L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission des transports et de l'environnement

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission des transports et de l'environnement

Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le jeudi 6 septembre 2001 - Vol. 37 N° 22

Consultations particulières sur le projet de loi n° 17 - Loi modifiant le Code de la sécurité routière et le Code de procédure pénale concernant le cinémomètre photographique


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Journal des débats

(Dix heures seize minutes)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre! Je déclare la séance la commission des transports et de l'environnement ouverte. Le mandat de la commission est de tenir des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières sur le projet de loi n° 17, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et le Code de procédure pénale concernant le cinémomètre photographique.

Est-ce qu'il y a des remplacements, Mme la secrétaire?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Brodeur (Shefford) remplace M. Bordeleau (Acadie) et M. Ouimet (Marquette) remplace M. Lafrenière (Gatineau).

Le Président (M. Lachance): Merci. Alors, cet avant-midi, nous allons entendre les porte-parole du Regroupement des loueurs de véhicules du Québec, à qui je demanderais immédiatement de prendre place à la table; le Regroupement québécois du taxi; et finalement, pour terminer l'avant-midi, l'Association des policiers provinciaux du Québec. En après-midi, à 14 heures, la Fédération des policiers et policières municipaux du Québec et la Fraternité des policiers de la CUM; puis la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse; et finalement, pour terminer nos travaux, le Groupe de recherche en sécurité routière.

Alors, avant de poursuivre, je demanderais de bien vouloir fermer les téléphones cellulaires qui sont ouverts durant la séance, s'il vous plaît.

Auditions

Alors, bienvenue. Je présume que vous êtes M. Robert Lalonde?

M. Lalonde (Robert): Exact.

Une voix: ...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lalonde (Robert): Et je me sens seul aussi, hein? Ha, ha, ha!

Une voix: ...

Le Président (M. Lachance): On verra. On verra bien. Alors, M. Lalonde, bienvenue à cette commission, et je vous rappelle que vous avez un maximum de 15 minutes pour nous faire part de vos commentaires.

Regroupement des loueurs de véhicules
du Québec (RLVQ)

M. Lalonde (Robert): M. le Président de la commission, M. le ministre des Transports, M. le critique de l'opposition officielle, Mmes, MM. les députés, bonjour. Comme indiqué, mon nom est Robert Lalonde et je suis président du Regroupement des loueurs de véhicules du Québec. Cette association de gens d'affaires québécois rassemble les responsables des plus grandes entreprises de location à court terme de véhicules au Québec. On retrouve parmi nos membres des entreprises telles que Avis, Budget, Discount, Enterprise et National.

Nos membres sont propriétaires de flottes représentant plusieurs milliers de véhicules qui sillonnent les routes du Québec à chaque jour. Nos clients se retrouvent à la fois chez les gens de passage chez nous et chez les Québécois et Québécoises qui louent de nos véhicules à des fins commerciales et personnelles. Ces Québécois et Québécoises forment la grande majorité de notre clientèle. Nos membres emploient plusieurs centaines de personnes et investissent, bon an, mal an, plusieurs millions de dollars dans le renouvellement et le maintien de la qualité de leur flotte de véhicules récréatifs et commerciaux.

Nous avons pris connaissance, le printemps dernier, du contenu du projet de loi n° 17 présenté par le ministre des Transports, introduisant au Code de procédure pénale des dispositions concernant le cinémomètre photographique, mieux connue sous l'appellation de «photoradar». Comme vous le savez, ce projet de loi vise à introduire des dispositions pénales prévoyant de lourdes amendes pour toute personne reconnue coupable d'une infraction constatée à l'aide d'un dispositif de photoradar. Il s'agit d'amendes dont nous savons tous qu'elles peuvent atteindre plusieurs centaines de dollars.

Nous comprenons que l'introduction de ces dispositions vise essentiellement à responsabiliser les comportements des conducteurs qui circulent trop vite sur les routes québécoises en dotant les forces de l'ordre d'un moyen de surveillance dans des endroits souvent inaccessibles ou trop dangereux pour exercer la surveillance traditionnelle impliquant la présence physique des policiers. Il importe donc, pour que cette mesure atteigne les objectifs fixés, qu'elle ait un impact direct sur la personne fautive, puisqu'il s'agit essentiellement de décourager un comportement qui est personnel à l'individu qui a le contrôle du véhicule au moment où l'infraction est commise.

n (10 h 20) n

Le respect des lois permet de sauver des vies. En plus, vous comprendrez que, à titre de propriétaires d'une flotte très importante et représentant plusieurs milliers de véhicules, nous sommes lourdement exposés aux conséquences de la conduite dangereuse, puisque celle-ci provoque des accidents sur de nombreux véhicules dont nous sommes les propriétaires et dont nous devons éventuellement, directement ou indirectement, assumer les coûts de réparation. Nos membres ne cessent de répéter à leurs clients l'importance que ceux-ci doivent attacher au respect des lois existantes, notamment celle concernant les limites de vitesse sur nos routes. Dans ce contexte, nous ne pouvons être défavorables à une initiative visant à assurer une circulation plus sécuritaire sur nos routes, notamment par le respect des limites de vitesse établies. Nous comprenons que tel est l'objectif poursuivi par l'introduction des dispositions sur le photoradar.

Nous devons cependant à ce stade attirer votre attention sur le moyen de responsabilité pénale proposé dans le projet de loi afin de soulever certaines problématiques qui nous apparaissent contraires à l'atteinte des objectifs mêmes de la loi. En effet, l'article 8, qui propose l'introduction de l'article 592.1 au Code de sécurité routière, prévoit que, en cas d'infraction constatée par une photographie prise au moyen d'un cinémomètre photographique, le propriétaire du véhicule routier est tenu responsable de l'infraction, à moins qu'il n'établisse qu'il n'avait pas consenti à un tiers l'utilisation de son véhicule.

Cette disposition, qui établit une responsabilité absolue à un locateur commercial de véhicules de bonne foi, nous apparaît être la source de nombreuses injustices et susceptible d'avoir des effets contraires aux objectifs recherchés par le ministre. En effet, la loi vise à décourager les chauffeurs imprudents en donnant aux autorités des moyens extraordinaires pour que ceux-ci ne puissent se conduire d'une façon irresponsable lorsqu'ils circulent sur les routes où la surveillance traditionnelle est difficilement praticable. On pense notamment aux autoroutes à circulation très dense. Or, en attribuant la responsabilité du paiement d'infractions aux propriétaires de véhicules routiers, le projet de loi, dans le cas des véhicules loués sur une base commerciale, nous apparaît manquer l'objectif de décourager les chauffeurs fautifs, puisque la seule personne pénalisée sera le locateur du véhicule qui n'a aucun contrôle sur la conduite du chauffeur.

Tous savent très bien qu'il sera difficile, voire souvent impossible de refacturer et récupérer auprès des clients les amendes de plusieurs centaines de dollars qui seront automatiquement facturées aux propriétaires. De fait, ceci pourrait même constituer un encouragement pour les conducteurs négligents à utiliser des véhicules loués pour commettre leurs infractions au Code de sécurité routière, puisque ceux-ci pourront alors éviter le paiement des amendes auxquelles leur conduite les aurait autrement astreints.

Vous comprendrez que, compte tenu de l'importance des sommes en jeu, la non-récupération de ces amendes représente des coûts élevés que les entrepreneurs québécois absorberont ou devront retransmettre tout à fait injustement à des clients dont la conduite est tout à fait conforme aux lois en vigueur. Dans les deux cas, ce résultat nous apparaît contraire aux objectifs fixés par la loi ainsi qu'aux règles d'équité fondamentales qui devraient régir l'introduction d'une telle mesure pénale dans le Code de sécurité routière.

Au surplus, cette mesure a pour effet pratique de priver le locateur commercial de ses moyens de défense. Le locateur commercial de véhicules n'a aucun contrôle sur la conduite individuelle du chauffeur et il n'était pas là au moment où l'infraction alléguée aurait été commise. Il se voit donc privé de tout moyen de défense raisonnable dans les circonstances, étant pris d'une part entre l'autorité publique qui exige de lui le remboursement de l'amende et, d'autre part, le client qui refuse de la payer et dont l'esprit de collaboration à la défense dans les circonstances et compte tenu des sommes impliquées sera, comme vous pouvez le deviner, plutôt réduite. Il est donc illusoire dans un tel contexte de penser que le droit à une défense pleine et entière existe pour un locateur de véhicules.

Nous demeurons cependant convaincus qu'il existe une façon de réconcilier les objectifs poursuivis par le ministre avec l'instauration d'un régime équitable pour les locateurs de véhicules. Cette solution consisterait à permettre au locateur de se dégager de sa responsabilité si, dans un délai raisonnable, par exemple dans les 30 jours de la réception du constat, le locateur pouvait transmettre aux autorités chargées de l'application de la loi l'identification du chauffeur responsable du véhicule et aussi le consentement de ce chauffeur à ce que, étant identifié comme responsable, il acquittera toute amende ou somme due en raison d'une violation du Code de sécurité routière ou d'une loi en vigueur relative à la circulation du véhicule loué. Sur réception de cette identification, l'autorité compétente relèverait alors le loueur de véhicules de sa responsabilité et assurerait la poursuite de l'infraction directement auprès du chauffeur identifié comme responsable ayant accepté cette responsabilité dès la signature du contrat.

Il va de soi qu'une telle solution imposera pour tous les locateurs de véhicules commerciaux au Québec une modification à leur contrat de location traditionnel. Nous sommes cependant prêts à assurer le suivi de cette mesure auprès de nos membres qui représentent la presque totalité de l'industrie de la location de véhicules afin d'assurer la rencontre des objectifs poursuivis par le ministre dans le respect de l'équité et de la justice envers les locateurs de véhicules. Cette solution assure également que le défaut de prévoir une telle clause au contrat maintiendra la responsabilité du locateur de véhicules et lui impose donc le fardeau de s'assurer que ses clients seront bien avisés des dangers qu'ils encourent s'ils décident de violer les lois relatives à la circulation routière.

Nous vous demandons donc de modifier le projet de loi n° 17 actuellement soumis à cette étude dans le sens que nous venons d'indiquer et demeurons convaincus qu'il sera ainsi plus en mesure d'assurer le respect des objectifs fixés par le ministre en responsabilisant, d'une part, les chauffeurs de véhicules et en assurant, d'autre part, que les locateurs seront traités équitablement et auront l'occasion de confirmer cette responsabilité à chaque fois qu'ils louent un véhicule appelé à circuler sur nos routes.

Je vous remercie de votre attention.

M. Chevrette: Merci, M. Lalonde.

M. Lalonde (Robert): Merci.

Le Président (M. Lachance): Merci. M. le ministre des Transports.

M. Chevrette: Tout d'abord, je vous le dis tout de suite, que je vous donne raison et que déjà nous avons travaillé avant même... Et je l'ai même annoncé hier matin, dans mon propre discours d'ouverture. J'espère qu'il y en a qui vont le comprendre plus, davantage aujourd'hui. J'ai même dit hier que, pour le camionnage et les locateurs d'autos, il y avait des problèmes majeurs. Je l'ai dit dans mon exposé initial et je vous dis tout de suite qu'on a déjà travaillé même sur des amendements parce que, c'est anormal qu'un propriétaire paie pour une infraction, surtout dans le cas des locateurs comme vous. Vous ne pouvez pas payer et vous n'avez pas à payer non plus pour une infraction d'un conducteur qui a la responsabilité d'un véhicule. Vous n'êtes qu'un locateur, vous n'êtes pas... Vous êtes pas police pour faire observer les lois, vous êtes tout simplement un service que vous donnez à des citoyens. Et d'entrée de jeu, je vous dis tout de suite que c'est déjà retenu.

J'avais dit que j'aborderais cette commission parlementaire avec beaucoup de largesse de vue puis de compréhension, et automatiquement je peux vous dire ceci: Je l'avais prévu même dans mon exposé d'ouverture parce que je considérais: cette partie de la législation déposée créait un problème majeur. Et d'ailleurs, il y a de mes gens qui ont communiqué avec certains de vos groupes, certaines compagnies, et on leur a fait déjà savoir avant même que ne débute la commission que nous comprenions votre point de vue et que nous le modifierions, le projet de loi, en conséquence.

Donc, prenez pour acquis que c'est chose acquise déjà. En ce qui regarde le ministre, il n'est pas question qu'on lègue une responsabilité qui a pas de bon sens à des gens qui exercent une profession mais qui peuvent pas conduire chaque locataire conformément aux règles du Code de la sécurité routière. Donc, c'est acquis.

D'autre part, votre présence me permet peut-être de faire quelques mises au point. Je regarde certains articles de journaux ce matin puis il y en a qui pensent qu'on a des photoradars sur les autoroutes. C'est pas des farces! Je sais pas qui a compris ça hier, puis qui a dit ça hier, mais il s'agit d'à peine une quarantaine de sites au Québec, dont le «tunnel de la mort» à Montréal, Saint-Joseph?Iberville; dont le pont Laviolette; dont la route du Vallon où, là, même la sécurité des policiers pourrait être en danger. Ce ne sont que ces endroits-là où on veut véritablement modifier le comportement des conducteurs québécois. Parce qu'il y a 25 % des décès au Québec que c'est dû à la vitesse et il y a des endroits où la présence policière ne peut s'exercer. C'est ça fondamentalement que vise le projet de loi. Rien d'autre et pas d'autre chose que ça. Et j'espère que ce sera compris un jour et qu'on cessera de faire des croisades contre tout sans absolument rien comprendre de l'objectif du projet de loi. Le projet de loi ne vise qu'à sécuriser les endroits difficiles, inaccessibles, où on peut pas exercer un contrôle normal via la police. C'est ça.

n(10 h 30)n

Parce que j'ai dit même hier matin que la présence policière est supérieure à cela, mais encore faut-il qu'ils soient capables de la faire. Donc, j'espère que cette mise au point de départ replacera le débat parce que je pense que c'est complètement erroné dans bien des cas. Il y en a qui s'imaginent... On a expliqué que chaque site, il y aurait une signalisation préalable. À chaque site, il y aura une signalisation préalable ? partout: Vous entrez dans une zone de radar. Il y aura de la promotion pour ces sites dangereux. Il y aura une promotion dans les journaux, à la radio, pour ces sites bien identifiés. Sur Internet également. Ça sera écrit en gros. Et je vais retenir les tableaux à messages variables en plus pour bien démontrer que l'objectif, c'est zéro accident, zéro contravention. C'est des vies humaines dont on parle et non pas tout simplement du bétail qu'on envoie à l'abattoir, là. C'est des humains, et j'espère qu'on va le comprendre dans cette optique-là.

Il s'agit pas d'installer des photoradars partout au Québec, sur n'importe quelle route. Il y en a même, des journalistes, qui ont écrit: Sur les autoroutes. Je sais pas où ils ont pris ça alors que, depuis six mois, on ne parle que des endroits dangereux. C'est 40 sites maximums. Puis il va y avoir un comité aviseur. On l'a retenue, cette suggestion-là également. Et cet après-midi je ferai l'ensemble des recommandations et des suggestions très concrètes ici. J'espère qu'on va bien comprendre que ce n'est pas une mesure généralisée, c'est une mesure pour les endroits où on se tue ou bien on rend des gens bien souvent innocents invalides pour le reste de leur vie. Dans mon comté, moi, j'ai le Dr Payette qui a perdu sa femme. Je sais pas si vous vous rappelez de ça, elle a été fauchée par un maniaque du volant. Je pense qu'il est temps qu'on fasse quelque chose. Si ce n'est pas la bonne formule, j'espère qu'on en produira d'autres, on en suggérera d'autres.

Dans votre cas, si je comprends bien, ce qui vous importe le plus, c'est que le responsabilité ne vous incombe pas. Est-ce que j'ai bien compris votre mémoire?

M. Lalonde (Robert): C'est exact.

M. Chevrette: Merci, monsieur.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le ministre. M. le député de Shefford et porte-parole de l'opposition officielle.

M. Brodeur: Oui. Merci, M. le Président. Bienvenue, M. Lalonde. Hier, on a entendu... on a entendu des groupes. On a entendu entre autres, par exemple, le Regroupement des concessionnaires automobiles du Québec qui, à prime abord, ont pris l'attitude ? et puis, je pense, c'est bien légitime chez plusieurs groupes qui déposent des mémoires ? de se dire: Bon, bien, si la loi est adoptée, vaut mieux qu'elle soit modifiée.

Après avoir questionné, par exemple, l'Association des concessionnaires automobiles du Québec et après leur avoir demandé: Oui, mais au-delà de ça, au-delà de ça, est-ce que vous pensez que cette loi-là, telle que présentée présentement, va changer les habitudes de conduite de vos clients? Est-ce que vous pensez que cette loi-là va faire en sorte que ces gens-là, qui utilisent vos véhicules loués, vont ralentir sur les routes? Est-ce que ça va occasionner moins de dommages corporels et moins de dommages à vos biens? Ma question est assez simple. Hier, quand je l'ai posée aux concessionnaires automobiles, ils... ils ont mis des doutes là-dessus. Vous, est-ce que vous pensez, comme... comme représentant de votre association, qu'un projet de loi comme ça va changer les habitudes de conduite de vos clients?

M. Lalonde (Robert): Nous, on se fie sur les études du gouvernement. Si le gouvernement a décidé d'imposer le photoradar, c'est que l'objectif à long terme, c'est la réduction des pertes de vies humaines. Et, quand même, on s'en cachera pas, on est des hommes d'affaires et on doit assumer le coût des réparations s'il y a des accidents. Et, pour nous, pour des raisons économiques, si la limite de vitesse est réduite dans ces endroits-là, donc moins d'accidents, donc moins de coûts pour notre industrie. Et on se fie essentiellement sur les études du gouvernement, on n'a pas d'autre étude qui prouve le contraire non plus.

M. Brodeur: Est-ce que vous avez pris connaissance de ces études-là? Nous, ici, on n'a pas eu l'occasion de voir si un cinémomètre photographique réduisait vraiment... changeait les habitudes de conduite des gens. Parce qu'il faut savoir que, en tout cas à notre sens à nous, qu'un policier est encore plus efficace, plus dissuasif qu'un cinémomètre photographique et peut-être moins... moins dispendieux pour l'automobiliste qui désire quand même changer ses habitudes de conduite. Est-ce que vous pensez plutôt qu'une installation ou augmenter les ressources aux corps policiers serait peut-être plus profitable aux citoyens québécois qui se servent de nos routes plutôt que d'installer ces machines-là, qui, pour ainsi dire, vont rapporter énormément au gouvernement du Québec?

M. Lalonde (Robert): Écoutez, à titre personnel, je suis pas en mesure de répondre à cette question-là, j'ai jamais fait d'études à ce niveau-là. Je laisse le soin au gouvernement de vérifier ces choses-là. Je serais malhonnête de vous dire que, oui, d'autres ressources peuvent améliorer ou pas améliorer. Ça serait malhonnête de ma part de vous dire que je connais la réponse. Je me fie à ce que le gouvernement a décidé. Si eux considèrent que l'implantation à des endroits inaccessibles va avoir des conséquences positives, nous, on est d'accord avec la position du gouvernement à cet effet-là.

M. Brodeur: O.K. Donc, si je saisis bien votre intervention et votre mémoire, vous lancez au gouvernement le message: Si vous adoptez un projet de loi tel qu'il est là, tel que rédigé présentement ? on n'a pas vu encore les amendements du ministre ? si le projet de loi est représenté à l'Assemblée nationale mais tel que présenté présentement, ça fait en sorte qu'il y a une inéquité pour vos membres...

M. Lalonde (Robert): Oui, parce qu'on...

M. Brodeur: ...et que le projet tel que présenté est injuste.

M. Lalonde (Robert): Le projet actuellement est injuste parce qu'il ne responsabilise pas le chauffeur. S'il y a pas d'amendements apportés à ce moment-là, il peut avoir un effet même contraire parce que des gens pourraient savoir qu'en utilisant nos véhicules ils pourraient éviter de payer des amendes, et ça deviendrait notre responsabilité, nous, de jouer le rôle du policier, et on n'a pas les moyens juridiques pour se défendre à ce niveau-là. On l'a vu, malheureusement notre industrie a vécu d'autres situations où des véhicules ont été utilisés pour contourner certaines lois à nos détriments.

M. Brodeur: En terminant, M. le Président, avant de laisser la parole à mon collègue de LaFontaine, tout simplement pour réagir aux propos du ministre concernant les journalistes qui ont inscrit que le cinémomètre photographique pourrait être installé à peu près n'importe où, il faut savoir que, telle que la loi est rédigée présentement, elle permettrait à un gouvernement de désigner tous les endroits au Québec pour installer un cinémomètre photographique, et le projet-pilote du ministre à quatre endroits pour débuter n'est pas inscrit...

M. Chevrette: Pas quatre endroits, c'est quatre appareils.

M. Brodeur: ... ? quatre appareils ? n'est pas inscrit dans la loi. Donc, la loi telle que rédigée présentement permettrait au gouvernement du Québec d'installer des photoradars partout sur nos routes. Merci, monsieur.

M. Chevrette: ...un libéral, non un PQ.

Le Président (M. Lachance): Vous pouvez poursuivre, M. le député de Shefford.

M. Brodeur: Non, non, c'était tout simplement pour apporter ce commentaire-là avant de laisser la parole au député de LaFontaine, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Très bien. Alors, M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Alors, merci, M. le Président. Bonjour, M. Lalonde. M. Lalonde, actuellement, lorsqu'un consommateur, un client, chez vous, loue un véhicule, une voiture ou une camionnette, il signe un contrat, il part avec son véhicule.

M. Lalonde (Robert): Pardon?

M. Gobé: Il part avec le véhicule, bien sûr.

M. Lalonde (Robert): Oui.

M. Gobé: S'il fait l'objet de contravention pour stationnement interdit, lorsqu'il voit la contravention, il la met dans la poubelle, qu'est-ce qui se passe avec vous et avec lui lorsqu'il ramène le véhicule? C'est sûr que là vous êtes pas au courant. Est-ce que vous recevez un avis de contravention quelque temps après?

M. Lalonde (Robert): O.K. Dans un premier temps, il faut comprendre que, dans ce cas-là, le constat est émis au locateur. Donc, sur le véhicule, le locateur du véhicule va retrouver un constat.

M. Gobé: C'est ça.

M. Lalonde (Robert): Malheureusement, vous avez raison, dans la majorité des cas, ces gens-là, disons, omettent, oublient de payer la contravention, et on reçoit un rappel administratif, et nous avons la responsabilité de payer immédiatement la contravention.

M. Gobé: C'est vous qui la payez?

M. Lalonde (Robert): C'est nous qui la payons et c'est nous qui subissons d'énormes pertes, oui.

M. Gobé: Donc, c'est ça. C'est ce que je pensais savoir, ayant été dans l'ancien temps un propriétaire d'une compagnie de location...

M. Lalonde (Robert): Ah!

M. Gobé: ...long terme et court terme. C'était la situation qui prévalait. Est-ce que, si on oublie le problème du cinémomètre pour deux minutes, vous jugez qu'actuellement, c'est inéquitable?

M. Lalonde (Robert): C'est effectivement inéquitable, oui.

M. Gobé: Est-ce que vous avez déjà fait des représentations auprès du gouvernement ou du ministère des Transports pour mettre fin à cet état de choses et faire en sorte que vous puissiez transférer, sur présentation du contrat aux autorités compétentes, la responsabilité au locataire?

M. Lalonde (Robert): On a regardé dans le passé différentes avenues et on continue à regarder différentes avenues, plus spécifiquement dans le cas de la fusion municipale, oui.

M. Gobé: Pourquoi ça a pas encore été concluant? Parce que c'est pas d'aujourd'hui! Moi, je me rappelle, ma compagnie, c'est de 1980 à 1985, date où j'ai été élu, que j'avais ces problèmes-là. On avait déjà à l'époque cette situation. Il y a eu d'autres gouvernements. Là, je veux pas parler d'un gouvernement ou l'autre. L'administration, sous Louis XVI, la Révolution, le Directoire et Napoléon, ça a toujours été les mêmes fonctionnaires. Alors, c'est un peu le même truc: Les gens ont changé, des fois les têtes sont tombées...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gobé: ...d'autres ont été en exil, mais les problèmes ont pas tellement évolué. Eh bien, quelquefois. Là, on est à peu près dans la même situation, le sanguinaire un peu en moins, parce que, ici, on est démocratique. Mais comment expliquez-vous que, depuis ces années-là, personne n'ait trouvé de solution? Est-ce que c'est parce qu'on voulait pas la trouver ou c'est parce que, du côté des locateurs, on n'a pas mis les efforts ou la volonté nécessaire pour parvenir... Parce que ça coûte cher. Moi, je me rappelle, j'en recevais beaucoup et, à la fin de l'année, là... C'était des 30 $, à l'époque, hein.

M. Lalonde (Robert): Oui. C'est un peu plus cher que ça maintenant, oui.

n(10 h 40)n

M. Gobé: Oui, mais 30 $ de l'époque, c'est 40 $ d'aujourd'hui à peu près, 45 $, et c'était, à la fin de l'année, là, c'était peut-être 30 000 $, 40 000 $ qu'on devait effacer comme mauvaise créance et on reportait ça sur le coût de la location en général, bien sûr. Alors, pourquoi ç'a pas abouti?

M. Lalonde (Robert): Dans un premier temps, l'existence du Regroupement est plutôt jeune et on n'était pas tellement bien organisé à ce niveau-là; ça fait simplement quelques années qu'on est organisé. Dans un deuxième temps, cette loi-là existe depuis... depuis toujours, selon moi, et il est beaucoup plus difficile de modifier une loi lorsqu'elle est déjà existante et lorsqu'on n'a pas eu le temps de sensibiliser certaines personnes à nos problèmes. La présence... Notre présence aujourd'hui, c'est justement pour sensibiliser le gouvernement aux problèmes qu'on vit. Et je suis d'accord, entièrement d'accord avec vous, notre industrie considère qu'il est inéquitable qu'on soit responsable du paiement des contraventions. Et d'ailleurs, pour aller plus loin, il y a certains abus de certains locateurs de véhicules, au niveau des contraventions, qui stationnent un peu n'importe où ou n'importe comment, parce qu'ils savent très bien que, au bout de la ligne, ils paieront pas la contravention, et on veut éviter que ce problème-là se retrouve...

On parle du fameux «tunnel de la mort». Demain matin, quelqu'un peut se dire: De toute façon, peu importe à quelle vitesse je circule, c'est pas moi qui va être responsable de payer la contravention au bout de la ligne. La compagnie de location se débrouillera avec cela.

M. Gobé: Donc, est-ce qu'on pourrait dire ? je sais pas si je devrais dire ça, là, mais ? est-ce qu'on pourrait dire que les améliorations ou les... pas les améliorations, les changements que le ministre des Transports entend apporter à cette façon de procéder actuellement vont avoir aussi un effet positif sur le paiement des autres contraventions? Pas celles du cinémomètre mais les autres qui sont... Actuellement, vous êtes obligés de payer vous-même. Ça va régler la situation.

M. Lalonde (Robert): Disons qu'on laisse...

M. Gobé: En général.

M. Lalonde (Robert): Disons qu'on espère que...

M. Gobé: Ça sera applicable aussi pour les tickets de stationnement.

M. Lalonde (Robert): Exact. On espère que les autorités municipales ou gouvernementales...

M. Gobé: Oui. Le ministre me fait penser... Mais ça, c'est une formule européenne, je pense. Je me souviens que, lorsque les gens donnaient leur talon de carte de crédit, on pouvait dire qu'il y avait une réserve, enfin, qu'on conservait. Sauf que légalement, on n'a pas tellement... on n'a pas le droit, quand la... on n'avait pas tellement le droit de le faire puisque la voiture... le véhicule était revenu. Puis, en plus, les délais quelquefois sont tellement longs que, six mois après, charger sur la Visa de quelqu'un 30 $... Puis le citoyen peut contester puis dire: Bien, écoute, c'est loin, tout ça. Alors, ç'a pas été tellement opérationnel.

Mais je sais qu'en Europe, par exemple, quand vous signez votre contrat de location, vous êtes tenu responsable, et ils envoient ça... C'est le parquet... Donc, le parquet, c'est le procureur de la République... Prenons la France ou l'Italie, c'est les mêmes principes. M. Chevrette aime ça que je parle de la France, vous le savez tous, hein, mais on va parler de l'Italie. Ha, ha, ha! Mais les contraventions... La compagnie Avis ou Hertz ? ça m'est arrivé ? à un moment donné reçoit la contravention et transmet ça... transmet une copie de l'avenant que vous avez signé au parquet, au procureur, qui, lui, entame la même procédure de récupération que pour les propriétaires automobilistes. Bon.

En France, ça marche pas bien parce qu'à chaque année, au 14 juillet, ils radient à peu près 2 ou 3 millions de contraventions impayées, qu'ils sont pas capables de récupérer. Mais le principe quand même est là. Est-ce que... Pensez-vous que ça pourrait être un principe qu'on pourrait appliquer ici?

M. Lalonde (Robert): Définitivement. Et, à ce moment-là, on prend la responsabilité de la personne fautive et non pas la victime qui est le propriétaire du véhicule. On pourrait réduire le nombre d'abus à cet effet-là, c'est certain.

M. Gobé: O.K. Maintenant, revenons sur les appareils radars. Bon, vous semblez favorable à ce que l'on installe un certain nombre d'appareils dans des endroits sensibles, névralgiques, avec haut risque, haut degré de risque d'accident prouvé probablement par l'expérience, hein. Est-ce que vous seriez favorable dans l'avenir au fait qu'un gouvernement se servirait de ces dispositions-là pour décider à un moment donné... dire: Bien, on l'étend, comment dirais-je, en bon Québécois, «at large», enfin, à travers le Québec, ou pensez-vous que ça doit rester vraiment dans ces zones très spécifiées et très dangereuses?

M. Lalonde (Robert): O.K. L'objectif, encore une fois, je crois que c'est...

M. Gobé: Je parle pour la sécurité, hein, pas...

M. Lalonde (Robert): ...de réduire le nombre d'accidents. Si des études peuvent prouver hors de tout doute que le fait de l'installer à la grandeur de la province va avoir un impact positif sur la réduction du nombre d'accidents, on peut pas être défavorable. Par contre, je pense qu'on n'est pas rendu à cette étape-là en ce moment et je suis définitivement pas un spécialiste en sécurité routière pour vous dire que c'est préférable de l'étendre à la grandeur de la province de Québec.

M. Gobé: Je comprends.

M. Lalonde (Robert): Je suis un locateur de véhicules, je suis un opérateur de location de véhicules.

M. Gobé: Oui, oui. Vous, dans vos membres, est-ce que vous pourriez nous indiquer peut-être quel est le pourcentage de véhicules loués qui reviennent... ou qui sont accidentés? Est-ce que c'est 10 %? 15 %? 20 %? Je parle pas d'un petit accrochage de coin de rue, là, on parle d'accidents dus à la vitesse. Vous devez le savoir parce que c'est vos assurances après tout, neuf fois sur 10... À moins que les gens prennent leur propre assurance ou des choses comme ça. Mais, en général, ils signent tous ? en général ? pour le petit casier là, pour avoir l'assurance. Alors, c'est quoi le pourcentage de véhicules, chez vous, qui, à chaque année, subit des accidents dus à la vitesse? Avez-vous des chiffres approximatifs, statistiques?

M. Lalonde (Robert): Pas de statistiques. Les seules statistiques qu'on tient compte, c'est les dommages, à quel endroit et à quel moment, et qui est responsable de l'accident. Mais, la cause de l'accident lui-même, on en tient pas compte. Mais on peut dire que, de façon générale, la vitesse est en ligne de compte.

M. Gobé: Est-ce que...

Le Président (M. Lachance): Dernière question, M. le député.

M. Gobé: Oui. J'ai pas vu dans les groupes qu'on a entendus ? à moins que je l'aie manqué quelque part ? de compagnies d'assurances. J'en ai pas vu. Je pose la question à vous, mais peut-être que M. le ministre pourrait nous répondre. Je sais pas si je peux me permettre de faire ce jeu de racquetball: on envoie la balle d'un bord puis c'est l'autre qui revient.

M. Chevrette: Ils vont venir au régime, par contre.

M. Gobé: Pour quelles raisons ils sont pas venus?

M. Chevrette: Ils viennent pour le régime la semaine prochaine. Probablement qu'on pourra gratter le même volet, parce que c'est pour le régime d'assurance automobile qu'ils vont venir, ils viennent pas pour le photoradar.

M. Gobé: Parce que je présume que ça doit avoir un impact sur les réclamations d'assurance; c'est important. Et, si vraiment c'est un système qu'on doit instaurer, malgré les réserves qu'il peut y avoir d'un certain nombre de personnes pour la sécurité, il serait peut-être bon de voir aussi pour les compagnies d'assurances, qui, elles, sont confrontées tous les jours avec ce problème d'accidents dus à la vitesse, par les revenus... par les indemnisations qu'ils doivent faire pour les carrosseries mais aussi pour, hein, tout ce qui découle autour, la responsabilité civile et ces choses-là. Vous avez pas eu de recommandations. Vous avez pas parlé avec vos compagnies d'assurances. Personne vous en a parlé? Ou avez-vous une idée non officielle de ce qu'ils pensent? Je dis bien «non officielle».

M. Lalonde (Robert): Écoutez, dans notre cas à nous, pour notre industrie, dans la majorité des cas, on assume le coût des réparations. On est nous-mêmes une propre compagnie d'assurances au niveau des réclamations sur collision. Donc, on a pas tellement... On ne parle pas beaucoup aux compagnies d'assurances à cet effet-là parce qu'on assume la majorité des coûts de dommages.

M. Gobé: C'est de l'auto-assurance, c'est ça.

M. Lalonde (Robert): C'est exact. Donc, à ce moment-là, on n'a pas vraiment à parler à ces gens-là.

M. Gobé: Écoutez, mon temps est fini. Je vous remercie, ce fut fort intéressant, et j'espère que ç'a permis à la commission d'améliorer sa réflexion dans le futur. Merci, monsieur.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Vachon, et je vous rappelle qu'il reste six minutes du côté ministériel.

M. Payne: Il y avait une question soulevée, question importante soulevée à plusieurs reprises par le député de Shefford. Et, comme introduction, je voudrais faire le commentaire suivant à l'égard de la valeur objective de l'installation de photoradars. Abstraction, en fait, que j'appuie ou appuie pas le projet. D'abord, en Colombie-Britannique, après une évaluation scientifique, ç'a été établi ? et je le cite, le rapport, très impressionnant ? à l'effet qu'il y avait une réduction de, à peu près... «...would reduce the traffic speed not only at the photoradar deployment sites but also in other locations.» Il y avait une réduction de 25 % ? de 25 % ? des accidents après l'installation.

En ce qui concerne une étude semblable, après une installation à Londres, je le cite: «The study found that 97 %...», 97 % de réduction de vitesse pour les véhicules qui ? et je traduis ? voyageaient à 60 milles à l'heure ou plus dans une zone où il y avait une limite de 40 %. Je pense qu'il faut dire à la commission qu'il y a des études très objectives, très crédibles, dans plusieurs pays du monde, où c'était pas seulement affirmé mais confirmé et prouvé qu'il y avait une réduction des accidents mortels et accidents avec blessures graves ou moins graves.

Même chose en Australie, à Victoria, septembre 1989. Victoria, une province, un état en Australie, a introduit le photoradar avec des résultats, et je le cite encore: «The study found... 14 à 30 % de réduction dans ce qu'on appelle le "low alcohol time casualty collisions" across treated rural and urban areas.» Trois endroits seulement. Je pourrais donner beaucoup plus.

n(10 h 50)n

Si, après quelques jours de commission ou deux jours de commission, on peut faire ces constatations-là, on a déjà fait beaucoup d'avance, beaucoup de progrès. Deuxièmement, l'opposition dit qu'ils voudraient limiter l'expérience à certains endroits. Aussi, ils voudraient que le gouvernement ou le ministère statue sur le fait que ça puisse être perçu et clairement identifié comme un projet-pilote. Ma question pour vous, comme indirectement je pose à l'opposition: Si le ministère acceptait les amendements que, vous, vous avez suggérés et en indiquant qu'il s'agissait d'un projet pour certains endroits bien spécifiques, dans un premier temps, et, deuxièmement, bien sûr, d'un projet-pilote, et avec le préambule que je viens de vous faire quant à la valeur d'un projet tel qu'installé, est-ce que vous seriez d'accord avec le projet de loi?

M. Lalonde (Robert): Si on...

M. Payne: En un mot.

M. Lalonde (Robert): Pardon. Si on modifie en fonction de notre demande?

M. Payne: Oui.

M. Lalonde (Robert): Écoutez, on peut pas être contre le projet de loi à ce moment-là...

M. Payne: Très bien.

M. Lalonde (Robert): ...il y a des bénéfices pour nous.

M. Payne: Mon argumentaire va dans le même sens, M. le Président, que je considère, après avoir écouté l'opposition depuis deux jours... Je viens de faire un résumé de toutes leurs objections. Et la réponse... Si la réponse était là, je voudrais demander si l'opposition, avec le consentement de répondre à ça, est-ce qu'ils accepteraient l'adoption du projet de loi?

Le Président (M. Lachance): Bien, là, on pose pas des questions aux membres de l'opposition. C'est pas comme ça, les règles du jeu, là.

M. Payne: J'ai demandé le consentement, s'ils acceptent.

M. Brodeur: C'est pas la formule, les questions, il y a d'autres forums pour les poser. On veut pas engendrer de débat, M. le Président, on est ici pour écouter des groupes, là.

Le Président (M. Lachance): Bien, la question peut s'adresser à M. Lalonde, qui est ici.

M. Payne: On a la réponse.

Le Président (M. Lachance): Alors, écoutez...

M. Payne: Il peut répondre s'il le voudrait bien, hein.

Le Président (M. Lachance): Oui, mais vous voyez la réponse. M. le ministre.

M. Chevrette: Bien, moi, je voudrais vous lire la petite phrase que vous avez dans vos propres contrats de location présentement. C'est écrit ceci: «Le locataire est responsable de toutes les infractions aux lois, aux règlements sur la circulation et devra payer toute amende s'y rattachant.» C'est votre contrat actuel, donc c'est... Ce que je vous ai offert comme amendement, ça corrige même votre contrat actuel, mon cher monsieur, parce que vous avez l'obligation de payer toutes les amendes dans votre contrat actuel. Ça m'a surpris, moi, c'est la première fois que je le vois, d'ailleurs. Vous savez très bien que, quand on loue... Sauf que, quand on va en Europe ? et le député de LaFontaine a raison ? on signe notre carte de crédit, et ils ont le privilège de se payer. Le locataire peut payer les tickets de... qui le... Il faudrait modifier...

C'est assez simple dans les faits. Si vous marquez que le locateur a l'obligation de payer ses redevances et que vous avez une formule, d'autre part, où il en assume la responsabilité, on règle le problème. C'est pas la montagne russe, ça, là, à traverser. Moi, je pense... C'est pour ça que, d'entrée de jeu, je vous ai dit: Je trouve même qu'actuellement le contrat, il est encore pire que ce que je vous propose ce matin parce que c'est toutes les infractions, donc: stationnement, vitesse excessive, alcool au volant, n'importe quoi. Donc, c'est vrai que vous êtes mal en point; moi, je le reconnais. Puis je le reconnais tellement que je l'ai dit avant même que vous passiez devant nous, je l'ai dit hier matin.

