(Neuf heures trente-cinq minutes)
Le
Président (M. Provençal)
:
Bon matin à tous. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je vous souhaite la bienvenue. Et je
demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la
sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission
est réunie afin de poursuivre les consultations
particulières et auditions publiques
dans le cadre du mandat d'initiative concernant l'augmentation
préoccupante de la consommation de psychostimulants chez les enfants et les
jeunes en lien avec le trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements
pour ce mandat?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Lafrenière (Vachon) est remplacé par M. Bachand (Richmond); M. Benjamin (Viau), par Mme Nichols
(Vaudreuil); Mme David (Marguerite-Bourgeoys), par Mme Sauvé
(Fabre); M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), par
M. Gaudreault (Jonquière).
Auditions (suite)
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, Mme la secrétaire. Nous
entendrons, ce matin, les organismes suivants :
le service TDAH de l'Hôpital de Montréal pour enfants, dont la présentation sera réalisée
par le Dr Martin Gignac, la Dre Christiane Laberge,
M. Jean-Claude St-Onge et le Regroupement des associations PANDA du Québec.
Comme la séance a commencé à 9 h 35, y
a-t-il consentement pour poursuivre nos travaux au-delà de l'heure prévue, soit
jusqu'à 12 h 35? «Midi» 35, pour qu'on se comprenne.
Des voix : Consentement.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Je souhaite maintenant la bienvenue au représentant
du service TDAH de l'Hôpital de Montréal pour enfants. Je vous rappelle que
vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les
membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et à commencer votre
exposé. Je vous cède la parole.
Hôpital de Montréal pour enfants (HME)
M. Gignac
(Martin) : Alors, bonjour.
Merci de nous avoir invités à nous entretenir avec vous ce matin. Donc, on va
s'entretenir sans plus tarder de l'augmentation de consommation des
psychostimulants chez les jeunes. Donc, je suis psychiatre d'enfants et d'adolescents, je suis psychiatre légiste. Je
travaille principalement à l'Hôpital de Montréal pour enfants et à l'institut Pinel de Montréal.
Je suis aussi professeur dans les deux facultés de médecine à McGill et à Montréal.
Donc, mon background pour parler de ce sujet-là,
c'est que j'ai fait une formation complémentaire après ma formation en médecine et ma résidence, j'ai fait
un fellowship au Massachusetts General Hospital, où j'ai travaillé avec un groupe de recherche qui s'intéressait particulièrement aux suivis longitudinaux d'enfants avec TDAH et sans TDAH. C'est une des plus grandes cohortes qui ont été
créées à travers le monde. Il y avait à
la fois des garçons et à la fois
des filles qui étaient suivis. Je
suis un psychiatre spécialisé, un expert médicolégal et je suis témoin
quotidiennement d'histoires de jeunes et de leurs familles dont le
parcours change positivement avec une approche individualisée pour la prise en
charge du TDAH.
Donc, on sait tous que la prévalence du TDAH
augmente depuis quelques années. Je pense que vous avez entendu l'INESSS. J'ai participé à certains travaux de l'INESSS et j'ai
pu constater les statistiques et les données de la littérature, et je
pense qu'aujourd'hui mon propos ce n'est pas de nier cette évidence-là.
Par contre, si on compare dans d'autres domaines
médicaux, comme l'asthme par exemple, on constate aussi qu'il y a une augmentation de la prévalence des troubles comme l'asthme ou des maladies pulmonaires.
On constate aussi que, dans d'autres domaines de la psychiatrie, il y a
une augmentation de certains troubles. On parle des troubles
anxieux, des troubles dépressifs. À
l'urgence de l'Hôpital de Montréal pour enfants, on a constaté, dans les 10 dernières
années, une augmentation du risque de suicide, des consultations pour idées suicidaires, qui avaient augmenté de façon
vertigineuse. Alors, bien sûr,
c'est pertinent, comme société, qu'on se questionne sur ces augmentations-là, mais le problème n'est pas unique au TDAH.
Donc, le TDAH repose sur une étiologie
hétérogène. Vous avez certainement entendu parler de la diathèse familiale, de
la génétique, du tabagisme durant la grossesse, et il y a d'autres enjeux. Et
j'aimerais pointer l'adversité psychosociale
comme un des facteurs importants à prendre en considération. Vous comprendrez
que je travaille beaucoup avec les
centres jeunesse. Entre autres, je travaille avec des jeunes qui ont commis des
délits, et plusieurs d'entre eux ont grandi dans des milieux où il y avait beaucoup
d'adversité psychosociale, beaucoup de traumatismes. Et on se questionne,
à l'heure actuelle, sur la contribution des
temps d'écran dans les bas âges chez les très jeunes enfants. On sait que c'est
un autre problème de santé publique.
Et je pense que vous êtes certainement au fait qu'on se questionne aussi sur
l'impact du cannabis sur le cerveau.
Je pense que vous en avez traité abondamment dans d'autres circonstances dans
cette noble enceinte.
• (9 h 40) •
Alors, le
TDAH, ce n'est pas un problème esthétique, hein? Au-delà du fonctionnement
scolaire, le TDAH, ça touche plusieurs
enjeux du développement des enfants. On parle ici d'estime de soi, de conflits
interpersonnels, d'accidents, de blessures.
Il y a plus de consultations dans les urgences pédiatriques avec des enfants
TDAH que des enfants sans TDAH. On
parle de toxicomanie, d'enjeux légaux, on parle d'accidents de véhicules
motorisés. Ces enfants-là, ces adolescents-là, ces jeunes adultes ont un plus
grand risque au niveau de la mortalité précoce. On parle de grossesses
précoces, de conflits familiaux, de comorbidité psychiatrique.
Et j'aimerais
vous entretenir, entre autres, de l'impact de la pharmacothérapie sur la
comorbidité psychiatrique. Alors, il
y a une grande étude qui a été menée, là, à travers les États-Unis, et le site
de l'Hôpital de Montréal pour enfants était un site de recrutement pour
cette étude-là, qui s'appelle le Multimodal Treatment Analysis. Si vous avez
une étude de recherche à aller consulter dans la littérature, je vous
inviterais à consulter celle-ci. Elle était financée par le NIMH, complètement
indépendante des financements pharmaceutiques. Et on voit que les enfants, les
adolescents et les jeunes adultes, parce que
c'est des cohortes qui ont été suivies de façon longitudinale, sont très
rarement seulement atteints de TDAH,
ils ont souvent des comorbidités. Et plus on vieillit avec le TDAH, plus la
comorbidité augmente. Donc, le risque d'avoir de la dépression augmente
avec le temps si on ne traite pas le TDAH. Le risque d'avoir des troubles
anxieux augmente si on ne traite pas le
TDAH. C'est vrai aussi pour la toxicomanie. Et une des études longitudinales,
dont le groupe de Boston avec lequel j'ai travaillé, est arrivée à la
conclusion que, quand on traite de façon précoce le TDAH, on arrive à
prévenir ces comorbidités plus tard dans la vie adulte. Alors, c'est quand même
une donnée importante quand on vient tenter
de justifier la mise en place d'un traitement chez un enfant pour essayer de
regarder le suivi longitudinal, quel impact ça peut avoir
ultérieurement.
Il y a aussi des données qui viennent de la
Scandinavie qui nous indiquent que le TDAH, par exemple en milieu carcéral,
lorsqu'il est bien traité, réduit le risque de récidive.
Alors, ces
médicaments qu'on utilise pour le TDAH, ce n'est pas seulement pour la
performance scolaire. Bien sûr, on
espère que ça va aider la performance scolaire, mais il faut regarder d'autres
aspects du fonctionnement des individus qu'on traite avec un TDAH, et je
pense que c'est ce que je tente de vous faire comme démonstration maintenant.
Donc, plus
spécifiquement, le TDAH dans le cadre scolaire... On dit souvent que les
enfants vont être envoyés en consultation parce que les professeurs ont
remarqué que ces enfants-là ne cadraient pas bien dans le fonctionnement scolaire, et on se demande est-ce que c'est un
problème de tolérance dans le milieu scolaire. Et les interventions qui sont
souvent préconisées pour ces enfants qui sont perturbateurs, bien, ils sont
expulsés, ils sont suspendus, ils sont mis en détention,
ils ont des punitions corporelles — espérons que c'est en train de disparaître,
ce genre de chose là — mais on ne parle pas
beaucoup de favoriser leur développement, on parle d'essayer d'éteindre un
comportement. Et on note que, lorsqu'on les traite de façon adéquate, ils sont plus fonctionnels et ils sont
plus susceptibles de répondre à des approches qui vont au-delà des
approches restrictives et des approches d'encadrement qui sont punitives.
Alors, si on en revient à l'étude du Multimodal
Treatment Analysis, une des données très éclairantes de cette recherche
scientifique, c'est que la médication fait une différence. Quand on applique
des mesures d'intervention psychosociale et
qu'on ajoute un traitement pharmacologique, on augmente l'efficacité des
mesures d'intervention psychosociale.
Alors, en conclusion, j'aimerais vous inviter,
aussi, à aller revisiter ce document qui a été produit par l'Institut national de santé publique du Québec où on parlait
d'un avis scientifique sur les programmes de formation aux habiletés parentales. L'intérêt, c'est : Est-ce qu'on
est capables de mieux former les parents pour intervenir de façon précoce pour
essayer de prévenir les conséquences au long
cours dont je vous ai entretenus ce matin? Est-ce qu'on est capables, aussi,
d'intervenir avec le jeune de façon précoce
pour peut-être enrayer un développement qui va mener à certaines comorbidités
plus tard, dont les troubles de comportement? Et est-ce que ces approches-là peuvent
être combinées à une approche pharmacothérapeutique,
lorsqu'indiqué, bien sûr, pour essayer d'optimiser le traitement et le rendre
le plus efficace possible?
Alors, les psychiatres du Québec sont sortis
dans les médias récemment, mais c'est une réflexion qui se déroule,
actuellement, à l'Association des médecins
psychiatres, à savoir est-ce qu'on peut implanter, actuellement, un cours
d'éducation à la santé mentale dans nos écoles pour aider les enfants à avoir
une meilleure reconnaissance émotionnelle. Alors, pour des enfants vulnérables qui ont un TDAH, pour les enfants
vulnérables qui grandissent dans un milieu où les parents n'ont pas été
très bien outillés, est-ce que le milieu scolaire est capable d'offrir certains
cours sur des habiletés, avoir de meilleures habiletés pour essayer de
contrôler nos émotions? Ça peut aider dans le fonctionnement scolaire. Et, si ces habiletés-là sont potentialisées avec
une approche pharmacologique, on pense
qu'en bout de ligne c'est ce qui va rendre le fonctionnement optimal, de
ces jeunes-là.
Alors, je vous donne ici un exemple, là,
d'outils qu'on peut enseigner puis qu'on peut utiliser dans le cadre scolaire, puis des fois je me dis : Peut-être,
dans l'enceinte de l'Assemblée
nationale aussi, on pourrait
enseigner à certains députés l'utilisation de la reconnaissance des émotions, mais ceci est une blague. Je ne vais
pas nommer de noms, bien sûr, là, mais, bon...
Donc, en conclusion, j'invite la commission à ne pas
jeter le bébé avec l'eau du bain. Je pense que c'est important de prendre en considération que ces approches
pharmacologiques qui sont utilisées pour le TDAH sont très utiles et sont
supportées par une littérature scientifique
qui est solide. L'augmentation est préoccupante, l'augmentation de
l'utilisation de ces médicaments,
mais il ne faut pas voir ça comme un phénomène unique au TDAH. On a d'autres
domaines de la médecine où on voit une augmentation, aussi, de la
prévalence de certains troubles et l'utilisation de certains produits pharmaceutiques. Une
approche multimodale est essentielle, donc ne pas se ramener seulement à
l'approche pharmacologique. Mais
essayer de mettre en place, par exemple, une approche d'habiletés parentales
qui serait universellement implantée au Québec, je pense que ce serait très, très utile. Et, le traitement
pharmacologique, ce que je dis souvent à mes patients, c'est que c'est
souvent nécessaire mais rarement suffisant. Alors, je vous remercie pour votre
attention.
Le Président (M. Provençal)
: Je vous remercie, Dr Gignac, pour votre exposé. Nous allons
maintenant commencer la période d'échange. Alors, on débute cette
période avec la députée de Lotbinière-Frontenac.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Bonjour. Tout à l'heure, vous avez parlé que
vous avez fait des études à Harvard
puis que vous aviez étudié des groupes de filles et de garçons. Est-ce qu'il y
a une différence, concernant le TDAH, quand
vous avez fait des études sur les garçons ou les filles? Est-ce qu'il y a plus
une grande proportion de garçons ou de filles qui ont ce trouble-là?
M. Gignac
(Martin) : On sait que la présentation des symptômes du TDAH diffère
entre les garçons et les filles. Alors, les garçons vont souvent se présenter plus
avec des symptômes moteurs, des symptômes d'hyperactivité, des symptômes
d'impulsivité. Chez les filles, on a, à l'avant-plan, les symptômes cognitifs,
moins de symptômes moteurs d'impulsivité et
d'hyperactivité. Et je ne pense pas qu'en proportion il y a nécessairement plus
de garçons qui en souffrent que de filles, mais les filles semblent être identifiées plus tardivement dans leur
suivi. Et, quand on arrive à l'âge adulte, les proportions d'hommes, pour femmes, qui sont traités avec le
TDAH sont équivalentes. Donc, on est dans du un pour un à l'âge adulte, mais il semble qu'on identifie davantage les
garçons précocement de par leur présentation. En clinique pédiatrique puis en
clinique de pédopsychiatrie, on parle
souvent de trois garçons pour une fille qui viennent en consultation, et il y a
même des endroits où on cite des
chiffres qui vont jusqu'à neuf garçons pour une fille, mais je pense qu'en
moyenne ce qu'on retrouve le plus
dans la littérature, c'est trois garçons pour une fille. Je peux vous dire qu'à
l'institut Pinel, où je travaille avec des jeunes avec des troubles d'inconduite, il y a une grande proportion qui sont
des garçons. On voit moins de filles, mais on en voit quand même
quelques-unes.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : O.K. Merci. Vous avez parlé, aussi, qu'il y
avait un lien du TDAH avec le suicide. Est-ce que j'ai bien compris?
M. Gignac
(Martin) : Mais je n'ai pas fait ce lien-là. Ce que j'ai dit, c'est
qu'on remarque, dans notre salle d'urgence,
qu'il y a aussi une augmentation des conduites suicidaires chez les jeunes, et
je pense qu'il faut s'attarder à ce problème
de santé publique là. Donc, l'augmentation du TDAH, en termes d'augmentation de
prévalence puis augmentation d'utilisation
des médicaments pour le traiter, ce n'est pas un phénomène unique en médecine.
On note qu'il y a aussi une augmentation de l'utilisation du Ventolin
pour l'asthme. On note qu'il y a une augmentation des crises suicidaires de
consultation à l'urgence. On note qu'il y a une augmentation des troubles
anxieux. On parle beaucoup, là, d'écoanxiété, actuellement,
chez les jeunes. On en voit beaucoup, en clinique pédopsychiatrique, de ce
genre d'enjeux là, et je pense qu'il faut
regarder l'ensemble de notre société pour comprendre comment ça se fait qu'on a
une augmentation de ces prévalences de
troubles là. Certains sont de l'ordre de la santé physique et d'autres sont de
l'ordre de la santé mentale, mais ce n'est pas un phénomène unique au
TDAH.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) : Parfait. Puis est-ce que vous pouvez nous parler
du TDAH puis le lien avec le temps d'écran ou l'impact, s'il vous plaît?
• (9 h 50) •
M. Gignac
(Martin) : Donc, j'ai fait exprès pour noter... On ne fait pas de lien
de cause à effet encore. Il y a eu des écrits, dans le passé, qui ont quand
même suggéré qu'il y avait un signal d'association entre le temps d'écran et la
présence d'un TDAH. Ce qu'on n'est
pas tout à fait capables de
démontrer, c'est est-ce que les enfants qui ont un TDAH sont davantage exposés à des temps d'écran
prolongés parce que ça devient un substitut à l'encadrement parce que c'est des
enfants qui sont exigeants. Alors, je ne
blâme pas les parents, là, mais il y a des parents, des fois, qui eux-mêmes
sont TDAH, qui ont un enfant TDAH et peut-être qu'ils font une
surutilisation de cet outil-là parce qu'ils se rendent compte que, quand
l'enfant est sur le temps d'écran, au moins il est calme, puis on a moins
besoin de l'encadrer puis d'intervenir.
Donc, il y a ce
lien-là qui est ressorti dans la littérature, et on pense que les enfants TDAH
sont particulièrement vulnérables à tous les
phénomènes de dépendance aux substances, la toxicomanie, mais aussi les
phénomènes de dépendance aux jeux
vidéo en ligne. Alors, on voit que, dans les cohortes de TDAH, les jeunes
atteints de TDAH qui font un surusage des
jeux vidéo en ligne, c'est plus élevé. Ça ne veut pas dire que c'est les jeux
vidéo en ligne qui causent le TDAH, mais ils sont associés, les deux
ensemble.
Alors,
c'est une question qu'on se pose, puis espérons qu'avec les études et les
recherches on aura davantage de réponses, éventuellement, mais il y a
un lien qui est remarqué dans la littérature.
Le Président
(M. Provençal)
: M.
le député de Dubuc.
M. Tremblay :
Merci, M. le Président. Bonjour.
M. Gignac
(Martin) : Bonjour.
M. Tremblay :
Merci pour la contribution à nos travaux. Dites-moi, on a un mandat, on
travaille sur un mandat précis qui regarde
l'augmentation préoccupante de la consommation de psychostimulants chez les
enfants avec le TDAH. Ce que je
comprends de vos interventions, c'est que, dans le fond, ce titre-là est
pertinent, mais que, dans les faits, ça devrait être un mandat d'initiative beaucoup plus large, avec un titre,
peut-être, beaucoup plus large qui permettrait de mettre en lumière les
véritables lacunes qui peuvent être répertoriées à l'heure actuelle. Est-ce que
je me trompe?
M. Gignac
(Martin) : Bien, en partie, je pense qu'effectivement c'est ce que je
tentais de dire, c'est-à-dire que je
note qu'il y a une augmentation préoccupante de plusieurs enjeux au niveau de
la santé mentale et même dans certains troubles
comme les troubles de santé physique. Et de poser cette question spécifiquement
avec le TDAH, c'est bien, parce que
ça permet d'en parler puis ça permet de réfléchir aux causes, mais,
effectivement, ça serait intéressant de regarder plus globalement qu'est-ce qui se passe, actuellement,
pour les autres troubles qui ne sont peut-être pas directement associés au
TDAH, mais peut-être qu'ils le sont. La
dépression, l'anxiété, les conduites suicidaires, c'est des enjeux avec
lesquels on travaille régulièrement, en santé mentale.
M. Tremblay : Dites-moi, on parle de l'usage des appareils électroniques, on est dans
cette ère-là, bien, ça fait quand
même quelques années que tout ça a démarré, mais, si on place la portée
d'études scientifiques puis de recherches sur les conséquences sur... bon, par rapport à nos jeunes, plus
spécifiquement, avez-vous l'impression qu'on n'est pas déjà un peu en retard par rapport à... Les études
commencent à entrer sur... de nous dire, par exemple, que deux... moi, j'avais
entendu deux heures d'usage par jour maximum pour un enfant. On a entendu, chez
d'autres invités... par exemple, une neuropsychologue qui est venue nous
signifier que 30 minutes par jour pour des enfants d'âge primaire, une
heure maximum pour des jeunes de niveau
secondaire, quand on comprend que ce n'est pas évident d'enlever l'appareil à
quelqu'un qui est dans l'adolescence,
là, puis qu'il figure que c'est à lui, l'appareil... Ma question, c'est
ça : Avez-vous l'impression qu'on pose déjà les actions concrètes
pour s'assurer de ne pas être trop en retard par rapport au besoin de réagir?
M. Gignac
(Martin) : Bien, je pense que c'est difficile de se prononcer sur le
temps d'écran maximal ou le temps d'écran
optimal. Je pense que c'est vraiment selon le fonctionnement d'une personne.
Moi, ce qui me préoccupe, c'est que la
surutilisation des réseaux sociaux, actuellement, fait en sorte que les jeunes
sont de plus en plus isolés, finalement. Donc, c'est supposé nous connecter
ensemble, mais ça nous isole énormément. Et les jeunes avec qui on travaille
qui ont un TDAH, souvent ils ont de
pauvres habiletés sociales, ils ont souvent été rejetés, ils ont des conflits
interpersonnels très fréquents, et eux, ils sont susceptibles de faire
appel à ces réseaux-là parce qu'ils ont de la difficulté à entrer en relation réelle, donc ils sont en relation virtuelle. Et,
si l'isolement augmente avec l'utilisation, la surutilisation de ces réseaux-là
puis de ces appareils-là, je pense qu'on les
place à plus haut risque de se retrouver dans des états dépressifs puis
peut-être d'avoir, éventuellement,
des conduites suicidaires. Donc, c'est préoccupant, dans la perspective où on
regarde est-ce que c'est associé avec des mesures de dysfonctionnement
chez les enfants et chez les adolescents.
Maintenant,
de dire : On va leur permettre deux heures, ou leur permettre 30 minutes,
ou leur permettre quatre heures, moi,
ce que j'aurais tendance à dire à des parents puis aux enseignants,
c'est : Regardez comment l'individu fonctionne avec son outil puis encadrez cet individu
spécifiquement en lien avec cet outil-là. C'est très difficile, je trouve, de
tirer des conclusions. Récemment, il
y avait des données qui sortaient, là, avec l'institut de santé publique, où on
disait qu'effectivement le seuil de deux heures semblait être un seuil
où on voyait apparaître plus de difficultés, après deux heures. Donc, c'est peut-être un seuil auquel on devra d'intéresser,
mais je ne peux pas dire que ça fait partie de notre pratique courante, de
dire ou de dicter aux parents : Ne
permettez pas plus que 30 minutes, ne permettez pas plus que deux heures. Je
pense que c'est vraiment selon l'évaluation de la personne qui est
devant nous.
M. Tremblay : D'accord. Dites-moi, on a parlé de... bien, on va reconduire un poste
de Commissaire à la santé. Croyez-vous
que ce poste-là, avec ce que ça implique comme mandat, ne pourrait pas donner
place à une priorité sur un axe jeunesse qui rencontrerait un mandat
plus élargi par rapport au phénomène? Qu'est-ce que vous en pensez?
M. Gignac
(Martin) : Je serais tout à fait en faveur avec ce genre d'initiative.
