(Onze heures six minutes)
Le Président (M. Merlini) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Bienvenue à la Commission de la santé et des services
sociaux. Ayant constaté le quorum, je déclare donc notre séance de travail
ouverte. Je demande à toutes les personnes présentes au salon rouge de
bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
La commission
est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre des
consultations particulières sur le projet de loi n° 130, Loi
modifiant certaines dispositions relatives à l'organisation clinique et à la
gestion des établissements de santé et de services sociaux.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements ce
matin?
La Secrétaire : Non, M. le
Président, il n'y a pas de remplacement.
Auditions (suite)
Le
Président (M. Merlini) :
Très bien. Aujourd'hui, nous entendrons les groupes suivants :
l'Association médicale du Québec,
le Groupe d'approvisionnement en commun de l'Est du Québec,
Sigma Santé et le Groupe d'approvisionnement en commun de l'Ouest du Québec, la table de coordination des réseaux
universitaires intégrés en santé et la Fédération des médecins résidents
du Québec.
Je souhaite
donc la bienvenue aux représentants de l'Association médicale du Québec. Je vous invite de bien vouloir vous présenter au début de votre exposé. Vous
disposez de 10 minutes, et ensuite on procédera à l'échange avec les
membres de la commission. Bienvenue. La parole est à vous.
Association médicale du
Québec (AMQ)
Mme Jen (Yun) : Bonjour, M. le
Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés. Je suis Dre Yun Jen, présidente de l'Association médicale du Québec,
et je suis accompagnée de Dr Hugo Viens, vice-président de l'Association médicale du Québec.
Pour ceux qui
ne connaissent pas notre association, l'AMQ est une organisation dont la
mission est de mobiliser les médecins pour l'avancement du
professionnalisme médical, notamment par la mise en place d'une gouvernance clinique forte. Alors, vous pouvez comprendre,
avec cette mission, ce projet de loi n° 130 nous interpelle beaucoup,
surtout en ce qui concerne le volet d'encadrement médical.
D'entrée de jeu, on tient à souligner qu'on est
conscients qu'il y a des problèmes à corriger dans certains établissements, et, dans ce contexte, l'AMQ est
d'accord avec les objectifs du projet de loi n° 130 qui s'appuient sur le
principe que les médecins qui ont des privilèges dans un établissement, ils ont
aussi des obligations, c'est-à-dire ils ont aussi des obligations envers la population générale, et que chacun se
doit de contribuer activement à l'offre de service pour cette population. Mais, malgré qu'on soit en
accord avec l'objectif et les principes de ce projet, on craint qu'il vient
affaiblir une structure déjà fragilisée par la mise en oeuvre de la nouvelle
réforme.
La Loi sur
les services de santé et les services sociaux actuelle prévoit déjà les rôles
des chefs de département clinique, du
CMDP, du DSP et du C.A. ainsi que la responsabilité des médecins et des
sanctions en cas de non-respect de
ces obligations. Certains d'entre vous considèrent que l'application de la loi
se fait de façon inégale entre les établissements et que le projet de loi est donc nécessaire. Pour
nous, la solution ce n'est pas dans l'ajout des règles et des mécanismes
à une multitude de règles et mécanismes qui
existent déjà. La solution passe plutôt par l'application plus rigoureuse de la
loi actuelle, une application qui passe par
une clarification du rôle des médecins gestionnaires et la mise en place d'un
vrai partenariat médico-administratif.
• (11 h 10) •
Les dispositions principales introduites par le
projet de loi n° 130 ne seraient, en réalité, pas nécessaires si les médecins gestionnaires ont la reconnaissance et le
soutien qui leur permettent d'exercer plus efficacement leurs fonctions.
Et, pour affirmer ça, on s'appuie sur un
sondage qu'on a effectué à l'AMQ en 2016 sur les besoins des médecins gestionnaires. Alors, dans les résultats de ce
sondage, on a vu que les médecins gestionnaires sont mobilisés par la volonté
et la capacité d'influencer l'organisation
des services et aussi par l'amélioration du système de santé. Et, contrairement
à
ce qu'on pourrait penser, la majorité des médecins gestionnaires sont positifs.
Ils perçoivent les changements actuels pas comme un obstacle, mais vraiment
comme une opportunité pour améliorer l'intégration et l'accessibilité des services. Ils veulent contribuer
à la mise en oeuvre de la réforme et ils veulent sa réussite. Par contre, notre sondage montre aussi que la nature du poste et les responsabilités d'un médecin gestionnaire sont souvent mal
comprises, et c'est là, le problème.
Alors,
une meilleure application des mesures et des obligations prévues dans la
loi serait possible si les médecins gestionnaires pouvaient compter sur
une forme de soutien de la part des administrateurs. Donc, c'est dire qu'on souhaiterait avoir un
meilleur partenariat médico-administratif. Et c'est là où est-ce qu'on revient aux effets potentiels du
projet de loi n° 130 qui nous préoccupe, ce projet envoie en quelque sorte le message que le secteur administratif
du réseau de la santé est le seul
garant d'un bon encadrement des services et des soins, alors que, dans la réalité, il doit y avoir
un équilibre entre le secteur administratif et les médecins, et c'est ce qu'on
appelle avoir une saine gouvernance clinique. Et ce qu'on craint avec le
projet de loi n° 130 dans sa forme actuelle, c'est que ça vient nier
l'effet positif d'une saine gouvernance
clinique, nier l'effet positif d'un sain partenariat médico-administratif et ça
vient peut-être écarter les médecins dans
la recherche de solutions. Il ne faut pas les écarter, et c'est pourquoi on a
mis en place, à l'AMQ, un regroupement des
médecins gestionnaires en 2015 pour leur offrir justement un soutien concernant
l'organisation des services et de les outiller
adéquatement. On organise un colloque annuel pour discuter des enjeux actuels
qui les touchent et on offre des formations en leadership médical qui
répondent à leurs besoins.
Sachez
que l'AMQ offre son entière collaboration au ministre de la Santé pour qu'il y
ait des efforts concertés pour
répondre aux besoins des médecins gestionnaires et de les soutenir dans leur
rôle. Nous considérons que l'expertise de
l'AMQ en matière de leadership médical et de professionnalisme peut aider le
gouvernement du Québec à assurer une meilleure application de la loi
actuelle sans faire des changements législatifs majeurs.
Je passe la parole au
Dr Hugo Viens, qui présentera les recommandations plus spécifiques de l'AMQ.
M.
Viens (Hugo) : Merci, Dre
Jen. M. le Président, M. le
ministre, MM. et Mmes les députés,
c'est donc notre expertise et notre connaissance des médecins gestionnaires et du professionnalisme médical qui nous
permettent d'affirmer aujourd'hui que la solution ne passe pas par ce projet de loi dans sa forme actuelle et que des modifications sont souhaitées.
Pour avoir suivi attentivement le déroulement de la commission depuis quelques jours, je sais que M. le ministre nous dira que l'intention est
de créer un fil conducteur dans le réseau
de la santé, que le projet de loi a pour objectif de donner des leviers pour une meilleure gestion de l'octroi et des renouvellements des privilèges. Malgré cela, nous restons profondément inquiets, sur le projet de loi, que le projet de loi donne aux P.D.G. des établissements le droit de faire une recommandation directement au C.A., ce qui réduit considérablement la responsabilité du CMDP, en lui donnant un rôle simplement
consultatif.
Nous reconnaissons la
responsabilité collective des médecins envers la société. L'autonomie et la
capacité d'autorégulation n'enlèvent pas l'obligation de concilier leurs intérêts et les besoins professionnels avec les
ressources disponibles, dans l'intérêt de la population. Toutefois, ce projet
de loi individualise la responsabilité et le principe d'autorégulation des médecins. Les systèmes performants comme les
Kaiser Permanente favorisent une responsabilité
et une imputabilité collectives des
médecins et des administrateurs en
matière de qualité des services et d'utilisation optimale des ressources. L'imputabilité et la
responsabilité conjointes des médecins et des gestionnaires sont déjà assurées
dans la Loi des services de santé et
des services sociaux, mais la culture d'application doit être consolidée. Comme
le disait ma collègue la Dre Jen, une législation supplémentaire ne fera
pas en sorte, à notre avis, que les intervenants auront magiquement les connaissances et les compétences pour l'appliquer
efficacement. C'est donc un travail collaboratif qui doit s'amorcer.
Afin
d'aider le travail des parlementaires, nous avons fait des recommandations
précises dans notre mémoire pour plusieurs
des articles qui nous préoccupent. Nous pensons que le projet de loi pourrait
être modifié pour répondre aux problèmes
actuels sans ébranler les structures inutilement. Nous espérons que les
modifications proposées seront retenues. Toutefois, si les membres de la commission souhaitent aller de l'avant
avec les articles tels que libellés, permettez-nous de faire des
propositions pour nous assurer que cette nouvelle législation n'affecte pas la
mobilisation des médecins.
D'abord,
le ministre devrait laisser une période raisonnable pour que les médecins
gestionnaires et les gestionnaires du réseau mettent en place les
éléments de la réforme déjà en cours. Le gouvernement pourrait créer un comité
de travail qui se pencherait sur la clarification du rôle des médecins
gestionnaires et du soutien dont ils ont besoin. S'il n'y avait pas
d'amélioration, selon les objectifs qui seront établis, le ministre pourrait
alors appliquer ces mesures. Toutefois, le gouvernement serait plus avisé de
mettre en place une mécanique de soutien, voire de tutelle pour une gouvernance
médicale fautive, sans pénaliser ceux qui font leur travail comme il se doit.
Il
nous apparaît également essentiel de mettre en place un mécanisme d'appel pour
les médecins qui perdraient leurs
privilèges de façon à éviter des décisions arbitraires et injustifiées.
L'absence de contre-pouvoir dans le projet de loi est préoccupante parce qu'elle peut aller jusqu'à
menacer la carrière d'un médecin. La seule option actuellement pour un médecin serait d'utiliser le Tribunal des
professions, encourageant un processus judiciaire qui ne devrait être utilisé
qu'en dernier recours. Il faudrait également
inclure une mesure d'appel devant le CMDP ou le C.A. d'un établissement.
Par exemple, le rôle du comité de discipline pourrait être élargi à cet effet.
Finalement, un
mécanisme de concertation avec les médecins pour fixer des cibles à atteindre
est nécessaire. Il permettrait aux
organisations de choisir des solutions à appliquer pour atteindre ces cibles.
Les médecins, tout comme les
gestionnaires, doivent avoir accès à des données et des indicateurs fiables
pour analyser leur pratique, se comparer et mesurer l'atteinte des
résultats.
M.
le ministre, en tant que médecin, vous savez, comme nous, que la dose d'un
médicament peut devenir un poison si elle est trop forte. C'est pourquoi l'AMQ
demande quelques modifications au projet de loi n° 130 pour éviter que
cela ne se produise. Nous croyons aussi qu'il faut laisser le temps aux
médecins gestionnaires de mettre en place la réforme actuelle sur le terrain.
Tout comme vous, ils souhaitent améliorer notre système de santé et des
services sociaux.
M. le ministre, M.
le Président, nous sommes maintenant prêts à répondre à vos questions.
Le
Président (M. Merlini) : Merci, Dre Jen et Dr Viens, pour cet exposé.
Nous allons débuter immédiatement la
période d'échange avec le député de La Pinière, ministre de la Santé et
des Services sociaux. Vous disposez d'un bloc de 21 minutes. À vous
la parole, M. le ministre.
• (11 h 20) •
M. Barrette : Merci, M. le
Président. Dre Jen, Dr Viens, merci d'abord d'être venus et merci de votre
présentation qui est d'une autre
teneur et d'un autre ton que ce que l'on a entendu hier. Et je pense qu'on doit
le souligner, là, parce qu'honnêtement
hier ce n'était pas à la hauteur de ce que le corps médical peut livrer comme
exercice dans le processus d'évaluation
ou de consultation d'un projet de loi qui est présenté par le gouvernement dans
cette Assemblée. Et je suis content
que vous ayez abordé le projet de loi de la façon dont vous l'avez fait, à
savoir d'une façon objective, et rassurez-vous, là, vous êtes ici parce
qu'on a besoin de vous entendre, on est ici pour être conseillés, et
d'échanger.
Je
vais commencer en mettant la table de façon suivante : Quand j'écoute le
corps médical, évidemment, le corps médical,
disons, dans le projet de loi, là, puis ici on ne parlera pas des autres
volets, là, de plaintes et d'approvisionnement, parce que vous venez ici parler de la partie médicale en termes de
gouvernance, le corps médical se sent menacé par ce projet de loi là, qui, dans les faits, n'est pas
une révolution en soi. D'aucuns pourraient dire que c'en est une, parce que
c'est vrai que ça fait un pas qui n'a jamais
été franchi dans le passé. Mais, si une chose que ce n'est pas, ce n'est pas un
projet de loi qui vise à faire en sorte
qu'un P.D.G. d'établissement ait un pouvoir de vie ou de mort professionnelle
sur un médecin. Alors, dans une
certaine mesure, commencez par le voir, comme je l'ai dit précédemment, comme
étant un complément à la loi
n° 10. Dans l'évolution de la réforme que l'on met en place, il y a un
élément qui manquait qui est celui de ce complément-là. Il faut le voir
comme ça.
Quand
vous parlez de la nécessaire collaboration et implication entre les
gestionnaires purs et les médecins, c'est exactement ce que je pense, là, puis je l'ai dit dans tous les autres
projets de loi qui ont touché la santé, à un moment donné... Moi, j'ai été élevé dans la cogestion, et c'est
clair qu'elle doit être là. Quand vous nous dites, Dr Jen... Et d'ailleurs je
salue le fait que vous êtes la
première organisation à avoir, il y a plusieurs années, mis en place des
programmes de formation, pour les
médecins, en gestion. Puis vous avez raison là-dessus, là, il y a plein, plein
de médecins qui ne comprennent pas la loi, qui ne comprennent pas les
règles dans lesquelles ils naviguent et qui donc n'agissent pas.
Par
contre, vous avez dit aussi que... vous avez convenu qu'il y avait des
problèmes dans le réseau, là, et qu'à certains égards ces problèmes-là... — et ça, c'est votre opinion, avec laquelle je
ne suis pas totalement d'accord, je suis d'accord en partie, mais pas totalement — vous dites : Dans le réseau, les lois
actuelles permettent de résoudre les choses. O.K. Je pense que non, moi, que ça ne permet pas de régler
toutes les choses. Le projet de loi n° 130 n'est pas un projet de loi pour
venir gérer la pratique professionnelle d'un médecin, mais bien de faire en
sorte que les balises selon lesquelles le médecin navigue dans le
système, elles, doivent être l'objet d'un certain encadrement.
Dr
Viens, vous avez fait référence... — et ça, ça me désole un peu de voir cette
perception-là, compte tenu du fait que
je l'ai dit à plusieurs reprises — vous avez parlé de données d'indicateurs
fiables, et ainsi de suite, là. Ce projet de loi là, là, ce n'est pas un projet de loi qui a été écrit
pour dire : Vous devez faire tant d'examens par jour ou voir tant de
patients par jour. Il y a d'autres
manières de gérer ça, par la négociation, et ainsi de suite, mettons, par
exemple, la loi n° 20. Ce n'est pas fait pour ça, là, ça, là. Ça,
c'est fait pour que, dans une organisation — on va être simple, là, dans
les commentaires — la machine roule, que la machine soit bien
huilée. La meilleure façon de le dire, là, c'est que cette loi-là doit être le lubrifiant du système. Ça ne marche
pas, là, bien, il y a quelque chose qui accroche, il y a un grain dans l'engrenage, il faut avoir la capacité d'agir sur
le grain qui nuit à l'engrenage. Alors, c'est comme ça qu'il faut le voir.
Vous
parlez de culture d'application, vous avez bien raison. Et, sur le terrain, là,
il y en a, des problèmes dans les organisations.
Parce qu'évidemment, quand on parle de ça, on parle de privilèges, hein, on ne
parle pas de la médecine au complet.
On parle de la médecine au complet mais dans une institution sur un territoire,
maintenant avec les CISSS. Alors, il
faut avoir ces leviers-là pour faire en sorte que la machine fonctionne. Et là
il y a plein d'exemples. Vous les avez entendus.
Je suis content de voir que vous avez suivi les travaux, donc vous avez entendu
les exemples que j'ai donnés.
Dr
Viens, vous avez vous-même fait référence à Kaiser. J'y ai souvent fait
référence moi-même. Il n'y a probablement pas d'organisation... Kaiser,
pour le bénéfice de tout le monde, c'est plus gros que le Québec en clientèle,
nombre d'institutions, et ainsi de suite, et
ça fait tout ce que le Québec fait. Alors, Kaiser, c'est le Québec en plus
gros, pas beaucoup plus gros, là, mais c'est quand même au moins le
Québec, et, vous savez — vous
allez me le confirmer, là, dans vos commentaires
ultérieurs — il n'y a
pas plus réglementé que Kaiser. Et pourtant, au conseil d'administration de
Kaiser, c'est une majorité de
médecins, en passant, et, quand on descend, oui, il y a des gestionnaires puis
il y a une cogestion, mais la
pratique médicale, elle est encadrée, elle est réglementée. Puis je ne dis pas
qu'il faut faire ça, là, ce n'est pas ça que je dis, là. Ce que je dis, là, c'est que le fait d'avoir une forme
d'encadrement, qui est donc un niveau de contrainte x, ça n'empêche pas la bonne pratique de la médecine,
puis ce n'est pas un déni d'autonomie professionnelle, c'est juste que
c'est un système qui fonctionne.
Alors,
la question que j'aurais à vous poser... Puis d'ailleurs je vous invite à faire
tous les commentaires qui vous viennent
à l'esprit sur ce que je viens de dire. Et, dans l'esprit de ce que je viens de
dire, là, n'est-il pas possible ou ne serait-il
pas possible de faire en sorte que nous puissions nous entendre sur ce qui est
le plus petit commun dénominateur de
règles à mettre dans une institution? Quand vous vous exprimez en disant :
Ça ne peut pas être le P.D.G., là, qui va venir me dire quelle dose de médicament donner, vous avez bien raison,
c'est bien évident, là. Mais ce n'est pas ça, le projet de loi. Est-ce que, par contre... Et là, Dr Viens, je sais que
vous, vous êtes chirurgien. Dre Jen, vous, je pense que c'est médecine
de...
Mme Jen
(Yun) : Spécialiste en santé publique.
M. Barrette :
...santé publique.
Mme Jen
(Yun) : Médecine préventive, oui.
M.
Barrette : La santé publique, on pourrait en reparler. N'est-il pas
normal, dans vos secteurs respectifs, qu'à un moment donné, là, il y a un levier pour que, le bloc opératoire, les
règles de bloc opératoire soient observées, point final, pas peut-être oui aujourd'hui, puis... Non,
non, c'est ça, la règle, là, puis on marche tous dans la même vitesse, là.
En santé publique, n'est-il pas normal à un
moment donné que le gouvernement ou le CISSS ait un certain nombre de priorités à au moins respecter? Et là ma question
est la suivante, comme je l'ai dit tantôt, je la répète : N'est-il pas
possible, souhaitable et possible,
souhaitable d'abord, possible ensuite, à ce qu'on détermine collectivement
c'est quoi, la palette de règles qui
nous manquent actuellement à propos desquelles, nouvel environnement, les gens
seront formés? Vous le faites
vous-mêmes. J'ai dit ça à la FMSQ hier. Formez-nous. Bien, non, formez-vous,
là. Je veux dire, vous n'êtes pas des enfants,
là, vous êtes capables, si ça vous intéresse, la gestion, de vous former. Vous
en donnez, de la formation, qui est très
bonne, d'ailleurs. Ça se fait. Mais ne manque-t-il pas ça, ces règles-là, et
n'est-il pas possible collectivement d'en arriver à la détermination de ce qu'il manque dans notre réseau pour
corriger les problèmes que vous-mêmes voyez sur le terrain?
Mme Jen
(Yun) : Merci, M. le
ministre, pour ces commentaires qui, selon moi, viennent clarifier comment on
devrait interpréter le projet de loi
n° 130. Et je dirais d'emblée qu'entre ce que vous expliquez puis entre ce
qui est écrit, il y a un certain
écart, alors, surtout quand on parle de la dose avec laquelle on va appliquer
les balises, je pense qu'il y a une certaine variation dans
l'interprétation qu'on fait du projet de loi.
Mon deuxième
commentaire, avant de répondre à la question, c'est que les règles, les
mécanismes et les balises ne sont pas
magiques. Elles sont nécessaires, mais elles ne sont pas magiques. Ce n'est pas
la panacée. Il ne suffit pas d'avoir des règles et des mécanismes, encore faut-il
les diffuser, les faire connaître, les appliquer et les renforcer. Et
ces étapes-là passent par les médecins
gestionnaires. Et ce que nous, on constate, c'est que, premièrement, le
dénominateur commun dont vous parlez
existe déjà, puis il existe déjà dans la loi actuelle de santé et services
sociaux. Le problème, c'est dans
l'application. Et ce que nous, on pose comme diagnostic, c'est que les médecins
gestionnaires ne sont pas bien outillés
pour jouer le rôle qu'ils doivent jouer, pour renforcer justement les règles,
les appliquer, les règles qui existent déjà.
Alors, voici ma partie de la réponse. Je passe
la parole à Dr Viens pour un complément.
• (11 h 30) •
M. Viens
(Hugo) : Écoutez, il y a des éléments très stimulants et intéressants
dans la discussion qu'on a aujourd'hui. Je pense que c'est très
constructif. Les modèles de gestion médicale, vous parlez des
Kaiser Permanente, les modèles d'application sont divers, les modes de
facturation sont divers, tout réside dans la capacité de créer une dynamique d'organisation qui soit positive et qui soit
empreinte d'imputabilité et de responsabilité, et je pense que c'est ce qui est
l'essence, essentiellement, de la loi
n° 130. Et, comme quand on parlait de médicaments tout à l'heure, on ne
dit pas que vous essayez d'induire ou
d'injecter un poison au réseau, mais bien un médicament, nos seules critiques
sont sur la dose et la vitesse avec laquelle on infuse le médicament.
Pour revenir
sur la notion des indicateurs dont vous parliez, dans mon commentaire tout à
l'heure, puis ça, c'est un des points
que j'ai retenus de la discussion avec la FMSQ hier, sur la nécessité
d'obtenir... Pour la bonne gestion d'un réseau et l'imputabilité, on a besoin d'indicateurs, de livrables, de
notions claires d'imputabilité, ce qu'actuellement, dans le réseau, on considère qu'en tout cas il y a un flou
à ça, et je crois que ces indicateurs-là pourraient être précisés à l'intérieur
d'une loi ou soit de modes d'application des
responsabilités respectives, sans nécessairement qu'on aille à une autorité
suprême, qui a le désavantage actuellement, et c'est notre principale
inquiétude, de démotiver le réseau.
Et il faut
comprendre que, dans la position actuelle, principalement sur
l'article 27, il y a un coup de semonce très fort qui est perçu dans la communauté médicale et
qui est dangereux. Moi, je vous dis, on est... Pour avoir été vice-président
d'un CMDP pendant cinq ans, je peux vous
dire que, oui, on a une problématique avec la culture d'application, puis là je
parle bien de culture d'application, parce
que ce qu'on répète et ce que plusieurs acteurs ont répété depuis le début de
la commission, c'est qu'il y a des
éléments qui sont là qui sont probablement suffisants, mais effectivement, vous
avez raison, puis il y a eu des
problèmes... Les CMDP l'ont demandée, l'augmentation de leurs pouvoirs des fois
pour agir sur les pas gentils ou les
méchants, là, comme Dr Arata... auxquels Dr Arata référait. Cette culture-là d'application n'est actuellement
pas nécessairement bien appliquée. Elle n'existe pas, cette... ou très peu.
Au CMDP, on a
des règlements et on sait très bien qu'à l'intérieur des règlements
du CMDP la mesure coercitive est
inquiétante pour les médecins. Et, même dans un hôpital où les médecins sont
de grands collaborateurs... Principalement, je vous dirais, le milieu dans lequel je travaille et j'ai oeuvré dans
les 15 dernières années, Saint-Jean-sur-Richelieu, on a une médecine très collaborative, on a un
partenariat médico-administratif très fort, et ça fonctionne très, très
bien. Et je peux vous dire que les
effets délétères de l'application de la loi n° 130, même pour des
médecins qui sont des gentils du réseau... se trouveraient démotivés et
verraient un affront à ça, qui peut être perçu... C'est peut-être une question
de perception, mais il y a un énorme danger,
là, parce que, je vous dis, le «backlash» de la communauté médicale face à une
mesure d'application telle que de donner les
pouvoirs à un D.G. d'hôpital sur les privilèges d'un médecin, on touche là à
un sacro-saint principe qui fait partie de
la culture. Les cultures, ça peut évoluer, et je pense que, dans les dernières
années, on a vu évoluer une culture,
et la présence du ministre qu'on a actuellement est certainement un élément
important dans cette évolution de
culture là. Une culture qui évolue n'est pas nécessairement... n'évolue pas
nécessairement dans le mauvais sens,
à notre avis. Mais il y a des grands dangers à ça. La loi n° 130,
l'application par un D.G. de cette autorité-là va être perçue de façon
très, très, très délétère par le réseau, et ça nous inquiète.
La démotivation a été rapportée par plusieurs
autres organismes, et on demandait d'expliquer, à plusieurs reprises, quel va être l'effet le plus pervers de
ça. Les députés de l'opposition l'ont mentionné à quelques reprises. Sans
avoir de réponse très claire, mais je vous dirais que, si on demande aux
gestionnaires, aux médecins gestionnaires actuellement, aux chefs de
département auxquels on demande l'application un peu plus rigoureuse des
modalités de gestion,
de l'imputabilité... bien, si ces médecins gestionnaires là ne sont pas
capables d'aller voir leurs membres dans un simple département, là, avec des gens qui sont sur le terrain, qui
travaillent tous les jours et leur dire : Tu dois collaborer, parce qu'on a monté ces médecins-là contre une
imposition ultime, cette démobilisation-là est dangereuse. Nous en sommes
convaincus.
M.
Barrette : Alors là, je vais vous soumettre la chose suivante, O.K.?
Puis on va remettre les choses dans... Je vais reprendre votre propos et vous préciser certains éléments.
Aujourd'hui, aujourd'hui, le privilège que reçoit un médecin, ça n'est pas un automatisme, en partant, là.
Alors, quand les médecins pensent actuellement que c'est un drame dramatique
d'avoir des conditions parce qu'une autorité
au-dessus de lui va avoir l'autorité de, bien, c'est déjà comme ça. Ce n'est
pas un automatisme, recevoir des privilèges.
Les conditions pour avoir les privilèges sont extrêmement minimales, mais
la mécanique d'obtention des privilèges,
elle existe déjà. Alors, quand les médecins disent : C'est dangereux,
c'est ceci, c'est cela, bien, ce
n'est pas parce que ça, ça va arriver. C'est déjà comme ça. Il y a des
conditions, mais qui sont extrêmement minimales.
La question,
à ce moment-là, ou la crainte pourrait être justifiée si les conditions
d'obtention de privilèges devenaient aléatoires
et au bon vouloir d'une personne, O.K.? C'est une critique qui est très
positive et ça ne peut pas être comme ça. Ça ne peut pas être comme ça.
Ça ne peut pas... Moi, je suis le P.D.G., je me lève demain matin, puis, à
partir de maintenant, là, tu ne peux pas
être dans un hôpital si tu as une barbe. Bon, je veux dire, c'est ridicule,
l'exemple que je donne, mais c'est la crainte que des gens peuvent avoir
dans l'exagération des choses.
Mon point
ici, là, c'est qu'il y en a, des règles. La question ici est de faire en sorte
que maintenant les règles soient peut-être un petit peu plus serrées,
pas énormément plus serrées. Moi, quand j'écoute les bons, là, parce que vous, vous parlez des pas fins, là, c'est l'expression
qui a été utilisée par d'autres personnes ici précédemment, bien, moi, quand
j'écoute des chefs, actuellement, les chefs,
moi, me parlent puis me disent : Enfin, on va avoir quelque chose
pour — je
donne l'expression que vous connaissez
bien — cheffer.
Enfin, là, je vais avoir le levier qu'il me faut pour exercer mon rôle
de chef.
Le P.D.G.
dans le projet de loi, là, il doit consulter. Il doit avoir un avis de son DSP.
Il ne peut pas décider de même, là. Ça
doit être déterminé après consultation, adapté au milieu en question. Puis ça
ne peut pas aller à l'infini, cette affaire-là, même pas aussi loin que
les médecins peuvent bien craindre. Mais n'est-il pas normal, en quelque part,
qu'il y ait un certain niveau de contrainte?
Moi, je regarde ça, là, et c'est toujours la même affaire, hein, c'est comme un
contrat. Un contrat, on le sort quand
ça va mal. On ne le sort pas quand ça va bien. Ceux qui ont une pratique collaborative, qui sont impliqués, puis
que ça fonctionne, je ne vois pas, moi, dans le projet de loi, qu'est-ce qui
peut venir changer leur vie, autrement que
la majorité des médecins collaborante dans un milieu, bien
là, va avoir un levier pour pouvoir agir sur sa minorité, que l'on sait être petite partout. C'est toujours
une petite minorité qui fait parfois, malheureusement, plus de troubles, proportionnellement à
son nombre.
Mme Jen
(Yun) : Mais encore une fois
je dirais : Il y a un écart entre ce qu'on met dans la loi et
comment on perçoit la loi. Que de donner la...
M. Barrette : ...ça devient une
question de perception de votre part.
Mme Jen (Yun) : Perception, oui.
M. Barrette : C'est pour ça que
c'est utile qu'on ait ces échanges-là, là.
Mme Jen
(Yun) : Puis la perception
est très importante, comme disait Dr Viens. Le risque de démobiliser
un corps médical est important.
Que de responsabiliser le P.D.G., et qu'il ait le dernier mot sur l'octroi et
le renouvellement des privilèges, est
perçu comme déposséder les CMDP d'une responsabilité qui est importante. Alors, juste cette perception-là a un
potentiel de démobilisation majeure.
M. Viens
(Hugo) : Bien, absolument. Puis on dit la même chose. Ce qui est clair, l'essentiel et
l'essence... Et tout le monde
est allé... tout le monde l'a répété, là, on n'est pas contre les principes, on
est... En fait, on n'est pas contre l'objectif de la loi. C'est dans son application, c'est dans
la vitesse d'infusion du médicament, c'est dans la vitesse avec laquelle ça se fait. On n'est pas en opposition
avec le projet de loi. Vous verrez que le ton est là. C'est dans les
modalités d'application. Et on croit qu'il y a probablement des
ajustements, de meilleures façons de le faire.
M. Barrette : Il ne me reste pas beaucoup
de temps, puis je veux...
Le Président (M. Merlini) : Deux
minutes.
M. Barrette : Il me reste deux
minutes. Il faut absolument que je vous pose cette question-là, parce qu'avec l'échange qu'on a eu c'est la question qui est probablement,
de mon côté, la plus importante. Dans la détermination, là... Puisque vous nous dites que vous êtes confortables
avec la finalité puis vous craignez la manière que ça va être fait ou le
contenu, quelle mécanique verriez-vous ou
recommanderiez-vous pour déterminer quelles sont les obligations que l'on
aurait à déterminer... à être attachées à
l'obtention de privilèges? En fait, il y a-tu une mécanique que vous verriez
comme étant pratique?
Mme Jen (Yun) : Bien, en termes de mécanique, nous croyons, nous
avons la position que les mécaniques sont déjà en place avec la loi
actuelle. Les CMDP devraient participer et l'ensemble des médecins
gestionnaires devraient participer activement avec les administrateurs de
l'établissement pour identifier les cibles de performance. Et c'est notre
position. C'est via une construction d'un
partenariat sain, médico-administratif, qui varie selon chaque milieu
hospitalier. Et, voilà, nous, on persiste à croire que le mécanisme se
fait plutôt via la construction d'un partenariat sain et d'une gouvernance
clinique forte.