Donc, soyez assuré qu'on va... En ce qui me concerne en tout cas, quelle que soit l'orientation que je prendrai, sur votre... dans votre cas bien précis, comme dans le cas des concessionnaires, la même chose... On peut pas demander à un concessionnaire de fournir une voiture de courtoisie puis se rendre responsable des infractions, de toutes les infractions du Code de la route. Je comprends votre point de vue, je vous remercie d'être venu nous le présenter, et sans doute que nos fonctionnaires communiqueront avec vous pour présenter des scénarios. Et je suis convaincu qu'on va régler ce dossier-là de façon rapide en ce qui vous concerne, et je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Lachance): Alors, merci, M. Lalonde, pour votre participation aux travaux de cette commission.

M. Lalonde (Robert): Merci.

Le Président (M. Lachance): J'invite maintenant les représentants du Regroupement québécois du taxi à bien vouloir prendre place.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Lachance): Alors, bienvenue messieurs, et je vous invite... j'invite le porte-parole à bien vouloir s'identifier ainsi que la personne qui l'accompagne, en vous indiquant que vous avez un maximum de 15 minutes pour votre présentation.

Regroupement québécois
du taxi inc. (RQT)

M. Lemay (Michel): Alors, bonjour, M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les membres de la commission. Permettez-moi de me présenter et de présenter la personne qui m'accompagne. Mon nom est Michel Lemay, je suis l'ex-président de la défunte Ligue de taxi de Sherbrooke, et membre du RQT; à ma gauche, Me Éric Dugal, qui est conseiller juridique du Regroupement.

Le Regroupement québécois du taxi inc. est un organisme à but non lucratif, est toujours fier de représenter les propriétaires de permis de taxi des diverses agglomérations et régions du Québec. Le Regroupement québécois du taxi a pour mission de représenter, tant collectivement qu'individuellement, l'ensemble des titulaires de permis et de propriétaires de taxi de la province de Québec et de promouvoir leurs intérêts. D'ailleurs, nous avions comparu le 21 mars 2000 devant cette commission afin de faire valoir le point de vue du Regroupement relativement à plusieurs sujets qui touchaient la sécurité routière.

Nous entendons vous présenter la position des propriétaires des permis de taxi, plus particulièrement de ceux qui louent leurs véhicules à des tiers, des chauffeurs qui ont la garde et l'exploitation du permis de taxi du véhicule. Nous avions présenté à l'époque des consultations sur le livre vert, une proposition mitoyenne quant à l'implantation du cinémomètre photographique. En effet, nous n'avons jamais été en faveur de l'établissement d'un tel système partout au Québec. Notre principale préoccupation était de n'utiliser cette technologie que dans des endroits où le contrôle policier est impraticable, voire même dangereux pour leur sécurité et celle des contrevenants interceptés. On n'a qu'à penser aux ponts, au tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine ou à la partie surélevée de l'autoroute métropolitaine, entre autres.

Nous ne pouvons qu'éprouver certaines craintes quant à une implantation systématique d'un tel moyen technologique sur toutes les routes du Québec. La tentation que pourrait éprouver un gouvernement ou un corps policier de transformer ces instruments en collecteurs de taxes sur des excès de vitesse dicte nos craintes. En effet, des expériences vécues dans d'autres juridictions démontrent que le nombre de constats émis croît d'année en année depuis l'implantation de telles mesures de contrôle. Par exemple, selon les sources citant le service de police d'Edmonton, le nombre de contraventions provenant des photoradars est passé de 94 309 en 1997 à 155 000 en l'an 2000.

Ceci est tout de même surprenant, puisque le principal but de cet appareil est d'imposer un effet dissuasif aux conducteurs.

Pourquoi n'y a-t-il pas moins de contraventions décernées avec les années d'utilisation? Soit que les automobilistes plus fortunés sont prêts à débourser une taxe pour rouler à tombeau ouvert, soit que le gouvernement installe ces appareils à des endroits payants, où il est de commune renommée que les automobilistes s'adonnent à des excès de vitesse comme la ligne droite, même si l'endroit n'est pas réputé pour être dangereux. Nous voulons éviter que le gouvernement, sous le couvert d'améliorer la sécurité routière, gonfle ses coffres aux dépens des automobilistes et des professionnels de la route qui, rappelons-le, paient déjà plus que leur quota de droits et taxes.

Lorsque nous ouvrons le journal le lundi matin et que nous voyons le résultat des accidents de la route, une chose attire notre attention: il y a beaucoup d'accidents qui ont lieu sur des routes secondaires ou des rangs. Serait-il rentable d'installer ces unités de cinémomètre fort coûteuses sur des tronçons de routes certes dangereuses mais peu fréquentées? Serait-il préférable de les installer sur une autoroute majeure ? Jean-Lesage, des Laurentides ? où on peut être assuré d'un fort bassin de contrevenants à l'heure? Il faut avouer que la tentation sera forte de passer de l'objectif louable de l'amélioration de la sécurité des usagers de la route à celui de rentabiliser à tout prix l'acquisition des unités de photoradar. C'est pourquoi nous émettons beaucoup de réserve quant à l'implantation de tels systèmes.

Au cours de la présentation de notre mémoire sur la sécurité routière, nous avions accordé une attention particulière au cinémomètre photographique car nous émettions plusieurs appréhensions relativement à l'imposition d'amende directement au propriétaire, alors que c'est son chauffeur qui a commis l'infraction d'excès de vitesse. Également, au chapitre des points d'inaptitude, nous étions en désaccord avec la création de deux types de sanction pour la même infraction. En effet, le conducteur qui commet un excès de vitesse reçoit des points d'inaptitude s'il est intercepté par un policier et il n'en reçoit pas s'il est pris sur le fait par un cinémomètre photographique. Le message envoyé au citoyen est: Vous pouvez payer pour excéder la vitesse... la limite. Puis il y a aucun effet dissuasif à ce moment-là.

n(11 heures)n

Or, ces deux irritants, qui étaient de simples propositions dans le cadre du livre vert sur la sécurité routière, se sont retrouvés dans le projet de loi n° 17. Les craintes que nous émettions, et qui étaient partagées par plusieurs entreprises qui doivent confier un véhicule à un tiers, ont trouvé écho, puisque le Protecteur du citoyen a exprimé ses réserves le 7 mai 2001 quant au mode d'imposition et de perception des amendes lorsque le cinémomètre photographique est utilisé et en l'absence de points d'inaptitude pour ce type d'infraction. Nous tenterons d'étoffer notre position pour présenter une solution qui peut être viable pour tous.

La problématique principale est la suivante: Comment punir l'auteur réel de l'infraction, qu'il soit propriétaire conduisant son automobile ou un tiers qui s'est vu confier la garde du véhicule automobile? Le système proposé, par lequel le propriétaire sera automatiquement responsable du paiement de l'amende vis-à-vis l'État, à charge de se faire rembourser par le conducteur, est tout à fait injuste pour les propriétaires de permis de taxi. Il faut comprendre, lorsqu'il y a location d'un véhicule-taxi, c'est le propriétaire qui reçoit un paiement de la part du chauffeur locataire et non pas l'inverse. Dans de tels cas, il est difficile pour le propriétaire de se ménager une possibilité de retenir des sommes pour compenser des amendes déboursées lorsque des billets de vitesse ont été émis alors que le véhicule était conduit par le chauffeur.

Les propriétaires de taxi sont dans une position encore plus fâcheuse que d'autres intervenants, puisqu'il n'est pas rare de voir des compagnies de location de véhicules demander un imprimé de la carte de crédit de la part des locataires de véhicules afin de se prémunir contre les amendes qui pourraient être imposées au propriétaire du véhicule, comme c'est le cas dans le cadre des amendes de stationnement.

D'aucuns pourraient prétendre que plusieurs systèmes fonctionnent présentement dans le cadre des amendes de stationnement. Pourquoi pas l'imposer au niveau des amendes de vitesse? Or, la principale distinction à faire entre les deux types d'amende est le montant qui peut être réclamé au propriétaire pour une infraction. Ainsi, un excès de vitesse outrancier peut facilement entraîner une amende de 400 ou 500 $.

Vous comprendrez qu'un chauffeur qui ne veut pas payer une telle amende n'aura qu'à déguerpir et se trouver un autre véhicule à louer d'un autre propriétaire. Il pourrait même au passage s'abstenir de payer sa location. Tout ce qu'il restera à faire au propriétaire pour récupérer le montant de l'amende est de prendre un recours aux petites créances, pour celui qui a moins que cinq employés, et, pour celui qui a plus que cinq employés, devant la Cour du Québec, la division régulière.

Toutes ces tracasseries sont créées de toutes pièces par le projet de loi n° 17 qui lui impose la responsabilité du paiement. Comme nous le décrivions à l'époque, l'État ou l'autorité municipale ou régionale a beaucoup plus de moyens au niveau administratif et pénal pour récupérer des amendes impayées qu'un simple individu qui doit s'adresser à un tribunal civil avec toutes les complications que cela implique.

Nous proposions une solution qui a deux volets: l'un technologique, l'autre administratif et pénal. Il semble que notre solution a soulevé des craintes au niveau d'atteinte de la vie privée des individus, et nous nous efforcerons de vous démontrer le contraire. Tout d'abord, le volet technologique. Le cinémomètre proposé est muni d'une seule caméra qui photographie seulement la plaque du véhicule impliqué. Le problème d'identification du conducteur indispose les populations, tant en Colombie-Britannique que dans les juridictions municipales comme Calgary et à Edmonton en Alberta. Donc, pour pallier à ce problème, il suffit d'utiliser des systèmes qui sont utilisés par exemple à Paradise Valley en Arizona ou à Pasadena en Californie. Ce système de cinémomètre est muni de deux caméras, l'une photographiant la plaque du véhicule situé en arrière ainsi qu'une autre photographiant de l'avant l'habitacle du véhicule.

Quant au volet administratif et pénal, la citation à comparaître, accompagnée de la photo de l'arrière du véhicule, peut être postée au propriétaire du véhicule dans les 15 jours de la commission de l'infraction. La photo de l'avant du véhicule ne serait pas développée immédiatement. Cette photo de l'avant pourrait être développée pour les fins d'un procès seulement dans les cas où le propriétaire conteste la contravention parce qu'il n'était pas au volant du véhicule. À ce moment, il sera facile de constater que, si le conducteur du véhicule était le propriétaire... Dans le cas contraire, le propriétaire devra, par écrit et sous serment, désigner qui était le conducteur du véhicule.

Dans l'éventualité où le propriétaire ne coopère pas lors du processus de désignation du conducteur, il pourrait perdre sa défense. En d'autres termes, le propriétaire disposerait de ce moyen de défense que s'il désigne le conducteur au moment de l'infraction. Lorsque le propriétaire identifie le conducteur, ce dernier recevra une citation à comparaître dans les 15 jours. Quant aux accusations portées contre le propriétaire, elles seraient abandonnées à ce moment-là. Lorsque le conducteur comparaîtra, il pourra consulter la photo de l'avant avant d'enregistrer un plaidoyer. S'il admet sa culpabilité et s'il reconnaît être l'individu photographié, la photo sera détruite, sinon elle sera conservée pour fins de procès. En tout temps, la photo ne devra pas quitter le dossier du poursuivant et elle ne saurait être exhibée à quiconque autre que le propriétaire; en cas échéant, le conducteur. Un masque pourrait même être apposé sur cette photo pour cacher les occupants du véhicule autres que le conducteur. Notre façon de procéder a l'avantage de protéger la présomption d'innocence des propriétaires qui louent leurs véhicules à des tiers. Et, comme les propriétaires de permis de taxi doivent tenir des registres des conducteurs auxquels ils confient leurs véhicules, il sera aisé pour eux de les identifier sous serment.

Des questions se posent évidemment quant à l'intrusion dans la vie privée des occupants d'un véhicule. Selon le système que nous proposons et selon les directives d'implantation annoncées par le ministère, nous croyons que ce système ne brimerait pas les droits du conducteur et des passagers du véhicule. Une analyse plus exhaustive du respect des droits et libertés est abordée dans le document que nous avons remis à Me Dugal et Me Dugal sera disponible pour répondre à vos questions au sujet de l'aspect juridique.

Mais certaines choses sont évidentes: les endroits où les cinémomètres seront installés vont être identifiés à l'avance par une signalisation routière adéquate; la photographie de l'avant du véhicule ne serait pas transmise au domicile du propriétaire mais le négatif serait conservé dans le dossier du poursuivant; cette photographie ne serait pas développée, que dans le cas où le propriétaire conteste avoir commis l'infraction; un masque sera alors apposé pour cacher tous les occupants autres que le conducteur. Cette photographie serait conservée parla suite dans le dossier de l'autorité poursuivante, en un seul exemplaire, et serait exhibée au conducteur qui aura été identifié par le propriétaire. Si le conducteur reconnaît sa culpabilité et s'il reconnaît qu'il s'agit bel et bien de lui au volant du véhicule, la photographie devra être détruite dans les 30 jours.

Seuls le poursuivant, le propriétaire et, le cas échéant, le conducteur présumé auront accès à cette photographie, Il est de commune renommée que les personnes assises à l'avant des véhicules automobiles peuvent être vues et même reconnues par quiconque circule ou est aux abords d'une voie publique. D'ailleurs, la réglementation prévoit que les vitres avant des véhicules ne doivent pas être teintées de façon à voiler des occupants avant d'un véhicule. Le fait, pour un policier, d'observer à l'intérieur de l'habitacle d'un véhicule pour s'assurer que les occupants portent leur ceinture de sécurité ne brime pas le droit à la vie privée. Par analogie, le fait que la Société des casinos capte et enregistre l'image des visiteurs du casino ne brime pas la vie privée de ces derniers, car ils se trouvent dans un lieu public et sont informés de tels systèmes d'enregistrement de l'image. Il existe des systèmes de caméras dans les stationnements de centres d'achat ainsi que les principales routes de la région de Montréal. Ces dernières caméras surveillent la route de loin, mais elles peuvent être manipulées aisément pour rapprocher l'image.

L'expectative de la vie privée est certainement réduite pour le conducteur d'un véhicule qui circule dans les voies publiques et qui, au surplus, contrevient délibérément à la législation relative aux limites de vitesse. Les propositions du RQT constituent un compromis entre le fait de ne pas être déclaré coupable d'une infraction pénale qu'on n'a pas commise et le respect de la vie privée. Lorsque nous conduisons notre véhicule, avons-nous une attente raisonnable d'intimité? Nous ne croyons pas que ce soit le cas au volant d'un véhicule et plus particulièrement lorsque l'on vous avertit, au moyen d'une signalisation routière, que vous entrez dans une zone de surveillance par cinémomètre photographique.

Le Président (M. Lachance): M. Lemay, je m'excuse de vous interrompre, mais il vous reste très peu de temps. Alors, si vous voulez sauter à l'essentiel en guise de conclusion. De toute façon, nous avons entre les mains votre texte et nous pourrons en prendre connaissance dans le détail.

n(11 h 10)n

M. Lemay (Michel): Donc, en terminant, dans un premier temps, nous avions émis plusieurs doutes sur l'utilisation éventuelle du cinémomètre photographique, bien que nous comprenions que dans certains cas il peut être utilisé dans des endroits dangereux, où l'interception policière est peut-être difficile. Cependant, puisque le gouvernement semble vouloir aller de l'avant avec ces technologies, nous croyons avoir proposé un système intéressant, respectueux des droits et des individus, qui minimisent les conflits éventuels entre propriétaires de véhicules et conducteurs. Il faut garder à l'esprit que les propriétaires de permis de taxi voient d'un mauvais oeil toute mesure qui les rend responsables pour les actes de leurs chauffeurs, alors qu'ils ne peuvent les contrôler sur la route à tout moment. Le système proposé punit réellement le conducteur fautif. Il n'y a pas eu lieu de créer deux catégories de sanctions pour une même infraction. Le régime général des points d'inaptitude qui a un effet dissuasif sur les mauvais conducteurs doit demeurer pour éviter de transformer ces infractions en taxe sur les excès de vitesse. Finalement, nous ne voyons pas comment le système que nous proposons pourrait enfreindre les chartes et pourrait être interdit d'utilisation par les tribunaux. Nous demeurons à votre disponibilité s'il y a des questions.

Le Président (M. Lachance): Merci. M. le ministre des Transports.

M. Chevrette: D'abord, je voudrais vous remercier et vous rassurer tout de suite que nous avons... Votre cas correspond, en ce qui regarde la responsabilité de propriétaire et de locateur, exactement aux mêmes choses que Rent-a-car, une compagnie de location d'automobiles. Et ça, je pense que de facto, si on règle un, on va s'organiser pour régler votre cas. Ceux qui louent à la journée ou à la semaine, je sais pas, peu importe, ce sera la même... le même système, de sorte qu'il y aura une protection pour le propriétaire.

Il y a peut-être des formules même à penser, entre vous et moi, qui pourraient être automatiques. Parce qu'hier on a eu des suggestions des concessionnaires à l'effet de signer une formule tout simplement qui porte la responsabilité avec le numéro. Et, quand vous recevez le billet, vous le retournez à qui de droit avec la feuille et l'infraction puis c'est fini. En tout cas, il y a de bons moyens de régler ça relativement facilement.

Cependant, je reconnais aussi que vous dites que, dans des endroits inaccessibles... C'est exactement l'objectif. C'est pas de mettre ça sur les routes... Puis ça va être spécifique dans la loi. Ça va être des sites dûment identifiés, avec signalisation, promotion, information, mais exclusivement des sites dangereux comme le «tunnel de la mort», par exemple, à Montréal, le pont Laviolette ou encore la route du Vallon ici, à Québec. Mais ça sera identifié. S'il faut les mettre en annexe, les sites, on va les mettre en annexe; pas de problème.

Il y a un point sur lequel je diverge d'opinion ? et pas seulement que moi, c'est le Barreau du Québec ? c'est quand vous dites que ça passe pas la rampe des chartes des droits et libertés. Le Barreau est venu nous dire le contraire hier, à cause de l'arrêt que je me souviens pas le nom. Dundee?

Une voix: Dundey.

M. Chevrette: Dundey. Arrêt Pontes... Donc, ils sont venus nous le dire eux-mêmes hier. J'ai remarqué que c'était assez affirmatif là-dessus. On leur a posé même une question de chaque côté sur les chartes et ils ont dit que ça passait vraiment la rampe. Donc, je sais pas en quoi... J'aimerais que vous m'expliquiez pourquoi vous dites que ça répond pas aux chartes.

M. Dugal (Éric): Je peux peut-être vous répondre à ça. C'est tout simplement que présentement, ce qui se passe dans le système qui est proposé, le propriétaire étant automatiquement responsable de l'infraction sans possibilité de se disculper, il y a une enfreinte à la présomption d'innocence. Maintenant, il y a des moyens que vous avez mis dans le projet de loi qui sont... on les a détectés comme étant des moyens pour passer la rampe des chartes, qui est l'absence de points d'inaptitude, qui est l'absence de peine d'emprisonnement. Et peut-être que ça passerait à ce niveau-là le test des chartes, sauf que ça a jamais été analysé au point de vue: Est-ce qu'il y a moyen de prendre d'autres... soit moyens technologiques ou moyens d'interception qui feraient en sorte qu'on atteindrait le test de la proportionnalité prévu par l'article 1 de la Charte?

M. Chevrette: Je crains votre suggestion. On a connu il y a... je me souviens pas combien d'années là... Il faut pas que je dise trop, trop vieux non plus, je vais avoir l'air d'un petit vieux. Mais il en a vu, les photos sur le siège avant, il y a quelques années au Québec, il y a un bon nombre d'années, et ça a créé une tollé de protestations parce que souvent, l'individu, il ouvre pas son courrier, c'est quelqu'un d'autre qui l'ouvre puis qui apercevait son auto. Infraction à Trois-Rivières tel soir puis il est pas seul. Ça a créé des problèmes monstres, cela, et je dois vous dire que je pense pas qu'on revienne à cela. Sauf qu'il faut resserrer les moyens, les moyens technologiques pour bien s'assurer que c'est pas le propriétaire qui... Mais le propriétaire sait à qui il prête ou à qui il loue son char, son auto, quand même.

Donc, avec des formules... On va vous en suggérer, des formules, on en a déjà d'écrites, des formules, pour dire bien que le propriétaire n'en a pas la responsabilité, de l'infraction, d'autant plus qu'il y a un contrat de location. Dans votre cas, il est prévu qu'il y aura un contrat de location, et ce sera spécifique, où ça sera pas le propriétaire qui portera l'odieux du paiement comme c'est le cas présentement.

J'ai regardé le contrat de location des compagnies de location, ils sont responsables de toutes les infractions. C'est pas l'objectif du tout. L'objectif, c'est... Puis c'est pas de l'étendre au Québec, comme je le rappelle, c'est plutôt de réserver ça très spécifiquement à quelques endroits, une quarantaine de sites au Québec qui sont jugés extrêmement difficiles pour l'accessibilité policière. On pourrait mettre même en danger la vie de policiers. Je vois les syndicats de policiers, moi, s'il fallait qu'on leur fasse faire du photoradar conventionnel dans le «tunnel de la mort». Le premier qui se ferait accrocher, là, la CSST va être là ? vous connaissez ça un peu ? la CSST va être là, il va y avoir des refus de travail, il va y avoir... Puis à bon droit, parce que c'est inaccessible. On n'est pas pour prendre des mesures pour rendre... pour mettre en danger la vie d'autre monde alors que tu veux empêcher des gens d'être exposés à des dangers de décès.

Donc, ça, là-dessus, on vous suit, les objectifs sont vraiment dans le sens que vous le dites, c'est spécifique à certains sites dangereux, point. Le reste, la présence policière vaut beaucoup mieux que n'importe quel moyen en ce qui regarde le contrôle routier. Parce que la présence physique, c'est toujours intimidant. Sauf que, dans les endroits où on met en péril la vie même d'un homme ou d'une femme alors qu'on veut éviter des décès, bien, il faut trouver des nouvelles technologies, il faut trouver d'autres moyens. Puis c'est pas généralisé.

Ils disent qu'il y a pas d'études. Des études, je pourrais vous en donner au moins cinq, six, là, très sérieuses, qui ont été faites, avec compilation statistique, puis qui démontrent hors de tout doute que c'est des moins 30, des moins 20: moins 20 en Norvège, au Royaume-Uni, etc. Il y a eu des statistiques, mais, encore là, c'est l'utilisation du photoradar, bien sûr, qui a contribué à baisser ces endroits-là.

Donc, je vous remercie de votre présentation, puis s'il y a possibilité de regarder, avec nos fonctionnaires de la SAAQ, les formulations... Si vous avez des suggestions, envoyez-nous les. Je vous remercie.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Shefford.

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Certains impératifs médiatiques font en sorte que je devrai quitter dans quelques instants, sauf que je désire, avant de partir, vous poser la même question que j'ai posée à plusieurs groupes depuis hier. Vous avez des milliers et des milliers de chauffeurs de taxi qui ont déjà des habitudes de conduite. Est-ce que vous croyez, vous, que l'installation de cinémomètres photographiques va changer l'habitude de conduite de vos membres en dehors des secteurs naturellement où il y a un photoradar? Généralement, si on indique un photoradar dans le prochain kilomètre, on ralentit, sauf que ce qui est important de savoir: si ces habitudes de conduite là vont être changées, par exemple, de la part de vos membres. Comme je le demande à tous les gens qui passent ici, est-ce que vous pensez que ça va changer l'habitude de vos membres ou si on installe ça de façon irréfléchie ? ce qui pourrait peut-être arriver ? et, à ce moment-là, ça va devenir plus une source de revenus pour le gouvernement que de changer l'habitude de conduite pour entraîner moins de victimes de la route, moins de morts, moins de blessés?

M. Lemay (Michel): Il y a une chose que je voudrais peut-être vous dire par déformation. Je dois vous dire qu'avant d'être dans le domaine du taxi, j'étais dans le domaine policier. J'ai eu à en planifier, des opérations radar, et l'élément le plus dissuasif qu'il peut y avoir, c'est les points d'inaptitude. Et, présentement, dans ce système-là, on ne retrouve pas ça. C'est un petit peu un billet. Vous louez un véhicule. Tout ce que vous pouvez avoir, c'est une amende. Et, si vous êtes assez bien nanti, l'amende, vous allez la payer. Puis ça n'avait pas l'effet recherché. Et c'est un petit peu dans ce sens-là, lorsqu'on vous a fait notre présentation, de vouloir identifier le conducteur, pour que ce soit réellement lui et puis qu'il y ait pas deux mesures: une, si vous vous faites prendre par un policier, des points d'inaptitude, et, si c'est tout simplement par un cinémomètre photographique, vous n'avez qu'une amende à payer.

L'amende, en tant... Bon, mon expérience personnelle me dit que non. Il y a des endroits... Je viens de Sherbrooke. Rue Portland à Sherbrooke, Portland et Wilson, ça fait 30 ans qu'on fait du radar là, que la police fait du radar là. Au moins deux à trois jours par semaine, il y a du radar là, puis la moyenne de gens qui ont été trouvés au radar est encore la même; c'est encore une bonne place pour faire du radar, ça rapporte. Mais ce qui... le moyen le plus dissuasif, c'est des points de démérite. Lorsque quelqu'un sait qu'il lui reste plus rien que deux ou trois points de démérite, oui, il lève le pied de sur le gaz; oui, il ralentit. C'était à peu près la mesure la plus dissuasive que, moi, j'ai vue, puis qui, je prétends encore aujourd'hui, a sa place. Et, dans ce projet-là, on ne retrouve pas cette mesure-là.

n(11 h 20)n

Est-ce que ça va en faire ralentir d'aucuns? Est-ce qu'une fois que cette signalisation puis la photoradar, on va être passé ça, est-ce qu'on va accélérer? Encore une fois, les études du gouvernement, lorsqu'il était... l'implantation des arrêts réglementaires, la prolifération des arrêts réglementaires faisait en sorte de créer un sentiment de frustration chez le conducteur puis le portait à aller plus vite par la suite. Et ça, c'est pas moi qui le dis, là, c'est des études du gouvernement qui nous disaient: Arrêtez de mettre des stops un peu partout pour ralentir la vitesse, ça a pas l'effet recherché. J'ai peur que simplement les amendes, ce ne soit pas suffisant pour pouvoir diminuer puis avoir l'effet réellement qu'on veut rechercher. L'effet est fort louable, puis j'en conviens, mais il faudrait l'assortir des points d'inaptitude, dans mon sens à moi, puis c'est un peu ma réflexion personnelle plutôt que celle du RQT, parce que je les ai pas consultés à ce sujet-là. Me Dugal va peut-être me lapider en sortant.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brodeur: Ah! Peut-être que Me Dugal voudrait s'exprimer sur le sujet aussi.

M. Dugal (Éric): En fait, il y a eu des discussions au sein du RQT à propos de ça, et, pourvu que le conducteur soit identifié de façon claire et que le conducteur soit responsable, il y a pas de problème à ce que les points d'inaptitude soient appliqués. Où il y avait un problème, c'est quand il y avait pas de points d'inaptitude qui étaient appliqués, c'est tout.

Le Président (M. Lachance): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui. Merci, M. le Président. Oui, M. le ministre, vous vouliez poser une... Vous voulez une clarification? Allez-y, puisqu'on est là pour écouter. Que ce soit la vôtre ou la mienne...

M. Chevrette: O.K. L'identification est pas nécessairement nécessaire si vous avez l'assurance que vous n'avez pas la responsabilité comme propriétaire.

M. Dugal (Éric): Ça, ça doit se faire par la loi et non pas par un contrat...

M. Chevrette: Non, non, je...

M. Dugal (Éric): ...parce que, sinon, on se retrouve dans le même problème.

M. Chevrette: Non, non, mais, si la loi réfère à un contrat, puis bien spécifique, on peut...

M. Dugal (Éric): Oui, puis il y aurait moyen de prévoir un contrat-cadre là-dessus. Ça, ça peut se faire.

M. Gobé: Bonjour, messieurs.

Une voix: Bonjour.

M. Gobé: Il fait plaisir de vous revoir en commission parlementaire. Ça nous rappelle quelques autres débats qu'on a eus en cette pièce. Écoutez, d'abord, je vous félicite de participer à cet exercice. Je crois qu'on est ici pour faire une réflexion la plus vaste et la plus complète possible et je crois que vous représentez certainement un secteur d'activité qui est au premier rang, hein, de la circulation routière, qui a certainement une grande expertise aussi. On sait que les chauffeurs de taxi passent... et les propriétaires, pardon, de taxi et leurs chauffeurs passent des 24 heures généralement, ou 18 heures, ou 15 heures, ou 16 heures, dépendant comment ils fonctionnent avec leur voiture sur la route. Donc, vous êtes à même d'avoir un bon jugement sur ce qui s'y fait de bien et de moins bien.

Alors, vous avez levé un point, M. Lemay, qui est assez intéressant, et peut-être que... Je pense, M. le ministre, ça vaudrait la peine... C'est un point qui a été levé par M. Lemay, qui est le suivant: Lorsqu'on va sortir de la zone radar... C'est marqué: Attention, zone radar. Surveillance par radar. Disons que la limite, c'est 80 km/h sur cette zone-là. La personne, normalement, va lever le pied, va passer à 80 km/h. L'objectif est atteint: sécuriser cette courbe-là, d'accord, ou ce passage-là où il y a beaucoup d'accidents. Là-dessus, là, O.K., on a atteint l'objectif. Mais le problème, c'est qu'après il y a une pancarte qui dit: Fin de la zone contrôle radar photo. Alors, ça va indiquer peut-être le message suivant au conducteur: Bon, la zone est finie, je peux accélérer.

M. Chevrette: Ou bien c'est l'infraction 142 km/h...

M. Gobé: Oui, mais disons qu'il l'a pas eue.

M. Chevrette: ...qui sera sur le tableau à messages variables.

M. Gobé: O.K. Non, non, mais... Là, c'est pas le cas. Mais...

M. Chevrette: Il va dire: Ça vient de me coûter 200.

M. Gobé: Oui. Non, mais je prenais pour acquis que c'est une mesure qui est là pas pour prendre 200 $ mais pour faire ralentir, pour sauver... éviter l'accident. La personne, l'automobiliste ralentit et il respecte donc la loi grâce à la machine. Pas à la vôtre, mais, en tout cas, à la machine que le ministère a fait installer. Puis quand il sort, c'est comme une autorisation de rouler plus vite parce qu'on lui enlève le message: Maintenant, il y a plus de radar, donc tu peux accélérer ou... C'est subliminal, là, comme message. Alors, est-ce que vous y voyez un danger, à ce moment-là, d'augmentation de la vitesse d'une manière automatique par des gens sur le reste du tronçon? Va-t-il falloir mettre d'autres radars plus loin ou d'autres policiers plus loin pour dire: Oh! Le gars, il va dire: Il y avait pas de radar. L'autre: On m'a dit qu'il y avait un radar et il n'y en a pas, de radar.

M. Lemay (Michel): Il y a une chose qui est certaine...

M. Gobé: Je sais pas si vous m'avez bien compris, là.

M. Lemay (Michel): Oui, je comprends très bien. Mais il y a une chose qui est certaine: s'il y a une prolifération de ces appareils-là un peu partout, oui, ça va être le jeu du chat et de la souris. Mais, si c'est bien fait puis dans des endroits spécifiques, et puis qu'on continue et que, à ce moment-là, les points de démérite entrent en jeu, je crois que oui, ça peut avoir un effet dissuasif.

Maintenant, comme je vous dis, si vous en installez un peu partout, bien, aussitôt qu'ils seront passés, ça sera le jeu qu'on fait avec les arrêts puis ça sera le jeu qui se fait un peu partout. On sait que, dans telle zone, il y a des radars. Moi, je m'en viens sur l'autoroute des Cantons-de-l'Est puis je sais que mais que j'arrive à Granby je vais avoir du radar. Ils en font plus qu'ailleurs, ça fait que j'ai des bonnes chances d'en pogner un là. Ça fait que je vais ralentir dans Granby, puis quand je vais être passé les limites, je vais accélérer un petit peu. Malgré que la sagesse vient avec les années, je suis pas un fervent de la course automobile, là, donc je respecte...

M. Chevrette: C'est une ancienne police qui dit ça, là...

M. Lemay (Michel): Non, qui fait attention.

M. Gobé: Est-ce que vous pensez, M. Lemay, que, à l'instar d'autres États américains... certains, pas d'autres, on n'est pas un État américain... mais de certains États américains, on devrait, au Québec, revoir la limite des vitesses maximales? On sait que ç'a été longtemps 55 lorsque vous descendez dans le Sud, hein. Moi, je suis descendu au courant du printemps, là, en voiture, et on se rend compte qu'il y a des États que c'est à 60, 65, même 70 milles à l'heure, hein, certains États.

Nous, Québec, on est toujours à la même vitesse, à la même limite depuis, je pense, 20 ans, quelque chose comme ça, 25 ans. Est-ce que vous croyez que, avant l'instauration de tout nouveau moyen, là, de contrôle ? parce que c'est le mot qui a été employé par les directeurs de police hier, «contrôle» ? eh bien, on devrait pas réactualiser ou revoir, nous aussi, les limites de vitesse, pour être certains que ces appareils-là deviendraient pas, comme certains peuvent le craindre ? et ils sont justifiés, des fois, de pouvoir le craindre; quand l'État se mêle de quelque chose, des fois, hein, on sait jamais ? que ça devienne donc pas automatiquement des percepteurs d'amendes, là, hein, à 105, 108, 109, et, boum! ça prend tout le monde?

Et on sait que, les gens, on a l'habitude de rouler un peu plus élevé avec les véhicules modernes maintenant qui sont plus sécuritaires, tiennent mieux la route, que les routes du Québec, quand le gouvernement prochain sera là, seront toutes réparées et que ça fonctionnera bien, qu'il n'y aura plus de trous et seront plus sécuritaires. Est-ce que donc on devrait pas penser à réévaluer ça avant de mettre en place toute autre mesure?

M. Lemay (Michel): Je serais pas réfractaire à une telle approche, mais il y a tout un travail de sensibilisation à être fait avant. On sait que, partout, c'est de renommée partout au Québec, bon, il y a un 10, il y a un 15, il y a un 20 kilomètres de tolérance de la part de nos policiers. Si on augmente d'un autre 10 ou d'un autre 20 kilomètres, est-ce qu'on va retrouver encore un 10, un 15 ou un 20 kilomètres de tolérance supplémentaire? Alors, il y a toute une sensibilisation à faire auprès de la population ? moi, en tout cas, ce que je pense, avant de toucher à ça ? à savoir que si, oui, on change les limites de vitesse, oui, il va y avoir quelque chose qui va être plus restrictif qu'il y a présentement. Bon. On le sait, on s'en va sur l'autoroute, c'est 100 kilomètres. On peut mettre notre régulateur de vitesse à 115 puis on sera pas importuné. Maintenant, si on monte à 110 ou à 120, est-ce qu'on va pouvoir... À 120, on va le mettre à 135 puis on sera pas importuné?

M. Gobé: Oui, c'est ça.

M. Lemay (Michel): Donc, il y a tout un travail de sensibilisation à faire auprès de la population avant de changer la loi comme telle.

M. Gobé: Mais est-ce que vous croyez, vous ? votre expérience dans le taxi aussi, mais comme ancien chef adjoint de la police de Sherbrooke, c'est ça? ? est-ce que vous croyez que le citoyen moyen, hein, l'automobiliste moyen peut s'accommoder d'un certain niveau de vitesse sans être tenté de le dépasser? En d'autres termes, est-ce qu'il n'y a pas une... Comme 100, par exemple, ça peut paraître des fois un peu lent et les gens ont une tendance à peut-être aller à 118, 120, mais est-ce que, arrivé à un autre niveau, ça correspondrait pas à ce que la majorité des gens ont comme intention ou comme volonté de rouler? Puis, à ce moment-là, seuls ceux qui se feraient prendre dans les machines, les nouvelles machines qu'on installe, seraient vraiment les fous du volant, les délinquants? Est-ce qu'il y a une vitesse raisonnable, acceptable, acceptée par les gens?

n(11 h 30)n

M. Lemay (Michel): Je serais bien mal pris pour vous dire quelle est la vitesse qui pourrait être permise. Est-ce qu'on pourrait l'augmenter? Oui. Il y a plusieurs endroits où la visibilité est bonne. La largeur, l'éclairage des routes, ainsi de suite, pourraient le permettre. Il y a d'autres endroits... Vous prenez notre autoroute, là, la 55, avec les accidents qu'on a à déplorer, c'est déjà assez vite, ce qu'il y a là. Donc, c'est pas de généraliser. J'aurais de la misère à généraliser et de dire: Bon, enfin, sur la 20, sur la 40, quand même qu'on augmentera de 10 ou 15 kilomètres la vitesse permise, il y a une bonne visibilité, c'est large, ça roule bien, il y a pas de problème. Il y a plus de problèmes avec les arrêts brusques, avec ceux qui circulent à 60, 70, avec le louvoiement qu'on voit, puis qu'on voit les jeunes avec la casquette en arrière puis, tiens, coupent un puis coupent l'autre. Bon.

M. Gobé: ...sur la vitesse, celle qu'on veut réduire avec les appareils, il y a le problème des camions, sur les autoroutes en particulier. Comme vous savez, très souvent les automobilistes ont à faire face à des compétitions, où on roule tranquillement à 118, 119, 115, puis là il arrive une espèce de mastodonte, il pleut, c'est le brouillard, enfin, et en pleine nuit, sur la 20, et là on se fait tasser dans le coin. Le gars arrive en avant de nous autres à 123, puis là l'automobiliste, le réflexe, d'abord, c'est de le laisser passer, après se tasser à gauche, puis de le redépasser. Donc, le gars, il se ramasse à 130, 135. S'il y a une machine qui est là, il va se prendre, d'accord?

Est-ce que vous seriez pas... D'abord, est-ce que vous pensez qu'on doit régler ce problème-là, hein, de la vitesse des camions? Et est-ce que vous croyez ? je n'ai plus de question après à vous poser, je vais vous poser les deux en même temps ? qu'on devrait, au Québec, faire comme les pays européens ? je m'excuse de revenir encore là, mais c'est parce qu'ils ont tellement de camions, de véhicules qui sont sur les autoroutes, sur les routes, et ça fonctionne, c'est tellement un trafic lourd qu'il faut regarder les expériences où ça se passe ailleurs ? avoir des vitesses spéciales pour les véhicules lourds d'affichées en arrière et qui sont inférieures à celles des véhicules de promenade?

M. Lemay (Michel): Je voudrais pas me prononcer dans la réglementation du camionnage. J'en ai déjà plein avec celle du taxi. Mais...

M. Gobé: C'est de la circulation, c'est pas du camionnage. Je vous pose une question. J'ai pas amené...

M. Lemay (Michel): Mais, d'expérience, M. Gobé, ce qui, moi, m'agace sur la route, c'est quand j'ai une file de trois ou quatre camions qui se suivent bumper à bumper, et là j'ai de la difficulté... il pleut, j'ai de la difficulté à en dépasser un parce que... les éclaboussures dans mon pare-brise. Ça, il y a des choses, je pense, qui pourraient être faites à ce niveau-là, des interdictions, comme on le fait avec les motocyclistes, qui peuvent pas circuler 20 de file pour empêcher toute circulation. Donc, il pourrait y avoir de quoi de fait dans ce sens-là.

