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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le jeudi 26 novembre 2015 - Vol. 44 N° 91

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 66, Loi sur les activités funéraires


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Table des matières

Remarques préliminaires

M. Gaétan Barrette

Mme Diane Lamarre

Mme Lise Lavallée

Auditions

Corporation des thanatologues du Québec (CTQ)

Fédération des coopératives funéraires du Québec (FCFQ)

Assemblée des évêques catholiques du Québec (AECQ)

L'Association des cimetières chrétiens du Québec

Regroupement provincial des comités des usagers (RPCU)

Autres intervenants

M. Dave Turcotte, président suppléant

Mme Véronique Hivon, vice-présidente

Mme Sylvie Roy

M. Sylvain Rochon

M. Mario Laframboise

*          M. Denis Desrochers, CTQ

*          M. Marc Poirier, idem

*          M. Alain Leclerc, FCFQ

*          M. Pierre Tardif, idem

*          M. Louis Dicaire, AECQ

*          M. Germain Tremblay, idem

*          Mme Monique Morin, L'Association des cimetières chrétiens du Québec

*          Mme Élise Briand, idem

*          M. François Chapdelaine, idem

*          M. Richard Prenevost, idem

*          M. Gino Cloutier, idem

*          M. Daniel Cyr, idem

*          M. Pierre Blain, RPCU

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures quarante et une minutes)

Le Président (M. Turcotte) : Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et aux auditions publiques sur le projet de loi n° 66, Loi sur les activités funéraires.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Lisée (Rosemont) est remplacé par M. Turcotte (Saint-Jean); M. Paradis (Lévis) est remplacé par Mme Lavallée (Repentigny); et M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière) est remplacé par M. Laframboise (Blainville).

Le Président (M. Turcotte) : Ce matin, nous entendrons la Corporation des thanatologues du Québec.

Remarques préliminaires

Sans plus tarder, je vais inviter M. le ministre de la Santé et des Services sociaux à faire vos remarques préliminaires. Vous disposez d'un temps de six minutes.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Merci, M. le Président. Vous me permettrez, M. le Président, d'abord de vous saluer, évidemment, de saluer mes collègues des oppositions pour l'étude... les consultations sur ce projet de loi et évidemment saluer les représentants de la Corporation des thanatologues. Bienvenue à cette consultation.

Alors, M. le Président, évidemment, vous ne serez sans doute pas surpris, peut-être que les gens qui nous écoutent le seront, mais les gens qui nous accompagnent ne le seront pas, la question des services funéraires est une question qui a été souvent débattue, et souvent débattue parce qu'on attendait qu'il y ait une certaine mise à jour de nos lois et règlements, et c'est ce à quoi on va s'attarder dans cette commission-ci.

Simplement pour mettre les choses en perspective, pour ceux qui suivent nos débats, moi-même, j'ai été très surpris de constater, à l'analyse de la loi, que nous avions des lois qui remontaient à 1888. Et, quand on regarde la documentation qui a été fournie et développée pour ce projet de loi là, on constate que c'est tellement vaste, ce sujet-là, qu'il y a plus de sept pages, même plus, une dizaine de pages de lois modifiées, ce qui signifie que... Je pense que, dans un monde moderne, il y a lieu de faire qu'il y ait une mise à jour de notre... peut-être pas de notre loi, parce qu'il n'y en a pas juste une, mais de ce sujet-là qui couvre une multitude de lois.   Alors, essentiellement, M. le Président, il s'agit ici de moderniser, de rationaliser, de simplifier, de ramener dans un endroit, législativement parlant, qui soit plus cohérent la multitude de lois et règles qui touchent et traitent des services funéraires de façon à ce qu'il y ait moins d'ambiguïté et que la chose... tant pour les intervenants du milieu que le gouvernement et d'autres autorités les choses soient plus claires.

Alors, M. le Président, on comprendra que, dans le monde des services funéraires, il y a un certain nombre d'éléments que je qualifierais de cardinaux. Il y a évidemment la question de la personne défunte, et là il y a donc des éléments de la loi qui visent à clarifier cette situation-là, certainement, à la lumière de nouvelles technologies qui existent aujourd'hui — et je suis convaincu que nos invités s'y adresseront dans quelques instants — tout comme il y a lieu, évidemment, de s'adresser à la question de la protection du public, tant sur le plan de ces opérations-là que du côté financier, mais également, évidemment, aussi sur la question de la protection du personnel qui travaille dans ce milieu-là, compte tenu, évidemment, des nouvelles technologies mais aussi de l'évolution de la situation populationnelle, notamment sur la question de la santé publique. Et, sans entrer dans le détail, on aura à s'adresser à la question de la gestion à la fois des cadavres et des cendres.

Alors, en rafale, M. le Président, je résume, là, les principaux objectifs qui sont visés par notre révision et je les énumère. Alors, ça vise à mettre en place un nouveau permis d'entreprise de services funéraires et de mettre fin à la délivrance de permis de directeur de funérailles, de prévoir des règles et des conditions liées à l'obtention des permis du secteur funéraire, de prévoir les cas et les situations où le permis peut être modifié, suspendu, révoqué ou non renouvelé, de traiter... pardon, d'habiliter le gouvernement à prendre des règlements en ce qui a trait aux normes d'hygiène, de protection, d'aménagement et d'équipement applicables à certaines activités funéraires, d'encadrer davantage les cimetières, columbariums et mausolées, de prévoir les règles applicables à l'inhumation et l'exhumation des cadavres, de confier aux entreprises de services funéraires la responsabilité du transport des cadavres, de prévoir des règles variables en fonction des maladies pouvant présenter des risques pour la santé de la population lorsqu'un cadavre en est porteur, de prévoir un encadrement souple relativement à la conservation et à la disposition des cendres humaines, de prévoir une gestion des cadavres en attente d'un statut de réclamé ou de non-réclamé dont le décès est constaté en dehors des établissements et dont la cause de décès ne relève pas du Bureau du coroner, de mieux outiller le ministre lors de l'inspection pour permettre l'application de la loi et des règlements, de retirer toute référence aux pratiques religieuses, de tenir compte de la réalité vécue dans certaines parties du territoire québécois.

Alors, M. le Président, évidemment, on aura compris que l'étendue des sujets qui peuvent être attachés à la pratique ou à la délivrance des services funéraires est vaste, d'où l'importance de mettre un peu plus de cohérence peut-être dans nos lois et règlements et particulièrement de les adapter à l'évolution de notre société et certainement à l'évolution de la culture de tout un chacun dans une société comme la nôtre qui est en pleine évolution.

Alors, voilà, M. le Président, je termine ici. Je vais donc vous redonner la parole pour que vous la donniez à quelqu'un d'autre.

Le Président (M. Turcotte) : Merci beaucoup, M. le ministre. Donc, j'invite maintenant la porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé et accessibilité aux soins et députée de Taillon à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de 3 min 30 s.

Mme Diane Lamarre

Mme Lamarre : Merci beaucoup, M. le Président. Je vous salue. Je salue également le ministre et les députés de la partie gouvernementale, mon collègue de l'opposition officielle le député de Richelieu, la députée de Repentigny et son équipe.

Bienvenue, messieurs et madame de la Corporation des thanatologues du Québec. J'ai eu l'occasion de rencontrer certains d'entre vous et je pense que vous nous avez démontré qu'il y avait effectivement pertinence à passer en revue cette législation qui affecte les activités funéraires. Parmi les enjeux que vous avez soulevés, notons que... Oui, notons que, dans les enjeux qui justifient ce processus, cette commission parlementaire, je pense que le fait qu'il y ait eu, depuis trois ans, les corps de près de 1 000 personnes qui n'aient pas été réclamés, en soi, ça suscite une réflexion, ça suscite le besoin de se pencher pour trouver des solutions à cette situation qui ne sont pas prévues actuellement, dans la législation actuelle.

Alors, dans l'ensemble du dossier que vous nous avez présenté, il y a également plusieurs autres éléments qui sont tout à fait pertinents et qui vont actualiser, je pense, les besoins. On voit de plus en plus de situations nouvelles au niveau des rites religieux ou laïques qui sont demandés aux organismes funéraires. Alors, tout ça, je pense, va faire l'objet de nos échanges tout au long de cette commission parlementaire, et je pense que ce sera intéressant, avec l'ensemble de tous les groupes qui viendront participer et qui sont avec nous dans la salle... Il y a déjà d'autres groupes qui sont présents et qu'on aura plaisir à entendre durant les prochaines journées et les prochaines semaines.

Alors, je vais également souligner la présence de la députée indépendante d'Arthabaska. Je vous salue et je m'excuse de ne pas avoir souligné votre présence au tout début.

Donc, je pense qu'on va entamer ces travaux avec beaucoup de collaboration, une grande ouverture et le souci d'actualiser la législation, de la rendre adéquate pour aujourd'hui et également d'essayer d'anticiper un peu l'avenir, puisque, on le voit, les projets de loi, ça prend parfois plusieurs années avant qu'on ne les revoie, alors ce n'est pas mauvais d'avoir un peu de vision pour être capable d'anticiper des problèmes qui sont déjà perçus ou qu'on constate ailleurs dans le monde.

Alors, merci. Très contente de pouvoir participer à ce processus législatif.

• (11 h 50) •

Le Président (M. Turcotte) : Merci beaucoup, Mme la députée de Taillon. J'invite maintenant la députée de Repentigny à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de 2 min 30 s.

Mme Lise Lavallée

Mme Lavallée : Merci beaucoup, M. le Président. Merci. Je suis très contente d'être ici, dans le cadre de ce projet de loi là, parce que ce n'était pas prévu, mais ça me touche, puisque je suis notaire depuis 35 ans. Je suis avec mon collègue de Blainville qui est aussi notaire.

Donc, dans notre pratique quotidienne, on a souvent été appelés à travailler dans le domaine de la mort, donc les règlements de succession ou les rédactions de testament. On a constaté, lorsque nous procédions à la rédaction de testaments, que de plus en plus de gens nous demandaient des dispositions pour la disposition des cendres. Ça devenait problématique, on se demandait si on pouvait le faire ou ne pas le faire, et chacun y allait de sa volonté.

On a constaté aussi dans la pratique la problématique des contrats de préarrangements qui souvent étaient perdus, donc des gens qui nous disaient : De quelle façon on peut retrouver le contrat, notre parente nous a mentionné qu'elle avait pris des préarrangements?, mais, le contrat, on ne le trouvait pas, on n'avait aucune idée où, avec qui ça avait été signé, et les gens repayaient pour des services funéraires. Donc, dans le projet de loi, j'ai constaté qu'il n'y en avait pas, mais j'ai l'intention d'en discuter. Et je suis contente de voir que, dans les mémoires que j'ai lus, il en était question.

Donc, j'espère que l'expérience que j'ai acquise au fil des années va permettre de faire avancer les travaux. Et je vais terminer... j'aurais dû commencer par ça, mais terminer en saluant mes collègues de l'opposition officielle, mes collègues de... et tous les gens qui sont ici présents. Merci.

Auditions

Le Président (M. Turcotte) : Merci beaucoup, Mme la députée de Repentigny. Donc, nous souhaitons la bienvenue à la Corporation des thanatologues du Québec. Pour les fins de l'enregistrement, je vais vous demander de bien vouloir vous présenter. Je vous rappelle que vous disposez d'un temps de 10 minutes pour votre exposé, et par la suite nous allons procéder à une période d'échange entre les parlementaires avec la commission. Donc, la parole est à vous.

Corporation des thanatologues du Québec (CTQ)

M. Desrochers (Denis) : Merci, M. le Président. Mmes et MM. les parlementaires, M. le ministre de la Santé. Mon nom est Denis Desrochers, et je suis président de la Corporation des thanatologues du Québec. À mes côtés se trouvent M. Marc Poirier, président du comité des affaires professionnelles de la corporation ainsi que le président de la Fédération internationale des associations de thanatologues, ainsi que Mme Annie Saint-Pierre, directrice générale de notre corporation.

La Corporation des thanatologues du Québec représente près de 500 professionnels et 179 entreprises et succursales du domaine funéraire au Québec. Nous représentons plus de la moitié de l'industrie au Québec. Nous sommes donc le principal interlocuteur du domaine.

Nous nous présentons devant vous aujourd'hui parce que nous avons besoin d'un nouveau cadre légal. Nous sommes heureux de voir apparaître ce projet de loi.

L'une des problématiques majeures avec laquelle nous composons est l'absence totale de reconnaissance légale des cendres humaines. Pourtant, sept Québécois sur 10 choisissent la crémation comme mode de disposition. C'est pourquoi, M. le ministre, nous tenons d'abord à vous remercier d'avoir eu le courage de rédiger cette loi. Il était grand temps, à notre avis.

Cependant, bien que nous appuyions le projet de loi n° 66 dans son ensemble, notre appui n'est pas sans réserve. Bon nombre de règlements qui suivront cette loi sont absents. Nous réclamons de connaître les règlements dans les meilleurs délais.

Sur les éléments bénéfiques, l'un des éléments les plus importants du projet de loi se trouve dans l'article 4, où l'on indique que les cendres humaines et les dépouilles doivent être traitées en toutes circonstances avec respect de la dignité du défunt. C'est là, pour nous, un énorme pas dans la bonne direction.

Ceci étant dit, nous craignons toutefois que la compréhension de la dignité humaine diffère d'une personne à l'autre, ce qui est digne pour l'un n'est pas nécessairement digne pour l'autre. Nous craignons que ces interprétations minent l'application de la loi et ramènent les thanatologues dans un flou où certaines dérives sont permises. En ce sens, nous invitons le gouvernement à solliciter des autorités externes pour définir la dignité humaine en matière funéraire. Nous croyons que le Comité national d'éthique sur le vieillissement ou autre pourrait statuer.

Un grand pas est aussi fait dans le dossier des cendres abandonnées. Nous apprécions particulièrement l'article 52 et 53 du projet de loi. Ces articles nous donnent l'option de disposer légalement et dignement, après un an, des cendres.

Permettez-moi maintenant de vous soumettre certains points à modifier. D'abord, pour nous, le recours au terme de «cadavre», dans le projet de loi, est inacceptable. Dans le domaine funéraire, nous travaillons auprès des défunts, des personnes décédées, des corps ou des dépouilles mais jamais avec un cadavre. Le terme «cadavre», pour nous, ne reflète pas cette notion de dignité à laquelle nous tenons tellement.

Il y a aussi d'autres points que nous souhaitons voir clarifiés ou modifiés. C'est le cas de la définition de «parent». Au XXIe siècle, les liens personnels sont souvent plus complexes que ne peuvent être simplement expliqués par un lien de sang ou un lien de mariage. C'est pourquoi nous proposons une définition plus large et plus hiérarchisée afin de déterminer clairement qui devient le responsable dans le domaine funéraire. Au moment d'un décès, certaines personnes s'improvisent comme le responsable.

Nous demandons aussi de revoir l'obligation de détenir un lot dans un cimetière pour l'exploitant d'un columbarium. L'article 45 nous étonne. Selon nous, cette proposition n'est pas applicable, c'est un dédoublement inutile.

L'abandon, maintenant, de la division et de la dispersion des cendres. À l'article 70 et 72, on propose comme... une entreprise funéraire doit remettre les cendres aux familles. Ici aussi, nous avons des suggestions. Il arrive fréquemment que plusieurs membres d'une même famille demandent d'obtenir chacun une partie des cendres afin de conserver un souvenir du défunt. Selon nous, les endeuillés n'ont pas à faire cette division des cendres eux-mêmes, par leurs propres moyens. Nous proposons que les cendres d'un défunt soient remises à un membre de la famille dans l'un ou dans certains contenants rigides et fermés.

L'article 72 sur la tenue d'un registre portant sur la dispersion des cendres par les familles. Selon nous, ce registre est irréaliste, nous n'avons aucun moyen de vérifier ce que font les familles avec les cendres. D'ailleurs, nous réclamons aussi que l'article 34 sur la présentation des dépouilles s'applique aussi aux cendres humaines. Pour nous, les cendres sont aussi des restes humains.

En plus des éléments bénéfiques, nous pensons que ce projet de loi est l'occasion de bonifier l'encadrement des thanatologues. C'est le cas dans le cas de la création d'un registre confidentiel des contrats d'arrangements préalables. Nous ajoutons qu'en matière de professionnalisme nous croyons que la création d'un mécanisme d'autorégulation du domaine funéraire dont l'adhésion serait obligatoire est une meilleure façon de défendre les intérêts des Québécois.

Je termine en abordant la question de la prestation de décès, dont vous avez entendu sûrement parler récemment. Il arrive malheureusement trop souvent que la prestation de décès serve à d'autres fins que de payer les frais funéraires.

En conclusion, nous appuyons le principe du projet de loi n° 66. Nous demandons par contre plusieurs amendements. Nous souhaitons voir les règlements le plus tôt possible.

Avant de répondre à vos questions, je vous invite à consulter notre mémoire, très étoffé, dans lequel vous trouvez toutes nos recommandations en annexe.

Merci de votre attention. Et nous sommes prêts maintenant à répondre à vos questions.

Le Président (M. Turcotte) : Merci, M. Desrochers. Nous allons maintenant passer au bloc ministériel. Juste un instant.

(Consultation)

Le Président (M. Turcotte) : Donc, on va passer au bloc ministériel. Donc, M. le ministre.

• (12 heures) •

M. Barrette : Alors, merci, M. le Président. Alors, M. Desrochers, M. Poirier, Mme Saint-Pierre, bienvenue à cette commission. Et merci d'avoir pris le temps de nous proposer et déposer un mémoire, qui expose effectivement pas mal clairement quelle est votre position, et manifestement ça nous éclaire.

Évidemment, la commission, ici, elle est là pour que vous puissiez nous instruire de votre vision des choses, c'est vous, les experts dans ce domaine-là. Et je reçois quand même assez... je reçois bien, sans que je vous donne nécessairement une annonce de quoi que ce soit, là, vos commentaires. Je les comprends bien, c'est comme ça qu'il faut recevoir mon commentaire.

Il y a une chose qui me surprend, par exemple, là-dedans, je dois vous avouer, là. Vous nous demandez de définir la dignité dans une loi, et ça, je suis un peu étonné, parce que de définir la dignité dans une loi, ça m'apparaît quelque chose de très difficile. J'aimerais vous entendre là-dessus, parce que vous ne serez pas surpris si je vous dis que ce que l'on considère digne aujourd'hui n'était pas la même chose il y a 20 ans, 50 ans, 70 ans, là, et, comme nos lois se mettent à jour comme aux 50 ans, là, ou presque, ça m'apparaît hasardeux de faire ça. Même, honnêtement, je pense que ce n'est pas possible, là, la dignité étant une chose que l'on comprend aujourd'hui mais qui est certainement une résultante plutôt qu'une définition, une résultante étant... Ce que je veux dire par là, c'est que ce qui, comme vous l'avez dit vous-mêmes, peut être digne pour un ne l'est pas nécessairement pour l'autre. Alors, ça m'apparaît, même pour aujourd'hui, difficile à faire.

M. Desrochers (Denis) : Si vous me permettez, M. le ministre, ce qu'on suggère, en fait, c'est que cette interprétation-là de la dignité soit faite par des comités qui existent déjà au sein du gouvernement dans d'autres orientations. On parle du Comité national d'éthique sur le vieillissement ou, enfin, du comité sur la dignité pour la fin de la vie, là. C'est des comités qui existent, qui peuvent apporter un éclairage réfléchi sur l'interprétation de la dignité.

Donc, pour nous, dans ce sens-là, effectivement, on sait que le terme de «dignité» est évolutif, on le voit probablement beaucoup plus, cette définition-là, dans un règlement que dans la loi, mais il n'en demeure pas moins qu'il est important d'encadrer ce qu'on appelle la dignité humaine parce que, pour nous, ce qui en découle, les actions qui en découlent vont être interprétées en fonction de la définition qu'on va lui donner. Donc, pour nous, il y a un exercice qui se doit d'être fait. On le définit dans d'autres organismes qui sont parallèles au gouvernement, qui sont des interprètes, en fait, des gens qui nous aident à réfléchir là-dessus.

Le Président (M. Turcotte) : M. le ministre.

M. Barrette : Si vous me le permettez, peut-être pour compléter cet échange-là, vous n'avez pas abordé... Parce que, la question de la dignité, je me serais attendu à ce que vous alliez... ça vous permette d'aller du côté des rites en fonction des différentes cultures, et vous n'avez pas abordé ça. Avez-vous quelque chose à nous transmettre comme vision de ça? Parce qu'aujourd'hui la société québécoise n'est plus ce qu'elle a déjà été, là, on ne peut plus diviser le Québec entre catholiques et protestants, par exemple, là. En tout cas, disons que la composition change, et l'actualité nous montre qu'elle changera. Alors, vous n'avez pas abordé ça. Et là, quand on arrive à la question de définir la dignité, il me semble qu'on rentre dans un terrain plus difficile.

Le Président (M. Turcotte) : M. Desrochers.

M. Desrochers (Denis) : Écoutez, simplement vous dire, ce qu'on voit dans notre pratique de tous les jours, c'est qu'effectivement les rituels évoluent à vitesse grand V. Le domaine funéraire a été pendant 200 ans à peu près une constante dans les traditions. Tout le monde avait des visites au salon funéraire pendant deux jours, tout le monde allait à l'église et tout le monde se faisait enterrer dans le cimetière paroissial, on convient de ça. Depuis les 15 à 20 dernières années, les rituels funéraires, vous l'avez bien mentionné, vous l'avez souligné, ont changé à vitesse grand V. Maintenant, la résultante de ça, c'est qu'on est dans des épisodes ou dans des demandes de rituel funéraire... Exemple, on voit aux États-Unis une dame qui s'est fait embaumer, s'est fait installer à sa table avec un jeu de cartes puis un verre de vin, puis qui reçoit les gens au salon funéraire. C'est assez étonnant comme rituel. Est-ce que c'est digne? Est-ce que c'est respectueux? À notre sens à nous, pas nécessairement. Il y a quand même un niveau de dignité...

Et aussi, en même temps, le prolongement de la dignité va avec qu'est-ce qu'on fait avec les cendres humaines. Bien souvent... Pour nous, les cendres sont des restes humains, et aux yeux de la loi elles n'existent pas, les cendres. Les rituels, maintenant, à partir du moment où est-ce qu'un corps n'existe plus et ce sont des cendres, on peut faire n'importe quoi, et c'est le n'importe quoi qui est difficile à baliser. On a besoin de support pour baliser. On est des experts en rituels funéraires, on peut aider, sauf qu'à un moment donné, si moi, j'accepte de faire certains types de rituel funéraire, peut-être, pour d'autres, ils ne l'accepteront pas. On a besoin de guides, justement, pour nous aider à bien faire ce type de rituel funéraire là.

Encore pas loin de chez nous... Je parlais d'un cas américain, mais pas loin de chez nous, à Valleyfield, il y a quelque temps, une dame est allée porter les cendres dans un supermarché, dans les mains d'un commis, parce qu'elle voulait s'en débarrasser. Donc, à un moment donné, là, le n'importe quoi... Est-ce que c'est digne? À mon sens, je ne crois pas.

Ce qu'on demande, tout simplement, c'est d'avoir une réflexion avec des gens qui méritent et qui sont capables de faire cette réflexion-là. On ne s'en remet pas strictement à notre simple bon vouloir. On pense qu'il y a des gens qui sont capables d'en arriver à une définition à laquelle on pourrait facilement adhérer.

Le Président (M. Turcotte) : M. le ministre.

M. Barrette : Juste pour partager avec vous un état de fait, le mot «dignité» apparaît dans 45 lois et à 197 reprises dans les règlements. Vous comprendrez que faire une définition de la dignité, ça peut poser problème.

Vous avez dit tantôt... vous avez commencé vos commentaires ou vos remarques introductives en référant à l'industrie dans laquelle vous participiez. Et, dans votre mémoire, vous critiquez — puis c'est correct, là, ce n'est pas négatif, ce que je dis là, là — vous qualifiez d'inapplicable la question de réserver un lot au cimetière pour inhumer, si vous me permettez, ou enterrer des cendres. Et ça, vous trouvez ça inapplicable, et ça, ça m'étonne beaucoup, je ne vois pas en quoi c'est inapplicable.

Puis là je vais préciser ma question. Vous êtes une industrie. Vous le présentez comme ça, puis je pense que vous avez raison, vous êtes une industrie. Donc, vous êtes en affaires. Et, à partir du moment où vous êtes en affaires, il me semble qu'il y a une responsabilité qui vient avec, là. Puis, dans la même approche, là, ou sur la base du même argumentaire qui... ne serait-ce que celui de la dignité, là, mais mettons-le plus affaires, j'ai de la misère à vous suivre dans votre vision ou conclusion d'inapplicabilité de la disposition des cendres d'un columbarium qui fermerait, par exemple, et à qui, dans la loi, on donnerait l'obligation d'avoir un terrain pour les enterrer. Je ne comprends pas cette position-là.

Le Président (M. Turcotte) : M. Desrochers.

M. Desrochers (Denis) : Écoutez, ce qu'on dit, essentiellement, c'est qu'il y a une duplication de lois, en fait. Ce qu'on dit, c'est que, si on considère les cendres humaines comme des restes humains, un columbarium, à notre conception à nous, est l'équivalent d'un cimetière.

Donc, pourquoi, si on a un columbarium, il faudrait en plus avoir des lots au cimetière, pour être capable de maintenir et opérer un columbarium? C'est là que ça devient difficilement applicable, parce que, là, à ce moment-là, on exige quasiment, jusqu'à un certain point, à ce que certaines maisons funéraires qui ont... — vous l'avez mentionné, on est en affaires — de devenir propriétaires de terrains, devenir opérateurs de cimetière. Ça devient... La quantité de cendres dans un columbarium... la quantité, pardon, d'urnes que nous avons dans un columbarium versus l'emplacement que ça prend dans un cimetière, on ne parle pas de la même chose, là, parce qu'il y a des règles, dans les cimetières, qui empêchent, par exemple, un propriétaire d'un lot au cimetière d'avoir, par exemple, autant d'urnes que je peux avoir sur un terrain. C'est des règles de cimetière, puis on est à la merci de ça, là.