M. Barrette :
Donc, dans ce partenariat-là, on peut quand même, ensemble, établir des
règles...
Mme Jen
(Yun) : Oui.
M. Barrette :
...qui vont dans le sens de 130. Très bien, moi, j'ai terminé, je pense, là?
Le
Président (M. Merlini) : Oui, effectivement, M. le ministre, votre
temps est terminé pour ce bloc d'échange. On va maintenant aller du côté de l'opposition officielle. Mme la
députée de Taillon, vous disposez de 12 min 36 s pour
votre bloc d'échange. À vous la parole.
Mme
Lamarre : Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, Dre Jen. Bonjour,
Dr Viens. Alors, merci, parce que, vraiment,
l'Association médicale du Québec a cette grande qualité de ne pas représenter
strictement les intérêts spécifiques ou
syndicaux, on va le dire comme ça, des médecins. Vous avez toujours une
approche. D'abord, vous êtes constitués de médecins omnipraticiens, de spécialistes et de résidents, ce qui vous
donne un regard, je pense, qui est plus transversal, et vos approches sont presque toujours
constructives. Alors, je veux vous remercier pour cette approche qui fait du
bien, je vous dirais, dans l'étude de ce projet de loi n° 130.
À
la page 1 de votre mémoire, vous utilisez une expression qu'on a vue cette
semaine dans les médias. Vous dites : Le ministre, dans son projet de loi n° 130, a les bons objectifs,
mais les moyens ne sont pas bons. Et, cette semaine, on avait exactement
un gros dossier qui disait : Bons objectifs, mauvaise méthode.
• (11 h 40) •
Alors,
dans le dossier qui nous occupe, avec le projet de loi n° 130, on a un peu
la même rhétorique, c'est-à-dire qu'on
a encore des objectifs qui sont louables, on veut augmenter la performance de
notre réseau, l'accessibilité du réseau, on veut augmenter l'imputabilité, mais ce que je décode dans votre
mémoire, c'est que les moyens ne sont pas bons, que les méthodes utilisées ne donneront pas les
résultats et qu'un peu à la lumière de ce qui s'est passé actuellement avec le
projet de loi n° 10 et avec plusieurs autres éléments de la réforme du ministre,
bien, on accumule des échecs. On n'accumule pas les résultats qu'on
souhaite, parce que, là, on est presque à trois ans.
Donc,
les diagnostics sont corrects, mais les traitements sont parfois nocifs et même
toxiques. Et je pense que ça, le ministre doit en prendre acte à un moment donné, que de n'utiliser comme seule stratégie que les menaces, ça ne donne pas les résultats escomptés. Et ce qui semble être reproché de
façon maintenant répétitive, et pas seulement par les syndicats,
mais par l'ensemble des intervenants,
c'est la méthode, et la méthode à laquelle le ministre croit, qui est
l'abolition des privilèges des médecins, ne sera pas nécessairement...
ou, en tout cas, un contrôle sur ça fait en sorte que...
Le
Président (M. Merlini) : Question
de... Excusez-moi, Mme la députée. Question de règlement, M. le
ministre?
M.
Barrette : Alors, le projet de loi n'est pas, en aucune manière... Le mot «abolition de privilèges»
n'existe pas dans le projet de loi. Ce n'est pas un projet de loi d'abolition de
privilèges. J'aimerais que notre collègue soit plus précise dans ses termes.
Le
Président (M. Merlini) :
C'est très bien. Alors, vous pouvez continuer, Mme la députée, en faisant évidemment
attention aux propos utilisés, parce qu'effectivement l'objet du projet de loi
n'est pas l'abolition de privilèges. Alors, veuillez continuer. Et ce
temps est pris sur la présidence, et non sur votre temps à vous.
Mme
Lamarre : Je vous remercie, mais je pense que les gens qui viennent
témoigner ici comprennent que ça pourrait
aller clairement jusqu'à la restriction au niveau des privilèges, clairement,
parce que c'est ce qui est indiqué dans certains éléments. Alors, on prend acte, mais on décode bien que, dans
le fond, l'intention, elle est là, dans la menace.
Donc,
tout le monde s'entend pour dire : Il faut plus d'imputabilité, il faut
que notre système fonctionne mieux, quand
même, et ça, je pense que vous le reconnaissez, du côté de l'Association
médicale du Québec. Alors, je vous avoue que, dans les suggestions, vous parlez beaucoup de collaboration
médecins gestionnaires et les gestionnaires. Qu'est-ce qui fait
qu'actuellement ça ne fonctionne pas? Parce que ça ne donne pas les résultats
attendus. Peut-être que c'est en processus,
mais là on ne peut pas dire, là, qu'on voit depuis deux ou trois ans... Et,
bien sûr, vous avez insisté beaucoup sur
les éléments de formation que votre association offre, mais qu'est-ce qui
pourrait être plus que juste de la formation? Parce qu'il faut quand même, à un moment donné, en donner pour son
argent à la population, et là le contexte n'est pas satisfaisant. On n'a pas besoin d'énumérer... On
peut se mettre la tête dans le sable puis dire : Non, non, tout va bien
puis ça va s'arranger, mais là il
faut des actions un peu plus concrètes. Qu'est-ce que vous suggérez
concrètement pour que ça s'améliore?
Mme Jen
(Yun) : Merci, Mme Lamarre,
pour votre question. Avant de passer la parole au Dr Viens, je dirais que, de façon générale, ce n'est pas en faisant la
même chose qu'on va arriver à des résultats différents. Donc, ce n'est pas en ajoutant toujours des règles et des mécanismes qu'on
va arriver à des résultats de santé différents. Et, dans ce contexte-là, comme j'ai dit tantôt, des règles, ce
n'est pas magique, des balises, ce n'est pas magique, encore faut-il les
appliquer, les renforcer, et ça, ça passe
par les médecins gestionnaires et les gestionnaires. Et ça prend une bonne
ambiance, un bon climat de collaboration pour trouver des solutions
locales, et la création de ce climat passe par les médecins gestionnaires, et ce qu'on constate maintenant, en
termes de moyens, de façon très générale, on ne rentrera pas dans les détails, c'est que les médecins gestionnaires que
nous avons maintenant, bien qu'ils soient très motivés, ils sont mal outillés,
ils ont besoin de formation, ils ont besoin de
reconnaissance, ils ont besoin d'être valorisés. Bien, voilà, ils ont besoin
d'être outillés. Dr Viens?
M. Viens
(Hugo) : Si vous permettez. On est revenus à quelques reprises sur la
culture d'application et le lien qu'il
y a avec la culture d'application et les problématiques du passé. On doit
comprendre qu'un système est en évolution, et le système a évolué à
vitesse grand V dans les deux dernières années. Ça, il faut le reconnaître. Il
faut reconnaître qu'il y a un épuisement, un
taux de burnout, un découragement de beaucoup de médecins gestionnaires qu'on
ressent sur le plancher, et il y a
une fragilité à ce niveau-là. Le ministre a certainement une qualité d'avoir un
leadership fort, et ça s'est ressenti
dans le réseau, mais à un coût qui est quand même assez élevé, je vous dirais,
sur les gestionnaires du réseau, dans le désir de participer de certains
médecins.
Et on répète encore, ce n'est pas tellement
l'essence ou la volonté derrière le projet de loi, mais vraiment son application. Et je réitère que nous sommes
intéressés à travailler et à collaborer. Je ne veux pas avoir le même ton
qu'hier, mais il y a
des éléments d'application qui peuvent être remis en question,
qui pourraient nous permettre, selon nous, et j'en suis à
peu près certain... en évitant le
côté délétère d'une application trop hâtive, qui pourrait être modifiée, par exemple un modèle de tutelle,
simplement, d'un CMDP qui pourrait, à la limite, être amené si un CMDP ne
réussit pas à aller chercher les pouvoirs nécessaires
pour faire modifier la culture organisationnelle.
Vous savez, en entreprise, on parle de vision,
mission, valeur, et on doit constamment réitérer ça et se rappeler quelle est
la mission, la vision et la valeur, et ça, je crois qu'on l'a oublié dans le réseau dans les 20, 30 dernières
années. On a manqué d'un leadership fort, d'une direction concrète qui
nous amènerait, tout le monde, dans un bateau dans la même direction.
Mme
Lamarre : Donc, si je comprends bien, vous seriez plus favorables à ce
qu'il y ait une possibilité pour le ministre de mettre certains CMDP
sous tutelle plutôt que de travailler sur l'atteinte des privilèges ou
l'absence de renégociation de privilèges. Est-ce que c'est comme ça que je dois
comprendre?
M. Viens
(Hugo) : ...les modalités avec lesquelles on peut induire un
changement de culture, on peut assumer et imposer une vision de
leadership fort, sans nécessairement déposséder de ce qui est très cher aux
médecins et qui risquerait de créer de la
grogne, à notre avis, un peu inutile, en donnant le pouvoir aux D.G. Mais on
laisse quand même le pouvoir dans la
main des médecins, qui seraient des médecins d'un CMDP de tutelle, qui pourrait
même être sous le joug de l'Association
des CMDP, mais qui serait un CMDP qui regrouperait toutes les qualités qu'on
connaît à un CMDP qui est capable d'amener un leadership fort, dirigé
par des médecins... de compréhension, de connaissance du réseau, de formation
adéquate et d'imposition d'un leadership fort dans le sens des valeurs
médicales.
Mme
Lamarre : O.K., mais, vous savez, la nature humaine est ainsi faite
que, quelle que soit la profession qu'on a, c'est beaucoup plus facile de se concentrer sur les besoins de nos coéquipiers
que de l'ensemble de la population. Et là c'est ce qui est reproché, ce qui est reproché à différents niveaux,
dans différentes... Alors, comment s'assurer que les médecins qui auraient à imposer des mesures qui
viseraient non pas le confort des équipes, mais le confort et l'accès de
l'ensemble de la population d'un territoire soient mieux entendus?
Je vous avoue
que, dans votre mémoire, que j'ai lu et que j'apprécie, quand vous arrivez à la
page 9 en disant : «Il
faudrait mettre un comité de travail qui se pencherait sur la clarification»,
ce n'est pas fort, comme mesure incitative. Alors, c'est pour ça que je vous
requestionne sur la tutelle des CMDP. Mais avant ça il me semble qu'il faut
fixer des indicateurs de performance, des
cibles à atteindre et une volonté... Je suis d'accord avec vous, il faut faire
un partage de cette culture-là à
travers tout l'établissement, mais je ne les vois pas, là, ces
recommandations-là, dans votre mémoire, et, sans ça, je vous avoue que c'est un petit peu... je ne vois pas
comment ça pourrait changer clairement les choses. Alors, il faut qu'il y ait un changement, donc ça prend
peut-être des mesures un petit peu plus, quand même... où on n'ira pas par des menaces. Je comprends bien la mesure de
travailler en synergie, mais avec quand même des indicateurs, des cibles
à atteindre qui sont beaucoup plus tangibles, là, pour les équipes.
M. Viens (Hugo) : La détermination
de ces indicateurs-là, justement, c'est un des éléments sur lesquels ces comités-là pourraient se pencher de façon
collégiale et conviviale, de déterminer vraiment quelles sont les orientations
qu'on doit prendre au niveau de l'imputabilité et de la responsabilité des
différents sous-groupes à l'intérieur de la communauté
médicale et des médecins gestionnaires. Et c'est d'ailleurs un des principes
des modèles de Kaiser, hein, ce n'est
pas un directeur général qui impose, mais les directions sont prises en
fonction d'un comité de pairs, de médecins. Et c'est justement la procédure contraire qu'actuellement on impose,
avec la loi n° 130, en utilisant un directeur général pour imposer les décisions, ou en tout cas
influencer fortement des décisions plus bas sur le terrain. Alors, des mesures
comme celles de renforcement des valeurs du CMDP, de leur... d'une mise en
tutelle, ça, ça n'a pas été essayé dans le passé, cette notion-là n'a
pas non plus été imposée par une culture d'application solide.
Puis ça
existe, hein? Dans le milieu duquel je viens, là, on a une culture
d'application, une culture de responsabilité. Donc, ça s'induit, ça peut être contagieux. Le professionnalisme médical
est contagieux quand on induit et qu'on a un leadership fort local qui demande une application.
Et ça, c'est la notion que j'appelle un peu celle du perron de l'église.
Avant la RAMQ, quand le médecin du village
était sur le perron de l'église, il avait ses citoyens autour de lui, il ne
pouvait pas se déroger à sa responsabilité, s'assurer de la santé des
gens dans son village. On a un petit peu perdu ça dans les dernières années, et ça se retrouve. Le
professionnalisme médical, et l'ADN médical, est encore là. Il s'agit juste de
l'aviver et de le cultiver.
• (11 h 50) •
Mme Lamarre : En fait, moi,
j'entends beaucoup que vous êtes d'accord avec l'amélioration du leadership médical, mais l'efficience d'un système
dans un établissement, si on parle plus d'un établissement de santé, ça dépend aussi
d'un nombre important de paramètres : les systèmes de transmission
de l'information, les autres professionnels. Vous avez sûrement entendu parler du modèle de gestion
des contraintes. Et, quand on s'intéresse à ce modèle-là, on se rend compte que ce qu'on pense être la vraie contrainte
n'est pas la même. Est-ce que ça, ça ne serait pas un modèle, le modèle de gestion des contraintes, où, de façon commune,
mais pas seulement les médecins... Là, je vous avoue, là, il faudrait que les médecins acceptent de travailler avec des infirmières, avec des
pharmaciens, avec des préposés, avec des gens de l'entretien ménager pour qu'on prenne le pouls de l'ensemble de la
séquence d'un épisode de soins et qu'on améliore l'efficacité. Est-ce
que ce genre d'approche là vous conviendrait?
Le Président (M. Merlini) : Très rapidement,
votre réponse.
Mme Jen (Yun) : Oui. De façon générale,
on a une approche d'interdisciplinarité, d'abord. Et, par rapport à l'identification des moyens, c'est difficile
d'identifier des moyens qui seront efficaces à coup sûr, mur à mur, ça dépend
des dynamiques locales. Et c'est pour ça
qu'on met beaucoup plus d'emphase sur la dynamique et le climat de
collaboration pour identifier les moyens plus spécifiques qui vont
marcher sur le plan local. Et ça prend des données. Merci.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup pour ce bloc d'échange avec la députée de Taillon. M. le
député de Lévis, du deuxième groupe d'opposition, vous disposez de huit
minutes. À vous la parole.
M. Paradis
(Lévis) : Merci, M. le Président. Dre Jen, Dr Viens, bienvenue. Je ne serai pas très
original, parce qu'on est rendus à
l'étape où, manifestement, dans ce dossier-là, tous ceux qui nous parlent, ou à peu près, sont conscients de l'objectif et du résultat à atteindre,
c'est-à-dire que le système fonctionne de façon optimale, qu'on fasse en
sorte d'éviter ce que les gens en général,
là... Puis je comprends tout ce que ça peut supposer, mais il y a des
réalités que le citoyen, que le
patient voit qui sont très terre à terre. Puis le but de ça, c'est de faire en sorte qu'on atteigne une façon de fonctionner optimale. Et là, depuis le début, il y a deux visions qui s'opposent,
qui se confrontent, qui se mélangent, c'est celles de dire : On a besoin de leviers, on a besoin
d'un petit quelque chose, parce que, manifestement, ça perdure, là, les problématiques qui sont soulevées ici perdurent;
puis d'autres disent : On a déjà tout ce qu'il faut, il faut rien que s'en servir. Il y a des règles, mais elles ne sont pas vraiment
appliquées. Vous le dites également en page 2 de votre mémoire, où vous dites : «Une mise en application plus
rigoureuse de ces articles, et possiblement des amendements mineurs visant
à clarifier le rôle des médecins gestionnaires, à mieux les soutenir,
répondrait aux besoins.»
Mais là ça ne
marche pas, là. Il faut qu'on atteigne un but. Il faut
qu'on atteigne quelque chose. Est-ce que c'est pensable que le projet de
loi soit un outil nécessaire à ce moment-ci? Certains diront : Un mal nécessaire.
Je pose la question. Est-ce qu'on est rendus
là? Parce que, manifestement, malgré ce que vous souhaitez, la formation,
malgré le fait qu'il y a des gens qui veuillent avancer, qui veuillent
faire davantage, il y a cette culture à changer petit à petit, mais il y a des besoins imminents, là, là. Pour
ceux qui nous regardent et nous écoutent, c'est un bloc opératoire qui ne
marche pas comme il devrait fonctionner, par exemple. C'est des gens sont reportés pour mille et une raisons. C'est très, très, très ponctuel, c'est très
factuel. Ça, les gens comprennent ça. Est-ce qu'on n'est pas rendus à avoir
besoin de ça?
Puis
sous-question à ce que je vous dis là... Quand vous dites : L'effet
pervers, c'est la démotivation, je
comprends. Vous n'êtes pas les
premiers à nous dire ça également. Mais expliquez-moi en quoi un médecin qui fait
bien son travail, là, tu sais, où ça
va tout bien, il n'y en a pas, de trouble, il est là, il fait ses trucs puis il
est conscient puis motivé, etc., pourrait être démotivé par quelque chose qui serait mis en place mais qui ne le
contraindrait pas, parce qu'il n'est pas dans les pas fins. Puis ça, ça a été dit par le conseil des médecins,
dentistes et pharmaciens, et c'est le terme qu'on utilise dans l'organisation, là. Vous l'avez dit, c'est une minorité, là, auxquels on veut
s'adresser.
Alors, deux
volets. Est-ce qu'on n'est pas... Est-ce qu'il n'est pas pertinent, parce qu'on
n'est pas rendus là... Et pourquoi on démotiverait des médecins qui font
bien leur job avec un outil qui, manifestement, ne devrait pas les contraindre?
Parce qu'ils ne seront pas assujettis à ça, ils font bien leur travail.
Mme Jen
(Yun) : Très brièvement, je
dirais qu'on est d'accord qu'il y a un besoin imminent de changements sur le terrain, parce qu'il y a des problèmes
vécus sur le terrain. Et, pour résoudre ces problèmes, ça prend des acteurs de
changement. Et nous, on considère que les médecins gestionnaires sont des
acteurs de changement importants. Et donc, pour trouver des solutions, il faut régler... bien, selon notre approche
médicale, il faut poser un diagnostic sur le problème, il faut questionner les médecins gestionnaires
sur, selon eux, c'est quoi, les solutions. Et ils ont répondu, à travers notre
sondage, que, pour pouvoir répondre, pour
pouvoir trouver toutes les solutions terrain, on ne rentrera pas dans les
détails, ça prend les meilleurs leviers, qui prennent forme d'un
meilleur soutien avec l'administration. Donc, ce n'est pas...
Actuellement,
ce qu'ils ressentent, c'est d'être un petit peu laissés tout seuls. On leur dit
qu'ils ont une responsabilité de
coordination, mais, encore, nous ne sommes pas... Les médecins gestionnaires ne
sont pas des gestionnaires de carrière, on s'entend, tout le monde connaît la formation médicale. Ils ont besoin
de soutien de la part des administrateurs, ils ont besoin de formation, ils ont besoin d'outils et
d'information, comme Mme Lamarre venait de souligner. Bien, voilà. Ça,
c'est ma réponse. Dr Viens, vous aimeriez compléter?
M.
Viens (Hugo) : Essentiellement, je crois qu'il y a actuellement un
courant qui est induit quand même, dans les derniers mois, dernières années, avec la formation, avec les
bouleversements actuels, il y a une prise de conscience. Je crois que ce n'est
pas vrai que les problèmes du passé sont appelés à continuer de se répéter
parce qu'il a réellement, je vous
dirais... Les médecins gestionnaires, ça ne date pas d'il y a très longtemps
dans les hôpitaux, et les changements de culture sont présents, et ils le sont, c'est une réalité. Et on est assez
convaincus que, si on laissait évoluer le réseau, actuellement, à la vitesse qui lui permettrait de
fonctionner, de mettre en place le leadership des médecins gestionnaires,
on arriverait à un changement qui serait
palpable. Et, des pas fins, il en resterait beaucoup moins, probablement assez
pour que ça devienne un peu trivial comme
expérience et beaucoup moins problématique dans la perception de la population.
M. Paradis (Lévis) : Dr Viens, je reviens sur le deuxième point. Je comprends bien ce que
vous dites, je comprends les
indicateurs, je comprends de tracer le portrait, le profil, etc. Je reviens sur
cet autre point parce que vous l'avez mis comme un élément majeur. L'effet, vous avez dit, pervers d'un projet
comme celui-là, c'est la démotivation des troupes. Puis vous avez parlé de votre expérience dans
votre milieu, Saint-Jean-sur-Richelieu, où vous avez cette motivation-là,
puis malgré tout vous dites : Il y a comme un danger de.
Je
vous la repose, ma question : Quelqu'un qui fait bien son travail, qui
fait bien, qui est un médecin gestionnaire, qui comprend, qui règle les choses, qui ne fait pas partie de ceux qu'on
montre du doigt et qui sont une minorité, en quoi, si c'était là, ça
risque de changer son quotidien, dans la mesure où il ne sera pas contraint par
quelque chose qui ne s'appliquera pas à lui? Il nous reste...
M. Viens
(Hugo) : 30 secondes.
M. Paradis (Lévis) : ...un bon trois, quatre minutes, facile, je pense. M. le Président, je
regarde mon chrono, là.
Le Président (M.
Merlini) : 2 min 30 s.
M.
Viens (Hugo) : Écoutez, puis la question est pertinente, je suis même
resté sur mon appétit hier en écoutant les
débats, justement, parce que vous avez reposé la question, on n'a pas pu répondre
à quelque chose d'assez spécifique, puis
je pense qu'il y a des exemples qui sont assez éloquents. J'ai eu une
discussion autour de ça, j'aime beaucoup les discussions de corridor, là, puis aller tâter le pouls de mes collègues,
puis des gentils, et ces gentils-là ne sont pas capables d'accepter. Et, encore là, il y a une question de
perception, là. Il y a un danger parce que, même si c'est une question de
perception, la culture n'est pas encore
assez induite sur le terrain, là, pour que les médecins acceptent actuellement
une imposition d'autorité comme celle-là. Les gentils se sentent pointés du
doigt, se sentent visés et ne comprennent pas, actuellement, la raison
pour laquelle on s'octroierait ce genre de droit là sur leur pratique, alors
qu'ils se sentent tout à fait adéquats dans ce qu'ils font.
Et
c'est justement là, le danger, l'effet pervers de la mesure actuelle, c'est
justement d'atteindre, et d'attaquer... ou, en tout cas, dans la perception que ces gens-là se sentent attaqués,
si on n'a pas laissé le temps à la culture de s'imprégner dans le milieu... et aussi à la culture
d'imputabilité. Ces médecins-là n'ont pas encore la culture d'imputabilité. La
notion du 50 % du budget
programme à laquelle on est rendus, là, vous seriez surpris de savoir à quel
point, dans la population médicale,
on n'est pas formés. On est formés pour donner des services aux patients à tout
prix, c'est notre rôle, on apprend à
donner tout ce qu'on peut donner à notre patient. La notion des contraintes, ce
n'est pas induit, ce n'est pas compris, ce n'est pas non plus... on n'a
pas de formation dans ça.
Donc,
il faut comprendre qu'il y a toute une communauté médicale qui, dans le
terrain, là... Ceux qui sont les gentils, qui travaillent fort dans le quotidien sont ceux qui ont le moins cette
perception-là qu'il est justifié de se faire taper sur la tête avec une loi
comme celle-là. Encore là, il y a de la perception là-dedans. Ce n'est pas
nécessairement l'essence de ce qu'on
retrouve dans la loi, mais il y a un effet très délétère là. Et le temps des
modifications des modalités de l'application, ou simplement du libellé, ou de la prise de position sur le besoin de
contrôle ou le besoin de coercition pourrait être modifié, à notre avis, sans obtenir cet effet délétère là.
• (12 heures) •
Le Président
(M. Merlini) : Merci beaucoup. Ça met un terme à ce bloc
d'échange avec le deuxième groupe d'opposition. Dre Jen, Dr Viens, représentant
l'Association médicale du Québec, merci de votre présence et votre contribution
constructive à nos travaux.
J'ajourne
nos travaux et j'invite les... je suspends, pardon, nos travaux et j'invite
notre prochain groupe à venir prendre place à la table. Les travaux sont
suspendus.
(Suspension de la séance à
12 h 1)
(Reprise à 12 h 4)
Le Président
(M. Merlini) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre
nos travaux. J'invite les gens à prendre place. Je souhaite donc la bienvenue
aux représentants du Groupe d'approvisionnement en commun de l'Est du Québec,
Sigma Santé et le Groupe d'approvisionnement en commun de l'Ouest du Québec.
Je
vous invite, avant votre exposé, de vous présenter ainsi que les personnes qui
vous accompagnent. Vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, et
ensuite on procédera aux échanges avec les membres de la commission. Bienvenue,
la parole est à vous.
Groupe d'approvisionnement en commun de l'Est du Québec
(GACEQ),
Sigma Santé et Groupe d'approvisionnement en commun
de l'Ouest du Québec (GAC de l'Ouest du Québec)
M. Gendron
(Yvan) : Parfait. Donc, merci, M. le Président. M. le ministre de la
Santé et Services sociaux, Mmes et MM. les députés du gouvernement et de
l'opposition, mesdames et messieurs, il nous fait plaisir d'être ici dans le
cadre des consultations sur le projet de loi n° 130, loi visant la
modification de certaines dispositions relatives à l'organisation clinique et à
la gestion des établissements de santé et de services sociaux du Québec. Donc,
je tiens d'abord à vous remercier, membres
de la commission, de nous avoir invités pour vous partager notre expérience et
notre point de vue comme acteurs du réseau au service de la population.
Je m'appelle Yvan
Gendron, j'occupe actuellement, pour le bénéfice de la commission, bien sûr, le
poste de président du conseil d'administration
du groupe d'achat en commun Sigma Santé et aussi de président-directeur général
du CIUSSS de l'Est-de-l'Île-de-Montréal. Je
suis accompagné par Mme Nathalie Boisvert, vice-présidente du conseil d'administration du groupe d'achat en commun de
l'Est du Québec, et également M. Daniel Castonguay, qui est président du conseil d'administration du groupe d'achat en
commun de l'Ouest. Mme Boisvert occupe aussi le poste de présidente-directrice générale du Centre régional
de santé et des services sociaux de la Baie-James, et M. Castonguay est
président-directeur général du CISSS de Lanaudière. C'est à ce titre de
présidents-directeurs généraux que nous participons
aux conseils d'administration, aux travaux de ces groupes d'achats là, en
commun. Donc, la preuve qu'on est impliqués, qu'on est engagés vraiment
dans cette organisation-là.
Nos
organisations, dans leur état actuel, existent quand même depuis 2012, avec la
réforme précédente. Elles ont été
créées dans le but d'optimiser la gestion de l'approvisionnement et de réduire
substantiellement les coûts des contrats d'approvisionnement du secteur de la santé et des services sociaux.
D'emblée, je souhaite vous dire que c'est mission accomplie, parce que, depuis 2012, nous avons
réalisé des économies fort importantes, substantielles, de plus de
300 millions de dollars, qui bénéficient directement au trésor
québécois, puis je vais y revenir tantôt.
Donc,
les groupes d'achat en commun et leurs gouvernants sont au coeur du projet de
loi n° 130. Dans ce projet de
loi, le gouvernement redéfinit la gouvernance des groupes d'approvisionnement
en commun et revoit certaines règles relatives
à l'organisation interne des établissements. Je vous rassure tout de suite, le
dépôt de ce projet de loi traduit la volonté
commune des groupes d'achat en commun, les trois groupes, et du ministère afin
de renforcer significativement le
rôle des groupes d'approvisionnement et des établissements dans la gestion du
réseau de la santé et des services sociaux. Nous appuyons en tous points
ce projet de loi.
Nous souhaitons mieux
faire connaître aux parlementaires le rôle de ces groupes d'achat en commun,
leurs réalisations, et, grâce à notre expertise du terrain, notre implication,
proposer quelques précisions au projet de loi.
Pour
la petite histoire, les groupes d'approvisionnement en commun existent depuis
plus de 30 ans au Québec. Ce
n'est pas nouveau. Ils ont pour objectifs de regrouper et d'optimiser les
différentes acquisitions en plus de générer, d'une part, des économies, bien sûr pour les
établissements de santé au Québec, grâce à un processus d'appel d'offres
public et à une mise en concurrence des
entreprises responsables de la fourniture des équipements, de fournitures et de
services dans le réseau québécois de la
santé et des services sociaux. D'autre part, et cela fait partie de notre
quotidien, de notre source
d'inspiration et de nos responsabilités communes à tous, il nous apparaît
primordial d'assurer à la population une
offre de services de très grande qualité, à nos utilisateurs, au personnel du
réseau et aux médecins, des équipements, des fournitures et des services de haute qualité, tout en étant à
l'affût de l'évolution de la technologie, de son développement et conséquemment de son enseignement. Nous
considérons que nos fournisseurs sont des partenaires de premier plan et, jour
après jour, nous maintenons et développons notre collaboration. C'est notre
devoir.
Comme je le mentionnais plus tôt, et même, depuis
2011, le ministre Bolduc avait demandé aux trois nouveaux regroupements, à ce moment-là, de coordonner leurs
efforts, leurs expertises et nous avait fixé l'objectif de générer des économies de plus de 100 millions de dollars.
En 2015, à son tour, le ministre Barrette nous a demandé de générer des économies de 75 millions récurrentes et
25 millions non récurrentes, supplémentaires, pour les
années 2015-2018. C'est avec
fierté que nous avons non seulement livré la marchandise, mais nous avons même
dépassé ces attentes-là, ces objectifs, tout en rehaussant la qualité de nos achats, et ce, au bénéfice de notre
population, de nos établissements afin qu'ils puissent rencontrer les objectifs budgétaires fixés par le
gouvernement, les objectifs de qualité, d'accessibilité, tout en protégeant
les budgets consacrés aux services. Donc, je
le dis fièrement, au 30 septembre 2016, donc déjà un certain nombre
de mois, les trois regroupements
d'achats ont généré, avec la précieuse implication d'experts cliniques et
administratifs du réseau, grande
collaboration, plus de 300 millions de dollars de nouvelles économies pour
le réseau de la santé. Et ce n'est pas fini.
• (12 h 10) •
Comment
avons-nous atteint ces objectifs? Plusieurs éléments de réponse vous seront
exposés aujourd'hui. Les groupes
d'achat en commun sont des entreprises de services partagés d'approvisionnement
qui offrent des services-conseils aux
intervenants des centres intégrés universitaires de santé et de services
sociaux, aux centres intégrés de santé et de services sociaux, aux centres régionaux ainsi qu'aux
établissements non fusionnés en matière d'approvisionnement. Nous sommes
reconnus comme une référence dans le domaine
de l'approvisionnement, notamment grâce à notre expertise en matière de qualité, de transparence et d'efficacité des
processus. Ainsi, nous soutenons nos membres dans la définition de leurs
besoins, nous favorisons leur participation
aux regroupements d'achats, ce qui permet de maximiser, bien sûr, le pouvoir
d'achat, tout en maintenant un environnement
propice à la concurrence, dans le but de générer des économies d'échelle.
Les
groupes d'achat en commun font également la promotion des meilleures pratiques
dans leur domaine. Nous travaillons
en étroite collaboration avec le réseau de l'éducation, notamment avec les
commissions scolaires, les cégeps et
les universités dans notre domaine. Les groupes d'achat en commun sont aussi
responsables, bien sûr, de la gestion, du
développement et de la coordination de tout ce qui se passe au niveau des
services d'approvisionnement en commun des biens et services. La qualité est au
coeur de tous nos mouvements, de tous nos processus développés avec, justement,
les différentes équipes.
L'objectif des
regroupements permet l'obtention de meilleurs contrats d'approvisionnement.
