(Dix heures cinquante minutes)
Le
Président (M. Merlini) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Bon mardi matin à tous. Ayant constaté le quorum,
je déclare donc la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes
présentes dans la salle du Conseil législatif, mieux connue sous le nom du salon rouge, de bien
vouloir éteindre toute sonnerie et avertisseur de leurs appareils
électroniques.
La commission
est réunie afin de procéder aux auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi
n° 148, Loi encadrant l'approvisionnement en médicaments génériques par
les pharmaciens propriétaires et modifiant diverses dispositions
législatives.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements ce matin?
La Secrétaire : Non, M. le
Président, il n'y a pas de remplacement.
Le
Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup. Nous allons donc débuter avec les remarques préliminaires puis nous recevrons
ensuite l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes.
Remarques préliminaires
Sans plus
tarder, j'invite le député de La Pinière, M. le ministre de la Santé et
des Services sociaux, à faire vos remarques préliminaires. Vous disposez
de six minutes. À vous la parole.
M. Gaétan Barrette
M. Barrette :
Alors, merci, M. le Président. Alors, bienvenue à tous les collègues,
évidemment, à cette commission parlementaire
sur le projet de loi n° 148, Loi encadrant l'approvisionnement en
médicaments génériques par les pharmaciens propriétaires et modifiant
diverses dispositions législatives.
Tout
simplement pour mettre les choses en contexte pour ceux qui, peut-être, arrivent
à leur première commission parlementaire,
qui nous écoutent actuellement, alors nous avons, dans la dernière année et un
peu plus, procédé à l'adoption de
diverses lois et, dans le domaine du médicament, nous avons adopté une loi
importante, la loi n° 81, qui nous permettait d'avoir un levier face à l'industrie
pharmaceutique, et particulièrement à celle traitant du médicament générique. Et ce projet de loi, cette loi-là, la loi n° 81, a
été étudiée et adoptée dans un objectif très simple qui était celui d'avoir un
levier pour que l'État québécois et
le citoyen, le cas échéant, puissent avoir accès à des médicaments génériques à
un meilleur prix possible. Et on
comprend que les dépenses en médicaments, qu'ils soient d'origine ou génériques
au Québec par les citoyens et par l'État, constituent une dépense qui est
substantielle, qui se chiffre en milliards de dollars. Il y a donc lieu
de... il y avait lieu de s'adresser à cette situation-là ne serait-ce que d'un
plan purement budgétaire pour déterminer s'il
y avait, un, à la case de départ, une situation qui justifiait notre
intervention et, deux, de mettre en place des leviers pour corriger
certaines choses s'il y avait des choses à corriger.
Or, lorsqu'on a fait l'étude et en consultations
publiques et à l'étude détaillée, mais particulièrement lors des consultations publiques sur la loi n° 81, on
a tous constaté que ce que les observateurs disaient de notre système de santé,
quant au prix des médicaments génériques en particulier... on les payait trop cher.
Je pense que c'est de connaissance et
d'acceptation commune que ce que l'on paie est trop élevé. La loi n° 81
nous permettait d'avoir des appels d'offres, et le fait d'avoir des appels d'offres a généré une situation, un climat
de négociation nouveau, surprenant à certains égards, avec l'industrie pharmaceutique, lequel nous a
permis récemment... Cet été, vers le milieu du mois de juillet, j'avais annoncé
que nous avions réussi, à la suite de
l'adoption de la loi n° 81, à créer un climat qui aura propulsé
l'industrie à négocier et à nous
permettre d'obtenir des économies récurrentes de 305 millions de dollars
par année pour l'État. 305 millions de dollars, c'est un chiffre très
significatif, compte tenu que la dépense que l'on fait au Québec est d'un peu
plus 700 millions de dollars
pour la dépense publique. Alors, c'est une entente que nous avons convenue qui
est substantielle et à l'avantage des citoyens et citoyennes du Québec
payeurs de taxes.
Alors, c'est
dans cet esprit-là que nous sommes ici aujourd'hui parce que l'entente que nous
avons convenu avec l'industrie a été
faite sur la base de la mise en place de nouvelles règles qui font en sorte, et
c'est le coeur du projet de loi aujourd'hui,
qu'un pharmacien propriétaire ne peut tenir en stock ou essentiellement avoir
des contrats qui excèdent... dans
lesquels un médicament pourra être fourni à plus de 50 % par un seul
fournisseur. Alors, le principe ici en est un d'équité dans le marché. Un de nos objectifs était aussi, justement,
d'équité entre les industries pour éviter les monopoles, donc maintenir
en vie certaines industries qui pourraient être éliminées s'il y avait une
guerre de prix, par exemple.
Alors, la loi
qu'on propose aujourd'hui est le
fruit de ces négociations-là et il y a comme objectif évidemment de faire en sorte que le prix soit le plus bas,
mais que les fournisseurs, les fabricants qui créent des emplois soient dans un environnement compétitif et, en quelque part,
antimonopole. Et la règle du maximum de 50 % vient faire ça en garantissant un accès au marché à tout le monde qui, entre eux, auront à oeuvrer dans un
environnement tout à fait normalement
compétitif dans le système économique dans lequel on vit. Donc, c'est un projet
de loi qui vient solidifier notre position et qui est complètement dans
l'intérêt et de la population, et du gouvernement, et de l'entreprise, et des
employés de ces entreprises-là, conséquemment.
Alors, voilà
grossièrement, M. le Président, la mise en place de notre commission
parlementaire, à laquelle viendront s'exprimer divers intervenants dans
ce milieu-là.
Le
Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup, M. le ministre, pour ces remarques préliminaires. J'invite
maintenant le député de Saint-Jean,
qui est le porte-parole de l'opposition officielle sur les dossiers touchant
l'industrie du médicament, à faire ses remarques préliminaires. Vous
avez un temps de 3 min 30 s. À vous la parole.
M. Dave Turcotte
M. Turcotte :
Merci beaucoup, M. le Président. Donc, tout d'abord, vous remercier, je suis
certain que vous allez présider les travaux aussi bien que vous le
faites habituellement; remercier l'ensemble du personnel de l'Assemblée nationale, qui va nous permettre d'avoir un débat
sur un sujet quand même important, il faut le dire; remercier les groupes,
les citoyens qui vont venir nous donner leurs
appréciations du projet de loi, donc, peut-être, éventuellement, des modifications ou des confirmations de ce qui se
trouve dans le projet de loi; et tous ceux qui ont soumis un mémoire que
nous pourrons aussi... qui nous permettra de bonifier notre réflexion pour
l'étude du projet de loi.
Donc, je n'irai pas sur le fond maintenant parce
que nous aurons quand même le temps d'en débattre et de questionner les gens bien avant, mais je voulais quand même tenir
quelques remerciements aux citoyens et aux organisations qui permettront
d'améliorer le projet de loi. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Merlini) :
Merci à vous, M. le député de Saint-Jean. Maintenant, je vais vers le député de
Lévis, qui est le porte-parole du
deuxième groupe d'opposition en matière de santé et de services sociaux. Vous
disposez d'un temps de 2 min 30 s pour vos remarques
préliminaires. À vous la parole.
M. François Paradis
M. Paradis
(Lévis) : Merci, M. le Président.
Dans ce début de semaine, je vous salue, M. le Président, de même que toute votre équipe. Encore une étude
importante, un enjeu important. Je salue également les membres du gouvernement,
M. le ministre et les membres de l'opposition officielle. Un projet de loi que
l'on aborde aujourd'hui, qui se veut un projet de loi de continuité de fait, le ministre l'a bien
mentionné, hein, issu et fondamentalement suite logique du n° 81. C'est un
enjeu, je le rappelle, important. Les économies anticipées sont substantielles
également.
Alors, je
serai modeste dans mes remarques préliminaires, conservant le temps de tous
ceux et celles qui veulent s'exprimer
sur le dossier. Mais je dois encore une fois vous dire que nous serons
extrêmement attentifs aux propos de ceux
et celles qui viennent nous donner leurs points de vue concernant le projet de
loi n° 148 et sa potentielle bonification, dans un esprit de se doter encore une fois d'outils qui sont les plus
performants possible et qui serviront l'ensemble des citoyens.
Alors, je nous souhaite de bons travaux, M. le
Président, avec cet objectif de collaboration et d'éléments constructifs. Et
merci à ceux qui viendront s'adresser à nous également pendant cette période de
temps là. Merci.
Auditions
Le Président
(M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Lévis. Je souhaite
donc la bienvenue aux représentants
de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes. Vous
disposez d'un temps de 10 minutes pour
votre exposé, et ensuite nous allons procéder aux échanges avec M. le ministre
et les membres des deux oppositions. Je vous invite donc à vous
présenter et à nous présenter votre exposé. À vous la parole.
Association canadienne des
compagnies
d'assurances de personnes inc. (ACCAP)
Mme Duhaime
(Lyne) : Merci, M. le
Président. M. le ministre, mesdames messieurs, membres de la commission,
merci de nous donner l'opportunité ce matin de vous donner nos commentaires
concernant le projet de loi n° 148. Je m'appelle
Lyne Duhaime, je suis présidente de l'Association canadienne des compagnies
d'assurances de personnes pour le Québec, et je suis accompagnée de
Jean-François Chalifoux, président-directeur général de SSQ Groupe financier.
L'ACCAP
représente des sociétés dans 99 % des assurances de personnes en vigueur
au Canada. Nos membres travaillent de
concert avec les employeurs, les syndicats et les associations professionnelles
pour offrir aux travailleurs québécois
une protection maladie complémentaire couvrant une large gamme de médicaments
sur ordonnance, les services paramédicaux comme les traitements d'un
psychologue, d'un physiothérapeute ou d'un chiropraticien, de même que les examens de la vue, les lentilles et verres
correcteurs et les soins dentaires, pour ne nommer que quelques-unes de nos
garanties.
• (11 heures) •
Notre industrie est partenaire du gouvernement
dans la prestation du régime général d'assurance médicaments. En effet, 56 % des Québécois sont couverts
par un régime privé d'assurances collectives ou d'avantages sociaux leur
offrant une assurance médicament. En
2016, les montants versés aux Québécois par les assureurs privés étaient de
2,6 milliards de dollars
seulement pour le médicament. Lorsqu'on tient compte de la coassurance que
doivent assumer les travailleurs couverts
par un régime privé, ce montant s'élevait à 3,1 milliards de dollars. Il
faut comprendre que 3,1 milliards de dollars est payé par les employeurs et les travailleurs du
Québec à titre de médicaments soit directement ou à travers les primes d'assurance collective. À eux seuls, les
médicaments génériques représentaient, en 2016, une dépense annuelle de plus
de 400 millions de dollars pour le volet privé du régime général
d'assurance médicaments.
Le
modèle québécois garantit que toute la population du Québec est, en tout temps,
couverte par une assurance médicaments.
De manière générale, les Québécois qui sont couverts par des régimes privés
bénéficient d'un accès rapide à plus de 12 000 médicaments sur
ordonnance. Pour sa part, le régime public couvre également un grand nombre de médicaments, soit environ 8 000. Depuis
l'avènement du régime général d'assurance médicaments en 1997, les Québécois
bénéficient d'un meilleur accès aux médicaments. Nous sommes tous fiers de ce
constat.
Toutefois,
à l'instar du gouvernement, notre industrie est préoccupée par la hausse du
coût du médicament. En effet, les régimes privés partagent avec le régime
public une facture qui est passée de près de 3 milliards de dollars, au
début de la mise en oeuvre du régime
général, à plus de 6 milliards de dollars annuellement aujourd'hui. Les
assureurs de personnes croient que
tous les Québécois devraient avoir accès à des médicaments sous ordonnance à
des prix abordables. Nous estimons que des réductions significatives de
coûts peuvent être obtenues en améliorant le système actuel.
D'ailleurs,
nous remercions le gouvernement et les parlementaires d'avoir mis en oeuvre de
nombreuses mesures, depuis les
dernières années, pour contenir le coût du médicament. Nous reviendrons sur
certaines d'entre elles un peu plus loin.
Nous
croyons que la meilleure solution pour assurer une couverture durable et
abordable des médicaments sur ordonnance
est celle qui combine les forces des régimes public et privé. Les médicaments
génériques sont une solution de
rechange sûre et efficace aux médicaments d'origine. Dans un même temps, ces
médicaments contribuent grandement au contrôle du coût global des
médicaments sur ordonnance.
Bien
que le projet de loi n° 148 traite principalement de l'approvisionnement
en médicaments génériques par les pharmaciens,
nous tenions à vous faire part de nos commentaires puisque le projet de loi
découle de l'entente de principe conclue
en juillet dernier entre le gouvernement du Québec et l'Association canadienne
du médicament générique, entente qui ferait considérablement baisser le
prix de ces médicaments. En effet, dans son analyse d'impact réglementaire, le ministère de la Santé et des Services sociaux a
souligné qu'une des conditions essentielles à la conclusion de l'entente
était d'accroître la concurrence sur le
marché du médicament générique, ce que vise à faire le projet de loi. Cette
entente de principe est d'une grande
importance pour le secteur des assurances, mais aussi pour les employeurs, les
syndicats, les associations
professionnelles et les travailleurs du Québec. Elle prévoit des économies
annuelles de 304 millions de dollars sur cinq ans pour les assurés
du régime d'assurance médicaments.
Dans
son analyse d'impact réglementaire, le ministère souligne que les assurés des
régimes privés pourraient aussi réaliser
des économies grâce aux baisses de prix publiques qui découleront de cette
entente. Nous le souhaitons fortement. Toutefois,
l'entente de principe demeure confidentielle et il n'est pas encore clair de
quelle manière les Québécois qui sont assurés par le volet privé du
régime général d'assurance médicaments en bénéficieront.
M. Chalifoux (Jean-François) : Par souci d'équité, nous voulons vous réitérer
que les ententes conclues entre le gouvernement et les fabricants de
médicaments devraient profiter autant aux Québécois couverts par un régime
privé qu'à ceux couverts dans le
cadre du régime public. Tous les Québécois en sortent gagnants lorsque le
gouvernement négocie à la baisse le
prix de vente inscrit à la liste des médicaments, une liste qui indique les
médicaments qui doivent faire l'objet d'un
remboursement par les régimes privés et le régime public d'assurance
médicaments. C'est pour cela que nous réclamons que le prix de vente
garanti inscrit à la liste des médicaments soit le prix négocié.
Rappelons
qu'au fil des ans nous avons constaté un écart de plus en plus important dans
le coût des médicaments payés par les
assurés du régime privé et ceux du régime public. En 2013, les assurés couverts
par un régime privé payaient en
moyenne 17 % de plus pour leurs médicaments que ceux couverts par le
régime public. Cet écart s'élevait à 37 % lorsqu'il s'agissait de médicaments génériques. Les
assureurs et leurs clients sont préoccupés par cet écart ainsi que par le coût
toujours croissant du médicament. Ces coûts
sont susceptibles d'avoir un effet sur la pérennité des régimes d'avantages
sociaux au Québec. Il en va de la capacité
des employeurs, des syndicats et des associations professionnelles de continuer à offrir un régime
d'assurance collective ainsi que de la capacité des travailleurs à en partager
les coûts.
Cela
étant dit, nous reconnaissons le progrès réalisé au cours des dernières années en matière de contrôle du coût des médicaments.
À titre d'exemple, notons la mise en oeuvre de la facture détaillée en
pharmacie. Nous remercions le ministre
de la Santé et des Services sociaux
d'avoir introduit cette mesure. Grâce à l'appui unanime des parlementaires, les Québécois ont droit à plus de transparence sur leur
facture de médicaments depuis le 15 septembre dernier. Les pharmaciens
doivent maintenant remettre une facture détaillée qui comprend le prix de la
molécule, les honoraires du pharmacien et la
marge du distributeur. Cette mesure permet aux Québécois d'être mieux
outillés pour comprendre la facture en pharmacie.
De
plus, en octobre 2015, le gouvernement a introduit la politique du prix le plus bas,
qui permet aux régimes privés qui le souhaitent de rembourser le médicament
d'origine en fonction du coût du médicament générique équivalent, peu importe le montant payé à la pharmacie. Cette
mesure était fortement attendue puisqu'elle encourage une plus grande utilisation du médicament générique, ce qui
entraîne des économies importantes. Bien que la part de marché des médicaments génériques dans les régimes privés au Québec
demeure la plus faible au Canada, elle est passée de 53 % en 2013 à 60 % en 2016. Ça
représente une hausse de sept points de pourcentage.
Par ailleurs, afin de contenir la
hausse du coût des médicaments, le gouvernement a également introduit des
mesures législatives lui permettant
de participer aux négociations de l'Alliance pancanadienne pharmaceutique.
Cette alliance vise à créer un front
commun avec les autres provinces et le gouvernement fédéral en vue de négocier
conjointement des prix plus bas pour
les médicaments brevetés et génériques. Nous saluons le fait que, dans le cas
des médicaments génériques, l'alliance
tire parti du pouvoir d'achat et du pouvoir réglementaire du gouvernement pour
réduire le prix de manière égale pour tous les Québécois et les
Canadiens. Tout le monde paie le même prix réduit, peu importe que les
médicaments génériques soient remboursés par le secteur public ou par le
secteur privé.
En
terminant, nous reconnaissons les progrès réalisés au cours des dernières
années en matière de contrôle du coût du médicament. Nous croyons que la
meilleure solution pour assurer une couverture durable et abordable pour les médicaments sur ordonnance est celle qui combine à
la fois les forces des systèmes public et privé. C'est pourquoi nous tenions à vous réitérer l'importance de conclure
des ententes qui assureront des conditions équitables pour l'ensemble des assurés, qu'ils soient couverts en vertu du
régime public ou du privé, et ce, dans un souci d'équité et de pérennité du
régime général d'assurance médicaments.
Mme Duhaime (Lyne) : Nous vous remercions et nous sommes maintenant
prêts à répondre à vos questions.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme Chalifoux...
M. Chalifoux, pardon, et Mme Duhaime, oui. Nous allons
maintenant procéder à la période d'échange. M. le ministre et député de
La Pinière, la parole est à vous.
M. Barrette :
Pour une période de...
Le Président
(M. Merlini) : Vous avez 24 minutes à votre disposition.
M. Barrette :
24 minutes? Merci, M. le Président. Bien, alors Mme Duhaime,
M. Chalifoux, merci de vous être présentés
aujourd'hui pour nous faire part de vos observations et de vos bons mots. Je
comprends que vous considérez que les
gestes que nous avons posés étaient favorables pas simplement pour vous, qui
représentez les assureurs de personnes, mais pour la société en général. Je vous en remercie. C'était la
finalité de notre démarche, et je suis très content que vous soyez ici
pour en témoigner. Vous êtes aux premières loges de cette chose-là.
Vous
avez fait quelques commentaires que j'aimerais que vous précisiez. Je pense que
c'est vous, M. Chalifoux, qui
avez insisté sur la nécessité pour vous d'avoir accès au prix de vente négocié.
Vous parliez du générique ou vous parliez des médicaments d'origine?
• (11 h 10) •
M. Chalifoux (Jean-François) : Bien, idéalement, pour l'ensemble des
médicaments. Il n'y a pas de raison d'avoir des régimes à deux vitesses
au Québec. On veut assurer la pérennité de nos régimes d'assurance collective.
Les employeurs en assument une bonne partie
des coûts, les travailleurs assument l'autre partie. Donc, évidemment, dans le
cas qui nous intéresse ce matin, on parle spécifiquement des médicaments
génériques. Puis, quand il y a des ententes cachées qui ne sont pas divulguées ou des ententes secrètes, là, c'est
difficile pour les assureurs de payer le même prix dans le cadre des
régimes privés.
M. Barrette :
Vous comprenez sans doute évidemment que, quand on négocie ces ententes-là,
celles qui sont confidentielles ne
peuvent pas faire autrement que d'être confidentielles. Je comprends votre
point de vue, par exemple, mais il y a des contingences contractuelles que vous
comprenez sûrement. Mais je comprends votre point. Mais c'est bien ça
auquel vous faisiez référence? Vous faisiez référence à la divulgation, mais là
ce serait la divulgation des ententes secrètes, là, ce qui n'est pas...
M. Chalifoux (Jean-François) : On aimerait bien pouvoir partager notre pouvoir
d'achat avec le régime public.
M. Barrette :
Mais par contre vous nous confirmez qu'on était rendus à un point où, tant chez
les employeurs que chez les employés,
le système, en tout cas la méthode qui était utilisée jusqu'à maintenant, si on
n'avait pas agi, était rendu à un point de rupture?
M. Chalifoux
(Jean-François) : Il y a des risques à cet égard, en effet.
D'ailleurs, les petits employeurs au Québec
optent moins pour les régimes d'assurance collective privés que ceux ailleurs
au Canada. Donc, il y a 40 % des petits
employeurs de moins de 50 employés au Canada qui offrent des régimes
d'assurance collective à leurs employés, tandis que c'est 20 % au
Québec.
M. Barrette :
O.K. Ça, j'aimerais ça... Ça déborde un peu du projet de loi, mais vous y
faites vous-même référence, à la
situation du Canada. Il y a un grand débat aujourd'hui, qui a lieu beaucoup
plus dans le Canada anglais que dans le Canada francophone qui est le Québec, un débat sur la pertinence,
l'avantage — on peut
qualifier ça, utiliser plusieurs termes
pour en parler — d'avoir
un régime universel d'assurance médicaments. Qu'en pensez-vous, de ça? Alors,
j'imagine que vous ne serez pas,
fondamentalement, nécessairement, favorables, là, mais quels sont les écueils
que vous y verriez? Bref, si, demain
matin, on se dirigeait vers ça, et je n'annonce rien, attention, je n'annonce
rien, mais c'est un débat qui fait rage, et puisque vous êtes plus
ailleurs qu'au Québec, comment voyez-vous ça, vous?