Le Président (M. Turcotte) : M. le ministre.

M. Barrette : Oui, M. le Président, merci. Mais, malgré tout, ça m'apparaît difficile de dire que c'est inapplicable.

M. Desrochers (Denis) : Bien, en fait, ce qu'on vient dire, c'est que, si... À partir du moment où est-ce qu'on statue qu'un columbarium est un lieu de disposition final, pourquoi avoir un cimetière, avoir un lot au cimetière? C'est l'équivalent, là.

M. Barrette : Je comprends, mais, à ce moment-là, ce n'est pas une question d'inapplicabilité, c'est une question de prise de position d'affaires.

M. Poirier (Marc) : Si vous permettez, monsieur...

• (12 h 10) •

M. Barrette : Parce que, si vous me le permettez, peut-être pour clarifier ma position, là, et vous permettre de clarifier la vôtre aussi, un columbarium, là, en mètres carrés, ce n'est pas comme un cimetière, comparativement au nombre d'individus, en relation au nombre d'individus dont les cendres sont hébergées dans le columbarium, alors c'est la même chose pour le terrain éventuel. Je vois mal l'inapplicabilité. Je comprends votre argument sur le plan affaires, si c'est ça qui est la raison, mais j'ai de la misère à vous suivre sur l'inapplicabilité de la chose.

Le Président (M. Turcotte) : Je crois que, M. Poirier, vous vouliez intervenir.

M. Poirier (Marc) : Il faut considérer que ça s'appliquerait... si j'ai bien compris le sens, ça s'appliquerait dans le cas où une entreprise devait fermer, cesser ses opérations, et qu'au niveau de cette entreprise il y ait un columbarium. C'est sûr que celui qui a accepté de mettre au monde un columbarium, dans l'entreprise privée, déjà il prenait la responsabilité un jour de voir à la disposition. D'ordre général, les gens qui demandent à déposer les cendres dans un columbarium, c'est parce qu'ils ne veulent pas qu'elles soient enterrées, alors il ne faudrait pas que par la loi ces cendres se retrouvent obligatoirement enterrées. Il y a un processus qui doit être établi pour retourner les cendres aux familles, si cette entreprise doit fermer ses opérations, dans un premier temps, et leur laisser faire le choix. Et, dans le cas de difficulté de rejoindre les gens pour pouvoir en disposer ou quoi que ce soit, là il y aurait lieu de voir qu'est-ce qui peut être fait pour continuer à respecter la première idée de l'usage d'un columbarium.

Le Président (M. Turcotte) : M. le ministre.

M. Barrette : Donc, dans ce cas-là, vous accepteriez qu'elles soient inhumées.

M. Poirier (Marc) : On n'a pas à l'accepter, que ce soit inhumé, en tant que responsables d'une entreprise, mais à tout le moins il doit y avoir un effort de fait pour que les familles puissent se prononcer avant qu'on en ait disposé. C'est là qu'à un moment donné il y a comme une difficulté.

M. Barrette : Très bien. J'ai terminé mon intervention, M. le Président.

Le Président (M. Turcotte) : C'est terminé? Nous allons passer maintenant à la députée de Taillon pour l'opposition officielle. Vous disposez d'un temps de 8 min 15 s.

Mme Lamarre : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bienvenue, M. Desrochers, Mme St-Pierre et M. Poirier.

On va aller rapidement parce qu'on n'a pas beaucoup de minutes. Je regarde, en complément aussi, là, de ce qui a été échangé, mais vous avez tout de suite au début de votre mémoire une demande que vous formulez par rapport à la définition du parent, pas parent dans le sens père et mère, là, mais de la personne la plus proche ou la personne responsable, et à la page 24 de votre mémoire vous avez déterminé un certain ordre de priorité, ce que je trouve qui est déjà un travail qui est louable, mais pouvez-vous nous parler un peu des difficultés que vous avez actuellement et de ce qui vous a amenés à faire cet ordre de priorité, là, qui me semble logique, mais, sur certains éléments, on pourrait aussi placer d'autres personnes à d'autres niveaux. Donc, peut-être nous défendre votre point de vue.

M. Desrochers (Denis) : Il faut comprendre que...

Le Président (M. Turcotte) : M. Desrochers.

M. Desrochers (Denis) : Merci. Quand on est dans une situation où est-ce qu'une personne décède, il arrive... je ne vous dirais pas régulièrement, mais qu'il arrive parfois que des gens s'improvisent parent : un voisin, une connaissance. On découvre le décès d'un ami, et, bon, le premier réflexe, c'est de dire : Bon, bien, regardez... Une fois que le décès est constaté, il faut le prendre en charge, il faut s'en occuper. Et donc, à ce moment-là, on aide à définir la notion d'avec qui on peut avoir une relation pour décider des dernières volontés de la famille. Et on ne veut pas se rendre après coup...

Je vais vous donner un exemple très pertinent, le cas où est-ce qu'une dame décède et sa voisine, voulant bien faire, appelle une maison funéraire pour en prendre charge. On s'en occupe parce que la madame nous donne la permission de le faire, selon nos protocoles de travail. Et, ceci étant dit, c'est qu'une fois que la personne est rendue sous notre protection, bien tout d'un coup elle se rend compte que, tu sais, la madame n'a pas de sous puis, à part qu'être sa voisine, elle n'a pas vraiment une relation... elle n'est pas liquidatrice dans le testament ou quoi que ce soit. Donc, on se ramasse avec cette personne-là dans nos installations, et il n'y a pas personne qui veut en prendre la charge, parce que cette dame-là... Et donc c'est pour ça qu'on veut qu'on spécifie, justement, une hiérarchie de gens qu'on peut définir comme étant des personnes apparentées ou une relation... La voisine n'est peut-être pas la meilleure des relations pour ce cas pertinent.

Le Président (M. Turcotte) : Mme la députée.

Mme Lamarre : Bien, si je prends juste... je poursuis votre exemple, de quelle façon... Il faudrait que ce soit vous qui, à ce moment-là, vérifiiez qui est la bonne personne, qui est la personne responsable. Donc, la notion de registre vous aiderait peut-être, à ce moment-là.

Le Président (M. Turcotte) : M. Desrochers.

M. Desrochers (Denis) : Vous parlez de registre pour les préarrangements funéraires, c'est dans ce sens-là que vous parlez?

Mme Lamarre : Oui.

M. Desrochers (Denis) : Naturellement, c'est sûr qu'une personne qui a des préarrangements funéraires, en partant, je vous dirais qu'on vient de solutionner une grande partie de l'équation.

Ceci étant dit, le registre de préarrangements funéraires, on veut que ce soit quelque chose qui soit confidentiel quand même, ce n'est pas tout le monde qui peut aller solliciter le registre, comme tel, mais ça aiderait effectivement les familles à définir, bien souvent, les souhaits et les volontés de la personne décédée, si dans un tel cas il y a un préarrangement funéraire. Ça peut être une aide, mais ce n'est pas une fin en soi. C'est certains cas, ce n'est pas tout le monde qui a des préarrangements funéraires.

Le Président (M. Turcotte) : Mme la députée.

Mme Lamarre : Donc, vous avez cette liste et vous considérez que ce serait plus pertinent d'avoir ce niveau de priorité là, ça correspond plus à votre réalité, là. Si on regarde, au tout début, bien sûr, là, ce serait d'abord le représentant personnel nommé par la personne décédée, le conjoint, l'enfant d'âge adulte, le petit-enfant d'âge adulte. Donc, vous gardez quand même beaucoup de liens familiaux, alors que dans la vraie vie, actuellement, il y a peut-être plus de liens civils que de liens parentaux. Est-ce que...

M. Desrochers (Denis) : C'est sûr que la déclinaison dans laquelle on a donné la hiérarchie, c'est à titre suggestif, on s'entend, là, ce n'est pas défini. C'est qu'on aide, en fait, le législateur à réfléchir, justement, à une hiérarchie à tout le moins plus claire pour nous aider...

En fait, bien souvent, quand survient un décès, on a une fenêtre où est-ce qu'on peut agir... ou en fait bien souvent c'est en urgence, hein? Même si la personne est décédée, il n'en demeure pas moins qu'on ne peut pas attendre des semaines, donc, c'est bien souvent le fait de quelques heures. Et donc trouver la personne, la bonne personne qui peut nous aider à organiser et à planifier un rituel funéraire approprié pour la personne décédée, c'est une question de délai assez rapide, donc on a besoin, justement, peut-être d'outils pour ça, pour nous outiller à définir avec qui on peut parler et qui est responsable vraiment dans le domaine.

Le Président (M. Turcotte) : Mme la députée.

Mme Lamarre : Merci. Un des éléments aussi que vous évoquez dans vos recommandations, c'est d'augmenter la prestation de décès de la Régie des rentes du Québec qui est à 2 500 $. Donc, pouvez-vous nous expliquer un peu? Parce que je vous dirais que, pour le public, il reste que, quand il y a un montant qui est donné, on a l'impression parfois que tout tend à s'ajuster au montant éligible, alors il y a ce risque-là. En même temps, c'est vrai qu'il est possible qu'il y ait des coûts qui changent avec le temps. Mais comment nous aider à nous assurer qu'on va prendre vraiment la meilleure décision par rapport à ces coûts, à cette prestation de décès?

Le Président (M. Turcotte) : M. Desrochers.

M. Desrochers (Denis) : Il faut bien comprendre que, la prestation de décès, je comprends bien que ce n'est pas l'affaire du ministère de la Santé, on en est très conscients. Par contre, l'opportunité, la tribune qu'on nous offrait aujourd'hui est tout à fait appropriée à sensibiliser, en fait, le gouvernement et les législateurs, en fait, que la Régie des rentes du Québec est un organisme... c'est des gens qui cotisent à la Régie des rentes du Québec, donc c'est le travailleur qui se paie ce programme-là, la situation étant que depuis 1998 la règle de prestation de décès de 2 500 $ existe, 1998. M. le ministre a mentionné tout à l'heure qu'effectivement ça prend des lunes avant de changer les règles dans le domaine funéraire, c'en est un autre bel exemple. Le programme n'a pas changé.

Donc, il faut être conscient, forcé d'admettre que, depuis 1998, les prix ont changé. Et on tend toujours à travailler dans un rituel digne et respectueux envers la personne décédée, il n'en demeure pas moins qu'il devient de plus en plus difficile de fournir une offre de services digne et respectueuse à un montant si minime, donc...

Le Président (M. Turcotte) : Mme la députée, il vous reste 30 secondes.

• (12 h 20) •

Mme Lamarre : Oui. En fait, je voulais vous donner peut-être l'opportunité de parler des articles 52 et 53 que vous avez dit appuyer et que vous considériez un élément positif dans le projet de loi, qui concernent la disposition des cendres. Vous en avez parlé un peu tantôt avec le ministre, mais peut-être nous apporter votre point de vue sur qu'est-ce que vous souhaitez de façon plus spécifique. Est-ce que ce qui est marqué dans l'article 52, 53 vous convient parfaitement? Est-ce que vous avez des ajouts ou des modifications?

M. Desrochers (Denis) : En fait, l'article 52, 53 vont dans le sens dans lequel nous voulons... nous travaillons, et nous croyons que le législateur est dans la bonne voie, dans ce sens-là, au sein de l'article 52 et 53...

Le Président (M. Turcotte) : M. Desrochers, je vais devoir malheureusement vous couper, le temps est épuisé pour le bloc de l'opposition officielle. Nous allons maintenant passer à la deuxième opposition. Mme la députée de Repentigny, pour un temps de 5 min 30 s.

Mme Lavallée : Merci beaucoup. Bienvenue.

Tout à l'heure, dans mon introduction, j'ai parlé des fameux contrats de préarrangements. Dans la pratique, on s'est rendu compte que des gens prévoyaient avant le décès de quelle façon ça se passerait, signaient des contrats avec des entreprises, et par mégarde les contrats étaient perdus. Arrive le décès, et on ne trouve pas. La famille sait très bien que la personne a pris un... a signé un contrat mais ne le trouve pas. Et on réalise qu'il n'y a pas de registre.

Donc, vous en parlez dans votre document. J'aimerais ça que vous nous parliez de l'expérience que vous avez, qui vous a amenés à faire cette proposition-là.

Et mon autre questionnement, c'était : Qu'est-ce qui arrive avec l'argent qui a été placé en fiducie et pour lequel une personne a acquitté ses frais funéraires, et la personne est décédée, on a repayé? Qu'est-ce qui arrive avec cet argent-là? Donc, ce seraient les deux questions.

M. Desrochers (Denis) : En deux temps, votre question...

Le Président (M. Turcotte) : M. Desrochers.

M. Desrochers (Denis) : La première, c'est qu'effectivement trop souvent aujourd'hui les gens réalisent... contractent des préarrangements funéraires avec des maisons funéraires, mais malheureusement ils ne le disent pas à leurs membres de la famille. Donc, le résultat, c'est que, malheureusement, quand cette personne-là décède... Et on a plein de cas patents de gens qui vont décéder qui ont des préarrangements funéraires, et les proches contractent un rituel funéraire auprès d'une autre maison funéraire ou... pas la même maison funéraire, parce qu'il y a des lumières qui s'allumeraient, mais avec une autre maison funéraire. Donc, il y a un double paiement pour une même personne d'un rituel funéraire.

Et, à savoir maintenant qu'est-ce qui arrive avec ces sommes d'argent là, il faut bien comprendre qu'elles sont déposées dans des institutions financières, et c'est les institutions financières qui en bénéficient. Et théoriquement... bien, en fait, théoriquement... pratiquement parlant, les gens qui ont payé ces sommes d'argent là destinées aux préarrangements funéraires, ça doit revenir à la famille. Donc, il y a des formulaires de résolution qui existent. Si on le sait, en fait, on annule le contrat et on doit rembourser la famille. Parce qu'il faut bien comprendre : dans le cas qu'on parle, la personne, le rituel funéraire a déjà été fait ailleurs.

En ayant le registre, on vient à tout le moins préserver, au moins avertir les gens qu'il y a deux... il y a un préarrangement funéraire. S'ils ont conclu avec une autre maison funéraire, à tout le moins ils pourront résilier le contrat et récupérer les sommes d'argent, qui appartient à la famille. Donc, encore une fois, c'est par souci... Le consommateur ne doit pas payer deux fois pour un seul service qu'il va obtenir.

Le Président (M. Turcotte) : Mme la députée.

Mme Lavallée : Mon autre question, c'est : Qui pourrait gérer ce registre-là? Parce que c'est sûr qu'on parle de peut-être créer une autre structure, il y a des coûts toujours rattachés à ça. Qui, selon vous, seraient les mieux placés pour gérer ce groupe-là?

Et comment avoir accès? Parce que tout à l'heure vous avez parlé de confidentialité. Qui pourrait avoir accès à cette information-là, de quelle façon? Parce que, bon, quand on veut accéder au registre des testaments, lors d'un décès, il faut avoir le certificat de décès, mais dans ce cas-là c'est confidentiel, il faut créer le mécanisme d'accès, là.

M. Desrochers (Denis) : À notre sens à nous, le Directeur de l'état civil est probablement l'autorité la mieux placée pour le faire, parce qu'à partir du moment où est-ce qu'on déclare un décès, forcément, il y a... Tous les renseignements contenus, déclarés au Directeur de l'état civil, il est probablement l'organisme le mieux placé pour être capable de répondre à cette question.

Il doit y avoir un drapeau rouge qui à peu de frais, informatiquement parlant, autorise tout simplement... qui dit qu'une personne a un préarrangement funéraire. Donc, la maison funéraire, au moment où est-ce qu'on contracte un préarrangement funéraire, enregistre tout simplement le préarrangement funéraire comme la Chambre des notaires le font avec les testaments mais auprès du Directeur de l'état civil, et, si la personne décède, il y a un drapeau rouge qui se lève en disant : Oups! cette personne-là a un préarrangement funéraire. Et, à partir de là, à partir de l'information, elle peut être traitée, la famille peut bénéficier de cette information-là. Je pense que c'est probablement... En tout cas, à notre sens à nous, c'est la façon la plus simple et la plus économique de le faire, là.

Le Président (M. Turcotte) : Mme la députée, il vous reste 40 secondes.

Mme Lavallée : Donc, ça pourrait se faire assez facilement, selon ce que vous nous dites.

M. Desrochers (Denis) : À mon humble avis, oui. D'après moi, technologiquement parlant, ça ne demande pas une grande complexité ni énormément de frais à investir par l'État, dans un système comme celui-là, quand le Directeur de l'état civil reçoit déjà tous les décès ici, en province. Donc, forcément, toute personne est déclarée décédée au Directeur de l'état civil. C'est la façon la plus facile de trouver une solution au problème.

Le Président (M. Turcotte) : Merci beaucoup. Je vais céder maintenant la parole à la députée d'Arthabaska pour un temps de 2 min 30 s.

Mme Roy (Arthabaska) : Oui, bien, pour une autre expérience, comme avocate j'ai souvent demandé des certificats de naissance, des certificats de mariage mais jamais des certificats de décès. En moyenne, c'est quel délai pour obtenir un certificat de décès?

M. Desrochers (Denis) : Au Directeur de l'état civil?

Mme Roy (Arthabaska) : Oui.

M. Desrochers (Denis) : Dans le moment, je vous dirais, dépendamment si on demande de la façon accélérée, si ma mémoire est bonne, là, on parle d'un délai de quelques jours, là, d'une semaine, à peu près.

Mme Roy (Arthabaska) : Mais une semaine est-ce que c'est trop, pour vous, pour savoir s'il y a un arrangement préalable?

M. Desrochers (Denis) : C'est sûr qu'après sept jours il est clair que probablement qu'il est déjà trop tard, parce que le rituel funéraire, bien souvent, il est déjà réalisé.

Par contre, dans notre conception à nous, c'est que de recevoir un certificat de décès, c'est une chose, mais l'information est déjà au Directeur de l'état civil parce que nous, on les enregistre électroniquement, les décès. Donc, il y a une lumière qui peut s'allumer facilement, là.

Mme Roy (Arthabaska) : Parce que je me demandais si on pouvait annexer la déclaration qu'il y avait déjà eu des arrangements préalables à l'émission du certificat de décès, mais ce ne serait pas possible parce que ce serait trop tard.

M. Desrochers (Denis) : D'après moi, oui.

Mme Roy (Arthabaska) : Mais, quant au fait que ce registre-là demeure confidentiel, je pense que c'est assez facile, parce que le directeur du registre de l'état civil a déjà des registres confidentiels comme pour les enfants adoptés ou dans d'autres domaines, là. Donc, ça, ça peut fonctionner.

Maintenant, au niveau de la dignité, si on revient — moi, j'ai 2 min 30 s, c'est pour ça que je parle vite — je pense que le ministre a raison, on ne peut pas la définir de façon statutaire dans la loi. Mais par contre est-ce qu'on ne pourrait pas déléguer un organisme, un des deux que vous avez nommés, qui devrait faire une définition et la réviser à tous, admettons, les deux ans, les trois ans, les cinq ans, là, comme on le jugera bon lors de la discussion, pour éviter que cette définition de «dignité» soit statique?

M. Desrochers (Denis) : Bien, écoutez, c'est sûr qu'on est ouverts à différentes suggestions puis... mais, dans la pratique de tous les jours, la commission de soins en fin de vie, il n'y a pas plus tard qu'il y a quelques semaines, a déjà défini ce qu'était le respect de la dignité en fin de vie. Donc, il y a déjà une base de réflexion qui est déjà là. À notre sens à nous, vu que les organismes qui étaient alentour du gouvernement font déjà cet exercice-là, pour nous autres, il tombait sous le sens de profiter de cette commission-là ou des commissions apparentées qui pourraient...

Le Président (M. Turcotte) : M. Desrochers, je vais devoir vous interrompre.

M. Desrochers (Denis) : Je suis trop long, hein, je le sais.

Le Président (M. Turcotte) : Bien, le temps est terminé. Nous allons vous remercier pour votre présence, de vous être déplacés ici, à la commission, aujourd'hui.

Donc, étant donné l'heure, je suspends les travaux jusqu'à 16 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 29)

(Reprise à 16 h 5)

La Présidente (Mme Hivon) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires ou autres appareils électroniques.

Nous allons poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 66, Loi sur les activités funéraires. Et cet après-midi nous allons entendre d'abord la Fédération des coopératives funéraires du Québec, ensuite l'Assemblée des évêques catholiques du Québec, suivie de L'Association des cimetières chrétiens du Québec.

Alors, je souhaite la bienvenue à la Fédération des coopératives funéraires du Québec. Je vais vous demander, dans un premier temps, de bien vous identifier chacun à votre tour. Et je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre présentation, qui va être suivie d'une période d'échange avec les membres de la commission. Alors, bienvenue. Et la parole est à vous.

Fédération des coopératives funéraires du Québec (FCFQ)

M. Leclerc (Alain) : Bien, merci. Je me présente : Je suis Alain Leclerc, directeur général de la Fédération des coopératives funéraires du Québec.

M. Tardif (Pierre) : Et Pierre Tardif, secrétaire du conseil d'administration de la fédération et aussi président de la Coopérative funéraire du Grand Montréal.

M. Leclerc (Alain) : Ça fait que, si vous voulez, je vais vous faire une présentation rapide de notre mémoire, de notre intervention là-dessus. Rapidement, pour vous présenter un peu ce qu'est la fédération et ce que sont les coopératives funéraires du Québec, donc, on vous précise que la fédération existe depuis une trentaine d'années, et on regroupe les coopératives funéraires du Québec, on a des membres dans six autres provinces canadiennes, et le membership de la fédération comprend aussi des coopératives funéraires au Pérou, au Costa Rica, aux États-Unis et en France. Les 20 coopératives funéraires du Québec qui sont membres de la fédération rassemblent plus de 200 000 personnes, donc il y a 200 000 membres dans ces 20 différentes coopératives là. Et l'objectif des coopératives, c'est d'offrir des funérailles, évidemment, de qualité à moindre coût au plus grand nombre de familles québécoises possible.

Au fil des années, les coopératives funéraires se sont implantées dans pratiquement toutes les régions du Québec, on est aujourd'hui présents dans une soixantaine de municipalités à travers 100 points de service. Les coopératives desservent annuellement 11 000 des quelque 63 000 familles qui nécessitent des services funéraires chaque année au Québec. Donc, ainsi rassemblé, le réseau des coopératives funéraires constitue le principal réseau d'entreprises funéraires au Québec, avec 17 % du marché. Je dois vous préciser que, dans certaines régions, comme au Lac-Saint-Jean, en Abitibi, en Estrie, les coopératives ont des parts de marché de 60 %, 70 %, mais on est moins présents dans les grands centres comme Montréal, par exemple.

Donc, il faut rappeler tout de même, parce que c'est pertinent dans le cadre du projet de loi, que les coopératives se sont difficilement créées au début des années 70. Leur arrivée a évidemment bousculé l'industrie funéraire. Avec des prix réduits, une pratique qui s'appuyait à l'époque sur le bénévolat des membres puis l'utilisation importante des sous-sols d'église, les coopératives ont su répondre à un besoin qui était latent de la population.

Soulignons simplement qu'une étude du gouvernement du Québec, le ministère de l'Industrie et Commerce de l'époque, en 1998, avait fait une analyse du secteur et avait déterminé que le prix des funérailles dépassait de 19 % le prix moyen canadien, en 1972, donc à l'arrivée des coopératives, et on disait que les Québécois étaient parmi les Canadiens payant le plus cher pour leurs frais funéraires à cette époque-là. En 1987, le rôle régulateur des coopératives avait fait son oeuvre, et les Québécois payaient, à ce moment-là, en moyenne 9 % de moins que les Canadiens. L'écart favorable aux Québécois s'est creusé en fonction du développement des coopératives pour atteindre 13 % en 1993 et 16 % en 2007. Selon l'étude du gouvernement du Québec, il était dit que, depuis l'arrivée des coopératives funéraires sur le marché québécois, au début des années 70, le prix moyen par service n'a cessé de décroître par rapport à la moyenne nationale. Ces données nous permettent d'apprécier le rôle de régulateur du marché que jouent les coopératives funéraires au Québec. Aujourd'hui, nous estimons que les familles québécoises qui utilisent nos services réalisent des économies de l'ordre de 22 millions de dollars par année.

Heureusement, la loi qui encadrait les activités funéraires au Québec, au milieu des années 70, avait la souplesse nécessaire pour accueillir ces nouvelles pratiques commerciales. Cette loi se limitait à protéger adéquatement la santé publique dans le transport, le traitement et l'exposition des cadavres. Cette souplesse réglementaire a été un facteur qui a favorisé la naissance et le développement d'un réseau d'entreprises funéraires qui a aujourd'hui un impact déterminant sur la qualité et le prix des funérailles au Québec.

• (16 h 10) •

Donc, on a assis notre mémoire sur quelques principes directeurs qu'on tient à vous présenter. Le premier, c'est évidemment d'avoir une loi qui est souple et qui est ouverte à de nouvelles pratiques.

On précise que les rites funéraires changent rapidement. Au début des années 80, par exemple, la crémation était presque inexistante au Québec. 30 ans plus tard, plus de la moitié des Québécois choisissent ce mode de disposition. Aujourd'hui, la plupart des cérémonies religieuses liées à un décès se font ailleurs que dans une église. Les funérailles ont lieu souvent une semaine, 10 jours ou deux semaines après le décès. Toutes ces pratiques étaient inexistantes il y a à peine une génération.

Que nous réserve l'avenir? Nous ne le savons pas encore, mais nous savons toutefois que l'arrivée massive des baby-boomers à l'âge de la retraite modifiera grandement les rites funéraires. Ce groupe de consommateurs a modifié toutes les pratiques commerciales tout au long de son vieillissement; il devrait en être de même des services funéraires.

