Journal des débats de la Commission de la santé et des services sociaux
Version préliminaire
43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)
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Le
mercredi 11 septembre 2024
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Vol. 47 N° 79
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 66, Loi visant à renforcer le suivi des personnes faisant l’objet d’un verdict de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux ou d’inaptitude à subir leur procès
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11 h 30 (version non révisée)
(Onze heures trente-quatre minutes)
Le Président (M. Provençal)
:Alors, bonjour à tous! Ayant constaté
le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services
sociaux ouverte. Je vous souhaite la bienvenue et je demande à toutes les
personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques. La Commission est réunie afin de poursuivre les consultations
particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 66, Loi
visant à renforcer le suivi des personnes faisant l'objet d'un verdict de
non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux ou d'inaptitude à
subir leur procès. Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. Mme Grondin (Argenteuil) est remplacée par M. Allaire
(Maskinongé); Mme Caron (La Pinière) par Mme Maccarone
(Westmount-Saint-Louis); et M. Marissal (Rosemont) par M. Fontecilla
(Laurier-Dorion).
Le Président (M. Provençal)
:Compte tenu qu'on a commencé un 16 minutes
plus tard, j'ai besoin du consentement pour qu'on puisse additionner un 16 minutes
pour respecter les gens qui sont... qui se sont déplacés pour venir présenter
un mémoire. Ça va? Consentement? Merci beaucoup.
Donc, ce matin, nous entendrons le témoin
suivant : l'Association des policières et policiers provinciaux du Québec.
Je vous souhaite la bienvenue et je vous rappelle que vous avez 10 minutes
pour présenter votre mémoire, et par la suite nous allons procéder aux
échanges. Alors, je vous cède immédiatement la parole, et merci de vous être
déplacés.
M. Painchaud
(Jacques) :Merci. Alors, M. le Président,
M. le ministre, et députés présents, et autres membres, bonjour. Avant de
commencer, je vais présenter, à ma droite, M.... Me André Fiset, avocat, qui
travaille avec nous, et à ma gauche, Me David Coderre, avocat à l'association.
Alors, d'abord, l'APPQ tient à remercier
la commission de l'opportunité qui nous est offerte de faire valoir notre point
de vue concernant le projet de loi n° 66. C'est d'autant plus important
pour nous, considérant le décès de notre collègue et amie la sergente Maureen
Breau, décédée tragiquement le 27 mars 2023 lors d'une intervention
policière. Ces événements vont rester gravés dans notre mémoire et ont remis à
l'avant-plan le nombre élevé d'enjeux reliés aux personnes aux prises avec des
troubles de santé mentale potentiellement dangereuses.
On n'a qu'à penser à l'absence de partage
d'information entre les différents acteurs intervenant auprès de ces personnes,
détaillée notamment par la coroner, Me Géhane Kamel, dans son rapport rendu
public hier. Nous faisons nôtres ses 38 recommandations, notamment celles
émises au ministère de la Santé et des Services sociaux, au ministère de la
Sécurité publique, au ministre de la Justice, au Directeur des poursuites
criminelles et pénales, à la Commission d'examen des troubles mentaux du
Québec, à l'École nationale de police du Québec et à la Sûreté du Québec.
C'est d'ailleurs suivant ces événements
que l'APPQ avait présenté à l'Assemblée nationale une pétition ayant accueilli
plus de 24 000 signatures demandant notamment au gouvernement un
meilleur encadrement des personnes aux prises avec des troubles de santé
mentale potentiellement violentes, et en novembre 2023 nous transmettions au
gouvernement un document de réflexion exposant nos recommandations à cet égard.
D'abord, il faut mentionner que dans sa
globalité, l'APPQ accueille favorablement les modifications proposées par le
projet de loi n° 66. Ces modifications sont toutefois insuffisantes dans l'océan
des problématiques de santé mentale et de sécurité publique. Plusieurs des
modifications proposées dans le projet de loi n° 66 se limitent aux
personnes judiciarisées, et non à toute personne potentiellement violente dont
l'état mental est perturbé.
Cela dit, nous sommes tout à fait conscients
que le projet de loi n° 66 n'est pas une fin en soi, et différentes autres
modifications législatives devraient être apportées afin de permettre un
meilleur encadrement de ces personnes dans le cadre de d'autres travaux du
gouvernement, notamment dans le cadre de la révision de la loi P-38.
Dans ce cadre, et avant d'entrer plus
précisément dans nos commentaires relatifs à ce projet de loi, nous sommes d'avis
que le gouvernement du Québec devrait étendre ses modifications législatives
afin d'adopter des mesures semblables à la loi Brian, qui furent adoptées en
2000 en Ontario suivant le meurtre de M. Brian Smith par une personne
atteinte de troubles mentaux. En outre, cette loi a écarté le critère de danger
immédiat nécessaire pour amener une personne contre son gré à l'hôpital par le
corps policier. Depuis ces modifications législatives, le modèle ontarien
permet notamment aux policiers d'amener une personne...
M. Painchaud
(Jacques) :...une personne atteinte de
troubles mentaux lorsqu'ils ont des motifs raisonnables et probables de croire
que cette personne se comporte d'une manière violente ou désordonnée et qu'elle
pourrait s'infliger des blessures graves ou à autrui.
Par ailleurs, cette loi permet d'imposer
un plan de traitement et de surveillance à certaines personnes atteintes de
problèmes graves de santé mentale, par exemple en contraignant ce dernier à ne
pas consommer de l'alcool ou des drogues.
Relativement... Et là, je vais rentrer
maintenant directement dans les modifications proposées au projet de loi
n° 66. Alors, premièrement, en ce qui concerne l'élargissement du mandat
des services correctionnels relativement au suivi des personnes visées par un
verdict de non-responsabilité criminelle pour troubles mentaux, visées par la
plupart des modifications proposées par le projet de loi n° 66, voici nos
commentaires. En cas de verdict de non-responsabilité criminelle et de
libération conditionnelle d'un individu, le Code criminel prévoit que le suivi
subséquent de ces conditions peut être délégué au responsable d'un hôpital
selon les modalités de la Commission d'examen des troubles mentaux du Québec,
malgré les moyens limités et le peu de ressources qu'il dispose pour remplir ce
mandat adéquatement. Conséquemment, aucun suivi périodique n'est effectué par
quelconque représentant du système judiciaire ou correctionnel. Alors, nous, ce
que nous disons, c'est que ce projet de loi répond adéquatement à cette
problématique, qui, je vous le dis, dissipe tout doute quant à la compétence et
à la capacité des services correctionnels à prendre en charge les personnes
visées par un verdict de non-responsabilité criminelle pour troubles mentaux.
Deuxièmement, nous soulignons l'importance
d'accorder des ressources adéquates, notamment en ce qui concerne le
financement, les effectifs et la formation continue. Nous dénonçons, depuis de
plusieurs années, le manque d'effectifs puis de formation continue au sein de
la Sûreté du Québec. Nous sommes à même de constater à quel point ce manque
d'effectifs et de ressources en formation a un effet sur la prestation de
services et nous croyons que ce serait la même chose pour les services
correctionnels. Nous sommes d'avis que l'implication à des services
correctionnels dans le suivi subséquent pourrait effectivement permettre un
encadrement plus rapproché des personnes visées non seulement en ce qui
concerne le respect des conditions de libération, mais également en ce qui
concerne l'évaluation de leur potentiel niveau dangerosité, le tout en
complémentarité avec des équipes médicales. C'est d'ailleurs un des objectifs
visés par ce projet de loi. Nous sommes d'avis que les services correctionnels
devraient systématiquement être impliqués dans le suivi des personnes visées.
• (11 h 40) •
Troisièmement, en ce qui concerne le
partage d'informations entre les intervenants, l'article premier du projet de
loi n° 66 permettra à un organisme du secteur de la santé et des services
sociaux de communiquer des renseignements qu'il détient à un corps de police
qui intervient auprès d'une personne faisant l'objet d'un verdict de
non-responsable criminelle. Nous sommes en accord avec les modifications
proposées à l'article 76 de la Loi sur les renseignements de santé et de
services sociaux, qui pourrait permettre le partage plus facile d'informations
pertinentes. Mais nous nous questionnons sur l'effet de telles modifications en
raison, d'abord, de l'absence d'un caractère systématique d'un tel partage
d'informations. En effet, dans le contexte de pénurie de main-d'œuvre et les problématiques...
les problématiques d'effectifs actuelles, cette modification pourrait ne pas
avoir tous les effets escomptés. De plus, la modification prévue à cet article
ne prévoit qu'un canal unidirectionnel de partage d'informations, soit de
l'organisme vers le corps de police. À notre avis, ce partage devrait concerner
tous les intervenants auprès d'une personne visée par le verdict de
non-responsabilité criminelle.
Notre recommandation n'a pas pour objectif
d'obtenir le dossier médical complet d'un individu, mais plutôt l'obtention de
toute information pertinente aux fins d'évaluation des risques, autant de la
part des services correctionnels que de l'équipe médicale traitante ou des
membres policiers ayant intervenu auprès des personnes, le but ultime de cette
récolte d'informations étant de planifier une intervention policière ou autre
de la manière la plus sécuritaire possible pour tous les acteurs en permettant
une évaluation des risques réels.
Nous recommandons l'inscription et le
partage systématique, détaillé et uniformisé d'informations pertinentes pour
toutes les parties impliquées non seulement pour l'organisme de santé. Un tel
partage et une telle instruction pourraient être effectués au Centre de
renseignements policiers de ... qu'on dit, nous, dans nos termes, le CRPQ, ou
tout autre système informatique centralisé et provincial permettant le partage
d'informations, ce qui aurait un effet concret, réel et immédiat sur le
quotidien de nos membres policiers et contribuerait nécessairement à une
diminution des risques lors d'une intervention policière. Au même titre,
l'inscription systématique de données provenant des décisions du comité
d'examen des troubles mentaux du Québec au CRPQ devrait, à notre avis, être
uniformisée afin d'assurer la protection du public et de nos membres.
Malgré ces commentaires, nous réitérons
que les modifications proposées par le projet de loi n° 66 demeurent une
avancée positive. En résumé, nous accueillons favorablement les modifications
proposées par le projet de loi n° 66, mais celles-ci ne peuvent à elles
seules...
M. Painchaud
(Jacques) : ...répondre aux diverses problématiques liées aux
enjeux de santé et de sécurité publique. Le suivi effectué par les services
correctionnels constitue une mesure adéquate et répond à nos propositions à ce
sujet. De fait, les infrastructures numériques et les procédures présentement
effectives permettraient nécessairement la mise en place d'un suivi adéquat
envers les personnes visées par un verdict de non-responsabilité criminelle
pour troubles mentaux ainsi qu'un partage efficace d'informations le cas
échéant. Ces modifications devront être accompagnées de ressources financières
et organisationnelles adéquates afin d'avoir un effet tangible et réel. Par
ailleurs, nous soulignons à nouveau «l'impérativité» de fournir des effectifs
supplémentaires et la formation continue à nos membres et à tous les
intervenants impliqués. Nous réitérons que le partage d'informations devrait, à
notre avis, être réciproque et transmis de manière systématique entre les
parties impliquées dans un objectif de sécurité publique et dans le respect des
droits fondamentaux de tous. La modification à l'article 76 demeure une
avancée positive.
En terminant, nous vous soumettons à
nouveau que les commentaires formulés à notre mémoire sont soumis sous toutes
réserves, dans la mesure où plusieurs tables de discussion sont présentement en
cours. Nous espérons, par ailleurs, que les recommandations émises par la
coroner à son rapport déposé hier soient mises en œuvre dans les meilleurs
délais et nous invitons ce dernier à poursuivre toutes les démarches afin
d'éviter une pareille tragédie, incluant toute modification législative
requise. Nous désirons remercier la commission de l'attention qu'elle portera au
contenu de ce mémoire. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup pour votre présentation. Alors, M. le
ministre, je vous invite à débuter l'échange.
M. Bonnardel : Merci, M. le
Président. M. Painchaud. Messieurs, bienvenue. Vous deviez être là hier, mais
je sais que vous souhaitiez entendre la coroner. Je me réjouis de voir que vous
recevez positivement le projet de loi. Ce n'est pas une fin en soi. Vous êtes à
la même place que moi. Je n'ai jamais eu la prétention de dire que tout est
parfait. Mais vous le savez... savez, je vous l'avais dit suite à la tragédie
Maureen et aussi des trois personnes qui ont été tuées, là, de façon aléatoire
en août 2022, qu'il fallait agir rapidement, qu'il ne fallait pas attendre
nécessairement le rapport, souhaiter que le rapport aille dans le même axe que
nous, mais quand tout cela est arrivé, j'avais demandé à mon sous-ministre,
vous le savez, je vous en avais parlé, on avait un comité interministériel en
place puis on était capables rapidement, autant avec le ministère de la Santé,
la Justice, le DPCP, différents partenaires, de comprendre, de comprendre ce
qui s'est passé puis de quelle façon on devait... on devait y répondre. Puis,
sincèrement, humblement, je pense que les deux principaux points, vous les avez
entendus, je vous les répète, puis c'est là-dessus que je vais axer mes
deux... mes deux, trois questions pour laisser mon collègue de Maskinongé, s'il
le souhaite, qui a vécu la tragédie encore plus fortement... Le nerf de la
guerre, bien, c'était les communications, les communications entre les
intervenants de la santé et vous, les policiers et policières sur le terrain et
aussi le suivi, le suivi comme tel.
Je vais commencer par le suivi, tiens.
Vous semblez... Bien, je pense que la réponse je l'ai mais je vous la pose
pareil, là. Pas dire louangez, là, mais vous parlez beaucoup, beaucoup des
services correctionnels. On s'est fait questionner, bon, les agents de liaison,
là, ils viennent d'où, là? Je reste convaincu qu'avec le, on dit en anglais, le
«background», mais le passé, le travail de ces agents de probation qui
deviennent en guillemets pour ne pas stigmatiser ces personnes, des agents de
liaison, vous semblez dire que ce sont les bonnes personnes qui ont un passé de
criminologues, travailleur social ou autre, ou autre, ou autre, être les bonnes
personnes pour faire ce suivi adéquat et être, je pense le mot, vous l'avez
même, le même que le mien, complémentaire.
M. Painchaud
(Jacques) : On croit vraiment que vous avez bien ciblé les
ressources à cet endroit-là pour ça.
M. Bonnardel : Êtes-vous...
bien, la réponse, je pense que je l'ai aussi, convaincu que ce suivi que l'on
souhaite faire avec les équipes médicales vont nous permettre d'avoir les
informations, personne qui a des modalités, ne pas consommer la drogue,
d'alcool, pas déménager, médication x, y, rencontrer son psy, ce sont des
informations auxquelles vous allez être vous allez être... ce sera utile pour
vous dans le CRPQ. Quelle sorte d'information spécifique, le CRPQ va vous aider
à avoir la part de soit l'équipe médicale soit l'agent de liaison comme tel.
M. Painchaud
(Jacques) : Bien, c'est clair... C'est clair que ces
informations, les renseignements, tout renseignement utile qui peut nous
permettre de prévoir une éventuelle dangerosité, prévenir le risque puis
certainement avoir des informations précises sur, des fois, sur des indications
sur le type d'intervention, ça va nous aider à tout adapter, là, la démarche
policière...
M. Painchaud
(Jacques) :...en amont. Alors, dans ce
contexte-là, ça va être très, très utile.
M. Bonnardel : Puis c'est
quoi dans le quotidien, là? La sous-question, là, où je m'en vais, avec
l'information, le suivi... Tu sais, on nous expliquait... Le policier ne
pouvait pas avoir accès à des informations, pas le diagnostic comme tel, mais
le rapport que... pas le client, mais la personne x avait avec son équipe
médicale pour être capable de comprendre la réaction du gars l'autre bord de la
porte. Comment il réagit face à quelqu'un, exemple, puis je donne souvent
l'exemple, qui porte l'uniforme ou autre?
M. Painchaud
(Jacques) :Bien, c'est le bon exemple,
c'est le bon exemple donné. C'est qu'actuellement, vous savez, il y a des gens
qui vont réagir soit à des termes, soit à des perceptions. Il y en a, des gens,
qui vont dire : Bien, moi... Il réagit mal si c'est un homme, il va réagir
mieux si c'est une femme. Alors, nous, bien, on a une policière, on va demander
à la policière de faire la première approche au lieu de l'homme, parce que, là,
ça peut l'amener dans une escalade. Alors, c'est... ce sont dans le détail,
mais ce sont des détails excessivement importants.
Puis également, bien, quand on apprend sur
la nature même des problèmes qu'il peut y avoir au niveau du comportement,
bien, pour nous, on veut... on peut adapter adéquatement notre intervention.
Alors, il y a vraiment un processus. Puis c'est ça, dans la formation, en
réponse à l'état mental perturbé, c'est des approches pour assurer une
désescalade. Il va falloir que les gens comprennent bien que la police, on ne
veut pas utiliser l'usage de la force. On veut autant que possible ne jamais en
avoir recours. L'issue est toujours incertaine. Il y a des dangers. Mais, si on
est capables, à ce moment-là, d'avoir le maximum d'informations pour adapter
notre intervention, notre discussion, notre dialogue pour désamorcer la
situation, bien, c'est clair qu'il y a des particularités qui peuvent nous être
utiles. Et, dans ce contexte-là, votre approche de pouvoir permettre un partage
d'informations va être bénéfique.
M. Bonnardel : Quand vous
dites, là, la recommandation six, là, rendre obligatoire l'inscription de
toutes les infos, vous craignez quoi, que l'équipe médicale dise à l'agent de
liaison ou aux informations... Qu'est-ce que vous... l'interprétation que vous
faites avec ça?
M. Painchaud
(Jacques) :Je vais laisser Me Fiset
répondre à la question.
• (11 h 50) •
M. Fiset (André) : J'ai eu
l'expérience d'assister à l'enquête du coroner Kamel pour la mort de Isaac
Brouillard Lessard et Maureen Breau. Je représentais une des parties
intéressées, la famille de Maureen. Une des problématiques qu'on s'est aperçu,
c'est que parfois les policiers se rendent sur place, ils vont rédiger un
rapport, mais, comme il n'y a pas de plaintes criminelles qui vont être
requises au DPCP, le rapport de leur intervention dans laquelle ils ont pu
constater la présence d'un sabre japonais... de tant de pied, la présence
manifeste que M. a bu ou qui a consommé des stupéfiants, malgré le fait qu'il y
avait des conditions à l'effet de ne pas consommer, ce rapport-là va rester au
niveau du poste de police. Et c'est pour ça que, dans les représentations de
l'APPQ, on fait mention que ça ne devrait pas être un escalier mobile ou un...
Il faut que ça circule dans les deux sens. Même s'il n'y a pas de procédure
criminelle, malgré notre devoir de confidentialité, ce serait important au
moins que le médecin traitant soit mis au courant. Il est agressif, il a frappé
son concierge. Le concierge ne veut pas porter plainte. Bien, ce serait
important que le médecin le sache, parce que c'est lui qui peut s'adresser à la
Commission d'examen des troubles mentaux, pour faire en sorte que peut-être ces
conditions devraient être un peu plus sévères ou on devrait carrément révoquer
sa libération puis faire en sorte qu'il soit traité. Ça, c'était une
problématique majeure qu'on a pu constater dans le cas dramatique que nous
connaissons. Mais, je peux vous dire, pour avoir représenté des policiers à plusieurs
reprises depuis 91, ce n'est pas unique à ce qui est arrivé à Louiseville,
malheureusement. Donc, il faudrait que l'information qui provient... sans
mettre des renseignements nominatifs, date de naissance, nom des témoins, juste
un compte rendu résumé de la part des policiers qui s'en va au médecin traitant
pour que lui puisse savoir : Bien, voici ce qui s'est passé en fin de
semaine, dans la nuit, à samedi à dimanche.
M. Bonnardel : Je comprends.
Je reviens sur notre volonté, votre volonté d'obtenir plus d'infos, là.
Concrètement, sur le terrain... Certains nous disaient : Ah! le secret
professionnel va être levé. Ce n'est pas ça, là. Tu sais, on... Donnez-moi...
Donnez-moi des exemples concrets, là, de la situation où il y a un appel. Qu'est-ce
que vous souhaiteriez obtenir au-delà de ce que je vais donner comme exemple,
que... je vous donne toujours le même, là? C'est quoi, là, concrètement, que
vous auriez besoin comme infos, comme policier, comme policière?
M. Painchaud
(Jacques) :Bien, ça... Oui, ça, c'est...
effectivement, c'est un élément important, c'est les critères qui sont
déterminés par la Commission d'examen des troubles mentaux du Québec. Donc, ces
informations-là sont utiles pour nous, et il faut... il faut les savoir. Et,
quand on parle du partage, puis là vous, vous êtes prêts, prêts aussi, où il y
a l'intervention policière... mais qu'est-ce qui fait que la personne est libre
et sous-condition, elle est dans des situations...
M. Painchaud
(Jacques) : ...ne devrait pas l'être en liberté, bien, c'est
évident que pour nous, il faut le savoir. Puis à ce moment-là, c'est là
l'arrimage que la coroner nous parle aussi, lorsqu'elle fait dans son rapport,
c'est que c'est important que tous les acteurs aient ces informations-là de façon
progressive et complète. Et c'est pour ça que nous également, on pense qu'il ne
faut pas que ça soit juste unidirectionnel, il faut que ça aille dans tous les
sens des acteurs, ne serait-ce que pour s'assurer du bon suivi. Parce qu'à un
moment donné, il faut comprendre, puis on partage les propos de la coroner qui
dit : Il n'y a pas une volonté de ramener ça à tout le monde dans un asile
psychiatrique, là, ce n'est pas ça du tout. Les gens doivent... on doit
préserver leur liberté et tout ça, mais il faut ramener le critère de sécurité
publique au centre. Et la sécurité publique, elle est importante et dans ce
cas-ci, bien, la liberté conditionnelle, s'il y a des situations qui sont
rencontrées, que la police peut les voir, bien, elle va voir, oups, c'est
important, c'est pertinent. On va indiquer aux autres acteurs ce qui s'est
passé et à ce moment-là, il va y avoir une révision et la personne qui ne
devrait pas être, parce qu'il est une bombe à retardement, bien, à ce
moment-là, même le CETM, on va dire : on révoque la liberté
conditionnelle, puis on va s'assurer que la personne ait des soins internes,
qu'on prenne soin d'elle puis qu'elle puisse reprendre le contrôle d'elle-même
et qu'il y ait une stabilité. Puis à ce moment-là, qu'elle puisse retourner à
ce moment-là en société libre. Alors, c'est dans ce sens-là que le partage
d'information est très important et utile.
M. Bonnardel : J'ose vous
poser une question, là : Ça arrive-tu que dans des cas particuliers, le
policier qui connaît mais ne sait pas en quel état est la personne de l'autre
côté de la porte, qu'il se dise : je n'ai pas assez d'infos, je vais
essayer d'aller en chercher puis je vais revenir. Ça arrive-tu ça, des cas
comme ça ou c'est...
M. Painchaud
(Jacques) : Oui, ça arrive...
M. Bonnardel : Ça arrive.
M. Painchaud
(Jacques) : Ça arrive, ça arrive. Il faut absolument avoir le
maximum d'informations, mais en étant, en sachant qu'elle est à quelque part.
Parce que là, actuellement, on n'a pas ces constats-là, on n'a pas ces
accès-là. Et quand... quand on vous parle dans nos commentaires, on parle aussi
du caractère du danger, là. Là, il y a eu des modifications l'année passée pour
permettre, là, de l'information puisse être partagée, puis il y a une forme
d'immunité par les personnels soignants à transmettre l'information à la
police. Mais encore là, ce n'est pas un danger imminent. Là, actuellement, il
faut absolument... Puis là, le projet de loi vient nous aider dans ce sens-là,
mais notre critique, c'est qu'elle ne vise que des gens qui ont fait une
infraction criminelle. Nous, on est inquiets des nombreux cas qui n'ont pas
encore été judiciarisés et pour lesquels on aurait besoin des informations, de
la même chose, autant pour nous pour intervenir, autant pour les autres acteurs
pour dire : Hé, on va réévaluer avec ce qui s'est passé. Ça fait que, si,
exemple, la police on est intervenu à quatre reprises, mais il n'y a pas, il y
a des écarts de comportement, il y a des, il y a des, il y a des... il y a des
éléments qui dit que la CETM, ils disent, exemple : Non, ils ne doivent
pas faire ci, il ne doit pas consommer, il doit... et que là, nous, on l'a cet
effet-là, bien, nous on va voir une pertinence de le colliger, puis deux, cette
pertinence-là, elle va être effective dans la mesure où ça aurait été utilisé
par les autres instances pour peut-être faire une révision de sa liberté.
Alors, c'est ça qui est important.
Le Président (M. Provençal)
: Député de Maskinongé.
M. Allaire : Merci, M. le
Président. Vous allez me permettre un commentaire. Je suis content. Je suis
content que vous soyez là. Je suis content que vous preniez vos
recommandations. Elles sont plus que pertinentes, naturellement. J'ai envie de
vous dire aussi que je suis content d'où on est rendus aujourd'hui, après tout
le chemin qu'on a, qu'on a vécu depuis la mort notamment de sergente Breau. On
a déposé une pétition à l'Assemblée nationale, on l'a déposée, je dirais,
ensemble, on avait travaillé ensemble. Ça va être ma première question avec les
éléments qui étaient dans la pétition, les éléments qu'on contrôle ici au sein
du gouvernement du Québec. Est-ce que vous êtes contents des résultats?
M. Painchaud
(Jacques) : Bien, on est, comme je vous dis, on accueille
favorablement puis on est... on est contents des avancées qui se produisent.
Mais, tout comme la coroner l'a dit, c'est multifacteurs, là, il y a plusieurs
éléments, puis ça demande plusieurs organismes où il y a
38 recommandations, près de neuf organismes, ministères sont interpellés.
C'est majeur et on croit, nous, que le passage pour que tout soit effectif et
fonctionnel, on doit se rendre à ces recommandations-là. Alors, c'est un pas
dans la bonne direction, le projet de loi, c'est important, c'est important
pour le Québec, mais quand on voit d'autres législations, comme en Ontario,
celle que j'ai mentionnée, on ne comprend pas pourquoi on ne pourrait pas se
rendre là. Ça fait déjà 20 ans en Ontario, là, puis ça semble correct,
là. Je pense que nous...
M. Painchaud (Jacques) :
...on est rendu là et il faut aller plus loin. Et j'indiquerais, là, puis je me
permets, sur la question que vous me demandez, j'ai une préoccupation. La
coroner est préoccupée parce qu'elle veut aussi que ses recommandations
puissent avoir une application concrète. Il faudrait que vous vous «assureriez»
dans une démarche qu'il y ait comme une table permanente pour laquelle il y a
une concertation puis une coordination avec un suivi des recommandations et, à
ce moment-là, qu'il puisse y avoir effectivement, parallèlement à ça, un
déploiement de formation et d'ajustement, puis de mise de mise en connaissance
de tous les acteurs, les intervenants et de nouvelles directives. Donc, il y
a... Vous avez des pouvoirs réglementaires pour aller plus loin. Mis à part le
projet de loi, puis vous avez des directives qui vont être émises, et elles
sont excessivement importantes pour avoir une opérationnalité terrain. Alors,
dans ce contexte-là, c'est une approche interdisciplinaire qu'il faut. Et je
pense qu'il va falloir que vous vous assuriez, au gouvernement, d'avoir des
acteurs qui sont là pour assurer un suivi puis une reddition et, à ce
moment-là, on va atteindre aux objectifs. On va être vraiment contents.