M. Chalifoux
(Jean-François) : En fait,
c'est une question fort pertinente. Il faut comprendre qu'il y a quelques
principes fondamentaux derrière l'assurance, là, qu'elle soit publique ou
privée.
D'abord,
l'accès. Je pense que l'accès au Québec est bien différent de celui au Canada.
Tous les Québécois ont accès à un
régime d'assurance médicaments, qu'il soit public ou privé. Donc, tous les
citoyens au Québec sont couverts, ce
qui n'est pas le cas au Canada, seulement que les clientèles vulnérables ou
ceux qui ont un employeur qui offre un régime d'assurance collective sont couverts. Donc, il y a une proportion non
négligeable de la population qui n'est pas couverte en vertu d'aucun régime pour ses médicaments. Donc,
ça, ça peut être une situation qui est propre au Canada anglais, qui
amène les parlementaires à être préoccupés de la situation.
Bon,
premièrement, l'accessibilité. Ensuite, il y a l'abordabilité, les coûts comme
tels des régimes. C'est ça qui nous
préoccupe à ce stade-ci quand on se projette... Bon, pour le moment, il n'y a
pas de problématique particulière. On a contenu, à tout le moins, ce
qu'on pouvait contenir. Mais, quand on se projette vers l'avant, les coûts des
régimes de médicaments augmentent plus
rapidement que l'inflation. Donc, ça, ça peut perdurer quelques années, là,
mais, à long terme, pour les
employeurs, pour les travailleurs, ça représente une préoccupation importante.
C'est pour ça qu'on dit : Avant
de tout basculer le système qui existe au Québec, perfectionnons-le. Puis c'est
dans cette optique-là qu'on s'adresse à vous aujourd'hui.
Donc, le
mécanisme d'assurance, là, c'est une certaine forme de partage de la richesse.
On peut tous payer les mêmes prix, on
peut tous avoir les mêmes garanties. En quelque part, il faut juste s'assurer
d'en avoir les moyens. Puis je pense
qu'au Québec le système est loin d'être parfait. On ne prétend pas cela. Mais
travaillons tous ensemble, les parties prenantes,
les gouvernements, la RAMQ, les assureurs privés, les organisations qui sont
preneurs de contrats, les pharmaciens,
afin d'assurer qu'on a encore les moyens de s'offrir des régimes d'assurance
médicaments dans le long terme puis
essayons d'éviter les coûts d'implantation d'un nouveau système qui ne sera pas
parfait lui non plus. Des systèmes d'assurance, j'en ai autant vu en
assurance de dommages qu'en assurance de personnes, ce n'est jamais parfait.
M. Barrette :
Alors, sur ce point-là, M. Chalifoux, Mme Duhaime, je suis parfaitement
d'accord avec vous. J'ai bien
apprécié les commentaires que vous avez faits dans votre introduction. Peu de
gens au Québec réalisent qu'on a une couverture
publique et privée, dans les faits universelle, par différents chemins, par opposition
à ce qui existe ailleurs au Canada, où c'est très partiel, la
partie publique est beaucoup plus partielle que la nôtre, d'une part. Et, d'autre
part, la mécanique que l'on a au Québec fait en sorte que, dans les faits, à
moins que des gens ne respectent pas la loi, tout le monde est couvert, ce qui
n'est pas le cas ailleurs au Canada.
Et vous allez
être probablement amusés d'apprendre que certains de mes collègues
dans les autres provinces, parce que
récemment j'ai été à une conférence fédérale-provinciale territoriale, ont
l'impression que leur système public est plus compréhensif — ça ne se
dit pas en français — est plus
étendu que le leur et plus étendu que le nôtre, alors que vous nous dites
même, dans votre vision, de l'autre côté de la médaille ou de la montagne, vous
constatez vous-mêmes que c'est exactement le contraire, le Québec a le régime le plus
étendu de couverture, et je pense qu'on négocie d'une façon, vous l'avez
noté vous-mêmes, plus agressive que la moyenne canadienne, et c'est au bénéfice
des citoyens.
Et là je vous ouvre la porte à toutes sortes de
suggestions qui vous viendraient à l'esprit ou auxquelles vous avez déjà
réfléchi. Quand vous nous dites qu'il n'y a pas de système parfait — je
suis d'accord avec vous, il n'y a pas de système
parfait — et que
c'est toujours possible d'améliorer les choses, est-ce qu'il y a des choses
qu'on n'a pas faites? Bien, à date,
on en a fait beaucoup. Vous l'avez noté dans votre introduction. Est-ce qu'il y
a des avenues qu'on n'a pas encore soit dessinées soit qui sont visibles
et qu'on n'a pas empruntées, vu de votre côté?
Mme Duhaime
(Lyne) : Bien, en fait, il y
a beaucoup de choses qui ont été faites. Comme on le disait, ce sont des pas dans la bonne direction. Évidemment, de
notre point de vue à nous, puisque, bon, on représente les payeurs privés,
c'est un sujet que vous connaissez bien,
c'est l'inéquité qui s'est créée au fil des ans entre le volet public et le
volet privé du régime général
d'assurance médicaments, donc c'est un aspect qui demeure important. On a déjà
fait des représentations devant d'autres commissions et devant vous, M.
le ministre, et on avait discuté des honoraires des pharmaciens, mais cette inéquité... Et c'est la raison pour laquelle
nous sommes ici aujourd'hui, c'est pour s'assurer que les payeurs privés,
donc les employeurs, les syndicats, les
associations professionnelles, les employés, vont bénéficier des économies que
vous avez négociées pour tenter de réduire
cet écart qui s'est creusé entre les deux volets du régime général d'assurance
médicaments. C'est, à notre avis, là,
l'enjeu majeur. Évidemment, il y a des enjeux comme les médicaments extrêmement
dispendieux pour les maladies orphelines,
dispendieux pour le cancer, et ça, on ne le nie pas, là, mais, pour les payeurs
privés, l'enjeu principal présentement est
l'inéquité entre les deux volets du régime général d'assurance médicaments.
M. Barrette :
Mais, en même temps, avec les mesures qu'on a prises, c'est quelque chose qui
devrait réduire cette inéquité-là ou ce déséquilibre-là. Y a-t-il des
éléments plus spécifiques qui auraient l'effet que vous souhaitez?
Mme Duhaime
(Lyne) : Dans la mesure
qu'il y a des ententes... Bon, on comprend, là, il y a le prix de la molécule,
il y a des choses du médicament lui-même. Il
y a des gestes qui sont posés, que ce soit le fait que le Québec, bon, joint
l'alliance pancanadienne. Donc, il y a des ententes qui peuvent être négociées
ou il y a des... Vous posez des gestes concernant
le prix des médicaments génériques. On travaille sur les honoraires des
pharmaciens. Mais il n'en demeure pas moins qu'il y a beaucoup
d'ententes... Comme l'entente que vous avez signée avec le médicament
générique, évidemment, je le comprends
qu'elle est confidentielle, on comprend la réalité commerciale. Il n'en demeure
pas moins qu'on ne connaît pas cette
entente et on veut s'assurer que les payeurs privés vont avoir leur juste part
des économies qui vont être
réalisées suite à cette entente-là.
M. Barrette :
Je comprends très bien votre position et, fondamentalement, je suis d'accord
avec ça.
Parfait. M. le Président, moi, j'ai fait le tour
des questions que j'avais pour nos invités.
Le Président (M. Merlini) : Merci
beaucoup, M. le ministre. M. le député de Dubuc.
M. Simard : Merci,
M. le Président. Je vais laisser mon
collègue poser ses questions parce
que le ministre a joué dans
mes affaires pas mal, là. Merci.
Le
Président (M. Merlini) :
M. le député des Îles-de-la-Madeleine et adjoint
parlementaire au ministre de la Santé et des Services
sociaux, à vous la parole.
• (11 h 20) •
M. Chevarie : Oui, merci, M. le
Président. Merci à Mme Chalifoux et... merci à Mme Duhaime, plutôt,
et M. Chalifoux, c'est ça,
de votre présentation. On sait que...
Bon, vous l'avez mentionné dans votre
mémoire, mais le régime d'assurance
médicaments a été implanté en 1997.
Ça fait 20 ans, et vous mentionnez qu'il
y a eu, au cours de ces 20 ans là,
le double en termes de coûts. On est passés de 3 milliards à 6 milliards.
Comment est-ce que vous expliquez cette augmentation de coûts là, je dirais, assez extraordinaire au fil des ans? Puis après ça j'aurai une deuxième question
s'il me reste du temps.
Mme Duhaime (Lyne) : Oui. Je
vais commencer puis je laisserai peut-être M. Chalifoux compléter.
Mais, nous,
lorsqu'on regarde les statistiques de tous les assureurs du Québec,
donc au niveau plus macro, ce qu'on voit, c'est qu'il y a
deux phénomènes combinés.
Les médicaments coûtent de plus en plus cher.
Donc, le prix moyen d'un médicament est de plus... Il y a des médicaments très, très dispendieux. Donc,
le pourcentage, par
exemple, de médicaments qui coûtent
plus de 10 000 $ par année,
le pourcentage est de plus en plus élevé. Et les gens prennent
de plus en plus de médicaments. Si on regarde le nombre de prescriptions
par assuré en 1997 et le nombre aujourd'hui, on a vu une augmentation importante.
Donc, il y a
l'effet combiné du coût du médicament lui-même et d'une plus grande
consommation de médicaments, qui
n'est pas nécessairement négative. Elle peut être due au fait que la
recherche a trouvé des nouveaux médicaments. Il y a beaucoup plus de
médicaments contre le cancer. Mais l'effet combiné des deux facteurs ensemble,
à mon avis, explique en partie, en grande partie, la hausse du coût des
médicaments.
M. Chalifoux
(Jean-François) : Le
3 milliards à 6 milliards, là, quand on tient compte des années, de
l'inflation normale, de la
consommation plus importante, ce n'est pas ça, ce n'est pas tellement ça qui
nous préoccupe tant que l'écart grandissant
entre les prix des médicaments payés par les travailleurs, et les employeurs,
les syndicats, les associations professionnelles.
Quand on compare, là, pour les mêmes médicaments avec ceux payables en vertu du
régime public, là, c'est comme si on
était dans une situation où, à chaque fois qu'on économise 1 $ dans le
système public, bien, ce dollar-là était
transféré dans le système privé. Puis c'est ce dialogue qu'on tente
d'entreprendre depuis quelques années déjà afin de s'assurer... On peut se comprendre qu'il y a une certaine subvention
entre les clientèles du public, qui sont, disons-le, là, admettons-le, des gens davantage privilégiés
du fait qu'ils occupent un emploi à temps plein pour la plupart, mais c'est
cet écart-là qui est grandissant, là, donc
qui était négligeable en 1997, est devenu 17 % 20 ans plus tard, puis ça
augmente d'un point par année. Donc,
à un moment donné, là, il faut contenir cette escalade-là des coûts dans les
régimes privés d'assurance pour les amener dans une fourchette, disons,
d'écart plus raisonnable.
M. Chevarie :
Oui, deuxième question. Si j'ai bien lu votre mémoire, vous dites que, par
rapport aux médicaments génériques, l'écart est de 37 %. C'est ça?
M. Chalifoux (Jean-François) :
Oui.
M. Chevarie :
Maintenant, j'ai compris aussi que le volume de médicaments couverts par les
assurances privées est plus élevé que
par le régime public. Donc, ce n'est pas une question de volume qui fait en
sorte que l'écart se traduit par 37 %.
M. Chalifoux
(Jean-François) : Là, on va
prendre des pommes avec des pommes, là, dans nos comparaisons, là. Le 37 %, c'est à médicament équivalent, là.
Donc, c'est les mêmes régimes, c'est les mêmes médicaments. Donc, on exclut,
là, ceux qui ne sont pas couverts
dans le régime public. Mais, si on prend les médicaments qui sont couverts en
vertu des deux régimes, l'écart est de 37 % entre ceux payables
dans le privé versus le public, là.
M. Chevarie : Merci.
Le
Président (M. Merlini) : Ça va? Merci, M. le député des
Îles-de-la-Madeleine. M. le député de Trois-Rivières.
M. Girard :
Merci beaucoup, M. le Président. Mme Duhaime, M. Chalifoux, on a eu
l'occasion de se rencontrer à plusieurs reprises dans différents dossiers,
donc c'est un plaisir de vous revoir.
Je vais faire
un petit peu de pouce sur la question de mon collègue au niveau du prix du
médicament que l'on paie au niveau public ou au niveau privé. Notre
gouvernement a instauré, depuis quelques semaines, depuis septembre, la facturation, que vous avez
saluée d'ailleurs, avec le prix de la molécule, les honoraires de formation et
la marge du distributeur. Je me pose
la question comme citoyen : Moi, j'ai un régime privé, je veux acheter un
médicament xyz demain matin, à la
même pharmacie, mon voisin qui a le régime public va acheter le même
médicament, si on se rencontre le soir, on compare nos factures, on
n'aura pas payé le même prix?
Mme Duhaime (Lyne) : Non, et principalement, là, en raison des
honoraires des pharmaciens, qui ne sont pas les mêmes pour les volets public et privé. Donc, le ministre négocie des
ententes avec l'Association québécoise des pharmaciens propriétaires. Donc, cette entente encadre les
honoraires qui sont facturés par les pharmaciens, alors qu'il n'y a pas de
telle entente pour le volet privé. Alors, les honoraires des pharmaciens
sont plus élevés pour le volet privé du régime.
M. Girard :
Est-ce que la facturation qui a été mise en place, le fait que ça devienne
beaucoup plus ouvert au niveau des
prix, est-ce que vous pensez que ce phénomène-là va pouvoir avoir un impact?
Les gens vont pouvoir, entre guillemets, magasiner leurs médicaments
d'une pharmacie à l'autre. Est-ce que vous pensez que ça peut avoir un effet à la baisse, au niveau de la facture globale
du médicament, pour quelqu'un qui est assuré dans le privé? Parce que vous mentionniez tantôt qu'il y a 56 % des
Québécois dans un régime privé, donc plus de la moitié des Québécois sont
dans un régime privé. À ce moment-là, est-ce
que cette facturation-là, comme je le disais tout à l'heure, qui est quand
même drôlement intéressante, qui a été mise
en place récemment, est-ce que vous croyez que ça va avoir un impact à moyen
ou long terme pour pouvoir contribuer à la
réduction du prix des médicaments pour le consommateur et pour l'ensemble
des assureurs au Québec?
Mme Duhaime
(Lyne) : À notre avis, cette mesure comportait deux objectifs.
Le
premier était de sensibiliser le patient, donc le consommateur, le client à la
pharmacie, aux composantes de la facture,
donc de comprendre que le prix d'un médicament, il y a des honoraires qui sont
facturés par le pharmacien et qu'il y
a une marge de grossiste, donc, et on peut voir, là, lorsque la nouvelle
facture est arrivée en pharmacie, il y a eu beaucoup de couverture dans les médias, donc, et c'était un des
objectifs, que les gens prennent conscience des composantes de leur
facture en pharmacie. Bon, ça, c'est la première chose.
L'autre
élément était de pouvoir maintenant aider les Québécois à faire des choix
éclairés. Donc, les assureurs veulent
déployer des outils de comparaison pour aider les Québécois parce qu'on le
comprend, la personne qui va toujours à
la même pharmacie chercher le même médicament, c'est difficile pour elle de
comparer : Bien, si j'allais de l'autre côté de la rue ou si j'allais ailleurs, bien, combien
coûterait le médicament? Donc, c'est difficile. On est un peu captifs d'une
pharmacie, hein?
Donc, nous, comme les
assureurs paient généralement 80 % de la facture et 20 % est payé par
le patient en coassurance, on s'attendait à
recevoir cette information détaillée et ensuite de pouvoir développer des
outils de comparaison. Mais il y a présentement un litige qui oppose la
RAMQ à l'Association québécoise des pharmaciens propriétaires parce que les pharmaciens contestent cette
position de la RAMQ à l'effet que cette information doit aussi être donnée
aux assureurs. Donc, il y a un litige en
cour, et donc, à notre avis, la mesure n'a pas encore pris tout à fait son...
elle n'a pas déployé tout à fait son effet, là.
M. Girard :
Mais, quand même, c'est une bonne mesure...
Mme Duhaime
(Lyne) : Tout à fait.
M. Girard :
...qui va pouvoir contribuer à diminuer le coût pour les citoyens parce que,
là, on parle de quelqu'un qui va dans une pharmacie x et l'autre, la
pharmacie y, qui ne paient pas le même prix, mais aussi on comprend que deux
personnes dans la même pharmacie, pour le même médicament, ne paient pas non
plus le même prix.
M. Chalifoux (Jean-François) : C'est un premier pas dans la bonne direction,
mais ce n'est pas une mesure qui est suffisante en soi pour générer des
économies substantielles, là. Donc, les assureurs devront faire leur travail de
sensibilisation auprès des participants de régimes d'assurance collective, et
les participants des régimes d'assurance collective devront également adapter
leur comportement. Donc là, on était dans une situation où les gens... dans un environnement très peu transparent par
rapport au prix des médicaments. Là, il y a
plus de transparence, mais qu'est-ce
que
les citoyens vont faire de la transparence, c'est ça qui va
déterminer le niveau d'économie, puis les pharmaciens vont aussi s'adapter
à cette nouvelle réalité de transparence de prix là.
M. Girard :
Donc, ce que vous nous mentionnez, c'est que c'est important de continuer à
travailler dans ce sens-là pour s'assurer
que les gens paient le juste prix des médicaments, donc les gens paient un prix
qui est équitable, peu importe
l'assureur, peu importe qui est la personne qui va acheter le médicament, qu'on
ait un prix qui soit raisonnable, qui soit équitable, qui soit en
fonction des coûts des médicaments, etc. Merci beaucoup.
Le Président
(M. Merlini) : Merci, M. le député de Trois-Rivières. M. le
député de Dubuc.
• (11 h 30) •
M. Simard : Merci,
M. le Président. D'abord,
je vous salue. Bienvenue dans votre maison qui est l'Assemblée nationale.
Je vais vous poser la question suivante par
rapport à ce que mes collègues ont soulevé comme, bien sûr, quelques questions là-dessus. Ne croyez-vous pas que l'association dont vous êtes les représentants devrait à
ce moment-ci mettre
en compétition des chaînes de pharmacies pour être en mesure justement de s'assurer que les
pharmacies, peu importe la chaîne
qu'ils seront, là, puissent se rapprocher de plus en plus de ce que le ministre
a négocié? Bien sûr, en réalité, on est
dans un système, il faut bien le dire, là, capitaliste, et les gens...
Nécessairement, vous êtes venus nous le dire, que vous êtes pris en otages un peu dans ça, là. Mais, si
vous faites jouer la compétition entre les différentes chaînes, potentiellement vous arriveriez peut-être au but que
vous nous soulevez.
Mme Duhaime
(Lyne) : Un très bon point.
C'est ce qu'il se fait d'ailleurs à
l'extérieur du Québec.
Au Québec, il y a
certains enjeux d'ordre juridique. Donc, le cadre juridique est beaucoup
plus strict au Québec que dans le reste du Canada, donc il
y a certaines difficultés.
Bon, une des difficultés, par
exemple, a trait à ce qu'on appelle
le dirigisme, donc l'interdiction de forcer une personne à se procurer
son médicament dans une pharmacie en particulier. Bon, il y a une nouvelle disposition qui a été incluse dans la Loi
sur l'assurance médicament, mais il y a des dispositions similaires même
dans la Loi sur l'assurance maladie
concernant les professionnels de la santé. Il y a aussi des dispositions dans
le code de déontologie des
pharmaciens, donc on pourrait se demander, et je ne dis pas que ce n'est pas
possible, il ne faudrait pas qu'on me
cite pour avoir dit que ce n'était pas possible, mais on peut se demander, si
on avait une entente avec différentes bannières, s'il serait possible pour les
bannières d'imposer ou de forcer les pharmaciens à ne facturer que ces montants-là.
Il y a certaines difficultés juridiques.
Donc, ce n'est pas qu'on n'y a pas pensé, c'est ce qui se fait largement à l'extérieur
du Québec.
M. Simard : Merci, M. le
Président. C'était ma question.
Le
Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup, M. le député de Dubuc. Maintenant, je cède la parole au député
de Saint-Jean, porte-parole de l'opposition officielle. À vous la parole pour
votre bloc d'échange, qui est de 14 min 30 s. À vous la
parole.
M. Turcotte :
Merci, M. le Président. À la page 3 de votre mémoire, puis vous en avez
quand même... vous avez abordé la question, puis il en a été question en partie,
là, avec les échanges avec M. le ministre. Quand vous dites : Nous estimons que le prix de vente garanti inscrit à la
liste des médicaments devrait être le prix négocié lors de ces ententes,
à combien vous évaluez la différence?
M. Chalifoux
(Jean-François) : Je n'ai
pas la réponse à cette question-là. Tout va dépendre de l'entente qui est
négociée avec la compagnie pharmaceutique par le gouvernement, là. Donc, on n'a
pas cette information-là pour être en mesure... On indemnise l'assuré, le patient en fonction du
prix de liste. Nous, ce qu'on connaît, c'est le prix de liste.
M. Turcotte :
Mais vous estimez qu'il y a une assez grande différence entre les deux, sans
savoir quelle est cette différence-là, pour demander l'équité dans ce...
