(Onze heures trente-sept minutes)
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
la Commission de la santé et des services sociaux ouverte.
La commission
est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des
consultations particulières sur le projet de loi n° 83, Loi concernant principalement l'admissibilité au régime d'assurance
maladie et au régime général d'assurance médicaments de certains enfants dont
les parents ont un statut migratoire précaire.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Nadeau-Dubois
(Gouin) est remplacé par M. Fontecilla (Laurier-Dorion).
Auditions (suite)
Le
Président (M. Provençal)
:
Merci beaucoup. Cet avant-midi, nous entendrons par visioconférence la
Fédération des intervenantes en petite enfance du Québec — Centrale
des syndicats du Québec et l'Association des pédiatres du Québec. Il me manque
une feuille...
Oui, alors, j'invite maintenant les
représentants de la Fédération des intervenantes en petite enfance à se
présenter, et par la suite vous aurez 10 minutes pour nous présenter votre
mémoire. À vous la parole.
Fédération des intervenantes en petite enfance du Québec
(FIPEQ)
et Centrale des syndicats du Québec (CSQ)
Mme Grenon
(Valérie) : Merci beaucoup. On est très heureux, la FIPEQ et la
centrale, d'être avec vous aujourd'hui. Je me présente, Valérie Grenon,
présidente de la Fédération des intervenantes en petite enfance du Québec, et
M. Marc Gagnon, qui est avec moi, conseiller à la vie professionnelle de
la Centrale des syndicats du Québec.
Pour nous, il y avait une importance d'être ici
avec vous, de là le dépôt, là, de notre mémoire, parce que, pour nous, tout le
monde mérite une chance égale. Pour les enfants dont les parents ont un statut
migratoire précaire, un premier pas a été fait en 2017 avec le projet de loi
n° 144, qui confirmait leur droit à une éducation gratuite et de qualité.
Nous avons accueilli favorablement cette première étape, comme nous accueillons
également favorablement la deuxième étape qu'est le projet de loi n° 83
pour le respect qu'il apporte à l'un des droits les plus élémentaires que
l'enfant possède, soit le droit à la santé, et ce, quelle que soit son origine.
Il est primordial pour nous de permettre le développement global et complet de
toutes les personnes qui font partie de notre tissu social et qui, maintenant
ou demain, y apporteront une contribution que l'on espère, évidemment, positive
et concrète.
Pour cela, il va sans dire qu'au minimum l'accès
à la santé doit être concret pour tous les enfants du Québec, quel que soit
leur statut migratoire. La prise en charge de tous les résidents du Québec,
principalement des enfants, permet non seulement un suivi de qualité par des
médecins qualifiés, mais également une meilleure gestion de nos programmes d'immunisation. La pandémie actuelle en
est un exemple excellent. Évidemment, plus la prise en charge se fera tôt, plus
elle sera efficace. En ce sens, l'universalité de l'accès à des soins de santé
est une obligation sociale.
• (11 h 40) •
Au niveau technique, notre lecture du projet de
loi a fait naître une certaine crainte quant à l'utilisation de l'expression
«depuis sa naissance», car nous croyons que cela pourrait priver des enfants
ayant subi des changements de garde parentale d'avoir accès aux soins de santé.
Considérant que ce n'est pas l'intention du législateur, nous recommandons de
retirer cette expression du projet de loi.
Nous aimerions maintenant attirer votre
attention sur l'étape suivante du développement personnel, qui n'est pas
abordée dans le projet de loi n° 83 et qui ne l'avait pas été non plus,
abordée, dans le projet de loi n° 144, mais qui devrait l'être un jour ou
l'autre, qui est l'accès aux services éducatifs en petite enfance. La recherche
démontre qu'un enfant sur cinq est vulnérable dans au moins un domaine de son développement
en commençant son parcours préscolaire, et, dans les milieux les plus
défavorisés, la proportion grimpe à un sur trois.
Nul besoin de rappeler que la fréquentation d'un
service éducatif pendant la petite enfance peut être particulièrement bénéfique
non seulement pour le développement des enfants, mais également pour l'ensemble
de la société, au niveau scolaire, mais
aussi au niveau de la santé : diminution de problèmes tels que l'anxiété,
la dépression, les risques de maladies cardiovasculaires,
l'hypertension, l'obésité, le diabète. Une meilleure santé mène également à une
diminution, bien sûr, de consommation de médicaments.
La motricité, le système cognitif, l'affection,
le langage, la sociabilisation, ce sont les cinq domaines de développement de
l'enfant. Pour un grand nombre d'enfants du Québec, les services éducatifs en
petite enfance sont leur premier contact avec le monde
extérieur à leur cellule familiale. Pour les enfants dont les parents ont un
statut migratoire précaire, la fréquentation d'un service éducatif en petite
enfance revêt une importance encore plus grande, car la nécessité d'intégration à une nouvelle société est un défi
tellement plus grand pour l'enfant comme pour sa famille.
Combien de fois dans
le réseau de la petite enfance avons-nous eu l'occasion d'observer que les
premières étapes de l'intégration d'une famille immigrante à la société
québécoise ont été réalisées par le biais des enfants? C'est à ce point vrai qu'il n'est pas rare de constater dans notre
réseau que l'enfant qui fréquente nos services éducatifs devient
l'interprète entre l'éducatrice et le parent après seulement quelques semaines
passées que ce soit en CPE ou en milieu familial régi et subventionné.
Ce que je viens de
vous dire, ce n'est qu'un exemple des impacts positifs des services éducatifs à
la petite enfance. Notre mémoire, que vous
avez reçu, fournit une liste plus complète d'avantages de la fréquentation d'un
CPE ou d'un milieu familial régi et
subventionné. Cependant, cet exemple démontre bien l'importance que peut avoir...
pour éviter l'isolement d'un enfant et de toute une famille nouvellement
arrivée au Québec.
Malheureusement, l'interprétation
actuelle du Règlement sur la contribution réduite a pour effet de limiter l'accès à des services éducatifs pour les enfants
sans papiers, et cela même si elles se trouvent au Canada pour s'y établir
définitivement, si elles arrivent ici pour fuir la persécution dans leur pays
d'origine ou simplement pour subvenir à leurs
besoins durant le traitement d'une demande d'asile. Nous recommandons, la FIPEQ
et la CSQ, que le règlement actuel soit modifié afin de permettre
l'accès à des places à contribution réduite pour tous les enfants dont les
parents ont un statut migratoire précaire.
Finalement, le statut
migratoire précaire peut être également associé à une situation financière
précaire. En réalité, le parent qui ne
possède pas un revenu viable, que ce soit par l'insuffisance de sa rémunération
salariale ou par l'absence de
revenus, n'aura pas les moyens financiers de payer la contribution réduite qui
permettrait la fréquentation du service de garde pour son ou ses enfants
car, pour être exempté de ce paiement, actuellement, la seule possibilité est
de bénéficier de programmes sociaux, programmes sociaux inaccessibles lorsque
le statut migratoire est précaire.
Considérant que les
effets positifs des services éducatifs à la petite enfance sont encore plus
significatifs pour les enfants issus de
milieux défavorisés, il serait important de ne pas limiter l'accès aux services. Au
contraire, on devrait créer des incitatifs, mettre des incitatifs en
place pour faciliter cet accès. Un de ceux-ci pourrait être l'exemption de la contribution
de base pour les enfants 0-5 ans dont les parents n'ont pas accès à un
revenu viable.
Pour présenter la
Convention internationale des droits de l'enfant, l'UNICEF souligne que les
enfants sont plus vulnérables que les adultes, qu'ils n'ont ni droit de vote ni
influence politique ou économique. Ils sont toutefois des êtres à part entière,
porteurs de droits sociaux, économiques et civils, culturels et politiques. Ils
ont des droits fondamentaux obligatoires et non négligeables. Le développement
sain des enfants est crucial pour l'avenir de toute société et le droit de se
développer fait partie des principes fondamentaux concernant les enfants.
Le
droit de tous les enfants d'accéder à des services de santé ainsi qu'à des
services éducatifs dès la naissance devrait
être implicite dans une société comme la nôtre, et cela, quel que soit le
statut migratoire ou celui de leurs parents. Les enfants doivent être
considérés comme étant l'avenir sans condition, sans restriction, et il est de
notre devoir, en tant que société, de leur ouvrir les portes de cet avenir.
Plus souvent
qu'autrement, l'enfant issu d'une famille au statut migratoire précaire a vécu
un déracinement. Nous avons l'obligation de tout mettre en oeuvre afin de lui
permettre de prendre racine ici si nous voulons assurer son développement dans les meilleures conditions possibles. Si le Québec
est une terre d'accueil, une bonne terre d'accueil, il est encore plus important qu'il soit le berceau
pour les enfants qu'il accueille et que ce soit fait avec toute la chaleur
humaine possible, aujourd'hui et pour demain. Je vous remercie.
Le Président
(M. Provençal)
: Nous allons
maintenant débuter la période d'échange.
Alors, M. le ministre,
vous disposez de 14 min 30 s. À vous la parole.
M. Dubé : Oui, très bien. Alors, merci beaucoup, M. le Président. Et, Mme Grenon, merci beaucoup pour votre présentation. Je
pense que, s'il y a bien un groupe qui connaissez bien les tout-petits, c'est
bien vous. Et, quand on parle des grands bénéfices de ce projet de loi là,
c'est d'essayer de leur donner, vous l'avez bien dit au début de votre
présentation, là, une chance égale, puis je pense que ça, c'est très, très
important.
J'aimerais revenir,
là, profiter de votre présence, peut-être, pour... Il y a un point technique
que vous avez soulevé, puis je veux juste être certain que je le comprends
bien, puis après ça je pourrai passer la parole à mes collègues du côté
gouvernemental, c'est toute la question sur l'expression «depuis sa naissance».
Peut-être que... Je vais vous dire, je pense que je comprends, nous, dans le...
du côté du gouvernement, pourquoi cette précision-là a été mise, puis après ça
je vous demanderais de réagir.
Vous avez un peu...
vous avez donné quelques éléments, mais je voudrais vous entendre pour préciser
votre pensée là-dessus. Nous, ça a été fait dans le contexte où, je vais dire,
un couple qui est résident au Québec déménage à l'étranger. Le couple a un
enfant, et on veut s'assurer que, même s'il n'est pas au Québec depuis sa
naissance, il aurait la couverture. C'était dans ce cadre-là qu'on avait fait
cette précision-là, si j'ai bien compris, là, parce que je ne suis pas un
légiste, là, mais, si j'ai bien compris, c'était ça, notre objectif.
Moi, j'aimerais vous
entendre pourquoi vous trouvez important qu'on l'enlève par rapport aux enfants
que vous voulez protéger, là. Je veux juste bien être certain que, si on avait
à faire des... On dit toujours que le projet de loi, il est perfectible, là,
puis vous êtes très précis sur ce point-là, j'aimerais ça vous entendre, où
vous pensez que ça peut donner un préjudice à d'autres enfants, dépendamment
des catégories de parents, etc. Est-ce que je peux vous demander de préciser
ça, s'il vous plaît?
• (11 h 50) •
M. Gagnon
(Marc) : Oui. Alors, c'est moi qui vais répondre à la question. Merci
beaucoup, M. le ministre.
C'est que, dans le
fond, l'article 7, on veut modifier le quatrième alinéa et on dit
«l'enfant mineur né hors du Québec si le
parent, mère ou père, avec lequel il demeure en permanence depuis sa
naissance», c'est que, dans le fond, comme on l'a compris, c'est que
l'enfant demeure avec un parent, et on demande, selon ce texte-là, que l'enfant
demeure avec le même parent depuis sa naissance. Nous, ce qu'on voit, c'est que,
s'il y avait un changement de garde, si le père et la mère étaient séparés ou
divorcés et s'il y avait un changement de garde, à ce moment-là, bien, l'enfant
ne répondrait plus à ce critère-là, et on pense que le fait de résider avec le
parent simplement serait suffisant.
M. Dubé :
O.K., donc, dans le cas d'une séparation ou peu importe, là, une réorganisation
de la garde, puis la garde... O.K., O.K., je pense que je comprends quel impact que ça peut avoir. O.K., en tout cas, on va y réfléchir, là. Puis
il y a peut-être des collègues qui vous reposeront la question,
parce que ça avait l'air d'être un élément important.
De façon globale,
puis là j'avais dit que je laissais la parole à mes collègues, mais je vais le
faire rapidement, parce que j'ai dit : Vous êtes vraiment un groupe qui
connaissez bien les tout-petits, là, c'est quoi, les plus grands bénéfices que vous voyez du projet de loi, là, qu'on a... que vous avez
devant vous en ce moment, là, pour la protection de nos enfants?
Mme Grenon (Valérie) :
C'est moi qui va répondre. Dans les faits, pour nous, c'est très bénéfique,
parce que, veux veux pas, un enfant qui a une bonne santé, donc, suivi
rapidement... Puis, on le sait, souvent, ça va être des situations précaires,
des familles qui vont être défavorisées, qui vont s'en venir, là... On ne veut
pas catégoriser, mais c'est sûr qu'un enfant plus rapidement pris en charge par
le système de santé... Puis on le sait, qu'on a un bon système de santé. Donc,
ça va lui permettre... de lui donner une chance égale.
Et également c'est
pour ça qu'on faisait un lien avec la petite enfance, parce que, oui, il y a la
santé physique, mais il y a la santé, également, de son développement, et
actuellement ces enfants-là n'ont pas accès aux services éducatifs à la petite
enfance régis et subventionnés. Donc, pour nous, la chance égale passe, oui,
par la santé, mais la santé, veux veux pas,
passe par son développement, que ça soit surtout son développement global,
développement moteur, développement intellectuel.
Donc, dans la vie, en
général, on est très liés avec les services sociaux pour accompagner les
familles, accompagner les enfants s'ils ont des besoins particuliers. Donc,
encore plus, là, ces enfants-là devraient avoir leurs pas dedans... puis c'est pour
ça qu'on saluait quand même ce projet de loi là. Donc, on était très favorables
au projet de loi, mais on voulait faire un pan de... Il pourrait y avoir un
ajout.
Puis c'est pour ça
aussi qu'on faisait un lien avec le projet de loi n° 144, qui avait été
fait... déposé en 2017, en lien avec... parce que les mêmes enfants qu'on
parle, bien, quand ils arrivent à leurs cinq ans, ils ont accès aux services
éducatifs scolaires. Donc, pour nous, on est le premier maillon de l'éducation,
donc on doit donner cette même chance là, puis ça va donner une chance à toute
la famille également, là, par le fait même.
M. Dubé :
Bon, M. le Président, je vais laisser mes collègues pouvoir poser d'autres
questions à...
Le Président (M. Provençal)
: Oui. J'aimerais qu'elle lève la main, il ou elle. Alors, Mme la députée
de Roberval, s'il vous plaît.
Mme Guillemette :
Merci, M. le Président. Il nous reste combien de temps?
Le Président
(M. Provençal)
:
8 min 10 s.
Mme Guillemette :
Merci. Bien, merci de nous avoir partagé votre mémoire et d'être ici aujourd'hui
pour mieux nous expliquer... Comme le disait M. le ministre, vous êtes vraiment
le premier maillon de la chaîne. Et moi, par
curiosité, j'aimerais savoir est-ce
que vous avez une idée ça peut
toucher combien d'enfants, cette mesure-là, au niveau de la RAMQ.
M. Gagnon
(Marc) : Oui, je peux répondre. Alors, les chiffres que nous... les
derniers chiffres que nous avons vus, ça
représenterait environ 700 enfants. C'est sûr que, là, on parle
d'enfants, là, qui peuvent aller jusqu'à 18 ans. Au niveau des 0-5 ans, bien,
je n'ai pas l'information, là. Je ne suis pas capable de vous transmettre
cette information-là.
Mme Guillemette :
O.K., parfait, merci.
Puis, dès les
premières pages de votre mémoire, vous nous parlez de chances égales, puis
c'est beaucoup dans votre discours aussi. Donc, en partant de cette
prémisse-là, croyez-vous que le projet de loi atteint, en tout cas, un de ces objectifs-là puis il va assurer à tous les enfants une
chance égale? On sait que ce n'est pas idéal, mais est-ce que vous pensez qu'on est sur la
bonne voie? Et qu'est-ce que ça pourrait avoir comme impact?
Mme Grenon
(Valérie) : Oui, je vais répondre, Mme Guillemette. Oui, comme je
disais tout à l'heure, pour nous, le projet de loi, on le voit favorablement. C'est un premier pas vers une chance égale au niveau
de la santé, de là qu'on le bonifiait pour donner une chance égale pour
accéder aux services éducatifs de qualité pour permettre à ces familles-là, là,
de les aider encore plus au niveau de l'accompagnement, oui, de la santé.
Mais, on le sait aussi, plus vite qu'un enfant va
arriver dans notre réseau éducatif, plus vite qu'on va être capables
d'accompagner le parent et de déceler des difficultés qui pourraient amener des
problèmes de santé, mais aussi des problèmes de développement. Donc, plus vite qu'il va, oui, avoir accès à un
service de santé, c'est parfait, mais venir
dans notre réseau... On va pouvoir compléter l'aide professionnelle
qu'il peut avoir avec la santé. On n'est pas des médecins, par contre on
est là pour le développement de l'enfant, donc on peut être des partenaires. Et
également, au-delà de l'enfant, on est des
partenaires avec les parents. On marche coude à coude avec eux pour les aider à
stimuler leurs enfants, à parler avec
eux des bons coups, mais également des
choses qu'on aurait à développer. Donc, on pourrait être un soutien également,
un filet social pour les familles, au-delà de l'enfant, oui, mais pour les
familles également, en appui avec la santé.
Mme Guillemette : Parfait,
merci. Et, bon, si le projet de loi est adopté, on aura un enjeu de
communication pour communiquer aux familles qui n'ont pas accès que, maintenant,
pour eux, c'est possible. Donc, est-ce
que... Comment vous voyez ça? Et est-ce que
vous pourriez être mis à contribution dans ce continuum, là, de volet de communication?
Mme Grenon (Valérie) : Tout à
fait, c'est sûr qu'on peut être un partenaire là-dedans. C'est sûr que beaucoup
de CPE et de groupes coordonnateurs
ont des places protocoles... des protocoles signés d'aide avec des familles
immigrantes. Donc, probablement qu'on est capables aussi de passer par là pour
essayer de rejoindre le plus de familles et d'enfants possible pour que la
bonne nouvelle soit répandue. Donc, ça peut être... On peut être vraiment un
pan, là, des communications.
Mme Guillemette : Parfait,
merci. Je ne sais pas si j'ai d'autres collègues qui auraient des questions ou
s'il nous reste du temps, là.
Le Président (M. Provençal)
: Il vous reste du temps. Il reste
4 min 15 s, mais je n'ai pas d'autre main levée, présentement,
là.
Mme Guillemette : Parfait. Ça
va pour moi.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la députée de Soulanges.
Mme Picard :
Bonjour. Merci beaucoup d'être parmi nous aujourd'hui. Votre apport est très
intéressant pour notre projet de loi.
En fait, je voulais savoir, sur le terrain, là,
quand un enfant d'une personne immigrante entre dans les services de garde,
comment ça se passe. C'est quoi, les enjeux? Comment on pourrait expliquer
concrètement, là, ce qui se passe sur le terrain pour aider les travaux de la
commission?
• (12 heures) •
Mme Grenon (Valérie) : Merci.
Actuellement, ça se passe vraiment bien. Je pense que c'est pour ça qu'on en
fait la promotion pour les enfants qui n'ont pas accès. Les enfants qui ont
accès à notre réseau... Comme je viens de le
dire, on est vraiment des partenaires avec les parents. Souvent, l'enfant va
apprendre rapidement le français, donc, comme je le disais tout à
l'heure, va nous aider à communiquer avec le parent. Puis on amène la
structure, aussi, de comment on fonctionne un peu au Québec.
Moi-même, étant éducatrice à la base... je ne
sais pas si vous connaissez un peu Québec, mais on était dans le secteur de
Vanier, beaucoup de familles immigrantes de partout, puis on a aidé, oui, pour
le langage, mais aussi j'en ai vus, des enfants arriver pas de bottes, pas de
manteau. Donc, on amène un soutien important. Il y a eu aussi tout le... au
niveau de l'hygiène, qu'on a amenée de l'aide aux parents pour bien comprendre
comment ça se passe au Québec et améliorer leur développement.
Souvent, il n'y a pas... les cultures... la
culture n'est pas la même, donc, sur l'importance de papa, maman, comment qu'il
faut avoir la structure pour aider leur enfant. Donc, il y a beaucoup
d'accompagnement qui est fait, que ça soit au niveau de l'alimentation, que ça
soit au niveau du développement, mais aussi d'aider la famille à avoir des
ressources, donc, qu'est-ce qui se passe dans le quartier pour aller chercher
de... au-delà des services éducatifs, pour les accompagner dans leur
cheminement. Puis en même temps, bien, une place de qualité pour leur enfant,
bien, leur permet, eux, comme adultes,
d'essayer de se trouver un emploi ou de retourner à l'école pour essayer
d'embarquer mieux dans la culture québécoise. Donc, c'est sûr qu'on est
un plus, puis pour nous, les intervenantes, bien, c'est encore mieux pour nous,
parce que c'est des petits trésors à deux pattes qui nous apprennent beaucoup
sur l'humain en général. Donc, c'est tout, là, Mme Picard.
Mme Picard : Merci.
Le Président
(M. Provençal)
: J'invite maintenant la
députée de Lotbinière-Frontenac à formuler sa question.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Merci, M. le Président. Combien de temps il
reste?
Le Président (M. Provençal)
: 1 min 30 s.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : D'accord, je vais aller rapidement. Donc,
tout à l'heure, M. le ministre vous
avait posé la question concernant l'expression que vous voudriez qu'on enlève
du projet de loi, «né au Québec». Vous aviez donné
une explication, mais je suis désolée, mais moi, je ne comprends pas. Donc,
j'aimerais ça que... si vous pouviez
élaborer puis nous expliquer, là, cette... ce que vous voudriez, bien, enlever,
par exemple, là. Excusez-moi.
M. Gagnon (Marc) : Oui, bien, c'est... Là, vous m'avez parlé de...
vous avez parlé de l'expression «né au Québec», là. Nous, c'est «depuis
sa naissance».
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : O.K.
M. Gagnon
(Marc) : Donc, est-ce que c'est cette...
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Oui, c'est la même chose. Excusez-moi...
M. Gagnon
(Marc) : Il n'y a pas de problème, il n'y a pas de problème.
Donc, écoutez, nous,
ce qu'on voit dans l'utilisation de l'expression «depuis sa naissance», on le
voit associé avec la... être... habiter en
permanence avec un parent ou l'autre depuis sa naissance, et, lorsqu'on va se
retrouver dans des situations où il
va y avoir un changement de garde, bien, à ce moment-là, l'enfant qui va avoir
subi un changement de garde pourrait être exempt de l'accès aux services
de soins de santé, aux services de santé, et je sais que ce n'est pas votre
intention, donc...
Le Président
(M. Provençal)
: Merci. Vous allez
m'excuser, M. Gagnon, je suis obligé de vous interrompre pour céder la
parole à la députée de Maurice-Richard pour les
9 min 40 s qui vont suivre. Alors, à vous la parole, Mme la
députée.
Mme Montpetit :
Merci, M. le Président. Bonjour, Mme Grenon, bonjour, M. Gagnon.
M. Gagnon, de toute façon, je
vais peut-être vous laisser compléter là-dessus, parce que ce que je
comprends... puis ça m'apparaît très, très pertinent, ce que vous
soulignez sur l'expression «depuis sa naissance», puis je veux juste être
certaine que je l'interprète de la même façon que vous, mais je suis certaine
que les juristes du ministère sont à l'écoute, puis, quand on va débuter
l'étude détaillée, ils vont pouvoir aussi nous éclairer sur l'interprétation.
Mais ce que j'en comprends, c'est que... là, je donne un exemple fictif, mais,
dans l'article 7, par exemple, quand ça dit «l'enfant mineur né hors du Québec
est éligible si le parent, mère ou père, avec lequel il demeure en permanence
depuis sa naissance, est une personne qui réside
au Québec», donc, si un enfant était, par exemple, né dans... puis, je pense, ça peut s'appliquer aussi, probablement, dans des contextes qui ne
sont pas une garde partagée, mais né à l'extérieur du Québec, vit depuis sa
naissance, par exemple, les six premiers mois ou la première année
de naissance avec son père ou sa mère, alors que l'autre parent réside
au Québec, par cette formulation-là, une fois qu'il reviendrait au Québec,
serait exclu de l'application de la loi. C'est bien ça que vous entendez par
vos... par les recommandations que vous faites?
M. Gagnon (Marc) : En effet, en effet. C'est qu'il y a
des circonstances... On peut imaginer des circonstances dans lesquelles, suite à un changement de garde, l'enfant
pourrait ne pas avoir accès au système de santé, et ce qu'on veut éviter, c'est cela. On a regardé le texte,
là, et l'interprétation qu'on vous présente... l'interprétation problématique qu'on
vous présente aurait été confirmée. Donc, idéalement, bien, ce serait de
trouver un moyen.
Nous, notre recommandation,
c'est d'éliminer «depuis sa naissance». On pense que ça ne changerait pas
l'esprit du texte en faisant ça. Et il y a peut-être d'autres possibilités,
puis il y a des personnes qui sont beaucoup plus compétentes que moi au niveau
juridique qui pourraient trouver des solutions, j'en suis convaincu. Nous, ce
qu'on voulait, c'est souligner, bien, on voit un danger avec l'utilisation de
l'expression et on voudrait éviter que, pour une interprétation différente, un
enfant soit privé de soins de santé.
Mme Montpetit :
Bien, c'est très pertinent de le porter à notre attention, parce que je pense
que l'objectif, justement, c'est de se sortir d'interprétations... bien, d'interprétations, justement, de l'application de la loi. Puis je pense
que... Ce que vous soulevez m'apparaît... en tout cas, mérite certainement
qu'on s'y penche sérieusement avec les juristes
quand on commencera l'étude. Mais je... Moi aussi, ça soulève des questions
dans mon esprit sur des situations, effectivement, de garde et d'enfant qui revient et qui
pourrait... ça pourrait être interprété pas dans le sens qu'on le souhaite.
J'aimerais vous entendre sur différents éléments
aussi. Il y a plusieurs groupes qui sont venus qui ont souligné le fait, justement,
qu'il y a des ambiguïtés dans le projet
de loi actuel qui pourraient,
justement, amener à reproduire certaines iniquités ou même en créer des
nouvelles.
