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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le mercredi 9 décembre 2020 - Vol. 45 N° 71

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 73, Loi modifiant diverses dispositions en matière de procréation assistée


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Auditions (suite)

CHU de Québec-Université Laval

Collège des médecins du Québec

Association des obstétriciens gynécologues du Québec

Mme Patricia Monnier

Mémoires déposés

Autres intervenants

M. Luc Provençal, président

M. Lionel Carmant

M. Enrico Ciccone

Mme Christine Labrie

Mme Marilyne Picard

Mme Nancy Guillemette

Mme Marie Montpetit

M. Joël Arseneau

*          M. Martin Beaumont, CHU de Québec-Université Laval

*          Mme Marie-Ève Bergeron, idem

*          M. Mauril Gaudreault, CMQ

*          Mme Isabelle Tardif, idem

*          Mme Violaine Marcoux, AOGQ

*          M. Dominique Tremblay, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures trente minutes)

Le Président (M. Provençal)  : Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte.

La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 73, Loi modifiant diverses dispositions en matière de procréation assistée.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Zanetti (Jean-Lesage) est remplacé par Mme Labrie (Sherbrooke).

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. Mme la secrétaire, y a-t-il des droits de vote par procuration?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Picard (Soulanges) dispose d'un droit de vote par procuration au nom de Mme Blais (Abitibi-Ouest) et Mme Montpetit (Maurice-Richard) dispose d'un droit de vote par procuration au nom de Mme Sauvé (Fabre).

Auditions (suite)

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. Ce matin, nous entendrons par visioconférence les groupes suivants : le CHU de Québec-Université Laval et le Collège des médecins du Québec.

Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants du CHU de Québec-Université Laval. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et à débuter votre exposé. Je vous cède la parole.

CHU de Québec-Université Laval

(Visioconférence)

M. Beaumont (Martin) : Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup également aux membres de la commission. Je m'appelle Martin Beaumont. Je suis le président-directeur général du CHU de Québec-Université Laval et je suis également le président du RUISSS de l'Université Laval, composé de l'ensemble des établissements du réseau de la santé et des services sociaux de tout l'est du Québec. Je vais laisser ma collègue se présenter maintenant.

Mme Bergeron (Marie-Ève) : Bonjour. Je suis Marie-Ève Bergeron. Je suis obstétricienne-gynécologue au CHU de Québec. Je suis spécialiste en endocrinologie de la reproduction et infertilité. Je suis également professeure agrégée à la Faculté de médecine de l'Université Laval et codirectrice médicale de la clinique Procrea de Québec.

M. Beaumont (Martin) : Donc, je remercie la commission de nous permettre de prendre la parole devant elle aujourd'hui et de nous autoriser à présenter notre mémoire. Depuis 2019, le CHU de Québec s'implique dans le développement d'un programme de procréation médicalement assistée au bénéfice de la population du pôle Est-du-Québec. Ma présentation s'inscrit dans cette lignée.

Avant toute chose, j'aimerais d'abord aussi prendre la tribune qui m'est offerte pour rendre hommage aux 16 500 intervenants du CHU de Québec-Université Laval qui, jour après jour, mènent une lutte incroyable contre la COVID-19, et encore plus ces dernières journées. À tous et chacun, je leur dis merci, et vous me rendez très fier de travailler pour cette organisation.

Le CHU de Québec-Université Laval offre des soins généraux, et spécialisés, et surspécialisés à tout l'est du Québec, à la Capitale-Nationale et au nord-est du Nouveau-Brunswick. Cela représente un bassin de 2 millions de personnes réparties sur un vaste territoire non densifié. Affilié à l'Université Laval, le CHU de Québec-Université Laval est le plus grand établissement de santé du Québec et l'un des trois plus grands au Canada.

Le CHU est un pôle important et reconnu en matière de santé de la mère et de l'enfant. Chaque année, on y compte environ 7 500 accouchements au CHU, ce qui fait de lui la plus grande maternité au Québec et un des plus grands au Canada. En 1984 naissait, au CHUL, le premier bébé conçu par procréation assistée au Québec grâce à des chercheurs du CHUL, un établissement du réseau public, sous le leadership du Dr Jacques-Émile Rioux. 36 ans plus tard, des milliers de cycles de fécondation in vitro sont réalisés à chaque année. De ce nombre, la très vaste majorité le sont dans la région de Montréal, en clinique privée.

Le CHU de Québec-Université Laval est d'avis que le projet de loi n° 73, qu'il accueille favorablement, doit prévoir une implantation prioritaire au sein des établissements du réseau public en favorisant l'accès et l'équité interrégionale. C'est d'ailleurs les considérations que j'aimerais porter à votre attention aujourd'hui.

Premièrement, l'importance d'implanter un programme dans les établissements publics, nommément pour des considérations de formation et des considérations de recherche et d'innovation, ainsi que l'accessibilité des services publics pour la population de l'est du Québec. Il nous semble juste que les gens des régions de l'est aient, tout comme les gens du pôle ouest, le choix de se tourner vers le public ou vers le privé pour réaliser leur projet de parentalité.

D'emblée, le CHU de Québec ne s'oppose pas au partenariat entre le public et le privé et compte faire preuve de leadership en ce sens pour assurer la fluidité des trajectoires, mais s'inquiète qu'une telle orientation se fasse au détriment de la mission des CHU, principalement pour l'enseignement, et la recherche, et l'évaluation. Il craint également qu'une telle orientation débalance l'offre de services privés versus les services publics.

Depuis 2019, le CHU a largement consolidé ses services de deuxième ligne et s'implique également afin que soit implanté à Québec le programme de procréation médicalement assistée de niveau tertiaire. Il a notamment déposé, en 2019, une proposition de programmation clinique, et un premier plan d'affaires, puis un second en 2010. Ont suivi un plan fonctionnel et technique, l'évaluation détaillée d'une autre solution immobilière, des plans et devis définitifs, dans le respect des cibles budgétaires et de l'échéancier qui lui avait été fixé.

Évidemment, nous sommes conscients que la santé financière du réseau actuellement... et qu'un nouveau scénario beaucoup plus modeste qu'à l'époque devrait être présenté. En attendant que le CHU obtienne l'aval du gouvernement pour aller de l'avant afin de réduire les délais d'attente, une entente a été signée avec la clinique Procrea de Québec, qui est, donc, à ce jour, la seule avenue pour les couples de l'est du Québec ayant un projet parental nécessitant la fécondation in vitro.

À l'ouest de Portneuf, les couples présentant une pathologie d'infertilité ont présentement trois options qui s'offrent à eux : les cliniques privées de Montréal, le programme de procréation assistée de notre partenaire, le CHU Sainte-Justine, et également de notre partenaire le Centre universitaire de santé McGill, toujours à Montréal. Pour le Québec de l'est de Portneuf jusqu'à la pointe des Îles-de-la-Madeleine, cependant, soit ceux-ci font appel à la clinique privée qui offre la fécondation in vitro à Québec soit ils doivent aller à Montréal.

Il s'agit, selon nous, d'une iniquité importante entre les régions en ce qui a trait à l'accès aux soins tertiaires en fertilité. N'oublions pas que, très concrètement, pour chaque cycle, six à sept déplacements sont à prévoir sur une période de trois semaines, avec la logistique et les coûts que cela implique, notamment en ce qui a trait aux frais de déplacement et de séjour, mais également à l'impact et les coûts sociaux, qui demeurent très importants.

Le CHU de Québec-Université Laval est d'avis que les 2 millions de personnes sur son vaste territoire de desserte méritent d'avoir le même accès à ces soins que le reste des Québécois, que le couple de Blanc-Sablon, de Rimouski, de Saint-Georges de Beauce, du Cap-aux-Meules ou de Cap-Chat ait lui aussi le choix de réaliser son projet de parentalité au sein du système public ou auprès du système privé.

Le réseau de la santé et des services sociaux québécois est basé sur des principes d'accessibilité des soins et d'équité dans la disponibilité des ressources, peu importe le statut social ou le territoire de résidence. Il nous apparaît, donc, primordial d'inscrire dans le projet de loi l'importance du développement équitable du programme tant pour la population du pôle ouest de la province que du pôle est en respectant les centres hospitaliers universitaires responsables de ces territoires de desserte, d'autant plus que le CHU est prêt et disposé à offrir ces services.

Il serait également à l'avantage des enfants de l'est du Québec qui sont atteints de cancer que le CHU puisse offrir les traitements de préservation de la fertilité autant par la cryoconservation d'ovules que la cryoconservation des tissus ovariens. Actuellement, ces services pour la clientèle pédiatrique sont seulement offerts à Montréal. Il s'agit, selon moi, d'une belle illustration de l'importance du continuum de soins et des services intégrés que permettrait l'implantation du programme au sein du CHU de Québec-Université Laval pour les patients du pôle est.

Comme l'acronyme l'indique, le CHU est un centre hospitalier universitaire, ce qui fait de lui... l'importance de sa mission fondamentale qu'est l'enseignement. Nous accueillons en nos murs entre 18 et 25 médecins résidents en obstétrique-gynécologie chaque année. Il est, donc, de notre avis que la formation des résidents en obstétrique-gynécologie et des fellows en endocrinologie gynécologique de la reproduction devrait relever des établissements publics, dans un encadrement propre aux départements médicaux des centres hospitaliers universitaires, puisqu'il s'agit de leur mission. Cette vision est également partagée par nos partenaires de la Faculté de médecine de l'Université Laval.

• (11 h 40) •

S'il est adopté, le projet de loi n° 73 permettrait aux résidents en obstétrique‑gynécologie et en urologie de bénéficier de l'enseignement de nos professeurs qui oeuvrent déjà en clinique privée, ce qui n'est pas le cas actuellement. Nous sommes d'avis qu'il est important d'offrir aux résidents un enseignement qui répond aux standards de qualité d'un CHU. Le CHU appuie cependant le changement apporté à cet effet dans le projet de loi n° 73, conscient que ce dernier, à court terme, permettrait à tout le moins aux résidents de l'Université Laval d'être exposés aux soins surspécialisés en clinique privée.

Le centre de recherche du CHU de Québec‑Université Laval est le plus important centre de recherche francophone en Amérique du Nord. Il compte 527 chercheurs et plus de 1 000 étudiants gradués. Il compte également sept axes de recherche, dont celui de la santé de la mère et de l'enfant. La reproduction et l'infertilité est d'ailleurs une de ses thématiques majeures.

Au cours des années, la recherche de sept axes ont formé de nombreux étudiants gradués, stagiaires postdoctoraux. Appliquant une approche inter et transdisciplinaire, ces chercheurs collaborent avec de nombreux cliniciens fondamentalistes sur la scène internationale. Il est important que ces deux disciplines continuent à cohabiter pour partager leur expertise de pointe, pour générer de nouvelles innovations et de pratiques toujours plus avancées.

En conclusion, M. le Président et chers membres de la commission, le développement du programme de procréation médicalement assistée au CHU de Québec n'est pas seulement l'ajout d'une clinique ou l'ajout d'un service de plus. C'est la promesse d'avancées importantes en fertilité de pointe. C'est aussi de mettre de l'avant l'importance de l'enseignement et de la recherche. C'est l'occasion d'innover, de mieux former la relève, de développer de nouvelles façons de faire... qui bénéficiera encore plus la population québécoise et de faire avancer science.

La COVID‑19 est un exemple flagrant que l'avancement de la science peut apporter concrètement à la société... L'absence d'un programme de procréation médicalement assistée a non seulement un impact sur l'accessibilité des soins, mais aussi sur notre mission fondamentale qu'est le CHU de Québec-Université Laval. Par exemple, le programme de neurochirurgie pédiatrique, ou l'implant cochléaire, ou l'oncologie surspécialisée...

Le Président (M. Provençal)  : M. Beaumont, je vais devoir...

M. Beaumont (Martin) : Je termine, oui.

Le Président (M. Provençal)  : Excusez-moi, je vais devoir vous interrompre parce que votre 10 minutes est écoulé.

M. Beaumont (Martin) : Oui, absolument.

Le Président (M. Provençal)  : Alors, on va devoir... On va initier la période d'échange avec M. le ministre. Je vous remercie beaucoup de votre exposé. M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Carmant : Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour à tout le monde, encore une fois, aujourd'hui. Merci d'être là. Merci, M. Beaumont, pour votre... d'avoir partagé ceci avec nous. Puis je salue Dre Bergeron qui est avec vous également.

Moi, là, j'aimerais clarifier une chose puis je l'ai fait hier aussi, l'enjeu du programme à Laval actuellement n'est pas un enjeu financier, mais plutôt un enjeu de prestation de service. Vous êtes sûrement au courant de tous les problèmes qu'on a actuellement, dans le Réseau mère-enfant, de découverture. Êtes-vous au courant?

M. Beaumont (Martin) : Oui, absolument. Vous parlez de la découverture des obstétriciens-gynécologues en région plus éloignée, oui?

M. Carmant : Et des infirmières aussi.

M. Beaumont (Martin) : Absolument. Oui, on est venus porter main-forte à plusieurs régions au courant de l'été.

M. Carmant : O.K. Alors, pouvez-vous me définir puis définir pour les autres députés, là, qu'est-ce que c'est, votre RUISSS, exactement, là, de 2 millions d'habitants?

M. Beaumont (Martin) : Oui. Le RUISSS couvre toute la Côte-Nord, le Bas-Saint-Laurent, la Gaspésie, les Îles-de-la-Madeleine, également les territoires de la Baie-James, et une partie du Saguenay-Lac-Saint-Jean, et la Capitale-Nationale, bien sûr, et Chaudière-Appalaches.

M. Carmant : O.K. Puis vous savez, M. Beaumont, que, chaque semaine, je reçois des appels d'hôpitaux dans ces régions-là qui me demandent de l'aide pour couvrir ces centres hospitaliers là. Puis je vous remercie pour les quelques fois que vous avez pu nous aider, mais on s'entend que, des découvertures, je dois en gérer à chaque semaine et que vous ne pouvez pas nous aider. Donc, si vous aviez du personnel de disponible, ce serait bien de me le dire aujourd'hui, qu'on puisse les envoyer dans ces différentes régions.

M. Beaumont (Martin) : Écoutez, aujourd'hui, vous savez qu'on vit le même contexte que l'ensemble de mes collègues. Dans le contexte de la COVID, vous avez vu que c'est quand même 7 500 accouchements. C'est quand même une maternité qui est importante. Quand on peut aider, on aide. On a aidé la Côte-Nord au courant de l'été : Baie-Comeau, Sept-Îles. On a aidé également nos collègues des Îles-de-la-Madeleine et du Bas-Saint-Laurent. Et, quand on peut le faire, on le fait. On est toujours là pour aider nos partenaires.

M. Carmant : Et alors... mais, quand on parle de santé de la femme et du bien-être mère-enfant, on s'entend que ce qui est le plus important, c'est un accouchement sécuritaire le plus près de chez soi.

M. Beaumont (Martin) : Absolument.

M. Carmant : D'accord. Alors, une fois qu'on a dit ça, là, ce qui est important de savoir, c'est que, nous, ce qu'on veut, c'est régler cette problématique-là d'abord et avant tout. Je comprends votre historique de problématiques, là, avec le développement du centre de fertilité. Je comprends l'enjeu très bien, là, d'offrir des services le plus près de chez soi pour tout le monde.

D'ailleurs, hier, je me suis assuré qu'il y ait des collaborations avec toutes les différentes régions du Québec, avec les différents CHU et les autres centres de procréation. Je me suis assuré également que, comme vous pouvez le voir, il va y avoir une gestion centrale des demandes. Donc, cette problématique-là, on est très sensibles à ça, mais, moi, ce que je veux vous sensibiliser aujourd'hui, là, c'est ma problématique d'avoir des accouchements sécuritaires dans toutes les régions du Québec et dans plusieurs régions qui sont sous la responsabilité de votre RUISSS. Qu'est-ce que vous allez faire pour nous aider d'ici la prochaine année?

M. Beaumont (Martin) : Écoutez, à chaque fois qu'on reçoit des demandes de nos partenaires, on le fait. Même, je vous dirais que, tout récemment, on avait des demandes du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie pour former des gens, pour leur donner une exposition supplémentaire à un volume d'accouchements. Ces gens-là sont accueillis dans nos murs, sont formés. Vous savez également qu'on va recevoir très bientôt tous les stages liés aux sages-femmes en partenariat avec l'Université du Québec à Trois-Rivières. Donc, je pense que le CHU de Québec et le RUISSS de l'Université Laval, en partenariat avec les autres P.D.G... Je vous dirais que, quand il y a des appels à l'aide pour être capable d'éviter des découvertures, nous avons démontré au cours des derniers mois que nous sommes toujours présents pour aider nos partenaires.

M. Carmant : Toujours? Il n'y a jamais eu de découverture dans votre RUISSS. C'est ça que vous me dites?

M. Beaumont (Martin) : Écoutez, je ne dis pas qu'il n'y a jamais eu de découverture, mais, quand le CHU de Québec est capable de continuer à offrir sa propre sécurité également pour son mandat suprarégional, quand on est capables, on est en mesure d'y aller, on y va.

M. Carmant : D'accord. Un centre comme celui que vous développez, ça requiert combien de personnes à peu près?

M. Beaumont (Martin) : Écoutez, ce qu'on envisage actuellement, dépendamment du partenariat qui pourrait être fait avec nos partenaires de Procrea, ça peut représenter aux alentours d'une trentaine de personnes supplémentaires, entre 30 et 40. C'est sûr que ça nécessite également des infrastructures et des équipements, donc, et, vous avez totalement raison, ça demande une allocation de ressources supplémentaires. Mais il ne faut pas oublier non plus que le CHU de Québec est un des plus grands formateurs ou fournisseurs en soins infirmiers. Mais il y a là aussi une question d'équité, de pouvoir offrir à la population de l'est du Québec des soins tertiaires également en FIV pour être capables d'avoir une équité dans l'accès aux services.

M. Carmant : Je suis bien d'accord, mais mettez-vous à ma place, là. Quand... Elles vont venir d'où, ces ressources-là? Et, si moi, j'ai à les allouer entre un centre qui n'a pas d'infirmières pour aider les femmes à accoucher chez elles ou un centre qui veut faire de la procréation assistée, quel est le choix le plus important pour la population, selon vous?

M. Beaumont (Martin) : Écoutez, moi, je vous dirais que, pour avoir travaillé en région une grande partie de ma carrière, pour avoir travaillé en Basse-Côte-Nord, pour avoir travaillé à Sept-Îles et dans ces milieux-là, ma priorité, comme la vôtre, serait d'offrir des services de proximité pour que les femmes puissent accoucher en toute sécurité dans leur milieu.

Donc, par contre, la question qui m'est posée aujourd'hui, comme CHU de Québec, un établissement qui a des responsabilités en matière de recherche et d'enseignement, vous comprendrez qu'il est important pour moi également de continuer à démontrer l'importance de l'enseignement, l'importance aussi de la convergence de la recherche et de tout ce qui touche la recherche translationnelle, et c'est la mission d'un CHU, et c'est la mission aussi, n'oubliez pas, de former les infirmières, les infirmières cliniciennes, les sages-femmes. Et c'est important, cette globalité-là des soins tertiaires, pour aussi assurer notre mission.

Mais, pour répondre à votre question, si j'étais à votre place, je prendrais probablement la même décision que l'important est d'offrir des services de proximité et permettre des accouchements sécuritaires dans les milieux plus éloignés ou les centres plus périphériques.

• (11 h 50) •

M. Carmant : D'accord, parce que c'est sûr que, si j'ouvre des postes chez vous et et des postes en région, on s'entend que les premiers à se faire combler vont être les postes au CHU de Laval.