M. Chalifoux
(Jean-François) : Dans la
mesure où le gouvernement a maintenant l'opportunité de négocier des ententes directement avec les compagnies de
médicaments génériques, puis j'imagine qu'il y aura, s'il n'y a pas déjà, des
ententes qui sont négociées à moindre prix, qu'on veut avoir accès. On ne
voudrait surtout pas se retrouver dans une situation
où les prix de liste augmentent puis on subventionne davantage qu'on ne le fait
aujourd'hui les achats par le régime public
d'assurance médicaments. Donc, en quelque part, on... Moi, ce que je perçois,
c'est créons un «level playing field», là, bien que ce soit un terme
anglais, là, créons un terrain de jeu nivelé, ayons accès aux mêmes prix.
Combinons nos pouvoirs d'achat, en fait. Ça serait une stratégie tout à fait
opportune et bénéfique pour l'ensemble des Québécois et Québécoises, et
négocions les meilleures conditions pour tous et toutes.
M. Turcotte :
Comment qu'on peut arriver à cet objectif-là quand on sait qu'on ne peut pas
avoir ces données-là? Parce que, même
le ministre l'a dit, c'est confidentiel, les ententes. Donc, comment vous
pouvez savoir combien payer si le gouvernement puis la compagnie
pharmaceutique ne dévoileront pas le montant?
M. Chalifoux
(Jean-François) : Bien,
c'est pour ça qu'on dit que c'est le prix de liste qui doit être négocié ou, si
le prix... il faut que le prix négocié devienne le prix de liste, là.
M. Turcotte :
Quand vous dites que vous voudriez combiner le pouvoir d'achat des deux, du
public et du privé, avez-vous en tête un mécanisme à ce sujet-là?
Mme Duhaime (Lyne) : Oui, depuis la
création de l'Alliance pancanadienne, donc on n'est pas au niveau québécois,
mais les provinces se sont regroupées pour justement améliorer leur pouvoir
d'achat, leur pouvoir de négociation
avec les compagnies pharmaceutiques, et nous demandons, mon association, au nom
des payeurs privés, de joindre l'Alliance
pancanadienne pour qu'on puisse négocier au nom de tous, donc que ce soit pour les assurés. Dans les
autres provinces, le régime public
prend une forme différente, là, du Québec, mais, pour les gens, peu importe
qu'on soit assurés par un volet
d'assistance, par le volet public ou par une assurance privée, on demande à ce
que tout le monde ait accès aux rabais qui sont négociés avec les
compagnies pharmaceutiques.
M.
Turcotte : Puis
cette demande-là, est-ce qu'elle a trouvé écoute?
Mme Duhaime (Lyne) : À mon avis, là, puis je ne participe pas directement à ces discussions, mais je
comprends que l'alliance est quand même
assez récente, donc elle est en train elle-même d'établir son mode de
fonctionnement, de s'organiser, de trouver sa gouvernance, et Québec a
joint l'alliance il y a quand même pas très longtemps, peut-être un an et demi. Donc, je pense,
on nous entend. Est-ce que c'est maintenant? Peut-être que non. Je
pense que... mais on continue
la discussion avec eux.
M.
Turcotte : Puis,
dans les autres provinces canadiennes, est-ce que les compagnies d'assurance
sont membres de l'alliance?
Mme Duhaime (Lyne) :
De l'alliance?
M.
Turcotte :
Oui.
Mme Duhaime
(Lyne) : Non. En fait, mon association représente toutes les
compagnies au Canada. Moi, je m'occupe du Québec,
mais donc on couvre 99 % du marché au Canada, et il n'y a aucune
compagnie d'assurance, aucun payeur privé qui est membre de l'alliance.
C'est notre demande.
M.
Turcotte :
Votre demande, c'est pour l'ensemble des compagnies d'assurance du Canada?
Mme Duhaime
(Lyne) : Exactement.
M.
Turcotte : O.K.
Proprement dit, pour le projet de loi, est-ce qu'il y a des choses que vous considérez
qu'elles devraient être améliorées ou modifiées dans le projet de loi?
Mme Duhaime
(Lyne) : On n'a pas de commentaire sur le projet de loi lui-même.
M.
Turcotte :
O.K. Ça fait que, dans ce cas-là, vous...
M. Chalifoux (Jean-François) : C'est l'opportunité d'entretenir le dialogue sur
les coûts d'assurance médicaments au Québec.
M.
Turcotte : Dans ce cas-là, vous allez être d'accord aussi pour qu'on saisisse l'occasion de faire
un dialogue ensemble sur une question aussi importante. Vous avez abordé la question
de la transparence tantôt, la question entre autres de la facture détaillée pour les pharmaciens. Quand on voit, aux États-Unis,
avec l'Obamacare où les compagnies d'assurance ont une certaine obligation de rendre public le montant que les assurés ont
versé aux compagnies d'assurance en
comparaison du montant qu'elles ont versé pour l'achat de médicament, on n'a
pas ça ici au Québec, cette transparence-là ou
cette ouverture-là de rendre publiques ces données-là. Qu'est-ce que vous en
pensez? Est-ce qu'on devrait appliquer ça ici au Québec aussi?
Mme Duhaime (Lyne) : En fait, c'est très intéressant que vous souleviez cette question-là, mais, dans les faits, on a
les statistiques et on est dans une situation au Canada, et c'est la même chose
au Québec, là, qui est totalement différente.
En fait, le ratio, là, prime-prestation au Canada est autour de
87 %. Donc, ce sont les statistiques que nous avons et je vous encourage à en parler avec les autorités réglementaires de
surveillance de la solvabilité des assurances comme l'Autorité
des marchés financiers et
l'équivalent à l'extérieur du Québec. Ils vont confirmer ces chiffres-là. Le marché
de l'assurance collective au Canada
et au Québec est extrêmement compétitif. Et il y a... En fait, s'il y avait
une mesure comme ce qu'on retrouve
pour l'Obamacare, elle n'aurait aucune application parce que les ratios sont très,
très élevés au Canada.
M. Chalifoux (Jean-François) : Puis je dirais que l'environnement québécois, là, il y a déjà pas mal de transparence, là. C'est peut-être pas public, les informations, là, mais chaque
preneur de contrat — grand
syndicat, association professionnelle, employeur — qui
sont soit représentées par des grandes firmes d'actuaires-conseils ou des
courtiers en assurance collective
certifiés qui... ont accès autant... lors des dépôts de soumission dans le cadre d'un changement de l'assureur à
des détails statistiques quant aux performances des régimes, quant aux
coûts des médicaments, quant aux frais généraux
des assureurs. C'est la même chose à chaque renouvellement, à chaque année,
donc, il faut comprendre que ce sont des régimes d'assurance collective qui sont renouvelables sur une
base annuelle lors de révision de tarification. À chaque année, il y a dépôt d'une proposition de renouvellement qui détaille précisément, pour chacune des garanties, les taux de sinistre, les taux de frais qui permettent
aux actuaires-conseils, aux courtiers de faire leurs analyses et de formuler
des recommandations aux employeurs, aux syndicats, aux associations professionnelles, de renouveler ou de magasiner, de retourner en
soumission.
Donc, ces éléments-là
sont transparents. On est supervisés par l'Autorité des marchés financiers, on
dépose annuellement nos rapports annuels. Donc, on salue, là, toute mesure
visant à améliorer la transparence. Je vous dirais qu'il y en a déjà passablement, là, pour les principales parties
concernées, là, que sont les employeurs, les associations
professionnelles, les syndicats, qui assument la grande partie des régimes, et
qui sont les preneurs de contrats qui supervisent la performance des régimes d'assurance
collective.
• (11 h 40) •
M.
Turcotte : Ça fait
que comment... Les preneurs de contrat, comme vous les appelez, là, eux, ils
reçoivent ça avec leur renouvellement
de politique d'assurance,
ils ont l'information pour leurs compagnies qu'ils ont parce qu'il y a un intérêt. Une compagnie d'assurance veut que tel
syndicat, ou telle organisation, ou telle entreprise renouvelle avec eux,
donc c'est sûr qu'ils vont essayer de leur
donner de l'information. Est-ce que c'est possible qu'ils aient l'information
d'autres compagnies aussi? Parce que
tantôt j'entendais parler des gens qui disaient : Bon, on pourrait
magasiner notre médicament, quand on
va à la pharmacie, au même titre que des gens, des preneurs de contrat
pourraient vouloir magasiner leur compagnie
d'assurance aussi. Donc, est-ce que... comment ils font pour avoir
l'information d'autres compagnies d'assurance?
M. Chalifoux (Jean-François) : Bien,
ça, évidemment, à chaque année, nous, on présente chez SSQ notre renouvellement
auprès du preneur de contrat, mais, dépendamment de la taille de l'employeur, à
une fréquence de deux, trois, cinq, huit
ans, 10 ans, dépendamment du preneur, là, va... ce qu'on appelle un retour
au marché et redemander des
soumissions auprès de nos concurrents qui sont présents au Québec. Et, à ce
moment-là, ils vont pouvoir revérifier la justesse des niveaux de tarif qui sont chargés par SSQ, là. Donc, ça se
fait. Il y a des mises en marché régulièrement au Québec, là, puis il n'y a aucun preneur de contrat
d'assurance collective qui va vous dire qu'il n'y a pas d'assureurs qui sont intéressés à soumissionner auprès de leur
entreprise, là, au contraire, il y a une grande, grande compétitivité dans
le marché. Puis c'est à ce moment-là que
l'actuaire-conseil ou le courtier d'assurance spécialisé pourra analyser les
écarts entre les différentes propositions des nombreux assureurs qui
participent à ces dépôts-là.
Mme Duhaime (Lyne) : Et même que
souvent les employeurs de plus petite taille sont ceux qui vont le plus souvent au marché parce qu'ils sont plus mobiles.
Donc, un employeur de très, très grande taille, bien, un, a un pouvoir de négociation beaucoup plus fort et il est équipé
avec des professionnels et, bon, va peut-être rester plus longtemps auprès
du même assureur, mais les employeurs de petite taille vont au marché
régulièrement, ce qui tend à avoir un effet à la baisse, là, sur les prix.
M.
Turcotte :
O.K. Est-ce qu'entre les compagnies d'assurance la couverture... Je comprends
qu'elle n'est pas toujours la même,
là. Entre les médicaments, est-ce que c'est réputé que, peu importe la
compagnie d'assurance privée... Parce
qu'il y a un écart, que vous disiez tantôt, entre le régime public et le régime
privé, ce n'est pas tous les médicaments qui sont couverts. Est-ce que,
d'une compagnie d'assurance à l'autre, il y a une différence?
M.
Chalifoux (Jean-François) :
Très bonne question, oui, il y a des différences, mais la différence ne
provient pas de la compagnie
d'assurance à l'autre. La différence provient de chaque preneur de contrat,
d'un preneur de contrat à l'autre en
fonction de sa capacité de payer, de sa propre réalité du mixte générationnel
qu'il puisse y avoir au sein de son entreprise, au sein de son
syndicat... va décider de ce qui est couvert ou non. Évidemment, on les
accompagne dans ces choix-là. Il y a une très forte proportion des régimes, là,
qui sont standardisés parce que d'un employeur à l'autre, évidemment, un employeur ne veut pas se mettre en
non-compétitivité par rapport à un autre, mais la réalité économique de chaque preneur de contrat va faire en sorte que
la liste des médicaments va être plus ou moins étendue, l'encouragement
à l'innovation, donc, certains employeurs
vont vouloir davantage d'information avant d'ajouter un nouveau médicament
à la liste, d'autres vont être plus agressifs
et adopter les nouveaux médicaments le plus rapidement possible. Donc, évidemment, c'est très variable, mais nous, on
répond aux preneurs de contrat qui souhaitent ajouter ou non des médicaments
à la liste ou en retirer, là. C'est ça, la dynamique, là.
M.
Turcotte :
Mais je comprends qu'ils ne doivent pas choisir médicament par médicament, là,
il doit y avoir des forfaits, si on
peut dire, là, tel type de... en fonction des prix puis des types aussi, là.
Puis là vous mentionnez aussi en
fonction d'une... le portrait sociodémographique des employés, ça peut avoir
plus tendance à avoir tel type de maladie ou autre, donc nécessiter des coûts, donc être plus adapté à leur
clientèle, si on peut dire, là, leur main-d'oeuvre, donc. Mais sinon, comment... entre le moment où un preneur, quelqu'un, un syndicat, une
entreprise qui décide d'aller dans une
compagnie d'assurances, Mme Duhaime, vous, vous dites : Certaines
entreprises importantes peuvent avoir sûrement... exemple, le gouvernement du Québec a
quand même un pouvoir assez important de négociation, des grandes centrales
syndicales versus une entreprise qui a peut-être 50 employés,
100 employés, ce pouvoir-là lui permet de mettre dans la balance auprès de la compagnie d'assurances...
de dire : Bien, si, en fonction... parce que tout augmente, là,
c'est naturel, là, le coût de la vie augmente. Donc, de pouvoir
maintenir un montant jugé acceptable pour l'assuré, la compagnie ou l'organisation, ce pouvoir-là de négociation qui
est plus grand, c'est parce qu'ils
ont les informations des autres compagnies et ils peuvent négocier avec
la compagnie d'assurances elle-même.
Le
Président (M. Merlini) : Merci. Je vais permettre la réponse. Ça
termine avec l'opposition officielle, mais allez-y avec votre réponse.
M. Chalifoux (Jean-François) : Pas
certain de bien saisir la question. Mais ce que je...
M.
Turcotte : Je comprends, là... le gouvernement du Québec qui, mettons, dit : À chaque année... pas à
chaque année, mais peut-être
aux cinq ans, peu importe, on renouvelle notre compagnie. Est-ce qu'on reste chez x ou on va chez y?
Donc, c'est parce qu'ils ont eu l'information dans les soumissions des autres.
Mais il faut qu'ils embarquent dans ce processus-là.
Ils sont accompagnés, comme vous avez mentionné, mais une plus petite
entreprise, qui n'a pas le pouvoir de négociation du nombre, mais qui
n'a pas aussi tout l'accompagnement, elle, elle est un peu plus dépourvue, là.
Mme
Duhaime (Lyne) : Non, c'est
un peu... En fait, bien, pas l'inverse, mais les plus petites, elles vont plus
souvent au marché. Elles se font
accompagner aussi par... souvent le courtier, donc ça peut être, soit des
consultants ou des courtiers, ils se
font accompagner. Les plus petites entreprises vont au marché, puis ce n'est
pas un processus très, très lourd, là, donc,
régulièrement, les plus petites entreprises vont au marché, donc, ce qui fait
en sorte qu'elles peuvent bénéficier de très bons tarifs, hein?
Le Président (M. Merlini) : Merci,
Mme Duhaime. Oui, M. Chalifoux?
M.
Chalifoux (Jean-François) :
L'environnement concurrentiel est tel au Québec que même les petits employeurs
peuvent négocier des ententes intéressantes.
Le
Président (M. Merlini) :
Merci pour ces réponses. Maintenant la parole va au député de Lévis, porte-parole du deuxième groupe d'opposition,
pour son temps d'échange de 9 min 30 s. À vous la parole.
M.
Paradis (Lévis) : Merci, M. le Président. Mme Duhaime, M. Chalifoux, vous avez parlé
d'équité essentiellement beaucoup dans ce que l'on est train de gérer ici. Je vais
tenter de résumer votre pensée parce
qu'elle était quand même importante, puis il y a probablement des gens
qui apprennent des choses, là, la différence de coût de 37 % payé par le privé par rapport au public, le fait que vous ayez
et que vous couvriez davantage de médicaments que le régime public. Vous savez les gens, hein, on une assurance. À
partir du moment où le médicament est remboursé... Je comprends l'outil,
la transparence, c'est parfait, tout le monde salue cette transparence dans...
Maintenant,
la facturation, est-ce que ça aura un effet sur le client ou on se contentera
de dire : Bien, de toute façon, l'assurance
paie? Puis on comprend qu'on a eu des discussions faisant en sorte que vous ne
puissiez diriger un client vers un établissement unique, alors on vient
d'en parler également, il y a des éléments là-dedans. Alors, ça faisait partie peut-être des choses qui expliquent la marge et la
différence, ce fameux 37 % pour les médicaments génériques, dans la
mesure où vous constatez qu'il y a une
différence sur l'honoraire que vous ne pouvez avoir... cette entente privée ne
peut pas être rendue publique, que
vous souhaiteriez que le prix de vente garanti inscrit à la liste des
médicaments soit le prix négocié — bon, c'est des demandes que vous avez. Avec
les réponses que vous avez eues, on fait quoi, très concrètement? Votre vision. Qu'est-ce qu'on fait très
concrètement pour faire en sorte que cette marge diminue, parce que plus vous
payez cher, plus inévitablement les employeurs paieront des contrats
plus élevés puis ça a un effet sur le client qui a aussi à assumer ses primes.
Alors, on
fait quoi, là? L'entente ne peut pas être rendue publique, les honoraires, vous
ne les contrôlez pas, vous ne faites pas partie de l'alliance
pancanadienne; votre solution, c'est quoi?
• (11 h 50) •
M. Chalifoux
(Jean-François) : Très
concrètement, on veut que le prix négocié par le gouvernement, là, peu importe comment le gouvernement en arrive à son
prix, se retrouve sur la liste des médicaments. Donc, le prix final, le prix net, là, payé par le gouvernement en vertu du
régime public, que ça devienne, pour chaque médicament, le prix sur la
liste. Et là, de cette façon-là, les assureurs vont payer le même prix. Ça,
c'est pour le prix de la molécule.
Par la suite,
bien, pour ce qui est des honoraires professionnels des pharmaciens, nous
entrons dans une négociation avec
l'Association québécoise des pharmaciens propriétaires. Nous avions une entente
qui est expirée depuis le 31 octobre dernier, et nous avons une table de négociation auquel les parties
prenantes, les assureurs, les tiers payeurs, là, ceux qui offrent les
solutions technologiques pour assurer le paiement des médicaments en pharmacie
et les pharmaciens propriétaires, bien, nous
négocions présentement, là, une nouvelle entente qui nous permettra de
satisfaire l'ensemble des parties prenantes au dossier.
M. Paradis (Lévis) : Alors,
vous êtes en travaux...
M. Chalifoux (Jean-François) :
On est là-dedans.
M. Paradis
(Lévis) : ...présentement
pour arriver à diminuer, en tout cas certains éléments irritants faisant en
sorte qu'il y ait une différence
assez importante entre le prix payé par le public versus par le privé. Je me
permettrai, et sans entrer dans la négociation, mais, je veux dire,
regarde, ce sentiment cette urgence que vous exprimez, elle est perçue également par les pharmaciens avec lesquels vous
devez négocier? Alors, inévitablement, ça doit se rendre quelque part. Ça fait partie des outils maintenant. Vous
dites : Nous souhaiterions faire partie de l'Alliance pancanadienne
pharmaceutique. C'est un souhait pour
l'ensemble des assureurs canadiens. Et il n'y a pas de réponse affirmative, là.
Pourquoi? Parce que c'est jeune,
parce qu'on est en train d'analyser ou parce qu'il y a une fin de non-recevoir?
Comment vous l'analysez?
Mme Duhaime
(Lyne) : Parce que c'est
jeune. C'est en train de se structurer, à mon avis, puis parce que ce n'est
pas simple, parce qu'évidemment l'alliance
pancanadienne, pour ce qui est du médicament breveté, si on met de côté le
générique, fait face aux mêmes situations
que le ministre, c'est-à-dire ce n'est pas toujours commercialement facile de
rendre ces ententes publiques. Ce n'est pas toujours facile aussi de négocier
au nom de tous les Canadiens, dans ce cas-là
les Canadiens, là, parce que ça pourrait avoir un effet à la hausse sur le prix
qu'on va réussir à négocier avec les compagnies
pharmaceutiques. Ce n'est pas simple, mais on pense que c'est équitable. Et
c'est là qu'on devrait arriver.
M. Paradis (Lévis) : Et aussi
vous êtes en demande continuelle...
Mme Duhaime
(Lyne) : Exact.
M. Paradis (Lévis) : ...faisant en sorte que vous puissiez, en tout
cas, vous espériez avoir une réponse positive éventuellement. Aussi dans
ce dossier-là vous êtes en démarche actuellement.
Mme Duhaime
(Lyne) : Exact.
M. Paradis (Lévis) : Vous avez abordé la question des coûts importants que pourrait générer
un régime universel d'assurance
médicaments, hein? Et c'est important. Il y a des gens qui disent : Il
faut que ça passe par là. Il y a des gens qui y croient, d'autres pas. Mais vous auriez pu nous donner davantage
de détails sur votre perception. En fait, concrètement, pourquoi, selon vous,
un tel système engendrerait des dépenses supplémentaires pour l'État? Je pense
qu'il y a des gens qui questionnent la vision en fonction d'un régime
comme celui-là.
M. Chalifoux (Jean-François) : Le coût de mise en place d'un régime comme
celui-là. En partant, là, le régime n'existe
pas aujourd'hui, là. Il y en a déjà, un système, au Québec, qui couvre
100 % des Québécois. Je ne parlerai pas pour les autres provinces
canadiennes, là. Au Québec, il y a déjà un système qui est en place. Si on
avait l'impression qu'on avait tout fait
pour contenir les coûts, que notre système était optimisé, mais qu'on
n'acceptait pas la résultante, ou les
coûts qui en découlent, bien là, je vous dirais : Bien, peut-être que ce
qui nous reste à explorer comme avenue, c'est le régime public. Mais on est loin d'être là. On n'a pas combiné nos
pouvoirs d'achat, on ne fait pas partie encore de l'alliance canadienne. Il y a toutes sortes de choses qu'on
peut mettre en branle pour parfaire le système actuel. On est dans une négociation avec l'AQPP comme je viens de le
mentionner. Donc, donnons-nous l'occasion. Le régime général d'assurance
médicaments a 20 ans. C'est
relativement jeune. Donc, donnons-nous l'occasion de le parfaire avant de le
balancer par les fenêtres et de le remplacer par un nouveau système qui
entraîne son lot de coûts et d'iniquités de toute façon.
