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Version préliminaire

43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Le mardi 23 mai 2023 - Vol. 47 N° 16

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 15, Loi visant à rendre le système de santé et de services sociaux plus efficace


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Journal des débats

9 h 30 (version non révisée)

(Neuf heures cinquante-neuf minutes)

Le Président (M. Provençal) :À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je vous souhaite la bienvenue et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leur appareil électronique.

La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi numéro 15, loi visant à rendre le système de santé et de services sociaux plus efficace.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Alors, Mme Caron, La Pinière est remplacée par Mme Setlakwe, Mont-Royal–Outremont.

Le Président (M. Provençal) :Ça me fait plaisir. Merci, Mme la secrétaire. Nous entendrons ce matin les témoins suivants : la Table de regroupements provinciaux d'organismes communautaires et bénévoles, l'Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec et l'Ordre des pharmaciens du Québec.

Nous allons donc débuter notre journée de travail en souhaitant la bienvenue à la Table des regroupements provinciaux d'organismes communautaires et bénévoles. Alors, mesdames, 10 minutes pour votre présentation et par la suite, nous procéderons aux échanges. Je vous cède la parole.

• (10 heures) •

Mme Fedida (Gaëlle) : Bonjour, je suis Gaëlle Fedida. Je préside la table et je suis accompagnée de Mercédez Roberge, qui la coordonne depuis 16 ans maintenant. Donc, la table des regroupements provinciaux et des organismes communautaires et bénévoles, c'est une concertation de tous les partenaires communautaires du ministère de la Santé et des Services sociaux depuis les années 80. Elle compose... Elle est composée de 44 regroupements nationaux, ce qui représente...


 
 

10 h (version non révisée)

Mme Fedida (Gaëlle) : ...3200 groupes communautaires de base. Notre mandat essentiel, c'est d'assurer l'équité dans l'accès aux services pour la population, donc l'équité entre nos membres et les groupes communautaires, partenaires du ministère de la Santé.

Grossièrement, concernant le p.l. 15, nous estimons que ça ne répond pas aux besoins. Il y a un enjeu de privatisation du réseau public qui est quand même une tendance majeure. Et nous, on va se concentrer pour vous présenter ce qui lève... ce qui est lié aujourd'hui aux organismes communautaires, et notamment les impacts du PL 15 sur les liens entre les organismes communautaires et le ministère de la Santé, qui est un bailleur de fonds, le bailleur de fonds principal des organismes communautaires. Donc, dans cette relation-là, on estime qu'il y a une atteinte au droit d'association et au respect du droit à la santé. Enfin, on veut aussi souligner qu'il y a quand même beaucoup d'enjeux autour des modalités de la consultation, qui est extrêmement rapide. Et nous sommes... il n'y a que deux groupes communautaires que vous allez entendre, malheureusement, vu la rapidité des... de la consultation, donc vous avez aussi le réseau des tables de groupes de femmes que vous rencontrerez cet après-midi, mais sinon, c'est finalement les seuls sons de cloche que vous aurez... que vous aurez avec la très courte consultation.

Donc, tout de suite, je vais vous parler du fait que les organismes communautaires en santé et services sociaux ne sont ni des établissements privés... ni des entreprises privées, je veux dire, ni des établissements publics. Il est absolument nécessaire de faire la distinction entre les OCASSS, donc organismes communautaires autonomes en santé et services sociaux et les entreprises privées ou les établissements publics. Pourquoi? Pour garantir leur autonomie. Les OCASSS appartiennent et sont gouvernés par leurs membres, d'où le principe de la politique de l'action communautaire autonome au Québec qui est très distinctif du Québec, d'ailleurs, c'est par, pour, avec la population. Donc, on parle bien des communautés locales qui se dotent de structures complémentaires au réseau de la santé, qui ne peuvent pas en aucun cas y être assimilées, et donc pas en termes des règles qui s'appliquent à elles non plus. Donc, on demande que ce soit précisément nommé dans le PL 15, qui donne... qui dit qui vont parler de plusieurs programmes, puis là on ne parle même pas du PSOC, qui existe quand même depuis 40 ans, qui ne parle pas non plus de la politique de l'action communautaire autonome, alors qu'elle existe aussi depuis plusieurs années. On demande à ce qu'un statut juridique distinct soit proposé pour les OCASSS et qui donc pourrait être... nous permettre d'être clairement distingués, notamment de tout le secteur lucratif. Parce qu'ici on parle des... on a l'impression d'être confondus avec les entreprises privées, alors que nous sommes sans but lucratif, contrairement aux entreprises privées. Je vais laisser la parole maintenant à ma collègue Mercédez.

Mme Roberge (Mercédez) : Oui, et simplement aussi pour vous aviser que, bien sûr, on pourra discuter à la fin, là, de d'autres recommandations qu'on a dans notre mémoire qui touchent l'ensemble, d'autres enjeux plus globaux. Mais on continue de se concentrer sur ce qui concerne directement les organismes communautaires. Donc, le ministère de la Santé est effectivement un bailleur de fonds et nous regardons le projet de loi 15 en fonction de sa capacité ou non à assurer l'équité d'accès de la population aux OCASSS, aux organismes que la population se donne. On a quand même pris soin d'indiquer quelques informations sur la façon dont actuellement le PSOC fonctionne pour voir les différences et des conséquences qu'apporterait le projet de loi 15. Le PSOC, donc on rappelle qu'il est quand même composé de trois modes de financement. On parle souvent à une mission globale, mais il y a d'autres modes, et il y a aussi d'autres formes de financement que le ministère de la Santé attribue aux groupes communautaires sous différents formats. Et il y a des... une partie de ces financements-là qui sont documentés. Il y a une partie qui ne l'est pas. Notamment, les ententes de services ne sont pas documentées, mais je reviens au PSOC, le PSOC, pour nous, est partiellement régionalisé et partiellement harmonisé. Ce qui est harmonisé, ce sont ce qu'on appelle les fondements, les fondements comme des conditions d'admission, les formulaires, des règles au niveau de l'indexation annuelle, la reddition de comptes. Ce sont des règles qui doivent être appliquées partout pour assurer l'équité. Donc, c'est ce qu'on appelle les fondements harmonisés, et l'aspect régionalisé se réalise par l'attribution des subventions par les CISSS et les CIUSSS actuellement aux groupes locaux et régionaux...

Mme Roberge (Mercédez) : ...dans le mémoire, on vous a indiqué quand même des petits... quelques données importantes à regarder qui viennent de l'étude des crédits de 2021-2022. Il y a 3 035 OCASSS qui reçoivent du financement pour la mission globale, et plus de la moitié de ceux-là reçoivent également du financement sous d'autres formes. Le document d'étude des crédits parlait du financement hors PSOC et mêmes autres financements, puis je vous rappelle qu'en plus il y a encore les ententes de service qui ne sont pas là-dedans.

Ça veut dire, ça, que les OCASSS sont autonomes et doivent l'être pour recevoir du financement à la mission globale. Donc, lorsqu'un OCASSS est déjà autonome, il le demeure, peu importe la source, le type du financement qu'il reçoit. Gaëlle a parlé de la politique gouvernementale de l'action communautaire, elle protège les organismes par rapport à leurs pratiques de transformation sociale notamment, quelle que soit la forme de financement qu'ils reçoivent.

Et ce changement-là, cette considération-là est importante lorsqu'on regarde le projet de loi. On constate, par exemple, que le PSOC, donc, Gaëlle l'a dit, n'est même pas mentionné. Pourtant, il existe depuis 1973. Alors, on ne comprend pas que le projet de loi dit que Santé Québec va élaborer un programme. Il est déjà élaboré, le programme. De quoi parle-t-on?

On comprend, par le projet de loi, que le PSOC demeurerait... les orientations du PSOC demeureraient sous la responsabilité du ministre et que l'opération se ferait par les... par Santé Québec et ses divisions régionales, qui vont donc également distribuer les subventions. Mais, pour que cette séparation-là entre orientations et opérations fonctionne, dans le cadre du PSOC, il y a des conditions à remplir.

Le fait de confier l'administration du PSOC à une instance nationale, ça... cet élément-là a du potentiel au niveau de l'assurance d'équité, puisque ça peut être une manière d'assurer l'application des règles harmonisées du PSOC dans toutes les régions, peu importe le code postal, hein, pour des personnes qui y habitent. Mais la composition du conseil d'administration de Santé Québec nous inquiète. Étant surtout composé de gens du milieu des affaires, on s'inquiète que, par méconnaissance, ces membres-là du conseil d'administration ne... prennent des décisions qui vont à l'encontre du respect de l'autonomie, du respect des pratiques et des actions de transformation sociale des OCASSS.

On craint aussi que Santé Québec n'ait pas les leviers qu'il faut pour faire appliquer les orientations. Et ça, ça serait un retour, en fait, à la situation actuelle où nous avons énormément de difficulté à faire respecter des règles harmonisées. Et le ministère n'avait pas à créer Santé Québec ni à faire... ni à le créer sous la forme d'une société d'État, parce que ça, c'est un problème majeur qu'on souligne dans l'autre section de notre mémoire, pour régler ce problème-là.

Ce qu'on note aussi, c'est un petit oubli, un petit oubli qui nous concerne, nous, particulièrement. La gestion du PSOC actuellement fait en sorte que les subventions attribuées aux organisations nationales et aux centres d'aide et d'accompagnement aux plaintes ne sont pas administrées par les CISSS et les CIUSSS, mais le projet de loi oublie de le mentionner. On craint que l'analyse accélérée du projet de loi fasse en sorte que cet oubli-là ne soit pas traité.

Il y a un élément très, très, très important dans le projet de loi, qui nous inquiète énormément, c'est la question de l'agrément. On comprend qu'il faudrait qu'un OCASSS détienne un statut d'agrément pour obtenir une allocation, puis une allocation, dans le projet de loi, c'est synonyme d'entente de service. Sauf que, comme on vous l'a dit tout à l'heure, les OCASSS, qui reçoivent toutes sortes de formes de financement, incluant des ententes de service, pour demeurer autonomes, ne peuvent pas se coller à des conditions qui seraient dictées par Santé Québec. Les organismes perdraient toute autonomie en faisant ça. Donc, cet élément... ce dernier élément là doit absolument être retiré. Les groupes communautaires doivent être retirés de l'application de l'agrément aux fins de financement. Sinon, toute l'autonomie dont ils... qu'ils détiennent va être compromise parce qu'on ne peut pas demander à un groupe d'être autonome le lundi et pas le mardi. Ce que...

• (10 h 10) •

Le Président (M. Provençal) :Madame, votre 10 minutes est écoulé. Alors, vous m'excuserez, nous allons maintenant procéder à la période d'échange en débutant avec M. le ministre.

M. Dubé : Bonjour, mesdames. Je suis très, très content...

M. Dubé : ...Mme Fedida, merci, Mme Roberge pour votre présentation. Bien, je peux comprendre que, lorsqu'on fait des changements comme on propose par le projet de loi n° 15, que ça peut soulever toutes sortes de questions. Puis je respecte ça, là, je pense qu'on va avoir... Peut-être juste pour clarifier les choses, on va avoir eu une quarantaine de rencontres, dont la vôtre, mais on va avoir reçu à peu près plus de... je pense que c'est 75 mémoires de différents groupes. Alors, c'est sûr qu'on va avoir écouté et pris en note beaucoup, c'est pour ça que je pense que la vôtre ce matin est très importante, là. Ça fait partie quand même des 75 groupes qu'on va avoir eu des mémoires et avec qui on va pouvoir avoir discuté.

Le fameux programme PSOC dont vous parlez, puis je pense qu'il faut que les Québécois comprennent de quoi on parle, là, je pense que c'est important de prendre juste quelques minutes. Ce programme là pour les organismes communautaires, c'est quand même maintenant plus de... je pense, je dirais un chiffre approximatif, là, à peu près plus de 850 millions qui est redistribué par le gouvernement à tous les organismes communautaires. Puis notre gouvernement, au cours des cinq dernières années, a presque doublé ce programme-là en termes de financement. Donc, ce que... vous avez raison de poser des questions puis de dire : En quoi ce programme-là va changer avec l'avènement du projet de loi n° 15? Je veux juste vous rassurer puis rassurer tous les organismes communautaires qui... notre objectif, ce n'est pas de changer ou de diminuer la contribution que le gouvernement va faire à ce programme-là, l'argent qui est là va rester disponible.

Même, je serais curieux, puis c'est une des questions que je veux poser parce que j'ai souvent entendu de plusieurs organismes que c'était un petit peu compliqué en ce moment et qu'il y avait peut être des je ne dirais pas des injustices, mais qu'il y avait certains groupes qui avaient de la difficulté à être reconnus comme comme groupe, parce que souvent on dit : Bon, bien, ce groupe-là... ce groupe communautaire-là, il est en place depuis de nombreuses années, puis on ne questionne pas l'admission ou quoi que ce soit, mais c'est plus difficile pour des nouveaux groupes de faire leur place.

Alors moi, avant de parler de p. l. 15, j'aimerais ça parce que vous l'avez dit, des fois, c'est difficile, qu'est-ce que vous aimeriez qui soit amélioré dans l'attribution? Vous avez parlé tantôt que c'est administré par les CISSS et les CIUSSS, j'aimerais ça vous entendre là-dessus puis après ça, on regardera parce que moi, de ce que je comprends, parce qu'on vise, on vise que l'orientation ministérielle ne changera pas. Santé Québec va les administrer, mais il n'y aura pas de changement dans la façon dont on gère le PSOC. Mais je veux vous entendre sur vos insatisfactions du PSOC actuel et en quoi vous êtes inquiets que ces chances-là même peut-être auraient plus de chances d'arriver avec un Santé et Québec? Je vous laisse répondre à cette première question-là.

Mme Fedida (Gaëlle) : Mais moi, je vais déjà peut être vous expliquer que la révision du PSOC, justement, on essaie vainement et désespérément d'y travailler depuis plusieurs, plusieurs, plusieurs années. Malheureusement, les... malheureusement, on est... ça ne fonctionne pas parce qu'on n'a pas la capacité de travailler dans des délais corrects pour les... pour les organismes. Donc là, ça fait... ça fait quatre ans qu'on discute de la façon dont on voudrait travailler pour réformer le PSOC. Alors, si on s'était entendu depuis quatre ans, on l'aurait réformé, ça fait au moins deux ans déjà. Je vais... je vais... Ça, c'est pour le petit stand de pouvons-nous... pourrions-nous avancer s'il vous plaît. Je vais laisser Mercedes développer sur les enjeux.

M. Dubé : Mais c'est ça, je pense, qui serait plus important pour nous de comprendre : Qu'est ce que vous voulez réformer dans le PSOC qui est le programme? Et après ça, on pourra discuter : Est-ce que p. l. 15 va s'assurer que ça va être plus facile avec un organisme comme Santé Québec de faire ces changements-là? Ça fait que je voudrais vous entendre sur des changements que vous voulez faire.

Mme Roberge (Mercédez) :  Un des... un des sujets importants pour nous, c'est... ça s'appelle l'harmonisation du PSOC. On s'entend, le PSOC est partiellement régionalisé et partiellement harmonisé. Mais l'équilibre entre ces deux aspects-là est difficile à obtenir et difficile à surveiller et à faire appliquer. Lorsque nous voyons, par exemple, nous, des écarts de reddition de comptes...

Mme Roberge (Mercédez) : ...qui est un élément qui est harmonisé depuis 2008. Lorsqu'on voit que, dans certaines régions, des CISSS et des CIUSSS ajoutent des règles de reddition de comptes à celles qui sont convenues comme étant celles génériques, générales pour tout le monde et qu'on contacte les responsables au ministère et qu'on se fait dire qu'elles ne peuvent rien faire, nous n'acceptons pas ça. Nous ne comprenons pas ça et n'acceptons pas ça puisqu'il s'agit de règles harmonisées. Les nuances régionales qui peuvent s'appliquer... Et tout ça a un effet, en bout de ligne, sur ce que vous nommez, M. le ministre, comme étant l'accessibilité du PSOC aux groupes O.K.? L'aspect... Et donc, dans chacune des régions, oui, les CISSS et les CIUSSS ont... dans leur administration, ont une attitude, mais elle doit se faire dans le cadre des règles, à l'intérieur des règles.

Le projet de loi nous inquiète à l'égard d'une... Ce qui nous inquiète dans le projet de loi, c'est le... qu'on n'y retrouve pas l'assurance que les divisions régionales de Santé Québec... Parce qu'on comprend qu'elles vont remplacer les CIUSSS dans le rôle administratif du PSOC pour les groupes régionaux et locaux, mais on ne trouve pas l'assurance de ça, que... dans le projet, que les divisions régionales de Santé Québec vont appliquer les règles harmonisées du PSOC et vont respecter les limites de la régionalisation et les limites de... et appliquer l'harmonisation.

Un des exemples qui réfèrent à ce que vous avez nommé au niveau de l'accès, c'est les critères d'admissibilité au PSOC, et les critères d'admissibilité au PSOC dépendent de la manière dont... Ça s'appelle la typologie, le type de groupe, la classification. Pour être reçu au PSOC, il faut rentrer dans une des cases, une des typologies. Ces typologies-là sont censées être les mêmes appliquées partout, sauf qu'on découvre que, dans certaines régions, il y a des typologies qui n'existeraient pas, ce qu'on ne comprend pas, ce qu'on ne croit pas. Alors là, on a des problèmes au niveau d'une... du manque d'application d'une règle harmonisée qui touche à l'admission. Et ça, ça fait en sorte que, dans une région, un groupe va être admis au PSOC et qu'il ne le serait pas s'il avait un autre code postal. Et ça, c'est la population de ces régions-là qui est désavantagée.

M. Dubé : En fait, c'est très clair, ce que vous dites. Ce n'est pas la création de Santé Québec comme telle qui est le problème, c'est que vous dites : En ce moment, l'administration du PSOC n'est peut-être pas harmonisée, n'est peut-être pas... les règles ne seront peut-être pas claires pour tout le monde, mais ça n'a rien à voir avec la création de Santé Québec. Alors, je pense qu'il va...

Mais je veux juste continuer mon point, parce qu'une des choses qu'on va vouloir faire avec p.l. 15, c'est qu'on ne peut pas régler tous les problèmes du monde, on ne peut pas référer à un programme gouvernemental dans un projet de loi comme celui-là, un projet... On se comprend bien là-dessus. Vous êtes d'accord avec ça. Alors, je pense que notre choix, c'est de bien vous entendre aujourd'hui puis de dire : Il y a des améliorations à faire au PSOC. Non seulement notre gouvernement y a mis beaucoup d'argent, mais ce n'est pas la première fois que j'entends ça, puis j'en ai parlé d'ailleurs à mon collègue Lionel Carmant, qui a quand même cette responsabilité-là, le ministre des... au niveau des services sociaux, c'est d'essayer d'harmoniser ça. Mais ce n'est pas Santé Québec qui va changer ça, là. Et ça, je pense que c'est important de comprendre. Alors, je veux juste que les gens comprennent bien que vos réticences sont plus face au programme lui-même.

• (16 h 20) •

Maintenant, si vous aimez moins la création de Santé Québec, je veux vous entendre là-dessus aussi, mais je pense qu'il faut être capable de faire la différence entre les deux. Est-ce qu'on peut continuer d'améliorer le programme PSOC, dans lequel on a mis beaucoup plus d'argent? C'est même le double des montants qui sont faits depuis quelques années. Mais, en même temps, je veux vous entendre sur Santé Québec, parce que c'est là qu'on pourrait peut-être dire : Est-ce que dans les règlements du PSOC, dans l'application que va en faire Santé Québec, lorsque les transferts se font entre le ministère et Santé Québec... qu'est-ce qu'on pourrait améliorer? C'est là que je voudrais vous entendre, s'il vous plaît.

Mme Roberge (Mercédez) : Eh bien, un des... une des choses qui nous inquiète, c'est dans l'ensemble du projet de loi, lorsque... Bon, à l'exclusion des quelques articles où il est nommément question des organismes communautaires, autrement, dans l'ensemble du projet de loi, on sent que les groupes communautaires sont amalgamés à organisation privée, à établissement du réseau même...

Mme Roberge (Mercédez) : ...et ça parce que, légalement, les organismes communautaires sont sous la... à la troisième partie de la Loi sur les compagnies, sauf que, lorsque le projet de loi ne fait pas la distinction entre une règle applicable aux entreprises privées, entendues au sens d'entreprises privées lucratives qui vont qui vont dispenser des soins privés sur... en facturant à des personnes, le projet de loi devrait à chaque fois s'assurer qu'il n'y a aucune confusion entre les entreprises privées lucratives et les organismes privés qui sont des organismes communautaires. Et ça, dans le projet de loi, il y a différents...

M. Dubé : Excusez-moi, Mme... Mme Roberge, je juste. Quand vous dites ça, on reporte quand même toutes les règles de la LSSS à la... dans la nouvelle loi en ce moment, un organisme à but non lucratif, vous avez raison, c'est en vertu de cette loi-là, mais il n'y a pas de changement entre la loi LSSS actuelle et ce qu'on propose dans le projet de loi n° 15. Qu'est-ce qu'on devrait changer selon vous, pour faciliter ça? Parce que ce n'est pas le... ce n'est pas le fait de créer le p. l. 15 qui change la façon de reconnaître un organisme à but non lucratif.

Mme Roberge (Mercédez) : Dans ce cas-là, M. le ministre, pour quelle raison dans votre plan santé? Dans le document que vous avez déposé il y a, en page 8, un tableau qu'on a reproduit dans le mémoire où dans la section Portrait du volume des soins et services rendus et capacité du réseau, nombre d'installations, il y a une ligne organismes pour communautaires comme si les organismes communautaires étaient des installations du réseau et/ou des organismes privés à but comme les autres, comme les entreprises. Il y a un glissement de vision. Et on vous dit c'est bien que certains articles précisément sur le communautaire précisent qu'on parle du communautaire, mais de faire attention, dans le restant du projet de loi, à bien distinguer lorsqu'il y a des règles qui ne s'applique qu'aux entreprises privées ou aux établissements du réseau, qu'elles ne s'appliquent pas aux groupes communautaires. Certains articles le disent, sauf qu'il ne faut pas... mais pas partout.

M. Dubé : Mais je ne pensais... mais, mais c'est un très bon point et c'est pour ça que je vous écoute avec intérêt parce que de ce genre, de ce que je comprenais jusqu'à tant que je vous entende, puis c'est pour ça que vous êtes bienvenues de dire ce que vous dites, là, je ne pensais pas qu'il n'y avait aucun changement par rapport à la LSSSS puis je vais le vérifier parce que moi, pour moi, écoutez, c'est quand même beaucoup d'argent, là. C'est presque 1 milliard qu'on met aux organismes communautaires annuellement. En tout cas, de toute façon, si on n'est pas là, ça s'en va là. Je vous considère, puis d'ailleurs c'est pour ça qu'on en a beaucoup parlé dans le plan santé, comme un partenaire, pas comme un organisme privé. Alors, si vous avez cette perception-là, bien, je pense qu'on fera une analyse correcte de la loi. Mais il n'y avait pas d'objectif de changement à la LSSSS si ça peut vous rassurer. Mais si vous avez cette perception-là, je veux...

M. le Président, il me reste combien de temps?

Le Président (M. Provençal) :...trois minutes.

M. Dubé : Il reste trois minutes, eh, je n'ai pas une seconde, je vais essayer de...

Dites-moi comment vous... Le fait qu'on a mis les groupes, je vais appeler ça, là, du côté des travailleurs sociaux, beaucoup plus proche du processus décisionnel avec le comité interdisciplinaire, comment vous vous sentez là- dedans? Vous sentez-vous loin parce que vous vous travaillez beaucoup plus avec la partie services sociaux qu'avec la partie clinique médicale? Je vais dire ça comme ça. Comment vous vous retrouvez dans cette nouvelle organisation-là où en est le comité interdisciplinaire et avec le bloc des services sociaux? Est-ce que ça vous aide à avoir une meilleure voix? Je veux vous entendre là-dessus.

?

Mme Roberge (Mercédez) : Moi, je laisserais les travailleurs et travailleuses sociaux répondre à cette question-là. Ce n'est pas quelque chose sur laquelle nous, on peut se positionner. Ce qu'on a cependant souligné au niveau des... de la composition de différents comités, c'est qu'au niveau par exemple, du conseil d'administration de Santé Québec, la forte proportion de personnes issues du milieu des affaires, les Top Gun donc que vous avez... l'expression que vous avez utilisée, ne peut pas nous donner...

Mme Roberge (Mercédez) : ...confiance dans le fait qu'un conseil d'administration de Santé Québec et de ses... et de ses divisions régionales va nous... va bien comprendre les spécificités des groupes communautaires et, par extension, du travail social, mais je laisserai les gens en travail social le dire.

M. Dubé : O.K. Bien, on aura la chance d'en parler, mais c'est parce que je fais souvent le lien avec, justement, les travailleurs sociaux puis les organismes communautaires, qui sont très, très proches, très, très proches avec... justement pour faire les bonnes choses. Puis je pense que, dans... l'objectif était de leur donner une plus grande place, qui... de façon non seulement accessoire mais très importante, peuvent vous donner une meilleure voix au niveau du continuum de soins. Alors, si vous pensez que... Je suis un peu surpris que ça ne vous donne pas une meilleure voix par rapport à la direction qu'on veut prendre. Peut-être... Madame Fedida, vous voulez... Votre micro est fermé.

Mme Fedida (Gaëlle) : Là, je pense que, normalement, il est ouvert.

M. Dubé : Oui, oui, là, je vous entends.

Mme Fedida (Gaëlle) : Oui? Vous m'entendez? Merci.

M. Dubé : On vous attend.

Mme Fedida (Gaëlle) : Je pense que peut-être la confusion, c'est que, dans le communautaire, il n'y a pas que des travailleurs sociaux, il y en a, oui, mais ce n'est pas forcément ça, le gros. Puis, quand vous, vous parlez des travailleurs sociaux, c'est dans le réseau de la santé, alors que là c'est... Vous semblez peut-être penser que le réseau communautaire est comme géré ou que le partenariat se déploie avec les travailleurs sociaux. Ce n'est pas du tout le cas. Le communautaire travaille avec un directeur des services de chaque établissement qui est responsable de la table... de la concertation avec les groupes communautaires, puis il y a des instances locales pour ça. Mais ce n'est pas particulièrement le secteur travailleur social d'un CIUSSS avec qui nous, on travaille. Pas... Ce n'est pas du tout comme ça que ça... que ça matche, je vais dire.

M. Dubé : Mais...

Le Président (M. Provençal) :...

M. Dubé : O.K. Bien, je pourrai continuer plus tard...

Le Président (M. Provençal) :Alors, nous allons poursuivre cet échange avec le représentant de l'opposition officielle et député de Pontiac. Alors, c'est à vous la parole.

M. Fortin :Merci. Merci, M. le Président. Bon matin, tout le monde. Merci à vous deux d'être avec... d'être avec nous virtuellement ce matin. Votre... Dans votre allocution d'ouverture, là, vous avez terminé... puis je comprends que vous n'aviez peut-être pas tout à fait terminé, mais vous avez terminé en parlant de l'autonomie des organismes communautaires, quelque chose qui, je le sais, là, vous est cher, et avec raison, mais vous avez parlé de la question des agréments. Donc, le projet de loi, de la façon qu'il est écrit, là, vous forcerait, les organismes communautaires, à, disons, signer cet agrément-là, et vous considérez que ça vous enlève une certaine autonomie. J'aimerais ça que vous nous l'expliquiez un petit peu plus en détail, là, à savoir qu'est-ce que ça viendrait vous enlever ou vous obliger, là... ou qu'est-ce que vous entrevoyez si cette... si ces articles-là sont adoptés.

Mme Fedida (Gaëlle) : C'est vraiment la remise en cause du PSOC et du fondement du PSOC. C'est-à-dire que ça voudrait dire qu'il y aurait d'autres critères qui font qu'on... un organisme va être partenaire du CIUSSS, alors que les critères, c'est les fameux fondements du PSOC dont parlait Mercédez, qui sont harmonisés, qui existent depuis 40 ans puis sur lesquels on essaie de continuer de faire de la bonification avec le ministère de la Santé, ce n'est pas toujours évident, mais... Donc, actuellement, il y a un régime clair qui définit la portée de l'autonomie, finalement, puis c'est la politique générale sur les organismes communautaires autonomes.

Alors, à partir du moment où un des ministères dit : Bien, moi, pour mes partenaires, je vais y aller avec un agrément, ça veut dire qu'on est en train de balayer d'un revers de la main tout ce qui se passe depuis 40 ans. Le réseau communautaire de plus de 3 000 groupes qui travaille actuellement et qui a l'heure juste, qui sait, O.K., où on s'en va, comment on travaille, c'est quoi, les étapes, c'est quoi, les modalités de financement, c'est quoi, les modalités de reddition de comptes, et cetera, tout ça est géré dans le PSOC. Et ici on nous parle de différents programmes qui seraient élaborés avec des questions d'agrément, donc, comme si le PSOC n'existait pas et comme s'il fallait qu'on refasse... qu'on était sur une page vierge puis on va recommencer toute la job. O.K. Bien, peut-être que c'est ça qui va finir par arriver, peut-être que ça serait la façon dont on réformera le PSOC, mais ce n'est pas tout à fait dans cette dynamique-là qu'on se sentait jusque là, en sachant que les travaux sur la vision du PSOC, ça dure depuis quatre ans, c'était déjà sous cette administration-là et c'est une sous-ministre qui avait ouvert ces travaux-là.

• (10 h 30) •

M. Fortin :Parce que vous... Parce que vous...

Mme Roberge (Mercédez) : Si je peux continuer...

M. Fortin :Non, allez-y. Allez-y, Mme Roberge.

Mme Roberge (Mercédez) : Si je peux poursuivre, l'agrément semble une deuxième voie pour obtenir du financement. Et le problème, c'est que cette voie-là n'est pas indépendante du PSOC...


 
 

10 h 30 (version non révisée)

Mme Roberge (Mercédez) : ...parce que les groupes communautaires reçoivent souvent du financement de la mission globale, en plus, parce que ce n'est pas suffisant pour leur mission globale. Voilà. Le PSOC n'étant pas suffisant pour leur mission globale, les groupes sont obligés d'aller chercher du financement supplémentaire sous d'autres formes, notamment des ententes de services, et l'agrément associe ententes -on espère que c'est uniquement pour des ententes et pas pour tout financement reçu par le gouvernement. Le ministre nous dit que le PSOC n'a pas changé., donc ça va, on comprend ça. Mais pour obtenir une entente de service, il faudrait qu'un groupe satisfasse à des conditions pour l'instant inconnues, mais qu'on craint parce que le petit tableau à la page 8 du plan santé qui amalgamait lesdits groupes à des établissements du réseau, on fait le lien entre l'agrément et la vision des groupes, des visions utilisatrices de l'état des groupes communautaires.

Donc, si pour obtenir une entente de services, un groupe doit satisfaire à des critères qui font en sorte que ce qu'il fait, si ces actions sont guidées, sont dictées par l'État, ce groupe-là n'est plus un groupe communautaire autonome. Contre son gré, il ne le serait plus. Et puisque c'est le même groupe qui reçoit du financement sur la base de son statut d'autonome et d'autre part, sur la base d'un statut non autonome, il ne peut pas se couper en deux, ce groupe-là. Donc, on demande d'exclure les groupes communautaires de la notion de l'agrément. On comprend pour quelles raisons ça peut exister, mais pas pour les groupes communautaires et parce que, sinon, ça équivaut à assimiler les groupes communautaires qui recevraient des... qui ne recevraient ne serait ce qu'une petite partie sous entente de services. Ça peut être un 5 000 $ dont on parle. Ça équivaudrait à les assimiler au réseau. Et pour nous, bien, on parle des mêmes groupes. Ce n'est pas des... ce n'est pas. Il n'y a pas 3 000 groupes d'action communautaire autonome plus 3 000 groupes qui ont des ententes de services. C'est une intersection tout ça. Il y a la majorité des groupes, heureusement, sont financés à la mission globale, mais ça ne veut pas dire qu'il faut alourdir la tâche de ceux qui doivent combiner le financement.

M. Fortin :Très bien. Mais merci, puis ça.... Je comprends ce que vous dites. Vous avez besoin d'une certaine autonomie ou d'une certaine flexibilité de... parce que vous n'êtes pas le réseau. Vous faites les choses que le réseau parfois ne peut pas faire, que le réseau a de la difficulté à faire, que le réseau n'est pas assez flexible pour faire. Alors, si on vous fait rentrer dans toutes ces petites cases là, bien, justement, vous n'arrivez plus nécessairement à prendre ces actions-là qui sont nécessaires pour offrir les services que vous offrez.

La deuxième chose sur laquelle j'aimerais vous entendre, là, c'est vous... Vous dites très clairement que Santé Québec, dans sa forme actuelle avec les Top Gun du ministre, comme vous y avez référé, là -c'est une phrase qui colle, celle-là, M. le ministre- pour le bon que ça amène puis le moins bon peut être, mais sa création va éloigner les décisions des mécanismes de surveillance. J'aimerais ça vous entendre là-dessus, là, à savoir votre grande préoccupation par rapport à la création de Santé Québec, puis le fait que ça s'éloigne un petit peu de tous ces contrepoids, de tous ces contre-pouvoirs- là. Quel... c'est quoi le bout qui vous inquiète le plus?

Mme Roberge (Mercédez) : La Vérificatrice générale du Québec vous en a parlé, lorsqu'elle est venue, sur ses inquiétudes quant à la manière dont... quand on... l'imputabilité de Santé Québec et les... Qui allait surveiller Santé Québec, hein, pour dire les choses crûment? Ce que, nous, nous contestons dans notre mémoire, c'est le fait que ce soit une société d'État qui a été créée. Que Santé Québec soit créée, c'est une chose, mais qu'elle soit créée sous la forme d'une société d'État, pour nous, ça pose problème. On craint qu'au niveau des comptes publics, les... les chiffres, la comptabilité, les revenus et les dépenses de Santé Québec ne soient pas intégrés de la même manière qu'ils le sont maintenant parce qu'ils sont des établissements du réseau dans l'enveloppe du ministère dans les documents d'études de crédits, dans des documents du ministère des Finances et du Conseil du trésor. Comment apparaîtront les informations sur la gestion financière de Santé Québec? On craint que Santé Québec soit poussée pour une... à équilibrer son budget, donc à diminuer... Si ce n'est pas pour faire des profits, ce sera pour... en baissant des services, donc que Santé Québec ait des attentes de rentabilité à remplir comme Hydro-Québec...

Mme Roberge (Mercédez) : ...Hydro-Québec doit le faire. Donc, c'est le statut société d'État qui nous inquiète et le fait aussi que son administration, on a parlé de ce conseil d'administration tout à l'heure, c'est l'administration d'une société d'État. Ce n'est pas la même chose qu'une administration d'un service public. Je suis sûr que, dans un service pour... Un conseil d'administration... les membres d'un conseil d'administration d'un service public n'ont pas à provenir du milieu des affaires, alors que, là, c'est une attente pour ce qui est du conseil d'administration de Santé Québec.

M. Fortin :Très bien. Ça va pour moi, M. le Président. Merci.

Le Président (M. Provençal) :Il reste une minute 20 s, voulez-vous l'utiliser? Oui, Mme la députée de Mont-Royal d'Outremont, oui.

Mme Setlakwe : Merci, mesdames. Peut-être juste élaborer un peu plus. Là, évidemment, le PSOC, on sait à quel point c'est important dans... comme député, à nos bureaux de comté. On a le SAB, le soutien à l'action bénévole, mais, le PSOC, on sait à quel point c'est fondamental, puis les organismes nous en parlent. Les critères sont pointilleux. Moi, ce que j'entends de votre part, c'est... puis vous avez été rassurées par le ministre, mais c'est que déjà il y a... il y a l'importance de l'autonomie, tout ça, déjà, malgré que le budget est important, il n'est pas suffisant et qu'il y a des organismes qui ne rentrent... ne respectent pas certains critères pointilleux, qui n'ont pas accès à du financement. Pouvez-vous donner des exemples précis? Moi, je lisais des revues de presse sur la psychothérapie. Par exemple, bien, si c'est de groupe, ils sont financés, si ce n'est pas de groupe, ils ne le sont pas. Puis juste donner des exemples concrets sur le terrain à quel point ça fait une différence.

Mme Roberge (Mercédez) : Bien, pour ce qui est de la psychothérapie, peut-être que, là, c'est un peu différent parce qu'il y a des services de psychothérapie qui ne sont pas nécessairement des groupes communautaires du type de ceux qui reçoivent du financement, financement par le PSOC. Mais moi, je vous ramènerais au fait que les groupes communautaires sont issus des communautés le... Donc, Gaëlle, elle a parlé, lorsqu'une... des gens dans une communauté identifie qu'elles ont un besoin et identifie que ce besoin-là... identifie la manière dont elles veulent que ce besoin soit comblé, qui n'est pas celui du réseau, la manière différente, alternative des groupes communautaires. Lorsqu'une communauté voit ce besoin et se crée un organisme qu'elle fait vivre tout le temps, ces communautés-là, bien, sont... ont raison de créer des organisations qu'elles se donnent.

Donc, lorsqu'on voit que le programme, qu'il soit... donc, que ce soit dans son administration régionale ou dans son administration nationale, remet en question la pertinence d'organisation parce qu'il y en a déjà similaire dans la région, ou parce que l'enveloppe est fermée, ou peu importe des raisons administratives, c'est le droit d'association qui est mis en péril... des communautés qui se sont donné une organisation pour avoir une voix collective plutôt qu'individuelle. Les groupes communautaires ne sont pas là que pour des services, ils sont beaucoup là pour défendre les droits, particulièrement le droit à la santé. Donc, ça...

Le Président (M. Provençal) :Madame Roberge, je vais devoir vous...

Mme Roberge (Mercédez) : ...c'est une caractéristique spécifique.

Le Président (M. Provençal) :Madame Roberge, je m'excuse de vous interrompre. J'ai laissé filer un petit peu pour que Mme la députée puisse avoir une portion de sa réponse. Nous allons poursuivre maintenant avec le deuxième groupe d'opposition et c'est le député de Rosemont qui va prendre la suite de cet échange. M. le député.

• (10 h 40) •

M. Marissal : Merci, M. le Président. Bonjour. Ça va être une longue journée aujourd'hui. Bonjour à mes collègues aussi. Oui, une belle journée. Merci, mesdames, d'être là. Comme je n'ai pas beaucoup de temps, je vais néanmoins prendre la peine de dire que je vais ajuster votre nom et votre mémoire à la longue liste de groupes qui ont vu des choses dans le projet de loi qui apparemment n'existent pas vraiment. Ça commence à devenir un peu troublant. J'ai l'impression qu'on va s'acheter des lunettes, tout le monde, à la sortie d'ici, là. Parce que vous avez vu des choses, le ministre dit : Ce n'est pas là. On prend des notes, mais on va finir par s'y perdre, là. Puis je ne sais pas qui a tort puis qui a raison, à la fin, de qu'est-ce qu'on voit dans ce projet de loi là.

Bref, quiconque fréquente un peu les groupes communautaires... vous avez mis bénévole et communautaire ensemble, là, je ferais néanmoins la distinction, là, parce que ça nuit parfois au communautaire, parce qu'on pense que c'est des bénévoles, et ainsi de suite, là. Mais quiconque a fréquenté un peu les groupes bénévoles sait que le principal problème, c'est la pérennité du financement, la prévisibilité du financement et la reconnaissance, par exemple, par un financement à la mission. Est-ce qu'il y a quelque chose, dans le projet de loi n° 15, en ce moment, qui commencerait à régler ce problème fondamental dont on a...

M. Marissal : ...entend parler. J'étais encore avec des groupes communautaires dans ma circonscription jeudi et vendredi dernier. C'est systématique, ça revient constamment. Est-ce qu'il y a quelque chose, dans le p.l. n° 15, qui vous laisse croire qu'on pourrait régler enfin les problèmes, justement, de pérennité, de prévisibilité et de financement à la mission pour reconnaître enfin ce que vous faites?

Mme Roberge (Mercédez) : Bien, il y a plutôt... Non, il n'y a pas ça dans le projet de loi. Il y a plein de... Plusieurs éléments nous amènent des craintes de perte d'autonomie et de perte de capacité des groupes communautaires à continuer d'avoir... de transformation sociale, leur action citoyenne. J'ai nommé tout à l'heure l'agrément, qui est un problème vraiment, vraiment important. Si... La question aussi de la répartition des responsabilités entre les opérations et les... les opérations, voyons, et la... et les orientations, voilà, c'est de nature, cette division-là, c'est de nature à favoriser l'harmonisation et l'application des règles, donc la stabilité dont vous parlez. Sauf que des conditions ne sont pas remplies, et on a besoin d'avoir une assurance plus grande pour montrer que les règles qui doivent être appliquées partout, pour des raisons d'équité face à la population, le seront.

Il y a... Le projet de loi ne précise pas quels seront les rôles des divisions régionales de Santé Québec dans l'administration du PSOC. C'est important comme précision. Tant que ce n'est pas précisé, nous demeurons avec nos craintes que la situation actuelle se poursuive, qu'on soit toujours en train de se battre pour que des règles, des règles devant s'appliquer partout s'appliquent partout. Donc, si ce n'est pas clair que les divisions régionales de Santé Québec appliquent les règles harmonisées du PSOC, et donc, les orientations du ministre, on n'est pas plus avancé que maintenant.

M. Marissal : Bien, je vous invite donc, dans un avenir assez proche, là, à nous envoyer plus distinctement des amendements possibles, là. Parce que ce projet de loi, vous le savez, il fait 1 200 articles, on n'est pas sorti du bois, il est perfectible, là, j'en suis à peu près certain, là, qu'il est perfectible. Il faudrait qu'on définisse à un moment donné, puis qu'on rétablisse, là, ce que j'appellerais le flou entre ce qu'un groupe comme le vôtre voit dans le projet de loi puis ce que le projet de loi veut faire. À un moment donné, il va falloir que tout le monde focusse les jumelles, là, sur le même point puis qu'on soit... qu'on ait une idée à peu près claire de ce qu'on voit là-dedans. Donc, si... Aidez-vous... Aidez-nous à vous aider, là. Si vous avez des amendements précis à apporter, à condition que le projet de loi est perfectible, là, puis qu'on soit capable d'y aller article par article, là, moi, je me porte volontaire, en tout cas, effectivement. Parce qu'au moins le moins qu'on puisse faire, c'est ne pas nuire à votre mission essentielle. Je vous remercie.

Le Président (M. Provençal) :Aurez-vous le goût de poser une deuxième question, M. le député?

M. Marissal : Oh mon Dieu! C'est luxueux.

Le Président (M. Provençal) :Un petit luxe ce matin.

M. Marissal : C'est Noël, c'est le Noël des campeurs. Oui, bien, rapidement, là. Vous dites : «Que l'État définisse un statut juridique spécifique aux organismes communautaires autonomes afin d'éviter les amalgames...» Je crois comprendre que vous voulez éviter les amalgames avec les organismes privés. Mais de quelle nature souhaitez-vous une distinction juridique?

Mme Fedida (Gaëlle) : Bien, clairement, dans... Actuellement on est régie par la loi... le chapitre III de la Loi sur les compagnies. Bien, en l'occurrence, on est régis par ça, mais toutes les modalités ne s'appliquent pas à nous, curieusement quand même, notamment sur la reddition de comptes. Donc, ça, il faut vraiment faire une césure claire entre ce qui est à but lucratif et à but non lucratif. C'est quand même la base. C'est surtout ça, l'enjeu, pour nous. Parce que des entreprises à but lucratif, évidemment, leur job dans la vie, c'est de faire de l'argent pour leurs actionnaires, puis c'est bien correct, mais nous, ce n'est pas ça qu'on fait. Et concrètement, sur des... que ce soit des modalités pas de reddition de compte, mais des modalités administratives qui doivent être surveillées de très près au niveau des secteurs à but lucratif, bien, c'est autant de choses qui alourdissent l'administration dans les organismes communautaires de manière inutile.

Puis je voulais simplement aussi peut-être refaire un petit millage sur l'exemple qu'on nous demandait tout à l'heure. Une agence Québec régionale, bien, est-ce qu'elle fera mieux que les CIUSSS, qui aujourd'hui n'en font qu'à leur tête...

Mme Roberge (Mercédez) : ...le même groupe dans un CIUSSS va être accepté au PSOC, dans l'autre ne sera pas accepté au PSOC. Le même groupe dans un... Moi, je vais vous dire, moi, je représente des maisons d'hébergement de deuxième étape, j'en ai certaines qui sont au PSOC, dans d'autres régions, elles ne sont pas au PSOC. Dans certaines régions, au PSOC, c'est des milieux de vie. Dans d'autres régions, au PSOC, c'est des maisons d'hébergement. C'est la foire totale, ça. Et ça, ça a des incidences sur leur financement parce que chaque catégorie a une façon différente d'obtenir du financement. Et c'est comme ça que je demande de travailler depuis quatre ans avec le ministère de la Santé et revenir au fondement du PSOC.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup, mesdames, de votre contribution puis de votre participation à nos travaux. Sur ce, je vais suspendre temporairement des travaux pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci beaucoup, mesdames.

(Suspension de la séance à 10 h 47)

(Reprise à 10 h 48)

Le Président (M. Provençal) :Nous recevons maintenant l'Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec. Alors, nous avons dans la salle Mme Racicot et Mme Vaillant. Mesdames, je vous souligne que vous avez 10 minutes pour votre présentation, et par la suite nous procéderons aux échanges. Et je vous cède immédiatement la parole.

Mme Racicot (Julie) : M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, merci de nous recevoir. Je suis Julie Racicot, présidente de l'Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec, et cheffe du département de pharmacie à l'Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec, et professeure de clinique à la Faculté de pharmacie du même nom. Je suis en compagnie aujourd'hui de Mme Linda Vaillant, qui est également pharmacienne, directrice générale de l'association. Je vais d'abord laisser Mme Vaillant vous exposer quelques recommandations puis je poursuivrai par la suite.

Mme Vaillant (Linda) : Bonjour à tous! D'entrée de jeu, je veux commencer par vous dire que l'APES adhère aux principes sous-jacents au projet de loi. Toutefois, évidemment, à sa lecture, là, on a eu quelques questions et préoccupations. Et c'est ce dont on va vous faire part ce matin.

Commençons avec la gouvernance. Pour nous, la création d'un organisme comme Santé Québec, c'est une bonne chose. Séparer les orientations des opérations, c'est une bonne chose de notre point de vue. Les établissements de santé, les soins aux patients, le circuit du médicament, les départements de pharmacie, ce sont des opérations. Alors, d'avoir une entité qui s'en occupe spécifiquement, pour nous, c'est une bonne idée.

Toutefois, au sein de Santé Québec, il nous apparaît important d'avoir une direction de soins et services pharmaceutiques. Pourquoi? Parce que le médicament est au centre de toutes les thérapies, de tous les traitements. Dans le projet de loi, le médicament a l'air d'une entité un peu autoportante, alors que le médicament sans pharmacien, je vous dirais qu'il va soit ne rien faire, soit être toxique. Dans tous les cas, il va coûter cher. Alors, pour nous, le médicament doit être rattaché aux soins et services pharmaceutiques, donc prodigué par le pharmacien.

• (10 h 50) •

Le médicament occupe une place centrale dans tous les traitements. On n'a qu'à penser au patient qui va en cabinet voir son médecin en GMF, qui va à l'urgence, qui est admis, qui a une chirurgie d'un jour dans un CMS. Il va à peu près tout le temps sortir de là avec une ordonnance de médicament qu'il va aller chercher à sa pharmacie privée. Donc, comme il est central dans tous les traitements offerts, pour nous, il devrait occuper une direction forte au sein de Santé Québec. Cette direction-là serait chargée de coordonner, sur tout le territoire québécois, les aspects qui sont liés au parcours de soins pharmaceutiques du patient.

Dans ce parcours de soins, à l'heure actuelle, il y a malheureusement des bris de services, il y a des bris dans la continuité. Il y a certains enjeux à ce niveau-là qui nous amènent aussi à vous proposer l'instauration de tables territoriales de soins et services pharmaceutiques. Au même titre qu'on aura des tables en médecine générale et en médecine spécialisée, il nous apparaît important aussi de réunir ensemble les pharmaciens des différents secteurs de pratique. Il faut se rappeler qu'à peu près 80 %...

Mme Vaillant (Linda) : ...des pharmaciens au Québec oeuvrent en pharmacie privée. C'est important, si on veut avoir une continuité des soins, un parcours optimal pour nos patients, de réunir les pharmaciens autour d'une même table, et qu'on ait, donc, des tables territoriales de soins et services pharmaceutiques, qui pourraient être sous l'égide de la direction de soins et services pharmaceutiques instaurée au sein de Santé Québec.

Je vous amène maintenant au sein des établissements. Le Conseil interdisciplinaire. Ça nous apparaît opportun de créer un tel conseil. Évidemment, de mettre, autour d'une même table, tous les professionnels de la santé qui sont responsables de la prise en charge des patients, c'est aussi une bonne chose. Toutefois, dans notre esprit, l'ajout d'un conseil en maintenant les conseils des professionnels existants, ça peut donner une impression de lourdeur au plan administratif. Notre proposition serait de faire de ce conseil une forme de comité de coordination, comme un exécutif des conseils professionnels, où on pourrait avoir des représentants de chacun des conseils et, avec la présence du P.D.G. et du directeur médical, on pourrait s'assurer que cette instance prenne des décisions qui soient exécutoires dès leur adoption, par exemple, des règles d'utilisation des ressources, des règles de soins, règles d'utilisation des médicaments. Ce sont donc le type de décisions qui pourraient être prises et rendre ce conseil un peu plus performant, disons-le comme ça.