M. Allaire : Je pense que la
coroner Kamel, hier, elle a été très claire, elle a même salué le fait qu'on
ait été proactifs en fait, qu'on n'ait pas attendu justement le dépôt de son
rapport pour aller au-devant puis déposer le projet de loi pour que les choses
changent, pour améliorer l'aspect communicationnel. Puis elle-même, de son
propre aveu, là, je pense que dans le projet de loi, dans le présent projet de
loi, elle ne voyait pas comment on aurait pu inclure peut être d'autres
éléments qui étaient inscrits dans ses recommandations. On en a parlé tantôt au
niveau communicationnel, là, je vais un peu insister là-dessus. Vous avez parlé
la communication qui ne doit pas juste être dans un sens pour être sûr d'être
efficace, justement, pour que la communication circule aussi dans l'autre sens.
Vous voyez ça comment concrètement, là? C'est-à-dire que c'est les policiers
qui transmettent l'information à l'agent de liaison. Et après ça, ça chemine...
• (12 heures) •
M. Painchaud
(Jacques) : Tout à fait. Vous avez bien, bien saisi, puis,
encore une fois, vous savez, dans tous ces enjeux-là, on a besoin de
ressources. Je donne juste un exemple, là, on fait... Si on va de l'avant et
c'est dans les recommandations de la CNESST, on va de l'avant avec un
formulaire d'évaluation du risque pour les interventions planifiées. Encore
faut-il que j'aie les équipes, les ressources qui viennent à nous dans une
intervention, dans un délai rapide pour venir assister les agents. Alors, on
est à bien des endroits à la Sûreté du Québec, dans des petites équipes pour lesquelles,
évidemment, si on a besoin de ressources, a besoin de renforts, on a... on va
avoir certaines difficultés. Alors, c'est bien sûr que si j'ai un formulaire,
puis oui, c'est clair que puis je n'interviendrai pas, puis je vais attendre
d'avoir mon backup, comme on dit, il y a une équipe spécialisée qui vient nous
aider, bien, encore, il faut qu'elle existe, il faut qu'elle soit disponible.
Alors quand on... la coroner fait part, elle en fait mention de l'importance
d'amener des ressources puis aussi des effectifs à la Sûreté du Québec. Bien
évidemment, ça fait partie de nos, de nos préoccupations et il faut qu'il y ait
des réponses adéquates. Puis j'en avais parlé au projet de loi n° 14.
J'avais demandé : Est-ce qu'il y a une législation qui vient contraindre
les organisations policières à dispenser la formation continue? J'ai compris
que le ministre, M. le ministre Bonnardel, va aller plutôt vers la voie
réglementaire. Et là aussi bien, vous avez les outils, vous avez le pouvoir de
faire changer les choses. Et il va falloir vraiment qu'il y ait des gestes
significatifs dans ce sens-là. On en a vraiment besoin. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, Mme la députée, de Westmount—Saint-Louis, je vous
cède la parole.
Mme Maccarone : M. le
Président. Bienvenue, messieurs, c'est un plaisir de vous avoir avec nous
aujourd'hui, encore une fois. Je m'excuse, mais je dois débuter en parlant un
peu de la pétition parce que je suis surprise de l'intervention de mon
collègue. C'est une pétition que lui-même l'a porté, mais il y a voté contre.
Et quand on est venus pour le défendre, il n'était pas là, il a voté contre le
mandat d'initiative en lien directement avec cette pétition pour vous épauler
et en lien avec ce qui est arrivé à Maureen Breau, alors je trouve ça
particulier de le soulever, mais, en tout cas, bravo! Bravo aux policiers pour
tout ce que vous avez fait, 24 000 signataires. Ça reste quand même
dans cette législature la pétition la plus importante en termes de signataires.
Ça fait que vous vous êtes mobilisés pour un cas, qui a, je pense, qui a
affecté tous les Québécois et Québécoises?
M. Painchaud
(Jacques) : Tout à fait.
Mme Maccarone : Alors, bravo
pour votre travail. Je souhaite revenir. Vous avez terminé en parlant de la
formation. Je sais que c'est un enjeu puis c'est le nerf de la guerre. On avait
discuté pleinement de ça lors des échanges pour le projet de loi n° 14,
qui est maintenant la réforme de la Loi de la police. Vous, vous avez proposé
les 45 heures, mais, vous savez, je ne sais pas si vous avez lu le rapport
Gehane Kamel, elle aussi, elle propose les 45 heures sur trois...
12 h (version non révisée)
Mme Maccarone : ...si on
abordait un amendement en ce sens, est-ce que vous seriez d'accord qu'on amende
le projet de loi pour inclure votre recommandation et la recommandation de Me
Kamel?
M. Painchaud (Jacques) :Bien, c'est clair que tout ajout pour garantir des arguments de
formation est importante. Conséquemment, oui, mais encore une fois, les besoins
sont importants. Vous avez vu, même en Ontario, je revenais avec l'Ontario, on
parle à terme pour l'intervention policière tactique, on parle de formation
continue à raison de quatre jours. C'est pratiquement comme 40 heures une
fois par année. Alors évidemment, dans ce contexte-là, les besoins sont là et
on demeure toujours attentifs et désireux d'avoir des modifications tangibles.
Parce que malheureusement, les organisations policières, pour des raisons soit
qu'on manque d'effectifs ou des raisons de coupures budgétaires, vont
malheureusement couper sur cet aspect-là. Et actuellement, l'intervention
policière revêt un caractère excessivement complexe et l'intervention avec des
cas de détresse en santé mentale nécessite des nouvelles approches, de nouveaux
outils, plus de temps d'intervention. Conséquemment, on a besoin de stratégies
d'intervention, d'outils et de formation et c'est dans ce sens-là qu'il faut y
aller.
Mme Maccarone : Mais comment
allez-vous atteindre cet objectif si c'est 40 heures minimum par année?
Puis on sait qu'il y a un manque d'effectifs puis la SQ nous ont partagé qu'ils
ont mis un objectif de former tout le monde d'ici décembre 2025. Est-ce que ça
va être possible? Parce que j'ose croire aussi que toute la formation, on ne
peut pas tout faire en ligne. Ça prend aussi les simulations pour vous aider à
bien, à bien comprendre, pour être bien formés, parce que ça va les deux par la
communication, oui, superimportant, mais que vous êtes formés pour agir. C'est
essentiel.
M. Painchaud (Jacques) :Oui. Et dans ce sens-là, la coroner en parle également, elle
parle de deux centres, créer deux centres de formation pour permettre le
déploiement de la formation et quatre postes satellites pour permettre des
activités de formation. Et la préoccupation qu'elle a et que d'autres coroners
ont faite dans d'autres rapports avec l'intervention policière, c'est l'importance
des simulations. Donc ça répond à la préoccupation. On ne peut pas tout faire
avec. Avec une vidéo, il faut absolument vivre ce qu'on appelle l'effet
simulation. Et dans ce contexte-là, il y a eu des stratégies, notamment le
coaching par les pairs. C'est-à-dire qu'il va y avoir un formateur, un coach
qui va arriver, puis il va même se déplacer sur des unités, il y a une partie
de la relève qui couvre le territoire, peut faire l'exercice d'une simulation
et c'est excessivement important pour le maintien des compétences, pour
minimiser ce qu'on appelle l'érosion du savoir. Alors dans ce sens-là, ça nous
met actif, ça nous met vigilants et dans ce contexte-là, c'est souhaitable. Et
pour ça, ça prend justement des ressources comme vous dites.
Mme Maccarone : Si je me
trompe, je pense qu'il y a 10 nouveaux formateurs.
M. Painchaud
(Jacques) : Il y a 10 nouveaux
qui mènent à 42. Avant, avant les événements, on était à environ 25. Il y a eu
des ajouts, mais encore une fois, en ce qui nous concerne, ce n'est pas
suffisant. Il va falloir qu'il y ait une augmentation du nombre de formateurs
pour répondre. Vous savez, qu'on a plus de 25 programmes différents de
formation à la Sûreté du Québec, il y a différents volets. Puis je tiens à vous
dire aussi, puis je sais que là, on parle d'intervention policière en tant que
telle, mais il ne faut pas oublier non plus le domaine des enquêtes. Le domaine
des enquêtes, la cybercriminalité. La criminalité se développe, se complexifie,
elle est internationale. Là aussi, vous avez des éléments quand on vous parle
du harcèlement, le harcèlement auprès, tu sais, des enfants, puis tout ça, l'Internet,
puis tout ça. Les ressources sont insuffisantes puis il y a des stratégies puis
il y a des nouvelles formations de pointe qu'il faut que la police soit à l'affût
et là aussi, les besoins de formation sont là, ça fait que je vais juste faire
un passage qu'au centre, sur la patrouille. Mais il y a aussi d'autres enjeux.
Mme Maccarone : Je partage
mon inquiétude parce que je sais comment c'est essentiel cette formation. Puis
pour protéger non seulement nos policiers mais aussi la population visée dans
les interventions. C'est très important. Puis il y a les deux programmes pour
mieux comprendre le CETM et aussi comment agir dans des cas d'état mental
perturbé. Il nous reste 15 mois pour atteindre l'objectif. Est-ce que c'est
possible? Parce que je pense aussi beaucoup au temps supplémentaire
obligatoire. La fatigue de nos policiers, les maladies, les blessures parce qu'ils
sont fatigués, parce qu'ils travaillent 80 heures par semaine, comment
allons-nous arriver à former tout le monde étant donné qu'on fait face...
Mme Maccarone : ...face à
un manque d'effectifs important.
M. Painchaud
(Jacques) : Actuellement, suite à notre négociation, on a
trouvé des aménagements où on permet, on s'entend que c'est dans certaines
conditions, pour assurer la formation atteinte de nos membres, il y aura des
modifications d'horaires pour la durée, que les gens puissent se former à l'unité.
Ça fait que ça, c'est des approches qu'on a innové au sein de notre convention
collective. Par ailleurs, c'est clair que dans les enjeux de formation, la
Sûreté du Québec a une obligation de moyens, surtout avec les avis de la
CNESST. On est, on est vigilant et on veut que les résultats, ça arrive. Mais
quand vous parlez de la formation, puis c'est là aussi quand on veut faire la
planification. Vous savez, les formateurs, là, bien, il faut les monter, il
faut les créer, il faut les équiper, il faut que... puis qu'ils prennent de
l'expérience comme formateurs et il faut qu'ils soient revalorisés. Et
actuellement, même à l'école nationale, ils ont leurs propres difficultés pour
recruter des formateurs. Donc, c'est clair que c'est des disciplines qui méritent
d'être vues et revues dans le sens où il faut s'assurer d'avoir un bassin, tout
comme on a besoin de bassins de spécialistes en matière policière auprès des
tribunaux. Alors, dans ce contexte-là, à la Sûreté du Québec, il y a des plans
qui sont soumis. On espère que les plans vont rencontrer leurs objectifs. On
demeure inquiet néanmoins, parce que là, après tant de temps, les ratios sont
quand même faibles. Et on sait que pour des interventions planifiées, et
autres, l'idéal, c'est que tout le monde sur une équipe soit formé. Pas un soit
formé puis deux autres ne le sont pas. Il y a quand même des gros virages en
termes d'intervention qui sont présents puis il faut, il faut absolument
prévoir des choses. Et une des choses, comme je l'ai dit tantôt, le coaching
par les pairs est une manière d'accélérer ou de, parallèlement aux programmes
de formation diffusés, de faire cet ajout-là. Parce que je vous dis bien
sincèrement, vous savez, il y a le cours MICP, là, qui est le maintien des
compétences en intervention policière. Bien, ce maintien-là, la Sûreté, bien on
l'avait ramené à deux jours. Bien, là, la coroner : Non, non, on va
l'amener, on va le faire à trois jours. C'est trois jours que c'est nécessaire
parce que là, encore une fois, on vient pour couper. Il faut vraiment prendre
le temps de faire les choses. On est des professionnels de la sécurité publique
et tout comme les cadres professionnels dans les autres ordres, il y a des
heures minimales chaque année.
• (12 h 10) •
Mme Maccarone : On ne
peut pas avoir des demi-mesures. C'est la même chose aussi quand on parle des
agents de liaison qui, en passant, ne sont pas nommés dans le projet de loi.
M. Painchaud
(Jacques) : Tout à fait.
Mme Maccarone : Ça fait
que je pense qu'on a une importance de les nommer et de comprendre bien leur
rôle. Vous, à votre recommandation 4, vous dites que ça va être important,
qu'on a un suivi systématique. Vous savez sans doute qu'il y a
1 900 dossiers actuellement et on a une annonce de 18 personnes.
Ça fait plus que 100 dossiers par personne, ça fait une intervention de
peut-être 1 à 2 fois par année avec les nombres que nous avons à l'intérieur
d'une année de travail. Comment allons-nous rejoindre ce critère puis ce besoin
que vous souhaitez ici, puis assurer qu'on a un suivi qui est effectif? On a
entendu aussi hier qu'apparemment ils vont aussi faire le lien avec les
victimes, avec les familles. Elles vont être très occupées ces personnes.
Comment est-ce qu'elles vont pouvoir faire systématiquement des appels à 4
heures le matin que vous, vous avez besoin d'avoir de l'information?
M. Painchaud
(Jacques) : Oui.
Mme Maccarone : Je n'ai
aucune idée comment ça, ça va fonctionner. Est-ce que vous avez une autre
recommandation pour nous en ce qui concerne...
M. Painchaud
(Jacques) : Moi, c'est là que tantôt je parlais d'avoir une
table permanente de coordination-concertation pour faire le suivi. Vous savez,
juste pour la personne en détresse, la coroner faisait allusion à un
gestionnaire du cas, là. Bien, je vous dirais que de notre côté, pour
l'ensemble de l'œuvre, il faut absolument, absolument qu'il y ait comme une
équipe qui... une table de concertation qui fait un suivi là-dessus, parce
qu'on va se perdre, on va se perdre. Il faut absolument arrimer les choses.
Alors, il faut éviter des doublons. Il faut s'assurer de la pertinence,
l'efficacité et tout ça puis la bonne compréhension de chaque ministère. Parce
que de demander la collaboration, c'est une chose, mais quand chaque service
est excédé. Vous savez, là, on est... l'épuisement, le travail, il manque de
ressources. Bien, c'est bien sûr que là, actuellement, il va falloir que tout
le monde ne voie pas ça comme une tâche supplémentaire. C'est ça, le défi est
là, puis ce n'est pas une tâche supplémentaire, ça doit faire partie intégrante
de notre démarche et que ça... qu'on puisse travailler tout le monde en
concertation.
Mme Maccarone : Il me
reste une minute. J'aurais voulu parler avec vous par rapport à P-38...
Mme Maccarone : ...par rapport
à plein de choses, mais je veux réserver la dernière minute qui me reste pour
soulever que vous êtes en fin de contrat, de mandat. Ça termine pour vous et je
veux saluer votre travail, grâce à vous, vous avez amené une bataille ici à l'Assemblée
nationale. Au nom de Maureen Breau puis sa famille, de tous vos confrères et
consœurs, vous vous êtes battu pour les gens que vous représentez. Vous avez
beaucoup à être fier. Vous allez nous manquer beaucoup Jacques, à cause de vous
puis votre mandat. Vous allez changer la politique à l'Assemblée nationale.
Vous allez charger la vie de plusieurs policiers, plusieurs familles, plusieurs
victimes, plusieurs personnes aussi qui souffrent de problèmes de santé
mentale. Alors sincèrement, merci beaucoup pour tout ce que vous avez fait. On
sait que la relève est pas mal fort mais. Mais vraiment merci puis bravo! Bravo
pour ce que vous avez fait.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, Madame. Merci beaucoup. On poursuit avec le député
de Laurier-Dorion.
M. Fontecilla : Merci, M. le
Président, bonjour, M. Painchaud, Fiset, Me Coderre. Merci beaucoup d'être ici
avec nous, encore une fois. Je suis. Et j'aimerais avoir un petit peu plus de
précisions sur les propos, votre opinion, là, sur la question : Lorsqu'un
policier a tendance à dans une intervention à constater qu'il y a un bris de
condition, de un. Il faudrait qu'il sache qu'il y a un bris de conditions.
Donc, ça, c'est quelque chose que vous demandez d'ailleurs, là.
M. Painchaud (Jacques) :
On a ces informations-là actuellement, on peut avoir, mais sauf qu'il faut, il
faut, il faut, il faut avoir tous les détails. Il faut s'assurer également que
si effectivement on le relève, il y a une suite logique? On a l'impression
souvent qu'on, comment dire, la chaudière, là, dans la barque, puis elle prend
l'eau, puis il faut enlever l'eau de la barque, oui, mais il y a un trou, puis
ça rentre tout le temps. Alors, il faudrait à un moment donné, des fois, on
dit : Aïe, vous avez de l'information, il y a un CRPQ, bien, oui, il y en
a quasiment pour deux pages sur... C'est parce que ce n'est pas normal a se
passe pas normal qu'on soit rendu à deux pages. Il faudrait à un moment donné
d'arriver d'arrêter puis dire : bien, c'est bris par-dessus bris puis il
‘y a comme rien, il n'y a pas de conséquences. Alors, quand il y a des
signalements, puis quand il y a des interventions policières pour lesquelles on
va effectivement faire les démarches pour le bris condition, il faut absolument
qu'il y ait une suite logique, puis qu'à un moment donné, qu'il y ait une
révision, puis dire qu'il y ait des conséquences parce que les gens font
continuellement des bris puis on est aux prises avec un nombre effarant
d'appels. Vous savez, dans le rapport de la coroner, on parle de
73 000 appels les cinq dernières années à la Sûreté du Québec. Pour
des gens qui... des appels qui touchent la santé mentale. Là aussi, on a un
enjeu, on a un enjeu : Est-ce que la personne a été judiciarisée ou pas?
Si elle est judiciarisée, le projet de loi répond bien, mais si elle n'est non
judiciarisée, on n'a pas information puis ce n'est pas colligé. Et là aussi,
c'est problématique. Alors on pourrait avoir quatre interventions policières
dans la semaine. On fait quatre rapports, il n'y a pas matière à
judiciarisation, mais c'est une bombe à retardement. Puis là, il n'y a personne
qui est dédouané pour pouvoir nous transmettre l'information. Puis nous, on n'a
pas de canal, on dit : bien là, on vient de la colliger l'information, elle
va où. Alors, on n'est pas capable d'aller dans la pleine prévention comme le
permet la loi Brian en Ontario.
M. Fontecilla : Je vais y
revenir, là, mais vous parlez des personnes non judiciarisées, là, mais c'est
un gros, un gros, un gros problème, là. Nous sommes du côté des judiciarisés.
Mais malheureusement là. Même si vous constatez qu'il y a une personne
judiciarisée, non et non et non criminellement responsable qui ne respecte pas
ses conditions par exemple consommation, etc. Et quel est le pouvoir du
policier dans cette situation-là, est-ce qu'il... Et qu'est-ce que vous
voudriez que le policier puisse faire?
M. Painchaud
(Jacques) : Vous parlez, là, vous parlez en vertu de P-38 ou
non?
M. Fontecilla : Non. Bien, en
fait, lorsque vous faites une intervention auprès d'une personne non
criminellement responsable.
M. Fiset (André) : On est
liés par un devoir de confidentialité. C'est un rapport de demander et
d'intenter des procédures au DPCP. Le rapport va rester dans nos filières, au
poste de police. Je ne peux pas appeler le poste... le centre hospitalier. Je
ne peux pas appeler son psychiatre. Je ne peux pas appeler le groupe de
travailleurs sociaux qui l'entoure, qui le suit, qui s'assure qu'il prend sa
médication. J'ai un devoir de confidentialité comme policier et si je ne
respecte pas ce devoir-là, je pourrais être visé par une plainte en déontologie
ou même par un processus disciplinaire. Alors, c'est pour ça que j'ai les mains
liées. Je ne peux pas rien dire. Je peux parler à mes collègues, je peux
sensibiliser mes confrères...
M. Fiset (André) : ...mais je
ne peux pas faire rien d'autre. C'est ça, le piège que j'ai.
M. Fontecilla : Est-ce qu'on
pourrait penser... Oui.
M. Coderre (David) : Si je
peux rajouter. On a certains leviers, en fait, qui sont prévus au Code criminel
justement, où est-ce qu'on pourrait partager une certaine information,
effectivement. Le problème, comme mon confrère l'a mentionné, c'est qu'on est
lié par le serment de discrétion. Ça revient tout le temps à la problématique,
on est lié par le secret en tant que tel. Il y a certaines dispositions
législatives, puis l'encadrement législatif actuel qui permet un certain
partage d'informations en certaines circonstances précises, mais qu'on ne le
mentionne pas dans le projet de loi n° 66, d'où notre recommandation,
justement, que ce soit bilatéral ou multilatéral, que l'information circule
entre les intervenants pour dire : Bien, si jamais il y a des conditions
qui ne sont pas respectées, moi, comme policier, je peux transmettre
l'information autant que recevoir l'information.
Donc, c'est pour encadrer, puis je sais
qu'on n'est pas en train de discuter des réformes au Code criminel aujourd'hui,
c'est peut-être d'encadrer les informations qui peuvent être transmises par nos
membres policiers, justement.
M. Fontecilla : Merci
beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, je remercie les représentants
de l'Association des policières et policiers provinciaux du Québec.
Sur ce, je vais suspendre les travaux
jusqu'à 15 heures. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 12 h 20)
14 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 15 h 02)
Le Président (M. Provençal)
:Alors, nous poursuivons les
consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 66,
Loi visant à renforcer le suivi des personnes faisant l'objet d'un verdict de non-responsabilité
criminelle pour cause de troubles mentaux ou d'inaptitude à subir leur procès.
Cet après-midi, nous entendrons les
témoins suivants : l'Ordre professionnel des criminologues du Québec, l'Association
des médecins psychiatres du Québec, la Commission des normes, de l'équité, de
la santé et de la sécurité du travail et l'Association des services de
réhabilitation sociale du Québec. Nous allons débuter cet après-midi avec Mme Josée
Rioux, présidente de l'Ordre professionnel des criminologues du Québec. Alors, Mme,
vous avez 10 minutes pour votre présentation et, par la suite, nous
poursuivrons avec des échanges. À vous la parole.
Mme Rioux (Josée) : Merci.
Bonjour à tous. M. le Président de la commission, M. Bonnardel, Mme Fortin,
Mesdames et Messieurs, je vous remercie de prendre le temps de me donner la
parole.
Le Président (M. Provençal)
:Pourriez-vous mettre votre... votre
micro, juste...
Mme Rioux (Josée) : Vous
voulez que je l'approche. Est-ce que c'est mieux?
Le Président (M. Provençal)
:Oui.
Mme Rioux (Josée) : Parfait.
Je peux porter... ma voix porte loin. Ça fait que je pourrais même ne pas en
avoir et me lever debout puis vous enseigner ça, mais je vais... je vais y
aller dans les règles de l'art. Donc, merci de prendre le temps d'entendre les
commentaires des criminologues qui ont travaillé sur un mémoire à l'ordre
professionnel.
Je me présente, comme M. le Président
disait, je suis Josée Rioux, je suis la présidente de l'Ordre et je suis aussi
enseignante à l'Université Laval, à l'École de travail social et criminologie.
J'enseigne bien entendu la criminologie depuis plusieurs années. Juste pour me
présenter un peu, j'ai une spécialisation en délinquants sexuels. Au Québec, j'ai
ouvert...
15 h (version non révisée)
Mme Rioux (Josée) : ...trois
centres de thérapie pour traiter les délinquants sexuels. J'ai ouvert aussi un
regroupement québécois pour regrouper les intervenants qui travaillaient auprès
des délinquants sexuels. J'ai été la première présidente de l'Ordre,
initiatrice de l'ouverture de l'Ordre des criminologues. J'en suis la troisième
actuellement. Et finalement, pendant quatre ans, j'ai été commissaire à la
Commission québécoise des libérations conditionnelles, poste que j'ai quitté
pour retourner à la présidence de l'Ordre. J'ai consacré toute ma vie à la
délinquance adulte. Ce qui me... me fascine le plus dans la vie.
Plusieurs des commentaires que je vais
vous faire aujourd'hui sont en lien avec les recommandations du mémoire qui a
été déposé lors de mon témoignage à l'enquête publique du décès de Maureen
Breau. Ce qu'on constate, c'est que le projet de loi veut modifier deux lois.
Si je commence par la Loi sur les renseignements de santé et services sociaux,
face à la transmission de renseignements additionnels aux policiers, il faut
faire attention à tout type de renseignements qui vont être transmis. Le secret
professionnel encadre le type de renseignements qui peut être donné, et force
est de constater que la loi sur la police ou le code de déontologie policière a
peu d'éléments ou pas d'élément sur le principe de confidentialité et secret
professionnel.
Une question se pose : Si les
policiers ont des informations liées au secret professionnel, est-ce que
ceux-ci devraient être liés par un type de secret professionnel aussi? C'est
une question importante. Aussi, ce qui doit être transmis aux différents
intervenants devrait être uniquement des renseignements nécessaires et
pertinents aux fins poursuivies par l'intervention, et ce, dans une situation d'urgence
uniquement. Bien entendu, le Code des professions encadre la levée du secret
professionnel et une bonne connaissance des différents critères de cette levée
devrait être connue par tous.
Concernant la loi sur le système
correctionnel, nous avons recommandé lors de notre... de l'enquête publique, l'établissement
d'une ligne de service qui prendra en charge et aidera une personne sur la CETM
au long cours. Nous sommes donc très heureux du projet de loi actuel. Avant de
discuter des agents de liaison, j'aimerais quand même mentionner que notre
mémoire faisait état que, dans le cadre des décisions de la CETM, pour un délit
à caractère violent, l'évaluation de la sécurité du public devrait tenir compte
de l'ensemble des facteurs liés au risque de violence d'une personne et
contenir davantage que le rapport du psychiatre traitant. Le risque de violence
est dynamique et doit être réévalué régulièrement avant et après la libération
afin que les stratégies de gestion du risque appropriées soient mises en place
et ajustées en fonction des besoins et de l'évolution du risque présenté par la
personne. Il faut donc voir le risque dans une approche intégrée et que les
interventions soient faites en ce sens.
En lien avec ce constat, nous avions
recommandé qu'une évaluation soit faite avant le passage d'une personne devant
la CETM et sommes très heureux de constater les avancées à ce niveau, notamment
par l'ouverture de postes de criminologues dédiés à ces évaluations. Ces
dernières permettront d'évaluer le risque ainsi que les besoins de la personne
lors de sa libération. La CETM pourra donc établir certaines conditions
nécessaires au rétablissement de la personne, et ce, en lien avec ses besoins.
À titre d'exemple, lorsque j'étais
commissaire à la Commission québécoise des libérations conditionnelles, si je
prends l'exemple d'une personne qui avait fait trois fois des introductions par
effraction ou une personne qui avait conduite avec les capacités affaiblies est
100 fois plus encadrée qu'une personne qui est sous mandat de la CETM, et
la personne libérée conditionnelle par la CQLC a des conditions en lien avec
ses problématiques et ses besoins, tout en étant aidée par un intervenant
compétent dans le suivi des libérés conditionnels. Dans le cas d'Isaac
Brouillard Lessard, si on prend cet exemple-là, qui avait à son actif cinq NRC
en violence, force est de constater que sa libération n'a pas vraiment tenu
compte de sa problématique de violence et de ses besoins en termes d'encadrement.
La protection du public doit toujours prévaloir et prévoir un suivi en ce sens.