Je ne vous ai pas
entendu sur la question du six mois qui est dans la loi, justement, sur...
Parce que je vous ai entendu beaucoup parler de... bon, d'égalité des chances
puis le fait, justement, vous l'avez mentionné à quelques reprises, que le
droit à l'accès doit se faire sans égard au statut migratoire des parents, mais
je ne vous ai pas entendu spécifiquement sur la question du six mois ou
sur l'intention qui doit être démontrée de rester au Québec. Est-ce que ça vous
apparaît... Et puis sur toute la question, aussi, de comment le parent doit
faire cette démonstration-là, on a plusieurs groupes qui sont venus nous
souligner que l'aspect administratif, justement, pour des gens qui ne parlaient
pas nécessairement la langue, pouvait poser différents problèmes.
Comme vous êtes aux premières loges de constater, aussi, ces situations-là,
j'imagine que vous pouvez peut-être nous éclairer davantage, là, sur ces questions-là.
M. Gagnon (Marc) : Bien, personnellement,
je ne suis pas un expert en immigration. Et le travail qu'on a fait, à la FIPEQ
et à la CSQ, face au projet de loi, c'était de s'assurer qu'on donnait des
chances égales à l'ensemble des tout-petits, des
0-5 ans, et c'est pour ça que nos deux recommandations principales
sont l'accès aux services éducatifs à la petite-enfance pour les enfants dont
un parent a un statut précaire, un statut migratoire précaire.
Je vous avoue que j'ai regardé avec beaucoup d'intérêt
les articles qui ont été publiés suite à la commission...
(Panne de son)
Le Président (M. Provençal)
: Petit problème technique.
M. Gagnon (Marc) : ...je
n'avais pas vu... Est-ce que je suis revenu?
Le Président (M. Provençal)
: Oui.
M. Gagnon (Marc) : Oui. Je
m'excuse. Je ne sais pas quand est-ce que j'ai quitté, là. Je disais que je
n'étais pas un expert en immigration, que j'avais lu avec attention, là, les
articles la semaine dernière.
Par contre, nous avons regardé en fonction des
services éducatifs à la petite-enfance. Notre recommandation, si on avait à
retravailler le dossier, ce serait de s'assurer de rendre les choses faciles
pour les enfants, parce que, dans le fond, on parle de droits des enfants, droit à la
santé, droit à l'éducation, droit aux services éducatifs à la
petite-enfance. Et, pour ces enfants-là, ce n'est pas eux autres qui ont à
faire toutes les démarches, puis, pour que ça soit facile pour eux,
bien, ça devrait être facile aussi pour les parents, surtout pour les parents
qui ne connaissent pas le fonctionnement du Québec,
le fonctionnement du Canada, qui arrivent ici, qui sont... Ce n'est pas...
Souvent, ce n'est pas seulement leur statut migratoire qui est précaire,
c'est leur situation financière, c'est leur situation émotionnelle aussi, parce
qu'en arrivant ici de différentes manières
autres que le chemin normal, bien, il y a des raisons à ça, il y a des gens qui
sont en... qui sont peut-être en détresse. Bien, il faut rendre
peut-être ça plus facile pour qu'on soit une terre d'accueil la plus
intéressante possible.
• (12 h 10) •
Mme Montpetit :
Vous m'ouvrez peut-être la porte, je vous... si pouvez continuer là-dessus, ou Mme Grenon,
sur votre deuxième recommandation, que je trouve fort intéressante. C'est sûr
qu'elle n'est pas sur l'accès aux places à contribution réduite dans les
services de garde, elle n'est pas... elle n'est pas exactement, j'allais dire,
sur le sujet du projet de loi, mais en même temps je pense que c'est la juste
continuité sur l'accès, à l'accès aux services, mais j'aurais aimé ça vous
entendre davantage sur cette recommandation-là, sur le fait qu'ils n'aient pas
cet accès-là, justement, comment ça se... comment ça se traduit. C'est quoi,
les conséquences, dans le fond, par rapport aux bénéfices qu'on pourrait aller
chercher? Parce que je trouve qu'il y a certainement un... Il y a certainement
quelque chose d'intéressant sur lequel on devrait se... qu'on devrait se
pencher aussi comme... comme législateurs.
Mme Grenon (Valérie) : Oui, ça
va me faire plaisir de répondre, puis je compléterai un peu ce que
M. Gagnon disait, parce que, même si la famille n'est pas là longtemps, tu
sais, on souhaite que... s'ils viennent au Québec,
qu'ils restent le plus longtemps possible puis qu'ils deviennent avec un
statut, là, pas migratoire, mais le petit peu de temps qu'on pourrait
avoir l'enfant dans notre réseau, bien, on va lui donner beaucoup de chances
puis on va lui donner un petit bagage qui va le suivre toute sa vie.
L'enfant de cinq ans... de 0-5 ans,
c'est une petite éponge, donc, rapidement, si on est capables de lui apporter
des soins... puis les soins de santé, c'est primordial. Mais pourquoi qu'on
fait le lien? Nous, c'est que ce qu'on lui amène comme soins psychologiques,
langagiers, au niveau de la sociabilité, de son développement moteur et
intellectuel, bien, pour nous, c'est des soins de santé, c'est des soins de
santé parce que ça va lui donner des racines solides, sa base de son affection.
On le sait, là, l'enfant de 0-5 ans passe tout par l'affection. Dès que le
lien d'attachement est fait, l'enfant va être ouvert à favoriser son
développement.
Puis, bien, veux veux pas, si le parent sent son
enfant en sécurité, bien, ça va lui permettre d'essayer de créer des liens, de
se créer un réseau professionnel ou social comme adulte pour peut-être qu'on
ait une chance de garder cette belle famille là avec nous au Québec pour plus
longtemps, donc de là les bénéfices, puis c'est pour ça que nous, on faisait un
lien. Oui, le projet de loi ne touche pas le réseau de la petite enfance, et
ça, on l'avait très bien compris, mais, pour nous, ce qu'on amène comme soins,
bien, c'est un lien direct avec le système de santé. Donc, on doit être des
partenaires là-dedans, c'est clair pour nous.
Mme Montpetit : ...
Le Président (M. Provençal)
: Je vais...
Mme Montpetit : Oui, allez-y.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, Mme la députée.
Je cède maintenant la parole au député de Laurier-Dorion.
Vous disposez de 2 min 25 s.
M. Fontecilla : Merci, M. le
Président. Bonjour, madame, monsieur, merci beaucoup d'être ici, là.
Écoutez, une question très en détail, là. Vous
avez nommé... Vous avez quantifié le phénomène, vous avez parlé de
700 enfants, là, de 0-18 ans. Comment êtes-vous arrivés à ce
chiffre-là?
M. Gagnon
(Marc) : C'est un chiffre que nous avons vu dans un document de la
RAMQ.
M. Fontecilla : O.K., c'est parfait. Et vous, évidemment... Ici, on traite d'un sujet, là, qui touche uniquement, là, la Régie
de l'assurance maladie du Québec, là, et donc c'est l'accessibilité à la RAMQ.
Et vous, vous proposez carrément
d'inclure... et vous assimilez la question de l'accès à des services de garde
subventionnés, à des places réduites et... à des places à contribution
réduite, là, et vous faites le lien, là, que c'est aussi une question de santé.
Or, les places
réduites, le financement du système de garde subventionné, ça dépend d'un autre
ministère, le ministère de la Famille, là.
Mais, pour bien comprendre, vous, vous proposez, là, en quelque sorte,
d'ajouter au projet de loi n° 83 des articles
qui permettent l'accès à des places à contribution réduite. C'est ça, votre
intention, là. Donc, c'est quelque chose qui touche le ministère de la Famille,
là?
Mme Grenon
(Valérie) : Tout à fait. Notre intention, c'est... si on est capables
de faire ajouter quelque chose là, oui, si
c'est par le changement d'un règlement. Parce qu'actuellement ces enfants-là,
dû au statut de leurs parents, n'ont pas accès aux services. Quand on
fait un lien avec la santé, c'est qu'on le dit souvent... Puis ça a été prouvé,
on est les yeux sur l'enfant pour voir s'il y aurait un problème.
Puis
la santé n'est pas seulement physique, mais elle peut être développementale
et... que ce soit intellectuelle ou physique, qui n'est pas
nécessairement, là, un trouble de santé qui mériterait un médecin, mais
peut-être un spécialiste au niveau du langage, au niveau de son développement
physique.
Donc, pour nous, plus
vite qu'il va arriver dans notre réseau, mieux que ça va être pour sa santé et
qu'on pourra accompagner le parent vers les soins spécialisés, là, au niveau
des médecins.
Le Président
(M. Provençal)
: Merci beaucoup,
Mme Grenon. Je suis obligé de vous interrompre...
Mme Grenon
(Valérie) : Pas de problème.
Le Président
(M. Provençal)
: ...pour
céder la parole au député des Îles-de-la-Madeleine pour
2 min 25 s.
M. Arseneau :
Merci beaucoup, M. le Président. Merci à nos invités pour leur présentation et
puis d'attirer notre attention sur d'autres volets, là, qui peuvent être ou
paraître discriminatoires envers les enfants qui n'ont pas de statut migratoire
établi, notamment pour avoir des services de garde, pour obtenir, donc, des
services qui peuvent aussi, là, contribuer à leur santé physique, et émotive,
et affective.
J'ai comme
l'impression, en lisant le mémoire, que c'est comme si on avait regardé la
problématique en silo, de façon très, très
ciblée, accès à la RAMQ, alors qu'on aurait dû ratisser beaucoup plus large.
C'est un peu ce que je conclus de votre mémoire, parce qu'en fait il
porte davantage sur les services de garde, évidemment, que l'accès à la RAMQ.
Mme Grenon
(Valérie) : Bien, tout à fait. Pour nous, c'est un très bon pas, on
est très favorables, comme on le disait tout
à l'heure, au projet de loi, avec le petit correctif, là, «depuis sa
naissance». Mais, pour nous, oui, on devrait aller voir plus grand que la santé seulement du jeune enfant, mais bien
dans son développement complet qui va lui donner des bonnes bases.
Puis, bien, c'est
dans notre réseau qu'il va acquérir les autres bases. On ne remplacera jamais
un médecin, ça, c'est clair, ou le système
de santé, mais on est un partenaire important pour assurer le développement de
l'enfant, puis plus rapidement qu'on pourrait voir des lacunes envers
nous versus en accompagnement avec les spécialistes, bien, on va lui donner la
meilleure chance possible.
M. Arseneau :
Donc, on a regardé le problème ou les enjeux auxquels les enfants qui n'ont pas
de statut migratoire, là, défini ou clair
avec un seul bout de la lorgnette, alors qu'on devrait regarder, justement,
l'ensemble des conditions et des environnements favorables à leur bon
développement et à leur santé. C'est ce que vous nous dites, essentiellement.
Mme Grenon
(Valérie) : Tout à fait.
M. Arseneau :
Maintenant, est-ce que... comme d'autres l'ont fait avant vous... je ne sais
pas si j'ai quelques secondes encore...
Le Président
(M. Provençal)
: 10 secondes.
M. Arseneau :
Plusieurs nous avaient dit : Le projet de loi qui est déposé, il demeure
sujet à interprétation. Outre la recommandation que vous avez faite, est-ce
qu'il y a... vous avez ressenti ça?
Le Président
(M. Provençal)
: Malheureusement, on
ne pourra pas avoir la réponse.
M. Arseneau :
D'accord. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Je remercie Mme Grenon et M. Gagnon pour leur
contribution aux travaux de la commission.
Je
suspends les travaux quelques instants afin que l'on puisse accueillir, par
visioconférence, le prochain groupe. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 12 h 18)
(Reprise à 12 h 20)
Le Président (M. Provençal)
: Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de
l'Association des pédiatres du Québec.
Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après
quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la
commission. Je vous invite à vous présenter et à débuter votre exposé. À vous
la parole.
Association des pédiatres du Québec (APQ)
M. Lebel (Marc) : Merci beaucoup
à la commission de nous avoir convoqués. Mon nom est Marc Lebel, je suis
pédiatre et infectiologue au CHU Sainte-Justine et je suis aussi le président
de l'Association des pédiatres du Québec.
Pour mettre en perspective, l'Association des
pédiatres, en fait, c'est un organisme sans but lucratif... on est voués à la
promotion, à la défense d'une médecine pédiatrique, là, québécoise de la haute
qualité. Et, dans cette perspective, on s'est toujours souciés au premier chef
de la défense des droits et des besoins des enfants. Vous savez que l'APQ a été
quand même assez vocale au courant de la dernière année, particulièrement, dans
le cadre de la pandémie, le retour des enfants en garderie, le retour des
enfants à l'école. Donc, le pédiatre, en fait, c'est un expert des problèmes de
la santé de l'enfant tant au niveau physique, mental et développemental.
On sait que Médecins du Monde, en 2016,
avait recommandé l'accès à la RAMQ pour les enfants qui sont nés dans la
province de Québec. Au début 2019, l'Observatoire des tout-petits avait
fait un état des lieux et des recommandations, puis, en avril de la même année,
en 2019, les quatre chefs des départements universitaires des CHU
pédiatriques du Québec, la Société canadienne de pédiatrie puis l'Association
des pédiatres s'étaient clairement positionnés pour un accès universel en soins
de santé pour les enfants migrants, ceux qui ont un statut migratoire précoce.
On sait qu'effectivement des enfants qui habitent au Québec, dont plusieurs
sont nés au Canada, n'ont pas accès à des soins couverts par l'assurance
maladie. Certains ont droit au programme fédéral, beaucoup tombent entre deux
chaises.
Il faut réaliser que ces enfants-là, en fait,
ils n'ont pas décidé qu'ils venaient au Québec, c'est leurs parents. Donc, ces enfants-là n'avaient pas un mot à dire
par rapport aux conditions dans lesquelles ils sont nés ou ils venaient.
Pourquoi c'est important? Bien, c'est important parce que le... qu'ils aient
une couverture parce que le bien-être des enfants est vraiment nécessaire pour la
réalisation de leur plein potentiel en tant que membres actifs et engagés de notre société. C'est vraiment un droit fondamental
et c'est important qu'ils puissent y avoir accès, et y avoir accès à partir
du début.
Au point de vue des pédiatres, on est confrontés
régulièrement avec la problématique de ces enfants non assurés. Il faut quand même savoir, le fait que des parents soient ici,
ça ne veut pas dire que leur enfant va avoir droit ou accès aux soins médicaux. Qu'est-ce que ça a comme
implication? Ça a comme implication que souvent les consultations
médicales sont plus tardives, c'est-à-dire les parents décident en fait de
retarder la consultation parce qu'ils savent qu'il
y a des frais associés. Qu'est-ce que ça peut faire et... comme conséquence? Bien,
ça a comme conséquence, en fait, d'augmenter
la sévérité de la maladie et des complications, donc ça aggrave leur état, ça
entraîne plus d'hospitalisations, des traitements plus coûteux.
Il faut savoir aussi que, s'ils avaient accès à
des soins réguliers et préventifs, on pourrait, en fait, prévenir certaines
maladies, des pathologies qui auraient été évitables si on avait eu un suivi
adéquat. On est pris aussi avec des
problèmes d'enfants qui ont des retards de développement. Et les retards de développement, quand ils ne
sont pas diagnostiqués assez tôt, ça peut avoir des conséquences à moyen
et à long terme pour le développement et le statut de l'enfant par après.
Souvent,
comme pédiatres, surtout quand l'enfant consulte à l'urgence ou le centre de
jour où il est hospitalisé, bien, on
est coincés, nous autres, entre les montants facturés par l'hôpital
aux parents puis notre désir d'offrir des soins et des traitements
appropriés. Les parents, quand ils viennent à l'urgence, ils sont facturés,
souvent on leur facture plusieurs centaines
de dollars, donc il y en a beaucoup qui retournent à la maison et consultent seulement
quand ils y sont obligés parce que l'état de l'enfant est instable ou sa pathologie
s'est compliquée. Donc, souvent, nous autres, on est pris. Bien, on veut traiter l'enfant, mais les parents,
en fait, ils voient les factures qui s'accumulent, et ça devient très problématique.
L'accès aux médicaments, aussi, est un enjeu.
Moi, je travaille en maladies infectieuses à Sainte-Justine. On a des enfants immigrants,
des réfugiés. On a la clinique de tuberculose et la clinique de VIH. En fait,
le traitement, la prise en charge de ces enfants-là, adolescents-là, bien, si
on n'est pas capables de leur donner leur médication, à ce moment-là, on risque
de se retrouver avec des complications beaucoup plus importantes.
Par exemple, quand j'ai fait... Je compare avec
nos voisins américains du Sud. Quand j'étais au... je faisais ma deuxième
spécialité en infectiologie pédiatrique, je l'ai bien vu, la différence entre
les hôpitaux privés et les hôpitaux publics en pédiatrie, mais c'était clair
que ceux qui n'avaient pas d'assurance, ils consultaient beaucoup plus tardivement, avaient beaucoup plus de complications,
donc ça leur donnait, en fait, des problèmes significatifs à court, à moyen et
à long terme, alors que, du point de vue de notre code déontologique, nous
autres, on veut... d'être un médecin, on veut s'assurer que nos patients, nos
enfants puissent avoir accès aux soins auxquels ils ont droit. On sait que,
quel que soit leur statut, les enfants ont droit à l'école, mais, pour la
santé, ça a l'air d'être quand même assez différent.
L'autre point qui est
problématique pour nous autres, et on a de la difficulté à comprendre, bien,
c'est le délai de carence de trois mois. Donc, c'est des gens qui ont le
droit, en fait, de venir au Québec, d'immigrer. Les lettres de la RAMQ, j'en ai
vu souvent, on leur dit de prendre une assurance temporaire, hein? Malheureusement,
plusieurs ne le font pas, ça met les parents
dans un dilemme quand leur enfant tombe malade. Est-ce que je vais consulter? Est-ce que je retarde la consultation
médicale, que ce soit en cabinet ou aux urgences? Certains peuvent croire
miraculeusement que la maladie va disparaître, puis on se retrouve souvent avec
des évolutions plus compliquées. En pratique, s'ils ont droit à la RAMQ,
l'assurance médicaments dans trois mois, bien, je pense que c'est important
qu'ils puissent l'avoir dès le moment... Donc, ces enfants-là ont accès à l'éducation,
ils ont accès à la vaccination —
des fois, c'est complexe, là, pour la vaccination — mais c'est important, en fait,
qu'ils puissent avoir accès à la fois à l'assurance maladie puis à l'assurance
médicaments.
Dans les documents
qu'on vous a fournis, il y a le mémoire de l'Association des pédiatres, il y a
aussi un document attaché qui est fait par l'équipe du Children's sans
frontières, qui sont confrontés exactement aux mêmes types de problématiques.
Il y a plusieurs exemples de cas à la fin. Et pourquoi c'est là? Bien, c'est
sûr... en fait, c'est beaucoup des politiques gouvernementales, là, qui ne sont
certainement pas optimales pour la santé des enfants.
C'est
clair qu'on est très contents, très heureux, à l'Association des pédiatres, que
les choses veuillent changer avec le projet
de loi n° 83. Il faut réaliser
aussi que plusieurs provinces ont des accès aux soins médicaux pour tous
les enfants qui sont nés dans la province ou
nés au Canada. Donc, je pense que c'est... on est contents que
ça aille de l'avant, mais il faut... il va falloir faire attention, il faut quand même
s'assurer que ça... l'ensemble des enfants qui sont ici aient accès au
régime.
D'essayer de dire
qu'on veut sauver de l'argent, on sauve de l'argent à court terme, mais par la
suite ça nous coûte, en fait, de l'argent, parce qu'ils vont se retrouver avec
des maladies évitables s'ils avaient eu un suivi médical, des maladies évitables,
en fait, soit par la vaccination ou des pathologies qui auraient été...
Le Président
(M. Provençal)
: Merci
beaucoup, Dr Lebel.
M. Lebel
(Marc) : Merci.
• (12 h 30) •
Le Président (M. Provençal)
: Je suis obligé de vous interrompre pour céder la parole à M. le ministre pour 10 minutes.
M. Dubé :
Alors, bonjour, Dr Lebel. Premièrement, vous remercier de nous faire
partager votre expérience, puis surtout que vous devez être une personne assez
occupée en ce moment. Quand on a deux spécialités, une en pédiatrie puis l'autre en infectiologie, là, je
suis certain que, ces temps-ci, vous devez... vous devez être assez occupé. Et
puis merci beaucoup pour le travail que vous faites, là, particulièrement en ces temps difficiles de pandémie qui, on le sait, affecte
aussi nos enfants. Ça fait que je tiens à vous remercier pour le travail que
vous faites, Dr Lebel.
Je le sais... Je
sais, par contre, que vous êtes... vous n'êtes pas un avocat, alors... à moins
que vous ayez caché ça en plus et que c'est une autre de vos spécialités, là,
mais j'aimerais vous demander... puis je comprends très bien votre objectif,
vous vous dites, en tant que médecin : Plus ça va être facile pour nous
d'enlever les barrières pour être capables de soigner les enfants, plus, comme
médecins, on est heureux, puis ça, je respecte ça.
Il y a deux points
que je voudrais soulever, là, avant de passer la parole à mes collègues, c'est
celui dans... Vous dites que, pour l'accès à l'assurance maladie, bien, il
faudrait s'assurer que... Comment on pourrait définir pour les enfants qui
vivent au Québec? Alors, bon, je... vous me voyez venir un peu, là, on a toute
sorte d'enjeux, puis la raison pour laquelle
je suis prêt à vous écouter, mais comment vous... Ça veut dire quoi, pour vous,
vivre au Québec, là? Parce que
la journée qu'on décide de simplifier le langage légal, on peut avoir toute
sorte d'autres enjeux. Je voudrais juste vous entendre un petit peu là-dessus,
s'il vous plaît.
M. Lebel
(Marc) : Les enfants, c'est clair qu'on ne pense pas, là, aux
touristes ou aux voyageurs, là, qui viennent au Québec — nous autres, même chose,
quand on va à l'extérieur, on prend une assurance spéciale — mais c'est
vraiment dans le cadre, là... ceux qui sont les plus démunis, qui sont souvent
les moins les riches, c'est vraiment ceux qui ont des problèmes avec
l'immigration. Je vais vous parler de la Clinique tuberculose parce que, souvent,
quand on a un cas, bien, on va vouloir faire le «screening» de toute la
famille, puis, honnêtement, quand je dis «la famille», bien là, on regarde ceux
qui vivent, hein, dans la maison, puis on en trouve dans les armoires... Ça
fait que, là, je leur dis : Moi, je ne suis pas la police, je ne suis pas
un agent d'immigration, mais, s'il y a des enfants qui vivent au Québec... Il y
a des enfants, là... on a eu, là, une enfant de 10 ans, ça faisait
10 ans qu'elle était au Québec, qu'elle allait à l'école puis elle n'avait
pas de carte d'assurance maladie. Tu sais, après 10 ans, c'est clair que...
Donc, je pense que les touristes, les gens qui viennent de façon très
temporaire, non, mais pour les autres, on devrait faciliter. Juste dire, les
pédiatres, là, ces patients-là, on ne les facture pas, là, mais les parents se
retrouvent avec une facture extrêmement importante de l'hôpital.
M. Dubé : O.K. Donc, on reviendra sur la définition de «vivre au
Québec», mais je vous entends, votre... puis je pense qu'on est tous
très sensibles à ça.
Vous avez dit le mot
qu'il ne faut pas prononcer, là, le touriste... Écoutez, ce que je voudrais peut-être
vous demander : Est-ce que vous en avez vu souvent, vous, de ces cas-là?
Vous dites : Là, c'est vraiment exagéré, là, il y a des gens qui sont ici uniquement
pour venir obtenir un service puis s'en retourner après. Est-ce que
vous, de vos collègues, en voyez tant que ça, de ces cas-là?
M. Lebel
(Marc) : Ceux-là, non, on n'a pas beaucoup de tourisme médical. Je
pense qu'il y en a peut-être plus en obstétrique-gynécologie,
là, où les gens veulent avoir la citoyenneté canadienne. Mais les enfants qu'on voit, là, souvent, c'est des immigrants légaux ou
illégaux et pour lesquels, à un moment donné, ils sont soit dans le délai de
carence, soit ils n'ont pas accès au programme fédéral.
M. Dubé : Bien, ça m'amène un peu à votre délai de
carence. C'est pour ça que vous demandez de le suspendre aussi parce que...
pour les mêmes raisons que le... je ne vous ferai pas rentrer dans... non plus,
là, mais c'est là que vous voulez aller aussi pour enlever toutes ces
limitations-là?
M. Lebel
(Marc) : Oui, parce qu'en pratique, là, quand l'enfant est
vraiment malade, il va consulter à l'hôpital. Donc, nous autres, on a
des patients... tu sais, je prends l'exemple, là, à Sainte-Justine, là, aux
soins intensifs, ça va leur coûter plus que... théoriquement, plus que
5 000 $ par jour. Ils ne choisissent pas, là, d'aller aux soins
intensifs, puis on sait très bien qu'ils paieront probablement peu ou pas ça.
Je pense que, si on
est capables d'avoir les patients plus précocement, c'est-à-dire pas de
retards, comme ce qu'on voit aux États-Unis,
bien, au total, ça devrait être moins compliqué, moins de complications, moins
de séquelles à court, moyen et long terme.
M. Dubé :
Vous, vous êtes à Sainte-Justine... puis je terminerais avec ça, là, puis,
encore une fois, on a souvent la question, puis mes collègues, là, du
gouvernement et même l'opposition, on a essayé plusieurs fois de savoir de
combien de personnes... Donc, si je vous demandais, vous, là, dans votre
pratique de Sainte-Justine, là, si on enlevait la question du délai de carence
puis du lieu, de combien d'enfants on vous faciliterait la tâche puis qu'on
améliorait les soins sur une base annuelle, donnez-moi un ordre de grandeur, si
vous êtes capable de m'en donner un, parce que Sainte-Justine, c'est quand même
un des endroits...
M. Lebel
(Marc) : Je n'ai pas les chiffres de Sainte-Justine. Moi, ça fait
30 ans que je suis en pratique, donc ça fait quand même, pendant cette
période-là, des centaines de patients. Puis les gens à Sainte-Justine sont
fins, là, nos infirmières, les pharmaciens
ont réussi à trouver, de peine et de
misère, les sous pour les aider à passer à travers, les sous pour, effectivement,
payer les médicaments, mais c'est toujours du cas par cas, puis c'est toujours
à recommencer.
