Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Dix heures quinze minutes)
Le Président (M. Brouillet): À l'ordre, mesdames et
messieurs! La commission reprend ses travaux.
Voici les membres et les intervenants pour cette séance: M.
Bissonnet (Jeanne-Mance), Mme Lachapelle (Dorion), M. Bourbeau (Laporte), M.
Clair (Drummond), M. Desbiens (Dubuc), M. Lachance (Bellechasse), M.
Léger (Lafontaine), M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata),
M. Rocheleau (Hull), M. Rodrigue (Vimont), M. Polak (Sainte-Anne), M. Blank
(Saint-Louis), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Caron (Verdun), M. Doyon
(Louis-Hébert), M. Blais (Terrebonne), M. Gauthier (Roberval), M.
Grégoire (Frontenac), M. Dauphin (Marquette), M. Perron (Duplessis).
Voici l'ordre du jour. Nous allons procéder à l'audition
des mémoires des organismes suivants: l'Association Covoiturage
Québec Inc., la ville de Montréal, la Conférence des
maires de la banlieue de Montréal, l'Association
québécoise du transport et des routes Inc., l'Association
haïtienne des travailleurs du taxi, la Communauté régionale
de l'Outaouais, Taxi GSM Ltée, Taxis LaSalle (1964) Inc., et la Ligue de
taxis de Baie-Comeau, pour dépôt de mémoire seulement.
J'inviterais immédiatement les représentants de
l'Association Covoiturage Québec Inc., à s'avancer à la
table, s'il vous plaît. Nous allons nous limiter à une heure de
présentation et de discussion pour chacun des organismes. Je vous
demanderais, autant que possible, de vous limiter à un maximum de 20
minutes pour la présentation. Le reste du temps servira à
l'échange des questions et des réponses. J'inviterais le
porte-parole à s'identifier et à nous présenter les
personnes qui l'accompagnent.
Association Covoiturage Québec Inc.
M. Guilbault (Noël): Mon nom est Noël Guilbault, je
suis président de l'Association Covoiturage Québec Inc.; ma
compagne est Ginette Forgues, directrice générale de
l'association et membre permanente de l'association.
Je voudrais remercier la commission de nous avoir invités
à nouveau à vous faire part de notre désir de mieux faire
connaître le covoiturage. Il en a été question durant les
deux jours précédents, mais très peu. Ce matin, nous
espérons que notre participation pourra éclairer tous les membres
de la commission et les aider à mieux connaître le covoiturage et
le but de notre association.
Dans un premier temps, nous allons parler de l'objet du mémoire,
du contexte actuel du covoiturage ici, au Québec, de ce qu'est le
covoiturage comme tel; nous allons vous dire pourquoi nous voulons promouvoir
le covoiturage, quelle est la situation actuelle du covoiturage au
Québec, quelle place occupe le covoiturage en regard du transport urbain
et quelles sont nos recommandations au gouvernement, à la commission,
sur le covoiturage.
M. le ministre Clair invitait, en août 1982, les citoyens et
citoyennes du Québec à analyser les propositions gouvernementales
portant sur la réforme du taxi et sur la légalisation du
covoiturage. Pour donner suite à cette invitation, l'Association
Covoiturage Québec Inc., vous présente aujourd'hui un
mémoire endossant la proposition gouvernementale visant à
légaliser le taxi collectif et la pratique existante du covoiturage,
ainsi qu'à en faire la promotion au Québec.
Quelle est l'importance de l'automobile dans le contexte actuel? Avant
d'analyser l'impact du covoiturage sur la société
québécoise, il faut d'abord rappeler l'importance du
véhicule automobile dans nos vies quotidiennes. Soulignons, d'abord,
qu'il y a 2 400 000 automobiles en circulation au Québec. Cet
accès répandu du véhicule automobile a fortement
influencé notre société par la mobilité qu'il nous
procure. Présentement, plus de 70% des Québécois utilisent
leur voiture personnelle pour se rendre quotidiennement à leur travail.
Soulignons que 50% des navetteurs - plus de 1 000 000 - voyagent seuls dans
leur voiture.
De plus, la survalorisation de la voiture personnelle nous a
entraînés à associer la mobilité individuelle
à la liberté individuelle. Les conséquences de ce choix
sont importantes: un étalement urbain croissant dans les années
soixante et soixante-dix, l'impossibilité d'offrir des services de
transport en commun adéquats pour l'ensemble de la zone urbaine, un
coût social élevé des services de transport en commun pour
desservir des régions à faible densité, des
dépenses publiques élevées pour fournir
l'infrastructure routière requise pour les automobilistes, une
circulation urbaine massive aux heures de pointe, des espaces urbains
considérables devant être alloués au stationnement des
automobiles, une pollution atmosphérique croissante causée par
les véhicules automobiles, une grande demande de pétrole pour
alimenter ces véhicules, un style de vie de plus en plus individualiste
et un coût individuel très élevé pour la
propriété de ce véhicule. Selon le Club automobile du
Québec, une automobile coûte entre 5000 $ et 7000 $ annuellement
à son propriétaire. Nous ne voulons pas faire ici le
procès de l'automobile, mais plutôt vous souligner que l'absence
de gestion des déplacements individuels, particulièrement en ce
qui a trait aux déplacements communs et réguliers des
travailleurs, a de lourdes conséquences sur notre
société.
Comme alternative, nous offrons le covoiturage. Le gouvernement du
Québec a reconnu, avec raison, que l'époque des nouveaux
investissements importants en infrastructures reliées au transport
terrestre est révolue. Nous vivons présentement une situation
économique difficile. Les dépenses publiques doivent être
réduites et nos investissements du passé doivent être
rationalisés. En d'autres mots, nous nous devons maintenant de
gérer adéquatement ce que nous avons acquis dans le passé.
Les entreprises sont aussi touchées par ce phénomène. La
demande de biens et de services est réduite et la rentabilité de
l'exploitation est affectée. Finalement, le consommateur voit son
pouvoir d'achat baisser et il est forcé, lui aussi, de rationaliser ses
dépenses.
Le covoiturage n'est pas la solution à tous ces problèmes,
mais il est certainement un des éléments de solution pouvant
être incorporés dans un plan global de restructuration du
transport au Québec. Les raisons sont diverses: entre autres, son
adoption n'implique aucune dépense publique additionnelle en ce qui a
trait à l'infrastructure sous-jacente; la promotion de ce mode de
transport n'implique que des investissements minimes pour le gouvernement par
rapport aux retombées économiques qu'il procure; le covoiturage
offre une solution de rechange économique aux consommateurs
obligés d'utiliser leur voiture personnelle pour se rendre à leur
travail; finalement, jumelé à l'adoption du taxi collectif, il
offre une alternative intéressante aux commissions de transport en
commun devant fournir des services dans des régions où
l'achalandage est trop faible.
Le covoiturage comme mode de transport complémentaire. Ce qu'est
le covoiturage. Avant de faire ressortir quels sont les avantages du
covoiturage pour les travailleurs, pour les entreprises et pour la
société, voyons, d'abord, ce qu'est le covoiturage et quelles
sont les expériences américaines et ontariennes dans ce domaine.
Le covoiturage est un mode de transport collectif privé où un
groupe de personnes -au moins trois - travaillant au même endroit ou dans
le même secteur font le trajet ensemble entre leurs résidences
voisines et leur lieu de travail ou d'études. Ces personnes partagent un
même véhicule et les frais associés à ces
déplacements. Les usagers du covoiturage demeurent habituellement
environ à une quinzaine de kilomètres (9 milles) de leur travail,
s'ils font du covoiturage par automobile, et à une quarantaine de
kilomètres (24 milles), s'ils font du covoiturage par fourgonnette.
Le covoiturage n'est pas du nouveau. En réalité, le
covoiturage n'est pas un nouveau mode de transport. En effet, un sondage du
Conseil des transports de la région de Montréal
démontrait, l'été dernier, que quelque 110 000 navetteurs
de la région de Montréal font du covoiturage pour se rendre
à leur travail. Sur l'ensemble du Québec, cette pratique est
adoptée par environ 20% des travailleurs. Soulignons ici que, pour les
fins de ces statistiques, le covoiturage se définit comme étant
simplement le transport régulier de plus d'une personne dans un
véhicule privé. Un sondage de Covoiturage Québec,
réalisé l'été dernier, démontre que
près de 50% du covoiturage actuel est de type familial. En conclusion,
le covoiturage se pratique déjà de façon spontanée
et naturelle depuis de nombreuses années. C'est dans sa forme
organisée et systématique que Covoiturage Québec propose
d'en faire la promotion. Cette initiative a déjà
été amorcée avec succès depuis 1973 aux
États-Unis et depuis 1978 en Ontario. Le Québec peut donc
bénéficier de ces expériences entreprises par ses voisins
et, ainsi, éviter certaines erreurs de parcours normalement
vécues lors des premiers essais.
Ce qu'est le covoiturage aux États-Unis. Aux États-Unis,
comme nous le disions précédemment, le covoiturage est
pratiqué de façon organisée depuis la crise du
pétrole en 1973. Le gouvernement fédéral, y voyant un
intérêt collectif important, s'est hautement impliqué.
Entre autres, il a: rédigé une loi type pouvant être
adoptée par les États pour légaliser le covoiturage
(environ 40 États ont, depuis, légalisé le covoiturage);
permis certains transferts de fonds alloués aux autoroutes pour
permettre l'implantation de centres de covoiturage (Highway Planning Funds,
UMTA Funds, etc.); créé un Centre national d'information sur le
covoiturage au sein du "Department of transportation"; créé le
"Executive Loan Program" pour aider au démarrage de programmes dans les
entreprises; incité les employeurs à voir à ce qu'au moins
20% de leurs employés se déplacent en covoiturage;
encouragé les États à offrir des incitatifs en ce qui
concerne les
Commission permanente
péages, les voies réservées, les centres de
regroupement de navetteurs, etc.; établi un réseau d'expertise
regroupé sous deux organismes: la "National Van Pool Operators
Association" et "l'Association of Ridesharing Professionals".
Les résultats témoignent de l'engagement gouvernemental.
Le covoiturage se répand de plus en plus et tous les
bénéficiaires s'impliquent dans l'organisation: les gouvernements
étatiques, municipaux et régionaux, les commissions de transport
en commun, les employeurs, certaines entreprises commerciales, les
particuliers. Conséquemment, aux États-Unis, quelque 250 000
travailleurs se rendent à leur travail régulièrement en
fourgonnette et ces 20 000 fourgonnettes enlèvent 150 000 automobiles de
la route aux heures de pointe. Le covoiturage par automobile étant plus
difficile à quantifier, le nombre exact nous échappe, mais il se
situerait dans les millions d'unités.
Le covoiturage en Ontario. En Ontario, c'est le gouvernement ontarien
qui a amorcé la promotion du covoiturage. Comme la plupart des provinces
canadiennes et des États américains, l'Ontario a, d'abord,
dû modifier son "Public Vehicles Act" en 1977 pour légaliser et
déréglementer la pratique du covoiturage. Puis il a mis sur pied
le "Share-A-Ride Program" au ministère des Transports et des
Communications, offrant une aide-conseil et une aide technique aux employeurs
désirant parrainer le covoiturage pour leurs employés. Plus de
110 unités de covoiturage par fourgonnette ont ainsi fait leur
apparition dans des entreprises telles que Dofasco, Northern Telecom, 3M,
Westinghouse, Bell Canada et Union Carbide. Un nombre beaucoup plus grand
d'unités de covoiturage par automobile a aussi vu le jour. Comme mesure
incitative additionnelle, le gouvernement ontarien a créé 25
"parkings" d'échange logeant gratuitement plus de 800 automobiles par
jour et permettant aux automobilistes en solo de transférer à un
point donné à des unités de covoiturage ou au transport en
commun.
Finalement, on a aussi fondé le "Ontario Van Pool Organization
Ltd.," une société d'État, propriétaire de 35
fourgonnettes mises à la disposition de groupes de navetteurs parcourant
de longues distances pour se rendre à leur travail. Ces covoitureurs
défrayent ensemble les coûts de leur fourgonnette (utilisation et
immobilisation) et voyagent ainsi de façon économique.
Le covoiturage au Canada. Au Canada dans son ensemble, le covoiturage
prend de l'essor. Les statistiques ne sont pas précises, mais
Énergie, Mines et Ressources Canada estime à 450 le nombre
d'unités de covoiturage par fourgonnette et à quelques millions
le nombre d'unités de covoiturage par automobile. Plusieurs provinces
canadiennes ont des lois assouplies encourageant la pratique du covoiturage.
Entre autres, le Manitoba, le Nouveau-Brunswick, l'Ontario,
l'Île-du-Prince-Édouard et la Saskatchewan encouragent la pratique
du covoiturage.
Pourquoi faire la promotion du covoiturage? En quoi le covoiturage
est-il intéressant pour la société
québécoise? Nous avons déjà identifié
plusieurs avantages sociaux, mais nous n'avons pas souligné ceux qui se
rattachent particulièrement aux navetteurs et aux entreprises.
Les avantages pour les navetteurs: Les navetteurs voyageant
habituellement seuls dans leur automobile bénéficient du
covoiturage à divers niveaux, dont: les économies de transport
pour se rendre à leur travail. Dépendant du kilométrage,
du type de véhicule utilisé, du nombre de covoitureurs et de la
formule de covoiturage, les économies varient entre 500 $ et 5000 $
annuellement. Par exemple, un groupe d'employés de la firme IBM,
à Bromont, copropriétaires d'une fourgonnette, voyagent
régulièrement entre Montréal et leur lieu de travail dans
un véhicule à quinze places. Ils épargnent chacun plus de
3000 $ annuellement en essence, péages et entretien. Si on ajoute
à cela l'économie réalisée sur l'usure
accélérée de leur automobile, cette épargne
annuelle s'élève à environ 5000 $, sans compter les
avantages suivants: l'élimination du besoin d'une deuxième
voiture et parfois même d'une voiture tout court; la réduction du
stress de la conduite; le confort et la rapidité d'un véhicule
privé; la fiabilité des horaires de transport; la
possibilité de voyager agréablement avec des collègues de
travail et des voisins, etc. (10 h 30)
Les avantages pour les entreprises. Les entreprises qui ont
parrainé ce mode de transport pour leurs employés
témoignent, elles aussi, des avantages qu'elles en reçoivent:
économies sur la construction et l'entretien d'espaces de stationnement.
(On sait qu'un espace de stationnement extérieur coûte entre 500 $
en banlieue et 2000 $ au centre-ville annuellement à un employeur; un
espace intérieur peut coûter jusqu'à 6000 $); accès
à une main-d'oeuvre élargie (Ceci est particulièrement
avantageux pour les entreprises situées dans les parcs industriels
éloignés des centre-villes); la stabilité du personnel (Il
est démontré aux États-Unis que les entreprises parrainant
le covoiturage ont diminué leur roulement de personnel);
l'amélioration du taux d'absentéisme et de la ponctualité
(Chrysler Canada, à Windsor, a réduit son taux
d'absentéisme et amélioré la ponctualité des deux
tiers en parrainant le covoiturage de ses employés);
l'amélioration de la productivité (Il a été
démontré que les employés faisant du covoiturage sont
moins
stressés et plus productifs); une meilleure relation
employeur-employés; une image corporative dynamique et soucieuse du
bien-être de ses employés, etc.
Les avantages pour la collectivité. Nous n'insisterons pas sur
les avantages que la société québécoise peut
retirer du covoiturage, car nous en avons déjà identifié
quelques-uns, notamment: l'optimisation des modes de transport existants; la
réduction de la congestion urbaine; l'optimisation des espaces urbains;
les économies d'énergie; l'amélioration de la
qualité de l'air et de la vie, etc.
Nous aimerions, cependant, vous souligner aussi deux autres avantages
importants: la rentabilité de l'infrastructure routière existante
et les conséquences sur les assurances automobiles. En effet, le
covoiturage permet aux autorités en transport d'augmenter l'accès
à des ponts, des échangeurs, des routes, tout en réduisant
l'achalandage sur ceux-ci. En 1970, le "Golden Gate Bridge Transportation
Authority", cherchant à solutionner un grave problème
d'embouteillage sur le pont Golden Gate à San Francisco, a fait une
campagne dynamique pour promouvoir le covoiturage des navetteurs. Le
résultat est que, en 1980, 10 000 navetteurs additionnels circulaient
quotidiennement sur le pont, et ce sans augmenter le nombre de véhicules
transporteurs.
En ce qui a trait aux assurances, nous aimerions souligner au
gouvernement que le covoiturage réduit le risque d'accidents sur les
routes, car une unité de covoiturage par fourgonnette enlève en
moyenne huit automobiles de la route, alors qu'une unité de covoiturage
par automobile en enlève de deux à trois; il est prouvé
que le conducteur d'une unité de covoiturage est plus conscient de la
responsabilité qu'il accepte et, conséquemment, sa conduite est
plus prudente. À cet effet, l'expérience américaine
démontre que les unités de covoiturage ont une moyenne d'accident
de 3,76 par million de milles parcourus, comparativement à 6,36, soit
presque le double, pour les autres véhicules automobiles.
De plus, les passagers d'une unité de covoiturage ont
habituellement une automobile pour leurs besoins personnels et payent leur
prime d'assurance de toute façon, ce qui bénéficie
à la Régie de l'assurance automobile du Québec et aux
assureurs privés, tout en réduisant le risque d'accidents. Notons
à ce chapitre que, depuis la mise en place en 1978 du système
d'assurance automobile actuel, il n'y a aucune crainte à avoir au niveau
des assurances pour les navetteurs en ce qui a trait au covoiturage.
La situation actuelle du covoiturage au Québec. Comme nous le
disions précédemment, le covoiturage se pratique
déjà au Québec depuis bon nombre d'années. Un
relevé de Statistique Canada indique que près de 500 000
travailleurs québécois se rendent régulièrement
à leur travail en faisant du covoiturage. Il reste, cependant, que plus
d'un million de Québécois voyagent encore seuls dans leur voiture
pour faire le trajet entre leur résidence et leur lieu de travail. Ce
sont ces automobilistes en solo que Covoiturage Québec tente
présentement de rejoindre.
Les objectifs de Covoiturage Québec. Comme vous le savez
déjà, Covoiturage Québec est un organisme à but non
lucratif subventionné par le gouvernement du Canada et le gouvernement
du Québec. Son intérêt et son mandat résident dans
la promotion et l'organisation du covoiturage parmi les travailleurs afin
d'augmenter le transport collectif au Québec. Pour ce faire, Covoiturage
Québec a choisi de rejoindre les automobilistes par le biais de leurs
employeurs. Nous nous adressons donc présentement aux grandes
entreprises peu ou pas desservies par le transport en commun ou à celles
dont le covoiturage peut résoudre un problème de
stationnement.
Les entreprises déjà impliquées ou
intéressées. Malgré le fait que la situation légale
du covoiturage ne soit pas encore clarifiée, plusieurs entreprises
québécoises ont déjà réalisé des
projets de covoiturage. À titre d'exemple, la compagnie Canadian
Marconi, à ville Mont-Royal, est présentement à instaurer,
avec l'aide de Covoiturage Québec, un projet de covoiturage par
automobile pour ses employés. Quelque 300 employés, voyageant en
automobile, ont déjà manifesté le désir de
covoiturer. Pour sa part, la compagnie s'est engagée à offrir un
stationnement gratuit à ces covoitureurs. La compagnie Pratt &
Whitney, à Longueuil, a organisé plus de 200 unités de
covoiturage par automobile en offrant un stationnement réservé
près de la porte d'entrée à ses employés faisant du
covoiturage. Soulignons que cet incitatif est intéressant puisque le
parc de stationnement chez Pratt & Whitney s'étend sur une
superficie rectangulaire de 0,7 mille. La compagnie IBM, à Bromont, est
présentement à organiser le même type de covoiturage pour
ses employés. À cet effet, il est intéressant de rappeler
qu'un groupe de quinze employés de cette compagnie, habitant à
Montréal, a acheté une fourgonnette en copropriété
pour couvrir économiquement les 22 000 milles parcourus annuellement
pour se rendre à leur travail. À l'École polytechnique de
Montréal, un projet de covoiturage monté par les étudiants
en génie a produit quelque 80 unités de covoiturage. Chez Marine
Industrie, à Sorel, c'est le syndicat qui a fait le travail
nécessaire pour regrouper des travailleurs en covoiturage. D'autre part,
la compagnie Bell Canada s'est engagée à réaliser un
projet
expérimental de covoiturage par fourgonnette lorsque la loi
permettra officiellement le covoiturage avec rémunération.
D'autres entreprises sont aussi prêtes à s'impliquer.
Cet intérêt des entreprises envers le covoiturage est assez
important en Amérique du Nord, puisqu'un sondage récent du
"National Association of Van Pool Operators" indique que plus de 700 employeurs
nord-américains parrainent déjà le covoiturage par
fourgonnette pour leurs employés. Un nombre encore plus grand organise
du covoiturage par automobile.
Les autres organismes intéressés. D'autres organismes et
regroupements sont aussi intéressés par le covoiturage. Les
villes de Bernières et de Sainte-Julie offrent un service de
regroupement à leurs citoyens se rendant à Québec et
à Montréal pour leur travail. Le ministère des Transports
du Québec a déjà envisagé le covoiturage comme un
des éléments de solution à un problème de
congestion routière occasionné par les travailleurs de l'Alcan,
à Arvida. Le CLSC de Terrebonne a tenu une séance d'information
et entrepris un service de regroupement pour les citoyens de la région.
La société de télédiffusion Radio-Québec
s'est engagée à faire une série d'émissions sur le
covoiturage dès que cette pratique sera légalisée. Des
organismes aussi importants que la Chambre de commerce de Montréal, le
"Board of Trade of Montréal", le Club automobile du Québec, la
Commission d'initiative et de développement de Montréal (CIDEM),
la Société pour le progrès de la rive sud,
Sociétal, l'Association québécoise du transport et des
routes, regroupant à eux seuls des milliers de membres, supportent aussi
le covoiturage et les activités entreprises par notre organisme pour en
faire la promotion.
Le contexte légal actuel au Québec. Toutefois, comme vous
le savez déjà, le contexte légal actuel du covoiturage au
Québec est présentement ambigu. L'article 36 de la Loi sur les
transports exige qu'un permis soit émis par la commission à ceux
qui offrent des services en transport moyennant rémunération. Or,
la commission n'a pas de permis explicite au covoiturage. Que doit faire un
citoyen voulant se conformer à la loi? M. Jean-Claude Doyon, de
Saint-Guillaume, a vécu cet imbroglio légal. Il a voulu se
conformer à la loi actuelle et a dû attendre cinq mois, prendre
congé de son travail et embaucher un avocat pour enfin obtenir un permis
de transport saisonnier de la Commission des transports du Québec.
Soulignons qu'il voulait transporter des collègues de travail en
fourgonnette, dans une région où le transport en commun est
inexistant. Cette ambiguïté légale sème de la crainte
chez les navetteurs et chez certaines entreprises intéressées au
covoiturage.
La place du covoiturage dans le transport au Québec. Avant de
terminer, nous aimerions vous renseigner brièvement sur la
clientèle visée par le covoiturage, sur les formes que peut
prendre le covoiturage et sur les contrôles que la Loi sur les transports
devrait imposer au covoiturage afin qu'il complémente les industries du
taxi et du transport en commun.
La clientèle visée par le covoiturage. En ce qui a trait
à la clientèle, le covoiturage est avantageux pour les
travailleurs et étudiants qui n'ont pas accès au transport en
commun, pour qui le transport en commun n'est pas pratique ou qui doivent
parcourir des distances supérieures à une quinzaine de
kilomètres pour se rendre à leur lieu de travail ou
d'études. Le covoiturage est particulièrement avantageux pour les
automobilistes voyageant seuls, pour les entreprises situées en
banlieues éloignées, pour les entreprises où le transport
des employés crée des problèmes et pour les commissions de
transport voulant rentabiliser leurs activités alourdies par
l'obligation de desservir des zones urbaines à faible densité de
population.
À San Francisco, on a calculé que, dans certaines
régions, il n'en coûte que 0,25 $ à 0,35 $ par siège
pour organiser du covoiturage par opposition à 1,47 $ par siège
pour fournir un autobus additionnel aux heures de pointe.
L'impact sur le transport urbain. Avant de parler des types de
covoiturage qui pourront se faire officiellement au Québec après
l'adoption d'un amendement à l'article 36 de la Loi sur les transports,
rappelons que le covoiturage est un mode de transport collectif privé.
Il ne demande aucun investissement en immobilisations de la part du secteur
public. Il aide aussi aux commissions de transport à régulariser
leur achalandage aux heures de pointe, qui demande de grands investissements
pour satisfaire aux besoins de quelques heures seulement, finalement, le
covoiturage des travailleurs décongestionne les centre-ville et
aère la circulation urbaine dense entre 7 heures et 9 heures et entre 16
heures et 18 heures.
Les formes de covoiturage. Trois formules sont utilisées pour le
covoiturage: le covoiturage par automobile, le covoiturage par fourgonnette et
le covoiturage par taxi. Le covoiturage par automobile se fait habituellement
entre voisins ou travailleurs d'une même entreprise avec l'automobile
d'une seule personne ou en alternant l'utilisation des véhicules des
covoitureurs. Le covoiturage par fourgonnette est soit parrainé par
l'entreprise, par les employés ou par un particulier qui achète
ou loue un véhicule à 12 ou à 15 places à ces fins.
Pour faire du covoiturage par taxi, on établit une entente avec une
compagnie ou un
chauffeur de taxi pour le transport régulier d'un groupe de
personnes. Cette formule s'appelle taxi collectif. Covoiturage Québec
s'engage à faire connaître ces trois formes de covoiturage aux
travailleurs québécois.
Les éléments de contrôle que pourrait prévoir
la loi. Nous avons démontré dans ce mémoire que le
covoiturage a sa place dans un système global de transport
intégré au Québec. Nous sommes aussi d'avis que le
gouvernement du Québec devrait prévoir certains contrôles
à la pratique du covoiturage afin qu'il s'intègre et
complète harmonieusement les autres modes de transport existants, tels
que le taxi et le transport en commun. À cet effet, il nous semble
approprié de vous suggérer de vous inspirer de la
réglementation sur le covoiturage mise de l'avant par le gouvernement du
Nouveau-Brunswick. Cette réglementation exige que les covoitureurs
respectent certaines clauses dont, un maximum de quinze places assises dans la
fourgonnette; pas plus d'un aller-retour par jour; un propriétaire ou un
locataire de véhicule automobile utilisé à des fins de
covoiturage ne peut posséder ou louer un autre véhicule
automobile aux mêmes fins, à moins qu'il ne soit l'employeur de la
majorité des covoiturés qui voyagent dans chaque véhicule;
les passagers ne peuvent pas payer le tarif plus souvent qu'une fois par
semaine; les unités de covoiturage doivent se soumettre aux exigences de
la loi des véhicules automobiles.
Si ces conditions sont remplies, aucune immatriculation commerciale ou
aucun permis de la Commission des transports ne sont requis. Selon cette
province, de telles conditions assurent un contrôle sur les
activités du covoiturage et protègent le transport public contre
toute forme d'abus.
Nos recommandations au gouvernement du Québec. À la
lumière des éléments que nous venons d'exposer dans ce
mémoire et sachant que le covoiturage offre des avantages
intéressants aux navetteurs, aux entreprises publiques et privées
et à la collectivité; que le covoiturage est un
élément essentiel d'un plan de transport global; que le
covoiturage est un mode de transport complémentaire aux modes de
transport publics et privés existants; que le covoiturage
n'entraîne pas de nouveaux investissements de la part du gouvernement et
devient même un service à la collectivité; que le
covoiturage se pratique déjà par des centaines de milliers de
Québécois, nous endossons la proposition gouvernementale
exposée dans De nouvelles avenues pour le taxi quant à
l'élimination des obstacles institutionnels et légaux sur la
pratique du taxi collectif et du covoiturage et nous endossons aussi le
gouvernement dans sa proposition de faire la promotion du covoiturage.
(10 h 45)
En foi de quoi, nous recommandons au gouvernement du Québec qu'il
amende l'article 36 de la Loi sur les transports afin que le covoiturage par
automobile et par fourgonnette, avec un maximum de 12 à 15 places, soit
légal sans obtention de permis de la Commission des transports du
Québec; deuxièmement, qu'il accorde une priorité à
ce projet de loi afin qu'il soit déposé et adopté au cours
de la prochaine session de l'Assemblée nationale; troisièmement,
qu'il adopte des éléments de contrôle pour le covoiturage,
similaires à ceux existant au Nouveau-Brunswick, afin de protéger
les industries de transport existantes; quatrièmement, qu'il recommande,
dans le cadre de la juridiction provinciale, des mesures incitatives,
réglementaires ou autres, visant à favoriser le
développement du covoiturage telles que des taux de péage
préférentiels, des campagnes de promotion, etc;
cinquièmement, qu'il encourage les autres intervenants du domaine tels
que les municipalités et les organismes de transport public à
épauler la politique provinciale en ce domaine par des mesures
complémentaires relevant de leur juridiction particulière,
à savoir des artères réservées, des aires de
stationnement particulières, des "parkings" d'échange, etc.
Si vous avez des questions, il me fera plaisir d'y répondre.
Le Président (M. Brouillet): Merci. M. le ministre.
M. Clair: M. le Président, d'abord, quelques mots pour
remercier M. Quilbault et Mme Forgues, de l'Association Covoiturage
Québec Inc., d'être venus passer leur message quant à la
légalisation du covoiturage. Je dois dire, M. le Président, que
j'ai eu l'occasion de discuter avec le conseil d'administration de
l'Association Covoiturage Québec Inc. jeudi ou vendredi de la semaine
dernière.
En fait, je pense que, parmi les parlementaires, des deux
côtés de la table, tout le monde s'entend sur la
nécessité et sur les avantages de légaliser le covoiturage
au Québec. Je pense qu'on pourrait faire nôtres la plupart des
commentaires qui se retrouvent dans le mémoire. Le seul obstacle qui
demeure sur la route de la légalisation du covoiturage, c'est
l'opposition traditionnelle - qui semble, cependant, s'être
atténuée - du milieu du taxi. Je sais que vous vous êtes
penchés sur cette question des impacts possibles de la
légalisation du covoiturage sur le secteur du taxi. J'aimerais,
plutôt que de poser plusieurs questions, vous donner l'occasion de nous
communiquer les résultats de l'analyse que vous avez faite d'un impact
possible sur le taxi, si on légalise le covoiturage.
M. Guilbault: M. le Président, nous avons essayé de
répondre à ces questions. Évidemment, cela demanderait
beaucoup de recherches et les statistiques en ce sens ne sont pas nombreuses en
ce moment. Cela nous demanderait beaucoup plus de recherches pour
répondre, avec une certaine précision, à certains
arguments soulevés par les associations de taxis. Nous avons
déjà eu une rencontre avec elles pour discuter des divergences de
vues entre les deux organisations. Nous nous sommes promis de nous rencontrer
encore pour en discuter et pour essayer quand même de faire en sorte que
les deux associations puissent se compléter et non pas se nuire.
D'ailleurs, dans notre approche en tant qu'organisme également sans but
lucratif et en tant que service à la collectivité, loin de nous
l'intention de vouloir nous substituer autant au taxi qu'au transport en
commun.
Alors, si on regarde l'impact du covoiturage sur l'industrie du taxi, il
est pratiquement nul si on considère que. seulement 1% des navetteurs
utilisent le taxi pour se rendre à leur lieu de travail. En plus,
l'utilisation du taxi se fait à 84% pour des distances de moins de deux
milles. On mentionnait au début que le covoiturage voulait
essentiellement desservir les gens qui voyageaient plus de neuf milles pour se
rendre à leur lieu de travail ou à leur milieu d'études.
De plus, le covoiturage s'adresse à 49% des navetteurs qui se rendent
seuls dans leur voiture à leur lieu de travail. Le covoiturage est aussi
intéressant pour ceux qui parcourent de bonnes distances, comme je viens
de le mentionner.
Ce sont les réponses que nous formulons, les arguments que nous
avançons pour prouver que le covoiturage ne peut nuire à
l'industrie du taxi. Au contraire, notre rôle de promotion, qui vise
à aller chercher essentiellement les voyageurs en solo dans leur
voiture, va plutôt aider l'industrie en général et
favoriser le transport en commun.
M. Clair: Dans ce sens-là, ai-je bien compris que, s'il y
avait légalisation du covoiturage, l'une des formes du covoiturage
étant l'utilisation du taxi collectif, toute initiative de promotion qui
serait mise de l'avant par votre association porterait également sur la
promotion du taxi collectif comme tel?
M. Guilbault: C'est cela. D'ailleurs, c'est déjà
prévu dans notre plan de promotion du covoiturage, et avec des
spécialistes en communications également, de faire ressortir non
seulement le covoiturage comme tel, mais le taxi collectif et le transport en
commun également. Il n'est nullement question pour le covoiturage de
vouloir accaparer la clientèle actuelle des transports en commun.
M. Clair: Le 18 février dernier, vous m'avez fait parvenir
un petit document intitulé Quelques éléments de
réponse à la question portant sur l'impact du covoiturage sur
l'industrie du taxi au Québec. Est-ce que vous avez objection à
ce que ce soit versé au dossier des membres de la commission, pour
informations additionnelles, avec le mémoire qui a été
produit ou est-ce que cela a été adressé à tous les
membres de la commission?
M. Guilbault: Non, nous n'avons pas d'objection à ce que
vous le déposiez pour tous les membres.
M. Clair: J'en ferai faire des photocopies et je les
distribuerai.
M. Bissonnet: Cela nous fait plaisir. M. Clair: Merci, M.
le Président.
Le Président (M. Brouillet): M. le député de
Laporte.
M. Bourbeau: M. le Président, il me fait plaisir de saluer
de nouveau M. Guilbault et Mme Forgues, qui ont pris l'excellente habitude de
venir lorsque la commission parlementaire des transports siège.
Je dois dire, en premier lieu, que le Parti libéral ne peut
qu'applaudir à toute initiative visant la promotion du transport
collectif privé, donc ne nécessitant aucun investissement public.
On peut dire que cette politique s'inscrit bien dans la philosophie même
du Parti libéral, qui privilégie autant que c'est possible
l'initiative et l'entreprise privée et qui considère
l'État comme ayant un rôle supplétif dans ce
domaine-là, bien qu'essentiel, il faut le reconnaître.
On connaît, en effet, les énormes déficits
qu'accumulent les commissions de transport public. Le ministre des Transports
est là pour en témoigner; son budget en souffre annuellement de
plusieurs centaines de millions. Je pense que tout ce que l'industrie
privée peut faire pour alléger le transport public doit
être considéré comme une façon de diminuer les
coûts si, effectivement, on peut arriver à cet
objectif-là.
Je pense que votre organisme ne vit pas que de l'air du temps.
Pourriez-vous nous dire exactement comment vous existez, où vous prenez
les fonds pour pouvoir exercer vos fonctions actuelles?
M. Guilbault: L'association a obtenu sa charte en 1981 et a
commencé ses activités en mai 1982. Les fonds, puisqu'on est un
organisme sans but lucratif, nous viennent de subventions du gouvernement
fédéral, soit
110 000 $ par année, plus des contributions du gouvernement
provincial également en tant que bureaux mis à notre disposition,
équipement de bureau, argent pour produire des documents d'information
auprès de la population. Les deux gouvernements nous fournissent ce
genre d'aide.
Pour le moment, cette aide nous a suffi puisqu'il s'agissait d'un
départ, de faire un travail de base, mais cela ne nous permet pas
d'avoir plus de trois permanents dans notre organisation. Nous sommes seulement
trois à temps plein et on peut voir, d'après les quelques
contacts que nous avons eus avec certaines entreprises, que nous n'aurons pas
suffisamment de fonds pour faire le travail de déblayage et
d'organisation de base requis pour faire démarrer dans une entreprise un
système de covoiturage. Évidemment, ce sera à nous de nous
adresser à nouveau aux organismes gouvernementaux pour faire augmenter
cette aide en leur présentant un plan d'action très précis
indiquant ce qu'on veut faire, où on veut aller et déterminant
à quel endroit une certaine aide financière ou un support
quelconque pourrait nous être utile.
M. Bourbeau: Vous avez dit que vous receviez une subvention de
110 000 $ par année du gouvernement fédéral. Est-ce que
votre organisme fait du travail en dehors du Québec ou si ses
activités sont restreintes au Québec seulement?
M. Guilbault: C'est strictement au Québec.
M. Bourbeau: Seulement au Québec.
M. Guilbault: Ces sommes d'argent sont données pour
développer le covoiturage au Québec.
M. Bourbeau: Si vous voulez, on va parler un peu des
fourgonnettes. Vous avez bien mentionné dans votre mémoire qu'il
y a trois façons de pratiquer le covoiturage: l'automobile privée
- on connaît assez bien ce genre de covoiturage - et aussi les
fourgonnettes. C'est un petit autobus, je présume, genre minibus
acheté par l'un des covoitureurs ou par l'ensemble des navetteurs et qui
sert à l'usage de tout le monde. En général, est-ce
toujours le même conducteur ou si chacun des navetteurs prend le volant
à tour de rôle?
M. Guilbault: On retrouve les deux. Si le propriétaire est
seul, comme cela arrive dans bien des cas, c'est lui qui prend la charge, c'est
lui qui conduit, mais il faut toujours un remplaçant en cas d'absence ou
de maladie. Il y en a d'autres qui se regroupent et chacun, à tour de
rôle, se fait conducteur. Ici, il faut noter que, pour conduire un
autobus de 12 à 15 places, il faut un permis spécial du
ministère des Transports. Ce n'est pas tout le monde qui a ce permis et
qui peut passer l'examen requis pour obtenir ce permis. C'est une question que
chaque compagnie ou chaque organisme devra étudier en fonction de ses
besoins. Il y a également des entreprises qui se proposent d'acheter ou
de louer des autobus pour les mettre à la disposition de leurs
employés. Là aussi, j'imagine qu'il y aura quelqu'un
d'attitré, mais on n'a pas assez d'expérience vécue encore
pour le savoir. On s'aperçoit, d'après l'expérience
vécue ailleurs, que cela se fait des deux façons.
M. Bourbeau: Dans le cas d'une fourgonnette qui appartient
à un seul propriétaire, qu'est-ce qui arrive si le
propriétaire est malade, un bon jour? En général, est-ce
que des arrangements se font d'avance entre les navetteurs pour qu'un autre
puisse prendre la relève? Je vous pose des questions de détail,
mais c'est intéressant, pour ceux qui n'ont pas d'expérience, de
voir comment cela fonctionne.
M. Guilbault: Je vais laisser Ginette répondre à
cela, elle est plus au courant de ces problèmes que je ne le suis dans
le moment.
M. Bourbeau: Elle est experte sur le terrain?
M. Guilbault: Oui.
Mme Forgues (Ginette): Habituellement, il y a un conducteur
substitut. On lui offre habituellement des avantages, c'est-à-dire qu'il
ne paie pas le transport entre sa résidence et son travail. C'est
l'avantage qu'on lui donne.
M. Bourbeau: Cela m'amène, justement, à ma question
suivante. Est-ce que le propriétaire du véhicule fait un profit
avec ses conavetteurs ou si c'est simplement sur une base de remboursement des
coûts?
Mme Forgues: C'est habituellement sur une base de remboursement
des coûts. Ce sont des coûts variables et des coûts fixes.
Ils sont tout simplement répartis entre le nombre de navetteurs qui
utilisent ce véhicule.
M. Bourbeau: Quand on parle d'un contrat d'adhésion, je
présume que le propriétaire du véhicule propose un tarif
à ses conavetteurs et que chacun accepte ou refuse selon le cas. C'est
cela?
Mme Forgues: Exactement. Cela se fait comme dans la libre
entreprise. Si le tarif
est intéressant, les navetteurs utilisent ce moyen de
transport.
M. Bourbeau: Qu'est-ce qui arrive si, à un moment
donné, les navetteurs trouvent que le tarif est trop élevé
en cours de route et décident d'abandonner? Y a-t-il un contrat de
signé entre ces gens ou si c'est simplement verbal?
Mme Forgues: Habituellement, il n'y a pas de contrat, à
moins qu'ils ne soient copropriétaires ou colocataires. S'ils sont
copropriétaires, chacun a un intérêt particulier et, de
toute façon, il n'y a pas de problème parce que les
dépenses sont vraiment réparties également entre chacun
des propriétaires et les livres sont ouverts. Si c'est un
propriétaire qui transporte d'autres gens, habituellement, il n'y a pas
de contrat, c'est une entente à l'amiable. C'est du transport simple et
privé.
M. Bourbeau: N'y a-t-il pas un danger que les commissions de
transport public voient dans ce genre de transport une forme de concurrence?
Quand on parle des fourgonnettes, ce sont, quand même, de petits autobus.
Avez-vous remarqué une forme d'hostilité de la part des
commissions de transport ou s'il n'y a pas de problème? Dans votre
mémoire, vous sollicitez l'aide des commissions de transport pour mettre
sur pied le système. Est-ce que vous pourriez dire quelques mots
là-dessus? (11 heures)
Mme Forgues: On n'a pas eu d'hostilité, non, de la part
des commissions de transport parce que, d'une part, on s'adresse aux
régions où le transport en commun n'existe pas ou est
inadéquat. Les commissions de transport reconnaissent, finalement, si
vous voulez, notre mode de transport comme étant essentiel et
nécessaire.
M. Bourbeau: La réponse que vous me faites m'étonne
parce que, dans votre mémoire, vous citez toute une série
d'expériences avec de grosses entreprises dans la région de
Montréal: Pratt & Whitney, Bell Canada. Il m'est apparu que la
plupart sont dans la région de Montréal. Ce n'est certainement
pas une région où le transport en commun n'est pas
organisé. C'est le contraire.
Mme Forgues: II faut comprendre que beaucoup d'employés
viennent de l'extérieur de Montréal. Ils partent, vous savez, de
Saint-Bruno, de Sainte-Julie et ils doivent utiliser leur voiture personnelle
pour se rendre à leur travail. C'est dans ce sens que des employeurs de
la région de Montréal s'intéressent au covoiturage.
Maintenant, quand on parle de Canadian Marconi, par exemple, il faut savoir que
chez Canadian
Marconi il y a 2500 employés et nous sommes en train d'organiser
du covoiturage pour 300 employés. Ce sont 300 employés qui
habitent dans des régions où le transport en commun n'existe pas
ou n'est pas pratique pour eux parce que pour certaines personnes, il y a de
deux heures à deux heures et demie d'autobus à faire pour se
rendre à leur travail. Donc, cela n'a pas d'allure. Ils prennent leur
voiture.
M. Bourbeau: II y a une certaine similitude entre le taxi
collectif à contrat et le covoiturage; il me semble que c'est pas mal la
même chose. C'est un véhicule qui est utilisé par trois,
quatre personnes, sauf que, dans le cas du taxi, le chauffeur n'est pas un des
navetteurs. Vous faites la promotion de ce genre de covoiturage même si
ce n'est pas exactement du covoiturage, enfin, comme les deux autres formes de
covoiturage. Dans un cas, les navetteurs sont propriétaires du
véhicule et fournissent la main-d'oeuvre, si je puis dire, alors que,
dans l'autre cas, cela prend plutôt un transport public. Cela ne vous
crée pas de problème de promouvoir ce genre-là?
Mme Forgues: Non. Nous disons aux gens que c'est du covoiturage
avec chauffeur. C'est tout. C'est une forme de transport collectif et nous
favorisons toutes les formes de transport collectif.
M. Bourbeau: Est-ce que le fait qu'un navetteur devienne tout
à coup un chauffeur de véhicule public, enfin, semi-public ne
crée pas de problème avec les syndicats? Je vous pose la question
comme cela parce qu'on pourrait dire que c'est un job qui est enlevé
à un chauffeur d'autobus pour être accaparé par quelqu'un,
un individu à cette étape.
Mme Forgues: Nous n'avons pas eu de manifestation de la part des
syndicats probablement parce qu'ils le voient aussi comme un service aux
employés. Les employés que la compagnie aide à former des
unités de covoiturage apprécient cette aide qui leur est
donnée de la compagnie. En ce sens, nous avons rencontré, par
exemple, les trois syndicats de la compagnie Canadien Marconi et ils
étaient complètement favorables. Mais là vous parlez des
syndicats, j'imagine, des compagnies d'autobus.
M. Bourbeau: Oui.
Mme Forgues: Non, on n'a pas eu de manifestation de leur
part.
M. Guilbault: On pourrait peut-être ajouter ici que
l'Association Covoiturage a déjà prévu, au niveau de son
conseil, un membre de la Commission de transport, justement, pour éviter
ces conflits.
Deuxièmement, la clientèle que l'on vise n'est pas du tout
celle qui est visée par le taxi collectif, du moins dans ce que je peux
comprendre, puisque nous, nous allons seulement en dehors des zones de
transport en commun, et pour les employés qui n'ont pas d'autres choix
que celui-là. Je ne sais pas si le taxi collectif circule à
l'intérieur des zones de transport en commun qui est beaucoup
différent de la clientèle que l'on vise.
M. Bourbeau: Dernière question. Dans votre document, vous
faites des suggestions pour promouvoir le covoiturage et, en fait, vous citez
des exemples un peu partout. Parmi ces suggestions, vous faites état
d'expériences américaines où on a utilisé les voies
réservées sur les ponts, par exemple, ou sur les grandes
artères pour favoriser le covoiturage. Est-ce que vous pourriez dire
quelques mots là-dessus?
M. Guilbault: Je ne peux pas vous parler d'une expérience
sur les voies réservées. Probablement que Ginette s'est
informée beaucoup sur cela. Les incitatifs que nous envisageons du
gouvernement, il y en a, évidemment, toute une série.
L'Association Covoiturage a quand même essayé de réduire
ses demandes à quelques points particuliers. Ces incitatifs tiennent
compte des différentes clientèles que nous voulons desservir.
Nous voulons desservir les navetteurs, qui est une des clientèles; les
employeurs aussi qui, eux, ont intérêt également a
encourager le covoiturage. Mais on veut aussi demander des incitatifs qui ne
relèvent pas nécessairement du gouvernement comme tel. Cela peut
relever d'un autre niveau de gouvernement et cela peut relever des entreprises
également. Ce sont tous ces incitatifs que nous avons essayé de
regrouper en un nombre limité au départ, en tout cas, pour nous
aider à faire démarrer le covoiturage. On pourrait
s'étendre davantage sur cela si le temps le permet, mais je ne sais pas
si vous voulez aller plus loin.
M. Bourbeau: Pas nécessairement, sauf que, lorsqu'on
voyage un peu aux États-Unis, on voit parfois aux abords des grandes
villes des affiches qui indiquent que certaines artères ou certaines
sections de l'autoroute sont réservées, à une heure
précise, aux automobiles où il y a deux, trois personnes ou plus.
Je voudrais savoir si, dans vos recherches, vous avez pu constater que cela
fonctionne bien, que c'est rentable pour la collectivité, ce genre de
traitement réservé aux gens qui font du covoiturage.
Mme Forgues: En effet, on se rend compte que les incitatifs qui
affectent la rapidité du transport sont très
appréciés, par exemple, les voies réservées. Il y a
des exemples à Washington, à Houston, à Miami et en
Californie, comme vous l'avez vu. Dans les zones où c'est
congestionné, ces incitatifs encouragent la pratique du covoiturage
parce que c'est beaucoup plus rapide. Ces voies sont réservées
aux automobiles qui transportent trois personnes ou plus. Un autre incitatif
qui aide beaucoup les navetteurs, ce sont les péages gratuits, parce
qu'à ce moment-là ils n'attendent pas en ligne pour payer. Ils
filent tout droit au péage. Il y a un sondage, d'ailleurs, qui a
été fait l'été dernier par le COTREM, qui
démontrait que les gens ne prennent pas le transport en commun parce
qu'ils trouvent que l'automobile est plus rapide, plus souple et plus
confortable. Les péages gratuits et les voies réservées
répondent justement à la rapidité que les navetteurs
recherchent. Cela leur permet de filer plus rapidement.
M. Bourbeau: Je vous remercie.
Le Président (M. Brouillet): Mme la députée
de Dorion.
Mme Lachapelle: Bonjourl M. Guilbault, j'aimerais vous poser une
question, parce que tout en étant très intéressée
par le covoiturage et le transport collectif d'ailleurs, je vous l'ai
signifié dernièrement -j'ai aussi des inquiétudes. En
effet, quand je sais qu'une compagnie s'organise pour faire du covoiturage pour
ses employés, je me dis: La personne qui va conduire la fourgonnette ou
l'automobile est un employé d'une compagnie. Donc, pour elle, ce n'est
pas son gagne-pain comme c'est le cas pour les chauffeurs de taxi. Je
m'inquiète un peu à ce sujet. Je me dis toujours que c'est bon
qu'on en fasse la promotion sous toutes ses formes, mais pensez-vous - je ne
sais pas si vous pourriez me répondre là-dessus - que vous allez
mettre l'accent sur le transport collectif afin qu'il soit surtout
utilisé de façon à être plus rentable pour les
chauffeurs de taxi? On est ici aussi pour parler de la rentabilité du
taxi à Montréal. Je me dis que, pour le chauffeur de taxi, c'est
son seul gagne-pain. Je ne voudrais pas que, quand même, toutes les
compagnies et aussi toutes les petites compagnies se joignent à cela et
que, finalement, cela ôte encore du marché au taxi à
Montréal. J'aimerais que vous m'éclairiez à ce sujet.