La loi qui a encadré l'industrie funéraire jusqu'à maintenant a permis l'éclosion de plusieurs pratiques différentes sur une période de plus de 30 ans. Les familles endeuillées ont pu avoir accès à de nouveaux produits, de nouveaux procédés, de nouvelles façons de faire, de nouveaux rites. La nouvelle loi devrait avoir toute la souplesse nécessaire pour accueillir les nouvelles pratiques à venir dans le respect de la santé publique.

Notre deuxième guide, c'est effectivement une loi qui respecte et qui est garante de la santé publique. Et, pour nous, c'est le coeur de la présente loi, et on tient à ce que ça demeure l'essentiel de la prérogative du gouvernement.

Donc, la protection de la santé du public doit être au coeur de l'approche gouvernementale. Selon nous, l'essentiel de la loi et de ses règlements doit porter sur la protection de la santé publique. La manipulation des cadavres, leur conservation, le travail des thanatopracteurs et tous les aspects liés à l'exposition des corps sont les éléments les plus importants à encadrer. Sur ces aspects, le gouvernement a un rôle incontournable à jouer et doit le jouer pleinement.

On souhaite aussi une loi qui est juste et équitable. La nouvelle loi devra être juste et équitable et ne devra pas favoriser un groupe d'entreprises funéraires au détriment des autres.

Il existe présentement au Québec trois grands groupes d'entreprises funéraires : les entreprises privées familiales, les entreprises publiques cotées en bourse et dirigées par des intérêts américains, pour celles qui sont au Québec, et enfin des coopératives, sans négliger le marché des cimetières, où les enjeux économiques et les champs d'intervention sont de plus en plus les mêmes que ceux des entreprises funéraires. Comme dans tous les secteurs économiques, ces entreprises rivalisent pour s'accaparer le plus grand marché des 350 millions dépensés annuellement par les Québécois pour les funérailles d'un proche. À ces entreprises de première ligne s'ajoutent les cimetières, qu'ils soient privés ou publics, qui recherchent évidemment une part du gâteau, les paroisses, qui voient leurs fidèles délaisser les funérailles traditionnelles, les fabricants de cercueils, qui voient leur marché grugé par la montée de la crémation, les quotidiens, qui voient les avis de décès migrer vers le Web, et enfin les thanatopracteurs, qui voient de plus en plus de dépouilles prendre le chemin de la crémation sans subir d'embaumement. Le gouvernement devra se montrer vigilant afin qu'aucun intervenant ne soutire d'avantage indu de la future législation.

On souhaite aussi une loi qui respecte la liberté du consommateur. Le temps nous a démontré que les entreprises funéraires qui n'ont pas su offrir des biens et services adaptés aux besoins de la population sont disparues. Par exemple, des entreprises ont déjà tenté de vendre des cercueils directement à la population via des locaux loués sur des grandes avenues, des projets de construction de columbariums contenant des centaines de milliers de niches ont déjà été conçus par des entreprises, et il y a des entreprises comme Costco et Wal-Mart, par exemple, qui tentent de vendre des cercueils dans les grandes surfaces. Nous, on croit à l'intelligence du consommateur, et l'expérience nous a démontré que le consommateur sait se débarrasser des entreprises qui ne savent pas répondre adéquatement à leurs besoins. Donc, plusieurs de ces entreprises ont fermé leurs portes... ou ces projets n'ont pas vu le jour, faute d'intérêt de la part des consommateurs. Et évidemment qui aurait cru, il y a 25 ans, qu'un projet marginal comme celui des coopératives funéraires se développerait aussi rapidement et deviendrait, en 2016, le principal joueur de l'industrie?

À notre avis, le législateur devra maintenir cette possibilité de laisser aux consommateurs la liberté de faire leurs propres choix entre différentes propositions qui pourront leur être faites. Ce n'est pas le rôle du législateur, selon nous, d'imposer ces choix, ces valeurs ou de déterminer ce qui est de bon goût ou non dans la façon dont les familles québécoises désirent rendre hommage aux proches disparus. Il ne faut pas fixer dans le temps, pour les prochaines années, le modèle d'affaires de 2015.

Et notre dernier grand principe : Évidemment, on souhaite une loi qui est facile d'application. On vise à ce que la loi et les règlements afférents devront être simples d'application et de contrôle. Cela implique que la charge administrative et les rapports doivent être ramenés au minimum pour les entreprises et que les règles à suivre doivent être faciles à comprendre pour le consommateur et pour les entreprises qui auront à administrer cette loi.

Maintenant on a quelques commentaires sur quelques articles du projet de loi. Le premier touche la notion du respect de la dignité de la personne. On a vu qu'à deux endroits, soit l'article 4 et l'article 71, on dit qu'«en toutes circonstances, la manipulation et la disposition [des cadavres] ou [des] cendres humaines doivent être faites de manière à assurer le respect de la dignité de la personne décédée». On retrouve le même concept de respect de la dignité de la personne décédée à l'article 71, où on dit : «Nul ne peut disperser des cendres humaines à un endroit où elles pourraient constituer une nuisance ou d'une manière qui ne respecte pas la dignité de la personne décédée.» On aimerait à ce qu'il y ait une précision sur la notion de respect de la dignité de la personne décédée. On ne voudrait pas que les directeurs de funérailles ou les gestionnaires de cimetière aient la liberté ou que ce soient eux-mêmes qui déterminent qu'est-ce qui est digne ou qu'est-ce qui n'est pas digne; qu'est-ce qui respecte la dignité de la personne décédée, qu'est-ce qui ne la respecte pas. Il faudrait s'assurer, donc... à tout le moins que vous légifériez pour donner des guides là-dessus.

Deux exemples qu'on donne. On parle de la famille de Jack Layton, pour ceux qui s'en rappellent, qui ont choisi de disperser quelques particules de leurs cendres à Montréal, dans la paroisse où il est né, une autre partie sur les îles de Toronto où il s'est marié, puis enfin une dernière partie dans un cimetière de la Ville Reine. Est-ce que c'est irrespectueux de la personne décédée?

La Présidente (Mme Hivon) : Je vous inviterais à conclure.

M. Leclerc (Alain) : À conclure, hein?

La Présidente (Mme Hivon) : Votre temps est déjà terminé. Mais je suis sûre qu'on va revenir par les échanges à vos questions, à vos préoccupations.

M. Leclerc (Alain) : Oui. Je vais attirer votre attention juste sur un autre élément qu'on considère important, c'est au niveau de la gestion des cendres dans les columbariums. Rapidement, il y a un article qu'on trouve difficile d'application, c'est lorsque vous demandez à tous les exploitants de columbariums de posséder des lots dans un cimetière pour un nombre de places suffisantes au nombre de niches vendues. C'est-à-dire, si une entreprise funéraire a vendu 5 000 niches de columbarium, vous lui demandez, dans le projet de loi, que cette entreprise-là possède 5 000 espaces dans un cimetière pour pouvoir couvrir ces niches-là. On trouve que ça va être difficile d'application et on ne comprend pas la logique de cet élément-là.

La Présidente (Mme Hivon) : Je vous remercie beaucoup. Et puis, sur ce, je cède la parole au groupe ministériel pour une période d'environ 15 minutes.

M. Barrette : Merci, Mme la Présidente. J'ai envie, à cette étape-ci... Bien, d'abord, bonjour, M. Tardif et M. Leclerc. Je sentais que vous étiez dans une envolée. Et je dois vous avouer que la lecture de votre mémoire semblait m'indiquer l'inverse de ce que vous étiez en train de développer, alors je vais vous laisser développer. Vous êtes contre l'obligation d'avoir des lots?

M. Leclerc (Alain) : On ne comprend pas pourquoi ça prend le nombre de lots équivalent au nombre de niches vendues. Dans le mémoire, ce qu'on dit, c'est que les entreprises funéraires vendent des niches de columbarium pour des durées déterminées de 25 ans, de 50 ans. Ce qu'on vous dit, c'est qu'à la fin de la durée du bail, il va se produire trois choses : soit que les descendants vont renouveler un nouveau bail pour une nouvelle période de 25 ans ou de 50 ans, soit que la famille va venir récupérer les cendres puis elle va en disposer elle-même, probablement dans un cimetière, ou les cendres vont devenir des cendres non réclamées. C'est seulement dans le dernier cas où les entreprises funéraires devront disposer de ces cendres-là dans un cimetière. Le projet de loi nous demande d'acheter des niches pour l'ensemble de ces trois catégories-là immédiatement, puis ça, on trouve que ce n'est pas nécessaire.

M. Barrette : Je vous remercie d'avoir précisé ça. Je ne l'avais pas comprise comme ça, votre position. Donc, il y a un cas où vous êtes en faveur, mais pas dans tous les cas de figure.

M. Leclerc (Alain) : Effectivement, oui. On pense que les entreprises funéraires devraient acheter des lots au cimetière pour disposer des cendres non réclamées, point à la ligne.

M. Barrette : Alors, qu'est-ce que vous faites de la situation de la faillite d'une entreprise?

M. Leclerc (Alain) : Dans les cas de faillite, même si l'entreprise funéraire avait des lots dans un cimetière, ça ne réglerait pas le problème. Le syndic va prendre possession des lots, puis ce n'est pas vrai qu'on va pouvoir enterrer ces cendres-là dans le lot de l'entreprise, dans un cas de faillite. Tout va être géré par le syndic, là, le syndic ne laissera pas faire ça.

Puis dans les cas de faillite, au Québec, il n'y a pas eu de problématique encore de cet ordre-là. Il y a eu quelques cas plus problématiques, mais je ne peux pas dire qu'au Québec on a eu des cendres dont on n'a pas pu disposer, au Québec, à l'heure actuelle. Là, vous imposez ça à toutes les entreprises. Les 325 entreprises funéraires au Québec devront avoir ce nombre de lots là juste pour couvrir peut-être un cas de faillite, là, qu'on n'a pas connu encore.

M. Barrette : Question... Peut-être que, là, il y a une divergence dans la compréhension, et peut-être que moi, j'aimerais savoir de vous si on comprend la même chose. Vous, est-ce que vous pensez que l'on voudrait qu'il y ait un lot au cimetière par citoyen?

M. Leclerc (Alain) : C'est ce que vous dites dans le projet de loi.

• (16 h 20) •

M. Tardif (Pierre) : Si je peux ajouter, M. le ministre, c'est que, selon l'article... Je n'ai pas l'article précisément. Merci. C'est parce que je veux préciser une chose, si vous permettez. On dit dans l'article que l'exploitant d'un columbarium doit avoir un lot d'une superficie suffisante pour lui permettre d'inhumer l'ensemble des cendres qu'il détient. Je vais vous donner un exemple. La Coopérative funéraire du Grand Montréal, dans le moment...

Une voix : ...

M. Tardif (Pierre) : Pardon?

M. Barrette : Ce n'est pas un lot par urne, ça.

M. Tardif (Pierre) : Pardon?

M. Barrette : Ce n'est pas nécessairement un lot par urne.

M. Tardif (Pierre) : Non, non, mais on parle de lot d'une superficie suffisante. Ça, ce n'est pas défini.

Chez nous, le cimetière avec qui nous faisons affaire pour disposer des cendres non réclamées ou... et le reste, ce cimetière-là a un règlement qui dit qu'il ne peut pas y avoir plus que 12 urnes dans son lot, c'est le règlement de ce cimetière-là. Chez nous, on a — j'ai fait faire le relevé, là — 2 354 habitacles. Multiplié par 1,5, parce qu'il y a des habitacles pour une urne puis d'autres pour deux, une moyenne de 1,5, ça fait 3 500. Divisé par 12, il faudrait qu'on achète 294 lots demain matin.

On va en acheter au printemps, deux lots, pour disposer des cendres, des quelques cendres qui ne sont pas réclamées, qu'on a encore mais qui ne seront pas réclamées au cours de l'hiver, puis au printemps prochain on va en disposer dans ces lots-là, mais le fait de nous obliger d'acheter autant de lots que pour toutes les urnes qu'on a actuellement, là, dont le contrat de location va se terminer dans 20 ans, 25 ans, 45 ans, les locations sont pour 25 ou 50 ans, ce serait nous obliger, nous, si la proportion demeure 12 urnes par lot, d'acheter quelque 300 lots là, là. C'est ça, l'interprétation qu'on en fait, de la loi.

M. Barrette : Je comprends votre interprétation sur la base de ce que vous venez de dire, mais il n'en reste pas moins — puis là je vous demande votre opinion, évidemment, vous êtes ici pour nous informer, là, puis je vous remercie beaucoup d'être ici — il n'en reste pas moins que... Et je comprends que c'est rare, mais en même temps ça arrive. Dans le cas d'une faillite, qui se retrouve avec la responsabilité?

Une voix : ...

M. Barrette : Oui, mais le syndic, il fait quoi avec?

M. Tardif (Pierre) : Il va acheter des lots.

M. Barrette : Bon. Bien, ça fait qu'on déplace le problème.

M. Leclerc (Alain) : Jusqu'à date, au Québec, il y a toujours eu une entreprise funéraire capable d'en racheter une autre. On l'a fait, nous, dans plusieurs cas, on l'a fait dans cinq ou six cas facilement, où des entreprises funéraires en faillite ont été récupérées soit par des coopératives ou soit par d'autres types d'entreprise.

M. Barrette : Vous avez dit... Si vous me permettez d'aborder un autre aspect, là, vous avez fait référence abondamment au fait que vous représentiez... vous étiez dans une industrie, vous faites référence abondamment à votre modèle d'affaires et à la liberté du consommateur. Et vous avez fait référence beaucoup à l'équité qu'il devait y avoir entre les différentes entreprises, on va dire ça comme ça, parce que c'est les mots que vous employez.

Pouvez-vous être plus... nous donner plus d'exemples de problématiques qui mèneraient à un manque d'équité dans la pratique des services funéraires? Vous devez avoir des exemples puis des choses plus précises à nous dire, là.

M. Leclerc (Alain) : Juste pour vous donner un exemple, là, très factuel, que vous réglez avec ce projet de loi ci, mais, jusqu'à maintenant, un permis de directeur de funérailles ne pouvait pas être émis à une organisation, c'était émis seulement à des individus. Généralement, c'était donné à des thanatologues. Nous, dans le réseau des coopératives funéraires... Un thanatologue qui sort, par exemple, du collège puis qui travaille dans une entreprise familiale va aller chercher son permis de directeur de funérailles puis il l'aura pendant toute sa carrière, donc pendant une trentaine, quarantaine d'années. Dans les coopératives funéraires, les permis sont détenus souvent par le directeur général qui est embauché par l'organisation. Évidemment, le directeur général reste pour l'organisation le temps qu'un D.G. reste, là, à tous les cinq, sept ans, 10 ans on change de directeur général, et ça nous pose des problèmes à chaque fois, parce qu'un directeur général, souvent, ne partira pas dans des conditions optimales, là, on s'entend, là. Donc, à chaque fois, on a toujours eu beaucoup de difficultés puis on a eu le concours du ministère pour être capables d'aller chercher un nouveau détenteur de permis puis d'avoir la souplesse nécessaire pour être capables de remplir le trou qu'on a. Ça, c'était au désavantage des coopératives, ça, puis on a vécu avec ce désavantage-là pendant plusieurs années. Et, avec le nouveau... avec le projet de loi que vous avez sur la table, vous réglez ce problème-là.

M. Barrette : ...des choses, à votre avis, qu'on ne règle pas sur ce plan-là de l'équité?

M. Leclerc (Alain) : Par rapport aux thanatologues, nous, on souhaite, par exemple, que les permis de directeur de funérailles ne soient pas émis aux thanatologues. Je sais que vous allez avoir des demandes probablement dans ce sens-là, où est-ce que les thanatologues souhaiteraient que la profession tourne autour des détenteurs de permis d'embaumeur. Nous, on pense que, les embaumeurs, de plus en plus ça va devenir des techniciens de laboratoire qui vont se charger de faire les embaumements, mais les directeurs de funérailles... Nous, on engage des M.B.A. beaucoup, de ce temps-ci, là, c'est des gens qui ont des formations en administration, et on souhaite que le métier de directeur de funérailles soit de plus en plus orienté vers des gestionnaires professionnels plutôt que vers des embaumeurs.

M. Barrette : Ce qui m'amène à vous poser une question en lien avec votre mémoire. Vous mentionnez là, et je le note avec un grand intérêt, que vous séparez la pratique du thanatologue du côté affaires. Honnêtement, là, je n'ai pas vraiment d'opposition ou de commentaire à faire, là, négatif sur votre position.

Maintenant, dans votre mémoire, vous n'êtes pas vraiment, vraiment en faveur que l'on édicte ou qu'on mette en place des règles ou des paramètres clairs de formation des administrateurs. Ça m'étonne, ça.

M. Leclerc (Alain) : On est dans un secteur très concurrentiel où chaque entreprise, pour être capable de rester en vie, doit améliorer sa prestation de services. Et je dois vous dire qu'au Québec, à mon avis, les services funéraires s'améliorent d'année en année depuis une trentaine d'années. Des cas de mauvais services ou des entreprises qui n'offriraient pas un service de qualité sont de moins en moins nombreux.

Et une façon d'améliorer sa prestation de services, c'est d'être capable de développer des programmes de formation à l'interne, et pratiquement tout le monde le fait, ça. Nous, on a des programmes de formation à l'interne pour tout l'ensemble de nos employés, et tous les grands groupes au Québec le font. Nous, on pense qu'on devrait rester à ce niveau-là et laisser le soin aux grandes organisations de former eux-mêmes leurs employés.

M. Barrette : Je comprends que c'est ce que vous souhaitez, mais en quoi, à ce moment-là, le fait d'édicter des règles de formation continue, de maintien de compétences serait négatif?

M. Leclerc (Alain) : À l'heure actuelle, c'est fait dans l'industrie sans intervention de l'État. Il y a des cours qui sont donnés, il y a des programmes qui sont donnés, il y a de la formation qui est donnée. Chaque nouveau directeur général, nous, dans le réseau, a une formation qui lui est donnée par notre réseau, c'est des choses qui se font sans que le gouvernement ait eu à intervenir là-dessus.

M. Barrette : Ne trouvez-vous pas qu'en cas de faiblesse de votre réseau... Parce qu'actuellement, si on mettait des règles qui seraient concordantes, par exemple... ou plutôt l'inverse, si vos règles se retrouvaient à être concordantes avec ce que l'on mettait en place, il n'y aurait pas de problème, mais ne trouvez-vous pas que, si votre organisation faiblissait... Parce que ça n'arrivera pas, là, on s'entend. N'y aurait-il pas l'utilité d'avoir quand même ces règles-là?

M. Leclerc (Alain) : C'est un peu l'oeuf ou la poule, hein? À l'heure actuelle, il y en a, des...

M. Barrette : Comme toujours.

M. Leclerc (Alain) : À l'heure actuelle, on offre ces programmes-là. C'est sûr que, là, vous me demandez... Si le législateur mettait des règles qui correspondent à ce qu'on offre déjà, est-ce qu'on serait contre? Bien, moi, je vous pose la question : Pourquoi légiférer pour nous obliger à faire ce qu'on fait déjà? Ce serait superflu, à mon avis.

M. Barrette : ...répondre, par exemple, à ça. C'est parce que c'est le principe du contrat; dans le cas présent, social. Un contrat, ça ne sert à rien quand ça va bien, c'est quand ça va mal qu'on sort le contrat. C'est dans cet esprit-là.

M. Leclerc (Alain) : En tout cas, les faits nous prouvent que, depuis une trentaine d'années, les gens ont réussi à se discipliner, là, sans que vous nous aidiez.

M. Barrette : Critique que je ne n'émettais d'aucune manière, M. Leclerc. C'est juste le principe du contrat.

Il y a un élément, là, un autre élément de votre mémoire qui m'étonne beaucoup, compte tenu de vos commentaires introductifs. Vous avez dit que le coeur de la loi, dans votre esprit — puis ça l'est, vous avez tout à fait raison — c'était la santé du public. Or, dans votre mémoire, vous n'êtes pas en faveur qu'on détermine par règlement les normes d'équipement, d'hygiène, et ainsi de suite, vous nous demandez de retirer le quatrième paragraphe de l'article 89.

M. Leclerc (Alain) : Où vous voyez ça, excusez-moi?

M. Barrette : L'article 89. Là, je n'ai pas la page avec moi, là, je suis désolé, là.

M. Leclerc (Alain) : Non, excusez, c'est une erreur. C'est l'article 89.4°.

M. Barrette : ...c'est effectivement ça, là. Le 4°, c'est... En tout cas, peu importe, mais c'est bien ça, là.

M. Leclerc (Alain) : Oui, c'est par rapport aux rites funéraires. Non, c'est quand on dit : «4° déterminer des normes d'équipement, d'hygiène et de protection applicables dans le cadre de rituels ou de pratiques funéraires, notamment en ce qui a trait [au toilettage du défunt].»

M. Barrette : L'esprit... Vous nous dites que le coeur, c'est la protection de la santé du public, en tout cas la santé du public est le coeur.

M. Leclerc (Alain) : Oui.

M. Barrette : Pourquoi vous voulez qu'on retire cet article-là? Je ne comprends pas votre position, là.

• (16 h 30) •

M. Leclerc (Alain) : À plusieurs endroits dans le projet de loi vous faites référence à la protection de la santé publique, l'hygiène au niveau des équipements. Cet article-là traite particulièrement des rites funéraires puis du toilettage des défunts, c'est une reprise que vous faites de cet argument-là pour encadrer les rites funéraires et les pratiques funéraires.

Donc, initialement, ce qu'on vous disait, c'est qu'il fallait que le législateur soit souple au niveau des pratiques funéraires et des rituels. Donc, on se demandait pourquoi il faudrait rajouter des... donner le pouvoir au gouvernement d'ajouter des normes au niveau de l'équipement puis de l'hygiène dans ce cas-là précisément.

M. Barrette : Parce que c'est la question de la toilette du cadavre et non de la thanatopraxie elle-même.

M. Leclerc (Alain) : Si ça reste dans le cadre du toilettage puis qu'on n'embarque pas au niveau des rites, nous autres, ça nous va.

M. Barrette : Répétez-moi ça, là, parce que je ne vous ai vraiment pas suivi.

M. Leclerc (Alain) : L'article dit : «4° déterminer des normes d'équipement, d'hygiène [...] dans le cadre de rituels ou de pratiques funéraires, notamment en ce qui a trait [au toilettage du défunt].» Ce que vous nous dites, c'est que, si ça concerne le toilettage du défunt, il n'y a pas de problème. Pour nous aussi ça irait, dans ce sens-là.

M. Barrette : Ah! O.K., pardon, je n'avais pas compris ce bout-là. Très bien.

Je pense que ça fait pas mal le tour. Attendez juste un petit instant, là, monsieur, je veux juste ne pas avoir oublié quelque chose. Ah oui! évidemment, parce que c'était mon commentaire initial. Il me reste une minute, puis je vais vous demander d'élaborer là-dessus.

Vous nous avez demandé, comme d'autres, au pluriel, de statuer sur la dignité. Et là vous avez pris l'exemple de M. Layton, et là j'ai envie de vous renvoyer la question : En quoi ce qu'il a fait n'était pas digne? Parce que...

M. Leclerc (Alain) : Pour nous, c'était très digne, ça, il n'y a aucun problème là-dedans.

M. Barrette : Alors, voilà mon point : En quoi l'État peut-il déterminer ce qui est digne comme... La beauté, n'est-ce pas dans les yeux, dans le regard de celui qui observe?

M. Leclerc (Alain) : Oui, je suis d'accord avec vous là-dessus.

M. Barrette : Alors donc, ce n'est pas...

M. Leclerc (Alain) : C'est que, dans le projet de loi, nous, ce qu'on vous suggère...

M. Barrette : Non, mais c'est parce que vous avez demandé en introduction de... pas en introduction mais au début de votre présentation qu'on légifère — c'est le mot que vous avez utilisé — sur ce qu'est la dignité, là.

M. Leclerc (Alain) : Nous, notre souhait, c'est que vous enleviez cette référence-là, la dignité, dans le projet de loi, à défaut de pouvoir le préciser.

M. Barrette : Parce que tantôt vous avez dit que vous aimeriez qu'on légifère sur la notion de dignité.

M. Leclerc (Alain) : Oui. À défaut de pouvoir le préciser, on aimerait mieux qu'il n'y ait pas référence à la dignité, parce que, si vous en faites référence dans le projet de loi sans le préciser, ça va laisser libre arbitre à tous ceux qui lisent la loi, les directeurs de funérailles comme les directeurs de cimetière, de s'en faire une interprétation auprès du public dans le sens des intérêts commerciaux.

M. Barrette : Très bien, merci. J'ai terminé.

La Présidente (Mme Hivon) : Donc, juste pour ma compréhension, votre premier choix, c'est de l'éliminer; deuxième choix, si ça reste, c'est de le définir.

M. Leclerc (Alain) : Absolument.

La Présidente (Mme Hivon) : O.K. Alors, sur ce, je cède la parole à la partie de l'opposition officielle pour une période de neuf minutes.

Mme Lamarre : Merci beaucoup, Mme la Présidente. M. Leclerc, M. Tardif, bienvenue.

Je suis aussi intéressée par la priorité que vous donnez à la santé publique, on est une commission sur la santé et les services sociaux, mais je la voyais peut-être sous d'autres angles. On sait que récemment on a été exposés à un risque potentiel d'Ebola. Est-ce que vous considérez qu'au niveau de la santé publique vous aviez ce qu'il fallait pour préparer, pour protéger la population, autant dans l'élimination des liquides biologiques que dans la préparation des corps ou l'incinération?

M. Leclerc (Alain) : Dans l'industrie funéraire, juste pour donner un exemple, on a à gérer les cas de sida depuis 25 ans, là. Tout thanatopracteur qui suit des normes d'hygiène minimales puis qui suit les protocoles qui sont en place protège sa santé et celle du public, là. Donc, peu importe la maladie qui est traitée ou de laquelle le défunt décède, je pense que, si les normes d'hygiène normales sont respectées, il n'y a pas de problème.

Mme Lamarre : Alors donc, vous me dites, vous étiez prêts pour l'Ebola. Je veux juste voir, parce que...