M. Dubé :
O.K. Quand vous dites une centaine, voulez-vous dire une centaine par année?
M. Lebel
(Marc) : Non, c'est... j'ai vu des centaines de...
M. Dubé :
Une centaine de...
M. Lebel
(Marc) : C'est probablement par année, personnellement, ça doit être
probablement aux alentours d'une... 10 à 20 par année pas plus que ça, là, mais
je travaille quand même dans un CHU pédiatrique tertiaire, donc on est le bout
de la ligne, là.
M. Dubé :
Non, non, je comprends bien. Bien, écoutez, ça me donne une idée, parce qu'on
essaie de voir, puis vous allez le comprendre, là, il y a une sensibilité à... beaucoup
d'empathie pour ces enfants-là, mais en même temps, essayer de voir dans quoi
on s'embarque si on allégeait encore plus le projet de loi, mais j'apprécie beaucoup.
Je vais laisser mes
collègues continuer, mais encore une fois, merci beaucoup, Dr Lebel, d'être là.
Merci.
M. Lebel
(Marc) : Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Oui, M. le ministre, je vais céder la parole à la députée de Soulanges,
et j'ai fait une erreur, c'est 13 minutes en tout que vous aviez.
Mme la députée.
Mme Picard :
Bonjour. M. le Président, il me reste combien de temps? Est-ce que vous pouvez...
Le Président
(M. Provençal)
: Il vous reste
5 min 30 s.
Mme Picard :
Parfait. Bonjour, Dr Lebel. Moi... On s'est déjà rencontrés dans le passé,
là, ma petite cocotte, elle a été traitée par vous lors d'un séjour à
Sainte-Justine, donc je suis très contente que vous soyez parmi nous
aujourd'hui pour contribuer à nos travaux. On est choyés, je trouve, comme l'a
dit le ministre.
J'aurais deux questions. En fait, avec un enfant
qui est lourdement handicapé, je... Toute la question d'une entrée temporaire
ici, au Québec, un touriste vaccinal, les enfants qui vivent au Québec... En
fait, la question que je me pose, c'est comment on
pourrait... On ouvre une certaine porte, veux veux pas, aux enfants qui sont déjà
malades dans leur pays pour venir ici. Est-ce que, selon vous, la période de
trois mois ne pourrait pas aider à restreindre un peu, là, l'accès à notre
système par rapport aux autres pays ou aux enfants qui entreraient?
M. Lebel (Marc) : Bien, c'est
une très bonne question, mais, d'un autre côté, si l'enfant a vraiment une
maladie, là, sévère, il va falloir qu'il consulte, là. Je vais prendre un
exemple, là, qui est mentionné dans le document du Children's, patient avec une
anémie falciforme, ce n'est pas arrivé hier, c'est depuis la naissance que
c'est là. Ces enfants-là, si on leur... s'ils ont un suivi, on va être
capables, en fait, de prévenir des complications, prévenir, en fait, des
hospitalisations ou des visites à l'urgence. Donc, de dire que... le délai de
trois mois, là, en pratique, c'est une affaire pour régler... mais, en tout
cas, ma perspective, là, c'est probablement plus quelque chose d'un point de
vue monétaire, ça n'aide pas l'enfant. Je
comprends que le gouvernement, le ministère veut faire des... certaines règles,
là, mais il faut quand même penser
que nous autres, comme pédiatres, ce qu'on veut, c'est le bien-être de nos
enfants, puis de restreindre ça... puis je ne pense pas qu'on parle, là,
d'un nombre extrêmement élevé, le ministère, probablement, cherche le nombre,
mais le délai de carence, en fait, c'est un des gros problèmes. En pratique,
nous autres, on ne les facture pas, là, on fait ça, on s'occupe de l'enfant,
mais les parents se retrouvent avec des factures, puis c'est un incentif à ne
pas consulter. Puis je prends l'exemple de l'anémie falciforme, l'anémie
falciforme, fièvre, il faut qu'il aille à
l'urgence. Pourquoi? Parce qu'il peut décéder rapidement d'une infection à
pneumocoque. S'ils attendent, bien, on risque de se retrouver avec des
complications ou même des mortalités.
• (12 h 40) •
Mme Picard : Et avec le projet
de loi adopté, est-ce que vous pensez que les parents vont être à l'aise de venir vous voir un peu plus? Est-ce que vous
pensez que ça va se savoir dans le réseau? Est-ce que vous, vous pouvez
contribuer à partager la bonne nouvelle sur le terrain ou... Comment on peut
les rejoindre?
M. Lebel (Marc) : Ça, on peut
certainement le faire. Pour nous autres, de participer à ce qui améliore les soins des enfants, je pense que c'est... ça fait
partie de nos objectifs, puis on pourra participer, puis on pourra travailler
avec le ministère à cet effet-là.
Mme Picard : Parfait. Merci
beaucoup. M. le Président, c'était terminé, je n'ai plus d'autres
questions.
Le Président (M. Provençal) :
Oui, Mme la députée de Roberval aurait une question.
Mme Guillemette : Bonjour.
Merci d'être ici avec nous aujourd'hui.
Je voyais, dans votre mémoire, que vous avez
abordé, mais très, très succinctement, au niveau de la femme enceinte,
d'élargir les soins aussi de la RAMQ. J'aimerais vous entendre un petit peu
plus là-dessus.
M. Lebel
(Marc) : Je n'ai pas eu le
temps de le mentionner, donc merci de revenir là-dessus. C'est clair que la...
parce qu'une grossesse, bien, au bout de la
ligne, il y a un enfant, et ce qu'on voit, c'est que, quand, effectivement, il
n'y a pas de suivi ou le suivi est sous-optimal pour la femme enceinte,
plus de risques de complication et une grossesse plus difficile pour la mère,
puis, la même chose, on a plus de naissances prématurées, puis les unités
néonatales sont prises avec des enfants que, si la mère avait eu un suivi,
bien, peut-être qu'on ne serait pas rendus là. Ce qu'on voit, au point de vue des chiffres ministériels, là, des...
les naissances prématurées, plus ça va, plus ça diminue, mais effectivement,
s'il n'y a pas de suivi prénatal, on augmente le risque de complications. Donc,
pour nous autres, c'était une... je sais que ce n'est pas dans le projet de loi,
mais c'est quand même une considération importante, la prise en charge de ces mères-là. On ne parle pas de tout le monde non plus, on ne parle pas du tourisme médical, on va parler
surtout celles qui ont un statut migratoire, là, difficile et précaire.
Mme Guillemette : Et vous en
voyez beaucoup dans votre pratique...
M. Lebel (Marc) : Bien, moi, je
n'en vois pas. J'en parlais avec Diane Francoeur, qui est une de mes collègues
à Sainte-Justine, elle, elle en voit, là. Nos gens en néonatalogie, donc ceux
qui s'occupent des prématurés, ils en voient régulièrement. Ce n'est pas des
gros nombres, mais, quand même, pensez que, si on facture 5 000 $
pendant 30 ou 60 jours d'hospitalisation aux soins intensifs de la
néonatalogie, il n'y a pas grand monde qui est capable de payer ça.
Mme Guillemette : Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Alors, je vais maintenant céder la parole
à la députée de Maurice-Richard. Vous disposez de
8 min 40 s.
Mme Montpetit : Merci, M. le
Président. Bonjour, Dr Lebel. Merci, effectivement, d'être avec nous. Moi
aussi, je partage l'impression du ministre à ce sujet-là que vous devez être,
de façon générale, bien occupé, mais particulièrement, en plus, dans les
circonstances.
D'entrée de jeu, je vous écoutais parler puis je
regardais le... je lisais... je relisais votre mémoire, puis ça me faisait penser à... Il y a quelques années,
j'étais allée dans une conférence en médecine sur l'impact de la carte
d'assurance maladie lors de son introduction, et
il y avait une personne qui était présente — puis vous allez voir le lien, je
pense, puis c'est peut-être à ça que vous
voulez nous... c'est peut-être de ça dont... à ça dont vous voulez nous
sensibiliser — qui
disait que, justement, avant l'introduction de la carte d'assurance maladie,
donc quand elle était plus jeune, dans les années 60, elle était allée
voir un médecin, s'était retrouvée avec un garrot, elle avait mal, elle avait
mal, elle avait mal, mais, comme il y avait
une facturation à chaque visite chez le médecin, les parents avaient attendu,
évidemment, avant d'y aller, jusqu'à ce que ça s'infecte tellement que,
finalement, ça s'était traduit par une amputation du pouce.
Donc, est-ce que, quand vous nous référez...
C'est peut-être un cas... Bien, est-ce que c'est un cas extrême? En fait, je
pense que c'est une démonstration, moi, qui m'a marquée beaucoup, d'à quel
point ça peut vraiment faire une différence,
justement, d'avoir un coût à l'entrée pour l'accès à des soins de santé. Et
vous faites référence, justement... vous parliez beaucoup de l'impact
que ça peut avoir d'attendre, puis je voulais que vous puissiez, justement,
nous référer à certains... C'est toujours bien, je pense, d'avoir des cas
concrets pour bien illustrer, pour bien comprendre les impacts que ça peut
avoir, les coûts qui sont reliés, justement... tu sais, le fait que des parents
puissent se retrouver par une contrainte financière à attendre avant d'aller en
consultation, d'aller voir un médecin. Puis je comprends bien, effectivement,
comme vous êtes dans un hôpital tertiaire, probablement que vous voyez la... je
ne veux pas dire la pointe de l'iceberg, mais les cas qui,
malheureusement, sont à un bout du spectre, mais je pense que ça nous
éclairerait si vous pouviez nous donner quelques exemples concrets de ce que
vous avez vu, là, dans votre carrière.
M. Lebel (Marc) : En fait, il y
a plusieurs choses. C'est une bonne question aussi. Je vais prendre l'exemple,
la fièvre chez l'enfant —
si vous avez des enfants, ils ont tous fait de la fièvre à un moment donné — on élimine
la pandémie, là, parce que c'est une circonstance exceptionnelle, bien,
généralement, on dit aux parents : Vous attendez deux, trois jours avant
de consulter si l'enfant fait de la fièvre à moins que son état ne soit pas
bon. Quand on sait qu'il y a des coûts, bien, ça risque de reporter la
consultation.
Je vais prendre un exemple, disons, on a un
enfant, disons, qui a fait une infection virale, il a développé une pneumonie,
bien, la plupart des gens auraient probablement consulté quand ça commence à
aller mal. Dans ce cas-là, bien, si effectivement la consultation, elle est
tardive, bien, on a plus de chances de développer des complications de la
pneumonie. Donc... Beaucoup... La plupart des pneumonies vont se traiter de
façon ambulatoire, une certaine proportion va se retrouver hospitalisée, puis
une plus faible proportion va aller aux soins intensifs. Dans les cas, en fait,
dont on mentionne, bien, le risque d'hospitalisation, avec une consultation
tardive, il va augmenter. Donc, ça, c'est dans le cadre des pathologies
urgentes.
Il y a des choses aussi... On parle des retards
de développement, qui est un projet-phare de mon collègue qui est rendu
ministre, là, M. Carmant, bien, les retards de développement, si on ne les
diagnostique pas tôt, bien, on va avoir un problème, on va avoir beaucoup de
problèmes. Dans le programme Agir tôt, bien, ça se trouve à se faire à
18 mois. Il faut quand même penser, il y a des problèmes de développement
qui sont évidents plus de... pas à la naissance, là, mais dans la première
année de vie, bien, pas de suivi, on va les diagnostiquer plus tard. Si on les
diagnostique plus tard, la prise en charge, elle est plus tardive, encore là,
des complications, des séquelles à court, moyen et long terme.
Donc, il y a des choses urgentes, il y a des
choses qui sont moins urgentes, mais, si le suivi ne se fait pas... Je prends
aussi l'exemple, là, un enfant qui naît, bien, il a besoin d'un suivi rapproché
parce qu'il y a plein de choses... Les enfants restent, là, les mères,
36 heures à l'hôpital. Après ça, ils partent, mais ils ont besoin d'un
suivi parce que des problèmes, des
cardiopathies qui sont diagnostiqués plus tard, des pneumopathies, d'autres
problèmes d'alimentation, bien, si on ne les voit pas au bon moment,
encore une fois, on va se retrouver avec un patient qui va être obligé d'être
hospitalisé avec plus de problèmes.
Mme Montpetit : Avec plus de problèmes,
plus de ressources utilisées aussi. Mais j'imagine que, quand on regarde
l'ensemble du... en plus des conséquences chez le patient, il y a... la
pression que ça ajoute sur le réseau de la santé aussi.
M. Lebel (Marc) : Oui.
Mme Montpetit : Je voulais revenir
aussi sur... Bien, en fait, j'en profiterais que vous êtes là, parce que je sais que vous êtes sur plusieurs
comités d'antibiothérapie puis de vaccination aussi, puis j'avais une question... vraiment par curiosité, comme
vous faites une spécialité de la vaccination, est-ce que ça a un impact, justement,
le fait qu'il y ait des gens qui n'ont pas accès à la RAMQ... je
comprends très bien que la vaccination, elle est gratuite pour les enfants, mais
est-ce qu'il n'y a pas une association... est-ce que vous voyez une
conséquence, en fait, aussi, au niveau de la vaccination des enfants qui seront
dans cette situation-là, dont les parents ont un statut migratoire précaire?
M. Lebel
(Marc) : Ça, c'est clair,
clair, clair, il y a des retards de vaccination, parce que c'est
des gens, en fait, qui aiment avoir le moins de contacts possible, entre
guillemets, avec le système, le réseau. Donc, ils n'aiment mieux pas aller se faire vacciner par les CLSC, puis ça,
c'est... nous autres, on en voit régulièrement
avec des retards vaccinaux. Puis, on sait, dans la première année de vie, il y a beaucoup
de maladies qui peuvent être prévenues par la vaccination, puis, si
on ne reçoit pas les vaccins au bon moment, bien, on a un problème.
Pendant la pandémie — je fais partie aussi du Comité
d'immunisation du Québec, là, comme représentant de l'APQ — bien, on a
conservé la vaccination des enfants en bas de deux ans. Ça a parfois été
difficile, là, quand le réseau allait vraiment mal, mais
on a voulu conserver ça, donc ça veut dire que c'est important. Puis ces
enfants-là, ils ne reçoivent pas tout ce qu'ils doivent recevoir, ils ne le
reçoivent surtout pas au bon moment.
• (12 h 50) •
Mme Montpetit :
O.K., merci. Mon impression était celle-ci, mais je pense qu'on doit en tenir
compte aussi, dans les impacts, comme vous
dites... en tout cas, ça a des impacts par la suite, parce que ce
n'est pas quelque chose qui peut se rattraper à n'importe quel moment sur
le calendrier de vie, avec les impacts que ça peut avoir sur l'ensemble de la communauté aussi.
J'aurais peut-être
une dernière question, parce que je vois le temps qui file. Je comprends, comme
pédiatre, évidemment, vous ne voyez pas les femmes enceintes, mais
vous voyez les petits bébés qui arrivent par la suite. Est-ce que... Puis, moi, c'est... bon, c'est une recommandation qui a été faite par plusieurs groupes, puis vous l'avez mentionné aussi, de s'assurer de donner accès aux femmes
enceintes qui n'ont pas accès à la RAMQ présentement, pour les... un
peu pour les mêmes raisons, dans le fond, donc toutes les complications qui
peuvent être...
(Panne de son)
M. Lebel
(Marc) : Ça a gelé.
Le Président
(M. Provençal)
: Il vous reste
30 secondes, Dr Lebel, pour pouvoir répondre. 30 secondes, s'il
vous plaît.
M. Lebel
(Marc) : O.K.
Mme Montpetit :
...et des...
M. Lebel
(Marc) : Donc, je pense que c'est...
Mme Montpetit :
...
M. Lebel
(Marc) : Bien, je vais vous laisser finir.
Mme Montpetit : Non, c'est parce que j'ai été déconnectée,
pardon. Je voulais juste voir aussi, c'est ça, l'impact, entre autres,
sur les prématurés, puis l'impact que ça peut avoir, surtout économique, sur le
réseau de la santé, entre autres, puis, encore là, la pression sur le réseau,
là.
Le Président
(M. Provençal)
: 10 secondes.
M. Lebel
(Marc) : Bien, moins bons suivis, plus de prématurité, plus de coûts.
Le Président
(M. Provençal)
: Merci
beaucoup.
Je vais maintenant
céder la parole au député de Laurier-Dorion.
M. Fontecilla :
Merci. Merci, Dr Lebel, d'être avec nous, de partager votre expérience.
Écoutez, le projet de
loi couvre toute une série de catégories qui étaient exclues, sauf une
catégorie, les enfants nés hors Canada
sans statut légal au Canada, bref, les enfants nés à l'extérieur, sans
papiers, là, donc, grosso modo. Vous,
vous recommandez de donner l'accès, comme d'autres, à tous les enfants, je
suppose que ça inclut cette catégorie-là aussi, mais j'aimerais plus particulièrement vous questionner sur la surcharge abusive des frais médicaux
pour les patients non assurés. Si le projet de loi est adopté tel quel,
il y aurait une catégorie qui ne serait pas admissible à la RAMQ, et, pour les
soins, les soins seraient facturés de 200 %. Expliquez-nous un peu, là, de
quoi il s'agit, là.
M. Lebel
(Marc) : Bon, quand on parle de la surfacturation, là, on dit souvent
«médicale», mais «médicale», ce n'est pas le médecin, là. La vaste majorité de
la facturation va se passer quand le patient se présente aux urgences, aux
centres de jour, cliniques externes où il est hospitalisé, où, effectivement,
par rapport au per diem habituel, bien, on peut charger deux fois, trois fois.
Je vais prendre l'exemple de Sainte-Justine, le per diem hospitalisé est
1 600 $ par jour. Ceux qui n'ont pas de carte RAMQ, c'est trois fois
ce prix-là, donc 5 400 $ par jour, hein, ça fait qu'imaginez si vous
avez un patient qui reste là longtemps.
Est-ce que les
médecins facturent? Là, je vais parler des pédiatres. Je peux vous dire, la
vaste majorité des pédiatres, les parents qui n'ont pas... l'enfant qui n'a pas
de carte RAMQ, là, moi, je ne leur charge jamais rien, ça fait 30 ans que
je ne leur charge rien. La majorité des gens le font. Je sais qu'il y en a qui
les facturent, mais ce que je vois plus souvent, c'est, en fait, des patients
qui sont vus dans d'autres hôpitaux par des médecins adultes qui nous les
réfèrent parce qu'eux autres, bien, ils ne peuvent pas être payés. Donc, ça,
c'est problématique, mais, je pense, le plus
gros... la plus grosse problématique, c'est les frais associés à l'hôpital. Ça
veut être dissuasif, mais, de l'autre bord, bien là, on se retrouve avec
des consultations plus tardives.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup.
Je vais maintenant céder la parole au député des
Îles-de-la-Madeleine pour 2 min 10 s.
M. Arseneau :
Oui, bien, merci... Dr Lebel, d'être présent, et de votre pertinence, et
nous accorder ce temps-là. Et moi, j'ai... il me reste deux minutes, et
je voudrais continuer sur la question de la facturation abusive, parce que ça
saute aux yeux. Vous dites, en fait, qu'on ne va pas facturer les coûts réels,
mais on va facturer de façon dissuasive, c'est bien ça?
M. Lebel (Marc) : Bien,
c'est-à-dire que le... tu sais, si on dit que le per diem — je prends
Sainte-Justine parce que je le connais bien,
là — il est
1 600 $, bien, les gens, on va leur facturer deux ou trois fois le
per diem. D'habitude, c'est trois fois le per diem, à Sainte-Justine.
M. Arseneau :
Eh bien, d'accord, alors... Et puis, de façon générale, vous dites : Bien,
on devrait pouvoir soigner tous les enfants, là, sans les catégoriser parce que
ça va coûter beaucoup plus cher, surtout que la majorité d'entre eux
vont demeurer au Québec. En réalité, je voudrais revenir sur la question des
abus de système, parce que toutes les contraintes qu'on semble vouloir mettre
en oeuvre, c'est pour bloquer un genre de... le risque d'un abus de système. Ce que vous dites, c'est que, dans votre pratique,
là, les abuseurs du système, vous n'en voyez pas, est-ce que j'ai bien
compris?
M. Lebel (Marc) : En pédiatrie,
ça a l'air d'être beaucoup moins important que ce qu'on voit en milieu adulte, là, où il y a clairement du tourisme
médical. Il faut savoir que l'enfant, quand il est ici, là, chez nous, bien,
c'est parce qu'il y a quelqu'un d'autre qui a pris la décision,
c'est-à-dire c'est les parents. Oui, il y en a, mais c'est rare, là, qui savent
que leur enfant a une maladie particulière qui ne sera pas traitable dans son
pays, qui va trouver toutes les raisons de venir, mais, à l'inverse, ces
patients-là, en général, ils restent au Québec après, puis on finit par trouver
des ententes avec la RAMQ. Donc, on trouve
pareil, mais il y a une période pendant laquelle, là, les parents sont sujets
à une facturation quand même significative.
M. Arseneau :
Donc, à vouloir sauver, à économiser quelques sous, on s'en trouve à débourser
éventuellement des milliers de dollars, si je comprends bien.
M. Lebel
(Marc) : Bien, je pense que oui, mais ça, on... je laisserai au
ministère calculer. Nous autres, ce qu'on veut, c'est vraiment le
bien-être des enfants.
Le Président (M. Provençal)
: Je vous remercie, Dr Lebel, pour votre contribution
et, je dirais même, pour votre générosité.
La commission suspend ses travaux jusqu'à
14 h 30. Merci à tous.
(Suspension de la séance à 12 h 57)
(Reprise à 14 h 35)
Le Président (M. Provençal)
: La Commission de la santé et des services sociaux reprend
ses travaux.
La commission
est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des
consultations particulières sur le projet de loi n° 83, Loi concernant principalement l'admissibilité au régime d'assurance
maladie et au régime général d'assurance médicaments de certains enfants dont
les parents ont un statut migratoire précaire.
Cet après-midi, nous entendrons par
visioconférence les organismes suivants : la Commission des droits de la
personne et des droits de la jeunesse, l'Association québécoise des avocats et
avocates en droit de l'immigration et le Bureau international des droits des
enfants.
Je souhaite donc la bienvenue aux représentants
de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la période
d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter
puis à débuter votre exposé. À vous la parole.
Commission des droits de la personne et des droits de la
jeunesse (CDPDJ)
M. Tessier
(Philippe-André) : M. le Président, M. le ministre, membres
de l'Assemblée nationale, je m'appelle Philippe-André Tessier, je suis
président de la Commission des droits de la personne et des droits de la
jeunesse. Je suis accompagné de Me Marie Carpentier, conseillère juridique
à la Direction de la recherche de la commission.
Je dois tout d'abord rappeler que la commission
a pour mandat et pour mission d'assurer le respect et la promotion des
principes énoncés dans la Charte des droits et libertés de la personne du
Québec. La commission est aussi... et assure aussi la protection de l'intérêt
de l'enfant ainsi que le respect et la promotion des droits qui lui sont
reconnus par la Loi sur la protection de la jeunesse. Conformément à notre
mandat, la commission a examiné le projet de loi afin d'en vérifier la
conformité à la charte et d'en faire les recommandations appropriées.
L'objectif de ce projet de loi est évidemment de
rendre admissibles au régime d'assurance maladie certains enfants dont les
parents ont un statut migratoire précaire. Actuellement, sont notamment exclus
plusieurs enfants dont les parents ont un permis d'étude ou de travail, de même
que tous les enfants dont les parents sont en situation d'immigration
irrégulière. D'autres intervenants vous ont déjà expliqué quels sont les effets
d'une telle exclusion sur la santé et le développement des enfants concernés.
Nous en faisons également état dans notre mémoire.
Malgré la gravité de
ces effets, s'il était adopté dans sa version actuelle, le projet de loi
maintiendrait l'exclusion de nombreux enfants se trouvant habituellement sur le
territoire du Québec. Il ferait notamment reposer l'admissibilité d'enfants
citoyens canadiens sur le statut migratoire de leurs parents. En effet, ces
derniers devraient démontrer leur intention de demeurer au Québec pour une
période de plus de six mois suivant l'inscription de leur enfant auprès de
Régie de l'assurance maladie du Québec soit en présentant la preuve de leur
autorisation de séjour, soit en faisant une déclaration assermentée attestant
de leur intention, et ce, malgré qu'ils ne soient pas autorisés à demeurer sur
le territoire.
De l'avis de la commission,
l'imposition de telles conditions serait contraire aux droits protégés par la
charte. Cela constituerait une atteinte discriminatoire au droit à la vie, à la
sûreté et à l'intégrité ainsi qu'au droit à la sauvegarde de la dignité de ses
enfants. La discrimination serait fondée sur trois motifs interdits par la
charte : l'état civil, l'origine ethnique ou nationale ainsi que la
condition sociale, tous prévus à l'article 10 de la charte.
Le projet de loi
n° 83 irait en outre à l'encontre de l'approche fondée sur les droits de
l'enfant prônée par le Comité des droits de l'enfant de l'ONU et à laquelle la commission
adhère. Cette approche vise à considérer les enfants comme des titulaires de
droits. À ce propos, j'estime essentiel de réitérer ce que la commission a fait
valoir l'an dernier, à l'occasion de
consultations tenues par la Commission spéciale sur les droits des enfants et
la protection de la jeunesse, la commission Laurent, elle a insisté pour...
sur l'urgence, pour le gouvernement du Québec, d'agir pour renforcer le respect
des droits de l'ensemble des enfants et leur garantir la pleine protection de
leur sécurité et de leur développement.
• (14 h 40) •
Cela inclut aussi les
droits qui sont reconnus par le droit international et par lesquels le Québec
s'est déclaré lié. Au nombre de ces droits est celui de jouir du meilleur état
de santé possible et de bénéficier de services médicaux et de rééducation qui
sont explicitement garantis par la Convention relative aux droits de l'enfant,
à laquelle, je le rappelle, le Québec a adhéré. La commission estime que le
fait de faire reposer les conditions d'admissibilité sur le statut migratoire
de l'enfant ou de son parent irait à l'encontre de l'intérêt supérieur de
l'enfant et des droits qui lui sont reconnus par le droit international, dont
le droit d'avoir accès aux soins de santé sans discrimination.