L'agent de liaison prévu au projet de loi
serait donc l'intervenant ressource pour les personnes libérées avec des
conditions spécifiques, ce qui est en lien avec nos recommandations. Par ailleurs,
nous ne sommes pas favorables à un suivi pour tous. Il faut cibler les
personnes qui ont des besoins particuliers et qui représentent un risque pour
la population, notamment au niveau de comportements violents et de dépendance.
Ce peut être aussi des besoins au plan de la réinsertion sociale, d'encadrement
face au respect des conditions si la personne a démontré certaines difficultés
dans le passé. La finalité du suivi est de s'assurer que la personne va bien et
qu'elle ne représente pas sur le moment un risque pour la population. Il faut
donc cibler les bonnes personnes à qui imposer un suivi. Tous n'ont pas les
mêmes besoins et le même niveau de risque. Par ailleurs, est-ce que le...
Mme Rioux (Josée) : ...le
projet de loi actuel permettra aux personnes une belle intégration avec les
agents de liaison. Le fait de se retrouver dans un bureau de probation pourrait
faire en sorte de stigmatiser les personnes qui, il faut se rappeler, ne sont
pas des criminels. Le but de la loi est d'assurer un suivi adéquat des
personnes sous la CETM. La question se pose : Est-ce que les agents de
liaison pourraient davantage être intégrés aux équipes traitantes du ministère
de la Santé et éviter ainsi d'intégrer les usagers sous le giron de la sécurité
publique? Ou bien si les agents de liaison sont du MSP, du ministère de la
Sécurité publique — pardonnez mes mes acronymes — pourraient-ils
être à même de travailler dans le milieu hospitalier? Je pense qu'il y a deux
questions qu'il faut qu'on se pose là-dessus pour éviter la stigmatisation,
mais aussi pour penser aux parents qui... les parents ou proches pourraient
éprouver des difficultés à travailler avec le réseau correctionnel parce que,
parfois, ils n'ont jamais travaillé avec ce réseau-là, puis ça peut être quand
même assez intimidant. Donc, la question, à ce niveau-là, je pense qu'elle est
de toute importance pour pouvoir favoriser la création du lien de confiance et
assurer un suivi bénéfique à tous.
• (15 h 10) •
En terminant, plusieurs recommandations de
la coroner Kamel font état qu'il reste encore beaucoup de travail à faire pour
prendre en charge les gens qui ont une problématique de santé mentale et qui
sont non responsables criminellement. À titre d'exemple, j'aimerais mentionner
que la recommandation R8 fait état qu'il faut déployer des ressources
d'hébergement spécialisées en psychiatrie légale pour s'assurer d'un suivi
adapté aux usagers sous la CETM. Le Québec est très mal, très mal desservi à ce
moment-là. Il y a peu de ressources spécialisées. À Montréal, il y a quand même
des bons services. Mais si on regarde ailleurs dans la province des réseaux
d'hébergement pour les personnes qui sont sous mandat de la CETM et une maison
de transition, si je prends un exemple à ce niveau-là, il n'y en a pas. Ça fait
que les gens sont laissés un peu à eux-mêmes, et le fardeau incombe beaucoup à
la famille qui... ce n'est pas toujours évident, à la famille aussi, de
rapporter les bris de conditions, mais aussi de prendre en charge les personnes
qui ont... qui vivent des difficultés particulières. Ça fait que, des fois, une
maison de transition comme à Montréal pourrait être une belle... une belle
avenue. Mais je vous dirais qu'ailleurs dans le Québec, même à Québec, il y a
peu de ressources. Ça fait que vous imaginez, dans les petites régions que
c'est que c'est quelque chose qui ne se retrouve pas. Ça fait qu'on peut dire
que ça en prend, mais il faut aussi qu'on pense à essayer de la mettre sur
pied. Tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas de ressources d'hébergement pour
ces gens-là, je ne pense pas qu'on va arriver à aider les usagers adéquatement
et éviter des drames comme ceux qui sont arrivés dans les dernières années au
Québec. La lumière rouge... les lumières rouges qui ont été... qui ont été
présentes, là, au cours des deux derniers événements sont quand même
importantes à prendre en considération.
Je vais m'arrêter là. Je vous remercie et
surtout d'avoir à cœur le bien-être de la personne présentant des problèmes de
santé mentale et aussi, bien sûr, la protection du public.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup, Mme Rioux. Je veux
mentionner que le... vous me reprendrez, votre mémoire, vous ne l'aviez pas
acheminé à la commission. C'est un mémoire que vous aviez déposé lors de l'enquête
publique sur le décès de Mme Maureen Breau et M. Isaac Bouillard-Lessard.
Mme Rioux (Josée) : Effectivenent.
C'est ça. Mais je peux le faire parvenir quand même si... si vous êtes...
Le Président (M. Provençal)
: S'il vous plaît.
Mme Rioux (Josée) : Parce
qu'il est adressé vraiment plus pour la commission.
Le Président (M. Provençal)
:Oui.
Mme Rioux (Josée) : Mais je
vais je vais vous l'envoyer.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup. Sur ce, M. le
ministre.
M. Bonnardel : Merci, M. le
Président. Mme, merci d'être là et de nous amener les éclairages importants
sur... vos connaissances sur l'expérience que vous avez, que vous avez eue,
deux... deux enjeux majeurs, je pense que vous le mesurez très, très bien. Les
deux rapports de la coroner Kamel, que ce soit celui du triple homicide sur
deux jours en... qui a été déposé en début d'année 2024 versus celui-là
nous amène à deux points majeurs c'était la communication qui était déficiente
entre les partenaires, ceux des intervenants de la santé versus les policiers,
puis je vais commencer par ça avant d'aller, par la suite, au suivi parce que
vous avez amené des points... des points intéressants.
Puis là, vous avez parlé un peu de
l'inquiétude, le secret professionnel, puis j'ai soulevé la question aussi avec
plusieurs. Vous êtes... vous êtes une spécialiste, vous le savez, la seule
façon que le policier avait de l'information sur une personne, c'est lorsque
l'équipe traitante disait : Va me chercher... Bonjour, je m'appelle Untel
ou Untel, va me chercher Bonnardel à telle adresse parce que je pense qu'il est
en danger pour sa personne ou pour autrui pour des raisons X, Y, Z. Puis là,
bien, le policier pouvait demander des renseignements sur le comportement, puis
il y allait. Puis là, la loi va nous permettre, pour un policier, d'essayer
d'obtenir de l'info, pas d'essayer, d'obtenir de l'information pas pour un
diagnostic, mais de comprendre un peu, peut-être, comment la personne s'est
comportée dans les deux...
M. Bonnardel : ...trois
dernières semaines face à l'équipe traitante, s'il y a eu rendez-vous ou non.
Comment vous voyez ce petit, ce petit bout-là, là, qui est immensément
important dans le travail et dans le travail des policiers puis qui a été
nécessairement mentionné par la coroner Kamel plus qu'une fois entre secret
professionnel, puis je pense que le policier non plus, il ne veut pas le
diagnostic complet de la personne, mais peux-tu m'aider à comprendre, puis
l'exemple que j'ai donné 100 fois : Comment la personne l'autre côté
de la porte réagit face à quelqu'un qui porte l'uniforme. Vous allez...
sûrement de meilleurs exemples que moi, là, mais c'est un peu ça que je veux
comprendre avec l'expérience que vous avez puis l'interaction et l'échange
d'information que le policier va souhaiter obtenir de l'équipe, de l'équipe
traitante, ou peut-être de l'agent de liaison.
Mme Rioux (Josée) : Mais
c'est pour ça que je parle des informations nécessaires et pertinentes. Je
pense que, pour bien protéger, notamment les interventions policières, il y a
des informations qui peuvent être données. Si je parle beaucoup du secret
professionnel, ça demeure quand même que je suis la présidente de l'Ordre des
criminologues, et le secret professionnel, c'est quand même une façon de
protéger le public, mais je pense que la transmission de l'information peut se
faire quand même de façon adéquate, en autant qu'on sache, qu'on balise un peu
plus, dans le fond, c'est quoi les informations qu'on peut donner. Je pense
qu'il peut y avoir certains critères précis. Si on enlève l'idée de la levée du
secret professionnel, parce que là, à ce moment-là, tout le monde est justifié
de pouvoir intervenir, mais si on balise un peu plus, même le mot «pertinent»
est nécessaire, il faudrait peut-être le baliser aussi. Qu'est-ce qu'on peut
donner comme information et qu'est-ce qui n'est pas nécessaire dépendamment des
cas? Je pense que c'est quelque chose qui va être possible, là. Déjà, ça se faisait
aussi, là, mais là peut-être que les gens sont un peu plus frileux avec tout ce
qui est arrivé, mais la question est soulevée, la question est importante. Mais
les policiers doivent avoir certaines informations pour aller intervenir.
M. Bonnardel : Quand vous
disiez «ça se faisait», c'est-tu dans l'appel de l'équipe traitante à un
policier qui dit : Va me chercher le gars x. Puis là le policier va
assurément, je pense, poser quelques questions. Je fais affaire avec qui? Je
pense, c'est la première chose que le policier souhaite obtenir comme info, ça
fait que j'imagine c'est là que l'équipe traitante, selon vous, est-ce qu'elle
était assez formée ou bien informée pour savoir qu'est-ce que je peux te donner
comme info pour ne pas non plus lever le secret professionnel, c'est-tu ça que
vous que vous... que vous voulez dire?
Mme Rioux (Josée) : Mais je
pense que l'information est à géométrie variable dépendamment où est-ce qu'on
se retrouve. La spécialisation des équipes aussi, parce qu'il y a certains
milieux où les équipes sont moins spécialisées que d'autres, elles sont
peut-être moins habituées à avoir des gens qui sont en non-responsabilité
criminelle. Mais je pense que ça se faisait. Là, c'est qu'on le soulève, O.K.,
dans un projet de loi. Et là c'est là où je dis qu'il faut qu'on le balise.
Mais moi, je pense qu'il y a certaines informations qui étaient données. Je ne
mets pas... je ne mettrais pas un 100 $ sur la table pour ça, là, mais, au
cours des années, il y a toujours eu des informations qui se sont partagées.
C'est que là on veut le baliser davantage, on l'inscrit dans la loi, chose qui
n'était pas là à ce moment-là, là, avant l'affaire Isaac Brouillard-Lessard,
là.
M. Bonnardel : Vous l'avez
dit, vous avez donné deux exemples, là, une personne qui a été arrêtée avec
consommation, puis une personne qui... introduction par effraction trois fois,
puis vous avez dit : Ces personnes sont mieux accompagnées que ceux
post-CETM. C'est ça que vous avez dit, hein, à peu près?
Mme Rioux (Josée) : Là, c'est
ce que je dis. C'est clair.
M. Bonnardel : Parce que j'ai
marqué «suivi CETM inadéquat», ça fait que c'est un peu ce que vous avez dit,
là.
Mme Rioux (Josée) : Bien,
inadéquat, je dirais non complet, O.K.? Quand, moi, je libérais un détenu qui
avait fait trois introductions par effraction, je mettais des conditions en
lien avec ses problématiques : toxicomanie, peu importe, dépendance,
alcoolisme, non-fréquentation, il y avait un suivi avec un agent de probation.
Il était beaucoup plus encadré, notamment que si on prend l'exemple d'Isaac
Brouillard Lessard qui, après cinq NRC en violence, n'avait pas de suivi en
tant que tel au niveau de la violence, chose qui aurait été importante à ce
moment-là, là, O.K.? Mais on n'a pas balisé la libération de la même façon.
Mais moi, c'est vraiment l'analogie que je faisais entre les deux. Pour avoir
été commissaire pendant quatre ans, j'en ai imposé des conditions à plusieurs
que, peu importe le type de délit, mais en le on le voit moins, on voit moins
cet encadrement-là au niveau d'une personne qui est libérée par la CETM. Et
c'est pour ça que je parle d'une ligne de service, l'évaluation avant, le suivi
après, et l'évaluation aussi continuelle, parce que le risque de violence est
en mouvance selon les événements de la vie d'une personne.
M. Bonnardel : Ça fait que,
sans mettre au banc personne, ce que vous dites indirectement, c'est que
l'équipe traitante, l'équipe médicale, on va l'appeler l'équipe, n'était pas
capable de suivre dans un... adéquatement sur une période, je vais dire au
mois, mettons, ou aux deux mois, certaines personnes, exemple, même aussi
facile que de déménager. Si la personne ne répondait plus au téléphone, il
n'est plus à son rendez-vous, Bonnardel, il est où? Bien là, on ne faisait plus
de recherches. En tout cas, j'essaie de...
M. Bonnardel : ...je réponds
pour des personnes qui ne sont pas là, là, mais c'est un peu ça que vous... de
l'expérience que vous avez, que vous évaluez puis que vous avez, j'imagine,
expliqué.
Mme Rioux (Josée) : Bien,
c'est un constat, effectivement. Les équipes traitantes ont davantage le mandat
de stabiliser l'état de santé de la personne. La surveillance face aux
comportements violents, c'est sûr qu'une équipe traitante ne va pas dire :
Ah! moi, je ne m'en occupe pas, ça ne fait pas partie de mon champ de
compétence. Mais il y a tellement beaucoup de choses puis il y a tellement...
les équipes traitantes ont tellement beaucoup de cas sur leur «caseload» qu'à
un moment donné, ça devient peut-être difficile. Et ça prend aussi la volonté
de la personne. Travailler en contexte involontaire, c'est quelque chose qui
est extrêmement difficile. Il faut savoir comment, il faut comprendre c'est
quoi, le contexte du non-volontariat. Les équipes traitantes sont peut-être
plus habituées, eux, à avoir des gens qui vont chercher de l'aide. Les... Si on
prend au niveau correctionnel, bien, les agents de probation sont habitués,
eux, à travailler dans un contexte totalement involontaire, là. Ils sont formés
pour ça.
M. Bonnardel : J'arrive à
l'autre point. Le suivi, l'arrimage entre l'équipe traitante versus les agents
de liaison du ministère de la Sécurité publique. J'utilisais hier le mot...
puis je pense que ça a été utilisé plus qu'une fois, le mot «complémentaire»,
le travail qu'eux auront à faire avec l'équipe médicale. Puis ce n'est pas une
question de : Moi, je suis meilleur que toi, puis c'est moi qui va
décider. Tu sais, le complémentaire, c'est d'arriver à...
• (15 h 20) •
Mme Rioux (Josée) : Chacun sa
compétence.
M. Bonnardel : ...chacun ses
compétences, puis c'est de protéger puis d'accompagner la personne qui a des...
qui a des modalités.
Comment vous voyez cet arrimage entre ces
futurs agents de liaison, qui... on va se le dire, qui étaient... qui seront ou
qui étaient des agents de probation avant, qui auront une formation
additionnelle par le ministère de la Santé, par le MSP, où qu'on va les
accompagner, mais qui ont déjà un... un passé, un passé quand même important
pour... Puis le but, vous le savez, là, je l'ai dit... le but, ce n'est pas de
stigmatiser ces personnes, c'est de les accompagner puis d'assurer un meilleur
suivi puis d'assurer leur sécurité puis la sécurité, nécessairement, des
policiers, policières.
Donc, l'arrimage entre les... entre
l'équipe médicale puis eux, vous... Bien, c'était une demande de la coroner. Je
pense que vous étiez dans la même ligne... dans la même ligne de pensée. Mais
je veux quand même vous... l'entendre de vive voix de votre part, là.
Mme Rioux (Josée) : Bien,
quand on parle d'un dossier qui va suivre une personne à la Sécurité
publique... va la suivre de l'arrestation jusqu'à la libération conditionnelle,
puis tout le dossier va suivre. Il y a sûrement une mécanique qui peut être
faite pour justement que l'agent de... bien, l'agent de liaison puisse
communiquer ou puisse avoir des renseignements, puisse travailler de concert
avec l'équipe traitante au niveau du ministère de la Santé. C'est une question
de disponibilité de dossier puis d'avoir accès aux informations, là, puis je
pense que ça, c'est quelque chose qu'il faut qu'il soit prévu, parce qu'ils ne
peuvent pas travailler en vase clos. On ne peut pas avoir une équipe traitante,
un agent de liaison puis que l'agent de liaison ait certaines informations puis
qu'il ne puisse pas la transmettre à l'équipe traitante, ça ne sert à rien, là,
je pense. C'est là où je parle de ma ligne de services, du continuum de
services, c'est avant, pendant et après. Il faut que tout le monde puisse avoir
les informations qui sont contenues au dossier de la personne.
M. Bonnardel : Selon vous...
Mme Rioux (Josée) : Tout en
gardant en tête que la personne n'est pas une personne criminelle.
M. Bonnardel : Bien... Selon
vous, il y a des avantages que ces agents de liaison, avec leur passé
professionnel MSP... d'accompagner ou d'être complémentaires dans le travail
des équipes médicales, il y a des avantages pour vous à avoir?
Mme Rioux (Josée) : Bien,
c'est les recommandations qu'on fait. Pour nous, c'est que les gens puissent
avoir un suivi... pas toutes les personnes, dépendamment des types de délits.
Quelqu'un qui a fait... qui est non responsable pour avoir fait trois... trois
vols dans un dépanneur, elle n'a pas besoin d'avoir un suivi avec un agent de
liaison. C'est pour ça qu'il faut vraiment cibler les bonnes personnes, évaluer
le niveau de risque. Mais, pour moi, la continuité de services... Moi, ce que
je disais à la commissaire Kamel, c'est, peu importe qui la fera, O.K., que les
gens soient compétents dans la continuité de services et faire en sorte que la
population soit protégée et que la personne aussi soit protégée d'elle-même, de
ses comportements, des fois, qui sont désorganisés.
M. Bonnardel : ...vous lui
avez répondu, là, c'est les cas à faible risque versus haut risque, là. On ne
mettra pas tout le monde... Bien, de toute façon, ce n'est pas moi qui va
décider, là, mais c'est à la CETM, je pense qu'ils ont assez d'expérience pour
dire, comme vous l'avez dit : Trois... Trois vols à l'étalage, ce n'est
pas ça qui...
Mme Rioux (Josée) : Je pense,
ce qui est important, c'est... on prenait l'histoire de Montréal, la personne
était... était non criminellement responsable pour avoir, si je me rappelle
bien, brûlé un passeport. Probablement qu'elle n'aurait pas été pointée pour
avoir un agent de liaison. Mais à ce moment-là, c'est le comportement qu'il
faut qu'on regarde, puis la désorganisation qu'il faut qu'on regarde. Peut-être
que la CETM ne dira pas qu'il a besoin d'avoir un agent de liaison, mais le
comportement par la suite pourrait amener peut-être à avoir un changement dans
les conditions, là.
M. Bonnardel : Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Collègue?
Une voix : ...
Le Président (M. Provençal)
:Ça va? Oui...
Le Président (M. Provençal)
:...oui, allez-y, Mme la députée.
Mme Dorismond : J'aurais une
question par rapport à votre profession. Croyez-vous que les agents de liaison
ou de probation pourront avoir un effet bénéfique?
Mme Rioux (Josée) : On ne
peut pas être contre la vertu. C'est certain qu'il va avoir un effet bénéfique,
parce que les personnes, quand ils se retrouvent seuls un peu... Prenez
l'exemple d'Isaac Brouillard Lessard qui retrouve tout seul dans son
appartement, avoir quelqu'un qui va l'accompagner dans sa réinsertion, dans sa
réintégration sociale, ça ne peut pas être autrement que bénéfique. Même si la
personne considère qu'elle n'a pas besoin, parce que nous, c'est notre lot de
nos clients, ça ne peut pas faire autrement que d'être bénéfique. Ça fait que,
si elle vit des difficultés, elle va avoir quelqu'un qui va... à qui elle va
pouvoir aller voir pour pouvoir, justement, discuter, discuter de certaines
difficultés, de problématiques ou peu importe. Je sais qu'il y a toujours
l'équipe traitante, mais l'équipe traitante, elle a aussi toute sa fonction,
mais l'agent de liaison aurait une fonction différente d'accompagnement dans la
communauté. Et ça, c'est pour moi un... ma ligne de service qui est importante.
Mme Dorismond : C'est un
plus.
Mme Rioux (Josée) : Oui, un
plus, je vous l'ai dit, on ne peut pas être contre la vertu.
Mme Dorismond : Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Ça va, M. le ministre? Alors, Mme la
députée de Westmount...
Mme Maccarone : Saint-Louis.
Le Président (M. Provençal)
:...Saint-Louis.
Mme Maccarone : Merci, M. le
Président. Bonjour, Mme Rioux. Un plaisir de vous avoir avec nous aujourd'hui.
Merci pour votre exposé. Moi, je souhaite revenir sur la notion de secret
professionnel. J'ai entendu les échanges puis je vous ai entendu dans votre
présentation en ce qui concerne aussi pour les policiers, qu'il n'y a pas de
balise. Puis je ne sais pas si vous savez, mais juste avant vous, ce matin,
c'était l'Association des policiers, policières du Québec, puis eux aussi, ce
qu'ils ont évoqué dans leur témoignage, c'est bien d'avoir la communication,
puis ils sont contents, parce que, maintenant, ils vont être en mesure d'avoir
plus d'informations avant d'agir, mais ils ont demandé que ce soit
bidirectionnel. Comment voyez-vous ceci mis en pratique? Est-ce qu'on a des
modifications à faire dans la Loi sur la police ou une autre loi pour leur
donner la permission, parce qu'ils sont aussi assujettis à la loi en termes de
secret professionnel? Mais comment voyez-vous ça pour répondre à leurs besoins?
Qu'est-ce qu'on peut faire puis qu'est-ce qu'on devrait partager?
Mme Rioux (Josée) : L'information
spécifique au besoin, moi, c'est toujours celle-là. On n'est pas là pour faire
un roman. O.K. Ce qui va être déterminant ou dans le service que le policier va
rendre ou dans le service que l'agent de liaison va rendre, moi, c'est ça qu'il
faut... que je considère qui va être important. Ça fait que je ne peux pas vous
donner vraiment un type d'information. Il faut qu'elle soit pertinente et
cohérente avec le type, avec la personnalité et les types de besoin de la
personne. Mais je pense qu'il faut le baliser, vous posez la question, on se
dit : bon, pertinent et dans l'urgence, mais quel type d'information
pourrait être... Il faut dédouaner un peu les gens qui vont avoir à donner de
l'information, parce que là c'est clair que, si on rentre au niveau de la santé
puis qu'on a des gens qui sont membres de leur ordre professionnel, c'est clair
qu'eux autres ils ont le secret professionnel à faire respecter. Parce que le
syndic de l'ordre, lui, là, sécurité, pas sécurité, si tu as brisé le secret
professionnel, tu l'as brisé.
Donc, c'est clair qu'il faut qu'on arrive
à donner une forme de dédouanement. Comment est-ce qu'on peut le faire? Ça, je
pense que c'est peut-être des modifications à la loi à faire. Il y a toujours
aussi la levée du secret professionnel, il y a quand même ces trois critères
qui sont importants. Mais, à quelque part, on n'aura jamais... on ne pourra
jamais avoir... Je ne pense pas qu'on va avoir une loi qui va prévoir tout. Une
loi ne prévoit jamais tout malheureusement, sans ça, on ne serait peut-être pas
ici. Mais je pense qu'il faut qu'on soit capable de comprendre quel type
d'information doit être transmis, si on dit bidirectionnel, bien oui, l'échange
doit être là parce que les deux travaillent avec la même personne.
Mme Maccarone : Mais eux, il
faut qu'ils soient dédouaner pour le faire, parce que, présentement, ils ont
dit : Ce n'est pas le cas.
Mme Rioux (Josée) : C'est
pour ça qu'il faut le prévoir. Il faut peut-être aller un petit peu plus loin,
là, puis donner certains critères.
Mme Maccarone : On a aussi
entendu des groupes, avant vous, qui ont parlé de la notion de consentement.
J'ai posé plein de questions là-dessus. Comment voyez-vous ça à l'intérieur de
ce processus? Parce qu'on a même entendu des personnes qui sont concernées par
les modifications, qui ont dit : On souhaite consentir parce que c'est
pour notre bien-être. Mais ça a l'air complexe parce qu'on a aussi autres
groupes qui sont là pour la défense des droits, des personnes, avec des
troubles mentaux, qui on dit : Mais non, le consentement, ça m'appartient,
puis je ne suis pas informé, puis je n'ai pas accès à de l'information pour
protéger mes droits.
Comment voyez-vous ça à l'intérieur de ce
processus aussi? Est-ce qu'on a des modifications à faire? Est-ce qu'il y a
quelque chose que nous devons conserver... préparer pour mettre dans la loi ou
dans un règlement, ou une directive, ou quelque chose comme ça?
Mme Rioux (Josée) : Bien, la
formule de...
Mme Rioux (Josée) : ...consentement,
c'est certain que le consentement aux soins puis le consentement à la
transmission des informations, si on regarde au niveau correctionnel, c'est
quelque chose qui est fait presque systématiquement. Au niveau médical aussi,
mais c'est probablement qu'on ne cible pas les bonnes personnes, parce qu'il
faut... on ne donne pas un nom, mais on donne un corps de métier. Donc, il faut
être... il faut être au fait qu'aussitôt qu'on entre en contact avec un client,
il faut qu'on regarde la formule de consentement. Je comprends qu'une personne
qui a une problématique de santé mentale puis qui n'est pas tout à fait là, la
notion de consentement, elle est... elle va être vue différente, elle va être
vue différemment, mais, encore là, je pense que c'est de l'information, c'est
de la formation aux gens qui travaillent en direct avec ces gens-là, justement,
sur les formules de consentement. Pour beaucoup d'organismes dans le niveau
correctionnel, c'est un automatisme.
Mme Maccarone : Puis, quand
on parle de secret professionnel ou les informations qui sont très sensibles...
puis là on parle que les agents de liaison vont avoir accès à toute cette
information. Comment voyez-vous aussi un encadrement de ce rôle? Une formation?
Est-ce qu'on devrait avoir un ordre professionnel? Parce que, là, on parle des
anciens agents de probation, qui, aussi, soulèvent plein de préoccupations, des
gens concernés parce qu'ils se sentent visés, ils ont peur, ils ne se sentent
pas pris en main. Même le professeur... hier, nous, on dit qu'elle... tout le
monde trouve que l'idée de l'agent de liaison est bonne. C'est une
recommandation de Géhane Kamel. Puis, comme vous avez dit, on ne peut pas être
contre la vertu, c'est vraiment une bonne idée, mais est-ce que ça devrait
vraiment être sous la responsabilité du ministère de... services publics?
Une voix : Santé?
• (15 h 30) •
Mme Maccarone : Oui. Parce
que, dans son rapport, le rapport qui était déposé juste hier, elle a
dit : Oui, Sécurité publique, mais, en 2022, elle a dit Santé et services
sociaux. Ça fait qu'elle... égal. On a posé la question hier, mais votre
opinion par rapport au rôle, la formation, comment on devrait l'encadrer puis
ça devrait résider où... Peut-être aux deux places, je ne sais pas.
Mme Rioux (Josée) : Bien,
c'est intimidant, hein, des fois, d'entrer dans un bureau de probation, pour
quelqu'un qui n'est jamais entré, c'est ce que je mentionnais tantôt. C'est
pour ça que je me demandais, est-ce que les équipes ne pourraient pas être...
les agents de liaison ne pourraient pas être intégrés aux équipes, aux équipes
traitantes? C'est la question qui peut être soulevée.