M. Guilbault: Je ne sais pas si j'ai bien saisi votre question.
Évidemment,
Covoiturage Québec n'est pas là pour réaliser des
profits. Ce n'est pas à but lucratif, de toute façon. On
n'intervient pas au niveau des chauffeurs de taxi pour leur faire concurrence
dans ce sens-là. Ce que nous recherchons, ce sont des gens qui
désirent un transport collectif et qui n'ont pas le choix d'un transport
en commun satisfaisant. Le
taxi collectif, pour eux, devient beaucoup plus onéreux. Donc,
ils ne peuvent pas, financièrement, s'en servir comme tel. On leur offre
une alternative qui, au moins, va les satisfaire du côté
financier, de sorte qu'ils vont payer ce que cela coûte. Ils n'auront pas
à prévoir un salaire pour conduire le véhicule.
Évidemment, s'ils choisissent d'avoir un chauffeur et de payer le
chauffeur, cela s'ajoutera à leurs coûts. Ce sera à eux de
le décider. Mais ce qui est prévu par Covoiturage Québec,
c'est qu'ils s'organisent ensemble et défraient les coûts du
transport; non pas de réaliser un profit à la fin de la semaine
ou de l'année.
Je ne sais pas si cela répond à votre question. Je sais
que la marge est assez étroite; il peut y avoir du covoiturage avec
profit, j'imagine qu'il pourrait s'en glisser, mais ce n'est pas la formule que
nous proposons. Ce serait peut-être là qu'il faudrait avoir une
certaine réglementation. On ne cherche pas à avoir une
réglementation. La seule raison pour laquelle on parle de
réglementation dans cette loi, c'est pour assurer les compagnies de taxi
collectif, de taxi en général et les transports en commun que
nous ne sommes pas là pour empiéter sur leur domaine. Alors, on
se dît: On va mettre des règles du jeu beaucoup plus
précises pour limiter et diminuer les interférences dans ce sens.
Mais, de toute façon, on préférerait ne pas avoir de
réglementation.
Le Président (M. Brouillet): Une dernière question,
M. le député de Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: Lors de l'audition des mémoires sur le
transport de la région de Montréal, au mois d'octobre - la ville
de Repentigny est assez avancée dans le domaine du covoiturage - je me
rappelle les propos du maire de la municipalité qui disait que cela
devenait très rentable pour celui qui offrait sa voiture à des
voisins qui travaillaient pas nécessairement à la même
compagnie, mais dans le même secteur. Selon ce que j'ai compris
tantôt, vous voulez développer le système de covoiturage
dans des régions où le transport en commun n'existe pas ou
à peu près pas.
Je ne sais pas si vous avez eu - je vais me faire l'interprète
des chauffeurs de taxi -des communications, par exemple, avec la compagnie Bell
Canada. Cette compagnie alimente beaucoup l'industrie du taxi dans la
région de Montréal, plus particulièrement le soir alors
que, aux changements d'équipes, on favorise le développement du
taxi. Il y a, peut-être, 200 à 250 voyages entre 23 h 30 et 0 h
30, car Bell Canada paie le taxi pour ses employés, après une
certaine heure, selon leur convention collective, pour les retourner chez
eux.
La première question que je me pose est: Pour Bell Canada, cela
devient peut-être très intéressant d'essayer d'impliquer un
de ses employés à l'intérieur d'un service pour
véhiculer quatre ou cinq employés à ces heures. C'est
là que cela surgit, à mon avis, un conflit; il y aura un manque
à gagner de façon inévitable si Bell Canada s'engage dans
un tel système.
Lorsque vous me parlez d'Econoline ou de camion pour dix à douze
passagers, cela m'inquiète. Évidemment, s'il n'y a pas de
transport en commun dans une région, c'est presque un bienfait d'avoir
un système de véhicules du genre Econoline, mais lorsqu'on tombe
dans la région de Québec ou dans la région de
Montréal où il y a du transport en commun, je vois d'un bon oeil
une voiture familiale, mais, lorsqu'on parle d'un autre type de
véhicule, j'ai certaines restrictions. (11 h 15)
Dans les recherches que vous avez faites dans d'autres
municipalités ou dans d'autres provinces où le système de
covoiturage est légalisé, est-ce que évidemment, cela ne
fait pas longtemps que vous fonctionnez - vous avez des statistiques pour
savoir si ce sont plutôt des voitures familiales ou si on essaie de
développer le système d'Econoline ou de fourgonnette, comme mon
collègue, le député de Laporte, le mentionnait? À
titre d'exemple, vous m'avez parlé de Marconi tantôt, mais je veux
parler de Bell Canada: je me pose des questions pour l'industrie du taxi
à cet égard. Deuxièmement, avez-vous des statistiques pour
savoir quelle sorte de véhicules on utilise dans les endroits où
le covoiturage est devenu - cela existe beaucoup au Québec actuellement
- un moyen de transport que la population avantage? Troisièmement,
comment allez-vous oeuvrer à l'intérieur de votre association
pour nous assurer que vous allez plutôt vous diriger vers les endroits
où le transport en commun n'existe pas ou presque pas?
Mme Forgues: II semble y avoir deux ou trois questions. Pour la
première question, en ce qui concerne Bell Canada, nous pouvons vous
assurer que le projet expérimental se fait avec les employés de
jour, premièrement, et non avec ceux de nuit pour lesquels Bell Canada
accorde des contrats aux compagnies de taxi. Maintenant, Bell Canada veut
tenter deux expériences pilotes dans des régions où le
transport en commun n'existe pas ou est inadéquat, par exemple à
Granby et dans son bureau de Dorval. Je ne sais pas si cela répond
à votre question. Vraiment, cela ne touche absolument pas les ententes
avec les taxis à Montréal.
En ce qui a trait aux fourgonnettes, il faut savoir que le transport en
covoiturage
par fourgonnette est intéressant seulement lorsqu'il y a une
grande distance à parcourir, lorsqu'il y a un nombre suffisant de
personnes pour remplir cette fourgonnette, parce que les coûts d'achat
d'une fourgonnette sont assez appréciables. On ne peut absolument rien
avoir en bas de 15 000 $. En d'autres mots, ce n'est pas intéressant
dans les centres urbains de s'acheter une fourgonnette et de faire du
covoiturage par fourgonnette. C'est seulement intéressant, par exemple,
pour les employés de Bromont qui habitent à Montréal et
qui parcourent 22 000 milles par année; pour eux, c'est vraiment
intéressant de faire du covoiturage par fourgonnette. Pour ce mode de
transport, les conditions économiques dictent seules, finalement, la
façon dont cela sera utilisé.
Maintenant, en ce qui a trait aux statistiques, il est évident
qu'il y a un beaucoup plus grand nombre d'unités de covoiturage par
automobile que par fourgonnette, justement à cause des raisons qu'on a
données précédemment. C'est donc le mode de covoiturage le
plus utilisé.
M. Bissonnet: Merci.
M. Clair: M. le Président, en terminant, j'ai vu des gens
sourciller tantôt, surtout dans le coin à droite, du
côté des journalistes, quand ils ont appris que l'Association
Covoiturage Québec était subventionnée par les deux
gouvernements. Comme on parle de légalisation du covoiturage, des gens
peuvent penser qu'on subventionne une association qui est elle-même dans
l'illégalité et qui encouragerait l'illégalité. Je
dois dire là-dessus, d'abord, que c'est dans le cadre des
politiques...
M. Bissonnet: Des décrets.
M. Clair: ...énergétiques du gouvernement du Canada
et du gouvernement du Québec que l'Association Covoiturage Québec
reçoit un appui financier des deux gouvernements. D'autre part, on
pourrait faire une longue discussion sur la légalité ou non du
covoiturage. Quand on parle de légaliser le covoiturage, en fait, on
parle davantage de mettre un terme à l'insécurité
juridique des navetteurs et des covoiturés, que d'enlever une
illégalité, puisque la Loi sur les transports dit simplement
qu'il est interdit de faire du transport de personnes contre
rémunération sans permis. La cause de M. Doyon dont on parlait
tantôt, et quelques autres, ont démontré que, justement,
c'était une situation incertaine quant à savoir si partager des
frais fixes et des frais variables pour l'utilisation d'un véhicule
automobile, c'était ou pas du transport contre
rémunération, même s'il n'y avait pas de notion de profit.
Tout cela pour dire que quand l'Association Covoiturage demande la
légalisation du covoiturage et que le ministère propose de le
faire, ce n'est pas dans le sens d'enlever une illégalité, mais
de donner une sécurité juridique, un encadrement pour les
navetteurs qui assure qu'ils soient dans une situation vraiment
légale.
Je vous remercie, M. le Président, et je remercie les gens de
Covoiturage Québec d'être venus en commission parlementaire.
Le Président (M. Brouillet): Est-ce que le
député de Jeanne-Mance aurait un tout petit mot à
ajouter?
M. Bissonnet: J'aurais une question à poser au ministre
concernant les assurances. Si on légalise le covoiturage et le transport
de passagers, est-ce que les taux d'assurance concernant les blessures
corporelles seront les mêmes que ceux que le propriétaire d'une
automobile paie actuellement?
M. Clair: C'est déjà le cas et tout passager d'un
véhicule automobile au Québec - et c'est là
l'énorme avantage du régime instauré en 1978 - est couvert
par la Régie de l'assurance automobile du Québec. C'est ce qui
est venu enlever un des plus gros obstacles qu'il y avait à la
légalisation du covoiturage en mettant tout le monde sur un pied
d'égalité. D'autre part, dans la mesure où le covoiturage
se fait déjà avec des véhicules automobiles
réguliers, chaque véhicule automobile paie la plaque
d'immatriculation et la prime d'assurance reliées au type de
véhicule qui est en cause. Il n'est pas question de modifier cela.
M. Bissonnet: C'est parce que le taxi paie trois fois plus
cher.
M. Clair: Mais ils ont un escompte de 40% sur l'immatriculation,
cependant.
Le Président (M. Brouillet): Très bien. Nous allons
mettre un terme à la discussion. Je remercie beaucoup...
M. Guilbault: Merci de nous avoir entendus.
Le Président (M. Brouillet): ...l'association. Nous
entendrons maintenant la ville de Montréal. J'inviterais le porte-parole
à s'identifier et à nous présenter les personnes qui
l'accompagnent.
Ville de Montréal
M. Allard (Jules): Mon nom est Jules Allard. Je suis directeur
adjoint du contentieux de la ville de Montréal. Je suis
accompagné, à ma gauche, par M. Bertrand Bergeron, conseiller en
recherches
économiques et, à ma droite, par M. Jean-Claude Le Lannic,
assistant contrôleur général.
M. le Président, M. le ministre, messieurs et madame, membres de
cette commission, il nous fait plaisir, au nom de la ville de Montréal,
de participer aux travaux de cette commission parlementaire sur l'industrie du
taxi. Dans un premier temps, nous entendons lire notre mémoire et, par
la suite, nous prêter à un échange de propos avec les
membres de la commission.
L'industrie du taxi a bien évolué à Montréal
depuis l'apparition de la première auto-taxi dans les rues de la
métropole en 1909. Considérée dans les débuts comme
une profession lucrative, cette activité avait rapidement attiré
un grand nombre d'artisans puisque, dès 1929, on recensait
déjà 1500 taxis dans la ville. Cet engouement pour la profession
devait, cependant, aboutir rapidement à une situation bien connue, soit
celle d'un trop grand nombre de taxis par rapport à la demande de
services. La crise de 1930 et la guerre allaient permettre de résoudre,
de façon temporaire, cette inadéquation entre l'offre et la
demande.
Mais, à la suite de l'adoption après la guerre des mesures
de libéralisation recommandées par la commission Asselin, le
nombre des permis de taxi à Montréal allait, de nouveau,
croître très rapidement, passant de 765, en 1946, à 4300 en
1953. Cette libéralisation a, évidemment, permis d'ouvrir les
portes de cette industrie à un plus grand nombre d'intervenants, mais
elle a, par contre, occasionné deux problèmes majeurs qui sont
celui de la rentabilité de cette activité et celui de la
qualité du service fourni à la population.
Comme cela se produit souvent lorsque émerge un problème,
des commissions ont été formées à
différentes époques afin d'étudier la question du taxi et
presque toutes, invariablement, ont été l'occasion de mettre en
évidence la nécessité de réduire le nombre de
permis. À deux reprises, soit en 1952 à Montréal et en
1956 dans le reste de l'île, une démarche fut entreprise dans ce
sens et une limite imposée au nombre de permis.
Compte tenu, cependant, de l'ampleur du problème, ces
décisions, bien que souhaitables, se révélèrent
insuffisantes. Aussi, à la suite des événements de 1969 et
compte tenu de certaines recommandations du rapport Bossé, les
autorités gouvernementales décidèrent, dans le cadre de la
nouvelle Loi des transports de 1972, de retirer aux gouvernements locaux leurs
responsabilités en matière de taxi. Cette industrie est donc
maintenant régie, de façon centralisée, par les
règlements nos 6 et 4, les municipalités ne conservant une
autorité qu'en matière d'aires de stationnement; et encore
sont-elles obligées de se soumettre à l'approbation du
ministère des Transports.
La Loi sur les transports permet au gouvernement du Québec
d'établir des normes relatives à la construction, l'utilisation,
la sécurité, la garde, l'entretien, la propriété et
la possession des véhicules-taxis. Le gouvernement détermine
également les tarifs, le nombre de permis, le territoire desservi, le
rôle des différents intervenants, telles les ligues de
propriétaires, et, enfin, les conditions d'obtention des permis de
chauffeur.
Le problème du taxi en 1983. La centralisation
décrétée pour l'ensemble de la province en 1973 afin de
régler un problème essentiellement montréalais n'a,
malheureusement, pas apporté les solutions espérées
à l'industrie du taxi à Montréal. Elle a, certes, permis
la création d'agglomérations de taxi, elle a
entraîné la mise sur pied des ligues de propriétaires et,
en avril 1979, le gouvernement en est venu à geler les permis de
catégorie agglomération. Mais les problèmes de fond, soit
ceux de la rentabilité de l'industrie et de la qualité des
services dans la métropole, n'ont jamais été
résolus comme le prouve la formation du Groupe de travail sur la
rentabilité du taxi dans l'île de Montréal. On peut
même penser qu'ils ont empiré à cause de la
détérioration de la conjoncture et parce que cette industrie a
dû faire face à un rétrécissement de son
marché. Le résultat est qu'il y a aujourd'hui 5818 taxis en
service sur l'île de Montréal, mais, parce que les revenus sont
insatisfaisants, il en découle une qualité de service qui peut
être très aléatoire.
Ce trop grand nombre de taxis fait également que le nombre de
courses par heure et par conducteur est très bas. Aussi, afin de se
garantir un revenu minimum, l'industrie a régulièrement fait
pression sur le gouvernement pour qu'il augmente les tarifs, ce qui a eu pour
effet de maintenir les prix élevés et de décourager encore
un peu plus la clientèle potentielle. En d'autres mots, le cercle
vicieux: excès de l'offre, insuffisance des revenus,
détérioration de la qualité du service, demeure et
l'établissement d'une tarification, sans lien avec les forces du
marché, a simplement permis de faire durer cette situation.
L'analyse que fait le document gouvernemental de la situation insiste
grandement sur les méfaits de la centralisation et ils sont
réels, notamment en ce qui concerne les contrôles. L'insuffisance
de ces derniers explique, en effet, l'état mécanique douteux de
centaines de taxis, le calibrage imprécis de plusieurs
taximètres, l'inexistence d'un registre d'affectation à la RAAQ,
la compétence insuffisante de nombre de chauffeurs et le manque de
recours véritables pour les clients insatisfaits. Le rapport
gouvernemental souligne également, à juste titre, le
caractère restrictif de sa
réglementation et ses effets sur le développement
éventuel des services offerts par cette industrie. Mais, de
manière assez surprenante, la cause principale du problème, soit
le trop grand nombre de taxis à Montréal, n'est pas
identifiée dans ce rapport comme étant le premier problème
à corriger.
Le projet de réforme insiste, en effet, sur la
nécessité d'ouvrir de nouveaux marchés et de faire une
certaine décentralisation. Mais, dans la mesure où la question
fondamentale demeure sans réponse, il en découle que la
réforme proposée ne résout pas vraiment le problème
de fond de cette industrie. Le projet gouvernemental, lui, permettrait
simplement de transférer au monde municipal un dossier qu'il s'est
approprié il y a quelques années, mais face auquel il semble
reconnaître aujourd'hui son impuissance à y apporter des solutions
valables et définitives.
La réforme proposée. En premier lieu, nous parlerons de
l'ouverture des nouveaux marchés. Le document gouvernemental propose,
dans un premier temps, l'ouverture de nouveaux marchés afin de permettre
à l'industrie du taxi de rentabiliser davantage son investissement en
équipement et en temps. Ceci se ferait par la suppression des
barrières réglementaires qui interdisent aux propriétaires
de taxi d'offrir à la population des services plus diversifiés
que le taxi traditionnel. (11 h 30)
Même si nous pensons que certains champs qui seraient ainsi
ouverts à l'industrie du taxi sont probablement déjà
occupés par d'autres transporteurs et ne représentent, dès
lors, qu'un potentiel de développement limité, nous ne pouvons
néanmoins qu'être en faveur de cette mesure, pour autant qu'elle
ne pénalise pas d'autres agents économiques. Il importe,
cependant, de souligner qu'une telle démarche pourrait très bien
être accomplie dans le cadre législatif réglementaire
actuel puisqu'il suffirait au gouvernement de corriger ses
règlements.
La décentralisation. La deuxième démarche
suggérée par le gouvernement afin de résoudre le
problème du taxi est la décentralisation. Ce retour à une
juridiction municipale sur l'industrie du taxi ne signifierait pas, cependant,
un retour à la situation d'avant 1973, mais plutôt un partage des
responsabilités entre le gouvernement du Québec et les
municipalités. Le gouvernement du Québec se réserverait le
pouvoir d'imposer à un propriétaire de taxi l'obligation de
détenir un permis pour un territoire et un véhicule donnés
et le gel des permis décrété le 4 avril 1973 serait
maintenu.
Le gouvernement aurait également le pouvoir de préparer
des normes de propriété dans les règles d'immatriculation
et des règles applicables à la possession. Il se garderait des
pouvoirs en matière de tarification, d'affichage et d'identification du
véhicule et du chauffeur. La Commission des transports du Québec
continuerait à administrer les permis de propriétaire, mais les
règles applicables aux transferts de permis et au respect des
règlements seraient plus sévères. La Régie de
l'assurance automobile du Québec, elle, conserverait la
responsabilité de la délivrance du permis de conduire,
conditionnel à l'obtention du permis de travail. Un moratoire serait
imposé sur la délivrance des permis de chauffeur de taxi
rétroactivement au 14 août 1982. Finalement, le gouvernement se
réserverait la responsabilité de fixer les normes de
sécurité des véhicules et de préciser les
règles applicables à l'immatriculation des
véhicules-taxis.
Les autorités locales, elles, se verraient confier des pouvoirs
qui leur permettraient d'édicter des normes relatives à
l'aménagement du véhicule, à son équipement,
à son utilisation, à sa sécurité, à sa garde
et à son entretien. Elles pourraient établir des tarifs,
réglementer l'identification du véhicule et du chauffeur, le
calibrage et l'utilisation du taximètre, l'éthique du chauffeur,
le confort et la sécurité du client, la propreté du
véhicule et les normes de stationnement. Elles pourraient
également délivrer les permis de travail grâce auxquels les
propriétaires artisans et les chauffeurs pourraient conduire un
véhicule.
Tous ces pouvoirs devraient s'exercer dans le cadre des limites
imposées par les pouvoirs concurrents du gouvernement et des
autorités locales et, surtout, devraient se traduire par des
contrôles qui, comme le reconnaît le document gouvernemental, n'ont
pas été exercés de manière satisfaisante depuis
1973, notamment au chapitre de la délivrance des permis de
chauffeur.
Le dernier élément de la proposition gouvernementale
concerne la concertation. Le gouvernement choisit de maintenir les ligues de
propriétaires pour chaque agglomération, mais en retranchant de
leur rôle toute responsabilité de coordination et d'organisation
de l'industrie. En d'autres mots, le gouvernement souhaite que les ligues ne
soient que des associations professionnelles et des organismes de promotion. La
Commission des transports du Québec resterait responsable de la
reconnaissance des ligues pour les agglomérations.
Le document se termine par la mention de perspectives de
développement allant des nouvelles formes d'énergie à
l'institutionnalisation du covoiturage, autant de suggestions
intéressantes, mais dont la réalisation peut très bien se
faire dans le cadre actuel.
La position de la ville de Montréal. L'intérêt que
porte la ville de Montréal à l'industrie du taxi ne date pas
d'aujourd'hui. Il se justifie parfaitement si l'on se rappelle que le chauffeur
de taxi est souvent notre premier porte-parole vis-à-vis de nos
visiteurs extérieurs et que cette industrie assure un service de
transport important, voire même parfois essentiel. Il est donc
nécessaire que l'activité du taxi à Montréal
retrouve, le plus rapidement possible, le niveau de qualité auquel la
population est en droit de s'attendre et qu'elle assure à ceux qui y
travaillent un revenu équitable. C'est donc dans cette perspective que
la ville de Montréal a pris position sur les divers aspects de la
proposition gouvernementale.
Tout d'abord, l'élargissement du marché. Ainsi que nous
l'avons mentionné au début, la ville de Montréal n'a
aucune objection à l'élargissement du rôle de l'industrie
du taxi, qu'il s'agisse du transport d'écoliers, de personnes
handicapées et de biens, du transport à l'occasion de
baptêmes, mariages ou funérailles, du transport sous forme
contractuelle avec l'entreprise privée, les organismes à but non
lucratif, les commissions scolaires et autres ou du transport substitut ou
complément au transport en commun, à la condition, bien
sûr, que ces nouveaux marchés constituent des
débouchés nouveaux véritables et non un empiétement
dans des marchés déjà exploités par l'entreprise
privée ou publique de façon rationnelle et rentable puisque ce
serait simplement élargir le problème du taxi à d'autres
secteurs de l'industrie du transport. Cependant, il serait inutile de nous
illusionner sur les effets d'une telle mesure. La rentabilité du taxi
à Montréal réside d'abord et avant tout dans la diminution
du nombre de permis.
Le ratio entre le nombre de permis et le niveau de population dans
l'agglomération
A-11 de Montréal, soit le centre de l'île, est de un taxi
pour 248 personnes, alors que, selon l'annexe du règlement 6, le ratio
qui est prévu est de un taxi pour 400 à 500 personnes. Ailleurs
sur le territoire de la CUM, le ratio est de un taxi pour 790 personnes
à l'ouest, et de un pour 825 personnes à l'est. À Laval,
l'agglomération de taxi A-8, le ratio est de un pour 1248 personnes,
alors que dans l'agglomération de taxi A-2, à Longueuil, le ratio
est de un taxi pour 820 personnes.
En d'autres mots, seule l'agglomération de taxi A-11 de
Montréal présente, dans la région métropolitaine,
un ratio qui n'est pas conforme aux normes du règlement no 6 et le
problème de la rentabilité de cette industrie est, en fait, le
problème de l'agglomération A-11.
En 1983 comme en 1973, le problème de fond demeure le trop grand
nombre de permis dans l'agglomération A-11. Lorsque ce problème
aura été résolu, et seulement lorsqu'il aura
été résolu, c'est-à-dire lorsque le nombre de
permis de taxi aura été réduit substantiellement, tous les
autres problèmes pourront être résolus.
Cette solution n'est pas nouvelle; elle a fait partie des
recommandations de la plupart des commissions qui se sont penchées sur
cette question. Ce dont l'industrie du taxi a besoin, selon nous, ce n'est pas
tant d'un élargissement des marchés, aussi souhaitable que puisse
être cette démarche, que d'une stratégie de
réduction progressive du nombre de permis qui permettra de
réduire le ratio de l'agglomération A-11. Je parle du ratio
réel et non du ratio sur papier. Mais, c'est là un objectif que
la proposition gouvernementale ne rejoint définitivement pas dans la
mesure où elle se limite, pour le moment, à la recommandation
d'un gel des permis de propriétaires au niveau existant le 4 avril
1979.
La décentralisation. Après avoir considéré
la centralisation comme la solution, en 1973, le gouvernement estime, en 1983,
que c'est maintenant la décentralisation qui est la solution.
Dans la mesure où le transport urbain est
généralement reconnu comme une compétence municipale et
dans la mesure où les gouvernements municipaux sont effectivement plus
proches des problèmes quotidiens que rencontre cette industrie, la ville
de Montréal favoriserait une politique de décentralisation qui
redonnerait aux municipalités les pouvoirs de gestion et de
contrôle en matière de taxi. L'inquiétude que
soulève dès lors la proposition gouvernementale vient donc non
pas du projet de décentralisation, mais de la signification même
que le gouvernement donne à ce concept.
Selon la définition du Conseil de planification et de
développement du Québec, "la décentralisation est l'action
par laquelle un pouvoir de l'administration publique, qu'il soit d'ordre
politique ou administratif, et exercé par une autorité centrale
ou unique est remis à des autorités locales ou
régionales."
Or, si l'on examine le partage proposé des responsabilités
entre les autorités locales et le gouvernement du Québec dans le
document intitulé De nouvelles avenues pour le taxi, on lit ceci: "Le
gouvernement garde le pouvoir de définir le service. La Régie de
l'assurance automobile du Québec est maintenue dans son rôle de
gardienne de la sécurité routière, tandis que la
Commission des transports du Québec conserve son rôle quasi
judiciaire et a pleine autorité sur les permis de propriétaire.
Pour leur part, les autorité locales auront pour tâche de
préciser les normes d'exploitation, d'établir les règles
de qualité de services et de fixer les tarifs."
Si l'on met en parallèle la répartition actuelle des
responsabilités et la répartition proposée, comme
l'illustre le tableau 1 qui apparaît au mémoire, on ne peut que
constater un certain chevauchement des compétences entre les deux
gouvernements. Le rapport gouvernemental fait par ailleurs clairement
état de la subordination des politiques locales à celles du
gouvernement provincial. En d'autres mots, le gouvernement décentralise,
mais se réserve suffisamment de pouvoirs pour être en mesure
d'intervenir chaque fois qu'il le jugera bon, que ce soit en matière de
permis, de tarification, de protection des usagers ou autres.
Mais, pour les municipalités, ce qui peut être encore plus
préoccupant que cette décentralisation qui n'en est pas vraiment
une, c'est le fait que le rapport laisse au gouvernement et à ses
organismes le pouvoir de définir une multitude de normes et de
règlements qui devront nécessairement faire l'objet d'un
contrôle dont les gouvernements locaux assumeront le coût et la
responsabilité.
En d'autres termes, la décentralisation, telle que
proposée, aurait surtout pour effet d'imputer aux autorités
locales la responsabilité de voir à l'application et au respect
des divers règlements régissant cette industrie, qu'ils soient
d'origine gouvernementale ou locale. Pour reprendre une expression
fréquemment utilisée lors des discussions entourant la
réforme de la fiscalité municipale, il s'agirait essentiellement
d'une décentralisation des coûts. Il est peut-être opportun
de signaler à cet égard que ce ne serait pas là une
situation très nouvelle à Montréal, puisque même si
le taxi est, depuis 1973, sous juridiction provinciale, la police de la
Communauté urbaine de Montréal a continué, durant toutes
ces années, à assurer une certaine application du
règlement no 6, comme en témoignent les plaintes qu'elle a
déposées devant la Cour municipale de Montréal pour la
période allant de 1975 à 1982, au tableau 2 que nous joignons
également à notre mémoire.
En résumé, la démarche décentralisatrice
mise de l'avant par le gouvernement souffre de deux faiblesses majeures. Elle
ne simplifie en rien la complexité administrative actuelle dans la
mesure où elle ajoute aux organismes existants un niveau
d'autorité supplémentaire, sans pour autant établir
clairement les champs d'intervention des différents centres de
décision. Deuxièmement, elle impute aux municipalités la
responsabilité et le coût de voir à assurer la surveillance
et le respect d'une réglementation qui pourra originer d'un autre niveau
de gouvernement, et ce sans proposer quelque forme de compensation
financière.
La ville de Montréal estime en effet que, s'il doit y avoir
décentralisation, celle-ci doit être complète et claire, de
manière que les responsabilités de chacun soient parfaitement
établies.
Les voies d'une solution. La mise en place d'une solution
véritable aux problèmes de l'industrie du taxi à
Montréal exige davantage qu'une simple récupération des
services policiers municipaux afin de contrôler la réglementation
gouvernementale, puisque ceci se fait déjà.
La première étape, nous l'avons dit, c'est la
réduction du nombre de permis de taxi. Ainsi que nous l'avons
mentionné à maintes reprises, le problème du taxi est
essentiellement un problème particulier à l'agglomération
A-11. Toute réforme qui ne commencerait pas par l'établissement
d'un processus de réduction du nombre de permis de taxi dans cette
agglomération serait absolument futile, et il est inutile de parler de
décentralisation tant que ce préalable n'aura pas
été satisfait.
La ville de Montréal propose donc que le gouvernement
élabore et applique immédiatement une stratégie de
réduction des permis de taxi dans l'agglomération A-11, ce qui
devrait permettre d'y ramener le ratio du nombre de taxis par habitant à
un niveau correspondant à une rentabilité acceptable.
C'est seulement dans la mesure où les parties auront convenu du
principe et des modalités d'une telle stratégie qu'il sera
possible, pour la ville de Montréal, d'envisager la seconde
étape, soit un transfert des responsabilités entre le
gouvernement du Québec et les municipalités. (11 h 45)
Deuxième étape: décentralisation véritable.
La ville de Montréal endosse en effet pleinement le principe d'une
décentralisation véritable, à la fois parce qu'elle
dispose déjà d'une structure d'accueil qui est la CUM, d'une
expérience de plus de 50 ans dans ce domaine et surtout parce qu'il
s'agit là d'une responsabilité véritablement municipale et
d'un problème que nous avons été appelés à
vivre pendant trop longtemps.
Cette décentralisation, outre le fait qu'elle suppose la
réalisation de la première étape, devra, par ailleurs, se
traduire par un transfert réel de tous les pouvoirs sans exception,
accompagné de compensations financières suffisantes et non par
une simple décentralisation des coûts.
Ceci signifie que les composantes essentielles telles l'émission,
la suspension, le transfert, la révocation des permis, la tarification,
le développement des services, les normes de sécurité, la
qualité des services, la délivrance des permis de travail, etc.
devront relever de l'autorité municipale qui, dans le cas de la ville de
Montréal, sera déléguée pour l'essentiel à
la communauté
urbaine.
Cette décentralisation, en réduisant substantiellement les
interventions du ministère des Transports, de la Commission des
transports du Québec et de la Régie de l'assurance automobile
permettra d'éliminer dans une large mesure les lourdeurs administratives
qui handicapent, à l'heure actuelle, le fonctionnement de cette
industrie, et elle permettra surtout d'établir un dialogue direct entre
elle et les gouvernements locaux.
En conclusion, en déposant son rapport sur le taxi, le
gouvernement a clairement indiqué qu'il était conscient des
problèmes auxquels fait face cette industrie et qu'il souhaite corriger
la situation actuelle.
Les propositions contenues dans ce document ouvrent des perspectives
intéressantes, qu'il s'agisse de nouveaux marchés ou de
transferts d'autorité aux gouvernements municipaux. La ville de
Montréal estime cependant qu'il existe un préalable à
toute réforme, soit la mise en place immédiate d'une
stratégie de réduction du nombre de permis de taxi dans
l'agglomération A-11. C'est seulement lorsque le principe et les
modalités d'un tel processus auront été établis
qu'il sera possible d'envisager une véritable décentralisation
permettant de ramener au niveau local le contrôle de l'industrie du taxi.
Merci.
Le Président (M. Brouillet): Merci, M. Allard.
M. le ministre.
M. Clair: M. le Président, c'est avec beaucoup
d'intérêt que j'ai pris connaissance du mémoire de la ville
de Montréal. Comme j'ai eu l'occasion de le dire
précédemment au cours de cette commission, 60% de l'industrie du
taxi est concentrée, à toutes fins utiles, au coeur de
l'agglomération montréalaise. Dans ce sens, que ce soit la Ligue
A-11, la Communauté urbaine de Montréal ou la ville de
Montréal, les mémoires qui nous sont présentés nous
intéressent au plus haut point, puisqu'on discute à ce moment du
problème majeur du taxi. Contrairement à ce qui semble être
affirmé, ce qu'on peut lire entre les lignes dans le mémoire, il
y a également des problèmes ailleurs dans le taxi au
Québec, mais ils sont de moins grande envergure, c'est évident,
que les problèmes qu'on peut connaître dans l'agglomération
montréalaise.
Mon premier commentaire sur le mémoire de la ville de
Montréal qui endosse les nouvelles avenues pour le taxi, désire
une décentralisation plus poussée, sera en résumé
à peu près le suivant. Je dirai que vraiment, dans les
municipalités au Québec, tous les goûts sont dans la nature
en ce qui concerne la possibilité de décentraliser. On a entendu
hier, en commission parlementaire, l'Union des municipalités
régionales de comté, par exemple, s'opposer formellement à
toute décentralisation ou à peu près; même une fois
réglée la question financière, elle n'était pas
vraiment désireuse qu'on procède à cette
décentralisation. À l'inverse, la ville de Montréal dit:
Quant à parler de décentralisation, si nous devons
décentraliser, décentralisons tout, complètement. Je vous
dirai là-dessus qu'on essaie d'être un peu au milieu des deux
positions. Je craindrais fort, quant à moi - je le dis comme je le pense
-que si on revenait complètement à la situation d'avant 1973,
cela veut dire à ce moment que le règlement no 6 serait, à
toutes fins utiles, complètement aboli et que le service de taxi ne
serait régi que par des autorités locales.
Je craindrais qu'à ce moment-là, on ne garde pas les
avantages qu'a quand même procurés la réforme de 1973 avec
les définitions des agglomérations, avec le gel de permis qui a
été appliqué à travers le Québec,
finalement, en 1979. Je craindrais qu'on perde un certain nombre d'acquis de
1973 et que le balancier aille complètement à l'autre bout de sa
course, qu'après avoir vécu un régime de centralisation
excessive, on passe à un régime de décentralisation
excessive et qu'on en revienne à connaître exactement les
mêmes problèmes que ceux qu'a amenés la centralisation en
1973: les pouvoirs qu'on désire garder ou centraliser, l'émission
des plaques, la définition du service traditionnel de taxi. Il me semble
que c'est effectivement une responsabilité nationale que de dire:
Qu'est-ce que c'est qu'un taxi? Le gel des permis de propriétaires, cela
a été un des problèmes quand le gouvernement de
l'époque, en 1973, a - passez-moi l'expression - ramassé le
phénomène des problèmes du taxi. Déjà, le
problème du trop grand nombre de permis était là.
Déjà, c'était un phénomène qui était
connu. Ce n'était pas le ministère des Transports qui l'avait
créé, le problème du trop grand nombre de permis, mais les
municipalités. Et, on a entendu des chauffeurs et des
propriétaires de taxi venir nous demander, la première
journée, que le ministre les protège contre un retour de
l'émission des permis dans les municipalités craignant que cela
devienne un sujet trop politique. Alors, le gel des permis, le contrôle
des permis par la Commission des transports du Québec et le retrait des
permis pour des infractions graves comme l'utilisation du "meter" -
excusez-moi, je ne retrouve pas le mot français - du taximètre
frauduleux, il me semble que la gérance de cette partie-là du
taxi devrait demeurer centralisée à la Commission des transports.
On ne voit pas l'utilité de centraliser cela, même si on dit qu'on
est prêt cependant à ce que les municipalités puissent
aller à la
Commission des transports faire valoir leur point de vue si elles
réclamaient une augmentation du nombre de permis de taxi dans leur
agglomération pour des raisons qui le justifieraient.
Par ailleurs, l'immatriculation et la sécurité
routière: je ne vois pas comment on pourrait confier cela à
quelqu'un d'autre qu'à la Régie de l'assurance automobile du
Québec, sans quoi on pourrait faire immatriculer les camions par je ne
sais pas qui, les véhicules de promenade par quelqu'un d'autre. Tous les
États dans le monde fonctionnent comme nous, et je ne vois pas comment
on pourrait décentraliser l'immatriculation. Ce qu'on propose de
transférer aux municipalités, aux autorités locales, c'est
les principaux éléments de gestion du taxi comme un mode de
transport des personnes en milieu urbain. Une plainte, par exemple, qui vient
régulièrement, surtout à Montréal, c'est au sujet
de la qualité des chauffeurs. On a essayé de contrôler
centralement la qualité des chauffeurs et -passez-moi l'expression -
ç'a fait patate, ça n'a pas marché. On pense qu'il y
aurait avantage à revenir à la situation d'avant 1973, ce qui est
un gros problème.
Deuxièmement, ce sont les autorités locales qui sont
responsables de l'intégration du transport par taxi dans les politiques
de transport urbain. Il nous apparaît, quand on parle de normes
d'utilisation de définition du service de taxi collectif et autres, que
cela devrait aussi, si on veut vraiment que cela s'intègre dans une
politique de transport urbain, appartenir à ceux qui sont responsables
d'établir cette politique, donc aux autorités locales.
Finalement, il y a la tarification et le contrôle qui seraient
effectués par les autorités locales encore là, parce qu'on
y voit, nous, des avantages importants. D'ailleurs, la ville de Montréal
l'affirme dans son mémoire. Elle dit: Les méfaits de la
décentralisation notamment en ce qui concerne le contrôle. Je suis
heureux que vous le souligniez parce que, dans bien d'autres mémoires du
milieu municipal, on mettait en cause l'idée que les
municipalités soient mieux placées pour contrôler. Et je
suis heureux de voir que notamment en ce qui concerne les contrôles, l'on
considère que la centralisation n'a pas donné les effets
escomptés depuis 1973.
Voilà pour les commentaires, M. le Président, sur le
mémoire de la ville de Montréal. Tout cela est dit d'un point de
vue très positif par ailleurs, parce que je reçois très
positivement le mémoire de la ville de Montréal qui, finalement,
donne un appui aux deux grandes orientations moyennant des ajustements, des
réserves, décentralisation et ouverture de nouveaux
marchés.
Voici maintenant mes questions, M. le Président. La ville de
Montréal dit:
Cependant, le problème no 1, c'est le trop grand nombre de permis
et, tant qu'il n'y aura pas une stratégie de réduction du nombre
de permis, nous ne sommes pas intéressés.
Si je faisais un commentaire méchant, je dirais qu'on ne fait que
gérer le nombre de permis qui nous ont été
transférés en 1973, mais je ne le ferai pas. Je poserai seulement
la question suivante: Quelle est la stratégie que vous avez
envisagée, si vous en avez envisagé une, de réduction des
permis? Ce serait par rachat? Par retrait des permis? Comment voyez-vous cette
question-là?
M. Allard: C'est à dessein, d'une certaine façon,
M. le ministre, que nous n'avons pas explicité dans le mémoire
comme tel, la question de la stratégie. Nous croyons qu'elle devrait
être préparée, bien sûr, par toutes les parties
intéressées et, en tout premier lieu, par les gens mêmes de
l'industrie en concertation avec les autres intervenants dans le transport,
principalement, le gouvernement.
À ce stade-ci, j'aimerais inviter mon collègue Le Lannic
à vous faire part peut-être d'une idée parce que nous avons
remarqué que dans le document gouvernemental, aux pages 6 et 7, on a
fait un peu rapidement le tour de la question. Sur la question de la limitation
du nombre de permis, on a fait état des difficultés qu'il y avait
à réaliser cela. On a aussi fait état de la
nécessité d'avoir moins de permis, mais on n'a pas osé
conclure, parce qu'on parlait d'une intervention gouvernementale par le rachat
d'un certain nombre de permis. Je me demande si on a vraiment examiné
toutes les avenues possibles de ce côté-là.
J'inviterais peut-être mon collègue Le Lannic à vous
faire part d'une proposition que nous n'osons pas présenter comme une
proposition appuyée d'une longue étude experte, mais il y a
sûrement quelque chose à faire de ce
côté-là.
M. Le Lannic (Jean-Claude): Bonjour. Comme vient de le dire Me
Allard, il ne s'agit pas d'une proposition de la ville de Montréal,
c'est simplement une idée qui est venue sur la table lorsque nous avons
regardé ensemble le problème.
Il est évident pour nous que le vrai problème du taxi
à Montréal, c'est le trop grand nombre de taxis par rapport
à la clientèle possible. Lorsqu'on dit qu'il faudra
peut-être changer les méthodes de contrôle, je pense qu'on
s'attaque aux effets plutôt qu'à la cause du problème. Le
jour où le nombre de taxis aura été réduit
substantiellement à Montréal et le jour où ce sera devenu
une activité très rentable, je pense que le besoin de
contrôle sera beaucoup moindre qu'il ne peut l'être
aujourd'hui. C'est le même problème dans toutes les
industries. S'il y a un trop grand nombre d'offreurs, on assiste
généralement à une dégradation de la qualité
du service offert à la population.
L'idée à laquelle nous avons pensé, qui pourrait
peut-être servir de base de discussion, est la suivante. Il est
évident que ce n'est pas au gouvernement de racheter les permis et de
contribuer ainsi à donner une rente, à toutes fins utiles,
à ceux qui gardent leur permis puisque celui-ci prendra une plus grande
valeur au fur et à mesure que le nombre de permis diminuera.
Le principe de base est à peu près le suivant: ce sont
ceux à qui une telle mesure bénéficiera qui devront payer
pour ce rachat. On pourrait adopter le scénario suivant. On
déterminerait quel serait le prix du permis en 1983. Il peut être
de 10 000 $, il peut être de 15 000 $, je ne le sais pas. Il y a à
peu près 5000 taxis dans la zone centrale à Montréal. Si
l'objectif est de 2500 permis, cela veut dire qu'il faut en éliminer
à peu près 2500. Cela peut représenter entre 25 000 000 $
et 35 000 000 $.
Il est évident qu'on ne peut pas demander une telle somme demain
matin. On pourrait constituer une espèce de fonds qui servirait à
racheter les permis en excédent, les 2500 de trop. Mais ces permis
seraient rachetés au prix de 1983 indexé, c'est-à-dire que
si la personne vend son permis au fonds, puisqu'elle n'aurait plus le droit de
vendre son permis à d'autres - tout permis devrait être revendu
à ce fonds - si la personne le revend en 1983, c'est 10 000 $ ou 15 000
$, mettons, et en 1984 ce serait toujours 10 000 $ ou 15 000 $ mais
indexés. (12 heures)
On pourrait financer ce fonds de rachat des permis à même
une cotisation annuelle qui pourrait être elle-même graduée
pour tenir compte de la plus-value progressive et de la rentabilité plus
grande progressivement dans le temps des permis qui subsisteraient. On pourrait
par exemple dire: En 1983, pour exploiter un taxi à Montréal,
cela coûtera 200 $ et en 1984, dépendant du nombre de permis qui
auront été retirés, cela pourra coûter 400 $ et
ainsi de suite. L'idée, c'est d'avoir un étalement tel dans le
temps que cela n'impose pas une charge trop grande à ceux qui demeurent
dans l'industrie et que la charge qu'on leur impose soit proportionnelle
à la rentabilité croissante de leur activité.
Comme je viens de vous le dire, ce n'est pas une proposition de la ville
de Montréal, c'est une idée qui a été amenée
pour discussion et on est toujours prêt à en discuter.
M. Clair: C'est une idée sur laquelle nous aussi, on se
penche. La difficulté principale, c'est que si le gouvernement impose
cette cotisation par voie d'une augmentation - c'est une avenue qu'on pourrait
emprunter - s'il augmente le coût de l'émission d'un permis annuel
de taxi de, je ne sais pas, 100 $ ou 200 $ pour alimenter ce fonds, il faut
être bien conscient qu'à ce moment on n'a pas consulté
nécessairement les propriétaires eux-mêmes quant à
leur volonté de le faire. Ce serait imposé par le gouvernement.
D'autre part, si on demande aux propriétaires de taxi s'ils sont
prêts à le faire et qu'on autorise, mettons, la ligue A-11
à imposer une cotisation additionnelle comme elle en a demandé le
pouvoir pour elle-même procéder au rachat des permis, nous
connaissons tous les difficultés de fonctionnement de la ligue
A-11 au cours des récentes années et les procédures
judiciaires à n'en plus finir qui se sont ensuivies.
Ma crainte, à ce moment, ce serait que, si on accorde un tel
pouvoir, on fasse face à d'éventuelles contestations judiciaires
de la part de dissidents pour quelque raison que ce soit et qu'on se retrouve
dans des difficultés aussi importantes que celles qu'on a connues en
1979, 1980 et 1981. C'est effectivement une idée intéressante qui
mérite d'être creusée.
Voici la deuxième question que je voulais poser. La ville de
Montréal est certainement la ville qui a eu le plus d'expérience,
et je le dis dans le sens positif, en termes de gestion du secteur du taxi et
de contrôle en ce qui concerne les années d'avant 1973. Depuis
1973, le contrôle policier est demeuré le même au service de
police de la Communauté urbaine de Montréal. Maintenant, quant
aux autres responsabilités qui étaient assumées par la
ville de Montréal avant 1973, je ne sais pas si vous avez les chiffres.
Je serais intéressé vivement à connaître combien il
y avait de personnes à la ville de Montréal qui étaient
affectées à ce service de contrôle du secteur du taxi.
Combien cela coûtait-il à la ville de Montréal? Combien y
a-t-il eu de personnes qui ont dû être congédiées ou
réaffectées dans d'autres services à la ville de
Montréal après 1973? Je ne sais pas si vous avez ces chiffres
avec vous ou si vous pourriez les avoir?
M. Allard: M. le ministre, j'ai quelques éléments
de réponse à cette question. Il y avait effectivement une
vingtaine de personnes, de policiers et de commis qui étaient
préposés à l'émission des permis de
propriétaires, des permis de taxi comme tels, à l'inspection des
véhicules, à l'inspection sommaire. Si le véhicule
était trop âgé, il y avait une inspection dans un centre
prévu à cette fin. Il devait y avoir un certificat. À une
certaine époque, c'était ce groupe qui faisait passer aux
chauffeurs des examens. Par la suite, la CECM est venue à la rescousse
et lorsqu'un aspirant chauffeur
se présentait à un examen et qu'il échouait, il
était tenu, pour se représenter de nouveau, de suivre des cours
du soir qui s'étalaient sur une période de trois mois au terme
desquels des examens très pertinents, très adaptés
à la ville de Montréal étaient proposés aux gens.
Par exemple, on les mettait en face de situations bien précises et on
leur demandait le plus court chemin de tel point à tel autre point? Nous
avons, je crois, assisté un peu, au cours des dernières
années, à une détérioration de cet aspect de la
compétence, parce que la vérification, qui a été
faite d'une façon plus centralisée, n'a pas atteint exactement le
même degré de qualité qu'elle avait à
l'époque. Il y avait, en plus de ces 20 policiers qui contrôlaient
de façon immédiate l'émission des permis de travail, et
l'émission des permis de taxi, quinze autres équipes de policiers
qui, eux, veillaient à l'application du règlement 2745 de la
ville, règlement qui...
M. Clair: Qu'entendez-vous par quinze autres équipes?
M. Allard: Quinze équipes de deux policiers...
M. Clair: Deux personnes.
M. Allard: ...de deux personnes, ce qui veut dire un effectif
total d'environ 50 personnes qui veillaient à l'application de la
réglementation du taxi à Montréal à
l'époque. On m'informe que la principale préoccupation, à
ce moment-là, de ces équipes était de veiller à ce
qu'il n'y ait pas de maraudage de l'extérieur, à savoir des
chauffeurs de taxi venant de l'extérieur qui venaient travailler sur le
territoire de la ville de Montréal. C'était une des principales
préoccupations. Il y avait, bien sûr, tout le reste des autres
dispositions réglementaires ayant trait à la propreté des
véhicules, propreté extérieure et intérieure. Ce
bureau recevait également les plaintes du public et veillait à
les résoudre de la manière la plus satisfaisante possible pour le
public. Bien sûr, au cours des années, depuis 1973, le service de
police a perdu une partie importante de ses attributions et le contrôle,
qui a été exercé sur le règlement, a
été graduellement retransmis aux postes des districts policiers,
et il n'y a que deux districts actuellement où il y a un policier qui,
à temps plein, voit à l'application du règlement
provincial, du règlement no 6. Ce sont les deux districts policiers du
centre-ville même de Montréal, le 33 et le 25. Combien cela
pouvait-il coûter à la ville de Montréal à
l'époque, en 1973? Il s'agirait de tirer une moyenne de ce
qu'était le salaire d'un policier et de le multiplier par 50 à
peu près.