Mme Duhaime
(Lyne) : ...
M. Paradis (Lévis) : Je comprends. Non, je comprends,
Mme Duhaime. Je comprends la mise en place, la structure, hein, rien que de redéployer quelque chose. Mais
supposons, et votre vision va plus loin que ça, après l'implantation, dans
la mesure où on applique cette structure-là,
les irritants demeureraient. Il n'y a pas de plus-value à ça, mis à part le
fait qu'on construise quelque chose de neuf.
Mme Duhaime (Lyne) : ...il y a l'aspect de... Il y a des coûts. Et l'autre
chose, c'est l'accès aux médicaments. Et, si on regarde, bien, par
exemple, au Québec, on a un système, un régime public-privé avec un accès très,
très bon. C'est-à-dire 100 % des
résidents du Québec ont accès à l'assurance médicaments. Et la gamme de
médicaments qui est couverte, elle est très grande. Si on regarde ce qui
se fait, par exemple, l'exemple qu'on va vous citer sûrement de la Nouvelle-Zélande, là, bien, en Nouvelle-Zélande,
ils n'ont pas accès à tous les médicaments auxquels on a accès ici au Québec, et même au Canada. Donc, souvent avec une
nationalisation de la pharmacie, du médicament, bien, vient une
réduction de l'accès aux médicaments. Donc souvent, à quels médicaments? Aux
médicaments les plus dispendieux, innovateurs, maladies orphelines. Donc, ça
devient un choix de société très, très important à faire.
M. Paradis (Lévis) : Intéressant. Je vous poserai une question en
terminant, parce que le temps file. Mais pourquoi, et les gens auront compris aussi dans votre exposé
et dans votre mémoire que, les assureurs privés, par le régime auquel les gens souscrivent, bon, vous couvrez 12 000
médicaments par rapport à 8 000 dans le public, aïe! c'est 4 000 de
différent, là, c'est 33 % de plus, et les gens vont dire : Ah!
pourquoi?
M. Chalifoux
(Jean-François) : La clientèle est différente. Nous, ce qu'on vise à
faire dans l'industrie de l'assurance
privée, c'est d'avoir une main-d'oeuvre performante, productive, accompagner
l'employeur, du présentéisme au
travail. Donc, dans bien des cas, même si c'est un médicament qui est pour un
enfant, s'il n'est pas couvert en vertu du régime public, mais que ça permet à quelqu'un de demeurer au travail,
un homme ou une femme, plutôt que de devoir accompagner son enfant en période difficile, si ça guérit l'enfant, même
chose pour l'employé, qu'il puisse se présenter au travail le matin avec moins de douleurs... Donc,
même si le médicament... il y a un intérêt pour l'employeur à ce que sa main-d'oeuvre soit performante et productive. Donc
là, on rentre dans un tout autre... dans des principes bien différents,
puis c'est l'employeur qui détermine, là, qu'est-ce qui est bon pour sa
performance et sa productivité.
M. Paradis
(Lévis) : Très clair pour moi. Merci, M. le Président.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Lévis. Mme
Duhaime, M. Chalifoux, représentant l'Association canadienne des
compagnies d'assurances de personnes, merci pour votre contribution à nos
travaux.
J'informe
les membres de la commission que, lorsque nous reprendrons nos travaux cet
après-midi, nous serons à la salle Louis-Joseph-Papineau.
Alors, je suspends
donc les travaux de la commission jusqu'à 15 h 30. Bon appétit à
tous!
(Suspension de la séance à
11 h 57)
(Reprise
à 15 h 47)
Le
Président (M. Merlini) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant
constaté le quorum, je déclare donc la séance de la Commission de la santé et des services sociaux
ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle
Louis-Joseph-Papineau... non, la salle...
La
Secrétaire : Oui...
Le
Président (M. Merlini) : ...oui, Louis-Joseph-Papineau, oui,
c'est bien ça, de bien vouloir éteindre — merci, Mme la secrétaire — toute
sonnerie et avertisseur de leurs appareils électroniques.
La
commission est réunie afin de procéder aux auditions publiques dans le cadre
des consultations particulières sur
le projet de loi n° 148, Loi encadrant l'approvisionnement en médicaments
génériques par les pharmaciens propriétaires et modifiant diverses
dispositions législatives.
Chers collègues, afin
que la visioconférence se passe bien, je vous rappelle qu'il ne faut pas
interrompre la personne qui a la parole pour
éviter les coupures de son et je vous rappelle que l'image du député qui a posé
une question demeure à l'écran lorsque le témoin y répond.
Cet
après-midi, nous entendrons donc, par visioconférence, M. Marc-André
Gagnon, professeur associé en politiques publiques de l'Université
Carleton, et l'Association générale des étudiants en pharmacie de l'Université
Laval.
Alors,
M. Gagnon, bienvenue à notre conférence... à notre commission
parlementaire, pardon. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous
procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à présenter
votre exposé. Bienvenue à la Commission de la santé et des services sociaux.
M. Marc-André Gagnon
(Visioconférence)
M. Gagnon
(Marc-André) : Bien, merci. Merci beaucoup pour cette invitation. Tout
d'abord, juste m'assurer que vous m'entendez bien.
Le Président
(M. Merlini) : Très bien.
M. Gagnon
(Marc-André) : Parfait. Ça me fait plaisir de venir présenter ici, en
fait, ça me fait plaisir de partager mes
résultats de recherche académique lorsque c'est possible. Avant de commencer,
je voudrais simplement mentionner, j'ai rédigé un court mémoire, qui a été
distribué, j'espère que tout le monde a pu obtenir copie. Ce que je vais
faire, je vais discuter rapidement les
points importants du mémoire pour dire mes commentaires au niveau du projet de
loi n° 148.
Donc,
avant de sauter dans le projet de loi n° 148 et la question du coût des
médicaments génériques, je voudrais tout
d'abord... Ce que j'ai essayé de faire, dans mon mémoire, c'est dresser un
portrait d'ensemble du régime d'assurance médicaments du Québec. Il ne faut pas oublier une chose, c'est que,
parmi tous les pays de l'OCDE, le Canada est le seul pays qui a un
régime public universel d'assurance maladie qui n'inclut pas le médicament,
comme si le médicament n'était pas un service
de santé essentiel. Parmi tous les pays de l'OCDE, en fait, celui que les coûts
par habitant en médicaments est le
plus élevé, c'est les États-Unis, qui est une espèce de modèle de gaspillage et
d'inefficacité, mais, ensuite, c'est
le Canada. Mais, au Canada, la province où est-ce que les coûts par habitant
sont le plus élevés, c'est le Québec.
• (15 h 50) •
Là,
on pourrait dire : Bien, c'est normal qu'on paie plus par habitant au
Québec parce qu'on a un meilleur accès que
dans le reste du Canada. Et c'est vrai. On fait légèrement mieux au niveau de
l'accès aux médicaments au Québec par rapport
au reste du Canada. Toutefois, si on regarde les études du Commonwealth Fund et
on regarde les pays comparateurs qui
ont des régimes publics universels d'assurance médicaments, si le Québec fait
mieux au niveau de l'accès aux médicaments
que les autres provinces canadiennes, on reste des derniers de classe par
rapport aux pays qui ont des régimes
publics universels d'assurance médicaments et qui paient beaucoup moins par
habitant. En fait, si on se compare à la moyenne
des autres pays de l'OCDE, on pourrait économiser environ 45 % par habitant en coût des médicaments tout
en s'assurant un meilleur accès avec un régime public universel.
Pourquoi
les médicaments coûtent si cher? Bien, simplement parce qu'on est dans un
système dysfonctionnel, et le coût
des médicaments génériques est un bel exemple de ça. Dans le mémoire, j'ai
inclus la figure 3, en fait, sur le coût pour 1 million de comprimés d'atorvastatine calcique — bon, c'est le Lipitor générique. Donc, si on
prend 1 million de comprimés de 20 milligrammes, combien ça coûte au
Québec, en fait, pour les régimes privés par rapport à ce que ça coûte
dans les autres provinces? J'aurais aimé savoir pour les régimes publics, mais
le Québec refuse de partager ses données avec
l'Institut canadien d'information sur la santé à cet égard. Donc, les régimes
privés ont partagé leurs données, et
ce qu'on voit, c'est que, pour la même quantité du même médicament, au Québec,
ça coûte environ deux fois plus cher qu'en
Ontario pour le Lipitor générique. Considérant que le prix du médicament, il y
a une part qui va au manufacturier, et
cette part qui va au manufacturier,
le prix de vente garanti basé sur le meilleur prix disponible au Canada,
on paie le prix le moins cher au Canada.
Ça signifie que la part qui va aux pharmaciens, aux chaînes de pharmacie, au
niveau de la marge, cette part-là est
beaucoup plus élevée que dans les autres provinces. En
fait, elle est environ cinq fois plus élevée que dans les autres
provinces.
Mais là je ne veux pas regarder la part qui va
aux pharmaciens, on va regarder uniquement la part qui va aux manufacturiers.
Si on regarde uniquement cette part-là et on regarde le prix au Québec, au Canada,
par rapport aux autres
pays, on voit que... en fait, la
figure 4, le même atorvastatine 20 milligrammes, ce qu'on voit, c'est
qu'en fait on paie deux fois plus
cher pour le même comprimé, donc le coût qu'on paie au manufacturier, on paie
deux fois plus cher qu'en Allemagne,
on paie quatre fois plus cher qu'en Suède, qu'au Royaume-Uni ou qu'aux
États-Unis, on paie sept fois plus
cher qu'en Nouvelle-Zélande. J'ai mis le cas de l'amlodipine aussi. Un peu de
la même façon, on paie de deux à 10 fois plus cher que dans les
pays comparateurs au niveau de l'amlodipine.
Là, il faut
comprendre, on a des marges qui sont immenses. Si on a des marges bénéficiaires
immenses, ça attire les intermédiaires, ça attire les stratagèmes pour essayer
de capturer ces marges-là. Ce qu'on voit, c'est qu'il y a une série d'intermédiaires, au niveau des chaînes, des
bannières, des distributeurs, qui mettent en place ces stratagèmes-là pour
essayer d'obtenir des bénéfices sans contrepartie.
Bon, on
connaît la question des ristournes qu'obtiennent les pharmaciens, qui a été
pendant longtemps un problème. À
partir de 2007, ça a été encadré, régulé, plafonné. Le problème, on pensait
qu'il était réglé. Mais il faut comprendre, là, si les ristournes sont plafonnées à 15 % au Québec pour les
pharmaciens, elles sont interdites en Ontario. Mais, si vous êtes une chaîne nationale comme Costco, par
exemple, bien, Costco demandait à ses fournisseurs des ristournes de plus
de 60 % pour pouvoir être distribué à l'échelle nationale. Bien, une
ristourne de 60 % chez Costco, ça signifie en fait, considérant qu'il n'y a pas de ristournes en
Ontario et au Québec, c'est-à-dire on faisait une espèce de calibrage au niveau
national avec les autres provinces, on demandait aux autres provinces, en fait,
des ristournes de 103 %, 104 %, donc c'est une façon de contourner
les règles qu'on avait mises en place pour les ristournes au Québec. Mais quels
sont les distributeurs qui possèdent deux
chaînes de pharmacies, Uniprix et Proxim... a mis en place des programmes de
conformité. Donc, en tant que
fournisseur, il est capable d'aller chercher des ristournes plus importantes,
capable d'aller... sa propre marque
maison aussi. Et on demandait par la suite aux chaînes de pharmacies de
respecter ce qu'on appelle les programmes de conformité, donc s'assurer qu'on respectait des quotas de 90 %
des médicaments qu'on voulait qu'ils soient distribués dans nos
pharmacies, que ce soient ces génériques-là qui soient distribués.
Mes questions
ont été réprimandées par l'Ordre des pharmaciens pour ça, mais en fait, le
principal stratagème, c'est la
question des marques maison, donc on pense à Jean Coutu avec Pro Doc, on pense
à Pharmaprix avec Sanis Health. La
question des marques maison, en fait, il faut comprendre, la chaîne de
pharmacies qui crée une marque maison ne produit rien. Ce qu'elle fait, c'est elle lance un appel d'offres auprès des
fabricants génériques et va avec celui qui demande le moins cher, fait
produire son médicament et met ensuite l'étiquette de sa marque maison sur le
médicament.
La RAMQ a
fait des études... des enquêtes pour voir combien coûtaient les marques maison,
le coût de production par rapport à ce que c'était revendu. La marge était de 89 %. C'est-à-dire que le coût de production,
le coût auquel achetait la pharmacie le médicament auprès du fabricant,
ce coût-là était majoré, grosso modo, d'à peu près 1 000 %. Il y a un
immense problème pour moi, je suis littéralement tombé en bas de ma chaise
quand j'ai vu ces chiffres-là. Il faut comprendre,
ces marges-là, c'est à peu près les mêmes marges que les hôpitaux vont obtenir
avec leur système d'appel d'offres.
Et aussi, mais en fait c'était la raison pourquoi j'ai demandé, dans le passé,
que le gouvernement du Québec fasse lui-même
ses propres appels d'offres, pourquoi est-ce que ce serait la bannière de la
pharmacie qui empoche? Et il faut comprendre,
même si la marque maison... la bannière crée sa marque maison, bien, ensuite il
faut convaincre les pharmaciens propriétaires de respecter cette marque
maison là, donc de prendre la marque maison.
Est-ce qu'il y a des programmes de conformité
aussi formels que mes questions avaient mis en place? Pas nécessairement, mais il y a plein d'incitatifs. Et
ces incitatifs-là, en fait, je ne sais pas quelle forme elles prennent, ça peut
être financière ou non. Mais, selon une
inspection professionnelle par l'Ordre des pharmaciens du Québec, 1594
pharmaciens affirmaient que leurs
franchiseurs, chaînes ou enseignes cherchaient à limiter ou orienter leurs
choix de médicaments génériques, dont
13 % affirmaient avoir subi des pressions indues, du chantage ou des
menaces pour vendre des médicaments d'une marque générique plutôt qu'une autre. Il y a beaucoup d'argent en jeu,
il y a beaucoup de pression commerciale en jeu.
Le projet de
loi n° 48 vise à essayer de diminuer ces incitatifs-là qu'on impose aux
pharmaciens. Pour moi, ce n'est pas
une solution. Le pharmacien, il est dans un système où est-ce que, si vous avez
un pharmacien qui est dévoué, qui
cherche que le bien-être de ses patients, il se retrouve à être constamment
puni dans ce système-là. Et de plus en plus on se retrouve avec des intermédiaires commerciaux qui lui imposent des
choix commerciaux par rapport à son choix professionnel, d'une part. Et
en plus...
Le Président (M. Merlini) : M.
Gagnon, il vous reste une minute, M. Gagnon. Il vous reste une minute.
M. Gagnon
(Marc-André) : Parfait. Et donc on est dans un système où est-ce
que ce... donc on est dans un système en
fait qui encourage l'imagination entrepreneuriale puis la capacité des acteurs
à constamment contourner les règles.
Le projet de
loi n° 148, c'est dire : On va plafonner à 50 % la part de l'approvisionnement
qu'un pharmacien peut avoir auprès
d'une marque, mais écoutez, ce genre de règle là, avec les jeux des alliances,
partenariats qu'il peut y avoir, des
intermédiaires et les fabricants, je veux dire, au bout de deux semaines, les
acteurs principaux vont trouver les moyens de contourner cette règle-là.
Pour moi, il
est beaucoup plus important de penser à une réforme structurelle du régime
d'assurance médicament afin de se
donner les outils institutionnels nécessaires pour assurer un meilleur accès
aux médicaments, de manière plus équitable, à meilleur coût, tout en
assurant un usage plus rationnel du médicament. Et malheureusement je suis très
sceptique sur la capacité du projet de loi n° 148 d'aller dans cette
direction-là. Merci beaucoup.
Le Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup, M. Gagnon, pour votre exposé. Nous allons débuter la
période d'échange. M. le député de La Pinière et ministre de la Santé et
des Services sociaux, la parole est à vous.
• (16 heures) •
M. Barrette :
Merci, M. le Président. Alors, M. Gagnon, bonjour, merci de prendre le
temps de participer à cette commission
parlementaire. C'est toujours très intéressant de vous entendre. Maintenant, je
commencerais, par contre, M. Gagnon,
par mettre en perspective certaines affirmations que vous avec faites, qui sont
exactes, mais qui, à mon avis, à mon humble avis, méritent peut-être
quelques nuances.
C'est
vrai que le Canada est le seul système qui a un régime d'assurance maladie qui
ne comprend pas le médicament. Vous
avez tout à fait raison là-dessus. Mais, là où je mettrai une grande, grande,
grande nuance, nous sommes le seul régime d'assurance maladie qui couvre tout à
payeur unique et qui interdit le reste dans le système public, d'une part. D'autre
part, nous sommes le seul système
d'assurance maladie à payeur unique qui ne permet ni le ticket modérateur ni la
contribution de l'usager de quelque manière que ce soit, que ce soit
d'une manière assurée ou non assurée.
Alors, de
dire que... ou d'appuyer toute la présentation sur ce simple fait-là, il me
semble qu'en quelque part ça vient un peu biaiser la réflexion. Je ne le
dis pas méchamment. Je comprends bien votre optique, je fais simplement
mentionner ce fait-là.
À titre indicatif pour ceux qui nous écoutent et
qui sont moins familiers avec les analyses comparatives des systèmes
de santé, les gens connaissent bien la France, la France est souvent prise en
exemple pour la qualité de son système, d'une
part, et d'autre part pour la performance de son système. D'ailleurs, récemment, je lisais une analyse, bon, qui est, en quelque part, un peu sommaire, sommaire dans le bon sens du terme, là, c'est des
experts comme vous qui avaient été invités
à commenter, à classer, parmi 10 pays, les meilleurs systèmes
de santé dans le New York Times — ça
ne fait même pas trois semaines que
c'est sorti — et
la France, la Suisse, l'Allemagne et le Canada étaient là-dedans,
et ce sont ces pays-là qui arrivaient en premier.
Et les gens
ne le savent pas, peut-être est-il utile de les informer et de leur indiquer
qu'en France l'assurance maladie
couvre deux tiers seulement
des coûts et que le troisième tiers, il doit être payé via une loi qui impose à
tout le monde d'avoir un assureur supplémentaire qui, à l'usage,
paie ce que l'on appelle les dépassements qui ont été prévus depuis 1945 dans leur système, qui sont de
l'«overbilling», là, des tarifs supplémentaires permis par l'État. Je ne dis
pas ça pour faire la promotion du système français, mais simplement pour
mettre les choses en perspective.
Alors, c'est
sûr que, quand on regarde le dollar public dépensé per capita, bien, on
constate que le dollar public est
comparable d'un pays à l'autre, à part, évidemment, les États-Unis,
comme vous l'avez bien mentionné. Il est relativement comparable d'un
pays à l'autre, mais le dollar canadien, il va totalement pour la totalité
du système d'assurance maladie, alors
que, dans les autres pays, le dollar public, il est fractionné en une partie
pour l'assurance maladie, une partie pour les médicaments, une partie
pour la physiothérapie, une partie pour, pour, pour. Alors, quand on compare, à
un moment donné, il faut avoir une lecture,
je pense, un peu plus nuancée de la chose. Moi, je le dis souvent et je vais le
redire maintenant, la Loi canadienne
sur la santé est une espèce de prison dans laquelle on agit, les gouvernements
provinciaux et territoriaux. Il y a des limites qu'on nous impose qui
nous empêchent de faire d'autre chose.
Quand vous
parlez du médicament, je comprends de votre propos, puis peut-être que je vous
impute des intentions, loin de moi de
vouloir faire ça, mais je comprends de votre propos ou je soupçonne que vous
êtes un protagoniste d'un régime
d'assurance médicaments universel similaire à celui de l'assurance maladie. Je
vous dirais que c'est une position qui
se défend. Il y a une logique, là, que l'on peut défendre pour faire ça.
Néanmoins, quand on en fait la promotion, force est de constater, quand on analyse, que ça amène une dépense publique supplémentaire.
Et, s'il y avait lieu de mettre ça en place,
évidemment, on arrive obligatoirement dans une dépense additionnelle
substantielle qui amène obligatoirement des augmentations des impôts, et
je ne sais pas si les gens voudraient aller là au moment où on se parle.
Je ne vous
dis pas que le système dans lequel on vit actuellement en termes d'assurance
médicaments est parfait, mais je pense que vous l'avez noté vous-même, le
régime public, le RGAM, le régime général d'assurance médicaments, qui est notre régime public à nous, qui ne couvre
pas la totalité de la population, qui est imparfait, je vous l'accorde, demeure
certainement le régime le plus exhaustif qui
offre la plus grande couverture du Canada. D'ailleurs, hier... cette nuit, en
fait, ont été publiées les données de l'ICIS qui montrent, de loin, là,
de loin, là, c'est presque 50 % de plus que les autres provinces, 40 %, le Québec dépense en dollars
publics en assurance médicaments jusqu'à, dans certains cas, 50 % de plus
que d'autres provinces riches. On dépense
plus que la Colombie-Britannique, on dépense plus que l'Ontario, et ainsi de
suite. Alors, je trouve qu'on est dans une
situation qui est quand même imparfaite mais favorable en termes de dépenses
publiques.