D'autre
part, les dispositions du projet de loi n° 83 contreviendraient, je le
disais, aux engagements internationaux du Québec au titre du droit à la
santé. Elles iraient à l'encontre des recommandations formulées par le rapporteur
spécial des Nations unies sur le droit à la santé à la suite de sa visite en
2019. Le projet de loi dérogerait également aux avis émis par le Comité des
droits économiques, sociaux et culturels des Nations unies ainsi qu'aux
exhortations de l'UNICEF, notamment. C'est pourquoi nous recommandons que le
projet de loi n° 83 soit modifié pour que tout enfant se trouvant
habituellement au Québec puisse bénéficier de la couverture du régime public
d'assurance maladie sans égard au statut migratoire de ses parents.
De plus, nous
estimons important d'attirer votre attention sur un autre aspect problématique
du projet de loi. Comme je vous l'ai mentionné, afin que certains enfants
puissent être admissibles à la couverture du régime public d'assurance maladie,
certains parents se verraient contraints de déclarer sous serment leur
intention de demeurer au Québec pour une période de plus de six mois, alors que
leur situation d'immigration est irrégulière. Or, il est reconnu que les
personnes qui se trouvent dans une telle situation craignent d'obtenir des
services d'organismes publics de peur que
leurs informations soient communiquées aux autorités d'immigration. Cette
crainte de parents apparaît d'autant plus justifiée, sachant que, selon
les dispositions de la Loi sur l'assurance maladie, la RAMQ peut communiquer
des informations servant à démontrer une infraction aux lois sur l'immigration.
En d'autres termes,
la production d'une déclaration assermentée, telle que requise par le projet de
loi, serait susceptible de constituer une barrière pour l'accès aux enfants aux
services de santé, et donc d'être préjudiciable à la réalisation de leurs
droits et aux objectifs poursuivis par le projet de loi. Si cette condition
faite aux parents en condition d'immigration irrégulière devait être maintenue,
la commission recommande à tout le moins d'adopter des mesures de protection
interdisant le partage de renseignements personnels qui seraient détenus par la
RAMQ aux autorités d'immigration, et ce, dans le but de mieux garantir l'accès
aux soins de santé auxquels ces enfants ont droit.
La mise en place de
telles mesures, qualifiées de pare-feu, par voie législative est d'ailleurs
recommandée par plusieurs instances
internationales, dont notamment le Haut-Commissariat aux Nations unies aux
droits de l'homme et le Comité des
droits de l'enfant, et appliquée dans différentes juridictions à travers le
monde. Le législateur, d'ailleurs, je le mentionnais, pourrait s'inspirer des
démarches d'États européens, auxquelles nous référons dans notre mémoire, et
des mesures récemment introduites au Québec dans la Loi sur l'instruction
publique qui tendent dans cette direction.
Dans
un autre ordre d'idées, la commission profite du fait que des modifications au
Règlement sur l'admissibilité et l'inscription des personnes auprès de
la RAMQ sont actuellement débattues pour réitérer sa recommandation en ce qui a trait au délai de carence dans l'accession
au régime public d'assurance maladie imposé à des personnes qui s'installent
ou se réinstallent au Québec. La commission
avait déjà mentionné, en 2013, que ce délai constitue une atteinte
discriminatoire au droit à la dignité et à l'intégrité de ces personnes
et, ce faisant, il devrait être aboli.
Enfin, la commission
saisit l'occasion qui lui est offerte pour réitérer aux parlementaires réunis
dans cette commission une autre
recommandation formulée il y a plusieurs années déjà, mais qui conserve toute
son importance, elle demande de modifier la charte pour ajouter le droit
de bénéficier des programmes, biens, services, installations et conditions permettant de jouir du meilleur état
de santé physique et mentale susceptible d'être atteint. Cet ajout aux
droits économiques et sociaux de la charte, pour la commission, assurerait une
meilleure protection du droit à la santé de toute personne vivant au Québec, y
compris, évidemment, les enfants.
Nous vous remercions de votre attention et nous
sommes prêts à répondre à vos questions.
Le
Président (M. Provençal)
: Merci
beaucoup pour votre exposé.
Nous allons
maintenant débuter la période d'échange. M. le ministre, je vous cède la parole
pour les 16 min 30 s qui suivent.
M. Dubé :
Bon, très bien. Merci beaucoup, M. le Président.
Et, M. Tessier,
un plaisir de vous rencontrer. Me Carpentier, merci aussi d'être là. Je
vois que c'est pas mal de travail, faire un mémoire aussi complet. Alors, je
suis certain que vous avez passé des heures agréables à mettre tout ça
ensemble. Alors, merci beaucoup, parce que, pour nous, c'est très important.
Avec tous les collègues qui sont sur cette commission... Ça faisait longtemps
que ce projet-là était dans les cartons, comme on dit chez nous, et être
capable d'écouter vos commentaires puis surtout de considérer sérieusement les
améliorations que vous nous suggérez au projet de loi, alors, très apprécié.
Vous mentionnez dans
votre mémoire, là, puis je pense que c'est à la page 29, là, que, si le
projet de loi était adopté tel quel, il maintiendrait l'exclusion d'un grand
nombre d'enfants dont les parents ont, je vais le résumer comme ça, un statut
migratoire qui est précaire pour l'assurance maladie. Bon, on l'a posé à
plusieurs, puis je me permets de vous le demander, parce qu'à chaque fois qu'on...
si on voulait laisser tomber certaines conditions. Je pourrai y revenir dans ma
deuxième question, mais avez-vous une idée de combien de personnes on peut...
on parle, ici, pour que... Quand vous dites... Je le répète, dans votre
mémoire, vous parlez d'un nombre important d'enfants. Est-ce que vous êtes
capables de le quantifier au meilleur de votre connaissance ou avec des sources
d'information?
M. Tessier (Philippe-André) : Oui, bien... puis c'est une question très
pertinente, M. le ministre, évidemment, là, quels sont les enfants qui
vont visés par ça. Puis c'est d'ailleurs une des questions que plusieurs
groupes... Je comprends que cette commission s'interroge sur le nombre de
personnes visées par ça et d'autres acteurs également. Comme vous le savez
aussi, et puis ça a été mentionné par d'autres acteurs également, il y a aussi
beaucoup de difficultés de faire une telle recension, compte tenu du statut des
personnes dont on parle.
Donc,
ces mises en garde là étant faites, ce qu'on a comme données, ce sont des données qui sont aussi, je pense, accessibles
à votre commission, c'est qu'il y a, selon l'Institut universitaire Sherpa,
entre 50 000 et 70 000 personnes qui ne disposent pas
d'assurance maladie au Québec en 2020. Il y a environ 700 naissances
par année qui ne mènent pas à l'émission d'une carte d'assurance maladie. Ça,
ça vient de la RAMQ.
On sait... puis ça
aussi, c'est dans notre mémoire, tous ces chiffres-là sont dans notre mémoire,
il y a des enfants et... en 2019, donc,
on savait qu'il y avait 366 enfants, nés cinq ans plus tôt, au Québec,
qui n'avaient toujours pas de carte
d'assurance maladie. Alors, sont-ils toujours au Québec ou pas? Encore là, ces
données-là, c'est des données parcellaires
qui capturent... C'est difficile à capturer, et le nombre d'enfants, donc, de
parents sans couverture, il est estimé entre 300 et 1 200.
Donc, encore une
fois, là, il n'y a pas des données exactes et précises, là, qui pourraient
venir... mais c'est un peu le portrait qu'on a, nous, des données dont on fait
état dans notre mémoire.
M. Dubé :
O.K., bien, merci. Mais en fait je vous pose la question... Là, je n'ai
vraiment pas de biais, là, je vous pose la question de façon... comme on dit,
vraiment, une question ouverte, mais, avec une incertitude du côté de ce nombre-là, vous ne craignez pas qu'en
permettant une couverture d'assurance maladie généralisée pour ces gens-là...
qu'on mette en danger la pérennité du système ou de créer de l'exagération...
Alors, je veux vous entendre sur, ce qu'on pourrait dire, les pour et les
contre de faire ces décisions-là, que ça soit dans l'ensemble des
recommandations que vous faites, là...
M. Tessier
(Philippe-André) : Bien, c'est parce que, pour la commission, disons,
si on prend un pas de recul ensemble, là, c'est sûr et certain qu'il y a
toujours des considérations budgétaires à ce genre de projet de loi. Il y a des
considérations de système, ça a un impact sur le système. On ne fera pas
semblant que ça n'existe pas, ces considérations-là, elles sont là.
Cela dit, ce qu'il
faut toujours comprendre, puis c'est un peu ce qui a été, aussi, démontré dans
notre mémoire puis que d'autres intervenants sont venus expliquer, c'est qu'il
faut toujours mesurer c'est quoi, le véritable coût des mesures qu'on met en
place. Et ici, si on tente, par exemple, pour une courte période de temps, de
ne pas couvrir une situation, et que, là, la personne se dit : Je vais
attendre qu'une condition médicale se détériore, bien, le véritable coût pour
le système de santé québécois, il est peut-être plus grand, et l'hypothèse, c'est
que, justement, il est plus grand parce que les problèmes de santé n'ont pas
été traités en amont lorsqu'ils auraient pu. Ils ont été traités... Il y a des
petites bombes à retardement qui se promènent.
L'autre élément,
aussi, dont il faut tenir compte, pour nous, pour... comme... dans notre
approche, encore une fois, basée sur les droits de l'enfant, nos obligations
internationales auxquelles le Québec s'est déclaré lié, c'est de dire que ces
enfants-là, dont certains, on le rappelle, là, sont des citoyens canadiens...
donc, c'est sûr et certain que, pour ces enfants-là, le fait ou le... Ce
frein-là qui peut être imposé à leurs parents, leur rend, eux... un impact sur
eux, sur leur développement.
Puis toutes les
recherches puis tout ce qui a été déposé devant la commission Laurent le
démontre, agir rapidement en petite enfance,
agir rapidement auprès des jeunes, c'est une des clés du succès. Que ça soit en
protection de la jeunesse, que ça soit en santé, que ça soit en éducation, dans
tous les aspects, le 0-2 ans, c'est critique. Il ne faut pas attendre, il ne
faut pas prendre le temps... même chose pour ce qui est des femmes enceintes et
tout.
Donc, tout ce
développement-là, là, pour l'enfant, il est critique, et d'attendre entraîne
des coûts sociaux sur la vie de l'enfant, sur la vie de la famille. Puis pour
nous, c'est ça qui est problématique, quand on a cette... Bien, c'est cette problématique-là à laquelle on pense qu'il faut
s'attaquer plus globalement dans ce contexte-ci. Puis ma collègue peut peut-être
ajouter...
Mme Carpentier (Marie) : Oui,
merci. C'est aussi... On reconnaît que le Québec a le droit d'établir des critères d'admission à l'assurance maladie, ça a
été reconnu par les tribunaux, mais c'est important que ces critères-là ne soient
pas discriminatoires. Donc, notre analyse du projet de loi nous amène à
constater que les critères qui sont proposés, puisqu'ils font répondre...
dépendre l'admissibilité des enfants sur le statut migratoire des parents, ils
sont discriminatoires au sens de la charte, puis ça, c'est inacceptable. Donc,
il faut trouver des critères qui ne seraient pas discriminatoires.
M. Dubé : Mais est-ce que vous seriez... O.K.,
laissez-moi vous reposer une question. Vous suggéreriez quoi, comme
alternative de... ceux qui sont là en ce moment, qui serait moins
discriminatoire ou qui ne le serait pas?
• (14 h 50) •
M. Tessier
(Philippe-André) : Bien, en
partant, la recommandation 1 de notre mémoire, vous l'avez... je pense
que tous les membres de la commission l'ont
bien vue, puis c'est ce qu'on a répété dans l'introduction, c'est la recommandation, aussi, qui s'inspire du comité
interministériel sur la question, qui est reprise par de nombreux intervenants
devant la commission, c'est de dire : Allons-y pour une plus grande
inclusion puis une plus grande couverture de ces enfants-là. C'est, on pense,
la meilleure solution.
Maintenant, ce qu'on dit à la recommandation 2 — si vous
avez bien vu, les deux sont interliées — donc, ce qu'on dit, c'est que, si
on y va sur une déclaration assermentée, il faut faire attention que ces
éléments-là ne soient pas un frein, donc on
donne accès, mais que, par la mesure ou la condition pour avoir cet accès-là...
fasse en sorte que, dans les faits, c'est un accès virtuel, là, qui est
sur le papier, puis il n'y a pas personne qui s'en prévaut parce qu'il n'y a
pas personne qui va aller faire la déclaration assermentée, de crainte que ça,
ça soit transmis aux autorités. Donc, il faut lire les recommandations 1 et 2
en conjonction.
M. Dubé : Non, je voulais vous
entendre, parce que ça ne sera pas des choix faciles, mais je comprends votre
point, je comprends votre point. Alors, je vais laisser la chance à mes
collègues, là, de continuer à poser des... à vous poser des questions.
M. Tessier (Philippe-André) :
Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Oui, merci, M. le ministre. Alors, je vais céder la parole
à la députée de Repentigny.
Mme Lavallée : ...
M. Dubé : Ton micro, Lise.
Mme Lavallée : Excusez. Je
reviens sur ce que vous venez de dire. On veut encadrer quand même un peu
l'accès, la couverture des enfants. On est près des États-Unis. On sait qu'aux États-Unis
le système de santé, c'est un système qui est onéreux pour quelqu'un qui n'a pas
d'assurances, et il faut faire aussi attention au fait qu'on pourrait être
tenté d'amener les enfants de ce côté-ci pour faire soigner les enfants,
sachant que, de toute façon, il n'y aurait pas de coût, là, tu sais, et puis
c'est quand même l'ensemble des Québécois qui paient pour ce système-là.
Comment on fait pour s'assurer que c'est
vraiment des gens qui sont dans un régime migratoire quelconque où on couvre
les enfants, puis éviter qu'il y ait une forme de tourisme qui s'en vienne
utiliser les services, alors que, déjà, les Québécois qui sont absents du Québec
pendant plus de six mois, on ne les couvre plus, là? Tu sais, je pense qu'il y a une... Je comprends qu'il y a une
question de la Charte des droits et libertés, mais aussi une question d'équité
envers ceux qui paient aussi le système. Comment on fait pour... Puis, oui, il
faut protéger les enfants qui ont besoin d'être
soignés, mais comment on fait pour s'assurer d'éviter des abus de gens qui
pourraient dire : Bien, voici, on a une porte ouverte puis on s'en
vient faire... on traverse, puis on s'en va faire soigner nos enfants au
Québec, puis ensuite on retourne chez nous?
M. Tessier (Philippe-André) :
Oui, bien, je sais que ma collègue veut répondre à ça. Peut-être juste comme... d'entrée de jeu, là, pour un peu
circonscrire... On comprend ce désir-là de faire en sorte qu'il n'y ait pas
d'accès aux soins, mais encore
faut-il savoir si, véritablement, il s'agit là d'un phénomène qui est présent,
du tourisme médical, si on veut.
Puis il faut faire aussi attention, le projet de
loi dont on parle ici vise la couverture d'enfants dont le statut de parents
dépend et correspond à des catégories particulières. Donc, c'est sûr et certain
que quelqu'un qui vient ici pour la fin de semaine, ce n'est pas le même cadre
non plus. Il faut faire attention ici, disons, de... Il faut comprendre le projet de loi aussi pour ce qu'il vient faire
puis ce qu'il vient corriger comme problématique avec les statuts qui y sont
associés. Lorsqu'on parle de situation
d'immigration irrégulière, lorsqu'on parle de quelqu'un qui franchit, par
exemple, le chemin Roxham avec sa valise qui est l'ensemble de ses
biens, de sa vie, il a sa vie dans sa petite valise puis il s'en vient ici, ce n'est pas quelqu'un qui vient
faire du tourisme de fin de semaine, médical. Il a fui, il a quitté une
situation qui le force à être en situation irrégulière ici. Ce n'est pas
un peu, là...
Donc,
moi... C'est pour ça aussi qu'il faut faire attention à ce qu'on vise avec le
projet de loi, dans les circonstances. Puis peut-être ma collègue veut ajouter
des points.
Mme Carpentier
(Marie) : Oui, merci. C'est une excellente question. C'est une question,
effectivement, très complexe, mais il faut
prendre en compte plusieurs facteurs, notamment le fait que les
enfants n'ont pas nécessairement le même statut d'immigration que leurs
parents. Disons que c'est un des problèmes, à l'heure actuelle, c'est qu'on a
des enfants citoyens qui, eux, devraient avoir droit puis sont établis ici pour
plus de six mois qui n'y ont pas accès. Alors,
si on s'en remet, encore une fois, au statut de leurs parents, on risque encore
de les exclure, alors qu'ils devraient avoir accès. Et donc ça, cette
question-là...
L'autre
question, c'est... les enfants ne sont pas responsables de l'irrégularité du
statut de leurs parents. Donc, même quand les parents prennent des décisions
d'immigration qui ne sont pas légitimes à nos yeux mais qui pourraient l'être à ceux de d'autres, ça ne nous apparaît pas
légitime de pénaliser les enfants pour ce genre de décision là. Disons
qu'il faut se rappeler qu'il faut considérer le droit de l'enfant.
Puis, sur le critère...
Comme la protectrice l'avait mentionné dans son rapport qui date d'il y a
quelques années, la loi, telle qu'elle était conçue avant les modifications
proposées, proposait, à l'alinéa deux de l'article 5, le concept de «est
établi». Donc, l'établissement, qui permettait de faire, de ce que j'en
comprends... qui aurait pu permettre de faire une preuve autre, du fait que la
personne demeure au Québec de façon régulière pour une longue période...
autrement que par le statut d'immigration des parents, par exemple, par une
preuve de fréquentation scolaire... Il faut toujours faire attention, ceci dit,
pour ne pas mettre une preuve qui soit trop exigeante et qui empêcherait des
enfants de démontrer qu'ils sont ici de façon régulière.
Mme Lavallée :
Mais ça serait quoi, pour vous, la preuve? Parce que, là, on ne veut pas de
déclaration assermentée, on veut... et là, à un moment donné, on a des gens qui
doivent gérer la RAMQ puis établir qui on couvre, qui on ne couvre pas. Si on
ne peut pas demander de preuve, si on ne peut pas demander de déclaration
assermentée, on fait quoi?
M. Tessier
(Philippe-André) : Bien, c'est pour ça... puis c'est une très bonne...
mais pour ça... ça répond un peu... Tantôt, là, rappelez-vous, là, je vous
parlais de la recommandation 2, puis c'est important de bien comprendre que,
pour la déclaration assermentée, ce qu'on dit, c'est que, si vous en faites une
exigence... je dis bien «si», là, c'est la voie qui est retenue, parce que,
pour viser la fin dont vous parlez, Mme la députée, c'est... si vous visez ça,
bien, la déclaration assermentée, il faut la mettre à l'abri du regard des
autorités de l'immigration. Il faut faire en sorte que les personnes soient...
sachent que, si elles font ça pour obtenir une couverture de santé pour leurs
enfants, je le répète, pas pour... donc, pour leurs enfants qui, des fois, encore
une fois, sont citoyens canadiens, c'est sûr et certain que ça ne doit pas
avoir de conséquences sur le plan de l'immigration pour ces personnes-là. Donc,
cette mesure pare-feu là pourrait justifier la déclaration assermentée et venir
la protéger. Le risque, sans ce genre de mesure là, c'est que la déclaration
assermentée devienne un frein trop important à la couverture des enfants.
Mme Lavallée :
O.K. Donc, vous seriez d'accord à ce qu'on maintienne la déclaration
assermentée, mais en ayant l'assurance que ces informations-là ne s'en aillent
pas au ministère de l'Immigration, quelque chose comme ça, à l'immigration,
qu'il y ait un minimum de garanties, mais vous seriez ouvert à ça, à ce
moment-là, pour qu'on puisse faire quand même faire des vérifications
minimales, là.
M. Tessier
(Philippe-André) : Si vous regardez bien la structure de notre
mémoire, la recommandation 1, c'est celle de l'étendre à tout le monde,
sans les conditions que vous mentionnez. Ce qu'on dit, c'est que, si le gouvernement,
si l'Assemblée nationale décide néanmoins de ne pas suivre la recommandation 1,
à tout le moins, de suivre la recommandation 2. Il faut y aller comme,
disons, en étapes, là, pour suivre notre logique de ce côté-là.
Mme Lavallée :
Merci. Moi, je n'ai plus d'autre question.
Le Président
(M. Provençal)
: Ça va? Il reste un
petit moins d'une minute s'il y a quelqu'un qui veut formuler une dernière
question à nos deux invités. Oui, Mme la députée de Soulanges.
Mme Picard :
Bonjour. Merci beaucoup pour votre présence parmi nous aujourd'hui.
J'aimerais vous
entendre sur les définitions du mot, supposons, «habitant», «vivant». Avez-vous
une recommandation quelconque? Parce qu'on dit qu'il faut habiter ou vivre au
Québec pendant trois mois dans notre projet de loi. Est-ce que, pour vous...
Quelle preuve, quelle... Comment on pourrait mieux définir le mot... le
mieux... le plus approprié, selon vous?
Le Président
(M. Provençal)
: Très rapidement,
s'il vous plaît.
M. Tessier
(Philippe-André) : Je pense que ma collègue y a fait référence tout à
l'heure, peut-être la laisser... Marie?
• (15 heures) •
Mme Carpentier (Marie) : Bien,
le terme «établissement» pouvait paraître intéressant parce qu'il laissait une
ouverture pour permettre différentes façons de faire la preuve, là... donc, des
différentes façons alternatives, par exemple, une
déclaration qui ne serait pas nécessairement celle des parents, par exemple, ou
la preuve d'un bail, par exemple, ou la preuve de fréquentation scolaire, par
exemple, qui pourrait démontrer que l'enfant est là pour une période régulière.
Mais je pense que ce qui est vital, c'est de ne pas fermer... de ne pas imposer
un critère précis qui empêcherait des enfants qui sont effectivement de façon
régulière au Québec de faire cette démonstration-là. Donc, donner une variété
de possibilités aux enfants, je pense que c'était ça, les objectifs de la
modification de 2001, là, d'ouvrir comme ça.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup.
Sur ce, je
vais maintenant céder la parole à la députée de Maurice-Richard. Vous avez 11 minutes, Mme la députée.
Mme Montpetit : Merci, M. le
Président.
Me Tessier,
Me Carpentier, merci beaucoup d'être là. 11 minutes, ça ne me donnera
pas le temps, malheureusement, de vous poser toutes les questions que
j'aurais à vous poser, mais je vais quand même prendre quelques secondes pour
vous remercier, parce que le mémoire extrêmement étoffé que vous nous procurez
comme parlementaires va assurément nous aider dans notre travail législatif,
puis je vous remercie. Je sais que c'est beaucoup de temps pour préparer de
tels mémoires, pour, des fois, avoir été de l'autre côté... bien, j'allais dire
de l'écran, mais de la table, normalement, mais je vous remercie d'avoir pris
le temps. C'est ce qui nous aide à bonifier, certainement, des projets de loi.
Ceci dit, je dois dire que je trouve ça quand
même assez préoccupant, ce que vous soulignez. Vous rejoignez des commentaires
de l'ensemble des groupes qui sont venus jusqu'à maintenant, puis c'est très
préoccupant de voir que votre commentaire général, dans le fond, c'est que...
Puis je pense que l'objectif, il est très clair, du ministre, en déposant ce
projet de loi là, c'est d'élargir puis d'élargir la couverture à plus
d'enfants. Mais là, je comprends, vous soulignez à quel point, justement, le
projet de loi viendrait maintenir l'exclusion d'un nombre important d'enfants,
et ça, je pense que c'est vraiment quelque chose auquel il va falloir
s'attarder, et s'attarder de façon très étroite parce qu'il ne faut pas se
retrouver, dans le fond, avec une pièce législative qui est adoptée qui ne nous
permette pas de faire un pas en avant, même s'il en donne l'impression.
Je veux juste aussi... avant de vous poser une
question, il y a un élément que je trouvais intéressant aussi, vous avez
mentionné... Parce que, dans l'échange avec le groupe... bien, avec les
groupes, mais avec le médecin qui était là avant vous, je lui posais une
question sur l'accès à la vaccination pour les tout-petits, si la peur ou le
fait de ne pas avoir accès pour les parents pouvait être un frein à la
vaccination. Puis ce que je trouve très intéressant dans votre mémoire que vous
avez souligné, c'est le fait que vous rapportez même qu'il y a des cliniques...
même si c'est très clair à ce niveau-là, au niveau du gouvernement du Québec,
que la vaccination des enfants, elle est gratuite et doit être accessible,
qu'il y a encore de la confusion sur les enfants qui sont dans un statut...
avec des parents qui ont un statut précaire, qu'il y a des cliniques qui
refusent de vacciner des enfants qui ne sont pas couverts par le régime public,
qui vont même facturer des frais supplémentaires. Donc, ce que vous venez
porter à notre attention, c'est qu'en plus
de ne pas avoir accès à certains services, dans le fond, par la RAMQ, non
seulement ça a des conséquences collatérales, je
vais le dire comme ça, de ne pas avoir accès à des services qui devraient être
gratuits par la RAMQ... Et ça, c'est un... c'est... vous apportez une couche de
plus sur les préoccupations qu'on devait avoir.
J'avais... Juste, peut-être, pour compléter sur
les échanges que vous aviez avec le groupe parlementaire précédent, sur la question
de la déclaration assermentée, moi, j'entends bien que ce que vous dites sur
votre recommandation, ça ne devrait pas être une exigence. Et ce que je
comprends que vous portez à notre attention, c'est que les balises des catégories
permettent, dans le fond, d'encadrer les inquiétudes. Je comprends qu'il y a certains
parlementaires qui ont des inquiétudes par rapport au tourisme médical. Ce que
vous portez à notre attention, c'est que, le fait d'avoir des parents qui sont
soit sous un permis d'études, soit sous un permis de visiteur, un permis de
travail ouvert ou dans une situation irrégulière, ces balises-là viennent déjà
placer un cadre, dans le fond, qui... viennent freiner cette dynamique-là de
tourisme médical, qui viennent déjà mettre des pare-feux, des balises en ce
sens-là.