M. Clair: Si on considère que le contrôle ne se fait
plus par la police de Montréal, à toutes fins utiles, parce que
ce que j'avais compris jusqu'à maintenant de la part de la
Communauté urbaine de Montréal, c'est qu'en termes de
contrôle policier, on n'exigeait pas de personnes additionnelles
puisqu'on semblait dire - je ne veux pas parler à leur place, mais c'est
du moins ce que j'avais compris - que pour le contrôle policier comme
tel, on considérait que les équipes existantes devraient
normalement suffire à la tâche. Leurs chiffres coïncidaient
passablement avec les vôtres puisqu'ils me parlaient de 25 personnes
additionnelles pour le service de police, parce qu'ils voyaient, eux aussi,
comme cela existait auparavant, je pense, le service de contrôle, si on
veut, d'émission des permis de chauffeurs et des permis de
propriétaires plutôt centralisé auprès du service de
police qu'auprès d'un autre service. C'est donc dire qu'on parle en gros
de 20 à 50 personnes additionnelles.
C'est mon commentaire là-dessus, M. le Président. Ce que
cela m'inspire, c'est que, encore là, comme je le disais hier, au moment
de la rencontre avec la Communauté urbaine de Québec, on voit
qu'il ne s'agit quand même pas de sommes astronomiques si on
transférait avec certaines responsabilités les revenus provenant
en partie ou en totalité de l'émission des permis de
chauffeurs.
M. Bissonnet: On parle de 2 000 000 $. M. Clair: Pour la
ville... M. Bissonnet: Au minimum.
M. Clair: Pour l'ensemble de la Communauté urbaine de
Montréal.
M. Bissonnet: On parle d'un minimum de 2 000 000 $.
M. Clair: M. le Président, je vais donner l'occasion
à mes collègues de pouvoir poser des questions aussi.
Le Président (M. Brouillet): M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je profite de
l'occasion, au nom des membres de la commission, pour saluer les
représentants de la ville de Montréal. Dans votre mémoire,
à la page 10, entre autres, vous mentionnez qu'il est important de
signaler à cet égard que ce ne serait pas là une situation
très nouvelle à Montréal puisque même si le taxi
est, depuis 1973, sous la juridiction provinciale, la police de la
Communauté urbaine de Montréal a continué, durant ces
années, à assurer une certaine application du règlement no
6.
À la page no 10b, on tient compte du nombre de plaintes
portées devant la Cour municipale de Montréal. Est-ce que ces
plaintes ont été portées uniquement par les policiers de
la Communauté urbaine de Montréal? Et qu'est-ce que cela
représente en proportion du nombre de plaintes totales qui ont
été portées par les policiers ou les représentants
du ministère des Transports qui, eux aussi, ont la juridiction? À
quel pourcentage cela s'élève-t-il?
M. Allard: Les plaintes qui ont été portées
devant la Cour municipale de Montréal, en vertu du tableau 10b, l'ont
toutes été uniquement par le service de police de la
Communauté urbaine de Montréal. À ma connaissance, il n'y
a eu aucune plainte portée devant la Cour municipale par des
représentants du ministère des Transports. J'ignore s'il y a eu
des plaintes devant d'autres tribunaux, comme à la Cour des sessions de
la paix, par exemple. Peut-être M. le ministre pourra-t-il vous
répondre là-dessus.
M. Rocheleau: Je me pose la question à savoir si le
ministère des Transports, qui avait la responsabilité de
l'entretien des véhicules, taximètres ou autres, lui aussi avait
appliqué le règlement no 6 et en quelle proportion cela
pouvait...
M. Allard: Pas devant la Cour municipale.
M. Rocheleau: Pas devant la Cour municipale?
M. Allard: Non.
M. Clair: J'aurais peut-être un élément
d'information pour le député de Hull. On m'indique que la
Sûreté du Québec et le service d'inspection du
ministère des Transports, à l'occasion, participent à des
opérations avec le service de police de la Communauté urbaine de
Montréal, mais il ne semble pas qu'il y ait eu de plaintes de
portées sur le territoire de la Communauté urbaine de
Montréal. Elles ne sont pas portées à l'initiative du
service d'inspection.
M. Rocheleau: D'accord. Dans le tableau 2, à la page 10b,
vous tenez compte des plaintes portées devant la Cour municipale depuis
les années 1975 jusqu'à 1982. En 1981, il semble y avoir une
différence assez importante entre les années antérieures,
tenant compte de 1975, 1976 et même de 1982. Quel genre de plaintes sont
habituellement portées?
M. Allard: La différence s'explique peut-être par le
fait qu'il y a eu des changements d'attribution de sections de travail à
l'intérieur même du service de police. Graduellement, il y a eu
des réductions de personnel au cours des dernières années,
et il y avait une section, qu'on appelait la section des permis, qui veillait
à l'application du règlement du taxi et qui a été
démantelée au cours des années 1980 et 1981, ce qui a
expliqué la baisse graduelle que l'on constate dans le nombre de
plaintes. Ce qui ne veut pas dire qu'effectivement la situation s'était
améliorée au cours de ces années.
Cependant, l'an dernier, la ville de Montréal a demandé
à la direction du service de police de redoubler d'efforts en vue de
faire appliquer davantage le règlement no 6, à la suite de
plaintes ou de commentaires que les autorités de la ville de
Montréal avaient recueillis.
Le type de plainte qui est le plus fréquemment noté par la
police, c'est de ne pas respecter les stations d'attente, c'est-à-dire
les normes prévues pour les stations d'attente. Si, par exemple, vous
avez des postes d'attente prévus pour cinq taxis et qu'il y en a huit ou
neuf, immédiatement, lorsque des policiers s'aperçoivent de la
chose, ils portent des plaintes dans ce sens.
Sur les 2029 plaintes, il y a eu 1030 poursuites et le plus grand
pourcentage va à ce type d'infraction ou encore au stationnement en
double file près des postes d'attente.
Il y a aussi 474 plaintes pour les voitures endommagées. Pour la
malpropreté extérieure, 78, et la malpropreté
intérieure, 43. C'est le gros des plaintes, ce sont les principales
infractions notées par le service de police. Je sais cependant que,
avant 1973, le service de police insistait beaucoup sur l'affichage
intérieur de la photographie, ce qu'on appelait à l'époque
le "pocket number" du chauffeur. Aujourd'hui, j'ignore si le service de police
y porte autant d'attention qu'auparavant, mais il y a plusieurs commentaires
que nous recevons à savoir que les voitures se passent d'un chauffeur
à l'autre et que ce n'est absolument pas surveillé. Enfin! (12 h
15)
M. Rocheleau: Tenant compte du fait qu'avant 1975 la
responsabilité totale relevait de la ville de Montréal, est-ce
que vous avez des comparaisons au point de vue des plaintes portées,
tenant compte du fait que vous sembliez à ce moment avoir plus
d'employés ou plus de policiers directement affectés à la
surveillance de cette industrie du taxi?
M. Allard: Je n'ai pas relevé les statistiques qui ont pu
être rédigées, colligées au cours de 1968, 1969,
etc. Cela devait jouer entre 2500 à 3000 plaintes par année.
M. Rocheleau: Maintenant, en bas de la page 11, vous semblez
avoir effectivement un prérequis. "Toute réforme qui ne
commencerait pas par l'établissement d'un processus de réduction
du nombre de permis de taxis dans cette agglomération serait absolument
futile..." dites-vous. À toutes fins utiles, un prérequis pour
régler ce qui semble être davantage le problème que
connaissent actuellement Montréal et plus particulièrement les
propriétaires de taxi de Montréal, c'est le nombre de permis qui
sont actuellement en circulation.
M. Allard: Il n'y a qu'à se promener dans la ville et
observer. Je vous donne simplement l'exemple du terminus Voyageur. Vous allez y
voir facilement dix véhicules-taxis pendant de très longs moments
qui ne prendront strictement aucune course. Allez un peu partout, pas besoin de
faire une longue étude pour se rendre compte qu'il y en a trop. Est-ce
que c'est relié aussi à un manque de contrôle de la
répartition, de l'affectation des véhicules? Nous ne le savons
pas, mais si vous questionnez des chauffeurs de taxi, c'est un commentaire que
vous allez avoir régulièrement. Il y a 2000 taxis de trop
à Montréal. Pour nous, cela nous apparaît essentiel de
fournir à l'industrie la chance d'être rentable pour qu'elle
puisse vraiment s'autodiscipliner, que ce ne soit pas la jungle.
M. Rocheleau: En 1973, avant le changement de politique, c'est la
ville de Montréal qui émettait les permis dans les
différentes régions. Dans la région A-11, en 1973, combien
y avait-il de permis?
M. Allard: Là-dessus, j'ai tenté d'avoir des
chiffres. Cela ne m'est pas possible de vous donner des chiffres
validés, mais on me dit, selon un policier qui travaillait à la
section à l'époque, qu'il devait y en avoir entre 4300 et 4400
alors que maintenant il y en a 5218, ce qui veut dire qu'il y a eu augmentation
depuis 1973. Par ailleurs, en réponse à M. le ministre, qui
semblait nous faire un reproche amical d'avoir transféré au
gouvernement un problème en 1973, je dois dire qu'on n'avait pas les
pouvoirs de restreindre, de diminuer ou de contingenter le nombre des permis.
Les municipalités ont des pouvoirs délégués qui
sont fort limités, vous savez.
M. Rocheleau: Maintenant, une dernière question,
étant donné que le ministre semble prétendre que la ville
de Montréal partage totalement ou en grande partie ses opinions sur les
nouvelles avenues. À la page 12, vous mentionnez, entre autres, à
l'avant-dernier paragraphe, que "cette décentralisation, outre le fait
qu'elle suppose la réalisation de la première étape,
devra, par ailleurs, se traduire par un transfert réel de tous les
pouvoirs sans exception, accompagné de compensations financières
suffisantes, et non par une simple décentralisation des coûts."
Avez-vous fait une certaine évaluation des coûts de ce transfert
de pouvoirs accompagné de nouvelles responsabilités?
Tantôt, vous avez mentionné qu'avant 1973, vous aviez des
effectifs de tant de policiers, de tant de cols blancs ou d'employés de
bureau. Si, demain matin, le gouvernement, par l'entremise de son humble
serviteur, le ministre des Transports, décidait d'appliquer la
décentralisation non seulement des pouvoirs, mais aussi des
responsabilités financières, cela voudrait dire quoi, comme
coûts? J'ai l'impression que vous ne prenez pas les
responsabilités; vous n'acceptez pas la décentralisation sans
pour autant négocier avec le gouvernement une responsabilité
financière aussi qui devrait être décentralisée.
Avez-vous établi certains coûts?
M. Allard: Non, nous n'avons pas cherché à
déterminer ou à préciser les coûts, parce qu'ils
nous paraissent relativement faciles à établir à partir du
moment où on sait que cela va prendre entre 25 et 30 employés de
plus possiblement. Il s'agit d'évaluer évidemment les salaires
que cela va occasionner ainsi que toutes les autres ressources qui entourent
cela. Fort probablement qu'un calcul rapide comme celui du député
de Jeanne-Mance tout à l'heure, à savoir 2 000 000 $, pourrait
être un chiffre raisonnable dans le cas de la Communauté urbaine
de Montréal.
M. Rocheleau: J'aurais peut-être une question, M. le
Président, à l'égard du ministre.
Le Président (M. Brouillet): Si le ministre l'accepte, je
suis tout à fait ouvert à ce genre de dialogue.
M. Rocheleau: Il va sûrement l'accepter.
Une voix: Il est mieux. Il n'a pas le choix.
M. Clair: Oui, oui, toujours, oui, oui.
M. Rocheleau: On parle beaucoup de décentralisation, M. le
ministre, et tous les mémoires y ont fait allusion, autant l'Union des
conseils de comté que les municipalités régionales de
comté et l'Union des municipalités; cela coûte combien,
à votre ministère, actuellement, cette opération taxi au
Québec, tant chez les petits bonshommes bleus, que l'ensemble des...
M. Clair: C'est justement, M. le
Président. Une chose que nous savons, c'est que cela ne
coûte pas très cher, compte tenu du nombre de personnes
affectées à ce service, si on veut. Mais ce qui est difficile
à établir, c'est le coût exact, puisque les personnes qui
ne sont affectées qu'au taxi... Si on prend, par exemple,
l'équipe des inspecteurs en transport, ce n'est pas leur seule
affectation; c'est difficile, surtout qu'ils travaillent très peu sur
l'île de Montréal, mais principalement ailleurs en province et,
dans la même journée, ils peuvent s'occuper de la
vérification des taxis, des autobus ou des camions. C'est difficile
d'établir un coût réel, mais je pense que les chiffres
méritent d'être étudiés; il s'agit surtout
d'établir ce que cela coûterait aux municipalités, c'est ce
qu'il faut établir. Ce qu'on peut regarder comme revenus possibles, il y
a d'abord les revenus des amendes. Il y a 2000 plaintes. D'ailleurs, c'est une
question que je voulais poser. Les 2000 plaintes ont rapporté combien en
termes de revenus? On m'accuse souvent, comme ministre des Transports, de
financer le gouvernement avec des augmentations d'amendes pour infractions au
Code de la sécurité routière, mais il y a un revenu
rattaché à cela. Deuxièmement, il y a le revenu
relié à la délivrance du permis de chauffeur qui pourrait
être transféré aux municipalités. Il y a 15 000
permis de chauffeur sur l'île de Montréal. S'il y en a 15 000,
mettons chacun par hypothèse à 100 $, cela fait 1 500 000 $, plus
le revenu des amendes. On voit que ce n'est pas...
M. Allard: Le revenu des amendes est de 100 000 $.
M. Clair: 100 000 $?
M. Allard: Oui, au maximum.
M. Clair: C'est une moyenne de combien? 100 $?
M. Allard: Non, 50 $.
M. Clair: De 50 $. C'est cela, 50 $. Tout ce que je veux dire au
député de Hull, c'est qu'on voit que, surtout basé sur le
principe qui a été retenu, je pense, par l'Union des
municipalités du Québec, lors de son dernier congrès,
à savoir qu'autant que possible, les réglementés paient le
coût de leur réglementation, on voit qu'il y a des avenues qui
peuvent être ouvertes de ce côté. À mon avis, le
problème de la compensation financière est relativement simple et
peu coûteux à résoudre pour le gouvernement. C'est
évident qu'on n'entend pas décentraliser seulement des factures,
mais on n'entend pas non plus laisser les municipalités - et je sais que
les gens de la ville de Montréal qui sont devant nous ne sont pas des
élus - profiter de l'occasion pour venir trouver une source
additionnelle de revenus dépassant le coût des services
décentralisés.
M. Rocheleau: Vous avez tout de même remarqué, M. le
Président, que ce ne sont pas les municipalités qui sont
accourues ici, demandant de leur transférer ou de permettre cette
décentralisation, tenant compte de l'opération des taxis,
mais...
M. Clair: Je ne veux pas contredire le député ni
engager un débat avec lui, mais on lit dans la position de la ville de
Montréal, sous le titre "Décentralisation véritable":
"Cela signifie que les composantes essentielles, telles l'émission, la
suspension, le transfert, et la révocation des permis de taxi, la
tarification, le développement des services, les normes de
sécurité, la qualité des services, la délivrance
des permis de travail, etc., devront relever de l'autorité municipale
qui, dans le cas de la ville de Montréal, sera
déléguée pour l'essentiel à la CUM." Ce que je
comprends, c'est que la ville de Montréal dit à la
décentralisation non seulement oui, mais encore plus loin que ce que
vous envisagez, M. le ministre, à une condition, compensation
financière.
M. Rocheleau: Oui, mais il faut tenir compte du fait que la ville
de Montréal, c'est la ville de Montréal, ce n'est pas l'ensemble
du Québec...
M. Clair: Là, vous avez raison, ce n'est pas
Saint-Germain-de-Grantham, c'est la ville de Montréal.
M. Rocheleau: Non, il faut faire une distinction importante dans
toute cette philosophie.
Une voix: Ce n'est pas Drummondville.
M. Clair: Méfiez-vous, on s'en vient bien.
M. Rocheleau: II ne demeure pas moins qu'on examine depuis hier
les nouvelles avenues pour le taxi. On a écouté plusieurs
intervenants qui ont présenté des mémoires drôlement
intéressants, mais je me pose toujours une question.
Premièrement, on traite du problème du taxi. Les
propriétaires de taxi ont à faire face à leurs
obligations, tenant compte de la conjoncture économique et autre.
À Montréal, actuellement, on tient compte que dans la zone A-11,
il y a, à toutes fins utiles, un nombre de taxis qui dépassent la
normale de beaucoup, mais on n'a pas entendu ou à peu près pas de
commentaires - ce n'est peut-être pas son rôle non plus - du
ministre sur les problèmes qu'affrontent actuellement les
propriétaires
de taxi, c'est-à-dire les coûts d'assurances, qui sont
exorbitants, la taxe ascenseur de M. Parizeau sur l'essence, etc. On a
discuté aussi des possibilités d'avoir une ristourne semblable
à celle du fédéral qui accorde un cent le litre. Est-ce
qu'on va discuter éventuellement de ce phénomène ou si on
discute simplement du problème du gouvernement, du problème des
municipalités, du problème de l'Union des conseils de
comté et de l'Union des municipalités et on oublie de parler du
problème que vivent les propriétaires de taxi dans leur
quotidien, c'est-à-dire des coûts qu'ils ont à supporter
pour gérer leurs frais quotidiens, hebdomadaires, mensuels et
annuels?
M. Clair: Peut-être le député de Hull
n'a-t-il pas pu, à cause des ses autres obligations, participer à
l'audition de tous les mémoires, mais ces questions ont
été posées par les gens de la Fédération des
ligues de taxis.
M. Rocheleau: Oui, je les ai entendus.
M. Clair: À ce point de vue, je ne partage pas du tout
votre avis. Quand la ville de Montréal fait des propositions quant
à la réduction du nombre de permis, c'est une idée qui
peut contribuer effectivement à la rentabilité. Je ne crois pas
que les propriétaires et les chauffeurs de taxi demandent des formes
déguisées d'aide sociale. Ce qu'ils veulent, c'est pouvoir
évoluer dans un marché qui leur permette d'être rentables.
Si, par l'ouverture de nouveaux marchés, diminution du nombre de permis,
meilleur contrôle chez les chauffeurs ou quelles que soient les mesures
qui pourront être retenues et mises de l'avant, l'objectif est d'en
améliorer la rentabilité et que cet objectif est atteint... Vous
savez, il y a des compagnies de transport qui paient effectivement des primes
d'assurances très élevées aussi, qui paient un carburant
très élevé, mais qui s'en plaignent moins, pourquoi? Parce
qu'elles sont dans un secteur où elles parviennent à rentabiliser
leur exploitation. À ce compte-là, je pense que ce serait - c'est
toujours la mentalité qui m'a animé - faire fausse route que de
dire: Ils ont des problèmes de rentabilité, on va leur donner
deux ou trois "candy", on va donner une petite ristourne sur le carburant, on
va jouer un peu avec les tarifs d'assurances à la Régie de
l'assurance automobile et, bingo! c'est réglé. Mais ce ne sera
malheureusement pas le cas, parce qu'il y a un problème d'occupation de
ces véhicules-taxis et le problème va demeurer entier. On aurait
donné du bonbon à court terme, mais on n'aurait pas vraiment
réglé le problème.
Ce que la ville de Montréal suggère, ce que d'autres aussi
ont suggéré va dans le même sens, la problématique
du taxi, c'est d'abord un problème de rentabilité et ce
problème de rentabilité peut être résolu par
plusieurs avenues. Ce que je retiens de la commission, c'est qu'on n'aura pas
à en retenir une seule mais, par une panoplie de moyens, on pourra
atteindre l'objectif de rentabiliser le taxi, d'une part, et de mieux
l'intégrer dans la problématique du transport urbain comme un
mode de transport à part entière. Ces autres questions ont
été discutées. (12 h 30)
M. Rocheleau: Je sais qu'on a traité de plusieurs de ces
questions. Il y a certaines auditions de mémoires auxquelles je n'ai pu
assister, mais j'ai quand même eu l'occasion de les lire de toute
façon. On a beaucoup parlé de décentralisation et des
possibilités de voir éventuellement les MRC ou les
communautés urbaines ou régionales prendre en charge cette forme
de décentralisation, mais il n'en demeure pas moins, M. le ministre...
Je comprends que, si le nombre de taxis excède les normes, je pense
qu'on retrouve le problème plus particulièrement -en tout cas
à 75% peut-être - à Montréal. C'est Montréal
qui connaît et qui vit ce problème; ici, à Québec,
c'est peu. On a suggéré - je pense que même les
coopératives l'ont suggéré - entre autres, à
Montréal, un homme par véhicule sur 24 heures, ce qui
réduirait le nombre de véhicules en circulation sur une
période de 24 heures par jour.
Je persiste à croire et je souhaiterais savoir si, au cours de
cette commission parlementaire, tenant compte du fait que les
propriétaires actuels de taxi ont des problèmes dans
l'immédiat, le ministre a l'intention de s'attarder un peu plus au
problème du coût des assurances des taxis où il semble y
avoir un abus actuellement. Je ne sais pas si c'est attribuable aux compagnies
ou aux accidents causés par les taxis ou les propriétaires de
taxi. Cela ne semblait pas être le cas l'autre jour lorsqu'on l'a
analysé; il semblait y avoir à peu près 12% de
responsabilité imputable aux propriétaires de taxi.
Il y a aussi le problème du carburant. Tantôt, M. le
ministre, vous avez dit qu'il n'est pas question de subventionner l'industrie
du taxi, et je comprends. Déjà, le Québec et les
municipalités subventionnent en grande partie le transport en commun
à des coûts drôlement effarants. Mais ce n'est pas non plus
à l'industrie du taxi de subventionner le gouvernement du Québec
par le coût des plaques d'immatriculation...
M. Clair: ...qui est de 40% inférieur à celui des
véhicules automobiles réguliers.
M. Rocheleau: Quand vous prenez l'ensemble des coûts: les
assurances se
chiffrent à peu près à 400 $ pour un
véhicule...
M. Clair: Non, c'est... M. Bissonnet: ...397 $ M.
Clair: La moyenne, cela?
M. Bissonnet: Non, pour un taxi, la plaque d'immatriculation
coûte 393 $.
M. Clair: Immatriculation et assurance.
M. Bissonnet: Alors, avec l'assurance, c'est deux fois plus
cher...
M. Clair: Immatriculation et assurance.
M. Bissonnet: ...que pour une automobile privée.
M. Rocheleau: En tout cas, de toute façon... Tenant compte
du fait que le gouvernement n'a pas nécessairement la
responsabilité de l'assurance sur le véhicule pour lequel le
propriétaire doit s'assurer, je pense qu'on devrait tenter
d'étudier quand même certaines modalités dans le but
d'avoir des coûts préférentiels pour ces
propriétaires qui possèdent une flotte de taxis quand même
drôlement importante au Québec, je pense, pour l'ensemble du
Québec.
M. Clair: M. le Président, je suis content que le
député revienne sur la question des assurances parce que cela me
permettra, d'abord, de préciser que l'étude des formulaires qui
avaient été remplis par les propriétaires de taxi,
concernant le taux de leur prime d'assurance automobile dans le domaine du
dommage matériel, a été faite. Ce qu'on m'indique au
bureau du Surintendant des assurances, je l'ai communiqué. Comme on n'a
rien à cacher, j'ai fait tirer des photocopies; je voulais les donner
hier et je l'ai oublié. L'étude qui a été faite par
le directeur de l'actuariat à la Direction générale des
assurances, aux institutions financières et coopératives, en
vient à certaines conclusions. Le député pourra en prendre
connaissance, mais je pense que c'est important, ce que le député
soulève, même si on retarde peut-être un peu l'audition des
mémoires.
Prenons l'exemption de la taxe sur les carburants. Celle-ci a
été octroyée, aux alentours des années cinquante,
à un groupe qui s'appelait les producteurs agricoles. C'était
pour le carburant des tracteurs de ferme et de la machinerie de ferme. Cela a
été considéré à l'époque comme allant
effectivement améliorer. Ce fut électoralement très
populaire, mais quelle a été l'efficacité réelle de
cela en agriculture au Québec? Cela a été zéro.
Qu'est-ce qui a amélioré le sort des producteurs agricoles au
Québec? C'est quand ils sont parvenus, par des plans conjoints, à
ajuster l'offre à la demande, à cesser de surproduire et
d'être dans une situation où, effectivement, un peu comme dans le
taxi, l'offre dépasse la demande dans le cadre des services
traditionnels actuellement offerts par le taxi.
Même si on donnait une ristourne sur le carburant: En moyenne les
chiffres que j'avais, c'est que la taxe sur le carburant par
véhicule-taxi, représente à peu près 1200 $ par
année. Je regrette, mais je ne pense pas qu'on réglerait le
problème avec 1200 $ de remboursement de la taxe sur le carburant par
année. C'est sûr que la première année,
l'année où on poserait le geste, ce serait populaire. Mais on
n'aurait pas réglé le problème fondamental de la
rentabilité du taxi. C'est probablement la raison pour laquelle les
gouvernements qui se sont succédé après cette exemption de
la taxe sur le carburant pour les producteurs agricoles dans les tracteurs et
autres équipements de ferme n'ont pas retenu ce genre de solution; cela
s'appelle des expédients, cela s'appelle ne pas s'attaquer à la
racine du mal et c'est ce qu'on essaie de faire, avec la proposition de
programme d'action qu'on a, de s'attaquer à la racine du mal qu'est la
rentabilité du taxi. Quelqu'un qui exploite un service rentable, comme
le disaient justement les gens de la ville de Montréal, c'est
évident que cela aurait un effet très positif sur la
qualité du service.
Quand on voit un nombre important de plaintes sur des véhicules
en mauvais état, ce n'est pas parce qu'il y a une taxe de 40% sur le
carburant. C'est parce que le véhicule-taxi ne parvient pas à
être suffisamment rentable pour permettre le renouvellement de la flotte
et pouvoir offrir une bonne qualité de service.
La question des assurances, cela a été
étudié; aucune objection, d'ailleurs le ministère des
Institutions financières, cette année, fait encore une analyse de
la situation des assurances afin de s'assurer qu'il n'y a pas d'injustice,
c'est une chose. S'il y a des problèmes, le ministre l'a dit, on agira.
Mais les études qui ont été faites n'amènent pas
à la conclusion qu'il y a abus. Que les primes soient très
élevées, ce n'est pas dur à constater, tout le monde est
d'accord là-dessus. Qu'il y ait abus par rapport aux règles
normales de fonctionnement des assurances dans ce domaine, la conclusion avait
été négative, il n'y avait pas d'abus en vertu des
règles normales.
La surtaxe sur le carburant, on peut bien en parler toute la
journée mais cela ne réglera pas le problème. Il faut des
règles du genre un homme, une voiture, une réduction du nombre
des permis ou, ce qui est l'option privilégiée dans le programme
d'action,
l'ouverture de nouveaux marchés et toute une série
d'autres mesures comme la conversion au GNC, comme l'ouverture vers le
transport des personnes handicapées, je parlais d'un lien
Mirabel-centre-ville. Il faut toute une série de mesures qui
permettraient d'améliorer la rentabilité. C'est ma philosophie et
c'est dans ce sens que je suis prêt à subir longtemps les
critiques de l'Opposition sur cela; se contenter de réduire la taxe sur
le carburant ou se contenter de jouer un peu avec les primes d'assurance
automobile dans le domaine qui relève de nous, dans le domaine public,
cela ne réglerait rien. Je pense que ce serait leurrer les
propriétaires de taxi que de leur laisser croire que cela
réglerait tout.
M. Rocheleau: Je pense quand même, M. le Président,
sans éterniser la discussion, qu'il faut examiner l'ensemble du
problème.
M. Clair: Je suis d'accord sur cela.
Le Président (Brouillet): II faudrait terminer
bientôt...
M. Bissonnet: Je tiens à avoir mon droit de parole.
Le Président (Brouillet): M. le député de
Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: Dans la ville de Montréal, il y a 53% des
taxis. Le mémoire que vous avez présenté reflète
inévitablement le problème no 1 de la ligue A-11 qui dessert
véritablement la ville de Montréal et, par le biais de la CUM,
les agglomérations A-5 et A-12. C'est bien évident que dans la
ligue
A-11 - M. le ministre, vous le savez très bien, la
députée de Dorion, qui s'implique dans le dossier du taxi, le
sait elle aussi très bien - c'est qu'il y a trop de permis de taxi
à Montréal. Il n'y a pas de doute. Il y a des avenues pour les
réduire; il y a eu une proposition qui a été faite par
l'assistant contrôleur général de la ville de
Montréal, il y a évidemment la ligue de
l'agglomération
A-11 qui a fait des suggestions, il y a également la ligue A-36
de Québec, qui est déjà intéressée à
racheter des permis, parce qu'il y en a trop à Québec. Elle veut
les racheter et probablement qu'elle a plus les moyens de les racheter que dans
la ligue A-11.
Lorsqu'on parle de permis, vous avez mentionné tantôt qu'en
1970, il y avait 4400 permis environ à Montréal, ce qui est
exact, parce qu'en 1954, il y en avait 4300. Il y a eu l'annexion de
Saint-Michel et de Rivière-des-Prairies et on arrive à 4400. Il
est arrivé un événement en 1967 et au moment où je
vous parle, le ministère ne semble pas trouver la réponse. C'est
qu'il y a eu 500 permis additionnels qui ont été accordés
pour l'Exposition universelle, à Terre des hommes. Actuellement, il y a
5218 dans la ligue A-11, cela inclut évidemment toutes les autres
municipalités qui ont été obligées de se joindre,
en vertu du règlement 36, à la ligue
A-11, soit la côte Saint-Luc, Montréal-Ouest, LaSalle,
Saint-Laurent, Saint-Pierre, Verdun et Westmount. On totalise actuellement 5218
permis. Pour la ligue de taxis A-11 à Montréal, pour la
Fédération des ligues, et probablement pour le ministère,
on pense que ces 500 permis, qui ont été émis
temporairement, sont devenus permanents. Évidemment, votre section des
taxis était bien efficace avant 1973. Je sais que c'était M.
Saulnier qui avait fait la demande au gouvernement à l'époque.
Êtes-vous au courant ou pourriez-vous nous donner des informations
additionnelles si ces 500 permis sont devenus des permis permanents?
Première question.
M. Allard: J'ai eu une consultation avec un membre du service de
police, qui travaillait à l'époque dans la section des permis de
taxi, et il conteste cette affirmation qu'il y aurait eu 500 permis de taxi
accordés en 1967. Je ne suis pas en mesure d'infirmer ni de confirmer
cette affirmation. Il faudrait peut-être qu'elle soit
vérifiée. Je ne sais pas s'il existe de la documentation quelque
part, mais il semble qu'il y ait eu, en 1967, une entente entre les trois
gouvernements: fédéral, provincial et la ville de Montréal
pour établir un système de transport pour les dignitaires qui
prévoyait effectivement une flotte d'environ 500 véhicules.
Est-ce que c'est devenu des permis de taxi? Personnellement, je n'en ai aucune
indication et pour nous ce n'est pas encore prouvé.
M. Bissonnet: Merci. Lorsque vous dites qu'avant 1973, il y avait
le service des taxis à la police, qu'il y avait, comme vous l'avez
mentionné, à peu près une vingtaine de policiers, des
équipes et il y avait également à l'intérieur de la
division des permis de taxi un personnel de fonctionnaires municipaux qui
était à peu près composé de douze à treize
personnes en plus de deux employés qui étaient à l'office
municipal du tourisme, qui étaient préparés aux examens
pour les nouveaux candidats pour obtenir un permis dit "pocket number". Lorsque
vous mentionnez également le contrôle avant 1973, je pense que
c'est une question très prioritaire, M. le ministre, concernant le
contrôle des voitures et le contrôle des chauffeurs. On a, à
titre d'exemple, les gens qui arrivent à Montréal par autobus,
qui veulent prendre un taxi au coin des rues Berry et de Maisonneuve, c'est
quasiment une guérilla pour entrer sur les "stands". Il y a
peut-être 20 autos qui veulent entrer pour un emplacement de cinq
à huit voitures. Il
est évident qu'on ne voit actuellement aucun contrôle sur
la compétence. Selon les informations que j'ai, beaucoup de personnes
conduisent un taxi sans "pocket number". Le "pocket number" que le
ministère a émis, l'occupant de la voiture ne peut même pas
regarder la photo parce que c'est une petite photo de un pouce sur deux, alors
qu'autrefois, c'était un "pocket number" que tout le monde pouvait voir.
Quand quelqu'un avait une plainte à formuler, il avait le nom et le
numéro. C'était très bien identifié. (12 h 45)
Une des sources très actuelles - vous allez probablement me le
confirmer - est qu'il y a un manque, actuellement, selon ce qu'il y avait avant
1973 et aujourd'hui, au point de vue de la vérification du service qui
est donné par auto-taxi dans la ville de Montréal. Est-ce que
vous pourriez établir une différence entre les deux
systèmes et nous indiquer votre constatation par rapport au
système auquel nous faisons face aujourd'hui?
M. Allard: Oui, je pense que la différence principale est
que, avant 1973, il y avait un contrôle avant que le permis de travail
soit donné, avant que le permis de taxi soit donné, alors
qu'aujourd'hui le contrôle n'est qu'après que tous ces permis
soient donnés. C'est beaucoup plus facile d'assurer une qualité
quand on contrôle dès la demande de permis que lorsqu'on se
contente d'arriver après pour appliquer un règlement et qu'on
traite avec des gens qu'on n'a pas eu l'occasion de connaître, d'examiner
et sur lesquels on n'a pas enquêté.
De plus, à l'époque, il existait des communications
constantes entre le monde du taxi et la police. Il y avait même beaucoup
de coopération, parce qu'il y avait une unité de travail, une
unité de fonctionnaires qui avait ce type de relation très
dynamique avec l'industrie du taxi. Aujourd'hui, ce sont des policiers qui sont
pris pour se faire détester, si vous voulez, en allant régler des
problèmes ou des chicanes sur les postes d'attente. Justement, au poste
d'attente que vous mentionniez, M. Bissonnet, il y a environ un mois, un peu
plus d'un mois, j'ai été témoin d'une bagarre à
coups de bâtons entre chauffeurs de taxi. Ce n'est pas pour encourager
l'industrie du taxi à Montréal, pour inciter les visiteurs
à prendre ce moyen de transport, quand cela se produit.
M. Clair: ...chauffeur de taxi, oui.
M. Allard: J'ai pris un taxi hier pour me rendre à la gare
Bonaventure, j'ai été très bien servi, d'ailleurs, dois-je
dire.
M. Bissonnet: Une autre question. À la ville de
Montréal, dans les années cinquante, on avait un système
de postes d'attente privilégiés à des associations de
services. Au cours de l'année 1953, si ma mémoire est
fidèle, on a mis tous ces postes d'attente sur rue en commun. Dans votre
mémoire, je ne trouve rien en ce qui a trait aux concessions. Je ne sais
pas si c'est à l'intérieur de votre comité. Vous avez
étudié les concessions qui se donnent à des associations
de services à l'intérieur de la ville. À titre d'exemple,
on va considérer les établissements qui sont des
propriétés gouvernementales: l'hôpital Notre-Dame,
l'hôpital Maisonneuve. Est-ce que vous avez analysé, dans la
facette de la rentabilisation et de l'égalité de tous les
propriétaires d'auto-taxi, s'ils sont traités sur le même
pied, d'égal à égal avec tous leurs confrères?
Est-ce que vous avez traité de ce sujet?
M. Allard: Malheureusement, nous n'avons pas, dans notre
comité, de fonctionnaires qui ont votre ancienneté comme
fonctionnaire à la ville de Montréal.
M. Bissonnet: Vous me faites rougir. On a parlé
tantôt de décentralisation. Il est bien évident, quand vous
demandez une décentralisation qui est assez complète, que vous ne
demandez pas que la plaque d'immatriculation soit émise par la ville de
Montréal, ce qui serait impossible. Mais dans toute cette
décentralisation - je vous ai parlé tantôt d'un chiffre qui
peut être conservateur - si, évidemment, on met le service de la
police de la CUM vraiment à un contrôle efficace de cette
industrie, on parlait de 2 000 000 $ - je considère que cela prend
à peu près 60 personnes.
M. Allard: II faudrait vraiment, véritablement s'asseoir
et examiner exactement quels seront les pouvoirs décentralisés,
si vous me permettez l'expression. La difficulté était de bien
déterminer exactement quelle allait être la responsabilité
qui allait être dévolue au niveau local. On voit que, en
matière de tarification, il semble exister un chevauchement, en
matière d'émission de permis de propriétaire. Je
réitère que nous le faisions auparavant et je ne vois pas
pourquoi on ne serait pas capable de le faire de nouveau, dans la mesure
où on aurait les pouvoirs nécessaires pour parler de
révocation, de suspension et de toutes ces choses-là.
M. Clair: Mais vous admettrez, Me Allard, que dans le cadre
actuel ce serait plutôt un pouvoir de retrait de permis qu'un pouvoir de
délivrance de permis, parce que si on suit votre logique, celle de la
ville de Montréal, il y a trop de permis actuellement.
M. Allard: Pendant un bon bout de
temps, ce serait cela, M. le ministre.
M. Clair: Cela m'inquiète un peu si vous me parlez d'un
pouvoir de délivrance.
M. Bissonnet: M. le ministre, ils n'ont jamais eu de pouvoir de
retrait de permis, cela a toujours été la Commission des
transports.
M. Clair: La commission, absolument.
M. Bissonnet: Le rôle que la ville de Montréal avait
surtout à jouer lorsqu'elle était responsable de
l'émission des permis de chauffeurs de taxi...
M. Clair: ...de chauffeurs.
M. Bissonnet: ...de chauffeurs, c'était toujours elle qui
les émettait... Les examens étaient tenus par elle avec l'Office
municipal du tourisme...
M. Clair: Mais M. le Président, on s'entend, on propose de
leur donner...
M. Bissonnet: ...et à cette époque-là, M. le
ministre, je peux vous dire qu'on ne parlait pas de la non-compétence
des chauffeurs de taxi à Montréal, c'était acquis.
M. Clair: C'est exactement ce qu'on dit.
M. Bissonnet: Comme le disait mon collègue, le
député de Hull, on a une commission parlementaire, on
écoute des mémoires, mais nous autres on veut que vous passiez
à l'action, puis vite, ça presse. Merci.
M. Clair: Alors, on comptera sur l'appui de l'Opposition, M. le
Président, au moment du dépôt du projet de loi.
M. Bissonnet: On va vous faire des propositions très
très constructives...
M. Rocheleau: ...et pertinentes plus tard cet
après-midi.
Le Président (M. Brouillet): Messieurs...
M. Clair: M. le Président, avant que les gens de la ville
de Montréal nous quittent, je voudrais simplement les remercier de
s'être déplacés ce matin, d'être venus nous
présenter leur point de vue, d'avoir répondu avec autant de
précision, d'ailleurs, aux questions pertinentes du côté
ministériel et du côté de l'Opposition. Je vous
remercie.
Le Président (M. Brouillet): Merci, messieurs. Alors, nous
allons suspendre nos travaux. Oui?
M. Bourbeau: M. le Président, je pensais qu'on avait
convenu d'entendre les gens de l'AQTR... Je ne sais pas s'ils sont ici. Est-ce
que les gens de l'AQTR sont ici?
M. Clair: Oui, ils sont là, mais...
M. Bourbeau: Étant donné qu'il n'est pas une heure
encore, est-ce qu'on ne pourrait pas commencer au moins à les entendre
un peu ou...
M. Clair: Je pense, M. le Président que...
Le Président (M. Brouillet): Savez-vous que commencer
à entendre un groupe puis l'arrêter au milieu de la
présentation de son mémoire, ce n'est pas très très
bien.
M. Bourbeau: C'est parce que j'aurais voulu poser quelques
questions à ces gens-là. Malheureusement...
Le Président (M. Brouillet): À compter de 15 heures
cet après-midi, vous aurez le loisir de poser vos questions, M. le
député de Laporte.
M. Bourbeau: Malheureusement, M. le Président, ce qui
arrive, c'est que le ministre dit qu'il a une réunion et qu'il doit
s'absenter. Et le député de Laporte a une réunion à
15 heures cet après-midi, de sorte que je ne pourrai pas du tout
assister à cette présentation-là. C'est malheureux.
Le Président (M. Brouillet): Alors, je pourrais vous
suggérer de passer votre question à l'un de vos collègues
qui sont ici, je suis certain qu'ils sauront la poser.
M. Clair: Votre message est passé.
M. Polak: M. le Président.
Le Président (M. Brouillet): Oui.
M. Polak: On a encore dix minutes avant une heure. Est-ce qu'on
ne peut pas parler, pendant ces dix minutes, du problème de celui qui ne
peut ni lire ni écrire et de son permis, son "pocket number"? C'est un
problème très très important. On n'a pas besoin que les
gens restent ici, mais j'aimerais bien qu'on prenne dix minutes parce que, dans
tous nos comtés, il y a des cas comme ça, et je pense qu'il faut
y trouver une solution.
M. Clair: M. le Président, les gens de la Régie de
l'assurance automobile du Québec seront présents cet
après-midi à 15 heures; ils ne sont pas ici dans le moment.
M. Polak: D'accord.
M. Bissonnet: M. le Président, je propose qu'on suspende
nos travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi.
Le Président (M. Brouillet): Nous suspendons nos travaux
jusqu'à 15 heures cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 54)
(Reprise de la séance à 15 h 10)
Le Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission permanente des transports reprend ses travaux. Nous
allons entendre les représentants de la Conférence des maires de
la banlieue de Montréal. Si vous voulez vous avancer, s'il vous
plaît. Je demanderais au porte-parole de bien vouloir s'identifier, s'il
vous plaît.
Conférence des maires de la banlieue de
Montréal
M. Lang (Bernard): Bonjour, M. le Président, M. le
ministre, madame et messieurs les députés. Mon nom est Bernard
Lang. En ma qualité de membre du conseil d'administration de la
Conférence des maires de la banlieue de Montréal, j'ai l'honneur
de soumettre ce mémoire à votre compétence, au nom de mes
collègues.
Le gouvernement du Québec, par son projet de réforme,
indique clairement sa conscience et sa préoccupation des
problèmes auxquels est confrontée l'industrie du taxi, composante
importante du transport urbain. Il témoigne aussi de sa volonté
de collaborer intensément avec tous les intéressés dans la
recherche des meilleures solutions possible. C'est dans ce même esprit de
collaboration que nous vous prions de recevoir ce document.
La réforme proposée. Bien que nous ne nous attarderons pas
sur chaque thème proposé dans le livre blanc, il importe que nous
fassions connaître nos vues sur le projet de réforme de
l'industrie du taxi en général.
Une réforme de l'industrie du taxi doit se faire dans le contexte
de la problématique du transport urbain. Une décentralisation
véritable doit se réaliser à partir d'un partage de
pouvoirs réels et non d'un transfert de contrôles seulement. Une
décentralisation des contrôles doit être accompagnée
d'un transfert de tous les pouvoirs impliquant l'entière autonomie
décisionnelle en matière de gestion. Une décentralisation
réelle doit inclure des compensations financières. Le taxi, comme
moyen de transport paracollectif, est une option qui peut être
considérée dans la recherche d'alternatives.
Ce projet de réforme de l'industrie du taxi s'inscrit dans un
objectif de décentralisation. Cet objectif tient sa réalisation
du nouveau partage des responsabilités entre les paliers de gouvernement
provincial et municipal. Mais le livre blanc ne développe pas l'aspect
financier comme, par exemple, les coûts générés par
l'augmentation des effectifs policiers, nécessaires à
l'application du programme d'action proposé. D'un examen de la situation
du taxi, sur le territoire de la Communauté urbaine de Montréal,
se dégagent des éléments majeurs dont nous retenons
l'écart entre l'offre et la demande, moins conséquents dans les
municipalités de banlieue que dans la métropole.
Le taxi, comme moyen de transport paracollectif. Partage des pouvoirs et
aspect financier. Une nuance existe entre partage des pouvoirs, partage des
compétences et partage des responsabilités, dont le projet de
réforme ne semble pas tenir compte. Ce que propose le livre blanc est
surtout un partage des compétences et des responsabilités, mais
très peu un partage des pouvoirs. Le transfert proposé s'effectue
surtout au niveau des contrôles, plutôt qu'au niveau des normes, ce
qui a pour effet de libérer le gouvernement de ses fonctions.
Les autorités locales n'ont actuellement aucun pouvoir
véritable sur le transport par taxi, bien qu'il soit
généralement admis qu'il devrait relever de la compétence
municipale. Une décentralisation réelle devrait être
accompagnée d'un transfert de tous les pouvoirs impliquant
l'entière autonomie décisionnelle en matière de gestion
dans ce domaine. Une décentralisation réelle devrait inclure des
compensations financières pour permettre aux municipalités de
faire face aux coûts engendrés par les responsabilités
nouvelles qu'elles devraient assumer directement ou par l'entremise de la
Communauté urbaine de Montréal.
Parmi ces responsabilités, nous retrouvons les permis de taxi,
les permis de travail, la tarification, les services de sécurité,
les avis de stationnement, l'inspection des véhicules.
Le taxi sur le territoire de la communauté. Un examen de la
situation du taxi sur le territoire de la CUM ne saurait se faire sans tenir
compte de l'écart entre l'offre et la demande. Il y a actuellement 5818
taxis sur l'île de Montréal. Ce nombre est jugé
excédentaire par rapport à la demande. Il en découle donc
des effets négatifs: revenus insuffisants, insatisfaction des
détenteurs de permis, services diminués au niveau de
l'éthique du chauffeur et de la sécurité de la
clientèle.
Le problème de rentabilité du taxi en banlieue, comme dans
d'autres agglomérations, peut être associé au trop grand
nombre de permis émis. Néanmoins celui-là n'est pas aussi
aigu que dans la
métropole où le ratio entre le nombre de permis et le
niveau de population est largement supérieur à celui que l'on
retrouve ailleurs sur le territoire: À Montréal, un taxi pour 248
personnes; dans l'ouest de l'île, un taxi pour 790 personnes; dans l'est
de l'île, un taxi pour 825 personnes.
Toutefois, le ratio de l'agglomération A-11 de Montréal ne
peut être évalué de la même façon qu'ailleurs,
la grande majorité des voyages se faisant répétitivement
et sur une courte distance, régulièrement pour un grand nombre
d'usagers. Dans les municipalités de banlieue par contre, les voyages
d'un point à un autre ou d'une ville de banlieue à une autre
représentent une distance beaucoup plus longue, effectuée
généralement sur une base occasionnelle. Une étude
comparative de rentabilité sur le territoire devra tenir compte de ce
facteur, bien que la rentabilité de l'industrie ne soit pas, pour les
municipalités, le but envisagé.
Le taxi comme moyen de transport paracollectif. Conçu comme moyen
de transport individuel, le transport par taxi n'est pas facilement conciliable
avec la notion d'un mode de transport paracollectif. Aussi,
l'élargissement du marché à des groupes comme les
écoliers et les personnes handicapées doit être
étudié en profondeur en matière de sécurité
et de coûts avant d'être encouragé.
Dans la recherche d'alternatives au mode de transport de masse dans des
secteurs où des problèmes de transport sont observés, le
véhicule-taxi pourrait être considéré.
Les municipalités doivent pouvoir avoir l'option de
déterminer dans tous les cas si ce service leur convient localement ou
non.
Conclusion. En conclusion, les municipalités sont conscientes
qu'une réforme doit être réalisée dans l'industrie
du taxi. Elles ne sont pas prêtes toutefois à accepter qu'un
nouveau partage des responsabilités ne soit accompagné, en
même temps, d'un partage de pouvoirs réels. Quant à
l'aspect financier, toute responsabilité nouvelle qui serait
dévolue aux municipalités doivent essentiellement comporter des
compensations financières. Merci.
Le Président (M. Brouillet): Merci. M. le ministre.
M. Clair: M. le Président, je voudrais remercier M. Lang
de venir représenter la Conférence des maires de la banlieue de
Montréal par un court mémoire sur la question de nouvelles
avenues pour le taxi.
Mes commentaires seront brefs. D'abord, en ce qui concerne
l'élargissement à d'autres marchés comme les personnes
handicapées, les écoliers, il me semble que l'expérience
acquise dans la région de Québec à ce titre, notamment
dans le transport adapté pour les personnes handicapées,
démontre clairement que, tant en termes de sécurité qu'en
termes de coût, c'est avantageux pour la collectivité. Je pense
que l'expérience de la Commission de transport de la Communauté
urbaine de Québec est très éloquente à ce point de
vue-là.