Mais je vous
l'accorde, le concept, l'idée d'un régime national d'assurance médicaments,
sans aucun doute, a des mérites, ça, il n'y a aucun doute là-dessus,
a des écueils. Il n'y a aucun système
qui est parfait. Je ne pense pas que les systèmes européens sont parfaits, eux aussi. Mais, tant les systèmes
européens qu'américains, que canadiens ou sud-américains, là, on ne peut pas vraiment comparer ça, je pense, là,
mais dans les pays industrialisés qui investissons, en dollars publics, des sommes comparables, nous
n'avons pas les mêmes chemins que parcourent ces dollars publics là et on n'a pas exactement les mêmes résultats. Mais il
n'y en a aucun qui est parfait, et je trouve que, malgré tout, au Canada,
on s'en sort, à mon avis, très bien.
Et je n'ai
même pas mentionné la sacro-sainte Suède, qui, elle, a un ticket modérateur
qui, au Canada, serait un péché
mortel. Non, mais c'est toujours amusant de le dire, ça, la sacro-sainte Suède
a un ticket modérateur. N'est-ce pas quand même quelque chose, dire
cette phrase-là et mentionner le mot «ticket modérateur»? Je regarde mes
collègues à l'instant et je sens beaucoup,
beaucoup... je sens une pulsion pour commenter cette possibilité-là, que je
vais leur laisser le plaisir
d'aborder, s'ils le souhaitent. Mais on en rit, là, ici, M. Gagnon, là...
on ne rit pas de la pulsion, mais du fait qu'on vit, dans notre système... puis, dans notre système, il y a des mots qui
passent bien puis il y a des mots qui passent moins bien, puis il est imparfait, donc il y a des bons
côtés, des fois, puis des moins bons côtés. Et faire certaines allusions, dans
notre environnement, dans notre contexte, ça
ne passe pas toujours très bien. Et je ne porte pas de jugement de valeur sur
qui que ce soit quand je dis ça.
Maintenant,
vous dites que le projet de loi ne fait pas un certain nombre de choses que
vous avez indiquées dans votre
présentation, mais c'est parce que le projet de loi, il n'est pas fait pour ça.
Ce n'est pas un projet de loi... Le projet de loi qui vise à faire ce que vous avez mentionné, briser la chaîne,
chercher le meilleur prix, enlever les avantages indus qui sont relayés aux consommateurs, bien, ça,
c'était la loi n° 81 et la loi n° 92. On a mis en place des lois qui,
carrément, visent à faire baisser la pression sur le consommateur, ça fait
ça.
Et 148, bien,
c'est une loi qui vise à faire en sorte que les économies substantielles... Et
je peux vous dire une chose, je vais
vous dire une chose bien, bien simple, j'ai bien hâte de voir comment le Canada
va se débrouiller, dans sa négociation avec
l'ACMG, l'Association canadienne du médicament générique, pour générer les
économies x, y, z. Nous, on l'a fait. Elles sont là, les économies puis elles vont être relayées aux
consommateurs. Elles sont là pour l'État. L'État, aux dernières nouvelles, c'était une extension des
consommateurs, puisque notre régime public, il vit à partir des impôts et des
taxes des citoyens et des
entreprises. On a mis en place des choses pour faire ça. 148 ne vise pas à en
faire plus. 148 vise une chose, vise
à faire en sorte que, vu du côté du producteur, du manufacturier, l'accès soit
suffisamment libre et concurrentiel pour éviter, justement, les monopoles. 148, et là je suis en désaccord avec
ce que vous avez dit, si j'ai bien compris, peut-être que j'ai mal compris, mais il y a une chose qui
est certaine, 148 ne permet pas des monopoles, c'est fait pour empêcher les monopoles. La limite de 50 %, là, c'est
pour empêcher des monopoles, c'est pour empêcher des bannières, c'est pour
empêcher des faux fabricants de monopoliser
un marché par des ententes contractuelles d'achat de la part de leurs
franchisés. Et c'est fait pour ça, 148.
Et 148 doit
se voir dans l'esprit ou dans les conditions d'une entente qu'on a convenue qui
amène des économies tellement
substantielles que je ne vois pas une seule province, actuellement, au Canada
avoir réussi à atteindre, par leur propre
voix ou par l'Alliance pancanadienne pharmaceutique, ou pharmaceutique
pancanadienne, de telles économies.
Alors, moi,
je vous laisse la parole, là, pour commenter là-dessus, commenter, d'abord et
avant tout, je vous dirais, sur 148,
là. Là, je comprends l'essence de votre mise en place, là, et que je respecte
et que j'apprécie, mais 148, actuellement, voyez-vous des problèmes?
Avez-vous des suggestions, puisque c'est l'objet de notre consultation
publique?
• (16 h 10) •
M. Gagnon
(Marc-André) : Parfait. En
fait, beaucoup de choses. Évidemment, je ne commenterai
pas sur les structures des régimes d'assurance maladie de manière générale et
d'assurance médicaments. C'est juste que l'exception du Québec, à terme, est devenue un petit peu
problématique à la fois au niveau des coûts, au niveau... On n'a pas nécessairement un meilleur accès que beaucoup
d'autres pays avec un régime public universel, et des problèmes aussi au
niveau de l'équité.
D'une part, vous m'avez lancé plein de questions
sur les dépenses publiques supplémentaires. Excusez, là, je veux juste quand même
mentionner, là, regardez, là, en ce
moment, les régimes privés
obligatoires, on a des cotisations salariales
obligatoires qui sont prélevées directement sur les salaires alors que les primes publiques,
c'est des cotisations obligatoires prélevées sur les salaires, la même
chose. Ce n'est pas une augmentation d'impôt. Un régime public universel, les primes privées obligatoires
deviennent des primes publiques obligatoires et vont devenir des primes
moindres parce qu'on va avoir un
système qui est plus efficace. Au bout du compte, on parle d'une augmentation
du revenu disponible des travailleurs, on ne parle pas d'une
augmentation des impôts.
Oui, le
projet de loi n° 81 est intéressant. L'entente qu'on a eue avec les
fabricants de génériques, on attend encore les détails, là, c'était supposé être en début octobre, mais les prix sur
la liste des médicaments n'ont pas encore été changés, etc. Bon, 38 % de réduction sur cinq ans, puis, je veux
dire, je ne boude pas mon plaisir, là, c'est une excellente chose qu'on est allés chercher, ce rabais-là, mais
ça, c'est un rabais sur le coût de détail du médicament, donc la part donnée
au fabricant. Et, je répète, le médicament,
si on regarde le Lipitor générique, bien, on paie le double au Québec par
rapport à l'Ontario. Ça fait que, si
on fait un rabais de 38 % sur une petite partie de l'ensemble de ce prix-là,
bravo! mais ça reste que les problèmes systémiques restent là.
On a mis de
côté les appels d'offres en disant : Bien, écoutez, si on allait avec les
appels d'offres, ça aurait pu faire perdre des emplois au niveau des
fabricants de génériques. Bien là, attention, là, là Pharmaprix et Proxim, avec
McKesson, ont leur propre marque maison,
Pharmaprix a sa propre marque maison, Jean Coutu a sa propre marque maison,
et eux fonctionnent avec des appels
d'offres, vont chercher les prix plus bas. Je ne vois pas qu'on va sauver des
emplois dans le secteur générique. On
va peut-être sauver des emplois au niveau des marques maison, mais, je le
rappelle, les marques maison ne produisent simplement rien.
Effectivement,
l'idée de limiter à 50 % l'approvisionnement par un fournisseur, puis vous
avez raison, là — s'il y a
un malentendu, je suis désolé — c'est une bonne chose, là. Je suis d'accord
avec l'esprit de la loi. Le problème, c'est qu'on est avec des acteurs, des intermédiaires qui ont
une capacité d'adaptation assez élevée, et ça serait facile pour deux marques
maison de se mettre ensemble ou de créer un
spin-off de marques maison, et vous avez maintenant deux marques maison qu'on peut imposer à des chaînes de pharmacie ou à
des pharmaciens propriétaires, et on va se retrouver avec les mêmes
pressions commerciales qu'auparavant.
Donc,
simplement, sur la question des marques maison, si le problème, c'est les
marques maison, bien, faisons comme
l'Ontario, éliminons les marques maison, tout simplement. C'est devenu illégal,
la Cour suprême a considéré que c'était
tout à fait conforme à la Constitution, etc. Donc, à partir de là, si on veut
s'attaquer aux marques maison, faisons-le avec le gros bâton, éliminons-les, tout simplement. Il n'y a aucune
raison que l'intermédiaire de la bannière empoche des sous sur les génériques plutôt que ce soit le
fabricant, le pharmacien avec ses ristournes qui sont régulées. Et, pour le
reste, bien, c'est le consommateur, le patient qui devrait aller
chercher des prix plus bas, tout simplement.
M. Barrette :
M. Gagnon, avec beaucoup de respect, je vous invite à bien lire la loi
n° 92, et vous y constaterez qu'aux
articles 80.1 et 80.2 ce que vous venez de mentionner comme étant à être
empêché, bien, de un, vous avez raison, mais vous
constateriez que c'est exactement ça que ça interdit. On a déjà passé des lois
qui interdisent ça, avec des amendes substantielles à la clé, s'il y avait
contravention à ces articles-là, d'une part, et en plus on s'est donné des
pouvoirs d'enquête substantiels pour justement mettre au jour ce genre de chose
là. Alors, on s'entend, là, vous et moi, on identifie exactement le même problème et on a le même souhait,
c'est-à-dire d'interdire ce que vous venez de mentionner. Mais on a déjà, dans nos lois, mis ça en place
pour régler ça, l'empêcher. Et, les amendes, je pense que, quand on arrive
dans les millions de dollars, ça commence à être des amendes qui sont
substantielles.
Sur
la question du prix, au moment où on se parle, j'ai de la difficulté à vous suivre parce qu'on paie le même
prix qu'en Ontario, là. Il n'y a
pas de différentiel de prix. Il peut y avoir un différentiel avec d'autres
pays, mais, pour ce qui est de la
dynamique canadienne, on paie exactement le même prix qu'en Ontario, il n'y a
pas de différence, ou ailleurs
au Canada, puisqu'on paie le prix le plus bas, à moins que quelqu'un
d'autre soit plus bas que l'Ontario, évidemment.
Mais,
quand vous mentionnez le fait qu'on n'a pas encore le détail, bien, on ne l'a
pas parce qu'il y a des ententes
qui, pour le moment... on a convenu de les
garder confidentielles parce que l'alliance pharmaceutique pancanadienne n'a
pas encore réussi à trouver le chemin pour
eux qui les amènerait au même niveau d'économie que nous. Alors, nous, on a
été les plus agressifs au Canada, on a
convenu d'une entente. Et vous conviendrez avec moi que l'enjeu pour l'État, actuellement, et par la bande le citoyen, est
d'avoir un coût le plus bas possible. Et vous l'avez mentionné vous-même, c'est quand même une économie substantielle dans
l'histoire du Canada. Il n'y a personne qui a réussi à faire ça. Et aujourd'hui les prix ne sont pas publics dans le
reste du Canada pour une raison bien simple, l'alliance pharmaceutique pancanadienne n'a pas encore réussi à trouver un
chemin qui les amène à notre destination. Attendons, et, à ce moment-là,
éventuellement les choses seront publiées.
Mais, dans les faits, ce que vous mentionnez que vous souhaitez voir interdit,
on l'a déjà mis dans la loi, mais pas dans
148 — 148,
c'est un autre objet — mais c'est dans 81 et 92 ensemble, je dirais, là.
M. Gagnon
(Marc-André) : Parfait. Merci beaucoup. Sur la question de la
différence de prix entre Québec et Ontario,
en fait, il y a deux parties au prix du médicament : il y a la part qui va
au fabricant et ce qu'on appelle, une mauvaise traduction, là, le coût de délivrance, la part qui va au pharmacien,
donc l'honoraire du pharmacien, et la marge que peut prendre la pharmacie. Dans les études du Conseil
d'examen du prix du médicament breveté, avec le Système national d'information sur l'utilisation des médicaments
prescrits, simplement ce qu'eux ont démontré, c'est que, lorsqu'on prend
en compte le coût de délivrance, donc la
part du pharmacien, bien, en fait, grosso modo, dans la figure 3, ce qu'on
montre ici, c'est que, de manière
générale, la moyenne du coût de délivrance pour 1 million de comprimés de
20 milligrammes est autour de
200 000 $ ici. Ça fait que, grosso modo, on parle de 0,20 $ par
comprimé, en moyenne, dans les autres provinces du Canada. Au Québec, le coût de délivrance, donc la part qui va au
pharmacien pour l'atorvastatine calcique, on parle ici de 0,75 $
par comprimé. Donc, sur le coût de base, on est à peu près à 0,40 $ par
comprimé pour le médicament lui-même, mais, au-delà du 0,40 $, il y a un
0,75 $ qui s'en va au pharmacien.
Là,
effectivement, il y a des questions des renouvellements mensuels qui se font
plus souvent au Québec. Mais, pour les régimes privés, en fait — là on
compare le coût des régimes privés parce qu'on n'a pas les données pour le régime public — il n'y a pas de renouvellement mensuel
obligatoire pour les régimes privés. Donc, à partir de là, on se retrouve quand
même à payer 1,15 $ le comprimé, alors que, dans les autres provinces, on
paie plus autour de 0,65 $ le comprimé,
et c'est ça qui est problématique. Donc, même si on a un 38 % de rabais
sur la part qui va au manufacturier, donc
38 % de rabais sur le 0,40 $ du comprimé qui va au manufacturier,
bien, au bout du compte, on se retrouve malgré tout à payer à peu près 1 $ le comprimé. Donc, le problème reste
entier au niveau systémique, par rapport au système. Ceci dit...
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. Gagnon. Ça met
un terme avec l'échange avec le groupe formant le gouvernement. Maintenant, nous allons aller à l'opposition
officielle. M. le député de Saint-Jean, la parole est à vous. Vous
disposez de 12 minutes pour votre échange avec M. Gagnon.
M. Turcotte :
Merci, M. le Président. Bien, vous pouvez terminer votre idée, M. Gagnon,
ce que vous étiez en train d'expliquer.
• (16 h 20) •
M. Gagnon
(Marc-André) : Bien, en fait, ça ramenait aux questions de problème
systémique. Puis là, en même temps,
ce n'est pas une affirmation comme quoi : Ah! bien, regardez, c'est parce
que les pharmaciens chargent trop cher ou quoi que ce soit. Non, non, on
a un système qui encourage certaines formes d'abus.
Puis je comprends
très bien, là, je veux dire, 92, 81, on a essayé de mettre en place des outils
pour essayer de modifier les choses. Puis
effectivement, je ne boude pas mon plaisir, ça a permis de faire un certain
ménage. Mais on se retrouve quand
même avec des stratagèmes qui restent en place et des niveaux de marge
bénéficiaire qui sont extrêmement élevés.
Donc, pour moi, ce type de réforme là, je reconnais la bonne intention puis je
suis content qu'on les applique, mais malgré
tout je suis loin de crier victoire pour les consommateurs parce qu'on se
retrouve dans les mêmes stratagèmes où est-ce
que les Québécois, Québécoises continuent à payer trop cher, où est-ce que les
fabricants génériques se retrouvent confrontés
à des appels d'offres faits par les grandes chaînes de pharmacie et n'ont pas
nécessairement les marges et les accès qu'ils aimeraient avoir.
Et
on se retrouve avec des pharmaciens, dans tout ça, que... Le pharmacien dévoué
qui veut juste la meilleure santé de
son patient se retrouve à être pénalisé ou recevoir des pressions. Je comprends
que 92 va aider à réduire ces pressions-là, mais ma formation d'économiste me dit que, quand les incitatifs
économiques sont là, qu'il y ait une règle ou qu'il n'y en ait pas, on
va trouver une façon de la contourner au besoin.
M. Turcotte :
Merci, M. Gagnon. Ça m'amènerait à... Parce que, là, vous abordez la
question, en partie, là, des honoraires professionnels des pharmaciens.
Et puis, à la page 8 de votre mémoire, vous mentionnez... puis vous l'avez
un peu repris en partie, là, dans vos mots, quand vous dites : «Les
pharmaciens sont [...] accusés d'abuser du système en réclamant des honoraires
professionnels trop élevés auprès des régimes privés, ou encore en touchant des
ristournes disproportionnées. La réalité est plutôt que, si certains
pharmaciens ou intermédiaires [ont] une fibre plus entrepreneuriale arrivent à contourner les règles, de manière légale ou
non, pour aller chercher des marges bénéficiaires extrêmement élevées,
un pharmacien consciencieux et dévoué qui recherche avant tout le bien-être de
son patient est souvent pénalisé par le
système actuel. Non seulement ses revenus resteront maigres par rapport aux
marges empochées par les autres
intermédiaires, mais de plus il est confronté à une logique commerciale qui
cherche constamment à empiéter sur son choix professionnel.»
On a abordé
un peu la question précédemment, M. Gagnon, avec les représentants des
compagnies d'assurance, mais ce
débat-là aussi est présent depuis un certain temps au Québec. Sur la question
de la rémunération des pharmaciens, c'est
sûr que ça a un enjeu. Vous avez abordé la question tantôt en réponse à M. le
ministre. Quand vous dites que, exemple, le renouvellement mensuel des prescriptions de médicaments, ça amène un
coût plus élevé malgré toute économie qui pourrait se faire auprès de l'industrie pharmaceutique, que ce soit pour
30 jours ou pour trois mois, c'est le même honoraire professionnel.
Donc, d'y aller trois fois, donc, on multiplie par trois le coût.
En même
temps, la rémunération telle qu'elle est basée actuellement, à part quelques
exceptions, peu importe le prix du
médicament, quand c'est, exemple, au public, bien, le pharmacien est payé le
même montant dans ses honoraires. Ça
inclut aussi tous les coûts de la pharmacie, etc., donc ce n'est pas juste son
temps à lui comme pharmacien. Donc, ça va dans les deux sens aussi, là. Puis là en même temps vous dites, puis
vous l'avez répété plus qu'une fois, que le projet de loi qu'on est en train d'étudier, bien, ne réglera pas
les problèmes, puis les gens qui sont mal intentionnés vont trouver des
façons de contourner.
Donc, un coup
qu'on se dit tout ça, on fait quoi? Parce que votre objectif est louable, mais
en même temps, les solutions ne sont pas si évidentes que ça, là.
M. Gagnon
(Marc-André) : Bien, écoutez, tout à fait, là, pour moi, je parle d'un
problème systémique ici. L'idée, c'est
qu'on a un régime qui est complètement fragmenté dans lequel il y a une série d'acteurs
qui sont capables de jouer sur les
règles. Et on a aussi un système... Et on ne va pas se le cacher, là, le régime
général d'assurance médicaments, en bonne
partie, il est construit sur un pelletage de coûts. Pour sauver des coûts au
niveau du public, bien, simplement, on ouvre
plus grande la porte aux abus de la part des régimes privés. Et la question, le
problème, c'est que les assureurs privés, normalement, sont payés en termes de pourcentage des dépenses. Ça fait
qu'ils ne vont pas se plaindre très, très fort par rapport à ça.
Mais au bout
du compte on a systématiquement des grandes divergences entre ce que paie le
régime public pour un médicament,
lorsqu'on prend en compte les honoraires des pharmaciens, et ce que va payer
les régimes privés. Et là ensuite on
peut dire : Ah oui, mais c'est les pharmaciens qui abusent. Mais là,
attention, là, un pharmacien qui va être dans un quartier... Regardez, je parlais avec un actuaire qui me parlait
de la ville de Québec, une dame qu'il a rencontrée lui disait : Je
remplissais toujours ma prescription dans la Haute-Ville et j'avais tel prix,
et, lorsque je suis allée dans la
Basse-Ville, là, le prix était plus élevé pour le même médicament. Simplement,
le pharmacien chargeait plus cher parce qu'elle avait un régime privé. Les honoraires, la marge étaient plus
chers pour les gens de la Basse-Ville. Mais le pharmacien de la Basse-Ville, c'est qu'il se retrouve dans un
quartier où est-ce qu'une plus grande proportion de ses clients sont sur le
régime public, où est-ce que les honoraires professionnels sont régulés,
encadrés, plafonnés, etc., en fait, fixés. Donc, à partir de là, s'il veut pouvoir se maintenir en vie, il n'a pas le
choix, pour les régimes privés, d'augmenter encore plus ce qu'il va
demander en termes d'honoraires professionnels.
Le problème
de base, c'est : il faudrait un système d'honoraires professionnels qui
soit équitable à la fois pour le
régime public et privé, qu'il s'applique à tout le monde de la même façon, là,
grosso modo, pour empêcher d'ouvrir la
porte aux abus, où est-ce que, finalement, un pharmacien, parfois, doit charger
plus au régime privé pour survivre. Mais tu as l'autre pharmacien à côté, lui, il a vite compris le système et lui
va essayer de trouver une façon de charger constamment des honoraires professionnels excessifs au régime privé, par
exemple. Donc, au niveau de ces problèmes-là — ici, c'est du paiement des pharmaciens, il faut comprendre — bien, le pharmacien qui veut juste faire du
bon travail, il est dans un système où est-ce qu'on encourage carrément
ce type d'abus, et c'est ça qui est problématique.
M. Turcotte :
O.K. Merci, M. Gagnon. Dans le projet de loi, quand on voit que pour une
interdiction de dépasser de 50 %
pour le même fabricant pour un médicament générique, certaines personnes
mentionnent, bon, peut-être qu'avec des
dédales administratifs, soit des filiales ou autres, qu'il y aurait possibilité
de contourner cette règle-là pour, finalement, dépasser le 50 %.
Vous en pensez quoi?