J'en arrive au chef du département de pharmacie. Actuellement, le chef du département de pharmacie a des fonctions qui sont prévues dans la LSSSS et dans le Règlement sur l'organisation et l'administration des établissements de santé, le ROAE. Dans notre compréhension, du moins, le ROAE va tranquillement disparaître pour céder le pas à de nouveaux règlements qui seront adoptés, là, suivant l'adoption du projet de loi comme tel. Alors, c'est important, pour nous, que les responsabilités du chef demeurent clairement nommées dans le projet de loi. On parle ici de la gestion de toutes ses ressources, les ressources humaines, les ressources matérielles, les ressources financières, incluant le budget médicaments. On ne retrouve rien de ça, actuellement, dans le p.l. n° 15. On reste avec certaines dispositions du ROAE, mais, pour nous, ça devrait être clairement inscrit, parce qu'on a besoin que l'expertise clinique du chef de département, qui sont... qui, à notre avis, est essentielle, soit vraiment bien instaurée dans le projet de loi, parce que ça va assurer une saine gestion des ressources, notamment du budget médicaments.

Je termine, pour ma partie, avec les mesures disciplinaires, simplement pour vous dire qu'on a constaté, avec surprise, qu'il y a des distinctions majeures dans le projet de loi quant au processus de traitement des plaintes de nature disciplinaire pour les pharmaciens. Ça fait 40 ans qu'on a le même processus pour les médecins, dentistes et pharmaciens, alors, pour l'APES, ce n'est pas clair. On ne comprend pas vraiment pourquoi est-ce qu'on instaure une différence, à ce moment-ci, pour les pharmaciens. Donc, on préconise plutôt le même processus que pour les médecins et dentistes.

Je cède la parole à Mme Racicot.

Mme Racicot (Julie) : Le projet de loi prévoit de nouveaux éléments qui pourraient priver des patients de médicaments, notamment dans le cas où l'INESSS aurait refusé de reconnaître la valeur thérapeutique d'un médicament. Donc, dans ce cas-là, le projet de loi stipule que l'établissement ne pourra pas fournir le médicament en question. Or, il arrive qu'après les décisions de l'INESSS, de nouvelles données cliniques soient publiées avec une plus grande efficacité du traitement, mais encore, aussi, des patients qui pourraient présenter une allergie ou une contre-indication au médicament de première ligne qui est inscrit à la liste des établissements. Donc, il faut garder le pouvoir, au comité de pharmacologie, de recevoir des demandes pour des patients au cas par cas, de faire l'évaluation, parce qu'il y a certaines situations précises où des patients pourraient avoir besoin de recevoir le médicament, même si l'INESSS avait initialement refusé pour valeur thérapeutique. Ces modalités sont d'ailleurs déjà prévues à la circulaire 2016-030, qui est, quand même, déjà bien campée.

Pour qu'un médicament soit évalué par l'INESSS dans une nouvelle indication, le fabricant doit soumettre une nouvelle demande. C'est irréaliste de croire que ça va se produire chaque fois que de nouvelles données concluantes vont être disponibles. On pense que l'INESSS doit pouvoir être en action en amont, pour amorcer une évaluation rapidement, sans attendre une demande du fabricant. L'accès aux médicaments pour la population québécoise ne devrait pas dépendre d'une demande d'un fabricant, alors que toutes les données cliniques sont disponibles pour en faire l'évaluation, ce qui fait que les délais sont longs. Donc, dans l'attente ou en l'absence d'un avis de l'INESSS, l'APES propose, à tout le moins, qu'un registre des demandes de médicaments de nécessité médicale particulière et de traitements d'exception soit constitué provincialement, donc un registre centralisé, qui serait accessible aux chefs de départements de pharmacie pour les soutenir lorsqu'ils vont recevoir des demandes pour les médicaments de ce type. Mais ce registre-là pourrait aussi servir en support à l'INESSS pour voir qu'est-ce qui, prioritairement, devrait être évalué par l'INESSS, quels médicaments, quelles nouvelles indications devraient faire l'objet d'une évaluation, parce que la demande est importante dans nos établissements.

L'APES recommande également que, lorsqu'il y a une situation urgente qui requiert qu'on doive utiliser un médicament de nécessité médicale particulière ou un traitement d'exception, d'avoir la possibilité de constituer un sous-comité du comité de pharmacologie, qu'on pourrait appeler un comité de convenance, qui serait plus agile pour prendre rapidement les décisions, faire les évaluations. Donc, ce comité-là serait, minimalement, composé du chef du département de pharmacie, le président du CMDP, ainsi que le président du comité de pharmacologie...

Mme Racicot (Julie) : ...Le projet de loi prévoit une responsabilité populationnelle des établissements territoriaux qui doivent mettre en réseau les établissements publics et privés.

En ce qui concerne le volet Médicaments, ce n'est pas clair pour nous. Est-ce qu'il est attendu du chef de département de pharmacie qu'il joue un rôle de surveillance sur son territoire, voire même surveiller un établissement privé qui recevrait les médicaments par une pharmacie privée? Donc, jusqu'où va le rôle du chef de département de pharmacie dans le contexte de responsabilité populationnelle? À notre avis, ça doit être écrit explicitement à la loi, parce que, présentement, il y a déjà une grande confusion qui règne autour de ce principe-là, qui a été particulièrement mise en lumière pendant la pandémie de COVID-19, notamment, dans le circuit du médicament.

Finalement les cliniques médicales associées, vous savez, qui offrent des services complémentaires aux établissements pour désengorger le réseau, surtout pour des chirurgies, il faut savoir qu'il n'y a aucune méthode qui est privilégiée présentement pour savoir d'où viennent les médicaments. Parfois, ça provient des établissements de santé, parfois, ça provient de pharmacies privées. Le contrôle qu'on connaît du circuit du médicament dans les établissements de santé doit être maintenu, à notre avis, dans ces cliniques-là, qui sont en quelque sorte des extensions des établissements de santé.

Il faut savoir aussi que la majorité des contrats ne visent que la fourniture de médicaments sans aucun soin et service qui seraient offerts par les pharmaciens pour prescrire, ajuster et surveiller l'effet des médicaments. Donc, on recommande que soit inscrit à la loi que les cliniques médicales associées doivent prévoir des soins et services pharmaceutiques en plus de la dispensation des médicaments et que le département de pharmacie de l'établissement territorial soit en charge et soit le prestataire de ces soins et services.

Donc, en conclusion, vous n'êtes pas sans savoir que le médicament constitue le principal outil thérapeutique en santé. Toutefois, vous aurez compris que le médicament ne vient pas seul, il doit venir avec des pharmaciens, qui sont les experts de l'usage, de la gestion des médicaments à tous les niveaux. C'est pourquoi les soins et services prodigués par les pharmaciens doivent occuper une place plus importante dans le projet de loi, notamment, par la création d'une direction des soins et services pharmaceutiques à l'Agence Santé Québec, des tables territoriales régionales de soins et services pharmaceutiques. Il faut également que les responsabilités de gestion du chef de département de pharmacie soient explicitement inscrites à la loi. Finalement, certains amendements sont nécessaires pour permettre un meilleur accès aux médicaments pour les patients. Merci.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup, mesdames, pour votre présentation. Alors, M. le ministre, quelques clarifications à demander?

M. Dubé : Certainement. Merci beaucoup. Oui, «quelques clarifications», vous dites ça avec le sourire, M. le Président.

Premièrement, à vous deux, mesdames, c'est la deuxième fois qu'on se voit en quelques mois, merci beaucoup pour la... je dirais la qualité et la rigueur de vos présentations. C'est très clair. Puis je vais essayer de passer à travers, dans le peu de temps qui nous est alloué, là. Mais c'est... je pense, pour les gens qui nous écoutent, de bien faire la différence entre les pharmaciens qui sont en établissement versus ce qu'on appelle les pharmaciens communautaires, qu'on connaît bien, là, sans nommer les noms des bannières, je pense qu'on... C'est important de faire la différence. Mais votre travail est excessivement important dans le continuum de soins.

Est-ce que ça veut dire que votre rôle, à l'intérieur du CMDP, vous trouvez qu'il n'est pas assez fort? Parce que ce que j'entends, puis moi, je pense que vous avez raison, que la place du médicament pourrait peut-être être mieux valorisée dans le continuum de soins. C'est ce que j'entends de... en gros, de votre présentation. Mais le voyez-vous plus au niveau du CMDP? Si vous aviez votre baguette magique, là, parce que ça peut être soit un renforcement au CMDP, soit ce qu'on appelle au conseil interdisciplinaire ou même, ce qu'on dit dans l'ancien DSP où, maintenant, on va avoir un directeur médical, si vous aviez votre baguette magique, c'est-tu plus haut niveau du continuum de soins qu'il serait important d'avoir une plus grande place du pharmacien?

Mme Racicot (Julie) : Il y a plusieurs niveaux, je vous dirais. Concernant l'accès aux médicaments...

M. Dubé : Vous aviez à choisir un, là?

Mme Racicot (Julie) : Oui. Mais il y a le parcours de soins et il y a l'accès aux médicaments. Concernant l'accès aux médicaments dans les établissements, ça fonctionne déjà très bien. Le chef du département de pharmacie doit détenir la responsabilité de la gestion du médicament, l'accès, le budget.

• (11 heures) •

M. Dubé : ...il y a le chef de département. Qu'est-ce que vous dites? Il devrait être nommé dans la loi?

Mme Racicot (Julie) : C'est déjà inscrit au règlement, et là, on s'y perd dans ça, donc, qui gère le budget médicaments, qui autorise, reçoit les demandes d'utilisation, nécessités médicales particulières. Donc, ces responsabilités-là incombent au chef de département de pharmacie, ça doit être maintenu ainsi, donc ça doit être écrit, à notre sens, explicitement à la loi.

M. Dubé : O.K. donc vous dites que le chef de département soit quelque chose qu'on traite dans le règlement, ce n'est pas assez fort.

Mme Racicot (Julie) : Exact.

M. Dubé : O.K., je comprends.

Mme Racicot (Julie) : L'autre chose, le parcours de soins.

M. Dubé : O.K. Le parcours de soins. Ça, on monte en haut, là, soit au conseil interdisciplinaire ou le CMDP, qui est un des conseils en dessous. Expliquez-moi ça.

Mme Racicot (Julie) : Mais on va plus haut que ça. On se rend à Santé Québec...


 
 

11 h (version non révisée)

Mme Racicot (Julie) : ...donc avec la Direction des soins et services pharmaceutiques parce que, vous savez, le parcours de soins du patient, qui vient avec un médicament, est de plus en plus complexe. On sait que 21 % des patients sont réadmis à l'hôpital à cause des médicaments. 69 % de ces situations-là auraient pu être évitables. Les patients quittent l'hôpital avec plusieurs, plusieurs médicaments, des prescriptions papier et par fax arrivent dans la pharmacie communautaire. Qui assure le suivi de la thérapie? Maintenant, plusieurs professionnels peuvent le faire. Donc, tout le parcours de soins du patient, donc, vient avec un médicament, mais bien avec des soins. Ça fait que c'est l'autre volet qu'on oublie.

M. Dubé : Est-ce que vous trouvez à ce... Parce que le continuum de soins, il se discute beaucoup au niveau du CMDP puis au conseil interdisciplinaire. C'est là que je veux comprendre. C'est-tu parce que vous trouvez que vous n'avez pas assez de place là comme pharmaciens?

Mme Vaillant (Linda) : Si je peux me permettre, peut être...

M. Dubé : Bien oui, allez-y.

Mme Vaillant (Linda) : En fait, le problème n'est pas tant au sein de CMDP. Je pense que les pharmaciens ont un rôle assez bien campé au sein de CMDP. Plusieurs pharmaciens sont même présidents des CMDP. On voit ça assez régulièrement. C'est vraiment au-delà du CMDP. C'est au-delà de l'établissement comme tel. Comme on est en train de créer une direction Santé Québec, comme on veut essayer d'harmoniser un peu les pratiques entre les différents établissements, il faut qu'il y ait une réflexion qui transcende l'établissement. C'est que ce n'est pas tant dans l'établissement que pour s'assurer d'instaurer quelque chose... C'est pour ça qu'on parle des tables territoriales. Donc, c'est supra établissement.

Donc, il faut s'occuper à deux niveaux du rôle du pharmacien. Il faut s'en occuper au sein de Santé Québec pour harmoniser ce qui fait un peu partout. Puis il faut des tables territoriales pour travailler en partenariat avec les pharmaciens communautaires dont vous parliez au début. Parce que notre patient, quand il sort de l'hôpital, il sort avec un médicament. Il faut s'assurer que ce médicament-là, si par exemple c'est un médicament d'exception puis qu'il a fallu faire des démarches auprès de la RAMQ pour obtenir le droit que le patient le reçoive, bien que ç'a été fait, pour ne pas qu'on se retrouve avec un patient qui est devant le pharmacien communautaire et, tout à coup, ne peut pas recevoir son médicament parce qu'il y a eu un manque quelque part.

M. Dubé : Puis, non, mais...

Mme Vaillant (Linda) : Donc, c'est une coordination, en fait, c'est plus à ce niveau-là.

M. Dubé : ...je suis... Je suis à l'écoute. Donc, là, c'est plus clair. Ce n'est pas au niveau de l'établissement comme tel. On a 16 établissements puis on a une dizaine d'hôpitaux spécialisés, je vais les appeler comme ça. Mais vous, vous le voyez plus au niveau de l'agence elle-même?

Mme Vaillant (Linda) : On le voit au niveau de l'agence puis on le voit au niveau du territoire. Donc, s'assurer aussi qu'on comprend bien le rôle du département de pharmacie sur le territoire.

M. Dubé : Sur le territoire.

Mme Vaillant (Linda) : Sur le territoire. Les résidences de personnes âgées, les CHSLD privés. Les privés conventionnés, c'est déjà plus clair, mais les privés, par exemple. Ça fait que c'est des situations qu'on a rencontrées durant la pandémie, où tout à coup le chef de département de pharmacie, on lui demande d'intervenir dans un CHSLD privé.

M. Dubé : Bien oui. C'est là que vous faites le lien avec le chef de la pharmacie, en fait.

Mme Vaillant (Linda) : C'est là qu'on fait le lien...

M. Dubé : O.K.

Mme Vaillant (Linda) : ...mais c'est surtout là où on fait bien la table territoriale parce que le CHSLD privé, il est desservi par contrat par une pharmacie privée. Alors, comment, comme chef de département de pharmacie, je m'en vais m'occuper...

M. Dubé : Je comprends.

Mme Vaillant (Linda) : ...de ce qui se passe comme médicament dans un CHSLD privé qui est déjà desservi par un pharmacien privé. Donc, il faut qu'il y ait un arrimage entre nous, entre les pharmaciens sur le territoire.

M. Dubé : Je pense qu'on aura des bonnes discussions avec le Dr Bergeron, ici, que vous connaissez bien.

Mme Vaillant (Linda) : Oui. On le connaît bien. Oui.

M. Dubé : Je suis certain qu'il vous écoute avec beaucoup d'intérêt. Je veux revenir sur deux choses importantes, votre point avec l'INESSS. Ça, ça m'intéresse beaucoup parce qu'on... J'ai entendu justement la présentation du CMDP qui est inquiet, là, du changement qui est... qui est proposé, je vais le dire comme ça. De quelle façon l'INESSS pourrait être plus réactive? Pour moi, ça serait important parce que je pense qu'on doit... on doit se fier au médecin, on doit se fier au pharmacien pour donner le bon médicament. Je ne pense pas que l'INESSS est fermée à ce que vous dites, mais revenez là-dessus. Dites-moi comment vous pensez qu'on pourrait la rendre plus agile en fonction due certains médicaments.

Mme Racicot (Julie) : Le projet de loi, tel qu'il est écrit, là, veut forcer les fabricants à faire des demandes, bien sûr, pour que soit réévaluée la nouvelle indication, la nouvelle littérature. Ça, on le comprend bien. Par contre, réalistement...

M. Dubé : C'est long. C'est long.

Mme Racicot (Julie) : ...de façon à ce que les fabricants fassent des demandes pour chaque nouvelle étude, publient les nouvelles indications, valeurs ajoutées qu'il n'y avait pas initialement, on refait la demande. Ce processus-là est très long et dépend des fabricants. Ça fait que pendant ce temps-là, dans les hôpitaux, on reçoit des demandes. On lit les études comme l'INESSS les lit. Puis on doit prendre une certaine décision. Donc, on souhaiterait que l'INESSS soit beaucoup plus rapide. Ça éviterait ces disparités-là au sein du réseau avec lesquelles on doit naviguer dans nos établissements.

M. Dubé : Mais est-ce que... Je pose la question, là, est-ce qu'il pourrait y avoir une période transitoire où, mettons, qu'il y a un jugement qui est fait, de dire : Bien, on va y aller, mais on va donner, je ne sais pas, moi, deux mois, six mois à l'INESSS pour revenir et là de confirmer ou d'infirmer la décision. Allez-y. Vous voulez commenter là-dessus?

Mme Vaillant (Linda) : Il y a deux choses. La première, c'est vraiment de s'assurer qu'on n'a pas besoin du fabricant pour réévaluer. Donc, l'INESSS, là, ne devrait pas être en attente d'une demande d'un fabricant pour recevoir une indication. Ça, c'est le premier élément. À notre avis, l'INESSS devrait être proactive, voir les études cliniques et se dire : Je revois tout de suite une indication.

M. Dubé : C'est... Puis mettez votre registre là-dedans, là. Je veux juste...

Mme Vaillant (Linda) : Alors, le registre...

M. Dubé : O.K. Allez-y.

Mme Vaillant (Linda) : ...ça, c'est le deuxième élément. Donc, le premier, c'est le fabricant. Le deuxième, c'est le registre. Alors, ce que vous dites, dans le fond, ça revient un peu à...

Mme Vaillant (Linda) : ...La proposition de registre. C'est-à-dire que laisser les établissements servir des traitements d'exception ou des médicaments de nécessité médicale particulière, évaluer au cas par cas, en fonction de la littérature, mais assurons-nous qu'on crée un registre, qu'on documente le registre sur pourquoi ça a été administré aux patients, sur la... Ou refusé, hein?, parce qu'on en refuse aussi, on ne les accepte pas toutes, là, donc pourquoi ça a été accepté ou refusé, et que ce registre centralisé soit accessible à l'INESSS aussi. Et, quand l'INESSS va voir qu'on est rendus à 20 demandes d'une situation particulière qui se ressemblent pas mal d'un établissement à l'autre, tout de suite, ils vont pouvoir se... lever le flag puis se dire : O.K., je travaille sur cette indication-là, je rends ça... je l'indique à la liste, je le recommande au ministre, vous l'indiquez à la liste, et à ce moment-là, on arrête de faire des demandes de médicaments particulières.

M. Dubé : Mais prenons, des fois, c'est mieux un exemple, prenons l'Ozempic, le médicament, là, qui... Hein?, c'est un facile pour vous, ça, avec l'obésité, puis et cetera. Il serait mis en ce moment dans le registre. On verrait qu'il y a énormément de demandes, qui sont... À l'extérieur du diabète, disons, je vais dire ça comme ça. Et là, on demanderait à l'INESSS de prendre position sur ce médicament-là avec son évaluation coûts versus bénéfices.

Mme Racicot (Julie) : Quand on parle des médicaments de nécessité médicale particulière ou des traitements d'exception, c'est vraiment des situations exceptionnelles. Ce n'est pas un volet populationnel.

M. Dubé : On n'est pas dans l'Ozempic, là.

Mme Racicot (Julie) : Donc, l'ensemble des gens, là, qui auraient besoin de l'Ozempic, selon les nouvelles études publiées, on ne s'embarque pas là-dedans, dans les médicaments d'exception. Pour ça, on va toujours attendre l'avis de l'INESSS. On ne s'embarque pas dans ça. Pour nous, le ministre n'a pas dit oui, il ne l'a pas ajouté encore à la liste, on ne bouge pas en ce sens-là. Ça devient un usage populationnel.

M. Dubé : Mais c'est quand même ce qui arrive, parce que, là, les gens dérogent un peu de... Du traitement du diabète pour aller de façon plus générale sur l'obésité. Je vous dis...

Mme Racicot (Julie) : À ma connaissance, c'est donné présentement chez les diabétiques. Mais il faudrait aller voir chaque établissement.

M. Dubé : O.K. Mais prenons un autre médicament. Donc, je reviens sur le registre, je trouve ça une belle suggestion. Qu'est-ce que ça voudrait dire? Combien de temps que la décision de l'INESSS pourrait prendre...

Mme Racicot (Julie) : Oui. Par exemple, en fait, c'est qu'aussi entre établissements on peut se supporter. Donc parfois, il y a une demande dans un établissement en région qui a peut-être un peu moins l'expertise et finalement, de dire : Bien, le centre de pédiatrie, le centre de cardiologie, eux, est-ce qu'ils ont eu une telle demande? Puis C'est vraiment les experts qui sont là, qui ont fait l'évaluation, ça fait que ça pourrait supporter d'autres établissements qui pourraient avoir une demande puis dire : bien non, même dans tel centre, ils ne l'ont pas accepté, là. Donc, ça permettrait au centre plus en région, qui détient un peu moins...

M. Dubé : Ce qui ne se fait pas en ce moment?

Mme Racicot (Julie) : Exact.

M. Dubé : Parce qu'on n'est pas au courant de tout.

Mme Racicot (Julie) : On s'appelle, là, parfois au téléphone pour se supporter...

M. Dubé : D'où votre suggestion du registre?

Mme Racicot (Julie) : Oui, puis passer le moins de temps possible sous cette forme-là. Tu sais, nous, on attend l'INESSS, là, donc, c'est ça.

M. Dubé : Je comprends. Puis d'où l'inconfort aussi de certains médecins, des fois, à le prescrire en opposition à l'INESSS ou quelque chose comme ça. C'est un peu ça que vous dites?

Mme Racicot (Julie) : Oui. Puis ce que je vous dirais par rapport à l'INESSS, une fois que l'INESSS a dit non de première fois, des fois, il y a des données publiées par après qui sont flagrantes.

Ou prenons l'exemple d'un patient, là, un exemple, là. Je sais que quand la CMDP est venue, ils ont parlé du lymphome, là, un autre exemple, là, un patient sous Pembrolizumab pour le cancer de la vessie. L'INESSS l'a refusé en première intention, l'a accepté en traitement de deuxième intention, quand le cancer progresse, avec des critères précis. C'est là où il est le plus efficace et c'est un médicament dispendieux.

Par contre, si on prend l'exemple d'un patient qui présente un effet secondaire à sa chimiothérapie. Donc, il a reçu en première ligne la chimiothérapie, il ne la tolère pas. Il ne peut plus recevoir de chimiothérapie. Ça fait que, là, pour réussir à avoir le Pembrolizumab, bien, il faut attendre que le cancer progresse pour se rendre aux critères de l'INESSS, alors que, là, on fait partie d'un patient, un cas très particulier, en fait, là. Mais c'est une minorité de patients aussi.

M. Dubé : Écoutez, il me reste cinq minutes, mais je ne peux pas... Pardon? Excusez-moi.

Mme Racicot (Julie) : C'est quand même une minorité de situations. On n'est vraiment pas dans le général puis dans le...

M. Dubé : On n'est pas dans l'Ozempic, là?

Mme Racicot (Julie) : Exactement.

M. Dubé : O.K. Non, c'est parce que... écoutez, plus je vous écoute, tous les deux, plus je nous trouve chanceux de vous avoir comme pharmaciens. Je veux juste vous dire ça.

Mme Racicot (Julie) : Merci.

• (11 h 10) •

M. Dubé : Parlez-moi de... Du processus de plainte, qui vous dérange un peu, là. Je veux juste bien comprendre.

Mme Vaillant (Linda) : Je peux peut-être expliquer ça?

M. Dubé : Oui, s'il vous plaît.

Mme Vaillant (Linda) : En fait, c'est que pour les plaintes de nature disciplinaire, pour qu'un pharmacien, un médecin ou un dentiste, c'est la même chose, ait une sanction à l'égard de la... il y a des motifs spécifiques. Ça peut être un motif lié à la compétence. Il y a quatre motifs spécifiques. C'est les mêmes motifs pour les pharmaciens que pour les médecins et dentistes.

Par contre, le projet de loi introduit deux façons de faire. Donc, pour médecins et dentistes, la plainte va être reçue et traitée par le CMDP, par les pairs. Le médecin et dentiste va être rencontré, va pouvoir émettre ses observations. Et il va être entendu comme on le fait maintenant pour les médecins et dentistes et pharmaciens.

Donc, le projet de loi va poursuivre cette méthode pour le médecin et dentiste. Mais, pour le pharmacien, ça ne s'en va pas du tout... Ça s'en va au directeur médical ou au P.D.G. directement pour une sanction sans qu'on entende le pharmacien, sans qu'il y ait évaluation par les pairs. Et on ne comprend pas pourquoi, pourquoi est-ce qu'on introduit ça. On pense même... En fait, il faut savoir aussi que le recours du pharmacien, après une sanction, c'est...

Mme Vaillant (Linda) : ...tribunal administratif, on va très rarement au tribunal administratif. Donc là, est-ce qu'on va créer des situations où on va recourir au tribunal administratif parce qu'on n'a même pas pris le temps d'entendre le pharmacien? Parce qu'il n'est même pas prévu qu'on l'entende. Ses observations, là, elles sont... c'est... Le médecin et le dentiste, lui, il peut émettre ses observations, mais le pharmacien, il attend sa sanction. On ne comprend pas cette distinction-là, on ne comprend pas quel problème on vient régler, parce qu'à notre avis il n'y a pas de difficulté particulière à l'égard des pharmaciens si on considère que ça fait 40 ans qu'on procède de cette façon. Ça fait qu'on ne sait pas pourquoi ça change.

M. Dubé : Est-ce que c'est le nombre de plaintes qui pourrait être en cause ou...

Mme Vaillant (Linda) : Écoutez, elles sont toutes portées à notre attention. À mon avis... Moi, je cherche la réponse à cette question-là.

M. Dubé : Mais on parle... Excusez-moi, vous avez dit quoi?

Mme Vaillant (Linda) : J'ai dit : Moi, je cherche vraiment la réponse à cette question-là. Je ne pense pas que ça soit le nombre, parce qu'elles sont toutes portées à notre attention à l'association, et il y en a quand même relativement peu.

M. Dubé : Sans faire de cas d'espèce, il y a eu quand même pas mal de plaintes récemment, là, mais c'est plus peut-être des pharmaciens. J'aurai la chance peut-être d'en parler avec le prochain groupe aussi, là, mais je voulais avoir... En fait, ma question simple : Est-ce que c'est plus spécifique aux pharmaciens communautaires ou d'établissement?

Mme Racicot (Julie) : En fait, c'est : quand on fait partie d'un CMDP, on devrait avoir le même processus disciplinaire pour tous les membres du CMDP. Il n'y a pas de distinction à faire.

M. Dubé : Je reviens, parce qu'il me reste quelques minutes, je veux en profiter. Oui. Je veux revenir sur la table de travail territoriale. Lorsque je regarde... Parce que, si on veut descendre le plus possible proche du terrain, il faut aller au niveau territorial, là, mais ce que j'appelle territorial peut se rendre jusqu'au RLS ou jusqu'au... à la MRC. Moi, c'est ça que j'appelle, puis on a entendu beaucoup de groupes qui nous ont demandé ça. Il serait où, dans cette approche territoriale là, le pharmacien, là? J'essaie de voir ça... Tu sais, on a beaucoup de GMF dans un niveau territorial. Vous verriez où votre pharmacien d'établissement au niveau territorial?

Mme Racicot (Julie) : En fait, c'est exactement ça. Tu sais, c'est une table où il y aurait ce qu'on appelle la grande famille de la pharmacie, mais il y aurait autant des pharmaciens d'établissement que des pharmaciens de GMF que des pharmaciens du milieu communautaire. Comme on disait, 80 % viennent du privé aussi, donc il faut trouver un arrimage. Je pourrais peut-être vous donner un exemple de ce qui s'est fait sur le territoire de la capitale nationale, ça pourrait aider à comprendre. Présentement, il y a les CRSP qu'on connaît, les comités régionaux de soins, services pharmaceutiques, pour lesquels l'égide est un petit peu moins claire, mais c'est un peu ce penchant-là qu'on aurait avec une plus grande responsabilité campée au niveau des tables territoriales. Au niveau de la capitale nationale, bien, il y a trois établissements concertés, donc il y a des pharmaciens d'établissement, il y a des pharmaciens aussi du volet communautaire, un représentant de la faculté de pharmacie.

Il y a des travaux qui ont été faits pour l'antibiothérapie intraveineuse à domicile. Donc, les patients partent avec des antibiotiques par les veines à la maison, soit par des dispositifs très particuliers d'administration ou des pompes qu'ils portent sur eux. Et chaque... l'hôpital prépare les premières doses, ensuite c'est la pharmacie communautaire qui prépare mais pas toutes les pharmacies. Ça fait qu'eux font affaire avec une pharmacie préparatrice. Ça fait que vous voyez, il y a trois pharmacies impliquées dans le processus pour le patient, toutes sortes de recettes, donc de préparations possibles, des concentrations différentes, des modes d'administration différents.

Donc, on s'est concertés au niveau régional, les trois établissements ensemble avec le volet communautaire, pour créer une seule recette pour chaque antibiotique, chaque dosage, il y a une seule façon de l'administrer, de le préparer. Donc, c'est beaucoup plus fluide pour les patients sur le territoire à ce moment-là. On a fait la même chose avec des critères pour l'anticoagulation des patients.

M. Dubé : Non, mais votre exemple est excellent.

Mme Racicot (Julie) : Ça fait que c'est plusieurs exemples comme ça qu'il y aurait du travail à faire.

M. Dubé : Encore une fois, merci beaucoup pour votre présentation. Très bonnes explications.

Mme Racicot (Julie) : Ça fait plaisir. Merci à vous.

M. Dubé : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) :Merci, M. le ministre.

M. Dubé : Merci.

Le Président (M. Provençal) :Alors, M. le député de Pontiac, je vous cède la parole.

M. Fortin :Merci, merci, M. le Président. Bonjour, Mme Racicot, Mme Vaillant. Merci d'être avec nous et pour votre... pour votre exposé mémoire étoffé, encore une fois. C'est très apprécié. Et j'ai beaucoup apprécié, dans votre introduction, et je vais vous la relire, là, juste parce que ça m'a frappé, ça revient souvent. Vous dites, essentiellement, que vous adhérez aux principes sous-jacents au projet de loi mais que vous avez de nombreuses questions et préoccupations qui ont fait surface à la lecture du projet de loi particulièrement à l'égard de modifications qui ne semblent pas en lien avec les objectifs visés. Je vous avoue que ça revient souvent. C'est... On a des beaux principes, on part de là, mais ce qui est dans le projet de loi comme tel, là, n'y arrive pas nécessairement.

Je vais commencer par les plaintes, si vous le permettez, parce que je trouve l'échange que vous avez avec le ministre incomplet. Est-ce qu'il y a un problème, en ce moment, avec le traitement des plaintes à travers le CMDP pour les pharmaciens spécifiquement? Parce que moi non plus, je ne le comprends pas, là, ce changement-là qui s'appliquerait uniquement aux pharmaciens mais pas aux médecins, aux dentistes...

M. Fortin :...puis le ministre ne semblait pas avoir d'explication, vous a relancé des questions, même. Alors, est-ce que vous en voyez un problème à travers le traitement des plaintes en ce moment?

Mme Vaillant (Linda) : Il y a deux types de plaintes : donc, il y a des plaintes de nature disciplinaire, il y a des plaintes qui peuvent provenir des patients qui passent au médecin examinateur et qui retournent au CMDP. Celles-là qui viennent du patient vont continuer à aller au médecin examinateur et vont aller au CMDP. Mais celles de nature disciplinaire, comme on le disait tantôt, n'iront plus au CMDP pour les pharmaciens, vont directement aller pour sanction.

À notre avis, il n'y a pas de problème particulier qui puisse justifier ça, et, quand vous avez nommé dans notre introduction nos préoccupations, ça, c'est un bon exemple d'un changement qui pour nous ne semble pas rencontrer les objectifs du projet de loi, parce qu'on ne comprend pas ce que ça vient modifier, et en fait on pense que ça va générer des problèmes et que ça va peut-être même judiciariser un peu le processus, parce que ça va amener les pharmaciens à déposer des recours auprès du tribunal administratif, ce qu'on veut complètement éviter et qui est quand même relativement rare en pharmacie établissement, mais là on ne voudrait pas se mettre à avoir une fréquence plus élevée de recourir à des tribunaux juste parce que le processus n'est peut-être pas adéquat.

M. Fortin :Mais, quand le ministre fait référence au volume de plaintes, là, il ne doit pas y en avoir tant que ça, des plaintes au niveau disciplinaire, là, qui sont traitées par le CMDP en ce moment.

Mme Vaillant (Linda) : Non, si on s'en tient au CMDP. Tout à l'heure, on semblait élargir, là, à l'entièreté de la pratique pharmaceutique. Ça, ça ne nous touche pas, ça touchera possiblement le prochain groupe. Mais, nous, à l'intérieur des établissements, il n'y a pas, à notre avis, une hausse de plaintes de nature disciplinaire qui concernent les pharmaciens. Ce n'est pas notre constat, du mois.

M. Fortin :O.K. Je vous avoue, une des grandes préoccupations qu'on a, de notre côté, là, c'est que le projet de loi soit adopté trop rapidement, et c'est un projet de loi qui va prendre effet dans plusieurs années, qui a 1 200 articles, c'est... Dans l'histoire de l'Assemblée nationale, là, c'est un des plus gros projets de loi qu'on a vus, et il y a beaucoup de groupes qui sont venus avec des préoccupations très pointues, très différentes, et une des craintes qu'on a, c'est que ce soit adopté... il y ait plusieurs des articles qui soient adoptés tels quels sans qu'on se rende justement à cette étude-là.

Qu'est-ce qui arriverait si on adopte la question du médicament d'exception, là, telle quelle, sans faire par exemple la proposition que vous mettez de l'avant ou sans faire des modifications? Est-ce que votre lecture, c'est qu'il y a des patients qui vont perdre accès aux médicaments dont ils ont besoin et dont ils ont déjà accès en ce moment?

Mme Racicot (Julie) : Oui, tout à fait. On n'a pas parlé de tout, mais oui. Mais ce n'est certainement pas le but du projet de loi, il y a une... c'est vraiment... il y a une façon de reformuler les choses, là. Je pense qu'on ne voit pas la portée de la phrase, là, qui priverait les patients de traitements, là.

M. Fortin :Bien, c'est ça qui va se passer. En ce moment, il y a des patients qui reçoivent des médicaments d'exception qui, à travers l'article comme tel, devraient cesser d'avoir ce médicament-là en ce moment, puis là, tantôt, vous avez parlé de lymphomes, vous avez parlé de cancers de la vessie, donc on parle de médicaments, là, qui sont nécessaires à... je ne veux pas dire la survie, mais peut-être même la survie, là, de ces patients-là.

Mme Racicot (Julie) : Oui, mais il y a plusieurs exemples, là. Il y a d'autres médicaments qu'on ne donnera pas, de morphine à une personne âgée, elle va prendre du tramadol, mais tramadol a été refusé pour valeur thérapeutique. Là, je vais être obligée de lui donner de la morphine à l'hôpital. Ça ne fait pas de sens non plus.

M. Fortin :O.K. L'intérieur versus l'extérieur des établissements. Si je vous ai bien comprises dans votre échange avec le ministre tantôt, là, au niveau de l'organisation clinique entre autres, là, vous avez parlé... vous avez dit : On nous propose une table justement parce que c'est à l'extérieur des établissements qu'il semble vraiment y avoir un enjeu de coordination, peut-être, là, où... et cet enjeu-là va prendre la place des cliniques médicales spécialisées, il y en a davantage. Le ministre a introduit le concept des hôpitaux privés également. Alors, il faudra voir comment tout ça va s'inscrire. C'est pour ça que, si je comprends bien, là, votre recommandation, vous la mettez sur la place publique pour que tout le monde travaille dans le même sens pour le patient à l'extérieur des établissements. Mais, à l'intérieur des établissements, le ministre a beaucoup de propositions, là, vous sembliez dire qu'il n'y a pas tant d'enjeux que ça en ce moment. Ça semble relativement, relativement bien aller, là, si je comprends.

• (16 h 20) •

Mme Racicot (Julie) : Oui. C'est plutôt la crainte de perdre ce qu'on a présentement, là. Donc, il manque beaucoup de mots «pharmaciens» dans le projet de loi. On ne parle pas de soins pharmaceutiques, on parle du médicament, l'utilisation du médicament. Les pharmaciens dispensent des soins aux patients, qui en soi, vous le savez, même dans les pharmacies privées, les pharmaciens en font de plus en plus : la surveillance de la thérapie, l'ajustement, la prescription, la... Ça, c'est les soins pharmaceutiques, ce n'est pas là beaucoup dans le projet de loi. Qui gère le budget médicaments? Ce n'est pas écrit dans le projet de loi. Donc, le volet... la responsabilité des chefs de département de pharmacie, qui sont des chefs de départements cliniciens comme les chefs de départements médicaux, nommés pour quatre ans, donc la crédibilité auprès des autres chefs médicaux est là beaucoup, ça nous donne une grande latitude. Donc, on est les gardiens de la bonne utilisation du médicament, et, sans la petite mention dans le règlement, bien, ça se perd, ça. Ça fait que c'est vraiment de maintenir les acquis, beaucoup.

Mme Vaillant (Linda) : J'ajouterais une précision. C'est sûr que, là, on est en train de refondre la LSSSS, là. Je pense que c'est quand même une loi... c'est énorme, là, vous l'avez mentionné. Nous, on a quand même saisi l'occasion de faire des propositions pour actualiser...

Mme Vaillant (Linda) : ...ce projet de loi, il y a des éléments qui étaient déjà dans la LSSSS, là, c'est sûr que ça ne vient pas d'être introduit, c'était déjà là, la notion de médicament, l'absence de soins pharmaceutiques. Mais on se dit : On est en 2023, donc peut-être qu'on a une belle opportunité, justement, tant qu'à réouvrir une loi aussi importante, d'introduire les éléments dont on parle, là, donc notamment la notion de soins pharmaceutiques.

M. Fortin :Non, non, puis vous avez raison, parce qu'on ne le fait pas à tous les jours, là, d'ouvrir ces lois-là. Alors, il n'y a pas d'enjeu par rapport à ça. Mais, quand vous dites, la perte de certains acquis, là, que c'est ce qui vous inquiète dans... à travers le projet de loi puis l'organisation clinique à l'interne, ce que vous nous dites, c'est que les chefs de département, là, entre autres, bien, dans votre secteur en particulier, ils doivent avoir... ils doivent gérer leurs propres ressources humaines, ils doivent gérer leurs propres ressources financières, mais il faut le mettre explicitement dans le projet de loi, sinon on ne sait pas trop comment ça pourrait se dérouler, qui pourrait avoir ces responsabilités-là, c'est ça?

Mme Vaillant (Linda) : Il faut clairement le mettre quelque part. En ce moment, il se retrouve en partie dans la LSSSS et en partie dans le règlement. Là, il n'est plus dans le p.l. 15, donc il nous reste la portion règlement. Ça fait que, là, il nous apparaît essentiel de ramener ça clairement dans le projet de loi.

M. Fortin :Très bien. Moi, je vous entends, je vous comprends. Ça fait beaucoup de sens à mon avis. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal) :On va céder maintenant la parole à la députée de Mont-Royal-Outremont.

Mme Setlakwe : Il reste un peu de temps?

Le Président (M. Provençal) :Il vous reste cinq minutes, Mme.

Mme Setlakwe : Merci. Merci beaucoup, mesdames, pour votre mémoire étoffé, vraiment, vous avez travaillé fort, le groupe a travaillé fort, et pour l'échange. Suite à l'échange, on a abordé déjà plusieurs points. J'ai envie de vous demander, là : Est-ce qu'il y en a un, point, sur lequel vous souhaiteriez élaborer davantage? On est là... vraiment là pour vous écouter. Puis sinon... mais je pense qu'il faut revenir... Moi, ce qui m'interpelle le plus dans la discussion, c'est l'impact sur des patients atteints d'une maladie rare ou qui nécessite un... soit ce qu'on appelle un médicament d'exception, ou bien la personne atteinte d'une maladie grave comme un cancer qui essaie un premier médicament, mais qui doit attendre que son cancer évolue dans le mauvais sens pour avoir accès à une autre... Ça, ça me... ça me laisse... ça me laisse très inquiète. Puis, généralement, comme mon collègue, c'est une réforme tellement importante, il faut prendre le temps, je pense, de bien faire les choses. Donc, j'ai... Voilà. J'ai mis la table.

Mme Racicot (Julie) : Bien, en fait, je vous dirais, de la façon que ça fonctionne présentement dans les établissements, ça fonctionne quand même bien. Il y a des médicaments qui sont acceptés, mais c'est vraiment réservé au cas par cas. Donc, il faut connaître la rigueur des pharmaciens pour savoir que les registres sont complétés, tout est là, ce qu'on a accepté, ce qu'on a refusé, pour quelles raisons. Il y a toujours un comité qui se rassemble, donc ça ne repose pas uniquement sur le chef de département de pharmacie. Quand il y a une décision à prendre, bien, on a le président du CMDP, on a le président du comité de pharmacologie. On monte ça maintenant jusqu'au CMDP s'il le faut, s'il y a lieu. Donc, il y a plusieurs étapes qui existent pour évaluer l'accès. Donc, ce n'est pas fait sur un coin de table, c'est fait de façon très, très, très rigoureuse.

Ce qui se passe, c'est que c'est beaucoup lié aux lenteurs, comme je vous disais, parce qu'avant qu'un médicament... Le fabricant doit soumettre... Premièrement, il y a l'avis de conformité à Santé Canada. Ensuite, doit obtenir l'indication à Santé Canada. Ensuite, doit faire une demande à l'INESSS, qui va prendre x temps à l'évaluer, recevoir la demande, un six, huit mois d'évaluation, et ensuite le ministre doit négocier l'entente, bien souvent, avant que ce soit inscrit à la liste. Ça fait qu'il peut s'écouler deux, trois ans avant que le médicament soit officiellement à la liste des établissements. Et le projet de loi dit qu'on ne peut donner que ce qui est à la liste, qui a reçu l'avis de l'INESSS, l'indication officielle. Donc, c'est là où les lenteurs du système nous forcent à naviguer un peu dans ça, effectivement. Mais c'est fait avec beaucoup de rigueur, puis on conserve tout ce qu'on autorise ou refuse pour les patients, puis, les cas par cas, on les réévalue. Est-ce qu'on a eu un cas similaire? Qu'est-ce qu'on avait répondu? On réévalue pour avoir un souci d'équité entre nos patients, mais il est certain qu'entre les établissements il peut y avoir des décisions différentes qui se prennent.

Mme Setlakwe : Merci. Vous avez mentionné tout à l'heure, je pense avoir bien compris, que 21 % des réadmissions sont en raison des médicaments. 69 de ces cas-là auraient pu être évités. Qu'est-ce que vous entendiez par ça, là? Est-ce que vous pouvez nous donner une explication?

Mme Racicot (Julie) : En fait, c'est qu'il y a beaucoup d'effets secondaires liés de plus en plus, on voit même des pharmaciens dans les salles d'urgence. Donc, vous savez, entre autres, le syndrome qu'on appelle des portes tournantes... mais les gens viennent à l'urgence, on rajoute un médicament, on ne sait pas trop, il s'en va, il revient, encore le même problème qui survient ou un nouveau problème lié à un nouvel effet secondaire, jusqu'à ce qu'on mette le doigt sur la source du problème, qui est bien souvent une cause médicamenteuse. Donc, on voit même des patients qui se retrouvent avec ce qu'on appelle des cascades médicamenteuses. Donc, c'est un médicament qui entraîne un effet secondaire, mais on ne voit pas que c'est l'origine du problème, ça fait qu'on rajoute un médicament pour contrer l'effet secondaire qui en cause un autre, alors on en rajoute un troisième. Donc, le fait de mettre un pharmacien dans le dossier va permettre d'avoir un regard global sur les médicaments du patient, de trouver la source du problème, puis des fois on peut retirer même trois, voire quatre médicaments, ce qu'on appelle la déprescription.

Donc, il y a plusieurs exemples de cas de figure où les médicaments en sont la cause. Si la prescription de départ n'est pas claire, le pharmacien d'officine au bout...

Mme Racicot (Julie) : ...à faire l'interprétation de l'ordonnance, il y a certains médicaments qui ne sont pas disponibles, donc il faut recontacter l'hôpital. Donc, il y a plusieurs cas de figure possibles en lien avec les problématiques pour les médicaments.

Mme Vaillant (Linda) : J'ajouterais un élément, si je peux me permettre, j'ajouterais un élément, il y a aussi des études qui nous disent qu'un patient qui rentre à l'hôpital il y a moins de 10 % de chances qui ressortent avec les mêmes médicaments, moins de 10 %. Donc, c'est certain qu'il va subir une transformation de sa pharmacothérapie, donc on a tout intérêt à s'assurer que le congé est bien géré, que le patient comprend bien les changements, qu'on communique bien au pharmacien communautaire pourquoi ces changements là se sont faits. Parce que parfois, le patient n'est pas certain de pourquoi il y a eu un changement. Le pharmacien communautaire n'a pas toujours l'information, donc comment est-ce qu'il peut appuyer adéquatement le pharmacien... le patient, je veux dire, et donc éviter justement ce retour à l'urgence parce qu'il y a eu une mauvaise gestion du congé. C'est malheureusement des choses qu'on rencontre actuellement. Il y a des enjeux de ressources, il y a des enjeux de processus et c'est pour ça qu'on propose notamment les fameuses tables territoriales, peut-être pour mieux gérer les congés qui génèrent beaucoup de frustrations chez nos collègues en pharmacie privée, qu'on comprend bien, qui en génèrent de notre côté aussi dans les établissements parce qu'on ne sait pas toujours quand est-ce que le patient va sortir puis on n'a pas toujours le temps de faire son bilan comparatif des médicaments à la sortie. Donc, il y a très certainement du travail à faire pour gérer le parcours, de ce que nous, on appelle le parcours de soins pharmaceutiques du patient et s'assurer d'une meilleure continuité des soins. Parce que, je le répète, là, moins de 10 % des situations vont faire en sorte que c'est le même médicament à la sortie. Donc, c'est sûr qu'on rentre, on sort avec d'autres choses, puis des fois, on a tout changé, là. On rentre avec deux, trois médicaments, on sort avec 10 ou 12, alors c'est un autre plan traitement complètement. Donc il faut s'assurer. Et, s'il n'est pas bien fait, bien pris par le patient, bien, il va revenir à l'urgence. Donc il y a vraiment un travail à faire de concertation. Puis ça passe à notre avis par l'es tables territoriales.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Je vais maintenant céder la parole au député de Rosemont.

M. Marissal : Merci, M. le Président. Bonjour, rebonjour, je devrais dire, on se voit souvent ces temps-ci, pour notre plus grand plaisir parce qu'effectivement votre mémoire est très éclairant puis comme d'habitude assez complet. Vous avez probablement suivi, il y a quelques semaines de ça, là... excusez-moi, je ne suis pas poli, je ne vous regarde pas, c'est parce que je lis en même temps. Vous avez probablement suivi le mémoire et l'audition ici de l'Association du Conseil des médecins, dentistes et pharmaciens du Québec. Oui, bien sûr, Dr Arata et docteur Jean qui nous disait... Jean Beaudin Beaubien, c'est-à-dire qu'il ne disait presque live, en tout cas, en direct ici : On est en train d'autoriser des médicaments pendant qu'on vous parle, parce que sinon, un patient atteint d'un lymphome n'aurait pas son médicament. Je crois comprendre que vous partagez la crainte que le projet de loi 15 risquerait de complexifier encore l'affaire davantage. C'est bien ça que je comprends?

Mme Racicot (Julie) : C'est le même exemple que je vous donnais avec le... là, c'est la même situation.

M. Marissal : Mais pour le lymphome.

Mme Racicot (Julie) : L'INESSS l'aurait refusé pour valeurs thérapeutiques.

Mme Vaillant (Linda) : À notre avis, ça ne peut pas être l'intention derrière ce qui est écrit dans le projet de loi 15. On a de la difficulté à concevoir que ce soit ça l'intention, parce que...c'est pour ça qu'on se dise qu'il y a quelque chose dans le libellé qui... on n'a peut-être pas la même compréhension de ce qu'on lit, là. Mais on serait étonnés que ce soit l'intention, parce que véritablement, on se trouverait à priver des patients de soins, puis je pense qu'il n'y a personne qui veut faire ça autour de la table.

