manière assez intense ensemble il y a près de deux ans, et j'ai eu l'occasion de rencontrer dernièrement l'ensemble des ressourceries réunies en réunion annuelle, puis le travail que vous faites, que vous accomplissez avec ce qu'on vous donne est formidable. Quand on parle des aspects environnementaux, économiques et sociaux, je pense que vous êtes un modèle vivant d'un groupe qui combine les trois. Parce qu'il y a beaucoup de gens qui travaillent, qui trouvent leur travail unique, souvent leur premier travail, dans une ressourcerie, qui n'en auraient pas eu autrement, en plus de nous aider à récupérer, réutiliser, recycler. Alors, bravo! Vous pouvez être sûrs que, nous, on va continuer à travailler avec vous. Mais surtout que ce n'est pas toujours évident, travailler en réseau comme ça, puis avoir les sous, puis les mettre à contribution, mais je suis vraiment confiant que ce que vous êtes en train de faire maintenant est un modèle de ce qui doit être fait dans le domaine.

Moi, j'aimerais que vous nous parliez un petit peu de vos défis quotidiens, dans les ressourceries, puis qu'est-ce qu'on peut faire pour vous aider. Je sais qu'on a souvent eu l'occasion d'en parler, mais il y a parfois aussi des bonnes idées, pour l'environnement général, qui cachent des problèmes insoupçonnés. Un de mes exemples préférés, je rappelle que, quand on a eu la très bonne idée de relier la production agricole, certaines productions porcines notamment, à l'obligation d'avoir une superficie de terrain pour épandre, personne n'avait pensé qu'on perdrait de la forêt privée aussi rapidement. Juste en Montérégie, en trois ans, on a perdu 8 000 hectares entre 1998 et 2001. 8 000 hectares de forêt en zone verte et un autre 2 000 en zone blanche. Alors, c'est un défi de taille de penser deux, trois «moves» plus loin.

Une des choses qui est sur la table en ce moment, c'est la redevance sur l'enfouissement. Ça, c'est une bonne idée, parce que, comme mes prédécesseurs l'ont dit dans cette fonction, ça ne coûte pas assez cher pour enfouir au Québec, donc on n'a pas assez d'incitatifs pour enlever des choses du flux des déchets. Mais une des choses insoupçonnées, c'est que, quand il va vous rester des tonnes et des tonnes, et des tonnes, à la fin de votre travail, vous risquez d'être pris avec ça. Alors, avez-vous poussé votre réflexion là-dessus et est-ce que vous avez des suggestions à nous faire pour qu'on puisse vous aider mieux?

Le Président (M. Pinard): Madame et M. le président.

M. Beaudet (Jacques): En fait, en plus d'être président du Réseau des ressourceries, dans la vie de tous les jours, je suis directeur de la Ressourcerie La Commode, fripes et trouvailles, à Québec, et je vous dirais que, et à titre de directeur mais à titre de président, la grande difficulté qui existe dans toutes les ressourceries au Québec ou à peu près dans toutes les ressourceries au Québec, c'est la grosseur des cueillettes. Vous me demandez: Qu'est-ce qu'on vit journalièrement? C'est ça. C'est-à-dire que le monde, les Québécoises, les Québécois sont très généreux. Donc, partout, on ne peut pas dire: si j'ai trop de matériel, je vais l'envoyer à côté, à côté aussi, ils en ont beaucoup. Et, avec l'arrivée particulièrement du PGMR, la difficulté qu'on est en train de voir, c'est qu'on est en train de grossir le goulot de l'entonnoir, donc il y a beaucoup de matériel qui arrive, mais la sortie de l'entonnoir, elle, il n'y a pas personne encore qui a pensé de la grossir. Donc, la seule, en tout cas, le danger ? je ne vous dis pas que c'est ce qui se passe ? mais le danger, c'est qu'on va juste faire faire un détour aux vêtements particulièrement ou à d'autres matériels par des ressourceries ou d'autres organisations, pour s'en aller pareil dans les incinérateurs ou dans les sites d'enfouissement.

n(16 heures)n

Donc, ce qu'on a de besoin actuellement, et la grande difficulté qu'on vit à tous les jours, et ce n'est pas la première fois qu'on en parle, et c'est important, on a besoin de deux choses: donc dans le fond de faire de la recherche et du développement. C'est sûr que ça nous fait mal au coeur à chaque fois, et je prends des exemples très concrets: des manteaux d'hiver. Bien, des manteaux d'hiver, on n'exporte pas ça, il n'y a pas personne qui veut de ça. Donc, un manteau d'hiver qui est très bon, de bonne qualité, qui est dans notre magasin pendant six semaines, huit semaines, mais, après ça, je n'ai pas le choix, on est obligé de le prendre, puis souvent il s'en va à l'incinérateur directement. Donc, quand on parle de recherche et développement, je pourrais vous donner des exemples. Aux États-Unis, il y a une entreprise qui, à partir de vieux jeans, font, bon, avec un mélange, font de la pâte à modeler donc pour les sculpteurs, qui est vendue. Bon, je ne vous dis pas qu'il faut instaurer ce genre d'entreprise là partout dans le monde, mais c'en est un, exemple, parce qu'il y a quelqu'un qui a fait de la recherche et du développement. Donc, on pourrait développer des choses de ce côté-là. Et, l'autre affaire, ce qui est nouveau avec les ressourceries et avec l'arrivée du réseau, c'est qu'on a changé la donne. C'est que maintenant, au Québec, on ne donne plus nos choses juste pour les pauvres, on donne des choses pour aider, entre autres, la création d'emplois, pour sauver l'environnement, etc. Donc, ce qu'on a de besoin, un des besoins qu'on a, c'est la promotion. Donc, il faut que les paliers gouvernementaux nous aident à informer la population en général que nos ressourceries sont accessibles à tout le monde. Donc, c'en est, des façons d'agrandir le goulot de sortie.

Donc dans le fond de dire à M. et Mme Tout-le-monde... Puis, on vient de le faire chez nous, un profil, puis je vous donne juste cela en exemple, mais 30 % de la clientèle chez nous a un revenu familial de moins de 20 000, mais en contrepartie on a 10 % de la clientèle qui ont un revenu familial de plus de 70 000 $. Donc, c'est sûr qu'il faut grossir, donc de dire au monde... Et donc, quand vous me dites: qu'est-ce qu'on a de besoin? qu'est-ce qu'on vit comme difficultés à tous les jours? c'est ça.

La difficulté qu'on vit... bien, qu'on commence à vivre mais qu'on ne vit pas encore beaucoup dans les ressourceries, mais qu'on le sent, c'est bien sûr, et ça, Emploi-Québec nous avait avertis depuis quelques années, c'est de trouver des bons employés. Quand je vous dis ça, c'est qu'avec l'emploi qui existe actuellement à Québec, au Québec, c'est sûr que, quand on fait affaires avec des programmes, bon, entre autres, de subventions salariales, etc., bien c'est bien sûr que c'est un petit peu plus difficile. Et, quand on offre des emplois au salaire minimum ou autour du salaire minimum, il y a tellement d'emplois partout... donc ça, c'en est une autre, difficulté qu'on rencontre, là, quotidiennement. Ça, c'est deux, trois affaires que je voulais au moins souligner, là, comme difficultés.

M. Mulcair: Bien. Je vais passer à l'opposition.

Le Président (M. Pinard): Alors, M. le critique de l'opposition...

M. Desrochers (Martial): Oui, mais j'aurais peut-être renchéri là-dessus.

Le Président (M. Pinard): Pouvez-vous vous identifier, s'il vous plaît?

M. Desrochers (Martial): Martial Desrochers.

Le Président (M. Pinard): M. Martial Desrochers, d'accord. Oui?

M. Desrochers (Martial): L'avantage de voir l'arrivée d'une loi, comme ça, sur le développement durable, c'est que nous, les organismes, face, entre autres, à l'administration, c'est d'éviter le cloisonnement. On travaille, nous autres, avec l'Environnement, avec Emploi-Québec, puis avec Développement économique, Innovation et Exportation. En gros, là, c'est les trois ministères avec lesquels on intervient. Mais chaque ministère a sa problématique. Ça fait que souvent, quand on va à Emploi-Québec, ils ne veulent pas entendre parler d'environnement, eux autres là, là, ils veulent entendre parler d'emploi, de formation, tout ça. Puis, l'exemple se répète à peu près aussi dans les autres ministères, qui n'ont pas dans leurs préoccupations les autres impacts.

Ce que le développement durable vient faire là-dedans, c'est que là ça va obliger nos interlocuteurs à en tenir compte aussi. C'est qu'on ne pourra pas juste... autrement dit, on a peut-être la chance d'être moins cloisonnés dans nos approches. Comme quelqu'un qui dit: Moi, je m'occupe juste de financier l'emploi. Non, ça ne se peut pas, ça; dans la vraie vie, ça n'existe pas. On fait de l'emploi pour faire quelque chose. Donc, avec le développement durable, bien nous, ce qu'on souhaite puis ce qu'on pense qui peut arriver, c'est que, quand on va s'adresser à une agence ou à un ministère ou à un organisme gouvernemental, c'est qu'on puisse élargir le débat pour prendre au complet l'ensemble de nos préoccupations et de notre mission.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. Desrochers. Alors, M. le député du Lac-Saint-Jean et critique officiel de l'opposition.

M. Tremblay: Bonjour. Vous mentionnez que, bon, l'importance, suite à ce projet de loi, que, l'élaboration de la stratégie, la société civile soit impliquée. Avez-vous une idée de quelle façon ça pourrait se faire?

Mme Monfourny (Jacqueline): Bien en fait on a parlé beaucoup de cette commission. On regarde le projet de loi, c'est un projet de loi qui est encore vaste, qui laisse beaucoup de possibilités. Nous, c'est vraiment dans la stratégie, parce qu'on veut être concertés, on veut que d'autres intervenants qui sont dans le milieu puissent aussi avoir voix au chapitre dès le départ. Parce que le problème, c'est souvent quand il y a... quand on est très avancés au niveau des objectifs et des façons de faire, bien on arrive finalement en cours de route et c'est difficile pour nous de nous intégrer à travers ça. Alors, on trouvait ça intéressant d'être interpellés maintenant, mais on voit notre contribution beaucoup plus en aval dans le processus.

Concrètement, bien c'est sûr qu'en tant qu'organisme à vocation environnementale mais qui travaillons justement au niveau social, on travaille, comme disait M. Desrochers, avec beaucoup d'intervenants, avec beaucoup de ministères, et ce travail de concertation là, on ne peut que le souhaiter finalement.

M. Tremblay: Est-ce que, à ce moment-là, une commission, c'est suffisant? Dans le sens que le gouvernement établit la stratégie, la soumet à la population, et là, dans la même formule que l'on a aujourd'hui, vous venez dire ce que vous pensez? Ou bien vous pensez plutôt qu'on devrait avoir, je ne sais pas, une espèce de comité qui chapeauterait le travail du ministère ou...

M. Desrochers (Martial): Bien, c'est sûr, comme disait Mme Monfourny, on est vraiment, nous, au début du processus, puis, je dirais, le développement durable, un peu par accident, hein, on est dedans, nous, complètement, à tous les jours. Puis, ce qu'on veut éviter, c'est justement... Bon, le mécanisme, comment ça va se faire? Ça va-tu être un comité... Ça, on verra, le temps venu, c'est quoi, la formule qu'il faut utiliser, mais ce qui est important, c'est qu'on soit là dès le début des discussions pour qu'on soit capable, un, de faire... moi, je pense qu'il y a beaucoup de gens qui peuvent profiter de notre expérience et bâtir des processus de travail qui vont tenir compte de ça, et non pas d'arriver... Dans notre position, c'est un peu frustrant des fois d'arriver devant un processus de consultation où on sait qu'il y a déjà beaucoup de travail de fait, puis on a comme l'impression de toujours travailler, je dirais, de reculons; c'est comme si on était... c'est comme si on empêchait les choses d'avancer au lieu de travailler à les faire avancer.

Donc, étant donné le rôle qu'on joue, d'être actif quotidiennement, dans notre cas, sur le terrain, bien ce serait peut-être intéressant pour nous et pour ceux avec qui on travaillerait qu'on soit impliqué tout de suite au début. La forme, on verra; ça, c'est... Puis aussi, c'est qu'en étant interpellé et impliqué tout de suite au début, on dit: Bien, on va être capable d'avoir les... d'aller chercher les ressources que ça prend. Nous aussi, on connaît ça parce qu'on est sur le terrain, mais on a besoin d'experts aussi, là, on ne connaît pas tout, on fonctionne beaucoup par essai et erreur. Ça fait que, plus tôt on est impliqué dans le processus, à mon avis plus c'est profitable pour tous les gens qui ont à travailler ce dossier-là.

Le Président (M. Pinard): M. Beaudet, vous désirez ajouter?

M. Beaudet (Jacques): Non, c'est beau.

Le Président (M. Pinard): Bien. M. le député.

M. Tremblay: Est-ce que l'aspect social, selon vous, est assez présent dans le projet de loi? Est-ce que ça vous satisfait? Parce que, veux veux pas, on parle plus souvent d'environnement quand on parle de développement durable, mais, vous qui êtes énormément dans le social, trouvez-vous que c'est suffisant? Ou ça ne s'applique pas?

Mme Monfourny (Jacqueline): Bien, moi, oui... Bien en fait, oui, ça s'applique, la question se pose, mais c'est qu'on est très en amont des stratégies, hein. Alors, à ce niveau-ci, moi, je ne voudrais pas nécessairement le voir apparaître très détaillé. Je pense que, dans les principes qui ont été exposés, il y a 16 principes, l'aspect social revient, dans ces principes-là, et son... Ce n'est peut-être pas égal avec l'environnemental, mais je pense que la difficulté va résider dans l'équilibre qu'on va devoir faire entre les trois volets: l'économique, le social et l'environnemental, et c'est cette balance-là qui va rester à faire. Donc, tout est dans la mise en oeuvre.

M. Tremblay: Merci.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Oui. Merci, M. le Président. Ressourceries, vous resssourcez quoi? Vous ramassez...

Mme Monfourny (Jacqueline): Bien, on collecte, on trie et on valorise... Principalement, actuellement, là, on a plus d'une vingtaine de ressourceries qui sont membres du réseau. C'est des ressourceries et des organismes à vocation environnementale, des organismes d'économie sociale, mais principalement ce sont des vêtements, des électroménagers, des matériaux de construction, des meubles, des choses qui sont délaissées par la collecte sélective, donc qui ne rentrent pas dans la collecte sélective, donc des jouets aussi, tout ce qui est trucs de maison plus les matériaux de construction ou de déconstruction, si vous voulez.

M. Grondin: Puis vous en disposez...

Le Président (M. Pinard): M. le président, vous désirez ajouter?

M. Beaudet (Jacques): Oui. Bien, juste pour préciser, M. le député. Il y a deux sortes de ressourceries, si on veut, il y a les ressourceries multimatières, qui ramassent un petit peu ce que Mme Monfourny... donc, vraiment très, très large, mais on a des ressourceries aussi avec des matières uniques. On peut penser, entre autres, à Recyclage Vanier, donc c'est le papier ? donc qui ramasse d'ailleurs votre papier ici, à l'Assemblée nationale; M. Bernier va être content que je l'aie dit ? et on a, exemples, SOS Vélo, à Montréal, ou Vélo vert, à Québec, qui, eux, sont uniquement dans le vélo. Donc, on a vraiment, là, des deux sortes. Je voulais juste au moins préciser, là.

Le Président (M. Pinard): De la peinture également.

M. Grondin: Alors, si vous ramassez le papier de l'Assemblée nationale, je suis certain que vous en ramassez beaucoup. Puis, quand c'est n'est plus utile, vous n'avez pas de porte de sortie, la seule chose qui vous reste, c'est l'incinérateur ou les sites d'enfouissement?

n(16 h 10)n

Mme Monfourny (Jacqueline): Bien, c'est ce que M. Beaudet... on veut tous répondre, là, parce que c'est une problématique très importante pour les ressourceries. Effectivement, c'est que... M. Beaudet parlait tout à l'heure du manque de débouchés pour certains produits, et c'est pour ça qu'il faut travailler à la recherche et au développement ou à d'autres aspects, là. Parce qu'on a quand même des recycleurs qui prennent certaines matières qui ne peuvent pas être revendues en magasin. Donc, il y a des recycleurs qui peuvent les récupérer pour les métaux ou pour d'autres aspects. Mais c'est très important, pour les catégories qui ne peuvent pas être revendues, donc qui ne peuvent pas être réemployées, de trouver de nouveaux débouchés. Donc effectivement, ça peut s'en aller...

Le Président (M. Pinard): M. le président.

M. Beaudet (Jacques): Et on pourrait aller plus loin en disant même: Effectivement, on a des gens qui viennent acheter du matériel qu'on ne peut pas passer dans nos magasins, et, j'oserais dire, malheureusement... ça, c'est du côté économique que je parle, mais il faut qu'on commence à se poser la question: Ces gens-là qui viennent acheter nos matériels ? exemple, moi-même, on vend de temps en temps, chez nous, des sacs vierges ou, bon, du linge qu'on n'a pas pu passer autrement ? mais là il faut se poser la question: ils font quoi avec ça? Et tantôt il me semble que, quand j'étais... M. le ministre en a parlé, bien est-ce qu'on est sûr que ça ne fait pas travailler des enfants de 10 ans en quelque part? Est-ce que c'est sûr que ça ne fait pas travailler des personnes, même adultes, en quasi esclavage? Donc, on devra aussi se poser ces questions-là. Et j'espère que, dans le projet de loi... ou dans plus la mise en place, on pourra se poser ces questions-là.

Parce que, d'un côté, comme administrateur, c'est sûr qu'il faut bien que je me débarrasse de mon stock, mais, d'un autre côté, mon côté social... et tantôt Mme Monfourny vous le disait, hein, de gérer les trois, puis, du côté de l'environnement, bien je me dis: Bien, c'est peut-être mieux si je l'envoie ailleurs. En tout cas, ça s'en va peut-être à Toronto, donc ce n'est pas dans nos déchets d'ici, c'est moins... Donc, c'est ma mission environnementale qui vient d'être comblée un peu, mais là ma mission sociale est peut-être complètement bousillée. Donc, c'est dans cet esprit-là qu'il faudrait travailler aussi avec vous autres plus tard.

M. Grondin: Vous sembliez être favorable au Fonds vert, est-ce que c'est parce que vous pensez avoir un lien pour aller chercher des sous dans le Fonds vert, pour faire mieux?

Mme Monfourny (Jacqueline): Bien je dois dire qu'on l'a vu, ce lien-là, oui, parce que c'est carrément libellé, là. On s'est vu là-dedans, pour répondre à votre question, oui.

M. Grondin: Puis une autre petite question. Bien, ce serait bien placé, remarquez, parce que je sais très bien que... C'est un peu comme moi, dans mon comté... Je ne pense pas qu'on ait de ressourceries, mais on a la maison des moissons, quelque chose de même, là, mission... À Sainte-Marie, il y a la mission... quelque chose. Je ne me rappelle plus du nom.

M. Beaudet (Jacques): Je ne sais pas si c'est dans votre comté, mais il y a la superbelle ressourcerie Beauce-Sartigan, qui est dans la Beauce.

M. Grondin: Oui, mais ce n'est pas dans mon comté.

M. Beaudet (Jacques): Mais c'est dans la Beauce. Il me semblait que la Beauce, c'était uni, ça, non?

M. Grondin: Ah! c'est tout uni.

Le Président (M. Pinard): Ne partez pas un débat, là.

M. Grondin: L'autre question que je me posais: tout à l'heure, vous parliez des employés. Est-ce que vous employez des fois des personnes handicapées, avec des handicaps légers, pour travailler dans vos ressourceries? Oui?

Mme Monfourny (Jacqueline): Il y en a plusieurs. En fait, il y a des centres... il y a plusieurs ressourceries qui emploient... qui sont justement... le centre est adapté pour ce genre de travail là, oui.

M. Beaudet (Jacques): Et même qu'on a... beaucoup de ressourceries ont des ententes, particulièrement dans la région de Québec et ailleurs, avec le CRDI, le centre de réadaptation en déficience intellectuelle de Québec. Donc, en plus de nos employés réguliers, plusieurs ressourceries ont des plateaux de travail spécifiques pour des personnes associées avec le CRDI.

Le Président (M. Pinard): Autres questions? Alors, M. le ministre.

M. Mulcair: Juste remercier les gens du Réseau des ressourceries du Québec, M. le Président, les féliciter pour le travail qu'ils font et les assurer de notre collaboration continue.

Le Président (M. Pinard): Alors, à titre de président de la commission, merci, Mme Monfourny, M. Beaudet et M. Desrochers. Les propos vont enrichir sensiblement les membres de la commission dans la poursuite de nos travaux sur le projet de loi n° 118. Merci.

Alors, j'appellerais maintenant l'Association québécoise pour la promotion de l'éducation relative à l'environnement. Bien vouloir se présenter, s'il vous plaît. Et je demanderais aussi à ce qu'on attende, avant de se lever, que les travaux de la commission soient terminés, parce qu'on enregistre. Tout ça est enregistré.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Pinard): Alors, mesdames messieurs, nous sommes heureux cet après-midi d'accueillir l'Association québécoise pour la promotion de l'éducation relative à l'environnement. Alors, messieurs, j'apprécierais que vous vous identifiiez pour les fins de l'enregistrement et pour nous permettre également d'échanger avec vous. Alors, une cordiale bienvenue.

Association québécoise pour la
promotion de l'éducation relative
à l'environnement (AQPERE)

M. Lhérisson (Hugues Harry): Merci. Mon nom, c'est Hugues Harry Lhérisson, et je suis coordonnateur de l'association.

M. Litzler (Robert): Président de l'AQPERE, l'Association québécoise pour la promotion de l'éducation relative à l'environnement.

Le Président (M. Pinard): Alors, bienvenue, messieurs. Alors, qui nous dévoilera le mémoire? Alors, M. le président.

M. Litzler (Robert): M. le Président de la Commission des transports et de l'environnement de l'Assemblée nationale du Québec, M. le ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs, Mmes et MM. les députés de la 37e Législature, permettez-moi de prendre quelques minutes pour vous présenter brièvement l'Association québécoise pour la promotion de l'éducation relative à l'environnement, AQPERE, dont j'ai l'honneur d'assumer la présidence depuis 10 ans. Notre association est dans sa quinzième année d'existence et a pour mission de faire la promotion de l'éducation relative à l'environnement, connue sous le signe E-R-E, ERE. Elle y parvient en créant des rencontres d'échanges entre les acteurs de l'éducation à l'environnement pour faire connaître leurs expertises et leurs expériences, afin de faire progresser cette dimension fondamentale de l'éducation autant dans le milieu scolaire qu'au près du grand public.

Si l'AQPERE exerce d'abord son action à Montréal, son rayonnement s'étend à l'ensemble des acteurs en ERE du Québec, du Canada et de la francophonie, comme en témoigne la gestion du secrétariat général de l'ONG internationale Planèt'ERE, qui vient de lui être confiée en juillet 2005 en partenariat avec le collège de Rosemont, chef de file canadien en écodéveloppement institutionnel. Parmi l'ensemble des réalisations au cours de ses 15 dernières années d'existence, celle dont nous sommes le plus fier est sans aucun doute notre contribution à l'intégration, en 1997, de l'éducation relative à l'environnement dans la réforme scolaire en cours. Ainsi, 10 ans après la publication du rapport qui porte son nom, Mme Gro Harlem Brundtland a vu le Québec répondre à un de ses souhaits les plus chers, celui de voir l'école se préoccuper d'éducation relative à l'environnement. Comme toute réforme, celle-ci ne fait pas l'unanimité. Toutefois, quel que soit son avenir, nous sommes convaincus que l'éducation relative à l'environnement fera désormais partie de l'éducation fondamentale de l'école québécoise tant elle est cruciale pour l'avenir de la planète, porteuse de valeurs humaines, sociales et écologiques et constitue la voie à suivre pour créer la société à laquelle nous aspirons.

n(16 h 20)n

Cela me donne maintenant l'occasion d'entrer dans le vif du sujet pour lequel nous sommes ici aujourd'hui. Nous abordons évidemment le sujet avec le regard de l'acteur en éducation relative à l'environnement. Nous exprimerons notre opinion sur les prétentions de la loi n° 118 et nous formulerons nos demandes, mais en conclusion nous présenterons aussi nos engagements.

Je suivrai exactement le document qu'on nous a transmis il y a une quinzaine de jours et qui présente la loi n° 118. Au titre I, Gouvernance fondée sur le développement durable, au chapitre des dispositions préliminaires, voici les constats que nous faisons. Nous relevons avec intérêt que le gouvernement du Québec a fait le constat que la société québécoise connaît actuellement un développement non viable et contraire à la durabilité et qu'un virage majeur s'impose pour freiner la dégradation accélérée de l'environnement. Nous apprécions notamment la création d'un poste de commissaire au développement durable qui a les pleins pouvoirs de contrôler la cohérence des actions gouvernementales. Il nous plaît par ailleurs de lire, à l'article 3 des dispositions préliminaires de la loi, que le gouvernement du Québec s'engage à ce que l'administration de l'État, à tous les niveaux, donne l'exemple, ce qui nous paraît fondamental pour obtenir l'engagement de chaque citoyen dans une démarche de protection de l'environnement.

Nos demandes. Étant donné que le gouvernement s'octroie le droit de déterminer la date à laquelle la présente loi prendra effet, nous souhaitons vivement qu'elle s'applique dès les premiers jours de son adoption à l'ensemble de la société, sans aucune exception.

Au chapitre II, intitulé Stratégies de développement durable, les mesures prises par l'administration, la section 1, qui touche aux principes et stratégies de développement durable, nous impose ou nous recommande les éléments suivants. En ce qui concerne les principes décrits à l'article 6, nous relevons qu'aux 14 principes qui étaient inclus dans l'avant-projet de loi et que nous avions commentés lors du dépôt de notre mémoire, en janvier, deux principes supplémentaires se sont ajoutés à la version actuelle du projet de loi. Il s'agit du principe de subsidiarité et de celui de l'internalisation des coûts. Nous ne reviendrons donc pas sur les principes, les premiers principes. Nous avions explicité notre compréhension et nous les avions approuvés, chacun. Nous pourrons revenir éventuellement sur certains d'entre eux au moment de la période de questions si l'auditoire le souhaite.

Pour les deux principes additionnels, voici notre position. Subsidiarité. La délégation des pouvoirs et des responsabilités au niveau le plus près de la population est en effet le prix à payer pour une application efficace de la Loi sur le développement durable. La loi s'appliquant à l'ensemble des citoyens du Québec, c'est donc au niveau de la municipalité que doit situer le centre de décision local. Cette délégation de pouvoir devrait s'étendre au contrôle des infractions au règlement qui accompagnera la loi pour la rendre opérationnelle, ainsi que de l'application des sanctions. En ce qui concerne l'internalisation des coûts, s'il s'agit là d'un principe très noble auquel on ne peut que souscrire, son application n'offre aucune assurance que ce n'est pas le consommateur qui assumera la facture de la disposition écologique du produit en fin de vie, alors que la logique veut qu'elle incombe à celui qui a mis le produit sur le marché.

Nos demandes en ce qui concerne le principe de subsidiarité: Que l'application de la loi n° 118 incombe à l'autorité municipale et que cette fonction soit incluse dans le plan stratégique de développement durable de la municipalité.

En ce qui concerne le principe d'internalisation des coûts: Que, dans le cas de contenants de remplissage unique ? c'est un exemple; boîtes de carton, bouteilles de plastique ou de verre ? l'entreprise qui a mis le contenant sur le marché assume le coût de son recyclage ? récupération, transport, tri, transformation.

Au point de vue stratégique, maintenant, laquelle stratégie est couverte par les articles de 7 à 14. Cette section qui traite de la stratégie et d'indicateurs de développement durable nous suggère les commentaires suivants. Nous sommes d'avis que la stratégie de mise en oeuvre décrite dans les articles de 7 à 11, auxquels nous souscrivons, et l'élaboration des indicateurs de développement durable, décrite à la section 12, devraient faire partie de la même démarche et ne pas être séparées dans le temps. Nous estimons par ailleurs que la préparation de la stratégie et des indicateurs de développement durable devrait être confiée à deux comités de travail restreints, 10 personnes maximum, et que leurs travaux soient soumis à la consultation d'une centaine de partenaires représentatifs de l'ensemble de la société, plutôt que de donner lieu à une consultation publique élargie du style de celle menée pour l'avant-projet de loi. Une telle consultation élargie ? appel de mémoires, analyses, tournée régionale de consultation, puis version finale de la stratégie et des indicateurs ? retarderait de manière importante son adoption par le gouvernement et repousserait d'autant l'application de la loi.

À l'article 13, qui spécifie les fonctions du ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs, nous suggérons que les deux comités de travail mentionnés précédemment se constituent en comités permanents pour collaborer avec le ministre et le conseiller.

En référence à l'article 14, nous nous permettons ici une suggestion: Pourquoi les 30 membres qui constituent le Cercle des Phénix et qui représentent une somme d'expertises et de compétences remarquables dans tous les domaines qui touchent à l'environnement ne se verraient-ils pas confier le mandat de conseillers de gouvernement en matière de stratégie et d'indicateurs de développement durable?

Section II. Mise en oeuvre de la stratégie et reddition des comptes. Les article 15 à 17 de cette section, concernant surtout les obligations des ministères face à la mise en oeuvre de la stratégie de développement durable, ne soulèvent pas de commentaires particuliers.

Au titre II, Dispositions modificatives finales. Parmi les modifications que subissent un certain nombre de lois par l'adoption de la loi n° 118, les deux suivantes retiennent plus particulièrement notre attention. L'insertion dans la Charte des droits et libertés de la personne de l'article 46.1, qui donne à chaque personne le droit de vivre dans un environnement sain et respectueux de la biodiversité, est un article que tous les citoyens québécois accueilleront avec une grande satisfaction.

L'insertion dans la Loi sur le ministère de l'Environnement de la section 2.1 relativement au Fonds vert, qui dans cette loi porte les numéros 15.1 à 15.11 et que les OSBL qui oeuvrent en environnement attendent avec une grande impatience et à propos duquel nous tenons maintenant à apporter les commentaires ci-dessous.

Fonds vert. Les articles suivants retiennent notre attention: l'article 15.1, qui prévoit une aide financière aux OSBL oeuvrant en environnement; l'article 15.3, qui fixe la date de début des activités du fonds; l'article 15.9, qui détermine la fin de l'année financière du fonds; et l'article 15.11, qui autorise le ministre des Finances à faire des avances au fonds pour assurer son démarrage.

