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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le jeudi 20 février 2020 - Vol. 45 N° 51

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 52, Loi visant à renforcer le régime d’examen des plaintes du réseau de la santé et des services sociaux notamment pour les usagers qui reçoivent des services des établissements privés


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Table des matières

Auditions (suite)

Réseau FADOQ

Office des personnes handicapées du Québec (OPHQ)

Les Usagers de la santé du Québec (LUSQ)

Comité de lutte à la maltraitance de l'Association des syndicalistes à la retraite de Laurentides-Lanaudière, Fédération des syndicalistes à la retraite du Québec (FSRQ) et Regroupement des syndicalistes à la retraite (RSR)

Mémoires déposés

Intervenants

M. Luc Provençal, président

Mme Marguerite Blais

M. Ian Lafrenière

Mme Marilyne Picard

Mme Monique Sauvé

M. Harold LeBel

Mme Isabelle Lecours

M. Jean Rousselle

*          Mme Lyne Rémillard, Réseau FADOQ

*          M. Philippe Poirier-Monette, idem

*          Mme Frances Champigny, OPHQ

*          Mme Anne Hébert, idem

*          M. Pierre Blain, LUSQ

*          M. Jacques Hould, idem

*          M. Jean-Claude Rocheleau, Comité de lutte à la maltraitance de l'Association des syndicalistes à la retraite de Laurentides-Lanaudière, FSRQ et RSR

*          Mme Sylvie Turcot, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Douze heures quinze minutes)

Le Président (M. Provençal)  : Bonjour à tous. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je vous souhaite la bienvenue et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 52, Loi visant à renforcer le régime d'examen des plaintes du réseau de la santé et des services sociaux notamment pour les usagers qui reçoivent des services des établissements privés.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Benjamin (Viau) est remplacé par M. Rousselle (Vimont); Mme David (Marguerite-Bourgeoys), par Mme Sauvé (Fabre); M. Zanetti (Jean-Lesage), par Mme Dorion (Taschereau); M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), par M. LeBel (Rimouski).

Auditions (suite)

Le Président (M. Provençal)  : Merci, Mme la secrétaire. Nous entendrons ce matin le réseau de la FADOQ. Je souhaite la bienvenue aux représentants du réseau de la FADOQ.

Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et à débuter votre exposé. Je vous cède la parole maintenant.

Réseau FADOQ

Mme Rémillard (Lyne) : Oui, M. le Président, je vous remercie. Mme la ministre, MM. et Mmes les parlementaires, je vous salue. Je me présente, Lyne Rémillard, directrice générale adjointe du Réseau FADOQ. Je suis accompagnée aujourd'hui de M. Philippe Poirier-Monette, qui est notre conseiller en droits collectifs au niveau du Réseau FADOQ aussi.

D'abord, j'aimerais vous remercier, les membres de la commission, pour cette invitation à exprimer le point de vue du Réseau FADOQ en lien avec le projet de loi n° 52.

Le Réseau FADOQ est un magnifique regroupement de 535 000 membres. Notre organisation effectue des représentations politiques dans le but de conserver et d'améliorer la qualité de vie des aînés d'aujourd'hui et de demain. C'est notre mission. Ainsi, le Réseau FADOQ profite de tribunes, dont celle-ci, afin que la voix des aînés soit représentée et surtout considérée dans les enjeux politiques.

D'emblée, le Réseau FADOQ accueille favorablement le projet de loi n° 52. Nous estimons effectivement que le régime d'examen des plaintes du réseau de la santé et des services sociaux mérite d'être amélioré. Parmi les éléments que nous saluons, il y a, notamment, le fait que les commissaires locaux aux plaintes et à la qualité des services des centres intégrés soient responsables de l'examen des plaintes des usagers provenant des établissements privés, l'uniformisation de la procédure d'examen des plaintes du public aux établissements privés seulement aussi, l'obligation d'utiliser un actif informationnel afin de regrouper les données relativement aux plaintes des agents... des usagers.

À ce sujet, le Réseau FADOQ suggère, par contre, que le Protecteur des usagers puisse avoir accès aux renseignements inclus dans ces actifs informationnels afin d'être extraits des analyses et en extraire des recommandations. Évidemment, cette accessibilité doit être octroyée sous réserve que la confidentialité et la sécurité des renseignements contenus dans les dossiers de plainte soient assurées. Par ailleurs, c'est certain que les renseignements extraits de ces actifs ne doivent pas permettre l'identification d'une personne physique.

Concernant les commissaires aux plaintes, bien que nous saluons la volonté du gouvernement du Québec de rehausser leur indépendance, nous estimons que des mesures proposées sont timides. En plus des critères abordés dans le projet de loi n° 52, nous suggérons au gouvernement du Québec d'inclure la participation d'organismes de défense des droits dans l'analyse des candidatures afin de déterminer les postulants qui pourraient se qualifier comme une personne indépendante. Ainsi, le conseil d'administration conserverait son pouvoir de nomination, sous réserve que la candidature retenue ait probablement obtenu une approbation externe. Le Réseau FADOQ estime que cette bonification permettrait de rajouter de la légitimité aux commissaires aux plaintes et rehausserait la confiance du public envers le système de régime d'examen des plaintes du réseau de la santé et des services sociaux.

• (12 h 20) •

Concernant les comités de vigilance, notre organisation recommande d'ajouter un membre du comité des usagers ou du comité des résidents parmi les personnes qui doivent obligatoirement faire partie de ces instances.

Nous saluons également le fait que la formulation d'une plainte ou d'un signalement effectué dans les établissements privés en vertu de la Loi visant à lutter contre la maltraitance envers les aînés soit faite auprès des commissaires liés aux centres intégrés. Toutefois, puisque la loi sur la maltraitance est abordée, nous suggérons au gouvernement de profiter de l'occasion afin de le bonifier. Il importe d'y inclure la maltraitance organisationnelle de manière bien définie. Notre organisation est également en faveur de l'introduction de sanctions pénales dans le cadre de cette loi.

Par ailleurs, nous souhaitons profiter de l'occasion et saluer le travail des centres d'assistance et d'accompagnement aux plaintes, les CAAP. Alors que le régime d'examen des plaintes du réseau de la santé et des services sociaux est complexe, les CAAP offrent des services de soutien essentiels de proximité et d'accessibilité aux personnes. Il importe que le gouvernement du Québec maintienne ses ententes de service avec les CAAP et qu'il rehausse, même, le financement de ces organisations afin que ces dernières puissent effectuer de la promotion quant aux services qu'ils offrent gracieusement à la population.

Finalement, nous recommandons au gouvernement du Québec de faire mieux connaître les droits des Québécois et des Québécoises à titre d'usagers du système de santé et des services sociaux. Il importe de s'assurer de divulguer les recours possibles en cas d'insatisfaction. Je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Provençal)  : Merci, Mme Rémillard, pour votre exposé. Mme la ministre va initier la période d'échange. Mme la ministre, je vous cède la parole.

Mme Blais (Prévost) : Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, Mme Rémillard, M. Philippe Poirier-Monette. Toujours impressionnée par le Réseau FADOQ, qui, d'année en année, augmente. Écoutez, là, les membres, vous êtes rendus à 535 000. Ça augmente tout le temps. Et ça veut dire que vous êtes un réseau fort et que vous prenez soin aussi de vos membres. Et vous avez aussi beaucoup évolué au cours des ans, hein? Maintenant, vous défendez les droits des personnes aînées, et je vous félicite pour ça.

Mme Rémillard (Lyne) : Merci.

Mme Blais (Prévost) : Écoutez, je vous remercie pour votre mémoire. D'entrée de jeu, je voudrais parler du fait que vous aimeriez que le Protecteur du citoyen ait accès aux plaintes. Dans le mémoire que le Protecteur du citoyen nous a fait valoir ici, il mentionne : «Toutefois, le Protecteur du citoyen se doit de rappeler l'importance de préserver l'indépendance des commissaires. Il s'agit du fondement même du régime d'examen des plaintes. Il faut donc en toutes circonstances protéger cette indépendance et mettre tout en oeuvre pour qu'il n'y ait pas d'ingérence — ni même d'apparence d'ingérence — dans le traitement des plaintes par les commissaires.»

Ce que vous dites, c'est que vous aimeriez que le... et corrigez-moi, que vous aimeriez que le commissaire aux plaintes ait accès au nombre de plaintes, non pas tant pour s'ingérer dans les plaintes mais pour être au courant. Or, le Protecteur du citoyen compile déjà, dans son rapport annuel, les plaintes des commissaires aux plaintes, puisque le commissaire... le Protecteur du citoyen arrive toujours en deuxième recours, après les commissaires aux plaintes et les médecins examinateurs. Alors, je voudrais... je voulais vous réconforter là-dessus et en même temps vous entendre. C'était quoi que vous aviez comme idée derrière cette recommandation?

Mme Rémillard (Lyne) : O.K. Philippe va vous répondre.

M. Poirier-Monette (Philippe) : Bien, en fait, là, on a été surpris aussi que l'actif informationnel n'était pas une obligation d'être utilisé. Ça, là, maintenant, avec le projet de loi, c'est inclus dans le projet... dans la loi. Donc, ça, on le salue, d'ailleurs. Donc, évidemment, le Protecteur des usagers n'avait pas accès à l'ensemble des plaintes. C'est ce que je comprends.

Donc, nous, ce qu'on veut simplement, c'est que ce soit clairement indiqué dans la loi que le Protecteur des usagers peut avoir un accès à ces données-là pour montrer les tendances soit par région, soit par cas, juste pour compiler. Protecteur du citoyen, Protecteur des usagers, c'est un peu l'ombudsman, hein, au Québec. Donc, on estime qu'un organisme de la sorte, qui signifie des données, bien, il y a quelque chose d'objectif là-dedans. Donc, c'est un peu ce qu'on souhaite, là.

Mme Blais (Prévost) : Moi aussi, j'étais surprise de constater que tout le monde ne déposait pas les plaintes dans le dossier informationnel. C'est pour ça qu'on veut en faire une obligation et qu'on veut aussi faire en sorte que l'actif informationnel soit à l'ordre du jour, dans le sens de le mettre à point. Et c'est la raison pour laquelle on a investi 1,2 million de dollars pour faire en sorte qu'il soit, je dirais, à niveau, qu'il soit à niveau.

Je ne vous ai pas entendu parler du commissaire-conseil. Qu'est-ce que vous en pensez?

Mme Rémillard (Lyne) : Vas-y.

M. Poirier-Monette (Philippe) : Moi, j'ai... sauf erreur, là, je n'ai pas vu rien dans le projet de loi qui parle spécifiquement du commissaire-conseil. Donc, c'est sûr qu'on vous a entendue en parler très publiquement. On est intéressés à voir quelle va être la mission du commissaire-conseil, à quel point il va être détaché, est-ce qu'il va avoir de l'indépendance. Donc, on aurait souhaité que ce soit inclus dans le projet de loi, qu'il y ait quelque chose à ce niveau-là pour au moins statuer sur ce que c'est, le commissaire-conseil, quelles responsabilités il va avoir, mais on est tout à fait ouverts à avoir... Donc, il faudrait avoir des détails sur le commissaire-conseil, quel est son rôle dans...

Mme Blais (Prévost) : Alors, le commissaire aux plaintes va faire en sorte qu'on puisse harmoniser les pratiques, faire en sorte qu'il y ait beaucoup plus d'informations, de la formation, pour être en mesure de regrouper les commissaires aux plaintes et à la qualité des services, mais ne va pas faire d'ingérence dans le travail des commissaires aux plaintes et à la qualité des services. Et d'ailleurs le Regroupement des commissaires aux plaintes et à la qualité des services était favorable à la nomination d'un commissaire aux plaintes. Ils font déjà de la formation et de l'information, mais ils ont tellement de travail que ça va les délester, en quelque sorte, d'une surcharge de travail parce que le commissaire-conseil va pouvoir se consacrer à cela.

Vous mentionnez aussi que vous aimeriez profiter de l'occasion pour qu'on puisse ouvrir la loi n° 115 pour mettre les sanctions pénales. Vous le savez, que c'est mon désir depuis le tout début, à l'époque où j'avais déposé le projet de loi n° 399. J'ai l'intention de le faire. On voulait donner un peu de temps, puisque le projet de loi a été adopté en 2018, et on doit revoir la loi en 2021, mais soyez assurés que c'est l'une de mes volontés.

Maintenant, vous dites, puis après ça je passe la parole à mes collègues, vous mentionnez que vous auriez aimé que le projet de loi ait plus de dents, en quelque sorte, par rapport à l'indépendance des commissaires. Juste vous rappeler que ce n'est pas une réforme complète du régime des plaintes, parce que ça aurait pris beaucoup plus de temps. Mais, quand même, je veux vous entendre. Quand vous parlez d'indépendance des commissaires aux plaintes, de quoi parlez-vous exactement? Qu'est-ce qui vous chicote?

Mme Rémillard (Lyne) : Nous, on pense qu'il faut une objectivité absolument. Et, de la façon que ça se passe présentement dans les établissements, que ce soit privé ou public, bien, il y a une grosse proximité avec les gens qui sont là, que ce soit au niveau des membres du conseil d'administration, des usagers, tout ça, et on pense qu'il faut justement qu'il y ait une indépendance plus grande.

Alors, tantôt, même quand vous parliez des commissaires délégués, tout ça, c'est ça qui va être important, parce que c'est ce qui va donner confiance aux gens. Si on veut vraiment que tout ce... les plaintes soient bien formulées puis bien corrigées quand il y a quelque chose qui ne va pas, je pense qu'il faut que les gens aient confiance en ce système-là. C'est dans cette avenue-là qu'on en parle.

Mme Blais (Prévost) : Mme Rémillard, vous avez raison, parce que... C'est la raison pour laquelle le projet de loi n° 52 veut faire en sorte que tous les commissaires aux plaintes et à la qualité des services relèvent des CISSS et des CIUSSS. Et le Regroupement des commissaires aux plaintes et à la qualité des services nous mentionnait qu'il y avait cette indépendance avec les conseils d'administration, qu'ils se sentaient à l'aise, qu'il n'y avait pas d'interférence. Et, si jamais il y en avait, bien, je pense qu'il ne faut pas que ça existe. Il faut vraiment travailler sur cette indépendance.

Mme Rémillard (Lyne) : Puis peut-être juste pour ajouter, c'est un peu pour ça qu'on disait qu'on aimerait ça qu'un organisme externe puisse dire son mot. On pense que ça ajoute encore plus à l'indépendance puis à l'objectivité de l'opération.

Le Président (M. Provençal)  : Je reconnais le député de Vachon pour la suite.

M. Lafrenière : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, Mme Rémillard. Merci pour votre présentation. C'est sûr, quand vous avez parlé de sanctions pénales, l'homme que je suis, l'ancien policier que je suis était très intéressé. Pourriez-vous élaborer un petit peu plus, ce que vous avez en tête quand vous parlez de sanctions pénales? Est-ce que vous voyez une gradation? Est-ce que vous voyez un registre d'infractions pour que, justement, les gens qui refont une infraction auraient par la suite une sanction pénale qui serait plus élevée? Comment vous le voyez?

Mme Rémillard (Lyne) : Bien, vas-y. On en parlait, justement, ce matin.

M. Poirier-Monette (Philippe) : Je pense que ça, cette gradation-là serait bien accueillie. L'idée, c'est que tous les actes graves sont encadrés. C'est un acte criminel, donc c'est encadré par le Code criminel.

Là, on parle plus d'actes qui sont juste à la frontière des actes criminels. Donc, il y a une absence de ce côté-là. Il y a des gestes, on estime, dont on nous témoigne à chaque semaine, qui pourraient mériter, de notre point de vue, des sanctions pénales mais qui ne sont pas assez grands pour être jugés criminels. Donc, il y a tout ce pan-là, je crois, que ça pourrait concerner.

Là, après ça, voir quelle est la gradation des sanctions, je crois qu'entre juristes, entre législateurs vous pouvez aussi en discuter, là. L'idée, ce n'est pas de vous dire exactement quel acte doit...

• (12 h 30) •

Mme Rémillard (Lyne) : Les processus, on va vous les laisser.

M. Lafrenière : Mais vous répondez complètement à ma question, parce que je voulais être bien sûr que j'avais bien compris que vous ne vouliez pas pénaliser une deuxième fois un acte criminel. Parce qu'on comprend qu'il y a un processus qui existe ou c'est la zone grise. La zone qui ne se retrouve pas... puis je ne veux pas vous prêter des mots en bouche, là, mais, ce qui ne se retrouve pas du côté criminel, ce qui est quand même assez sérieux, vous voyez la possibilité d'avoir une sanction pénale là-dessus.

M. Poirier-Monette (Philippe) : Oui, tout à fait.

M. Lafrenière : Parfait. Ça, ça m'aide beaucoup à ma compréhension. Merci.

Tout à l'heure, vous avez parlé de l'importance de la transparence, de l'indépendance. J'ai parlé beaucoup, moi, d'apparence d'indépendance aussi, parce que possiblement qu'ils sont très indépendants et transparents, mais que, des fois, les apparences ne sont pas là.

De l'autre côté, je vous dirais qu'il y a un groupe qui est venu nous voir puis qui nous a dit qu'il y avait un danger. Le danger, c'était d'enlever la proximité que les commissaires avaient. Puis je ne le fais pas mien, là, mais un des arguments qui nous a été servi, c'est que les commissaires étaient très présents, grande proximité, et il y a un des groupes qui s'en est servi pour dire qu'ils étaient contre notre projet de loi aujourd'hui parce qu'ils trouvaient que les commissaires seraient moins proches.

Puis là je vais vous mettre ça très clair. Les groupes privés nous ont dit qu'ils étaient en accord, publics, on le sait, mais là c'étaient plutôt les privés conventionnés qui nous ont dit hier qu'ils étaient... qu'ils avaient un grand malaise, même qu'ils étaient contre notre projet de loi. Et un des arguments, c'était de dire qu'il y aurait une moins grande proximité entre les commissaires et les utilisateurs. J'aimerais vous entendre, comme vous représentez des gens qui sont dans tous les établissements. C'est-tu quelque chose que vous avez entendu, cette crainte d'avoir une moins grande proximité avec les commissaires?

Mme Rémillard (Lyne) : Je vais y aller, Philippe, tu compléteras. Moi, je pense que ce ne sera pas nécessairement comme ça que ça va se passer. Je pense que les commissaires, s'ils sont indépendants, ils ne seront quand même pas dans les nuages, ces gens-là, ils vont quand même être sur le terrain. Alors, ils vont les avoir, les... La proximité va être là, O.K.?

Bon, c'est peut-être inquiétant pour des gens qui sont conventionnés. Ça, on n'ira pas sur ce plancher-là, là. Nous, on va laisser ça aller, là...

M. Lafrenière : Allez-y, je vous écoute.

Mme Rémillard (Lyne) : Mais c'est peut-être plus inquiétant. Bien là, je vais laisser Philippe en parler un peu, mais je trouve que...

M. Poirier-Monette (Philippe) : Bien, c'est sûr que je ne veux pas...

Mme Rémillard (Lyne) : On ne porte pas de jugement.

M. Poirier-Monette (Philippe) : On ne veut pas porter de jugement, c'est leurs propos. On estime, nous, que ça ne retire pas de la proximité.

C'est sûr qu'il y a aussi... Ce qu'on dit là-dedans, là, c'est qu'il faut absolument que les commissaires soient accessibles, là, que leurs services soient accessibles. Tous, ici et chacun, là, chacun, chaque parlementaire, vous avez des commettants, je suis sûr et certain, à chaque semaine, qui vous appellent pour se plaindre du système de santé, puis il n'a aucune idée qu'un commissaire aux plaintes existe. Ça, c'est un enjeu, puis on se le fait parler, puis c'est pour ça que les CAAP existent aussi.

Donc, vous comprenez qu'à ce niveau-là, nous, il faut... Je crois qu'il y a un exercice de relations publiques à faire. Il faut que les commissaires... Il faut que ce soit bien accessible. Il faut que les contacts soient facilement accessibles, il faut qu'il y ait un suivi au niveau de la plainte. Donc, nous, on encourage vraiment à ce que le gouvernement accélère, augmente la communication autour des commissaires aux plaintes, là.

M. Lafrenière : Et mon but, ce n'était pas de vous mettre dans une mauvaise position, comprenez-moi bien. C'est qu'hier on a eu cette discussion-là, et vous comprenez qu'en apparence... puis je ne veux pas prêter de mauvaises intentions, mais, en apparence, un groupe qui vient nous voir en disant : Chez nous, ça va très, très bien, vous n'avez pas besoin de vous en mêler, on gère tout seuls, c'est sûr que ça envoie un drôle de signal. Vous avez parlé tantôt de campagne de relations publiques ou quoi que ce soit. C'est sûr que, comme message que ça envoie, c'est particulier. Puis, je vois de votre part, sans le dire, vous aviez un malaise vous aussi.

Puis ce que je voulais entendre aujourd'hui... Parce que, nous, ça nous a surpris. On s'attendait peut-être à cette position-là de la part du privé complètement. Ils sont venus nous dire qu'ils étaient complètement en accord. Je peux vous dire qu'encore hier je me creusais la tête à savoir pourquoi. Mais le privé nous a dit, par exemple, qu'il fallait s'attendre à une augmentation des plaintes au début quand c'était connu, mais eux le voyaient comme une opportunité de s'améliorer. Eux autres se disaient : Quand on reçoit des plaintes, ça nous permet d'améliorer des problématiques. Mais les privés conventionnés, ça n'a pas été...