M. Leclerc (Alain) : L'Ebola comme n'importe quelle autre maladie contagieuse.

Mme Lamarre : Oui. Parce qu'il y a une différence importante, là, dans les risques de contamination entre un patient qui est porteur du sida puis un patient qui était porteur de l'Ebola.

Mais ce qui m'inquiète ou, en tout cas, me questionne, c'est qu'à la page 10 de votre mémoire vous dites : «Le législateur ne devrait pas s'immiscer dans les formations qu'un titulaire devrait suivre...» Je comprends la distinction que vous avez faite tantôt puis je suis assez d'accord avec le directeur... mais, la formation, quand vous dites qu'un thanatologue est formé pour 30 ans, est-ce qu'il y a des formations continues obligatoires? Et pourquoi le législateur ne pourrait pas préciser un peu certaines obligations par rapport à la mise à jour de la formation des thanatologues?

M. Leclerc (Alain) : Parce qu'à l'heure actuelle l'industrie s'en occupe, il ne faut pas penser que les thanatopracteurs, par exemple, sont laissés à eux-mêmes, là, aussitôt sortis du cégep. Puis il y a des nouvelles technologies qui apparaissent sur le marché, y compris dans les laboratoires de thanatopraxie, et il y a des formations qui sont données de façon continuelle à ces gens-là.

Donc, c'est fait par l'industrie, c'est fait par les différentes organisations qui existent. Autant la Corporation des thanatologues que nous, on offre des formations pour les thanatopracteurs de nos réseaux et on s'organise pour que la formation continue soit faite.

Mme Lamarre : Est-ce qu'il y a un mécanisme, par exemple, de certification annuel? Parce qu'il peut y avoir une résidence funéraire qui ne se soumette pas à ça. Est-ce qu'il y a des obligations qui garantissent que tous les salons, tous les thanatologues de tous les salons funéraires du Québec vont avoir fait ces mises à jour?

M. Leclerc (Alain) : Dans notre cas, et je peux parler pour les gens de la corpo, c'est des choses qui sont faites sur une base volontaire.

Mme Lamarre : Vous dites oui, mais là on pense... Nous, on a la responsabilité du Québec, là.

M. Leclerc (Alain) : C'est volontaire, c'est volontaire.

Mme Lamarre : Est-ce qu'il y a des mécanismes de certification, par exemple, pour l'ensemble des thanatologues? Est-ce qu'on peut retirer un permis d'exercice à un thanatologue s'il n'a pas réalisé une formation continue qu'on dirait, par exemple, sur l'Ebola, là, nouvelle maladie qui n'était pas envisagée au Québec? Est-ce qu'on peut retirer son permis ou est-ce qu'on peut s'assurer, être certain qu'il aura fait une formation? Non?

M. Leclerc (Alain) : À l'heure actuelle, la délivrance des permis, ça vous revient, là, c'est vous qui délivrez les permis, et à l'heure actuelle vous ne pouvez pas enlever le permis de quelqu'un s'il n'a pas suivi de formation.

La Présidente (Mme Hivon) : M. le député de Richelieu.

M. Rochon : Oui. Sur l'aspect formation, il y a bien un passage de votre mémoire qui pourrait nous inquiéter, et je cite ce passage : «Encore une fois, nos formations constituent un élément de notre stratégie commerciale visant à nous démarquer de nos concurrents.» Alors là, vous faites l'aveu que c'est à géométrie variable, la formation, non? L'aveu est là.

M. Leclerc (Alain) : Il y a plusieurs types d'employés dans une organisation. C'est sûr que, par exemple, les thanatopracteurs qui ont à traiter des... qui ont à embaumer des cas d'Ebola ou des cas de sida, ça ne fait pas partie de la stratégie commerciale d'une organisation, ce n'est pas quelque chose qui est apparent pour le public, mais, si on se réfère aux conseillers aux familles, par exemple, ou aux directeurs de funérailles, chaque organisation a des stratégies. Si vous avez déjà utilisé les services d'une entreprise funéraire, vous pouvez voir qu'une par rapport à l'autre les approches sont différentes. Comme par exemple, dans notre cas, nous sommes des organisations à but non lucratif, donc l'approche qu'on a par rapport aux familles peut être différente d'un autre type d'organisation.

Alors, ce qui est dit dans le mémoire, c'est que, nous, l'approche qu'on a développée à l'intérieur de nos organisations fait en sorte que la formation qu'on va donner, principalement aux conseillers aux familles, peut être différente de celle de d'autres types d'organisation.

La Présidente (Mme Hivon) : Mme la députée de Taillon.

Mme Lamarre : Oui, merci. Alors, à la page 6 de votre mémoire, vous faites référence à la dignité et vous donnez quelques exemples qui sont intéressants, par exemple : «Qui portera le jugement de valeur sur ce qui est respectable ou non? Le directeur de funérailles qui préférera vendre un espace dans son columbarium plutôt que de voir les cendres remises à la famille? Le gestionnaire du cimetière qui jugera qu'un columbarium dans un salon funéraire privé qui peut être vendu, déplacé ou incendié n'est pas assez respectueux de la dignité "éternelle" du défunt?»

Est-ce que vous avez réfléchi à certains guides qui pourraient nous aider, à certains paramètres sur lesquels on pourrait se pencher pour évaluer qu'est-ce qui est respectable et qui respecte la dignité? Parce que vous avez au quotidien des exemples qui vous apparaissent être plus ou moins conformes au respect de la dignité. Est-ce que vous avez la possibilité de nous aider dans cette démarche-là?

• (16 h 40) •

M. Leclerc (Alain) : À mon avis, si vous ouvrez cette porte, vous en avez pour des semaines à discuter de ce qui est digne et ce qui ne l'est pas.

Nous, je vous parlais tantôt, on donne de la formation à l'intérieur de nos réseaux pour les conseillers aux familles, pour qu'ils soient en mesure de répondre aux demandes des consommateurs dans le respect de la dignité puis dans le respect des valeurs qui sont défendues par la personne décédée. Aussitôt que vous ouvrez la porte à vouloir interpréter vous-même ce qui est la dignité de la personne humaine, c'est là où vous allez devoir porter des jugements de valeur sur ce que vous considérez digne ou non par rapport à des cendres humaines puis par rapport à l'exposition d'un corps. Et c'est là que vous allez rentrer dans les pratiques commerciales, puis c'est là que vous allez être obligés de dire à l'industrie qu'est-ce que vous considérez comme bon et qu'est-ce que vous considérez comme néfaste pour l'industrie, et c'est là le danger que vous ouvriez cette porte-là. Si vous ouvrez cette porte-là trop grande, vous allez devenir des gestionnaires de salon funéraire.

Donc, nous, on souhaite ne pas en parler du tout parce que, si vous faites seulement en parler au niveau du projet de loi... Vous savez, une personne qui perd un proche, là, elle est vulnérable au maximum, là. En l'espace de 24 heures, vous êtes assis devant un directeur de funérailles, vous avez perdu votre conjoint, votre conjointe, puis le directeur de funérailles, c'est un vendeur professionnel que vous avez devant vous, et vous êtes démuni, là, vous ne savez pas quoi faire. Si la personne... Si vous avez un bon vendeur devant vous, puis qu'il commence à dire que le législateur veut... vous savez, la dignité humaine, c'est important, le gouvernement du Québec a légiféré là-dessus, la loi n° 66 m'oblige à traiter la personne défunte dans la dignité puis dans le respect de la personne, puis je vous conseille de faire le plan b plutôt que le plan a... Les gens vont utiliser le fait que vous fassiez référence à la dignité pour pouvoir se donner des avantages.

Mme Lamarre : Ce qui avait été évoqué par d'autres groupes, et c'était une raison pour laquelle on nous demandait aussi de nous pencher sur ce projet de loi, c'est qu'il y avait de plus en plus de demandes considérées comme farfelues. Alors, comment on peut trouver un équilibre pour vous aider peut-être à éviter d'être obligés de répondre à des demandes un peu farfelues et en même temps s'assurer de la dignité?

M. Leclerc (Alain) : ...il décède 63 000 personnes au Québec par année, c'est quelques centaines par jour, et effectivement, des cas farfelus, on en voit passer, là, dans les médias peut-être une fois à tous les trois, quatre ans, là. Les familles, en général, sont respectueuses de leurs défunts, et les gens qui travaillent dans l'industrie sont aussi respectueux des pratiques. Et effectivement des cas farfelus, à mon avis, ne sont pas suffisants pour forcer une législation.

Sortons des funérailles puis faisons le parallèle avec les mariages, par exemple. On a toutes sortes de mariages, les gens peuvent se marier de différentes façons. Et les gens qui jugent du bon goût d'un mariage, c'est souvent les deux personnes qui sont principalement concernées, là, puis on peut imaginer tous les cas de figure, là. Mais, si les gens ont décidé de le faire de cette façon-là, puis de se marier de cette façon-là, et que la communauté qui les entoure est d'accord avec ces pratiques-là, à mon avis, on n'a pas à s'en mêler.

Même chose pour les funérailles. Si un proche décide d'enterrer un membre de sa famille de la façon x, y, z, si ça respecte la santé publique, puis la famille est d'accord de procéder de telle façon, et la communauté qui l'entoure est d'accord pour suivre ça, nous, on pense qu'il faut juste les accompagner là-dedans, sans porter de jugement sur ce qu'ils décident.

La Présidente (Mme Hivon) : Merci beaucoup. Alors, on va maintenant passer aux échanges avec le groupe formant la deuxième opposition, avec Mme la députée de Repentigny, pour une période de neuf minutes.

Mme Lavallée : Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Hivon) : De 6 min 30 s, excusez-moi.

Mme Lavallée : 6 min 30 s. Bonsoir. La Corporation des thanatologues, cet avant-midi, a présenté une proposition concernant la création d'un registre confidentiel de préarrangements funéraires. Dans votre mémoire, vous n'en parlez pas, de ça. J'imagine que vous vendez des préarrangements. Et, étant notaire, j'ai constaté dans ma pratique que parfois il y a des familles qui ne trouvaient pas les contrats, n'avaient aucune idée mais avaient toujours entendu parler de la part de la personne qui est décédée qu'elle avait pris un contrat, puis, rendu au décès, bien, comme on ne trouve pas le contrat, bien on repaie pour des services qui avaient déjà été payés. Qu'est-ce que vous pensez de cette proposition-là?

M. Leclerc (Alain) : Je vais laisser parler Me Tardif.

M. Tardif (Pierre) : Je suis notaire aussi mais honoraire. C'est fini, je ne pratique plus.

À prime abord, pas d'objection. Il faudrait s'assurer de l'identification des personnes, ce n'est pas souvent que la famille a déjà le... a, exemple, le numéro d'assurance social de la personne décédée. Et il faudrait s'assurer surtout de la rapidité d'accessibilité au registre, parce que ça doit être quasi instantané. Vous le savez comme moi, c'est dans les 24 heures qu'il faut savoir ça, hein, s'il y a un contrat ou pas.

Alors, s'il y avait un registre auquel on pourrait avoir accès à certaines conditions mais immédiatement, étant assurés qu'on a la bonne personne, qu'on fait référence à la bonne personne, personnellement, je n'ai pas d'objection, mais il y a des conditions, parce que, si ça prend quelques jours avant d'avoir accès, ça retarde, ça complique la situation. Je ne sais pas si je réponds bien...

Mme Lavallée : Oui, mais ce matin... Parce qu'on essaie de trouver une solution à ça, parce que sinon il y a de l'argent qui reste puis qui...

M. Tardif (Pierre) : Oui, absolument.

Mme Lavallée : Puis, ce matin, la proposition qu'on nous a faite, c'est de se servir du registre de l'état civil, que ce soit l'État civil qui gère ça, ces inscriptions de contrat là. Est-ce que, pour vous, ça peut être...

M. Tardif (Pierre) : Aucune objection à ce que ce soit le directeur de l'état civil, à la condition, je répète, que ce soit quasi instantané, que ça ne prenne pas deux semaines avant d'avoir le résultat. Parce que, obtenir un certificat de décès de l'État civil, on ne l'a pas en quelques minutes, là, il y a un certain délai là-dedans. Il y a une certaine lourdeur administrative qu'il faudrait absolument éviter au cas de mise en place d'un registre, d'un tel registre, eu égard à l'urgence que la famille vit, c'est ça.

Mme Lavallée : Oui. Puis, selon vous, dans votre réalité, est-ce que ça arrive souvent qu'effectivement les familles ne trouvent pas ces contrats-là puis qu'on se ramasse à être...

M. Tardif (Pierre) : Ça, je ne peux pas répondre, je ne suis pas en... je ne sais pas, dans les salons, si... Je ne suis pas capable de vous répondre à ça. Puis vous savez comme moi que le fait de référer au testament, c'est plus ou moins utile, parce que souvent le testament est lu après l'inhumation, puis il n'y aura pas d'exhumation, on s'entend là-dessus.

La Présidente (Mme Hivon) : M. le député de Blainville.

M. Laframboise : Oui. Moi, je vais revenir sur la première intervention du ministre par rapport à la faillite, là, pour les cendres non réclamées, et tout ça, parce que, bon, vous l'avez dit, il y a trois grands groupes, là, d'entreprises dans votre domaine, il y a vous puis il y a aussi les entreprises publiques cotées en bourse puis propriété américaine, donc ce n'est pas impossible qu'un jour ils ferment une filiale canadienne, là, donc ça pourrait arriver. Donc, pour nous... Je comprends ce que vous voulez dire, là, vous nous dites : Il ne faudrait pas qu'il y ait... vous nous demandiez d'avoir des lots pour toutes les urnes qu'on a dans notre columbarium, mais par contre il faudrait qu'il y ait une procédure. Donc, si... Parce que je vois que, bon, si jamais vous décidez de fermer ou faire quoi que ce soit, vous appelez la famille, puis ils peuvent venir chercher les urnes, il n'y a pas... Comment il en resterait si, admettons, demain matin vous... Parce que vous le savez, là, des fois il y a des cendres qui ne sont pas réclamées, et tout ça. Si on décidait de rappeler, pour une raison de fermeture d'un columbarium ou quoi que ce soit, est-ce qu'on peut quantifier le pourcentage que... puis une procédure, parce qu'il faudrait rappeler toutes les familles, et tout ça? C'est le syndic qui le ferait, ça, je suis conscient de ça. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'avoir un compte... en tout cas une certaine formule en fidéicommis pour permettre ça, si jamais ça arrivait? Parce que, nous, il faut protéger le public, là, il faut que vous soyez conscients, là, que... Tantôt, vous avez dit qu'il y en a qui sont des vendeurs professionnels. Ça me fait peur, ça. Ce n'est probablement pas vous autres, là, mais c'est peut-être dans ceux qui sont des entreprises cotées en bourse, là. Donc, y a-tu moyen qu'on s'assoie pour voir, là, si c'est possible à quelque part, là?

M. Leclerc (Alain) : Je pense que la... en tout cas la meilleure solution, puis les gens de cimetière peut-être vous le diront mieux que moi tout à l'heure, là, mais, si les cimetières étaient obligés d'accueillir les cendres non réclamées dans un cas de faillite, par exemple, si jamais ça arrivait... Parce qu'à l'heure actuelle, dans le fond, la difficulté qu'on a, c'est que, si jamais ça arrive dans une entreprise, dans une municipalité donnée, puis que le ministère est pris avec ces cendres-là, vous ne savez pas quoi faire avec. Si les cimetières étaient obligés d'accueillir ces 50, ces 100, ces 200 cendres là qui seraient laissées pour compte, bien là le problème serait réglé. Mais là vous forcez toutes les entreprises funéraires du Québec à acheter des lots dans tous les cimetières du Québec au cas où qu'on arrive éventuellement dans un cas où il y aurait des cendres à inhumer.

M. Laframboise : Sauf que, là, les cimetières, eux, vont probablement nous dire : Qui est-ce qui va payer pour ça, là? Vous, vous nous dites : On ne veut pas payer pour ça, c'est toujours le même problème.

Mon problème à moi : si le columbarium ferme, ce n'est pas de la faute du cimetière, c'est de la faute de l'entreprise qui a bâti le columbarium, là. Donc, c'est un peu ça, là. Il va falloir essayer de s'asseoir à quelque part pour trouver une façon que ce ne soit pas... Tu sais, moi, je veux bien qu'il y ait un fonds pour dire aux cimetières : Bon, bien, O.K., on va vous payer pour ça, mais il faudrait qu'à quelque part on prévoie quelque chose, sinon... Nous, comme je vous dis, on veut protéger le public. Puis il y aura probablement de plus grandes bâtisses qui vont se construire, puis ce n'est pas impossible qu'un jour il y en ait qui ferment puis que... à quelque part, là. Oui?

La Présidente (Mme Hivon) : Merci beaucoup... Je vous laisse terminer très, très rapidement.

M. Tardif (Pierre) : Je comprends très bien votre préoccupation, mais la solution proposée dans le projet de loi est exagérée, avec tout le respect qu'on a à votre égard, est exagérée par rapport au but visé, est exagérée pour une organisation comme la nôtre. Ça voudrait dire, je le répète, que demain matin, si la loi est en vigueur, il faut qu'on achète 300 lots, ça n'a pas de bon sens. Alors, vous comprenez ce que je veux dire, vous comprenez mon point de vue. Mais je comprends très bien votre point de vue, puis il y aurait lieu, je pense, de s'y pencher, là-dessus, de trouver une solution.

La Présidente (Mme Hivon) : Je vous remercie. Je vous remercie beaucoup d'être venus éclairer les membres de la commission.

Alors, sur ce, je vais suspendre les travaux le temps que notre prochain groupe, soit l'Assemblée des évêques catholiques du Québec, prenne place. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 16 h 49)

(Reprise à 16 h 52)

La Présidente (Mme Hivon) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous avons maintenant le plaisir d'accueillir l'Assemblée des évêques catholiques du Québec. Donc, vous connaissez les règles. Je vous laisse donc 10 minutes pour faire votre présentation, après vous être identifiés, et ensuite nous passerons à la période des échanges. Alors, la parole est à vous.

Assemblée des évêques catholiques du Québec (AECQ)

M. Dicaire (Louis) : C'est ouvert?

La Présidente (Mme Hivon) : C'est ouvert. Vous pouvez commencer, la parole est à vous.

M. Dicaire (Louis) : Merci. Bonsoir à vous. Je suis Mgr Louis Dicaire, évêque auxiliaire à Saint-Jean-Longueuil et sur le comité de l'AECQ, de l'assemblée des évêques du Québec, depuis bien avant 2010, où on a travaillé cette question et on a déposé un premier rapport, un premier... un mémoire en 2010. Et c'est heureux que vous nous ayez invités à relancer la question, parce qu'il y a des choses qui ne se sont pas vraiment tassées, là, dans le... qui sont restées un peu des champs en friche, et c'est heureux qu'on puisse venir facilement vous entretenir là-dessus.

Je vous présente M. Germain Tremblay, qui est le principal ouvrier qui a travaillé sur le mémoire et celui d'aujourd'hui aussi que vous avez reçu.

M. Tremblay (Germain) : Alors, bonsoir, tout le monde. Je suis très heureux d'être ici, très heureux de vous rencontrer et de vous voir en mode travail, pas juste En mode Salvail. J'aimerais saluer également ma députée, je suis de Repentigny. Mme Lavallée, bonjour.

En 2010, on avait forcé un peu la porte. On avait entendu parler qu'un projet de loi se préparait concernant l'entreprise funéraire, la disposition des cendres. On n'avait pas été invités à présenter un mémoire, mais, ayant su que quelque chose se préparait, on s'était imposés, je dirais, et on avait fait parvenir au ministre Bolduc, à l'époque, notre mémoire, que vous retrouvez également en annexe, là, du mémoire actuel. Et, lorsque le projet de loi a été rendu à notre connaissance, il y a quelques semaines, le projet de loi n° 66, on a été très heureux de voir que, certains propos ou certaines demandes que nous avions en 2010, bien, on en retrouvait des traces dans le projet de loi actuel. Essentiellement, le court document qu'on vous présente aujourd'hui reprend les principaux sujets que nous abordions en 2010.

D'abord, on se désolait de l'absence de toute réglementation en ce qui concerne la disposition des cendres et on avançait à l'époque, là, que ce vide juridique ne favorisait pas des conditions favorables pour bien vivre le deuil. On proposait alors que les cendres soient traitées de la même façon que les cadavres et que tout reste humain, de façon digne et respectueuse. Là, on pourrait avoir tout un débat sur la notion de dignité, là, le même mot et le même événement peut paraître digne pour une personne et ne pas l'être pour d'autres. On l'utilise de temps en temps dans le mémoire actuel, on essaiera de l'expliciter du mieux possible. Et alors on demandait, en 2010, que la loi oblige à disposer les cendres de la même façon qu'on fait pour les corps et en obligeant notamment les entreprises funéraires à en préserver l'intégrité, ce que l'on retrouve dans le projet de loi actuel. On proposait à l'époque, plutôt que de remettre les cendres aux familles, qu'on les présente... qu'on les confie, c'est-à-dire, aux responsables de cimetières ou de columbariums, qui veilleraient à les disposer dans un lieu aménagé à cet effet.

Donc, vous avez probablement perçu dans le mémoire actuel que nos idées n'ont pas changé. Essentiellement, ce qu'on a voulu faire, d'abord, c'est commenter les trois articles du chapitre IV du projet de loi actuel.

Le premier article obligerait les entreprises funéraires à remettre donc les cendres à une seule personne dans un contenant rigide qui les contient en totalité. On retrouve là une trace de ce qu'on avait demandé en 2010 et nous en sommes heureux. Cependant, bien entendu, la personne, la famille qui récupère les cendres d'un proche aura toujours la possibilité de les diviser ou d'en disposer à sa guise. Bien évidemment, puisqu'on n'est pas reconnus pour changer d'idée fréquemment, on aurait préféré que la reconnaissance juridique des cendres humaines soit davantage précisée ou définie afin de s'assurer que les restes humains puissent être manipulés et disposés avec toute la dignité et le respect qui s'imposent.

Et ce n'est pas un sujet banal ou innocent, et je vous raconte une anecdote. En 2010, lorsqu'on a présenté notre mémoire, on l'avait rendu public, bien entendu, sur notre site Internet et on l'avait fait connaître un peu partout, et ça a déclenché... Ça fait 24 ans que je travaille au secrétariat de l'assemblée des évêques du Québec, c'est la première fois que j'avais des discussions aussi enflammées avec des personnes qui m'appelaient. Il y a même un homme qui m'a téléphoné et qui en fin de discussion a dit qu'il aimerait pouvoir me brûler et verser mes cendres dans la toilette. À la grosseur que j'ai là, ça n'aurait pas fait un déversement d'eaux usées très important, mais pour vous dire que c'est un sujet qui suscite beaucoup d'émotions, beaucoup de discussions. Et on nous a accusés, on nous accuse encore de vouloir gérer la vie des gens jusque dans la mort, jusqu'après la mort. L'intention n'est pas là. L'intention du mémoire, c'est de redire, dans le fond, notre vision et notre perception de ce que nous considérons respectueux et digne de restes humains lorsque vient le temps d'en disposer, que ce soit un cadavre ou que ce soient des cendres.

Ensuite, dans le deuxième article, le projet de loi interdirait de disperser les cendres humaines à un endroit qui pourrait constituer une nuisance ou d'une manière qui ne respecte pas la dignité de la personne décédée. L'intention est excellente. Ceux qui nous ont précédés avaient la même question, la même interrogation; je crois qu'il faudrait un cadre réglementaire qui définisse de façon plus précise ce que sont ces endroits nuisibles et quelles pratiques ne respectent pas la dignité de la personne. J'ai entendu vos réponses, tout à l'heure, et la discussion que vous avez eue, on pourra y revenir, si vous le désirez, mais cet article-là me semble un peu flou ou laisser la porte ouverte à une multitude d'interprétations, qui peut-être ne nous aiderait pas ou nous nuirait davantage qu'il ne veut nous aider.

Bien entendu, nous, on continue à croire que les cimetières, les columbariums, là, demeurent les endroits les plus appropriés où déposer les restes humains. Dans notre pratique, on a été suffisamment témoins, là, d'histoires malheureuses concernant la garde et la disposition inappropriée de cendres humaines pour ne pas penser que, malgré la bonne volonté de ceux qui reçoivent, là, ces cendres-là, il ne pourrait pas y avoir, là, des pratiques qui soient encore désolantes. Et les cimetières, les columbariums, donc, sont les lieux permanents où la communauté tout entière, pas seulement les familles endeuillées, peuvent faire mémoire des défunts, et en ces lieux le défunt n'est plus la seule propriété des proches mais continue d'occuper une place dans la société, dans la mémoire collective. Et ce sont également des lieux d'apprivoisement de la réalité de la mort, qui est beaucoup occultée de nos jours. Donc, on continue à croire que les cimetières et les columbariums sont des lieux qui créent une distance psychologique nécessaire pour bien vivre le deuil et même pour envisager notre propre mort.

• (17 heures) •

Enfin, le troisième article du chapitre IV, là, propose que l'inhumation et la dispersion des cendres soient déclarées à l'entreprise qui a pris charge du cadavre et que l'acte soit inscrit au registre. Il n'y aurait donc plus de disposition non enregistrée ou anonyme des cendres humaines. C'est une avancée importante, mais, encore là, ça n'assure pas la présence d'un lieu de commémoration identifiable ou permanent.