Depuis le 31 mars 2005, date à laquelle se terminait la troisième année du programme de financement statutaire des groupes environnementaux nationaux, plusieurs groupes environnement, faute de ressources financières, ont fermé leurs portes. Des acteurs hautement qualifiés ont dû se réorienter et réorienter leurs activités ailleurs, privant ainsi la société d'une expertise patiemment acquise sur le terrain au fil des années. Ceux qui ont survécu doivent leur survie au prix d'un ralentissement considérable de leurs activités, au soutien de partenaires qui continuent de reconnaître leur valeur ou encore à l'engagement de bénévoles particulièrement actifs.

Or, avec une société qui place l'environnement au premier rang de ses préoccupations, comme le montrent des sondages récents, il est évident que le ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs devra de plus en plus compter sur l'intervention des groupes environnementaux auprès des citoyens. D'autres, et nous en sommes, auront la tâche de créer des activités de formation pour rendre plus compétents ceux et celles qui interviennent auprès des jeunes et des adultes. Le ministère du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs ne peut pas se priver de ces groupes qui oeuvrent partout au Québec. Il faut donc qu'il leur vienne en aide rapidement. La perte d'un groupe environnemental crée un vide impossible à combler.

n(16 h 30)n

C'est pourquoi nous plaidons la cause de tous les groupes en exprimant le souhait que la loi n° 118 soit adoptée avant l'ajournement de la présente session parlementaire; que la loi n° 118 prenne effet dans les jours qui suivent son adoption, et qu'en ce qui concerne le Fonds vert le ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs emprunte au ministre des Finances, comme l'article 15.7 du projet de loi n° 118 le lui permettra, les sommes nécessaires au démarrage du fonds; que les groupes environnementaux nationaux qui étaient déjà visés par le défunt programme de financement statutaire obtiennent une aide financière avant le 31 mars 2006 qui couvrirait la période du 1er avril 2005 au 31 mars 2006, octroyée sur la base des critères qui prévalaient lors du dernier versement du PFS; qu'un programme de financement semblable à celui qui avait été élaboré au bénéfice des groupes environnementaux de base, qui oeuvrent en première ligne auprès des citoyens, soit restitué. L'AQPERE et l'UQCN, l'Union québécoise pour la conservation de la nature avaient apporté leur contribution aux fonctionnaires du ministère de l'Environnement de l'époque pour la rédaction de ce programme qui était alors déjà au stade de la mise en application. En ce qui nous concerne, nous sommes de nouveau disposés à prêter main-forte aux fonctionnaires de l'actuel ministère.

Nous sommes par ailleurs en désaccord avec l'article 15.10, qui donne le droit au ministre des Finances, en cas d'insuffisance du fonds consolidé du revenu, de puiser dans le Fonds vert pour payer les sommes requises pour l'exécution d'un jugement contre l'État. À ce titre, voici une comparaison très révélatrice. Lorsque le Comité d'action et de concertation en environnement du cégep de Rosemont a décidé de créer le Fonds d'intervention en environnement, il a été convenu que ce fonds ne servirait jamais à autre chose qu'à financer l'écodéveloppement de l'institution, qui comprend la gestion écologique, d'une part, et les activités de sensibilisation et d'éducation de la communauté collégiale, d'autre part. Pas étonnant que ce cégep maintient depuis plus de 10 ans sa place de chef de file en environnement dans le milieu de l'éducation, tous les ordres d'enseignement confondus. Nous souhaiterions qu'il en soit ainsi du Fonds vert du Québec.

Le dernier point que nous voulons soulever concerne la modification, apportée à la loi n° 118, à l'article 17 de la Loi sur le Vérificateur général, qui prévoit la nomination d'un vérificateur adjoint qui porte le nom de Commissaire au développement durable. Nous estimons qu'il faudrait que chaque région administrative du Québec ait son commissaire au développement durable. Cela garantirait une meilleure efficacité dans l'application de la loi en permettant une meilleure détection des contrevenants, contribuant ainsi à l'alimentation du Fonds vert. Cela faciliterait aussi la rédaction du rapport annuel que doit produire le vérificateur général adjoint. Conclusion...

Le Président (M. Pinard): Merci beaucoup, monsieur...

M. Litzler (Robert): En conclusion...

Le Président (M. Pinard): Monsieur, on continuera lors des échanges...

M. Litzler (Robert): Très bien.

Le Président (M. Pinard): ...on aura sûrement l'occasion d'aborder votre conclusion. Comme le temps est déjà dépassé, immédiatement un échange de 15 minutes avec le côté ministériel et un autre 15 minutes avec l'opposition officielle. M. le ministre.

M. Mulcair: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, il me fait extrêmement plaisir de souhaiter une très cordiale bienvenue à M. Litzler et à M. Lhérisson, qu'on connaît depuis le début de notre travail. M. Litzler est quelqu'un qui a accomplit des choses absolument extraordinaires. Et je vais, sur le temps du gouvernement, inviter M. Litzler de nous présenter... Ma première question, c'est: Est-ce que vous pouvez nous faire votre conclusion? Est-ce que vous pouvez faire votre conclusion?

M. Litzler (Robert): Oui. Alors, en conclusion, nous remercions la Commission des transports et de l'environnement d'avoir invité l'AQPERE à s'exprimer à propos du projet de loi sur le développement durable. Nous espérons avoir apporté une contribution éclairante à la poursuite des travaux qui doivent conduire à l'adoption de cette loi et nous offrons au ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs notre plus sincère collaboration à l'avancement de la cause de l'éducation relative à l'environnement, qui est notre champ de compétence.

M. Mulcair: Bien, merci. M. Litzler, pour ceux qui ne le connaissent pas, est vraiment un chef de file historiquement ici, au Québec, en éducation relative à l'environnement. Il a vécu... il a expliqué les difficultés avec le financement, mais il a aussi un problème assez particulier cette année, parce que, même si beaucoup d'emphase a été placée sur les effets du milieu de la culture... de certaines actions sociales, cette année, côté syndical, il y a eu un effet important pour certains groupes environnementaux. Est-ce que vous pouvez expliquer aux membres de la commission les difficultés qui ont été connues?

M. Litzler (Robert): Récentes? Les difficultés récentes...

M. Mulcair: Oui, c'est ça.

M. Litzler (Robert): ...dues au conflit que vivent actuellement les syndicats avec le gouvernement dans la négociation de la convention collective. Nous avons envoyé au ministre, mais nous avons également envoyé aux syndicats... à la CSQ, à la Centrale des syndicats du Québec, nous avons envoyé une lettre dans laquelle nous déplorons évidemment que les actions qui sont actuellement entreprises au niveau syndical nuisent aux groupes environnementaux, qui dépendent souvent... dont la vie dépend souvent des activités qu'ils mènent à l'intérieur des écoles, qu'ils mènent également avec la population avec l'aide de certains enseignants. Et ils se sont vu, peut-être pas officiellement, montrer le chemin de ne pas permettre à ces activités-là de se développer. Alors, imaginez un instant, un groupe, je le nomme, il est au Québec, il est à Québec même, c'est Québec'ERE, lequel Québec'ERE travaille de façon importante avec les enseignants et qui se voit refuser l'accès des écoles sous prétexte du conflit syndical.

Nous avons clairement demandé à M. Parent, donc le président de la CSQ, de renoncer à ces actions-là et nous lui avons signifié qu'il était tout à fait contradictoire, non cohérent, qu'un syndicat qui prétend avoir près de 1 000 écoles vertes Brundtland, qui sont des exemples à suivre, le modèle québécois au niveau de l'école, puisse boycotter des activités environnementales déployées par des groupes environnementaux qu'ils desservent. On ne comprend absolument pas une incohérence pareille. Nous reprochons parfois au ministère de prendre des mesures qui sont incohérentes avec l'objectif d'éducation relatif à l'environnement que nous avons, mais voici sans aucun doute dans le milieu syndical une incohérence tout aussi évidente. Alors, et là j'ai cité Québec'ERE, mais je pourrais vous en citer beaucoup d'autres. Le Centre de la Montagne, par exemple, qui est à Montréal et que nous connaissons très bien, a des activités nombreuses, et ces gens-là, tout comme Québec'ERE, sont obligés finalement de mettre à pied des personnes, les envoyer en chômage, parce qu'ils ne peuvent plus les rémunérer, la rémunération de ces groupes-là dépendant directement des activités qu'ils proposent aux écoles.

Le Président (M. Pinard): Mme la députée de Pontiac.

Mme L'Écuyer: Merci, M. le Président. Alors, ce n'est que pour souscrire à ce que vous venez de dire. Dans mon comté, j'ai une école qui est Brundtland, et, depuis le début des négos, l'ensemble des activités qui touchent l'environnement ont cessé à cause des moyens de pression. Et je déplore beaucoup cet état de fait, compte tenu que souvent, puis c'est un milieu rural, puis c'est très difficile de sensibiliser, peut-être beaucoup plus que dans les milieux urbains, de sensibiliser une population à l'environnement, surtout compte tenu qu'on connaît peu des effets... bon, on n'a pas beaucoup de smog, et des choses comme ça. Et c'est une école qui est Bruntland depuis au moins six ans, qui avait un très, très bon programme, et, cette année, à cause des moyens de pression, l'ensemble des programmes... et je ne peux que souscrire à ce que vous venez de dire. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Merci. M. le ministre.

M. Mulcair: Je veux revenir sur un autre aspect justement du fonds, parce qu'effectivement, pour ce qui est de la date du 31 mars 2006, j'ai vérifié avec le sous-ministre du développement durable, M. Gaudreau, et avec les affaires juridiques, et il est tout à fait possible pour nous, si on l'a avant Noël, de l'avoir opérationnel, de verser. Il faut être conscient d'une chose: il y a des amendes, parfois importantes, et les amendes vont aller là-dedans. À défaut de l'avoir, les amendes vont aller au fonds consolidé. Et il va falloir juste qu'on soit conscients de ça. Si on veut que ça, ça soit opérationnel, ça devient un élément de plus, pour nous en tout cas, pour le mettre en marche le plus rapidement possible.

J'étais en train tout à l'heure, M. le Président, de parler du rôle de M. Litzler, et je pense qu'il a eu l'occasion dans sa présentation d'en parler un petit peu, mais je lui donner l'occasion d'en mentionner davantage et de parler un petit peu de ce qu'a réussi le cégep de Rosemont, qui fait vraiment des choses extraordinaires. Et j'aimerais qu'il nous parle un petit peu plus du cégep de Rosemont, quelles activités, quelles démarches, quels programmes et comment ça peut constituer un modèle. Parce que les établissements verts Brundtland, on a ici, à Québec ? on en avait une avant, mais là on a le cégep Limoilou qui est devenu récemment le premier bébé dans la région de la Capitale, il y en a d'autres ? mais le travail qu'eux ils font est autrement très axé sur la pratique. Peut-être qu'il peut nous expliquer un peu davantage ce qui se passe au cégep Rosemont et quel rôle ils ont joué là-dedans.

Le Président (M. Pinard): M. Litzler.

n(16 h 40)n

M. Litzler (Robert): Donc, merci, M. le ministre. 30 secondes pour expliquer le lien entre l'AQPERE et le collège de Rosemont. Je pense que c'est important que je vous dise ça en deux mots. J'étais enseignant au collège de Rosemont, pendant 30 ans, professeur de chimie, et je me suis préoccupé très rapidement, dès 1975, donc bien avant la production du rapport Brundtland, d'enseigner la chimie avec le regard sur l'environnement. Ça a totalement modifié ma conception de l'enseignant, et je me suis vraiment jeté corps et âme dans l'éducation relative à l'environnement à travers mon enseignement.

Lorsque j'ai pris la présidence de l'AQPERE, en 1995, très rapidement le collège de Rosemont, qui était déjà actif depuis cinq ans en développement durable, on pourrait dire effectivement, donc bien avant le temps, avant que la loi n° 118 ne paraisse, m'avait dit: M. Litzler, on vous ouvre la porte pour que vous puissiez plus facilement assister aux rencontres, qui vont être extrêmement importantes, dans la préparation du Forum Planèt'ERE I.

N'oublions pas que le mouvement Planèt'ERE est d'origine québécoise. Ce sont les Québécois qui ont mis au monde le mouvement Planèt'ERE, qui a connu son troisième forum en juillet dernier, qui a donné lieu également à la création d'une ONG internationale Planèt'ERE. C'est la seule ONG qui a une activité spécifique en éducation relative à l'environnement, qui a une mission d'éducation relative à l'environnement, au monde. Il n'y en a pas d'autre qui a une exclusivité au niveau de l'éducation en environnement, et nous sommes parfaitement heureux bien sûr que le siège social de cette ONG Planèt'ERE, c'est la délégation québécoise, 40 Québécois qui sont allés au Burkina Faso en juillet dernier, qui ont ramené chez eux, ici, au Québec, comme nous souhaitions le faire, le siège social de cette ONG Planèt'ERE. Et ce siège social a été confié au partenariat AQPERE-collège de Rosemont. Pourquoi? Parce que l'AQPERE s'est taillé, sur le plan international, une réputation en éducation relative à l'environnement non contestable et que le collège de Rosemont a, depuis 1990, mis sur pied un programme d'écodéveloppement ? c'est ainsi que nous l'appelons ? l'écodéveloppement ayant deux volets: un volet gestion environnementale des activités et un volet éducation, sensibilisation et formation des étudiants, et c'est dans ce programme-là que nous opérons et que l'AQPERE continue bien sûr, étant donné que le siège social de l'AQPERE est au collège de Rosemont, que nous continuons de servir la clientèle du collège de Rosemont.

Alors, quelques détails sur, comme M. le ministre me le demandait, quelques détails. Une originalité tout à fait exceptionnelle et qui est encore pour le moment, mais pas pour longtemps... et je suis très, très, très heureux de pouvoir peut-être l'annoncer dans une phrase tout à l'heure, eh bien, pendant 10 ans, de 1995 à 2005, nous avons créé notre propre fonds d'intervention en environnement ? financier, là ? fonds d'intervention en environnement, au collège de Rosemont.

Comment? Eh bien en rendant responsable chaque individu qui franchit le seuil du collège de Rosemont, responsable de l'environnement. C'est-à-dire que, s'il y produit, parce qu'il va manger à la cafétéria, s'il y produit des matières résiduelles qui méritent d'avoir une seconde vie, il sache exactement où les mettre et y contribue. Nous avions besoin d'un fonds d'intervention financier pour ça. Eh bien, c'est le milieu lui-même, c'est-à-dire les étudiants, les enseignants, le personnel professionnel, qui y contribue. C'est aussi, dans le contrat de gestion de la cafétéria, le gérant qui se voit imposer, faut de quoi il ne rentrait pas, se voit imposer la gestion écologique des matières résiduelles qu'il produit dans sa cuisine. Dieu sait si une cafétéria en produit, des déchets. On pourrait facilement l'estimer à 50 % de l'ensemble des matières résiduelles qui sont produites dans une institution de 3 000 étudiants.

Eh bien, le fonds d'intervention en environnement, en recevant les contributions de tous les responsables de production de matières résiduelles, ce fonds est de l'ordre de 40 000 $ annuellement, sans que le collège ne soit jamais obligé de demander des subventions à quelque gouvernement que ce soit. C'est le milieu lui-même, se responsabilisant depuis l'étudiant jusqu'à la direction, qui a décidé que, pour se donner véritablement une gestion écologique institutionnelle, avait cet effort financier à faire. Si je produis à la cafétéria un déchet ou une matière résiduelle qui peut être recyclée, je me dois d'accepter de payer un minimum pour que ces matières-là soient recyclées de façon écologique, soient traitées de façon écologique, sinon elles s'en font au compacteur à déchets et à l'enfouissement.

Mais nous avons aussi voulu introduire le concept de développement durable à l'intérieur de l'enseignement, parce que c'est en effet la porte d'entrée que toutes les écoles, de la maternelle jusqu'à l'université, devraient à notre avis emprunter. Lorsqu'un étudiant fait sur une base volontaire ? il n'y a pas de coercition à l'intérieur de ça ? si un étudiant, sur une base volontaire, peut effectuer un travail de recherche sur une problématique environnementale de notre temps, croyez-moi, cet étudiant-là devient un individu convaincu et un agent multiplicateur dans son milieu.

Nous avons donc misé là-dessus en créant un concours, Pédagogie-Environnement, qui, l'année dernière, à sa cinquième édition, est devenu un concours intercollégial. 13 cégeps y ont participé, et nous avons l'espoir que, pour la prochaine exposition des travaux des étudiants, on va doubler ce nombre. Et n'oublions pas que nous avons maintenant... et c'est extrêmement important d'avoir cette décennie 2005-2014, qui est une décennie que l'ONU a décrétée décennie de l'éducation au développement durable. Nous avons 10 ans devant nous ? il y en a une qui est déjà écoulée pratiquement ? nous avons donc du temps devant nous pour faire en sorte que les écoles du Québec, à l'issue de la décennie, soient, aux niveaux primaire et secondaire, des écoles vertes Brundtland, qu'au niveau collégial nous puissions avoir l'ensemble des cégeps qui embarquent à l'intérieur du concours Pédagogie-Environnement, avec ses conséquences, et qu'au niveau universitaire les gens se sentent, à un moment donné, traqués eux aussi, de leur côté, parce que ce n'est pas vrai que nos cégepiens vont sortir de nos cégeps et trouver des universités dans lesquelles ils n'ont pas une possibilité de continuer leur action. C'est ça un peu qui se développe au collègue de Rosemont depuis une quinzaine d'années et c'est ce à quoi nous travaillons pour que ça puisse gagner l'ensemble du Québec.

M. Mulcair: Merci beaucoup.

Le Président (M. Pinard): Alors, merci beaucoup, M. le président. Oui, effectivement. Alors, le critique officiel de l'opposition, M. le député du Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Merci, M. le Président. Félicitations pour vos travaux, c'est vraiment fascinant. Cependant, quand vous avez appris que votre groupe ne serait plus financé par le gouvernement, qu'est-ce que le ministère vous a dit?

M. Litzler (Robert): On n'a jamais eu cette affirmation-là. Nous avons toujours cru que le travail... et je dois vous dire que, lorsqu'il y a eu un changement de gouvernement, nous étions à ce moment-là dans la troisième année du fameux fonds BFS du programme de financement statutaire, qui avait été voté donc pour trois ans, et le ministre de l'Environnement et du Développement durable a respecté l'engagement de la troisième année, c'est-à-dire nous a fourni le financement statutaire pour la troisième année. C'est sûr que ce financement que nous avons eu se terminait au 31 mars dernier, donc 31 mars 2005. C'est pour ça que je faisais allusion tantôt qu'on est dans un vide financier à l'heure actuelle et qu'on souhaite évidemment que, d'ici le 31 mars 2006, il y ait la date finale du Fonds vert, que dans ce laps de temps la loi puisse être adoptée et que l'on puisse avoir accès à du financement, sinon on va être, nous aussi, dans une situation extrêmement précaire.

n(16 h 50)n

Il faut dire que c'est grâce au support extraordinaire que le collège de Rosemont nous offre, en termes de loyer, de chauffage, etc. ? enfin bref je ne fais pas de détails là-dessus ? que nous arrivons finalement à continuer à faire en sorte que notre curriculum vitae d'association continue de progresser, O.K.? Évidemment, nous ne comptons pas que sur le financement du gouvernement du Québec, nous organisons aussi des colloques, nous organisons des événements qui tentent aussi de nous rapporter, en tous les cas de ne pas faire de déficit, mais de nous permettre d'avoir quelques ressources financières, comme le colloque de Montréal, qui était à sa sixième édition et qui s'en va vers la septième édition l'an prochain. Nous tentons évidemment, avec tous les intervenants et aussi les commanditaires que nous pouvons avoir, de dégager une certaine marge de manoeuvre. Mais, si vous voulez maintenir effectivement un secrétariat, avec l'ensemble des responsabilités que nous avons, et dont la dernière qui est le secrétariat général de l'ONG Planèt'ERE, qui est en construction, donc il n'y a pas de ressources encore comme telles, eh bien c'est sûr que notre situation est fragile si nous n'obtenons pas de ressources.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Tremblay: Mais enfin, moi, je trouve ça extrêmement plate, la situation actuelle, parce que là vous venez nous dire: acceptez le projet de loi parce qu'on a besoin d'argent. Mais c'est parce que le gouvernement n'aurait pas besoin du projet de loi pour vous financer, il le faisait avant. Donc là on a un petit peu le couteau sur la gorge, nous autres, comme législateurs, parce qu'il faut passer le projet de loi avant les fêtes. En tout cas, ça, je veux au moins que vous soyez conscient qu'on n'a pas besoin du projet de loi pour que vous puissiez recevoir de l'aide gouvernementale. Si le ministre avait voulu, il aurait bien pu vous financer.

Changement de sujet. Quand vous dites que la stratégie et le développement des indicateurs devraient être confiés à un comité de travail, ça ne devrait pas être deux stratégies séparées, ça devrait être une stratégie, et que ça pourrait être un comité de travail... deux comités de travail restreints, vous amenez l'idée en plus que ça pourrait être des membres du Cercle des Phénix. J'aimerais ça que vous élaboriez un peu sur cette idée intéressante.

Le Président (M. Pinard): M. le président.

M. Litzler (Robert): En fait... Pardon?

Le Président (M. Pinard): M. le président.

M. Litzler (Robert): Oui. En fait, ce que l'on souhaiterait... On a vu que, lors de la consultation publique qui s'est faite au mois de février dernier, ou en mars dernier ? ça a quand même pris trois mois ? il y a eu 600 mémoires de déposés, etc. Le gouvernement a fait la tournée du Québec, partout, pour entendre les gens, à Montréal, nous avons présenté notre mémoire... Et on se dit: Bien, l'opération, l'annonce de l'avant-projet de loi a été faite au mois de novembre, et on se retrouve aujourd'hui au mois de décembre, donc il y a un an qui s'est écoulé, il y a du travail qui s'est fait évidemment au cours de cela, mais on pense qu'on est maintenant mûrs, à notre avis, on devrait être mûrs... une fois la loi adoptée, on devrait être mûrs de mettre en fonction des comités plus légers, des structures plus légères qu'une consultation publique «at large» et qu'on pourrait trouver facilement des gens qui seraient prêts à travailler sur deux comités, le nombre de membres, peu importe, là, on les a fixés à 10, mais ça peut être plus, O.K., de façon à ce que le travail effectif au niveau de la stratégie et aussi des indicateurs...

Parce que, nous, on se dit que publier une stratégie ou annoncer une stratégie sans avoir en même temps les indicateurs de performance, non, pour nous, ça va ensemble. Et donc on souhaiterait ? l'annonce, c'est le souhait qu'on exprime ? qu'il y ait assez rapidement, dès le moment où la loi est adoptée, qu'il y ait deux comités qui soient mis en place. En ce qui concerne, étant donné que la stratégie comprendra notamment un volet éducation à l'environnement, qui est absolument fondamental, nous sommes prêts. Nous sommes prêts à apporter notre collaboration dans ce domaine de compétence qui est le nôtre, O.K.? Et on pense que... Et c'est pour ça que je faisais allusion à un moment donné aux membres du Cercle des Phénix, parce que vous avez dans ce cercle-là... Les gens ont été honorés; ils ont été honorés pourquoi? Ils ont été honorés non pas sur une action, ils ont été honorés sur toute une série d'actions accomplies durant leur vie, durant 10, 15, 20 années. J'ai obtenu le... Je suis membre du Cercle des Phénix pour l'ensemble du travail que j'ai effectué en éducation relative à l'environnement, et j'annonce aujourd'hui que, si effectivement un de ces comités-là a besoin d'un membre qui s'occupe d'éducation relative à l'environnement, j'offre ma collaboration. Et je me dis qu'on pourrait, dans les 30 personnes qui ont tous une expérience et une expertise absolument formidables, sinon ils n'auraient pas été couronnés membres du Cercle des Phénix, eh bien, elles peuvent... elles ne le feront peut-être pas toutes, ça dépend de la santé, ça dépend évidemment de beaucoup de facteurs, mais je suis persuadé... et j'en connais déjà qui oeuvreraient facilement et volontairement à un comité qui mettrait en place la stratégie, aideraient à mettre en place la stratégie et contribueraient aussi à déterminer les paramètres de performance.

Moi, je sais que, au niveau de l'éducation relative à l'environnement, c'est clair que ça ne me prendrait pas six mois pour aligner l'ensemble des paramètres de performance qui sont nécessaires pour avancer à l'intérieur du développement durable, en ce qui concerne l'éducation en environnement.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Tremblay: Moi, je trouve que c'est une excellente idée, d'autant plus que ce n'est pas des gens partisans, c'est des gens qui ont de l'expertise, qui ont été reconnus. Moi, en tout cas, je trouve que c'est une bonne idée. Je regarde l'autre côté de la table en espérant que ça va les faire réfléchir, mais je trouve que l'idée est excellente. Je n'ai pas d'autre question.

Le Président (M. Pinard): Ils sont partisans, M. le député, partisans de l'environnement.

M. Tremblay: Oui, oui, voilà, partisans de l'environnement.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Juste une petite question. Je regarde, dans vos demandes, le principe d'internalisation des coûts, j'avais déjà apporté ça, mais je trouvais que c'était bon, que quelqu'un qui fait un produit soit responsable du contenant jusqu'à la fin de sa vie. Avez-vous... Y a-tu d'autres, à quelque part, ailleurs dans le monde, que ça peut se faire, ça? Ça se fait-u à quelque part ou si c'est complètement...

M. Litzler (Robert): Il y a des pays qui sont pas mal plus avancés que le Québec et le Canada, quand on songe à certains pays d'Europe notamment. Je n'ai pas fouillé sur cet aspect-là, mais j'imagine que, si on retient un principe comme celui-là, eh bien on pourrait facilement étayer puis trouver les arguments qu'il faut pour que ça se fasse chez nous également.

M. Grondin: C'est bien. C'était très intéressant.

Le Président (M. Pinard): Autres questions, messieurs? Alors, M. le professeur retraité, mais président, M. le coordonnateur, je vous remercie infiniment. Ça a été excessivement enrichissant pour les membres de la commission, et nul doute que nous allons tenir compte de vos propos. Merci.

(Changement d'organisme)

n(16 h 56 ?  17 h 7)n

Le Président (M. Pinard): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite la plus cordiale des bienvenues à l'Union des producteurs agricoles du Québec, qui est ici pour enrichir les travaux de la commission parlementaire sur le développement durable et la loi n° 118. Alors, j'inviterais son président à bien vouloir s'identifier pour les fins d'enregistrement, tout en vous félicitant, M. le président, pour votre réélection...

M. Pellerin (Laurent): ...pas cher!

Le Président (M. Pinard): ... ? ha, ha, ha! ? ainsi que la personne qui vous accompagne, M. le président.

Union des producteurs agricoles (UPA)

M. Pellerin (Laurent): Alors, merci, M. le Président. Vous autres, vous savez c'est quoi, les élections, hein? Vous savez combien ça peut être «tough» des fois.

Mon nom est Laurent Pellerin. Je suis président général de l'Union des producteurs agricoles, et je suis accompagné de Jean Larose, qui est le directeur général de l'Union des producteurs agricoles.

Le Président (M. Pinard): Bienvenue, M. Larose.

M. Pellerin (Laurent): Alors, je ferai quelques commentaires. On a distribué des documents. Malheureusement, on ne les avait pas eus d'avance. On était occupé à d'autre chose, la semaine passée, et mettons que ça a tombé dans les choses qui sont un petit peu en regard. Alors, on s'excuse de vous le remettre à la dernière minute comme ça, mais on va vous faire une présentation assez rapide. On ne lira pas le document, on va vous faire une présentation sommaire de qu'il y a là-dedans. On va réserver le temps pour échanger avec vous autres sur des questions que vous avez et les réponses qu'on pourra apporter ou des commentaires d'éclaircissement.

Je ne passerai pas non plus beaucoup de temps à vous introduire qui est l'UPA, vous connaissez pas mal l'UPA. Juste pour vous rappeler qu'on est 44 000 producteurs, quand même, au Québec; 41 fédérations affiliées à l'UPA. On regroupe à peu près tout ce qui existe en agriculture. Contrairement à la rumeur populaire, n'est pas obligée d'être affiliée à l'UPA quelle que fédération que ce soit. Donc, ils s'affilient tous sur une base volontaire à l'UPA, et nous en sommes très fiers. Et nous avons un taux de membership, cette année, signé par les producteurs... ça aussi sur une base volontaire, parce qu'on n'est pas obligé d'être membre de l'UPA, on est obligé de cotiser, comme dans les autres centrales, on n'est pas obligé d'être membre. Alors, cette année, nous avons l'extrême fierté d'avoir 94 % de nos membres, des producteurs agricoles du Québec qui ont signé leur carte de membre, hein. On n'haït pas ça, ces chiffres-là.

n(17 h 10)n

C'est comme la deuxième ronde de consultation qui se fait sur le sujet. D'abord vous dire qu'on est heureux du vocabulaire politique de développement durable. Quand il sera complètement appliqué à l'agriculture, nous en serons encore plus heureux. Dans la première ronde, le ministre Mulcair s'était, je ne dirais pas «promené», parce que ce n'était pas une promenade, mais il a fait un grand tour du Québec. Il a eu l'occasion de rencontrer plusieurs de nos groupes affiliés en région et plusieurs de nos fédérations spécialisées aussi, avec lesquelles il a échangé, et je pense que nos gens ont soumis leurs préoccupations par rapport à cette grande politique là.

Donc, aujourd'hui, ce qu'on va vous présenter, c'est l'essentiel des propos qu'on a tenus en région, adaptés de l'évolution depuis ce temps-là, parce qu'il y a quand même plusieurs mois qui se sont écoulés depuis la dernière fois. Entre autres, on a joint au document une flambant neuve résolution. Alors, il y a l'handicap de vous avoir présenté le document à la dernière minute, mais vous avez quand même une première, c'est la résolution qui a été adoptée: Politique québécoise de développement durable en agriculture. Elle a été adoptée par les 400 délégués de l'UPA la semaine passée à Québec. On vous l'a mise en annexe. Il y a des demandes au gouvernement du Québec et à l'UPA, des actions... qui agrémente notre présentation.

Vous avez... Jean Larose va vous faire la présentation de l'essentiel du document, mais vous avez aussi, j'imagine, pour la plupart d'entre vous, suivi l'évolution des producteurs agricoles au cours des 10, 15, 20 dernières années. Vous êtes, pour plusieurs d'entre vous, des députés de circonscriptions rurales, donc vous avez l'occasion de rencontrer notre monde un peu partout sur le terrain. Nous avons aussi présenté ? non encore officiellement mais en atelier thématique; donc, les 400 délégués y ont touché, et c'était public ? le plan de développement durable agricole pour les cinq prochaines années, au dernier congrès, la semaine passée. Nous allons entamer ces démarches-là à partir de janvier prochain.