Mme Rémillard (Lyne) : Non, mais je vous dirais que, sans porter de jugement puis sans avoir de... Nous, notre objectif, là, c'est que les usagers aient une bonne place... quand il y a une plainte à formuler, qu'ils soient bien entendus. Alors, qu'ils soient conventionnés ou pas, si le commissaire joue bien son rôle... Je pense qu'il y a aussi une avenue qu'il faut comprendre, c'est qu'il faut que le commissaire joue son rôle, mais qu'il n'en joue pas plus non plus, qu'il soit là juste pour les bonnes raisons puis qu'il fasse son travail comme il faut. À ce moment-là, d'après moi, ça ne causerait pas de... en tout cas, de...

M. Lafrenière : Ça fait que, selon vous, le même système, qu'on soit public, privé, privé conventionné, on ne devrait pas avoir des systèmes différents, ça prend un système standard partout.

Mme Rémillard (Lyne) : Je pense que oui, absolument. L'uniformisation est importante.

M. Lafrenière : Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. D'autres interventions?

Mme Blais (Prévost) : Bien, M. le Président, allez-y.

Le Président (M. Provençal)  : Écoutez, merci d'être présents et de nous présenter votre mémoire. Quand vous parlez de l'importance d'avoir des règles uniformes, ce que je comprends, c'est que, présentement, c'est à géométrie variable. Et quels sont... Quel va être le principal enjeu pour réussir à avoir cette uniformité-là, selon vous? Parce que vous avez parlé de communication, mais il y a certainement d'autres enjeux. Quels sont les enjeux que vous, vous identifiez?

Mme Rémillard (Lyne) : Bien, on a parlé de la formation. Je pense que c'est quelque chose qui est important aussi, que les gens qui vont être en poste aient la formation pour comprendre tous la même chose, de la même façon, que ça s'applique aussi de la même façon. Je pense que ça aussi, c'est important. Je pense que... C'est comme dans n'importe quoi, l'uniformisation n'est pas simple. Ce n'est peut-être pas demain matin qu'on va avoir ça, parce qu'on trouve toujours des façons à faire des exceptions, mais, si on ne vise pas ça, on ne rehaussera pas la qualité des services.

Le Président (M. Provençal)  : Merci, madame. Mme la ministre.

Mme Blais (Prévost) : Oui. Je voudrais vous rassurer quant au rôle du commissaire-conseil. C'est évident qu'il aura des balises, que son rôle sera extrêmement défini. Je vous ai aussi entendus — vous n'êtes pas les seuls — mentionner que vous aimeriez que ça fasse partie du projet de loi. Nous allons étudier cette possibilité-là. Il faut le voir d'un point de vue juridique, là, avec les juristes du ministère de la Santé et des Services sociaux. Qu'il fasse partie de la loi ou non, il y a une chose qui est certaine, il va falloir s'assurer qu'il n'y ait pas d'ingérence à l'intérieur du rôle des commissaires aux plaintes et à la qualité des services. Donc, vous êtes d'accord avec ça?

Mme Rémillard (Lyne) : Oui. Ah oui! on salue ça, oui.

Mme Blais (Prévost) : Bien, je vous remercie beaucoup puis... Oui.

Une voix : ...

Le Président (M. Provençal)  : Oui, 1 min 30 s. Mme la députée de Soulanges.

Mme Picard : Merci. J'aimerais vous entendre. On a eu beaucoup de groupes qui sont venus nous parler que les gens, souvent, ont peur de faire des plaintes. Donc, j'aimerais avoir votre point de vue, à savoir si le projet de loi n° 52, une fois adopté, s'il est adopté tel quel, va améliorer un peu... ou bien vos impressions de comment on peut améliorer ça pour que les gens aient moins peur de faire une plainte.

Mme Rémillard (Lyne) : Vas-y, Philippe, je te laisse aller.

M. Poirier-Monette (Philippe) : On pense qu'en résidence privée pour aînés c'est un enjeu, ça. Donc, les gens avaient peur de subir...

Une voix : ...

M. Poirier-Monette (Philippe) : ...de réprimandes de la part de la direction. Donc, à ce niveau-là, je crois que c'est un pan important, là, le fait que le commissaire du CISSS va avoir responsabilité sur les RPA. Donc, ça, en ce sens-là, je pense que ça bonifie.

Encore là, ici, comme... tout est dans tout, hein, il faut juste que ce soit bien communiqué. Il faut que les gens aient un contact facile avec le commissaire, puis, de cette manière-là, je crois qu'il y aurait peut-être moins de réticence de la part des usagers, là.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. À ce moment-ci, je vais céder la parole à la députée de Fabre.

Mme Sauvé : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je veux saluer, bien sûr, les deux invités. Merci. Merci pour votre présentation et votre réflexion. Puis je vais me joindre un peu aux commentaires de la ministre plus tôt pour reconnaître la force et... la force de votre réseau et aussi la force de votre réflexion. Vous êtes vraiment un pilier dans la défense des droits, et sachez qu'on est toujours très attentifs aux réflexions que vous amenez à travers les différents projets de loi.

Moi, je veux, d'entrée de jeu, amener un élément qui me... en fait, je suis très heureuse que vous l'ayez amené, parce qu'on n'en a pas parlé précédemment, et il y a un collègue aussi, de l'autre côté, qui a voulu en savoir un peu plus, la question de votre recommandation 8, les sanctions pénales. Alors, vous amenez cette notion-là. Vous êtes les premiers à nous en parler aussi clairement, que des sanctions pénales soient introduites dans le cadre de la loi. Alors, c'est sûr qu'on aura des discussions dans la suite des travaux, mais merci de l'avoir amené, parce que ça ne fait pas partie du projet de loi. Et là, avec les échanges, j'entends que la ministre a cette intention d'y aller dans ce sens-là. Alors, c'est très clair que nous aurons des échanges là-dessus. Mais merci de l'avoir amené, parce que c'était un élément absent du projet de loi, alors qu'on entend que ça peut être un élément qui va être priorisé par la ministre.

• (12 h 40) •

On a parlé tantôt, vous avez parlé, dans votre recommandation 9, de ce partenariat-là très important avec les centres d'assistance et d'accompagnement, les CAAP. Je sais que vous avez des partenariats, comme on dirait en bon québécois, tricotés serrés avec eux. C'est essentiel aussi de valoriser leur rôle, parce que, tout au long des travaux, les groupes, ce qu'ils sont venus, entre autres, nous dire, c'est qu'ils avaient certaines préoccupations par rapport à l'alourdissement du mandat des commissaires locaux du réseau public, qui se voient, donc, confier un mandat additionnel. Alors, bien que ce soit... Il faut saluer cette avenue-là. En même temps, la réalité, c'est qu'effectivement il peut y avoir un mandat plus large qui amène beaucoup plus de travail.

Alors, on l'a considéré au niveau du mandat des commissaires locaux aux plaintes. On a dit... On s'est souciés du délai, on s'est souciés des ressources qui seront nécessaires au niveau des ressources humaines, des ressources financières, mais on n'a pas trop parlé de l'impact que ça aurait sur les autres partenaires, qui sont pourtant très, très implicitement interpelés dans la démarche de plainte. Alors, merci de ramener le rôle clé des CAAP.

Et, peut-être aussi, je pense que ce n'est pas une fausse hypothèse de travail de se dire que l'impact de cette loi va faire en sorte que les gens vont aller davantage vers des démarches de plainte. On ne souhaite pas qu'il y ait plus de plaintes, mais, en même temps, lorsqu'il doit y en avoir, il doit y en avoir, et c'est le but du projet de loi. Alors, les CAAP vont avoir probablement devant eux un nombre accru de plaintes, un nombre d'accompagnements des familles et des aînés.

Alors, je trouve ça très important que vous rameniez le rôle, le fait qu'ils vont avoir probablement à faire face à ces nouveaux enjeux du nombre de plaintes, et qu'un financement, un rehaussement de leur financement et une reconnaissance de leur rôle soient encore accentués. Alors, vous en avez fait une recommandation, mais je veux vous entendre davantage là-dessus puis j'aimerais vous entendre aussi sur le lien, qui est déjà présent, que vous avez avec eux.

Mme Rémillard (Lyne) : Vas-y, Philippe, c'est toi qui le...

M. Poirier-Monette (Philippe) : Bien, écoutez, c'est sûr que les CAAP risquent d'avoir un travail accru s'il y a du retard qui se prend du côté du traitement des plaintes, étant donné qu'il y en aurait plus. Donc, les CAAP... Lorsqu'il n'y a pas de réponse, lorsqu'il y a des retards, lorsque ça déborde le temps requis pour répondre, les CAAP embarquent beaucoup là-dedans.

Autrement, c'est sûr que nous, on a du personnel chez nous, là, qui font affaire, je dirais, quotidiennement, pratiquement, avec les CAAP pour à peu près les mêmes raisons que vos commettants lorsqu'ils appellent à vos bureaux. Des fois, c'est juste parce qu'ils n'arrivent pas à communiquer avec le commissaire aux plaintes. Donc, nous, c'est pour ça qu'on salue.

D'ailleurs, le mandat qui a été ajouté au CAAP, ça aussi, on l'avait salué, en lien avec les baux. Donc, ça, c'était très important, parce que c'était une zone de gris. À l'époque, lorsqu'il y avait un enjeu avec les baux, les CAAP ne pouvaient pas prendre le mandat. Donc, il fallait qu'ils fassent un peu... Ils jouaient sur les mots en disant que c'était une plainte, non pas que c'était une raison de se plaindre... non pas que c'était une raison qui allait à la Régie du logement. Là, dans ce cas-là, les CAAP peuvent faire ce genre de manoeuvre. Puis ça, on l'avait salué.

Donc, évidemment, ça, ça a été un volet de mandat qui a été accru chez les CAAP. On pense également qu'ils font généralement du très bon travail. En tout cas, chose certaine, lorsqu'on réfère, on n'a jamais de retour sur le fait qu'ils ont eu du mauvais service des CAAP. Donc, s'il y a un organisme, je pense, qui est à prioriser du côté du gouvernement, je pense que le mandat doit être prolongé, élargi, et que des ressources additionnelles seraient très certainement bien accueillies de leur côté.

Mme Rémillard (Lyne) : On pourrait peut-être souligner, puis, Mme la ministre, vous êtes au courant de notre intérêt qui a toujours été là pour les résidents, justement, que ce soit dans des résidences, que ce soit dans des centres privés ou quoi que ce soit, on a toujours eu un gros souci de la qualité de services et de vie de ces gens-là. Alors, les gens qui sont... qui peuvent aider dans ce sens-là, on est toujours là pour les appuyer.

Mme Sauvé : Et merci d'en faire la promotion, parce que ça ajoute à la reconnaissance qu'on doit avoir envers tous les acteurs. Je vous dirais que... Bon, on a parlé tantôt des sanctions pénales. Vous avez parlé aussi... La ministre vous a posé des questions sur votre perception du rôle du commissaire-conseil. Là, on est en train, bien sûr, de regarder l'ensemble de vos recommandations. Vous en avez 10. Est-ce que vous pensez que, bien que louable, le projet de loi n° 52 aurait mérité d'être davantage complet, avec les recommandations, autant dans votre préoccupation par rapport à la qualité de l'indépendance, autant aussi dans les partenariats qui doivent être en place, les sanctions pénales, la définition, même, du rôle du commissaire-conseil? Est-ce que vous pensez que... Puis vous avez... Tantôt, ce sont vos propres mots, vous avez dit : C'est plutôt timide sous certains aspects. Est-ce que vous auriez souhaité que le projet de loi n° 52 aille plus loin et soit un peu plus inclusif de toutes les notions que je viens de mentionner?

Mme Rémillard (Lyne) : Bien, écoutez... Philippe, tu pourras compléter. Moi, je pense que... Pour nous, un projet de loi, c'est un projet de loi, O.K.? Il y a d'autres étapes après. On s'attend à ce qu'ensuite les choses soient complétées ou soient, comment je dirais, bonifiées, je vais le dire comme ça. C'est pour ça qu'on salue plusieurs choses. On était d'accord à dire que... Pour nous, il y avait des petites choses qui étaient, justement, timides. On les a mentionnées pour essayer d'améliorer. Philippe, s'il y a un complément, vas-y.

M. Poirier-Monette (Philippe) : On est tout à fait d'accord, là, donc c'est pour ça qu'on appuie le projet de loi, mais on a, évidemment, une dizaine de recommandations. Donc, on souhaite juste que le projet de loi soit bonifié par rapport à ce qu'il est présentement. Donc, nous, on ne veut pas jeter tout le régime de plaintes à terre, on pense qu'on peut continuer avec ça, mais évidemment il y a beaucoup de choses qu'on souhaite qui soient améliorées, là.

Mme Rémillard (Lyne) : On était contents d'entendre la ministre dire que, pour elle aussi, c'est un souci, la pénalité, et que c'est quelque chose qui s'en vient. Alors, nous, bien souvent, on doit soulever des points pour que ça fasse du chemin après. Alors, on souhaite d'avoir été bien entendus.

Le Président (M. Provençal)  : Je dirais, si vous me permettez, les dépôts que vous faites et les recommandations viennent simplement soulever notre niveau de réflexion quand on veut discuter du projet de loi et quand on aura à regarder article par article. Tout simplement, je pense qu'il y a des gens ici, autour de la table, qui prennent beaucoup de notes et qui prennent en considération les commentaires qui sont formulés. Alors, vous pouvez être certaine, madame, que vous avez une très bonne écoute, comme les autres groupes ont eue, autour de la table.

Mme Rémillard (Lyne) : Je ne suis pas inquiète.

Le Président (M. Provençal)  : Excusez, je vous ai volé une minute. M. le député de Vimont est...

Des voix : ...

Mme Sauvé : Je ne vous en veux pas, M. le Président. Il n'y a pas de problème. Il me reste combien de temps?

Le Président (M. Provençal)  : Il vous reste trois minutes.

Mme Sauvé : Parfait. Merci. Je voulais revenir sur votre recommandation 7. On en a peu parlé, mais je vous dirais qu'il y a beaucoup de groupes qui... et aussi il y a la ministre qui s'est montrée ouverte à cette intention de se dire qu'on est dans une volonté d'analyse, d'amélioration continue, parce qu'il y a le projet de loi, il va être étudié, et tout ça, mais, s'il est adopté, donc, il y aura la suite et il y aura toute l'étape opérationnelle. Mais encore faut-il évaluer avec des indicateurs, avec une certaine reddition de comptes, mais surtout observer l'impact que cette loi aura sur la valeur ajoutée par rapport au processus, évidemment, de la démarche de plainte.

Alors, vous avez bien dit qu'une analyse, amélioration... ce soit élaboré. Est-ce que vous pouvez un petit peu détailler? Est-ce que vous avez une idée un peu, par exemple, ça pourrait être quoi, l'échéance qu'on se donne pour évaluer? Est-ce que ça doit se faire de façon continue? Comment vous voyez ce processus d'analyse et d'amélioration?

M. Poirier-Monette (Philippe) : Bien, évidemment, on souhaite que ce soit continu. À ce niveau-là, tu sais, on parle explicitement, là, de la maltraitance organisationnelle dans cette recommandation-là. Donc, dans un acte de maltraitance accompli par du personnel ou quoi que ce soit, quelqu'un qui est ébouillanté, donc, l'équation est assez vite, là, la personne qui a fait de la négligence va avoir une sanction. C'est assez facile.

Mais là, quand on parle de manque de soins ou manque de personnel, on punit qui, là, à ce moment-là, là? Donc, c'est un peu ça, là, qu'on soulève par cette recommandation-là. On va voir qui? Le P.D.G.? On va plus loin en région? On monte dans le ministère? C'est qui, le responsable?

Donc, nous, ce qu'on dit, c'est, au moins, là, prendre connaissance, dans le cadre du processus d'amélioration, que ce soit continu et puis que... bien, que ça fasse en sorte que le ministère s'améliore, que le CISSS s'améliore, que les régions s'améliorent et que les établissements s'améliorent.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. 40 secondes.

Mme Sauvé : Alors, bien, merci beaucoup pour vos propos, pour vos réponses très claires. Et, dans le fond, ce que je retiens, c'est que, votre recommandation 7, même si elle est davantage liée à la maltraitance, vous souhaitez vraiment qu'il y ait une amélioration continue de façon élargie.

Mme Rémillard (Lyne) : Oui, vous avez tout à fait raison, c'est ce qu'on veut aussi. Et c'est juste une façon différente de dire : On va regarder qu'est-ce... Quand on parle de maltraitance, on en parle aussi dans ce volet-là.

Mme Sauvé : Voilà. Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Je vais maintenant céder la parole au député de Rimouski.

M. LeBel : Combien de temps?

Le Président (M. Provençal)  : 2 min 45 s.

• (12 h 50) •

M. LeBel : Merci, M. le Président. Vous êtes généreux. Le commissaire-conseil, bon, je comprends ce que vous dites, vous aimeriez qu'il soit dans le projet de loi. Puis je suis un peu d'accord avec vous, parce que la ministre donne beaucoup d'importance à ce commissaire-là, puis je vois qu'elle a un plan dans la tête, puis c'est bien, mais, s'il n'est pas dans le projet de loi, on ne pourra pas en parler ici, autour de la table, quand on fera l'étude article par article. On devra attendre que la ministre nous dépose sa vision du commissaire-conseil. C'est parce que j'aimerais... On pourrait, comme, ici, autour de la table, éventuellement, pouvoir discuter du rôle du commissaire-conseil, puis, s'il était dans le projet de loi, bien, ça aiderait.

Ceci étant dit, moi, sur le projet de loi n° 115, j'avais plaidé beaucoup, beaucoup pour reconnaître la maltraitance organisationnelle. Je m'étais... On m'avait envoyé promener parce que... Je n'avais pas réussi à convaincre. Mais je vois que vous le ramenez et je suis très satisfait de ça.

Mais ça veut dire... Parce que, comme vous avez dit, s'il manque de préposés, ou il manque de lits, ou tout ça, il n'y a pas les mauvais services, le commissaire aux plaintes s'adresse à qui? Il monte où? Jusqu'au ministre? Jusqu'au premier ministre? Au gouvernement qui n'a pas donné les bons services? Mais il faut qu'il se manifeste, le commissaire, là, aux plaintes, et, pour ça, il faut qu'il soit indépendant. Il ne peut pas dénoncer la maltraitance organisationnelle contre son ministère, son propre ministère s'il est payé par le ministère. J'aimerais ça vous entendre là-dessus. Comment on peut reconnaître la maltraitance organisationnelle puis permettre au commissaire aux plaintes d'intervenir si lui-même est dépendant du ministère?

Mme Rémillard (Lyne) : Vas-y, Philippe, mais je compléterai.

M. Poirier-Monette (Philippe) : Le meilleur exemple, là, qu'on pourrait prendre, là, c'est les rapports. Chaque fois que le Protecteur du citoyen dépose son rapport ici, là, tout un chacun des parlementaires est très attentif à ce qui est écrit là-dedans. Donc, je pense que ça, au moins, là, ce genre d'organisation là fait en sorte que ça souligne à grands traits des lacunes du système. On espère que ce soit un peu le même principe qui s'applique. Donc, est-ce que c'est le Protecteur des usagers, c'est-tu la Commission des droits de la personne qui en aurait la responsabilité? Je ne le sais pas. Mais évidemment il faudrait que ce soit en dehors de la boîte. Ce serait la chose qui ferait en sorte qu'il y aurait des apparences, en tout cas, d'objectivité, là.

M. LeBel : Ça fait que, dans le fond, si on veut vraiment protéger les patients, les aînés de la maltraitance organisationnelle, ça ne peut pas être que dans les mains du commissaire aux plaintes. Il faut qu'il y ait quelqu'un de complètement indépendant, le Protecteur du citoyen, la Commission des droits de la personne, qui puisse avoir accès à ces informations-là puis intervenir.

M. Poirier-Monette (Philippe) : C'est ce qu'on croit.

Mme Rémillard (Lyne) : Il faut que les personnes qui puissent apporter de l'amélioration, du changement, une réflexion soient mises dans le processus.

M. LeBel : Un vrai protecteur des aînés.

Mme Rémillard (Lyne) : Un vrai protecteur des aînés.

M. LeBel : Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup, Mme Rémillard et M. Poirier-Monette, du réseau de la FADOQ.

Je suspends les travaux jusqu'à 13 heures, où la commission se réunira en séance de travail. Alors, je vais demander aux gens de quitter la salle, pour ceux qui n'ont pas affaire.

(Suspension de la séance à 12 h 52)

(Reprise à 15 h 02)

Le Président (M. Provençal)  : Alors, bon après-midi à tous. La Commission de la santé et des services sociaux reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 52, Loi visant à renforcer le régime d'examen des plaintes du réseau de la santé et des services sociaux notamment pour les usagers qui reçoivent des services des établissements privés.

Cet après-midi, nous entendrons les organismes suivants : l'Office des personnes handicapées du Québec, Les Usagers de la santé du Québec et le Comité de lutte à la maltraitance de l'ASR... et d'autres lettres, là, qu'on pourra nommer en temps et lieu.

Alors, comme la séance a commencé à 15 h 01 — on devrait peut-être la récupérer, théoriquement — je vais vous demander d'avoir... de pouvoir dépasser d'une minute, c'est-à-dire 17 h 16. Merci beaucoup.

Je souhaite la bienvenue aux représentantes de l'Office des personnes handicapées du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et à commencer votre exposé. Je vous cède la parole.

Office des personnes handicapées du Québec (OPHQ)

Mme Champigny (Frances) : Bonjour. Mon nom est Frances Champigny. Je suis la vice-présidente du conseil d'administration de l'Office des personnes handicapées du Québec. Je vous remercie de nous avoir invités à participer à ces consultations. Je vous présente les personnes à mes côtés, Mme Anne Hébert, directrice générale de l'office, et Mme Sabrina Collin, avocate des services juridiques de l'office, et corporatifs.