M. Tessier
(Philippe-André) : Oui, bien,
merci pour votre commentaire, là. Puis, pour ce qui est de la vaccination, c'est... effectivement, vous avez raison, puis je dois y revenir, vous
en avez fait état, là, puis... dans votre préambule, pour nous, c'est
aussi un élément, là, c'est aussi une des données qu'on a fournies aux
parlementaires, les travaux sont en ce sens-là. On voit bien aussi, avec la
campagne de... vaccination actuelle, pardon, il y a aussi un défi d'aller
rejoindre certains citoyens, certains résidents, certains Québécois et
certaines Québécoises, donc. Et puis, dans un objectif de santé publique, quand
on parle de la varicelle ou même les vaccins de base, là, c'est un peu ça
aussi, dans un objectif de santé publique, il faut s'assurer que toute la
population est vaccinée. Puis, lorsqu'il y a des barrières ou des freins,
lorsque les parents pensent qu'ils ne sont pas admissibles... parce qu'eux ne
sont pas admissibles, leurs enfants ne sont pas admissibles ou parce qu'ils
pensent que, s'ils y vont, bien, ça va... ils vont être obligés de remplir un
formulaire qui va faire en sorte qu'ils vont être dénoncés, ce sont tous ces
freins-là qu'on vient illustrer un peu dans la réalité, le concret du vécu.
Alors, pour nous, ça, c'est un élément important, puis je vous remercie de le
souligner.
Pour ce qui
est de la question peut-être plus... votre question plus spécifique,
effectivement, la recommandation 1, vous l'aurez compris... Le
cadre légal dans lequel la démarche s'inscrit, c'est quand même un cadre qui
est bien balisé, hein, on parle de parents avec des permis d'études, des
parents avec des permis de visiteur, avec des permis de travail ouvert, donc il
y a toutes ces catégories-là qui sont visées. Puis c'est une des observations
qu'on a faites aussi dans notre mémoire, c'est
qu'évidemment on utilise le vocabulaire «statut migratoire précaire», mais ce
n'est pas une catégorie juridique, ça, ça inclut beaucoup de choses, puis on
comprend pourquoi c'est utilisé, là, mais c'est sûr et certain que ça inclut
des gens en situation régulière et irrégulière, ça inclut des enfants citoyens,
non citoyens. Donc, c'est comme une espèce de terme qui inclut beaucoup de
catégories, et ces catégories sont bien définies, bien balisées, donc c'est sûr
et certain... Je ne sais pas si ma collègue veut ajouter quelque chose
là-dessus.
Mme Carpentier (Marie) : Bien,
peut-être sur la question des pare-feux, là, la question des pare-feux, la
proposition, en fait, c'est de créer des barrières étanches entre
l'administration des services de santé, et on... Ça pourrait être considéré
aussi dans d'autres secteurs des services sociaux aussi — là,
il y a des recommandations à cet effet-là ailleurs dans le monde — pour
s'assurer, en fait, que la façon... la prestation des services de santé ne soit
pas liée avec le statut des personnes, pour s'assurer, en fait, que les personnes
soient capables de bénéficier des systèmes de santé. Donc, le pare-feu, c'est
un peu le concept qui est utilisé, notamment dans les discussions
internationales sur ces questions-là, là, pour s'assurer... pour éviter que les
gens évitent d'aller recourir aux services sociaux en raison de la possibilité
que leurs informations soient divulguées.
Mme Montpetit : Merci. Non, je
me suis mal exprimée quand j'ai utilisé... je m'excuse, j'ai utilisé le mot
«pare-feu» de votre deuxième recommandation, mais ce que je voulais dire, c'est
que les catégories en question, dans le
fond, ce que je comprends, c'est qu'elles créent déjà un filtre, comme il y a
des balises, justement, par catégorie de personnes qui pourraient faire
ce genre de demandes là, donc ce qui ne rend pas nécessairement nécessaire la
déclaration assermentée. C'est ce que je voulais dire. C'était «balise», le mot
que je voulais utiliser. Je ne veux pas ajouter à la confusion.
Dans votre première recommandation, c'est ça,
vous parlez de «tout enfant habituellement présent sur le territoire». C'est
sûr que, là, moi, je ne suis pas juriste, donc je ne sais pas s'il y a une
définition claire de ce qui est «habituellement»,
mais peut-être que vous pourriez nous éclairer sur ce que vous entendez par le
concept d'«habituellement» et «sur le territoire».
M. Tessier (Philippe-André) :
Peut-être que ma collègue peut répondre, oui.
Mme Carpentier
(Marie) : Oui. Bien, écoutez, c'est le privilège du législateur de le
définir, là, mais je pense que la RAMQ avait suggéré que c'est
effectivement une période de 183 jours, de six mois.
Juste vraiment pour préciser, notre analyse est
sur le fait que ce qui nous intéresse, c'est que l'enfant soit sur le
territoire pour 183 jours, indépendamment de ce qui arrive avec ses
parents. Donc, il faut essayer de trouver les moyens de permettre à l'enfant de
prouver que lui est présent sur le territoire pendant 183 jours, indépendamment
du statut de ses parents, finalement.
M. Tessier (Philippe-André) :
Bien, c'est ça, parce que, là, une des choses qu'on veut dire, puis je vais
ajouter, c'est peut-être, tu sais, les exemples de... les enfants vivent des
situations qui ne sont pas nécessairement les mêmes que leurs parents. Les
parents peuvent avoir vécu une situation x, il peut y avoir des gardes
partagées, il peut y avoir toutes sortes de réalités propres à l'enfant qui
font en sorte que le statut de l'enfant n'est pas le même que celui du parent.
Puis c'est aussi ça qui est délicat dans cet exercice-là, c'est de bien
comprendre que ce qu'on vise, c'est l'admissibilité des enfants et non pas aux
parents.
• (15 h 10) •
Mme Montpetit : Absolument. Mais c'est là que ça nous ramène, je pense,
à toute la complexité de l'interprétation de tout ça, comment on fait pour démontrer
l'intention d'un enfant sans la rattacher au statut migratoire ou à
l'intention du parent, on risque de retomber un petit peu dans les mêmes... malheureusement,
les mêmes interprétations.
J'imagine que, le temps file, il ne doit pas me
rester beaucoup de temps. Mais je voulais peut-être vous entendre sur la question
de l'accès, aussi, pour les femmes enceintes. Plusieurs groupes ont porté à
notre attention aussi l'impact que ça peut avoir sur l'enfant à naître, dans le
fond. Je ne sais pas si vous aviez des éléments que vous vouliez porter à notre
attention sur cet aspect-là.
M. Tessier (Philippe-André) :
Bien, écoutez, on n'a pas fait de recommandation spécifique sur la question parce
qu'évidemment le projet de loi visait, là, les enfants. Évidemment, bon, qui
dit femme enceinte, on s'entend qu'on est dans un continuum.
Mais on attire votre attention là-dessus, c'est
vraiment les pages 17 et suivantes de notre mémoire, sur la vulnérabilité
particulière aussi, là, des femmes qui sont enceintes, donc qui ont un statut
migratoire précaire, donc qui ont... dont la couverture d'assurance. Et on fait
état aussi, là, du fardeau financier puis des problématiques qui peuvent être
associées, et que cela aussi... encore une fois, on ne prend pas une situation
en amont, on récolte un peu, on est obligés de corriger un problème qu'on
aurait peut-être pu éviter s'il avait eu des suivis, s'il y avait eu une
approche peut-être plus préventive par rapport à cette question-là. C'est un
peu ce que vous retrouvez aux pages 17 et suivantes dans notre mémoire,
mais on n'a pas fait de recommandation spécifique sur la question.
Mme Montpetit : Combien il me
reste de temps, M. le Président? Ça doit être...
Le Président (M. Provençal)
: Il reste 20 secondes.
Mme Montpetit :
Bien, je vais vous remercier, durant ce 20 secondes. Mais merci beaucoup
puis merci encore pour votre mémoire, c'est fort intéressant. Merci à vous
deux.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, Mme la députée.
Je vais maintenant céder la parole au député de
Laurier-Dorion. Vous disposez de 2 min 45 s.
M. Fontecilla : Oui, merci, M.
le Président. Bonjour, Me Carpentier, Me Tessier. Merci beaucoup
d'être ici, de nous éclairer. Votre mémoire est fort exhaustif.
Écoutez, on
comprend de votre mémoire, là, concernant la question de la déclaration
assermentée, les pare-feux, etc., c'est que, pour vous, là, ce n'est pas
la solution à privilégier, c'est... en quelque sorte, si on va de ce côté-là,
vous l'avez dit, il faudrait instaurer un certain nombre de mesures, là, mais
que vous privilégiez vraiment un accès pour tous les enfants. Est-ce que...
J'aimerais que vous nous expliquiez, là, selon vous, quels sont les bienfaits
d'une inclusion de tous les enfants, un peu, sans égard à son statut, là, par
rapport à des exclusions selon des catégories, là. Quel est l'avantage d'avoir...
au-delà de la question des droits, évidemment, là?
M. Tessier (Philippe-André) :
Bien, écoutez, puis je pense qu'on y a fait référence plus tôt, effectivement,
la base de notre recommandation, c'est la recommandation 1 de notre
mémoire et c'est d'assurer l'accès à tous les enfants, parce qu'il s'agit,
encore une fois, d'une approche qui se veut préventive des problématiques de
santé qui peuvent être vécues plutôt que de
venir régler des problèmes plus tard. C'est aussi une façon de s'assurer que
certaines mesures de santé publique, comme par exemple la vaccination,
mais autres éléments, soient mises de l'avant.
C'est d'avoir une approche qui est inspirée
aussi des meilleures pratiques en... pour ce qui est de la santé et de l'éducation, de tous les modèles qui sont mis
de l'avant pour s'assurer que les enfants aient un plein développement
puis puissent aspirer à tout ce qui... tous les rêves qu'ils peuvent avoir.
Donc, sans jouer dans... sans vouloir exagérer, c'est sûr et certain que cette
approche préventive là en amont, elle aura des conséquences réelles pour des
gens. Elle évite des problématiques de santé plus graves dans le temps. Et
c'est sûr et certain que c'est pour ça que nous, on privilégie l'abolition du
délai de carence et on privilégie une approche ouverte et inclusive par rapport
à l'accès aux soins de santé pour les enfants. Ma collègue peut ajouter un mot?
Une voix : Oui, allez-y.
Mme Carpentier (Marie) : Si je
peux me permettre une réponse un peu simpliste, c'est aussi d'éviter de jeter
le bébé avec l'eau du bain. C'est que plus on met des mesures d'exclusion en
place, plus on risque d'exclure des enfants qui devraient légitimement avoir
accès à la couverture. Donc, l'intérêt d'élargir à toutes les personnes qui se
trouvent régulièrement sur le territoire, c'est qu'on n'échappe pas des
personnes qui devraient légitimement avoir accès... tous les enfants, je veux
dire, qui se trouvent habituellement sur le territoire, permet de ne pas
échapper des enfants qui, légitimement,
devraient avoir accès et qui n'arrivent pas à prouver ce qui est demandé par le
gouvernement mais qui
devraient y avoir accès quand même.
Le Président (M. Provençal)
: Merci, M. le député.
Je vais maintenant céder la parole au député des
Îles-de-la-Madeleine pour 2 min 45 s.
M. Arseneau : Merci beaucoup, M.
le Président. À mon tour, je vais vous remercier pour tout le travail que vous
avez investi dans ce mémoire qui est très exhaustif, très intéressant,
également, et qui se conclut par des recommandations extrêmement précises et
claires. Je...
Bien, ma question va aller dans le même sens des
autres interlocuteurs, là. Si je vous comprends bien, ce qu'on essaie de faire
avec ce projet de loi là, c'est d'élargir l'accès à l'assurance maladie à
plusieurs enfants qui ne l'ont pas aujourd'hui, et, si on ne change pas le
texte, bien, essentiellement, on manque notre coup, on n'arrive pas à atteindre
nos objectifs, c'est bien ça?
M. Tessier (Philippe-André) :
Effectivement. Merci pour vos bons mots sur le mémoire. Effectivement,
l'objectif de la commission, comme vous le savez, est d'éclairer le travail des
parlementaires, dans la mesure du possible, avec le plus d'informations
possible, et c'est pour ça que, même s'il a 76 pages, je pense qu'il
mérite d'être considéré, puis merci beaucoup pour vos bons mots. Je le partage
avec l'ensemble de l'équipe qui l'a préparé et les membres de la commission.
Mais, pour répondre à votre question,
simplement, oui, effectivement, le sens de notre recommandation 1, c'est
de dire qu'il faut construire — puis ma collègue y a fait référence — ce
projet de loi là dans l'idée que ce qu'on vise
à faire, c'est assurer la couverture des enfants et que, s'il y a des cas
exceptionnels qui ne méritent pas couverture, bien, c'est... si on prend
le projet de loi comme visant à restreindre ces cas exceptionnels là plutôt que
de donner accès à la couverture de, c'est sûr et certain que cette lecture-là,
en partant, complique la vie de gens qui, comme ma collègue y faisait référence, y ont droit, mais pour toutes sortes de
raisons, en raison de leur statut migratoire précaire, en raison de leur
condition, en raison de leur incompréhension des règles et tout...
Je fais un petit aparté, là. Ça fait
deux jours que vous travaillez sur le projet de loi, on a des gens qui ont
travaillé très fort sur les définitions, et
je peux vous dire que ce n'est pas simple, ce n'est pas simple, ces
catégories-là d'immigration, ce n'est pas simple à comprendre, les
différentes nuances. Imaginez... placez-vous dans la peau d'une personne qui vient d'arriver ici ou qui est ici de façon
temporaire, ce n'est pas évident à comprendre qui est admissible ou pas. Et
déjà, juste en partant, Mme la députée, là, je pense, de Maurice-Richard y faisait référence, déjà, juste l'existence de ces catégories-là, déjà, en partant, c'est un
bon filtre, mais juste de comprendre qui est qui, dans quelle boîte, je peux vous dire que ça a pris des juristes,
puis il a fallu se casser la tête un petit peu ici, à la commission,
aussi.
M. Arseneau : Est-ce que vous
pensez qu'on pourrait...
M. Tessier (Philippe-André) : ...
M. Arseneau : J'ai peu de
temps. Est-ce que vous pensez qu'avec un projet de loi, s'il est adopté tel
qu'il a été présenté, finalement, on s'engage dans une autre dynamique où on va
être accusés de ne pas respecter les droits fondamentaux des enfants, Protectrice
du citoyen, Commission des droits de la personne, et ainsi de suite?
M. Tessier (Philippe-André) :
Bien, écoutez, le sens de notre recommandation, c'est, effectivement, dans sa
forme actuelle, le mémoire ne va pas... le mémoire... le projet de loi, pardon,
ne va pas assez loin. Ça, on vous le dit à la recommandation 1.
Maintenant, est-ce qu'on dit que c'est un pas
dans la bonne direction? C'est sûr, on ne peut pas nier l'évidence, il y a quand même une couverture plus grande qui se fait. La
volonté ministérielle a été annoncée, et je pense que M. le ministre l'a dit, donc on va... on le
reconnaît aussi d'entrée de jeu dans le document. Donc, oui, il y a une plus
grande couverture, mais, puis c'est le «mais» qui est important.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, Me Carpentier et Me Tessier, pour
votre contribution aux travaux de notre commission.
Je suspends les travaux afin que nous puissions
accueillir le prochain groupe par visioconférence.
(Suspension de la séance à 15 h 18)
(Reprise à 15 h 20)
Le Président (M. Provençal)
: Bonjour et bienvenue à la Commission de la santé et des
services sociaux. Avant de commencer... Excusez-moi.
Je souhaite maintenant la bienvenue aux
représentants de l'Association québécoise des avocats et avocates en droit de l'immigration. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons
à la période d'échange avec les membres de
la commission. Je vous invite à vous présenter puis à débuter
votre exposé. À vous la parole.
Association québécoise des avocats et avocates
en droit de l'immigration (AQAADI)
M. Cliche-Rivard (Guillaume) :
Bonjour. Merci beaucoup. Me Guillaume Cliche-Rivard, je suis président de l'Association québécoise des avocats et
avocates en droit de l'immigration, en compagnie de Me Richard Goldman,
qui est membre de l'association également.
L'AQAADI, fondée en 1991, réunit
400 avocats et avocates qui pratiquent en droit de l'immigration et de la
protection des réfugiés, et donc qui est sur le terrain à tous les jours avec
les demandeurs, avec les immigrants, avec les potentiels ou futurs immigrants
et aussi avec leurs enfants, évidemment. Donc, l'AQAADI, aujourd'hui, va vous
faire ses représentations, et il y a un mémoire écrit à l'appui, et on va
suivre l'ordre du mémoire.
L'AQAADI remercie également le ministre et tous
les membres de la commission pour l'étude du projet de loi, mais spécifiquement
et personnellement le ministre Dubé pour avoir présenté le projet de loi pour
qu'on puisse enfin accorder un statut... pas un statut, pardon, mais bien l'admissibilité
à la RAMQ pour des enfants qui n'en avaient jusque-là pas droit.
La présentation va se détailler en
trois points : d'abord, une proposition quant aux enfants nés au Québec
de parents sans statut d'immigration, ensuite aux autres enfants qui ne sont
pas nés au Québec, puis nous allons présenter une proposition de programme
d'amnistie pour les factures non résolues pour certains parents qui ont de
graves charges financières, à l'heure actuelle.
Alors, nous reconnaissons que le projet de loi n° 83 constitue un grand pas en avant pour les enfants
canadiens nés au Québec sans statut régulier d'immigration. Nous acceptons le
critère d'intention de résider au Québec pour 183 jours dans l'année
suivant l'inscription présenté à l'article 8 du projet de loi, et nous
sommes d'avis que ça constitue un critère raisonnable d'admissibilité, et nous
croyons que la possibilité de fournir une déclaration assermentée pour faire la
preuve de cette intention, comme le prévoit l'article 11, constituera une
solution simple et pratique qui permettra l'admissibilité de plusieurs enfants
à notre régime d'assurance maladie.
Cela étant dit, plusieurs
organismes, devant la commission, ont parlé de problématiques de mise en oeuvre
et ont parlé de la nécessité ou du besoin de simplifier l'admissibilité à la
RAMQ. Alors, pour nous, cette proposition-là devrait
s'accompagner d'une présomption, d'une présomption temporaire et globale de
couverture pour les enfants nés au Québec, de manière à ce qu'on soit certains
que les enfants soient traités ou soient guéris tout de suite et qu'on demande,
pendant un délai, peut-être, sensiblement, de 30 jours, là, ou un délai
raccourci, aux parents de fournir la preuve de l'intention par déclaration,
mais qu'on n'empêche pas un enfant, pour quelconque raison administrative,
d'avoir besoin ou d'avoir accès aux services. Alors, on irait avec une
présomption globale d'application pour l'enfant né au Québec, et, dans les
30 jours, le parent ferait la démonstration de cette intention-là par
l'affidavit. C'est ce qu'on suggérerait comme mesure intermédiaire.
Il y a aussi beaucoup
de mentions dans le projet de loi de l'autorisation de séjour délivrée par les
autorités canadiennes. L'AQAADI pratique évidemment beaucoup en droit fédéral,
et je pense qu'une révision ou un arrimage exact entre les termes de la loi
fédérale et les termes de ce que le règlement prévoit en matière... ici, dans
le projet de loi, devrait être fait pour qu'on soit certains exactement de qu'est-ce
qui est nécessaire et qu'est-ce qui pourrait permettre la qualification. À mon
humble avis, pour l'instant, ce n'est pas clair quel document serait...
permettrait de qualifier ou de rendre
admissible, alors il faudrait vraiment utiliser les mêmes termes pour savoir exactement
qu'est-ce qu'on veut. Et on parle de l'original de l'autorisation, pour
nous, on a une petite problématique avec l'utilisation et l'exigence de
l'original, surtout dans un contexte de pandémie, où c'est très difficile, avec
le télétravail ou avec d'autres contextes qu'on connaît, de fournir des
originaux. Alors, pour nous, des copies certifiées ou des documents envoyés par
courriel ou fax pourraient permettre de qualifier pour ce critère-là.
Le grand problème que
nous avons, et nous avons mis une mise en contexte et un cas type qui est
arrivé la semaine dernière, on a beaucoup de modifications et on a des modifications
législatives proposées, mais la mise en oeuvre demeure notre grand problème. Il
doit y avoir vraiment un suivi et un contrôle pour s'assurer que toutes les modifications
qui sont proposées, tant la loi qui était avant le p.l. n° 89...
n° 83, pardon, que la loi actuelle, qu'il y ait vraiment
un suivi très serré qui soit fait pour s'assurer que toutes les modifications
soient vraiment rencontrées sur le terrain,
parce qu'au jour le jour nous, on frappe beaucoup de refus, on fait
face à des refus injustifiés, malheureusement,
d'agents de première ligne, alors que le règlement n'est pas appliqué exactement
tel que défini. Alors, aujourd'hui, si on élargit la portée de l'admissibilité,
il faudra surtout s'assurer que ces décisions-là soient exactement appliquées
sur le terrain. Je cède la parole à mon confrère.
M. Goldman
(Richard Neil) : ...
Le Président
(M. Provençal)
: Votre micro, s'il
vous plaît.
M. Goldman
(Richard Neil) : Désolé, un classique. Dans un deuxième temps,
l'AQAADI veut souligner l'importance pour tous les enfants se trouvant
habituellement au Québec de pouvoir bénéficier de soins gratuits, et ce, sans
égard à leur statut d'immigration. Nous soumettons qu'une société progressiste
comme la nôtre ne peut pas tolérer que des soins soient niés à un enfant malade
puisque ce dernier est né ailleurs. Nous soumettons que l'intérêt supérieur de
l'enfant doit se retrouver au coeur de nos priorités, et donc nous soumettons
ainsi avec respect que le projet de loi n° 83 doit
être amendé pour refléter ce besoin.
La Convention
relative aux droits de l'enfant, à laquelle le Québec s'est déclaré lié,
protège effectivement les droits des enfants sans égard à leur statut
d'immigration. Je ne vais pas vous lire les différentes propositions qui
parlent de l'intérêt supérieur et du droit à la santé, plusieurs groupes vous
les ont cités, mais c'est suivant cet engagement que l'AQAADI sollicite que les
enfants qui vivent habituellement au Québec soient élargis, O.K.? Vous... On
est très reconnaissants que c'est déjà élargi aux enfants nés au Québec, mais
on vous demande d'élargir aux enfants qui
vivent habituellement au Québec, qu'ils soient même... qu'ils ne soient pas nés
au Québec ou au Canada.
Nous soulignons que
la RAMQ, dans son rapport du comité interministériel du 5 novembre 2019,
justement, est arrivée à cette même conclusion, et je cite : «Si le gouvernement
du Québec exprime la volonté de bonifier la couverture actuellement offerte aux
enfants, l'équipe de travail recommande la mise en place de la solution 2,
qui consiste à faire en sorte que tout enfant habituellement présent sur le
territoire soit considéré comme étant une personne qui y réside, peu importe
son lieu de naissance.»
Donc, on est déçus de
voir que le projet de loi n° 83 n'offre aucune protection aux enfants sans
statut nés hors Québec, et l'AQAADI recommande que le projet de loi soit amendé
pour offrir cette couverture. M. le ministre et les autres parlementaires
demandent souvent : Mais quelles sont vos propositions? Et nous avons une
proposition très concrète qui est dans le mémoire, que je vais essayer de
résumer rapidement, on pourrait y revenir pendant la période des questions.
Donc, pour accomplir cet objectif, nous proposons de remplacer le
paragraphe 4° de l'article 2 du Règlement sur l'admissibilité et
l'inscription des personnes auprès de la RAMQ par le libellé suivant, donc ça
se lirait ainsi : «L'enfant mineur né hors Québec, si le parent avec
lequel l'enfant demeure en permanence ou la personne qui en a le soin ou la
garde demeure de façon habituelle au Québec.»
Donc, pour mettre ça
dans le contexte de l'architecture de la loi, l'article 5 de la loi, là,
on parle de la loi, dit : «Pour l'application de la présente loi, est une
personne qui réside au Québec toute personne qui y est domiciliée, satisfait aux conditions prévues par le règlement
et est, selon le cas : [...]une personne — selon le paragraphe 5° — qui appartient à toute autre catégorie de personnes déterminées
par règlement», O.K.?
Donc, cet amendement
ferait en sorte que les enfants qui résident habituellement au Québec seraient
considérés des enfants qui résident au Québec, évidemment sous réserve de
certaines conditions. Quelles sont les conditions? Il y a le domicile. Pour le
domicile, c'est l'intention, et déjà vous avez fait un énorme pas en avant avec
la possibilité de faire la preuve de l'intention avec l'affidavit.
• (15 h 30) •
Donc,
cet amendement, qui rentrerait les enfants dans... sous l'article 5.5° de
la loi, ferait en sorte que les enfants, même nés hors Québec, hors Canada,
auraient accès à l'affidavit pour démontrer l'intention de rester au Québec
pour six mois dans l'année qui suit l'inscription. Donc, ça, c'est pour
l'intention pour les...
Deuxième
critère : Comment est-ce qu'on définit «vivre habituellement au Québec»? Là,
on a une proposition très
concrète, qui est dans notre mémoire, pour démontrer que le parent avec lequel — on
est au... si vous suivez en PDF, à la page 8 de notre mémoire — l'enfant
demeure en permanence ou qui en a la garde demeure de façon habituelle au
Québec. L'AQAADI propose d'ajouter, à l'article 15 du règlement, une liste
de documents faciles à obtenir et permettant de prouver qu'elle demeure habituellement
au Québec.
Et donc voici le
texte qu'on propose d'ajouter à l'article 15 du règlement : «Pour les
fins de l'article 2,4°, une personne peut démontrer qu'elle demeure de façon
habituelle au Québec en produisant un bail, des factures d'électricité, un avis
de cotisation de Revenu Québec ou un permis de conduire démontrant que le
parent avec lequel l'enfant demeure ou la personne qui en a le soin ou la garde
est physiquement présent au Québec et l'était depuis au moins trois mois avant
la date de l'inscription de l'enfant.»
Je pense que ça
rencontre un peu le critère qui était soulevé, même dans l'autre intervention
de la commission, mais qu'est-ce qui arrive des personnes qui arrivent
aujourd'hui et qui demandent le soin. Bien, ça démontre une certaine...
Le Président
(M. Provençal)
: Je vous remercie,
maître. On va devoir passer à la période des échanges.
Alors, je vais céder
la parole au ministre pour la suite des choses. M. le ministre.
M. Dubé :
Bon. Tout d'abord, merci à vous deux pour une excellente présentation, puis
surtout, encore une fois, je le répète, là, pour tout le travail qui est mis
dans ces mémoires-là avant les présentations, c'est très apprécié. Puis je reconnais beaucoup votre expertise en
immigration, alors c'est... je pense que vous arrivez avec des recommandations,
à mon sens, qui ont été réfléchies, qui tiennent compte de votre expertise dans
les enjeux que vous devez vivre tous les
jours avec différentes familles. Alors, c'est exactement ce qu'on cherche, puis
merci beaucoup de la qualité de ce que vous faites, ce que vous avez
mentionné.
