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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le mercredi 20 février 2002 - Vol. 37 N° 35

Consultations particulières sur le projet de loi n° 72 - Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement et d'autres dispositions législatives relativement à la protection et à la réhabilitation des terrains


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures trente minutes)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre! Je déclare la séance de la commission des transports et de l'environnement ouverte et je rappelle le mandat de la commission qui est de tenir des consultations particulières et des auditions publiques sur le projet de loi n° 72, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement et d'autres dispositions législatives relativement à la protection et à la réhabilitation des terrains.

Est-ce qu'il y a des remplacements, Mme la secrétaire?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Mme Blanchet (Crémazie) remplace M. Paquin (Saint-Jean); M. Bergman (D'Arcy-McGee) remplace M. Lafrenière (Gatineau).

Auditions (suite)

Le Président (M. Lachance): Merci. Alors, aujourd'hui, nous allons tour à tour entendre des représentants du Centre québécois du droit de l'environnement, par la suite le Réseau environnement, pour terminer avec Vivre en ville, ce qui va clore ces auditions, ces consultations, ces auditions publiques.

Alors, je demande aux personnes qui, dans la salle, auraient un téléphone cellulaire de bien vouloir le fermer durant la séance, s'il vous plaît.

Bienvenue à tous les parlementaires ainsi qu'aux personnes qui les accompagnent. Et j'invite immédiatement les représentants du Centre québécois du droit de l'environnement à bien vouloir se présenter à la table.

Alors, bienvenue, monsieur, je vous prie de vous identifier et de nous faire part de vos commentaires sur le projet de loi dans un cadre de 15 minutes maximum.

Centre québécois du droit
de l'environnement (CQDE)

M. Bélanger (Michel): Merci. Merci, de m'accueillir aujourd'hui parmi vous. Mon nom est Michel Bélanger. Je suis vice-président du Centre québécois du droit de l'environnement. Je suis également vice-président de l'Union québécoise pour la conservation de la nature et je pense que l'Union a fait parvenir une lettre supportant les propos, là, qu'on émet dans le cadre de notre mémoire aujourd'hui.

Je vais aborder quelques points simplement parce que je... Bon, vous avez tous eu l'occasion probablement de lire le mémoire. On est rendu à la, peut-être, quatrième mouture, du moins à court terme, là, de cette loi-là, de cet amendement-là, et, à chaque fois je me demande, puis d'ailleurs c'est le même réflexe que je pose à chaque fois que je commence à lire un nouvel article: Pourquoi écrire cet article-là, à ce moment-ci, après 15 ans de vie avec les anciennes dispositions? Et, si je prends globalement le projet de loi lui-même, il y a peut-être trois objectifs que j'aurais souhaité ou qu'il pourrait être souhaitable de viser.

Le premier, c'est peut-être d'essayer de rejoindre davantage d'individus, de personnes potentiellement payeurs, susceptibles d'avoir à payer la facture. On avait le pollueur, le propriétaire n'était pas en force encore, et là on l'élargit au gardien. C'est déjà un avantage important. Deuxièmement, je pense que l'objectif devrait avoir été ou devrait être d'éviter les coûts futurs découlant de ce problème-là. Et je le mets dans la même chose... non seulement éviter les coûts, mais éviter également qu'on puisse refiler la facture à quelqu'un d'autre. Et le troisième objectif, ce serait bien entendu d'aller plus loin que ce qu'on a déjà dans le Code civil du Québec. Si le ministre se dote de pouvoirs, c'est pour aller au-delà de ce qu'on avait déjà dans les lois auxquelles le ministre aurait de toute façon également accès, mais surtout ne pas aller moins loin que ce que le Code civil donne déjà aux gens. Et ça, il faudrait faire attention, parce que j'ai une critique à ce niveau-là, et c'est peut-être la première, le premier point que j'ai soulevé.

J'en reviens sur la première disposition du projet de loi. Je pense qu'elle a peu été soulevée, même dans les anciennes versions du projet de loi n° 156, pourtant ça s'y retrouvait. C'est peut-être parce que j'ai allumé sur le tard un peu. Mais il n'est jamais trop tard parce que ce n'est pas encore allumé... ce n'est pas encore adopté. Mais je pense que c'est une erreur de prévoir, à l'article 19.7, qu'il n'y aurait de recours en injonction ? toute la procédure de recours en injonction qui est prévue à 19.2, 19.3, 19.4 jusqu'à 19.7 ? lorsqu'un plan de réhabilitation serait adopté. Vous savez que ce pouvoir, ce recours en injonction là, a été accordé. C'était un pouvoir qui allait au-delà de ce que le droit commun, le droit civil donnait déjà aux gens et... Bon, il y avait, c'était assoupli pour pouvoir élargir cet accès-là. Et, à chaque fois que le gouvernement a adopté des mécanismes de contrôle préalable à des entreprises, comme les certificats d'autorisation avant de polluer, les attestations d'assainissement pour tendre à dépolluer une entreprise qui pollue depuis quelques années. On fait une exclusion en disant: Bon, dans ce cas-là, lorsqu'un promoteur, une entreprise bénéficiera d'un certificat d'autorisation ou d'une attestation d'assainissement, il ne sera pas susceptible d'être poursuivi par injonction.

Je le comprends un peu, parce que la personne se plie à un minimum de conditions pour exploiter, et, dans ces conditions-là, il peut être en droit de s'attendre à ne pas être poursuivi en injonction s'il respecte son permis. Je pense que, lorsqu'on rajoute le terme «plan de réhabilitation», je pense qu'on va une coche trop loin, parce que ce que ça va faire, un plan de réhabilitation, c'est simplement de ramasser la cochonnerie qui a été mise dans l'environnement antérieurement et qui serait là pour deux raisons: ou bien ça a été mis à une époque où il n'y avait aucun contrôle ou les contrôles qui ont été mis par le biais des autorisations ont mal fonctionné. Parce que, si on se ramasse avec un terrain contaminé alors qu'une personne a toutes les autorisations gouvernementales pour opérer, les certificats d'autorisation, c'est qu'à quelque part il y a quelqu'un qui n'a pas vu que ça coulait directement là et ça s'accumulait là, ou encore il y a eu des accidents ou quoi que ce soit.

Lorsqu'on vient dire à la personne: Écoute, maintenant, tu vas réhabiliter ton terrain et, fais-toi-z-en pas, tu n'auras plus de recours en injonction potentiels contre toi, la question que je me pose, c'est: Mais quelles seraient ces circonstances-là où quelqu'un pourrait poursuivre de toute façon après la décontamination? C'est si le terrain, tout à fait contaminé, ou encore mal contaminé, ou simplement circonscrit par des mesures, comme on sait que ça peut arriver, continuait à contaminer les voisins. Or, je ne comprends pas. Si, effectivement, le terrain décontaminé porte encore atteinte à des tiers... Parce que, s'il ne contamine pas les autres, une personne n'aurait pas accès à cette injonction-là, parce que, pour avoir accès à l'injonction, il faut qu'il y ait une atteinte active à la qualité de l'environnement d'une personne... 19.1, 19.2., la mécanique marche comme ça. Pour pouvoir utiliser l'injonction de la loi, c'est que tu te plains qu'on émet un contaminant dans ton environnement. Le jour où le terrain est décontaminé puis il n'émet plus rien, il n'y a pas de danger d'injonction. Vous n'avez pas besoin de donner de bonbon puis de...

La question, c'est par contre lorsque vous avez un plan de réhabilitation qui ne fonctionne pas bien. S'il coule, là, vous venez d'enlever les recours en injonction aux voisins, aux gens. C'est là que je ne comprends pas. Je le comprenais pour les permis d'opérer, en disant: Bien, c'est sûr, quelqu'un, on lui donne le droit d'opérer à telles conditions. S'il fallait qu'il se fasse poursuivre en plus alors qu'il est à l'intérieur de son permis, là, oui, je comprends. Mais un plan de réhabilitation, je pense que ça va trop loin.

Maintenant, deuxième point. J'en ai trois seulement à aborder avec vous, ce ne sera pas très long. Le deuxième point... J'ai entendu certaines interventions de certains groupes qui demandent une contre-partie, un bonbon à la réhabilitation. Ça rejoint un peu ce que... Au même titre que je suis contre le fait de retirer l'injonction, parce que je pense qu'elle est là lorsqu'il y a quelque chose qui aura mal été et que ça va porter atteinte à des tiers, au même titre, je n'endosse pas la position qui dirait: Si quelqu'un, volontairement ou forcé, décontamine son terrain, il devrait être à l'abri de toute autre intervention du gouvernement. Je me dis deux choses: ou bien l'intervention qui suivrait, du gouvernement, viendrait sur une autre raison, un autre motif que celui pour lequel on a demandé de décontaminer, par exemple, si on découvrait qu'une substance qu'on pensait inoffensive tout d'un coup ne l'est plus, puis on n'avait pas demandé de la nettoyer ? ça m'étonnerait, mais ça peut arriver ? mais encore, si c'est insuffisamment fait ou... et je me réfère à une décision que la Cour d'appel a rendue dans l'affaire Impériale, où effectivement, après quelques années, le ministère s'aperçoit que la job a mal été faite.

C'est vrai que c'est enrageant de devoir peut-être réouvrir l'opération, mais, si on est obligé, si un jour le ministère est obligé de réouvrir, c'est qu'il y a quelque chose qui a mal été. Si quelqu'un peut se mettre derrière en disant: Vous n'avez pas le droit d'intervenir, vous n'avez pas le droit de réouvrir le plan, je l'ai fait tel qu'on me l'a demandé de faire, c'est que ça enlève finalement toute possibilité de contrôle gouvernemental sur une situation qui pourrait être problématique.

Moi, je ramènerais un peu à l'essence même de cette décision-là de la Cour d'appel. Ils ont dit non seulement que le gouvernement avait le pouvoir de le faire, il s'est donné le pouvoir et il l'a appliqué. Il dit: Quant aux injustices potentielles, oui, je vous avais donné ce permis-là, oui, j'ai accepté votre plan de réhabilitation et maintenant je le change. Il dit: Si effectivement le gouvernement s'est planté, s'est trompé, n'aurait pas dû revenir après, bien, il restera toujours les poursuites en responsabilité, vous poursuivrez le gouvernement en responsabilité civile, et c'est ce que la Cour a fait. Je veux dire, le jugement est quand même bien. On a des pouvoirs d'intervention si c'est nécessaire. Quand on les applique, est-ce qu'on est empêché de ne rien faire par après? Pas nécessairement. Et je pense qu'on parle de cas exceptionnels si ça se produit. Puis, si effectivement il y a un préjudice à quelqu'un, bien, à ce moment-là, il pourra se retourner contre le gouvernement.

Vous savez, en dehors de mon bénévolat, je gagne ma vie aussi puis je fais du recours collectif. Je suis impliqué dans un dossier comme ça où le gouvernement a permis à une pisciculture de polluer un lac. On a fermé la pisciculture avec les citoyens, puis, une fois que ça a été fini, ça n'a pas été long, le gouvernement a dédommagé 2 millions la pisciculture. Lorsqu'un client... Ce qu'on appelle les clients du ministère de l'Environnement... parce qu'il y en a deux: il y a les citoyens, pour une part, mais il y a aussi souvent les détenteurs de permis. Lorsqu'un client est affecté par une décision du ministère, ce n'est pas très long pour que le ministère corrige au besoin. Je vous avouerai que c'est... Même dans ce dossier-là, les citoyens sont toujours en cour, eux autres, parce qu'ils ont perdu leur lac, mais le promoteur, lui, a été dédommagé.

n (9 h 40) n

Donc, une situation comme celle-là, si un jour le gouvernement revenait sur un plan de réhabilitation d'un terrain, je n'ai aucun doute que, s'il y avait des recours à exercer, ils pourraient être exercés. De là à ajouter en disant que le gouvernement s'empêche d'intervenir dans le futur, je ne sais même pas de quelle façon ça pourrait être fait, soit dit en passant, mais je pense que ce n'est pas nécessaire à ce stade-ci. C'est un problème, les gens ont le problème et devraient le corriger.

Le troisième item, c'est toute la question des avis et des interventions au bénéfice des tiers. Je trouve le projet de loi relativement modeste, et, à chaque fois qu'on rentre dans la question des avis, des inscriptions au registre ou encore des avis de migration, je me pose toujours la question: Pourquoi limiter ce cadre-là à des gens ciblés? Exemple, on se raccroche toujours au pouvoir d'ordonnance, au gardien fautif, il y a toujours un espèce de lien avec les personnes qui ont été visées au départ. Mais, lorsqu'on parle d'informer des tiers, par exemple, qu'un terrain est contaminé, c'est qu'on veut qu'un jour... on veut éviter que quelqu'un refile ce terrain-là à un tiers. Ça concerne tout le monde, même le propriétaire qui n'est pas un gardien fautif. De toute façon, à partir du moment où est-ce qu'il sait que son terrain est contaminé, s'il ne veut pas le dire à personne, s'il ne veut pas l'enregistrer, s'il ne veut pas que ça se sache, c'est qu'à quelque part ou bien il ne veut pas le décontaminer puis il veut espérer le refiler ou... En tout cas, c'est mettre en place un problème latent qui risque d'être retourné à d'autres.

Moi, je l'ai répété souvent dans le passé aussi: Lorsqu'on enregistre un avis de contamination sur un terrain et qu'on dit: Oui, mais la valeur des terrains va baisser, ce n'est pas à cause qu'on enregistre un avis que la valeur baisse, c'est à cause que le terrain est contaminé. Donc, la seule chose qu'on fait en obligeant d'enregistrer, c'est de dire: Là, vous ne pourrez pas le refiler à personne d'autre. De toute façon, ils n'ont pas le choix. Oui, on va me dire: Le Code civil intervient. Bien, oui, il intervient en matière de vice caché. Alors, tant mieux s'il réussit à assez bien le cacher, il va pouvoir le refiler, puis un jour il espérera de ne pas être poursuivi. L'idée, c'est que je ne vois pas d'avantage du tout, du tout, à partir du moment où est-ce que le législateur décide d'abord d'informer. Pourquoi enregistrer? C'est pour informer. Bien, à ce moment-là, pourquoi pas informer dans tous les cas où il y a un terrain contaminé?

Et je lisais aussi la question de la migration des produits. On dit: Lorsque la migration atteint la propriété des voisins, il faudrait avertir les voisins. Mais on ne vise que la migration qui viendrait d'activités visées par règlement. Mais pourquoi? Je me suis posé la question encore: Pourquoi, lorsqu'on va avoir des activités visées par règlement et que la migration vient, risque de porter atteinte à un voisin, c'est seulement là qu'on doit avertir le voisin? Mais tous les autres cas où ce n'est pas les activités visées par le règlement, où c'est un terrain simplement d'un propriétaire mais qui va porter atteinte au voisin, je me pose la question: À partir de ce qu'on ouvre cet article-là et l'intention est d'avertir parce qu'il y a quelque chose qui s'en vient chez les voisins, c'est très bien, l'intention, mais, à ce moment-là, pourquoi limiter?

Alors, j'ai les précisions, là, au fur et à mesure de chacun des articles, mais il y a toujours un lien à l'intérieur des mêmes acteurs qui ont été ciblés. Je le comprends, peut-être pour l'ordonnance, la première ordonnance de décontamination, qu'on cible certaines personnes à qui on veut éviter... des propriétaires innocents. Quoique le Code civil... Je pense que, lorsque... On me disait qu'on s'est inspiré un peu du gardien en écrivant «le gardien» au niveau du Code civil, mais le Code civil est encore plus sévère que ça lorsque la migration, par contre, risque d'atteindre des voisins. On parle des troubles de voisinage, et là il n'est pas question nécessairement de connaissances préalables ou même... comme on le prévoit ici, mais, bon, c'est un pouvoir d'ordonnance ministériel, c'est quand même, ça excède les pouvoirs de droit commun. Alors, voilà, c'était l'essentiel des commentaires que je voulais faire.

Le Président (M. Lachance): Merci. Alors, nous allons amorcer la période d'échange avec les parlementaires. M. le ministre délégué à l'Environnement.

M. Simard (Montmorency): Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais, d'entrée de jeu, vous souhaiter un bon avant-midi de travaux. M. Bélanger, soyez le bienvenu parmi nous. Je tiens à vous remercier pour votre présence, pour la qualité du mémoire que vous nous avez soumis, également vous remercier parce que je sais qu'à chaque fois que le ministère a eu à faire appel à vos services que vous avez toujours répondu oui à l'appel et que vous avez toujours été présent dans le dialogue qui concerne le présent projet de loi, et je tiens encore une fois à vous en remercier.

Vous me permettrez deux points très rapidement parce que je sais que mes collègues voudront également vous questionner. Au début de votre présentation, vous nous avez résumé les trois objectifs que vous voyez en filigrane de ce projet de loi. Le dernier et non le moindre, vous nous dites que, à votre avis, 72 doit aller plus loin que l'actuel Code civil du Québec. Et c'est justement là-dessus que va porter ma question.