Donc, compte tenu de cela et des commentaires que nous venons de faire sur les trois articles, si nous pouvions... ou si nous avions une recommandation ou des recommandations à faire ou des idées à vous donner, dans un premier temps, ce serait de continuer — c'est commencé, c'est déjà un bon pas — de continuer à vouloir traiter tous les restes humains de la même façon, peu importe leur état. Les cendres, tout comme les cadavres, exigent le même respect et ont la même dignité. Cette vision dépasse la simple considération de l'aspect physique ou la condition biologique. On sait bien qu'on ne peut pas faire ce qu'on veut d'un cadavre, ne serait-ce que pour la santé publique, on le reconnaît bien, mais ce n'est pas parce que c'est des cendres ou ce n'est pas parce que ce sont des os qu'on retrouve plusieurs années après l'écrasement d'un avion, par exemple, qu'on peut en disposer n'importe comment. Et il suffit, et on le dit dans notre mémoire, là... il suffit de rencontrer, de voir des familles dont une personne est disparue dans un écrasement, une noyade ou quoi que ce soit, et une des premières choses qui est demandée, c'est de retrouver le corps pour qu'ils puissent avoir une sépulture respectable et digne. Donc, si c'est bon pour un, ça doit être bon l'autre également.

Et on réclame également... S'il y a une autre demande qu'on peut faire, c'est la revalorisation des lieux de sépulture. Pendant un certain temps, on pouvait être portés à croire qu'on voyait le thanatologue, l'entreprise funéraire, le propriétaire de cimetière comme étant un ennemi, comme étant celui qui veut d'abord ramasser notre argent sous des allures, là, de bienfaiteur, de vouloir prendre soin de nous mais, dans le fond, ce qu'ils voulaient, c'était faire de la business, mais, au-delà de ça, les lieux de commémoration, les lieux de mémoire que sont les cimetières et les sépultures demandent ou exigent, exigeraient d'être davantage revalorisés par nos concitoyens. Et vous voyez que...

La Présidente (Mme Hivon) : ...invite à conclure.

M. Tremblay (Germain) : Oui?

La Présidente (Mme Hivon) : Je vous invite à conclure.

M. Tremblay (Germain) : Je conclus...

La Présidente (Mme Hivon) : D'accord.

M. Tremblay (Germain) : ...pour vous dire que, vous voyez, je n'ai pas parlé de religion, dans mon mémoire, ça va au-delà de ça. Ce n'est pas une approche religieuse, d'abord, qu'on apporte. Cette vision-là, on la partage, je veux dire, dans notre vision religieuse, mais c'est d'abord une vision anthropologique, psychologique où le respect, la dignité, la commémoration, la mémoire des personnes défuntes, peu importe l'état dans lequel elles se retrouvent après leur mort, méritent le même respect et un traitement qui appelle au respect et à la dignité, voilà, tout simplement.

La Présidente (Mme Hivon) : Merci beaucoup de votre présentation. Alors, sur ce, je vais céder la parole à la partie ministérielle pour une période d'environ 14 minutes. M. le ministre.

M. Barrette : Merci, Mme la Présidente. Alors, Mgr Dicaire, M. Tremblay, bienvenue. Je pense qu'il est tout à fait intéressant, approprié et pertinent que vous vous présentiez aujourd'hui pour nous faire part de vos commentaires pour un sujet qui est certainement d'une grande délicatesse, compte tenu, dans nos cultures, de l'impact que ça a.

Vous l'avez dit vous-mêmes, là, puis vous allez voir un peu où je vous emmène... — puis en fait je ne veux vous amener nulle part mais juste avoir un échange, là — vous l'avez dit vous-mêmes, votre mémoire traite fondamentalement du traitement ou de l'attitude que l'on doit avoir à propos des cendres. Le reste du projet de loi, je comprends que vous êtes probablement confortable avec?

M. Tremblay (Germain) : J'ai lu l'ensemble du projet de loi, il y a beaucoup de choses qui nous touchent peut-être de façon plus éloignée. Beaucoup de choses sont très intéressantes, par exemple, sur les cendres ou les corps non réclamés, la façon de traiter ces restes humains là après quelque temps, la recherche que l'on fait pour savoir comment est-ce qu'on va traiter ces restes humains là une fois qu'ils ne sont pas réclamés après un certain temps, tout ce qui concerne la gestion, l'administration des entreprises funéraires, l'approche qu'on doit avoir avec les familles endeuillées.

L'ensemble du projet de loi, je pense, d'abord est une mise à jour qui... c'était le temps que ce soit fait, là, parce que, l'ensemble des lois, là, que l'on mentionne et qui sont mises à jour par ce nouveau projet de loi là, c'était le temps que ce soit fait. Nous, on ne travaille pas beaucoup en entreprise funéraire. On a des liens avec les entreprises, on a des liens avec les cimetières, bien sûr, plusieurs de nos paroisses ont des cimetières, mais nous, là, comme Assemblée des évêques, puisque c'est un mémoire de l'Assemblée des évêques, on a peu à voir avec l'entreprise ou le commerce funéraire. Mais, dans l'ensemble du projet de loi, il y aurait peut-être un point ou l'autre que j'aurais pu pointer, là, il faudrait que je relise puis que je revoie mes notes, mais on a voulu se concentrer sur d'abord la disposition des cendres parce que d'abord c'est déjà un sujet qu'on avait traité dans notre mémoire de 2010 et aussi parce que dans notre pratique, et, je dirais, depuis les 25 ou 30 dernières années, c'est un sujet récurrent dans les discussions par rapport aux rituels funéraires, que ce soient des gens d'Église, que ce soient des familles endeuillées, que ce soient des gens que l'on rencontre ici et là, toutes sortes de pratiques qui ont vu le jour et qui posent et qui continuent de poser question. Voilà pourquoi on s'est concentrés là-dessus.

M. Barrette : Merci de votre commentaire, là, c'est à peu près ce que j'avais saisi de votre approche. Et donc ça nous ramène... ça nous éloigne notre échange du côté technique ou administratif de ce qui traite des services funéraires. Alors, allons-y dans le coeur de votre intervention, à savoir la disposition des cendres, et plus particulièrement la dignité qui doit l'entourer, compte tenu des commentaires que vous avez faits.

Moi, compte tenu de mon âge vénérable... Ça, c'est de l'humour, mais il n'en reste pas moins que je suis d'un âge qui fait en sorte que je proviens de la culture religieuse, sans que j'en sois encore partie nécessairement, mais je me rappelle bien du précepte qui veut que nous naissions poussière et nous redevenions poussière. Et la poussière a la caractéristique de voler au vent.

Et ça m'amène à entretenir cet échange-là avec vous sur la question de la dignité. La poussière étant ce qu'elle est, la dignité n'est-elle pas un exercice, un état d'âme ou de pensée qui se situe et qui réside fondamentalement chez les vivants, et que donc cette dignité-là soit un concept, un principe, une valeur, une expérience — vous pourrez choisir le mot que vous voudrez, il n'y en a pas de meilleur que d'autre — qui appartient aux vivants qui sont autour du défunt, donc des cendres, et que le côté de la dignité, l'aspect de la dignité soit un élément qui appartient fondamentalement aux vivants, au pluriel évidemment, qui entourent les cendres?

Alors, je vous dis ça simplement parce que j'aimerais avoir votre opinion sur le fait que, nous, dans la loi, c'est ouvert. Et, les gens qui viennent aujourd'hui et qui probablement vont venir dans les prochains jours, manifestement il y a un fil conducteur, puis, je vous le dis, je ne m'attendais pas à ce que le fil conducteur des interventions soit celui de la dignité. Je suis surpris, mais je le comprends. Je suis surpris, mais je le comprends très bien, puis c'est tout à fait raisonnable. Je suis juste étonné du poids de ça dans les interventions, mais je le comprends très bien. Donc, il y a lieu d'en débattre.

Ceci dit, y a-t-il lieu, à partir du moment où... En ce qui nous concerne, aujourd'hui, pour les fins de la discussion, la dignité étant quelque chose qui réside dans l'esprit et le coeur des vivants qui sont dans cette situation-là, y a-t-il vraiment lieu pour l'État de légiférer, de définir quelque chose qui par définition est éminemment variable, particulièrement compte tenu de la société qui change et de sa composition, qui est maintenant tellement vaste et, conséquemment, tellement variée quand vient le temps de faire face aux rites funéraires? N'y a-t-il pas là plutôt un danger, de nous demander de vouloir définir dans une législation des principes de dignité face aux cendres?

• (17 h 10) •

M. Tremblay (Germain) : Il y a peut-être un danger, sauf qu'on retrouve dans la loi, à l'article 71, et ça a été souligné, là, par les intervenants qui nous ont précédés, un article — donc c'est la loi — qui dit qu'on ne peut pas disperser les cendres humaines «à un endroit où elles pourraient constituer une nuisance ou d'une manière qui ne respecte pas la dignité de la personne». Donc, c'est le projet de loi qui apporte ce concept-là, on ne peut pas disperser les cendres d'une manière qui ne respecte pas la dignité de la personne décédée. On ne parle pas des personnes qui sont vivantes puis qui font des rituels ou quoi que ce soit par rapport à ces cendres-là, on parle de la dignité de la personne décédée.

Je n'ai pas... Quand je lis ça, comme disait l'ancien politicien, je ne suis ni pour ni contre, bien au contraire, mais je suis d'accord avec ça en autant qu'on s'entend sur qu'est-ce que ça veut dire. Donc, c'est pour ça qu'un article comme celui-là peut être utile, intéressant, mais est-ce qu'il ne peut pas être enfargeant également si on ne sait pas trop ce que ça veut dire? De la même manière, «à un endroit où elles pourraient constituer une nuisance», c'est quoi? C'est où, ça, ces endroits-là? Comme vous dites, c'est de la poussière, ça vole au vent. Est-ce que de la poussière, ça peut vraiment être disposé de façon telle à ce que ça nuise à quelqu'un quelque part? Donc, c'est pour ça qu'on en parle, parce que le projet de loi en parle.

M. Barrette : Vous avez terminé?

M. Tremblay (Germain) : Oui.

M. Barrette : Je ne voulais surtout pas vous interrompre. Bien, je vais vous éclairer là-dessus. Pour être bien franc, là, parce qu'il faut être francs, là, nous, comme parlementaires, là, il n'y a pas de cachette dans une loi, en tout cas il ne doit pas y en avoir en ce qui me concerne, c'est volontairement que c'est maintenu ouvert, là, parce que les articles de loi, ils sont là parfois... une loi est là parfois pour dicter un comportement, mais une loi est aussi là parfois pour sanctionner, si nécessaire, une action de quelqu'un dans un contexte donné. Alors, moi, je vous dirais que ces articles-là de la loi sont plus dans une optique de jugement légal, un juge qui aurait à faire face à une plainte, parce que...

Et là je vous demande votre opinion, là. Ce que je dis, là, c'est une question que je vous pose, c'est un commentaire mais qui est en fait une question. À partir du moment... Et on l'a eu, l'exemple, tantôt, je pense que vous étiez ici lorsque l'exemple a été donné, je vous voyais du regard. Lorsque vos prédécesseurs ont fait leur présentation, on a fait référence aux cendres de M. Layton, on a fait référence à la famille de M. Jack Layton qui avait demandé à ce que ses cendres soient distribuées une fraction ici, une fraction ailleurs, et ainsi de suite. Manifestement, pour la famille, c'était digne. À tort ou à raison, j'ai perçu que ce n'était peut-être pas quelque chose de digne pour d'autres personnes, à tort ou à raison, mais certainement qu'on peut imaginer des gens qui diraient : Bien, voici, ce n'est pas digne, ça. Alors, où est la dignité? Et moi, j'imagine bien cette loi-là être utilisée face à quelqu'un qui ferait une plainte et j'imagine très bien un juge se poser la question : Est-ce digne?, et continuer la phrase avec : Est-ce digne pour la famille ou l'individu?

Moi, je peux vous imaginer... vous ne serez pas surpris si je vous dis que moi, je pourrais très bien imaginer une dispersion de mes propres cendres d'une manière très exotique, on va dire, que d'autres ne jugeraient vraiment pas digne. Alors, moi, je dis simplement que ces articles-là sont ouverts par définition parce qu'ils font référence intrinsèquement et implicitement à la perception des vivants, qui seront les seuls à pouvoir juger de la dignité de la chose ou non, à moins que la personne, évidemment, ait donné des directives préalables très strictes, auquel cas c'est encore la même chose qui s'applique.

Vous me posiez la question sur la question de la nuisance. La définition, là, je vous la lis, là, c'est un «facteur qui constitue un préjudice, une gêne pour la santé, le bien-être, l'environnement», c'est un concept, là, qui est assez simple. Mais, encore là, parce que vous posiez la question, tant de ce côté-là que de la dignité il me semble qu'on doit avoir une règle qui nous prémunisse contre des exagérations mais relatives à la perception des vivants, ne croyez-vous pas? Alors, ce règlement-là, là... Et je comprends votre point de vue et votre questionnement. Est-ce qu'on devrait, nous, le légiférer? Moi, je vous renvoie volontairement la balle : Ne devrions-nous pas au contraire avoir une loi qui peut être utilisée face à des situations qui sont de l'ordre de la perception, la dignité étant un facteur ou un concept qui a une variation, une variance culturelle, populationnelle, et même dans la même culture?

M. Tremblay (Germain) : Le problème, ce n'est pas l'idée; moi, je suis d'accord avec votre idée, là. Le problème, c'est peut-être le mot «dignité» dans le cadre de cette loi-là. La dignité, c'est une pratique, mais c'est aussi, en amont ou en même temps, un concept, hein? Ce qui est digne pour un n'est pas digne pour l'autre nécessairement, vous l'avez dit. Puis ce n'est pas la première fois qu'on ne serait pas nécessairement d'accord sur la notion de dignité pour une pratique quelconque, je ne dis pas que vous avez tort puis qu'on a raison, et vice versa, mais, en étant de cette façon-là dans cet article-là, dans ce projet de loi là, dans le fond, ma question, c'est : Est-ce que c'est absolument nécessaire que dans cet article-là on parle de dignité? C'est une question, là, je me pose la question en discutant avec vous, là.

M. Barrette : Bien, c'est très intéressant, je pense que c'est le plaisir de ces échanges-là. Alors, je sens, je conclus... Est-ce que je peux conclure que ce que vous nous recommanderiez, c'est de ne pas faire référence à la dignité?

M. Tremblay (Germain) : Je serais peut-être un peu trop osé de vous proposer ça immédiatement, ça demanderait peut-être un peu plus de réflexion et peut-être un peu plus de discussions. La seule chose que j'ose dire présentement, c'est : Est-ce que, de la façon dont c'est formulé actuellement, ça aide davantage que ça nuit à l'objectif de cet article-là ou de ce chapitre-là dans cette loi-là? Une fois ça dit, là, il faudrait que j'y réfléchisse un peu plus puis que...

M. Barrette : Et je comprends, hein, ce n'est pas... il n'y a personne qui a tord ou raison là-dedans, là. Oui?

M. Dicaire (Louis) : Ce qui nous étonne, actuellement, c'est le nombre de pratiques qui existent autour des rituels de défunt. Et ça, ça finit par être comme une sorte de piège, là, dans lequel on se fait entraîner.

Et puis est-ce qu'il faut approuver n'importe quoi? C'est là qu'on est, là, c'est là qu'on bute sur une difficulté de se comprendre et de comprendre aussi les familles qui veulent faire une chose ou l'autre, là.

La Présidente (Mme Hivon) : Merci beaucoup. Alors...

M. Barrette : ...je vous remercie de la qualité des échanges qu'on a eus, c'était très intéressant.

La Présidente (Mme Hivon) : Merci. Donc, sur ce, on va passer la parole à l'opposition officielle avec Mme la députée de Taillon pour une période d'environ 8 min 30 s.

Mme Lamarre : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mgr Dicaire, M. Tremblay, bonsoir. Alors, moi aussi, à la lecture de votre mémoire, des deux mémoires, celui de 2010 et celui de 2015, il est certain que la partie, la section... le chapitre IV, la disposition des cendres humaines, est vraiment celui qui est le plus dominant dans vos interventions. Moi, je regarde l'article 70 et l'article 72. Dans l'article 70, on dit : «Les cendres humaines ne peuvent être remises par l'entremise de services funéraires qu'à une seule personne et doivent l'être dans un contenant rigide qui les contient en totalité.» Et à 72 on fait référence à... la personne qui inhume des cendres humaines ou qui les disperse doit déclarer à l'entreprise...

Est-ce que, pour vous, le fait de maintenir les cendres... Parce que vous avez fait référence un peu à la similitude entre ce qu'on fait avec un cadavre et ce qu'on fait avec des cendres. Est-ce que le fait de les disperser, ça vous apparaît quand même respecter l'esprit de maintenir les cendres ensemble?

M. Tremblay (Germain) : Je peux... Allez-y.

M. Dicaire (Louis) : Pour nous, la dispersion, ça reste une difficulté extrêmement importante parce que, de fait, on perd de vue l'unicité de la personne, et ça, là, c'est un peu traître pour... à notre point de vue.

M. Tremblay (Germain) : Et, pour répondre peut-être aussi à votre question, moi, là, j'ai été heureux de voir cet article 70 là, c'est une des demandes qu'on avait faites en 2010. Pour avoir parlé à quelques entrepreneurs funéraires il y a quelques années, ce n'était pas, pour eux, toujours de gaieté de coeur que de répondre à la demande des familles de diviser les cendres dans des bijoux, dans différents objets, de remettre ça. Eux, en tout cas quelques-uns à qui j'ai parlé, trouvaient cette responsabilité ou cette pratique-là un peu particulière, parfois un peu lourde. Là, on vient de les décharger de cela.

Et moi, je crois que c'est un pas intéressant. Et, s'il y a un article qu'il faudrait garder, c'est bien celui-là, en disant : L'entrepreneur funéraire, lui, remet dans sa totalité, dans son entièreté, dans un contenant solide, les cendres à la personne ou au cimetière, en tout cas, à la personne qui doit les recueillir pour en disposer soit en les inhumant ou autrement. Donc, pour moi, cet article-là, en tout cas, tout au moins, là, en ce qui concerne l'unicité et de remettre ça à une seule personne dans sa totalité, pour moi, c'est une avancée intéressante.

• (17 h 20) •

Mme Lamarre : Je comprends et je lis très bien l'article 70 de la même façon que vous, mais plus je relis l'article 72, plus je me dis : On convient quand même, à 72, que «la personne qui inhume des cendres humaines ou qui les disperse — et là on comprend que c'est a posteriori, là — doit déclarer à l'entreprise de services funéraires ayant pris en charge le cadavre le lieu où ont été inhumées ou dispersées ces cendres, pour inscription au registre des activités funéraires de cette entreprise».

Est-ce que vous comprenez que ça voudrait dire que quelqu'un qui en aurait mis dans un bijou, qui en aurait mis dans trois ou quatre endroits, donc, une famille devrait revenir et dire à l'entreprise des services funéraires où ont été dispersées... dans combien d'objets ou dans combien de sites ont été dispersées...

M. Tremblay (Germain) : Ça pourrait être compris comme ça. Si on coupe les cheveux en quatre, on pourrait dire : Non, c'est juste si on les inhume ou si on les disperse. Si on les met dans un bijou, on ne les inhume pas puis on ne les disperse pas.

Là, je ne sais pas comment ça peut être vu ou interprété, là, mais ça aussi, cet article 72 là, au moins il reste une trace, on ne peut plus, de façon anonyme, en faire ce qu'on veut et ne plus savoir où est-ce que c'était. Au moins on dit : Si on les inhume personnellement... Parce que moi, je peux partir avec l'urne de mon père puis aller l'enterrer dans la cour chez nous, en arrière. Donc, ça, je comprends que, si je fais ça, je dois au moins en avertir l'entreprise funéraire qui en a pris soin pour qu'elle puisse le mettre... qu'elle puisse inscrire ça dans un registre. La même chose, si je les disperse dans ma piscine parce que c'est exotique, bien je vais le dire aussi à l'entrepreneur funéraire. C'est comme ça que je le comprends.

Mme Lamarre : On n'a peut-être pas beaucoup de leviers, là, pour s'assurer que ça va être vraiment fait, là. Il y a une amende qui est prévue, une amende individuelle puis une amende pour le titulaire d'un permis. Pour le titulaire d'un permis, on s'entend que c'est plus facilement retraçable, mais, pour une personne physique, ça peut porter à confusion, donc, ou en tout cas ça peut... on n'est pas sûr, là, que ça pourrait se surveiller correctement.

M. Tremblay (Germain) : Moi, au-delà des mots, et malgré les imperfections qu'on y trouve encore, je dois quand même avouer, là, qu'il y a une avancée intéressante. Je veux dire, avant ça, les cendres humaines ne sont rien. Là, il y a une certaine reconnaissance, juridique ou autre, qui dit : Bien, ce n'est pas absolument n'importe quoi, il y a une certaine façon de les traiter. Même si, pour nous... Si c'est moi qui avais fait la loi, peut-être que je l'aurais... certains articles seraient différents, où sur la dispersion on aurait peut-être discuté différemment, mais en tout cas déjà ce qu'il y a là, c'est mieux que ce qu'il y avait avant, parce qu'avant il n'y avait rien.

Mme Lamarre : Bien, on est tout à fait d'accord pour dire que l'article 70 correspond à quelque chose de plus précis, mais on travaille pour les 40 prochaines années, puisque cette loi date d'il y a 40 ans, alors on essaie de faire pour le mieux, avec un peu de perspective d'avenir aussi.

Il y a toute la notion d'être responsable de définir le concept de dignité qui est évoqué aux articles 4 et 72. Qui devrait être responsable de définir ce concept de dignité? Est-ce qu'il y aurait intérêt à avoir des groupes de travail? Est-ce qu'on peut permettre une vision plus strictement législative? De quelle façon vous le voyez?

M. Tremblay (Germain) : C'est à tout le monde... Et, en faisant ce qu'on fait là, on s'aide à mieux définir. Je veux dire, on l'a vu, là, dans le projet de loi sur mourir dans la dignité, on a discuté beaucoup de dignité, n'est-ce pas, Mme Hivon, et on ne s'entendait pas nécessairement sur tout, on s'entendait sur certaines choses. Puis là on est tous des êtres raisonnables, minimalement intelligents, avec une certaine culture, avec des études, avec des lectures en banque, puis on n'est pas capables nécessairement de s'entendre sur une définition unique correspondant à ce que tout le monde pense de ce qu'est la dignité. Donc, c'est acquis... Je veux dire, le gouvernement aura beau faire une loi pour dire : La dignité, c'est ça, je peux nommer autant de personnes qui ne seraient pas d'accord que de personnes qui seraient d'accord. Donc, dans le fond, c'est en faisant cet exercice-là qu'on réussit à avancer puis à mieux définir les choses.

Bien sûr, nous, en Église, comme femmes et hommes de foi, on a une conception de la vie dans son entièreté, une conception du corps, une conception de la mort, une conception des rituels funéraires, mais on fait encore... Même si l'État est laïque, et j'applaudis cela, la société demeure plurielle, puis je me permets de dire qu'on a encore droit au chapitre, de s'exprimer, de voter puis de donner notre opinion. C'est exactement ce qu'on fait, sans imposer ce qu'on pense, malgré ce que certaines personnes peuvent en penser, malheureusement, mais, faire cet exercice-là avec vous, moi, j'en suis très heureux.

Puis je ne m'attends pas, en partant d'ici, puis lorsque la loi sera promulguée et votée, qu'on va retrouver là tout ce qu'on a dit puis tout ce qu'on a souhaité, absolument pas. On a aussi, nous, de notre côté, toute une éducation, une catéchèse, des discussions à avoir avec nos croyants, avec nos concitoyens, avec nos voisins. J'ai encore le droit de dire que je crois, j'ai encore le droit de dire que je crois à la résurrection puis j'ai encore le droit de dire que moi, je préférerais être inhumé que dispersé. Cela étant dit, vous avez le droit, comme parlementaires, comme politiciens, de faire un projet de loi, de nous inviter pour en discuter puis de voter les lois que vous voulez bien voter. Une démocratie, c'est ça.

La Présidente (Mme Hivon) : Merci beaucoup. Alors, on va passer aux échanges avec le deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de Repentigny, la parole est à votre groupe pour 5 min 30 s.

Mme Lavallée : Merci. Bonjour. Vous parlez de l'aspect psychologique. Je me souviens, dans ma pratique comme notaire, j'avais rencontré une psychologue qui m'avait fait une certaine réflexion suite à toutes ces nouvelles modes, les nouvelles façons de régler le décès de quelqu'un, l'incinération, la rapidité alors qu'avant les rituels étaient beaucoup plus longs, puis là, maintenant, c'est plus rapide, et les effets que ça pouvait avoir sur le processus de deuil après le décès pour ceux qui survivent. Et, dans votre document, vous parlez de l'aspect psychologique. Je ne sais pas si c'est de ça que vous voulez parler. Est-ce que vous pouvez élaborer là-dessus?

M. Tremblay (Germain) : Oui, c'est un tout, hein? Le processus du deuil, du mourir, là, avant, pendant et après la mort, c'est un processus qui est entier, qui est complet puis qui est complexe également. Plusieurs psychologues vous diraient, par exemple, qu'une personne qui décède, qui passe directement de son lit d'hôpital au four crématoire sans que les proches aient pu même venir le voir sur son lit de mort, qui ne le verront plus après sa mort et qui n'auront même pas l'occasion, même, de voir l'urne ou de voir les cendres, il y a peut-être des problèmes qui peuvent être vécus par certaines personnes, hein? Pour certaines personnes, le fait de ne pas voir un cadavre, ça peut être pire que le fait de voir disperser des cendres, je veux dire, là, là, tout est possible, et le spectre est large, dans le domaine psychologique.

Notre conception, c'est de dire que tout ce processus-là a un sens, le fait d'accompagner une personne mourante, le fait de l'accompagner jusqu'à la mort, le fait d'avoir des rituels suite à cette mort-là, que ce soient des rituels religieux ou autres, là, ça, la question n'est pas là. Trop souvent on a occulté ces rituels-là, et les psychologues actuellement disent qu'il y a des personnes qui vivent des problèmes graves justement parce que le deuil a été mal vécu, faute de rituel signifiant, intéressant ou même faute de rituel tout court. Donc, bien sûr, je n'embarquerai pas... je n'irai pas plus loin là-dedans, là, ce n'est pas ma compétence, ce n'est pas mon domaine, sauf qu'on n'a pas besoin d'être psychologue pour savoir qu'un deuil mal vécu, ça peut être très nuisible et pour très longtemps. On a notre conception, nous, bien sûr, de ces rituels-là, on a nos propres rituels qui se vivent depuis des centaines et même des milliers d'années, on a un très beau rituel funéraire en Église, très, très beau, qui essaie de prendre en compte une multitude de choses, mais justement le fait d'occulter ces rituels-là — et là on est au-delà, là, de la dispersion des cendres ou non — ça peut être dommageable.

