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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le vendredi 27 novembre 2020 - Vol. 45 N° 68

Interpellation de la cheffe du deuxième groupe d’opposition au ministre de la Santé et des Services sociaux sur le sujet suivant : Les lacunes dans l'offre de service de soins de santé et services sociaux pour les peuples autochtones au Québec


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Table des matières

Exposé du sujet

Mme Manon Massé

Réponse du ministre

M. Ian Lafrenière

Argumentation

Conclusions

M. Ian Lafrenière

Mme Manon Massé

Autres intervenants

M. Luc Provençal, président

Mme Nancy Guillemette

M. Gregory Kelley

Mme Suzanne Blais

M. Louis Lemieux

Journal des débats

(Neuf heures cinquante-neuf minutes)

Le Président (M. Provençal)  : À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. La commission est réunie afin de procéder à l'interpellation de la cheffe du deuxième groupe d'opposition au ministre de la Santé et des Services sociaux sur le sujet suivant : Les lacunes dans l'offre de services de soins de santé et services sociaux pour les peuples autochtones du Québec.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Picard (Soulanges) est remplacée par M. Lemieux (Saint-Jean); Mme Montpetit (Maurice-Richard), par M. Kelley (Jacques-Cartier); M. Zanetti (Jean-Lesage), par Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques); et M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), par M. Ouellet (René-Lévesque).

• (10 heures) •

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. Je comprends qu'il y a une entente à l'effet que l'opposition officielle interviendra lors de la deuxième, quatrième et sixième série d'interventions, alors que le troisième groupe d'opposition interviendra lors de la cinquième série d'interventions. Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition, vous avez la parole pour 10 minutes. À vous, madame.

Exposé du sujet

Mme Manon Massé

Mme Massé : Merci, M. le Président. Bonjour, tout le monde. Merci d'être là. En fait, je veux commencer par nous rappeler qu'est-ce qui nous rassemble ici aujourd'hui. Le 8 octobre 2019, le gouvernement a fait une promesse aux Premières Nations et aux Inuits qui partagent le territoire. Il s'est engagé à leur donner accès, sans aucune discrimination, à tous les services sociaux et de santé. Il s'est engagé à ce que les autochtones puissent jouir, en toute égalité, du meilleur état possible de santé physique et mentale. Il s'est engagé à prendre les mesures nécessaires pour assurer la pleine réalisation de ce droit. C'est ça qui est écrit dans la déclaration des Nations unies pour le droit des peuples autochtones, dont nous avons adopté les principes ici même en octobre dernier.

On va se le dire, ça ne devrait pas prendre l'ONU pour nous dire ça. Tout le monde devrait avoir le même accès aux soins de santé, tout le monde devrait se sentir en sécurité dans nos hôpitaux et nos cliniques. Le drapeau qui flotte au-dessus de chacune d'elles, qu'est-ce qu'il veut dire? Bien, il veut dire : Ici, vous allez être traités avec dignité et avec respect. C'est nos valeurs de base au Québec. Mais le décès de Joyce Echaquan nous a ramenés sur terre. Les autochtones n'ont pas le même accès aux soins de santé que les autres. Les autochtones vivent du racisme dans le réseau de la santé, du racisme qui est systémique, parce qu'il est toléré par le système.

Le symbole de notre échec, c'est Joyce, mais pas juste Joyce. C'est les gens de Natashquan, qui ne peuvent pas veiller leurs proches en fin de vie selon les rites qu'ils ont toujours pratiqués, avec la sauge, avec les tambours, avec la communauté présente. C'est la communauté de Maliotenam, qui perd ses enfants quand la DPJ intervient, sans respect des droits et de la culture innue. C'est Marie-Louise Niquay, de Manawan, forcée de déménager à Joliette pour faire son hémodialyse, Marie-Louise, qui a dû choisir entre sa santé, les soins et sa famille. C'est Levi Kumarluk, décédé d'un poumon perforé 18 heures après son accident, parce qu'on ne voulait pas lui accorder l'évacuation médicale dont il avait besoin. C'est la mère de Nancy, à Salluit, qui est allée au dispensaire avec des vertiges, des malaises. Elle souffrait, elle a dit qu'elle était malade. Au dispensaire, on ne l'a pas crue. Ils l'ont retournée chez elle trois fois, ils l'ont retournée à la maison trois fois, elle revenait. Malheureusement, la mère de Nancy n'était pas soûle, elle avait attrapé le botulisme, et elle en est décédée. Ce sont les jeunes enfants du Nunavik et Eeyou Istchee, qui doivent se rendre à Montréal ou à Québec tout seuls pour une intervention d'urgence, faire des heures et des heures d'avion, débarquer dans une ville où tu n'as jamais mis les pieds, qui ne ressemble en rien à tout ce que tu as connu depuis que tu es né, te faire soigner par des gens qui ne savent pas parler ta langue, tout ça sans tes parents proches, sans quelqu'un pour t'accompagner.

Je me pose la question, M. le Président : Est-ce qu'on accepterait ça si c'étaient nos enfants? Est-ce qu'on accepterait que nos proches se fassent traiter de même sur leurs terres, qu'ils ont toujours occupées? Est-ce qu'on accepterait cette discrimination qui ronge le système si les discriminés, c'étaient nous? Non, je ne pense pas. Je ne pense pas qu'on accepterait ça puis je ne pense pas que les Québécois et Québécoises l'acceptent non plus, maintenant que Joyce nous a ouvert les yeux.

M. le Président, ça a pris le courage d'une femme sur son lit de mort pour lever son cellulaire et pour montrer au Québec ce que les gouvernements successifs savaient déjà depuis longtemps. Le racisme que les autochtones vivent dans notre système de santé, l'accès inégal aux soins, ça fait longtemps que les gouvernements sont au courant. On a eu la commission Viens, on a eu l'enquête sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, on a eu des centaines d'histoires comme celle-là, comme celle de Joyce. À chaque fois, les politiciens s'en sortent, s'en lavent les mains, puis ils laissent pourrir la situation, puis on attend la prochaine crise. Et, maintenant que la situation les rattrape, ils nous disent que, cette fois-là, ça va changer. Je suis désolée, M. le Président, mais les autochtones, ils ont déjà vu neiger, là, ils étaient ici avant nous autres. Cette fois-ci, ça va prendre plus que des paroles, plus que des paroles en l'air, ça va prendre des résultats, des gestes concrets, des actions concrètes, des résultats.

La semaine dernière, la communauté de Joyce a pris l'initiative, car le Conseil des Attikamekw de Manawan et le Conseil de la nation attikamekw ont proposé le Principe de Joyce. Le Principe de Joyce, c'est garantir à tous les autochtones un accès équitable, sans discrimination aux services sociaux et aux soins de santé; c'est de défendre leurs droits, leurs droits à la santé physique, mentale, émotionnelle, spirituelle au lieu de le bafouer, ce droit-là; de connaître et de respecter leur savoir traditionnel et leurs pratiques en matière de santé. Même si ces gens-là sont en colère, ils nous ont tendu la main. Quand le gouvernement a refusé le Principe de Joyce cette semaine, qu'est-ce que vous pensez qu'ils ont compris? Eh bien, ils ont compris qu'à la CAQ les mots «racisme systémique», ça dérange plus que le racisme lui-même. Ce n'est pas comme ça qu'on bâtit la confiance, M. le Président. Les autochtones vont nous faire confiance le jour où on va les écouter.

Ce que les autochtones nous disent, c'est que le problème, ce n'est pas les individus, ce n'est pas les Québécois, c'est le système, c'est l'effet de 400 ans de colonialisme et des traumatismes qui en découlent. Le ministre a fait une annonce sur la formation du personnel, l'argent qui a été mis à reconstruire le Centre d'amitié autochtone de Joliette, c'est bien, mais le problème est beaucoup plus profond que ça, et il le sait. On a un système à reconstruire, M. le Président.

Et, aujourd'hui, j'avais interpelé le capitaine de ce système, de ce service, pardon, qui est le ministre de la Santé. Pourquoi? Bien, parce que je voulais savoir ce qu'il allait faire, lui, comme capitaine de la santé et des services sociaux, pour que les services deviennent sécuritaires pour les autochtones. Je voulais savoir ce que le ministre de la Santé allait faire pour les traiter en égaux, pas juste à Joliette, mais partout au Québec. Mais le ministre de la Santé n'est pas là. Finalement, sachez que je m'adresse au ministre responsable des Affaires autochtones, puis je suis un peu déçue, mais ce n'est pas parce que je ne l'aime pas. Et il le sait parce que je lui en avais parlé. Pour moi, si on veut discuter de nation à nation, bien, il faut que, lorsqu'on parle des autochtones en santé, que le ministre de la Santé s'en sente imputable. C'est lui, c'est de façon transversale dont il faut aborder les choses et non pas comme un dossier parmi les autres. J'avais honnêtement cru, j'ai espéré jusqu'à hier soir, que le gouvernement avait saisi cette dimension-là, que M. Legault avait envoyé un message clair à l'ensemble de ses ministres.

Alors, M. le Président, ça fait deux ans que la CAQ est en poste. Ça fait un an que le rapport de la commission Viens a été déposé. Ça fait cinq mois que le ministre de la Santé est ministre de la Santé. Ça fait deux mois qu'on a un nouveau ministre des Affaires autochtones. Bon, peut-être qu'ils ne sentent pas cette urgence-là, mais les autochtones, eux, ils baignent là-dedans depuis des générations. Alors, aujourd'hui, j'espère que nous aurons la chance... Parce que, moi, ce que je vais faire, je vais pointer vers des trous, des lacunes du filet qui nous ont été mis en lumière par les différentes commissions depuis des années, et je vais amener des solutions, et c'est clair pour moi que ça commence par la reconnaissance du Principe de Joyce et donc de l'existence réelle du racisme systémique dans la société québécoise et particulièrement dans le système de santé.

• (10 h 10) •

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Je cède maintenant la parole à M. le ministre également pour une période de 10 minutes. À vous la parole.

Réponse du ministre

M. Ian Lafrenière

M. Lafrenière : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, merci. Je veux saluer les gens qui m'accompagnent aujourd'hui, d'abord, toute l'équipe qui est avec moi. Et, vous savez, j'ai déjà fait des interpellations comme député mais jamais comme ministre. Et, quand les ministres saluaient l'équipe, je me demandais pourquoi ils le faisaient avec tant d'insistance. Je vous confirme que c'est beaucoup de travail pour l'équipe. Alors, merci beaucoup aux hommes et aux femmes qui sont ici avec moi. Les députés de la banquette ministérielle, député de Saint-Jean, députée de Roberval, députée d'Abitibi-Ouest, merci beaucoup. Et, M. le Président, je prends la peine de le mentionner parce que c'est un exercice qui est important aujourd'hui, exercice démocratique qui est très important. Et, quand on veut faire de la transparence, ça demande de la recherche, et je vous confirme que l'équipe a travaillé très fort jusqu'à cette nuit. Alors, beau travail qui a été fait.

M. le Président, je vais me permettre aussi de saluer les gens qui nous regardent à la maison et plus particulièrement deux personnes aujourd'hui. Puis je suis sûr que mes collègues de l'opposition ne m'en voudront pas. Premièrement, le grand chef de la nation attikamek, Constant Awashish, qui m'a dit qu'il nous écouterait, qu'il était très intéressé par nos débats. Alors, encore une fois, une belle occasion que vous nous donnez de parler des relations avec les autochtones, c'est tellement important. Et la deuxième personne que je veux saluer, bien, écoutez, je pense que c'est notre doyenne, qui nous écoute aujourd'hui, c'est ma grand-mère, qui va avoir 102 ans dans quelques semaines. Alors... Et, je vous dis, elle est très critique, et je ne veux pas la décevoir, elle déteste quand on se chicane entre nous et elle déteste quand on dit que c'est la faute des autres. Alors, grand-maman, je vais m'assurer de ne pas te décevoir aujourd'hui.

M. le Président, premièrement, je voudrais répondre à l'interrogation à savoir la présence du ministre de la Santé aujourd'hui. Et, effectivement, ma collègue m'en avait parlé il y a... je pense, c'est voilà une semaine, son intention. Et, vous savez, je pense, je ne vais surprendre personne aujourd'hui en vous disant qu'il y a une grande pandémie. Et mon collègue ministre de la Santé est présentement très occupé à combattre cette pandémie.

Mais je veux vous rassurer, je veux rassurer, parce que, depuis le début de mon arrivée en mandat, oui... à ce mandat-là, le premier ministre a passé un message clair à l'ensemble des ministres, qu'on devait travailler ensemble. Et, M. le Président, lorsque j'ai été nommé, le premier geste que j'ai fait, c'est d'envoyer un message à l'ensemble des députés de cette Chambre en disant : On doit travailler ensemble. Les efforts autochtones, ce n'est pas le travail d'une personne, c'est délicat, c'est important. Alors, j'ai envoyé ce message-là d'ouverture puis je vous confirme, M. le Président, que mes collègues ministres ont répondu à l'appel, ont répondu présent.

Et, dans le cas particulier du ministre de la Santé, on a travaillé très fort ensemble, et la preuve, c'est que la première annonce qu'on a faite, premier geste concret... Parce que ma collègue a raison, les gens des Premières Nations nous le disent : On a entendu parler beaucoup, il y a beaucoup de choses qui ont été dites, il y a beaucoup de rencontres qui ont été faites, mais nous, on veut de l'action. Montrez-nous des gestes concrets.

Et le premier geste concret qu'on a posé, c'est avec le ministre de la Santé. Et c'est une première annonce qu'on a faite. Parce que, lorsque la collègue me demandait : Est-ce qu'on tolère ça, est-ce qu'on tolérerait ça si ça arrivait à un de nos proches, à un de nos enfants?, puis la réponse, c'est non. C'est non, et la preuve, c'est qu'on agit.

Et ça ne sera pas réglé rapidement, ma collègue a fait référence à 400 ans d'histoire. Il n'y a pas de magie là-dedans, là, je ne réglerai pas ça du jour au lendemain, ça va demander beaucoup de travail. Et, M. le Président, je veux vous rassurer, je veux rassurer les gens qui nous écoutent, on est dans l'action, présentement. Mais ça va prendre du temps, ça va prendre de la patience, il va y avoir des moments plus difficiles. Et c'est l'engagement que j'ai obtenu de la part des chefs et des grands chefs des différentes nations, des différentes communautés. Je leur disais : Écoutez, on va avancer. On va être dans l'action. Ça ne sera peut-être pas à 100 % dans l'objectif que vous voulez ou de la façon que vous vouliez, mais vous savez, on est très ouverts à la critique. Puis je pense qu'aujourd'hui c'est ce qu'on va recevoir, on va recevoir de l'information qui va nous permettre d'être encore plus exacts dans nos gestes, dans nos façons de travailler avec les Premières Nations.

Je veux aussi vous dire que, depuis mon arrivée en poste, j'ai préparé un plan qui s'appelle J'ai espoir. Et moi, M. le Président, je crois qu'ici on doit avoir espoir qu'on va faire mieux, qu'on va y arriver ensemble en corrigeant notre système. Puis, la collègue a raison, oui, il y a des individus sur lesquels on doit travailler, mais un système aussi qu'on doit améliorer.

Et on l'a déjà annoncé dans notre première annonce en matière de santé, qu'on devait avoir de la formation. Et, vous savez, je vais vous donner un geste très important que le ministre de la Santé a posé à ce moment-là. Il aurait pu dire qu'on va former, dans le fond, les infirmières, les préposés aux bénéficiaires, les docteurs, donc le personnel soignant. Non. Sa décision a été une décision courageuse, de dire : On va former tout le monde dans le système hospitalier. La personne qui fait l'entretien, le préposé aux bénéficiaires, la personne à la réception, tout le monde va être formé. Alors, c'est la première grande décision qu'il a prise. La deuxième, ça a été de dire : On ne fera pas ça juste à Joliette. Oui, on commence à quelque part, mais c'est l'ensemble du système de la santé, l'ensemble du système de la santé qui va avoir cette formation-là. Parce que, oui, M. le Président, il faut être proactif. On ne peut pas réparer... faire du cas par cas, il faut vraiment être proactif, et c'est ce qu'il veut faire.