C'est notre troisième plan quinquennal de développement en agriculture durable au Québec. Il y a eu, je pense que plusieurs doivent s'en rappeler, la grande opération Portrait des fermes du Québec, 18 000 fermes qui ont été visitées sur une base très extensive, un questionnaire de 350 questions, des entrevues personnalisées à la ferme, ce qui nous a permis de créer une mesure étalon ? on a fait ça en 1998 ? première mesure étalon, qui n'existait pas au Québec, ni au ministère de l'Environnement, ni au ministère de l'Agriculture, ni dans nos données, à l'UPA, de l'état de ce qu'il y avait comme cheptel et comme outillage, équipement, grandeur de bâtiments, achats d'intrants, sur toutes les fermes québécoises, concernant les préoccupations environnementales. On est très fiers de ce portrait-là. On l'a appelé «étalon» à cette époque et, pour la première fois, on s'en est servi comme mesure étalon en 2003, cinq ans après; on a fait aussi une re-tournée, pas des 18 000 fermes, mais d'un échantillon assez large ? te rappelles-tu combien il y avait de fermes dans l'échantillon avec...

Une voix: ...

M. Pellerin (Laurent): 7 000?

Une voix: 4 000 ou 5 000.

M. Pellerin (Laurent): ...4 000 ou 5 000 ? avec la collaboration du ministère de l'Agriculture, qui procède à l'enregistrement des fermes à chaque année, mais là il y avait un questionnaire supplémentaire pour vérifier le chemin parcouru. Beaucoup de données intéressantes. Il y en a quelques-unes qui sont là-dedans. Quelques déceptions, dont une sur le fait que les engagements gouvernementaux n'ont pas toujours suivi ? c'est la place pour le dire ? et ont très peu suivi en fait au fil des ans, et ce n'est pas récent, dû au dernier gouvernement, ça a été une tendance lourde de tous les gouvernements depuis 1988, toutes les promesses, tous les engagements qui ont été faits, 400 millions par là, 239 par là, 265 une autre fois... ont été livrés, pour moins que la moitié de ce qui a été annoncé au fil des années.

Alors, je demanderais à Jean de vous faire la présentation du bloc, des blocs qui sont là.

Le Président (M. Pinard): Alors, M. Larose.

M. Larose (Jean): Oui. Alors, M. le Président, M. le ministre et membres de l'Assemblée nationale, en fait, s'il y a un message à retenir aujourd'hui, c'est qu'on veut vous traduire... Comme M. Pellerin vous l'a dit, depuis 10 ans, les agriculteurs et agricultrices du Québec sont impliqués dans une stratégie agroenvironnementale. Ce qu'ils demandent aujourd'hui, c'est que les efforts que les agriculteurs et agricultrices vont faire dans le futur, ils aimeraient pouvoir les inscrire dans une politique de développement durable spécifique au secteur agricole.

Peut-être vous rappeler, pour qu'on en arrive là, comme M. Pellerin vous l'a dit, depuis l'hiver 2005, les producteurs agricoles, à l'intérieur de l'organisation de l'UPA, ont fait le bilan de 10 ans de stratégie agroenvironnementale et par la suite ils ont regardé l'avenir, qu'est-ce qu'ils voulaient déterminer comme priorités pour les cinq années qui suivront. Et, dans cette perspective-là, comme M. Pellerin vient de vous le dire, d'abord on a procédé à une espèce d'évaluation des gains qu'on a obtenus sur les questions environnementales. Je vais passer assez rapidement, mais je pense que c'est important qu'on en illustre quelques-uns. Je pense que c'est des chiffres que M. Mulcair connaît bien, peut-être que d'autres personnes les connaissent moins bien. À la page 8, on vous dit qu'on a observé une progression dans les modes d'entreposage sécuritaire des fumiers, qui sont passés de 66 % à 86 % de l'ensemble du cheptel; il y a eu une diminution assez importante d'utilisation des engrais minéraux, une diminution de 31 % d'engrais minéraux, de phosphore, ce qui a eu pour effet de diminuer de 21 % la quantité de phosphore par hectare cultivé. Il y a une diminution aussi de l'utilisation des pesticides. Le bilan des ventes dans le secteur agricole a enregistré une baisse de 10,2 % entre 1992 et 2001. Cependant, la quantité de matières actives vendues, exprimée par hectare en culture annuelle, est passé de 3,65 kilos à l'hectare en 1992 à 2,46 kilos à l'hectare en 2001, ce qui représente une baisse globale de 33 %.

Les pratiques de conservation des sols. Si on fait référence à l'objectif qu'on a en particulier de mieux contrôler la pollution diffuse ? ça ne se contrôle pas exclusivement par ça, mais c'est un bon indicateur ? les pratiques de conservation des sols permettent de réduire le ruissellement, et elles sont passées de 36 % à 44 % au cours de la période qui a été étudiée, ce qui représente une hausse de 110 000 hectares donc qui sont en pratiques de conservation des sols. Par ailleurs, aussi, depuis 1998, les superficies protégées par des haies brise-vent ont doublé.

Ceci étant dit, comme M. Pellerin vous l'a signifié, dans la réflexion qu'on faite les agriculteurs, aussi ils nous ont exprimé certaines frustrations, je dirais, du constat: Malgré qu'il y ait des avancées sur la question agroenvironnementale, ils ont une préoccupation d'abord sur le fait qu'ils ressentent... on parle d'absence ou du peu de reconnaissance des efforts accomplis et des pratiques agroenvironnementales par le ministère de l'Environnement, qu'on souhaiterait plus partenaire dans les efforts qu'on fait. Et les groupes environnementaux... évidemment, comme M. Pellerin vous l'a dit, le soutien financier gouvernemental, ce qui n'est pas particulier au gouvernement actuel, je dirais, c'est une frustration qui s'est accumulée au fil des ans, mais rarement ou jamais les engagements gouvernementaux ont été respectés ou rencontrés.

Une autre préoccupation qu'on a, c'est qu'on a à faire face à une réglementation qui est en constante mutation, ce qui fait que, pour les agriculteurs et agricultrices, étant donné que ces réglementations-là impliquent des investissements à moyen et à long terme, c'est difficile pour eux aussi de s'ajuster à ce contexte-là. Le REA, le RCES, Code de gestion des pesticides, et on a introduit, l'année passée, un nouveau concept qui est celui des bassins dits dégradés, donc un ensemble de modifications régulières, au fil du temps, qui font donc que c'est assez difficile de suivre les demandes que nous recevons de la société, et évidemment une plus grande lourdeur administrative et une rigidité de certains programmes.

Malgré ça et malgré ce désappointement, dans les consultations qu'on a faites de l'ensemble de nos producteurs et productrices, ils ont indiqué sans équivoque qu'ils devaient continuer à s'impliquer, d'être dans une perspective proactive et de continuer à s'investir dans une stratégie agroenvironnementale. Et je vous dirais que nous l'avons faite sur une base assez élargie, puisque cette consultation-là s'est faite au près de 1 200 producteurs et productrices. Et dans cette perspective-là on a dégagé des priorités qui sont relativement proches, je pense, de plusieurs intervenants qui suivent bien le secteur agricole, incluant le ministère de l'Environnement. Il y a six priorités que nous avons établies en ce qui concerne donc notre stratégie pour les cinq prochaines années: la protection de l'eau, qui est évidemment la préoccupation première; le contrôle des odeurs aux bâtiments et à l'épandage; la rationalisation de l'usage des pesticides; les gaz à effet de serre; la valorisation des boisés de ferme; et la disposition des matières résiduelles.

Ceci nous amène à vous parler d'une politique de développement durable. Pour nous, ce que ça signifie, parce qu'on pense que seuls les agriculteurs vont pouvoir atteindre certains objectifs, mais ils pourront les atteindre plus rapidement et d'une façon sûrement beaucoup plus efficace s'ils sont capables de le faire en concertation puis en partenariat avec les intervenants du milieu, avec les ministères concernés, avec les gens du monde municipal, avec les groupes environnementaux. C'est dans cette perspective-là qu'on parle, nous, d'avoir une politique de développement durable en agriculture.

n(17 h 20)n

On recherche un équilibre, là, entre, je dirais, les préoccupations sociétales et aussi les préoccupations qu'on a aussi du milieu dans lequel évolue le secteur agricole. Et on dit dans le fond que ça implique que les entreprises agricoles aussi doivent s'adapter pour se développer puis survivre dans un environnement qui est en constante mouvance. Vous n'êtes pas sans savoir, puisque c'est un débat qui se fait beaucoup dans les médias actuellement, que nous allons à Hong Kong le... nous sommes dans un contexte, en agriculture, de mondialisation aussi, on demande aux entreprises agricoles de s'adapter aux nouvelles règles internationales, et en même temps bien on est confrontés, à ce moment-là, aussi, lorsque nous avons à nous adapter, là, à de nouvelles règles environnementales, que ces règles-là s'inscrivent aussi dans ce défi que les producteurs et productrices ont à relever.

Alors, on dit: Une stratégie québécoise de développement durable de l'agriculture devrait contribuer à faire progresser l'adoption des bonnes pratiques sur le plan environnemental en instaurant notamment un ensemble de conditions propices aussi à la viabilité économique des entreprises. Évidemment, comme on vous l'a dit, les retombées d'une telle stratégie seront à la mesure des moyens qui vont y être consacrés, et je dirais aussi dans la mesure des efforts conjoints que feront les partenaires impliqués pour y arriver.

En bas de la page 15... de la page 10, on vous dit: Nous croyons que la mise en place d'une stratégie québécoise de développement durable pour l'agriculture implique donc une concertation entre les différents partenaires; une volonté et une vision communes; une cohésion dans les priorités d'action; des objectifs clairs et mesurables ? alors, il faut qu'on soit capables de se dire entre nous comment évoluent les gains environnementaux qu'on fait, qu'on soit capables de les traduire aux gens qui prennent des décisions au niveau politique, mais qu'on soit aussi capables de les traduire au niveau de la population québécoise dans son ensemble aussi ? une responsabilisation de tous les acteurs concernés ? les agriculteurs veulent faire leur part et souhaitent aussi que les autres intervenants qui sont impliqués s'impliquent et assument leurs responsabilités ? évidemment, comme je l'ai dit tantôt, une prise en compte des facteurs externes au développement des entreprises ? économique et social.

Alors, pour nous, il y a une nécessité, je dirais, de convenir de certains préalables à ça. Pour une politique de développement durable, nous autres, on souhaite que nous travaillions d'abord à partir du constat qu'on a fait, dans un horizon où il y aura un cadre réglementaire stable, basé sur une approche ferme par ferme, orienté vers des gains environnementaux qui assurent la viabilité des entreprises en respect des engagements financiers ? on vient de le dire ? une reconnaissance des progrès accomplis et une reconnaissance aussi des coûts associés aux attentes sociétales.

On vous dit aussi que, pour nous, la meilleure façon et le plus bel exemple de traduire ce genre de volonté de s'investir concrètement sur le terrain, c'est le projet de partenariat que nous avons actuellement avec la Fondation de la faune. C'est un programme de mise en valeur de la biodiversité des cours d'eau en milieu agricole, et ça se fait en partenariat actuellement avec... c'est des producteurs qui sont au coeur de ces initiatives-là, mais ça se fait en partenariat avec les clubs-conseils en agroenvironnement, ça se fait aussi souvent avec les gens du monde municipal et avec des groupes environnementaux. C'est un projet, là, d'une durée de cinq ans. Et, pour vous illustrer l'engouement que ce type de projet là a suscité, il y a eu 35 demandes de projets qui ont été soumises à la Fondation de la faune. C'est un projet de partenaires. Vous savez comment fonctionne la faune? Ils vont chercher des partenaires du secteur privé, du secteur institutionnel aussi en même temps. Pour l'instant, on a un budget de 8 millions sur la période de cinq ans, ce qui a fait en sorte qu'on a pu seulement démarrer 10 projets.

Mais ce sont donc des projets qui se déroulent par petits bassins; ils ont un objectif d'améliorer la qualité des cours d'eau, mais de réintroduire aussi des nouvelles espèces fauniques, donc ce qui fait en sorte que nous atteignons deux objectifs. L'autre objectif, qui est intéressant, c'est la prise en main par les agriculteurs, les agricultrices des enjeux environnementaux. Ils sont au coeur de ces actions-là, et je vous dirai aussi en même temps que ce projet est très bien encadré par un groupe environnemental et des gens qui sont très proches aussi de la façon de bien faire ce type de projet là.

Donc, il y a quelque chose de très porteur dans ce genre d'initiative là, puisque vous voyez déjà l'engouement que ça suscite. Si on avait vraiment une vision globale et un projet commun, on pourrait étendre ce genre d'initiative là à beaucoup d'autres bassins et beaucoup d'autres implications de producteurs et productrices, et on demande que nos partenaires, et en particulier le ministère de l'Environnement, adhèrent à ce genre d'initiative. Alors, je dirais, en gros, là, c'est le message qu'on voulait vous transmettre.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. Larose. Alors, sans plus tarder, M. le ministre.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. M. Pellerin, félicitations pour votre réélection; M. Larose, toujours le même plaisir. Je vais commencer avec votre frustration, parce que je la partage des fois. Il y a deux semaines demain, j'étais à l'émission des nouvelles de TQS, et l'interview portait sur d'autres sujets, mais on m'a joué, en plein milieu de ça, quelques images de porcheries et de gens qui se plaignaient, dans le coin du Richelieu. Et je vous demande de le sortir, je vous le trouverais si vous ne l'avez pas... parce que ma première réponse, c'était: Au Québec, on a un droit de produire. J'aimerais bien que vous reconnaissiez que je suis capable de dire ça aussi à l'occasion ? parce que j'ai même donné un vibrant discours quand on a adopté cette loi-là ? et que ces fermes-là ne représentaient aucun danger pour l'environnement parce qu'on a des règles en place qui permettent à ces fermes-là de se réaliser. Et ça, c'est une réussite qu'on a ensemble.

La semaine prochaine, les médias vont suivre de très près les changements qui surviennent le 15 décembre, pour le REA. On a suivi ensemble, il me semble, assez bien, merci, la voie, la carte routière que nous a donnée le BAPE, fort d'une énorme consultation spécifique sur la production porcine, puis on a besoin l'un de l'autre. J'ai eu... c'est une anecdote, mais, cette semaine, j'étais à Montréal dans le cadre de la conférence, j'étais avec M. Charest et M. Doer, du Manitoba, il y a une journaliste de la Gazette qui m'interpelle à la fin et elle me dit: Bon, la levée du moratoire... ceci et cela... Puis elle me donne trois ou quatre choses qu'elle avait retenues, et c'était exactement le contraire de ce qu'on était en train de proposer. Alors, très gentiment je l'ai interpellée, je lui ai demandé comment elle était arrivée à cette conclusion-là.

Et il y a énormément d'information compliquée, technique, qu'on va être obligés, nous... On va travailler très fort de notre côté, puis peut-être on peut se coordonner là-dessus, parce que, pour convaincre les gens de voir que ce qu'on propose justement, c'est une démarche de développement durable. C'est un modèle, un paradigme de développement durable. On peut voir l'importance économique de ce milieu agricole, au Québec, respecter l'environnement et travailler au niveau social pour aplanir les inquiétudes et les éventuelles difficultés; on est capables de le faire ensemble.

Puis je fais toujours avec vous la même concession. Et, là-dessus, vous et moi, on est d'accord. Mais vous vous trompez quand vous dites que je ne parle pas souvent des bons coups de l'UPA et de ses membres. Parce qu'à travers le Québec je le répète, puis je donne des centaines de conférences par l'année, puis je le dis toujours: mon chiffre est 95 % ? puis ça peut être 92 % comme 97 % ? mais je fais toujours la concession que 95 % de vos membres sont très respectueux des lois et règlements. Mais je veux juste que, vous et moi, on s'entende. Les rares fois que je suis obligé d'intervenir, d'une manière rare mais musclée, parce qu'il y a un récalcitrant qui ne veut rien savoir, est-ce que vous allez me «backer» à votre tour?

Le Président (M. Pinard): M. le président.

M. Pellerin (Laurent): On émet, je pense, un engagement assez ferme, à la page 11 de ce document-là. Il y a une chose dans laquelle on croit fermement ? pour utiliser ce mot-là ? c'est une approche ferme par ferme. Et notre objectif, je pense, n'a pas toujours été compris sur ce sujet-là. Nous, on dit: À partir du moment que le producteur est en ordre chez eux, on lui laisse la paix. S'il y en a un qui n'est pas capable d'être en ordre chez eux parce qu'il n'a pas les superficies suffisantes, parce qu'il a des pratiques incorrectes, bien, si on ne fait pas une approche ferme par ferme, on noie ça dans une... des anciennes municipalités en surplus ou par un bassin dégradé, on camoufle du monde qui ne mérite pas d'être camouflé, qui mérite d'être vu. Et nous, pour nous, l'approche ferme par ferme, c'est la responsabilité de chacun des producteurs. Tu as un problème chez vous, fie-toi pas sur le bassin pour le régler, ton problème; tu as un problème chez vous, règle-le. Et ça, je pense que c'est incontournable, et là-dessus on est prêts à supporter n'importe lequel des ministres de l'Environnement qui se projetterait en avant sur cette approche-là. Rendons chacun de nos producteurs responsable de ce qu'il fait chez lui.

M. Mulcair: O.K. Mais, moi... On se comprend, vous et moi, là-dessus depuis longtemps, que notre approche par bassin versant est en train pour nous de produire de très intéressants résultats et... On peut ne pas s'entendre sur un certain nombre d'approches. Mais, dans le cas que je vous donne, je vous parle de quelqu'un qui clairement serait en infraction répétée de son c.a., ne le respecterait pas, donc c'est le gars qui n'est pas correct. S'il faut une intervention après le 15, on va s'entendre que c'est l'exception, puis je vais le dire que c'est l'exception, mais on s'entend qu'à un moment donné l'application rigoureuse de la loi est à l'avantage des 95 % qui respectent. On est d'accord?

M. Pellerin (Laurent): Tout à fait. On a toujours été de cette école-là.

M. Mulcair: O.K. Bien je suis content de l'entendre, puis... Que ce soit avec vous, que ce soit avec le Centre patronal de environnement, cette approche que nous avons d'une application rigoureuse de la loi d'une manière égale à tout le monde profite à la vaste majorité, qui sont, eux, respectueux.

n(17 h 30)n

Le député de Lac-Saint-Jean et moi, on a parlé tantôt, aujourd'hui, avec un groupe qui regarde le cycle de vie des projets et des produits. C'est une approche intéressante de développement durable qui permet d'avoir une information la plus objective possible. Le sujet dont, vous et moi, on a parlé un petit peu à travers La Terre de chez nous, c'étaient les normes qui existent, ou qui n'existent pas, ou qui peuvent être radicalement différentes dans d'autres pays. Je vous ai déjà offert toute notre collaboration, si vous aviez des cas concrets. Vous m'avez répondu, par La Terre de chez nous, que c'était à moi d'aller les chercher. Mais c'est vous qui les évoquez. Est-ce qu'il y a quelque chose qu'on peut faire pour dénouer ça, et que je puisse vous...

M. Pellerin (Laurent): On aurait peut-être pu se rencontrer à TQS, mais je ne vais pas souvent à TQS.

M. Mulcair: Ha, ha, ha!

M. Pellerin (Laurent): Écoutez, mon pot de cornichons produit en Inde est arrivé. Il est intitulé, pour la première fois, «Produit en Inde», parce qu'à venir jusqu'à aujourd'hui on savait bien que les concombres qui étaient dans le pot étaient produits en Inde, mais ce n'était pas marqué sur le pot. Maintenant, c'est marqué. Ça s'appelle Nos Compliments de l'Inde, Nos Compliments... vous savez d'où, de la chaîne en question.

Et on est en train de faire les études de qualité. Pas question de résidus, de pesticides, ces choses-là, ça, on est sûr que c'est plus facile à trouver, mais sur la qualité de ces produits-là, en partant de la fertilisation à tout ce qu'on pourra trouver, microbactéries, etc.

On vient d'avoir une étude intéressante aussi du gouvernement du Québec sur des produits québécois, dans l'approvisionnement du milieu institutionnel gouvernemental. Il y a deux légumes en canne, en conserve, qui ont passé...

M. Mulcair: On avait compris. Je parle très bien anglais.

M. Pellerin (Laurent): ...qui ont passé le test gouvernemental, ce sont le maïs sucré en grains et les petits pois. Et les seuls qui ont passé le test de la qualité, selon l'appareil gouvernemental, ce sont ceux qui sont produits au Québec, dans la grande famille des Aliments Carrière. Nous en sommes extrêmement fiers. Les autres, de provenance de toutes sources et de tous pays, n'ont jamais passé les tests de qualité que vous avez exigés de ces produits-là.

Alors, je pense c'est le genre de choses qu'on est capables de faire la démonstration. On a des exigences supplémentaires ici. Nous, on n'a jamais demandé d'abaisser les normes environnementales québécoises au plus bas commun dénominateur. On est prêts, on est d'accord à avoir des règles qui sont... qui assument un certain leadership, qui sont en avance sur les autres. Pas trop, juste assez, ce qu'on est capable de supporter au niveau de la compétition.

Et on est capable de compétitionner avec ça. Mais il faut avoir la reconnaissance. Et c'est la même logique que l'approche ferme par ferme. Si vous noyez une gang de producteurs dans une approche de bassin versant, celui qui n'est pas correct, il n'aura jamais l'occasion de le savoir, et celui qui est correct n'aura jamais le bénéfice d'avoir fait les étapes qu'il faudrait qu'il fasse.

Par exemple, notre producteur, dans une approche ferme par ferme, qui a fait l'exercice phosphore à partir de l'alimentation de ses animaux jusqu'à la fin bénéficie d'une réduction de production de phosphore de 31 % moins élevée. Il devrait avoir le droit d'avoir une marge de manoeuvre un petit plus grande chez eux que de suivre la norme moyenne. L'autre qui n'a pas fait l'exercice puis qui est en manque de sols à épandre, bien il n'a pas bien, bien des choix: oubedon il le réduira, son phosphore, ou bien il le traitera, ou bien donc il réduira son cheptel en ordre croissant de pression. Mais ça, nous autres, on est prêts à supporter ça. Ça fait 10 ans qu'on dit ça, nous autres.

Et on a rarement eu un ministre ou un gouvernement qui a souscrit à une approche aussi rigoureuse que ça. Il y a une responsabilisation producteur par producteur. Repensez à ça comme il faut: l'approche bassin versant camoufle des pratiques ou des attitudes ou des états qui permettent, d'un côté, à des gens de se camoufler, mais à d'autres gens de ne pas bénéficier du chemin qu'eux autres ont parcouru.

M. Mulcair: Mais je pense qu'on a répondu à une partie de ça ensemble en travaillant le nouveau REA, quand on a dit que, même dans les bassins en surplus, si on respectait déjà les normes 2010, qu'on pouvait aller de l'avant. Donc, il y a une sorte de reconnaissance à cet égard-là.

Mais l'approche bassin par bassin était imposée ? par peu importe le gouvernement ? parce qu'on avait des graves problèmes à renverser dans certains régions. Mais vous savez quoi, la bonne nouvelle, et vous le savez comme moi que, même dans des coins comme la rivière Chaudière, qui avait connu des problèmes tout à fait exceptionnels, c'est en train d'être renversé. On a une région ici, tout près de Québec, qui va être sortie de la liste bientôt.

Alors, c'est en train de produire des résultats, et c'est ça qu'on veut. Ce sont des résultats. Mon collègue de Lac-Saint-Jean ayant demeuré tout à l'heure, je veux lui donner la chance de continuer sur cette question des importations, parce que c'était un des sujets que, lui, il est le premier à l'avoir mis sur la table aujourd'hui, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Lac-Saint-Jean, critique officiel.

M. Tremblay: Oui. Bien, en fait, tout à l'heure on parlait des barrières que pourrait créer éventuellement, des barrières économiques que pourrait créer le fait de ne pas respecter... Quand on produit quelque chose, le fait de ne pas respecter l'environnement ou le droit des travailleurs, éventuellement on pourrait assister dans l'avenir à... Comme, par exemple, les Japonais sont forts là-dessus... où ces derniers pourraient dire: Je n'achète pas ton produit, même si je suis dans un contexte de libre marché, je n'achète pas ton produit parce que je n'ai pas la garantie environnementale ou la certitude que le produit a été fait correctement. Donc, ça pourrait devenir un argument pour devenir une barrière économique. Et ça, est-ce que vous le voyez comme un avantage pour le Québec, dans le sens que, compte tenu de la qualité des produits que nous faisons, ça pourrait éliminer de vos compétiteurs et ouvrir grande la porte aux produits québécois, ou vous ne voyez en ça aucun aspect positif?

Le Président (M. Pinard): M. le président.

M. Pellerin (Laurent): Bien, la réputation de nos produits sur les marchés mondiaux bien avant les préoccupations environnementales, si on recule 10, 15, 20 ans en arrière, le fait de mettre un drapeau canadien sur un produit qu'on exporte à travers le monde a toujours été une marque de commerce de salubrité, de haute qualité, et c'est encore comme ça, quand on voyage partout à travers le monde. Si vous voulez être protégé dans les pays les plus dangereux, collez un «flag», une feuille d'érable rouge sur votre «packsack» puis vous êtes probablement en meilleure sécurité que si vous collez l'autre sorte d'étoile. Ça, ça ne fait pas de doute. C'est vrai pour les produits agricoles, c'est vrai pour les produits alimentaires partout à travers le monde. Est-ce qu'on pourrait bénéficier de meilleurs marchés, de meilleurs prix avec une réputation environnementale encore améliorée? La théorie nous dit: Oui, en principe. Je le prendrais à l'inverse. Est-ce que le consommateur québécois choisit notre produit sur la tablette, je ne dis pas «choisirais», choisit notre produit sur la tablette quand on lui présente des produits qui viennent du Brésil ou du Mexique qui ont été produits dans des conditions de travail inhumaine et dans des conditions de salubrité qu'on ne connaît pas? La réponse, c'est non. L'enquête Wal-Mart des dernières semaines le révèle, la réponse, c'est non.

La très, très grande majorité des consommateurs ? et, quand on fait des études de marché avec nos fédérations spécialisées, on arrive à peu près aux chiffres de deux tiers à 70 % des gens ? achètent le prix. Alors, dans notre propre société ? avant de se faire une réputation à l'international, on produit d'abord pour nourrir notre monde ici, la très grande majorité de ce qu'on produit, c'est pour nourrir nos Québécois, nos Canadiens ? nos propres consommateurs, leur niveau de sensibilité à un produit très haut de gamme, très environnemental, il est là, il existe, mais malheureusement c'est la minorité de la population qui a ces préoccupations-là. Et l'effet sur le prix, bien il est aussi très minime. Parce qu'aussitôt qu'on dépasse un petit écart sur le prix, nos études, qui ont été faites par des firmes indépendantes, nous disent que, je pense, c'est un écart de 5 % ou 10 % sur le prix, tout de suite tu vois baisser... même l'élite des plus sensibilisés devient un petit peu plus automatique, là, elle étire le bras vers le prix.

Alors, on a toute une éducation à faire là-dessus, on a toute une sensibilisation à faire là-dessus, d'abord sur notre marché domestique, parce que, je le répète, c'est là qu'on vend la masse de notre volume, et sur quelques marchés d'exportation. Écoutez, je ne vous cacherai pas que les Japonais qui achètent notre produit les achètent pour des raisons de qualité. Ça, c'est... il n'y a aucun doute. Et on est capable de produire de la qualité, ça, elle est déjà là.

Est-ce qu'on peut faire plus? Théoriquement, je vous dis oui. D'ailleurs, je le lie à la phrase que je vous disais précédemment: On n'a pas de trouble, nous autres, à avoir une réglementation qui est un petit peu en avance sur les autres. C'est le «petit peu», là, qu'il faut quantifier. On ne peut pas être très en avance sur les autres au niveau de ce qu'on exige de nos gens, parce qu'au niveau des coûts de production on peut se mettre facilement... Je regarde la question des concombres, là, les «pickles», on a perdu 50 % de la production l'an passé, au Québec ? 50 % de la production! Et les «pickles» que vous allez manger dans la prochaine année, ils vont venir de l'Inde. Pourquoi? Direct, direct, direct. C'est plus difficile de produire ici, à cause des questions environnementales, et le gouvernement a mis des mesures de salaire minimum obligatoire pour les cueilleurs. Alors, ça fait ses effets.

Ce n'est pas vrai qu'on peut calculer tous les travailleurs d'ici qui donnent l'équivalent d'un rendement de salaire minimum pour cueillir des petits fruits et des petits concombres. Et ce n'est pas nécessaire non plus qu'ils produisent le volume. Il y a tellement peu de main-d'oeuvre, nous autres, ça ne nous fait rien que quelqu'un ramasse juste deux paquets ou deux «plates» de fraises dans sa journée. Celles qu'il a ramassées, même s'il n'a pas fait un rendement de salaire minimum, elles sont ramassés. Alors, ça aussi, il va falloir considérer... Ça en est, des conditions de base. Quand il y a des jeunes qui viennent faire leur première expérience de travail dans le milieu agricole, bien peut-être que ça ne mérite pas toujours un paiement au salaire minimum.

Et ça, vous avez pris ces décisions-là comme gouvernement à l'époque, qui ont été reconsidérées et maintenues par le gouvernement actuel. On va être encore aux prises avec ça au mois de janvier. C'est des petites choses des fois, mais cette sensibilité fine là, ça la prend. Et, je répète, on est prêt à être en avance sur les autres, mais pas trop, puis, dans certains secteurs le «pas trop», il est mince, dans d'autres secteurs, il est plus grand. Alors, il faut une flexibilité pour aller de l'avant, et particulièrement sur les conditions environnementales.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

n(17 h 40)n

M. Tremblay: Vous savez que le projet de loi que nous étudions actuellement inclura dans la charte des droits un droit à un environnement sain. Qu'est-ce que ça vous dit, ça, quand, par exemple, vous aurez quelqu'un qui établit une porcherie, que ça va sentir puis qu'il y a des citoyens qui... Est-ce que vous avez peur que des citoyens puissent utiliser cet élément dans la charte et que ça ait des conséquences pour les producteurs?

M. Pellerin (Laurent): Tout à fait. Et au risque de se faire des amis ? supplémentaires, on a en a déjà un certain nombre ? moi, j'ai beaucoup de craintes à l'inclusion de ces morceaux-là dans une Charte des droits et libertés, parce qu'il manque un chapitre à la Charte des droits et libertés. Il manque un chapitre sur les devoirs et les responsabilités. J'ai beaucoup de difficultés dans une société dans laquelle on a juste des droits; il y a des responsabilités aussi. Et quand on prend la décision de venir vivre dans le milieu rural pour une génération, pour deux générations, c'est sûr qu'on a des droits comme citoyens, on a le droit de vivre dans un environnement sain, mais on a aussi des responsabilités par rapport à nos concitoyens. On fait des choix, il y a des conséquences pour ces choix-là, bien il y a un bout qu'il faut se dire: on vit avec.