Les agents... les agents de liaison, si
comme... ils sont comme les agents de probation, ils sont tous membres de leur
ordre professionnel, donc, eux, ils ont... ils ont... ils savent quoi faire
avec l'information. Ils savent c'est quoi, le secret professionnel. Ils savent
ce qu'ils peuvent dire, ce qu'ils ne peuvent pas dire puis ils sont capables de
donner un cadre auprès des personnes. Si c'est des agents... des agents de
probation, je vais dire le mot, «convertis» en agents de liaison, bien, ils
savent quoi faire, ils l'ont déjà fait, là, parce que, qu'on soit avec une
personne judiciarisée ou qu'on soit avec une personne qui est sous le mandat de
la CETM, les informations sont les mêmes, là, et le partage d'information va se
faire dans un contexte de secret professionnel et de respect de la personne.
Mme Maccarone : On parle
beaucoup aussi de, évidemment, formation, manque d'effectifs. On sait qu'on a
entendu, il y a 1900 dossiers, on a annoncé 18 agents de liaison. Vous, vous
avez dit, dans votre exposé : Suivis, seulement ceux à risque de violence.
Moi, la question juste pratico-pratique, parce que je ne connais pas tout ça,
ça fait que je souhaite apprendre, si je siège autour de la table de la
commission, pourquoi je donnerais la libération à quelqu'un qui a un risque de
violence puis qui a besoin d'avoir un suivi, surtout que j'ai un manque de
ressources? Est-ce que ça va changer la nature de la façon qu'eux, ils vont
travailler, en sachant que ça se peut qu'il n'y aura pas un agent de liaison
qui va suivre cette personne? Vous comprenez un peu la préoccupation? Comment
voyez-vous ça?
Mme Rioux (Josée) : Bien,
c'est pour ça que je disais tantôt, ce n'est pas tout le monde qui doit être
suivi par un agent de liaison. Il faut aller chercher les gens dont le risque
qui a été évalué avant que la personne passe devant la CETM et... qui sont
capables de statuer qu'il y a un risque de violence, il y a un risque... le
risque est plus élevé. Mais il faut avoir foi aussi au système. On est tous
dedans. Si on a 18 agents de liaison pour commencer puis qu'on arrive à en
avoir plus... mais ce ne sont pas toutes les personnes qui vont être sous
mandat... qui vont être... qui sont sous mandat de la CETM qui vont être
suivies, ça fait que, si on se retrouve avec des agents de liaison à Rimouski,
bien, il y en a peut-être quatre à Rimouski, qui vont être suivies par l'agent
de liaison, là, parce qu'il ne doit pas y avoir plus de personnes qui sont sous
mandat de la CETM à Rimouski. Même chose à Sherbrooke, là, ça fait que je pense
que Québec et Montréal, bien sûr, il y a une concentration un peu plus grande,
mais les effectifs vont se répartir. Puis on est à 18, mais peut-être qu'après
ça on arrivera à 20, 22. Mais c'est pour ça que je dis que ce n'est pas tout le
monde qui a besoin d'être suivi. La ligne des services, ce n'est pas tout le
monde, mais, si tout le monde est évalué avant...
15 h 30 (version non révisée)
Mme Rioux (Josée) : ...O.K.,
avant son passage devant la CETM, bien, on va arriver avec un résultat et il y
a une recommandation à la CETM qui va avoir été faite par l'équipe traitante et
par des professionnels qui connaissent leur client et qui connaissent le... qui
connaissent le mécanique... la mécanique d'évaluation aussi, là. Le risque de
violence, ça s'évalue.
Mme Maccarone : O.K. Puis la
recommandation que vous appuyez de Me Kamel aussi, les ressources d'hébergement
spécialisées. Savez-vous combien qu'on a actuellement puis combien qu'on a
besoin?
Mme Rioux (Josée) : David
Henry, de l'ASRSQ, qui va venir vous voir tout à l'heure, va pouvoir vous
répondre beaucoup mieux.
Mme Maccarone : O.K.... la
question.
Mme Rioux (Josée) : Il
connaît son réseau, mais moi, je connais une ou deux ressources à Montréal,
Maisons de transition spécialisées en santé mentale, personnes qui ont commis
des crimes. Mais ici, à Québec, il n'y en a pas, de ces ressources-là. Ça fait
que vous imaginez, là, à Québec, il y a des centres... il y a des centres qui
accueillent des gens qui ont des problématiques de santé mentale, mais pas
vraiment en hébergement, puis ils ne sont pas spécialisés avec les gens qui
sont non... non criminellement responsables au niveau de l'hébergement, de la
réinsertion puis du suivi. Si vous... s'il n'y en a pas à Québec, là, vous
pouvez imaginer... je vais reprendre Rimouski, parce que c'est ma ville natale,
bien, à Rimouski, il n'y en a pas non plus, O.K.? Puis, à Sherbrooke, pour
avoir été là longtemps, il n'y en a pas non plus. Ça fait que ça, c'est un
manque.
Puis moi qui a été à la commission, je
voyais souvent le syndrome de la porte tournante, là, des gens qui est... qui
avaient des problématiques de santé mentale, qui entraient puis qui sortaient,
parce que des fois ils ont un double statut, une fois, ils ont été non
criminellement responsables, ils ont recommis un délit, ils sont criminellement
responsables, ils se retrouvent en prison, devant la commission, on ne sait pas
quoi faire avec eux autres, O.K., parce qu'on n'a pas de ressource où les
libérer. Donc, vous voyez, il faut qu'on ait un système, mais c'est... Pour
avoir ouvert trois centres de thérapie au Québec, moi, je peux vous dire que c'est
assez ardu d'ouvrir un organisme. Ça fait qu'on s'imagine de peupler le Québec
d'au moins dans chaque région, d'une ressource d'hébergement pour les personnes
qui sont sous la commission des troubles... la Commission d'évaluation des
troubles mentaux, on a du travail à faire. C'est faisable, mais on a du travail
à faire. Je suis très positive, moi, dans tout ça.
Mme Maccarone : Ça fait qu'on
a noté la question pour savoir combien on a besoin. Là, vous parlez des portes
tournantes. C'est un phénomène que les policiers font face au quotidien, 40 appels
par jour en... qui sont en lien avec des problèmes de santé mentale. Puis c'est
quelque chose qu'eux soulèvent, parce que, c'est sûr, ce projet de loi ne va
pas régler ça. C'est un projet de loi qui parle de communication, mais ça ne va
pas régler les portes tournantes, ça ne va pas régler le P-38, mais vous savez
qu'il y a quand même du travail qui est en train de se faire en parallèle avec
ce que nous sommes en train de faire ici. Quelle est votre opinion en ce qui
concerne les modifications pour le P-38? Les policiers souhaitent qu'on s'inspire
de l'Ontario puis la loi de Brian, par exemple. Que pensez-vous de ça? Puis
encore, je veux juste vous situer, les personnes concernées par les
modifications, que ce soit le partage de l'information, le consentement, eux,
ils sont favorables à une modification qui dit qu'on n'a pas besoin d'évaluer
une situation dangereuse avant que les policiers peuvent agir. Quelle est votre
opinion sur ceci?
Mme Rioux (Josée) : J'aurais
beaucoup de difficulté à vous donner mon opinion pour ne pas avoir assez étudié
et pris connaissance des modifications du P-38. Malheureusement, on a beaucoup
de modifications aux lois, là, parce qu'on est aussi dans le criminel, mais on
est aussi dans la loi... les lois professionnelles. Alors, c'est clair que je n'ai
pas pu prendre état de ça, mais je pense que l'Association des médecins
psychiatres doit être capable de vous donner pas mal plus de réponses que moi,
plus adéquates en tout cas. Puis je ne veux pas me défiler, là, mais je veux
juste être honnête.
Mme Maccarone : Tout à fait,
il n'y a pas de souci. Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Merci, Mme la députée. Alors, on va
poursuivre avec le député de Laurier-Dorion.
M. Fontecilla : Merci, M. le
Président. Mme Rioux, merci beaucoup d'être ici avec nous. Vous avez mentionné
tantôt les questionnements sur l'intégration des agents de liaison, tels qu'on
le conçoit, parce qu'on n'a pas beaucoup d'informations. Ils ne sont pas nommés
notamment dans le projet de loi, dans les équipes traitantes, les équipes de
soins, là.
La question que je me pose, en termes de
secret professionnel, de confidentialité, dans l'état actuel des choses, par
exemple, un agent de probation pourrait faire partie d'une équipe traitante...
comment dire, procéder à un échange d'informations globales sur l'état de la
personne?
Mme Rioux (Josée) : Bien, si
elle fait partie de l'équipe traitante, puis elle est nommée comme étant...
faisant partie de cette équipe-là auprès de la personne, elle va avoir les
mêmes informations que les autres. Ce n'est pas parce que c'est un corps de
métier différent, puis que ça n'appartient pas au même ministère, mettons, qu'elle
ne pourra pas faire partie de l'équipe traitante. Il faut juste qu'elle soit
identifiée comme telle.
M. Fontecilla : Donc, en
termes d'architecture du secret professionnel, il n'y a pas d'obstacle à
cette... à cette participation-là.
Mme Rioux (Josée) : Pas à mon
avis à moi, parce qu'elle va faire partie de l'équipe traitante.
M. Fontecilla : Très bien.
Et, dites-moi, éclairez-moi, un agent de liaison tel qu'on le conçoit aurait un
rôle de surveillance, beaucoup de conditions et est-ce que...
M. Fontecilla : ...ce n'est
pas un rôle de surveillance, ce n'est pas un rôle de... thérapeutique, là,
d'aide... d'accompagner la personne vers un rétablissement, si on peut... je
peux m'exprimer ainsi, là? Est-ce que vous pensez que le rôle de surveillance
pourrait mettre à mal une relation thérapeutique une relation d'aide?
Mme Rioux (Josée) : C'est sûr
que la création du lien thérapeutique est importante, O.K., l'Alliance
thérapeutique qu'on va appeler. Je pense que les agents de liaison sont formés
pour être capables de créer un lien avec les personnes. Comme je vous disais
tout à l'heure, on travaille... nous, on travaille en contexte non volontaire
et on arrive à créer un lien avec les personnes. Je ne vois pas la... Je ne
vois pas la dichotomie entre les deux, là. Même s'ils sont là pour surveiller,
ils ne vont jamais juste faire de la surveillance. Ils vont faire de
l'accompagnement aussi. On est des humains, puis les criminologues, on croit
beaucoup, nous, à la réinsertion puis à la réintégration sociale, donc c'est
sûr qu'ils ne feront pas juste de la surveillance. Parce que juste faire de la
surveillance, c'est sûr que le lien va être difficile à créer. Mais quand il y
a un accompagnement qui va avec, c'est sûr qu'à un moment donné, la personne
sait que l'intervenant est là pour lui, O.K.? Elle n'est pas là pour... Le
contexte... Être capable de marier l'aide et l'autorité, là, c'est ce que je
dis souvent à mes étudiants, c'est un... c'est un... c'est un contexte
difficile, mais c'est un contexte faisable de marier les deux. J'appelle... Je
dis toujours : Avoir une main de fer dans un gant de velours. C'est être
capable de faire le parallèle entre les deux puis marier les deux. Je pense
qu'un agent de liaison va le faire. S'il a déjà été agent de probation, il sait
déjà comment faire, et ce contexte-là est possible.
• (15 h 40) •
M. Fontecilla : Il y a
plusieurs intervenants, intervenantes, donc Mme Kamel nous disait que... Ça a
été dit il y a quelques minutes : La formule d'agent de liaison, au début,
ce n'était pas clair si c'était dans le système de santé ou dans le système
correctionnel. Et même la coroner n'avait pas... au début n'avait pas...
n'avait pas fait un... Elle a fait... En fait, elle a fait un choix lorsqu'elle
a entendu le ministre s'avancer dans cette voie-là. Est-ce qu'on pourrait
concevoir un agent de liaison qui dépend du... qui est intégré au système de
santé seulement, là, donc avoir une fonction de surveillance dans le système...
une équipe traitante dans le système de santé.
Mme Rioux (Josée) : Ce n'est
pas incompatible, en autant que les deux puissent... que les agents de liaison
puissent fonctionner avec les équipes traitantes. Je dis que ce n'est pas
incompatible. C'est sûr que la sécurité publique est davantage habituée, habiletée
à faire de la surveillance qu'une équipe traitante au ministère de la Santé et
des Services sociaux. Mais pour moi, l'important, c'est la personne qui va
bénéficier du service. Est-ce qu'elle va être capable de sentir qu'elle est
bien? C'est pour ça que je parlais... peut-être de... je mettais peut-être un
bémol sur le fait de se présenter dans un bureau de probation, parce que ce
n'est peut-être pas toujours évident, pour les familles aussi, là. Le réseau
correctionnel, ça fait toujours un peu peur. C'est méconnu, hein, mais c'est
pour ça que je parlais que les agents soient peut-être même sous la gouverne de
la sécurité publique puis puissent aller travailler, un peu comme à Pinel, il y
a des agents de probation qui travaillent là, ils sont directement en lien,
mais puissent travailler avec le ministère de la Santé dans les établissements
hospitaliers au lieu du bureau de probation.
Moi, je trouvais important qu'il y ait un
suivi, la formule que ça prendra, nous, on va être là pour supporter, on va être
là pour seconder, on va être là pour apporter les bonnes idées. Mais je
laisse... je laisse le soin aux gens qui sont concernés à décider où est-ce que
ça ira. Je veux juste que la personne se sente à l'aise et ne soit surtout pas
stigmatisée. Moi, c'est ma préoccupation à moi, l'individu, pour moi, il est
bien important.
M. Fontecilla : Merci...
Le Président (M. Provençal)
:Merci, M. le député. Alors, je
remercie Mme Rioux de l'Ordre professionnel des criminologues du Québec pour sa
participation.
On suspend des travaux pour laisser place
au prochain groupe. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 43)
(Reprise à 15 h 46)
Le Président (M. Provençal)
:Nous allons poursuivre maintenant nos
travaux. Nous recevons les docteurs Gamache, Allard et Dufour de l'Association
des médecins psychiatres du Québec. Alors, je vous invite à nous présenter
votre mémoire 10 minutes, et, après ça, on procédera aux échanges. Je
vous cède immédiatement la parole.
Mme Gamache (Claire) : Alors,
M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, je suis ici au nom,
donc, de l'Association des médecins psychiatres du Québec. Je suis Claire
Gamache, médecin psychiatre depuis 26 ans aux CISSS de Laval, donc en
Rive-Nord de Montréal et présidente des médecins psychiatres du Québec depuis
quatre ans. Je suis accompagnée de la Dre Marie-Frédérique Allard, une grande
célébrité, membre du C.A. de la AMPQ et psychiatre légiste dans la région de
Shawinigan, et Dr Mathieu Dufour, psychiatre légiste qui a débuté sa pratique
en Ontario et qui est maintenant chef de département à l'Institut national de
psychiatrie légale Philippe Pinel de Montréal et président de l'Académie
canadienne de psychiatrie et droit. Et docteur Dufour a été aussi sur le C.A.
de l'AMPQ en 2020.
Nous tenons à remercier la commission pour
l'invitation, évidemment, à présenter nos observations sur un dossier qui
nous... qui nous interpelle particulièrement. L'AMPQ tient d'emblée à saluer
ces discussions intersectorielles et interministérielles, ainsi que
l'élaboration d'un cadre structurant autour de cette patientèle très vulnérable
qui représente un grand défi pour les cliniciens que nous sommes. Ces
discussions mettent en lumière qu'il s'agit de défis sociaux, familiaux,
cliniques et qui touchent la sécurité de la patientèle elle-même, de leurs
proches, des cliniciens et de tous les intervenants impliqués auprès d'elle et
évidemment de la population impliquée.
L'AMPQ tient aussi à saluer que ce projet
de loi implique l'ajout de professionnels autour de cette patientèle, de sa
réadaptation, un ajout vraiment essentiel et bienvenu.
Parallèlement, nous devons sans cesse nous
dire qu'il est de notre devoir à tous, cliniciens, familles, dirigeants,
chroniqueurs, de répéter que la patientèle psychiatrique est beaucoup plus à
risque d'être victime de violence que d'être perpétratrice de violence. Une
minorité entre 3 à 5 % de tous les actes de violence dans la société sont
attribuables à une personne avec un trouble mental. Ça fait que c'est important
de se rappeler de ça quand on travaille sur ces dossiers-là.
Nous souhaitons également rappeler, puis
plusieurs de vos invités l'ont fait, là, les circonstances tragiques qui nous ont
menés au dépôt de ce projet de loi, soit le décès d'une policière et de
personnes... d'une personne souffrant de trouble mental. Notre mémoire et nos
recommandations...
Mme Gamache (Claire) : ...pour
objectif, entre autres, de rendre les interventions policières, lorsque
nécessaire, plus sécuritaires pour tous. Nous ne voulons plus de drames Maureen
Breau et nous ne voulons plus de drames Alain Magloire, pour n'en nommer que
deux.
Avant d'aborder le projet de loi no 66
plus directement, nous voulons d'abord souligner que le corps médical et les
corps policiers ne sont pas étrangers l'un à l'autre. Sur le terrain, nous
sommes déjà appelés à échanger des informations et à collaborer. Nous voulons
aussi rappeler que les patients sous commission d'examen des troubles mentaux
représentent un faible pourcentage de notre patientèle, en général. En raison
de plusieurs facteurs, ces patients requièrent un encadrement particulier et la
mobilisation de plusieurs ressources pour assurer leur suivi et leur traitement.
Ce travail et cet encadrement psychiatrique se font en parallèle de tout un
éventail de tâches en médecine spécialisée hospitalière qu'est la psychiatrie,
soit : des évaluations psychiatriques à l'urgence, la gestion
d'hospitalisation, de patientèle variée, de suivi en clinique externe, de
support à la première ligne.
• (15 h 50) •
Vous le savez, on entend beaucoup parler
de santé mentale, bien, la patientèle sous CETM est une portion de tout ce
travail-là, clinique que les psychiatres font. La patientèle sous commission
d'examen est généralement aux prises avec une pathologie, en général
psychotique. Vous savez possiblement que les pathologies comme la
schizophrénie, qui se présentent avec de l'anosognosie, c'est l'absence de
reconnaissance de sa propre problématique, arrivent chez 60 % des patients
qui sont porteurs de cette pathologie-là. Cela complique grandement l'alliance
thérapeutique, car souvent ces personnes malades ne comprennent pas qu'on
veuille les traiter ni la pertinence du traitement. Ils se considèrent souvent
victimes d'un système qui veut les contraindre à être traités ou à être
internés. Si le traitement est précoce et empathique, les patients peuvent
progressivement accepter que le traitement améliore leur vie, sans tout à fait
accepter le diagnostic. Cette fragilité de l'alliance thérapeutique doit être
comprise afin de bien baliser les interventions autour du projet de loi et
toujours réfléchir les soins à ces patients en termes de réadaptation et de
rétablissement, qui ont comme assise l'alliance avec l'équipe traitante.
C'est dans cette perspective que certains
éléments doivent être, à notre avis, clarifiés dans le projet de loi. Pour les
cliniciens de l'AMPQ, il est essentiel de baliser clairement les informations
utiles à transmettre aux corps policiers lors d'interventions voulant prévenir
un risque de violence ou de détérioration pour les usagers sous mandat de la
commission d'examen. De plus, logiquement, si de l'information peut être
divulguée aux corps policiers lors d'un risque de violence ou de détérioration,
doit-on prévoir ce même mécanisme balisé pour divulguer de l'information aux
agents de liaison prévus dans le projet de loi? Puisque les agents de liaison
ne feront pas partie de l'équipe traitante, ces mêmes balises exceptionnelles
devront être définies.
Donc, les recommandations de l'AMPQ, et
nous, nous avons déposé un mémoire, là, que vous avez reçu, donc. Les
recommandations sont... la première : poursuivre, actualiser et prioriser
la hiérarchisation de la psychiatrie légale, travail de collaboration et de
concertation entre le ministère de la Sécurité publique, le ministère de la
Santé et des Services sociaux, et le ministère de la Justice du Québec, et,
évidemment, les acteurs du terrain. Ce travail, qui est très important, va
permettre d'encadrer le présent projet de loi dans un espace cohérent et
compétent, hein? C'est une espèce de chapeau, la hiérarchisation de la
psychiatrie légale, autour de tous ces projets de loi, c'est-à-dire des
responsables d'hôpitaux imputables, formés, soutenus et efficaces qui vont
encadrer des équipes tout aussi compétentes et efficientes sur le terrain.
Ensuite, plusieurs recommandations autour
des agents de liaison envisagés : définir leur statut, leurs rôles et
responsabilités et, évidemment, inclure les règles de déontologie qui doivent
s'appliquer aux agents de liaison; préciser que les agents de liaison ne
peuvent occuper la fonction d'agent de probation, pour nous, ça doit être deux
types de travail complètement distincts afin d'éviter la mixité des dossiers et
une certaine confusion dans les rôles et responsabilités; permettre aux agents
de liaison de transmettre des informations aux équipes traitantes en respectant
leur code de profession, donc de l'information bidirectionnelle; on pourra
donner des exemples plus tard, préciser que les organismes peuvent transmettre
les renseignements aux agents de liaison ainsi qu'aux corps policiers
uniquement pour la planification ou l'exécution d'une intervention adaptée aux
caractéristiques d'une personne ou de la situation; préciser que le recours à
un agent de liaison doit être fixé par la commission d'examen sur la base de
critères clairs, par exemple, le passé criminogène, les habitudes de
consommation...
Mme Gamache (Claire) : ...les
bris de conditions ou l'historique de violence. Définir et baliser la
complémentarité des rôles et responsabilités des nouveaux criminologues et des
criminologues déjà en place au ministère de la Santé et des agents de liaison
du MSP et s'assurer que l'espace de collaboration sera très clair. Et dernières
recommandations, protéger l'alliance thérapeutique essentielle au
rétablissement, en précisant clairement les informations utiles à donner lors
d'interventions voulant prévenir un risque de violence ou de détérioration.
Merci de votre écoute, puis nous sommes là tous les trois pour répondre à vos
questions.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, merci beaucoup, Dre Gamache,
pour votre présentation. Sur ce, j'invite, M. le ministre, à initier cet
échange.
M. Bonnardel : Merci, M. le
Président. Messieurs, Dames, merci d'être là. J'avais hâte de vous recevoir
parce que, bon, vous êtes partie prenante de tout ce qui... l'actualité. Vous
êtes des personnes immensément importantes. Quand on appelle l'équipe médicale,
vous êtes l'équipe médicale dans une... dans une certaine mesure. Puis en
premier lieu, je ne vais pas vous poser des questions tout de suite, là, sur le
suivi, la communication, les agents de liaison. Je veux mieux comprendre votre
rôle dans le quotidien puis que vous me donniez un peu un cas de figure, là.
Bonnardel, là, qui passe, là, qui passe devant la CETM. Après ça, qu'il y a des
modalités qu'on appelle un suivi conditions. Expliquez-moi, là, le quotidien,
là. Moi, là, je suis devant la CTEM, on me dit : M. Bonnardel, vous allez
devoir rencontrer l'équipe médicale. Bon, bien, c'est quoi le modus operandi?
Ça prend combien de temps avant que la première... Je veux que vous me donniez
un petit peu, là, en trois minutes, comment ça fonctionne.
Mme Gamache (Claire) : En
fait, il y a plusieurs cas de figure. Un cas de figure, un patient soit qu'on
connaissait déjà ou qu'on ne connaît pas et qui fait un délit et qui est
reconnu non criminellement responsable. Souvent, les évaluations sur la
non-responsabilité criminelle vont se faire dans... dans. On pourra parler
hiérarchisation, mais elles vont se faire dans différents hôpitaux. Mais très
souvent, à Montréal, ça va se faire à l'Institut Philippe-Pinel.
Donc, l'institut va soit voir ce
patient-là en prison ou à l'institut. Il va faire une analyse de responsabilité
criminelle. Le juge va reconnaître ce patient-là non criminellement
responsable, et ce patient-là va être stabilisé et transféré dans un hôpital de
secteur. Donc, il s'en vient chez moi à Laval. Et là on me dit : Dre
Gamache, votre patient, que vous connaissiez, ou que vous ne connaissez pas,
est reconnu NCR, on vous l'envoie à l'hôpital jusqu'à ce qu'il ait sa prochaine
comparution. Donc il va probablement hospitalisé dans mon hôpital jusqu'à ce
que je revoie le Tribunal administratif du Québec, donc la commission d'examen.
Et je vais connaître ce patient-là et je vais préparer un rapport sur ses
risques de dangerosité, sa pathologie, ses antécédents psychiatriques. Je vais
aller présenter tout ça à la commission d'examen, qui va ensuite fixer les
conditions dans lesquelles ce patient-là peut soit être obligé de rester à
l'hôpital encore un bout de temps, mais en général, s'il a été transféré de
Pinel, c'est parce qu'on pense qu'après quelques mois il pourrait être en
libérations avec des conditions.
Donc, je vais discuter de mon patient, sa
pathologie, ses risques, ses antécédents. Est-ce qu'il accepte la médication ou
pas? Est-ce qu'il y a une bonne alliance avec nous ou pas? Est-ce que la
famille est autour ou pas? Donc tous ces éléments-là, dans quel genre d'équipe
je propose de le suivre à son congé? Est-ce que c'est avec une équipe de
clinique externe? Est-ce que c'est avec une équipe de suivi intensif dans le
milieu? Donc il y a dépendant de ce qui s'est passé, là, un peu... Mme Rioux
vous disait : S'il a volé dans un dépanneur, c'est différent que s'il a
frappé quelqu'un et tout ça. Et finalement, la commission va donner des
conditions à ce patient-là, et on va le suivre en équipe par la suite en
fonction de ses conditions : pas le droit de consommer, doit donner son
adresse à son équipe traitante, doit venir à ses rendez-vous régulièrement,
doit prendre sa médication.
Une fois qu'on a dit ça, le patient va
progressivement faire des sorties supervisées pour voir si tout se passe bien
et on va le suivre dans la communauté. Il y a toutes sortes de façons de suivre
quelqu'un dans la communauté. Une équipe SIM va voir un patient deux ou trois
fois par semaine. Certaines équipes SIM vont aller donner les médicaments tous
les jours à un patient. Donc, il y a toutes sortes de modalités de suivi en
fonction des besoins cliniques puis des besoins pour maintenir une stabilité
chez ce patient-là. On fait ça pendant un an. Si on a une délégation de pouvoir
puis que notre patient, on sent qu'il n'était pas là aux deux ou trois
rendez-vous à la maison. Les parents nous disent : Ah! il n'a pas dormi
chez lui. Je pense qu'il a repris un peu de consommation. On s'assure de le
retrouver et, si on a une délégation de pouvoir, on va demander aux policiers
de nous le ramener à l'hôpital pour qu'on puisse s'en occuper.
M. Bonnardel : O.K. Donc,
mettons qu'après un an, là...
Mme Gamache (Claire) : Oui.
On retourne en commission d'examen.
M. Bonnardel : O.K. Mais le
gars, il est chez eux, là.
Mme Gamache (Claire) : Oui.
M. Bonnardel : Il y a un
protocole, on va l'appeler comme ça, là, sur lequel il doit venir vous
rencontrer, ou quelqu'un vient le rencontrer.
Mme Gamache (Claire) : Il y a
des conditions de la commission d'examen, oui.
M. Bonnardel : Des
conditions... puis disparu.
Mme Gamache (Claire) : Oui.
M. Bonnardel : Ça arrive,
j'imagine?
Mme Gamache (Claire) : Oui.
M. Bonnardel : ...
M. Bonnardel : ...Bonnardel ne
répond plus, essaie de le rappeler, il ne répond plus, va chez lui, il ne
répond pas, plus là. Ça arrive?