Nous mettons l'emphase sur la
création des meilleurs processus et sommes en constant rafraîchissement de ces
derniers afin qu'ils soient adaptés
aux normes en vigueur, aux besoins de notre clientèle évolutifs, dans
l'assurance de bien desservir nos concitoyens. Nous garantissons aux établissements une acquisition d'équipements et de
fournitures de grande qualité, à la fine pointe de la technologie.
Grâce à la
force, bien sûr, du nombre d'établissements regroupés, les groupes d'achat
peuvent offrir un meilleur pouvoir
d'achat au réseau de la santé québécois en permettant l'élaboration
d'acquisition d'équipements et de fournitures de pointe, ainsi que des services requis par le réseau de la santé et
des services sociaux, au bénéfice de notre population. Grâce à l'apport de nos regroupements, le
pourcentage d'achat a atteint 47 % du volume d'achat global en 2016, ce
qui nous rend également très fiers.
L'équité entre les fournisseurs, la saine concurrence et la transparence sont
au coeur de notre démarche d'affaires et de l'élaboration de nos appels
d'offres.
Pour ce qui est de la gouvernance, qui est au
coeur même de cette démarche législative dont il est question aujourd'hui, j'aborderai rapidement le sujet de la
gouvernance de ces différents groupes d'achat en commun. Veuillez noter que les conseils d'administration des
regroupements sont, entre autres, composés des P.D.G. de chacun des
établissements membres ou encore d'un cadre supérieur relevant
directement de son autorité ainsi que d'un membre représentant la Fédération des médecins spécialistes, pour nommer
ces trois intervenants. Dans l'esprit du sixième alinéa de l'article 2
de la Loi sur les contrats des organismes
publics, notre reddition de comptes est fondée sur l'imputabilité de nos
dirigeants et sur la bonne
utilisation des fonds publics. Contrairement à ce que prétendent les
représentants de Medec, nous assurons toute
transparence dans le respect des règles et normes de confidentialité exigés et
recommandés lors de signatures de contrats.
Le conseil d'administration définit les
orientations de ces regroupements-là, tient compte évidemment des orientations ministérielles et s'assure de la
reddition des comptes inhérente à leurs activités. Chaque regroupement d'achats
possède des instances qui impliquent directement et quotidiennement plusieurs
directions d'établissement membres. Nous
recevons des mandats d'acquisition en provenance des établissements et du
ministère. Tous ces acteurs jouent un rôle majeur dans la définition des besoins de même que dans l'actualisation
des orientations et des activités des regroupements.
Ces groupes
d'achat en commun agissent selon un mode de fonctionnement collégial dans la
formation des comités qui procèdent à
l'acquisition des biens et services pour les établissements, ce qui permet
d'éviter que des décisions soient prises
unilatéralement. Nous nous assurons de former plusieurs comités, composés des
spécialistes de haut niveau oeuvrant dans
notre réseau, ayant chacun leur mandat spécifique selon la nature des
acquisitions. Nous consultons, par exemple, les infirmières cliniciennes, les chercheurs, les ingénieurs, médecins,
physiciens, nutritionnistes, pour nommer ceux-là, selon les besoins. Ils
ont hautement à coeur la qualité des services.
Les groupes
d'achat en commun travaillent en étroite collaboration avec leurs
administrateurs. Notre mode de gouvernance, basé sur cette
collaboration, contribue à l'amélioration de la qualité des services à la
population en se regroupant. C'est un mode
de fonctionnement à l'écoute des membres, qui est garant de notre succès sur
des économies générées. Nous sommes,
par contre, en constante réflexion quant aux différentes approches, bien sûr,
pour s'assurer de faire évoluer nos
pratiques, une grande collaboration entre les trois grands groupes d'approvisionnement,
qui nous permet d'assurer une
synergie en fonction de l'expertise développée, de la disponibilité des
ressources. Donc, nous travaillons toujours en commun, ensemble, et nous
avons développé certaines zones de spécialités.
Bien sûr, ces
regroupements-là, accompagnés des comités d'utilisateurs mis en place pour
élaborer des dossiers de mise en
concurrence, se questionnent continuellement sur les meilleures stratégies. Et,
à ce niveau, bien sûr, on s'appuie sur
la réglementation. Nous essayons toujours de trouver la meilleure stratégie en
fonction des besoins pour obtenir le meilleur
prix et ainsi assurer une saine gestion des deniers publics. De cette façon,
par contre, bien sûr, deux tiers de nos contrats d'appels d'offres sont basés sur la qualité, la qualité qui
nous permet d'assurer d'avoir quand même le meilleur service, les meilleures fournitures ou le meilleur
équipement. Et, de plus en plus, on penche, bien sûr... toujours à bien planifier nos appels d'offres, avec les meilleurs
critères, pour s'assurer que nos fournisseurs d'équipement, et autres, là,
nous fournissent les meilleurs équipements.
Nous avons
une stratégie aussi, bien sûr, locale. Nous devons tenir compte des besoins
locaux, régionaux, de la manière la
plus rigoureuse possible, tout en respectant les règles du Conseil du trésor.
Nous sommes responsables des
décisions prises au cours de l'année, puisqu'elles découlent d'autorisations
spécifiques, en vertu des différentes législations. C'est un modèle d'affaires de proximité, bien sûr,
qui respecte... Actuellement, nous sommes dans trois sièges sociaux, mais il y a de plus de 11 bureaux régionaux,
qui s'assurent d'être présents, justement proches de la clientèle pour répondre
de façon stratégique, là, aux besoins des
différentes régions, aux besoins du milieu. Donc, sur l'ensemble du territoire,
nos experts connaissent les marchés
de proximité, des centaines de fournisseurs disponibles qui approvisionnent
quotidiennement nos établissements.
Nous avons un devoir social, un devoir d'acteur corporatif et sociétal. Nous
collaborons, bien sûr, avec tous ces acteurs de développement
économique.
En terminant,
comme nous l'avons expliqué tout au long de cette présentation ainsi que dans
le mémoire qui vous a été remis, les groupes d'achat en commun sont des
organisations efficientes qui permettent à leurs membres et au trésor public de réaliser des économies substantielles en
regroupant leurs pouvoirs d'achat, tout en favorisant la concurrence. Nous avons dépassé de loin les demandes et nous voulons
aller plus loin. Ceci étant dit, quand on parle du potentiel actuellement atteint de 47 % sur le total, on
vise 60 %, pour aller chercher un autre 525 millions d'achat en
commun, pour avoir des économies supplémentaires de 100 millions.
Donc, c'est
avec conviction, en s'assurant d'une proximité avec nos dirigeants, les efforts
de nos équipes concertées en
collaboration avec nos experts, que nous pouvons faire mieux, ce qui définit
nos succès et les définira dans le futur. Donc, en tant qu'acteurs, en terminant, de premier plan, les dirigeants
d'établissement que vous avez devant vous, comme nous, s'impliquent pour faire la différence pour créer des opportunités
en assumant nos responsabilités. Le ministère, le gouvernement et vous
tous peuvent en être fiers.
Je vous remercie de votre attention, et nous
sommes disponibles aussi pour répondre à vos questions.
Le
Président (M. Merlini) :
Merci, M. Gendron, pour votre exposé. Nous débutons la période d'échange avec
le député de La Pinière et ministre
de la Santé et des Services sociaux.
Vous disposez de 22 minutes. À vous, la parole.
M. Barrette : Merci, M. le Président.
Alors, M. Gendron, M. Castonguay, Mme Boivert, merci d'être ici aujourd'hui. D'entrée
de jeu, M. le Président, je vais juste mentionner quelque chose. Pour ne pas
que vous soyez indisposés, je vous annonce
simplement que, vers la fin, je devrai quitter parce que je dois être au Conseil des ministres pour un dossier que je dois présenter moi-même.
Mais soyez assurés qu'en vidéo je regarderai la fin de l'intervention.
Alors, je vais partir vers la fin probablement, dépendamment de la gestion du
temps, du temps parlementaire de notre collègue
de l'opposition officielle. Alors, pour ce qui est de la deuxième opposition,
je suis désolé, mais je vais le réécouter plus tard dans la journée.
Bien, merci
d'être venus, parce que je pense que vous venez faire certainement oeuvre utile en présentant ce que vous faites. Ce n'est pas très connu dans le réseau, ce que vous faites.
Bon. Vous savez que moi, je suis impliqué là-dedans depuis très, très, très longtemps, mais c'est vrai que ce que vous faites, un, ce
n'est pas connu, et, deux, les gens ne réalisent pas l'importance des économies
qui sont générées par vos actions, et ça, je pense qu'on ne le soulignera
jamais assez. Les gens ne le savent
pas, mais, à bien des égards, dans bien des fournitures, de quelque type que ce
soit, vous ne l'avez pas mentionné,
mais vous faites des approvisionnements en commun qui ont une étendue qui est
très grande, là. Vous allez de grands équipements médicaux très
dispendieux et spécialisés à des choses plus simples, mais vous avez une
palette d'achats, là, qui est extrêmement vaste et pour lesquels je
pense que le Québec
peut être fier, parce qu'on va
chercher les prix souvent les plus
bas au Canada, là, ça, c'est très clair, là, pour ceux qui sont informés de
cette dynamique-là, et ça, c'est à votre... le mérite vous en revient.
Alors, ceci
dit, vous avez dit deux, trois affaires, peut-être juste pour éclairer les
gens, vous dites que vous faites 47 %
de ce qui s'achète en approvisionnement en commun, pouvez-vous nous indiquer
quelle est la nature du 53 % restant? Et, compte tenu du succès dans le 47 %, pourquoi on ne le fait pas
encore dans le 53 %? Là, vous allez me dire que c'est de ma faute à
moi, là.
• (12 h 20) •
M. Gendron
(Yvan) : Non, bien, il fallait se
garder un peu de plaisir quand même, là, pour la suite des choses. Mais évidemment
il y a beaucoup, je dirais, de secteurs, entre autres au niveau de la spécialisation technologique, et autres,
équipements, fournitures spécialisées, que
les gens ont trouvé des avantages importants à négocier parce que, bien sûr que, quand on constate, encore de nos jours... Quand
on fait des groupes d'achat, mettons, sur les prothèses de hanche ou les pacemakers, qu'on a 40 %,
50 %, 60 %.
70 % d'économies lors d'un appel d'offres, bien, on se dit : Il y a
encore beaucoup de choses à faire. Bien évidemment, il faut que nos
comités d'utilisateurs se forment, on a beaucoup de participation, que ce soient des médecins, des spécialistes, des
professionnels, et autres, là. Et le fait, je pense, de regrouper sous
34 établissements, suite à la réforme, va nous faciliter les choses, parce
qu'on est quand même, là, 34 décideurs. Quand
il y en avait 182, puis 750 avant, bien, c'était plus difficile de faire des
choses. Maintenant, bien, je pense que, la stratégie, le leadership est plus facile à obtenir, puis on a une très
belle collaboration des équipes de professionnels et des médecins à ce niveau-là. D'ailleurs, au niveau des
conseils d'administration, nous avons des représentants, là, de la sphère
médicale, par exemple, là. Donc, on peut
faire plus, et maintenant c'est plus facile avec moins, bien sûr, de
représentants d'organisation.
M. Barrette :
...je n'ai pas pensé de noter, mais effectivement, auparavant, il fut un temps,
et pas très lointain, donc il n'y a
vraiment pas longtemps, qu'il y en avait 182, et les achats de groupe étaient
plus difficiles parce que si... vous
vous en rappelez tout aussi bien que moi, ça demandait, précédemment,
l'approbation de tout un chacun de participer, alors que, là,
maintenant, c'est moins comme ça.
Donc, pour faire l'autre 53 %, bon, il y a évidemment
des fournitures où ce n'est pas utile de le faire pour des raisons de volume ou de spécialisation, mais est-ce que
je peux dire qu'actuellement vous pourriez en faire plus si vous aviez
les capacités d'en faire plus en termes de volume et d'étendue d'achats?
M. Gendron
(Yvan) : Bien, la réponse
est définitivement oui, à plusieurs
niveaux, puis mes collègues pourront rajouter
aussi, bien sûr, là. Mais c'est plus facile d'autant plus que, depuis quelques
années... De passer de 11 regroupements à trois regroupements d'achat en commun, c'est plus facile de partager
notre expertise, partager les bons coups. Mais en même temps on a un
devoir de ne pas créer des monopoles d'achat non plus, O.K.? C'était une des
craintes que les utilisateurs avaient, de
dire : Si j'embarque dans un regroupement d'achats, est-ce que je vais
perdre un peu le monopole... Plutôt
est-ce que je vais être pris avec une compagnie versus une autre? Il y a un
danger, toujours, là-dedans, puis de façon particulière en pharmacie, par exemple on connaît très bien les
histoires de pénurie de produit, et autres, là, mais ça se passe
aussi au niveau de la technologie. Mais on a un devoir là-dessus, et moi, je
pense que maintenant on a un pouvoir de
se réunir de façon plus facile. Puis les gens participent de plus en plus et y
trouvent leur compte. Donc, on a un appel à ce niveau-là à faire, mais on a beaucoup de participants maintenant
sur l'appel d'offres, mais on a un gain à faire. Est-ce qu'on peut monter jusqu'à 70 %? Je ne suis
pas certain, là, mais 60 %, c'est atteignable hors de tout doute, mais je
pense qu'on va pouvoir aller plus loin que ça.
M. Barrette :
Vous allez être probablement d'accord avec moi si je dis qu'il y a des
fournitures pour lesquelles l'approvisionnement
en commun n'est pas vraiment approprié pour des raisons de spécialisation, mais
il y a encore des équipements et/ou fournitures où on peut avoir une
action, puis ça, c'est correct de dire ça comme ça.
M. Gendron
(Yvan) : Il y a des
équipements qui sont uniques, là, dans leur forme, là, mais, avec le temps, ils
deviennent moins uniques parce qu'il y a de
la compétition qui se forme. Donc, dans un premier horizon de temps, quand
les équipements sont uniques, par exemple,
on n'a pas un intérêt de faire un achat en commun. Mais, bien sûr avec le temps,
les technologies avancent, bien, il faut
toujours se requestionner. Donc, il faut que ce soit évolutif, notre façon de
faire.
M. Barrette : Là, je vais
rentrer un petit peu plus dans le détail, bien, dans le détail, dans de la
mécanique opérationnelle des achats en
commun, de deux manières. Je vais vous poser un certain nombre de questions.
Je comprends que vous êtes en faveur, je ne pense pas que vous qui êtes là-dedans, vous allez venir ici nous dire que ce n'est pas
une bonne idée, là, le contraire
aurait été surprenant. Mais il n'en reste pas moins qu'il y a
des commentaires qui se sont faits. Je ne sais pas si vous
avez eu l'occasion de suivre les travaux de cette commission-ci. Probablement
pas...
M. Gendron (Yvan) : Non, on
est...
M. Barrette : ...parce que vous
avez des jobs à temps plein, là.
M. Gendron (Yvan) : On est
assez occupés, oui.
M. Barrette : C'est
ça, qui est d'un autre ordre. Le
Medec est venu nous dire un certain
nombre de choses qui m'ont beaucoup étonné, puis j'aimerais ça que vous nous
éclaireriez là-dessus ou que vous nous donniez vos commentaires. Une des choses que le Medec
a dit, puis je vous la relaie, là, et je la cite quasiment mot à mot, le Medec
est venu nous dire que, dans la façon
de faire actuelle des regroupements d'achats, des achats de groupe, pour eux autres,
là, ils voyaient cette mécanique-là, cette procédure-là toujours
basée sur le plus bas prix. Moi, j'ai répondu que ce n'est pas le cas, et vous
avez... Parce que le Medec, là, ce
sont des fournisseurs. Ce n'est pas des acheteurs, c'est des fournisseurs,
c'est eux qui soumissionnent à vos appels d'offres, là. Là, je sais évidemment
pas mal la réponse, mais je pense qu'il y a lieu pour vous d'entrer un petit peu
plus dans le détail. Quand une organisation vient ici nous dire que la qualité n'est pas un critère, bon, il
y a deux questions
qui viennent : Est-ce que c'est vrai? Et, si ce n'est pas un critère, est-ce que
c'est vrai dans certains cas, dans
tous les cas? Quel est le poids relatif de la qualité? La qualité est-elle, oui ou non, un élément dans les appels
d'offres? Prenez le temps, là, puis lâchez-vous lousse pour nous expliquer
ça, parce que moi, j'ai été très,
très, très étonné de ce
commentaire-là. Et le commentaire était très affirmé de la part des
représentants du Medec, et là je dois vous dire que ça détonnait, là,
dans mon esprit par rapport à ce que j'ai vécu moi-même dans ce milieu-là.
M.
Castonguay (Daniel) : Alors,
c'est de toute évidence qu'on a été surpris lorsqu'on a appris ça, parce que,
non, la qualité est très importante au
sein des regroupements d'achats. Alors, on réunit des comités d'experts dédiés,
dépendamment des spécialités, par rapport à l'équipement ou à la
fourniture qui est, nécessairement, à acquérir, et ce comité d'experts là... Nous
avons, dans chacun des appels d'offres, un appel d'offres monté avec un nombre
de critères de qualité. Les deux
tiers de nos appels d'offres ont des critères de qualité, qui peuvent atteindre
jusqu'à 30 % de l'appel d'offres,
pour voir le produit qui est le plus de qualité, pour que nos cliniciens
puissent donner le service à la clientèle le plus approprié. Et par la suite le facteur prix rentre en ligne de
compte dans l'appel d'offres, pour ceux qui se classent sur le facteur qu'on appelle un facteur K, qui est
prévu dans les appels d'offres. Et ça, c'est fait toujours en partenariat
avec l'ensemble des cliniciens qui utilisent soit les équipements de haute
technologie ou les fournitures médicales nécessaires.
Alors, en tout temps, on intègre un critère de qualité, et fait avec beaucoup
de rigueur de la part des cliniciens, des
utilisateurs des produits qui participent à ces comités d'experts pour bâtir
les appels d'offres et faire les évaluations avant qu'on puisse ouvrir les enveloppes de prix, pour que le prix
devienne, après ça, une condition de la poursuite des appels d'offres.
Alors, le critère qualité est très important.
Dans d'autres
domaines, où il n'y a pas... Dans le tiers restant, c'est que le critère
qualité n'est pas nécessairement nécessaire pour le produit qui est
convoité.
M. Gendron
(Yvan) : Je pourrais... un petit
complément. À ce que je sache, nous sommes le client, donc le client, c'est vraiment la population, c'est les gens qu'on
dessert, c'est nos utilisateurs qui utilisent différents produits. On a des
bonnes relations avec Medec, aussi l'AFISQ,
mais c'est à eux, quand même, de se positionner, mais c'est à nous autres
de bien planifier nos critères, dans le
fond, ce qu'on demande, que ça soit précis par rapport à ça, là, et c'est à eux
d'évoluer par rapport à ça. Et, s'ils
baissent leurs prix de 30 %, 40 %, 50 %, 60 %, je pense
qu'ils ont de la marge aussi, là, pour agir pour l'amélioration de leurs
produits en même temps, puis nous autres, bien, on est un acteur de
développement, d'amélioration.
M.
Barrette : Juste pour clarifier, parce que, comme vous le savez, il y
a des gens qui nous écoutent de l'extérieur, et même pour le bénéfice de nous, les parlementaires, dans la mécanique
que vous utilisez, là, et à la tête de laquelle vous êtes, est-ce qu'il est possible qu'un produit à la
case départ soit éliminé, avant l'ouverture des enveloppes, sur la base de
l'évaluation de la qualité?
M.
Castonguay (Daniel) : Tout à fait, un produit peut être éliminé sur la
base de la qualité. S'il doit atteindre le pourcentage de 70 % pour traverser le critère de qualité et il
arrive à la note de 62 %, alors on n'ouvre pas l'enveloppe, il est
disqualifié.
M. Barrette : Donc, la qualité...
C'est structuré, l'évaluation, là.
M. Castonguay (Daniel) : Exact.
M. Barrette : J'imagine qu'il y a
des grilles puis qu'il y a plusieurs personnes, là, qui font ça.
M. Castonguay (Daniel) : C'est une
grille d'experts qui a été bâtie, et, à partir d'une grille très objective, là,
l'évaluation, elle est faite. Et, si le
produit qui est soumis ne répond pas à cette grille précise qui a été faite par
les experts et que... c'est une grille qui est connue, on n'ouvre pas
l'enveloppe.
M. Gendron
(Yvan) : Et, en complément, si
vous permettez, M. le ministre, il faut rappeler que, pour la population... D'abord, les experts
cliniques, les médecins — parce
que les experts, pour nous, c'est les médecins, les infirmières, donc c'est des
gens du réseau qui offrent des services — ils ne veulent pas engager
leur responsabilité professionnelle en donnant des services avec des équipements
ou des fournitures de mauvaise qualité. Donc, ça fait partie de la base
de nos choix, de nos décisions, et on les prend...
M.
Barrette : C'est intéressant, ce que vous dites. Alors, est-ce que je dois comprendre, si vous
mentionnez les infirmières, que,
lorsque pour un produit quelconque il
y a l'implication... un produit, un
service... bien, pas un service, évidemment, mais un produit, lorsque le travail d'une
infirmière a un... pas un impact, mais est impliqué dans le choix, ça aussi, c'est pris en considération? Je vous
donne un exemple, là : on achète un produit, là, puis... Évidemment,
ce que je comprends de ce que vous
nous dites, c'est que ça, c'est pour le patient. La qualité, là, c'est parce
que le produit que vous achetez, dans
cet exemple-là, là... Puis on peut prendre un exemple
simple, qui est une lentille. Bien, ça, ça va aller dans l'oeil d'un patient, alors c'est sûr que la
qualité, là, c'est la qualité de la lentille. Mais mettre une lentille, ça
demande une manutention d'un médecin
puis d'une infirmière, ça veut dire que, dans l'évaluation de la qualité, il y a
aussi l'impact que ça a... donc, il y a
une infirmière qui participe à l'évaluation parce qu'elle le manipule. Alors, un produit
pourrait être merveilleux, mais, s'il
n'est pas manipulable ou il est dangereux à la manipulation, bien là, vous
allez peut-être avoir un score moins bon, même si la
lentille est bien bonne. Je vous donne un exemple grossier, là. C'est ça?
M. Castonguay (Daniel) : Exact. Vous
avez raison.
M.
Barrette : Alors, quand les
gens nous disent : La qualité, ce n'est jamais là, puis c'est juste le
prix, ça ne tient pas la route, là, ça.
M. Gendron (Yvan) : Non.
M.
Barrette : À l'inverse, il
doit y avoir, j'imagine... puis là je vais prendre un exemple
un peu caricatural, je l'admets : acheter des crayons, là,
j'imagine qu'il n'y a pas un comité d'experts, là.
M. Castonguay (Daniel) : ...et puis
c'est le prix.
• (12 h 30) •
M.
Barrette : Et là c'est le
plus bas prix. Donc, ce que je comprends, là, pour la mécanique que vous
utilisez, la qualité a un potentiel
éliminatoire. Et ça, ça veut dire qu'une compagnie, là, qui dumperait, là... Le
«dumping», c'est un mot que tout le monde connaît en commerce, là. Du dumping, ça peut être contrecarré, entre
autres, par la qualité. Parce qu'on
peut faire du dumping en prix, puis on peut faire du dumping en prix parce que
la qualité n'est pas là, là, on connaît toutes les mécaniques, là. Donc,
la qualité est toujours, toujours, toujours un élément. Bon.
Dans des secteurs précis, puis là je vais dans
le sens de ma collègue de l'opposition officielle, les gens sont venus... certaines personnes sont venues nous
dire : Bon, les achats en commun, là, le médicament... L'APES est venue
nous voir sur ça. Puis vous n'êtes sûrement
pas surpris, si vous l'avez entendu, de leur commentaire. Le médicament, ce
n'est pas de la même manière que ça se
traite. Quelle est votre relation... Parce qu'évidemment ceux qui ont fait le
plus d'achats dans le passé,
historiquement, là, c'est les départements de pharmacie dans les hôpitaux.
C'est eux autres qui en ont fait le plus. Est-ce que vous autres, vous
êtes impliqués dans ces achats-là ou non? Ou est-ce que c'est séparé, là?
M.
Castonguay (Daniel) : Oui, on est impliqués, les groupes d'achat,
depuis plusieurs années dans l'approvisionnement au niveau pharmaceutique. Et également le produit est livré jusque dans
la pharmacie d'établissement, sans passer par l'approvisionnement interne avec... Lorsque c'est négocié par des
groupes d'approvisionnement, avec les firmes, tout est vraiment pensé et tout est fait, même la
péremption des médicaments, directement dans nos pharmacies, et impliquant
nos pharmaciens.
M. Barrette :
Là, mon temps file. Il me reste combien de temps?
Le Président (M.
Merlini) : Il vous reste sept minutes, M. le ministre.
M. Barrette :
Ah! sept minutes, ça va bien. Continuons.
M. Gendron (Yvan) : En complément, M. le ministre. Avant tout, il faut que les pharmaciens et que
l'équipe médicale de chacun des établissements permettent que ce médicament-là soit utilisé, qu'il n'entre pas qui
veut. Donc, après cette
discrimination-là, je dirais le besoin spécifique pour les différentes
clientèles. Après ça, ça s'en va au
niveau des approvisionnements
communs en fonction des besoins. Mais, tout d'abord, au niveau de la qualité...
M.
Barrette :
...d'établissement où un ou des pharmaciens d'établissement ont toujours
un rôle à jouer dans votre procédure, là.
M. Gendron (Yvan)
: Effectivement, toujours.
M.
Barrette : O.K. Là,
je vais aborder un autre élément qui est plus commercial, juste pour que vous
nous éclairiez là-dessus. Je pense que, dans bien des cas, vous
fonctionnez encore par vagues, là. Mais il y a une attention, quand même,
qui est portée à s'assurer d'avoir une
mécanique qui fasse en sorte qu'il
n'y ait pas de monopole de créer. On combat les monopoles existants,
mais on ne veut pas en créer de nouveaux, puis on veut s'assurer que le marché
soit ouvert.
Le
Medec, quand ils sont venus ici, ont aussi dit que la mécanique
d'approvisionnement nuisait à l'entrée dans le commerce de fournisseurs qui pourraient être plus compétitifs. Ça, je
vais vous dire bien franchement, là, c'est la deuxième affirmation qui m'a étonné, parce que je n'ai
jamais vu rien de ce genre-là dans le passé, là. Alors, peut-être que les
choses ont changé. Éclairez-nous là-dessus, là.
Mme Boisvert
(Nathalie) : Je vais débuter, puis peut-être vous pourrez compléter. Par
rapport aux groupes d'approvisionnement en
commun, on a mis en place des politiques de développement
durable qui nous permettent d'être
près des... dans les régions pour éviter justement
le... pour permettre la concurrence puis éviter qu'il y ait des monopoles
qui se construisent. Alors, ces politiques-là
sont aidantes pour les groupes, puis sont aidantes aussi pour les régions, et
permettent aux régions de pouvoir
soumissionner sur nos appels
d'offres, également.
Alors, c'est une présence, là, qui est intéressante dans les régions, et
avec notre politique de développement durable.
M.
Barrette : Mais, sur la
question qui avait été évoquée... Peut-être que j'ai mal posé la question, c'est possible,
évidemment. Sur la question de permettre, ou de ne pas permettre, ou de nuire, ou
de ne pas être suffisamment ouvert à tous
les fournisseurs planétaires, est-ce
qu'on a une mécanique qui empêche ça?
Autrement dit, là, vos appels
d'offres, aux dernières nouvelles,
sont publics, sont sur le SEAO, là. Ça, c'est public, ça fait que l'univers le
voit. Mais il n'y a pas de politique,
actuellement, qui empêcherait une firme japonaise de venir
soumissionner sur un produit qui est dans l'appel d'offres de manière compétitive. Il n'y a pas ça, là?
Parce que
ce qui a été évoqué, là, c'est qu'on ratait des occasions d'affaires parce que
notre mécanique empêchait des gens de soumissionner un produit de qualité
équivalente à un meilleur prix. C'est ça qui a été évoqué, plus clairement, là, si ma question n'était pas claire. Notre mécanique empêche quelqu'un
qui vient de l'univers de rentrer ici pour un produit compétitif sur le
plan clinique et à un prix plus bas. Ça, ça m'a beaucoup étonné comme
affirmation.
M. Gendron (Yvan) : Je vais vous répondre de deux façons. Premièrement, les règles,
lois, etc., directives, que ce soit au niveau du Conseil du trésor ou au niveau du
temps de réglementation, nos règlements de conseils d'administration,
les orientations du ministère, au contraire, c'est de transparence, là.
Écoutez, les gens, ils savent tout, ils savent tout, c'est public sur le système d'appel d'offres électronique. Moi, comme
président-directeur général, ainsi que mes collègues, on s'implique dans ces conseils d'administration
de regroupements d'achats là parce qu'on a des intérêts de s'assurer que
notre clientèle est bien desservie, là.
Et
c'est ouvert. Nous, on veut la meilleure concurrence, avoir le meilleur prix pour
un équipement, une fourniture de
qualité, de très haute qualité, qui nous permet d'avancer là-dessus. On n'a
aucun avantage à jouer différemment, mais on va garder quand même ce leadership-là. On ne donnera pas aux
fournisseurs qui s'achètent entre eux autres qu'ils définissent le
marché, là. D'ailleurs, la preuve, c'est qu'en se regroupant puis en se
donnant, justement, par vagues... Parce qu'il faut
y aller par vagues, parce qu'on ne peut pas régler pour cinq ans les
fournitures de l'ensemble du Québec parce qu'on va tuer le marché
puis on va perdre des économies. D'ailleurs, dans le mémoire que vous avez,
vous avez des fois des comparaisons
entre deux ans, qu'un groupe d'achat à réussi à avoir des économies importantes
sur un pacemaker, par exemple, puis,
deux ans après, on a obtenu encore mieux, bien, justement, parce qu'une
concurrence s'installe. Puis le pacemaker,
à ce que je sache, il est toujours d'aussi bonne qualité, puis l'ensemble des
fournisseurs ont accès à toute cette information-là.
M.
Barrette : Est-ce qu'il y a eu un seul cas où... Parce que, dans le
monde médical, là, il n'y a pas 80 compagnies, là, ce n'est pas comme une automobile, là, où il y
a une tonne de modèles, là. Est-ce qu'il y a un seul cas, dans le monde
médical, où on a vu des gens quitter le Québec parce que... achats regroupés?
M. Gendron (Yvan) : On a surtout vu, surtout en milieu médical,
mettons, au niveau des équipements médicaux spécialisés, des compagnies, mettons, s'entendre
entre eux autres pour s'acheter, on voit beaucoup plus ça, O.K.? Il y a
des équipements aussi qui ne tiennent
pas la route longtemps, parce
qu'évidemment il n'y en a pas des tonnes qui sortent de ce type de
modèle là. Ça arrive dans ce sens-là. Sinon, la réponse, non.
M. Barrette :
Non? O.K. Moi, j'ai fait le tour, M. le Président.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le ministre et député de
La Pinière, pour ce bloc d'échange. Nous allons du côté de l'opposition officielle. Mme la députée de
Taillon, vous disposez de 13 minutes. À vous la parole.
Mme
Lamarre : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bienvenue.
Bienvenue, M. Gendron — on a eu l'occasion de se rencontrer il n'y a pas très
longtemps — Mme
Boisvert et M. Castonguay.
Donc,
vous nous avez présenté des chiffres intéressants, puis moi, je vous avoue que
j'aime bien voir ces chiffres-là, les
économies. Vous avez mis des exemples très concrets dans votre document. Alors,
je vous remercie. C'est très éclairant. Et effectivement on considère que c'est un acquis d'avoir réussi, je
pense, à diminuer de 11 à trois le nombre de regroupements d'achat en
commun.
Maintenant,
dans le projet de loi, vous avez vu qu'à l'article 38 le ministre prévoit la
possibilité de faire une fusion des
groupes. Donc, à trois, le ministre considère quand même qu'il pourrait encore
vous refusionner en un seul pour certains achats ou pour certaines
caractéristiques. Comment vous voyez ça et dans quels secteurs vous voyez que
ça pourrait s'appliquer, dans quels secteurs vous trouvez que ça ne devrait pas
s'appliquer?