Hier, les représentants du CPEQ, mais davantage de représentants du Barreau du Québec, nous ont dit qu'au contraire l'actuel projet de loi reniait en quelque sorte le Code civil du Québec, niait le concept du pollueur-payeur. Et, vous, vous nous dites au contraire: Non, le concept pollueur-payeur... le concept ? pardon ? de gardiennage est un peu une extension juridique tout à fait naturelle du concept de pollueur-payeur.

Donc, j'aimerais que vous puissiez réagir à ce que le Barreau tient comme position dans ce qu'il voit de la loi, du projet de loi n° 72, par rapport au Code civil du Québec.

M. Bélanger (Michel): Je n'ai pas eu l'occasion... Je n'ai pas lu le mémoire du Barreau. J'aurais aimé ça, parce que je ne comprends pas en quoi eux disent que le projet de loi... Si je comprends votre question, le Barreau dirait que le projet de loi va moins loin que le Code civil?

M. Simard (Montmorency): Le Barreau nous a dit explicitement ? je n'ai pas le document du Barreau avec moi ? mais de manière très bien citée que le projet de loi n° 72 était aux antipodes de l'esprit qui animait le Code civil du Québec.

M. Bélanger (Michel): Ah non! Non, moi, je trouve que le projet de loi va même moins loin que le Code civil du Québec peut aller. Si on prend les différentes dispositions... Bien, quand on parle du gardien, on ne parle pas du pollueur.

M. Simard (Montmorency): Non, mais, vous voyez, M. Bélanger, qu'il y a une bonne collaboration, puisque mon collègue le député de l'opposition, le député de D'Arcy-McGee...

M. Benoit: ...le ministre n'avait jamais les lettres qu'il avait reçues. C'est nous autres qui lui fournissaient les lettres et, quand la commission a commencé, on fournissait les lettres au ministre... il ne les avait jamais reçues, lui.

M. Simard (Montmorency): Non, mais me permettez-vous que je vous relise le petit paragraphe, là? Non, je trouve ça intéressant, parce que, à mon avis, là, vous venez nous dire quelque chose de nouveau, puis il faut profiter de votre présence pour contre-argumenter suite à la présence du Barreau.

Alors, je vous lis le paragraphe: «Le principe du pollueur-payeur procède par ailleurs de la même philosophie qui a été à l'origine du Code civil au Québec, à savoir la responsabilisation des citoyens pour leurs gestes et comportements.» J'attire votre attention sur la phrase suivante: «Il est regrettable que le projet de loi n° 72 s'éloigne de ce principe fondamental en imposant un fardeau potentiel de responsabilités sur les épaules de ceux qui ont ou qui ont eu la garde physique d'un terrain.»

Je ne veux pas vous poser une colle, hein, mais je...

M. Bélanger (Michel): Non! Là où le projet de loi va beaucoup plus loin que le Code civil, oui, c'est en ce sens qu'il peut intervenir lorsque des personnes ne subissent pas nécessairement un préjudice, et ça, je pense que c'est le mérite... parce que sinon ça ne servirait à rien que le législateur... ça ne servirait à rien que le ministre se dote de pouvoirs d'ordonnance si ce n'était pas d'intervenir lorsque tu n'as pas nécessairement de plaignant. Ça serait l'fun, ça évite des procès. Par contre, parfois entre les voisins, quand on peut appeler à l'aide le ministère pour dire: Écoute, tu as un pouvoir, peux-tu le faire à ma place, je n'ai pas d'argent, je n'ai pas le goût de poursuivre mon voisin, ça, c'est bien. Mais lorsque... et ça, c'est le gros avantage. Si je donne crédit au Barreau, ce serait là-dessus, mais ce n'est pas nouveau, c'est depuis 1989 dans la loi. Alors, bien que le Barreau veut recommencer ce qui a déjà été adopté... Mais on l'a déjà depuis bientôt 12 ans. Non, là-dessus, je ne pense pas qu'on va trop loin.

Là où le projet de loi va plus loin, comme je le mentionnais, c'est lorsque tu n'as pas nécessairement un préjudice à un voisin, lorsque tu n'as pas nécessairement quelqu'un qui peut s'en plaindre et tu interviens. Mais si... de dire que le Code civil intervenait dans des cas qui étaient moins... bien, moins, disons, fautifs, entre guillemets, je ne suis pas prêt à dire ça si on s'en tient seulement à quelques dispositions. Si on s'en tient à la disposition de base qui dit qu'il faut que tu commettes une faute pour être responsable de quelque chose, oui. Quand il déborde sur l'autre, la responsabilité du gardien, là, je suis un peu moins d'accord, parce que je trouve, au contraire, que vous auriez pu aller encore plus loin. Vous allez, au contraire, coller assez bien à l'article 1465, qui parle, qui donne même une certaine ouverture avec un renversement du fardeau de preuve à l'autre partie. Parce que c'est ça, c'est... Il y a une présomption de faute ou de responsabilité, 1465, et qui pèse sur la personne qui est poursuivie. Il peut s'en dégager s'il montre qu'il a fait diligence raisonnable. Moi, j'aurais aimé ça que vous alliez... Vous l'avez vu un petit peu plus loin, c'est la définition, parce que vous allez... On est dans le mou encore. Le mou du Code civil, on va le retrouver là, alors que c'est une loi que j'aurais aimé mieux qui soit plus précise. Mais c'est tout.

n(9 h 50)n

Mais, si on continue la logique et qu'on tombe sur 976 ? c'est ce que je vous ai mentionné rapidement ? c'est les troubles de voisinage, ça, ça, vous êtes pas du tout là, vous autres, et là c'est la responsabilité sans faute. Je reconnais que c'est parce que quelqu'un a subi un préjudice, mais ça va bien plus loin que vous autres, ça.

M. Simard (Montmorency): Et d'ailleurs on prend bonne note de votre observation et de votre suggestion. Concernant d'ailleurs ces avis aux tiers sur les registres fonciers, hier la Chambre des notaires, en fait, nous recommandait très vivement qu'obligation soit faite que l'ensemble des, comment dire, des attestations soient cautionnées soit par un avocat ou soit par un notaire. Qu'en pensez-vous? Là non plus, ce n'est pas une colle. Ha, ha, ha!

M. Bélanger (Michel): Alors, moi, j'ai le bonheur d'être les deux. J'ai été notaire avant d'être avocat, alors j'aurais doublement intérêt à vous dire: Ah, oui, absolument. Je vais vous dire, il y a une disposition qui mentionne qu'il serait bon d'aviser les créanciers hypothécaires et je pense, c'est 31.48, 31.49, je ne sais pas, dans les premiers articles, et ça commanderait effectivement... Moi, je pense que ça devrait être élargi à beaucoup d'autres, à toutes les personnes qui pourraient détenir des droits parce que tout le monde a intérêt sur ça, et ça, ça commande une certaine recherche qui demanderait de savoir qui a des droits sur des propriétés qui relèveraient probablement de l'expertise des notaires. Je veux savoir où on doit les mettre. Par contre, de là à dire qu'il faudrait qu'absolument que ça transite par des juristes, moi, je vais vous dire: Les juristes sont extrêmement dépendants ? comme va l'être le ministère, je le vois par la disposition où vous référez aux experts ? extrêmement dépendants de ce que les experts vont nous dire là-dedans. De là à vérifier qu'est-ce que l'expert a dit de manière à s'assurer que c'est bien... J'avais pris connaissance des propositions que la Chambre avait faites dans le passé, puis ce que je trouvais original, c'est que ça restait quand même une vérification un peu étrange parce qu'ils vérifiaient finalement... ils voulaient avoir les sécurités voulues pour ne pas s'engager dans une responsabilité qui ne leur incombait pas, mais tout en exerçant une certaine compétence sur la vie. Et ce qui est difficile à établir, c'est où effectivement ça relève de l'expertise du notaire ou c'est pas plutôt celle de l'expert qui vient donner l'attestation.

Or, ce qui resterait, c'est effectivement une dernière analyse pour s'assurer qu'avant l'enregistrement on a sensiblement le respect d'un minimum de conditions. Ça peut être utile, mais je pense que ce qui est encore beaucoup plus utile, c'est de s'assurer de la probité de l'expertise elle-même sur laquelle tout le monde va s'appuyer, y compris les experts, je pense, bien en amont d'une contre-vérification par des juristes. Avec tout le respect que j'ai pour la proposition, qui a quand même certains mérites, là, mais il y a une utilité relative, je pense.

M. Simard (Montmorency): Merci beaucoup, maître.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Masson.

M. Labbé: Merci, M. le Président. M. Bélanger, merci de votre présentation, merci d'être venu ce matin.

Alors, je vais vous parler peut-être de toute la question de financement, je pense, c'est un élément qui est important. Dans votre mémoire, à la page 2, entre autres, vous soulignez que c'est important que le gouvernement, autant les municipalités aussi, se donnent les moyens financiers justement pour permettre la décontamination. Par contre, vous rajoutez un élément qui... c'est là-dessus... je voudrais revenir avec vous, c'est: «De plus, on devrait envisager des mesures suffisantes pour éviter que la facture soit refilée à des tiers innocents.»

Hier, on a entendu... en tout cas, certains organismes, je peux vous nommer, entre autres, les banquiers et puis le Centre patronal de l'environnement, qui mentionnaient que, nous autres, on devrait être presque considérés comme gardiens, comme étant des tiers innocents, dans le sens qu'on ne devrait pas nécessairement avoir la responsabilité de décontaminer ces terrains-là, compte tenu qu'on n'a pas eu nécessairement... ça n'a pas été nous autres qui l'a pollué, dans un sens. Par contre, ils disaient: Si, en bout de ligne, vous considérez qu'on est responsables, que vous nous poursuivez ou que vous décidez que, nous autres, on doit décontaminer, laissez-nous au moins la possibilité d'avoir un recours contre le pollueur, le premier pollueur ou celui qui a pollué le plus ce terrain-là comme tel. J'aimerais savoir qu'est-ce que vous en pensez. D'abord, la notion... est-ce qu'il devrait être responsable, tenu responsable et, deuxièmement, si le gouvernement les considère comme étant responsables au même titre que le pollueur. Eux autres parlaient même de la notion de pollueur-payeur, mais aussi celui plutôt qui a le cash et qui était le gardien comme tel. C'est la notion qu'ils ont mentionnée hier.

Alors, est-ce qu'on devrait leur permettre, dans un deuxième temps, d'avoir un recours possible contre le pollueur? Vous savez ce que ça veut dire? Ça peut étirer des délais, à ce moment-là, au niveau juridique, etc.

M. Bélanger (Michel): C'est-à-dire que... je vais juste reprendre votre dernier point, «ça va étirer des délais au niveau juridique». Comme je le mentionne ici, moi, je pense que le souci qu'on doit avoir, c'est que les terrains soient nettoyés. À partir du moment où est-ce que quelqu'un doit le nettoyer, s'il y a des recours à exercer par après en termes d'environnement, au moins, ça va être protégé. Oui, ça va être long, ils vont se contre-poursuivre. Moi, j'en suis beaucoup là, c'est que... Allons sur la solution la plus directe pour décontaminer et adresser le problème d'environnement et essayons, dans la mesure du possible... évitons... Comme ce qui m'embête souvent, c'est que, si les pouvoirs d'ordonnance sont flous ou critiquables, là, on ne décontaminera pas avant longtemps et là on va être pris en amont avec le problème. Mais, lorsque vous me donnez l'exemple des banquiers, tout ça, est-ce qu'on peut se retourner contre d'autres après, je n'ai pas de problème qu'ils se retournent après. Je ne voudrais pas qu'ils se retournent avant, effectivement, parce que, là, effectivement, on est parti puis ça ne sera jamais fait.

À partir du moment où est-ce que vous ouvrez la porte sur les gardiens... Là, vous l'avez ouverte sur les gardiens coupables ou moins innocents, mettons, mais il faut comprendre qu'à partir de ce moment-là ce n'est plus le pollueur, parce que je pense que le ministère, s'il est capable de mettre la main sur le pollueur, en termes de principe, en termes d'éthique, en termes de n'importe quoi, social, il va frapper sur le pollueur, c'est plus acceptable, entre guillemets, O.K. Le jour où on va s'adresser à quelqu'un d'autre que le pollueur, c'est ou bien parce qu'il n'existera pas, on ne le retrouve pas, il est insolvable, donc d'emblée on est en train d'aller sur quelqu'un qui est plus innocent, O.K.

Il est innocent pourquoi? Le propriétaire qui achète moins cher son terrain parce qu'il est contaminé, il n'est pas tout à fait innocent. Il a payé moins cher le terrain, probablement pour la valeur de la décontamination. Là, il faudrait les prendre un après l'autre et dire: Bon, est-ce qu'ils sont... sont-u coupables ou ils ne sont pas coupables? Et là, oui, on pourrait passer beaucoup de temps à ce niveau-là, à savoir qui on doit aviser. Mais, si l'idée est au départ de se doter de moyens d'intervention à l'égard d'autres personnes que des pollueurs, moi, je les mets tous sur le même pied après. C'est tous des gardiens, c'est des locataires, c'est... Il y en a qui sont un petit peu plus irresponsables que d'autres. Si certains ont des recours contre d'autres et que... Comme les banques, si la banque a prêté après avoir enregistré un avis de contamination... D'ailleurs, ça, c'est un autre avantage si on pouvait les enregistrer. J'imagine qu'ils ne doivent pas être rébarbatifs à l'avis, eux autres, d'enregistrer, sauf que, s'ils prêtent pareil après, bien, ils ne sont plus innocents, tu sais.

Donc, la question de la connaissance en amont, c'est une chose, mais l'obligation de décontaminer, si vous allez en dehors du pollueur, c'est clair qu'on va toucher des gens qui, des fois, vont être un peu plus coupables que d'autres, si je peux dire. Mais l'intention, c'est quand même, ce que je comprends, de se doter de pouvoirs qui vont au-delà du pollueur. Et, à partir de ce moment-là, moi, en tout cas, personnellement, je les mets tous sur le même pied mais avec des... Mais je conçois qu'il faudrait qu'il y ait des recours, mais ces recours-là existent déjà, on n'a pas besoin de les prévoir là, ils existent. Si le pollueur... Bon, remarquez qu'une banque, par rapport au pollueur... Oui, ça, il faudrait que je vérifie, là. L'acheteur, le vendeur, tout le monde, oui, il y a une chaîne, les tiers, celui qui ramasse, la municipalité peut-u s'en aller sur... Ça, c'est vrai que c'est une bonne question.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Labbé: Ha, ha, ha! Là, c'est le réflexe de notaire qui revient.

M. Bélanger (Michel): Oui. C'est vrai qu'il y a peut-être plus de difficultés pour la banque, quoique... en tout cas, si je comprends.

M. Labbé: Mais vous avez bien fait le tour du jardin. Je vous remercie, c'est ce que je voulais entendre.

M. Bélanger (Michel): Mais je ne suis pas sûr d'avoir répondu, finalement. Ha, ha, ha!

M. Labbé: Oui, oui, vous avez bien répondu. Merci.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Orford et porte-parole de l'opposition officielle.

M. Benoit: Oui. Me Bélanger, merci d'être avec nous aujourd'hui. Dans nos remarques préliminaires, l'opposition, nous avons mentionné comment nous étions heureux que vous soyez ici aujourd'hui. Je pense que vous êtes un de ces phares, au Québec, que l'on peut s'ancrer puis dire: Bien, il y a un vécu environnemental et légal tellement fort qu'on doit écouter des gens de votre trempe, quand ils viennent en commission parlementaire, d'une façon privilégiée. Alors, encore une fois, merci que vous soyez ici aujourd'hui.

Quelques petites questions. Vous nous faites part d'ailleurs, au début de vos remarques, que c'est la quatrième mouture de ce projet de loi. Je vous rappelle que la dernière mouture, c'est l'opposition qui a un peu bloqué toute l'affaire parce qu'on croyait que ce projet de loi là il n'était pas adéquat, il aurait causé un grand ralentissement économique au Québec. Nous en étions fort conscients, et ça obligeait un peu tout le monde, incluant les différents ministres ? il y en a eu trois qui ont passé depuis ? mais ça obligeait un peu tout le monde à refaire leur devoir. Et on a l'impression, à écouter tout le monde depuis hier, que cette quatrième mouture, comme vous dites si bien, est très près de finir par percoler adéquatement, et je pense qu'on va finir par avoir un bon café.

Une fois ça dit, vous nous dites dans votre mémoire: «Dans tous les cas, le problème est le même, les fonds viennent vite à manquer pour réparer ou circonscrire cette réalité. Les fonds viendront à manquer puisque plus personne n'a intérêt à payer pour nettoyer. Car, même en nettoyant, le terrain ne vaudra jamais plus que sa valeur marchande.»