L'office, je vous le rappelle, est un organisme gouvernemental qui contribue à accroître la participation sociale des personnes handicapées. Il soutient et conseille les gouvernements pour toutes les initiatives pouvant avoir une incidence sur les personnes handicapées. Son expertise lui provient de ses différentes fonctions ainsi que de son conseil d'administration, lequel est composé en majorité de personnes handicapées ou de membres de leurs familles, représentant la société civile.

L'office vient aujourd'hui vous exprimer son appui au projet de loi n° 52. Ce projet de loi a le potentiel, selon nous, de renforcer le régime d'examen des plaintes au bénéfice de plusieurs personnes handicapées qui reçoivent des services sociaux... services du réseau de la santé et des services sociaux.

Je vais laisser aux soins... à Mme Hébert d'élaborer davantage sur le sujet.

Mme Hébert (Anne) : Merci. Comme vient de le mentionner Mme Champigny, l'office reconnaît l'importance de l'objectif de ce projet de loi, soit de renforcer le régime d'examen des plaintes du réseau de la santé et des services sociaux notamment offerts par les établissements privés. Nous estimons que le traitement des plaintes s'inscrit dans l'essence même d'un service de qualité, car il contribue à son amélioration. Il doit conséquemment être au coeur des préoccupations de toute administration, qu'elle soit publique que privée. C'est en ce sens que nous nous montrons favorables au projet de loi.

Plus particulièrement, il y a trois mesures qui méritent d'être soulignées dans ce projet de loi, qui requièrent notre attention et notre appui. Ces mesures contribuent à renforcer la crédibilité du processus de plainte puis elles permettent également d'accroître la confiance des citoyennes, des citoyens envers celui-ci.

Premièrement, nous sommes en accord avec l'introduction d'une exigence liée à l'indépendance pour la personne exerçant la fonction de commissaire aux plaintes. Nous croyons qu'il est essentiel que le traitement des plaintes soit effectué par une personne qui est libre de tout rapport susceptible d'influencer son action.

Deuxièmement, nous saluons la mesure du projet de loi qui étend le mandat du commissaire local aux plaintes aux établissements privés. Cette mesure stipule que les plaintes et les signalements de maltraitance visant les établissements privés seront dorénavant traités par cette personne. Une telle centralisation du traitement des plaintes est une initiative des plus pertinentes.

Enfin, nous voyons également d'un très bon oeil l'ajout, au comité de vigilance et de la qualité des établissements privés, d'une personne représentant le centre intégré de santé et de services sociaux. Ce comité a notamment pour fonction d'effectuer le suivi des recommandations du commissaire local et du Protecteur du citoyen. En ce sens, une telle façon de faire se situe en cohérence avec les mesures précédentes.

Cela étant dit, M. le Président, nous avons tout de même deux préoccupations que nous souhaiterions soumettre à l'attention des membres de la commission parlementaire.

La première concerne le délai de traitement des plaintes ou des signalements pour maltraitance envers une personne en situation de vulnérabilité. Certaines personnes handicapées sont plus susceptibles de se trouver dans cette situation. Elles sont également plus vulnérables aux différentes formes d'exploitation. Elles doivent donc pouvoir bénéficier de mesures de protection conséquentes. Des situations de maltraitance envers les personnes vulnérables nécessitent des interventions immédiates. L'absence de précision quant aux délais de traitement accordés à de tels signalements ou plaintes nous préoccupe particulièrement. Selon nous, les plaintes et signalements pour maltraitance devaient être traités avec diligence. C'est pourquoi nous recommandons qu'ils soient traités en priorité dans les meilleurs délais par le commissaire local.

Le deuxième point concerne l'adaptation de la procédure de plainte aux personnes handicapées. Il est primordial de s'assurer que les personnes handicapées puissent exprimer et formuler facilement une plainte. Il faut aussi qu'elles puissent recevoir et comprendre toute l'information pertinente à ce sujet. Des mesures d'adaptation sont donc nécessaires pour s'en assurer.

Prenez, par exemple, une personne qui a une déficience intellectuelle ou une incapacité auditive ou visuelle liée à la parole. Il faut prévoir la production de formulaires, de documents d'information adaptés, dans des moyens adaptés — on pense au braille, aux gros caractères ou à la langue des signes — ainsi qu'un accompagnement adéquat, comme le recours à une personne accompagnatrice ou interprétant la langue des signes québécoise. Il faut que ces personnes handicapées soient en mesure de formuler facilement une plainte dans les institutions privées autant que publiques et il faut surtout qu'elles soient en mesure de transiger en toute égalité, avec les moyens appropriés, dans le cours de la démarche de traitement de la plainte. Donc, pour nous, ça nous semble un élément très, très important qui... pas nécessairement obligatoire de le retrouver dans le projet de loi, mais il faut s'assurer... Il faut rappeler cette obligation-là dans le processus de plainte.

Pour terminer, j'aimerais également profiter de l'occasion pour rappeler l'importance de poursuivre les efforts à réduire le nombre et la gravité des situations pouvant faire l'objet d'une plainte. Donc, la plainte, on arrive en bout de processus, mais il faut aussi essayer de travailler en amont. Et, pour nous, il semble... il est important d'agir de façon intégrée sur les différentes dimensions pouvant influencer la qualité des services dispensés par le réseau.

Et je voudrais souligner que l'office reçoit très positivement, accorde un très bon accueil à la question d'un système d'information commun pour la gestion des plaintes, parce que ça va pouvoir alimenter la réflexion sur les objets de plainte pour être capable d'agir en amont.

Également, on accueille très positivement l'idée d'un leadership du commissaire-conseil, qui va pouvoir guider, s'alimenter pour agir également en amont. On trouve ça très intéressant.

Et on trouve aussi intéressante l'idée d'une coordination des différents acteurs, là, qui interviennent dans le processus des plaintes en termes d'assistance et d'accompagnement. On pourra, si la période de questions le permet, parler un petit peu plus des efforts, nous, qu'on fait pour se coordonner avec, entre autres, les centres d'assistance et d'accompagnement aux plaintes, là, l'office. Donc, toutes des suggestions qui vous ont été faites pour... lesquelles nous semblent très intéressantes.

Donc, en continuant à agir sur ces aspects, en plus de renforcer le régime d'examen des plaintes, on mettrait en place les conditions propices au développement et à la dispensation des services de qualité au profit de l'ensemble des personnes, dont les personnes handicapées et leurs familles. Je vous remercie.

• (15 h 10) •

Le Président (M. Provençal)  : Merci, mesdames, pour votre exposé. Nous allons commencer cette période d'échange avec Mme la ministre. Et je vous cède la parole, madame.

Mme Blais (Prévost) : Merci, M. le Président. Bienvenue, Mme Frances Champigny, je suis très heureuse de vous avoir ici, à cette commission parlementaire, Mme Hébert, qui oeuvre au sein de l'Office des personnes handicapées depuis près de 36 ans maintenant, qui a gravi tous les échelons professionnels jusqu'à directrice générale, Mme Sabrina Collin, conseillère juridique. Et je mentionnerais aussi la présence de Mme Louise Gagnon-Lessard, qui est accompagnatrice. Merci.

J'aimerais tout d'abord vous dire que vous êtes un acteur important pour le gouvernement du Québec, en particulier pour le ministère de la Santé et des Services sociaux, vous féliciter aussi pour votre collaboration, actuellement, avec la direction des aînés et des proches aidants concernant l'entente-cadre nationale sur la maltraitance. Vous travaillez très bien ensemble. C'est votre domaine, et votre présence est très importante.

Maintenant, vous le soulevez, un point... Vous êtes d'accord sur l'ensemble du projet. Vous soulevez un point puis vous avez parlé de sourds, alors vous le savez, que vous m'avez titillée. Alors, vous le savez, combien je suis impliquée au sein de la communauté sourde. Et, quand vous avez mentionné la difficulté pour les personnes en situation de handicap, notamment les personnes qui utilisent le braille ou l'une des langues des signes utilisées au Québec, combien ça pouvait être un obstacle...

Avant que vous ne mentionniez ça, j'étais pour vous poser cette question-là, puis que je vais vous poser quand même. Vous demandez à ce que les personnes en situation de handicap... que le traitement des plaintes soit traité en premier. Et j'étais pour vous poser la question : Mais en quoi est-ce équitable comparativement aux autres personnes vulnérables? Et là vous avez parlé des personnes en situation de handicap comme les sourds et les aveugles, puis il y en a d'autres aussi. Ça fait que j'aimerais que vous puissiez approfondir là-dessus.

Mme Hébert (Anne) : En fait, on demande précisément, pour les cas de maltraitance, que les plaintes liées à la maltraitance soient traitées en priorité sur ces cas spécifiques là. Ce n'est pas pour l'ensemble des plaintes qui sont formulées par des personnes handicapées, mais, dans le cas des maltraitances, je pense qu'il faut agir vraiment avec diligence. On comprend qu'il y a un délai de 45 jours pour une réponse, délai maximum de 45 jours, mais on aimerait... Parce que, les personnes qui vivent cette situation de maltraitance, ça ne peut pas s'étirer, là, comparativement à d'autres plaintes qui... Nous, à l'office, il y a des personnes qui passent par nos services individuels pour demander de l'aide sur certaines situations. Ça a beaucoup recours, par exemple, aux délais d'obtenir des services ou à des questionnements sur l'évaluation pour l'obtention de services à domicile, par exemple. Mais, des cas de maltraitance, on pense que ceux-là devraient être traités prioritairement par rapport à ces cas-là. C'est notre message sur la priorisation.

En ce qui concerne l'adaptation des moyens, bien, c'est plus dans la transaction courante dans le traitement de la plainte. Il faut que le commissaire local adapte... ait... utilise des moyens adaptés de communication pour cette clientèle-là, parce que sinon il ne travaille pas en toute égalité, il n'offre pas tout le traitement... les moyens pour assurer vraiment le droit à l'égalité de ces personnes-là dans le traitement des plaintes.

Puis, si les gens ne sont pas capables de comprendre le processus, de compléter adéquatement le formulaire, si c'est trop compliqué, ce n'est pas dans le bon format, bien, c'est un obstacle qui... Puis surtout, là, ce qu'on nous rapporte, c'est que les gens s'empêchent de porter plainte parce que c'est trop compliqué d'avoir le formulaire en braille ou d'avoir un interprète LSQ pour formuler.

Mme Blais (Prévost) : Vous me touchez en plein coeur. Je suis tout à fait d'accord avec vous, ça ne devrait pas se passer comme ça. Ça devrait être simple, mais c'est tellement compliqué d'avoir des interprètes, même difficile pour moi parfois quand je veux, ici, faire mes voeux. Mais je vous comprends puis je vais porter une attention particulière par rapport à votre demande. Et je suis certaine que tout le monde est sensible à cela ici, autour de la table.

Puis il y aurait peut-être lieu d'avoir aussi beaucoup plus de formation. Vous parlez que vous êtes d'accord avec le commissaire-conseil. Il pourrait avoir un rôle à jouer là-dedans au niveau de la formation, au niveau de la sensibilisation et faire en sorte que, dans les établissements, quand il y a des plaintes qui concernent, justement, la communication comme telle pour les personnes en situation de handicap et plus de vulnérabilité... qu'on soit en mesure d'avoir les outils nécessaires, c'est-à-dire des interprètes puis du braille, pour être capables de pouvoir les accompagner rapidement. Moi, je suis très, très, très sensible puis je pense que les juristes seront très sensibles également.

Mme Hébert (Anne) : Si vous me permettez, je rappelle qu'il existe déjà une politique que le gouvernement du Québec a adoptée dans le cadre de la mise en oeuvre de la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées, politique sur l'accès aux documents et services, qui oblige les ministères et organismes à utiliser les moyens.

Mme Blais (Prévost) : Oui, je sais.

Mme Hébert (Anne) : Puis c'est aussi... C'est en respect de la Charte des droits et libertés de... C'est une obligation, mais il faut le rappeler. Il faut donner... Il faut rappeler souvent cette obligation-là puis, concrètement, il faut la rendre possible très concrètement, là.

Mme Blais (Prévost) : Vous savez, Mme Hébert, avant de poser... avant de céder la parole à mes collègues, ça fait depuis 2007 que je demande à ce que la période de questions et de réponses orales soit interprétée en LSQ, depuis 2007. On est en 2020. Alors, je refais la demande aujourd'hui au président de l'Assemblée nationale. Il me semble qu'on est rendus là et que les personnes qui... Parce qu'on pense que les personnes sourdes sont toutes capables de lire, hein? Donc, on... Non, ce n'est pas ça, la réalité. Et, même à ça, par respect pour les personnes qui utilisent soit la LSQ ou l'American Sign Language... bien, la LSQ au Québec, bien, on devrait avoir une période de questions et réponses orales interprétée en LSQ. Maintenant, M. le Président, je cède la parole. J'ai fait mon petit éditorial.

Le Président (M. Provençal)  : Merci, Mme la ministre. Dans un premier temps, je vais céder la parole à la députée de Soulanges.

Mme Picard : Merci, M. le Président. Marguerite, je t'appuie aussi dans ta mission.

Bonjour. On se connaît particulièrement, on travaille ensemble. Merci beaucoup pour votre présence ici cet après-midi. Moi, je connais bien vos services individualisés d'assistance à la personne. J'aimerais, dans un premier temps, que vous expliquiez concrètement à la commission quels sont ces services et comment vous verriez votre rôle à travers les services suite au projet de loi n° 52.

Mme Hébert (Anne) : L'Office des personnes handicapées du Québec offre des services de référence et d'accompagnement aux personnes handicapées dans leurs démarches pour obtenir des services. D'abord, on a une petite équipe d'accueil et référence qui répond à des questions sur les programmes et services existants ou sur les droits, là, pour pouvoir les guider. Et on les réfère au bon endroit puis on leur explique tout ce qu'ils doivent faire pour obtenir les services.

Puis on a une autre équipe d'accompagnement, où, là, quand les besoins sont plus grands, la personne a besoin vraiment d'être soutenue dans les démarches pour obtenir des services, bien, il y a des conseillers qui sont dédiés et qui accompagnent les personnes.

On reçoit un minimum, là, de... On traite à peu près, en accompagnement, 5 000 personnes — je ne dis pas des demandes, là, parce que les personnes peuvent avoir plusieurs demandes en cours d'année — 5 000 personnes, là, dans l'année, et ça tourne beaucoup autour des mêmes thèmes. Quand on parle de santé et services sociaux, c'est beaucoup autour du soutien à domicile, c'est accompagner les personnes pour avoir un service de soutien à domicile qui correspond à leurs besoins. Mais les services éducatifs requièrent aussi beaucoup d'attention. Quand on parle plus... Bien, ça, c'est plus, comme, notre rôle.

• (15 h 20) •

Puis, par rapport au processus de plainte, nous, ce n'est pas un processus de plainte. Les gens s'adressent à nous pour être... avoir de l'information et être accompagnés. Mais on veut beaucoup travailler avec... en collaboration avec les partenaires qui offrent différents services. C'est pourquoi on a signé une entente avec la fédération des services d'assistance et d'accompagnement aux plaintes dans le réseau de la santé et services sociaux, pour qu'on se fasse du référencement commun. Nous... Eux, ils sont spécialistes dans l'assistance et le traitement des plaintes. Donc, quand il y a des gens qui s'adressent, au premier chef, à l'office, on peut travailler très près avec ces centres-là. Puis nous, on a une expertise plus grande sur les programmes puis les manières d'adapter la réponse aux personnes handicapées. Donc, les deux organisations s'entraident et... pour que ce soit beaucoup plus facile dans les démarches pour les personnes handicapées. C'est sûr que nous, on ne traite pas les plaintes, mais on donne de la bonne information, on guide les personnes dans les démarches.

On essaie aussi, le plus possible, d'agir en amont, c'est-à-dire d'éviter la plainte. C'est-à-dire, quand c'est porté à notre attention qu'une personne handicapée s'adresse à nous parce qu'elle vit des problèmes puis elle ne sait pas trop quoi faire dans les démarches, on a un pouvoir de représentation des personnes. Donc, on peut accompagner la personne, la représenter pour agir en amont, pour trouver des solutions avant pour éviter le dépôt de plainte.

Mme Picard : Une petite dernière question rapidement. Pour les personnes les plus vulnérables, les personnes en situation de handicap qui sont non verbales, j'aimerais vous entendre sur la façon, selon vous, la plus appropriée qu'on pourrait les aider pour un dépôt de plainte.

Mme Hébert (Anne) : Bien, c'est sûr que, quand c'est non verbal, bien là, il y a plusieurs situations possibles. C'est souvent le parent ou un proche qui va accompagner. On va travailler beaucoup avec le parent, le proche, mais il faut que la personne soit quand même avec des moyens adaptés, puisse prendre des décisions, faire des choix quand elle est en mesure de le faire.

C'est pour ça aussi qu'il y a un certain nombre de ces personnes-là aussi qui sont sous la responsabilité du Curateur public. Donc, on a aussi une entente avec le Curateur public pour avoir... pour ne pas qu'il y ait un dédoublement de services, mais qu'on travaille ensemble pour répondre à ces personnes-là. Le curateur peut nous référer des cas, comme nous, on essaie de travailler conjointement avec les représentants du curateur.

Mais, quand c'est une personne non verbale, là, on essaie de trouver un intermédiaire crédible pour la personne, tout en n'évacuant pas, là, la personne elle-même du processus. Là, il y a tellement de cas de figure, je ne peux pas répondre plus précisément, mais on essaie de faire attention à tout ça.

Le Président (M. Provençal)  : Mme la ministre, je pense que vous avez le goût d'intervenir.

Mme Blais (Prévost) : J'ai deux questions. Il y en a une pour Mme Champigny. Qu'est-ce qui vous a donné... Qu'est-ce qui vous a poussée à devenir vice-présidente de l'Office des personnes handicapées du Québec?

Mme Champigny (Frances) : Le goût de participer à un changement, à rendre une société plus accessible et inclusive.

Mme Blais (Prévost) : Donc, vous avez souffert de certaines situations.

Mme Champigny (Frances) : Pas nécessairement moi, mais je l'ai vu. Vous savez, on est handicapé... comme on se voit, mais, souvent, dans la vision de l'autre, l'autre nous voit plus handicapé. Il oublie qu'un handicapé physique comme moi, qui ai un trouble de parole... J'ai encore toute ma tête et je peux participer à bien des choses. Mais elle dit, quand la société voit ça, un trouble de parole : Bien, elle ne doit pas toute être là.

Mme Blais (Prévost) : Des préjugés. Peut-être que vous êtes capable de répondre à la deuxième puisque vous êtes la vice-présidente. Je sais que vous avez eu des partenariats avec le Curateur public, avec les centres d'accompagnement et d'assistance aux plaintes. J'aimerais vous entendre là-dessus, sur les forces et les faiblesses de ces partenariats.

Mme Champigny (Frances) : Ah! je vais laisser Mme Hébert répondre.

Mme Hébert (Anne) : C'est toujours, je dirais... C'est positif. D'abord, il y a constat positif. La collaboration établie par des voies d'entente formelles avec les deux organisations, là, c'est positif. Mais il faut être très vigilant à chaque année de refaire le point sur comment on s'adapte à cette situation-là. Puis une des grandes difficultés, curieusement, c'est la méconnaissance des citoyens des services qu'on offre mutuellement. Donc, ça demande beaucoup de faire connaître nos services auprès d'une population plus large, pas juste les personnes handicapées. Des fois, c'est les proches qui disent : Ah! tu devrais appeler à l'office. Donc, je dirais, la faiblesse, là, même si on collabore avec des organisations puis même si cette collaboration-là va bien, c'est cette méconnaissance qui existe, dans la population, de notre offre de services. Et ça, c'est la première, la méconnaissance.

Et aussi c'est... Une des difficultés qu'on a, je l'ai mentionné tout à l'heure, c'est... Les gens rencontrent tellement de difficultés dans leurs démarches pour obtenir des services — c'est long, c'est fastidieux, c'est coûteux en temps et parfois en argent — que l'énergie dépensée à tout ça reste... qu'il ne reste plus beaucoup d'énergie pour porter plainte.

Et, c'est pour ça, je vais insister, en conclusion, sur l'importance aussi des moyens que vous... du commissaire-conseil, du système informatisé, parce que ça va aider à avoir une connaissance des difficultés puis à essayer de guider l'action sur des problèmes à résoudre en amont, parce que c'est... Quand on... C'est cette réalité-là beaucoup, de l'épuisement dans... des personnes dans leurs démarches, puis de dire : Ah! est-ce que la plainte va vraiment changer quelque chose? Est-ce que je vais... ça va être mieux?

Ce qui me permet de... Vous m'ouvrez la porte pour parler d'un projet sur lequel l'office travaille présentement, sur la simplification des démarches d'accès aux personnes handicapées. On a un important projet qu'on travaille avec la collaboration du Secrétariat du Conseil du trésor pour réduire le nombre de démarches en diminuant le nombre de formulaires, en diminuant le nombre de preuves à fournir pour que... alléger les démarches ou pour ne pas épuiser les personnes handicapées ou les parents, là, dans les démarches qu'ils ont à faire pour obtenir des services. Ça, c'est une autre façon aussi de régler le problème, mais...

Je ne sais pas si je réponds bien à votre question, mais, je vous dirais, les deux éléments, là, c'est la méconnaissance et l'épuisement des familles dans toutes les démarches qu'ils ont à faire pour obtenir des services, les familles des personnes handicapées.

Le Président (M. Provençal)  : La députée de Lotbinière-Frontenac avait une question toujours?

Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) : Oui. Il me reste combien de temps?

Le Président (M. Provençal)  : Une minute.

Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) : Je vais faire ça vite. Donc, merci d'être là. Tout à l'heure dans votre présentation, vous avez parlé de coordination entre les acteurs. J'aimerais vous entendre là-dessus.