Je pense qu'il y a effectivement des phénomènes, actuellement, en
pédopsychiatrie... On veut dépister précocement, on veut intervenir de façon
précoce, on veut instaurer des approches
universelles, et je pense que ça va prendre, effectivement, beaucoup de
leadership pour en arriver à choisir
lesquelles interventions on va privilégier, à quels moments clés est-ce qu'on
va offrir ces interventions-là. Et
moi, je suis certainement prêt à travailler conjointement... puis je pense que
l'hôpital dans lequel je travaille, actuellement, est intéressé à s'investir dans ces projets-là,
tout comme l'Association des médecins psychiatres. Donc, je pense qu'il y a
plusieurs parties, là, qui sont impliquées et puis qui veulent travailler dans
ce sens-là.
M. Tremblay :
Autre exemple, dites-moi, il y a eu, je peux le nommer, Dr Bernard
Hammarrenger...
Des voix :
Hammarrenger.
M. Tremblay :
... — Hammarrenger? — neuropsychologue...
M. Gignac
(Martin) : Oui, je connais Dr Hammarrenger, oui.
M. Tremblay : ...en conclusion, venait à signifier que lui
était disposé... il croyait pertinent d'avoir un comité qui pourrait
plancher sur des lignes de pratiques interprofessions. Croyez-vous que ça peut
être, aussi, un outil intéressant? Croyez-vous qu'à l'heure actuelle... On a beaucoup
parlé, depuis le début, du réseau qui implique la famille, qui implique la structure scolaire, qui implique le réseau de la
santé, évidemment, notre société dans l'ensemble. Est-ce qu'on a suffisamment d'instances sur le terrain pour
intervenir dans une démarche d'amélioration ou s'il y aurait place à un nouveau
catalyseur qui permettrait de davantage mettre en lumière le phénomène?
M. Gignac
(Martin) : Bien, moi, j'avais travaillé un peu avec l'INESS, là, sur
penser au cheminement des enfants qu'on
identifie comme potentiellement TDAH dans des milieux scolaires, puis une des
choses qu'on notait puis, je pense, qui mériterait une attention,
c'est... comme le système scolaire, le système de santé fonctionnent dans deux
ministères différents, on aurait intérêt à
ce que ces deux ministères-là... mais en fait à ce que les deux systèmes et que
les écoles et les systèmes de santé
se parlent davantage. Donc, tout ce qui va favoriser cette interface-là, je
pense que ça va améliorer la prise en charge des enfants.
Par ailleurs, par rapport à cette idée d'avoir
des lignes directrices qui nous guident dans la mise en place, là, d'approches puis d'interventions, bien, peut-être
j'aurais dû le divulguer, là, je suis nouvellement président de CADDRA, le Canadian ADHD Resource Alliance, alors, on a
fait des lignes directrices. Dre Vincent, que vous avez entendue aussi,
est impliquée dans ces lignes directrices
là. Je pense qu'on aurait intérêt à avoir peut-être une approche interdisciplinaire.
Donc, certainement qu'on pourrait collaborer avec d'autres groupes. Les
psychologues sont déjà impliqués, mais pas spécifiquement
les neuropsychologues, mais certainement que leur apport serait pertinent, là.
Donc, oui, je suis plutôt en faveur de supporter le développement de
lignes directrices.
• (10 heures) •
M. Tremblay : On a parlé de... bien, il a été question d'un
certain manque de rigueur, à certains égards, au niveau des diagnostics,
dans la démarche d'établir le diagnostic. On fait même allusion à des
disparités avec les régions, où, peut-être
par manque d'effectifs, entre autres, on arrive à des taux qui sont assez
différents, assez significatifs. Croyez-vous qu'à l'heure actuelle il y
a vraiment une rigueur au niveau des... Est-ce qu'il y a un manque de rigueur au
niveau des diagnostics qui sont prononcés en
région comme en grand centre, peu importe, dans l'ensemble de l'oeuvre? Est-ce qu'on ne devrait pas... Est-ce qu'il
n'y a pas urgence à intervenir?
M. Gignac
(Martin) : Je pense
que c'est un signal qui est important. Il faut regarder qu'est-ce qui fait en sorte qu'on a des taux de prévalence qui varient d'une région à une autre. Il y a
plusieurs hypothèses en arrière de ça. On pourrait penser que l'adversité psychosociale varie d'une région à
une autre, on pourrait penser que le Québec n'est pas un endroit uniforme
en termes de niveaux de services. Il y a des
endroits où les listes d'attente pour avoir un service en CLSC en santé
mentale, c'est presque un an, il y a
d'autres endroits, les enfants sont vus en 30 jours. Alors, il y a une
disparité dans l'offre de services. Je pense que ça aussi, ça doit faire
partie de notre réflexion.
Par ailleurs,
si on identifie qu'il y a un problème de compétence médicale au niveau des
diagnostics ou incompétence de psychologues qui posent des diagnostics
psychologiques de TDAH, c'est certainement aux ordres professionnels d'identifier ces cas-là, qui sont particuliers. Il
y a beaucoup d'initiatives au niveau de la formation continue. J'avais
participé... avec un programme du
Collège des médecins qui avait été implanté partout dans la province pour
vraiment s'assurer que tout le monde était au même niveau par rapport à
l'utilisation d'outils.
Donc, je ne suis pas sûr que la raison numéro
un, c'est un problème de compétence. Je pense que la raison numéro un, c'est un problème de synergie,
peut-être des disparités qui sont régionales, peut-être qu'il y a plus
d'adversité psychosociale dans
certaines régions. Et, si la compétence est un enjeu, bien, il y a certainement
des instances en place qui pourront
aborder ça, et je pense qu'il faut s'y attarder, c'est certain, mais je ne suis
pas sûr que c'est la première chose qui est en haut de la liste.
M. Tremblay : Encore du temps?
Le Président (M. Provençal)
: Une minute.
M. Tremblay : J'aurais tendance
à dire : Ce que j'en comprends, sans prétendre à pouvoir vulgariser tout
ça, on a une société de performance. Au
niveau des familles, il y a du travail à faire au niveau de la conscientisation
par rapport au phénomène. Je comprends qu'au niveau du milieu scolaire
il y a du travail, aussi, à faire au niveau des effectifs, peut-être de mettre davantage d'énergie sur la
réalité, conjointement avec les parents, les familles, puis qu'effectivement
il faut renforcer, probablement, le maillage
avec la médication. C'est à peu près le constat que j'en fais, dans le fond.
C'est un problème de société qui est vraiment réel.
Le
Président (M. Provençal)
:
Merci. Il me fait plaisir de céder, maintenant, la parole à la députée de
Vaudreuil.
Mme Nichols : Merci, M. le
Président. Merci, M. Gignac, d'être ici aujourd'hui. J'ai épluché votre
C.V., vos réalisations, vos implications, je
suis très emballée, mais aussi très impressionnée par votre C.V. Et je vois que
vous avez même le temps de faire des
Ironman, donc je ne sais pas où vous trouvez le temps, mais, en tout cas, vous
pourrez nous donner des trucs, tout
en nous donnant des cours sur la gestion des émotions. Mais en fait c'est très
enrichissant que vous soyez aussi ici aujourd'hui pour partager avec
nous votre vision, votre expertise et vos connaissances.
On entend... C'est presque gênant de poser des questions,
parce que j'ai l'impression qu'on est... En fait, cette commission-là, on apprend beaucoup. Vous savez, nous, on fait de la
politique puis on n'a pas des champs d'expertise... en fait, on a des champs d'expertise très variés sur
plusieurs domaines, mais rarement très pointus comme, entre autres, les personnes qui viennent en
cette commission apporter leur input ou apporter... En fait, ça nous apporte
beaucoup de nouvelles connaissances puis ça nous questionne... ça porte
à questionnement par la suite.
Je
veux peut-être juste... La commission, aujourd'hui, c'est à la demande de mon
collègue, et, à la fin, ce qu'on va faire, c'est qu'on va rendre des
observations, des observations et des recommandations. Donc, on va se réunir
après, on a un recherchiste qui travaille avec nous, donc, toutes les personnes
qui vont être passées ici, on va faire ça ensemble puis on va mettre, tu
sais, probablement, ce qui a le plus attiré notre attention. Bien, moi,
j'aimerais savoir, vous, là, dans les recommandations puis dans les
observations, là, s'il y a quelque chose qu'on devrait définitivement inscrire
dans notre rapport, ce serait quoi.
M. Gignac
(Martin) : J'aurais de la difficulté à choisir une recommandation,
mais ce que je tentais de souligner, là,
dans mes conclusions, c'est que je pense qu'une approche universelle
d'habiletés parentales offerte de façon équitable partout sur le territoire, une approche
manualisée, où chaque intervenant qui s'implique avec les parents utilise la
même approche, ça serait très, très
utile, au Québec. Je pense qu'il y a des initiatives qui se sont faites, mais
ce n'est pas une approche universelle. Donc, je pense que ça, ça serait
une recommandation intéressante et forte.
Je
pense que le cours d'éducation à la santé mentale — comment comprendre les habiletés sociales,
résolution de conflits, régulation
émotionnelle — serait
utile de façon précoce en milieu scolaire, avec un cursus qui pourrait toucher
les différentes phases de développement et les besoins des enfants.
Et je pense qu'il faut quand même prendre en
considération qu'on est choyés, au Québec, d'avoir un programme d'accès à la médication qui... Quand je me compare
avec mes collègues du Canada, dans les autres provinces, on est mieux outillés, au Québec, pour avoir accès aux
traitements pharmacologiques, entre autres pour le TDAH, et ça, je pense que
c'est quand même une donnée intéressante à
remettre en lumière. C'est-à-dire que notre taux qui est plus élevé par rapport
à ailleurs au Canada peut être en partie
attribuable au fait qu'on a un meilleur programme d'accès. Et, pour bien de mes
collègues en Colombie-Britannique, par
exemple, avoir accès à une molécule pharmacologique psychostimulante longue
durée, à moins que la personne paie de sa
poche ou ait un programme d'assurance privée, ça ne sera pas disponible. Alors,
là-dessus, je pense qu'il faut quand même
appuyer sur le fait qu'au Québec on a fait de bonnes choses. Et il ne faut pas,
comme je le disais tantôt, là, jeter le bébé
avec l'eau du bain, c'est-à-dire qu'il faut garder les bonnes choses qui ont
été faites et continuer à bâtir sur
ces bonnes choses là. Alors, peut-être, dans ces trois domaines-là, c'est ce
que j'aurais comme message clé, là, pour la commission.
Mme Nichols :
On a entendu divers intervenants, puis ce qu'on semblait retenir, c'est qu'il y
avait entre autres une problématique...
En fait, l'accès aux médicaments, vous en avez parlé, l'accès aux médicaments
était peut-être facile ici, au Québec, mais il semblait y avoir une difficulté
pour qu'est-ce qui était... Parce qu'on s'entend qu'on doit travailler, probablement, les deux ensemble, pas juste le
médicament, mais travailler aussi les à-côtés, la thérapie, le suivi, là, et
cette partie-là semble plus difficile d'accès. Est-ce qu'à votre
connaissance il y a une...
M. Gignac
(Martin) : Donc, souvent, ces familles-là vont aller chercher des
services en services spécifiques, là, qu'on
appelle la première ligne. Donc, ils vont tenter d'avoir un support
psychosocial, un travailleur social, un psychoéducateur, un éducateur spécialisé. Il y a des écoles qui offrent
ce genre de services là, il y a d'autres écoles qui sont moins bien nanties. Il y a des CLSC où c'est
très facile d'y avoir accès et des CLSC où il y a des temps d'attente qui
sont prolongés.
Puis je pense qu'il
faut prendre en considération que, dans les CLSC qui sont implantés dans des
milieux vulnérables, je pense à certaines
régions de Montréal ou même en région, en Mauricie ou dans Lanaudière, il y a
certainement des endroits où il y a
des CLSC qui sont plus sollicités que d'autres parce qu'il y a des populations
vulnérables qui y demeurent, bien, il
faut s'assurer que notre offre de services est adaptée à la vulnérabilité de la
population. Et, si on est capables d'avoir un accès qui est plus uniforme, plus équitable, peut-être qu'on va voir
un rééquilibrage dans l'utilisation de la médication, peut-être qu'on va être capables de faire d'autres
types d'interventions en substitution à un traitement pharmacologique.
Mme Nichols :
Parce que je comprenais... puis vous avez dit que c'est rarement juste le TDAH,
qu'il y a d'autres choses à traiter
aussi, ça fait qu'il y a un lien à faire, aussi, avec les services qui doivent,
justement, accompagner. Vous avez
parlé que le risque augmente d'avoir des troubles anxieux, des troubles de
dépression, des troubles bipolaires, donc il y a un lien à faire, et,
justement, je présume qu'en combinant c'est la clé du succès.
M. Gignac
(Martin) : Exactement. Donc, les approches multimodales, où on est
capables de faire... Bien sûr, la pharmacothérapie, c'est utile, mais ça
ne va pas résoudre les problèmes, là. En anglais, on dit «pills don't build
skills», c'est-à-dire que les médicaments n'amènent pas de nouvelles capacités
aux personnes, il faut faire autre chose.
Je
vous ai vus sourire, parce que je ne suis peut-être pas le premier à citer
cette fameuse phrase là, mais c'est notre mantra, je pense.
• (10 h 10) •
Mme Nichols :
J'ai une question qui peut paraître un peu étrange : Est-ce que le TDAH,
c'est inné? Est-ce que c'est un
trouble qui est inné puis ça se développe dépendamment dans le milieu dans
lequel on est ou, dépendamment... justement, on a parlé de milieux favorisés, des milieux défavorisés, de la
surexposition aux écrans, des enfants qui vont moins jouer dehors.
Donc, est-ce que le TDAH, c'est inné puis c'est quelque chose qui peut se développer
en fonction de notre entourage ou en fonction de notre milieu dans
lequel on vit?
M. Gignac (Martin) : Donc, il y a beaucoup de recherches qui ont
été faites sur ces questions-là. La génétique est le facteur numéro un, donc la transmission... On ne sait pas, on ne pense pas que
c'est un gène, là, mais on sait qu'il y a une transmission qui est intergénérationnelle. Je
vous dirais que, dans les dernières décennies, on s'est beaucoup intéressés au phénomène épigénétique,
c'est-à-dire qu'il y a des gènes qui n'étaient pas activés dans une génération
antérieure mais qui le deviennent parce qu'ils ont vécu des stress
spécifiques dans leur environnement, et là ils vont transmettre cette activation génétique aux futures générations, donc
il va y avoir un phénomène d'amplification. Donc, on peut voir, même
dans la génétique, des variances d'une génération à une autre, selon ce qu'ils
ont vécu. Alors, par exemple, si, moi, ma génération antérieure a vécu une
guerre x dans un territoire y, bien, j'ai plus de chances d'avoir des
phénomènes épigénétiques qui vont me rendre vulnérable à développer certains
troubles. Et on pense que, pour le TDAH, il y a des phénomènes épigénétiques. Donc, l'adversité psychosociale, l'environnement
a un impact sur l'expression de certains gènes et a un impact aussi sur le développement de certains troubles de
l'humeur, TDAH et l'anxiété. Donc, on parle, par exemple, des enjeux d'attachement, on parle de traumatismes
précoces, des enfants qui ont été victimes d'abus physiques, abus sexuels,
c'est des phénomènes qui sont associés avec la présentation de TDAH. Donc, la
génétique et l'environnement semblent jouer
un rôle, la génétique ayant un rôle un peu plus marqué, là, selon la
littérature, que l'environnement, mais il y a des facteurs
environnementaux à prendre en considération.
Mme Nichols :
Puis est-ce qu'il peut y avoir un élément déclencheur ou est-ce qu'il peut y
avoir quelque chose sur un... en fait, un
événement sur un laps de temps? Hier, on abordait, avec des sociologues, par
exemple, un divorce, le divorce des
parents. Est-ce que ça peut s'exprimer sur un court laps de temps ou, non, on
serait plus, là, dans un autre trouble, un trouble anxieux ?
M. Gignac (Martin) : Habituellement, le
TDAH n'apparaît pas dans la vie, à moins d'avoir subi un traumatisme crânien, là. Le TDAH, c'est un
phénomène qu'on va rechercher à partir de la naissance, là. Souvent, il y a des
caractéristiques. Des fois, le
divorce ou des stresseurs dans l'environnement vont faire en sorte qu'on perd
nos repères, puis donc la maladie s'exprime davantage, mais il y avait
des signes avant-coureurs, là, ça ne va pas apparaître soudainement à un âge
parce qu'on a vécu un stress. Mais, si on
grandit dans un milieu où l'adversité psychosociale est grande à partir de
notre naissance, là ça nous rend plus vulnérables à développer les
troubles, entre autres le TDAH.
Mme Nichols :
Merci beaucoup. Merci.
Le
Président (M. Provençal) : La parole est
maintenant au député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui, M. le Président.
Est-ce que je récupère le temps de parole du député de Jean-Lesage... en tout cas, de... je ne veux pas nommer personne... de la deuxième
opposition ou... avec consentement?
Le Président
(M. Provençal) :
Avec consentement, on va vous donner du temps... le temps supplémentaire, ce qui est...
M. Gaudreault :
Alors, je demande le consentement pour avoir le temps non utilisé de la
deuxième opposition.
Le
Président (M. Provençal) : Moi, je pense
que, comme personne qui a initié ce mandat-là, vous méritez ce temps-là.
M. Gaudreault :
Oh! avoir su, M. le Président, j'aurais fait d'autres demandes avant.
Merci
beaucoup, M. Gignac, de votre présence. C'est vraiment très instructif,
tout ce qu'on entend depuis le début de
cette commission parlementaire. Je pense que les Québécois auraient intérêt à
suivre davantage. Je suis content de voir qu'il y a des caméras, parce
que ça montre qu'on ne fait pas juste avoir des problèmes de gestion
d'émotions, à l'Assemblée nationale, mais on
a aussi des préoccupations extrêmement sensibles sur les besoins réels de nos
enfants, entre autres.
Je ne sais pas trop par où commencer tellement qu'il y
aurait de choses. Moi, en tout cas, il y a un phénomène qui m'interpelle
beaucoup depuis le début de cette commission, j'aimerais ça vous entendre
là-dessus : Est-ce qu'au Québec on n'est pas en train... ou est-ce qu'on n'a pas
commencé, au fond, à médicaliser un problème social ou un phénomène social?
Ce qui était, avant, un enfant plus
turbulent, un peu plus actif, un peu plus créatif, même, bien là, aujourd'hui,
c'est rendu un TDAH ?
M. Gignac (Martin) : C'est toujours le
débat du... à quel seuil est-ce qu'on pense que ça devient problématique. Donc, moi, l'approche que j'ai,
habituellement, c'est de regarder, dans le continuum de fonctionnement de
l'enfant, à quel moment est-ce qu'il y a une certaine rupture de
fonctionnement. Donc, quand l'enfant est toujours dans un mécanisme où il s'adapte à son environnement puis que l'environnement est capable d'encadrer c'est enfant-là, habituellement ça ne mène pas à un
diagnostic. Donc, le TDAH, ce n'est pas... Même si on utilise des critères
diagnostiques qui sont catégoriels, c'est-à-dire
qu'on dit : Ah! ça, c'est un cas TDAH, ça, ce n'est pas un cas TDAH, il y
a un continuum de troubles. Et souvent,
quand je donne des conférences grand public, par exemple, il y a toujours
des gens dans la salle qui disent : Ah! je viens de me découvrir que j'ai un TDAH. Mais en même temps vous travaillez, vous êtes stable au plan familial, vous êtes capable de vous occuper de vos enfants, peut-être
que vous avez des symptômes qui sont minimes, mais ça ne veut pas dire
que vous avez le trouble.
Alors,
le trouble devrait s'appuyer sur un ensemble de symptômes avec des difficultés
fonctionnelles qui sont quand même bien définies, là, dans notre DSM puis dans
les autres outils qu'on utilise pour poser le diagnostic. Donc, peut-être
qu'il y a des gens qui utilisent un seuil qui est plus près
que ce que vous apportez, là, c'est-à-dire qu'il y
a peut-être des gens qui vont
avoir à dire : Bien, lui, il dérange, donc on va le traiter. Mais est-ce qu'on est capables de mettre en lumière... Puis est-ce qu'une autre
personne qui observerait cet enfant-là aurait le même avis sur son niveau de
dysfonctionnement? C'est très
variable d'un professeur à un autre. Parfois, c'est très variable d'un parent à
un autre quand les enfants sont en garde partagée.
Alors,
je proposerais d'avoir... quand ces questions-là se posent, est-ce que c'est
plus un problème d'encadrement, un
problème qui est plus mineur, de s'assurer qu'on va chercher plusieurs sources
d'information pour mettre en lumière que cet enfant-là, finalement, il n'a pas besoin d'être traité. C'est un
tempérament, c'est comme ça qu'il fonctionne, mais il s'adapte bien puis
il est fonctionnel, donc on ne va pas mettre en place un traitement
pharmacologique.
Et
peut-être que, là-dessus, il y a des gens qui ont ramené le seuil un petit peu
trop près de la norme, peut-être, là, mais
je n'aime pas beaucoup le terme de «norme», en santé mentale, parce que c'est
un continuum, là, et tout le monde a des petits troubles ici et là. Mais, quand on commence à tomber dans de
graves dysfonctionnements — des difficultés à réussir à
l'école, je n'ai pas d'amis, je ne suis pas invité jamais, je n'arrive pas à
réussir, j'ai une pauvre estime de moi-même, je commence à avoir des symptômes dépressifs — et là que les choses s'accumulent, le TDAH,
ce n'est pas juste adaptatif, dans ce cas-là, ça devient vraiment un
problème, puis on a des outils pour traiter ces enfants-là.
M. Gaudreault :
Vous l'avez abordé tout à l'heure, le fait que le médicament est accessible au
régime de remboursement ici, au
Québec, là, l'assurance maladie, est-ce que ça pourrait être une des causes de
la surmédicamentation?