Réduire la vitesse, oui, parce que ces gens-là n'ont pas la facilité de freiner aussi rapidement qu'un véhicule. Mais il faut pas oublier, dans le même sens que je vous ai dit tantôt, il y a de la vitesse puis, qu'est-ce qui cause des accidents, le fameux louvoiement où, vous le dites vous-même, oui, on va se braquer en avant d'un camion à 125 km/h et puis là on décide de freiner puis de regarder le paysage. Lui, il s'en vient en arrière, là, avec un 20 puis un 30 tonnes, là, c'est pas facile à freiner.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre des Transports.

M. Chevrette: Moi, je voudrais vous montrer un petit peu la difficulté qu'on peut avoir. Il y a beaucoup de gens présentement qui aimeraient que, sur les autoroutes, on déplafonne la vitesse, comme dans certains pays européens. Puis dans les faits, c'est pas sur l'autoroute qu'il y a plus d'accidents; c'est 6 % de décès sur les autoroutes. Les routes les plus dangereuses, ce sont les routes où il y a rencontre, soit de 90 milles... à 90 km/h, dans certains rangs qui sont très droits. Les rangs, les routes qui traversent deux paroisses, par exemple, en ligne droite, il y a rien de pire. Ça, ça roule à planche parce que c'est droit, puis souvent il y a des chances qui se prennent puis c'est du face à face, c'est du frontal.

Et puis dans le milieu urbain, contrairement à ce qu'on pense, il y a des accidents dans le milieu urbain comme c'est pas possible. Puis il y a des configurations de routes, il y a quelques sites qui... Je pense au tunnel de la mort parce que je l'ai fait plusieurs fois, Saint-Joseph et Iberville. Parce que tu vois pas ce qui s'en vient. Tu peux pas le voir. Donc, c'est clair que ces endroits-là sont des endroits plus ciblés, plus ciblés en l'occurrence, parce qu'il est pas question d'installer ça...

Moi, je crois que vous avez raison de dire que ça prendrait des campagnes de sensibilisation. Si j'annonçais demain matin que je déplafonne les autoroutes, ça serait un tollé général. Si j'annonçais que je réduis la vitesse, ça serait la même chose. La population est pas préparée à avoir des modifications présentement. Mais... Prenez un camion. J'ai parlé... Vous vous rappellerez, dans les premiers mois que j'ai été ministre des Transports, j'ai proposé peut-être que les camions soient plafonnés à 90. J'avais rencontré M. Besner, qui avait des puces qui déclenchaient automatiquement, qui arrêtaient la vitesse. Si vous aviez vu le tollé! Les lettres rentraient à pleines poches, les fax. Parce que, le «just-in-time», là... Ils ont beau me faire accroire, puis ils me feront pas pleurer, là, ils ont beau me faire accroire que ça va rouler... que ça roulerait à 90, quand il faut qu'ils soient «just-in-time», si ça prend 120, ils vont aller à 120. C'est ça qui est la... la...

On est pris dans une conjoncture sociale qui fait en sorte qu'on a de la difficulté à faire changer les habitudes. Tout le monde pense cependant qu'il faut modifier les comportements. Et on peut le faire de façon traditionnelle, le plus possible, mais en cas d'incapacité faut que tu le fasses avec des nouvelles technologies, c'est clair. C'est ça, un peu, le débat qu'on mène présentement. Et j'en parlerai de façon plus particulière avec certains groupes, mais je pense qu'on ne doit pas se fermer, on doit pas être des huîtres, on doit être ouvert aux discussions puis au dialogue. C'est ça, je pense, qu'il faut si on veut arriver à améliorer le bilan routier. Et ça se règle pas toujours par une recette miracle de la présence humaine, dans bien des cas. Merci, monsieur.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Marquette, une petite courte?

M. Ouimet: Oui, peut-être au ministre qui dit qu'on doit être ouvert aux discussions. Est-ce que la question d'un limiteur de vitesse serait acceptable pour les camions? Ce qui se fait à l'Union européenne, d'après ce qu'on me dit, depuis les 10 dernières années, les camions ont un dispositif mécanique qui ne dépend pas de la volonté du conducteur, qui limite la vitesse automatiquement.

M. Chevrette: Moi, je serais en faveur. Personnellement, je suis convaincu que ça serait une économie, à part de ça, d'énergie, que ce serait... Moi, M. Besner... M. le propriétaire de Besner est venu me dire qu'il pouvait absorber l'augmentation justement de la gazoline parce qu'il réussissait à faire des économies d'énergie en... C'est sûr qu'il y a quelque chose là.

Par contre, voyez un autre exemple, vous me permettrez. On parle du cellulaire, là, c'est dangereux. On s'en vient avec des tableaux de bord, quasiment comme des télévisions, qu'ils vont te donner... que les gens vont lire. On est toujours confronté à une technologie par rapport à une réalité qu'on obtient a posteriori et non pas a priori. Mais, si on n'essaie rien, on fera rien. C'est ça je veux dire. Moi, je pense que certains pays d'Europe... D'ailleurs, au congrès mondial du transport, au mois de janvier prochain, on est sensé avoir toute une démonstration de... en ce qui regarde toute la régularité dans la conduite, l'économie d'énergie dans la conduite avec des technologies modernes. Et j'ose espérer qu'on partira pas en croisade contre quelque chose mais qu'on va d'abord vouloir les étudier puis peut-être les expérimenter à partir de projets-pilotes.

M. Gobé: Combien de morts par accident avec les camions au Québec, M. le ministre? Est-ce qu'on a la statistique?

Une voix: À peu près 150 en moyenne par année.

M. Chevrette: 150 par année.

M. Gobé: Puis d'accidents... de blessés en général? Le nombre de blessés?

M. Chevrette: Blessés, c'est 4 000 graves...

M. Gobé: Par camion. Accidents avec des camions, pour la vitesse.

M. Chevrette: 400 sur 4 000, c'est 10 %. Mais c'est pas 10 %, par contre, du parc automobile.

M. Gobé: Non, non.

M. Chevrette: Là, on est rendu 4 millions.

M. Gobé: Mais ils sont souvent sur les routes...

M. Chevrette: Oui.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Marquette.

M. Chevrette: On sait quand ça frappe, par exemple...

M. Ouimet: Une dernière pour...

M. Chevrette: ...les séquelles sont beaucoup plus graves, puis... C'est clair.

M. Ouimet: Une dernière pour le ministre: Si le limitateur de vitesse serait bon pour les camions, est-ce que ça serait bon pour les voitures de touristes? Même principe?

M. Chevrette: Bien, le même principe, oui. Une compagnie de location pourrait effectivement user le mécanisme...

M. Ouimet: Bien, de l'imposer, que l'État l'impose.

M. Chevrette: Le problème, c'est que la juridiction du Québec... le Québec n'a pas de juridiction au niveau de la fabrication, c'est le Canada qui est... les normes de construction.

M. Ouimet: Parce qu'au niveau du fabricant un dispositif qui est ajouté par la suite n'a rien à voir avec le fabricant?

M. Chevrette: Non, effectivement. Puis ils peuvent le faire, puisque ça se fait même sur des camions puis c'est pas nécessairement dans le domaine de la construction.

Le Président (M. Lachance): Alors, merci, MM. Lemay et Dugal, du Regroupement québécois du taxi, pour votre participation aux travaux de la commission.

J'invite maintenant l'Association des policiers provinciaux du Québec à bien vouloir se présenter à la table.

n(11 h 40)n

M. Chevrette: Durant ce temps-là, M. le Président, je pourrais peut-être dire au député de Marquette que j'ai personnellement écrit à M. Collenette sur le ralentisseur là... sur le mécanisme déclencheur. J'attends sa réponse. Je vous donnerai les deux... lorsque j'aurai sa réponse, je vous donnerai les deux lettres.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Lachance): Alors, bienvenue, messieurs. J'invite le porte-parole à se présenter et à présenter la personne qui l'accompagne. Et je vous indique aussi que vous avez 15 minutes pour votre présentation.

Association des policiers provinciaux
du Québec (APPQ)

M. Cannavino (Tony): Merci, M. le Président. M. le ministre, MM. les députés. Mon nom est Tony Cannavino. Je suis le président de l'Association des policiers provinciaux du Québec. Je suis accompagné par mon vice-président, M. Réjean Corriveau. Je remercie le ministre et la commission de nous permettre de nous prononcer justement sur un dossier qui est quand même assez délicat, celui des cinémomètres, quoiqu'on avait déjà exprimé l'année dernière notre position face à cet outil qui, pour nous, nous apparaît comme étant... extrémiste est peut-être pas approprié dans le contexte.

Du point de vue de la santé et de la sécurité des citoyens comme du strict point de vue de la discipline publique, l'objectif poursuivi par le projet de loi est louable. On ne peut qu'être d'accord avec la recherche d'une diminution de la fréquence des accidents et de la gravité des lésions, surtout s'il est vrai que la réduction de la vitesse créerait une circulation plus fluide, apaisée et contribuerait à diminuer l'agressivité au volant.

L'Association des policiers provinciaux du Québec partage donc les objectifs poursuivis par le ministre. Cependant, nous ne croyons pas que le cinémomètre photographique soit un moyen privilégié pour le moment. Il existe en effet d'autres moyens permettant d'obtenir une réduction de la vitesse sur les routes. S'il est vrai que les méthodes de contrôle des vitesses jumelées aux campagnes publicitaires reliées à la vitesse ont atteint un plafonnement, il n'est pas vrai que la solution passe nécessairement par le recours à des cinémomètres photographiques. Ce sont plutôt les méthodes de travail qu'il faut changer ainsi que les campagnes publicitaires. Par exemple, les patrouilles de retenue constituent une méthode de travail qui permet d'obtenir d'excellents résultats quant à la réduction de la vitesse sur les autoroutes et les voies rapides.

Pour les membres de l'Association des policiers provinciaux du Québec, des experts en matière de sécurité publique, une réduction de la vitesse sur les routes peut être obtenue de façon plus durable en agissant par l'éducation plutôt que par la répression. En cela, l'APPQ se positionne d'une manière conforme à l'approche généralement préconisée par le gouvernement. Nous croyons que, par exemple, des campagnes publicitaires prenant à contre-pied certaines publicités mettant l'accent sur la puissance des véhicules ou encore un règlement pour obliger les délinquants de la route à suivre un cours de conduite mettant l'accès sur la sécurité routière constitueraient des moyens efficaces de sensibilisation et d'éducation. D'autres moyens encore pourraient être imaginés pour obtenir une réduction de la vitesse sur les routes du Québec.

Toutefois, le cinémomètre photographique n'entre pas dans cette catégorie. À cet égard, l'étude du groupe de recherche en sécurité routière de l'Université Laval est éloquente. Pour en citer quelques passages: un des obstacles majeurs à l'implantation des radarphotos est celui de l'acceptation des limites actuelles de vitesse, particulièrement sur autoroute, où une majorité de citoyens les considèrent déraisonnables et injustifiées. Introduire des radarphotos en maintenant la limite actuelle de 100 km engendrerait un tollé justifié, à moins d'adopter une marge de tolérance identique aux pratiques actuelles. C'est pourquoi nous préconisons un redressement de la limite de vitesse autorisée sur le réseau routier. Relever la vitesse maximale sans en assurer un contrôle strict risquerait d'augmenter sensiblement les vitesses moyennes actuellement observées. L'introduction des radarphotos s'en trouverait justifiée sans que les vitesses actuelles ne s'élèvent dangereusement, puisqu'elles se situent aux environs de 118 km/h.

Autrement dit, il faudrait permettre selon eux une augmentation de la vitesse sur les autoroutes afin de justifier l'introduction d'un outil visant à réduire la vitesse. Se peut-il que nous soyons en présence d'un raisonnement paradoxal sinon absurde?

Nous retenons que le cinémomètre photographique est un des outils qui pourraient peut-être s'avérer utiles pour mener une intervention ponctuelle ou pour agir sur une masse de véhicules, par exemple si l'on voulait que la vitesse de 70 km soit vraiment respectée sur le boulevard Métropolitain de l'île de Montréal. Toutefois, contre les fous du volant cet outil est totalement inutile. Le cinémomètre photographique ne peut procéder à l'arrestation d'un conducteur délinquant dont la conduite constitue un danger public. Celui qui roule à tombeau ouvert recevra une contravention. Fort bien. Mais en quoi la sécurité des autres usagers de la route et même celle du chauffard a-t-elle été protégée par le flash d'un radarphoto?

D'autant plus que cet outil est rendu inefficace lorsqu'en présence d'une plaque illisible ou camouflée, ne serait-ce qu'avec un support à bicyclette. La facilité avec laquelle la lecture de la plaque peut être rendue difficile rend sceptique quant aux résultats qui seront obtenus. Peut-être que finalement il n'y aura que les gens qui se permettent d'aller à 111 km sur l'autoroute qui feront les frais d'un radarphoto.

Certes, le Code de sécurité routière oblige le conducteur et le propriétaire d'un véhicule à nettoyer la plaque d'immatriculation pour qu'elle soit lisible en tout temps. Cependant, depuis quelques années, la police au Québec a entrepris un virage professionnel qui vise une meilleure intégration au sein de la communauté ainsi qu'une meilleure utilisation de ses ressources. On voit mal comment on pourrait justifier auprès des contribuables que les policiers puissent accorder une importance démesurée aux plaques simplement malpropres.

Enfin, soulignons que l'efficacité des radarphotos pour consulter une preuve devant les tribunaux n'est pas clairement établie. Le pourcentage des contrevenants identifiés suffisamment clairement pour qu'une citation soit émise semble faible. Selon une étude du ministère des Transports de l'Ontario, 56 % des photos prises entre août et décembre 1994 n'ont pas été utilisées. La ville de Pasadena en Californie rejette quant à elle 40 % des clichés. Il est facile d'en déduire que l'utilisation des radarphotos se traduira par une augmentation des contestations, alors que les cours municipales sont déjà engorgées.

On doit également se demander si le radarphoto ne serait pas un outil pouvant déconsidérer l'administration de la justice. Présentement, les corps de police ont une directive ministérielle leur faisant obligation d'assurer la requalification des opérateurs radars à chaque cinq ans. Pourquoi? Pour assurer le citoyen de la rigueur avec laquelle se fait la recherche de la vérité et, donc, l'administration de la justice. Le constat d'infraction est fait par un être humain qui s'appuie sur un moyen technique, c'est-à-dire le radar. À cela, le gouvernement voudrait substituer un constat d'infraction fait uniquement par un moyen technologique. Objectivement, il s'ensuit une déshumanisation de la justice.

L'utilisation du radarphoto soulève enfin le problème quant à l'équité. Le projet de loi pose l'hypothèse d'émettre des constats d'infraction sans pour autant y associer des points de démérite. Pourtant, la même infraction, lorsqu'elle sera constatée par un patrouilleur pouvant identifier le conducteur du véhicule, donnera lieu à des points de démérite. Qu'est-ce qui justifie la différence de traitement? Pourquoi, dans un cas, l'éducation passerait-elle uniquement par une sanction financière alors que, dans l'autre, s'ajoute le risque d'une suspension de permis? Une telle approche ne peut que confirmer auprès du public que l'utilisation du radarphoto n'est peut-être que l'introduction d'une taxe déguisée.

En somme, l'Association des policiers provinciaux du Québec considère que, s'il est vrai que le cinémomètre photographique n'est pas simplement une machine à sous, son efficacité comme outil d'éducation est loin d'être établie. C'est pourquoi, plutôt qu'une fuite en avant technologique, l'APPQ préconise l'élaboration de nouveaux moyens d'intervention. S'il est vrai que depuis 20 ans les méthodes d'intervention ont évolué très peu comparativement à la densité de la circulation, au nombre de véhicules du parc automobile et au nombre de titulaires de permis de conduire, cela ne fait que démontrer l'importance que soit menée une réflexion sérieuse pour élaborer de nouvelles stratégies d'intervention.

Également, l'APPQ ne peut que cautionner l'introduction d'un outil tel que le cinémomètre photographique, car l'expérience des patrouilleurs nous indique que, si la vitesse est une cause d'accidents, elle est loin d'en être la première cause. Rappelons que l'étude du professeur Paquette révèle que les autoroutes constituent néanmoins la portion la plus sécuritaire du réseau. Entre 1986 et 1990, 7,4 % des accidents mortels au Québec s'y sont produits contre 34,8 % sur les routes limitées à 90 km et 15 % sur les routes limitées à 50 km, c'est-à-dire des routes où les véhicules se croisent ou qui se situent dans des zones à forte densité de population. Le problème est donc moins la vitesse que l'environnement dans lequel circule l'automobiliste.

Pour l'ensemble de ces considérations, nous croyons donc que le gouvernement devrait surseoir son projet d'introduire le cinémomètre photographique et devrait plutôt revoir sa réglementation, favoriser l'élaboration de nouvelles méthodes d'intervention, fournir les ressources humaines et engager des campagnes publicitaires faisant contre-pied à l'exaltation de la vitesse, de la performance et de la compétition qui imprègnent la publicité en matière d'automobiles et de véhicules utilitaires. On ne peut également passer sous silence qu'il y a un contresens à permettre aux conducteurs d'automobiles de conduire des tombes... des bombes sur quatre roues pendant qu'en même temps l'État interdit d'utiliser cette puissance.

Les objectifs poursuivis par le projet de loi sont la réduction de la vitesse, le nombre de collisions ainsi que la réduction de la gravité des blessures. Pour y arriver, on cherche à obtenir un changement d'attitude de la part des conducteurs, car ceux-ci perçoivent la limite de vitesse comme une indication et non comme une obligation à respecter. Il en serait ainsi parce que les conducteurs ne se sentent pas interpellés et ne prennent pas conscience qu'ils constituent un danger potentiel en conduisant. C'est là qu'intervient le radarphoto comme moyen de contrôle de la vitesse.

Cependant, faire vivre les automobilistes sous l'oeil du radarphoto pénalise finalement la masse des conducteurs plutôt que de s'attaquer aux délinquants. Avec cet outil, le gouvernement augmente le bassin de population passant dans le rayon du radar. Éventuellement, c'est autant de contraventions émises. Car tout le problème est là: Est-ce que cet outil sert d'abord à améliorer la sécurité de la population et donc à réduire les dépenses de l'État ou à augmenter les revenus de l'État? Si on veut aller chercher 18 millions de dollars, avec quatre appareils, en 292 jours, avec des amendes moyennes de 100 $, il faut 20 contraventions à l'heure pendant huit heures. Comme près de 50 % des photos doivent être rejetées pour obtenir ces 18 millions de dollars, il faudrait donc doubler le nombre de constats d'infraction, soit 40 constats à l'heure ou, si on préfère, un constat d'infraction à tous les... à toutes les 90 secondes. Dans cette perspective, ce qui distingue le radarphoto d'une machine à sous, c'est que la machine à sous fait de temps en temps un heureux parmi les utilisateurs.

n(11 h 50)n

Il apparaît donc nécessaire de rappeler que l'excès moyen par rapport à la vitesse permise n'est que de 11 km, c'est-à-dire 7 mi/h sur les autoroutes et de 6,59 km/h, c'est-à-dire 4 mi/h sur les routes où la vitesse est limitée à 90 km. On doit donc faire le constat que la masse des conducteurs est plutôt respectueuse de la réglementation. C'est pourquoi l'APPQ ne croit pas qu'il soit nécessaire de pénaliser la masse des conducteurs pour obtenir une amélioration des conditions de sécurité sur les routes et les autoroutes du Québec. L'élaboration de nouvelles méthodes d'intervention et d'éducation du public constituent des voies autrement plus durables. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre des Transports.

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Tout d'abord, je voudrais vous remercier et vous dire que je partage passablement votre point de vue en ce qui regarde les campagnes publicitaires sur la force des véhicules, des bolides, sauf qu'on ne peut... on n'y peut rien. On n'a pas la juridiction sur le fabricant puis on n'a même pas la juridiction des ondes en ce qui regarde la publicité payée. Et ça, ça sera toujours un problème majeur.

Et c'est vrai que ça a l'air contradictoire. À un moment donné, tu as une annonce d'un bolide qui file à 200 km, une Ferrari, puis tu vois l'accident mortel comme contrepoids publicitaire fait par la SAAQ. C'est assez une aberration mentale. Ça, je le reconnais. Mais on n'a pas les juridictions, il faut le reconnaître aussi. Je pense que les faits nous amènent à observer ces aberrations sans en avoir les moyens de les corriger, pour l'instant en tout cas.

Donc, deuxième chose, je reconnais aussi que la présence policière, la présence physique policière est extrêmement importante. Je dirais même: C'est probablement le meilleur moyen. Mais vous êtes un bon président de syndicat, vous. Vous êtes sûr... Je suis sûr que vous laisseriez pas vos policiers en danger de vie. Vous seriez le premier à appeler la CSST si on exposait leur vie ou si on les mettait en danger en tout cas de vie. Ils ont même le droit, en vertu de la CSST, vos membres, de cesser, de refuser le travail si c'est trop dangereux.

Le projet de loi... Ceci m'amène à vous dire que le projet de loi, c'est précisément pour ne pas placer personne... Je demanderai pas à un policier de mettre sa vie en danger pour sauver une autre vie. Je pense qu'il faut sauver les deux vies. C'est ça, l'objectif du projet de loi: pas de contravention. Et je prends pour acquis que la majorité ou la très grande majorité des Québécois sont pas fous. Quand ils voient le mot «radar», ils ralentissent.

Mais il y a un petit noyau de délinquants qui s'en foutent puis qui se foutent même, dans certains cas... Il y a des bombes roulantes qui se foutent de vous autres. Vous savez ce qui arrivé sur la route 40, par exemple, à Trois-Rivières il y a... il y a à peine un an. Ça a été la catastrophe avec la moto, il y a un an. Il y a toujours ce petit noyau là.

Mais je ne comprends pas que... si vous me dites dans un même souffle que les Québécois en général observent les lois puis qu'à plus forte raison quand ils voient un gros signal avec un tableau à part de ça à messages variables... que ça peut devenir une machine à sous. Vous en avez été une pas pire en fin de semaine, vous autres, 4 400 arrestations. C'est une opération particulière que vous avez faite.

Moi, je vous dis tout de suite que c'est pas ça, les objectifs. Les objectifs, c'est: aucune contravention, zéro contravention, zéro accident. C'est ça le, le... qu'on recherche, et on le recherche exclusivement sur des sites difficilement accessibles, difficilement accessibles et qui pourraient mettre en péril. C'est ça, l'objectif fondamental. Puis j'ai discuté même hier.

On a fait une expérience au mois d'août, le 1er août dernier, sur la route du Vallon, ici, avec la Sûreté, avec la police. Et c'est extrêmement dangereux. Les seules fois où on peut le faire, c'est quand il fait très beau, avec des policiers en motocyclette et puis qui peuvent démarrer assez rapidement puis... Puis ça a été fait, ça, comme expérience, là. Puis on a dit: C'est extrêmement dangereux. Je suis convaincu que vous me demandez pas ce matin de placer vos policiers dans un état précaire au niveau de leur propre vie. Je suis convaincu de ça. Je serais malhonnête que de penser ça.

Donc, comment feriez-vous concrètement, vous, à l'intérieur du «tunnel de la mort», pour assurer une protection au public sans mettre en péril vos propres pro... vos propres policiers, si ce n'est pas par des technologies modernes?

La deuxième question: Avez-vous lu la recherche qui a été faite et les travaux qui ont été faits en Australie dans la ville... dans l'État de Victoria où utilisent... où ils utilisent régulièrement le photoradar dans des endroits stratégiques? Moins 30 % aux artères urbaines, puis sur les routes en général, moins 20 %; en Norvège, moins 20 %; je suppose que vous l'avez lu; au Royaume-Uni, moins 22 %; en Californie, dans la ville National City, moins 26 %; en Colombie-Britannique, pour le temps qu'ils l'ont utilisé, moins 25 %.

C'est toutes des choses, ça, qui parlent par eux-mêmes, c'est des statistiques compilées, c'est des observations réelles. Est-ce que vous niez ces faits, oui ou non? Est-ce que vous niez ces recherches? Est-ce que vous niez ces statistiques? Et je terminerai, avant de vous donner la parole, par l'étude du professeur Paquette. Je vous invite à rester ici après-midi, parce que vous l'avez cité très hors contexte, et je vous le prouverai avec lui cet après-midi.

M. Cannavino (Tony): Tout d'abord, M. le ministre, vous faites référence à d'anciennes techniques de travail. Quand vous parlez que, que ce soit dans le «tunnel de la mort» ou du Vallon ? pour connaître ces endroits-là assez bien ? que c'est difficile pour des policiers faire des opérations radar, oui, oui, avec les anciennes méthodes. Avec les opérations radar statiques, effectivement ça deviendrait très difficile, sur Saint-Joseph ou Iberville, d'aller installer un policier là, oui. Sauf que maintenant nous avons d'autres techniques.

M. Chevrette: Quand vous voulez punir un policier, vous l'envoyez sur le Métropolitain. Vous le savez?

M. Cannavino (Tony): Bien, c'est un vieux mythe, ça, c'est un vieux mythe, puis tous les policiers qui sont allés travailler au Métropolitain, ils ont apprécié justement ce travail-là. C'est un travail qui est différent. Et, quand on parle du «tunnel de la mort», je vous référerai, moi, un peu à ce que finalement vous avez modifié au fil des années, parce que la route 20, dans le bout de Beaconsfield, Île-Perrot, c'était une catastrophe les accidents, là, hein. Vous vous rappelez? Ça roulait vite, ça roulait... t'avais des fous du volant, il y a des gens, là, qui faisaient des conduites dangereuses. Savez-vous ce qui a réglé ça? C'est une nouvelle construction d'un viaduc, mais pourtant ça faisait des années qu'il y avait des recommandations qui étaient faites dans ce sens-là.

Or, ç'a pas pris du radar, ç'a pris une nouvelle configuration du site. Quand on parle du fameux «tunnel de la mort» de Saint-Joseph et Iberville, je vais vous dire une affaire, ça fait quoi, 25 ans, 30 ans qu'on entend parler de ça. Je pense qu'il serait peut-être temps de changer la configuration de ça, puis la remettre un peu plus... avec les nouvelles techniques, les nouvelles technologies, rendre ça peut-être un peu moins dangereux. Je comprends que la visibilité est zéro, mais je suis persuadé, moi, qu'on est capable de changer ce portrait-là. Mais ça fait 25, 30 ans que tout le monde en parle, mais il y a rien qui se corrige.

Alors, c'est bien certain qu'on mettra pas un policier, là, dans ce tunnel-là, sauf que maintenant, au lieu d'avoir un policier qui fait une opération radar statique, nous avons des radars que, lorsque le véhicule de patrouille circule, il est capable d'enregistrer la vitesse autant lorsqu'il suit un véhicule que lorsqu'il en croise un.

Deuxièmement, on a nos véhicules depuis un an, les véhicules semi-banalisés, là, qui sont quand même assez efficaces. Les semi-banalisés, c'est ceux qui ont pas de gyrophare. Vous avez toute l'identification du véhicule comme étant un véhicule de patrouille, sauf qu'il a pas de gyrophare. Je peux vous dire que ça opère pas à peu près puis dans des situations ou dans des endroits tels du Vallon ou la Métropolitaine. Pourquoi? Parce que le véhicule est capable de suivre le chauffard et il est capable de l'intercepter ou le faire ralentir avec ses clignotants dans la grille. Donc, il va ralentir, et ensuite il l'intercepte dans un endroit sécuritaire. Et c'est la façon de procéder.

Vous avez souligné l'excellent travail qui a été fait en fin de semaine, mais en fin de semaine on a eu des policiers qui ont travaillé sur les routes, et il y a eu des opérations qui ont été planifiées, organisées dans des endroits stratégiques. Alors, ceux qui se sont promenés, qui ont circulé sur les différentes routes du Québec, bien, ils ont fait attention. Je comprends donc, parce que, là, ils voyaient pas juste un véhicule, ils en croisaient un autre plus loin, puis, à un moment donné...

M. Chevrette: ...

M. Cannavino (Tony): Ça, c'est la...

M. Chevrette: ...de travail avec les effectifs en place.

M. Cannavino (Tony): Bien, moi, je vais vous dire de quoi, c'est peut-être une question aussi de budget, hein, pour les directions. Quand vous avez... Parce que les effectifs...

n(12 heures)n

M. Chevrette: Bien, si ça fait à la Fête du travail puis si ça se fait au mois de mai, pourquoi ça se ferait pas une fois par semaine à différents endroits?

M. Cannavino (Tony): Mais, moi, je partage votre opinion là-dessus...

M. Chevrette: Bon, voyons!

M. Cannavino (Tony): ...mais savez-vous combien d'heures ç'a nécessité en temps supplémentaire?

M. Chevrette: Je le sais pas.

M. Cannavino (Tony): Oui, c'est ça. Écoutez, je suis d'accord avec vous, on devrait faire ça constamment, ces opérations-là, je partage votre opinion. Parce que, si vous mettez les effectifs... Je vous demande pas d'embaucher d'autres effectifs actuellement, là. Je vous dis: Si les ressources que nous avons actuellement, on les faisait travailler justement sur les priorités, qui sont, entre autres, la sécurité routière, ça serait des opérations comme en fin de semaine, où partout au Québec, pas juste sur les autoroutes, sur les routes secondaires, les gens croisaient des véhicules de patrouille. Quand on parle de 4 000 billets d'infraction, ç'a pas été... C'est pas parce que c'était la partie de plaisir et tout le monde a... J'ai pas eu de plainte de bursite dans les bras parce qu'ils ont fait trop de billets de contravention. Mais je vais vous dire de quoi, ça ralentissait pas à peu près sur les autoroutes. Quand...

M. Chevrette: Si on met 200 effectifs de plus à la Sûreté du Québec...

M. Cannavino (Tony): Oui.

M. Chevrette: ...et si on vous assurait que vos gens sont en toute sécurité, est-ce que vous seriez pour le photoradar comme complément dans des actes de complémentarité avec vous autres?

M. Cannavino (Tony): Écoutez, si... Regardez bien, là. Je vous ai même pas demandé 200 personnes de plus parce qu'en fin de semaine ils ont travaillé, les gens. On les a fait travailler. On a mis des budgets pour faire travailler ces gens-là un peu partout. Ça fait que... Moi, c'est certain, vous me demandez... Vous me donnez 200 policiers, je peux vous en demander encore plus que ça pour d'autres raisons aussi. O.K.? Mais, nonobstant ça...

M. Chevrette: Je suis sûr de ça puis il y en a que vous me diriez pas.

M. Cannavino (Tony): Pardon?

M. Chevrette: Vous seriez gêné de me donner toutes les raisons, vous m'en donneriez un petit bout.

M. Cannavino (Tony): On vous alimenterait pour longtemps, c'est ça que vous voulez dire. Mais oubliez pas votre ancienne expérience. Vous parliez de... Bon. Sauf qu'il faut faire...

M. Chevrette: Mais c'est pour ça que je les connais, vos raisons. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cannavino (Tony): Oui. Oui, mais ç'a changé. Le mouvement syndical a changé depuis 25 ans, hein, vous savez?

M. Chevrette: Oui, oui. Mais il y a des gestes...

M. Cannavino (Tony): Oui. Puis il y a pas juste les intérêts corporatifs. Ce que je peux vous dire là-dedans...

M. Chevrette: Non. Le roi est mort, vive le roi! Ç'a pas changé, ça.

M. Cannavino (Tony): Oui. Bon, bien, écoutez...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cannavino (Tony): Je vais vous dire d'autre chose, M. le ministre, si on acceptait les cinémomètres photographiques, on nous a avisés qu'il fallait embaucher une quarantaine de personnes, regardez, on est contre ça. On est contre le cinémomètre.

M. Chevrette: Non. Mais, effectivement, c'est dans des gestes de complémentarité. Par exemple, dans un tunnel, vous savez que vous pouvez pas y aller.

M. Cannavino (Tony): Oui.

M. Chevrette: Pourquoi, par exemple, qu'à l'extérieur, à l'extérieur, dans des endroits où c'est propice puis que la sécurité d'un policier est pas en danger, on combine pas des actions régulières? C'est là qu'il faut changer les mentalités.

M. Cannavino (Tony): M. le ministre, si le photoradar faisait intercepter le véhicule qui est en infraction, je partagerais... Si le photoradar était accompagné de policiers pour intercepter, que, ça, ça deviendrait une preuve de la vitesse, je serais d'accord avec vous parce qu'il faut faire cesser l'infraction. C'est ça qui est dangereux. Premièrement, la personne qui conduit à une vitesse excessive ou qui fait du louvoiement, bien, prenons la vitesse excessive, c'est-u quelqu'un qui est en état d'ébriété? C'est-u quelqu'un qui vient de voler un véhicule? Ça serait assez ironique que celui qui vient de se faire voler un véhicule reçoive en plus une amende parce qu'il a été intercepté, son véhicule.

M. Chevrette: Non. Mais cette partie-là, on l'a réglée pas mal.

M. Cannavino (Tony): Pardon?

M. Chevrette: Cette partie, vous en avez manqué un bout parce qu'on a... Depuis hier matin, on a bien évolué.

Le Président (M. Lachance): On va permettre au député de Vachon d'intervenir.

M. Cannavino (Tony): Dans quel sens?

Le Président (M. Lachance): M. le député de Vachon.

M. Payne: Je pense que, pour l'intérêt du grand public, c'est important d'être très simple. Je dirais, dans un premier temps, que votre utilisation du témoignage du professeur Paquette, le responsable pour le Groupe de recherche en sécurité routière, il vous contredit. Vous l'utilisez pour vos propres fins.

Mais je vais vous lire ce qu'il dit en conclusion: «Les bénéfices prévisibles pour le Québec ? en ce qui concerne le photoradar ? outrepassent largement les inconvénients inhérents à toute intervention visant l'amélioration de la sécurité des usagers du réseau routier.» Et il dit: «L'usage judicieux de ces dispositifs ? de photoradar ? peut apporter une contribution significative à l'amélioration du niveau de sécurité. Les dispositifs de contrôle automatiques constituent des mesures peu coûteuses compte tenu de leur efficacité.» Et il continue. Je pense qu'il faut être très, très... faire bien attention avant de citer quelqu'un parce que sa conclusion vous contredit.

M. Cannavino (Tony): Je vais vous...

M. Payne: Permettez-moi?

M. Cannavino (Tony): Oui.

Le Président (M. Lachance): Rapidement, M. le député.

M. Payne: Ma question, c'est la suivante. En écoutant votre exposé, je me demandais pourquoi vous pouvez appuyer le barrage routier alcool parce que les objections que vous soulevez semblent être... pourraient être utilisables et utilisées aussi pour une autre mesure de sécurité qu'on utilise actuellement, c'est-à-dire le barrage routier alcool que vous favorisez.

Et la deuxième question à cela: Comment vous pouvez, malgré votre affirmation, avoir un patrouilleur sur le pont Jacques-Cartier ou le pont Laviolette où il n'y a pas d'accotement? Comment vous pouvez protéger la sécurité de vos patrouilleurs? N'est-ce pas plus facile d'avoir un dispositif mécanique qui peut ajouter à votre propre sécurité et à la fois, comme disent toutes les études, réduire la vitesse d'une façon dramatique?

M. Cannavino (Tony): M. le député, avec tout le respect que je vous dois, je pense que c'est vous qui me citez mal, là. Premièrement, la comparaison que vous faites avec des interventions, entre autres avec les facultés affaiblies, on est d'accord avec les barrages.

M. Payne: C'est ça.

M. Cannavino (Tony): On n'est pas en désaccord avec ça, nous autres.

M. Payne: C'est ça que j'ai dit.

M. Cannavino (Tony): On n'est pas non plus d'accord... On n'est pas en désaccord avec les anciennes opérations radars statiques. Mais je vous dis qu'on a également d'autres moyens maintenant. On a des radars qui sont au laser, avec des faisceaux qui permettent d'intercepter les véhicules, de capter la vitesse des véhicules en les suivant ou en les croisant. Ça aussi, ça peut se faire d'une façon mobile. Ça veut dire que le policier est pas obligé d'être planté dans le milieu du pont Jacques-Cartier. Je vais vous dire de quoi, il n'y a pas grand-monde qui irait là, hein? Sauf que, en ayant des patrouilles, ils sont capables justement de suivre ces gens-là qui sont en infraction et les intercepter. Ça, ça fait une différence, je peux vous dire.

Autre point, lorsqu'on nous fait la comparaison avec d'autres pays, est-ce qu'on peut rester ici? J'ai rien contre les expériences en Australie, en Norvège ou au Royaume-Uni, là, mais prenons l'expérience au Québec, en Ontario et en Colombie-Britannique. J'ai un communiqué de presse qui était sorti le 28 juin 2001 du Ministry of Attorney General. Et je vais juste vous lire ce qui est indiqué là-dessus.

«Victoria, B.C. Photoradar Program came to an end, at midnight last night, Attorney General Jeoff Plant confirmed today. Photoradar undermined public confidence in traffic enforcement. Cabinet decision to terminate photoradar reflects this Government's commitment to fairness and to the safety of the public. Direct visible policing and immediate intervention is a much more effective deterrent to speeders than getting a photoradar ticket in the mail. He added that a police officer on the scene is in a much better position to determine if a speeding driver also guilty of other offences like drunk driving or driving without proper license...»

M. Payne: M. Cannavino, vous lisez pas les études scientifiques, vous lisez des commentaires politiques, et les études ? je peux les déposer en commission ? qui contredisent formellement ce que vous dites indiquent la réduction dramatique...

M. Chevrette: C'est un engagement électoral, ça, je m'excuse.

M. Cannavino (Tony): Monsieur...

Le Président (M. Lachance): Je m'excuse, mais le temps est dépassé, même du côté ministériel, et je vais permettre maintenant, du côté de l'opposition, au député de Shefford, de reprendre les échanges. M. le député de Shefford.

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Bienvenue en commission parlementaire. J'ai bien, bien suivi votre argumentation, une argumentation bien étoffée d'ailleurs, qui a été déjà utilisée ici, hier, par l'opposition. Et donc je suis heureux de voir...

M. Chevrette: Ha, ha, ha! Bien étoffée...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brodeur: Non, je peux vous dire qu'on n'en a pas discuté avant, sauf qu'il y a... J'aimerais commenter, au point de départ, un commentaire du ministre, là, qui a l'air à avoir beaucoup de plaisir, là, lorsqu'il disait, d'entrée de jeu, tantôt, qu'il disait: Est-ce que vous voulez mettre la vie de vos membres en danger dans le «tunnel de la mort»? Je pense que la réflexion n'est pas là. Ce qu'il faut protéger, c'est le public.

Donc, les gens qui circulent dans ce tunnel-là ont droit à une protection, et je pense pas qu'encore, à date, il y ait aucun photoradar qui ait arrêté personne qui roulait à 160 km/h dans un tunnel. Donc, à ce moment-là, avec les techniques que vous avez actuellement, vous avez la possibilité de repérer ces gens-là. Pas obligé de l'arrêter dans le milieu du tunnel, là, on peut l'arrêter de l'autre côté puis ça va empêcher des dommages. Donc, je rappelle au ministre que l'objectif, c'est la sécurité routière. Puis, si on veut protéger les gens qui se promènent dans des endroits dangereux, c'est d'utiliser les méthodes sur lesquelles on peut arrêter les gens qui sont dangereux. Donc, c'est mon premier commentaire, M. le Président.