J'ai aussi constaté,
puis là je dois vous dire que ça... je trouve ça intéressant, là, que vous
êtes... vous considérez que le six mois de présence au Québec peut être
admissible ou, en tout cas, peut être raisonnable pour déterminer
l'admissibilité d'un enfant, mais... pour la question de l'assurance maladie,
mais qu'est-ce que vous faites du parent? Parce qu'ici c'est toujours le débat,
est-ce que c'est l'enfant qui est admissible versus est-ce que c'est le parent?
Alors, moi, je vous demande... Vous êtes d'accord avec la question du six mois,
puis ma collègue la députée y faisait référence dans une présentation
ultérieure qu'on a eue, mais il y a beaucoup de gens qui ont eu des craintes
là-dessus. Alors, j'aimerais vous entendre un petit peu plus là-dessus, parce
que ça, ça nous aiderait pour être capables de bien camper l'éligibilité non
seulement de l'enfant, mais, comment je pourrais dire, indépendamment du
parent. J'aimerais vous entendre, peut-être, tous les deux là-dessus.
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Bien, je débuterais — merci beaucoup, M. le
ministre — en
disant que c'est un critère d'intention de résider, hein, et non pas la preuve
de l'avoir fait, ou la preuve de le faire, ou la preuve d'être en voie de
l'accomplir. Donc, le parent, essentiellement, émet une intention sur la base
d'une déclaration. Donc, je pense que de faire du Québec... le 183 jours,
c'est essentiellement un petit peu plus que la moitié de l'année, donc d'avoir
son principal lieu dans la province, de démontrer cette intention-là, pour moi,
c'est logique. On comprend que l'enfant ne peut pas avoir d'intention, là,
c'est un enfant, mais le parent peut certainement démontrer cette intention-là
avec un affidavit, une déclaration solennelle. Me Goldman.
M. Dubé :
Mais comment vous faites? Parce que c'est ça, un peu, la problématique qu'on a,
on veut que, puis on l'a... en tout cas, je l'avais expliquée dans mon texte,
au début, quand on a commencé les audiences, on a dit : On veut séparer ça
le plus possible de l'admissibilité des parents... l'admissibilité, pardon, des
enfants des parents. On veut vraiment que ça soit les enfants qui soient
admissibles, mais, si on a un critère d'admissibilité, là, qui dépend des
parents... C'est pour ça que je veux vous entendre un peu là-dessus. Qu'est-ce
qu'on fait avec ça?
M. Goldman
(Richard Neil) : Bien, M. le ministre, vous faites presque l'argument
de la Commission des droits de la personne.
M. Dubé :
Oui, mais c'est pour ça que je veux vous entendre là-dessus, parce que...
M. Goldman
(Richard Neil) : Pour nous autres... Bien, en fait, quand la
commission et d'autres ont dit : Bien, il ne devrait pas y avoir vraiment
de critère rattaché aux parents, plusieurs des députés ont dit : Bien, il
faut avoir une certaine balise. Même la commission a fini par dire : Ça
doit être des enfants qui résident habituellement au Québec. Alors, si on veut
élargir sans balises, disons, tout enfant qui est physiquement présent,
l'AQAADI n'aura aucune objection. C'est un peu en réponse aux préoccupations
des parlementaires de dire : Bien, il doit y avoir certaines balises. Nous
autres, on arrive avec un projet, il y en a deux, affidavit d'intention ou
bien, déjà, dans le tableau, le fameux
tableau d'admission qui est appliqué, il y a une possibilité de démontrer
l'intention avec une preuve de régularisation. J'espère qu'on va garder
ça même si ce n'est pas dans le règlement.
M. Dubé : On n'a pas le choix
d'aller avec les parents, c'est...
M. Goldman
(Richard Neil) : Pardon?
M. Dubé :
J'ai dit : On n'a pas le choix d'aller avec une documentation qui est liée
aux parents si on fait ça.
M. Goldman
(Richard Neil) : Bien, disons, comme un enfant de trois jours ne peut pas signer un affidavit ou quoi que ce soit,
on trouve que, même si ce n'est pas idéal, c'est raisonnable. Si on va... on
doit avoir des balises pour un nouveau-né, logiquement, ça doit passer par les
parents. Maintenant, qu'est-ce qu'on fait pour les parents? Ça, c'est le
travail quotidien de l'AQAADI, c'est pour aider les parents à se
régulariser. Mais ce qui est intéressant avec ce projet de loi, ça ne dépend
pas de la démarche du parent de faire la régularisation, il y a plein
d'obstacles. Moi, avec Guillaume Cliche... vous raconter longuement les
obstacles que nos clients rencontrent en termes de frais, en termes de délais,
etc. Ce qui est intéressant de ce projet de loi, on peut éviter ça avec un
affidavit qui signale l'intention.
M. Dubé :
O.K. En tout cas, c'est matière à réflexion, c'est... Puis, ce genre
d'affidavit là, est-ce que vous êtes au courant, dans votre expérience, encore
une fois, en matière d'immigration, que ça a déjà été utilisé pour d'autres
fins? Parce que, là, on est vraiment dans un avis d'intention, là.
M. Goldman
(Richard Neil) : Guillaume.
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Il y a plusieurs... notamment, en droit fédéral, quand
on fait une demande de résidence permanente, par exemple, on signe
effectivement un formulaire comme quoi on a l'intention de résider au Québec, par exemple, et ça existe, ça, à
plusieurs reprises. Ce n'est pas nécessairement un affidavit au sens où il y a
vraiment une déclaration solennelle devant le notaire, ou avocat, ou
commissaire, mais souvent on le signe, et ça a la même portée ou ça a la même
valeur juridique. Alors, c'est souvent des déclarations sur l'honneur, sans que
ce soit nécessairement une déclaration solennelle devant un commissaire à
l'assermentation, qui ont essentiellement le même impact.
Mais on peut prévoir
un formulaire, un formulaire qui est probablement déjà bien étoffé, où le
parent va pouvoir faire son choix de sélection. Donc, on peut cocher certaines
cases où on va rentrer le nom de l'enfant, on va rentrer depuis quand on est
résident du Québec ou depuis quand on réside au Québec, de quelle preuve ou de
quel élément on veut faire l'objet, on
coche, et finalement on se... on va dans n'importe quel endroit où on peut,
pour 5 $, là, se faire assermenter, et on va pouvoir fournir cette
déclaration-là avec un formulaire, déjà, type.
Je ne suis pas en
train de dire que les parents vont commencer à rédiger, le soir, à la maison,
un affidavit. Je pense qu'un formulaire type va pouvoir être facilement
identifiable et utilisé pour ces enfants puis ces familles... pour ces
familles, en fait.
M. Dubé :
O.K. Merci. Je vais laisser mes collègues continuer. Mais on va essayer de
trouver des choses pratiques, c'est pour ça que je vous pose les questions.
Merci beaucoup à vous deux. Merci.
Le Président
(M. Provençal)
: Alors, la députée de
Roberval aurait des questions à vous poser.
Mme Guillemette :
Oui, merci, M. le Président. Il nous reste combien de temps?
Le Président
(M. Provençal)
:
9 min 23 s.
Mme Guillemette :
Parfait, merci. En tout début d'exposé, vous parliez de... que la mise en
oeuvre est importante. Au niveau des suivis,
quel genre de suivi on pourrait mettre en place pour avoir une bonne mise en
oeuvre puis faire un bon travail?
• (15 h 40) •
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Bien, écoutez, on vous a soumis un exemple... et merci
pour la question, mais on vous a soumis un exemple d'une de nos consoeurs qui a
dû faire des interventions répétées, là, auprès de l'agent principal pour
essayer, finalement, de faire valider la RAMQ pour un enfant qui y avait droit.
Alors, est-ce que ça
peut être une possibilité de faire des vérifications ou des formations suivies
ou de faire des tests, hein, de faire des appels tests où on sollicite l'accès
à la RAMQ pour des enfants qui n'existent pas, là, des enfants tests? Nous, on
va continuer de le faire. Est-ce qu'il peut y avoir un endroit centralisé où on
va pouvoir faire état de nos problèmes assez rapidement? Évidemment, il y a le
Protecteur du citoyen, mais on sait tous que ça prend beaucoup de temps, alors
que l'enfant est dans un besoin éminent. Et là où on revient à notre
présomption d'application immédiate, c'est que cette présomption-là, si on la
met en oeuvre, l'enfant va pouvoir avoir accès tout de suite aux services. Et
donc, là, les problèmes de mise en oeuvre, ils vont continuer d'exister, on ne
pourra jamais les corriger à 100 %, mais au moins le petit enfant, sur le
terrain, là, comme présomption va s'appliquer, il va pouvoir avoir accès aux
soins jusqu'à tant qu'il fasse cette preuve-là de régularisation.
Et dans l'exemple
qu'on a fourni, pendant 26 jours, l'enfant n'a pas bénéficié des soins
nécessaires parce qu'il y a eu des allers-retours entre un télécopieur, un fax,
un aller-retour avec un courriel, une demande de procuration. C'est ça qu'on
veut éviter. La mise en oeuvre ne sera jamais parfaite, mais, si on peut mettre
une présomption d'application immédiate pour tous les enfants qui sont nés ici,
je pense qu'on va s'éviter beaucoup de fâcheuses situations où l'enfant n'aura
pas accès à un service rapide.
Mme Guillemette :
Parfait. Merci.
M. Goldman (Richard Neil) : Et,
si je pourrais juste souligner, là, dans cet exemple qui est dans notre
mémoire, il y avait un travailleur de première ligne à la RAMQ qui a dit, à
tort, que l'enfant n'avait pas droit, alors que l'enfant rencontrait les
critères. Donc, c'est très important, comme Me Guillaume dit, qu'il y ait
un suivi puis un contrôle de qualité.
Mme Guillemette : O.K. Donc...
mais j'imagine que... vous parliez de refus injustifiés, j'imagine que ça ne
doit pas être monnaie courante, quand même, ça doit être l'exception, là, dans
laquelle il y a des refus injustifiés. Oui, monsieur...
M. Goldman (Richard Neil) :
Oui, oui. En fait, l'histoire qu'on donne, où, donc, c'est une dame qui avait déjà
fait une demande humanitaire, donc selon le fameux tableau qui se trouve dans
le rapport du Protecteur du citoyen, le
tableau utilisé par la RAMQ pour évaluer l'admissibilité, une preuve de dépôt
d'une demande de résidence permanente pour un enfant né au Québec est
suffisante. Malgré ça, la mère a appelé puis s'est fait
dire par une préposée : Non, madame,
une preuve de réception, ce n'est pas suffisant, l'enfant... le statut de
l'enfant, ça suit le statut du parent.
C'est une histoire que moi, là — je
travaille avec cette loi depuis une vingtaine d'années — j'ai entendue plusieurs
fois. Donc, les gens sont découragés, ils ne font pas la demande, ils n'ont pas
de décision, ils se ramassent, trois, quatre ans plus tard, avec des problèmes
graves de santé pour leur enfant. Et donc je ne peux pas dire que ça arrive à
chaque semaine, mais ce n'est pas un cas isolé.
Mme Guillemette : O.K. Merci.
On parle, là, de fournir une preuve des parents, qu'ils sont bien résidents, qu'ils vivent habituellement... c'est le
terme que vous utilisez. Vous n'avez pas peur que... Parce qu'on nous demande
de mettre un pare-feu entre la Santé et l'Immigration, donc ceux qui ne sont
pas immigrants reçus ou qui sont en attente, vous n'avez pas peur que ça leur
mette un frein à avoir la preuve de bail ou de venir consulter que de se faire
dire : Bien, on va vous déclarer à l'immigration ou... Vous voyez ça
comment?
M. Cliche-Rivard (Guillaume) :
C'est sûr qu'il faut faire très attention, il ne faudrait pas que ça devienne
une raison, ou un motif, ou un risque qu'il y ait des dénonciations qui soient
faites auprès des services frontaliers, là, canadiens. On a connu des problèmes
similaires avec des femmes ou des enfants qui n'allaient pas à la police pour
faire des plaintes parce qu'ils avaient peur, finalement, d'avoir l'objet de divulgation.
Bon, il faut savoir que, dans tous les cas,
quand un enfant naît au Québec, il y a un acte de naissance, les parents sont
mentionnés sur l'acte de naissance. Donc, essentiellement, ces enfants-là,
l'existence ou le fait que les parents existent, c'est déjà dans le système, le
nom des enfants, des parents sont déjà là. Alors, pour moi, je pense qu'il ne faudrait pas avoir peur de... Il ne faudrait
pas qu'en essayant d'augmenter la couverture pour certains enfants,
qu'il n'y en ait pas, on soit limité par des aléas qui existent déjà ou des
craintes qui existent déjà de toute façon. Il faudrait plutôt élargir la
couverture puis s'assurer que ça demeure, évidemment, confidentiel et qu'il n'y
ait pas de divulgation, ou d'appel, ou de lien entre les services
d'agents frontaliers canadiens et la RAMQ. Évidemment, ce n'est pas le
rôle de la RAMQ du tout, là, d'alerter l'ASFC, l'Agence des services frontaliers,
sur le statut d'une personne.
Mme Guillemette : D'accord.
Donc, vous seriez favorables à ce qu'il y ait une barrière quand même assez
hermétique entre la Santé et l'Immigration.
M. Cliche-Rivard (Guillaume) :
Comme ça devrait être le cas et comme tout le monde applique sa loi avec les objectifs de sa propre loi, la loi de la RAMQ va accéder à
des soins de santé pour des enfants, c'est
ça, son objectif, et
non pas de dénoncer ou d'aviser les agents frontaliers d'un statut d'une personne
en statut d'immigration irrégulier. Ce n'est pas ça, l'objectif,
du tout de la Loi sur la RAMQ.
Mme Guillemette : Parfait. Je
vous remercie. Ce sera tout pour moi, M. le Président.
Le
Président (M. Provençal)
:
Oui. Votre collègue la députée de Lotbinière-Frontenac voudrait adresser une question. À vous la
parole.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Merci, M. le Président.
Bonjour, tout le monde. Moi, je vous ai entendu,
tout à l'heure, tu sais, dire que notre projet de loi, c'est un grand pas en avant pour les enfants canadiens qui
sont nés au Québec, mais que vous aimeriez avoir un élargissement
à tous les enfants qui vivent au Québec. Est-ce que vous avez une idée de
combien d'enfants ça représente?
M. Cliche-Rivard (Guillaume) :
Ah! bien, écoutez, c'est difficile. Je pense qu'on a parlé de 700 enfants
nés au Québec, donc citoyens
canadiens. Pour ceux en situation d'irrégularité, par définition, on ne connaît pas
le nombre, on a des estimations au Canada, bien sûr, mais on ne connaît
pas le nombre. Mais, à ça, je vois la question, à l'effet... bon, combien ça va...
bon. Combien de gens? Combien ça va coûter? On a beaucoup réfléchi à cette question-là
et, au final, on s'est demandé : En fait, combien ça coûte, la vie d'un enfant?
C'est essentiellement ça qu'on s'est posé comme question.
Et on n'est pas capables... évidemment, personne n'est capable de mettre un
chiffre. Ce n'est pas une question d'argent
quand, je pense, on parle de la vie d'un enfant. Donc, pour moi, si c'est 500,
si c'est 800, si c'est 1 000,
écoutez, si on peut sauver un enfant de maladies ou de problèmes graves de
santé, je pense qu'en tant que société progressiste on doit le faire,
là.
Le Président (M. Provençal)
: Avez-vous...
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Et...
Le Président (M. Provençal)
: Oui, allez-y.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Si je peux ajouter, est-ce qu'il me reste du
temps, M. le Président?
Le Président (M. Provençal)
: Oui, 1 min 30 s.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Si je peux ajouter, est-ce que vous pensez
que l'élargissement pourrait entraîner un
effet pervers, par exemple, sur la venue de certaines personnes
avec des enfants qui sont malades, qui cherchent...
(Interruption)
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : ...
— excusez-moi,
c'est mon chien — qui cherchent
des soins de santé gratuits, par exemple?
M. Goldman
(Richard Neil) : Bien, en
fait, notre souci, c'était de répondre aux préoccupations qu'il doit y avoir
certaines balises, et nous croyons que les balises posées... la démonstration
d'intention et preuves de résidence pour, au
moins, trois mois, on a appris ce qu'était... parce que,
selon notre compréhension, trois mois est utilisé dans certaines
villes européennes. On trouve que c'est un juste équilibre.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, il reste moins de 30 secondes. À ce moment-là...
M. Dubé : Peut-être, M. le
Président, j'aimerais ça faire un commentaire, si mes collègues me le
permettent, là, avant la fin, que j'apprécie beaucoup cette présentation-là,
qui donne des cas pratiques et qui donne aussi des recommandations pratiques.
J'apprécie beaucoup ce sens-là que vous avez dit : Il faut trouver des
balises, vous en suggérez, puis je trouve ça très rafraîchissant. Je vais vous
dire, j'apprécie beaucoup. Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
: Merci pour votre commentaire, M. le ministre.
À ce moment-ci, nous allons passer la parole à la députée de Maurice-Richard pour les 11 minutes qui suivent.
• (15 h 50) •
Mme Montpetit : Merci beaucoup,
M. le Président. Bonjour, bonjour à vous deux. D'entrée de jeu, avant d'aller au sujet qui nous occupe, je veux juste
vous remercier pour tout le travail que vous accomplissez au quotidien.
Le parcours migratoire en est un compliqué, j'ai l'occasion de le constater
tous les jours dans ma circonscription. Et il
y a des situations
qui sont plus... plus difficiles que d'autres, et je sais à quel point vous
faites une différence marquée, c'est
le moins qu'on puisse dire, dans la vie... dans la vie de ces gens-là. Donc, je vous remercie pour votre contribution à notre... à notre société.
Par rapport à votre mémoire, puis je... je ne
sais pas si c'est moi qui ai mal compris, mais je veux juste m'assurer de bien comprendre ce que vous... ce que
vous recommandez, parce que ce qui nous amène à... ce qui amène le gouvernement
à déposer ce projet de loi, puis ce qui nous amène à avoir cette discussion-là,
c'est notamment le rapport de la Protectrice du citoyen, qui, elle, est venue, dans
le fond, souligner le fait que la RAMQ fait une interprétation erronée de
l'intention du législateur, l'intention du législateur qui est très
claire : un enfant qui est né au Québec est admissible aux soins, aux
services de santé. Puis elle le dit bien, là, elle dit : «Pour le Protecteur
du citoyen, l'intention du législateur indique clairement que le statut du
mineur non anticipé né au Québec de parents à statut migratoire précaire doit
être distingué de celui de ses parents.»
Ça, il n'y a aucune ambiguïté dans l'interprétation
qu'elle en fait. L'enfant est donc, du fait, de sa naissance au Québec,
admissible au régime d'assurance maladie. Elle vient ajouter, dans son rapport,
justement, le fait que l'admissibilité à la RAMQ... bon, que l'admissibilité,
elle est liée à la naissance sur le territoire, et le fait que la RAMQ vient le
lier... vient lier l'admissibilité de l'enfant à l'intention du parent, non
seulement ça ne respecte pas l'intention du législateur, mais ça vient
outrepasser les compétences de la RAMQ. Et là j'entends que... Puis là pardonnez-moi si j'ai mal saisi votre recommandation, mais vous... la proposition que vous faites, c'est de perpétuer... dans
le fond, c'est de donner raison à l'interprétation qu'en fait la RAMQ et en
disant que, faute d'être capable de démontrer le statut ou l'intention d'un
enfant, bien, on passe... on continue de passer par les parents pour faire
cette démonstration-là au lieu de se... de s'en tenir seulement au fait que
l'enfant est né ou pas sur le territoire.
Mais je ne veux pas vous mettre des mots dans la
bouche, mais, pour moi, ce n'est pas clair, la... je vous vois hocher de la
tête, donc j'imagine que ce n'est pas ça, mais ce n'est pas clair, pour moi,
l'intention... votre intention par rapport à ce que la
RAMQ fait présentement et par rapport à ce que la Protectrice du citoyen nous
recommande de changer.
M. Goldman (Richard Neil) :
Pour commencer, on partage à 100 % l'interprétation de la Protectrice du citoyen. On n'était pas d'accord avec
l'interprétation de la loi. Pour nous, un enfant né au Québec, qui a toujours
vécu au Québec, est établi au Québec puis était déjà admissible. Cela
étant dit, la RAMQ a pris une certaine interprétation. Le Tribunal administratif du Québec a partagé cette interprétation, même
si nous autres, on n'est pas d'accord, on est dans cette situation.
Mais le projet de loi n° 83 nous donne une
façon d'avancer et de mettre ce débat de côté pour finalement donner la couverture clairement aux enfants nés au
Québec de parents sans statut. Donc, pour nous, c'est une victoire dans
le sens que c'est 20 ans de militantisme. Et, encore une fois, on remercie le
ministre de finalement être la personne qui
va mettre ça en oeuvre. Mais on peut faire mieux et élargir à tout enfant qui
réside habituellement sur le territoire.
Mme Montpetit : Donc, dans un
monde idéal, ce que je comprends, c'est que, si on voulait avoir... C'est ça, justement, c'est tout enfant né au Québec. Parce
que, tout à l'heure, vous faisiez référence, justement, à la production d'une
preuve, là, on va l'appeler une preuve, là,
pour les fins de la discussion, mais par le parent, faute que l'enfant soit
capable de démontrer une intention. Moi, c'est cet élément-là sur lequel
je voulais que vous reveniez davantage.
M. Goldman
(Richard Neil) : Bien, pour le dire autrement, on accepte ça comme un
compromis raisonnable qui va être pratique. Comme Me Cliche-Rivard
a dit, on peut faire un gabarit qu'une personne peut prendre, Accès Montréal, par exemple, pour faire assermenter pour
5 $. On trouve ça un compromis raisonnable d'offrir pratico-pratique
la couverture.
Ce que Me Cliche-Rivard a aussi souligné,
c'est que ça devrait se baser sur une présomption de couverture. Donc, juste
pour situer le contexte, on sait que, pour chaque acte de naissance... pour
chaque naissance au Québec, la RAMQ reçoit du Directeur de l'état civil un acte
de naissance. Ce qu'on est en train de dire dans notre mémoire, dès la
réception, il devrait y avoir une présomption de couverture. Si un
fonctionnaire ne bouge pas pour faire des vérifications aussi vite que ça,
l'enfant est couvert. Ça devrait être le contraire du cas pratique qu'on a
donné dans notre mémoire, où personne n'a rien fait, on a donné une mauvaise
information, on n'a jamais rendu une décision parce qu'on a découragé la femme
même de déposer une demande. S'il y a une présomption de couverture, l'enfant
est couvert. Si l'agent veut faire des vérifications, demander un affidavit,
une preuve de régularisation, des choses qui sont raisonnables de demander, O.K.,
on donne 30 jours. Puis, si jamais l'agent n'est toujours pas d'accord,
bien, on rend une décision puis la personne a la possibilité de contester.
Mme Montpetit : Donc, juste,
encore là, pour qu'on se comprenne bien, parce que je pense que l'objectif
qu'on doit poursuivre, c'est qu'un enfant qui est né au Québec ait accès, tu
sais, qu'il n'y ait pas deux catégories d'enfants qui sont nés au Québec, ceux
qui ont accès aux services de santé puis ceux qui n'y ont pas accès, je
comprends que vous venez répondre à ça avec la présomption temporaire de
couverture automatique, mais est-ce que, sur le... juste pour comprendre, sur
le principe, est-ce que vous rejoignez le fait qu'un enfant qui est né au Québec
doit avoir accès aux services de santé? Après ça, le reste, c'est peut-être de
la mécanique, mais, si ce que vous proposez d'une présomption temporaire n'est
pas dans le projet de loi, on se retrouve encore dans une situation où il y a
des enfants qui naissent au Québec et qui n'ont pas accès aux services.
M. Goldman (Richard Neil) :
Bien, O.K., je peux répondre à votre question. À 300 %, on est d'accord
que chaque enfant né au Québec, qui habite habituellement ici, qui n'est pas
juste de passage devrait avoir la couverture. Me Cliche-Rivard, je ne sais
pas si vous avez des idées quant à si ça devrait être dans un amendement ou
plutôt dans une directive.
M. Cliche-Rivard (Guillaume) :
Bien, moi, j'aurais dit qu'au-delà de ça, hein, tout enfant qui réside ici,
point barre, là, sans égard où il est né, notre position, c'est que l'enfant
qui habite au Québec devrait avoir accès aux soins
de santé, c'est un enfant. Le contrario, c'est de ne pas guérir un enfant, et
ça, j'ai beaucoup de misère à ce qu'on puisse concevoir ça,
dans une société.
Donc, évidemment, l'AQAADI appuie toute solution
qui va permettre la facilitation de l'accès universel à la RAMQ, mais on
comprend aussi les balises qu'un législateur voudrait venir imposer, et on
voudrait se situer un peu comme en proposant, disons, une solution mitoyenne
face à un débat pour ne pas qu'on le perdure, mais pour que, rapidement, on
puisse le mettre en vigueur pour qu'enfin ces enfants-là puissent être traités.
C'est surtout ça, la... Et donc, pour aller
chercher un plus grand consensus, rejoignons-nous un petit peu plus au milieu,
je pensais, et allons-y pour une couverture globale de ces enfants-là,
qui ont besoin de nous.
Mme Montpetit : Oh! moi, je
suis de l'école qui pense que l'on peut faire vite et bien à la fois. Je pense
que la volonté de mettre ça en place rapidement, en tout cas, nous, nous la
partageons certainement. Je pense que j'ai eu l'occasion
de le dire au ministre, là, mais je
le réitère dans ce contexte-là, parce que je sais que ça peut faire une
différence importante pour des enfants puis des familles. Mais je pense
que, tant qu'à travailler sur une pièce législative, autant la faire pour
qu'elle ait une portée la plus importante possible puis qu'elle soit la plus
pérenne possible aussi. Mais je voulais juste qu'on s'entende, en fait, sur...
au-delà de la... je ne veux pas dire des technicalités, là, je ne voudrais pas minimiser la chose, mais
je pense, sur les valeurs de base, sur un enfant au Québec — là, j'ai dit «né», mais réside — qu'un
enfant au Québec devrait avoir droit aux services de santé. Je pense que ça,
c'est important, c'était plus sur la base.