Et là, en mettant cet article-là, même si nos conseillers nous avisent que c'est dans une section un peu plus générale, que le poids légal est relatif, peut-être pas aussi significatif que d'autres pourraient le croire, il sera sûrement invoqué à la première occasion par les gens qui tiennent le genre de plaidoyer qu'ils tiennent actuellement. Pour nous, là, ça ne nous aidera pas.

M. Tremblay: Je n'ai pas d'autres questions.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Moi, M. Pellerin, j'aurais aimé vous apporter... le 9 novembre, on a eu un forum, à Scott, sur les nouvelles technologies pour traiter le purin, et puis on voyait des agriculteurs qui ont expérimenté des choses pour séparer le liquide du solide, puis là ils pouvaient contrôler beaucoup mieux le phosphore. Et puis, ces producteurs-là, en principe, un peu comme vous avez parlé tout à l'heure, pourraient augmenter leur cheptel en contrôlant leur phosphore. Dans le plan, le REA, est-ce que ça va les bloquer ou bien s'ils vont pouvoir augmenter quand même leur cheptel avec des nouvelles technologies?

M. Pellerin (Laurent): M. Mulcair a utilisé le bon mot tantôt en disant que le REA avait réglé ou amélioré certaines affaires, il n'a pas tout réglé, pas tout amélioré. Il reste encore des considérations pour certains secteurs de production. La région de Chaudière-Appalaches a été très active au niveau de la recherche et de la démonstration à la ferme; il y a eu plusieurs sessions ce printemps, entre autres, sur le traitement, mais il y en a eu une aussi sur les rampes d'épandage, pour constater que les techniques disponibles, même si elles sont très dispendieuses, ne sont pas toujours au rendez-vous du résultat. C'est vrai pour les techniques de traitement et c'est vrai pour les rampes d'épandage. Alors, il reste beaucoup de travail à faire au niveau du développement d'outils qui sont commercialement, quotidiennement opérables par les producteurs.

Le lien que vous faites entre un producteur qui aurait fait les efforts de contrôler ce qu'il fait chez eux: Est-ce qu'il devrait y avoir une marge de manoeuvre supplémentaire? Pour nous autres, c'est oui. Sinon, je veux dire, c'est quoi l'intérêt ou la motivation individuelle d'aller plus loin dans l'amélioration de ses pratiques s'il n'y a pas de récompense individuelle? Si la récompense, elle est collective sur le bassin versant, l'individu n'embarquera pas là-dedans. Alors, ce qu'on disait tantôt sur l'approche ferme par ferme, ça va jusque là.

Le producteur qui aurait des limites dans sa production parce qu'il n'a pas les superficies d'épandage... rappelez-vous que, dans notre esprit, il va toujours rester la première utilisation des fumiers et lisiers: fertiliser les cultures qu'on fait, au Québec. On importe encore 400 000 tonnes métriques d'engrais minéraux de l'Ouest canadien et de la Floride pour la potasse... pour le phosphore, la potasse vient de l'Ouest canadien. Il y aurait moyen de réduire ce 400 000 tonnes là encore beaucoup en produisant plus de productions animales au Québec, en ayant plus de fumiers disponibles, moins d'import de potasse et phosphore, et d'azote fort probablement aussi, toutes des choses qu'on ne fait pas au Québec. Puis, si on faisait ça, bien ce serait le fun parce qu'on aurait du fertilisant puis on aurait des sous-produits qui seraient des animaux, de la viande...

M. Grondin: On sait très bien... en tout cas, moi, je vis dans ce coin-là de pays, les producteurs agricoles, les idées leur bouillent, là, hein? Ils savent qu'ils ont des... il y en a plusieurs qui savent qu'ils ont un problème avec l'environnement. Ils essaient toutes sortes de technologies. Mais je pense, moi, que... je l'ai toujours dit, un peu de... il faudrait leur donner un petit peu d'élastique pour qu'ils puissent mettre ces technologies-là en pratique, les essayer. On serait surpris de voir l'amélioration qu'on pourrait apporter si on donnait un peu l'occasion à ces gens-là de les mettre en pratique, leurs techniques.

M. Pellerin (Laurent): Bien, j'aime bien votre intervention. L'esprit patenteux de nos producteurs, il est aussi large que l'esprit patenteux moyen du Québécois, et la nécessité a été, dans la question environnementale, souvent une bonne occasion pour que notre patenteux se révèle.

Juste de plaider auprès des fonctionnaires du ministère de l'Environnement la possibilité qu'un producteur puisse faire sa rampe d'épandage tout en ayant droit à l'aide gouvernementale, vous vous imaginez comment c'est un tour de force? Et pourtant on a des patenteux qui pourraient vous concocter une petite rampe d'épandage basse, avec le minimum d'investissement et le maximum de résultats, beaucoup mieux que certaines grosses compagnies qui aiment ça nous vendre du gros stock à gros prix.

Mais, juste ça, de tordre un peu ou d'avoir une réglementation un peu flexible pour autoriser ce genre d'affaire là, ça prend des mois, et des mois, et des mois. Alors...

M. Grondin: On dit souvent... Moi, il y en a plusieurs par chez nous qui disent: On n'est pas des ingénieurs, on est des ingénieux. Moi, je...

Le Président (M. Pinard): Dernière question, M. le député.

M. Grondin: Oui. Il y a une autre chose que j'aimerais savoir. Vous devez avoir un peu un constat... On parle souvent que les agriculteurs, pour avoir leurs terrains assez grands pour produire, admettons, avec des porcs, ou n'importe quoi, ont eu besoin de défricher. Mais, d'autre part, je sais très bien que plusieurs agriculteurs ont planté des terrains au complet.

Aujourd'hui, depuis, je ne sais pas, moi, les 10 dernières années, est-ce qu'on a plus de plantations ou on a défriché plus? C'est quoi, la...

Le Président (M. Pinard): M. le président.

M. Pellerin (Laurent): Si on recule 35, 40 ans en arrière, le Québec cultivait 2 400 000 ha. Aujourd'hui, on est autour de 1 900 000 ha. Alors, nous, tant qu'on ne sera pas revenus à 2 400 000 ha, on ne s'excitera pas bien, bien. Je pense que c'est une possibilité agricole de la vallée du Saint-Laurent, et Abitibi région, et Lac-Saint-Jean aussi, qu'il est facile d'atteindre si on se donne l'objectif de l'atteindre. Alors, pour moi, le déboisement commencera après le 2 400 000 ha. Jusqu'à ce moment-là, c'est de la remise en culture de terres qui l'ont déjà été.

Le Président (M. Pinard): Alors, une dernière question, M. le député d'Alma... de Lac-Saint-Jean, excusez-moi.

M. Tremblay: Dans la stratégie... dans le projet de loi, on parle... un des principes, c'est la participation citoyenne. J'aimerais savoir comment ça va avec le projet de loi n° 54, quand vous voulez... parce que, veux veux pas, il y a un petit peu de développement durable dans ça, dans le sens que les citoyens sont amenés à dire ce qu'ils ont à dire.

Le Président (M. Pinard): M. le président.

M. Tremblay: Ce n'est pas l'enthousiasme.

Une voix: Des hauts et des bas.

M. Pellerin (Laurent): Oui, il y a des hauts et des bas. On ne peut pas dire que ça va très bien. De même que, dans certains cas, quand c'est conduit correctement, on ne peut pas dire que ça va très mal non plus. En moyenne, c'est un exercice extrêmement pénible, assez pénible que, selon ce qu'on m'a rapporté dans les dernières semaines, la CSST aurait émis un avis à l'endroit des fonctionnaires des différents ministères qui siègent devant ces tables-là, que le retrait préventif serait de mise, parce que ça n'a pas d'allure, faire supporter une pression comme ça à des fonctionnaires.

Et qu'en est-il du producteur, qui en public doit aller se dévêtir de son projet, dans le fond, là, à peu près, se faire inspecter du petit orteil à aller au dernier poil? Ça n'a presque pas d'allure, ce... humainement, là, je vous dirais, pour avoir jasé avec des gens avant et après le processus, c'est une épreuve familiale intolérable. Malgré ça, on a eu des réunions qui se sont tenues avec un certain décorum, un certain ordre; 40, 50 citoyens qui sont concernés ? parce que la loi est supposément claire, mais elle n'est pas appliquée comme ça partout ? et ça s'est déroulé relativement bien. Sur 11, 12 audiences publiques, consultations publiques qu'il y a eu ? actuellement 11, je pense, qu'on est rendu? ? il y en a sept, huit... huit, neuf qui ont donné des résultats, qui se sont tenues dans des conditions relativement correctes; il y en a deux, trois qui ont complètement dérapé, pour différentes raisons, mais qui ont complètement dérapé.

Une voix: ...

M. Pellerin (Laurent): Oui, oui, mais, même pour les huit, neuf, là, je vous dirais... D'abord, il y a un prix à payer pour le producteur. C'est tout à fait inadmissible qu'un producteur, pour se faire entendre de ses concitoyens, mette sur la table 4 000 $, 5 000 $, 8 000 $, 10 000 $, 12 000 $. Je trouve ça inacceptable. C'est le public qui veut venir entendre le projet, bien, qu'il paie pour, que la municipalité paie pour. Ce n'est pas aux producteurs à défrayer ces sommes d'argent là tout le temps. Il y a une limite, là, à un moment donné.

n(17 h 50)n

Le gouvernement avait dit qu'il paierait les services du médiateur après; à date, il n'y a pas eu de médiateur d'utilisé. Et on a suggéré au gouvernement sept, huit recommandations pour améliorer le processus, dont, entre autres, nommer un président d'assemblée qui connaît le métier, pour ne pas avoir quelqu'un en conflit d'intérêts devant la salle, d'avoir un service d'ordre dans la salle. Que tous les observateurs du monde puissent venir dans ces assemblées-là, je n'ai pas de problème, mais que ceux qui ont le droit de parole, ce soient les gens concernés. Et ça, «concernés», là, ce n'est pas vaguement concernés par: j'ai droit à un environnement sain au Québec, là. Vaguement, et puis que tu restes au centre-ville de Montréal, puis il se bâtit une porcherie à Richelieu, là; «concernés», pour nous autres, ce n'est pas ça. Et on en a... La liste a été faite, là, cinq, six considérations.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Morin (Montmagny-L'Islet): Merci, M. le Président. Chez nous, je suis très proche de mes agriculteurs, et ici vous dites: «Nous croyons que la mise en place d'une stratégie québécoise de développement durable pour l'agriculture implique une volonté, une vision commune.» Mais ce que je veux savoir: Est-ce que chez vous, dans votre union, vous cherchez aussi une vision commune? Ici, je pense porcin, acéricole.

Le Président (M. Pinard): M. le président.

M. Pellerin (Laurent): J'ai vu la lettre de réponse du président de la Fédération des producteurs acéricoles, qui est de votre région, à un groupe de producteurs, dont un producteur porcin qui voulait se construire une porcherie très proche d'une érablière. Et même les normes de production de sirop biologique prévoient ces distances séparatrices là. Et, quand les gens souhaitent des distances de kilomètres, ce n'est pas la réalité. Et je pense même le pamphlet... Je ne sais pas si vous avez vu le pamphlet qui suggère les distances? On parlait d'une distance, si ma mémoire est bonne, de 100 mètres ou quelque chose comme ça. Les gens, c'est ça, ils se font des ambitions épouvantables.

J'ai été extrêmement réconforté cet automne, dans la tournée de la province que j'ai faite, de voir le jeune maire de Saint-Cyprien, au sud de Trois-Pistoles, être élu dans sa municipalité, jeune producteur de porc honni, décrié, banni du milieu il y a deux ans, quand il a eu son projet de construction de porcherie. Ça me laisse quand même un certain optimisme que ça a des chances de se replacer un jour. C'est curieux que, après que les porcheries se sont bâties dans les milieux, on arrive à des constats et des comportements comme celui de Saint-Cyprien. Finalement, ils ne trouvent plus la porcherie, ils n'ont pas eu connaissance des épandages, parce que les odeurs ont été contrôlées, et le citoyen a été élu maire.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Morin (Montmagny-L'Islet): La plus belle preuve, c'est chez nous, à Saint-François-de-Montmagny, dans ma place natale. Mais, moi, j'ai été conseiller municipal pendant 25 ans, et ça, on a réussi à harmoniser ça. Mais, suite à la lettre de M. Lemieux, ça donne des arguments aux citoyens pour contrer la porcherie qui est placée entre deux rochers puis entre deux bois qui est... mais là ça amène... Celle-là, on ne l'a pas trouvée drôle, parce que j'ai rencontré le comité de citoyens, et là ils nous disent: Pierre Lemieux a dit ci, a dit ça. Mais ça n'aide pas, c'est pour ça que je vous demande: Est-ce que vous ne pourriez pas contrôler cette vision commune là, nous aider, toujours?

Le Président (M. Pinard): M. le président.

M. Pellerin (Laurent): C'était pour ça que la lettre... J'étais content que la lettre soit écrite et que le petit pamphlet soit fourni avec, pour les normes de production de, je pense, que c'était le Siropro, la marque de commerce. Parce qu'entre ce que les gens espéraient comme distances puis la réalité qui était marquée sur le pamphlet, ça faisait une méchante différence. Et il n'y a pas beaucoup d'érablières au Québec qui ne pourraient pas bénéficier d'un statut haute qualité à cause de la présence d'une porcherie, là. Parce que la distance était vraiment minime, à peu près la distance que ma porcherie est, chez nous, de la cabane à sucre.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Mulcair: Je tiens à dire ici, en commission, ce que j'ai déjà eu l'occasion de mentionner: on suit de très près avec vous la situation de ces consultations-là. Aidez-nous à être très informés de ce qui se passe. Il y a des bouts qui passent à la télé, des bouts, pas.

Pour vous raconter une expérience récente que j'ai eue. Je donnais une conférence justement dans le coin de Boucherville, un comité d'accueil pour nous qui était composé de personnes qui étaient opposées à des porcheries dans le coin du Richelieu. Alors, comme on fait souvent ? c'est une technique que j'utilise souvent pour tenter de désamorcer, ça ne marche pas toujours, puis vous allez comprendre, dans le cas que je vous cite, que n'était pas le cas ? on essaie de rencontrer des personnes qui viennent, de rencontrer un groupe représentatif, les entendre. Parfois, ça aide à désamorcer, les gens voient qu'on est prêts. J'ai rencontré donc trois des personnes, trois femmes qui manifestaient contre le projet. Et, dans ce cas précis, j'avais vu un des promoteurs à la T.V., une semaine ou à peu près avant, dire: C'est drôle, il y a du monde qui viennent même de Montréal, qui n'habitent pas ici. Je me suis dit: Bon, comment il peut savoir ça? J'ai rencontré, deux des personnes étaient très respectueuses, une troisième ne me laissait pas parler, elle avait... Moi, j'essayais de donner des explications techniques, expliquer pourquoi c'était surveillé, pourquoi qu'on était confiants qu'on respectait le BAPE, et ainsi de suite. Puis, à force d'être coupé, ça devenait un peu rébarbatif, et à un moment donné j'ai eu une intuition, je lui ai juste demandé où est-ce qu'elle habitait. Elle habitait bien dans le centre de Montréal. Alors, à un moment donné, tirant prétexte d'une partie de l'échange qu'elle n'a pas aimée, elle se lève puis elle claque la porte. J'ai fini la conversation. On ne s'entendait pas sur notre analyse des choses, mais c'était cordial, c'était correct avec les deux autres personnes, puis la réunion a pris fin. Quand je suis ressorti, c'est elle qui criait le plus fort, et ainsi de suite.

Un ou deux jours après, à la télé, toujours dans le cadre des consultations, j'ai vu un «tape» qui avait été fait. Et qui est-ce que je n'ai pas vu en train d'organiser, crier le plus fort, pointer du doigt, cette même madame là qui m'avait bien expliqué qu'elle n'avait rien à voir avec la région. Alors, moi, je veux bien faire notre bout, puis que les gens du milieu travaillent, puis que les gens aient la même information, puis qu'il y ait de l'ordre dans ces consultations-là. Donc, je veux juste vous dire que je suis plus que prêt à ce qu'on travaille ensemble. Quand il y a une nouvelle chose qui est mise sur la table, et il y a toujours une période de rodage, moi, j'ai l'impression qu'à la longue on va aplanir les difficultés. Mais sachez que je sais que ce que vous dites est vrai. Pas toujours pour chaque individu, mais ça se produit, je l'ai expérimenté de première main.

Alors, si vous voulez bien, on va se trouver un moyen de communication très étroit avec nous pour qu'on suive l'évolution de ce dossier-là. Puis, si on se rend compte qu'il faut agir autrement, bien je suis plus que prêt à vous aider. Moi, je veux que ça réussisse. Je ne veux pas que ça devienne un prétexte pour des gens qui n'ont rien à voir avec un projet ou un milieu de faire flèche de tout bois. Parce que ce n'est pas ça le but. Le but, c'est de s'assurer qu'on ait une harmonisation correcte avec le milieu. Mais, si vous me permettez, avec un clin d'oeil en terminant, pour votre inquiétude pour la Charte des droits, j'ai entre les mains un jugement, du 2 mars 2005, de l'honorable juge Jean-Claude Larouche, dans un dossier de Laurien Tremblay et al. contre Daniel Gagnon, dans lequel le juge... Et je ne dirais pas plus, parce que j'ignore si ça a été porté en appel, mais je vais quand même vous dire, le jugement en voisinage, et tout ça est basé... il y a une citation très précise aux articles 5 et 6 de la charte des droits. Donc, les producteurs, entre eux, se servent déjà de la charte des droits. Ils n'avaient pas... Le nouveau droit vise peut-être à préciser d'une manière plus large.

Le Président (M. Pinard): Un commentaire, M. le président?

M. Pellerin (Laurent): Oui, un commentaire là-dessus. D'abord, je ne veux pas non plus caricaturer, qu'à chaque fois qu'il y a quelqu'un qui chiale c'est quelqu'un de l'extérieur, là. Je pense qu'on peut identifier des individus, vous l'avez fait, c'était un bon exemple. Mais on est très conscients aussi qu'il y a des gens de la place, qu'il y a même des producteurs agricoles entre eux qui se font une bonne guerre. Vous savez, quand vous organisez un genre d'activité publique, consultation publique comme ça, vous recueillez toutes sortes de préoccupations, des bonnes, des moins bonnes, des justifiées, des pas trop justifiées. Quand il arrive la construction d'un bâtiment de production ? puis il serait porcherie, il serait autre chose, je soupçonne qu'on pourrait avoir la même réaction dans certains cas. Celle de la production porcine est facile parce qu'on va aller sur la question odeurs, pollution, puis on essaie de jouer la «game». Mais aussi, sur le terrain, il peut arriver, entre producteurs, aussi une lutte pour le terrain disponible, surenchère des prix...

M. Mulcair: Tout à fait.

M. Pellerin (Laurent): Vous voyez aussi, toute cette question est là. On n'est pas complètement dupes sur ces questions-là, on voit bien le théâtre. C'est pour ça qu'on demande que les réunions soient tenues de façon correcte. Si vous avez bien lu nos correspondances, nous n'avons pas demandé l'abolition du processus, là.

M. Mulcair: Non, non.

M. Pellerin (Laurent): On a dit, écoutez, nous autres, on a pris... Vous nous aviez demandé de jouer la «game», de l'expérimenter un an, on est prêts à le faire. Après les 11 premières, les neuf premières, on a fait des suggestions pour améliorer le processus. Moi, que des gens viennent se déguiser en toute sortes d'affaires pour une soirée foraine, je n'ai pas de trouble avec ça, mais, pour une soirée de consultation, je trouve ça un peu déplacé. Alors, si on est capables de mettre de l'ordre dans...

M. Mulcair: Juste pour que vous sachiez, ils étaient bel et bien déguisés pour ma manif aussi.

M. Pellerin (Laurent): Il y avait des beaux costumes l'autre soir. Je pensais que ce n'était pas la place.

Le Président (M. Pinard): Alors, M. le président.

M. Pellerin (Laurent): C'est surprenant des fois comment des gens d'un certain âge, qui devraient être matures, comment ils peuvent se comporter.

Le Président (M. Pinard): Alors, M. le président, M. Larose, merci infiniment de vos interventions, elles sauront sûrement guider les membres de la commission pour le projet de loi n° 118. Merci beaucoup. Je suspends nos travaux jusqu'à 20 heures et j'invite les députés qui seront ici ce soir, ils peuvent déposer ou laisser en cette salle leurs documents, nous allons fermer ça à clé. D'accord?

(Suspension de la séance à 17 h 59)

 

(Reprise à 20 h 2)

Le Président (M. Dubuc): Nous sommes prêts à reprendre nos travaux. On reçoit l'Ordre des architectes du Québec. Merci d'être présents. Donc, vous avez 15 minutes pour présenter vos mémoires, côté ministériel, 15 minutes, l'opposition, 15 minutes. Si vous voulez bien vous présenter, puis on vous écoute. Allez-y.

Ordre des architectes du Québec (OAQ)

M. Bourassa (André): Alors, M. le Président, M. le ministre, Mmes MM. les membres de la Commission parlementaire des transports et de l'environnement, je me présente, je suis André Bourassa, je suis le président de l'Ordre des architectes. Et m'accompagnent Jean-Pierre Dumont, avocat, qui notre secrétaire, ainsi que Richard Trempe, collègue architecte qui est coprésident du comité environnement.

Alors, à titre de président de l'Ordre des architectes, il me fait plaisir d'être ici ce soir pour échanger avec vous sur le projet de loi sur le développement durable, le projet de loi n° 118. L'Ordre des architectes se considère privilégié de pouvoir intervenir lors des présentes audiences, et nous vous en remercions. Avant de commencer... donc on a présenté nos personnes, et puis dans un bref moment Jean-Pierre Dumont vous entretient de quelques points suivants.

M. Dumont (Jean-Pierre): Alors, avant d'entrer dans le vif du sujet, nous allons vous présenter en quelques mots quel est notre organisme et surtout vous situer dans quel contexte nous intervenons aujourd'hui. Alors, l'Ordre des architectes du Québec est un ordre professionnel de 2 760 architectes, dont la principale fonction est d'assurer la protection du public en régissant la pratique de l'architecture au Québec. Pour remplir son mandat, l'Ordre des architectes s'assure d'abord de la compétence de ses membres et de leur intégrité tant au seuil d'entrée dans la profession que tout au long de leur carrière.

Maintenant, quand on parle de protection du public, on parle notamment de sa protection physique, psychologique et patrimoniale, et, quand on réfère au patrimoine ou à la protection patrimoniale du public, on l'entend ici dans son sens large, c'est-à-dire comme incluant tout ce qui nous appartient comme collectivité, c'est-à-dire nos biens, nos ressources, notre environnement. C'est donc dans ce contexte que nous situons notre intervention au sein de la présente commission.

Bien entendu, notre présentation sur le projet de loi n° 118 se limitera volontairement aux seuls aspects que nous croyons pertinents à la pratique de l'architecture au Québec ou à la qualité des bâtiments. Nous espérons sensibiliser les parlementaires à l'importance d'adopter et de mettre en oeuvre, d'abord au sein de l'appareil gouvernemental et par la suite, nous l'espérons bien, à l'intention du public en général et aussi du secteur privé, des mesures qui seront propices à la construction, au Québec, de bâtiments de qualité, conformes à des critères et des normes élevés de durabilité et respectueux de l'environnement et du paysage québécois.

Alors, l'exposé de ce soir vise à compléter et fournir un éclairage supplémentaire au mémoire déposé dans le cadre de la consultation du printemps dernier et à faire ressortir les principales préoccupations que nous avons au regard du projet de loi n° 118. Après quelques considérations générales, nous aborderons des aspects un petit peu spécifiques du projet de loi et insisterons sur certaines mesures qu'il importe d'adopter dans un avenir rapproché afin que les objectifs visés par le projet de loi se réalisent pleinement.

Alors, sur ce, je cède la parole à notre président, André Bourassa.

M. Bourassa (André): Quelques considérations générales, donc. Les architectes sont parmi les acteurs principaux de la conception et de la construction de nouveaux bâtiments ainsi que de la réfection de bâtiments existants. Le bâtiment où nous sommes en est à un bel exemple, ne cesse de s'améliorer et de se rajeunir.

Les bâtiments ont un impact majeur sur la personne et son environnement. Pensons seulement que le secteur du bâtiment utilise 38 % de l'énergie consommée au pays, pour des fins de construction, chauffage, éclairage, climatisation, que le secteur des bâtiments est responsable de la production de 30 % des gaz à effet de serre et que les bâtiments sont concernés par plus de 25 % des déchets dirigés vers les sites d'enfouissement. C'est considérable.

Leur construction et leur aménagement ont un impact direct sur la santé et le bien-être des citoyens et peuvent influencer la productivité évidemment des travailleurs qu'ils abritent. Très important. Leur planification et leur implantation, de ces bâtiments-là, sur le territoire ont aussi une incidence directe sur le coût des infrastructures publiques, selon bien sûr, vous le savez, qu'on s'étende plus ou moins.

Enfin, il ne faut jamais oublier qu'au Québec le citoyen passe environ, en moyenne, 90 % de son temps à l'intérieur. Alors, la qualité de l'air intérieur, dont le bâtiment est très responsable, va avoir une influence extrêmement importante sur la santé des gens. De nombreuses études de la santé publique le démontrent notamment.

Toutes ces raisons font en sorte qu'il est impératif de se doter aujourd'hui au Québec d'une loi sur le développement durable et de tous les outils qui l'accompagnent pour qu'enfin, d'une part, le milieu de la construction... tous les niveaux soient conscients de son importante responsabilité en ce domaine et, d'autre part, que le public québécois et les générations qui nous suivent puissent bénéficier de bâtiments durables, économiques et sains. Et, quand on parle de durabilité pour un bâtiment, on devrait toujours penser à une durée de vie de 75 et même 100 ans et non pas, comme on entend parfois, de durée de vie économique de 25 à 30 ans. C'est une différence importante.

L'Ordre des architectes du Québec accueille donc favorablement le projet de loi n° 118 et appuie sans aucune réserve tous les principes qu'il sous-tend. Nous considérons ce projet de loi comme porteur d'une nouvelle façon de faire au gouvernement lorsque vient le temps de construire et de sélectionner les professionnels affectés à un dossier.

À l'approche réductrice sur la base unique du coût de construction, nous devrions observer comme conséquence logique de ce projet de loi et de la stratégie à venir une approche beaucoup plus visionnaire et globale qui, telle que décrite à l'article 6, devra prendre en compte l'ensemble des coûts d'un bâtiment à construire.

C'est donc dire que devront être considérés non seulement le coût de construction du bâtiment, mais aussi et surtout les coûts de construction qu'il nécessitera par la suite. Un bâtiment pour lequel on aura économisé une petite parcelle sur les coûts d'isolation, par exemple, va absorber beaucoup de coûts d'énergie supplémentaire par la suite. Et c'est vraiment important d'en tenir compte. La façon de voir devient différente à ce moment-là.

C'est pourquoi l'Ordre accueille avec grande joie le principe n° 16 de l'article 6 du projet de loi n° 118, l'internalisation des coûts ? excusez, c'est un terme qu'on associe plutôt à d'autres secteurs. Cette internalisation des coûts, qu'on définit au projet comme le fait de prendre en compte l'ensemble des coûts qu'un projet occasionne à la société durant tout son cycle de vie, donc de sa conception à sa disposition finale, s'applique d'autant plus au bâtiment qui, tel que nous l'avons dit plus tôt, devrait être conçu pour durer plusieurs dizaines d'années.

Bien sûr, on peut penser que, comme rien n'est parfait en ce bas monde, que certaines améliorations peuvent encore être apportées au projet de loi. Notamment concernant le champ d'application de la loi, qui peut concerner le secteur privé évidemment dans le terme... concernant les bâtiments. À l'article 4, on mentionne que les écoles, les hôpitaux, les municipalités ne sont pour l'instant pas vraiment du domaine public. Alors, c'est sûr que ça restreint énormément les bâtiments du secteur public, à ce moment-là. Si on a enlevé les écoles, les hôpitaux, bon, il nous reste des palais de justice, le parlement et d'autres items, mais il nous en reste beaucoup moins à ce moment-là, c'est important. Donc à cet égard-là peut-être qu'un échéancier plus précis donnerait plus d'incitatifs dans ce secteur-là.

n(20 h 10)n

Puisqu'il n'y a pas d'ordre dans les critères qui sont énoncés, on peut se poser la question: Comment vont s'opposer les différents critères les uns par rapport aux autres? Par exemple, si on dit que le critère d'efficacité économique est préséant par rapport à tout le reste, bien il pourrait arriver qu'on privilégie une efficacité économique à court terme au détriment des 15 autres articles.

Donc, peut-être qu'à ce niveau-là il y aurait lieu d'améliorer certaines... cette question de hiérarchisation des critères, de donner évidemment des délais qui pourraient favoriser que, dans un laps de temps le plus bref possible... qui pourra permettre le design intégré. Ce qu'on appelle le design intégré, c'est de faire intervenir dès le début de la conception des projets l'ensemble des intervenants, l'ensemble des professionnels, architectes, ingénieurs, etc., pour que la conception des bâtiments soit le plus intégrée possible.

Évidemment, de favoriser des sélections de professionnels qui permettent à ces professionnels-là d'avoir les ressources suffisantes pour le développement de solutions novatrices. En ce moment, la sélection de professionnels de la part du gouvernement se fait sur la base le plus souvent du plus bas coût possible. Bien, évidemment, si on est toujours au plus bas coût possible, on doit appliquer des recettes qui ont été appliquées antérieurement et non pas améliorer... On ne veut pas réinventer la roue, soyez-en certains, d'un projet à l'autre, mais, pour permettre de l'améliorer, on a absolument besoin d'avoir des ressources adéquates. Il faut savoir que, quand même, l'Assemblée nationale a déjà voté un décret qui détermine à quel prix le gouvernement rémunère les professionnels; alors, à tel pourcentage, à tel taux horaire, tout ça, ça a été voté déjà à l'Assemblée nationale. Or, dans les appels d'offres, dans la sélection des professionnels, on retrouve fréquemment des coupures d'honoraires jusqu'à 50 % de ce même décret là. Donc, c'est sûr que ce n'est pas là qu'on aura les solutions les plus novatrices, que ce soit en matière d'environnement, d'efficacité énergétique ou quoi que ce soit d'autre.