Deuxième chose, je demande ? j'ai posé cette première question là à tous les groupes qui sont passés ici depuis hier ? on sait que... Puis je vais parler des mesures, des mesures dissuasives. On sait que, lorsqu'on veut changer les habitudes, les habitudes de conduite ou les habitudes de faire de quelqu'un, on se doit d'utiliser les mesures appropriées et, selon vous, est-ce que vous pensez que l'installation de photoradars peut modifier l'habitude de conduite des automobilistes?

M. Cannavino (Tony): Premièrement, je vais dire, M. le député, que, si ça peut modifier, peut-être sur une courte distance puis peut-être pas, pour la majorité, parce que vous avez beau annoncer que vous allez entrer dans une zone de radar, écoutez bien, là, pendant quelques distances ? parce que, dans le projet de loi, on parle également de limiter puis bien afficher ? une fois ça passé, il arrive quoi? Vous venez de faire comme en formule 1 quand ils font un départ, là, O.K.? C'est parfait! Là, les lumières sont vertes, on continue.

n(12 h 10)n

Parce que pensez pas, là, que, s'il y a des photoradars sur l'autoroute, que les corps policiers, qui débordent pas d'effectifs, pensez pas qu'ils vont, en plus, doubler avec des effectifs policiers, on va vraiment être pragmatique, puis ils réagissent là-dessus, là. O.K. Ça fait juste 29 ans que je suis policier, puis je peux vous dire que ça, c'est la pratique. Si on compense avec un outil, ils vont mettre les ressources ailleurs. Donc, ça, ça va indiquer qu'il y a une zone où vous pouvez pas aller vite, mais, après ça, allez-y, il y a plus de problème là. Ça, c'en est un.

Et, quand on me réfère également... Lorsque je souligne un communiqué du bureau du Solliciteur général et qu'on me répond que ce sont des raisons politiques, bien là, j'ose espérer que leurs raisons politiques étaient louables puis qu'elles visaient la sécurité des citoyens, parce que je pense que c'est la même chose. Vos intentions, j'espère que c'est la sécurité des citoyens. Moi, j'ai pas vu là-dedans... À moins que je sois candide, je pense pas qu'un politicien a d'autres raisons que la sécurité de ses citoyens. D'ailleurs, c'est le commentaire, c'est ce qui est indiqué par le Solliciteur général de la Colombie-Britannique. Ça fait que moi, j'y voyais pas de mauvaises intentions ou des raisons purement pour des fins électorales. En tout cas, si c'est ça, écoutez, je suis candide.

Mais, si on vient aussi à un commentaire que vous faisiez tantôt, quand vous dites: On mettra pas un policier dans le «tunnel de la mort», O.K., moi, je peux vous dire de quoi: Avec les techniques qu'on a, lorsque l'infraction est constatée, le policier va intercepter le... premièrement, il va signaler. Ça veut dire que le chauffard vient de se rendre compte qu'il y a un policier en arrière de lui puis il ralentit, en partant. Deuxièmement, il va s'assurer de sa sécurité et de la sécurité du chauffard, parce qu'il va le faire immobiliser dans un endroit qui est sécuritaire. C'est comme ça que ça se passe, là.

Mais, si on me parle du «tunnel de la mort», j'imagine que ça serait pas juste un problème d'intervention policière. J'espère que vous allez constater qu'il y a une configuration qui devrait être modifiée, là, des structures, parce que ça a été fait sur la 20 dans le bout de Beaconsfield, de L'Île-Perrot, puis c'est drôle, ça a résolu le problème. Mais ça faisait combien d'années qu'on le soulignait? Moi, je pense qu'il y a également cet engagement-là.

Puis le cinémomètre photographique... Si on laissait au moins l'expérience qui se vit depuis un an avec les semi-banalisés, faire un genre de réflexion après deux ans d'expérience là-dessus et qu'en même temps on mette des gens à une table... C'est drôle, hein, mais ceux qui sont les experts de la sécurité routière... En tout cas, moi, j'ai pas été interpellé pour siéger là-dessus, mon confrère de la Fédération non plus. Ça aurait été intéressant d'avoir à une table les associations policières, les corps policiers et le ministère, autant le ministère de la Sécurité publique que le ministère des Transports. On aurait peut-être trouvé des solutions avant d'arriver à un photoradar que, lorsque vous êtes intercepté par un photoradar, vous avez l'amende, puis, lorsque vous vous faites arrêter par un policier, vous avez en plus les points de démérite. Je vais vous dire une affaire, ça va être un fouillis général, parce que force est de constater ? et ça, vérifiez les constats des différentes provinces qui l'ont aboli ? qu'il y a un taux de contestation assez impressionnant, assez impressionnant.

M. Brodeur: Merci. Une dernière question avant de passer à mon collègue de LaFontaine, parce que je m'en vais dans le même forum où le ministre est parti présentement, là. Lorsque vous parliez tantôt qu'on parlait de prétextes politiques, l'opposition est d'avis, et plusieurs personnes voient le même jeu de la part du gouvernement du Québec, que ça va surtout servir à remplir les coffres du gouvernement qu'à augmenter la sécurité routière.

Ceci étant dit, vous avez parlé tantôt de limites de vitesse. Les limites de vitesse... On sait qu'au Québec il y a des limites... Si on prend l'exemple des autoroutes québécoises, on indique une limite maximum de 100 km/h. On sait également ? il est connu, il est connu ? que la vraie limite de vitesse n'est pas 100 km/h, elle est 117, 118. On sait qu'on peut aller rouler de cette façon-là. Est-ce que vous croyez ? puis je pense que vous l'avez dit au point de départ ? qu'il serait impératif, avant de penser seulement, avant de penser à installer un photoradar, de mettre des limites de vitesse qui sont adéquates, qui sont adaptées aux besoins de ces routes-là? Parce que, là, je le disais hier...

Prenez, par exemple, si la limite de vitesse effective est de 118 sur une autoroute et, dans certains endroits, avec un photoradar... Parce que j'imagine que le photoradar devrait suivre la loi. La loi, c'est 100 km/h. Donc, dans certains endroits, on arrêterait des citoyens à 100 km/h puis, dans d'autres endroits, à 118. Donc, deux poids, deux mesures. Je pense qu'il serait impératif de revoir toutes les limites de vitesse et de faire justement peut-être une commission parlementaire et vous consulter à ce moment-là sur le processus qu'on devrait suivre et, premièrement, de faire le ménage dans les limites de vitesse, donner les ressources nécessaires aux policiers québécois et puis donner des grilles de travail qui permettraient justement, là, de préserver la sécurité du public.

M. Cannavino (Tony): Moi, je vais vous dire que ce que vous amenez est intéressant, parce qu'on parle à ce moment-là d'une étude avec des gens qui possèdent l'expertise. Et, au lieu d'arriver puis de lancer un chiffre magique d'une nouvelle vitesse, moi, je pense qu'il faut revoir ça en profondeur. Et je suis pas réfractaire à ces avenues-là, mais en autant que ça soit fait après étude, une analyse sérieuse par des gens qui s'y connaissent.

J'ai rien contre les chercheurs ou les scientifiques. J'ai rien contre ça, mais il faudrait également consulter ceux qui l'appliquent et ceux qui constatent le comportement des conducteurs sur la route. Et ça, on parle, entre autres, des différentes associations. Là, je vous parlais des associations policières. On entendait les associations, les chauffeurs de taxi, le camionnage... Moi, je pense que la consultation est importante. La table de travail, elle devrait se tenir. Et je vous parlais également de différentes méthodes nouvelles: la patrouille de retenue est quand même assez efficace aussi, là.

Le Président (M. Lachance): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui. Merci, M. le Président. Justement, vu qu'on parle d'autres méthodes, tout à l'heure, je disais par-dessus la table au ministre qu'il y avait des méthodes qui existaient ailleurs, qui sont un peu mixtes, là, ce que le ministre propose et ce que, vous, vous proposez.

Vu qu'on parle de surveillance d'endroits très spécifiques, très dangereux, difficiles d'accès ou d'opération pour les forces policières, à part se promener dedans et puis avoir les systèmes de radar mobiles dans les voitures, est-ce qu'il y aurait pas... il serait pas intéressant d'avoir des appareils fixes dans un endroit et qui... reliés avec la technologie moderne à un véhicule de police qui, lui, est stationné dans un endroit où l'interception est possible et, lorsque ça flashe... lorsque la photo se prend, l'infraction est constatée, l'information est envoyée par ondes courtes, bien sûr, dans le véhicule du policier qui, lui, l'a sur son écran et procède en zone sécuritaire à l'interpellation? Est-ce que, à ce moment-là... Parce que je vois pas ça dans le truc du ministre et je pense que ça...

Si le but recherché est vraiment de sécuriser ces zones-là, je crois qu'on devrait aussi regarder cette possibilité. Je sais que la gendarmerie... les carabinieri italiens le font, la Gendarmerie nationale française le fait. Je ne sais pas pour les corps de police allemands, mais je crois qu'en Allemagne aussi il arrive régulièrement qu'on voit sur les routes des trépieds où c'est marqué «radar» et il y a aucune voiture de police, mais à 1 km, 2 km plus loin, alors que c'est... l'interception est plus facile. Que pensez-vous de... En tout cas, j'aurais aimé ça qu'on arrive et dise: On est là pour vous écouter, amener des solutions intermédiaires alternatives. Moi, j'en amène une, là. J'amène un exemple, là. Est-ce que vous pensez que ça pourrait être une alternative intéressante que le ministre devrait amener dans le projet de loi?

M. Cannavino (Tony): D'ailleurs, M. le député, c'est ce que je soulignais tantôt. Mon objection au cinémomètre photographique, c'est que ça faisait pas stopper l'infraction. Mais, si vous avez, comme vous le dites, là, un cinémomètre photographique et, dans les, je sais pas, 100 m ou 200 m plus loin, il est intercepté, vous arrêtez une infraction, et vous constatez en plus si ça origine pas de d'autres délits. Ça aussi, c'est important. Moi...

C'est pas le mécanisme que je suis en désaccord. C'est pas le mécanisme, mais c'est par rapport aux objectifs visés puis qui sont louables. Quand le ministre dit, là: «Il faut réduire les accidents puis la gravité des accidents», je partage entièrement vos objectifs là-dessus. Mais ce que je me dis, le cinémomètre non appuyé de l'interception, ça peut pas fonctionner. Ça ne peut pas fonctionner. Pourquoi? Parce que vous permettez que cette infraction-là se continue. Vous mettez quand même en danger les gens parce que... c'est bien beau que ç'a cliqué, là, mais la personne probablement s'en est même pas rendu compte, donc continue soit à conduire d'une façon dangereuse ou continue à vitesse folle. Il est pas intercepté. Moi, je pense qu'il y a ça aussi.

M. Chevrette: ...me permettez-vous une petite question?

M. Gobé: Oui, allez-y, M. le ministre.

M. Chevrette: Je vous donnerai le...

M. Gobé: Oui, oui. Pas de problème. Non, non. On est là pour travailler.

M. Chevrette: Savez-vous qu'il y a des technologies qui peuvent même avertir qu'il rentre dans une zone de radar pour lui dire? Puis il y a même des tableaux variables comme quoi il vient de commettre une infraction? Et puis il y a des panneaux immenses qui vont annoncer que c'est dans une zone de radar. Il faut prendre le monde pour des gens intelligents quand même.

M. Cannavino (Tony): Regardez bien, là. Je pense pas que les gens sont imbéciles, loin de là, puis vous non plus. Ce que je vous dis, c'est celui qui commet l'infraction, s'il sait qu'il est pas intercepté, il continue.

M. Chevrette: Qu'est-ce qui nous empêche de travailler conjointement et puis que, plus loin, dans des zones sécuritaires, il y en ait, des interceptions? Sauf que sur le pont Laviolette, quand il tourne à droite en bas, vous avez aucune chance de l'arrêter nulle part. C'est ça qu'est le problème.

n(12 h 20)n

M. Cannavino (Tony): M. le ministre. M. le ministre, il faut penser qu'il y a d'autres technologies, il y a d'autres méthodes maintenant. Nous avons des radars au laser. Nous avons des véhicules semi-banalisés. Nous avons des motos... On a maintenant des outils de travail. La preuve, vous l'avez dit. En fin de semaine, la fin de semaine de la fête du Travail, ç'a été un succès, hein? Je veux dire, un succès, il y a quand même eu des accidents. Non, mais vous l'avez quand même souligné aujourd'hui, n'est-ce pas? Mais c'est drôle, on n'avait pas de cinémomètre photographique. Mais, si la personne qui excède la vitesse, là, puis qui conduit d'une façon dangereuse, si on l'intercepte pas, bien, justement, ce qui arrive à ce moment-là, elle met quand même en danger sa vie et la vie des autres. Si cette personne-là est interceptée, si vous me dites que le cinémomètre photographique doit être en opération avec une équipe d'intercepteurs, je vais changer ma façon de voir les choses...

Une voix: ...

M. Cannavino (Tony): ...pas cette... Oui, mais regardez bien, là, la différence entre «ça peut se faire» et «ça doit être avec un intercepteur dans la zone sécuritaire»... je vais partager votre opinion.

M. Gobé: Mais, M. Cannavino, je pense que c'est un bon point, et, moi, s'il y a une chose avec laquelle je suis d'accord avec le ministre, c'est: Il faut trouver les moyens de réduire ces accidents. Ça, je pense, tout le monde est d'accord ici, vous en particulier, puisque vous êtes les artisans, hein, de ces campagnes-là.

Évidemment, on diffère un peu sur les moyens et sur les choses, puis le ministre nous disait: On est ici pour écouter, pour amener des solutions, puis amenez-nous des... Bon. Ce que vous mentionnez, ce que vous amenez tout à l'heure: Pourquoi on commencerait pas tout d'abord, maintenant justement, à équiper les forces policières de certains appareils qu'ils installeraient lors d'opérations sur les lieux dangereux reliés par la technologie des ondes à une voiture qui est à 500, 600 m ou 300 m en zone sécuritaire et qu'on fasse aussi avec ça déjà des projets-pilotes pour voir si ç'a déjà un impact?

M. Chevrette: ...

M. Gobé: Puis il y a pas besoin... Je suis pas sûr même qu'on soit obligé de changer la loi pour faire ça.

M. Chevrette: Je pense que oui.

M. Gobé: Oui, mais, en tout cas...

M. Chevrette: Ça nous oblige pareil, sauf qu'il faut bien comprendre qu'il y a des endroits où, même, il n'y a pas de zone sécuritaire pour celui... il pourrait vous échapper. Je vous donne un exemple, le pont de Trois-Rivières. La zone sécuritaire est au-delà de la ceinture. Vous connaissez la configuration. C'est dans ce sens-là que je dis: Il faudrait une combinaison des deux. Là où il y a une zone sécuritaire, il pourrait y avoir interception. Là où il n'y a pas de zone sécuritaire, on n'a pas bien, bien le choix, il faut lui dire qu'il a commis une infraction. Et c'est pas tout le monde, ça. Sauf que je peux vous dire une chose, le père de famille qui va prêter son auto à son petit gars et puis que, le petit gars, il va avoir pris la ceinture puis il vous a échappé, il échappera pas à l'amende. Je peux-tu vous dire que c'est persuasif, le père vis-à-vis son fils, en mosus? Regardez les deux aspects puis il y a possibilité de combiner les efforts pour réaliser quelque chose d'intéressant pour les vies humaines.

M. Cannavino (Tony): M. le ministre, avec l'expertise que possèdent les policiers au Québec, O.K., moi, je peux vous dire que je ne peux imaginer un endroit où on ne pourrait pas intercepter le véhicule à un certain endroit. Qu'on parle du pont de Trois-Rivières, le pont Laviolette, il y a des endroits pour les intercepter, ces gens-là, à la sortie. C'est pas un problème. Pourquoi? Parce qu'on est capable de faire différentes opérations, que ça soit pour facultés affaiblies ou autres. Donc, il y a une zone où, à la sortie du pont, vous mettez des signaux, une signalisation qu'il y a un barrage et tranquillement les gens vont réduire leur vitesse puis ils vont s'immobiliser à un endroit. Ils vont être avisés qui était en infraction. Et, je vous le dis, si on met automatiquement, O.K., l'opération cinémomètre accompagnée d'interception, je pense que ça, ça devient maintenant un outil qui peut être efficace, qui va justement empêcher les gens de continuer l'infraction. Puis, si la personne a volé le véhicule, on est capable de l'intercepter; si la personne est en état d'ébriété, on l'arrête.

L'autre point qu'il faut également continuer, si on a ça, c'est d'y attacher les points de démérite, parce que, là, on intercepte. Et je peux vous dire que certains sont beaucoup plus à l'aise de payer des amendes si ça touche pas les points de démérite.

Le Président (M. Lachance): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui. Alors, si je comprends bien, M. le Président, je pense qu'on a un point commun maintenant, c'est que, si on pouvait utiliser des appareils fixes, à condition qu'ils soient reliés à une patrouille d'interception ? ça peut 500 m, 800 m; c'est vrai qu'un pont, ça peut être plus long, mais les technologies modernes le permettent, et je l'ai vu moi-même, hein, dans la réalité ? je pense qu'on aurait déjà un premier consensus qui peut-être tendrait à régler certaines situations dans certains endroits ? je ne dis pas toutes, là ? où c'est problématique ou compliqué ou dangereux pour les policiers de faire leur travail, ça serait très rapidement que les corps policiers puissent acquérir ces appareils et l'information qui vient avec pour les mettre en opération.

M. Chevrette: D'ailleurs, on a déjà fait la discussion, par exemple, avec les membres de la SAAQ et les gens du ministère des Transports pour travailler avec la Sécurité publique pour contrer le phénomène Ferrari, qu'on appelle. Je sors d'une zone de radar et là j'écrase. Ça, déjà, c'est... Au niveau des ministres, la discussion est faite; la discussion est commencée au niveau des sous-ministres. Et sans doute qu'à la Sûreté il va y avoir un suivi de ça, sinon ça donne rien. On veut changer des mentalités. Pour changer des mentalités, il faut pas que ça dure exclusivement sur 40 vg, là.

M. Cannavino (Tony): Exact. En plein ça.

M. Chevrette: Il faut que tu saches que c'est sur 1 km, 2 km, 3 km de route, s'il y a 3 km à faire.

M. Cannavino (Tony): M. le ministre, l'effet Ferrari que vous parlez, M. le ministre, là, on le retrouve également pas seulement lorsque les zones qu'on mettrait là, zone de radar, vous l'avez également, le phénomène, lorsque vous avez deux camions remorques qui se suivent côte à côte pendant 3 km, puis tout le monde s'impatiente. Puis là, à un moment donné, quand il décide que là: Ah bien, je pense qu'il est temps, parce qu'il avait 3 km de plus que l'autre véhicule, ça fait que ça lui a pris à peu près 3 km pour le dépasser, puis il se tasse, je peux vous dire de quoi: Là, vous assistez à une piste de course. Pourquoi? Parce que tout le monde est exacerbé là-dedans.

Donc, oui, il y a des choses à regarder. Juste le simple fait d'en discuter ensemble, il y a des pistes intéressantes qui se développent ici. Ç'aurait été intéressant d'avoir un genre de forum, une table de travail avec les gens qui possèdent cette expertise-là. Le phénomène, entre autres, des camions, vous le savez, c'est sérieux, ce phénomène-là. On pourrait arriver puis peut-être parler du phénomène des vitesses, comment on peut...

M. Chevrette: ...table, M. Cannavino. Je ne veux pas vous... La police est à la table, là. Je ne dis pas le Syndicat de policiers, mais la police est à la table de concertation.

M. Cannavino (Tony): M. le ministre, regardez justement, l'Association des chefs de police, vous savez quand même que ces gens-là ont des contraintes depuis des années. Il faut les comprendre que, au niveau budgétaire, ils nagent pas dans l'argent. Et, lorsqu'on leur présente un cinémomètre, premièrement, c'est moins de ressources puis il y a des rentrées de billets. Et il faut les comprendre puis je vous dis...

M. Chevrette: ...un endroit dans le monde où il y a eu des mises à pied de polices là où ils ont utilisé les cinémomètres.

M. Cannavino (Tony): Bien, j'écoutais, entre autres...

M. Chevrette: Aucun endroit dans le monde où on a utilisé les cinémomètre n'a provoqué de mise à pied.

M. Cannavino (Tony): Je ne parle pas de mise à pied, M. le ministre. Ce que je vous dis, à ce moment-là: Les ressources sont mises ailleurs, O.K.? Ailleurs. Ils ne doublent pas, ne doublent pas les opérations. C'est ça, le phénomène. Ils sont tellement en effectifs sur le fer partout que, s'ils ont ça, des cinémomètres photographiques, soyez certains que les policiers qui étaient à la sécurité, à la sécurité du territoire, la surveillance du territoire, ils vont être affectés à d'autres dossiers. Ça, c'est le phénomène.

M. Chevrette: Merci.

Le Président (M. Lachance): Alors, une courte.

M. Gobé: ...la parole à mon collègue. Il a une question, une dernière question à poser.

Le Président (M. Lachance): Une courte question, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Deux, trois minutes, sur un autre... sur un autre moyen, un autre outil de travail qui n'a pas été abordé dans le cadre de cette commission parlementaire ci, mais le limiteur de vitesse, vous savez le dispositif qu'on installe dans un véhicule, là, pour supprimer. Avez-vous une opinion là-dessus?

M. Cannavino (Tony): Écoutez, nous avons pas une réflexion complète là-dessus. Ce qu'on a eu à discuter, entre autres, c'est les fameux... ce qu'on appelait «les bavards» que, souvent, les compagnies installaient dans les véhicules et qui permettent justement de s'assurer que la vitesse est respectée. Je comprends la difficulté d'imposer à des compagnies, que ce soit à GM, Honda ou qui que ce soit, des limitateurs de vitesse, mais je peux vous dire qu'on pourrait quand même arriver peut-être avec les camionneurs justement soit à réduire une vitesse, si c'était ça, la conclusion de l'étude ou de la table de travail, ou peut-être mettre justement ces fameux bavards là qui feraient en sorte que le policier pourrait constater... Est-ce que ça serait ça? Je le sais pas. Je pense que ça mérite une analyse.

M. Chevrette: Ils l'ont, certains pays d'Europe déjà.

M. Cannavino (Tony): Oui.

M. Chevrette: Ils contrôlent à la fois la vitesse, le temps, ce qui crée moins de problèmes pour ce qui est de l'horaire de travail. Les gars peuvent pas conduire des 15 heures, 16 heures en ligne là-bas. Ils savent le temps d'arrêt, où est-ce qu'ils sont arrêtés.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre, moi, j'ai des problèmes avec la gestion du temps.

M. Chevrette: Ah, excusez.

M. Gobé: C'est tellement intéressant, M. le Président.

Le Président (M. Lachance): Dernière intervention.

M. Ouimet: Je suis tout à fait conscient de ce qu'a dit le ministre, mais c'est parce que le moyen qu'on a au Québec pour assurer une meilleure sécurité routière dépend toujours du comportement du conducteur et puis, par la suite, des sanctions pour sanctionner son comportement fautif. On n'a pas évalué d'autres dispositifs, d'autres possibilités qui existent. Il y a de la documentation là-dessus. Il y a eu un colloque au mois de juin qui l'a élaboré et, moi, je pense que c'est un peu court que de dire que ça relève de la juridiction fédérale.

Au niveau des fabricants d'automobiles, oui, peut-être, mais il y aurait façon de, je pense, installer des dispositifs sur des véhicules si c'est véritablement le but poursuivi par le ministre et par son gouvernement. Mais la conséquence, c'est sûr que, dès le moment où tu limites la vitesse partout sur le territoire de la province, ça ne génère plus de revenus pour l'État parce qu'il n'y a plus lieu d'imposer des constats d'infraction au niveau des hautes vitesses. Le problème est peut-être là.

M. Gobé: On n'aurait plus de revenu.

M. Chevrette: On a un projet sur la table avec le fédéral pour faire un projet-pilote justement avec des types d'équipements. Et on devrait finaliser ça assez prochainement. Vous savez qu'avant d'étendre ça du jour au lendemain, il y a certaines compagnies qui disent: Écoute, tu m'obliges à. On commencerait par un projet-pilote et on aurait probablement un genre de technologie qui pourrait se situer comme celle du Japon ou bien celle qu'on retrouve en Europe.

Le Président (M. Lachance): Alors, merci, messieurs, de votre participation aux travaux de cette commission. Et, là-dessus, je suspends les travaux jusqu'à 14 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 30)

 

(Reprise à 14 h 1)

Le Président (M. Lachance): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! La commission des transports et de l'environnement reprend ses travaux. Je vous rappelle que le mandat de la commission est de tenir des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières sur le projet de loi n° 17, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et le Code de procédure pénale concernant le cinémomètre photographique.

Alors, j'indique aux personnes présentes dans la salle de bien vouloir fermer leur téléphone cellulaire pendant la séance, s'il vous plaît. Je vois que les policiers sont des gens ponctuels. C'est très bien.

M. Chevrette: Le ministre aussi.

Le Président (M. Lachance): Ha, ha, ha! Alors, nous allons débuter avec la Fédération des policiers et policières municipaux du Québec et la Fraternité des policiers de la CUM. J'invite le porte-parole à se présenter ainsi que les personnes qui l'accompagnent. Bienvenue.

Fédération des policiers et policières municipaux
du Québec (FPMQ) et Fraternité des policiers
et policières de la CUM (FPCUM)

M. Prud'Homme (Yves): Alors, bonjour. Merci, M. le Président. Yves Prud'Homme, président de la Fédération des policiers et policières municipaux du Québec. À ma droite, Georges Painchaud, président de la Fraternité des policiers et policières de Montréal; et, à ma gauche, Martin Roy, qui est directeur des relations de travail à la Fraternité des policiers et policières de Montréal.

Cela étant dit, M. le Président, M. le ministre, MM. et Mmes les députés...

Le Président (M. Lachance): ...les 15 minutes rituelles dont vous disposez pour nous convaincre.

M. Prud'Homme (Yves): Oui. J'allais vous souligner qu'étant donné que la Fraternité s'est jointe à la Fédération, ce qui va vous permettre de terminer votre session un peu plus tôt, peut-être qu'on me donnerait un petit cinq ou 10 minutes de plus, sinon il aurait fallu entendre les deux associations.

Ceci étant dit, nous remercions la commission des transports et de l'environnement de nous donner la possibilité d'exposer notre point de vue sur le projet de loi n° 17. La Fédération des policiers et policières municipaux du Québec est un regroupement d'associations syndicales qui compte plus de 8 500 policiers et policières municipaux dans la province, incluant ceux de la Communauté urbaine de Montréal. La Fraternité des policiers et policières de Montréal s'est jointe à la Fédération pour la préparation et la présentation du présent mémoire.

Lors de notre consultation... lors de la consultation générale sur le livre vert concernant la sécurité routière au Québec, tenue par cette commission au mois de juin 2000, nous avions exprimé nos objections à l'utilisation du cinémomètre photographique. Nous avions également mentionné qu'il fallait revoir notre approche en matière de sécurité routière en privilégiant la prévention plutôt que la répression. Le cinémomètre photographique ne répond pas à cette approche. De plus, il comporte de tels inconvénients que nous ne comprenons pas qu'il soit encore à l'ordre du jour. Nous réitérons donc les commentaires que nous formulions dans notre mémoire sur le livre vert en précisant notre position sur différents aspects de la question.

La Fédération n'a jamais été favorable ? et j'ajouterais peut-être ne sera jamais favorable en ce contexte que je connais ? au cinémomètre photographique. Au lieu d'investir dans les ressources humaines et dans des opérations policières qui pourraient répondre aux attentes on préfère recourir à un service d'une technologie contestable à plusieurs égards. Nous ne pouvons faire abstraction des grandes vicissitudes du système proposé, soit l'imputation d'une responsabilité absolue au propriétaire du véhicule, la négation du droit à une défense pleine et entière, l'atteinte à la vie privée et l'instauration d'un régime à deux niveaux de sanction en ce qui concerne les points d'inaptitude.

Sommes-nous prêts à sacrifier les règles fondamentales de notre système de droit pénal, soi-disant pour réduire la vitesse et le taux d'accident, alors que des opérations policières bien ciblées permettraient de meilleurs résultats sans remettre en question notre système de justice? À cette nomenclature d'inconvénients qu'il faudrait subir pour pouvoir recourir au cinémomètre photographique on devrait aussi ajouter ceux qui seront générés par l'obligation de ne pas obstruer la plaque d'immatriculation.

L'article 251, suggéré par le projet de loi n° 17, interdit toute forme d'obstruction de la plaque d'immatriculation des véhicules routiers, ce qui rend problématique l'utilisation d'un simple support à vélo, d'une roulotte ou tente-roulotte, d'une remorque domestique ou bateau. Tout véhicule doté d'un tel équipement serait en infraction, ce qui est plutôt incongru. Encore une fois, jusqu'où faut-il aller pour permettre l'utilisation de cette machine?

Nous ne sommes pas contre l'utilisation de mesures visant à contrôler la vitesse et à réduire le taux d'accidents, à condition que ce soit fait suivant les règles de l'art. À cet égard, on ne peut que constater que la machine n'est pas encore mûre pour remplacer les policiers. Le contrôle de la vitesse par des policiers revêt de nombreux avantages qu'on ne doit pas ignorer. D'abord, il y a un contact direct avec le citoyen qui est informé immédiatement de son infraction. Avec une caméra, le citoyen devra attendre plus de 15 jours avant de recevoir un constat d'infraction, ce qui compromet son droit à une défense pleine et entière.

Il sera impossible pour lui de situer avec précision l'événement pour contester valablement une machine présumément fiable. Comment ce citoyen peut-il savoir si, à telle heure ou à telle date, à tel kilomètre de route, il roulait à telle vitesse alors qu'il n'a pas été intercepté au moment même de l'infraction reprochée? Avec un policier, le constat est concomitant à l'infraction et le conducteur est identifié. On n'a donc pas besoin de faire supporter l'infraction par le propriétaire du véhicule. Il est tout à fait inconcevable dans notre système judiciaire que l'on envisage qu'une personne peut être punie par la faute d'une autre.

Que fera-t-on des entreprise qui ont des parcs de véhicules, qu'il s'agisse d'une compagnie de transport, de location ou autres? Il est tout aussi impensable de les exclure du régime applicable que de les inclure. On peut imaginer le chaos sur la route si une catégorie importante de véhicules pouvait bénéficier de passe-droit. On peut aussi entrevoir le casse-tête de ces entreprises dans la gestion du système proposé. Bien sûr, on ne va pas jusqu'à imputer des points d'inaptitude au propriétaire du véhicule. Pourtant, qu'il s'agisse d'argent ou de points, le principe devrait être le même. S'il est inconcevable de sanctionner le propriétaire au chapitre des points d'inaptitude, il est tout aussi illogique de lui faire assumer une amende.

Par ailleurs, le système de points de démérite est l'élément le plus dissuasif des excès de vitesse, bien plus que l'amende. C'est lui qui atteint le récidiviste et finit par le calmer. Avec le cinémomètre photographique, on se prive de cet élément en plus de discriminer les citoyens selon que le constat a été émis par un policier ou pas. L'intervention policière conventionnelle a aussi l'avantage de permettre un contrôle des conducteurs et des véhicules. En effet, le policier vérifiera l'état du conducteur et son dossier au Centre de renseignements policiers, il examinera également le permis de conduire, les enregistrements, le certificat d'assurance et la condition du véhicule. En accentuant la surveillance policière conventionnelle, on améliorerait le contrôle des conducteurs et des véhicules.

Les avantages ne manquent donc pas de favoriser la surveillance policière conventionnelle alors que des inconvénients majeurs minent la crédibilité du cinémomètre photographique. La vue d'un véhicule de patrouille est l'élément le plus dissuasif pour contrer la vitesse. Envoyer un constat par la poste plutôt que d'intercepter le contrevenant, ce n'est pas de la prévention. Le conducteur qui s'est fait doubler par le contrevenant photographié ne sera pas informé qu'un constat a été émis. La prochaine fois, ce sera lui le contrevenant. Un même conducteur pourrait être photographié à trois reprises dans une même journée et l'apprendre 15 jours plus tard. Entre-temps, il aura continué de rouler à une vitesse excessive au détriment de la sécurité alors qu'il aurait possiblement ralenti s'il avait été intercepté à la première occasion.

n(14 h 10)n

Certaines municipalités se sont dotées d'escouades de circulation efficaces. Dans les mois suivant l'instauration de ces escouades, on notait une diminution marquée du nombre de contrevenants, la présence soutenue de véhicules de police ayant un effet dissuasif convaincant. N'est-ce pas là le but recherché, soit de réduire la vitesse et non pas de collecter les amendes? Mais, dira-t-on, le cinémomètre photographique sera installé uniquement dans des endroits difficiles à surveiller de façon conventionnelle. À notre avis, c'est un leurre pour faire passer la mesure et en étendra l'application par la suite. Il n'existe pas d'endroit qui ne peut être surveillé, il y a plutôt une absence de volonté ou une négligence totale à faire effectuer la surveillance policière qui s'impose à certains endroits. Le boulevard Métropolitain à Montréal représente un bel exemple. On ne parlera pas d'excès de vitesse aux heures de pointe, puisqu'il est toujours congestionné, mais, quelle que soit l'heure, cette artère ne reçoit pas la surveillance policière dont elle devrait bénéficier. Si les véhicules de la Sûreté du Québec étaient plus visibles, les conducteurs changeraient rapidement leurs habitudes.

Il faut donc privilégier la prévention et à l'occasion utiliser la répression dans cette même optique de prévenir la délinquance par des opérations visibles et bien planifiées. Qu'on ne vienne surtout pas nous dire que c'est impossible de contrôler la vitesse sur le boulevard Métropolitain ou ailleurs, ce n'est pas le cas. Après deux mois de régime de surveillance suivie, on peut être certain que les automobilistes auront levé le pied. Il suffira par la suite de maintenir une certaine constance pour les convaincre de continuer à se discipliner.

On propose l'installation de ces appareils aux abords des chantiers de construction. Croit-on vraiment que la signalisation qui annonce l'utilisation des cinémomètres photographiques aura plus d'impact qu'un véhicule de patrouille bien en vue sur les lieux? Par ailleurs, en quoi ces lieux seraient-ils si difficiles à faire surveiller par une patrouille conventionnelle? Sur le chantier de l'autoroute 13, on a constaté occasionnellement des véhicules de la Sûreté du Québec qui surveillaient la vitesse avec un cinémomètre. La seule vue du véhicule faisait ralentir la vitesse des conducteurs et sécurisait le chantier. Le problème de la sécurité sur les chantiers de construction ne réside dans l'incapacité de les surveiller. En réalité, la présence policière n'est tout simplement pas assez soutenue. Aux États-Unis, il n'est pas rare de voir un véhicule-patrouille présent en permanence sur un chantier de construction. L'effet est assuré, tous ralentissent.

Le cinémomètre photographique n'aura jamais l'impact d'une présence policière. On collectera une amende à coup sûr, mais aura-t-on pour autant sécurisé les travailleurs et les autres automobilistes? Une surveillance policière accrue aura certainement raison de la vitesse sur nos routes et dans nos rues. Plus il y aura d'opérations policières, plus les conducteurs se montreront prudents. À la longue, l'investissement sera rentable à tous points de vue.

Quant au cinémomètre photographique, il sera toujours perçu comme une machine à piastres et c'est exactement le portrait qu'en fait le projet de loi n° 17. Avant de recourir à pareil artifice, que l'on dote d'une politique réelle de surveillance routière à l'échelle de la province, que l'on révise les amendes et le système de points d'inaptitude en ciblant davantage les infractions les plus dangereuses et susceptibles de causer des accidents.

Si le cinémomètre photographique peut paraître attrayant à prime abord, il faut y regarder de plus près pour remarquer à quel point cette mesure n'est pas souhaitable compte tenu de ses inconvénients. L'objectif de sécurité que l'on dit rechercher serait atteint de façon plus efficace en ayant recours aux ressources conventionnelles. De toute évidence, on semble ne pas vouloir investir dans ces ressources, ce que nous ne pouvons que déplorer. Il est d'ailleurs frustrant pour les policiers et policières de constater que leurs dirigeants semblent empressés d'investir dans cette machine alors qu'ils leur refusent des équipements beaucoup utiles à leur travail et à leur sécurité, comme par exemple des caméras dans les véhicules de patrouille. Évidemment, ça ne rapporte pas.

En conclusion, si l'on veut vraiment améliorer la sécurité publique sur nos routes, on doit prendre les meilleurs moyens. Et le meilleur moyen, c'est la présence policière. Par ailleurs, les conditions exigées pour l'utilisation du cinémomètre photographique sont des accrocs majeurs à nos règles de justice. Il ne faut pas se surprendre qu'à ces conditions le cinémomètre photographique soit perçu comme une source de financement plutôt qu'un outil de prévention. Étonnamment, on persiste dans cette voie en faisant abstraction des valeurs que nous prônons comme société. Nous ne pouvons... nous nous opposons à l'instauration du cinémomètre photographique, puisqu'il ne s'agit pas d'un outil de travail valable pour les policiers, et ni pour le public, et ni en termes de sécurité.

En terminant, nous tenons à réitérer notre suggestion au ministre, qui a été faite en juin 2000, et nous lui demandons d'entreprendre une révision du Code de la sécurité routière, notamment en ce qui a trait aux limites de vitesse qui sont, par exemple, les mêmes pour tous genres de véhicules, automobilistes ou véhicules lourds, l'échelle des points de démérite, les amendes et peut-être d'autres. Je remercie les membres de la commission de votre attention et nous sommes disposés à répondre à vos questions.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. Prud'Homme. Vous êtes bien entré dans le temps qui vous était imparti.

M. Prud'Homme (Yves): J'essaie.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre des Transports, pour amorcer cette période d'échanges.

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je comprends que le mémoire a été écrit en ne tenant pas compte des déclarations d'ouverture de la commission et en ne tenant pas compte des groupes qui ont passé devant vous et auxquels on a donné des réponses sur plusieurs points. Je pense, entre autres, aux propriétaires de location, aux garagistes, aux concessionnaires et aux chauffeurs de taxi, parce qu'on a tout réglé ça en cours de route en disant qu'on présenterait des infractions... Je le comprends donc. C'est pas un reproche que je fais parce que c'est pas sur ça que vous avez eu à vous préparer, mais je dois constater que vous avez plusieurs passages qui sont passés dus à cause du fait que déjà on a accepté des recommandations, ayant dit, dès le départ, que c'est avec une ouverture d'esprit qu'on regarderait chacun des mémoires, comme on l'a fait pour le président des officiers de la Sûreté du Québec préalablement cet avant-midi. Donc, je ne reprendrai pas tous les points: propriétaires, locataires, concessionnaires, taxis, etc., sauf que je voudrais nuancer vos propos.