En ce qui concerne par ailleurs les autres points, plusieurs ont
été soulevés déjà par la Communauté
urbaine de Montréal ou d'autres. La question, par exemple, de la
garantie de compensation financière. Ma réponse à cela est
qu'effectivement il faudrait qu'il y ait des compensations financières
qui soient équivalentes au transfert de responsabilité, de
compétence ou de juridiction, dans la mesure, cependant, du coût
additionnel qui est ainsi produit, puisqu'on sait, par exemple, que sur le
territoire de la Communauté urbaine de Montréal,
déjà le service de police de la communauté est responsable
de l'application du règlement no 6. Et, je ne pense pas que la
compensation financière en cause soit un problème important,
puisqu'il ne s'agit pas là de sommes très importantes. On sait
que 60% des permis de taxi au Québec se concentrent sur l'île de
Montréal et les chiffres qui nous étaient donnés ce matin
par des gens de la ville de Montréal, sur la base de l'expérience
qu'ils avaient eue antérieurement, pourraient être - le
député de l'Opposition le disait lui-même - de 2 000 000 $.
2 000 000 $ pour une lacune. cela semble un gros chiffre. Si cela couvre 60%
des coûts reliés à la réforme, on se rend compte
qu'on ne parle pas de sommes de dizaines de millions de dollars, mais c'est
quand même important quoique limité.
La position de la Conférence des maires de la banlieue de
Montréal est de dire: S'il y a une décentralisation, on veut une
décentralisation véritable. On fait une distinction entre des
compétences, des responsabilités et des pouvoirs. On nous dit:
Vous voulez nous décentraliser les responsabilités et les
compétences, mais non pas les pouvoirs réels. Je pose la question
très directement: Si on donne aux autorités locales, comme on le
propose, le pouvoir de contrôler complètement la question des
chauffeurs, la tarification, les services qui pourraient être
instaurés, c'est-à-dire que les autorités locales
pourraient décider elles-mêmes si elles appuient le taxi
collectif, paracollectif, de quelle façon, à quel rythme, sur
quelles lignes sans aucune obligation, il reste quoi au niveau du gouvernement
du Québec? Le gel des permis.
Vous demandez que - vous soulignez dans votre mémoire qu'il y a
trop de permis - le pouvoir de délivrer des permis reste
centralisé à Québec. Dans le moment, si ce pouvoir
était décentralisé - c'est plus le pouvoir de retirer des
permis que d'en
délivrer - on garderait l'immatriculation, la définition
de certaines normes de sécurité minimales applicables à
tous les véhicules au Québec, le permis de propriétaire
rattaché à la Commission des transports du Québec, les
normes de sécurité routière qui s'appliquent à
l'ensemble de la population auprès de la Régie de l'assurance
automobile. Quels sont les pouvoirs additionnels que vous voudriez avoir pour
que vous considériez qu'il y a une décentralisation réelle
des pouvoirs?
M. Bissonnet: Avant que M. le maire Lang réponde à
cette question, j'aimerais clarifier ceci. Dans votre question, lorsque vous
parlez des autorités locales et que vous faites référence
au transport collectif, les autorités locales...
M. Clair: Dans le cas de Montréal.
M. Bissonnet: ...à l'intérieur de la
communauté urbaine, la Conférence des maires de banlieue, ne
peuvent rien décider en ce qui a trait au transport collectif parce que
cela relève de la CTCUM et, malheureusement, la CTCUM, comme à de
nombreuses reprises, n'est pas présente ici. Je m'implique en disant
cela, en ce sens que les autorités locales de la CUM ne peuvent rien
décider quant au transport collectif.
M. Clair: Je pense que la question mérite d'être
posée puisque, par exemple, l'autorité que la CUM a actuellement
sur le taxi, c'est surtout par l'entremise de son service de police et le
règlement d'application. La notion d'autorité locale dans le cas
du taxi à Montréal, je pense que tout le monde l'a comprise; la
proposition, dans ce sens-là, est claire: c'est de remettre
l'autorité à la Communauté urbaine de Montréal en
respectant la structure qui est déjà en place et non pas en
renvoyant la responsabilité à un exploitant, la CTCUM.
Je repose ma question. Vous semblez favoriser une
décentralisation - vous dites véritable - des pouvoirs
réels. Après avoir pris connaissance de la proposition du
gouvernement, quels sont ces pouvoirs réels dont vous souhaitez voir la
décentralisation en admettant, encore une fois, que la question de la
compensation financière soit réglée?
M. Lang: J'admets qu'il faut étudier ces solutions en
profondeur afin de répondre à votre question. C'est seulement un
principe que je déclare aujourd'hui.
M. Clair: C'est donc une position de principe. Pour nous, cela
est important. Vous dites que vous voulez avoir des pouvoirs réels et je
vous dis: Voici les pouvoirs que je vous donne. Je les écris noir sur
blanc dans un programme d'action. J'imagine que lorsqu'on me dit, dans un
document, qu'on ne veut pas simplement des compétences, des
responsabilités ou des fonctions, mais des pouvoirs réels, on
doit avoir une idée assez précise de ces pouvoirs réels
qu'on voudrait. Sans quoi, c'est une position de principe qui, vous en
conviendrez, est difficile à recevoir de mon point de vue.
M. Lang: Peut-être que nous pouvons envoyer une lettre
supplémentaire pour déclarer tous les sujets qui nous
inquiètent.
M. Clair: D'accord, parce que ce que j'ai vu dans votre
mémoire, après avoir pris connaissance du mémoire de
l'Union des municipalités du Québec et de l'Union des
municipalités régionales de comté, c'est qu'il s'inspirait
largement du leur. Je l'ai dit devant ces gens-là, il m'apparaissait que
ce que l'Union des municipalités du Québec réclamait
surtout, c'était justement ce qu'on proposait et qu'il y avait
peut-être un écart d'entendement, si on veut, quant à la
signification des pouvoirs qu'on souhaite transférer aux
municipalités. Finalement, on était substantiellement sur la
même longueur d'onde. Alors, c'était ma question, M. le
Président.
Le Président (M. Brouillet): Merci. M. le
député de Sainte-Anne.
M. Polak: M. le Président, très brièvement,
je pense que c'est le premier mémoire présenté par
quelqu'un que je connais personnellement, le maire Lang, dont la langue
première est l'anglais. So I will just put a few questions to you, Mr
Mayor, in English. First of all, I want to thank you for appearing here before
us. After all, the Conference of Mayors represents 42% of the population of the
Urban Community of Montréal and the voice of the mayors is very
important to us.
Do I understand correctly? Really what you are saying in your brief is:
We do not mind taking on some of this work that may be given to us by the
Government but you have to pay us for the work that we will do. That is what it
means. It may be my own personal pretension, but my experience with you
in the Government is so that you like to give jobs but you do not pay for them
and so we are a little bit worried. Is that so in a nutshell?
M. Clair: M. le Président... M. Polak:
Excusez-moi.
M. Clair: Question de règlement, M. le Président.
Ce que le député vient d'affirmer...
M. Polak: Voulez-vous que je traduise
là?
M. Clair: Non, je vous ai suivi. Je ne parle pas aussi bien
anglais que vous, je le reconnais bien humblement. Quand le
député fait cette affirmation, c'est parce qu'il n'a pas
regardé les chiffres de la réforme de la fiscalité
municipale de 1980. Il n'affirmerait pas cela parce qu'on a envoyé
beaucoup d'argent. C'est 400 000 000 $, si ma mémoire est
fidèle?
M. Polak: Tout ce que j'ai dit, M. le Président... En
réponse à la question de règlement.
Une voix: 300 000 000 $.
M. Clair: Je vais me contenter de dire que je m'inscris en faux
contre les propos du député de Sainte-Anne, complètement,
M. le Président.
M. Polak: M. le Président, je réponds toujours,
quand on m'accuse de faire une déclaration fausse, en disant que pas
seulement ceux qui sont devant nous, mais la population en
général commence à perdre un peu confiance dans vos
paroles et vos promesses. Donc, on dit: Payez-nous et on va s'assurer de faire
le job que vous payez. C'est tout ce qu'ils disent, pas plus que cela.
M. Clair: Si vous êtes certain que la confiance augmente
envers vous, bienheureux!
M. Polak: Vous allez le voir, c'est garanti là!
M. Rocheleau: De jour en jour.
M. Polak: Mr. Mayor, one additional question. Yesterday you were
not here but there was some extensive discussion concerning the transport of
handicapped people, physically as well as mentally handicapped, and of course
in connection with the industry of the taxi. They say that - and the figures
were produced before us -in Montréal, the system as it is now, it will
be probably much more expensive than if we sort of farm this out through
cooperatives like they do in Québec City, a whole new point of view
which seems to be very interesting. Do you have any comments on this? I know
that in you brief you stated that this should be discussed "en profondeur" but
I always feel there comes a time where we should stop discussing and studying
in "profondeur" and maybe take a position. If it could be proven that this
would be less costly to the community, I assume the mayors would be in favour
of such a change?
M. Lang: Provided that we consider it to be a safe means of
transport of handicapped people, yes definitely.
M. Polak: Is the Conference of suburban mayors involved in the
study of this or I misread them when I mentioned that the "communauté
urbaine" had a committee looking into it? Are you participating in that?
M. Lang: We will be participating in the very near future.
Le Président (M. Brouillet): M. le député de
Sainte-Anne, est-ce que vous avez terminé?
M. Polak: Oui, je pense que vraiment c'est tout. That is all,
thank you.
M. Clair: M. le Président, si les membres de la commission
parlementaire ont finalement fait le tour assez rapidement du mémoire de
la Conférence des maires de la banlieue de Montréal, cela
s'explique non pas par un manque d'intérêt, je pense, pour le
mémoire qui a été présenté mais surtout par
le fait que les prises de position de la Conférence des maires de la
banlieue se retrouvent également dans d'autres mémoires sur
plusieurs des points. Cela explique, je pense, qu'il serait inutile que les
parlementaires reposent les mêmes questions; on connaît un peu les
réponses et l'esprit de votre mémoire ressemble à celui
d'autres mémoires. Je remercie M. le maire de Saint-Luc de sa
présence parmi nous.
Le Président (M. Brouillet): Merci. M. le
député de Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: Je proposerais qu'on étudie maintenant le
mémoire no 6, la Communauté régionale de l'Outaouais,
considérant que les porte-parole doivent prendre l'avion dans peu de
temps. Il n'y a qu'un seul avion ce soir, à 17 heures, pour Hull.
M. Clair: D'accord, M. le Président.
Le Président (M. Brouillet): Y a-t-il consentement?
M. Clair: Consentement.
Le Président (M. Brouillet): Les parties sont d'accord.
Nous allons entendre la Communauté régionale de l'Outaouais et,
après, nous reprendrons l'ordre du jour de ce matin.
Je demanderais au porte-parole de s'identifier et de nous
présenter les personnes qui l'accompagnent.
Communauté régionale de
l'Outaouais
M. Ménard (Pierre): Je suis Pierre Ménard,
président de la Communauté régionale de l'Outaouais. Je
suis accompagné de Mme Claudine Brunet, qui est chargée de la
planification et qui est urbaniste de profession, et de M. Antoine
Grégoire qui est président-directeur général de la
Commission de transport de la Communauté régionale de
l'Outaouais.
J'aimerais vous mentionner tout de suite, au début de notre
exposé, que même si la Commission de transport de la
Communauté régionale de l'Outaouais ne présente pas de
mémoire distinct, les dirigeants de la commission ont participé
à nos discussions, ont participé aux rencontres d'information qui
ont eu lieu avec les fonctionnaires du ministère et ceux-ci souscrivent
aux propos qui sont dans notre mémoire quant à la question de
l'élargissement des marchés et quant aux différentes
questions du document qui traite des commissions de transport.
Il y aurait lieu de commencer par un exposé de la situation dans
l'Outaouais, particulièrement, au départ, par rapport au
territoire et à sa desserte. La communauté régionale
couvre un vaste territoire de quelque 2400 kilomètres carrés.
Elle comprend onze municipalités, dont six affichent un caractère
franchement rural. À l'extrémité est du territoire, se
trouvent les deux petites villes de Masson et de Buckingham dont la population
combinée se chiffre à environ 12 300 habitants. Cette population
est desservie de manière adéquate par cinq taxis dotés de
permis de catégorie région. Le principal centre urbain de la
communauté est constitué par la conurbation de Gatineau, Hull et
Aylmer où se concentrent 85% de la population globale, soit environ 158
000 habitants. Il y a deux agglomérations de taxi dans cette zone
urbaine: l'agglomération de Hull A-34 et celle de Gatineau, A-55.
L'agglomération de Hull a une population totale de 59 800
habitants et elle est dotée de 84 permis de taxi. Cela représente
un ratio de un permis par 710 habitants, presque le double de celui qui est
fixé dans le règlement 6. Pourtant, l'industrie du taxi à
Hull se porte assez bien. Cela est dû à la demande importante
générée par les édifices administratifs du
centre-ville le jour, et par la clientèle ontarienne des clubs, bars et
restaurants le soir.
L'agglomération de Gatineau a une population de près de 75
000 habitants et 61 permis de taxi y sont en vigueur, soit un permis pour 1230
habitants. Ce ratio est très proche des limites fixées par le
règlement. Cependant, les centres d'emploi de Gatineau sont de type
industriel plutôt qu'administratif, tandis que les établissements
nocturnes recrutent la plupart de leur clientèle localement. En
conséquence, la demande pour les services de taxi est très
modérée et un certain nombre d'exploitants ont du mal à
s'assurer un revenu satisfaisant.
La ville d'Aylmer compte à l'heure actuelle près de 27 000
habitants. Son territoire n'a jamais été désigné
comme agglomération, de sorte que les 22 taxis qui y circulent sont
dotés de permis de catégorie région. Cette situation
devrait être corrigée par la création d'une nouvelle
agglomération couvrant le territoire de la ville ainsi que la partie de
la banlieue qui s'étend dans le canton de Eardley, sur le territoire de
la municipalité de Pontiac. Le rapport permis/population pour Aylmer
s'établit à un pour 1225 et il est conforme à la norme
réglementaire. La demande est cependant trop faible pour assurer une
pleine utilisation du potentiel de l'industrie dans cette ville.
Ces quelques constatations soulèvent une interrogation concernant
le bien-fondé des normes relatives au nombre de permis,
édictées à l'article 69 du règlement 6. Ces normes,
basées uniquement sur des données démographiques, nous
semblent peu aptes à assurer une adéquation, même
approximative, de l'offre à la demande. Il nous apparaît
évident que les facteurs sociaux et économiques ont sur la
demande une influence beaucoup plus déterminante que la simple taille de
la population. Les normes actuelles n'ont donc, à notre avis, aucune
utilité réelle et elles devraient être
retranchées.
Ceci dit, le fait demeure que le nombre de véhicules
présentement autorisés à effectuer le service de taxi dans
l'ensemble de la zone métropolitaine de Gatineau-Hull-Aylmer est
amplement satisfaisant pour répondre à la demande. La
communauté est donc favorable, pour l'instant, au maintien du gel des
permis. Advenant une augmentation sensible de la demande dans l'une ou l'autre
des parties de la zone, il siérait de profiter de l'occasion pour
pallier les légers surplus que nous avons relevés. Nous
souscrivons donc à l'idée de favoriser dans un premier temps le
transport de permis d'un territoire à un autre. La politique en ce sens
devrait cependant être formulée de manière à
accorder expressément la priorité à la
récupération des permis excédentaires dans les
agglomérations d'une même région géographique.
Dans le but de nous familiariser avec la problématique du taxi
dans notre région, nous avons invité les dirigeants des ligues de
propriétaires de nos deux agglomérations à venir nous
rencontrer. Ces personnes nous ont confirmé les affirmations que nous
avions obtenues d'autres sources concernant le niveau de la demande pour les
services de
taxi dans les différentes parties de notre territoire. Elles nous
ont également exprimé leur satisfaction à l'égard
des procédures de révision tarifaire établies par la
Commission des transports, avec la seule réserve que des hausses de
tarif plus fréquentes, mais moins importantes, seraient plus
bénéfiques.
Autant que nous puissions en juger, les deux ligues fonctionnent bien.
Dans le cadre du mandat que leur attribue la réglementation actuelle,
des accords ont été conclus entre les membres relativement au
partage des territoires qui leur sont alloués. Elles procèdent
aussi à des échanges d'information concernant les chauffeurs
disponibles. Sur ce dernier point, d'ailleurs, il semble s'être
établi une coopération étroite entre les deux ligues.
D'après nos interlocuteurs, le problème majeur des
propriétaires de taxis serait le manque de chauffeurs. La Régie
de l'assurance automobile dénombre 612 permis de chauffeur dans la zone
métropolitaine de Gatineau-Hull-Aylmer. Ce chiffre représente 3,6
chauffeurs par taxi, soit sensiblement la même proportion que celle
mentionnée dans le livre blanc pour l'ensemble du Québec. Selon
les propriétaires, la majorité de ces permis serait
détenus par des individus qui ne sont pas vraiment
intéressés à les utiliser sur une base
régulière et il y aurait un réel besoin pour un plus grand
nombre de chauffeurs disposés à travailler.
Nous ne sommes pas en mesure de porter un jugement éclairé
sur cette question et nous sommes biens conscients de la
nécessité de maintenir un équilibre normal entre l'offre
et la demande de main-d'oeuvre. Toutefois, nous tenons à faire
état de nos réserves en ce qui a trait au moratoire
proposé sur les permis de chauffeur.
Nous nous devons de mentionner que les propriétaires
souhaiteraient même voir une libéralisation de la procédure
de délivrance des permis de chauffeur. Ils ne nient pas la
nécessité d'une procédure stricte de sélection des
candidats. Bien au contraire, ils disent n'être pas entièrement
satisfaits de la performance de la Sûreté du Québec dans ce
domaine et citent certains cas où des individus ont pu obtenir des
permis de chauffeur alors même qu'ils étaient impliqués
dans des activités criminelles. Les propriétaires
considèrent cependant que la procédure actuelle implique des
délais beaucoup trop longs, compte tenu de la carence de chauffeurs
qualifiés. Ils suggèrent qu'un permis provisoire puisse
être émis à n'importe quel détenteur de permis de
conduire de catégorie 31, sur présentation d'une preuve d'offre
d'emploi par une compagnie de taxi. Au terme de l'enquête de la
sûreté, ce permis provisoire serait ou remplacé par le
permis permanent ou révoqué, si cela s'avérait
préférable.
L'idée, à notre avis, est intéressante et nous
recommandons au gouvernement d'étudier la possibilité non
seulement d'instituer des permis provisoires, mais aussi d'utiliser la preuve
d'emploi, au lieu du moratoire proposé, comme clé d'ajustement de
l'offre à la demande.
Qu'en est-il maintenant de nos commentaires par rapport aux grandes
réformes proposées dans le projet? Par rapport à
l'ouverture de nouveaux marchés, le gouvernement propose
d'élargir sensiblement le champ d'action de l'industrie du taxi. Il
entend ainsi assurer la rentabilité à long terme de l'industrie
et du même coup faciliter la tâche des commissions de transport
public en diversifiant l'éventail des moyens à leur disposition
pour assurer le transport des passagers. Sur ces derniers aspects,
rappelons-le, une action a déjà été amorcée
l'année dernière avec l'adoption des dispositions relatives aux
transporteurs scolaires dans le cadre du projet de loi no 31.
La possibilité d'intégrer au système de transport
collectif un mode de transport plus souple et moins coûteux que l'autobus
nous paraît au départ assez séduisante. Un certain nombre
d'expériences ont été tentées dans ce domaine dans
plusieurs régions de l'Amérique du Nord. Les résultats,
sans être absolument probants, semblent indiquer que, dans certaines
conditions, le taxi collectif peut être utilisé avantageusement
soit comme complément ou soit comme substitut aux modes plus
conventionnels de transport en commun. La question toutefois est loin
d'être simple et il importe de ne pas minimiser les écueils qui
pourraient se trouver sur cette voie.
Tâchons de voir comment, pratiquement, pourrait se réaliser
l'intégration. De prime abord, on serait tenté de proposer le
recours au taxi collectif pendant les heures de pointe, afin de réduire
les dépenses d'immobilisation. Cette avenue cependant s'avère peu
praticable car les heures de pointe sont celles, justement, où les taxis
traditionnels sont le plus en demande et font les meilleures affaires. Les gens
du taxi préféreraient évidemment être appelés
à prêter main-forte au transport en commun pendant les heures
creuses de la journée et de la soirée. Il n'est pas exclu que
cette dernière approche puisse être avantageuse pour les
organismes de transport. Elle permettrait d'offrir, sur certaines lignes, un
service adapté à la demande, à des coûts
d'opération relativement bas par comparaison au maintien en service
d'autobus réguliers.
On peut penser également à la desserte des secteurs
périphériques en voie de développement où la
demande est encore trop faible pour justifier la mise en service de circuits
d'autobus. Dans des cas de ce genre, en faisant appel au taxi pour
effectuer un rabattement sur les lignes déjà en place, on
pourrait sûrement retarder certaines échéances au chapitre
des immobilisations. Il faut se rappeler ici que le contrôle de
l'aménagement est une fonction qui n'est exercée à la
communauté régionale que depuis une dizaine d'années. La
croissance urbaine s'est faite pendant longtemps chez nous d'une manière
assez aléatoire, de telle sorte que l'agglomération
présente un contour assez flou. Nous pourrions énumérer
une multitude de petits groupements résidentiels, à quelques
kilomètres des centre-ville, où les déplacements des
jeunes adolescents, des personnes à la maison et des gens
âgés comptent parmi les petits soucis quotidiens. La
réforme du taxi qui nous est proposée permet d'imaginer une
formule pour offrir à ces citoyens un service minimal qui pourrait leur
convenir. Reste à savoir quels en seraient les coûts et comment il
faudrait les répartir. Le recours aux fonds publics nous paraît
inévitable si l'on veut à la fois garder les tarifs à un
niveau abordable pour les usagers et offrir aux exploitants du taxi une
entreprise viable. Considérant le nombre élevé de secteurs
potentiellement éligibles à des services de ce genre dans notre
région, nous nous devons d'agir avec prudence et nous aurons besoin d'un
temps de réflexion assez long avant de passer à l'action.
Il est fort probable qu'une mise à contribution judicieuse de
l'industrie du taxi pour le transport des passagers permettrait aux commissions
de transport de réaliser des économies appréciables au
niveau du carburant, de l'entretien des véhicules et de la
main-d'oeuvre. Nous entrevoyons cependant un problème en ce qui a trait
à la main-d'oeuvre. Quelle serait la réaction des syndicats face
à des projets comme ceux que nous venons d'esquisser? On sait
l'incertitude qui entoure à l'heure actuelle l'interprétation et
l'application par les tribunaux de l'article 45 du Code du travail dans les cas
de sous-traitance. La polémique jurisprudentielle qui a cours
présentement est centrée sur la notion du contrat. Or, la forme
contractuelle qui est suggérée par le livre blanc pour
régir la collaboration de l'industrie du taxi, confirmerait l'existence
d'un lien de droit entre la commission de transport et l'exploitant du taxi.
Celui-ci ne serait-il pas alors lié par la convention collective en
vigueur entre la commission et ses employés? Cela représenterait
une situation intolérable pour les gens du taxi qui ont toujours
rejeté énergiquement tous les efforts de syndicalisation. La
perspective de complications de ce genre ne peut manquer de provoquer chez eux
des réticences bien justifiées. Il est évident que cette
question devra être éclaircie dès le départ à
la satisfaction de toutes les parties concernées.
Il nous faut parler enfin d'un problème encore plus fondamental.
Le taxi collectif, même placé sous l'autorité de la
commission de transport, représente une forme de concurrence par rapport
aux modes conventionnels. Du point de vue de l'usager, le concurrent
possède, par surcroît des atouts importants comparativement aux
véhicules à plus grande capacité et aux modes de
fonctionnement plus rigides qu'ils commandent. Pour qui se préoccupe
avant tout de l'intérêt collectif, il est clair que, dans le
contexte technologique actuel, les systèmes de grande et moyenne
capacité sont les plus aptes à nous rendre maîtres des
problèmes de congestion urbaine et de gaspillage d'énergie. Les
investissements considérables qui ont été consentis dans
ce domaine par tous les paliers de gouvernement témoignent
éloquemment de telles convictions. Il importe donc de ne pas perdre de
vue nos objectifs de promotion et de développement de systèmes de
transport en commun rationnels, "rentables" - entre guillemets - et
adaptés aux besoins de nos populations. Les taxis conventionnels, aussi
bien que collectifs, et les autobus scolaires, ont peut-être un
rôle à jouer. C'est ce rôle qu'il faut tenter de
définir. (15 h 45)
À la communauté régionale, l'état
d'avancement de la planification en matière de transport des personnes
ne nous permet pas encore d'évaluer l'apport potentiel des moyens
nouveaux que nous offre le gouvernement. Par conséquent, nous ne sommes
pas en mesure de porter un jugement éclairé sur
l'opportunité des amendements législatifs proposés. Nous
estimons que c'est à la commission de transport qu'il reviendrait de se
pencher sur la question, préférablement en collaboration avec les
autres commissions de transport du Québec. Nous recommandons donc au
gouvernement de reconnaître le caractère distinct et
spécifique des propositions du livre blanc qui ont une incidence sur
l'organisation du transport en commun et d'engager à leur sujet un
dialogue avec les intervenants directement concernés.
Le nouveau partage des responsabilités. Le livre blanc
préconise une décentralisation progressive des pouvoirs et des
tâches reliés à l'encadrement et au contrôle des
activités du taxi. Seule la première étape du processus
fait l'objet d'une description détaillée dans le document tel que
publié. Pouvons-nous présumer que le gouvernement entend confier,
plus tard, des responsabilités plus grandes aux autorités
locales? Si tel est le cas, nous croyons que ces intentions devraient
être énoncées clairement afin que nous puissions nous faire
une idée juste de l'ampleur éventuelle de la tâche que l'on
nous propose d'assumer.
Le projet de décentralisation, tel qu'il nous est
présenté, ne touche qu'une faible
partie de l'ensemble des pouvoirs qui continueront d'être
exercés à l'endroit de l'industrie du taxi. Le gouvernement, en
effet, croit préférable de conserver tous les pouvoirs relatifs
aux permis de propriétaires, à l'immatriculation et à la
sécurité des véhicules, aux permis de conduire et aux
ligues de propriétaires. Il entend - je cite -"prendre les mesures
nécessaires afin de protéger les usagers en ce qui concerne la
tarification, l'affichage, l'identification du véhicule et du chauffeur"
et il se réserve en outre le pouvoir de définir le service.
Les autorités locales, quant à elles, se verraient confier
le pouvoir d'établir les tarifs, de délivrer le permis de travail
aux chauffeurs et de réglementer l'aménagement et l'utilisation
des taxis, sous réserve de compatibilité avec la
législation provinciale.
En ce qui a trait d'abord au pouvoir d'établir les tarifs, nous
croyons que le transfert aux instances locales ne deviendra nécessaire
que lorsqu'on envisagera d'amorcer l'intégration du taxi au
système de transport en commun et de définir une politique
globale de tarification. D'ici là, nous ne voyons pas d'utilité
à ce que le palier central se départisse de son rôle. On se
souviendra d'ailleurs que les gens du taxi nous ont déjà fait
part de leur satisfaction quant à l'action de la Commission des
transports du Québec dans ce domaine.
Nous voyons quelques avantages cependant à ce que soient
assumés localement les pouvoirs relatifs à la délivrance
et au renouvellement des permis de chauffeur. Cette mesure permettrait sans
doute de remédier aux délais excessifs dont se plaignent les
représentants de l'industrie. En outre, il est probable que les
policiers locaux, étant plus familiers avec le milieu que les agents de
la Sûreté du Québec, réussissent plus facilement
à identifier et à écarter les éléments
indésirables.
En ce qui regarde maintenant les pouvoirs généraux de
réglementation de l'aménagement et de l'utilisation des taxis,
nous devons avouer que nous demeurons perplexes. Il nous semble que
l'encadrement minimal qu'entend se réserver le gouvernement laisse peu
de place à l'exercice d'un pouvoir local. Une fois que la loi
provinciale a défini le service, établi les normes de
sécurité et pris des mesures pour protéger les usagers en
matière de tarification, d'affichage et d'identification, que reste-t-il
à régler autre que de l'accessoire? La propreté et
l'entretien du véhicule, le confort du client, l'éthique du
chauffeur, ce sont là des éléments de la qualité du
service, laquelle ne saurait être assurée par des voies
réglementaires. Elle est beaucoup plus du ressort de l'industrie
elle-même. Le document est clair dans ce cas, entre autres, à la
page 30.
La fonction de contrôle. Si le livre blanc propose un transfert de
pouvoirs des plus limités, il en va tout autrement lorsqu'il s'agit des
responsabilités en matière de contrôle et de surveillance.
On y lit: "Les communautés devront s'assurer de la surveillance et du
respect de la réglementation établie pour l'ensemble de leur
territoire et donner suite aux infractions devant les cours municipales." Cette
fois, il n'y a pas à s'y tromper. Les autorités locales ont bel
et bien la responsabilité et le gouvernement ne se réserve
rien.
Les structures d'accueil. Après avoir passé en revue les
responsabilités que nous assigne le livre blanc, nous tâcherons
d'imaginer ce que représenterait pour la communauté
régionale et ses municipalités la mise en oeuvre de la
décentralisation telle qu'elle est proposée.
L'élaboration de normes et de règles adaptées aux
besoins réels de la région nécessite des ressources et des
compétences professionnelles que la communauté ne possède
pas à l'heure actuelle. Il faudrait analyser le marché du taxi et
les conditions d'exploitation, établir une structure tarifaire
appropriée, élaborer un projet de réglementation et
concevoir les mécanismes de contrôle requis.
Pour ce faire, plusieurs approches pourraient être
envisagées, soit l'embauche d'un professionnel en transport sur une base
contractuelle, soit la création d'un groupe de travail intermunicipal et
le recours à un conseiller technique qualifié provenant soit de
l'entreprise privée, soit possiblement du ministère des
Transports ou, comme troisième possibilité, le recours à
l'entreprise privée.
Ensuite, il faudrait voir à exercer les contrôles
établis. Le livre blanc prévoit confier les
responsabilités à la communauté pour l'ensemble de son
territoire. Cela impliquerait des ententes avec cinq corps de police, incluant
la Sûreté du Québec. La tenue des enquêtes
préalables à l'émission des permis de chauffeur et la
surveillance des taxis entraîneraient pour ceux-ci une charge
additionnelle et nous ne savons pas si les corps policiers municipaux seraient
en mesure de l'assumer avec les effectifs dont ils disposent
présentement. En outre, quelle que soit la formule que l'on ait
adoptée pour établir la réglementation, il faudrait quand
même que la communauté se dote d'une structure permanente, aussi
peu lourde soit-elle, pour la coordination et l'encadrement administratif.
Il est évident que la prise en charge par le palier local du
contrôle et de la surveillance des taxis entraînerait des
coûts non négligeables tant à la communauté qu'aux
municipalités. Nous n'avons pour l'instant aucun moyen d'évaluer
ces coûts. En contrepartie, le projet prévoit deux sources de
revenus: les frais de délivrance des
permis de chauffeur et les amendes imposées pour les infractions
aux règlements. Les revenus qui pourraient être engendrés
par les permis n'atteindront pas des montants très importants à
l'échelle de la communauté. Nous avons présentement
quelque 600 détenteurs de permis de chauffeur dans la région et
les nouveaux candidats sont peu nombreux, selon les dires mêmes des
propriétaires.
Quant aux amendes, le niveau des revenus qu'elles représentent
sera en fonction de l'effort consenti par les corps policiers pour
déceler les infractions, mais n'oublions pas que, sur tout le territoire
de la communauté, il n'y a que 174 taxis. Somme toute, il est
très peu probable que ces revenus potentiels puissent compenser pour les
coûts occasionnés par le transfert des responsabilités que
propose le gouvernement. Il est essentiel qu'une analyse complète des
coûts et des revenus associés au contrôle du taxi soit
rendue disponible si le gouvernement entend se départir de cette
fonction pour la confier à un nouvel intervenant.
Les effets de la décentralisation proposée. Nous venons de
faire état des difficultés que nous entrevoyons en rapport avec
l'application des propositions du gouvernement dans notre région. Nous
tenons maintenant à formuler un dernier commentaire qui est d'un
intérêt beaucoup plus général. Dans cette optique,
permettez-moi de citer un passage du projet Des nouvelles avenues pour le taxi:
"Le grand nombre d'intervenants administrativement indépendants et
l'éloignement des organes gouvernementaux par rapport aux centres
d'exploitation ont rendu difficiles le suivi de la situation du taxi et
l'apport de réponses satisfaisantes aux problèmes qui se sont
posés. L'éparpillement des responsabilités a
entravé l'exercice d'un certain contrôle de la part du
gouvernement. Chaque organisme a, de par ses responsabilités, de
multiples préoccupations. Il ne faut donc pas s'étonner qu'un
ajustement administratif pleinement justifié ne puisse quelquefois
être appliqué avant plusieurs mois."
Nous avons cité ce long passage parce qu'il exprime parfaitement
les craintes que nous éprouvons face à la décentralisation
partielle qui nous est proposée. Au lieu de réduire le nombre des
intervenants, on en ajoute à plusieurs paliers qui sont tous
administrativement indépendants les uns des autres et qui, par
surcroît, ne sont aucunement familiers aux intervenants actuels. Les
organismes gouvernementaux demeurent à leur place, loin des centres
d'exploitation, et ils conservent toujours leurs pouvoirs sur des
éléments clés du secteur du taxi. Les nouveaux acteurs que
l'on veut mettre en scène ont déjà de multiples
préoccupations et, pour certains d'entre eux, ces préoccupations
n'ont aucun lien, si ténu soit-il, avec la responsabilité qu'on
leur propose d'assumer.
Le volet décentralisation du projet de réforme, à
notre avis, risque de créer plus de problèmes qu'il n'en pourra
résoudre. Le partage des pouvoirs, tel qu'il est proposé, nous
plongerait dans une situation d'ambiguïté et sèmerait la
confusion dans les esprits. Les responsabilités seraient encore plus
diluées qu'à l'heure actuelle et le processus décisionnel
serait davantage vulnérable aux blocages administratifs et aux
imbroglios bureaucratiques. Si le gouvernement estime ne pas être en
mesure de continuer à exercer le contrôle sur les activités
du taxi, nous croyons qu'il faudrait envisager ou bien une formule plus
radicale de décentralisation ou bien le simple recours à des
ententes pour assurer la surveillance.
En conclusion, la communauté régionale a trouvé
dans le livre blanc certains motifs d'appréhension et beaucoup
d'éléments prometteurs pour l'avenir. La préparation de ce
mémoire lui a permis de se familiariser avec certains aspects de la
problématique régionale qu'elle n'avait pas eu le loisir
d'examiner dans le passé.
Sur le territoire de la communauté, l'industrie ne semble
souffrir d'aucun problème sérieux. Sous réserve de
quelques petits ajustements mineurs comme la création d'une nouvelle
agglomération pour la ville d'Aylmer et des améliorations
à apporter aux procédures de délivrance des permis de
chauffeur, toutes les parties concernées sont satisfaites de la
situation actuelle.
Le projet de réforme présenté dans le livre blanc
comporte deux grands volets bien distincts qui doivent être
abordés séparément. L'ouverture de nouveaux marchés
pour le taxi a une forte incidence sur l'organisation du transport des
personnes en milieu urbain. Cela relève donc de la compétence des
commissions de transport et c'est avec celles-ci que le gouvernement devra
engager le dialogue.
La décentralisation, telle qu'elle est proposée,
s'apparente beaucoup plus à une attribution de tâches qu'à
un réel transfert de pouvoirs. Elle entraîne cependant une
implication administrative et financière importante pour la
communauté. Ces aspects devront faire l'objet d'éclaircissements
et d'analyses systématiques avant que la communauté puisse
prendre position sur le projet mis de l'avant. Merci de votre attention.
Le Président (Brouillet): C'est bien. Merci. M. le
ministre.
M. Clair: M. le Président, d'abord je voudrais remercier
M. Ménard et les gens qui l'accompagnent de cette présentation de
leur
mémoire. Un mémoire qui est l'un des bons mémoires,
je pense, l'un des mémoires les plus fouillés que nous ayons eus.
Je profite de l'occasion pour souligner publiquement d'ailleurs que le groupe
de travail, les gens qui m'accompagnent aujourd'hui ont eu et
apprécié l'occasion qui leur a été offerte de
discuter de la proposition de restructuration de l'industrie du taxi. Je pense,
comme vous le soulignez vous-même, M. Ménard, que cela a
été l'occasion aussi pour la Communauté régionale
de l'Outaouais de pouvoir mieux se familiariser avec les problèmes du
taxi. L'analyse que vous en avez faite est, à cet égard,
éloquente puisqu'on constate à peu près les mêmes
éléments sur lesquels vous avez attiré notre
attention.
Plusieurs des éléments que vous avez soulevés sont
très intéressants. En ce qui concerne, par exemple, la
création d'une agglomération à Aylmer, nous allons nous
pencher là-dessus. C'est une question ad hoc, ponctuelle, qui ne pose
pas de problème ailleurs au Québec mais je pense que cela
mérite d'être étudié.
Sur la question du transfert de permis d'un territoire à un
autre, nous partageons le même point de vue. Il s'agirait de savoir qui
aurait autorité, justement, pour assurer ces transferts de permis d'un
territoire à un autre.
En ce qui concerne le manque de chauffeurs et le gel des permis de
chauffeur qui a été décrété en août
dernier, c'est une situation qui semble particulière à
l'Outaouais; il y a peut-être quelques autres agglomérations
où ce problème se présente mais ce n'est pas un
problème généralisé et nous allons aussi essayer de
savoir quelles sont les raisons pour lesquelles il y a un manque de chauffeurs.
Peut-être que cela tiendrait à la centralisation des permis ou de
l'association de services mais, encore là, ce que je viens de vous dire
est sujet à caution. Le gel que nous avons imposé en août
dernier, c'est simplement que la régie... La Régie de l'assurance
automobile n'a pas cessé d'émettre des permis de chauffeur. Tout
ce que nous avons dit, c'est qu'à compter du mois d'août dernier
tous ceux et celles qui voulaient obtenir un permis de chauffeur, devaient
être avisés qu'à compter de cette date ils pourraient avoir
à se soumettre à de nouvelles formalités, à se
requalifier en quelque sorte pour conserver, dans l'avenir, leur permis de
chauffeur. Cela n'empêche pas le recrutement, actuellement, de nouveaux
chauffeurs.
Sur ces deux questions - c'est une interprétation - le transfert
de permis d'un territoire à un autre et la sélection des
chauffeurs, situation particulière dans l'Outaouais, il me semble que la
situation que vous décrivez milite justement en faveur de normes qui
soient administrées localement.
Si, dans l'Outaouais, la disponibilité de chauffeurs est
limitée et qu'on doit avoir des normes un peu moins exigeantes,
peut-être, ou favoriser le recrutement par quelque façon que ce
soit, il semble que ce serait avantageux que l'émission des permis de
chauffeurs puisse se faire localement. Ce serait plus facile de régler
ce problème si la Communauté régionale de l'Outaouais
avait juridiction là-dessus plutôt que nous qui devrions essayer
de le régler à partir de Québec. (16 heures)
C'est la même chose sur les transferts de permis d'un territoire
à un autre. Je pense que ce serait plus facile à faire à
partir de structures d'accueil comme la Communauté régionale de
l'Outaouais, qu'à partir de la Commission des transports du
Québec ou du ministre des Transports. Parce qu'à ce
moment-là, nécessairement, les délais sont plus longs.
Pour les commentaires, c'était essentiellement cela. Donc, un
mémoire fouillé et intéressant qui s'est penché
vraiment sur les possibilités qui pourraient être offertes dans
l'Outaouais. Je pense que c'est un mémoire positif à ce point de
vue là. Maintenant, au sujet des questions, à la page 10 et aux
pages suivantes du mémoire, on dit: "Le gouvernement, en effet, croit
préférable de conserver tous les pouvoirs relatifs aux permis de
propriétaire, à l'immatriculation, à la
sécurité des véhicules, aux permis de conduire et aux
ligues de propriétaires." Effectivement, à une nuance
près, les pouvoirs relatifs aux permis de propriétaire, c'est de
laisser le pouvoir à la Commission des transports du Québec,
à toutes fins utiles, d'annuler des permis puisqu'il y a un gel qui est
décrété. On n'a pas l'intention de revenir
là-dessus.
L'immatriculation. Il nous semble que cela va de soi que
l'immatriculation demeure centralisée à Québec. Les normes
de sécurité des véhicules. Je pense qu'il n'y a personne
qui peut sérieusement proposer qu'on ait des normes de
sécurité pour les véhicules qui soient différentes
de l'Outaouais, à Drummondville, à Trois-Rivières,
à Chicoutimi. Il me semble que cela va de soi. Quant aux permis de
conduire, la délivrance d'un permis de conduire comme tel, non pas du
permis de travail, du "pocket number", mais du permis de conduire comme tel, il
m'apparaît, qu'effectivement, c'est normal que cela reste
centralisé entre les mains de la Régie de l'assurance
automobile.
La question des ligues de propriétaires: Elles sont
déjà accréditées. À moins qu'on veuille les
abolir et en créer de nouvelles, je ne vois pas tellement
l'utilité de commencer ce processus, dans la mesure où cela ne
semble pas créer de problème. Vous dites vous-même que chez
vous les ligues fonctionnent bien. Alors, il reste le pouvoir
de définir le service. Entendons-nous ce que signifie
définir le service dans notre esprit. C'est que s'il y avait une loi
encadrant le service de taxis, cela nous paraît évident qu'il
faudrait définir ce qu'est une ligue, définir ce qu'est un
service de taxis, ce qu'est un service "jitney", ce qu'est un service de taxis
collectifs, ce qu'est du taxi à contrat. Chaque municipalité ou
autorité locale, communauté dans votre cas, ayant le pouvoir
d'implanter ou de ne pas implanter telle ou telle variante du service par
taxi.
Alors, voilà les pouvoirs que vous décrivez et que nous
conservons. Je pense qu'on s'entend là-dessus. Mais par la suite, vous
faites valoir, au même titre que la Conférence des maires de
banlieue tantôt, qu'en transférant le contrôle des permis,
l'intégration du taxi à une politique de transport urbain, le
contrôle de la qualité du service, c'est plutôt des
tâches et non pas tellement des pouvoirs. Je vous pose la question que je
posais à M. Lang, tantôt. Si vous voyez des avantages à la
décentralisation des pouvoirs, tenant pour acquis qu'on règle la
question de la compensation financière, mais en décentralisation
quels sont les pouvoirs additionnels que vous verriez parmi ceux qu'on
énumère? Quels sont ceux qui seraient conservés par le
gouvernement? Quels sont les pouvoirs additionnels dont vous pensez avoir
besoin pour être en mesure de voir autre chose qu'une attribution de
tâches dans la réforme qui est proposée?
M. Ménard: Je pense, M. le ministre, que tout repose dans
la définition de ce qu'on appelle l'encadrement minimal qui sera fourni
par le gouvernement. Vous dites, entre autres, vous avez repris mes deux points
concernant les questions de territoires et les questions de nombre de permis de
chauffeurs et de disponibilité de chauffeurs, en disant: Cela milite en
faveur de la décentralisation. C'est vrai que cela milite en faveur de
cela, pour autant qu'il n'y ait pas un cadre normatif rigide qui fasse que
finalement on en vienne à exécuter des tâches, mais dans un
cadre dont la rigidité va empêcher de tenir compte des
disparités régionales ou des différences
régionales. C'est peut-être là le plus gros de notre
inquiétude. Si on reprend la majorité des points que vous avez
énumérés, je pense qu'il n'est pas question d'avoir la
prétention de revenir sur la question des immatriculations ou quoi que
ce soit. Quand on lit cette phrase dans le projet qui dit: "Prendre les mesures
nécessaires afin de protéger les usagers en ce qui concerne la
tarification, l'affichage, l'identification du véhicule et du
chauffeur", qu'est-ce que cela veut dire exactement, cet encadrement minimal,
M. le ministre? On nous dit: Vous allez avoir le pouvoir de fixer la
tarification au niveau local. D'autre part, vous dites: Le gouvernement entend
prendre les mesures afin de protéger les usagers par rapport à la
tarification. C'est toute cette définition d'encadrement minimal qui
nous fait nous poser des questions et c'est là qu'on se pose
véritablement des questions sur les pouvoirs locaux qui resteront. Une
loi-cadre peut être très large, mais elle peut devenir aussi de
plus en plus contraignante à certains moments. C'est là qu'on
dit: On ne voudrait pas être de simples exécutants d'une loi qui,
peut-être, d'année en année, viendrait s'engraisser
d'autres normes provinciales.
M. Clair: C'est justement - je peux vous rassurer
là-dessus, M. Ménard l'objectif inverse qu'on poursuit, parce que
je pense qu'on ne peut pas centraliser plus que cela ne l'est
présentement. On le pourrait toujours sur les stationnements. Je pense
que le seul pouvoir qui reste aux municipalités, c'est le pouvoir de
déterminer les stationnements pour les taxis. C'est le seul pouvoir,
à peu près, dont on ne dispose pas. L'objectif, c'est d'aller
vers une décentralisation réelle.
Ces pouvoirs, qui resteraient centralisés, sont des normes
très minimales qui doivent être appliquées à travers
le Québec. Quand on dit: "Prendre les mesures nécessaires afin de
protéger les usagers en ce qui concerne la tarification", cela fait
référence essentiellement à l'usage frauduleux d'un
taximètre. On dit dans le programme d'action, même si c'est mis en
cause par certains propriétaires de taxi, certains chauffeurs, qu'on
sera très sévère à l'égard de l'usage
frauduleux du taximètre, parce que, actuellement, c'est un peu ridicule.
On peut frauder avec un taximètre; la seule pénalité,
c'est une suspension ou encore le transfert de permis. Tu vends ton permis
à ta femme ou à ton frère ou à n'importe qui. La
sanction est insuffisante. Si des usagers sont fraudés, on
prévoirait dans la loi des mesures très sévères de
répression de la fraude dans le domaine de l'utilisation d'une
tarification frauduleuse.
L'affichage et l'identification du véhicule: la plaque
d'immatriculation doit être placée en arrière - je ne sais
pas trop à quel endroit - et l'identification du chauffeur - c'est un
reproche qu'on nous a fait ce matin - doit être affichée
clairement. Dans les véhicules, on doit afficher clairement le "pocket
number" afin de protéger l'usager. Ces mesures ne nous apparaissent
tellement pas contentieuses qu'on se dit: qu'elles soient conservées
centralement, c'est comme dire que les automobiles doivent avoir des pneus qui
sont en bon état. C'est fondamental. Vous donner le pouvoir plutôt
que le garder, le seul avantage qu'il y a le garder centralisé, c'est
qu'on s'assure qu'il y a une norme qui est applicable à tout le
monde.
Quand on parle d'encadrement minimal, dans notre esprit, c'est vraiment
un encadrement minimal afin de laisser les municipalités - ou, dans
votre cas, les communautés - être vraiment en mesure de
définir quelle est leur politique d'utilisation du taxi comme mode de
transport des personnes dans un territoire urbanisé,
premièrement; deuxièmement, de voir quelle est l'utilisation
qu'on fait des nouvelles avenues, comment on contrôle l'entrée des
chauffeurs. Le reste, c'est l'immatriculation, le contrôle de permis.
C'est pour cela que j'ai de la difficulté à voir quels seraient
les pouvoirs additionnels à ceux que nous proposons que vous aimeriez
voir décentralisés.
M. Ménard: C'est difficile de vous répondre, M. le
ministre. C'est sûr que si on s'en tient aux explications que vous venez
de donner par rapport à un encadrement minimal, effectivement,
l'argumentation ne sera pas longue. Sauf que...
M. Clair: Vous aimeriez voir le projet de loi.
M. Ménard: Bien, on aimerait peut-être voir
l'encadrement minimal, effectivement. Puis au risque de sembler méchant,
M. le ministre, c'est que la lecture du document me laisse l'impression qu'on
est parti avec une excellente idée, puis qu'au fur et à mesure
que vous l'avez montré aux différentes commissions, services,
régies, puis tout ça, tout le monde est venu ajouter un petit
bout de sa chasse gardée qu'il ne voulait pas laisser aller. À ce
moment-là, l'idée était peut-être excellente au
départ, mais finalement, tout le monde s'est peut-être dit dans
les ministères, dans les régies, puis dans les commissions: C'est
jamais dans l'établissement de nos normes qu'on s'est trompé; on
a toujours eu de la misère à les appliquer. Alors, gardons-nous
l'établissement des normes parce que nous, à Québec, on
est bon pour faire ça, mais à ce jour on n'a pas
été bien bien bon pour les appliquer, alors on va
décentraliser ça. On sera toujours là peut-être un
peu pour venir dire après: Messieurs, je ne suis pas sûr que vous
avez bien appliqué la réglementation puis le contrôle de
nos normes.
Tout ce temps-là, ce fonctionnaire hors région, puis hors
contexte, il va l'avoir écrit puis il va avoir du temps pour en imaginer
un autre. À un moment donné, on va se réveiller et petit
à petit on va peut-être se trouver d'autres normes. C'est pour
cela que je vous dis que toute la notion... Ce n'est pas clair, puis ce n'est
évidemment pas définitif ce que cela va être, l'encadrement
minimal. Nous, quant à devenir purement des distributeurs de
contraventions, comme on le dit dans notre document, faites des ententes de
services avec les corps policiers, donnez des ristournes sur les
contraventions, puis ils vont se payer la traite, ils vont en donner pour vous
autres.