La Présidente (Mme Hivon) : Oui, M. le député de Blainville.

• (17 h 30) •

M. Laframboise : Oui, merci. Moi, je veux revenir sur l'article 71, parce que je le relis, là, puis avec ma formation légale, là : «Nul ne peut disperser des cendres humaines à un endroit où elles pourraient constituer une nuisance ou d'une manière qui ne respecte pas la dignité de la personne décédée.» Moi, honnêtement, j'aurais souhaité «la volonté de la personne décédée», mais je comprends que, pour dire «la volonté», ça veut dire qu'il y a toujours un document à quelque part qui dit ce que la personne veut. Donc, je comprends le gouvernement, je comprends le légiste de dire : Bon, bien là on ne peut pas dire «la volonté». Mais on utilise le mot «dignité». Donc, à ce moment-là, la dignité, puis je suis d'accord avec M. le ministre, c'est-à-dire qu'elle va se référer à la personne décédée. Et évidemment la dignité, pour des catholiques, est différente de celle d'autres religions, et tout ça, parce qu'ils ont leurs habitudes puis ils ont...

Donc, vous savez, c'est difficile, là, d'arriver à trouver le terme, mais je trouve que, si on ne pouvait pas utiliser le mot «volonté», parce qu'à quelque part on ne peut pas garantir que chaque personne qui décède va avoir écrit ses volontés par rapport à la disposition de ses cendres ou de son corps, bien le mot «dans le respect de la dignité de la personne», bien, ça garde l'individu. Vous, vous semblez dire : Bien là, le mot «dignité»... Moi, là, le mot «dignité», lorsqu'il réfère à la personne décédée, moi, je n'ai pas de difficulté à aller en disant : Cette personne-là, dans son milieu de vie, la façon dont la famille veut disposer des cendres, je pense que ça respecte la dignité de la personne. Puis là, bien, évidemment, s'il y a contestation, ce serait juridique, puis c'est ce que le ministre dit, mais, en référant à la dignité, à la personne décédée, moi, je pense qu'on circoncit le problème, là. En tout cas, je voudrais vous entendre là-dessus, là.

M. Tremblay (Germain) : On pourrait continuer d'en discuter très longtemps. J'aimerais juste d'abord parler de la volonté. Les rituels funéraires sont pour les vivants, ce n'est pas pour les défunts. Vivre un rituel, c'est permettre aux personnes qui survivent à la personne décédée de pouvoir faire leur deuil, de pouvoir se situer face à cette mort-là et de pouvoir passer à travers l'épreuve. Le rituel accompagne la personne en deuil pour tenter de lui faire vivre cette situation traumatisante le mieux possible par toutes sortes de façons, de rites, de symboles, de paroles, de chants, d'odeurs, de musiques, etc. Donc, les rituels sont faits pour les vivants.

Une personne qui décède et dont la volonté est de ne rien avoir, je respecte cela. Si j'étais exécuteur testamentaire de quelqu'un qui me dit : Je ne veux rien, je respecterais sa volonté. Mais là il y aurait tout un autre débat, une autre discussion, à savoir : Mais, pour les personnes qui restent puis qui n'ont pas pu faire de rituel pour pouvoir vivre leur deuil, qu'est-ce que ça veut dire? On pourrait en parler la prochaine demi-heure également encore.

La Présidente (Mme Hivon) : Merci beaucoup. Alors, sur ces questions toutes simples, je vous remercie d'avoir pris le temps de venir nous parler aujourd'hui.

Je suspends les travaux quelques instants, le temps que notre prochain groupe, L'Association des cimetières chrétiens du Québec, prenne place. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 33)

(Reprise à 17 h 35)

La Présidente (Mme Hivon) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors je souhaite la bienvenue à L'Association des cimetières chrétiens du Québec. Comme je l'ai dit à vos prédécesseurs, vous disposez d'une période d'une dizaine de minutes pour faire votre présentation, et je vous invite d'entrée de jeu à présenter l'ensemble des personnes qui vous accompagnent. Alors, la parole est à vous.

L'Association des cimetières chrétiens du Québec

Mme Morin (Monique) : Merci. Bonjour à tous. Alors, je demanderais peut-être à mes membres de se présenter. Ce sont tous des membres de L'Association des cimetières chrétiens, on a essayé d'avoir une diversité de Montréal aller à Rimouski. Alors...

Mme Briand (Élise) : Bonjour. Élise Briand, Compagnie du Cimetière Mont-Royal à Montréal.

M. Chapdelaine (François) : Bonjour. François Chapdelaine, directeur général de la Compagnie du cimetière Saint-Charles à Québec.

M. Prenevost (Richard) : Richard Prenevost, directeur général, Repos Saint-François d'Assise à Montréal.

M. Cloutier (Gino) : Bonjour. Gino Cloutier, Jardins commémoratifs Saint-Germain à Rimouski.

M. Cyr (Daniel) : Bonjour. Daniel Cyr, Cimetière Notre-Dame-des-Neiges à Montréal.

Mme Morin (Monique) : Et moi-même, Monique Morin, directrice de la Corporation du cimetière Mont-Marie depuis 25 ans, sur la Rive-Sud de Québec, qui gère six cimetières.

La Présidente (Mme Hivon) : Très bien. Vous pouvez débuter votre présentation. Merci.

• (17 h 40) •

Mme Morin (Monique) : Nous sommes très heureux de pouvoir représenter, par L'Association des cimetières chrétiens du Québec, l'ensemble des cimetières à but non lucratif.

Dans le milieu de la gestion des cimetières, ce projet de loi était attendu depuis fort longtemps, car plusieurs articles de loi existants étaient désuets et ne correspondaient plus du tout à la réalité des cimetières d'aujourd'hui, comme l'a mentionné M. le ministre, on est tout à fait d'accord avec ce fait. À ce titre, parlons que, depuis les années 80, un amendement de la loi avait entraîné un vide juridique important quant aux cendres humaines. Ce dernier point est très important, et une refonte des lois s'imposait afin d'y ajouter des dispositions concernant les cendres humaines.

On nous informe que l'actuelle Loi sur les inhumations et exhumations sera abrogée. Nous constatons que, dans la section V du projet de loi, le législateur entend mettre en place un règlement qui fixera les normes, conditions d'inhumation et d'exhumation. Les dispositions de la loi actuelle présentent de façon relativement simple les règles applicables aux inhumations et exhumations, il y aurait sans doute moyen de préserver une partie de la loi et d'ajouter de la substance à l'article 56, plutôt que d'attendre un règlement qui vienne se greffer à la loi pour bien fonctionner. Notre association propose qu'une description plus étoffée soit ajoutée au projet de loi, plutôt que de reporter ces règles au stade réglementaire.

En abrogeant la loi, plusieurs articles de loi qui assuraient la protection de la santé publique disparaissent. Nous tenons à nous assurer que les chapitres 6 à 12 de cette loi, à défaut d'être inclus dans le projet de loi n° 66, soient clairement énoncés dans les règlements d'application de la nouvelle loi, puisque l'article 40 sur les charniers n'en tient pas compte présentement.

D'autre part, le projet de loi ne mentionne aucunement les salles réfrigérées des grands cimetières, qui ont remplacé les charniers d'antan. Il faudra s'assurer que la loi permette le dépôt des dépouilles dans les salles réfrigérées destinées à cette fin.

Dans les dispositions générales, définitions, le terme «exploitant de cimetière» n'y apparaît pas et, à notre avis, pourrait y être ajouté, on pourrait lire : Toute entreprise, compagnie de cimetière, fabrique ou communauté religieuse qui gère ou administre un cimetière où sont pratiquées inhumation, exhumation des cendres humaines ainsi que des crémations.

Concernant les articles... 43 du projet de loi, changement de superficie d'un usage de cimetière, cela impose un contrôle du ministre de la Santé sur toute modification, même partielle, d'un cimetière existant, incluant des cimetières de communautés religieuses. On recommande que cet article limite le contrôle du ministre sur de telles transactions aux terrains où il y a effectivement présence de défunts. Il faut comprendre que les terrains libres, inoccupés pourraient être exclus dans la mesure où est-ce qu'il n'y a pas de sépulture, bien sûr.

L'article 58, exploitants de crématoriums, il serait opportun, à notre avis, d'ajouter le terme «exploitant de cimetière», puisque plusieurs cimetières exploitent un four crématoire depuis les tout débuts de la crémation au Québec, dont le premier en 1901 au Cimetière Mont-Royal.

Dans l'article 71, restrictions aux endroits publics et disposition de cendres humaines, le terme «nuisance» est très important, puisqu'il restreint sévèrement les endroits où peuvent être dispersées ou déposées les cendres humaines. Il serait important que le législateur définisse par règlement les endroits qui ne respectent pas la dignité de la personne humaine. Par exemple, des terrains de golf, on s'est fait demander... Il y a des gens qui déposent dans les bacs à ordures, des chemins publics. En fait, on pourrait en avoir même sur nos balcons. Afin d'éviter les litiges devant les tribunaux, les détresses psychologiques, il est primordial que la destination finale de cendres humaines soit un cimetière. Les cimetières sont des endroits publics, toujours accessibles aux membres des familles endeuillées.

Par contre, cet article permettrait toujours à des personnes d'apporter les cendres humaines et de les déposer à la maison. Dans notre pratique de tous les jours, nous voyons souvent les résultats d'une telle permission : la prolongation du deuil, les détresses psychologiques, cendres humaines abandonnées, rapportées au cimetière avec aucun lien avec la personne qui les rapporte, et assurément ne veulent pas payer non plus pour en disposer. Nous recommandons que la destination finale des cendres humaines soit un cimetière. Les cimetières sont des endroits dont la mission est spécifiquement la conservation, la commémoration des défunts, et les cimetières assurent depuis des centaines d'années le respect des dépouilles des défunts ainsi que des cendres humaines.

On a la solution pour les cendres abandonnées chez des maisons funéraires, certains cimetières parmi nous en ont des centaines. Il serait vraiment, vraiment préférable qu'elles soient inhumées, selon notre idée, dans un cimetière.

L'article 72 permettra toujours qu'une personne prenne possession pour elle-même des cendres humaines. Considérant les nombreuses familles reconstituées, les relations parfois très difficiles entre les membres d'une même famille, on déplore de plus en plus que la personne ayant signé le contrat de crémation puisse s'approprier les cendres d'une personne et ainsi empêcher d'autres membres de la famille de se recueillir auprès des cendres du défunt. Les cendres humaines ne devraient jamais appartenir à quelqu'un qui en a payé seulement la crémation.

En conclusion, L'Association des cimetières chrétiens appuie ce projet de loi puisqu'il assurera le respect, la dignité des personnes décédées, autant lors de l'inhumation du corps que lors de la dispersion des cendres humaines. Merci de votre écoute.

La Présidente (Mme Hivon) : Merci beaucoup, merci de votre présentation. Alors, je vais maintenant céder la parole, pour le début des échanges, à la partie ministérielle pour une période d'environ 15 minutes. Donc, M. le ministre, la parole est à vous.

M. Barrette : Merci, Mme la Présidente. Alors, bien, bienvenue, alors, M. Cyr, M. Cloutier, Mme Morin, M. Prenevost, M. Chapdelaine et Mme Briand. Merci d'avoir pris ce temps pour venir nous faire part de vos commentaires, qui sont on ne peut plus pertinents, dans le dossier actuel, dans le sujet qui est en cours et que l'on traite, en cours de traitement actuellement.

J'ai bien pris note de tous les commentaires que vous nous avez faits, là, mais qui reprennent, évidemment, ce qui est contenu dans votre mémoire. Je peux tout de suite vous dire que, sur la plupart des éléments de questionnement que vous avez, il y aura une réponse dans le règlement, ça, c'est clair. Je peux comprendre par contre la critique, ou le commentaire, ou les suggestions que vous nous faites sur la base du fait que ce n'est plus dans la loi, et conséquemment il faudrait que ça apparaisse en quelque part.

Est-ce que je peux comprendre que ce qui sera dans le règlement, pour la plupart des commentaires que vous avez faits, ça sera suffisant pour vous?

Mme Morin (Monique) : En fait, ce qu'on trouvait un peu drôle... je ne dirais pas «drôle» mais...

M. Barrette : Je comprends.

Mme Morin (Monique) : ...c'est que, sur l'inhumation, on ne retrouvait seulement qu'un ou deux passages clairs, mais que sur les exhumations on avait pratiquement une page de règlements. Alors que les exhumations, on en fait une, deux, c'est vraiment exceptionnel, les inhumations, on en fait, on en fait des milliers. Donc, c'était un peu ça, que ce soit rapporté dans un règlement.

Mais, si le règlement assure une bonne profondeur comme il était mentionné dans l'ancienne loi, que ceux qui n'ont seulement que des charniers, ils puissent conserver les corps en charnier mais dans des périodes très limitées... On ne voudrait pas qu'au mois de juillet on retrouve des corps à la chaleur. Et c'est tout ça qui nous, un peu, perturbait. On voulait être sûrs que ce soit reporté, ces items qui étaient très primordiaux pour la santé publique et le bien-être des gens, dans le règlement, puis on se demandait pourquoi il n'y en avait pas eu aucune mention, alors, de la loi. C'est...

M. Barrette : Essentiellement, pour vous rassurer, c'est parce qu'on pensait mettre tout ça dans le règlement. Mais vous avez tout à fait raison, un, de nous faire part de vos préoccupations, puis vos préoccupations sont, on va dire, fondées. Alors, ce sera traité dans le règlement, je peux vous en assurer.

Maintenant, vous avez vu... Je ne sais pas si vous avez été ici tout l'après-midi, mais vous avez constaté qu'il y a eu beaucoup d'échanges, puis il y en a eu aussi plus tôt cet après-midi, sur la question de l'obligation d'avoir un lot. Et là je comprends de votre propos, puis j'aimerais que vous élaboriez peut-être un peu plus là-dedans, là, y compris sur le côté financier... Dans votre perception, vous, vous considérez que ce n'est pas un problème, alors que d'autres considèrent que c'est un problème, d'avoir l'obligation d'avoir un lot pour disposer de cendres dans une circonstance x. Vous comprenez que des gens ont comme position de dire : Le syndic va s'en occuper, mais c'est comme déplacer le problème au syndic. Mais il reste quand même la problématique d'en disposer, puis moi, je comprends dans votre position que la disposition finale doit se faire au cimetière, donc chez vous.

Mme Morin (Monique) : Bien, en fait, l'association s'est déjà penchée à plusieurs reprises sur les besoins d'avoir des lots, appelons-les communautaires, pour les maisons funéraires qui n'avaient pas ou ne disposaient pas de cimetières, puisque les contrats de concession de niche souvent sont conclus pour 25 ans ou 50 ans. Après ce délai, que ce soient ces cendres-là ou que ce soient les cendres qui sont abandonnées dans les maisons funéraires, plusieurs cimetières, d'autres de mes compagnons vont vous en parler, sont obligés d'entreposer ces cendres-là ou sont obligés d'en disposer, et souvent... Il ne faut pas se laver les mains, il y a des frais à tout ce qu'on fait. Alors, si la personne a des fins de concession, on pourrait avoir des lots communautaires où est-ce qu'il pourrait y avoir 50, 100 cendres de déposées dans ce lot communautaire, mais c'est sûr qu'on tient à ce que les maisons funéraires paient une concession de lot.

Depuis fort longtemps, les cimetières acceptent toujours les cendres abandonnées des maisons funéraires ou des faillites, puis on n'a jamais aucun déboursés qui nous sont donnés; parce qu'ils ont fait faillite, ils n'ont pas à payer. Alors, on voudrait une juste... Puis on trouve que, dans le projet de loi, c'est justifié de demander que les cendres soient respectées et soient déposées dans un lieu... et les cimetières sont ouverts à ça fortement, à donner des endroits appropriés à des montants très, très justifiés et minimes, plutôt que de les voir traîner sur des tablettes des entrepôts où est-ce qu'on met la canisse de gaz puis on a... Moi, j'ai vu ça, des canisses de gaz, des cendres funéraires dans un... Quand mon père est décédé, je suis allée dans une maison funéraire. Dans un garage, il y avait des voitures, des cercueils, il y avait de tout, des canisses de peinture, tout ce que vous voulez, puis les cendres étaient à travers tout ça. Alors, pour moi, c'était d'un irrespect total.

Quand j'ai commencé à travailler, voilà 25 ans, dans les cimetières, je trouvais qu'il y avait beaucoup de choses qui étaient faites... irrespectueuses, autant que de prendre les cendres... On demandait qu'est-ce qui n'est pas digne. Est-ce que mettre dans une benne à ordures des cendres, c'est digne, pour la plupart des gens ici ce soir? À mon humble avis à moi, non. Alors, si on me demande : Est-ce que ça, c'est digne?, non. Est-ce que c'est digne, de retrouver des cendres dans le fond d'un garage ou dans le fond d'une cour où que personne ne sait où les cendres sont? Il faut se poser la question.

Mais on est très ouverts à avoir des lopins de terre pour les maisons funéraires. Je pense que M. Chapdelaine pourrait vous dire qu'est-ce qui s'est passé dans le cas d'une faillite dernièrement, là, l'année dernière, je crois.

• (17 h 50) •

M. Chapdelaine (François) : Bon, ici, une compagnie funéraire, une entreprise funéraire de la région, je ne nommerai pas le nom, mais s'est retrouvée à faire faillite, donc il y a un créancier qui a bouclé... qui a saisi la propriété, les locaux. Il y avait un columbarium, et il y avait là plusieurs urnes. Ce n'est pas le syndic qui règle, c'est... Le ministère de la Santé est mis à contribution, on recherche protection du consommateur.

Au Cimetière Saint-Charles, on a accueilli plus de 100 urnes et on a dû gérer la situation, recontacter des familles, essayer de retrouver alors que sur des contrats c'était plutôt flou, là, qui était où. Donc, on a eu un effort à déployer pour offrir aux familles ce support-là, pour que celles qui voulaient récupérer les urnes ou leur offrir tout simplement un lieu digne de sépulture puissent procéder.

Donc, on s'est retrouvés au final avec... bon, c'est 53 urnes inhumées dans un lot communautaire. Un lot communautaire, ce n'est pas un champ de un kilomètre par un kilomètre, là, on parle de 6 pieds par 10 pieds, hein? Puis on a rentré les 53 urnes là, on sait... Elles sont étiquetées, elles sont là. Si un membre d'une famille vient pour récupérer, elles sont accessibles, donc c'était dans une voûte métallique. Il y a eu un rite, on a pris le temps de se recueillir. On a fait ça dans la dignité mais avec les moyens du bord.

Donc, pas de revenus, mais on a assumé, nous, l'odieux de la situation, on a géré ce que normalement serait revenu à la responsabilité de l'entreprise funéraire. Il aurait dû y avoir une espèce de provision pour s'assurer le respect... les dernières volontés de la personne sont respectées, là. Donc, on va jusqu'au bout pour ne pas que ça se retrouve simplement : Bon, les cimetières sont là pour ça, c'est le débarras de la mort.

M. Barrette : Bien, écoutez, j'apprécie beaucoup votre pragmatisme dans les échanges parce que, bien, d'abord c'est très bien, là, moi, j'aime bien ça comme ça, parce qu'ici, évidemment, on a beaucoup de... s'opposent des concepts de dignité, là, mais en même temps il y a un côté pragmatique qui est celui de la consommation, il y a un commerce là-dedans. Puis je ne dis pas ça négativement, là, c'est juste... Comme vous le dites, Mme Morin, là, c'est la réalité, là, de la chose, là, il y a un coût à la fin de ça puis, bon...

Alors, ça m'amène à vous poser deux, trois questions, là. Donc, vous, là, vous n'en avez pas, de problème à ce qu'il y ait cette obligation-là dans la loi.

Mme Morin (Monique) : Absolument pas, tout au contraire.

M. Barrette : En même... Je m'excuse de vous interrompre, c'est juste pour arriver à... parce que j'avais compris que vous étiez d'accord avec ça. Mais en même temps, là, éclairez-nous, là. Le coût de ça, là, c'est-u si compliqué que ça? C'est-u si dispendieux que ça? Ça représente quoi, là? Un «ballpark», là.

Mme Morin (Monique) : Écoutez, on en a parlé, à l'association, on a apporté le sujet qu'on préconiserait, nos membres, d'avoir un montant minimaliste pour être capable d'offrir ce service aux maisons funéraires. On n'a pas discuté de ça, mais, dans notre esprit, c'était un montant minimaliste. Alors, c'est-à-dire qu'il pourrait y avoir une disposition des cendres. Les maisons funéraires pourraient avoir une concession de lot qui pourrait être louée pour 50 ans ou 100 ans, et ils pourraient y déposer — ça pourrait être aux deux ans, aux trois ans — un contenant avec l'année du dépôt des cendres, avec lequel, les cendres, on aurait toutes les cendres étiquetées avec le nom de la personne, etc., que, si un jour quelqu'un viendrait, il voudrait absolument récupérer les cendres d'une famille, ce serait possible, à des coûts quand même abordables.

Je pense que, si vous avez un columbarium et que vous chargez... je dis ça comme ça, je ne suis pas une maison funéraire, là, mais que la maison funéraire charge, disons, 2 500 $ pour 25 ans d'un columbarium, si vous avez un lopin de... lot communautaire qui vous a coûté, en bout de ligne, peut-être 500 $ puis que vous pouvez y déposer l'ensemble des lots qui ne seront pas reconcédés après 25 ans, si vous en avez 200, 300, bien vous pourrez les mettre dans votre lopin de terre, puis votre lopin de terre continuera à être là pour d'autres, d'autres et d'autres.

Alors, je pense qu'on n'a jamais... M. Chapdelaine vous l'a mentionné, on n'a jamais été gourmands, peut-être pas assez, justement, parce que, quand il y a des dispositions comme... on l'assume, on assume les frais, mais on se dit que ce n'est pas nécessairement aux cimetières, encore une fois, d'assumer ces frais-là.

M. Barrette : Est-ce que la pratique de ces lots communautaires là est uniforme dans votre milieu? Je vais vous avouer que je ne savais pas exactement comment vous le faisiez. Là, vous me dites qu'il y a un récipient de métal dans lequel il y a des urnes identifiées, donc il y a un récipient, là, qui résiste à la dégradation dans le sol. Est-ce que cette pratique-là est uniforme?

M. Chapdelaine (François) : Il y a plusieurs modèles qui existent. On est en train de concevoir...

M. Barrette : Non, mais le principe d'avoir une structure, là, qui est résistante à la dégradation physique. La raison pour laquelle je vous pose cette question-là, c'est parce que vous comprendrez que, si c'est ça, l'exhumation est quelque chose de simple, là.

Mme Morin (Monique) : En fait, aussi, tantôt, juste pour faire une parenthèse, on a parlé tantôt de cendres, de poussière, puis je voulais en parler, mais là... En fait, c'est des os broyés, hein? Si vous prenez un... Ce qu'on voit dans les films, là, c'est foutaise, là, il faut oublier ça, là, ce n'est pas vrai que ça s'en va dans... Hein?

M. Barrette : Je le sais bien.

Mme Morin (Monique) : Alors, c'est vraiment des os que vous avez. Alors, si les personnes les déploient n'importe où, c'est des os que vous avez à terre, là, ce n'est pas de la poussière, là. Je voulais juste mettre en...

M. Barrette : On comprend l'image.

Mme Morin (Monique) : En fait, c'est ça, mais le contenant pourrait être en bois, le contenant pourrait être en métal. Si la maison funéraire dit : Bien, écoute, moi, j'aimerais mieux un contenant en bois, je vais mettre mes cendres à l'intérieur, on n'a pas d'objection à ça, parce que plusieurs des cendres seront peut-être déposées dans des urnes de granit, de bois, ça peut être de bronze et de tous les matériaux possibles.

M. Barrette : Mais est-ce que la pratique est uniforme?

Mme Morin (Monique) : Non, parce que chaque cimetière est indépendant et autonome.

M. Barrette : O.K. Donc, il y a des endroits où les urnes, dans un lot communautaire, sont mises dans le lot communautaire mais individuellement sont enterrées.

Mme Morin (Monique) : Oui, exact.

M. Barrette : Bon, l'autre élément que je voulais vous... l'autre question que je voulais vous poser en lien à votre mémoire, vous avez fait référence à la... vous avez fait une demande sur des clarifications quant à la nature ou la description de ce qu'est un cercueil. Là, éclairez-nous, là, parce que, si vous nous faites cette question-là, si vous nous faites ce commentaire-là, c'est parce qu'il y a des bizarreries qui se passent dans votre monde, là.

M. Prenevost (Richard) : Tout à fait. Alors, on va vous faire ça simple. Effectivement, c'est qu'on a reçu des requêtes, récemment, avec les rituels qui changent, où, par exemple, on nous demandait d'inhumer un défunt dans un linceul. Sauf que les appareils d'aujourd'hui, les descentes mécaniques, c'est à deux courroies avec un système... et le défunt doit être sur quelque chose de rigide, autrement, je veux dire, il glisse par les courroies, il tombe dans le fond de la fosse, ce n'est pas respectueux.

M. Barrette : Donc, c'est une question purement mécanique.

M. Prenevost (Richard) : Simplement une question mécanique, pratique. Alors, ça, c'est un premier aspect.

Le deuxième : on nous demande maintenant d'accepter ou d'exposer dans des cercueils où on voit le défunt à travers de l'osier ou quoi que ce soit. Nous, on fait simplement souligner au législateur : Est-ce que ça devrait être un peu plus fermé que de laisser ça ajouré, pour la protection de la santé publique? C'était le point qu'on soulevait de ce côté-là.