Vous semblez dire que du cinémomètre photographique avec présignalisation n'a aucun impact psychologique. Moi, je m'excuse, mais je m'inscris en faux là-dessus. Quand je m'en vais sur la route puis que c'est marqué signalisation aérienne, tu y penses. Quand tu... Puis je suis loin d'être le plus brillant des Québécois. Puis quand il y a un panneau... Le gars de Shefford dit ça, mais je me considère supérieur à lui par exemple!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: En ce qui regarde les panneaux de signalisation. Quand je regarde les panneaux de signalisation, quelqu'un de moindrement intelligent ? même pas un haut quotient intellectuel ? puis qui a une pancarte assez majestueuse devant lui puis qui rentre dans une zone de radar, avec tout le respect que j'ai pour vos propos ? puis je vous reconnais le droit d'écrire ce que vous voulez ? venez pas me dire sincèrement que ça l'a aucun effet. Ç'a pas de bon sens. C'est faire injure à l'intelligence humaine que de dire ça, très honnêtement. Donc, un panneau de signalisation disant qu'il y a un radar, je m'excuse, ç'a un effet psychologique sur la très grande majorité des citoyens, sauf sur une minorité. Mais affirmez pas ex cathedra parce que vous seriez un pape non catholique. Vous avez sûrement pas le don de l'infaillibilité là-dessus. Parce que j'ai fait toutes mes études en psychologie. Puis, en psychologie, on sait très bien qu'il y a des influences externes qui réagissent sur le psychologique, sur le mental. Donc, affirmez pas ça. À mon point de vue, vous diminuez la valeur de votre mémoire.

M. Prud'Homme (Yves): Je peux pas répondre à ça tout de suite?

M. Chevrette: Ah! vous pouvez tout de suite, c'est pas grave, en autant que vous prenez pas toutes mes minutes parce que j'ai des questions à la fin.

M. Prud'Homme (Yves): Bien, O.K. Je vais essayer d'y répondre tantôt d'abord.

M. Chevrette: Non, non. Vous pouvez y aller.

M. Prud'Homme (Yves): Oui?

M. Chevrette: Oh oui!

M. Prud'Homme (Yves): Bien, d'abord, d'entrée de jeu, lorsqu'on inscrit dans notre mémoire que, quant à nous, c'est pas un instrument ou un moyen valable, ce n'est pas dans l'immédiat ou à court terme. D'abord, il faut regarder l'objectif qu'on poursuit par l'instauration d'un moyen semblable. Il est exact de prétendre qu'un cinémomètre peut avoir un certain effet à court terme, mais ce n'est pas la même réalité chez tous les citoyens. Étant donné qu'on ne peut pas implanter avec seulement le cinémomètre photographique l'élément le plus dissuasif qui existe, qui sont les points d'inaptitude et de démérite, quelqu'un qui a suffisamment les moyens, le cinémomètre photographique... Il va peut-être ralentir un peu mais il va peut-être un peu s'en fouter à la longue. C'est ça que je veux vous faire comprendre.

Lorsqu'on a discuté... lorsqu'on a inscrit dans notre mémoire qu'on n'atteint pas l'objectif de la sécurité sur nos routes, il y a une certaine catégorie de citoyens, de conducteurs, parce qu'on n'a pas l'imposition de points d'inaptitude à son permis et qu'ils ont les moyens de payer les amendes, ils vont passer outre. C'est ce qu'on veut tout simplement vous faire comprendre.

Deuxièmement chose. En Colombie-Britannique ? on a conversé avec nos confrères ? c'est vrai qu'elle a eu un effet à court terme, M. le ministre ? c'est ça qu'il faut comprendre ? mais, lorsqu'on parle d'une politique globale, d'une approche globale pour améliorer la sécurité sur nos routes, est-ce qu'on songe uniquement à court terme ou bien donc si on a un plan qui est global...

n(14 h 20)n

M. Chevrette: Mais là-dessus...

M. Prud'Homme (Yves): ...et à long terme? C'est ce qu'on veut tout simplement.

M. Chevrette: De façon pointue, sur la Colombie-Britannique, à court terme, M. Prud'Homme...

M. Prud'Homme (Yves): Ça a été efficace.

M. Chevrette: Si vous sauviez 20 % des vies humaines à court terme, comme ils l'ont fait en Colombie-Britannique, ça vaut pas la peine, même à court terme, de sauver des vies?

M. Prud'Homme (Yves): Savez-vous qu'est-ce qui s'est passé en B.C.?

M. Chevrette: C'est un engagement ? vous me le montrerez pas là-dessus ? c'est un engagement électoral qui a fait qu'ils ont abandonné ça.

M. Prud'Homme (Yves): Je m'excuse, il y a plus que ça.

M. Chevrette: C'est de la petite politique. Parce que 20 % de vies humaines de moins en décès puis 20 % d'accidents graves avec séquelles graves, pour moi, que ce soit à court terme, c'est tant mieux. Puis, si on est capable de l'étendre à long terme, c'est encore tant mieux! Là-dessus, je vous demanderais de peser vos mots.

M. Prud'Homme (Yves): M. le Président, je voudrais juste souligner au ministre des Transports que c'est vrai qu'en B.C. ça a été un engagement politique. D'ailleurs, toutes les provinces et tous les États américains l'ont enlevé parce qu'il y a eu des pressions publiques. Alors, si le ministre veut maintenir qu'effectivement c'est politique, c'est vrai. Le gouvernement actuel est péquiste et les libéraux, aux prochaines, vont faire un engagement politique. Et, s'ils prennent le pouvoir, ils vont l'abolir. Ils vont faire ce que M. Harris a fait en Ontario et ce que le ministre, le premier ministre en B.C. a fait.

Mais il y a aussi une autre chose. Quand je dis que c'est à court terme, c'est qu'à moyen terme il y a plus que ça qui a joué. C'est que les citoyens le savaient et, parce qu'ils n'étaient pas interceptés et parce que l'infraction était continuelle, quand ils dépassaient la fameuse zone, et là ils appuyaient sur le champignon. C'est ça que je veux tout simplement vous dire et vous souligner.

Or, c'est vrai qu'il faut reconnaître ? et je veux pas faire une insulte à l'intelligence du ministre, M. Chevrette ? c'est vrai, il y a eu, il y aura un effet premier, de court terme. Mais, après ça, est-ce qu'on va avoir... est-ce qu'on va avoir réglé le problème? Est-ce qu'on va avoir atteint l'objectif de réduire les accidents si le monde commence à peser sur le champignon, par exemple...

M. Chevrette: Mais monsieur...

M. Prud'Homme (Yves): ...et puis que 2 km plus loin ils sont la source d'un accident mortel? C'est ce que je veux dire.

M. Chevrette: M. Prud'Homme, vous étiez là ce matin.

M. Prud'Homme (Yves): Oui. J'ai entendu une partie...

M. Chevrette: On refera pas... on refera pas la discussion que j'ai faite avec M. Cannavino, je vous ai dit que je favorisais ça, des complémentarités d'action. Reprenons pas le monde à zéro.

M. Prud'Homme (Yves): Mais non, mais je veux pas...

M. Chevrette: Vous étiez là, d'autant plus.

M. Prud'Homme (Yves): Oui, mais tantôt... Oui.

M. Chevrette: Je vous demande de vous situer dans le temps parce que vous étiez ici. Pour moi, M. Prud'Homme, je crois qu'il est de mon devoir, je crois personnellement qu'il est de mon devoir comme ministre du Transport de sauver des vies. Si c'est à court terme, tant mieux. Si je me fiais sur vos propos: C'est pas grave, là, laisses-en mourir quelques-uns, je suis en train de planifier quelque chose pour du moyen terme. Moi, je m'excuse, mais je peux pas adhérer à un jugement du genre. Ce qu'on peut faire à court terme pour sauver des vies... J'aimerais ça que vous m'assistiez le lundi matin dans mon bureau de comté, moi, quand une femme m'arrive puis elle s'est fait faucher son fils. À court terme, c'est pas grave, la Fédération des policiers m'a conseillé que c'était pas... qu'il faudrait pas s'occuper de ça. C'est à moyen puis à long terme qu'on va s'occuper des cas de mort. Une vie humaine? En tout temps, demain matin, cet après-midi, si on est capable.

Et toute la compagne de publicité qui est dans les journaux présentement en ce qui regarde la sécurité publique, ça sensibilise des gens. Prenez tout ce qu'on a dit sur les motards le printemps passé. Savez-vous que cet été les motards, ça a baissé dramatiquement? Grâce précisément à la publicité que ça a fait avec la presse puis les intentions de... plus coercitives et tout.

Je vous prie d'adhérer au principe qu'une vie humaine, en tout temps et dès immédiatement, ça l'a sa raison d'être comme fondement de responsabilité. Moi, je ne crois pas, parce que j'aurais une pression publique... Je peux bien faire comme le député de Shefford, promettre n'importe quoi, mais pour l'instant, c'est moi qui ai la responsabilité. Et, pour moi, demain matin, une vie humaine est très importante. Demain matin, si j'étais capable de sauver une vie additionnelle, je le ferais. Ça serait zéro décès sur les routes. Donc, il faut absolument profiter de toute occasion pour la promotion, pour la signalisation, pour avoir des effets psychologiques, pour des campagnes de promotion puis de sensibilisation, pour la complémentarité des actes policiers sur le plan coercitif par rapport à des campagnes de formation et de sensibilisation. Je pense qu'il faut tout user. Mais, de grâce, ne me dites pas qu'à court terme il y a pas d'effet. Je pense que ce serait personnellement décevant de votre part.

M. Prud'Homme (Yves): Alors, M. le Président, je veux juste préciser parce que je n'ai jamais dit que... Je dis tout simplement que l'instauration d'une machine, d'un cinémomètre photographique aura un certain effet à court terme. Je ne... On n'est pas contre l'objectif poursuivi d'améliorer la sécurité sur nos routes, O.K., c'est pas ce qu'on dit. Si le ministre veut absolument abaisser à zéro le nombre d'accidents et de victimes, nous sommes en parfait accord avec cette orientation, qu'on utilise ? ce qu'on a marqué, inscrit dans notre mémoire ? les ressources, qu'on modifie les interventions, les méthodes de travail des policiers, mais qu'on utilise des policiers. Parce que, ce qu'on a écrit... Et il me semble que le ministre ne semble pas comprendre cette distinction-là.

J'y vais avec une approche qui est globale. D'abord, je pense que l'approche globale du ministère est plutôt parfois boiteuse. On a, imaginez-vous, en 1997, aboli l'obligation des permis de conduire chez les jeunes, et, à ce que je sache, c'est déjà un facteur ou une clientèle importante, les accidents chez les jeunes. On a aboli l'obligation qu'ils suivent des cours de conduite, on a instauré un système de probation, un système probatoire. Mais avant 1997...

M. Chevrette: Sur ce point, M. Prud'Homme...

M. Prud'Homme (Yves): ...on avait l'obligation d'aller suivre un cours de conduite avant l'obtention d'un permis de conduire.

M. Chevrette: Oui. Sur ce point, M. Prud'Homme...

M. Prud'Homme (Yves): Ce que je veux tout simplement souligner, M. le Président, c'est que je regarde ça d'une approche qui est globale. On devrait peut-être regarder les points d'inaptitude, on devrait peut-être les augmenter. Un gars qui perd ou un conducteur qui perd son permis, pourquoi allons-nous lui permettre d'avoir une plaque automobile? Pourquoi on lui retire pas sa plaque? Pourquoi on l'empêche pas de conduire un véhicule ou qu'on se dote pas de moyens? C'est dans cet esprit-là que nous avons confectionné notre mémoire.

M. Chevrette: Mais, M. Prud'Homme, vous lisez les dossiers?

M. Prud'Homme (Yves): Et...

M. Chevrette: Vous lisez les dossiers?

M. Prud'Homme (Yves): Et... Et je pense que M. Painchaud veut ajouter là-dessus, là, parce que je l'ai pas laissé parler.

M. Chevrette: Un instant! Avant, j'ai une question à rectifier.

Le Président (M. Lachance): Juste un instant, M. le ministre. Moi, là, je commence à pas aimer le ton qui est utilisé depuis les dernières minutes. Alors, de part et d'autre.

M. Chevrette: C'est beau.

Le Président (M. Lachance): J'aimerais ça qu'on revienne à quelque chose d'un peu plus mollo.

M. Chevrette: Je voudrais corriger carrément votre assertion chez les jeunes. Le fait d'avoir exigé tolérance zéro chez les jeunes a des effets deux fois plus bénéfiques que les cours de conduite. Donc, essayons pas de faire...

M. Prud'Homme (Yves): Je sais bien.

M. Chevrette: ...diverger la discussion. Et, les statistiques à l'appui, nous pouvons démontrer que les cours de conduite sans tolérance zéro étaient plus négatifs que la tolérance zéro présentement exigée chez les jeunes dans la période de probation. Quand on compare un chat, on le compare avec un chat. On compare pas un cheval puis un lapin.

M. Prud'Homme (Yves): M. le Président, je fais tout simplement souligner que, avant 1997, c'était obligatoire, le fait de suivre un cours de conduite avant l'obtention d'un permis. La tolérance zéro, les périodes probatoires, nous partageons entièrement cette orientation, sauf qu'on aurait peut-être dû maintenir les cours de conduite parce que ça s'adresse à la formation. Et, quand on parle d'approche globale, une révision de certains éléments du Code de sécurité routière, c'est tout cela. Je partage le point de vue du ministre lorsqu'il dit: Il faut aller à zéro victime. Ça, je suis entièrement d'accord avec cet objectif. Mais le cinémomètre ne répond pas à cet objectif à moyen et long terme.

Et M. Painchaud voulait ajouter un élément.

Le Président (M. Lachance): M. Painchaud.

M. Painchaud (Georges): Merci, M. le Président. D'abord, M. le Président, je voudrais, au nom de la Fraternité des policiers et policières, avec lesquels mon exécutif s'est déplacé pour venir vous rencontrer ce matin ? c'est-à-dire cet après-midi, pardon ? vous dire que ce n'est pas en ce qui a trait à l'efficacité de la recherche du gouvernement de vouloir légiférer dans le but d'avoir les buts très louables que j'accorde au ministre, de vouloir effectivement réduire les accidents pour apporter un mieux-être à la population, notre mémoire ne se veut pas de vouloir ici parler de l'efficacité; ce dont on parle, c'est uniquement de l'efficience.

Vous savez que l'efficacité, c'est de vouloir faire des choses très productives, ce que le ministre nous affirme depuis tantôt, mais l'efficience, c'est de faire les bonnes choses. Avec tout le respect que j'ai pour le ministre, ça fait 32 ans et demi que je suis policier et mes confrères d'en arrière, on totalise un très grand nombre de policiers, et nous sommes dans la plus grande ville du Québec, qui est Montréal, on couvre toute l'île au complet. On veut tout simplement apporter ici notre expertise puis notre expérience face à ce que nous vivons à tous les jours. En tant que porte-parole des 4 200 policiers de la CUM, ce que nous, nous croyons, ce que nous voulons dire au gouvernement, c'est que nous avons énormément foi en la prévention.

n(14 h 30)n

Vous savez que nous avons travaillé, depuis plusieurs années, les services policiers, à améliorer notre image et à laisser de côté la répression pour prendre une juste part et essayer de trouver un équilibre entre la prévention et la répression, et c'est dans le cadre de la répression que, nous, nous disons que le cinémomètre nous est apparu comme étant un élément répressif et que notre organisation croit énormément qu'il ne faut pas perdre de vue, chose que nous doutons, le côté éducation.

L'éducation se fait dans la prévention beaucoup plus ? et c'est notre prétention ? qu'elle ne se fait dans la répression, et l'intervention policière est essentielle et nécessaire, parce que c'est dans la relation humaine avec les citoyens qu'il y a une possibilité d'éducation.

M. Chevrette: M. Painchaud...

M. Painchaud (Georges): Et cette relation-là, M. le ministre, si vous le permettez...

Une voix: Rapidement.

M. Painchaud (Georges): ...elle touche à un élément crucial de ce que vous avez dit: votre formation psychologique. Et, si on m'accorde le temps, par les questions de l'opposition, je poursuivrai la réflexion. C'est un domaine qu'il me plairait énormément de poursuivre.

M. Chevrette: Mais on a fait de grands sondages scientifiques à la suite de chacune des campagnes de sensibilisation, de formation et de sensibilisation, et le port de la ceinture en fut un premier exemple majeur, ç'a plafonné à 37 % tant et aussi longtemps qu'il n'y a pas eu des mesures coercitives qui se sont ajoutées. Ça, c'est prouvé. Vous pouvez... je pense que scientifiquement... à part de ça, si votre association veut étudier tous ces sondages-là et ces recherches-là, on vous les donnera. Mais affirmer que seules la sensibilisation et l'information règlent le tout, c'est se leurrer collectivement. Il nous faut absolument...

M. Painchaud (Georges): L'éducation, M. le ministre, l'éducation.

M. Chevrette: Non, non, il nous faut absolument la combinaison de deux facteurs... formation, sensibilisation, information, les trois ensemble, là, ça plafonne. Il faut absolument doubler du coercitif si on veut arriver à quelque chose de très valable. On en a des preuves évidentes. À chaque fois qu'on fait une campagne de sensibilisation, on voit que ça plafonne. Prenez le port du casque à vélo...

Le Président (M. Lachance): M. le ministre, votre temps est écoulé.

M. Chevrette: Non, mais peut-être dépasser une minute, puis ils dépasseront d'une minute.

Le Président (M. Lachance): Alors, allez-y, mais très brièvement.

M. Brodeur: Une minute max.

M. Chevrette: Max. D'ailleurs, je vais lui donner la chance d'être... de prouver sa grande sagesse. Allez-y.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Shefford et porte-parole de l'opposition officielle.

M. Brodeur: Merci, M. le Président, et merci, M. le ministre, pour votre bonne éducation. Simplement, bienvenue, bienvenue en commission. On parlait d'influence psychologique, on sait que, je pense, la meilleure influence qui pourrait venir auprès du ministre, c'est d'écouter de façon correcte les gens qui représentent, les gens qui font justement, qui dirigent la sécurité routière au Québec, soit les policiers. Il y a des milliers de policiers au Québec qui ont ce devoir-là et qui font bien leur travail, et je pense que, dans le premier cas qui nous occupe, c'est d'écouter ces gens-là qui occupent ces positions-là et qui font régner, en tout cas, le savoir-vivre sur nos routes.

Deuxièmement, M. le Président, et puis on a pu le lire entre les lignes puis on l'a pris à travers divers témoignages, principalement ce matin, et j'ai d'ailleurs entendu... dans votre mémoire, vous avez parlé d'absence de volonté ou négligence de faire exécuter le travail. Hier, hier, on avait les directeurs de police, d'ailleurs, qui, soit dit en passant, disaient qu'ils n'avaient pas entendu de policiers se plaindre contre le photoradar, que les dirigeants syndicaux étaient tout seuls à penser ça, ils étaient tout seuls à penser ça. Je pense qu'il n'a pas écouté la radio ni la TV aujourd'hui. Mais, en tout cas, c'est autre chose.

Je pense qu'il y a une question qui me brûle les lèvres puis peut-être qu'elle brûlerait les lèvres du ministre, mais il oserait pas la poser ici, devant les caméras, ni à micro ouvert, parce qu'on sait que c'est une question budgétaire, parce qu'ils ont... Je pense que tout le monde conçoit que, s'il y avait surveillance policière, il y aurait une mesure dissuasive autrement qu'un photoradar. Un photoradar, ça arrête absolument personne. Et, si ça arrête personne, ça coûte moins cher. Sauf que, s'il y avait surveillance policière, est-ce que le même nombre de tickets pourrait être donnés, puis ce serait pas trop onéreux pour le gouvernement du Québec? C'est la grande question sûrement que le gouvernement se pose, parce que ce qu'on voit en dessous de ça, c'est une question budgétaire et non une question de sécurité routière.

M. Prud'Homme (Yves): Bon, M. le Président, peut-être que le ton a monté tantôt... je voudrais préciser que ça se fait... en tout respect, soit dit en passant, je respecte beaucoup M. le ministre, puis je respecte tout le monde autour de cette table, mais vous allez peut-être comprendre pourquoi nous en avons un peu ras le bol de se faire toujours parler de contraventions et de contraventions. On dit: Bien, écoutez, les policiers, c'est la police de proximité, la police communautaire. Mais ce que vous savez pas, c'est que les directions de police, je pourrais les qualifier de: ils parlent des deux coins de la bouche. Des quotas, on n'utilise pas ça dans le langage policier. On appelle ça des évaluations de rendement. Mais, en bout de ligne, il y a des municipalités, il y a des villes qui ferment leur budget avec l'entrée de fonds que rapportent les contraventions. Et ce que nous avons toujours dénoncé comme représentants syndicaux, à mon point de vue, c'est cet établissement de quotas. Et c'est la même chose, parce que j'ai entendu parfois le gouvernement dire: Bien, lorsqu'il y a eu une certaine négociation avec la Sûreté du Québec, il y a eu entre 25 et 30 millions de moins d'entrées de fonds dans les coffres du Trésor. À la CUM, il y a des villes qui ont financé le cinémomètre laser dans leur municipalité. Pourquoi vous pensez ils l'ont financé en peu de temps malgré que c'était pas dans le budget du Service de police de la CUM?

Bon, ceci étant dit, c'est une question de sous et de piastres, et qu'on nous dise qu'on va investir dans la sécurité publique à même les conducteurs ou les argents des conducteurs fautifs, je suis plus ou moins sceptique, vous comprendrez. D'abord, on devrait jamais faire l'erreur et une équation entre... j'ai toujours fait la comparaison entre l'environnement et la sécurité publique. L'environnement, investir pour la qualité de vie, l'environnement puis le maintien pour nos générations qui viennent, qui nous suivent, c'est un investissement, mais ça ne rapporte pas. Et, depuis un certain nombre d'années, dans la sécurité publique, on a tenté de financer les coûts à même les budgets des villes par l'émission de contraventions. Et c'est ça que nous ne pouvons accepter.

Et le cinémomètre, s'il n'est pas utilisé dans un autre contexte que celui du projet de loi que je connais, le projet de loi n° 17, bien, c'est exactement la même... ce sont tout simplement... c'est un moyen de remplir les coffres de l'État. Lorsqu'on parle de patrouilles conventionnelles, je peux vous dire que j'ai rarement vu, moi, un automobiliste dépasser une auto de la Sûreté du Québec à 160 km/h sur la 20 ou sur la 40. Lorsqu'on parle d'une politique globale, lorsqu'on regarde la limite des vitesses qui est exigée pour un automobiliste sur la 20 ou sur la 40 ou dans d'autres secteurs et que je regarde un véhicule camion lourd être assujetti à la même... au même maximum, je trouve qu'on n'est pas cohérent. Et c'est ce qu'on a demandé voilà un an et ce qu'on répète à cette commission: Assoyons les vrais acteurs. Et les directeurs de police, avec tout le respect que je leur dois, ils répondent à des mandats et ils sont menottés. Alors, quand vous les consultez, vous avez pas l'heure juste de ceux et celles qui patrouillent dans la rue. Et, à ce que je sache, je peux, moi, en tant que porte-parole des policiers et policières municipaux ? Georges Painchaud, la même chose, et Tony Cannavino ? vous dire la vraie, la vraie réalité. Alors, c'est un peu ça. Je sais pas si j'ai répondu à votre question.

M. Brodeur: Oui, je vais...

M. Prud'Homme (Yves): Je sais pas si Georges veut ajouter.

M. Painchaud (Georges): Est-ce que vous voulez que je rajoute?

M. Brodeur: Oui, vous pouvez rajouter.

Le Président (M. Lachance): M. Painchaud.

n(14 h 40)n

M. Painchaud (Georges): Merci. Alors, voyez-vous, moi, je pense que... et je reviens encore sur la question des relations humaines, je vais vous donner des exemples, je pense, pour exprimer le fond de notre pensée. Vous savez, les préposés aux traverses scolaires, je vous dis: N'essayez jamais d'enlever ça sur la rue, vous allez avoir la plus grosse manifestation que vous avez jamais connue, le gouvernement. Pourquoi? Parce que c'est des enfants. Hein? Mais c'est quoi, l'élément crucial? C'est la relation humaine que les traverses d'écoliers ont avec les enfants. C'est des humains qui se parlent. Il vient un état, une complicité. Ce sont pas des machines, c'est des humains qui se parlent. Vous allez me dire: C'est des enfants. Je vais vous dire que, dans chaque être humain... on parlait de psychologie, il va très bien reconnaître l'analyse transactionnelle que les psychologues utilisent qui dit que, dans chaque être humain, il y a un adulte, un parent et un enfant. Et soyons certains là, glisser est un plaisir enfantin et rouler en voiture, c'est la même chose que glisser en ski pour un être humain, et c'est une question de plaisir. Et, lorsqu'on a des gens qui sont sur la route et qu'on traite avec froideur par l'utilisation des machines, on ne fait plus de différence avec ce qui est un être humain et ce qui ne l'est pas. On mélange la voiture et l'être humain.

Et je peux vous dire qu'il y a des gens qui conduisent et qui vont faire de la vitesse parce qu'ils aiment Jacques Villeneuve et qu'ils décident volontairement de faire une infraction aux risques et périls que cela peut occasionner, et qui sont par le fait même des irresponsables. Mais vous avez des gens qui vont faire de la vitesse parce qu'ils sont en train de doubler un véhicule, et ces gens-là, trois semaines après, vont recevoir une infraction, alors que le geste qu'ils ont commis n'avait aucune intention. Et c'est pour ça qu'on utilise, lorsqu'il y a une relation humaine, ce qu'on appelle le pouvoir discrétionnaire du policier, que lui est habile dans sa relation humaine, dans son contact humain avec le citoyen, il essaie de faire l'évaluation pour être plus juste et plus équitable. Et, si vous coupez la relation humaine entre le citoyen, effectivement, l'automobiliste et le policier, vous venez de traiter les humains avec des machines.

Et c'est ça, le fond fondamental du problème de ce projet de loi là. On vous demande d'être des gens humains et de reconnaître l'intervention humaine. Et je parle à quelqu'un qui a une formation en psychologie, là. C'est tout.

Le Président (M. Lachance): Le système de son est assez bon, M. Painchaud, là.

M. Painchaud (Georges): Je m'excuse.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Painchaud (Georges): Je suis connu depuis 30 ans, M. le Président, je parle avec passion puis avec des émotions.

M. Chevrette: D'ailleurs, ce que je dis, c'est pas le ton qui influence, c'est la valeur des arguments.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Painchaud (Georges): C'est ça, puis j'espère que j'en ai des bons, M. le ministre.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Shefford.

M. Brodeur: On peut dire que vous êtes très éloquent, M. Painchaud. Toujours dans la question budgétaire, un policier, un ex-policier me disait, la semaine dernière, que, si les policiers devaient sur nos routes faire respecter la loi intégralement, donc si on suppose que, sur l'autoroute, c'est 100 km/h, s'il fallait qu'ils fassent respecter la loi intégralement, ça prendrait presque autant de policiers qu'il y a de citoyens au Québec parce que ça finirait pas, il faudrait arrêter tout le monde.

Dans ce premier ordre d'idées là, est-ce que vous croyez, puis vous l'avez dit, vous avez abordé le sujet tantôt... Avant de parler de cinémomètre photographique ou de truc de ce genre-là qui, on le sait pas, peut-être ultimement pourrait être utile pour compléter dans certains endroits... est-ce qu'avant de discuter d'une loi comme ça on devrait plutôt être honnêtes avec les citoyens: si c'est 100 ou 110 ou 118, mettre justement la limite de vitesse à 118 et faire en sorte que, pour le reste, les effectifs nécessaires soient là pour faire régner la juste vitesse sur l'autoroute? Si on doit donner une contravention à 121, on la donne à 121 et on n'a pas de marge de manoeuvre à faire. Donc, à ce moment-là, si on avait des vitesses qui seraient raisonnables sur nos autoroutes, raisonnables dans le sens où on peut facilement arrêter... le jugement humain entre en ligne de compte. Supposons qu'on y va à 118 km/h, est-ce que les effectifs sont nécessaires, la Sûreté du Québec, ou les policiers municipaux, ou les autres corps de police, pour faire justement, là... pour faire en sorte qu'une loi soit respectée?

M. Prud'Homme (Yves): Alors, M. le Président, lorsque j'ai relu le livre vert, on parle là-dedans... on se posait des questions: Comment se fait-il que le citoyen québécois ne comprend pas que la limite doit être respectée? Comment se fait-il que les citoyens, les automobilistes québécois ont toujours une certaine marge? Bon. Vous le savez? Je peux pas vous dire si, sur les autoroutes 20 et 40, par exemple, on devrait hausser la limite de vitesse. Cependant, on sait tous... on ne joue pas, on fait pas la politique de l'autruche, on sait que c'est entre 100 et 118, quelque chose comme. Parce que j'ai déjà fait le test, moi, puis j'ai fait «cruise» 100, puis il y avait quelqu'un en arrière qui me poussait, puis il y avait des autos puis il y avait des véhicules lourds.

n(14 h 50)n

J'ai déjà dit, et nous nous sommes exprimés, que nous devrions revoir certaines limites sur certaines de nos routes. Cependant, j'ai ajouté que, si nous le faisions... on émet une contravention. Si nous avions... Et par la suite, après ça, on se questionne: Pourquoi les automobilistes comprennent pas le message? Bien, c'est parce qu'on sait qu'on va être toléré à 115, à 118, et là on applique le même raisonnement dans les villes et dans les municipalités. Ah! bien, c'est 70. Bien, plus 15, ça fait 85. Alors, 50 plus 15 ou plus 10, ça fait 60. On manque totalement notre objectif. Alors que, si nous avions une politique ferme, c'est 120, 130 sur la 20 et sur la 40... En d'autres routes plus... à sens où on se rencontre, peut-être que ça devrait être 100. Peut-être que les camions devraient rouler 70. Et peut-être que, sur la 20, les camions devraient pas dépasser, exemple, le 100 km/h. Mais, par contre, on lancerait un message. Ça prendrait un certain temps, je le reconnais, M. le Président. Mais on se questionne sur l'attitude et le comportement humain. Mais, lorsqu'on leur lance un message de tolérance, que ça va être accepté, acceptable, qu'est-ce qui se passe? Bien, on assiste à ce qu'on assiste actuellement. Mais, si nous avions des limites plus raisonnables justifiées et justifiables sur les autoroutes, où on ne se rencontre pas, sur les routes provinciales, où on n'a peut-être... où on se rencontre... Et c'est dans ce sens-là que la Fédération suggère au ministre de faire une révision du Code de la sécurité routière, de revoir, par exemple... Dans certaines municipalités, l'autorité municipale a abaissé la limite de 90 à 70, savez-vous pourquoi? Parce qu'ils collectent les infractions. Et savez-vous qu'est-ce qu'on dit aux policiers jusqu'à temps qu'on les syndicalise? Poignez tout le monde, sauf les résidents de la ville ou de la municipalité. Et je pourrais faire rencontrer au ministre mes membres, aujourd'hui mes membres.

Or, c'est ce qu'on vient vous livrer comme message. C'est ce que nous avons dit il y a un an. Nous le pensons toujours. Nous sommes prêts à collaborer avec le ministère, avec le ministre, avec ses fonctionnaires. Nous sommes prêts à travailler à revoir. Il y a peut-être des points d'inaptitude qui devraient être haussés pour certaines infractions. On devrait peut-être envisager d'abaisser certaines amendes, par exemple. Or, il faut qu'on fasse un exercice, qu'on lance un message clair aux Québécois. Et je répète, M. le Président, que je partage la préoccupation du ministre et du gouvernement et j'ai des raisons très personnelles de les partager. Si vous voulez le savoir, je pourrai vous rencontrer après la présente commission.

Le Président (M. Lachance): M. le député de... oui, M. le député de Shefford, mais je vous signale que, même en ajoutant 1 min 45 s que j'ai octroyée au ministre tantôt...

M. Brodeur: Il reste combien de temps?

Le Président (M. Lachance): Il vous reste à peu près deux minutes. Alors, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Brièvement. Votre message principal aujourd'hui lorsque vous comparez le cinémomètre avec la présence policière, ce que vous dites, c'est là l'objet de votre conclusion: le cinémomètre ne fait pas le poids.

Brièvement, je voudrais vous amener à comparer deux dispositifs: le limiteur de vitesse par rapport au cinémomètre. Dans une étude qui a été publiée sur le site de l'Association québécoise du transport et des routiers, dans le cadre de la Conférence nord-américaine sur la vitesse, le président du Centre européen d'études et de sécurité d'analyses et des risques, M. Claude Got, dit ceci, et permettez-moi juste de vous lire un court extrait: «Quand les facteurs de risques sont clairement identifiés et que des dispositifs efficaces permettent de les réduire, voire de les supprimer ? quand il parle de supprimer, il parle de limiteurs de vitesse ? pour des coûts et des contraintes acceptables, il est difficile pour des pouvoirs publics de ne pas les mettre en oeuvre. Un ensemble de motivations associant la volonté de réduire nos consommations d'énergie et des objectifs de sécurité routière va rendre inévitable de limiter la vitesse des véhicules par des méthodes qui ne dépendront pas du bon vouloir des usagers.» Il démontre un peu plus loin dans son étude que les dispositifs existent déjà et ont été expérimentés.

Est-ce qu'on pourrait sauver plus de vies avec des limiteurs de vitesse qu'avec des cinémomètres, si tel est l'objectif poursuivi par le gouvernement?

M. Prud'Homme (Yves): Je répondrai oui à votre question. Est-ce que, comme société, on devrait prôner et privilégier cette approche? Il faudrait y travailler, Mais il est bien évident, quant à moi, que l'effet serait plus direct, plus immédiat, mais l'adoption d'un règlement ou d'une législation quelconque serait immédiate. Et ce que nous dénonçons et déplorons dans le cinémomètre, c'est que, notamment, l'infraction se poursuit. C'est qu'on aura beau envoyer un billet par le courrier, mais peut-être que cette personne-là, ce conducteur-là, 2 km plus loin, va être la source d'un accident mortel. Alors, si on se préoccupe de notre objectif, alors essayons de trouver des moyens pour éviter cela. Et c'est faux de prétendre, comme les chefs de police l'ont prétendu, qu'il y a des endroits qu'on peut pas faire de contrôle de circulation. C'est inexact et c'est leurrer la population que d'affirmer cela. C'est faux. J'ai des problèmes pour opérer des opérations radar, établir des traquenards ou des pièges, si vous voulez, mais c'est faux de prétendre que je peux pas contrôler la vitesse sur le Métropolitain, dans le tunnel de la mort ou encore sur Du Vallon, à Québec. Patrouillons, effectuons une présence policière, les gens vont ralentir. Et les techniques de radar que nous possédons déjà, toutes les organisations policières, avec le fameux radar laser, en croisant, etc., il y a quelqu'un au bout... alors, c'est inexact de prétendre ce que les chefs sont venus vous dire et ce que certains prétendent. C'est pas vrai.

Le Président (M. Lachance): M. Prud'Homme, je regrette, mais c'est la tâche ingrate de gérer le temps, et le temps est déjà dépassé depuis quelques moments. Alors, merci, messieurs, pour votre présentation.

Alors, j'invite immédiatement les représentants de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse à se présenter à la table, s'il vous plaît.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Lachance): Alors, bienvenue, messieurs. Je crois reconnaître un visage plus familier que les deux autres. M. Lefebvre, je vous laisse le soin de nous présenter les deux personnes qui vous accompagnent.

Commission des droits de la personne
et des droits de la jeunesse (CDPDJ)

M. Lefebvre (Roger): Alors, M. le Président, je voudrais dans un premier temps vous saluer et saluer mes ex-collègues et, à travers ceux et celles qui sont ici, en cette commission, aujourd'hui, vous remercier chacun et chacune d'entre vous pour le vote de confiance que vous avez exprimé à mon égard le 19 juin dernier en me confiant, en même temps que vous l'avez fait pour M. Pierre Marois, un ex-député et ministre de l'Assemblée nationale, en nous confiant la responsabilité de diriger la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.

Je suis accompagné aujourd'hui de Me Pierre Bosset, à ma droite, qui est directeur de la recherche à la Commission, et, à ma gauche, de Me Claude Girard, conseiller juridique à la Commission.

M. le Président, la Commission des droits de la personne, à tous les jours, a une responsabilité extrêmement importante, soit celle de protéger les droits les plus fondamentaux des citoyens du Québec. Cette responsabilité-là, cette mission-là, M. le Président, se fait à travers le respect. Cette responsabilité-là, c'est de s'assurer que, en tout temps, les dispositions de la Charte des droits et libertés du Québec sont respectées et aussi, évidemment, la Loi de la protection de la jeunesse.

Il y a des règles et il y a des principes que l'on retrouve dans la Charte des droits et libertés qui doivent être en tout temps respectés particulièrement par le législateur, par les membres de l'Assemblée nationale, et c'est dans ce sens-là que la Commission des droits a été invitée à venir commenter, déposer un mémoire pour donner son point de vue sur le projet de loi n° 17. Ce mémoire-là, M. le Président, vient d'être distribué à chacun et à chacune des membres de la commission.

La Commission tient à dire de façon très claire qu'il est important d'améliorer la sécurité routière au Québec, de prendre les moyens nécessaires pour réduire la vitesse. Mais, pour y arriver, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse n'est pas d'accord avec la mise en place du cinémomètre ou du photoradar.

M. le Président, la Commission est en désaccord avec les dispositions du projet de loi n° 17 tel qu'il est écrit parce que, dans un premier temps, nous arrivons à la conclusion très claire que certaines dispositions vont à l'encontre de la présomption d'innocence que l'on retrouve à l'article... règle ou principe que l'on retrouve textuellement à l'article 33 de la Charte, qui se lit comme suit: «Tout accusé est présumé innocent jusqu'à la preuve de sa culpabilité... jusqu'à ce que la preuve de sa culpabilité ait été établie suivant la loi.» M. le Président, le projet de loi n° 17 introduirait le contraire, à savoir la présomption de culpabilité à l'égard du propriétaire d'un véhicule automobile. Je vous invite, M. le Président, vous et vos collègues, à prendre connaissance d'arguments plus détaillés au soutien de ce que je viens de dire aux pages 8, 9 et 10 de notre mémoire.

Le projet de loi n° 17, s'il était adopté, introduirait, et c'est le deuxième argument qui amène la Commission des droits de la personne à indiquer être en désaccord avec le projet de loi, introduirait le double régime de preuve, le double régime de sanction pour une même infraction selon que cette infraction de vitesse aurait été constatée par un patrouilleur ou par le photoradar ou le cinémomètre. Ce serait, M. le Président, aller à l'encontre du principe fondamental d'équité, à savoir que toute personne est égale devant la loi. Cet argument de la Commission est développé aux pages 11 et 12 du mémoire que nous avons déposé.

M. le Président, la Commission n'a pas non plus l'assurance que seule la plaque d'immatriculation serait prise en photo si le mécanisme proposé dans le projet de loi n° 17 était mis en place. Cette crainte, cette inquiétude, cette assurance que nous n'avons pas suffit à mettre en doute la légitimité du dispositif comme tel et nous amène à conclure que ça irait, si ce dispositif était mis en place, à l'encontre de l'article 5 de la Charte des droits et libertés, M. le Président. Et si vous le permettez, je vais vous en donner lecture: «Toute personne ? c'est ce que l'on retrouve à l'article 5 ? toute personne a droit au respect de sa vie privée.»

M. le Président, en résumé, la Commission des droits est en désaccord avec l'objectif ou les éléments que l'on retrouve à l'intérieur du projet de loi n° 17 pour les trois motifs principaux suivants... Il y en a d'autres, il y a certains autres motifs qui apparaissent également dans le mémoire, mais les trois éléments les plus préoccupants pour la Commission sont: une entorse, une négation de la présomption d'innocence, des règles ou des dispositions qui vont à l'encontre du principe d'équité fondamental, à savoir que tout citoyen au Québec et dans toute société démocratique est égal, doit être traité de façon égale devant la loi, et aussi une atteinte possible au droit au respect à la vie privée.