M. Clair: C'est pour cela, je pense, que ce que vous venez de
dire démontre à quel point, si ç'avait été
l'objectif poursuivi, cela aurait été simple. Si cela avait
été juste de faire appliquer localement le règlement no 6,
un règlement centralisé, c'est exactement ce qu'on aurait fait.
On l'a envisagé, cette possibilité, mais ça ne
règle pas le problème du contrôle de la qualité des
chauffeurs, de l'intégration du transport par taxi dans une politique de
transport urbain qui relève des autorités locales. Cela ne
règle pas la possibilité d'utiliser le taxi comme substitut
à certains autres modes de transport. Je peux seulement
réaffirmer ce que je disais tantôt, soit que la
décentralisation que nous envisageons est réelle. Non seulement
elle est réelle, mais je vais même plus loin. Je vous dis que je
comprends qu'il faudra peut-être qu'on attende de voir le contenu du
projet de loi. Un peu comme le disait une personne célèbre:
Nommez-m'en un pouvoir de plus que vous voulez. Parce que les pouvoirs qui
resteraient à la Régie de l'assurance automobile ou à la
Commission des transports du Québec apparaissent devoir rester là
inévitablement. L'immatriculation et le contrôle de la
sécurité routière, il y a un organisme au Québec
qui en est chargé, c'est la Régie de l'assurance automobile.
Le contrôle des permis de propriétaire pour l'instant,
à la limite, si on voulait on pourrait... On se fait dire qu'on voudrait
refiler une patate chaude. Si on voulait refiler la patate chaude plutôt
que de laisser la responsabilité à la Commission des transports
du Québec de retirer des permis pour usage frauduleux du
taximètre ou pour non-respect grave de certaines obligations, ce serait
là refiler une patate chaude, parce que, effectivement, ce sont des
décisions difficiles à prendre. Tant vous que moi, comme
élus, on aime autant que ce soit plutôt un tribunal quasi
judiciaire qui prenne les décisions que des hommes politiques. On serait
peut-être plus embarrassé. (16 h 15)
Je pense que l'objectif de la réforme, ça va dans le sens
que vous souhaitez. Il restera à voir le projet de loi, afin de vous en
convaincre réellement. Mais, quand même, je pense que cela va dans
le sens que vous souhaitez. Peut-être n'avons-nous pas été
assez précis sur ce qu'est un encadrement minimal? Maintenant, je me dis
que vous n'avez pas beaucoup de risques à prendre, parce que cela ne
peut pas être plus centralisé que cela l'est actuellement. Comme
on n'a pas retenu la voie d'ententes de services pour contrôler quelque
chose qui serait établi nationalement, je pense que
vous pouvez croire en nous quand on vous dit qu'on a une volonté
réelle de décentraliser.
M. Ménard: On n'a pas à s'en plaindre que ce soit
centralisé présentement, parce qu'on n'a pas à faire le
boulot. Si le projet se concrétise en projet de loi, nous aurons
à faire le boulot. Je vais vous donner deux petits exemples. Quant
à la question des permis de propriétaire, vous dites que c'est
une patate chaude. C'est vrai que c'est une patate chaude. D'autre part, on a
démontré au début de notre mémoire, qu'il ne
faudrait pas que ce soit seulement des normes de ratio permis-population. Chez
nous, cette norme ne fonctionne pas. Il serait peut-être aussi plus
simple que ce point soit administré chez nous. Je ne dis pas, donnez-le
moi, je le veux. Je vous dis que c'est effectivement une patate chaude dans un
contexte comme Montréal, mais ce n'est peut-être pas une patate
chaude dans le contexte de chez nous.
Un autre exemple que je veux vous donner. Cela concerne la question de
la sécurité des véhicules. Un chauffeur de taxi qui est en
infraction à 50 km de Hull, il faut qu'il revienne à Hull, dans
les 48 heures pour montrer que la réparation a été faite.
Il va perdre sa demi-journée. Mais cela c'est un domaine que vous
conservez. Pourquoi celui-là? Vous me dites que vous avez des
installations techniques. Oui, peut-être, mais quant à son
application pour les propriétaires, cela n'est pas nécessairement
facile non plus dans une région en dehors de Montréal, parce que
le centre de vérification est plus éloigné.
M. Clair: Oui, vous avez raison en partie sur cela. Mais ce que
nous cherchons a éviter... L'histoire du taxi a été
marquée par un mouvement de balancier, d'une centralisation excessive
à une décentralisation excessive, à une centralisation
excessive. Ce qui nous guide comme orientation c'est de dire: essayons de
conserver les acquis de la centralisation. Il y en a eu un certain nombre. Les
gouvernements avant nous n'ont pas tout mal fait. Ils ont quand même
quelques petits éléments positifs. Je pense que la réforme
de 1973 a quand même eu des aspects très positifs.
Dans l'analyse qu'on fait de la situation, on essaie de se dire que ce
qui a bien fonctionné nationalement, peut-être qu'on devrait le
laisser là où il est. Ce dont les municipalités
s'occupaient et qui avait connu un meilleur résultat avant que ce que
nous pouvons faire maintenant à partir de Québec, on dit,
essayons de faire un départage qui va éviter le mouvement de
balancier de la décentralisation complète à la
centralisation, sans jamais finalement régler le problème.
C'était ma dernière intervention. Je veux donner
l'occasion au député de Hull qui, j'imagine, a des questions, de
les poser.
Le Président (M. Brouillet): M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je tiens
sûrement à souligner l'apport important que la Communauté
régionale de l'Outaouais nous apporte aujourd'hui par la
présentation de son mémoire. Je remercie en même temps le
président de la Commission de transport de la Communauté
régionale de l'Outaouais qui l'accompagne ainsi que Mme Brunet qui est
chargée de la planification à la communauté
régionale.
J'ai été très heureux de lire, et même
à quelques reprises, ce mémoire. Cela rencontre, je pense, les
grands objectifs de la Communauté régionale de l'Outaouais qui,
d'une part, a été créée comme telle en 1969. Elle a
accompli énormément depuis ces années, même si elle
est toujours en attente d'une restructuration qui se fait, pour le moins,
imminente, dans les prochains mois, souhaitons-le, tenant compte du fait que
cela fait près de sept ou huit ans maintenant que nous demandons cette
restructuration. Et, à la page 15 du mémoire, il y a un
paragraphe très intéressant qui résume très bien la
pensée de la communauté régionale. C'est celui qui dit:
"Le volet décentralisation du projet de réforme, à notre
avis, risque de créer plus de problèmes qu'il n'en pourra
résoudre. Le partage des pouvoirs, tel qu'il est proposé, nous
plongerait dans une situation d'ambiguïté et sèmerait la
confusion dans les esprits".
C'est là un point de vue relativement intéressant. Vous
êtes président de la Communauté régionale de
l'Outaouais. Vous avez déjà été aussi dans la
politique municipale comme conseiller municipal à Hull. Cela
m'amène à vous poser, tenant compte de cette expérience et
de cette expertise dans le domaine, certaines questions qui découlent
effectivement de nouvelles avenues du taxi. J'en profite pour relire, à
la page 24 un passage du document que nous déposait le ministère
des Transports il y a quelques mois: "Les communautés urbaines et
régionales existent depuis plusieurs années. Elles ont eu le
temps de consolider leurs assises et jouent déjà un râle
majeur dans le domaine du transport par le biais des commmissions de transport.
Il nous apparaît donc souhaitable de leur confier, dans les plus brefs
délais, des responsabilités étendues en matière de
taxi." Je continue: "Après avoir examiné le rôle et la
vocation des MRC, il nous apparaît également pensable de leur
confier les responsabilités que nous voulons décentraliser". Le
ministre me disait à ce sujet hier: Je comprends qu'elles n'ont pas
toutes appris à fonctionner encore, les municipalités
régionales de
comté, mais il y en a qui sont prêtes à s'embarquer
dans ces nouvelles responsabilités, ou qui pourraient vouloir
s'embarquer dans ces nouvelles responsabilités.
M. Ménard, vous qui vivez dans une région relativement
importante du Québec, très importante même, et qui
connaissez justement les problèmes que nous vivons avec les
municipalités régionales de comté, si on tient compte,
entre autres, des municipalités régionales de comté de la
Haute-Gatineau, la vallée de l'or, Pontiac où il y a actuellement
des conflits de délimitation de territoires, j'aimerais entendre vos
commentaires sur les réactions et sur la position qu'a prise le Conseil
de planification et de développement du Québec, un organisme
très important - ou qui était important du moins, à venir
jusqu'à tout récemment - lorsqu'il dit ceci: Le Conseil de
planification et de développement du Québec constate
qu'après avoir constitué la MRC comme une instance administrative
responsable de l'aménagement du territoire, le gouvernement du
Québec, sans vouloir lui attribuer un statut de gouvernement
régional... Cette orientation diffère des recommandations du
conseil émises en 1978. Et, on mentionne ici que le conseil ne souscrit
pas à cette orientation gouvernementale qui vise à faire un
gouvernement régional de la MRC. C'est là une orientation qui ne
lui apparaît fondée ni sur les besoins ni sur les aspirations des
collectivités locales, mais plutôt tenir de position
technocratique relevant davantage de données théoriques.
Tantôt, vous avez soulevé un point relativement important
quant au partage des responsabilités où il y avait cinq corps de
police impliqués, incluant la Sûreté du Québec.
Alors, cela tient compte des municipalités comme telles. Et, dans les
recommandations du Conseil de planification et de développement du
Québec, on lit ceci: "Le Conseil de planification et de
développement du Québec recommande que la décentralisation
se fasse d'abord vers et avec les gouvernements locaux selon ce que ces
derniers seraient prêts à assumer comme nouvelles
responsabilités, d'une part; d'autre part, il recommande aussi, par
conséquent, que les gouvernements locaux aient accès à de
nouvelles ressources fiscales autonomes pour faire face aux nouvelles
responsabilités. Alors, plutôt que de diriger vers la MRC une
nouvelle ou des nouvelles responsabilités, que ce soit davantage
dirigé vers les gouvernements locaux qui pourraient, à la suite
des demandes des municipalités qui les composent, demander à leur
MRC de s'impliquer avec un consensus global."
Je voudrais savoir si vous partagez cette opinion, à savoir
qu'une MRC est au service des municipalités qu'elle représente,
ou si ce sont les municipalités qui sont au service d'une MRC. Je
voudrais vous entendre là-dessus, parce que la Communauté
régionale de l'Outaouais est une grosse MRC.
M. Ménard: On nous qualifie de grosse MRC et de la plus
vieille MRC du Québec. Je pense qu'effectivement, quand on parle d'une
communauté, on ne peut pas parler de gouvernement régional. Je ne
veux pas entrer dans les grands exposés de science politique, mais la
notion de gouvernement implique des élus, élus directement
à ce niveau-là. On parle, entre autres, des pouvoirs de taxation.
Ce sont deux choses que les communautés n'ont pas et que les MRC n'ont
pas. Dans ce sens, on revient à votre question et on dit: Oui, la MRC ou
la communauté est beaucoup plus un organisme de services. Quant à
savoir si cela doit venir d'en bas et aller vers le haut ou si cela doit venir
d'en haut et redescendre vers le bas, il est bien évident que, dans la
majorité des cas, cela devrait effectivement venir du bas et aller vers
le palier régional.
Je pense que vous connaissez l'histoire de la CRO, tout aussi bien que
moi, sinon mieux. Vous savez très bien que si, à certains
moments, il n'y avait pas eu des actions gouvernementales, il y aurait
peut-être encore des choses qui ne seraient pas réglées au
niveau régional. Je ne dis pas cela dans le sens de militer en faveur de
la question du taxi. La question du taxi, nous ne l'avons pas demandée
et on ne la rejette pas du revers de la main. On ne la souhaite pas ardemment,
mais on se dit qu'il y a probablement moyen - si les sommes sont disponibles,
s'il y a des accommodements -de vivre avec, malgré les
difficultés importantes de fonctionnement qu'il pourrait y avoir.
Dans un contexte global - si votre question est vraiment dans un
contexte global - je pense qu'il y a des gestes qui doivent être
posés à un niveau où, localement, les gens ne pourraient
pas nécessairement s'entendre. Je ne reviendrai pas sur toute l'histoire
de notre région mais, si on regarde certaines des difficultés
qu'il a pu y avoir au niveau du fonctionnement de la CRO, si les
compétences avaient toujours émané du niveau local, on
n'aurait peut-être pas l'espèce de "maturité" - entre
guillemets - qu'on a aujourd'hui. Fondamentalement, je ne peux pas être
en désaccord avec votre exposé en disant que, logiquement, les
besoins devraient émaner des municipalités locales pour aller
vers un palier supralocal ou régional d'un organisme de services -parce
que finalement, les communautés, c'est cela.
M. Rocheleau: Je vous remercie, M. Ménard. Vous conservez
toujours une attitude très forte d'excellent politicien, pouvant parler
quand même très longtemps sans vous
mouiller. Je vous félicite. Je voudrais...
M. Clair: ...C'est un talent que le député de Hull
vous envie.
M. Rocheleau: C'est toujours en préparation, M. le
ministre. On a des aptitudes extraordinaires dans mon coin. Une question que je
pourrais vous poser, M. le ministre, si vous avez la gentillesse d'y
répondre - je suis persuadé que vous l'avez -est la suivante:
Dans un projet de loi à être préparé
éventuellement, à la suite des mémoires qu'on a entendus
et des recommandations énoncées dans De nouvelles avenues, est-il
possible que cette décentralisation se fasse uniquement dans certaines
régions qui connaissent actuellement des problèmes tout à
fait particuliers, par exemple, Montréal? (16 h 30)
M. Clair: La façon dont j'envisage la chose - je tiens
à dire que le député l'a souligné à
plusieurs reprises, on était nous-mêmes conscients de cela - tout
le monde n'est pas au même niveau de problème et tout le monde
n'est pas au même niveau de préparation pour recevoir une
décentralisation du taxi. Dans les MRC, par exemple, le
député l'a souligné à plusieurs reprises, cela nous
apparaît évident. On disait: Avant quelques années, ou
forts de l'expérience de quelques mois encore... Mais on peut utiliser
les mots "plusieurs années" dans le cas de certaines MRC. La
façon dont j'envisage actuellement la chose, ce qu'on pourrait faire -
et là ce serait vraiment en termes de pouvoirs - c'est vivre pendant 'un
certain temps dans un double régime, un régime centralisé
pour les municipalités qui ne voient pas d'intérêt à
ce que les pouvoirs soient décentralisés, et un régime
décentralisé pour les municipalités ou les
communautés qui le désirent. Autrement dit, avoir une loi qui
définit ce qu'est le taxi, le taxi collectif, le taxi à contrat,
les associations de services, les ligues; une loi qui prévoit quels sont
les pouvoirs qui pourraient être confiés aux municipalités
ou aux communautés et que, une à une, les communautés ou
les municipalités qui désirent embarquer dans le projet de
réforme le fassent; à ce moment-là, nous nous
retirons.
J'ai la conviction - conviction morale -qu'avec ce qu'on espère
être capable de mettre au point comme proposition on n'aura besoin de
forcer le bras à personne pour embarquer dans la proposition de
réforme une fois qu'elle sera traduite dans un texte de loi parce que
c'est de l'intérêt même des collectivités locales
qu'elles aient un bon service de taxi, de qualité. Si c'est possible
d'utiliser les nouvelles avenues, cela va apparaître de
l'intérêt de la CTCRO, de la Commission de transport de
Sherbrooke, de
Québec ou de Laval, de peu importe laquelle. Ce qu'on va faire,
c'est essayer d'avoir un encadrement minimal dans une loi qui définit un
certain nombre de choses qui doivent être définies centralement et
de prévoir une décentralisation progressive. Dans ce
sens-là, je ne suis pas du tout fermé à l'hypothèse
qu'évoque le député de Hull, à savoir que,
plutôt que d'imposer une décentralisation, on offre des pouvoirs
et que ceux qui sont intéressés à les exercer les exercent
mais en étant conscients qu'on a atteint la limite de la
centralisation.
Je ne vois pas qu'on puisse beaucoup améliorer le système
tel qu'il existe présentement à partir d'une administration
centralisée à Québec. Le pire qui arriverait à ceux
qui n'embarqueraient pas dans le régime décentralisé,
c'est qu'ils continueraient à vivre le système actuel. À
ce moment-là, chacun considérera les deux hypothèses: le
système centralisé qu'on connaît avec ses problèmes
et ses avantages et le système décentralisé avec ses
contraintes mais ses avantages. C'est certainement une possibilité
à retenir.
M. Rocheleau: Merci, M. le ministre. Il y a un autre point... Mme
la Présidente, on vous salue. Une autre question que j'aimerais poser -
et elle m'inquiète un peu celle-là; il y a bien des choses qui
m'inquiètent mais celle-là m'inquiète un peu plus -
à la page 14, vous mentionnez ici, entre autres, vers la fin: "Il n'y a
que 174 taxis. Somme toute, il est très peu probable que ces revenus
potentiels puissent compenser les coûts occasionnés par le
transfert des responsabilités que propose le gouvernement." Là,
vous parlez plutôt de possibilités de revenus en provenance
d'amendes. Est-ce que cela pourrait être une forme de revenus par
laquelle les municipalités anticiperaient de financer leurs
dépenses de décentralisation et de responsabilité de taxi?
C'est-à-dire, de tenter de pincer les taxis davantage pour se faire des
revenus pour défrayer les dépenses occasionnées pour
maintenir une certaine expertise sur leur territoire. Cela pourrait
m'inquiéter, M. le Président.
M. Clair: Ce n'est pas à cela, M. le Président, je
pense, que la CRO fait référence. C'est qu'il existe
déjà un service d'inspection qui, lorsqu'il fait des
vérifications, impose, en fait, des amendes pour un certain nombre
d'infractions qui sont prévues au règlement, sans qu'on en fasse
abus. C'est évident qu'il y aura toujours des infractions qui seront
commises dans le domaine du taxi, comme dans d'autres domaines, et ces revenus,
il est certain que ce sont des revenus qui seraient limités. Dans un cas
comme celui de la CRO, il y a 174 ou 175 permis, mais il y aurait
sûrement encore un certain nombre de revenus qui
pourraient provenir de cela. Je ne pense pas que la CRO ait voulu
proposer un harcèlement des chauffeurs ou des propriétaires de
taxi.
M. Rocheleau: On partage peut-être la même
appréhension parce qu'on connaît aussi les policiers et ce qu'ils
font. Sans faire du harcèlement, quand les policiers décident de
payer la traite à quelqu'un, ils peuvent le faire. Et cela, c'est au
détriment des propriétaires de taxi dans une région. J'ai
déjà été maire de Hull et je vous avoue qu'on avait
des revenus assez substantiels des amendes en provenance de stationnement
illégal, etc. On se faisait même parfois demander si nos agents
étaient payés à la commission sur les billets qu'ils
distribuaient durant la journée.
M. Clair: De bons policiers, d'habitude, appliquent les
règlements municipaux. Si les règlements municipaux du maire de
Hull étaient trop sévères, c'était son
problème. Qu'il ne mette pas cela sur le dos de la police.
M. Rocheleau: Les règlements municipaux sont là
pour être appliqués, mais il y a toujours une certaine... On dit
souvent que c'est écrit dans le livre, mais il y a aussi la question de
tenir compte de tous les facteurs et de comprendre aussi...
M. Clair: Vous feriez un bon ministre de la Justice, vous!
M. Rocheleau: Je n'ai pas pensé à celui-là,
encore. J'aimerais peut-être entendre le président de la
communauté parce que c'est bien à cela qu'il a fait allusion.
C'est une forme de source de revenus pour payer les coûts de cette
décentralisation et cela m'inquiète un peu.
M. Ménard: Effectivement, M. le député,
comme l'a mentionné le ministre, le projet fait déjà
référence à ce volet. Il parle à la fois du revenu
provenant des "pocket number" et à la fois des revenus provenant des
infractions. Ce n'est pas nécessairement parce qu'on les souhaite. Si on
se fie aux chiffres donnés par la ville de Montréal ce matin et
si on a fait un ratio pour notre région, il y a un potentiel de revenus
et cela semble toujours un peu effrayant de le dire comme cela,
d'espérer qu'il y ait pour 4350 $ d'amendes. Si on se fie au ratio de
Montréal, le potentiel est celui-là chez nous. Je partage votre
inquiétude, M. le député. Lorsqu'on a partagé des
responsabilités autour d'une même table de conseil de ville et
qu'effectivement on budgétisait des amendes provenant du service de la
police, on faisait un peu ce même genre d'exercice.
M. Clair: Vous ne faisiez pas cela? Ce n'est pas possible, Mme la
Présidente!
M. Rocheleau: On tentait de les diminuer. Dans les autres postes,
on tentait d'aller chercher des revenus additionnels. C'est tout, Mme la
Présidente. Je tiens à remercier les représentants de la
communauté régionale ainsi que ceux de la commission des
transports. Je pense que c'est un mémoire qui va nous servir
énormément et qui est très intéressant.
M. Clair: Je ne peux que joindre mes commentaires à ceux
du député de Hull pour remercier les gens de l'Outaouais et les
féliciter pour leur ouverture d'esprit et le travail qu'ils ont
effectué en souhaitant qu'on puisse continuer dans la préparation
éventuelle du projet de loi. Je souhaite avoir l'occasion de voir avec
vous, de façon encore plus détaillée, ce que vous
entrevoyez comme concept de décentralisation. Je vous remercie, Mme la
Présidente.
M. Ménard: Mme la Présidente, M. le ministre, MM.
les députés, merci.
La Présidente (Mme Lachapelle): J'appelle le groupe
suivant à se présenter: l'Association québécoise du
transport et des routes Inc.
Association québécoise du transport et
des routes Inc.
M. Reeves (Lionel): Mme la Présidente, c'est moi Lionel
Reeves, directeur général de l'AQTR. Le document qui va vous
être présenté a été préparé par
un comité ad hoc ou un comité formé de professionnels, de
technologues bénévoles, ils étaient dix. Ce document vous
sera lu et commenté par notre vice-président aux affaires
techniques, M. Georges Gratton, et M. Pierre Alpin, membre du comité,
nous accompagne comme personne-ressource.
M. Gratton (Georges): Mme la Présidente, M. le ministre,
MM. les députés, c'est avec intérêt que
l'Association québécoise du transport et des routes a
analysé le document du gouvernement du Québec portant sur De
nouvelles avenues pour le taxi, et ce par l'implication de ses membres dans la
recherche, la conception et l'application d'éléments ou de
systèmes de transport.
En effet, l'AQTR est un organisme sans but lucratif dont le millier de
membres, individuels ou collectifs, oeuvrent dans le domaine du transport au
Québec. Qu'ils proviennent du secteur public ou du secteur privé,
qu'ils oeuvrent au niveau des infrastructures, des opérations, de la
planification, de la gestion ou de la
recherche, leur adhésion à l'association n'a qu'un seul
objectif: le développement des techniques de transport.
En conséquence, la contribution de l'AQTR à ce dossier est
de nature technique dans la poursuite d'objectifs précis, soit de
répondre aux besoins de mobilité de la population et de
rechercher l'efficacité des systèmes de transport des
personnes.
C'est ainsi que l'AQTR a institué un comité ad hoc pour
vous présenter ses commentaires et suggestions sur le sujet.
Les principes. Dans ce document, nous nous attardons principalement sur
le premier volet de la proposition gouvernementale, soit
"l'élargissement du rôle du taxi afin qu'il s'intègre mieux
au réseau actuel du transport des personnes."
Les principes qui sous-tendent notre intervention sont les suivants:
l'amélioration de la qualité des services à la population;
la réduction des coûts de transport pour l'ensemble de la
société; l'optimisation de l'utilisation des ressources
transports. Nous devons constater que dans les conditions de
réglementation existantes, ce sont des principes dont l'application est
difficile, sinon impossible, particulièrement en regard des contraintes
institutionnelles.
Le taxi est un mode de transport individuel. Le choix du véhicule
est réglementé et le taxi fonctionne à la demande d'une
tarification individuelle selon la distance. Si l'on considère
l'érosion du marché traditionnel du taxi, l'augmentation
considérable de l'offre de transport, la situation économique
difficile et la compétition entre les différents modes de
transport, nous en tirons la conclusion qu'une recherche concertée de
nouveaux marchés s'impose.
D'un point de vue technique, l'AQTR est d'avis que les principaux
éléments de la réforme gouvernementale répondent
à ses préoccupations concernant la gestion optimale des
systèmes de transport des personnes. Il nous apparaît
évident qu'on doive encourager les propriétaires de taxi à
s'adapter à l'évolution de la demande de transport et d'utiliser
pleinement le potentiel d'équipement.
Les conditions particulières à l'ouverture du
marché du taxi sont, à notre point de vue, les suivantes:
l'avènement de nouveaux services ne doit pas changer la vocation
première du taxi, soit la mise en disponibilité d'un service
personnalisé à la demande; les marchés ne doivent pas
déjà être desservis par d'autres modes plus
adéquats; les rôles des différents modes de transport
doivent demeurer cohérents.
Les conditions énumérées ci-dessus sont en tout
point conformes aux vues exprimées par l'AQTR à la commission
parlementaire sur le transport en commun à Montréal à
l'automne de 1982. Nous traitons ci-après quelques-unes des avenues
envisagées.
Ainsi, la considération des avenues suivantes nous semble
très valable: le taxi servant pour le transport des handicapés,
particulièrement les personnes ambulantes; le taxi comme service
collectif à titre de substitut ou complément au transport en
commun à des fins de transport d'écoliers ou de transport
à contrat; la législation sur le covoiturage qui ouvre de
nouveaux marchés durant la journée et pour le retour à
domicile; la considération des énergies nouvelles et
l'utilisation de véhicules spécialisés. (16 h 45)
Le transport des personnes handicapées. Par l'utilisation de
systèmes adaptés au transport des handicapés, le
Québec a choisi une excellente avenue à l'égard des
expériences vécues ailleurs, particulièrement aux
États-Unis. Cependant, l'utilisation du taxi à ces fins offre un
potentiel d'économie additionnel appréciable qui est peu
exploité au Québec.
En effet, entre 30% et 50% des déplacements effectués par
des services de transport adapté le sont pour des personnes ambulantes;
dans certains cas, le pourcentage est même beaucoup plus
élevé. De plus, la moyenne d'utilisation au Québec varie
de 1,2 à 2 déplacements par véhicule-heure pour des
trajets d'une dizaine de kilomètres. La plupart du temps, il n'y a donc
qu'une personne à bord du véhicule. Les coûts unitaires
varient aussi énormément, soit de l'ordre de 10 $ à 20 $
le déplacement selon le système. Or, de tels déplacements
en taxi coûtent environ 8 $.
L'utilisation des taxis pour le transport des handicapés
ambulants représente donc une solution à la fois efficace et
économique et qui permettrait d'offrir, au même coût, une
plus grande capacité de transport à ce groupe de personnes.
Services collectifs. Au moins 150 expériences de taxi collectif
ont été tentées en Amérique du Nord depuis 20 ans.
Très peu sont toujours en cours et elles sont, dans tous les cas, soit
subventionnées, soit implantées dans des conditions tout à
fait particulières.
Nous ne citerons ici que certains exemples parmi les plus
éloquents. La ville d'Edmonton en Alberta remplaçait, en 1980,
certains circuits d'autobus par un service de taxi collectif fonctionnant le
soir, le dimanche et les jours fériés. En mars 1981, le service
était aboli. Les coûts élevés d'exploitation et le
faible achalandage rendaient le service inefficace.
Des services de taxi collectif de type "jitney" existent
présentement dans les villes américaines d'Atlantic City et de
San Francisco. Dans le premier cas, le service de taxi collectif remplace le
transport en commun, inexistant à Atlantic City. Dans le
cas de San Francisco, le service est offert uniquement aux heures de
pointe et concurrence taxi conventionnel et transport en commun. Ces deux
services fonctionnent avec une certaine rentabilité et leur
clientèle est constituée principalement d'anciens usagers de taxi
conventionnel et d'autobus.
D'autres services de taxi collectif desservent certains centres
d'activité. Les villes de Saint-Bernard Parish, en Louisiane, et
Peterborough, en Ontario, offrent de tels services. Ils ont des achalandages
quotidiens de quelque 200 passagers. Il importe cependant de souligner que ces
deux services sont subventionnés par des organismes publics.
La ville de Little Rock, en Arkansas, possède un service de taxi
collectif depuis 1952. Le système n'est pas subventionné, mais a
la particularité de fonctionner sur un territoire où le taux de
permis de taxi (conventionnels et collectifs) est de cinq permis par 10 000
habitants, soit quatre fois moins qu'à Québec et six fois moins
qu'à Montréal.
En d'autres termes, le taxi collectif ne devrait pas être
perçu comme la solution à tous les maux du taxi. Il serait
probablement plus juste de le percevoir soit comme un tremplin servant au
développement de services de transport en commun conventionnels, soit
comme un substitut pur et simple au transport par autobus.
Avant de s'aventurer sur un tel terrain, il faudrait d'abord
répondre aux questions suivantes: Devrait-on subventionner le transport
de passagers par taxi collectif? Le taxi collectif devrait-il être en
concurrence directe avec le transport en commun et le taxi conventionnel?
Devrait-on restreindre le marché du taxi collectif à certains
territoires ou l'étendre à l'ensemble du Québec? La
réponse à ces questions permettra vraisemblablement d'identifier
une formule de taxi collectif et un territoire d'essai sur lequel un projet
pilote serait tenté.
Quoi qu'il en soit, l'expérience démontre bien que les
chances de succès sont plus élevées dans des villes de
taille moyenne, où le transport en commun est réduit ou
inexistant et le nombre de permis de taxi par 10 000 habitants n'excède
pas 10.
En ce qui concerne d'autres formules de taxi collectif, tels le
transport à contrat lors d'événements spéciaux et
le transport d'écoliers, nous suggérons de les envisager dans un
contexte d'optimisation de l'utilisation des ressources de transport sur un
territoire défini.
Une intégration modale apparaît essentielle à
l'utilisation rationnelle de cas modes de transport collectif avec les
systèmes existants, dans la recherche d'une
complémentarité des réseaux.
Le covoiturage. Nous sommes en accord avec la position gouvernementale,
a savoir que le covoiturage est une mesure rationnelle visant à une
meilleure utilisation des ressources existantes et qui entraîne des
économies d'énergie, une meilleure utilisation des réseaux
routiers, une décongestion des centre-ville de même qu'un
soulagement des ressources pointes de transport collectif. Par ailleurs, cette
mesure a pour efffet de créer des déplacements additionnels
durant la journée et pour le retour à domicile. Ceci ne peut
qu'être bénéfique à l'industrie du taxi.
Les énergies nouvelles. L'incitation à l'utilisation
d'énergies autres que le pétrole est de nature à
répondre à nos objectifs d'efficacité et de protection de
l'environnement, particulièrement lorsqu'on analyse les avantages de
l'utilisation de carburants tels le propane ou le gaz naturel comprimé.
Le résultat des expériences menées au Québec
devrait nous guider dans ces avenues.
Les véhicules spécialisés. Compte tenu de
l'importance des problèmes actuels reliés aux voitures-taxis,
à savoir la capacité limitée, l'accessibilité, la
durabilité, les coûts d'exploitation et d'entretien, et compte
tenu des nouvelles avenues de marché envisagées, il importe de
favoriser le développement, l'implantation et l'utilisation de
véhicules spécialement conçus pour les services de taxi,
telles que la création québécoise du GSM.
Les systèmes auxiliaires. L'implantation de services
élargis de transport de personnes, tel que présenté plus
haut, requiert l'utilisation de systèmes auxiliaires ne faisant pas
partie des équipements de transport conventionnels.
Il n'y a pas de doute que les changements et déviations aux
services conventionnels de transport de personnes vont nécessiter des
systèmes améliorés pour la prise de commandes des
passagers, la répartition des chauffeurs, le contrôle des
déplacements de véhicules et pour l'application des
méthodes de tarification qui seront approuvées.
Les systèmes envisagés pour répondre à ces
besoins sont du type TELIMOVE, c'est-à-dire
Téléinformatisation des mouvements de véhicules. Ce sont
des infrastructures télématiques dont le développement et
l'implantation s'intègrent tout à fait au programme d'action
envisagé pour le virage technologique du Québec.
Recommandations. En somme, nous formulons les recommandations suivantes:
1. Promouvoir l'utilisation du taxi pour le déplacement des
handicapés ambulants. 2. Promouvoir l'utilisation du taxi collectif
à titre de complément ou substitut au transport collectif,
là où les conditions essentielles sont satisfaites à titre
de
complément au transport des personnes. 3. Promouvoir le
covoiturage. 4. Favoriser l'expérimentation contrôlée
d'autres formes d'énergie dans l'industrie du taxi. 5. Assurer
l'évaluation et l'expérimentation de véhicules plus
adaptés au transport par taxi, tel le GSM. 6. Considérer
l'industrie du taxi comme un mode de transport individuel et collectif et
s'assurer de son intégration et de sa complémentarité aux
systèmes existants. 7. Encourager le développement et
l'application des systèmes de gestion et d'infrastructures
télématiques.
Pour la collectivité, il sera toujours plus avantageux de
coordonner positivement les divers éléments affectant le
transport des personnes. Si les résultats des recommandations
formulées plus haut en vue d'agir positivement sur la demande ne se
révèlent pas suffisants, il sera toujours possible de prendre des
mesures en vue de limiter l'offre. Merci.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Clair: Permettez-moi d'abord de remercier M. Reeves, M.
Gratton et M. Alepin de la préparation de ce mémoire parce que,
effectivement, comme on l'a souligné tantôt, c'est un
comité de bénévoles qui a travaillé au projet De
nouvelles avenues pour le taxi. Je pense que cela mérite d'être
signalé. L'Association québécoise du transport et des
routes n'a qu'un point de vue technique à exprimer, avec les deux
objectifs de répondre au besoin de mobilité et de rechercher
l'efficacité des systèmes de transport des personnes. C'est donc
dire tout l'intérêt que les membres de la commission peuvent
porter à un mémoire comme celui-là.
M. le Président, deux points en particulier ont retenu mon
attention dans le mémoire. Sur plusieurs points, on confirme en quelque
sorte, on valide les orientations retenues par le ministère, avec un
certain nombre de nuances, de limites quant au taxi collectif, notamment.
Vous vous prononcez clairement pour la légalisation du
covoiturage en affirmant que cette mesure aura pour effet de provoquer des
déplacements additionnels durant la journée pour le retour
à domicile, ce qui ne peut qu'être bénéfique
à l'industrie du taxi. Vous avez sûrement entendu parler
déjà de la réticence traditionnelle du milieu du taxi
à la légalisation du covoiturage, voyant dans cette
légalisation une possibilité de perdre du marché
plutôt que de l'accroître. Cette affirmation que vous faites,
est-ce qu'elle est basée sur une impression ou si vous avez
gratté un peu, analysé quelles pourraient être les
conséquences sur l'industrie du taxi?
M. Gratton (Georges): M. le ministre, je pense que quand on
analyse la situation des déplacements particulièrement en milieu
urbain, on constate qu'environ 85% des déplacements de l'industrie du
taxi le sont pour de courtes distances, de un à deux milles. On constate
aussi que les déplacements par véhicule automobile sont en
moyenne beaucoup plus élevés, particulièrement lorsque les
gens font du covoiturage, comme il y en a qui en font actuellement, leur
distance moyenne de parcours est de l'ordre de 15 kilomètres. C'est dire
qu'on constate que le marché du taxi n'est absolument pas celui du
covoiturage, tout comme le marché du taxi et du covoiturage n'est pas
celui du transport en commun. Je citerai un exemple pour illustrer cela.
À la commission de transport de Laval, on avait l'habitude de dire que
13 500 personnes de Laval venaient vers Montréal durant la
journée et que 16 500 personnes de Montréal venaient vers Laval
par transport en commun le soir; c'est-à-dire qu'il y a un
déplacement de l'ordre de 20% de la population du transport en commun
qui se rend à Montréal par des moyens autres, comme le
covoiturage, qui revient le soir par transport en commun ou par taxi et qui,
durant la journée, est dépendant d'autres modes de transport que
de la voiture et du covoiturage. Alors, c'est vous dire qu'effectivement il y a
des déplacements vers l'industrie du taxi et vers le transport en commun
par l'industrie du covoiturage, si on peut l'appeler ainsi.
M. Clair: C'est un achalandage induit au taxi par le
développement progressif du covoiturage.
M. Gratton (Georges): Oui, puisque tous les gens qui font partie
de l'équipe de covoiturage ne finissent pas nécessairement
à la même heure le soir et ils ne vont pas toujours à la
même destination durant la journée.
M. Clair: Merci. Ma deuxième question. Même si le
commentaire est bref. On fait allusion à l'article 4.6 des
systèmes auxiliaires. On dit: "L'implantation de services élargis
de transport de personnes tels que présentés plus haut, requiert
l'utilisation de systèmes auxiliaires ne faisant pas partie des
équipements de transport conventionnels." On parle de la
répartition des chauffeurs, du contrôle de déplacement de
véhicules, de l'application de méthodes plus sophistiquées
de tarification. On ajoute: "Les systèmes envisagés pour
répondre à ces besoins sont de type TELIMOVE,
téléinformatisation des mouvements de véhicules. Ce sont
des infrastructures télématiques dont le développement et
l'implantation s'intègrent tout à fait bien au
programme d'action envisagé pour le virage technologique du
Québec." On voit plus ce qui se passe à l'étranger
lorsqu'on fait une mission de travail spécifique que ce qu'on voit chez
nous et qu'on pourrait voir tous les jours. De retour d'une mission de travail
avec des élus de la région de Montréal sur les questions
de transport en commun dans les villes de Paris, Lyon, Marseille et Hambourg,
ce qui m'a le plus frappé sur le plan technique, c'est l'utilisation
très poussée de l'informatique justement dans le contrôle
des mouvements de transport, un souci de mettre à contribution tout le
potentiel offert par l'informatique en matière de rationalisation, de
productivité des modes de transport. Cela m'a frappé parce que je
pense qu'il y a effectivement beaucoup à faire là-dessus. (17
heures)
En discutant avec les techniciens de la Communauté urbaine de
Montréal, il y a peu de temps, on m'expliquait que, quitte à ce
que ce soit vérifié, si on contrôlait mieux la
fréquence de certaines rames de métro, on pourrait éviter
pendant longtemps l'achat de matériel additionnel avec du
matériel informatique un peu plus sophistiqué. Voici ma question.
Est-ce que l'AQTR s'est penchée sur l'état de l'utilisation de
l'informatique dans les systèmes de transport au Québec,
transport de personnes, transport de surface? Quelles sont les conclusions qui
se dégagent, le cas échéant?
M. Gratton (Georges): En fait, je pense que vous avez raison, M.
le ministre. En Europe, on voit beaucoup d'intégration des
systèmes informatiques au contrôle et à la gestion des
transports en commun, en fait, de tous les systèmes de transport. On
peut facilement s'en inspirer. Il y a des cas d'application ici au
Québec. Mais je laisserais M. Pierre Alepin répondre à
votre question puisqu'il est lui-même spécialiste en informatique
dans le domaine des transports. Pierre.
M. Alepin (Pierre): Merci. M. le ministre, pour répondre
à votre question à savoir si l'AQTR s'est penchée sur les
systèmes d'informatique appliqués au transport, permettez-moi de
vous dire que nous commençons présentement à nous pencher
sur le sujet. Nous allons avoir un premier colloque sur l'utilisation de
l'informatique dans les transports au mois de mai prochain.
Au nom de l'AQTR, c'est assez difficile de vous répondre
techniquement sur le sujet, mais je suis à votre disposition pour
répondre d'après mon expérience personnelle.
M. Clair: En conclusion, M. le Président, il
m'apparaîtrait que cela pourrait être très
intéressant, dans un premier temps, de dresser ce que j'appelais un
état de la situation comparatif à ce qui se fait ailleurs dans le
monde, pour voir si le niveau de pénétration, la mise à
contribution de l'informatique est suffisante au Québec
présentement, que ce soit en termes de transport par taxi, de transport
par autobus, de coordination de différents modes de transport. C'est une
analyse qu'on aurait avantage à faire. Si l'AQTR est
intéressée à s'y pencher, je serais prêt à
envisager - je le dis spontanément - une contribution du
ministère des Transports pour essayer de dresser cet inventaire s'il n'a
pas déjà été fait quelque part ailleurs
auparavant.
M. Gratton (Georges): En fait, c'est un projet qui nous
intéresse grandement. Comme le soulignait Pierre, il va y avoir un
colloque prochainement sur l'informatique dans le domaine des transports. L'an
prochain, fort probablement que notre congrès international - puisqu'on
espère en avoir un avec l'aide du ministère fort probablement -
portera sur l'informatique dans le domaine des transports, son implication, son
utilisation et à quel point cela peut nous permettre de solutionner et
de faire avancer l'état de l'art dans le domaine.
M. Reeves: M. le ministre, lors d'un colloque, récemment,
à l'Association des routes et transports du Canada, quelques ateliers
ont étudié ce sujet. Son congrès qui a lieu à
l'automne - à Calgary ou Edmonton, je ne me souviens pas - va porter
encore là-dessus. L'informatique, cette technologie de pointe, nous
tient à coeur et elle nous bouscule tout le monde dans notre vie
d'aujourd'hui, parce que c'est une technologie qui a évolué
tellement rapidement qu'on se doit de la connaître ou même de se
recycler si on veut.
M. Clair: C'était ma dernière question, M. le
Président. Effectivement on doit s'y intéresser. Quand on
m'affirme, par exemple, que dans le secteur du transport en commun dans la
région de Montréal, 5 000 000 $ investis dans l'informatique
pourraient épargner 100 000 000 $ d'investissements dans le
matériel roulant, cela me fait dresser les oreilles comme ministre des
Transports. Cela suscite toutes sortes de questions. C'est la raison pour
laquelle j'ai posé des questions là-dessus. Je vous remercie.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: M. le Président, je voudrais remercier, au
nom de l'Opposition, l'Association québécoise du transport et des
routes d'avoir présenté ce mémoire à notre
commission parlementaire. Je constate, et je
pense que c'est une constante dans la plupart des mémoires que
nous avons eus jusqu'ici, une volonté de céder le transport des
personnes handicapées à l'industrie du taxi. C'est évident
que pour le gouvernement, ce sera moins coûteux et pour les
handicapés, ce sera un service plus adéquat.
Quant au service collectif, vous vous êtes peut-être
penchés de façon plus sérieuse sur la majorité des
mémoires que nous avons reçus. Ce que je constate, c'est que vous
avez raison de dire que le transport par taxis collectifs est un substitut pur
et simple au transport par autobus. Lorsqu'on regarde les différentes
expériences que vous avez analysées, on peut se poser la question
que c'est peut-être un transport de taxi collectif. Évidemment, il
n'y a pas eu au gouvernement une première phase d'un projet pilote
actuellement, peut-être que l'interrogation que je me pose, compte tenu
qu'on n'a aucune expertise ni aucune compétence dans ce domaine au
Québec, c'est qu'il sera peut-être obligatoire pour le
gouvernement, de subventionner ledit transport collectif. D'autre part, que
vous insistiez pour qu'il y ait un projet pilote, je pense qu'aujourd'hui, nous
sommes déjà en retard. Un projet pilote aurait dû
naître il y a deux ou trois ans, compte tenu des études qui ont
été faites à l'intérieur du ministère des
Transports.
Quant au covoiturage, il y avait une certaine compétition avec le
taxi, mais je tiens compte des informations que vous donnez du comité
des dix, qui sont probablement personnelles. Évidemment, avec le temps,
on saura si cela apportera une croissance à l'industrie du taxi, ce dont
je me permets de douter un peu, personnellement. C'étaient des
commentaires d'ordre général, mais je pense, en ce qui concerne
l'informatique, que c'est une nouvelle avenue. Je pense que le gouvernement
doit, s'il y a lieu, épargner des coûts à quelque
échelon que ce soit du transport. Il est important de s'impliquer
à cet effet, mais je tiens compte qu'à l'égard du service
des transports de taxis collectifs, qu'on ne peut pas prévoir
actuellement les résultats et qu'on est devant une interrogation. Je
suis convaincu que cela ne rentabilisera pas de façon adéquate
l'industrie du taxi dans la province de Québec. Je vous remercie.
Le Président (M. Desbiens): Je remercie les membres de
l'Association québécoise du transport et des routes qui nous ont
présenté leur point de vue. Je demanderais maintenant à
l'Association haïtienne des travailleurs du taxi de s'approcher, s'il vous
plaît!
M. Barthélémy, coordonnateur, veuillez nous
présenter celui qui vous accompagne, s'il vous plaît!
Association haïtienne des travailleurs du
taxi
M. Barthélémy (Gérard): M. Cicéron,
coordonnateur adjoint de l'association.
M. Clair: S'il n'y a pas d'autres personnes, j'aimerais, si c'est
possible, qu'ils s'installent plus à gauche, j'aurais plus de
facilité à voir nos invités. Parfait, merci.
M. Barthélémy: Notre association est heureuse de la
tenue de cette commission parlementaire sur le taxi. Le mémoire que nous
vous présentons n'est pas un document tout à fait
étoffé. Vous comprendrez que la situation même des gens qui
font du taxi à Montréal nous empêche de produire un travail
plus complet. Cependant, ce document a l'avantage de faire écho du point
de vue de citoyens du Québec vivant à Montréal et qui
doivent chaque jour faire face à une situation des plus difficiles dans
la recherche du pain quotidien.
Dans la première partie de notre mémoire, il y a la
présentation de notre organisme et, dans les trois volets à
l'intérieur, nous essayons d'apporter notre contribution aux trois
points soulevés dans le document du ministre des Transports.
L'Association haïtienne des travailleurs du taxi, organisme
à but non lucratif incorporé au Québec en mars 1982, a
comme objectifs principaux la promotion des droits et la défense des
intérêts fondamentaux des artisans et chauffeurs de taxi
réguliers; la mise sur pied de mécanismes d'autodéfense et
de représentation pour la revendication des droits des travailleurs du
taxi; l'information du public et des institutions concernées sur la
situation et les difficultés vécues dans l'industrie du taxi par
les membres des minorités surtout visées; l'action auprès
des autorités compétentes afin de les porter à assumer
toutes leurs responsabilités dans ce domaine; la recherche de voies et
l'établissement des bases d'un processus de consultation communautaire
dans le but d'aplanir les difficultés qui surgissent entre travailleurs
du taxi appartenant à des ethnies différentes.
L'Association haïtienne des travailleurs du taxi prend acte du
désir du gouvernement du Québec de mettre un terme au marasme qui
sévit depuis trop longtemps dans l'industrie du taxi, par la
présentation du document du ministère des Transports: De
nouvelles avenues pour le taxi. L'Association estime cependant que le
programme d'action présenté dans le document du ministère
des Transports ne peut permettre d'espérer vraiment une
amélioration sensible dans cette industrie, du moins dans la
région de Montréal qui nous intéresse plus
particulièrement.
Nos considérations, qui seront axées sur
trois aspects indispensables à toute réforme de
l'industrie du taxi - rentabilité, décentralisation et
concertation - sont loin d'être exhaustives. Nous les proposons,
néanmoins, dans un esprit d'ouverture et de collaboration.
La rentabilité. L'industrie du taxi à Montréal est
loin du seuil de la rentabilité en raison du trop grand nombre de permis
en circulation. C'est là le problème majeur de cette industrie,
la source de nombreux maux et de multiples frictions. Le ministère des
Transports a innové et fait preuve d'originalité en proposant,
plutôt qu'une réduction du nombre de permis, l'ouverture de
nouveaux marchés.
Le document du ministère des Transports propose de
légaliser certaines pratiques courantes, mais illégales, comme
par exemple, le transport des biens. Si nous applaudissons à une telle
mesure, nous devons relever qu'il ne s'agit pas d'un nouveau marché
à proprement parler.
Le document propose également que de nouveaux services puissent
être rendus de façon inexclusive par le taxi: le transport de
personnes handicapées, transport intégré au transport en
commun, etc. Si ces projets nous semblent positifs, leur réalisation
à Montréal paraît plutôt problématique et
pourrait même être la cause de graves conflits. De plus, cela
pourrait n'aboutir qu'à déplacer les problèmes,
qu'à exporter à d'autres secteurs les difficultés du
taxi.
Enfin, il n'est pas dit que ces mesures suffiront à
éponger le surplus de permis actuellement en opération à
Montréal. Il nous semble donc qu'une étude spéciale est
nécessaire quant à la viabilité et l'opportunité de
ces mesures à Montréal.
Il faut signaler, de plus, que le document du ministère passe
totalement sous silence des problèmes concrets de rentabilité
comme le coût considérable des assurances requises; les frais
onéreux exigés pour l'entretien des voitures; le prix très
élevé de l'essence à Montréal ainsi que celui de la
taxe de vente sur les voitures-taxis.