M. Marissal : Oui, bienvenue dans mon monde. On a aussi quelques problèmes de ce côté-ci à comprendre parfois l'intention du projet de loi. Donc, parlant d'intention, là, ça fait quelques semaines qu'on débat de centralisation, décentralisation. Je crois comprendre que, ce que vous nous dites, là, c'est que dans l'urgence, puis vous êtes dans l'urgence presque tous les jours, à tout moment, il vaudrait mieux ne pas trop centraliser. Il vaudrait mieux garder une structure décentralisée pour être capable rapidement de prendre des décisions qui ont question de vie ou de mort sur certains patients. Je ne veux pas dramatiser puis surdramatiser, là, mais ce que vous nous dites, si je comprends bien, c'est ne mettons pas une couche de plus. Regardons ça localement pour être capable de prendre des décisions rapidement avec la bonne molécule. C'est ça que vous dites?

• (11 h 30) •

Mme Vaillant (Linda) : Il y a encore de la flexibilité dont on dispose actuellement. On essaie de vous rassurer en vous disant que ce n'est pas des décisions de... ça se fait généralement de manière concertée, réfléchie. Gardons ça, mais par contre, centralisons l'information, c'est ça notre proposition du registre. Assurons-nous de centraliser l'information, assurons-nous que l'INESSS dispose de cette information-là et est capable de prioriser ses dossiers pour peut-être agir plus rapidement sans attendre qu'un fabricant lui en fasse la demande.

M. Marissal : Centraliser l'information et partager l'information. On en revient à des systèmes d'informatique ou d'information, ou de transfert d'information. Vous en êtes où là-dedans?

Mme Vaillant (Linda) : Je vais te laisser répondre.

Mme Racicot (Julie) : Pas très avancé, je vous dirais. Au niveau informatique, c'est une des lacunes qu'on a présentement. Vous savez, on travaille encore avec des sorties d'hôpital qui soit... sont soit faxées à la pharmacie et le fax manque les pages du verso. Donc, on fait la moitié des médicaments, ça ne se peut pas. On rappelle. Les patients apportent leurs papiers, mais sortent avec plusieurs papiers pour le médecin de famille, ne savent plus quel papier donner à qui, donc il manque une page, des fois d'ordonnance. Donc on est là-dedans. Vous le savez, au Québec, là, ça, c'est très...


 
 

11 h 30 (version non révisée)

Mme Racicot (Julie) : ...Les chefs de département de pharmacie, dans la pandémie, on a été très agiles par la création de fichiers Excel qu'on avait dans des groupes privés Teams où on partageait nos inventaires de médicaments pour être capables de se répartir les stocks au pire de la pandémie. Donc, pour l'instant, j'imagine, une espèce de système comme ça qu'on pourrait partager.

M. Marissal : À terme, il serait préférable d'avoir un...

Mme Racicot (Julie) : Tout à fait, tout à fait.

M. Marissal : D'accord. On se comprend bien.

Mme Vaillant (Linda) : Il y a certainement de l'amélioration à ce niveau-là.

Le Président (M. Provençal) :30 secondes.

M. Marissal : 30 secondes. Rapidement, vous recommander que soit inscrit clairement dans la loi le rôle attendu du chef de département de pharmacie, à défaut de, quel est le risque de ne pas l'inscrire?

Mme Vaillant (Linda) : Bien, ça risque de créer la confusion qu'on vit actuellement, c'est-à-dire que... qui intervient s'il y a des enjeux de médicaments sur le territoire, dans des établissements qui sont semi-privés ou entièrement privés? Donc, quelle est la responsabilité des départements de pharmaciens et des chefs à l'égard de l'utilisation des médicaments, vu que l'établissement, lui, a une responsabilité territoriale? Est-ce que le chef du département de pharmacie en a une aussi, compte tenu du fait que ce sont des pharmaciens de pratique privée qui ont des contrats dans les milieux privés? Alors, quel est notre rôle là-dedans? C'est vraiment ça qu'on a besoin de clarifier.

M. Marissal : Merci.

Mme Racicot (Julie) : Je vous dirais au niveau du... de la gestion du budget médicament. Donc, ça prend un pharmacien qui est capable de dire : Ah, tel coût augmente, tel médicament, le coût augmente, pourquoi? Aller retourner voir la littérature, voir les pratiques, retourner questionner les médecins sur cette pratique-là qui est en augmentation, est-ce qu'on a les données probantes? Est-ce que l'INESSS a donné son accord? Est-ce que... Vous savez, on a une grande vigie qu'on exerce au niveau du budget médicament, sur les coûts, c'est une surveillance constante qu'on fait, ça prend quelqu'un d'un peu plus peut-être impartial, qui va être capable après d'intervenir auprès des équipes médicales pour voir les bonnes pratiques, puis s'assurer qu'on fait le meilleur usage possible des médicaments, qui permet par le fait même un contrôle des coûts également.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Alors, je remercie Mme Racicot et Mme Vaillant pour leur participation et leur contribution à nos travaux. Sur ce, je suspends les travaux pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci beaucoup, mesdames.

(Suspension de la séance à 11 h 33)

(Reprise à 11 h 36)

Le Président (M. Provençal) :Nous allons compléter notre plan de travail avec l'Ordre des pharmaciens du Québec. Alors, messieurs, vous allez disposer de 10 minutes pour votre présentation et...

Le Président (M. Provençal) :...par la suite, nous procédons à l'échange. Alors, je vous cède la parole, M. Bolduc.

M. Bolduc (Bertrand) : Merci beaucoup, M. le Président. M. le ministre, Mmes, MM. les parlementaires, merci de nous accueillir. Mon nom est Bertrand Bolduc, je suis président de l'Ordre des pharmaciens du Québec jusqu'à demain. Je suis accompagné de notre président élu, M. Jean-François Desgagné, qui commence jeudi, de Mme Manon Lambert, notre directrice générale, et de M. Patrick Boudreault, qui est directeur principal de la qualité et de l'exercice des relations partenaires. Nous vous remercions de nous permettre de vous présenter nos observations sur le projet de loi n° 15 aujourd'hui.

À nos yeux, le projet de loi n° 15 apporte de bonnes solutions. C'est dans cet esprit que nous nous présentons ici, devant vous, aujourd'hui, et nous souhaitons vous proposer de nouvelles suggestions qui devraient permettre d'enrichir cette réforme, en donnant aux pharmaciens un rôle adapté à leur savoir-faire dans la nouvelle architecture du système de santé, et ce, évidemment, au grand bénéfice des patients. Je ne répéterai pas les commentaires de mes collègues de l'APES sur l'importance du médicament dans le système de santé. Je pense qu'elles ont très bien décrit cette importance-là, et on va aller directement au cœur de notre propos.

Nous voyons, dans la réforme amenée par le projet de loi n° 15, une excellente opportunité de redéfinir la place du pharmacien, dans l'organisation du système de soins, au sein de la future agence Santé Québec. Tout d'abord, nous croyons qu'une direction des soins et services pharmaceutiques forte aurait sa place. Ensuite, dans chaque établissement de santé, nous pensons aussi que l'organigramme actuel souffre de l'absence d'un directeur des soins et services pharmaceutiques de plein droit, un pharmacien qui serait placé sous l'autorité du P.D.G. Ce directeur ou directrice serait doté de fonctions élargies, qui l'amènerait à coordonner l'activité professionnelle et clinique de l'établissement avec les autres directeurs. Il ou elle aurait également pour mandat de travailler en collaboration avec les pharmaciens de son territoire extérieurs à l'établissement, et ce, afin de sécuriser au mieux la trajectoire de soins empruntée par les patients au sein de l'établissement ainsi que sur le territoire. Actuellement, ce rôle revient au directeur des services professionnels. Les changements apportés par le projet de loi n° 15 feront en sorte que ces responsabilités reviennent au directeur médical. Considérant la place que prend le médicament en établissement de santé et la sécurité des patients, nous sommes d'avis qu'il est temps qu'une telle fonction soit créée.

Enfin, dans les établissements privés ou associés, le projet de loi ne prévoit que peu de choses concernant le circuit du médicament. Nous considérons qu'il serait judicieux que celui-ci soit, à l'instar d'un établissement public, encadré par un pharmacien hospitalier. Une telle mesure viserait à garantir, pour les patients, une qualité égale des services pharmaceutiques dans l'ensemble du Québec, peu importe la porte d'entrée utilisée.

Parlons du maillage territorial. La mise en œuvre du projet de loi n° 15 fera disparaître les comités régionaux de services pharmaceutiques, qui étaient chargés de faciliter l'organisation territoriale des soins. Par un habile travail de coordination, les membres du CRSP, qui couvrent l'ensemble des types de pharmaciens, donc les propriétaires, les salariés, les pharmaciens de GMF et, évidemment, les pharmaciens hospitaliers, soutiennent, en temps normal, la mise en œuvre des réseaux locaux de services sociaux et de santé. Ils ont d'ailleurs rempli un rôle particulièrement central lors de la pandémie de COVID-19, où ils ont articulé l'application des décisions ministérielles sur le terrain. Les CRSP ont aussi contribué à un déploiement efficace des guichets d'accès à la première ligne, une belle réussite, qui a permis à près de 20 % des patients d'être référés en pharmacie. La suppression des CRSP risque donc de créer un vide, qui se traduira par un affaiblissement de la première ligne et un retour des patients vers des services d'urgence, qui sont déjà engorgés. Nous proposons donc de résoudre ce problème en créant une table régionale des soins et services pharmaceutiques dans chaque région du Québec, qui remplira des fonctions comparables de planification territoriale.

• (11 h 40) •

En ce qui concerne la trajectoire des patients, nous saluons la création des conseils interdisciplinaires d'évaluation des trajectoires et de l'organisation clinique. Nous y voyons une excellente manière d'assurer la qualité de l'offre de services cliniques et de mieux superviser les trajectoires de soins que suivront les patients, notamment en mettant en commun l'expertise de plusieurs groupes de professionnels. Nous encourageons le ministre à aller encore plus loin, dans la voie qu'il a choisie, en élargissant les compétences de tels conseils aux trajectoires externes, et non seulement internes. Concrètement, cela permettra de mieux coordonner le passage du patient d'une structure de soins à l'autre, entre le GMF, l'hôpital et la pharmacie communautaire. Finalement, c'est la sécurité du patient, lors de sa prise en charge, qui en sortira renforcée.

On a parlé beaucoup d'accès aux médicaments en établissement de santé. Si on fait une récapitulation du fonctionnement actuel, il revient au chef de pharmacie de dresser la liste des médicaments qui seront utilisés dans son établissement...

M. Bolduc (Bertrand) : ...après consultation du comité de pharmacologie. Ces médicaments sont eux-mêmes sélectionnés par ceux figurant dans la liste du ministre que l'INESSS aide à adresser. De manière générale, cette liste ne comprend elle-même que des médicaments homologués par Santé Canada. Lorsqu'un prescripteur souhaite que son patient, en raison de ses particularités médicales, ait accès à un médicament ne figurant pas sur la liste du ministre, voire n'ayant pas été reconnu par Santé Canada, une demande doit être formulée auprès du CMDP ou, selon le projet de loi 15, du comité de pharmacologie pour l'obtenir. Le projet de loi actuel durcit les conditions d'accès à ces cas exceptionnels. Ces médicaments, dits de nécessité particulière, ne pourraient plus être autorisés par les comités de pharmacologie lorsque leur valeur thérapeutique n'a pas été reconnue par l'INESSS. Nous pensons qu'une certaine souplesse devrait être conservée sur le sujet. La littérature scientifique progressant plus vite que les recommandations de l'INESSS, nous suggérons de conserver les mécanismes existants à l'heure actuelle. Nous sommes favorables à ce que les comités de pharmacologie soient tenus de prendre en compte les avis de l'INESSS, évidemment, mais nous demandons qu'ils ne soient pas contraints de s'y limiter. Autrement, cela risquerait de priver certains patients de traitements efficaces. Par ailleurs, le projet de loi pourrait envisager la création d'un registre national répertoriant toutes les demandes de médicaments de nécessité particulières ayant été acceptées, un peu comme nos collègues de La Presse viennent de le proposer. Ce document, consultable par les chefs de départements de pharmacie et les éventuels directeurs des soins et services pharmaceutiques, améliorerait l'équité interétablissement pour les patients tout en offrant à L'INESSS et à Santé Québec une meilleure visibilité sur les pratiques dans le réseau.

Enfin, et c'est là notre dernier commentaire, nous souhaitons que les indications reconnues par Santé Canada ne constituent pas l'unique cadre de prescription des médicaments. Il arrive souvent qu'on découvre qu'un médicament employé pendant des années pour traiter une... soit également efficace pour en traiter une autre. Cependant, même si de nouvelles études sont publiées, les entreprises pharmaceutiques ne font pas toujours la démarche longue et coûteuse pour eux pour que ces nouvelles indications soient prises en compte par Santé Canada. Si les pharmaciens doivent remplir des justificatifs à chaque fois qu'un médicament est prescrit en dehors de la monographie de Santé Canada, deux problèmes potentiels peuvent se produire, soit ils ignoreront ces dispositions, ce qui serait au détriment de la loi, ou bien ils cesseront d'utiliser ces médicaments, ce qui serait au détriment du patient. Aucune de ces deux situations n'étant souhaitable, il paraît préférable de conserver le système actuel en état.

Pour conclure, nous appuyons cette réforme qui se veut moderne, adaptée aux évolutions du système de santé et, pour une protection optimale des patients, nous croyons que les pharmaciens doivent y avoir toute leur place. Notre rôle de protection du public nous amène à proposer une place plus stratégique pour les pharmaciens en établissement afin d'optimiser l'utilisation des médicaments et les trajectoires de soins, tant au niveau hospitalier qu'en milieu communautaire.

Alors, nous vous remercions de votre attention et, évidemment, nous sommes là pour répondre à vos questions avec mes collègues.

Le Président (M. Provençal) :...présentation, M. Bolduc. J'en profite pour vous féliciter, M. Desgagné, pour votre nomination.

Maintenant, nous allons procéder à la période d'échanges. Alors, M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Dubé : Oui, M. le Président. Je voudrais dire à M. Bolduc que ses dernières années à la présidence ont été assez occupées puis je veux en profiter, là, avec mes collègues pour remercier le travail que vous avez fait avec votre équipe. Monsieur Desgagné, je vous souhaite des années plus tranquilles, je vous dirais ça, hein? On va tous se souhaiter des années un peu plus tranquilles.

M. Bolduc, merci à vous puis à votre équipe, là, pour cette présentation-là. C'est évident que je vois beaucoup de similitudes entre votre présentation puis celle de... puis je ne pense pas que vous avez fait ChatGPT pour copier l'autre ou vice versa, là. Vous avez l'air des gens assez autonomes et vous êtes... bien, vous pratiquez la même chose, d'un côté en établissement puis l'autre côté en communautaire, ça fait que...

Je veux revenir sur la question... Puis j'en profite parce que souvent la discussion que j'aurai avec mes collègues, entre autres, de l'opposition dans les prochaines semaines, c'est qu'est-ce qui va dans le projet de loi et qu'est-ce qui va dans un règlement puis qu'est-ce qui va dans l'approche qui va être faite par Santé Québec? Puis ça, je pense que c'est... À force, là, on aura eu peut-être, je ne sais pas moi, pas loin d'une centaine de mémoires, là, avec ceux qui sont venus, puis il va falloir, à un moment donné, qu'on prenne un peu de recul puis de dire : C'est quoi le grand principe de... Qu'est-ce qu'on veut dans le projet de loi qui doit être là? Qu'est-ce qui est dans le règlement, comme c'est le cas en ce moment avec la L4S, et qu'est-ce qu'on veut laisser... l'agilité à Santé Québec de travailler?

Ça fait que je veux revenir sur deux questions. Il y en a une, je vais régler tout de suite, là, parce que, quand M. Bergeron me dit qu'il est d'accord déjà, ça avance plus vite, mais je dois avoir l'opinion de l'opposition. Je veux juste dire...

M. Dubé : ...on est assez favorable à l'idée du registre. Ça, je pense que c'est... On pourra en parler avec l'opposition dans les prochaines semaines, mais l'idée de... Tout à l'heure, quand j'en parlais à nos deux pharmaciennes en établissement, je pense d'être capable de donner à l'INESSS une certaine agilité pour qu'il y ait le bon processus thérapeutique qui soit suivi par celui qui administre, le médecin, mais en même temps, donner la chance de l'INESSS. Ça fait que je veux juste dire pour aujourd'hui, là, qu'on en parle là, je serais curieux d'entendre les oppositions là-dessus, mais je dirais une grande ouverture à voir cette discussion-là au niveau du registre si c'est ça la façon de respecter le principe de protection du patient et de donner à l'INESSS la chance d'intervenir, je pense qu'on va trouver, comment il appelle ça, une voie de passage. On va trouver ça. O.K.

Il y en a deux que je voudrais revenir, que je trouve... C'est pour ça que tantôt je faisais ma petite introduction sur qu'est ce qu'il voit dans la loi versus dans le règlement, puis là, j'aimerais parler de la table territoriale. Bon. La table territoriale, si je le comprends bien, puis nos deux, nos deux pharmaciennes, tout à l'heure, nous l'ont dit, faites-moi la différence entre cette table-là qui, à mon sens, existe un peu déjà, versus la situation actuelle. Qu'est qu'est ce que... qu'est-ce qu'on pourrait faire pour s'assurer qu'il y ait cette cohésion-là? Puis je fais une longue introduction, je vais terminer. Vous avez pris beaucoup de place dans le p. l. 11 quand on a dit : On veut que le pharmacien prenne sa place à travers la première ligne. Moi, je pense que ça va ensemble ce que vous nous proposez, et c'est ça que je voudrais savoir comment, pour vous, c'est important que ça soit dans la loi versus dans un règlement. Vous me suivez?

Mme Lambert (Manon) : Bien. Dans les faits, comme professionnels, on a quand même une vision privilégiée sur...

M. Dubé : Rapprocher votre micro un petit peu, s'il vous plaît.

Mme Lambert (Manon) : Parce que je suis un petit peu enrhumée aujourd'hui.

M. Dubé : Ah! O.K. c'est beau.

Mme Lambert (Manon) : On a...

M. Dubé : Il y a des bons médicaments pour ça, en passant...

Mme Lambert (Manon) : Oui, tout à fait, tout à fait. Mais un rhume traité, ça dure sept jours puis non traité, ça dure une semaine, donc.

M. Dubé : C'est bon.

Mme Lambert (Manon) : On a une vision privilégiée sur sur ce qui se passe. Puis je veux confirmer ce que nos collègues de l'APES ont mentionné, l'offre de services en établissements de santé, en inspection professionnelle, ce qu'on voit, c'est que c'est très bien. Les pharmaciens hospitaliers font, de façon générale, un super bon travail. Le problème qu'on voit, c'est lors des transitions.

M. Dubé : Les transitions.

Mme Lambert (Manon) : C'est vrai en... c'est vrai en pharmacie, c'est vrai en médecine également. Donc, quand on passe d'un établissement à une autre établissement, quand on quand on sort de l'hôpital, bien là, effectivement, il y a des problèmes de communication, il y a des problèmes de collaboration qui mettent en péril parfois la sécurité du patient et qui entraîne ce que Julie disait tantôt, Mme Racicot, je m'excuse, le phénomène de la porte tournante.

M. Dubé : Oui.

Mme Lambert (Manon) : Actuellement, il y avait eu une modification qui avait amené les CRSP, ce n'était pas naturel.

M. Dubé : Rappelez ce que ça veut dire CRS...

Mme Lambert (Manon) : Les comités régionaux de services pharmaceutiques, ça, ça doit faire une quinzaine d'années que ça existe. Ce n'était pas naturel auparavant pour les pharmaciens et les pharmaciens communautaires.

M. Dubé : Puis est-ce que je me trompe que ce n'est pas dans la loi, ça, en ce moment? C'est dans la loi?

Mme Lambert (Manon) : C'est dans la loi. 

M. Dubé : Comme tel, prescrit? O.K.

Mme Lambert (Manon) : Absolument. Et c'est pour ça qu'on pense, nous, que cette structure-là avait commencé à donner d'excellents résultats. Tantôt, on a notre nouveau président qui vient de Trois-Pistoles où on a vu que le comité régional avait été à la base du déploiement des GAP pour ce qui est de l'offre de services pharmaceutiques. Donc, c'est des structures qui ont vu leur importance.

M. Dubé : Oui, c'est vrai. C'est vrai que les pharmaciens étaient impliqués quand on a fait le premier GAP.

Mme Lambert (Manon) : Absolument, absolument. Et ce sont des structures qui sont d'une telle importance, à notre avis, qui méritent d'être mises dans la loi. Et si je fais le parallèle avec...

M. Dubé : Mais la fonction de... la façon de procéder, c'est dans le règlement. Tout ce qu'on fait dans la loi, c'est de dire que ce comité-là doit exister.

Mme Lambert (Manon) : Absolument.

M. Dubé : O.K. O.K. O.K.

• (11 h 50) •

Mme Lambert (Manon) : Absolument. Vous pouvez aller plus ou moins loin, ça, c'est votre prérogative, éventuellement, comme législateur. 

M. Dubé : Mais je veux juste vous dire, en tout cas, on pourra en parler à... lorsqu'on ira, mais je n'ai pas d'objection à ce qu'il reste là, s'il faut qu'il reste là parce que vous, vous trouvez que c'est important qu'il soit là.

Mme Lambert (Manon) : Mais pour les pour les patients, pour les patients, c'est fondamental, et je ferais le parallèle avec les départements.

M. Dubé : En quoi c'est important pour le patient? Ça, ça m'intéresse quand vous dites ça.

Mme Lambert (Manon) : C'est les questions de transition. Si l'offre de services pharmaceutiques n'est pas bien coordonnée, quand je sors de l'hôpital...

M. Dubé : Entre établissements puis le communautaire.

Mme Lambert (Manon) : Bien, oui. Quand je sors de l'hôpital puis je m'en vais à une officine, si...

Mme Lambert (Manon) : ...le pharmacien d'officine communautaire n'a pas les bonnes informations, il pourrait reprendre, par exemple, un médicament qui a été cessé parce qu'il n'a pas l'information qu'il a été cessé, et c'est finalement le médicament qui a conduit le patient à l'hôpital. Donc, on veut éviter ce genre...

M. Dubé : Puis ça, c'est le conseil qui fait ça?

Mme Lambert (Manon) : Bien, c'est fondamental. On veut éviter ce genre de choses là. Puis je ferais le parallèle un peu avec l'offre de service médical. On a vu qu'on a éliminé les départements régionaux de médecine, de médecine générale, par exemple, ceux spécialisés, mais on a remplacé par un département territorial. Pourquoi? Parce que c'est important d'asseoir les services spécialisés avec les services de première ligne. Bien, c'est exactement la même chose en pharmacie. Pourquoi on ne parle pas de départements régionaux en pharmacie? C'est que les pharmacies sont des entités privées qui n'ont pas de contrat avec le réseau, donc on a peut-être un peu...

M. Dubé : Mais mais comment on fait... Je vous pose la question, là, puis je n'ai pas d'arrière-pensées, mais c'est quoi, le levier qu'on a sur un pharmacien communautaire par opposition au levier qu'on a par rapport à un médecin?

Mme Lambert (Manon) : Bien, encore une fois, comme je vous dis, au niveau des...

M. Dubé : Parce que ceux qui ne veulent pas faire ce conseil-là, ils n'ont aucune obligation de le faire.

Mme Lambert (Manon) : Oui. Non, absolument, puis il n'y a pas de contrat comme avec les GMF.

M. Dubé : Bon.

Mme Lambert (Manon) : Par contre, par contre, ce que je peux vous dire, c'est qu'avec les CRSP, qui ont connu des débuts difficiles, qui était inégal d'un territoire à l'autre, le travail des CRSP, mais, quand on avait des pharmaciens engagés là-dessus, on a réussi à faire des miracles. Le Paxlovid, M. le ministre, dans certaines régions, c'est vraiment... puis je peux laisser parler Jean-François, donner l'exemple du Paxlovid.

M. Desgagné (Jean-François) : M. le ministre, moi, je suis un pharmacien de famille. Moi, je travaillais le samedi, je travaillais à la pharmacie le samedi, puis, dans le Bas-Saint-Laurent, là, le CRSP, il fonctionne très bien, il est fonctionnel, et c'est la seule entité qui existe où les pharmacies communautaires peuvent parler aux pharmaciens hospitaliers, puissent parler des vraies affaires. C'est très populaire, ces expressions-là, c'est un peu bateau, mais bref.

Dans le cas du Paxlovid, là, il ne faut pas oublier que les pharmaciens, au Québec, on a été les premiers pharmaciens au monde à pouvoir prescrire le Paxlovid. Et je peux vous dire que, sur le plancher des vaches, les pharmaciens communautaires, on avait beaucoup d'appréhensions. Mais, une des façons qu'on a pu régler ça, c'est qu'on a pu, en travaillant avec les... à travers les CRSP, travailler avec nos collègues hospitaliers pour développer des corridors de services.

M. Dubé : Mais vous, vous êtes... je vais le dire, là, c'est pour ça que tantôt je me demandais : Mais c'est quoi, le levier que l'on a pour, je dirais, presque obliger le CRSP... avec le pharmacien?

M. Desgagné (Jean-François) : Bien, écoutez, obliger... moi, je pense qu'objectivement, si on a un endroit où on peut... en dehors de toutes les considérations de compétition, d'incompréhension, de tout ça, ça nous prend une plateforme où on peut discuter, où on peut planifier les choses. Nous, dans le Bas-Saint-Laurent, l'année passée, on a vécu une situation problématique avec les heures d'ouverture où les pharmacies, sur presque l'entièreté du territoire, étaient fermées le 25 décembre, le 1ᵉʳ janvier. Notre présidente du CRSP, Mme Paradis, a travaillé de façon extraordinaire pour essayer de rabouter les choses, de discuter avec les pharmaciens, puis finalement on a des pharmaciens qui ont levé la main en disant : Écoutez, on est conscients de la réalité du... C'est un endroit où... Moi, je n'aime pas beaucoup la coercition, je préfère tout ce qui est discussion, planification, puis aligner les objectifs.

M. Dubé : Donc, déjà, de le mettre dans la loi, parce qu'en tout cas... ou de le laisser dans la loi, je vais le dire comme ça, sans pouvoir coercitif, ça serait déjà quelque chose. C'est un peu...

M. Desgagné (Jean-François) : Mais moi, je... C'est le seul endroit où on peut discuter.

M. Dubé : C'est un peu ça que j'entends. O.K., O.K.

Mme Lambert (Manon) : ...on a vu avec les CRSP. Donc, on a des beaux succès. On peut tabler sur les succès qu'on a vus.

M. Dubé : Oh oui, tout à fait.

Mme Lambert (Manon) : Et le deuxième élément, si vous me permettez un petit reproche. Souvent, le réseau de la santé avec la pharmacie communautaire, dans le passé, lançait des directives. Donc : On sort tel patient. Les pharmaciens communautaires, vous aurez à prendre en charge tel patient, ressource, pas ressource. Déjà de considérer la pharmacie communautaire, de les asseoir avec les collègues hospitaliers, vous allez avoir un meilleur engagement que de fonctionner par des directives avec une entreprise privée. Ça m'apparaît important.

M. Dubé : Puis je reviens à la question que j'ai posée à vos prédécesseurs tout à l'heure. Votre rôle au niveau du CMDP est-ce qu'il est assez fort, ou c'est pour ça que vous demandez d'avoir un... je dirais, un pharmacien qui relève du P.D.G. au niveau d'établissement?

Mme Lambert (Manon) : Bien, pour nous, c'est deux choses différentes, là.

M. Dubé : Bien, c'est ça que je veux comprendre.

Mme Lambert (Manon) : Le CMDP, son rôle principal, c'est la qualité de l'acte médical, dentaire et pharmaceutique.

M. Dubé : Mais aussi du continuum du processus.

Mme Lambert (Manon) : Absolument... bien, en fait, là, maintenant, vous introduisez le conseil interdisciplinaire.

M. Dubé : Le conseil.

Mme Lambert (Manon) : Nous autres, ce qu'on dit : Allez plus loin avec le conseil interdisciplinaire puis regardez les trajectoires aussi. Parce que ce n'est pas vrai que l'hôpital vit tout seul, il y a des...

Mme Lambert (Manon) : ...des professionnels...

M. Dubé : ...mais vous pensez... Excusez-moi, là, c'est parce que... Comment qu'il me reste de temps?

Le Président (M. Provençal) :Quatre minutes.

M. Dubé : C'est vraiment important, cette discussion-là. En faisant le comité interdisciplinaire, c'est pour s'assurer justement du continuum de soins qu'on peut faire. C'est pour ça que je vous demande : Est-ce que votre rôle comme pharmacien, à l'intérieur du CMDP, vous permet de questionner ce continuum de soins là qui inclut les médicaments? C'est ça qu'est ma question.

Mme Lambert (Manon) : Bien, pas au niveau de la première ligne, actuellement, ce n'est pas clair. Je vais jouer ma voix à celle de l'APES qui disait que la responsabilité populationnelle n'est pas claire. C'est pour ça que, dans notre mémoire, un des rôles du directeur, ce serait d'animer cette... ces tables-là régionales, de s'assurer...

M. Dubé : Le directeur que vous voyez qui se rapporterait au P.D.G., là.

Mme Lambert (Manon) : Oui, absolument, et qui aurait la responsabilité de s'assurer que toutes ces transitions-là dont je vous parlais tantôt, qui peuvent être bien délétères ou bien positives pour le patient si elles sont bien organisées. Donc, il y aurait quelqu'un qui aurait cette responsabilité-là qui pourrait aussi ramener au niveau...

M. Dubé : Qui est très différent de ce qu'on fait au niveau du CMDP puis du... Là, je comprends votre point.

Mme Lambert (Manon) : Absolument, absolument, et qui est différent de ce que fait le chef aussi, là, c'est deux choses différentes. Un ne remplace pas l'autre, là.

M. Dubé : O.K. Tout à l'heure, on a parlé...

Le Président (M. Provençal) :Trois minutes.

M. Dubé : Trois minutes? Bon, je veux juste bien comprendre. Tantôt, on a parlé du processus de plainte, O.K. Je n'ai pas pu intervenir après, mais le processus de plaintes, en ce moment, d'un pharmacien qui est salarié versus un pharmacien qui est... ou bien donc un médecin qui est travailleur autonome, c'est très différent. Comment vous réagissez par rapport au... Vous, vous êtes des entrepreneurs autonomes, quand on parle de pharmaciens comme... ou ent out cas la plupart de vos membres. Au niveau de l'assurance, ça vous dit quoi?

Mme Lambert (Manon) : Bien, écoutez...

M. Dubé : Ou les plaintes, je devrais dire.

Mme Lambert (Manon) : En fait, l'ordre... l'ordre ne fait pas de distinction, là, sur le plan disciplinaire entre les pharmaciens hospitaliers ou les pharmaciens... Ce sont tous nos membres, hein, les pharmaciens salariés et les pharmaciens propriétaires, et tout ça. Force est d'admettre qu'actuellement le projet de loi ramène certains éléments disciplinaires qu'il y avait auparavant. C'est deux processus différents, hein, on ne parle pas... on ne parle pas du processus disciplinaire de l'Ordre des pharmaciens ici, on parle du processus disciplinaire à l'intérieur de l'établissement.

M. Dubé : Des plaintes, entre autres.

Mme Lambert (Manon) : Exactement. Et là on semble ramener certaines dispositions pour le pharmacien, on en oublie d'autres. Nos collègues ont parlé, évidemment, du droit d'être entendu, mais moi, je vais vous parler d'un autre élément qui est important pour la protection du public, c'est que, dans la loi actuelle, lorsqu'un pharmacien a une sanction du conseil d'administration... c'est le conseil d'administration, l'ordre professionnel en est avisé. Parce que ce qu'on voit généralement, c'est que, bien sûr, l'établissement fait son travail au niveau du pharmacien comme tel, mais, si le pharmacien a eu une conduite vraiment inacceptable qui pourrait nuire, éventuellement, s'il transportait cette conduite-là dans un autre établissement, parce que la sanction ne s'applique pour que l'établissement dans lequel il travaille, l'ordre était avisé, la loi prévoyait que l'ordre était visé. Ce n'est plus le cas actuellement. Donc, c'est comme si on a repris certains éléments, pas d'autres, et ça fait un canard boiteux. Donc, l'idée, c'est vraiment d'y aller comme c'était auparavant. Ça fonctionnait dans le passé et c'était... ça nous permettait, à nous, comme ordre professionnel, de surveiller ça aussi.

M. Dubé : Bon, bien, ça m'éclaire un peu. Parce que, tout à l'heure, on a peut-être mis... on a fait ça rapidement. Il me reste, quoi, 30 secondes?

Le Président (M. Provençal) :Un petit peu plus.

M. Dubé : Un petit peu plus. C'est le temps de vous remercier, parce que ce que vous avez fait, dans votre région, avec les débuts du GAP, avec la collaboration des pharmaciens, je sais qu'on n'est pas rendu exactement où on veut, mais je pense qu'on a fait un grand bout de chemin. Puis je pense que les pharmaciens ont contribué à cette prise en charge là et c'est pour ça que je suis... On verra, dans les prochaines semaines, prochains mois, comment on peut traduire ce que vous avez commencé avec une plus grande participation des pharmaciens. Je veux le dire aux deux... aux deux présentations de ce matin. Je trouvais ça important de vous remercier.

• (12 heures) •

Le Président (M. Provençal) :Merci, M. le ministre.

M. Dubé : Merci.

Le Président (M. Provençal) :M. le député de Pontiac, vous avez la parole.

M. Fortin :Merci, merci, M. le Président. Bonjour, M. Bolduc, toute l'équipe. M. Bolduc, merci, je pense, ça fait... Ça fait combien d'années? Neuf ans que vous êtes en poste, si je ne me trompe pas. Bien, félicitations d'abord pour votre travail, pour les avancées que vous avez menées à l'ordre. Et M. Desgagné, je ne sais pas si vous souhaitez un mandat tranquille comme vous le souhaite le ministre. Je ne pense pas qu'on se lance là-dedans pour des mandats tranquilles, je pense que vous voulez probablement faire bouger les choses aussi.

M. Desgagné (Jean-François) : De toute façon, je connais mes membres, je connais mes collègues, et on est prêts à affronter toutes les tempêtes.

M. Fortin :Ah! voilà, voilà. Je reconnais quelqu'un du Bas-du-Fleuve. Là, je veux revenir sur la question des plaintes rapidement, là...


 
 

12 h (version non révisée)

M. Fortin :...parce que c'est la dernière qui a été traitée, puis je ne veux pas que ce soit traité trop rapidement. Si je vous ai bien compris, Mme Lambert, vous avez dit essentiellement que, parce que... de la façon que c'est organisé en ce moment, là, pour des plaintes en établissement, entre autres, ça ressemble à un canard boiteux parce qu'on touche à certains aspects, on oublie certains aspects. Il y a... ce n'est pas une ligne claire, disons, comme il y a en ce moment.

Mme Lambert (Manon) : ...la façon dont ça a été traduit dans le projet de loi 15, on reprend certains éléments, on n'en reprend pas d'autres. C'est comme si on avait oublié une partie des... une partie des choses pour le pharmacien.

M. Fortin :Donc, rendu là, votre recommandation?

Mme Lambert (Manon) : Ramenons les choses...

M. Fortin :Touchez à rien, là, des fois...

Mme Lambert (Manon) : Bien, ramenons les choses comme on les a ramenées pour les sages-femmes, les sages-femmes qui sont nouvelles dans ce processus-là. Ramenons les choses à ce niveau-là puis ramenons les choses comme pour les médecins qui ont été ramenés totalement. Donc, en anglais, on dit : "If it's not broken, don't fix it". Donc, ça fonctionne. Ça a fonctionné dans le temps. Ce n'est pas... il n'y a pas un grand nombre de plaintes au niveau pharmaceutique, mais ça a fonctionné dans le passé. Quand on avait à être avisé, on a été avisé, comme ordre professionnel. Puis, comme je vous le disais tantôt, c'est un élément important de protection du public. Donc, nous, on recommande de maintenir les choses telles qu'elles sont actuellement.

M. Fortin :Non, bien, je vous entends s'il y a un élément organisationnellement qui fait du sens. Déjà, si c'est efficace, si ça protège le public et s'il n'y a pas de problème en tant que tel, je ne vois pas pourquoi on irait jouer là-dedans, à moins que la ministre, nous... ait une vision différente, là, je vous entends là-dessus.

Votre deuxième recommandation par rapport aux chefs de... aux chefs de pharmacies, là, vous voulez qu'ils conservent leur responsabilité, mais que ce ne soit pas sous la direction médicale. Pouvez-vous nous expliquer exactement ce que vous voulez dire, l'impact que ça pourrait avoir?

M. Boudreault (Patrick) : Bien, écoutez, aujourd'hui le pharmacien... le pharmacien... Vous avez vu le nombre... le médicament, c'est le deuxième poste budgétaire après les salaires dans un établissement, c'est énorme. On dépense énormément de médicaments en province, et ça, c'est à part toute l'organisation des soins. On a parlé de l'interface entre le communautaire et l'établissement, mais à l'intérieur de l'établissement aussi, pour bien gérer le circuit du médicament, on a besoin de technologies, on a besoin de robotisation, on a besoin de systèmes informatiques. Et on croit que pour bien gérer, pour bien gérer le département, pour bien gérer le fait pharmaceutique d'un établissement de santé, bien, on se doit d'être à l'endroit et au niveau où se prend les décisions. Nous, entre les ordres professionnels, on travaille avec nos collègues de l'Ordre des infirmières et du Collège des médecins, c'est quotidien et on ne sent pas, là, qu'on est sous le Collège des médecins. Alors, probablement qu'on est rendus d'avoir une nouvelle... une actualisation d'une nouvelle façon de voir les choses sur laquelle le pharmacien... à quel endroit on a besoin de son expertise. Et c'est très certainement à l'endroit où se prend les décisions dans un établissement de santé. Et c'est en toute cohérence aussi avec notre proposition d'avoir une direction des soins pharmaceutiques forte au niveau national, au niveau de Santé Québec, mais d'avoir aussi à l'intérieur de l'établissement, un rôle des chefs de département qui, comme les prédécesseurs l'ont dit... qui est bien campé dans la loi ou sinon dans le règlement, mais préférentiellement dans la loi, mais aussi avec un directeur des soins et services pharmaceutiques, au conseil de... au comité de gestion de l'établissement et qui gère le médicament en collégialité avec le directeur médical, le DSI, le directeur des services multi. Alors on pense qu'aujourd'hui on est rendus là.

M. Fortin :O.K. Mais le point que vous faites, là, c'est que le pharmacien n'a pas besoin d'être disons sous l'égide médicale, là, à ce niveau-là, mais qu'il y a un travail de collaboration à faire, bien évident. Ça, on comprend ça, je pense que ça touche à certaines de vos recommandations, entre autres sur la Loi sur la pharmacie, là, vous amenez des recommandations à ce niveau là. Puis là, j'imagine que c'est en place depuis longtemps parce qu'à première vue, je la comprends mal, disons, le... ce qui est en place, là, et que vous recommandez de changer à travers votre recommandation 10, quand vous dites "qu'un établissement de santé ne peut permettre l'achat, la préparation puis la fourniture de médicaments que s'il y a un médecin qui y exerce", ça, ça doit être là depuis...

Mme Lambert (Manon) : C'est là depuis 1974, et évidemment avec l'arrivée des hôpitaux privés, si on fait le parallèle avec les CMS, les cliniques médicales spécialisées, l'organisation des services pharmaceutiques ou la fourniture de médicaments n'est pas optimal à ce niveau-là. Si on va avec des hôpitaux privés, est-ce qu'on va rester avec une station... parce qu'il y a des médecins... oups! Tout d'un coup, on n'a plus besoin de pharmaciens pour...

Mme Lambert (Manon) : ...organiser le circuit du médicament. Vous savez, avec le temps, le travail de médecin, le travail de pharmacien, c'est deux... c'est deux professions très différentes puis qui n'ont pas les mêmes compétences. Donc, on pense qu'elles doivent être complémentaires. Mais ce n'est pas vrai demain matin qu'un médecin peut débarquer dans une pharmacie puis gérer un circuit du médicament complexe, ce n'est pas son expertise. Donc, on dit : Enlevons donc ce vestige-là. Surtout avec les hôpitaux privés, ça serait une bonne idée que... d'être certain que le circuit du... qu'un circuit du médicament hospitalier va être géré par des pharmaciens hospitaliers.

M. Fortin :O.K. Ça, c'est une chose, là, par rapport aux hôpitaux privés puis aux CMS, là, ça, c'est une recommandation qui fait à mon sens beaucoup de... beaucoup de bon sens. Mais sur la question des hôpitaux privés puis des CMS, on a entendu tantôt des pharmaciens d'établissement se prononcer là-dessus, vous êtes d'avis essentiellement que la table ferait ce travail-là également, là, permettrait cette coordination-là pour les hôpitaux et les CMS, parce que c'est ce qui semble être à l'extérieur, évidemment, de leur champ d'expertise. Mais, pour vous, cette table-là, est-ce qu'elle peut remplir une partie de cette mission-là aussi?

Mme Lambert (Manon) : Bien, ça va dépendre. On n'a pas encore beaucoup d'informations sur les hôpitaux privés...

M. Fortin :Non, nous non plus.

Mme Lambert (Manon) : ...comment ça va être organisé par rapport aux établissements publics. Est-ce que c'est des patients, un peu comme on voit avec les chirurgies, qui sont des patients des établissements publics avec une sous-traitance. Ça fait que c'est difficile à dire... à répondre à votre question actuellement. Ça fait que c'est deux choses. On pense que si on y va avec vraiment des hôpitaux privés... Un hôpital, c'est un hôpital, là, et donc le circuit du médicament, le circuit du médicament en hôpital, c'est différent d'un circuit du médicament en officine, ça implique beaucoup plus d'interdisciplinarité, beaucoup plus de communication, beaucoup plus de collaboration interprofessionnelle. Et ça, ce sont les pharmaciens hospitaliers qui ont cette dimension-là. Ce qu'on a vu partir dans les appels d'offres pour les hôpitaux privés, c'est de dire : On va avoir un comptoir de pharmacie qui va donner les médicaments quand le patient va partir. Oui, mais pendant qu'il va être à l'hôpital privé, qu'est-ce qu'on va faire? Donc, ça nous inquiète un peu tout ça.

Donc l'idée, c'est que l'expertise pour assurer la sécurisation du circuit du médicament hospitalier soit faite par des pharmaciens qui ont cette compétence-là, puis, jusqu'à maintenant, ce sont les pharmaciens hospitaliers qui s'occupent de ça.

M. Fortin :Et pour lesquelles ils ont fait des études supplémentaires.

Mme Lambert (Manon) : Absolument.

M. Fortin :O.K. Très bien. Moi, ça me va, M. le Président. Merci...

Le Président (M. Provençal) :Il reste une minute 40.

Mme Setlakwe : ...

Le Président (M. Provençal) :Oui. Allez-y, Mme.

Mme Setlakwe : Merci. Bien, je vais aller directement. Merci à vous tous. Dans les statistiques intéressantes dans votre mémoire, vous parlez que les erreurs liées à la médication demeurent le deuxième type d'événements... je suis à la page six, là, quatrième paragraphe, indésirables les plus fréquemment déclarés lors d'une prestation de soins, c'était en 2020-2021, derrière les chutes. Sur plus de 400 000 événements indésirables, il y en avait 24,5 qui étaient liés à la médication. C'est énorme. Est-ce que le projet de loi va améliorer quelque chose à ce niveau-là?

Mme Lambert (Manon) : À ce niveau-là?

• (12 h 10) •

M. Boudreault (Patrick) : ...il y a des éléments qui peuvent nous aider. Tout le volet du conseil interdisciplinaire, pour nous, c'est important qu'un pharmacien soit nommément sur ce comité-là, qu'il soit bien nommé et qu'on ne regarde pas uniquement les trajectoires de l'établissement, mais qu'on en regarde aussi les conséquences sur l'ensemble des partenaires qui sortent de l'établissement. On a trop vu par le passé des révisions de processus intraétablissement avec des conséquences sur des partenaires, pharmacies communautaires, cliniques dentaires, cliniques de réadaptation, des organismes communautaires pour lesquelles on n'a pas bien attaché le tout. La table régionale qu'on propose... le comité interdisciplinaire, si on élargit son mandat avec les partenaires à l'extérieur de l'établissement, bien, on réussit fort probablement à organiser un peu mieux les transitions entre l'établissement et la communauté pour ajouter de l'efficience et ajouter de la sécurité à travers de tout ça. Et il y a d'autres pièces maîtresses aussi. Si on regarde le projet de loi trois, si on se partage une information qui est pertinente et si on peut se doter de technologies et de systèmes d'information plus performants, bien, on a fort probablement des pièces maîtresses qui nous permettront pour les patients d'avoir un circuit de soins qui est plus sécuritaire, dans lequel il pourra lui-même s'impliquer.

Mme Setlakwe : ...

Le Président (M. Provençal) :C'est terminé. Alors, M. le député de Rosemont, vous prenez la suite.

M. Marissal : Oui. Merci. Bonjour. Félicitations et merci à vous. Comme c'est jeudi, vous finissez demain. Bon, il n'y a pas d'overlap. Vous êtes couvert.

J'y vais rapidement. Recommandation cinq : Que le circuit du médicament prévu dans les établissements de santé privés soit sous la responsabilité d'un pharmacien hospitalier. Vous l'avez dit, là, à maintes reprises, vous avez expliqué pourquoi vous pensez que c'est la...

M. Marissal : ...idée. En ce moment, ça marche comment?

Mme Lambert (Manon) : Bien, actuellement, les hôpitaux privés, c'est un nouveau concept, là, c'est un...

M. Marissal : Non, mais il y a des CMS. Il y a quand même des médicaments qui se donnent dans des...

Mme Lambert (Manon) : Oui, il y a des CMS. Actuellement, on se limite, je dirais, puis c'est une de nos inquiétudes, à fournir le médicament. Il n'y a pas de soins pharmaceutiques qui sont offerts, ça fait qu'on fournit les médicaments. Le chef du département de pharmacie fournit les médicaments aux CMF, et c'est... ce sont les infirmières et les médecins qui gèrent la médication dans les établissements de... Dans ce genre d'établissement là.

M. Marissal : ...comprenne bien, mettons, je me fais opérer à Rockland, M.D. On a besoin de quelque chose pour calmer la douleur, il y a quelqu'un qui livre les médicaments, qui est responsable?

Mme Lambert (Manon) : On met ça au commun, on met ça au commun puis on donne ça aux patients.

M. Marissal : O.K. Mais, en rendant les pharmaciens hospitaliers, qui sont derrière vous, là, d'ailleurs, les pharmaciens et les pharmaciennes d'établissement, je devrais dire, responsables en quelque sorte, parce que... Prenons l'exemple où il y a un pépin, là, ça peut arriver, des pépins, avec des molécules, là, des fois, ça, ça a des conséquences non voulues, là, donc c'est les pharmaciens d'établissement qui sont responsables? Qui est responsable à la fin?

Mme Lambert (Manon) : O.K. Bien, actuellement, on ne peut pas rendre un pharmacien d'établissement à qui on demande juste de fournir les médicaments responsable, après ça, de l'utilisation, s'il n'y a pas de soins pharmaceutiques qui sont offerts. C'est un problème, qu'il n'y ait pas de soins pharmaceutiques.

Puis, au-delà de chercher qui est responsable de quoi, ce qui est important, c'est : est-ce que mon patient est traité de façon sécuritaire. Puis actuellement, ce qu'on dit, c'est qu'il n'y a pas de soins pharmaceutiques qui sont offerts dans ce genre d'établissement là. Il y a des médicaments qui sont fournis, mais il n'y a pas de soins pharmaceutiques qui sont offerts.

M. Marissal : O.K. Bien, je ne cherche pas nécessairement de coupable, là, mais, à un moment donné, quand on recule la chaîne de commandement, là, comment ça se fait que telle molécule a été donnée à tel patient, puis il en est mort, mettons, là?

Mme Lambert (Manon) : Ça, le pharmacien ne pourra pas être responsable de ça puisqu'il n'y a pas de soins pharmaceutiques. Par contre, je ne sais pas, moi, si l'établissement demande, on va prendre des médicaments connus, de la morphine, puis que le pharmacien d'établissement se trompe puis il donne du fentanyl puis que ça passe inaperçu aux yeux tout le monde, bien, il y a, oui, il y aura certainement une responsabilité, mais, ça, c'est les tribunaux qui auraient... qui seraient appelés à juger. Mais, ça, c'est une partie de la responsabilité. La responsabilité du pharmacien est beaucoup plus grande que ça, en théorie, quand il offre des soins pharmaceutiques. Là, il travaille en équipe puis, à ce moment-là, il y a une coresponsabilité médecin-pharmacien pour que le bon médicament soit donné au bon patient au bon moment à la bonne dose. Mais ce n'est pas ce qui se passe actuellement dans les CMS.

M. Marissal : O.K. Bien, merci.

Le Président (M. Provençal) :Ça va. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau : Bonjour. Et félicitations pour votre mandat qui se termine et félicitations pour votre nouveau mandat. Je voulais continuer sur la même thématique parce qu'on nous annonce déjà qu'il y a des hospitalisations qui sont maintenant permises dans certaines cliniques. C'est exactement le même... On n'a pas changé le modèle sur la médication? C'est...