Une autre
question — puis je
sais que le temps passe toujours beaucoup plus vite que je le
souhaiterais — vous
avez fait référence, dans votre mémoire, à des... vous en avez parlé, de la
disparité entre ce qui est permis et ce qui est appliqué. Vous nous avez
sensibilisés au fait que, lorsqu'il y aura des changements qui seront faits, de
s'assurer qu'ils descendent et qu'ils soient bien compris. Mais, dans votre mémoire,
vous faites déjà référence à plusieurs... bien,
à une situation, notamment, sur le fait qu'une femme pouvait avoir accès à la
RAMQ pour son enfant, il y avait des problèmes
d'interprétation. Est-ce que c'est quelque chose que vous rencontrez, c'est...
je ne veux pas dire anecdotique, mais
est-ce que c'est un problème organisationnel au niveau de la RAMQ, ou si c'est
vraiment un enjeu de compréhension de certaines règles, ou c'est... À
quel point il y a des interventions plus larges qui devraient être faites en ce
sens-là pour s'assurer que ce qui est en place soit bien compris avec ce qui
est déjà en place, dans le fond, aussi, là?
M. Goldman (Richard Neil) :
Comme j'ai mentionné tantôt, je ne peux pas dire que c'est quotidien, mais je
travaille avec la loi depuis environ 20 ans, et ça arrive régulièrement
que quelqu'un appelle puis il a une information comme ça : Madame, la situation de l'enfant suit votre statut; vous n'avez pas de
statut, l'enfant n'a pas de couverture, alors que les lignes directrices, très claires, disent que, même
maintenant, là, aujourd'hui, si on a une preuve de demande de
régularisation, l'enfant est admissible. Avec le projet de loi n° 83, ça
va être... l'intention par un affidavit va être possible aussi, donc ça va
faciliter l'accès.
Mais est-ce que ça arrive? Moi, je dirais
régulièrement. Ce n'est pas chaque semaine ou chaque jour, ça arrive
régulièrement. Qu'est-ce qui est la cause? Je ne sais pas. Il faudrait
questionner, je pense, poser la question à la
RAMQ. Quelle est la solution? Des communications, formations à l'intérieur,
comme Me Cliche-Rivard a dit, des tests, que des personnes
indépendantes appellent avec des cas de figure, des enfants fictionnels pour
tester le système, et aussi que les superviseurs... À chaque fois qu'on appelle
pour notre cellulaire, on dit : L'appel est enregistré et peut être
vérifié pour fins de qualité, pourquoi pas pour la couverture de la RAMQ?
Mme Montpetit : Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup.
Alors, je vais maintenant céder la parole au
député de Laurier-Dorion pour les 2 min 45 s qui suivent.
• (16 heures) •
M. Fontecilla :
Merci, M. le Président. Je salue la... Je vous salue, messieurs,
M. Cliche-Rivard et M. Goldman. Merci pour la qualité.
Également, il
y a des idées très intéressantes, justement la présomption temporaire de
couverture automatique, là, et c'est un peu... je vois un peu
l'équivalent, ou enfin la même logique, là, qu'un peu dans le principe de
Jordan appliqué aux enfants autochtones, là, mais enfin je ne veux pas rentrer
là-dedans, là.
Mais je voulais soulever deux aspects qui
n'apparaissent pas dans votre mémoire. Le premier, qui découle de la question
du délai de carence —
il y a deux intervenants qui sont venus demander l'abolition du délai de
carence concernant les soins pour les enfants, là — est-ce que votre présomption
temporaire de couverture automatique pourrait... signifierait, en quelque
sorte, l'abolition du délai de carence? Première question.
Et la deuxième question, c'est concernant les
soins pour les femmes enceintes. Qu'est-ce que vous auriez à dire sur ces
questions-là?
M. Goldman (Richard Neil) : Mais,
sur le délai de carence, on a toujours été contre. C'est sûr que ça prive du
monde... des soins. La question ne se pose pas vraiment avec notre proposition,
puisqu'il s'agit soit d'enfants nés au Québec, donc qui sont déjà ici, ils
n'arrivent pas, ou des personnes qui sont ici pour au moins trois mois, donc,
les parents sont ici pour au moins trois mois. Le délai, donc, ça ne se pose
pas vraiment. On est contre le délai de carence. Même, dans le petit temps qui
nous est alloué, on n'a pas pu tout couvrir tous les points, notamment
l'amnistie de certains frais. Je ne sais pas, peut-être que quelqu'un peut
poser une question à Me Cliche-Rivard à ce sujet
pour lui en parler, mais on est contre le délai de carence, même si ce n'est pas
exactement relié à notre proposition.
Pour les soins pour les femmes enceintes, on
est, encore une fois, à 3 % pour, pour toutes les raisons qui ont été
expliquées par plusieurs autres intervenants. Ça nous coûte 1 000 fois
plus cher si quelque chose va mal et il y a un problème de développement, etc.,
en plus de tous les engagements du Québec en matière de santé, etc. Mais on ne
les a pas abordés parce qu'on est un peu limités dans ce qu'on peut faire dans
10 minutes.
M. Fontecilla : Je vous remercie.
Le Président (M. Provençal)
: C'est terminé? Alors, je remercie Me Cliche-Richard
et Me Goldman pour...
Oh! excusez, excusez, mon cher collègue. Je cède
maintenant la parole au député des Îles-de-la-Madeleine. Je trouvais qu'on allait vite, aussi, dans notre...
au niveau du temps. Vous disposez, vous aussi, de
2 min 45 s. Mille excuses.
M. Arseneau : Vous étiez en
train de conclure à mes dépens. Avec mes 2 min 40 s, je vais quand
même en profiter pour faire une petite blague. En tant que fier Acadien, je
suis content de voir des gens qui représentent l'Acadie.
Blague
à part, j'aimerais avoir une petite précision technique sur la présomption
d'intention, le document, l'affidavit qu'on devrait remplir. Les gens qui ont
comparu juste avant vous parlaient d'une déclaration assermentée et qui devait
être accompagnée d'une mesure pare-feu. Est-ce que c'est... On parle de deux
choses différentes ou on aurait besoin de
mesures pare-feu aussi, là, pour éviter qu'en remplissant un affidavit, par
exemple, on dévoile le statut des parents face à l'immigration et qu'on
se mette dans une situation problématique?
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Je ne pense pas qu'on va se trouver dans une situation
problématique. Comme je disais, par l'acte
de naissance, on sait déjà que les parents sont là, par définition, donc je ne
pense pas qu'on a ce risque. Mais évidemment il faut faire attention, il
faut mettre les mécanismes, là. Il faut s'assurer que ça ne soit pas des
informations qui vont être transférées directement. Ça, c'est sûr qu'il faut
faire attention.
M. Arseneau :
D'accord. Puis j'aimerais vous entendre, à moins que... Parce que j'ai été
distrait pendant deux minutes, j'ai été dérangé, je ne crois pas vous avoir
entendu parler de la demande pour l'amnistie à laquelle vous faites référence.
Est-ce que vous pourriez nous... passer la prochaine minute et demie à nous
expliquer ce que vous souhaitez?
M. Cliche-Rivard
(Guillaume) : Merci beaucoup, je voulais y revenir, puis c'est très
apprécié. Écoutez, on a plusieurs situations de personnes qui se retrouvent,
actuellement, avec des factures très salées, là. On le sait, ce que ça coûte,
les soins de santé, évidemment, partout, mais ici aussi. J'ai des gens que je
connais personnellement, des clients, des gens qui font affaire avec des
membres de l'AQAADI, qui, malheureusement, à chaque semaine, là, ou à chaque
mois, ont une entente de paiement avec certains hôpitaux pour des enfants qui
auraient normalement, si la loi... si le p.l. n° 83 avait été adopté, qui
n'auraient pas eu à payer ces factures-là.
On reconnaît
aujourd'hui, implicitement ou explicitement, que ces enfants-là auraient dû
être couverts, dans notre société. Et on
parle de plusieurs milliers de dollars, souvent plus que des dizaines de
milliers de dollars, là, on parle de beaucoup de frais, beaucoup d'argent, et
ce sont des ententes de paiement sur cinq, 10, 15 ans que ces familles-là
doivent payer, qui s'ajoutent au loyer, qui s'ajoutent souvent aux besoins que
ces enfants-là ont déjà, parce que, souvent, des enfants qui ont besoin d'aide
en très bas âge, c'est des enfants qui vont avoir besoin de soins récurrents,
souvent, pas toujours, et donc les factures s'accumulent, tout ça, alors
qu'aujourd'hui on reconnaît, essentiellement, qu'on aurait dû le faire il y a
plusieurs années.
Alors, je pense qu'on
devrait créer un programme pour effacer, amnistier ces dettes-là et créer un
programme pour rembourser, ou annuler, ou retourner une certaine partie des
fonds qui ont été payés, alors qu'aujourd'hui on reconnaît que ces enfants-là
n'auraient pas dû... les parents n'auraient pas dû avoir à payer.
M. Arseneau :
Merci beaucoup. J'imagine que mon temps est écoulé?
Le Président
(M. Provençal)
: Effectivement, M. le
député, votre temps est écoulé.
M. Arseneau :
Cette fois-ci, vous pouvez mettre fin à la séance.
Le Président
(M. Provençal)
: Merci de me donner
la permission. Je remercie Me Cliche-Rivard ainsi que M. Goldman pour leur
contribution aux travaux.
Je vais suspendre la
commission pour faire place au prochain groupe. Merci.
(Suspension de la séance à 16
h 06)
(Reprise à 16 h 11)
Le Président
(M. Provençal)
: Merci. Je souhaite maintenant
la bienvenue aux représentants du Bureau international des droits des enfants.
Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi
nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je
vous invite à vous présenter puis à initier votre exposé. Merci.
Bureau international des
droits des enfants (IBCR)
M. Landry
(Guillaume) : Alors, bonjour
à toutes et à tous. Merci de l'opportunité, M. le ministre, les membres
de la commission, chers députés, de prendre part à cette réflexion, dont on est
assez fiers, que le Québec entame sur la question des soins de santé aux
enfants ayant des parcours un peu complexes et différents.
Alors,
c'est avec enthousiasme qu'on vient présenter auprès de vous le fruit de nos
réflexions et de nos travaux. J'ai la chance et l'honneur d'être avec M.
François Crépeau, professeur de droit et directeur du centre de droits de la personne et du pluralisme juridique à l'Université
McGill. Il est également l'ancien rapporteur spécial des Nations unies
pour les droits de l'homme, des migrants. Alors, ce sera sans doute un appui
important dans la période des questions pour compléter un peu mes
interventions.
Alors, encore une fois,
très ravi que ce projet de loi existe. Et puis on a eu peut-être la chance de
passer un peu plus tardivement, donc on a pu
écouter les interventions des autres collègues et puis on va essayer
d'être complémentaires à leurs interventions plutôt que de réitérer ce
qui a déjà été dit.
Peut-être l'angle que l'on cherche à aborder aujourd'hui,
c'est celui des droits de l'enfant. Donc, en 1989, a été introduite la Convention relative aux droits de l'enfant. C'est un
texte fondamental qui a plus de 30 ans d'existence et que le Québec
s'est aussi... a décidé de se lier à ce document-là en 1991, avec un décret.
C'est un texte qui porte vraiment sur 41 droits de l'enfant en particulier, ça
évoque le droit à la santé. Et notre mémoire évoque plusieurs de ces droits-là,
mais peut-être qu'il y a quelques éléments clés, je pense, qui sont importants
de prendre en compte sur... qui sont novateurs, dans cette convention-là, et
qui, aujourd'hui, devraient peut-être inspirer la bonification du projet de loi
en examen.
La première, c'était l'introduction du principe
selon lequel un enfant est un sujet de droit. Ça peut paraître simple, mais, en
tant que tel, c'est peut-être la genèse de la difficulté qu'on rencontre aujourd'hui
avec l'enjeu qui nous concerne, c'est-à-dire que les enfants étaient considérés
peut-être comme des sous-personnes relevant du statut particulier de d'autres personnes, des adultes, des parents, etc., alors que,
pourtant, les droits de l'enfant sont introduits, dans ce principe-là,
qu'en tant que sujets ils sont des personnes à part entière, avec leur statut
et leurs droits, et ça, c'est fondamental. Trop longtemps on a eu l'approche
qu'un enfant, c'est un peu une plante verte. On met des barbelés autour, on la protège jusqu'à ce qu'elle devienne un individu
quand elle sera adulte. C'est contraire à l'approche des droits de
l'enfant, c'est-à-dire que, dès la naissance, cette personne-là existe, elle a
ses propres droits.
Alors, je ne m'attarderai pas plus longtemps
là-dessus parce que je pense qu'il y a unanimité qu'on peut peut-être évoluer
d'une perspective où le statut des soins accordés à l'enfant ne devrait plus
être dépendant du statut spécifique de ses parents. C'est fondamental pour
s'inscrire dans une approche de droit de l'enfant.
Le deuxième point, par contre, qui est peut-être
un petit peu plus encore problématique dans l'examen du projet de loi, c'est la
notion de l'intérêt supérieur de l'enfant. C'est un principe fondamental de la
Convention relative aux droits de l'enfant que, parfois, on vient saupoudrer.
On le mentionne dans des avant-projets de loi, dans des procédures, dans toutes
sortes d'éléments à gauche et à droite, mais il faut faire un lien entre
l'examen du projet de loi n° 83 et les travaux, actuellement,
de la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la
jeunesse.
On s'inscrit dans une dynamique, au Québec, où
on veut peut-être faire un pas en arrière puis s'attarder sur le
positionnement, l'approche qu'on a, dans notre société, envers les enfants, et
l'un des points clés, c'est de s'outiller pour
comprendre qu'est-ce que ça veut dire, prendre en compte l'intérêt supérieur
des enfants. Et force est de constater que,
jusqu'à maintenant, c'est plutôt une approche bureaucratique qui a primé, mais
en aucune circonstance le législateur ou les services publics ne se sont vus dans
une position où ils se sentaient imputables à rendre des comptes, à
savoir comment est-ce qu'eux, dans un cas particulier ou sur un
ensemble, prenaient compte de l'intérêt supérieur de l'enfant.
Donc, il y a
cette inversion-là qui est importante, où ce n'est pas tant l'enfant qui
devrait correspondre à des critères et rentrer dans une case, mais c'est plutôt
à notre société, à nos services auxquels l'enfant a droit qui devraient
répondre à la prémisse de pouvoir illustrer de quelle manière est-ce qu'une
décision parmi tant d'autres, qu'elle soit administrative, qu'elle soit
juridique, qu'elle soit financière, socioéconomique, bien, elle répond à
l'obligation de tenir compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, et ça,
là-dessus, ça devrait être, dans le fond, l'élément fondateur du texte de loi
qui vient inspirer le reste. Peu importe la couleur bureaucratique,
administrative, législative que le projet de loi devrait prendre, ça devrait
être fondamentalement pour venir prendre en compte l'intérêt supérieur de
l'enfant et que le reste, autrement dit, des procédures devraient vraiment être...
répondre à cette obligation-là.
Alors, ça, je
pense que c'est un élément important. On s'en est aperçu dans plusieurs pays
avec l'enregistrement des naissances,
par exemple, où longtemps on s'est attardés sur l'idée que les pays forçaient,
dans le fond, les parents ou les
enfants à rentrer dans une procédure, et le fardeau, dans le fond,
bureaucratique, c'est aux enfants où on transférait l'obligation de
s'enregistrer ou aux familles d'enregistrer les naissances.
Alors, c'est
un peu la même chose ici, où on met beaucoup de l'avant l'obligation des
familles ou des enfants de remplir des conditions ou d'obtenir des
cartes, des sous-cartes ou des procédures pour pouvoir avoir accès. Mais, si on
renverse la vapeur et on dit : Les enfants ont des droits particuliers qui
sont différents des adultes et qu'il y a ce droit, là, clair, réitéré dans
plusieurs textes, un droit à la santé, un droit à la non-discrimination, bien,
à partir de ce moment-là, c'est plutôt l'inverse, où la société devrait être à
même de pouvoir répondre à cette obligation-là et que l'enfant, plutôt
d'hériter d'une surcharge bureaucratique, à devoir répondre à des critères...
ça devrait plutôt être à la bureaucratie d'être au service de l'accès à la
santé de l'enfant.
Alors, ça, c'est vraiment un changement de
posture qui est assez fondamental, mais qui viendrait beaucoup simplifier les
choses. Sous-jacent à ça, c'est de dire que plus le projet de loi est complexe
et crée des balises procédurales... ça veut dire qu'on vient faire le choix,
comme société, qu'on va investir des ressources et des énergies dans des étapes
bureaucratiques plutôt que d'utiliser ces ressources, notamment financières, et
ces énergies à l'octroi des services de santé. Et c'est peut-être là la
préoccupation qu'il y a dans le projet de loi actuel, parce qu'on continue
d'avoir un nombre assez important de balises bureaucratiques qui peuvent être
un frein assez conséquent à l'accès aux soins de santé, et là il y a une
question à se poser, dans le fond.
Dans plusieurs pays où on intervient, des fois
les choix de mots sont assez simples, mais on aide des pays, comme le Burkina
Faso, le Togo, la Côte d'Ivoire, la République démocratique du Congo ou le
Honduras, à migrer d'une terminologie où on parle des enfants du Québec, à
parler des enfants au Québec, et cette approche-là, elle devrait dire que tous
les individus qui sont sur notre territoire sont sous notre responsabilité et
que, dans le fond, les services devraient être disponibles aux enfants sur le
territoire nonobstant leur statut administratif, en quelque part. Et une simplification du langage permettrait tout simplement
de résumer ça, où un projet de loi devrait s'attarder sur l'accès et le droit
qui en découle.
Et c'est peut-être à la RAMQ de se charger de
l'opérationnalisation technique de voir incarner ce droit-là plutôt que de
passer du temps sur le projet de loi à baliser une bureaucratie qui tourne
autour, finalement, de balises qui,
finalement, de facto, constituent des freins et briment ce droit-là. Alors,
c'est une approche, là-dessus, qui viendrait peut-être chambouler un peu
la configuration du texte et qui est assez importante.
Vous l'avez peut-être vu dans le mémoire, il y a
beaucoup de références qui sont faites à différents pays qui font face aux
mêmes enjeux, notamment la crainte du tourisme médical, hein, qui peut vraiment
être un frein, et qu'on veut mettre, comme
société, les paramètres pour garder quand
même le contrôle, étant donné que
notre système de santé a ses
limites et qu'il coûte cher. Alors, on veut être certains d'en garder le
contrôle.
Mais ce qui est important de constater, dans
l'éventail des sociétés sur lesquelles on a fait un inventaire un peu rapide,
on peut constater que l'exercice, l'expérience a démontré qu'il valait mieux
donner un accès gratuit, immédiat à tous les enfants et que, conséquemment, ce
n'était pas, finalement, une préoccupation, l'élément du... la crainte du tourisme médical, et que, dans les
faits, les pays n'ont pas vu, finalement, une tonne de personnes débarquer
pour venir exploiter le système de santé. Jusqu'à
maintenant, on n'a pas de données probantes, ni ici ni dans plusieurs
pays, qu'on fait face à une venue massive de personnes qui ont spécifiquement
comme intention de venir exploiter le système
de santé pour leurs enfants. Par contre, on a des données probantes, c'est de
dire que les balises que l'on met, qui freinent cet accès-là, causent,
en ce moment, des préjudices et ont des conséquences aujourd'hui pour des
enfants aujourd'hui. Donc, ça veut dire que les données qu'on a sont davantage
sur les conséquences et les préjudices causés de cette approche-là plutôt que
sur une exploitation et un coût économique important d'une utilisation de ce
qu'on pourrait appeler le tourisme médical.
Donc, à cet effet-là, je pense qu'il y a quelque chose d'important à examiner.
Donc...
• (16 h 20) •
Le
Président (M. Provençal)
:
Merci beaucoup, M. Landry. Malheureusement, un 10 minutes, ça
s'écoule très rapidement.
Alors, pour la suite des choses, je cède la
parole au ministre. À vous la parole.
M. Dubé :
Très bien. Alors, M. Landry et M. Crépeau, merci beaucoup pour votre
présence puis aussi pour votre mémoire.
Alors, moi, j'irais tout de suite dans le vif du
sujet, parce que vous... Je comprends très bien vos objectifs, puis je pense
qu'on a tous à même, là... l'idée de protéger le maximum d'enfants et de les
rendre admissibles, dans le contexte... Mais
vous avez référé à des concepts qui sont assez larges, dans le sens de... Quand
vous parlez de présents temporairement au Québec, qu'ils devraient avoir
accès gratuitement aux services de santé, vous définissez comment une présence
temporaire?
M. Landry
(Guillaume) : Très bien. Je ne sais pas, je vais peut-être laisser la
parole au Pr François Crépeau pour intervenir là-dessus.
M. Crépeau (François) : Très
bien. On est tous d'accord, et c'est ce que Guillaume vient d'expliquer, que
tous les enfants, dont le Québec devrait se sentir responsable, doivent être
couverts par l'assurance maladie. Ça, c'est le... ce serait ça, la position du
bureau. Alors, il y a des enfants pour lesquels le Québec n'a pas besoin de se
sentir responsable, les enfants des touristes. Alors, il faut peut-être les
soigner, mais on va leur envoyer une facture, ils vont être couverts par leur
régime national. Il y a des gens qui viennent ici avec des objectifs
extrêmement temporaires, pour du travail pendant... avec un permis temporaire
de trois mois, de six mois et qui ont de la couverture médicale privée payée
par l'entreprise, etc.
Donc, il peut y avoir des éléments dans lesquels
on indique que telle, telle personne ne sera pas couverte, mais la règle de
base devrait être de dire, il me semble, que tout enfant dont la résidence
habituelle est au Québec, quel que soit son
statut migratoire ou le statut migratoire de ses parents, a droit aux services
de santé du Québec. Il y a deux raisons principales à ça. D'une part, le
principe de l'intérêt supérieur de l'enfant, qui fait que tout enfant dont la
résidence habituelle est au Québec... et «résidence habituelle» est défini,
ici, par le Code civil : être établi au Québec et avoir l'intention d'y
résider. Est-ce que ça doit être trois mois, six mois? Il me semble que le...
Il va falloir faire attention, très
clairement, au délai de carence, parce que le délai de carence... Par exemple,
à la naissance d'un enfant, imposer
un délai de carence n'a pas de sens parce qu'il a besoin de soins de santé
immédiatement, mais il peut y avoir des éléments de délai de carence qui
se présentent. Mais l'objectif, c'est de s'assurer que tous les enfants ont
accès, de manière à simplifier, entre autres, et ça a été expliqué par les
autres groupes qui sont passés avant nous, simplifier, entre autres, la
procédure administrative. Ça la simplifiera pour les services de santé
eux-mêmes. On réduit les coûts de la gestion administrative de l'ensemble des
critères que l'on a accumulés au fil des années pour déterminer qui a droit et qui n'a pas droit, mais aussi on va
permettre... on va réduire les coûts, plus tard, de tous ces enfants qui
n'auront pas été soignés à temps et dont on va découvrir plus tard qu'il
y a des séquelles qu'il va falloir soigner plus tard, plus tard quand ils
seront enfants ou plus tard quand ils seront adultes.
Et toutes les recherches montrent que les
enfants qui entrent dans un pays en bas âge avec des parents qui n'ont pas de
statut, qui ont un statut temporaire et qui le perdent par la suite, restent
dans le pays et finissent, après un certain temps, par obtenir un statut. C'est
le cas des «dreamers» aux États-Unis. Et ces gens-là restent, et il y a toute
une littérature sur le fait que ces enfants-là ne retournent pas dans le pays
d'origine, qui n'est pas leur pays d'origine. Leur pays, c'est là où ils ont
été socialisés, élevés, éduqués, ce sera au Québec. Et, de ne pas leur donner accès aux services de santé à temps et de façon à ce que les
parents aient confiance que ces services répondent à leurs besoins, c'est se
créer des problèmes pour l'avenir, c'est de faire en sorte qu'on aura plus tard
une partie de la population qui aura été mal soignée et dont il faudra
récupérer des soins de santé beaucoup plus complexes par la suite, donc on se
tire dans le pied.
M. Dubé : Écoutez, j'apprécie
la précision, là, parce qu'initialement je la trouvais plus large. De la façon
dont vous la définissez, je comprends un peu plus.
Maintenant, est-ce que je peux vous demander ce
que vous définissez par soins primaires? Parce que vous dites aussi, dans vos... «pour une présence temporaire afin qu'ils
soient couverts pour leurs soins primaires». Est-ce que je devrais
prendre quelque chose en compte, là, dans cette définition-là?
M. Crépeau (François) : Pour
moi, la définition de soins primaires, au Québec, c'est ce qui est couvert par l'assurance
maladie. On peut avoir, personnellement, des opinions sur ce qui devait être
couvert par l'assurance maladie, les soins dentaires, etc., on peut avoir des
idées pour l'avenir, mais, en tout
cas, les soins couverts par l'assurance maladie, aujourd'hui, au Québec,
sont des soins primaires.
M. Dubé : O.K., c'est bon.
Écoutez, j'ai sûrement de mes collègues qui ont d'aussi bonnes questions, sinon
meilleures.
Le Président (M. Provençal)
: M. le ministre, j'aurais deux de vos
collègues qui voudraient adresser des questions. Alors, dans un premier temps,
je vais céder la parole à la députée de Lotbinière-Frontenac.
M. Dubé : Merci, M. le
Président.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Merci, M. le Président. Bonjour à tous. Vous avez... Vous proposez
de donner un accès aux soins de santé gratuits à tous les enfants résidant au
Québec. Vous l'avez dit aussi, que notre système de santé a des moyens
financiers limités. D'après vous, ça serait quoi, les balises qu'on devrait
mettre? Qu'est-ce que vous proposez, concrètement?
M. Landry (Guillaume) : À mon
sens, si je regarde les modèles qui sont en vigueur dans plein de pays, on peut aller du Chili jusqu'à la Grèce, à la Suède,
on peut regarder les modèles en Allemagne, en Espagne, etc., strictement
sur la question du coût, on l'a entendu par la Table de concertation, on l'a
entendu par l'Observatoire des tout-petits et encore plus par Médecins du
Monde, c'est que l'économie d'échelle, qui pourrait être celle de réduire
l'accès parce qu'on veut économiser parce qu'on ne veut pas nécessairement
défrayer des coûts là-dessus, se retrouve à créer des coûts plus importants
dans le temps. Et la trajectoire de ces enfants-là est importante... est de
constater, finalement, que ça cause des problèmes, et c'est là où c'est
intéressant de voir le mouvement de masse, où des pays en Amérique latine, des pays en Europe du Nord, en Europe
méditerranéenne, dans différentes régions du monde ont élargi à force de constater, avec des études, que,
finalement, cet argument-là, ne serait-ce qu'économique, ne tenait pas la
route.