M.
Castonguay (Daniel) : D'entrée de jeu, d'abord, de devenir public
devient, pour nous, un avantage important de pouvoir se concerter avec
des orientations et des mandats très clairs, et là, à ce moment-là, dans des
domaines très spécifiques de haute
technologie, pharmaceutique ou autres, que les trois groupes d'achat se
partagent les mandats et les orientations. Ce qui est important pour
nous lorsqu'on fusionne, où on est trois, où on les fusionne, c'est de garder l'«empowerment» de l'ensemble des établissements,
des 34 établissements, c'est de garder notre «empowerment» pour être capables d'être très impliqués dans le
regroupement d'achats, parce que c'est ce qui fait l'engagement et c'est ce qui
fait qu'il faut mobiliser l'ensemble des
experts, nous, pour être capables de toujours aller en achat en commun, pour le
bien de donner l'accès aux services à la population. Alors, oui, pour nous,
c'est faisable parce que ça va donner des orientations
très, très, très claires et des mandats clairs et, nous, à ce moment-là, le
conseil d'administration qui pourrait migrer différemment, guider
l'ensemble des établissements dans cette concertation-là.
Mme
Lamarre : Oui, mais, dans le... Le ministre a cité tantôt, là, et hier
l'APES nous a présenté... Par exemple, du
côté des médicaments, il y a des calendriers d'appels d'offres. Parce qu'il y a
des médicaments qui deviennent génériques, si vous signez une entente pour trois ans puis qu'au bout de six mois il
y a un générique qui devient disponible, bien, on se rend compte que... C'est
sûr qu'on peut avoir des pertes importantes, là, à négocier un seul... mais
aussi à négocier avec un seul
fournisseur pour trois ans. Alors, est-ce que, pour les médicaments, vous ne
voyez pas des occasions d'exception et l'importance de maintenir trois
regroupements différents?
• (12 h 40) •
M. Gendron (Yvan) : Tout d'abord, il faut parler de la vie actuelle, depuis les dernières
années. Là, on travaille déjà
en concertation depuis des années. Tantôt, c'est le groupe de l'Est, tantôt
c'est le groupe de l'Ouest, tantôt c'est Sigma
Santé qui part avec l'appel d'offres provincial, pour différentes raisons.
Souvent, c'est le développement de l'expertise, il y a une
opportunité. Mais avant tout, bien sûr, là, ce qui est fort important
dans ce que vous dites, qui est tout
à fait pertinent, c'est : il faut avoir une bonne lecture du
marché, là, une bonne lecture de l'évolution des produits, de ce qui s'en
vient, pour mettre un appel d'offres,
exemple, sur un an seulement quand on sait qu'il y a plein de nouvelles
technologies qui s'en viennent, ou de
poursuivre un contrat six mois parce
qu'on sait qu'il y a
d'autre chose qui s'en vient, justement pour toujours chercher le meilleur
bénéfice pour la clientèle, et particulièrement dans le domaine pharmaceutique,
où il y a une évolution constante et importante,
surtout avec toute la médecine personnalisée, comme vous connaissez bien, etc.,
là. Ça, il y a comme, je dirais, un intérêt,
une préoccupation fort importante là-dedans. Vous avez tout à fait raison. Ça fait partie de nos
préoccupations. Donc, souvent, des appels d'offres plus courts
pour bénéficier des avantages, et autres, puis du changement
technologique.
Mme Lamarre :
Et, si vous étiez centralisés à un seul regroupement d'achats pour des
médicaments, par exemple, le risque de pénurie serait beaucoup
plus grand parce que vous concentreriez votre achat sur un certain
médicament, mettons, d'un certain générique,
et à ce moment-là... c'est sûr qu'à première vue ça pourrait être très
attrayant d'avoir des économies qui
pourraient aller jusqu'à 70 %,
là, on le voit, mais qui rendrait tout ça très, très vulnérable parce que
d'un coup on crée une demande énorme auprès
d'une seule compagnie pharmaceutique, d'un seul fabricant, ou même, dans n'importe quel contexte où il y aurait un
bris ou une mise à niveau demandée par la FDA pour les installations de ce
fabricant-là, on risque de mettre tout le
Québec en pénurie de médicaments. Et, pour avoir vécu ça, ce n'est pas facile
de trouver des options quand on a vraiment
tous mis nos oeufs dans le même panier, je vous dirais. Dans le domaine du
médicament, on l'a vu, même en essayant d'en importer des États-Unis ou de
l'Europe, il y avait des délais de trois à six
mois. Alors, pour ne pas mettre la population en danger, là... Parce qu'on l'a
bien vu, le médicament, ce n'est pas la même catégorie de fourniture que des pacemakers ou des remplacements de...
des cristallins, là, pour remplacer des cataractes.
M. Gendron (Yvan) :
Dans votre question, qui est tout à fait pertinente, Mme la députée, il y a
plusieurs éléments. Premier élément, bien
sûr, là, c'est : on profite, là, justement, des vagues d'achat, avec
différents critères, pour s'assurer,
justement, qu'on ne tombe pas en pénurie, là. Mais, dans le domaine
pharmaceutique, de façon particulière, on
est un peu pris à savoir quelle compagnie va acheter laquelle, puis quelle va
arrêter de produire tel produit. Pour éviter ça, nous, on veut s'assurer
qu'on puisse aller soit par vagues, des vagues restreintes en termes de temps,
en termes d'accessibilité, revenir par
rapport à ça, mais on veut s'assurer aussi, avec tous les critères de qualité,
d'accessibilité, ils doivent nous garantir, là, O.K., ils ont des
obligations, devoirs, responsabilités... et de s'assurer de fournir...
Mme Lamarre : ...ne vous
garantissent, ils ne font...
M. Gendron (Yvan) : Pardon?
Mme
Lamarre : Est-ce que vous avez des pénalités prévues s'ils ne
fournissent pas? Parce que moi, j'en ai vu beaucoup, de contrats, où on dit «vous devez», mais, s'il n'y a pas de
pénalités, bien... Aux États-Unis, ils ont imposé des amendes de 8 000 $ par jour quand une
compagnie ne remplit pas son obligation de fournir. Est-ce que vous avez ce
genre de pénalité là dans vos contrats?
M. Castonguay (Daniel) : Oui, il y a
ce genre de pénalité dans les contrats.
Mme
Lamarre : Pouvez-vous m'en donner un, exemple? C'est quoi, la plus
haute pénalité que vous avez en cas de pénurie d'un fabricant?
M.
Castonguay (Daniel) : En cas de pénurie, on passe au fournisseur
suivant dans l'appel d'offres, et la compagnie qui est en rupture de stock paie l'écart du prix que l'autre fournisseur
va nous le... le fournir. Et ça, c'est dans des contrats actuellement.
Mme Lamarre : Je vous dirais, ce
n'est pas une pénalité qui protège la population, parce que le deuxième fournisseur sera incapable de fournir l'ensemble
du volume. S'ils se partageaient l'ensemble du volume à fournir à 40-30-30,
mettons qu'ils sont trois, et que celui de
40 en manque, eh bien... même si vous dites, là... celui de 30, il n'en aura
pas suffisamment. Alors, c'est pour
ça, je veux juste attirer l'attention sur les risques. Et, quand on demande
trois fournisseurs en tout temps du
côté des médicaments, ce n'est pas par caprice, ce n'est pas parce qu'on ne
veut pas que l'État profite des
meilleures économies. C'est parce qu'il y a un risque réel à cause de ce
potentiel de bris de fonctionnement, de production, d'interruption de
production qui cause des dommages, là, qui sont ingérables autrement.
M. Gendron
(Yvan) : On partage vos
préoccupations, ce que vous dites, parce qu'effectivement il y a une difficulté
à ce niveau-là. On le vit, là, on a, oui, des pénalités, oui, on a des
critères, etc., mais est-ce qu'on a les moyens de l'appliquer puis d'avoir un
retour? Ça, c'est une autre affaire. Dans certains cas, oui, parce que le
risque le plus grand, c'est de perdre
le marché, puis de le perdre justement au profit d'une autre compagnie. Mais on
sait très bien que les produits se réduisent,
puis, de plus en plus qu'on va s'en aller vers la médecine personnalisée, il va
falloir affiner un peu notre façon de
faire, notre façon, je dirais, d'acheter ces produits-là et de s'assurer que
nos fournisseurs sont responsables. Et ça, on a besoin de vous, les parlementaires, on a besoin de vous, le
gouvernement, pour apporter des éléments supplémentaires qui nous
permettent d'avoir ces leviers-là pour jouer pleinement notre rôle.
Mme
Lamarre : Puis le projet de loi ne pourrait pas prévoir certaines de
ces pénalités-là, puisqu'on a une
section particulièrement dédiée à l'approvisionnement en commun?
M. Gendron
(Yvan) : Moi, je pense qu'au niveau...
Le gouvernement avec le Conseil du trésor, et autres, devront
prévoir ces modalités-là pour nous soutenir
là-dedans. Parce que nous, comme groupe d'achat et comme président-directeur général d'établissement, bien sûr, on a nos limites, mais on s'assure de prendre le
maximum, là, je dirais, de barrières, de leviers pour s'assurer que la
clientèle est toujours bien desservie.
Mme Lamarre : ...le ministre a dit
qu'il écouterait, alors on va lui faire confiance.
M. Gendron (Yvan) : On va lui répéter.
Mme
Lamarre : Mais c'est certainement quelque chose qui... Parce qu'on l'a vécu. On se pensait à
l'abri, au Québec, de toute forme de pénurie, et on en a vécu, et
on en vit encore constamment, alors ça vous met, vous-même, dans une situation
très difficile.
M.
Castonguay (Daniel) :
...peuvent faire une grande différence, et également il ne faut pas... et
bâtir les pénalités en conséquence,
mais il ne faut pas oublier que les pénalités n'annulent pas le risque, le
risque demeure présent pareil.
Mme
Lamarre : D'accord, mais je
veux juste nous rappeler qu'aux États-Unis ils les imposent, ces pénalités-là. Alors,
si le fabricant qui est en Europe ou, peu importe, ailleurs dans le monde a le
choix entre approvisionner les États-Unis, où il y a
une amende, et le Québec, où il n'y a pas d'amende, on se rend compte
qu'on va toujours être les perdants dans ce dossier-là.
Alors, c'est juste par mesure de précaution pour la population.
Le groupe
Medec est venu nous voir et il nous a parlé des ristournes, d'un 12 % de
ristournes obligatoires qui était dans
les contrats. Est-ce que vous pouvez nous dire comment on pourrait se départir
de ça, ou à quoi servent ces ristournes et pourquoi nous, on impose ça dans nos contrats? On le sait, là, ces
contrats-là... ces compagnies-là sont mondiales, et, quand ailleurs on dit : Ce n'est pas permis
pour ces compagnies-là d'offrir des ristournes, ça leur fait un mauvais
bulletin, et je ne pense pas qu'on veut être associé à ça, au Québec.
Alors, comment on peut se départir de ça?
M. Gendron
(Yvan) : Tout d'abord, on va clarifier certaines choses, là, c'est une
pratique qui existe depuis, je dirais, de nombreuses années dans certains
secteurs spécialisés. Ça, c'est une chose. Deuxièmement, quand Medec
dit : On ne devrait pas avoir ça
parce qu'on est pénalisés, là, inquiétez-vous pas, ils ajustent
leurs prix en conséquence de ça. Donc, Medec, les fournisseurs ne
perdent pas d'argent avec ça. Ça, c'est deux choses.
L'idée en
arrière de ça, du fameux 12 %, qui est pour un certain nombre de contrats
dans les équipements spécialisés ou
dans certaines fournitures, surtout les fournitures en cardiologie, ou peu
importe, l'idée, à l'époque, il y a de nombreuses années, c'était de dire : On veut s'assurer qu'un certain montant,
qui provient justement des économies soit d'achats, de volume, d'utilisation,
peu importe, puisse permettre, finalement, le développement, je dirais, de l'établissement,
le développement de la spécialité, par exemple en cardiologie, pour
aller plus loin, donc au bénéfice de la population. Maintenant...
et éviter aussi que ça tombe dans un déficit, que ça tombe dans une utilisation
autre, parce qu'il y avait des gains
d'économie, et ça permettait... je dirais, ça donnait un
incitatif aux acteurs, aux spécialistes, aux utilisateurs de s'impliquer
et de faire partie, justement,
des appels d'offres, mais de s'assurer que ces montants-là soient bien sûr
au bénéfice de la population, du développement, de l'enseignement, et
autres.
Maintenant,
si cette pratique-là, on dit, bon : Elle est dévolue, on ne doit plus
l'utiliser, bien, écoutez, de
toute façon, nous, comme présidents-directeurs généraux,
ce n'est pas l'élément, nous autres, principal de l'histoire. C'est à nous
de gérer l'ensemble des budgets puis d'y attribuer la bonne essence... la bonne
utilisation, finalement.
Mme
Lamarre : On est en 2017, il y a
des règles de gouvernance maintenant. Si vous dites que, de toute façon, ils se reprennent, moi,
j'aimerais mieux que vous négociez sur le vrai prix, approprié, puis qu'on
donne aux gens qui ont besoin de
développer des services et de la recherche avec ces budgets-là
les vrais budgets, qui porteraient le vrai nom. Je pense
que ça, on a intérêt à nommer les choses correctement, et, dans votre secteur,
c'est majeur.
Il me reste
une minute, je voudrais juste... vous pourrez répondre aux deux en même temps.
Vous achetez pour combien de médicaments, les trois groupes, chez
McKesson, chez le grossiste McKesson?
M. Gendron
(Yvan) : Je pense qu'on va
prendre la question en délibéré puis vous revenir, la commission,
parce qu'on n'a pas été dans ce détail-là, mais on va pouvoir vous
fournir ça.
Mme Lamarre : Mais, à peu près,
c'est quoi, le pourcentage de vos achats?
M. Gendron (Yvan) : 600 millions,
que répond...
Mme Lamarre : 600 millions de
dollars?
M. Gendron (Yvan) : Oui,
600 millions de dollars.
Mme
Lamarre : D'accord. Alors,
vous savez qu'actuellement il y a, au
niveau de la gouvernance, quelqu'un qui est à la fois président d'un établissement
fusionné, CHUM et Sainte-Justine, et qui est vice-président de McKesson.
Comment vous gérez ce conflit d'intérêts évident?
Le Président (M. Merlini) : En
30 secondes.
M. Gendron
(Yvan) : En 30 secondes,
donc, je peux prendre trois expressos... Non. Ce que je dirais, un, ça ne
nous concerne pas, nous, à la table, présentement, comme président des conseils
d'administration et vice-président des regroupements d'achats, donc je laisserais la question au ministre,
répondre, là... les nominations, parce que c'est des nominations qui sont pour
des membres indépendants.
Mme
Lamarre : Vous nous
confirmez qu'il y a 600 millions de dollars qui sont achetés par les trois regroupements d'achat en commun auprès de l'organisation McKesson.
M. Gendron (Yvan) : Tout à fait.
Mme Lamarre : Je vous remercie beaucoup.
Le
Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup, Mme la
députée de Taillon, pour ce bloc
d'échange. Maintenant, Mme la députée de Repentigny, du deuxième
groupe d'opposition, vous disposez de neuf minutes. À vous la parole.
• (12 h 50) •
b15389 Mme
Lavallée : Merci beaucoup. Merci beaucoup, bienvenue d'être... pour
être ici, M. Castonguay que je connais déjà, puisqu'il travaille dans ma
région.
Les
pharmaciens d'établissement ont recommandé que vous puissiez offrir vos
services aux cliniques médicales du
Québec. Il y a une ouverture dans la loi, puis je pense que le ministre veut
aller vers ça. Ce serait un nouveau marché pour vous. J'imagine que ça amène certaines particularités à regarder, à
considérer. Et est-ce que vous seriez capables à moyen terme
d'approvisionner les centaines de cliniques médicales?
M. Gendron
(Yvan) : Bonne question. Je pense
qu'il y a deux questions là-dedans, puis, Daniel ou Nathalie, vous répondrez. Mais d'abord, la première
question : Est-ce que nous, on pourrait, mettons, oeuvrer là-dedans?, bien
je pense que, si on nous demande de
le faire puis de profiter, justement, de l'appel d'offres, de l'expertise, et
autres, je pense qu'on va bien l'entendre en même temps.
Pour ce qui est... La modalité qui est la plus importante,
c'est comment ça va se faire. Puis la distribution, et autres, là, ce serait tout un défi. Mais en même temps c'est les
fournisseurs qui distribuent. Donc, il y aurait un passage ou une transition quelconque. Mais, écoutez, on en
achète énormément, de produits pharmaceutiques, maintenant. Par contre, les groupes, mettons, pharmaceutiques, et
autres, là, c'est des entreprises indépendantes, avec leur façon de faire,
et autres, là, mais je pense que c'est une
question gouvernementale et légale. Je ne pourrais pas répondre si ce serait la
meilleure des choses, là.
Mme
Lavallée : Est-ce que c'est une question que le ministre vous a posée
avant l'élaboration du projet de loi?
M. Gendron (Yvan) : Non.
Mme Lavallée : Non. Je n'ai pas
d'autre question.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme la députée de Repentigny.
Alors, Mme Nathalie Boisvert, représentant
le Groupe d'approvisionnement en commun de l'Est du Québec, M. Daniel
Castonguay, représentant le Groupe d'approvisionnement
en commun de l'Ouest du Québec, et M. Yvan Gendron, représentant Sigma Santé,
merci de votre présence et votre contribution aux travaux de la
commission.
Compte tenu
de l'heure, je suspends donc les travaux de la commission jusqu'à
15 heures, où nous poursuivrons notre mandat. Bon appétit à tous,
merci.
(Suspension de la séance à 12 h 52)
(Reprise à 15 h 12)
Le
Président (M. Merlini) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Je demande à
toutes les personnes présentes au salon rouge de bien vouloir éteindre
la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
Nous poursuivons donc les auditions publiques
dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 130, Loi modifiant certaines dispositions
relatives à l'organisation clinique et à la gestion des établissements de
santé et de services sociaux.
Je souhaite
donc la bienvenue aux représentants de la Table de coordination des réseaux universitaires intégrés en santé. Je vous demande de bien vouloir vous
présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent. Votre audition sera d'une durée de 1 h 30 min,
presque, et vous disposez de 30 minutes pour votre exposé. Par la suite,
nous procéderons... Ça, ça ne change pas, vous avez vraiment
30 minutes pour votre exposé. Nous procéderons par la suite à la période
d'échange avec les membres de la commission. Bienvenue, la parole est à vous.
Table de coordination
nationale des réseaux universitaires
intégrés de santé (TCN des RUIS)
Mme
Bourdon (Gertrude) : Merci,
M. le Président. Alors, M. le ministre, Mmes, MM. les parlementaires, bien,
d'abord, merci de nous recevoir. Et puis,
sans plus tarder, je me présente, Gertrude Bourdon, je suis présidente du RUIS
de l'Université Laval et P.D.G. du CHU de
Québec, et je vais présenter également mes collègues qui m'accompagnent,
alors : sur ma gauche, Mme Patricia
Gauthier, qui est présidente du RUIS Sherbrooke et également
présidente-directrice générale du
CIUSSS Sherbrooke et du Centre hospitalier universitaire Sherbrooke;
immédiatement à ma gauche, alors le
Dr Pierre Cossette, qui est doyen de la Faculté de médecine de l'Université de
Sherbrooke, mais il est également président le la conférence des doyens; immédiatement sur ma droite, le Dr Fabrice
Brunet, qui est président du RUIS de Montréal et également P.D.G. du CHU de Sainte-Justine et du CHUM; et, à mon
extrême droite, Mme Martine Alfonso, qui est présidente du RUIS McGill et P.D.G. par intérim du Centre universitaire de
santé McGill. Alors, les collègues s'exprimeront de la gauche vers la
droite à tour de rôle. Alors, immédiatement, je passe la parole à Mme Patricia
Gauthier.
Mme Gauthier (Patricia) : Alors,
bonjour à tous. Alors, je vais vous entretenir sur la création des réseaux universitaires intégrés de santé, le RUIS, la
composition des RUIS ainsi que la gouvernance des RUIS, alors ce sera la
partie que je ferai.
C'est
en 2003 qu'ont été créés les quatre RUIS, pour Réseau universitaire intégré de
santé, correspondant aux quatre
facultés de médecine du Québec, soit Laval, McGill, Montréal et Sherbrooke, et
leurs territoires d'enseignement. J'ai
personnellement exercé le rôle de président et de vice-président du RUIS depuis
2004 au sein du RUIS de Sherbrooke. Ils
ont, dès lors, mis en oeuvre... Ça a été mis en oeuvre par des leaders du
ministère de la Santé, Michel Bureau en fait partie, de ces leaders du début, ainsi que les D.G. des CHU et doyens de
l'époque. Alors, ces leaders-là ont mis en place chacun des RUIS, et aussi ça a été fait par l'ensemble des partenaires
qui ont pris part à la création de ces RUIS là en 2003.
Au fil des
ans, ils ont ajusté leurs façons de faire et leur programmation pour tenir
compte des besoins de leurs membres
respectifs et pour adapter leurs interventions à l'évolution du réseau de la
santé et services sociaux lui-même. Ils
ont notamment élargi leur champ d'action à l'ensemble
des régions de leurs territoires et ils ont fait en sorte que, dans tous
les travaux, la prise en compte de véritables continuums de soins et services,
soit de la première ligne aux soins surspécialisés, qui sont offerts en
quatrième ligne, soit toujours considérée.
Et, cette évolution-là, on peut dire que,
maintenant, on parle surtout du RUIS 2.0. Donc, depuis sa création, en 2003, avec la réflexion qui a été faite avec la
réforme, on en vient à dire qu'on est maintenant rendus au RUIS 2.0 pour
vraiment passer à une autre étape de RUIS,
qui va intégrer davantage, aussi, le volet des services sociaux à l'ensemble
de la réforme que nous venons de vivre avec la loi n° 10 et la loi
n° 20.
La
composition des RUIS. Alors, le projet de loi n° 10, qui a été sanctionné
le 9 février 2015, et pour lequel les RUIS avaient affirmé... ils étaient venus ici, en commission
parlementaire, pour affirmer, souscrire aux objectifs de cette réforme. Alors,
ce projet de loi là modifie de facto la composition des RUIS. Les comités de
direction des RUIS sont maintenant minimalement composés de tous les
P.D.G. de leurs territoires. Les doyens des facultés de médecine, présents depuis le début des RUIS, se sont vu
rejoints, dans la plupart des RUIS, par leurs collègues de médecine dentaire,
de sciences infirmières, de sciences
sociales et de pharmacie. Ce membership élargi est essentiel pour promouvoir la
pratique en interdisciplinarité et
sensibiliser les étudiants pendant leurs formations initiales. Alors, c'est
l'intégration du volet social avec le secteur santé qui prend toute son
importance pour soutenir l'offre de services de santé et services sociaux.
Maintenant, la gouvernance des RUIS. Les RUIS
sont des instances de concertation. La mobilisation de leurs membres pour agir
de manière concertée repose, d'une part, sur le partage d'une même vision et
sur l'adhésion à des objectifs communs, et, d'autre part, sur l'interdépendance
de leurs actions pour l'atteinte de leurs objectifs.
Le comité de
direction de chacun des RUIS est maintenant présidé par le P.D.G. du CHU de son
territoire. Alors, c'est ce qui fait
l'objet de notre présence ici aujourd'hui. La composition de sa gouvernance
fait l'objet de l'article 39 du
présent projet de loi. Nous aurons d'ailleurs des suggestions à formuler à cet
effet, sur la deuxième recommandation qui
vous est faite aujourd'hui, afin de reconnaître la contribution essentielle du
milieu académique dans la poursuite des travaux du RUIS et de son interdépendance avec les milieux de soins et
services, autant santé que services sociaux. Donc, nous avons vraiment
besoin l'une de l'autre, autant la composante académique que la composante
clinique.
Finalement,
la Table de coordination nationale des RUIS, constituée par le ministre et
présidée par son représentant, en
l'occurrence le sous-ministre associé aux affaires médicales et universitaires,
a essentiellement la responsabilité de coordonner
l'action des RUIS pour assurer l'accès à la médecine académique dans toutes les
régions du Québec et assurer la
concertation entre eux. Et nous souhaitons vous mentionner que, cette coordination-là
qui est faite par le ministère de la Santé, on souhaite que ce soit
comme ça aussi, parce que Dr Bureau nous avait suggéré que l'on puisse prendre
cette coordination-là nous-mêmes. Je pense qu'à cette étape-ci on souhaitait
que la coordination soit aussi exercée par l'instance du ministère de la Santé.
Alors, voilà, je passe la parole à Dr Cossette.
• (15 h 20) •
M.
Cossette(Pierre) : Merci, Patricia. Donc, je vais vous parler
un petit peu de la mission, des mandats, puis illustrer un peu à quoi
les RUIS ont servi et servent encore, donc, conformément à l'énoncé de la loi,
qui est de favoriser la complémentarité puis
l'intégration des missions de soins, d'enseignement et de recherche,
d'évaluation des modes de technologie
et des impacts en services sociaux. Donc, les RUIS existent pour l'ensemble des
régions du Québec, agissent dans tous les traitements des dossiers comme
ça.
Pour les
facultés de médecine, en fait, en fonction de notre responsabilité sociale,
pour nous, c'est important de pouvoir
contribuer d'une façon pertinente au développement de la main-d'oeuvre
médicale. C'était le point de départ, là, et on fait beaucoup plus que ça maintenant. Et ça, c'est important de
bien comprendre ça, parce que l'articulation entre le réseau de la santé
puis le réseau universitaire est essentielle à plusieurs égards. D'une part, on
pense que le réseau universitaire peut
influencer les meilleures pratiques du réseau de la santé, mais, d'autre part,
c'est important que le réseau de la
santé influence le réseau universitaire dans sa façon d'enseigner, d'enseigner
des choses pertinentes. Et un exemple qu'on
peut comprendre, aussi, c'est toute l'évolution de la pratique vers la médecine
de famille puis le déploiement des groupes de médecine de famille, des
UMF, qui sont maintenant des GMFU, qui sont depuis... Parce qu'initialement
l'enseignement médical, il y a 30 ans, était fait dans les CHU.
Maintenant, c'est très déployé, et aujourd'hui on a, au Québec, 38 UMF, qui sont réparties dans tout le Québec. Et ces
gens-là contribuent aux soins, mais c'est important aussi qu'ils aient
accès à des modèles de soins différents, c'est important d'avoir des UMF en
milieu urbain, en milieu intermédiaire puis
en milieu éloigné pour que tous ces modèles-là soient enseignés. Donc, pour
nous, l'interaction entre le réseau
puis l'enseignement, par exemple dans le développement de la médecine de
famille, est absolument essentielle des deux côtés, si on veut. Donc,
ça, c'est un point qui est important pour nous.
Et l'autre
chose, c'est que, dans le virage vers la médecine de famille, qui est un
objectif qui est poursuivi par les facultés
de médecine, on veut que nos médecins qui sont en place dans les milieux...
donc on veut que la médecine ne soit pas enseignée juste par des grands
professeurs d'université, mais soit enseignée par des praticiens du milieu, et
ça prend une force mobilisée dans le
milieu, qui sont souvent les médecins de famille, mais qui peut être aussi des
spécialistes en milieux régionaux,
qui vont venir enseigner, qui vont accepter aussi de prendre des étudiants à
tous les niveaux de leur formation. Donc, ça, c'est un enjeu important. Et il y a une des
recommandations qui va revenir là-dessus, parce que la fonction d'enseignement de ces médecins-là qui sont
déployés dans le réseau, elle est essentielle pour que nos programmes soient bons, mais elle est essentielle aussi pour
qu'on puisse enseigner de la bonne façon, qu'on enseigne la médecine qui
reflète vraiment la réalité multiple du
terrain. Donc, pour nous, ça, c'est un point qui est important. Donc, de
concilier les besoins académiques avec les impératifs cliniques, et vice
et versa, c'est un élément majeur.
L'autre chose
aussi qu'on remarque de plus en plus, c'est que cette concertation-là entre les
milieux académiques et les milieux
cliniques est essentielle dans la formation d'autres professionnels que les médecins comme tels, puis les médecins de famille à plus forte raison, là. Donc,
qu'on soit en réadaptation ou en sciences infirmières, les enjeux sont très,
très importants. Il faut
pouvoir coordonner les milieux de stage entre les établissements d'enseignement et les établissements de
santé. Donc, par exemple... c'est vrai aussi en réadaptation. Donc, l'enjeu
d'avoir accès et de pouvoir se partager des plateaux d'enseignement est vraiment très important, et, là aussi, c'est au bénéfice mutuel du réseau
de la santé puis du réseau de l'enseignement supérieur.
Donc, de la même
façon que, pour les médecins, il faut faire des choses pertinentes... Et il faut
être capables de s'interinfluencer.
Et j'irais même une coche plus loin, donc les médecins qu'on
déploie, par exemple, dans nos GMFU, ils ne vont pas enseigner juste à des médecins, ils
vont enseigner aussi à des infirmières puis à des infirmières praticiennes
spécialisées. Donc, ça, c'est un autre
élément important de leur mission d'enseignement qu'il faut
réussir à coordonner, mais à protéger
dans toute réforme ou dans tout changement qu'on fait. Donc, pour nous, ça,
c'est des éléments importants.
Une
illustration de ce que les RUIS ont permis, c'est le développement des campus délocalisés, il y
a aussi des campus cliniques,
mais il y a deux campus délocalisés complets. Donc, il y a celui de l'Université
de Montréal à Trois-Rivières, celui de l'Université de Sherbrooke à Chicoutimi,
qui ont été des éléments clés dans l'organisation des soins
et puis dans le développement de la main-d'oeuvre de ces régions-là, mais pour les mains-d'oeuvre en général. Donc, la beauté, c'est qu'on a maintenant un petit peu
de statistiques qui nous démontrent que les médecins formés dans ces campus-là choisissent plus la médecine de famille,
spontanément, là, avant toute autre loi, là. Donc, c'est vrai dans tout
le Canada, en fait c'est entre 55 % et 65 %. Donc, plus spécifiquement
à Sherbrooke, c'est 57 %, dans notre campus de Chicoutimi, puis, à Montréal, c'est 62 % dans le campus de
Trois-Rivières. Et donc ça, c'est des facteurs aussi qui contribuent à l'attraction puis à la rétention de
la main-d'oeuvre en région, puis ça, c'est vrai pour ces campus-là, mais
c'est aussi vrai pour ce que McGill fait à Gatineau ou ce que Laval fait
notamment à Rimouski, donc ces impacts-là.
Donc, c'est
un autre endroit où l'articulation a fait ses preuves, elle démontre qu'elle
est pertinente et qu'elle est bonne
pour le milieu, puis elle est bonne pour la prestation de soins. Par exemple,
si on regarde au Saguenay—Lac-Saint-Jean
ou en Mauricie, le recrutement médical,
depuis l'ouverture des campus, là, avant même que le premier médecin ait gradué
de là, a été beaucoup plus important.
Donc, c'est un facteur d'attraction et de rétention de la main-d'oeuvre
médicale en région, le déploiement des activités d'enseignement. Donc,
c'était juste pour mieux illustrer ce que ça peut donner.
Donc, cet
impact-là se fait sentir, on se disait, pour la formation médicale, la
distribution, mais on a aussi toutes sortes
d'autres impacts, on a quelques analyses d'impact qui démontrent que les
campus, sur la distribution, ont un impact socioéconomique, ont un impact sur le milieu culturel, ont un impact de
développement économique dans ces régions-là. Alors, on a certaines statistiques là-dessus, mais c'est bien démontré.
Puis c'est vrai pas juste dans les campus délocalisés qu'on a au Québec,
c'est vrai aussi ailleurs au Canada.