Alors, moi, je veux rassurer ma collègue de l'opposition en lui disant : On a un ministre de la Santé qui prend ça très au sérieux et qui est dans l'action. Puis, aujourd'hui, oui, je vais parler en tant que ministre responsable des Affaires autochtones, mais je parle au nom de mon gouvernement, parce qu'on travaille ensemble dans ces dossiers-là, et, dans chacune des annonces, il y a d'autres ministres qui étaient avec moi, et, à preuve, on va en avoir une plus tard aujourd'hui, et je vais avoir une collègue ministre qui va être avec moi pour cette annonce-là. Ça vous démontre à quel point, M. le Président, c'est vraiment un travail d'équipe, et j'ai tendu la main dans le passé, je la tends encore aujourd'hui, en disant : On doit travailler ensemble.

Collègues des oppositions, vous avez des suggestions, des commentaires à nous faire, on est vraiment là pour travailler ensemble. Ce sujet-là est trop important pour en faire de la partisanerie. Et je veux vous rassurer, M. le Président, jusqu'à présent, nos travaux sont faits de cette façon-là et les collègues de l'opposition ont vraiment tout fait pour aider, pour faire avancer la cause j'en suis très, très, très heureux. Bravo!

 Depuis mon arrivée, ça a vraiment été une relation d'ouverture avec les communautés, établir des contacts, et, malgré le fait qu'on est en période de pandémie, vous allez comprendre que de faire des relations pour la première fois, de contacter des gens par téléphone, c'est plus difficile qu'en personne, mais c'est la réalité qu'on vit avec la pandémie.

Aujourd'hui, j'espère avoir l'occasion de parler de ce qui va bien dans le système, parce qu'il y a des belles choses. Il y a des belles réussites, mais je veux vous dire aussi, M. le Président, que, malgré tout ça, on sait qu'il y a des lacunes, on sait qu'il y a du travail à faire et, la preuve, on s'est donné un plan de 200 millions, un plan, j'ai espoir, qu'on va mettre en branle dans les prochaines semaines. J'avais promis une annonce par semaine et c'est ce qu'on fait, c'est ce qu'on livre. Pourquoi c'est si important? Parce qu'encore une fois les membres de Premières Nations nous disent : Assez parlé. On a raconté, à plusieurs reprises, ce qu'on avait vécu. Agissez, faites quelque chose.

Le plan va être en trois phases, M. le Président. La première phase, c'est maintenant. Il y a une urgence d'agir, de démontrer qu'on est capable de faire des changements. Et, vous savez, les communautés... les allochtones nous font la même demande, hein? Tout le monde veut, au Québec, que ça bouge. Les éléments tragiques de Joyce Echaquan ont été un électrochoc. Ils nous ont demandé de bouger, de réagir. C'est ce qu'on fait.

La deuxième phase sera l'année prochaine, et là on aura plus de temps pour le travailler, et j'espère le travailler, même, avec les groupes d'opposition, parce que je crois vraiment que c'est ensemble qu'on va y arriver.

Et la troisième phase, M. le Président, c'est la page blanche. C'est cette phase que je me garde avec les Premières Nations pour dire : Voyons, voyons, peut-être, des points qu'on n'aurait pas vus, nous, dans notre planification. Développons ensemble cette troisième phase, laissons-nous la chance, dans le fond, de réajuster le tir et de corriger des lacunes qu'on n'aurait peut-être pas vues.

Alors, M. le Président, ce que je vous dis depuis tout à l'heure, c'est qu'on est très ouverts : très ouverts à la critique, très ouverts à corriger nos plans aussi. Et, d'ailleurs, quand on a fait la première annonce pour la sécurisation culturelle, on a dit : Voici où on veut aller. Cependant, dans l'application, on a de l'ouverture et, à preuve, lorsque mardi, j'ai reçu le Principe de Joyce... la semaine passée, mardi passé, je l'ai reçu, une semaine plus tard, j'ai donné suite à mon engagement, j'ai fait une sortie médiatique, ici, en disant qu'on saluait le travail.

C'est un travail qui est colossal, c'est un travail qui va nous aider avec le ministre de la Santé pour voir comment, justement, ajuster notre principe de sécurisation culturelle. Et on est d'accord avec le principe. Cependant, il y a un mot qui nous divise, il y a une expression qui nous divise, et c'est le racisme systémique. Et ça, depuis le jour 1, ça a été très clair avec les différentes nations, M. le Président.

Alors, je comprends, les gens pourraient déçus, mais ils ne peuvent pas être surpris. Et il y a une expression anglaise que je ne peux pas traduire, qui dit : «We agree to disagree». Et sur ce terme, c'est comme ça que je me suis adressé à des membres de la nation attikamek en disant : Écoutez, on est d'accord avec ce qu'il y a dans le principe. C'est vraiment intéressant. Et le fait qu'il y a eu des consultations, pour nous, c'est une grande richesse pour nous aider à améliorer ce qu'on veut faire en sécurisation culturelle. Cependant, il y a une chose qui est très claire pour nous depuis plusieurs semaines : chaque fois que le terme de racisme systémique fait surface, ça divise les gens, et, même, ça fait monter de l'intolérance. Il y a des commentaires vraiment qui sont in-à-propos qui sont dits. Et là on s'est dit : On va combattre le racisme. Ça ne nous empêche pas de le faire.

Et, M. le Président, malgré notre désaccord sur le terme racisme systémique, ça ne m'a jamais empêché de travailler avec une nation. Ça ne m'a jamais empêché de travailler avec un groupe, un leader, parce que ce qu'on veut faire, au final, c'est combattre le racisme. Et ça, c'est notre ferme intention. Puis, M. le Président, on va continuer de le faire. On va continuer de le faire parce que c'est important pour nous.

En terminant mon introduction, je voulais vous dire que, dans notre plan, depuis mon arrivée, on a parlé de trois axes. Et j'espère être capable de vous en parler aujourd'hui, parce que nos relations vont s'améliorer en développant l'amélioration culturelle, le développement culturel, le développement économique et, oui, le développement touristique, parce que, M. le Président, dans les prochaines années, j'ai l'impression que les Québécois vont vouloir voyager beaucoup plus au Québec. On veut développer une offre touristique autochtone, parce que je crois fermement, M. le Président, que, de cette façon-là on va se rapprocher et on va travailler sur ce qui est si important pour moi, c'est-à-dire le vivre-ensemble. On a à se connaître, on a à se respecter. Puis, au final, ce qu'on veut, c'est bien vivre ensemble. Alors, M. le Président, je vous remercie.

Argumentation

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup, M. le ministre. Nous allons maintenant débuter la période d'échange. Mme la cheffe du deuxième groupe d'opposition, vous avez la parole pour un maximum de cinq minutes. À vous.

• (10 h 20) •

Mme Massé : Merci. Bon, je reste assise. Désolée, j'ai appris qu'on faisait ça assis. Mais, moi, c'est rare, je suis toujours debout, d'habitude, hein?

En fait, le premier thème que je vais aborder, c'est la question de la sécurisation culturelle et la responsabilité populationnelle. J'imagine qu'avec vous il y a des gens aussi du ministère de la Santé. Ils vont savoir très bien de quoi je parle. Alors, c'est sûr que ce qui est frappant lorsqu'on est en lien avec les gens des Premières Nations, c'est qu'ils ont peur d'aller dans le système de santé ou dans le système des services sociaux, d'ailleurs, parce que l'expérience qu'ils ont vécue, depuis des décennies, depuis des siècles, est une expérience négative.

Alors, peur de faire face aux préjugés et de ne pas être pris au sérieux, de ne pas recevoir le bon diagnostic, le bon traitement, peur de ne plus revoir son enfant, peur... jusqu'à la peur de mourir. C'est des peurs qui habitent les gens des Premières Nations et qui fait que, bien, ils se tiennent plus à l'extérieur qu'à l'intérieur du système de santé. Alors, la sécurisation culturelle, dans les faits, ce n'est pas que juste reconnaître, entendre et reconnaître qu'ils ont peur, c'est d'agir en fonction de ça.

Alors, moi, je pense qu'il y a un appel à l'action dans le rapport Viens, qui est l'appel 74, qui donne une indication au ministre de la Santé de comment il pourrait rassurer les gens des Premières Nations, et je le lis, c'est : «Modifier la loi sur [la] santé et les services sociaux et la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris pour y enchâsser la notion de sécurisation culturelle...» Et, dans ce sens, faire ce travail-là en collaboration avec les Premières Nations. C'est-à-dire que, si on reconnaît qu'effectivement le principe de sécurisation culturelle est fondamental, bien, il faut que cette loi soit... que la loi sur la santé et les services sociaux enchâsse le principe même.

Des définitions, il y en a, hein, il y en a, il n'y a pas... les autochtones en ont définies, il y a... au niveau de l'éducation, au niveau de la santé, je veux dire, c'est défini, là, ça fait que je ne vais pas prendre le temps ici pour le définir. Ce que je vous dis, c'est qu'il faut l'enchâsser.

M. le Président, mon cinq minutes, je le prends en entier, c'est ça?

Le Président (M. Provençal)  : Oui.

Mme Massé : Bien. Alors, je lance ça comme piste. Il y a un trou dans le filet, sécurité... sécurisation culturelle, sécurité des autochtones, je nommerais. Une des façons d'obliger l'État à répondre à ce trou dans le filet, c'est d'enchâsser, dans la loi sur... la LSSSS, comme on dit, ce principe de sécurisation culturelle.

Et je me dis : tant qu'à faire, tant qu'à aller jouer dans cette loi-là, bien, ça pourrait être intéressant, et ça aussi, ça enverrait un sacré bon message, que le ministère de la Santé et des Services sociaux oblige ses institutions à divulguer les informations qu'elles ont concernant les enfants disparus. Je pense notamment aux Attikameks, qui nous ont fait de grandes représentations pour nous expliquer — mais je sais qu'ils ne sont pas les seuls — nous expliquer qu'il y a quelque chose qui ne marche dans le système de santé et de services sociaux, puisqu'ils n'arrivent pas à savoir ce qu'il s'est passé avec leurs enfants qui leur étaient enlevés et qui se retrouvaient à quelque part dans le système de santé et services sociaux. Alors, je pense que, tant qu'à jouer dans la loi, bien, ça vaudrait la peine aussi d'inscrire ce qu'on a failli faire dans un autre cadre de loi par le passé. La prédécesseure du ministre actuel des Affaires autochtones avait signifié son intérêt de refaire un projet de loi autonome, ce que nous demandaient les Premières Nations. Je pense que, si on inscrivait, en travaillant avec eux autres, dans la loi sur la santé et les services sociaux, cet appel à la transparence des institutions, je pense qu'il y aurait là quelque chose d'intérêt.

Je vais juste terminer, parce que cinq minutes, c'est très court, sur la question de la responsabilité populationnelle. C'est simple, ça fait partie de la loi sur la santé et les services sociaux. Je pense que, dans les faits, d'adopter le Principe de Joyce serait une façon de venir inscrire la reconnaissance que nous avons au Québec que la santé de nos gens, peu importe leurs origines, elle est inscrite par la responsabilité populationnelle qu'a le ministère de la Santé et des Services sociaux. Et une façon de le faire, c'est, bien sûr, de reconnaître aussi le Principe de Joyce et ce principe-là.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Je cède maintenant la parole à M. le ministre.

M. Lafrenière : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. le Président, nos échanges sont déjà très riches. Et j'ai pris en note trois points importants que ma collègue a soulignés.

Je vais commencer par la sécurisation culturelle. Et j'ai bien aimé lorsqu'elle a mentionné que plusieurs ont des définitions différentes. Et je vais vous avouer, moi, bien honnêtement, quand je suis arrivé dans le dossier, j'ai demandé ce que ça voulait dire effectivement, parce qu'il y a plusieurs façons de le voir. Et moi, je vais vous donner deux pistes de réponse, une réponse que j'ai trouvée très simple mais qui m'a marqué énormément, et c'est le grand chef Constant Awashish qui, un jour, m'a dit : Tu sais, Ian, il y a une jeune fille de 10 ans qui est venue me voir qui m'a dit qu'elle s'inquiétait pour son avenir. Mais moi, M. le Président, je vais vous avouer que j'ai deux grandes filles de 11 ans, 12 ans, et jamais mes enfants ne m'ont dit s'inquiéter pour leur avenir. Et ce que cette jeune fille là venait de lui dire, c'est que, dans le fond, avec tout ce qu'elle avait entendu avec l'histoire tragique de Joyce Echaquan, pour elle, elle craignait le type de soins qu'elle aurait. Et pour moi, M. le Président, quand on entend quelque chose comme ça, je pense qu'on n'a plus besoin de définition par la suite pour la sécurisation culturelle, on comprend ce qu'ils vivent, on comprend bien.

Et c'est tellement important pour nous que l'annonce n° 1 qu'on a faite, c'est vraiment la sécurisation culturelle, et c'est-à-dire de façon concrète. Et je comprends très bien quand on parle de l'enchâsser dans la loi, c'est à l'étude présentement. Oui, c'est important, c'est à l'étude.

Cependant, quand on parle de geste concret pour les Premières Nations, ils ont des atteintes beaucoup plus terrain. Et la première façon qu'on a trouvée, c'est d'avoir des navigateurs, M. le Président. Ça, c'est un terme qui peut avoir l'air bizarre. Juste vous rassurer, ce sont des humains, ce n'est pas un principe de tablette, là, ce sont des navigateurs, des humains qui vont accueillir les membres des Premières Nations dans le système de santé. Parce que, vous savez, des fois, ça peut être assez impersonnel comme édifice, c'est quand même assez grand, alors où on va, problème de langue parfois, problème de reconnaissance. Alors, nos navigateurs vont être là pour accueillir les membres des Premières Nations, pour les rassurer et s'assurer, en plus de ça, qu'ils vont avoir les bons soins, donc de les diriger. Ça, c'est la première des choses.

Deuxième des choses, on parle d'agents de liaison. Donc, c'est de faire en sorte que l'information du terrain remonte jusqu'au niveau décisionnel, parce que, ma collègue l'a bien dit tout à l'heure, il faut regarder notre système, comment améliorer le système. Alors, ça, ça a été la première étape, première partie importante qu'on a annoncée. Et ça, ça a commencé avec Joliette et ce sera fait dans tous les centres. Et, je l'ai dit tout à l'heure, on parle d'une formation qui va être étendue à tous les centres. Alors, ça, moi, je trouve ça rassurant. Ça, c'était pour la sécurisation culturelle, M. le Président.

Quand on parle de projets de loi, et ma collègue a mentionné... on se rappellera le projet de loi n° 31, et j'y étais, je pense qu'on y était ensemble aussi, c'était sur un autre sujet. Et il y avait eu tentative, justement, de corriger cette lacune du passé pour donner réponse à des parents qui ont des questions tellement importantes. Et c'était un dossier déchirant. Je n'aime pas dire le terme «dossier», parce que ce sont des hommes, des femmes, des familles, qui ont vécu des moments horribles. Et, M. le Président, lors du retrait de cette partie du projet de loi n° 31, il y a un engagement qui avait pris par ma prédécesseure d'aller jusqu'à la fin des choses, de revenir avec une offre bonifiée. Et, aujourd'hui, devant mes collègues de l'opposition, je prends le même engagement en vous disant : Ça s'en vient, ça s'en vient. C'est extrêmement important. On a compris le message, cependant, de le faire différemment, parce que, justement, on travaille ensemble puis on grandit dans tout ça. Alors, oui, il y aura quelque chose de différent qui sera présenté.

Et, encore une fois, je tends la main à mes collègues de l'opposition. Travaillons ensemble pour le livrer, parce qu'il y a des attentes. Et, M. le Président, on parle de 1984. Il y a beaucoup d'attentes des parents qui ont des attentes envers nous. Et je parle des derniers cas, M. le Président. Ma collègue de l'opposition me fait signe que ça remonte aux années 70 aussi, mais les derniers cas, c'est 1984, et je vous dis que ça remonte à... on pourrait même dire Matusalem, comme disait ma grand-mère.