Donc, le mouvement qui est en vogue, c'est de
dire : À partir du moment où une personne est sur notre territoire, un
enfant est sur notre territoire, il vaut mieux lui donner accès maintenant aux
soins dont il a besoin et auxquels il a droit, et ensuite de ça on verra, sur
la trajectoire de son statut, indépendamment de la prise en charge des soins
immédiats à cette personne-là... Donc, en ce sens-là, moi, j'irais sur une
ouverture qui est inclusive. Et j'argumenterais, d'ailleurs, que c'est une
approche qui va être économique quand on prend en compte l'ensemble des coûts
de la prise en charge à long terme de la personne.
M. Crépeau (François) : Il faut
concevoir la prise en charge de ces enfants-là qui ne sont pas pris en charge aujourd'hui
comme un investissement pour l'avenir de la même manière qu'on considère que le
droit à la santé et le droit à l'éducation au Québec sont un investissement
pour l'avenir. Ces enfants-là resteront au Québec pour leur grande majorité et
finiront par devenir des citoyens productifs qui retourneront au Québec par
leur créativité, par leur... en créant des
entreprises, en payant des impôts, etc. Donc, c'est un investissement
supplémentaire. Oui, il y a une dépense
supplémentaire, mais probablement avec une réduction des dépenses ultérieures
et avec le fait que ces gens-là seront en meilleure santé et produiront
mieux au Québec.
Le Président (M. Provençal)
: Maintenant, est-ce que Mme la députée de Lotbinière
peut céder la parole à une collègue?
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Oui. Merci.
• (16 h 30) •
Le
Président (M. Provençal)
:
Alors, je céderais la parole à Mme la
députée de Repentigny.
À vous la parole. Votre micro, s'il vous plaît. Alors, Mme
la députée de Repentigny, est-ce que vous pourriez activer votre micro?
Mme Lavallée : Désolée. Oui,
oui, désolée. Le micro est là.
Le Président (M. Provençal)
: Merci.
Mme Lavallée : C'est le charme des Zoom, actuellement. Là, on oublie, des fois, de remettre le micro, de l'ouvrir ou
de le fermer.
Donc, dans un souci d'équité... parce que je
vous entends parler du fait qu'on devrait soigner tous les enfants qui sont sur
notre territoire, mais il y a aussi un souci d'équité pour les citoyens qui
paient à grands frais tout le système de santé actuel, vous en avez parlé tout
à l'heure.
Il y a des mémoires qu'on a eus, de la
Protectrice du citoyen et du regroupement qui a passé avant vous, où on balisait quand même l'accès à ces soins-là.
Est-ce que vous êtes en accord avec ce qu'eux autres proposent? Est-ce
que vous voyez... quand même, qu'il y ait un minimum d'encadrement afin
d'éviter que... exemple, les États-Unis, où on sait à quel point les coûts pour
accéder aux services de santé sont énormes, puis qu'il pourrait être tentant de
traverser les lignes pour trouver une raison, puis faire soigner son enfant,
puis retourner aux États-Unis? Parce que, oui, il y a des enfants qui vont
peut-être rester, mais il y a peut-être des enfants qui ne resteront pas, là,
qui vont faire un aller-retour. Comment on fait pour s'assurer qu'on respecte
aussi les gens qui paient pour ce système-là puis qui... oui, qui veulent
soigner les enfants qui sont sur leur territoire, mais qu'il y ait quand même
un encadrement pour respecter une forme d'équité?
M. Landry (Guillaume) : Bien,
je peux peut-être commencer, puis je suis certain que François aura sans doute
beaucoup de choses à compléter là-dessus.
Ce qui est important de constater, c'est que, si
on identifie un problème potentiel sur la venue de personnes qui seraient
motivées par un usage, une exploitation du système de santé et que,
conséquemment, les balises sont là pour freiner cet usage indu de notre
système, bien, ces... je comprends la rhétorique et l'importance de tenir
compte de ces paramètres-là, mais en même temps, quand on regarde l'expérience
migratoire, les gens ne se déplacent pas spécifiquement pour aller chercher un
service plutôt qu'un autre et, ensuite de ça, plient bagage et retournent chez
eux. Alors, c'est là où il y a un problème sur la conception même l'expérience
des gens qui vivent ces situations-là de migration et qui débarquent chez nous.
Donc, si la stratégie, ce serait de dire :
On ferme les portes au système de santé pour prévenir d'abord l'expérience
migratoire, on le constate dans les pays où ça a lieu, ça n'a pas l'effet
désiré, et on se retrouve avec une charge beaucoup plus importante par la suite
de la non-prise en compte des droits et des besoins de ces personnes-là à long
terme, parce que ces gens-là restent, et puis il y a toutes sortes d'enjeux qui
se trament là-dessus.
Le deuxième exercice, c'est de constater que,
dans les pays qui ont des expériences migratoires différentes, qui sont des
pays receveurs, finalement, majoritairement de migrants, de personnes en situation
de migration, en tant que tel, on le voit, la conjoncture, que ce soit sur la
prise en charge du système de santé, n'est pas un facteur qui va venir faire à
lui seul fluctuer et freiner ou faire bouger l'expérience migratoire. Les gens
quittent pour une multitude de raisons, mais ce n'est certainement pas pour
celle spécifiquement de viser un pays où on va venir prendre en charge plutôt
qu'un autre leurs besoins en matière de santé.
Bien, je laisse François, qui a beaucoup plus
d'expérience en la matière, compléter.
M. Crépeau (François) :
Un point. Moi, il me semble qu'un système géré dans la RAMQ dans lequel on
appliquerait le principe de la résidence habituelle et on fournirait des
cartes-soleil à toute personne qui se présente et qui peut démontrer la
résidence habituelle en vertu des méthodes de démonstration de la résidence
habituelle du Code civil, c'est-à-dire, et ça a été mentionné par nos prédécesseurs,
un bail, des factures d'Hydro-Québec, de Gaz Métro — ça ne s'appelle plus
Gaz Métro — ou
alors des déclarations qui ne sont pas forcément des déclarations authentiques,
là, présentées devant... assermentées, mais aussi la suggestion, j'ai trouvé,
de la Protectrice du citoyen de permettre à des organismes communautaires de
faire des... d'écrire des lettres attestant de la résidence habituelle de la
personne, tous ces moyens-là pourraient être rapidement mis en oeuvre par des
personnes qui résident au Québec de façon habituelle, mais qui n'ont pas
forcément le statut migratoire, etc., et qui pourraient, à ce moment-là,
obtenir rapidement... et ça, c'est encore une question de délai administratif,
mais obtenir rapidement la RAMQ et la carte-soleil.
Tout enfant qui naît au Québec devrait avoir la
carte-soleil immédiatement. La Protectrice du citoyen a proposé une carte provisoire pour les premiers 183 jours. Pas
contre ça, à partir du moment où les services sont donnés, ces
enfants-là ont besoin des services. Mais on simplifierait considérablement
l'appareil administratif de gestion en ayant la résidence habituelle, en
permettant à toute une série de mécanismes de venir attester de la résidence.
Et cette carte-soleil est la clé, est la clé
pour les hôpitaux, pour les médecins, etc. La personne qui habite Burlington et
qui veut se faire soigner à Montréal... a cette carte, sauf par la fraude, et
là on a des mécanismes policiers pour... Je veux dire, la fraude, elle existe
partout et dans tous les systèmes, et donc il faut des mécanismes policiers
pour lutter contre ça. Mais, si on simplifie administrativement l'accès à la
carte-soleil avec un mécanisme de base simple qui permet d'avoir accès
rapidement et avec des documents, ça n'empêche absolument pas la RAMQ de faire des inspections, de faire des enquêtes
pour vérifier la réalité. Ces choses-là sont toujours possibles et elles
existent.
Donc, pour moi, la simplification administrative
est une des clés pour que le système fonctionne bien et pour vérifier que les
personnes qui se présentent ont effectivement cette carte-soleil.
Mme Lavallée :
Donc, ce que je comprends de votre part, vous êtes quand même ouverts à... vous
êtes en accord avec ce que la Protectrice du citoyen et ce que le groupe
avant vous avançait, disant : Ça prendrait une déclaration minimale des parents, de leur intention et des
preuves... ou du fait qu'ils habitent, parce qu'il faut toujours bien prouver
la résidence habituelle au Québec. Donc, avec ça, on pourrait émettre une
carte-soleil provisoire pour les 183 jours et faire la suite, donc il y a un encadrement. Parce
que, tout à l'heure, je vous écoutais puis, honnêtement, là, j'étais inquiète,
parce que, là, c'est comme si on ouvrait tout, mais sans aucune vérification.
Puis ça, quand on vérifie déjà les gens du Québec qui quittent pendant
183 jours puis qu'on leur fait perdre leurs acquis... et il faut aussi
être justes et équitables envers tout le monde aussi, là.
M. Crépeau (François) : Comme
tout système, il faut un encadrement. L'important, dans le but de mettre en
oeuvre l'intérêt supérieur de l'enfant, c'est de faire en sorte que l'accès à
ces services soit facilité pour tous les enfants
qui résident habituellement au Québec, et ça, on peut le faire. Entre autres,
une des choses, c'est, si on place... que la résidence habituelle est le
critère d'accès aux soins de santé et qu'il n'y a aucune connexion entre la
RAMQ et les services d'immigration du
gouvernement canadien, on enlève la crainte qu'ont beaucoup de migrants dont le
statut est aléatoire de se présenter devant les services gouvernementaux et, à
ce moment-là, on a... on va avoir une adhésion de tous ces migrants qui,
pour le moment, hésitent, n'osent pas, etc., préfèrent aller à la clinique de
Médecins du Monde. On va avoir une adhésion au système, on aura tous des gens
avec des cartes, on va avoir des enfants qui vont être soignés et on va éviter
des problèmes de santé plus tard.
Mme Lavallée : Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup.
Alors, je cède maintenant la parole à la députée
de Maurice-Richard pour la suite, 11 minutes.
• (16 h 40) •
Mme Montpetit : Merci beaucoup,
M. le Président. Bonjour à vous deux. Merci d'être là avec nous pour terminer
cette journée de consultations.
La question
du tourisme médical, de toute évidence, est une inquiétude de certains,
peut-être légitime, peut-être pas, mais... puis là je m'adresse
peut-être au ministre, je m'excuse, je vais profiter du temps qu'on a entre
nous, mais, moi, quelqu'un qui a une
approche plutôt scientifique de façon générale, de par ma formation aussi,
j'aime bien, quand on a ces approches-là, d'être basée sur des faits,
puis je pense que... pour les discussions futures qu'on aura, comme c'est un élément qui semble revenir beaucoup,
sur comment protéger, je vais dire, le Québec d'abus, quand on fait référence au
tourisme médical, c'est quand même à ça qu'on fait référence, je pense
qu'encore faut-il savoir ce qu'il en est exactement.
Donc,
j'imagine, peut-être, que les équipes du ministre sont avec nous, nous
écoutent, pourront peut-être porter à notre attention aussi, s'il y a des
données factuelles à cet effet-là, s'il y a des hypothèses qui ont été
formulées, s'il y a des données qui ont été validées. Je pense qu'avant
de... comment je pourrais dire, d'établir une pièce législative sur des
présomptions... elles sont peut-être légitimes, ces présomptions-là, mais je
pense qu'il faut quand même essayer de les
confirmer d'abord par une démarche un petit plus rigoureuse que par nos
impressions personnelles. Puis, encore là, je n'ai pas de jugement sur
la chose, mais je ne présumerais pas des intentions des gens.
Je pense
qu'en effet on devrait être préoccupés prioritairement par s'assurer de
maximiser puis d'élargir l'accès à la santé pour les enfants qui sont au
Québec puis ne pas se mettre des barrières, je vais dire, supplémentaires si
elles ne sont pas avérées ou si elles ne s'avéreront pas. Donc, assurons-nous
de travailler avec les bonnes données. Puis,
s'il s'avère, effectivement, que c'est une inquiétude qui pourrait se
confirmer, bien, on agira en fonction de son... C'est mon petit laïus
sur le tourisme... Il n'y a pas de question, c'était juste pour la suite des
choses, pour quand on travaillera sur notre étude détaillée. Mais vous avez
été, de toute façon, de bon conseil sur cet élément-là.
Vous me permettrez un petit aparté, parce qu'il
y a un élément dans votre mémoire que... puis vous avez répondu à beaucoup de
questions, de toute façon, de par votre mémoire puis de par vos échanges aussi
avec les élus, mais vous avez fait référence aux femmes enceintes, puis je vous
pose la question, parce que ça a été mentionné par plusieurs aussi, qu'il faut s'assurer d'apporter une attention aux
femmes migrantes, mais vous avez fait référence plus spécifiquement au
fait que ces femmes-là font l'objet, au Québec, de maltraitance et vous
mentionnez notamment ou spécifiquement par rapport aux soins périnataux. Vous
êtes le deuxième qui portez cet élément-là à notre attention. Je ne sais pas si vous pourriez nous en dire
davantage, parce que vous l'avez simplement mentionné. Moi, c'est quelque
chose qui me préoccupe beaucoup, d'entendre ça, surtout avec tous les débats
qu'on a eus sur la question du racisme systémique dans le réseau de la santé au
Québec, avec les cas qu'on a vus, notamment à Joliette, là, complètement autre
chose. Mais j'aimerais ça que vous... profiter de votre présence pour que vous
puissiez nous éclairer davantage sur ce que vous avez vu ou entendu à ce
sujet-là.
M. Landry
(Guillaume) : Très bien.
Merci pour la bonne question. Peut-être juste un aparté aussi, un premier point. Sur le
tourisme médical, je pense que je ferais quand même écho à ce que
Médecins du Monde a révélé dans son intervention, c'est de faire très
attention aussi, parce que la catégorie touriste, au Canada, peut servir à beaucoup
de statuts différents. Alors, il faut faire attention si on compile des données
au niveau de la RAMQ sur des personnes qui sont jugées comme étant sous un
statut de tourisme.
Mais ce n'est pas vraiment des gens qui sont
dans une démarche touristique, sur un séjour de quelques semaines, là, pour venir
visiter simplement l'endroit, parce qu'on peut passer vraiment des mois et des
années sous un statut de visa touristique parce qu'on est aux études, parce
qu'on est en attente d'un autre statut, etc., donc de faire quand même très
attention à vraiment distinguer qui correspond à un touriste au sens d'une
définition vraiment dans l'essence touristique versus celle de la catégorie des
visas, qui peut englober beaucoup de réalités différentes sous l'onglet
«touriste».
Sur la question des soins
de santé, effectivement, c'est quelque chose qui fait même partie de la
Convention relative aux droits de l'enfant. L'Observatoire des tout-petits a
été très éloquent pour évoquer l'importance des phases de développement et la
prise en compte, finalement, des phases du foetus sur son développement, ce qui
est déterminant sur l'ensemble de la vie de la personne par la suite. On l'a
constaté, Médecins du Monde a raconté des histoires, j'ai entendu la Table de
concertation, aussi, qui l'évoquait. Donc, peut-être, dans ma vie, j'ai
aussi... je suis le conjoint d'une sage-femme, donc on constate tout à fait
nombre de cas de femmes qui se retrouvent dans une situation où elles n'ont pas
accès aux soins, font des choix qui ne sont pas motivés par, nécessairement, le
bien-être de leur personne et celui de l'enfant, mais par des contraintes
économiques ou des peurs en lien au statut et qui ont des conséquences tout à
fait néfastes et tangibles sur elle-même et sur leur enfant à naître ou leur
enfant né.
Alors, ça,
c'est vraiment important de pouvoir l'illustrer et le comprendre, que ce n'est
pas sans conséquence, le régime actuel, et que, vraiment, il y a des cas
qu'on peut vraiment documenter de femmes qui vivent... et ces enfants-là qui vivent des préjudices en raison du
fait qu'elles n'ont pas pu avoir accès pleinement aux services prénataux,
et postnataux, et, évidemment, l'accouchement en soi. Alors... Puis je vous
renvoie juste le témoignage, à la fin, de la Table de concertation, c'était
très éloquent, là, là-dessus, là, sur des cas assez concrets.
J'espère que je réponds à votre question,
Mme Montpetit.
Mme Montpetit :
Oui. Vous n'apaisez pas mes préoccupations, mais ce n'était pas l'objectif de
ma question. Non, non, au contraire, vous répondez bien, puis je... c'est...
je comprends, vous nous mentionnez que ce n'est pas nécessairement dans le réseau
de la santé non plus, des fois ça se fait de façon parallèle pour éviter des
frais qui pourraient être liés à des services.
Je suis toujours très choquée, je pense,
d'entendre ce genre de cas dans la société moderne dans laquelle on vit, mais je pense qu'une fois qu'on le sait,
qu'on est au courant on a une responsabilité aussi, comme parlementaires,
d'y apporter une attention, même si ce n'est pas dans le cadre de ce projet...
puis ça pourrait être dans le cadre de ce projet de loi, si on voulait
l'étendre plus largement, mais sinon d'y répondre d'une autre façon.
Mais je vous remercie beaucoup. Ce sera tout
pour moi, M. le Président, mais je vous remercie du temps que vous avez passé
avec nous puis les réponses fort éloquentes que vous avez faites.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, Mme la députée.
À ce moment-ci, je vais céder la parole au
député de Laurier-Dorion.
M. Fontecilla :
Merci, M. le Président. Et je voudrais saluer également M. Landry et
M. Crépeau, très intéressant, les informations que vous nous donnez
aujourd'hui, là, beaucoup sur la question du tourisme médical, là, qui semble
susciter beaucoup d'inquiétudes, là.
Écoutez, dans votre mémoire, vous parlez
beaucoup des expériences internationales. Le projet de loi, bien, certainement,
c'est une avancée pour plusieurs catégories d'enfants qui ne sont pas nés...
issus de l'immigration, on va l'appeler comme ça, en général, là. Mais il y a
une catégorie qui est exclue, c'est des enfants nés hors Canada, sans statut légal au Canada, donc des enfants nés
à l'extérieur avec des parents sans papiers, on va les appeler comme ça. Je voudrais... D'après vous, d'après votre
connaissance des expériences internationales, comment ce secteur-là... Quelle
est la tendance, là, qui... Quelles sont les expériences qui sont menées au
niveau international pour cette catégorie d'enfants là?
M. Landry (Guillaume) : À mon
sens, en tout cas, le modèle que je constate de plus en plus dans les pays,
c'est d'aller vers une simplification des codifications qui viennent à cet
égard-là, parce que le danger d'un projet de loi qui devient trop spécifique,
c'est qu'on vient régler les enjeux de peut-être une catégorie assez précise
d'enfants, puis, par conséquent, on a comme dommage collatéral, qui n'était pas
nécessairement l'intention du législateur... mais on vient créer, finalement,
des conséquences sur un groupe qui n'entre pas dans la définition ou dans la
case et qu'on se retrouve, finalement, à
créer des discriminations collatérales qui n'étaient, encore une fois, pas nécessairement pas intentionnelles.
Mais vraiment,
là-dessus, c'est assez complexe de tenir compte de toutes les catégories de
papiers, de sans-papiers, de
migrants, de gens qui ont différents statuts, des enfants séparés, des enfants
non accompagnés, et là-dessus les modèles qui se sont dégagés les dernières années, c'est d'y aller sur une
approche inclusive où on dit : Tout enfant sur le territoire, avec
les éléments de résidence, a accès aux services. Donc, on ne vient pas, à ce
moment-là, spécifiquement lister une catégorie de gens dans leurs trajectoires
migratoires ou avec un statut particulier plutôt qu'un autre, on prend
l'approche où ce sont les enfants sur le territoire qui ont accès à leur droit
à la santé et... qu'on vient fournir cet élément-là, avec des balises de base,
ce qui nous permet quand même de garder un certain contrôle, mais qu'on évite
de devoir, de façon récurrente, retravailler constamment ce projet de loi là.
Parce qu'on le constate, les situations administratives dans lesquelles les
enfants se situent évoluent, et qu'on pourrait présumer que, dans quelques
années, bien, on va se retrouver avec des gens qui ont d'autres types de
statuts, et que, là, tout d'un coup, le projet de loi ne les a pas inclus, et,
en ne les ayant pas inclus, bien, ils se retrouvent exclus, donc discriminés
par la suite des choses, alors d'être assez soucieux de ça.
Ce qu'on constate, autrement dit, c'est vraiment
vers un texte qui vient vraiment cerner en beaucoup moins de détails une
approche plus inclusive, et, à ce moment-là, ça facilite, au niveau de l'opérationnalisation
du projet de loi, la dimension nécessaire, bureaucratique qui devrait être au
service de l'aspiration du projet de loi, qui est bien clairement attribuée. Je
ne sais pas si, François, il y a d'autres éléments à ajouter.
M. Crépeau
(François) : Non. Simplement renverser, en effet, la posture, avoir un
principe d'inclusion et définir des
exclusions précises, techniques plutôt qu'un principe d'exclusion dans lequel ensuite on
demande aux gens de nous dire pourquoi ils doivent être inclus. Le
principe devrait être celui d'une inclusion, et ensuite, s'il y a des
exclusions précises, comme les touristes, puisqu'on a parlé d'eux, ou des travailleurs
temporaires, à qui on demande d'avoir une assurance privée très précise, là,
ceux-là seraient spécifiquement exclus.
M. Fontecilla : Donc, une seule
catégorie de base, qui comprend tous les enfants, et, à partir de là, des
exclusions précises.
• (16 h 50) •
M. Crépeau (François) : Voilà.
Et, si on prend le critère de la résidence habituelle, on va avoir beaucoup
plus... bien, on va avoir un certain nombre d'enfants supplémentaires qui vont
être couverts, quel que soit le statut migratoire des parents ou d'eux-mêmes,
et on pourra, à côté de ça, exclure un certain nombre de personnes à cause d'un
statut de touriste ou d'un statut de travailleur temporaire qui a une assurance
privée, etc.
Le Président (M. Provençal)
: Je vous remercie beaucoup.
Je vais maintenant céder la parole au député des
Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : Merci, M. le
Président. MM. Crépeau et Landry, merci de votre présence et de la clarté
de vos propos, aussi de nous ramener à l'essentiel, c'est-à-dire que ce projet
de loi là vise à clarifier une situation, à rendre
la situation beaucoup moins complexe et beaucoup moins sujette à l'interprétation administrative de fonctionnaires ou de la RAMQ.
Donc, moi, j'ai tendance à souscrire à cette
idée de simplicité et de clarté, et je voulais savoir si... Quand vous dites que le fardeau de la preuve, en quelque sorte, devrait être renversé, en présumant que les gens qui demandent,
pour leurs enfants, d'obtenir des services, bien, sont d'honnêtes citoyens,
sont des gens qui répondent aux critères, est-ce que vous iriez jusqu'à dire
qu'on devrait admettre l'ensemble des enfants qui sont présents sur le
territoire et qui ont besoin de soins de santé et qu'il appartiendrait à la
RAMQ de démontrer qu'ils ne sont pas admissibles par les moyens d'une enquête, là, comme il se fait, par exemple, dans le
domaine de l'impôt? On présume que tout le monde est honnête, fait toutes ses déclarations. Il
peut y avoir une équipe d'enquêteurs au travail pour débusquer les fraudeurs.
M. Crépeau (François) : Je veux
dire, il y a... aucun système administratif ne permettrait l'ouverture à tout le monde... le vrai monde fonctionne. Donc, je
pense que l'idée, c'est celle, comme vous l'avez dit, de la simplification
et de l'accessibilité.
Donc, l'idée c'est de permettre à toute personne
qui est résidente habituelle — je reprends toujours ce critère — de
venir le démontrer. Et, si on s'assure et on passe le message que, d'une part,
tout mode de preuve de la résidence habituelle, comme ça se fait devant les
tribunaux dans bien d'autres domaines, peut être amené, y compris, par exemple, suggestion de la Protectrice du
citoyen, des déclarations de groupes communautaires qui vont assurer que
cette personne est effectivement résidente depuis telle date, etc., et des factures,
etc., si la personne vient présenter ça, et si on s'assure aussi qu'elle n'a
pas peur de la RAMQ, au sens où elle n'a pas peur que les données qu'elle va
présenter pourraient être signalées à Immigration Canada, on va s'assurer à ce
que les gens se présentent à la RAMQ et vont
demander d'avoir la carte, et, si la RAMQ fonctionne, administrativement,
correctement, ils vont l'avoir rapidement, ça va régler tous les
problèmes dans les hôpitaux et chez les médecins, on va simplifier
considérablement la gestion du système.
Mais, pour ça, il faut s'assurer que le système est effectivement... offre une
interface sympathique, ouverte et propose des accompagnements — ça a
été dit par nos prédécesseurs également — pour les personnes pour
lesquelles c'est difficile, par exemple, les personnes qui... bien, qui ne
parlent pas français, anglais, etc., qui se retrouvent ici, il faut des
accompagnements. Donc, pour ça, il faut un principe d'ouverture qui nous permet
de répondre aux besoins...
M. Arseneau : Donc, un préjugé
favorable.
M. Crépeau
(François) : Bien, un préjugé favorable, à partir du moment où il y a
une certaine documentation. Vous ne pouvez pas arriver et prétendre être
résident dans une ville et voter dans une ville si vous n'y posséder rien et
n'avait pas un bail, donc il faut quand même quelque chose. Mais, si on permet
toutes sortes de modes de preuve, ce qui
n'empêche pas la RAMQ de faire des vérifications, eh bien, on va faciliter le...
et on va savoir aussi qui sont ces gens,
ça va nous donner des statistiques. On se pose la question depuis le début de
la commission : Combien il y en a? Combien il y en a? Combien... Bien, on va le savoir, combien il y en a.
Ça va être beaucoup plus facile à étudier, et on va pouvoir faire des
calculs et avoir des données.
Le Président (M. Provençal)
: Je vous remercie, messieurs du Bureau international des
droits des enfants.
La commission, ayant accompli son mandat,
ajourne ses travaux au 28 avril, après les affaires courantes, où elle
entreprendra un autre mandat.
Merci beaucoup de votre contribution et de votre
collaboration et bonne fin de journée à tous.
(Fin de la séance à 16 h 55)