M. Beaumont (Martin) : Bien, écoutez, pas nécessairement. Je vous dirais que c'est des créneaux, dans ce domaine-là, qui sont quand même assez spécialisés. Les gens qui ont vraiment la fibre de travailler dans le domaine de l'obstétrique et de la gynécologie et de travailler dans le domaine, vraiment, des accouchements, des cliniques GARE, ce sont des choix qu'ils font. Donc, moi, je vous dirais que je pourrais même m'engager à former encore plus d'infirmières, à offrir encore plus de places de stages pour être capable, comme le prévoit le RUISSS, d'envoyer le plus possible de personnes retravailler dans leur région d'origine. Et ça, c'est une des priorités du RUISSS de l'Université Laval, c'est de former encore plus de monde pour qu'ils retournent travailler en région, parce que la rétention des régions est aussi le succès du CHU de Québec-Université Laval.

M. Carmant : Ça, je suis très, très heureux de vous entendre dire ça, puis on va s'en reparler. Merci beaucoup.

J'aimerais vous parler... J'ai vu que Dre Bergeron est également codirectrice de Procrea Québec. Ce qu'il faut vous assurer aussi, c'est que l'offre actuelle dans le réseau public, là, puis, ça, il ne faut pas confondre, là, pour tout le monde ici, c'est une offre payante. Puis, nous, ce qu'on veut, c'est un réseau... c'est une offre qui va être payée par le gouvernement, quel que soit l'endroit où le service est fourni. Et la raison, c'est, encore une fois, pour s'assurer, surtout dans les premières années, où on va voir un nombre important de patientes qui attendent pour ce programme-là, qu'on ait toute la disponibilité sans augmenter les listes d'attente.

 Donc, moi, ce que je veux savoir de vous, c'est est-ce que vous travaillez en partenariat avec Procrea Québec, qui, déjà, offre des services à la population, puis de me définir ce partenariat-là, parce que je vois que Dre Bergeron vous accompagne ici.

Mme Bergeron (Marie-Ève) : En fait, il y une entente de services entre la clinique Procrea et le CHU de Québec, comme il est exigé à toutes les cliniques privées, là, pour obtenir leur permis. Maintenant, bien, les médecins spécialistes en infertilité qui travaillent au CHU de Québec travaillent aussi chez Procrea, puis on collabore, si on veut, un peu plus de cette façon-là entre les deux établissements. La trajectoire des patients est simplifiée aussi entre les deux établissements... offrir le meilleur service pour diminuer le plus possible le fardeau psychologique pour les couples infertiles.

Maintenant, il n'y a pas actuellement... Le CHU de Québec n'est pas utilisé actuellement comme une clinique satellite, si on veut, de Procrea Québec, comme il peut se faire, par exemple, au CHU de Sherbrooke, qui agit un peu à terme de clinique satellite pour le centre hospitalier universitaire de Sainte-Justine, par exemple. À Québec, on n'a pas instauré ça, mais c'est quelque chose qu'on envisage avec le nouveau projet de loi, là, quand il y aura le nouveau programme, pour répondre à la demande, en fait, là, qui va être grandissante, puis, c'est ça, ça fait partie de nos projets. On a commencé à y réfléchir, absolument, oui.

M. Carmant : Qu'est-ce que ça voudrait dire de faire de plus, là, que ça, ça m'intéresse? Qu'est-ce qui se fait... Au niveau de l'échographie, qu'est-ce qui manque pour les...

Mme Bergeron (Marie-Ève) : Oui, exactement, en fait, à l'hôpital, on aurait besoin de techniciens d'échographie supplémentaires, machines d'échographie supplémentaires et d'infirmières aussi, évidemment, une infirmière pivot, là, en clinique de PMA, pour répondre à la demande, parce qu'actuellement au CHUL, le pavillon, là, au CHU de Québec, où se font les traitements de fertilité, on offre les stimulations ovariennes avec agents oraux, les inséminations intra-utérines, les consultations de deuxième ligne, mais aussi de troisième ligne, les consultations de préservation de la fertilité. Ça fait qu'on a déjà toute une équipe avec des infirmières d'expérience. Mais, pour agrandir l'offre de services au CHUL, si on veut utiliser l'hôpital un peu comme un satellite, là, pour augmenter le nombre de patientes, en fait, qui pourraient être suivies dans la grande région de Québec, il faudrait développer aussi un peu de ce côté-là...

M. Carmant : D'accord, ça, c'est... et, ça, vous pensez pouvoir nous... décider des services requis d'ici quelques mois, j'imagine?

Mme Bergeron (Marie-Ève) : En fait, oui, si vous nous le demandez, c'est sûr qu'on va s'y plonger rapidement. On a déjà commencé à y réfléchir. On avait travaillé sur quelques hypothèses déjà pendant l'été, début de l'automne. Évidemment, on pourrait se baser sur le modèle du CHU de Sherbrooke pour travailler, là, sur ce nouveau mandat là.

M. Carmant : Puis vous, docteure, qu'est-ce que vous pensez du projet de loi n° 73 en général? Est-ce que vous avez eu la chance de le regarder?

Mme Bergeron (Marie-Ève) : Oui. Je suis ravie du retour du programme de couverture publique de la fécondation in vitro. Comme vous le savez, M. le ministre, les traitements de fertilité sont très difficiles au niveau à la fois physique, psychologique. Et puis le fardeau financier qui était ajouté sur les épaules des couples dans les cinq dernières années rendait la situation très difficile pour eux, avec beaucoup de détresse. Je suis soulagée de voir que votre gouvernement offre de couvrir un traitement de fécondation in vitro. Les balises qui ont été proposées me semblent justes, et puis, ensuite, nous permettra d'évaluer un peu comment va le programme, et puis peut-être, possiblement, même de l'élargir un peu, toujours basé selon le médicament requis, au cours des prochaines années.

M. Carmant : ...de votre présence, parce que j'ai deux petites questions, là, de sujets qui sont... on a des avis divergents, parce que je ne pensais pas vous parler ce matin. Un, l'âge pour l'implantation des embryons congelés, qui est à 42 ans actuellement, qu'est-ce que vous en pensez? Et, deux, la possibilité de, peut-être, dans certaines situations, implanter deux embryons, qui est un peu permis selon les lignes directrices du collège, je sais qu'il ne vous reste pas beaucoup de temps, là, mais si vous pouvez me donner votre avis...

Mme Bergeron (Marie-Ève) : En fait, pour ce qui est de la question de l'âge limite, qui est fixé d'abord à 41 ans pour le prélèvement d'ovules, la stimulation ovarienne, mais jusqu'à l'âge de 42 ans pour le transfert d'embryons, j'y comprenais, par cette règle-là, qu'on souhaitait diminuer les risques maternels et périnataux associés à l'âge maternel avancé. Évidemment, je comprends qu'une dame qui deviendrait enceinte avec son transfert d'embryons à 41 ans, accoucherait à 42 ans, ne pourrait pas utiliser ses embryons surnuméraires, du moins, par la couverture du régime d'assurance maladie. C'est une certaine contrainte.

Mais, en même temps, comme médecin spécialiste qui a goûté à l'arrêt de l'ancien programme parce qu'il y avait des dépassements de coûts, j'entrevois ça quand même relativement positivement en me disant : On commence de façon prudente. On va réévaluer. Mais c'est certain que, pour une dame qui deviendrait enceinte puis accoucherait à l'âge de 42 ans... ne pourrait pas utiliser les embryons congelés, c'est un peu restreignant, effectivement. Mais je suis d'accord de ne pas pousser pour un âge maternel beaucoup plus avancé que ça pour limiter les risques de complications à la fois chez la mère et les enfants à naître.

Maintenant, pour ce qui est du nombre d'embryons à transférer, on était très limités dans nos pratiques, depuis l'adoption de la loi n° 20, par rapport au nombre d'embryons. Il existe certaines indications médicales où on peut... où il est médicalement requis, puis logique aussi au niveau scientifique, de transférer deux embryons chez une femme à mauvais pronostic, qui pourrait être plus jeune que 37 ans, comme par exemple des patientes qui ont des réserves ovariennes très basses dans des cas particuliers ou des échecs d'implantation antérieurs.

Le Président (M. Provençal)  : Dre Bergeron, je vais devoir vous interrompre parce que le temps est échu. Je vous remercie beaucoup des réponses. Ça me fait de la peine de vous interrompre, mais je dois gérer le temps. Alors, je vais maintenant céder la parole au député de Marquette qui va prendre la relève pour la suite. Alors, M. le député.

M. Ciccone : Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, Dre Bergeron, M. Beauchemin. Dre Bergeron, si vous voulez finir votre pensée justement sur la dernière question du ministre, vous pouvez y aller.

Mme Bergeron (Marie-Ève) : Merci. En fait, j'allais simplement ajouter que je pense que le Collège des médecins est la bonne entité pour fixer les lignes directrices, là, par rapport au nombre d'embryons à transférer.

• (12 heures) •

M. Ciccone : Merci beaucoup. M. Beaumont, je vous écoutais depuis... lors de vos propos sur l'équité, et j'en suis, là. En étant porte-parole de la Capitale-Nationale de ma formation, je suis du fait qu'on doit offrir les mêmes services, là, que ça soit dans l'est ou même dans le pôle ouest, pour utiliser vos mots, et surtout au même niveau. Considérant le fait que c'est quand même une question archihumaine, ce projet de loi là, il faut quand même éliminer le voyagement, le stress qui vient justement avec ces procédures archi-importantes pour les femmes et pour les couples, mais, si... parce qu'on peut faire affaire avec le privé, mais, également, ce que j'entends, c'est que vous avez... Vous êtes dans le public et vous voulez offrir le meilleur service possible. Avez-vous chiffré justement l'implantation de... parce que vous parlez d'un département de formation et de recherche. Avez-vous chiffré justement combien ça pourrait coûter, ouvrir un genre de département de recherche et de développement?

M. Beaumont (Martin) : Bon, pour la portion de recherche... Merci pour la question. Ça, c'est très bien implanté. Le volet recherche, là, on est quand même très avancés. Comme je le disais tantôt, on a un axe de recherche qui est complet. On a des chercheurs là-dessus avec une belle programmation, des chercheurs qui rayonnent actuellement au niveau international.

Pour ce qui est du programme en tant que tel, c'est sûr que le CHU de Québec avait déposé, aux alentours des années 2013 et 2015, un projet quand même d'envergure, un projet qui venait faire converger l'ensemble de l'obstétrique-gynécologie avec une clinique de PMA intégrée. C'était un grand projet. Mais on est très conscients de l'état des finances publiques, et je suis convaincu que le CHU pourrait aller vers un projet, là, en termes d'infrastructures non récurrentes, qui pourrait graviter aux alentours de peut-être, tu sais, entre 7 et 9 millions. Et, selon moi, en termes de personnel, comme je l'ai dit tantôt, ce n'est pas seulement des soins infirmiers. Il y a d'autres types de professionnels. Ça pourrait gravir, là, aux alentours de 3,5 millions... entre 4 millions, pour ce qui est de la récurrence du personnel nécessaire.

Donc, ça, c'est, à peu près, là, le chiffre que ça pourrait nous permettre pour débuter une première implantation pour réaliser, tu sais, de 200 à 500 cycles par année. Mais on est totalement d'accord avec l'orientation aussi du Dr Carmant sur l'importance de développer le partenariat public-privé. Et ce partenariat-là doit se maintenir, parce que les... chacun, on doit être en symbiose pour continuer à offrir et donner le choix aux gens dans un contexte de services totalement assurés.

M. Ciccone : Un peu plus tôt, vous parliez avec le ministre justement de la découverture, là, et, je comprends, la situation actuelle, avec la pandémie, ce n'est pas nécessairement facile, ce n'est pas juste dans l'est, c'est dans l'ouest également. Mais est-ce que vous pensez, justement, avec ce que vous proposez au niveau de la recherche et de la formation, qu'on pourrait peut-être venir régler ce problème-là au niveau de la rétention également? Parce qu'on est un peu dans le principe de l'oeuf et la poule, là. Qui vient en premier? Alors, si on est capables de découvrir... Si on est capables d'appliquer justement ce que vous proposez, est-ce qu'on pourrait réduire justement le problème de découverture ici ou chez vous, au RUISSS?

M. Beaumont (Martin) : Bien, écoutez, je pense que les problématiques qui ont été exposées par notre ministre sont réelles, O.K.? Donc, honnêtement, les enjeux éthiques derrière laisser de la découverture en région, tu sais, je l'ai vécu, j'ai été là. C'est extrêmement compliqué, et je salue le fait de vouloir consolider ça. Je pense que le RUISSS de l'Université Laval, actuellement, dans son plan stratégique, a comme mission d'améliorer même le nombre de stages, ouvrir l'enseignement, aller recruter encore plus d'infirmières, pour qu'elles rentrent dans la profession, et permettre même aux infirmières de retourner en région. Et on met même en place actuellement ce qu'on appelle des réseaux de transfert de connaissances pour être capables de développer les capacités de nos partenaires qui sont moins exposés à certaines situations. Donc, moi, je pense que je serais prêt même à relever le défi, à continuer à contribuer à augmenter la formation et augmenter même les stages en région pour permettre aux gens de demeurer dans les régions avec des découvertures plus importantes.

M. Ciccone : Ça tombe bien, parce que M. le ministre aime les défis. Alors, je suis persuadé qu'il pourra... vous pourrez en discuter. Vous parliez du RUISSS qui touche plus de 2 millions de personnes.Avez-vous colligé, là... Puis je ne veux pas vous mettre dans un coin, mais avez-vous colligé le pourcentage de femmes seules ou de couples qui désirent avoir recours au programme VIF?

M. Beaumont (Martin) : 16 %, une famille sur... Bien, un couple... Un projet sur six, là, une famille sur six a des besoins de cette nature-là. Donc, c'est 16 %, possible, là, des gens de la population de l'est du Québec. Et, ça, bien sûr, Dre Bergeron, là, vous pouvez en rajouter, là. Vous êtes beaucoup plus au fait que moi, là, des statistiques, mais c'est un sur six.

Mme Bergeron (Marie-Ève) : En fait, un couple sur six va avoir besoin d'investigation ou de traitements de fertilité. Parmi ces couples-là, un certain pourcentage va avoir recours à la fécondation in vitro, mais un couple sur six, le 16 %, là, c'est le nombre de couples infertiles.

M. Ciccone : Merci. Je vais y aller, en terminant, avec quelques questions plus générales. Qu'est-ce que vous voyez dans le projet de loi, de façon générale ou des points précis, là, où il y a des lacunes de façon claire, là, qu'on pourrait comprendre, là?

M. Beaumont (Martin) : Bien, écoutez, tantôt, nous, on a bien mentionné, là, que le projet de loi n° 73, tel qu'il est présenté, il est accueilli favorablement par notre organisation. Là où on y voit certains enjeux, c'est justement sur la répartition équitable de l'offre de service et de s'assurer que l'ensemble des CHU peuvent continuer... tous les CHU, incluant Sherbrooke et le CHU de Québec, puissent faire converger leur mission d'enseignement et de recherche dans ce domaine-là.

M. Ciccone : Est-ce qu'on a oublié quelque chose dans le projet de loi avant l'étude détaillée?

M. Beaumont (Martin) : Écoutez, pas en ce qui me concerne, là, actuellement. Je ne sais pas, Dre Bergeron...

Mme Bergeron (Marie-Ève) : Non. Bien, aujourd'hui, comme représentante du CHU de Québec, je pense que le message à retenir, c'est que notre organisation accueille vraiment de façon favorable, là, le projet de loi n° 73. Évidemment, comme je mentionnais tantôt, c'est un départ prudent. Mais, comme on tient à la réalisation du projet, on veut aider nos patients, je pense qu'on s'enligne pour quelque chose... une offre de service qui est, d'abord, raisonnable puis qui pourrait être réévaluée selon les succès, là, du projet au cours des prochaines années.

M. Ciccone : J'aimerais ça vous entendre, parce qu'on en a parlé pas mal avec tous les autres groupes qu'on a entendus... J'aimerais ça revenir un peu sur l'âge, là, parce qu'il y a un peu divergence. Il y en a qui voudraient... Là, on met une limite de 41 ans, 42 ans, pour les femmes, pour avoir accès à ce programme. Plusieurs endroits... On a cité plusieurs pays où on va y aller sur une analyse médicale au lieu d'avoir un âge bien précis. J'aimerais ça vous entendre là-dessus.

Mme Bergeron (Marie-Ève) : En fait, l'âge de 41 ans, pour la femme, qui a été fixé est sans doute basé sur des évidences dans la littérature médicale qui montrent une diminution importante des taux de naissance vivante chez les femmes de cet âge-là. Évidemment, les taux de succès de la fécondation in vitro diminuent aussi à partir de l'âge de 35 ans, mais restent quand même très intéressants. Mais, au-delà de 41 ans, les naissances vivantes sont faibles.

Donc, chaque dollar investi est plus... En fait, ça coûte beaucoup plus cher créer un bébé chez une femme qui a plus de 41 ans que ça peut coûter chez une patiente plus jeune. Ça fait que c'est de cette façon-là que je comprenais la logique, là, de l'âge qui était fixé dans le projet de loi. Évidemment, si on avait des ressources financières illimitées, bien, je pense qu'on pourrait se permettre de traiter plus de patientes, mais, si on veut investir les fonds publics dans un programme qui va maximiser les taux de grossesse pour couvrir les couples infertiles à bon pronostic, je trouve que l'âge limite fixé est quand même raisonnable.

M. Ciccone : Merci beaucoup. Merci beaucoup, M. le Président. Ça fait le tour de notre côté.

Le Président (M. Provençal) : Merci. Nous allons poursuivre cet échange avec la députée de Sherbrooke. Alors, je vous cède la parole, madame.

Mme Labrie : Merci, M. le Président. Je vais avoir deux questions pour vous. Je vais les poser, d'emblée, toutes les deux parce qu'on a juste deux minutes, là. Après, vous pourrez répondre.

La première, ce serait pour vous, Mme Bergeron. Vous avez parlé, tout à l'heure, de la détresse que vivent les couples ou les femmes qui sont en démarche de procréation. Il y a d'autres groupes ici qui nous ont dit que ça vaudrait la peine d'inclure du soutien psychologique dans la couverture. J'aimerais que vous me disiez si vous êtes de cet avis-là aussi.

Puis l'autre question, c'est... J'entends bien votre préoccupation pour le développement du service dans le public puis la question de l'équité dans toutes les régions, de l'accès aux services à proximité. Est-ce que ça répondrait à votre demande si on essayait de modifier la loi pour prévoir un développement prioritaire du service dans les établissements publics en favorisant une équité territoriale, mais en sachant qu'évidemment, bon, dans les circonstances, ce n'est peut-être pas possible de le développer tout de suite partout, mais que ce soit fait prioritairement comme ça?

Mme Bergeron (Marie-Ève) : Je peux répondre à la première question. En fait, actuellement, au CHU de Québec, on a déjà une ou deux travailleuses sociales et une psychologue qui font partie de notre équipe, là, de la clinique PMA. Et puis nos patientes et les couples ont accès au suivi, là, par ces professionnels-là, gratuitement. Puis effectivement je pense que ça serait important de préserver, là, ce service-là à l'hôpital.

M. Beaumont, je peux vous laisser répondre à la...

• (12 h 10) •

M. Beaumont (Martin) : Oui. Puis, pour la deuxième question, écoutez, en ce qui me concerne, c'est qu'on a encore des services à donner à très court terme. Donc, le partenariat avec la clinique Procrea doit être consolidé. On doit continuer à améliorer ça. Mais, sans aucun doute, moi, je verrais d'un bon oeil qu'on voit au développement prioritaire du secteur public, parce que c'est sûr qu'éventuellement l'offre va continuer... la demande va continuer à s'accroître, et la grande peur que j'ai, c'est qu'on voit d'autres cliniques s'installer dans la région de Québec pour répondre à la demande au détriment d'un investissement public.