Rien n'est dit sur d'éventuelles mesures qui permettraient
d'alléger, dans ces domaines, le fardeau des travailleurs du taxi,
malgré l'escalade du coût de la vie et la diminution de la
clientèle du taxi. (17 h 15)
La décentralisation. Le ministère des Transports se
propose de transmettre aux autorités locales la tâche de
préciser les normes d'exploitation, d'établir les règles
de qualité de service et de fixer les tarifs en raison des
problèmes résultant de la lourdeur, de l'éloignement et de
la complexité de l'appareil gouvernemental."
Nous en concluons que nous devrons attendre ce transfert des pouvoirs et
espérer que les autorités concernées voudront bien nous
consulter avant de trouver réponse à de graves questions comme,
par exemple: l'insuffisance des stands, surtout aux bons endroits, et
l'impossibilité d'utiliser ces stands aux heures les plus rentables;
l'existence de "concessions" dans les édifices publics, hôpitaux,
gares ou sur les propriétés publiques (abords d'hôtels); la
surutilisation des voitures des flottes.
Nous craignons que cette attente soit fort longue et que le marasme
actuel ne s'aggrave lourdement. Mais il est un point qui ne saurait souffrir
d'attente et sur lequel le ministère des Transports se doit de se
prononcer clairement et sans délai: le droit de tous les travailleurs du
taxi, en règle avec la loi, de vivre de leur métier et ce, sans
aucune discrimination.
Nous ne pouvons taire notre étonnement de voir que le document du
ministère ne prévoit aucune disposition qui permettrait de
prévenir la répétition de situations de discrimination qui
ont pourtant fait la une de l'information durant plusieurs semaines, en juillet
1982. C'était à Montréal. Il est indéniable que le
ministère des Transports a été directement impliqué
dans la distribution des permis de taxi à l'aéroport de Dorval
dans des circonstances et avec des résultats qui nous ont fait craindre
d'assister à l'amorce d'un mouvement visant à éliminer le
plus possible de l'industrie du taxi les travailleurs haïtiens.
Les remous provoqués par l'affaire de la compagnie S.O.S. TAXI,
à la fin de juin 1982, n'ont pu que raviver ces craintes. Force est de
constater que jamais le ministère des Transports ne s'est
prononcé publiquement sur la discrimination ouverte pratiquée par
certaines compagnies ni sur l'utilisation de cette discrimination comme moyen
de concurrence déloyale envers les travailleurs haïtiens du taxi.
Il serait sain que, sur cette question, le ministère des Transports
démontre sans ambiguïté qu'il fait partie de la solution et
non pas du problème.
Au chapitre de la décentralisation, le document du
ministère annonce deux choix très importants:
A. la volonté de diminuer, voire d'éliminer la pratique
illégale mais courante de la vente à tempérament. À
notre avis, il faudrait accorder un délai pour permettre que soient
achevées les transactions en cours, afin de ne pas pénaliser ceux
que l'on veut protéger, les acheteurs.
B. le projet d'un moratoire temporaire sur la délivrance des
permis de chauffeur de taxi. Selon nous, ce moratoire devrait pouvoir durer
jusqu'à deux ans, surtout à Montréal. De plus, des mesures
doivent être envisagées en vue d'arriver à l'annulation de
certains permis détenus par des personnes exerçant
déjà un emploi à temps plein, par exemple les pompiers et
autres.
La concertation. Alors que le document du ministère des
Transports manifeste une
volonté de modifier la structure même de l'industrie du
taxi, aucun changement structurel n'est proposé pour favoriser la
concertation. On se contente de réaffirmer l'obligation de constituer
une ligue de propriétaires pour chaque agglomération. On
introduira la possibilité d'intervention du ministre dans
l'administration des ligues pour faire respecter le processus
démocratique; pour Montréal, c'est déjà chose
faite.
Nous sommes d'avis qu'au moins dans le cas de Montréal, il
faudrait aller plus loin: penser à modifier les structures mêmes
de la ligue en permettant, par exemple, aux artisans et aux
propriétaires de s'organiser sur des bases différentes,
même regroupées au sein de la ligue.
Nous pensons qu'il est indispensable que soit mise sur pied une
véritable table de concertation regroupant tous ceux qui sont
susceptibles d'intervenir dans l'industrie du taxi à Montréal,
à savoir: les autorités de la Communauté urbaine de
Montréal; les associations de services; les flottes; les
propriétaires artisans et, enfin, les chauffeurs.
Je crois qu'il revient au ministère des Transports de faciliter
la mise sur pied de cette table de concertation.
Même si l'Association haïtienne des travailleurs du taxi a
centré ses considérations sur trois thèmes
évoqués dans le document du ministère des Transports, De
nouvelles avenues pour le taxi, elle n'en demeure pas moins consciente que de
nombreuses questions et de nouveaux problèmes n'ont même pas
été soulevés, qui touchent de très près au
domaine de l'industrie du taxi. Les membres de l'association espèrent,
néanmoins, que leurs observations, leurs suggestions et leurs
réflexions, même limitées et incomplètes, pourront
contribuer avec celles d'autres groupes de travailleurs à
l'amélioration des conditions de travail et de vie de tous ceux qui,
dans la région de Montréal, ont fait du taxi leur gagne-pain
quotidien. Merci.
Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.
M. Clair: Permettez-moi, d'abord, de remercier M.
Barthélémy et M. Cicéron, de l'Association haïtienne
des travailleurs du taxi, d'avoir pris connaissance des nouvelles avenues que
nous proposons en matière de taxi et d'être venus nous faire part
de leur point de vue. D'ailleurs, j'ai eu l'occasion, avant la publication des
nouvelles avenues, de rencontrer des représentants de l'Association
haïtienne des travailleurs du taxi. C'est à ce moment qu'on avait
convenu qu'ils étudieraient la proposition gouvernementale et qu'ils
viendraient en commission parlementaire nous faire part de leur point de vue.
Nous l'apprécions aujourd'hui.
Je vais commencer mon commentaire par une affirmation non ambiguë
quant à la question de la discrimination dans l'embauche de chauffeurs
ou dans l'admission de chauffeurs. Il ne fait aucun doute que le
ministère des Transports et celui qui vous parle sont opposés
à la discrimination dans le secteur du taxi, au même titre que
dans les autres secteurs qui relèvent de ma juridiction. Cela dit, le
problème de la discrimination est beaucoup plus complexe qu'un simple
problème de transport. Nous pouvons effectivement, jusqu'à un
certain point, avoir un encadrement juridique qui incite à la
non-discrimination. Dans ce sens, dès que le rapport de la Commission
des droits de la personne sera connu, dans la mesure où il y aurait des
dispositions qu'on devrait inclure dans notre réglementation pour
favoriser la non-discrimination, nous les étudierons à leur juste
valeur. J'ajouterai même qu'en ce qui concerne la redistribution des
permis de taxi à l'aéroport de Dorval nous n'aurions aucune
objection, quant à nous, en particulier M. Jean-Jacques Lemieux qui a
beaucoup travaillé sur ce dossier avec le groupe de recherche sur la
rentabilité du taxi à Montréal, à aller expliquer
à la commission quel était l'esprit qui animait le
ministère des Transports du Québec dans la réglementation
qui a été adoptée, puisqu'elle ne visait nullement
à discriminer qui que ce soit.
La méthode retenue était assez simple, finalement.
C'était par tirage au sort. Les propriétaires pouvaient
participer au tirage pour seulement un permis de taxi. Ceci semble avoir eu
pour effet d'écarter effectivement les flottes. Les deux seules
conclusions qu'on puisse en tirer, c'est que, premièrement, il semble,
selon les informations qu'on m'a fournies, qu'il y ait eu peu de
propriétaires haïtiens qui aient postulé. Je crois qu'il y
en a eu moins d'une dizaine. Donc, les chances au tirage au sort étaient
d'autant plus limitées.
D'autre part, on pourrait prétendre que les travailleurs du taxi,
membres de l'Association haïtienne des travailleurs du taxi, probablement,
travaillent en plus grand nombre pour les flottes qui, effectivement, elles,
étaient un peu discriminées, si on veut, par la
réglementation retenue. Mais c'était une réglementation
qui ne visait nullement à discriminer qui que ce soit, mais simplement
à essayer d'offrir, au plus grand nombre possible de
propriétaires de permis de taxi, l'occasion d'être tirés au
sort dans ce cas-là.
Quant à nous, au ministère des Transports, on a agi, il
nous semble, dans le meilleur intérêt de l'industrie du taxi et
sans discrimination. On prendra connaissance avec beaucoup
d'intérêt des recommandations, des conclusions de la commission.
Également, on est prêt, en tout temps, à aller expliquer
à
la Commission des droits de la personne, si on y était
convié, quels sont les principes qui ont guidé l'action du
ministère des Transports dans ce cas-là et d'ailleurs, celle de
l'administration de l'aéroport de Dorval, puisque cela a
été fait conjointement avec elle.
Par ailleurs, ce qui m'inquiète, c'est essentiellement deux
choses. Comme le milieu du taxi, vous proposez la diminution du nombre de
permis de propriétaire de taxi. Vous proposez même, en ce qui
concerne les nouveaux chauffeurs, un moratoire de deux ans. Imaginons
qu'effectivement on procède, d'une façon ou d'une autre, au
rachat de certains permis de propriétaire de taxi, les chances sont
grandes que les personnes financièrement les plus vulnérables
vont vouloir vendre leur permis. Cela a de fortes chances d'être, dans
certains cas, des gens dont la rentabilité est marginale. Ma crainte est
celle-ci, et c'est la question que je vous pose. S'il advenait que ce soient
des propriétaires de permis membres de votre association qui vendent, ne
risquerait-on pas de voir là une façon d'essayer
d'éliminer des propriétaires de taxi qui sont membres de votre
association?
Même chose pour la question de la règle un homme une
voiture par jour. Si cette règle devait être implantée ou
si on devait décréter un moratoire complet de deux ans sur
l'émission de nouveaux permis, comment cela se passerait-il dans la
pratique? Je ne le sais pas et c'est ce qui m'inquiète un peu.
J'aimerais avoir votre point de vue là-dessus. Ne risquerait-on pas, en
procédant au rachat de permis ou à l'élimination d'un
certain nombre de permis de chauffeur, de toucher à un grand nombre de
membres de votre association?
M. Barthélémy: Je peux vous répondre, M. le
ministre. En passant, je veux dire que je souscris entièrement à
l'idée mise de l'avant par les représentants de la ville de
Montréal à ce sujet. Si on veut racheter des permis, cela se
fera, à mon humble avis, sur une base volontaire. On ne va pas imposer
à quelqu'un de vendre son permis. Cela dit, ceux qui vendront leur
permis, c'est parce qu'ils auront décidé de le faire.
Vous soulignez que, si on rachète des permis comme ceux qui font
le moins d'argent sont peut-être des nôtres et ils seront
peut-être portés à vendre leur permis. Je souligne
qu'actuellement, à Montréal, c'est l'ensemble des artisans
surtout qui est intéressé à se débarrasser des
permis. Si, éventuellement, il y a rentabilité, soit par
l'élargissement du marché ou par le rachat de certains permis,
ceux qui restent seront intéressés à demeurer sur le
marché. Le dégoût des artisans est attribuable au fait
qu'on passe des journées de 18 heures à ne rien faire,
finalement. C'est là le problème.
Quant aux membres de notre communauté, qui seront, eux aussi,
pénalisés par le fait qu'on décrétera un moratoire
sur l'émission de nouveaux permis de chauffeur, nous ne voyons pas
seulement notre communauté visée dans une telle démarche;
nous voyons l'ensemble du monde du taxi qui est plein à craquer, si vous
voulez. Il y a un marché saturé, il y a trop de monde dans ce
secteur d'activité. Nous pensons à un moratoire de deux ans.
Qu'il pénalise des gens de notre communauté ou d'autres
communautés, c'est un sacrifice qu'on peut se payer, qu'on doit se
payer.
M. Clair: Pour augmenter la rentabilité, il y a trois
grandes avenues: l'élargissement à de nouveaux marchés,
l'ouverture de nouveaux marchés, le rachat ou l'extinction d'un certain
nombre de permis de propriétaire ou encore la règle un homme une
voiture. Sur cette question, est-ce que votre association a une position
précise? (17 h 30)
M. Barthélémy: Nous pensons que le système
un homme par voiture ne fera pas un bien excessif à cette industrie
vraiment malade, surtout à Montréal, mais cela peut apporter un
léger soulagement à la situation actuelle. D'après les
échanges avec les chauffeurs de notre association et de notre
nationalité, dans l'ensemble du monde du taxi, il y a consensus sur ce
point. Un homme par voiture peut apporter une certaine amélioration,
mais la résistance est, je pense, chez les grands propriétaires
de flottes de taxis.
M. Clair: Si une telle mesure devait être mise en
application par force de loi ou par la volonté de ligues ou des
associations de services une fois qu'elles seraient pleinement
habilitées à le faire, est-ce que vous verriez des mesures
particulières à prendre pour s'assurer qu'il n'y ait pas de
discrimination dans le choix qui se ferait des chauffeurs par les
propriétaires de flottes? Voyez-vous des précautions
particulières à prendre sur cette question?
M. Barthélémy: À mon avis, la seule
précaution qu'on devrait prendre, c'est de procéder avec justice
pour tous. Si on procède avec justice, il n'y a aucune chance que les
membres de notre association soient victimes d'une mesure en ce sens. Nous
avons une étude qui nous prouve que 60% des Haïtiens qui font du
taxi à Montréal sont propriétaires de leur voiture.
M. Clair: 60%?
M. Barthélémy: Oui; 7% sont copropriétaires,
23% sont locataires.
M. Clair: En résumé, votre association
se prononce en faveur de l'hypothèse qui a été
invoquée ce matin par M. Le Lannic, de la ville de Montréal,
à savoir une cotisation additionnelle chez les détenteurs de
permis pour éliminer, éteindre ou racheter des permis. Elle se
prononce également en faveur de la règle un homme une
voiture.
M. Barthélémy: Oui.
M. Clair: Sur ces deux questions?
M. Barthélémy: On n'a pas de problème sur
ces deux approches.
M. Clair: Sur ces deux approches? M. Barthélémy:
Oui.
M. Clair: De même que vous favorisez l'ouverture de
nouveaux marchés. Là, je pense que cela va.
Enfin, vous indiquez, relativement aux ligues de taxis, à la page
6 de votre mémoire: "Nous sommes d'avis qu'au moins dans le cas de
Montréal il faudrait aller plus loin: penser à modifier les
structures mêmes de la ligue en permettant, par exemple, aux artisans et
aux propriétaires, sur des bases différentes, même
regroupés au sein de la ligue." Je n'ai pas très bien compris
quels étaient les changements que vous proposiez aux structures
mêmes de la ligue. Pourriez-vous nous donner un peu de précisions
là-dessus? Qu'est-ce que vous voyez comme modifications aux structures
de la ligue?
M. Barthélémy: En ce qui concerne la ligue A-11, la
plus grosse ligue de Montréal, nous pensons que sa structure actuelle,
c'est-à-dire un conseil d'administration de sept membres pratiquement
coupés de la base, n'ayant que des relations d'affaires, si vous voulez
- envoi de comptes pour la cotisation annuelle et quelquefois d'une brochure
quelconque pour faire de la publicité pour ses projets ou pour des biens
comme les pneus et certains garages - ne peut vraiment pas servir les
intérêts de ceux que cette ligue était censée
représenter. Nous verrions plutôt une ligue militante où
les relations entre la base et le sommet seraient soutenues, une ligue avec des
instances fonctionnelles qui permettraient aux membres d'avoir leur mot
à dire, de faire valoir leur point de vue. Et...
M. Clair: Je m'excuse de vous interrompre, M.
Barthélémy. Je souhaite, comme ministre des Transports, que la
ligue soit plus dynamique, qu'elle fonctionne, qu'elle crée des groupes
de travail, etc., mais je pense que cela ne se fait pas par des changements
à la loi. Cela doit venir de l'interne, de l'intérêt que
les membres portent à leur ligue. C'est pour cette raison que, quand
vous parliez des modifications aux structures de la ligue, je
répète ma question. Faire des voeux pieux, c'est une chose; voir
comment on peut modifier les structures de façon à atteindre les
objectifs qu'on partage tous les deux, cela en est une autre. C'est sur cela
que j'aimerais avoir votre opinion.
M. Barthélémy: Si vous voulez une précision,
je parlais des structures externes de fonctionnement de cette ligue. Nous avons
raté une occasion de le faire au cours de l'automne quand le
ministère des Transports est intervenu dans le litige qu'il y avait
pratiquement entre cette ligue et ses membres. Nous avons vu cela de cette
manière: le ministère des Transports est venu et il a
tranché la question. Il a mis tout le monde à sa place et,
après les élections, on commence à marcher dans cette
même ligue qui, aux yeux de ses membres, ne voulait rien dire et n'avait
aucun sens. Malgré tout l'effort qu'on a fait durant l'automne, tout
l'argent qu'on a dépensé, tous les investissements qu'au niveau
même du ministère des Transports on a faits, on est dans la
même situation qu'avant, une ligue qui, pratiquement, ne veut rien
dire.
M. Clair: Ce que vous mettez en cause, n'est-ce pas davantage
l'existence même de la ligue que ses structures? Parce que, sur des
modifications aux structures, s'il y en avait de plus précises que
celles que vous venez d'évoquer à proposer, je serais tout
disposé à les examiner, mais je ne vois pas tellement ce qu'on
peut faire d'autre que de proposer ce qu'on propose justement dans notre
programme d'action. Est-ce qu'au fond ce n'est pas davantage l'existence
même de la ligue que vous mettez en cause?
M. Barthélémy: Je vous ai déjà
souligné cet aspect. À notre avis, une ligue est censée
représenter ses membres. Si, dans la pratique, il n'y a aucun signe que
cette ligue soit en mesure d'intervenir et de défendre plus ou moins
efficacement l'intérêt de ses membres, on peut se permettre de se
poser des questions sur son existence même ou sur l'utilité
d'avoir cette ligue. Nous pensons qu'il y a toujours place pour des
améliorations, mais il faut vraiment être sensibilisé
à cette question que la ligue A-11 qu'on a maintenant reste telle
qu'elle est présentement, aujourd'hui ou demain, à notre avis,
c'est de l'argent qu'on soutire de la poche de ses membres pour aider seulement
quatre ou cinq personnes à se tailler une position, et c'est tout.
M. Clair: En tout cas, M. le Président, en concluant,
avant de donner l'occasion à mon collègue, le
député de Jeanne-Mance et aux autres de poser des questions, je
peux simplement, quant à moi, vous encourager et
encourager les membres de votre association, membres de la ligue A-11
également, à s'activer, justement, eux-mêmes afin de rendre
vivante cette ligue autant que c'est possible de le faire. Comme ministre des
Transports, c'est à peu près tout ce que je peux faire: souhaiter
que les membres s'intéressent à la vie de leur ligue et que ce ne
soit pas simplement le ministre des Transports qui, une fois de temps en temps,
est obligé de retourner par loi spéciale mettre de l'ordre. Ce
que j'ai déjà indiqué, ce n'est pas un jeu auquel le
Parlement se prêterait à tous les deux ou trois ans, je pense. La
prochaine fois qu'il s'en mêlerait, il s'en mêlerait pour la
dernière fois, j'ai l'impression.
M. Barthélemy: C'est là notre problème: on
n'a pas les moyens d'intervenir pour faire bouger les choses dans cette
ligue.
M. Clair: C'est la vie interne de la ligue.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: Seulement un commentaire. Je vais passer la parole
au député de Sainte-Anne et je reviendrai après lui. Au
niveau des assemblées de la ligue A-11, ils n'en ont pas eu depuis deux
ans et demi.
M. Clair: II y en a eu deux.
M. Bissonnet: II y en a eu une dernièrement pour les
élections, point. Il n'y a pas d'implication des chauffeurs de taxi dans
une ligue lorsqu'elle ne tient pas d'assemblées. Évidemment, il y
a un nouveau conseil d'administration. Si on a des assemblées, on peut
inciter les propriétaires, les chauffeurs de taxi - en fait, ce sont les
propriétaires, ce ne sont pas les chauffeurs -à s'impliquer
là-dedans. Durant deux ans, il n'y a pas eu d'assemblées, pas
d'états financiers. Si on veut qu'une ligue fonctionne, il faut qu'il y
ait un contact direct et quotidien avec ses membres.
M. Clair: On fait les mêmes voeux, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: Merci, M. le Président. M. Barthélemy, au
nom de l'Opposition, je voudrais vous remercier, vous et vos camarades,
d'être venus ici, de Montréal. J'imagine que vous avez fait du
covoiturage, tous ensemble. Je sais comment il est difficile de préparer
un tel mémoire. Il y a tout de même des points là-dedans
qui sont différents de ceux des autres mémoires. On a quelque
chose en commun: nous sommes aussi un groupe minoritaire. On pense aujourd'hui
à vivre en minorité.
J'ai quelques questions à poser. Vous parlez de votre
association, de ses objectifs principaux. Vous parlez de défendre les
intérêts des artisans, chauffeurs de taxi, etc. Est-ce que ce sont
seulement des Haïtiens qui peuvent entrer dans votre association ou si
vous acceptez un gars comme moi, d'origine hollandaise? Je viens d'un bon petit
pays, la Hollande, je suis venu comme immigrant. Si j'avais un taxi, est-ce que
j'aurais le droit de devenir membre chez vous?
M. Cicéron (Willy): Pouvez-vous répéter
votre question?
M. Polak: Avez-vous compris ma question?
M. Cicéron: Oui, mais je veux que vous repreniez la
question.
M. Polak: Dans votre Association haïtienne des travailleurs
du taxi, quand je lis vos objectifs, je ne vois pas qu'ils limitent le
membership à ceux qui sont haïtiens. L'association s'appelle
l'association haïtienne. Est-ce que d'autres gens qui travaillent dans
l'industrie du taxi, à part les Haïtiens, peuvent devenir
membres?
M. Cicéron: Nous avons formé une association de
travailleurs haïtiens. Par contre, nous pouvons collaborer et nous sommes
là pour collaborer avec tous les chauffeurs de taxi, artisans du taxi
pour travailler ensemble afin d'améliorer la situation du taxi.
M. Polak: Parfait. Ma deuxième question est la suivante.
À la page 3 de votre mémoire, vous parlez, comme d'ailleurs tous
les groupes de taxi, soit les artisans, soit les chauffeurs nous l'ont soumis,
du coût des assurances et du prix très élevé de
l'essence. Cela revient toujours. Vous étiez ici, ce matin, quand le
ministre a répondu: Ce n'est pas grave, c'est seulement 1200 $ par
année de taxe sur l'essence. Pour les assurances, ce n'est pas grave,
non plus, parce qu'il y a eu un beau petit mémoire de quelqu'un, le
Surintendant des assurances ou je ne sais qui, qui dit que, vraiment, la
situation n'est pas différente de celle qu'il y avait avant la nouvelle
loi sur l'assurance.
Avez-vous du matériel de comparaison avec quelqu'un qui a un taxi
à Toronto ou dans d'autres villes? Parce qu'il y a beaucoup
d'Haïtiens qui sont dans d'autres villes au Canada aussi. Vous avez tout
de même des contacts entre vous, dans la
communauté. Avez-vous des statistiques pour démontrer que,
n'importe où ailleurs au Canada, ils font beaucoup mieux qu'à
Québec ou à Montréal?
M. Cicéron: Malheureusement, nous n'avons pas de contact
avec d'autres chauffeurs haïtiens, qu'ils soient à Toronto ou
à New York. Ce que nous pouvons dire, si on fait la comparaison entre
Montréal et Toronto, c'est qu'à Toronto, où la population
est beaucoup plus élevée qu'à Montréal, on a
à peu près la moitié du nombre de permis de taxi. Donc, le
problème du nombre élevé de permis que tous les
intervenants ont souligné ici, c'est un fait irrévocable. Comme
nous le soulignons dans notre document, c'est le problème majeur du taxi
à Montréal.
M. Polak: Au point de vue des frais de fonctionnement, avez-vous
du matériel comparatif - peut-être que le ministre pourrait le
faire vérifier par un de ses adjoints ici, il y en avait douze hier soir
-entre Toronto, Ottawa, Calgary et Vancouver, pour savoir combien cela
coûte pour faire fonctionner un taxi par année, en moyenne, et ce
qu'il reste comme revenu net pour un tel artisan? Il y a certainement des
statistiques qui existent. J'aimerais bien le savoir. J'ai entendu dire que
dans la province de Québec, à Montréal et dans les grands
centres, c'est presque devenu scandaleux en comparaison des autres. (17 h
45)
M. Clair: Je n'ai pas de chiffres là-dessus, mais une
chose est évidente. Comme le soulignait M. Barthélemy, je ne
pense pas que ce soit une question de coût de fonctionnement, mais une
question d'ajustement de l'offre et de la demande. Comme M. Barthélemy
l'indiquait - ce sont à peu près les proportions - à
Toronto, il y a deux fois moins de taxis pour une population à peu
près équivalente; c'est évident que cela joue sur la
rentabilité de l'industrie.
M. Polak: Mon dernier point, M. Barthélemy, c'est un point
très important pour vous et, personnellement, je le trouve très
important aussi, c'est la question de la discrimination. Tout à l'heure,
le ministre a dit - je suis content qu'il l'ait dit même si c'est
peut-être une déclaration pieuse - qu'il était contre la
discrimination, qu'il ne pouvait tolérer ça, etc. Ensuite, il a
dit qu'il attendrait le résultat de ce qui se passera à la
commission pour voir s'il y a des changements à faire. Mais oublions,
pour le moment, le résultat de ce qui se passera devant la commission.
Avez-vous, comme association, des suggestions sur le plan pratique à
offrir maintenant au ministre des Transports dans le secteur du taxi?
Peut-être y a-t-il quelques points sur lesquels vous pourriez insister ou
suggérer pour qu'on en tienne compte bientôt concernant justement
ce facteur. Ou peut-être préféreriez-vous dire: On a fait
nos recommandations à la commission et on va attendre le
résultat, comme le ministre l'a dit tout à l'heure.
M. Barthélemy: Pour nous, c'est trop long d'attendre le
résultat de la commission. Nous aimerions que le ministre fasse quelque
chose d'urgence en ce sens. Certaines compagnies, pour concurrencer une autre
compagnie, ne veulent pas engager de Noirs sous prétexte d'attirer plus
de clientèle. Plusieurs compagnies manifestent de la discrimination
vis-à-vis de la communauté noire et particulièrement des
Haïtiens. Nous en avons parlé déjà, si je me rappelle
bien, lors de notre première entrevue avec le ministre à ce
sujet. Par exemple, prenons la compagnie Coop de Montréal et la
compagnie Co-Op de l'Est qui veulent concurrencer, dans le nord-est de la
ville, la compagnie SOS, la compagnie Champlain, dans l'ouest, pour accaparer
la clientèle des hôtels du centre-ville. C'est dit verbalement aux
chauffeurs. J'ai réussi, dernièrement, à faire parler un
chauffeur de la Co-Op de l'Est qui défend parfois les Haïtiens et
qui a reçu verbalement des menaces du président de la Co-Op. S'il
veut appuyer l'entrée d'un Noir dans la Co-Op, il va se faire bousculer,
se faire mettre dehors.
M. Polak: Qu'est-ce que le ministre des Transports pourrait
faire, puisque vous réclamez une action immédiate, en termes de
mesures concrètes?
M. Barthélemy: Ce que je demande au ministre des
Transports, ce n'est pas de forcer les compagnies à engager des Noirs,
mais il y a effectivement de la discrimination chez ces compagnies dans le but
d'attirer la clientèle. Nous demandons au ministre des Transports
d'insérer, dans une loi qui ne sera pas trop arbitraire en ce sens,
quelque chose qui dirait que, si nous avons un permis de taxi, nous avons le
droit de travailler dans l'association de notre choix, ce qui n'existe pas. Si
on va à la Coop de Montréal, on ne va même pas accepter
notre demande; on va nous dire qu'il n'y a pas de place pour nous ici.
Par conséquent, le ministre des Transports, peut apporter
certaines corrections à la loi en s'appuyant sur ce que dit la
Commission des droits de la personne. C'est une atteinte aux droits de la
personne. Il peut demander que ces compagnies aient un quota de Noirs afin
d'éliminer cette pratique discriminatoire. Sinon, il va toujours y avoir
une querelle entre telle ou telle compagnie. La Coop de Montréal, la
Co-Op de l'Est et Champlain taxi disent ouvertement aux chauffeurs: Vous ne
devez jamais engager de Noirs sur vos voitures-
taxis. On a un exemple très clair. Un chauffeur de Taxi Moderne a
acheté un taxi de la Co-Op de l'Est à midi, et à quatre
heures du matin, on a coupé son appel parce qu'un Blanc lui avait vendu
son taxi.
M. Clair: M. le Président, si le député de
Sainte-Anne me permet un bref commentaire avant qu'il continue ses questions,
c'est une avenue qui m'avait été proposée avant même
la publication de De nouvelles avenues pour le taxi. Mais le
député de Sainte-Anne va comprendre mon point de vue, j'en suis
sûr. La discrimination est déjà, en soi, si on veut,
déclarée illégale par la Charte des droits et
libertés de la personne. Je me demande comment on pourrait, dans une
réglementation, en vertu du règlement no 6 qui serait le seul
moyen d'agir, rendre plus illégal quelque chose qui est
déjà prévu dans la Charte des droits et libertés de
la personne.
Quant à des mesures du type de celles qu'évoque M.
Cicéron, je pense que la Commission des droits de la personne est
beaucoup plus habilitée que votre humble serviteur d'abord à
mesurer exactement de quoi il s'agit et, deuxièmement, à faire
des recommandations. C'est pour cette raison que j'indiquais tantôt que,
quant à moi, je vais attendre de voir le résultat des
recommandations de la Commission des droits de la personne, sans quoi, j'aurais
un peu l'impression de me porter juge à la place de la Commission des
droits de la personne et d'agir peut-être moi-même avec
discrimination, n'étant pas informé autant que le sera la
Commission des droits de la personne. Cela m'apparaît difficile.
Je ne voudrais pas que les gens de l'Association haïtienne des
travailleurs du taxi retiennent de ma position que je ne veux rien faire. Il y
a deux procédures possibles, une première où le ministre
des Transports lui-même prend des dispositions législatives ou
réglementaires pour agir pendant que l'organisme réellement
mandaté pour s'occuper de ces questions, qui est la Commission des
droits de la personne, est en train de faire une enquête; j'aurais un peu
l'impression de devancer les conclusions de la commission, d'une part, et,
d'autre part, de me porter juge ou en quelque sorte interprète de la
charte à la place de la commission.
M. Polak: Une dernière question. En ce qui concerne la
recommandation, je pense que je suis d'accord avec le ministre, qui veut
attendre le résultat de l'enquête de cette commission. Mais devant
cette commission, avez-vous fait des suggestions positives? Si le but de la
commission est seulement de déterminer s'il y a eu discrimination, oui
ou non, cela ne règle pas votre problème. Donc, y a-t-il des
propositions actuellement sur la table devant la commission? Sinon, il faut les
mettre sur la table devant le ministre.
M. Cicéron: Pratiquement, nous n'avons pas passé
encore publiquement devant la commission. Nous avons
délégué certains membres de notre association à
huis clos. La première phase est déjà terminée au
niveau de Montréal-Nord, c'est-à-dire le conflit entre Taxi
Moderne et la compagnie Co-Op de l'Est taxi. La semaine dernière,
c'était leur tour de présenter les mémoires et on devait
attendre encore deux semaines la reprise des travaux de la commission, mais on
ne sait pas encore la date. La commission devait fixer la date des travaux qui
vont commencer, effectivement, avec Montréal, c'est-à-dire la
ligue A-11. Ensuite, ce sera le tour de la ligue A-12.
Pour terminer la première question -j'y reviens encore - au
niveau du ministère des Transports, la déclaration des compagnies
qui n'engagent pas de Noirs est la suivante: Je n'engagerai pas de Noirs tant
que le gouvernement ne m'y forcera pas. C'est le point de vue de certaines
compagnies qui n'engagent pas de Noirs. Elles attendent le gouvernement pour
engager des Noirs. Tant que le gouvernement ne les y forcera pas, elles n'en
engageront jamais.
M. Barthélemy: J'aimerais apporter un autre
élément de réponse à votre dernière
question. En ce qui concerne l'enquête de la Commission des droits de la
personne actuellement en cours à Montréal, l'association a
préparé un mémoire; nous n'avons pas beaucoup de copies
ici, mais on peut en fournir une. On a essayé de voir le
phénomène, qu'on a d'ailleurs dénoncé, parce que,
dans sa façon de s'exprimer, de s'extérioriser, nous croyons
qu'il y a beaucoup d'injustice à l'égard de notre
communauté et nous avons mis de l'avant certains éléments
de solution au problème. Justement, nous avons déjà
présenté notre mémoire à la commission et je crois
que le travail que nous avons produit a été d'une grande
utilité pour les travaux de cette commission, contribution que les
commissaires n'ont pas manqué de souligner.
M. Polak: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): Mme la députée
de Dorion, je vous cède la parole, mais avant...
M. Bissonnet: Consentement pour...
M. Clair: Consentement pour continuer jusqu'à
épuisement.
M. Bissonnet: ...continuer jusqu'à épuisement.
Le Président (M. Desbiens): Jusqu'à
épuisement de la liste des intervenants, d'accord? Mme la
députée de Dorion.
Mme Lachapelle: Je voudrais faire deux remarques, avant de poser
deux questions. Concernant la Charte des droits et libertés de la
personne, je pense que vous êtes bien au courant qu'il n'y a pas
seulement de la discrimination à cause de la couleur, mais souvent de
l'âge, du sexe, etc. Le gouvernement du Parti québécois en
est bien conscient et n'arrête pas d'améliorer sa charte, c'est ce
qu'on a fait à l'automne dernier. Maintenant, on peut avoir recours pour
être entendu et le verdict viendra.
Concernant la ligue - tout à l'heure, vous parliez de la ligue de
taxis A-11 en particulier - je pense que votre communauté doit quand
même se réjouir de voir quelqu'un de votre communauté
élu au sein de cette ligue. Je pense que, si vous avez des choses
à dire, c'est important que votre communauté fasse pression
auprès de votre membre pour que celui-ci, à son tour, fasse des
pressions pour convoquer des assemblées générales afin que
vous puissiez discuter des points qui vous préoccupent.
Ma question est la suivante. À la page 3 du document, vous vous
dites d'accord avec les marchés proposés par le document du
ministère. Vous semblez inquiets face à l'intégration du
transport pour les handicapés et le transport intégré au
transport en commun dans la ville de Montréal. Pourriez-vous m'expliquer
quelles sont vos inquiétudes?
M. Barthélemy: Nos inquiétudes se basent sur
l'expérience qu'on a connue à Dorval. Par exemple, à
Dorval, 80% à 90% de l'effectif étaient des chauffeurs noirs, des
chauffeurs haïtiens, quand, le 1er avril 1981, est entrée en
vigueur l'exploitation d'un service de limousines, octroi de permis qui venait
enlever près de 60% du marché du taxi à l'aéroport.
Nous devions alors faire face à une situation nouvelle où
l'effectif qui travaille à l'aéroport n'arrive pas à
joindre les deux bouts. Dans la tête d'un petit groupe de chauffeurs
blancs, ordinairement hostiles à la présence haïtienne
à l'aéroport, s'est dessinée une affaire
établissant que, s'il y avait 225 voitures à l'aéroport,
après le coup de Samson Limousine on pourrait finalement tirer son
épingle du jeu. (18 heures)
Ces gens se disaient: Étant les plus anciens ici, nous avons une
sorte de droit, de privilège d'être là. Et il y avait un
certain va-et-vient entre ces gens qui voyaient l'exploitation du taxi à
l'aéroport de cette façon et des agents de la Gendarmerie royale
du Canada qui surveillaient le stand de taxis pour le compte de Transports
Canada qui s'occupe un peu de l'aéroport. Cette idée, dans
un premier temps, n'a pas fait son chemin parce qu'on ne trouvait pas assez
d'adhérents à cela. On avait dit: On va faire un examen. Il faut
que la personne parle anglais couramment. Malheureusement, les Haïtiens ne
sont pas très bons en anglais. On se disait: On va chercher tous les
moyens pour les coincer. On savait cela. Il y avait des Haïtiens qui
étaient bien "chums" avec ces chauffeurs. On voulait faire entrer quatre
ou cinq Haïtiens dans cette affaire. Donc, la chose a chuté. On
savait ce qu'il y avait dans la tête de ces gens. Cela n'a pas
fonctionné.
Quelques mois après, Transports Canada est venu avec ce que ces
gens qui étaient embêtés par la présence
haïtienne à l'aéroport de Dorval avaient comme projet. Dans
un pareil cas, que l'on soit fou ou sage, on doit se poser des questions.
N'est-ce pas le même projet qui est transféré à
Transports Canada par ces gens qui ne voulaient plus de nous? Tous ces moyens,
qui accompagnaient l'entrée en vigueur de ces nouvelles mesures à
l'aéroport, étaient vraiment discriminatoires à
l'égard de tous ceux qui travaillent à l'aéroport. Comme
on savait que les Haïtiens se tenaient plus ou moins ensemble, on
était contre cela. On savait que les Haïtiens n'allaient pas
marcher, mais on n'a pas fait du tort seulement aux Haïtiens, on a
sacrifié quasiment tous les chauffeurs blancs aussi et tous ceux qui
travaillaient à Dorval.
Actuellement, ceux qui sont là, en majorité, ne savaient
pas ce qu'on mange à Dorval, pratiquement. Une journée, on fait
quatre voyages. Les gens qui étaient habitués à Dorval
savaient que cela ne valait pas la peine de payer 1200 $ pour travailler
à l'aéroport, alors qu'avant on ne payait que 0,75 $ par voyage.
Donc, on a pratiquement mis dehors tout le personnel qui était là
avant pour le remplacer par d'autres qui ne savaient pas. On a raconté
toutes sortes d'histoires autour de cette question. On a dit que les
Haïtiens n'étaient pas là parce qu'ils n'étaient pas
propriétaires de leur voiture. Il est drôle de remarquer,
finalement, que les gens qui étaient à l'origine de ce projet au
niveau des chauffeurs blancs, ceux-là les mêmes qui n'ont pas
été pigés parmi les candidats, le 1er avril, à
notre grand étonnement, étaient dans la file. C'est cette forme
d'appréhension qui nous fatigue. On craint de voir appliquer une
réédition de Dorval, si on n'alerte pas les gouvernements ou les
personnes intéressées dans le dossier.
Mme Lachapelle: Je pourrais ajouter quelque chose. C'est le cas
de Dorval qui vous rend un peu craintifs. Quand on parle du transport des
personnes handicapées ou de l'intégration de tous ces nouveaux
services au transport en commun, je pense que ce ne
sera peut-être pas les mêmes critères qui vont jouer
à ce moment. Tout le monde va pouvoir y avoir accès. Les craintes
ne devraient pas être les mêmes.
M. Cicéron: Pour moi, de nouveaux services tels que le
transport des personnes handicapées et le transport
intégré au transport en commun, c'est un programme que le
ministère des Transports voulait légaliser. Par contre, c'est un
transport que les chauffeurs de taxi ont l'habitude de faire couramment. Cela
ne veut pas dire que c'est nouveau sur le marché du taxi. C'est juste la
légalisation de ce système.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Bissonnet: Je vais revenir là-dessus, si vous voulez
attendre.
M. Clair: Non, c'est juste pour clarifier une question. Je pense
qu'en commission parlementaire, ce n'est ni le lieu, ni le moment, ni l'endroit
pour débattre de toute la question de Dorval. D'ailleurs, avec les
affirmations de M. Barthélemy, il y a des gens de mon ministère
qui se sentent un peu accusés; ils vont probablement requérir
l'occasion de se faire entendre par la Commission des droits de la personne
afin de pouvoir donner leur version. On se tromperait, comme commission
parlementaire, si on essayait de porter des jugements là-dessus. Il y a
un organisme chargé d'enquêter sur l'application de la Charte des
droits et libertés de la personne, c'est la Commission des droits de la
personne, et je me sens un peu mal à l'aise de voir la tournure de la
discussion. Je pense qu'on n'est pas habilité, personne, à
trancher cette question. Comme je l'indiquais tantôt, en ce qui concerne
mon ministère et mes fonctionnaires, moi-même, individuellement,
et eux-mêmes, individuellement, au nom des responsabilités que
nous assumons, tout ce qu'on peut dire, c'est que nous sommes disponibles pour
répondre aux questions de la commission. Nous serons vivement
intéressés à prendre connaissance de ses recommandations
dans ce secteur.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: Je voudrais juste parler un peu de la façon
dont on a confié les postes d'affectation à l'aéroport de
Dorval. La seule question que je voulais poser s'adresse au responsable du
ministère pour savoir combien il y a eu de demandes. On compte 185
postes dans la ligue A-11.
Une voix: Plusieurs centaines.
M. Bissonnet: Plusieurs centaines. M. Clair: Plusieurs
centaines.
M. Bissonnet: Au sujet de l'aéroport de Dorval, je
voudrais faire un commentaire. Le ministre a dit tantôt que moins de dix
de nos concitoyens d'origine haïtienne avaient fait leur demande. Je
comprends que c'est 0,75 $ du voyage. Les conditions requises pour faire une
demande afin de faire partie des 185 propriétaires de taxi, qui peuvent
aller à Dorval sont, entre autres, de payer un montant de 100 $ par
mois. C'est une des conditions qui ont été acceptées par
Transports Canada et par Transports Québec.
Quand je vais à l'aéroport, je prends souvent un taxi.
J'ai été très surpris d'entendre que moins de dix de nos
concitoyens haïtiens ont fait leur demande alors qu'il y en a beaucoup
plus qui "jouent" Dorval. J'ai déjà été chauffeur
de taxi et j'ai "joué" un peu; à un moment donné, je me
suis arrêté. On nous a dit qu'il y en avait moins de dix. Vous
nous avez dit qu'il y avait des examens en anglais, mais tous ceux qui
étaient intéressés pouvaient faire une demande.
Après, on aurait pu voir s'il y avait eu discrimination à cet
effet. Le tout s'est fait par tirage au sort, mais j'aimerais vérifier
certaines choses auprès de la ligue.
Première question: À Montréal, dans la ligue A-11,
combien y a-t-il de propriétaires de taxi d'origine haïtienne?
M. Barthélemy: Actuellement, on a entre 400 et 450
propriétaires qui sont d'origine haïtienne.
M. Bissonnet: Deuxième question: Combien y a-t-il de
chauffeurs réguliers - je ne parle pas des chauffeurs à temps
partiel, mais de chauffeurs qui gagnent leur vie exclusivement de l'industrie
du taxi - qui sont d'origine haïtienne? Approximativement.
M. Barthélemy: D'après une étude que nous
venons de faire, nous pouvons avancer le chiffre de 700 Haïtiens qui sont
impliqués dans cette industrie à Montréal.
M. Bissonnet: Ils sont 700 chauffeurs. Est-ce qu'on inclut les
400 propriétaires?
M. Barthélemy: Oui.
M. Bissonnet: On parle de 1200 travailleurs d'origine
haïtienne qui, chaque jour, oeuvrent dans l'industrie du taxi.
M. Barthélemy: On s'est posé la question
là-dessus et c'est ce qui nous a poussés à mener cette
enquête. Nous avons constaté que plusieurs ont laissé cette
industrie. Par exemple, quelqu'un qui loue une voiture-taxi à
Montréal présentement, je
n'arrive pas à comprendre de quoi cette personne vit si elle n'a
pas une autre source de revenu. Donc, il y a beaucoup de gens qui ont
lâché cette industrie et notre étude nous prouve que cela
ne dépasse pas 700 à 800...
M. Bissonnet: Tantôt, le ministre vous posait une question
relativement au rachat des permis. Actuellement, un propriétaire de taxi
a-t-il des difficultés - qu'il soit d'origine haïtienne ou non -
à vendre? On me dit qu'actuellement, à la ligue A-11, cela se
vend environ 7700 $ à 8000 $, valeur marchande. Y a-t-il des
difficultés réelles pour quelqu'un comme vous si, demain matin,
vous décidez - vous en avez soupe - de vendre votre permis? Aurez-vous
des difficultés à trouver un acheteur?
M. Barthélemy: D'après mon expérience
quotidienne, ce que je réalise, c'est que si quelqu'un veut vendre son
permis pour 7000 $, il va trouver preneur facilement. Mais l'individu qui a
payé son permis 12 000 $, 14 000 $ ou 15 000 $ et qui n'a pas un autre
emploi, qui n'a pas une autre source de revenu, garde son permis dans l'espoir
que, quelques mois plus tard, il pourra y avoir une reprise économique
au pays et qu'il pourra toujours vendre son permis pour 9000 $ ou 10 000 $.
Mais présentement, si on offre son permis à 7000 $ - il y a des
gens qui ont de l'argent quand même - on va l'acheter; peut-être
pas des chauffeurs de taxi.
M. Bissonnet: Actuellement, le marché, aujourd'hui et la
semaine dernière, comment cela fonctionne-t-il? Les permis se
vendent-ils facilement? Évidemment, le prix n'est pas le même
qu'il y a un an et demi; je suis bien d'accord avec vous. Il y en a qui l'ont
payé 10 000 $ ou 12 000 $ et là, on me dit que c'est 8000 $. Y
a-t-il une demande au marché de l'offre de vendre des permis?
M. Barthélemy: Au niveau de la demande, je n'en vois
pas.
M. Bissonnet: Dans votre mémoire, vous avez parlé
des ventes à tempérament. Je suis convaincu qu'il y a beaucoup de
membres de votre association qui ont eu de grandes difficultés dans ce
domaine. Dans le projet De nouvelles avenues pour le taxi, on parle d'adopter
une nouvelle formule qui est le nantissement. Cette avenue permettra à
des personnes qui veulent acheter des permis d'avoir un financement bancaire
contre un nantissement garanti, ce qui évitera toute la situation des
ventes à tempérament où des gars de taxi achètent
des autos et les paient 50 000 $ dans l'espace de quatre ans. C'est une mesure
qu'il faut mettre de l'avant, M. le ministre, le plus rapidement possible.
En ce qui a trait à la Commission des droits de la personne et
à l'enquête sur la racisme dans l'industrie du taxi, j'ai
assisté à l'ouverture de l'enquête, la première
journée, et j'ai constaté que la Commission des droits de la
personne fait une enquête très exhaustive. Il faut attendre le
rapport. Malgré que la commission ait étudié à huis
clos toute l'industrie du taxi, évidemment, on fait aujourd'hui des
audiences publiques, mais il faut, en tant que parlementaires, concernant les
lois qui nous régissent ou lorsqu'un citoyen, quel qu'il soit, a une
revendication à faire au niveau de cet organisme, attendre les
résultats. Je pense que, dès que les résultats seront
connus, le gouvernement aura à agir en fonction des résultats de
cette commission.
On a parlé tantôt de la question - et j'y reviens - d'un
homme, une voiture. De vos 400 à 450 propriétaires, combien y en
a-t-il qui sont affiliés à une association et combien y en a-t-il
qui sont indépendants? (18 h 15)
M. Barthélemy: Selon notre étude, ces
propriétaires sont affiliés dans une proportion de 92,8%. Vous
remarquerez qu'on avait...
M. Bissonnet: La question que je vous pose, Gérard...
M. Barthélemy: Barthélemy.
M. Bissonnet: M. Barthélemy, je suis habitué
à la communauté haïtienne; dans mon comté, j'ai 7000
à 8000 membres de la communauté haïtienne. Ce que je veux
vous dire, c'est que ce ne sont pas ceux qui sont membres de votre
association...
M. Barthélemy: ...réponse.
M. Bissonnet: Quels sont ceux qui sont affiliés, par
exemple?
M. Barthélemy: À une association de services.
M. Bissonnet: Combien en avez-vous à Diamond, à SOS
taxi?
M. Barthélemy: C'est ce que...
M. Bissonnet: C'est inclus dans les 92%?
M. Barthélemy: Nous avions interrogé 425
chauffeurs, donc on peut se faire une idée, et 92%... Non, excusez-moi,
je précise. Il y en a 83% qui sont abonnés aux trois principales
associations de services de Montréal: Diamond, La Salle et SOS taxi.
Suivent dans l'ordre, Taxi Moderne, 9,2%; Beaubien, 4,2% et Veterans, 1,3%. Il
y en a 35% de locataires et on peut...
M. Bissonnet: Pour être bien clair -
cela va mieux répondre à ma question, quant aux compagnies
auxquelles ils sont affiliés, cela ne m'importe peu - combien y a-t-il
de propriétaires qui ont un dôme A-11? Sont-ils
indépendants? Font-ils du "fly"? Se tiennent-ils près des
hôtels, dans les postes communs, etc.? Combien y en a-t-il sur ces 400
qui ne sont affiliés à personne, sans téléphone,
etc.?