Mme Lambert (Manon) : ...Bien, encore une fois, on ne le sait pas parce que les appels d'offres qu'on a vus, ou enfin appels d'intention, appelons-le comme ça, les appels d'intention... Puis on nous a quand même dit, du côté du ministère : Bien, on est en... Il y a beaucoup de choses, là, qui sont perfectibles à ce niveau-là. Mais ce qu'on a vu dans un des appels d'intention, c'était qu'on voulait un comptoir pharmaceutique quand le patient sortait de l'hôpital privé. Nous, ce qu'on dit, c'est que, lorsqu'il est là, il faut s'assurer que les médicaments sont bien utilisés aussi.

M. Arseneau : O.K. Puis, la notion de comptoir pharmaceutique, pour le commun des mortels, ça veut dire quoi?

Mme Lambert (Manon) : Bien, c'est avoir un comptoir d'une pharmacie privée où on n'a peut-être pas nécessairement le devant, mais on a un pharmacien de pratique privée. Vous allez sortir de l'hôpital privé, vous allez avoir par exemple une prescription d'analgésiques, vous allez au comptoir, puis le pharmacien va faire le même travail que s'il était à la... à sa pharmacie d'officine puis il va vous remettre le médicament. Mais ça, c'est pour les médicaments qui sont à l'extérieur de l'établissement.

M. Arseneau : D'accord. Je voudrais revenir sur la table territoriale que vous... On a compris, là, essentiellement qu'il y a des choses qui n'ont pas été... des éléments du système actuel qui n'ont pas été transposés. Et vous souhaitez qu'on les transpose. Mais la table territoriale, l'unité territoriale, comment vous le décrivez, puis quel est son avantage?

Mme Lambert (Manon) : Bien, en fait, nous, ce qu'on suggère dans l'annexe, c'est que, le territoire, ce n'est pas nous qui allons décider, c'est le ministère, dans la loi. En fait, le ministre se donne la possibilité, là, d'identifier quels seront les territoires. Donc, nous, on dit : Bien, il faut y aller, une table par territoire. Donc, est-ce que le territoire sera une MRC, est-ce que le territoire sera une région, c'est quelque chose qui peut être fixé par la loi. Mais il nous faut une table par territoire, clairement.

Et quand vous dites : on veut reporter, moi, je dirais plus qu'on veut reporter, on veut que ça fonctionne encore mieux que les CRSP. Donc, il faut que ça soit mieux organisé, mieux financé pour s'assurer que ça va donner le... Parce qu'imaginez, là, on avait des CRSP qui étaient un peu organisés...

Mme Lambert (Manon) : ...à l'huile de bras, disons ça comme ça, actuellement, et ça a donné des petits miracles. Donc, si on les organise bien, si on a un responsable, si on a du financement, je pense qu'on peut vraiment aider nos patients avec ces tables-là.

M. Arseneau : Est-ce que je...

Le Président (M. Provençal) :30 secondes.

M. Arseneau : Juste pour terminer sur le territoire, est-ce que l'unité territoriale, c'est pour permettre une meilleure efficacité, une meilleure concertation, ou c'est parce qu'il peut véritablement y avoir des enjeux, là, à géométrie variable selon le territoire?

Mme Lambert (Manon) : C'est vraiment... bien, en fait, c'est pour une décentralisation. Puis effectivement, dans certaines régions, prenez la Montérégie, ce n'est pas vrai que, dans certains secteurs de la Montérégie où on est plus en ruralité puis à Longueuil, que les enjeux sont nécessairement les mêmes.

M. Arseneau : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal) :Alors, je remercie Mme Lambert, M. Boudreault, M. Desgagné et M. Bolduc de l'Ordre des pharmaciens du Québec pour leur contribution et leur participation. Sur ce, la commission suspend ses travaux jusqu'après les avis touchant les travaux des commissions vers 15 h 15. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 12 h 17)


 
 

15 h (version non révisée)

(Reprise à 15 h 21)

Le Président (M. Provençal) :À l'ordre, s'il vous plaît. La Commission de la santé et des services sociaux reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques. Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi no 15, Loi visant à rendre le système de santé et de services sociaux plus efficace. Cet après-midi, nous entendrons des témoins suivants : le Réseau des tables régionales de groupes de femmes du Québec; le Regroupement québécois des intervenantes et intervenants en action communautaire en CISSS et en CIUSSS; la Commission...

Le Président (M. Provençal) :...la santé et des services sociaux des Premières Nations du Québec et du Labrador, l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec et l'Association du personnel d'encadrement du réseau de la santé et des services sociaux.

On a commencé un cinq minutes en retard, donc je vais avoir besoin de consentement pour qu'on puisse prolonger d'au moins cinq minutes pour entendre l'ensemble de nos groupes. Merci beaucoup.

Je souhaite maintenant la bienvenue au Réseau des tables régionales de groupes de femmes du Québec. Alors, mesdames, je vous invite à prendre la parole. Vous avez 10 minutes pour votre présentation, et nous procéderons par la suite aux échanges. Je vous cède la parole.

Mme Landriault-Dupont (Élise) : Bonjour. On m'entend bien? Alors, M. le ministre, M. le Président, les parlementaires, merci de nous accueillir. Nous sommes ici pour représenter le Réseau des tables régionales des groupes de femmes du Québec.

Alors, le réseau, c'est un organisme féministe de défense collective des droits des femmes dans une perspective intersectionnelle qui existe depuis 2001. Il s'agit d'un regroupement provincial composé de 17 tables de... 17 tables régionales des groupes de femmes au Québec. Donc, au travers de ses membres, le réseau est en lien avec plus de 400 groupes de femmes dans la province.

Alors, c'est un privilège pour nous d'être ici aujourd'hui. Malheureusement, c'est un privilège que nous aurions grandement souhaité partager avec d'autres. Le gouvernement, nous pensons, se prive en ce moment de l'expertise de nombreux groupes citoyens, organismes communautaires, régionaux et organisations représentant une diversité de groupes marginalisés. Selon ce qu'on sait, là, on est un des deux seuls organismes communautaires invités à cette commission.

Alors, nous pensons que le processus expéditif et accessible sur invitation seulement constitue, selon nous, donc, une entrave importante à un processus pleinement démocratique. Le gouvernement risque ainsi d'aller de l'avant avec un projet de loi qui comporte plusieurs angles morts. Seul un large et plus vaste processus démocratique est garant, selon nous, d'une réforme réussie.

Aussi, nous estimons que les consultations, telles qu'elles ont eu lieu, portent atteinte au processus démocratique à l'intérieur même de notre organisation parce que la rapidité du processus nous a empêchées d'aller chercher toutes les connaissances au sein de notre regroupement pour analyser le projet autant que nous aurions été capables de le faire.

Le réseau joint donc sa voix aux dizaines d'organisations qui demandent au gouvernement de mener un vrai débat public démocratique sur la question. Merci.

Mme Pitre (Gabrielle) : Donc, je vais poursuivre. En fait, au niveau... Le Réseau des tables régionales de groupes de femmes du Québec souhaite aborder le projet de loi n° 15 sous l'angle du droit à la santé.

Donc, reconnu dans plusieurs d'instruments juridiques internationaux, le droit à la santé est un droit fondamental que le Québec s'est engagé à respecter. En ce sens, les femmes ne sont ni des clientes ni des usagères de services de santé, elles sont titulaires en matière de droits à la santé, et ce fait doit être pris en compte par le gouvernement, notamment lorsqu'il établit les structures du système de santé québécois.

Afin que toutes les femmes puissent réellement se prévaloir des droits réitérés dans le projet de loi n° 15, tel que le droit d'être informé de son état et des risques et conséquences des options de soins, de consentir aux soins, de même que le droit de participer à toute décision affectant son état de santé et de bien-être, il est essentiel d'assurer l'accessibilité et la qualité des services de santé et des services sociaux. Cet accès passe notamment par l'accessibilité des services dans leurs langues pour les personnes des différentes communautés culturelles et des Premières Nations du Québec et pour les personnes sourdes et malentendantes, ainsi qu'une accessibilité physique de service garantie. Reconnue comme une des composantes du droit à la santé, cette dernière se doit d'être assurée par le projet de loi n° 15.

Ainsi, bien que le projet de loi n° 15 réaffirme les droits de l'usager prévus dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux et inclut le droit de recevoir les services en présence, l'exclusion de l'article 9.2 de la LSSSS, qui stipule que nul ne peut entraver l'accès d'une personne à un lieu auquel elle a droit d'accéder et où sont offerts des services de santé ou des services sociaux, nous préoccupe grandement.

Par ailleurs, malgré l'inscription de droits de l'usager à la Loi sur les services de santé et les services sociaux, nous constatons que les femmes sont encore confrontées à plusieurs entraves lorsqu'elles se tournent vers le réseau de la santé et des services sociaux : discrimination à l'égard de celles à la croisée des oppressions, inaccessibilité physique et manque d'abordabilité de certains services, de même que des problèmes quant à la sécurisation culturelle, le respect du consentement, de l'intégrité et de la dignité des femmes. Ces entraves minent sérieusement le droit des femmes à la santé, d'autant plus que celles-ci ont recours aux services de santé à toutes les étapes de leur vie, même quand elles ne sont pas malades, mais ont des besoins en matière de santé reproductive.

Devant ces constats, le Réseau des tables régionales de groupes de femmes du Québec se demande en quoi la réforme proposée permettra-t-elle de s'attaquer aux enjeux susmentionnés et d'accroître l'égalité d'accès des femmes aux services de santé. Il recommande en ce sens que le gouvernement intègre le principe de Joyce...

Mme Pitre (Gabrielle) : ...à ces décisions, ces actions et ces investissements en santé, en collaboration avec les peuples autochtones, et s'assure que le projet de loi participe à la mise en œuvre de ce principe.

Finalement, considérant les inquiétudes soulevées par la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec et la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, secteur privé, sur les impacts négatifs de la mobilité accrue de la main-d'oeuvre, le réseau se demande si le projet de loi risque de réduire l'accès et la qualité des soins dans certaines régions éloignées des grands centres. Merci.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Un autre aspect que nous partageons au Réseau des tables régionales de groupes de femmes, c'est que nous sommes d'avis que le projet de loi n° 15 doit impérativement faire l'objet d'une analyse différenciée selon les sexes dans une perspective intersectionnelle, l'ADS+. Il s'agit d'une approche, l'ADS+, qui permet de discerner les effets différenciés des projets de loi, des politiques et de toute autre initiative publique, afin de prévenir la création d'inégalités et atteindre l'égalité de droit et de fait entre les femmes et les hommes, et entre les femmes elles-mêmes.

Après s'être engagé sur la scène internationale en 1995, le Québec a déployé deux plans d'action pour introduire l'ADS dans ses instruments de gouvernance. Dans sa Stratégie gouvernementale pour l'égalité entre les femmes et les hommes de 2022-2027, le gouvernement réitère son engagement quant à l'application de cette approche renforcée. De même, la prise en compte des distinctions de genre dans le domaine de la santé fait partie des obligations internationales de mise en œuvre du droit à la santé. Cela signifie également que le Québec doit accorder une attention particulière aux besoins et aux droits en matière de santé des femmes les plus marginalisées, telles que les femmes réfugiées ou migrantes, les femmes racisées, les fillettes et les femmes âgées, les femmes dans l'industrie du sexe, les femmes autochtones, les femmes vivant avec un handicap, les femmes trans et les femmes de la diversité sexuelle.

Le Réseau des tables régionales de groupes de femmes du Québec souligne que l'ADS+ est particulièrement pertinente pour le projet de loi n° 15, considérant que les femmes composent la forte majorité du personnel du réseau de la santé, et qu'elles doivent recourir davantage aux services de santé, en raison de besoins relatifs à la santé sexuelle et reproductive et des rôles sociaux qu'on exerce depuis de nombreuses années, comme, par exemple, quand il est question de soins des enfants, de proches malades ou vieillissants. Donc, une ADS+ faciliterait le travail de l'ensemble des actrices et acteurs impliqués dans l'élaboration du projet de loi, afin d'éliminer les carences rencontrées dans la gouvernance, l'organisation et la prestation de services.

• (15 h 30) •

L'application d'une ADS+ est un levier qui aurait permis, par exemple, d'identifier les risques que pose le projet de loi à l'autonomie de la pratique sage-femme. Comme le souligne la Coalition pour la pratique sage-femme et la concertation nationale féministe du Groupe des 13, les propositions sur la gouvernance clinique impliquent une fusion du Conseil des sages-femmes avec le Conseil des médecins, des dentistes et des pharmaciens, et l'abolition du poste de responsable des services de sages-femmes, au profit d'un poste de directrice de département clinique. Cela suscite des inquiétudes au sein de notre organisation. Ces propositions risquent de renforcer la vision médicale de l'accouchement et mettre les médecins, dont les médecins spécialistes, en position d'autorité sur les sages-femmes.

Or, l'autonomie des sages-femmes fait partie des conditions permettant que les femmes et les personnes qui accouchent puissent faire des choix libres et éclairés pendant la grossesse et lors de l'enfantement. Elle est également garante de leur capacité à organiser efficacement leurs services en collaboration avec les autres professionnels, de même qu'avec les familles et les communautés. C'est pourquoi il importe d'assurer l'autonomie professionnelle des sages-femmes, tout comme l'a... reconnu lors de l'appui unanime, là, à l'Assemblée nationale dernièrement. Mais le projet de loi devrait être modifié afin de maintenir des instances distinctes pour les sages-femmes.

Mme Bernier (Mélanie) : Parlons maintenant de la place accordée au secteur privé. Le réseau des tables soutient que le gouvernement doit reculer sur la place accordée au secteur privé. Nous partageons la préoccupation de la FIQ et de la FIQP, à savoir que le projet de loi légitimise et normalise le recours au privé, notamment en indiquant, à l'article 2, que les services de santé sont fournis par des établissements publics et privés, sans distinction ni priorisation. Pourquoi le gouvernement souhaite-t-il, par ce projet de loi, que les ressources de l'État soient dirigées vers un secteur privé qui accroît les inégalités d'accès, siphonne la main-d'œuvre du réseau public, est plus cher et moins efficace que ce dernier, et dont la logique des services est orientée vers la rentabilité? C'est pourquoi le réseau conclut que cette orientation politique est un manquement à l'obligation internationale de mise en œuvre du droit à la santé, telle qu'interprétée par le Comité des droits économiques et socioculturels des Nations unies...


 
 

15 h 30 (version non révisée)

Mme Bernier (Mélanie) : ...Ensuite, pour revenir à la démocratie, concernant le processus démocratique, les gouvernements précédents ont manqué à ces obligations en réduisant, au fil des différentes réformes organisationnelles, la participation de la population, dont les femmes et les groupes de femmes qui les représentent. En ce sens, la participation de la population telle que requis... telle que requise par le droit à la santé, nécessite l'implication d'une multitude d'autres actrices et acteurs, de même que de réels pouvoirs décisionnels. Le droit à la santé doit être compris de manière large et ne pas être circoncis... circonscrit, pardon, aux droits de l'usager et de l'usagère. La participation de la population à la prise de toutes les décisions en matière de santé, et ce au niveau communautaire, national et international, est un aspect important de ce droit.

Le Président (M. Provençal) :Pouvez-vous conclure, s'il vous plaît, parce que votre temps est écoulé?

Mme Bernier (Mélanie) : Je conclus. Et pour finir, en fait, une menace à l'action communautaire autonome... Dans le fond, le projet de loi propose que les fonds destinés au programme de soutien aux organismes communautaires, le PSOC, qui représente le financement à la mission globale de nombreux groupes de femmes relèvent de Santé Québec. Une telle proposition ferait en sorte que les organismes d'action communautaire autonome deviennent les bras opérants d'une société d'État. Ainsi, le respect de l'autonomie de ces groupes est lourdement menacé. Voilà.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup, mesdames, pour votre exposé. M. le ministre, on débute la période d'échange.

M. Dubé : Avec plaisir, M. le Président. Mesdames, merci beaucoup encore une fois, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, pour votre participation. Peut-être juste rappeler, là, parce que les... Il y a beaucoup de mémoires qui sont rentrés dans les dernières heures, puis je pense que mes collègues sont au courant, on va avoir reçu, je pense, à peu près une centaine de mémoires. Donc, on peut peut-être différer sur nos opinions, mais je pense que dans le processus démocratique, d'en avoir reçu plus d'une centaine, c'est déjà très bon signe. Et on s'est engagé non seulement à en prendre connaissance, mais si je pense du côté du gouvernement, je pense qu'on va prendre tout le temps nécessaire à utiliser les recommandations que vous faites et celles de tous les autres mémoires qui vont être présentés. Je voulais juste peut-être le rappeler.

Et je rappelle aussi, parce que je veux vous entendre un petit peu sur toute la question que vous avez appelée sur l'analyse différenciée basée sur les sexes, que je trouve très intéressante parce qu'on a en ce moment un débat, justement, vous avez suivi ça, avec les cartes d'assurance maladie, les genres, etc. Je pense que c'est un débat que notre gouvernement a décidé de prendre à bras le corps, si je peux dire, qui avait été mis de côté depuis longtemps. Je pense qu'on a... on a décidé de prendre cette discussion-là sérieusement avec le ministère de la Justice, notamment.

Mais je vous rappellerais, puis c'est pour ça que je veux essayer de comprendre, entre ce qui doit être fait dans le projet de loi no 15 versus ce qui peut être fait dans les autres lois parce que... Puis là je lis rapidement votre mémoire, parce qu'on en a eu plusieurs, mais il n'y a rien qui va à l'encontre de l'ADS dans le projet de loi. Alors, j'essaie de voir où vous pourriez être rassurés parce que je pense que c'est important de vous rassurer. Est-ce que ça peut être vous par voie de règlement? Est-ce que ça peut être par voie d'un engagement que Santé Québec pourrait... Un peu comment on fait, on demande à Santé Québec de trouver les moyens de faire de la gestion de proximité tout en leur laissant assez de marge de manœuvre pour faire les choses, mais que nous, comme législateurs, on dise clairement à la population qu'on veut le faire. Alors, moi, je vous demanderais qu'est ce qui est si important pour vous de quelque chose qui est assez complexe, là, on se comprend? Vous, pour vous, l'ADS, c'est simple, là, mais pour des législateurs, c'est quand même assez complexe. On se comprend? Puis je le vois par l'analyse des genres qu'on fait en ce moment. Dites-moi qu'est ce qui est important qui soit dans la loi, versus, est ce qu'on ne pourrait pas être au niveau des règlements, puis ce serait suffisant? C'est la question que je vous pose avant, peut-être, de passer la parole à mes collègues ici, là?

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Pour nous, ce qui est important, c'est que le projet de loi no 15 fasse l'objet d'une analyse différenciée selon les sexes dans une perspective intersectionnelle. Donc, que dès maintenant, vous avez écrit le projet de loi no 15 et dès maintenant on retourne au travail, puis on regarde chacune des mesures, puis on regarde c'est quoi l'impact sur les femmes et sur les hommes. Parce qu'il y a des impacts spécifiquement pour les femmes dans ce projet de loi là, comme la privatisation des soins et services de santé et services... et sociaux. Ça, c'est un impact genré que le projet de loi no 15 va avoir sur les femmes, la question de la privatisation. La question de la pratique sage-femme...

M. Dubé : Donnez-moi un exemple, là, parce que je veux...

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Absolument.

M. Dubé : Je vous écoute. Là, vous me dites... Parce qu'on l'a dit, on va utiliser le privé...

M. Dubé : ...ces commentaires au public. Mais quel est l'impact spécifique de l'analyse genrée d'aller au privé?

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Bien, un des impacts est de constater que la majorité des femmes s'appauvrissent au Québec. Donc, il y a une question d'appauvrissement au Québec. Et il y a cette question aussi de proche aidance. Quand on regarde qui est proche aidante, ce sont majoritairement des femmes. Qui s'occupe des soins aux enfants? Ce sont majoritairement des femmes. Donc, si c'est les bénéficiaires de services, des personnes dont elles s'occupent n'ont pas accès ou ont difficilement accès aux services au public... au privé, pardon,  bien,dont l'impact va revenir sur elles d'avoir la charge mentale et la charge de trouver comment est-ce qu'ils vont pouvoir accéder aux services si les services se donnent au privé ou si la majorité n'ont pas accès à de l'assurance... de l'assurance privée, de l'assurance collective, donc ne peuvent pas recourir aux services. Donc, il y aura là un manque de services pour ces femmes.

M. Dubé : Mais je veux juste bien comprendre parce qu'en ce moment, ça n'ira pas au privé, ça. C'est ça que j'essaie de comprendre. Votre point, c'est vous me dites si ça va au privé.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Oui.

M. Dubé : Il n'y a rien dans le projet de loi qui dit ça, là.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Il y a une augmentation des services au privé dans le projet de loi n° 15.

M. Dubé : Vous voyez ça où dans le projet de loi, là?

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Dans plusieurs articles.

M. Dubé : Qu'il y a augmentation de l'utilisation du privé.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Bien, par exemple, l'article 2 légitimise et normalise le recours au privé en indiquant que les services de santé sont fournis par des établissements publics et privés, sans distinction ni priorisation. Donc, comment s'assurer que des personnes qui n'ont pas de couverture d'assurance ou des personnes sur qui la charge repose, comment s'assurer qu'il y aura là un impact... leur impact soit considéré?

M. Dubé : Oui, mais.... O.K. Mais je veux juste qu'on se comprenne, c'est déjà comme ça dans la LSSSS, le projet de loi n° 15 ne change pas ça.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Il vient normaliser et il vient... il vient le légitimer.

M. Dubé : Ah! le normaliser.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Bien, il vient légitimer et normaliser le recours au projet de loi n° 15. Donc, il y a là quand même une grande... un grand pas dans la privatisation des soins de santé et services sociaux.

M. Dubé : Mais... O.K.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Mais en fait, si vous me permettez, l'exercice de faire une ADS+ ne repose pas sur un organisme communautaire, l'exercice repose sur les fonctionnaires dans le Secrétariat à la condition féminine, qui pourrait grandement aidé l'appareil gouvernemental à réaliser l'ADS+ dans un tel projet loi.

M. Dubé : C'est exactement... non, mais je vous entends très bien, mais c'est pour ça que je dis ça n'a pas besoin d'être dans le projet de loi, c'est déjà un autre ministère qui s'en occupe, et c'est là que je dis si on veut...

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Ah! Je comprends ce que vous voulez dire.

M. Dubé : C'est quand même assez complexe ce que vous demandez, puis je ne dis pas que ce n'est pas important, au contraire. C'est notre gouvernement qui a décidé de prendre cette approche-là au niveau des genres. On est d'accord là-dessus, alors. Mais est ce que ça doit se faire par ce projet de loi là qui est déjà...

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Je comprends ce que vous voulez dire.

Mme Landriault-Dupont (Élise) : Peut-être que je pourrais ajouter quelque chose? L'ADS+, il y a un processus qui sert à analyser les projets de loi, alors c'est la responsabilité du gouvernement. C'est le gouvernement qui s'est engagé à faire ça. Dans la mise en place d'un projet de loi, on met... on appelle ça les lunettes ADL+, donc on analyse le projet de loi pour voir les répercussions de ce projet de loi. Donc, ce n'est pas ne pas à l'intérieur du projet de loi qu'on doit le faire, mais c'est une approche qui permet d'aller plus loin dans l'analyse des conséquences du projet de loi, des implications,  et c'est le travail du gouvernement, c'est l'engagement.

M. Dubé : Là, je comprends votre réponse parce que c'est un peu comme lorsqu'on dit, nous, qu'on veut regarder le projet de loi avec une lunette ou une approche de gestion de proximité, je pense qu'on le dit plusieurs fois. Vous, vous dites : Est-ce qu'on a besoin de mettre ça dans le projet de loi ou est-ce que par exemple, par règlement ou...

Je vais vous donner un exemple, prenons un exemple. On a dit qu'il y aurait à avoir un plan de transition. Un plan de transition est important parce qu'à mon sens on met les principes dans le projet de loi. Il y aura des règlements qui vont suivre. Mais par la suite, on va devoir déposer un plan de transition parce que, faisons l'hypothèse qu'on vote le projet de loi cet automne, je le dis souvent, la première chose que le gouvernement va faire, c'est un plan de transition parce que ça va prendre des mois et des mois avant d'être implanté. Ce que j'entends, c'est que des éléments comme l'ADS pourraient être par exemple dans le plan de transition pour s'assurer qu'on protège le côté des genres, par exemple. Est-ce que c'est... 

• (15 h 40) •

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Effectivement, c'est un outil...

M. Dubé : O.K.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : ...c'est une lunette qu'on met en analysant dans chacun des articles, donc ce n'est pas un ajout d'un article, c'est un outil...

M. Dubé : O.K. Non, mais...

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : C'est un outil qui existe, c'est un outil, un outil de gouvernance en fait, qui existe pour améliorer, pour prendre connaissance des impacts genrés de chaque mesure.

M. Dubé : Oui, je comprends très, très bien.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Donc, ce n'est pas un article qu'on souhaite ajouter.

M. Dubé : Puis je ne suis pas un spécialiste de l'ADS, mais comme vous me venez de me le présenter, que c'est une lunette pour être capable de voir comment on peut faire les choses. En tout cas, j'en parlerai avec mes collègues de l'opposition dans les prochaines semaines, prochains mois...

M. Dubé : ...est-ce que ça pourrait faire partie d'une analyse dans le plan de transition peut-être? Et je vais laisser, M. le Président, peut-être j'ai des collègues qui voudraient continuer, qui sont peut-être plus connaissantes que moi dans l'ADS.

Le Président (M. Provençal) :Alors, Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Dorismond : Bien, moi, je voulais revenir sur le secteur privé, là. Quand vous dites que ce n'est pas... qu'il y a plusieurs citations dans le projet de loi, je ne sais pas si vous avez eu la chance de voir certaines présentations de commission, mais le ministre l'a dit à plusieurs fois, tu sais, c'est des projets de loi qui regroupent déjà des projets de loi qui étaient déjà intégrés. Donc, dans la LSSS, effectivement, on revoit cet article-là, nous on a fait juste un copier-coller. L'établissement privé et public est déjà normalisé depuis 1991, là, c'est du copier-coller. Ça fait que c'est pour ça, dans ce sens-là, moi, je ne comprends pas... en lien avec votre préoccupation avec le secteur privé. Ça fait que j'aimerais ça vous entendre.

Et sachez aussi que la FIQ et la FIQP, FIQP, «P» égale privé. Donc, ils ont normalisé eux autres aussi au niveau de leur syndicalisation, ils ont rajouté un secteur privé. C'est comme les établissements CHSLD privés conventionnés, les GMF, c'est là depuis des années et, dans le fond, c'est un complément. La chose que le gouvernement a... Peut-être mon collègue va pouvoir l'expliquer vu qu'il a le mandat pour les minihôpitaux, mais, dans ce sens-là, c'était vraiment pour améliorer, que ça soit complémentaire, s'il manque des chirurgies, de faire en sorte que les gens peuvent avoir accès. Nous, on focuser surtout sur l'accès en santé. Et le but, ce n'est pas de faire payer les gens, c'est d'avoir des services. Et ils vont pouvoir y aller avec leur RAMQ. Donc, en tout cas, j'aimerais ça vraiment vous entendre sur ce sujet.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : En fait, on s'est toujours opposé à la privatisation des services de santé et sociaux. Je veux dire, depuis notre existence puis depuis... Les groupes de femmes existent depuis plus de 2001, nous, on existe depuis 2001. On s'est toujours opposé à la privatisation. Donc, on a là une tribune pour réitérer notre... notre position sur la privatisation. Nous, on se demande... Tu sais, vous dites : Les gens auront accès. Quels gens auront accès à ces services? Puis on veut qu'il y ait des services, mais à quel prix? En fait, c'est toujours ça, les questions qu'on... qu'on invite les parlementaires à réfléchir. Et puisqu'il y a là un projet de loi qui reprend des parties déjà existantes, on aurait aimé ça que la prépondérance du réseau public soit explicitée dans ce projet de loi n° 15 et que tout article en incohérence avec le principe d'un réseau public soit retiré du projet de loi n° 15. Il y avait là une matière à refaire quelque chose d'innovant et de structurant pour toutes les Québécoises dans toutes les régions du Québec.

On aurait voulu que le projet de loi réaffirme les principes d'universalité, d'intégrité, d'accessibilité de la gestion publique du système de santé et de services sociaux. Or, ça n'a pas été réalisé. Et on aurait voulu aussi que le gouvernement se dote d'un plan d'action pour éliminer progressivement tout recours au privé en matière de services de santé et de services sociaux bien que c'est depuis 1991, comme vous le dites, que ce soit installé. Donc, il y aurait eu matière à renverser la vapeur selon notre humble avis.

Mme Dorismond : Je comprends mieux votre demande. Merci.

Le Président (M. Provençal) :M. le ministre.

M. Dubé : Je ne sais pas, est-ce que la députée de Bellechasse... Allez-y.

Le Président (M. Provençal) :Il reste trois minutes.

Mme Lachance : Trois minutes. Je vais en prendre juste, si vous permettez, M. le ministre.

M. Dubé : Avec plaisir.

Mme Lachance : Je voulais revenir...

M. Dubé : ...respecter les règles d'ADS tout de suite.

Mme Lachance : C'est bien. Je l'apprécie, M. le ministre. J'avais... Je voulais revenir, dans votre mémoire, à la page 11, vous parler des reculs pour les services en santé reproductive. Évidemment, vous... vous nous entretenez un peu dans la pratique sage-femme. Et puis des discussions qu'on a déjà eue avec l'équipe sage-femme qui est venue nous expliquer un peu son point de vue, et je vous dirais qu'on était dans une discussion très collaborative où on avait mis sur la table des forces, des faiblesses puis leurs... de la réalité sage-femme.

Mais une chose que j'ai retenue, c'est qu'on doit s'assurer de maximiser l'interdisciplinarité. Donc, les sages-femmes, où elles se situaient, c'était qu'on devait faire quelque chose, et leur souhait était davantage de pouvoir élargir le pratique, saisir le moment pour élargir leur pratique. Et là, quand je vous lis, dans le mémoire, je sens que vous percevez tout ça comme un recul, alors que la perception que j'avais, lors de la rencontre...

Mme Lachance : ...avec les sages-femmes, c'était nettement le contraire, un grand pas vers l'avant et une occasion unique de réaffirmer la pratique sage-femme dans son intégralité. Donc, dans ce contexte-là, je veux vous entendre parce qu'il y a une dichotomie, et il n'y a pas si longtemps, elle était ici avec nous. Donc, je...

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Bien, tout d'abord, c'est les mieux placées, hein, pour parler de leur pratique, là. Nous, on est porte-voix, on est écho. On est proche de la Coalition pour la pratique sage-femme, donc c'est avec elle qu'on a eu des discussions. Mais ce qu'on avait... quand on parlait... ce qu'elles nous nommaient, quand il était question d'interdisciplinarité, là où est-ce qu'elles levaient un drapeau rouge, c'est que les médecins spécialistes ne soient pas en position d'autorité sur les sages-femmes. Donc, oui, à l'interdisciplinarité, mais dans une gestion plus horizontale de collégialité, sans qu'il y ait des médecins spécialistes qui soient au-dessus de leur pratique à elles. Donc, c'était... c'est l'écho qu'on en retient, qui, selon nous, ne vient pas à contradiction de leurs propos, là, c'était pour renforcer leur volonté, là, que leur autonomie soit respectée.

Le Président (M. Provençal) :...une minute.

M. Dubé : Bien, juste rapidement, parce qu'il manque de temps, mais j'ai beaucoup aimé votre présentation, puis je dois vous dire que j'apprends beaucoup avec l'ADS, là, dont vous avez expliquée. Ce que j'aimerais dire, M. le Président, pour terminer, quand on va faire le plan de transition, là, je vais m'informer aux fonctionnaires quel serait le... je dirais, le filtre ADS qu'on pourrait regarder pour nos grands principes. Je vais parler à la ministre, Mme Biron, de la Condition féminine puis je vais juste m'assurer que, quand on va faire le plan de transition, on va le regarder. Je trouve ça important. Puis vous m'avez... je dis que j'apprends à tous les jours, vous m'avez appris ça aujourd'hui puis je vais en tenir compte. Merci beaucoup. Merci.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Puis, si je peux me permettre, en fait, nous on parle d'ADS+, Monsieur Dubé.

M. Dubé : ...prendre ADS pour commencer, puis après...

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Ajouter le plus en même temps, comprenez-le ensemble.

M. Dubé : O.K., c'est bon. C'est comme La Presse+, c'est ça?

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Absolument. C'est maintenant ça, c'est La Presse+, maintenant, on parle d'ADS+ et non pas juste d'ADS.

M. Dubé : Ah! O.K. Parfait, c'est beau. Excellent. C'est bon.

Une voix : Merci.

M. Dubé : Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal) :Alors, je vais céder maintenant la parole à la députée de Mont-Royal — Outremont.

Mme Setlakwe : Merci. Merci à vous, mesdames, pour votre présentation, votre mémoire. Je veux élaborer sur deux, trois volets, mais continuons sur la question de l'analyse différenciée selon les sexes intersectionnelle, ADS+. Là, on a eu un échange qui nous a permis, évidemment, de comprendre la forme, là. Ce que ça implique, ce n'est pas : Est-ce que ça rentre dans un projet de loi ou un autre?, je pense, c'est une analyse qui doit être en continu. Et j'aime bien l'analogie des lunettes, même chose, disons, pour les changements climatiques : tous les projets de loi, toutes les initiatives doivent être regardés avec les lunettes changements climatiques aussi.

Moi, ça m'interpelle quand vous parlez de la charge mentale d'une femme. Moi-même, je suis une femme, femme blanche, qui a des enfants, je sais c'est quoi... mais j'aimerais, au-delà de la forme, là, que vous nous expliquiez davantage en quoi les femmes immigrantes réfugiées qui ne parlent pas le français, qui ont un enjeu auditif, malentendantes, autochtones, etc., qui ont tous ces ajouts-là souffrent... bien, parce que... actuellement, ou est-ce qu'elles ne vont pas nécessairement souffrir plus en vertu du nouveau régime.? Et donnez-nous des exemples sur le fond. Comme ça, quand on va faire l'étude du projet de loi, on va pouvoir les avoir en tête.

• (15 h 50) •

Mme Pitre (Gabrielle) : Bien, peut-être je peux commencer, mes collègues pourront poursuivre, bonifier. Ce qui est... On parlait, tout à l'heure, de cet exemple de lunettes, c'est-à-dire qu'en partant, quand on propose l'ADS+ du projet de loi, de dire... d'aller vérifier qu'article par article, règlement par règlement, quels vont être les impacts. En fait, une fois le projet de loi mis en place, quels seront les impacts sur les femmes? Et ce qu'on se rend compte... en fait, ce que l'ADS+... et c'est pour ça qu'on insiste autant sur le volet de l'intersectionnalité, donc, représenté par le plus, c'est que non seulement les articles et le projet de loi n'aura pas les mêmes retombées sur les femmes que sur les hommes, par exemple, mais les impacts sur les femmes entre elles ne sont pas les mêmes.

C'est-à-dire que, quand on parle, par exemple, d'accès aux services, un des éléments qu'on a mis de l'avant dans le mémoire, c'est au niveau de la langue, en fait, dans laquelle les personnes issues de différentes communautés, par exemple, peuvent se faire répondre quand elles ont besoin de services. Si je suis une femme issue de l'immigration, que je parle très peu ou pas très bien le français, et qu'on me demande... on m'informe des soins, par exemple, que je peux avoir à recevoir pour une problématique de santé, et que je ne comprends pas tout à fait bien, donc, est-ce que je suis en mesure de donner mon consentement libre et éclairé si je ne comprends pas exactement qu'est-ce qu'on m'explique au niveau de mes enjeux de santé, au niveau des possibilités de soins ou d'intervention, par exemple, de santé qui peuvent être offertes pour moi?

C'est un peu la même chose quand on met un peu la santé des femmes qui, par exemple, malentendantes ont besoin de certains appareils ou de certaines... d'accompagnement par exemple. On va leur dire : Bien, quels sont les obstacles entre la personne qui a des enjeux au niveau de sa santé et le fait de pouvoir être en bonne santé avec un bien-être, une qualité de vie? Donc, quels sont les obstacles? D'abord et avant tout, est-ce qu'elle connaît...

Mme Pitre (Gabrielle) : ...service. Est-ce qu'elle est capable de s'y rendre? Donc, on parle par exemple de transport. Est-ce qu'elle va avoir accès en partant de... tu sais, on parlait tout à l'heure des femmes migrantes, est-ce que la... À qui vont être offerts les services, est-ce qu'on parle de seulement des citoyennes, est-ce qu'on parle des résidentes permanentes, est-ce qu'on parle des demandeuses d'asile? Donc, c'est un peu de tout ce qu'on essaie de mettre en lumière. Ça fait que quand on dit... de quoi souffrent les femmes? Bien, évidemment, de plusieurs injustices sociales, mais notamment, au-delà de leur genre, et c'est pour ça qu'on insiste sur le volet de l'intersectionnalité, c'est de reconnaître qu'au-delà du fait d'être une femme, si je suis une femme en situation de précarité économique, si je suis une femme en situation d'immigration, si je suis une femme de la diversité sexuelle, je vais même me buter à d'autres obstacles supplémentaires pour être capable d'avoir accès au système de soins, puis d'être consciente de bien comprendre ce qui m'attend, et de pouvoir consentir aux soins, par exemple, que je vais recevoir. Je ne sais pas si vous vouliez ajouter.

Mme Setlakwe : Est-ce que vous avez vu, dans le projet de loi, des... un libellé qui était insuffisant comme à certains articles en particulier? J'en vois quand même des articles qui concernent les mécanismes d'accès en fonction des particularités socioculturelles et linguistiques, tu sais, j'ai quand même vu... On n'est pas rendus dans le détail, mais est-ce que vous avez tout de suite identifié des lacunes?

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Je retrouve l'information, un instant. Tu voulais-tu y aller, Élise?

Mme Setlakwe : Mais je... mais, tu sais, je ne voulais pas vous piéger. En même temps, ce que vous dites, c'est... vous nous demandez de porter attention, d'être alerte, bien oui, je comprends.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : En fait, c'est ça, d'être alerte, de porter une attention, particulièrement à l'accessibilité. Tu sais, c'est sûr que nous, on n'a pas une équipe juridique, hein, aussi, on va se le dire, donc une étude article par article, là, ça n'a pas été possible, mais de manière transversale, puis en parlant notamment avec des associations qui représentent les droits de ces personnes, bien, c'est là où est ce qu'il y a eu des échos qui disent : Ah, on a comme des petits drapeaux rouges qui se lèvent. Donc, je pense qu'il y a là une attention particulière à l'accessibilité pour que le droit à la santé fasse réellement partie du projet de loi n° 15.

Mme Setlakwe : Oui. J'ai aussi vu... bien, on va porter une attention particulière, au début, là, il y a vraiment des énoncés de principe quant au droit, tu sais, là, on reconnaît les... certains droits. Moi, j'ai trouvé ça... J'imagine, c'est des... c'est peut-être du libellé qui se trouve déjà ailleurs, dans d'autres projets de loi, mais moi, comme avocate, j'ai trouvé ça intéressant.

Il faut parler du PSOC, on a eu un groupe ce matin qui nous expliquait qu'il y a une crainte par rapport au nouveau régime parce que, déjà, avec le régime actuel, c'est assez pointilleux, les critères à respecter, tout ça, là, il faut vraiment qu'on s'assure d'avoir, ce que j'ai bien compris, des tables régionales où... tu sais, au sein de Santé Québec, les personnes qui vont s'assurer que l'argent est bien octroyé, mais qu'il y ait une équité puis qu'il y ait une harmonisation au niveau, là, de distribution de l'argent, donc, ça, je pense que c'est un volet très important pour vous, donc je vous laisse élaborer là-dessus.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : En tout cas, le volet plus important pour nous qu'on souhaitait porter à votre attention, c'était... en tout cas, il y avait... il y a eu un drapeau rouge qui a été levé sur le fait que le PSOC soit attaché à Santé Québec. Il y aurait une volonté que ça demeure au ministère Santé, Services sociaux pour que les organismes communautaires ne deviennent pas les bras opérants de Santé Québec et que le principe d'autonomie, qui est un principe très important pour les organismes d'action communautaire autonome, soit respecté. Donc, il y avait quand même là un grand drapeau rouge pour ne pas qu'on devienne les... je n'ai pas d'autre expression que bras opérant, pour ne pas qu'on ait des commandes non plus, pour que vraiment les besoins viennent de la communauté, ils sont identifiés par la communauté puis les façons de répondre aux besoins aussi, et non que ce ne soit pas Santé Québec, là, qui se met... une agence d'État qui vient à décider comment faire pour atteindre de meilleurs résultats, davantage de résultats, c'est vraiment aux organismes communautaires autonomes de définir les moyens pour arriver à leurs fins. Et ce qu'il y a présentement avec le ministère de la Santé, Services sociaux, c'est perfectible, c'est loin d'être parfait, mais il y avait là une considération plus grande pour l'autonomie en tout cas qu'on entrevoyait que si c'était rattaché à Santé Québec. Ça fait que ça, c'était beaucoup pour que ça demeure un programme généraliste de soutien du milieu communautaire, de financement à la mission, et pas que ça devienne avec quelque chose de trop... de très cadrant, cadré, puis que ça ne réponde plus aux critères d'autonomie, en fait.

Mme Setlakwe : Je prendrais un pas de recul. Nous, ce qu'on fait, c'est quand on étudie... tu sais, il faut toujours se ramener, là, un projet de loi qui vise à améliorer l'efficacité du système, est-ce que, généralement, vous voyez... puis là je crois que vous portez un chapeau particulier pour protéger les femmes, voyez-vous une... des... que le nouveau régime va apporter des améliorations en termes d'efficacité, accès, qualité des soins aux patientes? Vous, vous n'êtes pas convaincu? Je ne veux pas vous mettre des mots dans votre bouche, là, mais votre appréciation générale.

Mme Pitre (Gabrielle) : Bien, je reprendrais...

Mme Pitre (Gabrielle) : ...un peu ce qui a été dit tout à l'heure, c'est-à-dire que, bon, on y va avec nos moyens. On n'a pas d'équipe de juristes pour analyser le tout et l'impact. Cela dit, je pense que, dans les principes de base, ce qu'on souhaite porter vraiment à l'attention, justement, de vos travaux, c'est de dire :À partir du moment où on reconnaît que l'action communautaire autonome, principalement pour les groupes de femmes... bien, principalement... notamment pour les groupes de femmes, c'est vraiment cette croyance où c'est les groupes qui vont avoir la réponse eux-mêmes aux travaux. Donc on veut vraiment partir de la base, les enjeux, les besoins sur le terrain. Puis c'est sûr que, quand on regarde, en fait, le projet de loi, puis on se remet dans le cadre du temps qu'on a eu pour l'analyser aussi... mais quand on voit une structure qui nous semble mettre de l'avant des postes de direction, des postes de gestion et où, on ne voit pas, en fait, l'expertise, par exemple du communautaire, se retrouver dans ces instances là, que ce soit au niveau des comités d'usagers ou au niveau des comités décisionnels, au niveau des conseils d'administration, on se demande en fait justement à quel point la voix des organismes qui sont sur le terrain va être entendue et les préoccupations vont être capables de remonter jusqu'à ces instances décisionnelles là. C'est cette préoccupation-là, j'ai envie de dire, je pense, au niveau de l'autonomie des groupes et d'entendre les préoccupations du terrain, que ce soit porté et considéré dans les décisions gouvernementales au niveau du projet de loi. C'est surtout ça actuellement.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Ça a été nommé aussi de vouloir être davantage dans la proximité. Nous, on est très sceptiques par rapport à cette proximité-là. On ne la voit pas, on ne la sent pas. On est très mitigé aussi quand on sait, comme par exemple, que la Fédération québécoise pour le planning des naissances n'a pas été consultée, alors qu'il y a quand même des enjeux ici pour l'accès à l'avortement puis aux IVG. C'est quand même dans le projet de loi 15 des enjeux importants qui sont effleurés, voire chamboulés. Ça fait qu'on est aussi... C'est pour ça qu'on est sceptiques parce que... oui, il y a une centaine d'organisations qui vont avoir été entendues. La Ligue des droits et libertés n'a pas été entendue pour parler du droit à la santé, la coalition riposte au plan santé, la Coalition solidarité santé n'ont pas été entendues non plus. Bien sûr, leurs mémoires vont être probablement lues, on l'espère grandement, mais on aurait aimé qu'elles aient... que ces organisations aient la tribune aussi pour venir exprimer. Ça fait que c'est sûr qu'on est mitigé par rapport au projet de loi 15 parce qu'il n'y a pas eu de consultation d'organisations pour venir contribuer à ce projet important pour améliorer l'efficacité du système.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. J'en profite pour vous spécifier que tous les mémoires qui sont déposés, quelles que soient les commissions, on en prend connaissance, on les analyse parce que les gens qui ont consacré du temps à nous déposer un mémoire, on consacre du temps par respect aussi pour bien l'analyser puis saisir les enjeux qu'ils ont soulevés par chacun des mémoires. Je voulais quand même apporter cette précision-là. Maintenant, je vais céder la parole au député de Rosemont.

M. Marissal : Merci, M. le Présisdent. Merci d'être là. C'est peu de temps. Vous n'avez pas eu le temps pour vous préparer devant un tel projet de loi. Moi, j'ai peu de temps pour vous questionner. Je vais quand même prendre juste 30 secondes pour vous remercier d'avoir parlé justement de l'analyse différenciée selon le sexe et avec le plus, évidemment. Je suis content que vous ayez éclairé la lanterne du ministre. En tout cas, vous avez allumé quelque chose. Là où je suis un peu inquiet, c'est quand il dit qu'il va aller consulter sa collègue à la Condition féminine, qui a rejeté le principe par-dessus bord lors d'une motion récente à l'Assemblée nationale. Ça fait que je ne suis pas sûr que c'est une bonne idée d'aller consulter sa collègue, mais enfin, bref, il peut toujours consulter la politique de son propre parti qui est au pouvoir, qui a été déposée et qui effectivement s'en réfère nommément dans sa politique, justement, qui a été déposée récemment, Stratégie gouvernementale pour l'égalité entre les femmes et les hommes 2022-2027. C'est une base, puis ce n'est pas moi qui l'ai écrite, c'est la CAQ qui est au pouvoir.

• (16 heures) •

Alors, cela étant dit, avec le temps qu'il me reste. Vous avez parlé justement des cliniques, en particulier qui sont dans le domaine des IVG. J'ai reçu encore ce matin un courriel d'une d'une omnipraticienne qui pratique les IVG à Montréal dans une clinique que je ne nommerai pas parce que ce n'est pas nécessaire. Elle est très inquiète. Comme d'autres, vous semblez être inquiète aussi. Pourriez-vous nous dire en quoi le projet de loi 15 vous inquiète quant à la bonne pratique reconnue au Québec, justement, notamment en matière d'IVG?

Mme Landriault-Dupont (Élise) : Alors, ce qui a été porté à notre attention, c'est notamment l'article 486 qui dit que les groupes qui veulent donner des soins en avortement, en IVG, doivent avoir l'autorisation de Santé Québec. Puis on se questionne, et la réponse n'est pas entre nos mains, mais on se questionne sur ce qui... est-ce que ça mettrait des bâtons dans les roues à l'émergence de nouveaux services, notamment les centres de santé des femmes? Il y en a seulement trois au Québec. Il n'y en a pas beaucoup. C'est des services qui viennent de la population, qui répondent à des besoins. Est-ce que de nouveaux services pourraient être bloqués? C'est l'inquiétude...


 
 

16 h (version non révisée)

Mme Landriault-Dupont (Élise) : ...qui est venue à nos oreilles. Je peux laisser mes collègues peut-être compléter s'il y a autre chose.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Il y avait cette inquiétude-là. Il y avait aussi le fait que le projet de loi ramène le débat de la direction médicale au sein des centres de santé des femmes, ce qui pourrait mettre en péril leur fonctionnement. Ça va laisser le champ libre à des exigences de normes de sécurité et de soin qui outrepassent ce qui est médicalement nécessaire pour faire les soins d'avortement... les services d'avortement ou d'IVG.

Donc, on recommande au gouvernement d'être prudent dans la façon dont vont être amenées les exigences de sécurité des centres... au sein des centres de santé des femmes, afin de ne pas outrepasser ce qui est nécessaire. Parce qu'on sait, hein, le passé nous l'a bien démontré, comme aux États-Unis, où est-ce qu'on va jouer dans ces règles-là, et c'est là où est-ce que le droit à l'avortement n'est plus respecté, en mettant des obstacles supplémentaires qui, finalement, ne sont pas nécessaires pour pratiquer les avortements, les IVG, au Québec.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Je vais maintenant céder la parole au député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau : Pour combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Provençal) :Vous avez trois minutes 18.