Donc, à ce niveau-là, je pense que la sélection des professionnels devra être... aurait avantage, dans les objectifs de cette loi, à être visée pour permettre un travail adéquat. Bien sûr, il pourra y avoir des incitatifs très gagnants-gagnants, pour favoriser, par exemple, la géothermie, des principes plus novateurs à l'efficacité énergétique vraiment plus considérable, de se rappeler aussi... M. le ministre, vous avez fait mention dans votre récente allocution à l'AQME, je reprends votre expression, «des compteurs qui tourneront à l'envers à Hydro-Québec»... L'ordre est un intervenant reconnu à la Régie de l'énergie en ce moment, et, selon les informations qu'on a de par notre implication dans ce dossier, si les compteurs tournent à l'envers, ils ne tourneront pas vite, parce que l'Hydro-Québec a quand même à ce niveau-là un échéancier et une façon de démontrer que ce n'est pas intéressant, dont on peut douter. Vous verrez notre réponse à la Régie de l'énergie par rapport à ce dossier-là. Nous sommes restés considérablement sur notre appétit. C'est important pour le développement des technologies environnementales au Québec que les gens qui veulent produire de l'énergie puissent le faire et que ça puisse leur être crédité. Donc, ce genre d'élément là est à suivre de très proche, et je sais que la volonté politique est là, donc je vous invite à être particulièrement vigilant à cet égard-là. Le mode n'est pas un mode accéléré en ce moment, du tout, à cet égard-là.

Bien sûr qu'un éventuel fonds en recherche appliquée sur le bâtiment puisse être utilisé, ce serait souhaitable. Je vous rappelle que l'architecture, c'est une science appliquée. Et, ce qui vend le mieux les projets novateurs, ce sont des projets de démonstration qu'on peut mettre ouverts au grand public le plus possible, ce sont des éléments de vente et de marketing qui sont extrêmement importants pour les questions environnementales liées au bâtiment. Évidemment, comme on vous l'a mentionné, les gens passent un pourcentage extrêmement important de leur temps à l'intérieur des bâtiments, donc tout ce qu'on pourra faire pour favoriser cette qualité d'air là, ça va être important. Les formes d'urbanisme à l'échelle plus humaine aussi seront importantes.

On a parlé dans notre mémoire ? je vois l'horloge, le temps presse ? on a parlé dans notre mémoire des programmes d'accréditation de bâtiments verts, comme LEED, que certains d'entre vous ont peut-être entendu parler dernièrement. LEED, comme programme d'accréditation, fait connaître énormément les bâtiments verts, et c'est très positif. Cependant, on pourrait penser qu'à l'instar du secteur de l'agriculture biologique on pourrait avoir une accréditation québécoise, à l'image de Québec Vrai, par exemple, qui serait un bâtiment vert vrai, peu importe ce que ce sera, mais qui soit une accréditation québécoise et non pas une accréditation basée sur des critères, je dirais, importés, qui sont très intéressants mais qui peuvent être bonifiés encore et surtout plus appliqués au contexte québécois. Il y a certaines nuances à apporter par rapport à ça.

Le pendant immeuble du gouvernement du Québec, c'est-à-dire la Société immobilière du Québec, est vraiment en ce moment un leader. La SIQ fait vraiment un effort considérable pour la promotion des bâtiments verts, et il faut vraiment lever notre chapeau à cet égard-là. Maintenant, où le bât blesse par rapport à la Société immobilière, c'est qu'on a une sélection des professionnels qui est extrêmement agressive, dans les pointages, par rapport aux prix d'honoraires. Donc, ça fait qu'on a des lames à deux tranchants, des firmes qui ont le meilleur pointage ne passent pas, pour des questions de prix, alors c'est sûr qu'on peut se questionner sur cette démarche-là en ce moment. L'objectif et la façon de l'atteindre ne sont pas tout à fait cohérents dans cet égard-là.

Évidemment, un des principes, c'est le principe de précaution. Alors, on ne peut pas parler de précaution par rapport au développement durable sans parler de la qualité des ouvrages qui sont faits. Or, que ce soit pour les ingénieurs, pour les technologues, pour les architectes, pour la science, les professionnels de la science du bâtiment, la question de surveillance des travaux, quand on parle de qualité et de durabilité, devient un enjeu extrêmement important, voire essentiel. Plusieurs municipalités nous interpellent de plus en plus et nous disent à ce moment-ci: Comment se fait-il que la surveillance des travaux n'est pas davantage obligatoire dans les services d'architecture, d'ingénierie et de technologues en bâtiment? Parce que, sans surveillance des travaux, la durabilité n'est pas au rendez-vous. Très souvent...

Le Président (M. Dubuc): M. le président, si vous voulez conclure, il vous reste 50 secondes. Alors rapidement, s'il vous plaît.

M. Bourassa (André): Bien sûr. Merci de nous aviser. Alors, nous vous parlions aussi de l'adoption de techniques de foresterie durables et d'autres critères que vous connaissez déjà. Alors, sur ce, je vous remercie de votre attention. Nous sommes bien sûr disponibles pour les questions. Et encore une fois nous sommes reconnaissants de cette démarche gouvernementale dans ce projet de loi qui, je pense, peut être porteur d'énormément d'améliorations pour notre société et bien sûr pour la protection du public. Merci.

Le Président (M. Dubuc): Merci, M. le président. Je laisse donc la parole à M. le ministre.

M. Mulcair: Bien, merci beaucoup, M. le Président. Alors, il me fait plaisir de souhaiter la bienvenue à M. le président Bourassa ainsi qu'aux gens qui l'accompagnent, M. Dumont, M. Trempe. C'est très utile pour nous. Et, je vais vous dire, au cours des deux derniers jours, la qualité des normes de construction au Québec a fait l'objet de beaucoup de discussions ici. Lors de la tournée, j'ai eu l'occasion de fournir une liste à mon collègue de Lac-Saint-Jean, à mon collègue de Beauce-Nord ainsi qu'aux autres membres de la commission: il y avait plus de 60 références à ces normes-là, venant d'une trentaine de groupes à travers le Québec, donc il y a beaucoup de gens qui se préoccupent de ça. M. le président, vous l'avez dit si simplement quand vous avez parlé d'isolation.

Puis, on tourne à un régime de 50 000, 60 000 unités de logement, au Québec, par année depuis les cinq dernières années, c'est la... du baby-boom qui est en train de nidifier, et je pense que c'est un exemple classique de manque de vision à moyen et long terme. Si on ne s'inspire pas de ce qui se fait de mieux en ce moment ? LEED est un bon exemple ? on va manquer le bateau, on va être en train de remplir ces maisons-là avec beaucoup plus d'énergie que ça n'aurait jamais dû prendre pour les chauffer notamment, mais pas seulement. Puis, j'ai eu l'occasion, cet été, de voir, dans des climats tout à fait similaires au nôtre, notamment en Autriche et en Haute-Autriche, où on a des bâtiments verts ? pour parler de vos compteurs qui vont dans les deux sens ? où justement... Il y a des édifices à bureaux qui vendent plus au net à l'année dans le réseau qu'ils n'en consomment. C'est possible. Pas sexy, sexy comme construction pour l'instant, j'en conviens, mais la technologie est en train d'être installée, et on va être capable de le faire, mais il faut qu'on s'y mette.

n(20 h 20)n

On sait aussi que le Québec est tout indiqué comme endroit pour le géothermique, et c'est là-dessus que j'aimerais que vous nous entreteniez quelque peu. Je sais que mon collègue de Lac-Saint-Jean va avoir des questions pour vous sur sa maison! Mais j'aimerais, justement sur le thème du coût et cette notion d'internalisation du coût, puis du cycle de vie, puis comment on peut raisonner autrement au gouvernement. Vous savez qu'autour de cette table vous avez des convaincus des deux bords. Mais, quand je dis le «le gouvernement», c'est comme si c'était désincarné, mais ce sont des gens de très bonne foi, avec toute leur énergie, qui essaient d'appliquer une façon de penser qui est: le moins cher. Comme c'était souvent écrit sur les Iltis, qui étaient les véhicules tout-terrains que l'armée canadienne utilisait en Afghanistan, chaque fois que ça tombait en panne ou que ça se renversait, les gars avaient fait des «bumper stickers» où c'était écrit: «Never forget, this is what was built by the lowest bidder». Et c'est un peu ça, n'est-ce pas?

À Mont-Laurier, notre nouveau palais de justice, qu'on vient d'ouvrir, est fait en géothermique complètement. Ça a coûté un petit peu plus cher, mais le calcul, c'était qu'au bout de six, sept ans on rentrait dans notre argent. Comment on fait pour changer, alors?

M. Bourassa (André): Bien, c'est-à-dire que, moi-même comme architecte, j'ai fait plusieurs maisons. Les premiers projets en géothermie, ça fait 20 ans. Alors, pour moi, c'était avant que ça s'appelle les bâtiments verts, c'est des choses qui étaient évidentes. Mais, aujourd'hui, étant donné le coût d'investissement initial qui est plus grand, il n'y a aucun avantage de la part des prêteurs sur les résidences, il n'y a aucun avantage à cet égard-là.

Si vous avez l'exemple du Manitoba, le Manitoba subventionne la géothermie d'une façon telle que et le gouvernement, et les clients, et les constructeurs font de l'argent. C'est en sens-là que je vous parlais. Si vous vous inspirez de ce programme-là, vous verrez que tout le monde est gagnant avec ça, il n'y a pas de... parce qu'on finance finalement la géothermie à même les économies effectuées.

M. Mulcair: ...poser une question sur ce programme-là, on finance le «retrofit» autant que la nouvelle construction?

M. Bourassa (André): Je crois que oui. O.K.? Mais évidemment la nouvelle construction, dans la géothermie, c'est plus facile à appliquer. Mais qu'est-ce que c'est, la géothermie? En gros, c'est qu'avec 1 kW d'électricité on en produit 3, 3,5. O.K.? Donc, on a quand même, dans notre cas, ici, au Québec, avec cette façon de faire, une façon de chauffer qui est non polluante, qui a un bon rendement sur l'investissement. C'est sûr qu'on n'installera pas une géothermie dans ce qu'on appelle une énorme maison mal isolée, etc. On va quand même privilégier une enveloppe efficace de la maison, une orientation des fenêtres adéquate. Il faut savoir de quoi on parle dans cette matière-là.

Normalement, au mois de février, il y a une mission technique au Japon pour aller voir les maisons préfabriquées de consommation énergétique zéro. À maints égards, c'est extrêmement intéressant. Ces techniques-là existent.

Mais, pour revenir à la géothermie, c'est qu'on a au moins une façon de faire qui soit non polluante, qui soit assez fiable, qui est éprouvée, mais il y a de l'amélioration encore à faire là-dessus. Les nouvelles entreprises, les points d'amélioration, il y a encore de la recherche à faire pour rendre ça encore plus efficace. Il faut se rappeler que la géothermie a quand même été développée aux États-Unis pour la climatisation, avant le chauffage. Alors, la façon de creuser les puits énergétiques dans le sol, l'équipement qu'il faut pour ça, c'est extrêmement onéreux, ça demande encore beaucoup de développement. Donc, il y a des choses à faire, et ce n'est pas facilement disponible dans toutes les régions du Québec à ce moment-ci, ce n'est pas toujours évident. Mais il faut vouloir. Quand on veut, on peut.

Mais disons que l'incitatif, un programme d'incitation à ça serait bienvenu, et pas pour faire 114 maisons dans une année. C'est un peu ridicule, comme ampleur de projet, que d'avoir des nombres de maisons aussi... je parle évidemment... vous comprenez que je fais référence à ce qui a été proposé récemment comme programme de la part d'Hydro-Québec. C'est un peu mince comme volume de maisons. On n'ira pas loin avec 114 maisons en géothermie au Québec.

M. Mulcair: Non, d'autant plus que ce n'est pas une technologie qu'il faut éprouver. On ne parle pas d'un projet pilote pour le plaisir d'apprendre quelque chose. Comme vous dites si bien, ça fait des décennies...

M. Bourassa (André): Écoutez...

M. Mulcair: ...que la technologie de base et les techniques de base sont connues.

M. Bourassa (André): Absolument. Absolument.

M. Mulcair: Pour ce qui est d'un autre point que vous avez soulevé, les compteurs, je vous ai raconté l'anecdote de mon collègue... Pierre Corbeil et moi qui étions à Val-d'Or. Et c'est lui qui a été, le lendemain, nommé ministre responsable d'Hydro. Alors, je vais prendre la suggestion implicite dans votre intervention, et vous pouvez être sûr que, mes proches collaborateurs et moi, on aura l'occasion de parler de ça avec nos vis-à-vis aux Ressources naturelles et de la Faune.

Je pourrais peut-être passer la parole à mon collègue de Lac-Saint-Jean, pour revenir après, M. le Président.

Le Président (M. Dubuc): M. le député du Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Le ministre avait raison, je vais parler de ma maison, puisque je suis en train de me construire une maison, avec un architecte, Jean Maltais, un bioarchitecte, et c'est vraiment un programme de... c'est un projet de recherche que je fais. On est avec géothermie, méthodes de construction, orientation, solaire passive.

Et, justement, j'aurai probablement... j'ai l'intention de m'installer un compteur inversé. Mais, quand vous dites: Ça va prendre du temps avant qu'il y ait de ce type d'énergie autoproduite au Québec, ma crainte ? et là je parle au ministre aussi en vous parlant; ma crainte ? est qu'Hydro-Québec comptabilise au mois, alors que, moi, l'été, je veux comptabiliser... parce que je suis dans un gisement éolien, j'ai la chance d'être dans un gisement éolien, sur le bord du lac Saint-Jean, et il faut absolument qu'Hydro-Québec comptabilise sur une base annuelle. Je comprends bien qu'Hydro ne veut pas acheter les surplus. Ça, en tout cas... Mais, si au moins ils peuvent comptabiliser sur une année plutôt qu'au mois, parce que, sans ça, en plein milieu de l'été ou même à l'automne, quand il vente fort, on n'a pas besoin d'énergie nécessairement. Il vente, et là, toute cette énergie-là, je ne peux pas l'emmagasiner, parce que je ne m'en servirai pas.

Alors que, si, au moins, pendant la période d'automne, il vente, et là je peux m'en servir pendant l'hiver, ça, en tout cas, j'espère qu'Hydro-Québec va y aller. Mais j'ai entendu dire qu'ils voulaient faire leur comptabilisation de façon mensuelle, et ça, là, ce serait scandaleux. Mon message est passé.

Vous avez parlé de la certification LEED. Pourquoi aurions-nous besoin d'une certification québécoise?

M. Bourassa (André): Je vous explique en gros. C'est que le système LEED est un système de pointage. Alors, on aura, par exemple, selon qu'on désire une accréditation platine, or, argent, peu importe, plus on a de points, meilleure est l'accréditation. Et ce système de pointage a des effets pervers en ce que ça permet d'aller dans un livre de recettes, en quelque sorte, plutôt que d'aller dans des objectifs. Et il y a des limites aux recettes.

Le système a été quand même, je vous le dis, développé pour les régions urbaines américaines. Alors, par exemple, on aura un point... si vous mettez de la moquette environnementale, vous aurez un point. Donc, dans un projet, aujourd'hui, normalement on n'a pas besoin de mettre de moquette, dans la plupart des projets. Sauf qu'on s'inventera un bureau de directeur en quelque part pour mettre un peu de moquette dans un coin, puis ça nous donnera le point.

Moi, quand on ne peut pas changer, qu'on n'a pas prise sur ce genre de critère là, je ne suis pas confortable avec ça puis je me dis: On peut faire mieux. Mais, comme LEED Canada est suspendu à LEED américain, j'ai un problème par rapport à ça. Je vous fais part des limites, je suis... je reconnais que... l'Ordre des architectes reconnaît très grandement comment LEED a fait avancer la question environnementale dans le bâtiment depuis une année, une année et demie, c'est remarquable.

Maintenant, il est peut-être temps de passer à autre chose. Pour la même système, je vous donnerai un exemple, on aura un autre point si vous mettez un toit végétal. Or, il y a d'énormes restrictions sur le toit végétal. Ça ne se fait pas, comme on a dit dans certaines revues environnementales, en étendant une membrane, en mettant de la terre puis en semant. Il y a beaucoup plus de précautions que ça à prendre, c'est coûteux, et est-ce que c'est la meilleure façon pour atteindre les objectifs qu'on poursuit? Non. Je vous dirai fermement et clairement: Non, dans la plupart des cas. Il y a d'autres techniques si on veut atteindre des objectifs d'efficacité énergétique. Rappelez-vous, étant donné le temps qui est passé à l'intérieur, que, lorsque ces membranes-là vont avoir des défaillances et qu'on se maintient un système humide au-dessus de la tête tout le temps, vous êtes avec une épée de Damoclès, ce qui peut à la longue créer des problèmes de moisissures.

Sur une usine où j'ai des gestionnaires d'immeubles compétents, et il y a des robots de 60 millions dans cette usine-là, je ne suis pas inquiet. Dès qu'il y aura une fuite, on va s'en occuper. Mais, dans des immeubles d'habitation où on a de la misère à faire du maintien d'actifs et où les gens savent à peine comment fonctionne le thermostat, quand il y aura des défaillances du toit végétal, je ne suis pas sûr qu'on aura les réactions assez rapides pour venir intervenir là-dedans. C'est la même chose, je dois vous le rappeler, ministre et députés: on a aussi un peu de difficultés, dans nos immeubles gouvernementaux, à avoir suffisamment de maintien d'actifs pour réparer les toitures telles qu'elles sont et les fenêtres telles qu'elles sont. Alors, si, en plus, on veut installer sur nos immeubles gouvernementaux des toits végétaux pour avoir le point LEED, je regrette, on n'a pas la meilleure technique pour atteindre nos objectifs.

Donc, on a besoin de critères d'accréditation qui soient plus souples et plus adaptés à notre secteur. Dans nos petites villes au Québec, si on veut installer un bâtiment LEED rigoureusement, selon un système de pointage, il arrivera que, si on n'a pas... sur un axe de transport en commun, bien, si on n'est pas sur un axe de transport en commun, on n'aura pas le point. Bien, est-ce que vous avez du transport en commun dans toutes les petites villes au Lac-Saint-Jean et au Saguenay? Je suis sûr que non. Donc, vous n'aurez pas le point LEED à cet égard-là. C'est un paquet de petits irritants. Ce n'est pas la fin du monde. Puis encore une fois j'en reconnais les grands mérites. Cependant, là, avec une loi comme celle-ci où on veut être maître, je pense, de notre développement durable puis le favoriser le plus possible, je pense que là il y a une étape à franchir qui est un système d'accréditation. Encore une fois, si on le fait pour les carottes et les poireaux, on doit bien être capables de le faire pour les immeubles.

M. Tremblay: C'est à qui d'assumer le leadership de créer une certification québécoise?

M. Bourassa (André): Je pense que ce genre d'élément là se fait toujours avec une volonté politique et une expertise technique. Alors, c'est clair que la volonté politique est de votre bord, puis, l'expertise technique, on va être là pour y participer, si ça vous tente.

n(20 h 30)n

M. Tremblay: Est-ce que votre ordre... Dans quelle mesure votre ordre fait de la formation à vos architectes ou influence... Parce que je réalise, dans le monde de la construction, il y a du monde extrêmement conservateur, puis de temps en temps tu en poignes qui sont... hein, ils veulent aller plus loin, puis ils sont passionnés, là.

M. Bourassa (André): Bien, écoutez, j'ai plusieurs chapeaux quand je vous parle ici, aujourd'hui. Outre d'être architecte, évidemment président de l'Ordre des architectes, je suis conseiller dans ma petite municipalité, donc je vois le monde municipal et le secteur du bâtiment, l'émission des permis. Vous voyez, les intervenants municipaux sont extrêmement importants, maintenant, dans la qualité de la construction. D'autre part, je suis formateur pour la SCHL, la Société canadienne d'hypothèques et de logement, sur certains aspects d'amélioration de la qualité dans le bâtiment. Donc, c'est des choses qui me concernent personnellement et auxquelles je suis très impliqué depuis plusieurs années. Et je peux vous dire qu'évidemment les entrepreneurs, ici, ont des programmes de formation, je peux vous dire que l'Ordre des architectes a un programme de formation continue ? qui devient obligatoire en avril, je ne veux pas dire de niaiseries ? et qu'on est très impliqués et qu'on donne beaucoup de formation, de formation sur le bâtiment vert aussi.

Pour ce qui est de l'industrie de la construction, comment vous pourrez interpeller à une table les intervenants des associations d'entrepreneurs, comment ces associations favorisent la formation? Bon, je peux juste vous dire qu'on a une formation de prévue, par exemple, avec des entrepreneurs dès le mois de janvier. Mais comment tout ça est mis en oeuvre, à quel rythme? Ce sera à eux de répondre à ça, je pense. Mais, pour la formation, il y en a de disponible. Oui, Richard.

M. Trempe (Richard): Peut-être pour compléter au niveau de la formation. André parlait, auprès des entrepreneurs, les associations d'entrepreneurs en construction offrent de la formation, il y a de la formation qui est... moi, je suis formateur pour de ces organismes-là. Par contre, on revient un peu à la case départ; au-delà de la formation, il faut que les gens au chantier aussi fassent ce qui est demandé. Et là, on a toujours un problème majeur, surtout dans le cas des condominiums, des bâtiments résidentiels. Alors, la formation... puis ce qui est le plus malheureux, c'est que cette formation-là auprès des entrepreneurs, elle est volontaire. Donc, je peux vous dire que c'est toujours les mêmes volontaires finalement qui se présentent aux formations, et ce qu'on rencontre sur les chantiers, c'est toujours les mêmes manquements. Donc, à la base même, là, une formation puis un suivi au chantier est essentiel.

M. Tremblay: Comment, parce que juste au niveau... moi, maintenant, je regarde les maisons, puis je trouve ça incroyable qu'on ne mette pas nos fenêtres du côté sud.

M. Bourassa (André): Vous les voyez d'un oeil différent.

M. Tremblay: Ah oui, ah oui, c'est incroyable! Puis je me dis: Pourtant, on est dans un pays nordique, comment ça se fait qu'on n'a pas pensé à ça, et que ça devrait être une évidence? Mais, une chose comme ça, est-ce que c'est le ministère des Affaires municipales qui devrait insister à faire des plans d'urbanisme faits en fonction de ça? Et à qui vient le leadership? Parce que je ne crois pas que c'est avec ce projet de loi là, aujourd'hui, qu'on va en arriver à ça. J'espère qu'au bout du compte on va y arriver. Mais, plein de petites choses, de petits détails comme ça, qui sont très peu banals, hein, à qui le leadership, qui doit l'assumer, sur une chose aussi simple que le solaire passif finalement?

M. Bourassa (André): Bien, soyez certain qu'on travaille, à travers nos programmes de formation, beaucoup pour faire ça. Cependant, énormément de projets de résidences, évidemment, sont faits sans architecte concerné par les questions environnementales, c'est certain, puisque ce n'est pas dans le champ réservé aux architectes, loin de là, l'habitation. Donc, tout ce qui s'appelle résidentiel unifamilial, le leadership, au niveau des conseils... il y a un seul endroit où il y a un permis qui s'émet, je vous le rappelle, ce sont dans les municipalités. Alors, c'est clair qu'on offre de la formation aux inspecteurs municipaux, par la COMBEQ notamment et autres organismes, mais, au-delà de ça, un inspecteur municipal ne pourra pas refuser un permis parce que les fenêtres sont au nord.

Il faut que je vous rappelle de façon plus concrète, dans une conférence que je donne sur les mythes et réalités de l'architecture environnementale, que toute la rive sud du Saint-Laurent, les terrains, qui sont très chers payés, le long du Saint-Laurent ont des vues au nord, sur le fleuve. Essayez de me dire qu'on ne mettra pas de fenêtre au nord quand on a une vue sur le fleuve qu'on a payée si cher, il faut quand même faire la part des choses, là, O.K.? Alors, on a toujours des contextes, toutes les maisons au bord des lacs, qui ont la vue sur le lac, que la vue sur le lac soit est, sud, nord ou ouest, on voudra avoir la vue sur le lac. Alors, c'est à nous de trouver des solutions imaginatives, à ce moment-là. Et on a beaucoup de plaisir à le faire. Oui, Jean-Pierre.

Le Président (M. Dubuc): M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Moi, j'aurais aimé vous entendre: La géothermie, là, ça prend quelle grandeur de terrain pour une résidence? Je vais vous poser trois petites questions, parce que je sais que je n'ai pas beaucoup de temps, ça fait que peut-être que vous allez avoir le temps de me répondre. Je voudrais avoir ça, sur la géothermie, là, une maison privée, quelle grandeur de terrain que ça prend pour installer ça chez eux? Après ça, est-ce que vous avez déjà pensé à récupérer l'eau, l'eau de pluie? Je sais qu'il y a des gens qui récupèrent ça présentement et ont un système, toute l'eau qui tombe sur la maison, ils la récupèrent. Et puis, l'énergie solaire, est-ce que vous avez déjà regardé ça?

M. Bourassa (André): Alors, pour le premier point, la géothermie, la réponse est facile, c'est que dans 5 pi par 5 pi vous avez assez grand de terrain pour creuser plein de puits diagonaux pour chauffer une immense maison. Donc, à ce niveau-là, la grandeur du terrain, ce n'est pas un critère. Il se fait de la géothermie verticale, de la géothermie horizontale. Évidemment, plus le terrain est cher... La géothermie horizontale, c'est quelque chose que personnellement je ne recommande pas. On ne va pas... Ce terrain-là, on ne pourra pas l'utiliser à d'autre chose. Donc, la géothermie verticale prend très, très peu d'espace, et c'est amplement suffisant. Un terrain de banlieue de 60 pi par 100 pi, n'importe quoi, c'est amplement suffisant pour ça. O.K.? Donc ça, c'est très facile.

L'eau de pluie récupérée, une modification des codes à cet égard-là pourrait être très intéressante. Il faut comprendre que normalement la gestion des eaux grises, la gestion des eaux noires, ce qu'on appelle, vous comprenez, je pense, assez bien de quoi on parle, l'eau des toilettes puis l'eau de la laveuse et de la douche, ce n'est pas la même chose. Donc, ça devrait pouvoir se traiter différemment. Le Q-2, r.8, le règlement provincial en cette matière, pourrait permettre, je pense, des applications beaucoup plus novatrices à cet égard-là.

Quand vous avez parlé, tout à l'heure, des pratiques qui sont longues à changer, la récupération de l'eau, c'en est un exemple. Et il faut comprendre aussi que nos inspecteurs municipaux, à qui incombe la responsabilité en matière d'environnement puis de traitement des eaux, ils sont extrêmement frileux à cet égard-là. Ils ne veulent pas ramasser une responsabilité de solutions qui seraient trop alternatives. Il faut les rassurer puis il faut les encadrer là-dedans. Ils ont besoin de support, beaucoup.

Je vous rappelle, sur la question des eaux et du traitement des eaux, qu'aujourd'hui on a des urinoirs qui ne nécessitent même pas d'eau. Et c'est très écologique, ça fonctionne super bien. Nous, on a utilisé ça dans plusieurs projets, et ça fonctionne. Imaginez, juste ça, juste sur l'île de Montréal, toute la question de traitement des eaux, les effluents qui ne sont pas convenablement traités au bout de l'île. On ne peut pas dire que la densification de la population sur l'île de Montréal est absolument écologique; oui si on considère le moindre déplacement des transports, mais non si on considère que les effluents ne sont pas suffisamment traités dans ce secteur-là. Comprenez-vous? Au bout de l'île, les gens de Sorel vous en parleront. On a un travail à faire, de ce bord-là, qui est important. Si c'est de changer des cabinets de toilette sur l'île, on en parlera. Mais on a un travail considérable à faire, et je ne me... personnellement, je n'accepte pas qu'on assimile concentration urbaine sur l'île à écologie. Oui par rapport au non-étalement, mais non par rapport à la façon dont c'est traité là. Dans nos villages, dans nos petites communautés, au Saguenay, vous avez des étangs d'épuration, vous devez vous occuper des eaux usées beaucoup plus que c'est fait en ce moment sur l'île de Montréal.

Alors, je pense qu'à ce niveau-là il y a beaucoup de travail à faire. J'ai digressé un peu de l'eau de pluie, mais c'est clair qu'au niveau des codes et des pratiques il y a beaucoup de travail à faire. Et en ce sens-là, les projets de démonstration, je vous le dis, par rapport à la main-d'oeuvre, c'est extrêmement important de se promener sur le territoire du Québec et d'organiser des formations pour montrer comment ça peut fonctionner. Prenez juste l'exemple de la ventilation mécanique obligatoire, les VRC dans les résidences, c'est une pratique extrêmement laborieuse à changer, parce que les installations de ces choses-là ne se font pas aussi aisément qu'on aimerait.

Votre dernier point était...

M. Grondin: L'énergie solaire.

M. Bourassa (André): Le solaire. Bien, évidemment, il faut distinguer ce qu'on parle, quand on parle du solaire actif ou du solaire passif. Les journalistes souvent nous interpellent en nous disant: Pouvez-vous venir nous donner des exemples de maisons solaires, de bâtiments solaires? Oui, normalement je suis au Japon, en février, pour aller voir des maisons solaires, à énergie zéro, mais à quel coût? Les maisons, ici, on veut les payer encore sur une génération, mais dans beaucoup de pays dans le monde on paie les maisons sur trois générations parce que le bungalow coûte 400 000 $. Alors, ce n'est pas la...

Le Président (M. Dubuc): Très rapidement. On va laisser la parole au ministre.

M. Bourassa (André): Bien sûr.

Le Président (M. Dubuc): Si vous voulez conclure rapidement, s'il vous plaît.

M. Bourassa (André): Oui, conclure que le solaire, le premier solaire, finalement c'est le solaire passif, c'est le solaire des fenêtres bien orientées, comme vous l'avez dit, ce n'est pas d'installer les panneaux solaires pour faire fonctionner un séchoir à linge à 5 000 W. C'est beaucoup plus simple que ça. La corde à linge, ça reste un équipement solaire majeur.

Le Président (M. Dubuc): Merci, M. le président. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Mulcair: ...symbole de la marche à laquelle j'ai pris part samedi à Montréal, tout le monde portait une épingle à linge.