M. Barthélemy: Nous n'avions pas fait de différence
entre ceux qui font partie d'associations de services et qui sont
propriétaires et ceux qui ne le sont pas. Ce que nous avons fait, c'est
le compte du nombre de voitures appartenant à des Haïtiens qui font
partie d'une association de services. Comme je le disais tantôt, 83% de
l'échantillonnage sont abonnés aux trois principales associations
de services, Diamond, La Salle et SOS taxi, 9% à Taxi Moderne, 4,2%
à Beaubien et 1,3% à Veterans.
M. Bissonnet: Ce qui voudrait dire qu'il y a environ 200
voitures, conduites par des chauffeurs d'origine haïtienne, qui ne font
pas partie d'associations.
M. Barthélemy: Oui, à peu près, c'est
50-50.
M. Bissonnet: D'accord. Vous n'avez pas parlé des
concessions dans votre mémoire.
M. Barthélemy: Oui, on l'a fait.
M. Bissonnet: Vous avez parlé de l'abolition des
concessions?
M. Barthélemy: Oui.
M. Bissonnet: D'accord. Vous recommandez l'abolition des
concessions?
M. Cicéron: Oui. En ce qui a trait à la concession,
nous demandons le retrait des concessions, surtout près des
édifices publics, édifices qui appartiennent aux instances
municipales, provinciales ou fédérales, comme les gares, les
hôpitaux et aussi aux abords de certains hôtels. Si nous regardons,
d'après ce que je constate actuellement, l'abolition des concessions
faisant partie de la rentabilité du taxi aussi, cela peut aider les
chauffeurs et les propriétaires à recevoir moins de tickets,
comme ils le font maintenant. Pourquoi? Parce que, avec l'abolition des
concessions, cela permettra à certains chauffeurs de trouver plus de
"stands" réservés pour se stationner et exempter certaines
infractions à l'heure d'achalandage. Par exemple, des stands qui se
placent dans de mauvais endroits où à l'heure de pointe, on est
obligé de les quitter, c'est-à-dire de 7 heures à 9 h 30
et de 16 heures à 18 h 30. Une fois ces stands fermés, ces
chauffeurs se retrouvent sans endroit pour stationner. C'est cela, je pense,
qui provoque parfois des stationnements en double file à certains
stands. Donc, on peut arriver à avoir ces stands de quatre ou de six
taxis. En d'autres termes, il y a aussi des édifices municipaux, tels
les hôpitaux, l'hôpital Notre-Dame, l'hôpital Royal Victoria,
l'Hôtel-Dieu, l'hôpital Maisonneuve-Rosemont, qui sont des
concessions de certaines compagnies. Ce sont des hôpitaux sous
juridiction municipale. Si ces concessions étaient abolies, cela
donnerait plus de possibilités à certains chauffeurs de trouver
une place au moins pour faire un petit peu plus de revenus, au lieu d'accumuler
des tickets de 52 $ en période de circulation intense.
Je veux revenir à la question que j'avais posée tout
à l'heure. C'est surtout pour les édifices publics. Si je regarde
bien et que j'analyse bien, d'après les rumeurs qui circulent, nous
disons... Je n'accuse pas le ministère des Transports, parce que le
ministère des Transports devait, afin de rendre l'industrie du taxi
rentable pour les propriétaires de taxi, veiller à ce que les
édifices publics soient des stands publics, en commun. Le Palais des
congrès, qu'on est à la veille de terminer - en mai prochain, ce
sera son inauguration...
M. Bissonnet: C'est un bon "spot", cela.
M. Cicéron: Oui, mais on sait déjà que deux
compagnies se battent pour avoir cette concession. Je trouve que c'est au
ministère des Transports de mettre un frein à cela afin de - je
ne sais pas combien il peut y avoir de places - donner du travail à
certains chauffeurs. Si on la remet à ces associations, c'est sûr
et certain que certains chauffeurs seront toujours dans
l'illégalité aux heures de pointe.
M. Bissonnet: Juste une dernière question et un bref
commentaire avant de poser la question. Nous, de l'Opposition, calculons que
tous ceux qui ont un permis de véhicule-taxi doivent avoir la même
chance, d'égal à égal, que tous les autres
propriétaires de véhicule-taxi, qu'ils soient avec n'importe
quelle compagnie. Cela est peut-être difficile avec les concessions
privées, par exemple, l'hôtel Quatre-Saisons -il y en a moins
qu'il n'y en avait - mais, au minimum, tous les édifices qui
appartiennent au gouvernement, tous les hôpitaux, cela devrait être
ouvert à tous les chauffeurs de taxi, de quelque association ou
indépendants qu'ils soient. C'est un point qu'on tient à voir
dans un nouveau projet de loi.
Deuxièmement, avez-vous, en moyenne, le coût des assurances
que paient les membres de l'association haïtienne, globalement? Avez-vous
une moyenne, à savoir combien cela coûte à tous vos
propriétaires qui sont dans l'association?
Combien cela coûte par année pour assurer leur
automobile?
M. Barthélemy: Pour une voiture récente...
M. Bissonnet: En moyenne?
M. Barthélemy: ...disons 1982, pour avoir l'assurance
complète, d'une compagnie à l'autre, cela peut varier entre 1500
$ et 1800 $ annuellement.
M. Bissonnet: En moyenne. Merci.
M. Cicéron: Pour apporter plus de précision
à ce que mon confrère a dit, pour une voiture récente, de
1981, que j'avais demandé d'assurer, cela m'avait coûté
1644 $. J'ai passé l'année sans accident. Mon renouvellement
d'assurance était de 2091 $.
M. Bissonnet: On vous remercie beaucoup, en tant qu'Opposition,
de votre participation à cette commission. Le seul souhait que je
formule est celui-ci: Vous avez peut-être des problèmes mais
l'important, à mon avis, c'est de s'intégrer comme
Québécois à la société
québécoise.
M. Clair: Juste quelques mots pour remercier les
représentants de l'Association haïtienne des travailleurs du taxi
de leur présence et de leur mémoire.
Le Président (M. Desbiens): Merci. Je demanderais
maintenant au représentant du groupe Taxi GSM Ltée de
s'approcher, s'il vous plaît. C'est le mémoire no 21. Je
demanderais au porte-parole de s'identifier et de nous présenter les
personnes qui l'accompagnent.
Taxi GSM Ltée
Mme Boucher (Marie-Claude): Je m'appelle Marie-Claude Boucher;
à ma droite, M. Al Cibulak; à ma gauche, M. Morrey Smith et Mme
Lyse Stecko. Nous représentons la compagnie Magnat/GSM, une association
qui a été formée dans le but de faire une analyse du
coût de la manufacture et la mise en marché d'un véhicule
qui pourrait remplir les nombreux rôles prévus au livre blanc.
Le taxi a toujours eu comme rôle, dans les villes, de transporter
sur demande un seul ou, tout au plus, quelques passagers à la fois.
C'est du reste ce qui explique le peu d'efficacité des voitures-taxis,
le chauffeur devant attendre ou se promener à vide entre deux courses.
Or, la flambée des coûts de l'essence et l'exploitation des
voitures a diminué la rentabilité de l'industrie du taxi et son
attrait comme entreprise commerciale. C'est le souci de rentabilisation qui
explique la popularité croissante des petites voitures et la
montée des tarifs. Au Québec, les règlements restrictifs
n'ont servi qu'à décupler les problèmes puisqu'ils
limitent les services que peut offrir le taxi. Ces divers problèmes et
les quelques autres qui affectent l'industrie du taxi, le gouvernement du
Québec montre bien qu'il en est conscient, dans son livre blanc, et nous
sommes heureux de l'occasion qui nous est donnée de faire valoir notre
point de vue.
Les réformes proposées dans le livre blanc à
l'industrie du taxi nous semblent nécessaires et souhaitables.
L'élargissement du rôle du taxi lui permettant d'offrir de
nouveaux services aux usagers faciliterait, en effet, son intégration
à l'ensemble du réseau de transport en commun. La réforme
contribuera aussi à la rentabilité de l'industrie et permettra
d'offrir un service bien mieux adapté aux besoins des usagers. L'Annexe
I énumère certains types de services offerts actuellement
ailleurs, en Amérique du Nord. Il est important de se souvenir que le
même véhicule peut, au cours d'une même journée,
jouer plusieurs rôles. Dans le document joint, Une journée dans la
vie du taxi GSM, nous illustrons des utilisations possibles des
véhicules.
Le transport en commun des handicapés se répand de plus en
plus grâce au service public et à l'entreprise privée. Tous
les taxis devraient pouvoir offrir aussi un tel service, pour peu que le
chauffeur sache comment s'y prendre et que le véhicule soit
adapté au transport des fauteuils roulants. Les véhicules actuels
ainsi que les règlements sur le taxi limitent le transport des
handicapés à un ou deux exploitants seulement, incapables de
suffire à la tâche.
La livraison de marchandises est un autre service que les taxis
devraient être en mesure d'offrir afin d'utiliser le plus efficacement
possible les chauffeurs et les véhicules.
Or, s'ils veulent élargir et améliorer les services que le
taxi peut rendre au public, les règlements doivent aussi encourager la
conception de nouveaux véhicules. Les taxis actuels sont de simples
voitures de tourisme, n'offrant ni l'espace ni le confort voulu aux passagers
et dont la construction n'assure pas une durée d'exploitation
commercialement rentable. Après les réformes, la voiture-taxi
remplira de nombreux rôles et les règlements doivent les
prévoir.
La ville de Londres est un bon exemple de normes du taxi. La capitale
anglaise exige, en effet, que la place réservée aux passagers
soit de grande dimension, que les entrées et sorties soient faciles et
que le siège soit confortable. Ces normes, relativement au chauffeur,
assurent de plus un service professionnel. (18 h 30)
Pour atteindre pleinement l'objectif fixé, soit
l'élargissement des services aux usagers du taxi, il faut permettre aux
exploitants du taxi d'avoir recours à un véhicule
spécialisé comme le taxi GSM. Ce véhicule offre en effet
de nombreuses caractéristiques répondant aux besoins des
utilisateurs dans les nouveaux marchés qui s'ouvriraient avec les
réformes.
Le véhicule GSM est fait pour accueillir les personnes en
fauteuil roulant, caractéristique grandement souhaitable et qu'on ne
retrouve absolument pas sur les taxis ordinaires. La version allongée
peut transporter douze écoliers. Le taxi GSM est également
conçu pour bien jouer son rôle traditionnel. L'espace
supplémentaire au-dessus de la tête, la largeur de sièges
et le plancher surbaissé sont autant de caractéristiques
appréciées des usagers, surtout des gens âgés pour
qui les voitures compactes, qui servent actuellement de taxi, posent des
difficultés.
Le taxi GSM a aussi des caractéristiques appréciées
des propriétaires et des exploitants. Le rouage d'entraînement, la
suspension, les matériaux de la carrosserie ainsi que le dessin
intérieur contribuent en effet à la bonne apparence du
véhicule et à sa bonne tenue mécanique, ce qui constitue
du reste une exigence de la loi actuelle.
Toutes ces composantes ont été conçues ou choisies
en fonction de leur durabilité et de leur facilité d'entretien.
Avec un bon programme d'entretien périodique et les soins voulus, le
taxi GSM aura une durabilité d'au moins trois ou quatre fois plus grande
que celle des taxis actuels.
Un pare-chocs moulé protège tout le véhicule et
contribue à lui garder son apparence de neuf. De plus, les panneaux de
carrosserie en fibre de verre durent indéfiniment et se réparent
facilement. Le véhicule peut être construit en version standard ou
allongée à partir des mêmes pièces de carrosserie et
de suspension, ce qui rend le concept applicable à différents
types de service.
Comme le dit le livre blanc, le ministère des Transports et celui
de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme du Québec, en collaboration
avec le secteur manufacturier, entendent raviver les efforts de mise au point
de commercialisation d'un véhicule mieux adapté au transport par
taxi et stimuler par le fait même la production de matériel de
transport.
Le véhicule GSM pourrait bien offrir la possibilité de
créer d'importantes installations de fabrication au Québec, non
seulement pour le marché québécois, mais pour l'ensemble
du marché nord-américain du taxi que l'on estime à 50 000
véhicules par année. Cette nouvelle industrie aurait des
retombées économiques très intéressantes pour le
Québec.
Une fois les nouveaux règlements en vigueur, nous recommandons
fortement que le Québec mette à l'essai, à titre de projet
pilote, divers types de services parapublics de transport. Cela montrerait au
public et à l'industrie du taxi ce qui peut se faire par des nouveaux
types de services et créerait un marché pour ces services. Ce
serait aussi une salle de démonstration des nouveaux véhicules
qui seront mis au point pour répondre aux nouvelle normes. L'industrie
privée sera sûrement disposée à participer, si le
Québec contribue en partie aux frais de démarrage.
Ce projet pilote montrerait comment les nouveaux services peuvent
s'intégrer aux modes de transport existants, métro, autobus et
train. On connaît bien désormais les notions relativement
nouvelles que sont les trajets fixes des taxis à vide et la
répartition par ordinateur. Le projet pilote pourrait servir à
évaluer ces idées et d'autres du genre.
On sait qu'il existe au Québec un marché pour ces nouveaux
types de service de transport en commun. De plus, l'étude
intitulée Les services de taxi collectif, quelques expériences et
des perspectives d'implantation au Québec, faite par Transports
Québec, en 1980, montre que le public est tout disposé à
payer davantage pour obtenir des modes de transport flexibles.
Conçu, fabriqué et testé au Québec, le taxi
GSM a prouvé qu'il se comporte très bien dans divers rôles.
Le ministère des Transports dispose actuellement d'une occasion sans
pareille d'utiliser ce taxi pour assurer la bonne implantation des
réformes.
Le gouvernement du Québec indique clairement que son livre blanc
sur l'industrie du taxi contribuera à la mise au point et à la
commercialisation d'un type nouveau de voiture-taxi. Il s'est également
engagé à offrir de l'aide financière et technique aux
municipalités et aux organismes désireux de lancer des projets
expérimentaux de service de transport parapublic.
Nous estimons que le taxi GSM est le véhicule tout
désigné, et nous sommes disposés à travailler avec
le gouvernement et tout autre organisme participant à ce projet. Mais
une question demeure toutefois. Quel type de projet le gouvernement entend-il
lancer et quelle somme est-il disposé à y consacrer? Ces
questions sont encore en suspens. Nous serions heureux de soumettre des
suggestions au ministère des Transports. Le Québec possède
tous les éléments essentiels du succès, sauf les
règlements et l'aide financière. Si les changements
proposés sont bien appliqués, le Québec deviendra un chef
de file dans le transport en commun parapublic et dans l'industrie du taxi. Et
si des projets originaux naissent du projet de loi sur le taxi, il montrera de
nouveau qu'il
est capable de concevoir et d'appliquer des idées neuves dans le
domaine du transport. Merci.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Clair: M. le Président, je voudrais d'abord remercier
Mme Boucher et les autres personnes qui l'accompagnent de cette
présentation à la commission parlementaire des transports.
Effectivement, dans les nouvelles avenues, dans les mesures
particulières, le ministère des Transports s'engageait à
relancer, avec le ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme,
la poursuite des études devant mener - on l'espère - à la
concrétisation de ce projet. Je peux indiquer là-dessus aux
membres de la commission qu'effectivement le ministère des Transports
est en communication avec le ministère de l'Industrie, du Commerce et du
Tourisme pour l'avancement du dossier.
M. le Président, ma première question* porte sur des
études de faisabilité qui ont été
réalisées ou qui sont en cours. J'aimerais savoir à quel
stade on en est présentement, à quel niveau d'avancement en sont
rendues les études en question et quels sont les résultats
jusqu'à maintenant de ces études de faisabilité.
Mme Boucher: Parlez-vous du côté financier ou du
côté technique?
M. Clair: Des deux côtés, du côté
financier et du côté technique.
Mme Boucher: Mes deux collègues ici ne parlent pas
français. Je vais leur poser la question en anglais et si cela ne vous
fait rien, soit que je traduise ou qu'ils répondent en anglais.
M. Clair: Non, non, traduisez. Cela va aller plus vite.
Mme Boucher: Je vais traduire? D'accord.
Nous croyons que dans environ trois mois, du côté
technique, nous aurons les spécifications formulées. Du
côté financier, c'est encore très préliminaire,
parce que les coûts ne seront pas déterminés avant que nous
sachions quel nombre de véhicules on pourra mettre en marché.
Comme de raison, le coût va être relatif au nombre de
véhicules qu'on va pouvoir manufacturer pendant la première
année.
M. Clair: L'étude de marché jusqu'à
maintenant révèle qu'il pourrait y avoir de la place sur le
marché nord-américain pour combien d'unités environ?
Mme Boucher: II semble qu'il y aurait une nécessité
d'environ 50 000 véhicules, mais ce n'est pas seulement dans l'industrie
du taxi. Ce serait dans d'autres industries aussi. Ce seraient, par exemple,
les véhicules de services des gouvernements, ce genre de choses, pas
seulement le taxi.
M. Clair: Et le marché québécois pourrait
représenter quel pourcentage du marché nord-américain?
Mme Boucher: Environ 10%
M. Clair: Environ 10%. Pour l'industrie du taxi comme telle, la
Ligue de taxi A-11, par ses porte-parole, a dit en substance à peu
près ceci: Cela peut être intéressant, mais vous avez
besoin, M. le ministre, de ne pas nous imposer le modèle de taxi GSM. On
veut être libre. Ma question est la suivante: Y a-t-il eu des approches
de faites auprès du milieu du taxi au Québec ou ailleurs au
Canada afin d'établir un contact et de faire la promotion du Taxi GSM
auprès des ligues de taxi, par exemple, au Québec?
Mme Boucher: II n'y a pas eu de communications directes avec les
compagnies de taxi au Québec. Cependant, nous avons eu une demande par
une compagnie de Vancouver.
M. Clair: En tout cas, je pense que cela pourrait être
intéressant que des contacts soient pris à ce sujet avec les gens
du milieu du taxi au Québec afin que, justement, ils soient
sensibilisés aux avantages et à la nature de la proposition que
Taxi GSM pourrait faire.
C'étaient mes questions, M. le Président. Je ne sais pas
si mon collègue, le député de Sainte-Anne, a des
questions.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: I will ask my questions directly in English, so we will
go even faster. The model we see here, the car, you know, where is it
operating, in what cities in Canada?
M. Smith (Morrey): Well, it is a test, a prototype. He has been
operating in Montreal and neighboring regions, not on a business basis, just as
a test operating basis. It has not been in service.
M. Polak: It says here, in your "mémoire", that the
company is manufacturing "pièces d'automobiles" for North America "avec
usines au Canada", so with plants in Canada. Do you have a plant in Canada?
M. Smith: Not yet.
M. Polak: Not yet. I hope you'll
consider Québec if you set up a plant, you know. We would like to
do a lot of business here. From that point of view, we feel the same way as the
Government. We are very nationalistic, we like people to establish themselves
in Québec and give work to Quebeckers.
Mme Boucher: La référence dans le mémoire
est à la compagnie Magna International qui est établie en
Ontario. Elle a 50 manufactures en Ontario. La compagnie GSM est établie
à Montréal.
M. Polak: Elle est à Montréal. Mme Boucher:
Oui.
M. Polak: Yesterday, we had a group here and they talked about
replacing gasoline for taxis with the new liquid gas. Is this envisaged for
that véhicule also or not?
M. Smith: Yes.
M. Polak: It could? That is all. Thank you very much. I
appreciated it.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: Just a minute. On that prototype, you know, what is
the expect as economy as mile per litre with the test you make on it to the
advantage of the taxi driver? How many miles per litre they could do with a car
like that?
M. Smith: Miles per gallon, I have never made the adjustment
yet...
M. Bissonnet: How many miles per gallon?
M. Smith: 21, 22, 23 in the city and above 30 on the highway. It
is about 12 or 14 litres per hundred, but 9 to 10 per litres per hundred on the
highway.
M. Bissonnet: We would have some difficulties, you know, if you
got some cars like that or some prototypes like that in Montreal for the
repairs and everything. You expect to have few dealers or only one place to go
for the repairs and everything?
Mme Boucher: Nous sommes en train de discuter avec les grands
manufacturiers d'un genre de projet conjoint avec un ou plusieurs grands
manufacturiers. La réparation des véhicules serait faite soit par
General Motors ou Ford, une des grandes compagnies, donc par leurs
distributeurs.
M. Bissonnet: Vous n'avez pas les prix maintenant, mais avez-vous
une estimation d'une automobile comme celle-là?
Mme Boucher: Nous estimons que le prix sera concurrentiel,
environ 15 000 $ ou 20 000 $. La différence avec un véhicule
conventionnel, c'est que ce véhicule sera probablement fabriqué
totalement en plastique, comme les devants de la Firebird et de la Camaro.
C'est le même genre de plastique qui sera utilisé pour faire
toutes les parties. Donc, l'entretien du véhicule sera très
économique.
M. Bissonnet: Cela veut dire que les assurances vont baisser.
Mme Boucher: Elles devraient baisser. Il n'y a rien qui baisse,
tout monte.
M. Clair: M. le Président, je voudrais remercier les gens
de GSM Ltée d'être venus faire cette présentation et les
assurer de tout l'intérêt et le soutien du ministère des
Transports. C'est certain qu'en matière de fabrication, d'aide
financière, c'est davantage le ministère de l'Industrie, du
Commerce et du Tourisme qui est concerné. Quant à nous, comme
développement du transport des personnes, nous sommes
intéressés d'abord et avant tout, c'est sûr, aux services.
Nous sommes un peu clients, nous sommes les représentants de l'ensemble
de la clientèle pour ses besoins de mobilité, mais nous sommes
aussi vivement intéressés aux retombées économiques
susceptibles de profiter à l'ensemble de la population
québécoise. C'est donc dire tout l'intérêt que nous
portons à ce dossier. Je vous remercie.
Mme Boucher: Merci beaucoup.
Le Président (M. Desbiens): Merci. Je demanderais
maintenant aux représentants de Taxi La Salle de prendre place à
l'avant, s'il vous plaît. Entre-temps je souligne, pour le
bénéfice des membres de la commission, que la Ligue de taxis de
Baie-Comeau a également présenté un mémoire, mais
pour dépôt seulement.
Je demanderais au porte-parole de Taxi La Salle de s'identifier, s'il
vous plaît et d'identifier son collègue.
Taxi La Salle
M. Brunet (Richard): Richard Brunet, vice-président de
Taxi La Salle et Gilles Vermette, directeur de la mise en marché.
Je vous remercie de l'occasion que vous nous donnez aujourd'hui de vous
présenter notre mémoire. L'industrie du taxi à
Montréal vit, depuis le début des années soixante-dix, le
pire marasme de son existence. Jamais les gens du taxi n'ont été
aussi insatisfaits et aussi insécures.
Il est vrai que les gens du taxi de
toutes les villes sont souvent insatisfaits. Il s'agit d'avoir
voyagé un peu pour le constater. Nous osons croire que les gens qui
prendront les décisions quant à notre avenir ne se serviront pas
de ce soi-disant problème international pour ignorer le problème
du taxi à Montréal.
Aujourd'hui, nous ne pouvons que nous réjouir de ce que le
gouvernement avoue l'échec total, conséquence directe des erreurs
du passé, et désire améliorer notre sort en
décentralisant et en créant de nouveaux marchés. Nous
croyons que nous devons être considérés comme de
véritables Québécois au même titre que les autres
citoyens. Pour atteindre ce but, il est normal qu'une réglementation
juste, honnête et surtout facile d'application ait lieu. La population
doit être protégée et se sentir en sécurité,
ce qui n'est pas le cas actuellement.
Notre compagnie, de concert avec notre comité consultatif, a
rencontré tous les membres de l'association et nous sommes heureux de
vous présenter ce mémoire qui, selon Taxi La Salle, pourrait
résoudre là majorité des problèmes du taxi à
Montréal.
Taxi La Salle est une association de services, depuis 1918, à
Montréal. Elle fait partie de l'agglomération A-11 et regroupe
plus de 15% des détenteurs de cette même agglomération. La
grande majorité de ses membres sont des propriétaires artisans.
Taxi La Salle fait partie du groupe Brunet-La Salle Corporation et les autres
filiales de Brunet-La Salle Corporation sont toutes reliées à
l'industrie du taxi, soit Station de service La Salle - qui sont des stations
d'essence - Charge Wise Taxico Ltée - carte de crédit dans tout
le Canada - Amar Entreprises Inc. - flotte de voitures-taxis de 13
unités - Rockland Garage - atelier de débosselage, de
mécanique et de radiateurs -Les Plastiques Rockland, fabrication de
lumières de toit et gravure de tout genre; Annonces roulantes, enseignes
sur les toits des voitures-taxis pour la publicité de différentes
compagnies nationales; la Concorde, compagnie d'assurances
générales assurances automobiles, habitation, ayant une charte
québécoise.
Comme vous pouvez le constater, notre groupe se spécialise dans
l'industrie du taxi et nous avons à coeur cette industrie.
Par le passé, nous avons soumis plusieurs mémoires qui ont
malheureusement été ignorés complètement. Nous ne
voulons pas faire un retour sur le passé, car c'est le futur qui
prévaut. Cependant, nous sommes convaincus que les erreurs du
passé pourront sûrement vous aider dans les décisions que
vous aurez à prendre.
Notre but en présentant ce mémoire n'est pas de
protéger les intérêts des associations de services, mais
bien de réaliser les objectifs communs de l'industrie du taxi et du
ministre, soit d'accroître la rentabilité et de faire en sorte que
le service soit mieux adapté aux besoins des usagers.
Notre mémoire vous est malheureusement soumis avec un retard - si
on tient compte de la date - car un groupe de travail de l'industrie du taxi,
connu sous le nom du Groupe uni du taxi, regroupant les propriétaires de
flottes, la ligue de taxis et les associations de services de
l'agglomération A-11 avait été formé pour la
rédaction d'un mémoire collectif.
Après plusieurs séances de travail, le mémoire
devait être préparé par les gens de la ligue et tous les
points y avaient été discutés.
À notre grande stupéfaction, le mémoire de la ligue
et non celui du Groupe uni du taxi nous fut remis le vendredi 11 février
et son contenu est totalement différent des discussions. Même les
directeurs de la ligue n'y ont eu accès avant l'envoi. Ne pouvant
appuyer un tel mémoire personnel, il nous fait plaisir de vous
présenter ce mémoire.
Nous avons été agréablement surpris de constater la
profondeur du livre blanc intitulé De nouvelles avenues pour le
taxi.
Les problèmes décrits dans ce travail sont
vérifiques. Quant à la réforme, nous l'appuyons, mais avec
certaines modifications.
Concernant l'ouverture de nouveaux marchés, nous sommes
très emballés par les suggestions du livre blanc relatives aux
nouveaux marchés possibles. Nous sommes convaincus que l'objectif
d'accroître la rentabilité pourra être atteint très
facilement si de nouveaux marchés, tel que suggéré, se
réalisent. Il est évident que la réticence au changement
ne fera pas exception à l'industrie du taxi et qu'à court terme,
la rentabilité ne sera pas atteinte dans les prochaines 24 heures. Car
les solutions simples et faciles n'existent pas.
Mais à moyen et à long terme, nous sommes convaincus que
ces nouveaux marchés répondront plus adéquatement aux
besoins des usagers et augmenteront la rentabilité de notre
industrie.
Pour ce faire, nous croyons que l'implication des associations de
services fera la différence entre la réussite ou l'échec
de tels projets. L'association de services est la mieux placée pour
faire la promotion de tels services et pour assurer un service de
qualité, sécuritaire et surtout continuel. Nous ne croyons pas au
contrat entre le client et le propriétaire de taxi car actuellement des
contrats style "run de lait" existent en petit nombre et ne sont pas rentables.
Il est plus facile pour une association d'établir un service de taxi
collectif ou "jitneys" ou encore d'autobus que pour le propriétaire
artisan. C'est d'ailleurs le rôle et le devoir des associations de
services de fournir le travail aux chauffeurs de taxi, c'est notre
raison d'etre. L'étude faite en 1980 par M. Michel Trudel,
intitulée Les Services de taxis collectifs: Quelques expériences
et des perspectives d'implantation au Québec démontre clairement
que lorsque les associations de services y étaient impliquées, la
réussite était plus forte.
Le jour où les associations de services auront à
promouvoir ces nouveaux marchés, la concurrence entre elles ne fera que
réduire le délai pour atteindre la rentabilité. La force
de frappe de l'association pour promouvoir un nouveau produit n'est pas
comparable à celle de chaque propriétaire de taxi isolé.
À titre d'exemple, avant l'entrée des loteries gouvernementales,
plusieurs miniloteries existaient et les fraudes étaient nombreuses.
Aujourd'hui, les loteries gouvernementales ont un volume largement
supérieur à ces loteries d'antan et les fraudes ont
été éliminées. Le public est mieux
protégé. C'est la même chose pour le taxi. Ne donnez pas
l'occasion à tous les distributeurs de mini-Loto l'autorisation de faire
leur propre loterie, car les problèmes d'antan vont resurgir rapidement.
Soyons professionnels.
L'addition de nouveaux marchés répondrait plus
adéquatement aux besoins des usagers et résoudrait en grande
partie le problème des autobus scolaires, des autobus publics, des
problèmes de stationnement des centre-ville et de la circulation.
Nous croyons qu'il y a quatre nouveaux marchés fort
intéressants pour notre industrie: le complément au transport en
commun; les "jitneys" - trajets fixes avec prix fixes - ; "run de lait" taxi
collectif et transport de biens.
Pour ce faire, il faudrait que les associations de services
développent ces nouveaux marchés; que les associations de
services soient responsables du respect des listes des taux établis; que
les compagnies signent des contrats avec les différents réseaux
d'autobus et que les minibus soient acceptés comme véhicule-taxi;
que le rôle d'une association soit bien défini, de même que
ses responsabilités.
C'est l'association de services qui est la plus proche de ses membres et
de la population. C'est aussi elle qui est la mieux placée pour
l'établissement et le développement de ces nouveaux
marchés. Sans l'intervention des associations de services, ces nouveaux
marchés seraient un échec certain et ne sèmeraient que des
problèmes additionnels déjà trop nombreux dans notre
industrie. Nous sommes persuadés que ces nouveaux marchés, par le
biais des associations, feront accroître la rentabilité de
l'industrie à court terme.
Quant au transport de biens, nous n'acceptons pas le texte du livre
blanc car, encore là, il sera une source de problèmes pour
l'application du règlement. Si les autobus de Voyageur, les trains du CN
et les avions d'Air Canada livrent des colis, pourquoi ne pourrions-nous pas
livrer des colis de petite taille? Nous avons un permis très dispendieux
et une concurrence avec les autres transporteurs de biens ne ferait
qu'améliorer le service et répondrait davantage aux besoins des
usagers. Encore là, ce marché pourrait être
développé facilement par des associations de services.
Quant à la décentralisation, elle nous semble une
nécessité pour la réussite d'un tel projet. Cependant,
nous croyons que l'industrie du taxi devrait être dotée des outils
nécessaires pour s'autocontrôler au même titre que
l'Association des courtiers de la province de Québec, le Collège
des médecins, le barreau, etc. Les autorités gouvernementales
seraient ainsi soulagées d'un poids difficile à assumer en cette
période de crise et ne devraient que superviser et contrôler un
tel organisme.
Cet organisme que nous préconisons sera appelé, pour les
fins du texte, la Régie du taxi. La composition de ses membres est
très importante et c'est là l'unique façon d'éviter
des problèmes éventuels par la formation de petits groupes, tel
que vécu dans le passé. Selon nous, les autorités
gouvernementales, les ligues de taxi, les regroupements de chauffeurs, la
chambre de commerce et les associations de services devraient être
représentés au conseil de cette régie. Une telle
régie représenterait l'ensemble de l'industrie et pourrait se
doter de sous-comités pour améliorer l'efficacité.
Pour ce faire, nous croyons que les représentants devraient
être choisis de la façon suivante: A) Représentants
gouvernementaux nommés par les autorités gouvernementales; B)
Représentants de la ligue.
Une ligue de propriétaires devrait exister d'une manière
démocratique et devrait être conçue de la façon
suivante: 1) Chaque association de services devrait former un comité
consultatif suivant le nombre de voitures comme suit: a) 300 voitures et plus,
onze directeurs, soit quatre chauffeurs, quatre propriétaires d'une
voiture, deux propriétaires de deux voitures et plus et un
employé de la compagnie; b) de 100 à 300 voitures, neuf
directeurs, soit trois chauffeurs, trois propriétaires d'une voiture,
deux propriétaires de deux voitures et plus et un employé de la
compagnie; c) 100 voitures et moins, il appartiendra à l'organisation
supérieure de la conurbation de suggérer et de déterminer
la formation de cedit comité. 2) Chaque comité consultatif
portera le nom de l'association de services. Exemple: Comité consultatif
de Taxi La Salle. 3) Le comité consultatif de chacune des associations
de services, aussitôt formé, devra fournir la liste de ses
directeurs à la régie du taxi de la conurbation. 4)
L'employé
de l'association sera nommé pour une année par
l'association de services. 5) Les chauffeurs et les propriétaires d'une
association de services seront élus pour une période
n'excédant pas deux ans à une assemblée
générale des chauffeurs et propriétaires de cette
même association et seulement la moitié des propriétaires
et chauffeurs élus devront démissionner chaque année, mais
auront le privilège d'être réélus. 6) Un
administrateur de l'association de services devra assister à toutes les
assemblées du comité consultatif afin de répondre aux
questions administratives. Cependant, ce dernier n'aura pas droit de vote. 7)
Les directeurs du comité consultatif de l'association de services
devront se réunir une fois par mois. 8) Les directeurs du comité
consultatif de l'association de services devront être
rémunérés par cette dernière moyennant une somme
à être déterminée par assemblée. 9) Chacun
des comités consultatifs devra élire parmi ses directeurs des
propriétaires délégués qui feront partie de la
ligue des propriétaires. Les chauffeurs et les employés ne
pourront être élus à ce poste et le nombre de
propriétaires délégués sera déterminé
comme suit: a) association de services de 300 voitures et plus, trois
propriétaires; b) association de services de 100 à 300 voitures,
deux propriétaires; c) association de moins de 100 voitures, un
propriétaire. Ces nombres peuvent très facilement être
discutés. 10) Chacun des comités consultatifs devra fournir les
noms de ses délégués à la ligue de taxi de sa
conurbation, laquelle les suggérera à la régie. 11) Tous
les délégués auront le privilège d'assister aux
assemblées générales de la ligue des propriétaires
et eux seuls seront admissibles à être élus comme
directeurs de la ligue. 12) Les directeurs de la ligue des propriétaires
devront faire partie d'associations de services différentes.
En résumé, cette façon de choisir les directeurs de
la ligue des propriétaires serait, à notre avis, la plus
démocratique, la plus efficace et la compétence de ces derniers
serait supérieure, vu que le privilège de siéger à
cette direction ne reviendrait pas à n'importe qui. Cette suggestion se
résume donc comme suit: 1) être élu par les membres de son
association de services; 2) être élu par son comité
consultatif; 3) être élu par les délégués. De
cette manière plus que démocratique, on éliminera la
possibilité de formation de groupes indésirables pour
représenter l'industrie du taxi.
C) Représentants des chauffeurs. La façon de
procéder chez les propriétaires pourrait s'appliquer. D)
Représentants de la chambre de commerce: nommés par la chambre de
commerce. E) Représentants des associations de services: Ils devront
être choisis par un vote des différentes associations de
services.
La régie du taxi ainsi constituée pourrait répondre
aux besoins de l'industrie et des autorités gouvernementales. Elle
devrait relever uniquement de la Communauté urbaine de Montréal.
Ses tâches seraient de préciser les normes d'exploitation,
d'établir les règles de qualité de services, de
présenter les révisions de tarification à la Commission
des transports du Québec, de permettre le développement du taxi
collectif après acceptation des autorités locales, de s'occuper
de l'application des règlements, de juger les infractions, de faire la
réglementation qui devrait être acceptée par les
autorités locales, de voir à l'application de la
réglementation par des personnes spécialement autorisées
et non par des novices dans l'industrie du taxi.
Ses responsabilités: adopter sa politique et choisir le type de
services qu'elle voudra développer avec l'accord de la Communauté
urbaine de Montréal; pourra se doter de moyens de contrôle; la CUM
conserverait un encadrement minimal des services de taxi; établir une
cohérence entre les rôles des différents modes de transport
et conservera les aspects positifs acquis de la centralisation; pourra
édicter les normes relatives à l'aménagement du
véhicule et de son équipement ainsi que les normes d'utilisation
de sécurité de garde et d'entretien; présenter à la
Communauté urbaine de Montréal les tarifs des services de taxi
traditionnels ou collectifs, s'il y a lieu; pourra compléter par
réglementation les normes déjà prévues par la
législation gouvernementale, pour autant qu'il n'y a pas
d'incompatibilité; pourra réglementer: l'idenfication du
véhicule et du chauffeur; le compteur; l'éthique du chauffeur; le
confort et la sécurité du client; la propreté et
l'entretien du véhicule; les aires de stationnement. Elle administrera
les permis des propriétaires sous la responsabilité de la CUM.
(19 heures)
Si la régie veut augmenter ou réduire le nombre de permis
de sa conurbation, elle pourra les acheter en répartissant le coût
sur l'ensemble des propriétaires restants, car la valeur de leur
commerce sera ainsi augmentée.
La régie pourra endosser le permis d'un propriétaire de
taxi lorsqu'il le nantira à une institution financière. De cette
façon, certaines gens voulant profiter de cette situation seront
éliminés et les institutions financières pourraient
financer un permis jusqu'à 50% ou 75% de la valeur du permis. En cas
d'impossibilité de payer, la régie paiera l'institution
financière et décidera soit de le revendre ou encore de
l'éliminer. Ainsi, la protection sera excellente pour les
propriétaires artisans et pour les institutions
financières. Le problème relatif au nombre de permis sera ainsi
entre les mains des gens du taxi et c'est eux qui prendront les
décisions et paieront pour cette réduction s'il y a lieu.
Quant au chauffeur sans permis, nous croyons que les règlements
de la régie pourront facilement prévoir cette sorte d'infraction
trop répandue actuellement, mais corrigeable très facilement.
Actuellement, toutes les associations de services ont des règlements
à cet effet. Vous trouverez en annexe une copie des règlements de
notre compagnie. Il serait absurde d'enlever le permis à un
propriétaire sans l'avoir avisé au préalable, car si le
propriétaire n'est pas avisé des représailles envers son
chauffeur, il ne faudrait pas le punir sévèrement pour des actes
dont il ne serait pas informé.
La régie devrait aussi avoir la responsabilité de la
délivrance des permis de chauffeur, de donner des cours de formation
spécialement conçus et adaptés aux chauffeurs de taxi, de
déterminer le nombre de chauffeurs nécessaires, etc. Qui de mieux
placés que les gens du taxi pour connaître leurs besoins
véritables?
Cependant, nous comprenons que toute décentralisation trop rapide
entraîne d'autres problèmes et que cette décentralisation
devrait se faire sous la surveillance de la Communauté urbaine de
Montréal uniquement.
Nous croyons que l'industrie du taxi a assez de maturité pour se
diriger elle-même. Cependant, pour éviter des abus et pour que
tous aient une ligne de pensée commune, il est nécessaire que les
autorités locales et gouvernementales nous supervisent et collaborent
étroitement. De plus, de cette façon, nous sommes
persuadés que le peuple québécois épargnera des
sommes d'argent importantes tout en augmentant l'efficacité. En
résumé, les autorités devraient établir les grandes
lignes à suivre et laisser l'industrie faire la cuisine
elle-même.
Nous croyons que l'industrie du taxi a besoin de subventions au
même titre que d'autres.
Nous ne voulons pas être privilégiés, nous ne
voulons qu'être traités également. Ceci aurait un impact
direct sur la rentabilité de notre industrie.
Actuellement, la Société de développement
industriel accorde des prêts à des taux réduits ou des
subventions pour l'achat de machinerie. Il serait bon que l'industrie du taxi
puisse profiter de ces avantages pour l'achat de véhicules neufs, de
radios ou de tout autre équipement nécessaire à son
travail.
Le gouvernement accorde des subventions pour le changement de
système de chauffage ou pour l'isolation des habitations afin de
réduire la consommation énergétique. Nous croyons qu'une
subvention pour l'achat de véhicules plus économiques aiderait
grandement à réduire la consommation d'essence, c'est notre plus
grosse dépense.
Les agriculteurs ont des réductions sur le prix de l'essence. Ne
croyez-vous pas qu'il serait grand temps que nous ayons ces mêmes
avantages? Le fédéral accorde déjà une ristourne
sur l'achat de l'essence.
Nous apprécierions que la taxe de vente de 9% soit abolie pour
l'achat de voitures neuves, ceci nous aiderait à acheter de nouvelles
autos, ce qui projetterait une meilleure image aux touristes. Car, il ne faut
pas l'oublier, le chauffeur de taxi est souvent le premier contact avec le
touriste en sol québécois.
Nous sommes les gens les plus lésés depuis le nouveau
régime d'assurance automobile. La convention d'indemnisation directe a
fait grimper les primes d'assurances. Nous croyons que le minimum serait de
subventionner une partie de ces coûts. Il en est de même pour les
assurances contre des blessures corporelles.
Quant au covoiturage, nous ne croyons pas que ce mode de transport
aiderait l'industrie du taxi. Au contraire, il pourrait se créer un
autre système de taxi maquillé. Les limousines, actuellement,
nous suffisent.
Les limousines devraient être de vraies limousines et non des
taxis maquillés sans permis. Ces limousines ont contribué
à l'érosion d'un marché. Il y a un marché pour les
limousines et il est grand temps qu'un contrôle soit exercé par
les autorités gouvernementales. Une concurrence déloyale n'est
jamais bien appréciée.
Nous sommes persuadés que nos suggestions à l'égard
de la nomination des directeurs de la ligue, permettraient à cette
dernière de réaliser les objectifs définis dans le livre
blanc.
L'abolition des concessions n'est pas possible tant que les
propriétaires de taxi ne seront pas obligés d'appartenir à
une association de leur choix. Si tous les propriétaires de taxi
appartenaient à une association, les concessions seraient abolies
immédiatement. Car, il est temps que nous cessions de payer pour donner
notre service. De plus, le rôle des associations pourrait s'accentuer de
beaucoup, et leur responsabilité serait aussi accrue, ce qui pourrait
faciliter le travail de la Communauté urbaine de Montréal et de
la ligue. Le service à la clientèle serait ainsi plus
adapté aux besoins des usagers.
Dans l'exemple cité dans le livre blanc où la ligue A-5 a
réussi un bon travail selon l'auteur, il est à remarquer que tous
les propriétaires faisaient partie d'une association de leur choix et
c'est là l'unique condition de réussite de toute réforme.
Il faut éliminer à tout jamais l'idée
d'éliminer
les associations de services. Le passé l'a prouvé sans
équivoque.
Seules les associations de services peuvent contrôler leurs
membres et s'assurer du respect des normes. Dans le passé, le
gouvernement a toujours évité cette question mais,
l'expérience le démontre clairement, tant et aussi longtemps que
le propriétaire de taxi ne sera pas obligé d'appartenir à
une association de taxi de son choix, rien de concret ne sera
réalisable.
Il est temps que cette question soit vidée. Pour ce faire, il
faudrait que l'association soit bien définie et que des normes soient
établies pour la création de nouvelles associations afin
d'éviter une multitude d'associations d'une ou deux voitures.
Conclusion. La réforme pourrait résoudre en grande partie
le problème du taxi. La création de nouveaux marchés
aidera certainement à la réalisation des objectifs. Le
décentralisation aura aussi des effets bénéfiques, mais le
tout est conditionné à la participation des associations de
services.
Seules les associations peuvent aider au respect des normes; aider le
développement des nouveaux marchés; Abolir les concessions;
trouver des avantages aux propriétaires de taxi. Sans les associations
et l'obligation du propriétaire de taxi d'appartenir à une
association de son choix, il serait utopique d'examiner une solution aux
problèmes du taxi. Ce n'est pas une prétention de notre part,
mais l'expérience du passé nous l'a clairement
démontré et il en est de même pour les villes qui ont
réussi avec le taxi collectif.
Nous espérons que vous trouverez le mémoire constructif.
Merci.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Clair: M. le Président, je remercie beaucoup M. Brunet
et M. Vermette de leur présentation. Ce mémoire est très
intéressant en ce sens que je pense que c'est le seul mémoire qui
nous est venu d'une association de services. Je pense que c'est un point de vue
qui est éminemment important dans l'organisation de l'industrie du taxi.
Là-dessus j'ai déjà reconnu, plus tôt au cours de
cette commission, que peut-être nous n'avions pas accordé autant
d'importance que nous aurions dû le faire au rôle joué par
les associations de services dans le programme d'action que nous avons
présenté, et dans ce sens-là, on va certainement tenir
compte du point de vue qui est exprimé. Nous allons même essayer
peut-être d'élargir notre connaissance et nos propositions sur les
associations de services.
M. le Président, les propositions de Taxi La Salle sont claires,
précises et ne suscitent pas beaucoup de questions, si ce n'est les
suivantes.
Vous affirmez que l'abolition des concessions n'est pas possible tant
que les propriétaires de taxi ne seront pas obligés d'appartenir
à une association de services de leur choix. Probablement parce que je
ne connais pas encore assez le secteur, mais j'ai de la difficulté
à voir comment l'obligation d'appartenir à une association de
services entraînerait automatiquement la disparition des concessions.
M. Brunet: Depuis au moins 5 à 6 ans, toutes les
compagnies de taxi sont d'accord que c'est ridicule de payer pour donner du
service. Actuellement on continue à le faire. Pourquoi? C'est qu'on ne
veut pas perdre nos membres parce que sans cela ils iraient dans l'autre. C'est
tout simplement la compétition qui nous fait offrir des prix
actuellement aux concessions.
M. Clair: Mais si tout le monde était membre d'une
association de services ça changerait quoi? Une association de services
pourrait continuer à...
M. Brunet: ...à exister.
M. Clair: Non seulement continuer à exister mais pourrait
continuer à être intéressée à soumissionner
pour une concession.
M. Brunet: Si vous remarquez depuis 19...
M. Clair: ...à moins que vous vouliez signifier que le
choix de l'appartenance à une association de services se fait une fois
pour la vie.
M. Brunet: Non, non, non ce n'est pas ça qui est
l'idée. Si l'on regarde depuis 1973, depuis que c'est rendu à
Québec, le nombre de taxis que chez nous on appelle "fantômes"
dans notre jargon, il a augmenté beaucoup. Puis s'il a augmenté
c'est probablement dû au manque de contrôle. C'est pour cela aussi
qu'il y a un marasme total actuellement. Donc, la question de la concession,
c'est une chose dont les compagnies de taxi se font accuser
énormément. Dans le fond, le jour où on n'aura pas une
concurrence déloyale, pourquoi quelqu'un resterait-il chez nous s'il
peut avoir les mêmes services pour rien s'il est indépendant?
C'est tout à fait normal.
M. Clair: Vous parlez du contrôle, vous dites que les
associations de services sont les mieux placées pour assurer, d'abord,
la mise en application des nouvelles avenues et le contrôle de la
qualité du service. Je voudrais vous poser une question sur un sujet que
vous n'avez pas abordé, c'est la question d'un homme, une voiture.
Comme
représentant d'une association de services, quel est votre point
de vue sur cette question d'un homme, une voiture? Quel est votre point de vue?
C'est la première question.
M. Brunet: Cette proposition-là, ça
été fait dernièrement. On ne l'a pas appliquée chez
nous. On n'était pas nécessairement pour ni contre. Étant
donné que 90%, je pense, des propriétaires chez nous sont
artisans, ça ne règle pas un problème. C'était
seulement une goutte d'eau dans l'océan, ce problème-là.
Aujourd'hui, au moins chez La Salle que, moi, je connais, il n'y en a pas
tellement. On n'a pas 100 voitures avec des chauffeurs.
M. Clair: Sur la question...
M. Brunet: Il y a une autre affaire, excusez. Il faut donner du
service, puis souvent c'est la fin de semaine. Qui va travailler? C'est le
monsieur qui a un deuxième travail qui va faire ce travail-là.
Dans notre cas, c'est ça.
M. Clair: Dans votre association de services par exemple, de deux
choses l'une, soit que vous décidez d'implanter la règle un
homme, une voiture, soit encore que, par règlement ou loi, vous
êtes forcés d'appliquer une réglementation comme
celle-là, un homme une voiture. Est-ce que vous êtes en mesure de
me dire si vous seriez capables d'effectuer le contrôle d'une
règle comme celle-là?
M. Brunet: Assez facilement, oui. Parce que tous les chauffeurs
qui travaillent chez La Salle sont enregistrés, ils ont tous un dossier
de chauffeur. Il s'agirait d'avoir un seul chauffeur par permis.
M. Clair: Donc, ça ne vous créerait pas de
problème.
M. Brunet: Aucun, parce que actuellement nos chauffeurs sont
très bien contrôlés, dans notre compagnie. S'il veut venir
travailler chez nous, il doit avoir un "pocket number" et il doit, d'ailleurs,
passer un test de connaissance de la ville. On ne se fie pas maintenant
seulement au "pocket number", ce n'est pas bon.