M. le Président, je vous inviterais à reconnaître... céder la parole à Me Pierre Bosset, qui va reprendre chacun des éléments que j'ai soulevés rapidement pour donner justement des explications additionnelles.

Le Président (M. Lachance): Très bien. Me Bosset.

M. Bosset (Pierre): Merci. Alors, comme M. Lefebvre vient de vous l'indiquer, je vais reprendre tour à tour chacun des principaux arguments qui viennent d'être énoncés de façon un peu plus détaillée.

n(15 heures)n

Sur la présomption d'innocence d'abord et l'article 33 de la Charte québécoise. La situation actuelle, on la connaît. Il existe des cinémomètres conventionnels, sans photo, qui sont en usage et qui permettent de constater des excès de vitesse. Dans le cas d'une infraction d'excès de vitesse, le Code de la sécurité routière prévoit aujourd'hui qu'il faut démontrer que l'accusé était bel et bien le conducteur du véhicule, ça se fait généralement par le témoignage d'un policier, et ce régime, selon nous, respecte la Charte. Le projet de loi n° 17 modifie ce système. Et comme, dorénavant, si le projet de loi est adopté, il ne serait plus... un policier ne pourrait plus témoigner de l'identité du conducteur, eh bien, on attribue dans ce cas-là la responsabilité de l'infraction au propriétaire du véhicule. Et, pour se défendre, le propriétaire devra soit prouver que son véhicule a été volé à toutes fins utiles ou prouver qu'il ne s'agit pas de son véhicule. Autrement, il s'agit d'une infraction de responsabilité absolue, pour reprendre le jargon qu'aiment bien employer les juristes.

Est-ce que cette... ce régime de preuve de l'infraction d'excès de vitesse est conforme à la présomption d'innocence? C'est la question que nous nous sommes posée. Je sais qu'elle préoccupe le ministre parce qu'il a pris la peine hier de poser des questions à cet effet aux représentants du Barreau. Je peux confirmer l'information qui a été fournie par le représentant du Barreau à l'effet qu'une décision de la Cour suprême, l'arrêt Pontes, semble indiquer que les dispositions du projet de loi seraient conformes aux chartes.

Cependant, ce que l'arrêt Pontes ne dit pas ? et là-dessus nous sommes en désaccord avec le Barreau ? ce que cette décision ne dit pas, c'est: Qu'en serait-il si la présomption d'innocence avait été invoquée dans cette cause? Elle ne l'était pas. Sans entrer dans les détails, l'arrêt Pontes portait sur une autre question que celle du photoradar et la présomption d'innocence n'était pas en jeu dans cette affaire. Et, à notre avis, si on avait invoqué la présomption d'innocence face à l'usage d'un cinémomètre photographique, il se peut que la décision Pontes... que le principe de l'arrêt Pontes ne se serait pas appliqué ici.

Quoi qu'il en soit, la Commission estime qu'un accusé devrait toujours pouvoir se défendre, et ce, qu'une peine d'emprisonnement existe ou non. On sait bien que le projet de loi n° 17 ne prévoit aucune peine d'emprisonnement en cas d'une infraction de vitesse constatée par photoradar. On sait pourquoi, c'est pour tenter de se conformer à la jurisprudence, bien sûr, mais, selon nous, qu'une peine d'emprisonnement existe ou non, l'accusé devrait tout de même avoir la possibilité de se défendre. Or, telle qu'il est proposé dans le projet de loi n° 17, c'est-à-dire dans le cadre d'une infraction de responsabilité absolue, l'usage du photoradar, selon nous, va à l'encontre de la présomption d'innocence. Même chose, en passant, pour l'infraction accessoire qui est prévue dans le projet de loi et qui consiste à placer devant la plaque d'immatriculation un objet pouvant nuire à la prise de la photo. Ici encore, il s'agit d'une infraction de responsabilité absolue qui pose le même type de problème.

Quant au respect du... quant au droit au respect de la vie privée, article 5 de la Charte québécoise, la question se pose parce qu'il n'est pas clair au juste, ce qui va... il n'est pas clair... la nature de la photo n'est pas encore claire à notre satisfaction. Hier, une des intervenantes devant vous a confirmé ? elle représentait d'ailleurs un fabricant de cinémomètres ? elle a confirmé que la photo prise par le cinémomètre ne comprend pas uniquement la plaque d'immatriculation, mais bien, et je cite, «le véhicule dans tout son environnement, y compris les passagers vus de l'arrière et aussi les piétons qui peuvent être dans les environs».

Donc, la photo prise au départ ne se limite pas à la plaque. Qu'est-ce qu'on fait de... quel usage doit-on faire de cette photo, compte tenu que cette photo, elle est conservée quelque part? Elle est conservée en l'occurrence sur le disque dur d'un ordinateur. Qu'est-ce qu'on va faire avec cette photo? Eh bien, le projet de loi répond en partie à cette question en disant qu'il y a seulement la photo de la plaque d'immatriculation qui va être transmise au propriétaire avec le constat d'infraction. On présume qu'on va procéder à un agrandissement d'une partie de la photo, mais, cette photo, l'entière photo demeure. Et on peut se demander ce qui va en arriver. Donc, là-dessus, le Barreau, je pense, a mis le doigt sur un point important. Il va falloir que des règles de confidentialité soient aménagées pour assurer la confidentialité des informations contenues sur la photo, même après que l'amende ait été payée et même après le procès, s'il y a un procès.

Et la question de l'équité finalement, qui a été également abordée par M. Lefebvre. Il y a un double régime de preuve qui est établi par le projet de loi n° 17. On en a parlé tout à l'heure en parlant de la présomption d'innocence. Il y a aussi un double régime de sanction, puisque les sanctions ne seront pas les mêmes suivant que l'infraction est constatée par un policier ou par un cinémomètre. Elles seront différentes sous deux aspects: il n'y a pas d'emprisonnement, il n'y a pas non plus de points d'inaptitude. On comprend pourquoi il n'y a pas d'emprisonnement. C'est, comme on l'a dit tout à l'heure, pour essayer de respecter la jurisprudence. Cependant, il demeure que ce double régime peut créer l'impression qu'il y a des excès de vitesse plus graves que d'autres dépendant de la façon dont ils sont constatés. Et, selon nous, ça peut lancer un message contradictoire dans le public et, à la limite, c'est de nature à miner chez certains la légitimité même du système de justice pénale. Et il y a une question, je pense, d'esprit des lois ici auquel il faut peut-être revenir.

Pour ces motifs et compte tenu aussi d'un aspect qui a été signalé par d'autres intervenants, mais sur lequel nous ne voulons pas nous étendre, c'est-à-dire celui de l'efficacité réelle de l'appareil qu'est le cinémomètre ? c'est une question technique sur laquelle nous ne prétendons pas être des experts ? et pour tous ces motifs, la Commission demande de revoir l'usage du cinémomètre photographique tel qu'il est actuellement prévu dans le projet de loi n° 17. Merci.

Le Président (M. Lachance): Merci. M. le ministre des Transports.

M. Chevrette: Merci de votre témoignage. Je suis surpris, d'autre part, parce que nous avons demandé au jurisconsulte tous les avis... le ministère de la Justice, qui est au fait de toute la jurisprudence dans tous les domaines du droit, et ils ont accepté le projet de loi dans sa version, confirmant ainsi ce que le Barreau disait hier, même confirmant a priori, parce qu'on avait eu l'aval du projet de loi à partir du jurisconsulte. M. Lefebvre sait très bien ce que c'est que le jurisconsulte, c'est le ministre aviseur à partir de tout le ministère de la Justice sur la légalité de nos lois. Donc, je suis vraiment surpris du commentaire de la Commission sur ce point parce que nous avons soumis ce dit projet de loi au jurisconsulte préalablement. Le Barreau est venu confirmer la légalité du projet de loi sous toutes ses formes. Et, je vous avoue que ? avec la jurisprudence à la fois des différentes cours du Québec, des cours supérieures et de la Cour suprême ? je suis véritablement surpris de votre commentaire quant à la légalité de la loi telle que déposée.

Quant à la légitimité, je comprends que vous en faites allusion mais vous osez pas vous prononcer parce que c'est vraiment une question d'opportunité politique ou pas de décider d'un projet de loi. C'est ce que j'ai bien compris dans votre dernier...

M. Bosset (Pierre): En matière d'efficacité, oui...

M. Chevrette: Oui.

M. Bosset (Pierre): ...on se prononce pas là-dessus. On n'est pas convaincus que ce soit efficace, mais on se prétend pas des experts.

M. Chevrette: Non, mais vous êtes pas des experts en conviction là-dessus.

M. Bosset (Pierre): Non, c'est ça.

M. Chevrette: Pas plus que je suis. En fait, on doit se fier sur les connaisseurs, à ce moment-là, des différents systèmes, je suppose. Ce n'est qu'une allusion que vous faisiez. Vous êtes pas convaincus comme individus, non pas comme Commission.

M. Bosset (Pierre): Comme Commission, comme Commission.

M. Chevrette: Comme Commission, est-ce que vous avez à vous prononcer sur la conviction qu'un projet de loi est efficace ou pas?

M. Bosset (Pierre): On nous a invités, je pense, pour fournir un éclairage sur les droits de la personne, ce que nous faisons.

M. Chevrette: C'est ce que je comprends. Donc, c'est une allusion que vous faites qui vous est personnelle.

M. Lefebvre (Roger): C'est-à-dire que c'est factuel, M. le Président. On a constaté que, ailleurs au Canada, on a introduit le système puis qu'on a décidé d'y renoncer subséquemment. Mais on peut pas, comme vous dites ? M. le ministre, vous avez raison ? tirer de conclusions. Ce sont des... C'est factuel, tout simplement.

M. Chevrette: M. Lefebvre, en Ontario et en Colombie-Britannique ? parce que c'est ça que vous faites allusion ? vous aurez remarqué que les engagements électoraux...

M. Lefebvre (Roger): Non, puis...

M. Chevrette: ...c'est pas basé sur des faits, des effets réels des lois. Parce que, si vous aviez étudié comme il faut la Colombie-Britannique, vous observeriez, par exemple, qu'il y a eu des effets bénéfiques de 20 % de moins d'accidents mortels et d'accidents graves. Donc, c'est une observation, sans faire l'analyse des faits qui ont amené à...

M. Lefebvre (Roger): C'est-à-dire que, où vous avez raison, M. le ministre, c'est que la responsabilité de la Commission... Et c'est dans ce sens-là que le mémoire parle, c'est comme ça qu'on l'a analysé à la Commission des droits: Est-ce qu'il y a des dispositions dans le projet de loi n° 17 qui viennent à l'encontre de dispositions inscrites dans la Charte des droits?

M. Chevrette: Oui, mais...

M. Lefebvre (Roger): Et nous arrivons à la conclusion que c'est oui.

M. Chevrette: C'est pas là-dessus que j'argumentais. Ça, c'est parce que vous avez utilisé comme argument: Ils l'ont retiré en Colombie-Britannique et en Ontario. Est-ce qu'ils l'ont retiré en Colombie-Britannique parce que ça avait des effets positifs contre les mortalités, par exemple, et contre les blessures graves? C'est non, les statistiques disent absolument le contraire. Ils l'ont retiré parce que c'était un engagement politique...

M. Lefebvre (Roger): Oui, oui.

M. Chevrette: ...d'une formation politique avant d'arriver au pouvoir. Je ne crois pas que ça puisse être un des arguments de la Commission...

M. Lefebvre (Roger): Non.

M. Chevrette: ...des droits et libertés de la personne pour analyser l'efficacité d'un régime éventuel. Entre vous et moi, je pense que vous comprenez ce que je veux dire.

M. Lefebvre (Roger): C'est-à-dire que, si, par hypothèse, la démonstration était claire, évidente et certaine que le cinémomètre serait efficace, ça pourrait ouvrir un débat, mais c'est pas le cas.

n(15 h 10)n

M. Chevrette: Mais je pense que je vais vous envoyer les résultats des statistiques de la Colombie-Britannique. Vous pourrez en vérifier la quintessence, des statistiques et de tout, et vous pourrez observer qu'il y a un monde entre ce qu'un engagement électoral et un engagement politique peut être par rapport aux faits, et aux faits, statistiques émanant de la Colombie-Britannique elle-même, nous prouvent qu'il y a eu une baisse de 20 % dans les décès, dans les accidents graves. C'est pour ça que je voudrais pas que vous affaiblissiez votre mémoire par le fait de donner une statistique qui correspond pas aux faits.

M. Lefebvre (Roger): Mais, M. le Président, l'argumentation de la Commission des droits, elle est d'ordre juridique, hein, strictement, et surtout basée sur des dispositions qui viendraient à l'encontre de certains articles que l'on retrouve dans la Charte des droits. C'est ça.

M. Chevrette: Mais faudrait pas croire que je veux entamer une discussion avec vous, là.

M. Lefebvre (Roger): Non, non.

M. Chevrette: C'est parce que vous avez affirmé que, parce qu'ils ont retiré, en Colombie-Britannique et en Ontario ? c'est vous qui l'avez dit ? vous ne croyez pas que ça pouvait être efficace. J'ai dit: J'espère que c'est pas votre seul argument, parce que...

M. Lefebvre (Roger): Non, absolument pas.

M. Chevrette: ...l'argument rationnel à partir des faits est l'inverse. Ce que je veux dire, on va s'en tenir plutôt...

M. Lefebvre (Roger): C'est bien évident.

M. Chevrette: ...au discours juridique et à l'analyse juridique, parce que, dans les faits, vous seriez contredit par rapport à la phrase que vous avez dite.

M. Lefebvre (Roger): C'est d'ailleurs pour ça que dans l'exposé et de Me Bosset et du mien, qui résume...

M. Chevrette: Me Bosset, sur les bords, tantôt, il s'est aventuré sur quelque chose de pas trop solide lui non plus...

M. Lefebvre (Roger): ...qui résume...

M. Chevrette: ...quand il a dit: Il est de notre pensée que ça pourrait ne pas être efficace. Vous pouvez pas savoir si c'est efficace. Si c'est efficace, ça, c'est de la nature des faits. L'efficacité, c'est basé sur des statistiques, c'est basé sur des faits, alors que l'analyse juridique, on n'affirme pas si c'est efficace ou pas efficace. Ce sont les faits, les statistiques qui prouvent l'efficacité ou non, n'est-ce pas?

M. Lefebvre (Roger): Mais si, moi, M. le ministre, je vous réponds que je suis loin d'être convaincu que ça serait efficace ? comprenez-vous? ? alors que, vous, vous pouvez l'être, on n'est pas plus avancé. Ça reste entier, les questions de droit fondamental auxquelles on a fait référence tout à l'heure.

M. Chevrette: Non, non, je comprends. Mais, je veux dire, enlignons-nous pas sur un degré d'évaluation...

M. Lefebvre (Roger): Oui, oui, oui.

M. Chevrette: ...parce qu'on pourrait se contredire jusqu'à demain matin sur l'évaluation, parce que j'ai en main les recherches, j'ai en main les statistiques qui démontrent que l'efficacité, bien au-delà des pressions politiques... Parce qu'un gouvernement pourrait très bien ne pas être une girouette face à la pression de l'opinion publique tout en étant convaincu des bienfaits pour une population ou pour un groupe de citoyens qui ne connaîtrait pas la mort parce qu'on a pris nos responsabilités au risque et péril de la rentabilité politique. Un gouvernement peut faire ça, comme une formation politique peut être pour les fusions une journée, être contre le lendemain, être contre à l'ôter, pas l'ôter, dépendant de qui qui parle. Ça, c'est leur choix. Mais ça, c'est au détriment de la perception qu'on peut avoir d'une formation politique ou de la volonté politique de faire quelque chose alors que, le droit strict ? puis je pense que c'est ça votre argumentaire ? vous devez vous en tenir exclusivement à la véracité du droit, à la jurisprudence et aux textes tels qu'ils vous sont écrits. C'est bien ça? O.K.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre, est-ce que vous permettriez au député de Marquette une intervention?

M. Chevrette: Oui.

M. Ouimet: C'est par rapport aux faits, parce qu'en lisant le mémoire de la Commission des droits de la personne et à leur décharge, ils ont utilisé les mêmes études que vous avez en main, entre autres celle de M. Guy Paquette. Ils citent, ils disent ceci, à la page 16 de leur mémoire...

M. Chevrette: Non, mais c'est pas de là qu'on partait.

M. Ouimet: Laissez-moi juste terminer. Non, mais c'est parce que, tantôt, vous leur avez prêté des intentions d'outrepasser...

M. Chevrette: Non, pas du tout.

M. Ouimet: ...leur mandat. Moi, j'ai compris qu'ils étaient carrément à l'intérieur de leur mandat.

M. Chevrette: J'ai pas... j'ai pas prêté d'intention, c'est dans un échange où M. Lefebvre a dit: Je doute de l'efficacité parce qu'on l'a retiré en Ontario et en Colombie-Britannique. C'est à partir de là que j'ai...

M. Ouimet: Oui, mais, si vous me permettez, ils vont plus loin que ça, là.

M. Lefebvre (Roger): Pas juste à cause de ça, là, mais...

M. Ouimet: M. Lefebvre, si vous me permettez? Ils disent carrément, là, à la page 16 de leur mémoire ? le spécialiste, Guy Paquette ? ils disent ceci: «Plusieurs études portant sur l'utilisation des cinémomètres photographiques au Québec [...] sont l'oeuvre du même auteur, Guy Paquette.» Première affirmation.

Deuxième affirmation: «Le spécialiste recommande l'implantation des photoradars à certains endroits même si leur efficacité à réduire le nombre d'accidents n'est pas clairement établie.»

Partant de ça, ils disent: Ça ne justifie pas de porter atteinte aux droits et libertés des personnes. C'est une analyse factuelle qu'ils font. Ils sont carrément à l'intérieur de leur mandat.

Le Président (M. Lachance): Bon. C'était un commentaire. M. Bosset.

M. Chevrette: C'est correct, mais je suis convaincu qu'ils sont capables de se défendre eux-mêmes.

M. Bosset (Pierre): Je voudrais répondre à la question de départ du ministre qui nous posait une question sur l'interprétation juridique que nous donnons à la présomption d'innocence. N'oublions pas que c'était ça, le point de départ de la question, il y a 10 minutes. Le Barreau vous a parlé de cette décision, là, Pontes, hier. Il vous a aussi dit cependant ? et je l'ai noté pour les avoir entendus ? ils vous aussi dit qu'il n'y a rien qui empêchait le législateur de faire plus que le minimum requis par les chartes. Mais, quoi qu'il en soit, le minimum requis par les chartes... Entre juristes, il est fréquent d'avoir des différends, des différences d'opinion; nous en avons avec le Barreau là-dessus, pour un des motifs que j'ai exposés tout à l'heure, à savoir que l'arrêt Pontes portait, au fond, sur une autre question de droit.

M. Chevrette: Non, non, mais ça peut être sain, ça.

M. Bosset (Pierre): Mais, deuxièmement, que, dans l'arrêt Pontes aussi, la responsabilité, l'infraction n'était pas la même, c'était une infraction d'avoir conduit alors que son permis était suspendu...

M. Chevrette: C'est beau.

M. Bosset (Pierre): ...alors qu'ici on a une autre infraction et qu'en plus la responsabilité pénale, elle est imposée à un tiers, le propriétaire du véhicule. Donc, il y a des distinctions à faire.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre.

M. Chevrette: Opinion pour opinion, moi, j'en ai une qui commence à me... à m'agacer, puis je l'ai dit à plusieurs reprises en commission, je l'ai dit à la presse. On parle beaucoup de droits dans notre société, on attribue beaucoup de droits ? puis je pense que c'est sain à part de ça qu'on ait des chartes de respect des droits et libertés ? mais il existe aussi des droits collectifs qui ne sont plus pris ou jamais pris en compte. Quand un individu qui a des droits circule sur un territoire public, il a des devoirs vis-à-vis le reste du public; et les autres aussi ont des droits sur ce territoire public, tout autant que celui qu'on défend comme droit individuel sur ce territoire public. J'espère que la Commission, un jour... Puis c'est pas un reproche, là, je fais un constat, puis ça commence à agacer énormément de gens au Québec. Je vous dis pas ça parce que je suis le seul à le penser, il y a énormément de gens au Québec qui disent: Oui, mais quand est-ce qu'on va avoir des droits aussi, nous, d'être protégés sur ces mêmes routes? Quand est-ce qu'on va pouvoir compter sur l'obligation d'autres vis-à-vis nous alors qu'ils ont des droits mais j'ai les mêmes droits?

Il y a un combat idéologique qui se fait présentement dans plusieurs coins du Québec, des petits groupes, des individus qui réfléchissent à cela, et je vous réfère au courrier Les femmes et l'Église, où il y a une philosophe qui répond aux arguments de la protectrice du citoyen, par exemple, qui dit carrément: Il y a... «Deux notions essentielles ont été gravement galvaudées.» C'est le Protecteur du citoyen qui parlait, là. Ici, la philosophe dit: «Or, le réseau routier est, par définition, un espace public. Tous les faits et gestes qui s'y produisent intéressent tous les usagers au même titre et la société dans son ensemble à travers ses institutions: justice, santé, notamment. Il y a, dès qu'on fait usage de ce réseau, un contrat social à respecter, qui implique des droits, certes, mais surtout des responsabilités pour tous les citoyens.»

Ce genre de texte, ce genre de prise de position, ce genre d'attitude commence à se répandre au Québec, et je suis sûr que la Commission des droits et libertés de la personne aurait avantage à creuser cela déjà, parce qu'on aura à faire, à courte échéance à mon point de vue, tout un débat là-dessus, et vous serez interpellés sans doute parce que vous vivez... vous avez des circonstances à analyser quotidiennement, je suppose, des faits, des réponses à donner à plusieurs citoyens qui se plaignent qu'ils ont eu des... qui ont été lésés dans leurs droits individuels.

Moi, je voudrais attirer votre attention là-dessus. Parce que je reconnais les droits de l'institution à s'exprimer sur le fond des... du droit, à interpréter le droit et les faits réels, mais je pense que cette dimension-là a échappé, au cours des dernières années, comme discussion collective. Mais elle se répand de plus en plus, et je pense que... je voulais vous tendre la perche là-dessus, s'il y a des réflexions qui ne sont pas commencées, à commencer ces réflexions-là, parce que ça va sûrement se faire comme débat social tantôt.

M. Lefebvre (Roger): Oui, M. le ministre, vous faites référence à des droits extrêmement importants et fondamentaux. D'ailleurs, c'est consacré par l'article 1 de la Charte, hein: Tout être humain a droit à la vie ainsi qu'à la sûreté, à l'intégrité et à la liberté de sa personne. En même temps qu'on consacre ce principe de base et fondamental, on consacre celui également sur lequel on s'appuie aujourd'hui, l'article 33, qui fait référence à la présomption d'innocence.

Le Président (M. Lachance): Et ça, M. le ministre, ça serait peut-être de former une nouvelle commission, la commission des devoirs et responsabilités des personnes.

M. Chevrette: Non, mais je pense qu'ils comprennent ce que je veux dire...

M. Lefebvre (Roger): Oui, oui, j'ai pris bonne note.

M. Chevrette: ...je veux attirer l'attention sur: Moi aussi, j'ai un droit dès que je mets le pied dans un endroit public.

M. Lefebvre (Roger): J'ai pris bonne note, M. le Président.

M. Chevrette: J'ai mes droits à la route, donc j'ai le droit à ma sécurité sur la route...

M. Lefebvre (Roger): Absolument.

M. Chevrette: ...tout autant que l'autre a le droit à sa sécurité. Si celui qui conduit en fou a tous les droits puis l'autre peut même pas poser des gestes similaires pour faire un contrepoids aux droits individuels... parce qu'on est dans un endroit public, ça devient un droit collectif de partage et non pas... c'est-à-dire plusieurs petits droits individuels, mais dans un espace collectif. Il y a un beau débat philosophique à faire là pour voir jusqu'à quel point la liberté des uns peut entraver la liberté des autres.

M. Lefebvre (Roger): Absolument.

Le Président (M. Lachance): M. Bosset.

n(15 h 20)n

M. Bosset (Pierre): Sans faire trop de philosophie ? c'est un débat fascinant effectivement ? mais je pense qu'il y a un danger à opposer droits individuels prévus dans la Charte aux droits collectifs. Il ne faut pas oublier que les droits individuels, comme la présomption d'innocence, c'est pas le droit du chauffard d'être présumé innocent, c'est votre droit à vous comme citoyen, c'est le droit des gens qui sont ici dans cette salle d'être présumés innocents. Et ce droit-là, il appartient à tous. Alors, je pense qu'il faut faire attention de faire des fausses oppositions parce qu'on risque de jeter le bébé avec l'eau du bain.

M. Chevrette: C'est parce qu'il y a eu tellement de prises de position dernièrement, par exemple: Est-ce que le ministre du Revenu peut transmettre, par exemple, des transactions pour protéger la collectivité contre des abus de corrupteurs, de voleurs, de bandits? Et puis est-ce que la police a le droit, par exemple, de s'immiscer dans tel secteur pour découvrir, je sais pas, moi, les taupes à la SAAQ? Il y a une série de faits qui donne un paquet de droits, si bien qu'il y a assez de droits que t'es plus capable de poser le geste. Même la police, on s'est rendu compte... J'en discutais ce midi avec M. Prud'Homme puis monsieur... j'ai toujours de la misère à...

Des voix: Cannavino.

M. Chevrette: Cannavino. On a passé un article à la fin de la session sur la... en justice, où on ne protège pas l'infiltration, par exemple, et on ne protège pas ceux qui peuvent être pris... les pompiers. Je sais qu'à la dernière minute... Je sais pas comment ça s'est fait, mais on en avait parlé. Je me souviens, on pensait que c'était réglé tous les deux puis ça l'est pas. Donc, ça, il y aura un amendement très prochainement pour permettre ça, sinon un type infiltré peut être considéré... Il est accusé au criminel alors qu'il fait son devoir strictement de policier. Donc, on a un gros débat à faire là-dessus. Je vous remercie de votre contribue à la commission.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Shefford.

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Premièrement, bienvenue, bienvenue à vous tous. Je sais que vous avez été très bien guidés par M. Lefebvre qui, soit dit en passant, est ex-ministre de la Justice. Il a déjà été ministre de la Justice, ce qui ajoute à la crédibilité de la Commission.

Je voudrais aussi juste reprendre le dernier point soulevé par le ministre lorsqu'il parle de droit collectif. On sait que le droit collectif est souhaitable, sauf que le droit individuel, dans le cas qui nous occupe ? dans le cas qui nous occupe ? est tellement altéré que je pense que c'était une condition où votre Commission veut absolument intervenir. Parce que, si on prend simplement le préambule du projet de loi, les remarques préliminaires, lorsqu'on dit: «Ce projet de loi prévoit que le propriétaire du véhicule routier sera responsable de la commission de toute infraction relative à la vitesse constatée», etc.; donc, il est présumé coupable, donc, il y a une présomption de culpabilité et il ne faudrait pas que ce soit un nouveau principe législatif de présumer des gens coupables.

Hier, j'entendais les chefs de police dire: Ah, bien ça, c'est bon, ça va être facile à appliquer la loi. Mais je pense pas qu'il faut commencer à légiférer avec des principes de justice aveugles et faciles. Donc, c'est pour ça que vos commentaires sont d'autant plus importants. Et vous avez eu très peu de temps pour répliquer. Est-ce que, de votre optique... De votre optique, est-ce que la façon qu'on a de procéder dans ce projet de loi là est acceptable? Juridiquement, vous parlez de la Charte des droits et libertés de la personne, est-ce que la façon qu'on a de légiférer et de présumer quelqu'un coupable pourrait être, suivant la Charte des droits et libertés de la personne, contestable devant les tribunaux?

M. Bosset (Pierre): Oui. Je pense que, si on lit entre les lignes dans notre mémoire, c'est effectivement la conclusion qui se dégage. Nous en sommes arrivés à la conclusion, contrairement au Barreau, qu'il y avait atteinte à la présomption d'innocence, et effectivement des contestations pourraient être entreprises éventuellement devant les tribunaux.

Nous avons également soulevé une question plus large, qui est celle de savoir si, à l'avenir, le législateur devrait continuer à créer des infractions comme celle-là, les renversements de fardeau de preuve également, comme ceux-là. Et, selon nous, ce n'est pas une tendance à encourager. On a essayé de mettre le doigt aussi là-dessus dans notre mémoire, qui est une problématique plus large, vous l'avouerez, que celle du cinémomètre.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Merci. Compte tenu des expériences dans d'autres juridictions canadiennes, entre autres en Alberta où le cinémomètre existe depuis 1988, d'après ce qu'on nous a rapporté hier, est-ce que la présomption d'innocence a été soulevée comme argument par rapport à des personnes qui auraient reçu une contravention? Avez-vous eu la chance de faire une vérification jurisprudentielle à cet égard-là? Non?

M. Bosset (Pierre): Pour les fins du Journal des débats, non.

M. Ouimet: Non. O.K. Question de la protection du droit à la vie privée, dans votre mémoire, vous dites: «Cela suffit à nos yeux à mettre en doute la légitimité du processus», mais vous ne dites pas la légalité du processus. Vous faites une distinction entre légitimité et légalité. Parce que le Barreau ? je veux pas vous mettre en porte-à-faux par rapport au mémoire du Barreau ? le Barreau disait clairement dans leur mémoire, quant à eux, ça passait le test des chartes, sauf que, eux aussi, je pense, remettaient en cause la légitimité du processus, entre autres en faisant allusion aux questions de preuve et d'administration de la preuve devant les tribunaux parce qu'on peut capter, avec les photoradars, des occupants à bord d'un véhicule ou des personnes qui seraient le long de la voie publique, et ça, ça pourrait porter atteinte aux droits et à la vie privée de ces personnes-là. Alors, l'État devrait, dans ce cas-là, détruire les images qu'il a, mais est-ce qu'il serait en train de détruire la preuve? Il y avait là un contentieux ou un litige auquel le Barreau n'avait pas encore réponse. Je me demande: Où est-ce que vous vous situez eu égard à ces arguments-là?

M. Bosset (Pierre): Bien, il faut comprendre que quand ce mémoire a été rédigé, on avait encore des doutes sur qu'est-ce qui apparaîtrait au juste sur cette photo. Le mémoire du Barreau, on l'avait lu, et, dans ce mémoire, il y avait effectivement une phrase où on disait que le photoradar pouvait prendre davantage que la plaque. Mais c'est une affirmation qui, dans le mémoire du Barreau, n'était appuyée d'aucune autorité, d'aucune référence au niveau des autorités. Donc, on voulait pas, nous, affirmer que le photoradar permettait de prendre davantage que la plaque, d'autant plus que le projet de loi dit que c'est juste la plaque qui est transmise au propriétaire. Alors, comme on était dans le doute, on s'est contentés de soulever des doutes sur la légitimité de cet usage.

Mais nous avons appris... Enfin, j'ai appris, moi, hier, en lisant les débats sur Internet, que l'appareil permet bel et bien de prendre davantage que la plaque. Et dans la mesure où... Si c'est vrai ? je l'ai vu hier d'ailleurs aux nouvelles à la télévision, c'est bien vrai ? ça pose des problèmes de respect de la vie privée. Je pense qu'il y a une mécanique à élaborer. Et je comprends que le problème a peut-être été soulevé récemment, là, donc il y a une mécanique à laquelle ni le Barreau ni nous-mêmes n'avons réfléchi, mais il va falloir, je pense, si le projet de loi est adopté, que le gouvernement envisage des mesures législatives de protection de la confidentialité des informations contenues sur les photos.

M. Ouimet: Avant l'adoption, je pense. Non pas après l'adoption mais davantage avant.

M. Bosset (Pierre): Préférablement, bien sûr.

M. Ouimet: Ce qui serait préférable, c'est avant l'adoption, c'est ce que vous dites?

M. Bosset (Pierre): Bien sûr. Si le projet de loi est adopté avec le cinémomètre photographique.

M. Ouimet: Également... Bon. Toujours à la page 16, vous semblez remettre un peu en question les études du professeur Paquette. Vous le faites de façon nuancée. Là, je porte un jugement sur l'écrit que j'ai sous les yeux, là. Vous dites premièrement que toutes les études au Québec ont été réalisées par le même auteur, M. Paquette. Et vous dites par la suite que l'efficacité à réduire le nombre d'accidents n'a pas été clairement établie. Pourriez-vous élaborer davantage sur ce volet-là? C'est sûr que ça nous intéresse de ce côté-ci. Ça revient à l'argument que soulève mon collègue depuis le début des audiences, au niveau... Est-ce qu'on est face à une véritable volonté de vouloir améliorer la sécurité routière ou est-ce que ça, ce n'est pas le couvert, et puis, la réalité, c'est une machine à sous pour le gouvernement, une machine à piastres?

Le Président (M. Lachance): Me Girard.

M. Girard (Claude): Alors, sur cette question... Bon, on se prononcera pas sur la question de la machine à sous. On peut pas se prononcer là-dessus, je pense que c'est pas poser la question de la bonne manière, mais pour ce qui est des études sur l'efficacité, en fait, ce qu'on a voulu soulever dans le mémoire, c'est qu'il y avait beaucoup d'interrogations. Lorsqu'on parle de M. Paquette, c'est le principal auteur, en tout cas ? dans la recherche que j'ai faite ou que nous avons faites à la Direction de la recherche ? qu'on a retrouvé. On sait qu'il a été aussi consulté par le gouvernement, je pense à la commission parlementaire de l'hiver dernier sur le livre vert. Donc, c'est un auteur qui s'est prononcé sur la question. Mais ce qu'on a voulu faire ressortir dans le mémoire, c'est qu'il y avait beaucoup d'interrogations sur l'efficacité, mais sans aller plus loin. Sans aller plus loin pour dire: Est-ce que, effectivement, ça va réduire la vitesse ou pas? C'est un débat, je pense ? et on l'a vu au cours des audiences depuis deux jours ? c'est un débat qui ne sera sûrement pas clos à la fin de la journée. Je pense qu'il y a des études qui disent oui, d'autres études qui disent non.

n(15 h 30)n

Mais nous, ce qu'on voulait faire ressortir, c'est que ça... il y avait beaucoup de questions, de questionnements sur l'efficacité, et c'est d'ailleurs ce qu'on a constaté aussi, à lire quelques études ou les quelques études dont nous avons pris connaissance. Je pense que c'est ça qu'il faut faire ressortir sur la question de l'efficacité. On se prononce pas sur l'efficacité, on dit que ça soulève beaucoup de questions. Et ça, il faut le mettre dans le contexte donc des droits et dire, à ce moment-là: On considère qu'il y a une atteinte fondamentale au droit à la présomption d'innocence dans le projet de loi, en particulier lorsqu'on vise le propriétaire du véhicule qui est pas capable de se défendre ou à peu près pas. On dit qu'il y a une atteinte à la présomption d'innocence, et là on se dit: Il y a beaucoup de questions sur l'efficacité. On met ça dans la balance avec l'atteinte aux droits, qu'on considère considérable, et là on dit: Bon, là, il y a quelque chose certainement qui nous interroge sur ce projet de loi. C'est pas qu'on est contre nécessairement les cinémomètres... les cinémomètres, pardon, photographiques, mais ça soulève à ce point des questions et ça enfreint un droit à la présomption d'innocence à tel point que, comme Commission, on est obligé de dire: Effectivement, ça pose un problème. On est obligé de le dire au gouvernement et on vous le dit comme législateurs. Ça nous pose de sérieuses questions, et c'est pour ça qu'on conclut que: Tel que libellé, si on continue à viser le propriétaire du véhicule, on pense que ça va à l'encontre de la Charte.

M. Chevrette: Canadienne ou québécoise?

M. Girard (Claude): Québécoise. Mais canadienne...

M. Chevrette: Le droit judiciaire, le droit d'accès à la justice.

M. Girard (Claude): C'est toute la section des droits judiciaires qu'il y a dans la Charte québécoise.

M. Chevrette: Et non pas les droits fondamentaux, les sept premiers.

M. Bosset (Pierre): Non, non. Pour être précis, là, quand on parle, nous, de la Charte québécoise, on parle des articles ? de mémoire ? 23 à 38, qui concernent les droits judiciaires, et, parmi ceux-là, on retrouve la présomption d'innocence.

M. Chevrette: O.K. Mais pas dans les sept premiers...

M. Bosset (Pierre): Non.

M. Chevrette: ..dits les droits fondamentaux, le droit, par exemple de voter, etc.

M. Bosset (Pierre): Non.

Le Président (M. Lachance): Ça va? Alors, merci, messieurs pour votre participation aux travaux de cette commission.

(Changement d'organisme)

Le Président (M. Lachance): Alors, j'invite M. Guy Paquette, du Groupe de recherche en sécurité routière, comme dernier intervenant dans le cadre des travaux de cette commission sur le cinémomètre, que M. Paquette appelle, je pense, à juste titre, le cinémomètre automatique.

M. Chevrette: Tout le monde s'est gavé de vos recherches et de vos déclarations, certains à contre-courant, d'autres... on espère de clarifier tout ça.

Le Président (M. Lachance): Alors, bienvenue, M. Paquette. Évidemment, vous connaissez les règles du jeu. Vous avez 15 minutes de présentation et, par la suite, les échanges avec les parlementaires. La parole est à vous.

Groupe de recherche en sécurité routière

M. Paquette (Guy): Merci, M. le Président. Je me suis réjoui, il y a déjà quelques semaines, d'être le dernier intervenant en me disant, à ce moment-là: S'il y a des questions qui se posent sur le plan technique ou autrement, ce sera peut-être une bonne manière de conclure les travaux de la commission. Maintenant, j'ai découvert avec surprise à quel point, à ce que dans certains cas on peut se retrouver interprété. Et vous allez me dire: Les hommes politiques sont habitués à ça, ça leur arrive tous les jours dans les médias.

M. Chevrette: ...même... toujours dans un état d'interprétation.

M. Paquette (Guy): ...et je me disais qu'il aurait peut-être été préférable que j'intervienne beaucoup plus tôt de manière à établir un certain nombre de choses un petit peu plus clairement.

Bon. J'ai choisi aujourd'hui de ne pas revenir avec une démarche semblable à celle que j'avais empruntée lors des auditions qui avaient touché le livre vert. Au lieu, j'ai tenté de faire un exposé très large sur les connaissances qui existent à l'échelle internationale dans le domaine de la sécurité routière, où on a fait une application de ce qu'on appelle des radars photographiques ou des cinémomètres automatiques.

Ma préoccupation a été davantage de me dire: Les travaux de cette commission, cette fois-ci, seront probablement d'essayer d'aboutir à des décisions, des décisions qui soient les plus éclairées possible. Mais à ce moment-là il y a fort à parier que cette fois-ci davantage de groupes d'intérêts vont arriver avec des perspectives, des points de vue, et comment est-ce qu'on peut tenter au travers de ça d'ordonner, de trier les informations, d'établir un certain nombre de priorités? Et j'ai finalement choisi aujourd'hui essentiellement une chose. J'ai présumé à l'avance de ce que serait probablement les principaux arguments développés par les uns et les autres et j'ai choisi de répondre à ça en précisant un certain nombre de choses.