M. Gignac
(Martin) : Bien, c'est sûr
qu'il faut d'abord établir qu'il
y a surmédicamentation. Je pense
qu'on est dans des seuils qui sont plus élevés qu'ailleurs
dans les autres provinces canadiennes, ça, je pense que c'est indéniable. Est-ce qu'on a dépassé le seuil de prévalence de la maladie? Il semble que, pour
certains groupes d'âge, c'est le cas, donc il faudrait se poser des questions sur qu'est-ce qui s'est passé avec ce groupe
d'âge là. Je pense qu'aussi c'est un symptôme du fait qu'on n'a peut-être pas accès à d'autres approches, et donc ça fait
en sorte que le seuil d'utilisation de médication est de plus en plus bas. Donc, on se dit que cet enfant-là a de légères difficultés,
on voudrait qu'il ait accès, par
exemple, à une thérapie x, y,
z, mais, si cette thérapie-là n'est pas accessible en un temps donné, bien, peut-être
que les médecins vont dire : Bien, on
va tenter de traiter ses symptômes puis on va voir si ça améliore le
fonctionnement. Donc, peut-être que cette hypothèse-là pourrait expliquer pourquoi
est-ce qu'on a une augmentation comme celle qu'on constate, actuellement.
Le Président (M. Provençal)
: Je vous
remercie, Dr Gignac, pour votre
contribution aux travaux de la commission.
Je
suspends les travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de
prendre place. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à
10 h 19)
(Reprise à 10 h 21)
Le Président (M. Provençal)
: Je souhaite maintenant la bienvenue à la Dre Christiane Laberge. Je
vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous
procéderons à la période d'échange avec les membres
de la commission. Je vous invite à vous présenter et à commencer votre exposé.
À vous la parole, madame.
Mme Christiane Laberge
Mme Laberge
(Christiane) : Merci. Alors, je suis Christiane Laberge, je suis médecin
de famille au ras des marguerites, donc je suis dans celles qui sont les
imprimantes à prescriptions, celles dont on nous taxe de trop prescrire.
Alors, je vais vous
raconter une histoire, parce qu'on parle... Je suis intéressée aux propos de
Martin, qui disait : Éducation et santé ensemble, on devrait faire un mix, ce
serait beaucoup plus efficace. Alors, comment je suis venue au
TDAH, à m'intéresser à cette problématique-là? En 2000, il y a cinq écoles du réseau Lachine, les écoles en difficulté
de Lachine, la Duff-Court, près de la route 20, des unités d'HLM, dont les écoles qui drainaient
cette clientèle-là avaient des problèmes
parce qu'un pédiatre avait pris sa retraite et que les enfants qui étaient
porteurs de TDAH prenaient 60 % du temps du personnel non enseignant — psychologues, «psychoeds», techniciens spécialisés,
orthopédagogues, orthophonistes. Donc,
toute l'équipe-école et personnel non enseignant passaient 60 % de leur
temps à gérer ces enfants-là, alors ils ont demandé au CLSC :
Pouvez-vous nous aider?
Au
CLSC, une coordonnatrice a décidé de mettre sur pied comment on va fonctionner,
école et CLSC. Elle a réussi à
motiver tout le monde — travailleurs sociaux, «psychoeds» aussi, psychologues, infirmières — à
tous travailler ensemble. Entre autres, une fois qu'on est arrivés à un consensus,
on a regardé d'abord ce qu'était le TDAH, parce que, dans les années 2000, ce n'était pas évident, ce n'était
pas aussi connu que maintenant, la médication, ça commençait, les longues
actions. Alors, on a commencé à regarder
tout ça et on a convenu d'un formulaire où on donnait aux parents la qualité de
parent : Vous avez un enfant
extraordinaire, on va le découvrir ensemble, on va travailler ensemble, et vous
allez autoriser l'école, de par son personnel non enseignant, ses
professeurs et ses directions, à parler ouvertement. Donc, on a une
confidentialité partagée entre les deux modes d'établissement.
Alors, on a fonctionné comme ça, au point où,
par exemple, quand ça venait de l'école, on avait un enfant qui était référé
par la psychologue qui avait fait toutes ses évaluations et qui disait :
Cet enfant-là est porteur, par exemple, d'un trouble d'apprentissage — avec l'orthopédagogue — était porteur d'un TDAH. On voyait l'enfant
au CLSC, on avait un questionnaire
médical formel sur l'alimentation, sur le mode de vie : Est-ce que cet
enfant-là dort à 1 heure le matin avec ses jeux technos ou si c'est un enfant qui se couche à 7 h 30
puis qui s'endort 7 h 45? Alors, on avait les habitudes de vie
de l'enfant. On voyait l'enfant au CLSC avec
un examen médical formel avec... S'il était pâlotte, on faisait aussi une prise
de sang pour voir s'il y avait de l'anémie,
parce que, quand tu es anémique, tu es fatigué, quand tu es fatigué, tu
apprends mal. Alors, on éliminait les
causes physiques et ensuite on allait dans les causes psychologiques, et on
regardait, avec nos psychoéducateurs,
avec l'école, quelles avaient été les approches qui avaient été faites pour ne
pas dédoubler, et on essayait d'avoir,
avec la famille, le plus de possibilités de développer l'encadrement de cet enfant-là
et les moyens de permettre d'adapter à ces situations. On a évidemment donné la
médication. Comme je suis la seule qui pouvait donner la médication,
c'est clair que c'est moi qui imprimais.
Donc, on a
traité les enfants, sauf qu'on donnait une continuité et on donnait un suivi au
mois au début, des fois aux 15 jours,
on disait aux parents... puis on avait une secrétaire, aussi, qui était fixe,
donc qui était accueillante et que... si le parent téléphonait au
travers de ça, on pouvait revoir l'enfant sur demande. Alors, on a fonctionné
comme ça, ça allait très bien. On avait
beaucoup de succès, on avait de l'encadrement. Et les autres visites se
faisaient à l'école, parce que, ces parents-là, avec l'école, dès qu'ils sont
appelés à l'école, les poils leur retroussaient, puis ils disaient : Que
c'est qu'il a fait encore? Donc, on
les a réapprivoisés à fréquenter l'école, au point qu'il y a
même des parents qui sont devenus des surveillants de dîner. Alors, on a
fait un mix comme ça. On avait aussi une action avec un travailleur social de
la Duff-Court. Donc, la demande pouvait venir de l'école, mais la demande
pouvait venir de chez nous. Les parents pouvaient
se présenter directement au CLSC, et là on faisait l'évaluation, on essayait de voir quels étaient les problèmes puis on
arrimait avec l'école, on avait des plans d'intervention concertés.
Et, à un moment donné, c'est trop beau, hein, il fallait qu'il y ait
des gens qui s'en aillent. Donc, la coordonnatrice, qui était quelqu'un, vraiment, de conciliation et de créativité, je dirais, est
partie, les psychologues de l'école ont pris leur retraite, les directions d'école ont pris leur
retraite, les secrétaires ont changé, les professeures sont parties en congé de
maternité, au point qu'on avait... j'ai des
enfants qui n'ont jamais eu moins de quatre professeures par année tout le
long de leur cursus primaire. Alors,
on a eu plusieurs bémols de ce type-là. Il est arrivé des coupures
dans le système d'éducation, vous
le savez, donc on a perdu de nos personnels non enseignants, malgré la difficulté
de ces écoles-là. Et on aussi, au CLSC, eu les coupes, les grands groupes, les transferts de troisième ligne en
première ligne, mais on n'a jamais défini la deuxième, hein? Vous allez tomber en bas de votre chaise,
mais on ne sait pas c'est quoi, une deuxième ligne. On a une première ligne,
qui est au ras des marguerites, on a une
troisième ligne dans les instituts
psychiatriques, mais entre les deux, ce n'est pas défini. Alors, on a
aussi eu des obligations pour les travailleurs sociaux de voir les patients
six, huit, 10 fois, hein? La thérapie
courte, ça marche pour tout le monde. Or, le TDAH, c'est une maladie
chronique... c'est un trouble chronique — ce n'est
pas une maladie, mais c'est un trouble chronique — l'anxiété, on s'entend que c'est pas mal
chronique, et, la dépression, on ne veut pas que ça devienne chronique.
Alors, nos
ressources se sont rétrécies comme peau de chagrin, et est apparu les silos,
qui sont revenus en place parce que,
là, on allait dans la confidentialité. Et le ridicule de l'histoire... À un
moment donné, j'ai un jeune de 15 ans avec lequel on doit discuter, DPJ, école, et j'étais là,
faisant partie du plan d'intervention, et là la DPJ disait : Non, je n'ai
pas le droit de divulguer parce que
j'ai la confidentialité, puis l'école disait : Ah bien, nous aussi, on est
dans la... Aïe, là, on va arrêter de niaiser,
là, on va aller chercher le jeune, on va lui demander s'il est d'accord qu'on
se parle, O.K., puis, comme ça, on va sauver
du temps puis on va encadrer notre jeune, parce que le client, c'est le jeune,
le patient, c'est le jeune. Donc, arrêtez de dire qu'on n'a pas de client parce que la demande n'est pas claire
d'un bord puis de l'autre, on va se parler, c'est quoi, son problème aujourd'hui, et on va régler ça
comment, puis avec lui. Alors, le jeune est descendu de sa classe, il a signé
le papier, il a dit :
Arrangez-vous puis vous me donnerez ce que vous faites avec moi, parce que moi,
je ne sais pas ce que je vais faire
avec moi. Donc, on a trouvé des solutions, à condition de se mettre ensemble.
Et, bien, ce qui a foiré, effectivement, c'est le bris de continuité
dans les services.
Et je pense
que c'est ça qui est le principal problème, aujourd'hui, c'est qu'on est, tant
à l'école que dans le système de
santé, dans des approches ponctuelles. C'est quoi, le problème? Tu as mal à
l'orteil? Je vais te guérir ton orteil, mais je ne regarde pas pourquoi tu as mal à ton orteil, parce que ça frotte
dans ton soulier, parce que tes bas sont trop épais, des niaiseries comme ça. Mais on ne cherche plus
beaucoup les causes, on ne regarde plus beaucoup l'ensemble. On a maintenant
une prise en charge d'un patient, mais, avec
un groupe de médecine de famille, vous consultez quand vous avez des bobos,
puis le suivi n'est pas nécessairement fait
par la même personne qui vous connaît sur une longueur de temps. Et, quand vous
parlez d'utilisation des psychostimulants,
ça demande un suivi. Ce n'est pas des bonbons, on le sait. Est-ce qu'il y a des
lignes directrices? Vous posiez la question
tantôt. Oui, il y a des lignes directrices, et elles sont claires, les lignes
directrices.
Je vais juste vous taquiner un peu. On vous a
parlé, avec Dre Vincent, du programme VIP, du programme attentiondeficit-info pour savoir ce que c'est,
pour aller voir les trucs et astuces. Combien parmi vous sont allés, juste pour
voir?
Une voix : ...
• (10 h 30) •
Mme Laberge (Christiane) :
Vous, vous êtes allé? Juste parce qu'on demande la même chose à nos parents. On offre aux parents des services, on prend nos
pads puis on leur montre comment accéder. On a 50 % de gens pour qui
la littératie, c'est un problème, et ça,
effectivement, il faut les rejoindre. Deuxièmement, il faut les rejoindre dans
ce qu'ils sont comme parents. Et, si
j'ai un parent qui est TDAH, là, bien, il ne m'a pas regardée plus que
3 min 15 s, parce qu'il est déjà ailleurs. Donc, il faut regarder aussi l'ensemble. Si on a un
parent qui est très porteur de TDAH, est-ce qu'il aura de la difficulté
à encadrer son jeune? Bien oui, parce qu'il va jouer aux vidéos autant que son
jeune, il ne verra pas que le temps passe.
Donc, il faut s'adresser à la famille, il faut mettre des psychoéducateurs de
milieu. Quand on dit : Bien, vous viendrez au CLSC parce qu'on n'a pas le temps de
se déplacer, bien, si on ne se déplace pas puis va voir le milieu physique
où l'enfant vit, on va manquer des
informations, on va manquer des
outils que le parent pourrait nous fournir, on va manquer, au niveau de l'adulte aussi, des données. Alors,
c'est pour ça que, comme médecin de famille, je pense qu'il faut remettre
le titre de médecin de famille à prendre soin de la famille.
Est-ce qu'on
s'est trompé dans la prescription? Bien certain qu'on s'est trompé, parce qu'on
a vu que c'était un TDAH, bon, tout à coup, on s'est rendu compte qu'il
y avait une majeure d'anxiété. Woups!
On va changer notre approche, on va aller chercher les problèmes
d'anxiété, on va aller diminuer ça, et peut-être que mon TDAH va être moins
floride.
Il y a
un orthopédagogue qui m'a donné la permission de vous parler. La madame a fait
son cours d'orthopédagogie, maîtrise,
avec des post-it partout pour ne pas oublier. Elle a marié un gars qui avait
bien de l'allure puis qui est très encadrant. Ça allait très bien, il s'occupait des affaires plates qu'elle
n'aimait pas, faire la business, puis elle, elle faisait la créativité. Deux enfants, elle, elle s'occupait du côté
enfants, c'était le fun, monsieur faisait les affaires qu'il aimait, lui,
c'était parfait. On fait une rénovation de maison, on a des moisissures,
on est obligés de tout défaire, et là le bordel prend, et en plus madame a été
affectée à trois écoles, elle ne se comprend plus, elle est tombée en trouble d'adaptation.
Le Président (M. Provençal)
: ...
Mme Laberge (Christiane) :
Pardon?
Le Président (M. Provençal)
: Je vais vous demander de conclure.
Mme Laberge
(Christiane) : Oui. Alors,
cette dame-là s'est présentée pour anxiété et dépression, on a découvert
qu'en dessous il y avait un TDAH. On a
traité le TDAH et on a apaisé la mise, et maintenant on va apaiser aussi
la récidive potentielle.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup de votre exposé, de
votre présentation. Alors, nous débutons cette période d'échange avec la
députée de Soulanges.
Mme Picard : Merci,
M. le Président. Bonjour,
Dre Laberge. J'ai une question, particulièrement, à propos du système scolaire pour vous,
comme vous connaissez beaucoup le dossier, parce que je vois que nos petits
cocos, ils souffrent, nos petits
cocos, ils ont besoin d'aide énormément. Il y a beaucoup d'anxiété, beaucoup de dépressions, une
pression, aussi, sur la réussite
scolaire. Selon vous, le lien avec l'alimentation, tant dans les lunchs à
l'école, l'alimentation à la maison... le sommeil aussi, mais particulièrement
pour l'alimentation, j'aimerais savoir ce que vous en pensez.
Mme Laberge
(Christiane) : On sait que,
pour l'alimentation, par exemple, le sucre n'a pas d'effet. C'est le party dans
lequel tu vas manger du sucre qui va t'exciter, mais c'est beaucoup
plus ça, le sucre n'a pas été prouvé. Deuxièmement,
les colorants n'ont pas été prouvés. Les
enfants qui ne mangent pas le matin, on sait que c'est assez important,
parce qu'il y a des parents qui nous répondent : Bien, moi
non plus, je n'ai pas faim le matin. Excuse-moi, ma grande, mais toi, tu
as fini de grandir, ton petit n'a pas fini
de grandir. Donc, effectivement, le repas le matin, pour partir sa journée, est
très important.
Deuxièmement, au niveau des dîners, il y a des parents qui commencent à manquer
d'imagination, parce que pas de pinottes, pas de moutarde, pas de
poisson, pas de ci, pas de ça, ça dépend des écoles. Perso, je prendrais une
classe, je mettrais mes allergiques dans la
classe, puis je laisserais la paix aux autres, parce qu'on sait qu'il y a
des parents qui sont pauvres, qui n'ont pas beaucoup d'argent... et, je
regarde, puis le beurre d'arachide, c'est quand même des protéines. Donc, oui, au niveau de l'alimentation, on pourrait améliorer beaucoup. On pourrait améliorer, parce que, quand on
regarde le Lab-École, on pourrait montrer aux enfants à faire la cuisine
et ils auraient des... au sein de l'école, là, il y aurait des réalisations où ils sont à succès, même si tu as un TDAH. Donc, de vivre des succès,
c'est une mesure de protection contre les ravages de ton TDAH. Alors,
oui, l'alimentation a une énorme importance.
Quand on
prend la médication, il n'y avait pas... on dit tout le temps : Ça
diminue la croissance. «No», ça dépend du soin que vous avez pris avec vos
parents pour leur enseigner qu'il
faut grossir le déjeuner, et que ton
enfant, s'il prend une molécule qui
donne 12 heures de protection, bien, s'il a mangé à 6 h 30, il
n'aura pas faim avant 6 h 30 le soir. Donc, si on dit aux parents québécois : On mange à 5 heures, puis qu'il picosse son souper, puis il a
faim à 7 h 30, puis on lui donne quatre barres tendres, bien,
ça ne fera pas la tâche. Il faut, à
ce moment-là, différer... oui, on
peut manger ensemble à 5 heures,
mais il faut différer le souper pour que, là, l'enfant qui a faim, on lui donne
vraiment ce qu'il doit avoir. Il va se coucher à 8 heures... les enfants n'ont
pas tellement de reflux, pas tellement de problèmes
de digestion, surtout si on les fait bouger, qui va équilibrer leurs
affaires. Est-ce que ça répond à votre question?
Mme Picard : Oui, merci
beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la députée.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) :
Bonjour. Bien, avant de me présenter en politique, j'ai beaucoup
réfléchi à savoir qu'est-ce que je
pourrais apporter de mieux ou de plus que mes collègues, puis, c'est ça, j'ai quand même
fait une liste. Puis, dans la liste,
j'avais l'idée de faire un cours à l'école, parce que, tu sais, notre société,
ça ne va pas très bien. Puis, au
niveau des enfants, c'est mon avis, là, on a beaucoup laissé aller. Puis
j'avais pensé faire un cours de citoyenneté pour développer
les habiletés sociales des enfants et en faire des bons citoyens, des meilleurs
citoyens. Je me demandais... Puis, là-dedans,
il y aurait... tu sais, du primaire jusqu'à
la fin du secondaire, puis développer les habiletés des jeunes pour être
bien en société. Qu'est-ce que vous pensez de ça?
Mme Laberge
(Christiane) : Bien, pour
être bien en société, il
faut être bien avec soi-même, hein, il faut
développer l'empathie. Et je dois
vous avouer qu'il y a beaucoup de programmes qui font ça. On a aussi les
programmes de méditation pleine
conscience pour les enfants, et je peux vous dire que ça fonctionne très bien
et qu'il y a des données probantes pour la méditation pleine conscience. Juste la
cohérence cardiaque, trois minutes, trois fois par jour, ce n'est pas long.
C'est gratuit, hein, en passant, RespiRelax, sur les appareils technos.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
Ça, est-ce que ça se donne à l'école, là?
Mme Laberge (Christiane) : On
donne les moyens à l'école et aux parents. Combien le font? Les parents se présentent le mois d'après en disant : Tu ne
seras pas contente, je ne l'ai pas fait. On n'a pas d'impact. Les gens courent
après leur queue, puis malheureusement les outils qu'on leur donne qui sont non pharmacologiques ne sont pas toujours
utilisés.
Sauf que,
quand ils sont utilisés, c'est magique. Un ti-pit de 14 ans à qui tu
donnes... tu lances ça dans l'air, tu dis : Fais Petit BamBou, qui est une technique de 15 minutes de
méditation pleine conscience, et tu dis : Fais ton RespiRelax, le petit gars arrive au bout de quatre mois, il
dit : J'ai monté mes notes de 10 points partout. Qu'est-ce que tu as fait? Bien, tu m'as dit
de faire RespiRelax puis Petit BamBou. O.K., mais qu'est-ce
que ça a changé dans ta vie? Bien,
quand j'arrive à l'examen, je respire
puis je me dis : Tu lis la question, tu réfléchis à la question puis tu réponds à la question
ici, maintenant. Puis
j'ai dit : Tu as monté de 10 points partout, j'ai dit, tu dois te
trouver bon. Il dit : Quand tu médites, tu ne juges pas. J'ai
fait : O.K., je peux-tu te cloner? Parce qu'effectivement il avait tout
compris et il avait fait ça gratuitement, par lui-même,
parce que ça l'avait intéressé. Donc, il y a des moyens simples qui ne coûtent
rien, mais auxquels on peut exposer les enfants.
Et, au niveau
des habiletés sociales, meilleure acquisition, c'est de jouer, jouer, de jouer
ensemble, mais, ça aussi, on n'a plus
beaucoup le temps. Ils n'ont plus le droit de courir dans la cour d'école parce
que tout à coup ils se râperaient un
genou puis qu'on aurait une poursuite parce que le genou saigne. Il y a des
enfants qui sont empêchés de bouger. On devrait les faire bouger, ceux qui ont le goût de bouger, puis ceux qui
ont le goût de chanter, on les fait chanter, puis ceux qui ont le goût de
dessiner, on les fait dessiner. On n'est pas tous pareils. On a tous des
forces, par exemple, et c'est ça qu'il faut retenir.
Il faut
développer l'empathie. Il y a eu des programmes Harmonie, qu'on s'est ingénié à
couper. Il y a des programmes avec les infirmières qui étaient dans les écoles,
qui faisaient autre chose que juste des vaccins, parce que ça vous
tente-tu de parler à celle qui vous pique
tout le temps? Pas vraiment. Les travailleurs sociaux, maintenant, sont
rapatriés aux CLSC, il n'y en a
presque plus qui sont dans les écoles. Donc, on n'a plus de place pour que les
enfants puissent aller chercher un hameçon, quand ils sont en détresse,
à l'intérieur de leurs cours autant qu'avant.
Donc, oui, il
y a des choses à faire si vous voulez vous impliquer. Actuellement, il y a la
Fondation Philippe-Laprise, en TDAH,
qui va faire des initiatives au niveau des groupes, au niveau des écoles,
favoriser tout ça. Dre Vincent, qui est toujours très impliquée, si vous voulez avoir les bonnes passes, où
c'est qu'ils sont, les projets, là, elle, elle est pas mal branchée
là-dessus. Donc, oui, il y a des outils, et on ne refuse pas de monde.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Parfait. Est-ce qu'il nous reste encore du
temps?
Le Président (M. Provençal)
: Député de Dubuc ou députée de Soulanges? M. le député de
Dubuc.
• (10 h 40) •
M. Tremblay : Écoutez, j'ai une question, oui — merci, M. le Président — très
simple. Dans le fond, ce que j'en comprends... corrigez-moi si je me trompe, mais ce qu'on entend, c'est
que, dans le fond, c'est un projet de société,
tout ça. Puis je salue votre intervention, qui est rafraîchissante, qui est humaine, parce que,
je ne sais pas, j'ai l'impression qu'on a
le réflexe de rendre tout ça très complexe. Est-ce qu'on ne travaille pas peut-être
un peu en silo? Philippe Laprise, finalement,
arrive par la bande à travers, bien, sa
réalité à lui, mais aussi à travers Le Grand Défi Pierre-Lavoie, où il est
devenu «chummy» avec Pierre puis il a
poussé son audace puis son projet à lui plus loin. Et puis là, bien, moi,
j'aurai vécu du Montessori avec une
de mes filles, j'aurai vécu de l'école apostolique dans le privé, on est
revenus au public. Il y a différentes approches qui avancent en
même temps au Québec, mais, dans le fond, on se rend compte que c'est un projet de société,
dans la mesure où tout ce réseau-là... Puis je donnerais un exemple, je
me souviens encore... je ne dirai pas en quelle année parce que ça ne me rajeunit pas. Ceci dit, je me souviens
que les slogans, c'était, par exemple, Le français, je le parle par coeur. Bon,
c'était du marketing, mais c'était dans un
contexte précis puis c'était un axe que l'État avait implanté dans le milieu
scolaire pour des raisons x, y.