Alors, on a du travail à faire là-dessus, mais je pense, M. le Président, qu'on va devoir le faire sans partisanerie. On va devoir travailler ensemble, oppositions et gouvernement. Parce qu'encore là c'est un bel exemple qu'on doit livrer. Il y a des attentes, les gens des Premières Nations qui nous écoutent ont formulé des attentes. Ma collègue a bien fait de le mentionner tout à l'heure, entre autres, il y a la nation attikamek, mais il y en a bien d'autres qui ont des attentes envers nous de livrer cette information-là.

Alors, ce que je viens de vous dire, M. le Président, c'est qu'on sait qu'il y a du travail à faire. On sait qu'il y a du travail à faire. On sait que ce n'est pas terminé. Mais moi, je veux vous rassurer en vous disant qu'au gouvernement on est une équipe complète, dont plusieurs ministres, et, dans ce cas-là, le ministre de la Santé et Services sociaux. On travaille ensemble pourquoi? Parce que c'est un enjeu qui est prioritaire, qui est majeur, puis on va y arriver ensemble. Je n'y arriverai pas tout seul, M. le Président. Mais je peux vous garantir aujourd'hui, en voyant mes collègues de l'opposition, j'ai un très bon feeling qu'on va arriver à le faire ensemble pour le bien des familles qui ont de grandes attentes envers nous. Merci.

• (10 h 30) •

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Je cède maintenant la parole à la députée Roberval.

Mme Guillemette : Merci. Merci beaucoup, M. le Président. Tout d'abord, je voudrais remercier M. le ministre, qui me permet ce matin, encore une fois, d'être ici et de discuter avec vous d'un sujet qui est... qui me tient à coeur, qui est très important. Et j'aimerais remercier les équipes qui l'accompagnent, parce qu'on a rarement l'occasion d'avoir deux cabinets avec nous. Donc, on a le cabinet des Affaires autochtones et le cabinet de la Santé. Donc, c'est... Merci d'être ici. Une salutation particulière à la collègue cheffe du deuxième groupe d'opposition, qui nous permet, encore une fois, de discuter d'enjeux très importants pour les deux nations, pour nos deux nations, et aux collègues également, député de Saint-Jean, députée d'Abitibi-Ouest, le collègue de Jacques-Cartier. Donc, ce sera une belle expérience encore ce matin.

Vous savez, j'ai une prédilection pour la santé mentale, mais je vous en parlerai dans un deuxième temps. Dans un premier temps, je vais vous parler du plan de lutte à l'itinérance. Bien que régulièrement on ait l'occasion de parler de plein de sujets, on a rarement l'occasion de l'aborder dans le sens de la spécificité des services offerts aux autochtones. Et je crois que c'est une belle opportunité qu'on a ce matin.

Vous savez, M. le Président, ma circonscription inclut la communauté de Mashteuiatsh avec laquelle j'ai, depuis de nombreuses années, l'occasion de travailler sur certains dossiers, notamment en santé. J'en profite également ce matin pour saluer le chef Cliff Moar et toute l'équipe des membres du conseil de bande. Donc, je suis très au fait des dossiers et des enjeux autochtones, des peuples autochtones, autant en santé et en services sociaux qu'en développements territoriaux ou en développement économique. J'ai aussi eu l'opportunité d'accompagner le Dr Philippe Gosselin, dentiste, et ce, pendant 15 ans, à raison d'une semaine par mois, dans la communauté d'Obedjiwan, pour dispenser des soins dentaires. Donc, les enjeux, j'ai pu les constater de visu sur le terrain, directement sur le terrain. Nous habitions dans la réserve. Donc, ça a été vraiment, pendant 15 ans, une belle expérience.

Et si on se reporte, il y a 30 ans, donc, j'ai vu une évolution, de 30 ans à venir aujourd'hui, aux services qui sont offerts, autant en communauté que chez nous à Roberval. Notre population, statistiquement, est composée de 10 % d'autochtones. Donc, on a quand même une certaine expertise à travailler avec les peuples autochtones dans notre service de santé.

Donc, la commission Viens a mis de l'avant différents appels à l'action en lien avec l'enjeu d'itinérance chez les peuples autochtones, dont l'appel à l'action 47, qui suggère de mettre en place un programme d'accompagnement à la justice et à l'intervention communautaire pour les personnes vulnérables en situation d'itinérance ou à risque de le devenir, l'appel à l'action 99, qui est de soutenir financièrement et de façon pérenne les services offerts en milieu urbain aux clientèles itinérantes, et aussi l'appel à l'action 100, qui est de soutenir financièrement la création d'un centre d'hébergement exclusivement réservé à la clientèle itinérante inuite de Montréal.

Donc, un soutien financier pour la mise en place des services de santé a également été mentionné dans la politique de lutte contre l'itinérance et dans le Plan d'action interministériel en itinérance 2015‑2020 où il y a des particularités pour les peuples autochtones, et les Premières Nations, et les Inuits. Donc, par ailleurs, en automne 2019, le ministère Santé et Services sociaux a initié l'élaboration du prochain plan d'action ministériel en itinérance, qui s'appuiera sur les orientations politiques nationales du plan d'action 2015‑2020, et c'est dans ce cadre, notamment, que le Projet résilience, à Montréal, est actuellement à l'étude.

En outre, récemment, l'Assemblée nationale a adopté, comme le mentionnait la collègue tout à l'heure, le projet de loi n° 32, dont les mesures visent à mieux adapter le système judiciaire aux clientèles vulnérables, à favoriser le recours aux nouvelles technologies de l'information et à optimiser la justice pénale. La loi met en place les dispositions nécessaires pour poursuivre l'adoption du système... l'adaptation du système de justice aux clientèles présentant des situations sociales particulières, comme les personnes vivant des problématiques de santé mentale ou de toxicomanie.

Le plus beau dans tout cela, c'est que nous ne comptons pas nous arrêter là. Nous allons continuer à travailler fort dans ce dossier, et ce, en collaboration et en partenariat avec les Premières Nations. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au député de l'opposition officielle, le député de Jacques-Cartier. À vous.

M. Kelley : Merci, M. le Président. Je veux commencer avec une citation de Carol Dubé : «Le 28 septembre 2020, ma femme, la mère de mes enfants, nous a été arrachée dans des circonstances inhumaines dont nous avons tous été témoins. La mort de Joyce a été une terrible tragédie pour nos enfants et moi. Je souhaite que les gouvernements du Québec et du Canada adoptent le Principe de Joyce afin que ce terrible événement ne soit pas survenu en vain, que sa voix sonne le début de réels changements pour tous les autochtones afin que plus jamais personne ne soit victime de racisme systémique.» Ça, c'est la citation au début du Principe de Joyce.

Et, oui, je veux parler de racisme systémique, parce qu'on peut blâmer la Loi sur les Indiens et le niveau fédéral, mais, nous, comme une société, à faire des choix comme une province. Et, juste pour notre histoire, on peut regarder sur le plafond, la peinture ici. On a des hommes blancs qui arrivent, et l'autochtone sur ses genoux. C'est partie de notre histoire, malheureusement. Mais on a aussi pris des décisions, comme un gouvernement, comme un État, d'avoir un ministère responsable pour la Colonisation et Occupation des régions. Les régions étaient déjà occupées. Par les autochtones.

Si on veut comprendre pourquoi, à Joliette... Et avec Manawan, il y a des frictions, des fois, des fois, qui sont basées par les décisions prises par les institutions du Québec, c'est parce qu'on a formé une occupation des régions où les Attikameks étaient déjà là, et il y a une longue histoire, et la communauté de Manawan connaît leur histoire très bien, et, quand même, l'État du Québec connaît ça très, très bien. Parce que, si on regarde dans le rapport de la commission Viens, on a un bon exemple où la décision, M. le Président, d'un gouvernement du Québec a forcé des Attikameks de changer leurs habitudes et à punir des gens qui à faire la chasse de l'orignal, qui était partie de leurs traditions, mais aussi la façon qu'ils nourrissent leurs familles.

Et c'est bien écrit dans une histoire, ici, de Marcel Pitikwe, de Wemotaci... alors, je vais prendre une autre communauté attikamek... qui a eu des gardes-chasses qui... est venu dans sa maison, à saisir toute la nourriture, toute la chasse qui a été faite pour sa famille pour l'hiver. Ils ont mis lui en prison. Alors, ils ont enlevé le père d'une famille. Mis en prison, enlevé toute la viande, l'orignal qui... orignaux qu'il a chassés pendant la saison de chasse, puis la famille était maintenant obligée de trouver des autres moyens de survivre tout un hiver. Ça, c'est juste une histoire dans le rapport de la commission Viens, mais c'était multiplié partout au Québec, puis on peut répéter cette histoire aussi partout au Canada, quand même, dans l'Amérique du Nord, en général.

Ce ministère-là a éventuellement été séparé dans les Ressources naturelles, et tout ça, mais, à la base, c'était une institution créée par le gouvernement du Québec, qui a eu une intention de changer l'habitude des peuples autochtones, qui a eu les habitudes de mettre les autochtones dans les coins, les parties, les terres qui étaient moins intéressantes, moins de ressources naturelles, moins de priorités pour le gouvernement d'exploiter. Et ça, c'est juste... c'est une réalité. Ça, c'est une décision et des décisions du gouvernement du Québec.

Mais je reviens au Principe de Joyce, parce qu'on n'a pas beaucoup de temps, et il y a plusieurs solutions qui sont dedans. Mais une que je trouve que c'est intéressant, c'est dans la commission... des appels à l'action de la commission Viens, c'est ce mécanisme de suivi. Et je trouve l'idée d'un ombudsman bien... fort intéressante pour les peuples autochtones. Si c'est dans le système et des services sociaux, ou quelque chose plus global, je pense qu'il y a une bonne idée là. C'est quelque chose qui n'existe pas dans les autres provinces. Si on faire ça, on va être à l'avance des autres provinces, avec une idée qui vient de la communauté, oui, des Attikameks, mais, je pense, il y a plusieursautres nations l'idée bien intéressante.

Alors, moi, je veux entendre le ministre peut-être expliquer un petit plus, parce que dans son point de presse mardi, il a dit : Oui, on est ouverts à cette idée-là, on trouve ça intéressant, j'ai eu des discussions avec le ministre de la Santé, mais le ministre de la Santé n'est pas ici pour nous de le questionner, lui. Alors, je veux juste entendre le ministre des Affaires autochtones élaborer un petit peu c'est quoi, les discussions qu'il a eues avec le ministre, mais aussi avec des nations autochtones.

• (10 h 40) •

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. Je vais maintenant recéder la parole à M. le ministre.

M. Lafrenière : Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup pour les points de mon collègue de Jacques-Cartier et prendre la balle au bond dans ce qu'il a mentionné. Il est revenu sur l'histoire, sur notre histoire récente et beaucoup moins récente aussi et je l'ai déjà dit : Vous savez, M. le Président, on ne pourra pas corriger près de 400 ans d'histoire par magie, comme ça. Ça va prendre beaucoup de temps, d'énergie. Puis c'est le même engagement que j'ai pris, en passant, avec les chefs et les grands chefs, en disant : Écoutez, on doit travailler ensemble, mais il y a beaucoup de travail à faire.

Principe de Joyce, je veux revenir là-dessus, parce que c'est très important et je me rappelle très bien de la déclaration de M. Dubé, le conjoint de Joyce Echaquan. C'est un message qui m'avait beaucoup marqué. Et, vous savez, on ne peut pas donner une explication à un décès comme ça puis on ne peut pas dire que son décès est en vain, parce que c'est une perte qui est terrible pour la famille, pour les enfants. Cependant, rappelez-vous que, depuis ce jour-là, ça a vraiment été un électrochoc au Québec et, à chaque semaine, il y a une action qui a été mise en place.

Pourquoi? Parce que, je pense, ça a été un réveil collectif et je dois vous dire, M. le Président, quand j'ai vu les images et que j'ai réagi, il y a de mes collègues, de mes amis des Premières Nations qui m'ont contacté, en disant : Tu es choqué parce que tu le vois, mais nous, ça fait longtemps qu'on le vit. On l'a dit, mais là, vous l'avez en plein visage puis vous réagissez.

M. le Président, je vais vous dire que oui, ça a été un réveil brutal pour plusieurs Québécois et c'est pour ça qu'on est dans l'action depuis ce jour-là. Qu'est-ce qu'on a fait, et mon collègue me demandait pour... mon collègue ministre de la Santé. Depuis ce jour-là, on sait que le premier ministre a rencontré la nation attikamek et on s'est engagés dans une rencontre hebdomadaire. Donc, à chaque semaine, il y avait des rencontres avec les dirigeants de la nation attikamek pour faire un suivi. Je pense qu'on ne peut pas aller avec un suivi plus proche que ça. Ça a commencé avec le premier ministre, et, par la suite, mon collègue ministre de la Santé était présent avec moi dans nos rencontres hebdomadaires.

Et, d'ailleurs, pas plus tard que ce matin, j'étais avec le grand chef et les chefs de la nation attikamek en rencontre pour faire notre suivi. C'est ce qu'on a établi ensemble : à chaque semaine, on se rencontre, on fait le suivi des différents dossiers. Et, bien entendu, en toute transparence pour le collègue, mes amis de la nation attikamek m'ont ramené, ce matin, le fait que le Principe de Joyce était très important pour eux, très, très important pour eux. Et, sans aucune surprise, je leur ai dit que depuis le jour un j'ai toujours été transparent avec eux et qu'il y a une chose sur laquelle on ne s'entendait pas, c'était le terme de «racisme systémique».

Cependant, quand on me demande ce qu'on va faire avec le Principe de Joyce, qui est si important, et des informations qui sont très pertinentes pour nous qu'on va mettre en oeuvre... Et, quand on parle d'ombudsman, nous, on le regarde, on trouve ça fort intéressant aussi, mais je vais pousser la réflexion avec mon collègue. Quand j'ai rencontré les membres des Premières Nations, on a eu beaucoup de discussions sur des systèmes. On peut penser aux CAVAC, par exemple, d'autres grands systèmes comme ça, et les gens me disaient souvent : C'est loin de nous. On n'a pas le réflexe d'aller vers des grands systèmes comme ça, nous, on a un réflexe de proximité, on veut faire confiance à quelqu'un yeux dans les yeux. Je ne vous dis pas qu'on est contre. Ce que je vous dis, c'est que c'est fort intéressant, mais on a quand même décidé, sur le terrain, d'avoir ce que je disais plus tôt, des navigateurs, des agents de liaison.

Et on peut continuer, on a d'autres possibilités qu'on regarde : d'inclure les communautés sur les comités d'usagers pour vraiment avoir une relation directe puis de partager, vous savez, les... Ce que je fais, présentement, de façon hebdomadaire avec la nation attikamek, on aimerait que ça se fasse dans le réseau de la santé avec des institutions comme un hôpital, comme un centre de soins. Alors, ça, on le regarde aussi. Un processus de plainte interne qui serait facile et qui serait plus proche des Premières Nations, c'est ce qu'on regarde aussi.

Alors, oui, collègue, la notion d'ombudsman est fort intéressante, mais ce n'est pas la seule chose qu'il y a à faire là-dedans, et c'est pour ça que, lorsque je suis sorti mardi en point de presse, ce que j'ai dit, c'est que le Principe de Joyce, on l'appréciait beaucoup. Comme je l'ai dit plus tôt, avec des consultations, avec du travail qui était vraiment réfléchi, ça nous aide. Il y a un seul point sur lequel on n'est pas en accord, mais je vous confirme, M. le Président, que ça ne nous empêchera pas de combattre le racisme, on va continuer comme ça.