Ce que les villes nous ont dit hier, l'Union des municipalités, c'est: Écoutez, on peut faire toutes sortes de sparages. Nous, ce qu'on voudrait, c'est ? puis vous nous l'avez dit aussi ? c'est que ces terrains-là redeviennent importants dans la communauté, qu'on évite ce que va nous dire Vivre en ville tantôt, qu'on évite que les gens aillent en périphérie des grands centres, qu'on puisse redévelopper les centres urbains.

n(10 heures)n

Or, une fois qu'on a tout compris ça, vous arrivez à la conclusion... Puis, Vivre en ville va nous le dire aussi sous d'autres formes, ils parlent d'avantages fiscaux. Vous, vous nous parlez du «superfund». Les banquiers nous en ont parlé; d'autres nous en ont parlé, mais peu de gens semblent savoir comment ça fonctionne. Vivre en ville a une note avec quelques petites explications. J'aimerais ça si vous pouviez nous expliquer, en une minute et demie, le «superfund» américain, comment il fonctionne dans sa technicalité.

M. Bélanger (Michel): Ce que j'en ai compris, c'est qu'il y a une couple d'années les Américains se sont dotés de ressources financières... D'abord, ça rejoint un peu ce que je répondais tout à l'heure. Devant le problème des sols contaminés, le nerf de la guerre, c'est l'argent. O.K.? Donc, ils se sont dotés de ressources financières suffisantes pour intervenir, et le casse-tête juridique commence après. Donc, autrement dit, ils décontaminent et poursuivent après pour se faire rembourser. C'est vrai qu'ils ne récupèrent pas tout. Mais c'est au même titre que les pouvoirs d'ordonnance quand on va être empêtrés avec quelqu'un qui ne veut pas être ordonné. J'ai pour mon dire que quelqu'un qui ne veut pas rembourser, il ne voudra pas non plus être ordonné de décontaminer. Mais, dans un cas, ça va être décontaminé.

D'où vient l'argent? D'une taxe à l'industrie, actuellement, à l'industrie qui pollue actuellement. L'esprit ou la philosophie derrière ça étant que, oui, on répare beaucoup d'erreurs d'une époque industrielle un peu inconsciente, si je peux dire, et puis, bon, eux autres ont ciblé ça comme étant la source: on va demander à l'industrie. Alors, je ne sais pas quelle industrie est visée, probablement des industries à risque, peut-être la liste des industries qui seraient dans le règlement ici. C'est un petit montant qui est perçu, qui est mis dans ce fonds-là et puis, avec les années, ça monte et ça... Puis ils ont évalué comment ça devait coûter. Parce que, finalement, c'est des fonds publics, c'est ou bien le gouvernement et les municipalités qui devront nettoyer, parce qu'on parle des problèmes...

Quand je le mentionne dans l'introduction, c'est important. Les terrains qui valent quelque chose, vous n'aurez même jamais besoin d'ordonnance, ils vont être décontaminés. Tout ça, toute cette loi-là va être appliquée lorsque personne ne va vouloir payer. Donc, ça revient à une question d'argent. C'est toujours... C'est là où j'en suis. Ou encore, il n'y a personne qui va être en «front» pour être exposé. Donc, ça prend tout de suite les sous. Sinon, c'est le gouvernement qui va payer la note. En bout de ligne, l'entreprise va fermer ses portes, va faire faillite. Vous allez avoir de la misère à la poursuivre. Ça va être des frais énormes. Donc, prenons tout de suite le taureau par les cornes, constituons un fonds.

Je donnais l'exemple des sites d'enfouissement. Je me rappelle très bien, parce que j'avais été commissaire sur cette commission-là du BAPE sur les déchets, sur les matières résiduelles, ça ne s'appelle plus des déchets, et on avait eu une bonne discussion sur, d'abord, le prélèvement d'une redevance sur le sac vert, parce que, là, c'était clair; c'est parce que, là, on a des bombes en puissance qui vont durer 30, 40, 50 ans. Donc, il va falloir les suivre, et là le gars qui a fait son argent sur le sac vert, il n'est plus là. Donc, ça, c'était simple.

Mais on s'était posé la question: Oui, mais... Ah oui! Puis là les promoteurs étaient venus nous dire: Oui, mais cet argent-là, c'est notre argent. D'ailleurs, je trouve toujours un petit peu ça... parce que c'est eux autres qui perçoivent la taxe. C'est comme la TPS, tout d'un coup, si tu ne la paies pas, elle reste à toi, tu sais. Mais ils disaient: C'est à nous et, dans 50 ans, on voudrait ravoir cet avoir-là pour nous. Et on disait: Non, si ça a été pris, prélevé pour le suivi et tout ça. Mais s'il reste de l'argent, bien, bravo! S'il reste de l'argent, ça ira dans la décontamination des sites orphelins. Donc, c'est un petit pas. On avait dit: Justement, c'est que l'État se dote de ressources de cette nature-là un petit peu pour avoir les moyens d'intervention et, après ça, à ce moment-là, oui, il se remboursera.

Donc, les difficultés juridiques qu'on a ici, qu'on va rencontrer sont les mêmes, sauf qu'effectivement c'est simplement pour aller rechercher l'argent une fois que c'est fait. Et je sais que... Bon, le taux de succès des Américains n'est pas énorme, je pense que c'est 30 %. Donc, ça veut dire que le gouvernement paie malgré tout 70 % de cette facture-là. Actuellement, on n'a aucune ressource, si ce n'est le trésor public.

M. Benoit: Je pense que c'est très clair, on ne peut pas être plus clair que ça, de tout ce qu'on a entendu ici aujourd'hui. Hier, on a reçu les gens du CPEQ, que vous connaissez, Odette Nadon, que tout le monde connaît bien sûr, et elle, à un moment donné, elle a dit: Écoutez, ce n'est pas bien, bien compliqué, cette affaire-là; ça prend une immunité. Si on veut relancer ces terrains-là, que le redéveloppement se fasse, ça prend une immunité ? je pense que c'est le mot qu'elle a pris ? sur le dernier propriétaire ou sur les derniers propriétaires, parce que, sans ça, on va jammer là. Il n'y a plus rien qui bouge. On n'est plus capables.

Alors, entre avocats, je sais que souvent vous vous entendez, souvent vous ne vous entendez pas. Est-ce que, effectivement, la notion d'immunité pour le gardien ou pour le dernier propriétaire, pour qu'on puisse éventuellement tout relancer ça... Me Yergeau nous a donné un exemple de clients, hier, qui lui disent: Écoutez, nous, on veut acheter un tel terrain, on veut le développer pour faire une école. Mais il a dit... À mon avis, je leur ai dit: Ne touchez pas à ça avant de connaître 72 parce qu'il se pourrait que vous soyez pognés à payer, dans toute la gang des gens responsables, que vous ayez été gardiens ou derniers propriétaires. Est-ce que vous êtes d'accord avec une approche comme celle-là où on donnerait une immunité à des gens qui, finalement, relanceraient ces terrains-là, ou si c'est complètement loufoque comme approche?

M. Bélanger (Michel): Non. Non, j'avais entendu l'argument. Ça m'achale, moi aussi, parce qu'il y a un volet où on dit: Oui, mais c'est parce qu'on voudrait volontairement que les gens puissent le faire, et tout ça. Et la notion d'immunité, là où elle me fatigue, c'est que si tu invoques ton immunité, c'est que tu es poursuivi un jour, sinon tu n'as pas besoin de l'invoquer ton immunité. Et le jour où tu es poursuivi et que tu invoques ton immunité, ce serait quoi comme exemple? Ce serait quelqu'un qui aurait décontaminé les sols et que, tout d'un coup, ça présente quand même des risques?

M. Benoit: Possiblement.

M. Bélanger (Michel): Mais s'il y avait cette... Ma question, c'est là que je dis... S'il y a un problème et on se doit d'intervenir, s'il y a une immunité là, à ce moment-là, c'est clair que c'est le gouvernement qui va intervenir. Donc, c'est qu'on va perdre certainement tous les moyens d'intervention à l'égard de ces gens-là. Quelqu'un qui achète... On va vous donner un exemple. Le client de Me Yergeau, si lui a payé moins cher son terrain puis qu'il le décontamine puis qu'il paie le prix qu'il aurait payé de toute façon le terrain, pourquoi lui donner ce cadeau-là?

Il y a des situations, possiblement, où une personne est vraiment un propriétaire complètement innocent, et on l'obligerait et on dirait: Puis un jour tu peux quand même continuer. Là, je suis d'accord. Et peut-être que, dans la mesure où le gouvernement atteste... Et là-dessus, je voudrais revenir, je m'étais mis trois exemples. Au niveau de l'immunité, le pourquoi du bonbon qui m'achale un peu, c'est que l'immunité veut dire: On ne peut plus te toucher. Mais, si on a besoin de te toucher, comment on va faire, alors qu'on ne peut plus te toucher? Si, par contre, on revient sur une décision qu'on a prise, où on s'est trompé, bien là tu pourras poursuivre le gouvernement, les recours existent. Ce n'est pas facile, mais ça existe.

Puis il y a une chose que vous avez mise dans le projet de loi qu'il ne faut pas perdre de vue: vous allez obliger dans une certaine mesure l'intervention d'experts, des tiers experts. Je sais que, dans les certificats d'autorisation, plus ça va, si la tendance... je veux dire, dans le lac Heaney , ça n'aurait pas été au ministère de l'Environnement de payer la note du promoteur si on avait pu mettre la main sur celui qui est allé lui dire que c'était bon, ce qu'il mettait dans le lac. Je veux dire, tu fais payer l'expert qui est allé dire que c'était correct. Donc, le gouvernement peut tout à la fois continuer à intervenir, contrôler, parce que ça prend ça, mais non pas acheter la responsabilité. Et moi, je suis tout à fait d'accord qu'il le donne aux professionnels. Ils chargent pour leurs clients, bien, ce sera dans le prix.

Par contre, il y a une chose... Et donc, ça, c'est une sécurité. On met beaucoup de choses, de paramètres autour d'un projet comme celui-là, on demande que ce soit vérifié par un expert. J'ose espérer que les règles entourant l'expertise vont s'assurer que cet expert-là a toujours une assurance responsabilité. Et là j'ouvre une parenthèse parce que... Mais ça, il faudra, le cas échéant, s'assurer de ça parce qu'un notaire, par exemple, quand il signe une vente, s'il est encore en pratique 10 ans après, puis c'est revendu, il va se faire pogner s'il s'est trompé, ça le suit. C'est ça qui est le drame des notaires. Un avocat, ce n'est pas ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bélanger (Michel): Un avocat, ce n'est pas ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Benoit: ...politique. Ha, ha, ha!

M. Bélanger (Michel): Mais c'est l'utilité également, c'est l'utilité de la profession aussi, c'est une garantie qui est donnée, et donc, ne serait-ce que de ça, ça vaut. Mais un avocat, ce n'est pas ça, l'avocat va être poursuivi s'il a fait son erreur quasiment durant... Et ce qui me préoccupe, c'est lorsqu'un expert va venir faire des plans de réhabilitation et que la firme n'existera pas dans 10, 15 ans, parce que le problème existe toujours. Il faudrait s'assurer que la couverture d'assurance, que l'étendue des protections ou des garanties suive; donc, autrement dit, que s'ils sont assurés, ils sont assurés pour les gestes qu'ils ont posés et que, indépendamment du moment, on pourra revenir contre l'assureur qui est quand même une grosse compagnie.

Mais, ça, il va falloir faire bien attention. Et quand aura mis tout ça en place, je ne vois pas pourquoi on aurait besoin d'une immunité. Tous les outils sont là. Qu'ils se retournent contre... Même le client de Me Yergeau, si son expert lui dit que c'est ça qu'il doit faire comme nettoyage, si le gouvernement dit: Bien, O.K., tu décontamines au niveau B, parce que c'est rien que ça qu'on a comme norme, puis qu'un jour ça change puis il monte ça à A, puis les maisons sont construites, puis on dit: Déménagez tout ça. Là, moi, je poursuis le gouvernement, je poursuis... tu sais... Effectivement, on a mis des outils, mais ces outils-là sont là, c'est... L'immunité ou la garantie, elle est dans les outils qui sont là. Pas besoin de plus que ça, je pense, en tout cas.

M. Benoit: Parfait.

Le Président (M. Lachance): Ça va?

M. Benoit: Ça va. Très bien, merci.

Le Président (M. Lachance): Alors, merci, M. Bélanger, pour votre participation aux travaux de cette commission parlementaire, de votre présence ici aujourd'hui. Merci.

n(10 h 10)n

J'invite immédiatement les représentants du RÉSEAU environnement à bien vouloir prendre place à la table.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Lachance): Bienvenue, messieurs. Alors, j'invite le porte-parole à bien vouloir s'identifier ainsi que les deux personnes qui l'accompagnent, en vous signalant, comme vous avez pu le constater pour la personne précédente, que vous avez un maximum de 15 minutes pour nous faire part de vos commentaires.

RÉSEAU environnement

M. Bernier (Denis): Merci beaucoup. À ma droite, M. Jean Halde, président de DVH, membre de RÉSEAU environnement. À ma gauche, M. Mario Quintin, directeur du développement pour RÉSEAU environnement, donc un permanent au sein de l'Association, et moi-même, Denis Bernier, directeur pour ENVIRO Conseil et aussi aujourd'hui à titre de vice-président du secteur sols et eaux souterraines pour RÉSEAU environnement.

D'entrée de jeu, je tiens à remercier la commission de nous recevoir aujourd'hui pour vous faire part de nos commentaires concernant ce projet de loi.

RÉSEAU environnement, c'est le plus important regroupement de l'industrie environnementale au Québec. Sa mission consiste à assurer le développement des technologies de la science, la promotion des expertises et le soutien des activités en environnement. Pour ce faire, on regroupe des spécialistes, des gens d'affaires, des municipalités, des industries, tous avec un seul but: l'environnement.

Plus spécifiquement, nous visons à favoriser les échanges techniques et commerciaux, la diffusion de connaissances techniques, le suivi de la réglementation, la représentation auprès des décideurs et l'assistance auprès des marchés internes et externes.

RÉSEAU environnement, je tiens à vous le souligner, compte près de 1 800 membres qui représentent 350 entreprises, 250 municipalités, plus de 1 200 professionnels. Ces professionnels oeuvrent dans quatre grands secteurs d'activités, à savoir: l'eau, l'air et les changements climatiques, les matières résiduelles, les sols et eaux souterraines. Plus particulièrement, le secteur des sols et eaux souterraines compte près de 200 membres qui oeuvrent directement dans ce domaine, en proposant et en réalisant des études dans ce secteur, et plus de 800 qui ont un lien indirect avec le secteur des sols et eaux souterraines.

La force de RÉSEAU environnement réside dans le regroupement de ses membres qui proviennent autant du secteur privé que public. Ses membres réunis au sein de comités de travail échangent sur leurs problématiques respectives et établissent des consensus, notamment concernant les modifications législatives et réglementaires mises de l'avant par le gouvernement.

RÉSEAU environnement tient à affirmer son appui quant à l'adoption d'un tel projet de loi. En effet, la protection et la réhabilitation des terrains contaminés se doivent d'être encadrées par l'État. À cet égard, une législation est attendue depuis fort longtemps par l'ensemble de nos membres oeuvrant dans ce secteur. Non seulement la nouvelle loi favorisera-t-elle l'essor de l'industrie de l'environnement, mais elle assurera la protection de nos écosystèmes, richesses collectives dont nous sommes tous tributaires.

RÉSEAU environnement est favorable avec l'ensemble du projet de loi et invite le ministère à aller de l'avant en tenant compte de nos commentaires. Nos commentaires ont pour objectif d'améliorer ce projet de loi et d'en faciliter l'utilisation par et pour nos membres qui sont les principaux intervenants qui vont devoir mettre en oeuvre ce projet de loi et les règlements qui vont y être associés.

Plus particulièrement, concernant l'article 31.43, selon cet article, le fardeau de la preuve porte sur le gardien du terrain. RÉSEAU environnement émet des réserves quant à la possibilité de parvenir à la reconstitution exacte de l'historique se rattachant à certains sites, considérant les nombreuses années d'exploitation de certains d'entre eux ainsi que les multiples utilisations de ces derniers. La quête des informations risque donc de s'avérer ardue, voire même impossible. De plus, RÉSEAU tient à souligner l'importance de faire le focus sur les réels responsables des contaminations.

31.52. Tel qu'énoncé, la présence de ces contaminants aux limites du terrain comme élément déclencheur de l'avis cause certains problèmes. En effet, il est courant d'entreposer des barils ou autres contenants le long des clôtures. Ce qui peut se traduire par des petites taches au sol qui résultent de déversements accidentels, qui dépassent les critères d'usage mais qui ne s'étendent pas aux terrains voisins. Ces sols contaminés sont localisés, en fait, à la limite du terrain et ne causent aucune contamination aux terrains voisins. Pour éliminer tous ces cas non problématiques, nous avons proposé un libellé qui se retrouve dans notre mémoire.