Bien, je suis
en train de réaliser... Je ne sais pas comment vous le voyez, mais effectivement, nous, l'ère numérique, le
train de vie des familles, la cadence qu'on donne, la performance, tout ça fait
en sorte qu'on est un petit peu en dehors d'un sentier qui, finalement, en tout cas, nous fait éviter un autre sentier
où il y aurait beaucoup plus de fleurs puis de trucs simples à réaliser,
mais collectivement.
Mme Laberge (Christiane) : Je
demeure très optimiste parce que je regarde la génération des 30 ans et je
regarde cette génération qui commence à
virer de bord, c'est-à-dire diminuent la consommation, commencent à cultiver
leur jardin, bien, quand ils ont des
enfants, ils cultivent les jardins avec les enfants, commencent à utiliser le
vélo, bien que ça nous fasse suer, parce qu'il n'y a plus place pour stationner les
voitures, quand on a un certain âge puis qu'on fait moins de vélo pour aller
travailler. On a des parents qui commencent à diminuer la performance d'être
inscrit au hockey, puis au patin, puis s'en aller à droite, à gauche.
J'ai une
maman, entre autres, là, exemple précis, qui dit : Moi, j'ai arrêté de me
garrocher partout. J'ai mon kit de sport
sur le poteau de l'escalier. Quand j'arrive de travailler, je dis : O.K.,
il fait beau, on s'en va courir... 12, 10, six, la petite avec son petit bicycle, on s'en va courir
pendant 20 minutes, on revient, on a sorti notre fou, on a fait notre
exercice, on est de bonne humeur. Les
enfants s'installent à table, «quick» douche, cinq minutes, changent de linge,
on fait le souper, puis les enfants
sont là puis ils font leurs devoirs, puis le calme est revenu. Il ne fait pas
beau? On s'en va danser en bas, dans le
sous-sol. Donc, cette mère-là a évité d'aller au hockey, au patin, à ci, là, se
garrocher partout, faire un souper à la sauvette, puis on a quand même l'esprit d'équipe. Puis elle
dit : Maintenant, les fins de semaine, on va faire de la montagne, ça ne
coûte rien, on a du plaisir, on fait des
pique-niques, on s'amuse. On s'est équipés de raquettes, ça ne coûte rien non
plus, donc on peut faire ça dans le terrain de golf à côté, de telle
sorte qu'ils se sont donné une qualité de vie.
Et je pense qu'il y a des parents, aujourd'hui,
des trentenaires... je pense qu'ils commencent à revenir. Ils commencent à arrêter les cellulaires au souper,
les fermer, parce que, quand vous me parlez puis que vous êtes au
cellulaire : Attends une minute,
attends une minute, allez-vous me parler? Vous rappelez-vous de quoi vous
vouliez me parler? Pas vraiment.
Donc, on manque énormément d'information avec nos enfants avec les appareils
électroniques des parents. Alors, si
on prend juste cette habitude-là, on va être capables d'être plus focus. Vous
écoutez, vous regardez les yeux dans les yeux, et on va augmenter nos
compétences sociales.
Jouer aux
cartes puis voir si vous me bluffez... Les enfants ne voient plus si on le
bluffe ou pas. Ils n'ont plus cette lecture
du regard. Donc, on peut se repratiquer, et ça, juste jouer aux cartes à
l'école, pour ceux qui aiment ça, ça pourrait être quelque chose d'intéressant, ça ne coûte rien. Donc, il y a plein
d'outils, plein, plein, plein d'outils qu'on peut utiliser qui ne
coûtent rien.
M. Tremblay : Je me pose la
question, il me semble qu'on n'en a peut-être pas parlé, comme partenaires dans
l'équation, les aînés, les grands-parents
qui sont... en tout cas, on parle peut-être d'un phénomène de société, mais qui
sont... pas cantonnés mais qui se
retrouvent dans des résidences structurées, un peu dans le même phénomène, tu
sais, où, finalement, tout est
encadré... Puis souvent on entend parler, en région, qu'il y a des problèmes au
niveau des programmes pour faire faire
de l'activité physique, pour dynamiser puis contrer en amont des maladies x ou
y. Est-ce qu'on n'oublie pas un peu...
Mme Laberge (Christiane) :
L'intergénérationnel?
M. Tremblay : Oui, bien, on en parle, de l'intergénérationnel.
Même au niveau des municipalités, tu sais, on souhaite que les équipements
puis les investissements impliquent tout ça, mais est-ce qu'on ne devrait pas
davantage...
Mme Laberge (Christiane) :
Arrimer les deux?
M. Tremblay : Oui.
Mme Laberge
(Christiane) : Bien, il y a
des initiatives qui sont prises là-dessus, et ils se sont trouvé que les
enfants aimaient ça quand les vieux
leur lisaient des histoires... les vieux dont je suis, leur lisent des
histoires, et les personnes âgées aimaient
ça quand les enfants leur racontaient des histoires. Donc, oui, il y a des
arrimages possibles, il s'agit juste d'ouvrir certaines portes.
Mais, chez
nous, je me rappelle, entre autres, une psychologue qui avait... J'ai
dit : Bien, on va l'envoyer aux scouts, le ti-pit, ou bien donc on va l'envoyer aux cadets, tu sais, parce que
les petits gars, ils aiment ça, les cadets, c'est un peu régimenté : Tu fais ça, tu as un bonbon, tu
fais ça, tu as une conséquence, mais au moins tu sais où tu t'en vas, c'est encadré,
donc d'habitude ils aiment ça. Les porteurs
de TDAH aiment plus ça que la majorité. Alors, on dit : O.K., on va faire
cette initiative-là. La psychologue a
dit : Ah non, je ne peux pas recommander ça parce que tout à coup il y a
un pédophile dans le groupe, puis
après ça je pourrais être accusée d'avoir
favorisé... Oh! arrête, il peut s'en aller sur la rue puis il va en rencontrer
un, pédophile, là.
Alors, oui, il y a des
fois où... comme je vous parlais tantôt de la confidentialité, qui est vue comme un outil,
malheureusement, parfois pervers pour éviter d'échanger des informations à la demande des parents. Si le parent dit : Je ne veux pas que vous le disiez, là on garde la
confidentialité très, très, très grande, que ce soit le grand-parent qui a reçu un
secret du petit... Est-ce que c'est un
secret qui est transmissible ou pas transmissible? Mais on va laisser un petit peu de place au jugement.
Et, quand
vous parlez de la... je vais aller au-devant des coups, si vous me permettez,
parce que la commission est ici pour la surconsommation des
médicaments. Tantôt, Martin a parlé des instances professionnelles qui
chapeautent l'application des protocoles. Actuellement, il y a deux bémols. La semaine passée, je ne sais pas si
vous avez vu, par rapport à la dépression, des consultations de 2 min 25 s à 14 min 10 s avec une
prescription systématique pour les 10 cas, avec sept non suivis. Si j'avais une demande à
faire — vous demandez des outils pratiques — je demanderais à la RAMQ et au Collège des
médecins de se pencher sur les médecins qui voient 50, 60 patients par
jour au sans rendez-vous et qui ont 10,
15 diagnostics de santé mentale. J'aimerais ça savoir combien de temps
ont-ils passé pour faire le diagnostic, combien de temps ont-ils passé pour faire le suivi, et est-ce que c'est la même
personne qui a fait le suivi ou si c'est une fois. Parce que, les
patients, ce qu'ils nous reprochent... quand on parle de TDAH dans des grands
groupes, comme Martin disait...
Une voix : ...
Mme
Laberge (Christiane) :
... — santé! — quand on donne des conférences, c'est que
les gens disent : Il m'a vu cinq
minutes puis il m'a prescrit ça. La mère : Bien, vu que mon fils est TDAH
puis j'ai l'air TDAH, j'ai eu une prescription.
Alors, oui,
je sais que, ce qu'on nous reproche, il y a des fois où c'est vrai, mais on
peut virer le bateau de bord, on peut
demander de l'aide des instances professionnelles pour aller voir ce qui se
passe, et ça, je pense qu'on a le pouvoir de faire ça.
M. Tremblay : Une dernière
question, vous me permettez, M. le Président, en quelques secondes?
Le Président (M. Provençal)
: Rapidement.
M. Tremblay : Vous ouvrez une porte sur un mandat. Est-ce qu'un
phénomène comme celui-là, une réalité de société comme celle-là ne
devrait pas être portée à l'attention d'un éventuel commissaire à la santé?
Mme Laberge (Christiane) : Bien
sûr, parce que tout ce qui regarde la santé, la continuité, le prendre soin, l'attachement, ça fait partie de la santé. Il faut
que les gens... On parlait d'habiletés sociales. C'en est une, habileté sociale,
de vivre en société puis de se faire prendre soin, donc, oui, ça va avec la
santé. Il faut assurer la continuité.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup.
Mme Laberge (Christiane) : Je
vous en prie.
Le Président (M. Provençal)
: Je vais maintenant céder la parole à notre collègue de
Vaudreuil. À vous.
Mme Nichols :
Merci, M. le Président. Merci, Dre Laberge, d'être ici, parmi nous,
aujourd'hui. J'aime beaucoup votre franc-parler. Je trouve que vous vulgarisez
bien des termes qui sont, pour nous... Comme je le disais à l'intervenant
précédent, on n'est pas des experts, on n'a
pas des notions aussi pointues que les vôtres, donc j'apprécie vraiment que
vous soyez ici. J'apprécie aussi les témoignages, les cas, là, que vous
nous partagez.
J'avais une
petite question. Au début, là, vous nous parliez, là, des écoles. Est-ce que
c'était dans le cadre d'un projet pilote ou c'était vraiment de
l'initiative du milieu?
• (10 h 50) •
Mme Laberge
(Christiane) : C'est une
initiative au secours du milieu, envers le CLSC. Puis c'est le directeur des
services professionnels qui est venu me chercher à l'autre CLSC puis il
dit : Ça t'intéresserait-u de faire ça? J'ai dit : Ah oui, ça pourrait être intéressant, puis c'est
comme ça que j'ai abouti là-dedans. Je ne connaissais rien. C'est
Dre Vincent, d'ailleurs... puis
tout le monde, la petite équipe du TDAH du Québec, mais Annick est devenue mon
mentor et nous a enseigné, à
l'infirmière avec qui je travaillais, entre autres, Louise Froment, qui a été
une infirmière extraordinaire... Et ce qui nous a amenées à la retraite
du CLSC, c'est justement cet effritement de la continuité, cet effritement
de...
Je vais vous
donner un exemple. Un patient qui a un TDAH, il est toujours dans le chaos,
tout le temps, tout le temps. Le
papa, il est toujours dans le chaos, et, si on ne l'appelle pas pour
dire : Vous avez rendez-vous avec la psychologue avec votre enfant mercredi, à 2 heures, il va
l'oublier parce qu'il est toujours en train d'être dans la tempête, dérangé.
Mais, si on ne l'appelle pas... parce qu'il n'y a personne pour l'appeler, mais
je pense que ça fait partie du travail du professionnel d'attacher le patient — votre appel est important pour moi — puis après ça on lui donne de l'autonomie.
Mais là ce qu'on fait, c'est qu'on ne
confirme pas les rendez-vous, de telle sorte qu'il y a plus de 30 % des
patients qui ne se rendent pas aux
rendez-vous, et ce sont des ressources qui sont directement dans le caniveau.
Alors, il faut qu'on essaie d'avoir cet attachement au service et dire : Oui, votre appel est important
pour moi. Donc, pour répondre à votre question, non, ce n'était pas un
projet pilote, ça l'est devenu après.
Mme Nichols :
Oui? Mais c'est intéressant. Est-ce qu'à la suite de... bien, on va dire un
projet pilote, mais je sais que ce n'est pas un projet...
Mme Laberge (Christiane) : À la
suite de cette époque-là?
Mme Nichols : ...oui, est-ce
que vous avez rédigé des recommandations?
Mme Laberge (Christiane) : Oui,
il y a eu un bouquin, là, au niveau des... un petit bout d'un petit chapitre là-dedans, mais je vous avoue que ça s'est tout
effrité. Donc, oui, ça a existé, mais, oui, maintenant, c'est tout effrité,
parce que ça demande, comme je vous
disais tantôt, la première condition, de la continuité. Il y a eu des endroits
où les intervenants auprès des enfants
avec problème d'attachement, ils ont exigé des intervenants trois ans à rester
là, un contrat de trois ans ferme — tu ne t'absentes pas dans les
trois prochaines années, à moins que tu aies une cause majeure, là, mais tu ne t'absentes pas, tu ne prévois pas t'absenter pour
les trois prochaines années — pour donner une continuité aux enfants.
Donc, ça fait partie de ça, dans la...
Mme Nichols : Une stabilité.
Mme Laberge (Christiane) : La
stabilité.
Mme Nichols :
La stabilité, je pense que c'est important dans des cas comme ceux-là. Parce
que je me demandais s'il y avait quelque chose, des recommandations, des
observations qui avaient été rédigées à la fin. Combien de jeunes ou
d'étudiants en ont bénéficié? Et, bien que ça ne soit pas nécessairement très
scientifique ou appuyé sur...
Mme Laberge (Christiane) : Sur
16 ans, je ne peux pas vous dire, parce que ça fait pas mal de monde.
Mme Nichols : O.K., ça a été
sur 16 ans?
Mme Laberge
(Christiane) : Ça a été sur
16 ans, l'appartenance à la Clinique santé mentale jeunesse. C'est devenu
officiellement Santé mentale jeunesse, et puis après ça on a... avec les
structures qui se sont mêlées et les statistiques obligatoires que les gens
doivent faire, qui ne rendent pas toujours compte de la réalité, souvent pas,
d'ailleurs...
Mme Nichols : Mais les
résultats étaient quand même...
Mme Laberge
(Christiane) : Les résultats
ont été probants au niveau des années où ça a duré, oui, oui. La collaboration était importante. On a même offert à
l'orthopédagogue qui y travaillait... l'orthophoniste qui travaillait, plutôt,
dans un garde-robe puis qui se trimballait
d'une école à l'autre, qu'elle partage mon bureau, parce qu'elle, elle pouvait
voir les parents. Si elle faisait du
midi à 8, bien, elle pouvait voir les parents qui étaient au travail sans
pénalité. Puis moi, je n'avais pas
besoin de mon bureau, je travaillais deux jours-semaine au CLSC, donc je
pouvais... Mais là, syndicalement, ça ne marchait pas, puis le ministère
de l'Éducation, puis le ministère de la Santé... de telle sorte qu'on n'a pas
pu le faire, mais alors qu'elle aurait pu
faire plus d'évaluations, n'ayant pas à trimballer son stock sur le dos et puis
de s'en aller... Les conditions de
travail, là... elle était dans une armoire à balais, là, avec le chauffe-eau à
côté, là. Ça fait que c'est vraiment très
difficile pour elles, parce que c'est souvent des filles... mais de se
trimballer d'école en école, puis tu perds beaucoup, beaucoup, beaucoup de temps. Donc, ça serait le
fun d'avoir des locaux. Et c'est d'ailleurs pour ça que j'ai arrêté d'aller
dans les écoles, parce qu'il n'y avait plus de place pour nous recevoir.
Mme Nichols :
C'est dommage, hein? C'est des obstacles qui ont des répercussions importantes sur
nos jeunes, entre autres.
Mme Laberge (Christiane) : Oui,
oui, absolument.
Mme Nichols : On a parlé
beaucoup, beaucoup d'approche multimodale...
Mme Laberge
(Christiane) : Oui, c'est
essentiel, c'est essentiel parce qu'on demande aux parents... Par exemple,
je vous disais tantôt qu'on faisait d'abord
l'évaluation de l'hygiène de vie, hein, puis on suggère à un parent... on
dit : O.K., il se couche à 11 heures, le soir. Il y a un petit
loup... une professeure qui me parlait la semaine passée, un petit gars de deuxième année qui se couche sur son pupitre,
il n'est pas disponible parce qu'il joue aux jeux vidéo jusqu'à 1 heure du
matin. Il a sept ans. Alors, tu dis aux
parents : Qu'est-ce que vous diriez si on coupait le wifi à
20 h 30, juste comme ça? Il ne
pourrait plus jouer, là, puis on enlève le jeu. Oui, mais il ne voudra pas.
Aïe! Fais une danse à 10 $, braille, puis roule-toi à terre, puis ça va passer, là. Ce n'est pas
négociable, là. Ça fait que ce n'est pas négociable, ce n'est pas négociable,
mon ti-pit, là. On va faire d'autres choses, on va aller lire une
histoire, on va aller faire d'autres choses, mais ce n'est pas négociable, arrête. Mais ça ne se fait pas. Ça ne
se fait pas pourquoi? Parce qu'il faut que tu tolères les cris, il faut que tu
tolères la colère, il faut que tu tolères
qu'il soit fâché contre toi, puis ça, les parents n'ont pas toujours l'énergie
pour le faire, non plus. Ça fait que ça demande de la constance.
Et, l'autre
chose, c'est que... vous parliez, tantôt, d'éduquer les enfants à la civilité.
Moi, je ferais des cours pour les
parents des enfants porteurs de TDAH, des réunions de parents. On a eu des
groupes PANDA, mais sauf que ça naît puis ça retombe. Ça naît puis ça
retombe parce que c'est des bénévoles. Et ce sont toujours les mêmes, vous le
savez, les CDM, toujours les mêmes. Alors,
c'est pour ça que ça ne tient pas. Et, s'il y avait des organismes avec une
porte ouverte qui dit : Tous les
mardis, ici, on reçoit des parents qui ont des enfants TDAH et qui sont
eux-mêmes TDAH, puis c'est un groupe ouvert, ça prendrait peut-être cinq
ans avant que la pérennité se crée, ça prendrait peut-être deux ans, mais on ouvre un lieu puis on dit : Venez-vous-en...
Et tous les organismes qui vous disent... que ce soit pour les hommes en
difficulté, que ce soit pour les
femmes en difficulté, les groupes, ça prend deux ans. Alors, si on s'attend à
des résultats au bout de six mois
puis, après ça, on dit : Ah non, ça ne marche pas, on ferme, bien, ça ne
marchera jamais. Donc, ça prend des gens,
aussi, de la communauté qui disent : O.K., nous autres, on va y
aller. Moi, je suis policier, moi, je suis docteur, j'ai un TDAH... On a
un médecin qui avait parti un mouvement TDAH Québec, mais effectivement ça
demande des gens qui embarquent et qui continuent, mais malheureusement les
gens s'essoufflent.
Mme Nichols :
On parle d'approche multimodale essentielle, mais on parle d'inclure les
acteurs, puis les acteurs, c'est autant les parents, l'école, le milieu,
et malheureusement il y a des barrières quand vient le temps de parler du dossier avec la DPJ, avec l'école. Ce que je
comprends, c'est que, parfois, c'est rigide, puis on oublie le bénéfice qui va
revenir à l'enfant dans tout ça.
Mme Laberge
(Christiane) : On oublie qu'on
a un patient qui est en avant qui s'appelle un enfant. Et, si on n'a pas
de parents qui ont suffisamment de ressources... On a-tu une grand-mère, on
a-tu un oncle, on a-tu... Il y a combien d'enfants que vous connaissez qui ont été
réchappés par quelqu'un qui est devenu un pilier de résilience pour lui? Bien,
c'est ça qu'on cherche pour ces enfants-là,
on cherche un pilier de résilience et on cherche des exemples qui ont réussi et
non pas des gens qui disent : Ah! moi,
j'adore mon TDAH. Ce n'est pas vrai, tu arrives chez vous, tu es brûlé, tu te
chicanes avec ton chum, tu n'es plus capable parce que tu as fait ta
tâche très bien, mais ça t'a demandé tout ton jus.
Mme Nichols :
Bien, justement, là, on parle des enfants, là, à un moment donné, je me demande
comment on peut accompagner les enfants au passage adulte. Vous nous
avez parlé d'un cas, tantôt...
Mme Laberge
(Christiane) : D'une adulte.
Mme Nichols :
...d'une adulte, là, j'étais curieuse, là, je me demandais elle avait quel âge,
cette adulte-là.
Mme Laberge
(Christiane) : Elle avait 32 ans.
Mme Nichols :
O.K. Ça fait que ça a été diagnostiqué à 32 ans.
Mme Laberge (Christiane) : Ça a été diagnostiqué à 32 ans, parce que,
tout ce temps-là, elle a adapté, elle avait le gars pour elle, elle avait les études pour elle, parce qu'elle était
organisée, c'est une fille hyperorganisée. Elle a même créé
une petite anxiété de performance. Tu sais, quand tu dérangeais ses affaires,
elle ne se retrouvait plus. Tu ne demandes pas à un TDAH : Perdez-vous vos clés? Bien non, adulte, il va
dire : Bien non, moi, je ne les perds pas. Combien de temps par jour tu passes à les chercher? Ça, c'est la question.
Donc, effectivement, les adultes réussissent à s'adapter, ils mettent
toujours la clé dans la poche de droite, ils se donnent
des outils, ils s'entourent de personnes. Une bonne secrétaire puis un TDAH très performant, écoute, c'est un couple extraordinaire, parce que ça opère. La secrétaire, elle dit : Ça, c'est pour demain,
pas négociable, ils vont le faire.
10 % des
doctorants et des maîtrises ne rendent pas leur mémoire à temps et manquent
leur fin de diplôme. À Washington, ils ont
mis des coachs qui les ramassent et ils ont augmenté la diplomation, parce que
la procrastination chez l'adulte,
c'est la forme plus fréquente de handicap. Donc, combien il y en a qui ne
paient pas le compte, qui ont des mauvaises cotes de crédit, etc., chez des professionnels, là? Alors, oui, il y a
des gens qui ont des difficultés, et l'encadrement peut être de tous
ordres et l'aide peut être de tous ordres.
Mme Nichols :
Je ne pense pas qu'il me reste beaucoup de temps...
Le Président
(M. Provençal)
: Moins d'une minute.