M. Arseneau : D'accord. Merci beaucoup. Merci pour votre présentation, pour les réponses très éclairantes à toutes les questions qui ont été posées par mes collègues. Moi, je voulais aborder un aspect qui n'a pas été discuté beaucoup, celui de la gouvernance puis de la place aux citoyens, aux groupes communautaires, et ainsi de suite, parce que je vois que vous faites de nombreuses recommandations sur la constitution des conseils d'établissement. J'ai le goût de vous poser un peu la question : Est-ce que le conseil d'établissement lui-même n'est pas à revoir comme idée? Parce qu'effectivement son rôle n'est pas très, très puissant dans l'organigramme. Mais j'aimerais vous entendre là-dessus. Comment on... Est-ce que vous y croyez, d'abord, au conseil d'établissement, comme ayant un rôle prépondérant? Et il y a d'autres idées qui avaient été émises, par exemple un conseil plus élargi, certains ont parlé d'un conseil de surveillance ou... enfin. Je ne sais pas si vous avez une réflexion là-dessus, pour s'assurer effectivement que... dans chacun de nos milieux à travers le Québec, qu'on puisse avoir véritablement un mot à dire pour des soins de santé qui s'adaptent de façon plus pointue aux différentes populations desservies.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Bien, on est mitigées. On partage votre questionnement. En fait, on trouve que, dans les conseils d'établissement, tels qu'ils sont définis dans le projet de loi, ils n'assurent pas suffisamment la participation de la population, particulièrement la participation des femmes, des groupes marginalisés, que ce soit au niveau local, régional ou national. Donc, on souhaiterait qu'il y ait davantage de places. Est-ce que ce serait dans les conseils d'établissement tels que prévus? En tout cas, pas tels que prévus.

On suggère quelques recommandations, comme par exemple une place significative aux groupes communautaires. On aimerait aussi qu'il y ait un comité santé et bien-être des femmes pour l'élaboration, le suivi, l'évaluation de plans d'action régionaux, donc dans chacune des régions. On aimerait aussi le maintien des comités des personnes usagères. On sait que ce n'est pas nécessairement tout remis en question, mais on tape sur le clou que, pour nous, c'est des comités qui sont fondamentaux au sein de structures décisionnelles.

Puis là j'en viens à la décision. En fait, c'est que ces instances-là ne soient pas juste consultatives, mais qu'elles puissent prendre des décisions sur ce qui les concerne. Parce qu'encore là, ça, c'est un des piliers du droit à la santé, que les personnes concernées puissent prendre les décisions qui les concernent. Puis on pense que, présentement, comment sont écrits les conseils d'établissement, comment ils sont réfléchis, bien, ça ne le permettra pas.

Quand on parle, par exemple, que la population va être consultée, mais ça va être les maires qui vont être consultés, dans les mairies, bien, les maires, c'est majoritairement des hommes blancs de 60 ans. Statistiquement, c'est ça. Et on pense que, pour nous, ça ne donne pas un reflet assez exact de quelle est la population au Québec. Donc, on pense qu'il y aurait... Pour consulter la population, il faudrait aller davantage qu'aller consulter les maires.

M. Arseneau : En page 19, vous parlez d'un modèle à revoir complètement, là, selon une gestion inspirée de la coproduction des services de santé. Qu'est-ce que vous voulez dire? C'est quoi, ce modèle, en quelques mots? Je pense que vous avez une vingtaine de secondes.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Oui. Bien, en fait, ce qu'on entend par coproduction, dans un modèle de gestion inspiré de la coproduction, c'est... ça signifie que l'État, les citoyennes, les travailleuses se voient accorder des pouvoirs de contrôle sur la production des services selon différentes échelles de capacité d'action. Les communautés usagères ne sont pas perçues comme des consommatrices, mais bien comme des coproductrices. Et ça vient avec la magnifique phrase que ma collègue vous a nommée en début, que les femmes ne sont ni des usagères...

Mme Pitre (Gabrielle) : Ni des clientes, ni des usagères, mais bien des bénéficiaires de droits en matière de santé.

Le Président (M. Provençal) :Alors, je vous remercie pour votre contribution puis surtout votre participation en présentiel, c'est toujours intéressant, l'interaction est toujours meilleure.

Alors, sur ce, je vais suspendre momentanément les travaux pour laisser place...

Le Président (M. Provençal) :...prochain groupe. Merci beaucoup de votre présence.

(Suspension de la séance à 16 h 6)

(Reprise à 16 h 9)

Le Président (M. Provençal) :Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant le Regroupement québécois des intervenantes et intervenants en action communautaire en CISSS et en CIUSSS.

Alors, merci de votre présence. Vous avez 10 minutes pour votre présentation, et, par la suite, nous procéderons aux échanges. Et on va s'assurer que vous allez avoir... vous allez être bien hydratés pour votre présentation. Merci.

• (16 h 10) •

Mme Cloutier (Suzie) : Donc, merci beaucoup de nous recevoir en ce mardi après-midi. Je pense la partie la plus... qui nous stresse le plus, c'est le 10 minutes. Ça fait qu'on va essayer de bien faire ça, en fait, mais on se sent déjà choyés d'avoir pu... recevoir l'invitation.

Donc, je suis Suzie Cloutier. Je suis organisatrice communautaire et je suis présidente du Regroupement québécois des intervenantes et intervenants en action communautaire en CISSS et CIUSSS. C'est très long. On va dire RQIIAC, c'est plus rapide. Et je suis accompagnée de collègues organisateurs communautaires, donc Jean-François Daigle, Sébastien Rivard et Marie-Lynne Brodeur. Donc, nous sommes tous des organisateurs communautaires membres du RQIIAC et nous tenons à préciser qu'aujourd'hui, nous sommes ici, donc, premièrement, en tant que membre en fait du regroupement et, donc, sur notre temps personnel. Voilà.

Donc, rapidement le regroupement, en fait, le RQIIAC existe depuis 1988. C'est un OBNL qui réunit sur une base volontaire, dans le fond, la majorité des personnes qui font de l'organisation communautaire dans les CISSS et CIUSSS du Québec. Donc, c'est important de savoir que c'est vraiment une association, là, volontaire, voilà, des OC. Et rapidement... Parce que peut-être que vous ne connaissez pas bien ce qu'est l'organisation communautaire, ce qui serait tout à fait normal, dans l'ordre des choses, en fait, mais il est important de savoir que l'organisme communautaire existe depuis avant même les CLSC au Québec et que souvent, c'est des OC, on dit OC... qui ont créé... qui ont contribué à mettre sur pied les CLSC. Et depuis, en fait, on est... on a été dans les CLSC, les C3S, les CIUSSS et éventuellement à l'Agence Santé Québec. Donc, c'est une pratique d'intervention collective, en fait, en soutien à des...

Mme Cloutier (Suzie) : ...collectivité, selon l'approche vraiment ascendante, donc qui part des besoins de la base vers l'institution. Elle vise... en fait, c'est une pratique large, là, qui vise l'amélioration des conditions de vie, la réduction des inégalités sociales, le développement du pouvoir d'agir, la participation citoyenne et l'inclusion sociale. Au Québec, il y a 428 postes d'organisations communautaires. C'est 428, mais vous comprenez que dans l'ensemble du réseau de la santé, c'est quand même une pratique un peu marginale même si on est vraiment déployés, là, sur l'ensemble du territoire.

Avant de laisser la parole à mes collègues, qui vont vous présenter le contenu de notre mémoire, on voulait juste faire une petite parenthèse pour vous dire qu'on a été très inspirés à la lecture de la loi 15, de l'expérience toute récente, en fait, que nous partageons tous de la COVID-19, en fait, où on a vu, littéralement sous nos yeux, en fait, le réseau devoir s'adapter pour devenir plus souple, plus agile, plus attentif aux besoins des populations. Et on a vu qu'est-ce qui avait fonctionné bien, en fait, c'est quand on était capable de prendre les besoins précis d'une population précise, en fait, ou territoriale pour adapter les services. Notre intention, c'est que les organisateurs communautaires ont été contributifs à plusieurs égards dans cette proximité-là, en fait, et on a plusieurs écrits qu'on pourra partager à ce sujet-là, ce n'est pas l'objet aujourd'hui.

Mais notre souhait, en fait, ce qu'on... notre souhait par rapport à la prochaine réforme et la loi 15, c'est qu'elle permette vraiment ce retour-là, en fait, et cette réelle décentralisation, cette réelle démocratisation là. Donc, c'est vraiment l'esprit qui nous a animés, là, dans la rédaction du mémoire et des recommandations. Donc, je laisse la parole à Jean-François pour les premières recommandations.

M. Daigle (Jean-François) : Nous avons abordé le projet de loi sous quatre thèmes : l'ancrage territorial et la responsabilité populationnelle, la décentralisation et la démocratie, l'approche communautaire en santé, puis l'autonomie des organismes communautaires et le recours au secteur privé. Nous avons 17 recommandations. Pour ma part, je vais vous présenter les quatre recommandations en lien avec l'ancrage territorial et la responsabilité populationnelle.

Tout d'abord, précisons ce que nous entendons par l'ancrage territorial. Notre pratique s'effectue dans un territoire vécu, c'est-à-dire où il y a un sentiment d'appartenance, une cohésion et une capacité d'agir directement. Il est évidemment nécessaire de prendre en compte les besoins des territoires vécus mais aussi leur donner des capacités d'action. Ce qui nous amène à notre première recommandation, c'est-à-dire intégrer au projet de loi la notion de territoire local correspondant au territoire économique, historique et culturel significatif, en s'assurant de la stabilité de ces sous-territoires locaux.

Cela nous semble important pour l'exercice de la responsabilité populationnelle qui incombe aux établissements. En effet, pour agir sur les différents déterminants sociaux de la santé, il faut développer une approche globale incluant la promotion, la prévention et les soins dans le milieu de proximité où il existe un réseau communautaire et une cohésion. Pour que les différentes actions puissent être définies dans une vision globale de la santé tout en tenant compte des multiples particularités des communautés, il faut aussi nécessairement introduire, dans le projet de loi, le développement des communautés et les services territoriaux de santé publique. Ainsi, il ne suffit pas de se concentrer sur l'organisation des soins mais aussi développer la résilience des communautés à développer leur capacité à intervenir en amont sur les différents déterminants sociaux de la santé.

Ce qui nous amène à notre deuxième et troisième recommandations, soit réintroduire les articles 1 et 2 de la Loi sur la santé et les services sociaux, qui présentent une vision globale de la santé, incluant la prévention et la promotion. À l'article 38, ajouter les services de développement des communautés territoriales, les services d'organisation communautaire et les services territoriaux de santé publique. Et notre quatrième recommandation pour s'assurer de l'ancrage des services : que les territoires... sous territoires-locaux... que les services d'organisation communautaire correspondent à ces sous-territoires locaux.

Nous pensons aussi que, pour que le réseau de la santé soit réellement décentralisé, il nous faut plus de démocratie, de pouvoir et d'imputabilité. Pour vous présenter les recommandations en lien avec ces sujets, j'invite Sébastien à poursuivre.

M. Rivard (Sébastien) : Merci, M. le ministre. Merci, Mesdames et Messieurs les députés de nous accueillir aujourd'hui. Je vais vous parler maintenant de démocratie locale pour une véritable décentralisation. En fait, il existe, dans le projet de loi, la notion de conseil consultatif. Nous, on pense que c'est une bonne piste, mais, pour ça, il faut vraiment les rendre obligatoires sur la base des sous-territoires qu'on vient de vous présenter. Ce serait vraiment important, là, on s'inspire un peu de ce que Monsieur Clerc vous a dit récemment, on trouve ça vraiment important qu'il y ait une création de conseils locaux qui ont de véritables pouvoirs de recommandation auprès des gestionnaires locaux. Ça, c'est vraiment ça, notre pratique, les organisateurs, organisatrices communautaires, on pense que c'est très important qu'il y ait cette possibilité-là de...

M. Rivard (Sébastien) : ...ces conseils-là, et, pour ça, il faut qu'ils soient aussi très démocratiques, donc il faut qu'ils soient formés de personnes représentatives de la société civile, ça a été nommé, là, par les intervenantes de l'autre groupe juste avant, de la société civile du territoire local. Donc, il ne faut pas que ce soient des personnes qui soient seulement nommées, il faut que ce soient des personnes qui soient soit élues par leurs pairs ou nommées par des collèges électoraux sur une base territoriale pour qu'ils soient vraiment représentatifs et qu'ils connaissent très bien les pratiques.

Alors, on a une série de recommandations, là, les recommandations 5 à 9, finalement, qui vous proposent une mécanique qu'on a imaginée, hein, comment bonifier le concept de conseil consultatif pour les rendre fidèles à ce que nous on souhaite comme principes. Donc, on pense que leur mandat doit être ajusté en conséquence. On parle de donner des recommandations aux gestionnaires locaux. On parle aussi de possibilité de faire des consultations publiques sur une base territoriale, consulter la population quand il arrive des situations. Ça, c'est vraiment important pour nous. Et pour ce qui est de la représentativité, on pense que, là, il faut aller voir dans chacun des territoires quels sont les groupes les plus représentatifs des populations, des gens intéressés par la santé, des citoyens, des élus locaux, des organismes aussi peut-être. Alors, ça, c'est pour la question des conseils locaux.

Et on... il faut aussi bonifier la... les conseils d'établissement de CISSS, CIUSSS les bonifier, pour les rendre encore plus efficaces. Il faudrait qu'il y ait une personne de chaque conseil local, donc sous-territorial, qui soit nommée en plus des gens qui étaient déjà prévus au projet de loi. Donc, on trouvait ça vraiment intéressant que les territoires locaux soient représentés dans les conseils d'établissement des CISSS et CIUSSS.

Maintenant, je vais changer de sujet en une minute pour vous parler de l'importance aussi de la santé publique territoriale, de la santé publique, de la prévention promotion. Ça, c'est notre pain, notre beurre. Les organisatrices communautaires, organisateurs communautaires, la prévention, promotion de la santé. On pense qu'il faut vraiment s'assurer que les actions locales de santé publique soient branchées sur leur communauté. Et pour cette raison là, il y a comme un flou dans les territoires des directions régionales où on pense qu'il faut. Ça prend un directeur de santé publique par territoire régional. Pas plus que ça pour ne pas qu'il couvre plus qu'un territoire chacun ou chacune d'entre elles. Il faut s'assurer aussi de leur indépendance dans l'exercice de leur mandat de vigilance sur la santé des populations. Que les directeurs et directrices régionaux de santé publique gardent toute leur indépendance dans l'exercice de leurs fonctions, ça... qu'ils soient proches des communautés, alors ça faisait le tour. Maintenant, je vais passer la parole tout de suite à ma collègue qui va vous parler des partenaires essentiels pour nous, les organismes communautaires. On voulait parler d'elles et d'eux. Alors, Mme Maryline Brodeur va vous en parler.

Mme Brodeur (Marie-Lynne) : Merci. Bonjour, M. le ministre. Bonjour ,M. le Président. Alors, et pour nous, il est important de consulter les organismes communautaires sur l'ensemble des éléments du projet de loi les concernant avant leur adoption, notamment sur certains articles. L'article 92 qui parle des allocutions... des allocations de subventions aux organismes communautaires. On ne mentionne pas dans cet article, savoir si c'est encore le PSOC qui est encore là ou il y aura une autre entité de Santé Québec qui est prévue. Il y a aussi l'article 346 au niveau territorial. C'est au niveau de la prestation des services des organismes communautaires. C'est important que ces protocoles d'entente respectent la mission de ces organismes communautaires. Il est important, selon nous, d'établir un véritable débat démocratique permettant à l'ensemble des acteurs clés de se prononcer et d'être entendus, dont les groupes communautaires en santé et services sociaux et les... et les groupes de défense des droits. Il faut s'assurer du respect de l'essence, des principes de l'action communautaire autonome par la future société d'État et reconnaître leur autonomie qui est déjà indiquée à l'article 432.

• (16 h 20) •

Aussi, il faut consolider le financement à la mission globale des organismes communautaires du Québec, prioritairement au développement... et de collaboration de services avec le réseau de la santé et des services sociaux. Par contre, il faut que les orientations soient respectées et que les ententes ne dénaturent pas la mission effectivement de ces organismes. Il faut préserver l'ensemble des politiques convenues précédemment avec le milieu communautaire, notamment la politique des reconnaissances... de reconnaissance de l'action communautaire. Il faut maintenir des espaces de consultation et de concertation existant avec les organismes communautaires, et ce, tant au niveau national, régional, sous-régional et local. D'ailleurs, je vous dirais...

Le Président (M. Provençal) :Je vais devoir vous interrompre parce que vous avez déjà dépassé votre 10 minutes. Alors, je m'excuse. Avant de céder la parole à M. le ministre, j'ai besoin de votre consentement pour que la députée de La Pinière remplace le député d'Acadie. Consentement? Oui, merci beaucoup. M. le ministre...

M. Dubé : ...Bien, écoutez, M. le Président, j'aimerais tout d'abord vous remercier de la qualité de votre apport. Je dois vous dire ça, là, quand on va jusqu'à faire des recommandations et des amendements, là, je pense que vous avez pris le temps pour faire le travail, et puis je tenais à vous le mentionner. Je pense que vous avez... En tout cas, vous avez rejoint une de mes cordes sensibles quand vous avez dit : Ce qu'on a appris dans la pandémie est l'objet de notre recommandation. Puis ça fait plusieurs fois que je dis ça, c'est ce qu'on a appris dans la pandémie qu'on doit mettre dans le projet de loi pour s'assurer qu'on améliore notre réseau de santé. Ça fait que je suis 100 % avec votre principe.

Bon, maintenant, ce n'est pas toujours facile parce que je le dis souvent, qu'est-ce qui est dans le projet de loi, qu'est-ce qui va être dans les règlements, qu'est-ce qui va être dans la transition? Mais je veux juste vous dire que vous êtes... vous êtes vraiment au bon endroit, puis j'apprécie ça. Donnez-moi un exemple parce que, en tout cas, de façon dont je comprends votre regroupement, vous êtes déjà des employés du réseau. Alors, vous, qui été la première intervenante, qu'est ce que vous faites dans votre quotidien qui vous permet de faire ces recommandations-là de qualité? Juste par curiosité, là, qu'est ce que vous faites?

Mme Cloutier (Suzie) : En fait, ça dépend de combien de temps vous avez, mais...

M. Dubé : Mais rapidement. Je n'ai pas beaucoup de temps, mais...

Mme Cloutier (Suzie) : Pas beaucoup de temps. Quatre axes de service en organisation communautaire. Typique, là. Un qui est soutien aux organismes communautaires. C'est, disons, le quatrième volet. Premier volet, action sur les déterminants sociaux de la santé. Moi, je travaille à Québec sur l'amélioration de la qualité de vie des gens qui habitent en chambre, en fait. Donc, les gens qui habitent dans les maisons de chambres qui sont... qu'ils... On sait que l'habitation est un déterminant très important de la santé. Donc, on travaille pour...

M. Dubé : C'est votre quotidien à vous, ça.

Mme Cloutier (Suzie) : C'est mon quotidien. Ça prend une partie de mon temps. Donc... Bon. Concertation...

M. Dubé : Ça fait que, vous, vous êtes à l'intérieur d'un CISSS ou d'un CIUSSS qui s'occupe de cette région-là, en quelque sorte.

Mme Cloutier (Suzie) : Moi, je suis au CIUSSS de la capitale nationale, en fait.

M. Dubé : O.K. Parfait.

Mme Cloutier (Suzie) : Dans le fond, j'aurais peut-être dû commencer par ça. Je suis attitrée à un sous-territoire. On parlait de sous-territoire, je suis dans le secteur Vanier des Rivières.

M. Dubé : Bon. Oui.

Mme Cloutier (Suzie) : Donc, je travaille à regarder, à connaître bien le quartier, par exemple Vanier, l'ensemble de la population, c'est quoi les besoins sur les établissements de la santé.

M. Dubé : Excellent. O.K.

Mme Cloutier (Suzie) : Ensuite, je travaille plus précisément, bien, dépendamment des jours, là, sur un dossier, par exemple, d'accès au logement social pour les gens qui ont des problèmes de santé mentale, pour les personnes en maison de chambres...

M. Dubé : Excellent.

Mme Cloutier (Suzie) : ...en gros. Chacun de mes collègues pourrait dire dans quel territoire il est rattaché et quels... ses dossiers.

M. Dubé : Mais c'est quand même particulier que vous êtes... c'est votre travail principal puis qu'en plus vous participez à ces recommandations-là dans le cadre du regroupement, là.

Mme Cloutier (Suzie) : Dans quel sens? Je m'excuse.

M. Dubé : Bien je veux vous... J'apprécie beaucoup ce que vous faites en plus de votre travail quotidien. C'est ça que je voulais dire. Bon. Maintenant. Je pense qu'il y a une suite logique que j'aimerais prendre deux minutes pour faire. Il y a M. Clair qui est venu puis qui a dit : En termes de reddition de comptes, on devrait se rapprocher des territoires. Il a été très clair là-dessus, des élus municipaux. On a dit qu'on allait en tenir compte. La méthode, ce n'est pas moi à la dire aujourd'hui, il faut qu'on discute avec l'opposition pour voir si on est prêt à faire ce genre d'amendement là, premièrement.

Il y a le groupe des médecins, les médecins pour la décentralisation du réseau, qui est venu il y a une dizaine de jours, puis qui ont dit exactement la même chose, de mettre la notion de territoire, donc d'aller une coche plus bas. Mais je pense que c'est un peu la même chose que vous nous dites aujourd'hui. On s'entend? Donc, il y a une certaine logique, M. Clair, qui nous dit ça en termes de reddition de comptes. Les médecins qui ont dit : La notion de territoire devrait... Et là, si j'avais spécifiquement un article, je pense que c'est... Je ne me souviens pas de votre prénom, au M. qui vous a suivi comme deuxième intervenant. Vous avez même dit que la notion de territoire, je vous lis, cette référence pourrait par exemple se retrouver à l'article 37 dans la définition des territoires et à l'article 322. Et ça, pour vous, d'inclure la notion de territoire au niveau du projet de loi lui-même, elle est importante?

M. Daigle (Jean-François) : C'est tout à fait important parce que, si je me penche notamment sur notre pratique à nous...

M. Dubé : Vous, vous faites quoi exactement, tant qu'à y aller rapidement, là?

M. Daigle (Jean-François) : Je suis dans Pierre-De Saurel, qui est en Montérégie-Est.

M. Dubé : Ah! on se rapproche de la Montérégie. J'aime ça. C'est bon. O.K.

M. Daigle (Jean-François) : Et mais quand on travaille pour le développement des différents projets, dans le fond, dans notre travail, il y a tout ce qui est avant l'établissement des soins, donc travailler au développement des communautés en santé. Donc, le territoire de travail, il faut qu'il y ait un espace où les gens se reconnaissent, où qu'il y a un sentiment d'appartenance, une capacité d'action où ils sentent, là, que ce qu'ils vont faire, il va y avoir une répercussion immédiate. Donc, c'est ça, le territoire qu'on parle.

M. Dubé : Sur leur région à eux.

M. Daigle (Jean-François) : Donc, c'est... Pour nous, c'est important. D'autant plus que les acteurs qui vont travailler et avec qui nos vis-à-vis vont... se situent à cette échelle-là, de territoire. Et de... Donc, c'est pour ça qu'on inclut dans le territoire aussi des processus démocratiques. On dit : Il faut aussi que les gens...

M. Daigle (Jean-François) : ...territoire se nomme des représentants. Puis il faut aussi rendre des comptes au territoire. Donc, c'est l'aspect... c'est pour ça qu'on dit que c'est vraiment important. Puis on ne peut pas travailler à une échelle québécoise ou même territoriale. Il y a des grands éléments, des grands enjeux qu'on peut... des grandes orientations qui peuvent être décidées, mais concrètement comment on peut être agile puis avoir des soins qui répondent directement aux besoins de la population, c'est en travaillant sur une échelle qui est plus locale.

M. Dubé : ...pendant la pandémie, puis c'est pour ça que je souscris au principe aujourd'hui, on pouvait être en... en Montérégie-Est, mais ce qui se passe à Sorel n'est pas la même chose que ce qui se passe à Saint-Hyacinthe ou, plus proche, à Longueuil, c'est... on est dans des territoires qui sont vraiment différents. Puis il faudrait être capable de faire cette... cette analyse-là, c'est ça que vous nous dites, là.

M. Daigle (Jean-François) : Bien oui. Puis, si vous me permettez, je vais aller plus loin. Concrètement, les stratégies de vaccination d'un territoire à l'autre en Montérégie ont été différentes. Puis ça, ça prend absolument une analyse des données de santé publique puis une connaissance très précise, pointue de la population pour savoir c'est où qu'on va les mettre, les cliniques, comment qu'on va rejoindre les personnes? Et c'est des stratégies qui sont différenciées de chacun d'un territoire à l'autre. Donc, c'est...

M. Dubé : En tout cas, c'est... Je ne sais pas s'il y a des... mes collègues qui ont des... qui ont des questions, ou s'il y en a... Peut-être, oui.

Le Président (M. Provençal) :Oui, oui, allez-y, M. le député de Saint-Jérôme.

M. Chassin :Je saute dans l'arène, parce que vous avez parlé, en fait, du fait, en fait, que, durant la pandémie, on a vu l'impact notamment des organisateurs communautaires puis des organismes communautaires aussi, qui avaient une conscience aiguë des besoins locaux puis de l'adaptation que, l'agilité, dans le fond, là, qu'exigeait la pandémie, demandait de tous. Puis, en fait, je suis pas mal sûr que tous mes collègues ici l'ont vu dans leur comté respectif. Comment est-ce qu'on intègre cette agilité-là dans... Parce que, dans le fond, vous en... vous en parlez en ayant l'air de mentionner que, pour vous, là, on doit aller plus loin, mais comment est-ce qu'on intègre cette... agilité-là, pardon, selon vous, si ce n'est, justement, par des volets consultatifs qui permettent d'entendre mais qui permettent aussi de... comment dirais-je, d'arbitrer les différentes demandes? Je suis sûr que vous êtes familier, là, dans la... Il y a beaucoup de demandes, il y a beaucoup de besoins, mais il faut pouvoir construire un tout cohérent.

M. Rivard (Sébastien) : Tout à fait. Ce qu'on vous a dit, en fait, ce qui s'est passé pendant la pandémie, là, c'est que je pense que les conseils d'établissement... les conseils d'administration à l'échelle CISSS et CIUSSS, disons, ont été moins actifs puis on a plus décentralisé la gestion des plans d'action. Les plans d'action étaient décidés par notre ministre de la Santé, à Québec, les grands objectifs, mais au niveau... il y a vraiment eu une vraie décentralisation avec la part des comités de citoyens, des locataires de HLM, des organismes communautaires. Vous l'avez dit, ça a été souligné par M. Pratte dans son livre aussi récemment, là. Donc, je pense que nous, on est vraiment les yeux puis les oreilles du réseau de la santé sur le terrain, on connaît tout le monde, on connaît les organismes, on connaît les citoyens, on est capables de savoir c'est quoi, les besoins d'adaptation.

Mais on vous a dit que ça prend plus que nous, là, ça prend plus que des employés du réseau, ça prend aussi des vrais conseils qui seraient créés sur une base locale, qui pourraient, dans le fond, recevoir... faire des recommandations au directeur... Vous voulez nommer des directeurs locaux, renommer, ça, c'est une bonne idée, dans les CLSC, les CHSLD, mais il faut que ces gens-là soient interaction avec leur communauté pour pouvoir de façon constante adapter des services, des aller-retour...

• (16 h 30) •

M. Chassin :Et être redevable des arbitrages aussi, donc.

M. Rivard (Sébastien) : Oui, exactement, des arbitrages. On pense que... peut-être que... Je suis tout à fait pour l'universalité des services, là, je pense que c'est important que, sur la Côte-Nord, à Montréal, on ait accès à la même gamme de services, mais, des fois, il faut les adapter. Ce n'est pas obligé d'être... Universalité n'égale pas copier-coller, hein, vous comprenez. Ça fait que ça, c'est important. Des fois, il peut y avoir des arbitrages, des adaptations. C'est ça, le fond de notre message. On pense que ça prend des instances plus locales qu'on pourrait ajouter à votre projet de loi pour les rendre encore plus effectives sur la base sous-territoriale, c'est ça qu'on vous dit. Puis ça peut être CLSC, ça peut être MRC, dépendamment. Le sous-territoire, ça, on ne va pas jusqu'à le définir parce qu'il y en a toutes sortes, de territoires. On va laisser les législateurs trouver la meilleure formule.

Mme Cloutier (Suzie) : Je ne sais pas si je peux me permettre, en fait. Idéalement, de la COVID, il n'y en aura pas tout le temps non plus, en fait, ou des crises, si on veut. Comme ça, il y a quelque chose en contexte de crise, mais on sait aussi, puis là on est en changement climatique, etc., des contextes de crises de toutes sortes, il y en aura d'autres, ça fait qu'il y a quelque chose qui est utile à ces niveaux-là mais au quotidien aussi, dans le réseau de la... Tu sais, au quotidien, on pense que d'avoir cette approche très territoriale...


 
 

16 h 30 (version non révisée)

Mme Cloutier (Suzie) : ...et cette vision globale là est utile aussi. Et c'est là qu'on... qu'une des recommandations importantes aussi, c'est de remettre, idéalement en début de loi, là, mais vous la mettrez... toute la notion de la vision globale de la santé, en fait, puis c'est vraiment à ces niveaux-là, territoriaux-là, quand on a une lecture fine de, oui, l'accès direct aux services de santé, pour dire quelque chose, mais après ça c'est quoi... qu'est-ce qu'il y a dans cette communauté-là en termes de services plus globalement, c'est quoi, les conditions de vie des personnes, où peut-on être contributifs, prenant pour acquis que... Puis là c'est démontré aussi qu'à peu près 75 %, en fait, de l'amélioration de l'espérance de vie est dû aux conditions de vie et à peu près 20 %, 25 % est dû à l'accès aux soins de santé, qui est important, là, on en convient, là, puis l'universalité, on en convient. Mais il y a quelque chose de l'expérience, en fait, locale des personnes, en fait, qui est essentielle et sur laquelle on prétend puis on pense que le réseau de la santé a un rôle important à jouer, et doit continuer à s'y investir, et va être pertinent et efficace, pour reprendre le titre de votre projet de loi, mais qu'on va gagner en efficacité aussi quand on agit à ces niveaux-là.

M. Dubé : Est-ce que je peux continuer, M. le député, ou vous avez d'autre... Non, non, mais, si vous avez autre chose... Mais peut-être vous pourrez compléter. Mais ce que vous nous faites réfléchir... Puis je trouve ça excessivement important, là, dans la suite de ce qu'on a vu avec Monsieur Clair, avec les médecins, pour la décentralisation, puis vous. J'irais un petit peu plus loin. J'aimerais dire que ce qui va être notre défi, puis on en parlera avec nos collègues, là, lorsqu'on fera l'article par article, c'est de dire qu'il faudrait absolument que, je dirais, l'aspect territorial soit reconnu dans la loi et de donner assez de flexibilité aux gens de Santé Québec, par exemple, de l'appliquer en fonction des particularités du territoire. C'est ce que... Je vais vous dire, c'est ce que je viens d'entendre, là. Puis déjà, si on faisait ça, je pense que les quelques articles que je mentionnais tout à l'heure, qui sont dans vos premières recommandations, seraient assez faciles à intégrer. Parce que, si on commence à dire que, par exemple, on va agir de la même façon à Sept-Îles qu'on va agir à Beauharnois, je ne suis pas sûr que c'est la bonne chose. C'est ça que j'entends de vos... Est-ce que je me trompe?

Mme Cloutier (Suzie) : Vous entendez bien.

M. Rivard (Sébastien) : Ça ressemble à ça.

M. Dubé : Ça ressemble à ça, hein?

M. Rivard (Sébastien) : Mais il faut que les principes soient les mêmes partout, hein? Dans le fond, l'idée qu'il y ait des conseils sous-territoriaux, ça, le principe pourrait être inséré dans la loi, mais, comme vous disiez, ça peut varier d'une région à l'autre, là. Les territoires de CLSC sont une référence quand même pour nous, là, parce qu'historiquement c'est quelque chose qui fait sens pour la population. Mais ça pourrait être autre chose aussi, dépendamment.

M. Dubé : S'il reste me... Il me reste combien de temps?

Le Président (M. Provençal) :...

M. Dubé : Juste sur votre recommandation de la santé publique, bon, où j'ai été un petit peu surpris, parce que j'ai vécu ça pas mal proche, la santé publique, là, pendant quelques années, là, vous dites que ça doit être... Je veux juste être sûr j'ai bien compris, puis je vais le relire parce que je veux bien comprendre, parce qu'on a quelques éléments de santé publique. Mais vous dites qu'elle doit, oui, être indépendante, mais comment vous la voyez globalement? Parce que souvent, dans une pandémie, ou peut-être pour les changements climatiques, il y a quand même des choses qui s'appliquent à tout le monde. Vous voyez comment cet équilibre-là entre ce qui doit être national versus ce qui doit être local?

M. Rivard (Sébastien) : Bien, écoutez, ce qu'on vous a dit, en fait, on ne s'est pas prononcés sur l'aspect national parce que, nous, ce n'est pas notre champ d'expertise, mais on est conscients qu'il y a un directeur national, là, de santé publique. Ça, on n'en a pas parlé, ce n'est pas... ça ne veut pas dire qu'on...

M. Dubé : ...ce n'était pas... O.K.

M. Rivard (Sébastien) : Non, on ne le remet pas en question. C'est juste... En fait, ce qui nous inquiétait, c'est plus, en fait, la marge de manœuvre dans la définition des territoires dans le projet de loi, ça dit que ça pourrait peut-être être revu dans l'avenir. On voudrait juste s'assurer, en fait, qu'on ne se mette pas à nommer un directeur de santé publique pour cinq régions, vous comprenez? Qu'il y en ait au moins un par région, ce serait notre idéal.

M. Dubé : Je comprends. O.K. O.K. Mais vous n'avez pas d'enjeu avec la responsabilité nationale pour certains enjeux, là?

M. Rivard (Sébastien) : Non, non, non, là.

M. Dubé : O.K. O.K. C'est ça que je voulais...

M. Rivard (Sébastien) : Non...

Mme Cloutier (Suzie) : ...différentes fonctions en santé publique aussi, on en est bien conscients, là, la protection en est une, mais l'aspect de pouvoir formuler des recommandations de santé publique sur la base d'une région x, y, z, compte tenu le contexte, pour nous, c'est un atout important, en fait.

M. Dubé : Je pense qu'il n'y a personne qui est contre ça, là. Puis on vient... on a reçu, là, dans les derniers jours, un mémoire qui nous est venu des directeurs de santé publique régionaux, je vais l'appeler comme ça, qui est rentré il y a quelques jours, dont on va pouvoir prendre connaissance. Est-ce qu'il me reste...

Le Président (M. Provençal) :...

M. Dubé : Une minute. Ne bougez pas...

Une voix : ...

M. Dubé : Non, moi, ça va. Si... Je n'ai pas... Quand ça va bien, pourquoi changer les choses? Mais je vous dirais, en dernier lieu, merci pour le travail qui a été fait durant la pandémie. Je pense que les gens ont compris qu'il faut se rapprocher du terrain. Puis, je pense, s'il y a un message où on peut pousser ce projet de loi là plus loin, c'est d'aller sur une notion territoriale. Ça fait que je ne peux vraiment pas être en désaccord avec les recommandations que vous faites aujourd'hui. Merci beaucoup. Merci.

Le Président (M. Provençal) :Nous allons poursuivre avec...

Le Président (M. Provençal) :...Mme la députée. Oui, c'est donc la députée de La Pinière qui va prendre la parole.

Mme Caron : Merci, M. le Président. Alors, merci beaucoup pour votre mémoire et votre présentation. Merci aussi de nous avoir rappelé que cette approche ascendante, donc, qui part vraiment des besoins existe même depuis avant les CLSC. Et je vais résumer, vous me corrigerez si j'ai mal compris, ce que je retiens de votre... de vos interventions, de votre présentation, c'est que conseil consultatif... En fait, vous avez plusieurs recommandations sur la gouvernance et c'est qu'agir localement... Vous avez parlé de démocratie locale, agir localement, ça veut aussi dire décider localement et non pas seulement faire de la reddition de comptes localement. Est-ce que ça, j'ai bien compris ça?

Une voix : ...

Mme Caron : Oui. Pour en revenir au territoire, vous parlez donc de sous-territoire. Est-ce que ces sous-territoires sont déjà définis dans chacun des plus grands territoires?

M. Daigle (Jean-François) : Si vous me permettez... Non. En fait, étant donné qu'on se rapporte à des territoires... le plus souvent, ça va se rapporter à un territoire qui va ressembler à un territoire de CLSC ou de MRC parce que les gens peuvent se reconnaître. Il y a un espace où on a des capacités d'action. Mais dans les faits ce qu'il faut retenir, c'est plus la définition d'une place où les gens ont un sentiment d'appartenance et une capacité d'action sur leur propre territoire qui définit... Donc on n'a pas d'unité administrative, là, définie.

Mme Caron : D'accord. Parfait. Je vais vous demander aussi... Parce que comme je suis porte-parole de l'opposition officielle pour les aînés, les proches aidants et les soins à domicile, je vais vous demander si... Dans le projet de loi actuellement, est-ce que vous voyez que... Pour les proches aidants, pour les soins à domicile, pour les aînés, est-ce que vous voyez des améliorations par rapport à la situation existante ou des possibilités d'amélioration? Ou encore est-ce que vous avez des craintes et vous auriez alors des propositions à faire pour améliorer ces trois points-là.

Mme Cloutier (Suzie) : Bien, en fait, on aimerait vous répondre, mais on n'a pas étudié sous cet angle-là. On s'est vraiment concentré pour étudier sous l'angle de ce qu'on connaît le mieux, en fait, qui est notre métier, en fait, là, notre profession. Donc, on n'oserait pas s'aventurer sur des sujets qu'on maîtrise moins, en fait, là.

M. Rivard (Sébastien) : Peut-être juste une chose qu'on peut dire, c'est que, ce qu'on vous a parlé, l'expérience de la pandémie, l'aspect décentralisation, c'est valable pour l'ensemble des programmes, que ça soit les soins aux personnes âgées, la santé mentale. On travaille là-dedans au quotidien. Puis je pense que les principes qu'on vous a parlé pourraient tout à fait améliorer les soins aux personnes âgées qui ont besoin de se reconnaître dans leurs soins de santé localement. Ça, je pense que les principes s'appliqueraient, puis il y a peut-être des choses qu'on a apprises dans la pandémie là-dessus un petit peu aussi, je pense.

Mme Caron : Oui, sûrement. Sûrement. Alors, est-ce que... Parce que Mme Brodeur, qui... s'est fait couper parce que le temps était écoulé. Alors, je vais en profiter pour vous demander... Est-ce qu'il y avait peut-être un ou deux points auxquels vous teniez vraiment, que vous n'aviez pas eu le temps de nous partager, que vous voudriez partager maintenant?

• (16 h 40) •

Mme Brodeur (Marie-Lynne) : Bien, oui. Je vous remercie beaucoup, Mme Caron. On s'est vues la semaine dernière. Bien, écoutez, moi, j'ai les dossiers strictement aînés, et c'est sûr qu'au niveau effectivement du soutien à domicile, je trouve que oui. Effectivement, ce que tu expliquais, ça serait très pertinent. D'ailleurs, M. le ministre, vous avez sûrement reçu mon mémoire que j'avais écrit avec Mme Bouffard sur le projet de proximité pour les aînés. Je vous dirais qu'aussi par rapport à ça on est en train de développer sur le terrain un projet de proximité pour les aînés. Est-ce que ça va marcher? On ne le sait pas, mais je crois qu'en tout cas le projet de loi... il y a des choses qui pourraient être très intéressantes par rapport à ça.

Mme Caron : D'accord. Et est-ce que ces choses-là sont dans le mémoire auquel vous avez fait référence, que vous avez écrit avec Mme Bouffard?

Mme Brodeur (Marie-Lynne) : Oui, effectivement. Oui.

Mme Caron : D'accord. Merci. Vous avez aussi certaines recommandations qui portent sur les organismes communautaires, donc sur... je crois comprendre sur l'indépendance, l'autonomie des organismes communautaires qui est importante à maintenir. Est-ce que vous aviez... Dans le projet de loi, est-ce que vous voyez des choses qui militent en faveur de ce maintien? Ou encore là est-ce qu'il y avait des choses que vous craignez, que vous aimeriez voir améliorées?

Mme Brodeur (Marie-Lynne) : Bien, je vous dirais que déjà l'article... 432 nomme très bien l'autonomie des organismes communautaires. Moi, ce que... le bémol que je pourrais mettre, c'est au niveau des...

Mme Brodeur (Marie-Lynne) :  ...l'entente... des ententes de service. Il ne faudrait pas que les ententes de service que le réseau octroie aux organismes communautaires dénaturent leur mission pour... pour boucher les trous de notre réseau.

Mme Cloutier (Suzie) : Mais si je peux me permettre? Vous savez, les organismes communautaires sont nos partenaires, en fait, au... sont celles du réseau général, mais elles sont aussi des partenaires avec qui on travaille quotidiennement en fait dans notre métier, ça fait que c'est sûr qu'on ne peut pas s'approprier l'ensemble de leurs revendications ou de leurs inquiétudes. On a vu le groupe avant nous le faire très bien et d'autres. Donc, tout... Nous, ce qu'on souhaite surtout mettre de l'avant, c'est de... c'est en accord avec notre façon de travailler, nos valeurs, de dire : Bien, tout ce qui concerne la relation entre le réseau et les organismes communautaires, donc ce serait important de prendre le temps de bien consulter les organismes, de voir en fait... dans le fond, de les consulter et de voir avec eux s'il n'y a pas des améliorations ou comment eux se sentent confortables par rapport à ça. Parce qu'il faut retenir que c'est un vaste réseau qui existe aussi depuis des dizaines d'années, en fait qui a un historique, etc. Donc, on est vraiment beaucoup en appui, en fait, là, à ces... à ces organismes-là et on sent de leur part une inquiétude, peut être latente en fait, mais par rapport au maintien de leur autonomie. Donc, on souhaite appuyer que c'est important en fait qu'elles puissent le conserver.

Mme Caron : Merci. Puis juste pour bien comprendre. Mme Brodeur, vous parliez... vous disiez : Il ne faudrait pas que les ententes de services viennent dénaturer les organismes communautaires. Est-ce que vous pouvez être un petit peu plus précise ou un exemple peut être? Des fois, ça aide à comprendre.

Une voix : Vas-y, Sébastien, vas-y.

M. Rivard (Sébastien) : Non, mais en fait, ce qu'on vous dit en termes de... Peut-être que «dénaturer» c'est peut être un mot un peu fort. En fait, il faut faire en sorte que les organismes aient assez d'argent pour leur mission globale, pour pas qu'ils ne soient pas seulement financés en ententes de services, parce que, sinon, ils ne sont plus capables de faire leur mission de base. C'est un peu dans cet ordre-là. Je pense qu'il faut bien baliser quand il y a des ententes. Ça existe déjà depuis des années, là, nous autres, ce qu'on dit, c'est qu'il faut vraiment s'assurer qu'il y ait un équilibre dans tout ça.

Mme Caron : O.K. Donc, si je comprends bien, il ne faut pas que les organismes communautaires deviennent comme des agences qui offriraient des services pour parer aux débordements, mais qu'ils puissent continuer d'assurer leur mission, de faire le travail qu'ils poursuivent depuis leur existence, finalement?

M. Rivard (Sébastien) : Tout à fait. Les organismes communautaires ne se voient pas... Ils existent. Vous savez, il y existe beaucoup d'agences privées en santé qui a toutes sortes de services dans le monde infirmier et compagnie. Les organismes communautaires, ils ont une mission sociale au quotidien, donc cette mission-là, il faut qu'elle soit préservée. C'est ça qui est important. On travaille avec eux autres à tous les... à tous les jours.

Mme Caron : Puis j'aurais... Est-ce que tu as une question? Non. Alors, juste pour terminer, vous avez parlé des déterminants de la santé dont on entend parler depuis plusieurs années. Donc, est-ce que vous avez quelque chose de précis à recommander à ce... à ce niveau-là, autre que ce que vous avez déjà évoqué?

M. Daigle (Jean-François) : En fait, ce qu'on a surtout insisté, c'est l'approche d'une vision globale puis que pour faire... Dans le fond, pour faire des populations en santé, il faut d'abord travailler sur les déterminants de la santé. C'est la majeure partie de l'amélioration de la santé des populations, mais aussi de chacun des individus. Donc, c'est ce travail-là qu'il faut faire d'abord, et pour faire ce travail là, il faut être le plus près possible des communautés, impliquer les gens, les partenaires, dont organismes communautaires et ça va nous amener... Et après ça, là, le 25 % qui reste, bien, c'est l'organisation des soins, c'est comment qu'on traite. Ça fait que, nous, on dit : On ne doit pas se centrer sur le 25 %, mais sur l'ensemble et travailler beaucoup avant que les gens aient des problèmes. Après ça, s'assurer qu'il y ait un milieu et une prise en charge aussi dans la communauté. Puis, entre les deux, là, quand il y a un problème grave, on a les soins de santé.

M. Rivard (Sébastien) : Juste pour compléter, vous savez qu'il y a des gens qui revendiquaient un bon plan de lutte à la pauvreté. Aujourd'hui, à l'extérieur de l'Assemblée nationale, on a la crise du logement. À tous les jours aussi, on est confronté à ça, les organisateurs communautaires, des gens mal logés qu'on reçoit dans le réseau. Ça fait que c'est deux exemples concrets de déterminants sociaux qui en appellent à un ensemble de politiques publiques, là. Ça fait que, ça, c'est important pour nous cette cohérence-là, là. Là, on a parlé de la santé aujourd'hui, mais c'est un ensemble de politiques publiques pour résoudre des problèmes aussi importants puis qui ont un impact sur la santé.

Mme Cloutier (Suzie) : En fait, je donnerais un exemple juste qui va marquer. Le jour un de la COVID, le jour un, c'était le 13 mars, mettons le 14, 15... 16 mars, pour dire quelque chose, je dirais peut-être la moitié ou plus des organisateurs communautaires, qu'est ce qu'on a fait? On est allé dans les banques alimentaires pour voir comment on pouvait restructurer les services d'aide alimentaire. Un coup que tout le monde avait perdu sa job avant qu'il y ait... tu sais, avant qu'il y ait les différentes mesures. Puis un coup que les bénévoles de 70 ans et plus étaient tous rentrés à la maison, mais le déterminant social de la santé dont on parle, c'est l'alimentation. Puis c'est c'est là qu'on se rend compte que, si on ne s'en occupe pas, quand bien même on combat, dans ce cas- là, c'était la COVID, quand bien même on a accès à...

Mme Cloutier (Suzie) : ...si les gens ne sont pas en mesure de manger, s'ils sont dans la rue, s'ils n'ont pas accès à un réseau social, etc., bien, on n'a pas une population plus en santé, donc c'est vraiment... On a plusieurs exemples possibles, mais c'est pour illustrer à quel point on ne peut pas s'en passer, en fait, d'avoir ce débat-là puis ces réflexions-là, même en travaillant dans le réseau de la santé... bien, pas même, mais en travaillant dans le réseau de la santé, on ne peut pas faire l'impasse sur cette réflexion-là, sur l'ensemble des déterminants de la santé.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Alors, je vais passer la parole maintenant au député de Rosemont.

M. Marissal : Merci. Merci, M. le Président. Merci d'être là à vous quatre. J'ai encore moins de temps que les gens qui ont parlé avant moi, ça fait que je vais aller vite. Vous parlez beaucoup de conditions de vie, déterminants de la santé, de prévention, tout ça. Mais, tu sais, on sait qu'au Québec, malheureusement, on n'est pas les champions, là, en termes d'investissements en prévention notamment. C'est malheureux. Je pense que le ministre l'a déjà reconnu, d'ailleurs, qu'on peut faire plus puis on devrait faire plus, là. Je pense qu'on devrait être autour de 5 % puis on est bien, bien, bien en bas de ça, là, autour de deux, si je ne m'abuse. À part le constat que vous faites, là, qui est parfaitement lucide, là, puis que je partage, là, il y a... Est-ce qu'il y a quelque chose dans le projet de loi 15 en matière de prévention que vous voyez comme une piste, si ce n'est pas nommément écrit, au moins une piste justement pour accroître le domaine de la prévention en santé plutôt que juste le curatif?

M. Rivard (Sébastien) : Bien, écoutez, le projet de loi... peut-être qu'on a manqué un bout des 300 pages, mais il me semble qu'il y a peut-être... ces éléments-là ne sont peut-être... peut-être pas, sous toute réserve, assez présents dans le projet de loi. Ce qu'on parle, oui, de la présence des directions de santé publique qui sont maintenues. On parle de certains programmes. Nous, on allait un peu plus loin en disant que c'était important aussi de rajouter aux services essentiels du réseau, l'aspect développement territorial, santé publique territoriale, organisation communautaire. Ça, c'est des moyens en fait de travailler sur des enjeux de prévention. Mais ce que vous dites sur les budgets de prévention, promotion, là, ce n'est pas... Moi, je ne l'ai pas vu dans le projet de loi, peut-être que ça mériterait dêtre... d'apparaître plus clairement. Je ne le sais pas, mais c'est sûr que c'est très important pour nous. On vient de vous le dire.

M. Marissal : Bien, on ne vous en voudrait pas d'avoir manqué un bout ou même deux du projet de loi. J'en ai probablement manqué un ou deux aussi. Puis, à chaque fois qu'on reçoit des groupes, on apprend quelque chose d'autre ou on découvre autre chose. Alors, c'est à ça que ça sert. Puis on conviendra que c'est quand même tout un projet de loi, là, avec 1200 articles.

À votre recommandation 14, là, "conséquemment, consolider le financement à la mission des organismes communautaires du Québec, prioritairement au développement d'ententes, de la collaboration ou de services avec le réseau de santé et les services sociaux". C'est une demande, là, classique, là, des... du communautaire, là, ça a même été chiffré. Le ministre disait tout à l'heure, ils ont... le gouvernement aurait doublé le budget, on est autour de 886 millions. Vous, vous dites : Ah! Ce n'est pas structuré, mais je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche, là. Je voudrais vous entendre là-dessus. Puis qu'est-ce que vous cherchez par consolider le financement?