Mme Hébert (Anne) : Bien, comme je vous disais, on a l'exemple d'une entente qu'on signe avec la fédération, disons, de la plainte. On a, avec le curateur... Ce serait bien, là, qu'il y ait une forme d'entraide puis d'échange, des moments. Ça peut... Pas obligé d'être un mécanisme très formel mais peut-être des moments dans l'année où les organismes qui oeuvrent pour offrir de l'assistance, de l'accompagnement, de la médiation se parlent, puis on essaie de voir comment on peut améliorer tout ça pour ne pas juste être en réaction mais être proactifs pour améliorer en continu le processus de plainte puis d'accompagnement des personnes.

Nous, on croit beaucoup, parce que c'est là qu'on agit, en médiation, agir avant qu'il y ait un dépôt de plainte. Pour nous, la plainte, là, c'est le dernier recours. C'est important, les plaintes, parce qu'il y a des choses qu'il faut dénoncer puis agir, mais, quand on peut être interpelé au début, quand il y a des difficultés, ça peut être important. Ça fait que, donc, on peut échanger sur des façons de faire puis se coordonner davantage pour éviter que les situations s'aggravent tellement qu'il faut porter plainte.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. À ce moment-ci, je vais céder la parole à la députée de Fabre.

Mme Sauvé : Merci beaucoup, M. le Président. Bon après-midi. Merci beaucoup, Mme Champigny, Mme Hébert, Mme Collin et Mme Louise Gagnon-Lessard. Merci d'être ici, parce que votre contribution, elle est excessivement importante, et on est tous, effectivement, autour de la table, très sensibles à la situation des personnes handicapées.

Il y a un mot qui n'a jamais été prononcé depuis le début des consultations, puis je pense qu'il faut le nommer ici parce que l'attention qu'on porte à la réalité des personnes handicapées, ça doit être empreint de ce mot, et c'est le mot «humanité». Je pense que, quand on est en train de travailler autour de la révision des démarches de plainte et qu'on a la réalité et les difficultés auxquelles vous êtes... les personnes handicapées doivent faire face au quotidien... je pense qu'il faut qu'on soit dans cette réflexion très attentive et très humaine.

Vous avez nommé des choses. En rafale, je vais essayer de faire un peu le portrait de ce que j'ai entendu de votre part. Je veux souligner l'accent que vous avez mis sur la notion de prévention. Puis je sais qu'on est en train de parler de projet de loi qui renforce le régime d'examen, mais on ne dira jamais assez l'importance de ce rôle de représentation de la personne et d'éviter la plainte. Et je pense que ça, c'est un rôle qui doit vous être reconnu, parce que c'est excessivement important.

L'autre aspect aussi, vous avez parlé des délais. Vous n'êtes pas les seuls à en parler. Je voudrais vous entendre un peu là-dessus. Est-ce que vous avez un peu le portrait de la situation par rapport aux personnes handicapées? Est-ce qu'il y a des enjeux particuliers de délai qui font en sorte que, le 45 jours, on n'y arrive pas? Est-ce que vous avez un petit peu des éléments de cette réalité-là à nous partager dans un premier temps?

• (15 h 30) •

Mme Hébert (Anne) : Je n'ai pas de donnée précise, hein, c'est plus des constats issus du traitement des dossiers individuels qu'on fait. Les délais inquiètent... c'est-à-dire que c'est plus une inquiétude préalable, avant le dépôt d'une plainte. Est-ce que... Si ça prend 45 jours avant ça, est-ce que ça règle vraiment ma situation? Est-ce que je mets l'énergie? Il y a une forme de... pas de découragement, le terme est trop fort, mais ce n'est pas... d'inquiétude par rapport au délai dans le traitement des plaintes, parce que ces personnes-là sont déjà en difficulté. Mais je n'ai pas entendu... Tu sais, en général, ce qu'on constate, c'est que le délai de 45 jours est respecté. Mais il faut se mettre dans la situation de ces personnes-là. C'est des délais supplémentaires, quand même, dans... tu sais, de vivre une situation difficile.

Mais ce qui est très clair pour notre conseil d'administration de notre organisation, c'est que, dans le cas de maltraitance, il ne devrait pas y avoir des délais importants. Le 45 jours est trop grand, ça nous semble, là. L'important, c'est d'agir le plus... avec diligence le plus rapidement possible quand la plainte est liée à de la maltraitance. Ça, c'est sans équivoque.

Mme Sauvé : Bien, vous faites bien de le rappeler, et c'est d'ailleurs la recommandation-phare de votre mémoire. Vous faites très bien de le rappeler.

Moi, je veux... L'autre élément que vous avez amené, parce qu'on a souvent parlé à travers les différentes présentations, puis c'est la réalité très terrain des personnes qui se retrouvent avec ou non la volonté de faire une démarche de plainte... Il y a la peur des représailles, mais ça, on en a parlé, et vous l'avez évoqué. Mais vous avez aussi évoqué la réalité d'épuisement des personnes handicapées, qui vivent déjà tellement de difficultés dans leur quotidien et qui... Vous avez dit : Le 45 jours, il est d'autant plus intense pour ces personnes-là qui vivent déjà des obstacles importants.

Alors, moi, j'ai le goût de vous dire, Mme Hébert, et je sais que tout au long de votre mémoire vous en parlez, l'importance d'avoir ces approches adaptées, tenir compte de la réalité des personnes handicapées... Mais vous n'en faites pas une recommandation formelle comme telle dans votre mémoire. Ma question est la suivante : Est-ce que vous souhaiteriez voir cette sensibilité, puis j'ai entendu l'ouverture de la ministre, est-ce que vous souhaiteriez voir, dans le texte du projet de loi, une sensibilité particulière qui inclut des approches adaptées pour répondre aux besoins des personnes handicapées?

Mme Hébert (Anne) : C'est sûr que ce serait un levier supplémentaire intéressant. On ne pourrait pas s'y opposer. On accueillerait ça très favorablement. Mais je rappelle que tous les moyens sont déjà là, c'est-à-dire qu'il y a une politique d'accès aux documents, il y a une obligation de la charte. Tu sais, l'encadrement législatif existe déjà. C'est toujours la... Si... C'est pour ça qu'on n'en a pas fait une recommandation, parce que ça existe déjà. Ça devrait être un réflexe. Mais il faut... Là, c'est dans un contexte où ce n'est pas garanti, où l'application n'est pas totale que... Peut-être qu'une mention pourrait être aidante.

Mme Sauvé : C'est un peu dans cet esprit-là que je vous interpelais, aussi. Je veux...

Mme Hébert (Anne) : Bien, vous comprenez qu'au plan juridique... Est-ce que c'est nécessaire, puisque l'encadrement existe déjà, là? C'est...

Mme Sauvé : Mais c'était...

Mme Hébert (Anne) : Mais ça peut être aidant de faire le rappel. Il faut que ce soit en termes de rappel.

Mme Sauvé : Voilà. On se rejoint bien. C'était mon intention. Je voulais vous revenir aussi, parce que je trouve ça fabuleux, le type de partenariat que vous avez élaboré avec la Fédération des CAAP, puis vous avez parlé des éléments forts, des éléments de faiblesse... Moi, je crois beaucoup, et particulièrement pour les personnes vulnérables et les personnes handicapées, à la fluidité de la démarche, hein? D'un acteur à l'autre, s'il faut raconter encore une fois son histoire et les embûches auxquelles la personne... S'il faut raconter ça trois, quatre, cinq fois, ça ajoute, même si le délai de 45 jours est là, ça rend ça très lourd.

Alors, dans la fluidité, là, puis le parcours que vous envisagez déjà puis que vous faites avec les CAAP, est-ce qu'il y a cette transition-là fluide? Parce que vous, vous avez votre expertise, eux ont la leur. Alors, comment ça se passe? Est-ce qu'il y a un petit bout du parcours où vous êtes les deux personnes, par exemple, très concrètement, les gens de l'office et les gens du CAAP, à maintenir un peu, là, justement, un double accompagnement pour une petite période de transition?

Mme Hébert (Anne) : C'est très variable selon les situations, là. Là, on essaie d'éviter le dédoublement. Ça veut dire qu'on s'entend, là, tu sais, je vous dirais, qui prend ça plus en charge, qui est plus responsable, puis là il y a des échanges entre les deux professionnels, les deux personnes pour éviter ça, pour éviter que la personne, elle fasse... tu sais, elle ait deux interlocuteurs avec qui elle transige, que... On essaie, dans la plupart des cas, de s'entendre très rapidement, là, dans le cas de centres d'assistance, sur qui prend... qui a la majeure du cas. Est-ce que c'est vraiment vers les plaintes qu'ils vont aller ou est-ce que c'est l'office qui continue d'accompagner autrement, avec des échanges de médiation? Donc, il y a un jugement, une évaluation qui se fait entre les deux organisations.

Mais, tu sais, je ne connais pas... À tous les... C'est du cas par cas, c'est individuel. S'il y a des... Il se peut qu'à un moment on travaille... Tu sais, dans certains cas, on travaille à deux quand c'est nécessaire, mais on essaie d'éviter ça pour, justement, que la personne puisse être accompagnée rapidement, qu'elle n'ait pas trop d'interlocuteurs autour d'elle.

Mme Sauvé : O.K. D'accord. Est-ce qu'il me reste un petit peu de temps?

Le Président (M. Provençal)  : Trois minutes, madame.

Mme Sauvé : Parfait. Justement, toujours autour de ce partenariat-là, vous avez nommé, puis, encore une fois, c'est un élément que vous faites bien d'exprimer, cette méconnaissance-là de la réalité des personnes handicapées, malgré toute l'expertise des CAAP et des autres acteurs avec qui vous travaillez, avec qui vous avez des ententes. Vous avez même nommé le mot «formation». Est-ce que c'est quelque chose qu'on pourrait vous reconnaître, un mandat de formation pour l'expertise que vous avez, lorsque, justement, vous avez des ententes avec d'autres acteurs, pour faire tomber un peu la méconnaissance?

Mme Hébert (Anne) : Oui. Dans la... Dans nos ententes de collaboration qu'on a avec les différents partenaires, on ajoute tout le temps un aspect formation, échange d'information entre les organisations pour que le personnel ait une connaissance de base sur les programmes et services, sur la réalité des personnes handicapées. On pourrait accentuer ce rôle-là, bien sûr, là. C'est toujours une question de moyens puis de priorités. Mais c'est une préoccupation qu'on a toujours d'étendre cette information et cette formation-là avec nos partenaires.

Mais c'est vrai aussi pas juste avec nos partenaires. Quand je disais : La méconnaissance, là, de la réalité des personnes handicapées... C'est aussi un ensemble de partenaires, pas juste dans l'offre de services, là, où il faut... C'est en continu qu'il faut parler de la réalité des personnes handicapées. Des fois, c'est des petits détails, c'est la personne qui est à l'accueil. L'organisation est bien, le personnel qui offre des services directs aux personnes handicapées sont bien formés, mais des fois c'est juste question de... première personne à qui on s'adresse au téléphone, qui peut créer un obstacle ou un refroidissement dans la volonté de poursuivre, là. Donc, ça doit se faire en continu.

Le Président (M. Provençal)  : Une minute.

Mme Sauvé : Rapidement, toujours dans le partenariat, parce que moi, je considère que ce sont de très bonnes pratiques qui méritent qu'on s'y attarde et qu'on regarde ça, parce que des bonnes pratiques, c'est intéressant de les déployer par la suite, est-ce que... dans toutes les régions du Québec, est-ce que ces ententes-là se déploient ou bien c'est à géométrie variable?

Mme Hébert (Anne) : C'est à géométrie variable pour différentes raisons. Ce sont des ententes nationales qu'on signe avec les partenaires, mais, pour différentes raisons, c'est à géométrie variable. Des fois, ça dépend, tu sais, des demandes dans une région qui nous sont adressées. Il y a plusieurs facteurs qui peuvent jouer. Mais ça, c'est une autre préoccupation.

Il faut que ça se déploie dans toutes les régions, mais je ne cacherai pas qu'il y a certaines disparités dans certaines régions. Puis, d'une année à l'autre, ça change pour... Ça dépend aussi de la disponibilité de nos ressources, de la disponibilité de ressources. Des fois, il y a aussi... Il y a des moments, là, quand on regarde dans les dernières années, ce ne sont pas les mêmes objets, ce ne sont pas les mêmes obstacles qui sont portés à l'attention de l'office ou de nos partenaires. Puis il peut y avoir des vagues de problèmes communs et... Puis ça, ça amène aussi une disparité, parfois, dans l'énergie qu'on y met, là.

Une voix : ...d'une région à l'autre.

Mme Hébert (Anne) : Oui, mais il y a des disparités régionales, malheureusement, oui.

Mme Sauvé : ...régionales, voilà. Merci, merci.

Le Président (M. Provençal)  : Je vous remercie. Alors, je vais céder maintenant la parole au député de Rimouski.

• (15 h 40) •

M. LeBel : Merci, M. le Président. Effectivement, il y a des disparités régionales. Dans la page 4, vous dites : «Soulignons que le suivi des recommandations implique bien plus que de corriger le comportement fautif d'une personne, d'un employé, il faut également vérifier s'il y a là un aspect systémique et, le cas échéant, mettre en oeuvre les mesures...»

Qu'est-ce que vous voulez dire par là?

Mme Hébert (Anne) : Parfois, les plaintes qui sont déposées, ça peut être juste, tu sais, très circonstanciel à des réactions, des attitudes, mais des fois ça peut être un problème plus général. Je vais donner l'exemple des plaintes qui sont portées à l'attention de l'office. C'est beaucoup des plaintes liées aux délais pour obtenir un service, mais ce n'est pas lié aux individus, un mauvais comportement, des préjugés. Mais ces délais-là sont parfois liés, tu sais, au manque budgétaire, au manque de ressources, etc.

Donc, c'est intéressant, là, de... C'est pour ça qu'on trouve intéressant le système d'information commun, entre autres, parce que ça va nous permettre de connaître, tu sais, des obstacles qui reviennent, qui sont récurrents, mais il faut aussi, dans... parfois, quand... que le commissaire local regarde ça puis porte à l'attention des autorités les aspects plus systémiques, là, tu sais, qu'il nomme des problèmes. Ça va être une source additionnelle d'information sur les obstacles qui persistent.

M. LeBel : Là, on parle beaucoup de maltraitance organisationnelle, et c'est ça que... Je me demande qu'est-ce qu'on... où on aboutit.

Rapidement, chez nous, il y a une Rimouskoise, Carole St-Laurent, c'est une personne qui vit avec un handicap, qui est incapable de recruter du personnel, des préposés aux bénéficiaires. Elle, elle essaie, mais, les programmes, tu sais, elle peut payer un préposé aux bénéficiaires 14 $ de l'heure, là, ça fait qu'il n'y a personne qui veut aller faire ça dans... Ça fait que, là, elle est prise à dormir dans son fauteuil le soir, elle n'est pas capable de prendre soin d'elle, il y a un changement de personne qui vient à chaque fois. Moi, je n'appelle pas ça de la bientraitance, là. C'est de la maltraitance. Mais, si elle fait une plainte, qu'est-ce qui va changer? Qu'est-ce que... Comment on peut obliger, à un moment donné, à lui donner des services?

Mme Hébert (Anne) : Bien, s'il y a des plaintes nombreuses, ça... Parce que Mme St-Laurent n'est pas la seule personne handicapée à vivre cette situation-là.

M. LeBel : Non, je le sais.

Mme Hébert (Anne) : Mais, si c'est porté souvent à l'attention, qu'on le voit, que ça devient comme un constat, un phénomène qui est vécu dans plusieurs endroits, ça peut être intéressant pour la prise de décision. Ça documente un problème. Nous, on le fait de différentes façons avec... On parle des services à domicile, de l'offre des services à domicile, il y a plusieurs façons de documenter des difficultés vécues.

Mais les plaintes, de bien connaître les plaintes, les raisons liées aux plaintes, ça permet de documenter les problèmes puis d'identifier comment on peut agir sur les raisons, tu sais, plus systémiques. Là, on parle de la qualité de l'offre de services. Ça nomme... Ça nous aide à nommer et à comprendre les problèmes. C'est pour ça que je répète que, parce qu'on le vit par rapport à d'autres programmes... que le système d'information commun qui est prévu dans le projet de loi est extrêmement important, de bien documenter ça.

M. LeBel : Il pourrait être utile dans vos pressions éventuellement.

Mme Hébert (Anne) : Tout à fait. Puis, cette initiative-là, on souhaiterait que dans beaucoup de programmes il y ait l'équivalent, parce que ça nous permet d'aller... Parce qu'il y a des cas qui peuvent nous être portés qui ne sont pas portés à l'individuel. On entend ça. Mais, plus on a de sources qui viennent appuyer ça et puis une connaissance plus fine, bien, on est plus en mesure, nous, à l'office, de faire des recommandations sur des solutions porteuses, là, qui nomment vraiment le bon problème, les bonnes solutions.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup, madame. Le dernier message a été très, très bien saisi par les gens autour de la table. Je vous remercie beaucoup pour votre contribution à nos travaux.

Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 15 h 44)

(Reprise à 15 h 47)

Le Président (M. Provençal)  : Nous reprenons nos travaux. Je souhaite la bienvenue aux représentants des Usagers de la santé du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à commencer votre exposé. À vous la parole.

Les Usagers de la santé du Québec (LUSQ)

M. Blain (Pierre) : Merci, M. le Président, Mme la ministre, membres de la commission. Je me présente, Pierre Blain, je suis le directeur général, le président des Usagers de la santé du Québec. Je suis accompagné aujourd'hui par le vice-président, M. Jacques Hould. J'aimerais souligner que nous devions avoir également une troisième personne qui est le président du comité des usagers Saint-Léonard—Saint-Michel. Malheureusement, il ne peut pas être là.

Les Usagers de la santé du Québec vous remercient de votre invitation. Nous sommes un mouvement citoyen regroupant les forces vives en matière de santé et de services sociaux au Québec afin de représenter les usagers et leurs droits. Notre organisme constate, analyse et intervient pour faire respecter les droits des usagers, de tous les usagers, qu'ils soient jeunes ou âgés, en situation de vulnérabilité, de handicap ou de santé mentale.

Nous considérons que le régime des plaintes est important et nécessaire, car c'est lui qui est le garant de la qualité des services. Le projet de loi n° 52 ne cible toutefois qu'un aspect du traitement des plaintes dans le réseau de la santé et des services sociaux, celui des établissements privés. Il leur en retire la gestion des plaintes pour la confier aux commissaires des établissements publics.

Les Usagers de la santé du Québec reconnaît le bien-fondé d'un tel changement. Toutefois, nous ne pouvons que nous poser des questions, car nous ne croyons pas que les commissaires du réseau soient plus indépendants que ceux des établissements privés et qu'ils obtiendront de meilleurs résultats. Soyons clairs, nous ne disons pas qu'ils ne font pas leur travail, nous disons qu'ils n'ont pas les outils pour pouvoir faire leur travail.

Le projet de loi centralisera un peu plus la gestion dans le réseau sur un territoire donné. Des voix s'étaient élevées dans le passé pour contester cette façon de faire.

Le projet de loi n° 52 centralisera également d'une autre façon la gestion des plaintes par son article sur la gestion informatique des plaintes, entre autres, la ministre, et je comprends ici que c'est la ministre de la Santé, qui fournira aux établissements l'actif informationnel pour gérer les dossiers des plaintes. De plus, la ministre peut, afin d'apprécier et d'évaluer l'efficacité et le traitement de la qualité des plaintes, aussi extraire des données de ces renseignements. Ça peut être extrêmement intéressant.

Toutefois, le projet de loi éloignera un peu plus l'usager qui veut porter plainte de son environnement et de son commissaire aux plaintes. Qui dirigera les usagers vers le commissaire aux plaintes? Une pancarte sur une porte dans un sous-sol, comme nous l'avons vu lors des visites d'évaluation en CHSLD?

• (15 h 50) •

M. Hould (Jacques) : L'autre problème du projet de loi n° 52 est que l'on ne connaît pas exactement quelle sera la liste des établissements visés par la loi. On nous dit 91, et c'est probablement exact. On a beau dire que ce sont les établissements privés, mais il faudrait qu'une liste d'établissements y soit annexée. Tous ces établissements sont certifiés. Pourquoi ne pas ajouter une catégorie, dans le certificat, qui indiquerait de qui relève la gestion des plaintes dans ces établissements?

Le projet de loi n° 52 soulève une autre problématique. En aucun cas le projet de loi ne fait référence à l'un des acteurs importants du régime des plaintes, le comité des usagers, le groupe qui représente les usagers dans les établissements. Eux seuls ont le mandat exclusif de défendre les droits des usagers. De plus, ils sont complètement indépendants, au grand déplaisir de certains administrateurs. Les autres groupes impliqués ont un rôle de traitement des plaintes ou d'accompagnement.

De plus, les comités des usagers des établissements privés devraient être intégrés aux CUCI afin de bénéficier d'un niveau supplémentaire d'intervention.

En revoyant les rapports de quatre commissaires aux plaintes, nous avons constaté une disparité dans l'interprétation de plaintes entre eux. En effet, le commissaire du CIUSSS de la Capitale-Nationale considère que 32 % de ses dossiers concernent les plaintes, alors que celui de Lanaudière en aurait reçu 66 %. Ne devrait-on pas faire une distinction entre insatisfaction et plainte? Ne devrait-on pas impliquer davantage les usagers et leurs comités dans les insatisfactions? En effet, ces comités étant présents dans tous les établissements, ils seraient les mieux à même de régler facilement les insatisfactions. Il faudra toutefois qu'on leur donne les ressources pour ce faire et qu'on les écoute, surtout.

M. Blain (Pierre) : Le Québec consacre chaque année 34 millions de dollars à la gestion des plaintes. C'est 510 millions, un demi-milliard dépensé en 15 ans. En avons-nous pour notre argent? Nous ne le croyons pas.