M. Barrette : Il ne reste pas beaucoup de temps, j'espère que vous allez pouvoir continuer la réponse, une question purement technique, là.

À 46, là, vous nous dites qu'un mausolée ne devrait pas être construit ailleurs que dans un cimetière. Moi, je peux vous dire qu'il y a des villes, des villages qui voudraient offrir ça à leur population. C'est quoi, la logique qui vous amène à conclure qu'un mausolée ne devrait pas être autrement que dans un cimetière?

Puis je vais vous donner un exemple. J'en ai un, exemple, moi-même, je vais vous le donner, là. Moi, je connais un endroit où le village veut reprendre l'église, qui n'est plus fréquentée, pour en faire un mausolée. Pourquoi ce ne serait pas correct, ça?

Mme Morin (Monique) : Bien, en fait, parce que les cryptes, c'est sensible. Il faut que ce soit fait de façon très professionnelle. Ça ne peut pas être disposé à peu près n'importe où, il faut que ce soit fait de façon à protéger les gens de maladies de toutes sortes, donc...

Deuxièmement, c'est un cadavre, ce ne sont pas des cendres. Donc, le cadavre en décomposition, ça peut avoir des bibittes, ça peut avoir... Bon, je n'en ferai pas le dessin, là, mais ça demande beaucoup de précision quant à la formulation d'une crypte et...

M. Barrette : Donc, votre commentaire, il est strictement pour le mausolée, puis, si c'était un columbarium, vous n'auriez pas de problème.

Mme Morin (Monique) : Un columbarium, c'est autre chose. Des cendres, c'est correct.

M. Barrette : Non, je comprends, là. O.K. Mais, le mausolée, là, ce sont ça, les raisons?

Mme Morin (Monique) : Oui.

M. Barrette : Donc, si les règles étaient respectées, vous n'auriez pas de problème?

Mme Morin (Monique) : J'aurais des problèmes parce que, pour moi, les dépouilles sont dans des cimetières.

La Présidente (Mme Hivon) : Merci beaucoup. Alors, maintenant que vous avez fait preuve de générosité, à l'opposition officielle, il vous reste 8 min 8 s exactement. Donc, je cède la parole à Mme la députée de Taillon.

• (18 heures) •

Mme Lamarre : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Ça me faisait plaisir, d'abord, de vous accueillir puis de vous permettre de répondre à la question du ministre. Alors, bienvenue, Mme Morin, M. Cyr, M. Cloutier, M. Prenevost, M. Chapdelaine, Mme Briand et M. O'Gallagher. Ça me fait plaisir.

D'abord, je veux vous féliciter pour la précision de votre mémoire, vraiment on sent que vous connaissez bien ce dossier et que vous avez parcouru le projet de loi avec énormément de rigueur et de détail. Et vous avez attiré notre attention, je pense, sur certains éléments facilement perfectibles, là. Je pense à l'article 2, quand vous dites, à l'alinéa 5°, qu'on a des salons funéraires qui offrent l'exposition et la crémation. Donc, dans le projet de loi, on a des petites modifications, je suis sûre qu'on va en tenir compte. Mais je peux vous assurer qu'on va regarder rigoureusement chacune de vos recommandations, parce qu'elles ont un caractère très précis qui bonifie la clarté puis la pertinence du projet de loi. Donc, je vous remercie beaucoup.

Moi, j'ai plusieurs questions puis je vais essayer d'aller dans d'autres éléments. L'article 2, vous recommandez d'ajouter d'autres définitions que celles qui sont inscrites à l'article 2. On a «cadavre», «établissement», «parent», «service de crémation», «service funéraire». Quelles sont les autres définitions que vous aimeriez voir ajoutées?

Mme Morin (Monique) : «Exploitant de cimetière»...

Mme Lamarre : Seulement celle-là?

Mme Morin (Monique) : ...alors pour que la définition soit claire, puisqu'on en parle dans la loi, mais on ne dit pas c'est quoi, un exploitant de cimetière. Pour nous, c'est simple, pour nous, on le sait, mais beaucoup de personnes confondent les maisons funéraires et les exploitants de cimetière. Moi, il n'y a pas une journée que je ne véhicule pas ça au sein de ma pratique.

Mme Lamarre : Mais il n'y en a pas d'autres? C'est vraiment celui qui vous préoccupait le plus?

Mme Morin (Monique) : Oui, c'est ça.

Mme Lamarre : D'accord. Maintenant, il y avait également, dans votre présentation, la notion de lieux un peu particuliers, donc que le législateur définisse dans le futur règlement... Donc, vous évoquiez le fait que vous auriez aimé avoir plus de règlements ou en tout cas plus de détails dans le projet de loi. Pouvez-vous nous indiquer principalement les articles où vous trouvez que vous auriez besoin d'avoir plus de détails?

Mme Morin (Monique) : En fait, bien, le ministre a peut-être répondu un peu à nos inquiétudes à savoir qu'ils seraient inclus dans les règlements. Il est évident qu'on pensait qu'ils seraient à l'intérieur directement de la loi, parce qu'il y a des choses qui sont minimalistes, comme la profondeur des défunts. Alors, tu sais, on ne pourrait pas avoir six pouces de terre par-dessus un défunt. Quand vous vous promèneriez dans un cimetière, bien, ça défonce, vous savez dans quoi vous allez tomber. Que ce soit aussi pour les charniers, j'en ai parlé tout à l'heure.

Et ce sont toutes des mesures très, très pointues, qui sont techniques et, à mon avis, auraient dû se trouver peut-être dans la loi, mais, comme M. le ministre l'a dit, il faut qu'on soit rassurés, ça va vraiment être dans le règlement. Mais un n'empêche pas l'autre.

Mme Lamarre : En fait, la distinction, c'est que, dans le règlement, c'est plus facile de le changer ultérieurement, si jamais on avait des modifications.

Mme Morin (Monique) : Oui, on avait compris.

Mme Lamarre : C'est pour ça que, si vous nous dites : Ça, on sent que c'est vrai là, mais ça va être vrai aussi dans 10 ans, dans 20 ans, on est peut-être mieux de le mettre dans la loi. Par contre, ce qui est plus susceptible de fluctuer avec le temps ou les coutumes, bien là peut-être qu'on aurait intérêt à le mettre dans des règlements.

Mme Morin (Monique) : Oui, parce que c'est sûr et certain qu'un corps en terre sera toujours un corps en terre, puis je vois très mal n'avoir seulement qu'un mètre de terre dans 20 ans. Quand vous allez mettre le pied dans... quand ça défoncera, que vous soyez dans 20 ans ou maintenant, ce ne sera pas plus agréable, là. C'est des choses assez...

Mme Lamarre : J'ai une question qui va vous sembler un petit peu étonnante, mais je veux vous la poser parce qu'il me semble que vous êtes des gens assez objectifs mais en même temps assez près de ce monde, qui est aussi une entreprise, qu'est le monde des services funéraires.

La provision de 2 500 $ qui est accordée actuellement pour les frais funéraires, là, au niveau de la Régie des rentes, est-ce que vous considérez que c'est raisonnable? Est-ce que vous considérez que ça devrait être augmenté, que ça devrait être indexé à tous les ans? Avez-vous... Parce que vous côtoyez quand même ce milieu-là, vous côtoyez l'augmentation des coûts, mais en même temps on ne veut pas non plus tomber dans un montant qui fait que, dès qu'on... Si on dit 5 000 $, bien c'est sûr que tout va être toujours à partir de 5 000 $, maintenant. Alors, j'aimerais vous entendre sur ce sujet-là.

Mme Morin (Monique) : On avait saisi un peu votre... On a été là toute la journée. Et c'est sûr et certain que, pour ce fait, vous avez raison, c'est sûr et certain.

La chose, nous, qu'on déplore souvent, c'est que, oui, le 2 500 $ va aller souvent, si c'est non, 99,9 %, aux maisons funéraires. Les cimetières, qu'est-ce qu'il va nous rester quand la famille va arriver? Zéro. Alors, c'est souvent déplorable, c'est ce que nous, on va déplorer, c'est qu'encore une fois on va nous apporter des cendres, parfois, de personnes démunies et qui ont dépensé le 2 500 $ à la maison funéraire, et ils vont arriver chez nous, ils vont dire : On n'a plus d'argent, on n'a plus de sous, on n'a plus rien. On n'a pas cette possibilité-là d'avoir une partie pour les maisons funéraires puis une partie pour les cimetières, alors on est toujours les grands oubliés, on est les derniers de la chaîne et les grands oubliés de la chaîne.

Donc, c'est sûr et certain que la maison funéraire qui va offrir un service va principalement payer ses frais d'abord. Et comme, les frais, il est vrai que les frais ont augmenté depuis les années, ça, c'est très vrai, bien souvent il n'en reste plus du tout pour nous.

Moi, je vous dirais : Est-ce que ce serait possible que, quand on augmentera les frais, un jour, il y ait une partie qui soit dévolue aux cimetières, tout au moins, ou le dernier repos de la personne, que ce soit dans un cimetière ou un columbarium extérieur? Le columbarium, chez nous — je fais juste un aparté — sur nos contrats de columbarium d'enfeu et de niche, on inclut, nous, la dernière disposition, qu'après le 25 ans ou le 50 ans la disposition finale sera en terre dans le cimetière, et les gens signent le contrat à cet effet. Alors, on n'a pas à se poser... Non. Les maisons funéraires disaient ce matin : Bien, on ne fait pas ce que les gens veulent. Ils l'ont signé, le contrat, c'est marqué dessus. Donc, à leur dernière disposition, les cimetières, si c'est prévu dans leur règlement, un peu comme les arrangements préalables que vous avez...

Mme Lamarre : ...ce qui va arriver après 25 ou 50 ans, c'est dans le premier contrat.

Mme Morin (Monique) : Voilà. Voilà, exactement, tout à fait. Un peu comme les préarrangements funéraires qu'on a parlé ce matin, c'est inclus dans les contrats d'arrangements préalables qu'une copie doit aller... propose qu'une copie aille au notaire ou à une autre personne de la famille. Si les gens prenaient le temps de le faire, ça veut dire que, le notaire de la défunte ou du défunt, quand on va le chercher, même si l'argent n'a pas été retiré lors de l'inhumation, une semaine avant ou après, il sera toujours dévolu à la famille pareil; même si c'est après, au moins ils l'auront. Mais, si on ne prend pas la peine de remplir le document... C'est vrai que ça peut peut-être prendre cinq minutes de plus, mais ce serait peut-être idéal si ce serait rempli de la même façon que les contrats de columbarium ou de mausolée, que ce soit mentionné qu'après ce soit déposé dans un lieu communautaire, un ossuaire dans un cimetière, mais qu'il y ait une mention sur leur contrat.

Alors, chez nous, on s'est déjà fait offert par une maison funéraire : On est prêts à vous donner toutes les cendres du columbarium, mais on ne vous donne aucun sou avec ça. Mais, j'ai dit, quand vous avez passé des contrats, vous les avez eus, les sous, il doit vous en rester. Non, il n'en reste plus? Bien, pourquoi ce seraient encore les cimetières à encore aller fournir pour... Puis on est des organismes à but non lucratif, alors on ne fait pas d'argent au bout pour donner à une personne, là, c'est toujours redonné à la communauté, s'il en reste. Donc, c'est sûr que, si on fournit tout le temps, bien, à un moment donné, c'est pour ça qu'il n'y en a plus, tu sais, le tableau est vide.

La Présidente (Mme Hivon) : Merci. C'est parce que je sais que j'ai le collègue de Richelieu qui veut absolument poser une petite question, donc je lui donne un petit moment et une courte réponse avant d'aller à la deuxième opposition.

M. Rochon : Oui. Bien, commentant l'article 71, là, qui dit que «nul ne peut disperser des cendres humaines à un endroit où elles pourraient constituer une nuisance ou d'une manière qui ne respecte pas la dignité de la personne décédée», vous estimez que le terme «nuisance» vient restreindre sévèrement les endroits où peuvent être dispersées ou déposées des cendres humaines, alors que d'autres ont estimé que ça venait restreindre peu précisément ces endroits-là. Vous n'avez pas d'inquiétude quant à la précision des endroits où ne peuvent être dispersées ou déposées des cendres humaines?

La Présidente (Mme Hivon) : Je vous invite à répondre rapidement.

M. Prenevost (Richard) : Oui. Rapidement, oui. Alors, la notion de nuisance à laquelle on pense, c'est que, si on dit : On déverse des cendres humaines dans le fleuve Saint-Laurent, est-ce que ça contrevient à la Loi sur la qualité de l'environnement? Et d'indiquer : Ils devront respecter la Loi sur la qualité de l'environnement, on vient d'éliminer le fleuve Saint-Laurent, les cours d'eau, peut-être nos parcs provinciaux, peut-être les municipalités avec les parcs municipaux. C'était cette notion-là de nuisance auquel on faisait référence.

La Présidente (Mme Hivon) : Merci beaucoup. Alors, je cède la parole à Mme la députée de Repentigny, au nom de la deuxième opposition, pour une période d'environ six minutes.

• (18 h 10) •

Mme Lavallée : Merci beaucoup. Dans votre document, vous parlez de l'article 12, vous dites : «On doit se questionner à savoir si cet article empêcherait les fabriques de paroisses d'accueillir à l'église des gens», et effectivement de plus en plus moi, j'ai eu à... Tout se fait à l'église, hein, on rencontre les familles, puis après il y a des cérémonies, puis l'article ne le prévoit pas, l'article 12. Mais vous vous questionnez à savoir s'il faudrait que la fabrique ait un permis ou pas ou... Donc, à ce moment-là, vous voudriez quoi? Que l'article 12 dise que ça ne s'applique pas, cet article-là, cette exigence-là, pour les fabriques?

Mme Morin (Monique) : Bien, en fait, qu'il y ait un aparté en disant que de toute façon la dépouille se rend à l'église, de toute façon la maison funéraire suit la dépouille. Et souvent les gens, pas qu'on est d'accord ou en désaccord, mais ils exposent pour une courte durée, on remet les hommages, et après ils font la célébration. Alors, dans la loi, on dit : Il faudrait qu'il y aurait un local permanent, etc., ce que n'ont pas les églises, mais par contre les dépouilles sont déjà là. Et les fabriques n'auront pas les sous pour aller chercher des permis à tous les ans, et tout ça, pour avoir quelques dépouilles dans l'année. On se disait : Bien, on pourrait essayer de protéger un peu les fabriques, qui, en fait, acceptent de faire cette position-là pour pallier aux...

On est d'accord aussi à ce que... M. Germain disait que de ne pas faire son deuil assez long, d'avoir les étapes... Dans notre vie, on a des étapes, hein, on naît, on se marie — pour certains — on meurt, puis souvent les gens qui nous aiment nous suivent, hein, ils font les étapes. Alors, cette étape-là est souvent balayée du revers de la main, et ils en paient le prix.

Moi, j'ai quelqu'un dans ma famille qui a perdu son fils, et le deuil a été excessivement long. Il faut absolument que les étapes soient faites, il faut absolument que les gens prennent le temps de vivre leur deuil et d'accepter la mort d'un proche. Et, comme le disait M. Germain, de ne pas voir la dépouille, de finir dans un cimetière, on l'enterre, puis il ne s'est passé rien de plus, c'est désolant, parce que c'est souvent chez nous après qu'ils reviennent.

Moi, j'ai vu des hommes pleurer dans mon bureau parce que leur épouse avait demandé d'être dispersée sur les plaines d'Abraham. Le monsieur, il dit : Quand je suis arrivé sur les plaines, il y avait un gros chien qui faisait ce qu'il avait à faire à l'endroit même où est-ce que je m'apprêtais à mettre les cendres de ma femme, il pleurait à chaudes larmes : Comment je peux régler ce litige-là de ma conscience, de déposer les cendres de ma femme dans un parc où est-ce que je sais que tous les animaux vont, en tout cas, faire ce qu'ils ont à faire, et, d'autre part, que moi, j'aie un lieu où j'ai besoin de crier ma peine, où j'ai besoin de réconfort en sachant qu'elle est là et qu'elle est protégée, même si elle est... Il était conscient qu'elle était morte, son épouse, mais, pour lui, elle était comme protégée en la mettant dans un lieu comme chez nous.

Alors, c'était ça quand on dit que le lieu est irrespectueux d'un humain, parce que les cendres humaines, ce sont des cendres humaines, alors que, d'avoir un lieu comme ça, est-ce qu'on peut dire que c'est respectueux? Où est-ce que... Moi, j'ai eu des cendres dans des choses de... dans des contenants de cigare de Cuba, là. Le monsieur, il m'a rapporté trois cigares, il en manquait sept. Son fils avait été séparé dans sa commune par sept cigares, puis il n'en avait rien que trois, il en manquait encore. Puis il dit : Là, je vous... Ça faisait trois fois qu'il m'apportait des parties de monsieur. C'est-u ça qu'on veut dans notre société, d'enterrer des parties de monsieur dans des cigares? Ou dans des bouteilles de Coke, j'ai vu des cendres dans des bouteilles de Coke. Est-ce que c'est ça qu'on veut? Est-ce que c'est ça, la dignité humaine, des cendres qui ont été transportées de Québec à Miami pendant des années dans un coffre de voiture puis qu'on ne retrouvait pas parce que personne ne savait où elles étaient?

Mme Lavallée : ...parce qu'il ne me reste pas grand temps. Ce matin, un représentant de la Fédération des coopératives funéraires a dit que, si la loi s'appliquait telle quelle, il devrait acheter, exemple, 300 lots. Tout à l'heure, on a eu la question de prix, puis j'imagine que vous l'avez entendu, ça. Ça peut... Parce que la loi semble dire, bien, qu'il faut qu'il prévoie l'achat d'un lot pour toutes les urnes qu'il a dans son...

Mme Morin (Monique) : D'abord, on n'achète pas un lot, on loue une concession de lot, excusez de vous reprendre.

Mme Lavallée : Excusez, excusez. Oui, oui, oui.

Mme Morin (Monique) : Je sais que c'est dans notre mentalité. Ma mère disait toujours : J'ai acheté mon banc d'église, mais je ne l'ai jamais vue partir avec son banc.

Mais M. Chapdelaine vous l'a expliqué, dans un terrain de 9 X 10 on peut en mettre des centaines, de... Alors, il est faux de penser que ça prend un lot par cendres, là. Absolument pas, là.

Mme Lavallée : Qui a une centaine, on peut parler de quel prix, à peu près?

M. Chapdelaine (François) : Bien, en fait, l'entreprise pourrait acheter le lot puis peut-être un contenant qui soit digne qui permettrait des inhumations de cet ordre-là, ça leur appartiendrait comme... là, c'est une solution technique, là, à définir, mais après ils paient l'inhumation, ce n'est pas... Un lot de 6 X 10, ça dépend des endroits, Montréal est probablement plus dispendieux comme...

Mme Lavallée : ...parce que, dans le fond, ça semblait poser...

Une voix : ...

M. Chapdelaine (François) : 3 000 $... Ce serait 10 000 $ pour 200 urnes, ce n'est rien par rapport... C'est une fraction du contrat initial, là, ce n'est pas un problème de coût. C'est peut-être un problème d'avoir le sentiment de dépendre d'un cimetière alors qu'il y a une tension parfois entre les acteurs, certains acteurs.

Mme Lavallée : Oui, c'est juste que l'article 45, dans le fond, exigeait un lot dans un cimetière d'une superficie suffisante pour permettre d'y inhumer les cendres humaines que le columbarium détient, puis, quand c'est...

M. Chapdelaine (François) : 500 dans un 6 X 10.

Mme Lavallée : Mais eux autres parlaient de milliers qu'ils pouvaient avoir, donc...

M. Chapdelaine (François) : ...une question peut-être, là...

M. Cloutier (Gino) : Non, mais c'est parce que c'est ça, c'est simple. C'est que, quand on concède...

La Présidente (Mme Hivon) : Je vais vous inviter à conclure.

M. Cloutier (Gino) : Oui, absolument. C'est simple. C'est que, quand on concède à une famille particulière, donc, un terrain, un exemple, 3 X 9 qui va être 2 000 $, on va autoriser un cercueil, un exemple, avec six urnes, alors que dans le cas qu'on parle, de columbarium qu'on va disposer de 50 ou 100 urnes funéraires, on peut faire une concession 3 X 9 au même prix, mais on va autoriser à inhumer plus que six personnes, on va autoriser 50 ou 100.

Donc, on n'est pas obligé d'acheter 300 lots, là, il y a des lots vraiment qu'on peut multiplier le nombre d'inhumations permises, parce qu'il y a des cas, effectivement... des cas problématiques, une faillite ou peu importe, qu'il y a la terminaison de la concession à l'entreprise privée.

La Présidente (Mme Hivon) : Merci beaucoup. Alors, je vous remercie, tous et toutes, de vous être déplacés pour nous faire part de vos commentaires.

Alors, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux de la commission jusqu'à 19 h 30. Merci.

(Suspension de la séance à 18 h 17)

(Reprise à 19 h 35)

La Présidente (Mme Hivon) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission reprend ses travaux. Je demande encore une fois à toutes les personnes de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires et autres appareils électroniques.

Nous allons poursuivre les consultations particulières sur le projet de loi n° 66, Loi sur les activités funéraires. Alors, ce soir, nous entendons le Regroupement provincial des comités des usagers.

Avant de procéder, est-ce que j'ai le consentement, puisqu'il est 19 h 35, que nous allions jusqu'à 20 h 21? Ça va? Consentement? Parfait.

Alors, bienvenue parmi nous. Je vous invite donc à vous présenter avant d'entamer votre présentation pour une durée maximale de 10 minutes.

Regroupement provincial des comités des usagers (RPCU)

M. Blain (Pierre) : Merci, Mme la Présidente. Merci, messieurs et mesdames de la commission.

On naît usager et on meurt usager. Le réseau de la santé et des services sociaux nous accompagne tout au long de notre vie, avant notre naissance et après notre départ. Le Regroupement provincial des comités des usagers du réseau de la santé et des services sociaux le rappelle d'ailleurs souvent. Il rappelle aussi que les comités des usagers sont présents partout pour défendre les droits des usagers, des tout-petits aux plus âgés. C'est pourquoi les usagers sont interpellés par ce projet de loi qui survient à l'étape ultime de la vie. La mort appelle des mesures particulières, la santé publique doit être préservée.

En instituant un nouveau régime juridique applicable aux activités funéraires, le ministre de la Santé et des Services sociaux met en place des mesures de protection pour ceux et celles qui restent après le départ d'un être cher, partir mais tout en protégeant ceux qui restent. Les personnes en deuil seront ainsi mieux protégées, puisque le projet de loi encadre les pratiques commerciales et les pratiques professionnelles qui entourent les activités funéraires. Le RPCU croit donc que ce projet de loi vise juste et actualise des pratiques qui auraient dû l'être depuis longtemps.

Le projet de loi, aux articles 6 et suivants, prévoit l'enregistrement de toute entreprise qui souhaite offrir des services funéraires, l'obtention d'un permis est obligatoire. Le ministre se donne le pouvoir, à l'article 23, de révoquer un permis ou de ne pas le renouveler selon certaines conditions. De plus, des inspections sont prévues. Le RPCU ne peut qu'être d'accord avec ces dispositions du projet de loi, qui établit des règles pour la délivrance de permis d'entreprise de services funéraires ou sa suspension. Donc, nous sommes satisfaits en partie de ce projet de loi.

Même si ce n'est pas l'objet premier de ce projet de loi, il faudrait peut-être amorcer une réflexion sur des méthodes alternatives à l'embaumement. Des études récentes, d'ailleurs, ont révélé que les méthodes utilisées pour l'embaumement des corps sont très polluantes. Les solvants organiques volatils et les biocides génèrent un déversement important de toxines, et surtout tous les fluides sont rejetés à l'égout. Tout petit geste peut compter.

Les rituels du deuil changent, de nouvelles façons de dire adieu aux êtres chers se développent. Chacun veut personnaliser son départ ou le départ d'un parent ou d'un ami. Aucune entreprise de services funèbres ne devrait être dans l'obligation de remplir certaines conditions jugées socialement inacceptables. En clair, le RPCU est préoccupé par certaines pratiques qui ont cours actuellement chez nos voisins du Sud et qui remettent en question la dignité humaine, même après la mort. Le RPCU croit qu'il n'y a qu'une seule façon digne d'exposer un défunt, et c'est dans un cercueil, dans une urne et dans un lieu approprié. L'installer sur une chaise, à une table ou dans sa voiture ne constitue pas, pour nous, une façon acceptable de respecter la dignité du défunt.

Comme pour l'État civil, qui peut refuser un nom offensant ou inacceptable, le projet de loi n° 66 devrait prévoir une instance qui, en cas de litige, pourrait trancher rapidement l'acceptabilité ou non de demandes d'exposition. Le projet de loi pourrait justement prévoir que ça peut être un officier de l'état civil, un greffier d'une cour qui pourrait faire ce genre de chose.

• (19 h 40) •

De plus, le projet de loi aborde également la question de la disposition des restes humains. On peut avoir recours, bien sûr, à l'inhumation ou à la crémation. Le projet de loi reste tout de même assez vague sur l'inhumation et la façon dont ça doit se faire. Est-ce à dire que le cercueil ou son équivalent n'est plus nécessaire? Est-ce à dire que l'on pourra maintenant inhumer des corps sans cercueil? Quelles sont les pratiques acceptables?

L'usage, dans plusieurs pays du monde, est le recours à un linceul. Cela nous semble tout à fait approprié si c'est la volonté de la personne en charge, je sais que des arrangements existent d'ailleurs quand il y a location de cercueil, mais je pense qu'il serait bon de peut-être préciser, jusqu'à un certain point.

L'article 70 du projet de loi indique que «les cendres humaines ne peuvent être remises qu'à une [...] personne et doivent l'être dans un contenant rigide qui les contient en totalité». Je sais que vous avez eu beaucoup de discussions à ce sujet. Le RPCU est d'avis que plus d'un contenant rigide pourrait être remis, les contenants devraient être scellés. On répondrait ainsi à la volonté de plusieurs qui souhaitent être inhumés à différents endroits. Ainsi, une personne veuve pourrait rejoindre les restes de ses conjoints ou de ses conjointes. Il en serait de même pour les familles reconstituées.