Des voix : ...

M. Rivard (Sébastien) : O.K. Je vais y aller. Donc j'ai travaillé longtemps dans le communautaire, ça fait qu'ils me lancent la puck. Donc non, en fait, ce qu'on dit par consolider, il faut s'assurer que tous les organismes aient un financement à la mission suffisant pour assurer l'ensemble des postes budgétaires de base. Ce n'est pas encore le cas. Sur les 3000 organismes communautaires en santé, services sociaux, il y en a encore beaucoup qui n'ont pas l'infrastructure nécessaire de base pour leur mission de base, comme on vient d'expliquer à votre collègue il y a quelques minutes. Donc c'est ça qu'on veut dire par consolider. Nous, comme on vous a dit, on n'ira pas jusqu'à chiffrer. Ce n'est pas notre travail. On vous dit que c'est un principe de base. Il faut consolider. On reconnaît effectivement les efforts qui ont été faits récemment par l'ensemble des gouvernements, mais ce n'est peut-être pas encore suffisant par rapport aux besoins énormes en termes de ce que font les organismes communautaires pour notre tissu social. On est un modèle québécois unique. Il faut vraiment miser là-dessus en termes d'investissements, comme on le fait dans d'autres programmes sociaux.

• (16 h 50) •

M. Daigle (Jean-François) : ...les organismes communautaires. En fait, quand on dit les...

Le Président (M. Provençal) :...

M. Daigle (Jean-François) : Pardon?

Le Président (M. Provençal) :Le temps est... qui lui est... est terminé, alors je vais passer la parole au député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau : Et moi, je vais transférer la parole à notre invité parce que j'aimerais entendre sa réponse. Je vais aller un peu dans le même sens. Allez-y, continuez.

M. Daigle (Jean-François) : En fait, pourquoi qu'on insiste sur la mission globale des organismes communautaires, c'est que les organismes communautaires, c'est souvent des milieux de vie, des lieux de démocratie, des lieux où les gens, là, viennent prendre... comprendre qu'est-ce qu'ils vivent. Puis, après ça, ils trouvent des moyens pour améliorer leurs conditions de vie. Puis ce n'est pas... Ce n'est généralement pas des spécialistes. Ça fait qu'ils ne sont pas là pour compléter le réseau de la santé, ou dans le sens d'offrir des soins spécialisés. Ils sont là souvent pour offrir un espace de solidarité, des éléments qui vont aider la qualité de vie des personnes tout au long, mais ce n'est pas... ils ne sont pas là pour... ils sont là pour compléter dans le sens qu'ils sont des partenaires dans la communauté...

M. Daigle (Jean-François) : ...des milieux de vie, donc c'est... cette mission-là puis cet espace-là, là, ce n'est pas en donnant des soins, en faisant une reddition de compte précise, et tout, ça, on ne peut pas le réaliser en faisant ça. Donc, c'est simplement pourquoi qu'on dit : Il faut veiller à garder cette essence-là qui est super importante pour les communautés.

M. Arseneau : Vous dites «veiller à le garder», est-ce que déjà on n'en a pas perdu un bout, là, depuis quelques années? Et est-ce que ce projet-ci est de nature à enrayer ce que moi je perçois comme une tendance à évacuer un peu ce que vous venez de mettre en lumière et de valoriser? Je veux vous entendre là-dessus.

M. Rivard (Sébastien) : Mais écoutez, ce qu'on vous a dit sur le maintien des... de la culture qu'on avait, à laquelle on tient, la culture de participation, en fait, il faut s'assurer que notre projet de loi puis le transfert à, en fait, à une société d'État versus un ministère, il faut qu'on garde les acquis qu'on... ce qu'on vous a dit, tous les lieux de collaboration qui existent, les politiques qui existent, il faut... il ne faut pas faire table rase avec une nouvelle... un nouveau type d'organisation de ce qui existait, il faut plutôt consolider. Il faudrait que la culture de collaboration qui existait, qui existe soit préservée, ça, c'est très important. Et ça, on ne sait pas comment ça... nous aussi, on ne sait pas qu'est-ce que ça va donner ce changement de structure, on ne le sait pas.

M. Arseneau : Bien, je ne sais pas, je ne vais pas vous mettre des mots dans la bouche non plus, là, mais vous exprimez des inquiétudes, vous dites ne pas le savoir, donc, nécessairement, le projet de loi n'a pas répondu à cet intérêt de votre part ou à cette préoccupation. En d'autres mots, le projet de loi, on en parle beaucoup sous l'angle hospitalo-centriste, est-ce que ce que vous pensez justement qu'il y a un angle mort qu'on n'a pas abordé suffisamment?

M. Rivard (Sébastien) : Bien, ce qu'on vient de vous dire. En fait, moi, je ne peux pas... je ne veux pas prendre vos mots, là. Tout ce qu'on voit, c'est qu'effectivement on a un changement, on a un gros projet de loi, nous, ce qu'on dit, c'est qu'il faut préserver les acquis, il faut préserver la culture, il faut mettre de l'argent pour la prévention, la promotion, décentraliser, la démocratie locale. Donc, peut-être qu'il y a des choses qu'on ne voit pas dans le projet de loi, mais, dans son application, je pense que des amendements qui pourraient être faits pour vraiment l'améliorer, c'est ce qu'on est venu vous présenter aujourd'hui. Pour le reste, écoutez, là, oui, un réseau de la santé à gérer, il va falloir le faire d'une manière ou d'une autre.

M. Arseneau : Merci. Toutes vos recommandations sont fort intéressantes, l'ancrage territorial en particulier, moi, ça me rejoint énormément, la question de la démocratisation aussi. J'aimerais vous entendre en terminant sur les écueils liés à une présence accrue des fondations, qu'est-ce que vous voulez dire?

Le Président (M. Provençal) :Malheureusement, M. le député, c'était terminé.

M. Arseneau : Je n'ai pas le temps. Bon. On s'en reparlera. Merci.

Le Président (M. Provençal) :Alors, je vous remercie à vous quatre, le travail que vous avez fait pour nous soutenir dans notre projet de loi n° 15 et surtout de vous être déplacés. Alors, je suspends les travaux pour que nous puissions laisser place au prochain groupe. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 54)

(Reprise à 16 h 58)

Le Président (M. Provençal) :Nous poursuivons nos travaux avec les membres de la Commission de la santé et des services sociaux des Premières Nations du Québec et du Labrador. Alors, vous avez 10 minutes pour la présentation de votre exposé. Et, par la suite, nous procéderons aux échanges. Alors, je cède la parole. Qui... qui se fait... Oh! très bien, c'est... Alors, c'est M. Picard qui... le chef de l'Assemblée des Premières Nations, qui va prendre parole. À vous.

M. Picard (Ghislain) :«Kuei, kuei.» (S'exprime dans une langue autochtone). Écoutez, merci de nous recevoir aujourd'hui. Je voudrais d'abord reconnaître qu'autant moi que vous, nous sommes sur des territoires autochtones ancestraux non cédés. Et je veux évidemment reconnaître d'abord ce protocole qui est cher à nos yeux. Et vous remercier, M. le Président, et saluer, évidemment, M. le ministre et les membres de la Commission de la santé et des services sociaux pour leur invitation à nous entendre dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 15, loi visant à rendre le système de santé et de services sociaux plus efficace.

Je suis accompagné, aujourd'hui, de Mme Marjolaine Sioui et de M. Michel Deschênes, respectivement directrice générale et analyste des politiques au sein de la Commission de la santé et des services sociaux des Premières Nations Québec-Labrador. Nous sommes également accompagnés de notre grand ami, le Dr Stanley Vollant, un chirurgien innu.

• (17 heures) •

Les lois provinciales devraient souligner l'importance des partenariats avec les Premières Nations et chercher à déterminer avec elles les besoins en matière de santé et à y répondre. La reconnaissance des valeurs de la culture et du rôle des Premières Nations dans la planification et la prestation des services de santé et des services sociaux de leur population sont des incontournables.

D'entrée de jeu, le projet de loi a pour objet, et je cite, «de mettre en place un système efficace, notamment en facilitant l'accès des personnes à des services de santé et à des services sociaux sécuritaires et de qualité en renforçant la coordination des différentes composantes du système et en rapprochant des communautés les décisions liées à l'organisation et la prestation des services». Fin de la citation. Pourtant, le projet de loi demeure muet quant aux actions concrètes qui doivent être déployées pour reconnaître l'existence des établissements indépendants de la santé et des services sociaux des Premières Nations situés dans les communautés. Pourquoi? Faut-il comprendre qu'une reconnaissance de la part de votre gouvernement ne s'applique qu'aux communautés ayant signé un traité et/ou une convention, avec, évidemment, tout le respect qui leur est dû?

Le projet de loi indique également, et je cite à nouveau, «vouloir reconnaître à toute personne le droit de recevoir des services de santé et des services sociaux adéquats, continus, personnalisés et sécuritaires». Fin de la citation. Pourtant, le réseau refuse d'offrir des services aux Premières Nations résidant dans les communautés, à moins qu'une entente de financement soit signée entre l'établissement de votre...


 
 

17 h (version non révisée)

M. Picard (Ghislain) : ...et la communauté. Même question, pourquoi? Est-ce que nous devons comprendre que les services de santé et des services sociaux adéquats, continus, personnalisés et sécuritaires ne seront pas vraiment reconnus à toute personne puisque certains services doivent être offerts au lieu de résidence du patient? En 2019, je vous rappelle que votre gouvernement a signé un protocole d'entente tripartite dans le cadre du processus de gouvernance en santé et en services sociaux des Premières Nations au Québec. Les parties se sont engagées, notamment, et je cite, à identifier les obstacles, les avenues de solutions possibles afin de faciliter l'accès juste et équitable des Premières Nations au Québec, à des programmes et à des services de santé et sociaux de grande qualité, ainsi qu'à travailler de concert afin d'assurer la participation des Premières Nations aux décisions touchant leur culture et leur mieux être, fin de la citation. De quelle façon avez-vous l'intention de refléter ces engagements dans votre projet de loi et dans la structure de gouvernance qui sera mise en place? J'aimerais répéter la question, mais je ne le ferai pas. L'entente à laquelle je viens de référer a été proposée sous le signe du partenariat et de la collaboration. C'est du moins dans cet esprit que nous avons accepté de la signer. Le projet de loi n° 15 nous en éloigne. Je regrette de dire que vous accumulez les occasions manquées de consulter adéquatement les gouvernements des Premières Nations, et ce, même si les plus récentes commissions d'enquêtes publiques ont été claires à ce sujet dans leurs recommandations.

Je passe maintenant la parole à Mme Marjolaine Sioui.

Mme Sioui (Marjolaine) :«Kwe». Marjolaine Sioui. La deuxième partie de notre présentation se fonde vraiment sur les axes d'action qui sont proposés par le projet de loi de votre gouvernement.

Donc, si on commence concernant la proximité... au niveau de la gestion de proximité, les établissements de santé et de services sociaux autonomes des Premières Nations existants mènent leurs activités sur l'ensemble du territoire au Québec. Malgré cette réalité, ils constituent en quelque sorte un prolongement de la couverture populationnelle du réseau de la santé et des services sociaux au Québec. Les établissements des Premières Nations répondent aux objectifs qui sont cités dans l'axe un de votre projet de loi puisque dans nos établissements les décisions sont prises au niveau local et ils sont aussi la latitude... ils disposent de la latitude, de la légitimité, de la flexibilité pour agir et intervenir au bon moment. Nos établissements offrent des services adaptés aux besoins et aux réalités de notre milieu, tout en mettant au niveau des services... au niveau des répondants aux services des clientèles, notamment en matière de santé communautaire, au niveau des services sociaux et aussi au niveau des personnes en perte d'autonomie et bien d'autres services. Pour ces raisons, nous demandons que les établissements de santé et des services sociaux sous l'autorité des gouvernements locaux des Premières Nations soient reconnus explicitement dans le projet de loi et... à titre d'établissements autonomes et partenaires du réseau de la santé et des services sociaux.

Au niveau de l'axe deux, on parle ici de l'amélioration de l'accès aux services de santé et aux services sociaux. Dans cet axe, le gouvernement vise notamment une meilleure répartition au niveau local des ressources cliniques et médicales. On vise aussi la valorisation de la pratique interdisciplinaire dans les trajectoires de soins et de services, que ce soit pour les médecins, sages-femmes, dentistes, pharmaciens, psychoéducateurs, et autres. Or, les établissements du réseau québécois offrent offre peu de services aux Premières Nations dans les communautés, à moins qu'une entente spécifique avec les instances locales des Premières Nations prévoyant dans certains cas une facturation des soins. Par conséquent, des personnes qui nécessitent des soins spécialisés devront souvent se déplacer dans des établissements du réseau québécois, et les coûts, bien sûr, seront... de déplacement seront assumés par les communautés. Nous demandons que les établissements territoriaux responsables du réseau dans les régions sociosanitaires se voient attribuer dans le projet de loi la responsabilité explicite de proposer des mécanismes appropriés de corridors de services des établissements des Premières Nations situés dans les territoires desservis. Pour terminer...

Mme Sioui (Marjolaine) :...ce doute. Eh bien, on parle aussi de la mesure qui va permettre à un établissement territorial de pouvoir réaliser une meilleure prise de... une meilleure prise en charge du... et un meilleur accès aussi pour les usagers des Premières Nations au niveau des trajectoires et au niveau des soins et services qui sont optimisés aussi pour les Premières Nations. À ce moment-ci, je vais passer la parole à mon collègue Michel.

M. Deschênes (Michel) : Si on aborde maintenant l'axe III, où le gouvernement vise, dans le projet de loi no 15, à être à l'écoute des usagers. Dans ce troisième axe, le gouvernement amènerait une meilleure prise en compte des besoins, de la satisfaction des usagers et des particularités locales, une gestion participative des usagers et de leurs représentants et plus de transparence. Ce dernier axe revêt une importance particulière pour les Premières Nations, car il offre l'opportunité au ministère de corriger une lacune qui existe depuis longtemps, soit l'absence de lieux véritables permettant aux Premières Nations d'exprimer leurs besoins et de proposer des solutions pratiques aux décideurs des différents paliers décisionnels du système québécois.

Les Premières Nations ne doivent plus être absentes, voire ignorées des lieux de représentation du système de santé et des services sociaux québécois. En ce sens, nous proposons des mesures conférant le rôle d'interlocuteur privilégié aux Premières Nations de matière... de manière concrète dans les comités qui seront institués par Santé Québec en vertu de la loi, ainsi qu'auprès d'autres instances comme le Commissaire national aux plaintes et à la qualité des services. On demande aussi l'attribution d'un siège au conseil d'administration de Santé Québec et dans chaque conseil d'établissement. Ces sièges seront réservés spécifiquement à des représentants désignés par les Premières Nations. Enfin, pour reconnaître aux Premières Nations le statut d'interlocuteur privilégié auprès du ministre sur le plan politique, nous demandons qu'un comité national spécifique aux Premières Nations soit créé pour servir de comité consultatif au ministre de la Santé et au ministre responsable des Services sociaux en matière d'élaboration de programmes d'accès, de plans d'action ministériels, d'élaboration ou de modifications législatives ou réglementaires pouvant affecter les Premières Nations.

L'axe IV qui a mené à la création de Santé Québec constitue une opportunité pour le système de santé et services sociaux québécois d'aborder davantage des enjeux de fourniture de services de santé aux Premières Nations selon une vision globale et culturellement adaptée, tout en disposant des moyens d'intervenir de façon coordonnée et cohérente au niveau régional et local. Il est essentiel que les Premières Nations participent aux côtés de Santé Québec et des établissements du réseau à la recherche de solutions répondant véritablement à leurs besoins et à ceux des usagers issus de Premières Nations. Celles-ci doivent pouvoir choisir les représentants qui prendront place au sein du conseil d'administration de Santé Québec, les conseils d'établissement et autres instances du réseau dans des sièges réservés spécifiquement aux Premières Nations.

En conclusion, nous demandons que soient intégrées dans ce projet de loi les mesures et les recommandations invoquées dans le présent mémoire pour leur conférer un caractère structurant, en assurer la pérennité et faciliter leur prise en compte dans l'évolution du cadre législatif et réglementaire québécois. Nous demandons qu'une section spécifique réservée aux Premières Nations soit ajoutée au projet de loi pour formaliser la reconnaissance des établissements de santé et de services sociaux des Premières Nations et le régime particulier qui s'applique à ces entités autonomes et à leurs organisations représentatives en tant que partenaires des établissements du réseau de la santé et des services sociaux du Québec. Cette intégration dans la loi doit être faite de manière à démontrer que l'identité des Premières Nations est unique et qu'elle doit être traitée et reconnue ainsi. Je vous remercie.

• (17 h 10) •

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup pour votre présentation. M. le ministre, vous avez la parole.

M. Dubé : Très bien. Merci, M. le Président. Et chef Picard, Dr Vollant et les gens qui ont la gentillesse d'être avec nous aujourd'hui en présence, merci pour cette présentation-là. Et je pense que des fois, même si on ne va pas à la vitesse que vous vouliez ou qu'on voudrait aller, je pense qu'il y a eu quand même une belle collaboration qui s'est faite, là, depuis quelques années. Et moi, j'aimerais peut-être vous... nous donner un défi, hein, comme me donner un défi à moi, puis vous allez m'aider parce que sans rentrer, chef Picard, dans le, disons, dans un débat constitutionnel, mais c'est assez complexe, toute la question du financement fédéral des centres de santé versus...

M. Dubé : ...l'accès des autochtones au réseau de santé. Hein, vous comprenez ce que je veux dire? Et j'aimerais bien comprendre parce que, quand je vois des gens comme le Dr Vollant qui est venu — ce n'est pas la première fois qu'il vient, là — moi je le vois comme une partie intégrante de notre réseau, un médecin qui pratique dans le réseau, etc. Mais quand on regarde la façon dont les centres de santé sont financés par le fédéral, ça devient un peu complexe de comprendre qu'est-ce qu'on peut faire, et c'est un petit peu pour ça qu'on a pris, je dirais, une certaine prudence dans le p. l. 15 pour ne pas faire d'emprise sur ce financement fédéral là. Ça fait que j'aimerais ça que vous nous expliquiez c'est quoi l'objectif qui est recherché quand vous dites de préciser? Mais vous voulez préciser quoi dans le p. l. 15, alors que les centres de santé sont quand même... relèvent du fédéral? Alors, je veux vous entendre là-dessus. Je ne sais pas si c'est le chef Picard ou... mais j'aimerais bien le comprendre parce que c'est assez complexe cette... cette notion-là, je vais l'appeler cette notion de financement fédéral là.

M. Picard (Ghislain) :Oui, M. le ministre, si je peux me permettre peut être une première réaction à votre question que je trouve extrêmement pertinente, et vous référez au Dr Vollant qui a vraiment qui a vraiment tout le respect, là, de l'ensemble de la communauté chez nous, et je pense que sa présence justement, puis vous le citez vous-même, vous vous y référez vous-même, sa présence dans le système québécois en tant que... représente bien un peu l'équilibre qui est recherché entre le réseau, le réseau de la santé au Québec et les membres de nos communautés qui en dépendent finalement à la fin de la journée. Je pense que c'est extrêmement important, et c'est pour ça... ça, ça vient expliquer en quelque sorte notre souhait d'être représentés adéquatement à tous les niveaux possibles au niveau du réseau de la santé au Québec.

Ceci étant dit, et vous relevez un aspect extrêmement important, celui du financement, et même nous, je veux dire, on se retrouve un peu coincés entre votre gouvernement et celui d'Ottawa alors qu'on est finalement les bénéficiaires du service. Hein, on s'entend là-dessus? Mais on n'a aucune espèce de contrôle sur la façon que ces services-là doivent être dispensés et on n'a aucune indication sur les montants que le Québec va chercher pour assurer ce service-là à l'ensemble du Québec, évidemment, mais de façon plus particulière à nos communautés.

Ce qu'on relève dans le projet de loi n° 15 c'est qu'à l'intérieur même des groupes conventionnés, il y en a trois au Québec, trois nations : les Inuits, les Naskapis et les Cris, vous faites déjà une distinction parmi ces trois groupes-là et alors que le reste de nous, là, et je le dis en tout respect aux conventionnés, c'est qu'on ne se retrouve nulle part alors qu'on en a une responsabilité directe envers les membres de nos communautés et surtout les personnes qui dépendent du réseau de la santé. Donc, moi, c'est ma partie qui m'appartient, je veux dire, à la lumière des observations que je fais depuis plusieurs années, là, sur les lacunes et les difficultés que vivent nos communautés. Mais je me tournerais peut-être là... je pense que Dr Vollant a sans doute un commentaire également là-dessus.

M. Dubé : Mais je pense que c'est complexe. Mais allez-y, Dr Vollant. On va essayer de trouver des solutions.

M. Vollant (Stanley) : Bien, peut être pour les gens qui sont moins habitués avec comment sont traitées les Premières Nations, comment fonctionne le système de santé, bon, la moitié des autochtones au Québec qui sont non conventionnés, donc ne font pas partie de la Convention de la Baie-James, et donc les Innus, les Mohawks, en tout cas toutes les autres nations. Donc, quelqu'un de Pessamit vient....

M. Dubé : En lien avec... c'est ça?

M. Vollant (Stanley) : ...vient dans le dispensaire, reçoit la première ligne et, quand il y a besoin de soins spécialisés avant en chirurgie, en endocrinologie, en cardiologie, il va être dirigé vers soit Baie-Comeau ou encore même Québec, ou Chicoutimi, ou ailleurs. Donc, il fait partie du système de santé, et je pense qu'il faut absolument qu'on mette ce continuum-là de soins de santé pour les Premières Nations bien clair dans le projet de loi n° 15, et je pense qu'on le fait déjà, mais je pense que ça vaut la peine qu'on l'officialise ce partenariat-là déjà des communautés avec le système provincial.

M. Dubé : Puis comment... On ne réglera pas ça aujourd'hui, mais on va avoir... ça va faire l'objet de discussions. Comment on le fait pour ne pas faire, je dirais, d'éléments de discussion avec le fédéral qui...

M. Dubé : ...qui serait... qui prolongerait toute cette discussion-là? Comment on le fait? Parce que c'est une des raisons pour lesquelles on s'est tenus loin de ça, parce qu'il n'y a pas les ententes spécifiques auxquelles vous venez de référer, qu'on a avec les Innus, par exemple, ou d'autres communautés. Comment on ferait pour régler ça par rapport au financement fédéral? ...une solution, moi, je suis très ouvert.

Mme Sioui (Marjolaine) :Bien, en fait, c'est au-delà de juste la partie financière. Quand on parle de corridor de services, d'arrimage avec le réseau, et tout, on voit des inégalités, des iniquités qui arrivent où est-ce qu'on a besoin de pouvoir trouver des solutions à plus long terme là-dessus. Quand on demande la reconnaissance du statut de nos établissements des Premières Nations qui sont existants, même s'ils sont autonomes, ce que ça veut dire, c'est que, présentement... on l'a vu, là, dans un autre projet de loi où on a demandé cette reconnaissance parce que les professionnels, qui sont des professionnels qui vont dans les mêmes ordres professionnels, comme Dr Vollant, et tout, se retrouvent à travailler dans les communautés, n'auront pas accès à certaines bases de données. Donc, on met, encore une fois, la santé...

M. Dubé : Quand vous dites ça, me parlez-vous, par exemple, comme, du dossier Santé Québec ou... des dossiers comme ça?

Mme Sioui (Marjolaine) :Oui, exactement.

M. Dubé : O.K Puis ça... Bon, on ne rentrera pas dans nos petites léthargies informatiques, là, qu'on va finir par régler un jour, mais ça, qu'est-ce qu'on pourrait faire, là, concrètement, pour permettre à vos communautés d'avoir peut-être un accès plus rapide au DSQ par exemple? C'est-tu un peu ça que vous me demandez?

Mme Sioui (Marjolaine) :Bien, en fait, je vais laisser mon collègue répondre. Les questions de... Présentement, on est en train d'implanter les DMA, les choses comme ça. Au niveau du DSQ, on a fait la demande formellement. Donc, on avait des solutions à proposer, et ça a été rejeté du revers de la main. Donc...

M. Dubé : Mais ça a été rejeté par qui?

Mme Sioui (Marjolaine) :Par la commission parlementaire.

M. Deschênes (Michel) : C'est lors de l'étude du projet de loi n° 3, concernant les renseignements de santé et de services sociaux.

M. Dubé : Pour que... Bien, O.K. Mais rappelez-moi exactement, là, pour être sûr que je comprends bien, puis, s'il y a des choses qu'on doit corriger, on... Mais qu'est-ce qui a été refusé à ce moment-là? Parce que moi, je n'ai pas participé à projet de loi n° 3, là. Alors, peut-être me l'expliquer.

M. Deschênes (Michel) : Lors de ces travaux-là, il a été demandé à ce que les centres de santé, les postes de soins, qui sont les établissements de santé des Premières Nations, soient reconnus comme organismes autorisés à recevoir des renseignements de santé et services sociaux. Actuellement, ils ne sont pas autorisés, en vertu de la Loi sur le partage de certaines données en santé.

M. Dubé : O.K. Parce que, là, il y a la notion fédérale qui rentre en ligne de compte aussi là-dedans.

M. Deschênes (Michel) : Ce n'était pas la raison qui était invoquée. La raison qui était invoquée, c'était simplement que la loi sur laquelle portait le sujet, les renseignements en santé et services sociaux, ce n'était pas, à ce moment-là, une loi d'organisation, une loi de structure. Et ce n'était pas le ministère de la Santé et Services sociaux qui déposait cette loi-là. On disait que ça prendrait un autre... à un autre lieu on devrait le faire, donc dans le cadre d'une réforme ou d'un changement dans la loi sur la santé et services sociaux. Ça, c'est les discussions qu'il y avait eu à ce moment-là.

M. Dubé : Puis est-ce que ça a... Puis c'est intéressant parce que... Est-ce que ça a besoin de passer par le projet... Je donne l'exemple parce que... Moi, en tout cas, je suis très ouvert à... On va commencer par se démêler entre nous autres sur le DSQ, là, puis il y a du monde qui travaille fort là-dessus pour que ça arrive, un DSQ plus moderne. Mais vous, vous me dites, c'est quelque chose qui serait important pour votre communauté, ça. Puis là c'est de faire le lien avec le p.l. 3 tel que passé, tel qu'il a été voté puis qui va être en application dans un an. Ça, ça n'a pas répondu à votre demande. C'est ça que je comprends bien aujourd'hui, O.K.

M. Vollant (Stanley) : Et, de façon pratico-pratique aussi, M. le ministre, je m'excuse d'interrompre...

M. Dubé : Non, non, mais allez-y.

• (17 h 20) •

M. Vollant (Stanley) : ...quelqu'un qui travaille... qui est hospitalisé à Joliette, qui retourne à Manawan, puis on n'a pas ses... est suivi par les infirmières de Manawan ou les médecins qui sont là, certains n'ont pas la clé DSQ, n'ont pas accès cette clé-là. Donc, souvent, on redouble les examens, on refait une autre formule sanguine, un autre rayon X.

M. Dubé : Ah! ça, ça n'a pas de bon sens. O.K. Je comprends.

M. Vollant (Stanley) : Et je pense qu'aussi on pourrait peut-être avoir des liens privilégiés, par exemple l'hôpital de Baie-Comeau avec Pessamit, l'hôpital de Joliette... pour avoir peut-être des liens... Moi, j'ai accès aux dossiers de l'hôpital Notre-Dame de chez moi.

M. Dubé : Je comprends très bien.

M. Vollant (Stanley) : Donc, c'est possible de pouvoir partager ces informations-là. Et ça pourrait être dans les deux sens, que les gens de l'hôpital de Joliette peuvent avoir accès au dossier médical de... et ça diminuerait le dédoublement d'examens, de questionnaires et d'allonger le temps qu'on passe aux patients...

M. Dubé : Bien, écoutez, Dr Vollant, là... puis c'est que ça sert, hein, notre commission parlementaire. Moi, quand je vous entends aujourd'hui, j'ai de la misère à ne pas être ouvert à ça, là, de vous donner, vous, en tant que chirurgien d'une grande réputation, comme disait le chef Picard tantôt... La journée qu'on a démêlé nos choses au niveau du DSQ, pourquoi ne pas le donner... puis je ne pense pas qu'il y ait un lien avec le financement fédéral, là. On se comprend, vous gardez votre financement. Est-ce qu'on pourrait donner... Je pense qu'on pourrait... En tout cas, on pourrait en discuter lorsqu'on va être en commission avec mes collègues de l'opposition, mais ça me semble une demande très claire que vous faites, là. Puis si le DSQ peut être ajusté pour qu'un chirurgien comme le docteur Vollant ait accès... peut-être au début avec une clé USB puis ultimement dans le dossier de santé numérique, je ne vois pas pourquoi qu'on ne le ferait pas, mais...

Mme Sioui (Marjolaine) :C'est aussi l'une des raisons pourquoi on propose aussi un comité, genre, aviseur du ministre pour pouvoir être en amont, justement, de problématiques comme ça ou d'enjeux qui se présentent pour que ça puisse se retrouver à votre niveau, pour justement prendre les mesures nécessaires ou les actions nécessaires, donc un rôle-conseil vraiment, qui serait formé des différentes nations qui travailleraient ensemble à ce niveau-là.

M. Dubé : Bien, écoutez, moi ce que je dirais pour aujourd'hui, là, parce que je veux prendre connaissance vraiment de la raison pour laquelle ça a été refusé au niveau du PL trois. Mais à la lumière de ce que j'entends de votre demande aujourd'hui, je vais le répéter... puis peut-être que la meilleure façon pour moi, ça serait d'en parler clairement comme une des étapes du plan de transition. Parce que vous m'avez peut-être entendu souvent dire qu'on va... Quand on va faire l'article par article, c'est sûr que le plan de transition va définir c'est quoi qu'il doit faire. Et si la question des données pour faciliter le travail de chirurgiens ou de gens qui sont en première ligne, peu importe le financement des centres de santé, moi, je pense qu'on devrait regarder ça très sérieusement. Ça fait que je n'ai pas de problème. Est-ce qu'il y a d'autres demandes de...

Mme Sioui (Marjolaine) :...répondre à votre question tout à l'heure, en disant : Bien comment on peut justement trouver des solutions, et tout, puis qu'est-ce qu'on cherchait aussi par le mémoire qu'on a déposé. Lorsqu'on mentionne d'avoir une distinction, on revient encore une fois à une reconnaissance de ces établissements qui sont dans les communautés, où est-ce qu'on ne peut pas... Comme vous l'avez dit tout à l'heure,  c'est vraiment complexe, et cette complexité-là doit être reconnue quelque part. Et on ne peut pas se retrouver dans un projet de loi où est-ce qu'on va se retrouver avec l'ensemble des établissements quand on sait très bien qu'on a un statut unique, qui est très différent de par nos législations qui s'appliquent, de par aussi les droits des Premières Nations, et tout.

Donc, au point de vue législatif, on veut cette reconnaissance-là qui nous distingue de tous les établissements en général au Québec.

M. Dubé : Peut-être... Comment il me reste de temps?

Le Président (M. Provençal) :...

M. Dubé : 40 secondes. Oui, ce n'est pas long, ça. Ce qu'on a voulu protéger avec les ententes qui sont déjà dans la L4S, c'était... Vous avez beaucoup... un plus grand pouvoir de décision que bien des CISSS et des CIUSSS dans le sens, bien, la première décision se prend là et le financement vient par la suite. Il faudrait qu'on définisse... Puis je vais laisser les collègues poser leurs questions. Mais ça il faudrait comprendre ça pour respecter ces principes-là qui sont de l'autonomie de vos nations. Je comprends bien, là. Ça, pour moi, c'est très important. Mais je vais laisser mes collègues poser les autres questions, là. Je manque de temps.

Le Président (M. Provençal) :...ministre. Alors, la suite va appartenir à Mme la députée Mont-Royal Outremont

Mme Setlakwe : Merci à vous tous. Moi j'étais... j'ai participé à la commission parlementaire sur le projet de loi trois sur le partage des renseignements de santé, puis à entendre l'échange... puis j'ai ressorti des notes. Je n'ai pas accès évidemment à tout mon dossier, mais je me suis rappelé qu'on a discuté de la question et essentiellement on a dit que ce n'était pas au niveau... ce n'était pas le bon forum. Ce n'était pas au niveau du PL trois sur les renseignements de santé qu'on pouvait régler l'enjeu et intégrer toutes les communautés autochtones. C'est comme si on ne peut pas les faire participer à un aspect du réseau, un aspect, s'ils ne sont pas déjà... ...moi l'expression, accrochés au réseau. On a eu des longues discussions, là, avec le sous-ministre... et les avocats qui ont participé à la rédaction du projet de loi. Puis j'ai même sous les yeux, tu sais, la définition d'organisme, parce que le p.l. 3 prévoit la mécanique qui force... qui force, oui, oui, qui oblige le partage de renseignements, puis c'est ce qu'on souhaite, entre organismes. Organisme est défini...

Mme Setlakwe : ...il y a une définition particulière et on a simplement des... bien, des établissements et deux... bien, une régie régionale de la santé et des services sociaux du Nunavik, parce qu'elle est instituée en vertu de, bon, un article précis de la loi LSSS, et le Conseil cri de la santé et des services sociaux de la Baie-James institué en vertu de cette même loi là, pour les autochtones cris. Pour les autres bien, ils ne pouvaient pas participer parce qu'ils ne font pas partie du réseau de la santé. Là, je l'exprime de façon très simple, mais M. le ministre, c'est comme... Dans le fond, c'est dans le cadre de ces discussions plus générales là, là, qu'il faudrait régler l'enjeu.

Une voix : ...d'accord.

Mme Setlakwe : Oui. Je voulais qu'on... donc c'est votre compréhension aussi. Donc c'est vraiment... mais, donc, il me semble que c'est un morceau qu'on a oublié, qu'on a... qu'on aurait dû, qu'on a oublié dans le PL 15. Soyons clairs, puis c'est maintenant le temps de corriger cette lacune-là.

M. Vollant (Stanley) : Oui, bien, je pense, c'est de reconnaître, Mme Setlakwe, c'est de reconnaître les centres de santé des communautés non conventionnées qu'on appelle les dispensaires, dans le terme usuel, là. C'est de reconnaître ces établissements-là qui sont déjà partenaires dans le réseau de santé. Parce que nos patients font très... en tout cas, naviguent dans le système de santé. Donc, on doit reconnaître ce qui est déjà établi. Je pense que de reconnaître nos établissements, ça va être la première étape, qu'on puisse avoir par la suite des ententes sur le partage des données, sur le DSQ ou le partage de données avec les hôpitaux et les centres des établissements. Donc, nous devons être reconnus dans ce qu'on a présenté dans notre mémoire.

Mme Setlakwe : Donc, il n'est pas trop tard, d'ailleurs. Le projet de loi trois a été adopté, mais on s'entend que la mise en œuvre de tout ça, ça va se faire... ça va prendre au moins un an. Puis le DSQ va continuer d'être en opération jusqu'à ce que le nouveau réseau soit opérationnel. Mais voilà, merci beaucoup pour votre contribution. Je pense qu'on a une réflexion importante à faire.

Le Président (M. Provençal) :...

M. Fortin :Oui, merci. Merci, M. le Président. Mais effectivement, là, le PL trois ce n'était pas tant un projet de réforme de gouvernance, mais là aujourd'hui on en a un, projet de réforme de gouvernance. Alors, je comprends que vous avez beaucoup de propositions, de modifications à apporter. Je veux... le projet de loi porte beaucoup sur Santé Québec puis son fonctionnement. Mais il ne faut pas oublier ce qui reste au ministère non plus, là. Vous avez mentionné dans votre mémoire le rôle de la direction des affaires autochtones du ministère. Vous demandez à ce que ce rôle-là soit redéfini, soit actualisé, disons, pour tenir compte de votre réalité d'aujourd'hui. Qu'est-ce qui ne marche pas avec la direction en ce moment? Qu'est-ce qui a besoin d'être amélioré et modifié, mis au goût du jour?

• (17 h 30) •

Mme Sioui (Marjolaine) :En fait, il y a quand même beaucoup des bonnes choses qui se font et il y a quand même une bonne collaboration, et tout. Par contre, comme vous le savez, la structure, elle est lourde. C'est gros, hein? Puis, au niveau des Premières Nations, ce qu'on entend sur le terrain, c'est un certain assouplissement au niveau de restructurer. On n'a jamais fait de... moi, en tout cas à ma connaissance, au niveau de la direction des affaires autochtones du ministère, de retour auprès des Premières Nations pour dire : Bon, on va s'examiner, on va s'autoévaluer pour voir un petit peu : Est-ce que ça répond aux besoins des Premières Nations?  Est-ce qu'actuellement... Est-ce qu'il y a des choses dans les relations que vous changeriez? Comment on verrait ça? Donc, quelque chose d'introspectif, positif, mais qui mènerait vers quelque chose d'un peu plus loin.

Actuellement, vous savez, on travaille sur... au niveau fédéral aussi, avec une loi... un projet de loi sur la santé des autochtones qui va venir à être déposé en janvier prochain. C'est sûr que les provinces et territoires sont interpellés ou vont l'être très bientôt à certains niveaux. Par contre, bon, on sait actuellement que pour les projets de loi du fédéral ou quoi que ce soit, ça peut être un peu plus difficile compte tenu de ce qui s'est passé avec C-92 qu'on appelle la loi fédérale sur les jeunes... les enfants, les jeunes et les familles des Premières Nations. Donc, comment on travaille avec tout ça?

Donc, quand on regarde avec la direction des affaires autochtones, on avait déjà proposé, dans le cadre de la table politique APNQL-Québec, on avait une table technique santé services sociaux, de rapprocher un peu plus haut, à un niveau plus près du ministre. Donc, ça revient un peu chercher notre autre recommandation qui est d'avoir un comité aviseur au niveau du ministre. Et en même temps pour la direction des affaires autochtones, s'il y avait un exercice qui était fait avec l'ensemble des communautés sur ce qui... le fonctionnement, les mécanismes qui sont en place, et bien de pouvoir....


 
 

17 h 30 (version non révisée)

Mme Sioui (Marjolaine) :...peut-être amené ça d'une façon un peu plus élargie, mais aussi qui répondrait davantage aux besoins, puis peut-être qu'on serait surpris aussi qu'il y aurait quand même plein de belles choses qui ressortiraient, mais c'est toujours dans une perspective d'amélioration continue.

M. Fortin :Pouvez-vous peut-être me faire la... ou nous faire, là, la démonstration de la différence entre le comité aviseur que vous proposez puis la... ce que c'est que la personne qui siégerait au conseil d'administration de Santé Québec, là, la... à ce siège-là réservé aux représentants des Premières Nations, c'est quoi la différence dans la... parce que là vous proposez un peu deux mécanismes différents de... disons, peut-être, il y en a un... peut-être un qui est plus niveau service puis un qui est plus coté avis, là, puis que conseil général, mais j'aimerais ça comprendre votre perspective autour de ça.

Mme Sioui (Marjolaine) :Oui. Mais, comme vous l'avez mentionné, il y a quand même deux entités, Santé Québec, le ministère de la Santé et Services sociaux. On voit le côté ministériel plus de façon stratégique, donc tout ce qui peut toucher au niveau des législations, des lois, des règlements, des choses comme ça. Donc, un comité aviseur, on vise ici une approche collective formée de représentants de Premières Nations des différentes nations, donc, qui pourraient justement se concerter et arriver avec, comme aujourd'hui, avec ce projet de loi là, si on avait eu ce genre de comité-là en place, on se serait donné le temps en amont de pouvoir répondre et de pouvoir aussi identifier les certains enjeux potentiels qu'on aurait pu voir avec le projet de loi. Donc, ça, c'est un rôle aviseur.

Au niveau du conseil d'administration, bien, c'est une personne, mais ce qu'on souhaite mettre en place aussi dans notre propre réseau, c'est d'avoir des personnes identifiées justement parce qu'on a déjà des réseaux très bien établis où ces personnes-là se concerteraient et pourraient justement veiller à recommander à la personne au siège qui serait réservé aux Premières Nations sur le conseil d'administration et qui est l'entité Santé Québec où est-ce qu'on se rapproche justement des communautés sur les territoires, et tout.

M. Fortin :O.K. Bien, vous avez, dans votre mémoire puis dans les interventions que vous avez fait tous les quatre, là, depuis le début de la commission, énormément de propositions à faire, puis c'est très bien, on veut les entendre ces propositions-là, mais ça laisse sous-entendre, disons, qu'il y a un manquement important par rapport à ce qui est dans le projet de loi en ce moment puis la place qu'on fait pour les Premières Nations, alors si je prends ça du point des... du point de vue des services offerts aux gens des Premières Nations, est-ce que, si le projet de loi est adopté tel quel, là, sans aucune des recommandations que vous suggérez en ce moment, juste avec le libellé qui est proposé par le ministre, est-ce que vous voyez à travers ça une amélioration des services aux gens des Premières Nations?

Mme Sioui (Marjolaine) :Je pense que...

M. Fortin :Dr Vollant.

Le Président (M. Provençal) :Le micro est fermé, Dr Vollant.

M. Vollant (Stanley) : Ce serait un non catégorique. Je pense qu'il faut aller plus loin pour vraiment officialiser les liens déjà du réseau de la santé avec les Premières Nations du Québec, Labrador, surtout le côté non conventionné, c'est ignorer la moitié des autochtones du Québec. Donc, je pense, c'est important vraiment de l'écrire, de vraiment démontrer ce partenariat-là qui existe déjà et les différents axes qu'on a déjà avancés. Je pense que les... ces positions-là, c'est le minimum. Et je pense qu'au lendemain de... les événements de Joyce Echaquan, je pense qu'à Joliette, ils ont quand même quelqu'un sur le conseil d'administration du CIUSSS et ont des gens aussi à intégrer dans les hôpitaux, et on aimerait voir ça à l'ensemble de la province. Je pense que si on veut aller de l'avant sur la sécurisation de la clientèle autochtone, je pense qu'il faut aller implanter ces structures-là, ces mécanismes-là dans tout l'ensemble du réseau.

M. Picard (Ghislain) :Je me permets de seconder le Dr Vollant. Et essentiellement, là, simplement, c'est vraiment une mise à niveau parce que, fondamentalement, le système ou le réseau de santé est devant la même clientèle, les mêmes réalités. Et pourquoi il y a différentes façons de faire, c'est vraiment la question qui est posée, hein, une distinction entre les communautés conventionnées et les non conventionnées. Et on trouve que c'est tout à fait... à la limite, c'est presque discriminatoire, là, la façon que les services sont dispensés.

M. Fortin :Parce que ce que je comprends de votre propos, Dr Vollant, c'est qu'après les événements tragiques de Joliette, là, après le décès de Mme Echaquan, là on a vu certains changements dans Lanaudière spécifiquement, là, à l'hôpital de Joliette ou au conseil d'administration, mais quand vous proposez justement qu'il y ait un représentant issu des Premières Nations sur chaque conseil d'administration ou, là, comité d'établissement, là, appelons ça comme vous voulez, là, mais ce que vous dites...

M. Fortin :...il faut s'y prendre tout de suite pour qu'il y ait au moins cette... cette pensée-là, cette réflexion-là par rapport aux différents services qui sont offerts, puis à la façon qu'on le fait envers les gens des Premières Nations. Parce que je comprends qu'il y a des corridors de services qui sont bien établis dans certains CISSS et CIUSSS, là, en ce moment. Vous avez parlé tantôt de la Côte-Nord, du Saguenay. Mais il y a des endroits où il y a moins de communautés évidentes des Premières Nations, mais il y a des gens issus des Premières Nations, je pense à Laval, la Montérégie-Est ou ailleurs, là. Donc, ce que vous nous dites, c'est que dans ces centres-là, même s'il n'y a pas de communauté bien établie, il y a quand même un pourcentage de gens qui font appel aux services de santé, et pour ces gens-là, on a besoin d'avoir cette... disons, cette pensée-là, si je vous comprends bien.

M. Vollant (Stanley) : Absolument. Tu sais, on parle de Capitale-Nationale, il y a quand même une population autochtone considérable dans la Capitale-Nationale,  en Gaspésie avec la nation micmaque et malécite. À travers partout le territoire, il y a cette présence-là des Premières Nations, et je pense que c'est important peut-être de le voir de façon plus systémique, là, dans l'ensemble du système de santé. Au lieu de faire des ententes par centre hospitalier, je pense qu'il faut le voir de façon plus globale.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup.

M. Fortin :Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal) :Alors, nous allons maintenant céder la parole au député de Rosemont.

M. Marissal : Merci. J'ai combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Provençal) :Vous allez avoir 4 min 7 s.

M. Marissal :  Merci. Merci d'être là, chef Picard, Dr Vollant. Je ne veux pas tourner le fer dans la plaie. Au contraire, là, je veux profiter de l'ouverture manifestée par le ministre parce que, comme ma collègue de Mont-Royal—Outremont, j'étais bien placé sur le projet de loi n° 3. C'est moi qui avais tenté de déposer l'amendement qui aurait probablement pu vous inclure au moins dans le projet de loi n° 3 qui est maintenant la loi. Puis, pour la petite histoire, on m'avait dit que ce n'était pas la place, et il y avait eu un très très long conciliabule, pour que vous le sachiez parce que tout ça s'est passé hors caméra comme ça se fait parfois, et puis on m'avait bien fait comprendre que ce n'était ni l'endroit ni le moment. Alors, si maintenant le projet de loi n° 15 est l'endroit et le moment, bien, c'est bien noté. Est-ce qu'à ce sujet, votre recommandation n° 9 fait le tour de la question ou vous voulez ajouter quelque chose? Elle se lit ainsi, là, vous ne la connaissez probablement pas par cœur : «Que la reconnaissance des établissements de santé et des services sociaux des Premières Nations ait pour effet qu'ils soient autorisés à accéder pleinement aux renseignements de santé et de services sociaux de leurs usagers détenus par le MSSS? Est-ce que ça fait le tour? Avez-vous autre chose à ajouter là-dessus?

M. Vollant (Stanley) : Non, je pense que c'est assez complet, oui.

M. Marissal : Ça compléterait le travail si on était capable de l'inclure. Évidemment, ça va prendre la forme d'un amendement, ça fait que ça va être pas mal plus compliqué à lire que ça, là. Mais, mettons qu'on est capable de rentrer ça dans le projet de loi, ça vous convient? Vous, Dr Vollant, vous dites que vous serez capable à ce moment-là de travailler, notamment en ayant accès aux données dont vous avez besoin.

M. Vollant (Stanley) : Je pense qu'il faut parler ici d'un partage des données. Je pense que ça peut aller dans les deux sens. Je pense que le praticien de l'hôpital de Joliette apprécierait beaucoup avoir le d'avoir accès aux dossiers de Manawan pour pouvoir donner les meilleurs soins, les plus optimaux à son patient qui est à la salle de rénovation, à l'hôpital de Joliette et vice et versa, dans d'autres centres de santé au Québec.

• (17 h 40) •

M. Marissal : O.K. Très bien. C'est clair. On fera les suivis nécessaires au cours des prochaines semaines, voire mois.

Par ailleurs, vous êtes bien placé aussi, Dr Vollant, mais je ne veux pas ignorer vos collègues qui sont là aussi, mais je n'ai pas beaucoup de temps, vous comprendrez. Je vais essayer d'être assez précis dans mes questions, là.

Vous connaissez bien la situation dans certaines communautés du Nord. Nous, les échos au Sud qu'on a, c'est bris de services, manque de personnel, des gens qui ne vont pas se faire soigner parce qu'ils sont trop loin ou parce qu'ils ont peur de ne pas être reçus ou parce qu'ils ont même peur de déranger. On nous a raconté toutes ces histoires-là. Mais moi, je suis loin, là, je suis loin de ces communautés-là. Est-ce qu'il y a quelque chose dans le projet de loi n° 15 ou est-ce qu'on pourrait mettre quelque chose dans le projet de loi n° 15 qui pourrait un peu améliorer la situation qui me semble être encore pire et plus chaotique plus on monte au Nord que ça l'est ici dans le Sud?

M. Vollant (Stanley) : C'est sûr que d'établir... de reconnaître déjà les établissements, de reconnaître le partenariat et de l'améliorer entre les centres des communautés et les centres du réseau provincial, je pense que ça serait déjà un plus. Puis d'inclure tout l'aspect de la sécurisation culturelle comme fondamental dans tous nos actes, nos interventions, je pense que ça faciliterait beaucoup. Je peux vous dire que les gens souvent pour donner l'exemple de ma communauté, Pessamit, il y a des gens qui ne vont pas à l'hôpital de Baie-Comeau parce qu'ils ont peur de se faire juger, de se faire avoir des... du racisme ni plus ni moins, là, de se faire...

M. Vollant (Stanley) : ...traité différemment. Et je pense que c'est important. Ce n'est pas juste à... c'est à Sept-Îles. C'est à Roberval, c'est à Mashteuiatsh, c'est même en Gaspésie. J'en entends parler par des gens des communautés micmaques en Gaspésie. Donc, il y a cette peur là d'aller consulter qui amène plus de complications, plus de délais et ça coûte plus cher pour nos citoyens québécois et canadiens.