De plus, tel que libellé dans le projet de loi, cet article n'est pas clair sur ce que signifie précisément la «présence de ces contaminants», «l'existence d'un risque sérieux de migration des contaminants» et ouvre une large porte à l'interprétation, particulièrement en ce qui concerne les contaminants retrouvés dans les eaux souterraines, dont les concentrations sont comparées à des critères établis en fonction de l'usage de l'eau souterraine.

J'invite ici M. Halde à prendre la parole pour continuer sur l'eau souterraine.

M. Halde (Jean): Toujours dans le même volet de l'avis aux voisins, à notre avis, en termes de praticiens ou peut-être de futurs experts, on trouve ça dérangeant, parce que la notion de migration dans l'eau souterraine, on le sait, c'est sous forme dissoute dans bien des cas. On peut retrouver des contaminants en traces qui migrent vers les terrains voisins. Et là, de la façon dont l'article est prévu, il n'y a pas de bémol là-dessus. Du moment qu'il y a une migration ou un risque de migration, peu importe la quantité ou le sérieux de cette migration-là, on doit aviser le voisin. Il y a des voisins qui sont des gens experts, si on peut dire, qui connaissent les problématiques de contamination et qui ne se formaliseront pas trop avec ça. Par contre, ce qu'on pense, c'est que ça peut générer un grand nombre de conflits qui pourraient faire en sorte que les gens vont plutôt s'abstenir de caractériser et de penser qu'il pourrait y avoir un risque sérieux de migration pour éviter ces conflits-là. Par contre, on est conscient que le but de ces avis-là aux voisins, c'est quand même justifié, mais ce serait justifié lorsque ça cause un risque réel.

Alors, ce qu'on propose, nous, pour l'avis aux voisins dans le cas de migration, ce n'est pas de faire l'avis aux voisins, mais plutôt de s'obliger d'aviser le ministère, et il y aura échanges avec les parties concernées, les pollueurs et le ministère, pour évaluer le sérieux de l'exercice et la pertinence d'aviser les voisins. C'est ce qui touche nos commentaires sur le 31.52.

On a aussi un commentaire sur l'article 31.65, l'expert. Ce qu'on tient à souligner, c'est que la position de RÉSEAU, malgré l'évolution des discussions à ce niveau-là, n'a pas réellement changé. On continue de penser et de prétendre que ce n'est pas nécessaire de constituer une liste d'experts, qu'on n'y trouvera aucune valeur ajoutée. Si on recule un peu dans les motivations du ministère pour créer une liste d'experts, il y en a deux principales qui sont de responsabiliser le milieu et d'augmenter la qualité des études, dans un premier temps, et, dans un deuxième temps ? ou peut-être la première motivation ? c'est de combler un manque d'effectifs pour vérifier les études qui sont déposées au ministère et en même temps améliorer les délais d'analyse.

Si on regarde ce qui se produit en termes de démarches ? et RÉSEAU participe au comité qui a été créé par le ministère pour discuter des experts, de la liste d'experts ? ce qu'on constate, c'est que les discussions progressent, mais l'Office des professions et l'Ordre des ingénieurs ont imposé au ministère certaines restrictions, dans le sens qu'ils ne veulent pas que l'expert porte un jugement professionnel sur le travail d'un autre expert. Alors, ce qu'on constate, c'est que le rôle de l'expert devient assez minime, dans le sens qu'il va évaluer si l'étude est complète, mais ne portera pas de jugement professionnel. Alors, ce n'est pas un rôle d'expert, ça, entre nous, là.

Si on veut donner une fonction réelle d'expertise et de jugement, il faudrait que l'expert signe l'étude qu'il a réalisée et qu'il endosse l'ensemble de la démarche et des conclusions, etc. Mais, encore là, on n'est pas convaincu que c'est une valeur ajoutée parce que les professionnels ? les ingénieurs, les chimistes, les géologues maintenant ? ont un code de déontologie, un code de pratique qui fait en sorte que, quand on signe une étude, on l'endosse déjà. Alors, ce n'est pas un plus, à notre avis.

On pourrait faire l'analogie avec les maîtres installateurs, qui ont été créés avec la Loi sur les produits pétroliers, qui étaient, entre guillemets, les experts dans ce type d'installations là, qui certifiaient que leurs installations étaient conformes aux lois et règlements. Le programme a été aboli neuf ans plus tard parce qu'on s'est rendu compte que ça n'avait pas vraiment amélioré la situation.

Alors, si on veut, notre recommandation, ce serait d'utiliser les systèmes en place, d'utiliser les ordres professionnels et que ces ordres-là gèrent la pratique des experts qui oeuvrent dans le domaine des terrains contaminés. Ce serait notre principale recommandation dans ce sens-là.

n(10 h 20)n

M. Bernier (Denis): En conclusion, RÉSEAU environnement est impliqué de très, très près dans le cadre du projet de loi n° 72 considérant que ce sont ses membres qui réalisent déjà les travaux de caractérisation et de réhabilitation des sites contaminés. De plus, certains de nos membres sont sur la scène internationale pour leur savoir-faire et leur haut degré d'expertise. Ce projet de loi placera le Québec en avant concernant la gestion des sites contaminés en Amérique du Nord. Il est donc fort intéressant pour nos membres que le gouvernement du Québec adopte ce projet qui favorisera l'encadrement des activités touchant ce secteur qui est un moteur économique pour le Québec. Nous tenons également à souligner que les modifications proposées par RÉSEAU n'ont pour objectif que d'améliorer le projet de loi dans son ensemble et d'en faire un outil qui aura un effet positif sur l'économie et la gestion des terrains contaminés.

Encore une fois, RÉSEAU environnement souhaite la mise en oeuvre de ce projet de loi ardemment. Merci.

Le Président (M. Lachance): Merci, messieurs. M. le ministre délégué à l'Environnement.

M. Simard (Montmorency): Je vous remercie, M. le Président. Alors, MM. Bernier, Halde et Quintin, merci de votre présence parmi nous ce matin. Merci pour la qualité du mémoire que vous nous avez présenté.

Je sais, et j'en entends parler depuis mon arrivée au ministère, que vous êtes des interlocuteurs privilégiés du ministère de l'Environnement. Je sais que l'on vous consulte régulièrement. Je sais également que vous représentez une clientèle très diversifiée et que cette consultation, donc, de par la richesse de votre représentativité, profite largement à l'ensemble de nos réflexions. Je tiens donc à vous dire merci de votre présence.

Je suis très sensible à plusieurs des arguments que vous nous avez présentés ce matin, tout particulièrement à toute l'importante question de l'expertise et de l'encadrement potentiel de cette expertise. Vous nous dites: Non, on ne devrait pas faire de liste, on devrait laisser aux ordres le soin finalement d'accréditer les experts.

Moi, je ne suis pas un spécialiste des ordres professionnels. Se pourrait-il que certaines catégories d'experts, je pense à des géographes, à des biologistes ou à d'autres encore que j'oublie, pourraient ne pas se retrouver dans les ordres professionnels et pour autant faire de très bons experts? Qu'est-ce qu'on fait de ces cas-là? Je vous pose la question.

Et ensuite, j'aurai une autre petite question à vous poser concernant la réglementation potentielle que l'on pourrait faire des analyses de risque. Est-ce qu'on ne pourrait pas davantage cibler ce que l'on entend par analyse de risque? Évidemment, lorsqu'on pense à une réglementation, ça ne se fait jamais en claquant des doigts. Vous le savez mieux que moi. Donc, il faut toujours avancer prudemment lorsqu'on évoque cela mais, tout de même, je vous pose la question.

M. Halde (Jean): Effectivement, il pourrait y avoir des gens qui ont une très bonne expertise en termes de gestion de terrains contaminés et qui ne seraient pas membres d'ordres professionnels. Vous avez nommé des biologistes. Effectivement, il y a des biologistes très compétents dans le domaine. Il y a des géographes qui sont très compétents dans le domaine. Je ne pense pas que le but de notre recommandation, de notre suggestion, c'est d'éliminer des gens ou de les ramener à un rôle de subalternes. Ce n'est pas ça du tout. Je pense qu'il y a des moyens de réintégrer ces gens-là en faisant une démarche de démonstration d'expertise qui pourrait être faite à travers un des ordres professionnels existants.

Je crois qu'en Colombie-Britannique il y a une démarche semblable. Les gens qui ne sont pas membres... Il y a deux ou trois ordres professionnels qui se sont vu attribuer le rôle de travaux dans les terrains contaminés, puis les gens qui ne sont pas membres de ça peuvent faire une représentation et démontrer leur expertise et être reconnus, mais uniquement pour cette pratique-là. Alors, il y a des moyens d'y arriver. Je pense que ce n'est pas impossible. Je ne sais pas si ça répond à cette partie.

M. Simard (Montmorency): Tout à fait. Et je comprends que vous et moi partageons le même objectif. On ne veut pas qu'il se retrouve des charlatans sur la liste d'experts, là, potentiellement.

M. Bernier (Denis): Tout à fait.

M. Halde (Jean): Je pense que ce qu'on recherche, c'est que ça soit des gens d'expérience qui posent les actes et qui endossent les jugements professionnels qui sont reliés à certaines démarches au niveau des terrains contaminés. On s'entend que ce n'est pas l'ensemble des activités. Ça, on est d'accord. C'est ce qu'on vise aussi. Ce n'est pas là-dessus qu'on a un problème, c'est sur la façon de le gérer.

Vous avez mentionné le volet analyse de risque. De ce que je comprends de la démarche de l'expert, l'analyse de risque ne fait pas partie des responsabilités de l'expert. L'analyse de risque, c'est un domaine de pratique qui, oui, est relié aux terrains contaminés, mais qui est une démarche très particulière, et je crois que le ministère, avec son groupe technique d'évaluation, se réserve l'analyse de l'ensemble des dossiers qui doivent être gérés par analyse de risque, à moins que ça ait changé tout récemment. Alors, ce n'est pas un acte qui va être endossé par l'expert comme tel.

M. Simard (Montmorency): Parce que, effectivement, ce dont il est fondamentalement question ici, à mon sens, c'est toute la question de la fiabilité de l'analyse de risque. Et, à cet égard, si je ne m'abuse, là, c'est le Barreau, hier, qui nous soumettait cette suggestion d'avoir des indicateurs plus précis dans ce qu'on entend par analyse de risque.

M. Halde (Jean): Je peux vous en parler de l'analyse de risque.

M. Simard (Montmorency): Bien oui, s'il vous plaît.

M. Halde (Jean): Chez nous, on en fait quand même assez régulièrement. C'est quand même une démarche qui est relativement bien encadrée, il y a les lignes directrices... Il y a trois volets à l'analyse de risque: il y a le volet santé, le volet environnement ou écotoxicologique, puis il y a le volet eaux souterraines. Et chacun de ces volets-là est bien encadré, il y a des lignes directrices du ministère de la Santé sur comment procéder à l'évaluation sur la santé, puis il y en a au niveau écotoxicologique qui ont été préparées par le ministère de l'Environnement, et le volet eaux souterraines, on le gère avec les lignes présentées dans la politique de protection des sols.

Alors, c'est quand même relativement bien encadré, et je pense qu'il y a divers... il y a toutes sortes de gens qui font des analyses de risque, c'est évident, mais avec une étude du ministère, avec une révision du ministère, je ne pense pas que c'est là qu'il y a un problème sérieux. Là où on a peut-être un problème, pour revenir à ce qui a été discuté avec la personne qui présentait précédemment, c'est la perception des résultats d'analyse de risque par les intervenants du milieu, et je pense principalement aux banquiers. Ces gens-là ont une crainte qu'une fois l'analyse de risque complétée le développement aille de l'avant, ils ont toujours peur que le ministère revienne et dise: Ah, on vient de changer d'idée, on en veut un peu plus, on recommence.

Et c'est là-dessus, je pense, que le volet... le principe des Brownfield qui dit qu'une fois qu'on a fait une démarche qui a été évaluée par le ministère de l'Environnement, on ne se fera plus demander d'aller plus loin. Alors, c'est un peu le principe des Brownfield qui, je pense, est une volonté des banquiers, entre autres, parce que ces gens-là, ils ne veulent pas financer les projets qui ont été réalisés par analyse de risque.

M. Simard (Montmorency): Je pousse votre argumentation un pas plus loin, si vous me le permettez, puis ce sera ma dernière question parce que des collègues veulent également vous interroger. Mais est-ce à dire, à votre avis, à partir de l'exemple des banquiers canadiens qui nous parlaient hier, qu'il incomberait, selon vous, au ministère de l'Environnement de faire une forme de contre-expertise de vos expertises?

M. Halde (Jean): Je pense que c'est ce qui se fait jusqu'à un certain point et c'est ce qui se faisait. Ça fait quand même plusieurs années qu'on est dans le domaine. C'est évident que... On parlait de responsabilité d'expert tantôt. Si on regarde ce qui était prévu dans la politique comme avis de conformité, l'avis de conformité, c'était un avis émis par le ministère de l'Environnement qui disait que, selon l'expert, c'était correct. Le ministère ne prenait pas une grande responsabilité là-dedans. Par contre, il y a des gens qui sont des experts au ministère, qui sont en mesure de regarder si la démarche a été rigoureuse, si l'interprétation est conséquente, etc., et si elle est valable. Alors, je pense que c'est un rôle du ministère. Mais là, le rôle que le ministère veut donner à l'expert, dans les discussions qu'on a, se limiterait à porter un jugement sur la table des matières de l'étude et non pas sur le contenu. Alors là l'expert devient à peu près inutile à mon avis.

M. Simard (Montmorency): On vous remercie encore.

Le Président (M. Lachance): Mme la députée de Matapédia.

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Alors, on va continuer dans la même foulée de ce que vous étiez en train de dire, messieurs. D'abord, je tiens à vous saluer, à vous féliciter pour votre mémoire aussi. Et on va continuer sur toute la question des experts, parce que vous en parlez quand même assez, précisément à la page 7, et à la page 8, en conclusion, vous nous dites: «De plus, certains de nos membres sont sur la scène internationale pour leur savoir-faire et leur haut degré d'expertise.»

n(10 h 30)n

Alors, on sait bien que depuis nombre d'années il y en a qui sont devenus des experts qui ont différents types de formation. Alors, si on ne veut pas perdre cette expertise-là, justement, et si on considère que cette liste d'experts qui va être confectionnée, bon, les critères vont être publiés dans la Gazette officielle, ça va être assez précis comme critères... Et, tantôt, M. Bélanger, qui est ici dans la salle, nous parlait, bon, d'une assurance responsabilité, par exemple, et on a des gens qui ont cinq, 10, 15 années d'expérience, et si on pense... Puis, vous avez des membres de Réseau environnement qui sont ce genre de personnes et qui sont membres de votre organisme, si on ne veut pas exclure ou perdre toute cette expertise et l'utiliser dans une liste d'experts, comment vous verriez ça en termes de critères? Et on sait comment c'est chatouilleux, hein, les ordres professionnels.

M. Halde (Jean): Oui, tout à fait. Vous avez touché un point important. D'ailleurs, dans les discussions actuelles sur les critères pour faire partie de la liste d'experts, on a touché le volet assurances professionnelles. Moi, je suis ingénieur, je suis obligé d'avoir des assurances professionnelles pour pratiquer. On a décidé que... Bien, quand je dis «on», le groupe de discussion a décidé que ça ne serait pas un critère. Pourquoi? Parce que des gens qui ne sont pas des professionnels au sens de l'Office des professions, comme les biologistes, ont de la difficulté à trouver de l'assurance dans le domaine de pratique. Alors, on veut intégrer ces gens-là, mais, en même temps, on crée de l'iniquité en termes d'accessibilité aux types d'experts. Alors, je pense que vous touchez un bon point, je n'ai pas la réponse précise à ça.

Mme Doyer: Vous savez... Excusez-moi. Vous avez décidé que ce ne serait pas un critère?

M. Halde (Jean): Ce n'est pas tout à fait décidé, mais parmi les discussions...

Mme Doyer: Mais alors que, moi, je ne sais pas, je... Comme parlementaire, je trouve que c'est extrêmement important.

M. Halde (Jean): Ah, moi aussi, si vous prenez mon avis personnel...

Mme Doyer: Puis vous n'allez pas sur un terrain où vous allez vous exclure justement à prime abord? Non, je ne sais pas...

M. Bernier (Denis): Là, on parle maintenant, exemple, du biologiste qui a une...

Mme Doyer: Des agronomes, des biologistes.

M. Bernier (Denis): Des géographes.

Mme Doyer: Géographes.