Les Usagers de la santé proposent que les commissaires aux plaintes aient plus de pouvoirs et se consacrent exclusivement aux plaintes. Il faudrait qu'on fasse une distinction entre leurs fonctions de plainte et de gestion des plaintes et leur retirer la gestion de contrôle de la qualité, qui pourrait, elle, se retrouver dans les nouvelles directions qu'on a mises en place, qui sont celles de patients partenaires. Ça pourrait être une façon, parce que c'est important. Oui, les plaintes sont là pour améliorer le système, mais je pense qu'on devrait faire une petite distinction.

D'ailleurs, le regroupement des commissaires aux plaintes et à la qualité du Québec avait recommandé d'avoir au moins le pouvoir d'enquête dans son mémoire, en 2017, sur le projet de loi n° 115 visant à lutter contre la maltraitance.

Donc, nous croyons fermement que, pour assurer l'indépendance des commissaires aux plaintes, on doit leur donner les moyens pour faire leur travail. Ils devraient devenir, dans certains cas et même dans plusieurs cas, décisionnels, un peu sur le système qui existe dans la fonction publique, de nomination. Quand on fait un appel, il y a une décision qui est rendue, et l'arbitre peut le faire. Et je pense qu'on pourrait le faire en faisant, justement, une distinction dans le niveau de plainte qui peut se faire.

Les commissaires devraient d'ailleurs intervenir directement lorsqu'il y a des situations problématiques. La ministre des Aînés a annoncé, lors de la présentation à la presse, la création d'un poste de commissaire-conseil. Nous en sommes très heureux parce que nous pensons que ce commissaire-conseil pourrait devenir un recours et pourrait justement amener des solutions.

Les Usagers de la santé du Québec croient que l'on devrait aller plus loin et que ce commissaire-conseil devrait être une instance d'appel des décisions rendues. Un usager qui ne serait pas satisfait des décisions du commissaire pourrait faire valoir en deuxième instance ses griefs. Bien sûr, le Protecteur du citoyen est là, mais nous pensons qu'une instance plus proche pourrait aller mieux. La décision de ce commissaire aurait plus d'impact sur les établissements.

En conclusion, le projet de loi n° 52 pourrait améliorer le régime des plaintes dans les établissements privés. Toutefois, rien ne sera changé dans l'ensemble du régime des plaintes. Il faudrait accorder plus de pouvoirs au commissaire. Et nous, Les Usagers de la santé du Québec, croyons que les usagers, par l'entremise de leurs comités, devraient également être impliqués. On a dépensé 510 millions en 15 ans pour le régime des plaintes. Il est légitime de se demander si nous avons... nous en avions eu pour notre argent.

Et nous croyons que le commissaire n'est pas assez indépendant et assez connu. Le projet de loi centralisera un peu plus la gestion dans le réseau de la santé, d'autant plus que le projet de loi utilisera le système informatique pour juger des résultats. Il est donc nécessaire qu'une instance puisse permettre un recours des décisions des commissaires aux plaintes, et le nouveau poste de commissaire-conseil au ministère pourrait être ce recours. Mais devrait-il être au ministère et relever du ministre, cependant?

Merci beaucoup de votre attention.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup de votre... pour votre exposé. Je suis convaincu que Mme la ministre a des éléments de réponse à certaines interrogations qui ont été soulevées. Mme la ministre, à vous la parole.

Mme Blais (Prévost) : Oui. Merci beaucoup. Merci beaucoup d'être parmi nous, M. Blain et M. Hould.

Il y a une chose avec laquelle je suis d'accord : quand vous parlez de mettre la liste des 91 établissements. De toute façon, elle est publique. Elle est déjà publique, cette liste-là. Alors, on a juste à aller voir, elle est là. Mais, si vous voulez qu'on l'annexe, moi, je n'ai pas de difficulté avec ça.

Vous mentionnez... C'est étrange parce que, comparativement au regroupement des comités des usagers... Eux sont complètement d'accord avec le projet de loi, le Protecteur du citoyen aussi. On a reçu aussi un mémoire du Collège des médecins, on a vu l'Office des personnes handicapées. Écoutez, en général, les gens sont pour ce projet de loi là et comprennent qu'on n'est pas... comprennent très bien qu'on n'est pas en train de refaire la réforme totale du régime des plaintes, mais que le projet de loi n° 52 s'adresse réellement aux établissements privés qui embauchent directement leurs commissaires aux plaintes et à la qualité des services, et, comme on voulait qu'il y ait une plus grande impartialité et une plus grande indépendance, faire en sorte que ces commissaires relèvent des CISSS et des CIUSSS.

D'ailleurs, le Regroupement des commissaires aux plaintes et à la qualité des services, on leur a posé la question : Est-ce que vous sentez que vous avez une indépendance dans ce que vous faites?, et la réponse a été oui. Alors, quand le regroupement dit oui... On est ici puis on pose ces questions-là tout le temps parce qu'on cherche à faire en sorte qu'il y ait cette indépendance-là. Alors, le regroupement a dit : Oui, on se sent extrêmement indépendants. Il y a même l'association des CHSLD privés qui est d'accord avec le projet de loi n° 52, parce qu'ils trouvaient que ce n'était pas une bonne façon, le fait d'embaucher un commissaire aux plaintes et que le commissaire aux plaintes reçoive un salaire du propriétaire du CHSLD privé.

Vous parlez des 35 millions qui sont dépensés pour les plaintes et vous posez la question : Est-ce que ça pourrait être mieux balisé ou mieux dépensé? Vous savez, le budget du réseau de la santé et des services sociaux est de 40 milliards de dollars...

M. Blain (Pierre) : Hein? Ça m'étonne.

Mme Blais (Prévost) : ...40 milliards, dont 35 millions pour les plaintes. C'est beaucoup, 35 millions, mais, comparativement à 40 milliards de dollars, ce n'est pas énorme. Puis il faut qu'il y ait un régime des plaintes, c'est essentiel, et il faut aussi... Vous l'avez mentionné, le Protecteur du citoyen est là en deuxième recours et le Protecteur du citoyen travaille très bien en deuxième recours.

Et je suis contente de voir que vous êtes d'accord avec le commissaire-conseil. Au fond, tout n'est pas négatif, là, dans ce que vous venez de nous dire, M. Blain.

M. Blain (Pierre) : Naturellement, ce n'est pas négatif. J'appuie le projet de loi. Je suis tout à fait pour que le commissaire aux plaintes aille à ce niveau-là, je n'ai pas de problème avec ça, sauf que ce n'est pas moi qui a dit que les commissaires aux plaintes n'étaient pas indépendants. Il y a eu la Protectrice du citoyen, déjà, dans les... au début des années 2014, 2013‑2014, l'ancienne, qui avait dit que, pour elle, les commissaires n'étaient pas indépendants.

Je peux comprendre, mais nous, présentement... On est d'accord avec ce principe-là. La seule chose, on dit : Les commissaires aux plaintes devraient être dans une situation plus large où ils devraient avoir plus de pouvoirs. Ils devraient être décisionnels. Je suis sur un comité des usagers, moi-même, depuis deux ans et je n'ai jamais rencontré un commissaire aux plaintes.

• (16 heures) •

Mme Blais (Prévost) : Mais, en terminant, parce que je pense qu'il y a d'autres personnes, même, qui veulent poser des questions, le Protecteur du citoyen, Mme Rinfret, est d'accord. Elle, elle est d'accord avec l'indépendance des commissaires, là. Vous me parlez du précédent, mais celle qui est venue nous voir, là, hier ou avant-hier, elle, elle est tout à fait d'accord avec l'indépendance des commissaires, ça fait que je tiens à le mentionner, là.

Le Président (M. Provençal)  : M. le député de Vachon.

M. Lafrenière : Merci, M. le Président. Merci à vous deux, messieurs, merci beaucoup. En passant, vous allez me permettre, moi, je suis le petit nouveau de la commission, ça fait qu'il y a bien des choses que je ne connais pas, bien des organismes que je ne connais pas. Puis, honnêtement, j'ai fait mes recherches, mais je ne vous connais pas beaucoup. Peut-être nous parler un peu de qui vous représentez, vous représentez combien de membres, parce que j'ai eu beau faire quelques recherches, mais je n'arrive pas à trouver cette information-là.

M. Blain (Pierre) : Vous avez raison. Quand on dérange, on pose toujours cette question-là.

M. Lafrenière : ... déformation professionnelle, je vous le confirme.

M. Blain (Pierre) : Non, non, je comprends. Non, effectivement...

M. Lafrenière : J'aime connaître les gens.

M. Blain (Pierre) : Depuis 2012, il y a un groupe, qui s'appelait le Conseil pour la protection et l'information des usagers, qui avait été mis en place, et c'était suite à des discussions que nous avions eues. Plusieurs groupes s'étaient rejoints, s'étaient rencontrés à l'initiative du Commissaire à la santé du temps, M. Salois, et nous avons décidé de faire un mouvement citoyen. Donc, nous représentons un ensemble de personnes, notre membership est ouvert. Et, présentement, nous n'avons pas de financement. Nous sommes en train de remettre en place... On l'a... On a mis ce nom-là en place en 2018, effectivement, et... depuis ce temps-là.

Et je vous dirai, M. Lafrenière... M. le député, que, de façon générale, c'est nous, présentement, qui agissons en dernier recours concernant des situations où les gens ont été voir et le commissaire aux plaintes, le Protecteur du citoyen, écrit aux cabinets des ministres, et n'ont pas eu de réponse, et se tournent vers nous pour faire changer les choses.

J'ai des cas pathétiques, entre autres, de deux personnes âgées qui étaient mariées depuis 65 ans et qui... Madame a été hospitalisée. Elle ne pouvait plus retourner chez eux. Monsieur était seul. Elle devait entrer en CHSLD, mais il n'y avait pas rien, dans le réseau, qui faisait en sorte que monsieur était capable de le faire. Ils se sont tournés chez nous pour trouver des solutions. Nous, on pourrait en proposer, des solutions, si on nous écoutait et si on nous invitait.

M. Lafrenière : Justement, quand vous parlez... Parce que je pense que vous faites de l'accompagnement, c'est bien ça?

M. Blain (Pierre) : Nous faisons de tout. Nous faisons de tout. J'ai un cas, là, présentement, pathétique d'une personne qui souffre d'une scoliose, qui n'a pas eu de suivi, qui n'est pas capable d'avoir un centre de réadaptation. Elle est dans la Beauce et elle me demande : M. Blain, pouvez-vous essayer de nous aider?

M. Lafrenière : Puis, quand vous faites de l'accompagnement... Encore là, je suis le petit nouveau dans ce domaine-là. Mais la loi ne vous aide pas là-dedans? Vous ne pouvez pas être reconnus en vertu de la loi des... santé et services sociaux?

M. Blain (Pierre) : Non. Bien, oui et non, ça dépend. Présentement, il n'y a pas de reconnaissance comme telle d'organisations comme celle-là.

M. Lafrenière : O.K. La raison pour laquelle je vous pose tout ça, c'est, un, comme je disais tout à l'heure, je ne vous connais pas beaucoup. Puis ça, c'est de ma faute à moi. Deuxièmement, depuis hier, on entend plusieurs groupes qui sont venus ici, on entend des positions, puis il y a certains points qui détonnaient un peu. Puis c'est correct, hein, le but final, nous autres, c'est d'avoir le meilleur projet de loi possible, et il faut le comprendre.

Puis moi, j'ai accroché sur une petite chose. Vous avez dit... Tout à l'heure, vous avez parlé de l'importance de peut-être scinder l'amélioration des plaintes. Et hier... Puis je veux entendre votre opinion là-dessus, parce qu'hier il y a un groupe qui nous a dit l'inverse. Il y a un groupe, des institutions privées qui sont venues nous voir, qui ont dit : Les plaintes — en passant, on en a eu beaucoup au début, ça s'est calmé par la suite — ça a été des occasions, pour nous, d'améliorer nos services. Puis, tout à l'heure, vous avez dit un petit peu un élément, là, qui était le contraire. J'aimerais vous entendre là-dessus, parce que je pensais, puis ils m'ont convaincu hier... Ça fait que je veux vous entendre là-dessus, que les plaintes étaient une occasion d'améliorer les services.

M. Blain (Pierre) : Bien, absolument. C'est moi qui a sorti le slogan, de toute façon, il y a cinq ans. Mais la différence n'est pas là. La différence... Effectivement, normalement, poser une plainte est une façon d'améliorer la qualité. Toutefois, présentement, on a inscrit... mais on a maintenant, dans chacun des établissements, depuis qu'on a des CISSS et des CIUSSS, une nouvelle direction qui s'appelle patient partenaire, qui, à mon point de vue, est là pour améliorer correctement.

C'est pour ça que je me dis, oui, on pourrait, justement, scinder, jusqu'à un certain point, ça, parce que ça n'existait pas avant, quand les commissaires aux plaintes ont été mis en place. Et là, maintenant, comme on a ces directions-là, ça pourrait être une occasion de pouvoir le faire.

M. Lafrenière : Mais vous ne pensez pas qu'on ne devrait pas garder, justement, notre commissaire aux plaintes le plus groundé, excusez l'expression... groundé possible sur le terrain? Quand on parle d'amélioration de services, puis, encore là, je vais vous donner ma petite expérience à moi... Moi, je veux que, lorsqu'il y a une plainte, on trouve une solution. La plainte, pour moi, c'est un mal. Le bien, au final, c'est de l'amélioration. Puis je vous entends, mais est-ce qu'on veut mettre ça plus compliqué un peu?

M. Blain (Pierre) : Non. Au contraire, c'est déjà là. Présentement, justement, ces directions-là font des sondages de satisfaction et font des... reçoivent des usagers pour améliorer la situation. Ce que je veux dire dans ce cas-ci, c'est que...

Et, c'est ça, j'ai essayé de l'aborder un tout petit peu, tout n'est pas qu'une plainte. Il y a des insatisfactions. Manger froid dans un CHSLD une journée, c'est une insatisfaction. Manger froid pendant trois mois dans un CHSLD, ça peut devenir une plainte. Mais je ne pense pas que le commissaire aux plaintes va aller dans ce sens-là, parce que lui ne va faire que de l'interventionnisme en une occasion. C'est pour ça que je dis qu'il y a une occasion qui est faite chez le commissaire, qui traite quelque chose, mais une autre direction pourrait le faire plus largement en pouvant améliorer directement les choses. C'est dans ce sens-là.

M. Lafrenière : Selon l'exemple que vous me donnez, vous pensez qu'un commissaire aux plaintes pourrait ne pas accepter une plainte, selon le nombre de répétitions.

M. Blain (Pierre) : Non, ce n'est pas ça que je dis. Non, il va le faire, mais sauf qu'il n'y aura rien de changé en bout de ligne, sauf dire : Le repas est froid.

M. Lafrenière : Je vous comprends. Avec votre exemple que vous donnez, le repas qui a été froid, servi une fois, même si on recule dans le temps, ça va être difficile de le changer. Mais on s'entend que, de part et d'autre, on peut avoir une tolérance différente aussi à certaines problématiques. Moi, je peux dire qu'après trois fois, c'est beaucoup trop.

M. Blain (Pierre) : Vous avez raison.

M. Lafrenière : Mais on veut un changement pour le futur. Encore une fois, je ne veux pas être... Sans tout connaître, moi, il y a une chose qui est claire, ce que je veux, c'est que, dans le futur, ça s'améliore. Si moi, je suis dans un établissement, puis c'est mon milieu de vie, ce que je veux, c'est que ça s'améliore.

C'est pour ça que mes questions, c'est de dire : Je crois que les groupes qu'on a entendus jusqu'à date nous parlaient d'amélioration. Alors, quand il y avait un commissaire, une personne qui recevait une plainte, puis rapidement... Parce que, comme je vous dis, la plainte, c'est bien; au final, ce n'est pas ça qu'on veut. Moi, ce que je veux, c'est que ça s'améliore. Je ne veux pas faire des plaintes à tout bout de champ puis qu'il n'y ait pas d'amélioration. Et je croyais qu'avec le système qu'on suggérait aujourd'hui on avait la possibilité d'avoir des améliorations dans un système qui était beaucoup moins lourd que d'envoyer ça dans un autre département, excusez l'expression.

M. Blain (Pierre) : Pour moi, ce n'est pas la même chose, à mon point de vue, si je peux me permettre.

M. Lafrenière : Allez-y, oui, je vous pose la question.

M. Blain (Pierre) : Et je ne vous contredis pas là-dessus. Pour moi, présentement, je pense que le commissaire aux plaintes peut se concentrer sur les plaintes et, à ce moment-là, peut, justement, améliorer autrement. Mais les deux vont ensemble.

M. Lafrenière : J'ai fini mon temps, monsieur.

Le Président (M. Provençal)  : Mme la ministre.

Mme Blais (Prévost) : Moi, j'aimerais vous rassurer, M. Blain, par rapport à... Vous parliez de scinder, puis de plaintes, aussi, que vous mentionniez. Par exemple, si on mange froid un jour dans un CHSLD, c'est une insatisfaction, si on mange froid pendant trois mois, ça peut devenir une plainte. Tout à fait d'accord avec ça.

Je veux seulement vous dire, pour vous rassurer, qu'au niveau, justement, des interventions avant que ça ne devienne une plainte dans le réseau il y a eu 25 100 interventions, des assistances, comme on appelle, qui a fait en sorte qu'on a été capables de faire une médiation avant que ça devienne une plainte. C'est quelque chose de très important et de très significatif, ce chiffre-là, tout comme le dossier informationnel qui fait partie du projet de loi et que j'ai demandé.

J'ai demandé à ce que le service informationnel soit une obligation. J'ai aussi demandé qu'on puisse, avec ce dossier informationnel là qui est un outil informationnel... qu'on puisse l'améliorer, parce qu'il faut qu'il soit amélioré pour qu'il soit, là, vraiment uniforme pour tout le monde et qu'il y ait cette obligation de déposer les dossiers. Je suis certaine que vous êtes d'accord avec ça, qu'il y ait... les plaintes, toutes les plaintes soient déposées pour qu'on ait un portrait, là.

M. Blain (Pierre) : C'est drôle, je pensais que ça existait déjà. Le ministère a déjà ces renseignements-là, puis c'est déjà là.

Mme Blais (Prévost) : Oui, mais il n'y a pas une obligation, il n'y a pas une obligation de déposer les plaintes dans le dossier informationnel, et là ça va devenir une obligation, tout comme le commissaire aux plaintes et à la qualité des services aura une obligation de déclarer s'il y a des liens de parenté avec, par exemple, le P.D.G. ou s'il y a des relations financières avec les membres du conseil d'administration ou avec le P.D.G., tout comme les membres du conseil d'administration, qui sont obligés aussi de faire ce genre de déclaration, qui leur donne une mise à distance et une impartialité.

Alors, ce sont des éléments... tout comme les comités de vigilance, parce qu'il y a une obligation d'avoir des comités de vigilance, mais le problème, c'est qu'il y avait des endroits où il n'y en avait pas, de comité de vigilance. Ça fait que, maintenant, il va y avoir une obligation, puisqu'il y a deux personnes du CISSS ou du CIUSSS qui vont aller sur les comités de vigilance des CHSLD privés, et des CHSLD privés conventionnés, et des autres établissements privés, puisqu'il y en a 91.

• (16 h 10) •

En terminant, j'aimerais, M. Blain, vous entendre parler davantage, puisque vous êtes d'accord, du rôle du commissaire-conseil. Moi, je le vois... Je vais vous dire comment je le vois. Je le vois comme une personne, premièrement, très indépendante de la ministre, la première des choses, très indépendante de la ministre. Jamais, jamais, jamais je ne vais m'immiscer dans le travail du commissaire-conseil ni dans le travail des commissaires aux plaintes. C'est ça, mon travail, ma responsabilité. Ça fait partie de mon imputabilité, M. Blain.

Commissaire-conseil, c'est pour former, informer, faire de l'harmonisation des pratiques, faire en sorte que les commissaires-conseils... que les commissaires aux plaintes soient en mesure de se réunir puis améliorer leurs façons de faire. Vous l'avez... Vous en avez parlé, de l'uniformisation des plaintes dans toutes les régions du Québec. Grosso modo, c'est ça. Et, si on juge ensemble qu'il faut que le commissaire aux plaintes — et si ça se fait juridiquement — fasse partie de la loi, bien, on verra à l'étude détaillée, mais, pour l'instant, il était à l'extérieur de la loi. Mais son rôle et sa mission est celle que je viens de décrire.

M. Blain (Pierre) : Ce que je comprends dans ce que vous me dites, c'est que, présentement, il n'y a pas harmonisation et que les commissaires font des choses différentes.

Mme Blais (Prévost) : Bien, c'est vous qui l'avez dit tout à l'heure.

M. Blain (Pierre) : Bien, c'est vous qui venez de le dire aussi, Mme la ministre.

Mme Blais (Prévost) : Non. Je répétais ce que vous aviez dit.

M. Blain (Pierre) : Moi, je n'ai pas dit ça. Mais la différence, cependant... Jusqu'à présent, mon expérience que j'ai eue avec le ministère de la Santé... Le ministère de la Santé a toujours été très réticent d'intervenir dans des établissements. J'ai rencontré plusieurs P.D.G. des CISSS et des CIUSSS, et tous m'ont dit, puis ça, je vous dis ça en toute confidentialité, je ne voudrais pas que ce soit répété, et je suis certain que personne ne nous entend...

Mme Blais (Prévost) : C'est public, là.

M. Blain (Pierre) : Ils nous ont toujours dit : Personne au ministère ne va me dire quoi faire. Alors, dans ce cas-ci, dans le cas du commissaire aux plaintes, c'est pour ça que je pense qu'effectivement c'est une excellente idée, mais il faut le sortir du système et qu'il devienne décisionnel.