M. Clair: Vous développez vos propres tests.
M. Brunet: Exactement.
M. Clair: Dernière question, M. le Président.
M. Polak: Vos examens ne sont pas forts.
M. Clair: M. le député de Sainte-Anne trouve
ça drôle, mais on a indiqué la faiblesse des examens,
justement. C'est connu. C'est de notoriété publique. C'est
écrit noir sur blanc dans l'énoncé de politique. Cela
démontre juste que le député de Sainte-Anne n'a pas lu
notre programme d'action.
M. Polak: M. le Président, celui qui ne peut pas
écrire et qui veut avoir son "pocket"...
M. Clair: M. le Président, c'est une question que j'ai
posée à la ligue A-11, et la ligue A-11 nous disait qu'on
progressait. Je pense qu'à certains égards c'est une affirmation
qui peut être soutenue dans l'établissement d'un consensus dans le
milieu du transport par taxi à Montréal. On a sursauté
à la lecture de la page 3. On dit, d'abord: "Un groupe de travail de
l'industrie du taxi, connu sous le nom de Groupe uni du taxi, regroupant les
propriétaires de flottes, la ligue de taxi et les associations de
services de l'agglomération A-11, avait été formé
pour la rédaction d'un mémoire collectif. Après plusieurs
séances de travail, le mémoire devait être
préparé par les gens de la ligue et tous les points y avaient
été discutés. À notre grande stupéfaction,
le mémoire de la ligue et non celui du Groupe uni du taxi nous fut remis
vendredi le 11 février 1983 et son contenu est totalement
différent."
Simplement parce qu'on a posé la question à la ligue, et
compte tenu de cette affirmation-là et du climat qui a prévalu au
cours des dernières années dans l'industrie du taxi à
Montréal, ça nous intéressait tous, je pense, de savoir
votre version puisqu'on a demandé sa version à la ligue.
M. Brunet: Jusqu'au 11 février, j'étais convaincu
qu'enfin on avait un regroupement. Malheureusement, le 11 février, je me
suis aperçu qu'on était dans le même marasme qu'il y a 3
mois ou 3 ans.
M. Clair: Mais c'était quoi, ce groupe-là? Qui en
faisait partie?
M. Brunet: Les associations avaient nommé 3
représentants, la ligue avait nommé aussi 3 représentants,
puis il y avait 3 représentants de propriétaires de flottes de
taxis. On faisait un échange d'idées de tout le monde pour
essayer d'arriver une fois pour toutes avec un mémoire qui demandait la
même chose pour l'ensemble. Par exemple, la question qui semble vous
choquer, de tous les taxis membres d'une association, c'était
là-dedans, tout le monde était d'accord.
M. Clair: Choquer?
M. Brunet: Non, non, mais ça semble. Je sais que ça
choque du monde de l'industrie. (19 h 15)
M. Clair: Non, c'est parce que cela m'intéressait d'avoir
la réponse.
M. Brunet: C'est disparu dans la brume, avec une foule de choses.
Je sais bien que je suis le premier déconcerté. Si vous avez
sursauté à la réception de notre document, moi, j'ai
sursauté le 11 février et depuis ce temps il n'y a rien eu
d'autre.
M. Clair: Je vous remercie, M. le Président.
M. Brunet: On ne dit pas que c'est partagé par les autres
compagnies, remarquez. On parle pour nous.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: Je peux dire, M. le Président, que la
compagnie La Salle donne un excellent service, ayant été
chauffeur de cette compagnie pendant cinq ou six ans.
M. Polak: II y a un conflit d'intérêts, M. le
Président.
M. Clair: Vos affaires se sont améliorées depuis,
n'est-ce pas? J'en suis convaincu.
M. Bissonnet: J'ai même joué au hockey avec M.
Brunet. Il ne se le rappelle pas.
M. Brunet: Oui, je m'en souviens. C'est parce qu'on a des ligues.
On a maintenant une ligue de soccer pour éviter, justement, les
problèmes dont on parlait tantôt.
M. Bissonnet: Ah bon! Il est plus jeune, effectivement.
M. Polak: Arrêtez de faire des confessions.
M. Bissonnet: M. le vice-président, simplement pour le
bénéfice de la commission, vous êtes une association de
services et, dans le mémoire, vous indiquez que vous avez
consulté vos membres pour ce mémoire. De quelle façon,
chez vous, à la compagnie La Salle, consultez-vous vos membres pour
avoir l'appui des membres? Parce qu'on est en face d'une compagnie
privée et les membres sont ceux qui paient la cotisation pour avoir le
service de la compagnie.
M. Brunet: Ce qu'on a fait, on a vu le nouveau livre De nouvelles
avenues pour le taxi. On a convoqué, par groupe de 30 pen- dant un mois,
tous les soirs tous les chauffeurs et les propriétaires. Ils
étaient 30 ou 40 par soir. Cela a pris environ 32 réunions pour
les rencontrer et, cette semaine, après l'avoir terminé, nous
leur avons présenté le mémoire avant de venir ici. Donc,
ils sont au courant du mémoire qu'on présente. Ce n'est pas
l'idée des 800. Il y en a sûrement qui n'étaient pas
d'accord avec tout le contenu -et c'est normal - mais ils ont tous eu
l'occasion de le voir à la préparation et de le voir à la
fin, avant vous.
M. Bissonnet: Vous avez un consensus là-dessus.
M. Brunet: On a un comité consultatif depuis le
début de Taxi La Salle, depuis 1964, pour autant que nous sommes
concernés. C'est une des raisons pour lesquelles la compagnie va
très bien, parce que je pense que les chauffeurs sont mieux
placés pour savoir, par exemple, où un centre de taxis devrait
être que moi qui suis derrière un bureau. D'ailleurs, c'est ce
qu'on propose au point de vue de la régie. C'est le même
principe.
M. Clair: Ce que j'ai trouvé le plus intéressant -
je m'excuse auprès du député -justement dans votre
proposition - une régie, on va d'abord y réfléchir bien
comme il faut - c'est l'existence de comités consultatifs dans les
associations de services. Il me semble, en tout cas, que c'est très
intéressant. Je ne sais pas si c'est en vigueur dans les autres
associations, mais il me semble que c'est dans l'intérêt
même d'une association de services.
M. Brunet: Selon nous, c'est une nécessité si vous
voulez connaître les besoins.
M. Bissonnet: Je reviens. Vous m'avez fait perdre le fil de mes
idées. Le document du ministère des Transports
énumère de nouvelles avenues qui ont été
explorées par certains mémoires. Au niveau de la
rentabilité du taxi - votre association de services est un chef de file
dans ce domaine à Montréal - le mémoire de la ville de
Montréal nous dit effectivement, et de façon bien
évidente, qu'il y a beaucoup trop de permis dans l'agglomération
A-11. On a fait une suggestion et la ligue de taxis nous a également
fait une suggestion quant à la possibilité du rachat de permis en
investissant, à titre d'exemple, un montant annuel de 200 $ pour
racheter les permis en trop. Évidemment, avec les nouvelles avenues,
nous prévoyons, nous, de l'Opposition, qu'on pourra aller chercher un
maximum de 200 à 250 permis transférables soit dans le taxi
collectif ou dans le taxi pour les handicapés et d'autres taxis, en
supplément des taxis traditionnels. Je suis convaincu qu'on parle
de cela à l'intérieur de votre association par l'entremise de
ceux qui sont membres de l'association. De quelle façon les
propriétaires de taxi qui sont inclus chez vous verraient-ils cela,
payer un montant annuel supplémentaire pour le rachat de permis de taxi
qui seraient en trop dans la région de Montréal?
M. Brunet: Le problème est plus profond que cela, je
crois. C'est bien beau de dire de racheter des permis, mais savoir combien et
à quel prix, c'est une autre histoire. Le fait qu'il y ait de nouveaux
marchés peut peut-être résoudre le problème, si cela
fonctionne. Je suis un des plus optimistes. Je suis prêt à penser
qu'on pourrait doubler et même tripler notre chiffre d'affaires avec les
possibilités de nouveaux marchés. Si c'est fait avec du bon
marketing, je suis convaincu qu'on peut doubler notre chiffre d'affaires.
Quant au nombre de permis, le problème, c'est que ce n'est pas
rentable actuellement. Je ne sais pas si c'est parce qu'il n'y a pas assez de
clients ou parce qu'il y a trop d'autos. En réalité, je crois que
c'est une combinaison des deux. Si on suppose que le marché demeure le
même qu'il est actuellement, assurément il faut enlever des
véhicules.
Il y a plusieurs années, on avait proposé une
façon: pendant six mois, on prenait les prix qui étaient
enregistrés lors des ventes, parce que tous les prix de vente sont
enregistrés au gouvernement. Vous établissiez un prix moyen,
disons 7500 $ par exemple, et on disait qu'on n'achetait pas 2000 ni 1000, mais
100; c'étaient les 100 premiers qui voulaient vendre à 7500 $,
répartis sur l'ensemble. Dans le passé, je suis convaincu que nos
membres - d'ailleurs, on en a souvent parlé - étaient tous
d'accord à payer un peu pour cela, si c'était prouvé que
c'était plus rentable après. Cela devrait l'être, à
moins que le marché ne continue à descendre comme il descend
depuis dix ans. Vous avez beau en enlever, vous réglez un
problème de façon temporaire, parce que, dans cinq ans, il y aura
le même problème, vous allez devoir abaisser le nombre encore.
M. Bissonnet: La cotisation à l'association La Salle est
de combien par mois?
M. Brunet: Elle est de 75 $. Cela comprend l'assurance-vie des
propriétaires et un paquet d'autres choses, si vous voulez. C'est
environ le même prix pour à peu près toutes les compagnies
à Montréal. Cela peut varier de 5 $ à 10 $.
M. Bissonnet: Vous avez également dans votre corporation
une compagnie d'assurances. Au niveau des assurances d'autos-taxis, à
titre d'exemple, dans la région de Québec, on nous a dit qu'il
n'y avait qu'une compagnie qui assurait les propriétaires d'autos-taxis.
Votre compagnie d'assurances qui fait partie du groupe La Salle offre-t-elle
des assurances aux autos-taxis? Pourriez-vous nous expliquer, en fait, le
marché des assurances, qui est compliqué pour ceux qui ne sont
pas experts dans ce domaine?
M. Brunet: Ce sont des assurances qui datent depuis longtemps. De
1967, 1968 jusqu'à 1971, on avait de la difficulté à
s'assurer parce qu'on assurait tous les La Salle à l'époque. Pour
résoudre le problème, on avait acheté Sterling Insurance,
de Sherbrooke, pour assurer strictement nos taxis. C'était le but
premier.
Après dix ans d'existence, je peux vous dire que notre chiffre
d'affaires n'est même pas de 4% constitué de taxis. La loi
Payette, avec l'indemnisation directe, a fait revirer du tout au tout le taxi.
Dans les six premières années où on a eu l'assurance-taxi,
à toutes les années, nous avons été rentables. Il y
a des années qui étaient plus creuses que d'autres, mais nous
avons toujours eu une rentabilité. Depuis la loi Payette, cela a
été déficitaire quatre ans de suite au niveau des taxis.
C'est assez facile à expliquer. Avec l'indemnisation directe, sans
subrogation, si vous avez un accident, c'est le chauffeur qui frappe une autre
personne qui est responsable. On ne paie plus les dommages de l'autre. Si, par
contre, le chauffeur se fait frapper dans un accident et qu'il n'est pas
responsable, c'est la Concorde qui paie et elle ne va pas en recours contre
l'autre.
Donc, nous, à La Salle, si vous assurez 1000 taxis et que vous
avez une fréquence de 100%, vous allez avoir 1000 accidents, c'est
automatique. Une année, vous allez en avoir 920, l'année
suivante, vous allez en avoir 1080. Avant le nouveau régime, 75% des
accidents étaient non responsables. C'est donc dire que je payais un
accident sur quatre et que je payais un véhicule moyen d'un particulier,
qui est plus vieux qu'une auto-taxi, si vous voulez. Les véhicules-taxis
sont plus neufs que les véhicules privés, selon la moyenne.
En plus, on doit payer la perte d'usage si la personne n'est pas
responsable. Dans le cas d'une voiture-taxi, on parle de 25 $ par jour. Donc,
trois fois sur quatre, tu dois payer 25 $ par jour, contrairement à
avant, où tu ne payais jamais cela, sauf si tu frappais un autre taxi ou
un camion. Du jour au lendemain - c'est la même fréquence, cela
n'a pas changé, nos chauffeurs sont aussi bons; dans 75% des accidents,
nous ne sommes pas responsables - vous êtes obligés de tripler la
prime en partant et de
l'augmenter, parce que la valeur du véhicule assuré est
plus élevée que ce qu'on payait comme dommages auparavant et vous
devez rajouter à cela la question de la perte d'usage.
En même temps, le service des assurances a changé sa police
d'assurance automobile pour tout le monde. Les appareils de radio sont inclus.
Une radio de taxi chez nous vaut entre 1200 $ et 1400 $. Cela augmente donc
votre prime de 12% encore. Pourquoi cela n'a pas paru lors de la loi Payette?
Je vais vous l'expliquer dans deux secondes. Mais, si on parle de cela
seulement, vous n'avez pas le choix. Prenez la prime que vous avez payée
en 1978, triplez-la et vous arrivez au montant. Ajoutez à cela les
coûts de l'inflation que vous avez eu à payer, comme tous les
consommateurs dans l'assurance normale.
Si on revient à 1978, pourquoi est-ce que cela n'a pas paru
immédiatement? C'est parce que tous les assureurs automobiles
québécois et étrangers sont partis avec l'idée que
le mauvais risque devenait un bon risque avec la loi Payette. Le taxi
était reconnu comme un mauvais risque auparavant. Des compagnies
américaines et surtout de l'Ontario sont venues assurer ici, à
des prix ridicules de 325 $ par année. Vous avez vu les compagnies
locales comme Bélair, Concorde, Wawanesa, Canadian Universal se retirer
quasiment du marché parce qu'on ne pouvait pas arriver avec la
concurrence qui était trop déloyale. C'était trois fois
plus cher.
Dans le temps, tous les membres étaient obligés
d'être assurés chez nous. On a dit: Allez vous assurer ailleurs.
On a même envoyé une lettre à tous nos membres pour dire:
Allez chez telle compagnie, c'est moins cher, profitez-en, la manne passera,
mais pas pour longtemps.
Mes propres autos, je les ai assurées ailleurs. Pour vous dire
à quel point c'était ridicule, un an après, cette
compagnie-là est sortie du Québec par hasard, une autre est
arrivée et actuellement il n'y en a plus d'autres. Les quatre ou cinq
compagnies d'avant sont revenues avec des taux réguliers qui sont,
malheureusement, inabordables pour l'industrie du taxi parce qu'on est les
premiers.
Pour compenser cela, on a essayé un nouveau système cette
année chez nous. On dit que la personne, responsable ou non, a une
franchise à payer. On limite aussi la valeur de l'auto parce que tout le
monde sait qu'après deux ou trois ans la valeur du taxi est beaucoup
moindre qu'une auto privée. On assure donc la valeur bien
spécifique et, responsable ou pas, la personne paie 500 $. En
réalité on coupe peut-être la prime de 700 $ à 800
$, mais si la personne se fait frapper deux fois pendant que sa voiture est
stationnée, cela lui coûte plus cher. Au moins, la prime est
contrôlée un peu plus qu'avant. C'est le seul moyen qu'on a pu
trouver pour réduire un peu la prime. Cela concerne les dommages
matériels.
Si vous me le permettez, au point de vue des blessures corporelles, au
début, on nous demandait cinq fois 85 $. On a fait des
représentations à Concorde parce que, selon nous, la prime d'un
véhicule-taxi pour les blessures corporelles valait 54 $ par
année. On frappe des piétons, mais beaucoup moins que... Il n'y a
pas de mort; s'il y en a, ce n'est pas tellement. Le gouvernement est
arrivé avec une prime de 425 $ qui a été réduite
à 255 $ après. Dernièrement, il nous a donné un
cadeau de 5 $. À mon avis, c'est complètement ridicule parce
qu'en ajoutant cela à notre prime nous demandons de 1200 $ à 1600
$, il n'y a pas un taxi qui peut arriver actuellement.
M. Bissonnet: M. Brunet, les statistiques relativement aux
accidents où les propriétaires d'autos-taxis sont
impliqués au niveau corporel, quel pourcentage cela
représente-t-il?
M. Brunet: De mémoire, même pas 1%; parce que,
depuis 1978, on ne s'occupe plus de cela. Il y a un blessé, on demande
si l'auto est endommagée; sinon, il n'y a rien là.
M. Bissonnet: Pas 1%? M. Brunet: À
l'époque.
M. Bissonnet: Quand vous parlez de l'obligation de tous les
propriétaires d'autos-taxis de faire partie de l'association, il y a
beaucoup d'automobiles fantômes maintenant "on the street". Pensez-vous
qu'il pourrait y avoir un consensus - je tiens, évidemment, compte de
votre mémoire - pour arriver à regrouper tous ces
propriétaires indépendants dans des associations quelles qu'elles
soient?
M. Brunet: Avant le 10 février, cela semblait être
accepté de tout le monde. Honnêtement, si on demande à la
police de Montréal de venir nous surveiller, pourquoi payer un gars 35
000 $? Dans le fond, on serait bien mieux de se servir des compagnies de taxi
qui pourraient avoir des inspecteurs. Obligez-nous à avoir des
responsabilités précises et cela ne nous fait rien de faire la
fameuse discipline et de rapporter cela.
Quant à tous les abus qui se sont passés à Dorval,
je n'avais quasiment pas de La Salle à Dorval dans le temps où on
parlait des problèmes. C'est drôle, mais j'avais plus de plaintes
juste de là que dans tout le reste de la ville. Pourtant, je pense que
je n'avais pas 15 La Salle par jour qui allaient là. C'est le manque de
contrôle qui
fait que vous avez des plaintes actuellement. (19 h 30)
M. Bissonnet: Dans une question posée au ministre par le
vice-président de la ligue A-11, on nous a dit que depuis trois mois il
y avait un consensus entre les ligues, les associations de services sur un
homme, une voiture. Est-ce qu'il y a eu, effectivement, un consensus à
cet effet?
M. Brunet: Cela fait suite à ce dont je parlais à
la page 3. Beaucoup de choses ont été discutées. Je suis
un de ceux qui étaient prêts à consentir à un homme,
une voiture. Il nous fallait d'autres concessions. Comme de raison, on faisait
un tout. Cela ne pouvait pas faire l'affaire de tout le monde,
assurément. Le mémoire était censé être fait
au nom de tout le monde et il répondait aux besoins de tout le monde.
Malheureusement, il y a eu trois mémoires avec des tangentes
différentes.
M. Bissonnet: Nonobstant cette chose, est-ce qu'il y a beaucoup
de relations entre la ligue A-11 et les associations de services? Y a-t-il
échange d'opinions régulièrement? Y a-t-il des rencontres,
en temps normal, entre la direction de la ligue et les associations de
services?
M. Brunet: Au cours des six derniers mois, il y en a eu presque
une fois par mois. C'est bon signe. Cela a été bon pour les deux
parties. Cela semble bloqué maintenant, mais je crois que c'est
facilement corrigeable.
M. Bissonnet: Merci beaucoup.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: Juste une question additionnelle. Vous avez
parlé tout à l'heure d'un chauffeur par automobile. Qu'est-ce qui
arrive en fin de semaine, parce que le même chauffeur ne peut pas
travailler sept jours par semaine? Est-ce que ce serait une solution, par
exemple, de dire que quelqu'un pourrait avoir un permis juste pour la fin de
semaine, une sorte de permis restreint? Je suis d'accord avec vous, un homme
par véhicule, c'est bien beau, mais, à un moment donné, il
n'y aura plus de services donnés parce que tout le monde veut avoir son
samedi ou son dimanche chez lui, possiblement. Cela peut créer des
problèmes.
M. Clair: La question du député de Sainte-Anne est
un peu dans le même sens que celle que je voulais poser. Si
c'était à implanter, avez-vous fait un scénario pour voir
comment vous ajusteriez l'offre sur la base de la règle un homme, une
voiture?
M. Brunet: Actuellement, c'est si peu rentable que je suis
convaincu que vous auriez du service 24 heures par jour, sept jours par semaine
dans n'importe quelle compagnie. Cela ne sert à rien de penser à
un scénario à court terme, mais si vous adoptez une loi à
cet effet, c'est une affaire à long terme, je crois qu'on ferait une
grave erreur. C'est mon avis. Ce n'est pas rentable à l'heure actuelle,
mais je ne pense pas que la base de la réforme, ce soit seulement un
homme, une voiture.
M. Clair: Non, ce n'était même pas un
élément de la réforme.
M. Brunet: C'est une goutte d'eau dans l'océan.
M. Clair: Cela a été beaucoup discuté par
d'autres groupes.
M. Brunet: Je suis un de ceux qui pensent que c'est une goutte
d'eau dans l'océan. Remarquez que je ne parle pas au nom de Taxi La
Salle; je parle en mon nom tout simplement. Je ne crois pas que ce serait la
solution à vos problèmes actuels. Si cela devient rentable... Je
crois beaucoup aux nouveaux marchés que vous préconisez,
énormément. Si le chauffeur est obligé d'avoir un contrat
dans sa boîte à gants, on perd notre temps. Ce sera de la folie
furieuse et cela ne vaut rien. Actuellement, comme ce n'est pas rentable, un
homme par véhicule, c'est beau, mais si cela devient rentable - parce
que nous, on pense à long terme, on est convaincu que cela va devenir
rentable un jour ou l'autre - ce serait peut-être une erreur de faire
cela.
M. Clair: Si l'association de services que vous formez devait
soumettre ses propriétaires au vote, cette possibilité de la
règle un homme par voiture, seriez-vous prêts à vous
soumettre au résultat qui en sortirait?
M. Brunet: Certainement, on pourrait le faire le plus rapidement
possible et si la majorité l'emporte...
M. Clair: Je n'avance rien. Vous avez l'air de penser que
j'annonce des décisions comme cela. Ce sont des questions.
M. Brunet: Non, c'est peut-être parce que, chez nous, on
prend des décisions plus rapidement.
M. Clair: Elle est bonne! Vous avez plus de souplesse pour agir.
Vous n'avez pas l'Opposition en face.
M. Brunet: D'ailleurs, à la prochaine assemblée, si
vous voulez avoir la parole, ce
sera peut-être un des sujets à discuter. Il n'y a aucun
problème de faire un sondage auprès de tous nos membres. Cela
nous fait plaisir, d'ailleurs. Remarquez que cela ne dérangera
aucunement la compagnie La Salle. Qui fait l'argent? C'est notre chauffeur,
s'il y en a plus à faire. En réalité, si notre gars est
satisfait, il va rester chez nous. Personnellement, je crois que c'est une
goutte d'eau dans l'océan, cette solution.
M. Clair: Dans certaines associations de services où c'est
en vigueur, on nous a parlé d'une amélioration de 30%. Je pense
que Me Élie est encore dans la salle.
M. Élie: Cela dépend, encore là, comme vous
disiez...
M. Brunet: Si vous voulez parler de compagnies précises,
M. Élie, on peut en parler. Cela me ferait plaisir. Je pense que ce
n'est pas le sujet de ce soir.
M. Clair: Je ne voulais pas ouvrir un débat avec Me
Élie. C'était simplement à titre de renseignements parce
qu'il me semblait que c'était lui qui l'avait souligné.
M. Brunet: Parce que s'ils sont si forts, ils semblent avoir bien
peur que cela comprenne d'autre chose.
M. Clair: Juste un dernier commentaire. Est-ce que le
député de Sainte-Anne avait d'autres questions?
M. Polak: Je voudrais faire remarquer au ministre que je dois
prendre l'avion. J'aimerais qu'après ce mémoire on parle de mon
analphabète parce que j'aimerais bien essayer de régler cela
ici.
M. Clair: Dernier commentaire, en tout cas. J'ai
déjà eu l'occasion de parler, en particulier, d'assurance en
matière de dommages matériels, de distribuer aux membres de la
commission l'analyse qui a été faite à ce sujet par le
Surintendant des assurances. Maintenant, sur la question de la Régie de
l'assurance automobile, juste les statistiques, les résultats de
1978-1979, 1979-1980, 1980-1981, quant à la fréquence des
accidents impliquant les véhicules-taxis quant au coût moyen des
accidents. Juste quelques chiffres. Si on établit une comparaison entre
les véhicules-taxis et les véhicules de promenade c'est
uniquement pour des accidents impliquant des dommages corporels, non pas pour
des dommages matériels, car la régie n'est pas obligée
à cela - la fréquence des accidents pour 1978-1979, 5,28% fois
plus élevée; 1979-1980, 4,39% fois plus élevée;
1980-1981, 4,91% fois plus élevée; 1978-1981, la moyenne des
trois années, 4,87% fois plus élevée.
En termes de coût des accidents, le coût moyen, cependant,
la gravité, autrement dit, des dommages, c'est beaucoup moins important.
Voyez-vous, si on établit un rapport de véhicules-taxis et
véhicules de promenade, on arrive pour 1978-1979 à 0,57% par
rapport aux coûts. Donc, à peu près la moitié moins.
1979-1980, à 0,56%. 1980-1981, 0,78%. Maintenant, les facteurs
combinés, si on veut, amènent la régie à conclure
que ce qu'on impute c'est à peu près la proportion du risque
représenté.
M. Brunet: En somme, vous parlez du taxi dans l'ensemble du
Québec?
M. Clair: Oui.
M. Brunet: D'accord. Si vous faisiez l'isolation de
Montréal ou de la ville même de Québec où la
circulation est totalement différente, vous auriez tout à fait
une autre histoire. Quant à vos ratios de...
M. Clair: Probablement qu'on aurait une plus grande
fréquence.
M. Brunet: Une plus grande fréquence, non. Des coûts
moins élevés parce que vous avez moins de morts. Où
ça se tue, c'est sur les grandes routes.
M. Clair: Je ne veux pas entreprendre un débat sur cette
question nécessairement. Par contre, si la Régie de l'assurance
automobile isolait presque à l'infini la nature des risques, ce n'est
pas possible.
M. Brunet: Je vous comprends. Mais votre ratio que vous avez
mentionné, 5,28% plus de blessures corporelles qu'auparavant...
M. Clair: Pas qu'auparavant. 5,28% plus de fréquence
d'accidents avec blessures corporelles pour les années que j'ai
énumérées en comparant véhicules-taxis et
véhicules de promenade. Cela ne veut pas dire qu'il y en a plus qu'avant
la Régie de l'assurance automobile. C'est simplement la comparaison pour
ces années, véhicules de promenade, véhicules-taxis, en
termes de fréquence d'accidents rapportés à la
régie impliquant des dommages corporels.
M. Brunet: De toute façon, actuellement, les primes
d'assurance, soit pour les blessures corporelles ou pour les dommages
matériels, cela n'a réellement pas d'allure pour l'industrie du
taxi. Remarquez, on est assureur et on est obligé de l'exiger cette
prime parce qu'il faut payer nos pertes. Même si le groupe du taxi
faisait une compagnie d'assurances lui-même, le coût serait
déficitaire de la même façon qu'actuellement.
Une voix: Le "no fault".
M. Brunet: Exactement, le "no fault". En réalité,
le problème, c'est que, si vous prenez les compagnies de camions, ce
n'est pas le même genre de véhicules. Ils ne paieront pas un
accrochage. Ils vont payer seulement la grosse perte. Tandis que nous, on a des
voitures privées comme taxis, dans le fond. Donc, un pare-chocs qui est
égratigné ou une aile qui est juste un petit peu
accidentée, c'est la même chose que pour une voiture privée
et c'est beaucoup plus dispendieux.
M. Clair: Je n'ai pas d'autres questions, M. le
Président.
M. Brunet: Juste un dernier point. Votre histoire d'un chauffeur,
une automobile, le problème.
M. Clair: Ce n'est pas mon histoire.
M. Brunet: En fait, c'est ce dont on parlait tantôt. Quelle
est la définition exacte de cela? Parce que vous avez beaucoup
d'individus qui ont acheté un permis à deux ou à trois
personnes et, après, en ont acheté un deuxième. Comment
pourriez-vous déterminer que c'est seulement un chauffeur, celui qui l'a
depuis trois jours et l'autre qui l'a depuis quatre jours, ou lorsque c'est le
père qui a le permis et que le fils travaille dessus les fins de
semaine, comme on en a quelques-uns chez La Salle? Le jeune va à
l'université et il travaille avec le taxi de son père. Que
fait-on avec ces gens? Je pense qu'il y aurait bien des cas, si on adopte cela.
C'est quoi, un homme, c'est quoi, un véhicule, et c'est quoi, la
combinaison des deux?
M. Clair: II est évident que cela devrait être
précisé.
M. Brunet: Elle est très délicate à faire,
je pense, si vous y pensez comme il faut.
M. Bissonnet: M. Brunet, en tout cas...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: ...l'Opposition vous remercie de votre
mémoire. Quant à toute la nouvelle structure - nous avons
reçu cela dans les derniers jours - nous allons quand même
l'étudier et on vous fera connaître nos commentaires à une
période ultérieure sur cette nouvelle formulation.
M. Clair: Je voudrais remercier M. Brunet. Je pense que cela a
été très intéressant pour les membres de la
commission. Je vous remercie.
Le Président (M. Desbiens): Nous vous remercions. Il y a,
avant de...
M. Polak: M. le Président, question de
privilège.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Sainte-Anne, sur une question de règlement.
M. Polak: M. le Président, je voudrais revenir sur le cas
suivant avec, d'ailleurs, l'assentiment du ministre hier. Quelqu'un qui a de la
difficulté à passer le test ou l'examen par écrit. J'ai vu
le cas. Je ne dirai pas qu'il s'agit d'un analphabète, il s'agit de
quelqu'un dans mon comté C'est un très bon chauffeur de taxi.
C'est un jeune homme de 24 ans qui veut travailler et qui ne veut pas recevoir
l'aide sociale. Il est capable de lire les noms de rues. Il connaît
très bien la ville de Montréal - il y travaille - sauf qu'il ne
peut pas passer cet examen au point de vue écriture. Il n'est pas
analphabète à 100%, mais disons que c'est un problème.
J'ai écrit au ministre - il s'en souvient - quand j'ai été
élu député, au début, quand j'avais encore peur du
ministre - maintenant, c'est changé un peu - et il m'a répondu:
Le problème, c'est que, selon le règlement tel qu'il est
maintenant, on ne peut pas déroger à cela, parce qu'on parle
vraiment de connaissance écrite de la langue française. Il faut
passer l'examen par écrit aussi. L'argument qu'on a invoqué est
le suivant: qu'est-ce qui arrive avec votre chauffeur de taxi si quelqu'un
l'arrête dans la rue pour prendre un taxi et que cette personne est
sourde-muette? Donc, qu'arrive-t-il avec ce chauffeur de taxi? Il n'est pas
capable. Le monsieur ou la dame sourde-muette montre une note où c'est
écrit: S'il vous plaît, transportez-moi à telle ou telle
adresse, à tel numéro. Il ne peut ni lire, ni écrire. Bon!
Combien de fois cela arrive-t-il qu'un sourd-muet arrête un chauffeur de
taxi? Si cela arrive, voici ce que mon chauffeur fait. Je lui ai posé la
question et il m'a dit: C'est bien facile. J'appelle ma compagnie de services -
La Salle, par exemple - ils sont rapides, ils vont envoyer un gars tout de
suite qui peut lire et qui va transporter cette personne. Cela peut prendre
cinq ou dix minutes. Mais par ce qu'on fait maintenant, on pénalise un
bonhomme qui est vraiment handicapé, lui aussi. Il est handicapé
au point de vue de son incapacité à passer cet examen. Donc,
là, je pense qu'il faut rétablir un peu l'aspect humain dans tout
cela. Quand vous allez faire le changement, je suggère vraiment que vous
pensiez à des cas exceptionnels où un pauvre homme a
déjà raté deux ou trois fois l'examen. Il n'est pas
capable de le passer.
Je connais même un avocat qui n'était pas capable de passer
l'examen du barreau. Il était trop nerveux. À un moment
donné, le barreau a décidé de ne plus faire subir d'examen
écrit. C'est un des meilleurs avocats à Montréal. Je ne
veux pas révéler son nom, mais je connais l'histoire. Donc, il
faut peut-être...
M. Clair: J'étais aussi bien nerveux, mais ils ne m'ont
pas donné ce privilège, moi.
M. Polak: Oui, mais vous étiez capable de subir cet
examen. Vous n'êtes pas nerveux. Donc, le sujet est vraiment, M. le
Président...
M. Clair: Vous ne voyez pas mes griffonnages!
M. Polak: Je sais qu'il y a des députés
ministériels qui ont exactement le même problème. J'en ai
parlé à quelques-uns de vos députés qui m'appuient
dans cette demande. Ce n'est pas du tout une affaire de politique partisane. Je
suggère que, pour des cas exceptionnels, on change le règlement
pour dire: Tel homme, il faut évidemment qu'il fasse la preuve
qu'il est capable de lire les noms de rues - je comprends qu'il y a certaines
choses - pour exercer son métier. Mais il n'a pas de problèmes.
Il l'a exercé depuis deux ou trois ans. Évidemment, chaque fois
qu'il est pris, il paie des amendes très fortes. Donc, il ne travaille
plus maintenant.
Le ministre m'a répondu, au mois de juillet 1982: Cette question
pourra être revue à l'occasion de l'examen de la nouvelle
politique en matière de taxi qui sera publiée bientôt.
Donc, M. le ministre, je suis ici pour la réponse. Je dis toujours,
à la fin de la commission: On a été une Opposition bien
correcte. On a coopéré. Peut-être pourrez-vous faire
quelque chose sur le plan humain, pas pour moi, mais pour un chauffeur de taxi
qui veut vraiment travailler et pour d'autres qui sont dans la même
situation. (19 h 45)
M. Clair: M. le Président, la question soulevée par
le député de Sainte-Anne est importante et elle est plus
importante, justement, qu'il peut le croire à première vue. S'il
s'agissait d'un cas exceptionnel, susceptible de se présenter seulement
une fois tous les deux, trois, cinq ou dix ans, l'approche qu'on pourrait avoir
pourrait être une approche effectivement non réglementaire. D'un
point de vue humain, on pourrait dire: Voyons comment on peut régler le
problème.
Maintenant, la situation se complique, quand on m'informe à la
Régie de l'assurance automobile du Québec qu'il y a en moyenne de
trois à quatre personnes par semaine qui demandent un permis de
chauffeur et qui ne répondent pas à cette norme d'être en
mesure de parler, de lire et d'écrire. Le problème est plus
important que ce qu'on peut y voir à première vue.
En termes de qualité de services, on doit avoir des normes
minimales. Est-ce trop exigeant que de demander d'être capable
d'écrire en français, notamment? L'écriture, cela pourrait
être réexaminé à la Régie de l'assurance
automobile, mais je pense que simplement abolir cette norme d'être en
mesure de lire et d'écrire, en termes de qualité de services, il
faut être prudent là-dessus, parce que dans un cas cela pourrait
effectivement, sur le plan humain, se révéler un bon candidat,
mais peut-être que plusieurs autres personnes ne se
révéleraient pas nécessairement de bons candidats. On va y
penser encore, mais quand la régie m'indique qu'il y a de trois à
quatre cas semblables par semaine, j'hésite bien gros à lui
demander de changer ses règlements là-dessus.
M. Bissonnet: Juste une petite minute, M. le ministre.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: Est-ce que les gens qui sont à la
régie ont déjà conduit des autos-taxis? S'ils ont
déjà conduit des autos-taxis, la seule condition qui s'impose,
c'est de savoir conduire et de savoir où l'on va. Dans un taxi, c'est
très rare qu'on va vous donner une adresse - à moins que ce ne
soit un touriste - sur un papier, à moins de rencontrer une personne qui
est handicapée, sourde et muette. C'est très rare!
M. Clair: Entendons-nous bien...
M. Bissonnet: II y a des personnes dans la vie qui ont
réussi, qui ne savaient pas écrire et qui ne savaient pas lire.
Il y en a qui ont monté des entreprises vraiment impressionnantes. Posez
la question à des gens du taxi qui sont là, ils vont vous
répondre.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: M. le Président, je voudrais juste
répondre au ministre. Je comprends très bien qu'il y a certains
tests à passer au point de vue de la connaissance du métier. On a
parlé ici des touristes qui viennent et qui ont reçu des
services. Je comprends très bien. Tout ce que je dis, c'est qu'il doit y
avoir un moyen. On ne va pas abolir le test, vos règlements vont rester
tels quels, mais on pourrait ajouter un paragraphe qui dise dans les cas
exceptionnels, où la personne a
tout de même toute la compétence requise mais n'est pas
capable de faire cet examen par écrit, d'envoyer les inspecteurs avec le
gars faire un petit tour en ville, d'une heure, une heure et demie, assez vite
pour voir s'il est capable de lire telle et telle rue, oui ou non. Tout ce que
je veux dire, c'est de mentionner dans le texte qu'il peut y avoir une sorte de
règle exceptionnelle, à savoir que cet homme doit passer tous les
autres tests et avoir toutes les compétences requises, autrement il
n'aura pas son permis. Je suis d'accord avec cela. Je ne plaide pas pour dire
que chaque analphabète - il y en a encore dans notre province - aura le
droit d'avoir un permis de taxi comme cela. Ce n'est pas cela que je demande.
Je dis simplement: Cet homme, quant à moi, est handicapé, il a un
handicap.
M. Clair: Voyez-vous, ce...
M. Polak: Qu'il ait un examen oral ou que quelqu'un aille avec
lui. Il y a bien des méthodes pour le faire. Au lieu de dire
rigoureusement: Voici: le texte dit par écrit. On ne fait pas
d'exception. Qu'on inclue une règle pour les cas exceptionnels. Il faut
que dans un cas comme cela... C'est terrible que cet homme n'ait pu avoir un
permis comme chauffeur de taxi, alors qu'il est très bon.
M. Clair: Remarquez que l'avantage de la décentralisation
serait justement de pouvoir faciliter la solution de ce genre de
problèmes. On m'indique qu'il y a deux ans à peine,
effectivement, on faisait des tests oraux, semble-t-il, quand c'était
administré par le Bureau des véhicules automobiles, avant que ce
ne soit fusionné à la Régie de l'assurance automobile.
Dans les dispositions, on exige un rapport médical, on exige de ne pas
avoir été condamné depuis deux ans pour un acte criminel,
punissable de plus de deux ans. Le danger de créer des cas exceptionnels
à la marge de chacun des critères d'admissibilité, d'un
côté, c'est de passer pour inhumain et bureaucratique. De l'autre,
cela risque de conduire à l'absence de normes, par contre. Je pense que
la décentralisation à ce point de vue pourrait certainement
faciliter la solution de problèmes comme ceux-là, de tenir compte
davantage de situations semblables.
Le Président (M. Desbiens): Mme la députée
de Dorion.
Mme Lachapelle: Je voudrais juste donner une information. Je sais
qu'il y a eu un précédent comme cela à l'Office de la
construction. Il y a eu des gens qui connaissaient le métier, qui
connaissaient quand même les mesures, etc, mais de là à
passer le test écrit, ils avaient eu des problèmes et ils ont
créé un précédent. Je pense que c'était
justement à l'entrevue orale. Il faudrait peut-être...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jeanne-Mance.
M. Bissonnet: J'aurais un autre point à apporter dans le
même sens que celui du député de Sainte-Anne, à la
suite des points de démérite de la sécurité
routière. Pour votre réflexion, M. le ministre, je pense qu'il
faudrait améliorer cette situation.
Actuellement une personne qui gagne sa vie en conduisant un taxi est six
jours par semaine sur la rue. Les clients sont toujours pressés et les
chauffeurs commettent des infractions assez régulièrement.
On a une qualité de conducteurs qui ont des permis de conduire de
chauffeur qui sont considérés sur le même pied qu'un
chauffeur comme vous, un chauffeur comme moi ou un chauffeur qui ne gagne pas
sa vie ainsi. Il prend douze points en deux ans. Pour les premiers douze
points, il n'y a pas de problème. On lui donne un permis spécial,
mais il peut reprendre encore douze points à l'intérieur de 24
mois. Ce n'est pas difficile pour un chauffeur de taxi d'avoir 24 points,
considérant que le client est pressé. Il le prend, trois points.
Le client ne paie pas, c'est vous qui payez, mais quand vous avez pris les 24
points, là c'est un problème. Le gars doit recevoir du
bien-être social parce qu'il ne peut plus gagner sa vie. J'en connais
trois actuellement qui ont pris, à l'intérieur de 24 mois, plus
de 24 points, ce qui représente, en moyenne, huit infractions pour un
gars qui est six jours par semaine sur la route. À l'intérieur du
Code de la sécurité routière, on n'a pas prévu
cela. On considère tout le monde sur un même pied, mais gagner sa
vie tous les jours avec son auto, les risques inhérents à
l'annulation du permis sont beaucoup plus - il n'y a pas de statistiques...
M. Clair: 5,8 fois plus élevés. C'est un
indice.
M. Bissonnet: Ah bon! Je pense qu'à l'intérieur du
Code de la sécurité routière on pourrait avoir une
façon de donner plus de points d'inaptitude à ceux qui sont sur
la route, comme les camionneurs, les chauffeurs de taxi, même les
chauffeurs d'autobus, malgré qu'eux n'ont pas souvent de billets.
C'est simplement à titre de réflexion parce que je pense
que ces personnes-là sont lésées. Elles se retrouvent sans
travail et je pense qu'elles sont pénalisées par la loi. Je pense
que la loi est trop sévère pour elles, si on les compare à
d'autres conducteurs qui n'ont pas besoin de conduire leur auto pour gagner
leur vie.
M. Clair: M. le Président, on a déjà eu
l'occasion d'en discuter. Le député de Jeanne-Mance et moi
ne partageons pas le même point de vue là-dessus même si je
reconnais qu'effectivement les chauffeurs de taxi, comme les chauffeurs de
camion, comme les voyageurs de commerce, comme les députés,
justement, je pense que c'est un exemple à donner... On sait que
plusieurs collègues... Il n'y a pas de cachette là-dessus, on est
plus présents sur la route, donc, on est plus portés, à
l'occasion, à...
M. Polak: Moi, j'ai déjà deux points...
M. Clair: Sans être plus portés, on est plus
susceptibles...
M. Bissonnet: Tu te promènes en avion.
M. Clair: ...de commettre telle ou telle infraction. Si on
ajustait le nombre de points d'inaptitude au nombre de kilomètres
parcourus par année, cela ne voudrait plus rien dire. C'est justement
ceux qui sont plus présents sur la route qui représentent le plus
grand risque.
La meilleure preuve, c'est que dans le cas du taxi - je donnais les
chiffres tantôt -les blessures corporelles pour les années 1978
à 1981 représentent une fréquence d'accident d'à
peu près cinq fois plus élevée. C'est évident que
ce sont ces personnes-là qui doivent le plus faire attention sur la
route et qui doivent être plus prudentes, même si j'admets que, par
simple calcul de probabilité, quand tu es présent 18 heures par
jour sur la route, tu cours beaucoup plus de risques d'avoir un accident, tu
cours plus de risques de commettre une infraction par inattention ou autrement.
Mais comme le risque qu'on représente est plus grand, on doit être
d'autant plus prudent. Même si cela a l'air bête et méchant
de la part du ministre des Transports, en termes de sécurité
routière, je ne pense pas que depuis l'instauration du régime des
points de démérite, points d'inaptitude maintenant, par le
député de Charlevoix, votre collègue, aucun ministre des
Transports ait accepté de remettre ce principe en cause même si ce
n'est pas une ligne de défense facile à maintenir. Je pense que
ce serait diminuer l'importance des points d'inaptitude que d'essayer de faire
des passe-droits pour les voyageurs de commerce, qui m'en ont demandé,
pour les livreurs à domicile, pour tous ceux - pour les femmes? - qui
sont plus présents sur la route. Je pense qu'en termes
d'intérêt pour la sécurité routière, je ne
vois pas qu'on puisse faire cela.
M. Bissonnet: Je peux vous répondre qu'au niveau de la
sécurité routière, on est tous d'accord avec cela, mais il
demeure que c'est un marché particulier. Si on mettait un plus grand
nombre de points précisément pour ceux qui ont un permis de
classe 31, ce n'est pas n'importe qui qui a la classe 31, je vous dis qu'en
donnant douze points additionnels pour les deux ans, ils vont respecter autant
la sécurité routière. Quand vous prenez un taxi,
dites-vous une chose: Votre client est pressé et souvent c'est bien
difficile à contrôler. Quand le type tombe sur l'aide sociale, ce
n'est pas un cadeau.
M. Clair: C'est une question de mentalité à
changer, pour tout le monde. Cela, je le reconnais.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Sainte-Anne. En terminant, si vous voulez.
M. Polak: Un dernier point à ajouter. Vu que le ministre
vient de refuser la demande du député de Jeanne-Mance, je pense
que pour être juste, il faut encore donner plus de raison à la
demande du député de Sainte-Anne. Comprenez-vous?
Le Président (M. Desbiens): La commission élue
permanente des transports a accompli le mandat qui lui avait été
confié par l'Assemblée nationale. Je demanderais au rapporteur de
présenter son rapport à l'Assemblée nationale dans les
plus brefs délais.
La commission ajourne ses travaux sine die.
M. Clair: Peut-être juste quelques mots avant... J'aurais
l'occasion de faire un bref exposé sur les conclusions, mais je pense
que compte tenu de l'heure, ce n'est peut-être pas nécessaire.
Enfin, mon collègue, le député de Jeanne-Mance et
moi-même, on les a à peu près tirées.
M. Bissonnet: Enfin, M. le ministre, je pense qu'à
l'intérieur de ce débat, sans en faire une conclusion de
façon bien précise...
M. Clair: On continue. Conclusions
M. Bissonnet: Je tiens à remercier tous ceux qui ont
soumis des mémoires. Nous avons tous, du côté de
l'Opposition, bien examiné et nous avons posé les questions les
plus pertinentes qu'on ait trouvées à l'intérieur de ces
mémoires. D'une part, il est bien évident qu'on a exprimé
nos points de vue personnels et on peut les regrouper à
l'extérieur de cette commission. La seule chose que je voudrais
signaler, en terminant, c'est que vous avez eu un monsieur qui était
avec moi depuis le début de cette commission et il vous a soumis une
étude, des recommandations sur la situation du taxi à
Montréal. Il s'agit de M. Paquet, que la
plupart des gens connaissent dans l'industrie du taxi. Je pense qu'au
niveau historique du taxi à Montréal, concernant certaines
solutions, son mémoire est très valable et vous auriez
intérêt à l'analyser pour que le service du taxi soit mieux
offert à la population.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Clair: L'objectif de cette commission parlementaire,
c'était d'essayer de voir comment on pouvait critiquer, enrichir un
programme d'action que nous avons proposé en août dernier. C'est
une volonté très ferme chez moi de déboucher le plus
rapidement possible sur la rédaction, le dépôt d'un projet
de loi, pour mieux encadrer l'industrie du taxi, lui permettre de se
rentabiliser. Parce qu'on a convenu d'être bref, je dirais simplement
qu'aucune des suggestions qui ont été faites au cours de cette
commission parlementaire n'est rejetée du revers de la main. (20
heures)
On va tenter de soupeser le pour et le contre de chacune des avenues qui
nous ont été proposées le plus rapidement possible. Compte
tenu que la Communauté urbaine de Montréal a créé
un groupe de travail, je ne voudrais pas déposer un projet de loi avant
d'avoir ses conclusions. J'espère que cela se fera le plus rapidement
possible, mon objectif étant de déposer un projet de loi
peut-être pas pour adoption, mais pour étude, avant l'ajournement
de la session, le 20 juin prochain. Nous espérons que, lorsque nous
déposerons le projet de loi, il représentera suffisamment les
consensus qui ont pu se dégager au cours de cette commission pour
être adopté rapidement par l'Assemblée nationale, quitte
à ce qu'au cours de l'été on ait l'occasion de revoir une
dernière fois, avec les principaux intéressés, les
dispositions de ce projet de loi.
M. le Président, je remercie mes collègues, les
députés de Jeanne-Mance et de Sainte-Anne, ainsi que mes
collègues du côté ministériel, dont la
députée de Dorion qui, comme vous le savez, m'a beaucoup
appuyé dans les relations avec le milieu du taxi à
Montréal. Elle a l'avantage de représenter un comté
montréalais, ce que je n'ai pas quant à moi et, donc,
d'être encore plus proche, sur le plan de l'intérêt de ses
électeurs, des problèmes de taxi de l'agglomération A-11
de Montréal. Je la remercie beaucoup de m'avoir assisté tout au
long de ces travaux et vous-même, M. le Président, du travail que
vous avez effectué de main de maître.
Le Président (M. Desbiens): Je vous remercie. Je remercie
tous les membres de la commission de leur collaboration. Cette fois-ci, pour
vrai, je demanderai au rapporteur de la commission de faire rapport dans les
plus brefs délais. La commission élue permanente des transports a
accompli le mandat qui lui a été confié par
l'Assemblée nationale et elle ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 20 h 02)