Mme Gamache (Claire) : Oui.
M. Bonnardel : Il se passe
quoi après, si ça arrive? C'est difficile, là, j'imagine.
Mme Gamache (Claire) : On
appelle la police.
M. Bonnardel : Oui. Puis là?
Mme Gamache (Claire) : En
fait, moi, il m'est déjà arrivé d'avoir des patients comme ça, j'appelle...
j'appelle effectivement les policiers, puis on trouve des façons de retrouver
ce patient-là. Il faut... tout le monde ensemble. Puis, des fois, la police de
Laval va appeler la police de Montréal : L'avez-vous vu?, et tout ça. Ça
fait qu'un patient sous commission d'examen, on met tout en œuvre pour le
retrouver puis savoir où il est.
Vas-y, Mathieu.
M. Dufour (Mathieu) : Oui.
Puis, si je peux me permettre, c'est rare que, disons, quelqu'un va
complètement fuguer, là, ça arrive, mais il y a souvent quand même une
progression. Ils vont commencer à moins bien aller quand on va les voir, ils
vont commencer à avoir des symptômes de psychose, commencent à prendre des
drogues. On fait des dépistages urinaires de drogues, puis là ça devient
positif. Il y a quand même souvent une gradation. Je pense que ce que Dre
Gamache parle, c'est qu'il y a une... il y a une équipe en clinique externe.
Bon, des fois, dans certains centres... Moi, je travaille à Pinel, on a des
très bonnes équipes en clinique externe. Dans d'autres hôpitaux désignés, il y
en a 45 au Québec, bien, des fois, il y a moins de suivi, hein, puis c'est ça,
je pense, qui était clair dans le rapport de la coroner. Mais chaque équipe a
quand même le double mandat de surveillance et de soins. Donc, on fait déjà...
on regarde déjà les conditions, s'ils sont rencontrés ou pas, et s'il y a une
augmentation du risque de violence, comme dit Dre Gamache, on a les leviers
légaux pour le rentrer à l'hôpital puis être sûr que ce patient-là ne devient
pas plus à risque de violence.
• (16 heures) •
M. Bonnardel : Je ne doute
pas, là, que vous faites un travail incroyable, des fois extrêmement difficile,
assurément, avec des cas... des cas particuliers.
Une voix : Je vous le
confirme.
M. Bonnardel : Oui, ça,
j'imagine, j'imagine. Dans le quotidien, ça ne doit pas être simple. Mais, à la
fin, les deux derniers rapports de la coroner Kamel, celui de février 2024 sur
le triple homicide, là, sur une période de deux jours, on arrive à des
conclusions, puis je ne vous blâme pas, là, je ne mets pas personne au banc, où
la coroner dit : Le suivi post-CETM... je vais dire déficient,
problématique, je vais dire ça de cette façon. Là, vous me voyez aller. La
coroner nous dit : Ça prend des agents de liaison pour être capables de
faire un meilleur suivi, puis je vais utiliser encore le même terme,
complémentaire à l'équipe médicale pour vous aider, s'aider, pour aider qui? La
personne, pour ne pas nécessairement... parce qu'on ne veut pas la stigmatiser,
c'est pour ça qu'on a utilisé le terme «agent de liaison», mais, de l'autre
côté, donner les informations adéquates au policier, policière qui est dans le
quotidien plus souvent qu'autrement. Vous l'avez dit, ce n'est pas simple, puis
il faut être capable d'avoir le plus d'info possible.
Donc, comment cet arrimage des futurs
agents de liaison, vous connaissez leur passé professionnel, qui auront été des
agents de probation, qui auront une formation additionnelle par le MSSS, par le
MSP, pour bien les préparer, répartis sur l'ensemble du territoire... Donc, c'est
un peu ça, cet arrimage, là, qui, pour moi, est... Parce que vous êtes partie
prenante de ce succès qu'on a à faire, qu'on a à avoir ensemble pour être
capables d'assurer la réussite, la réussite de tout ça. Comment vous voyez cet
arrimage entre ces futurs agents? Parce que les commentaires des criminologues
tantôt étaient immensément importants, les vôtres aussi le sont parce que vous
êtes vraiment dans le quotidien, là, des actions de tous les jours avec ces
gens, là.
Mme Gamache (Claire) : C'est
extrêmement complexe, hein? Puis on vient de Montréal, hein, on a parlé dans
l'auto tout le long. Puis vous avez entendu Mme Crocker hier, vous avez entendu
Luc Vigneault, qu'on connaît très bien, là, puis on... Si on parle du cas d'il
y a deux ans, puis je le connais bien, là, je suis à Laval, hein, puis c'est un
de mes collègues, là, qui avait ce patient-là, puis, oui, c'est... c'est
terrible pour un psychiatre puis pour une équipe traitante de vivre des choses
comme ça, c'est épouvantable, puis, évidemment, pour les gens qui sont décédés
puis pour les familles de ces gens-là, là, et de ce patient-là, mais il ne faut
pas oublier que ce patient-là avait aussi déjà un agent de probation, hein?
C'était un monsieur qui avait des antécédents criminels puis qui... à un moment
donné, on a comme abandonné un peu les accusations criminelles parce qu'il est
rentré dans le système de la psychiatrie. Ça fait que ce qu'on a beaucoup dit à
la coroner Kamel au moment de nos présentations, c'est : Il faut arrêter
de dire que c'est juste un ou juste l'autre.
Ça fait qu'effectivement qu'il faut
travailler davantage en collaboration. Puis des fois, oui, on a des patients
qui doivent avoir des dossiers criminels, puis des agents de probation, puis
des suivis rigoureux, puis avoir probablement, sous CTEM, des suivis aussi
extrêmement rigoureux. Ça fait que déjà ça, ça existe, et déjà il faut
probablement améliorer la collaboration entre les agents de probation puis
baliser ce que l'équipe traitante peut nommer puis ce que l'agent de probation
peut faire. Si on met un agent de liaison entre les deux, est-ce que ces agents
de liaison là... Il va falloir réfléchir beaucoup, beaucoup aux rôles et
responsabilités, au code, aux renseignements qu'on peut se...
16 h (version non révisée)
Mme Gamache (Claire) : ...mais
ce qu'on se disait : Est-ce que ce serait envisageable que ces agents de
liaison là, comme ils connaissent très, très bien tous les les enjeux
criminogènes et aussi le système criminel, et tout ça... est-ce que ces gens-là
pourraient être effectivement la liaison entre l'équipe traitante et le système
correctionnel? Et, si on connaît très bien les policiers du quartier, les gens
qui travaillent là, les équipes mixtes, et tout ça, ça fait que possiblement
que ce serait effectivement de la liaison de façon idéale. On parle de...
Est-ce qu'on devrait les mettre carrément dans les équipes traitantes? Si on
les met carrément dans les équipes traitantes, il faut qu'ils soient sous le
ministère de la Santé. Ça fait qu'il y a... il y a des choses qui ne sont pas
nécessairement possibles. Ça, je pense, là, dans... dans le concret. Ça fait qu'à
mon avis la liaison doit se faire, il faut mieux communiquer, il faut mieux
trouver des façons d'avoir des échanges. Puis c'est sûr que plus ces mondes-là
se parlent et se connaissent, tout en respectant vraiment que l'équipe
traitante a vraiment un lien avec ces patients-là, puis en se rappelant que ces
patients-là ne sont pas des criminels, sauf quand ils le sont en même temps,
puis des fois ils le sont en même temps, hein, mes deux collègues ici ont plein
de patients qui ont des dossiers criminels, qui ont des pathologies
psychiatriques sévères puis qui sont sous commission d'examen, déjà ça, ça
existe, là, des gens à double statut, ça existe déjà. Ça fait qu'où est-ce qu'on
met les agents de liaison? Comment on arrime tout ça en respectant tout ce qu'on
essaie de nommer depuis deux jours? C'est là le grand défi, là.
M. Bonnardel : Je vous pose
une question qui est très large, là, puis c'est la CETM qui va le définir à la
fin. On parle d'un suivi de ces agents pour ces personnes, pour des cas à haut
risque, on va le dire ainsi. Quel type de profils...
Mme Gamache (Claire) : ...peut-être
laisser Mathieu répondre, mais des gens à haut risque, je pense qu'il a une
sensibilité par rapport à cette nomination-là, là.
M. Dufour (Mathieu) : Puis c'est
peut-être juste comme un vocabulaire plus légal, là, je suis psychiatre
légiste, ça fait qu'avoir fait la surspécialisation, on apprend toute la
jurisprudence. Puis, depuis 2014, suite à la loi C-14 de M. Harper qui avait
quand même fait une réforme du système de psychiatrie légale, ils ont créé une
nouvelle désignation qui s'appelle «accusé à haut risque», pour les patients
qui sont non criminellement responsables, qui sont peut-être plus dangereux que
les autres patients. Donc, cette désignation-là... puis, en fait, justement, un
projet de recherche, là, récemment, je pense qu'on est à 11 maintenant, aujourd'hui
au Québec, puis il y en a 17 partout au Canada. Donc, c'est vraiment des
patients qui sont normalement à Pinel ou je sais qu'il y en a quelques-uns à l'Institut
universitaire, santé mentale de Québec. Donc, ça, c'est... les accusés haut
risque, c'est une désignation particulière, ça fait que peut-être pour répondre
à votre question, c'est quels patients qui ont peut-être un plus grand risque
de violence par rapport aux autres patients sous CTM, qui devrait avoir plus de
surveillance, ou que ce soit agent de liaison ou plus d'équipe spécialisé en...
en psychiatrie légale autour d'eux. Je pense qu'on peut utiliser juste des
patients qui ont peut-être besoin d'un peu plus de surveillance quand ils sont
dans la communauté.
M. Bonnardel : Parlez-moi...
Mme Gamache (Claire) : ...répondre
à la question, parce que vous dites : Qu'est-ce qu'on devrait faire avec
cette clientèle-là? Bien, il faut vraiment avoir des équipes très solides,
hein? On a une nouvelle équipe de SIM, de suivi dans la communauté, forensique
à Montréal, donc autour de Pinel, on pense qu'on devrait avoir... Puis là c'est
tout le dossier de la hiérarchisation, là, on pense qu'on devrait avoir moins
de centres désignés. On pense que les équipes devraient être beaucoup plus
solides dans ces centres désignés là pour avoir ce double mandat de
surveillance dans la population puis de surveillance de la pathologie
psychiatrique. Tu veux peut-être compléter...
Mme Allard (Marie-Frédérique) : Moi,
je travaille en région, là, ça fait que c'est un petit peu différent, puis des
régions où on a des grands territoires aussi. Ça fait que ça, c'est une autre
réalité qui va... qu'il faut... qu'il faut prendre en considération, parce que
des fois les équipes SIM, le med drop, tu sais, d'aller porter la médication
tous les jours, ce n'est pas toujours facile ou faisable quand que la personne
vient d'un village à, mettons, 70 kilomètres de, mettons, Trois-Rivières
ou de Shawinigan, ou peu importe. Ça fait qu'il y a certaines particularités.
Je pense que la... aussi, avec ce qui est arrivé avec le ministère de la Santé,
l'ajout de 44 criminologues, ça va déjà être... c'est vraiment un très bon
rehaussement en partant dans nos équipes traitantes. Ça fait que ça, on salue
ça. Puis ça va être de voir le... mettons, l'arrimage. Et je pense qu'on a
nommé un peu peut-être des pistes de solutions entre comment les équipes
traitantes vont pouvoir travailler avec les agents de liaison.
C'est sûr que plus on a d'intervenants
autour de nos patients, plus qu'on a de services à offrir... puis on a... on a
entendu Mme Rioux aussi qui... je pense qu'on est capable d'établir l'alliance,
même si les gens ne sont pas toujours, tu sais, volontaires, là, on finit par
le faire, par établir une... Je pense qu'on est capable d'établir une bonne
alliance, mais il va y avoir beaucoup de choses à définir, dont des balises au
niveau du travail et de la confidentialité.
Puis on se disait... je pense qu'il ne
faudra pas que ça se fasse sur un... sur un coin de table, là, peut-être un
comité avec des éthiciens, avec plusieurs personnes pour qu'on puisse définir
exactement qu'est-ce... qu'est-ce qu'on a besoin, autant pour...
Mme Allard (Marie-Frédérique) :
...la sécurité du public, mais que pour les patients aussi.
M. Bonnardel : Bien, ça, je
peux vous assurer qu'on va le travailler le MSSS. Puis je suis convaincu... en
tout cas, quelques fois, vous l'avez dit, là, ça peut peut-être devenir pesant,
lourd, je suis convaincu que ces agents vont être un support non négligeable,
tu sais. La complémentarité, je pense que c'est le meilleur mot qu'on peut
utiliser, dans le travail que vous avez à faire, versus ce que les agents, dans
le rôle qu'ils auront, spécifique... vous avez le vôtre, ils auront le leur, et
ensemble le partage de l'information sera immensément important.
J'ai peut-être une dernière question sur le
secret professionnel. Bon. Là, le policier aura la possibilité de parler à
l'équipe médicale pour savoir, bon, bien, je m'en vais à telle adresse, c'est
Bonnardel qui reste à cette adresse. M.... Le but, ce n'est pas nécessairement
de comprendre puis de connaître le diagnostic, je pense que vous êtes meilleurs
spécialistes que moi, mais peut-être le comportement de M. X dans les dernières
semaines, sinon depuis sa dernière rencontre avec vous, je pense que...
Êtes-vous d'accord sur ce principe, là, de partage d'information, pour certains
qui étaient inquiets, là, de... Puis le policier... encore une fois, je ne veux
pas parler pour ceux qui auront, des fois, à faire ces appels, mais je pense
qu'ils vont se concentrer pas mal plus... je donne encore le même exemple, de
quelle façon le M. X réagit face à quelqu'un, exemple, qui porte l'uniforme
quand la porte va ouvrir.
• (16 h 10) •
Mme Gamache (Claire) : En
fait... en fait, Luc Vigneault vous a un peu dit qu'il y a comme une espèce de
culture, effectivement, d'éviter de parler, en psychiatrie, puis c'est une
culture qu'il faut effectivement, en partie, défaire, là. Il faut parler de
consentement, de divulguer de l'information dès qu'on rencontre nos patients.
Puis il y a tout un travail à faire, là, de changement de culture à ce
niveau-là. Puis, oui, il y a des patients qui sont... qui sont, évidemment,
paranoïdes puis qui ne veulent pas qu'on transmette de l'information, mais,
quand on est dans des contextes de risque de violence ou de détérioration, on a
déjà les leviers pour pouvoir échanger avec les policiers. Ça fait que je pense
que ça fait partie du travail quotidien qui... Ça fait que le secret
professionnel n'a plus beaucoup lieu d'être quand on est dans des contextes de
dangerosité immédiate, là.
M. Dufour (Mathieu) : Puis si
je peux rajouter, tu sais, je pense que l'idée du secret professionnel ou de la
confidentialité, c'est si, disons, il y a des agents de liaison qui vont
visiter l'hébergement puis qui voient des choses, bien, il faut le rapporter
aussi à l'équipe traitante, il faut que ça soit bidirectionnel, parce que ça
reste que l'équipe traitante, avec l'hôpital, est ultimement responsable de la
gestion de tout le risque du patient de par son rôle, là, tu sais, le... Bien,
comme vous savez, M. le ministre, quand quelqu'un est non criminellement
responsable, c'est la commission d'examen qui donne des conditions puis ensuite
délègue la gestion des conditions au responsable de l'hôpital... que ce
risque-là soit relié à la toxicomanie, à un trouble de personnalité ou à la
schizophrénie, est responsable de tous le risque. Donc, s'il y a un agent de
liaison qui fait une certaine surveillance, il faut que le responsable
d'hôpital le sache parce qu'il est aussi responsable de la surveillance, parce
que, sinon, ça devient assez redondant, puis il faut absolument se parler.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup.
M. Bonnardel : Il me reste-tu
une minute ou deux? Non?
Le Président (M. Provençal)
:Non, désolé.
M. Bonnardel : J'aurais
pris... Je vais aller vous la poser après.
Mme Gamache (Claire) : On a
le droit de se parler après.
M. Bonnardel : Oui, c'est ça.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, Mme la députée de
Westmount-Saint-Louis.
Mme Maccarone : Oui, merci
beaucoup. Merci à vous pour votre exposé, c'est très intéressant, mais je vais
continuer dans le même alignement que le ministre, parce que, dans le projet de
loi... je veux nous ramener un peu au projet de loi, vous l'avez soulevé, dans
votre mémoire, que ce n'est pas précis, à qui vous pourriez donner de
l'information, ou l'inverse. Alors, vous, vous souhaitez qu'on amende le projet
de loi pour nommer les agents de liaison, pour être en mesure de vraiment
partager l'information avec eux, puis aussi l'inverse.
Mme Gamache (Claire) : On
veut vraiment que ce soit bidirectionnel. Un peu comme dit Dr Dufour, si les
agents de liaison voient des choses puis entendent parler par les policiers
qu'il y a vraiment des choses particulières, c'est des patients qu'ils
connaissent sous CETM, on veut avoir cette information-là pour travailler. Puis
c'est sûr qu'il va falloir qu'on propose à plusieurs patients de signer la
possibilité qu'un cercle de soins puisse se parler, hein? C'est hier qu'on
disait : L'échange, il faut que ça se fasse peut-être avec un corps de
métier plutôt qu'avec des personnes particulières. Ça fait que ça va faire
partie des choses qui devront être discutées, là, peut-être avec les éthiciens
puis avec des patients partenaires, pour voir dans quelle mesure on ouvre ces
éléments-là.
Mme Maccarone : J'ose croire,
c'est la même chose pour les policiers. Vous l'avez soulevé un peu, puis vous
m'avez entendue dans... lors des derniers échanges, puis peut-être vous avez
entendu les policiers, ce matin, qui disaient... c'est ça qu'ils souhaitent,
eux aussi, hein, parce qu'ils font face à des difficultés puis ils ne savent
pas sur quel pied danser, comment offrir cette information, est-ce que j'ai le
droit d'offrir cette information? Ça fait que, peut-être, ça aussi, ça mérite
d'être clarifié.
La notion de consentement, je souhaite
vous entendre aussi là-dessus. Comment ça figure à l'intérieur de tout ceci? On
a entendu des personnes concernées qui disaient que le consentement... eux sont
très pour le consentement puis ils disent : Je devrais l'offrir tout le
temps parce que je sais que c'est pour mon bien-être, puis c'est pour m'aider
aussi, à ma réinsertion sociale. Comment voyez-vous...
Mme Maccarone : ...à l'intérieur
de tout ce partage de l'information, comment nous devons le traiter?
Mme Gamache (Claire) : C'est
une très grande question, en fait, la notion de consentement. Souvent, quand
les patients vont bien, puis j'ai beaucoup aimé M. Vigneault dire, hier, on
peut préparer nos... notre espèce de protocole de crise, hein? Donc, dès le
départ, les patients, quand ils commencent leur suivi avec nous, on peut
prévoir des protocoles de crise. Puis, à la limite, on peut même prévoir, dans
ces protocoles-là, si je ne suis plus d'accord à ce que vous donniez de
l'information à telle, telle, telle personne parce que je ne vais vraiment pas
bien, est-ce qu'on peut s'entendre déjà pour dire : Bien, peut-être que,
dans le fond, vous pouvez recevoir de l'information, mais j'aime mieux vous
n'en donniez pas à ma mère, que vous n'en donniez pas, mais si je suis vraiment
en danger ou je deviens dangereux... Puis à ce moment-là, nous, on peut le
dire, là, qu'à ce moment-là on va continuer de donner de l'information à certains
corps de... Ça fait que ça fait partie de la conversation qu'on pourrait
beaucoup mieux organiser avec la patientèle. Puis ça pourrait même se discuter
en commission d'examen, à la limite, puis que ça fasse partie des choses qui
sont discutées puis des conditions qui sont discutées, de se faire un protocole
de crise que tout le monde va essayer de respecter quand ça va être le temps
d'être en désorganisation, là.
Mme Maccarone : O.K. O.K.
M. Dufour (Mathieu) : Puis,
si je peux peut-être rajouter, tu sais, tout ce qui est la confidentialité avec
le rôle des proches et de la famille. Je pense, hier, il y avait Mme Brabant,
là, qui est une proche, et je pense qu'on... tu sais, ce qu'on entend beaucoup
des proches, c'est qu'on ne les implique pas assez. Et, des fois, on se cache
derrière certaines lois sur la confidentialité quand, des fois, tu sais, on
peut, avec les lois actuelles, recevoir de l'information, mais ensuite en
donner, c'est là qu'il faut avoir le consentement du patient. Puis, tu sais, je
pense, là on parle beaucoup de la psychiatrie légale pour les patients sous
CETM, il y a toute la réforme de la P-38, là. Le ministre Carmant avait demandé
au professeur Noreau de regarder tout ça.
Mme Maccarone : Devance-moi
pas trop, là, j'ai cette question-là aussi.
M. Dufour (Mathieu) : O.K.
Mais d'abord je vais juste en parler juste brièvement, parce qu'il y a un
aspect de la P-38, les hospitalisations involontaires, qui est en lien avec la
confidentialité. Quand est-ce qu'on peut, comme équipe traitante, parler aux
proches dans un contexte où qu'on évalue quelqu'un pour un P-38 et autres. Puis
Dre Gamache a mentionné, moi, j'ai pratiqué six ans en Ontario en plus de ma
résidence, plus six ans, donc j'ai travaillé 11, 12 ans là-bas. Et il y a
une section, là je vais devenir technique, là, 54 de la Loi en santé mentale où
qui permet aux patients qui sont évalués pour des P-38 ou des patients sous
CETM que les mêmes lois de confidentialité dans la santé ne s'appliquent pas.
Donc, il y a certaines... disons, il y a beaucoup plus d'ouverture dans cet
échange d'information là pour les gens de la santé. Donc, l'Ontario a décidé
que pour des patients qui sont plus à risque de violence, qui sont sous CETM de
l'Ontario, bien, le secret professionnel ne s'applique pas, ou en tout cas avec
des balises beaucoup plus ouvertes que pour les autres patients.
Mme Gamache (Claire) : Autant
pour la famille que pour les corps de métier.
M. Dufour (Mathieu) : Exactement.
Avec tout le monde.
Mme Maccarone : O.K. Vous
avez répondu à ma question pour la P-38. Merci. Ça fait que... Mais je reviens
aussi aux agents de liaison puis la notion de famille. Vous l'avez évoqué, on
l'a entendu des témoignages, hier, des recoupements des victimes puis aussi,
évidemment, le témoignage des familles qui sont concernées. Puis Me Kamel a
aussi soulevé que c'est un aspect qui est souvent oublié quand on parle de ces
drames. On a entendu aussi de la part du ministre que ça se peut que les agents
de liaison auront un rôle aussi auprès des familles. Comment voyez-vous ça?
Est-ce que ça va être trop lourd? Comment que ça va fonctionner? Est-ce que ça
devrait être leur responsabilité ou est-ce que c'est l'équipe traitante qui
devrait avoir ce rôle de partage de l'information puis des suivis avec les
membres de la famille ou peut-être les victimes?
M. Dufour (Mathieu) : Je peux
peut-être m'essayer. Tu sais, comme je pense qu'il ne faut pas oublier, c'est
quand un passant est non criminellement responsable et demeure sous la CETM.
Les dernières études justement d'Anne Crocker, qui fait le plus d'études, là,
sur le système de psychiatrie légale au Canada, c'est que les gens restent en
moyenne 5 à 6 ans en moyenne à travers le Canada. Bon, c'est un peu moins
longtemps au Québec parce qu'on a plus de NCR pour des crimes moins sévères,
donc qui restent moins longtemps, mais disons, en général, cinq ou six ans.
Donc, ça, c'est un épisode de soins, c'est une petite partie, cinq, six ans,
dans toute leur vie. La plupart des gens vont être... Donc... une fois, là.
C'est rare quand même, comme M. Brouillard-Lessard, qui ont plusieurs verdicts
NCR. Donc, après, ces gens-là ont quand même besoin de soins et restent dans le
milieu de la santé puis souvent dans les mêmes services, là. Je pense au Dre
Allard aussi, a cette réalité-là à Shawinigan. Donc, les familles, il faut les
impliquer avec les équipes traitantes parce qu'on... ils vont être impliqués à
vie. Tu sais, quelqu'un qui a un diagnostic de schizophrénie, c'est une pathologie
qui est malheureusement incurable, pathologie chronique qui vient souvent avec
de multiples réhospitalisations, ou en tout cas des rechutes psychotiques, donc
il faut vraiment que l'équipe traitante soit impliquée avec la famille, peu
importe la présence d'un agent de liaison, pour cette continuité de soins aussi
là, quand la CETM ne sera plus là...
Mme Allard (Marie-Frédérique) : ...je
pense que probablement qu'il y a des familles qui vont voir ça quand même d'un
bon œil, parce qu'ils vont avoir l'impression où ils ont aussi une place où
s'adresser, tu sais, puis je pense qu'on a un... il y a un travail à faire pour
impliquer...
Mme Maccarone : Une lacune à
remplir.
Mme Allard (Marie-Frédérique) : ....encore
plus les familles. Mais je pense que, s'il y a un agent de liaison, peu importe
où il serait, ou un criminologue, ou comme dans une équipe traitante, bien, je
pense que ça peut être aidant pour les familles s'il peut y avoir un échange,
des... — des fois, ils ont des questionnements — un endroit
où dire : Bien, ça ne va pas. Qui j'appelle? Qu'est-ce que je fais, là?
Mme Maccarone : O.K. Dre
Gamache, vous l'avez déjà fait dans vos remarques, où est-ce qu'on... ça
devrait loger, ce rôle : Santé et Services sociaux. Vous savez que Pre
Crocker, hier, elle a dit : Vraiment Santé, Services sociaux. Puis là,
dans les échanges, puis aussi c'est indiqué dans votre mémoire, si on a un
agent de probation, on ne devrait pas aussi avoir un agent de liaison? Est-ce
que, ça, ça peut résoudre le problème si, mettons, l'agent de liaison était
sous la responsabilité du ministère Santé et Services sociaux? Mais on n'aura
pas de confusion entre le rôle, parce que c'est vrai, les personnes concernées,
ils ont... ils sont craintifs, il y a une peur. Puis, si c'est pour leur
bien-être, est-ce que c'est quelque chose que nous pouvons considérer pour
régler ce... cette préoccupation que vous avez?
• (16 h 20) •
Mme Gamache (Claire) : En
fait, c'est clair que, si on décide de mettre ça sous le ministère des Services
sociaux, ça fait partie de l'équipe traitante, donc tous les enjeux de
confidentialité sont...
Mme Maccarone : Réglés.
Mme Gamache (Claire) : ...sont
beaucoup moins problématiques, là. Puis moi, j'ai envie de dire : Plus on
a d'expertise partout, mieux c'est. Ça fait que, là, on aurait de l'expertise
plus, là, au niveau du système criminel. Les criminologues ont beaucoup apporté
cette expertise-là aussi dans les équipes traitantes, ça fait que... Mais je ne
suis pas certaine que c'est possible, là. Mais c'est sûr que ça réglerait
cette...
Mme Maccarone : Tout est
possible...
Mme Gamache (Claire) : C'est
ça.
Mme Maccarone : ...jusqu'à
tant que la loi n'est pas adoptée...
Mme Gamache (Claire) : C'est
ça.
Mme Maccarone : ...puis il y
a de la place pour des amendements...
Mme Gamache (Claire) : Oui.