Présentement, c'est un rôle-conseil. On a beau donner les conseils qu'on veut, mais, pour moi, j'ai... C'est ça. Je vous dis : Sortons-le de là, mettons-lui des pouvoirs. Et je pense que ça va être une excellente idée.

Mme Blais (Prévost) : Je peux vous dire une chose, M. Blain, quand je demande au sous-ministre d'écrire une directive puis quand je la signe, directive qui va au P.D.G., je peux vous dire que c'est une directive qui vient du ministre et que cette directive doit être suivie. C'est comme ça que ça fonctionne. C'est comme ça que ça doit fonctionner. Le ministre a une imputabilité, tout comme les directeurs généraux ont une imputabilité, comme les personnes qui travaillent au ministère de la Santé et des Services sociaux, les sous-ministres, les sous-ministres adjoints. Nous avons une imputabilité envers le public. Moi, je prends mes responsabilités. Et je pense que c'est comme ça. Ce n'est pas vrai, là, que c'est les P.D.G. qui se gouvernent seuls, là. On se gouverne ensemble, là. Et c'est important de le mentionner, très, très important de le mentionner.

Le Président (M. Provençal)  : Merci, Mme la ministre, d'avoir fait cette mise au point. Je vais maintenant céder la parole à la députée de Fabre.

Mme Sauvé : Merci beaucoup, M. le Président. M. Blain et M. Hould, merci pour votre présentation. Vous nous parlez de votre expérience, mais... Puis vous avez... Vous avez clarifié tantôt votre position, que vous êtes en faveur du projet de loi, même s'il y a des éléments qui méritent d'être amenés, des préoccupations que vous avez.

Moi, il y a une... Il y a une nuance que vous avez faite et que je trouve intéressante. Je trouve toujours ça intéressant, la contribution que les groupes peuvent amener à notre réflexion, parce qu'on a des points de vue différents, mais on a aussi des éléments du portrait qui sont différents.

Alors, quand vous nous avez parlé, entre autres, de la distinction à faire entre l'insatisfaction et la plainte, je trouve que c'est un éclairage que nous n'avions pas nécessairement reçu de la part des autres groupes. Alors, je vous en remercie. En même temps, la ministre a mentionné tantôt, avec chiffres à l'appui, toute l'action qui était déjà faite et qui se faisait déjà au niveau de la prévention. Parce que je pense qu'on est tous ici, autour de la table, avec l'intention première de se dire : Si on peut être dans la prévention, si on peut être dans la proximité, bien, si on peut être dans l'harmonisation et des pratiques rigoureuses, je pense qu'on est... On se rejoint à bien des égards sur cette question. Je pense que, si on se ramène à ça, il n'y a pas grand débat entre nous.

Mais ce que j'entends aussi de votre part particulièrement, M. Blain, c'est que, oui, vous avez remis un peu au jeu des éléments de la gouvernance qui est proposée, mais, en même temps, vous avez clairement, clairement mentionné qu'il y a des éléments qui méritent une clarification au niveau de la définition. Et ça, je retiens cet élément-là que vous avez amené.

On a parlé... Puis, encore là, il y a eu quelques éléments de débat autour du rôle du commissaire-conseil, mais, en même temps, le rôle du commissaire-conseil a été pas mal au coeur de bien des discussions qu'on a eues depuis quelques jours. Alors, j'ai le goût de vous demander, M. Blain et M. Hould, très simplement, quels sont les éléments, puis au-delà du débat qu'on peut avoir, là, entre nous, puis on a bien entendu votre propos, quels sont les éléments qui, en lien avec le projet de loi qui est sur la table... qui mériteraient des clarifications au niveau de la définition.

M. Blain (Pierre) : Si je peux me permettre, le projet de loi comme tel concerne les établissements privés. Tous les groupes que j'ai entendus, Mme la ministre aussi, tous les groupes que j'ai entendus ont tous fait la même chose. On est tous sortis du projet de loi pour parler des commissaires aux plaintes et de leur travail en général. Par conséquent...

Présentement, le projet de loi comme tel, pour les établissements privés, il n'y a pas de problème. La seule chose, je pense, que vous devriez y inclure déjà peut-être, étant donné qu'on ouvre la porte par ce... l'angle de l'informationnel, qui... Je ne sais pas, j'ai cru comprendre, maintenant, Mme la ministre, que c'est vous qui allez être responsable de la gestion des plaintes.

Une voix : ...

M. Blain (Pierre) : Ah! bien, vous voyez, ça...

Une voix : ...

M. Blain (Pierre) : Bien, on ne le sait pas, là, justement. Normalement, ça relève de la ministre de la Santé. Bien oui, la gestion des plaintes relève de la ministre de la Santé. Alors, c'est ça qu'il faudrait qu'on comprenne. Et on introduit, dans ce projet de loi là, la partie informatique, qui relèverait, normalement, de la ministre de la Santé. Donc, c'est ça qu'il faut qu'on clarifie.

Et nous, on pense qu'à partir de ce moment-là, si on a, en plus, un commissaire-conseil, il faudrait avoir cela dans le projet de loi pour qu'on lui donne vraiment des pouvoirs.

Mme Blais (Prévost) : Alors, juste vous dire, M. Blain, concernant les CHSLD, c'est ma responsabilité, au ministère de la Santé et des Services sociaux. Tous les CHSLD, toutes les ressources intermédiaires, les ressources de type familial, c'est sous ma responsabilité. Juste clarifier.

M. Blain (Pierre) : Je comprends, mais les commissaires aux plaintes ne s'occupent pas seulement que des CHSLD, ils s'occupent aussi des hôpitaux puis des CLSC où je travaille.

Mme Blais (Prévost) : Écoutez...

Le Président (M. Provençal)  : Monsieur...

M. Blain (Pierre) : Pardon. Excusez-moi.

Mme Blais (Prévost) : On n'entrera pas là-dedans, là.

Le Président (M. Provençal)  : Je remercie la députée de Fabre d'avoir permis à la ministre de faire cette précision-là. Je l'apprécie énormément, madame. Je vous demanderais de poursuivre l'échange, s'il vous plaît.

Mme Sauvé : Merci. Avant de céder la parole à mon collègue de Vimont, je vais... simplement une autre question, parce que c'est très important. Vous l'avez nommé d'entrée de jeu, M. Blain, vous êtes, votre regroupement... Puis vous êtes vous-même sur un comité d'usagers depuis deux ans. J'aimerais un petit peu que vous nous expliquiez, puis mon collègue a posé des questions à mieux vous connaître, j'aimerais qu'on poursuivre un peu là-dessus, quelle est votre représentation, quel est votre lien avec les membres que vous représentez et un petit peu la voix, le portrait que vous avez. Parce que vous amenez des propos très affirmés, qu'on entend bien, et c'est très bien, c'est le but de l'exercice, mais je voulais un peu savoir les consultations qui ont eu lieu et qui ont permis, justement, pour vous, d'amener les propos que vous amenez aujourd'hui.

M. Blain (Pierre) : Ces consultations... Je suis content que vous posiez la question, effectivement. Nous avons un groupe d'environ 1 000 personnes qui sont membres chez nous comme tel, qui ont manifesté leur intérêt. Et, à partir de ce moment-là, nous faisons certains sondages avec eux.

La différence aussi, c'est tout ce que je reçois. Je reçois, au minimum, entre trois et quatre appels ou courriels par semaine de personnes qui nous demandent d'intervenir. Présentement, malheureusement, il y a aussi beaucoup de comités des usagers et de comités de résidents qui sont insatisfaits de ce qui se passe présentement dans le réseau et qui me demandent : Est-ce que vous devriez?

Présentement, je ne veux pas rentrer là-dedans, ce n'est pas mon rôle. Mon rôle est de représenter les usagers en général, d'amener des pistes de solution, principalement. Et c'est pour ça que, les membres de notre conseil d'administration, c'est là-dessus qu'on se fait... C'est pour ça qu'on se dit un mouvement citoyen, pour englober le plus large possible les situations.

Mme Sauvé : Merci de ces clarifications. Je vais céder... M. le Président. Merci.

Le Président (M. Provençal)  : M. le député de Vimont, s'il vous plaît. Il vous reste cinq minutes.

M. Rousselle : Parfait. Merci. Bien, premièrement, merci d'être ici. Vraiment important que vous soyez ici, parce que, plus de gens qu'on entend, mieux que c'est. On peut se faire vraiment une tête. Dû au fait que je ne viens pas de ce milieu-là, moi, ça m'intéresse et puis ça m'éduque automatiquement.         Juste vous rappeler que le projet de loi, ça ne vise pas juste les privés, hein? Parce que vous avez dit que ça touchait... J'ai eu... En tout cas, j'ai eu l'impression de comprendre que ça ne touchait que les privés. Ça comprend vraiment le système au complet.

Donc, écoutez, moi, je vais en profiter, dû au fait que vous êtes un représentant des usagers, donc, puis vous avez des téléphones, est-ce que... Puis là c'est sûr qu'on parle d'indépendance des commissaires. Je pense qu'avec le projet de loi on parle vraiment que ce soit vraiment une indépendance totale, là. Peu importe, il faut vraiment que ce soit ça pour que les gens aient confiance, parce que, s'il n'y a pas une indépendance totale, bien, la confiance, elle ne sera pas là, donc personne ne va parler.

Dites-moi donc, parce que vous parlez d'un comité d'usagers dont vous faites partie, savez-vous... C'est parce que je pense que ce n'est pas dans tous les endroits qui ont des comités d'usagers et... Est-ce que ces comités d'usagers là... pensez-vous qu'ils devraient avoir une formation? Parce que, c'est bien beau, à un moment donné, tu vas embarquer, comme, dans le comité parce que tu as un intérêt, soit tes parents sont là ou ton enfant, mais peu importe, là, mais sans aucune expérience. Tu y vas, là, de bonne foi, dans le fond. Puis des fois, même, il y a des endroits, j'ai su qu'il n'y en a pas parce qu'il n'y a pas d'intérêt. Donc, j'aimerais ça vous entendre là-dessus, voir si vous verriez une formation ou...

• (16 h 20) •

M. Blain (Pierre) : Vous avez tout à fait raison. Je pense que pour être sur des comités des usagers, ça prend une formation. De toute façon, je l'ai demandé pendant des années, que la formation soit obligatoire. J'espère que ce sera entendu un jour et que cette formation deviendra obligatoire. Et je suis très content, d'ailleurs, qu'une des personnes qui avait permis que des formations puissent être mises en place, c'est la ministre Blais, dans le temps, quand elle était ministre aussi des Aînés. Donc, c'est elle qui avait mis en place des formations qui avaient pu commencer, sauf qu'elles ne sont pas obligatoires, et il faut qu'on les rende obligatoires, ces formations.

Je vais vous donner une intervention que nous avons faite à notre comité. Je ne sais pas si vous vous souvenez. Je pense que c'est dans votre coin de Montréal, où les deux personnes sont décédées chez elles, des personnes âgées, et qu'on a trouvées trois semaines après, parce qu'elles étaient décédées. Immédiatement, ce que nous avons fait, le comité des usagers, nous avons immédiatement demandé l'aide du CIUSSS et, en même temps, nous avons procédé immédiatement à un sondage de la satisfaction des usagers dans ce territoire-là. Nous sommes contents, sauf qu'il y a eu des problématiques qui sont sorties.

Mais moi, je veux vous dire une chose qui est encore plus préoccupante. Quand on fait des sondages de satisfaction, tout ça est anonyme. Nous avons trouvé trois cas, trois cas de personnes en détresse, et que nous avons brisé la confidentialité pour le dire au CIUSSS, qui est intervenu immédiatement. La réponse a été de nous dire : Bien, on ne le savait pas. Bien, nous, on l'a su parce qu'on était justement sur le terrain, parce qu'on a fait des représentations.

Donc, c'est là où le travail des comités des usagers est extrêmement important. Il est dans le milieu, il est à même de le faire. S'il vous plaît, donnez-leur les moyens pour pouvoir le faire et pour qu'ils puissent le faire, et amenez-les dans les insatisfactions.

M. Rousselle : Pensez-vous que les commissaires, justement, aux plaintes... ou il n'y a pas assez de publicité, peut-être, que les gens, parce que les gens... On sait bien que les gens, probablement, ils ont à s'occuper de leurs propres maladies ou s'occuper de leurs parents. Donc, la tête est ailleurs. Est-ce qu'il y aurait à faire, peut-être, une publicité alentour ou le commissaire devrait être plus sur le terrain aussi pour se faire connaître? Parce que, comme vous dites, vous êtes sur un comité des usagers, vous avez même dit : Je ne l'ai même pas rencontré, mon commissaire. Donc, je voudrais vous entendre là-dessus.

M. Blain (Pierre) : Je vais laisser M. Hould répondre.

M. Hould (Jacques) : Moi, j'ai fait partie des visites d'évaluation dans les CHSLD, et, souvent, le comité aux plaintes n'était à peu près pas connu, même des comités d'usagers. Ils connaissaient, à un moment donné, le nom. Une fois qu'on les travaille, là, ils connaissent le nom, mais ils vont le voir une fois par année, quand ils ont... quand le commissaire est capable de se dégager pour assister à leur assemblée publique annuelle.

Et, c'est certain, en multipliant le nombre de centres de services que les commissaires aux plaintes vont avoir à... sous leur responsabilité... vont diminuer d'autant plus leur capacité d'être présents. Et, dans ce sens-là, il faut absolument qu'ils développent un partnership avec les comités d'usagers, qui vont, à ce moment-là... eux autres sont les yeux, et qui vont, à ce moment-là, l'informer des problèmes qu'il y a.

Et, dans certains problèmes, il y a des problèmes qui sont, bon, d'alimentation, mais il y a d'autres problèmes plus importants aussi. Comme, moi, dans un cas, on a été informés que le conducteur d'un minibus, il avait un problème avec ses freins, puis son boss lui avait dit de continuer à véhiculer les gens puis, s'il y avait un problème, de compresser pour diminuer la vitesse, là. On a envoyé l'information immédiatement pour que ce soit corrigé rapidement. Et, dans ce sens-là, il y a des niveaux d'intervention. Dans ce cas-là, c'est une question de sécurité. C'est pour ça qu'on parle de décision, parfois.

Le commissaire, c'est un... L'insistance qu'il a mise était l'équivalence d'une décision, même si ce n'était pas dans... Il faut que... quelque chose qui se passe là, qu'il y ait une enquête interne pour voir qu'est-ce qu'il en est, puis, avant qu'on sache exactement qu'est-ce qu'il en est, qu'on mette le minibus sur les rails.

Un autre élément...

Le Président (M. Provençal)  : Monsieur, je vais vous interrompre. Je vais être obligé de céder la parole au député de Rimouski.

M. LeBel : Vous êtes obligé? C'est le fun, ça. Merci. Merci d'être là. Peut-être deux informations. Un, moi, je pensais vraiment qu'après l'adoption de 115, de la loi n° 115... qu'on allait améliorer les choses beaucoup plus vite. J'ai... Vraiment, j'entends des choses depuis le début, là, que l'accès, l'information n'est pas là, c'est encore difficile, avoir accès aux plaintes, que le continuum n'est pas clair, là, où tu t'adresses. Vraiment, des fois, j'ai l'impression de jouer dans Le jour de la marmotte, d'entendre les mêmes affaires qu'il y a deux ans. Je suis un peu... Puis j'espère qu'on pourra profiter de ce qu'on fait là pour peut-être améliorer certaines choses dans cette loi.

Vous comme d'autres, vous dites que le commissaire-conseil, il a un rôle important, puis qu'on devrait l'intégrer dans le projet de loi. Je pense qu'il y a de l'ouverture. On va en discuter. Mais vous n'êtes pas le premier à nous le dire. Je pense qu'il y a quelque chose à faire là.

Moi, ma question, c'est... Vous avez un paragraphe qui dit : «Le projet de loi centralisera donc un peu plus la gestion dans le réseau sur un territoire donné.» J'aimerais ça que vous m'expliquiez ça. C'est quoi... Qu'est-ce que vous voyez par ça, là, cette centralisation? Qu'est-ce qui vient... C'est quoi, le danger que vous voyez, quand vous parlez de ça? Vous êtes le premier à nous dire ça.

M. Blain (Pierre) : L'éloignement de l'usager, de celui ou celle qui... pour qui il pourrait se tourner pour porter plainte.

Oui, normalement, il y a des comités des usagers également dans ces établissements privés là. Il y en a partout. Du moment qu'il y a un commissaire, qu'il y a du financement le moindrement public, il y en a, sauf que... Je vais vous donner un exemple. Côte-Sud, ici, qui est un établissement privé qui reçoit des lits du public aussi, la moitié des gens peuvent porter plainte directement, parce qu'il y a un commissaire aux plaintes, puis l'autre ne peut pas. Ils peuvent, mais il faut qu'ils passent par l'autre entremise directement. Bien, le commissaire aux plaintes, là, va recevoir les plaintes des usagers qui relèvent du privé, les autres vont passer par le commissaire aux plaintes local. Mais, présentement, c'est plutôt... c'est l'éloignement de la prise de décision.

M. LeBel : O.K. Quand vous parlez de centralisation, vous parlez d'une centralisation régionale.

M. Blain (Pierre) : Oui, c'est ça.

M. LeBel : O.K. O.K. Je comprends un peu plus. C'est là que le rôle du commissaire-conseil pourrait faciliter les choses si on le précise dans la loi.

M. Blain (Pierre) : C'est ça.

M. LeBel : O.K. Maintenant, comment vous évaluez, vous... Parce qu'au début je disais que les choses se sont améliorées. Mais quelqu'un, là, qui est dans le réseau, qui veut porter plainte, est-ce qu'on a amélioré les choses, depuis deux ans, ou c'est encore aussi compliqué? Parce que vous êtes là depuis longtemps. Je vous connais, là. Bien, je vous ai vu aller dans des forums depuis...

M. Blain (Pierre) : Bien, je n'ose pas vous donner ma réponse, M. le député, parce qu'on va dire que je suis négatif. Présentement, au contraire, je pense qu'avec... Il y a eu une amélioration au niveau des comités des usagers, sauf que, présentement, je pense qu'il n'y a pas... le lien n'est pas assez important avec tout ce qui se trouve dans le réseau de la santé.

Les commissaires aux plaintes, justement, je vous le dis, sur notre territoire, on n'en a pas beaucoup sur notre territoire. On a deux CHSLD, on a deux CLSC, il y a un commissaire aux plaintes, on a des commissaires adjoints. Les CHSLD ne sont même pas du même commissaire adjoint aux plaintes. Il y a deux commissaires adjoints différents pour le même... les deux CHSLD de notre territoire.

Donc, j'aimerais être optimiste. Je suis certain qu'on est capables d'améliorer, et il faut trouver les moyens pour le faire, et l'information en est un, moyen pour le faire.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. Je m'excuse, le temps est écoulé pour votre groupe. Alors, je vous remercie pour votre contribution aux travaux.

Je suspends les travaux afin de permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 30)

(Reprise à 16 h 33)

Le Président (M. Provençal)  : Nous reprenons nos travaux. Je souhaite la bienvenue aux représentants du Comité de lutte à la maltraitance de l'Association des syndicalistes à la retraite de Laurentides-Lanaudière FTQ, après ça, Fédération des syndicalistes à la retraite du Québec et un autre organisme. Alors, je vais vous demander de procéder à... de vous présenter et de nous donner... excusez-moi, de nous faire part de votre exposé.

Mais, à titre informatif, je me fais un devoir de lire à peu près tous les mémoires puis de m'informer de tous les organismes qui viennent nous voir, et, dans votre cas, vous êtes un comité, à ce que j'ai bien compris. Est-ce que c'est un comité qui a un très fort membership? Est-ce que... Vous semblez être plus du côté des gens retraités syndicalistes, etc. C'est à titre informatif, parce qu'on aime bien connaître les gens qui se présentent. On l'a fait tout à l'heure avec...

(Interruption)

Le Président (M. Provençal)  : Bon, on va être obligés de suspendre, monsieur.

Des voix : ...

Le Président (M. Provençal)  : Ça vous donne du temps pour penser à la réponse.

Des voix : ...

Le Président (M. Provençal)  : Oui, c'est un vote.

(Suspension de la séance à 16 h 35)

(Reprise à 16 h 54)

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. Nous allons reprendre nos travaux. Alors, deux choses. Premièrement, on est partis tellement rapidement que... J'avais besoin du consentement pour qu'on se lève, qu'on aille voter. Alors, je comprends qu'on avait consentement.

Et là on consent tous à revenir à la table pour notre échange, et je vais avoir besoin du consentement aussi pour aller au-delà de l'heure qui avait été prévue, compte tenu que nous avons dû aller faire un vote au salon bleu puis par respect aussi pour les gens qui sont ici, pour qu'on puisse leur donner le temps qu'ils ont pour la présentation.

Alors, je vous redonne la parole, M. Rocheleau. Et je ne redirai pas tout le titre de votre comité, de votre association. À vous la parole.

Comité de lutte à la maltraitance de l'Association des syndicalistes à la retraite
de Laurentides-Lanaudière, Fédération des syndicalistes à la retraite
du Québec (FSRQ) et Regroupement des syndicalistes
à la retraite (RSR)

M. Rocheleau (Jean-Claude) : Merci. Bonjour, tout le monde. Alors, je suis Jean-Claude Rocheleau, président du Comité de lutte à la maltraitance envers les aînés. Le comité a été mis sur pied par les deux regroupements dont je fais partie, soit l'association des syndicalistes à la retraite FTQ Laurentides-Lanaudière et le Regroupement des syndicalistes à la retraite du conseil régional du Montréal métro. Et on est chapeautés par la Fédération des syndicalistes à la retraite, qui siège aussi sur notre comité. J'ai avec moi Sylvie Turcot, qui est membre du Comité de lutte à la maltraitance et responsable de la formation.