Mme Labrie : Ça répond très bien à mes questions. Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Alors, je remercie la Dre Bergeron et M. Beaumont pour leur contribution à cette commission.

Je suspends les travaux quelques instants afin que l'on puisse accueillir par visioconférence le prochain groupe. Je vous remercie encore et bonne fin de journée.

(Suspension de la séance à 12 h 12)

(Reprise à 12 h 17)

Le Président (M. Provençal)  : Je souhaite la bienvenue aux représentants du Collège des médecins du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et à débuter votre exposé. Je vous cède la parole maintenant.

Collège des médecins du Québec

(Visioconférence)

M. Gaudreault (Mauril) : Bonjour. Mon nom est Mauril Gaudreault. Je suis président du Collège des médecins du Québec. Je suis accompagné aujourd'hui de la Dre Isabelle Tardif, qui deviendra secrétaire du Collège des médecins en janvier prochain.

M. le ministre, M. le président de la Commission de la santé et des services sociaux, députés membres de la commission, mesdames, messieurs, nous vous remercions de cette occasion de présenter nos commentaires concernant le projet de loi n° 73, traitant principalement de procréation assistée. Nous partageons les objectifs du législateur de veiller à la sécurité du public, à la qualité des soins de procréation assistée et de réduire les effets secondaires de ces techniques.

Nous saluons également l'avancée que représente la couverture publique de certains services de procréation assistée pour les personnes et les couples désireux de réaliser leur projet parental. Nous appuyons les objectifs généraux du projet de loi, qui vient renforcer notre partenariat avec le ministère de la Santé et des Services sociaux et qui fait ressortir aussi la complémentarité de nos rôles. C'est dans cette perspective, d'ailleurs, que nous présentons aujourd'hui nos commentaires.

Depuis plusieurs années, le collège et le ministère ont établi un modèle de collaboration unique pour encadrer les pratiques de procréation assistée. Ce modèle repose non seulement sur l'implication des décideurs et régulateurs, mais également sur l'ensemble des équipes médicales qui oeuvrent en procréation assistée au Québec. Il ne fait aucun doute que cette pratique doit être sécuritaire, de qualité et reposer sur des normes et un consensus clinique. Cet objectif dépasse le cadre juridique offert par l'État. L'orientation gouvernementale doit tenir compte des pouvoirs et des leviers dont disposent les ordres professionnels.

Depuis 2016, le collège a mis en place un programme de surveillance générale des activités de procréation assistée par indicateur. Nous avons diffusé différents rapports en lien avec notre obligation de surveiller l'application des normes en matière de médecine reproductive. Nous avons également publié, en 2015, des lignes directrices pour encadrer cette pratique.

Les données recueillies auprès des milieux qui offrent des techniques d'insémination et de fécondation in vitro ont permis de brosser un portrait rassurant de la qualité des soins et de la conformité des pratiques. Des visites d'inspection professionnelle et des enquêtes ont aussi été réalisées auprès de médecins qui pratiquent la procréation assistée. Le présent projet de loi introduit la possibilité de recueillir des données à des fins médicoadministratives et de surveillance de l'état de santé. La collaboration en matière de surveillance par le collège et de vigie par la Santé publique nous apparaît souhaitable.

À l'article 7 du projet de loi, on a toutefois remplacé la notion de surveillance par celle d'enquête. À la lumière des activités actuelles du collège, nous craignons que surviennent des chevauchements et désirons mieux comprendre quel sera l'objet de l'inspection et de l'enquête. Est-ce que les enquêteurs dédoubleront le travail de ceux du collège? Leurs critères répondront-ils aux normes déontologiques du collège? Est-ce que ces procédures viseront les conditions de délivrance des permis ou tous les éléments se rapportant à la procréation assistée? Nous insistons sur l'importance de bien délimiter les rôles de chacun afin que notre collaboration complémentaire se poursuive de manière constructive et cohérente. C'est pourquoi nous demandons au ministre de nous rassurer sur nos questionnements.

De plus, les articles 20 à 23 du projet de loi introduisent l'exigence pour le Collège des médecins de produire un certificat de conduite professionnelle. Ces dispositions visent les médecins gestionnaires des différentes cliniques ou centres de procréation assistée. Évidemment, nous adhérons au principe d'exemplarité en matière de parcours professionnel. Toutefois, la délivrance d'un certificat de conduite professionnelle exige la transmission de renseignements confidentiels et sensibles. Parce que les critères permettant le refus de délivrer un permis sont déjà précisés dans la loi, le collège propose donc de retirer cette exigence et s'engage à fournir les informations nécessaires.

Je cède maintenant la parole à Dre Tardif pour exprimer d'autres préoccupations en regard de la formulation actuelle du projet de loi n° 73.

• (12 h 20) •

Mme Tardif (Isabelle) : Merci, Dr Gaudreault. Bonjour à tous. Dans le cadre de sa mission de protection du public, le collège souhaite rappeler que les médecins ont des obligations relatives aux dossiers dont ils ont la garde. Nous craignons les écueils que peuvent amener la cessation d'exercice ou le changement de lieu d'exercice des médecins qui pratiquent la procréation assistée, tout comme le non-renouvellement de permis ou le déménagement d'une clinique.

Par exemple, quelle sera la responsabilité du médecin par rapport aux embryons et aux gamètes préservés dans son centre? Selon le projet de loi, il semblerait que la clinique en sera la gardienne, mais, dans l'éventualité de la fermeture d'un centre, à qui reviendra la responsabilité de la manutention et du transport des produits de conception? Si plusieurs règles viennent encadrer la conservation, la cession et la destruction des dossiers médicaux, il est tout aussi important d'exiger un même encadrement pour les gamètes et embryons conservés dans les centres de procréation assistée.

Par ailleurs, nous saluons que le projet de loi s'appuie sur les lignes directrices édictées par le collège pour encadrer les conditions particulières lors du transfert chez la femme de deux embryons. Il y avait, en effet, un malaise chez les médecins en raison des écarts entre les critères imposés légalement pour le nombre de transferts d'embryons et ceux retrouvés dans les normes de pratique du collège.

Sur la question des lignes directrices maintenant, nous nous engageons, en partenariat avec le ministère, à poursuivre leur actualisation. Cependant, les exigences formulées dans le projet de loi quant au contenu des lignes directrices nous apparaissent directives et pourraient limiter notre agilité à suivre la pratique de ce domaine médical qui est en pleine évolution. Le projet de loi rappelle bien qu'il appartient au Collège des médecins d'élaborer les lignes directrices en matière de procréation assistée, de veiller à leur application et de les mettre à jour selon l'évolution des connaissances. Toute autre précision ne nous semble pas nécessaire.

Le collège est également favorable à la mise en place d'un comité d'éthique central qui harmonisera les pratiques et placera l'éthique au centre des activités de procréation assistée. Nous soulignons au ministre l'importance de préciser les fonctions et la composition du comité d'éthique clinique, de prévoir une représentation du collège à tout comité central en lien avec la procréation assistée et, finalement, de s'assurer d'un arrimage avec les comités d'éthique locaux qui sont déjà en place dans les centres de procréation assistée.

Parce que les cliniciens, tout comme le public, auront de nombreuses questions sur les conditions d'application de ce programme, nous suggérons aussi la mise en place d'un service-conseil. On pourrait le retrouver soit au sein de l'équipe ministérielle, ou au sein de la RAMQ, pour faciliter l'application de la présente loi et des règlements qui s'y réfèrent.

Je cède maintenant la parole au Dr Gaudreault pour le mot de la fin.

M. Gaudreault (Mauril) : En terminant, je rappelle que le collège est favorable à la majorité des modifications présentées dans le projet de loi n° 73 et se tient disponible pour contribuer à sa bonification. Ce projet de loi met de l'avant la collaboration déjà bien établie entre notre ordre professionnel, le ministère et l'ensemble des équipes médicales en santé reproductive. Le collège s'engage à poursuivre le partenariat établi avec l'équipe ministérielle, toujours afin d'assurer une cohérence dans la réalisation de nos mandats respectifs. Ensemble, continuons d'assurer tant la qualité, que la sécurité et le caractère éthique des activités de procréation assistée au Québec et assurons‑nous de la pérennité du programme. Faisons-le au nom des enfants à naître et de leurs parents. Merci de votre attention.

Le Président (M. Provençal)  : ...à vous deux pour votre exposé. Nous allons maintenant initier la période d'échange avec M. le ministre. À vous la parole, M. le ministre.

M. Carmant : Oui. Merci beaucoup de votre présentation et des détails que vous avez soulevés au niveau de vos inquiétudes. C'est un honneur de vous rencontrer, M. Gaudreault, Dre Tardif aussi.

Vous avez soulevé plusieurs petits points, là. Le premier qui m'a... qui porte à inquiétude, c'est celui à propos des enquêtes. Qu'est-ce que vous faites actuellement au niveau des enquêtes? Et nous, on voulait, en fait, resserrer un peu plus les règles, donner un peu plus de liberté. Mais vous semblez aussi, dans un autre point, nous dire que vous avez certaines inquiétudes quant à la confidentialité. Donc, j'aimerais voir exactement quelle est votre position, là, par rapport à ce que vous faites, comment on peut le faire de façon un peu plus serrée, sans empiéter sur les règles qui semblent vous... également.

M. Gaudreault (Mauril) : Bien, je vais débuter la réponse. Bien, comme vous le savez, comme ordre professionnel, on est préoccupés par l'exercice de la pratique de la médecine, comme Collège des médecins, bien sûr. Et évidemment les deux grandes activités de notre ordre professionnel sont celles de l'inspection et des enquêtes lorsque cela est nécessaire. Et, lorsque nous recevons une plainte, évidemment, celle-ci est d'abord examinée par un syndic, syndic qui communique avec le ou la plaignante pour bien comprendre l'état de la plainte et qui, par la suite, décide soit de la rejeter soit de l'accepter et procéder à son enquête par la suite. Et, à partir de ce moment-là, évidemment, vous aurez compris que tout cela se fait de façon indépendante et complètement confidentielle et que le président, même, de l'ordre que je suis ne le sait même pas lorsqu'il y a de tels types d'enquêtes. Tout ce qu'on peut dire, c'est qu'il y a eu des enquêtes, mais c'est impossible, pour moi, pour nous, de vous en dire plus que ça par rapport à la teneur de ces enquêtes-là.

M. Carmant : D'accord, mais nous, notre but, c'est vraiment de, d'une façon routinière, s'assurer de la qualité des services fournis, surtout qu'on a quand même une opération importante, là, où on va vraiment travailler de façon main dans la main entre des cliniques privées et puis des centres publics. Donc, c'est pour ça qu'on veut être sûrs, tu sais, de la... Surtout que ça a déjà été un sujet d'actualité, nous, on veut être sûrs d'en faire plus et non seulement sur une base de plaintes. Et, vous, comment pouvez-vous... Est-ce que vous pouvez contribuer à cet effort, tu sais, de contrôle régulier ou est-ce qu'il faut qu'on utilise une tierce partie? C'est ça, le point qu'il est important de clarifier ce matin, là.

M. Gaudreault (Mauril) : Ah! je répète, vous avez notre collaboration totale pour poursuivre l'évolution de ce programme, et, ensemble, nous conviendrons des meilleures choses à faire dans le respect des missions et rôles de chacun. Ça, je n'ai pas de problème à ce qu'on regarde ça pour voir comment on peut s'assurer de la qualité de l'exercice de cette pratique qui, nous l'avons dit, est en constante évolution. On pourra convenir ensemble de façons de faire, bien sûr.

• (12 h 30) •

Mme Tardif (Isabelle) : Peut-être que je rajouterais qu'en 2015 la loi nous donnait, donc, déjà l'obligation d'émettre des lignes directrices et de veiller à leur application. Alors, pour veiller à leur application, notamment, il y a eu une démarche de collecte de données auprès des centres de procréation assistée. Il y a 16 centres qui ont été sollicités pour donner des informations, donner le... nous fournir différentes informations par rapport à leurs activités. Il y a deux rapports, donc, qui ont été émis en 2019 suite à cette enquête-là, cette démarche-là. Dans l'ensemble, c'était rassurant, sur la pratique qui était faite dans les différents centres de procréation assistée avec les différents niveaux de soin de procréation assistée.

Il y a eu, donc, des rapports qui ont été fournis, là, à la ministre à l'époque et il y a eu des bulletins qui ont été faits pour chacun des centres, avec leurs données et leurs données comparatives par rapport aux centres de même niveau de soins et de l'ensemble des centres qui offrent de la procréation assistée, et des recommandations ont été faites auprès de chacun de ces centres-là. Et il y a eu un suivi, au cours de l'année 2020, auprès de chacun de ces centres pour s'assurer du suivi des recommandations qui avaient été faites en 2019. Donc, il y a aussi cette surveillance-là et cet accompagnement-là qui a été très apprécié par les cliniques sur le terrain, là, d'avoir cette rétroaction-là, et ces informations-là, et ce suivi-là de la part du collège.

M. Carmant : Parfait. Merci beaucoup. Deuxièmement, qu'est-ce que vous pensez de l'obligation, là, pour le directeur médical du centre de procréation assistée, de fournir un certificat de bonne conduite professionnelle pour recevoir ou se renouveler un permis de clinique?

M. Gaudreault (Mauril) : Bien, les certificats de conduite professionnelle, comme vous le savez, Dr Carmant, sont exigés par les établissements de santé lorsque qu'un médecin demande des privilèges pour y pratiquer, et, ça, je ne vous apprends pas ça, là, dans le sens de soins donnés à des patients, de soins donnés à une population. Et ça, c'est tout à fait correct que les établissements de santé demandent cela, ce certificat de conduite professionnelle.

En fait, notre questionnement, c'est à l'effet qu'un médecin gestionnaire d'une clinique, d'un centre de procréation assistée, qui n'a pas de contact direct avec les patients... Devons-nous, à ce moment-là, fournir un certificat de conduite professionnelle? Là, c'est le questionnement que nous avions, et non pas par rapport aux médecins qui vont poser des actes, mais par rapport aux médecins qui assurent un... assument un rôle de gestion. À ce moment-là, ça ne nous apparaissait pas nécessaire d'aller jusque-là étant donné, comme vous le savez très bien, vous aussi, que le certificat de conduite professionnelle, au collège, contient des éléments confidentiels et qui sont... qui peuvent être sensibles aussi par rapport aux professionnels.

Mme Tardif (Isabelle) : Puis, en fait, j'ajouterais que votre loi... En fait, le projet de loi et le règlement mentionnent déjà des critères selon lesquels un permis, par exemple, pourrait ne pas être délivré, par exemple une suspension, une radiation ou une limitation d'exercice, en lien avec, évidemment, les activités de procréation assistée. Donc, ces éléments-là, c'est des éléments qui, pour la majorité, sont publics, et qui, donc, sont accessibles, et pour lesquels on pourrait aussi fournir l'information complémentaire dont vous auriez besoin, mais un certificat de conduite professionnelle va beaucoup plus loin que les informations qui sont pertinentes pour votre démarche.

M. Carmant : D'accord. Et, dans un autre ordre... Bien, en fait, toujours dans la même ligne, qu'est-ce que vous nous... Y a-t-il des choses que vous ajouteriez qui pourraient nous permettre de renforcer la qualité des soins dans tous les milieux où ceux-ci sont offerts, à la lecture du projet de loi?

Mme Tardif (Isabelle) : Peut-être que...

M. Gaudreault (Mauril) : Je te laisserais aller.

Mme Tardif (Isabelle) : Oui, parfait. Peut-être que j'ajouterais... Bon, on l'a mentionné dans notre allocution, là, mais l'inquiétude par rapport à la cession des embryons et des gamètes, je pense que ça, c'est un enjeu qui est significatif. Et on aurait intérêt à prévoir des mesures plus précises pour s'assurer que, si, par exemple, il y a une fermeture de clinique ou, par exemple, si vous décidez de ne pas renouveler le permis d'une clinique pour x ou y raison, bien, qu'il y ait... qu'il n'y ait pas d'enjeu au niveau de la conservation des embryons et des gamètes, que ça puisse être récupéré par un autre centre, par exemple, de façon formelle.

M. Carmant : D'accord, merci beaucoup. M. le Président, je passerais la parole à la députée de Soulanges.

Le Président (M. Provençal)  : Oui. Alors, Mme la députée de Soulanges.

655 17891 Mme Picard : Bonjour. Merci beaucoup d'être présents aujourd'hui. Je voulais savoir... Que pensez-vous de la possibilité de transfert de deux embryons lorsqu'une fécondation in vitro est... lorsque cela est médicalement indiqué? Est-ce que vous pouvez nous préciser certaines lignes directrices à cet effet?

M. Gaudreault (Mauril) : Je donne la parole à ma collègue qui a des réponses plus pointues par rapport à cette question.

Mme Tardif (Isabelle) : Effectivement. En fait, la loi actuelle posait clairement un problème parce qu'elle édictait que le transfert de deux embryons ne pouvait pas se faire en bas de l'âge de 37 ans, donc, et nos lignes directrices du collège, qui ont été émises en 2015, nuançaient beaucoup plus la question du transfert de deux embryons. Donc, le projet de loi actuel, on trouve qu'il vient dénouer cette impasse-là que certains médecins sur le terrain avaient par rapport au transfert de deux embryons, parce qu'effectivement, dans le guide, on parle de conditions pour lesquelles on pourrait aller... et considérer le transfert de deux embryons, qui vont au-delà d'un critère pur et simple d'âge.

Donc, il y a des facteurs de bons pronostics pour le transfert sélectif d'un seul embryon. Mais, dans certains cas particuliers, il peut y avoir, selon les facteurs pronostics de grossesse et de naissance vivante, de même que le jugement clinique du médecin... ça peut être indiqué d'aller vers le transfert de deux embryons. Donc, il y a beaucoup plus de souplesse. Il y a quand même un cadre dans nos lignes directrices, mais il y a beaucoup plus de souplesse que ce que la loi qui est en vigueur actuellement mettait de l'avant.

Mme Picard : Merci. J'ai une dernière question. J'aimerais savoir ce que vous pensez de la possibilité d'avoir une banque de gamètes québécoise.

Mme Tardif (Isabelle) : Cette question‑là est probablement plus du ressort de notre équipe d'experts. On a un comité, on a un groupe de travail ici, au collège, là, qui est mené par notre équipe à la permanence, mais sur lequel siègent des experts en procréation assistée et en reproduction et fertilité. Alors, c'est probablement plus une question qui s'adresse à notre groupe de travail et à nos experts.

M. Gaudreault (Mauril) : Mais on pourra y apporter une réponse si vous le désirez quand même, tu sais, mais avec nos experts, voilà.

Le Président (M. Provençal)  : Mme la députée de Roberval.

Mme Guillemette : Oui, merci, M. le Président. Merci d'être avec nous ce matin. Moi, j'aimerais vous entendre sur le critère d'admissibilité selon l'âge, de 41 ans ou 42 ans, pour l'implantation.