Je voulais vous remercier, parce que non seulement le mémoire était extrêmement important, mais ce qui est tellement rafraîchissant de vous entendre, il y a quelques groupes qui nous ont marqué, comme vous ce soir, de dire: Regardez plus large, là. Ce n'est pas un truc. Pensez à l'étalement urbain, oui, mais pensez à l'effet sur les effluents à Montréal. C'est cette pensée, c'est avoir ces éléments-là, quelque chose de plus large. Comme le Centre québécois du développement durable était ici, il prêchait la même chose. Les gens qui sont venus nous voir, du centre universitaire, c'était la même chose, sur le cycle de vie. Pensez plus large. Il y a toutes sortes d'éléments qu'il faut regarder en même temps.

n(20 h 40)n

Vous me voyez heureux surtout de vous entendre parler des toits verts, parce que tu te sens presque un hérétique. Moi, je viens d'une très grande famille, je viens d'une famille de 10 enfants, donc on a tous travaillé fort toute notre vie, et j'étais très jeune, j'ai fait des toits, moi, pendant quatre étés: des toits asphalte et gravier. O.K.? C'est très chaud sur les toits en été, quand on pose l'asphalte et le gravier, mais, moi, je sais ce que c'est un mauvais toit au Québec. J'ai remplacé des toits notamment à Loyola College, dans l'ouest de la ville, qui n'avaient pas six ans, tout était pourri en dessous. Alors, je sais que c'est intéressant aux États-Unis, sous certains climats, mais, ici, je suis loin d'être certain que c'est génial, mais il y a des gens qui poussent tellement fort là-dessus que tu dis: Bah! peut-être que j'ai manqué quelque chose. Non, mais maintenant je peux au moins citer le président de l'Ordre des architectes qui, lui, est un sceptique aussi, ça, je suis bien content. Dommage que vous n'étiez pas là pour le groupe avant, parce que vous avez parlé de carottes et poireaux, on avait l'UPA juste avant vous.

Mais, en terminant, le député de Lac-Saint-Jean a mentionné... C'est sûr que le projet de loi est un peu subversif, parce qu'il indique la voie à venir pour le gouvernement. Donc, quand on va établir les règlements, il va falloir que ça tienne compte de ce qu'eux viennent dire et de ce que tu viens de dire, et pour le compteur qui tourne dans les deux sens et pour ce qu'eux viennent de dire pour les normes. C'est ça, inculquer et imposer cette vision du développement durable à toutes les étapes de l'administration, d'avoir cette stratégie qui respecte l'ensemble de ces principes. C'est ça. «In a nutshell», c'est ça. Alors, je ne peux pas vous remercier assez, vous ne savez pas à quel point c'est important, votre présence et votre apport ici aujourd'hui. Merci beaucoup.

Le Président (M. Dubuc): Merci, M. le ministre. Merci, messieurs de l'Ordre des architectes du Québec, et, votre mémoire, c'était vraiment bien présenté. Merci. Je vais suspendre les travaux pour quelques secondes.

(Suspension de la séance à 20 h 42)

 

(Reprise à 20 h 43)

Le Président (M. Dubuc): Je demanderais au Fonds d'action québécois pour le développement durable de bien s'approcher, s'il vous plaît.

Merci de votre présence. Je vous remercie de présenter vos mémoires. Si vous voulez bien vous présenter.

Fonds d'action québécois pour le
développement durable (FAQDD)

Mme Labrecque (Sophie): Oui. Bonjour, je vais me présenter tout d'abord, je suis Sophie Labrecque, la directrice générale du Fonds d'action québécois pour le développement durable, appelé le FAQDD pour les intimes, et je serai accompagnée de Nicolas Girard, chargé de projet et responsable des communications au FAQDD. Nous n'avons pas déposé un nouveau mémoire, nous nous basons sur le mémoire qu'on a présenté pour la consultation, mais nous allons commenter nos recommandations, qui sont sensiblement les mêmes, à part quelques petits défis qu'on va vous soumettre aujourd'hui.

Le Président (M. Dubuc): Merci. J'aimerais tout simplement vous dire que vous avez 15 minutes de présentation, 15 minutes du côté ministériel puis 15 minutes sur l'opposition. Allez-y. Merci.

Mme Labrecque (Sophie): Parfait. Merci. Alors permettez-moi d'entrée de jeu de vous présenter le Fonds d'action québécois pour le développement durable, acronyme que vous avez, le FAQDD, acronyme qui vous a sûrement été cité lors de la présente consultation, à maintes reprises, nous l'espérons.

On peut dire que nous sommes l'organisme qui peut témoigner des actions concrètes en développement durable au Québec, et vous allez comprendre pourquoi. Le FAQDD est un organisme à but non lucratif qui s'est vu confier par le gouvernement du Québec, en mars 2000, une enveloppe budgétaire de 45 millions de dollars pour favoriser par ses actions et ses interventions le développement et la connaissance dans le domaine de l'environnement et du développement durable. Notre mission, qui ressemble un peu au Fonds vert, à celle développée par le Fonds vert, est de susciter et de soutenir financièrement des projets porteurs et structurants qui, dans une optique de développement durable, visent à modifier les pratiques et à changer les comportements individuels et collectifs. Étant donné la nature même du développement durable, le FAQDD favorise le partenarait pour la réalisation des projets. Vous allez voir qu'on se démarque en ce sens.

Nous allons modifier un peu le contenu qui est dans le mémoire en le bonifiant, parce qu'on a accepté dernièrement des nouveaux projets. Alors, vous allez voir l'ampleur de notre action.

Depuis la création et les lancements de ses programmations, le FAQDD a analysé plus de 1 048 demandes, dont la valeur totale de celles-ci s'élèvent à 264 millions, si on avait eu l'argent bien sûr pour tout soutenir ces projets-là. De ce nombre, ont été financés 170 projets, 121 bourses, 102 stages, pour un investissement total de 38 millions de dollars. Puis, la force de notre stratégie, c'est qu'à chaque dollar qu'on ajoute il y a un investissement supplémentaire qui est fait par le milieu, et ça représentait 63 millions de dollars. Les projets qui ont reçu l'appui du FAQDD se sont réalisés dans 16 des 17 régions du Québec, et on a touché pas moins de 13 thèmes environnementaux. Nous avons donc rejoint pour ce faire 108 OBNL, 15 municipalités, 16 entreprises et 15 institutions d'enseignent, plus 10 centres de recherche.

Fort des impacts qu'on a soutenus et les projets qui ont généré beaucoup de création d'emplois, plus de 800 emplois, le FAQDD agit en véritable catalyseur pour les acteurs du milieu et les intervenants de la société civile, qui deviennent à leur tour des porte-parole et des partenaires multiplicateurs pour transmettre les valeurs du développement durable. Alors, on peut dire que notre expertise au cours des années... on a développé des mécanismes rigoureux d'analyse de projets, et qui sont effectués par des analystes avec en support un code d'éthique, une grille d'analyse validée et reconnue par des spécialistes. Et nous avons aussi l'aide de l'équipe des gens du ministère, qui apportent leur objectivité et leur expertise complémentaire pour certains dossiers que l'on juge pertinent de faire analyser en supplémentaire. Donc, ça fait de nous des gens qui sont habitués d'analyser et de bien servir la communauté. Bien entendu, au final du processus d'attribution, vous aurez compris que la demande est beaucoup forte et dynamique et qu'il n'y a que quelques élus.

Le FAQDD a, depuis cinq ans, établi des mécanismes de reddition de comptes assujettis aux obligations du ministère, ce qui en fait un organisme crédible, avec une saine gestion et une saine gouvernance. Nous avons été très visionnaires, au FAQDD. Donc, en 2003, le Fonds d'investissement pour le développement durable, le FIDD, a été créé. Cette semaine, mardi le 6 décembre, nous avons annoncé une collaboration avec les partenaires, le Fonds de solidarité de la FTQ, le Fondaction, le Fonds de développement de la CSN ? et M. Mulcair était là bien entendu ? et nous avons annoncé une augmentation de la taille du fonds, qui est passé de 18 millions à 38 millions. Ce que je veux vous faire remarquer dans ces principes du FIDD, c'est qu'il agit en tant qu'investisseur responsable tant au Québec qu'à l'international et qu'il va soutenir des projets de réduction de gaz à effet de serre.

Qu'est-ce que ça fait comme répercussions positives et impacts pour le FAQDD? Le FAQDD, c'est nous, hein, et FIDD, c'est le Fonds d'investissement, et le Fonds d'action québécois pour le développement durable, c'est nous. Donc, un premier investissement, c'est que ça élargit notre perspective, ça stimule les changements de comportement auprès une clientèle stratégique, les PME, qu'on va tenter de récupérer un peu plus tard pour grossir ou diversifier nos stratégies de financement et qui représentent une part importante du secteur économique québécois, afin qu'ils s'attaquent à ce défi crucial.

La deuxième conséquence positive, c'est que les bénéfices qui vont être générés plus tard par le FIDD vont nous revenir. C'est une contribution de l'ordre de 8 millions. Et, quand ça va nous revenir, on va le réinvestir, au Québec, dans des projets portés par des acteurs terrain en développement durable, soit des organismes à but non lucratif, des municipalités et des coopératives. Donc, vous voyez qu'on a un très grand impact sur le terrain.

n(20 h 50)n

Le cycle de vie, nous l'avons financé au tout départ. Nous avons, par le biais du FAQDD, nous avons permis que cette spécialité devienne une appropriation québécoise. Et c'est à partir du premier financement qui a été fait par le FAQDD, qui a été repris par le FIDD pour en faire ce que vous connaissez maintenant, l'approche cycle de vie, qui est reconnue maintenant par le Programme des Nations unies pour l'environnement... Ça, c'est un exemple, mais je pourrais vous en citer 170, exemples, parce qu'on a 170 projets qui ont été porteurs et qui ont eu des impacts.

Donc, ce qu'on veut vous dire, c'est que le FAQDD met à la disposition du gouvernement du Québec l'expertise acquise au cours des cinq dernières années et doit être reconnu comme un partenaire actif dans le Plan de développement durable du Québec et le Fonds vert. Il est important de bâtir sur ces acquis qui ont permis à la société québécoise d'entreprendre sa démarche vers le développement durable. Nous pouvons conclure que le FAQDD est un conseiller de choix. On pourrait vous citer quelques exemples à l'international, où les gens du terrain viennent conseiller les gouvernements. Un acteur indispensable pour le gouvernement est le déploiement du Fonds vert, en ce sens qu'on pense que le gouvernement du Québec doit miser sur les organismes déjà en place pour susciter l'intérêt et l'engagement de tous vers le développement durable, et ça, en tenant compte d'un échéancier très serré.

Je vais vous donner quelques exemples concrets. On a permis de soutenir des initiatives qui ont été vraiment porteurs de sens, puis je veux juste vous illustrer quelques exemples pour que vous ayez en tête un peu l'impact du FAQDD. Donc, nous avons travaillé avec les jeunes dans les établissements scolaires de niveau primaire et secondaire. On a financé, pour ce faire, deux projets: La terre dans votre assiette, Des idées en l'air, qui étaient faits par le mouvement des Écoles vertes Brundtland. Nous avons informé et sensibilisé le grand public par des campagnes sur le développement durable, et on l'a fait par le soutien de la campagne Sans pesticides, naturellement, développée par la Coalition pour une alternative aux pesticides. Nous avons aussi mis en place des infrastructures pour donner à la population un accès à des milieux naturels dans un encadrement instructif. Pour ce faire, on a soutenu le Centre nature du mont Saint-Hilaire, qui gère la réserve de la biosphère du mont Saint-Hilaire, là, qui est reconnue par l'UNESCO.

Le Président (M. Dubuc): Vous allez m'excuser, Mme la directrice, Mme Labrecque, on doit suspendre les travaux une vingtaine de minutes pour aller voter. Il va vous rester environ sept minutes encore de votre temps.

Mme Labrecque (Sophie): Ça va me faire plaisir.

Le Président (M. Dubuc): On est de retour dans 15 à 20 minutes. Merci.

(Suspension de la séance à 20 h 53)

 

(Reprise à 21 h 11)

Le Président (M. Dubuc): On reprend nos travaux. Mme Labrecque, il vous restait sept minutes...

Mme Labrecque (Sophie): Il me restait 15 minutes.

Le Président (M. Dubuc): Pardon?

Mme Labrecque (Sophie): Ha, ha, ha!

Le Président (M. Dubuc): On va aller à sept. On vous laisse la parole.

Mme Labrecque (Sophie): Alors, j'étais rendue à vous présenter... Voulez-vous que je fasse une récapitulation? Non, ce n'est pas nécessaire. Mais juste vous dire que, fort de toutes nos actions... j'avais commencé à vous présenter des exemples de projets qui ont été vraiment porteurs puis que vous entendez sûrement parler par les temps qui courent.

Donc, nous avons financé des projets avec les jeunes pour le mouvement des Écoles vertes Brundtland. Nous avons fait aussi des campagnes d'information, de sensibilisation grand public en soutenant la campagne sans pesticides naturels, la Coalition pour une alternative aux pesticides. Nous avons aussi aidé et soutenu des infrastructures qui visaient à donner à la population un accès à des milieux naturels dans un encadrement instructif. Donc, je rappelais le Centre nature du mont Saint-Hilaire, qui gère la biosphère du mont Saint-Hilaire, reconnue par l'UNESCO; soutenu de nouvelles techniques et technologies environnementales: on a été à la base du projet pilote de CO2 Solution, pour la première mise à l'essai de cette technologie, au cégep de Lévis-Lauzon.

Nous avons aussi soutenu le maillage entre les universités et le secteur privé afin de mieux orienter la recherche. Donc, on a été à la base de la première étape de la concertation pour la recherche universitaire sur les matières résiduelles, du Centre d'expertise sur les matières résiduelles. Aussi, nous avons développé, aidé et soutenu à développer des outils de consultation et d'intervention qui visaient à appuyer la démarche des municipalités. En ce sens, je rappelle qu'on a été aussi à l'origine du soutien d'Agenda 21, du Centre québécois du développement durable, qui eu beaucoup, beaucoup d'impact, notamment au Saguenay et à Sorel, le Plan de développement durable, la collectivité montréalaise... des indicateurs de performance. Notamment, dans la loi, vous proposez d'avoir des indicateurs de performance et des statistiques. En ce sens-là, c'est un bon exemple, soutenu par le Conseil régional de l'environnement de Montréal ainsi que la ville de Montréal; et on a aussi travaillé pour la conservation des milieux humides de la Communauté métropolitaine de Québec, Canards Illimités.

Et puis, bien, j'ajouterais quelque chose qui nous tient beaucoup à coeur aussi. On a soutenu la mise en place d'une première formation spécialisée en développement durable, multidisciplinaire, de deuxième cycle universitaire, par le DESS, en écoconseil, de l'Université du Québec à Chicoutimi. Je pense que vous avez déjà reçu la Chaire en écoconseil, d'ailleurs, ici. Et puis on a soutenu aussi 18 démarches, inspirées par 13 organismes du ROBVQ, là, qui est reconnu par le gouvernement pour la gestion des bassins versants.

Je vais tenter d'aller plus rapidement. Ce qu'on voulait vous dire, c'est que, nous, on est d'accord avec le projet de loi n° 118. On est d'accord que des surplus du Fonds vert soient indépendants du ministère des Finances, que la définition que vous proposez, qui est celle de Brundtland, nous, ça nous convient, puisqu'elle est reconnue au niveau international et qu'elle fait consensus aussi au Québec. Nous, on est... Cependant, on voudrait vous préciser qu'on ne voudrait pas que le développement durable devienne un thème fourre-tout, et puis on souhaite que la stratégie de... d'indicateurs, des statistiques précises, on trouve que c'est une excellente idée; que le concept de développement durable, notamment aussi dans le Fonds vert, doit prendre en considération les trois pôles intégrés de la définition, là, il ne faut pas que ce soit isolé, soit la protection de l'environnement, l'équité sociale et l'économie. La nomination du commissaire, ça nous convient, en autant que ce soit un suivi rigoureux de tous les processus, que ce soit encadré et que ça permette de se diriger vers une société intégrant pleinement les principes du développement durable. Nous reconnaissons que le ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs doit absolument avoir un rôle majeur dans le déploiement du plan d'action.

Cependant, nous sommes un peu déçus d'avoir constaté, dans le nouveau projet de loi, que vous avez évacué la partie de levier... de diversification des fonds. Alors, je vous ramènerais à l'article 11.2°, où vous dites que «les mécanismes mis en place pour susciter la participation des différents intervenants de la société civile»... nous, on pense que c'est extrêmement important; et le point 15.1, où, dans la définition, vous dites que, pour réaliser le Fonds vert, on doit prendre en compte «un soutien financier, notamment aux municipalités et aux organismes sans but lucratif oeuvrant le domaine de l'environnement». Donc, les sommes, on n'est pas contre les stratégies concernant les sommes, mais on trouve que vous devriez aussi permettre une certaine ouverture, d'avoir une vision plus large, pour diversifier, là, la partie 15.4.2°, les dons, les legs et autres contributions versées pour la réalisation des objets du fonds. Nous, on pense que, par notre expertise de cinq ans, on a été capables d'ajouter l'argent du terrain et on pense qu'on serait capables de faire un second effet de levier majeur pour pouvoir intéresser, mobiliser et passer un message positif, qui soutient les valeurs du développement durable. On a réussi depuis cinq ans, puis on pense qu'on est très bons pour jouer ce rôle.

Le Président (M. Dubuc): Excusez-moi, Mme Labrecque, si vous voulez conclure rapidement, s'il vous plaît.

Mme Labrecque (Sophie): Alors, je voudrais vous dire qu'en ce sens-là... J'en aurais long à dire, alors je vais conclure en disant que nous pensons que nous sommes un partenaire majeur pour déployer les stratégies du Fonds vert, que le FAQDD entend mettre en place des mécanismes nécessaires et qui sortent de l'ordinaire pour assurer la pérennité des actions en développement durable auprès de la société, et qu'on sera à même de lui présenter sous peu un plan d'action visant l'intégration de partenaires et de citoyens désireux de poursuivre la mission du FAQDD en complémentarité avec des stratégies gouvernementales. Le FAQDD est un partenaire incontournable, un levier de choix pour l'intégration du développement durable au Québec. On peut donc affirmer que nous sommes fiers de briller parmi les meilleurs.

Le Président (M. Dubuc): Merci, Mme Labrecque. M. le ministre.

M. Mulcair: J'aime beaucoup le dernier bout de phrase, on devrait en faire un slogan! C'est comme: PQ, zéro, libéraux, Kyoto.

Mme Labrecque, avec la permission de mon collègue du Lac-Saint-Jean et de Beauce-Nord, je vais laisser aussi M. Léopold Gaudreau intervenir aussi, parce qu'il y a un bout dans votre présentation où on n'est pas sûrs d'avoir saisi toutes les nuances de votre propos. C'est en ce qui concerne la diversification des fonds. Vous avez exprimé votre accord avec le projet de loi, vous avez suivi les amendements, puis vous avez dit qu'il y a quelque chose qui a disparu. On n'arrive pas à saisir.

Mme Labrecque (Sophie): En fait, ce n'est pas tellement que la dimension a disparu, c'est qu'on ne le sent pas dans les enlignements que vous allez donner à travers le Fonds vert. Donc, vous avez l'eau, la gestion des matières résiduelles, et, nous, on pense que vous devriez isoler à l'intérieur du Fonds vert une partie très, très spécifique, dédiée aux organismes à but non lucratif, qui ont une mobilisation, la société civile, qui ont un pouvoir démocratique, un pouvoir économique beaucoup plus grand maintenant que par le passé. C'est sûr qu'ils sont intégrés dans les différents volets que vous avez identifiés, mais, nous, on pense qu'on devrait ou qu'il devrait exister une partie qui permettrait à des organisations telles que le FAQDD ou d'autres organisations d'aller faire un effet de levier, c'est-à-dire d'aller vous proposer des actions qui permettraient d'ajouter de l'argent extérieur ou de se servir du Fonds vert pour se déployer différemment, pas juste dans les actions que vous avez précisées.

n(21 h 20)n

M. Mulcair: Il y a beaucoup de livres qui ont été écrits sur les différentes techniques de rédaction législative. Je peux vous référer notamment un bon livre, par Michel Sparer et Wallace Schwab, sur la rédaction des lois, publié dans les cahiers du Conseil de la langue française à l'époque. Ils expliquent souvent qu'il y a une tendance rédactionnelle dans les pays de juridiction anglo-saxonne, où on tend vers une assez longue énumération, mais on se bute souvent à certaines règles d'interprétation qu'on exprime en latin, tantôt ejusdem generis, tantôt expressio unius est exclusio alterius.

Si on commence à faire une telle énumération, on risque d'être astreint à rester dans le genre qu'on a exprimé, pour ce qui est de la première expression. Pour ce qui est de la deuxième, le fait d'exprimer les uns présuppose implicitement que tu es en train d'exclure d'autres. C'est pour ça qu'en rédaction dite civiliste, française, on a tendance à avoir une rédaction large qui permet d'atteindre un certain but. C'est ce qui est prévu ici.

Pour le dire dans les termes les plus simples, ce n'est pas exclu, ce que vous étiez en train de dire...

Mme Labrecque (Sophie): Non.

M. Mulcair: ...mais, si on commence cet exercice-là... Je parlais tantôt avec Me St-Martin, à un autre chapitre, que certaines personnes voudraient voir tel groupe ou telle chose ici. Si on fait ça, ça peut faire plaisir au groupe qu'il est en train de dire là, mais implicitement les autres qui n'auraient pas été ajoutés pourraient, par interprétation, être considérés comme n'étant pas là, et de un; et de deux, comment tu fais une énumération exhaustive, à ce moment-là? Alors, c'est un piège rédactionnel qu'on tend à éviter avec une rédaction plutôt large.

Il ne faut pas perdre de vue que c'est le cadre, ça, en anglais, le «framework», hein? Ça, c'est la charpente de ce qu'on est en train de faire. Tomber trop dans une rédaction détaillée, je pense, risque de nous jouer un tour plus tard, quitte à faire plaisir dans l'immédiat, mais, lorsque ça viendra le temps de l'interpréter, je ne suis pas sûr qu'on ne serait pas en train de se jouer un tour.

Mais je m'engage à le regarder de très près avec les gens qui m'accompagnent, parce que le but est certainement celui-là.

Mme Labrecque (Sophie): Je pense que ce serait tout à votre honneur de lancer aussi un message positif, dans le sens de... une espèce de... «La société civile», il ne faudrait pas que ça devienne un mot fourre-tout, mais qu'on puisse le sentir aussi à l'intérieur du projet de loi, un peu plus que juste dans les grands thèmes ou les grandes stratégies.

Donc, nous, si vous le dites que vous le prenez en compte, on est bien heureux de cette position-là. Cependant, c'est notre devoir de vous mentionner qu'à la lumière des 1 048 demandes qu'on a reçues on est à même de vous dire qu'il y a beaucoup de potentiel au Québec, puis qu'on se positionne à l'international de par l'expertise qui est ici.

Donc, vous savez, l'économie, c'est basé sur trois pôles, et nous pensons maintenant que les organismes à but non lucratif et le tiers-secteur viennent aussi jouer les forces vives aussi et sont capables de tirer leur épingle du jeu maintenant. Et puis, on a juste à constater à quel point les citoyens font changer les pratiques commerciales de plein de compagnies. Donc, on n'est plus dans... Peut-être aussi apporter un nouveau point: on n'est plus dans la stratégie de convaincre du développement durable; les gens sont déjà convaincus, on est déjà dans une espèce de rythme, de mouvement, et on pense qu'en passant par le FAQDD aussi, si vous... on est prêts à jouer un rôle de conseiller et de partenaire, on est prêts à supporter ces efforts-là, et on pense qu'on serait capables d'accélérer le plan d'action ou de supporter ce rythme de déploiement du plan d'action. Donc, c'est en sens-là que j'apportais la solution tout à l'heure.

M. Mulcair: Bien. Alors, je vais passer à mon collègue du Lac-Saint-Jean et revenir avec une dernière question de notre côté, M. le Président.

Le Président (M. Dubuc): M. le député du Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Oui. Merci. Bravo pour le travail que vous faites, c'est vraiment fantastique et inspirant.

Vous parlez d'inclure la... Au moment où, après ce projet de loi là, le gouvernement devra établir la stratégie et les indicateurs de développement durable, comment voyez-vous que la société civile, notamment des gens comme vous qui avez acquis une expertise, puissent être inclus dans la démarche? Est-ce que, pour vous, une commission parlementaire s'avère un véhicule efficace, ou un comité de sages, ou... Est-ce que vous avez réfléchi à cette formule? Parce que je pense que, comme le ministre l'a dit, si, aujourd'hui, nous sommes en train de faire la charpente, la fondation, il reste beaucoup de travail à faire, énormément de travail à faire, je dirais.

Et, pour la suite des choses, est-ce qu'une commission parlementaire, à votre sens, c'est suffisant, compte tenu qu'on vous propose quelque chose, vous faites quelques commentaires, et ça finit là? Ou bien donc vous pensez que, comme dans certains États dans le monde, il serait préférable d'avoir une espèce de comité de sages ou d'experts pour aider le gouvernement?

Mme Labrecque (Sophie): Oui. C'est une question extrêmement pertinente. Moi, je pense que la commission... C'est important que vous écoutiez ce qu'on a à dire. Moi, je pense que vous le faites très bien, puis on se sent bien dans cette formule-là aussi. Ce qu'on peut vous dire aussi, c'est que, nous ? c'est exactement pour ça que je disais dans l'autre étape ? je sais que les organismes à but non lucratif vont être ciblés à travers toutes les stratégies, là, j'en suis bien consciente, mais, nous, à la FAQDD, ce qu'on voulait vous mettre en évidence, c'est toute la qualité de l'expertise, de l'analyse jusqu'au suivi, et la capacité de mobilisation aussi de toute cette force vive là qui travaille sur le terrain au niveau du développement durable.

Donc, on pourrait, à un autre processus de consultation, quand on sera rendus dans les indicateurs... ou en support à titre de conseiller... Je pense qu'il y a un organisme à but non lucratif, tel que nous, qui fait le même travail au niveau de la France, qui agit à titre de conseiller, qui supporte, là, certaines décisions, qui mobilise les gens pour être capable de supporter le gouvernement dans ces prises de décision là. Donc, on pourrait jouer un rôle à ce niveau-là, et ce serait très bien de le faire aussi.

Le Président (M. Dubuc): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Quand on parle d'indicateurs et de stratégie, s'il y en a qui savent c'est quoi, c'est bien vous, puisque, quand vous analysez un projet quelconque, vous devez le regarder avec la lunette du développement durable. Quelqu'un, aujourd'hui, est venu nous dire qu'il serait pertinent, compte tenu que, dans le projet de loi, la première année établit la stratégie et, la deuxième année, les indicateurs... Pensez-vous que les deux pourraient être menés de pair et se faire en même temps?

Mme Labrecque (Sophie): Nous, on se base sur les indicateurs pour analyser les stratégies. Donc, on se trouve à faire comme un peu l'inverse, au niveau du FAQDD. C'est-à-dire qu'on est partis d'une multitude de grilles qui existaient, on l'a fait valider par des conseillers, des professeurs, Claude Villeneuve, etc., bon, des gens qui sont très, très reconnus dans le milieu du développement durable. Ce qu'on a fait, c'est qu'on peut, à partir de là, pouvoir influencer les stratégies, pouvoir aider les gens puis les soutenir, parce qu'on travaille en partenariat. Moi, je pense que c'est interrelié. Parce que vous allez sûrement faire évoluer avec cette loi-là, vous allez... c'est ça, vous allez probablement innover, changer les paramètres et influencer, à la lumière de tous les gens qui sont venus présenter les points ici. Et, moi, je pense que ça doit être interrelié.

Le Président (M. Dubuc): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Comment croyez-vous que va se faire, peut se faire la cohabitation entre la FAQDD et le Fonds vert? Tout à l'heure, vous avez parlé que le Fonds vert pourrait être une espèce de levier supplémentaire à ce que vous faites, n'est-ce pas?

Mme Labrecque (Sophie): Oui. Alors, nous, comme vous le savez, on a reçu une enveloppe de 45 millions en l'an 2000 pour faire ce plan-là; ça se termine. Mais on pense qu'à la lumière de l'expertise qu'on a apportée on a été capables de travailler en collaboration avec le ministère, mais en étant très, très dynamiques, selon les paramètres, les conventions qui avaient été établies. On pense qu'on serait capables, à l'intérieur du Fonds vert, de reproduire un autre système où on serait capables de rendre ça un peu plus dynamique, en ajoutant l'apport de capitaux privés, ou l'apport de capitaux extérieurs, ou l'apport de capitaux des gens du milieu. Les gens ont besoin d'effet levier, ils sont prêts maintenant à mettre... à investir.

Vous avez donné l'exemple auparavant avec les architectes en disant: Il faut faire une nouvelle façon de faire pour bâtir une maison. Mais les gens sur le terrain ont une nouvelle vision du développement durable, ils l'ont expérimentée, il y a des groupes qui se sont illustrés, on ne part pas de zéro. Donc, on pense qu'on est capables de redynamiser tout ce partenariat-là, et que ce soit pris en compte, puis que ce soit plus identifié ou plus mis en avant-plan justement. Et je pense que ça, ça donnerait un bon message d'encouragement, aussi, que le fonds se déploie ou se... grossit ou ait plus d'impact aussi au niveau du Québec.

n(21 h 30)n

M. Tremblay: Dans votre proposition 2, vous écrivez: «Que chacun des ministres désigne, au sein de chaque ministère et organisme, une personne de haute autorité responsable du dossier du développement durable.» J'aimerais ça vous entendre et j'aimerais ça aussi que le ministre vous entende, parce que je... Plusieurs intervenants se posent la question: Comment le ministre de l'Environnement arrivera à influencer tous les ministères, quand on sait... d'autant plus que tout le monde ici, sur la colline, travaille en silo? Quand vous dites «une personne», est-ce que ça voudrait dire qu'il faudrait nommer... chaque sous-ministre, par exemple, deviendrait responsable, ou ce serait un répondant, ou comment vous voyez ça?

Mme Labrecque (Sophie): Je serais portée à vous retourner la question: Est-ce que vous comprenez de notre point? Mais, nous, on pense que, dans chacun des ministères, ça peut pas... c'est pas, la structure n'est pas la même. Donc, on pense qu'on doit quand même nommer un responsable qui se sent imputable de bien déployer la politique en fonction des stratégies du ministère. Mais, d'un ministère à l'autre, c'est sûr que ce ne sera pas les mêmes... nécessairement les mêmes stratégies, compte tenu des thèmes ou des dossiers qui sont en cours. Mais, vous le savez, c'est comme n'importe quoi, hein, si vous êtes 15, à une soirée, à accueillir des gens, puis il n'y a pas personne qui est responsable, à un moment donné vous allez jaser puis il n'y a personne qui va accueillir les gens.

Donc, à un moment donné, il faut être capable de nommer quelqu'un de façon importante pour faire une différence et faire écho aux gens du terrain. Parce que les gens qui s'adressent au ministère doivent sentir que la politique va vraiment être déployée au niveau du développement durable, puis qu'il y ait une reconnaissance aussi dans chacun des ministères ou dans chacune des fonctions. Donc, on ne sait pas si c'est un... Nous, ce qu'on suggérait, ce serait quelqu'un qui serait de haut niveau naturellement, le plus possible, pour que ce soit pris au sérieux, que ce soit respecté et que ce soit intégré dans le ministère. Mais c'est sûr que chaque ministère peut avoir un déploiement différent, mais on pense que c'est important.