M. Gagnon
(Marc-André) : Bien, en fait, je ne dis pas qu'ils vont essayer de
dépasser, c'est... Regardez, on vient de
publier, dans Globalization and Health, un article sur les
fusions-acquisitions dans le secteur pharmaceutique générique, voir les différents jeux d'alliance. Puis parfois
ce n'est pas des fusions-acquisitions, ça va être simplement des partenariats
ou des ententes qui vont être mises en place. Et il faut comprendre, au niveau
des chaînes de pharmacie au niveau nord-américain,
en particulier aux États-Unis, en ce moment les chaînes de pharmacie, les
«pharmacy benefits manager» aussi,
comme on les appelle, sont en train vraiment de se consolider, et eux font une
pression immense auprès des fabricants génériques.
Et on se retrouve avec plusieurs acteurs dans ce système-là qui sont en mesure
de naviguer un petit peu ces pressions-là, soit par des
fusions-acquisitions, soit par un jeu d'alliance, soit par des partenariats.
Un
petit marché comme le Québec qui arrive avec
une règle qui dit : Bien, nous, on... 50 % du même fournisseur,
bien, les fournisseurs qui vont vouloir fournir ici, ils vont dire : Bien,
écoutez, d'accord, on va simplement créer un spin-off d'une petite compagnie à
part, donc au lieu d'avoir une seule marque, on va avoir deux marques pour nos médicaments, et à ce moment-là on va pouvoir... et
faire les mêmes pressions auprès des patients québécois... en fait, auprès
des pharmaciens québécois. Et ça, pour moi, ce type de règle là est fort
problématique.
Ici,
l'enjeu, c'est d'abord et avant tout les marques maison. Bien, c'est ce que je
crois qu'il faudrait interdire d'abord et
avant tout. Et ensuite, si on veut envoyer le Bureau de la concurrence pour
s'assurer qu'il n'y ait pas d'ententes et de partenariats au sein des fabricants de génériques... bien, on l'a fait
en 2007, peut-être il est temps de rappeler le Bureau de la concurrence pour aller faire le ménage
là-dedans. Mais fondamentalement je n'ai pas l'impression que la loi
n° 148 va apporter... Je veux
dire, on ne va pas reculer avec la loi n° 148, mais ça ne va pas être un
grand pas en avant non plus.
M. Turcotte :
Je peux y aller, M. le Président?
Le Président
(M. Merlini) : Oui, oui, allez-y, oui, oui, oui.
• (16 h 30) •
M. Turcotte :
Oui? Je voulais être sûr.
Vous
revenez, là, avec ça sur la question des marques maison, là, avec aussi... On
le voit, là, il y a quand même
des transactions de certaines bannières de
pharmacies au Québec. Bon, on a vu Jean Coutu récemment, bon, qui va
avoir un plus grand lien, mettons, avec Brunet, bon, Uniprix avec
Pharmaprix.
Concrètement,
là, quelles seraient les conséquences si on appliquait votre plan par rapport aux marques maison?
Le Président
(M. Merlini) : En 45 secondes, M. Gagnon. En
45 secondes, s'il vous plaît.
M. Gagnon
(Marc-André) : Au niveau
des marques... C'est parce que, écoutez, on a un intermédiaire ici qui... Vous regardez, sur le rapport annuel de Jean
Coutu, Pro Doc est une vache à lait. Pro Doc ne produit rien. À un moment donné, il y a
un problème. Pourquoi est-ce qu'on se
retrouve à faire de larges bénéfices pour une chaîne de pharmacies qui ne produit rien en termes de médicaments,
alors que ça, c'est des sous qui devraient revenir à l'ensemble des patients pour baisser les coûts des médicaments de manière
générale au Québec, là. Donc, pour moi, c'est ça, le véritable problème.
Pour
moi, une réforme systémique... on doit se donner les outils institutionnels au
niveau de l'achat du médicament. Dans
toute la série de régimes qu'a parlé le ministre Barrette, la France, etc.,
bien, vous regardez les outils institutionnels qu'ils ont au niveau... pour négocier le prix des médicaments, pour
promouvoir l'usage rationnel du médicament, ça, c'est des
infrastructures qu'on n'a pas ici étant donné la fragmentation du système entre
le public et le privé.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. Gagnon, pour cet
échange avec l'opposition officielle. Nous allons maintenant vers le député de Lévis, de la deuxième opposition,
pour un bloc d'échange de huit minutes. À vous la parole, M. le député
de Lévis.
M. Paradis (Lévis) : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Gagnon,
toujours un plaisir, hein? Dans d'autres projets de loi, on a eu l'occasion de vous entendre également et de constater
les recherches puis les chiffres qui nous sont présentés, alors,
extrêmement bien documentés, dans un dossier, dans un domaine qui, ma foi, est
quand même complexe.
Deux
choses, d'abord, et je reviens sur l'ambition du projet de loi n° 148, en
tout cas sa volonté... et je reprends, dans
les impacts réglementaires notamment, le fait qu'on considère qu'une condition
essentielle pour favoriser une plus grande concurrence sur le marché,
c'est de faire en sorte que la position dominante des marques maison, qui,
elle, est susceptible de réduire la
concurrence sur le marché, limiter la capacité financière des autres fabricants
à consentir des baisses de prix, on s'y attaque.
Alors là, c'est la
notion du 50 %, et vous remettez... je comprends, à travers votre mémoire,
vous remettez en question l'efficacité de cette mesure-là, bien que le ministre
nous ait dit, puis on l'a vécu pas mal ensemble, 81 et 92, il y ait des règles et des articles qui
s'attaquent au contournement potentiel versus des dispositions financières et
pénales qui sont, ma foi,
importantes. Et, au surplus, dans le 148, bien, on obligera tout pharmacien à
transmettre à la RAMQ un rapport
annuel sur ses achats, histoire de valider et de vérifier tout ce qui s'est
fait. Donc, malgré cette assurance-là, la volonté de permettre une plus saine concurrence, d'éviter la
monopolisation par le biais des marques maison, dans ce que vous voyez là, on ne peut pas y arriver. Votre
constat, c'est un constat d'échec sur la volonté du 148 à atteindre ses objectifs.
M. Gagnon
(Marc-André) : Ce n'est pas un constat d'échec, là. Comme je dis, ce
n'est pas un pas en arrière, c'est
juste qu'on parle de marges bénéficiaires tellement élevées... Écoutez, quand
on s'est attaqués aux ristournes, qu'on a plafonné les ristournes au
Québec, là, à partir, en fait, de 2007, mais ensuite en 2010, à 20 %, etc.
Écoutez, là, vous avez un système où est-ce
que vous avez des marges bénéficiaires immenses. Vous avez beau plafonner à
20 %, vous êtes... Moi, la première
chose que j'ai dite... bien, on est certain que d'ici quelques mois on va avoir
un ensemble de stratagèmes qui va
être en place pour contourner ces règles-là, pour s'assurer que certains des
joueurs qui sont plus rapides dans le système
vont pouvoir aller s'en mettre plein les poches, et c'est ce qu'on a vu avec
les différentes chaînes de pharmacies, de différentes manières.
Ici,
c'est un peu la même chose. C'est que je comprends, là, l'effort, il est
louable, mais, dans le bouillonnement du
secteur générique nord-américain, en ce moment, ce type de règle là me semble
trop facilement contournable. Donc, je
ne dis pas que ça va être un échec. Je dis, ça va sûrement être du sable lancé
dans l'engrenage, mais ce n'est pas une manière qui va arrêter les engrenages
des abus qu'on pouvait voir en ce moment.
M. Paradis (Lévis) : Moi, je vois, dans le 148, un projet de loi de
continuité, parce que, bon, faisant suite au 81 et 92, avec des
objectifs bien précis, qui se questionnaient sur les marges bénéficiaires, sur
la problématique des coûts de délivrance,
etc., tout n'étant pas parfait en soi, vous dites : Bien, tant qu'à ça,
allons à l'extrême limite. Tant qu'à dire : Vous n'achèterez pas plus que 50 % d'une marque maison, bien, abolissons les marques maison
et rendons-les illégales.
Si
c'était fait, si votre option était adoptée, quel serait l'impact immédiat d'une mesure comme celle qui a déjà
été mise en place ailleurs?
M. Gagnon
(Marc-André) : La mesure immédiate, en fait, est-ce que... sur les
fabricants de génériques, ça serait bénéfique,
me semble-t-il. Simplement, eux auraient beaucoup plus accès à un véritable
marché, donc meilleur accès.
Au
niveau des chaînes de pharmacies, deux choses. Effectivement, on met fin aux
marques maison qui sont très problématiques
au niveau de... justement, c'est un secteur de la chaîne de pharmacies qui ne
produit rien et qui fait beaucoup de sous, mais qui avait mis en place aussi une
série de pressions commerciales auprès des membres, donc des pharmaciens propriétaires. Ces pressions-là disparaissent
aussi de la même façon. Aussi, on se retrouve... bien, écoutez, vous avez...
McKesson possède deux chaînes de pharmacies et une marque
maison, mais McKesson peut se créer une deuxième marque maison puis demander à ses deux chaînes de pharmacies de
dire : Bien, écoutez, pour ces 23 génériques là, qui sont les gros
vendeurs, on va aller avec telle marque maison puis, pour les autres, on va
aller avec telle autre marque. Au bout du compte, c'est 50-50, c'est ce qu'on impose. Et, d'accord, la loi
n° 92 a des pénalités financières qui sont là. Moi, je pars du principe
que, si les incitatifs financiers pour essayer de contourner les règles sont
là, bien, les abus ils vont être là, tout simplement.
M. Paradis (Lévis) : Votre scepticisme, vous le décrivez très, très
concrètement. Vous nous dites que, somme toute, si on recule un peu en arrière et qu'on essaie de comprendre la
problématique des prix puis de la fixation des prix, c'est
systématiquement puis c'est manifestement un problème de coûts de délivrance.
Vous identifiez le problème de façon très précise. Il est là, l'abus. Je vois
votre... et vous me corrigerez, je vois votre analyse avec l'atorvastatine, le 254 % de plus pour la délivrance, faisant en
sorte qu'on paie... qu'inévitablement il y a un impact sur le consommateur.
Le problème où le bât blesse, puis là on
sort un peu du 148, c'est la problématique et le coût de délivrance,
c'est-à-dire ce que l'on appelle la part du pharmacien.
M. Gagnon
(Marc-André) : En fait, oui et non. Ce que j'ai montré, c'est
qu'effectivement le coût de délivrance est
un problème en soi, donc la part du pharmacien qui est beaucoup trop gonflée,
et ça, ça ne veut pas dire que c'est tous les pharmaciens qui s'en mettent
plein les poches. Protégez-Vous, son enquête montrait très bien que les
coûts varient du simple, au double,
au triple, selon la pharmacie, au niveau du coût de délivrance. Donc, à partir
de là, ce n'est pas tous les pharmaciens qui logent à la même enseigne.
Mais
il y a un problème aussi au niveau du coût du détail des médicaments, donc la
part qui revient au manufacturier. On
paie beaucoup plus cher au Canada que dans les autres pays et, même avec un
rabais de 38 %, on continue à payer beaucoup plus cher que dans les autres pays. Pour moi, en fait, quand on
a discuté du projet de loi n° 81, j'étais venu faire un plaidoyer en faveur des appels d'offres pour
les génériques. Un système d'appels d'offres pour les génériques aurait,
pour moi, été une bien meilleure solution,
d'une part, pour assurer qu'on va chercher le maximum d'économies pour l'État
québécois, mais aussi dans un cadre... je
répète, dans un contexte de fusion, acquisition. Écoutez, 25 milliards en
fusion, acquisition en 2015, 45 millions en fusion, acquisition
dans les génériques en 2016.
Là,
on se retrouve avec des logiques de consolidation, au niveau des fabricants,
contre lesquelles on ne peut pas se
protéger. Un système d'appels d'offres aurait permis de se protéger entre
autres en assurant de mettre des clauses pour la sécurité de l'approvisionnement et éviter les pénuries de
médicaments. On a choisi un chemin autre, je suis d'accord avec ça, je prends note et, soit dit en passant,
j'apprécie beaucoup qu'on est allés négocier un rabais sur le prix listé du
médicament générique et non pas un rabais
confidentiel. C'était la crainte que j'avais, ce qui montre... ce qui est un
peu différent des logiques
précédentes où est-ce que le régime public avait tendance à essayer de réduire
ses coûts en pelletant les coûts dans
le privé. Là, ici, on est allés négocier une baisse de prix qui allait s'appliquer à la fois
au public et au privé. Ceci dit,
cette baisse de 38 %, si on se compare aux autres pays comparateurs sur le
prix des mêmes génériques, on paie encore beaucoup trop.
Le Président
(M. Merlini) : Merci beaucoup, M. Gagnon.
M. Gagnon
(Marc-André) : Donc, le coût de détail est aussi problématique.
Le
Président (M. Merlini) : Merci, M. Gagnon. Ça met un terme
aux échanges. M. Marc-André Gagnon, professeur associé en politiques publiques de l'Université Carleton,
merci de votre contribution aux travaux de la commission.
Je
suspends quelques instants pour permettre à l'Association générale des
étudiants en pharmacie de l'Université Laval de prendre place. Alors,
nous suspendons quelques instants.
(Suspension de la séance à
16 h 40)
(Reprise à 16 h 43)
Le Président (M. Merlini) :
Alors, nous reprenons donc nos travaux après cette brève suspension. J'ai le plaisir d'accueillir l'Association générale des
étudiants en pharmacie de l'Université Laval. Vous disposez de 10 minutes
pour faire votre
exposé, et ensuite il y aura une période d'échange avec le ministre et les
porte-parole des deux oppositions. Je vous invite à vous présenter avant
de faire votre exposé. À vous la parole.
Association générale des
étudiants en pharmacie
de l'Université Laval (AGEPUL)
M. Cantin (Eliott) : Parfait.
O.K. Ça fonctionne. Oui. O.K., moi, mon nom, c'est Eliott Cantin.
M. Beausoleil
(Olivier) : Olivier Beausoleil. J'occupe le poste de vice-président
aux finances dans l'association étudiante.
M. Cantin
(Eliott) : Et je suis vice-président aux affaires extrafacultaires de
l'Association générale des étudiants en pharmacie.
En fait, ce
qu'on voulait présenter aujourd'hui, c'était principalement par rapport à une
inquiétude qu'on pouvait avoir par
rapport au projet de loi, principalement quand que, par exemple, avec une
compagnie pharmaceutique, si on atteint,
par exemple, 50 % de l'approvisionnement avec une compagnie pharmaceutique
X, c'est parce qu'on sait qu'un produit
générique a environ, mettons, 80... bien, il y a un 20 % de
biodisponibilité qui va être différent normalement avec le produit original. Puis ce qu'on a peur, c'est
qu'il y a certains patients, par exemple, qui peuvent vraiment réagir de
manière différente à certains
médicaments ou à certains génériques puis, de temps en temps, un patient, par
exemple, pourrait bien réagir à un générique, mais pas à un autre. Puis on a
peur que la limitation à 50 % puisse empêcher un pharmacien, à un certain moment pendant l'année, de pouvoir
continuer de servir comme un produit générique au patient que le patient
aurait besoin.
Parce que,
des fois, changer un générique pour un autre, vu qu'il y a une variabilité de
20 % dans la biodisponibilité, bien,
on a peur qu'il puisse y avoir comme des différences majeures dans les
traitements des patients puis que... En fait, il y a une étude aussi là-dessus qui supporte le fait qu'il y a plus
d'hospitalisation dans le fait, par exemple, de changer les produits
génériques chez un patient.
Je vais laisser Olivier continuer par rapport à
l'étude à ce sujet.
M. Beausoleil (Olivier) : C'est
ça. Dans le fond, moi, ce que... Merci, Eliott, d'abord.
Ce que je
voulais amener comme point, c'est qu'en fait un générique n'est pas équivalent
nécessairement à un autre générique.
Santé Canada, pour approuver un générique, se fie à sa biodisponibilité, comme
Eliott l'a dit, la quantité disponible
dans le sang de ce médicament-là qui doit être plus ou moins 20 %
similaire au médicament original. O.K.? Donc, on a un «range» de
80 % à 120 % d'équivalence par rapport à la molécule originale. O.K.?
Cependant,
les médicaments génériques entre eux peuvent donc avoir jusqu'à 40 % de
différence entre un et l'autre. Un
médicament pourrait avoir 80 % de la biodisponibilité de l'original,
tandis qu'un autre pourrait en avoir jusqu'à 120 %. Et, jusqu'à maintenant, il n'y avait pas d'étude
nécessairement qui était sortie qui avait prouvé que cette différence-là avait un effet sur la santé du patient. Là, je vois
que... de ce que j'ai pu assister jusqu'à maintenant, on voyait beaucoup qu'on
parlait du côté rémunération, du
côté est-ce que c'est possible de contourner. Nous, on voulait se
concentrer sur la santé du patient, quel impact ça allait avoir sur le
patient, concrètement, au Québec.
Donc, il y a
une étude, justement, qui est sortie récemment, début octobre, où on a vu que
ça a été publié dans certains
journaux, dont un de nos professeurs, un cardiologue, Paul Poirier a participé,
puis cette étude-là prouve que... dans
le fond, elle a suivi des patients qui prenaient des médicaments pour
l'hypertension, trois différents médicaments, puis tous ces patients-là étaient sur le médicament original jusqu'à ce
que le brevet tombe échu. Là, une certaine partie a continué sur
l'original, une certaine partie est tombée sur le médicament générique.
On a constaté que, chez les patients qui avaient
changé pour le médicament générique, il y avait eu 11 % plus d'événements cardiovasculaires et 11 % plus
d'hospitalisation seulement au cours du premier mois pour les patients qui
avaient changé au générique. Donc, déjà là,
on voit une première preuve que les génériques ne sont pas nécessairement
équivalents aux originaux comme on le
pensait auparavant. Donc, simplement cette différence-là entre le générique et l'original nous fait penser qu'il peut y avoir une
différence encore plus marquée et importante entre les génériques entre eux.
Ainsi, si on
plafonne à 50 % l'approvisionnement de certains propriétaires en une compagnie
générique, ce qui engendrerait que
certaines pharmacies devraient s'approvisionner différemment dans leurs
molécules, et donc des patients devraient...
s'ils veulent conserver leur pharmacien, ce qui est un droit du patient d'avoir
à choisir... d'avoir un choix libre et
éclairé dans le choix de son pharmacien, si la pharmacie n'est pas capable
d'offrir au patient le même générique qu'il prenait auparavant, eh bien,
il est possible que son état de santé, qui était stable auparavant, se
déstabilise.
Donc, si on
veut retrouver... là, il peut y avoir des hospitalisations, ce qui engendre un
coût aussi pour le système de santé.
Ça, c'est de un. Et, si on veut s'assurer de restabiliser... de s'assurer que
l'état de santé du patient redevient stable comme il l'était auparavant, il va falloir faire des analyses de
laboratoire, faire un suivi plus étroit, et ça aussi, ça engendre des coûts. Donc, pourquoi risquer ce changement de
stabilité là chez un patient chez qui la condition est stable? Pourquoi
risquer des hospitalisations supplémentaires, des événements cardiovasculaires?
Là, je parle juste d'une étude qui est sortie
récemment pour des génériques de médicaments pour l'hypertension, mais ça
pourrait potentiellement s'étendre à d'autres classes de médicaments
également.
Donc,
nous, c'est ça, on ne voulait pas nécessairement s'attarder sur la
rémunération, on ne voulait pas nécessairement... parce que ce n'est peut-être pas non plus de notre
intérêt, mais là, c'est ça, le point principal qu'on voulait amener à la
table aujourd'hui.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. Cantin et
M. Beausoleil, pour votre présentation. Nous allons débuter immédiatement la période d'échange avec M.
le ministre et député de La Pinière. À vous la parole pour un bloc
d'au moins 19 min 30 s.
M. Barrette :
Merci, M. le Président. Alors, M. Beausoleil, M. Cantin, je ne me
rappelle par l'ordre, je m'excuse. M. Beausoleil,
bon. Alors, bien, d'abord, merci de venir nous rencontrer aujourd'hui et de
nous faire part de vos observations. C'est très apprécié.
Est-ce que,
sur le projet de loi comme tel... bien, en fait, vous avez fait un commentaire
sur le projet de loi, mais,
sur le projet de loi comme tel, vous n'avez pas de commentaire spécifique. Vous
en avez un sur les conséquences de l'application du projet de loi. Je comprends
bien.
Et permettez-moi simplement de faire ce
commentaire-là parce que votre intervention était de cette nature-là. Pendant les prochaines minutes, vous
transformez... ce n'est pas une critique, mais vous transformez notre
commission parlementaire en «journal
club», puis c'est bien correct, ça m'intéresse. Alors, faisons un «journal
club» parce que c'est ça que vous faites, puis c'est correct.
Alors, vous
venez nous voir en nous mettant en garde contre des conséquences cliniques d'un
plafonnement du volume des génériques
venant d'un fournisseur, d'un fournisseur dans une pharmacie donnée. C'est
l'argumentaire que vous défendez. C'est correct, à date?
• (16 h 50) •
M. Beausoleil (Olivier) : Oui.
M. Barrette :
Bon. Et vous appuyez votre argumentaire sur une étude, et il y en a une. Il n'y
a pas de littérature extensive à date. Peut-être qu'il y en aura un
jour... Pardon?
M. Beausoleil (Olivier) :
Est-ce que c'est un échange ou est-ce qu'on attend que vous terminiez?
M. Barrette : Oui, oui, je veux
juste finir mon argument, puis après... C'est un échange.
M. Beausoleil
(Olivier) : C'est certain
que les bases, ce n'est pas super bien documenté, c'est une porte qui s'ouvre.
Donc, on n'est pas en train de faire une critique, de s'opposer totalement, on
est simplement en train d'exposer une inquiétude potentielle qu'on pourrait
avoir.