Mme Tardif (Isabelle) : En fait, nous, au collège, grâce à l'exercice qui a été fait, là, avec les indicateurs et les données obtenues des différentes cliniques, on a, dans le rapport, là, que vous avez possiblement en main, établi, donc, justement, des pourcentages, en fonction de l'âge, de grossesses... de troubles... grossesses cliniques, et c'est sûr que c'est dans ce contexte‑là qu'on a vu qu'il y avait une baisse de taux de succès avec évidemment... plus l'âge avance, une baisse qui est plus significative. Là, on regarde en termes de pourcentage de naissances vivantes, qui, dans l'ensemble, pour tous les âges, est autour de 29 %, et qui diminue, à 41, 42 ans, à 13 %, et à 6 % en haut de 43 ans. Là, je parle de fécondation in vitro. Donc, nous avons ces données-là que nous avons transmises. Et donc c'est, j'imagine, sur la base des données qui ont été transmises que cet élément‑là a été ajouté à la loi.

Le Président (M. Provençal)  : M. le ministre.

M. Carmant : Oui. Comme il reste un peu de temps, je vais poser une dernière question qui était vraiment sur le... En fait, moi, j'avais demandé aux associations de regarder si, dans notre... la base de données qu'on veut mettre sur pied pré, per et postnaissance, quels étaient les critères de performance et de qualité des soins. Mais là je vous ai entendu dire que vous aviez également des critères de normes de pratique. J'aimerais ça en entendre parler et voir quels seraient les moyens de les intégrer dans notre suivi aussi au niveau des données informatiques que l'on va mettre sur pied. Quelles sont vos normes de pratique actuellement puis comment on peut les intégrer ou comment on peut travailler ensemble là-dessus?

• (12 h 40) •

Mme Tardif (Isabelle) : En fait, nos normes de pratique sont détaillées dans le guide... en fait, dans nos lignes directrices. Donc, c'est... Il y a plusieurs aspects à considérer. Il y a évidemment tout le cheminement, toute la démarche clinique et... qui mène à la prise de décisions concertées avec, évidemment, les patients et qui sont bien détaillées au niveau de notre guide. Ce qu'on a recueilli comme indicateurs... Bien, évidemment, il y avait différents indicateurs. Il y avait des indicateurs en termes de nombre, bon, de grossesses, de nombre d'embryons transférés, les questions aussi par rapport à... le taux de grossesses gémellaires.

Donc, il y a différents indicateurs qui ont été identifiés et qu'on a transmis, là. On pourra continuer à travailler étroitement, là, avec le ministère pour vous donner les différentes informations et encore plus de détails par rapport aux indicateurs qui peuvent être mis en place. Mais, en gros, là, c'est les indicateurs qu'on avait utilisés, qu'on avait comparés aussi par rapport aux données canadiennes et qui nous avaient fait conclure que, dans l'ensemble, la pratique de la procréation assistée au Québec était de qualité.

M. Carmant : Merci beaucoup. Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Nous allons poursuivre nos échanges avec le député de Marquette.

M. Ciccone : Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, Dre Tardif. Bonjour, Dr Gaudreault. Très intéressant. Merci beaucoup de nous éclairer. Selon vous, quelle est votre opinion justement sur l'accessibilité des services en région, sur le sujet qui nous concerne, là?

M. Gaudreault (Mauril) : Bien, moi, je peux débuter une réponse. Écoutez, je l'ai dit souvent, puis peut-être que je vous l'ai dit à vous aussi, M. Ciccone, mais, lors d'une présence antérieure... Le collège veut participer avec tous les autres intervenants à faire en sorte que le réseau de la santé soit accessible partout au Québec. Puis c'est le gars de Chicoutimi qui vous parle quand il dit ça, là, mais, tu sais, dans ce sens-là, oui, on pourrait... Puis on a parlé de partenariat avec le ministère, etc., qui était déjà établi. Je ne pourrais pas vous donner des détails. Vraiment, il y a 16 cliniques, il y a 16 centres de procréation assistée... de détails à ce point... jusqu'à quel point c'est accessible partout au Québec, mais vous aurez compris que, l'organisation que j'ai le privilège de diriger, on va travailler avec vous pour que ça soit accessible de façon correcte partout, dans toutes les régions du Québec.

M. Ciccone : Je vous pose cette question-là parce que, justement, la députée de Roberval en a fait mention hier aussi, parce qu'on a vu... On a entendu un groupe qui nous a dit qu'il y avait une belle collaboration entre l'Hôpital de Chicoutimi et le CHUM ici, plus près de chez nous. Mais, en même temps, est-ce que vous aimeriez avoir vraiment un service, là... puis je vais utiliser les mots «clés en main», je ne veux pas manquer de respect, mais, vraiment, un service où ceux qui veulent faire partie de ce programme-là, du VIF... est capable de le faire, là, dans sa région? Je sais que ce n'est pas évident, là, de l'implanter partout, mais, en même temps, je veux vous entendre là-dessus. Ne serait-il pas important, là, de l'avoir là également?

M. Gaudreault (Mauril) : Bien, je pense, vous le savez aussi, je suis prêt à jouer un rôle là-dedans. Le collège, on a tenu une large consultation publique l'année dernière, hein, puis les gens nous ont dit qu'on devrait se préoccuper plus de l'organisation des soins et services de santé au Québec, nous ayant démontré à ce moment-là que le Collège des médecins avait été plutôt frileux dans ce sens-là au cours des récentes années, des dernières années. Donc, le public veut que le collège se prononce plus souvent sur la scène publique par rapport à des enjeux comme cela, dont celui de l'accessibilité un peu partout au Québec. Donc, en ce sens-là, je le répète, ça va me faire plaisir de collaborer pour améliorer les choses, et dresser un portait juste de la situation, et bien écouter la population québécoise aussi.

M. Ciccone : Je ne sais pas si... Je ne veux pas vous mettre en boîte, là, mais, justement, combien de plaintes que vous recevez par année dans le sujet qui nous concerne, là, au niveau de la fécondation in vitro, puis je ne parle pas au niveau du Collège des médecins avec tous les médecins, là, juste dans le sujet qui nous concerne, là?

M. Gaudreault (Mauril) : Le nombre de plaintes, vous aurez compris que c'est embêtant de répondre à cette question-là, étant donné toute l'indépendance qu'il y a avec la direction des enquêtes puis le fait que, moi, comme président, je ne le sais même pas, combien il y a de plaintes. Je ne le sais pas. Puis, honnêtement, je ne le sais pas, là, puis il ne faut pas que je le sache non plus, combien il y a de plaintes. Donc, notre ordre... Je ne peux pas vous dire combien il y a de plaintes, mais je peux vous dire que, quand il y a des plaintes, elles sont analysées, regardées et enquêtées lorsqu'il le faut. Ça, je n'ai pas de problème du tout à vous dire ça, par exemple.

Mme Tardif (Isabelle) : Et on peut vous confirmer que, dans les dernières années, il y a eu des inspections lorsque pertinent et des enquêtes.

M. Ciccone : Est-ce que... On a parlé... Il y a des groupes qui ont relevé ces craintes-là, mais est-ce que vous... Avez-vous des craintes quant à l'implantation trop rapide, là, du programme?

M. Gaudreault (Mauril) : Bien, il faut faire ça de façon concertée, ensemble, mais j'ai... répondre aux besoins que la population nous exprime. Donc, si on le fait de façon concertée, ensemble, j'ose espérer que les personnes intelligentes qui vont travailler là-dessus ne le feront pas trop rapidement.

Mme Tardif (Isabelle) : Et c'est sûr qu'il y a des enjeux au niveau de l'application. C'est pour ça que, dans notre mémoire et dans l'allocution de départ, on a mentionné que ce serait fort utile d'avoir un service-conseil parce qu'il va y avoir des questions, il va y avoir des enjeux, au niveau de l'application, tant du public que des médecins qui sont dans les centres de procréation assistée, par rapport aux différentes balises, là, qui sont en place.

M. Ciccone : Est-ce que la loi devrait vous donner un peu plus de pouvoir à décider... Est-ce que le Collège des médecins devrait déterminer les critères de l'âge maximal d'une patiente? Parce que, là, on voit... certaines procédures, c'est 41 ans, d'autres 42 ans. Est-ce qu'on devrait y aller un peu plus sur l'analyse au niveau médical, comme on fait dans d'autres pays, au lieu de, justement, déterminer un âge précis?

M. Gaudreault (Mauril) : Bien, le collège... Je peux donner, Dre Tardif, une réponse additionnelle, mais, en début de réponse, je dirais que le collège, c'est un ordre professionnel qui s'occupe de la qualité de l'exercice puis de protéger le public. Ce n'est pas une société savante, le Collège des médecins du Québec. Donc, oui, l'établissement de lignes directrices, de critères, comme vous parlez, le collège peut être un des partenaires pour mettre ça en place avec d'autres organisations, qu'on appelle, nous, communément, dans notre jargon, des sociétés savantes, par rapport à cela. Exemple, on pourrait collaborer avec l'INESSS, là, qui est une organisation gouvernementale, par rapport à cela, mais de participer à la définition ensemble, là, avec d'autres partenaires, en ce sens-là, pour ce qui est d'établir des critères d'âge, comme vous parlez...

Mme Tardif (Isabelle) : Oui. Puis effectivement les connaissances évoluent tellement rapidement aussi qu'il faut se laisser aussi la marge de manoeuvre pour tenir compte de l'évolution, là, des connaissances et de ce domaine qui est particulièrement effervescent.

M. Ciccone : Merci beaucoup pour votre collaboration. Je vais céder la parole à ma collègue.

Le Président (M. Provençal)  : Les quatre prochaines minutes vont appartenir à la députée de Maurice-Richard.

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Bonjour à vous deux. Une courte question. Je pense que, sur les quatre minutes, j'en prendrai une. Je vous laisserai le reste du temps.

Dans votre mémoire, vous faites référence au comité d'éthique qui est mentionné dans le projet de loi et vous faites une recommandation pour une meilleure cohérence avec les normes professionnelles, de préciser les fonctions et la composition. Vous ne l'avez pas détaillé davantage dans votre mémoire. Donc, j'aimerais ça... Est-ce que vous avez des propositions à faire sur, justement, cette composition, les fonctions que le comité devrait occuper, mais surtout sur la composition également? J'imagine, vous aviez une idée en tête en faisant cette proposition-là.

M. Gaudreault (Mauril) : Je vais laisser... Je vais commencer d'abord et laisser Dre Tardif poursuivre, mais ce que je veux dire, c'est l'intention, la volonté, le désir du collège de participer aux travaux d'un tel comité, et toute l'importance des principes éthiques, pour nous, évidemment, j'appuie là-dessus, et d'être partie prenante de la composition d'un tel comité, bien, dans le sens d'être d'accord pour supporter cela.

Mme Tardif (Isabelle) : Puis effectivement c'est tout à fait une... Quand on a vu apparaître, au niveau du projet de loi, cette suggestion-là... En fait, ce comité central-là a mis de l'avant... ça allait tout à fait dans les recommandations et dans le guide d'exercices... à ce qui avait aussi été mis de l'avant par rapport à un comité central, parce qu'évidemment, là, comme je le disais tout à l'heure, c'est un domaine qui est en pleine évolution, et il y a beaucoup de considérations éthiques, entre autres. Et il y a, donc, des enjeux particuliers qui doivent être adressés de façon plus centrale... puis s'assurer d'être bien arrimés avec les centres et les comités locaux d'éthique, les comités cliniques.

Alors, au niveau de la composition, c'est sûr qu'on pense que le collège est un partenaire significatif qui devrait être impliqué dans tout comité central qui traite de procréation assistée. Donc, le collège, évidemment, avec les partenaires au niveau du ministère, aussi au niveau, donc, de cliniciens et de personnes qui sont directement impliquées au quotidien avec les questions de procréation assistée, mais aussi avec les patients et les proches... Donc, on croit beaucoup, au collège, à toute la notion du partenariat avec le patient et avec les proches. Donc, on pense que c'est important aussi qu'ils fassent partie de discussions aussi centrales que ce qui va être adressé à ce comité.

Mme Montpetit : Parfait. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Provençal) : M. le député de Marquette.

• (12 h 50) •

M. Ciccone : Oui. Je veux juste revenir au certificat de conduite. Vous nous avez dit tantôt qu'il fallait faire la différence entre un médecin et un gestionnaire, mais pour quelles raisons, selon vous, est-ce qu'une clinique pourrait avoir son permis non renouvelé au niveau du gestionnaire, par exemple?

Mme Tardif (Isabelle) : Ça pourrait être, par exemple... En fait, vous avez, dans la loi et dans les règlements, là, dans ce que vous proposez... Dans ce qui est proposé, c'est bien mentionné que quelqu'un, par exemple, qui aurait vu son permis suspendu ou qui aurait été radié même temporairement pour des... en raison de problématiques directement liées avec la procréation assistée, c'est très clairement indiqué que ce serait... ça fait partie des critères pour lesquels un permis pourrait ne pas être renouvelé ou, en tout cas, que ce directeur médical là, par exemple, pourrait ne pas pouvoir exercer cette fonction-là.

Donc, on est... Ces informations-là, ce sont des informations qui sont, pour la majorité, publiques, et les informations qui sont énoncées, comme je disais, de suspension, ou de radiation, ou de limitation, c'est des informations qu'on peut tout à fait fournir, dont la majorité sont publiques. Le certificat de conduite professionnelle va, par ailleurs, beaucoup plus loin, et c'est là qu'on avait des réserves par rapport à la pertinence d'avoir l'ensemble des autres informations au dossier professionnel d'un médecin.

M. Ciccone : Merci, M. le Président.

M. Gaudreault (Mauril) : Et je répète que, pour nous, c'est important, par rapport aux soins directs avec un patient, mais on doute de la pertinence de cela lorsqu'il s'agit d'un médecin qui est gestionnaire.

Le Président (M. Provençal)  : Alors, nous allons poursuivre cet échange avec la députée de Sherbrooke.

Mme Labrie : Merci, M. le Président. Je vais commencer par une petite question vraiment technique, là. Quand un médecin procède à un acte qui est remboursé par le public, qu'il le fait dans le privé, est-ce qu'il touche la même rémunération que quand il pose le même acte au public?

M. Gaudreault (Mauril) : Moi, je ne peux pas répondre à cette question-là.

Mme Tardif (Isabelle) : Bien, ça ne relève pas du Collège des médecins. C'est vraiment la Régie de l'assurance maladie du Québec qui pourrait vous répondre à cette question.

Mme Labrie : O.K., je vous remercie. Est-ce que vous pensez qu'on devrait prioriser le développement des services de procréation assistée dans le réseau public en priorité?

M. Gaudreault (Mauril) : Bien, je pense qu'il faut s'entendre sur la priorisation des services à offrir aux Québécois par rapport à ça. Donc, en priorité, je ne sais pas, et ce n'est, quelque part, pas à nous de décider ça.

Mme Labrie : À part à développer ces services-là au privé...

M. Gaudreault (Mauril) : Mais, nous, c'est vraiment notre collaboration par rapport à la mise en place des services et à la bonne marche des services en question...

Mme Labrie : Je veux dire par rapport à les développer dans les réseaux privés, pas par rapport aux autres services publics.

M. Gaudreault (Mauril) : Bien, à ce moment, ça non plus. Le collège a comme mission de s'assurer de services de qualité, que ça soit public ou privé. Donc, il n'y a pas de préférence, pour nous, que ce soit dans le réseau public ou dans le réseau privé. Comme ordre professionnel, nous, ce qu'il faut faire, c'est s'assurer que la pratique, elle est bonne partout.

Mme Labrie : O.K. Puis est-ce que, de votre point de vue, ce serait un enjeu si la décision était prise de centraliser les services au public à Montréal?

M. Gaudreault (Mauril) : Bien, encore là, ce n'est pas ma prérogative de me prononcer là-dessus. Et, nous, ce qu'on va faire, c'est de s'assurer que les services, ils sont corrects partout, c'est ça, et qu'ils sont accessibles pour toute la population.

Mme Labrie : Bien, je vous remercie.

Le Président (M. Provençal)  : Ça complète, ça va? Alors, je remercie les Drs Tardif et Gaudreault pour leur contribution à nos travaux.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures, où elle se réunira à la salle du Conseil législatif. Merci beaucoup de votre collaboration, de votre contribution, et bonne fin de journée.

(Suspension de la séance à 12 h 54)

(Reprise à 19 h 37)

Le Président (M. Provençal)  : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de la santé et des services sociaux reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 13, Loi modifiant diverses dispositions en matière de procréation assistée.

Ce soir, nous entendrons par visioconférence les organismes suivants : Association des obstétriciens gynécologues du Québec et la Dre Patricia Monnier, professeure agréée à l'Université McGill et obstétricienne-gynécologue au Centre de reproduction McGill.

Alors, je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Association des obstétriciens gynécologues du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et à commencer votre exposé. Puis je tiens à m'excuser, là, du délai d'attente qu'on a eu pour que vous puissiez initier votre présentation. Alors, je vous cède la parole.

Association des obstétriciens gynécologues du Québec

(Visioconférence)

Mme Marcoux (Violaine) : Bonjour, M. le président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés et les membres de la commission. Mon nom est Violaine Marcoux et je suis présidente de l'Association des obstétriciens gynécologues du Québec. En tant que spécialiste en obstétrique-gynécologie, je suis heureuse de pouvoir partager avec vous des recommandations constructives pour favoriser la mise en place d'un programme durable et qui répond aux plus hauts standards de qualité. Je suis accompagnée aujourd'hui de mon collègue, Dr Dominique Tremblay, qui est également membre du comité exécutif de l'association.

L'AOGQ a pour mission l'amélioration constante de la qualité des soins préventifs et curatifs destinés aux femmes et favorise le développement professionnel continu de ses membres. En tant que professionnelle de la santé, je participe activement aux suivis de grossesses de nombreuses femmes enceintes au Québec. Nous sommes des gens impliqués dans toutes les étapes d'un projet familial. Nous sommes honorés d'être présents aujourd'hui pour enrichir et approfondir la réflexion du gouvernement en ce qui concerne les services de procréation assistée offerts au Québec.

D'entrée de jeu, je tiens à vous dire que nous sommes favorables au projet de loi n° 73, qui prévoit rétablir la gratuité de certains traitements de procréation assistée pour les Québécois qui doivent se tourner vers cette option pour avoir un enfant. Au cours des cinq dernières années, nous avons été témoins des impacts négatifs liés à la fin de la couverture publique des actes de procréation assistée. Nous avons également assisté en première ligne au grand désarroi des personnes et des couples qui doivent se tourner vers cette option pour avoir un enfant.

• (19 h 40) •

Les recommandations que nous proposons aujourd'hui ont pour objectif de contribuer à présenter un programme public accessible, sécuritaire et pérenne pour les patientes afin de leur permettre... de concevoir une famille. Par ailleurs, nos commentaires s'inscrivent dans un esprit de collaboration.

D'abord, nous souhaitons aborder la question de l'accessibilité des soins et des services en région. À cet égard, notre association collabore déjà activement avec le gouvernement afin d'assurer que les services en gynécologie et en obstétrique soient accessibles à travers la province. Les actes de procréation assistée n'y font pas exception. Au cours des dernières années, un déséquilibre de l'offre des soins et des services a malheureusement été créé, et ce, entre les régions et les centres urbains et entre les secteurs publics et privés.

Il s'agit également d'un constat qui a déjà été émis par le Commissaire à la santé et au bien-être lors de son dépôt de son rapport sur les activités de procréation assistée au Québec en 2014. Le projet de loi n° 73 tente de corriger cette situation en prévoyant que le ministre puisse délivrer des permis en fonction des besoins des régions. Ce dernier pourra également refuser de délivrer un permis si les besoins des régions ne le justifient pas.

Certes, il s'agit d'un point important pour une couverture régionale optimale, mais il nous apparaît essentiel de définir au préalable les besoins des différentes régions. Sans données ni critères précis inscrits à la loi, la juste répartition des ressources demeure aléatoire. Il importe que les besoins régionaux soient estimés et qu'un plan de déploiement régional soit mis en place afin d'assurer l'équité entre les différentes régions.