Donc, en
résumé, pour nous, c'est très important, cette articulation-là entre les
milieux universitaires et les milieux cliniques, et c'est important
aussi l'articulation entre les milieux universitaires cliniques surspécialisés
et les milieux régionaux. Et c'est un des
objectifs des RUIS que tout Québécois, peu importe son lieu de résidence,
puisse bénéficier de services
accessibles répondant au plus haut standard de pratique et dispensés dans une
perspective d'interdisciplinarité, comme
j'ai mentionné, une perspective qui est essentielle pour le développement des
services de première ligne. Parce que, si on parle de hiérarchisation
des services, pour que la première ligne marche bien dans des régions, des
milieux régionaux, il faut que la deuxième,
et surtout la troisième, quatrième ligne soient capables de répondre de façon
fluide.
Donc, l'autre point du RUIS, dans cette
hiérarchisation-là, c'est que toutes les équipes cliniques locales puissent
disposer de soutien, soit par la formation
ou soutien à distance, et des connaissances nécessaires pour avoir un réseau qui est efficace et pour garantir aussi l'accès à
toute la population du Québec et des territoires aux soins et services de
troisième et quatrième ligne. Donc,
ça fonctionne vraiment dans les deux sens. Donc, ça, c'est des éléments importants
du RUIS.
Je vais vous
donner quelques exemples de chantiers sur lesquels les RUIS travaillent à
l'heure actuelle. Parce que tout ça,
c'est juste un organisme de coordination. Je ne vous parlerai pas de la
cardiologie tertiaire parce que c'est un chantier qui a été réglé par les RUIS. Donc, on n'y
travaille plus, parce que ça fonctionne maintenant bien, c'est déployé
dans tout le Québec.
Mais on a présentement un soutien au plan d'action ministériel pour la prise en charge des patients aux prises avec la douleur chronique, et ça soutient le développement de centres d'expertise, pour tout le territoire, et une interface
avec l'ensemble des régions, jusqu'aux soins de première ligne.
On a aussi un soutien au plan d'action ministériel
pour les personnes atteintes de maladie d'Alzheimer. On promeut, avec ça, et on soutient le développement d'équipes
locales, situées dans les GMF et qui s'intéressent au développement des meilleures pratiques et
modalités de prise en charge pour les personnes âgées qui ont des troubles
cognitifs.
Un autre
exemple, c'est le soutien au plan ministériel pour la prise en charge des AVC en développant un
registre d'intervention d'AVC puis une hiérarchisation des services, là,
jusqu'à la thrombolyse.
Et on a aussi un soutien au plan d'action québécois
pour le développement de la télésanté. Donc, la télésanté, il y a peut-être deux grands axes intéressants là-dedans.
Il y a de la téléformation qu'on fait, mais il y a des télésoins aussi. Donc, le réseau de McGill a travaillé sur les
soins au Grand Nord beaucoup en télésanté, notamment pour la population jeune. La télépathologie a été
développée dans le réseau de l'Université Laval. Le MPOC, les maladies
pulmonaires obstructives chroniques, a été développé dans le réseau de
Montréal, est maintenant déployé dans tous les réseaux. À Sherbrooke,
on a développé les soins de plaies à domicile en télésanté. Donc, c'est des
exemples de choses qui sont développées dans une optique réseau et qu'on veut
généraliser par la suite.
Donc,
je reviens brièvement dire que, dans le domaine relié à l'enseignement, la
recherche et l'évaluation, il y a aussi tout un volet RUIS là-dedans...
d'ailleurs, c'est un des volets qui va se développer beaucoup, tout le volet de
la pertinence. Donc, on veut travailler, on
veut s'assurer que le «lag» entre les connaissances universitaires et autres
puisse être franchi rapidement entre ça puis l'application dans le
réseau. Donc, c'est aussi un des chantiers principaux.
Donc,
pour nous, en 2017, les RUIS sont toujours bien placés pour soutenir la
transformation du réseau. La mise en
place des meilleures pratiques... Il faut intégrer pour ça le volet social et
réadaptation dans le mandat, parce que, quand on parle de thématique,
comme je vous dis tantôt, AVC, Alzheimer, et tout ça, on ne peut pas prendre
juste le volet médical, sinon on passe
complètement à côté de la cible, là. Il faut vraiment intégrer tout ça, et,
pour nous, ça vise à partager les connaissances, puis vraiment miser sur
la complémentarité entre le milieu universitaire et le milieu clinique, et de travailler sur la pertinence. Donc, les deux
recommandations qu'on va vous faire visent à renforcer la gouvernance des
RUIS pour assurer que ce soit bien arrimé
entre ces milieux-là et aussi de s'assurer que la mission d'enseignement fasse
partie des choses qui sont protégées, qui
font partie des devoirs des médecins qui travaillent dans le réseau. Donc, je
vais passer la parole, sur ce, à M. Brunet, donc, qui va vous parler de
la gouvernance médicale.
M.
Brunet (Fabrice) : Merci beaucoup. Donc, je vais vous parler du projet
de loi n° 130 et l'instauration
d'une gouvernance médicale imputable.
Donc, en 2015, deux
projets ayant un impact majeur sur l'organisation et le fonctionnement du
réseau ont été adoptés, soit le projet de loi n° 10, sanctionné le 9 février 2015, et le projet de loi n° 20, sanctionné le 10 novembre de la même année. Tel que stipulé à son article 1, le projet de loi n° 10 modifie l'organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux afin de favoriser
et de simplifier l'accès aux services pour la population, de contribuer à l'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins et
d'accroître l'efficience et l'efficacité de ce réseau. Pour sa part, le projet de loi n° 20 vise à optimiser l'utilisation des ressources
médicales et financières du système
de santé dans le but
d'améliorer l'accès aux services de médecine de famille et de médecine
spécialisée.
Le
projet de loi n° 130 propose essentiellement une révision des
modalités de la gouvernance médicale en introduisant des dispositions qui donnent aux établissements différents moyens qui ont pour objectif de rendre imputables les P.D.G. et leurs conseils d'administration des services
médicaux offerts et à offrir dans leur organisation à la population.
• (15 h 30) •
Les
P.D.G. des CISSS, des CIUSSS et des établissements non fusionnés sont imputables de l'organisation
des services et de l'organisation professionnelle et médicale de leur établissement respectif.
L'application des moyens proposés par
le projet de loi n° 130 pour en venir à une véritable gouverne
médicale dont eux-mêmes et leurs conseils d'administration sont directement
imputables leur appartient en propre.
Cependant,
tout établissement, quel qu'il soit, fait partie d'un vaste réseau,
lequel est responsable d'offrir des services accessibles, continus et de qualité sur l'ensemble du territoire
québécois. Les établissements ne disposent pas tous des
mêmes ressources, les caractéristiques
démographiques et géographiques de chacune des régions nous obligent à
travailler toujours mieux en réseau
pour assurer l'accès, tout en préconisant l'accès local chaque fois que le
contexte s'y prête, ainsi que les besoins des patients.
La valeur ajoutée des
RUIS prend racine dans la synergie qui émane du partenariat étroit qui existe
entre l'ensemble des P.D.G. de son territoire, d'une part, et entre ces P.D.G.
et le milieu académique, d'autre part, dont on vient de parler, pour animer la
concertation, susciter la complémentarité dans l'action et permettre ainsi
l'atteinte des objectifs ministériels.
Il
est clair que l'existence d'obligations spécifiques reliées à l'octroi et au
maintien des privilèges de pratique des médecins en établissements constitue un levier nécessaire pour atteindre
les objectifs et définir les modalités d'accès aux services, peu importe le lieu de résidence de la
personne. Les RUIS sont bien placés pour soutenir les travaux qui mèneront
au succès. Leurs travaux peuvent et doivent
se discuter à l'échelle de chacun des territoires de RUIS — je vous rappelle qu'il y en a quatre — en
collaboration étroite avec les professionnels, et mener à un système mieux
organisé qui permet les adaptations
requises selon la spécialité médicale concernée et selon les caractéristiques
des territoires à soutenir pour assurer un accès continu, pérenne et
éviter les ruptures de services.
Il est toutefois
essentiel que les obligations qui seront rattachées à la jouissance des
privilèges de pratique des médecins tiennent
compte des obligations liées à leurs responsabilités académiques dans les
différentes disciplines où ils sont
impliqués, que ce soit en enseignement ou en recherche, et du temps qu'ils
doivent y consacrer. La protection de ces obligations permettra
d'assurer à la fois la pleine synergie de la concertation clinico-académique et
de favoriser la préparation d'une relève professionnelle pour qui le travail en
interdisciplinarité sera la norme, en phase avec les objectifs du réseau de la
santé et des services sociaux.
La
force d'un RUIS émane de l'interaction entre ses membres. Ensemble, ils
conviennent des corridors de services à consolider ou à développer, dans une perspective systémique, faisant
ainsi en sorte que l'organisation clinique de chacun d'eux fasse partie d'un tout cohérent à l'échelle
locale, régionale et interrégionale. En ce sens, les dispositions du projet de loi n° 130 qui touchent à la
gouverne médicale en établissement constituent un levier nécessaire pour trois
points : premièrement, pour faciliter le développement des corridors de
services, avec des modalités qui peuvent varier selon les services dont
il peut être question et selon les régions; deuxièmement, pour faciliter,
encore ici selon des modalités variables, la
pérennité des services en région; troisièmement, pour contribuer à éviter les ruptures de
services, lesquelles exigent des acteurs concernés une énergie immense
pour y pallier, je dirais même, une motivation.
La première recommandation que nous vous
soumettons : Les RUIS recommandent que soient formellement protégées, à
l'intérieur des obligations rattachées à la jouissance des privilèges de
pratique, les obligations liées aux responsabilités
académiques des médecins, dans les différentes disciplines où ils sont
impliqués, que ce soit en enseignement ou en recherche et, en conséquence, le
temps requis pour s'y consacrer.
Je vais passer la
parole à ma voisine, qui est la présidente du RUIS McGill.
Mme Alfonso
(Martine) : Merci, Dr Brunet. La section dont je vais vous parler maintenant
portera sur la gouvernance des RUIS. Nous
désirons attirer l'attention sur la formulation de l'article 39 qui
propose une modification à la qualité des personnes désignées pour
assurer la présidence et la vice-présidence des RUIS.
Nous
comprenons et acceptons la volonté ministérielle de faire en sorte que la
destinée des RUIS soit portée par les P.D.G., lesquels sont imputables de l'organisation des
soins et services et de l'organisation médicale et professionnelle de leurs établissements. C'est ce qui est voulu par l'article 39 qui
modifierait l'article 436.3 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, chapitre S-42,
et qui se lirait comme suit, et je cite : «Le directeur général de
l'établissement qui exploite le centre hospitalier de soins généraux et
spécialisés désigné centre hospitalier universitaire du réseau, à l'exception d'un tel centre desservant
exclusivement des enfants, et le directeur général d'un établissement qui fait
partie du réseau et qui exploite un centre désigné institut universitaire ou centre affilié universitaire, identifié par le ministre, agissent, selon ce que ce dernier détermine, [pour
agir] comme président ou vice-président de ce réseau.» Et fin de la citation.
La
contribution du milieu académique, nous en avons parlé plusieurs
fois dans cette présentation, a
jusqu'à ce jour été déterminante
pour, d'une part, concilier les besoins académiques et les besoins cliniques
et, d'autre part, pour mobiliser le
corps médical à s'impliquer activement auprès d'équipes cliniques des régions
pour favoriser l'introduction des
nouvelles pratiques. Cette contribution du milieu académique devra se
poursuivre pour qu'un RUIS continue à être pleinement contributif à
l'atteinte des objectifs des services visés.
Notre deuxième
recommandation est donc que l'article 39 soit révisé de manière à
introduire la présence de vice-présidents,
dont un vice-président serait un P.D.G. d'un établissement membre du RUIS ainsi
qu'un V.P. académique qui serait un doyen émanant des sciences de la
santé et qui aurait à son actif une forte expérience clinique.
Mme Bourdon (Gertrude) : Merci, Martine. En conclusion, les lois adoptées,
donc, en 2015 ont pour objectif de favoriser
l'accès aux services dans l'ensemble des régions du Québec. Le projet de loi
n° 130 vient compléter les outils mis
à la disposition des P.D.G. et des RUIS pour réaliser les objectifs
d'accessibilité, de qualité, de sécurité, d'efficacité, d'efficience qui
sont à la base de ces lois.
Les RUIS réitèrent
leur adhésion à ces objectifs et continueront à animer la concertation dans
leurs territoires respectifs, clés de voûte
pour réussir les transformations voulues pour le réseau de la santé et des
services sociaux. Nous réitérons
également l'importance de protéger, à l'intérieur des obligations des médecins
pour avoir pleine jouissance de leurs
privilèges de pratique, leurs obligations liées à l'enseignement et à la
recherche dans les différentes disciplines où ils sont impliqués.
Assurer
l'accessibilité et la pérennité de la présence des services cliniques, médicaux
et professionnels dans toutes les régions du
Québec, promouvoir et soutenir le travail interprofessionnel, faciliter
l'intégration des volets santé sociale
et de réadaptation dans la pratique clinique, faire émerger et soutenir des
projets de pertinence clinique, médicale et autres, voilà à quoi les
RUIS s'engagent à contribuer. Nous vous remercions de votre attention.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup à vous tous pour cet
exposé. Nous allons maintenant commencer la période des échanges avec
les députés gouvernementaux, avec le député de La Pinière, ministre de la
Santé et des Services sociaux. Vous disposez d'un bloc de 24 minutes, M.
le ministre. À vous la parole.
• (15 h 40) •
M. Barrette :
C'est le record de la journée. Alors, vous avez la plus longue... on va avoir
le plus long entretien de toute la commission parlementaire, pour notre
volet gouvernemental.
Alors,
Mme Bourdon, Dr Cossette, Mme Gauthier, Dr Brunet,
Mme Alfonso, merci d'être venus nous présenter votre mémoire. Je ne
sais pas si vous l'avez dit en introduction,
il me semble que non, mais vous êtes aussi... évidemment sauf vous Dr Cossette, vous êtes tous P.D.G.
aussi d'une institution, là, pour que ce soit bien clair pour tout le monde, soit universitaire, soit universitaire, mais vous êtes soit une
institution non fusionnée, soit vous êtes un CISSS ou un CIUSSS. En fait, vous êtes des CIUSSS, Estrie même
dans le cas de l'Estrie. Alors, c'est important de mettre ça en place parce que
la question que je vais vous poser est essentiellement la suivante, pour commencer notre échange. Vous êtes aujourd'hui représentant les RUIS, mais
en même temps vous êtes dans vos fonctions en premier... puis je ne veux pas
mettre une hiérarchie entre premier puis
deuxième, ce n'est pas ça que je veux faire du tout, là, mais, à la base, vous
êtes à la tête d'institutions du
réseau, que ce soit le CHUM et
mère-enfant Sainte-Justine, le CUSM ou un CIUSSS. Par contre, la
géographie des RUIS n'est pas exactement le miroir de vos organisations.
Pouvez-vous commenter là-dessus?
Je
m'explique un peu, peut-être que ma question n'est pas assez claire, parce que
je... Effectivement, elle n'est peut-être pas assez précise,
plutôt. Il y a toujours, pour moi, une problématique pour ce qui est du RUIS.
Puis, si je prends, par exemple, le CIUSSS-Estrie, votre RUIS, il sort de votre CIUSSS, puis c'est la
même, même chose un peu pour les autres dans une certaine mesure, sauf peut-être
les CHU. Vous ne voyez pas là une problématique?
Le
Président (M. Merlini) :
Juste avant votre réponse, pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, un
RUIS, c'est un réseau universitaire intégré en santé, un CIUSSS, c'est un centre intégré universitaire de santé et de services sociaux, et un CISSS, bien, c'est un centre intégré de santé et services sociaux.
Alors, on utilise des acronymes, chers téléspectateurs, pour faciliter
la conversation. Alors, allez-y pour votre réponse.
Mme
Gauthier (Patricia) : Alors,
compte tenu que vous parlez de Sherbrooke, alors je vais
prendre la parole.
M. Barrette :
C'est parce qu'il y a juste vous autres autour de la table, là qui avez cette caractéristique-là.
Mme
Gauthier (Patricia) : Oui,
c'est ça. Alors, la beauté, on était venus en commission parlementaire pour
vous demander que le CHU de
Sherbrooke soit intégré à l'intérieur du CIUSSS de l'Estrie, à ce moment-là, alors CIUSSS de l'Estrie-CHUS comme on dit.
C'est sûr
que, le volet réseau, le réseau s'agrandit, et, pour, entre autres, le volet des soins surspécialisés, c'est sûr que c'est... ça ne peut pas être... On essaie
de retrouver là le bassin naturel des clientèles qui viennent à Sherbrooke
pour chercher des soins surspécialisés — il y a
trois villes universitaires : Montréal, Sherbrooke et Québec — et donc à quel endroit la population, en
fonction de sa localisation géographique, vient chercher ces soins
surspécialisés.
Alors, c'est
dans ce contexte-là que nous, à Sherbrooke, pour le réseau du CIUSSS de
l'Estrie-CHUS et dans le contexte du
RUIS de Sherbrooke, pour le volet clinique, on va élargir le bassin. Alors, on
a un bassin d'un demi-million de population
avec le CIUSSS maintenant, compte
tenu de l'intégration de la
Montérégie, de Granby et de Cowansville, de ces deux territoires de desserte là. C'est un territoire
naturel qui venait chercher ses services du côté de l'Estrie. Et, pour le RUIS, on va compléter, encore là, avec des
corridors de services avec le CIUSSS de la Mauricie—Centre-du-Québec pour des services pour lesquels la clientèle qui est dans le
Centre-du-Québec, principalement... vient chercher de façon naturelle.
Alors, ce
qu'on a à convenir... Et le CIUSSS de Mauricie—Centre-du-Québec fait partie du RUIS de
Sherbrooke, et ce qu'on travaille
ensemble, les deux P.D.G., c'est de s'assurer qu'on essaie de voir qu'est-ce
qui est le mieux pour le patient.
Alors, c'est le patient qui guide. Alors, est-ce que c'est mieux qu'il vienne à
Sherbrooke plutôt que d'aller à Trois-Rivières,
compte tenu de la distance qu'il a à parcourir et compte tenu de... Alors,
c'est un peu la base sur laquelle on
essaie d'établir ces bassins naturels de desserte, et ça, c'est pour le volet
clinique. Puis c'est la même chose aussi... Il pourrait y avoir des gens du côté de Saint-Hyacinthe qui viennent plus à
Sherbrooke parce qu'ils sont plus collés près de... limitrophes avec Sherbrooke, avec l'Estrie, et ça
peut être la même chose du côté de Saint-Jean-Richelieu, aussi, pour une
certaine partie.
Alors, c'est
vraiment ça qui guide le volet des corridors de services. Maintenant, les
corridors de services, au lieu de les
convenir avec les ex-établissements, on les convient entre les CIUSSS, et c'est
la démarche pour laquelle, depuis la réforme, on a entamé... et on
l'entame entre les P.D.G. de CIUSSS, à ce moment-là.
M. Barrette : Oui?
M. Cossette (Pierre) : Juste un
complément de réponse. Parce que c'est sûr qu'il y a deux volets aux RUIS. Initialement, il y avait le RUIS clinique puis le
RUIS enseignement, et là il faut quand même distinguer ces deux volets-là,
puis on voit qu'avec le temps, dans le fond,
la portion enseignement, transfert de connaissances, pertinence va prendre
de plus en plus d'importance, et là il faut
vraiment réaliser à ce moment-ci qu'il y a une discordance, effectivement. Il y
a quand même encore 34 établissements au Québec, dont les
établissements non fusionnés. Mais des établissements universitaires, premièrement, il n'y en a pas 34, et il y a une
concordance, à certains endroits, parfaite entre les secteurs de pointe et les secteurs d'enseignement, puis les
secteurs cliniques, mais ce qui est vraiment important de réaliser, c'est
qu'au niveau des milieux universitaires
médicaux, entre autres, on ne peut pas avoir, s'il y a 34 établissements,
34 masses critiques dans le...
Donc, pour
être capable... J'ai parlé plus, dans ma portion, de médecine de famille qui
est répartie dans le territoire parce
que c'est ça, le modèle d'organisation, mais, si on parle de médecine
surspécialisée, bien, la cardiologie tertiaire, elle va se retrouver... dans des endroits où elle est maintenant, c'est
des problèmes réglés. Donc, il ne faudrait pas perdre les acquis qui ont
été faits à ces endroits-là avec ces regroupements-là.
Puis, au
niveau de la formation, ça, c'est encore plus important. Donc, par exemple, à
Sherbrooke, on forme 22 % des
étudiants en médecine du Québec, à Montréal, c'est 30 quelques pour cent. Donc,
c'est très important que le bassin d'établissements
ou de population puissent refléter... si on veut être capables de remplir notre
mission. Puis là je parle juste de la formation médicale, mais ça
pourrait être dans d'autres domaines, pareil pour les pôles de recherche.
Donc, c'est
très important de réaliser qu'il y a l'établissement qui est responsable de sa
population, mais, au niveau universitaire
puis l'intégration suprarégionale, on ne peut pas avoir 34 secteurs de
pointe. Il y a juste un certain nombre de
facultés et il faut concentrer au même endroit l'expertise pour la recherche,
l'enseignement, parce que, sinon, on va juste la diluer. Et d'où la pertinence et l'importance d'avoir des pôles
universitaires forts qui vont rayonner bien au-delà. Donc, le CHUQ, à Québec, bon, doit rayonner bien
au-delà de Québec, là, il rayonne... Donc, de la même façon, comme je donnais par illustration, ce que McGill fait dans
le Nord-du-Québec est extrêmement important, là, donc. Puis Montréal
font beaucoup de choses aussi.
Donc, dans ce
sens-là, cette réorganisation-là du réseau qui a permis toute une série de
simplifications administratives
n'entame pas le besoin d'avoir une hiérarchisation où les pôles universitaires
jouent un rôle fort à la fois de
créer des masses critiques de soins surspécialisés, mais aussi de développer
les connaissances qui vont être disséminées dans le réseau.
Donc, dans ce
sens-là, oui, il y a une complexité là, mais c'est moins complexe qu'avant, en
fait, parce qu'avant il y avait les
agences, et tout ça, au travers ça, là. Maintenant, bien, au moins, le nombre
d'établissements est diminué. Mais le
réseau, oui, garde encore sa complexité. Mais ça n'enlève pas du tout la
nécessité de la concertation santé-université ou santé-académique pour y
arriver.
Une voix : Dr Brunet, vous
voulez ajouter?
M. Brunet
(Fabrice) : Moi, je pense qu'aujourd'hui il faut qu'on parte des
besoins de la population et qu'on regarde
sur un territoire donné, à la fois en termes de besoins
géographiques, mais aussi en termes
de besoins de soins et de services, comment l'ensemble
du réseau peut répondre. On a différents types d'établissements, des établissements qui sont avec des niveaux de
soins et de spécificité variables, et on a déjà, dans un premier temps, besoin de coordonner cette offre pour mieux
répondre aux besoins de la population, puis, dans
un deuxième temps, de transformer
cette offre pour aller encore plus loin dans la réponse aux besoins de la population.
Quand je dis «de la population», ce n'est pas uniquement
des patients en phase aiguë, mais c'est aussi des patients ou de la population
qui ont des problèmes chroniques ou des problèmes complexes.
Le RUIS est une façon de concevoir, grâce aussi
à la connaissance dont on vient de parler, comment mieux organiser la réponse
aux besoins de la population, et c'est pour ça qu'elle dépasse cette vision, la
vision d'un seul établissement, quelle que soit sa mission. Aujourd'hui, on est
en train de réfléchir sur le paysage sanitaire ou la carte sanitaire et la
coordination de cette carte sanitaire pour pouvoir mieux répondre à la population,
aux besoins de la population. Je
pense que les RUIS sont un endroit
où, au-delà de la concertation, on peut, avec le terrain, avec les patients
partenaires, les citoyens
partenaires, réfléchir sur une nouvelle façon de s'organiser pour intégrer l'ensemble
des ressources que nous avons aujourd'hui dans le système de santé et mieux répondre. C'est pour ça que les RUIS
apportent une autre dimension. On a parlé tout à l'heure de garder au
niveau du ministère la table de concertation parce que c'est un endroit où on va pouvoir échanger en permanence
entre les aspects de transformation du système, qui sont, d'une part, les contraintes économiques et les contraintes
réglementaires, mais également comment le terrain peut transformer, avec
ce lieu de concertation que sont les RUIS, le système de santé pour mieux
servir la population.
Une voix : Oui, Mme Alfonso?
Mme
Alfonso (Martine) : Si je peux, en complément du commentaire de Dr
Brunet, donner l'exemple du RUIS de McGill, qui a des établissements qui
sont tous très différents, il y a des établissements sur l'île de Montréal,
dans la région métropolitaine, en Outaouais,
l'Abitibi-Témiscamingue, mais aussi le Grand Nord, qu'a invoqué le doyen
Cossette, et les membres de toutes
ces populations sont en droit d'avoir l'accès aux mêmes services de proximité,
mais aussi aux services spécialisés. Donc, autour d'une même population
s'organisent les soins qui peuvent être donnés autour d'eux, mais grâce au RUIS, qui est un bon forum pour
soutenir les équipes locales, mais aussi prévoir une alternative si, dans
une région donnée, un service ne peut pas être offert, ces continuums-là
peuvent être organisés.
Le RUIS,
c'est un groupe qui se connaît de mieux en mieux, chacun de nous connaît de
mieux en mieux les équipes qui mènent
les équipes cliniques dans les différents territoires, et on bâtit là-dessus
dans le forum du RUIS, qui, encore une fois, répond aux besoins à la
fois de proximité, et spécialisés, et surspécialisés en soutenant les équipes
dans les activités académiques.
• (15 h 50) •
M.
Barrette : Alors donc, vous
voyez un avantage, de l'angle du RUIS... Parce qu'il faut faire attention parce
que vous avez deux fonctions, là, vous
cumulez deux fonctions, puis je ne veux pas avoir cet entretien-là sur la base
de l'autre fonction, qui serait très intéressante aussi, mais, à un moment
donné, ça se chevauche. Vous avez vu un avantage à la loi n° 10, dans votre fonctionnement
RUISsien, là, si on peut employer cette expression-là, la loi n° 10 a
simplifié votre vie, puis je pense que sur
le plan organisationnel aussi, évidemment, peu importe ce que les gens peuvent
bien dire. Mais, sur le plan...
Prenons ça dans l'angle inversé, maintenant. Dans l'angle de la loi n° 130...
pas la loi, mais le projet de loi que l'on étudie actuellement, vous y
voyez un avantage. En fait, je devrais vous poser la question très
simple : Est-ce que c'est une bonne
chose ou non que le P.D.G., le président d'un RUIS, soit aussi issu des présidences
des CISSS, CIUSSS et établissements non fusionnés? Est-ce que ça
simplifie votre vie ou est-ce qu'il y a un désavantage là? Question très
ouverte.
Mme
Bourdon (Gertrude) : Oui. Je
vais débuter, si vous permettez. Je pense que l'ensemble de la présentation,
comme présidente du RUIS... La force de la
gouvernance du RUIS est de bien s'assurer qu'on met ensemble et qu'on
différencie nos mandats propres. C'est que, quand on préside le RUIS, on le
préside tel que la proposition sur la recommandation
de l'article 39, c'est qu'on le préside aussi avec des vices-présidents.
Donc, on a une espèce de groupe d'orientations, décisions avant d'arriver dans
notre grande table de coordination. Et ce qui est intéressant dans cette
table de coordination là, c'est que, si on
faisait toutes nos rencontres en même temps, les P.D.G. du Québec sont assis
autour de tables pour parler de leurs territoires, pour parler de... Donc, ce
qu'on disait tantôt, oui, c'est facilitant.
Le p.l.
n° 130, tel qu'on l'exprime aussi en page 6, c'est que, comme P.D.G.,
et les P.D.G. qui sont assis à la table du RUIS, nous sommes tous responsables
et nous travaillons avec l'université pour organiser nos services, améliorer
nos services et s'assurer que nos services,
hiérarchisés, comme on a parlé tantôt, soient accessibles dans l'ensemble du
Québec. Donc, ça comprend autant des
projets communs qu'on mène et qu'après on partage... Si on prend la télésanté,
ça a été quand même une révolution,
et ce n'est pas fini. Et aussi, quand on est rendus à parler de l'organisation
médicale sur un territoire, c'est
clair qu'entre P.D.G. et avec l'université nous allons parler des privilèges,
de l'octroi des privilèges et des obligations
reliées dans ces privilèges-là, si on veut s'assurer que nos médecins puissent
non seulement faire leur travail, être
partie prenante, mais aussi être imputables, puis qu'on leur dise franchement
ce qu'on attend d'eux, dans le fond.
M.
Barrette : Bon, bien, voilà, allons-y. Parce qu'encore une fois... Je
le redis à chaque fois parce que ce n'est pas simple pour les gens pas familiers avec ce milieu-là de séparer les
deux fonctions. C'est que, même quand vous prenez votre chapeau de RUIS... Ce que je comprends de ce
que vous me dites, tout le monde, mais peut-être vous plus, Mme Bourdon, dans votre
dernier commentaire, c'est une bonne affaire d'avoir les deux chapeaux, là,
dans une certaine mesure, là, ça facilite aussi. Mais, quand vous nous
dites votre phrase, je n'utiliserais peut-être pas les mêmes verbes,
justement... Et c'est ma question : Est-ce que ce sont les bons verbes?
C'est bon, le projet de loi n° 130, pour que les médecins puissent s'acquitter et soient imputables de leurs tâches
académiques, au sens large du terme, enseignement, et vous avez même dit «recherche» hein, vous avez
dit ça. Et vous avez terminé votre commentaire en disant : Bien, il
faut qu'ils soient imputables et il faut qu'ils le fassent.
Alors
donc, dans l'angle de 130, l'objet de notre rencontre aujourd'hui, c'est que,
pour vous, c'est utile, donc c'est une
solution à une problématique, que des médecins qui sont dans vos organisations
s'acquittent de leurs tâches d'enseignement. Pas nécessairement de recherche, parce que de la recherche, ce n'est pas
tout le monde qui en fait, mais l'enseignement, par contre, ça, ça peut poser une problématique. Alors, est-ce que c'est
«puissent» ou... Parce que «puissent», c'est «pouvoir». C'est la
différence entre le «doit» ou «peut». «Puissent», c'est «peut», «doit», c'est
«doit».
Mme Bourdon
(Gertrude) : Pour l'octroi de privilèges...
M. Barrette :
En fait, ma question...
Mme Bourdon
(Gertrude) : Oui, c'est des obligations, là, ce n'est pas...
M.
Barrette : ...si elle n'est pas assez claire, là... Moi, 130, c'est
une loi qui est un complément à la loi n° 10, qui a comme objectif, puis je pense que vous avez suivi
les travaux, là... L'objectif, c'est de régler une certaine problématique. Moi, je sais très bien, là, que,
dans le monde académique, là, il y a du monde qui n'aime pas ça faire de...
Ça n'a l'air de rien, là, mais on sait tous
qu'il y a du monde qui ne sont pas très portés sur l'enseignement, là. Alors,
la loi n° 130 va vous permettre
d'avoir le levier pour faire en sorte que, dans votre univers de RUIS,
certaines tâches, lorsque ça
s'applique, l'enseignement puisse être imputable. Pas les «tâches» imputables,
là, mais que les gens soient imputables de leurs tâches. C'est correct,
ce que je dis, ou non?
M. Cossette
(Pierre) : J'aimerais faire deux commentaires, un sur la question
précédente, à savoir qui est le président ou
non. Jusqu'à maintenant, les RUIS étaient présidés en alternance soit par un
doyen ou une doyenne ou un ou une D.G. de CHU. Donc, pour nous, ce qui
est important, c'est que les deux y soient. Honnêtement, président ou vice-président, ce n'est pas très important. Ce
qui est très important, c'est que la loi prescrive une obligation à ces gens-là
de travailler ensemble. Donc, ça, c'est notre recommandation.