L'autre point qu'il est important pour moi à mentionner au collègue... Tantôt, je disais qu'on travaillait en équipe. Je peux vous dire que, dès le début de mon arrivée, on a créé un caucus autochtone au sein même du gouvernement. Pourquoi? Parce que j'ai besoin de cette information-là qui vient des différentes communautés. Alors, tous mes collègues députés et ministres qui ont une communauté autochtone sur leur territoire, on se réunit une fois par semaine pour avoir l'information du terrain, parce que je veux prendre des décisions rapides, je veux prendre des décisions qui sont basées sur des faits qui arrivent du terrain. Et c'est pour ça que j'ai tendu la main, à plusieurs reprises, à mes collègues de l'opposition, pour qu'on travaille bien ensemble pour avoir cette information-là et réagir en temps réel. Parce que, je l'ai dit plus tôt, je vous le redis encore une fois, tout le monde a soif d'action, les gens veulent qu'on agisse. On a parlé beaucoup, mais on doit être dans l'action, et c'est ce qu'on fait, M. le Président. Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. Je vais maintenant céder la parole à la députée d'Abitibi-Ouest.

Mme Blais (Abitibi-Ouest) : Merci, M. le Président. Avant toute chose, M. le Président, j'aimerais saluer les gens de la communauté de Pikogan. «Kwe»... (S'exprime dans une langue autochtone).

En tant que députée de la circonscription d'Abitibi-Ouest, je considère qu'il est primordial de souligner la présence et l'apport de la nation abitibiwinnik à la vie économique culturelle de notre coin de pays.

Depuis le tout début de mon engagement politique, j'ai toujours considéré les gens de cette communauté comme des partenaires, des gens pour qui j'ai un profond respect et une amitié sincère, un peuple avec l'histoire à la fois riche et tragique, mais qui porte sur le monde le regard empreint de la résilience de ceux qui ont survécu à de dures épreuves. C'est, d'ailleurs, parce que ces liens d'amitié me sont chers que le sujet d'aujourd'hui me tient à coeur.

L'accès aux soins de la santé des populations autochtones, les difficultés auxquelles ces communautés font face, j'y ai été témoin lorsque j'étais infirmière auxiliaire à l'Hôpital Hôtel-Dieu d'Amos, à quelques kilomètres de la communauté de Pikogan.

M. le Président, j'aimerais prendre un moment pour nous transporter il y a 40 ans et vous inviter à inverser les rôles. Imaginons que ce soient nous qui devons consulter un médecin issu d'une communauté et d'une culture qui n'est pas la nôtre, qui ne parle pas la même langue, qui n'a pas les mêmes coutumes. Avant même le diagnostic, le niveau d'anxiété monte déjà d'un cran.

Si vous permettez, j'aimerais partager avec vous un des plus beaux moments de ma carrière en soins hospitaliers. Une dame âgée avait été admise lorsqu'elle a été retrouvée au bord du chemin du secteur de Matagami, soit deux heures au nord d'Amos. Elle n'avait pas de pièce d'identité, elle ne savait pas sa date de naissance et elle avait de sérieux problèmes de mobilisation, incapable de communiquer avec nous, car elle parlait d'anciens dialectes et ne connaissait pas le français. Imaginez l'angoisse que vivait cette dame, M. le Président. Bien qu'une interprète était présente sur notre territoire, deux de mes collègues et moi-même avons suivi une formation pour apprendre les rudiments de sa langue. Nous l'avons fait parce que nous avions eu l'intime conviction que cela nous permettrait de mieux la soigner et de lui offrir un peu de réconfort. Les mots ont des effets thérapeutiques, j'en suis convaincue. Pour elle, j'étais devenue sa... (s'exprime dans une langue autochtone), celle qui donne des soins. Un matin que je m'occupais d'elle, elle a pris ma main et a déposé un bisou en signe de gratitude. Jamais je n'oublierai ce moment et cette marque de confiance.

Si je vous parle de tout ça, M. le Président, c'est pour vous montrer que c'est par l'ouverture aux langues et aux cultures autochtones du Québec que passera l'amélioration des soins offerts à ces communautés. Pour cela, il faut s'assurer que l'ensemble des cohortes d'étudiants en médecine soit formé sur la réalité autochtone et inuite du Québec. De cette façon, ils développeront les compétences nécessaires à ce domaine social, médical bien précis. Cependant, pour assurer la réussite de cette approche, il faut favoriser la présence du personnel autochtone dans le milieu de la santé. C'est pourquoi, chaque année, un nombre de places est réservé pour l'admission des étudiants autochtones, inuits au doctorat médecine à travers le Québec.

M. le Président, j'ai confiance qu'avec les actions prises par notre gouvernement et avec l'implication nouvelle du député de Vachon à titre de ministre responsable des Affaires autochtones nous débuterons une ère de réconciliation, d'amitié, de respect mutuel avec les autochtones et les Inuits du Québec. «Meegwetch», merci, M. le Président.

• (10 h 50) •

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole à la cheffe du deuxième groupe d'opposition. À vous la parole, madame.

Mme Massé : Merci, M. le Président. Dans ce deuxième bloc... C'est parce que j'entendais la collègue parler des langues, il y a des appels à l'action de la commission Viens qui sont très spécifiques sur la question des langues, tant au niveau des banques de traducteurs, traductrices, ce qui est fondamental, qu'aussi ne serait-ce que d'envoyer un signal que, dans le système de santé et d'hébergement, les autochtones peuvent utiliser leur langue maternelle. Je ne me souviens plus du numéro, là, c'est ça que je cherchais avant d'être surprise, mais j'ai confiance que votre équipe va mettre le doigt dessus facilement.

Dans ce deuxième cinq minutes, en fait, je voulais parler d'une vérité de La Palice, c'est-à-dire les 12 travaux d'Astérix pour avoir... quand tu es autochtone, avoir accès aux soins de santé. C'est une complexité de système. Ça dépend où tu habites. T'es-tu conventionné? Pas conventionné? T'habites en milieu urbain ou sur ta communauté? Est-ce que ta communauté est considérée comme isolée, pas isolée? Elle est-tu proche d'un grand centre? Bref, casse-tête terrible. D'ailleurs, si j'avais eu plus de temps, je vous aurais lu un petit extrait du rapport de la Commission de la santé et des services sociaux des Premières Nations du Québec Labrador, parce que ça fait vraiment, quand j'ai lu ça, là, 12 travaux d'Astérix. Ça a des référents pour nous. Et, dans ce sens-là, bien, je pense que vous voyez, d'entrée de jeu, d'une façon impressionniste, ce avec quoi je vais aborder, c'est la question des compétences.

Je pense qu'une des solutions pour mettre fin à cette... Je ne vous parlerai pas d'indépendance du Québec. Moi, j'y crois. Je sais que vous n'êtes pas là, mais il faut absolument que le gouvernement du Québec assume sa pleine responsabilité en matière de responsabilité populationnelle. Et ça, c'est pleinement de nos compétences. C'est sûr que ça va vouloir dire qu'il y a des appels à l'action. Là, je pense autour des 80, 82, 83, qui dit qu'il faut que le gouvernement du Québec initie ces négociations-là avec le gouvernement fédéral et les gouvernements autochtones, justement, pour être en mesure de signer des ententes tripartites qui vont, disons, guider le phare pour faire en sorte que les 12 travaux d'Astérix deviennent un peu moins compliqués, puisque le Québec a la responsabilité populationnelle dans sa loi sur les santés et les services sociaux.

Je veux identifier un autre problème, c'est la question du financement par projet pilote. Et là, on l'a vu par le passé, il y a des projets, comme, par exemple, la Clinique Minowé dans, je pense, votre circonscription ou juste à côté. Je pense aussi au programme Wigobisan à Lac-Simon, je pense à la clinique, justement, nouvellement financée. Bien, je sais que vous avez financé le béton, mais je ne sais pas qu'est-ce qu'il va avoir comme services dans la clinique. J'attends toujours des nouvelles de ça. Bref, ce soit... aussi, le centre d'amitié autochtone Mamuk à Québec.

Bref, il y a quelque chose de particulier de l'ensemble de ces projets-là, c'est qu'ils sont issus d'autochtones hors communauté souvent, sauf Lac-Simon, dans ce que j'ai nommé, qui ont des initiatives locales qui sont le fruit et qui... d'initiatives locales qui, malheureusement, n'ont pas un financement... que le financement pérein... pérenne, pérenne, pardon, n'est pas assuré, alors donc, financement par projet.

Et vous voyez, voilà une autre raison pour laquelle, lorsqu'on reconnaît le racisme systémique, M. le ministre... c'est qu'on est capable de poser des gestes qu'on sait que le gouvernement d'après ne va pas défaire puisqu'on agit dans le système et non pas comme des initiatives fort intéressantes comme les navigateurs, les agents de liaison. Ce n'est pas mauvais en soi, sauf que ça ne change pas profondément la loi. Donc, après ça, bien, facile de mettre la hache là-dedans puis changer ça. Bref, c'est ça.

Donc, la question du financement est fondamentale. Pourquoi? Bien, parce que, justement, parce que les compétences sont en jeu, justement, parce qu'il y a eu du racisme systémique depuis des décennies, voire des siècles, ça fait en sorte que la reconnaissance du rôle et de la capacité des Premières Nations de gérer leurs services de santé ou leurs initiatives de santé dans leurs approches à eux, bien, fait en sorte qu'il faut qu'il y ait des ententes pour que l'argent soit au rendez-vous. On ne peut pas voir des pinottes quand ça va mal puis, après ça, se retrouver à quêter l'argent au gouvernement. Donc, les solutions sont sur la table.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Lafrenière : Merci, M. le Président. Merci, collègues de l'opposition. Encore une fois, ça nous permet d'avoir de bonnes discussions. Et j'ai bien aimé quand on a parlé des soins de santé et de voir de quelle façon aussi on peut s'assurer d'un financement qui est pérein. Donc, à chaque année, les gens ne se demandent pas : Est-ce que ça va revenir? Est-ce que je suis dans une insécurité? Notre plan d'action prévoit un financement sur cinq ans. Quand on dépose notre plan d'action, notre plan d'action du 200 millions, tout ce qu'on annonce jusqu'à présent, c'est sur un horizon de cinq ans.

Et je dois vous dire aussi, M. le Président, que les actions qu'on annonce dans les dernières semaines, dans les prochaines semaines aussi, c'est inspiré d'un plan d'action gouvernemental pour le développement social et culturel des Premières Nations et des Inuits. Et ça, je dois saluer le précédent gouvernement, qui avait commencé le travail en cette matière. Ça fait que vous voyez qu'on réussit à bien s'entendre, puis ma grand-mère va être fière, je ne mets pas ça sur le dos des autres, on est capable de bien travailler ensemble. Et c'est quelque chose qui avait débuté sous l'ancien gouvernement, puis on a repris ses actions, puis on les met de l'avant.

Tout à l'heure, on parlait de sécurisation culturelle aussi et difficultés des langues, j'en suis. Et, quand on parlait de navigateurs, un des points importants des navigateurs, c'est d'être capable d'accueillir les gens dans leur langue. Et c'est pour ça qu'on n'est pas arrivé avec une mesure que j'appellerais du mur-à-mur, en disant : Voici comment on va fonctionner. Puis ce serait simple, en passant, M. le Président, hein, de dire : Voyez, on va embaucher tant de fonctionnaires mur-à-mur, voici ce qu'on va faire. Ce n'est pas ce qui est préconisé du tout. C'est vraiment une approche qui va être régionale. Alors, pour exemple, quand on parlait du centre hospitalier de Joliette, bien, avec la nation attikamek, on va le développer ensemble et s'assurer que nos navigateurs ont une connaissance de cette réalité-là. Et on va le développer ensemble, même pour la formation. La formation, il y a un tronc commun, mais ça va être ajusté avec chacune des communautés, parce qu'on ne veut pas tomber dans du mur-à-mur, on veut vraiment s'ajuster. Alors, ça, c'était la première des choses que je voulais dire.

Tout à l'heure, ma collègue m'a fait sourire aussi, quand elle parlait d'indépendance. Je n'embarquerai pas longtemps sur ce sujet-là. Mais, étant donné qu'elle a ouvert la porte, je pense qu'elle va bien comprendre notre point aussi, quand on parlait de déclaration des Nations unies, on est en accord avec le principe. Encore là, on trouve ça fort intéressant. La raison pour laquelle nous, comme sept autres collègues de sept autres provinces, on réagit, c'est qu'on se le fait imposer, et là c'est une attaque directe en notre pouvoir de gouvernance ici. Il y a plusieurs provinces qui lèvent la main en disant : On est tous d'accord avec le principe, qui est fort intéressant. Puis je reviens avec le Principe de Joyce, c'est la même chose, on est d'accord.

Alors, ne jetons pas tout ça, on est d'accord avec la majorité. Il y a des points sur lesquels on ne s'entend pas. Alors, je suis persuadé que ma collègue tient à ce que le Québec reste fort dans tout ça et fasse respecter ses droits, et c'est pour ça qu'on est en accord avec le principe. C'est dans l'application, dans la façon que ça a été fait, du fédéral, qu'on réagit en disant : Il faut le faire correctement, il faut bien l'attacher, parce qu'au final, quand ça va s'appliquer sur le terrain, bien, il faut que ça soit bien fait. Alors, ça, c'est un autre exemple, M. le Président.

Depuis tout à l'heure, on parle beaucoup de santé, je m'en voudrais de ne pas mentionner des choses qui... ce que j'appelle des bons coups, parce qu'il y a des choses qui se passent bien, qui se font bien. Puis c'est normal, dans les médias, on va parler plus de l'avion qui s'écrase que celle qui atterrit, mais laissez-moi vous parler de quelques avions qui ont atterri correctement récemment. Pourquoi? Parce que, vous savez, les employés dans le monde de la santé, dans le milieu de la santé, font un très bon travail. Il y en a certains qui font un moins bon travail, puis, dans ce temps-là, on le corrige, mais je vais vous donner un exemple avec Manawan.

Manawan, il y a de cela une semaine et demie, le chef Ottawa me contacte, il me dit deux choses. Un, au niveau de la santé mentale, il sent que sa communauté est vraiment vulnérable. Deux, il dit : Mes gens qui donnent des soins sont épuisés, on n'y arrive pas. Ça, je l'appelle un jeudi. Je contacte mes deux collègues — parce que j'ai dit, tout à l'heure, qu'entre ministres on travaille bien ensemble dans ce dossier-là — donc, mes deux collègues à la Santé, et, le lendemain, on confirme au chef Ottawa qu'il va avoir de l'aide. Non seulement il a eu de l'aide, il y a eu des équipes qui ont remplacé les équipes médicales sur le terrain pendant le week-end, mais il y a une équipe du CIUSSS aussi qui a été déployée pour aider en matière de santé mentale.

Et je parlais la semaine dernière avec le chef Ottawa, il me disait : Tu sais, Ian, ça n'a pas été facile au début, parce que les gens de la santé, quand ils ont appris qu'ils s'en venaient chez nous, il y en a qui avaient des craintes. Vous savez, plus tôt, je vous parlais d'apprendre à se connaître, du vivre-ensemble, bien, le monde de la santé, les gens avaient des craintes, en disant : Comment on va être reçus sur place? Puis il dit : Ian, je suis heureux de te dire aujourd'hui que non seulement ils ont été bien reçus, puis ils ont très bien mangé pendant le week-end avec nous, on les a bien acceptés, ça a bien été, mais, pour lui, c'était un petit pas de gagné avec les gens du milieu de la santé. Parce que, quand ils retournent dans leur centre hospitalier, ils vont raconter comment ils ont été bien reçus et comment ça s'est bien passé.

Puis moi, je vais tabler là-dessus, M. le Président. Parce que, oui, on peut corriger ce qui ne va pas bien, mais on peut rappeler qu'il y a des choses qui se font très, très bien, il y a un beau travail. Puis je veux saluer les gens du milieu de la santé, qui font un travail remarquable. Puis, quand ce n'est pas bien fait, on va le corriger, M. le Président, on n'a pas peur de ça. Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Je cède maintenant la parole au député de Saint-Jean.

• (11 heures) •

M. Lemieux : Merci beaucoup, M. le Président, et je vous promets de ne pas faire comme la dernière fois et m'adresser directement à mes collègues, que je salue, d'ailleurs, mais de passer par vous.