M. Marissal : O.K. Et puis dernièrement, là, pour terminer mon intervention, là, c'est le gars du Sud qui vous parle, le gars de Montréal. Avez-vous des recommandations particulières quant à vos gens, les gens des Premières Nations qui sont en ville, qui sont assez nombreux, qui pour certains, semblent être en situation de détresse profonde? On nous dit sur le terrain : Il n'y a pas les ressources ou il n'y en a pas assez. Moi, je n'en sais rien. Qu'est-ce que vous avez à nous dire là-dessus?

M. Vollant (Stanley) : Je pense que ça demanderait une commission parlementaire juste à ce sujet. C'est très complexe, ça ne peut pas se régler en une minute, mais c'est un... je pense que c'est un sujet très, très chaud. À Montréal, à Québec, surtout à Montréal, parce qu'on les voit dans... malheureusement dans la rue. Ils sont pris entre deux... entre l'arbre et l'écorce. Je pense qu'ils ont besoin d'une intervention parce que chacun se... ni le provincial, ni le fédéral, ni les communautés veulent en prendre soin et qu'elles sont comme dans un vide juridique. Et je pense que ça vaudrait la peine qu'on se penche sur la question de façon plus spécifique.

M. Marissal : Je ne peux pas vous promettre une commission parlementaire, mais je peux la demander par contre, parce que je suis d'accord avec vous qu'on a un sacré problème. Je vous remercie de votre temps.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup à vous quatre pour votre participation et c'est grandement apprécié, autant ceux qui sont en présentiel que par visioconférence. Alors, merci beaucoup.

On va suspendre les travaux pour faire place au prochain groupe. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 43)

(Reprise à 17 h 47)

Le Président (M. Provençal) :Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant l'Ordre... des représentants de l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec. Vous disposez de 10 minutes, et, par la suite, nous aurons nos échanges. Je cède la parole à M. Malenfant. À vous.

M. Malenfant (Pierre-Paul) : Bien, merci. Alors, mon nom est Pierre-Paul Malenfant, je suis président de l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec. Je suis accompagné aujourd'hui de Mme Mary-Lyne Roc, travailleuse sociale et directrice des affaires professionnelles, ainsi que de M. Alain Hébert, travailleur social et conseiller principal aux affaires professionnelles.

M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, tout d'abord, au nom de l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, je tiens à remercier la Commission pour cette invitation à se prononcer sur le projet de loi 15. L'Ordre constate que les services sociaux n'ont pas été suffisamment présents dans les débats de la Commission jusqu'à maintenant. Nous estimons donc avoir le devoir de les mettre de l'avant dans les 45 prochaines minutes afin qu'ils soient pleinement considérés dans le projet de loi. L'Ordre a pour mission de soutenir, d'encadrer et de surveiller l'exercice professionnel de ses 15 500 membres. Plus de 12 000 d'entre eux exercent actuellement dans le réseau public comme clinicien, superviseur ou gestionnaire. L'analyse présentée aujourd'hui se fonde sur les données de la recherche, l'avis d'experts, les préoccupations que l'Ordre porte depuis plusieurs années à titre d'organisation, dont la mission première est la protection du public. Cette analyse concorde également avec la réalité vécue par nos membres.

Tout d'abord, nous souhaitons souligner les intentions et objectifs qui ont mené au dépôt de ce projet de loi. Nous y voyons une volonté de la part du gouvernement de répondre à des préoccupations largement exprimées ces dernières années.

• (17 h 50) •

Cela dit, pour l'Ordre, le projet de loi est surtout l'occasion de rétablir l'équilibre entre les deux missions de l'État, celle de la santé et celle des services sociaux qui, au fil des réformes précédentes, s'est érodé. En ce sens, l'Ordre accueille favorablement la création d'une direction multidisciplinaire des services sociaux et d'un conseil multidisciplinaire des services sociaux distinct. Ces ajouts font écho à une recommandation de la Commission Laurent dans son rapport déposé en mai 2021 et à une requête formulée par l'Ordre au cours des dernières années. S'il s'agit d'un premier pas dans la bonne direction, il faut aller plus loin pour rétablir l'équilibre. Il faut aller plus loin pour que les services sociaux puissent se déployer de manière à répondre adéquatement aux besoins des populations de chaque ville, village ou quartier. Le modèle qui intègre des services de santé et les services sociaux est assez unique au Québec. L'Organisation mondiale de la santé estime d'ailleurs que cette façon d'organiser les services publics est à privilégier pour améliorer la santé et le bien-être de la population. Toutefois, pour que cette union atteigne ces objectifs, les deux missions doivent coexister dans une logique qui leur est propre. Et actuellement ce qu'on voit, c'est que les services sociaux sont soumis à une logique médicocentriste qui les dénature et limite leur portée, et le projet de loi 15, qui est devant nous aujourd'hui dans sa forme actuelle, ne nous permet pas de croire que cela changera. La logique médicocentriste appliquée aux services sociaux se traduit concrètement par des programmes spécifiques et spécialisés, calqués sur les services de santé, et pour lesquels l'accès nécessite un diagnostic ou des critères spécifiques.

Or, les services sociaux se doivent d'être d'abord et avant tout généraux. Ils doivent se déployer dans une approche globale. Ils doivent se fonder sur les besoins exprimés par la personne en tenant compte du contexte social et communautaire. Les médias regorgent d'histoires reflétant des problèmes sociaux et nécessitant le recours à des interventions qui devraient être offertes par les services sociaux généraux. Pensons à la crise du logement, à la précarité des conditions de travail dans certains milieux, à l'insécurité financière et alimentaire, au manque de places en CPE, à la violence conjugale ou encore aux transitions de vie. Cette logique médicocentriste se reflète aussi dans les indicateurs de performance utilisés en santé, appliqués par défaut aux services sociaux. Ces indicateurs, qui se concentrent presque exclusivement sur le quantitatif, ne permettent pas de prendre la pleine mesure de la qualité des interventions offertes par les travailleurs sociaux ni du nombre d'interventions réalisées. Ils ne permettent pas non plus de mesurer les impacts et les retombées des services sociaux sur la population.

En fait, le ministère ne sait rien sur les interventions réalisées dans l'environnement de la personne, ce qui est pourtant le propre d'une...

M. Malenfant (Pierre-Paul) : ...intervention sociale, le quotidien des travailleurs sociaux. Comme le bien-être d'une personne repose sur la qualité de ses liens avec son environnement, le travailleur social interviendra aussi auprès des proches, du voisinage, de l'employeur, des organismes communautaires. Et actuellement, tout cela n'est pas pris en compte dans les indicateurs de performance. Le projet de loi 15 est l'occasion de sortir de cette logique et pour y arriver, il faut que les services sociaux soient au même pied d'égalité que la santé. Comment? Tout d'abord en reconnaissant que les nouvelles structures... de gouvernance des services sociaux pour ce qu'ils sont, c'est-à-dire des piliers du réseau.

En omettant des services sociaux dans le nom de Santé Québec, le projet de loi formalise, pour ne pas dire confirme l'inféodation des services sociaux à la santé. La première recommandation de l'Ordre est donc de nommer Santé Québec pour y inclure les services sociaux, et cela vaut également pour les instances régionales. La présence des services sociaux doit aussi d'être renforcée dans toutes les instances gouvernementales. Une direction multidisciplinaire des services sociaux et un conseil multidisciplinaire des services sociaux dans les établissements régionaux ne seront malheureusement pas suffisants.

L'ordre propose donc premièrement une représentation paritaire des services sociaux avec la santé au sein du Conseil interdisciplinaire d'évaluation des trajectoires et de l'organisation clinique des établissements, ainsi que l'inclusion d'office du directeur du personnel multidisciplinaire des services sociaux comme membre du comité exécutif du Conseil. Deuxièmement, un conseil d'administration de Santé et Services sociaux Québec ayant une représentation significative de membres issus du domaine de services sociaux de la population. Troisièmement, une direction propre aux services sociaux à l'intérieur de Santé et Services sociaux Québec avec des pouvoirs et des responsabilités équivalentes à celles prévues pour la santé. Et finalement, l'ajout d'un article au projet de loi mentionnant le caractère spécifique des services sociaux et de leur approche ainsi que le devoir des différentes instances de gouvernance de le respecter.

Parlons maintenant de l'un des objectifs énoncés de la réforme, la proximité. Dans le domaine des services sociaux, quand on parle de proximité, on l'entend à deux niveaux. Il doit se traduire autant dans la gouvernance que dans l'opérationnalisation des services sociaux. En d'autres mots, la gouvernance doit être locale, incarnée dans des établissements autonomes et laisser un pouvoir décisionnel important aux parties prenantes, notamment aux professionnels et aux citoyens. Ces personnes sont les mieux placées pour définir les problèmes et les adapter aux dynamiques et aux contextes locaux.

L'Ordre recommande ainsi d'introduire dans le projet de loi 15 la création d'établissements publics locaux de santé et de services sociaux de première ligne mandatés pour actualiser sur leur territoire la mission des services sociaux locaux. Ces établissements devraient être dotés d'un conseil d'administration faisant une large place aux citoyens ainsi qu'à des représentants des milieux communautaires, scolaires et municipaux, en plus d'inclure des professionnels de la santé et des services sociaux de l'établissement. Leur mandat serait essentiellement d'assurer la planification, l'organisation et la dispensation des services de première ligne. Comme mentionné précédemment, l'organisation des services sociaux doit s'inscrire dans une logique sociale et communautaire plutôt que médicale et hospitalière. Nous croyons que ces établissements autonomes sont la solution pour y arriver. Il va de soi qu'un budget de fonctionnement suffisant devrait leur être accordé.

Permettez-nous également d'attirer votre attention sur la finalité du projet de loi. Évidemment, l'ordre ne remet pas en cause la logique d'efficience. Toutefois, l'efficience en soi ne peut être une finalité. Il s'agit d'un moyen. L'amélioration de la santé et du bien-être de la population québécoise devrait être la finalité. En ce sens, l'ordre propose d'introduire dans les articles 1 à 3 de la Loi sur la santé et les services sociaux, la LSSS... de les inclure dès le début du PL 15. Finalement, pour appuyer le dernier passage de notre intervention, permettez-nous de vous partager les propos d'une gestionnaire travailleuse sociale, des propos tenus dans le cadre d'une recherche en cours et à paraître nommée Fusion, défusion, confusion, la réforme Barrette, cinq ans après, et je cite : "On a donné un mégapouvoir au ministère et il fait descendre ses décisions, mais les gens n'y voient aucun sens parce que ce n'est pas ce dont la population a besoin, mais ils n'ont pas le choix d'appliquer ces directives. La réforme de 2015, c'est la rencontre de deux grands mouvements néfastes pour la santé et le bien...

M. Malenfant (Pierre-Paul) : ...de la population, la technocratisation et la médicalisation. Ce n'est pas contre les médecins personnellement, c'est contre la logique médicale. Il faut changer ça. Nous estimons que des témoignages comme ceux-là, entendus, par exemple, dans le cadre d'une commission spéciale allant à la rencontre des citoyens, des communautés, des professionnels du terrain auraient permis un portrait plus juste de l'ampleur du défi qui est devant vous, devant nous. Ils auraient sûrement permis de trouver des solutions qui font sens pour tous.

Nous vous remercions de votre attention et nous sommes maintenant disponibles pour répondre à vos questions.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup pour votre exposé. Alors, M. le ministre.

M. Dubé : Très bien, M. le Président. Alors, Monsieur Malenfant, et à vos deux collègues, merci beaucoup d'être là aujourd'hui. Votre présentation très appréciée, je pense. Je veux juste peut-être faire une petite genèse, si je peux me permettre, de changements qui ont été faits depuis, entre autres, la commission Laurent, l'ajout, entre autres, de notre directrice nationale et... entre autres pour la protection de la jeunesse, mais qui est aussi maintenant... aux services sociaux. Je pense que ça a été un ajout... Puis vous le reconnaissez, je pense que c'est un grand changement depuis la réforme, pour ne pas nommer celle que vous avez nommée. J'essaie de me tenir loin de ça.

Et deuxièmement je pense que vous reconnaissez... et je l'apprécie parce que vous reconnaissez quand même que dans le p.l. 15, on fait deux éléments très importants pour le côté services sociaux, c'est de la présence du nouveau conseil, qui n'existait pas dans la structure actuelle et qu'on reconnaît qu'il va être un membre important du comité interdisciplinaire. Parce que ça je pense que dans ce qu'on appelle... Lorsqu'on regarde le conseil interdisciplinaire dans le continuum de soins, les services sociaux sont là, ça, je pense qu'on le reconnaît, et avec un directeur dans chacun des... Ça fait qu'au moins je pense qu'on s'entend qu'il y a eu, depuis, je vais dire, deux ans, quand même des changements importants, bon. Je veux dans la genèse... Parce que même si on ne s'entend peut-être pas sur le titre de Santé Québec qui ne reconnaît pas... Je pense que... On va être clair que le ministère, c'est encore le ministère de la Santé et des Services sociaux. Je fais juste cet éditorial-là en passant.

• (18 heures) •

Mais ce que j'aimerais aussi vous dire, où je suis très, très sensible, comme on l'a entendu... parce que je l'ai dit, que le projet de loi, il était perfectible ou qu'on pouvait le... Si à la lumière de tout ce qui a été écrit, qui dit qu'il y a des articles de loi qui devraient préciser l'importance, comme vous parliez tantôt, de l'article deux ou l'article trois de l'aspect des services sociaux, je vais être le premier à vouloir le reconnaître. Je veux juste qu'on se comprenne bien que, lorsque... puis je donnerai l'occasion aux oppositions de poser leurs questions, mais ils n'avaient nullement l'intention de diminuer le rôle des services sociaux, surtout avec ce que je viens de vous dire qu'on a fait depuis deux ans, de la sous-ministre, mais aussi du directeur national, bon.

Je veux aussi que les Québécois comprennent la notion de qu'est-ce qu'on veut dire par services intégrés, parce que... puis là je vous demanderais de réagir. Je me souviens très bien, quand je suis parti avec Mme Savoie, notre sous-ministre, l'été dernier, avant qu'on finalise notre recommandation sur le projet de loi et notre engagement électoral... on est allés au Danemark. Les gens nous ont dit là-bas : S'il y a une chose que vous devez protéger, c'est l'intégration du médical et du travail social. Le fait qu'un CISSS ou un CIUSSS ou... on va l'appeler un établissement... J'hais ce mot-là, établissement, parce que personne ne sait c'est quoi un établissement. Bien, un établissement, ils ont dit : Il y a une chose qui ne doit pas changer, c'est que ça doit combiner le service au complet, non seulement clinique, mais services sociaux. Et ça, quand les gens de l'extérieur nous disent que c'est une des grandes avancées qui a été faite... et c'est pour ça que ça s'appelle des CISSS parce que c'est un centre intégré de santé et de services sociaux. Moi, je vous dis aujourd'hui, pour vous rassurer, puis s'il faut le mettre à quelque part dans quelques articles, on ne veut justement pas se distancer de ça, des... Et c'est pour ça d'ailleurs que notre gouvernement a reconnu l'importance d'avoir un ministre responsable des services sociaux qui est mon collègue le ministre Carmant. Ça fait que je veux juste bien vous rassurer. Et si on a besoin de mettre certains articles pour vous rassurer que notre objectif, c'est d'avoir les services sociaux...


 
 

18 h (version non révisée)

M. Dubé : ...à la bonne hauteur, bien, je pense qu'on a fait des améliorations dans le projet de loi, ça fait que je voulais vous dire ça. Il y a une chose qui me surprend un petit peu, puis après ça, je pourrais passer la... les questions à mes collègues, c'est au niveau des indicateurs, puis je reconnais qu'il faut faire attention aujourd'hui de faire un projet de loi où on va mettre les grands principes, mais d'avoir des règlements ou d'avoir des objectifs, d'avoir peut-être des indicateurs, mais je suis pas sûr que les indicateurs vont dans un projet de loi parce que si... et c'est pour ça que je voudrais vous entendre, vous les voyez où ces indicateurs-là qu'on pourrait... parce que mon collègue, je le nomme, là, le ministre Carmant est en train d'évoluer dans ses indicateurs, mais parlez-moi un peu de ce que vous recherchez, mais je vous soumettrais humblement que je ne suis pas sûr qu'on veut rentrer des indicateurs dans un projet de loi, mais je veux vous entendre là-dessus.

M. Malenfant (Pierre-Paul) : Oui, vous avez parfaitement raison, M. le ministre, là, à savoir que ce n'est pas dans un projet de loi qu'on doit mettre des indicateurs. Maintenant, l'essentiel de notre message, c'est à l'effet qu'au fil des années... Vous savez, M. le ministre, là, moi, là, je suis un vieux routier du réseau, hein, 1980, j'en ai vu des réformes, et à l'époque, là, de 1971 à 1985, ça s'appelait le ministère des Affaires sociales dans lequel il y avait la Santé. Au fil du temps, on a dit : Bien oui, il faut, hein, c'est... les deux piliers, il faut les mettre, alors on a mis santé et services sociaux. Correct. Mais au fil du temps, il y a eu une érosion sans arrêt des services sociaux, au point où maintenant on vous appelle le ministre de la Santé, puis qu'on appelle le réseau de la santé, puis les établissements de la santé, puis toutes sortes de choses de la santé. Et je dirais : Bien, et oui, mais, et les services sociaux? Alors, la question des indicateurs ne doit pas être prise à part. Lorsqu'on a un réseau qui transcende une place fondamentale pour les services sociaux, les indicateurs vont venir à un moment donné, mais quand vous avez un réseau qui est bâti autour d'un modèle médical, bien, nécessairement, calculer le nombre de prothèses de hanche puis le nombre d'interventions médicales comparativement avec l'intervention sociale, c'est différent. Je vais vous donner un exemple, M. le ministre, très simple, un travailleur social qui, aujourd'hui, là, aujourd'hui même, là, a fait six entrevues durant sa journée, là, selon les paramètres des indicateurs de gestion, c'est un très bon travailleur social. Celui qui a fait trois entrevues, mais qui a travaillé en réseau, qui a contacté l'école, qui a rencontré le conjoint, qui a rencontré peut-être le milieu de garderie, etc., qui a travaillé en réseau, qui a fait un excellent travail pour régler les problèmes avec les partenaires dans la communauté autour, fait un excellent travail, mais les données qui sont fournies dans le système, c'est le nombre, à un moment donné. Alors, c'est dans ce sens-là qu'on dit qu'il faut changer cette culture-là de données qui est basée beaucoup sur des modèles médicaux plutôt que sur les services sociaux.

M. Dubé : Des modèles médicaux. D'ailleurs, on en parle beaucoup justement avec la sous-ministre parce que lorsqu'on bâtit avec le Dr Carmant, bien, le... on pense qu'on doit se sortir de l'environnement médical, vous avez absolument raison, mais je pense que ça peut se faire à l'intérieur du ministère, c'est ça que vous dites, mais qu'il doit y avoir des indicateurs très différents, là, je voulais juste qu'on se comprenne, mais on n'ira pas jusqu'à définir ça dans le projet. Je ne voudrais pas que vous soyez déçu, là, si on finit nos 1 180 articles et les amendements, mais c'est important que vous mentionniez qu'on ne traitera pas au niveau clinique ou médical de la même façon qu'on va régler les services sociaux, c'est ça. Est-ce que vous voulez intervenir?

M. Hébert (Alain) : Oui. Bien, peut-être, en fait, pour répondre, on est bien conscient, M. le ministre, qu'effectivement on ne peut pas aller dans un niveau, tu sais, de détail dans un projet de loi, ça ne ferait pas de sens, on est tout à fait en accord avec ça. Peut-être la recommandation qu'on fait nous dans notre mémoire à la page 12, c'est peut-être d'insérer un article dans le projet de loi qui demande de reconnaître la spécificité des services sociaux et des découlant. Donc, quelque chose qui met l'emphase, qui permet d'avoir un ancrage dans le projet de loi pour dire : Bien, il y aura un certain nombre d'éléments différents distinctifs pour les services sociaux et le principe serait inscrit dans la loi, sans nécessairement le détail.

M. Dubé : Bien, écoutez, moi, je... Encore une fois, on est à l'écoute aujourd'hui, ce n'est pas de dire oui ou non, mais il y a quelqu'un qui m'a... une de nos députées, là, je ne la nommerai pas parce que je voudrais lui donner l'autorité ou la, je dirais, la paternité ou la maternité, je devrais dire, sur sa suggestion, mais elle a dit, elle se retrouve, elle, dans un comté où il n'y a pas de CLSC, il n'y a pas d'hôpital, il n'y a pas de GMF, puis ce qu'elle a besoin, c'est des travailleurs sociaux...

M. Dubé : Alors, moi, la notion de territoire que vous avez entendue de plusieurs personnes, je pense que c'est intéressant de... Puis je veux vous entendre là-dessus. Comment on peut appliquer cette notion-là de services sociaux à la notion de territoire? Vous avez entendu, on a eu plusieurs personnes qui sont venues, on devrait-tu se baser sur les CLSC, sur les MRC? Je veux vous entendre parce que ça m'a frappé quand j'ai entendu ça, de dire, bien, mon Dieu! On pense souvent à l'hôpital ou on pense aux GMF, mais on pense peut-être moins aux services sociaux. Qu'est-ce que vous pensez de ça?

M. Malenfant (Pierre-Paul) : Écoutez, j'étais sur la route aujourd'hui en me rendant à Québec enfin, puis j'ai été surpris de constater qu'à certains endroits, il y avait sur le bord de la route : CLSC avec une flèche. Les CLSC font partie de l'ADN des Québécois depuis 1971 enfin. Les territoires de CLSC sont bâtis en fonction des territoires de MRC qui est une structure administrative reconnue puis qui est très présente puis qui fonctionne très bien. Et dans les villes, bien, c'est dans les quartiers. Qui, ici, ne connaît pas le nom de son CLSC? Qui n'a jamais consulté à un moment donné un CLSC? Alors, ce qu'on constate, c'est que ça nous prend effectivement une instance locale pour travailler en réseau local de services avec les partenaires.

Alors, pour nous, on a tendance à appeler ça bien des CLSC 2.0, de dire : Mettons-les au goût du jour. Parce que, vous savez, avec le temps, les CLSC ont eu tendance à être de moins en moins présents. Puis je vais vous donner un exemple très concret, M. Dubé. Moi, j'ai produit ces fiches d'information-là psychosociale, en 2013, lorsqu'il y a eu la tragédie de Lac-Mégantic. J'étais à ce moment-là conseiller et formateur national au volet psychosocial pour le ministère. J'ai produit six fiches. Ici, là, vous avez Un sinistre est arrivé. D'autres, c'est Mon enfant a été confronté à un événement traumatique, bon, etc., des fiches d'information psychosociale. Depuis un certain temps, à la dernière page, à la dernière page, vous avez besoin d'aide. Voici des ressources. À l'époque, CLSC, aujourd'hui GMF. Allez-vous me dire que la tragédie à Laval, que la tragédie à Amqui ou que les inondations qu'ils ont dans Charlevoix actuellement que les gens qui ont été évacués se sont retrouvés avec peu de choses avec eux autres sont allés cogner à la porte du GMF? Selon ce qu'on leur distribue, c'est ce qu'on leur dit, alors qu'il y a des CLSC. Les équipes psychosociales sont dans les CLSC. Pourquoi on ne le reconnaît pas dans les documents officiels du ministère?

M. Dubé : Écoutez, vous n'êtes pas les premiers à faire ce commentaire-là, puis c'est pour ça que je vous soulève cette notion-là de territoire. Là, je faisais la... Vous avez entendu les commentaires qu'on a eus de groupes qui ont précédé. M. Clair est arrivé au début en parlant d'une reddition de comptes qui devrait peut-être se faire par territoire. Après ça, on a eu les médecins pour la décentralisation qui ont fait la même chose. Tout à l'heure, je ne suis jamais capable de le prononcer, le RQIIAC, qui est le regroupement des... qui s'occupe des organismes communautaires. Vous dites un peu la même chose. C'est pour ça que je voulais vous entendre parce que si la façon de redonner les lettres de noblesse aux CLSC, c'est de revenir à cette notion de territoire là, bien, je pense qu'il va falloir en tenir compte dans la façon dont... Puis, je pense, les gens vont... Mais ça, vous êtes non seulement à l'aise avec ça, mais c'est ça que vous demandez dans vos recommandations.

M. Malenfant (Pierre-Paul) : Je laisserais peut être de ma collègue, Mme Roc, M. le Président.

Mme Roc (Marie-Lyne) : Bien, en fait, les services sociaux, un de leurs caractères qui est extrêmement important, c'est qu'ils permettent aussi de rétablir le filet social dans une communauté avec les liens qu'ils construisent justement entre les différentes partenaires. Donc, c'est à ça que ça doit servir, les services sociaux. Ça doit être une porte d'entrée accessible, facile puis aussi que les gens se connaissent sur le territoire. Ils sont capables aussi de répondre aux besoins de la communauté. Donc, c'est pour ça qu'on leur donne ce caractère-là qui doit être extrêmement important pour que finalement ça produise des communautés qui sont bien, qui sont en... qui... qui... qui développent des communautés fortes, engagées. C'est justement par ce type de service là.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. Vous allez m'excuser. Il y a un vote qui est demandé au salon bleu, donc on va suspendre pour aller voter. Alors, suspension des travaux s'il vous plaît... que je ne gère pas.

(Suspension de la séance à 18 h 11)

(Reprise à 18 h 27)

Le Président (M. Provençal) :Alors, nous allons reprendre nos travaux. Mais avant de poursuivre là où nous étions, nous... j'ai besoin de votre consentement pour ajouter un 15 minutes additionnel aux cinq minutes que nous avions. Parce qu'il faut quand même... il faudrait quand même respecter le temps du prochain... du dernier groupe. Consentement? Merci. Alors, M. le ministre, il vous restait deux minutes 27.

M. Dubé : Bien, écoutez, je pense que le commentaire que je ferais, c'est la continuité du CLSC. Je trouve ça tellement important ce que vous avez mentionné, puis... en tout cas, c'est sûr qu'on va en tenir compte. Mais qu'est-ce qui est le plus important pour vous? Parce qu'une des choses que j'ai entendues récemment, c'est qu'entre autres, les CLSC n'ont plus les ouvertures de fin de semaine, pour la plupart. Puis j'essaie de voir le... comment je dirais, de... le levier qu'on doit avoir sur ça. Puis quand je dis... ce n'est pas coercitif, ce que je dis là, mais on a déjà une certaine difficulté à avoir, par exemple, des heures d'ouverture pour nos GMF, des fois le week-end, tout ça. Comment vous voyez ça dans les CLSC, vous qui connaissez le réseau depuis longtemps? Étant donné l'importance, entre autres, des travailleurs sociaux d'être là, pas juste cinq jours semaine, mais des fois... Comment vous voyez ça? Parce que, surtout avec ce qu'on a connu dans la pandémie, les gens, leurs problèmes, ils n'arrêtent pas le vendredi à 5 h. Alors, si vous pensez que les CLSC font partie de la solution, vous avez utilisé le CLSC 2.0, j'aimerais ça vous entendre un peu là-dessus, là.

M. Malenfant (Pierre-Paul) : Oui, c'était très important de d'abord préciser qu'il y a des travailleurs sociaux, des travailleuses sociales dans tous les programmes du réseau, hein, il y en a qui sont à l'urgence, il y en a qui vont travailler en psychiatrie, etc. Concernant les CLSC, on a déjà des travailleurs sociaux qui font de la garde 24-7. On a déjà des travailleurs sociaux qui... des travailleuses sociales aussi qui sont à info sociale, là, 8-1-1, option deux, donc...

M. Dubé : ...il y a un beau succès jusqu'à maintenant.

M. Malenfant (Pierre-Paul) : Exactement. Et moi, là, M. le ministre, je pense que si on donne des responsabilités locales, terrain, où on a une emprise... Écoutez, moi, dans ma vie, au CLSC, là, une fois par semaine, on s'assoyait, les médecins, les travailleurs sociaux, les psychoéducateurs, les psychologues, les infirmières, les hygiénistes dentaires, les organisateurs communautaires, on s'assoyait ensemble le mercredi matin, puis on faisait le point, on est rendu où, c'est quoi les problèmes qu'on rencontre, qu'est-ce qui est nouveau, comment on s'occupe de telle affaire, comment ça se passe dans tel secteur, comment ça se passe dans tel secteur. Donc une espèce en anglais d'empowerment des professionnels en sachant qu'on est rattachés à la communauté, aux organismes...

M. Dubé : On revient aux territoires...

• (18 h 30) •

M. Malenfant (Pierre-Paul) : Quand vous allez pouvoir créer cette... cette dynamique-là, vous allez créer de l'engouement, O.K., et les gens vont être dédiés. Actuellement, moi, je suis un vieux routier, je me répète, mais dans le temps, nous autres, on voulait rentrer et travailler dans le réseau de la santé, puis il n'y avait pas de place. Aujourd'hui, le monde quitte le réseau de la santé, alors c'est un symptôme. Donc, faire en sorte que les gens puissent revenir...

M. Dubé : Mais vous avez dit... C'est tout?

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup. M. le Député de Pontiac.

M. Fortin :Merci. Merci, M. le Président. Bonjour, bonjour à vous trois. Merci. Merci de votre patience, tout d'abord, du petit contretemps, on s'en excuse. J'étais content de vous entendre, M. Malenfant, revenir sur ne serait-ce que, ne serait-ce que l'appellation de cette nouvelle itération, là, des CISSS et des CIUSSS, là, des... cette espèce de... On est passés des CSSS où il y avait services sociaux, aux CISSS et CIUSSS où il y avait encore services sociaux dans le nom. Maintenant, à Santé Québec, Capitale-Nationale, l'Outaouais, Abitibi, Laval, etc...


 
 

18 h 30 (version non révisée)

M. Fortin :...On perd cette appellation-là. Et c'est vrai, je pense, en nommant l'historique comme vous l'avez fait tantôt, là, en parlant du ministère des Affaires sociales, si je ne m'abuse, ça nous donne un portrait, même si c'est peut-être à certains moments involontaires, ça donne un portrait quand même de la réflexion qu'on a puis de la place qu'on accorde aux services sociaux. Et je trouvais ça désolant d'entendre M. le ministre d'entrée de jeu dire que, bien, là-dessus, on va peut-être avoir une vision différente, là. Je... Mais, pour vous, l'appellation comme telle, il y a une importance à ça?

M. Malenfant (Pierre-Paul) : Écoutez, c'est fondamental, il faut appeler un chat un chat. Quand on parle du réseau de la santé et des services sociaux au Québec, il faut être clairs : si l'appellation ne rencontre plus le terme «services sociaux», avec le temps, ce qui va apparaître dans l'histoire, c'est qu'un jour il y a un gouvernement qui a décidé de tasser les services sociaux, même dans le titre, et de voir l'érosion des services sociaux qu'on connaît depuis les 30 dernières années, où tout a tourné autour de l'hôpital, du médicocentral, médicocentrisme, et tout ça. De voir ça, pour nous, c'est absolument important. On ne peut pas parler juste du contenu sans parler de la forme. Alors, d'avoir... moi, je vois très bien «Santé et Services sociaux Bas-Saint-Laurent», «Santé et Services sociaux Estrie», ce n'est pas plus long que «Centre intégré de santé et de services sociaux de», à un moment donné.

Et ça donnerait, je dirais, une image qui... Comme quoi que le gouvernement prend en compte cette dimension-là, qui... qu'on ne voit pas. Vous êtes... Le ministre mentionne qu'il est allé au Danemark, mais vous allez ailleurs dans les provinces, vous allez aux États-Unis, là, c'est très, très séparé. On a ce modèle-là au Québec, l'OMS, les recherches le démontrent, c'est la meilleure façon de le faire, alors mettons aussi le nom autour de tout ça.

M. Fortin :Bien, vous avez raison, ce n'est pas bien... En fait, ce n'est pas juste que ce n'est pas plus long, c'est plus court, là. On enlève le «centre intégré universitaire», il resterait juste «santé et services sociaux». Moi, je ne la comprends pas, celle-là, à moins que ça vienne d'un «focus group». Peut-être que M. le ministre pourra nous le dire éventuellement, c'est peut-être ça qui s'est passé. J'ai comme cette impression-là, mais, bon, ça, ça leur appartient.

Mais là, rentrons dans le contenu, là, parce que, ce que vous demandez, c'est qu'il y a environ... Il y a la moitié des... disons, des instances, là, ou des décideurs à l'intérieur de Santé Québec qui viennent du monde des services sociaux. Là, ce que vous voyez dans le texte actuel, là, le texte présent du projet de loi, c'est qu'il manque beaucoup de gens au niveau des services sociaux. Puis qu'est-ce que... C'est quoi l'impact de ce que vous voyez en ce moment, là, si c'est adopté tel quel, sur le monde des services sociaux?

Mme Roc (Marie-Lyne) : Bien, en fait, c'est que c'est un déséquilibre. Parce que, nous, on vous parle de deux logiques qui peuvent très bien cohabiter, mais elles doivent coexister. Alors, ce qu'on vous demande, nous, c'est... Ce qu'on plaide, c'est qu'en fait c'est qu'il faut que cet équilibre-là soit présent. Étant donné que c'est deux logiques qui se... qui sont spécifiques, bien, en fin de compte, quand il y a une seule voie avec une voie majoritaire, c'est... puis c'est une autre logique complète, la question des services sociaux, et à ce moment-là, bien, on finit par ne plus entendre la voix qui est minoritaire. Donc nous, ce qu'on dit, c'est : rétablissons l'équilibre, c'est ce qui va assurer, justement, le fait que ce mariage-là soit viable, santé et services sociaux.

M. Fortin :Très bien. Je saute à votre conclusion. Dans votre conclusion, là, vous dites : «l'ordre constate que le projet de loi propose un modèle de gouvernance qui, malheureusement, ne correspond pas au modèle de gestion du réseau décentralisé et démocratique qui donnerait de la valeur aux services sociaux.» Ça, on l'a entendu puis on en parlait un petit peu plus tôt, là, de plusieurs groupes qui disent : bien, il y a les mots-clés, là, qu'on met sur la place publique, «décentralisation», puis tous ces trucs-là, mais, quand on regarde le détail du projet de loi, ce n'est pas nécessairement ça qu'on voit dans le projet de loi comme tel. J'aimerais ça juste comprendre, là, ce que vous dites quand vous dites : ce n'est pas un modèle qui est décentralisé, ce qui est proposé là.

M. Hébert (Alain) : Bien, en fait, ce qu'on reconnaît dès le début de notre mémoire, c'est qu'il transparaît dans le projet de loi des intentions de décentralisation, de participation des citoyens, de participation des usagers. Il y a quand même des principes affirmés en termes de gestion de proximité. On reconnaît, on le voit. Ce que, nous, on tente d'éclairer... En fait, d'apporter comme éclairage, c'est que, tel que présenté, si on ne retrouve pas la création d'une instance locale, un établissement, en fait, de services de santé et sociaux de première ligne sur la...

M. Hébert (Alain) : ...base de territoires locaux où il y a des communautés vécues, des dynamiques territoriales que les gens connaissent, c'est qu'on n'aura pas véritablement, à ce moment-là, une proximité tant au niveau de la gouvernance que de l'opérationnalisation des services sociaux. Alors, c'est pour ça que, dans le fond, on se contente de mettre en lumière, c'est que l'angle mort ou le grand absent, c'est cette instance locale, qu'on recommande de santé et services sociaux de première ligne dotée de façon autonome, là, tu sais, un... On parle, là... puis, effectivement, des fois, en termes de vocabulaire, ce n'est pas toujours simple de se retrouver, établissement, instance, unité administrative, là, on parle vraiment, pour nous, d'établissements locaux, c'est-à-dire d'établissements au sens de structures administratives autonomes, donc avec un conseil d'administration sur lequel on retrouve, donc, des élus provenant de différents secteurs, de la communauté, du milieu municipal, du milieu scolaire, du milieu communautaire, de la population, des usagers, qui assurent la gouverne de cet établissement-là, qui, recevant un budget de fonctionnement, pourrait voir à adapter les services de première ligne, particulièrement les services sociaux, aux besoins de la communauté.

Ça n'empêche pas, bien sûr, d'avoir des orientations ministérielles, ça n'empêche pas d'être nourri par la recherche par les instituts universitaires, mais l'adaptation des services au plan local, c'est sur un territoire particulier que ça peut se faire, et avec aussi la contribution des professionnels qui sont impliqués, et en particulier pour les professionnels des services sociaux. Au niveau des travailleurs sociaux, ce sont des professionnels qui ont une autonomie, des connaissances, un jugement, une autonomie professionnelle, un désir de contribuer, un engagement dans leur milieu de vie et ils peuvent être des ressources pertinentes, importantes en collaboration avec les autres acteurs, les autres professionnels, le secteur de la santé pour donner des meilleurs services, des services plus efficaces, plus adaptés à la communauté puis qui vont mieux contribuer au bien-être aussi des personnes, et des groupes, et des communautés locales présents sur le territoire.

Alors, c'est dans ce sens-là, pour nous, que c'est le point. Ce qu'on dit, c'est qu'il faut aller plus loin. Il y a... On voit la perspective et la volonté de décentraliser. Si on... Pour vraiment que ça puisse s'incarner et se faire, on pense, nous, que c'est cet établissement local qu'ici qu'est le chaînon manquant actuellement. Et c'est pour ça qu'on le propose et qu'on souhaite attirer l'attention et un éclairage là-dessus.

M. Fortin :Mais vous n'y faites pas directement référence, mais la question dans... à moins que je l'ai manquée, là, dans votre mémoire, mais la question des conseils d'administration régionaux qui sont en place, en ce moment, avec les CISSS et les CIUSSS, qui, justement, sont des gens issus d'un peu tous les milieux, les différentes MRC, des gens avec différentes expériences professionnelles, qui sont un peu ce... bien, qui sont le conseil d'administration du CISSS et du CIUSSS. Là, ça devient des conseils ou des comités d'établissement, j'oublie le terme exact, avec, si je me fie à ce que le ministre avance, des... un mandat de reddition de comptes et de mesure de performance. Là, on est loin de deux instances similaires, là. Je comprends que ce n'est pas dans votre mémoire, mais le conseil d'administration a pas mal plus, appelons ça d'une... locale puis de compréhension puis d'impact venant du milieu local qu'un conseil d'établissement qui pourrait avoir juste une reddition de comptes à faire.

• (18 h 40) •

M. Malenfant (Pierre-Paul) : Oui, effectivement. Puis, vous savez, imaginons-nous, là, si on est au Bas-Saint-Laurent. C'est ma région. Le siège social est à Rimouski. Est-ce que les gestionnaires qui sont à Rimouski, là, savent les particularités de ce qui se passe au CLSC de Pohénégamook, qui est à 175 kilomètres? Est-ce que le siège social de Baie-Comeau sait très bien ce qui se passe à Havre-Saint-Pierre. Alors, cette notion-là de régionale est beaucoup trop grande quand on regarde notre territoire. Alors, il existe, par territoire de MRC, déjà des CLSC qui sont là. Donc, ramenons tout ça sur une base locale, et on va sentir la population, les partenaires autour vouloir intégrer le processus, et de pouvoir offrir des services qui vont être à la lumière des besoins de la population.

M. Fortin :Très bien. Mais moi, je vous remercie, c'est tout pour moi. Juste une invitation au ministre, quand vous serez en Outaouais, on ira voir le CLSC chez nous, là, le CLSC LeGuerrier, mais il faut que vous arriviez à 6 heures du matin pour parler à tout le monde qui attend dehors devant la porte du CLSC pendant 1 heure afin d'avoir des services. Ces gens-là, ils tiennent à leur CLSC local. Voilà.

Le Président (M. Provençal) :Mme la députée.

Mme Setlakwe : ...

Le Président (M. Provençal) :Oui, deux minutes 20 s.

Mme Setlakwe : Merci beaucoup. Votre mémoire, franchement, il est très bien monté, puis vous êtes très éloquent dans vos propos. Est-ce qu'il y a un point sur lequel vous n'avez pas eu la chance de faire valoir ou d'aller... d'approfondir un peu? Moi, je regarde en particulier le point 18, là, quand vous parlez d'une politique ministérielle qui devrait être adoptée en vertu de l'article 25. Est-ce que vous souhaitez élaborer là-dessus, peut-être? Ou autre chose? Je... Puis d'ailleurs, moi, j'ai été très interpellée par...

Mme Setlakwe : ...les exemples précis que vous avez donnés, en termes d'indicateurs. En quoi les indicateurs de performance qui sont liés à la quantité ne représentent pas bien la valeur ajoutée du travail qui est fait en service social? Donc, c'est ces deux éléments là que je...

Mme Roc (Marie-Lyne) : Bien, en fait, la politique, c'est aussi un petit peu ce qu'on a avancé en termes de la finalité. En fait, dans quel but on fait tout ça, c'est pour avoir des orientations, en fait, communes, et aussi, qui sont des orientations qui ne sont pas émises seulement par le ministère, mais, en fait, qui mettent en travail les parties prenantes. Donc, ça devient une politique, puis il faut aller plus loin, parce qu'actuellement on parle d'une politique en santé. Nous, on parle d'une politique santé-bien-être, donc qui, aussi, prend en compte les éléments sociaux. Et puis que cette politique-là soit, finalement, travaillée avec les parties prenantes, puis aussi que ça nous serve de trame pour, justement... en termes de trame, de finalité. En fait, c'est la vision qu'on a sur le pourquoi on fait les choses.

Mme Setlakwe : Merci. Est-ce que... moi... vous avez d'autres exemples à donner sur... à part les indicateurs de performance? J'aimerais ça vous entendre. Mais je reviendrais sur la question de l'appellation, sur l'appellation.

Le Président (M. Provençal) :30 secondes, s'il vous plaît.

Mme Setlakwe : Oui. Moi, sur le coup, je me suis dit, c'est peut-être juste de la sémantique, puis ça allège, mais là, à vous entendre, je vois que ce n'est pas ça du tout, là. Vous m'avez convaincue.

Mme Roc (Marie-Lyne) : ...la cohérence, c'est une cohérence de services sociaux. C'est pour ça qu'on vous parle de leviers de prises. Nous, on a vu des prises dans le projet de loi, et c'est ce qu'on vous propose, pour faire en sorte qu'on rétablisse ce fameux équilibre dont on parle. Donc, on le voit au niveau de la gouvernance, au niveau des finalités, au niveau aussi des indicateurs de performance, tous des éléments qui prennent en compte le spécifique des services sociaux puis, vraiment, leur mission.

Le Président (M. Provençal) :...M. le député de Rosemont.

M. Marissal : Merci, M. le Président. Bonsoir, merci d'être là, désolé, aussi, pour le petit délai de tout à l'heure. Vous aviez raison de dire, tout à l'heure, qu'on est attachés à nos CLSC. J'aurais envie de vous dire : On est attachés à ce qu'il en reste, parfois, qu'on connaît le nom. Dans mon cas, ce n'est pas compliqué, c'est le CLSC de Rosemont, ça fait que c'est assez simple à retenir, en plus. Mais je dis «ce qu'il en reste», mais il en reste, dans certains endroits, quand même beaucoup.

Puis vous avez raison d'insister sur les services sociaux. Moi, j'ai vu, encore récemment, à Rosemont, une équipe de TS, permettez que je vous appelle ainsi. Je sais qu'on ne parle pas assez souvent de vous et puis je m'en excuse. C'est parce que c'est vrai qu'on ne parle jamais des TS, mais moi, j'en parle, à l'occasion, quand je peux. Puis j'ai vu un programme, notamment, d'aide psychologique, en groupe, à des hommes qui auraient des tendances ou des tentations violentes, et Dieu sait qu'on en a, des problèmes de violence chez les hommes au Québec, et en Amérique du Nord, en particulier. Et je l'ai vu de première main, ce qui se fait là. Et ce n'est pas publicisé, ce n'est pas glamour, il n'y a pas des millions là-dedans. C'est assez petit, c'est local, puis ça dit ce que ça dit. Puis il manque de places, il manque déjà de places. Alors, au moins, il y a ça, puis il reste ça.

Vous avez peut-être vu récemment, aussi, que j'avais déposé, avec mon parti politique, une motion, ici, pour maintenir la mission des CLSC. Le gouvernement m'a fait l'agréable surprise de voter avec nous là-dessus, puis je n'ai aucune raison de douter de la bonne foi, là... Et on a même accepté, du côté gouvernemental, de maintenir le libellé tel que je l'avais formulé, avec l'intégral de la mission, l'intégralité de la mission des CLSC. Très bien. Moi, j'en prendrais plus, des CLSC. Puis, je finis mon éditorial ici, je suis content de vous entendre dire ça, parce que moi, quand je défends les CLSC, j'ai, parfois, un peu peur d'être un peu ringard, tu sais. On dirait : Regarde le bonhomme avec les cheveux blancs qui parle des CLSC, les nostalgiques des années 70. Bien, non, parce que, de un, je ne suis pas si vieux que ça, puis, de deux, c'est important, les CLSC. Puis vous avez raison de dire que ce sont des services, absolument, de proximité extraordinaires, qui font une différence tous les jours.

Alors, sur ce long préambule, puis vous me le pardonnerez, mais il fallait que je le dise : Il vous manque combien de monde, en ce moment, dans le réseau, juste chez les TS?

M. Malenfant (Pierre-Paul) : On nous dit qu'il manque environ 1 500 postes, qu'il y aurait 1 500 postes de TS dans...

M. Malenfant (Pierre-Paul) : ...Le réseau qui serait disponible. Je vous ferais remarquer qu'il rentre 900 étudiants par année dans les programmes, dans les universités, il en sort 800 par année. Savez-vous combien de demandes?, 5 000. Ça veut dire, c'est plein de jeunes, c'est plein de personnes qui retournent à l'école, qui veulent faire du travail social.

Donc, moi, en 2019, j'avais eu une rencontre avec le ministère à cette époque-là, qui nous disait : les travailleurs sociaux, c'est en équilibre dans le réseau. Est-ce que c'est en équilibre en fonction du budget ou en fonction des besoins?, on n'a pas répondu.

Mais je profiterais de l'occasion, M. le député, pour parler de la question de l'autonomie professionnelle. Vous parlez des groupes d'aide pour les hommes violents. Moi, j'ai mis sur pied il y a 40 ans un groupe dans ma région qui existe encore. Et, à cette époque-là, comme travailleur social qui faisait du travail clinique observant ces besoins-là, j'ai parlé dans ma réunion de CLSC, de dire : Je rencontre beaucoup de femmes qui ont... victimes de violence conjugale, les hommes, à un moment donné, il n'y a pas de service, il me semble qu'on aurait besoin, dans la région... Oui, ça serait pas pire, documentons ça, regardons ça. Et à un moment donné : go! J'y vais. Pas demander à mon patron ou au ministère : est-ce qu'on peut mettre sur pied un programme à un moment donné?

Le travail social, c'est connecté sur la réalité du monde et ça répond en fonction des besoins qui sont exprimés, des besoins qui sont observés. Et, ça, on a perdu ça. Nos membres nous le disent, on a des «case loads», tu as tant d'entrevues à faire, pas plus longtemps que 10 rencontres, après ça, passe, «next». On a du monde qui attendent partout. Tu n'as plus d'autonomie professionnelle à un moment donné.

M. Marissal : ...une détérioration accélérée ou accrue avec le projet de loi n° 15?

Le Président (M. Provençal) :malheureusement, M. le député, malheureusement, le temps est vraiment terminé. Je tiens à vous remercier de votre patience. On s'excuse encore pour le contretemps, ce n'était vraiment pas voulu.

Sur ce, nous allons suspendre les travaux pour laisser place au dernier groupe. Merci.

(Suspension de la séance à 18 h 48)

(Reprise à 18 h 50)

Le Président (M. Provençal) :Nous terminons notre journée de travail en recevant les représentants de l'Association du personnel d'encadrement du réseau de la santé et des services sociaux. Alors, vous aurez 10 minutes pour faire votre présentation. Par la suite, nous ferons nos échanges. Je vous cède immédiatement la parole. Et je tiens encore à m'excuser du délai, pour vous avoir fait attendre. Merci.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :...M. le Président. Alors, M. le Président, M. le ministre, membres de la Commission, j'aimerais tout d'abord vous présenter Monsieur Christian Samoisette, Président de notre Association et responsable des mesures d'urgence et sécurité civile au CIUSSS du Centre-Ouest-de-l'Île-de-Montréal, il a donc été sur le terrain dans le feu de l'action tout au long de la pandémie, Michelle Bourget, conseillère aux relations de travail à l'APER, et moi-même, maître Anne-Marie Chiquette, directrice générale par intérim. Nous voudrions vous remercier de l'occasion qui nous est donnée de venir vous exposer notre réflexion sur le projet de loi 15. Nous...

Mme Chiquette (Anne-Marie) :...nous voulons aussi profiter de l'occasion pour remercier publiquement les cadres du réseau de la santé et des services sociaux pour leur implication extraordinaire dans la gestion de la pandémie et de la vaccination.

L'APER est une association qui représente des cadres du réseau de la santé et des services sociaux depuis 50 ans. Nous sommes multiculturels, bilingues et sensibles aux demandes des membres des Premières Nations, des Cris et des Innus. Nous avons aussi des membres qui sont cadres en santé et services sociaux au Nouveau-Brunswick. Nos membres sont clairement en accord avec les objectifs de PL 15 que sont l'efficacité, l'accessibilité, la coordination et la gestion de proximité incluant, et surtout, le principe de subsidiarité.