M. Barrette : Et c'est comme ça que je le reçois. Je le reçois
comme ça, mais le commun des mortels, qui est moins familier avec ça, comme vous l'êtes, comme je le suis, peut penser
qu'il y a là un axiome, que là c'est vraiment comme ça, là, tout le temps, tout le temps, tout
le temps. Je veux simplement mettre les choses en perspective. C'est une
étude, elle a une valeur, comme toutes les études, mais le fondement de toute
la littérature scientifique demeure la corroboration
par d'autres études. Ça, c'est le commentaire que je fais, avec lequel vous allez sans doute
être d'accord.
Deuxièmement, et là je vais aller à l'autre extrême de la logique de la chose, deuxièmement, ce que vous nous dites
justifierait une politique de ne jamais aller vers le générique, parce que,
si cette étude-là est prise au pied de la lettre, ce qui est la base de votre argumentaire aujourd'hui, qui est intéressant, bien, ça
va dans la direction, à partir de maintenant, c'est médicament d'origine pour toujours
pour tout le monde, puis ça amène là. Alors, si votre argument, et
c'est votre argument, qu'il y a
un danger au 50 % sur la base de
la comparaison avec les médicaments d'origine, la conclusion logique,
c'est que c'est terminé, là, on ne met plus personne sur aucun générique.
L'autre argument que je veux vous faire valoir,
c'est que, vous l'avez dit vous-même, dans les médicaments génériques, sur la question de la
biodisponibilité, pour le commun des mortels qui nous écoute, qui n'est pas
familier avec le mot, ça veut dire
l'effet thérapeutique en fonction de la dose prescrite, pour que tout le monde
puisse... grosso modo, là, je ne veux
pas entrer dans le détail, mais là je m'adresse au grand public qui n'est pas
familier avec ces concepts-là, ça va de moins 20 % à plus
20 %, donc de 80 % à 120 %.
Conséquemment,
si vous prenez l'exemple du 80 %, vous pouvez aussi prendre l'exemple du
90 %, du 95 %, du 105 %, du 110 %. Alors, il n'y a
pas un axiome. Ce n'est pas une règle, ça, là. La conclusion de l'étude ne peut
pas aujourd'hui être une règle absolue. Il y
a une analyse qui est faite avec une coordonnée, vous avez utilisé vous-même le
mot. Vous ouvrez une nouvelle
cohorte, c'est un premier pas, peut-être que... mais le principe, vous nous
amenez vers une logique de médicaments d'origine, jamais de génériques.
M. Beausoleil (Olivier) : Ce
n'est pas exactement ça que je voulais dire.
M. Barrette : Bien, je vais juste
finir parce que ça, c'est le fondement de ma réponse que je vous fais et de la
discussion que l'on a.
Maintenant,
dans la pratique, là, en fonction des règles de marché — et là, là, j'insiste là-dessus, ça, je pense
que vous savez ça, là — ce n'est pas vrai qu'un pharmacien, dans sa
pratique usuelle d'aujourd'hui, aujourd'hui, là, en 2017, un pharmacien qui a été diplômé il y a 10 ans,
que, pendant les 10 dernières années, le pharmacien, dans sa pharmacie, a toujours utilisé le même générique. Jamais que
ça, ça arrive. Les génériques utilisés par les pharmaciens fluctuent en
fonction de différentes règles, notamment des règles de marché et d'assurance.
Alors, il se
peut même, et c'est très fréquent, qu'un même patient puisse, dans son
cheminement thérapeutique, recevoir,
pendant une période donnée, un médicament d'origine, avoir un premier
générique, avoir un deuxième générique, avoir un troisième générique qui va lui être servi
par un pharmacien qui, lui, aura acheté des génériques en fonction des
prix du marché et d'éventuelles ristournes des compagnies. C'est ça, la réalité
du marché.
Alors, de
s'opposer au 50 % sur la base d'une étude qui a ses limites, comme je
viens de l'exprimer, mais sans prendre
en considération la réalité quotidienne professionnelle des pharmaciens, bien
là, je trouve que ça va un petit peu loin.
Parce que ce que vous dites, ça dit deux choses. La phrase, ce que ça dit, là,
c'est simple, soit on ne passe jamais du
médicament d'origine au générique, parce qu'il y a un risque, soit on minimise
le risque par une évaluation quelconque,
on prend le générique et on ne change plus jamais de générique après.
Ce que vous
invoquez, c'est le risque à l'inconstance. Ce que je vous dis, c'est que non
pas la littérature, mais l'expérience
pratique du monde pharmaceutique, et là je parle du pharmacien propriétaire qui sert des médicaments, est à
l'effet contraire, et il n'y a pas de
littérature qui montre que dans les 25 dernières années on a eu ce genre
d'événement là, du moins documenté.
Donc, on
boucle la boucle, on revient à la case départ de la littérature. Je n'ai pas de
preuve, moi, là, là, qui me permet de
même suggérer qu'il y ait un risque significatif actuellement à faire ce que
l'on fait. Et le 50 % ne vient certainement
pas avec une limitation, parce que, par classe de médicaments, vous n'allez
quand même pas me dire que dans une pharmacie donnée il y a toujours un
seul générique qui est fourni, à moins que ce soient des monopoles.
M. Cantin
(Eliott) : O.K. Oui, le point que je voulais apporter, en fait,
c'était surtout... ce n'est pas nécessairement de refuser le générique, c'est plus que le fait de passer d'un générique
à un autre, c'est qu'on peut passer d'un patient qui va être stable à un patient qui risque... qui
pourrait possiblement ne plus être stable puis qu'il va falloir comme
recommencer, par exemple, des études
de laboratoire puis recommencer à suivre ce patient-là par rapport à un nouveau
traitement avec un nouveau produit générique.
Mais, en
fait, l'inquiétude, c'était vraiment par rapport au fait que, comme on disait,
c'est que, si on atteint 50 % avec
une compagnie générique, ce qu'on avait peur, c'est juste que le pharmacien ne
puisse plus s'approvisionner dans le
produit générique qu'il voudrait donner à son patient. Parce que c'est sûr que
c'est une minorité, mais il y a certains patients, par exemple, qui ont déjà essayé plusieurs génériques, par
exemple, puis qu'ils ont absolument, par exemple, besoin d'un générique en particulier. C'était plus
dans le sens que, si l'approvisionnement est atteint à 50 %, bien, on
trouvait ça dommage que ce patient-là
soit obligé soit de changer de pharmacie ou de se chercher un autre pharmacien,
parce que le pharmacien ne pourra
plus servir le générique, en fait, avec qui le patient a été peut-être stable
pendant, je ne sais pas, moi, cinq ou
10 ans. Parce qu'il y a des patients des fois qui ont essayé vraiment
deux, trois génériques ou quatre puis qu'il
y en a un en particulier avec qui ça a bien fonctionné, un générique, en fait,
puis que les autres ça fonctionnait moins bien.
Je suis
d'accord par contre que, peut-être côté littérature, on manque de données, on
n'a peut-être pas toutes les études qui approuvent ça. C'était plus dans
le sens... dans les petites exceptions où on a des patients qui vont avoir besoin de continuer avec un générique x, c'est qu'on
trouvait ça dommage qu'à cause du 50 % le pharmacien puisse, par exemple, avoir des... en fait, pas des problèmes
pénaux, mais des amendes, en fait, par rapport à ça, alors que le pharmacien
va vouloir juste aller dans l'intérêt de son patient. En fait, personnellement,
c'est ce que je pensais.
M. Beausoleil
(Olivier) : Puis pour compléter sa réponse, c'est ça, on n'est pas en
train non plus de dire qu'on ne devrait
pas utiliser les génériques, qu'on devrait rester avec les originaux. C'est
absolument non réaliste, j'en suis conscient.
Nous, c'est
plus dans une perspective de stabilité dans le traitement du patient qu'on
voyait la chose. Donc, si un patient
a débuté une thérapie avec un médicament générique x, on devrait idéalement
mettre toutes les chances de notre côté
pour pouvoir poursuivre avec cette thérapie-là. Effectivement, dans les
dernières années, ça n'a pas fait partie de la pratique d'un pharmacien, parce qu'effectivement souvent la molécule a
changé en fonction du prix de vente ou souvent les pharmaciens ont eu à
changer de générique en fonction de plusieurs facteurs externes.
Mais là,
maintenant, étant donné qu'on va pouvoir... je vais pouvoir vous montrer
l'étude par la suite, si ça vous intéresse,
mais maintenant qu'il y a une petite brèche, peut-être un petit doute qui vient
s'installer... ce n'est pas quelque chose
qui est coulé dans le béton, j'en suis conscient, mais c'est une petite brèche,
c'est une petite porte qui s'ouvre, qui dit que peut-être que ce serait... ce
serait probablement préférable de garder la thérapie stable d'un patient. S'il
est sur l'original, on le garde sur
l'original. S'il est stable sur le générique et que ça fonctionne bien sur le
générique, on le garde là. Mais on devrait mettre toutes les chances de
notre côté, et la loi devrait aussi permettre au pharmacien d'utiliser son jugement clinique pour pouvoir poursuivre avec ce
traitement-là. On ne devrait pas lui mettre nécessairement de bâton dans les roues en lui imposant un changement de
molécule s'il a atteint un quota x. Si c'est ce qui est le mieux pour son
patient de poursuivre avec un médicament x, qu'il soit en mesure de le faire.
C'est plus dans cette perspective-là.
• (17 heures) •
M. Barrette : Disons que là ça
nous amène dans un terrain qui est totalement différent, là, pour ce qui est du
jugement clinique, mais, sur le plan pharmacologique, on peut commencer par
aller dans l'autre sens aussi. Il y a de nombreuses
études qui elles ont été faites, qui ont montré que bien des génériques ne
donnaient aucun effet différent, là, et qu'il y avait un effet placebo qui était significatif. Je ne vais vous
citer que toutes les études qui ont été faites avec les inhibiteurs de pompe à protons, où il a été montré
que c'est parce qu'il n'y en avait pas de différence, là, entre le générique
et le médicament d'origine, et les génériques entre eux.
Et là on tombe... ça nous emmène, ça, dans un
débat qui doit découler de données probantes qui viennent d'études à large spectre, suffisamment large de spectre et à double insu pour prouver telle, telle chose.
Mais, nonobstant tout ce que je viens de dire, à partir du moment où on aborde la problématique sur la base de la biodisponibilité et donc de l'effet
thérapeutique, ce que ça demande, c'est un suivi clinique pour potentiellement
ajuster la dose pour avoir l'effet escompté.
Quand
l'étude à laquelle vous faites référence suggère la possibilité d'avoir des
effets secondaires indésirables augmentés,
bien, c'est d'abord et avant tout parce que le pourcentage de biodisponibilité
n'était pas le même. Ça, c'est l'hypothèse,
mais ça ne démontre pas que, si l'ajustement avait été fait... parce que c'est
dose à dose, c'est milligramme et
milligramme. Si la biodisponibilité n'est pas la même, bien, l'ajustement du
générique va éviter cette problématique-là. Là, on tombe dans la
pratique médicale et/ou pharmaceutique, c'est un autre angle complètement.
Mais que vous
me disiez aujourd'hui que ça exige des professionnels de la santé
d'avoir une réflexion plus poussée lorsqu'il y a eu un changement du médicament d'origine vers
le générique ou entre génériques, je suis d'accord avec vous. Mais, dans cet angle-là, dans l'angle que je viens
d'exprimer, c'est l'angle qui justifie le plafonnement à 50 %. Le
50 %, c'est une décision économique,
ce n'est pas une décision clinique. Et la conséquence clinique peut être gérée
par et les pharmaciens et les médecins séparément ou conjointement.
M. Beausoleil
(Olivier) : Effectivement,
si on est prêts à faire le suivi par
la suite. Parce que ce suivi-là,
c'est sûr qu'il va y avoir des coûts
aussi qui sont engendrés par ce suivi-là. Mais, moi, ce qui m'inquiétait, c'est
le fait qu'on dénote une différence
entre le générique et l'original quand le générique est approuvé en fonction de l'original. Donc, il y a une différence de, comme je disais,
20 % entre les deux, maximale ou maximalement. Là, on peut aller jusqu'à
40 %, il peut y avoir une différence plus grande.
M. Barrette :
...dans la pertinence, c'est la responsabilité des organismes réglementaires
d'approbation. Alors, là, là...
M. Beausoleil (Olivier) : Comme
Santé... C'est vers là que je voulais aller aussi.
M. Barrette :
Non, c'est vous qui allez là, ce n'est pas moi. Quand vous dites ça, là, à ce
moment-là, là, il faudrait vous
adresser à Santé Canada pour que Santé Canada dise : À partir de
maintenant, on ne passe plus au générique puis on ne change pas de
générique.
Maintenant,
sur le dernier commentaire que vous avez fait juste avant... l'avant-dernier,
pardon, commentaire que vous avez fait, en disant : Bien là,
peut-être qu'il faudrait faire un suivi, moi, j'ai toujours pensé que la
pratique de la pharmacie et de la médecine exigeait des suivis, là.
M. Beausoleil
(Olivier) : Non, je suis tout à fait d'accord, et c'est l'essentiel du
travail de pharmacien que de faire le
suivi du médicament. Mais je sais que les analyses de laboratoire coûtent cher
à l'État, entre autres. Donc, c'est juste, là, de changer d'un... Mais disons qu'un suivi... Le suivi est
habituellement fait à l'année ou aux six mois. D'avoir à le faire plus régulièrement simplement parce qu'on change
de molécule, ça engendre des coûts aussi. Là, je sais que vous êtes probablement de loin plus qualifié que moi pour
parler de coûts engendrés à l'État pour certaines choses. Nous, on est
juste là pour justement amener une piste de réflexion et non pour vous
contredire.
M. Barrette :
Je comprends et d'ailleurs je trouve que notre conversation est très
intéressante, stimulante. Mais ça boucle la boucle, le dernier commentaire que
vous venez de faire, ça boucle quand même la boucle. Ça veut dire, si vous basez tout sur l'étude de l'Université Laval,
qu'on ne passe plus... Vous savez comme moi que c'est comme ça que ça fonctionne, la médecine, là. La médecine, c'est
que, s'il y a des évidences qu'il y a un plus grand risque, il faut trouver
une manière de contrer le risque.
Si cette étude-là
était vérifiée à grande échelle, on ne passe plus jamais de l'innovateur au
générique, et, si on passe au
générique, c'est après un essai thérapeutique d'ajustement posologique à cause
de la biodisponibilité. Mais là, la dernière partie de ma phrase, ça veut dire,
chers pharmaciens, chers docteurs au pluriel, dans le merveilleux monde de la
médecine, faites votre job. Parce que ça, c'est du suivi. Le 50 % nous
amène à la même place, alors.
Mais, à
l'inverse, comme je l'ai dit tantôt, ça fait des décennies qu'il y a des
changements de génériques chez les patients.
Et je n'ai pas vu, moi, puis là je plaide l'ignorance, là, parce que je ne vois
pas toute la littérature mondiale de tous les sujets, je n'ai pas vu de
littérature qui va à large échelle dans ce sens-là, dans un environnement
qui... Depuis des décennies, il y a des changements de l'innovateur au
générique, d'origine à générique, à un autre générique, un autre générique.
C'est tout ce que je dis.
M. Beausoleil
(Olivier) : Ce n'est pas que
je disais que ce n'était pas le travail des professionnels de la santé que
de faire le suivi, bien au contraire. C'est simplement qu'un patient qui a une situation
qui est stable, qui est bien traité sous un générique x, pourquoi déstabiliser sa situation si on a la possibilité de ne pas le faire? C'était plus dans cette optique-là que de dire qu'on ne devrait pas faire de... Je ne
prétendais pas qu'on ne devrait pas faire de suivi en tant que professionnels
de la santé, loin de là.
M. Barrette : On se comprend, là. Mais, si vous utilisez l'argument... si je dois me baser sur votre
argument du 50 %, donc d'un
générique à l'autre, bien, la même logique doit s'appliquer de l'innovateur au
générique. La position que vous
prenez, là, elle ne peut pas s'appliquer juste à un bout, elle doit s'appliquer
tout le long de la phrase. Ça fait que, si vous dites que c'est un risque de 50 %, vous dites donc que c'est
un risque aussi de passer de l'innovateur au générique. Donc, si je veux
contrer un risque, on ne prescrit plus jamais de générique.
Or, l'expérience des décades passées a montré...
ou il n'y a pas de littérature qui montre, qui corrobore ou qui confirme l'étude en question, qui est peut-être
bien correcte, puis qui va peut-être être reproduite, et qui va peut-être
devenir, dans le futur, la référence.
Je ne peux pas le dire, je ne connais pas le futur. Je dis juste que votre
position aujourd'hui nous amène là. Si c'est bon au 50 %, là, quand on est rendu là,
bien, ça doit être bon à la case départ. C'est la même logique et la
même conséquence.
Conséquemment...
puis je vous dirais même, puis je vais être un petit peu plus pointu dans mon
commentaire, beaucoup plus pointu, si
vous prenez générique à générique, y a-t-il... Vous avez choisi, dans votre discours,
de prendre un exemple d'innovateur à
moins 20 %. Bien, moi, je vous dis, là, qu'il n'y a pas de générique qui
va passer de moins 20 % à moins
30 %. Il n'y en a pas. Il y a juste des moins 20 % qui vont aller à
plus. Ça fait que changer de générique, c'est quasiment une bonne idée.
Ça fait que 50 %, là, c'est le contraire.
Alors, la
fluctuation entre génériques, là, est probablement, en moyenne, moins grande
que de l'innovateur au générique.
C'est ça, là, que vous dites, là. Si vous partez du raisonnement 100 % à
moins 20 %, il y a un risque, 11 %, bien, moi, je vous
dis : Bien, alléluia! 50 % vont avoir un meilleur générique. Mais il
n'y a pas moins de risque, là.
M. Beausoleil (Olivier) : Je ne
comprends pas vraiment le raisonnement par rapport à ça, là.
M. Barrette :
Bien, c'est parce que vous dites, vous, qu'il y a une étude, puis vous prenez
l'exemple, c'est votre exemple, on
part de l'innovateur, qu'il y a une efficacité de 100 %. C'est le point de
référence, il y a 11 % de plus d'événements.
Puis vous prenez l'exemple d'un générique qui a moins 20 % de
biodisponibilité. Moi, je vous dis que, si on change ce générique-là, à la fin, là, on va améliorer le patient
parce qu'il n'y en a pas, de moins 30 %, sur le marché. Ils ne sont pas mis par Santé Canada sur le marché. Le
moins 20 % va devenir... ça va être un autre générique, qui va être
moins 10 %, peut-être. Zéro différence
avec l'innovateur. Je vous dis que ce n'est pas simple de même, cette
affaire-là, tout simplement.
M. Cantin (Eliott) : Mais, en
fait, par contre, c'est de moins 20 % à plus 20 %. Donc, si on passe...
M. Barrette : Je le sais.
M. Cantin (Eliott) : Bien,
c'est ça. Donc, la différence peut aller jusqu'à 40 %.
M. Barrette :
C'est rare qu'on a des événements cardiovasculaires avec un petit peu plus
d'effets que moins, là.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup. Ça met un terme avec
l'échange avec M. le ministre. Et nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle. M. le député de
Saint-Jean, vous disposez d'un bloc de 13 minutes. À vous la parole.
M. Turcotte :
Merci, M. le Président. Tout d'abord, merci beaucoup, M. Beausoleil et
M. Cantin, pour votre présentation. Peut-être, sans vouloir en ajouter,
des fois... c'est correct de venir donner votre opinion. Vous auriez pu complètement être ailleurs, mais vous avez décidé
de faire le choix de venir nous présenter votre opinion parce que votre future profession vous tient à coeur, puis vous
tenez à justement faire en sorte que les futures lois soient les meilleures
pour notre population. Donc, je vous
remercie d'avoir pris de votre temps, au nom de votre association, pour venir
nous présenter les choses. Puis je
pense que vous connaissez le caractère un peu bouillant du ministre de la
Santé, donc, des fois, quand ça ne fait pas son affaire, il le dit.
Donc, ceci
étant dit, j'aurais aimé vous questionner par rapport à... Actuellement, entre
un médicament innovateur ou
générique... Bien, moi, je vais voir mon médecin, et il me prescrit un
médicament, il me dit : Bien, tu peux prendre le médicament
d'origine... bien, innovateur, ou tu peux prendre un générique. Qui va décider
quel générique on prend? Est-ce que c'est le
pharmacien qui le suggère? C'est le patient? C'est le médecin? Qui décide du
générique qui est le mieux?
• (17 h 10) •
M. Cantin
(Eliott) : En fait, ça,
normalement, ça va être le pharmacien qui va décider. Un coup que le pharmacien
va recevoir la prescription, il va décider
quel générique qu'il va donner. Je vous dirais qu'il n'y a pas nécessairement
un choix en particulier envers un
produit générique en général, en fait, là. Mais, habituellement, c'est ça.
C'est sûr que le médecin pourrait
toujours, par exemple, marquer qu'il veut que ce soit tel générique, sans
substituer. Mais personnellement je n'ai pas vu ça très, très souvent, là,
je veux dire, c'est quand même très rare que ça arrive. Mais en général,
habituellement, c'est le pharmacien qui va décider quel générique le
patient va prendre.
M. Turcotte :
O.K. À ce moment-ci ou lors de l'adoption du projet de loi et de son
application, il se peut, je suppose que ça doit être déjà le cas, qu'un
certain nombre de pharmaciens vendent un pourcentage plus élevé que 50 %
d'un médicament générique de... et là de tous les médicaments regroupés, là, du
même fournisseur. Donc, ça doit arriver actuellement.