Le Président (M. Dubuc): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Bien, parce que je me pose la question. C'est sûr que l'idéal, ce serait que chaque sous-ministre, et même à la rigueur chaque ministre, soit... ait une compréhension totale de ce que c'est, le développement durable. Sauf que là, si tous les sous-ministres... je ne crois pas que tous les sous-ministres actuellement dans l'appareil gouvernemental auront la même passion que M. Gaudreau, notre sous-ministre en développement durable, et donc est-ce qu'il faudrait embaucher des nouvelles personnes dans chaque ministère? Mais là, est-ce que ces personnes-là auront assez d'autorité pour influencer le sous-ministre? Ce n'est pas une question, c'est une réflexion que je soumets.

Mme Labrecque (Sophie): Bien, moi, là, je suis étonnée de voir que vous n'êtes pas mobilisés par le développement durable par les temps qui courent. On en entend parler partout, tout le monde est mobilisé, écoutez. Je vais vous faire une référence. Moi, je viens d'un autre secteur, qui était l'alphabétisation, puis, si je vous dis donnez-moi 2 $ pour l'alphabétisation, j'ai beaucoup de chemin à faire avant de vous convaincre. Alors, si je vous parle de développement durable, ce n'est pas certain que tout le monde comprend la définition du développement durable, mais tout le monde sait que c'est nécessaire, utile, important de s'engager, puis de faire une action. Tout le monde est d'accord avec ça. Donc, c'est évident que... moi, je pense qu'en ayant un projet de loi... c'est reconnu à l'international, il y a beaucoup de gens qui le font. Le FIDD est même capable d'aller chercher l'investissement des PME et des entreprises. Moi, je pense qu'il y a un bout de chemin qui est fait au niveau de l'information par rapport à cette problématique-là. Vous-même, vous construisez une maison dans cette optique-là.

Donc, moi, je pense qu'on a quand même fait pas mal un bon bout de chemin. Et c'est en ce sens-là que je veux vous démontrer l'importance des organismes à but non lucratif, le pouvoir de tous ces organismes-là. C'est sûr que c'est des gens qui n'ont pas nécessairement beaucoup d'argent, mais ils ont beaucoup de pouvoir politique, ils ont beaucoup de pouvoir d'action démocratique, ils peuvent influencer les pratiques, ils peuvent influencer les différents ministères, et justement convaincre les gens qui sont en pouvoir de l'importance d'inclure les valeurs du développement durable, mais dans plein de sphères d'activité au Québec.

Le Président (M. Dubuc): M. le ministre.

M. Mulcair: Oui. Sur la question de la consultation, justement, à la page 6 du mémoire, vous recommandez d'inclure la consultation sur le projet de stratégie à l'intérieur de l'échéancier de mise en oeuvre du Plan du développement durable. Et le projet de loi prévoit que le projet de stratégie fasse l'objet d'une consultation en commission, et que je peux aussi prendre toute autre mesure pour consulter. Qu'est-ce que vous pensez donc si je consultais par Internet?

Mme Labrecque (Sophie): C'est une bonne idée. C'est une bonne idée, surtout qu'il y a des leviers qui sont reconnus maintenant. Je pense que ça pourrait être une des stratégies, mais pas la seule stratégie.

M. Mulcair: Oui, il ne faut pas présumer que tout le monde est branché, mais...

Mme Labrecque (Sophie): Mais, ça pourrait être une bonne idée, oui.

M. Mulcair: O.K. Bien, de notre côté, M. le Président, il ne nous reste qu'à remercier les gens du fonds pour leur extraordinaire collaboration et leur contribution très importante aux travaux de cette commission. Je les remercie surtout d'avoir pris la peine de refaire, de remettre sur le métier... c'est un des rares groupes à avoir vraiment tout repris par rapport à leur présentation au printemps, de revenir nous en enrichir. Alors, on ne peut pas faire autrement que de les remercier beaucoup.

Le Président (M. Dubuc): On vous remercie beaucoup de votre présentation. Je demanderais au Conseil québécois du commerce de détail de bien vouloir s'approcher, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Dubuc): Bienvenue, M. le président, M. Gaston Lafleur. Si vous voulez bien présenter vos collègues, s'il vous plaît.

Conseil québécois du
commerce de détail (CQCD)

M. Lafleur (Gaston): Bien, M. le Président. Alors, je suis accompagné, à ma droite lointaine, de M. Pierre Fortin...

Une voix: ...

M. Lafleur (Gaston): Non, à ma droite lointaine... Ha, ha, ha! M. Pierre Fortin; à ma droite immédiate, Mme Lisa Pinheiro, économiste auprès du Groupe d'analyse. M. Fortin, en passant, est professeur à l'UQAM, bien connu, et aussi fait partie du Groupe d'analyse. À ma gauche lointaine, Me Françoise Pâquet, qui est directrice des relations gouvernementales au Conseil québécois du commerce de détail; et, à ma gauche immédiate, M. Alain Harvey, marchand propriétaire, Canadian Tire.

Le Président (M. Dubuc): Merci. M. le président, vous avez 15 minutes pour présenter votre mémoire; 15 minutes sur le côté ministériel et 15 minutes pour l'opposition. On vous laisse la parole.

M. Lafleur (Gaston): Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, M. le ministre, MM. Mmes membres de la commission, nous vous remercions d'avoir accepté de bien vouloir nous inviter à cette commission parlementaire vous entretenir de nos propos à l'égard du projet de loi n° 118 sur le développement durable. Nos commentaires concernent pour l'essentiel spécifiquement une disposition, en fait un principe contenu dans le projet de loi, il s'agit de l'internalisation des coûts, que le gouvernement propose d'enchâsser dans ce projet de loi à titre de principe et auquel le Conseil québécois s'oppose compte tenu des impacts importants qu'il occasionnera à la fois aux détaillants et aux consommateurs, ainsi qu'à l'atteinte des objectifs visés par la politique québécoise de gestion de matières résiduelles. Je dois vous indiquer aussi que nos propos sont appuyés par le Conseil canadien des distributeurs en alimentation, dont vous avez copie de lettre annexée à notre mémoire.

Le développement durable interpelle l'ensemble de la société, et bien sûr les détaillants n'y échappent pas. Le secteur de la distribution et du commerce de détail reconnaît qu'il a quant à lui un rôle important à jouer et une responsabilité à assumer à cet égard. Soulignons la grande implication déjà des détaillants dans la gestion des matières résiduelles. Ils participent en effet de plus en plus activement à l'élaboration de programmes de récupération et de valorisation de divers produits de consommation, et ce, à travers l'ensemble des provinces canadiennes. Actuellement, il existe 35 programmes de ce genre à travers le Canada et sept autres sont en voie de développement. Ces programmes visent notamment les peintures, les huiles, les contenants, emballages et imprimés, les produits électroniques et électriques, les résidus domestiques dangereux, les pneus, les piles, ainsi de suite.

La participation et l'implication des détaillants se situent notamment au niveau de l'implantation et du financement des programmes lorsqu'ils sont détenteurs de marques de produits visés ou premiers importateurs de ces produits au Québec. Leur implication, aussi, au sein des organismes agréés chargés de mettre en place des programmes tels que Éco-peinture, la Société de gestion des huiles usagées et Éco Entreprises Québec sont quelques exemples, et finalement, pour certains, la récupération des produits post-consommation. Notre organisme, CQCD, compte plusieurs comités consultatifs dans des domaines jugés importants pour le secteur du commerce de détail en matière environnementale. Les détaillants sont également de plus en plus interpellés pour participer à des tables de concertation et comités de travail externes mis en place par les autorités gouvernementales et des organismes publics et privés, notamment RECYC-QUÉBEC.

n(21 h 40)n

À tout cela il faut bien sûr ajouter une foule d'initiatives de toutes sortes entreprises par les détaillants sur une base individuelle, telles que la construction d'édifices verts, l'implantation de mesures d'efficacité énergétique dans les établissements commerciaux, la réduction de leurs emballages, l'utilisation des contenants réutilisables pour le transport de la marchandise, la gestion intégrée de leurs matières résiduelles commerciales, la participation des collectes ponctuelles de produits de post-consommation, etc.

L'adoption des lois et règlements visant l'implantation des programmes de responsabilité élargie a amené le conseil à faire une réflexion très sérieuse, en 2003, qui a impliqué l'ensemble des intervenants et qui a abouti à l'établissement de certains principes qui font consensus au sein de notre industrie, dont vous trouverez le détail à la page 5 de notre mémoire.

L'article 6 du projet de loi propose une série de principes sur lesquels devrait s'appuyer l'administration dans le cadre de ses interventions visant la recherche d'un développement durable. Le deuxième alinéa de l'article 15 du projet de loi prévoit: «Ces interventions peuvent notamment comprendre la révision des lois, des règlements, des politiques ou des programmes existants.» Par conséquent, toute politique gouvernementale, législation et réglementation qui découleront éventuellement des ministères et organismes compris dans l'administration devront respecter ces principes. Nous comprenons donc que la portée de ce projet de loi n'est pas limitée à l'administration mais qu'elle vise également l'ensemble de la société civile, incluant le secteur du commerce de détail.

Parmi les principes identifiés se trouve notamment le principe de l'internalisation des coûts, prévu au paragraphe 16° de l'article 6. Or, le CQCD s'objecte à l'idée d'enchâsser un tel principe dans le projet de loi, et ce, pour plusieurs motifs. D'une part, celui-ci irait à l'encontre d'une harmonisation des programmes à travers le Canada visant les mêmes produits de consommation ainsi que la sensibilisation et l'éducation nécessaire des consommateurs via la transparence des frais reliés à ces programmes.

D'autre part, le manque d'information dont disposeront les consommateurs affectera leur participation et indirectement le taux de succès des programmes. Ainsi, il y a lieu de craindre que les objectifs visés par la politique québécoise seront plus difficiles à atteindre. Enfin, il occasionnerait des impacts financiers et administratifs importants pour les détaillants, des impacts qu'on considère pervers, probablement non envisagés quand on a introduit le principe, mais qui seront tout au moins très présents.

Pour élaborer sur les divers motifs qui nous poussent à solliciter cette prise de position, nous avons demandé à nos deux économistes de nous faire une étude. Et je vais céder la parole à M. Fortin.

M. Fortin (Pierre): Merci beaucoup, M. Lafleur. Merci de nous permettre de vous adresser la parole. À la demande du CQCD, le Groupe d'analyse a examiné la question de l'internalisation obligatoire des coûts de recyclage qui est proposée par le paragraphe 16° de l'article 6 du projet de loi.

Notre groupe est un groupe conseil en économie, finance et stratégie installé à Montréal et faisant appel à l'occasion à des associés universitaires de l'Université de Montréal, de l'UQAM, de l'Université de Sherbrooke et de l'Université Laval, et de nombreuses universités américaines aussi évidemment, parce qu'on a des affiliations américaines. Notre rapport sur l'internalisation des coûts a été préparé par Mme Lisa Pinheiro, qui est à ma gauche, qui est économiste au Groupe d'analyse, et les Prs Marc Van Audenrode, de l'Université de Sherbrooke, et moi-même, de l'UQAM.

C'est sans hésitation aucune que nous appuyons la position du CQCD. Notre inquiétude commune est que, dans son application, la loi oblige les fabricants et les détaillants à cacher aux consommateurs les coûts de recyclage. À notre avis, ce n'est pas la voie à suivre. Nous suggérons donc respectueusement au gouvernement d'amender le paragraphe pertinent de façon à rendre l'internalisation des coûts clairement facultative plutôt qu'obligatoire.

Dans la présentation qui suit, nous voulons ajouter en quelque sorte notre CQFD à la position du CQCD. La présentation que je vais faire est basée sur la diapo en PowerPoint qui vous a été remise.

Alors, tout comme le conseil, nous appuyons sans réserve le principe des programmes de gérance de produits. Ce sont les moyens concrets de le mise en oeuvre qui doivent être débattus. Cette mise en oeuvre doit être la mieux accueillie et la plus efficace possible. En d'autres mots, si le recyclage des produits est incontournable et qu'il faut accepter d'en payer le plein prix, il faut en même temps s'assurer que ce prix soit le plus bas possible pour la société, qu'il s'agisse des consommateurs, des détaillants ou des fabricants.

Dans sa formulation actuelle, le projet de loi obligerait les fabricants et les détaillants à internaliser les coûts de recyclage. Appliqué rigoureusement, ce principe leur interdirait de révéler ces coûts aux consommateurs en les affichant séparément du prix total du produit. Nous sommes d'avis que ce ne serait pas une bonne idée et qu'il faut au contraire laisser aux fabricants et aux détaillants la possibilité de divulguer ces coûts aux consommateurs s'ils le désirent.

Deux raisons fondamentales justifient notre opposition au principe de l'internalisation obligatoire: premièrement, il desservirait les intérêts des consommateurs et, deuxièmement, il imposerait des coûts inutiles aux détaillants. En ce qui concerne les consommateurs premièrement, nous savons depuis 2001 que plus de 80 % se déclarent favorables au principe de payer des frais environnementaux. Les consommateurs ne sont pas contre, ils sont pour payer des frais environnementaux. Plus récemment, en 2005, nous avons également appris que 92 % des consommateurs estiment important que les coûts de recyclage soient clairement identifiés lorsqu'ils achètent des produits domestiques dont les résidus sont dangereux. Donc, la première raison pour laquelle il ne faut pas interdire la divulgation des coûts de recyclage est que les Québécois sont massivement opposés à une telle interdiction.

La seconde raison est que, dans les affaires humaines, la transparence et la connaissance ont toujours meilleur goût que l'opacité et l'ignorance. La transparence est à la fois une arme éducative et une arme économique. C'est une arme éducative nécessaire parce que la conscientisation des citoyens sur les questions environnementales est encore loin d'être chose faite au Québec. Les Québécois n'ont pas encore tous intégré le recyclage à leur routine de vie. Ils sont encore souvent mal informés sur l'identité des produits nocifs et sur la disponibilité de services de recyclage. Heureusement par ailleurs leur appui aux mesures environnementales augmente avec le temps, mais il demeure encore souvent abstrait. La transparence des frais de recyclage lors de l'achat de produits serait un moyen efficace de les sensibiliser, des les informer et de les éduquer sur cette question vitale. La transparence est aussi une arme économique en plus d'être une arme éducative. Pour qu'il puisse exercer son choix souverain, le consommateur doit au préalable être bien informé.

Or, connaître les frais de recyclage leur permet d'adopter un comportement d'achat sélectif au plan spécifiquement environnemental. Bien des consommateurs sont prêts à acheter un produit moins nocif à l'environnement même s'il leur coûte globalement un peu plus cher, mais un tel comportement de leur part n'est possible que s'ils peuvent observer et comparer les coûts de recyclage des produits disponibles. Ils peuvent alors exercer une pression concurrentielle bénéfique sur les fabricants et sur les détaillants qui sont moins performants sur le plan environnemental. Dans un contexte où ils acceptent massivement de payer les frais environnementaux et demandent instamment d'être informés de ces frais, on ne doit pas craindre que les Québécois maudissent ces frais comme si c'étaient des taxes. Bien au contraire, il faut se méfier de l'hostilité politique que susciterait le rejet de la transparence en faveur de l'opacité des coûts de recyclage. Étant hautement scolarisés et soucieux de l'environnement, ce sont les cachotteries plutôt que la vérité des coûts qui choqueraient nos concitoyens.

Alors, je passe la parole maintenant à ma collègue, Mme Pinheiro.

Mme Pinheiro (Lisa): Merci, Pierre. En plus de desservir les intérêts des consommateurs, l'internalisation obligatoire des coûts de recyclage imposerait également aux détaillants des coûts inutiles qui se répercuteraient inévitablement sur la facture à payer par les consommateurs. Premièrement, la règle aurait un impact certain sur les loyers des détaillants. Plusieurs d'entre eux voient en effet le loyer de leurs locaux fixé en fonction de leur chiffre d'affaires brut. C'est souvent le cas, par exemple, pour ceux qui font affaire dans les centres d'achat. Or, l'internalisation obligatoire des coûts de recyclage viendrait gonfler de manière totalement artificielle ce chiffre d'affaires et ferait automatiquement augmenter leurs loyers. Par là même, ils seraient obligés d'augmenter leurs prix de vente pour les consommateurs.

n(21 h 50)n

Deuxièmement, si le projet de loi était adopté dans sa forme présente, le Québec serait la seule province à ériger en principe l'obligation pour les détaillants d'internaliser les frais environnementaux. Ça poserait un problème logistique important pour les détaillants nationaux, qui opèrent sur plusieurs provinces. Dans leurs imprimés publicitaires, dans leurs systèmes informatiques, sur leurs sites Internet, ils seraient obligés d'afficher au Québec un prix différent de ceux qu'ils annoncent dans les autres provinces. En plus du danger de confusion pour les consommateurs, des frais de gestion additionnels devraient être absorbés. À nouveau, le résultat serait des prix globalement plus élevés pour les consommateurs québécois.

Troisièmement, la singularité québécoise poserait également un problème pour les détaillants des régions frontalières. Essentiellement, le prix unique internalisé du Québec serait plus élevé que les prix non internalisés des provinces voisines. Donc, cette situation pourrait également influencer les consommateurs et ajouterait à la confusion qui peut déjà exister autour des différences de taxes de vente entre les provinces. Au final, les détaillants québécois de ces zones frontalières subiraient un désavantage concurrentiel.

Il faut enfin aussi comprendre ? et ça, c'est le quatrième point ? que ce sont les petits détaillants qui seraient surtout pénalisés par les effets pervers de la mesure. Les hausses de loyer, les coûts informatiques et les difficultés en régions frontalières les frapperaient beaucoup plus durement qu'ils ne frapperaient les grands détaillants. On peut aussi ajouter d'ailleurs que, si les coûts de recyclage restaient cachés, ça donnerait aux grands détaillants, auprès des recycleurs, un pouvoir de négociation que les petits n'auraient pas.

Nous concluons donc en affirmant que, si les fabricants, les détaillants et les consommateurs sont tous prêts à absorber les coûts de recyclage, ils sont par ailleurs en droit de s'attendre à ce que la loi leur permette de le faire de manière la plus efficace possible, avec le meilleur accueil et au plus bas coût possible. Or, si on interdit aux fabricants et détaillants de révéler les coûts de recyclage aux consommateurs, c'est l'effet contraire qui va arriver. Opter en principe pour l'opacité, c'est aller contre le désir massivement exprimé des consommateurs d'être bien informés de ces frais, c'est empêcher l'usage de la transparence comme une arme économique et éducative dans la poursuite du développement durable et c'est imposer des coûts inutiles aux détaillants, tout particulièrement aux plus petits détaillants, de même qu'aux consommateurs qui reçoivent la facture finale.

En conclusion, nous suggérons donc respectueusement au gouvernement d'amender le paragraphe 16° de l'article 6 du projet de loi afin de permettre la divulgation des coûts de recyclage aux consommateurs plutôt que de l'interdire. C'est la voie que le bien commun nous dicte de suivre. Merci.

M. Lafleur (Gaston): Mais, bon, conclusion finale, comme on l'a dit tantôt...

M. Mulcair: Par rapport aux conclusions du début? C'est ça?

M. Lafleur (Gaston): Non, pas du tout. Non, non, non.

Le Président (M. Dubuc): ...

M. Lafleur (Gaston): Non, c'est parce qu'on aime bien l'expression «pour la transparence, contre l'opacité», et à cet égard évidemment...

M. Mulcair: C'est la soirée des pléonasmes! Allez, continuez avec la conclusion de la fin.

Le Président (M. Dubuc): Allez-y.

M. Lafleur (Gaston): Bon, bien, très rapidement. Pour l'ensemble des motifs exprimés, M. le ministre et membres de la commission, nous vous soumettons respectueusement de retirer l'article 16° ou, à tout événement, comme on l'a mentionné, qu'on l'adapte pour s'assurer que cette transparence puisse être autorisée et permise.

Le Président (M. Dubuc): Merci. M. le ministre.

M. Mulcair: Ah bien, moi, de toute façon, moi, j'aime bien ça, la contrariété, moi, j'aime bien la confrontation. Évidemment, je pense que j'ai vu le professeur Fortin à l'Institut économique dernièrement... Vous n'étiez pas là pour mon débat avec...

M. Fortin (Pierre): Pardon?

M. Mulcair: Vous n'étiez pas à l'Institut économique pour mon débat récent? Je croyais que je vous avais vu là-bas.

M. Fortin (Pierre): Malheureusement, non; la multilocation circonscriptive m'était physiquement impossible. Alors, je n'étais pas... je ne pouvais pas être... j'étais ailleurs à ce moment-là.

M. Mulcair: Je voulais vous souhaiter la bienvenue. Ce que je disais, c'est que, un peu à l'instar de ce que j'ai vécu la semaine dernière à l'Institut économique de Montréal, où j'ai participé à un débat où le professeur Ian Scott, je crois, qu'il s'appelait...

Une voix: ...

M. Mulcair: ...Clark, de l'Université d'Ottawa, affirmait que Kyoto: balivernes, c'étaient des racontars d'écolos, n'importe quoi, 12 000 personnes en délire collectif, hallucinations, il n'y avait aucun rapport. Alors, c'était le fun, moi, je trouve ça intellectuellement stimulant, tout comme je trouve ça intellectuellement stimulant de vous entendre être les seuls, sur les 582 groupes qui nous ont fait des mémoires, qui soutiennent ce que vous dites ce soir.

Mais je vais quand même essayer de comprendre pourquoi vous êtes tout seuls à dire ça, puis je suis prêt à prendre une partie du blâme, parce que, si des gens aussi bien que vous peuvent comprendre ce que vous venez de dire, c'est que de toute évidence, comme disait Cool Hand Luke: «We have a serious problem communicating». Où est-ce que vous avez vu ce que vous venez de raconter, dans notre projet de loi? Où est-ce que vous avez vu l'obligation? Où est-ce que vous avez vu l'interdiction? Où est-ce que vous voyez ça? Aidez-moi! Et personne de nous, aucun des avocats, aucun des gens qui ont... aucun des légistes, personne n'a vu la même chose que vous. Alors, aidez-nous.

Le Président (M. Dubuc): Allez-y...

M. Lafleur (Gaston): Alors, notre propos vient de l'interprétation qu'on en fait ? si on est erronés, c'est merveilleux ? mais du vécu, de l'expérience vécue dans deux situations. Entre autres, la situation d'Éco-peinture, où à l'origine votre prédécesseur avait indiqué, dans l'entente entre Éco-peinture et son ministère... et lui-même, le ministre, l'exigence de l'internalisation des frais. L'internalisation des frais faisait en sorte qu'on devait s'assurer par tous les moyens possibles de faire en sorte que ces frais-là soient inclusifs et qu'ils ne soient pas rendus visibles.

D'autre part, M. le ministre, je vous rappelle une initiative fort récente, où peut-être pas vous-même personnellement mais certainement les gens de vos cabinets ont été impliqués, il s'agit de la conclusion d'une entente entre RECYC-QUÉBEC et la SOGHU, et où l'entente originale indiquait la nécessité d'internaliser les prix des frais environnementaux dans le coût des produits. Et par la suite il y a eu une modification qui a été apportée, ça a été enlevé de cette entente-là grâce à une intervention de votre cabinet, qui a fait en sorte qu'on a fait tout simplement abstraction de cette nécessité.

Mais il a été compris dans le milieu, dans l'ensemble du milieu, qu'on ne pouvait pas, exemple, indiquer sur la facture aux consommateurs le prix, le coût des frais environnementaux payés.

M. Mulcair: On va rester avec...

M. Fortin (Pierre): C'est l'expérience du vécu.

M. Lafleur (Gaston): C'est l'expérience vécue.

M. Mulcair: O.K. Parlons de l'expérience vécue, à ce moment-là, parce qu'on se comprend qu'il n'y a rien de ce que vous venez de dire dans notre projet de loi. Parlons de la peinture.

Règlement Q-2 R-20.01, Règlement sur la récupération et la valorisation des contenants de peinture et des peintures mises au rebut. Article 4: «L'entreprise ou le fournisseur assujetti à l'obligation de récupération prévue à l'article 3 doit prendre les mesures propres à informer les consommateurs de l'existence et du fonctionnement du système de récupération mentionné dans cet article.» Alors, c'est exactement le contraire de ce que vous venez d'affirmer.

Article 9, quatrième alinéa: «Les coûts engendrés par la mise en oeuvre du système de récupération et des moyens de valorisation de même que ceux découlant de la réalisation des campagnes d'information et des autres mesures prises pour promouvoir la récupération et la valorisation des produits concernés»... doivent, au plus tard... de cinq années, être fournis. Article 8, paragraphe 5°: Dans les 90 jours qui suivent telle date, on doit donner «une description des campagnes d'information et des autres mesures prévues pour promouvoir auprès des consommateurs la récupération». Article 3 de l'annexe, deuxième paragraphe: «Ce système de récupération doit comporter des points de collecte où peuvent être rapportés gratuitement les contenants...»

Je ne vois pas, je n'arrive pas... j'ai pris des notes quand Mme Pinheiro parlait, tantôt. Les coûts informatiques et l'augmentation des loyers parce qu'on va internaliser le coût de recyclage? L'option... Donc, vous voulez quoi, une consigne? Cinq cents sur le truc de plastique de Tide, puis on va le... Wal-Mart ne veut déjà pas prendre les bouteilles même si la loi les oblige, et on a un plus haut taux de récupération en Ontario, où ils ne veulent pas de consigne! Aidez-moi à comprendre. Moi, je suis plus que prêt à vous rendre service, mais il n'y a personne ici qui a compris.

M. Lafleur (Gaston): Parfait. Alors, votre premier item, M. le ministre, en fait ce sont dans les ententes d'agrément où se trouvent les restrictions qu'on vous mentionne, et non pas dans votre règlement. Donc, c'est dans le processus d'application. M. le ministre, actuellement votre projet de loi indique un principe qui n'est non pas facultatif, mais obligatoire, et ce principe doit s'appliquer dans l'élaboration des programmes. Ce qu'on vous dit, c'est dans la livraison des moyens, dans les moyens, dans la façon dont ça va être livré. Quand on regarde l'expérience vécue, ce qu'on vous dit, c'est que malheureusement la transparence n'y est pas. Qu'on puisse le publiciser, l'afficher, puis qu'on ne veuille pas l'indiquer sur le prix...

Et je vais vous faire un parallèle. Quand on regarde la Loi de la protection du consommateur, ce que les consommateurs veulent en matière de transparence et d'information et d'exactitude, c'est aussi d'assurer le suivi du coût. Le suivi se fait comment? Sur la facture. Ou sur l'étiquette du produit. Sur la facture.

Alors, ce que l'on vit actuellement, c'est une forme d'interdiction. Je ne vous dis pas que... C'est évident qu'il faut aller chercher ça un peu loin, mais ce qu'on voit, c'est que dans l'application de ce principe d'internalisation des coûts, quand on voit que le coût des biens doit refléter l'ensemble des coûts qu'il occasionne à la société...

M. Mulcair: Il faut lire le liminaire, confrère. Lisez le début, maintenant, de cet article-là, si vous voulez bien, s'il vous plaît.

n(22 heures)n

M. Lafleur (Gaston): Oui, oui. «Afin de mieux intégrer la recherche d'un développement durable dans ses sphères d'intervention...

M. Mulcair: Oui.

M. Lafleur (Gaston): ...l'administration prend en compte...

M. Mulcair: Prend en compte.

M. Lafleur (Gaston): ... ? prend en compte ? dans le cadre...»

M. Mulcair: On parle d'une prise en compte...

M. Lafleur (Gaston): Oui, «prend en compte»...

M. Mulcair: ...d'un principe lorsqu'on élabore une stratégie.

M. Lafleur (Gaston): Oui.

M. Mulcair: Où est-ce que vous trouvez un effet sur les coûts informatiques...

M. Lafleur (Gaston): Bien, ça...

M. Mulcair: ...et l'interdiction de donner de l'information aux consommateurs? C'est hallucinant d'affirmer une chose pareille, voyons donc!

M. Lafleur (Gaston): M. le ministre, c'est ce que l'on vit.

M. Mulcair: Bien, voyons donc!

M. Lafleur (Gaston): Alors, je vais juste céder la parole, parce que, sur le volet informatique, j'ai un détaillant ici qui peut peut-être vous parler.

Mme Pâquet (Françoise): Est-ce que je peux juste...

M. Lafleur (Gaston): Vous voulez dire un commentaire?

Le Président (M. Dubuc): Si vous voulez vous présenter, s'il vous plaît.

Mme Pâquet (Françoise): Oui. Françoise Pâquet, du Conseil québécois du commerce de détail. Je vous... Lorsque M. Lafleur mentionne que c'est concrètement, sur le terrain, qu'on le vit, je vous dirais que, lorsque les gens parlent d'internalisation, les termes qu'on voit souvent, qu'on entend souvent, c'est «frais cachés versus frais transparents». Si vous communiquez avec Éco-peinture, le conseil d'administration d'Éco-peinture, et si vous communiquez avec le conseil d'administration de la Société de gestion des huiles usagées, vous allez comprendre qu'il n'y a pas une réunion du conseil d'administration où il n'y a pas cet enjeu-là qui est débattu.

Au moment où on se parle, Éco-peinture est en processus de renouvellement de son entente. Il y a eu énormément de discussions et de débats alentour de la table pour savoir: Est-ce que les détaillants peuvent rendre transparents ou non les frais? Le même débat s'effectue au sein de la SOGHU.

Et, M. le ministre, vous avez participé en partie à la conférence Insight, qui a été donnée il y a une semaine, deux semaines environ, sur la gestion des matières résiduelles, et, à l'intérieur de ce forum de deux jours là, il y a eu un représentant de votre ministère qui est venu parler, pendant 25 minutes, du principe de l'internalisation des frais. Et, si vous regardez le texte de la conférence, ce dont on parle, c'est «frais cachés versus frais transparents».

M. Mulcair: Je vais essayer de comprendre, parce que je fais partie de ceux qui ne vous comprennent pas, puis on ne vous comprend pas. Alors, je suis sûr que vous avez de l'expérience que vous essayez de partager avec nous. On a parlé de peinture tantôt, j'ai lu le règlement, qui dit le contraire de ce que vous affirmez.

Mais est-ce que vous êtes en train de dire que vous voudriez, sur une canette de peinture de 40 $, que le 0,50 $, sauf erreur, qu'on charge... il y a un 0,50 $, à peu près?

Mme Pâquet (Françoise): Ça dépend de la grandeur du contenant.

M. Mulcair: On va dire un 0,50 $, là, je ne me trompe pas trop? Vous voudriez pouvoir mettre un «sticker» sur la canette: Le prix de cette peinture inclut 0,50 $ pour vous permettre de ramener ce qui peut rester dans le contenant et pour assurer son recyclage? C'est de ça qu'on est en train de débattre ce soir?