Si la présidence est
occupée par un P.D.G., puis c'est tout à fait légitime, à ce moment-là il faut
qu'il y ait un vice-président qui est
académique. Parce que c'est l'essence même du RUIS de forcer... Quand moi ou
d'autres qu'on se connaît — on est habitués de travailler ensemble — ne seront plus là, on veut forcer les
réseaux à travailler ensemble.
Juste en médecine, il y a plus que 7 000 apprenants répartis dans le
réseau, là. Si on ne force pas les gens à travailler ensemble, ça va moins bien
aller un jour, là. Donc, ça, c'est le premier point.
Le
deuxième point, c'est que, dans la logique actuelle où les privilèges et autres
activités focussent beaucoup sur l'accessibilité,
et on souscrit à ça... Moi, comme doyen d'une faculté de médecine et de
sciences de la santé, je n'ai pas de problème
à ça du tout, mais, si on veut l'accessibilité pour demain puis pour
maintenant, c'est essentiel que les fonctions d'enseignement soient aussi reconnues... donc, que, quand on travaille
dans un milieu universitaire, la fonction d'enseignement...
M.
Barrette : Je vous interromps, Dr Cossette, parce que je comprends
bien ce que vous me dites puis je pense qu'on le comprend tous. Moi, ma question, c'est : Quand vous me
dites que vous voulez vous assurer que les activités d'enseignement et
de recherche, tant dans les hôpitaux universitaires qu'en région, soient
protégées, qu'est-ce qui est opérateur dans votre pensée? C'est protéger ou s'assurer
que ça se fasse?
M. Cossette
(Pierre) : On veut s'assurer que ça se fasse, parce que ça fait...
M.
Barrette : Parce que 130, là, c'est : «Obligations attachées aux
privilèges». Alors, ce n'est pas protégé, ça, 130, c'est s'assurer que ça se fasse. Alors, dans votre esprit, 130,
vous le voyez comme un moyen pour vous assurer que ça se fasse?
M.
Cossette (Pierre) : En fait, dans notre esprit, la nuance à ça, c'est
que ce n'est pas tous les médecins, comme toutes les infirmières et tous
du réseau, qui font beaucoup d'enseignement...
M. Barrette :
Ça, on est d'accord là-dessus, là.
M.
Cossette (Pierre) : ...mais, quand quelqu'un est engagé pour faire de
l'enseignement et qui compte dans notre réseau pour faire de l'enseignement, ça fait partie de ses obligations.
Un médecin qui est parti, qu'on a formé pour faire de l'enseignement ou... c'est pourquoi on inclut
aussi la recherche, même la recherche, là, si on l'a libéré puis on l'a financé
pour venir faire de la recherche, bien, quand
il revient, ses privilèges, c'est faire de la clinique, de l'enseignement et de
la recherche. Donc, on va s'attendre, pour renouveler ses privilèges, à
ce qu'il puisse continuer à faire les missions pour lesquelles il a été
embauché et qu'il a été recruté. Donc, c'est l'essence même de la
recommandation qu'on fait là.
M. Barrette : Donc, 130,
pour vous, dans l'univers RUISsier, et non de P.D.G. d'institution, là, vous
voulez que 130, si je vous lis bien, là, soit un levier pour faire en sorte
que, dans vos organisations, tous les joueurs patinent dans le même sens sur votre patinoire économique, à des
hauteurs différentes, ce n'est pas tout le monde qui est chercheur. Ça,
on s'entend, là, c'est normal.
Maintenant, vous
l'avez dit, je reprends un peu...
M.
Cossette (Pierre) : Tout le monde n'est pas nécessairement enseignant,
mais un médecin ne pourrait pas faire dérailler
la mission d'enseignement de son collègue parce que ça ne lui tente pas. Donc,
ça fait partie, dans une mission, de... Voilà.
M. Barrette :
Ah! bon point. Parce que, là, ça rejoint un exemple que j'ai pris en clinique
avec des groupes précédents : à un
moment donné, tout le monde est capable de faire de l'enseignement aux
externes, puis il y en a qui ne veulent
pas faire de l'enseignement aux externes, on va dire ça comme ça parce que ça
existe, mais 130 vient vous donner ce levier-là. C'est correct, ça, de
dire ça comme ça? Ce n'est pas bien méchant?
M.
Cossette (Pierre) : La vision qu'on a de ça, c'est que les médecins,
puisqu'on parle des médecins, dans le milieu universitaire, doivent
s'impliquer dans l'enseignement, pas juste aux externes, pas juste aux
résidents...
M. Barrette :
Non, non, je comprends.
M.
Cossette (Pierre) : ...dans l'enseignement pour tous les
professionnels auxquels ils ont à exercer ce rôle-là. Et ça implique une
responsabilité de l'établissement aussi. Ça implique que l'établissement, qui
est un établissement universitaire, puisse assurer à une faculté de médecine et
des sciences de la santé que les stagiaires, dans tel ou tel domaine, vont
avoir une place pour faire leurs stages.
M.
Barrette : O.K. Dans la catégorie, parce que vous en avez parlé
beaucoup... Je pense qu'on se comprend, là, sur le fait que 130, même si vous êtes prudents dans vos commentaires,
c'est quand même un levier pour faire en sorte que votre machine
académique fonctionne. On peut-u dire ça comme ça, dans la prudence des mots,
là?
Mme Bourdon
(Gertrude) : Oui, oui, on l'a dit, c'est un levier supplémentaire.
Oui, oui, c'est même écrit.
• (16 heures) •
M. Barrette :
Parfait. Vous avez beaucoup... Parce que le temps file, il faut absolument que
je vous pose la question suivante, celle-là qui est suivante... qui suit
la question précédente. Vous avez parlé beaucoup
de corridors de services, hein? Et les corridors de services, il y a
différentes manières de faire ça, les corridors de services, ça peut être
le patient qui est dans un corridor ou ça
peut être le docteur qui est dans un corridor. Est-ce que 130 est, pour vous,
un avantage là-dedans?
Elle n'est pas
vicieuse, la question, là. Je sais qu'elle est «touchy», là, mais...
Mme Bourdon (Gertrude) : Non. Un avantage... C'est-à-dire, ça va dépendre comment qu'on va s'en servir, là. La loi, ça ne
gère pas. C'est-à-dire...
M. Barrette :
Juste sous l'angle du levier que ça vous permet, là, juste...
Mme Bourdon (Gertrude) : Oui. Oui, je dirais plus, dans la continuité de
ce qu'on est en train de faire, c'est de mieux clarifier nos corridors de services et d'être moins aléatoires en fonction des désirs individuels. Et on est en
train d'en faire quand même...
M. Barrette :
Mme Bourdon, vous êtes d'une prudence...
Mme Bourdon
(Gertrude) : Bien, c'est-à-dire...
M. Barrette :
...d'une élégance prudentielle proverbiale, je dirais, là.
Mme Bourdon
(Gertrude) : Est-ce que c'était clair?
M. Barrette :
C'est clair.
Mme Bourdon
(Gertrude) : D'accord. C'était ça.
M. Barrette :
Ce qui est entre les lignes est clair, là.
Mme Bourdon (Gertrude) : Non, mais c'est ça. Mais ce n'est pas pour rien,
ça. C'est parce que, quand un corridor repose
sur la volonté d'un individu, il est fragile. La force d'un RUIS, c'est la
masse critique. C'est qu'on travaille ensemble. Quand on dit qu'on est un lieu de concertation, ce n'est pas une société
d'admiration mutuelle, c'est : on est un lieu de concertation, on
parle des vrais problèmes.
Si
on se sert bien de l'octroi des privilèges, qu'on s'en parle, qu'on travaille
concerté dans notre RUIS... Parce qu'au sein
de notre RUIS vient aussi avec ça une responsabilité des CHU, et des hôpitaux,
et de notre université d'attachement pour faire en sorte de maintenir
l'accès. On l'a dit, on l'a répété 50 fois, là, pendant notre mémoire. Mais ça, l'accès, ça doit se faire à travers des
corridors de services, on l'a dit, pérennes. Pérennes, ça veut dire qu'on les
structure, qu'on a des ententes qui sont écrites, qui sont convenues, qui sont
convenues avec les médecins, avec les professionnels, des fois.
M.
Barrette : C'est bon. Alors, dit différemment, Mme Bourdon, là, 130
est un outil qui exige de bien s'en servir, mais c'est un outil qui est
nécessaire.
Mme Bourdon (Gertrude) : Au moment où on se parle, on est rendus là, on
est rendus là. Notre point de vue, dont
on a discuté puis qui fait... et avec les P.D.G., là, puis on a tous les P.D.G.
à nos tables, je pense qu'on est dans une société où la population nous
demande, nous, en tout cas, les P.D.G., une reddition de comptes. On prend du
temps à faire de la reddition de comptes,
mais on comprend ce que la population veut. Et je pense que p.l. n° 130
vient quand même dire à nos
professionnels : Il doit aussi y avoir une reddition de comptes sur ce que
font nos professionnels, quels genres de
services ils livrent, et en fonction des besoins de la clientèle et des
attentes de la population. Et c'est pour ça que c'est si important, nos
territoires de RUIS. Parce que Martine le disait bien, c'est que notre territoire
de RUIS... Nous, Laval et McGill, on a des territoires énormes, donc, avec des
densités de population qui sont très variables, et donc, ces particularités-là, nous, on les connaît, nos
P.D.G. de nos RUIS les connaissent, on doit adapter nos corridors en fonction
des spécificités de ces RUIS là.
M. Barrette :
Il me reste... Il ne me reste plus rien? Dommage.
Le Président (M.
Merlini) : Merci beaucoup, M. le ministre, pour ce bloc d'échange avec
nos invités.
M. Barrette :
Merci.
Le
Président (M. Merlini) : Alors, nous allons maintenant du côté de
l'opposition officielle. Mme la députée de Taillon, vous disposez d'un
bloc de 15 minutes pour votre échange avec nos invités. À vous la parole.
Mme
Lamarre : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bienvenue, Mme
Bourdon, Mme Alfonso, M. Brunet, Mme
Gauthier et Dr Cossette. Merci de nous apporter cette dimension. Effectivement,
on peut témoigner que les RUIS contribuent
à l'évolution des modèles de pratique, contribuent à l'interdisciplinarité,
contribuent à faire évoluer une pratique qui malheureusement n'est pas tout à fait encore actualisée au Québec
par rapport à ce qu'on voit dans beaucoup de pays aussi développés que le Québec. Et, à travers ce
que vous dites et la prudence que vous avez dans vos commentaires, je comprends qu'une des préoccupations que vous avez
autour du projet de loi n° 130, c'est que le lien qui va déterminer
l'attribution des privilèges peut être
consacré à des activités d'ordre... répondre à des besoins, disons,
administratifs, cliniques et
enseignement. Et vous, vous dites : Nous, on veut être sûrs que les volets
clinique et enseignement ne soient pas défavorisés au détriment d'une
performance qui répondrait plus à des objectifs administratifs.
Est-ce
que vous avez actuellement... Pour être sûrs de ne pas en perdre, de ne pas
perdre de ces privilèges-là, ou que
le médecin ne soit pas pénalisé au niveau de ses privilèges parce qu'il a des
missions d'enseignement, est-ce que vous avez les bonnes données actuellement? Par exemple, est-ce que vous savez
quel est le pourcentage de médecins qui ont des activités d'enseignement
actuellement, pourcentage général dans vos établissements?
Mme Bourdon
(Gertrude) : Oui. On le sait.
Mme Lamarre :
Et le pourcentage en moyenne et...
Mme Bourdon
(Gertrude) : Oui, on le suit puis on l'a...
Mme
Lamarre : ...du temps des médecins qui est consacré à des activités
d'enseignement, est-ce que vous avez ces données-là?
Mme Bourdon (Gertrude) :
À chaque fois qu'il y a un octroi de privilège, les pourcentages reliés aux
soins, à l'enseignement et la recherche sont
identifiés pour chacun des médecins. Donc, on a ce tableau complet pour chacun
des privilèges qui sont octroyés.
Mme Lamarre :
Donc, vous seriez capable de nous transmettre...
Mme Bourdon
(Gertrude) : Et la proportion, elle est plus élevée...
Mme
Lamarre : ...dans un mois ou dans une semaine, un pourcentage de
médecins qui ont des activités d'enseignement
et la répartition du temps qui est déjà alloué, au niveau des privilèges, entre
le temps consacré à l'enseignement,
la recherche et les activités cliniques. Vous dites que vous êtes capable de
compiler ça et de le transmettre à la commission. C'est bien ça?
Mme Bourdon
(Gertrude) : Oui, on va vous le compiler. C'est probablement manuel,
mais...
Mme
Lamarre : Approximatif, là, on n'est pas à 1 % près, mais un
ordre de grandeur. Parce que ce qui est possible, c'est qu'il y ait des transferts de ces
disponibilités-là dans la disponibilité pour l'enseignement, par exemple, s'il
y a des pressions pour faire autre chose. Je pense, M. Brunet, vous
aviez un commentaire à faire?
M. Brunet
(Fabrice) : Oui. Je trouve que c'est une excellente question. On peut
le quantifier, comme vous le décrivez.
Il faut aussi qu'on le rattache à la mission de chacun des établissements à
l'intérieur d'un RUIS. Comme on a dit tout
à l'heure, il y avait des CISSS, centres intégrés, il y a des CIUSSS, centres
intégrés universitaires, il y a des instituts, il y a également des CHU, donc les CHU, les centres hospitaliers
universitaires. À l'intérieur de ces différentes entités, en termes d'enseignement, il y a différents
mandats, différentes missions, et donc, lorsqu'on parle de privilèges et que
ces privilèges vont intéresser à la fois l'organisation des soins et des
services, mais également l'enseignement et la recherche, ça dépend du type
d'établissement à qui on s'adresse.
Cependant, il y a un élément que je voudrais,
là, bien mettre en avant, qui est peut-être parfois plus difficile à quantifier
parce que ce n'est pas de l'enseignement sur le plan académique, comme on
voyait tout à l'heure, mais aujourd'hui le
réseau dans l'ensemble, y compris les centres intégrés, qui n'ont pas
obligatoirement de valence universitaire, contribue à former en permanence leurs équipes pour s'améliorer. Cet
aspect de formation continue n'est pas toujours comptabilisé. Pourtant,
elle est essentielle à la vie d'un réseau qui évolue et qui s'améliore en
permanence.
Donc, non seulement les centres hospitaliers
universitaires vont pouvoir vous donner... peut-être pas au pourcentage de 1 % près, peut-être que oui,
d'ailleurs, et en différenciant ceux qui sont des enseignants et ceux qui sont
plus des experts dans l'enseignement,
puisqu'on a deux catégories, ceux qui sont des enseignants souvent contact, le
lieu de stage, etc., puis des experts en pédagogie, qui travaillent
parfois même en recherche, en pédagogie pour améliorer le transfert de connaissances ou la gestion des
connaissances. Mais n'oubliez pas tout le reste du réseau qui contribue en
permanence, et c'est pour ça que les RUIS sont intéressants, dans le sens où
ils ont toute cette dimension.
Mme Lamarre : ...on n'a pas beaucoup
de minutes, M. Brunet. Je veux juste, donc...
M. Brunet
(Fabrice) : Excusez-moi, mais là vous me parlez de quelque chose qui
me passionne. On ne peut pas non plus ne pas être passionné!
• (16 h 10) •
Mme
Lamarre : J'apprécie et je comprends le sens de votre intervention,
mais ce que je me dis, c'est qu'ultimement ce que vous voulez, c'est bien préserver, dans le travail d'un médecin,
la vocation, la portion de son travail qui correspond à de l'enseignement et
donc vous êtes un peu préoccupé parce que vous pensez qu'à travers cet
enseignement-là il y a également une façon de moderniser, d'actualiser
les pratiques professionnelles, et là on se rend bien compte que, dans le projet de loi n° 130, on va calculer,
on va mettre des objectifs aux médecins. On va leur définir des privilèges qui
vont avoir une caractéristique assez fermée. Je ne veux pas parler de minutes
de travail, mais il va y avoir quand même... Parce que, si on veut être capable, sur la base de ces privilèges, de
dire : On poursuit, on les maintient, les privilèges, ou on ne les
maintient pas, il faut quand même qu'il y ait une définition assez claire de la
répartition du temps du médecin.
Et donc je pense qu'il faut qu'on parte avec des
outils, qu'on ait un état de situation actuel pour être capables d'apprécier. Et, quelque part, je pense
que plus on va être clairs dans cette demande-là, plus les médecins vont
baisser la résistance à l'introduction du projet de loi n° 130, parce
qu'ils vont dire : C'est clair, l'ensemble
de mes activités est bien
noté, reconnu. Sinon, il y a un risque, il y a un risque que les
médecins résistent. Il y a un risque que vous, dans votre mission, je
pense, qui fait consensus... Je pense qu'il faut maintenir la vocation
éducative, enseignement, recherche, évolution
des pratiques. Il faut également évaluation des pratiques, pas juste évolution,
mais évaluation des pratiques, qui
est dans votre mission, il faut la préserver. Déjà, on n'a pas beaucoup de
mesures d'évaluation dans nos pratiques.
Donc, moi, je
me dis : Il faut partir avec un tableau, et j'aimerais bien que la
commission puisse avoir accès à ce tableau
de départ, et je pense que ça pourrait rassurer certaines personnes. Je suis
d'accord, il y a une partie plus complexe, une partie de grande coordination. Il n'y a rien qui vous empêcherait de
nous traduire cette réalité-là, mais il me semble que ce serait pertinent et qu'on diminuerait
peut-être une partie de la résistance. Parce que, jusqu'à maintenant, il y a eu
beaucoup, beaucoup de résistances qui ont été exprimées.
Maintenant,
l'autre dimension, et je suis professeur de clinique à l'Université de
Montréal, donc je comprends bien
cette dimension-là, mais on a un problème actuellement, on peut bonifier nos
pratiques, mais on a un problème d'accès. Et tantôt, Dr Cossette, quand vous avez parlé du projet sur lequel
vous travaillez, de télésanté, avec l'évaluation des plaies à distance, moi, je me dis : Wow! Ça, ça
répond à un besoin parce qu'effectivement ça aide à donner accès à des soins de
façon moderne. Est-ce qu'il y a une façon actuellement... Est-ce qu'il y a une
priorité à l'intérieur des projets d'enseignement
et de recherche qui ont une vocation clinique, mais de mettre aussi un peu
l'emphase sur des projets qui facilitent l'accès, l'accès en région,
l'accès sur tout le territoire, mais l'accès urbain aussi? Parce que, là aussi,
il y a énormément de lacunes à ce niveau-là. Est-ce qu'il y a ce lien-là entre
les RUIS et les établissements?
M. Cossette
(Pierre) : Bien, c'est un des buts, d'avoir ces tables de concertation
là, parce qu'évidemment, dans la
recherche, là, entre la recherche sur la molécule, le patient, la population,
il y a tout un continuum, et, pour nous, c'est très important que la
recherche universitaire — bien,
la connaissance vaut quelque chose en soi — bien, soit aussi au service de la population. Donc, il y a des projets
qui se développent en téléréadaptation. Puis parfois, aussi, il y a la
recherche comme telle, mais le
passage à l'échelle est un défi, là. Donc, ça fonctionne dans un endroit, mais
de le passer à l'échelle, que ce soit intégré dans la hiérarchisation des services, ça devient un
défi, puis c'est là que ça devient très important d'avoir des mécanismes de concertation suprarégionaux, là.
Parce qu'on ne peut pas réinventer la roue dans chaque réseau, donc il faut que... Et la table de concertation
nationale est très importante parce que les choses qui marchent bien, il faut
les évaluer, mais, une fois qu'on les
a évaluées, il faut essayer de les implanter, parce que la difficulté, c'est de
réussir à faire l'implantation et soutenir l'implantation.
Donc, nous,
on travaille puis dans chaque... Puis c'est là qu'il y a vraiment de l'espace
pour tout le monde, chacun des
milieux universitaires travaille sur certaines thématiques, et le but, c'est de
mutualiser ça à la fin puis que ça descende vers la population le plus possible, donc. Et c'est ce que... L'exemple
du réseau de Montréal avec l'AMQ aussi est déployé un peu partout maintenant — excusez, M. le Président, les maladies
pulmonaires obstructives chroniques, donc atteints de maladies pulmonaires. Mais la téléréadaptation,
c'est une autre chose qui s'en vient, qui est développée dans certaines parties de nos réseaux. Mais ça, il faut que ça
soit intégré dans la gouvernance. Puis, quand on parle de la hiérarchisation
puis du service à distance, ça n'implique,
justement, pas toujours ni que le patient ni que le médecin ne se déplace, là.
Le service peut se donner... Je ne dis pas que la télémédecine remplace tout,
mais c'est un complément important à intégrer
dans l'organisation des soins, là. Donc, ça, c'est clairement un des objets sur
lesquels les RUIS peuvent travailler. Je
sais que le ministère travaille à revoir ses orientations présentement là-dessus,
mais nous, on pense que c'est un objet extrêmement intéressant sur
lequel on veut continuer à travailler.
Une voix : M. Brunet.
M. Brunet
(Fabrice) : Je voudrais dire deux mots. Le premier, c'est que, la
télésanté, ça fait de nombreuses années qu'on l'utilise, et effectivement on démontre qu'on peut améliorer
l'accès. Mais je voudrais aller un peu plus loin, parce que les RUIS, en fait, sont capables aujourd'hui
de mieux coordonner l'offre de soins telle qu'elle existe, faciliter l'accès
et l'améliorer de façon très importante à
partir du moment où on identifie bien les besoins du patient et quelle
structure peut y répondre dans un environnement géographique donné, en
fonction aussi de ses besoins au niveau de soins. On a actuellement un projet, à l'Hôtel-Dieu, à Montréal, qui est de
travailler à l'envers, c'est-à-dire de comment allons-nous transformer l'offre de soins en fonction des
besoins de la population qui est analysée et identifiée utilisant également les
bases de données provenant de la télémédecine dont vous étiez en train de
parler. Ce projet, si on le combine à la coordination
de l'offre de soins qu'on vient de voir avec les RUIS, tout à l'heure, et qu'on a la transformation du système au fur et à mesure de
projets qu'on analyse, pilotes, comme ça, on va être capables d'améliorer de façon très notable l'accès.
Aujourd'hui,
l'accès — vous
avez vu, il y a eu quelques reportages là-dessus — eh bien, il y a des endroits où il n'y a pas autant de patients qu'on devrait
avoir et d'autres endroits où il y en a trop, avec des attentes, en particulier
aux urgences, etc. Comment mieux coordonner?
La télémédecine peut aussi nous aider, les centres de coordination du RUIS peuvent nous aider, mais il y a aussi des
initiatives pour analyser l'offre de soins et sa transformation vis-à-vis des
besoins de la population... va aussi aider à
transformer le... Et là la connaissance universitaire peut nous aider.
Cependant, c'est quand même le réseau
de santé qui est en train d'évoluer. On ne peut pas non plus attendre
l'ensemble des études pour pouvoir se transformer. Donc là, on est à un
moment très, très, très crucial où il faut que tous les éléments d'un puzzle se mettent en place et puis on est dans une
phase de transition. Analyser l'impact en pleine phase de transition,
c'est toujours difficile. Donc, c'est pour ça qu'on va vous donner l'ensemble
du tableau dont vous avez besoin.
Et je dirais un dernier mot :
l'enseignement pour l'enseignement n'est pas notre objectif.
Mme Lamarre : Il faut que ça se
traduise sur le terrain.
M.
Brunet (Fabrice) : C'est l'enseignement pour améliorer les soins, et c'est là où le RUIS est capable de
démontrer ça.
Mme
Lamarre : Mais un des
risques du projet de loi n° 130 qui inquiète, là, qui nous est rapporté, c'est
que les enjeux administratifs prévalent sur d'autres enjeux. Parce que
ce que vous évoquez, qu'à partir d'un travail commun, d'un travail universitaire, d'un travail d'enseignement ou de remodelage de structures de travail... bien, des fois, il faut
attendre un an, deux ans avant d'avoir les
objectifs. Alors, si on fixe, à partir de l'adoption du projet de loi n° 130, des demandes
très, très précises pour un contrat d'un an avec les
médecins en disant : Ce sera ça, vos privilèges, et, d'ici l'an prochain, vous devez rencontrer ça, bien, comment
vous pouvez trouver les leviers qui vont garantir qu'à la fois le travail
que vous êtes en train de faire, qui
investit pour ce qu'on va recueillir dans deux ans ou dans trois ans, ne soit
pas complètement diminué,
soustrait, effacé parce que la performance à court terme n'est pas là? Et, moi,
ça, c'est une préoccupation.
Tantôt, vous avez parlé, Dr Cossette, de
l'alternance et vous dites : On va casser l'alternance. Moi, je pense qu'il y avait
quelque chose de positif dans cette alternance entre un doyen
et un P.D.G. Parce
que, clairement, le P.D.G. reçoit
ces demandes du ministre. Alors, le P.D.G., il va faire appliquer
ces demandes-là, et donc tant mieux si les P.D.G. ont cette sensibilité-là au niveau du volet enseignement,
mais, sinon, ça pourrait facilement causer préjudice à cette portion d'enseignement là. Il faut le doser. C'est pour ça
que je vous disais : L'enseignement et l'accès doivent être conciliés,
parce que, là, c'est vraiment un enjeu
principal. C'est presque une maladie de notre système de santé actuellement, je
vous dirais, le manque d'accès. Alors, il faut aussi mettre une priorité
là.
Le Président (M. Merlini) : En
30 secondes, s'il vous plaît.
Mme
Bourdon (Gertrude) : Oui.
Dans la proposition, le président est un P.D.G. d'un CHU, avec un «U», donc
une mission universitaire. Donc, un président de RUIS ne pourrait pas ne pas
avoir de préoccupation pour la mission universitaire, c'est dans sa mission d'être là. Et c'est aussi pour ça qu'on propose
même un V.P. du territoire du RUIS, pour
aussi avoir la vision de l'organisation des services du territoire dans un territoire
donné. Donc, en faisant ça, on a vraiment une vision globale, qui est la vision académique,
la vision d'organisation des services en milieu universitaire plus urbain et une vision de l'organisation
en milieu semi-urbain ou rural.
Le Président (M.
Merlini) : Merci.
Mme Lamarre :
Mais, ultimement, c'est celui qui tient l'argent qui a la décision finale, et
ça sera le P.D.G..
Le
Président (M. Merlini) : Merci, Mme la députée de Taillon pour ce bloc d'échange. Ça met
fin à ce bloc d'échange. Et maintenant,
au tour du deuxième groupe
d'opposition, M. le député de Lévis, vous disposez d'un bloc de 10 minutes.
À vous la parole.
• (16 h 20) •
M. Paradis (Lévis) : Merci, M. le Président. Mme Bourdon, Mme Alfonso, M. Brunet, Mme
Gauthier, Dr Cossette, merci d'être là. Je sors un peu de notre
conversation seulement pour dire quelque chose, parce que je pense que c'est important — et
là je m'adresse à vous, Mme Bourdon, mais, par votre biais, à tous ceux et
celles que vous représentez dans vos
fonctions — pour
vous lever mon chapeau puis vous dire bravo — et vous le retransmettrez par le biais de ce
que je dis — avec la qualité d'intervention dans une tragédie
aussi incroyable que celle du Centre culturel islamique de Québec
récemment. Et je sais que, pour connaître certaines personnes qui étaient dans
les endroits où on a dû agir rapidement, vous
avez, votre équipe... les gens du réseau ont démontré une qualité, un humanisme
extraordinaire. Et c'est aussi ça, ce que vous faites, hein, dans ces moments-là de
haute tension, d'arriver à rassurer, évidemment de prendre soin, puis de passer des messages, et de se dire : On est
bien équipés. Alors, j'en profite parce
que je vous vois là, à défaut de
pouvoir le faire avec tous ceux et celles qui ont pu intervenir à ce
moment-là.
Ceci
étant dit, je comprends ce que vous dites. Et puis c'est peut-être
un peu complexe pour les gens qui nous écoutent et nous regardent, ces missions universitaires, bon, la mission hospitalière, l'enseignement, la recherche, mais je comprends fort bien. Je comprends que
vous dites : Il ne faut pas oublier ça, et, dans les obligations qu'auront
ou qu'auraient les médecins, quand on va
déterminer des obligations, accorder des privilèges, que, cette notion d'enseignement, de recherche, on en tienne compte, qu'elle soit protégée,
quelque part. Je le vois comme ça.
Puis, à une question
du ministre, très précise, pour revenir à la loi n° 130 : Est-ce que
c'est un outil qui peut servir?, et là je
reprends vos propos, vous dites : Le n° 130, c'est un levier
supplémentaire. Alors, je comprends que ce qu'il y a là va vous
permettre d'aller dans le sens que vous souhaitez.
Plusieurs
organisations sont venues ici nous dire que cet outil-là, il
avait des effets extrêmement négatifs, qu'il n'était pas nécessaire, parce
que les outils existent déjà.
Ils ne sont simplement pas utilisés ni appliqués. Puis là, bien, on a parlé un
petit peu d'enseignement, quelque part, entre guillemets, ça n'a pas de rapport, mais on nous a
dit : Si on passait par une meilleure formation, peut-être que les
gens pourraient utilisés correctement les pouvoirs qu'ils ont déjà.
Est-ce que,
de fait... Et là je vous replace dans le contexte du n° 130,
est-ce qu'il existe déjà des outils vous permettant de faire ce que
vous souhaitez faire sans être obligés d'avoir besoin de celui-ci?
M.
Brunet (Fabrice) : Vous
savez, il y a toujours, lorsque nous sommes dans une activité comme vous
décrivez, des outils qui existent,
et, s'ils étaient complets, on n'aurait pas besoin de rajouter d'autres outils.
Donc, il y a des outils, mais ils sont insuffisants dans
certaines situations. Et je pense que, là, exactement
comme ma collègue Mme Bourdon l'a dit tout à l'heure, ça
nous donne un levier de plus, mais pas obligatoirement l'ensemble des besoins
qui étaient déjà couverts par d'autres
outils. Donc, c'est un ensemble dans une boîte à outils, d'outils qu'on a, et
c'en est un nouveau qu'on rajoute,
qui nous permet d'aller plus loin et plus vite, mais on avait déjà
d'autres possibilités préexistantes pour résoudre d'autres problèmes.
Mme Gauthier
(Patricia) : Bien, je pense qu'on vient consolider les outils que nous
avions. Je pense que, ces outils-là, oui,
c'est vrai qu'ils étaient présents, mais ils n'étaient pas utilisés de la bonne
façon et ils étaient peu utilisés. Je pense qu'avec la présentation du projet de loi n° 130 ça vient nous
permettre de les remettre en valeur, de rehausser le rôle du chef de département, qui est un rôle
essentiel dans nos organisations. Et donc, si on veut jouer un rôle adéquat,
que ce soit au niveau d'un chef de
département dans le cadre d'un RUIS pour lequel on a à s'assurer des corridors
de services, le volet universitaire à l'intérieur du département aussi,
alors on a besoin de rehausser ce rôle du chef de département, le rôle du DSP aussi, qui a un rôle essentiel à jouer.
Alors, moi, je dirais plus que c'est une consolidation des outils existants, et qui va permettre aussi au
conseil d'administration, avec ce rehaussement-là, de mieux jouer son rôle avec
le P.D.G. de l'organisation.
M. Paradis
(Lévis) : Je reviens avec l'analogie de la boîte d'outils, hein, et,
dans une boîte d'outils, il y en a plusieurs,
puis il y en a dont on n'aime pas se servir, ils sont dangereux ou ils font
trop de bruit, bon. Et là je fais le parallèle à partir de là parce qu'il y a des gens qui nous ont dit : Attention,
on a déjà des leviers, on a déjà des outils. On ne s'en sert pas comme on devrait. On devrait peut-être plus
être formés à mieux s'en servir, donc savoir comment on travaille avec la boîte dont on dispose. On est même allé jusqu'à
dire que ça pourrait créer des situations conflictuelles parce qu'à travers,
à travers tout ça, il y a aussi des ego qui peuvent être touchés, il y a des...
bon.