Nous arrivons ici avec ce que nous sommes et ce que nous avons été. Petit détour pour vous dire que j'ai eu la chance d'aller travailler comme journaliste en territoire autochtone à peu près partout, dans le moyen Nord du Québec, mais dans l'ouest aussi, où j'ai passé 10 ans, et dans le Nord, le Nord dans l'Ouest. Et je voulais qu'on fasse, pas une parenthèse, mais je voulais qu'on regarde ce dont on parle aujourd'hui, les soins de santé et de services sociaux pour les autochtones et les Premières Nations dans le Grand Nord. Le contexte ici aussi est important, il fait foi de tout. C'est une marotte de ma part de toujours parler du contexte, mais je commence en disant, pour faire court, qu'il faut arrêter de regarder le nord avec nos yeux et surtout nos lunettes fumées du Sud.

Donc, le nord, le Grand Nord, l'Arctique, déjà, si je parle de Nunavik, Nunavut, on vient de perdre la moitié du monde qui ne savent pas lequel est lequel, en partant. Wikipedia, c'est facile, on l'a sur nos téléphones, nos tablettes. Quelques mots vite fait : «Durant la guerre froide, le monde commence à s'intéresser à l'Arctique, [bla, bla, bla].

«Ce n'est qu'à partir des années 1960 que le gouvernement du Québec commence à jouer [son] rôle sur cette portion de son territoire acquise 50 ans plus tôt. Dans l'élan de la Révolution tranquille, Québec reprendra progressivement le contrôle», bla, bla, bla... Bref, si on s'intéresse au sujet, il faut voir le contexte, être plus large, et savoir de quoi et de qui on parle.

Il y a aussi, quand je parlais du contexte, ce que l'actualité nous dit et nous fait penser. L'actualité, si je me reporte à mes bonnes années, à mes belles années, il y a à peu près 20 ans dans les médias, avant que les drogues dures fassent leurs ravages dans le nord, c'était la colle et l'essence. Les plus jeunes ne sauront pas de quoi je parle, mais souvenez-vous, vous allez tout de suite voir des images. Je me souviens des reportages de mes collègues de l'époque qui nous scandalisaient littéralement, en nous montrant des images des groupes de jeunes autochtones qui s'intoxiquaient en respirant des vapeurs d'essence. Il y en a, avant, plusieurs années avant, que c'était de la colle.

Plus récemment, les vagues de suicides... et là encore, les images de ce que les journalistes qui sont allés là-bas, parce que c'est loin... Alors, on y va avec nos yeux du Sud, on arrive dans le nord et tout nous surprend, tout nous dérange, tout nous frappe. Bref, les vagues de suicides, jusqu'à en parler presque de suicides à la chaîne, faisaient aussi les manchettes récemment.

Parlons-en, parce que c'est au coeur du sujet dont on parle, parce que c'est encore, malgré que ce soit encore un peu tabou, c'est toujours un énorme problème, particulièrement chez les jeunes. Et j'essayerais presque de dire que ceux qui y survivent doivent composer avec des problèmes de violence systématique, mais ça, c'est une autre histoire.

Donc, en consultant le rapport de gestion 2019‑2020 déposé cet été par le RRSSSN... Oui, je sais, c'est des acronymes qui se compliquent, plus on... Mais appelons-le, pour les intimes, le RR triple S N, en réalité, c'est la Régie régionale de la santé et des services sociaux du Nunavik. Ceux qui n'avait pas compris, le Nunavut, c'est dans l'ouest, le Nunavik, c'est au Québec. Bon, si on regarde ce rapport-là, il est fabuleusement intéressant. Et je vais faire vite sans trop le citer parce que ce que j'en retiens, c'est qu'on a trouvé les moyens... D'ailleurs, il y a du financement, là, il y a 75 millions qui ont été débloqués pour les prochaines années, à partir desquelles on va pouvoir financer ce dont je vais vous parler. On a demandé aux Inuits de créer, imaginer, travailler un programme de prévention du suicide par et pour eux. Et ça fait toute la différence.

Il y a donc maintenant une stratégie régionale en prévention du suicide. Il y a maintenant des solutions, des façons d'essayer d'intervenir qui leur appartiennent. Le ministère de la Santé et des Services sociaux, pour parler d'argent... parce que c'est dramatique quand nous, on en parle, ou, quand on en parle dans le Sud, on pense en termes d'argent, combien ça coûte, puis, en réalité, il faut penser en termes de vie et de suicide. Le ministère de la Santé, donc, a donné au RRSSSN 118 millions pour 2020. Ça constitue une partie de son budget, parce qu'il y a aussi du fédéral là-dedans. Et, au final, ce qu'il faut savoir, c'est qu'il y a maintenant une stratégie qui est financée. À partir du 1er octobre dernier, on pouvait déjà embaucher du monde pour essayer de faire ce qu'ils ont constaté qu'il fallait faire, qu'ils avaient besoin de faire, et dans une grande marge aussi, le faire eux-mêmes, par eux, pour eux. En ce qui me concerne, c'est une énorme partie de la solution. Et, quand on ne met pas nos lunettes fumées du Sud et qu'on regarde la réalité terrain dans l'Arctique, ça change tout.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Je cède maintenant la parole au député de l'opposition officielle, le député de Jacques-Cartier. À vous.

M. Kelley : Merci, M. le Président. Le 25 novembre, nous avons souligné la Journée nationale de commémoration des actions contre la violence faite aux femmes. Je pense, c'est important juste de rappeler qu'on a eu le rapport... bien, l'enquête nationale sur les filles autochtones disparues et assassinées, mais c'est toujours important juste de rappeler les faits que les femmes autochtones sont 3,5 fois plus... excusez-moi, 3,5 fois plus susceptibles des actes de violence conjugale. Une femme autochtone est 12 fois plus... 12 fois plus susceptible d'être assassinée, quand on regarde les chiffres envers les peuples non autochtones. Alors, c'est des chiffres qui sont vraiment tristes, mais c'est une réalité.

But I did want to just take the point that, this week, there was a report that was released by The Native Women's Association of Canada just to highlight that the 215 indigenous women that they follow on this question have said that, during COVID and during the measures put in place to confine people, at least in these cases it's 251 they followed... results that they are experiencing more violence at home. It's extremely important to remember that.

C'est la même chose pour toute la société des femmes qui sont victimes de violence. La COVID a vraiment mis eux autres dans la situation où ils sont plus vulnérables puis à risque, mais la réalité est plus pire aussi pour les femmes autochtones du Québec, mais aussi du Canada.

Alors, pourquoi je fais ça? Je porte le ruban blanc cette semaine, comme mes collègues, mais je veux juste poser la question au ministre, peut-être, de nous juste donner une mise à jour sur les actions que le gouvernement a pris dans les derniers deux ans sur... pour mieux protéger ces femmes-là, mais aussi quelles initiatives est-ce que le ministre des Services sociaux a prises pour aussi aider les femmes autochtones. Parce qu'on peut regarder... oui, des gens habitent sur réserves ou sur leurs territoires, mais aussi, je pense à des femmes qui, peut-être, résident en ville, comme à Montréal. Il y a des femmes qui sont à risque là aussi. Alors, c'est un enjeu important, je pense, pour toute notre société.

Puis je veux encore juste revenir un petit peu à une suggestion. Parce que, de faire un vrai changement au sein du système de santé, ça va prendre pas juste un comité des ministres, mais il y a quelque chose qui existe pour les anglophones, qui est l'accès à des services en santé et des services sociaux en langue anglaise. C'est un comité qui est encadré par une loi, qui oblige chaque CISSS et CIUSSS de livrer des rapports, des services qui sont offerts à la communauté, mais aussi il y a des lacunes. Il y a des représentants dans les différentes régions du Québec, des anglophones qui viennent de l'Estrie, l'Outaouais, quand même, de la Côte-Nord, Bas-Saint-Laurent, on peut regarder tout le territoire du Québec. Il y a des gens qui viennent de la communauté qui siègent sur un comité au sein du ministère de la Santé pour s'assurer que les services sont là. Et, des fois, ils vont bien expliquer au ministère que : Aïe, ça ne va pas bien, ici. Il y a une lacune ici, il faut régler le problème, là.

Alors, je pose ça aussi, un petit peu, comme peut-être une option pour le ministre des Affaires autochtones puis aussi le ministre des Services de santé de regarder cet exemple qui existe pour les anglophones et de peut-être former quelque chose qui est similaire avec les autres nations autochtones du Québec. Parce que, comme je dis, il y a des fonctionnaires du gouvernement du Québec qui siègent sur ce comité-là avec la communauté. Et, des fois, ça marche bien. Quand il y a une volonté, ça marche bien, quand la loi est bien encadrée, ça peut marcher bien.

Et je dis que c'est quelque chose qui a été mis en place pendant les discussions autour de la Charte de la langue française dans les années 70. La communauté a travaillé avec le gouvernement, le Parti québécois, à l'époque, de M. Lévesque, pour s'assurer que les anglophones étaient bien représentés au sein du système de santé. Alors, peut-être, un modèle comme ça peut fonctionner pour le ministère de la Santé aussi. Et sinon, au minimum, on va avoir des rapports qui sortent... qui dit : Bien, regarde, sur tout le territoire du Québec, il manque ça, ça, ici, et ici, et là.

Parce qu'on a vu encore... je reviens des appels d'actions dans le rapport de la commission Viens... c'est la récolte des données qui est difficile au Québec puis au Canada en termes de qu'est-ce qu'il se passe avec les peuples autochtones. Et c'est bien noté quand ils ont essayé, la commission Viens, de faire le résumé de la situation des autochtones. Ils ont dit : Des fois, c'est très difficile de trouver l'information. Les chiffres n'existent pas.

Alors, je lance ces deux éléments-là au ministre puis j'attends d'entendre ses réponses. Merci.

• (11 h 10) •

Le Président (M. Provençal)  : Merci. M. le ministre.

M. Lafrenière : Merci beaucoup, M. le Président. Avant de répondre à la question du collègue, je veux répondre à la question de la collègue cheffe de la deuxième opposition. C'est à partir des articles 12, tantôt, quand on parlait de la langue, et il y en a plusieurs qui font référence à la langue, alors c'est important. Puis, en même temps, ça permet de répondre à mon collègue de Jacques-Cartier sur l'importance de la langue dans les services. Et c'est pour ça que je reviens, encore une fois, avec les navigateurs qui vont être dans les centres hospitaliers, qui vont avoir cette capacité-là d'échanger avec la clientèle dans la langue... dans leur langue maternelle. C'est important. Vous avez parlé de l'anglais aussi, puis je comprends cette importance-là avec certaines communautés aussi.

D'ailleurs, j'aimerais vous souligner, M. le Président, qu'il y a présentement un comité triparti qui existe, avec le fédéral, nous et l'Assemblée des premières nations du Québec et du Labrador, qu'on appelle, entre nous, l'APNQL. Alors, il y a un comité triparti qui existe déjà pour voir, au niveau de la santé, qu'est-ce qu'on peut faire, qu'est-ce qu'on peut faire pour améliorer les soins et comment on peut donner les soins directs.

M. le Président, je m'en voudrais, quand mon collègue de Jacques-Cartier parle de violence faite aux femmes, de ne pas embarquer sur un sujet qui est très cher pour moi. Vous savez, j'ai eu l'honneur et le plaisir de présider une commission spéciale importante pour nous, la Commission spéciale sur l'exploitation sexuelle des mineurs. Quand on parle de jeunes femmes qui sont vulnérables, quand on parle de jeunes femmes qui avaient besoin d'aide, et surtout, que le gouvernement agisse, c'est un exemple qui est très concret. Et, d'ailleurs, dans cette commission, M. le Président, on a... on s'est déplacés à Val-d'Or pour rencontrer les membres des Premières Nations, pour entendre ce qu'ils avaient à nous dire.

Parce qu'effectivement, comme mon collègue de Saint-Jean disait tout à l'heure, on ne peut pas faire du mur-à-mur, on ne peut pas se servir des mêmes services, si vous voulez, qu'on a dans le Sud, en disant : Ça va s'adapter. Bref, comme il l'a si bien dit tout à l'heure, on ne peut pas regarder ça avec nos yeux du Sud. Il faut s'adapter, il faut regarder, dans les communautés, quels sont les besoins.

Sans parler des résultats de cette commission spéciale, je peux vous dire cependant qu'en se déplaçant, pour nous, c'était important d'avoir la vision du terrain, voir comment on pouvait répondre à leurs besoins spécifiques.

Quand on parle des clientèles vulnérables, M. le Président, c'est une clientèle qui est très vulnérable. Je vais en profiter, parce que notre temps est compté — on passe du temps de qualité ensemble, mais notre temps est compté — pour vous parler d'une autre clientèle vulnérable, et je parle de la protection de la jeunesse aussi, M. le Président. Quand on parle de femmes, souvent, on va parler de protection de nos enfants aussi, et je vais prendre un exemple concret qui est arrivé, et je suis persuadé que, dans mon prochain bloc, je vais avoir la chance de reparler de la protection de la jeunesse, parce que c'est important pour tout le monde ici.

Récemment, on a vécu un cas à Mani-Utenam. Et, encore là, quand je vous parle de notre nouvelle approche dans notre disponibilité, dans notre proximité, le chef m'a contacté en disant qu'il y avait eu un événement à Mani-Utenam, et ça n'allait pas bien. Ce qu'il s'est passé, on a appliqué les processus standards. Dans le fond, on n'a pas fait ce que le collègue de Saint-Jean a dit tout à l'heure, on ne s'est pas adaptés, avec nos lunettes locales, en disant : Comment on peut le faire dans cette communauté? Est-ce qu'on ne devrait pas parler aux autorités locales? Comment on pourrait faire mieux? Alors, entre vous et moi, M. le Président, ça aurait pu être fait très différemment, puis ça n'a pas été le cas.

Est-ce qu'on peut corriger le passé? Non, mais on peut améliorer le futur. Qu'est-ce qui a été fait par la suite? Avec mon collègue ministre délégué à la Santé, c'est de regarder, premièrement, à très courte échéance... Parce qu'on peut parler de changements législatifs, M. le Président, mais ça n'arrive pas demain. Donc, à courte échéance, comment la Protection de la jeunesse va mieux travailler avec les organisations locales? Ça, dans la semaine, ça s'est réglé. Par la suite, qu'est-ce qu'on a dit aussi? Regardons comment déléguer certains pouvoirs en matière de protection de la jeunesse. Et ça, M. le Président, ça se fait ailleurs. Je peux vous donner des beaux exemples. Lac-Simon, pas plus tard que la semaine dernière, j'ai signé ce protocole, justement, pour leur donner des pouvoirs en vertu de l'article 37.5 pour qu'ils appliquent eux-mêmes la protection de la jeunesse. La communauté attikamek a déjà ce modèle-là.

Alors, quand on parle de partager, justement, et d'ajuster notre façon de faire... Protection de la jeunesse, vous savez, suite aux événements tragiques de Granby, il y a plusieurs changements qui ont été faits; on a la commission Laurent qui va nous rendre ses recommandations, il y a déjà un volet autochtone qui est important pour nous. Mais, en attendant, quand on a des demandes avec les différentes communautés — parce qu'il ne faut pas voir les peuples autochtones comme un bloc monolithique, hein, ce n'est pas tout le monde qui a les mêmes besoins — on s'adapte, et, dans le cas des Attikameks, dans le cas des Algonquins à Lac-Simon, on s'est bien adaptés; Val-d'Or, c'est la même chose, il y a une entente qui existe à Val-d'Or aussi pour l'application de la protection de la jeunesse. Alors, c'est vraiment ça quand on parle d'un partenariat, c'est de s'ajuster, de donner des bons outils et, après ça, bien, les assister dans leur travail au quotidien, et ça fonctionne, M. le Président.

Ce n'est pas parfait. Le système, il n'est pas parfait. Mais, tantôt, je vous parlais de bons coups. Moi, c'est des bons coups, je voulais souligner aujourd'hui, parce que le système sait s'adapter, on a des gens de coeur qui sont sur le terrain, et ça nous a démontré que c'étaient des beaux résultats pour le bien de la communauté et les gens qui sont vulnérables. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. Je vais maintenant redonner la parole à la députée de Roberval. À vous.