Je vais vous parler aujourd'hui des résidences privées et des systèmes... et du système de plainte.

Le mandat de notre comité est de lutter contre la maltraitance envers les aînés en faisant des représentations pour améliorer les lois et les règlements nécessaires à leur protection. De plus, nous offrons de la formation sur la lutte à la maltraitance. Le comité a été formé à la demande des membres des associations, qui rapportaient plusieurs problématiques qu'ils vivaient eux-mêmes et dont ils avaient connaissance.

Jusqu'à maintenant, nous avons rencontré, au printemps 2019, une attachée politique de la ministre Blais, à qui nous avons déposé un volumineux dossier avec des propositions d'actions visant à protéger nos aînés. Nous avons aussi rencontré des attachés politiques des députés de la CAQ à Montréal, dans les Laurentides et Lanaudière. De plus, nous avons écrit aux députés responsables des dossiers des aînés pour chacun des partis d'opposition.

Lors de nos rencontres, nous avons utilisé, pour illustrer notre propos, le dossier de ma mère, qui souffrait de la maladie d'Alzheimer depuis 10 ans et qui a subi de la maltraitance dans une résidence privée.

En fait, la maltraitance faite aux aînés, c'est un peu comme l'éléphant dans la pièce de notre société. Tout le monde sait qu'il y en a, mais on en parle peu. Ma mère a vécu plusieurs épisodes de maltraitance, comme de la violence verbale de la part d'une préposée, de la contention chimique sans l'autorisation de la famille. Elle a été laissée dans sa couche souillée durant toute la journée, et ce, à plusieurs reprises. Elle a aussi été laissée assise dans son petit fauteuil plusieurs nuits avec la télévision allumée à tue-tête. Je pourrais continuer encore, mais nous allons nous limiter à ceci.

Ma mère a subi tout ceci malgré le fait que nous sommes six enfants qui allions en rotation la visiter. Imaginez les personnes qui ne reçoivent peu ou pas de visite. Cette maltraitance a aussi été captée par des caméras installées dans sa chambre, et ce... dont la résidence était informée ainsi que les employés.

Je pense que... Maintenant, jour après jour, on visionne de tels gestes répétitifs de maltraitance. On doit parler de maltraitance institutionnalisée. Et, comme société, nous devons intervenir avec force pour que cela cesse.

Je vais vous raconter le parcours du combattant des plaintes que j'ai déposées pour, je l'espère, éclairer votre réflexion sur le type de mécanisme à mettre en place.

J'ai porté plainte à la résidence, qui a adressé le cas de la préposée fautive. J'ai aussi déposé une plainte au CISSS ainsi qu'au Protecteur du citoyen. J'étais suffisamment scandalisé pour entreprendre ces lourdes démarches bureaucratiques. J'ai un passé professionnel qui me prédispose à revendiquer, mais ce qu'il faut comprendre, c'est que le traitement... les traitements que ma mère a subis ne sont pas isolés et que peu de gens ont le temps, l'énergie et, je dirais, la résilience de s'attaquer à un processus de plainte si peu accueillant.

• (17 heures) •

Suite aux preuves déposées dans ma plainte au CISSS, il y a eu enquête. Un rapport contenant des recommandations a été produit. Malheureusement, le CISSS n'a aucun pouvoir pour imposer ses recommandations. De plus, le CISSS a refusé de traiter certains éléments de maltraitance. La représentante du CISSS m'a confirmé n'avoir aucun pouvoir, sauf celui de faire des recommandations qui pourront ou non être suivies par la résidence privée. Pire, elle a indiqué que le CISSS ne peut pas trop forcer la main à la résidence, de peur de la voir fermer ses portes et de ne pas être en mesure de replacer les résidents. Je pense que nous devons collectivement méditer sur ce raisonnement et se demander s'il est acceptable.

Comme je n'ai pas reçu les documents qu'on m'avait promis de la part du CISSS suite à ses recommandations, je suis passé à l'étape suivante, soit celle de déposer une plainte au Protecteur du citoyen. Le protecteur a accepté ma plainte et ouvert une enquête après avoir étudié mes preuves papier et vidéo. Un rapport fut émis. La représentante du Protecteur du citoyen m'a dit que c'était ma parole contre celle des dirigeants de la résidence, et ce, malgré mes preuves papier et vidéo, une réponse qui ne fait aucun sens.

Malgré les multiples infractions relevées par le protecteur dans son rapport, il n'a formulé qu'une seule recommandation volontaire : la formation des employés sur la maladie... les maladies cognitives. La résidence s'était engagée, lors de ma première plainte, à donner de la formation via la société d'Alzheimer. Or, le protecteur n'a constaté aucune trace de cette formation après avoir passé en entrevue les employés. Il a donc réitéré la recommandation. Comment peut-on penser que la résidence s'en acquittera, alors qu'elle ne l'a pas fait la première fois? Qui fera le suivi? Le protecteur est-il vraiment l'instance la mieux placée pour le faire?

Je crois que le système de plainte est défaillant, car les organismes qui s'en occupent n'ont aucun pouvoir de coercition et que les recommandations sont laissées à la bonne volonté des dirigeants des résidences privées. De plus, le processus de plainte est trop lourd, trop complexe. Il manque... Il y a un manque d'information sur la façon de déposer une plainte et sur son processus.

Même si le projet de loi fait en sorte que les plaintes des résidences privées pour aînés seront obligatoirement déclarées aux commissaires aux plaintes indépendants des CISSS, le projet de loi n'est pas complet et manque de mordant, selon nous. Il faut déterminer des moyens coercitifs pour faire appliquer les recommandations ou rendre obligatoire la mise en place des recommandations résultant d'une enquête, avoir un meilleur encadrement pour mener les enquêtes et les rencontres avec les plaignants. Si les enquêtes ne sont pas satisfaisantes, vers qui le plaignant peut-il se retourner? Le Protecteur du citoyen? Il doit aussi y avoir une indépendance totale pour le commissaire. Sinon, il peut être influencé par son employeur.

Au-delà des plaintes, la maltraitance devrait être adressée à la source, entre autres en ayant plus de préposés, en leur donnant une meilleure formation sur les maladies cognitives et en limitant leurs tâches à celle de s'occuper des résidents. Ce n'est pas de la faute des préposés, c'est le système qui doit changer.

Il manque aussi une façon rapide d'intervenir lorsqu'il y a un signalement de maltraitance. À qui les familles peuvent-elles faire appel lorsqu'elles constatent... des gestes de maltraitance sont posés et que la résidence ne tient pas compte de leurs demandes de correction?

Prenons l'exemple des situations dangereuses en milieu de travail. Les travailleurs et travailleuses peuvent exercer un droit de refus tant qu'il n'y a pas une intervention de la CNESST pour assurer la sécurité. Pourquoi un système comparable n'existerait pas pour la sécurité de nos aînés?

Ma mère est décédée avant que la plainte n'ait terminé son cheminement. Je continue cette bataille en sa mémoire. S'il est vrai qu'il faut améliorer les systèmes... le système de plainte, il faut aussi mettre en place des moyens pour prévenir la maltraitance et offrir à nos aînés le confort et la quiétude auxquels ils ont droit. Nous ne pouvons pas avoir, au Québec, deux systèmes de protection pour nos aînés, un pour ceux qui sont dans le réseau public et un pour ceux qui sont dans le privé.

Merci beaucoup de nous avoir écoutés.

Le Président (M. Provençal)  : Merci pour votre exposé et votre témoignage. Mme la ministre, je vais vous céder la parole.

Mme Blais (Prévost) : Merci, M. le Président, Mme Turcot, M. Rocheleau. M. Rocheleau, votre histoire vient vraiment me chercher. Je suis bien triste que vous ayez vécu ça. C'est inacceptable. Tout le monde ici, autour de la table, considère que la maltraitance est une chose inacceptable.

Je l'ai mentionné à quelques reprises, mais, en 2009, quand j'ai eu la chance de déposer un plan d'action pour combattre la maltraitance envers les personnes aînées, et, je le répète, on me disait : Ça n'existe pas, il y a de la maltraitance envers les femmes et les enfants mais pas envers les personnes aînées, on a mis des actions-phares, comme la ligne Aide Abus Aînés, on a fait une première sensibilisation avec Yvon Deschamps, à l'époque, qui disait : Bien, moi, je ne savais pas que la maltraitance existait, on a parti une équipe, à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, une équipe spécialisée en maltraitance, on a mis en place une chaire de la maltraitance pour connaître l'ampleur de la maltraitance. On est allés plus loin quand on a compris qu'il y avait de la maltraitance organisationnelle, puis il y a eu la loi n° 115, et on en parlait.

J'ai mentionné, pendant cette commission parlementaire, que j'étais pour ouvrir la loi n° 115 pour mettre en place des sanctions pénales. Il faut qu'il y ait des sanctions pénales. Et, quand une résidence fait en sorte qu'il y a de la maltraitance à répétition, il faut avoir le courage de fermer les portes de la résidence. Je comprends, là, qu'il manque de places, là, mais la réponse n'est pas : Il manque de places. La réponse, c'est : Cessons cette maltraitance.

Dans la loi n° 115, qui a été adoptée en 2018, chaque établissement et les résidences privées doivent se doter d'une politique pour combattre la maltraitance envers les personnes aînées et les personnes vulnérables. Il n'y a personne ici qui va accepter qu'il y ait de la maltraitance, et on va travailler dans le sens de ce que vous dites.

Vous dites que le projet de loi ne va pas assez loin. Ce n'est pas un projet de loi qui fait la... qui réforme l'entièreté du régime des plaintes mais qui vise, finalement, à faire en sorte que les commissaires aux plaintes relèvent du public plutôt qu'ils soient embauchés par le privé. Les commissaires aux plaintes qui relèvent des CISSS et des CIUSSS ont l'obligation, aussi, de prendre les plaintes dans les résidences privées pour personnes aînées. Je l'ai mentionné tout à l'heure, là, les P.D.G. des CISSS et des CIUSSS sont imputables.

Il ne faut pas que des histoires comme votre histoire se répètent. On termine trois jours de consultations avec une histoire qui brise le coeur, une histoire crève-coeur. Vous savez, j'ai fait le tour, comme ça, pour venir prendre ma place. Moi, j'ai perdu mon mari, ça va faire cinq ans au mois de mars, et j'ai vu votre signet, j'ai vu votre maman. J'ai vu que votre maman vous accompagnait, et ça m'a fait quelque chose. Et je ne savais pas que vous étiez pour me raconter cette histoire-là. Mais c'est pour ça qu'on fait des projets de loi, c'est pour ça qu'on vient en politique, c'est pour changer les choses.

Alors, qu'est-ce que vous aimeriez qu'on change dans le projet de loi? Parce que vous n'en avez pas parlé beaucoup. On veut mettre en place un commissaire-conseil pour qu'il soit en mesure de faire plus de formation, d'information, pour harmoniser les pratiques. On veut rendre davantage le commissaire aux plaintes indépendant. On ne veut plus que les commissaires aux plaintes relèvent des établissements privés, il y en a 91. On veut que le dossier informatique soit obligatoire pour toutes les plaintes. Dites-moi qu'est-ce que vous voulez en plus. Qu'est-ce que je pourrais faire pour améliorer les conditions de vie des personnes en situation de vulnérabilité qui sont maltraitées? Dites-moi pas, là, qu'il y en a autant comme ça à tous les jours. C'est inacceptable.

• (17 h 10) •

M. Rocheleau (Jean-Claude) : Je vous remercie pour votre compassion, c'est fort apprécié. Ma mère a dû subir ça, et je peux vous dire que ça a été difficile pour la famille, difficile pour moi aussi, parce que c'est moi qui s'en occupais et visionnais les vidéos. On avait mis des caméras pour d'autres choses que la raison pour laquelle ça a finalement servi. Mais ça a été très difficile à visionner et de voir ma mère subir cette maltraitance-là.

Mais moi, je pense que, dans les moyens... Pour mon expérience que j'ai vécue, pour avoir... m'être adressé au CISSS et de me faire dire ce que je me suis fait dire... Je trouvais ça complètement inacceptable, parce que ma seule réponse que j'ai eue pour le CISSS, ça a été de dire : C'est ça, vous me dites que je ne peux pas... on ne fera rien, puis on ne dira plus rien parce qu'on ne sait pas où les placer, puis on va les laisser se faire maltraiter. Ça ne fait aucun sens.

Il faut ravoir, à quelque part, les moyens de protéger ces gens-là, et, dans le système actuel, ce qu'on dit, c'est que ça prend des moyens coercitifs. Ce n'est pas vrai que les résidences vont faire ça par eux autres mêmes. J'en ai la preuve, parce que, quand j'ai déclaré la première plainte à la résidence et que j'ai demandé de donner de la formation avec la société d'Alzheimer, c'est parce que la résidence, qui était spécialisée en maladie d'Alzheimer, n'avait donné aucune formation, aucune formation à ses employés sur la maladie d'Alzheimer. Et ils ne l'ont pas fait, malgré ce qu'ils m'avaient dit qu'ils feraient. Et c'est le commissaire qui s'est rendu compte... aux plaintes qui s'est rendu compte que... Finalement, il n'a pas trouvé de trace, de résultat de cette formation-là. Et c'est souvent ça qui arrive.

Dans le cas de maltraitance, on voit... moi, en tout cas, de ce que j'ai vu dans les 10 ans où j'ai suivi ma mère dans différentes résidences, il y a une méconnaissance des maladies cognitives qui fait que les gens ne savent même pas qu'ils font de la maltraitance. Nous, on donne de la formation sur la maltraitance avec La Société d'Alzheimer des Laurentides, et on travaille en collaboration avec les coordonnatrices en maltraitance, et ce qu'on voit dans les vidéos, bien, c'est exactement ça, ce qui... Dans les vidéos, ça démontre que les gens, ils ne savent même pas que c'est ça, de la maltraitance.

Mme Blais (Prévost) : Je veux vous encourager. On est en train de rédiger la première politique d'hébergement et de soins de longue durée. Pourquoi? Justement pour accompagner le personnel soignant, parce que, dans nos établissements, 80 % des personnes ont des troubles neurocognitifs sévères. Il faut les accompagner, parce que parfois les gens ne savent pas qu'ils font de la maltraitance.

M. Rocheleau (Jean-Claude) : Exact.

Mme Blais (Prévost) : Ce sont des maladies complexes. La maladie d'Alzheimer et les maladies apparentées, c'est complexe, puis il faut les accompagner.

Le Président (M. Provençal)  : M. le député de Vachon, je pense que vous aviez demandé la parole.

M. Lafrenière : Oui, absolument. Merci, M. le Président. Merci à vous. Merci de votre témoignage, qui est... Moi aussi, je vais dire comme la ministre, ça vient nous chercher. Puis, je pense, c'est pour ça qu'on est assis ici aujourd'hui, parce que, justement, on ne peut pas réparer le passé, mais on travaille pour le futur.

Puis moi, j'ai une question peut-être toute simple, mais j'aimerais vous entendre là-dessus. Selon vous, qui pourrait porter plainte ou qui devrait porter plainte? Qui aurait le pouvoir de porter cette plainte-là? Parce que, dans certains cas, il semble que ça ne peut pas être l'usager. Alors, qui pourrait porter plainte ou qui devrait porter plainte?

M. Rocheleau (Jean-Claude) : Bien, en principe, les gens qui souffrent de la maladie d'Alzheimer ne peuvent pas porter plainte, hein, parce que... Ça leur prend quelqu'un. Moi, je l'ai fait pour ma mère, parce que j'étais un des mandataires, et, avec mes frères, on a déposé la plainte, et j'ai fait tout le suivi. Mais ma question puis ma réflexion, elle est là. J'ai vu d'autres résidents atteints de la maladie d'Alzheimer, puis qui étaient seuls, qui n'avaient jamais de visite, puis que, quant à moi, ils auraient dû en avoir, parce que j'ai vu des choses que je n'ai pas aimé voir, mais personne ne pouvait dénoncer les situations.

Puis ce qui est plus dangereux là-dedans, c'est la peur de représailles. Et ça, elle est bel et bien... La preuve, c'est que, quand j'ai déposé la première plainte à ma mère, après ça, là, ça a déboulé. Il y a eu des représailles sur ma mère. On lui a donné de la médication. Le soir, on la laissait dormir dans sa chaise, puis, le matin... qui faisait en sorte qu'elle était tellement fatiguée et tellement difficile à se lever, après ça, on venait me dire... la résidence venait me dire : Vous savez, votre mère, là, je pense qu'il va falloir la relocaliser parce qu'elle a de la difficulté à se déplacer. Tu dormiras toute la nuit dans une chaise, recroquevillé, avec une télé ouverte, à 80 quelques années, puis tu me diras, voir, le lendemain matin, si tu es «up and running». Ça ne marche pas.          Le système, il est problématique. Moi, j'étais vraiment découragé. Puis c'est pour ça que j'ai accepté de faire cette lutte-là. J'ai accepté de former le comité puis de défendre des... Puis je n'arrêterai pas tant qu'on n'a pas réussi à protéger nos aînés puis à faire de quoi pour eux, parce que c'est important de les protéger.

Et, comme je le disais tantôt, il ne faut pas avoir deux systèmes de protection, pas... pour ceux qui sont dans le privé puis dans... ceux qui sont dans le public. Ça prend un système qui protège tous nos aînés.

Et, je disais, quand il y a des cas de maltraitance, bien, quant à moi, il devrait y avoir une ligne d'urgence pour la maltraitance, pour dire : Il faut...

M. Lafrenière : Il y en a une.

M. Rocheleau (Jean-Claude) : Oui, il y en a une, mais ça prend quelqu'un qui vient intervenir. Il ne faut pas déposer une plainte puis de dire : On va attendre que la plainte procède pour traiter la maltraitance qui se déroule dans la résidence. Il faut qu'on dépose... il y ait une place où on peut dire : Il y a de la maltraitance, puis que quelqu'un aille voir, arrête ça, puis là, après ça, on peut faire l'enquête pour dénoncer toutes les autres situations puis les autres affaires qu'on a vues. Mais ça prend quelque chose comme, je l'ai dit, avec la CNESST, ça prend quelque chose, d'intervenir maintenant, et après on fait l'enquête.

M. Lafrenière : Si je comprends bien, pour vous, pour la dénonciation, ça devrait être élargi.

Mme Turcot (Sylvie) : Tout témoin de maltraitance devrait être capable d'appeler et dire : Je suis témoin de la maltraitance envers cette personne, et qu'il puisse signaler, qu'il soit mandataire ou pas. Si tu es témoin, tu dois pouvoir le signaler.

Le Président (M. Provençal)  : Mme la ministre.

Mme Blais (Prévost) : Alors, vraiment, là, votre témoignage vient solidifier mon idée qu'il va falloir l'ouvrir, cette loi-là. Pourquoi? Elle est bonne, mais, dans la vie, une loi, c'est fait pour évoluer quand on se rend compte qu'il y a encore des situations qui perdurent.

Le signalement est obligatoire dans les CHSLD. Je pense que le signalement devrait être obligatoire partout où il y a des aînés, puis maintenant on est rendus dans les résidences avec des aînés vulnérables comme votre mère.

Deuxièmement, quand il y a des sanctions pénales, je pense qu'à un moment donné il y a comme des holà, hein? Parce que, quand il n'y a jamais de sanction, tu dis : Je congédie quelqu'un, puis que la personne s'en va chez elle, puis qu'il n'y a pas de sanction, bien, elle peut très bien se trouver un travail ailleurs puis recommencer, puis on ne veut pas ça.

Mais, en même temps, il faut dire que... Je vais parler des CHSLD. J'en ai visité 100 puis je vais en visiter d'autres la semaine prochaine. La majorité du temps, moi, je rencontre, là, des missionnaires, tu sais, des gens qui travaillent, là, des préposés, là, ils ont le coeur comme ça, là, qui travaillent très, très, très fort. Puis c'est vrai qu'il manque de personnel. Il manque de personnel partout. On veut les embaucher. On en embauche. Ce n'est pas un travail facile. C'est un travail difficile.

Alors, ça va nous prendre, ensemble, en tant que société, beaucoup de courage pour changer de culture, et ça n'appartient pas à un parti politique. Puis, les membres de l'Assemblée nationale qui sont élus, je pense qu'il faut travailler ensemble pour changer ces cultures-là puis pour faire en sorte d'améliorer toutes les lois qui touchent aux personnes les plus vulnérables de notre société. Ce n'est pas politique, ça devient plus haut que ça. Ça devient... On est élus. On est 125. Travaillons ensemble pour que notre société soit meilleure et pour qu'on respecte nos aînés, nos personnes vulnérables, que ce soient des enfants, que ce soient des adultes. Tu sais, quand on entend parler de la... des enfants qui ont des difficultés, qui sont maltraités, puis des aînés, dans un Québec comme notre... dans un Québec comme le nôtre, ce n'est pas vrai, ce n'est pas possible, ça. Je suis en train de faire un plaidoyer, mais, je tiens à vous le dire, là, ça me pousse encore plus.

M. Rocheleau (Jean-Claude) : Oui, je suis tout à fait d'accord avec vous, ça doit s'adresser... Il faut faire... Tout le monde ensemble, il faut faire de quoi pour protéger les aînés maintenant, parce qu'aussi, dans le futur, c'est nous qui allons être là. Donc... Et je peux vous dire que moi, j'en rêve encore, des fois, le soir, de ce que j'ai vu, et c'est encore difficile, là, de... Tout ce film-là est encore dans ma tête, et c'est ça qui est mon motif, là, de continuer dans cette direction-là.

Le Président (M. Provençal)  : M. le député de Vachon.