Par contre, il est important, dans toute réforme, de regarder le passé pour éviter les erreurs. À cet égard, je vous citerais un article de 1988 sur le système de santé québécois dans l'International Review of Community Development qui citait : «...les grands paramètres du système socio-sanitaire québécois sont : un rapport de consommation providentialiste fondé sur la consommation individuelle et passive... des contrats de travail où les médecins sont des entrepreneurs privés autonomes alors que les salariés sont... fortement protégés par des clauses rigides de définition de postes et de sécurité d'emploi. Il n'y a pas de solutions à la crise du système hors de la prise en considération simultanée de ces paramètres.»

Il faut aussi bien comprendre le système sociosanitaire québécois. En effet, il est important de comprendre que la création de notre réseau de santé universel au Québec, comme au Canada d'ailleurs, a été créée avec une concession majeure faite aux médecins. En 1971, au Québec, la priorité des médecins n'était pas de mettre en place un système universel, mais bien d'assurer leur autonomie, leurs revenus et leur façon de faire. Le compromis qui a été donné aux médecins était de leur permettre d'évoluer dans notre système de santé à titre de travailleurs autonomes. Loin d'être un jugement de valeur, c'est un fait fondamental pour le reste de l'histoire et qui a, maintenant encore davantage, un impact majeur sur le climat de travail dans le réseau.

Le compromis fait aux médecins en 1971 a permis la création de deux systèmes : le système médical et le système de santé et de services sociaux. Ces deux systèmes fonctionnent en parallèle et ils ne s'aiment pas. Les deux systèmes ont des impératifs, des manières de faire et des objectifs bien différents.

Pour bien illustrer notre propos, permettez-nous un exemple. Si l'on prend, par exemple, un orchestre symphonique qui représenterait le réseau, la soliste invitée représenterait le système médical. La soliste invitée ne connaît pas le travail qui a dû être fait pour que tout fonctionne lorsqu'elle fait... elle donnera sa prestation. Elle arrive, elle chante, elle quitte. Encore une fois, ce n'est pas un jugement de valeur. Un travailleur autonome travaille pour lui, un salarié travaille pour un employeur. Les dynamiques sont donc très différentes et amènent, par conséquent, une complexité de gestion dans l'ensemble du réseau.

Ainsi, notre soliste invité, à l'instar des médecins, ne connaît pas les conventions collectives, les règles applicables, les limites imposées au réseau par le gouvernement.

Sur le terrain, cette complexité de gestion apporte son lot de frustrations de part et d'autre du système médical et du système de santé, et est au cœur même du climat délétère que nous vivons actuellement. Les cadres des dirigeants du réseau ont un pouvoir de gestion uniquement sur les employés de ce réseau, pas sur le système médical. Ils ne peuvent exiger à l'instar des autres professionnels la ponctualité et le savoir-être, un minimum de dossier, des redditions de comptes sur la quantité des actes posés, de même que sur leur sécurité, leur qualité ainsi que la facturation des actes médicaux.

Au cours des 25 dernières années, les divers gouvernements ont sabré dans le financement du réseau, sans pour autant vraiment toucher au système médical. Au contraire, ce dernier a vu ses revenus augmenter de façon substantielle, créant un déséquilibre important, causant de grandes frustrations dans le système de santé et de services sociaux. On n'a qu'à se souvenir de l'impact de la prime de la jaquette médicale.

Et pourtant, malgré ces réformes, voici les problèmes que nous avions et que nous avons toujours : avoir un médecin de famille; avoir accès rapidement à un médecin; liste d'attente pour les chirurgies et les traitements; attente aux urgences; accès à un médecin spécialiste. Le point commun entre ces problèmes est médical.

Nous répétons, les cadres des dirigeants du réseau de la santé n'ont aucun pouvoir de gestion sur le système médical. Le statu quo n'étant pas une option, il est de la responsabilité de tous, incluant le système médical, de travailler à améliorer ce climat de travail, qui permettra l'attraction et la rétention de la main-d'œuvre dont nous avons tous besoin pour rendre les services à la population. Commençons à travailler ensemble et non en parallèle.

Par conséquent, nous considérons que PL 15 doit être vu sous le prisme d'une prise en charge du système médical par le réseau en donnant aux médecins des contrats de travail à salaire ou à honoraires, avec la capacité pour le réseau de les encadrer tout en les dégageant de responsabilités administratives qui grugent énormément leur temps et leur efficacité. On vous réfère aussi au rapport du groupe...

Mme Chiquette (Anne-Marie) :...pour un financement axé sur les patients, présidé par Mme Wendy Thompson en 2014, qui recommandait d'établir des ponts entre le clinique et l'administratif en ajoutant un concept d'imputabilité médicale et en recommandant aussi la mise en œuvre d'un audit systématique des pratiques médicales et leur paiement. Ce n'est pas une hérésie, ça se fait actuellement ailleurs au Canada avec beaucoup de succès.

Maintenant la création de Santé Québec. L'APER est entièrement d'accord pour une société d'État. On avait fait la demande en 2014. On recommande aussi que le nom soit «Santé et Services sociaux Québec», parce que, dans le réseau, on utilise beaucoup d'acronymes, et SQ est déjà utilisé. Ça permettrait aussi de reconnaître pleinement l'apport des services sociaux dans notre réseau.

Nous demandons aussi que le siège social de cette société d'État soit dans le Grand Montréal. Ainsi, nous aurions une meilleure vision d'ensemble du système sociosanitaire en ayant le ministère à Québec et Santé Québec dans le Grand Montréal.

Nous sommes en accord avec l'augmentation de cadres de proximité, ça ne nous surprend pas, mais nous recommandons aussi que l'augmentation des cadres se fasse dans les directions en soutien comme les finances, les ressources humaines, les services techniques, parce que c'est surtout là que la réforme Barrette a coupé des postes de cadres.

Un seul employeur. Vous avez vu dans notre mémoire, on a parlé beaucoup, beaucoup d'Optilab. On a un document à faire parvenir au ministère là-dessus d'ailleurs. Il a été clairement démontré que la mobilité des employés a entraîné plus d'inconvénients que d'avantages, et surtout, ce qui n'est pas efficace, puisque les établissements n'ont pas les mêmes systèmes, les mêmes équipements, les expertises et les mêmes façons de faire. Il nous faut donc former à répétition des employés, ce qui constitue une source de dépenses importante, grugeant ainsi tout avantage financier en plus d'une perte de temps. Un cytologiste, ça prend un an à former, O.K.?

Nous avons aussi une question concernant les établissements regroupés dans Pl 15. On lit à 11.75 que les employés d'un établissement regroupé deviennent sans autre formalité les employés de Santé Québec, alors que 10.87 prévoit que les CISSS, les CIUSSS et les établissements non fusionnés sont fusionnés à Santé Québec à la date qui suit six mois celle fixée par le gouvernement. C'est deux dates très différentes. Les employés des établissements regroupés travaillent dans des CISSS et des CIUSSS, ce qui va faire qu'on va avoir des employés qui vont être à Santé Québec tout de suite et d'autres qui le sont plus tard. En tout cas c'est peut-être moi qui a mal compris.

Maintenant la gestion médicale des chefs de département. Nous demandons à connaître la définition des professionnels de l'article 181 de pl 15. La LSSSS prévoit que le chef de département clinique exécute les responsabilités suivantes : coordonner les activités professionnelles des médecins, dentistes, pharmaciens et biochimistes. Par contre, PL, à 181, prévoit que le chef de département clinique exerce les fonctions suivantes à l'égard des professionnels qui font partie de son département. Est-ce qu'on inclut dans les professionnels les infirmières, les ergos, les physios, les travailleurs sociaux? Là, c'est une autre dynamique complètement changeante.

• (19 heures) •

En plus, PL 15 prévoit que la cheffe de service sera maintenant sous l'autorité du chef de département, qui est un médecin. Je vais vous dire ce qu'une de mes cadres a dit : Je ne le sais pas si je dois rire ou pleurer ma vie. Comme déjà mentionné, les médecins ont dans les faits besoin d'être déchargés des tâches administratives pour se concentrer sur les tâches médicales, ce pour quoi ils sont formés. Ce ne serait aucunement efficace, que les médecins sont débordés et doivent satisfaire des attentes gouvernementales, les médecins n'ont aucune formation en gestion et très peu d'intérêt. Les médecins ne connaissent pas les conventions collectives et les lois du travail. Les médecins ne connaissent pas le système de santé en ce qui concerne la gestion matérielle, les ressources humaines, les finances, la paie, les ressources informatiques, et cetera. Il n'y a donc aucun ajout d'efficacité à avoir des chefs de département médecins qui seraient l'autorité de la cheffe de service. Actuellement, il y a de la cogestion, ça fonctionne plus ou moins, mais ça fonctionne.

La capacité d'absorption du réseau d'une nouvelle réforme. Alors finalement, nous vous demandons de prendre en considération le fait que le réseau... Sa capacité d'absorber cette nouvelle réforme, considérant son ampleur et le contexte dans lequel elle devrait s'exercer. Le réseau s'est attaqué de front à une pandémie mondiale qui aura duré plus de trois ans et viennent à peine de se résorber. On est sur le terrain, on y va, puis j'y ai été pendant la pandémie, Michelle aussi, puis Christian était là, le climat de travail est difficile puisque tous les acteurs sont épuisés, frustrés, anxieux et impatients. Il est clair aussi qu'il manque beaucoup de cadres de proximité en soutien des équipes. La pénurie existe aussi pour les postes de cadres intermédiaires.

Les négociations des conventions collectives avec les quelque 200 000 employés du réseau ont débuté et seront particulièrement ardues dans un contexte de réforme et d'inflation. On le voit déjà sur le terrain.

Le Président (M. Provençal) :Je vais vous inviter à conclure, s'il vous plaît.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :S'il vous plaît. Donc, on demande effectivement qu'il faut tenir compte de tous ces éléments...


 
 

19 h (version non révisée)

Mme Chiquette (Anne-Marie) :...dans l'implantation de la réforme.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup pour votre exposé. M. le ministre.

M. Dubé : Très bien. C'est un plaisir de vous revoir puis merci pour votre intervention et le travail qui a précédé cette présentation-là. Merci beaucoup, très apprécié. Moi, je vais me concentrer sur une question, que vous posez très bien... puis je ne veux pas faire le débat sur les médecins, qu'on a déjà eu puis qu'on continuera d'avoir, parce que vous l'avez soulevé à votre façon. Mais la raison pour laquelle je voudrais me concentrer, c'est sur nos gestionnaires de proximité, nos cadres et de trouver la façon d'avoir les leviers nécessaires pour trouver des solutions à ce que vous dites avec nos médecins, puis je m'explique. La définition exacte du rôle d'un gestionnaire de proximité, pour moi, ça va être à définir, entre autres, par... en tout cas, je pense... Mon approche... puis ce sera à moi d'en discuter avec mes collègues de l'opposition dans les prochaines semaines, mais ce qu'on a voulu établir un fait qu'il doit y avoir des gestionnaires de proximité. Bon, est-ce qu'il pourrait y avoir en plus des coordinateurs territoriaux? Ça, c'est un autre débat, d'ailleurs, que j'ai salué de plusieurs présentations. Ça fait que je voudrais peut-être vous entendre là-dessus. Parce que, pour moi, il y a une grande différence entre un gestionnaire d'une installation... je vais le dire comme ça pour respecter la terminologie du ministère, alors qu'un responsable territorial n'est plus au niveau d'une installation, mais d'un territoire, hein, on s'entend bien. Ça, ça va être la deuxième partie de ma question.

Moi, ce que j'aimerais savoir de votre part, c'est comment on fait pour rendre un gestionnaire de proximité imputable, c'est une chose, mais d'être capable d'avoir un certain levier sur un médecin. Parce que, quand on a des... Avec, comme vous dites, avec la cogestion, quand ça va bien, c'est quoi, 80 % des temps, 90 % du temps, ça va bien puis on n'a pas besoin d'intervenir, mais, quand on ne s'entend pas où arrête la responsabilité professionnelle ou éthique du médecin versus la responsabilité du cadre qui a le pouvoir décisionnel et qui est capable de dire : Bien là, écoutez, malgré votre responsabilité professionnelle, moi, je pense qu'en tant que cadre, ce n'est peut-être pas la bonne décision... Et c'est ça qui nous cause un problème bien souvent. Puis je veux vous entendre là-dessus parce que vous êtes tellement clair dans votre... Vous avez fait un préambule sur ça et... je sais, je connais bien votre expérience, ce n'est pas la première fois qu'on se parle. Comment on trouve cet équilibre-là au gestionnaire de proximité qui va dire : Moi, à un moment donné, il va falloir que je mette mon... excusez-moi, mon pied à terre, puis dire : M. le médecin, je respecte beaucoup votre autorité professionnelle, mais, à un moment donné, là, on ne s'entend pas puis ce n'est peut-être pas la meilleure décision?

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Mais je vais vous répéter ce que mes membres me répètent depuis 32 ans, là, on est condamnés à gérer avec les médecins. Donc, toutes les habiletés politiques qu'on peut avoir jusqu'ici, on les a avec les médecins. C'est important, et c'est une des premières demandes que j'avais faites aux réunions du plan santé... qui est un travail extraordinaire, Monsieur Dubé, là-dessus, on ne parle pas de la même réforme que la réforme de M. Barette...

M. Dubé : C'est plus long, un peu, d'y aller comme ça, je vais vous dire, mais je pense...

Mme Chiquette (Anne-Marie) :C'est plus long, c'est plus long, mais ça vaut la peine, parce que c'est autrement un traumatisme. Le traumatisme de la réforme Barrette est plus grand que le traumatisme de la pandémie pour mes cadres, O.K.?

M. Dubé : Eh boy!

Mme Chiquette (Anne-Marie) :O.K. Ça vous dit quelque chose.

M. Dubé : C'est assez... c'est un gros... c'est un gros énoncé, vous faites là, là, oui. O.K.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Oui, c'est qu'il y a un changement de culture qu'il doit y avoir. Je pense que... et j'ai vu le visionnement des deux syndicats de médecins, c'est important que... Les médecins auraient dû être présents au plan santé pour qu'ils entendent ce que les professionnels, les cadres, les pharmaciens auraient à dire sur le comportement des médecins dans les établissements. C'est important. Ça nuit grandement au climat de travail. Et, comme je le disais tout à l'heure, le déséquilibre financier aujourd'hui où on doit couper et faire des compressions dans le réseau de la santé pendant que, de l'autre côté...

M. Dubé : ...vous demandez, parce que les gens qui nous écoutent, là... Puis moi, je ne suis pas dans le «bashing» aujourd'hui, là.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Non, moi non plus.

M. Dubé : O.K.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Mais on va y aller avec les faits.

M. Dubé : Mais on va y aller avec les faits. Moi, je suis dans un hôpital, là, puis j'ai un patient qui est là, qui n'est peut-être pas satisfait du service qu'il est en train d'avoir, là. Je ne parle pas d'un processus de plainte qui va pouvoir faire dans 45 jours, je parle de la journée 1. Il est, en ce moment, dans un hôpital, son conjoint, sa conjointe, son parent est en train de recevoir, selon lui, un traitement qui n'est peut-être pas à la hauteur de ses attentes pour un ensemble de raisons. Quels leviers qu'on doit donner à un gestionnaire de...

M. Dubé : ...proximité sur un médecin ou un professionnel de la santé?

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Bien, le cadre, le gestionnaire de proximité a les leviers avec le personnel et les professionnels, parce qu'il les encadre, il a les leviers, puis ils sont imputables. M. Dubé, les cadres sont imputables dans le réseau, les professionnels sont imputables, O.K. Ça, c'est clair.

M. Dubé : Oui, mais si... Puis je vous pose la question, en tout cas je suis très direct, là.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Oui.

M. Dubé : Si le gestionnaire, il n'est pas capable de trouver le médecin sur l'étage, si le médecin n'est pas rentré dans sa faction de nuit, il fait quoi, le cadre, là? Quel est le pouvoir d'intervention? Parce que les cas des... Je le répète, 90 %, 95 % du temps, vous le savez, ça va bien en cogestion. Mais c'est... Quand ça ne va pas, quel est le levier que le cadre a de dire à un professionnel : Vous n'êtes pas là, vous devriez être là? Où...

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Je ne suis pas allée dire, M. Dubé, que ça va bien en cogestion. On va laisser la cogestion, là, ça ne va pas bien en cogestion, ce n'est pas vrai.

M. Dubé : Je pensais que c'est ça que vous aviez dit tantôt. O.K.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Non. Non. Non, non. Non, non, pas là.

M. Dubé : Mais c'est parce que c'est ça qu'on a beaucoup entendu des médecins.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Oui, oui, ils veulent rester dans la cogestion, puis je les comprends, ils commencent à avoir peur, ils commencent à stresser, parce que la gestion n'est vraiment, vraiment pas simple, O.K. Les gestionnaires de proximité n'ont pas de leviers avec les médecins, là.

M. Dubé : Bien non!

Mme Chiquette (Anne-Marie) :C'est de parler, de discuter avec eux autres, d'essayer de les convaincre. Puis vous avez vu la liste dans notre mémoire, là, au niveau de la cogestion et des... Donc, ça demande beaucoup d'habileté politique, parce qu'on n'en a pas de leviers, on n'en a pas de leviers.

M. Dubé : Mais c'est pour ça que je vous demande la question, Mme : Quels leviers qu'on devrait donner à nos gestionnaires de proximité pour régler ça? Vous me dites : Ça fait 30 ans que ça dure. On fait quoi?

M. Samoisette (Christian) : Bien, si je peux me permettre...

M. Dubé : Oui.

M. Samoisette (Christian) : ...si les médecins, quand ils sont à l'intérieur d'un établissement, seraient considérés comme des employés de cet établissement-là, là on aurait un levier, on aurait un levier administratif, un levier disciplinaire. Mais ce sont des travailleurs autonomes même quand ils sont à l'intérieur de l'hôpital. C'est pour ça qu'on ne peut rien faire.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :S'ils décident que vendredi ils vont à un colloque, vendredi, ils vont à un colloque, on annule tout. On ne peut pas... On ne gère pas leurs horaires, on ne peut pas les... on ne peut pas contrôler, c'est des travailleurs autonomes et c'est dans leur nature.

M. Dubé : Alors, il y a quand même des leviers qu'on met dans le projet de loi n° 15 qui font que... - mais je vous le dis, là, puis on peut en débattre, puis... pas sûr qu'on va avoir tout le temps aujourd'hui pour faire ça - mais où on demande qu'entre autres le P.D.G. de l'établissement ait un droit de regard sur le choix du directeur médical, parce que, s'il y a mésentente, bien, il a quand même un droit de regard sur le choix qui a été fait, ce qui n'est pas le cas du tout en ce moment, là. Est-ce que ça aiderait?

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Oui. On a les DSP. Bien, tout dépendra de l'autorité que vous donnerez au directeur médical aussi, là, par rapport aux médecins. Est-ce qu'il aura une obligation... Est-ce qu'il aura une imputabilité? Est-ce qu'il aura une habilitation d'avoir des mesures disciplinaires, des encadrements, de donner des horaires, de vérifier aussi?

Vous savez, Dr Barrette avait une grande estime pour Cleveland Clinic, mais Cleveland Clinic... les médecins ont un contrat d'un an, doivent justifier tout ce qu'ils font, pas un... Si tu veux un deuxième test de radiologie, il faut que tu le justifies. Alors, chez nous, on n'a pas ça. Ce que ça crée comme déséquilibre, c'est que les médecins fassent ce qu'ils font. Vous l'avez compris.

M. Dubé : Ça, c'est au niveau du directeur médical. Vous avez entendu les commentaires qu'on a eus des médecins sur la direction médicale. Ils ne sont pas tout à fait là, là.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Non.

M. Dubé : Je vais rester poli.

• (19 h 10) •

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Non, non, j'ai compris. J'ai compris. Mais ils sont...

M. Dubé : Parce que, moi, je pense qu'il est important de... Parce que de mettre un cadre de proximité, c'est une chose, mais de lui donner des leviers, c'est d'autre chose, et c'est ça, je pense, que...

En tout cas, j'entends votre principal message aujourd'hui, c'est qu'il faut rétablir cet équilibre-là, et, encore une fois, c'est toujours délicat, parce qu'on va dire : Dans 90 % des cas, ça fonctionne. Mais c'est quand ça ne fonctionne pas, puis qu'un patient est à l'hôpital, puis il dit : Moi, je n'ai pas la perception que je reçois le service que mes parents, mon conjoint, ma personne... et qu'il n'est pas capable de retrouver quelqu'un qui peut avoir une autorité immédiate sur le professionnel de la santé. Vous ne l'avez pas, ça?

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Exact. Vous avez... Nos médecins sont extraordinaires, O.K. Je suis allée à l'hôpital avec ma mère la semaine passée, là, hanche fracturée... Les médecins sont extraordinaires, le personnel est extraordinaire, mais ils ne sont pas efficaces, parce qu'ils n'ont pas de temps pour gérer leur horaire, ils n'ont pas de temps pour gérer... Il faut leur enlever, il faut leur dire : Écoutez, on va vous dégager de tout ça, mais en même temps, aussi, ça va nous permettre de vous encadrer et d'avoir un certain contrôle sur le 10 %, comme vous dites. Moi, j'irais un petit peu plus loin, mais on va rester à 10 %, O.K., 10 %. Mais ça permettrait une meilleure...

Mme Chiquette (Anne-Marie) :...des services médicaux, parce qu'on gérait leur horaire. Ça fait que, s'il y a un cas là...

M. Dubé : Oui, mais ça... Il me reste combien de temps?

Le Président (M. Provençal) :Cinq minutes.

M. Dubé : Cinq minutes. Je pense que c'est là qu'une fois qu'on aura déterminé, dans le projet de loi, le principe d'un gestionnaire de proximité, peut-être que d'aller jusqu'à un directeur territorial, si on décidait d'aller là, là, suite à certaines recommandations... mais que ce serait à Santé Québec de définir quel est le rôle exact de ce gestionnaire-là. Pas dans le projet de loi, parce que ce qu'il est peut-être bon de faire aujourd'hui pourrait être différent dans deux ans, on se comprend, parce que ça va être évolutif.

Mais moi, ce que je vous dirais aujourd'hui, après vous avoir entendue, puis je buvais chaque mot que vous disiez tantôt, c'est qu'il faut donner à Santé Québec le choix de s'ajuster, au cours des prochaines années, dans le rôle très clair qu'ils vont donner à ces gestionnaires de proximité là, pour être capables de mieux évoluer avec nos médecins ou avec nos professionnels de la santé. Puis ça, je pense que... En tout cas, je veux encore vous entendre là-dessus, parce que c'est tellement clair, ce que vous dites, puis je veux que les Québécois qui nous ont écoutés aujourd'hui disent : Il est là, c'en est un gros, problème. Puis c'est pour ça qu'on n'a pas eu peur d'attaquer la gouvernance clinique. Je sais que c'est difficile, là. Dans le projet de loi, on aurait pu dire : On oublie ça puis on laisse la gouvernance clinique comme elle est. Ce n'est pas ça qu'on a fait, là, on a pris une position très claire qu'il fallait changer la gouvernance clinique, puis les cadres peuvent nous aider à faire ça.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Mais je pense que les... De ce que j'ai perçu des deux syndicats du Collège des médecins, là, on est prêts, je le sens. Ils ne l'ont pas dit catégoriquement, mais eux aussi sont victimes de cette situation-là et de ce déséquilibre-là. Ils le voient bien sur le terrain, parce qu'il y a une...

M. Dubé : Dans quel sens vous dites qu'ils sont victimes de ça, selon votre interprétation?

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Parce que, un, il y a des demandes du ministère pour avoir plus de patients. Ils doivent rencontrer des critères. Ça fait que là, le temps pour gérer qu'ils avaient avant, ils ne l'ont plus. Donc, ça, ça met de la pression. Ils s'aperçoivent aussi que les gens ne sont pas heureux, hein, les infirmières quittent. Ils vont aller chez Pfizer, ils vont aller chez des compagnies à gauche puis à droite. Donc, il n'y a pas...

M. Dubé : Puis les chirurgies ne s'améliorent pas, puis les...

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Exactement. Donc, ils réalisent, en même temps... Puis il y en a beaucoup qui vont vous le dire : Bien, moi, je trouve que je suis trop payé, puis, etc., là. Ils vont le dire, O.K. Donc, ils sont un peu conscients... Puis c'est vraiment la première fois, moi, que j'ai vu... Parce que j'ai visionné les présentations, particulièrement, des syndicats de médecins puis du collège, qui étaient tous d'accord de dire qu'on ne pouvait pas rester dans le statu quo. Ils n'étaient pas dans l'attaque, ils étaient dans l'écoute.

Donc, je pense qu'on est rendus là de regarder ailleurs. Le Children, à Toronto, encadre ses médecins, O.K. Il y a des endroits où on le fait. Il faut commencer à le regarder pour leur permettre de ne pas s'occuper des tâches administratives. Même la facturation de la RAMQ, pour ce qui est dans les établissements, on s'en occupera, O.K. Donc, c'est d'amener ça.

M. Dubé : ...combien de temps?

Le Président (M. Provençal) :Il vous reste deux minutes.

M. Dubé : Deux minutes. Mais continuez, parce que... En tout cas, selon moi, là, dans nos priorités des prochaines semaines, prochains mois, là, quand on sera rendus à la gouvernance clinique, la position de nos gestionnaires de proximité, pour moi, c'est ce qu'il y a de plus important si on veut trouver l'équilibre dont vous parlez, qui a été, disons, enlevé au cours des dernières années.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Tout à fait. Je veux dire, si je prends juste Maisonneuve-Rosemont... Moi, je suis là depuis 1992, O.K., à Maisonneuve-Rosemont. Donc, quand on avait un problème à l'urgence, par exemple, on appelait Mme Boily, on faisait descendre le directeur des ressources, la D.G., à l'époque, on faisait descendre tout le monde aux urgences puis on s'assoyait. Aujourd'hui, oubliez ça, là. C'est beaucoup plus complexe, parce que c'est plus gros. Puis c'est plus complexe parce qu'effectivement, dans la réforme Barrette, ce qu'on a coupé c'est les cadres dans le soutien, le personnel qui travaille en soutien, donc les ressources humaines. Donc, quand il faut appeler les services matériels, puis que ça part, puis ça s'en va, puis ça redescend, bien là, ça devient long. Il faut que le gestionnaire de proximité ait quand même des leviers pour être décisionnel le plus rapidement possible.

Mais ce qui est très important, et ce que j'applaudis, c'est... Puis vous l'avez entendu de tous les syndicats, là, ils veulent avoir des cadres. Moi, là, ça fait... hein, Michelle et moi, ça fait des années qu'on est là-dedans, là, c'est historique. Pourquoi? Parce que, quand on sort de l'université ou du cégep comme infirmière, on a travaillé, on a besoin d'avoir un cadre. Le cadre, c'est important pour mille raisons, O.K., en support, parce que c'est des...

M. Dubé : ...l'avez bien dit, c'est le cadre qui fait le lien entre ces différents professionnels de la santé, là.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Tout à fait.

M. Dubé : Mais il faut lui donner les leviers dont il a besoin.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Exact.

M. Samoisette (Christian) : Et surtout que, si on prend en considération le fait que la majorité des cadres de proximité sont des anciens cliniciens. Ce n'est pas du monde qui arrivent directement... là. C'est du monde... des anciennes infirmières, des anciens TS, donc c'est des gens qui savent et qui peuvent coacher le nouveau personnel.

M. Dubé : Bien, moi, en tout cas, j'étais à Victoriaville il y a deux...

M. Dubé : ...Puis il y a huit cadres de proximité qui ont été nommés dans le CIUSSS. Puis j'ai rencontré une infirmière de 20 années d'expérience, c'est elle qui est agente de proximité là-bas, bien, elle sait de quoi qu'elle parle, là, elle est capable de parler aux patients, elle est capable de parler aux médecins. Mais elle me disait : Donnez-nous des leviers pour qu'on puisse intervenir. C'est ça qu'elle nous disait.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Tout à fait. Puis avec les médecins aussi.

M. Dubé : O.K.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup.

M. Dubé : Merci beaucoup, Madame. Merci.

Le Président (M. Provençal) :M. le député de Pontiac.

M. Fortin :Oui. Merci. Merci, M. le Président. Madame Chiquette, Mme Bourget, Monsieur Samoisette, merci d'être là. Vous buviez chacune des paroles, M. le ministre, je comprends que, votre dessert, il est liquide aujourd'hui. Mais, moi, je veux m'attarder, là, à certains des... À la toute fin de votre de votre mémoire, parce que vous avez un paquet de recommandations, un paquet d'interrogations, un paquet d'inquiétudes, mais aussi de trucs sur lesquels vous approuvez, mais à la toute fin, là, vous dites : «nous pensons que le réseau actuellement n'a pas la capacité d'absorber la gestion et l'intégration d'une nouvelle réforme, surtout de l'ampleur proposée par le projet de loi 15.» Alors, ça, c'est un peu le... Avant de terminer, là, vous prenez un pas de recul, vous regardez tout ça puis vous dites : Pas sûrs qu'on est en mesure de faire ça en ce moment. Je veux comprendre d'où ça vient et c'est quoi votre préoccupation de... Si on va de l'avant avec la réforme, là, qu'elle... Telle qu'elle est écrite, sur vos membres, sur vos cadres.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Bon. Première des choses, on apprécie énormément la vitesse à laquelle ça va pour l'instant, comparativement à l'autre. Comme on dit, c'est un traumatisme, ça a été un traumatisme sur le terrain, là, c'est clair. Ce l'est encore. Mais le réseau travaille encore avec des masques. Vous allez dans un hôpital, vous devez porter un masque. On est encore dans la COVID, dans cette gestion-là, bien que c'est moins ce que c'était, O.K.? Donc, ce qui est sorti dans la population en termes d'anxiété, de problèmes de santé mentale, là, les gens dans le réseau étaient encore dans l'adrénaline, ça n'a pas sorti tout de suite.

Là, sur le terrain, ce qu'on voit, là, des plaintes ici, des plaintes là, l'anxiété, des problèmes de santé mentale, l'épuisement. Donc, ce qu'on veut juste vous dire, c'est qu'on est un peu en retard de la société dans le réseau parce qu'on a été plus longtemps dans la COVID, et on l'est encore de façon pas mal moindre, mais on porte les masques, puis, et cetera. Ça complique tout le travail qu'on a à faire parce qu'il faut tester, il faut faire attention, et cetera. Donc, de permettre... déjà gens qu'on parlait de six mois de la date, c'est juste les établissements regroupés qui deviennent les employés de Santé Québec tout de suite, ça fait que, ça, ça me posait beaucoup de questions. Puis J'ai beaucoup de membres là-dedans, là, j'ai Jewish, etc., là. Mais, c'est ça, c'est de vous dire : nous, on y va, sur le terrain, même pendant la COVID. Moi, j'allais au Jewish, j'allais à Sainte-Justine, j'allais au CHUM, au CUSM. Là, on est beaucoup, beaucoup, à Montréal, OK? Donc, on y va, sur le terrain, on voit le monde, on voit l'état de fatigue, on a les plaintes aussi, hein? Le personnel se plaint des cadres, les cadres se plaignent des collègues. Il y a l'environnement de travail. On a de la fatigue, on a de l'épuisement, on a de l'anxiété, on a de la colère, on a de la frustration. Tout ça sort en ce moment. Donc, leur permettre de dire... De comprendre qu'en ce moment ce n'est peut-être pas la meilleure idée de leur dire qu'on s'en va dans une autre réforme. De dire : bien, ça va prendre un certain temps, on va y réfléchir, on va y aller par étapes, ça a rassuré les gens. Moi, dès le début, c'est ce qu'on a fait, des midis-conférences pour dire aux gens : écoutez, on n'est pas dans la réforme Barrette, là, parce que les gens étaient vraiment stressés par rapport à ça. Donc, c'est juste de comprendre qu'on est encore dans la fatigue pandémique, là.

• (19 h 20) •

M. Fortin :Mais quand vous dites, là, puis je peux comprendre, là, le certain niveau d'adrénaline qui dure peut-être plus longtemps que dans la population parce que vous êtes dedans, là, vous avez été dans la pandémie longtemps, puis, ça, ça s'applique à l'ensemble des employés du réseau, là, mais quand vous dites, là, vous voyez plus de plaintes, par exemple, qu'est-ce que vous voyez qui se passe, là, aujourd'hui? Je mets de côté la réforme deux secondes, là, mais qu'est-ce que vous voyez qui est en train de se produire, là, aujourd'hui, là, dans le réseau?

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Il y a beaucoup de grogne. Il y a beaucoup de plaintes contre d'autres employés, des plaintes contre des cadres, beaucoup plus que ce qu'on pouvait voir avant la COVID, OK? Puis on le voyait un petit peu, là, on avait le haut de la vague puis on redescendait, là, descendait la vague, là, là, l'adrénaline tombait, les gens tombaient à genoux, les gens étaient en colère, les gens faisaient des plaintes. On avait des plaintes, on faisait des enquêtes. On est là-dedans, là. Vous demandez aux ressources humaines, vous allez voir, là, on est dans des plaintes de harcèlement psychologique à gauche puis à droite. On est là-dedans. C'est juste symptomatique d'une fatigue, de tout ce qui s'est passé, qu'un réel climat de...

Mme Chiquette (Anne-Marie) :...il faut ajouter à ça qu'évidemment il y a les chirurgies, tous... Tu sais, je veux dire, le système lui-même, à part la pandémie, existe toujours, là, il faut le faire rouler pareil. Puis ça s'est rajouté, alors... puis il y a une pénurie, il y a moins de monde, etc., ça fait que... puis il y a les négociations syndicales, là. On n'est plus, on n'est plus du tout à la même place qu'on était, dans les 20 dernières années, avec la loi sur les mesures essentielles et le Code du travail qui a été changé. On l'a vu, nous autres, on a des cadres qui ont reçu des belles cartes de Saint-Valentin avec des beaux mots dedans, hein, ça fait que... puis des démissions en bloc, là, on en a vu aussi, hein, bon. Alors, on est là-dedans. Donc, ça ne facilite pas le climat de travail du tout.

M. Fortin :Vous avez... tantôt, là, vous l'avez mentionné d'entrée de jeu, vous êtes revenue dans une des questions qu'on a posées, mais la question des établissements regroupés puis l'annexe deux, puis l'annexe II, pour ceux qui ne l'ont pas devant eux, là, il y a toutes sortes d'établissements, là, l'hôpital juif St. Mary's...

Mme Chiquette (Anne-Marie) :...

M. Fortin :...le Centre Miriam, etc., il y a des CHSLD...

Mme Chiquette (Anne-Marie) :...même Mont-Sinaï.

M. Fortin :...il y a le Jeffery Hale, que le ministre apprécie beaucoup. Mais là, ce que vous... Je veux comprendre votre compréhension de la chose. Qu'est-ce que vous lisez à travers l'article 1175, là, qui fait en sorte que les employés de ces établissements-là deviennent des employés de Santé Québec de même?

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Bon, le Jewish General, là, l'hôpital fait partie du CIUSSS du Centre Ouest où Christian. Donc, les employés du Jewish, selon ma compréhension de la loi, seraient, sans autre avis, O.K., des employés de Santé Québec, alors que les autres employés du CIUSSS du Centre Ouest qui ne font pas partie du Jewish, là, eux autres, c'est le CISSS et le CIUSSS qui sont intégrés six mois après la date déterminée par le gouvernement, et par la suite deviendront des employés. Ça fait que je ne comprenais pas. Parce que, là, ça devient complexe en termes de gestion, ces employés-là.

Une voix : ...

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Ce six mois-là, qu'est-ce qui se passe, là? Je ne sais pas si vous comprenez, c'est qu'on transfère tout de suite les employés comme étant des employés de Santé Québec, mettons, du Jewish, O.K., mais les autres du CIUSSS Centre Ouest, eux, ça va se faire quand le CIUSSS va être transféré six mois après la date déterminée par le gouvernement.

M. Fortin :...vous ne voyez pas de raisons tout de suite comme ça, mais voyez-vous un risque associé à ça?

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Bien, c'est parce que ce n'est pas efficace, je veux dire, en termes... On va gérer ça comment? Il y en a qui vont être des employés Santé Québec, alors que les autres vont être encore des employés du CIUSSS? Ça va se gérer comment? J'ai facilement... Centre Ouest, là, j'ai facilement cinq établissements là-dedans, là, qui seraient tout de suite transférés. Puis je me demande pourquoi. Est-ce que c'est une erreur juste d'écriture? Ça se peut très bien, là, que le transfert se fasse, qu'on accepte le côté culturel de ces établissements-là. Parce que St. Marry's, on est à St. Marry's, on est à Douglas aussi... C'est des établissements particuliers. Puis je suis dans le Saint-Laurent... là, et etc., là. Donc, est-ce que c'est... est-ce qu'il y avait... Qu'est-ce qu'on recherchait à faire avec l'article 1175, là? C'est ça, je ne comprends pas.

M. Fortin :Bien, vous n'êtes pas la seule. J'espère qu'on va avoir la chance de faire cette discussion-là avec la ministre. Je comprends que c'est l'article 1175, alors il va falloir se rendre à 1175, M. le ministre, s'assurer qu'on est capables de se rendre. Mais effectivement, là, il y a des hôpitaux majeurs là-dedans, il y a des grands centres, même des centres de réadaptation, L'Hôpital chinois. Alors, il va juste falloir s'assurer de comprendre où c'est qu'on s'en va, là, puis qu'est-ce qu'on essaie de faire à travers ça, parce que, j'avoue, moi non plus, je ne le vois pas, à première vue je ne le vois pas. Ça va prendre beaucoup de clarifications pour s'assurer que les employés de ces établissements-là sont traités de façon convenable puis qu'il y ait une certaine... en même temps une gestion gérable, disons. Super. Merci, M. le Président. Ça va pour moi.

Le Président (M. Provençal) :Il reste tout près de quatre minutes. Mme la députée de Mont-Royal.

Mme Setlakwe : Merci. Oui, moi, en lisant votre mémoire, j'avais... il y a des passages qui m'ont fait sursauter, celui de la fin, là, mon collègue en a parlé. Vous l'expliquez bien, là, que le... c'est ça, nous, on le voit moins, là, mais, quand on rentre dans un hôpital, on voit que, tu sais, il y a encore une grande fatigue au niveau de la pandémie. Mais il y a d'autres passages sur lesquels on peut revenir maintenant. Le Santé Québec, employeur, seul employeur, vous élaborez, là, toutes sortes de conséquences fâcheuses, en particulier vous dites qu'il va falloir «investir temps, énergie, ressource et argent pour former un nouveau personnel parce qu'il n'y a aucune garantie que les nouveaux employés demeureront en poste, ce qui n'est pas efficace, nuit à la stabilité...» Vous voyez vraiment un problème avec ça, là, au niveau des cadres.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Tout à fait. On a le meilleur exemple, c'est Optilab. Optilab, les cytologistes, dans une grappe, il y a deux grosses grappes à Montréal, il y a plusieurs établissements, ils ont tous la même ancienneté...

Mme Chiquette (Anne-Marie) :...Quand vous allez travailler, par exemple, au CHUM, c'est suprarégional. Il faut avoir une expertise, il faut connaître les appareils là-bas, il faut connaître tous les systèmes, systèmes informatiques. Ce n'est pas homogène dans le réseau, hein? Ce n'est pas parce qu'on les a fusionnés que tout est homogène puis que les gens ont l'expertise. Donc, j'ai un employé qui arrive d'un autre établissement, parce qu'il a de l'anxiété. Il prend ce poste-là. Il faut le former en suprarégional, il faut le former avec les nouveaux équipements, les nouveaux systèmes. Ça prend un an. L'employé décide de s'en aller ailleurs. On passe notre temps, juste dans Optilab, CUSM, le CHUM, à former du monde à répétition. On a aussi des employés qui aiment beaucoup, beaucoup être formés, là. Il faut se dire ça aussi O.K.?

Donc, c'est... il faut le regarder. On n'a rien contre la mobilité. Il y a des établissements qui font des entrevues de départ depuis des années, et ce qu'on s'est aperçu, c'est généralement des employés ou des cadres qui ont deux ans d'expérience à peu près qui s'en vont. C'est là-dedans qu'on a le plus de mobilité de gens qui vont se déplacer. Puis C'est normal, il y a de l'emploi, ce n'est pas générationnel. Moi, je n'ai rien contre cette génération-là, ils ont la possibilité. Contrairement à moi, quand j'ai commencé, il n'y en avait pas, de jobs, quand on en avait une, on restait dessus. Mais aujourd'hui, il y a tellement d'emplois, ils vont l'essayer, ils retournent, ils aiment-tu ça, ou ils n'aiment pas ça. Donc, c'est plus dans les deux premières années qu'on va retrouver de la mobilité.

Maintenant, ce qu'il faut garder dans la mobilité, pour avoir l'ancienneté, l'ensemble du réseau, c'est se demander : est-ce que c'est un cadeau empoisonné, OK? Est-ce que ça va nous générer des économies et de l'efficacité? Optilab est le meilleur projet pour nous démontrer, le ministère est d'accord, que ça n'a pas fonctionné, parce que ça amène, ça génère des coûts de formation. Puis même juste de faire des achats regroupés, oui, ça peut réduire les coûts, mais ça amène que c'est beaucoup plus long et que, s'il y a un bris dans un équipement, bien, c'est très difficile d'être capable de faire faire les réparations. Alors que, si on a des systèmes différents et des équipements différents, bien, on peut transférer les demandes de laboratoire à un autre établissement, OK? Donc, il y avait une certaine flexibilité à ce niveau-là qui n'existe plus. Donc, ça, c'est un projet qu'on peut regarder parce que c'est de l'ancienneté. Dans une grappe où il y a plusieurs établissements, c'est l'ancienneté commune, puis ça ne fonctionne pas. Ça fait qu'une ancienneté globale réseau, c'est sûr que l'Est-de-l'île-de-Montréal, ils doivent être stressés. Ça, je comprends ça. À Montréal, ils sont plus stressés qu'ailleurs, c'est clair, là. Mais en même temps, est-ce que ça va générer des économies? Est-ce que ça va permettre... Comme on le dit, on va être obligés de former ces gens-là, ils ne connaissent pas... Puis ce n'est pas parce que vous êtes capables de travailler à un hôpital en Montérégie que vous allez être capables de travailler dans un hôpital universitaire à Montréal.

• (19 h 30) •

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup pour votre réponse. Je vais céder maintenant la parole au député de Rosemont.

M. Marissal : Ah! merci, M. le Président. C'est la fin, vous marquez la fin de nos consultations pour le projet de loi 15. Pas juste aujourd'hui, là, la fin des haricots pour ce qui est de la consultation. Je vous remercie d'être là. Mais j'en aurais pris plus, pas nécessairement de vous, là, c'est déjà assez chargé, ce que vous nous donnez, mais j'aurais pris plus de groupes. Je le note parce que je n'aurai plus la parole après.

Puis on en a fait la demande, mes collègues de l'opposition se sont joints à moi, on l'a demandé. Il y a 55 groupes qui signent aujourd'hui une lettre ouverte, là, dans Le Soleil. Il y a beaucoup de gens qui voudraient être entendus, qui ne le seront pas. Puis, non, M. le ministre, un mémoire déposé, ce n'est pas la même chose qu'un témoignage ici. Je comprends, on va les lire, on les a lus, on va les décrypter, c'est vrai. Mais, au nombre de fois que vous avez dit, M. le ministre : les gens qui nous écoutent en ce moment, fait la démonstration qu'effectivement il y a des gens qui écoutent. Puis il y a beaucoup de gens qui écoutent. Devant un tel projet de loi, honnêtement, j'en aurais pris plus. Puis ce n'est pas un caprice de député, là. Je peux vous dire, là, on était ici ce matin à 10 h, là, on va sortir d'ici vers 8 h, là, tantôt, je suis fatigué, j'ai les yeux qui piquent, je n'ai plus de vocabulaire, mais...  Je n'ai peut-être plus de cerveau non plus, mais c'est important d'entendre les groupes. Et il y a à ce jour 103 mémoires qui ont été déposés, et plus maintenant même, ça continue, 112. Qui dit mieux, ça continue, 112. On a entendu peut-être une quarantaine de groupes. Moi, je pense que ce n'est pas une question de nombre, ce n'est pas une question... Mais c'est une question de faire les choses dans l'ordre puis de les faire correctement.

Puis c'est la main tendue que je... la main que je tends au ministre là-dessus parce qu'on va avoir du travail. Je suis content de l'avoir entendu dire, plus tôt aujourd'hui : on en a pour quelques semaines et probablement quelques mois. Bon, ça élimine d'emblée le scénario loufoque, là, d'un bâillon en deux semaines, là, auquel on ne croyait pas. Mais, enfin, peut-être qu'on se reverra en décembre, mais pour...


 
 

19 h 30 (version non révisée)

M. Marissal : ...au moment où on va pouvoir travailler sur le projet de loi.

Dites-moi donc, là, rapidement, maintenant que j'ai pris tout mon temps, là, pour faire mon éditorial : C'est quoi, votre plus gros problème de gestionnaires, de cadres en ce moment?

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Le plus gros problème, c'est, justement, ce que je vous expliquais, de Maisonneuve-Rosemont. C'est que c'est difficile.

M. Marissal : ...

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Non, ce n'est pas Maisonneuve, ils sont adorables là-bas. Non, non, non. C'est qu'anciennement on était capables d'avoir rapidement des gens qui sont en haut, descendent à l'urgence, décisionnels, pour dire : O.K., on règle ça. Là, c'est long, c'est long avant d'avoir l'autorisation, puis de monter, puis de monter. Tu sais, la cheffe d'unité va demander à sa coordonnatrice, qui va demander... Il y a des établissements qui sont très protocolaires. Il y en a d'autres, culturellement, que c'est plus à l'horizontale, au niveau... c'est pragmatique, on va travailler en équipe. Mais il y en a que c'est très, très... Donc, ma cheffe d'unité appelle la coordonnatrice, appelle la directrice adjointe, qui appelle la directrice, qui appelle le P.D.G., puis là, des fois, il faut demander au ministère, puis ça redescend, puis, des fois, ça va... il faut aller au Conseil du trésor pour avoir les approbations monétaires. J'exagère...

M. Marissal : Mais avez-vous l'impression que ça va être plus fluide et plus rapide avec l'agence Santé Québec? Moi, j'ai l'impression que non, mais... Je ne sais pas. Je veux vous entendre là-dessus.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Bien, un, on va avoir un employeur qui va être juste notre employeur, et qui ne sera pas le gouvernement. Le gouvernement, malheureusement, a deux chapeaux, O.K. Puis la raison pour laquelle, fondamentalement, je la voudrais à Montréal ou le Grand Montréal, c'est, justement, d'avoir une perspective différente de celle du ministère aussi. J'aime bien ces gens-là, je travaille avec eux, mais il faut avoir une perspective montréalaise et du Grand Montréal. Il faut élargir, il faut aller jusqu'en Outaouais. Il faut être capables d'avoir une vision globale, en ayant, à Québec, le ministère, puis Santé Québec ou Santé et services sociaux Québec dans le Grand Montréal, pour couvrir l'ensemble du territoire.

J'ai une cadre qui a toujours travaillé à Québec, qui, depuis un an, travaille en Montérégie. Elle dit : Ça n'a pas d'allure, Anne-Marie, comment c'est différent. Les approches sont différentes. C'est important. Ça fait que comment Santé Québec va le faire? Je ne le sais pas, mais, au moins, j'aurai un employeur et je lui souhaite d'avoir les autorités et le budget nécessaires. Puis ce seront des gestionnaires qui pourront réfléchir.

À partir du moment où on pourra dire... O.K., on va toucher aux paramètres médicaux, le carcan syndical, hein, parce qu'on est... Le réseau est pris en otage, on se comprend. C'est Rochon qui l'a dit. Ce n'est pas moi, c'est M. Rochon, dans son rapport. Alors, il est pris en otage. Il faut toucher à ces paramètres-là. Donc, déjà qu'on a juste un employeur, qui serait Santé et services sociaux Québec, ça va aider grandement, que ce soient des gestionnaires qui comprennent comment ça fonctionne, avec des médecins, en collaboration. Mais qu'on soit capables aussi d'encadrer les médecins, ça va aider énormément. Et d'avoir accès rapidement, pour un gestionnaire de proximité, à des ressources matérielles, d'être capables d'avoir une réponse rapide.

M. Samoisette (Christian) : Et de la marge de manœuvre.

Mme Chiquette (Anne-Marie) :Et de la marge de manœuvre.

Le Président (M. Provençal) :Merci beaucoup, Mme. Merci de votre patience aussi, on s'excuse encore pour le délai.

Avant de conclure les auditions, je procède au dépôt des mémoires des organismes et des personnes qui n'ont pas été entendus lors des auditions publiques. Pour votre information, il y a moins d'une demi-heure, on était rendus à 114 mémoires et on s'attend à ce qu'il va y avoir d'autres mémoires qui vont entrer. Je veux spécifier que l'ensemble de ces mémoires-là vont être considérés, ils vont être lus et analysés. Ça, c'est important de le mentionner.

Je vous remercie pour votre contribution à nos travaux.

La commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die. Merci beaucoup de votre collaboration et de votre patience.

(Fin de la séance à 19 h 35)


 
 

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