Par ailleurs, l'accessibilité et la continuité des services en gynécologie, en obstétrique et en fertilité passent par une disponibilité adéquate et en temps opportun des professionnels tant dans le réseau privé que public. Toutefois, en raison du nombre limité d'effectifs pour couvrir l'ensemble des besoins actuels et futurs en obstétrique-gynécologie sur l'ensemble du territoire québécois, l'ajout du nouveau service de procréation assistée pourrait mettre en péril l'équilibre et les efforts mis pour favoriser la répartition des effectifs sur l'ensemble du territoire.

C'est pourquoi nous jugeons essentiel que le projet de loi prévoie des mesures qui viseront à pallier une éventuelle rareté de médecins dans le secteur public. Bien que la gamme complète des services de procréation assistée soit maintenant disponible au centre universitaire de Sainte-Justine, ainsi qu'au Centre universitaire de santé McGill, et dans quelques établissements publics régionaux, il faut viser une juste répartition des ressources humaines spécialisées.

Nous recommandons, donc, au gouvernement du Québec de préciser clairement dans le projet de loi que les ressources humaines doivent être équitablement réparties entre le secteur public et le secteur privé. La présence offerte dans le secteur public devrait également être basée sur...

Le Président (M. Provençal)  : S'il vous plaît, Dre Marcoux, est-ce que... On va juste regarder... On va vérifier pour votre son. Le son...

Une voix : ...

Le Président (M. Provençal)  : Oui, on suspend. On va suspendre pour...

Une voix : ...

Le Président (M. Provençal)  : Bien là, vous ne voulez pas qu'elle disparaisse, là. On suspend pour juste faire un ajustement au niveau du son, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 19 h 43)

(Reprise à 19 h 59)

Le Président (M. Provençal)  : Nous reprenons nos travaux. Alors, mille excuses, Dre Marcoux, pour nos problèmes techniques. Avant de vous céder la parole, je vais avoir besoin du consentement de la salle pour excéder le temps qui était prévu pour terminer nos travaux. Consentement?

Deuxièmement, le député de Marquette veut offrir une... deux minutes... c'est-à-dire, une minute, pour chacun des partis de l'opposition, de son temps pour que ces derniers puissent avoir un petit peu plus de temps pour interroger les personnes qui vont nous présenter le mémoire. Consentement?

Alors, maintenant que j'ai le consentement de tout le monde, madame... Dre Marcoux, je vous cède la parole pour la présentation de la seconde partie de votre exposé, et il vous reste six minutes. Je vous cède la parole, madame.

• (20 heures) •

Mme Marcoux (Violaine) : Bonjour. Honnêtement, je serais probablement capable de parler assez vite pour rentrer dans le temps que vous m'avez donné même avec les permissions, mais je vais faire attention.

Donc, je crois qu'au moment où on a été interrompus, on parlait de la disponibilité des professionnels. Je disais, donc, que l'accessibilité et la continuité des services en gynécologie, en obstétrique et en fertilité passent par une disponibilité adéquate et en temps opportun des professionnels tant dans le réseau privé que public.

Toutefois, en raison du nombre limité d'effectifs pour couvrir l'ensemble des besoins actuels et futurs en obstétrique et en gynécologie sur l'ensemble du territoire québécois, l'ajout du nouveau service de procréation assistée pourrait mettre en péril l'équilibre et les efforts mis pour favoriser la répartition des effectifs sur l'ensemble du territoire. C'est pourquoi nous jugeons essentiel que le projet de loi prévoie des mesures qui viseront à pallier une éventuelle rareté de médecins dans le secteur public.

Bien que la gamme complète des services de procréation assistée soit maintenant disponible au centre hospitalier universitaire de Sainte-Justine, ainsi qu'au Centre universitaire de santé McGill, et dans quelques établissements publics régionaux, il faut viser une juste répartition des ressources humaines spécialisées. Nous recommandons, donc, au gouvernement du Québec de préciser clairement dans le projet de loi que les ressources humaines doivent être équitablement réparties entre le secteur public et le secteur privé. La présence offerte dans le secteur public devrait également être basée sur les besoins régionaux préalablement définis.

Quant à la pérennité du programme, étant donné que les fonds publics ne sont pas illimités, nous comprenons la nécessité de doter le programme de critères précis, qui sont notamment basés sur l'indication médicale et les chances de succès des traitements. Nous souhaitons toutefois proposer un élargissement aux critères d'admissibilité afin d'éviter les bris de service pour certaines patientes.

Plus précisément, le projet de loi prévoit qu'une femme doit être âgée de moins de 42 ans lors du dernier transfert d'embryons congelés. Or, il nous apparaît problématique qu'une femme atteignant l'âge de 42 ans en cours de processus puisse se voir refuser le transfert d'un embryon congelé pour des raisons hors de son contrôle, comme par exemple une maladie ou un accident.

Pour éviter un tel bris de service, nous proposons d'amender le projet de loi afin d'assurer que les femmes atteignant l'âge de 42 ans en cours de processus et n'ayant pu recevoir leur transfert d'embryon dans le temps prescrit puissent terminer leur traitement jusqu'à l'âge de 45 ans en bénéficiant de la couverture publique.

De plus, depuis la fin du programme de procréation assistée, en 2015, certaines interventions requises pour la préservation de la fécondité dans les cas de femmes atteintes d'un cancer et subissant des traitements de chimiothérapie ont été maintenues et sont toujours assurées par la RAMQ. Toutefois, bien que les traitements liés à la préservation et à la congélation soient couverts par le régime public, le transfert d'embryons, lui, ne l'est pas.

De surcroît, le projet de loi actuel ne prévoit pas la couverture publique du transfert d'embryons dans des cas d'oncopréservation. Nous croyons, donc, que le projet de loi n° 73 représente une occasion opportune pour corriger cette situation. C'est pour cette raison que nous recommandons l'ajout de services de transfert d'embryons dans des cas d'oncopréservation dans la liste des services assurés par le programme.

Nous proposons, par ailleurs, de bonifier le projet de loi afin de faire en sorte que des traitements de diagnostic génétique préimplantatoire soient couverts par la RAMQ pour les familles porteuses ou atteintes de maladies génétiques particulières connues. Il en va de même pour la couverture des dons d'ovules pour certaines femmes âgées de moins de 41 ans.

Quant au permis des services couverts, nous croyons important de rappeler que l'ancien programme, lancé dans la précipitation, a occasionné bien des surprises et des interprétations concernant la couverture ou non des services offerts dans les cliniques de procréation assistée. En fait, le régime avait été déployé alors que nous ignorions la composition du panier de services assurés dans son entièreté. Pour éviter toute improvisation dans le déploiement du programme, nous recommandons au gouvernement de définir la gamme des services qui seront offerts et assurer la mise en place du nouveau programme dans un guide des pratiques qui serait accessible à l'ensemble des CPA.

Les membres de l'AOGQ, dont plusieurs oeuvrent au sein des CPA de la province, tiennent à réitérer l'importance pour le gouvernement de documenter de façon efficace toute la pratique. Pour éviter les dérives du passé, l'État doit être en mesure d'obtenir une vue d'ensemble des soins et des services de procréation assistée offerts afin de prévenir en amont les écueils pour rapidement être en mesure de corriger le tir. C'est pourquoi nous recommandons la mise en place d'une collecte systématique et obligatoire des données concernant les activités des CPA, ainsi que leur participation au registre canadien des naissances issues de la procréation assistée.

En conclusion, pour notre association, il est primordial que le programme soit pérenne, sécuritaire, accessible partout au Québec et dans le réseau public et privé, en plus de favoriser l'analyse de la collecte des données, afin d'assurer une meilleure surveillance et garante des meilleures pratiques. Encore une fois, au nom de l'AOGQ, je tiens à vous offrir toute notre collaboration pour la mise en place et le maintien du programme de procréation assistée. Je vous remercie. Ça nous fera plaisir de répondre à vos questions.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup, Dre Marcoux, pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange avec M. le ministre. Alors, M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Carmant : Bonjour, Dre Marcoux.

Mme Marcoux (Violaine) : Bonjour.

M. Carmant : Bonjour à votre collègue également. C'est un plaisir de vous voir ce soir.

Un point qui m'a surpris dans votre présentation, le transfert d'embryons dans le contexte de préservation de la fertilité, n'est-ce pas de la procréation médicalement assistée? Pourquoi ça ne serait pas couvert d'après votre lecture? Est-ce qu'il y a quelque chose qui n'est pas clair dans le projet de loi?

Mme Marcoux (Violaine) : Ce n'était pas précisé puis c'était spécifiquement exclu de l'ancien programme. Alors, on voudrait être assurés que, dans les cas d'oncopréservation, ce serait maintenu. Puis je vais aussi me permettre d'ajouter que le programme actuel semble prévoir une limite pour la congélation des embryons, puis peut-être que, dans ces cas-là, il faudrait revoir les limites du programme que vous proposez dans ces cas-là.

M. Carmant : D'accord. Effectivement, il y a une limite d'âge qui est peut-être un peu jeune, là, mais ça, ça a été noté déjà. Puis l'autre chose qui m'a surpris dans votre rapport, c'est le besoin de réduire la certification pour les centres de niveau 2A. Ça me surprend un peu venant de votre association, là. Vous trouvez ça trop sévère?

M. Tremblay (Dominique) : Bien, M. le ministre, je vais répondre à cette question. Nous sommes en accord avec la mise en place de permis, et je pense que c'est essentiel pour les cliniques de niveau 3 et 2B. Je pense qu'on désire apporter une nuance pour le 2A parce qu'on craint que ça ait un impact négatif pour les services en région. Les cliniques 2B, c'est les cliniques où on va initier à distance les soins en fertilisation in vitro pour que, par la suite, les patients transfèrent dans des centres où on va l'offrir, les niveaux 3, la fertilisation in vitro.

Les niveaux 2A, c'est des endroits où on va stimuler l'ovulation en vue d'insémination, ce qui prend... qui a beaucoup moins de besoins au niveau technique et qui peut se faire un peu partout en région. On croit que la mise en place de permis pour des niveaux 2A, donc, seulement pour les stimulations et inséminations, pourrait décourager plusieurs endroits en région qui désireront ne pas offrir, à ce moment-là, ce service, et les gens... La population devra alors, à ce moment-là, se déplacer pour avoir des inséminations, ce qui, selon nous, ne serait pas favorable, comme projet de loi, là, pour les gens en région. Et c'est en ce sens-là qu'on recommande le retrait du 2A, c'est pour assurer une meilleure couverture et une accessibilité à la population.

M. Carmant : D'accord. Merci, Dr Tremblay. Je vais revenir à vous tantôt, mais j'ai une dernière question, peut-être, à la Dre Marcoux. Moi aussi, j'ai... La distribution, là, des effectifs tant médicaux que professionnels et infirmiers, là, c'est un souci. Comment vous voyez ça, vous, au niveau de l'ajout de ce programme? Quelles sont vos inquiétudes puis quels sont les moyens d'éviter les écueils, selon vous?

Mme Marcoux (Violaine) : C'est certain que, comme association professionnelle, on est préoccupés par l'arrivée d'un nouveau service couvert sur la couverture existante. On est préoccupés par la couverture existante. On s'assure... On a d'ailleurs une entente avec votre gouvernement depuis l'année dernière pour assurer une couverture en obstétrique sur tout le territoire, une entente qui va, selon nous, bien parce qu'il n'y a pas eu de découverture à cause des médecins. Mais c'est certain qu'on est conscients que nos effectifs sont fragilisés.

Puis les plans d'effectifs médicaux ont été planifiés avant l'arrivée d'un programme de procréation médicalement assistée. Notre association serait certainement en faveur de mesures qui viendraient favoriser la participation et la rétention des médecins dans le régime public. Je pourrais ajouter que l'augmentation des postes en résidence ne ferait pas de tort non plus certainement parce qu'on a été particulièrement touchés par ce phénomène-là.

Alors, c'est certain qu'on est prêts à collaborer pour trouver des solutions pour favoriser la rétention, améliorer les conditions de pratique dans les centres tertiaires universitaires puis, évidemment, mieux distribuer les effectifs sur le... le nouveau programme.

• (20 h 10) •

M. Carmant : Puis, si je peux vous rassurer, là, ce n'est pas du tout dans nos intentions, là, d'augmenter les cliniques CPA privées, c'est vraiment pour utiliser leur expertise et leur capacité actuelle pour nous aider à mettre en place le programme.

L'autre chose qui est importante aussi, puis, peut-être, Dr Tremblay va pouvoir m'aider, c'est au niveau de la rémunération. Je vais profiter de votre expertise et de votre rôle au sein de la fédé. J'ai pas mal regardé sur tous les sites Web, là, les prix actuels, là, puis, encore une fois, je le répète, mais, je pense, c'est important d'insister là-dessus, là, on parle de services privés dans une institution publique, là, puis pas mal tous les prix se ressemblent. Êtes-vous à l'aise avec la rémunération des actes de la façon dont elle se fait actuellement? Puis ensuite j'aimerais ça que vous partagiez aussi votre impression sur les frais techniques puis qu'est-ce qui devrait être inclus dans ces frais techniques là.

M. Tremblay (Dominique) : Bien, il y a deux choses. C'est sûr que le problème, actuellement, c'est que les médecins sont rémunérés sur un montant global qui inclut les gestes médicaux et les frais techniques. Donc, ça, pour nous, c'est un enjeu qui est majeur. Pour nous, ce serait très important, surtout lorsqu'on a des actes où, des fois, 90 % du montant est facturé pour les frais techniques, que ça soit séparé au niveau comptable et que les chiffres qui apparaissent pour les revenus des médecins et/ou pour les frais soient complètement séparés, ce qui permettrait... qui empêcherait, là, des aberrations pour la compréhension de ce qui se passe dans les coûts qui se passent là-dessus. Donc, pour nous, ça, c'est un élément qui est important.

Et je ne sais pas si je répondais à votre question pour le premier point. Pour ce qui est...

M. Carmant : J'aimerais avoir plus de détails, là, comme on regarde... Je ne sais pas si vous avez eu la chance de regarder, là, sûrement, mais, par exemple, tu sais, la FIV a un certain montant associé avec les différents actes, a un certain montant associé avec... actuellement, dans tout ce qui se ressemble beaucoup, là, que ce soit à Sainte-Justine ou ailleurs. Est-ce qu'on trouve que ces prix-là sont adéquats ou est-ce qu'on a... ou vous trouvez que c'est sur ou sous-évalué?

M. Tremblay (Dominique) : Bien, écoutez, je pense que l'association n'a pas eu... n'a pas fait d'expertise sur les coûts des frais techniques là-dessus. Je pense qu'il serait opportun que le gouvernement fasse cet exercice-là pour lequel ça nous fera plaisir de collaborer. Mais c'est sûr que l'association n'a pas fait de calcul actuellement sur les coûts des frais réels techniques tant dans le réseau public que dans le réseau privé.

M. Carmant : D'accord. Et qu'est-ce qui devrait être inclus, selon vous, dans l'acte au niveau de la composante technique?

M. Tremblay (Dominique) : Bien, la position de l'association, pour nous, lorsqu'un service public est considéré assuré, on devrait s'assurer que, justement, celui-ci soit gratuit et offert partout, incluant, surtout, au public. Donc, pour nous, c'est important. Il y a eu, dans le premier programme, la mise en place du programme, un flou au début sur ce qui était effectivement couvert ou pas. Nous, on pense que l'investigation de la fertilité devrait être clairement définie et couverte par le programme pour que tant les cliniques que, surtout, la population ne soient pas prises en otages avec des frais qui pourraient ne pas avoir été prévus dans la couverture. Donc, c'est pour ça qu'on a suggéré dans notre mémoire que l'ensemble du panier de services soit bien défini et couvert dans le programme.

M. Carmant : Quant à l'augmentation, pour les implantations d'embryons, jusqu'à l'âge de 45 ans, est-ce qu'il y a des inquiétudes ou peu par rapport aux conséquences, là, maternelles sur des grossesses à cet âge-là? Est-ce que c'est quelque chose qui vous inquiète?

Mme Marcoux (Violaine) : C'est une excellente question, puis on a passé plusieurs... beaucoup de temps à y réfléchir. On comprend que le programme doit avoir des balises. Par contre, le délai potentiel d'une seule année pour les patientes qui seraient à la limite du programme au moment où elles ont leur ponction d'ovules nous apparaissait problématique. Ça poserait beaucoup de... Ça pourrait mettre beaucoup de pression sur les patientes et les médecins. Par contre... parce qu'il faut comprendre que le taux d'implantation dépend de l'âge au moment où les embryons ont été créés, mais que le taux de complications au moment de la grossesse va dépendre de l'âge de la maman qui porte la grossesse.

Alors, il y a un consensus au niveau des spécialistes en médecine foeto-maternelle. Puis on sait que le risque augmente graduellement après l'âge de 40 ans, mais encore de façon plus significative après 45 ans. C'est pour ça qu'on est arrivés avec cette proposition-là de 45 ans, en essayant de trouver une balance entre la pression sur les patientes, les médecins et aussi un taux de complications maternelles qui pourrait nous sembler acceptable, à condition évidemment que la patiente en question soit bien évaluée par son équipe traitante.

M. Carmant : Parfait. M. le Président, je passerais la parole à la députée de Roberval.

Mme Guillemette : Merci, M. le Président. Merci d'être avec nous ce soir. C'est très instructif, un sujet qui est loin de nous, là. Donc, c'est intéressant d'entendre... Vous parliez de mettre en place des mesures nécessaires pour effectuer votre devoir d'enquête. De quelles mesures ça serait intéressant de mettre en place pour pouvoir effectuer ce devoir-là?

Mme Marcoux (Violaine) : Je crois que c'est le Collège des médecins qui a fait référence aux pouvoirs d'enquête qui sont prévus dans le projet de loi. C'est certain que, nous, ce qu'on veut, c'est que ça soit des experts en procréation médicalement assistée qui travaillent sur le programme. Mais, généralement, les pouvoirs d'enquête ne sont pas réservés aux associations professionnelles, mais plutôt au Collège des médecins, qui s'assure de la sécurité du public en général. Est-ce que j'ai bien répondu? Est-ce que j'ai saisi votre question?

Mme Guillemette : Oui, oui, oui, ça va, merci. Une dernière question. Est-ce qu'il reste encore un petit peu de temps?

Le Président (M. Provençal)  : Une minute.

Mme Guillemette : Ah! parfait. Donc, bien, j'aimerais avoir votre idée sur la possibilité de transférer deux embryons.

Mme Marcoux (Violaine) : Le taux de complications issu des grossesses multiples est grandement augmenté par rapport à une grossesse unique. Ça, c'est une donnée qui est bien établie, puis c'était même un des buts du premier programme qui a diminué le taux de grossesses multiples, les coûts associés à la prématurité, aux admissions. Alors, c'est important qu'on ait des... Le programme québécois a été un des pionniers dans le monde en termes d'embryons uniques, puis je crois que c'est un des aspects du programme à préserver autant que possible. C'est certain qu'il faut probablement laisser... Il faut laisser une marge de manoeuvre au jugement clinique, mais il ne faudrait pas reculer sur des progrès qui ont été faits par le premier programme en termes d'embryons uniques, de transfert d'embryons uniques.

Mme Guillemette : Bien, merci, Dre Marcoux.

Le Président (M. Provençal)  : Mme la députée de Soulanges.

Mme Picard : Merci, M. le Président. J'aimerais avoir votre opinion. Est-ce que vous trouvez qu'on devrait standardiser un peu les suivis pour les futurs parents? Est-ce qu'on devrait standardiser un peu, là, les techniques pour... En fait, je parle des techniques plus... du support qui est octroyé aux futurs parents. Est-ce qu'on devrait le rendre équitable, égal partout, autant au public qu'au privé, de faire vraiment une démarche standardisée sur le support?