Mme Pâquet (Françoise): C'est de ça dont on parle. Le coût...

M. Mulcair: Mais, madame, je viens de vous lire... Non seulement vous avez le droit de le faire, je vous invite à le faire, je vous incite à le faire, puis, s'il y a quelqu'un qui vous dit le contraire de ce que je viens de dire là, je vais le rendre encore plus explicite. Mais ce n'est pas ça qui est écrit, alors je ne vois pas qui peut vous dire le contraire.

Mme Pâquet (Françoise): Mais ce n'est pas... La réponse n'est pas dans le règlement, la réponse se situe...

Une voix: Dans l'application.

Mme Pâquet (Françoise): ...dans les signatures des ententes qui sont signées entre RECYC-QUÉBEC et les organismes agréés auxquels... Dans les deux ententes, il y a une disposition spécifique qui interdit que les coûts apparaissent.

M. Mulcair: Mais, écoutez, là...

Mme Pâquet (Françoise): C'est vraiment dans l'entente et non dans le règlement.

M. Mulcair: Écoutez. Moi, là...

Le Président (M. Dubuc): M. le ministre.

M. Mulcair: Vous êtes en train de me dire qu'il y a une entente qui irait à l'encontre d'une disposition législative. Alors, moi, je sais qu'une telle disposition doit être considérée comme non écrite. On est dans un domaine où les lois et les règlements sont d'ordre public. Alors, si vous avez vraiment cette impression-là ? moi, je m'appelle bien Thomas, O.K.? je porte bien mon nom, mes parents savaient ce qu'ils faisaient ? alors apportez-moi un cas de l'un ou l'autre de vos détaillants qui, en voulant mettre un «sticker» sur une canette de peinture pour dire: Ces 40 $ comprennent 0,50 $ pour nous permettre de couvrir les frais de récupération... Vous m'amenez la personne qui vous a interdit de faire ça, parce que vous allez d'abord m'amener la personne qui a essayé de le faire, vous allez me montrer qui leur a interdit, et, moi, je vais vous montrer un ex-employé.

Mais, moi, je suis prêt à prendre le pari que c'est de la légende urbaine, qu'il n'y a aucun tel cas qui existe, de quelqu'un qui a voulu mettre un «sticker» sur une canette de peinture pour dire: Ça inclut le 0,50 $.

Alors, si on est pour parler de vraies affaires, parlons de vraies affaires. Il n'y a rien qui vous interdit de faire ce que vous nous dites que vous voulez faire. De là à dire que ça hausse le coût des loyers, soyons sérieux! Un peu de rigueur! Ça ne se peut pas, ce que vous affirmez ce soir.

Le Président (M. Dubuc): M. Lafleur.

M. Lafleur (Gaston): M. Mulcair, parlons des TIC, T-I-C, technologies. Actuellement, en Alberta, il y a des droits environnementaux, qui sont de l'ordre de combien?

Une voix: 5 à 50.

M. Lafleur (Gaston): 5 à 50 $. Alors, ce n'est plus des 0,50 $ dont on parle. Puis, quand on parle de développement durable, c'est un petit plus que de parler des cannes de peinture. Là, ce que vous établissez, ce sont des principes importants qui vont durer et qui vont influer de façon significative et non équivoque sur la façon dont l'administration va devoir gérer le développement durable.

M. Harvey, ici, je vais le faire... il va pouvoir témoigner... Parlons de la facture, de la facture au point de vente. Ce qui fait... ce qu'on me dit, c'est qu'actuellement il y a une interdiction qui circule sur l'indication qu'il y a des frais environnementaux sur la facture des clients. La balance, les «stickers», puis tout ça, c'est de la publicité, c'est de la pub; si on peut en faire dans les journaux, on peut en faire dans les circulaires, puis on peut en faire partout. Mais demandez à vos fonctionnaires, vous pouvez demander à Recyc-Québec, au président de Recyc-Québec, si on pouvait et si on peut indiquer sur nos factures le prix ou le frais environnemental qui est versé par le consommateur et si on peut, par le fait même, faire la distinction du prix, entre le montant environnemental et le coût du produit, dans nos publicités.

Le Président (M. Dubuc): M. le ministre.

M. Mulcair: M. Lafleur, vous venez de me dire, d'affirmer qu'il y avait un problème, que c'était interdit de mettre des «stickers», là vous changez de sujet complètement.

M. Lafleur (Gaston): Je ne dis pas, non, je ne dis pas que c'est interdit...

M. Mulcair: Ta, ta, ta! Attendez, c'est mon tour. Et d'un! Et de deux, vous plaidez que ce que nous faisons risque de vous occasionner des problèmes de coût d'ordi, à tel point qu'il va avoir des hausses des loyers, que les gens vont faire faillite. Ça, c'est votre logique, ce n'est pas moi qui l'invente, c'est vous qui l'avez affirmé. Là, maintenant, vous me dites, je veux la permission de mettre dans mes ordinateurs plus d'information.

Vous connaissez aussi bien que moi la décision de la Cour suprême dans Brown Shoes. Il n'y a personne qui peut vous interdire de donner de l'information. Vous pouvez l'imprimer sur un «sticker», vous pouvez l'imprimer sur un mur, vous pouvez le mettre sur une banderole. C'est de l'information, et je vous demande de faire cette information. Je suis fier du fait qu'au Québec, pour les huiles usagées, pour les pneus, pour la peinture, on fait ça. Et c'est ça, la voie de l'avenir. Là-dessus, vous avez raison, parce qu'il y a une logique à ça. Si, moi, je ne conduis pas une voiture, je suis en vélo ou transport en commun, ou à pied, pourquoi, diantre, je paierais pour le recyclage de l'huile de votre bagnole? Il n'y a aucune logique à ça. La personne qui pollue, qui utilise, qui consomme, qui engendre le coût pour la société, c'est ça, le coût qu'on veut attribuer à la bonne personne. C'est juste de ça qu'il s'agit. Il n'y a personne...

Le Président (M. Dubuc): M. le ministre, si vous voulez conclure.

M. Mulcair: ...qui vous a interdit et personne ne peut vous interdire de faire ce que vous voulez là, et je vais vous aider. Tout ce qui est dit ce soir est dans une transcription, vous n'avez qu'à revenir me voir, n'importe quand, si vous avez quelqu'un qui vous dit que c'est illégal de donner de l'information au public, je vais vous garantir je vais être avec vous à tout coup.

Le Président (M. Dubuc): Merci, M. le ministre. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Bien, écoutez, je pense que définitivement il y a peut-être eu une mauvaise interprétation du projet de loi. Ce n'est peut-être pas un économiste que vous auriez eu de besoin, c'est un avocat, pour prendre compte que le projet de loi, finalement il est seulement déclaratif. Et là c'est l'opposition qui vous parle, ce n'est pas le gouvernement. Mais c'est juste que l'administration publique prend en compte.

Mais, tirons quand même leçon de ce qui se passe ce soir, et je pense qu'il y a quand même... en fait, moi, de mon côté ? c'est drôle, on en a parlé un peu aujourd'hui ? je vais appuyer toute initiative faisant en sorte que le consommateur puisse voir le coût du recyclage. Et ça, donc, je pense que, ce soir, on est pas mal plus d'accord qu'on a de l'air, là, mais effectivement, s'il y a quelqu'un au gouvernement... dans le ministère de l'Environnement qui dit qu'il est interdit de le faire, bien je pense que vous avez du travail à faire de votre côté. Donc, je n'aurai pas d'autres questions.

Le Président (M. Dubuc): M. le député de Beauce-Sud.

Une voix: Beauce-Nord.

Le Président (M. Dubuc): Beauce-Nord. Excusez-moi.

M. Grondin: Elle est blonde, Beauce-Sud.

Le Président (M. Dubuc): ...

M. Grondin: J'ai dit: elle est blonde, Beauce-Sud.

Des voix: Ha, ha, ha!

n(22 h 10)n

M. Grondin: Merci, M. le Président. Moi, quand je vois l'internalisation des coûts, ça ne me fait pas énormément peur, parce que je me dis que le consommateur, de toute façon, là, si on ne le fait pas payer quand il l'achète, si on le paie avec nos taxes, parce qu'après ça il faut en disposer, il faut payer pour les sites d'enfouissement, il faut tout payer... On a beau dire, si on ne le paie pas à l'achat ou si on ne le voit pas, on le paie en quelque part. Parce que, veux veux pas, il se ramasse dans un site d'enfouissement, il se ramasse en quelque part, puis on le paie. Mais c'est nous autres qui le paie, c'est tout le monde qui le paie. Alors, comment est-ce qu'on... si on ne le paie pas au début, on le paie à la fin, il y a quelqu'un qui le paie. Je ne sais pas comment est-ce que...

M. Lafleur (Gaston): Bien, nous, essentiellement ce que l'on souhaite... puis j'entends vos propos, M. le ministre et membres de cette salle, de cette Assemblée, et on en serait plus qu'heureux de s'assurer ? puis on va faire les vérifications rapidement ? sur la question de la transparence des frais. Mais, nous, ce qu'on veut s'assurer, ce qu'on vit, puis, encore une fois, j'ai ici un détaillant, là, qui est ici, là, qui peut en témoigner si la commission souhaite l'entendre, on souhaite essentiellement que l'on puisse avoir le libre choix d'indiquer le prix du produit et le prix des frais environnementaux pour que le consommateur puisse faire un choix éclairé.

Et notre crainte, provenant de l'expérience qu'on a, c'est que la notion d'internalisation des coûts qui a circulé au cours des dernières années a eu un effet d'empêchement à l'égard de nos entreprises. Et c'est ce qu'on veut, on veut essentiellement avoir le libre choix.

Le Président (M. Dubuc): Merci. Merci, le Conseil québécois du commerce de détail. Je demanderais au Réseau Environnement de bien vouloir s'approcher, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Dubuc): Merci... pour le Réseau Environnement, de venir présenter votre mémoire. Si vous voulez bien vous présenter et votre collègue, s'il vous plaît.

Réseau Environnement

M. Sergerie (Jean-Noël): Oui. Mon nom est Jean-Noël Sergerie, j'agis à titre de président de Réseau Environnement. À ma gauche, qui m'accompagne, Mme Josée Méthot, qui est notre directrice générale.

Le Président (M. Dubuc): Merci. Vous avez 15 minutes pour présenter votre mémoire, 15 minutes du côté ministériel et 15 minutes de l'opposition. Donc, merci.

M. Sergerie (Jean-Noël): Parfait. Dans un premier temps, M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, mesdames messieurs, merci de nous recevoir à cette heure pour vous parler de notre position en regard à l'avant-projet de loi sur le développement durable et devant votre commission.

Dans un premier temps, nous avons suivi la tournée dans plusieurs régions du Québec et nous avons déposé, en février dernier, le mémoire sur l'avant-projet de loi durable... sur le développement durable ? excusez-moi ? et on ne déposera pas à nouveau un autre mémoire, mais nous allons vous présenter des points sur lesquels on aimerait insister, si vous nous le permettez.

Dans un premier temps, nous aimerions vous parler un peu de la présentation de l'organisme qu'est Réseau Environnement. Donc, Réseau Environnement est le plus important regroupement de professionnels de l'environnement au Québec. Sa mission consiste à assurer, dans une perspective de développement durable, l'avancement des technologies de la science, la promotion des expertises et le soutien des activités en environnement par le regroupement de spécialistes, de gens d'affaires, de municipalités et d'industries de l'environnement. L'organisme s'appuie sur l'adhésion de près de 1 900 membres bénévoles, dont 400 entreprises, plus de 200 municipalités et 1 200 professionnels qui oeuvrent dans différents secteurs d'activité, soit l'eau potable, les eaux usées, les sols, les eaux souterraines, l'air et les changements climatiques et les matières résiduelles. Pour assurer une forte présence en région, nous avons des présidents de région, et ces personnes-là assurent le rôle de courroie de transmission avec nos membres sur l'ensemble du Québec. Nous avons un chapitre dans l'Abitibi-Témiscamingue puis dans le Bas-Saint-Laurent?Gaspésie?Les Îles, la Capitale-Nationale, la Côte-Nord, l'Estrie, la Mauricie et Centre-du-Québec, le Saguenay?Lac-Saint-Jean et la région de Montréal. Un C.A. de 18 membres, de bénévoles, travaille aux destinées de Réseau et huit de ces membres-là sont sur le conseil exécutif. Comme je le disais tout à l'heure, c'est tous des bénévoles, et, de plus, nous avons 13 employés qui travaillent pour notre association.

Réseau Environnement accueille favorablement l'avant-projet de loi sur le développement durable déposé à l'Assemblée nationale et remercie le ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs de nous avoir sollicités à transmettre notre opinion sur le Plan de développement durable.

Réseau Environnement s'attend à ce que le gouvernement du Québec soit cohérent et montre le bon exemple. Donc, en faisant preuve de leadership au chapitre de l'écologisation des opérations gouvernementales, il donnera le ton en matière de développement durable. En ce sens, le Plan de développement durable du Québec doit clairement et explicitement engager le gouvernement en tant que consommateur. Le plan deviendra alors le moteur du développement durable du Québec.

Reconnaissant que cette démarche du gouvernement est intimement liée à tous les dossiers de notre association et à son engagement à remplir sa mission, il va sans dire que beaucoup d'efforts ont été déployés afin de commenter les documents et de démontrer l'engagement de notre organisme à contribuer au développement durable. Nous accueillons la nouvelle définition au niveau du développement durable dans son caractère indissociable. Ce commentaire-là nous plaît, entre autres.

Sans avoir été écrits ou définis clairement en toutes lettres dans le texte du Plan de développement durable, les acquis de la Politique nationale de l'eau et de la Politique québécoise de gestion des matières résiduelles 1998-2008 inquiètent les membres de Réseau Environnement. En effet, on ne voudrait pas que ces derniers, pour ne citer que ces deux dossiers, ne soient maintenant dilués, voire perdus, dans les méandres du Plan de développement durable. Réseau Environnement rappelle au gouvernement que les politiques déjà adoptées doivent être mises en oeuvre de façon prioritaire. En fait, Réseau Environnement est inquiet, puisque le Plan de développement durable nous semble moins concret que la Politique nationale de l'eau ou la Politique de gestion des matières résiduelles 1998-2008, considérant que sa mise en oeuvre n'est pas complétée.

Au niveau de la nomination du Commissaire au développement durable, le maintien de la création du poste de Commissaire au développement durable rassure les intervenants du milieu parce qu'il oblige une reddition des comptes et une imputabilité plus transparente. Cependant, l'association regrette que sa recommandation quant à sa nomination par l'Assemblée nationale n'ait pas trouvé écho. À nos yeux, dans le but de préserver son indépendance dans l'exercice de ses fonctions, nous croyons que le Commissaire au développement durable doit être nommé par l'Assemblée nationale de tous les députés du Québec.

Cependant, une inquiétude persiste... puis on parle... Au niveau du Fonds vert ? excusez-moi ? une inquiétude persiste quant à l'orchestration du Fonds vert. S'il est clair que les sommes déposées dans des fonds serviront au financement de mesures visant l'ensemble des acteurs environnementaux, Réseau Environnement continue de croire que son administration doit proposer une redistribution des revenus proportionnelle à la contribution de chacun des secteurs d'approvisionnement. Ainsi, malgré l'absence d'un fonds de l'eau, l'association maintient que les sommes prélevées auprès des acteurs de l'eau doivent être exclusivement réservées à ce secteur d'activité. Nous comprenons que l'article 15.2 de la section II,1... que ceci est fait pour le secteur de l'eau; mais qu'en est-il des autres secteurs? Réseau Environnement réitère que l'attribution des montants doit respecter la provenance des fonds, que des fonds dédiés par secteurs eau, matières résiduelles, sol, etc. soient créés à même ou avec le Fonds vert.

Je laisserais la parole maintenant à Mme Méthot.

n(22 h 20)n

Mme Méthot (Josée): Bien que, dans notre mémoire sur l'avant-projet de loi sur le développement durable, nous avons commenté une quinzaine d'articles, évidemment on ne reviendra pas sur chacun d'eux ici. Nous n'en soulignerons que quelques-uns.

D'entrée de jeu, nous aimerions revenir sur l'article 1. En fait, comme nous l'avions dit dans notre mémoire, Réseau Environnement est d'avis que le projet de loi doit démontrer plus de conviction. En effet, pour nous, l'expression «la recherche d'un développement durable» semble peu dire. C'est bien notre point de vue. On trouve qu'on peut rechercher le développement durable ardemment ou lâchement, et on trouve que cette distinction-là fait en sorte... cette possibilité ne fait pas nécessairement notre affaire. Alors, on demande donc au gouvernement d'aller plus loin et plutôt viser l'atteinte du développement durable, plutôt que d'en faire la recherche. Ainsi donc, le libellé devrait être remplacé par tout simplement «le développement durable» et on enlèverait le verbe «rechercher», donc tout simplement.

Pour ce qui est, maintenant, de l'application de la loi à l'administration, à l'article 3, on continue à se questionner. On l'a fait à l'avant-projet de loi, on continue à se questionner sur les PPP du gouvernement. Est-ce que... En fait, on s'interroge sur les partenariats donc public-privé qui font partie des entreprises. Est-ce qu'ils vont être assujettis au même titre que le restant des organismes, ministères, etc., du gouvernement? Alors ça, c'est en fait une question encore sans réponse pour nous. On aimerait éventuellement savoir si ça va aller aussi loin que ces organismes-là.

Ensuite, pour ce qui est des principes et des mesures ? on ne reviendra pas, nous, sur l'internalisation des coûts!

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Méthot (Josée): Il est clair que ? ha, ha, ha! ? pour guider nos actions, notre prise de décision dans le respect du développement durable, il va sans dire que des principes fondamentaux doivent être adoptés. Et, nous, on trouve que les principes adoptés par le gouvernement ont la qualité d'être bien connus, en ce qui se fait sur le plan international, tout en ayant la vertu de représenter du gros bon sens. Alors, en général Réseau Environnement adhère à tous ces principes, bien que certains ont des petites particularités, en général c'est bien le cas.

Comme nous croyons qu'afin de démontrer sa conviction à faire appliquer et mettre en oeuvre le Plan de développement durable, le gouvernement doit s'assurer que les 16 principes soient bel et bien tous pris en compte. Vous comprendrez que l'association se réjouit maintenant que le projet de loi propose de tenir compte de l'ensemble des principes. C'est ce que nous avions demandé dans notre mémoire sur l'avant-projet de loi et c'est ce que nous avions demandé lors de la consultation publique. Alors, nous en sommes bien heureux.

Réseau Environnement salue également l'adoption du principe 4, sur l'efficacité économique, qui souligne enfin que l'économie du Québec et des régions doit être performante de même que respectueuse de l'environnement. Pour nous, c'est vraiment un principe judicieux.

Maintenant, pour ce qui est du principe 14, production et consommation responsables, Réseau Environnement salue l'ajout, en fait ce nouvel ajout qui intègre dorénavant l'adoption d'une approche d'écoefficience, ce qui n'était pas là lors de l'avant-projet de loi. C'est pour nous ainsi plus complet comme principe.

Il faut se rappeler, le principe 13 de l'avant-projet de loi, qui était intitulé «pollueur et utilisateur-payeur», en fait chez nous avait soulevé beaucoup de discussions puisqu'il semblait vouloir mettre l'accent sur les biens de consommation et sur les matières résiduelles, alors que pour nous il devait aller beaucoup plus loin et intégrer toutes sortes de contaminants. En ce sens, on doit dire que maintenant Réseau Environnement apprécie donc la modification apportée au libellé, dans le projet de loi n° 118, qui suggère maintenant deux fondements, soit le principe d'internalisation des coût ? où on est d'accord ? en complémentarité à celui du pollueur-payeur. Le gouvernement semble ainsi, pour nous, faire la distinction dans l'application des principes entre l'entreprise génératrice de pollution, de résidus et de déchets de production et celle qui a pour mandat d'en assurer la disposition selon les normes et les bonnes pratiques. Alors, pour nous, c'est très bien.

Nous continuons... On ne peut pas toujours ne pas être d'accord! Nous continuons de croire que les fonctions du ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs telles que définies à l'article 13 ne donnent pas suffisamment de pouvoirs au ministre pour assurer l'application de la Loi sur le développement durable. Pour nous, des verbes comme «promouvoir», «coordonner», «conseiller», ce n'est pas diriger, et selon nous le ministre devrait avoir plus de pouvoirs. Nous croyons... en fait nous craignons que les autres ministères n'aient pas tout à fait l'écoute nécessaire. Alors, c'est un questionnement que nous avons depuis l'avant-projet de loi, et nous aimerions en fait qu'il y ait plus de leadership de ce côté-là. Alors, voici ce qu'il en était.

En ce qui concerne la mise en oeuvre de la loi, à l'article 16, dans l'optique que la loi doit bien démontrer les intentions et la volonté du gouvernement de mettre en oeuvre son plan, nous considérons que le verbe «pouvoir» de l'article 16 doit être remplacé par le verbe «devoir». On aimerait bien voir plus de «doit» que de «peut désigner», «peut préciser», «peut notamment». On aimerait bien plus voir «le gouvernement doit préciser les conditions et les modalités». Pour nous, ça démontrerait beaucoup plus de volonté et de conviction dans la tâche.

À l'article, maintenant, à l'article 17, relativement aux objectifs particuliers que chaque ministère s'est fixés ou doit se fixer, en fait on se réjouit, Réseau Environnement se réjouit que maintenant le libellé de l'alinéa 1 fasse mention des objectifs en conformité de la stratégie. Pour nous, c'est une amélioration par rapport au libellé de l'avant-projet de loi. En fait, dans l'avant-projet de loi, on avait plutôt l'impression que n'importe quel objectif pouvait faire l'affaire. Maintenant, on voit bien que ça s'aligne tout dans la même direction et on trouve que c'est plus sérieux.

Maintenant, pour ce qui est des dispositions modificatives et finales, il va sans dire que nous aurions préféré que le Fonds de l'eau soit préservé, qu'il soit conservé, sauf qu'évidemment, puisque, pour nous, on veut absolument que les fonds qui soient récupérés d'un secteur puissent revenir au même secteur, donc, dans le cas de l'eau, que ça revienne à l'eau. On sait très bien que, par l'article 15.2, la disposition est déjà là pour l'eau, sauf que ça n'a pas été fait pour les autres secteurs d'activité. Alors ça, on y revient encore, c'est un point qui était très, très, très important pour nos membres.

Pour ce qui est de l'Institut de la statistique du Québec, en fait nous nous réjouissons en fait que l'institut devra dorénavant recueillir, produire et diffuser les informations statistiques sur les indicateurs de développement durable. Je crois que c'est une nécessité. Alors, c'est du gros bon sens.

Maintenant, pour parler du Fonds vert, à la section II.1, on aimerait souligner davantage qu'à 15.1 on doit aussi inclure les entreprises.

Le Président (M. Dubuc): Excusez-moi, madame. Si vous voulez conclure rapidement, votre temps est écoulé. On vous laisse conclure rapidement, s'il vous plaît.

Mme Méthot (Josée): ....

Le Président (M. Dubuc): Il vous restait beaucoup de pages encore, hein?

Mme Méthot (Josée): Pardon?

Le Président (M. Dubuc): Il vous en restait beaucoup?

Mme Méthot (Josée): Non, pas du tout, mais...

Le Président (M. Dubuc): Non. Bien, si vous voulez conclure, parce que le temps est écoulé.

Mme Méthot (Josée): ...monsieur peut faire la conclusion.

Le Président (M. Dubuc): Merci.

Mme Méthot (Josée): Merci.

M. Sergerie (Jean-Noël): Il y a certaines... Merci. Il y a certaines recommandations qu'on aurait voulu insister. Maintenant, entre autres, on recommande que le gouvernement du Québec développe immédiatement une stratégie composée d'actions concrètes, cette stratégie étant intrinsèquement reliée au succès du Plan de développement durable, parallèlement à l'adoption de la loi. Par sa mission, son expérience, son désir de participer activement au développement durable du Québec, Réseau Environnement s'engage à jouer un rôle de soutien technique et d'expertise scientifique.

En conclusion, Réseau Environnement souligne l'importance de la démarche gouvernementale et réitère l'intérêt d'une transversalité des problématiques environnementales. Le Plan de développement durable doit faire le pont entre la Politique de l'eau, les plans de gestion des matières résiduelles, la politique énergétique et le Protocole de Kyoto. Merci.

Le Président (M. Dubuc): Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Mulcair: Merci. Alors, il me fait plaisir d'accueillir les gens de Réseau Environnement, M. Sergerie, Mme Méthot, plaisir de vous avoir avec nous, puis merci beaucoup pour vos commentaires qui sont le reflet de beaucoup d'expérience autour de la table, chez vous, chez Réseau Environnement.

n(22 h 30)n

Je voulais vous rassurer sur une chose, surtout sur le fonds. Si, par exemple, on prend la redevance qui est prévue sur l'enfouissement, il faut se référer donc à cette loi-là, qui est la 130, et constater que les sommes doivent être utilisées pour ça. Alors, le fait de les utiliser comme partie du Fonds vert nous oblige néanmoins d'utiliser une somme équivalent à ça pour la gestion des matières résiduelles. C'est mathématique. On ne peut pas le faire autrement. C'est une contrainte législative. Mais, la marge de manoeuvre ? et j'ai souvent utilisé l'image ? c'est une approche carotte et bâton, en ce sens que, même si la vaste majorité des municipalités... dans le coin du député de Lac-Saint-Jean, on a des beaux exemples de municipalités qui sont tout à fait à la page; moi, j'ai un coin de résistance, que tout le monde connaît, c'est la CMM ? pour l'instant, je n'ai pas le leur ? parce qu'ils insistent de mettre quelque chose là-dedans qu'ils savent qu'on ne peut pas accepter... Ça va venir, je discute régulièrement avec eux autres, mais, pour l'instant, c'est un gros point de résistance. Mais, peut-être, quand ils vont voir la valse des dizaines de millions de dollars qui vont aller ailleurs que chez eux, «it'll have a wonderful way of concentrating their attention», et ça va sans doute constituer un incitatif.

Ah! Nos amis en haut veulent nous voir encore.

Le Président (M. Dubuc): Ça fait que je m'excuse, je dois suspendre les travaux.

M. Mulcair: Bon, étant donné ce qui s'est passé la dernière fois, ça a pris au moins 10 minutes pour collecter toutes les ouailles, peut-être qu'on peut échanger quelques minutes encore avec Réseau Environnement.

Le Président (M. Dubuc): Oui, encore, pour qu'on puisse permettre de...

M. Mulcair: Donc, je voulais vous rassurer là-dessus et sur l'affectation des sommes pour le Fonds de l'eau, les deux sont garantis. Merci pour vos autres commentaires. J'ai parlé avec mes autres collaborateurs, et on va s'assurer de vous rassurer là-dessus, pour que le «peut» devienne «doit». Je pense que, nous, on est en train de donner le coup d'envoi. Et il faut que ce soit de l'incitatif, mais ça va être le modèle à suivre.

Le Président (M. Dubuc): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Tremblay: Vous travaillez au niveau des technologies environnementales principalement, et c'est fascinant de voir les discours des différents chefs d'État... bien, que ce soit l'Europe ou les États-Unis actuellement qui, d'un côté, signent le protocole, l'autre ne le signe pas, mais tout le monde s'entend pour dire: Les technologies... Bon, il y a Chirac qui a dit, avant-hier, que ce n'était pas la panacée, mais n'empêche que, moi, je pense que le Québec pourrait devenir une terre d'accueil et même un endroit... La Mecque du développement des technologies environnementales, d'une part, dans son utilisation, il y trouverait des bénéfices environnementaux économiques, mais, d'autre part, dans la création d'emplois que ça pourrait engendrer dans le recherche et le développement.

Et donc, si nous avions à aller dans cette direction, c'est clair que ce n'est pas avec le projet de loi aujourd'hui qu'on va y arriver, mais, dans l'avenir, peut-être d'ici quelques années, il y aura un autre gouvernement, par quoi commenceriez-vous pour faire en sorte que des entreprises qui sont membres de votre réseau puissent fleurir davantage et émerger?

M. Sergerie (Jean-Noël): Je peux peut-être répondre à votre question en vous disant que, Josée et moi et une partie de l'équipe de Réseau, on arrive de Pollutech, à Paris, où Réseau Environnement était responsable du pavillon du Canada. Nos amis de la France ? on parlait de 158 pays; nos amis de la France ? trouvaient spécial que ce soit un organisme du Québec qui soit responsable du pavillon du Canada, et je peux vous dire qu'une douzaine d'entreprises avaient des kiosques sur place. Il s'est fait, excusez-moi l'expression, de la business sur place, on avait des gens aussi qui n'avaient pas de kiosque, mais ils étaient là aussi. Déjà, beaucoup d'entreprises au Québec, beaucoup de consultants font affaire dans d'autres... sont reconnus et font affaire dans d'autres parties du monde. Et je pense que le Québec est déjà, dans certaines parties du monde, reconnu pour ses expertises. Et on pense que le Plan de développement durable qu'on veut mettre en place au Québec est un plus, et je pense qu'on peut, au niveau sciences et technologies, avancer un petit peu plus loin si on est en mesure de s'asseoir dans des comités où on va être en mesure de dire: Voici les vraies choses.

C'est pour ça que je pense que le Plan de développement durable doit continuer avec un exercice qui nous permette, au niveau de l'eau, de l'air, des sols, des changements climatiques... On avait un groupe au niveau des changements climatiques, des gens qui sont renommés, qui sont membres de notre association et de d'autres associations aussi. Je pense que le Québec est une mine d'or à exploiter au niveau des sciences et technologies de l'environnement et je pense que ce qu'on est en train de faire ici, le Plan de développement durable, c'est un pas de plus pour qu'on soit reconnu, autant au Québec que dans d'autres pays, au niveau des sciences et technologies de l'environnement.

M. Mulcair: Bien, merci beaucoup.

Le Président (M. Dubuc): M. le ministre.

M. Mulcair: C'est un peu les aléas de la vie parlementaire, mais, étant donné la quantité de temps que ça a pris la dernière fois, ça n'avait pas de sens de vous faire attendre pour reprendre. On a réussi à avoir d'excellents commentaires dans votre mémoire, vos explications ce soir; il y a un échange plus court qu'on aurait souhaité, mais je pense que, par politesse pour nos invités, on va aller voter, puis mettre fin pour ça aujourd'hui.

Le Président (M. Dubuc): Ça fait que, excusez-nous, on est appelés à aller voter, ça fait qu'on va ajourner les travaux. La commission ajourne ses travaux sine die. Merci. Bonne soirée.

(Fin de la séance à 22 h 35)


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