Mme Maccarone : ou bien
peut-être le dépôt d'un projet de loi futur, si on ne peut pas le régler
aujourd'hui.
Avec le très peu de temps qu'il me reste,
je souhaite vous entendre en ce qui concerne la... Je ne suis pas capable.
Vous savez le mot?
Mme Gamache (Claire) : Oui.
Mme Maccarone : En
psychiatrie légale, expliquez-nous c'est quoi, la problématique — vous
l'avez aussi indiqué dans votre mémoire — c'est quoi, la
problématique, puis qu'est-ce que nous avons besoin pour régler ce problème.
Mme Gamache (Claire) : C'est
très, très vaste, mais c'est un projet qui est discuté depuis plus de
10 ans au Québec, hein, ça fait plus de 12 ans, là, qu'on discute de
cette hiérarchisation-là. C'est d'organiser la psychiatrie légale pour que
les... les endroits où on désigne des hôpitaux, on ait des équipes solides pour
avoir de... dans le fond, de... la détention de cette clientèle-là, donc des
unités fermées avec du personnel plus... plus compétent pour s'occuper de cette
clientèle-là, puis, quand ces gens-là sont libérés sous condition, avec des...
une hiérarchisation, c'est-à-dire que les patients très dangereux seraient
suivis dans des hôpitaux désignés beaucoup plus solides, avec des équipes plus
solides, et, quand on est en libération, puis que les patients sont, bon, dans
une période où ils sont beaucoup plus réadaptés, après des fois deux, trois ans
à Pinel, on peut les envoyer dans leur région, avec des équipes qui sont à la
fois aussi bien, bien équipées, mais qu'ils pourraient, à la limite, même être
supervisés par ceux qui les ont connus dans les périodes où ils étaient très...
Ça fait qu'on voudrait diminuer les
hôpitaux désignés. Au Québec, on en a 45, en Ontario il y en a 10. Donc, on
voudrait vraiment diminuer les hôpitaux désignés pour que les hôpitaux soient
beaucoup mieux équipés avec énormément d'expertise, quand c'est nécessaire, et
on pense qu'il devrait y avoir un tribunal spécialisé éventuellement pour
s'occuper de toute cette clientèle-là au lieu d'avoir trois, quatre tribunaux,
en fait les... la Cour du Québec, la Cour supérieure, pour aller pour les
patients.
C'est extrêmement compliqué pour nous.
Moi, je ne suis pas une psychiatre légiste, là, puis ça fait deux ans qu'ils me
cassent les oreilles avec toutes ces affaires-là, à l'AMPQ, ça fait que là je
comprends beaucoup mieux. Mais, pour les familles et les patients, c'est un...
c'est un casse-tête incroyable, là.
Mme Maccarone : C'est une
recommandation phare...
Mme Gamache (Claire) : Oui.
Mme Maccarone : ...de Géhane
Kamel aussi à l'intérieur de ses deux rapports.
Mme Gamache (Claire) : Oui.
Puis la dernière chose de la la hiérarchisation, c'est d'avoir des responsables
d'hôpitaux qui savent de quoi ils parlent, qui sont compétents, qui connaissent
les lois et qui sont capables d'avoir un portrait global de tous les gens qui
sont sous CETM dans leurs hôpitaux puis, idéalement, un portrait global au
Québec de qui est sous CETM, qui a besoin de surveillance, qui a besoin d'être
à Pinel, qui peut aller à Shawinigan, qui peut être suivi à Laval par la suite.
Vous avez entendu parler peut-être du
COOLSI pendant la pandémie de COVID-19, les soins intensifs pour les patients
très, très malades où est- ce qu'on envoyait les patients. On pense à un
COOLPSI pour la hiérarchisation de la psychiatrie légale.
Mme Maccarone : Il me reste
une minute. Mme Rioux m'a dit que ça se peut que, vous, vous avez des
informations en ce qui concerne les hébergements adaptés, les maisons de
transition. Combien est-ce qu'on a actuellement puis combien est-ce qu'on a
besoin pour rejoindre la demande?
Mme Gamache (Claire) : C'est
Mathieu qui a ces... qui a ces chiffres-là.
M. Dufour (Mathieu) : Oui.
Oui, puis... En fait, là, je ne suis pas spécialiste en hébergement. Mais,
juste pour faire le lien, Dre Gamache, le projet de hiérarchisation, elle a
très bien expliqué...
M. Dufour (Mathieu) : ...AMPQ
puis plusieurs autres personnes, dont le ministère de.. de M. le ministre
Bonnardel, sont très impliqués, puis, tu sais, c'est un projet... On parle de
l'hébergement là-dedans, mais c'est un projet vraiment vaste sur trois ans, un
projet du ministère de la Santé qui ont... puis ils ont demandé à Pinel de
coordonner. Donc, c'est pour ça, comme cheffe de département à Pinel, c'est
Dre Bédard-Charette, notre DSP, qui dirige tout ça, puis c'est vraiment...
on améliore le système au complet. Donc, c'est pour ça... Là, on parle d'agents
de liaison puis de confidentialité, mais le projet de hiérarchisation est
beaucoup plus grand pour améliorer le système, parce qu'on sait qu'il y a des
enjeux, puis un des enjeux, c'est l'hébergement. Je pense, Mme Rioux
parlait qu'il y a seulement de l'hébergement spécialisé en psychiatrie légale à
Montréal. Puis, en fait, on a appris... Parce qu'il y a... il y a l'Entre-Toit,
qui s'appelle l'Entre-Toit Saint-Jacques puis Léger à Montréal, ils ont deux
centres de services, et l'intervalle... ils sont comme trois ressources
spécialisées 24 heures/7. Et on a appris qu'en fait... On pensait que...
nous, c'est spécialisé en psychiatrie légale. Mais non, ils prennent d'autres
gens aussi. Donc, même là, est-ce qu'ils sont vraiment spécialisés en
psychiatrie légale? Bien, ils offrent de bons services. Et nous, la plupart de
nos patients à Pinel vont dans ces ressources-là ou vont dans d'autres
appartements supervisés, mais à l'extérieur de Montréal, il n'y en a pas.
Une voix : On en a combien à
peu près...
M. Dufour (Mathieu) : Disons,
là, j'y vais comme ça, là, c'est peut-être 80 à 100 places sur environ le
1 900, 2 000 personnes sous la CETM, donc ce n'est vraiment pas
beaucoup. Puis, tu sais, j'ai pratiqué en Ontario, puis on avait beaucoup plus
d'hébergement spécialisé en psychiatrie légale qui était en lien avec des
organismes de bienfaisance aussi.
Mme Allard (Marie-Frédérique) : Bien,
on n'aurait pas besoin de 1 900 places...
Mme Gamache (Claire) : ...en
hébergement, mais on a probablement 700 patients en détention actuellement
au Québec.
M. Dufour (Mathieu) : Exact.
Donc, environ 1 200...
Mme Maccarone : C'est très
peu. Je ne m'attendais pas à ce chiffre.
M. Dufour (Mathieu) : Oui.
Le Président (M. Provençal)
:On va être obligés de clore cette
discussion-là, cet échange-là.
Mme Maccarone : Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Et je vais céder la parole maintenant
au député de Laurier Dorion.
M. Fontecilla : Merci, M. le Président.
Merci beaucoup d'être ici avec nous, là. Votre expertise est essentielle. Je
vais continuer sur le même sujet, là. Je suppose qu'il y a un lien. Beaucoup de
ces personnes-là qui sortent de vos services peuvent se retrouver en situation
d'itinérance aussi.
Une voix : ...en fait...
M. Dufour (Mathieu) : Bien,
je vous dirais... je vous dirais que c'est très rare qu'ils sont en situation
d'itinérance. Parce qu'étant donné que le patient qui est sous CETM représente
un risque important pour la sécurité du public, s'il n'y avait pas de
contraintes légales... Donc, la CETM nous dit : On peut le libérer de
l'hôpital, après un séjour à l'hôpital, avec des conditions particulières. Avec
ces conditions-là, c'est sécuritaire, mais si on enlevait ces conditions-là,
c'est là qu'il serait un risque de violence. Puis quand ils sortent comme ça,
avec des conditions en particulier, bien, souvent, il y a une condition que...
qu'il faut qu'il soit dans une résidence approuvée par l'hôpital, il faut qu'il
vienne à son rendez-vous psychiatrique, qui est souvent des dépistages
urinaires de drogues. On en fait souvent. Il y a beaucoup de conditions. Puis
je vous dirais... Bon là, moi, c'est peut-être biaisé parce que je travaille à
Pinel, c'est les cas les plus lourds puis les plus dangereux, mais on a quand
même plus que 150 personnes en clinique externe qu'on suit. Et ces
patients-là, moindrement qu'ils perdent leur logement, nous, on ne peut pas
tolérer... on les ramène à l'hôpital, parce que l'itinérance vient avec le
fait : Est-ce qu'ils vont continuer leurs médicaments? Est-ce qu'ils vont
consommer des drogues? Et le risque est trop important. On ne tolère pas... On
le ramène à l'hôpital le temps de retrouver un autre logement. Donc, je vous
dirais : En majorité, on ne tolère pas l'itinérance. Est-ce qu'il y a des
ratés puis, des fois il y a des échappées? Probablement, puis ça, on veut le
changer avec le projet de hiérarchisation, mais normalement ils ne sont pas en
situation d'itinérance.
Mme Allard (Marie-Frédérique) : ...les
problèmes de logement, les problèmes d'hébergement, on a des patients qui
restent détenus dans les... donc qui prennent des lits d'hôpitaux parce qu'on
n'a pas d'endroit où les envoyer. Puis il y a... il y en a des patients qui
sont tout à fait autonomes, qui pourraient sortir d'hôpital, aller vivre en
appartement, mais ce n'est pas possible parce qu'on n'en trouve pas. Ça fait
que là, on se retrouve avec un risque... bien, avec un problème de lits. Tu
sais, je vais prendre l'exemple de la Mauricie-Centre du Québec, on a
15 lits de psychiatrie légale. Bien, il y a... plus que 30 patients
qui sont là. On n'est pas capable de faire de nouvelles évaluations parce qu'on
a trop de patients en détention au TAQ, parce qu'ils ne sont pas capables de les
sortir, parce qu'ils n'ont pas de milieu d'hébergement. Ça fait que vous voyez
un petit peu... C'est comme... C'est des vases communicants, puis on se
retrouve dans des situations difficiles, parce qu'il y a des gens en détention
qui ont besoin de soins, qui ont besoin d'être évalués, mais ça va retarder
parce qu'on n'a pas de place dans les hôpitaux... Puis on n'est pas capable...
Mme Gamache (Claire) : ...
Mme Allard (Marie-Frédérique) : C'est
ça. Ça fait qu'on est... C'est... C'est... C'est un problème de société, là. Ce
n'est pas juste...
M. Fontecilla : Tout à fait.
On n'est jamais noir et blanc, là. Mme Gamache, vous avez dit tantôt
quelque chose qui m'a intrigué, là. Les agents de liaison, tels qu'ils sont
présentés, parce qu'on n'en connaît pas énormément, là, ne feront pas partie de
l'équipe traitante. Tantôt, je questionnais Mme Rioux qui nous disait...
ou qui ne voyait pas de problème à ce qu'ils...
M. Fontecilla : ...que les
agents de liaison fassent partie... Est-ce qu'il y a un problème pratique de...
Mme Gamache (Claire) : Bien,
en fait, si je vous dis qu'ils sont engagés par l'hôpital, puis ils travaillent
dans le ministère de la Santé, ils vont être dans les équipes traitantes. Mais
je ne pense pas que le projet de loi envisage ça comme ça. Ça fait que, s'ils
sont dans le ministère de la Sécurité publique, ils ne pourraient pas faire
partie intégrante d'une équipe traitante dans un hôpital. Quand on confie un
patient sous commission d'examen, on le confie aux responsables de l'hôpital.
Donc, ils vont faire partie vraiment d'une autre équipe à l'extérieur, et, dès
qu'on est à l'extérieur du système de soins ou de l'équipe traitante, on est
obligé de faire des ententes de confidentialité puis de partage d'information,
là.
M. Fontecilla : Puis est-ce
qu'on pourrait concevoir une façon ou un changement législatif, à la limite,
pour faire en sorte que cette... cette intégration puisse se faire avec deux
ministères responsables?
• (16 h 30) •
Mme Gamache (Claire) : Je ne
sais pas si ça existe. On a les équipes mixtes actuellement, hein, dans
plusieurs villes où il y a des travailleurs sociaux qui sont engagés dans....
dans... en fait, qui vont travailler dans les postes de police, mais qui font
partie de... Je pense qu'il y a moyen, peut-être, de trouver des arrangements,
là, qui est responsable de qui. Je peux vous donner l'exemple de... Chez nous à
Laval, on a une grande équipe de travailleurs sociaux qui sont engagés à la
ville de Laval depuis des années, ça fait 25 ans, puis on travaille en
collaboration. J'ai le cellulaire du chef des travailleurs sociaux de la police
de Laval, il a le cellulaire de la plupart des psychiatres chez nous. On ne
fait pas partie de la même équipe traitante, mais on se connaît bien puis on a
l'habitude de partager de l'information pour la clientèle dans des contextes de
dangerosité ou d'évaluation...
M. Fontecilla : Mais il faut
établir ce lien-là. C'est formalisé?
Mme Gamache (Claire) : Mais
il faut établir les balises. Oui.
M. Fontecilla : Vous avez
aussi dit que...
Le Président (M. Provençal)
:M. le député, le temps est écoulé.
M. Fontecilla : Écoulé. On
connaît la phrase.
Le Président (M. Provençal)
:Excusez-moi. Alors, je remercie le
Dre Gamache, le Dre Allard et le Dr Dufour pour cet échange, qui a été très
intéressant, avec les gens de... et les membres de la commission. Alors, on
suspend les travaux.
(Suspension de la séance à 16 h 31)
16 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 16 h 35)
Le Président (M. Provençal)
:Alors nous recevons maintenant les
représentants de la Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la
sécurité du travail. Alors, nous avons quatre personnes qui sont présentes.
Vous avez 10 minutes pour votre présentation et nous procéderons à l'échange
par la suite. Alors, je vous cède la parole.
Mme Gagné (Anouk) : Merci, M.
le Président. Permettez-moi d'abord de vous remercier pour l'invitation à
prendre part à cette consultation. Je me présente, Anouk Gagné,
présidente-directrice générale de la Commission des normes, de l'équité, de la
santé et de la sécurité du travail. Je suis accompagné aujourd'hui de M.
Mohamed Aiyar, vice-président à la prévention, ainsi que de Me Julie Perrier et
Me François Bilodeau, tous deux avocate et avocat à la Direction générale des
affaires juridiques de la CNESST.
La CNESST fait la promotion des droits et
des obligations en matière de travail et en assure le respect auprès des
travailleurs et des travailleuses et des employeurs du Québec. Elle est ainsi
appelée à intervenir dans les domaines des normes du travail, de l'équité
salariale, de la santé et de la sécurité du travail. Dans le cadre de sa
mission, elle s'est vu confier la gestion du régime de santé-sécurité du
travail sur l'ensemble du territoire québécois et est chargée d'appliquer
notamment la Loi sur la santé et sécurité du travail, la LSST. Cette dernière a
pour objet l'élimination à la source des dangers pour la santé, la sécurité et
l'intégrité physique et psychique des travailleuses et des travailleurs. Cette
philosophie qui anime la structure de la loi se traduit par une implication
paritaire du milieu de travail en prévoyant des mécanismes de participation des
travailleurs et des travailleuses, de leur association, ainsi que des
employeurs et de leurs associations pour mobiliser tous les milieux à agir en
prévention des accidents. Elle s'applique à toute entreprise de juridiction
provinciale, incluant le gouvernement, ses ministères et organismes, ainsi qu'à
tout lieu de travail tel que le définit la loi. Le législateur a prévu l'imposition
d'obligations légales aux acteurs du monde du travail. Les principales
obligations des travailleuses et des travailleurs sont de prendre les mesures
nécessaires pour protéger leur santé, leur sécurité ou leur intégrité physique
ou psychique et veiller à ne pas mettre en danger la santé, la sécurité ou l'intégrité
physique ou psychique des autres personnes qui se trouvent sur les lieux du
travail ou à proximité des lieux du travail. L'employeur, quant à lui, demeure
le principal débiteur d'obligations en vertu de la LSST compte tenu de son
droit de gérance et de l'autorité qu'il détient sur les lieux de l'organisation
du travail, les obligations générales de l'employeur sont notamment de s'assurer
que l'organisation du travail et les méthodes et techniques utilisées pour l'accomplir
sont sécuritaires et ne portent pas atteinte à la santé du travailleur.
Utiliser les méthodes et techniques visant à identifier, contrôler et éliminer
les risques pouvant affecter la santé et la sécurité du travailleur. Informer
adéquatement le travailleur sur les risques reliés à son travail et lui assurer
la formation, l'entraînement et la supervision appropriés afin de faire en
sorte que le travailleur ait l'habileté et les connaissances requises pour
accomplir de façon sécuritaire le travail qui lui est confié. S'est ajoutée l'obligation
suivante lors de l'adoption en 2021 de la Loi modernisant le régime de la santé
et la sécurité du travail, soit prendre les mesures pour assurer la protection
du travailleur exposé sur les lieux de travail à une situation de violence
physique ou psychologique, incluant la violence conjugale, familiale ou à
caractère sexuel. Certains travailleurs dont les policières et les policiers
sont, du fait de leurs fonctions, en contact avec des personnes dont la santé
mentale est perturbée et sont conséquemment exposés à des risques importants,
dont la violence physique, sans toutefois que l'on puisse qualifier...
Mme Gagné (Anouk) : ...de
telles situations comme étrangères aux activités de leur employeur. Bien au
contraire, ces situations font partie intégrante des activités des corps
policiers qui doivent composer avec cette réalité, et même, à certaines
occasions, utiliser la force nécessaire pour maîtriser un individu. Dans un tel
contexte, l'obligation de protéger la travailleuse ou le travailleur contre la
violence passe nécessairement par une évaluation des risques. Et c'est cette
étape qui permet à l'employeur de mettre en œuvre les méthodes de travail
appropriées en adéquation avec l'appréciation des risques.
Considérant l'expertise de la commission
et son cadre légal, les inspectrices et les inspecteurs mènent plusieurs
enquêtes annuellement à la suite d'accidents du travail graves ou mortels. La
démarche utilisée par les inspecteurs permet de cerner les causes de l'accident
et ainsi faire des recommandations pour éviter qu'un tel accident ne se
reproduise.
Cela a notamment été le cas à la suite du
décès de la policière Maureen Breau lors d'une intervention en mars 2023.
L'enquête de la CNESST a notamment permis de déterminer que l'évaluation du
risque lors d'une intervention d'arrestation planifiée était déficiente. Elle a
été laissée à la discrétion des policières et des policiers et les a exposés à
intervenir face à un individu dont le niveau de dangerosité aurait nécessité
une stratégie d'intervention leur assurant une plus grande sécurité. La
planification de l'arrestation était inadéquate puisqu'il y a plusieurs
éléments des principes de défense et des principes tactiques lors d'une
intervention policière n'ont pas été respectés. La formation des policières et
des policiers en matière d'emploi de la force était insuffisante. La supervision
par l'employeur lors de l'évaluation du risque et de la planification de
l'intervention était inadéquate.
En conséquence, la CNESST a émis
13 recommandations qui traitent différents aspects liés à la santé et à la
sécurité des policiers et des policières du Québec, en lien avec les
interventions planifiées et l'évaluation du risque, le maintien des
compétences, la méthode de travail sécuritaire et la supervision.
Conséquemment, la CNESST a suggéré quelques pistes afin de tendre vers des
standards assurant une plus grande sécurité des travailleurs et du public,
notamment au niveau de la communication de l'information personnelle pertinente
des personnes dont l'état mental est perturbé. Sans que le dossier médical
devienne entièrement accessible, certains éléments essentiels à la santé et à
la sécurité des travailleurs devraient être communiqués aux corps policiers.
Cette avenue mérite d'être explorée car l'absence ou le manque d'information
devient un obstacle à l'évaluation réelle des risques. En effet, si au départ
l'évaluation des risques est faussée, la méthode de travail associée en ce
serait... sera nécessairement affectée et la santé et la sécurité du
travailleur grandement compromise. Ce travail de prévention essentiel doit
s'effectuer en amont afin d'avoir une meilleure connaissance et évaluation des
risques, ce qui se répercutera positivement dans toute la chaîne décisionnelle.
Des décès pourront ainsi être évités.
• (16 h 40) •
La meilleure évaluation du risque est
celle qui permet une analyse de toute l'information disponible et du portrait
réel d'une situation donnée. En ce sens, les enjeux de confidentialité peuvent
être un frein à la mise en œuvre de l'obligation qui incombe à l'employeur de
protéger ses travailleuses et ses travailleurs contre une situation de
violence. Si l'information permettant d'identifier adéquatement les risques
n'est pas accessible ou complète, il est probable que l'évaluation des risques
soit faussée et que les méthodes de travail ne soient pas adaptées à la situation,
compromettant ainsi la santé, la sécurité et l'intégrité physique ou psychique
d'une travailleuse ou d'un travailleur.
Un constat alors s'impose. La limite à la
prévention de la violence physique dont peut être victime une policière et un
policier intervenant auprès de personnes non criminellement responsables pour
cause de troubles mentaux et sous ordonnance de la Commission d'examen des
troubles mentaux est tributaire notamment de l'information médicale concernant
cette personne. De ce fait, cet enjeu de confidentialité met en opposition des
droits fondamentaux protégés par la charte québécoise, soit le droit à la vie
privée et le droit pour un travailleur à des conditions de travail justes et
raisonnables et qui respectent sa santé, sa sécurité et son intégrité physique.
Ainsi, en ce qui a trait au partage
d'informations, la difficulté consiste à trouver un juste équilibre entre la
confidentialité des informations médicales ou autres et le droit des conditions
de travail qui assurent la santé, la sécurité et l'intégrité physique et
psychique des travailleurs intervenant auprès des personnes non criminellement
responsables pour cause de troubles mentaux. En nous présentant ici, nous
souhaitons contribuer à la mise en place d'un cadre législatif permettant la
mise en œuvre des droits prévus à la LSST et à la Charte des droits et libertés
de la personne, plus spécifiquement en soulignant que le travailleur ou la
travailleuse a droit à des conditions de travail qui respectent sa santé, sa
sécurité et son intégrité physique et psychique. Toute personne...
Mme Gagné (Anouk) : ...personne
qui travaille a droit, conformément à la loi, à des conditions de travail
justes et raisonnables et qui respecte encore une fois sa santé, sa sécurité et
son intégrité physique.
La CNESST salue donc le dépôt du projet de
loi n° 66 visant à renforcer le suivi des personnes
non criminellement responsable pour cause de troubles mentaux ou inaptes à
subir leur procès. Cette proposition est en accord avec la suggestion de la
CNESST quant à la communication de certains renseignements pertinents
concernant des personnes dont l'état mental et perturbé. Ceci entraînera une
meilleure évaluation des risques de laquelle découlera une méthode de travail
ou une stratégie d'intervention qui favorisera la santé et la sécurité des
personnes au travail, plus particulièrement les policières et les policiers.
La CNESST a la santé et la sécurité des
travailleuses et des travailleurs à cœur et remercie les parlementaires. Je
vous remercie pour votre temps. Mes collègues et moi demeurons disponibles pour
répondre à vos questions.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup, Mme Gagné, pour votre
présentation. M. le ministre.
M. Bonnardel : Oui. Merci, M.
le Président. Messieurs, dames, merci d'être là. Quelques questions, la
première sur... Bon, vous avez parlé des premières interventions, vous parlez
d'intervention planifiée, évaluation du risque. J'aimerais ça que vous me
donniez un portrait de ce que, pour vous, ça veut dire. Puis quand vous dites
ça... bien, j'imagine que vous avez rencontré... on va parler vite, vite du cas
de Maureen Breau, vous avez, j'imagine, rencontré les policiers qui étaient
avec Maureen. Quelle analyse vous faites entre cet événement X, la Sûreté du
Québec, versus d'autres événements que vous avez peut-être eu à enquêter où il
n'y a pas eu tragédie malheureuse, heureusement ou malheureusement, dans ces
deux cas? Expliquez-moi un petit peu, là, l'analyse, parce que c'est le
premier point que vous mentionnez dans vos recommandations, puis ce bout-là, il
m'intéresse parce que je veux le comprendre aussi. Puis ma sous-question va
aller entre ce que la Sûreté du Québec... bien, l'enseignement à l'École
nationale de police en premier lieu, versus ce que... les requalifications de
la Sûreté du Québec versus les autres corps de police, les principaux,
Montréal-Laval, Laval-Québec. Donc, c'est ce petit bout-là, là, que je veux...
Prenez trois, quatre minutes s'il le faut, là, mais donnez-moi un peu l'analyse
que vous faites de cette intervention planifiée, évaluation du risque qui doit
être mieux définie selon vos mots.
Mme Gagné (Anouk) : Parfait.
Évidemment, les recommandations s'appliquent à tous les corps policiers. Je
vais laisser mon collègue, M. Mohamed Aiyar, qui est vice-président à la
prévention, répondre à la question, qui pourra peut-être être complétée, s'ils
le souhaitent, par nos collègues de la Direction générale des affaires
juridiques.
M. Aiyar (Mohamed) : Merci,
Mme Gagné. On sait tous que, dans des situations de travail, la meilleure
chose à faire, c'est la prévention pour qu'un événement ne se produise pas.
Pour faire de la prévention, ça prend des outils, ça prend de l'information.
L'information, il faut faire une analyse de risque. Je commence par, bon, c'est
prévu dans la LSST qu'un employeur a l'obligation d'assurer la santé et
sécurité de ses travailleurs, mais comment? Tout d'abord, en faisant de la
prévention. Comment faire la prévention? Bien, tout d'abord, en ayant une description
de ses tâches, de passer une analyse détaillée de qu'est-ce que ça comporte
comme risques. Donc, ces risques répertoriés, on vient les apprécier. Par la
suite, bon, on les priorise et on met des actions, ou pour... idéalement, c'est
pour les éliminer à la source ou minimalement les contrôler.
Dans le cas où on parle de la
planification de l'intervention, ça commence tout d'abord... Pour avoir... pour
pouvoir faire... mener l'analyse de risque, il va falloir avoir de
l'information. Et dans le cas de l'intervention des policiers, pour faire une
intervention planifiée, il faudrait prendre le temps de collecter de
l'information, de l'analyser, de savoir à qui on a affaire face, là, lors de
l'intervention, et, surtout, prendre chaque risque et puis dire : Bon,
bien, qu'est-ce qu'on va faire pour le minimiser ou pour le contrôler? Donc, on
n'arrive pas à l'improviste et on fait une intervention. Donc, la planification
est extrêmement importante parce que, parfois, il y a des stratégies d'intervention,
on mène des approches d'intervention, des tactiques qui sont différentes, des
personnes... on a besoin peut-être de personnes qui sont spécialisées,
dépendamment des risques qui étaient identifiés, et ça nous permettrait d'être
plus en mesure de prévenir ce qui peut se passer lors de l'intervention.
Par rapport aux événements où il n'y a pas
eu d'accident et où il y a eu des événements, mais qui, heureusement, la
conséquence était autre chose qu'un décès, c'est qu'effectivement la prévention
a joué des rôles qui sont importants. Malheureusement, depuis les
10 dernières années...