Mme Guillemette : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, pour ce deuxième tour de parole, j'aimerais prendre un moment pour vous entretenir de santé mentale. Vous ne serez pas surpris. En cette période de crise sanitaire, c'est un sujet auquel on donne beaucoup de place. On parle beaucoup, ces temps-ci, de l'importance de la santé mentale, et c'est un facteur important qu'on doit aussi prendre en considération lorsqu'on pense aux enjeux de la santé des peuples autochtones du Québec.

Malheureusement, notre capacité à estimer les besoins des Premières Nations et des Inuits en matière de santé mentale est affectée par l'absence de données spécifiques sur les peuples autochtones. Par exemple, nos données statistiques sur la dépression ne peuvent être ventilées selon l'identité autochtone. Comme cette information ne fait pas partie des instruments de collecte des données et que les régions majoritairement peuplées d'autochtones ont parfois décliné la participation à certaines enquêtes, il va de même pour les données sur le taux de suicides, qui ne peuvent être déterminées à partir des données des enquêtes québécoises. Cette situation est vraiment problématique, parce qu'elle nous empêche de mettre à profit et de mesurer le défi auquel nous devons faire face afin d'assurer un soutien adéquat aux peuples autochtones.

Afin d'inclure les groupes autochtones dans les enquêtes du Québec, des travaux sont en cours présentement pour explorer la possibilité de prendre en compte l'identité autochtone dans une perspective globale au sein du MSSS, notamment avec la mesure 4.2.6 du Plan d'action gouvernemental pour le développement social et culturel des Premières Nations et des Inuits 2017‑2022 .

L'inclusion des peuples autochtones dans les enquêtes du Québec a comme finalité de permettre au MSSS de rehausser la surveillance ainsi que d'améliorer la compréhension du contexte de la dépression, de l'alcoolisme et du décès par suicide au Québec, incluant celle des peuples autochtones. Ces travaux permettront de produire des informations pertinentes de qualité et disponibles en temps opportun aux différents acteurs de la santé publique afin de mieux soutenir et d'adapter adéquatement les politiques et les programmes de prévention existants. Mon collègue de Saint-Jean, tout à l'heure, a fait mention d'une belle collaboration qui a été mise à profit pour mieux soutenir, dans la réalité des peuples autochtones, une communauté.

Il y a certains liens qui sont faits déjà entre santé mentale et sentiment d'appartenance. Vous savez, une bonne santé mentale, c'est nourri par un sentiment d'appartenance fort, une inclusion sociale, une confiance en ses moyens et en ses aptitudes. Ça peut aussi s'appuyer sur un sentiment de compétence, sur la spiritualité, mais surtout sur le soutien affectif qu'on reçoit.

On sait que la mise en valeur de la culture passée et présente est quelque chose de nécessaire pour que leur rôle sur leur territoire québécois soit reconnu de tous, pour qu'on évite de tomber dans le piège de la représentation anecdotique de l'histoire dans nos institutions, les institutions culturelles, éducatives.

Cet été, M. le Président, j'ai eu la chance d'aller visiter le musée amérindien et d'aller participer à des fouilles archéologiques. Et, lorsque la situation le permettra, j'invite M. le ministre à venir visiter ce magnifique musée autochtone. Donc, en attendant d'avoir des données empiriques pour diriger plus spécifiquement notre action aux besoins des peuples autochtones, il est important qu'on agisse maintenant pour favoriser une bonne santé mentale dans les communautés. Certaines pistes de solution sont déjà bien connues par notre gouvernement et seront explorées. Je sais déjà que le ministre a ce dossier-là très à coeur. Nous continuerons d'agir en collaboration avec les Premières Nations.

Et je ferais un petit clin d'oeil, M. le ministre. Hier, on a eu la nomination de Mme Marie-Andrée Gill, on parle de culture, donc, Mme Marie-Andrée Gill, une écrivaine originaire de Mashteuiatsh, a reçu, du CALQ, du Conseil des arts et des lettres du Québec, en collaboration avec Culture Saguenay—Lac-Saint-Jean, le prix de l'Artiste de l'année. Donc, félicitations, Mme Gill. Et on a plusieurs belles exemples de Mashteuiatsh ou de d'autres communautés, si on ne pense qu'à Michel Jean, qui a reçu le Prix littéraire France-Québec 2020. Donc, la richesse de la culture autochtone, on doit se l'approprier aussi, nous... Pour contrer la stigmatisation, il n'y a rien de mieux que de bien connaître nos deux peuples, pour pouvoir collaborer pour le meilleur, pour l'avenir. Donc, je vous remercie, M. le Président.

• (11 h 20) •

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au député du troisième groupe d'opposition, le député de René-Lévesque. À vous, monsieur.

M. Ouellet : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, à mon tour de saluer le ministre et les collègues ce matin pour cette interpellation. Avant de faire cette interpellation, j'ai parcouru une vaste revue de presse. Mais j'aimerais juste attirer l'attention sur trois articles qui, aujourd'hui, vont faire partie assurément du plaidoyer que nous allons faire pour améliorer les services de santé pour les Premières Nations.

Le 19 novembre 2020, Espaces autochtones, pour Radio-Canada : Les communautés autochtones du Québec rattrapées par la deuxième vague. Un peu plus de 150 cas confirmés, dont au moins 81 depuis la première vague. ICI Radio-Canada Côte-Nord, le 20 novembre : Retour des points de contrôles aux entrées de Uashat. 22 août 2020, sur Espaces autochtones, encore, sur Radio-Canada : Le prudent déconfinement des Mohawks de Kahnawake.

C'était écrit dans le ciel, M. le ministre, les communautés autochtones étaient parmi les populations les plus à risque pendant cette pandémie, et avec raison. Il fallait tout faire pour les outiller, pour les protéger, pour éviter, autant que possible, que le virus entre dans les communautés. Elles ont tenu le fort, elles ont paré la menace, et c'est parce qu'elles étaient organisées, et elles l'ont fait spontanément. Elles ont limité l'accès à leurs points d'entrée, elles ont... elles se sont déconfinées moins rapidement que le reste du Québec. Certaines ont reporté le début des classes, d'autres ont établi des zones de transition.

Il faut rappeler que, chez les autochtones, les aînés sont extrêmement respectés. C'est peut-être sur la base de cette valeur humaniste que les communautés ont si bien résisté. Je relisais, d'ailleurs, un article qui cite un jeune Mohawk de 10 ans, en parlant de l'importance de tout faire pour protéger les aînés pendant cette pandémie : «Les aînés, pour nous, c'est comme un arbre. Ils font partie de l'arbre.»

Ce que j'essaie de démontrer, c'est que, grâce à leurs valeurs de solidarité et de respect, grâce à leur leadership, à leur cohérence, les communautés autochtones ont fait face à la première vague et ont, depuis le début de la deuxième vague, fait face avec courage et efficacité. Ils se sont débrouillés, malgré le fait que les services de santé dispensés par l'État étaient déficients dans certains cas. Elles se retrouvent dans des services trop souvent discriminatoires dispensés par l'État québécois.

D'ailleurs, je vous rappelle que ma collègue députée de Joliette a déposé une motion pour enchâsser le concept de sécurisation culturelle dans la loi sur la santé et les services sociaux. Le plus important, c'est que cette motion a été adoptée à l'unanimité. Donc, comme parlementaires, nous avons l'obligation morale d'agir en ce sens. On a annoncé de la formation, c'est bien, M. le ministre, mais, pour se donner tous les moyens de ne jamais reculer, ça prend un outil législatif.

Pendant la pandémie, M. le ministre, les élus de ma région, de la Côte-Nord, avec les élus des Premières Nations, on a tenu plusieurs rencontres téléphoniques. Parce que, vous le savez, sur la Côte-Nord, ce n'est pas un système de santé comme on connaît ailleurs dans la métropole et dans la capitale, et, dans certains cas, on peut même le qualifier de médecine de brousse. Donc, les gens de la communauté d'Essipit, de Pessamit, de Uashat mak Mani-Utenam, d'Ekuanitshit, de Nutashkuan, d'Unamen Shipu, de Pakuashipi, de Matimekosh—Lac John ont, à chaque semaine, expliqué leurs craintes, leurs peurs face à cette pandémie, et on discutait, avec les élus et la Santé publique, des meilleures façons de mettre des pratiques pour sauver leurs communautés, protéger leurs communautés. Et, vous savez, M. le ministre, les communautés des Premières Nations, ce sont des communautés tissées serrées. Dans les logements — et il y a beaucoup de surpopulation — on voit plusieurs familles partager les mêmes pieds carrés, et cette promiscuité amenait évidemment tout un défi si la COVID-19 allait se présenter à l'intérieur même des communautés.

Donc, tout ça pour dire qu'aujourd'hui on ne peut pas faillir, et j'aurais des questions pour le gouvernement pour faire encore mieux dans cette pandémie et aider encore nos communautés, notamment celles de la Côte-Nord, mais toutes les communautés des Premières Nations sur l'ensemble du territoire.

On apprenait ce matin qu'Ottawa ne digère tout simplement pas que votre gouvernement a mis de côté 1,2 million de tests de dépistage rapide de la COVID-19, qui ne sont tout simplement pas déployés. Donc, pour nous, on croit que ces tests rapides devraient être utilisés pour aider les Premières Nations à diagnostiquer rapidement la présence de la COVID pour assurer de limiter la propagation. Donc, où en est le déploiement du gouvernement pour les tests rapides? Est-ce que votre gouvernement aussi envisage un plan d'évacuation aérien d'urgence pour évacuer des membres des communautés éloignées malades de la COVID? Et, en terminant, est-ce que le gouvernement est ouvert à déployer aussi temporairement et rapidement des soins ambulatoires directement dans les communautés pour éviter au maximum les déplacements des gens vers les hôpitaux, où ils risquent de contracter la COVID et de les ramener dans leur communauté?

Bref, le ministre de la Santé nous dit qu'il en fait beaucoup. J'aimerais, aujourd'hui, entendre du ministre des Affaires autochtones : Avec son arrivée, quel est le leadership qu'il attend occuper pour ce qui est de la limitation de la propagation de la COVID-19 à l'intérieur des communautés des Premières Nations? Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup, M. le député. Alors, M. le ministre, je vous recède la parole.

M. Lafrenière : Merci beaucoup, M. le Président. Merci à mon collègue de René-Lévesque pour sa question qui me permet de parler, justement, de cette pandémie qui frappe effectivement très fort dans les communautés. Puis on comprend, hein, avec la promiscuité, avec un problème de logis, avec des gens... plusieurs personnes, plusieurs familles dans la même unité d'habitation, on comprend la sensibilité de tout ça.

Et c'est pour ça que nous sommes en lien, je vous dirais, quotidiennement avec les communautés, puis je peux vous donner des exemples. Tantôt j'ai parlé de Manawan, je vais y revenir. Mais Wemotaci l'a vécu aussi, Wemotaci a des cas confirmés positifs dans la communauté. Lac Barrière, même chose, un cas qui a été déclaré. Mais, rapidement, les gens de la communauté s'inquiètent. Pourquoi? Parce que leur crainte, c'est que ça se propage rapidement.

Dans le cas de Manawan, quand on a su, justement, qu'il y avait une hausse des cas, quand on a su par le chef Ottawa qu'il y avait une problématique, on a agi, on a agi rapidement. Et, vous savez, on pourrait dire que les soins de santé, c'est de compétence fédérale dans une communauté, mais on a agi. On a agi avec le CIUSSS. Ça, c'est un geste concret, une équipe qui... des équipes, pardon, qui ce sont déplacées pendant le week-end pour aller sur place pour, justement, faire en sorte de calmer l'éclosion qu'il y avait là et surtout de soutenir le personnel médical, qui était, bien honnêtement, brûlé complètement du travail qu'il faisait là. Alors, ça a été fait, ça a été fait rapidement, puis on n'a pas attendu d'avoir des grands principes, on l'a fait rapidement sur la demande qu'ils ont...

Pour ce qui est de barrer l'accès à certaines communautés, c'est un réflexe qui était approprié. Et je dois vous avouer, M. le Président, depuis mon arrivée en poste, j'aurais aimé faire la tournée des communautés pour rencontrer les gens, mais c'est la dernière chose à faire présentement. Dernière chose à faire, moi, qui arrive dans une zone en Montérégie, zone rouge, zone à risque, d'aller dans des communautés comme ça et de risquer de propager la COVID. Alors, on le fait par téléphone, mais on est en lien, je veux vous rassurer, on est en lien. Mais il y a une très grande sensibilité des communautés des Premières Nations à la visite, d'avoir de la visite sur leur territoire, ils ne tiennent pas à ça, mais pas du tout, pour les raisons que vous avez évoquées tantôt. Alors, oui, on y travaille.

En toute transparence, vous avez parlé des tests rapides, je vais faire des vérifications, je ne vous dirai pas n'importe quoi, mais je ne le sais pas, je ne le sais pas, mais je vais faire des vérifications avec ce que vous m'avez apporté. Je peux vous dire a contrario que, dans la région de l'Abitibi, il y a une communauté qui m'avait interpelé, ils disaient qu'il manquait de «testing kit», des trousses de test, et on a fait l'appel avec nos collègues du fédéral, puis ça s'est réglé rapidement. Alors, on le fait, ça, c'est le genre de chose qu'on fait au quotidien. Je dis souvent que, dans notre secrétariat, on est des facilitateurs, on est impliqués dans la majorité des dossiers, mais avec d'autres ministères. Et vous avez demandé quel genre de leadership on a, mais c'est très collaboratif, on travaille avec tous les ministères, on a des résultats qui sont probants, qui sont rapides.

La santé, c'est tellement important pour nous, M. le Président, que nos... pas une, mais les deux premières annonces qu'on a faites, dans le plan J'ai espoir, touchaient la santé. On a parlé, tout à l'heure, de la sécurisation culturelle, qui est si importante. Et la deuxième annonce, par la suite, c'était le Centre d'amitié autochtone de Lanaudière. Et vous allez me demander pourquoi la santé, parce que, souvent, les gens quand ils vont recevoir des soins, vont aller se loger, vont rester sur place, et ça va être à proximité, c'est même un terrain, on a pu obtenir la proximité d'hôpital, pour permettre, justement, d'avoir des soins. Parce que, vous l'avez dit tout à l'heure, vous avez parlé de médecine de brousse, puis il y a des gens qui doivent se placer au quotidien puis, oui, des communautés, mais même des gens, des fois, de régions plus éloignées qui doivent se déplacer.

Hier, je parlais à un chef, M. le Président, qui, lui, doit se déplacer avec son épouse, de venir jusqu'à Québec pour avoir des soins de dialyse. Il est heureux de savoir qu'ici, à Québec, on a un centre d'hébergement où ils peuvent rester sur place. Mais, oui, c'est un enjeu, c'est un enjeu qu'on vit avec certaines régions, on en est conscients, M. le Président, et, non, ça ne s'est pas réglé du jour au lendemain, on a encore beaucoup de travail à faire là-dedans.

Ceci étant dit, il y a des belles avancées, j'en ai parlé tout à l'heure, je vais continuer de parler de certaines avancées qui ont été faites pour les personnes vulnérables. Récemment, on a réussi à embaucher des ressources, au niveau de la DPJ, pour le Grand Nord. C'était un défi, M. le Président, on ne réussissait pas à avoir des ressources qui restaient sur place, on a réussi à en embaucher, à avoir le personnel nécessaire. Et, en ajout à ça, on a, avec la communauté crie et inuite, développé des logements qui vont être bâtis pour le personnel. C'est un autre des enjeux qu'on vit dans certaines communautés, comment avoir de l'attraction pour le personnel et comment le garder sur place. Alors, oui, il y a du logis qui va être bâti. Ça, encore là, c'est un exemple qui est très pragmatique sur comment donner des bons soins. Vous allez me dire, ce n'est pas le logis pour l'infirmière ou le médecin qui donne les meilleurs soins, mais d'avoir un médecin ou une infirmière sur place, qui peut loger sur place, ça contribue grandement à avoir des soins.