Mme Nichols : ...moins d'une minute. Mais, je comprends, dans le fond, cette dame-là, là, inconsciemment ou consciemment, je ne sais pas, mais a adapté sa vie en fonction des
faiblesses qu'elle avait puis elle a su s'entourer pour aller chercher,
là, les points forts qui lui manquaient.
Mme Laberge
(Christiane) : Absolument.
Mme Nichols :
Je ne sais pas si elle en était consciente quand elle...
Mme Laberge
(Christiane) : Non, non.
Mme Nichols :
...probalement pas... Probablement, tout s'est écroulé, justement, au moment où...
Mme Laberge
(Christiane) : Le chaos est arrivé.
Mme Nichols :
...le chaos est arrivé, la moisissure.
Mme Laberge
(Christiane) : Oui, oui, effectivement.
Mme Nichols : Mais il
y a des personnes, justement,
qui ne le réaliseront pas, puis c'est ceux-là, je pense, qu'il faut accompagner vers la vie adulte. Mais, encore là, un enfant vers la vie
adulte, comment on peut les accompagner? Il n'y a pas de diagnostic ou de test précis pour y arriver.
Mme Laberge (Christiane) : Bien, dans le temps où il y avait
un médecin de famille qui les voyait à
peu près une fois par année,
que c'était encore recommandé mais complètement inutile, on les voyait planter,
on les voyait avoir de la difficulté, on les
voyait arriver à un défi qui les dépassait. Tant que le défi est négociable, il
n'y en a pas, de problème, mais, quand
le défi devient trop grand pour ta capacité d'adaptation, là tu te mets à
déraper et là tu deviens symptomatique. Et ces patients-là plus âgés arrivent avec de l'anxiété, arrivent avec des
troubles d'adaptation avec humeur anxiodépressive et arrivent avec des troubles panique, des fois.
Alors, c'est là où on va, entre guillemets, voir ce qui va arriver. Mais, un
peu comme la violence conjugale,
pensez-vous que la personne cogne à la porte puis elle dit : Allo, j'ai
été violentée? Tu dis : Non, tu
as des bleus partout, ma grande, qu'est-ce qui s'est passé? Je me suis cogné
sur la porte. Alors, c'est un petit peu la même chose. Il faut les
suivre, il faut les connaître, il faut s'y attacher. Il faut faire de la
médecine familiale.
Le
Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup.
Mme Laberge
(Christiane) : Je vous en prie.
Le Président
(M. Provençal)
: Nous allons
compléter cet échange avec le député de Jonquière.
M. Gaudreault :
Oui, merci. Est-ce que je dois redemander le consentement?
Le Président
(M. Provençal)
: Non.
M. Gaudreault :
Non? O.K.
Mme Laberge
(Christiane) : Vous avez une cote.
• (11 heures) •
M. Gaudreault : Oui, c'est ça, j'ai des Airpoints. Moi, je
procrastine beaucoup quand ça
vient le temps de faire la vaisselle, le ménage, le lit, le lavage,
alors je comprends ce que vous voulez dire par procrastination.
Vous vous qualifiez
vous-même comme imprimante à prescriptions.
Mme Laberge
(Christiane) : Bien sûr.
M. Gaudreault : C'est qui qui pèse sur le piton de l'imprimante? Est-ce que
les profs, les commissions scolaires
et les parents sont ceux qui insistent? Est-ce que
vous avez vécu ça dans votre pratique? Est-ce
que vous avez déjà vu
ça?
Et là je vais être
encore plus insidieux. Considérant qu'il y a du financement associé à des
écoles puis à des commissions scolaires pour soutenir les enfants en difficulté,
est-ce qu'il pourrait y avoir, sans que ça soit conscient, un
certain biais pour dire : Plus on a
d'enfants diagnostiqués, plus on va avoir du budget, donc de là le piton
sur l'imprimante à...
Mme Laberge
(Christiane) : La réponse est non, parce que j'ai une tête de cochon,
de telle sorte que, quand...
M. Gaudreault : Mais vous, vous avez une tête de cochon, mais est-ce que
les autres... est-ce que tous vos collègues...
Mme Laberge (Christiane) : Oui. Au
niveau des pressions de la part des
parents, en général, quand on suit nos lignes directrices,
c'est rare qu'on va commencer avec une prescription. On va commencer par une
réévaluation. Donc, on va donner le temps
aux parents, s'il y a des mesures d'hygiène de vie à mettre en place,
de les mettre en place, de voir leur
degré de motivation, de voir leur degré de coopération potentielle,
et à la prochaine visite, là on pourra enclencher. C'est exceptionnel qu'on a donné la médication la
première fois, parce qu'on leur dit tout
le temps : Vous n'êtes pas en
crise d'angine, vous n'avez pas besoin de nitroglycérine pour vivre, là, donc
on peut prendre le temps de faire un plan, et de se revoir, et d'y songer. Quand on donne la
médication, on va donner des petites doses, qu'on va augmenter, parce que
je n'ai pas de recette, ce n'est pas
marqué dans votre front lequel va fonctionner et lequel ne fonctionnera pas. On
sait qu'il y a 20 % des patients qui ne répondront à aucune
molécule, donc il faut les suivre pour ne pas donner ça pour rien non plus.
L'autre
chose au niveau de la médication, il faut savoir que de 30 % à 35 %
des patients ne prennent pas les médications
prescrites ou les prennent tout croche. Quand tu fais trois mois avec une
prescription d'un mois, probablement que
ce n'est pas pris de la bonne façon. Quand la médication n'est prise... puis
que tu rencontres ton patient, puis tu vois ça, là, des phénomènes de décalage comme ça, tu dis : Bien, est-ce
que ça ne deviendra pas la drogue de l'examen, hein, de la performance? Et, si c'est ça, moi, en tout
cas, je leur réponds que ce n'est pas le but de l'histoire. Moi, quand je mets
mes lunettes j'en ai autant besoin pour mes
dossiers que pour lire mon Coup de pouce. Donc, si j'ai besoin vraiment
de lunettes, c'est-à-dire de la
molécule, j'en ai besoin la fin de semaine, parce que, la fin de semaine, quand
je fais la cuisine, j'ai besoin d'un début, un milieu puis une fin. J'ai
besoin de vivre des victoires, j'ai besoin de développer d'autres compétences que celles académiques. Et on le prend
ou on ne le prend pas. Si le patient veut le prendre juste comme drogue
de performance, c'est non, ne pèse pas sur le piton.
Au niveau des
pressions scolaires, je n'en ai jamais eu, vraiment. Ça a toujours été
négociable.
M. Gaudreault :
O.K. C'est un problème très, très, très complexe.
Maintenant,
est-ce que les médecins de famille ont ce qu'il faut pour diagnostiquer et
traiter le TDAH? Est-ce qu'ils ont tout ce qu'il faut entre les mains
pour faire le travail?
Mme Laberge (Christiane) : Théoriquement, c'est les ordres professionnels
qui doivent voir à ça, c'est eux qui... Maintenant, entre autres, le Collège
des médecins vient d'imposer 250 heures de formation. Est-ce que ces
formations sont toutes requises dans
le champ d'expertise des médecins, habituellement? Oui, je vous dirais,
éthiquement, oui, mais ça, ça regarde
l'éthique de chacun. Je n'ai pas de réponse précise à vous donner.
Théoriquement, on devrait être habilité, quand on traite quelque chose, une pathologie... d'être habilité de la
traiter. Et, si on n'est pas habilité, on a le devoir de transférer aux
gens qui savent, dans n'importe quelle spécialité.
M. Gaudreault :
Exact. Et le respect de l'interprofessionnalisme et de...
Mme Laberge (Christiane) : Oui,
oui, oui.
M. Gaudreault :
C'est ça. O.K.
Mme Laberge (Christiane) : Si
tu ne le sais pas, pose la question à la bonne personne, oui.
M. Gaudreault : Exact.
L'interdisciplinarité, c'est ça. Il me reste-tu du temps?
Le Président (M. Provençal)
: 30 secondes.
M. Gaudreault :
30 secondes, bien, pour vous dire merci. J'ai bien entendu le message sur le
bris de continuité dans les services, bris de continuité chez les
jeunes, jeunes, mais aussi, quand ils passent à l'âge adulte, là, pouf! ils
passent entre deux chaises.
Mme Laberge (Christiane) :
Bien, de moins en moins parce que, maintenant, on a agrandi jusqu'à 25 ans
les cliniques jeunesse, donc on a
théoriquement eu... parce qu'avant tu étais trop vieux pour les jeunes, trop
jeune pour les vieux, mais maintenant on a amélioré le passage, mais ce
n'est encore pas très évident.
M. Gaudreault : Merci.
Mme Laberge (Christiane) : Je
vous en prie. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Je remercie la Dre Laberge pour sa contribution à nos
travaux.
Je suspends
les travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre place. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 11 h 05)
(Reprise à 11 h 08)
Le
Président (M. Provençal)
: Je
souhaite maintenant la bienvenue à M. Jean-Claude St-Onge. Je
vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous
procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Donc,
je vous invite à débuter.
M. Jean-Claude St-Onge
M. St-Onge
(Jean-Claude) : Bonjour.
Alors, tout d'abord, je vous remercie pour l'invitation et puis pour
l'intérêt que vous portez à
cette question.
Alors, le
TDAH a un pôle... on le conçoit comme une neuropathologie dont les causes
principales sont génétiques. À
l'autre extrême, il y a des médecins... comme par exemple, le Dr Saul, un neurologue, qui dit que le TDAH n'existe pas
parce qu'effectivement il refléterait
d'autres problèmes. Et finalement, un peu entre les deux, vous avez le
Dr Keith Conners, qui est un
grand spécialiste du TDAH, qui dit que nous sommes devant une fausse épidémie — ce sont ses termes — et un désastre qui serait attribuable
à la promotion de l'industrie.
Alors, une
autre explication est possible. Ce qu'on appelle le TDAH représenterait une
série de réalités cliniques différentes et hétérogènes qui ne peuvent être
conçues sur le mode d'une catégorie unique et homogène qui serait identifiée
par une neuropathologie commune et invariante à tous les cas.
Alors, les
monographies des fabricants de psychostimulants sont unanimes. Par exemple, le
fabricant du Vyvanse dit : Les
causes spécifiques du TDAH sont inconnues, et la même chose, par exemple, pour
le fabricant du Ritalin. Alors, par
cette affirmation, ce qu'il faut entendre, c'est qu'on n'a pas réussi à trouver
une signature génétique particulière qui permettrait d'identifier et de
distinguer cette condition-là par rapport à d'autres.
• (11 h 10) •
Alors, les critères d'identification du TDAH qui
figurent au DSM, qu'on appelle la bible des psychiatres, sont subjectifs et fondés sur les symptômes. C'est
d'ailleurs ce qui faisait dire à Thomas Insel, qui était le directeur des NIMH
aux États-Unis, des instituts de santé mentale, que le DSMne
pouvait... qui disqualifiait le DSM comme outil diagnostique. Alors, par
exemple, à cause de ce caractère très
subjectif des critères du TDAH, c'est ainsi que, par exemple, aux États-Unis,
le diagnostic varie entre 1 % et
16 % selon le pédiatre qui est consulté. Alors, ce qui veut dire que, sur
1 000 patients, le premier va en
diagnostiquer 10 et le deuxième, 160, avec, évidemment, toutes sortes de
valeurs entre ces deux extrêmes-là. Alors,
pour une même tranche d'âge et selon les pays et les régions d'un même pays, la
prévalence et la consommation de psychostimulants varient considérablement.
Par exemple, au Kentucky, ils sont 3,3 fois plus nombreux à recevoir le diagnostic qu'au Nevada. Et, selon les centres de
contrôle des maladies aux États-Unis, 19 % des garçons du secondaire ont
reçu le diagnostic, contre 27,4 % au Québec, selon la dernière enquête sur
les jeunes. Alors, les jeunes Québécois de 13
à 17 ans consomment 3,3 fois plus de psychostimulants que leurs pairs dans le
reste du Canada, et la consommation aux États-Unis est 35
fois plus élevée qu'en France.
Alors, plusieurs
raisons nous incitent à remettre en question l'unicité puis la cohérence du diagnostic. Alors,
pour reprendre les propos d'un
pédopsychiatre de Québec, Jacques Thivierge, dans la plupart des cas que nous
appelons TDAH, on n'a pas constaté
d'atteinte au cerveau. Alors, les symptômes peuvent découler, par exemple, d'une maladie organique non cérébrale comme l'apnée du sommeil,
d'habitudes de vie comme la surexposition aux écrans, de conditions de vie difficiles
et de maltraitance, d'une atteinte
au cerveau, par exemple encéphalite virale, ou exposition aux substances
neurotoxiques, pour s'en tenir à ces quelques
exemples là. Puis, quant à ceux qui
ont subi une atteinte au cerveau, est-ce qu'on peut postuler qu'ils
partagent tous et toutes une même neuropathologie?
Alors, il y a
jusqu'à 70 % des plus jeunes de leur classe, parce qu'il peut y avoir
quasiment un an de différence entre les
plus jeunes et les plus vieux, qui obtiennent plus souvent le diagnostic. Et,
selon certaines études, il y aurait jusqu'à 73 % des jeunes qui éprouvent des problèmes de sommeil.
Alors, est-ce que c'est un TDAH ou bien est-ce que c'est un problème de sommeil? Alors, notamment les adolescents qui
sont programmés temporairement pour se coucher plus tard, quand ils se lèvent le matin, ils sont fatigués, ils sont
inattentifs, etc. Alors, leurs symptômes, finalement, est-ce qu'ils résultent
d'une atteinte au cerveau, d'un autre problème de santé ou de la
médicalisation des problèmes sociaux et culturels? Alors, jusqu'à neuf TDAH sur 10 reçoivent plus d'un
diagnostic, souvent trois ou quatre, comme spectre de l'autisme — ils seraient environ 48 % à
50 % au Québec dans ce cas — traumatisme crânien, trouble de la
thyroïde, déficience intellectuelle, épilepsie,
trouble oppositionnel, dépression, trouble de l'audition centrale. Les
prématurés, c'est la même chose. Les enfants, par exemple, dont la mère
a connu des complications à l'accouchement sont dans la même situation.
On peut également
se poser la question à savoir s'il est justifié de superposer un diagnostic de
TDAH par-dessus un diagnostic de
déficience intellectuelle, ou d'anxiété, ou d'autisme, ou d'épilepsie. Alors,
est-ce qu'un diagnostic d'autisme, finalement, ne suffit pas à rendre
compte des difficultés de ces enfants-là et puis des difficultés non seulement
de ces enfants-là, mais aussi de leurs
familles? Et ici on peut invoquer un vieux principe philosophique qu'on appelle
le rasoir d'Occam, à savoir que la
théorie, hein, qui peut rendre compte d'une situation avec le moins
d'hypothèses possible est la meilleure.
Alors, quand
on peut les tolérer, les psychostimulants ont une certaine efficacité à court
terme, mais la monographie du Ritalin
précise qu'aucune étude contrôlée n'a été réalisée quant à l'efficacité et la
sécurité long terme du Ritalin, contrairement
à ce qu'on lit, d'ailleurs, dans les lignes directrices de la CADDRA. Et en
outre la monographie du Ritalin recommande d'arrêter le traitement à la
puberté.
Alors, une
méta-analyse de la collaboration Cochrane — c'est à peu près ce qui se fait de
mieux — signale
à quel point les études commanditées et/ou rédigées par des auteurs liés
à l'industrie sont biaisées. Inversement, vous avez cinq études à long terme qui n'ont reçu aucun financement de l'industrie
qui montrent que les médicaments à long terme n'améliorent pas les résultats scolaires, et puis ils et elles, surtout,
présentent un peu plus d'anxiété, d'humeurs dépressives et de tristesse. Et, selon l'étude MTA aux
États-Unis, après trois ans il n'y a aucune différence entre les groupes
médicamentés et non médicamentés ou
sous thérapie, et après six ans les sujets médicamentés affichaient une
augmentation des symptômes. Et une
étude australienne montrait que les sujets médicamentés présentaient une
augmentation de la pression diastolique de 10,79 points, ce qui est
considérable et ce qui peut les rendre sujets, effectivement, je veux dire, à
une polypharmacie.
Alors, la méta-analyse de Cochrane signalait que
les effets indésirables des psychostimulants sont largement sous-déclarés dans
les études commanditées. Alors, vous connaissez les effets secondaires les plus
fréquents, je ne les répéterai pas, mais une
chose qu'il vaut la peine de souligner, c'est que les dernières études montrent
qu'effectivement les sujets qui sont médicamentés à long terme
présentent une densité osseuse inférieure à la normale jusqu'à 25 %, et
sur cinq ans 11 % des utilisateurs développent des hallucinations.
Alors, parmi les effets indésirables qui sont
rares ou peu fréquents, il y en a un sur 660 qui développerait une psychose. Alors, quand vous considérez, par
exemple, qu'aux États-Unis il y a 19,5 millions d'utilisateurs de
psychostimulants, ça fait environ
30 000 personnes qui développeraient une psychose. Et certaines
études font état d'un lien plausible, hein, la relation de cause à effet
n'a pas été démontrée jusqu'à date, mais entre l'utilisation, donc, des
psychostimulants et l'apparition tardive de
symptômes semblables à la maladie de Parkinson. Et, selon la base de données de
Santé Canada, le Strattera et le
Concerta arrivent aux deuxième et troisième rangs parmi les médicaments
suspectés d'effets indésirables sérieux.
Alors,
évidemment, les psychostimulants peuvent aider dans certains cas, dans les cas
les plus graves. Et, selon les centres
de contrôle des maladies aux États-Unis, il y en a 14 % qui présenteraient
des symptômes sévères, alors, possiblement ceux que la CIM, la Classification internationale des maladies, qui a changé
d'avis en juillet dernier, appelait les hyperkinétiques, hein, dont la
prévalence tournerait autour de 1,5 %, qui serait une véritable maladie
neurologique.
Le Président (M. Provençal)
: Je vais vous demander de conclure votre présentation.
M. St-Onge (Jean-Claude) :
Alors, voilà, je conclus. On en reparlera. Merci.
Le
Président (M. Provençal)
:
Merci, M. St-Onge, pour votre exposé. Nous allons débuter l'échange avec la députée Lotbinière-Frontenac.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) :
Bien, merci pour votre présentation. Vous avez dit beaucoup
de choses, j'ai un peu de difficulté
à suivre. Je vais poser ma première question sur... Tu sais, on a entendu plusieurs
études que... vous avez énuméré plusieurs études, là, tout ça. Bien,
c'est quoi, votre solution pour qu'il y ait moins de médication?
• (11 h 20) •
M. St-Onge
(Jean-Claude) : Parmi
les solutions, je pense, la Dre Laberge en a proposé un certain nombre. Alors, ça, c'est un fait, effectivement. Et puis il y a beaucoup d'études qui ont montré, par exemple, que la formation des parents, que la prise en charge, finalement...
le fait que les enfants ne bougent pas suffisamment, le fait que les enfants
doivent bouger davantage, etc. Je veux dire, il y a énormément de solutions qui
sont disponibles, effectivement, comme par exemple, bon, il
y a des techniques,
des technologies qui nous permettent... comme la remédiation
cognitive, par exemple, on peut entraîner le cerveau, à travers
des jeux, à se concentrer et puis à...
Alors donc, il y a énormément...
la formation des parents, pas seulement que la formation
des parents, mais également la formation des professeurs.
Dans l'étude MTA, par exemple, ce qu'on a fait, c'est qu'on a formé les
professeurs pendant trois mois, on a
formé les parents pendant trois mois, et finalement on a réussi, effectivement,
je veux dire, à éliminer, je veux
dire, toutes ces formes et tous ces
problèmes de manque de concentration. Alors, les élèves dont les parents
avaient été formés, dont les professeurs avaient été formés ne présentaient
aucune différence entre ceux qui avaient été diagnostiqués TDAH et ceux qui ne l'étaient pas au niveau de la
réalisation des devoirs, par exemple.
Autrement dit, ils pouvaient se concentrer
aussi bien. Alors, c'est les interventions psychosociales, je pense, qui sont
les plus importantes, à ce niveau-là, pour contrer les symptômes du
TDAH.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Quelle sorte de formation qui était offerte
aux professeurs?
M. St-Onge (Jean-Claude) : La formation qui était offerte aux professeurs,
on n'en parlait pas en détail dans les articles sur l'étude, mais on
montrait aux professeurs, finalement, comment traiter ces problèmes-là, on
montrait aux professeurs comment utiliser,
finalement, divers moyens pour que les élèves puissent se concentrer davantage.
Alors donc, il y a effectivement, je veux dire, d'autres solutions que les
médicaments. Ce qui ne veut pas dire que les médicaments ne sont
jamais... être utilisés dans les cas les plus graves, effectivement, comme
solution temporaire, oui.
Le Président
(M. Provençal)
: M. le député de
Dubuc.
M. Tremblay : Oui, merci, M. le Président. D'abord, enchanté de vous rencontrer.
Dites-moi, vous avez parlé... En fait,
on a entendu des réalités provenant de neuropsychologues qui... Bien, en fait,
il y a eu un certain crescendo, en tout
cas, quant à ce que moi, j'ai perçu, dans le sens où on pouvait avoir
l'impression qu'il y avait effectivement, par rapport au titre de la commission qui nous regarde... du
mandat d'initiative sur lequel on doit se pencher aujourd'hui... Finalement,
on se rend compte, avec le témoignage de
neuropsychologues, qu'il y a effectivement des cas qui nécessitent une
médication, on nous expose cette
réalité-là. Votre travail, au niveau de la littérature, a été reçu par des
spécialistes d'une certaine approche,
qui est plus philosophique. Comment vous voyez la position des
neuropsychologues qui viennent nous exposer, malgré tout, qu'il y a beaucoup de travail à faire pour améliorer la
démarche qui nous amène à un diagnostic plus précis? Je ne sais pas si
vous comprenez un peu le sens de...
M. St-Onge (Jean-Claude) : Effectivement, il y a pratiquement un consensus.
Par exemple, si vous regardez ce qu'on
dit dans le DSM, c'est qu'on n'a pas trouvé de marqueurs biologiques
pour quelque diagnostic qu'on retrouve dans le DSM. Et, quand on
dit, par exemple, que le TDAH, c'est un problème neurologique dont les causes
principales sont génétiques, on n'a pas véritablement...
Si
je prends un exemple, par exemple, celui d'un article du Lancet qui est
sorti en 2010, hein, on disait, par exemple, que les TDAH... et l'auteur principal de l'étude disait qu'on a trouvé
la preuve que le TDAH est génétique. Alors, en quoi consistait cette preuve-là?