M. Bernier (Denis): J'ai comme employés des géographes qui sont des spécialistes en caractérisation, ils pourraient vous émettre un rapport de très haute qualité. Mais cette personne-là, ça ne faisait pas partie... En tant que géographe, elle a une difficulté majeure d'avoir une assurance professionnelle. Si elle n'était pas intégrée au sein d'une firme qui... Le rapport est signé aussi par un ingénieur. O.K.? C'est une difficulté très importante. Si on veut, au sein de la liste, ne pas se limiter à n'avoir que des ingénieurs, des géologues et autres personnes, des chimistes, qui font partie d'un ordre respectif, bien il faut laisser tomber la partie assurance. Et, nous, on n'est pas...

M. Halde (Jean): On n'est pas chauds à la liste d'experts non plus, hein?

M. Bernier (Denis): On vous l'a mentionné.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bernier (Denis): Je pense qu'on vous l'a mentionné. Ha, ha, ha!

Mme Doyer: C'est beau. Merci beaucoup.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Salaberry-Soulanges.

M. Deslières: Merci, M. le Président. M. Bernier, merci. Merci à vous trois d'être présents aujourd'hui en face de cette commission. Merci de votre présentation. On sent, à la lecture de votre mémoire et à vous écouter, que vous êtes partie prenante de ces questions et en connaissance de cause, votre mémoire est très spécifique sur des points.

Vous nous dites en conclusion que, avec l'adoption de ce projet de loi, la loi n° 72 placerait le Québec dans les premiers rangs en Amérique du Nord. Vous nous faites certains commentaires pour préciser et bonifier dans un esprit très positif et vous nous dites: Écoutez, adoptez-les, là, le milieu... Puis c'est le troisième ou quatrième groupe qui nous dit ça, puis on l'a lu dans certains autres mémoires où les gens ne sont pas venus nous les présenter la même chose: Écoutez, allez-y, on est en attente depuis un temps immémorial pour ces choses-là, là, 10 ans, 15 ans, au Québec. Alors, allez-y.

Nonobstant certains commentaires où il y a un petit peu de zones grises ? on s'entend, on s'entend bien ? l'ensemble du projet de loi vous satisfait d'emblée.

M. Bernier (Denis): Exact.

M. Deslières: Bon. Je vais revenir sur le point de l'article 31.43. Vous savez que la difficulté pour le législateur, c'est d'arriver à un équilibre. On est dans une société de droit, et il y a des principes, il y a des objectifs, et de traduire ça dans des textes législatifs... Ce n'est pas toujours facile de regarder la réalité puis de saisir toute la réalité, puis de produire les effets escomptés par les textes législatifs. Mais, vous savez qu'au coeur de ce dossier-là il y avait toute la question de responsabilité, vous en avez fait part, vous avez eu des contacts avec les gens du ministère de l'Environnement pour bonifier certains aspects du projet de loi. On comprend ? puis vous n'êtes pas le premier groupe à nous le dire ? la question de responsabilité ? puis vous nous le dites dans des termes très modérés ? ce ne sera pas facile de déterminer tout ça. Cependant, ce qui a fait possiblement... Je fais une interrogation à haute voix, ce qui a fait le retard de ce genre de... c'est de déterminer la responsabilité. Est-ce qu'on s'entend? Est-ce qu'on s'entend sur des... Ça a pu être un des éléments qui a retardé.

L'article 31.43 tente de définir ? tente de définir ? la chaîne ? si vous me permettez l'expression ? de responsabilité. Bien sûr, il y aura de l'historique, le premier aura pollué à 25 %, le quatrième aura pollué... Bon, ce n'est pas facile. Vous auriez dû lire la petite histoire... contenue dans la lettre du Barreau, là. Je vous le conseille, c'est à lire. Cependant, il y a un effort certain pour tenter de déterminer cette chaîne de responsabilité. Vous nous dites: Ça ne sera pas facile, tout ça. Est-ce que... Dans d'autres éléments, vous nous apportez des suggestions, même des corrections à des articles, est-ce que sur cet article-là, 31.43, vous avez des propositions concrètes pour bonifier cet article-là concernant la chaîne de responsabilité?

M. Bernier (Denis): Le premier point, j'aimerais vous rappeler la mission, et nous sommes là pour l'amélioration de l'aspect technique. Nous ne sommes point juristes.

M. Deslières: Non?

M. Bernier (Denis): Parfait.

M. Deslières: ...

M. Bernier (Denis): Donc, en partant sur...

M. Deslières: Mais vous l'avez fait ailleurs, dans d'autres articles.

M. Bernier (Denis): C'est de la mise en oeuvre, oui.

M. Halde (Jean): Est-ce que je peux...

M. Bernier (Denis): Vas-y.

M. Halde (Jean): Peut-être essayer d'aller dans ce sens-là. Ce qui est intéressant pour des gens qui veulent développer des terrains contaminés, c'est que les règles du jeu soient claires. Alors, je pense que l'article 31.43, qui est celui qui détermine qui peut recevoir une ordonnance, se doit d'être relativement clair. Et je pense que ce qui doit ressortir clairement de ça, c'est que celui qui peut recevoir une ordonnance ? en résumé, le libellé, je laisse ça aux juristes, là ? il faut qu'il ait, d'une façon ou d'une autre, contribué à soit ajouter de la contamination, à modifier les conditions qui font en sorte que la contamination se diffuse autrement, il faut qu'il y ait une contribution réelle au problème de pollution. C'est dans ce sens-là, je pense, que notre recommandation irait. Si ça reste trop large, ça va faire peur et ça risque de freiner le développement des terrains contaminés. C'est notre crainte à nous, et, évidemment, on prêche pour notre paroisse, on est dans l'industrie de la gestion des terrains contaminés entre autres.

Le Président (M. Lachance): M. le député d'Orford.

M. Benoit: Merci, M. le Président. MM. Bernier, Halde et Quintin, merci beaucoup d'être ici avec nous aujourd'hui. Je vous inviterais à saluer votre président, M. Dussault, qui ne peut pas être ici avec nous, mais qui sera à votre grand colloque, j'imagine, au mois d'avril et qui est un valeureux citoyen du comté d'Orford. Alors, il ne faut pas oublier de le mentionner, bien sûr.

Il y a deux grands pans de mur, quand on a fait 156, qui ont vraiment, là... que ça ne fonctionnait pas, c'était la chaîne de responsabilité, et le deuxième... Et, c'est là que tout a commencé d'ailleurs, avec la liste des experts, quand M. Roger Nicolet, l'Ordre des ingénieurs est entré en communication avec nous pour nous dire: Wo! Wo! Il y a quelque chose qui ne marche pas là-dedans. Puis là ça a été le feu sur tous les fronts, tous les ordres professionnels, et là je pense que le ministre a réalisé qu'il était dans le milieu de toute une bataille des ordres professionnels. Comme nous disait si bien notre consoeur, ils sont un peu chatouilleux, certains ont la peau très sensible, alors je suis surpris qu'on revienne... Je croyais que le débat des ordres professionnels avait été fait sur 156 puis qu'on s'était à peu près entendu. Je suis un peu surpris de voir qu'il n'y a pas un consensus plus large que ça.

Mais, avant que je permette à notre confrère de D'Arcy-McGee de poser une... qu'il puisse poser ses questions, je voudrais juste vous dire que je suis aussi impressionné de voir que la moyenne d'âge des gens qui sont ici et de votre président... Dans l'industrie Réseau environnement, ce sont des gens d'affaires de plus en plus jeunes, et ça, c'est réconfortant. L'image qu'on a encore trop souvent dans nos sociétés, c'est que les industriels sont des gens qui ne se préoccupent pas plus qu'il faut de l'environnement, qui sont là pour faire une piastre. Bien que vous soyez là pour faire une piastre, mais on est aussi heureux de voir que vous êtes aussi de plus en plus préoccupés. Et ça, c'est la nouvelle génération qui pousse de gens d'affaires, et c'est ce que vous représentez très bien, et on vous en félicite.

Une fois ça dit, je vais demander, si vous êtes d'accord, M. le Président, au député de D'Arcy-McGee... C'est lui qui est notre expert. C'est un notaire, alors il vient d'une corporation professionnelle lui-même, et c'est vraiment lui, là, qui a, au moment de 156, fait tout le débat sur la liste d'experts, et j'aimerais ça qu'il vous repose quelques questions même si elles ont déjà été posées une première fois.

Le Président (M. Lachance): M. le député de D'Arcy-McGee, vous avez la parole.

n(10 h 40)n

M. Bergman: Merci, M. le Président. Merci pour votre présentation. En lisant l'article 31.65 du projet de loi, dans les premiers deux alinéas, il se lit comme suit: «Le ministre dresse, et tient à jour, une liste des experts habilités à fournir les attestations qu'exigent les dispositions de la présente section.» Et le mot-clé, c'est «des experts habilités».

Si on prend le Code des professions, l'article 25 ? et je veux juste pouvoir faire un extrait de quelques phrases ? c'est indiqué: Pour déterminer si un groupe de personnes doit ou non être intégré dans un ordre, on doit tenir compte des facteurs suivants. Il y a cinq facteurs, et je pense que ça répond aux questions que le ministre doit savoir, cette liste des experts habilités. Les cinq points sont les suivants:

«1° les connaissances requises pour exercer les activités [...];

«2° le degré d'autonomie dont jouissent les personnes qui seraient membres de l'ordre dans l'exercice des activités dont il s'agit [...];

«3° le caractère personnel des rapports entre ces personnes et les gens recourant à leurs services [...];

«4° la gravité du préjudice qui pourrait être subi par les gens recourant aux services de ces personnes par suite du fait que leur compétence ou leur intégrité ne seraient pas contrôlées [...];

«5° le caractère confidentiel des renseignements que ces personnes sont appelées à connaître.»

Alors, si on regarde tous ces critères, moi, je pense que ça tombe exactement dans qu'est-ce que le ministre doit chercher quand l'article 31.65 parle d'une liste dressée des personnes habilitées. Et, moi, je demande alors la question: Est-ce que le ministre doit ajouter dans cet article que les personnes en question, les experts, doivent être des professionnels membres d'un ordre professionnel? Car ici, à Québec, nous avons constitué un système professionnel qui est la fierté du monde. On a 45 ordres professionnels, à peu près 205 000 personnes, et c'est reconnu à travers le monde qu'on a le meilleur système professionnel à travers le monde. Pourquoi est-ce que le ministre ne prendrait pas ces experts de ce système professionnel qui est en marche et qui a un système d'accréditation, inspection, discipline, qui est tout structuré pour lui? Et vous voyez que ces critères pour constituer un ordre ou pour être membre d'un ordre sont très, très clairs et ont toutes les exigences que le ministre doit chercher. Alors, est-ce que ce n'est pas logique que... on ne fait pas un lien entre ces experts habilités et notre système professionnel? C'est ma question.

M. Halde (Jean): Votre point est intéressant, ça va dans le même sens de notre présentation, notre mémoire. Pourquoi ça... Pour avoir participé à beaucoup de discussions à ce niveau-là, pourquoi on n'a pas spécifié que l'expert doit être membre d'un ordre professionnel, c'est pour tenir compte des gens qui ne le sont pas, pour ne pas exclure ces gens-là. Alors, c'est l'objectif.

Par contre, ça amène d'autres problèmes, on en a discuté tantôt, la possibilité des assurances, tout ça. Nous, ce qu'on dit... On va même plus loin que ça, on dit: Faites-en pas de liste d'experts, demandez que les documents en question soient signés par un membre d'un ordre professionnel, et l'ordre professionnel pour... Je prends un ingénieur, il y a différents types d'ingénieurs. Je ne peux pas signer des plans, moi, pour «designer» un avion, je n'ai aucune connaissance là-dedans. Mon ordre m'empêche de le faire, mon code de déontologie fait ça aussi. Alors, l'ordre professionnel en question pourra sévir sur un professionnel qui est sorti de son champ de compétence. C'est là qu'on va, nous, on va jusqu'à ne pas constituer la liste, point. De tout simplement dire que l'acte devrait être posé par un professionnel, point, c'est tout, pour justement utiliser ces systèmes-là qui sont en place.

M. Bergman: Une dernière question, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Très bien.

M. Bergman: En ce qui concerne les personnes qui ne sont pas membres d'un ordre professionnel, certainement ça peut être un incitatif ou un encouragement pour la personne en question pour devenir membre d'un des ordres professionnels qui est en relation de ce type d'activité. Certainement, les ordres professionnels ne sont pas des ordres fermés, ils sont ouverts à des personnes avec la compétence nécessaire, et certainement chacune des personnes que vous avez mentionnées aura une place dans un ou l'autre des ordres professionnels, et certainement ce serait un grand bénéfice pour la personne en question, pour l'ordre professionnel, pour notre système professionnel et, au bout de la ligne, pour notre société, car certainement tous les critères que j'ai mentionnés sont les critères que le ministre doit chercher en constituant sa liste. C'est mon commentaire sur votre...

M. Halde (Jean): Ça va dans le sens de ce qu'on disait, il y a toujours une possibilité pour des gens qui ne sont pas membres de se faire reconnaître au moins pour un champ de pratique précis, comme ça se fait en Colombie-Britannique pour les terrains contaminés.

M. Benoit: Est-ce que je pourrais juste... Pourriez-vous nous parler de la Colombie-Britannique justement pour un instant?

M. Halde (Jean): Il y en a qui pourraient en parler plus que moi, mais on a eu un colloque... c'est-à-dire une table ronde de discussion là-dessus, Américana, qui est un des événements, là, organisés par RÉSEAU, et il y avait des gens de Colombie-Britannique. Je vais être très sommaire, il y a deux niveaux. Il y a une liste d'experts et il y a aussi un système qui fait que les gens peuvent demander, si on veut, l'environnement à deux vitesses, là, de faire traiter leur dossier plus rapidement plutôt que de le faire traiter par les gens du ministère de l'Environnement. Alors, il y a une liste d'experts puis il y a le système en parallèle où le ministère mandate une firme, un tiers pour analyser les dossiers.

Mais le champ de pratique de l'expert est limité... Puis, là je ne voudrais pas me tromper, Michel Beaulieu, qui est ici, pourrait en parler plus précisément, mais c'est les ingénieurs, les agronomes et, je pense, les chimistes, ou quelque chose comme ça. Mais c'est des ordres professionnels. Mais tout autre expert qui a 10 ans, 15 ans d'expertise peut se faire reconnaître comme expert en passant par un des ordres qui gèrent, si on veut, l'administration de ça.

Ce n'est pas un système qui est parfait, il y a des critiques sur ce système-là. Il y a des gens qui disent que c'est un peu une chasse gardée parce qu'il n'y a pas assez de gens qui ont réussi à se qualifier comme experts et, bon, ça fait une pression à la hausse sur le marché. Ce n'est pas un système parfait, là. Je ne suis pas en train de dire qu'il faut prendre ce modèle-là, mais de se rattacher aux ordres, on pense que c'est un gros plus.

M. Bernier (Denis): Je pourrais vous inviter à téléphoner chez RÉSEAU environnement. Nous avons un enregistrement de cette table ronde là, et il nous fera plaisir de partager ces documents-là avec vous.

Le Président (M. Lachance): M. le vice-président de la commission parlementaire transports et environnement et député de l'Acadie.

M. Bordeleau: Oui. En fait, sur le même sujet, je veux juste compléter. Est-ce qu'il existe actuellement au Québec, au niveau des ordres professionnels, dans n'importe quel secteur, à votre connaissance, ce type de reconnaissance de personne dans un ordre professionnel qui n'a pas nécessairement la formation? Parce que l'image que j'ai des ordres professionnels, c'est que c'est souvent déterminé à partir d'une formation académique qui est très spécifique, et, bon, je pense à... On parlait tout à l'heure d'un biologiste, bon, un biologiste ne pourra pas être reconnu comme un ingénieur, il n'a pas fait... Mais est-ce que ça existe dans les ordres professionnels actuellement au Québec qu'on reconnaisse des gens pour une partie d'expertise? Est-ce que ça se fait actuellement ou ce serait complètement nouveau?

M. Bernier (Denis): Je vous donne un exemple, une personne qui a eu une formation X dans un autre pays et qui voudrait venir au Québec oeuvrer à titre d'ingénieur en aérospatiale va devoir passer des tests et va avoir un champ de pratique réservé, précis, un temps précis, dire: Bien, t'as passé un examen, t'as le droit maintenant d'opérer dans ton champ d'activité pour tel mandat. Donc, c'est des secteurs d'activité, des champs de pratique précis. Donc, il passe des examens pour avoir le droit d'oeuvrer, de poser des gestes professionnels qui, normalement, sont réservés aux ingénieurs.

M. Bordeleau: Est-ce qu'il va pouvoir utiliser le titre d'ingénieur?

M. Halde (Jean): Ça, c'est une bonne question.

M. Bernier (Denis): Je ne le sais pas, mais je sais qu'il a le droit de faire des actes professionnels qui sont normalement des chasses gardées, des champs d'activité réservés. Mais est-ce qu'il a le titre d'ingénieur? Je ne peux pas m'avancer sur ça.

M. Bordeleau: Est-ce qu'ils doivent être entérinés par un ingénieur qui est membre de l'Ordre, les travaux qu'il va faire?