Mme Marcoux (Violaine) : Est-ce que vous... Je ne suis pas certaine de comprendre quelle démarche vous faites référence. Est-ce que vous faites référence aux investigations, aux processus? Parce que le Collège des médecins a déjà établi des lignes de pratique à cet effet. Je ne suis pas certaine de saisir votre question. Pourriez-vous préciser?

Mme Picard : Oui, bien, peut-être plus au niveau, là, supposons, du soutien psychologique avant l'intervention, pendant l'intervention, est-ce qu'on... On veut aussi arriver avec des suivis postintervention, un suivi sur l'enfant aussi qui naît. Donc, je voulais avoir votre opinion sur tout ça un peu.

• (20 h 20) •

Mme Marcoux (Violaine) : On ne pourra jamais s'opposer à un plus grand support en santé mentale dans les temps qui courent. C'est certain qu'on va être en faveur d'augmenter le support psychologique qui est offert aux patientes, à leurs familles, quand elles en ont besoin. Puis vous avez fait référence aux suivis postnataux qui devraient être effectués. C'est certain qu'on est en faveur de ça, à savoir est-ce que... jusqu'à quelle... de quelle façon notre système peut le faire en ce moment, peut accommoder ces nouveaux besoins là. Ça va dépendre de votre budget un peu, mais c'est certain qu'on est en faveur de ça, c'est certain, certain, parce que c'est un besoin qui est réel puis qui est grandissant.

Mme Picard : Une petite dernière question?

Le Président (M. Provençal)  : Oui.

Mme Picard : O.K., parfait. Que pensez-vous de limiter à six le nombre d'inséminations artificielles assurées par le régime public? On régit à six.

Mme Marcoux (Violaine) : Ça nous semble une bonne balance entre les taux de succès escomptés et puis le coût. En termes de risque-bénéfice également, ça nous semble une bonne option. Je crois que d'autres groupes l'ont précisé également. Il faudrait que le projet de loi précise à quel point les patientes qui ont déjà fait des inséminations dans le passé, parce qu'on sait que les chances de succès diminuent avec... ou peuvent rester très faibles après plusieurs essais d'insémination... à quel point ces patientes-là pourront faire des nouveaux essais d'insémination dans le cadre du nouveau programme, mais, en général, on est d'accord avec la proposition de votre... la proposition du projet de loi.

Le Président (M. Provençal)  : Oui, vas-y, 30 secondes.

M. Carmant : Une petite vite. On a dit qu'à propos du nombre d'inséminations, désolé... que, les patients, ils insistent pour avoir les six, mais d'où ça vient, ça, ce... des gens qui décident d'avoir absolument... Nous, on se base sur la clinique.

Mme Marcoux (Violaine) : Ça se base sur le fait que les patientes... Je présume puis je comprends... Ce que je comprends, c'est que les patientes qui passent à travers ce processus-là sont très déterminées à tomber enceintes, puis avoir leurs chances de succès, puis qu'il y a plusieurs patientes qui veulent ou qui demandent le nombre... qui associent le nombre qui... à un droit. Ça met beaucoup de pression dans les... sur les équipes traitantes, d'après ce qu'on comprend. Je crois que c'est de là que ça vient.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Alors, maintenant, je vais céder la parole au député de Marquette. À vous.

M. Ciccone : Merci beaucoup, M. le Président. Dre Marcoux, Dr Tremblay, bonsoir.

Je vais vous référer à la page 15 de votre mémoire. Il est écrit : «"La transition souhaitée par le secteur public ne s'est pas concrétisée. Depuis la fin du programme, malgré l'offre de services disponible dans les établissements publics, les habitudes d'utilisation des PMA sont demeurées orientées vers le secteur privé."»

Vous parlez ici dans une proportion, là, l'année passée, de 70 %. Là, je vous cite : «Il ne faut donc pas s'attendre à ce que le marché se régule de lui-même. C'est pour cette raison que nous jugeons essentiel que le gouvernement se dote de mesures qui viseront à pallier une éventuelle rareté de médecins...»

Alors, ce que je comprends, c'est que, un, ce n'est pas inclus dans le projet de loi. Il n'y a pas de mesure en ce sens, justement, pour régulariser les deux. Est-ce que vous croyez que ça devrait être inclus dans le projet de loi noir sur blanc?

Mme Marcoux (Violaine) : C'est certain que l'offre de services dans le système public nous préoccupe. On veut s'assurer d'avoir... Puis nous sommes une association professionnelle affiliée à la FMSQ. C'est certain que le message qu'on va vous donner, c'est un service... Un service qui est médicalement assuré devrait être offert dans le système public. Alors, c'est certain qu'on va être en accord avec des mesures qui vont favoriser le développement du secteur public. Puis, les statistiques, ça vient du rapport Salois, également, qui faisait état de la même chose en 2014.

M. Ciccone : O.K., merci. Dans votre mémoire, également, vous dites : «...les permis délivrés pour les centres de procréation assistée par le ministre de la Santé et des Services sociaux devraient tenir compte des besoins en se basant sur les données démographiques et la couverture actuelle des services.»

Quel est l'état justement de la situation présentement? Quelles sont les disparités entre les régions? Parce que je reviens toujours aux régions, parce que je sais que c'est peut-être impossible de penser comme ça, là, mais j'aimerais tellement ça que les personnes des régions puissent avoir le même service que ceux qui sont proches des grands centres, d'éviter le voyagement. Alors, quel est l'état de la situation présentement, là, les grands centres vis-à-vis les régions?

M. Tremblay (Dominique) : Oui, je vais répondre à la question. Actuellement, les groupes... Les pôles... Effectivement, je comprends que vous aimeriez beaucoup qu'on puisse offrir le service intégral partout, mais, comme j'ai déjà répondu, c'est impossible. Il faut quand même centraliser les choses qui sont vraiment techniques, et la meilleure façon d'offrir... c'est de garder des pôles importants, dans les grandes métropoles, de fertilisation in vitro, mais d'accentuer le développement des cliniques, là, qui pourront débuter pour les régions, les sites de fertilisation in vitro, en faisant un partenariat avec les centres de niveau 3 qui vont l'effectuer. Une des choses pour lesquelles... Et c'est là-dessus que je pense qu'il faut qu'on continue à travailler, pour le développement, qu'il y en ait partout.

Un des problèmes du premier programme actuellement, c'est que le programme était fait pour que les actes... était fait... On prévoyait que tout était fait au même endroit, ce qui veut dire que, lorsqu'on voulait le commencer en région, il n'y a pas rien qui faisait qu'on pouvait partager le tout. C'est important et ça fait partie de nos recommandations qu'on puisse, justement, pour les régions, pour les médecins en région, pour les centres en région, avoir un système où on va partager les frais et que les régions reçoivent leur juste part des revenus et des frais qui sont prévus dans le programme. Et c'est une façon qu'on va encourager le développement de cliniques 2B, entre autres, en région, pour assurer une couverture partout.

M. Ciccone : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal)  : Alors, la députée de Maurice-Richard va prendre le relais.

Mme Montpetit : Oui, je vous remercie. Je prends le relais, M. le Président. Bonsoir, Dre Marcoux. Bonsoir, Dr Tremblay. Bien contente de vous avoir avec nous ce soir. Je sais qu'on n'a pas beaucoup de temps.

Un des éléments... vous portez à notre attention dans votre mémoire, c'est le souhait, dans le fond, que le projet de loi qui est à l'étude soit élargi pour certaines exceptions. Puis vous faites référence à certains éléments, dont, notamment, les femmes enceintes ou ayant été... pardon, les femmes atteintes ou ayant été atteintes d'un cancer. Vous voyez quoi comme exception exactement, comme... Puis expliquez-moi... Moi, je ne suis pas une spécialiste de ce dossier-là. C'est pour ça qu'on vous reçoit ce soir, pour en apprendre davantage, mais je trouvais que c'était une recommandation qui semblait fort intéressante.

Mme Marcoux (Violaine) : On y a fait référence un petit plus tôt. Le programme actuel prévoit que les patientes qui vont subir un traitement de chimiothérapie ou un traitement pour le cancer ont accès relativement rapidement, dans les jours qui suivent, à un cycle de FIV avec une collecte d'ovules qui sont congelés. Le programme actuel prévoit que ces patientes-là, plus tard, quand elles sont finalement en rémission, doivent payer pour le transfert de ces embryons-là. On trouve que ça serait une mesure juste et équitable que ces patientes-là soient évidemment incluses puis peut-être de considérer prolonger le remboursement des frais de congélation plus longue qu'un an, parce que, souvent, ça prend plus qu'un an pour que les patientes puissent être en rémission puis puissent finalement avoir accès... avoir la permission de faire un transfert d'embryons congelés.

Mme Montpetit : Je pense, ça fera sûrement partie des éléments dont on pourra discuter avec le ministre quand on sera rendus à l'étude détaillée. C'est bien clair. Merci.

Je veux juste savoir, M. le Président... O.K., deux minutes, ça ne me laisse pas beaucoup de temps, mais j'aurais aimé vous entendre sur la question de l'âge. Il y a plusieurs groupes qui sont venus hier, qui ont fait référence à la limitation, vous l'avez abordée un petit peu plus tard, pour... un peu plus tôt, pardon, pour le transfert d'embryons, mais je voulais savoir... De façon plus générale, au-delà de considérations... je veux dire, de restrictions financières, et tout, est-ce que vous pensez que c'est vraiment une loi qui doit faire une balise d'un âge maximal ou versus... Par exemple, est-ce que ça devrait être confié au jugement du médecin qui peut évaluer, entre autres, la réserve ovarienne ou d'autres critères, là, au-delà de l'âge, là?

• (20 h 30) •

Mme Marcoux (Violaine) : Notre association s'est positionnée clairement en faveur d'une limite d'âge, que ce soit pour la ponction ovarienne, c'est-à-dire 41 ans... Puis on a proposé l'âge de 45 ans pour le transfert parce qu'on croit que, dans le cadre d'un régime public, avec des fonds qui ne sont pas illimités, il faut mettre des balises à quelque part. Alors, on supporte cette proposition-là, mais on proposait l'amendement jusqu'à 45 ans pour les transferts d'embryons, parce qu'il faut quand même tenir compte des taux de complications maternelles qui peuvent augmenter... qui augmentent certainement dans la quarantaine.

Mme Montpetit : Puis le 45 ans auquel vous référez, justement, est-ce que c'est un chiffre qui est basé sur des données probantes? Pourquoi pas 44 ou pas 46? J'imagine, vous avez tranché sur la littérature, sur des indications médicales ou c'est un chiffre...

Mme Marcoux (Violaine) : Oui, excellente question. Les études médicales sont ainsi faites que, souvent, les patientes sont divisées par tranche d'âge. Alors, les études ont montré que le taux de complications maternelles... Au-delà de 45 ans, les spécialistes en médecine foeto-maternelle... Au-dessus de 45 ans, le taux de complications est, en fait, multiplié. Alors, c'est pour ça qu'on est arrivés avec 45 ans. Pourquoi pas 44 ans? C'est probablement un biais, de la façon dont les études ont été construites et étudiées, mais c'est pour ça qu'on est arrivés à 45 ans.

Mme Montpetit : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. La parole va maintenant appartenir à la députée de Sherbrooke.

Mme Labrie : Merci, M. le Président. Je suis assez préoccupée par ce que vous abordez dans votre mémoire, sur la répartition équitable des ressources entre le privé et le public. Moi, si je vous comprends bien, actuellement, il y aurait trop de ressources qui sont au privé. Est-ce que vous savez quelle proportion des obstétriciens-gynécologues sont au privé, en ce moment, versus au public?

Mme Marcoux (Violaine) : La proportion des obstétriciens-gynécologues au privé est très faible parce que ce n'est quand même pas une grosse proportion des 500 quelques obstétriciens-gynécologues qui font... qui sont des spécialistes en endocrinologie de la reproduction. Mais les chiffres, bon an mal an, en termes de fertilité, montraient qu'environ 70 % des patientes se dirigeaient vers des cliniques privées parce que ce sont celles qui ont le mieux développé leur offre de services, tout simplement.

Mme Labrie : Puis, quand vous parlez d'une répartition équitable, qu'est-ce qu'on devrait viser comme proportion pour que ce soit équitable si, là, en ce moment, c'est 70 % qui vont au privé?

Mme Marcoux (Violaine) : C'est une excellente question. Je ne suis pas certaine qu'on a un chiffre à vous proposer, mais on est clairement en faveur d'une meilleure offre, de favoriser l'offre du secteur public puis d'y mettre les conditions pour y parvenir.

Mme Labrie : Par exemple, il y en a qui nous ont dit qu'on devrait inverser cette proportion-là. Est-ce qu'il faut l'inverser? Est-ce que c'est moitié-moitié? Puis, aussi, quand vous dites ça, est-ce que, pour viser une équité, on devrait aussi viser que le délai d'attente soit équivalent au privé et au public?

Mme Marcoux (Violaine) : Le délai d'attente, c'est facile à répondre, oui, effectivement. La proportion exacte, je ne suis pas certaine que je suis en mesure de m'avancer sur un chiffre aujourd'hui, mais on va... On peut vous revenir avec ça, mais, à savoir si c'est 50 %, 70 %, 30 %... mais ça va dans ces chiffres‑là, certainement.

Mme Labrie : Puis qu'est-ce qu'on pourrait faire pour rééquilibrer les ressources puis ramener dans le public les spécialistes qui, en ce moment, vont offrir ces services‑là au privé?

M. Tremblay (Dominique) : Une des choses qu'on peut faire, ça va être de rendre beaucoup plus attrayant actuellement le milieu public. On a... C'est évident que les médecins qui sont en milieu public ne font pas que de la procréation médicalement assistée. Ils vont faire de la garde au niveau de l'établissement. Donc, plus on a une équipe qui est solide, plus on va être capables de garantir la couverture provinciale de l'offre en gynécologie-obstétrique.

C'est pour ça que, dans le cadre de l'entente qu'on a eue, à l'automne dernier, sur le plan de remplacement qui offrait... pour lequel l'AOGQ a offert sa collaboration pour assurer une couverture provinciale en obstétrique, un comité sur la réorganisation de l'offre en obstétrique provinciale est prévu et sur lequel... particulièrement en région, et pour lequel, pour nous, cette réorganisation‑là et la réévaluation de tout ça nous apparaît important pour continuer à l'offrir. De plus, je pense que, si on améliore les conditions de pratique, on sécurise les plateaux techniques et les plateaux humains, incluant les infirmières, le milieu public va devenir plus intéressant, et c'est la meilleure façon de garantir, de renforcir l'offre de services au public.

Le Président (M. Provençal)  : Alors, je vais maintenant céder la parole au député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau : Merci, M. le Président. Alors, fort de ces trois minutes aujourd'hui, ce qui est beaucoup de temps pour moi, je vais poser trois questions. D'abord, je vais aussi vous remercier, Dre Marcoux, Dr Tremblay, pour cette présentation fort instructive.

Et, pour votre préoccupation concernant l'accès des services en région, vous parlez de répondre aux besoins. Vous parlez d'une juste répartition des services, de mesures d'équité, d'accessibilité. Je pense que ce genre d'article là devrait être dans tous les projets de loi tous dossiers confondus. Mais, puisqu'on parle ici des services de procréation assistée, je voulais savoir comment interpréter l'affirmation à l'effet qu'il y a un nombre insuffisant de ressources à l'heure actuelle, mais aussi pour le futur. Vous parlez de façon générale chez les gynécologues et obstétriciens ou spécifiquement pour ces services, les services dont on parle aujourd'hui?

M. Tremblay (Dominique) : Bien, actuellement, je pense qu'on collabore, là, comme on a dit, à un plan de couverture provinciale, et il n'y a pas eu de bris de services depuis l'introduction du plan de remplacement. La problématique actuelle, c'est que les gens qui pratiquent la procréation médicalement assistée sont partie prenante de cette couverture-là et des plans de remplacement en région. C'est des gens aussi qui vont faire du remplacement. C'est des gens qui font de la garde en établissement. Et c'est sûr que la réintroduction d'un programme avec une augmentation du volume d'activité risque de diminuer cette offre de services là.

Donc, c'est des gens qui ne seront plus disponibles pour aller faire un remplacement en région. C'est des gens qui ne seront... qui pourraient être moins disponibles pour aller faire de la garde en établissement ou encore tentés d'aller dans le privé. Et les effectifs n'ont pas été basés sur la réintroduction d'un programme. Donc, tel que la Dre Marcoux le disait, c'est nos inquiétudes de voir une augmentation. L'arrivée du nouveau programme, on la salue, mais on ne peut pas ne pas être inquiets d'un détournement de ces activités-là au détriment des régions, et c'est pour ça qu'on réitère aussi que... Je pense que l'augmentation des postes serait bienvenue en formation.

M. Arseneau : D'accord, merci. Deuxième question, peut-être que je n'aurai pas le temps pour la troisième. Vous avez mentionné les dérives du passé. Quelles sont, en résumé, ces dérives ou ces pistes qu'il faut éviter d'emprunter?

Mme Marcoux (Violaine) : En quelques secondes, parce que c'est ce qu'il nous reste, le programme précédent... Il y avait un consensus. Le commissaire Salois l'a dit, le programme manquait probablement de balises, a été introduit un peu rapidement. Les critères de couverture n'étaient pas toujours très bien établis. C'est un peu tout ça qui a occasionné une explosion de coûts puis qui a finalement forcé le programme à fermer, bien, les coûts ont carrément explosé. Alors, c'est l'importance de mettre des balises, de bien planifier le programme...

M. Arseneau : Tellement.

Mme Marcoux (Violaine) : ...de planifier son introduction, la couverture.

M. Arseneau : Donc, il n'y a pas des questions, là, autres que financières... La question de service, qualité de service, d'éthique, et tout ça, est-ce que vous incluez ça dans des dérives ou il n'y en a pas d'identifiées à cet égard?

Le Président (M. Provençal)  : Il ne nous reste plus de temps pour avoir la réponse. Je remercie les Drs Marcoux et Tremblay pour leur contribution aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants afin qu'on puisse accueillir par visioconférence la prochaine personne. Je tiens à vous remercier et je m'excuse encore pour le délai à cause de certains petits problèmes techniques. Merci beaucoup de votre collaboration et de votre contribution.

M. Tremblay (Dominique) : Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 20 h 39)

(Reprise à 20 h 41)

Le Président (M. Provençal)  : Je souhaite maintenant la bienvenue à la Dre Patricia Monnier. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter puis à commencer votre exposé. Je vous cède la parole, madame.

Mme Patricia Monnier

(Visioconférence)

Mme Monnier (Patricia) : Merci, M. le Président. M. le ministre, Mmes et MM. les députés, tout d'abord, merci de me laisser la parole. Je me permets de me présenter brièvement. Je m'appelle Patricia Monnier. Je suis binationale, Française et Canadienne.

Après des études de médecine en France, et une spécialisation en gynécologie-obstétrique, puis une spécialisation... une surspécialisation... je ne sais pas comment on dit, une sous-spécialisation en gynécologie médicale et reproduction, en fait, en infertilité, j'ai été nommée professeure titulaire en 1998. J'ai dirigé une unité de médecine de la reproduction en France à partir de 1998 et je suis arrivée au Québec en 2006.

Immergée dans une unité de recherche en périnatalogie, qu'on a appelée URCEP à l'époque, dirigée par le Dr William Fraser, j'ai recherché le contact avec les patients qui me manquait et j'ai ainsi intégré l'équipe, la seule équipe dans le domaine public qui est en reproduction, du CUSM en 2010, cadre dans lequel je pratique toujours depuis cette date.