Si ça n'arrivait pas, bien, on ne serait pas en train de jaser d'un projet de
loi là-dessus. Donc, admettons que
c'est 80 %, 70 %, 60 %, peu importe. Il y aura, dès la mise en
oeuvre du projet de loi qui deviendra une loi, donc, dès son application, un choix à faire. Donc, pour
un certain pourcentage de personnes, le pharmacien... ou avec la personne,
dire : Bien, tu recevais tel médicament
de tel fabricant, là, on va devoir te changer. Donc, il devra y avoir un choix
à faire. Comment ça va se faire?
M. Beausoleil
(Olivier) : Écoutez, c'est dur de dire. Je suppose que ça va être du
cas par cas d'une pharmacie à l'autre,
quel médicament ils vont choisir de changer versus quel médicament générique
ils vont garder. On a beaucoup parlé
de l'efficacité d'un générique par rapport à l'autre, qui pouvait varier. Mais
aussi, au niveau des effets secondaires, ce n'est pas rare que des patients nous rapportent
que certains génériques, par rapport à un autre, leur ont amené des effets
secondaires et qu'ils exigent qu'on
tienne... qu'on leur serve ce générique en particulier, avec lequel ils ne
ressentaient pas d'effets secondaires.
Donc, ce
n'est pas rare pour plusieurs pharmacies, incluant la mienne, où je travaille,
d'avoir, de tenir un certain générique
pour l'ensemble de la molécule en tant que telle et d'avoir un pot
exclusivement pour un patient qui avait mal réagi à ce générique-là. Donc, c'est inévitable que ce serait positif,
même ce serait très justifié, que le pharmacien ait la pleine liberté de
choisir avec quelle compagnie il s'approvisionne et qu'il ait de la
flexibilité, en fonction des patients qu'il a, de choisir un générique
par rapport à l'autre.
M. Turcotte :
O.K. Admettons, là, que là le projet de loi est appliqué tel qu'il est prévu
actuellement. Ça fait en sorte que, du jour au lendemain, bien, le
pharmacien ou la pharmacienne devra faire un choix avec ses patients, et la transition est pratiquement inexistante dans le
projet de loi. Donc, est-ce que d'avoir une période de transition qui
permettrait justement, comme le ministre l'a un peu mentionné, de
pouvoir ajuster la médication avec la personne, donc de voir s'il y a des réactions ou pas, pourrait être une
option? Parce que, pour une personne qui n'a pas encore de médicament,
le pharmacien pourra lui proposer un autre générique qui ne rentre pas dans son
50 % déjà existant.
Moi, ce que
je vois, le plus gros du problème de ce que vous nous présentez, si on tient
compte de l'étude que vous nous
parlez, bien, c'est pour les médicaments qui sont déjà prescrits, donc qui sont
déjà attribués à des personnes, et
que là, il faudra faire des choix, puis ça se peut qu'il y ait une réaction
suite à ça. Donc, est-ce que d'avoir une période de transition de je ne
sais pas combien de temps pourrait amener une certaine solution à votre
inquiétude?
M. Beausoleil
(Olivier) : Effectivement, ce serait positif. Puis d'ailleurs,
là, on parle... c'est dans une minorité des cas, là. C'est vrai qu'on change fréquemment de générique, ça
arrive, et en fonction des différentes réalités du milieu. Et, dans la plupart des cas, les patients réagissent
bien habituellement. Mais là c'est dans la minorité des cas où ce n'est pas
possible, je veux dire, c'est dans la minorité des cas où il y a des effets
secondaires ou une baisse de l'efficacité avec l'autre générique, que là
ce serait vraiment intéressant pour le pharmacien d'avoir une flexibilité à ce
moment-là.
C'est sûr que
d'avoir une période de transition, où on pourrait essayer une molécule
différente, voir si ça réussit au
patient et, le cas échéant, où ça ne réussit pas au patient, de pouvoir revenir
à l'autre molécule générique qu'on tenait auparavant, c'est sûr que ce serait intéressant dans le bénéfice du
patient et non du pharmacien. Nous, notre intervention principale, là, c'est pour la population, pour la
santé des Québécois. C'est ça qu'on veut mettre de l'avant ici puis c'est
pour ça qu'on est présents ici aujourd'hui.
M. Turcotte : Je comprends que vous ne voulez pas aborder la
question de la rémunération parce que, bon, vous avez mentionné d'entrée de jeu que ça vous concernait moins. Je peux
comprendre actuellement. Éventuellement, ça va vous concerner quand même. Dans le cas où... Selon ce que M. le ministre a mentionné précédemment, les pharmaciens ont aussi ce rôle-là avec les médecins, bien
entendu, de voir si une prescription, donc un choix de médicament, est
correcte, s'il n'y a
pas de réaction, puis tout ça, et de modifier si tel est le cas. Pour cette
révision-là ou ce suivi-là, est-ce
que les... Moi, de ce que je
comprends, c'est que les rémunérations ne sont pas nécessairement... les
pharmaciens ne sont pas nécessairement rémunérés pour faire ça.
M. Beausoleil (Olivier) :
Effectivement, ce que je trouve déplorable. Mais ça, c'est encore un enjeu qui
est beaucoup plus grand, là, c'est le mode de rémunération des pharmaciens. on est
principalement rémunérés à la distribution de médicaments et non aux services cliniques qu'on donne. Avec la loi n° 41
et avec certains actes de la loi n° 41, oui, on va être rémunérés pour un suivi pour un nombre défini de fois par année.
Donc, ce n'est pas à chaque fois qu'on fait un suivi, c'est qu'il y a un
nombre x de suivis qui va être rémunéré dans l'année. Donc, c'est ça.
En ce moment,
le mode de rémunération fait qu'on est rémunérés principalement à la
distribution des médicaments, un
honoraire à chaque fois qu'on sert le médicament. Mais, si on veut aller plus
loin, si on veut faire un suivi et prescrire des analyses de laboratoire, analyser les résultats, le cas échéant,
faire une opinion pharmaceutique au médecin par la suite, par la RAMQ, les opinions pharmaceutiques sont
rémunérées; par les assurances privées, ce n'est pas le cas. Donc, c'est
juste la façon dont on est rémunérés.
On dirait que
ce n'est pas une méthode qui nous pousse à aller plus loin nécessairement dans
nos interventions, entre autres dans
les suivis. Donc, ce serait intéressant, c'est sûr, que, si on pouvait revoir
le mode de rémunération et être rémunérés
au service clinique qu'on donne, au lieu d'être rémunérés à la distribution du
médicament, ce serait une innovation qui aurait sa place d'être puis qui
serait très appréciée dans le milieu, à mon avis.
M. Turcotte : Moi, je crois que, comme on veut faire des
grandes réformes ou qu'on veut changer les choses, c'est souvent auprès des plus jeunes qu'on doit
s'adresser, souvent, parce que la... souvent, les rêves, les aspirations, c'est
dans la jeunesse qu'on peut les trouver.
Donc, premièrement, je vous remercie pour votre témoignage, ce que vous nous
amenez. Je vous remercie aussi pour votre intérêt pour les travaux
parlementaires sur le projet de loi n° 148. Mais, en terminant... Est-ce
qu'il y a encore un peu de temps?
Le Président (M. Merlini) :
Oui, il vous reste trois minutes, M. le député de Saint-Jean.
M. Turcotte : Bon. J'aimerais ça vous questionner sur la
question des stages en pharmacie pour voir où est-ce que c'en est à l'Université Laval.
M. Cantin
(Eliott) : En fait, pour la
condition des stages, ça s'est quand même relativement bien réglé, je vous
dirais, là, on a quand même... En tout cas, à cette session-ci, si je ne me trompe pas, tout le
monde est vraiment placé, on n'a
comme pas vraiment de problème par
rapport aux stages. On avait peut-être
un petit peu plus d'inquiétude par
rapport à l'hiver parce qu'en fait il va y avoir plus de gens qui
vont... en fait, parce que toutes les cohortes à l'hiver vont vraiment être en stage. Tandis que là à l'automne, par
exemple, les premières ne sont pas en stage. C'est sûr qu'à l'hiver,
habituellement, c'est une période où est-ce qu'il y a plus de stages
toutes cohortes confondues, là. Donc, on avait peut-être plus des inquiétudes
par rapport à ça. Mais pour l'instant ça va bien, puis pour l'instant il n'y a
pas de problème.
M. Beausoleil
(Olivier) : C'est ça.
Pendant la période de crise, l'année dernière, ce qu'on craignait, c'était de
retarder certains diplômes qu'on allait
remettre. Mais là, ce n'est plus... tout devrait arriver dans les dates, là, il
n'y a plus vraiment d'inquiétude par rapport à ça. On a fait des ajustements. On a réussi à faire du recrutement
aussi. Puis là on touche du bois, mais ça semble s'être stabilisé, là.
M. Turcotte : Bien, je vous remercie beaucoup puis je vous souhaite bonne chance dans
votre prochaine profession.
Le Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup, M. le député de Saint-Jean. Nous allons maintenant vers le deuxième groupe d'opposition. M. le député de
Lévis, la parole est à vous pour un bloc d'échange de neuf minutes. À vous
la parole.
• (17 h 20) •
M. Paradis
(Lévis) : Merci, M. le
Président. M. Cantin, M. Beausoleil, bienvenue. C'est intéressant,
hein, je veux dire, vous êtes dans
une portion du n° 148 qui met un peu de côté la notion économique, pas
seulement un peu mais totalement, pour
vous arrêter à cette étude-là qui a été présentée et qui a fait jaser, hein, je
vous dirai que l'effet sur les gens, ça a été un questionnement. D'ailleurs, dans cette même étude, c'est le Dr Poirier,
cardiologue, où... et je pense que c'est intéressant de le dire et de le préciser aux gens, vous avez
comparé le nombre de visites à l'urgence, les hospitalisations avant et après
l'arrivée sur le marché de versions
génériques de médicaments spécifiquement dans le domaine de l'hypertension. Et
là vous avez constaté des choses, le fameux 11 % dans le premier
mois d'épisodes d'urgence ou d'hospitalisation.
En même
temps, c'est intéressant parce qu'il y a des gens qui se sont dit, puis je
présume... Puis en fait je veux avoir un peu l'effet, comment vous avez perçu
l'effet de cette nouvelle-là. Après médication, les gens, là, ils sont...
Tu sais, c'est important, tu prends la bonne
pilule au bon moment puis tu fais confiance en ton pharmacien. Puis qui ne
s'est pas fait dire un jour :
Bien, écoutez, on a maintenant le générique, puis, regarde, ça va bien, ça fait
la job? Je comprends qu'à travers ça
il y a la vigilance du professionnel, il y a la vigilance aussi de
l'utilisateur, hein, qui doit être en mesure de dire à son professionnel s'il y a des effets qu'il ne ressentait pas
ou s'il y a des impressions. Puis ça vous nourrit aussi, ensuite, dans
votre relation avec le patient.
Sauf que Dr
Poirier dira... le 11 % dans le premier mois chez les personnes qui sont
passées à la version générique, il dira,
et je le cite : «"Ce pourcentage s'est atténué par la suite,
possiblement parce que les médecins ont ajusté la dose du médicament de leurs patients ou qu'ils leur ont
prescrit un autre médicament", avance M. Poirier. [Donc,]
12 mois après l'introduction de
la version générique — notamment d'un des produits que vous avez analysés — la fréquence des visites à l'urgence et des hospitalisations demeurait
2 % plus élevée...» Mais là on a quand même de façon significative diminué
le pourcentage qui avait été vu dans le premier mois, on s'entend?
Ça a été
quoi, la... Puis je prends un autre truc, puis c'est important aussi parce
qu'il y a des gens, moi, qui m'ont questionné,
des personnes âgées, notamment, qui se sont dit en voyant ça : Ouf! Il
faut-u que je retourne à l'innovateur?, on est-u en train de me donner
quelque chose que je ne devrais pas prendre? Puis je sais que ce n'est pas ça,
le but de l'exercice. Vous avez dit : Ce qu'on veut faire, là, c'est
inviter à la prudence. C'est ce que j'ai compris de l'étude. Et d'ailleurs vous direz dans l'étude que ça
n'établit pas de lien de cause à effet entre les changements de médicament,
mais donc ça invite à la prudence. Alors donc, ça, c'est dire :
Soyons conscients puis soyons allumés tout le monde.
C'était quoi,
la réaction de cette étude-là dans votre travail? Et vous travaillez dans une
pharmacie. Comment les gens ont perçu ça? Est-ce que ça a suscité une
crainte, davantage de questionnements sur l'opportunité de choisir le générique
par rapport à l'innovateur?
M. Beausoleil (Olivier) :
Vas-y.
M. Cantin (Eliott) :
Personnellement, moi en tout cas, la réaction que j'ai eue beaucoup, c'est
qu'il y a des pharmaciens, entre autres... Bien, tu sais, parce qu'il y a deux
genres... Il y a des pharmaciens en fait qui vont avoir beaucoup plus d'assurance, il y en a d'autres qui vont être un petit peu
plus, on va dire, peureux, si on veut. Je vous dirais que, chez les pharmaciens qui sont un petit peu
plus peureux, ça a peut-être fait un petit peu peur par rapport au suivi.
Les pharmaciens, en fait, voulaient faire
plus de suivi dans le fait, mettons, de passer d'un médicament originaux à un
générique pour juste s'assurer, en fait, que
le traitement soit adéquat puis qu'il n'y ait comme pas de problème du fait
de passer de l'originaux au générique.
Personnellement, c'est beaucoup ce que j'ai vu dans mon milieu de travail puis
ce que j'ai entendu parler en général,
que... de peut-être faire des suivis qui étaient plus étroits. Mais, à part ça,
je ne sais pas si Olivier avait des expériences.
M. Beausoleil (Olivier) : Mais
auprès de clients...
Une voix : Auprès de la
clientèle.
M. Beausoleil
(Olivier) : C'est ça, auprès de la clientèle, il n'y en a pas beaucoup
qui ont pris connaissance de cette
étude-là jusqu'à maintenant. J'en ai eu certains. Puis, à ce moment-là, comme
vous l'avez dit dans l'étude, c'est le 11 % au cours du premier mois, on parle bien du premier mois, et donc de la
période de changement sur laquelle je veux insister. C'est pendant la période de changement qu'il y a eu une hausse
des hospitalisations, et ce n'est donc pas le... Moi, ce n'est pas nécessairement le passage au
générique que je vois problématique, c'est juste le changement de thérapie, le changement de molécule. Donc, si un patient est
stable avec un médicament quelconque, un générique quelconque, moi, je
n'avais pas nécessairement de problème à... pas de... Je cherche un mot.
M. Paradis (Lévis) : De crainte
à...
M. Beausoleil (Olivier) : C'est
ça, je voulais calmer ses inquiétudes. Je voulais calmer ses inquiétudes par rapport à : J'ai changé de... j'ai pu changer
au médicament générique, il y a trois ans, est-ce que ça va être négatif pour
moi? La période de changement est terminée, vous êtes stable avec ce
médicament-là, il n'y a pas nécessairement d'inquiétude
à avoir, à ce moment-là, parce que le changement s'est passé, vous vous êtes
ajusté, maintenant, votre thérapie est
stable avec ce nouveau médicament-là. Donc, je n'ai pas de problème à les
rassurer à ce moment-là. Puis habituellement ça passe assez bien.
M. Paradis
(Lévis) : Et là on se
comprend, parce que le premier changement, il passe de l'innovateur au
générique. Le premier élément
ensuite, il pourrait y avoir substitution sur un générique parce que maintenant
le pharmacien tiendra un produit
provenant d'un autre fabricant. Mais en fait, votre première intervention,
quand vous avez à rencontrer un client, un patient, c'est le moment où on passe de l'innovateur au générique
puis de juger, dans ce 30 jours-là, dans ce mois-là, évidemment, l'effet
du médicament, puis surtout les effets sur son traitement, puis les
modifications que, lui, peut sentir ou qu'on pourrait vous rapporter.
C'est entre l'innovateur et le générique, rarement entre deux génériques.
M. Cantin
(Eliott) : Oui, bien, en fait, c'est parce que c'est rare, c'est très
rare quand même qu'on va changer d'un
générique à un autre. Habituellement, c'est stable dans les pharmacies. Puis
l'approvisionnement puis les personnes, en fait, en général, vont souvent prendre le même générique, à moins
qu'une pharmacie change vraiment... Comme je vous disais, ça arrive qu'il y a une pharmacie qui a un produit que...
elle a un générique puis, du jour au lendemain, elle passe complètement à un
autre générique. Il y a des personnes, par exemple, qui vont pouvoir rapporter des effets secondaires ou il y a des personnes qui vont
vouloir revenir à l'ancien générique parce
que ça allait bien. Mais, en général, c'est quand même rare qu'on
passe d'un générique à un autre.
Mais c'est
sûr que le problème, comme Olivier a dit, c'est surtout, justement,
le changement, le fait de passer de l'original
à un générique. Oui, il va falloir faire attention, il va falloir faire un
suivi. Mais là c'est parce qu'on n'a plus un
problème de juste original à générique, ça va être
original, à générique, à générique. On a juste peur que ça s'accentue,
en fait, là.
M. Paradis
(Lévis) : Mais est-ce qu'il vous est arrivé, dans votre pratique où vous travaillez, avec des collègues
qui ont terminé depuis plus longtemps
parce que vous êtes... bon, d'avoir à faire des changements
de générique à générique? C'est quelque chose qui est déjà arrivé. Les génériques ne sont pas identiques sur
le marché, depuis les 50 dernières années, là, je veux dire, il y a des choses qui ont changé, et tout ça. Il vous
arrive d'avoir à être obligés d'offrir un autre générique par rapport à
un premier qui est pris par un patient, là.
M. Beausoleil (Olivier) : Oui,
effectivement. Puis surtout, au cours de la dernière année, il y a eu plusieurs
bouleversements puis changements dans le
milieu pharmaceutique. Donc, oui, il
y en a eu, des changements de
générique. Puis, c'est ça, il y en a
plus dans la dernière année, et, dans la dernière année, il y a
eu plus de patients aussi qui ont rapporté qu'avec ce nouveau générique là ils ont eu tel effet secondaire ou...
C'est une infime partie de tous les changements qu'on aurait faits, mais
reste que ça arrive. Donc, il faut juste rester vigilants.
M. Paradis
(Lévis) : Mais je comprends ce que le ministre raconte. Puis, je veux dire, une étude, aussi
probante soit-elle puis aussi intéressante soit-elle, fait en sorte que, dans la multitude de données qui sont
publiées, à un moment donné,
c'est une vision qui incite à la prudence. Mais ce n'est pas en soi une vérité
qui s'applique à tout. Je comprends bien.
Je suis quand même
content que vous abordiez ça parce
que manifestement, au-delà... puis que vous me disiez que certains patients se sont informés davantage.
La publication de cette étude-là, en tout cas pour des gens autour de moi, a
provoqué des questionnements puis, pour certains, a fait en sorte que
certains remettent en question l'utilisation d'un générique,
en se disant : Coudon, c'est-u bon, ce que je prends là? Ça fait que, moi,
le côté très positif de votre présence, au-delà d'inciter à la prudence, c'est de faire en sorte que le
professionnel et le patient... fasse le travail qui est le sien,
c'est-à-dire de suivre...
Tu sais, une
pilule, ce n'est pas rien qu'une pilule. Une pilule, ça suppose qu'à chaque
fois qu'on renouvelle... la plupart
du temps, c'est au mois, bon, à moins que ce soit des renouvellements plus long
terme, mais qu'il y ait aussi un moment de contact entre le professionnel et
son patient pour savoir si tout va encore bien. Et ça, je pense que, dans
la façon de faire maintenant, probablement
dans la vôtre, ça fait partie aussi de l'éthique que vous vous donnez,
c'est-à-dire de la façon de traiter votre patient pour faire en sorte
qu'il soit en meilleure santé possible.
Le Président (M. Merlini) :
Vous avez le mot de la fin, messieurs. Allez-y.
M. Beausoleil
(Olivier) : Parfait. Donc, effectivement, c'est notre rôle principal,
en tant que pharmaciens, de faire le suivi
et de la thérapie du médicament, s'assurer... On est les plus proches du
patient, on le voit, comme vous dites, à tous les mois, lors du renouvellement, donc c'est sûr que c'est un travail
qui doit être fait d'emblée. À toutes les fois que le patient renouvelle, on doit s'assurer que tout se
passe bien avec son médicament, au niveau de l'efficacité, au niveau de la tolérance, au niveau de son adhésion, s'il
prend bien son médicament également. Donc, ça, c'est notre travail principal,
et on le fait, et on n'a pas de problème à le faire. On n'est pas en train de
dire qu'on ne devrait pas le faire du tout, au contraire, loin de là. C'est certain que, par contre, s'il y a plusieurs
changements... s'il y a des changements, là, ce suivi devra être encore une fois plus étroit, et probablement qu'il y
aura plus d'ajustements
qui devront être faits également.
M. Paradis (Lévis) : ...l'importance
de votre place également dans la chaîne des professionnels de la santé.
Le Président (M. Merlini) : Merci
beaucoup...
M. Paradis (Lévis) : Vous êtes
souvent ceux que l'on voit en première ligne. Alors, bravo pour votre travail!
Le
Président (M. Merlini) :
Merci, M. le député de Lévis. M. Olivier Beausoleil, M. Eliott
Cantin, représentant l'Association
générale des étudiants en pharmacie de l'Université Laval, merci pour votre
présence. Merci pour votre contribution aux travaux de la commission.
Étant donné que nous avons terminé notre journée, la commission ajourne ses travaux
au mercredi 8 novembre 2017, à 15 heures, où nous allons poursuivre son
mandat.
Merci et bonne fin de soirée.
(Fin de la séance à 17 h 29)