M. Lafrenière : Combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Provençal)  : Il vous reste trois minutes.

M. Lafrenière : Trois minutes. Excusez. Je reçois ce que vous nous dites. Puis, en passant, je vois que tous les collègues, on a la même réaction. Puis je pense que ça nous rappelle l'importance de travailler là-dedans, de travailler avec vous.

Processus de dépôt de plainte, tantôt, on en a parlé un petit peu ensemble. Je reviens beaucoup là-dessus, parce que, moi, c'est l'importance de... que ça ne tombe pas entre deux craques. Vous l'avez dit beaucoup tout à l'heure, vous avez dit : Il y a des gens qui ne sont pas en position, des gens qui sont vulnérables.

Vous êtes la première personne, je crois, qui nous a parlé de représailles, qui était capable de nous expliquer un petit peu ce que ça voulait dire, des représailles, de façon très concrète. Ça, ça a été vécu par votre mère dans un établissement. C'est comme ça que vous l'avez vu de votre côté.

• (17 h 20) •

M. Rocheleau (Jean-Claude) : Oui, oui. C'est comme ça que... Puis c'est une réalité, elle est là, hein? Puis moi, j'ai parlé avec des personnes dans les différentes résidences où ma mère est allée, où on a vu des... certaines affaires, puis je parlais avec d'autres personnes qui étaient là pour leurs parents, puis que je leur disais : Bien, écoutez, portez plainte, tu sais, faites-le. Ah non! Je ne veux pas que... Tu sais, je n'ai pas d'autre place où la mettre puis je ne veux pas qu'elle ne soit pas bien traitée, j'aime autant ne pas rien dire puis je vais surveiller un peu plus. C'est ça, la réalité. Les gens ont cette peur-là, puis je peux vous dire que ce n'est pas le fun.

Moi, je l'ai fait parce que, dans ma vie... J'ai été syndicaliste toute ma vie et j'ai défendu des gens toute ma vie. Je sais comment ça marche, je sais comment faire, je suis capable de me tenir debout puis je suis capable de déposer des plaintes puis faire tous les recours qu'il faut. Mais je dois dire que, moi-même, qui est habitué, le système est complexe, il y a des bouts, je ne comprenais plus. Je ne comprenais plus rien de ce qui se passait tellement que le processus était compliqué avec le CISSS et avec... Je ne comprenais pas leur processus d'enquête puis la façon, pourquoi on n'adressait pas certaines parties de la maltraitance puis on adressait d'autres parties. Tu sais, on a fait ça très général puis on a dit : On va donner des règles puis on va, tu sais...

Puis c'est dans le rapport du CISSS, là, qui dit qu'il n'y a pas eu assez de communication avec le CLSC. Il n'y a pas eu une déclaration qui a été faite au CLSC pour dire que ma mère s'en allait à l'hôpital, alors qu'ils sont obligés de le faire. Il y a plein de manquements de même, comme ça, qui sont notés dans le rapport, mais, crime, j'ai l'impression qu'on a juste dit : Bien, on va signer des documents d'entente, puis ça devrait régler la patente. Ce n'est pas vrai. Ça prend des gens qui vont suivre ça, ça prend des inspecteurs, ça prend des gens qui vont faire en sorte que les choses vont changer. On ne peut plus se permettre d'attendre que ça bouge parce que... Le malheur avec le système de maltraitance, c'est qu'il arrive un cas, ça sort dans le journal, on en parle pendant deux semaines, pouf! après ça, ça tombe puis ça meurt. Nous, on est là pour les garder, les dossiers, en vie.

M. Lafrenière : Je n'ai plus de temps, j'ai même dépassé mon temps, mais vous avez dit tantôt que... Vous avez dit que, la ligne de signalement, vous n'êtes pas contre ça, mais vous voulez qu'il y ait une action qui soit prise.

M. Rocheleau (Jean-Claude) : Oui, immédiate, avant l'enquête.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Alors, je vais céder maintenant la parole à la députée de Fabre.

Mme Sauvé : Merci, M. le Président. M. Rocheleau, Mme Turcot, écoutez, votre témoignage nous touche tous vraiment beaucoup. Merci d'avoir le courage de partager ce témoignage avec nous.

Je vous dirais que, depuis trois jours, évidemment, on a ce projet de loi n° 52 sur la table et, dans un souhait de vouloir réviser de la meilleure façon, tous ensemble autour de la commission, le processus de plainte, on a parlé de rôle, de gouvernance, de structure, même dans les meilleures intentions. Et, à la fin de ces trois jours, vous nous ramenez l'essentiel, l'aîné et sa famille, et je veux vous remercier pour ça.

Vous savez, vous avez clairement... Puis je veux souligner et saluer l'invitation à la collaboration à la ministre. Je veux lui dire que nous sommes là aussi. Et je veux lui dire aussi que j'ai apprécié quand elle s'est adressée à vous pour dire qu'il faut non seulement dire que c'est inacceptable, mais il faut voir tout ce qui peut être fait ensemble et élargir le plus possible pour faire en sorte que tous les aînés ne vivent pas ce que votre maman a vécu.

Et j'ai entendu quelques pistes de solution, mais, en même temps, quand on parle de maltraitance, c'est très clair qu'il y a la notion du délai au-delà de... Alors, quand on parle du délai de 45 jours, on s'entend que, dans une situation d'urgence telle que celle qu'a vécue à répétition votre mère, ça aussi, c'est un enjeu. Vous l'avez peu nommé, mais je suis certaine que ça fait partie de tout cela.

Vous avez écrit, dans votre texte et votre témoignage, et je veux revenir là-dessus parce qu'il faut absolument qu'on l'aborde en cette fin de consultation, vous avez écrit ceci en parlant de votre mère : «Elle a subi tout cela malgré le fait que nous sommes six enfants qui allions, en rotation, la visiter. Imaginez les personnes qui ne reçoivent que peu ou pas de visiteurs.» Moi, je vais vous raconter, si vous me permettez, M. le Président, une petite anecdote. Une des plus grandes tristesses que j'ai vécues au début de mon rôle de députée sur le terrain, c'est lorsque j'ai fait le constat, à visiter les aînés dans les CHSLD et les résidences de mon comté... la solitude de nos aînés. Et je me suis assise avec un monsieur qui avait un parcours de vie extraordinaire, et il était dans sa chaise roulante, et je me suis mise à lui parler. Et, à un moment donné, il s'est arrêté de parler, les larmes ont coulé sur ses joues, et je lui ai demandé qu'est-ce qui se passait et s'il y avait quelque chose que je pouvais faire. Et il m'a répondu ceci, et je le dis avec beaucoup d'émotion : Madame, vous êtes ma seule visite.

Alors, je veux vous demander, à vous qui avez vécu tout ce parcours avec votre famille : Qu'est-ce qu'on peut faire aussi... qu'est-ce qu'on peut faire pour tous ces aînés qui sont seuls?

M. Rocheleau (Jean-Claude) : C'est la question que je me suis posée aussi, parce que je regardais ces gens-là dans les résidences, les différentes résidences où je suis passé, puis je regardais ces personnes-là qui étaient toutes seules, puis personne pour poser des questions, à savoir qu'est-ce qui est arrivé.

À un moment donné, on est arrivés dans la résidence, puis il y a une madame qu'on connaissait, qu'on voyait depuis longtemps, et que, finalement, elle est arrivée puis elle a le visage tout bleu. Puis là on a dit... Tu sais, c'est difficile. On nous dit, bon : Elle est tombée. Mais, tu sais, il n'y avait pas de famille pour poser des questions, il n'y avait pas de famille pour dire : C'est-tu vraiment ça qui est arrivé? C'est-tu la bonne affaire? Il y avait-tu de quoi à faire?

Tu sais, moi, ma mère, ils me disaient que, ma mère, ils la retrouvaient à terre toutes les nuits puis ils la retrouvaient par terre le matin, parce qu'ils faisaient des rondes... remarquez qu'ils ne respectaient pas les délais, mais ça, c'est autre chose, mais ils la retrouvaient par terre. Et c'est pour ça qu'on a installé les caméras, c'est pour être capables de voir pourquoi elle tombait par terre. Finalement, on s'est aperçus que, la nuit, elle s'assoyait dans son lit puis elle s'endormait. Puis elle dormait du côté du pied du lit, ce qui fait qu'elle glissait en bas, puis là elle tombait à terre, pas fortement, parce qu'elle ne se blessait jamais, mais elle était là, tu sais?

Donc, moi, je pense que ça prend des caméras pour protéger les personnes qui ne peuvent pas dire les choses. Tu sais, les aînés qui sont dans les résidences, ils ne peuvent pas parler, ils ne peuvent pas dire... Même ma mère ne pouvait pas exprimer... Puis je sentais la colère de ma mère quand j'y allais, parce qu'elle se fâchait à rien, alors que ce n'était pas ça, ma mère, puis tout ça, avant qu'on s'aperçoive que c'était une préposée qui faisait de la violence verbale puis qu'elle avait un inconfort à toutes les fois qu'elle était en présence de cette personne-là.

Bien, je pense qu'on devrait quand même être capables de surveiller les gens qui sont vulnérables, et qui ne peuvent pas se défendre, puis qui ne peuvent pas rien faire tout seuls. Il faut trouver une façon de pouvoir s'assurer que les choses... Puis ce n'est sûrement pas un employé, parce que je peux vous dire que, pour avoir vu des employés qui m'ont dit : Ah non! nous, on ne peut pas parce que, tu sais, on a notre travail puis, tu sais... Ça fait que ça ne peut pas être les personnes qui travaillent dans la résidence qui vont vouloir le faire parce que... de peur aux conséquences aussi. Puis je comprends ça aussi. J'ai été représentant de travailleurs, là, puis je sais c'est quoi, là, tu sais, toute cette histoire-là, mais c'est la réalité, là, tu sais? Mais il faut trouver une façon puis il faut y réfléchir pour protéger ces personnes-là.

Mme Sauvé : Merci beaucoup.

Le Président (M. Provençal)  : M. le député de Vimont.

M. Rousselle : Merci, premièrement. Merci beaucoup. Vous en parlez puis vous me faites réfléchir, parce qu'actuellement je m'occupe de mes parents. Donc, c'est... On est dedans, là.

Je pensais tout haut. Puis on parlait de changements. Je pense qu'il faudrait même essayer de faire, je ne sais pas, plus que de la sensibilisation. Il faudrait faire, au grand public, vraiment une prise de conscience, pas juste pour les personnes âgées mais toutes les personnes vulnérables.

Vous savez, j'arrive de Singapour. Quand tu rentres dans le métro... La première chose, quand je rentrais... c'est sûr que j'ai des cheveux blancs, mais, la première chose, quand je rentrais, on me laissait la place. Essayez ça dans le métro de Montréal, vous, là, là. C'est impossible. Comprenez-vous? Donc, je donne cet exemple-là, mais j'y vais vraiment large. Il va falloir vraiment partir ça à partir de l'école, mais il va falloir faire quelque chose. Ça n'a pas d'allure. Comprenez-vous?

Quand vous parlez des caméras, vous, est-ce que vous en mettriez un petit peu plus? Comme vous parlez des gens qui sont comme vraiment avec des problèmes cognitifs, qui ne peuvent pas s'exprimer ou qui n'ont pas de famille, vous... Parce que, là, la loi, actuellement, c'est la famille qui le demande puis... En tout cas, il y a des règles à suivre, là. Est-ce que vous, vous l'étaleriez un petit peu plus large pour ces gens-là, justement, qui ne peuvent pas parler? Parce qu'encore une fois il y a des gens qui ont des problèmes cognitifs, mais il y a des gens aussi qui peuvent avoir des problèmes de langue aussi. Ils peuvent avoir... En tout cas, il y a toutes sortes de problèmes. Vous, est-ce que vous iriez jusque-là?

• (17 h 30) •

M. Rocheleau (Jean-Claude) : Oui, parce qu'il y a des gens qui ont des... Nous, en travaillant avec la société d'Alzheimer puis en donnant des cours... Tu sais, il y a des gens qui sont atteints de maladies cognitives, qui perdent l'usage de la parole. Ils ne parlent plus, hein, ils ne sont plus capables de s'exprimer. Mais, oui, je pense qu'on devrait... Moi, j'en ai eu, des caméras, pendant plusieurs années dans la chambre de bain. En fait, on en a toujours eu, là, des caméras, puis les employés le savaient. On avisé tout le monde. Tout le monde savait qu'elles étaient là puis qu'ils travaillaient avec cette affaire-là, ce qui n'a pas empêché tout ce qui s'est passé.

Donc, ce n'est pas un absolu, mais moi, je pense que, dans l'encadrement qu'on doit donner pour les personnes vulnérables, il faut de l'inspection, il faut des gens, il faut plus de mesures pour aller voir ce qui se passe dans la résidence. Ils appliquent-tu les règles? Est-ce que c'est... puis parler à ces familles-là qui ont des gens là, voir comment est-ce qu'eux autres, ils vivent ce qui se passe là-dedans. Il faut trouver des façons si ce n'est pas des caméras, mais il faut être plus présents puis avoir de quoi pour vraiment aller voir pour protéger ces gens-là. Ils ne sont pas capables de le faire par eux autres mêmes puis ils ne seront jamais capables de le dire non plus. Donc, il faut trouver une façon. Moi, je pense que c'est soit par des visites d'inspection ou soit en mettant des caméras. Mais, déjà, les caméras, ça refroidit certaines ardeurs, là, de vouloir faire quelque chose, là. C'est déjà un plus, quant à moi.

Puis je n'étais pas gêné d'installer, même si j'ai défendu des travailleurs toute ma vie. J'ai parlé avec tous les employés qu'on installait les caméras, puis que les caméras étaient là pour rester, puis que c'était pour la protection de ma mère.

Le Président (M. Provençal)  : Deux minutes.

M. Rousselle : Écoutez, vous parlez de formation. Tantôt, j'étais comme étonné qu'il n'y ait pas de... cette formation-là à l'intérieur, justement, des résidences, au niveau de la formation des employés, là, maladies cognitives. Je sais que, dans... En tout cas, au Service de police de Laval, on avait cette formation-là. Là, je me dis, dans un milieu où, encore une fois, il y en a encore plus, de gens qui peuvent avoir des problèmes cognitifs, c'était comme : Voyons, «my God», ils n'ont pas eu de formation! Ça m'a... En tout cas, je ne connais pas le milieu, mais j'ai trouvé ça, comme, étonnant d'entendre ça.

Dites-moi donc aussi, il y a-tu un genre de loi de l'omerta aussi qui se fait? Parce que c'est sûr que les gens ont peur des représailles, j'ai compris ça puis je peux comprendre, mais est-ce que vous avez, vous, selon votre expérience à vous... Est-ce qu'il y a un petit peu... Est-ce qu'il peut y avoir un petit peu de loi de l'omerta à l'intérieur des résidences?

M. Rocheleau (Jean-Claude) : Bien, c'est sûr qu'il y en a. Comme je vous dis, il y a les employés qui ont peur pour leur travail, un. Il y a des résidents ou des parents de résidents qui ont peur que la résidence mette leurs parents dehors, hein, s'ils portent plainte ou s'ils brassent trop. Puis, comme j'ai dit tantôt, moi, je n'ai pas eu peur de brasser les choses puis de faire arriver des choses, et on en a subi le prix, assez que ma mère est sortie... on a été obligés de sortir ma mère en toute vitesse de là. Et quelqu'un qui souffre de la maladie d'Alzheimer, là... Ma mère a perdu 60 livres parce qu'on l'a déplacée de place, et ça a été le début de sa fin avec cette affaire-là. Donc...

Et, la formation, je peux vous dire, moi, j'ai été le premier étonné. Puis, comme j'étais avec la société Alzheimer, c'est moi qui disais aux employés comment faire des approches. Tu sais, il y en a une, préposée, qui était une assistante, qui est allée voir ma mère puis lui a dit : Est-ce que vous avez eu le vaccin, l'année passée, pour la grippe? Là, j'ai dit : Parlez-vous vraiment à ma mère, là, parce que... J'ai dit : Elle souffre d'alzheimer. On est dans une résidence spécialisée pour la maladie d'Alzheimer.

Et, même si c'est une résidence spécialisée pour la maladie d'Alzheimer, il n'y avait aucune obligation de formation, hein, pour les maladies cognitives. Puis je l'ai demandé, puis c'est finalement le Protecteur du citoyen qui a répété la demande, dans sa recommandation, en disant : Vous devez former vos gens sur les maladies cognitives parce que... Écoute, j'étais obligé de quasiment tout leur dire quoi faire puis comment faire des approches avec le monde. Parce que tu ne peux pas dire à quelqu'un : Venez-vous-en, Mme Rocheleau, on s'en va faire... prendre votre bain, hein? Tu sais, tu ne peux pas arriver puis lui donner l'option : Voulez-vous aller prendre votre bain, oui ou non? Tu ne peux pas faire ça. Il faut que tu lui dises, directive, puis elle va suivre. Mais ça, c'est des approches que tu apprends quand on t'enseigne les maladies cognitives, les conséquences puis les façons de faire.

Donc, il faut donner cette formation-là, elle est primordiale. On ne peut pas ne pas se permettre de donner cette formation-là. Puis il va y en avoir de plus en plus, de cas de maladies cognitives au Québec, donc c'est drôlement plus important de faire connaître comment on peut agir et comment on peut aider ces personnes-là.

Le Président (M. Provençal)  : Ce message-là est sûrement bien reçu par les membres de la commission. Le temps étant écoulé pour... je vais céder la parole au député de Rimouski.

M. LeBel : Merci, M. le Président. Bonjour. Je suis content de vous voir là.

M. Rocheleau (Jean-Claude) : Merci.

M. LeBel : Des fois, on est frustrés ici, on ne réussit pas à apporter la parole des gens. On s'est parlé il y a une semaine à peu près, et vous êtes là aujourd'hui pour parler à tout le monde, et ça me réconcilie, des fois, avec le travail qu'on a à faire.

Là, j'imagine, là, je vois, il me semble que ça me saute dans la face, tout ce qu'on a à faire, comme élus, ici, par rapport au vieillissement de la population puis les enjeux qui vont arriver plus tard. Moi, dans le Bas-Saint-Laurent, il y a une personne sur quatre qui a 65 ans et plus. Au Québec, ça va arriver dans une dizaine d'années, ça. Mais, moi, on le vit, là, puis c'est sûr que ce que vous avez dit par rapport aux représailles, de dire... de peur de voir la résidence fermer ses portes puis ne pas être en mesure de replacer les résidents, là, vous m'allumez quelque chose, là. C'est certain que, chez nous, j'ai cette pression-là et je vais vérifier ça davantage. Puis je comprends que ça a une pression sur le système puis une pression aussi sur les familles qui placent leurs... qui ne portent pas plainte parce qu'ils disent : Je n'ai pas d'autre place. Et ça, j'ai l'impression que ça va se rempirer, ça ne s'améliorera pas, là, si on ne fait pas quelque chose d'une façon assez urgente.

Je n'ai pas beaucoup de temps, je vous le dis. Vous avez comme trois propositions. À mon avis, si on a quand même intégré le commissaire-conseil au projet de loi, il y a des choses qu'on pourrait... ce qu'il propose qu'on pourrait rentrer, tu sais, rendre obligatoire la mise en place des recommandations résultant d'une enquête, des choses qu'on pourrait faire. Je pense qu'on pourrait travailler... Un meilleur encadrement pour mener les enquêtes et les rencontres avec les plaignants, je pense, c'est faisable, travailler ça dans la loi, vers qui le plaignant peut se retourner s'il y a... Ça, je pense qu'on est capables de faire un bout avec vos recommandations, puis merci de les amener.

Où est-ce que c'est plus difficile, c'est les moyens coercitifs, là. Je ne sais pas trop comment qu'on pourrait intégrer ça, mais, pour vous, c'est important. J'aimerais ça vous entendre parler. Qu'est-ce que ça pourrait être, des moyens coercitifs?

M. Rocheleau (Jean-Claude) : Bien, coercitif, ce n'est pas nécessairement de pénaliser la résidence ou quelque chose comme ça, c'est... Si tu forces les recommandations puis tu dis : Regarde, c'est ça, on a fait une enquête, on a des recommandations, puis vous devez les mettre en place, ça, c'est un moyen coercitif. Puis, je veux dire, ça n'empêche pas la résidence de fonctionner, ça va juste la forcer à mieux s'encadrer, puis à avoir des règles plus claires, puis à protéger les gens un peu plus, si on force la mise en place des recommandations, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

M. LeBel : Mais, pour ça, il faut que les commissaires aux plaintes aient des équipes pour faire ça. Il faut qu'ils soient... Il faut qu'il y ait des gens autour, une équipe suffisamment...

M. Rocheleau (Jean-Claude) : Tout à fait. Il ne pourra pas faire ça tout seul, je l'ai vu. Puis c'est ma question aux deux places, dans les CISSS et au Protecteur du citoyen : Qui va faire le suivi? Personne n'a été capable de me répondre correctement là-dessus. Donc, il faut qu'on fasse des suivis de ça, puis ça prend des gens pour s'assurer que c'est implanté aussi. Si on prend la peine de faire une enquête puis on prend la peine de faire des recommandations, bien, on devrait prendre la peine de s'assurer qu'elles se mettent en place, ces recommandations-là.

M. LeBel : Pour ça, il faudra investir dans les équipes, il faudra qu'il y ait plus de personnes.

M. Rocheleau (Jean-Claude) : Oui, tout à fait.

M. LeBel : Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Vous avez soulevé tout un principe d'imputabilité dans les démarches. Je vous remercie beaucoup.

Mémoires déposés

Avant de conclure les auditions, je procède au dépôt des quatre mémoires des organismes qui n'ont pas été entendus lors des auditions publiques. Je vous remercie pour votre contribution à nos travaux.

La commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die. Merci à tous. Et merci encore pour votre témoignage.

(Fin de la séance à 17 h 37)

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