Est-ce que vous
entrevoyez... Puis vous en faites, là, vous en êtes, de la gestion, puis de la
saine gestion qualitative puis humaine avec
tous ceux que vous côtoyez. Est-ce que vous voyez un potentiel de situations
conflictuelles avec l'application d'un projet de loi, ou qui deviendrait
loi, comme le n° 130?
Mme Alfonso (Martine) :
Comme vous le dites, on est déjà dans cette dynamique-là, on est préoccupés, et
c'est notre responsabilité de nous
assurer que notre établissement offre les services, qu'on travaille avec nos
voisins dans le cadre d'un continuum
de services. On est déjà à travailler sur... à s'assurer que le territoire est
bien couvert, que les services sont bien donnés.
Dans la plupart des
cas, ce sera, en fait, un plaisir de bien clarifier quelle est la contribution
que chacun des médecins offre déjà aux établissements, aux territoires, à la
population. Il arrivera des moments où ça permettra une conversation qui est plus globale, parce qu'on regardera tout un
territoire pour une spécialité donnée, par exemple, et c'est vrai qu'il
arrivera quelques fois, comme c'est toujours le cas dans une situation de
gestion, où il y a peut-être un ou deux cas
pour lesquels la situation est plus difficile, la conversation ne mène pas à
une résolution, il y a un besoin qui n'est pas comblé, et là on aura un levier supplémentaire qui viendra peut-être
seulement du fait qu'il faut qu'on arrive à mettre sur papier quels sont
les privilèges et quelles sont les attentes, ce qu'on n'a pas fait jusqu'à
maintenant de façon aussi systématique pour tout le monde. Alors, c'est
peut-être un outil que nous n'utiliserons pas beaucoup, mais qui est disponible
pour résoudre une situation qui demeure problématique.
M.
Brunet (Fabrice) : Juste pour compléter la réponse, des conflits, il
en existe aussi aujourd'hui. Je veux dire, ce projet de loi dont on est en train de discuter, c'est parce qu'il y a
un problème qui n'est pas encore résolu. Sans ça, on ne serait pas en
train d'en discuter, parce que, finalement, on n'en aurait pas besoin.
Alors,
est-ce que ça va nous apporter plus de conflits ou moins de conflits? Je pense
que, tout à l'heure, ce qu'on a discuté,
c'est que nous sommes dans une vision d'amélioration des services à la
population. À partir du moment où nous avons... Et les médecins sont
extrêmement sensibles à ça, les médecins, les professionnels de la santé, et
même les administratifs que nous sommes. À
partir du moment où nous avons comme objectif d'utiliser ce projet de loi, ou
les outils que nous donne ce projet
de loi, pour améliorer les soins et les services et aussi utiliser
l'enseignement et la recherche pour
encore plus améliorer ces soins et ces services, je n'anticipe pas de conflit.
Parce que les conflits aujourd'hui sont parfois liés au fait que nous
n'avons pas la possibilité de les régler.
Donc, vous voyez, il
y a un moment où on est aussi dans une difficulté, parce que, s'il n'y avait
pas de conflit aujourd'hui, si tout allait
bien, si l'accès était parfait, s'il n'y avait pas de souci, on ne serait pas
en train de discuter ici, tous
ensemble, d'est-ce que ce nouveau projet de loi va améliorer quelque chose. On
anticipe qu'il va améliorer. Il y aura certainement
des gens qui vont être réfractaires. Mais, à partir du moment où c'est pour le
bien de la population et que tout le monde adhère à cette vision, moi,
je pense que ce sera plutôt facilitateur. C'est en tout cas ce que nous avons
comme impression avec les concertations et les discussions qu'on a dans nos
établissements actuellement.
M.
Cossette (Pierre) : Je voulais juste... Renforcer le rôle des
directions départementales, c'est très important. On parle beaucoup de
personnes, mais, en fait, des départements ont besoin de se concerter pour à la
fois les soins cliniques dont on parle, mais
aussi pour les activités, et prodiguer l'enseignement nécessaire pour former
cette relève-là. Moi, je diffère un
petit peu d'opinion que le Dr Brunet, je pense que l'enseignement est une vertu
en soi, parce que, tantôt, on n'existe plus si on ne forme pas notre
relève.
Une voix :
...
M. Cossette (Pierre) :
Mais mon point, c'est de dire que la pratique ne va pas être figée dans le
temps, là. Quelqu'un veut faire plus de ci,
moins de ça pendant sa carrière, mais, comme groupe, à l'intérieur d'un
département, dans un hôpital
universitaire, il faut qu'il s'assure que l'ensemble des missions soient
couvertes, incluant les corridors de
services, et autres, et incluant les missions d'enseignement et de recherche.
Tout le monde ne fait pas de tout, mais le groupe doit s'assurer que
tout est fait.
Donc,
dans ce sens-là, c'est pour ça que les recommandations d'amendement qu'on fait
sont là, parce que c'est important, si on est pour ajouter des outils,
que les outils couvrent l'ensemble des missions.
M. Paradis
(Lévis) : Il me reste peu de temps, je pense, M. le Président.
Le Président (M.
Merlini) : Une vingtaine de secondes.
M. Paradis
(Lévis) : Une vingtaine de secondes. Merci d'être venus nous
rencontrer.
Mme Bourdon (Gertrude) : Merci. Et je tiens aussi... le centre intégré
universitaire de la Capitale, avec qui on a travaillé dans cette...
M. Paradis
(Lévis) : Absolument, tout à fait, vous avez raison.
Le
Président (M. Merlini) : Mme Bourdon, Mme Alfonso, Mme Gauthier, Dr
Brunet et Dr Cossette, représentant la
table de coordination des réseaux universitaires intégrés en santé, merci de
votre présence et merci de votre contribution aux travaux de la
commission.
Je
suspends les travaux quelques instants et j'invite les représentants de la
Fédération des médecins résidents du Québec à venir prendre place. Nos
travaux sont suspendus.
(Suspension de la séance à 16 h 29)
(Reprise à 16 h 36)
Le
Président (M. Merlini) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux. Je
souhaite donc la bienvenue à la Fédération
des médecins résidents du Québec. Je
vous souhaite la bienvenue. Je vous demande de bien vouloir vous présenter ainsi que ceux qui vous
accompagnent. Vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé, et
suivra la période d'échange avec les membres de la commission. Bienvenue, la
parole est à vous.
Fédération des médecins
résidents du Québec (FMRQ)
M. Lemieux (Christopher) : Merci, M. le Président. Je vais commencer par les
présentations. Donc, mon nom est Christopher
Lemieux, je suis président de la Fédération des médecins résidents du Québec; à
ma droite, Me Patrice Savignac Dufour,
qui est le directeur général de la fédération; et, à ma gauche, Me Audrey
Laganière, qui est la directrice des affaires juridiques.
Donc, premièrement, merci, M. le Président, M.
le ministre, Mmes et MM. les parlementaires, merci de nous permettre de venir
nous exprimer aujourd'hui sur le projet de loi n° 130.
Avant de
débuter, la FMRQ représente 3 700 médecins résidents dans la
province, provenant d'une des quatre facultés de médecine du Québec. Ceux-ci participent quotidiennement à l'offre de
services dans tous les établissements du Québec. Ceux-ci représentent
donc la relève médicale et seront donc touchés par ce projet de loi.
Nous nous entendrons
tous pour dire que notre système est performant mais n'est pas parfait. Nous
pensons que certains éléments du
projet de loi n° 130 n'auront pas les objectifs escomptés et nous font
craindre sur la qualité des services aux patients.
Premièrement, l'hypercentralisation. La FMRQ
avait déjà fait en 2014 des mises en garde devant cette même commission quant aux volontés du ministre de tout
centraliser au sein du réseau de la santé. C'était une de nos principales
critiques du projet de loi n° 10, du projet de loi n° 20, et
maintenant du projet de loi n° 130.
La
microgestion est un autre des problèmes relevés. En plus du pouvoir de décision
des grandes orientations des établissements,
on ajoute maintenant l'allocation des ressources médicales de chacun des
établissements. Comme l'article 36, le ministre s'autorise maintenant le pouvoir d'autoriser tout projet de
règlement du conseil d'administration, du CMDP et des autres comités au
sein des établissements. Ceci représente un retrait important des pouvoirs de
ces instances. Aussi, la nomination des
P.D.G. par le ministre, qui a été instaurée avec le projet de loi n° 10,
sera maintenant appliquée, via le projet de loi n° 130, aux P.D.G.
adjoints. Ceci représente une entrave à l'autonomie des conseils d'administration.
Pour ce qui
est des points de gouvernance, les CISSS, les CIUSSS et les établissements non
fusionnés doivent maintenant fournir
leurs plans d'organisation, qui seront approuvés par le ministre, avec ou sans
modifications. Encore une fois, aucune
autonomie, sur ce point de vue, du côté des conseils d'administration. Aussi,
l'article 19 permet au ministre de dicter les structures
départementales de tous les centres hospitaliers. N'est-ce pas un peu trop?
Le réseau
perd de plus en plus de flexibilité, et les acteurs du milieu se sentent de
plus en plus serrés. L'ensemble du
pouvoir en est remis à une seule personne. Est-ce que c'est vraiment
nécessaire? Y a-t-il une meilleure approche dans la collaboration dont
nous pourrions utiliser?
La centralisation
a bien sûr un lot d'effets positifs, dont principalement des avantages
financiers, mais est-ce que ceux-ci
entraînent de meilleurs soins aux patients? À vouloir tout contrôler, parfois
on perd le contrôle. L'hypercentralisation devrait être temporaire, alors... lorsqu'on en a parlé, il y a
maintenant deux ans. Voilà maintenant que nos craintes sont
matérialisées, et nous assistons à une poursuite de cette centralisation.
• (16 h 40) •
Le message à
l'ensemble du corps médical est simple ici, c'est un message négatif et ça
laisse comprendre que nous sommes
incapables de mener à bien les établissements de santé. On applique ici une
mesure pour contrôler certains problèmes anecdotiques, alors qu'on peut
s'entendre pour dire que ce n'est pas l'entièreté du réseau qui souffre présentement. Certains milieux sont plus dysfonctionnels que d'autres, et le projet de loi vise principalement ces milieux.
Hier, Mme
Lamarre parlait de mesures de performance et de profils de performance avec la
Dre Francoeur, qui, la Dre Francoeur,
assumait qu'on pouvait rapporter jusqu'à 26 % d'amélioration juste en faisant des... juste en apportant
des comparaisons. Pourquoi ne pas apporter
ça à l'échelle du Québec et... Parce qu'on le sait tous, certains milieux sont
plus performants que d'autres, mais
on n'a pas présentement les outils pour faire ces mesures-là. Sachant qu'il y a
des milieux qui sont plus
performants, pourquoi ne pas justement analyser pourquoi sont-ils plus
performants et tenter d'étendre tout cela
à l'ensemble du réseau? D'ailleurs, nous avons déjà dit en commission
parlementaire que nous étions pour ces index de performance.
Par la suite,
un gros morceau du projet de loi n° 130 atteint à l'autonomie
professionnelle des médecins. Ceci n'est pas une question de caprices ou de corporatisme, c'est un modèle de
soins de proximité et de prise de décision qui est axé sur les besoins du patient. Heureusement pour le
patient, le médecin a l'intérêt de son patient avant les objectifs de gestion
financière. Par ailleurs, l'article 18
retire le pouvoir du CMDP de pouvoir décider quel acte sera... quel acte
médical relèvera de quel département.
Ceci est encore une fois un retrait des pouvoirs qui sont accordés à cette
instance, et, il faut se rappeler, les
CMDP sont avant tout les gardiens de la qualité de l'acte et de l'excellence
des soins prodigués dans notre système, autant au niveau médical que
dentaire et pharmaceutique.
Dans les
dernières lignes... en fait, dans les dernières minutes, je vous ai parlé
principalement de certains points qui
ont été relevés par plusieurs personnes à venir jusqu'à présent, mais
maintenant je voudrais souligner certains problèmes qui affectent principalement nos membres, en fait
qui vont affecter principalement nos membres et d'où relève la majorité de nos inquiétudes aujourd'hui. On parle
principalement des obligations qui vont être rattachées aux privilèges et, pour
commencer, on peut parler du renouvellement des
privilèges après la demande de nomination, qui sera maintenant à seulement un an. Ceci aura pour effet, selon nous,
de fragiliser les postes pour nos finissants. Nous sommes évidemment pour le processus de renouvellement des
privilèges, mais pourquoi le faire après un an? C'est un autre fardeau
administratif qui s'ajoute.
Maintenant,
bon, nous parlons des obligations, mais pourquoi s'inquiéter? Il y a raison de
s'inquiéter parce qu'on ne sait pas
quelles seront les obligations, dans quel cadre vont s'insérer ces obligations,
où, quand, comment, etc. Nous aimerions aujourd'hui que le ministre nous éclaire là-dessus. Lors des projets de loi nos 10 et 20, des amendements ont surgi
après consultation publique. Nous voulons nous éviter de répéter l'expérience
aujourd'hui. Évidemment, ces obligations ont un énorme danger d'iniquité pour
nos membres. Pensez seulement aux plus... la comparaison avec les médecins plus âgés versus les plus jeunes avec
l'inclusion des clauses orphelines, ces obligations particulières qui seraient
seulement pour la relève médicale. C'est
inacceptable, selon nous. M. le Président, nous souhaitons ici avoir
l'assurance de la part du ministre, à
cet égard, comme il l'a déjà fait à notre satisfaction pour le projet de loi
n° 10, que les obligations, si obligations il y a, elles seront
collectives plutôt qu'individuelles et imposées seulement aux nouveaux
médecins.
Nous
craignons évidemment des obligations sans limites, limitation des actes pouvant
être réalisés entraînant une restriction
des champs de pratique, particulièrement en raison d'un manque de plateau
technique ou du désir des médecins plus
âgés de garder certains cas seulement pour eux. On parle souvent, en fait...
souvent, dernièrement, du généralisme. Un
nouveau chirurgien pourrait voir sa pratique restreinte, alors qu'il a été
formé et excelle dans certaines autres techniques. La polyvalence est une excellente chose dans notre
système, mais ça ne devrait pas être un frein à l'excellence. Ou, un autre exemple, demander des obligations hors
normes afin d'éviter le recrutement d'un candidat. C'est des choses qui
nous inquiètent, et on ne sait pas présentement où sont les limites de ces
obligations.
Rappelons-nous
que, depuis deux ans, à chaque fois qu'il y a eu de nouvelles obligations
imposées aux nouveaux médecins dans
le cadre des dernières réformes, ce sont essentiellement nos finissants qui en
ont fait les frais. On parle de l'obligation de prise en charge de
500 patients, c'est la relève médicale; l'obligation de pratique dans un
milieu en sous-région, la relève médicale; la limitation des nouveaux postes en
milieu hospitalier, la relève médicale; et, plus récemment, 35 nouveaux postes pour les médecins de famille qui ont été
reliés à des obligations. On parle des obligations, ici, de travailler dans une clinique spécifique et
de travailler en heures défavorables. Cette décision a été prise sans préavis
et, selon nous, c'est un non-respect des accords,
et lois, et règlements qui sont déjà en cours. S'agit-il d'une application du
projet de loi avant son adoption et, encore une fois, pour la relève médicale? Nous devons nous assurer de collectiviser
les responsabilités des modifications.
Nous
l'avions soulevé dans le cadre des consultations sur le projet
de loi n° 10, que, lorsqu'il y
avait bris de service, on ne pouvait
mettre le poids de cette responsabilité sur les jeunes médecins qui intégraient un
milieu, notamment pour les corridors de services, ce qui
avait été accepté par le ministre. Il faut poursuivre dans cette voie et
collectiviser les mesures. Le ministre a le
devoir de s'assurer de mettre de l'avant des solutions qui ne vont pas seulement
toucher la relève médicale. Merci.
Le
Président (M. Merlini) :
Merci beaucoup, Dr Lemieux, pour cet exposé. Nous allons maintenant
procéder à la période d'échange avec le député de La Pinière et
ministre de la Santé et des Services sociaux. Vous disposez de 21 minutes, M.
le ministre, à vous la parole.
M.
Barrette : Merci, M. le Président. Alors, Dr Lemieux,
Me Savignac Dufour, Me Laganière, bienvenue et merci d'avoir pris le temps et avoir eu l'intérêt pour
venir nous présenter votre interprétation, vos commentaires sur notre projet
de loi, le projet de loi n° 130, commentaires et appréciation qui est
aussi empreinte de ce que vous avez retenu des commentaires des autres groupes
qui sont passés avant aujourd'hui.
Comme
pour la loi n° 10, ce n'était pas vous qui étiez là à l'époque, puis c'est
normal, là, parce que vous avez une...
bien, une rotation, vous finissez par finir votre résidence, ce qui est tout à
fait normal, et c'est heureux, d'ailleurs. Le projet de loi n° 10 n'était pas fait et celui-là n'est pas fait
pour que tout le poids de quoi que ce soit soit sur le résident, O.K.? Ni sur les résidents ni sur les résidents
qui arrivent en pratique. Ce n'est pas ça. Et il n'y aura pas de mesures qui
seront ciblées à un groupe, de quelque
nature que ce soit. Ça n'arrivera pas. Il peut y avoir des gens qui se sentent
ciblés, qui peuvent constituer un
groupe, comme, mettons, des déviants, mais pas sur l'âge. Alors, ça,
rassurez-vous, ce n'est pas ça qui est l'objectif.
Maintenant,
vous avez fait un certain nombre d'affirmations ou exprimé des craintes. Moi,
c'est sûr que, tout le long... Je
comprends qu'on prenne le relais de certains parlementaires, là,
particulièrement de l'opposition, là, mais je vais vous inviter à me dire... me donner un seul — un seul, juste un — exemple où moi, là, j'ai pris une décision
locale. La microgestion, là, c'est
une décision locale. J'en ai déjà pris, là, comme par exemple, là... O.K. Mais
donnez-moi un exemple de microgestion que j'aurais fait, là.
M. Lemieux (Christopher) : En fait, ce que je vous dirais, c'est que c'est
surtout le risque qui est là. En attribuant ces pouvoirs-là, c'est que
le risque est là de pouvoir faire de la microgestion.
M. Barrette :
Permettez-moi, Dr Lemieux, ça fait bientôt deux ans que la loi n° 10 a été
non seulement promulguée, mais mise en
application. Avez-vous des exemples, là, qui justifient vos craintes? Avez-vous
entendu parler d'exemples qui justifient vos craintes?
M. Savignac Dufour(Patrice) : En
fait, oui, M. le ministre. En fait, au moment où on se parle, on nous dit qu'il y a des médecins, des résidents, des
résidents en médecine de famille qui sont des finissants, et ils attendent avec
énormément d'anxiété
la confirmation s'ils vont avoir un des 24 nouveaux des 35 postes qui ont les
nouvelles conditions, qui sont, selon
nous, illégales, et on nous dit que c'est parce que ça attend l'autorisation du
bureau du ministre, et que c'est pour ça que les gens présentement sont
dans l'anxiété de savoir s'ils vont avoir un poste au 1er juillet prochain.
M. Barrette :
Et c'est parfait, l'exemple que vous me donnez là, parce que ça, ce n'est pas
un exemple de microgestion, c'est un exemple
du mode de fonctionnement qui existe depuis 2004. Ce à quoi vous faites
référence, ça s'appelle la gestion du
plan des effectifs médicaux, que vous connaissez très bien, auquel vous
participez. Et les 24 postes auxquels
vous faites référence sont des postes supplémentaires qui sont apparus parce
que des résidents qui sont partis à l'extérieur reviennent au Québec.
En
passant, juste pour le plaisir des oppositions, on revient au Québec,
actuellement. On ne quitte pas le Québec, on revient, parce que c'est bon, le Québec. Ces 24 résidents là
reviennent, attendent une place, oui, qui va être décidée, comme ça l'est toujours, dans le plan
gouvernemental de gestion des plans d'effectifs. Ça existe depuis 2004. Ce
n'est pas de la microgestion, c'est ce qui a été convenu depuis plus de
13 ans. Avez-vous un autre exemple?
• (16 h 50) •
M. Savignac Dufour (Patrice) : En fait, M. le ministre, cet exemple-là, pour prendre le même exemple, ce qu'on vous
expliquait, c'est que, par exemple, on sait que vous avez eu, vous avez toujours
des négociations avec les autres fédérations médicales, et, sur la question des
cliniques, par exemple, pour les services dans les heures défavorables, l'impression que nos membres ont, c'est qu'au moment où on se parle, avec ces 24 postes là où, vraisemblablement, vous avez décidé qu'on allait y attacher des obligations de
travailler à des heures défavorables... bien, la relève médicale a l'impression que le ministre ne réussit pas à
s'entendre avec les partenaires, on fait payer les jeunes. C'est ça,
l'exemple.
M.
Barrette : On ne fait pas
payer les jeunes. C'est-à-dire qu'il y
a actuellement... Et je vais
citer, parce que vous les
avez entendus, vous étiez dans la pièce... Vous avez entendu les présidents des
RUIS, qui ont utilisé... Vous savez, les
RUIS, là, ce n'est pas une créature gouvernementale, c'est universitaire. Vous avez
entendu des gens, là, qui viennent nous
dire qu'ils ont des obligations de reddition
de comptes pour livrer des services à
la population. Ici, au gouvernement,
on ne fait pas de la microgestion. On met en
place un certain nombre de règles, que d'aucuns peuvent qualifier de
contraintes mais dont la finalité est
que les services soient donnés à la population, qui, elle, par ses impôts et ses taxes, paie la
formation des médecins. Ce n'est pas de la microgestion, ça, c'est de la
gestion normale du réseau, qui, à date, n'a pas livré la marchandise.
Alors,
moi, je considère que, quand vous dites que, là, le ministre,
le ministre, le ministre... Toutes les phrases commencent par «le ministre».
Il n'y a pas de centralisation de pouvoirs, il y a des orientations et des
décisions systémiques qui, elles, visent à
faire en sorte que les services soient rendus. Ce n'est pas moi, là, qui vais
décider de donner des privilèges à un
ou à l'autre. Il y aura des consultations qui vont être faites. C'est écrit dans le projet de loi. Mais n'est-il pas normal qu'il y ait un certain nombre de conditions à respecter lorsqu'on
pratique la médecine? Sinon, bien, c'est comme la première question que j'ai posée à la présidente de la FMSQ :
Les docteurs sont-ils, dans l'organisation hospitalière, institutionnelle, des
intouchables?
M. Lemieux
(Christopher) : Bien, en fait, je ne crois pas...
M. Barrette :
Oui? Vous avez dit oui?
M. Lemieux (Christopher) : M. le
ministre, je vous dirais tout simplement qu'il y a déjà les CMDP et les C.A. qui sont déjà en place pour gérer plus localement, si on veut,
leurs établissements, et ce qu'on trouve derrière tout ça, c'est
qu'on enlève une bonne partie de leurs pouvoirs, et c'est là que le problème
est. Il y a déjà des mesures en place pour justement prendre les médecins déviants et pour ajuster le
tir, mais malheureusement est-ce
que ces mesures-là ont été prises? Ce n'est pas une raison pour... ce n'est
pas une raison d'amener un projet de
loi pour ces quelques
cas anecdotiques, alors que présentement c'est... On enlève tout le
pouvoir à l'ensemble des différentes instances.
M. Barrette :
Dr Lemieux, je vais faire un parallèle, puis vous allez l'apprécier parce que
je vais prendre le parallèle de la FMRQ, votre organisation. Il y a quelques
années, et ça ne fait pas très longtemps, il y a quelques années — bon,
pour le bénéfice de ceux qui nous écoutent, là, ça ne fait même pas cinq ans — vous
êtes allés en cour pour que vous ne
soyez pas présents à l'hôpital plus que 16 heures d'affilée. Vous êtes
allés en cour pour que vous ayez un
congé postgarde. Vous êtes allés en cour pour qu'avant la garde vous ayez une
pause. Vous êtes allés en cour pour qu'il
y ait des règles. C'était approprié
dans votre esprit, puis vous avez gagné. Ça a entraîné, on va dire ça comme ça,
une certaine perturbation de l'organisation du réseau. Quand c'est à votre avantage, je constate que les règles
sont bonnes. Quand il y a un risque d'avoir une obligation qui ne fait
pas votre affaire, ce n'est pas bon. Il me semble qu'il y a là deux poids, deux
mesures.
M. Lemieux (Christopher) : En fait, les règles ici sont différentes. Les
résidents sont des salariés, et les médecins sont des travailleurs autonomes. Donc, on ne peut pas vraiment
faire... Je ne crois pas qu'on puisse faire le parallèle ici de tout ça. Et je vous rappelle qu'on a été en cour parce que
ce qui était l'objectif primaire derrière tout ça, c'est que c'était
dangereux pour les patients, les
24 heures. Donc, l'objectif primaire était de protéger les patients, protéger
nos membres aussi.
M.
Barrette : Disons que, vous
me permettrez de faire le commentaire suivant, je pense que l'objectif
premier pour lequel l'argument de la
sécurité des patients a été utilisé, c'est le temps de travail, là. Et, pour ce
qui est de la sécurité des patients, c'est un argument qui a été et qui demeure, je dirais,
raisonnablement débattu dans le réseau. Puis l'exemple que j'ai toujours
pris, là... Si l'argument était vrai dans l'absolu, ça voudrait dire qu'on
devrait forcer une infirmière à dormir
lors de son premier quart de nuit. Je ne connais pas... avant son premier quart
de nuit. Je ne connais personne, moi, là, qui rentre à minuit, le soir, pour une semaine de nuit, qui réussit à
dormir huit heures de temps avant de faire son premier chiffre de nuit, là. Alors, cette infirmière-là,
si elle est aux soins intensifs, là, elle est aux soins intensifs avec des
patients très, très critiques, elle fait son premier quart de
travail, et je n'ai jamais vu de données probantes qui indiquent que les
infirmières, lors de leur premier quart de nuit, sont dangereuses pour les
patients.
M.
Savignac Dufour (Patrice) : Bien,
en fait, M. le ministre, vous avez le droit à votre opinion personnelle,
là, il y a un tribunal qui a tranché, là. Puis il y a un principe qu'on
appelle la séparation des pouvoirs, là, donc ça, cette question-là a été tranchée par
un juge. À l'époque, le gouvernement avait tout l'occasion d'aller en appel, et ça ne
s'est pas fait. Et, la question,
le tribunal a tranché à l'effet que les anciens 24 heures violaient la Charte des droits et libertés de la
personne du Québec, l'intégrité de la personne dans la charte canadienne. Pour
nous, c'est un dossier clos, et c'est heureux pour les patients que les
résidents traitent et pour les résidents.
Mais, ceci
dit, c'est justement pour éviter qu'il n'y ait des
judiciarisations, M. le ministre, qu'on vous demande dès maintenant de
donner des assurances qu'on ne sera pas encore obligés d'aller devant les
tribunaux pour plaider la discrimination contre les jeunes avec l'application
du projet de loi n° 130.
M. Barrette : Ah, bien là!
M.
Savignac Dufour (Patrice) : C'est
ça qu'on espère entendre de vous aujourd'hui, c'est des garanties, comme
vous l'aviez fait à l'époque du projet de
loi n° 10, sur les services dans les corridors... pour le travail dans les
corridors de services. On est convaincus, pour le savoir, qu'au milieu
des années 90, quand le ministre Rochon avait imposé... diminution de salaire pour les médecins entrants
dans le milieu, on avait été obligés d'aller devant les tribunaux, et je sais
de source sûre que vous ne faisiez pas
partie de ceux qui trouvaient que c'était une idée de génie, de couper le
salaire des entrants en médecine.
Puis là-dessus on pense que vous êtes un allié pour assurer que les jeunes ne
paient pas le prix des réformes.
M.
Barrette : Alors, vous ne paierez pas le prix de quoi que ce soit,
mais, si vous me dites que j'ai une opinion personnelle, je vous dis simplement : Vous pouvez me répondre de
façon juridique, c'est de bon aloi, mais, votre opinion personnelle à l'effet que je fais de la
microgestion, bien, vous n'avez pas trouvé un seul cas, et je vous le demande
encore : Avez-vous au moins un seul cas anecdotique, réel, de
microgestion, juste un? Anecdotique, là.
M. Lemieux
(Christopher) : Bien, en
fait, ça maintient que c'est le risque. Pourquoi se donner les pouvoirs de
pouvoir le faire, alors que, justement, si c'est le cas, si on... dans un cas
anecdotique, je veux dire...
M.
Barrette : La réponse à ça, elle a été bien, bien exprimée par le
groupe qui est passé devant vous et par tous les groupes qui ont discuté devant nous, ici, de façon relativement
neutre, du projet de loi n° 130. À la question : Est-ce qu'il y a des problèmes qui existent, pour
lesquels les leviers actuels... on n'arrive pas à résoudre?, bien, tous ceux
qui sont arrivés ici, d'une façon
pondérée, ont dit oui, à des mots parfois pas couverts du tout, parfois
couverts. Il y a quelques minutes,
vous avez entendu Mme Bourdon, la P.D.G. du RUIS de Québec et aussi du CHU de
Québec, dire, d'une façon très élégante, que, bien oui, ça la servait,
hein? C'est à ça que ça sert.
Maintenant,
les problèmes, là, ce n'est pas moi qui les invente puis ce n'est pas à moi à
les résoudre, mais c'est à moi, je
pense, à faire en sorte que, dans le réseau, il y ait ce levier-là pour faire
en sorte qu'on les règle. Maintenant, si vous me dites que le levier ne doit pas être utilisé de façon
intempestive, je suis d'accord avec vous. Mais ça ne veut pas dire que le projet de loi est mauvais pour autant,
ça veut simplement dire qu'il est nécessaire et qu'il doit être utilisé avec
un certain discernement. Et c'est la raison
pour laquelle, dans le projet de loi, il y a des consultations qui doivent être
faites, et c'est la raison pour
laquelle, dans le projet de loi, bien oui, le ministre, là... Parce qu'on aime
ça, tout mettre sur le dos du ministre,
puis ça ne me dérange pas, évidemment, là, parce que je suis capable de le
prendre, mais, à un moment donné, quelqu'un
doit arbitrer des situations d'exception, ça sert aussi à ça, et un ministre et
un gouvernement. Ça n'empêche pas l'obligation d'avoir ça.
• (17 heures) •
Je vais prendre un autre exemple, là. Est-ce que
c'est normal de se construire une pratique à 500 patients par année pendant 15 ans? La réponse à ça... Je
ne veux même pas que vous répondiez. Si vous répondez puis que ce n'est pas la réponse... si ce n'est pas la réponse que
vos membres attendent, vous allez être dans l'embarras. N'importe qui, là, qui est en pratique, là,
sait très bien qu'une pratique complète, là, en médecine de famille, en
cabinet, ne peut pas être construite
uniquement à 200, 300, 400 patients par année. Or, c'est ça qu'on voit.
C'est ça qu'on voit. Alors, il arrive un
moment donné où le balancier s'en va dans l'autre direction puis, quand le balancier
est allé trop loin dans l'autre direction, il faut le ramener au juste milieu. Et, dans la catégorie privilèges et
obligations, il y a un juste milieu à viser et à obtenir, tout
simplement.
Alors, je
vous le dis, là, ce n'est pas fait pour vous autres. C'est fait avec vous
autres, au sens où vous allez être là-dedans,
mais ce n'est pas fait pour que ce soit vous, les cibles, les boucs émissaires
de tous les problèmes du réseau. Mais
en même temps, là, écoutez, là, il faut en revenir à un moment donné, là, ce n'est pas... il n'y a rien, là, absolument... Il n'y a personne qui a d'exemple de dire... Même
l'autre bord, là, vous ne pouvez pas sortir d'exemple de microgestion. On n'en a pas. Mais, à un
moment donné, là, il faut les donner, ces orientations-là, puis, dans les
orientations, il y a aussi certains pouvoirs réglementaires.