Donc, je vais y aller tout de suite dès le départ simplement pour souligner une chose. Quant à moi, les arguments qui ont été présentés dans nombre de cas m'apparaissent autant favorables que défavorables, m'apparaissent raisonnables, m'apparaissent dans certains cas fondés, mais en même temps ce qui me gêne un peu, c'est qu'au travers des travaux de cette commission qui sont censés porter sur une amélioration des conditions de sécurité routière, l'enjeu véritable, c'est celui de sauver des vies, vous l'avez répété, je vous ai entendu dans les médias à plusieurs reprises depuis hier, cet enjeu-là m'apparaît à l'occasion escamoté en raison de la défense, je dirais, faite par certains individus ou certains organismes.

Il faut bien comprendre qu'à chaque fois qu'on change quelque chose à quelque part, on va déranger quelqu'un. Et ça, à mon avis, il va falloir que tout le monde se mette ça dans la tête. Le véritable enjeu ici aujourd'hui, c'est de se poser la question: Devons-nous bouger ou pas? Et ça, c'est une décision qui est fondamentale. Tout le monde va vous le dire en sécurité routière: Le conflit éternel, tel qu'on l'exprime en tout cas dans nos congrès, nos colloques ou autrement, c'est toujours de dire: Ce conflit éternel, c'est celui de la mobilité et de la sécurité. Il y a un conflit éternel là-dedans. Plus je veux être mobile plus je veux être rapide, comme ça peut être le cas en avion ou avec un TGV. Bien, normalement, j'aimerais m'assurer que je suis en sécurité. C'est vrai pour tous les modes de transport, sauf celui de la route. Celui de la route, ce sera peut-être le cas dans 20 ans, dans 25 ans. J'ai hâte d'arriver là. J'ai hâte de me rendre à Montréal en prenant la 20 puis en cédant entièrement le contrôle de mon véhicule à un dispositif automatique. Je pourrai faire autre chose pendant ce temps-là qui sera plus intelligent.

Maintenant, pourquoi la vitesse aujourd'hui? Bien, vous le savez puis plusieurs l'ont répété. On s'est attaqué avec succès à des problématiques de sécurité routière extrêmement diversifiées depuis les 25 dernières années, au Québec comme partout dans le monde occidental, avec des succès somme toute intéressants. Mais ces succès, maintenant, est-ce qu'il faut s'en satisfaire? Il faut reconnaître qu'on plafonne. La vitesse est devenue par la force des choses l'un des enjeux à privilégier. Les études qui ont été citées ici à l'effet desquelles 25 % des accidents auraient comme premier facteur de causalité... On dit bien: premier facteur, on dit pas facteur contributif à l'accident. Parce que, dans les cas où on parle de facteur contributif, sur les études qui ont été menées dans le cas des accidents graves, par exemple, en Europe, la commission RÉAGIR, sur des milliers d'accidents, des analyses approfondies, on en arrive à estimer que la vitesse est présente dans 80 à 85 % de ces accidents graves. Donc, quand on s'intéresse vraiment à un cas particulier? Quand c'est la vitesse qui détermine l'accident.

Ce que je veux faire, c'est donc revenir très brièvement sur certains arguments dont j'ai entendu parler et ce que j'ai lu surtout depuis hier sur le site Internet. Premier argument qui fait partie des arguments défavorables ? puis je vais aussi parler des arguments favorables par la suite: la responsabilité indue des propriétaires de véhicule. C'est vrai, le projet de loi nous amène à aller dans ce sens-là, et dans le fond c'est un retour en arrière sur la pratique des années 1969 lorsque le radarphoto a été utilisé ici, au Québec. Alors, dans ce cas-ci bien sûr qu'on peut s'insurger contre le fait qu'il n'y a... on est présumé coupable au départ, du point de vue du propriétaire.

Je voudrais rappeler qu'il n'y a que trois scénarios possibles si on tient à implanter le radarphoto. Un, identifier le conducteur lors de l'infraction. Et, ça, ça suppose quoi? Ça suppose une photographie de face, tel que ça se pratique dans certains états américains, notamment. Ça suppose un jumelage avec la banque de données des permis de conduire. Et là il m'apparaît que les problèmes qui sont relatifs à l'intrusion dans la vie privée sont passablement plus considérables. Il y a peu d'administration dans le monde qui ont accepté de se lancer là-dedans.

Deuxième cas de figure, identifier le conducteur a posteriori par une procédure de nomination. C'est ce qui est retenu, notamment, dans les pays réputés démocratiques comme l'Australie, comme la Grande-Bretagne, où là au départ le propriétaire est présumé responsable et on dit: À moins, sur le constat qu'on lui envoie... vous devez nous répondre d'ici 15 jours, si vous ne l'avez pas fait dans 15 jours, en identifiant une autre personne, vous êtes présumé coupable et en plus ? dans ces cas-là ? puisque vous êtes réputé être coupable, vous êtes assorti des points d'inaptitude; si vous n'étiez pas au volant, si vous aviez prêté votre véhicule, vous devez nommer, identifier la personne.

Personnellement, en tant qu'individu, je serais favorable à cela parce que l'effet dissuasif par la suite sur les conducteurs qui verraient non seulement une sanction financière mais une sanction administrative, qui est celle des pertes de points d'inaptitude, aurait passablement plus d'effet. Mais, compte tenu des difficultés d'application que ça risque de poser et compte tenu des rares cas où le propriétaire n'est pas le conducteur et des cas où il serait souhaitable que le propriétaire le sache...

Prenez des cas où, par exemple, un adulte, un parent prête son véhicule à son jeune. Pendant un an, il l'a accompagné dans le cadre des nouveaux programmes d'apprentissage de la conduite automobile. Il le laisse aller ensuite. Il reçoit, par la poste, 10 jours après la commission de l'infraction, un billet où il se rend compte que ce n'était pas lui qui était au volant, c'est son fils, et il s'est fait prendre à 70, 80 km/h dans une zone de 50 en milieu urbain. En tant que parent je serais heureux de disposer de ça pour essayer de contrôler un peu plus mon garçon. En termes d'éducation à la sécurité, pour les propriétaires des véhicules, la responsabilité, à mon avis, ça va beaucoup plus loin.

Ce troisième scénario, celui qui consiste à dire: Bien, écoutez, on y va et on présume que les gens sont responsables, comme dans le cas des billets de stationnement, eh bien, c'est une solution qui est un pis-aller. Mais, si on veut améliorer la situation en introduisant le radarphoto, à mon avis on n'a pas le choix de se diriger dans cette direction.

Deuxième argument, le radarphoto est une violation du droit à la vie privée. Bon, je reviendrai pas tellement là-dessus. Il me semble qu'on a eu suffisamment de jugements qui ont été rendus un peu partout dans le monde où on fait état du fait que le droit à la sécurité collective sociale prime sur un privilège, on parle bien d'un privilège. L'obtention d'un permis de conduire, c'est un privilège, c'est pas un droit. Il peut être révoqué à tout moment. Donc, là-dessus... je m'empresse de pas aller plus loin. Je veux juste vous dire que je comprends maintenant les préoccupations des uns et des autres.

n(15 h 40)n

Les agences de location aux États-Unis ont même commencé à installer dans les véhicules de location des puces électroniques connectées sur GPS et qui permettent de savoir, à ces entreprises, lorsque le client ramène la bagnole, qu'il a commis des excès de vitesse, et il les frappe d'une amende additionnelle. Pourtant, c'est une agence de location, ils ont pas à faire appliquer la loi. Mais préoccupés de questions de sécurité pour leurs véhicules, et je suppose pour leur clientèle, qu'ils souhaitent revoir, ils se sont empressés même de se rendre jusque là.

La prolifération des instruments de contrôle puis de surveillance, là, dans la vie quotidienne, moi aussi, j'en ai contre, de voir des caméras à chaque coin de rue, dans tous les centres d'achats, dans tous les édifices publics, puis maintenant de constater que c'est le même cas dans les maisons privées, les gens qui font surveiller leur gardienne pour savoir qu'est-ce qui se passe quand ils ne sont pas là. C'est un fait de réalité quotidienne. Lorsqu'il se déroule sur la route, à mon avis, c'est un espace public. Les gens qui ne veulent pas se faire voir là, eh bien, ou bien ils vont rouler plus lentement, ou bien ils devraient rouler ailleurs.

Troisième argument, le radarphoto ne permet pas d'intervenir sur les comportements dangereux. C'est un argument développé par les policiers. Cet argument me dérange, me dérange parce que le radarphoto ne peut intervenir que sur la vitesse. Or, la vitesse est un comportement dangereux. Tout comme les caméras feu rouge ne peuvent intervenir que sur l'infraction feu rouge, c'est un comportement qui est très dangereux.

Les policiers ont raison de dire que, si on les remplace par les radarphotos, bien là on a un problème, et on a un problème de taille. Je pense, je suis convaincu, en tout cas moralement convaincu, bien que personne m'ait donné d'assurance dans ce sens-là, que c'est l'intention de personne, autant du côté de la Sûreté du Québec que du côté des administrations municipales ? en tout cas, j'ose le croire. Ce qu'il faut comprendre en travers de ça, c'est que l'ajout des radarphotos, c'est un ajout. C'est un ajout qui va permettre d'effectuer des contrôles additionnels que les policiers malheureusement ne disposent pas des moyens et des ressources nécessaires pour être capables de le faire.

La situation, on la connaît. Le dérapage qu'on a connu en matière de contrôle routier au Québec est tel que, sur l'autoroute, la fameuse marge de tolérance de 20 km/h, on l'a rappelé ici cet après-midi, a eu tendance à se généraliser aux autres portions du réseau. Sur l'autoroute, on n'a pas de problème, mais ailleurs, c'est fort problématique.

J'ai entendu aussi tout à l'heure ? puis là je veux au moins répondre à ça ? quelqu'un dire que, si on remplace les policiers par des machines, qu'on déshumanise tout le système. Un, il ne faut surtout pas remplacer les policiers; il faut qu'on les affecte à des tâches plus intelligentes, puis, entre vous et moi, ça doit pas être drôle de faire du radar. J'ai déjà été avec des policiers pour voir ce que c'était, et c'est vraiment pas drôle comme... comme job.

Quand on a commencé à étudier comme eux le font depuis quelques années puis qu'ils ont appris à faire de l'intervention sur autre chose que de l'application bête, dans certains cas, de règlements, je les comprendrais de vouloir se dégager d'autre chose. Mais l'argument à l'effet duquel le radarphoto détruit les relations humaines, écoutez, ça, j'ai entendu ça dans l'histoire quand on a mis les premiers feux de circulation. Avant, c'était un policier qui gérait, puis qui disait: Allez, viens-t-en, Jos, passe, c'est le temps d'y aller; attends un peu de ce côté-là. C'était bien plus humain à l'époque. Mais que voulez-vous? Il a bien fallu remplacer ça pour être un petit peu plus efficace.

L'absence de points de démérite. Autre argument défavorable, mais qui n'a été évoqué que par un groupement parce qu'en général les gens se disent: Bien écoutez, si on est pour se faire mettre le radarphoto sur les bras, autant qu'on se fasse pas coller les points d'inaptitude par-dessus. Mais, dans le cas présent, on voulait s'en servir en disant: Bien peut-être que ça ferait un argument de plus pour qu'on fasse sauter l'idée d'amener le point du radarphoto. Bien, dans ce cas-ci, je pense que, à moins qu'on choisisse le scénario qui consiste à identifier le propriétaire mais qui, au-delà du propriétaire, a été véritablement un conducteur, on peut pas aller avec les points d'inaptitude. À moins qu'on s'en aille à nouveau avec la perspective qui concerne l'approche telle qu'utilisée en Australie puis en Grande-Bretagne.

Un autre commentaire qui a été émis là-dessus qui me gêne beaucoup. On dit: Attention, ça devient inéquitable. Ceux qui ont de l'argent, ils vont pouvoir continuer de faire des folies sur la route, etc., et les points d'inaptitude, ça, ça a un effet dissuasif. Vous avez tout à fait raison, ceux qui ont soulevé cette question-là. Les points d'inaptitude, ça a un effet dissuasif plus considérable que la seule amende. Le problème qu'on a, c'est qu'au Québec il y a tellement peu d'interceptions puis de contrôles policiers qu'il n'y a aucun effet dissuasif, même avec les points d'inaptitude, pour la très grande majorité des contrevenants.

On vient de terminer une étude. Notre étude, là, elle est deux ans en retard, parce qu'on s'était basé sur un problème qui concernait l'identification des clientèles dites à risque, les «speeders». Toute la littérature scientifique dans le monde nous dit: Si vous voulez faire ça à partir de leur dossier de conducteur, vous avez qu'une chose à faire: vous examinez leur dossier d'infractions. Vous examinez leur dossier d'infractions en matière de limite de vitesse, prenez pas les petites infractions de limite de vitesse, prenez les grosses. À partir du moment où vous en avez au moins trois dans le dossier, vous êtes sûr que vous identifiez des gens qui sont vraiment des «speeders».

Bien, nous, on a appliqué ça au Québec puis, après avoir travaillé pendant deux ans d'arrache-pied sur une analyse des données, on est obligé de constater que ça marche pas, c'est pas applicable. Pourquoi c'est pas applicable? Parce qu'il y a tellement peu de contrôles sur la vitesse que ce n'est pas un bon indicateur. Autrement dit, la probabilité de se faire prendre est tellement faible que, points d'inaptitude ou pas, argent seul ou pas comme sanction, actuellement ça ne changerait malheureusement pas grand-chose.

Radarphoto, instrument de taxation. Je passe très rapidement là-dessus. Ce qu'on a pu découvrir un peu partout, c'est que le radarphoto, quand il est utilisé au départ, génère énormément d'argent les premières semaines et les premiers mois, surtout si on se cache, surtout si on le dit pas au public et qu'on s'amuse à changer les marges de tolérance qui sont appliquées, comme ça a été malheureusement le cas en Ontario, mais même aussi en Colombie-Britannique et dans certains États américains. À partir du moment où on est transparent, je ne connais aucun conducteur qui est assez cinglé pour défier une machine dont c'est certain qu'elle va l'attraper. Donc, ça, ça concerne essentiellement une chose, des cas problématiques. Ces cas problématiques, c'est ceux-là qu'il faut coincer, c'est ceux-là qu'il faut ralentir.

Je termine avec les arguments favorables. Le cinémomètre photographique, il l'améliore, la sécurité. Parmi les rares études qui sont suffisamment solides sur le plan scientifique pour nous permettre d'affirmer ça, il y en a une qui date des années soixante-dix, en Allemagne, sur une portion d'autoroute où on a fait une réduction des morts dans une proportion de huit pour un. Ça fait 25 ans que ça dure de manière ininterrompue comme succès. Le ratio diminution des blessés est dans une optique de 18 pour un.

Je reviendrai pas sur les chiffres de l'État de Victoria, je veux juste vous citer la Grande-Bretagne. La Grande-Bretagne vient de terminer une immense série de projets-pilotes, huit. Eh bien, sur ces huit projets-pilotes, proportion de vitesse... véhicules excédant la limite de vitesse est passée de 55 à 16 %, réduction moyenne des vitesses a été de 4,2 milles à l'heure, ce qui a entraîné une diminution d'accidents de 28 % et de décès et de blessés graves de 47 %, et ces résultats, je peux vous le dire, là, Corbett et Simon, qui sont les auteurs de l'étude évaluative, sont les auteurs parmi les plus crédibles qu'on puisse trouver dans le domaine.

Et le dernier argument que j'amènerais, c'en est un que personne n'a évoqué, mais c'est la réduction des coûts sociaux. Plutôt que de dire qu'on est en train de chercher un moyen d'aller prendre de l'argent dans la poche des contribuables, moi, j'y vois le contraire: on va être capable de remettre de l'argent dans la poche des contribuables compte tenu des coûts sociaux.

Vous avez tous déjà entendu parler de ces études de type économétrique où on dit: Attention, une vie humaine, ça n'a pas de prix. Mais on est capable de la calculer, on est capable de le faire. Ce que je vous souligne, c'est que, dépendamment des pays, une vie humaine, ça va de 150 000 $ à 30 millions de dollars. Vous comprendrez que, dans les pays africains, ça vaut pas cher et que, dans les sociétés très riches où on est prêt à mettre le paquet pour sauver une vie humaine, les États-Unis, on va se retrouver avec des valeurs de l'ordre de 30 millions de dollars.

Le calcul fait pour le Québec ? je dis bien pour le Québec ? en prenant des normes qui sont des normes qui nous sont très proches, fait en sorte qu'actuellement on peut considérer qu'ici nos coûts liés à l'insécurité routière, coûts simplement liés aux accidents corporels, sont de 4 milliards de dollars par année. Et, si notre bilan sécurité était à la hauteur de celui de la Grande-Bretagne, autrement dit si on était un peu plus performant, on aurait déjà 1 milliard de coûts en moins à supporter annuellement. Et ça, c'est une donnée, je pense, qui nous... répugne à bien des gens qui consiste à dire: Mais ça se calcule pas, le prix d'une vie humaine! Ça se calcule quelque part au travers des soins de santé et des services sociaux, de la douleur des uns et des autres. À mon avis, c'est un élément fondamental.

Je vous souligne simplement, en terminant, que, dans les dispositions qui concernent l'implantation d'un radar photographique, pour que ça marche, il faut qu'un certain nombre de précautions et de critères soient respectés. Il y a des intentions qui me sont apparues correctes dans le projet de loi. J'ai proposé ? puis vous l'avez dans le document ? certains amendements qui sont de nature cosmétique, puisque je parle davantage de dispositifs automatiques plutôt qu'uniquement photographiques, parce qu'on va travailler avec des technologies, je l'espère, numériques.

Puis je dois vous avouer, M. le ministre, c'est pas dans le projet de loi, mais j'entretiens de grands doutes quand vous me dites qu'on va être capable de faire de belles démonstrations avec quatre appareils sur 40 sites. Ça m'apparaît tout à fait irréaliste. Je ne sais pas à partir de quoi on a fait ce type de calculs. Mais, si on veut faire une démonstration claire pour convaincre l'opinion publique, je pense qu'il y aurait tout lieu de se doter d'un bon programme de vérification et de validation avec un comité externe qui puisse, je pense, très librement critiquer la manière de faire. Je vous remercie.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. Paquette, pour votre exposé. M. le ministre des Transports.

n(15 h 50)n

M. Chevrette: Je vous remercie, moi aussi. C'est intéressant, vous écouter. On vous aurait écouté pendant une heure, parce qu'on se rend bien compte que vous avez pris la peine d'étudier les différentes études, étudié les différents programmes qui ont eu lieu dans divers pays. Donc, je vous remercie de votre collaboration et de votre apport, que vous donnez à cette commission. Et j'ose espérer que vous serez disponible d'ailleurs pour contribuer avec la SAAQ à améliorer sensiblement une législation potentielle qui répondrait à l'objectif fondamental, celui de réduire le nombre de vies.

Comme vous l'avez exprimé, maintenir... maintenir un bilan routier est tout un exploit, juste le maintenir. Ç'a été ardu mais relativement facile de baisser de 2 200 à 750, mais on se rend compte, depuis une couple d'années, que c'est difficile à maintenir, à maintenir ce bilan-là à ce niveau-là. On s'est fixé des objectifs sur cinq ans. Je pense que, si on continue à travailler, tout le monde ensemble, avec des actions complémentarisées les unes aux autres, on réussira non seulement à le maintenir, mais sans doute à l'améliorer. Et je voudrais vous en remercier.

Vous avez... vous êtes au courant de l'étude qui a été conduite ou le programme qui a été conduit en Colombie-Britannique. On sait que, pour des raisons politiques... c'était un engagement électoral pour l'enlever. Est-ce que vous avez lu les résultats, et est-ce qu'ils sont concluants?

M. Paquette (Guy): C'est très clair, l'étude... les différentes études, parce qu'il y en a eu plusieurs dans le cas de la Colombie-Britannique, je ne dirais pas que ce sont les plus rigoureuses, celles qu'un chercheur souhaiterait voir être mises en oeuvre, mais je pense qu'elles concluent ce à quoi on est en droit de s'attendre sur le plan théorique à partir du moment où un programme est correctement implanté. Mais je vous avouerais que, personnellement, je critique même le type d'implantation qui s'est faite en Colombie-Britannique, parce qu'à mon avis, lorsqu'on a commencé à jouer avec la manipulation des seuils de tolérance à partir desquels les cinémomètres sont déclenchés, il y a là un problème.

C'est la raison pour laquelle je considère que vous devriez faire un pas de plus et non seulement en disant aux gens: On va installer des panneaux qui signalent l'endroit où sont utilisés ces appareils ? par exemple: prochain tronçon, 4,6 km, surveillance automatisée ? mais il faudrait que soient très clairement connues quelles sont les marges de tolérance, qu'on ne joue pas avec ça. Parce que, là, on peut avoir une présomption tout à fait raisonnable de penser que, à quelque part, quelqu'un se dit qu'en abaissant ces seuils non seulement il améliore sa sécurité, mais il améliore certainement les entrées de fonds.

M. Chevrette: Que pensez-vous des panneaux à messages variables en sortant de la zone, qui indiqueraient, par exemple, que quelqu'un a circulé à 140 kilomètres.

M. Paquette (Guy): Je vous rappelle très, très modestement que c'est une de mes propositions lors de la précédente commission parlementaire. À mon avis, ça va avoir un effet vraiment efficace de modification comportementale. C'est quelque chose qui coûte un peu plus cher évidemment à installer sur des sites qui sont fixes, mais qui est autrement plus efficace sur le plan comportemental. Et à mon avis, l'objectif, vous l'avez très clairement établi, ce n'est pas de garnir les coffres du gouvernement, c'est tout simplement d'en arriver à une meilleure gestion du comportement vitesse. Et, comportement vitesse, je suis un conducteur comme vous tous, ma dernière contravention au Québec, elle date ? j'étais très jeune conducteur ? des radarphotos. Et je sais très bien que, moi, sur le plan individuel, que ça fera pas mon affaire que d'avoir des radarphotos. Mais je suis pas plus fou qu'un autre, quand il va y avoir une zone d'annoncée, je vais lever le pied.

M. Chevrette: Maintenant, vous avez entendu divers groupes qui ont proposé... par exemple, les locataires et puis les concessionnaires d'automobiles et également le taxi. Remarquez qu'ils nous proposaient différentes formules, vous avez pu le suivre, je pense, comme débat. Que pensez-vous des suggestions qui ont été faites là-dessus?

M. Paquette (Guy): Bien, moi, je considère qu'il y a eu plusieurs rapports qui ont été extrêmement intéressants, et un des points qui m'apparaît peut-être un petit peu plus troublant, c'est effectivement ce sur quoi on pourra être éventuellement coincé pour plusieurs automobilistes qui vont choisir d'installer, à longueur d'année, des supports à vélo, mais le modèle, je suppose, le plus large possible, alors qu'ils n'ont jamais pratiqué de vélo de leur vie. Une des hypothèses qui a été avancée ? j'ai lu ça dans les débats tard hier soir ? était celui de réintroduire la plaque d'immatriculation à l'avant, ce qui résoudrait tous les problèmes.

M. Chevrette: Pour les remorques en particulier? Pour les remorques?

M. Paquette (Guy): Oui, entre autres pour les remorques, mais ça réglerait aussi le problème de l'obstruction des plaques, mais je trouve aussi que sur les autres éléments qui ont été avancés, notamment le fait que tous les locateurs opèrent avec réserve sur marge de crédit et qu'une modification au contrat de location puisse faire en sorte que, automatiquement, on soit capable de faire suivre. Le locateur qui constate par la suite que le véhicule a été légèrement accidenté ne se gêne pas, il ne se prive pas d'aller prendre ce qu'il a à prendre sur les cartes de crédit des individus.

M. Chevrette: Oui, d'autant plus que j'observais... je l'avais pas observé auparavant, mais j'observais ce matin, sur le contrat qui lie le locateur et le locataire, il y a une clause qui dit présentement qu'il paie toutes les infractions. Donc, ça va être nécessairement une amélioration pour eux dans le cadre actuel des choses, là, en changeant cette partie-là.

M. Paquette (Guy): Bien, en tout cas, moi, je trouve que ce sont d'excellentes suggestions. Je ne suis pas un juriste, j'ai pas la prétention d'avoir quelque compétence que ce soit dans ce domaine. Ce qui m'intéresse, c'est de faire un calcul en bout de ligne: Est-ce que, les inconvénients que l'on va rencontrer dans la mise en place de ce type de dispositif, est-ce qu'ils outrepassent les bénéfices qu'on peut en attendre? Et je pense que dans le cas d'une implantation qui est réfléchie, qui est structurée, les bénéfices dépassent très largement tous les coûts qui ont été évoqués par qui que ce soit jusqu'à maintenant.

M. Chevrette: Quant à l'établissement des sites, il y en a plusieurs qui nous ont dit qu'ils craignent qu'on les mette partout, à la grandeur du Québec, alors que le projet-pilote ne vise que des sites difficiles d'accès, où les statistiques démontrent qu'un nombre assez élevé d'accidents se produisent, accidents avec décès, accidents avec... avec blessures graves. Comment vous voyez l'établissement de ces sites? Parce qu'il y en a qui nous ont parlé de critères, etc.

M. Paquette (Guy): Dans l'une des études et dans le mémoire qui a été soumis lors de la commission précédente, j'ai fait état des critères qui sont utilisés par d'autres juridictions un petit peu partout dans le monde. J'en ai retenu quelques-uns qui sont un peu plus simples d'application. Ces critères, dans la plupart des cas, ils s'appuient essentiellement sur une chose: le volume d'accidents par rapport à des sites comparables, mais d'accidents qui sont liés à des vitesses excessives. Donc, on peut sortir de là des critères. Par contre, ceci nous oblige à une réévaluation périodique. Si on a réglé, en bout de ligne, un problème dans un secteur donné, eh bien, je pense qu'il faut pouvoir, au travers de ces évaluations périodiques, déplacer l'appareillage du cinémomètre pour aller intervenir sur un autre secteur, une fois qu'on a pu régler un problème.

Par contre, dans mes recommandations, j'indiquais que les zones scolaires et les zones de travaux devraient être des zones autorisées en tout temps. Et ça...

M. Chevrette: Scolaire et?

M. Paquette (Guy): Les zones scolaires et les zones de travaux. Et ça, si vous examinez les résultats des enquêtes d'opinion publique non seulement ici au Québec, mais partout dans le monde, vous vous rendez compte qu'on atteint, là, des scores qui sont absolument inégalés. Vous allez me dire qu'il y a de l'émotionnel dans le cas des zones scolaires, mais, quant à moi, je trouve qu'il est encore... qu'il est tout autant criminel de boire avec un verre de trop... de conduire avec un verre de trop que de conduire dans une zone scolaire aux heures d'entrée puis de sortie des enfants en roulant à 50, 55, 60 km/h, parce qu'on sait que les réductions de vitesse, même d'à peine quelques kilomètres-heure sont extrêmement déterminantes en cas de collision. Et surtout, surtout, très clairement, il faudrait que personne n'ose imaginer qu'on puisse retirer les brigadiers scolaires. Il faut qu'ils demeurent là, mais, les pauvres! ils sont souvent dépourvus en termes de moyens en regard des situations qu'ils ont à gérer.

M. Chevrette: Maintenant, croyez-vous qu'il est indispensable et absolument nécessaire d'avoir continuellement des patrouilles d'interception là où on installerait les cinémomètres photographiques?

M. Paquette (Guy): Avoir en permanence des patrouilles d'interception? Moi, je pense qu'il faudrait pas avoir plus de patrouilles qu'on en a en temps normal. C'est un ajout additionnel, il faudrait pas retirer les policiers de ces secteurs-là. Et je pense qu'il faut le prendre dans cette perspective: dans des zones qui sont des zones problématiques, pas simplement parce qu'elles sont difficiles d'intervention. Dans certains cas, on n'arrive pas tout simplement pas à bout du problème. Et corriger une infrastructure, dans certains cas, c'est beaucoup trop coûteux. Et je pense que le cinémomètre peut être une méthode d'intervention qui peut être aussi socialement extrêmement acceptable par tout le monde à partir du moment où les choses sont transparentes, sont claires, sont honnêtes.

M. Chevrette: Mais rien n'empêche de travailler dans le cadre d'une participation de complémentarité entre les différents corps policiers et les endroits où on installe les cinémomètres.

M. Paquette (Guy): Bien, moi, ça m'apparaît être indispensable. Il y a aucune politique de sécurité routière à mon avis qui apparaît viable à partir du moment où on n'est pas capable d'y associer le plus tôt possible les corps policiers. Et ça...

M. Chevrette: Mais je suppose qu'il doit avoir... on doit avoir la capacité, grâce aux technologies modernes, par exemple, de découvrir qu'il y a un type qui, tous les jours, peut-être pas dans sa Ferrari ni dans sa Porsche, mais avec son auto, qui passe régulièrement à 30 km au dessus de la vitesse permise. Et un travail de complémentarité avec la Sûreté du Québec ou les corps policiers pourrait être indispensable pour sortir un de ces genres d'individu de la route, par exemple.

n(16 heures)n

M. Paquette (Guy): Bien, écoutez, je pense qu'il va se sortir tout seul. À partir du moment où il entre dans une zone où il y a des radarphotos, et, si en plus vous achetez cette idée... Puis, moi, je prône très vivement qu'on aille dans ce sens-là, que le conducteur fautif ? puis qu'il l'a été volontairement, il l'a vu, qu'il entrait dans une zone sous surveillance automatisée ? qu'il se fait aviser au sortir de la zone et voit son numéro de plaque d'immatriculation qui apparaît sur un panneau d'affichage, avec le kilométrage auquel il a été évalué. Cet individu-là, il va pas commettre trois infractions par semaine, parce que je vous garantis qu'à son prochain chèque de paie il va être obligé de se séparer de son véhicule. Alors, il aura pas cette nécessité. Je pense que les policiers, lorsqu'on peut les dégager de certaines tâches telles que, par exemple, aller faire la gestion des feux de circulation quand on a une panne d'électricité, c'est pas une job très intéressante. Il y a des choses pas mal plus intelligentes, et efficaces, et pertinentes pour nos policiers.

M. Chevrette: Merci.

Le Président (M. Lachance): Avant de céder la parole au député de Shefford, j'aimerais savoir si, à votre connaissance, il existe des études ou une étude sérieuse... vous avez parlé de la Grande-Bretagne, mais dans les pays d'origine latine, au tempérament latin, comme la France, par exemple, ou l'Italie.

M. Paquette (Guy): Bon. La France, elle dispose d'un parc de photoradars qui est relativement important, sauf qu'ils se sont en même temps, je dirais jusqu'à la réforme de la loi il y a peu de temps, empêtrés dans un problème technique, qui était celui de dire: Il faudrait que l'on identifie en même temps le conducteur. Et, dans certains cas, on a tenté de travailler avec la technologie photo de face, mais photo de face pose des problèmes absolument monstrueux, des problèmes sur le plan technologique, là, qui sont considérables. La France a changé sa réforme depuis peu... a produit une réforme il y a peu de temps, l'an dernier, et maintenant on est capable d'opérer les radar-photos simplement à partir de la présomption selon laquelle c'est le propriétaire qui est responsable. Mais vous connaissez un peu nos cousins français; dans certains cas, ils vont se doter de règlements ou de lois qui semblent avoir énormément de mordant, mais ils ne font pas de mise en application, et tout le monde connaît les fameux pardons présidentiels qui reviennent régulièrement et qui permettent de donner l'absolution à énormément de gens.

L'avantage qu'on a au moins ici, dans notre société, c'est qu'on sait qu'on est juste d'un bout à l'autre. Si vous avez une contravention, même si vous êtes très bien placé, vous allez devoir la bouffer, comme on dit entre nous. Et le photoradar a cet immense avantage, c'est qu'il est juste pour tous. Il y a pas de traitement de faveur, il y a pas de traitement particulier. Et, à mon avis, si on peut avoir la transparence puis l'honnêteté voulues, on va être capable de faire une application qui va être pour le plus grand bénéfice de la majorité et qui va peut-être permettre de ralentir ceux qui, malheureusement, ne comprendront jamais tous les messages de sécurité et les cris de désespoir de leurs proches et de leurs amis, que, malheureusement, on entend trop souvent.

Le Président (M. Lachance): M. le député de Shefford.

M. Brodeur: Oui, merci, M. le Président. Dans le même ordre d'idées que la question qui vous a été posée par le président. Vous avez dans votre exposé, d'entrée de jeu, parlé d'une étude qui avait été faite en Allemagne. C'est pour ça qu'un peu la même impression me venait, l'objectif de la question du président, parce que, pour ceux qui sont allés en Allemagne, si vous circulez à 120 km/h sur la route, je pense que vous avez l'impression que vous devez débarquer parce que vous vous pensez arrêté. Ça fait que les habitudes de conduite, là, sont différentes et la mentalité allemande aussi est différente. Donc, je trouve difficile d'application ces études-là ici, au Québec, mais étant donné que les études sont minces aussi... D'ailleurs, la Commission qui a déposé un mémoire juste avant votre entrée disait: «Dans un mémoire remis dans le cadre de l'étude du livre vert sur la sécurité routière, le spécialiste recommande l'implantation des photoradars à certains endroits, même si leur efficacité à réduire le nombre d'accidents n'est pas clairement établie.»

Une voix: ...

M. Brodeur: Tout ça... vous réagirez après ça. On a entendu ce matin deux représentants de policiers, que je considère des experts, puisque les policiers, c'est eux qui sillonnent nos routes, nous dire qu'il n'est pas vrai que les policiers, avec la technologie actuelle, ne peuvent pas faire de la surveillance dans des endroits dangereux. Et l'on sait que, si quelqu'un circule à une vitesse excessive, il est un danger et, si on lui envoie seulement une contravention quelques semaines ou quelques mois plus tard par la poste, c'est pas une mesure dissuasive. Donc, les policiers nous disaient ce matin qu'ils ont la technologie pour le faire, ils peuvent arrêter ces gens-là, pas nécessairement dans le milieu du tunnel, mais il y a quand même un espace pour l'arrêter, et, à ce moment-là, le photoradar ne sera pas nécessaire. Donc, est-ce que... En tout cas. Pour plusieurs, il apparaît que cette méthode de faire là est beaucoup plus dissuasive qu'un photoradar, et, si les gouvernements investissaient plutôt dans la surveillance policière, on pourrait faire en sorte non seulement de dissuader le récalcitrant en lui envoyant immédiatement une contravention, mais il aurait un avertissement immédiat. Plus, on protégerait la vie du public qui l'accompagne à ces endroits dangereux là. Est-ce que vous avez consulté justement ces policiers-là?

M. Paquette (Guy): Vous avez tout à fait raison quand vous dites que c'est bien plus dissuasif de se faire arrêter par un policier patrouilleur plutôt que de l'apprendre... là, je vous corrige parce que vous dites «un mois plus tard». Le projet de loi, c'est indiqué «15 jours». Moi, j'aurais préféré que ce soit un peu plus raccourci dans le temps, il me semble que les nouvelles technologies nous permettraient d'informer les gens bien plus rapidement. Techniquement, il y a même des essais qui ont été faits à certains endroits où vous commettez votre infraction, elle est constatée sur le plan numérique, jumelée à une base de données, ça s'en va en fibre optique. Vous arrivez chez vous, vous ouvrez votre ordinateur, c'est déjà dans votre courriel. Donc, ça peut être très rapide au besoin.

Et ce que je veux vous signaler, c'est qu'il faut pas introduire le photoradar ou le cinémomètre automatique sous prétexte qu'il y a des endroits qu'on ne peut pas surveiller. Ça donnerait un coup de pouce additionnel, c'est certain. Les nouvelles technologies en particulier, les technologies au laser vont permettre de pouvoir cibler avec énormément de précision les individus qui sont des infractionnistes. Ce que j'ai tendance plutôt, moi, à dire, c'est: Ajoutons le cinémomètre automatique à l'arsenal en place.

Quand je vous disais tout à l'heure que la probabilité d'être arrêté au Québec pour excès de vitesse est extrêmement faible, elle est probablement beaucoup plus faible que pour une vaste proportion, là, des provinces et des États nord-américains. Vous le savez, vous n'avez qu'à vérifier le comportement des conducteurs québécois aussitôt qu'ils traversent la frontière. Pourtant, même en traversant la frontière, on bénéficie, dans la plupart des États maintenant, de limites de vitesse sur autoroute qui sont sensiblement plus élevées qu'ici. Donc, la morale de ça, c'est de dire: Le photoradar, c'est pas une solution pour des endroits qui sont particulièrement difficiles. Le photoradar s'applique sur des zones où il y a une forte concentration d'accidents liés à la vitesse.

On peut avoir un endroit qui est difficile à surveiller, mais, s'il ne pose pas de problème de sécurité, pourquoi installer un photoradar là? Ça n'a pas de sens. Par contre, pensez bien qu'un endroit... On a cité souvent l'autoroute Du Vallon, ici, à Québec. Sur l'autoroute Du Vallon, il s'est produit, en moyenne, 250 accidents par année. Et vous voulez savoir où c'est? Il suffit de descendre et vous allez voir toutes les traces de freinage, les bordures qui sont égratignées. Et vous savez que, à peut-être quatre endroits où il suffirait d'implanter ce dispositif avec l'affichage électronique, vous venez de régler votre problème à tout jamais. Si vous voulez régler le vrai problème de Du Vallon, il faut changer la configuration de l'autoroute, mais là on a un projet d'au moins 300 millions, parce qu'il va falloir faire pas mal d'expropriations puis il va falloir essayer de construire quelque chose qui soit aussi correct pour respecter la trame, l'environnement urbain.

Là, avec un investissement de peut-être 400 000 $, on va régler... peut-être aucun décès par année, parce qu'il est rare qu'il y en ait, les vitesses sont pas si élevées que ça puis c'est une autoroute, c'est des voies séparées, on va quand même régler pas mal de blessés légers puis de blessés graves, beaucoup de tôle froissée, et j'espère que les assureurs s'en frotteraient les mains. Et tout ça pour peu d'argent, peu d'argent qui va probablement être gagné, là, la dépense va être amortie en l'espace d'un mois. Le premier mois, bien des gens ne croiront pas que c'est vrai que, dorénavant, ils ne peuvent pas circuler en haut de 70 km/h sur Du Vallon, alors que la vitesse moyenne actuelle est d'à peu près 90 à 100. Je me suis fait doubler hier soir par une bétonneuse. Je roulais moi-même à 105 km/h dans la courbe. Je me suis fait doubler par une bétonneuse.

M. Brodeur: Arrêtez-le!

Une voix: ...

M. Brodeur: Il y a une phrase qui m'a frappé dans votre préambule, tantôt. Vous avez dit qu'un projet-pilote de quatre photoradars, selon vous, c'est pas suffisant, il faudrait en inventer... pas en inventer, mais en installer beaucoup plus pour que ce soit efficace.

M. Paquette (Guy): Si ce que l'on cherche à faire, c'est une démonstration de l'efficacité du radar-photo à réduire les vitesses puis à diminuer les accidents, à mon avis, quatre appareils en rotation sur 40 sites, ça m'apparaît être insuffisant. Il vaudrait bien mieux se dire que, si on veut pas aller au-delà d'un investissement de quatre ou cinq machines, bien, toutes les concentrer au même endroit, puis vous allez voir. Si vous les mettez sur Du Vallon, vous allez voir vos accidents, je vous le garantis, fondre de 250 à 125 en l'espace de six mois.