Alors, on est dans cette approche-là. Je le disais, encore une fois, on est très ouverts, très ouverts aux commentaires qu'on reçoit. Et, cher collègue, je peux vous confirmer, je vais vérifier pour les tests rapides, puis je vous reviendrai, parce que c'est important pour moi. Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Merci, M. le ministre. La parole maintenant va revenir au député de Saint-Jean.

• (11 h 30) •

M. Lemieux : Merci beaucoup, M. le Président. J'écoutais le débat, hier, aux motions sans préavis, en hommage à Max Gros-Louis et, entre autres, l'intervention du collègue de René-Lévesque, et vous allez voir pourquoi ça m'a frappé. Je me suis souvenu que c'est vraiment le premier autochtone que j'ai vu en vrai, comme on disait dans le temps, là, aujourd'hui, on dit en présentiel. Il faut dire que j'étais très jeune, c'était au Colisée de Québec, M. le député de René-Lévesque, pour le tournoi pee-wee, et que Max Gros-Louis, je m'en souviens encore, je le vois, battait la mesure dans le colisée et soulevait tout le monde avec son tambour pour appuyer son équipe. Le petit bonhomme que j'étais n'était pas peu impressionné par le tambour puis par ses couettes. J'étais impressionnée aussi, et il faut que je fasse vite parce que j'ai pris toutes sortes de notes auxquelles je veux venir, mais, en 1979, à Regina, quand le jeune journaliste que j'étais s'est retrouvé dans un «friendship centre», puis, après, quand il s'est retrouvé dans les Territoires du Nord-Ouest pendant deux semaines pour la venue du pape Jean-Paul II à l'époque à Fort Simpson, où il n'est pas venu la première puis il est revenu l'année d'après. Ça fait déjà trop longtemps de ça, il y en a qui se demandent de qui je parle quand je parle de Jean-Paul II, c'était le pape à l'époque.

Tout ça pour dire que ces impressions-là sont importantes. Puis ces impressions-là font en sorte qu'on vient conforter cette espèce de vision que j'essayais d'énoncer tout à l'heure qui est importante, parce qu'il faut voir les choses comme elles le sont sur leur terrain, qui n'est pas le nôtre. Ce n'est pas eux et nous, mais, en même temps, c'est chez eux, et il faut respecter ça.

Je ne raconte pas ça pour rien, parce qu'on arrive ici avec ce que nous sommes, comme je disais tantôt, et le contexte fait foi de tout. Donc, c'est important de le voir. Quand je parlais du Grand Nord, quand je parle maintenant du Moyen Nord, il y a plein de choses dans ce que les peuples des Premières Nations nous demandent qu'on ne comprend pas parce que, sauf erreur, on n'est pas capable de même l'imaginer dans certains cas.

Et, là encore, ce que le député de René-Lévesque vient de nous dire au sujet de la pandémie, effectivement, on a vu ça passer, mais jusqu'à quel point les personnes âgées sont importantes pour les Indiens, jusqu'à quel point on a des arguments légitimes pour faire ce qu'on a fait...

D'ailleurs, les arguments, M. le Président, du député de René-Lévesque par rapport aux tests sont plus que légitimes. Content d'entendre le ministre des Affaires autochtones dire qu'il va faire des vérifications. Moi, ma compréhension, c'est qu'on voulait les envoyer et on se prépare pour les envoyer, une fois qu'on va valider tout ce qu'il faut, vers les régions éloignées. Et il n'y a pas juste Sept-Îles puis les Îles-de-la-Madeleine qui sont des régions éloignées au Québec. Et là on aurait une bonne place où les envoyer.

La sécurisation culturelle dont a parlé la cocheffe du deuxième parti d'opposition m'a vraiment accroché au début. J'ai vraiment dit : Bien oui, il faut... encore là, il faut se remettre à leur place. Et, vous le disiez, Mme la députée d'Abitibi-Ouest, c'est tellement important de voir la situation dans leurs yeux, dans leurs langues. Mais, moi, en tout cas, les navigateurs du ministre des Affaires autochtones, je trouve ça pragmatique, je trouve ça pratico-pratique, je trouve ça réaliste. C'est, jusqu'à preuve du contraire, quelque chose d'immédiat ou de presque immédiat, et c'est tant mieux.

Le député de Jacques-Cartier a émis une... «and you were so bang on, my friend», quand vous parliez des agences qui sont obligées de considérer la partie anglophone de la clientèle. Vous venez de donner une très bonne piste à notre ministre des Affaires autochtones, et je suis certain qu'il va accrocher là-dessus bien avant l'ombudsman. Je ne sais pas lui, mais moi, l'ombudsman, à quelque part, il me semble que, dans le service de santé, au-delà des comités des usagers, il y a tellement de couches et de labyrinthes que, si on peut aller directement à ceux qui en ont de besoin, on va faire la job, comme on dit.

Et la responsabilité populationnelle, Mme la cocheffe du deuxième groupe d'opposition, bien là, vous m'avez. Je vais vraiment, moi aussi, y penser beaucoup. Pas la partie indépendantiste de l'affaire, mais la partie constitutionnelle de l'affaire. La partie représentation à Ottawa. Parce qu'au final, quand on parle de soins de santé, comme de n'importe quoi des Premières Nations, il y a toujours une espèce de triangle, qui est loin d'être amoureux. La bonne nouvelle, là-dedans, c'est que j'ai fait des vérifications et, encore récemment, on m'a dit que les relations entre le monde de la santé du Québec et Ottawa étaient aussi bonnes qu'elles pouvaient l'être dans les circonstances, même en pandémie.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Nous allons terminer le bloc d'intervention. Et je cède la parole au député de l'opposition officielle, le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley : Merci, M. le Président. Je suis content que la députée de Roberval a parlé de la santé mentale, parce que, quand on a eu l'annonce du 100 millions de dollars, c'est une bonne chose, mais j'ai dit que c'est important qu'on va trouver qu'il y a l'argent disponible pour les peuples autochtones du Québec. Malheureusement, pendant la crise et très récemment, la nation naskapie a vécu un suicide d'une très, très jeune membre de la communauté. Ça arrive trop souvent et c'est triste, alors j'espère que, dans un temps qui n'est pas... difficile pour plusieurs Québécois, on n'oublie pas que cet argent, on va trouver des parties pour les différentes communautés autochtones. Parce que ce n'est pas facile, quand même, les Cris ont fermé leur frontière pour s'assurer tout le monde reste chez eux, parce qu'eux autres... ma collègue la cheffe de la deuxième opposition officielle a parlé du fait du logement, et c'est une vraie crise, mais, quand on pense qu'il y a trois familles dans le même logement... Puis, si jamais il y a une vraie éclosion dans une communauté crie, on va avoir plusieurs problèmes pour, oui, des personnes plus aînées en sécurité, mais les personnes à risque. Alors, la prévention est très, très, très importante.

Et, en même temps, les tests rapides... est important, mais aussi je veux s'assurer qu'il y a des discussions avec le gouvernement fédéral, parce qu'ils ont dépensé beaucoup d'argent partout au Canada. Pour protéger le Manitoba, on comprend, présentement, il y a une crise là, mais j'espère qu'on va avoir notre... pas notre juste part, mais le gouvernement fédéral a un rôle à jouer aussi pour s'assurer qu'il y a un financement adéquat pour la prévention et la bataille contre le COVID pour les peuples autochtones du Québec.

Et, M. le Président, je veux juste parler un petit peu, tout le monde ici connaît mon père, plusieurs personnes, sur côté, à la fonction publique, ont travaillé avec mon père, mais tout ce dossier de la santé mentale, c'est important. Parce que mon oncle a marié une femme autochtone, à trois heures nord de Whitehorse, à Lowes, qui est allée à une école résidentielle. Alors, mes cousins sont autochtones. Pelly Crossing, c'est une ville de 300 personnes. Puis je vous dirais que, pour mes cousins, oui, il y a une mine pas loin, mais mes cousins étaient comme : à chaque fois qu'on travaille dans une mine, on pense, des fois, juste parce qu'il y a un job dans le coin, c'est y a un «fit», c'est parfait.

Mais ce n'est pas la réalité pour mes cousins, qui ont trouvé ça difficile de faire le mélange de leur culture, leur condition puis la réalité d'une moderne planète, si je peux dire ça comme ça. Ce n'était pas facile pour eux autres non plus d'aller vers le Sud, à Vancouver, pour étudier. Ce choc d'aller à une communauté de 300, à une grosse ville métropolitaine, pas facile. Et c'était difficile pour leur santé mentale, c'est quoi, notre avenir, on en est où et...

Alors, quand on parle de santé mentale et quand on voit des cas, c'est vrai, et ce n'est pas facile, et je vous dirais que ce n'est pas facile. Quand même, mon oncle, c'est un avocat qui travaille pour protéger les droits des autochtones, il peut dire que ce n'est pas facile pour les gens de Pelly Crossing, dans cette petite communauté qui est loin des ressources et des institutions. Alors, quand on parle de tout ça, ce n'est pas juste de faire un débat, mais on parle des vraies personnes qui sont dans des situations très, très vulnérables.

Je suis content de l'échange que nous avons eu ici. Moi, je pense qu'avec plusieurs des éléments qui existent des différents rapports qui ont été mis sur la table, à un certain moment, c'est probablement une bonne idée de déposer un projet de loi qui est plus large, où on peut travailler ensemble, qui on peut avoir la représentation des peuples autochtones, ici, pour peut-être modifier plusieurs lois du Québec.

• (11 h 40) •

Ça, c'est un énorme travail parce que, comme on a discuté, ce n'est pas juste le ministre des Affaires autochtones qui va changer tout. Ça prend un changement dans plusieurs différents ministères. Ça prend une action concrète du gouvernement. Moi, je pense, quand on regarde des appels à l'action, ce n'est pas une critique envers les fonctionnaires SAA, mais j'imagine qu'eux autres veulent plus de ressources aussi.

Alors, mais peut-être c'est le temps maintenant de créer un ministère qui est responsable pour, et pas juste un secrétariat. Et, encore, ce n'est pas un reproche vers un secrétariat, mais peut-être c'est le temps de donner plus de ressources, plus de fonctionnaires et un plus grand budget qui est dédié aux peuples autochtones du Québec. Puis, je pense, ça, ce n'est pas une mauvaise chose. Ça, c'est quelque chose que je pense que tout le monde, ici, sur ce côté de la Chambre, est probablement prêt à discuter, parce que c'est écrit dans le rapport. Et moi, je trouve que c'est aussi quelque chose, très, très intéressant. Et, peut-être, ça peut aider, peut-être non, mais je pense qu'il y a un débat à avoir là-dessus.

Alors, je veux juste remercier le ministre puis aussi tous ses collègues pour les interventions d'aujourd'hui. Encore, je répète, je pense, c'était une bonne discussion, dans la bonne direction. Mais c'est sûr qu'il y a beaucoup de choses qu'il reste à faire. Merci, M. le Président.

Conclusions

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. Nous en sommes aux dernières interventions. M. le ministre, vous avez la parole pour 10 minutes.

M. Ian Lafrenière

M. Lafrenière : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, chose promise, chose due, collègue de René-Lévesque. L'information que j'ai reçue, c'est qu'on est en attente de validation des tests, de voir de quelle façon ça va s'appliquer. Alors, je vais vous revenir avec plus de précision, mais c'est la première réponse que j'ai eue.

Et, pour moi, cet exercice-là, aujourd'hui, bien, ça me permet, justement, de parler de l'exercice qu'on vient d'avoir ensemble. Je ne le disais même pas à la blague quand je disais qu'on était pour avoir deux heures de temps de qualité ensemble. J'apprécie beaucoup la façon que s'est déroulé l'échange. Et je peux vous dire, j'ai pris plusieurs pages de notes, parce que c'est ensemble, je pense, qu'on va arriver à un meilleur résultat. Puis ça a été très positif ce matin.

Puis je suis heureux de voir aussi mon collègue de Jacques-Cartier, qui nous dit qu'il va nous appuyer dans nos demandes avec le fédéral pour s'assurer qu'on a les bonnes ressources, les ressources financières aussi, pour le système de santé dans les communautés. Et je salue son approche ce matin.

On a parlé de beaucoup de choses aujourd'hui, M. le Président. Et je vais tenter, en quelques minutes, de faire une conclusion de tout ça, mais je veux régler... bien, je veux régler... je veux parler de l'aspect santé et santé mentale. Mon collègue de Jacques-Cartier en a parlé, puis c'est effectivement extrêmement important. Mon collègue ministre délégué à la Santé, en a déjà parlé, il y a des listes d'attente pour les psychologues, il y a des listes d'attente pour les psychiatres. Il fallait trouver des solutions rapides pour les gens qui ont besoin d'un service. Hein, quand on est en situation de détresse, on ne peut pas attendre des mois, même pas des semaines.

Alors, on a augmenté les services sur le 811. Il y a le programme québécois pour les gens qui ont besoin de santé... de soins de santé, pardon, mentale sans passer par un médecin de famille, ça, c'est bien. Et, ce matin, par un pour hasard, je voyais l'Association québécoise de prévention du suicide, qui a lancé un site Web fort intéressant, qui s'appelle suicide.ca. Il y a une application qui s'appelle Mes outils. Et je l'ai testée ce matin, M. le Président. Et rapidement, quand on va sur cette plateforme, on nous demande si on veut avoir de l'information ou de l'aide, et il y a quelqu'un qui peut dialoguer avec nous en direct.

Je vous parle de ça, M. le Président, parce que, vous savez, des fois, la réponse peut venir de plusieurs groupes. Et, dans ce cas-là, c'est une association qui a décidé de faire sa contribution, puis je voulais les saluer aujourd'hui. Je veux saluer le travail qu'ils ont fait.

Je vais vous dire qu'il y a plusieurs ressources qui ont été ajoutées dans le système, mais ce n'est pas terminé, pour la santé mentale, on a ça à l'oeil. Et, d'ailleurs, mon collègue ministre délégué à la Santé me disait qu'il avait fait une approche avec nos collègues de l'opposition pour le plan 2021‑2026, une approche non partisane avec des consultations pour voir de quelle façon on peut améliorer les services qu'on donne. Et mon collègue de Jacques-Cartier a amené un point intéressant pour les communautés des Premières Nations et inuites, de quelle façon on peut améliorer ces soins-là, puis je suis persuadé que c'est des commentaires qui vont remonter dans cette approche qui est non partisane.

Depuis notre arrivée en poste, M. le Président, depuis mon arrivée en poste, ce que j'ai tenté de faire, c'est des annonces concrètes. Je vous l'ai dit tout à l'heure, les gens ont réagi beaucoup à ce qui est arrivé à Joyce Echaquan, mais c'est une réalité qui était là, on l'a eu au visage, les gens ont réagi, c'est un électrochoc. Et je veux m'adresser à Carol Dubé, au conjoint de Joyce Echaquan, en lui disant que, dès le lendemain, les Québécois ont réagi rapidement, nous ont demandé de faire des actions, puis c'est ce qu'on a commencé à faire.

Alors, le Principe de Joyce, M. le Président, on l'a. Pour nous, c'est un principe qui est fort important, fort important. Et le ministre de la Santé m'a déjà dit qu'il regardait, dans ce principe-là, de quelle façon on pourrait l'appliquer pour que ce soit bien, bien concret. Parce que, oui, c'est intéressant, et les consultations qui ont mené à ça sont une démarche qui est fort complète.

De notre côté, depuis... je vous disais, depuis mon arrivée, j'ai le plan... j'ai espoir où, à chaque semaine, on fait des annonces concrètes pour amener des changements mais des réponses aussi. Tout à l'heure, il y a un collègue qui faisait mention à l'ENFFADA. On peut faire mention aussi au rapport Viens. On répond à des appels à l'action qui étaient là, qui étaient déjà couchés sur papier, il fallait juste provoquer des choses, et là on est dans la livraison.

Alors, M. le Président, on est rendu à la quatrième semaine, quatrième annonce qui va avoir lieu dans pas tant de temps que ça, dans quelques minutes. Alors, j'invite les gens dans cette salle à regarder cette annonce et les gens à la maison, qui sont nombreux à nous écouter, à nous entendre en direct tout à l'heure, à 13 h 30, parce que c'est une autre annonce qui répond à des appels à l'action.