Mes réflexions sont guidées par un souci d'efficacité, et, probablement, elles vont soulever plus de questions qu'elles n'apportent de réponses. En effet, en tant qu'homme ou femme politique, vous avez, à mon sens, à définir la société dans laquelle nos enfants vont appeler à se développer et à grandir.

À propos des agents de stimulation de l'ovulation, le législateur a écrit : «La prescription d'agents oraux pour la stimulation ovarienne dans le cadre des traitements de base de l'infertilité est la seule activité clinique de procréation assistée au sens de l'article 2 de la loi qui peut être exercée ailleurs que dans un centre de procréation assistée.»

Il s'agit d'un traitement de première ligne de l'infertilité. Il est tellement facile de prescrire des pilules que, sans aucun monitorage... En fait, ce qu'on appelle monitorage, c'est une échographie pelvienne. Et donc gare au risque de grossesses multiples, dont chacun sait qu'elles sont plus à risque pour la santé des mamans et des bébés. Le régime prend tout... Le registre prend tout son sens, et il faut, à mon sens, à mon avis, qu'il englobe toutes les activités de procréation médicale assistée.

Dans ma pratique, j'ai vu des patientes qui prenaient de telles pilules au long cours chaque mois et pendant plusieurs mois — il faut savoir que, lorsqu'elles ont des dysovulations sévères, ces patientes sont en aménorrhée — et donc pour avoir leurs menstruations régulièrement, alors que ce n'était pas le but ultime de ces traitements, mais bien une stimulation de l'ovulation.

Donc, ma proposition est la suivante, c'est d'imposer un monitorage de l'ovulation pour toute prescription de stimulants à l'ovulation, que ce soit en dehors ou dans des centres québécois, même si cela n'est pas parfait. En effet, j'explique à mes couples... car je ne prescris jamais un comprimé de Clomid ou de létrozole sans avoir une stimulation, sans avoir une échographie.

J'explique à mes couples que ce n'est pas une simple échographie qui va éviter le risque de grossesses multiples, mais, au moins, elle aura pour but d'éviter une grossesse de haut rang, et donc trois ou plus. Il faut se rappeler que nous ne pouvons pas voir les oeufs, les ovocytes, les ovules à l'échographie pelvienne, mais uniquement le follicule dans le milieu... donc, le milieu liquidien dans lequel le gamète féminin mature est censé se développer.

Alors, pour deux grandes raisons, on a tout de même un risque d'avoir des faux jumeaux, c'est-à-dire l'implantation de deux oeufs fécondés, premièrement, pas d'échographie en trois dimensions, donc un follicule peut empêcher un autre... et, deuxièmement, un follicule qui est censé contenir un ovule mature, donc, fécondable, aux environs... est aux environs de 14 mm, donc, une précision de plus ou moins 1 mm à chaque mesure. Finalement, en stimulation de l'ovulation, on traite des images, et c'est ce qui explique l'insécurité de ça.

À propos des conditions... à taxer la PMA, le législateur a écrit : «Les services de procréation assistée requis à des fins d'insémination artificielle et de FIV sont considérés comme des services assurés pour la personne seule ou les conjoints parties au projet de procréation assistée si :

d) la personne seule ou l'un ou l'autre des conjoints n'a pas fait l'objet d'une stérilisation chirurgicale volontaire ou d'une réanastomose des trompes ou des canaux déférents, selon les cas, au sens des paragraphes...», etc.

La réflexion, c'est que j'ai bien peur que cela ait pour effet de diminuer les stérilisations volontaires des hommes, ce qui est regrettable, car l'intervention pour une stérilisation volontaire d'un homme est une intervention qui peut se dérouler sous anesthésie locale, donc, moins à risque qu'une stérilisation d'une femme, qui doit se dérouler sous anesthésie générale.

Donc, un domaine, la contraception, où les hommes peuvent prendre leur place petit à petit, sans dépendre de la volonté de leur conjointe, et on leur met ce diktat sous le nez... Donc, ma proposition, c'est de retirer la stérilisation chirurgicale volontaire des hommes comme condition de non-accès à la PMA. Toujours à propos des conditions d'accès, on en a largement parlé, c'est le fameux âge des femmes et la femme est âgée de 18 ans ou plus et de moins de 41 ans.

Alors, qu'en est-il du don d'ovules? En effet, médicalement, il est reconnu qu'un don des ovules est efficace s'il provient d'une femme plus jeune que la receveuse, et ce, jusqu'à l'âge de la ménopause physiologique, 50 ou 52 ans dans nos pays développés. Aux détracteurs de grossesses tardives, je répondrai que ces patientes font l'objet d'une surveillance attentive et doivent avoir un bilan avant conception qui est normal : fonctions rénales, dépistage du diabète, mammographie et électrocardiogramme. Et je rajouterai aussi une consultation en grossesse à risque, où on leur explique tous les risques, ce qu'on ne contrôle pas du tout en cas de conception naturelle.

Et qu'en est-il de l'âge limite des hommes? En effet, selon la littérature, l'APA, c'est-à-dire l'âge paternel avancé, est responsable d'une moindre efficacité en PMA, de majorer le risque de fausse couche spontanée, de majorer le risque d'infertilité, de majorer le risque génétique, en particulier la mutation de novo, et de majorer les troubles de développement de l'enfant à naître, une majoration, en particulier, des risques d'autisme, de schizophrénie et d'instabilité motrice, le fameux TDAH, que l'on appelle. Le problème devient quel âge limite pour l'homme.

Si on en croit la littérature, entre 35 et 40 ans, a lieu le début de la moindre efficacité de la PMA. Je n'ai pas la réponse à cette délicate question, mais les enjeux sont médicaux, comme dit plus haut, et ils sont sociétaux. Quelle société veut-on bâtir pour l'avenir? Ils sont éthiques. Le parent doit amener l'enfant jusqu'à son indépendance. Qu'en est-il de l'adolescent qui voit son père vieillissant? Ça, ça pose des problèmes. Je ne suis pas spécialisée dans l'adolescence, mais, tout de même, est-il éthique de composer une FIV avec micro-injection à une femme jeune qui est avec un mari âgé, un conjoint âgé?

• (20 h 50) •

Mais il y a aussi des enjeux culturels, en particulier une répudiation de la femme non enceinte. Il y a des exemples dans la Bible, Jacob, Mathusalem, et, plus près de nous, des stars comme Charlie Chaplin, par exemple. Nous avons débattu longtemps de cette difficulté dans l'équipe et avons conclu la chose suivante. Tout homme âgé de 50 ans ou plus doit avoir une consultation avec la psychologue de l'équipe, et elle fera particulièrement attention lorsque la somme de l'âge des deux membres du couple est de 100 ans ou plus.

Donc, proposition, revoir l'âge limite supérieur des femmes et introduire un âge supérieur limite pour les hommes, ce qui aura un triple avantage à mes yeux : un souci d'égalité pour les deux sexes, étayé par la littérature; un rajeunissement automatique des couples à traiter car, dans notre société, un homme âgé est, en général, ce n'est pas la règle... mais avec une femme âgée au sens de la reproduction; et une réflexion des couples susceptibles de nous consulter. En effet, s'il est passé dans les moeurs qu'il y a une horloge biologique pour la femme, il n'en est pas de même pour l'homme.

Et donc, à propos des inséminations artificielles, autre point que je voudrais débattre avec vous, le législateur a écrit : «Les services de procréation assistée requis à des fins d'insémination artificielle [...] sont considérés comme des services assurés — donc — sont les suivants :

a) selon l'indication médicale, un maximum de six inséminations[...];

c) [soit] un maximum de six paillettes de sperme provenant soit du conjoint, soit d'un donneur.»

Une première réflexion, c'est qu'il convient de dissocier les paillettes de sperme de conjoint, IAC, insémination avec sperme de conjoint, et de donneur, IAD. D'après l'expérience des CECOS, c'est-à-dire les centres d'étude et de conservation des oeufs et du sperme humain, en France, le facteur majeur de l'obtention d'une grossesse, c'est l'âge des femmes, encore une fois, mais la diminution de la fertilité du sperme après congélation est essentiellement liée à la diminution quantitative du nombre de spermatozoïdes mobiles. Les CECOS ont, donc, une grande expérience dans ce domaine...

Le Président (M. Provençal)  : Dre Monnier...

Mme Monnier (Patricia) : ...car ils existent depuis plus de 50 ans et représentent l'infrastructure bioclinique. Excusez-moi...

Le Président (M. Provençal)  : Le temps pour votre exposé est écoulé. Cependant, les gens ont déjà votre mémoire.

Mme Monnier (Patricia) : Oui, c'est ça.

Le Président (M. Provençal)  : Alors, ils vont pouvoir bien vous questionner. Alors, je cède la parole au docteur... pas au docteur, excuse-moi, le temps est en train de faire son oeuvre. Je n'ai pas fait de grand... beaucoup d'erreurs. M. le ministre.

M. Carmant : Voyons donc! Bonjour, Dre Monnier. Merci pour ce...

Mme Monnier (Patricia) : Bonjour, M. le ministre.

M. Carmant : Vous allez bien?

Mme Monnier (Patricia) : C'est...

M. Carmant : Oui, enchanté. Merci pour votre mémoire très personnel. J'ai quelques questions pour vous.

La première qui me saute aux yeux, c'est votre commentaire sur la vasectomie. Comme vous savez, pour nous, c'est important de ramener la procréation assistée dans le réseau public, mais un des problèmes qu'on avait vécus lors du premier cycle public, ça avait été justement une certaine forme d'exagération des gens qui se sont... qui n'ont pas bénéficié du programme, incluant beaucoup de couples reconstitués ou d'individus qui avaient décidé de faire une vasectomie et qui ont décidé d'aller pour la procréation assistée. Donc, je comprends l'impact de la vasectomie, là, sur un homme et sur une famille, mais ne pensez-vous pas que ça risque justement d'avoir un effet contraire à ce qu'on souhaite?

Mme Monnier (Patricia) : Eh bien, moi, je dirais que la vasectomie... Je suis étonnée, venant de France, du nombre d'hommes qui ont accès à la vasectomie. Donc, ça, c'est une différence culturelle avec la France. Et je trouve que c'est bien que les hommes prennent en main leur contraception, enfin, en main, entre guillemets. Et donc c'est cet aspect que je voudrais débattre. Alors, je comprends que, sur le plan de la procréation, ça peut être un effet pervers, mais, d'un autre côté, une grossesse non désirée, ce n'est pas non plus souhaitable. Et donc nous, on voit plutôt des grossesses désirables, désirées, etc., mais une grossesse non désirée, ça peut donner des dégâts aussi.

Donc, je voudrais qu'on réfléchisse à ces deux aspects de la question. Comme je vous ai dit dans l'information... je suis en gynécologie-obstétrique et je suis aussi en procréation médicale assistée. Donc, j'ai les deux casquettes et j'ai vu des grossesses non désirées. Croyez-moi, c'est horrible, et, donc, pour les dégâts pour les femmes, pour les couples. Et donc je trouve que c'est bien que les hommes prennent ça au sérieux et se font faire une vasectomie.

M. Carmant : D'accord. Donc, c'est vraiment votre inquiétude de voir la diminution du taux de vasectomie qui mène à ce commentaire‑là?

Mme Monnier (Patricia) : Absolument, oui, oui.

M. Carmant : D'accord, O.K. Ça, ça pourrait être débattu, mais je comprends maintenant le point. L'autre point qui... Je ne sais pas si vous le savez, mais, dans mon ancienne vie, j'étais neuropédiatre. Donc, l'âge limite chez les hommes et puis les pathologies que vous soulevez, c'est quand même intéressant, mais, je veux dire, c'est quand même un concept qui est difficile à implémenter, ne diriez-vous pas, dans une loi sur la procréation médicalement assistée, de mettre un âge limite pour les hommes?

Mme Monnier (Patricia) : Alors, pour les hommes, il faut savoir qu'en France il y a eu une enquête... Ce n'est pas dans la loi. Il y a une enquête qui dit que les répondants, en tout cas, ont mis la barre assez haute. Ils ont mis la barre à 60 ans, sachant que l'espérance de vie d'un homme est de 62 ans et demi à peu près. Donc, c'est embêtant pour l'enfant. Donc, l'enfant il a besoin de ses deux parents pour se développer et... des parents.

Écoutez, dans ma clientèle, j'ai deux couples en tête dont les hommes ont plus de 60 ans, et ils sont avec des femmes... l'un avec une femme jeune, qui a 30 ans, et l'autre avec une femme plus âgée, qui a 42 ans. Donc, lui, il est grand-père. Elle, elle est grand-père par mariage, si vous voulez. Elle n'est pas grand-père... Elle n'est pas grand-mère biologique, mais lui, il est grand-père biologique et il veut un enfant, mais quelle va être la place de cet enfant dans cette famille, je me demande. Je ne sais pas.

Et donc, comme je vous ai dit, je n'ai pas la réponse à cette question, mais je crois que vous avez, en tant que ministre, en tant que député de cette commission, à décider quelle société vous voulez pour l'avenir. Et donc est-ce que vous voulez une société de pères vieillissants ou pas? Je peux vous assurer que, dans la littérature, il y a... Bien oui, c'est comme ça, je peux vous assurer que, dans la littérature, il y a beaucoup de références. Et donc c'est quelque chose qui me tient à coeur, effectivement, mais il y a beaucoup de références, et, l'âge des pères, il pose un problème.

Et donc ça rétablirait... parce que, vous savez, les femmes, elles ont... elles portent sur elles la lourdeur du fait de ne pas avoir d'enfant dans une famille, mais les hommes aussi. Vous savez, une PMA, ça se fait à deux. Même si on est en procréation assistée, il faut être deux. Il faut du sperme et il faut des ovaires. Et donc, si on a l'un ou l'autre qui est vieux, bien, ça marche moins bien.

M. Carmant : Oui, on est bien au... D'ailleurs, c'est pour ça qu'on parle d'un projet de vie dans le mémoire. Juste pour profiter... parce qu'on a parlé beaucoup des différents âges dans différentes législations. Vous, votre expérience en France, c'était quoi, l'âge maternel qui était...

Mme Monnier (Patricia) : Alors, en France, il y avait d'abord la loi de bioéthique, qui a évolué depuis que je suis partie puisque, maintenant, elle s'adresse à la PMA pour tous, etc. Donc, ça devient un peu comme au Québec. Moi, quand je suis... je pratiquais en France, c'étaient des couples hétérosexuels. Donc, il fallait être un couple, et l'âge limite, c'était 43 ans. Nous, il n'y avait pas un remboursement par la sécurité sociale, l'équivalent de la RAMQ, si vous voulez, mais ce n'était pas interdit. Mais, jusqu'à 43 ans, il y avait une prise en charge, quatre ans, quatre FIV. Donc, c'était très généreux comme programme. C'est très généreux comme programme, quatre fécondations in vitro jusqu'à 43 ans, jusqu'au 43e anniversaire, et, à partir de 43 ans, ce n'est plus pris en charge.

M. Carmant : Et j'ai vu aussi que vous aviez un intérêt également, puis je vois que vous ne l'avez pas abordé dans votre mémoire... mais, sur le rôle de l'obésité et la fécondité, est-ce que vous pouvez nous dire qu'est-ce que vous en pensez par rapport à la procréation médicale assistée?

• (21 heures) •

Mme Monnier (Patricia) : Alors, c'est vrai que l'obésité et que la fécondité... Les femmes obèses, ça a été décrit, elles ont des enfants, mais l'obésité, ça diminue... ça pousse à augmenter les doses, donc, et ça diminue la fertilité naturelle. Et donc c'est pourquoi il y a... Dans notre équipe, nous avons la possibilité d'offrir des consultations de nutrition gratuites. Alors, attention, il y a le surpoids dans le cas de la dystrophie ovarienne, ça, c'est complètement à part, et le surpoids en général. Donc, les femmes obèses en général et les femmes obèses qui ont une dysfonction ovarienne, c'est complètement différent, le mécanisme. Mais n'empêche que, dans les deux cas, si elles perdent aussi peu que 10 kilos, je parle des femmes obèses qui ont un indice de masse corporelle au-delà de 30, donc, qui sont vraiment très obèses, eh bien, elles se remettent à ovuler dans 90 % des cas. Quel est le traitement médical qui a 90 % d'efficacité? Moi, je ne le connais pas.

Donc, c'est ce que j'explique à mes patientes. Évidemment, il faut prendre le temps. Je prends tout le temps qu'il faut. La première consultation, c'est la consultation où on voit qu'est-ce qui, dans le mode de vie, ne va pas et qu'est-ce qui pourrait être une barrière à la fécondité. Et donc le poids fait systématiquement partie de mon interrogatoire.

M. Carmant : Merci. Là, M. le Président, je passerais la parole à la députée de Soulanges, s'il vous plaît.

Mme Picard : Bonjour, docteure. Vous mentionnez une réflexion... Dans votre mémoire, à la dernière page, vous dites : «Quant est-il de la FIV dite en cycle naturel avec ponction d'un ovule mais non-obtention d'embryons?» Pourriez-vous éclaircir votre réflexion, s'il vous plaît?

Mme Monnier (Patricia) : Alors, la FIV en cycle naturel, c'est quoi déjà? Eh bien, c'est soutenir... On va laisser le corps travailler normalement et on va soutenir un follicule qui domine. Qu'est-ce qui se passe dans la nature? Eh bien, il y a un follicule dominant et il dit aux autres : Tassez-vous! C'est l'atrésie folliculaire, hein? Et donc on va soutenir le follicule dominant par un petit peu de stimulation, très peu, hein, et puis on va empêcher, si possible, qu'il y ait une ovulation spontanée. Mais le problème, c'est que, par cycle débuté de fécondation in vitro en cycle naturel, il y a 50 % d'embryons seulement. Pourquoi? Pour trois raisons.

La première, c'est qu'on arrive à la ponction, et malheureusement la dame a ovulé spontanément ou, alors, il y a un... Bien sûr, on fait toujours une échographie avant de lancer toute la démarche, avant de lui faire une anesthésie locale, etc., et même une analgésie, on va dire, par voie générale. Et puis la deuxième raison pour laquelle on n'a pas d'embryon, c'est qu'on va... on a un follicule, on va l'aspirer, il n'y a pas d'oeuf dedans, ah! bon, pas d'oeuf, pas d'embryon. Et la troisième raison, c'est qu'il y a un oeuf, mais que, malgré une micro-injection, s'il a décidé de ne pas se laisser féconder, il n'y aura pas d'embryon non plus.

Donc, par... 50 % des FIV en cycle naturel ont un embryon, et, paradoxalement, cela donne d'excellents résultats aux patientes qui sont des mauvaises répondeuses, donc, et aux patientes qui sont âgées. Pourquoi? Parce que tout se passe comme s'il y avait un blocage du corps et qu'on les stimule fort, ces patientes, pour rien. Donc, le problème, c'est qu'il y a une question de coût. Alors, j'en parle toujours à mes patientes quand je pense que c'est une bonne indication, mais elles se dirigent vers le cycle stimulé en disant : On ne sait jamais, peut-être j'aurai plus d'un ovule et peut-être je vais pouvoir avoir un embryon. Et donc voilà.

Mme Picard : Que pensez-vous de limiter à six le nombre d'inséminations artificielles assurées par le régime public?

Mme Monnier (Patricia) : C'est ça, donc, les six inséminations, il faudrait les dissocier des paillettes, parce que, comme je dis dans mon mémoire, il y a des paillettes de sperme pour les hommes qui ne peuvent pas être là. Bon, congeler le sperme, ça, ça peut être discutable, mais c'est ainsi. Eh bien, quelquefois, dépendamment du sperme, eh bien, comment il va se décongeler, on va décongeler plus d'une paillette. Et donc deux paillettes sont peut-être nécessaires. J'ai en tête un couple à qui c'est arrivé récemment, deux paillettes sont nécessaires par insémination.