M. Brodeur: Donc, pour être efficace, il faudrait des photoradars un peu partout au Québec...

M. Paquette (Guy): Non.

M. Brodeur: ...dans tous les endroits. On peut parler de milliers de photoradars à ce moment-là.

M. Paquette (Guy): Non, surtout pas, surtout pas. On parle d'endroits qui sont des lieux à forte concentration d'accidents où il est difficile d'intervenir autrement.

M. Brodeur: Il y en a combien, au Québec, de ces endroits-là?

M. Paquette (Guy): Je ne pourrais pas estimer le nombre d'endroits. Je pense que là on tombe dans le domaine des critères puis de l'application des critères. Dans les documents que j'ai produits jusqu'à maintenant, j'ai sorti un certain nombre de valeurs à partir desquelles on pouvait travailler en termes de seuil critique et, à mon avis, je pense que les analyses qui seraient faites au fur et à mesure par le ministère des Transports, qui aurait la responsabilité de déterminer les lieux où il vaut la peine d'intervenir, je pense que c'est ça qui devrait devenir l'élément fondamental. Mais, à mon avis, sur tout chantier de construction majeur au Québec, on devrait toujours avoir une unité en opération. Ça, c'est très clair.

M. Brodeur: Bon. Si on additionne les endroits où il y a des réparations au Québec, malgré qu'on devrait en avoir plus, il y en a déjà quelques-unes... Si je prends juste l'exemple, par exemple, de chez moi, que je connais plus, le comté de Shefford, il y a plusieurs endroits où, ultimement, selon vos propos, on devrait installer des photoradars. Donc, ça serait, quant à moi, un millier de photoradars au Québec. Donc, c'est une grosse industrie, là. Pour que ça soit efficace, selon vos dires. Mais vous me dites que vous allez diminuer le nombre d'accidents de moitié sur Du Vallon. Est-ce que vous allez changer les habitudes de conduite seulement sur Du Vallon ou vous allez changer fondamentalement, avec ces quelques photoradars-là, les habitudes de conduite partout au Québec?

n(16 h 10)n

M. Paquette (Guy): Très clairement qu'on ne va rien changer ailleurs au Québec. Par contre, ce qu'il y a d'encourageant, c'est que l'expérience britannique récente nous montre qu'il y a des effets de généralisation sur les zones autour, alors qu'on pensait, nous, comme chercheurs, il y a quelques années, pour avoir fait énormément d'évaluations de l'efficacité des opérations policières coups-de-poing, règle générale, il n'y avait pas d'effet de généralisation. Là, on en constate, et c'est très intéressant, c'est en même temps très encourageant.

C'est très clair que l'effet de généralisation qu'on aura autour de Du Vallon serait limité aux portions immédiates. Mais, très souvent, vous savez aussi qu'une personne sur la phase d'adaptation, au moment où elle sort d'une autoroute puis qu'elle entre dans une trame urbaine ou dans un village, le temps d'acclimatation puis d'adaptation pour passer d'une vitesse de 110, 120, dans certains cas 130 km/h, pour entrer dans un village à 50, ça prend un certain temps. À partir du moment où vous êtes déjà capable de ramener vos gens au travers d'une autoroute urbaine à des vitesses correctes, aux environs de 100 km/h sur une autoroute urbaine, et qu'ils vont se retrouver immédiatement sur une rue résidentielle à 50, dites-vous bien que le passage de 100 à 50, il se fait pas facilement sur le plan de la perception. Pourquoi est-ce qu'on est obligé d'y aller avec de la coercition en matière de vitesse alors qu'avec l'alcool on peut y aller par la conviction, on peut y aller par la persuasion? Les gens sont raisonnables, ils peuvent écouter les arguments. Parce que le domaine de la vitesse, en termes d'appréhension personnelle, n'a strictement rien à voir avec tout ça. Les véhicules d'aujourd'hui sont tellement silencieux, confortables, les systèmes de son, la suspension, malgré l'état des routes, font en sorte qu'on n'a pas l'impression qu'on roule de manière exagérément rapide.

M. Brodeur: C'est lui qui l'a dit, hein, c'est pas moi.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: C'est un expert, un expert, un grand expert.

Une voix: ...écoute.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brodeur: On va continuer dans les questions strictement budgétaires. Ne croyez-vous pas, si on investirait au même endroit dans une surveillance policière, donc accompagnée peut-être d'un photoradar et d'un policier, d'un policier en tant que tel qui fait du radar, qui a la technologie pour le faire... est-ce que, si on investirait pas plutôt dans ce domaine-là, dans ces endroits dangereux là, avec une surveillance permanente, ce serait beaucoup plus efficace et beaucoup plus dissuasif qu'un photoradar?

M. Paquette (Guy): Pas du tout. Vous lirez la dernière partie de mon mémoire où vous verrez qu'il y a un organisme relativement important...

M. Brodeur: Meilleur que la police?

M. Paquette (Guy): ...dans lequel on a pris le temps d'essayer d'évaluer le coût de certaines interventions en termes de rentabilité. Le photoradar fait partie des mesures qui ont les meilleurs rapports d'efficience.

Des voix: ...

M. Paquette (Guy): Est-ce que je peux toujours avoir votre attention? J'aimerais bien vous répondre parce que c'est important.

Un policier avec son véhicule va probablement ? je dis bien «probablement», c'est une estimation que je vous donne ? coûter au moins, avec tout ce que ça implique, 125 000 $ par année. On a besoin d'un policier, par exemple, sur du Vallon, qui va travailler tout le temps. Un photoradar, qui, lui, va opérer 24 heures sur 24, 365 jours par année, et donc ce sera pas 200 jours par année, va vous coûter probablement, avec les frais récurrents d'entretien, aux environs de 18 000 $ par année. Faites le calcul et vous allez voir qu'il y a une sacrée différence, au départ, en termes de coûts.

L'autre chose, c'est que votre policier, il va peut-être pouvoir intervenir au mieux s'il est très efficace, mais Du Vallon, c'est dangereux, il va falloir qu'il soit très prudent, puis, en hiver, il y a des fois où c'est vraiment problématique... il va pouvoir peut-être aller vous chercher quatre contrevenants par heure. Le radarphoto, vous le savez, en théorie, il peut aller en chercher deux à la seconde. C'est sans commune mesure. Mais attention là. C'est comme dans le temps où on fabriquait des allumettes puis que le monde les gossait à la mitaine. Quand il est arrivé des machines pour faire ce genre de travail, bien, les machines étaient bien plus efficaces.

Moi, je veux qu'on libère les policiers de ces tâches qui sont des tâches que je considère être des tâches peu intéressantes, peu valorisantes, puis dans lesquelles ils n'ont plus les moyens en termes de nombre d'effectifs policiers par rapport à la croissance du trafic automobile puis aux problèmes qui se posent. Je veux qu'ils soient là, je veux qu'ils puissent intervenir sur les gens dont on présume qu'ils ont des comportements qui vont bien au-delà des simples excès de vitesse.

M. Brodeur: Au bout de votre pensée, M. Paquette, si on installerait des photoradars partout au Québec puis on affecterait les policiers à d'autre chose, ce serait meilleur.

M. Paquette (Guy): Non, absolument pas. Écoutez, on n'est pas un état policier, hein, puis un état policier automatique ou un état policier tout court. Je ne veux pas avoir de photoradar partout au Québec. Je préférerais très largement là qu'on se dirige vers le développement de système de routes intelligentes le plus vite possible parce que déjà on trouve que, très souvent, conduire, c'est une activité qui est plus ou moins agréable, mais là ça peut devenir carrément infernal. Donc, la couverture en mur-à-mur, les Britanniques malheureusement viennent de verser de ce côté-là. Le ministre des Transports, là, il vient de décider qu'il serait intéressant de porter le nombre de caméras en Grande-Bretagne aux environs de 6 000.

Une voix: Neuf mille, je pense.

M. Brodeur: Neuf mille?

M. Paquette (Guy): Six mille. Je considère qu'on est rendu, là, à des niveaux qui sont non seulement sans précédent, mais qui, là, vont beaucoup trop loin. Ce fameux rapport entre conflit-mobilité-sécurité, la sécurité oui, soit. Mais, moi, je n'ai pas envie qu'on vienne me dire d'abandonner mon véhicule puis de circuler en vélo parce que c'est plus sécuritaire.

M. Brodeur: Parce que j'essaie d'aller le situer à un juste milieu, là. On est allé dans votre prémisse de base: quatre photoradars, c'est pas suffisant. Si on veut changer...

M. Paquette (Guy): Pour un projet-pilote, entendons-nous, là.

M. Brodeur: Pour un projet... Et, si on veut, ultimement, aller plus loin, selon votre pensée... Puis vous me dites qu'on remplacera pas les policiers par des photoradars au complet. Quand même là, vous nous dites qu'il y a un certain nombre de photoradars qui devraient être installés. Vous me dites aussi, également, qu'on peut donner une contravention à toutes les deux secondes. Ça devient agressant pour un citoyen, là. Je pense qu'il faudrait, à travers tout ça, je pense, avant de penser à aller plus loin que ça, revoir le système de sécurité routière qu'on a, revoir la vitesse qu'on a sur nos routes avant d'arriver avec des photoradars qui, par exemple, installés un peu partout, pourraient être injustes dans certains cas. Je pense qu'on a à revoir tout le système avant d'y aller avec des photoradars.

M. Paquette (Guy): C'est surtout ça qu'il faudrait éviter. Mais je pense que, maintenant aussi, les limites de vitesse, on n'a pas à y toucher dans les zones scolaires, en milieu urbain non plus. Les limites de vitesse de 30 km/h, 50 km/h en milieu urbain, maintenant c'est universel. En France, ça a pris un certain temps avant qu'ils finissent par descendre de 60 à 50 en milieu urbain. Nous, on jouera pas là-dessus. On sait qu'au Québec on a un problème en termes de consensus social, de crédibilité de limite de vitesse sur les autoroutes. C'est une question qui est à part. Et je vais être le premier à dénoncer M. Chevrette ou les corps policiers qui voudraient s'installer sur la 20 ou sur la 40 avec des radars photographiques. Ça, là, ce serait contre-productif et ça jetterait à terre tous les bénéfices qui pourraient être attendus de ce genre de système. Ça, soyons extrêmement clairs. Des zones critiques, on peut les identifier. On sait que le radar photographique, c'est une arme de plus dans l'arsenal des moyens de coercition et de dissuasion dont on peut disposer avec efficacité. On sait, par des études réalisées à l'étranger, que, lorsque c'est bien fait, on a des résultats de manière assurée.

Ce qui me préoccupe, c'est le respect de ces critères. C'est la raison pour laquelle je tiens, moi, en tout cas, en tant que chercheur, à conserver mon indépendance relativement à tout ça. Parce que, comme individu, ça ne m'intéresse pas de voir des radars photographiques à chaque coin de rue. Comme chercheur et comme personne préoccupée de sécurité routière et d'amélioration du bilan routier, je sais qu'actuellement c'est la meilleure mesure que l'on puisse avoir en termes d'efficience, par rapport à ce que ça va nous coûter, par rapport aux inconvénients que ça va engendrer. Compte tenu des gains qu'on peut en retirer, eh bien, ces gains-là... On disait tout à l'heure: Les économistes, ils peuvent faire des calculs là-dessus. Les gens qui ont des proches qui ont subi des traumatismes ou qui ont carrément perdu des proches à la suite d'accidents de la route, inutiles dans énormément de cas, qui sont le fait de certains individus... Puis, malheureusement, même si on multipliait par deux les effectifs policiers, on ne serait pas toujours là pour pouvoir les coincer lorsque ce serait le temps de le faire. La technologie est là pour ça.

Le Président (M. Lachance): Alors, très rapidement, votre temps est écoulé.

M. Brodeur: Oui. Comment expliquer, lorsqu'il y a des opérations spéciales lors de week-ends... Par exemple, on l'a vu au printemps dernier où on a mis des ressources plus importantes, où les accidents ont diminué de moitié, le nombre de morts a diminué de moitié, le nombre d'accidents avec blessés a diminué de moitié. À ce moment-là, on met des ressources qui sont nécessaires et, à ce moment-là, je pense que... Je sais pas, ma perception des choses, c'est: on fait exactement la même chose à la grandeur du Québec en tout temps. Et, si on réorganiserait justement les travaux des policiers et les horaires, on pourrait faire en sorte non seulement de protéger les gens, de donner un signal clair qu'on doit respecter les lois sur les routes... Et, en même temps, ces gens-là, vous me dites: Bien, s'ils donneraient juste trois conventions par jour, 365 jours par année, 500 $ par jour, je pense que chaque policier se paierait à ce moment-là puis on aurait un résultat clair. Pourquoi ne pas préconiser ce genre d'investissement là plutôt que l'investissement du photoradar, qui est agressant pour le citoyen? Si je comprends bien, ça en prendrait beaucoup pour en faire effet.

M. Paquette (Guy): Bon. Alors, pour commencer, je vais répondre sur la question des bilans routiers qui s'améliorent lors de ces opérations. Un, sur le plan statistique, ça prend plus qu'une fin de semaine ou deux fins de semaine pour être capable de valider ça avant d'avoir des effets qu'on peut considérer comme étant significatifs. Deuxièmement, si on était capable de répéter ça très régulièrement, tant mieux. Mais, moi, ce que j'ai vu, mardi matin, c'est que les gens, sur la 20, entre Saint-Augustin et ici, Québec, roulaient à 130 km/h. Toute la fin de semaine, il y avait des policiers partout, puis ils roulaient vraiment au pas, à 100, 105, 110 maximum. Mais là les policiers, ils avaient bien le droit de le prendre, leur congé de la fête du Travail. Bien, qu'est-ce qui se passe? Bien là, tout de suite, les gens, très rapidement, ont changé.

n(16 h 20)n

L'histoire du photoradar, en termes d'introduction, c'est qu'il apparaît que c'est la meilleure mesure que l'on puisse introduire actuellement. Il y a pas... Je suis un spécialiste en communication, je forme des étudiants là-dedans et je sais que, malheureusement, peu importe la qualité des campagnes que l'on pourrait mener sur la chose, ce ne sera qu'un appui. Ce qui compte, c'est de pouvoir amener les individus dans la perspective où la probabilité objective de se faire contrôler pour excès de vitesse soit telle qu'ils s'autodisciplinent. L'idée, c'est pas de prendre les gens. Je suis le premier à dire: Contrairement à ce qui se passe dans d'autres juridictions où on dit: Il faut déplacer les radar-photos pour que les gens aient l'impression qu'ils peuvent être pris n'importe où... au contraire, moi, je livre le message qui consiste à dire: Identifions les zones critiques, disons-le très clairement aux citoyens, et ceux qui sont assez fous pour continuer de se comporter en délinquants, eh bien ceux-là, qu'on les sanctionne.

M. Brodeur: Vous êtes spécialiste en communication, vous dites?

M. Paquette (Guy): Oui.

M. Brodeur: J'espère aussi en sécurité routière?

M. Paquette (Guy): Et en sécurité routière.

Le Président (M. Lachance): M. le ministre, il vous reste deux minutes.

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais remercier à nouveau notre spécialiste. Tantôt, le député de Shefford me donnait des leçons de compréhension. Je m'aperçois que ça a été dur à le faire comprendre.

Ceci dit, je voudrais que vous puissiez me dire, quand vous parlez de la validité d'un projet-pilote... Nous avons identifié certains sites, un certain nombre de sites à la SAAQ, peut-être une quarantaine. Selon vous, quelles sont les proportions de sites versus les caméras qu'il faudrait avoir pour véritablement mener une expérience-pilote à bonne fin?

M. Paquette (Guy): On peut pas répondre strictement sur un plan théorique parce que tout dépend de la longueur des tronçons qui sont désignés. En fonction de la longueur des tronçons, de leur configuration, des points où on peut faire ce type de vérification, là on est capable de se prononcer.

L'autre chose que je veux surtout souligner là-dedans, c'est que, si on veut faire un projet-pilote, on peut pas décider qu'on commence demain matin, parce qu'il faut accumuler des données auparavant. Les données qui ont permis d'identifier les sites dangereux, on les a; on revient en arrière puis on dit: Ici, il y a eu une forte concentration d'accidents. Mais ça, ça ne nous dit pas si ces accidents sont liés à une problématique de vitesse excessive. Or, si on voulait faire les choses comme du monde, il faudrait qu'on recueille de l'information, des données pendant plusieurs mois auparavant en regard de ces faits, qu'on se rende compte qu'il y a effectivement là un problème de vitesse et qu'ensuite on soit capable de valider les effets de l'introduction du cinémomètre dans ces endroits.

On a parlé de cinémomètre, juste de cinémomètre aujourd'hui. Dans les recommandations que je vous fais, je propose même de changer le terme pour «dispositif» parce qu'il m'apparaît que, tant qu'à se lancer dans des débats du genre qui touchent autant la question du travail des policiers que de la réorientation dans certains cas puis le redéploiement de ces effectifs policiers, des problèmes que ça pose sur la responsabilité des propriétaires, bien, moi, il m'apparaît qu'on aurait dû parler aussi de caméras feu rouge parce que, même si c'est quelque chose qui nous touche moins, c'est malheureusement un problème qui est en croissance actuellement. Et je pense que ça aussi, c'est un autre outil qu'on devrait mettre à la disposition des gens qui ont à faire de l'intervention pour nous sauver malgré nous.

M. Chevrette: Merci. Face à la compétence, je...

Le Président (M. Lachance): Alors, merci, M. Paquette, pour votre participation aux travaux de cette commission.

Remarques finales

Et, en vertu des dispositions de notre règlement, nous allons amorcer dans quelques instants les remarques finales en commençant d'abord par celles du porte-parole de l'opposition officielle et, pour terminer, ce sont les remarques finales du ministre des Transports et représentant du gouvernement. Alors, M. le porte-parole de l'opposition officielle et député de Shefford, vous avez 15 minutes pour nous faire part de votre synthèse de ce que nous avons entendu ici.

M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Nous avons entendu plusieurs groupes depuis hier, une douzaine de groupes. Nous avons aussi entendu beaucoup de gens depuis le dépôt du projet de loi le printemps dernier. J'ai eu la chance de rencontrer des policiers, des camionneurs, des simples citoyens qui utilisent la route. Et, à la lumière de ce qu'on a entendu aujourd'hui et hier, il y a rien qui démontre que le photoradar est un système dissuasif pour changer les habitudes de conduite des gens. Donc, dans un premier temps, M. le Président, l'installation de photoradars n'est pas dissuasive. Et, à la lumière de ce qu'on vient d'entendre, par exemple, de M. Paquette qui nous dit que quatre photoradars pour changer le système, c'est pas assez, il en faudrait peut-être un 1 000 ou un 2 000 qui donnent des factures à toutes les deux secondes, donc, M. le Président, de cette façon-là, je pense que le photoradar est tout simplement ultimement, à quatre ou à 1 000 exemplaires, juste un prétexte pour aller chercher de l'argent de plus dans les poches des automobilistes.

Donc, sachant très bien que ça change pas du tout, pas du tout les comportements de conduite, M. le Président, à ce moment-là, je pense que l'objectif, l'objectif de sauver des vies et d'augmenter la sécurité routière, le photoradar n'amène pas une meilleure façon de protéger des vies au Québec. Et, lorsqu'on dit que ça va sauver tant de vies, tant de vies ou tant de vies, on le sait qu'il y a aucune étude concrète. Il y a quelques études seulement faites par la même personne au Québec et il y a rien qui indique que le photoradar sauverait une vie.

D'autant plus, M. le Président, qu'on nous dit que ces installations-là seraient faites dans des endroits où les policiers ne pourraient faire de la surveillance. Il a été clairement démontré, M. le Président, par les policiers, et on doit juger que ce sont les experts, les experts de nos routes, il est clairement démontré que la technologie actuelle permet de faire une surveillance adéquate dans tous ces endroits-là. Donc, la question qu'on doit se poser: Si les policiers sont capables de faire une surveillance adéquate dans ces endroits-là, quel est l'objectif d'installer des photoradars au Québec? Quel est l'objectif?

On parle d'un projet-pilote, sauf que le projet de loi, lui, ne parle pas du tout d'un projet-pilote. Le projet de loi permet au ministre de la Sécurité publique, qu'on n'a pas vu ici de la semaine, qu'on n'a pas vu ici de la semaine, donc au ministre de la Sécurité publique de désigner des endroits et des corps policiers ou des municipalités qui peuvent installer ces photoradars-là. Donc, le projet de loi, tel que stipulé, pourra permettre d'en installer quatre, cinq, 1 000, 2 000, 3 000. C'est un bar ouvert, M. le Président. Et un expert nous a dit tantôt qu'on peut donner une contravention aux deux minutes.

On sait qu'en Ontario l'expérience a été faite, et le photoradar rapporte à l'État 4 millions de dollars par année. M. le Président, si on ne peut augmenter la sécurité des gens sur nos routes, si on ne peut pas démontrer qu'on va sauver une seule vie avec ça, on peut sûrement démontrer qu'on va faire de l'argent. M. le Président, les citoyens, et principalement les automobilistes, sont les plus taxés en Amérique. Le ministre, à la première période de questions... à la première occasion, au printemps dernier, je lui posais la question, s'il était pour retirer ce projet de photoradar là. Il a dit: Non, mais on va faire un fonds dédié; c'est pas une taxe, on va faire un fonds dédié. Il y en a un gros fonds dédié, M. le Président, au Québec, les automobilistes payent 2 milliards de dollars de taxe sur l'essence, 2 milliards de taxe sur l'essence, sans compter qu'ils payent 700 millions de dollars pour les permis d'immatriculation.

M. le Président, d'ailleurs, dans la région de Montréal et dans la région de Québec, il y a des taxes spéciales concernant les automobilistes. On parle de 60 millions à Montréal. On parle également de vos taxes sur les pneus, 2 $ du pneu. Tout ça, M. le Président, là, ça fait environ 3 milliards de dollars de taxes et d'impôts à donner aux automobilistes. Donc, M. le Président, si on se dit que ces taxes-là reviennent aux automobilistes et au système routier, tant mieux, mais non, M. le Président, le budget total du ministère des Transports est de 1,7 milliard de dollars, donc le gouvernement du Québec se remplit les poches adéquatement avec ça. En plus, cette année, il y a eu une augmentation terrible du prix de l'essence et il y a eu aucun retour aux automobilistes. Regardez l'état des routes présentement. Et, lorsqu'on parle de fonds dédié sur une taxe supplémentaire, M. le Président, je pense que les Québécois en ont assez de payer des taxes et en auront plein le dos, M. le Président, si on installe ces photoradars-là.

Ensuite de ça, M. le Président, je pense que, en terminant, ça serait la moindre des choses que le ministre, plutôt que de déposer des amendements, nous dise tout simplement qu'il va retirer son projet de loi, qu'il va retirer son projet de loi, qu'il va remettre ça à plus tard, et sinon à jamais. Ce serait la meilleure solution, M. le Président. La semaine prochaine, on sait que nous allons étudier... nous allons recevoir des groupes sur la sécurité routière. On a parlé de vitesse sur les routes. On sait présentement, M. le Président, que la vitesse sur les routes... Parce que, si on prend, par exemple, les autoroutes, c'est maximum 100 km/h, et on sait qu'il y a une tolérance, une tolérance, 115, 118. Donc, M. le Président, ça, c'est applicable partout. Si on peut aller 15 km plus rapidement sur les autoroutes, les gens se disent qu'ils peuvent aller 15, 20 km plus rapidement ailleurs.

Donc, avant de penser seulement à installer un photoradar qui créerait un système de deux poids, deux mesures, donc une contravention automatique dans certains secteurs et, dans d'autres secteurs, ça serait laissé à la discrétion des policiers qui ont déjà un manque de ressources ? s'ils arrêteraient tout le monde qui roule 101 km/h, la Transcanadienne serait pleine, M. le Président, il y aurait plus de monde sur le côté, arrêtés, qu'il y aurait du monde sur la route... Donc, on doit revoir, absolument revoir les limites de vitesse, on doit revoir tout le système, on doit aussi revoir les quarts de travail des policiers, et, si c'est nécessaire, d'en rajouter d'autres, en rajouter d'autres, M. le Président, pour que la sécurité des automobilistes soit garantie.

n(16 h 30)n

Le ministre nous dit depuis deux, trois jours, et je l'entends en «scrum» depuis hier: Ah! bien là, c'est parce que l'opposition, eux autres, la sécurité des gens, là, ça leur importe peu. M. le Président, la sécurité des gens, là, ça passe par la logique, puis on a entendu depuis deux jours, deux jours, des gens nous dire que la meilleure façon de protéger la sécurité du public, c'est de mettre les effectifs nécessaires sur la route, de mettre les effectifs nécessaires. Donc, le dépôt d'un projet de loi comme ça, M. le Président, c'est une question strictement budgétaire et non pas une question de sécurité publique.

Donc, M. le Président, dans ce cas-là, dans ce cas-là, ce que je vous dis en terminant, c'est que l'opposition va se battre de façon acharnée pour que le Québec ne se dote pas de systèmes de photoradar, pour que le Québec ne se dote pas d'un système additionnel pour taxer les automobilistes qui sont les plus taxés d'Amérique. Et, dans ces conditions-là, M. le Président, ce qu'on demande au ministre, c'est de retirer son projet de loi. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le député de Shefford. Vous avez maintenant la parole, M. le ministre des Transports.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. En écoutant le député de Shefford, je comprends toute la quintessence du sens, de la différence entre «entendre» et «comprendre». Il y a deux groupes sur 12 qui se sont exprimés sur les effectifs, aucun autre... les autres sur certains droits. Il y a seulement deux groupes sur 12, je les ai comptés, et j'ai lu personnellement tous les mémoires. Donc, on ne charriera pas.

Quand on fait même pas la différence entre des coûts de mobilité puis des coûts de sécurité puis qu'on n'additionne pas ce que ça coûte en santé puis en indemnités, je vous dis franchement, ça manque de rigueur et ça manque de sérieux comme critique de l'opposition.

Ceci dit, je me suis présenté ici avec beaucoup d'ouverture d'esprit puis j'ai écouté tous les mémoires. Ça a été rafraîchissant d'entendre un spécialiste à la fin, à part de ça. Si on l'avait compris, d'ailleurs, on n'aurait probablement pas fait de remarques aussi farfelues et légères qu'a pu faire le critique de l'opposition, depuis deux jours qu'on a entendu des gens se soucier d'améliorer la sécurité publique.

J'ouvrais le débat en disant: 25 % des accidents... La plus grande cause de décès au Québec, c'est la vitesse maintenant. Ça a rejoint et même dépassé quelque peu l'alcool: 19 % d'accidents avec blessés graves. Ça, c'est 1 000 blessés graves par année, 180 décès.

Si on regarde les pourcentages par rapport au global, 13 % des accidents avec blessés légers. C'est 5 000 blessés légers dans des accidents dus à la vitesse. Ça me préoccupe et ça me préoccupe au-delà des intérêts, au-delà des intérêts de certaines personnes ou de certains groupes. On doit transcender les intérêts quand on a à prendre des décisions ici.

Sauf qu'avec beaucoup d'ouverture d'esprit je reconnais qu'il y a eu énormément de suggestions extrêmement heureuses. Et je voudrais remercier tous ceux et celles qui ont défilé devant nous, parce que je pense que ça doit pas être un voeu pieux de vouloir sauver des vies. Et afficher une partisanerie au niveau de l'analyse... C'est plutôt d'analyser les raisons, les motifs qui sont donnés, et ça, ça m'a plu de voir qu'il y avait du monde qui avait compris que de se présenter devant une commission parlementaire, il valait la peine de donner des motifs pour justifier les suggestions, et il y en a eu énormément.

Il y en a eu une, par exemple... Et je commence à donner toutes celles qui seront retenues, qui seront retenues, à mon point de vue... que je ferai des recommandations au Conseil des ministres. Et je présenterai deux scénarios au Conseil des ministres: il y a le scénario de la réécriture du projet avec un ensemble d'amendements dont je tiendrai compte, et je vous les donnerai tantôt, ou encore un scénario tout simplement d'amendements majeurs.

Personnellement, je serais porté, à première vue, à parler de réécriture et non pas d'amendements, parce que je pense que c'est assez substantiel, les amendements qui nous ont été suggérés, Mais je crois que je dois laisser au Conseil des ministres de choisir entre les deux scénarios, d'une réécriture de projet de loi ? donc ce qui signifierait un retrait ? ou encore d'un lot d'amendements dont je voudrais faire part un peu ici suite à ces échanges constructifs de la part de la majorité des groupes.

Tout d'abord, je pense que... d'autant plus que les victimes sont souvent des jeunes; je pense que c'est la Sûreté du Québec, ce matin, qui nous disait que les victimes sont malheureusement souvent des jeunes. Je pense qu'on doit se soucier de n'importe quelle perte de vie, mais imaginez-vous, quand on a des blessés graves avec séquences pour la vie d'un tout jeune garçon de 18 ans ou de 16 ans puis qu'il est invalide jusqu'à 60, 70 ans, c'est encore plus dramatique, même si, bien sûr, une vie humaine a une même valeur quel que soit l'âge de la personne.

Ce que je retiens donc, ce sont un peu les consensus que je crois qui se dégagent un peu de toute cette commission. Donc, d'abord, d'entrée de jeu, ce projet de loi n'aura la durée que le temps de l'expérience. En d'autres mots, tous ceux qui ont exprimé des craintes de voir s'élargir ou de voir perdurer dans le temps cette législation, c'est faux. Je mettrai une clause... je suggérerai une clause crépusculaire, qu'on appelle, une clause qui ne prévoira que le temps de l'expérience-pilote et le temps de l'analyse, mais spécifique à cette législation. Donc, ça veut dire, si c'est deux ans d'expérience plus un an de bilan, ça sera trois ans, et la loi n'existera plus.

Qui plus est, je proposerai également au Conseil des ministres que ce bilan soit déposé à l'Assemblée nationale du Québec et que ce bilan fasse l'objet d'une commission parlementaire, avec l'aide de spécialistes, pour en évaluer véritablement le bien-fondé avant de procéder à une toute nouvelle législation, quelle qu'elle soit. En d'autres mots, si on voulait l'étendre, il faudrait relégiférer, il faudra revenir devant l'Assemblée nationale. Mais même l'expérience-pilote sera analysée par les parlementaires et il y aura une commission parlementaire spécifique sur cette expérience-pilote.

Le nombre d'appareils utilisés et les termes généraux du projet-pilote seront spécifiés par une législation. Spécification des sites qui seront en annexe, du nombre d'appareils qui figureront. Il s'agit pas d'être... Il s'agit d'être d'une transparence totale. Un comité aviseur sera mis en place tel que demandé par, je crois, l'association... c'est-u le Barreau? Je me souviens pas quel groupe... mais un comité...

Une voix: ...

M. Chevrette: Le CAA. Mais il y aura... tous les groupes intéressés en feront partie pour définir les balises du projet-pilote: définir les critères de sélection des sites, en définir le nombre requis et retenir les sites pertinents; définir le type d'appareil; préparer un arrêté ministériel identifiant les sites d'opération; publiciser les sites par radio, télévision, panneaux de signalisation sur Internet, et chaque site choisi fera l'objet d'une signalisation très évidente à l'entrée même; assurer une gestion et une évaluation transparentes de l'ensemble du projet-pilote.

Ce comité aviseur pourrait être formé des représentants de la Société de l'assurance automobile, du ministère de la Sécurité publique, du ministère des Transports du Québec, de divers services policiers, de représentants de l'industrie du transport et des automobiles, CAA, etc., coroner au besoin et milieu de la santé. Et je n'hésite pas également à parler de groupes structurés. On veut absolument de la transparence dans ça.

Pour donner suite à une recommandation de la protectrice du citoyen, le projet de loi comporterait une clause permettant au propriétaire ayant acquitté une amende de s'adresser à un tribunal compétent pour en obtenir le remboursement du conducteur concerné, si on ne trouve pas les moyens qu'on a avancés depuis hier matin. Mais ça va être, ça, il va y avoir un moyen de réparer toute injustice qui pourrait poindre à l'horizon.

Le projet de loi indiquera que la contravention sera acheminée au propriétaire dans un délai de 15 jours. S'il faut mettre 10 jours, suite aux avis du comité aviseur, on mettra 10 jours. Je comprends, la célérité a une importance capitale si on veut avoir un effet.

S'il s'agit d'un locateur de voitures, d'un concessionnaire ou celui d'un taxi, celui-ci pourra soumettre le contrat signé par le locataire, et la contravention sera acheminée à ce dernier, comme on a parlé avec les concessionnaires, avec les loueurs de... toutes les grandes compagnies de location et également avec les chauffeurs de taxi, ce matin. Ce qu'ils voulaient avoir, moi, je trouve que ç'a du grand bon sens. On ne taxe pas inutilement le propriétaire, mais on responsabilise celui qui loue une voiture ou qui emprunte une voiture.

Des solutions seront proposées pour tenir compte des différentes problématiques exprimées également en ce qui regarde la confidentialité des documents. Ça, je pense que c'est tout à fait important. D'ailleurs, on a l'obligation... c'est bien plus pédagogique si je le dis parce qu'on a l'obligation de se conformer, tous, qui que nous soyons, à la Loi d'accès à l'information en tout temps. On n'a même pas besoin de l'écrire, mais, pour certains, ça va être bon au moins qu'ils la lisent, ils vont pouvoir comprendre quelque chose à un moment donné.

n(16 h 40)n

Suite à des recommandations de l'ACQ, je vais carrément faire commencer le travail, s'il n'est déjà amorcé, pour la question des conducteurs de camion, tout le statut du chauffeur professionnel. Je pense que, dans l'industrie du camionnage, pour y avoir travaillé beaucoup depuis quatre ans, c'est indispensable parce qu'on a légiféré sur la tolérance zéro. Et le dossier d'un conducteur pourrait avoir une répercussion sur le dossier du propriétaire. Je suis très sensible à cela et je vais travailler très clairement à l'élaboration de quelque chose de mieux structuré pour surveiller la conduite des chauffeurs professionnels pour qu'ils aient véritablement un dossier de chauffeur professionnel.

Je vais également demander à la SAAQ que les amendements soient préparés en concertation avec le Barreau, d'une part, et, d'autre part, avec les principaux partenaires concernés afin de corriger ce que le Barreau nous donnait hier comme remarques. Je pense que c'est important qu'on les retienne.

Et enfin, au-delà de ce que peuvent comprendre certains individus, créer un fonds dédié où l'argent sera complètement réinvesti dans la sécurité, complètement réinvesti dans la sécurité. Ça, ça m'apparaît être intéressant pour continuer à travailler quotidiennement, quotidiennement à réinvestir en sécurité. Réinvestir en sécurité, ça veut dire se doter peut-être d'alcobus; ça peut être de contribuer à former des groupes dans des quartiers, dans des milieux. Réinvestir en sécurité les argents qui seraient perçus de cette expérience-pilote, on se comprend bien, de cette expérience-pilote, parce que c'est important de le dire. Les autres...

Quand on investit en taxes sur l'essence, quand on est capable de comprendre quelque chose, on sait que ça sert à réparer des routes, à construire des routes, mais aussi ça sert à d'autres choses, toute la gestion, l'administration. Et, si on parle de sécurité, il y a des primes d'assurance automobile.

Et, là-dessus, je voudrais dire un mot, surtout pour les fins de la presse. Connaissez-vous quelque chose au Québec qui n'a aucunement augmenté depuis 17 ans, mais qui, par contre, a vu ses bénéfices continuellement augmenter? Ç'a été les primes d'assurance automobile. Et la seule formation politique, en passant, qui a pigé à deux mains dans la banque de la Société de l'assurance automobile, ce sont les libéraux du Québec avec 2 milliards. Ils ont aucune leçon à donner sur ce qui est... pour ce qui est de la question de la gestion des fonds de l'assurance automobile. Donc, s'il vous plaît, un peu de modestie ou un peu de retenue quand on sait pas... on connaît pas nos dossiers.

Enfin, je voudrais dire merci à tous ceux qui ont voulu travailler de façon constructive. Moi, je pense qu'on a véritablement... on a véritablement fait le tour. Je vais prendre le temps de réfléchir à tout cela. Je vais recommander au Conseil des ministres des choses et j'ose espérer qu'on pourra continuer à collaborer, tous ceux qui ont voulu le faire, là, à collaborer à faire en sorte qu'on puisse avoir le meilleur des projets de loi. Mais tout ça, pas pour se faire plaisir, tout ça ne serait-ce que pour sauver une vie humaine. Quand je... Ça m'horripile de voir qu'on est peu sensible dans certains cas à cela.

Moi, je vous rappelle que, quand on est à l'Assemblée nationale, souvent il se lève un député: Puis le ministre, il est responsable. À Thetford, je me rappelle, quand les deux jeunes ont été happés par un chauffard qui n'avait ni permis puis qui n'avait ni automobile, c'était quasiment la faute du ministre, de la part de cette opposition mirobolante. Mais, fondamentalement, là, au-delà des partisaneries ou au-delà des partis ou des lignes de parti politique, là, je pense qu'on est nanti du devoir. On est nanti du devoir véritablement de faire tous les efforts, mais en complémentarité et aussi, n'en déplaise à certains parlementaires, avec les moyens financiers que l'on a. On ne nage plus dans les déficits de 6 milliards. Il nous faut faire le maximum avec les argents disponibles. C'est ça, respecter les citoyens puis c'est ça, avoir à coeur de réussir.

Moi, je pense que c'est mon devoir de travailler pour la sécurité. Je pense qu'il est de mon devoir de ne jamais manquer une occasion de faire plus pour la sécurité. Mais il est aussi de mon devoir, je pense, de respecter les droits individuels mais pas au prix des libertés individuelles des autres. Ça, va falloir qu'on retienne ça dans notre société. Jusqu'où la liberté des uns peut aller sans brimer la liberté des autres? Moi, je pense que c'est un débat qu'il nous faudra faire dans notre société, sinon on manquerait le bateau. Quand on est dans un endroit public, quand on emprunte la route au Québec, si tu as le droit de rouler conformément aux règles, parce que c'est le respect automatique des autres usagers, il faut prendre les moyens pour contrer ceux qui n'ont aucune liberté.

Et je pense pas que les citoyens... On est porté à généraliser, mais je ne pense pas que les citoyens du Québec soient plus bêtes qu'ailleurs. Quand on a lancé le virage à droite, on nous a prédit la catastrophe, et c'est une opération qui est excellente présentement. Ça va très bien, l'opération, et on est en train de l'analyser.

On nous prédit, là, qu'il n'y a personne qui va respecter les vitesses, comme si on savait pas lire que c'est une zone de radar, comme si on était pas assez intelligent pour savoir qu'on peut être piégé. Moi, je fais confiance aux Québécois. Et je sais que les Québécois veulent absolument être protégés. Et le gouvernement a ce rôle indispensable, essentiel, de base, c'est de faire respecter les autres citoyens aussi, et on va tout faire pour contrer les excès, dans le respect, bien sûr, des chartes des libertés et des droits. Merci.

Le Président (M. Lachance): Merci, M. le ministre. Alors, je remercie tous les membres de la commission pour leur collaboration au cours des travaux de cette commission. Et, comme la commission a accompli son mandat, j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 16 h 46)



Document(s) associé(s) à la séance