On a trouvé chez, par exemple, les sujets qui étaient TDAH ce qu'on appelle des
CNV de grande taille. Bon, c'est des
segments d'ADN qui sont effacés et d'autres qui se répètent, c'est des
délétions et des réplications de segments
d'ADN. Alors, qu'est-ce qu'on a découvert? On a découvert que c'était le cas
chez 12,5 % des TDAH. Ce qui veut dire qu'il y avait 86 %,
finalement, des TDAH qui n'exhibaient pas cette signature génétique là, mais
qu'il y avait 7,5 % des non-TDAH qui présentaient des CNV de grande
taille. Alors, comment peut-on dire, effectivement, je veux dire, que le TDAH, à ce moment-là, est effectivement une
condition neuropathologique qui serait déterminée par les gènes? Alors, c'est
impossible. Alors, c'est comme ça. Alors donc, il n'y a pas de marqueurs
biologiques qui nous permettent de
l'identifier. Alors, s'il n'y a pas de marqueurs biologiques... Ce n'est pas
comme, par exemple, la méningite. La méningite, vous arrivez chez le médecin, vous avez un certain nombre de symptômes,
mais vous avez les tests complémentaires que vous pouvez faire passer,
par exemple un IRM, qui montrent que vous avez un oedème au cerveau, et là vous
pouvez effectivement confirmer votre diagnostic. Mais, pour le TDAH, aucune de
ces choses-là n'existe.
Alors,
quand on dit que c'est effectivement, je veux dire, une neuropathologie
génétique, il n'y a absolument rien qui nous permet de l'affirmer.
Alors, non seulement ça, mais comment pouvez-vous poser un diagnostic minimalement
fiable quand quelqu'un se présente chez vous
soit parce que, par exemple, il est dans une situation difficile parce qu'il a
été victime de maltraitance, parce
qu'il a été victime, par exemple, d'intimidation... Puis on sait que beaucoup
de jeunes, beaucoup d'étudiants qui
sont victimes d'intimidation vont développer les mêmes symptômes que le TDAH.
Alors, il n'y a absolument, à l'heure
actuelle, effectivement, aucun test objectif qui nous permet de dire que cet
enfant-là est TDAH et que cet autre-là souffre
plutôt peut-être de dépression parce que ça marche mal à la maison, parce que
les parents sont en train de divorcer, puis
que le divorce est difficile, parce qu'il est intimidé à l'école. Il n'y a
absolument rien, effectivement, qui nous permet de poser le diagnostic
différentiel avec un minimum de certitude. Alors, on parle, finalement, d'une
condition qui est mal définie, on parle d'un concept qui est mal défini,
on parle d'un concept pour lequel on n'a pas de test objectif.
M. Tremblay :
Bien, on aura entendu, comme terme, que c'était compliqué de le définir.
Maintenant, est-ce qu'on pourrait croire
que, dans l'évolution du phénomène ou de la réalité, quand on travaille en
amont sur des segments d'âge plus
jeune, on ne déclenche pas un processus qui a instantanément des répercussions
au niveau des autres segments d'âge qui
vont entrer dans un état d'une certaine dépendance par rapport à la médication
puis par rapport à cette espèce d'univers là où on a besoin d'un suivi continu? Vous avez enseigné, par exemple, au
niveau collégial. Avez-vous perçu des réalités TDAH? On a même parlé de
marché noir de médication, rendu à ce niveau-là.
M. St-Onge
(Jean-Claude) : Eh oui, effectivement, dans les dernières années,
quand j'ai enseigné, il y avait beaucoup de
jeunes qui nous arrivaient avec un papier en disant qu'ils étaient TDAH. Pour
vous avouer franchement, je n'ai pas perçu véritablement grand
différence entre ceux qui étaient identifiés comme étant TDAH... Mais là c'est
une anecdote, là. Moi, je me fie plutôt sur
les études, et puis je me fie sur ce que la science a à nous apporter, puis
j'essaie d'évaluer la valeur de ces
études-là. Et puis, en général, les études, effectivement, je veux dire, qui
sont commanditées par l'industrie ne sont pas très fiables, alors que
les études indépendantes le sont davantage.
Mais,
si on revient aux anecdotes, effectivement, je n'ai pas trouvé tellement de...
Et puis pourquoi ces étudiants-là seraient-ils
inattentifs ou pourquoi seraient-ils... D'abord, les hyperactifs... moi, je
n'en ai pas vu en classe, des gens qui ne
peuvent pas rester en place, qui dérangent tout le monde, etc., c'est tellement
rare. Ça dépend peut-être du prof, là, aussi, parce qu'il y a des profs,
bon, disons qu'ils sont endormants. Vous en avez sûrement connu.
Alors
donc, non, moi, je n'ai pas trouvé, effectivement, que ceux qu'on identifiait
comme étant TDAH étaient plus difficiles,
plus inattentifs que les autres. Et, au cours des dernières années pendant
lesquelles j'ai enseigné, vous en aviez de plus en plus, de ça. Les critères diagnostiques, là, ne sont pas du tout
précis, là. Et puis, comme les critères diagnostiques sont très
subjectifs, à ce moment-là, je me dis que les gens qu'on a identifiés comme
étant TDAH...
D'abord,
c'est facile, hein, de mimer les... Quand vous voulez avoir, par exemple, des
psychostimulants pour avoir un
«high», c'est très facile, vous allez chez le médecin, vous mimez les
critères... vous mimez les symptômes, plutôt, et puis on vous prescrit, à ce moment-là. Et il y en a
beaucoup... On me disait, par exemple, qu'il y a des gens, effectivement, je
veux dire, des femmes, entre autres, des
hommes qui se font prescrire des psychostimulants parce qu'ils veulent maigrir.
Et puis c'est très facile, finalement, de
mimer les symptômes du TDAH chez le médecin : Bon, j'oublie toujours mes
choses, je ne suis pas attentif,
etc., puis on va vous prescrire, dans certains cas, assez facilement, je veux
dire, des psychostimulants.
M. Tremblay :
Dans le fond, est-ce qu'on peut en comprendre qu'il y a des lacunes évidentes
au niveau des diagnostics, au niveau du
sérieux qu'on devrait y accorder et puis peut-être au niveau des protocoles
pour s'assurer, peut-être, des
contre-validations puis des suivis plus serrés pour s'assurer qu'on ne
contourne pas, finalement, ce qui devrait être très précis, avec des
conséquences lourdes?
• (11 h 30) •
M. St-Onge (Jean-Claude) : C'est parce que le problème avec le TDAH, c'est
que les symptômes — d'abord,
un symptôme, ce n'est pas une
maladie — peuvent
effectivement, je veux dire, être produits par bien des choses différentes,
hein? L'apnée du sommeil, par exemple,
exactement, je veux dire, va produire à peu près les mêmes symptômes que le
TDAH. Et en l'absence de marqueurs biologiques, comment faites-vous la
différence entre ça et puis l'autre chose?
M. Tremblay :
Oui, je comprends. Merci.
Le Président
(M. Provençal)
: Je redonne la parole
à la députée de Lotbinière-Frontenac.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Bien, je suis un petit peu troublée
d'entendre ce que vous dites, parce que,
bien, en tout cas, ce que moi, je perçois, c'est que vous ne faites
pas confiance du tout aux médecins puis à leur capacité de diagnostiquer. La Dre Christiane Laberge, tout à l'heure, nous avait dit que, bien, les médecins ont des lignes directrices
claires. Donc, je voudrais vous entendre là-dessus.
M. St-Onge (Jean-Claude) : C'est que les lignes directrices viennent de la
CADDRA, qui, elles, viennent du DSM, et
le DSM, effectivement, c'est là que les critères diagnostiques du TDAH
sont alignés. Or, ces critères-là sont extrêmement
subjectifs, comme je l'expliquais, et puis
on n'a pas de test objectif, c'est-à-dire
qu'on n'a pas pu identifier quelque marqueur biologique que ce soit qui nous permet d'identifier le TDAH. Et, comme je
le disais, je veux dire, le diagnostic, aux États-Unis, par exemple, chez les pédiatres — il n'y a pas d'étude ici, alors je ne peux
pas vous donner d'étude ici — il varie entre 1 % et 16 %. Alors, on le voit, que les critères ne nous
permettent pas d'identifier, effectivement, avec un minimum d'assurance
un enfant qui serait TDAH et un enfant qui souffrirait d'autre chose.
Alors,
c'est ça, le problème, c'est la
confiance qu'on peut avoir au DSM, qui, à mon avis, n'est pas méritée.
Pourquoi? Parce que... Puis effectivement, même, par exemple, David
Kupfer, qui a dirigé les travaux du DSM-5, disait assez récemment, je veux
dire, qu'il n'y a aucun marqueur biologique ou génétique qui n'a été identifié
jusqu'à présent pour identifier quelque diagnostic qu'on retrouve dans le DSM,
et il y en a environ 360. Alors, on est effectivement un peu dans le vide. Alors, on part effectivement de ce qui est vu, des comportements, des symptômes, mais un symptôme,
ce n'est pas une maladie. Si vous
avez la fièvre, c'est peut-être un rhume, c'est peut-être une grippe, c'est peut-être
un cancer, alors donc on a des tests objectifs,
quand même, pour savoir si c'est effectivement de l'influenza ou si c'est un cancer. Mais, dans le cas du TDAH et dans le cas d'à peu près
tous les diagnostics, sinon tous les diagnostics, qu'on retrouve dans le DSM,
on n'a pas ces marqueurs biologiques là, on n'a pas ces outils-là.
Le Président
(M. Provençal)
: Une dernière?
M. Tremblay : M. le Président, j'ai peut-être une dernière question. Si vous aviez
l'opportunité, la possibilité de déposer un mandat d'initiative envers
les parlementaires, l'État, quel titre pourrait porter le mandat d'initiative?
M. St-Onge
(Jean-Claude) : Qu'est-ce que vous entendez par «mandat d'initiative»?
M. Tremblay :
Bien, dans le fond, le mandat d'initiative qui a été déposé ici porte sur une question
précise au niveau de la médication. Si vous, vous aviez à déposer
un mandat d'initiative sur une réflexion précise par rapport à votre vision de la réalité TDAH, quel titre on...
M. St-Onge (Jean-Claude) : Une recommandation,
ni plus ni moins?
M. Tremblay : Oui.
M. St-Onge
(Jean-Claude) : Bien, dans le
cas, effectivement, des enfants qui sont hyperactifs, qui sont impulsifs — ça
existe, l'impulsivité, l'hyperactivité puis l'inattention — dans
ces cas-là, effectivement, je pense qu'il faut faire une évaluation extrêmement serrée. Alors, il faut regarder, évidemment, le parcours de vie
de l'enfant, il faut examiner les
conditions dans lesquelles il oeuvre. Je veux dire, que ce soient les
conditions à l'école, à la maison, il faut regarder, il faut faire une évaluation
complète et objective de sa santé, et
puis, effectivement, arriver à poser un diagnostic, qui ne sera pas
nécessairement un diagnostic carré, et essayer d'intervenir par le biais
d'interventions psychosociales sur cet enfant-là.
Et, une fois que vous aurez essayé ça, que ce soit la formation des parents,
que ce soit, par exemple, la remédiation cognitive ou que ce soit d'autres choses... et si, effectivement, je
veux dire, les symptômes continuent de persister, là avoir recours à la
médication, et avoir recours à la médication mais pour les cas véritablement
les plus graves.
Alors, le trouble hyperkinétique... parce que la
Classification internationale des maladies ne reconnaissait pas, jusqu'à juillet
2019, le TDAH. Le TDAH, c'était même une expression qui n'apparaissait même pas
dans la Classification internationale des maladies, on parlait surtout de trouble
hyperkinétique, qui serait effectivement une maladie neurologique, bon, et on
refusait de l'admettre. Alors, pourquoi la CIM a-t-elle changé...
Le Président (M. Provençal)
: Il faut conclure.
M. St-Onge
(Jean-Claude) : ... — parce
que je sais qu'il y avait une énorme réticence à reconnaître le TDA
dans la Classification internationale des maladies — est-ce
que c'est le lobby de l'industrie pharmaceutique qui a fait qu'on a changé? Peut-être, effectivement. Et le trouble hyperkinétique, selon une étude
britannique qui date d'il y a quelques années, 2004, quand même, mais une étude du gouvernement britannique assez
complète, il affecterait environ 1,5 %
des enfants. Alors...
Le
Président (M. Provençal)
:
M. St-Onge, je dois vous interrompre parce que je vais devoir céder la
parole à la députée de Vaudreuil.
Mme Nichols :
Merci, M. le Président. Bonjour, M. St-Onge. Moi, j'ai lu votre mémoire,
j'ai lu le document que vous nous
avez déposé. J'entends aussi ce que vous nous dites. Ça fait quand même trois
jours, là, qu'on entend, là, des experts,
des sociologues, des médecins, des neuros, des philosophes, on entend plein de
choses. Puis là je suis surprise parce qu'autant
votre mémoire ou les propos que vous nous rapportez ça vient contredire...
puis, je veux dire, mes collègues, vous n'êtes pas obligés de tout partager, là, mais ça vient beaucoup
contredire tout ce qu'on a entendu dans les trois derniers jours et tout
ce qu'on a lu dans les trois derniers jours.
Je vous
dirais qu'il y a une chose sur laquelle on s'entend, et je pense que les
médecins qui sont venus ici, ils ont eu le courage, l'humilité de le dire, à l'effet qu'il y a beaucoup trop de
prescriptions. Ça, je pense que tout le monde qui est passé ici nous
l'ont dit. Parfois, il y a même des médecins qui en étaient incommodés, qui
disaient : Bien oui, on a des collègues qui prescrivent peut-être un peu
trop vite. Ça fait que, ça, on s'entend là-dessus, puis je pense que vous nous l'avez dit aussi tantôt, à quel point c'était
facile d'obtenir une prescription, qu'on avait juste à aller chez le médecin
puis mimer des critères pour obtenir le fameux médicament.
Bon, là,
peut-être, où on ne s'entend pas, oui, on peut obtenir le médicament, mais
est-ce que les patients sont traités pour
rien? On pourra en parler ou en débattre. Ce que je comprends dans ce que vous
nous dites, c'est que, oui, il y a des patients qui sont traités pour
rien.
Et corrigez-moi si je me trompe, mais, dans ce
que vous dites aussi, c'est que le TDAH, bien, ce n'est pas une maladie du cerveau, ce n'est pas inné. C'est pour
ça que ça vient défaire un peu, tu sais, ce qu'on entend depuis trois jours.
Puis je vous laisse la parole là-dessus, sur le TDAH qui n'est pas une maladie
du cerveau.
M. St-Onge
(Jean-Claude) : Non, ce
n'est pas ça que je dis, hein? Le trouble hyperkinétique est probablement,
effectivement, selon beaucoup de
spécialistes, une maladie du cerveau. Alors, le trouble hyperkinétique, ce
sont, par exemple, les enfants qui présentent tous les symptômes :
inattention, impulsivité, hyperactivité, alors que, le TDAH, vous avez trois types, hein, trois sous-types : vous
avez le type inattentif, vous avez le type hyperactif impulsif et vous avez le
type mixte.
Alors, pour
un diagnostic de trouble hyperkinétique, ça exigeait les trois symptômes, d'une
part. Non seulement ça exigeait les
trois symptômes, mais les enfants, par exemple, qui étaient anxieux, qui
étaient dépressifs ou qui souffraient de
schizophrénie, hein, ne pouvaient pas recevoir un diagnostic de trouble
hyperkinétique. Alors, oui, effectivement, dans certains cas, des
enfants qu'on appelle TDAH peuvent souffrir d'un trouble du cerveau.
Et puis, il y
a quelques années, juste après la Première Guerre mondiale, il y a eu une
épidémie d'encéphalite virale aux États-Unis, et c'est à partir de ce
moment-là, effectivement, je veux dire, qu'on a commencé à parler de
dysfonction cérébrale mineure chez ces enfants-là. Et, par la suite, ce qui est
arrivé, c'est que tous les enfants qui présentaient ces symptômes-là recevaient
ce type de diagnostic là.
Alors,
ce n'est pas parce que toutes les feuilles sont vertes que tout ce qui est vert
est une feuille. Alors, voilà, ce n'est
pas parce que, par exemple, il y a beaucoup d'enfants qui vont présenter ces
symptômes-là que ces enfants-là souffrent nécessairement d'un trouble du cerveau. Il y en a probablement un
certain nombre, oui, effectivement, ceux qui souffraient du trouble... ou ce qu'on appelait le trouble
hyperkinétique, pour qui, oui, c'est un problème... c'est une maladie du cerveau. Et prenez les enfants qui ont été exposés à des substances
neurotoxiques, l'arsenic à Rouyn, par
exemple, le plomb dans l'eau des
écoles, bon, ça a des effets sur le cerveau, mais est-ce que
c'est une maladie primordialement du cerveau ou est-ce que c'est une maladie environnementale qui a des effets sur le cerveau, qui est secondairement une maladie
du cerveau? Et un
enfant, par exemple, qui a été victime d'encéphalite virale et puis
un enfant qui a été exposé au plomb, est-ce
qu'ils souffrent de la même neuropathologie? Probablement pas.
• (11 h 40) •
Mme Nichols : Bien, je ne suis pas une experte, là, je ne me
qualifie pas d'experte non plus dans le dossier, mais, quand on parle,
mettons, du plomb dans l'eau, on s'entend qu'on est sur un dossier précis, une
cause précise. Il y aurait peut-être un lien de causalité, un cause à effet, je
ne suis pas certaine, là, tu sais, ça peut avoir un impact sur le cerveau. C'est comme si je fais du vélo puis je tombe par
terre, je me grafigne le genou, bien, c'est parce que j'ai fait du vélo
puis je suis tombée par terre, mais
ça ne veut pas dire que mon genou a une maladie. Bien, en tout cas, j'essayais de simplifier. Puis,
je vous le dis, moi, je n'ai probablement pas les notions ni tout le background que les
personnes qui viennent ici... viennent témoigner, mais j'essaie de
démêler tout ça puis j'ai l'impression d'être, des fois, un peu plus mélangée.
Dans votre mémoire, vous dites : «Si le
Québec est vraiment fou de ses enfants, il faudrait peut-être commencer à
mettre un tel programme en oeuvre.» Vous parlez du programme... des
alternatives?
M. St-Onge
(Jean-Claude) : Oui, des
alternatives psychosociales, finalement, des interventions psychosociales, pour
débuter, pour commencer, effectivement.
Mme Nichols : Puis les psychostimulants avec les services, là,
quand on dit que ça peut fonctionner, les deux en parallèle, ou qu'il peut y avoir un accompagnement, vous dites : Oui, ça peut aider dans les cas les plus graves. Est-ce que c'est ce que je comprends?
M. St-Onge (Jean-Claude) : Oui,
effectivement.
Mme Nichols : O.K., très
bien. Écoutez, je vais vous poser
une question peut-être un peu
plus générale. Vous savez qu'aujourd'hui,
ce qu'on travaille, la Commission sur la santé et des services sociaux, on se
penche entre autres sur l'augmentation préoccupante de la consommation des
psychostimulants chez les enfants et les jeunes en lien avec les troubles déficitaires de l'attention, les TDAH. Et
on fait cet exercice-là, il y a plusieurs personnes qui viennent nous livrer
des témoignages, nous envoient des mémoires
ou il y a des personnes qui ne viennent pas mais qui nous envoient aussi des
mémoires — d'ailleurs, je les remercie, parce qu'on les
lit — mais croyez-vous
que l'exercice d'aujourd'hui répond à un besoin?
M. St-Onge
(Jean-Claude) : Oui, je
crois que oui, effectivement. Je veux dire, quand on constate qu'il y a
tellement d'enfants qui... puis
tellement de jeunes, particulièrement des jeunes du secondaire... 27,4 %
des garçons du secondaire reçoivent un diagnostic
de TDAH. Est-ce que c'est véritablement possible? Alors, il y a quelque chose,
là, qui est profondément dysfonctionnel.
Et puis non seulement ça, mais, si vous tenez
compte, par exemple, des autres diagnostics que les enfants sont susceptibles de recevoir, que ce soit diagnostic
de dépression, par exemple, de troubles alimentaires, d'abus de substances, ça voudrait dire que quasiment tous les enfants du
Québec ont des problèmes psychologiques, ont des problèmes psychiatriques.
Mme Nichols :
J'ai un problème. Des fois, je trouve, c'est parfois contradictoire, parce que,
tantôt, vous nous avez dit : Des
hyperactifs, bien, je n'en ai pas vu dans mes classes, puis là vous nous parlez
qu'il y a un 27 %, dans les écoles, du secondaire, qui souffrent de... qui ont été identifiés d'un cas de
TDAH. Mais, d'un autre côté, les critères du diagnostic sont très
subjectifs, mais vous vous basez sur des données qui ont été diagnostiquées.
J'ai de la misère à faire le lien logique dans...
M. St-Onge
(Jean-Claude) : Bien, c'est
tout simplement parce qu'on peut parler, à ce moment-là, de surdiagnostic,
de faux positifs ou de diagnostics erronés.
Alors, est-ce que ces enfants-là, par exemple, qui sont déprimés, est-ce que
ces enfants-là qui sont anxieux,
c'est à cause d'une condition médicale ou bien donc est-ce que c'est à cause du
type de société dans laquelle on vit? Est-ce que c'est à cause...
Mme Nichols :
Mais ça ne pourrait pas être une condition médicale? Parce que je comprends que
ça ne peut pas être une maladie du cerveau, donc ça serait autre chose?
M. St-Onge
(Jean-Claude) : Ça peut être
une condition médicale, comme par exemple l'acné, mais ce n'est pas une maladie du cerveau, l'acné, nécessairement.
Alors, ça peut être une condition médicale sans que ce soit une maladie du
cerveau. Par exemple, on sait que, bon, les enfants qui souffrent de plusieurs
maladies somatiques sont beaucoup plus susceptibles
de recevoir un diagnostic de TDAH que, par exemple, les enfants qui ne
souffrent pas de plusieurs maladies somatiques. Alors, il y a
surdiagnostic et puis il y a surmédicalisation, il y a surprescription de
médicaments.
Mme Nichols : Bien, merci.
Le Président (M. Provençal)
: C'est au tour, maintenant, du député de Jean-Lesage à prendre
la parole.
M. Zanetti :
Merci beaucoup. Je vais vous poser deux questions en une, répondez-y comme vous
voulez. Y a-t-il, à votre avis, un
biais épistémologique, dans la production du savoir sur le TDAH, qui est lié à
la façon dont la recherche est financée?