M. Halde (Jean): Non. Non, ce qui se produit, c'est que la personne devient autonome et reconnue comme compétente dans ce champ de pratique là. C'est une reconnaissance particulière, et il y a toujours une porte... Même dans les universités, il y a des gens qui peuvent rentrer à l'université, faire une maîtrise, un doctorat puis qui n'ont pas les études, le cheminement baccalauréat, maîtrise, doctorat. Ils peuvent être reçus ou acceptés s'ils ont fait un cheminement particulier. Évidemment, ces gens-là ont une marche à monter, là, mais il y a toujours une possibilité qui existe comme ça, qui est prévue. Alors, ce n'est pas quelque chose de tout à fait farfelu de penser que ça pourrait se faire.

M. Bordeleau: O.K. Merci.

n(10 h 50)n

Le Président (M. Lachance): Alors, merci, MM. Bernier, Halde et Quintin, pour votre participation aux travaux de cette commission ici aujourd'hui. Merci.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre! Alors, la commission des transports et de l'environnement reprend ses travaux avec les consultations particulières sur le projet de loi n° 72. Nous allons entendre les représentants du dernier groupe prévu à notre horaire, Vivre en ville. Alors, je vois que vous êtes déjà en place.

Une voix: Pour consacrer la clôture.

Le Président (M. Lachance): Oui, le dessert. Ha, ha, ha!

Une voix: O.K. On est le dessert. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lachance): Alors, messieurs, si vous voulez bien vous identifier. En vous indiquant que vous avez une présentation d'une durée maximum de 15 minutes. Bienvenue.

Vivre en ville

M. Laliberté (Pascal): Bonjour. Mon nom est Pascal Laliberté, je suis chargé de projet, Vivre en ville.

M. Vaillancourt (Jérôme): Moi, je suis Jérôme Vaillancourt, directeur général de l'organisme. Je voudrais d'abord vous dire bonjour, vous remercier de l'intérêt que vous portez à notre opinion. On constitue peut-être le dessert, j'aimerais saluer M. le président, M. le ministre délégué et chers membres de la commission. La présentation va porter... Bon, sans faire une longue publicité sur Vivre en ville, on va quand même se présenter, mais surtout présenter notre intérêt en fonction de la présente audience et aussi les propositions plus générales, plus spécifiques qui sont contenues dans le mémoire.

Vivre en ville, bien, c'est le regroupement québécois pour le développement urbain, rural et villageois viable, qui a été fondé en 1994 puis qui regroupe autant des individus, des organismes que des professionnels, des praticiens, des municipalités. Donc, c'est un groupe assez large qui, en fait, travaille autour d'une mission commune qui est la promotion du développement viable, qu'il soit appliqué dans la planification ou même l'aménagement des agglomérations québécoises. Avec de la recherche, de l'éducation puis même avec de l'action, on veut stimuler l'innovation québécoise pour orienter un développement qui soit centré sur les collectivités viables au Québec.

Donc, d'entrée de jeu, je veux souligner notre satisfaction à l'égard du projet de loi. On ne peut pas être en désaccord, je pense qu'on ne peut qu'être d'accord avec les principes sous-jacents. On considère que le législateur a rempli sa mission, soit enfin offrir un cadre moderne pour le Québec en matière de gestion des terrains contaminés, qu'on parle autant... de la protection allant jusqu'à la réhabilitation. Selon nous, c'est une forme intéressante pour la gestion préventive, mais aussi sensée de nos ressources pour en assurer la pérennité pour nos générations actuelles et futures.

Vivre en ville, pourquoi on est intéressés? En fait, c'est qu'on veut contribuer, en lien avec nos préoccupations, mais aussi nos connaissances, à bonifier le projet de loi. Malgré tout, bon, l'intérêt direct de la mission, c'est... Ça va en intérêt direct avec notre mission, qui est le milieu urbain. C'est là que se concentrent souvent les plus grands espaces abandonnés qui sont composés, bon, de terrains contaminés ou qui sont en apparence de contamination. Ils sont souvent en plein coeur des villes ou en marge des centres-villes. Donc, ça freine la revitalisation des quartiers à cause de leur non-développement qui est dû principalement à leur degré de contamination puis des surcoûts en réhabilitation ou en redéveloppement. Le projet de loi apporte donc une protection pour l'avenir, en fait pour éviter ce genre de situation avec lequel on se retrouve aujourd'hui. Donc, ça permet le développement de la ville sur la ville, comme on indiquait, puis la réurbanisation ou le renforcement des centres urbains.

Donc, toute cette série d'avantages, les gains collectifs, c'est clair, c'est parce que c'est des terrains qui sont souvent bien situés, je l'ai dit, puis qui sont viabilisés, donc desservis en infrastructures. Donc, de permettre le redéveloppement par le projet de loi, on permet une restructuration, une revitalisation des quartiers, l'amélioration de la qualité de vie. On optimise les infrastructures déjà déployées, que ce soit l'aqueduc, les égouts, les transports, puis on permet un retour de revenus en valeurs foncières, un accroissement des valeurs fiscales au pourtour des terrains, un attrait pour les investisseurs, un effet d'entraînement puis la réduction des risques à la santé et à l'environnement. En ce sens-là, on sent que le projet de loi, c'est mission accomplie, mais on veut le bonifier justement pour l'urbain puis aussi dans d'autres secteurs à risque, puis à travers nos mesures qu'on va vous présenter aujourd'hui.

n(11 heures)n

Ce qu'on propose en fait pour bonifier, c'est des éléments de responsabilisation via des outils économiques. En fait, on parle plus de stratégie ou de plan stratégique, puis des aspects un peu plus techniques. La stratégie, c'est quoi en quelques mots? Bien, c'est pour soutenir la portée. C'est mieux outiller la loi, outiller les gens qui auront à l'appliquer, puis accélérer l'atteinte des résultats qu'on souhaite en décontamination, réhabilitation. Est-ce... les éléments qui sont contenus dans notre mémoire intègrent, bien entendu, le programme Revi-Sols, qui est déjà en vigueur. Mais, nous, on pense qu'il y a un apport qui est indéniable des collectivités, que ce soit en matière de priorités de redéveloppement pour des sites définis, de pair avec l'État, en milieu urbain ou en matière aussi de réglementation urbaine, pour diriger, rediriger ou focaliser le développement sur des secteurs prioritaires. Ça, c'est pour contrer l'espèce de dualité que les promoteurs promulguent actuellement, c'est-à-dire d'aller s'installer en périphérie dans des terrains qui sont vierges pour ne pas décontaminer les terrains. Puis, par là, on pourrait aussi inclure des aides fiscales locales qui sont peut-être en dehors de la présente commission mais qu'on propose quand même dans notre mémoire. L'apport de l'État, bien, c'est sûr, c'est appliquer la loi, c'est les règlements. C'est l'importance aussi d'y greffer les outils économiques en matière d'incitatifs et de désincitatifs, en plus du programme Revi-Sols. On va insister sur quelques-uns de ces éléments-là en vue de maximiser les efforts de réhabilitation puis les gains qu'on pourrait faire en matière d'assainissement.

En gros, les aspects économiques qu'on voit par rapport à un plan stratégique, je l'illustre surtout par un exemple. C'est pour contrer un peu l'économie classique, c'est-à-dire les annonces qu'on a faites en fin janvier en matière de réhabilitation, redéveloppement, à Montréal. C'est sûr que c'est un contexte particulier de terrains abandonnés par une contamination d'activités qui étaient d'une époque passée où l'environnement n'était pas une préoccupation fondamentale. Mais il n'en demeure pas moins que les terrains sont restés à l'abandon pendant un certain temps. On a annoncé 32 millions en fonds privés et publics pour leur décontamination. Ça, ça incluait 16 250 millions, de la part des contribuables, via le programme Revi-Sols. Ça fait qu'avec une gestion préventive comme on a dans la loi on suppose, en tout cas, que le 32 millions n'aurait pas dû être investi ou perdu ou gaspillé. On aurait évité cette dépense-là aujourd'hui; donc cet argent-là aurait pu être dans n'importe quoi de plus rentable. Puis une gestion prudente, ça amène quoi? Bien, ça amène que les terrains restent ou préservent une certaine qualité. Donc, le développement, qu'on a annoncé, de 258 millions en matière immobilière, il se serait effectué dans le passé. Donc, on n'aurait pas perdu les revenus en taxes foncières, comme ça a été le cas en laissant les terrains à l'abandon.

Donc, selon nous, le frein réel au développement économique, ce n'est pas le projet de loi puis ses mesures préventives, c'est plutôt le laisser-faire, l'absence de cadre de gestion dont on a souffert. Ça nous mène donc à des propositions un peu plus spécifiques en matière de gestion préventive, justement. On propose l'adoption de mesures de suivi. On vient de démontrer l'importance que ça pourrait avoir en matière économique. Bien, c'est nécessaire pour les coûts évités, la réduction des pertes de revenus fonciers qui ont été exposés.

Bon, on pourrait l'envisager dans un milieu urbain jugé prioritaire par la collectivité et l'État mais aussi dans des zones plus risquées. Le règlement devrait viser les catégories d'activités commerciales et industrielles à risque, soit pour leur nature ou leur site. Puis, ainsi, on aurait des gains non seulement en matière d'économie publique, mais aussi pour l'entreprise privée parce que c'est une forme de gage d'assurance pour la protection des terrains. On maintient une valeur apparente intéressante pour le redéveloppement. Les terrains ne se dégradent pas; donc il y a moins de risque aussi pour la santé puis les ressources. C'est évident que les coûts d'exploitation peuvent peut-être apparaître plus élevés à court terme, mais il faut comprendre qu'à long terme la réhabilitation éventuelle risque de coûter beaucoup plus cher aux entreprises ou aux contribuables québécois.

Contrer l'effet dissuasif, comment? Bien, peut-être en évaluant la possibilité d'intégrer des outils économiques, que ce soient des déductions fiscales pour les frais de suivi en fonction des activités qui seraient soumises à une réglementation de cette sorte, de cette nature.

Encore en matière de gestion préventive, on a parlé de caractérisation initiale pour accroître la responsabilisation. C'est sûr qu'on est entièrement satisfait du projet de loi, que ce soit à l'égard des articles 31, 43, 51, 53 où, là, on met la table, que ce soit en constat, en prévention et en protection de territoires pour les activités qui cessent ou elles changent d'utilisation. Donc, il y a plusieurs cas qui peuvent être traités avec ces articles-là, mais il y a quand même des exceptions, bon, qui peut-être peuvent justifier notre caractérisation initiale ? des propriétaires qui changent ? mais l'utilisation ne cesse pas. Bon, c'est un exemple, là, je ne veux pas rentrer dans le détail. Alors, comment on pourrait s'assurer de clarifier la responsabilisation à ce chapitre puis éviter tous les désagréments qu'il y aurait en cas de litige pour trouver le vrai responsable puis trouver qui va payer pour les coûts de réhabilitation? Donc, une caractérisation initiale, ça offre une certaine réponse, selon nous, pour les entreprises, les activités qui s'implantent. On pourrait l'appliquer peut-être aux activités jugées plus à risque. Puis c'est évident que ça va de pair avec ce que j'ai expliqué tout à l'heure par rapport aux mesures de suivi. C'est que, là, on vient créer une espèce de tout qui est assez stratégique mais qui vient enrichir le principe de responsabilisation.

Mais, pour aller encore plus loin, il va falloir s'assurer que tout le monde participe à l'effort global. En fait, notre voix s'ajoute à peut-être bien d'autres gens qui sont venus vous voir pour le retour ou la réintroduction des garanties financières. Nous, ce qu'on propose, c'est l'imposition de garanties peut-être pour des activités jugées à risque ou des zones à risque, puis on le voit plutôt comme une assurance qui serait souscrite pour la collectivité par les entreprises pour couvrir les frais d'assainissement de correction des terrains contaminés, autant pour les cas problèmes qu'une forme d'enveloppe collective. Je vais y revenir tout à l'heure. C'est déjà utilisé ailleurs, puis ça évite que ce soit les contribuables qui assument les frais des responsables qui sont disparus ou encore des responsables qui ne sont pas responsables parce qu'ils ont prouvé le contraire. Ça rejoint aussi la préoccupation du ministre Boisclair qui dans La Presse récemment, lorsqu'il y a eu les annonces pour le programme Revi-Sols, annonçait qu'il était plutôt d'accord avec ce genre de principe là, et je cite: «Il y a une limite à ce que ce soit l'ensemble des Québécois qui payent pour la décontamination du sol. Il faut que les actuels propriétaires ou dans certains cas même les propriétaires passés assument pleinement leurs responsabilités.»

Donc, nous, ça vient soutenir le retour des garanties. Mais, quand je parlais tout à l'heure de faire travailler doublement les garanties financières, c'est qu'il va y avoir un fonds qui va être cumulé avec... c'est sous forme de garantie, forme de taxes, n'importe quoi, puis on verra le moyen. On pourrait le rendre doublement productif en permettant, en créant un fonds d'emprunt avec des taux d'intérêts préférentiels pour les gens justement, les développeurs qui veulent réhabiliter les terrains qui seraient jugés prioritaires par les collectivités ou par l'État, et, bien entendu, serait couplé au programme Revi-Sols. Donc, là, l'effet indu de tout ça, c'est qu'on accélère encore plus le redéveloppement en milieu urbain puis l'assainissement des sites prioritaires.

Puis il y a d'autres outils qui peuvent venir se coupler pour renforcer encore les mesures économiques. C'est peut-être plus du ressort des municipalités, c'est-à-dire certaines municipalités américaines réduisent les coûts en infrastructures, parce que normalement les coûts en infrastructures sont relégués au promoteur immobilier, que ce soient l'aqueduc, l'égout; il envoie la facture. Donc, les agglomérations américaines sur certains sites contaminés jugés prioritaires disent: On veut que tu redéveloppes, donc on va te réduire la facture d'infrastructures. Peut-être aussi même qu'on pourrait évaluer des déductions d'impôts pour les gens qui effectuent des travaux de décontamination, en vue du redéveloppement dans les secteurs précis.

En termes d'aspect technique, bon, il y a le suivi postconfinement; c'est en vertu de l'article 31.45. On n'a pas de problème à la base avec l'idée de confiner avec des analyses de risque à l'appui puis des contaminants excédentaires sur le terrain. Mais il faudrait par contre qu'on implante des mesures de suivi pour certaines activités à risque pour être sûrs de ne pas se retrouver avec une mauvaise surprise, dans l'avenir. Ce ne sera pas nécessairement à l'État à payer pour ça, c'est sûr que c'est le responsable de l'activité. Donc, là encore, on vient soutenir la proposition de garantie financière. C'est que, là, ces garanties pourraient s'appliquer pour des sites spécifiques pour l'avenir lorsqu'il y a confinement. Donc, on n'a pas parlé du pool collectif tantôt de garantie financière, mais, là encore, on soutient aussi l'élément de déduction fiscale en matière d'impôts pour ce genre d'activités de suivi.

Autre aspect technique, bien, la connaissance, le traitement in situ. Bien, dans le mémoire, on explique qu'il faut favoriser prioritairement le développement des connaissances, au Québec. C'est ce que le projet de loi permet, mais il faut aller plus loin que ça en matière d'analyses de risque et de caractérisation; donc ce que le plan stratégique qu'on a proposé permet, puis aussi l'expertise en matière de décontamination. Mais, là encore, on spécifie plus spécifiquement pour la décontamination in situ, le traitement in situ pour éviter d'avoir un paquet de problèmes socioenvironnementaux liés au déplacement, au transfert des terrains contaminés entre les régions du Québec puis aussi la concentration en un seul type de matériel contaminé.

En matière de processus de l'information, bien, l'enjeu à la base, c'est une information adéquate qui soit complète, qui soit disponible, qui soit accessible. Selon nous, c'est l'enjeu fondamental pour permettre à la population de faire des représentations effectives lorsqu'elle le juge nécessaire pour défendre ses intérêts. Donc, l'actuel projet de loi nous satisfait à cet égard; l'information est complète et accessible. Par contre, on se dit que, peut-être pour valider dans le futur si tout est correct dans le processus, on devrait faire un bilan dans la société civile et le gouvernement pour voir si, en fonction des dossiers qui auront été traités dans l'application de la loi, tout ça va bien fonctionner, on pourrait valider même si la population est en mesure d'effectuer des bonnes représentations ou de défendre ses intérêts.

En conclusion, on ne peut que féliciter l'arrivée du projet de loi. On soutient son adoption, tant pour sa portée, ses opportunités qu'il offre en matière de redéveloppement que pour la protection des terrains et des ressources qu'il va entraîner. Je pense qu'on offre enfin au Québec un vrai cadre de gestion qui propose un effort global. Ça permettra surtout à la collectivité québécoise d'être gagnante, tant aux plans environnemental, social et surtout économique. Quand je parlais tout à l'heure des coûts à éviter puis des pertes économiques qu'on pourrait minimiser, alors tout cet argent-là pourrait être investi à des fins beaucoup plus rentables pour la collectivité.