Donc, dissocier les paillettes des cycles d'insémination, ça me paraît important. Et puis les IAC, inséminations avec sperme de conjoint, les IAD, ça, c'est mon expérience française qui dit que, eh bien, il y a beaucoup plus d'inséminations avec sperme de donneur qui voient le projet parental... jusqu'à huit cycles d'insémination avec sperme de donneur, alors que six, je suis complètement d'accord, je ne vais pas moi-même au-delà de six quand il y a sperme de conjoint.

Mme Picard : ...encore du temps?

Le Président (M. Provençal)  : Il vous reste trois minutes.

Mme Picard : On a reçu un groupe qui nous disait qu'il y avait beaucoup de préjugés, que, souvent, les gens pensent, dans la population, que c'est les femmes qui sont infertiles. Est-ce que vous pensez... En fait, comment on pourrait mieux sensibiliser la population au fait que ce n'est pas que les femmes qui sont infertiles, et qu'il y a aussi les hommes qui sont infertiles, et puis défaire un peu ce tabou-là? Avez-vous des idées?

Mme Monnier (Patricia) : Oui, bien, justement, en mettant un âge limite supérieur des hommes... Vous avez commencé déjà. Bien, pourquoi est-ce qu'ils ont mis un âge supérieur, etc.? À nous d'expliquer. Et moi, je pense que je suis complètement d'accord avec vous, c'est qu'il n'y a pas que les femmes qui sont infertiles. Il y a aussi des hommes infertiles. Mais le problème, c'est un problème culturel. Comme j'ai dit, il y a répudiation.

Écoutez, j'avais, dans ma clientèle, une patiente jeune avec un homme, bon, maghrébin, qui était âgé. Eh bien, la femme a dit : Si vous ne faites pas la ...(, je vais être répudiée si je ne suis pas enceinte. Évidemment, ça donne une dimension supérieure, supplémentaire, disons, à la PMA et à l'obligation de réussite. Mais donc, voilà, ça, c'est mon expérience personnelle. La répudiation des femmes, il faut en parler. Bien sûr que, dans certaines cultures, eh bien, c'est important. Les femmes, elles portent le poids toutes seules de la fertilité du couple, malheureusement, mais, bon, ça passera par un enseignement, par... oui, par un enseignement très précoce des couples.

Le Président (M. Provençal)  : Une minute.

Mme Picard : Ah bon! Je vais poser ma dernière question. Que pensez-vous d'offrir peut-être une banque de gamètes québécoise?

Mme Monnier (Patricia) : Je n'ai pas entendu la question.

Mme Picard : Est-ce que vous pensez que le Québec devrait avoir sa propre banque de gamètes?

Mme Monnier (Patricia) : Ah! Eh bien, si ça diminue les coûts, oui, parce qu'un coût de gamètes masculins, ça coûte cher, hein? Ça coûte à peu près 800 $ avec les frais de transport. Donc, c'est quand même onéreux, et donc il y a des patientes qui défraient ces coûts-là. Et, alors, bon, je ne sais pas combien c'est, le coût de transport pour trois paillettes, mais le problème, c'est que c'est, si elles sont enceintes à la première, bien, les deux autres sont perdues pour la suite ou alors elles essaient d'avoir une deuxième grossesse. En parlant de ça, je n'ai pas eu le temps d'en parler, mais c'est dans mon mémoire, n'oublions pas qu'une grossesse, c'est neuf mois, et donc trois mois d'allaitement, parce qu'il parlait de... Je comprends, le législateur ne voudrait pas qu'il y ait des cuves avec des embryons congelés, mais je rajouterais...

Le Président (M. Provençal)  : Dre Monnier?

Mme Monnier (Patricia) : ...en cas de grossesse, à ce moment-là, on pourra préserver les embryons plus longtemps parce que c'est important.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Alors, je vais céder maintenant la parole à la députée de Maurice-Richard.

Mme Montpetit : Je vous remercie, M. le Président. Bonsoir, Dre Monnier. Merci d'être avec nous à cette heure qui commence à être tardive. C'est encore plus apprécié de vous rendre disponible.

Quelques questions concernant... Puis c'est très louable de votre part de soulever... Comme vous le dites, vous soulevez des questionnements, là. Je pense que ce sera notre rôle aussi d'y répondre quand on tombera dans l'étude détaillée du projet de loi. Vous faites référence à la question de l'âge sur deux éléments, puis je voulais juste être certaine de bien comprendre, parce que vous dites revoir l'âge supérieur limite des femmes. Vous souhaitez qu'il soit revu à la hausse ou à la baisse? Ce n'était pas clair pour moi.

• (21 h 10) •

Mme Monnier (Patricia) : À la hausse.

Mme Montpetit : À la hausse? D'accord.

M. Monette (Pascal) : À la hausse, oui, parce qu'à cause du don d'ovules. Si vous barrez les femmes à 41 ans, et elles ont, par exemple, une défaillance de l'ovaire, elles ont besoin d'un don d'ovules, parce qu'il y a des femmes jeunes qui ont besoin d'un don d'ovules et elles n'ont pas d'ovules. Il faut bien qu'elles aillent chercher là où elles peuvent. Alors, il y a deux solutions au Québec : soit elles font affaire avec une banque qui est une banque très onéreuse soit elles font affaire avec quelqu'un de la famille, soit amical soit familial, qui peut donner... une femme jeune, bien sûr, qui a plus de 18 ans, qui pourra donner les ovules pour elles, bon.

Et donc je voudrais que vous les revoyiez à la hausse et, en même temps, que vous mettiez un âge limite pour les hommes. Ça me tient à coeur parce que... Comme je l'expliquais avec votre collègue précédemment, c'est que, la femme, elle porte sur ses épaules trop, trop la fertilité du couple. Et donc le fait de mettre un âge limite pour les hommes, étayé par une littérature... Encore une fois, ce n'est pas moi qui le dis toute seule, et il y a beaucoup de littérature dans le même sens. Il suffit, d'ailleurs, de rentrer, sur Internet, «âge paternel avancé» et «conceptus», par exemple, «les qualités du conceptus», et vous allez voir toute une référence. Et donc ça aurait vraiment un rôle thérapeutique et un rôle, comment dirais-je, instructif aussi des patients. Mais pourquoi est-ce qu'ils ont mis un âge limite pour les hommes? Bien, à nous d'expliquer.

Mme Montpetit : Bien, c'est parfait, ça clarifie, parce que j'étais... J'avais bien vu que vous disiez mettre un âge limite pour les deux sexes, mais je voulais juste être certaine de bien comprendre la révision que vous demandiez. Puis je voyais que vous étiez intervenue dans certains débats qu'il y a eu sur la fertilité tardive, justement, qu'on est dans une société où la fertilité est un peu plus tardive qu'il y a 10 ans, ou qu'il y a 20 ans, ou encore plus, qu'il y a 50 ans. Toujours sur la question de l'âge, puis là j'imagine que vous avez... vous voyez ça au quotidien aussi, mais est-ce que vous auriez une indication, que ce soit par votre expérience professionnelle ou que ce soit sur des données probantes, sur des expériences à l'international... Cet âge-là, la limite, vous la fixeriez à quel âge?

Mme Monnier (Patricia) : Alors, ça a été beaucoup débattu avec des groupes avant moi. Donc, 45... Bon, par exemple, j'ai une patiente, en ce moment, enceinte à 46 ans, et donc... mais elle a fait un diagnostic préimplantatoire. Elle a un embryon qui est bien balancé sur le plan des chromosomes, etc. Donc, on espère qu'elle va aller au... Mais, vous savez, 60 % des fausses couches sont liées à un problème génétique et 40 % sont liées à autre chose, et, dans 80 % des cas, on n'a pas de raisons des fausses couches à répétition. Alors, on dit : C'est l'âge, parce qu'on ne sait pas.

Et donc à quel âge, bien, ça a été très, très bien défini plus antérieurement. Il y a des femmes à 42 ans qui vont avoir des problèmes et des femmes à 45 ans qui vont être en parfaite santé, qui ne vont pas avoir de problème. Donc, je pense qu'il faudrait laisser la justification médicale, mais la justifier dans le dossier, bien sûr, pourquoi est-ce qu'on accède au désir de la patiente. Vous savez, il y a des patientes, elles n'entendent pas ce qu'on dit. Elles veulent faire avec leurs propres ovules, parce que ça fait partie du phénomène de deuil de la fertilité, avant de passer au don d'ovules.

Et, nous, dans notre équipe, nous avons un comité clinique qui se réunit pour les patientes qui ont 43 ans et plus. Et donc on discute systématiquement des dossiers des femmes qui ont 43 ans et plus pour savoir si c'est logique de les lancer dans la fécondation in vitro, et la conclusion est toujours la suivante : couple informé que le don d'ovules donnera le meilleur résultat, les patientes informées du peu de chances de grossesse naturelle, de grossesse qui va aboutir à une naissance vivante. Mais, malgré cela, eh bien, il y a beaucoup de patientes qui vont... qui veulent se prouver quelque chose et qui veulent aller au-delà de la démarche. Et donc, bon, ça, c'est discutable, mais c'est ainsi. C'est la vraie vie. Elles n'entendent pas ce qu'on dit. Et donc elles vont faire tous les bilans qu'on va leur demander, ça, il n'y a pas de problème, mais, dans leur tête, elles ont besoin de faire une grossesse avec leurs propres ovules.

Mme Montpetit : Par rapport au comité que vous mentionnez, je serais curieuse de voir... sur les critères, justement, que vous utilisez pour faire ce type d'évaluation.

Mme Monnier (Patricia) : Eh bien, on se base sur la réserve ovarienne et on se base sur le sperme.

Mme Montpetit : Parfait. J'aurais une dernière question, qui est assez large, vous allez me dire, mais, comme vous êtes notre, comment on dit ça, cerise sur le... Vous êtes notre dernière ce soir. On termine les consultations avec vous. Puis je trouvais que vous aviez... Vous avez fait référence, dans votre allocution de départ puis dans les réponses que vous avez données aussi, aux nombreux couples que vous avez accompagnés au cours de votre carrière professionnelle, puis je trouvais que c'était l'occasion... On n'a pas eu l'occasion de poser cette question-là à des professionnels encore, mais le genre d'épreuves, de difficultés qu'un couple, justement, peut rencontrer sur son parcours, un parcours de la PMA ou de la FIV, je suis certaine que vous avez beaucoup d'indications à nous donner là-dessus qui pourraient nous aider dans nos réflexions lorsqu'on en sera à l'étude détaillée aussi.

Mme Monnier (Patricia) : C'est-à-dire que vous voulez des histoires de couples. C'est ça?

Mme Montpetit : Pas nécessairement. Sans tomber dans le... Je ne veux pas tomber dans la confidentialité, évidemment, que vous avez comme médecin, mais, ce que je veux dire, sur le type de parcours, si on veut, ou le type d'épreuves qui peuvent être rencontrées... Vous faisiez référence, par exemple, aux ovules vides. Je comprends qu'il doit y avoir quand même certaines... je veux dire, «catégories», je ne suis pas certaine que c'est le bon mot, parce qu'il y a aussi des histoires très personnelles à travers ça, mais le type de difficultés qui peuvent être rencontrées, dans le fond, dans un couple, à travers ce parcours-là.

Mme Monnier (Patricia) : Eh bien, il y a... On a beaucoup discuté de la dépression de ces couples, et nos traitements entraînent du stress. Et donc le stress, c'est mauvais pour la fertilité. Et donc il y a une espèce de cercle vicieux qui s'installe dans le stress qui est généré par l'inefficacité des traitements. Et donc plus ces couples sont stressés, moins ça va marcher. Donc, c'est un cercle vicieux négatif, d'où l'intérêt d'avoir une consultation psychologique, hein? Donc, je signale toujours que les couples... La psychologue est à leur disposition. Je ne sais pas combien elle en voit. Il faudrait lui demander à elle, parce que moi, je n'ai que la vision de mes couples, mais c'est sûr qu'il y a une consommation de psychologues importante, hein? Donc, ça, c'est un exemple. L'autre exemple que j'ai donné, c'est la répudiation des femmes qui ne sont pas enceintes dans certains couples. Ça, c'est une réalité. Et donc est-ce que c'est éthique? Je ne sais pas. Je ne sais pas, mais c'est une réalité.

Qu'est-ce qu'il y a comme parcours difficiles? Par exemple, je suis en train de réfléchir, parcours difficiles... Bien, par exemple, les femmes qui ont un don d'ovules et qui n'ont pas de grossesse, elles ont investi énormément dans leur grossesse, mais... dans leur traitement, je veux dire, et elles n'ont pas de grossesse au bout du compte, et elles se culpabilisent énormément, alors que, ma foi, c'est une technique, hein? Et donc, comme toutes les techniques... À cause de quoi? Elles veulent vraiment savoir. Moi, je n'ai pas la réponse à tout, hein?

Et donc je ne sais pas pourquoi ça n'a pas marché, mais ça n'a pas marché. Il y a des femmes seules qui ont... qui veulent tout maîtriser. Ça, c'est très difficile. Elles veulent tout maîtriser du début à la fin, et je pense à une en particulier. Elles veulent tout maîtriser. C'est-à-dire qu'elles veulent comprendre pourquoi ça ne marche pas dans leur affaire. Elles ont 42 ans et elles veulent savoir pourquoi ça ne marche pas.

Le Président (M. Provençal)  : Dre Monnier?

Mme Monnier (Patricia) : Qu'est-ce que vous voulez que je réponde à ça? Bien, je leur dis... en raison de leur âge, et puis voilà.

• (21 h 20) •

Le Président (M. Provençal)  : Dre Monnier, je vous remercie beaucoup. Je m'excuse, je dois vous interrompre. La partie échange avec l'opposition officielle est terminée. Je vais maintenant céder la parole à la députée de Sherbrooke pour la suite.

Mme Labrie : Merci, M. le Président. Je trouve ça intéressant, la réflexion que vous nous amenez sur l'impact potentiel, là, de la diminution des vasectomies chez les hommes. C'est vrai que c'est une rare occasion pour les hommes de participer à la contraception au sein de leur couple, puis je trouve que c'est précieux aussi qu'ils puissent faire leur part, là, pour gérer la contraception. Donc, c'est un effet collatéral qu'on devrait prévenir, je pense. Est-ce que vous savez... Vous, dans votre pratique, est-ce qu'il y a une proportion importante de couples qui viennent vous voir dont l'homme a subi une vasectomie? Est-ce que c'est courant?

Mme Monnier (Patricia) : Eh bien, oui, c'est courant. Donc, je ne veux pas vous donner comme ça de chiffres, mais, oui, c'est courant, c'est fréquent. Et, pour moi, qui suis Européenne, je trouve ça bien, parce qu'il y a une différence culturelle entre l'Europe et l'Amérique du Nord. Ça, c'est sûr, il y a plus d'hommes qui font des vasectomies en Amérique du Nord qu'en Europe. Donc, moi, je trouve ça précieux.

Mme Labrie : Puis, quand ils viennent pour, finalement, avoir des traitements de fertilité, est-ce que c'est parce qu'ils ont une nouvelle conjointe ou c'est avec la même conjointe?

Mme Monnier (Patricia) : Oui, c'est vrai, c'est parce que ce sont des couples recomposés. Ils ont une nouvelle conjointe, donc, et puis la reperméabilisation souvent n'a pas marché. Alors, ça dépasse mon expertise. Il faudrait demander à un urologue quels sont les critères. Pourquoi est-ce qu'une reperméabilisation marche ou pas? Je pense qu'il y a surtout un délai, un temps qui est important par rapport à la vasovasectomie. Donc, la vasovasostomie, c'est-à-dire la reperméabilisation, va marcher plus ou moins. Et donc, quelquefois, elle marche parfaitement, mais ces couples-là, par définition, on ne les voit pas. On ne voit que les couples avec problèmes, hein?

Mme Labrie : Est-ce que ça pourrait être une option, par exemple, de permettre l'accès aux traitements, mais seulement si ces démarches-là ont été faites et si l'homme est avec une nouvelle partenaire pour éviter qu'il y ait des abus, par exemple?

Mme Monnier (Patricia) : Ça pourrait, oui, ça pourrait.

Mme Labrie : Parfait. Je vous remercie.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. Nous allons conclure ces échanges avec le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau : Merci, M. le Président. Pre Monnier, c'est très intéressant, la réflexion plutôt philosophique ou holistique que vous amenez sur certains éléments auxquels on n'aurait peut-être pas pensé sans votre participation. La question de l'accès aux hommes vasectomisés est intéressante, d'autant plus que les hommes, à ce que je sache, peuvent envisager, là, le renversement, là, de la vasectomie, là, la vasovasostomie, et avoir le remboursement de la RAMQ pour ce faire, si je comprends bien.

Mme Monnier (Patricia) : Tout à fait.

M. Arseneau : Donc, on les prive d'aller vers la fécondation assistée, mais on leur dit : Retournez sous le bistouri, et, si ça fonctionne, bien, vous pourrez avoir votre projet familial dans une famille recomposée. Il y a quelque chose là, sur le plan philosophique, qui est assez particulier.

Mme Monnier (Patricia) : Oui, c'est vrai. Non, mais d'autant plus que la vasovasostomie, je pense, se déroule sous anesthésie générale et pas sous anesthésie locale, comme la stérilisation volontaire. Et donc, tout à fait, il faut envisager toutes les solutions, mais je trouve que barrer l'accès à la PMA parce qu'on a eu une stérilisation volontaire, c'est un petit peu un raccourci qui m'embête aussi. Donc, bon, je n'ai pas la réponse à la question posée, bien sûr, mais je suggère après que vous réfléchissiez à quel type de société vous voulez.

M. Arseneau : Et l'autre élément important que vous amenez, si on a deux... quelques secondes, sur l'âge limite supérieur pour les hommes, je lis que vous dites essentiellement que ce serait pas mal la même chose chez les hommes que chez les femmes... ou légèrement plus âgés, là. J'ai lu très rapidement. Vous parlez de la somme des âges atteignant un peu plus de 100 ans. Donc, on parle d'une cinquantaine d'années, selon vous?

Mme Monnier (Patricia) : C'est ça. Vous savez, 100 ans, c'est complètement arbitraire, hein, mais, ma collègue psychologue, elle a interrogé, parce que ça nous interpelle quand même, d'autres équipes... et qui se fiaient à ça. C'est un marqueur comme un autre.

M. Arseneau : Mais vous pensez surtout aux enfants et non pas à l'équité hommes-femmes ou c'est les deux éléments que vous retenez?

Mme Monnier (Patricia) : C'est les deux éléments que je retiens, mais c'est surtout la santé des enfants nés. Ça, c'est important pour moi, parce que, bien sûr, j'ai, dans ma pratique, des hommes qui ont plus de 60 ans, qui ont des enfants autistes, etc.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup, Dre Monnier, pour votre contribution aux travaux de la commission et surtout pour avoir accepté d'y contribuer à cette heure-ci de notre journée.

Mémoires déposés

Avant de conclure les auditions, je procède au dépôt des mémoires des organismes qui n'ont pas été entendus lors des auditions publiques. Je vous remercie pour votre contribution à nos travaux.

La commission ajourne ses travaux sine die. Merci beaucoup de votre contribution. Je vous souhaite une bonne fin de soirée. Merci à toutes les personnes de la commission qui ont participé. Bonne fin de soirée.

(Fin de la séance à 21 h 26)

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