Puis, si vous avez aussi l'information, est-ce qu'on sait aussi quelle
proportion de la recherche en Amérique du Nord est financée... bien, c'est des études indépendantes et quelle
proportion est financée par l'industrie qui produit les
psychostimulants?
M. St-Onge
(Jean-Claude) : Bon, on
sait, par exemple... pas nécessairement pour les psychostimulants, là, je n'ai
pas vu d'étude là-dessus, mais on sait
qu'environ 80 % des essais cliniques sont financés par l'industrie
pharmaceutique et on sait également
que les chercheurs qui sont liés financièrement à l'industrie — c'est une étude qui est parue, par exemple,
dans le journal américain de psychiatrie — que les chercheurs qui sont financés par
l'industrie sont 4,9 fois plus susceptibles de trouver des résultats positifs aux études et de penser que le
médicament sous étude est plus efficace que le placebo que les chercheurs indépendants ou que les chercheurs
qui ne sont pas financés par l'industrie. Alors, il y a véritablement un
biais au niveau de l'efficacité des
médicaments. Et puis, comme les études, les essais cliniques notamment, je veux
dire, leur but principal, c'est de démontrer que le médicament est efficace ou
pas et non pas de savoir quels sont les effets indésirables, finalement, des médicaments, parce qu'en général les
essais cliniques ne durent pas très longtemps... La vaste majorité, par exemple, des essais cliniques qui
ont été faits sur le TDAH ont duré en moyenne quelques semaines, et le plus
long a duré 425 jours. Alors, que voulez-vous comprendre ou comment
voulez-vous savoir si, effectivement, le médicament qui est pris à long terme peut avoir des effets indésirables
lorsque la vaste majorité des études sont des études à court terme?
Parce que les effets indésirables des médicaments, hein, se révèlent très
souvent après plusieurs années.
M. Zanetti : J'ai-tu encore du
temps?
Le Président (M. Provençal)
: 30 secondes.
M. Zanetti : Est-ce que vous
pensez que le public devrait financer des études et est-ce que ça serait une
façon d'amoindrir ce biais épistémologique là dans la production du savoir?
M. St-Onge
(Jean-Claude) : L'industrie
pharmaceutique est trois fois et demie plus rentable que les autres industries.
Sur les 500 entreprises sur la
liste du magazine Fortune,on peut voir, effectivement, que
l'industrie pharmaceutique, les 10 compagnies
pharmaceutiques étaient trois fois et demie plus rentables. À ce moment-là, je pense
qu'une des solutions possibles serait
de faire en sorte qu'on taxe, par exemple, les profits de l'industrie, qu'on
mette ça dans un fonds, dans un fonds qui pourrait financer la
recherche, qui pourrait financer la recherche qui serait faite, à ce moment-là,
par des chercheurs indépendants et sur
lesquelles on pourrait davantage compter que les études qui sont faites par
l'industrie. Parce que c'est
l'industrie qui est juge et partie, à ce moment-là, alors comment pouvez-vous
vous assurer de l'objectivité des résultats
des études, d'une part? Et puis, deuxièmement, hein, bon, ce qui se produit,
c'est que les chercheurs qui reçoivent des
montants considérables de l'industrie vont effectivement avoir une vision
biaisée sur l'efficacité du produit en question.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Je vais céder, maintenant, la parole au député de
Jonquière.
M. Gaudreault :
Oui, merci beaucoup, M. le Président. Je veux vous remercier de votre présence
ici, je veux vous remercier,
également, de votre mémoire. Mais, en ce qui me concerne, M. le Président, moi,
je n'ai pas plus de questions. Je n'aurai pas de question à poser à
M. St-Onge. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Alors, je vous remercie de votre contribution.
Nous allons prendre une pause pour pouvoir
permettre au prochain groupe de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 50)
(Reprise à 11 h 52)
Le Président (M. Provençal)
: Je souhaite maintenant la bienvenue au représentant du Regroupement
des Associations PANDA du Québec. Je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous
procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je
vous cède la parole, monsieur.
Regroupement des Associations PANDA du Québec
M. Boisrond (Frédéric) :
Bonjour. Je m'appelle Frédéric Boisrond, je suis directeur général du
Regroupement des Associations PANDA du Québec.
Alors,
notre groupement est un regroupement d'organismes à but non lucratif. Nous
mettons sur pied des services de
première qualité pour favoriser la réussite scolaire et sociale des personnes
atteintes de TDAH pour répondre aux besoins spécifiques de leurs proches. D'autres organismes communautaires en
santé mentale offrent aussi des services aux personnes ayant le TDAH. Cependant,
avec nos huit associations, nous sommes le seul réseau national d'organismes à
but non lucratif dédiés uniquement à l'entraide et à l'aide aux
personnes ayant le TDAH et leurs proches. Nous travaillons avec le ministère de la Santé et des Services sociaux, le
milieu scientifique et universitaire pour démystifier le TDAH, réduire les
préjugés, améliorer la compréhension de la
problématique. Nos associations livrent des services qui favorisent la réussite
sociale et scolaire, la réduction des
méfaits et de leurs impacts négatifs sur le noyau familial. Nous sommes
inscrits dans la trajectoire optimale
des services de l'INESSS comme organisme de support à la famille de personnes
ayant le TDAH, un rôle que nous
assumons depuis plus de 25 ans. Cependant, nous sommes conscients qu'avec
seulement huit associations, dont
aucune dans les grands centres urbains, notre réseau est à construire,
particulièrement face à une demande de plus en plus croissante.
Notre clientèle se
divise en trois groupes. Le premier groupe inclut des personnes qui
s'autodiagnostiquent. Lorsqu'elles croient
avoir des symptômes qui s'apparentent au TDAH, elles décortiquent la
littérature scientifique, se basent parfois
sur des mythes et sur l'observation de personnes ou de personnalités
identifiées comme ayant le TDAH avant de rechercher des services auprès
de nos associations. Entre autres, nous les référons vers des services qui leur
permettront d'obtenir un diagnostic. En attendant, elles restent inscrites dans
nos activités.
Dans le deuxième
groupe se trouvent des personnes qui ont recours à la médication et qui
réalisent que cette médication ne règle pas
tout. Il y a aussi ceux qui se demandent quand est-ce qu'on va arrêter d'en
prendre. On sait quand on commence, mais on ne sait pas quand ça finit.
Le
troisième groupe est composé de personnes qui ont reçu un diagnostic de TDAH
mais pour lesquelles la médication n'est
pas recommandée. Sont aussi incluses dans ce groupe des personnes qui, avec ou
sans prescription, cherchent une alternative à la médication. Elles
viennent nous voir pour trouver des stratégies pour composer avec le TDAH sans
les médicaments. À prime abord, nous leur
offrons la possibilité d'échanger avec d'autres parents ou adultes ayant le
TDAH sur des mécanismes que ces personnes auraient mis en place pour
eux-mêmes ou pour leurs enfants.
Le
dénominateur commun de ces trois groupes qui composent notre clientèle est la
détresse : Ma femme n'est plus capable;
notre fils est en train de nous rendre fous; je suis à la veille de perdre ma
job; notre fille va se faire mettre dehors
de l'école; je ne suis plus capable de moi-même.
Nos
associations sont une des principales portes d'entrée du
continuum de services. Les parents sont référés vers nous par les écoles, les
camps de jour, les services de loisirs, les médecins, les CLSC, les moniteurs
d'activités de toutes sortes. Nous sommes aussi la salle d'attente pour
celles et ceux qui attendent un diagnostic, pour celles et ceux qui n'ont pas
le TDAH mais qui ont des comportements apparentés. Pour désengorger notre
réseau, l'Association PANDA Brome-Missisquoi offre l'atelier Ce qui est un
TDAH... et ce qui ne l'est pas!
Nous
n'avons pas le loisir de refuser qui que ce soit. Au-delà d'être la porte
d'entrée, nous sommes souvent le dernier recours et nous devons aider
chaque famille à trouver sa propre porte de sortie. Même si nous offrons des
activités de groupe, nous accordons beaucoup
d'importance à des interventions individuelles. Chaque personne ayant le TDAH est
un cas singulier. Au Saguenay—Lac-Saint-Jean, nos intervenants se déplacent pour aller rencontrer les familles
à domicile. À Thérèse-De Blainville, nous faisons plus de 600 interventions
individuelles par année.
Quand on appelle une association
PANDA, c'est qu'on est en situation d'échec, échec causé par un TDAH
diagnostiqué, avec ou sans médication. Parce que, s'il faut le rappeler, la
médication ne règle pas tout.
Notre
travail consiste à faire l'inventaire des connaissances sur le TDAH, un domaine
qui évolue très vite. Nous devons départager les informations crédibles et les
solutions offertes par des charlatans, décomplexifier et vulgariser des contenus scientifiques pour permettre aux parents
de comprendre pour pouvoir prendre des décisions éclairées. Nous devons aussi défaire les mythes autour du TDAH. Pour
réaliser cette étape, heureusement, nous sommes épaulés par les meilleurs
spécialistes du Québec.
Dans
le réseau scolaire, nous amenons les parents à faire équipe avec l'école. L'association Deux-Rives et celle d'Abitibi-Est, malgré des ressources limitées, font l'accompagnement scolaire et l'aide aux devoirs adapté à la réalité des élèves
ayant le TDAH.
Mais
nous travaillons aussi avec le personnel enseignant pour les aider à développer
des outils et à mettre en place
des mesures d'accommodement pour faciliter son travail. Là encore, le résultat de
notre travail dépend de la volonté de l'enseignant et des moyens que
l'école met à sa disposition.
Notre
association Basses-Laurentides offre de la formation aux employeurs, aux
moniteurs de camps de jour, au personnel qui travaille dans les centres
de détention. Elle intervient auprès des détenus qui, médication ou pas,
veulent comprendre comment leur TDAH les a
amenés en prison et pour trouver des stratégies pour éviter la récidive. Ce
sont nos associations qui offrent des
stratégies à des entraîneurs de hockey, de soccer, des professeurs de piano, de
natation, des responsables des cadets
et des scouts pour intégrer les jeunes dans leurs activités dans le but de les
amener à briser le cycle des échecs répétitifs.
Les
associations PANDA misent sur les forces et les passions de l'individu pour
l'aider à compenser ses déficits. Nous proposons des stratégies pour
faire vivre des réussites à celle et celui qui ne fonctionne pas au même niveau
que les autres, ce qui a poussé
l'Association PANDA Bas-Saint-Laurent à développer un atelier sur l'estime de
soi. Nous misons sur des méthodes
pour permettre aux personnes ayant le TDAH de distinguer ce qui est futile de
ce qui est important, ce qui peut attendre de ce qui est urgent. Nous
les aidons à gérer leur temps. Les stratégies offertes passent du plus simple au plus complexe, mais elles respectent les
limites de chaque enfant, de chaque ado, de chaque adulte et les ressources de
la famille pour qui nous transformons l'information en des outils pratiques.
Oui, on peut
amener des adultes à accepter qu'un jeune bouge. Oui, on peut amener un
employeur à accepter que son employé
préfère se promener au fond de la salle pendant une importante réunion mais
qu'il entend, il comprend, il apprend.
Une liste de tâches sur un frigo, une check-list, c'est bon pour tout le monde.
Si on apprend à déposer ses clés toujours au même endroit, la probabilité de
les perdre à la maison est quasi nulle. Et si on commençait à apprendre à
dormir?
L'Association PANDA de la MRC Les
Moulins offre des ateliers spécifiquement pour les parents d'enfants de six à 12 ans : Enlève tes bottes, accroche ton
manteau, déshabille-toi, mets tes vêtements dans le panier à linge sale, prends
ta douche, viens souper, fais tes devoirs,
après tu pourras jouer au PlayStation. On n'a pas besoin d'être TDAH pour en
oublier un bout. Si on y allait d'une directive à la fois?
• (12 heures) •
C'est
ça, PANDA, sensibiliser, faire
comprendre à toutes les personnes autour de celle qui a le TDAH ou les référer
vers des ressources plus pointues qui
leur permettront de comprendre comment la personne ayant le TDAH gère l'information et le temps. Être défini
comme un groupe de support à la famille, c'est savoir qu'autour de la personne
ayant le TDAH il y a des parents, des conjoints, la fratrie, des
grands-parents, des amis, des coéquipiers, des professeurs, des collègues
de travail. C'est tout le réseau
autour de cette personne qui subit l'impact du TDAH et sur lequel nous sommes,
avec d'autres organismes communautaires, les seuls à agir.
Nous
avons voulu vous démontrer, aujourd'hui, que les associations PANDA et d'autres organismes communautaires, avec
des stratégies qui invitent à mieux organiser le temps et les activités
quotidiennes, font partie de la solution dans la réduction de la médication. Mais nos stratégies ne règlent pas
tout, elles sont soit complémentaires à la médication ou une alternative pour ceux qui n'en veulent pas. Force
est d'admettre que, si le réseau communautaire
n'est pas renforcé, ceux qui s'autodiagnostiquent pourraient être tentés
par l'automédication, les personnes ayant le TDAH risquent de rester plus longtemps sur la médication, ceux qui n'en
veulent pas n'auront pas d'autres alternatives crédibles et pourraient être
tentés par des solutions non éprouvées et
non reconnues. Nos associations ne règlent pas tout, elles font partie d'un
ensemble de services qui, pour donner
des résultats, doit fonctionner en parfaite synchronisation. Je vous remercie
de votre attention.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, M. Boisrond, pour votre exposé. Nous allons
initier cet échange avec la députée de Lotbinière-Frontenac.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Bonjour. Moi, j'aimerais que... Bien, vous
avez dit que vos associations sont présentes seulement dans les régions,
donc aucune en centre urbain?
M. Boisrond
(Frédéric) : Aucune.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Pourquoi?
M. Boisrond
(Frédéric) : Parce qu'on n'est pas financés pour ça.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : O.K. J'aimerais savoir, aussi, qui travaille
chez vous. Est-ce que c'est des bénévoles? C'est quoi, leur profil de
formation?
M. Boisrond (Frédéric) : D'abord, on a des psychoéducateurs, on a,
évidemment, des bénévoles, des gens spécialisés en éducation, les travailleurs du domaine, mais nous sommes épaulés,
aussi, par les spécialistes que vous avez vus ici, au cours de la semaine, entre autres
Dre Laberge, Dre Vincent. Ce sont toutes les personnes... Quand on
parle de nos bénévoles, nous parlons aussi de ces gens-là, d'accord?
Nous avons accès aux meilleurs.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : O.K. Puis, tout à l'heure, vous avez parlé de
défaire des mythes, vous avez parlé, aussi, de charlatans. Comment vous
faites ça?
M. Boisrond (Frédéric) : Bien, écoutez, nous allons... nous
fonctionnons... évidemment, nous travaillons avec le milieu scientifique, donc, les médecins que vous
avez entendus ici, qui nous disent c'est quoi, les dernières informations.
Mais nous devons aussi composer avec des
gens qui proposent des solutions, qui disent que c'est, par exemple, les
colorants alimentaires, c'est... on
peut traiter ça en prenant du pot, on peut, on peut, on peut. Donc, nous, on
veut s'assurer que, quand on donne
une information à notre clientèle, c'est l'information qui est éprouvée
scientifiquement et non pas quelque chose qu'on a lu quelque part sur Internet, parce que ça reste aussi une
source où les gens vont chercher de l'information qui n'est pas tout à
fait appropriée.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : D'après vous, c'est quoi, la recette gagnante
quand une personne vient vous voir avec une problématique, là, de TDAH
ou non?
M. Boisrond (Frédéric) : Bien, en fait, il n'y a pas une recette, hein,
c'est un menu différent pour chaque personne. Donc, les problématiques
sont tellement différentes. Parfois, la personne elle-même qui a le TDAH, ce
n'est pas elle qui a le plus de problèmes
avec la... de comportement, si vous voulez. C'est souvent les parents qui ont beaucoup
de difficultés à accepter, aussi, que
leur enfant ne sera pas l'idéal qu'ils avaient rêvé. Il y a tellement
d'éléments autour d'un enfant ou d'un adulte qui a un TDAH, même les
adultes qui réalisent, après 20 ans d'une carrière ponctuée d'échecs, qu'il
y a peut-être quelque chose à regarder.
Souvent, les parents vont vous raconter qu'ils vont apprendre qu'ils ont
eux-mêmes un TDAH quand leur enfant
va recevoir le diagnostic. Donc là, on n'a plus une seule personne, là, qui rentre dans une association, c'est deux personnes ayant le TDAH et toute la famille, finalement.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) :
Puis, quand vous rencontrez, par
exemple, un enfant, est-ce que,
normalement, vous avez de la collaboration
de la famille ou c'est un petit peu difficile? C'est quoi, la proportion?
M. Boisrond
(Frédéric) : Bien, notre
réseau a cet avantage que c'est volontaire, d'accord? Donc, quand les gens
viennent rencontrer une association PANDA, c'est un choix, c'est un choix de famille,
c'est une décision d'aller chercher de
l'aide, d'aller chercher du support, de vouloir échanger avec d'autres parents
sur des solutions, des stratégies qu'ils ont adoptées. Donc, non, c'est
volontaire, donc, oui, en général, il n'y a pas de souci.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : O.K.
Puis est-ce que vous faites, par exemple, de l'éducation? Est-ce que vous
faites des conférences dans les écoles, par exemple, ou aux parents?
M. Boisrond
(Frédéric) : Toutes nos associations offrent des conférences avec les spécialistes dont je vous ai parlé
et d'autres. Toutes nos associations offrent des ateliers pour permettre aux gens de comprendre c'est quoi,
le TDAH. D'abord, quand quelqu'un
arrive chez nous, a rencontré son médecin, qui lui a donné un diagnostic de TDAH,
ce n'est pas évident qu'on lui a tout expliqué. Donc, c'est un peu notre rôle à
nous de décortiquer cette information, qui est souvent très scientifique, pour expliquer ce que c'est. Je dois
quand même admettre que nous essayons de rester le plus loin
possible de la médication, par exemple, hein? On ne veut pas intervenir là-dessus,
tout simplement parce que ça ne relève pas de bénévoles
ou de psychoéducateurs. Donc, on essaie de dire : Retournez voir votre
médecin ou votre pharmacien pour obtenir plus d'information parce que ce
n'est pas à notre niveau, ça.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : O.K. Parfait.
Le Président (M. Provençal)
: Député de Dubuc.
M. Tremblay : Oui, merci, M. le
Président. Bonjour.
M. Boisrond (Frédéric) :
Bonjour.
M. Tremblay : Bravo pour l'engagement!
M. Boisrond (Frédéric) : Merci.
M. Tremblay : Dites-moi, vous
avez parlé du milieu carcéral, il en a été question chez d'autres invités
aussi. Est-ce qu'il y a une réalité diagnostique sur des segments
d'âge? On le comprend... Est-ce qu'on peut établir des liens par rapport au fait de peut-être précipiter des
diagnostics? Est-ce qu'il y a des conséquences sur de la criminalité dans
l'ensemble? Est-ce qu'il y a des coûts rattachés à ça? Comment vous
voyez cette dimension-là?
M. Boisrond
(Frédéric) : Je vous réponds
strictement comme directeur du Regroupement des Associations PANDA, d'accord? Je peux avoir d'autres opinions, mais,
strictement en vous répondant comme ça, c'est de vous dire que notre travail à nous, c'est d'intervenir avec une personne qui
est en situation d'échec ou une famille qui est en détresse. On ne
questionne pas le cheminement qui a
amené quelqu'un en prison, d'accord? Tout ce qu'on sait,
c'est que la personne nous dit qu'elle se
retrouve là et qu'elle croit que c'est une conséquence d'un TDAH mal géré, d'accord?
Et donc, nous, ce qu'on essaie de
faire avec cette personne, c'est de lui donner des outils pour mieux gérer ses
comportements, mieux gérer ses attitudes, mais nous ne questionnons pas le parcours de l'individu, mais plutôt, à
partir de maintenant, comment on fait pour éviter que ça se
reproduise.
M. Tremblay : Voyez-vous des différences par rapport à vos interventions sur des jeunes ou
moins jeunes, dans un constat
d'échec, qui sont sous médication, sinon qui ne sont pas sous médication?
Voyez-vous des réalités différentes à ces deux niveaux-là, au niveau de
pouvoir travailler avec ces types de clientèle?
• (12 h 10) •
M. Boisrond
(Frédéric) : Non, il n'y a
pas de différence, parce qu'encore une fois chaque cas est différent. Une
personne qui n'a pas de médication — et là j'ai Dre Laberge derrière moi,
là, je ne vais pas dire n'importe quoi — ça peut être un cas plus léger qu'un
autre, d'accord — vous
me direz si elle fait un geste de la tête, là — c'est un cas plus léger qu'un autre. Et des cas plus lourds sous
médication, si on ramène tout le monde... Quand on dit que la médication ne
règle pas tout, c'est que peut-être qu'elle ramène tout le monde à un
certain niveau qui nous permet, nous, d'intervenir pour ajouter à quelque chose. Nous, on dit que nos stratégies sont
complémentaires pour la personne qui a une médication, parce que la médication
ne règle pas tout. Donc, on ne mesure pas si une personne a une médication ou
pas, si on va atteindre de meilleurs
résultats, sinon on pousserait tout
le monde à aller en chercher. Donc,
l'idée, c'est de dire : Chaque personne est à son niveau, et
l'intervention qu'on va faire va être en fonction du niveau où la personne se
retrouve.
M. Tremblay : Dites-moi, avez-vous l'impression qu'un organisme
comme le vôtre est sollicité à sa juste valeur comme potentiel partenaire dans l'amélioration de la réalité actuelle? On a fait état de disparités au niveau des
régions, vous dites que vous êtes moins présents en centres urbains pour
faute de moyens. Est-ce que PANDA devrait être davantage sollicité comme
partenaire dans le phénomène?
M. Boisrond (Frédéric) : Nous, on a travaillé avec l'INESSS pour... on n'a
jamais forcé pour être dans le parcours optimum, là, on n'a pas forcé ça. On s'est présenté là, on a travaillé
et on s'est rendu compte que, nécessairement, il
y avait un rôle pour le communautaire là-dedans.
Mais ce n'est pas la première fois, depuis 25 ans, là, qu'on est reconnus comme
ça. Cette fois-ci, on l'est encore, d'accord?
Mais je pense que, quand on regarde le nombre de personnes qui sollicitent les
services des associations PANDA, notre
pertinence n'est plus à démontrer, d'accord? Nous, on l'a faite, cette démonstration-là.