On croit sincèrement que le développement d'une nation puis sa survie dans son territoire ne reposent pas simplement sur la croissance économique tous azimuts, à court terme, sans respect de l'intégrité de ses ressources mais plutôt sur une gestion sensée et prudente de la croissance dans une perspective de développement soutenu et de pérennité des ressources. C'est ce que souvent les gens appellent croissance intelligente ou développement durable; ou sinon, si on ne fait pas ça, on va être perdant au match de la compétitivité économique, puis on n'aura pas les moyens dans le futur de réhabiliter nos ressources.

n(11 h 10)n

Un bon exemple peut-être pour parler de dettes futures, c'est justement l'étude d'Environnement Canada qui a été faite en 1994 par rapport aux fuites de réservoirs souterrains. Dans l'étude, on évaluait les coûts de nettoyage en cas de déversement des réservoirs à à peu près 235 millions annuellement ou encore 5,9 milliards de dollars, collectivement. Mais ce que je pose comme question: C'est quoi, le coût réel d'un réservoir souterrain qui fuit quand on sait qu'un litre d'essence peut rendre impropre 1 million de litres d'eau pendant 50 ans? Alors, c'était là l'essence de notre intervention: on voulait démontrer qu'il y a déjà de nombreux bénéfices dans la loi, dans le projet de loi mais qu'on pourrait les accroître avec les mesures qu'on propose.

On ne dénigre pas, bien entendu, nos propositions. Mais, compte tenu de la qualité de l'ensemble du projet de loi puis de la nécessité de l'adopter assez incessamment, Vivre en ville pourrait soutenir facilement l'adoption du projet de loi dans sa forme actuelle. Mais on espérerait quand même que nos propositions soient analysées dans le cadre de l'application de la loi ou encore pour des amendements futurs. Alors, je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Lachance): Merci, messieurs. M. le ministre délégué à l'Environnement.

M. Simard (Montmorency): Merci beaucoup, M. le Président. MM. Vaillancourt et Laliberté, merci beaucoup de votre présence. Vous êtes les derniers dans notre liste de consultation mais non les moindres. Nous avons beaucoup apprécié la qualité de votre mémoire.

Et je suis tout particulièrement sensible à une vision, disons-le comme ça, là, à défaut de trouver un meilleur mot, mais «écosystémique» de votre approche, une vision donc très intégrée, très progressiste et à laquelle je suis très sensible. Sensible aussi au fait que vous nous ayez dit très clairement que vous souteniez entièrement l'adoption du projet de loi n° 72, presque intégralement, dans sa version intégrale. Et j'ai beaucoup aimé aussi le fait que vous ayez su dissiper le mythe, un certain mythe qui pouvait peut-être perdurer à la suite de 156, en disant qu'il est totalement faux de croire que cette nouvelle législation freinera le développement des terrains où les sols sont contaminés en milieu urbain. Je pense que c'est important, c'était un souci, là, de la remouture de 72.

Vous êtes de ceux qui avez défendu, de manière assez claire, le concept de «garantie financière». On en a parlé hier. C'est un souci que nous avons, je crois, dans cette commission d'explorer davantage ce concept, sa mise en application.

Si je comprends bien ce que vous nous dites, vous nous dites: Bon, voici, nous suggérons qu'un groupe, qu'une entreprise puisse verser une garantie financière pour son terrain mais que cette garantie puisse servir à un fonds commun. Vous parliez d'enveloppe collective dans votre mémoire; c'est l'expression comme telle, donc qui pourrait servir à tous, hein? Donc, contrairement au nom de l'émission, ce n'est pas Un contre tous mais c'est Un pour tous. Pourriez-vous développer votre idée en ce sens?

M. Vaillancourt (Jérôme): Bien, c'est ça. La façon qu'on voyait les garanties financières, c'était peut-être un peu à la mode «superfund» à l'américaine évoluée, c'est-à-dire de créer une espèce de vase gigantesque dans lequel on pourrait permettre au gouvernement de ne pas avoir à payer aux contribuables québécois, en fait, avoir à payer pour la décontamination de sites où on perd les responsables. Parce que, dans le fond, l'héritage est assez lourd.

Actuellement, l'inventaire n'est pas fait au complet des sites qui sont contaminés. On ne sait pas de quelle nature non plus ils le sont, combien va coûter exactement toute la décontamination. C'est le genre d'étude qu'il va falloir être faite pour mieux situer le coût exact, pour la collectivité, de la décontamination. Mais, comme le projet de loi parle maintenant de la garantie financière à laquelle l'entreprise aurait à contribuer, elle ne serait pas perdue dans le sens qu'elle pourrait elle-même y avoir accès. Quand on parlait de fonds d'emprunt, si jamais ils veulent réhabiliter, bon, il y a les déductions fiscales qu'on parlait, mais il pourrait aller chercher cet argent-là à des taux préférentiels pour redévelopper ou réhabiliter leurs sites.

Ça fait qu'on pense qu'il y aurait un gain sur l'ensemble de la collectivité par rapport à créer une enveloppe collective. Parce que, si on crée seulement des enveloppes spécifiques rattachées à des sites, on ne peut pas faire travailler l'argent autant qu'en mettant sur pied le fonds d'emprunt à taux préférentiel. Alors, c'est peut-être une façon... Même le gouvernement pourrait y ajouter de l'argent dans les garanties financières, dans l'enveloppe garantie financière, justement pour permettre le fonds d'emprunt, là.

Parce que le programme Revi-Sols actuellement, c'est des subventions dédiées. C'est sûr que chacun doit contribuer à un certain pourcentage. Mais c'est un peu ça qu'on voulait exprimer: les garanties financières travailleraient beaucoup plus si on créait un fonds d'emprunt collectif. Donc, ce serait vraiment une forme d'assurance comme on a présenté, une forme d'assurance souscrite pour les terrains contaminés mais aussi le fonds d'emprunt à taux préférentiel. Je ne sais pas si ça répond à la demande de clarification.

M. Simard (Montmorency): Oui. Oui, oui. Je sais que mes collègues voudraient également vous poser des questions. Il y a un petit truc sur lequel je voulais revenir, si vous me le permettez. Vous parliez d'apparence de contamination, au début du mémoire.

M. Vaillancourt (Jérôme): Oui. Bien, c'est un peu comme j'ai expliqué. C'est qu'en milieu urbain souvent, comme les secteurs précis de contamination où le degré de contamination n'est pas identifié, on se retrouve des fois à avoir du non-développement à cause de l'apparence de contamination. C'est un peu ce qui a été constaté dans la Table ronde nationale sur l'environnement, l'économie aussi le disait. C'est parce que, en milieu urbain parfois, un secteur, on ne sait pas vraiment à quel degré il est contaminé mais il y a une forme d'apparence de contamination qui freine le développement. Ce n'est pas par rapport à la législation, c'est surtout par rapport au contexte urbain ou à la mission de Vivre en ville. C'est qu'on se rend compte qu'il y a des terrains qui ne sont peut-être même pas contaminés mais qu'on n'a pas fait vraiment d'étude approfondie pour le savoir, mais que, dans l'opinion publique ou dans l'historique, il s'est créé cette apparence de contaminants. Parfois, ils sont peut-être contaminés, c'est sûr, là. Dans la plupart des cas, ils le sont mais des fois à des degrés pas très dérangeants pour une utilisation autre qu'industrielle.

M. Simard (Montmorency): Je vais laisser la parole à mes collègues. Mais, avant de le faire, vous me permettrez de vous féliciter pour la contribution assez exceptionnelle que vous amenez dans l'espace public en matière d'urbanisme, de développement durable et d'écogouvernance, en quelque sorte. Je sais que vous êtes un groupe assez jeune dans le temps mais pourtant très dynamique. Vous participez, si je ne m'abuse à... vous avez participé à plusieurs bureaux d'audiences publiques, vous êtes des membres actifs de plusieurs groupes de travail et de réflexion. Je crois par ailleurs comprendre que c'est l'une de vos premières, comment dire, présences en commission, en audition particulière.

M. Vaillancourt (Jérôme): Oui, bien, probablement. Mais ça dépend, là, des... je ne peux pas...

M. Simard (Montmorency): Parce que vous vous en êtes très bien tirés.

M. Vaillancourt (Jérôme): Ah, bien, c'est gentil. Merci. Peut-être qu'on va prendre notre retraite à 30 ans. Non, on a 30 ans.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Vaillancourt (Jérôme): Ha, ha, ha! On a tellement travaillé, on prendra notre retraite à 40 ans.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Salaberry-Soulanges.

M. Deslières: Merci, M. le Président. MM. Laliberté et Vaillancourt, bienvenue à cette commission. Merci pour la présentation de votre mémoire. Et je tiens à vous féliciter parce que je pense que vous êtes le deuxième ou troisième groupe à nous présenter un mémoire écrit recto-verso. Donc, c'est un plus. Non, on l'a souligné, je pense que c'est important.

Nous avons parlé, au cours de ces deux derniers jours, de beaucoup de réhabilitation, de notions de réhabilitation de terrains. Mais le projet de loi, le titre du projet de loi se lit comme ceci: Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement et d'autres dispositions législatives relativement à la protection et à la réhabilitation des terrains. Et vous nous apportez, dans votre mémoire, cette notion très intéressante de protection, de gestion préventive. Et, en tout cas, de mémoire, à la lecture, je pense que c'est la première fois que je vois dans la littérature qui nous a été transmise au cours des dernières semaines, des derniers jours, cette notion de gestion préventive. C'est audacieux, et, en tout cas, moi, ça m'interpelle et ça m'intéresse beaucoup.

Vous nous dites: Écoutez, la société fait le constat qu'on doit investir beaucoup. Maintenant, pour réhabiliter, on tente d'avoir un cadre juridique, mais allons-y avec un peu plus d'audace. Napoléon répétait: De l'audace! De l'audace! Et surtout de l'audace pour faire avancer et modifier les choses. Et vous nous apportez une notion fort intéressante et vous nous dites: Écoutez, rendus où on est rendus, là, ajoutez donc dans votre projet de loi cette notion en amont, de dire «protégeons», puisque le titre du projet de loi... Puis il semble que ce n'est pas très lourdaud dans le projet de loi, cette notion de protection. Allez-y donc, protégez donc sur le plan juridique, sur le plan législatif, puis balisez donc ça. Puis vous le balisez vous-mêmes dans votre proposition parce que vous nous dites: Écoutez, l'intégration au projet de loi d'un mécanisme de suivi des terrains pour les activités industrielles et commerciales jugées à risque; vous balisez cette notion-là.

Je voudrais vous entendre encore et encore sur cette notion-là parce que ça m'apparaît être quelque chose d'excessivement important. Et, si c'était audacieux, bien, tant mieux et allons-y avec l'audace. Messieurs, vous avez la parole.

M. Vaillancourt (Jérôme): Bon. On va essayer d'être audacieux dans la réponse aussi. Ha, ha, ha! Non, mais, c'est ça, la forme de gestion préventive. C'est sûr qu'on n'a pas toutes les connaissances pour l'appliquer en matière de... on n'est pas des experts en décontamination, réhabilitation de terrains. Mais, nous, on croit que c'est plus sage de viser la protection, bon, que se soit par les mesures de suivi ou la caractérisation initiale.

n(11 h 20)n

La forme que ça peut prendre: peut-être via un règlement, ou, en tout cas, je laisse peut-être le soin aux fonctionnaires de développer davantage là-dessus. Ça peut être des outils de modélisation que l'entreprise mettrait en oeuvre pour s'assurer qu'à tous les cinq ans ils font un suivi, soit par caractérisation ou des fois par modélisation. Je sais que les Américains sont peut-être très forts là-dessus, la modélisation informatique d'analyse de risque et de contaminants. C'est peut être quelque chose de très complexe parce que je ne m'y connais pas de A à Z, mais ça pourrait être quelque chose. Quand on parlait de développer l'expertise, bien là, justement, l'innovation québécoise pourrait entrer là-dedans puis développer des outils de suivi pour justement être certain que dans les faits, l'optique ou l'objet final de tout ça, la finalité, c'est de s'assurer qu'on prévient, qu'on est sûr que dans 5, 10, 15 ans on ne se retrouvera pas à la situation où on est actuellement avec un lot de terrains, un bagage de dettes pour l'ensemble de la réhabilitation puis de la dette collective, là ? j'entends autant le privé que le public.

Donc, dans la forme réglementaire, ça pourrait être ça. Bon. Quand on en a parlé, on a plus spécifiquement ciblé des activités à risque, bien entendu. Mais dans les outils que ça pourrait signifier comme mise en oeuvre, bien, c'est des modélisations d'analyse de risque, différents outils de suivi des entreprises. Puis là, après ça, les obligations, ça serait la récurrence, c'est-à-dire: Est-ce que l'entreprise doit fournir ça au gouvernement à telle... à tous les... Oui, ça pourrait être des normes qui seraient dirigées comme ça. On pourrait même les moduler en fonction du risque, si vraiment on a des craintes.

C'est la même chose pour le suivi du confinement. C'est qu'on juge que, bon, on peut confiner sur place, tant mieux, mais il va falloir être certain qu'on ne se réveille pas dans 20 ans avec un problème majeur sur les bras, puis que là, il n'y a plus de responsable parce que ça fait longtemps qu'il est parti.

Donc, c'est la même chose, la gestion préventive s'applique aussi, là-dedans. Puis la forme, comme j'expliquais, reste à définir. On n'est pas entré dans le détail pour expliquer l'ensemble des mécanismes, là. Mais, je ne sais pas si ça répond en partie à votre question, là, sur les...

M. Deslières: Merci, et je pense que ça ne peut pas tomber dans l'oreille de sourds.

M. Vaillancourt (Jérôme): Ha, ha, ha! D'accord.

Le Président (M. Lachance): Merci. M. le député de d'Orford.

M. Benoit: Alors, MM. Vaillancourt et Laliberté, merci d'être avec nous ici aujourd'hui. Vous faites mention dans votre mémoire à la page 4, de ce colloque, congrès que vous aviez tenu, en 1999.

On n'a pas eu assez l'occasion de vous dire comment il y en a, des colloques puis des réunions au Québec puis des congrès, mais on est invité à peu près à cinq par semaine, nous autres, les politiciens, dans ces histoires-là, mais il y en a peu qui marquent le pas finalement, qui changent le cours de l'histoire. Et dans le cas de ce grand congrès de novembre 1999 que vous aviez organisé, vous avez indéniablement marqué le pas de toute une pensée d'organisation de la société. Et le document qui en a suivi par la suite est un modèle qui fait école dans toutes les écoles finalement, en ce moment, là. Alors, ça, bravo! bravo! Vous avez fait un ouvrage pas mal exceptionnel et on espère que vous allez recommencer, d'ailleurs. Moi, personnellement, j'espère que vous allez recommencer ce genre d'opération là parce qu'on aurait besoin de continuer à prêcher à plus que des groupuscules mais à l'ensemble des élus ce que vous avez essayé de prêcher, à ce moment-là. Et de faire venir des experts d'un peu partout à travers le monde, comme vous l'aviez fait, nous a ouvert des pans de murs complets de comment on pouvait aménager notre société et de la mieux organiser, finalement.

Une fois ça dit, dans votre mémoire à la page 10 ? d'autres l'ont fait avant vous ? des gens nous parlent de cette pression pour sortir des grands centres, que ce soit Québec ou Montréal, des grands projets parce que c'est trop compliqué de développer des terrains contaminés dans les centres-villes. Vous la sentez, cette pression-là, à Montréal, vous la voyez, vous l'entendez ou si c'est juste quelque chose que les gens se gargarisent avec?

M. Vaillancourt (Jérôme): Il ne faudrait pas, en fait, croire que la tendance est terminée; je pense que la tendance se poursuit. On verra peut-être dans cinq ans ou 10 ans, là, quand peut-être j'aurai mûri un peu cette réflexion. Parce que, là, il y a un cadre d'aménagement pour la région métropolitaine qui essaie justement d'expliquer ce qu'on fait là, de concentrer les développements dans les secteurs déjà viabilisés, parce que ça va pour la richesse collective, ça va pour le développement, la protection de l'environnement.

Mais je pense que ça existe encore, là; peut-être même que c'est rendu plus loin que ce qu'on imagine, c'est-à-dire la deuxième ou troisième couronnes. Mais, comme j'explique, il y a déjà un outil à Montréal qui est le cadre d'aménagement qui va probablement offrir une solution parce qu'on oblige au développement dans des secteurs précis. Mais, nous, on juge que souvent ce n'est pas seulement ce genre d'outils là qui est nécessaire, c'est une gamme, c'est une espèce de palette d'outils qui, une fois tous mis en oeuvre, permettent vraiment de dire: On s'installe là. On oblige le promoteur à décomplexifier ou enlever l'apparence de complexité qu'il y a à développer en centre-ville ou dans les centres urbains. C'est tout le monde qui va être gagnant parce que les agglomérations qui ont misé là-dessus, bien, elles sont gagnantes aujourd'hui parce que, bon, elles ont maximisé leur centre-ville, elles ont des développements économiques. C'est l'attrait aussi que ça génère: une fois que tu décides de ton axe de développement pour les 40 prochaines années, bien, ça génère des investissements de partout parce qu'on sait où est-ce qu'ils s'en vont, eux autres, là, tu sais; on sait qu'est-ce qu'ils veulent faire.