M. Lemieux (Christopher) : J'aimerais juste, avant qu'on manque de temps,
que vous reveniez sur les obligations en question. Quelles seront ces
obligations? Dans quel cadre seront-elles insérées?
M.
Barrette : Les obligations, comme c'est écrit dans le projet de loi,
il y a une consultation qui doit être faite. Et c'est dommage que tous les gens qui viennent ne prennent pas un
moment pour dire : O.K., c'est vrai que ça a une utilité puis voici comment on devrait faire la
consultation pour être sûr qu'il n'y a pas de dérapage. Quelqu'un pourrait
utiliser ce mot-là. Mais, à quelque part, il ne peut pas ne pas y en
avoir.
Là,
je vais vous donner un exemple historique. Vous ne pouvez pas l'avoir vécu
parce que vous êtes résidents, mais
les règlements de département et de services dans les hôpitaux, en général,
passent entre les mains de conseillers juridiques
et ils sont édulcorés. Ils sont tellement édulcorés qu'à un moment donné ils ne
veulent plus rien dire. Ils sont édulcorés
de façon à ce que, justement... Puis ils ne disent tellement rien, là, que ça
ne sert à rien. Un règlement, c'est fait
pour être utilisé s'il y a quelque chose qui ne marche pas. Ça fait que, s'il
ne dit rien... Je vais vous donner un exemple : un règlement de département qui dit : Il doit
y avoir une réunion au moins une fois par année des membres du département.
Ça dit quoi, ça? On fait une réunion puis on
va manger de la pizza? Bien, je peux vous dire que, dans les règlements standard
des hôpitaux, il y a ce genre de phrase là.
Il doit y avoir une réunion une fois par année des membres du département, puis
ça ne dit pas du tout la finalité, ça ne dit
rien d'autre qu'il doit y avoir une réunion. Alors, c'est un exemple parmi tant
d'autres, là. Bon.
Vous
savez, un CMDP, ça n'a pas 56 obligations, là. Ça a l'obligation de
vérifier la qualité de l'air, avoir un comité d'examen des titres, un comité d'évaluation de l'acte médical. Oui, mais
il fait quoi, le comité d'évaluation médicale? Comment il doit faire son travail? À quelle fréquence? Qu'est-ce qu'il
doit donner comme rapport, et ainsi de suite? Je ne dis pas que ça doit dire ça, là, mais, à un moment
donné, quand les règles sont floues ou pas suffisamment précises — elles peuvent être précises dans le
libellé mais avoir une portée qui n'est pas claire — bien, ça donne, au
bout de la ligne, quelque chose de tellement
pas clair que ce n'est pas utilisable pour avoir un effet. Bien, c'est ça qu'on
voit, là. Puis, quand ça n'a pas d'effet...
quand ce n'est pas suffisamment précis, bien là, quand on va à la cour... Vous,
Me Savignac Dufour, bien,
vous savez, vous aimez ça, aller à la cour quand les choses ne sont pas
claires, parce que vous vous appuyez sur le pas clair pour dire que ce n'était pas justifié de. C'est une technique
juridique, là, 101, je dirais, là, c'est ce que vous apprenez à la cour. Quand ce n'est pas clair, ça ne peut
pas être clair dans la démonstration d'un tort ou d'une non-observance, là.
Ce n'est pas clair, ou ça n'a pas été écrit,
ou peu importe. Alors, à un moment donné, les choses doivent être suffisamment
précisées, certainement sans tomber dans l'excès.
Alors, je comprends
vos craintes, mais vos craintes sont basées sur je ne sais pas quoi, là.
M. Lemieux (Christopher) :
Bien, en fait, c'est justement parce que c'est un peu flou, les obligations,
les obligations que vous parlez. Est-ce que,
justement, c'est des obligations juste pour les médecins ou ça va être pour les
organisations de département? C'est un peu la raison pour laquelle on...
M.
Barrette : ...à ça hier. Les médecins, là, quand on me donne comme
argument : Oui, mais il y a une contrepartie, bien, oui, c'est vrai. Il y a une contrepartie.
C'est parfaitement vrai. On ne peut pas obliger un médecin à faire quelque
chose dans une organisation si ça lui prend
tel, tel instrument qu'il n'a pas. C'est bien évident, là. Mais, à l'intérieur
de ces contingences-là, le médecin, en quelque part, doit être tenu, à
l'intérieur d'un milieu imparfait, de se comporter correctement, pas parfaitement, correctement. Puis là je reprends
l'exemple — parce
qu'il est tellement simple, là — c'est celui du bloc opératoire. Quand bien même qu'il y a des salles qui sont
fermées et quand bien même qu'il n'y a pas assez de personnel pour faire toute la journée, mettons, il est évident que le
monde doit être là pour commencer le matin. Quand bien même on a un bloc opératoire de 12 salles,
là, puis, pendant six mois de l'année, pour toutes sortes de raisons justifiées
ou non, ils marchent à six salles, bien oui, mais il faut qu'ils marchent, les
six salles.
Alors
là, les gens vont nous répondre : Bien oui, mais il y a 12 salles,
vous devez avoir l'obligation de faire marcher les 12 salles. Il y a une obligation morale, c'est vrai, et ça, ça
fait partie des contingences, mais quand... Puis je prends l'exemple de Sainte-Justine, parce que Dre
Francoeur, qui était ici, est à Sainte-Justine, puis, elle, c'est ça, son
problème. Son problème à Sainte-Justine, là, c'est qu'il n'y a pas le
nombre maximal de salles qui fonctionnent parce que, les infirmières régulières, il y en a beaucoup,
beaucoup qui sont en congé de maternité, puis c'est très bien ainsi.
Maintenant, s'il n'y a pas de
personnel formé pour les remplacer pendant une courte période de temps, de
quelques mois, ça fait moins de salles qui fonctionnent.
Maintenant,
ce dont on parle dans 130, c'est de faire fonctionner l'existant fonctionnel
correctement. On ne peut pas demander en contrepartie la perfection,
parce que tout ce qu'on demande, c'est que ce qui existe, là, fonctionne correctement. Donc, des règles de bon
fonctionnement, de fluidité, la machine bien huilée, mais la machine, là,
pendant une période donnée, peut aller à certaines vitesses puis, à
d'autres moments, à une autre vitesse. Puis on ne peut pas répondre, au projet de loi n° 130 :
Faites marcher la machine à la vitesse maximale et dans les meilleures
conditions, les conditions parfaites
possibles, c'est l'inverse. On doit demander aux gens, compte tenu des
contingences, de faire en sorte qu'ils ne rajoutent pas un problème
supplémentaire, c'est tout. Ça, ça m'apparaît normal.
Le Président (M.
Merlini) : En 30 secondes, une conclusion.
M.
Lemieux (Christopher) :
Bien, en fait, pour ce qui est des pratiques médicales, c'est sûr qu'on a le
code de déontologie, évidemment,
auquel on peut se rapporter. Je comprends votre point de contingence, là, évidemment
il y a des restrictions qu'on ne peut pas faire fi, mais, sinon, pour
l'instant, je n'ai que l'objectif que, pour la relève médicale il n'y aurait
pas... l'entièreté des obligations ne serait pas sur la relève médicale, et je vous remercie de l'engagement que vous avez pris aujourd'hui.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup pour ce bloc d'échange, M. le
ministre. Mme la députée de Taillon, porte-parole de l'opposition
officielle, vous disposez d'un bloc de 13 minutes.
Mme Lamarre : 13 minutes. Merci
beaucoup, M. le Président. Dr Lemieux, Me Savignac et Me Laganière, bonjour. Écoutez, il y a un malaise, hein, on le
sent, là, la façon dont le ministre vous répond est assez troublante, parce
que je pense qu'il y a un certain nombre de
vos questions qui sont tout à fait légitimes. Et, ce besoin de comprendre le
«correctement», jusqu'à maintenant, en trois
ans, on ne peut pas dire qu'on a eu une démonstration claire, nette et précise
que, dans tous les cas où le ministre avait
dans l'esprit «correctement», ça s'est traduit... puis là je ne répondrai pas à
vos besoins à vous, mais en besoins de la population à résoudre, les
besoins individuels et collectifs des Québécois et des Québécoises. Donc, je pense qu'on est en droit d'être plusieurs à
demander au ministre de préciser ce qu'il considère être quelque chose de correct parce qu'actuellement on
n'a pas de définition basée sur des données probantes ou sur un parcours
clair, net et précis. Et, si ça, ça
accompagnait les projets de loi, effectivement, peut-être que ça diminuerait
les inquiétudes, les résistances.
Mais, pour l'instant, avec les antécédents qu'on a, on doit comprendre qu'on a
des raisons, tous et toutes, d'être plus préoccupés et de demander un
peu plus de précisions.
Je voudrais
dire, en entrée de jeu, que le ministre a dit qu'il ne s'ingérait pas dans des
cas particuliers, mais il y a quand
même, le 21 janvier dernier, un article, dans Le Journal de Montréal,
où on a bien vu, là, que le ministre avait eu une modification des postes de nouveau médecin, qu'il avait souhaité en
enlever à la région de Saint-Jean, Châteauguay et Saint-Hyacinthe pour
en ajouter dans le secteur de Champlain, où se trouve sa circonscription et où
également est la circonscription de son collègue qui est président du Conseil
du trésor actuellement, et qu'à la suite de représentation il y a eu une révision
de cette décision. Donc, c'était clairement une forme d'ingérence dans de la
microgestion.
M. Barrette : M. le Président, il
n'y a pas eu de révision...
Mme Lamarre : M. le Président, pas
d'article.
Le Président (M. Merlini) : Un
instant. Est-ce que c'est une question de règlement, M. le ministre?
M. Barrette : Oui, c'est...
• (17 h 10) •
Le
Président (M. Merlini) : En
vertu de l'article 39, vous
devez me donner l'article dans lequel vous faites un appel au règlement.
(Consultation)
Mme Lamarre : M. le Président,
si à chaque fois que j'exprime quelque chose qui déplaît au ministre...
M. Barrette :
...pas besoin de dire le numéro : motifs indus. Motifs indus, M. le
Président, la députée de Taillon a affirmé
qu'il y avait eu une révision de décision. Il n'y a pas eu de révision de
décision. Et, pour éclairer la lanterne de notre collègue, il y a des postes qui ont été octroyés dans une
superclinique qui n'ont pas été comblés, n'ayant pas été comblés, les postes sont allés ailleurs. Il n'y a
pas eu de révision de la décision. Et, juste pour éclairer la lanterne de notre
collègue, la superclinique en question est
à, essentiellement, une rue de son comté. Alors, s'il y a une personne ici,
dans la pièce, qui en tire un avantage, c'est la députée de Taillon.
Mme Lamarre : M. le Président,
là, je pense qu'on...
Le Président (M. Merlini) : M.
le ministre, M. le ministre, je ne crois pas que ce que vous invoquez est une
question de règlement. Je vais vous redonner votre parole à vous, Mme la
députée de Taillon.
Mme Lamarre : Je reprends, M.
le Président.
Le
Président (M. Merlini) : Je comprends que vous avez cité un
article de journal et vous avez cité les faits invoqués.
Mme Lamarre : Alors, j'ai cité
et j'ai lu l'article de journal.
Le Président (M. Merlini) :
Alors, allez-y, votre temps n'a pas été imputé.
Mme Lamarre :
Et l'article de journal, et là je ne veux pas être... manquer de politesse,
mais Le ministre Barrette redonne les postes qu'il avait
enlevés. Voilà le titre de l'article. Et je vous dirais qu'un peu plus loin
on rapporte exactement
ce que vous déplorez, c'est-à-dire que 35 nouveaux postes... Et, ces
nouveaux postes, bon, bien, plusieurs de
ces nouveaux postes sont liés à une obligation particulière, les nouveaux
médecins devront s'engager à faire au moins 12 heures par semaine en heures défavorables dans l'une des
supercliniques de leurs régions, au moment où il n'y a que deux
supercliniques qui sont formellement ouvertes et qui sont, dans le fond, des
cliniques-réseaux qui ont été tout simplement modifiées en supercliniques.
Alors,
je veux juste qu'on vous donne la possibilité... Je sais que, quand on présente
en commission parlementaire, on n'a
pas toujours les arguments proches, à la main, parce qu'on ne s'attend pas à ce genre d'objections. Mais je pense qu'on
est ici pour travailler sur le projet
de loi n° 130 et pour voir quels
sont les avantages et quelles sont les mesures qui seraient favorables.
Vous devez quand même,
comme jeunes et futurs médecins, parce
que, comme résidents, certains
d'entre vous pratiquez déjà, être
conscients que notre système n'offre pas l'accessibilité adéquate à beaucoup de citoyens du Québec.
Alors, quelles seraient vos autres options? Qu'est-ce que vous proposez pour
que ça fonctionne mieux?
Je
pense que, quand on est jeune, qu'on arrive dans un milieu, on regarde les
choses différemment. Dites-nous-le comment vous voyez... Et est-ce que, dans vos cours,
vous avez des formations sur des nouveaux modèles de gestion, d'organisation des soins, de synchronisation des soins? Parce que, là vraiment,
les gens nous disent : Je suis obligé d'aller trois fois pour avoir... mon médecin n'a pas les résultats,
ça ne fonctionne pas. Il y a des
dérives quand même dans notre système, qu'est-ce que vous proposez,
vous, avec votre regard neuf?
M. Lemieux (Christopher) : Bien, en fait, ce que je pourrais vous dire — puis, Mme Lamarre, merci pour la question — je vous dirais : Ça prend deux choses,
pour le système de santé, pour bien fonctionner. Évidemment... Puis je suis d'accord avec vous que notre système n'est
pas parfait, et on veut tendre vers la perfection, mais, bon, est-ce que c'est
un objectif qu'on va réussir à atteindre? On verra. Mais je pense
qu'il y a deux choses, deux éléments importants,
là, pour avoir un système
plus efficace et je pense que tout
part de la collaboration entre le côté administratif et le côté médical,
parce que les deux ont des objectifs communs, qui est évidemment le service à
la population, mais les deux doivent s'entendre.
Donc, c'est sûr que, si chacun travaille de son côté, les choses n'avanceront...
les choses n'iront pas de l'avant.
Maintenant,
qu'est-ce qu'on peut faire aujourd'hui pour essayer d'améliorer l'accessibilité
à l'ensemble du Québec? Bien, je
pense que c'est ce que j'ai apporté un peu plus tôt et ce que vous aviez
discuté hier avec la Fédération des médecins spécialistes, c'est évidemment les mesures de... l'index de performance,
si on veut, pour justement identifier les milieux qui fonctionnent bien, parce qu'il y en a, des
milieux qui fonctionnent bien, puis on ne se le cachera pas, et d'essayer de
comprendre pourquoi est-ce qu'ils
fonctionnent si bien, O.K., pourquoi... c'est quoi, leur modèle d'affaires,
c'est quoi, leur modèle de gestion.
Parce que, je vous dirais, dans ma formation à moi, dans ma formation médicale,
on n'a pas de formation de gestion
directement. Je veux dire, on apprend au fur et à mesure. Mais pourquoi ça
fonctionne si bien à certains endroits?
Essayer de comprendre ça et de l'étendre à la grandeur du Québec, ça serait la
base de cela. Et évidemment, un autre
acteur important dans tout ça, je pense que c'est les CMDP, évidemment, parce
qu'eux ce qu'ils vont apporter, c'est la qualité de l'acte aux patients.
Donc,
c'est important, tout le monde doit être... tout le monde doit travailler ensemble
pour un objectif commun. Et
ce qui est difficile avec le projet
de loi n° 130, c'est que les
gens ont l'impression que c'est imposé, c'est comme ça, puis on ne travaille pas main dans la main, on
travaille, on avance, tu suis ou tu ne suis pas... bien, vous suivez ou vous ne
suivez pas. Et donc je pense que
c'est un peu l'inconfort qu'on a avec tout ça. Mais je pense que la base, c'est
la collaboration.
Mme Lamarre :
Et est-ce que vous voyez que... Dans le système, depuis que, maintenant, on a
le projet de loi n° 10, le projet de loi n° 20, est-ce que vous voyez
cette collaboration de façon plus importante?
M. Lemieux (Christopher) : Je vous dirais, le projet de loi n° 10, le projet de loi n° 20, en fait, on a centralisé beaucoup.
Je vous dirais que les milieux sont encore... ne sont pas encore bien rodés, et
donc on n'a même pas encore terminé
la mise en place de tout ça qu'on apporte d'autres changements, donc c'est
difficile pour les équipes sur place de
suivre, de s'adapter aux changements. C'est sûr que l'objectif
des projets de loi antérieurs, évidemment c'est d'augmenter
l'accessibilité, et tout, mais le... Je pense qu'une chose doit se faire en
temps et lieu. Et, de toujours apporter des changements,
alors que les derniers changements n'ont pas encore pris totalement... ne se
sont pas complètement installés, je
pense que ça peut brusquer les milieux. Parce que tout le monde est d'accord
qu'on veut augmenter les soins, l'offre de services aux patients, mais des changements d'une aussi grande
importance ne peuvent pas se faire du jour au lendemain.
Mme
Lamarre : ...moi, ce que je vois dans la littérature et ce que je vois
aussi qui fonctionne dans les milieux où on est allés... On est allés
ensemble, le ministre et moi, à la Cleveland Clinic, et il y fait référence,
mais il y a des paramètres, parfois, qu'il
estompe dans la façon de présenter ce qui s'y passe, mais c'est beaucoup la
notion d'un épisode de soins complet, et non pas juste de cibler la
partie qui appartient aux médecins, aux résidents en médecine, dans le processus. Et souvent il y a des correctifs et il
y a, comme je disais tantôt, une synchronisation des soins qui fait qu'on
gagne en efficience, qu'on gagne en
performance. Au niveau des salles de chirurgie, on parlait tantôt... oui,
parfois, ça peut être le chirurgien
qui est en retard, ça peut être l'anesthésiste, ça peut être des procédures
nouvelles qui s'ajoutent et qui
nécessitent des périodes de 30 minutes entre les chirurgies, ça peut être
l'allongement des disponibilités des plateaux. Parce que je pense qu'il faut allonger les plateaux. Moi, quand
j'entends que les échographies ne sont pas disponibles dans les hôpitaux après 17 heures, le soir,
c'est inconcevable, là, qu'après 5 heures on n'ait plus d'échographie.
Alors, tout ça, ça paralyse aussi le
système, ça le rend beaucoup moins performant, ça fait des allers-retours pour
les citoyens. Et là, actuellement,
c'est comme s'il n'y avait que la pratique médicale qui était ciblée dans le
contexte hospitalier, actuellement.
M. Lemieux (Christopher) : Je vous dirais que c'est ça qu'on a l'impression.
Et je pense que, comme vous l'avez dit,
d'avoir les ressources, ça va permettre aux gens du milieu de pouvoir,
justement, fournir les services à la population. Les ressources, c'est la base aussi, parce que, sans ressources...
malheureusement, on peut bien vouloir, mais c'est très important.
Mme
Lamarre : J'ai quand même besoin d'entendre de votre part, comme
l'avenir de la pratique, que les médecins vont être ouverts à l'évaluation des pratiques, à une révision dans
l'organisation des soins, parce qu'il faut qu'on fasse mieux, c'est
certain. Et moi, j'ai vu beaucoup de processus... Je parlais, hier, d'envoi
de... de transmission de profil, d'ordonnance,
de transmission d'information sur les tests. On a parlé de surdiagnostic, de
surtraitement. Il faut absolument développer
chez les jeunes médecins cette acceptation et même cette recherche de
l'évaluation des pratiques pour qu'avec l'argent des Québécois on leur
en donne plus et que la qualité soit là. On est capables d'être bons au Québec,
on est capables d'être performants, mais il
faut un travail commun et coordonné. Et, malheureusement, le ministre pose
peut-être le bon diagnostic, mais il ne choisit pas le bon traitement en
ne tapant que sur une portion d'un épisode de soins.
• (17 h 20) •
M. Lemieux (Christopher) : En fait, oui, je suis tout à fait d'accord avec
vous. Comme on l'a déjà dit, en 2014, on
est ouverts à ce type d'évaluation, justement, pour améliorer la pratique. Puis c'est clair qu'en ayant les ressources
pour mieux s'évaluer ça va nous permettre de s'améliorer, parce que c'est sûr
que, si on n'a pas ce qu'il faut pour s'évaluer,
on ne peut jamais savoir... on ne peut jamais se comparer aux autres, on ne peut
jamais trouver qu'est-ce qu'on pourrait
améliorer pour justement offrir une meilleure... avoir une meilleure offre de
services. Et c'est clair que, pour nous, on embarque dans tout ça, là.
Mme
Lamarre : Est-ce que vous êtes prêts à en convaincre vos collègues
aînés, puisque parfois vous subissez les
conséquences? Est-ce que vous êtes capables d'influencer, vous pensez, les
médecins qui sont déjà en pratique et qui n'ont peut-être pas cette même culture? Parce que je pense qu'il faut
que ça passe par vous, les jeunes médecins, faire en sorte qu'il y ait des choses qui changent et
qu'il y ait une autre façon de voir ça, une façon de s'améliorer pour être au
service de la population plutôt que de voir
dans ces mesures-là strictement des mesures coercitives. Parce que, sinon, ce
qui arrive, c'est qu'effectivement on
se retrouve avec des projets de loi qui ont plus une approche coercitive qu'une
approche de travail en commun. Mais,
s'il n'y a pas cette première étape de reconnaître qu'il faut quand même qu'il
y ait des changements et que ces
changements-là passent par des bons indicateurs de pratique et une cohésion
dans la correction des éléments qui ne
fonctionnent pas, bien là, pour la
population, ce n'est plus acceptable, parce qu'il faut qu'il y ait quelque
chose qui se passe.
Le Président (M.
Merlini) : En 40 secondes, s'il vous plaît, docteur.
M. Lemieux (Christopher) : Oui, tout
à fait. Donc, effectivement, je veux dire, nous, on... je peux parler pour mes
membres, mais on garde cette position-là. Et c'est clair qu'on ne veut pas que
le fardeau soit sur l'ensemble de la relève
médicale. Donc, oui, on peut travailler à convaincre le maximum
de gens qu'on peut, mais, encore là, on ne peut parler que pour nous présentement. Et on est très ouverts, justement
à ce modèle de pratique là qui va nous permettre, tous ensemble, en collaboration,
d'offrir une meilleure offre de services à l'ensemble des Québécois et Québécoises.
Et,
juste en terminant, évidemment, comme j'ai demandé à M. le ministre, j'aimerais ça vous demander en tant que parti officiel de l'opposition l'assurance que, si le projet de loi n° 130 est mis en place, le fardeau des obligations
ne sera pas simplement sur les épaules de la relève médicale.
Le
Président (M. Merlini) : Merci beaucoup pour ce bloc d'échange, Mme
la députée de l'opposition officielle. Je me tourne maintenant
vers le...
Mme Lamarre :
...une seconde pour demander au ministre de vérifier quand même comment est
localisée la circonscription de Taillon, puisqu'il a fait référence à un coin
de rue...
Le Président (M.
Merlini) : Votre temps, malheureusement, est écoulé.
Mme Lamarre :
Alors, je pense qu'il devrait regarder où est Taillon.
Le
Président (M. Merlini) : Je
vais aller vers le deuxième groupe
d'opposition. M. le député de Lévis, vous avez 8 min 30 s pour
clore notre travail. À vous, M. le député de Lévis.
M. Paradis
(Lévis) : Merci, M. le Président. Je vous salue, Dr Lemieux, Me
Savignac, Me Laganière. Merci d'être là. Je
vais résumer un peu, parce qu'il s'est dit beaucoup de choses, puis c'est
parti d'une drôle de façon. En fait, ce
que je comprends à travers votre mémoire, c'est que, dans l'actuel projet de loi, vous craignez, quelque part... vous craignez plusieurs choses, mais
vous craignez notamment que l'administratif l'emporte sur le clinique.
M. Lemieux (Christopher) : ...surtout que ces obligations-là soient remises
sur les épaules de la relève médicale uniquement.
M. Paradis
(Lévis) : Des gens nous ont
dit, juste avant vous : Le projet de loi n° 130... Puis là je vais
aller dans cette direction pour que
vous puissiez exprimer votre vision fondamentale du projet de loi puis de ses
effets potentiels. Les gens nous ont dit : C'est un outil de plus dont on ne se
servira pas à outrance. Vous avez entendu comme moi, vous étiez là, vous avez assisté, là, vous avez entendu.
D'autres nous ont dit : Ça ne devrait pas effrayer ceux et celles qui ont
comme objectif... Puis vous l'avez dit
également, les nouveaux médecins ont cette volonté-là de faire que le système
soit meilleur puis roule davantage,
soit optimal. Alors, il y a des gens qui nous ont dit : Ça ne devrait pas
non plus effrayer ceux qui ont cette volonté-là. Ça va seulement
permettre, puis je reprends encore un terme qui a été dit en tout début d'audition, parce que, là, on boucle la boucle,
par la citation des CMDP qui disait : Nous, on les appelle les pas fins,
là... va servir à peut-être gérer les
pas fins, puis qui ne devrait pas, en tout cas en principe, effrayer ceux qui
font leur travail avec toute la volonté et le désir que tout aille bien
au nom du patient puis au nom de la profession.
Vous ne
pensez pas... Vous avez peur d'un dérapage avec un outil comme celui-là? Par
rapport aux affirmations qui ont été faites, comment vous vous
positionnez?
M. Lemieux
(Christopher) : Bien, en
fait, le problème est justement dans la limite derrière tout ça. C'est que,
présentement, on a un projet de loi, on
parle d'obligations qui vont être reliées à des privilèges, mais on ne sait pas
c'est quoi, la nature de ces
obligations-là. Tout à fait d'accord avec vous que... C'est sûr que quelqu'un
qui n'a pas une pratique déviante ne
devrait pas être affecté, si on veut, par des représailles. Mais, tout
de même, il y a tout de même ce risque-là d'avoir des obligations
qui sont non justifiées, si on veut, ou déraisonnables qui soient appliquées un
peu... sans bonne gestion. C'est un
peu... Puis c'est dur pour nous de s'exprimer parce que, justement,
on n'a pas ces obligations-là, on ne sait pas c'est quoi... jusqu'où
on peut aller, et c'est la raison principale, là, justement, de l'inquiétude
qu'on a dans ce projet de loi.
M. Paradis
(Lévis) : Ce n'est pas
évident de... C'est comme une plaidoirie en cours. Quand, habituellement, on
dépose les preuves pour être capables d'être
en mesure d'intervenir, là, il vous manque comme des outils, là, pour aller
plus loin.
Je vous pose
une autre question. Est-ce que vous avez... Si je vous disque des gens ont
l'impression qu'à l'occasion l'autonomie
professionnelle des médecins peut aussi être, à l'occasion, la cause de
l'inaccessibilité à certains soins de santé pour les patients, vous
répondez quoi?
M. Lemieux
(Christopher) : En fait, je
vous référerais au Code de déontologie des médecins qui, justement, a plusieurs articles, si on peut les appeler comme
ça, qui définissent comment un médecin devrait se comporter, et, à ce moment-là, si un médecin a une pratique plus
déviante, on a quand même les outils pour régler ce problème-là. Déontologiquement parlant, le médecin se doit
d'offrir des services... puis je m'en étais sorti un tout à l'heure, là, qui
était, tu sais : «Le médecin doit
collaborer avec les autres médecins au maintien et à l'amélioration de la
disponibilité, de la qualité du service avec compétence, intégrité et
loyauté.»
M. Paradis
(Lévis) : ...puis vous le
voyez, puis vous le savez, puis vous le dites vous-même, la pratique n'est
pas toujours optimale, on n'atteint pas
toujours l'objectif que vous souhaitez atteindre, parce que vous représentez
ceux et celles qui sont là puis qui
seront là, là, la relève, vous êtes là. Alors, malgré le code de déontologie,
malgré les outils existants, il y a
quand même des histoires qui sont rapportées puis qui touchent le patient chez
lui. Puis lui, il le ramène à sa plus
simple expression, là : une intervention chirurgicale qui est annulée, qui
est retardée, un bloc qui n'est pas là, des examens qui ne peuvent pas se faire, on ne commence pas à l'horaire...
Vous avez tout ça, là, je veux dire... Malgré ce que vous dites, la
déontologie et les outils qui existent déjà, on continue à patauger là-dedans.
M. Lemieux
(Christopher) : Bien, je
vous dirais, la question, c'est : Pourquoi on ne les utilise pas? Tu sais,
les outils sont déjà là et...
M. Paradis
(Lévis) : D'où je rejoins la
députée de Taillon qui a dit, il y a deux instants : C'est quoi, votre...
Alors, pourquoi on ne l'utilise pas?
Pourquoi, si ça existe, ça ne règle rien? Puis, si ça ne règle rien puis qu'on
ne les utilise pas, est-ce qu'il ne
faut pas un outil supplémentaire pour assainir, globalement, la pratique, faire
en sorte que vous soyez heureux dans... parce que c'est votre avenir?
M. Lemieux
(Christopher) : Bien, en
fait, je vous dirais, effectivement, le problème, à la base, c'est pourquoi
on ne les utilise pas. Et je ne pourrais pas
répondre à cela. Mais ça reste qu'on a déjà des mesures en place, bien, pour
régler ce type de problème là, et pourquoi
rajouter d'autres... bon, on va les appeler les outils, mais c'est d'autres
contraintes qui... Justement, est-ce que... Une fois qu'il va y avoir un
problème, comment qu'on va pouvoir gérer, justement, où est-ce qu'on va, c'est qui qui s'occupe de quoi, et compagnie? Donc, on
trouve que... Les règles sont déjà là, donc pourquoi ne pas les utiliser?
Pourquoi ne pas s'assurer, là, de bien les utiliser?
M. Paradis
(Lévis) : Tout à l'heure,
les gens qui représentaient aussi les RUIS disaient : Ça va peut-être
permettre de clarifier des zones
grises. Je poserai une question en terminant. Les gens nous ont dit :
L'effet néfaste, si tout ça prend forme,
c'est de provoquer une démotivation, voire une démobilisation des effectifs,
des gens qui sont dans la profession médicale.
Comment vous ressentez... Quels sont les échos que vous en avez, à travers ceux
et celles que vous représentez? Vous en représentez 3 700.
M. Lemieux
(Christopher) : Oui. Mais,
en fait, c'est un peu ce que vous soulevez, effectivement, parce que ce qu'on... dans tous les changements... L'objectif
de tout ça est louable, puis ça, c'est clair. C'est les façons de se rendre
à cet objectif-là qui
causent problématique aux gens dans le milieu, et particulièrement nos membres
sont, comme vous dites, probablement
en partie démoralisés de tous les changements qui se passent, de tout le
fardeau qui est, dans certains cas,
imposé à la relève médicale. Et c'est clair qu'on n'est pas dans un mode de
collaboration, mais plus dans un mode de
coercition, là, vraiment, là. Donc, ça, c'est problématique si on veut amener
des changements dans le milieu de la bonne façon et que ça se fasse de
façon harmonieuse.
M. Paradis (Lévis) : Merci.
• (17 h 30) •
Le Président (M. Merlini) : Merci
beaucoup, M. le député de Lévis, pour ce bloc d'échange. Dr Lemieux, Me
Savignac Dufour et Me Laganière, représentant la Fédération des médecins
résidents du Québec, merci de votre présence et de votre contribution aux
travaux de la commission.
Mémoires déposés
Avant de
terminer, je dépose donc les mémoires des organismes qui n'ont pas été
entendus. Je nomme l'Association des
groupes d'intervention en défense des droits en santé mentale du Québec,
l'Association des médecins hématologues et oncologues du Québec,
l'Association des spécialistes en médecine préventive du Québec,
la Centrale des syndicats du Québec,
M. Pierre Deshaies, la Fédération des centres d'assistance et d'accompagnement aux
plaintes, le Protecteur du citoyen,
l'Ordre des sages-femmes du Québec, le Regroupement des médecins omnipraticiens pour une médecine
engagée et le regroupement des sages-femmes du Québec.
Je lève donc
la séance de la commission. Ayant accompli son mandat, la commission
ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 17 h 31)