Que tous les scientifiques au Québec
s'assoient autour d'une table et réalisent que le communautaire est
indispensable dans le parcours optimal des services, on n'a pas à dire
qu'on est pertinents, c'est clair.
Maintenant,
nous, on va continuer à faire ce qu'on peut faire avec ce qu'on a. C'est clair
qu'on ne va pas continuer à brûler
nos gens, à brûler nos ressources, parce qu'on a déjà été 14 associations particulièrement gérées par des bénévoles.
Mais, quand vous avez des bénévoles qui gèrent une association en santé mentale
et que ces gens ont des enfants, à la maison,
qui ont un TDAH et qu'ils réalisent eux-mêmes qu'ils ont un TDAH, ou le
conjoint ou la conjointe a un TDAH, ça
ne prend pas de temps qu'on brûle tout le monde. Nous, on a décidé qu'on va
faire avec ce qu'on a. Actuellement, nos associations reçoivent des financements qui vont de 0 $ à
170 000 $ par année. On fait ce qu'on peut avec ce qu'on a, mais
on va continuer à le faire.
M. Tremblay : Merci. Bravo!
M. Boisrond (Frédéric) : Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la députée de Soulanges, s'il
vous plaît.
Mme Picard : Merci
beaucoup, M. Boisrond. J'avais
une question. Vous avez parlé du système
carcéral, mais est-ce que vous êtes aussi présents dans les centres
jeunesse?
M. Boisrond (Frédéric) : Non.
Mme Picard : Non?
M. Boisrond (Frédéric) : Non.
Dans mes informations, là, je n'ai pas de présence particulière dans les centres
jeunesse. C'est possible, mais je ne l'ai pas là, au moment où je vous parle, d'accord?
Mme Picard : Intéressant. Et
puis...
M. Boisrond
(Frédéric) : C'est un peu
plus fermé, hein, il y a des secteurs qui sont un peu plus fermés. Même les
écoles, ce n'est pas toujours... ce n'est pas toutes les écoles qui
ouvrent leurs portes à des ressources, mais nous, on a vraiment fait notre travail parce qu'on est pertinents, donc
nous, on est accueillis dans les écoles.
Mme Picard : Vous avez parlé du
programme apprendre à dormir. J'aimerais en savoir plus.
M. Boisrond
(Frédéric) : En fait, ce
n'est pas un programme qu'on a, hein, ce sont des conseils qu'on donne
aux gens, et je suis certain, si ce
n'est pas fait, des professionnels comme la Dre Annick Vincent en parlent régulièrement, que ça fait partie des choses qu'il faut mettre en place avec les enfants.
Un enfant qui ne dort pas, qui ne dort pas assez, qui passe plus temps à
jouer au PlayStation, il y a peut-être des impacts aussi, là.
Mme Picard : Selon vous, la
démarche jusqu'à un diagnostic, est-ce qu'il y a quelque chose qu'on pourrait améliorer... très certainement, mais qu'est-ce
que vous voyez dans la démarche pour atteindre le diagnostic qu'on pourrait
améliorer?
M. Boisrond
(Frédéric) : Bien, en fait,
le souci, c'est le temps d'attente, hein, avant d'avoir un diagnostic, mais,
pour nous aussi, c'est une surcharge, parce
qu'on a beaucoup de gens qui viennent chercher des services pour
un TDAH alors peut-être
qu'ils ont autre chose, d'accord? Donc, on dessert des gens et, je le disais, on
n'a pas le loisir de dire : Non, on
va attendre que vous ayez un diagnostic. On ne peut pas faire ça, parce qu'il y a
des enfants, là, qui risquent d'échouer leur année scolaire, là,
juste... Vous savez, la première chose qu'on fait... quand les gens arrivent,
souvent ils ont cogné ailleurs, puis
personne n'a répondu, puis qu'on va être la première organisation qui va donner une réponse. Juste ça,
ça calme, ça met les choses en place. Donc, on ne peut pas dire non, si
ce n'est que pour ça.
Mme Picard : J'aimerais vous
entendre par rapport aux réseaux sociaux, à tout qu'est-ce qui est autour de
nos jeunes, qui peuvent peut-être contribuer
aussi à... Il y a un intervenant qui nous parlait que les jeunes, ils sentent
que l'école, c'est plate parce qu'il
n'y a pas rien qui se passe, on est assis sur une chaise. Qu'est-ce que vous
pensez, vous, de l'effet que les jeunes sont habitués à avoir un stimuli
au quotidien?
M. Boisrond (Frédéric) : Je ne
saisis pas trop bien votre question.
Mme Picard :
Oui, bien, en fait, on le sait, que les jeunes sont habitués à avoir plein de
stimuli. Comment, à l'école, on pourrait rendre ça plus attrayant pour les
jeunes? On a parlé d'activité physique, alimentation. Selon vous, dans quelle
avenue on pourrait le mieux cibler?
M. Boisrond (Frédéric) : Je ne pense pas que nous, on peut répondre à ça.
Je pense que, ça, il y a des spécialistes, au niveau de l'éducation, qui travaillent sur, justement, des concepts
différents, là, de transmettre les connaissances, qui sont mieux placés
que nous pour le faire.
Tout
ce qu'on sait, c'est que nous, quand on travaille avec des personnes qui ont le
déficit d'attention, on doit prendre des
mécanismes pour s'assurer de décortiquer l'information pour qu'elle soit
absorbée. Tantôt, je vous ai donné l'exemple du parent qui donne un
ensemble de directives à un enfant, et que, TDAH ou pas, il va en perdre en
bout, donc, et puis il va retenir ce qui est
le plus stimulant pour lui. Comme moi, d'ailleurs, aussi, j'aurais retenu
l'idée de jouer au PlayStation que de ranger le linge sale, hein?
M. Tremblay : Vous auriez l'opportunité d'intervenir, demain matin, sur des priorités
précises, vous plancheriez sur quoi? Sur quel mandat vous iriez de
l'avant?
M. Boisrond (Frédéric) : Bien, moi, je dirais, développer le réseau
communautaire. Je veux dire, ça n'a aucun sens d'avoir un réseau aussi
faible en quantité et même en qualité. Parce que, vous savez, nos bénévoles, il
faut les former, et c'est un temps qu'on met
à former des bénévoles, parce qu'on est en santé mentale, il faut s'assurer que
les gens donnent des informations crédibles, scientifiques, qui ne
mettent pas les gens en péril parce qu'on ne leur a pas donné une information valable. On travaille avec les
meilleurs spécialistes, mais, même encore... ce sont des gens qui sont capables
de tenir un discours compréhensible par
notre clientèle, mais, encore, nous aussi, on doit être capables d'emmagasiner
cette information-là pour être capables de la transmettre aussi, on a
besoin d'outils.
On est bons, on est
bons, mais on peut tellement être meilleurs. On peut tellement être meilleurs
puis on peut tellement rendre des services
beaucoup plus intéressants que ce qu'on fait maintenant. On est bons, mais on
ne peut pas se contenter d'être bons.
Le Président
(M. Provençal)
: Merci. Je vais
maintenant céder la parole à la députée de Vaudreuil.
Mme Nichols :
Merci, M. le Président. Merci beaucoup. Merci de prendre du temps pour venir
nous parler, entre autres, de votre organisme, en fait. Nous, on a... je
pensais que la députée de Soulanges était d'ailleurs pour l'aborder, parce que
nous, on a le groupe PANDA dans Vaudreuil-Soulanges...
M. Boisrond (Frédéric) :
Il a fermé.
Mme Nichols : ...il a été créé en 2008, puis c'était Karolyne
Normand, là, qui en était la responsable, et, oui, il a fermé, puis je
me demandais est-ce que c'est une question financement.
• (12 h 20) •
M. Boisrond (Frédéric) : C'est tout. C'est l'épuisement des bénévoles.
Vous parlez de personnes qui ont eux-mêmes le déficit d'attention, je le répète, qui ont le déficit d'attention,
qui ont des enfants qui ont le déficit d'attention. Vous parlez de ressources qui reçoivent 10 000 $ par
année. PANDA Vaudreuil-Soulanges, recevait 10 000 $ par année, puis,
bêtement, une année, on s'est
retrouvé là-dedans avec un surplus de 5 000 $ puis on
s'est fait couper parce qu'il ne faut pas avoir plus que 25 % de
surplus à la fin de l'année. Bow!
Alors, vous voyez, ce
sont des incohérences comme ça qui font que Vaudreuil-Soulanges, qui était une
de nos associations les plus solides en termes de qualité de ce qu'on offrait,
pour de l'épuisement, pour l'incapacité d'aller recruter des ressources pour mettre là, ne serait-ce que de payer un
employé à temps partiel, bien, on n'a pas le choix que de fermer, et
vous avez une région...
Mme Nichols :
En explosion démographique.
M. Boisrond
(Frédéric) : Merci beaucoup.
Mme Nichols :
Oui, on a une région en explosion démographique. Là, vous avez devant vous la
députée de Soulanges, qui fait partie du
gouvernement, donc, vous avez l'opposition officielle aussi, donc c'est le
temps de faire de vos demandes pour
réactiver du financement. Je suis sûre qu'il y a une bonne oreille, de l'autre
côté. La députée de Soulanges connaît
bien la problématique, elle nous a partagé, entre autres, une petite tranche de
vie. Donc, vous avez l'opportunité, là, manquez-la pas, là, je vous
donne du temps de glace, là.
M. Boisrond
(Frédéric) : Ah! moi, je suis certain que j'ai été clair. Vous savez,
quand vous avez un problème comme celui-là,
un problème de santé mentale, que vous avez entendu, nous, on vous dit :
Nous avons huit associations pour l'ensemble
du Québec, puis le financement est un financement qui va par région. Donc,
quand on a un financement pour Vaudreuil-Soulanges, c'est pour aider les
gens de Vaudreuil-Soulanges. Pensez-y, il n'y a aucune organisation, sur le
territoire de l'île de Montréal, qui est spécialisée uniquement et
spécifiquement en TDAH.
Mme Nichols :
Le financement venait d'où?
M. Boisrond
(Frédéric) : Du PSOC.
Mme Nichols : Du PSOC.
M. Boisrond
(Frédéric) : Programme de soutien aux organismes communautaires.
Mme Nichols :
Oui, c'est ça. Le PSOC, on s'entend que tout le monde se l'arrache parce que
c'est un financement qui est souvent récurrent.
M. Boisrond
(Frédéric) : Et nous avons
décidé aussi, au cours des dernières années, de refuser toute forme de
financement de l'industrie pharmaceutique parce qu'on se retrouve avec des gens
qui s'attendent à ce qu'on fasse la promotion de la médication. Ce n'est pas
notre rôle. On n'est pas contre, hein, mais ce n'est pas à nous de faire cette promotion-là ou de suggérer ça à notre clientèle.
Ce n'est pas notre job, c'est la job des médecins, c'est la job des
pharmaciens.
Mme Nichols :
Oui. Je vous félicite, d'ailleurs, je trouve que vous... ça fait partie, là...
Vous devez rester... Vous êtes un
regroupement sans préjugés, qui accueillez les gens sans les... bien sûr, ils
sont identifiés TDAH, mais vous les accueillez,
vous les écoutez, vous, les personnes en détresse. Donc, vous êtes un
organisme, définitivement... on en a besoin dans Vaudreuil et dans
Soulanges.
En
moyenne, là, ça... parce que, tu sais, vous disiez que vous aviez environ
10 000 $ par année pour Vaudreuil-Soulanges, mais, en moyenne, dans les autres régions... ou ça
vous prend combien de financement pour pouvoir... Puis là dites-moi-le, là, c'est le temps de me dire combien ça vous
prend de financement pour que ça fonctionne pour pouvoir réouvrir le bureau
dans Vaudreuil-Soulanges, ou en moyenne.
M. Boisrond
(Frédéric) : Ah! bien, il
faudrait d'abord que j'arrive à retrouver tout ce monde-là pour les remettre
ensemble, pour faire des évaluations.
Mme Nichols : Oui, ça je
comprends, je comprends, les bénévoles.
M. Boisrond
(Frédéric) : Mais,
voyez-vous, les besoins sont différents d'une région à l'autre, hein? Je pense
que probablement que les gens sont
venus vous dire qu'au Saguenay—Lac-Saint-Jean les données sont beaucoup plus élevées qu'ailleurs, hein,
donc, tout le monde sait ça. Donc, on est solides, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, mais ça ne veut pas dire qu'on ne
peut pas être meilleurs, d'accord? On fait du bon travail. Au
Bas-Saint-Laurent, on n'a aucun financement. L'année dernière, on a fonctionné avec 5 000 $, et c'est
essentiellement de la collecte de fonds qui nous a donné 5 000 $
pour faire notre travail. Vaudreuil-Soulanges, c'était 10 000 $. Les
associations les mieux financées sont à 170 000 $, donc, on parle de Bas-Saint-Laurent, de
Sainte-Thérèse, d'accord, de Thérèse-De Blainville. Donc, ces
associations-là aussi,
Basses-Laurentides et Thérèse-De Blainville, ces associations-là, parce
qu'elles sont un peu plus solides, vont desservir les gens de Laval, par exemple, d'accord, ce pour
quoi on n'est pas financés. Donc, c'est un choix qu'on fait, aussi, de ne
pas dire non à quelqu'un qui vient de ville LaSalle, qui prend son auto, qui
embarque toute la famille, qui s'en vient à Sainte-Thérèse.
On ne va pas lui dire : Non, on ne peut pas vous servir. Mais en réalité
on n'est pas financés pour ça, c'est nous qui décidons d'aller aussi
loin.
Mme Nichols :
Je comprends, dans le fond, qu'on identifie deux problématiques : un, les
bénévoles, un problème de bénévoles,
justement, pour les rencontres ou pour accueillir ces gens-là, et qu'il y a un
problème, aussi, de financement.
Puis je ne jette pas le blâme, là, mais ça n'a
jamais été porté à mon attention, qu'il y avait un problème de financement de PANDA dans Vaudreuil. Je n'ai
jamais personne qui est venu cogner à ma porte puis qui m'a demandé :
Est-ce que tu peux aider PANDA? Parce que je
le fais avec plusieurs organismes de Vaudreuil, et ça n'a jamais été porté
à mon attention. Et je suis très sensible à
ce genre de cause, croyez-moi. J'ai
été mairesse, j'ai été préfète, je suis maintenant députée, donc je le
connais bien... je connais bien mon milieu, puis je le sais, qu'il y a
un besoin pour ça. Donc, sachez que je suis là si vous décidez de...
Puis je peux peut-être aussi faire des liens avec des bénévoles et avec d'autres
organismes, parce qu'on a vraiment beaucoup d'organismes, puis je pense qu'ils
peuvent peut-être même se partager dans les...
M. Boisrond (Frédéric) :
Parfait. Merci.
Mme Nichols : Alors, voilà. Merci beaucoup. Merci de ce
que vous faites, je pense qu'on en a besoin. Je remercie ceux qui s'impliquent, aussi, auprès de vous, vous
avez parlé de Dre Laberge, vous avez parlé de Dre Vincent. Bien sûr,
je comprends que vous avez besoin aussi de
cette expertise-là, et les bénévoles, c'est de la denrée rare maintenant,
mais bravo pour le travail que vous faites!
Le Président (M. Provençal)
: Alors, je cède la parole au député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci,
M. le Président. Merci beaucoup pour votre présentation et votre présence ici. Vous disiez, tout à
l'heure, que vous refusez le financement des compagnies pharmaceutiques. Je comprends très bien
vos motifs, c'est tout à fait
louable. Quel est, selon vous, le rôle des producteurs de psychostimulants dans
la situation qu'on vit ici, au Québec, où la prévalence, justement, de consommation est tellement
plus élevée que partout ailleurs au Canada, par exemple?
M. Boisrond (Frédéric) : Bien, pour moi, ce sont des entreprises
privées, hein, donc qui ont des objectifs de vente. Nous, franchement, ce ne sont
pas des questions qu'on se pose, dans la mesure où nous, que la personne prenne
une médication ou pas, on l'accueille. Et
nous n'avons... et nous ne demandons jamais aux gens de prendre la médication. Nous pouvons leur demander
d'aller voir leur médecin, d'aller voir leur pharmacien, mais nous
n'intervenons pas dans le domaine de
la médication. Donc, nous sommes loin de ça, d'abord parce que
nous n'avons aucune expertise, vraiment aucune expertise. Nous sommes vraiment
dans des rapports humains, comment aider une personne à trouver
des mécanismes pour bien fonctionner, pour atteindre ses objectifs,
voyez-vous? Donc, si la médication est un des outils, pour nous, c'est parfait.
Si ce n'en est pas, si on peut faire sans la
médication, pour nous, c'est parfait. Mais le rôle de l'industrie comme telle, c'est loin, loin, loin de nous.
M. Zanetti : Je comprends. Avez-vous l'impression que notre société
a médicalisé des problèmes sociaux? Dans le cas, par exemple, du TDAH, est-ce que vous sentez que,
des fois, le problème dépasse simplement un problème de cerveau?
M. Boisrond (Frédéric) : Écoutez, encore
une fois, moi, je vous dirais que,
quand les gens viennent nous voir, ils viennent
nous voir parce qu'ils ne veulent pas en prendre, ils viennent nous
voir parce qu'ils en prennent puis que ça ne résout pas tout, ils viennent nous voir parce qu'ils cherchent une alternative ou ils sont sur le bord d'en prendre puis
ils préfèrent ne pas en prendre. Ce
sont des choix personnels. Dans ce que nous, nous observons, la médication est
un choix personnel, ou un choix qui
se fait avec les médecins, ou un choix qui se fait, les parents, avec le
personnel médical. Encore une fois,
ça n'a aucun impact sur notre travail, aucun impact. Quand quelqu'un
arrive, il arrive avec ses objectifs, l'objectif de comment je peux faire sans médication, comment je peux arrêter. On a
souvent les... quand les jeunes arrivent à l'adolescence ou à la fin de l'adolescence, ils veulent arrêter. Donc,
ce n'est plus les parents qui décident, l'individu décide de lui-même. Comment on l'accompagne? Nous, c'est
d'accompagner la personne dans ses décisions, dans ses choix. On ne
choisit pour personne, en fait.
Le Président
(M. Provençal)
: Merci. Nous allons
conclure cet échange avec le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui, merci. Merci beaucoup de votre
présence. Je constate que vous, vous êtes vraiment au front, tu sais, vous n'êtes pas là pour les grandes stratégies.
Ce n'est pas que vous n'êtes pas capables d'en faire, ce n'est pas ça que je dis, mais votre mission, c'est de prendre
soin de la personne comme elle est, comme elle se présente devant vous,
sans jugement, sans essayer de... bon, et on la fait avancer. Alors, beaucoup,
beaucoup de reconnaissance pour ça.
Ceci étant dit, hier, Jeunes et santé mentale nous ont dit : Une de nos demandes,
c'est l'accès gratuit à la psychothérapie. Êtes-vous d'accord avec ça?
M. Boisrond
(Frédéric) : Autant que nous ne prenons pas parti pour la médication,
nous ne prenons parti pour aucune autre
forme de thérapie, ou autres. Nous, ce qu'on fait, c'est que, quand les gens
arrivent, ils nous disent : Moi, je veux essayer la psychothérapie,
on essaie de vous trouver la meilleure information qu'on peut trouver.
• (12 h 30) •
M. Gaudreault : Oui, mais, quand la meilleure information nous dit : Ça va coûterait 2 500 $ pour un traitement
et qu'on fait affaire avec des familles qui peuvent avoir des revenus modestes,
ce n'est pas simple, là.
M. Boisrond (Frédéric) : Mais c'est la famille qui fait ce choix-là. Si
elle est capable de le payer, c'est la famille qui fait ce choix. Nous, on ne
peut pas dire à la famille : Si vous faites ce choix-là, ça va vous
appauvrir. Donc, on ne rentre pas
là-dedans, là, on ne fait pas de la gestion de budget, d'accord? Donc, vous
savez, les offres de soins pour le TDAH, là, vous ne pouvez pas imaginer combien qu'il y en a, là, actuellement, d'accord? Il y en a, là. Il y en a qui sont basés sur la
salive, il y en a qui sont basés sur des prises de sang. Il y en a, d'accord?
M. Gaudreault :
C'est sûr, il y a un marché. En tout cas, les chiffres nous disent ça.
M. Boisrond (Frédéric) : Bon, c'est
ça. Alors, nous, ce qu'on fait, c'est
d'essayer de dire, justement, aux gens : Voici ce que nous, nous avons de
la médecine conventionnelle, là, qu'est-ce qui se dit de la médecine
conventionnelle, voici qui sont les gens qui nous conseillent, nous,
quand on vous donne un conseil, d'accord?
M. Gaudreault :
Il me reste-tu du temps? Oui?
Le Président
(M. Provençal)
: ...secondes.
M. Gaudreault : O.K. Je comprends que vous n'êtes pas un service budgétaire,
mais, quand même, est-ce que, chez les gens qui vont chez vous,
vous constatez vraiment une différence sur les revenus familiaux par rapport aux jeunes qui ont des problèmes de TDAH? Est-ce que vous voyez
qu'il y a une différence par rapport aux revenus familiaux?
M. Boisrond (Frédéric) : Vous savez, quelle que soit la problématique sociale, problématique de santé que vous allez avoir, elle va appauvrir
une famille, d'accord? Quand il y a un enfant qui a un problème de santé, la probabilité que le couple reste ensemble diminue en conséquence, donc la probabilité qu'il
y ait un seul revenu est plus élevée, la probabilité que la personne qui travaille soit une mère est
aussi élevée. Donc, oui, on a affaire à des familles où les gens perdent leur
emploi parce qu'ils ont une charge familiale
qui vient avec le fait que l'enfant ait un problème de santé, donc, oui, on a
affaire à des familles à faibles revenus. Donc, ça, il ne faut jamais le perdre
de vue, on a affaire à des familles à faibles revenus. Quand on n'a pas affaire à des familles à faibles revenus, ils
sont ailleurs puis ils ont déjà trouvé, ils ont déjà payé pour avoir un diagnostic. Mais nous, on est dans
ceux qui sont sur les listes d'attente, on est dans ceux qui sont dans la file.
M. Gaudreault :
Merci.
M. Boisrond (Frédéric) : Je
vous en prie.
Le
Président (M. Provençal)
: Je
remercie M. Boisrond, du Regroupement des Associations PANDA du Québec,
pour votre participation et votre contribution.
La commission ajourne ses travaux jusqu'à mardi
12 novembre 2019, à 10 heures, où elle accomplira un autre mandat. Merci
beaucoup, bon retour à...
(Fin de la séance à 12 h 33)