Donc là, avec le temps, on a peut-être une première partie de réponse, mais dans cinq ou 10 ans, comme je vous dis, on reviendra pour voir est-ce qu'il y a eu d'autres outils qui se sont greffés, est-ce que la réglementation, est-ce que l'économie a permis de suivre le bal.

M. Benoit: Avez-vous, en votre âme et conscience, l'impression que l'étalement urbain dans les zones périphériques vertes alentour de Montréal, c'est fini? J'essaie de me rappeler, quand j'avais 15, 16 ans, que je voyageais sur le pouce entre Saint-Hyacinthe et Montréal, à part du village de Saint-Hilaire, je veux dire, c'était des champs agricoles, c'était des grands champs.

Je repassais entre Saint-Hyacinthe et Montréal il y a quelques jours par ce qu'on appelait l'ancien... la 9, et c'est bâti, hein; c'est bâti, là. Sauf quelques terres après Sainte-Madeleine, c'est bâti: McMasterville, Saint-Hilaire, Beloeil, bien sûr, Longueuil, Saint-Lambert.

Et avez-vous l'impression... Et j'entends les volontés des gouvernements, autant du gouvernement en ce moment que nous, quand nous avons été là, de dire: C'est fini, on va avoir des plans d'aménagement puis on va bâtir dans les centres-villes, on va revaloriser les centres-villes. Et je dois avouer que j'avais 16 ans quand je faisais du pouce. Maintenant, je fais moins de pouce que j'en ai déjà fait, là...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Benoit: ...mais ça s'est développé pas mal, hein? Est-ce que vous avez l'impression que les moyens qu'on s'est donnés, les outils qu'on s'est donnés vont arrêter cet étalement urbain?

Et je parle de Montréal, mais je peux parler de Sherbrooke, hein? Entre Magog puis Sherbrooke, là, oubliez ça, les champs agricoles, il n'y en a plus, de zonage agricole. C'est bâti puis ça se bâtit allègrement: Saint-Élie, Rock Forest, Deauville, Omerville, ça se bâtit.

M. Vaillancourt (Jérôme): Ça, la tendance va toujours être là, puis ce n'est pas nécessairement parce que le gouvernement va réussir à mettre en oeuvre qu'on va freiner la tendance, c'est les mentalités des Québécoises et des Québécois.

Puis il va falloir, à un moment donné, que les gens... parce qu'il y aura toujours une demande; parce que, même si on redirige les promoteurs vers les centres urbains ou à la périphérie immédiate, il y aura toujours une demande, les gens vont toujours vouloir avoir leur bout de terrain, etc.

Ça fait que, quand je parlais d'une gamme d'outils, c'est qu'à un moment donné il va falloir qu'on réponde aux rêves ou aux aspirations des gens puis qu'on enlève aussi leur espèce de réflexion préétablie, c'est-à-dire, ça coûte trop cher de rester en ville. C'est ça, le problème qu'on a, actuellement. C'est qu'ils vivent avec cette idée-là que ça coûte plus cher. C'est vrai que ça coûte plus cher, mais ils oublient de compter qu'il n'y a pas de deuxième voiture, qu'il y a des espaces à proximité, donc qu'ils vont consommer moins d'essence en allant au dépanneur à pied ou qu'on pourrait aller au théâtre. Donc, le gain en qualité de vie, il est difficilement monnayable dans la tête des gens. Puis ça, même le gouvernement, peu importe quels outils il pourrait mettre en oeuvre, on va toujours avoir ce problème-là qui n'est peut-être pas un problème en soi, dans le sens que, si c'est leur aspiration, il faut juste leur offrir d'autres modèles. S'assurer, par exemple, qu'on a une gestion de la croissance qui va en fonction de la vraie croissance.

C'est qu'on ne peut pas... à Montréal présentement, il n'y a pas une croissance réelle, puis on développe toujours plus loin. Ça sert à quoi? C'est du saute-mouton, ça ne sert à rien. En tout cas, ça nous coûte plus cher en infrastructures.

Il faut juste dire: On met la barrière là; tout ce qu'il y a autour, c'est une ceinture verte. On ne développe pas là dans les 30 prochaines années, puis on se concentre sur le territoire qu'on a, parce que dans le territoire concentré, des fois, on a assez d'espace pour acquérir un million de nouvelle personnes dans un cadre de vie intéressant, autant pour ceux qui préfèrent l'urbain, typiquement urbain asphalte, que ceux qui préfèrent un terrain avec un peu de verdure, un jardin communautaire et tout autour, là.

M. Benoit: Une dernière question. Vous parlez d'outils financiers aux pages 18, 19 et 20; le ministre vous en a félicité. Je pense que vous êtes très proactifs, vous arrivez avec des solutions ou, en tout cas, avec des approches de solution.

En quelque part là-dedans, vous nous parlez que l'État pourrait prêter des fonds, non pas donner comme on fait, mais prêter, un fonds d'emprunt que vous parlez. Est-ce que, techniquement, il y a quelque chose qui fait qu'une ville ne peut pas prêter en ce moment à une entreprise pour qu'elle puisse développer un terrain? Je pense à une ville dans mon comté où on a décidé à un moment donné qu'une industrie voulait s'y installer et on a acheté l'édifice, carré, la ville a acheté l'édifice et elle le loue à cet entrepreneur-là qui fait des armoires de cuisine, et puis c'est un grand «success story».

Est-ce que dans la loi quelque chose empêche la ville de McMasterville de décider qu'elle va développer un immense projet en prêtant des fonds à partir de ses fonds propres et en louant ces terrains-là ou en le faisant faire par le promoteur et en lui vendant les terrains, je ne sais? Est-ce que ces outils-là sont regardés à leur juste valeur ou tout le monde a peur d'avoir peur, finalement?

n(11 h 30)n

M. Vaillancourt (Jérôme): Ha, ha, ha! C'est une bonne question parce que, dans le fond, est-ce que c'est spécifiquement interdit? Il faudrait que je vérifie parce que, moi-même, je n'ai pas l'impression que ce soit spécifiquement interdit. Je pense qu'une municipalité peut le faire parce que je l'ai déjà vu dans certains cas de développement d'édifices, comme à Québec, bon, où il y avait un prêt qui était octroyé. Mais le promoteur était-il privé? Je ne pense pas, c'était un promoteur à but non lucratif, donc c'est pour ça... Il faudrait que je vérifie, là, sincèrement, là, est-ce qu'on a peur de... Je ne pense pas que ce soit une crainte, ça dépend toujours des budgets disponibles dans la ville, puis même au gouvernement... Je pense que c'est une optique qui... En tout cas, dans le mémoire, on la propose comme une optique intéressante, parce que, tant qu'à avoir l'argent là qu'on recueille pour les garanties, bien pourquoi on ne ferait pas comme les assureurs? Les assureurs placent cet argent-là puis ils font des profits avec actuellement. Ça fait que la ville, je pense, pourrait se le permettre, mais je ne sais pas si c'est spécifiquement, dans la législation, interdit de faire des prêts, d'accorder des prêts.

M. Benoit: Parfait. Merci.

Le Président (M. Lachance): Alors, merci, MM. Vaillancourt et Laliberté, pour votre présence ici cet avant-midi. Et ceci met fin aux auditions que nous avions prévu faire, et nous allons maintenant aborder l'étape finale de nos travaux avec les remarques.

(Consultation)

Le Président (M. Lachance): Avant de céder la parole au représentant de l'opposition officielle pour ses remarques finales, je veux déposer les mémoires de deux organismes qui n'ont pas été entendus et qui n'avaient pas demandé à l'être, soit l'Ordre des géologues du Québec et la Fédération des caisses Desjardins du Québec.

Remarques finales

Alors, M. le député d'Orford et porte-parole de l'opposition officielle, pour vos remarques finales sur ces auditions relatives au projet de loi n° 72.

M. Robert Benoit

M. Benoit: Très succinctement, M. le Président. D'abord, dire au nouveau ministre délégué à l'Environnement qu'on l'avait assuré de notre collaboration dans la mesure où on ferait avancer l'environnement, et il a pu voir la collaboration de l'opposition dans la mesure où on a l'impression que l'environnement avance au Québec.

Et on peut nettement voir ? et tout le monde s'est entendu là-dessus ? l'amélioration entre 156 et 72 et on s'en réjouit de ce côté-ci de la Chambre. Je pense que les gens nous l'ont dit. Me Bélanger nous a parlé de la quatrième mouture, et, c'est vrai, on a travaillé ardemment là-dessus, puis je pense qu'on arrive pas loin d'un bon café, là, et on va prêter notre collaboration à la dernière étape.

Malheureusement, on va déplorer, comme c'est le rôle de l'opposition de le faire... On invite le gouvernement à déposer la réglementation. On sait comment ces projets de loi là, la réglementation, ils cachent souvent... Je ne me souviens plus lequel de nos ministres qui disait que c'est dans les détails que se cache le diable, ça serait bien agréable d'avoir la réglementation en même temps que le projet de loi. On me dit oui à une liste d'experts, mais vous aurez dans la réglementation ce serait quoi, la liste d'experts. C'est toujours dangereux. On se souvient du projet de loi sur les matières résiduelles où le règlement, près de deux ans après, n'est toujours pas sorti et on se demande même ce que vaut le projet de loi finalement, en bout de ligne. Alors, premier point.

Deuxième point, le monde des affaires nous a dit... Que ce soient les banquiers ou les autres qui sont venus hier, ils nous ont dit: Oui, on peut vivre avec un projet de loi à peu près comme celui-là. Les gens de l'environnement, que ce soient les CRE, l'UQCN ou les avocats spécialistes en droit, nous disent: Oui, on peut vivre avec ça. Et certains confrères nous ont dit que finalement c'est notre rôle de s'assurer que les grandes balises vont être bien maintenues là-dedans.

Le Barreau nous pose une grosse question, et ils nous disent, eux: Le projet de loi, il n'est pas acceptable. Ils nous posent cette question, et on devra y répondre au moment du projet de loi article par article.

Il y a un consensus, et ça, c'est nouveau entre 156 et 72... Je dirai même que je ne me souviens pas vraiment que les gens nous en aient parlé à 156 du Superfund, et là, de plus en plus, les gens semblent nous dire: Il y a quelque chose là, puis il faut trouver un moyen... Et puis ce n'est pas juste à l'État non plus, hein? Le Superfund, là, je ne le conjugue pas comme quelque chose où seulement l'État doit participer. D'autre part, on sait que nos entreprises sont taxées, bon, etc. Alors, on laissera au ministre trouver la solution et...

Bien, c'est ça. Je pense que c'est rien que moi qui avais droit à des remarques, mais je ne sais pas si certains de nos confrères ont des remarques à faire. Je veux remercier les membres, ici, qui sont avec nous, Raymond et Stéphane, qui ont toujours été... ainsi que les autres membres de la commission et vous, M. le Président, qui avez bien présidé nos travaux. Merci beaucoup.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le député d'Orford, pour vos bons propos. Et voici maintenant les remarques finales pour M. le ministre.

M. Jean-François Simard

M. Simard (Montmorency): Alors, merci beaucoup, M. le Président. Je tiens, d'entrée de jeu, à vous dire à quel point je suis réjoui des consultations particulières, de l'audition publique que nous venons de tenir. Je crois que nous pouvons dire mission accomplie pour cette partie d'audition particulière, puisque nous avons auditionné près d'une quarantaine d'experts regroupés dans 12 groupes qui, eux-mêmes, représentent une partie fort substantielle de la société. L'ensemble de la société civile a été représenté ici, que ce soit le secteur industriel, que ce soit le secteur du droit, que ce soient des groupes spécialisés en environnement, etc., des groupes municipaux.

Donc, nous avons eu des rapports qui, dans l'ensemble, pour ne pas dire unanimement et de manière très claire ont affirmé, comme l'a dit le critique, une nette évolution par rapport à la mouture du projet de loi n° 156. Certains disaient qu'on en était à la quatrième mouture, moi j'en connais trois: la première loi, là, dans la LQE, le projet de loi n° 156, le projet de loi n° 72. Donc, il y a là un peu une espèce de course à relais que je reprends en compagnie de l'opposition.

Moi, je suis un des plus jeunes membres de cette Assemblée parlementaire, M. le Président, le plus jeune membre du Conseil des ministres, mais j'ai assez d'expérience pour savoir qu'on ne pourra pas continuer sans l'appui et la collaboration de l'opposition. Ça, je sais ça, et je l'ai sentie, cette précieuse collaboration, je l'ai appréciée et je souhaite qu'elle puisse perdurer jusque, donc, à la fin de nos travaux. J'ai beaucoup apprécié, donc, l'expérience du député d'Orford, beaucoup apprécié également les commentaires toujours très à propos de notre ami le député de D'Arcy-McGee, qui a une expérience notariale qui est précieuse dans le cas très précis de ce projet de loi, ainsi que du vice-président de la commission. J'ai beaucoup apprécié également l'intérêt manifesté par tous mes collègues de la majorité ministérielle qui, dans presque tous les cas, sont intervenus pour s'adresser à nos invités, donc... Et merci à vous, M. le Président, pour le brio avec lequel vous avez assumé la présidence de ces travaux.

Nous avons réfléchi sur un projet de loi qui me semble essentiel, qui vient compléter ce que le Parti libéral, à l'époque, avait amorcé ? et je le dis, là, sans partisanerie ? avec le projet de loi n° 65 sur le concept de pollueur-payeur. Moi, je crois sincèrement que nous faisons une deuxième phase, nous venons compléter ce qui avait été amorcé par le projet de loi n° 65. C'est un projet de loi qui, à mon sens, ne vise pas tant à... qui vise, bien sûr, à corriger les erreurs du passé et à prévoir les erreurs à venir, mais ce n'est pas un projet de loi qui, j'allais dire, M. le Président, se voit, en tout cas, en ce qui me concerne, dans une perspective punitive, c'est plutôt dans une perspective de réparation. On n'est pas dans une perspective, donc, strictement de responsabilité civile au sens strict du Code civil, on dépasse ça, on est dans une perspective beaucoup plus sociale, dans une dimension de santé publique et de protection, j'allais vous dire, M. le Président, de ce qui est fondamental dans notre société, notre patrimoine écologique, hein? Donc, on est dans ce registre, et je sais qu'on est sur la même longueur d'onde avec l'opposition là-dessus.

Donc, on a entendu plusieurs commentaires très constructifs, très positifs parmi lesquels on pourrait notamment... Je n'ai pas la prétention de tous les reprendre ici parce qu'il y a quand même eu beaucoup de choses, mais il y a notamment la Chambre des notaires qui nous suggérait d'inscrire au registre foncier, là, des attestations faites par des notaires ou des avocats. L'Association des banquiers canadiens nous a proposé la constitution d'un fonds qui pourrait être constitué à même les cotisations des experts pour dédommager ceux qui y auraient recours faute, donc, de moyens suffisants. L'Institut de développement urbain nous proposait de bonifier l'encadrement de l'analyse de risques. Et, comme y faisait référence le critique de l'opposition officielle à propos de 31.49, il y a toute une cette question, là, sur les superfunds, effectivement, là, qui... C'est une chose qui m'a surpris, là, au niveau de ces consultations, ça a été souvent repris. Donc, il y a plusieurs suggestions positives qui nous permettront, M. le Président, d'alimenter nos travaux à venir. Et, encore une fois, merci à tous et à toutes.

Le Président (M. Lachance): Alors, merci, M. le ministre. Et, là-dessus, je voudrais...

Une voix: ...

Le Président (M. Lachance): Bien, écoutez, sur l'enveloppe de temps... Oui, c'est possible sur l'enveloppe de temps du côté ministériel.

Alors, je voudrais remercier tous les parlementaires pour leur précieuse collaboration. Il y a eu une atmosphère, un climat d'harmonie assez exceptionnel lors de ces auditions, et je l'apprécie, ça facilite le travail d'un président de commission.

n(11 h 40)n

Juste un petit mot pour le ministre, qui est jeune. Un jour, il vieillira, ça, il y a une loi qui...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Lachance): Et je lui rappellerai que, à 35 ans, j'étais également député et que, aujourd'hui, j'en ai 56. Alors, un jour... Je vous souhaite de vieillir en sagesse.

M. Simard (Montmorency): ...à tous les jours.

Le Président (M. Lachance): Là-dessus, j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 11 h 41)


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