Première annonce est importante pour la sécurisation culturelle dans le monde hospitalier. Mon collègue ministre de la Santé a décidé d'élargir cette annonce-là et de s'assurer que tous les employés et non pas seulement le personnel soignant, tous les employés étaient pour être impliqués, et pas juste le centre de santé de Joliette mais vraiment l'ensemble. C'est la sécurisation culturelle, donc, qui est annoncée dans la première... l'annonce n° 1.

Annonce n° 2, c'est le Centre d'amitié autochtone de Lanaudière, et, encore là, pour permettre à des gens qui ont des traitements à recevoir, qui ont des soins de santé à recevoir, de pouvoir être hébergés et d'avoir une approche qui est adaptée aussi. Alors, ça, ça a été notre deuxième annonce.

Par la suite, une annonce qu'on n'a pas eu le temps de parler beaucoup aujourd'hui, c'est cette table ronde, cette table commune avec l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, et ce qui va nous permettre... Tout à l'heure, quelqu'un demandait : Comment vous allez faire le suivi de tout ça? Comment vous allez regarder ce que vous avec annoncé et voir comment ça percole dans le système? Et quelle est la réaction des communautés? Et on espère, avec cette table commune, qui va être coprésidée par moi et le chef Picard, d'être capable de remonter ces grands enjeux puis de trouver des solutions, des solutions qui sont... oui, qui sont pragmatiques, mais qu'on peut appliquer très bientôt. Alors, ça, c'est la troisième annonce. Puis la quatrième, bien, vous allez l'avoir tout à l'heure.

Parallèlement à ça, il y a beaucoup de discussions avec les communautés. Quand on parle des Premières Nations, quand on parle des Inuits, c'est 55 communautés au Québec. Et souvent on a tendance à tout rassembler ça dans un groupe, mais ils ont des besoins bien différents. Puis je vais me permettre, dans les minutes qui nous restent, de parler de certains enjeux. Entre autres, dans la région d'Abitibi, on a connu un enjeu avec la chasse à l'orignal, et j'ai eu la chance, lundi passé, de confirmer le début des négociations. Alors, on a un négociateur, la nation algonquine ont leur représentant, qu'on va financer, qu'on va aider, pour dialoguer ensemble, pour trouver une solution. Et ce que je veux, c'est une solution qui est permanente. Et j'ai un maire de la région qui me dit : Pourquoi vous ne nommez pas un négociateur permanent pour trouver une solution temporaire? J'ai dit : Je vais faire l'inverse. Je vais mettre un négociateur temporaire pour trouver une solution permanente, parce que ça fait des années que ça revient. Et il y a quelque chose qui est clair, je pense que ce n'est pas juste la chasse à l'orignal, c'est bien plus profond.

Alors, M. le Président, en même temps qu'on fait cette table technique sur la chasse à l'orignal, puis je ne suis vraiment pas un spécialiste de chasse à l'orignal, on va avoir une table politique aussi, avec la nation algonquine, de nation à nation, pour parler des enjeux, ce qu'on peut améliorer dans cette région, dans ces communautés-là, pour faire en sorte que ça ne revienne pas comme ça. Parce que, quand ça arrive, on l'a vu, ce qui est arrivé, bien, il y a quelque chose de plus profond, puis on va le régler ensemble.

On va continuer nos actions, M. le Président, ce n'est pas terminé. On a un premier bloc jusqu'à Noël. Et, par la suite, comme je vous ai déjà dit, on va avoir des annonces qui vont être adaptées avec les communautés. Et, je l'ai dit tout à l'heure, mais je vais le répéter devant mes collègues aussi, il y a plusieurs de nos actions qui découlent de la mise en oeuvre du Plan d'action gouvernemental pour le développement social et culturel des Premières Nations et des Inuits, et ça, ça avait été lancé par le précédent gouvernement, M. le Président, et je veux le saluer. Je veux saluer le travail qui avait été fait à cette époque-là, puis nous, on continue dans cette voie. Et il faut reconnaître quand il y a des choses qui sont bien faites, et c'est ça qui s'appelle faire de la politique non partisane.

M. le Président, tout à l'heure, je vous ai parlé du grand chef Constant Awashish, qui m'avait confié qu'un jour un jeune enfant lui avait dit qu'elle craignait pour l'avenir, et je vous le dis encore une fois, pour moi, ça m'a brisé le coeur, ça m'a fendu le coeur. Mes filles ne m'ont jamais sorti un commentaire de ce type-là. Et c'était bien senti, c'était profond. Et c'est pour ça que j'ai appelé mon plan J'ai espoir, parce que moi, j'ai espoir de changer les choses. J'ai espoir que cette jeune fille là, dans quelques années, va aller voir le grand chef Awashish et lui dire : Tu sais quoi? Moi aussi, j'ai espoir. Je pense qu'on va réussir à changer les choses. Ce ne sera pas rapide, ce ne sera pas du jour au lendemain, M. le Président, mais je veux lui donner de l'espoir.

Et, avec ce que j'ai entendu aujourd'hui, avec les échanges qu'on a eus dans cette Assemblée, des échanges qui étaient riches... comme je vous dis, j'ai pris plusieurs pages de notes pour amener des changements... et moi, ça me confirme notre volonté de travailler ensemble. Alors, j'ai encore plus d'espoir aujourd'hui, M. le Président, d'arriver à livrer quelque chose d'intéressant.

Tout à l'heure, on parlait d'emploi aussi. C'est bien, de donner les soins, mais il faut aussi donner de l'espoir avec de l'emploi. Et, quand on a parlé de développement, moi, j'ai toujours parlé de développement en trois phases, donc le développement culturel, très important, développement économique, avec des emplois de choix, et non pas par manque de choix, en disant c'est là que tu vas aller travailler, et le développement touristique, M. le Président. Et j'en parle, encore une fois, parce que je suis persuadé que, dans les prochains mois ou prochaines années, les Québécois vont chercher une offre touristique locale, et quelle belle occasion pour faire connaître les différentes nations, quelle belle occasion pour voyager au Québec, aller rencontrer nos frères et nos soeurs de différentes nations, de découvrir leur quotidien. Et je pense que ça va faciliter le vivre-ensemble, M. le Président. Moi, j'y crois vraiment. Et la preuve, c'est qu'on a un organisme incroyable, qui s'appelle Tourisme autochtone Québec, qui travaille, qui milite avec nous pour, justement, développer cette offre touristique là.

Et ça, je terminerais avec un principe que j'aime beaucoup des Premières Nations, qui s'appelle le principe des sept générations. Ce qu'on fait aujourd'hui ensemble va avoir une répercussion sur les sept prochaines générations. Alors, on n'a pas le choix, M. le Président, il faut réussir, il faut réussir à tabler... à faire des annonces, de faire des gestes importants aujourd'hui, qui vont avoir un impact sur nos enfants, nos petits-enfants. Et ça, c'est pour sept générations.

Alors, c'est un petit peu le contrat que je nous lance ensemble, avec les oppositions, travaillons ensemble. Parfois, on ne sera pas en accord, mais il y a une chose qui est claire, on a le même but, la même visée, c'est d'aider... d'améliorer les relations avec les Premières Nations. Et ça, je suis persuadé de ça, M. le Président. Je regarde mes collègues ici. Je suis persuadé qu'on veut tous la même chose.

Je vous remercie, M. le Président.

• (11 h 50) •

Le Président (M. Provençal)  : Merci, M. le ministre. La conclusion appartient maintenant à la cheffe du deuxième groupe d'opposition, pour une période de 10 minutes.

Mme Manon Massé

Mme Massé : Merci, M. le Président. Effectivement, on a eu plusieurs éléments. C'est rare qu'on a l'opportunité d'avoir, comme ça, un temps réservé pour parler de nos relations avec les premiers peuples, et c'est appréciable.

Faciliter le vivre-ensemble, je pense que tout le monde en est. D'ailleurs, c'est la première étape du principe de sécurisation culturelle. Cette première étape là parle de conscientisation, d'être conscient qu'il y a des cultures millénaires qui sont extraordinairement riches. Mais ce n'est que la première étape.

La deuxième étape, c'est : il faut avoir une sensibilité, apprendre la langue, deux mots, trois mots, quatre mots, ça change tout. Mais ce n'est pas ça, la sécurisation culturelle.

La troisième étape, c'est de développer des compétences culturelles. Ça commence à être un peu plus dur, parce que, là, il faut s'engager, il faut faire quelque chose, il faut bouger quelque chose.

Et, finalement, bien, tout ça est au «je», hein? Les trois premières étapes, c'est je, moi, personne. Quatrième étape, sécurisation culturelle, là, c'est le «nous» qui rentre, et c'est le nous dans des actions structurelles, structurantes. Pas des initiatives, des éléments structurants.

Et c'est ça, M. le ministre, que moi, j'ai de la difficulté à comprendre. Pourquoi, quand on parle de la nécessité d'avoir des choses structurantes, comme, par exemple, inclure dans une loi, c'est structurant... Bien sûr, les navigateurs, je vous le disais un peu plus tôt, c'est une initiative, en fait, c'est tellement simple, ça fait tellement longtemps qu'on le sait qu'on se demande donc comment ça se fait que ce n'est pas fait encore. Mais changer fondamentalement les choses, structurellement les choses, bien, c'est d'agir dans la sécurisation culturelle pour ces gens qui nous ont accueillis il y a 400 ans.

Alors donc, c'est sûr que moi, quand j'ai vu les communautés attikameks arriver avec le Principe de Joyce, ce qui est devenu... Pour moi, je me suis dit : Bon, bien, ça va être adopté facilement, puisque, déjà, on avait adopté ici les principes qui guident la déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. C'est du copier-coller sur les principes de cette déclaration-là. Bien, je me suis dit : Voyons, tu sais, comment ça se fait qu'on n'est pas capable... Oui, bien sûr, d'agir, et ça, c'est nécessaire, il était grandement temps, mais, ceci étant dit, comment se fait-il qu'on n'est pas capable d'envoyer un message clair? Pas juste aux gens des Attikameks. Rappelons-nous, là, le Principe de Joyce, là, c'est la majorité des nations qui se sont prononcées en faveur, qui sont derrières les Attikameks pour ce Principe de Joyce là, et, plus que ça, leur organisation politique, qui est APNQL, a aussi clairement signifié que ce qu'ils veulent, ce qu'ils souhaitent, pas qu'on juge s'ils ont raison ou tort, mais qu'on les écoute.

Les écouter, je vous entends, M. le ministre, vous allez... vous jasez avec plein de monde. Moi aussi, je jase avec plein de monde. Et c'est fou, parce que ces gens-là... Moi, là, je jase avec des aînés, des gens issus... des artistes issus de différentes communautés, puis ce qu'ils me disent, c'est... je les entends dire clairement : Bien, il faut, il faut, Manon, il faut — moi — que vous reconnaissiez la discrimination systémique. Pourquoi? Bien, parce que c'est ça qu'on vit, nous. On ne vous demande pas si on a raison ou tort, on vous dit : C'est ça qu'on vit.

Alors, j'entends le ministre, qui dit : Bien, regardez, on a fait ceci, on a fait cela. Puis, tu sais, c'est clair que, tout au long de notre échange, autant avec les oppositions, que je remercie d'avoir été présentes aussi, on a parlé de problèmes systémiques en santé et services sociaux. Je n'ai pas abordé la question de la DPJ pour une seule raison, c'est que je sais qu'on va avoir d'autres moments pour le faire et je sais qu'il y a du travail de fond qui est en train de se faire. C'est juste pour ça que je ne l'ai pas abordé. Mais, ceci étant dit, on a échangé sur des problèmes systémiques vécus par nos frères et soeurs autochtones. Bien, c'est sûr que, pour moi, je m'attends aussi à des solutions systémiques.

Et ça, par exemple, ça n'oppose pas d'inscrire, dans la loi de la santé et des services sociaux, la responsabilité populationnelle qui est déjà la nôtre, d'inscrire la question de la sécurisation culturelle. Ça n'oppose pas avec des actions concrètes ici et maintenant, un n'oppose pas l'autre. La seule différence, c'est : quand tu agis au niveau du système, bien, tu t'assures que ça va être pas mal plus dur à défaire s'il y a quelqu'un d'autre qui arrive après toi.

Et moi, je pense que le Québec, on est rendu là. Regardez les sondages qui sont sortis au mois d'août, où les gens disaient... les Québécois et Québécoises disaient oui à 90-«ish» %, je ne m'en souviens plus, je n'ai pas de mémoire, disaient... les Québécois et Québécoises de toutes origines disaient : Oui, le gouvernement du Québec, le gouvernement, l'État a un rôle à jouer pour éliminer la discrimination systémique vécue par nos frères et soeurs.

Ça fait que moi, c'est à ça que j'appelle. Puis, dans le fond, quand je regarde ça, je me dis : Qu'est-ce le Principe de Joyce a de différent de ce qu'on a adopté ici, collectivement, tout le monde? Puis il y a une chose, c'est la reconnaissance du racisme systémique vécu par nos frères et soeurs autochtones. Puis je me dis : Ce n'est pas juste parce qu'ils sont entêtés, là, tu sais, ou c'est qu'ils ont une fixation. Non, non, c'est parce que c'est ça qu'ils et elles vivent.

D'ailleurs, qu'ils et elles vivent, peu importe leur âge, peu importe leur nation d'origine, peu importe s'ils vivent hors ou en communauté, moindrement qu'ils prononcent leur nom de famille ou que leur plaque de voiture est plaquée à Mashteuiatsh... Ah! c'est drôle, ils se font coller plus que les autres. Ça existe, ils nous le racontent, ils nous le disent. Et on en a des tonnes, d'histoires comme ça.

Alors, si tel est le cas, je ne comprends pas pourquoi la CAQ, actuellement... puis vous pouvez dire que j'en fais une fixation, mais c'est juste que je ne comprends pas... Ce n'est pas une question de mots, c'est ça qu'ils vivent. Je suis qui, moi, blanche de 57 ans, pour dire que ce n'est pas ça qu'ils vivent? Ils me le disent, que c'est ça qu'ils vivent. Ça, c'est le bout que je ne comprends pas et je ne comprends toujours pas à la fin de notre échange.

Alors, oui, M. le ministre, j'entends votre programme J'ai espoir. Vous ne pouvez pas imaginer, lorsque j'étais la seule dans ce parlement, la seule... j'en ai déjà parlé avec mon collègue, d'ailleurs, de Jacques-Cartier, qui osait parler de racisme systémique, parce qu'il n'y a personne, aucun autre parti qui voulait mettre ces deux mots-là ensemble. Je me rappelle comment ce n'était pas simple, mais on y est arrivés. Pourquoi? Bien, parce qu'on a tendu l'oreille puis on a écouté les gens qui vivent la situation.

Alors, je veux laisser le mot de la fin à, moi aussi, Carol Dubé, le conjoint de Joyce, qui nous dit : «Je souhaite que les gouvernements du Québec et [le gouvernement d'Ottawa] adoptent le Principe de Joyce afin que ce terrible événement ne soit pas survenu en vain, que sa voix sonne le début de réels changements pour tous les autochtones afin que [...] jamais [plus] personne ne soit victime de racisme systémique.»

• (12 heures) •

M. le Président, je trouve que les autochtones ont fait leur bout de chemin. Ils nous tendent la main. Le gouvernement dit, le ministre le dit, que le racisme systémique divise. Bien, peut-être. Mais de refuser de reconnaître la réalité vécue par les autochtones, ça divise, ça aussi, puis ça divise, sinon plus, ça creuse le fossé entre nous, Blancs, francophones, machin truc, et eux, premiers peuples. Et ça, pour moi, en mémoire de Joyce, c'est inacceptable.

Le Président (M. Provençal)  : Merci, Mme la députée. Je vous remercie pour la qualité de vos interventions, démontrant vos préoccupations pour les peuples autochtones du Québec.

(Panne de son) ...je lève la séance, et la commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die. Merci beaucoup à tous.

(Fin de la séance à 12 h 01)

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