M. Aiyar (Mohamed) : ...depuis
les 10 dernières années, trois décès chez les policiers. Et à chaque fois, ce
qu'on a, la commission, lorsqu'on mène des enquêtes, là, c'est qu'on arrive,
c'est que l'intervention n'a pas été bien planifiée. C'est que les policiers et
policières manquent de formation. Et donc, ce qui mène un petit peu lorsqu'on
arrive, on n'est pas tellement préparé pour faire face à de l'imprévu, de
l'imprévu qu'on aurait pu avoir si on avait toute l'information, le prévoir à
l'avance.
M. Bonnardel : O.K., si je
vous suis, le premier point, vous dites : mauvaise information que le
policier avait sur l'état mental du monsieur l'autre côté de la porte...
Mme Gagné (Anouk) : Manque
d'information. Pas mauvaise , mais manque d'information...
M. Bonnardel : Manque
d'information. ...mauvaise, mais manque d'information. L'autre point, vous
dites : peut-être qu'une personne, un travailleur... vous connaissez les
équipes mixtes dans les différents postes. Vous dites : peut-être que si
un travailleur spécialisé, travailleur social avait accompagné les policiers ce
soir-là auraient pu atténuer. Vous dites : C'est un peu ça que vous
sous-entendez...
Mme Gagné (Anouk) : Pas
nécessairement l'accompagnement, mais si les policiers avaient eu en leur
possession l'information associée à l'état de santé mentale de la personne pour
qui... vers qui il y a une intervention qui est faite, il y a un risque qui est
pris en charge, qui est évalué préalablement et qui permet d'ajuster
l'intervention qui sera effectuée. Je ne sais pas si, M. Aiyar, vous voulez
compléter.
M. Bonnardel : Je comprends.
Mme Gagné (Anouk) : On est
vraiment en prévention, hein? D'avoir une meilleure information permet d'avoir
une action plus appropriée et d'éviter de se mettre dans une situation où on
met à risque la santé de la travailleuse et du travailleur.
M. Bonnardel : Je peux-tu
vous demander si... je comprends votre analyse. Cette journée fatidique, les
policiers et policières auraient dû repartir pour obtenir ces informations
manquantes, pour être capable de bien connaître la personne qui était de
l'autre côté. C'est un peu ça que vous...
Mme Gagné (Anouk) : Mais,
dans l'état de la loi actuelle, je ne pense pas que c'était possible pour eux
de repartir. Par contre, ce qu'on dit, c'est que ce qui serait souhaité, c'est
que normalement, si on reprend cette situation-là, les policières ou policiers
auraient dû avoir entre les mains plus d'informations concernant l'état de
santé de la personne vers qui ils se dirigeaient pour adapter l'intervention au
niveau du risque qui aurait été jugé plus élevé en ayant possédé l'information
sur l'état de santé de cette personne.
• (16 h 50) •
M. Bonnardel : Vous
dites : À l'École nationale de police, là, qu'on devrait inclure dans le
programme de formation initiale en patrouille-gendarmerie, les enseignements
relatifs aux interventions planifiées et non planifiées. Donc, ça, c'est un
élément d'enseignement qui était pour vous déficient à l'École nationale.
C'est-tu ça que vous faites comme...
M. Aiyar (Mohamed) : Les
interventions planifiées et non planifiées effectivement, parce qu'on sait que
les policiers, ce n'est pas tout le temps qu'ils ont la chance de planifier
leurs interventions. Lorsqu'en cas de ... quelqu'un qui est en train de rouler
dans son auto, on n'a pas le temps de planifier l'intervention. Par contre, il
y a des interventions qui peuvent être planifiées et donc analyser le risque et
s'assurer effectivement qu'on a tout ce qu'il faut, que ça soit en termes de
méthode d'intervention, que ça soit en termes de support des policiers qui
interviennent ou en termes de stratégie aussi. Donc oui, effectivement,
l'intervention qui a été faite dans le cas qui nous concerne a été improvisée
sur place.
M. Bonnardel : O.K., O.K.,
j'ai pas mal la réponse, mais je vous la pose quand même, là. J'imagine que le
partage d'informations maintenant qui se fera des deux côtés entre l'équipe
médicale versus le policier ou la policière qui demande de l'information, ça
répond à, ça répond aux attentes que vous... que vous avez...
M. Aiyar (Mohamed) :
Définitivement. Le p. l. 66 pour nous, il va donner plus d'informations
aux intervenants, policiers et policières pour se préparer. Donc, en ayant
cherché de l'information qu'aujourd'hui, au moment qu'on se parle, ils ne
seront pas... ils ne sont pas en mesure d'aller la chercher. Oui, c'est très...
on est très favorable à ce que les policiers, policières aillent chercher de
l'information avant de réaliser leur intervention lorsqu'ils ont la chance de
la planifier.
M. Bonnardel : Puis j'imagine
que vous avez écouté les intervenants qui étaient avec nous depuis deux jours.
J'imagine que les informations comme telles, secret professionnel qui était
une problématique pour certains versus diagnostic versus comportement. Je pense
qu'on est plus dans le comportement que le diagnostic que le policier,
policière veut obtenir pour être capable de faire une analyse, en tout cas, la
plus précise possible de la personne qui est l'autre côté de la porte quand on
va... on va cogner, là.
Mme Gagné (Anouk) :
Exactement. Ce n'est pas nécessairement le diagnostic, c'est vraiment de
pouvoir prévoir, anticiper quel comportement la personne pourrait avoir. Et je
vous rappelle...
Mme Gagné (Anouk) : ...pour
nous, c'est toujours dans une perspective d'analyser le risque et d'anticiper
le danger, dans le fond, associé à l'intervention.
M. Bonnardel : Merci. Ça va
pour moi.
M. Bilodeau (François) : Si
je peux me permettre, si je peux me permettre juste un ajout. Et ça va
permettre de moduler les méthodes de travail en conséquence. Ça ne veut pas
dire une non-intervention, mais ça veut dire que la méthode pourrait être
différente. Je m'explique. Par exemple, un policier pourrait demander à la
personne qui est sous la CETM de sortir à l'extérieur, l'intervention pourrait
se faire à l'extérieur, toutes des choses comme celle-là. Quand on a le temps
de planifier une arrestation ou une intervention policière, c'est une occasion
en or justement pour aller chercher en amont cette information-là. Pas
nécessairement le diagnostic. Des fois, ça peut peut-être être ça aussi, mais à
tout le moins savoir si c'est quelqu'un qui est violent, qui a déjà par le
passé décompensé, etc. Vous avez parlé de la formation aussi des policiers. Sur
quatre policiers, il y avait un policier qui avait la formation REMP, vous
savez, là, au niveau des interventions avec des personnes dont l'état mental
est perturbé. Alors, voyez-vous, toutes sortes de choses comme celles-là qui
peuvent être faites aussi en amont, bien, c'est une très belle piste de
solution pour pouvoir arriver à du résultat finalement. Parce que, vous savez,
la commission, on va demander aux employeurs d'avoir des méthodes de travail
sécuritaires. Ils vont faire leur possible, là, pour pouvoir en avoir, des
méthodes sécuritaires. Mais, s'ils n'ont pas la matière brute en amont pour
qu'elle soit une méthode qui va fonctionner, qui va être sécuritaire, bien, ça
ne marchera pas au final.
Puis j'ai suivi, évidemment, j'ai
participé à l'enquête du coroner dans l'affaire de Maureen Breau, je les ai
tous entendus, les témoins. J'ai même eu l'occasion de contre-interroger des
policiers. Et ils sont un peu démunis face à cette situation-là. Moi, ce que
j'entends, là, c'est que c'est quelque chose qui se produit, là, si ce n'est
pas quotidiennement, des interventions avec des personnes dont l'état mental
est perturbé, c'est au moins deux à trois fois par semaine. Donc, ça prend de
la formation qui est associée à ça. Ça prend aussi de l'information pour avoir
la bonne façon d'intervenir, là.
M. Bonnardel : Bien. Merci.
Le Président (M. Provençal)
:Ça va? Alors, Mme la députée de
Westmount-Saint-Louis.
Mme Maccarone : Merci, M. le
Président. Merci pour votre exposé. Très intéressant. Je souhaite savoir s'il y
a eu augmentation de dossiers qui vous êtes en train de suivre en lien avec le
e à 425, les états mentaux perturbés pour les policiers. Est-ce qu'il y a une
augmentation ou est-ce que c'est en croissance? Combien de dossiers avez-vous
en main actuellement?
M. Aiyar (Mohamed) : Oui. On
remarque de plus en plus de situations effectivement auxquelles les policiers et
les policières sont exposés, donc notamment des incidents, les accidents
mortels, on en a vu, on a trois depuis les dernières... les 10 dernières
années, mais c'est aussi de plus en plus médiatisé, donc on en apprend souvent
là-dessus. Mais oui, c'est en augmentation, effectivement.
Mme Maccarone : Ça fait que,
est-ce que c'est un enjeu pour vous que vous êtes en train de traiter
spécifiquement avec la SQ? Parce que vous avez un dossier avec eux. Comment ça
va, le suivi de ce dossier? Comment ça se passe? Est-ce que ça va bien?
M. Aiyar (Mohamed) : Nous
avons émis 13 recommandations dans notre rapport, qu'on trouve
intégralement dans le rapport de coroner Kamel. Et, oui, ce sont des
recommandations qu'on suit. Le 24 octobre... rencontre avec l'ensemble des
organisations qui a reçu nos recommandations, et on va tout d'abord s'assurer
que l'information est diffusée, que ces recommandations sont connues de tout le
monde et faire un suivi là-dessus.
Mme Maccarone : Mais en ce
qui concerne l'information, parce qu'on sait, c'est le nerf de la guerre, vous
l'avez évoqué, on comprend, puis vous l'avez soulevé aussi dans votre rapport,
ça fait partie des recommandations que vous faites, mais ils font face à des
manques d'effectifs très importants qui causent beaucoup de problématiques. On
ne peut pas tout faire la formation en visuel, tu sais. On a besoin aussi
d'avoir la simulation. C'est quoi l'accompagnement que le CNESST va faire en ce
qui concerne ceci? Parce que je me demande comment qu'ils vont réaliser
l'objectif de former tout le monde en REMP pour décembre 2025. Comment est-ce
qu'ils vont le faire? Est-ce que le CNESST va revenir chaque fois pour
dire : Mais ce n'est pas fait, ce n'est pas fait, ce n'est pas fait?
Est-ce qu'il va y avoir une directive envoyée au ministère de Sécurité
publique? Comment ça se passe pour vous?
M. Aiyar (Mohamed) : Il y a
déjà une recommandation, des recommandations qui sont déjà été émises dans le
cadre de notre enquête, effectivement, concernant la formation. La CNESST fait
le suivi et fera le suivi de ces recommandations. Mais comment, nous, on va
accompagner le milieu, vous savez qu'on a 320 inspecteurs et inspectrices
qui sillonnent la province, on a mis juste dernièrement une équipe de 18 conseillers
spécialistes dans tout ce qui est santé psychologique et qu'eux, ils viennent
soutenir les milieux, donner de l'information, démystifier les risques
psychosociaux notamment, et s'assurer que les employeurs et les travailleurs...
M. Aiyar (Mohamed) : ...les
travailleurs et leurs représentants connaissent leurs droits et leurs
obligations, mais aussi on assure aussi tout ce qui est... Si vous allez sur
notre site Web, là, vous allez trouver une panoplie d'outils qui sont à la
disposition des milieux.
Maintenant, la formation elle-même pour
les policiers, les policières, ce n'est pas la CNESST qui va la faire. Par
contre, un inspecteur, une inspectrice exigera à ce que la formation soit
réalisée dans des délais que l'inspecteur jugera opportuns. Et on fera le suivi
effectivement pour s'assurer que la formation est donnée, parce que
l'article 51.9 de la LSST demande à ce que les travailleuses et
travailleurs soient formés adéquatement, informés des dangers et des risques
qu'ils courent en réalisant leur tâche. Et, comme Mme la Présidente directrice
générale l'a bien dit, que... s'assurer qu'il acquiert, qu'il arrive à acquérir
les habiletés nécessaires pour compléter leurs tâches. Oui, l'inspectorat, chez
nous, ça serait effectivement que la formation soit donnée comme convenu,
notamment on va le trouver dans le programme de prévention que l'employeur va
développer, il va y avoir de la formation là-dedans et puis les inspecteurs
vont s'assurer qu'il y ait des suites à que l'information soit donnée.
Mme Gagné (Anouk) : Et la
responsabilité appartient premièrement à l'employeur. Donc, nous, on fait des
suivis, on offre des outils, de l'accompagnement, mais il y a une
responsabilité de l'employeur : apprendre à mettre en place les mesures
nécessaires pour assurer la sécurité, la santé, l'intégrité de leur personnel
donc...
Mme Maccarone : Qu'est-ce qui
arrive quand on ne répond pas à ce besoin, à ce critère? Je comprends que c'est
dans la loi. Vous l'évoquez, tous les articles de loi, c'est dans votre mémoire
aussi. Ce n'est pas juste le... que les policiers font face en termes de
formation, c'est aussi le maintien de compétences. Ça aussi, beaucoup de
difficultés dont ils font face, encore une fois, à cause du manque d'effectifs.
Parce que ce n'est pas le manque de volonté, l'Association des policiers,
policières du Québec ont dit qu'ils souhaitent même que ça soit écrit dans la
loi, une obligation de 45 heures à travers trois ans, c'est la même
recommandation de Géhane Kamel. Qu'est-ce qui arrive quand on ne rejoint pas
cet objectif? Puis j'ajoute à ça l'année prochaine, là, vous avez dit : On
a trois, quatre dossiers avec arrêt de travail à cause du E425. On en a 10
l'année prochaine, on fait quoi?
Mme Gagné (Anouk) : Je vais
laisser la parole à Me Perrier.
• (17 heures) •
Mme Perrier (Julie) : Bien,
écoutez, comme M. Aiyar l'a bien indiqué, évidemment, les inspecteurs
essaient de soutenir l'employeur, hein? Il faut rappeler aussi que le choix des
moyens appartient toujours à l'employeur. Dans un dossier comme celui-ci, où il
y a des impératifs autres qui font en sorte que la correction de la situation
problématique, elle est plus difficile, le rôle de l'inspecteur, c'est... en
fait, l'inspecteur a le pouvoir de prolonger le délai dans la mesure où il sent
qu'il y a une implication, une responsabilisation de la part d'un employeur,
hein, c'est ce qui est souhaité en fin de compte. Ultimement, lorsqu'il y a un
inspecteur, c'est parce que c'est un pouvoir discrétionnaire non seulement
d'ordonner des corrections en vertu de la loi mais c'est aussi un pouvoir
discrétionnaire de fixer le délai qui est prévu pour réaliser cette
correction-là. Ultimement, lorsque l'inspecteur sent qu'il y a un délaissement,
ou une non-prise en charge, ou un manque de volonté, évidemment, à ce
moment-là, il peut y avoir, dans le fond, des constats d'infraction qui sont
émis, mais ce n'est pas ce qui est souhaité. On souhaite vraiment accompagner
dans l'optique d'une prise en charge.
Mme Maccarone : Je comprends,
c'est juste que c'est une réalité dont nous faisions face, ça fait je comprends
que ça fait partie des recommandations, puis tout le monde a de la bonne
volonté, mais je l'ai mentionné à maintes reprises, je ne sais pas comment on
va y arriver parce qu'on fait face à énormément de difficultés pour rejoindre
cet objectif.
Prenez-vous aussi en considération, dans
votre analyse, toujours en prévention, parce que je comprends de prévention,
c'est ça qu'on souhaite, les territoires de couverture pour les policiers, pour
la SQ, parce que c'est difficile des fois, on n'a pas beaucoup de policiers
pour un territoire qui couvre, puis ça se peut qu'ils sont déplacés, puis là il
y a un autre territoire qui est vide, alors on va avoir un policier ou une
policière qui va se retrouver peut-être seul, ça fait que sa vie est peut-être
plus en danger, le niveau de dangerosité est quand même élevé parce qu'on est
plus une équipe de deux, est-ce que ça, c'est le genre d'affaire que vous aussi
vous surveillez?
M. Aiyar (Mohamed) : Par
rapport à ça, ce qu'on regarde, c'est concernant la charge de travail. La
charge de travail, on la trouve un petit peu partout, là, avec la pénurie de
main-d'œuvre qu'on vient de vivre, qu'on vît encore, c'est un phénomène
effectivement. Et puis, nous, on le regarde sous l'angle de risques
psychosociaux, tout d'abord, chez la travailleuse, chez le travailleur, la
charge de travail, c'est un facteur parmi les facteurs de risques
psychosociaux. Mais, définitivement, lorsque...
17 h (version non révisée)
M. Aiyar (Mohamed) : ...les
travailleuses et les travailleurs n'ont pas la formation, n'ont pas les moyens,
n'ont pas le temps, aussi, pour réfléchir et avoir... pouvoir faire un recul en
arrière, un pas en arrière lorsqu'ils se trouvent dans des situations, c'est
problématique, effectivement, et on le prend en considération.
Mme Maccarone : Et quand nous
avons des cas isolés? Le cas de Maureen Breau en est un, puis c'était souligné
aussi dans le rapport de Géhane Kamel. Elle a dit que la formation, même pour
Maureen Breau... elle n'a pas eu une formation depuis 2014, malgré qu'elle l'avait
demandée à maintes reprises. Ça fait que ça faisait neuf ans qu'elle n'avait
pas cette formation. Avez-vous le pouvoir d'intervenir dans des cas individuels?
Mettons, si elle, elle avait posé une plainte pour dire : Moi, j'ai besoin
d'être formée, je suis maintenant sergente, j'ai accepté ces nouveaux
responsabilités, ça fait trois fois, depuis, que je demande d'avoir cette
formation, aidez-moi. Est-ce que, ça aussi, c'est quelque chose qui peut se
faire?
M. Aiyar (Mohamed) : Oui, on
a un service de... une garde téléphonique, là, ouverte 24 heures sur 24,
pour recevoir les plaintes. On traite les refus de travail... Effectivement,
dans ce cas, ça aurait pu être une plainte, et, oui, l'inspecteur interviendra,
il analysera, donc... comme, dans la LSST, c'est une obligation d'avoir la
formation nécessaire pour s'acquitter de ses tâches... aurait pu,
effectivement, lorsqu'il constate que la formation est en jeu, exiger la
formation de la travailleuse dans ce cas, effectivement.
Mme Maccarone : En avez-vous
eu, de ce type de plainte, dans les dernières années?
M. Aiyar (Mohamed) : Non, on
n'a pas eu de plaintes dans ce sens, par rapport à la formation elle-même. On a
eu des plaintes concernant le fonctionnement du système RENIR. Vous avez
certainement entendu que la couverture ne rentre pas, que le système ne
fonctionne pas. On a eu des plaintes concernant les champs de tir, lorsque les
policiers sont entraînés, tout ça.
Mme Maccarone : Oui. Ils sont
fermés.
M. Aiyar (Mohamed) : Effectivement.
On a eu des plaintes dans ce sens, mais pas spécifiquement sur la formation par
rapport à l'intervention elle-même.
Mme Maccarone : O.K. Ça
répond à mes questions. Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, je remercie les représentants
de la Commission des normes, de l'équité et de la santé et de la sécurité au
travail pour votre participation à nos travaux et votre collaboration à notre
réflexion. Merci beaucoup.
Je vais suspendre les travaux pour laisser
place au prochain groupe.
(Suspension de la séance à 17 h 06)
(Reprise à 17 h 11)
Le Président (M. Provençal)
:Alors, nous allons terminer notre
journée de travail en recevant M. David Henry, directeur général, et Mme
Véronique Lejour, directrice générale du Centre L'Entre-toit, qui représentent
l'Association des services de réhabilitation sociale de Québec... du Québec,
excusez-moi. Alors, vous aurez 10 minutes pour votre présentation, et nous
allons procéder aux échanges. Alors, je vous cède la parole.
M. Henry (David) : Merci.
Merci beaucoup, merci pour l'invitation. Donc, mon nom est David Henry. Je suis
criminologue, je suis directeur général de l'Association des services de
réhabilitation sociale du Québec. L'ASRSQ, c'est le regroupement de
75 organismes communautaires qui donnent des services aux personnes
contrevenantes et judiciarisées. On regroupe notamment 40 maisons de
transition à travers le Québec qui accueillent des personnes en libération
conditionnelle, également 28 organismes communautaires qui ont des accords
de partenariat avec le ministère de la Sécurité publique pour assurer le suivi
en communauté d'environ 7 000 personnes contrevenantes en libération
conditionnelle, sursis ou probation, et ce, en collaboration bien entendu avec
les agents de probation. Nous regroupons également des organismes spécialisés
en santé mentale, dont notamment L'entre-toit, et ma collègue Véronique Lortie,
et qui est là aujourd'hui avec moi, la Maison l'Intervalle, à Montréal
également, et Pech, l'organisme Pech, à Québec, que vous connaissez peut-être.
Alors... Bien, quelques considérations.
D'une manière générale, hein, c'est sûr que, comme criminologue, quand un
tribunal pose des conditions réalistes de remise en liberté, il est évident, il
est important que celles-ci soient respectées et qu'il puisse y avoir des
conséquences en cas de bris de ces conditions de remise en liberté. Donc, je
suis d'une manière générale plutôt favorable à l'ajout d'agents de liaison du
MSP qui seront chargés de vérifier le respect des modalités, finalement, émises
par la commission d'examen. À mon avis, un rôle d'évaluation, peut-être
notamment au niveau de la dangerosité, pourrait aussi être confié à ces agents.
Par ailleurs, il est évident dans mon esprit que ce ne sont pas toutes les
personnes, hein, qui sont sous mandat de la commission d'examen qui nécessitent
un suivi serré et qui nécessitent d'avoir un agent de liaison.
Alors, deux grandes considérations. La
première question en fait à se poser, c'est la grande question, c'est de savoir
comment va s'opérationnaliser vraiment le rôle de ces agents de liaison de
concert avec la multitude des acteurs qui sont déjà présents autour des
personnes non criminellement responsables - je pense que le rapport de la
coroner était assez explicite sur justement le manque de communication et de
collaboration entre les différents acteurs - comment cela va s'opérationnaliser
auprès des équipes traitantes, auprès des équipes traitantes élargies, qui sont
multidisciplinaires, qui comprennent différents professionnels, comment
également va s'opérationnaliser leur rôle auprès des organismes communautaires
dans la communauté, comment ces agents vont pouvoir vérifier réellement les
conditions qui sont émises par la commission d'examen, par le tribunal, quels
seront également leurs moyens d'action en cas de non-respect des modalités de remise
en liberté ou en cas d'augmentation du risque. Donc, ça, pour moi, c'est
vraiment quelque chose de fondamental, et il va falloir réellement réfléchir
à...
M. Henry (David) : ...cette
opérationnalisation.
La deuxième considération par rapport au projet
de loi, de mon point de vue, la réhabilitation et l'intégration des personnes
non criminellement responsables passent nécessairement par l'implication
d'organismes qui sont ancrés dans la communauté. Actuellement, les organismes
communautaires ne sont pas suffisamment soutenus pour mener à bien cette
mission de réintégration à long terme. Et il faut bien comprendre, on va en
parler, je pense, un peu plus longuement tantôt, mais pour certaines personnes
plus à risque, l'hébergement est un élément essentiel pour les stabiliser.
Elles ont besoin d'un environnement contrôlé pour se développer et pour pouvoir
fonctionner socialement. Et d'ailleurs, M. Brouillard-Lessard a fréquenté
pendant plusieurs mois, pendant neuf mois la ressource L'Entre-toit dirigée par
ma collègue, avant les tragiques événements, et il fonctionnait très bien dans
cet environnement. Donc c'est quelque chose à voir en... L'hébergement est
quelque chose d'essentiel pour certaines personnes qui présentent des risques.
Elle vous... Elle vous parlera plus en détail, hein, des services qu'ils
offrent et de ce que j'appelle, c'est vraiment mon terme à moi, ça n'existe pas
réellement, je pense, mais ce que j'appelle la psychiatrie légale
communautaire. C'est un secteur qui est complètement sous-développé et qui
n'est même pas explicitement reconnu dans les différentes ententes de service.
Donc, ce projet de loi, pour moi, c'est un premier pas dans la bonne direction,
mais on doit développer davantage la psychiatrie légale communautaire dans toutes
les régions du Québec.
Et avant de céder la parole à Véronique,
juste quelques considérations à la volée, un peu, dans l'environnement actuel.
Premièrement, il faut accepter que
certaines personnes, pas toutes, mais vont avoir besoin d'un suivi à long
terme, hein? Tous les passages à l'acte n'ont pas la même intensité, la même
dangerosité, et ça doit être pris en considération dans le suivi qui va être
fait, d'où l'importance d'une évaluation adéquate. Les personnes qui ont un
problème de santé mentale grave et persistant et qui ont commis des gestes de
violence vont devoir être suivies à long terme, parce que le risque de
désorganisation est toujours possible cinq, 10, 15, 20 ans après. Une
perte d'emploi, une rupture amoureuse, la perte du logement, l'arrêt de la
médication, la médication qui, pour une raison ou une autre, cesse de
fonctionner, une consommation de drogues ou d'alcool excessive, bref, tous ces
éléments-là font en sorte que la personne pourrait se désorganiser. Et le suivi
va devoir donc être à long terme, suivi qui va devoir varier d'intensité en
fonction du besoin et du risque à travers le temps. Mais il faut accepter cet
état des... cet état de fait, à mon avis.
Deuxième considération. Ce que j'entends,
on a besoin d'hospitaliser certaines personnes qui se désorganisent. La
communauté, les organismes ou la famille n'est pas équipée pour les héberger
dans ces moments-là. L'hospitalisation peut être de courte durée, hein? Juste
le temps de stabiliser l'état mental de la personne, et on la retourne dans la
communauté par la suite. Mais cette hospitalisation, elle est importante. Et
moi, ce que j'entends actuellement dans la communauté, c'est qu'il est très
difficile d'obtenir une hospitalisation lorsqu'on l'estime nécessaire, par manque
de place, premièrement, mais il y a aussi des considérations peut-être à avoir
sur, je vais en parler un petit peu tantôt, mais la loi P-38, dont vous
êtes au courant, il est de plus en plus difficile d'hospitaliser quelqu'un
contre son gré. Il faut trouver un équilibre entre les libertés individuelles
et les besoins de la communauté. Mais je crois qu'on a des questions à se poser
à ce niveau-là.
Troisième... Troisième petite
considération rapidement. Extrêmement important, selon moi, la psychiatrie régulière
ne doit pas être confondue avec la psychiatrie légale. Ce sont des pratiques et
des clientèles différentes, à mon avis. Et, dans les cas de la psychiatrie
légale, l'évaluation du risque ne peut pas être seulement en lien avec la
désorganisation mentale, mais avec l'ensemble des facteurs de risque
criminogènes. Ça, c'est... en tout cas, c'est une petite phrase comme ça, là,
mais c'est extrêmement important, à mon avis.
Finalement, avant de laisser la parole à
Véronique, il y a beaucoup de changements actuellement dans l'environnement. La
hiérarchisation des services en psychiatrie, peut-être la réforme justement de
la loi P-38, je vais en parler un petit peu tantôt, la révision des
pratiques, peut-être, de la commission d'examen, le p.l. no 66, il faut
absolument un fil conducteur et un arrimage entre toutes ces réformes qui sont
prévues ou en cours. Et, un des enjeux principaux, c'est de préciser évidemment
les rôles et responsabilités ainsi que l'imputabilité des différents services.
Alors, merci beaucoup encore pour cette
invitation. Et je vais laisser Véronique présenter ces services. Tu es sur
«muet» Véronique.
Mme Lejour (Véronique) : Bonjour,
tout le monde. Désolée. Véronique Lejour, directrice générale du Centre
L'Entre-toit.
Bon. Bien sûr, David a fait une
introduction. Je viens, en fait, pour parler un peu de l'hébergement en
psychiatrie légale, proposer, en fait, le modèle, faire connaître le modèle qui
existe à Montréal, bon, et la région de Montréal parce qu'on est sortis un
petit peu du territoire de Montréal.
En fait, il faut comprendre que ce
réseau-là, en hébergement en psychiatrie légale, existe à Montréal depuis
40 ans. Donc...
Mme Lejour (Véronique) : ...ça
inclut aussi, là... maintenant, il y a une ressource à Saint-Jérôme puis il y a
quelques places qui sont réservées... Montérégie-Centre. Toutes ces ressources
sont en entente de services avec le ministère de la Santé et des Services
sociaux, puis c'est davantage sur le modèle de l'entente nationale de... des
ressources intermédiaires. Donc, je sais, là, dans un... dans un témoignage
précédent, on parlait de maisons de transition. On n'est pas une maison
transition. On est vraiment de type ressource intermédiaire ou ressource autre.
Donc, on offre un continuum de services à
une clientèle en fonction aussi d'un encadrement qui va varier en intensité.
C'est-à-dire qu'il va y avoir des foyers de groupes de... transitoires, des
foyers de groupe long-terme et des appartements supervisés. Au fil du temps,
bien sûr, on a développé une expertise pour accompagner, encadrer la clientèle
de façon intégrée. Donc, je pose le mot «intégrée» puisque c'est important.
C'est tant au niveau du rétablissement de la personne, au niveau de la santé
mentale, mais aussi au niveau de la réhabilitation sociale, en gérant le risque
de désorganisation mentale, mais aussi les autres facteurs de risque qui sont
reliés à une récidive probante. Donc, le Centre L'Entre-toit, on fait partie de
ces types de ressources là.
On a plusieurs autres services. Je vais me
consacrer vraiment à la psychiatrie légale puisque c'est la raison pour
laquelle on est là. On a trois points de services en psychiatrie légale, donc
deux basés à Montréal et un à Saint-Jérôme. Notre clientèle référée par
l'ensemble des établissements qui sont sur le territoire de... des ressources,
en fait. Donc, les 85 % de notre clientèle sont sous le joug, là, de la
Commission d'examen des troubles mentaux pour non-responsabilité criminelle.
C'est sûr que notre clientèle, majoritairement, ce qu'ils ont, c'est qu'ils
représentent un risque potentiellement élevé s'ils ne sont pas encadrés et...
de façon quotidienne et structurée dans un milieu sécuritaire avec un
accompagnement aussi adapté à leurs besoins. Et ils ont... ils sont aussi
réfractaires, là, face aux soins et... le traitement. Donc, on parlait tantôt
de... une clientèle qui n'est pas toujours d'accord avec ce qui leur sont
offerts, là, comme services. On peut parler de séjour qui se comptabilise quand
même en années. Donc, même si on est transitoire, il faut comprendre que
l'évolution de la personne est variable et chancelante dans le temps en
fonction de toutes sortes de facteurs que David tantôt a nommés. Donc,
effectivement, des fois les séjours peuvent être de plus longue durée. L'objectif
du séjour, en fait, c'est bien sûr d'accompagner la personne dans son niveau
fonctionnel, en fait, au niveau de la vie domestique, quotidienne, etc., mais
surtout aussi au niveau comportemental et de la santé mentale. Donc, c'est des
équipes vraiment d'intervenants 24 heures sur 24 qui vont être présents et
qui sont formés dans le domaine de la relation d'aide, soit en criminologie,
psychoéducation mais aussi technique d'éducation spécialisée, donc travail
social. C'est vraiment une équipe multidisciplinaire.
• (17 h 20) •
Donc, l'objectif du séjour final, c'est
vraiment de... On est un peu les yeux et les oreilles, en fait, de l'équipe
traitante. C'est eux qui ont vraiment la prise de décision finale au niveau
de... les recommandations par rapport à la CETM, où, encore là, l'application
de certains plans de contingence lorsqu'on juge qu'il y a un risque qui est
présent, ou encore de relocaliser la personne, bien, c'est aussi notre
objectif. C'est de donner toutes les informations puis de pousser la personne à
évoluer positivement dans ses... dans ses habiletés autant sociales que
fonctionnelles, en vue d'un autre hébergement. Les autres hébergements, comme
je vous ai nommés, ça peut être d'autres types de ressources, comme... nommés
d'entrée de jeu ou encore des appartements supervisés, des appartements
autonomes ou un retour en milieu familial.
Donc, je vais arrêter parce que je sais
qu'on a pris quand même beaucoup de temps. Bien, c'est sûr qu'il y a des
critères qui fait en sorte que le séjour peut être davantage optimal, mais
c'est sûr que, dans le rapport de la coroner, plusieurs éléments, là,
ressortent par rapport à tout ça. Alors, voilà.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup pour cet exposé.
Alors, M. le ministre, c'est à vous.
M. Bonnardel : Oui. Merci, M.
le Président. Merci à vous deux d'être là. Je vais me concentrer un peu sur le
travail que vous avez à faire au quotidien avec le ministère de la Sécurité
publique. Bien, vous le savez... vous êtes des partenaires, vous avez à
travailler avec des agents de probation à tous les jours, à tous les jours.
Vous le savez aussi, puis je vais me concentrer, comme je le mentionnais, sur
un aspect du rapport du coroner que vous avez, j'imagine, regarder, ou en tout
cas minimalement, vu les conclusions, là, puis les recommandations. Une des
plus importantes, c'était la problématique de suivi post-CETM. Bon, vous
comprenez... puis on ne va pas élaborer, là, pendant cinq minutes sur la... ce
que les psychiatres, les criminologues nous ont...
M. Bonnardel : ...mentionné
tantôt, mais il y avait une problématique.Puis là, bien, pour ne pas
stigmatiser ces gens, le terme «agent de liaison»... puis vous n'êtes pas sans
savoir que ces agents de liaison auront été dans leur passé des agents de
probation, comment vous voyez cette... puis je vais utiliser le même mot, là,
cette complémentarité entre les agents de liaison versus les équipes médicales
et le potentiel d'information que ces agents pourront donner aussi dans le
futur pour supporter puis aider le travail des policiers, policières dans le
quotidien, là? Peu importe, qui vous voulez.
M. Henry (David) : D'accord.
Je peux y aller un petit peu puis, Véronique, tu compléteras si tu veux. Bien,
comme je le disais, ce qu'on se rend compte, c'est que, dans le fond, le
suivi... il est variable en fonction de la région puis des équipes traitantes,
etc. Donc, l'arrivée d'un nouvel acteur, d'un agent liaison, qui sera... donc
ce que je comprends, en tout cas, du projet de loi, sa spécificité, c'est
vraiment de s'assurer du respect des conditions de remise en liberté.
Personnellement, encore une fois, je pense que je vois ça d'un bon oeil et je
pense que la complémentarité avec les différents acteurs du milieu est
possible, mais elle doit être travaillée. Dans le fond, le problème, c'est que
la plupart des professionnels travaillent en silo sans nécessairement
communiquer l'information à cause de toutes sortes aussi de lois et de
contraintes, hein, qui existent par rapport à ça. Mais le fait d'avoir un... on
dit, à partir de ce moment-là, on a un professionnel dont la charge spécifique
est de s'assurer de ce respect, je crois que c'est une bonne chose et je crois
que ça peut être une aide, en fait, dans certains cas, parce que les équipes traitantes
ne sont pas toujours bien outillées pour pouvoir le faire. Donc, ce serait mon
commentaire à chaud, là. Véronique.
Mme Lejour (Véronique) : En
fait, je pense que ça répondait à la question, à moins que vous avez d'autres
questions, mais, effectivement...
M. Bonnardel : Non, mais
comme vous l'avez, je pense, mentionné aussi tantôt, vous comprenez que ce ne
sont pas tous les cas CETM qui vont être suivis, là. Je pense que le mot...
bien, le haut risque, on va l'appeler comme ça, là, ce sont une infime
partie... je n'ai pas le pourcentage, je ne veux pas en donner, mais ce sont
une infime partie de ces personnes qui seront suivies par ces agents de
liaison, là.
M. Henry (David) : C'est
intéressant. Donc, justement, si on parle de complémentarité, je veux dire,
quand même, les agents de probation, le ministère de la Sécurité publique, ont
une expertise dans le domaine de l'évaluation de la dangerosité. Donc, d'amener
cette expertise complémentairement avec le réseau de la santé, c'est intéressant,
c'est un outil de plus. Mais donc, encore une fois, comment, sur le terrain, ça
va s'opérationnaliser? Comment ça va être reçu par les équipes traitantes?
Quels vont être les leviers d'action? Ça, c'est le côté terrain pratique, là,
qui reste à définir.
M. Bonnardel : Ah! ça, je
peux vous rassurer, là, on peut appeler ça un cadre de référence entre le
travail des agents versus les criminologues, versus les... tout ça va être bien
mis, bien écrit, là, pour s'assurer que tout le monde fait son boulot comme il
se doit.
J'aurais une dernière question, là. Vous
avez parlé de réhabilitation. De quelle façon, selon vous... Bon, il n'est pas
prévu que les cas CETM soient accompagnés comme tels. Peut-être qu'ils
pourraient l'être pour du logement, mais donnez-moi un peu, là... incitez-moi à
mieux comprendre votre travail pour me dire : François, si on avait un ou
deux CETM qu'on pourrait accompagner, de quelle façon ça pourrait être fait,
hormis le fait que le logement est important pour tout le monde, là? Alors,
donnez-moi un peu votre point de vue là-dessus.
Mme Lejour (Véronique) : Bien,
en fait, la réalité... Je vais me permettre à ce niveau-là, là...
M. Bonnardel : Allez-y.
Mme Lejour (Véronique) : Bon,
comme je suis en hébergement et j'accueille 85 % de ma clientèle CETM,
c'est sûr que c'est une nécessité d'avoir de l'hébergement aussi pour certains
cas, pas tous les cas. Donc, tu es toujours en évaluation des besoins. Nous, on
offre vraiment un encadrement structuré 24 heures sur 24, sept jours sur
sept, mais il y a d'autres ressources qui vont faire des appartements
supervisés ou que ça va être en appartement supervisé 35 heures/semaine,
une supervision. Donc, c'est vraiment adapté, c'est nécessaire et, bon, c'est
sûr que je vois des cas de figure aussi où il n'y a pas d'hébergement à
l'extérieur de Montréal comme je vous l'ai nommée, il n'y a aucun hébergement.
Donc, vers où ces gens-là se retrouvent, dans quel endroit approuvé par
l'équipe présente, ils se retrouvent, c'est important. Et est-ce que, là, le
rôle justement d'un agent de liaison s'il n'y a pas nécessairement de suivi
toujours psychosocial à côté, bien, va avoir une importance à ce niveau-là pour
aller voir comment la personne fonctionne.
M. Bonnardel : Allez un petit
peu plus loin, là, dans... Bien, voulez-vous intervenir, monsieur?
M. Henry (David) : Non, non,
je vais laisser...
M. Bonnardel : Je vais
terminer. Allez un peu plus loin dans votre travail, dans votre réflexion.
Hormis le logement, l'accompagnement que vous faites...
M. Bonnardel : ...avec ces
personnes, le CETM, comment vous mesurez le succès, la réhabilitation de ces
gens, là, qui se trouvent un logement qui pourraient trouver un travail.
Comment... comment vous travaillez ça, combien de temps ça peut prendre puis le
succès, vous le mesurez comment?
Mme Lejour (Véronique) :
Bien, en fait, le temps est très variable en fonction de la personne.
C'est-à-dire qu'une personne va pouvoir évoluer avec nous pendant cinq ans de
temps. Il y en a d'autres qui vont avoir besoin d'un an. C'est très variable en
fonction des capacités de la personne, comment elle évolue. Nous, on est
transitoires. Donc, notre objectif c'est de les pousser au maximum quand on est
rendus dans le maintien, quel autre type de ressources qui peut répondre aux
besoins de cette personne-là? Comme je vous ai dit des fois, ça peut être des
fois des groupes long terme comme nous, mais en long terme, ça peut être des
appartements supervisés, ça peut être des appartements autonomes parce que la
personne est totalement autonome parce que la personne est totalement autonome,
elle gère aussi d'elle-même une partie du risque qu'elle représente. Elle
reconnaît ce risque-là. Donc, c'est très variable d'une personne à l'autre. Et
c'est là où, contrairement à une maison de transition sin on fait le parallèle,
où la mesure prend fin, la personne quitte, ce n'est pas le cas en psychiatrie
légale. Donc ça varie vraiment...
M. Bonnardel : Si je
comprends bien votre rôle, vous faites partie des possibles modalités de suivi
post CETM.
Mme Lejour (Véronique) :
Exactement, dans l'endroit approuvé.
M. Bonnardel : Approuvé.
Mme Lejour (Véronique) : Oui.
M. Bonnardel : Bien reçu.
Merci pour vos réponses.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la députée de Laporte.
• (17 h 30) •
Mme Poulet : Oui, bonjour à
vous deux, M. Henry, Mme Lejour. Je voudrais savoir, vous avez parlé de
l'évaluation du risque. Comment est-ce que vous qualifiez l'évaluation du
risque auprès de la clientèle non criminellement responsable dans le système
actuel? Vous avez parlé au niveau de la dangerosité, au niveau de que vous avez
parlé de suivi de variable d'une certaine variable d'une personne à l'autre?
Mais quel est le risque? Comment vous qualifiez l'évaluation du risque auprès
de la clientèle, de cette clientèle-là?
M. Henry (David) : Oui, vas-y
je pense que c'est très pratique en plus, ça...
Mme Lejour (Véronique) : En
fait, rapidement, on parle de plusieurs hôpitaux désignés donc avec plusieurs
services différents. Donc, ce qui fait en sorte qu'effectivement, au niveau de
l'évaluation du risque réel offert par les équipes traitantes et tout ça est
variable en fonction de chaque réalité. Donc, c'est sûr qu'elle n'est pas
toujours faite de façon systématique. On l'a vu, là, le rapport du coroner l'a
dit, donc, ... est aussi variable. C'est sûr que c'est important. Il y a des
outils qui existent, ça aussi c'est ressort dans le rapport. Puis c'est sûr
qu'à l'heure actuelle aussi au niveau du ministère, je pense qu'il y a un
certain ajustement au niveau du ministère de la Sécurité publique, au niveau de
l'outil actuariel qui est utilisé, le RBAC, c'est un bel outil, mais c'est
quand même au niveau de la santé mentale doit être quand même des fois adapté.
Donc voilà, est-ce que ça répond bien à votre question?
Mme Poulet : O.K. Parfait.
Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Oui, allez-y...
M. Henry (David) : C'était
juste pour préciser que l'outil actuariel, hein individuel du RBAC-PCQ, ce
n'est pas l'outil qui sera utilisé pour évaluer la dangerosité de la clientèle
non criminellement responsable, puisque ce n'est pas l'outil qui est là qui est
désigné pour ça, là, qui est fait pour ça. Une petite précision.
Mme Poulet : J'aurais juste
une question de précision, vous parlez d'ajustement. Pouvez-vous qualifier ces
ajustements-là.
Mme Lejour (Véronique) :
Bien, en fait, c'est sûr que la... l'outil actuariel en ce moment, qui est
utilisé au niveau du ministère de la Sécurité publique, au niveau de la
clientèle reconnue criminellement responsable, ce n'est pas un outil qu'on
pourra totalement copier avec une clientèle non criminellement responsable.
Donc, c'est sûr qu'il va falloir avoir aussi un ajustement, là, c'est-à-dire
d'utiliser les outils qui sont déjà reconnus aussi au niveau de la
non-responsabilité criminelle.
Le Président (M. Provençal)
: Ça va. Ça va, M. le ministre. Alors, Mme la députée de
Westmount-Saint-Louis.
Mme Maccarone : Merci, M. le
Président. Merci beaucoup pour votre exposé puis votre présentation. C'est très
intéressant. Je souhaite rester sur l'ajout d'un agent de liaison. Tout le
monde pose les mêmes questions, ça va être quoi les rôles et responsabilités.
C'est quoi votre recommandation? Comment devons-nous définir le rôle? Si vous,
vous pouvez former la personne, ça va avoir l'air de quoi? Quelle compétence?
Ce serait quoi les responsabilités?
M. Henry (David) : Je peux
peut-être y aller. Le nom le dit, je pense : Agent de liaison,
c'est-à-dire faire la liaison entre les différents professionnels qui entourent
la personne non criminellement responsable. s'assurer que la communication que
l'information transige entre les corps policiers, le milieu hospitalier, le milieu
communautaire. Donc, c'est un rôle...
17 h 30 (version non révisée)
M. Henry (David) : ...peut-être
qu'on pourrait définir comme une espèce d'intervenant pivot finalement, qui est
là pour s'assurer que l'information circule. C'est une personne qui s'assure du
respect des conditions émises et qui a la... idéalement qui a des leviers d'intervention,
si la personne ne respecte pas ses conditions de remise en liberté. Ça, c'est
un principe criminologique de base, là. Quelqu'un fait quelque chose de mal, on
le découvre, il faut qu'il y ait une conséquence à l'acte. Sinon on renforce
des comportements qui sont non souhaités. Et finalement, je pense qu'il y a un
rôle d'évaluation, j'en parlais un petit peu dans ma présentation, qui peut
être intéressant, évaluation, justement, qui pourrait être un soutien aux
équipes traitantes.
Mme Maccarone : Vous savez
sans doute, bien, ça fait partie aussi de beaucoup des questionnements que nous
avons eus lors des autres témoignages, où est-ce que le rôle devrait se loger
présentement dans un projet de loi, c'est sous la responsabilité du ministère
de Sécurité publique, parce que c'est les anciens agents de probation. Mais si
on écoute l'Ordre des psychiatres, eux, ils nous disent que ça... ce serait
plus facile que ça se passe sous les responsabilités du ministère de Santé et
Services sociaux à cause de toutes les notions de confidentialité puis aussi l'aspect,
comme vous soulevez un peu, d'évaluation.
Ils ont aussi soulevé, puis je souhaite
vous entendre là-dessus, eux, ça fait partie de leurs recommandations... Parce
que vous, vous avez dit : La notion de... Si, mettons, il y a un... ils ne
respectent pas les conditions de libération, selon l'Ordre des psychiatres,
eux, ce qu'ils souhaitent, c'est une exclusivité du mandat des agents de
liaison auprès seulement évidemment des personnes non criminellement
responsables, mais aussi que, si les agents de liaison ont quelqu'un en charge,
cette personne ne devrait pas aussi être sous la responsabilité d'un agent de
probation. Parce que pour eux, c'est une question d'une approche non punitive
face aux personnes non criminellement responsables. Votre opinion là-dessus, c'est-tu
possible? Parce que vous, vous avez défini un rôle peut-être un peu à part de
ça.
M. Henry (David) : Bien, c'est
un choc de culture entre deux ministères puis entre deux visions de la
personne. Pour le milieu de la santé, la personne non criminellement
responsable, c'est un patient, pour le milieu de la sécurité publique, c'est un
contrevenant. Donc, c'est évident qu'il y a... il y a un choc de culture.
Après, il faut réussir à trouver, je pense, même... il y a moyen, en tout cas j'ose
espérer qu'il y a moyen de trouver justement des ponts entre ces deux
conceptions, parce qu'une n'est pas complètement vraie, l'autre... vous
comprenez? Tout le monde a... En tout cas, c'est... La vérité est souvent
grise, hein, en tant que telle. Puis ce que le monde... en tout cas, moi, j'ai
une petite expérience aussi en psychiatrie, hein, puisqu'avant de travailler à
l'association, je travaillais dans le domaine en tant que tel, et ce que je
vois, c'est l'intensité du suivi, du risque, de la dangerosité évolue beaucoup
à travers le temps. Et on le voit de toute façon dans le cas présent. Donc, en
24 h, l'évaluation du risque peut changer complètement, parce qu'il y a
tel événement, telle chose qui s'est passée. Donc c'est des variables qui sont
très importantes. Et c'est pour ça que, bien oui, à certains moments, peut-être
que c'est le milieu hospitalier qui est plus adapté, mais des fois, c'est
peut-être le milieu plus sécurité publique qui est plus adapté à la situation,
qui est... au comportement qui a été adopté par la personne. Donc il faut
vraiment réussir à... bien, idéalement, il faudrait réussir à réunir ces deux
visions et que toutes les personnes puissent réellement travailler ensemble. Et
je comprends qu'au départ, c'est un choc parce que c'est un choc de culture
entre... entre des corps de métiers différents.
Mme Maccarone : Mais, si ces
personnes sont dans un endroit neutre comme chez vous, L'Entre-toit, c'est un
endroit neutre, est-ce que c'est vous qui devez déterminer d'abord? Parce que
ça va être le CETM qui va déterminer, on pense, que la personne concernée a
besoin d'avoir un agent de liaison. Mais vous, est-ce que vous avez un rôle à
faire cette détermination aussi d'abord? Parce que c'est vrai ce que vous
dites, c'est plus clinique versus plus contravention. Je ne sais pas c'est
quoi, la réponse à la question, mais je vois vraiment les deux pôles qui sont
vraiment différents. Puis je suis préoccupée de comment nous allons accompagner
ces personnes qui sont vulnérables, qui peuvent aussi être considérées comme
des victimes. Surtout si notre but, c'est la réinsertion puis non
criminellement responsable, bien, ça se définit tout seul, la définition.
Alors, en tout cas, je suis préoccupée de ça parce que je ne sais pas comment
que nous allons travailler. Mais vous, est-ce que vous pourriez faire cette
recommandation peut-être pour dire : On a besoin de ça ou de ça?
Mme Lejour (Véronique) : Ah
bien, c'est sûr qu'à ce moment-là ça serait très variable. Tu sais, nous, notre
clientèle est vraiment référée par les milieux hospitaliers. Puis je pense que
c'est ça aussi, l'enjeu. C'est que toute la psychiatrie légale a toujours été
sous la gouverne de la santé ici. Donc, c'est le responsable de l'hôpital, les
hébergements...
Mme Lejour (Véronique) : ...sont
avec la santé aussi. C'est l'équipe traitante qui va nous référer le... nos
résidents. Donc, c'est un peu cette réalité-là. Est-ce qu'on peut arriver à
tricoter quelque chose? J'ose espérer, là. Je crois que c'est... ça peut être
possible. Est-ce, justement, quelqu'un qui est encadré 24 heures sur 24 dans un
hébergement clôturé, spécialisé nécessite absolument, aussi, un agent de
liaison? Toutes ces questions-là sont, donc...
Mme Maccarone : Puis, en
général, la relation que les personnes sous votre responsabilité... quel genre
de relations est-ce qu'ils ont avec les agents de probation? Est-ce que c'est
positif? Est-ce que c'est difficile? Est-ce qu'ils sont craintifs? On a entendu
des témoignages des groupes à la défense des droits des personnes avec les
troubles mentaux, que, tu sais, ils voient ça comme punitif, ils sont
craintifs, si ça reste sous la responsabilité des services correctionnels. Selon
votre expérience puis votre expertise, les relations, est-ce qu'elles sont
positives, difficiles? Comment ça fonctionne?
M. Henry (David) : ...bien...
Mme Lejour (Véronique) : Je
peux y aller. Non, non, je peux y aller, David.
M. Henry (David) : Oui,
vas-y, vas-y.
• (17 h 40) •
Mme Lejour (Véronique) : Bien,
rapidement, en fait, c'est qu'il faut comprendre aussi que la loi des services
correctionnels permet aussi de déléguer le suivi à des organismes
communautaires, et L'Entre-toit fait partie de ces organismes communautaires là
aussi, au niveau... Donc, c'est sûr que la relation se fait avec un intervenant
communautaire, agent de probation, est là, vraiment, en lien pour s'assurer du
respect de la mesure et de faire les démarches, là, évidemment légales, a la
responsabilité légale. Donc, c'est très complexe. Et comment, ça aussi, ça va
s'arrimer dans un contexte de commission d'examen des troubles mentaux? Voilà.
M. Henry (David) : Bien, si
je peux juste rajouter quelque chose. J'en ai parlé, là, au début, mais, pour
moi, il faut absolument développer la psychiatrie légale communautaire. Des
centres comme L'Entre-toit, ça existe juste à Montréal, ça n'existe pas en
dehors de Montréal, et ça, c'est un enjeu. Et je crois vraiment que, dans l'environnement,
les organismes communautaires sont nécessaires, parce que le rétablissement en
santé mentale, il est à long terme, et c'est ces organismes-là qui vont
permettre, finalement, d'accompagner la personne dans sa réhabilitation et,
ultimement, qui assureront la sécurité de nos communautés. Et, encore une fois,
le projet de loi, c'est un bon premier pas, mais il manque, il manque tout un
pan de l'accompagnement à plus long terme, là.
Mme Maccarone : Oui, je
comprends, ça ne va pas régler tout. Ça ne va pas mettre fin aux portes
tournantes, ça ne va pas régler le P-38, ça ne va pas régler beaucoup de
difficultés que nous faisions face, ça ne règle pas la formation. Je comprends.
Mais c'est un excellent point que vous amenez, en termes de ressources, parce
que c'est les questions que j'avais posées à des groupes précédents. Là, vous
avez dit qu'il y avait 40 maisons de transition?
M. Henry (David) : Oui, mais
les maisons de transition, il ne faut vraiment pas confondre, hein? C'est pour
une clientèle qui est criminellement responsable, qui est en libération
conditionnelle. Donc, oui. Mais, oui, il y a une quarantaine de... il y a 40
maisons de transition au Québec.
Mme Maccarone : Parce que ce
qu'on a entendu, c'est qu'on a un grand besoin d'en avoir plus. Alors, combien
est-ce que nous avons besoin, combien de places? Ça coûte combien? Est-ce qu'il
y a des régions spécifiquement ciblées?
Mme Lejour (Véronique) : Je
vais me permettre juste de faire la distinction entre les ressources de
transition, vraiment, qui accueillent une clientèle contrevenante, versus des
centres spécialisés en psychiatrie légale. Ça, il y en a quatre, donc c'est
très différent. On en a quatre dans la région de Montréal. Nous, on dessert
la... Saint-Jérôme aussi. On a une petite ressource de 10 personnes à
Saint-Jérôme. Donc, au total, si je prends... de L'Entre-toit, on a 64
résidents. Tantôt, j'entendais des chiffres de 700 personnes qui sont détenues
sur la commission d'examen. Ils ne sont pas tous concentrés à Montréal, là.
Donc, on sait que même, bon, Pech a une spécificité de psychiatrie légale à
Québec, mais il n'y a pas d'hébergement spécialisé à Québec, non plus, pour
quand les besoins y sont. Donc, ils sont partout. À quel volume? Ça, nous, on
n'a pas les données, malheureusement. Mais c'est sûr qu'ils sont là, les
besoins sont là.
Mme Maccarone : O.K. Merci
beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
:Alors, je vous remercie beaucoup de
votre collaboration et de votre contribution à nos travaux.
Avant de conclure des auditions, je
procède au dépôt des mémoires des organismes et des personnes qui n'ont pas été
entendus lors des auditions publiques.
Et la commission, ayant accompli son
mandat, ajourne ses travaux au jeudi 12 septembre, à 8 heures, où elle se
réunira en séance de travail. Alors, merci beaucoup, et bonne fin de journée.
(Fin de la séance à 17 h 44)