Il ne faut pas faire fi, d'ailleurs, du symbolisme de l'enterrement et du réconfort que peut permettre la réunion au-delà de la mort. Le mythe de Roméo et Juliette a encore sa place dans notre société post mortem... postmoderne, pardon. La force du symbolisme repose là, la force du symbole aussi de la réunion.

Le projet de loi prévoit que les cendres peuvent être mises en terre, mais qu'en est-il de la dispersion des cendres? Le RPCU ne croit pas que disperser des cendres soit approprié sans un encadrement. En effet, le respect de la dignité humaine demande de la retenue à cet égard. Disperser des cendres humaines sur une autoroute ne nous apparaît pas un signe de respect. Disperser des cendres dans un cours d'eau ou dans une forêt peut sembler acceptable aux yeux de plusieurs, et effectivement, mais, quand des milliers de personnes feront le même geste, cela pourrait devenir problématique. Donc, la plus grande prudence et surtout le plus grand respect doivent donc nous guider à cet effet.

En conclusion, le RPCU appuie, bien sûr, le projet de loi n° 66 sur les activités funéraires. Il croit cependant que des mesures d'encadrement sont tout de même nécessaires. Nous suggérons également que le projet de loi devrait mieux encadrer la mise en terre des restes humains, tant pour l'utilisation d'un cercueil que pour la dispersion des cendres. Merci de votre attention.

La Présidente (Mme Hivon) : Merci beaucoup de votre présentation. Alors, je cède la parole pour un premier bloc d'échange avec la partie ministérielle, et, M. le ministre, vous avez 17 minutes.

M. Barrette : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. Blain. C'est toujours un plaisir de vous recevoir et c'est toujours agréable de constater que vous avez des opinions que vous exprimez clairement en fonction des besoins des usagers, même si ici, évidemment, on parle plutôt des familles que de l'usager lui-même, hein?

J'ai pris connaissance de votre mémoire et j'ai constaté un certain nombre de choses. Je vais reprendre l'ordre dans lequel vous les avez présentées, là. Au début, vous nous dites que vous n'êtes pas satisfaits de certaines dispositions. Qu'est-ce qui vous satisferait?

M. Blain (Pierre) : C'est qu'il y a peut-être eu une erreur de notre part, effectivement, parce que je faisais référence principalement à la loi qui était en vigueur antérieurement et qui est la Loi sur les laboratoires médicaux, la conservation des organes et des tissus et la disposition des cadavres. On a fait une mauvaise lecture peut-être de notre façon, et c'est... Pour moi, je pensais qu'il fallait que le projet de loi n° 66 modifie cette loi, et je viens de constater, justement, en discutant avec certains de vos personnels, qu'effectivement ces dispositions-là existaient. Par conséquent, je pense qu'il y aura... les ajustements sont faits à ce niveau-là.

Cependant, pour moi, il y a des choses qui devront continuer à être mieux validées, parce qu'effectivement on le sait maintenant, que les cercueils peuvent être loués, effectivement, mais sauf qu'on me dit que parfois les dispositions concernant les changements de garnitures ne sont peut-être pas vraiment respectées, et ça peut devenir, à partir de ce moment-là, un problème de santé publique.

M. Barrette : Parfait. Merci. Au sujet... Encore une fois, je suis l'ordre de votre mémoire, là. Sur la question de la thanatopraxie, vous avez fait un commentaire qui m'a surpris un peu, parce que vous faites des commentaires à propos du fait que le projet de loi, il n'indique pas les conditions qui justifient l'embaumement ou... peut-être pas «justifier», ce n'est pas le bon mot, là, mais les conditions selon lesquelles l'embaumement est obligatoire.

M. Blain (Pierre) : Effectivement, ça fait toujours référence à l'autre projet de loi, qui était beaucoup plus précis pour les moments de disposition du corps. Et d'ailleurs c'est un sujet que je voudrais aborder immédiatement, parce que... Et c'est là où les comités des usagers, dans certains cas, nous ont informés de certaines pratiques. Comme maintenant il y a de moins en moins de personnes qui sont exposées, parfois la famille veut voir le corps avant. Et où est-ce que ça se fait, à ce moment-là? À l'hôpital dans certains cas. Est-ce que les hôpitaux sont équipés pour ce genre de chose là?

Et je peux vous donner un exemple personnel. Quand ma mère est décédée, elle est décédée chez elle. Cependant, les ambulanciers l'ont amenée à l'hôpital, parce que c'est là où on a constaté le décès. Et, quand on a voulu voir le corps, parce que... quand elle est décédée, et comme elle était pour être... une crémation le lendemain, bien c'est le seul moment où j'ai pu la voir, mais l'hôpital n'avait pas vraiment les façons de le faire. Et on a vu d'ailleurs dans les journaux récemment, je pense que c'était ici, à Québec, où on avait disposé un corps en bas, dans le sous-sol, et je pense que ce n'était pas une façon digne de le faire.

Donc, je ne pense pas que le projet de loi va nécessairement pallier ce genre de chose, mais peut-être qu'il serait bon d'y songer, de voir quelles seraient les dispositions qui pourraient être prises.

M. Barrette : O.K. Donc, j'avais mal compris le commentaire. Dans le mémoire, vous ne faites pas référence à des conditions qui justifieraient ou obligeraient l'embaumement comme tel, mais bien l'obligation de la procédure menant à l'embaumement, donc l'exposition obligatoire.

M. Blain (Pierre) : Absolument, absolument. Ce que je dis cependant, et c'est là où je parle un peu d'écologie, c'est le fait que tout est à l'égout par la suite, et ça, c'est un peu troublant.

M. Barrette : Là, vous parlez de l'aquamation.

M. Blain (Pierre) : C'est ça, de ce qui passe, nécessairement, quand on nettoie les salles. Il peut y avoir des résidus de sang et de fluides, et ça, ce n'est pas traité.

M. Barrette : O.K., très bien. Là, j'aimerais ça... Vous, vous êtes le RPCU, là. J'aimerais aborder un autre élément, là, qui est vraiment, là, je dirais, dans votre giron, là, et on ne parle pas du défunt, mais on parle de l'entourage. Est-ce que vous avez des commentaires à nous faire, des suggestions à nous faire, des histoires à nous raconter de problèmes qui existent dans cette période-là de la vie, donc de la mort, particulièrement en ce qui a à trait à de potentiels écueils, dérapages, accrochages dans le côté... — bêtement, dans une certaine mesure, mais très désagréable quand ça arrive — du côté administratif?

• (19 h 50) •

M. Blain (Pierre) : Vous avez raison de le faire, et c'est pour ça que j'en ai glissé un mot entre autres quand la mort survient dans un hôpital ou dans un CHSLD. C'est toujours des moyens très difficiles, c'est des moments où les gens sont en état de choc, et à ce moment-là il peut y avoir des façons de faire qui ne sont peut-être pas appropriées.

Je ne suis pas certain que ce soit nécessairement dans le projet de loi qu'on va pouvoir le faire, mais je prends un autre exemple aussi banal, si je peux dire, c'est le temps qu'on donne à des proches, en CHSLD, de disposer des effets personnels d'une personne, où elle a 24 heures pour libérer une chambre et quand elle est déjà dans un autre état de choc. Donc, ce n'est pas nécessairement des choses qui sont toujours appropriées.

L'autre chose qui existe aussi, justement, c'est la dispersion des cendres. J'ai consulté un peu, on a... Bon, je peux vous donner mon exemple personnel. Moi, je ne veux pas être un SDF, je ne veux pas être un sans domicile fixe, par conséquent, pour moi, c'est essentiel que mes cendres soient dans un endroit précis, entourées des miens, et tout ça. Pour d'autres personnes, ce n'est pas le cas, mais cependant on m'a raconté des histoires qui peuvent sembler des blagues mais qui n'en sont absolument pas. Justement j'écoutais cet après-midi la conférence des évêques, qui parlaient, dans certains cas, du vent. Effectivement, ça peut être très traumatisant pour quelqu'un qui veut disperser des cendres, et tout à coup il se retrouve avec son père dans la bouche. Alors, malheureusement, c'est des choses qui existent.

Et c'est pour ça que je pense que ça prend un minimum d'encadrement ou une façon différente... Je pense qu'on vous a donné des exemples aussi. Quand votre projet de loi, dans l'article 71, je pense, 72, parle qu'il y a des endroits qui sont peut-être appropriés, effectivement, je pense qu'il y a des... il faut qu'on puisse le faire. Ce que je ne... Dans le fond, il y a peut-être quelque chose qui manque un peu. C'est-à-dire on parle de l'enregistrement, bien sûr, d'où est la sépulture par la suite, et ça, c'est une chose qui est peut-être plus liée au Code civil qu'aux procédures comme telles dans le projet de loi, mais je pense qu'on pourrait préciser, justement, ce genre de chose. Justement, encore une fois, si je me rappelle bien, c'est les évêques qui parlaient de ça, pour eux, bien sûr, la personne humaine est un tout, donc on ne doit pas le séparer. Mais moi, je pense, au contraire, c'est très rassurant de savoir... Et j'ai un exemple personnel, effectivement, d'une personne veuve qui a été mariée deux fois et dont la moitié des cendres va être dans un endroit et l'autre partie sera dans l'autre, parce que justement la symbolique de... est extrêmement importante.

M. Barrette : Au RPCU, vous êtes souvent le récipiendaire de toutes sortes de plaintes.

M. Blain (Pierre) : C'est ça.

M. Barrette : Alors, vous êtes un peu le paratonnerre des informations, là, tout va chez vous... bien, peut-être pas tout, mais beaucoup de choses vont chez vous.

Sur le plan, encore une fois, administratif, avez-vous beaucoup, beaucoup de plaintes ou de commentaires à nous relayer sur les problématiques de contrat, de non-respect de contrat, de ceci et de cela, là, qu'on n'a pas abordé, là, actuellement dans nos échanges? Je vois que cet après-midi vous avez pas mal suivi les échanges qu'on a eus. Y a-tu des choses, là, qu'on n'a pas explorées? Parce que c'est peut-être vous, une des personnes les mieux placées, parce que vous êtes neutre là-dedans, vous êtes du bord des familles, là.

M. Blain (Pierre) : On m'a parlé d'une chose effectivement aussi, c'est être certain de la reconnaissance du corps. Supposons que le cercueil est fermé et que... Et on a vu d'ailleurs dans des journaux récemment, mais on a eu d'ailleurs quelqu'un qui s'était plaint un jour parce qu'il y avait eu une confusion de corps. Donc, ça aussi, je pense que c'est une chose qui est importante et qu'on devrait pouvoir couvrir. Il faut vraiment qu'il y ait une reconnaissance.

Pourtant, la loi le prévoit, normalement, avant de faire... Je pense que même une crémation... Je sais que, quand c'est arrivé avec ma mère, c'est mon frère qui y est allé pour reconnaître que le corps qui était pour être incinéré était bien celui de la personne, mais la même chose devrait exister, je pense, aussi dans d'autres cas.

Alors, oui, on a eu des problèmes; aussi des problèmes de contrat, des problèmes de préarrangements funéraires. Comment s'assurer du respect, aussi de ce qu'il peut y avoir dans un testament? Et ça, c'est arrivé effectivement, on a eu connaissance qu'on voulait que... Dans un cas de divorce très difficile, on a demandé que toutes les photos des enfants soient déchirées et mises dans le cercueil, pour être sûr qu'ils partent avec la personne qui partait. Donc, oui, il y a des situations aussi difficiles que celles-là, et ce sont des situations que nous avons, nous, au RPCU, parfois.

M. Barrette : O.K. Si je reviens... Donc, sur le côté administratif, c'est essentiellement... c'est l'essentiel de vos commentaires et/ou suggestions, là?

M. Blain (Pierre) : Bien, au niveau administratif, effectivement, c'est le délai parfois de constater le décès, parce que ça aussi, c'est arrivé, et surtout si on est avec des groupes ethniques qui, dans certains cas, doivent demander aussi une toilette funéraire, qui se fait normalement dans un certain laps de temps. Et, j'ai vu, on nous a téléphoné pour nous parler justement d'un cas semblable où la personne a dû rester à côté du corps de sa mère pendant 17 heures parce que le délai de... le décès n'avait pas été constaté. Mais je pense que maintenant les infirmières peuvent constater aussi des décès, et, je pense, ça peut améliorer et accélérer, dans certains cas, certaines procédures.

M. Barrette : O.K. Si je reviens un peu en arrière, parce que, là, j'ai parlé de l'administratif, mais, si on revient au corps de la loi, comment verriez-vous... Parce que tout le monde nous parle de dignité, dans la disposition des cendres spécifiquement, là. Comment verriez-vous les balises de ça? Parce qu'on nous demande beaucoup ça.

M. Blain (Pierre) : Moi, déjà en partant, je pense que c'est important de ne pas laisser à la personne qui reçoit les cendres elle-même la séparation. Donc, si on veut prévoir effectivement une dispersion, bien ça prendrait peut-être un contenant spécifiquement pour ça, puis un contenant qui serait enterré ou qui serait... autrement. Je pense qu'on devrait pouvoir le savoir déjà, quand on parle de dispersion des cendres, parce que déjà c'est des mesures qui seraient envisageables. Donc, moi, je vois mal, justement... Parce qu'on en a tous entendu parler, des cas semblables. J'ai quelqu'un récemment, là, qui est proche de nous, au RPCU, qui a voulu disperser les cendres de sa mère... une partie, pardon, une partie des cendres de sa mère à Saint-Jacques-de-Compostelle. Naturellement, elle n'a pas pu le faire, parce que les réglementations étaient différentes, mais sauf que c'est elle qui a dû, justement, séparer les cendres. Donc, pour moi, je pense que, s'il y a une amélioration, c'est peut-être là, en précisant justement qu'on peut avoir un, ou deux, ou trois contenants, puis à ce moment-là on peut le faire.

L'autre chose : on ne sait pas si on peut conserver les cendres à la maison. C'est possible, je pense, dans certains cas, mais il ne faudrait pas non plus que ça devienne parfois des vengeances qui peuvent s'établir, c'est-à-dire : Je vais te mettre en arrière des barreaux dans une chambre à la maison, puis tu ne sortiras pas. Je me souviens d'un film qui était un peu semblable. Mais c'est pour ça, je pense, qu'il faut peut-être prévoir, dans certains cas, certaines circonstances.

M. Barrette : Au-delà du film, êtes-vous en train de nous dire que vous avez entendu des histoires comme ça, là?

M. Blain (Pierre) : Oui, absolument, absolument.

M. Barrette : Bon, O.K.

M. Blain (Pierre) : Quand je vous ai parlé des cendres dispersées puis... c'était très traumatisant pour la personne.

M. Barrette : O.K., c'est bon. Bien, je ne sais pas si c'est bon, là, mais...

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Blain (Pierre) : Je verrais mal, justement, qu'on dise : Bien, j'aimerais ça qu'on boive ma personne et qu'on mette ça dans un bassin pour que les gens puissent boire l'eau. Non, je ne pense pas.

M. Barrette : Bon, O.K. Là, vous parlez plus peut-être de séparation des cendres, mais tantôt...

M. Blain (Pierre) : Séparation... Parce que, le projet de loi, vous parlez d'un contenant.

M. Barrette : Oui. Non, ça, c'est pour la partie du contenant, là.

M. Blain (Pierre) : C'est ça. Et, pour moi, je pense que ça peut être une façon, c'est-à-dire que, les gens qui voudraient, déjà qui prévoiraient que ça serait dispersé ou différentes façons, ça pourrait se faire comme ça.

M. Barrette : Mais vous avez fait référence aussi à la dispersion des cendres sur l'autoroute. Là, c'est par curiosité. Dans les gens que vous côtoyez, là, ça s'arrête où? C'est quoi, la perception, là, actuellement?

M. Blain (Pierre) : Ça pourrait se faire, ça pourrait se faire parce que, pensant honorer quelqu'un qui fait le trajet Québec-Montréal souvent...

M. Barrette : ...sur la 75, là.

M. Blain (Pierre) : Mais, pour moi, je ne pense pas que c'est une bonne façon. Je pense que justement, dans un environnement qui est approprié, une forêt, une rivière... je pense que c'est des balises qui sont acceptables, mais, que ce soit à tout vent, semé à tout vent, je ne pense pas que ce soit la bonne façon de faire les choses.

M. Barrette : Donc, vous considérez que, si un député de Montréal voulait être dispersé sur la 20, ce n'est pas une bonne idée.

M. Blain (Pierre) : Je ne pense pas.

M. Barrette : Bon, on retient la chose.

La question du cercueil, pouvez-vous revenir là-dessus? Parce que ça, ça m'intrigue. Ça aussi, je ne m'attendais pas à avoir beaucoup de commentaires sur le cercueil, mais vous êtes le deuxième ou le troisième à nous parler de ça, là.

M. Blain (Pierre) : Bien, la première des choses, bon, louer un cercueil, ça se fait, bon, ça, je l'ai vu aussi dans la famille. Mais ensuite de ça il y a deux choses : ou bien on enterre ou bien, ensuite de ça, on fait une crémation. Si on enterre, on enterre comment? Est-ce que c'est avec l'autre petit cercueil, là, qui est le contenant en bois, en carton? Donc, ça, ce n'est pas précisé, je pense que ça pourrait le faire. Est-ce que, justement, on peut enterrer quelqu'un juste dans un linceul? Est-ce que, justement, il y a d'autres règles qui existent? Je ne le sais pas, c'est pour ça que je pose la question. Moi, je pense que ça peut être acceptable, justement, écologiquement parlant. J'ai vu plusieurs revues à ce niveau-là, où on disait : Bien, ça polluerait moins, ça serait plus écologique, puis, bon, alors...

• (20 heures) •

M. Barrette : Là, le temps passe. Je vais vous poser une question très qualitative, pas vraiment subjective mais qualitative certainement, mais qui est directement en lien avec votre expérience de représentant des comités d'usagers, évidemment les comités des usagers sont peut-être une des organisations qui est plus exposée à faire face à ce genre de situation là : Quelle est votre perception, du milieu que vous représentez, de l'état de la législation actuelle quant aux services funéraires? Est-ce que les gens... Parce que, là, le projet de loi arrive, et là on met sur la table des sujets qu'on est... entre guillemets, on force une discussion. Est-ce qu'elle se fait spontanément? Parce que, pour nous, là, vous avez compris que c'était une loi qui avait une portée principalement administrative et de protection du public et du citoyen, là, face à cet événement-là ou cette structure-là d'affaires, mais quelle est la perception des usagers, vu de votre angle actuellement? Est-ce qu'il y a un débat? Est-ce qu'il y a un débat? Est-ce que votre perception est qu'on est dans le mille ou à côté de la track?

M. Blain (Pierre) : Dans ce cas-ci, comme le projet de loi a été déposé très rapidement et qu'on a eu une semaine seulement pour vous présenter notre mémoire, j'ai fait une consultation auprès de tous les membres de notre conseil d'administration, qui tout de même représentent chacun leur région, leur demandant des commentaires, et j'ai reçu quelques commentaires, justement, qui me disaient que, pour eux, ça semblait acceptable, effectivement, que c'était une façon d'encadrer ce qui se passe actuellement. J'ai vu qu'à partir de ce moment-là c'était une façon de le faire, et c'est pour ça qu'on a fait notre mémoire, et je l'ai fait valider, bien sûr, par les membres de notre conseil d'administration et de notre comité exécutif.

La Présidente (Mme Hivon) : Merci beaucoup. Merci, M. Blain. Alors, on va maintenant passer la parole au groupe de l'opposition officielle pour une période de 10 minutes. Donc, Mme la députée de Taillon, la parole est à vous.

Mme Lamarre : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonsoir, M. Blain. Très heureuse de vous accueillir aussi. Merci pour votre mémoire. Très succinct, cinq grands enjeux.

Moi, j'irais à votre point III de votre mémoire au sujet du personnel compétent. Vous faites référence aux compétences, dans le fond, de ce personnel-là, on l'a évoqué un peu avec d'autres. Est-ce que vous seriez d'accord pour qu'il y ait certaines normes, qu'il y ait certains paramètres ou certaines garanties de mise à jour, en particulier avec votre préoccupation environnementale, et tout ça, au niveau des services des thanatologues?

M. Blain (Pierre) : Merci de la question. Effectivement, c'est une bonne question, parce que dans ma famille aussi on a pratiqué un peu ces choses-là, donc on est un peu à jour. Le plus grand ami de mon père était justement directeur de funérailles. Donc, effectivement, vous en avez des bons puis vous en avez des moins bons, et, pour moi, justement, les... Et c'est pour ça que je suis content que le projet de loi précise au moins une chose, qu'on nomme un directeur général compétent, mais qu'est-ce que ça veut dire effectivement? Est-ce que ça demande plus d'explications? Je ne le sais pas, mais, pour moi, je pense que la première des choses qui est importante, c'est le respect de la dignité, bien sûr, et surtout le respect aussi des règles par la suite. La vente sous pression, je pense que ce n'est pas le bon moment de la faire, à ce niveau-là, et je ne pense pas qu'un projet de loi va pouvoir peut-être l'encadrer correctement, mais c'est une industrie, c'est une industrie comme n'importe quelle autre, et je pense tout de même qu'on devrait avoir un genre de code d'éthique pour pouvoir mieux encadrer la profession.

Mme Lamarre : Donc, code d'éthique, et je vous rejoins aussi là-dessus, mais ma question portait peut-être plus sur des compétences comme thanatologue, là. Alors, il y a cette dimension-là aussi.

M. Blain (Pierre) : Bien, pour moi, les compétences, vous avez déjà... Parce qu'il faut faire une distinction, comme le projet de loi le fait, entre celui qui est le propriétaire de l'entreprise et celui qui, ensuite de ça, pratique certaines activités professionnelles. Je pense que c'est à ce niveau-là que le projet de loi pourrait être peut-être un peu plus précis, au niveau de ça. Je sais qu'il existe effectivement des cours qui se donnent, je pense que le certificat est important, et je sais que le ministre peut mettre des balises. Est-ce que justement... De quelle façon? Je ne le sais pas, je ne peux pas vous répondre plus sur ça, mais je pense que c'est une chose, effectivement, extrêmement importante, parce que, dans certains cas, il y a des problèmes de salubrité publique. Puis, comme je vous dis, les exemples qu'on nous a donnés concernent entre autres les cercueils qui ne sont pas toujours, par la suite, changés, avec les garnitures.

Mme Lamarre : C'est comme dans n'importe quoi. Il doit y avoir une grande majorité des gens qui pratiquent de façon irréprochable, mais il y a peut-être...

M. Blain (Pierre) : Oui, c'est ça, c'est ça.

Mme Lamarre : ...compte tenu du risque de contamination, du risque de...

M. Blain (Pierre) : L'autre aspect que j'ai abordé un tout petit peu, je sais que le projet de loi sur les... Dans l'autre cas, on parlait qu'on ne peut pas prendre une photographie d'un cadavre quand on est, justement, dans cette fonction-là. À l'ère de l'Internet, je pense que c'est d'autant plus important de le repréciser, parce que justement l'Internet est international, et on peut passer n'importe où. Donc, moi, je n'aimerais pas ça me retrouver comme... Aujourd'hui, j'ai visité le Musée de la civilisation, et il y avait une momie qui était exposée et dans toute sa nudité. Je n'aimerais pas ça, bien que je vais être incinéré, là, mais...

Mme Lamarre : Vous êtes le président du Regroupement provincial des comités des usagers, et, moi, ma préoccupation, c'est de me dire : Est-ce qu'au niveau des services et de la sollicitation... Personnellement, là, dans un décès proche, il y a eu par la suite envoi d'une lettre pour une consultation avec une psychologue sans qu'on ait fait de demande, sans que... Donc, c'était le salon funéraire qui avait transmis les informations à cette personne, j'ai appris par la suite qu'elle avait un lien avec le salon funéraire. Donc, est-ce que ça, c'est quelque chose qui vous est rapporté par vos membres?

Et puis l'autre dimension, c'est aussi quand on arrive avec des préarrangements puis que finalement ce n'est jamais le même montant, il faut toujours allonger un peu plus d'argent parce que ça, ce n'était pas couvert, l'urne qui a été choisie il y a 10 ans n'est plus disponible, ça prend... il y a d'autres urnes, puis elles sont 100 $, 150 $ de plus. Enfin, je pense qu'il y a plusieurs possibilités, là, pour les usagers, de se faire offrir plus de services ou de se faire imposer, jusqu'à un certain point... que, pour respecter les volontés du défunt, on soit obligé d'ajouter de l'argent.

M. Blain (Pierre) : Vous avez tout à fait raison. Plus dans la deuxième partie de votre commentaire que dans la première, effectivement c'est arrivé. C'est arrivé entre autres aussi avec des personnes sur le bien-être social, qui justement tout à coup devient quelque chose qui est perçu presque comme un ajout au montant qu'ils ont, là. Quand vient le moment du décès, s'ils ont des préarrangements, on ne paie pas... Je pense qu'il y a eu des choses qu'on a vues, là, on a été questionnés à ce sujet-là déjà, je ne me souviens plus exactement, c'est un de mes adjoints qui s'en est occupé, mais je pense qu'il y a des choses à voir à ce niveau-là, effectivement.

Dans le cas, justement... Et c'est là où, notre mémoire, on fait une distinction entre... parce qu'il y a une partie professionnelle, mais il y a une partie commerciale, et c'est dans la partie commerciale, justement, que ça nous prend des garanties. Et c'est pour ça que notre mémoire est intitulé Partir tout en protégeant ceux qui restent, parce que c'est ça, la partie la plus importante. Parce que la personne, dans le fond, ça ne la dérangera pas, elle, mais ça va déranger ceux qui sont là, la famille, les proches, et je pense que c'est ça qui est important.

Le Curateur public, d'ailleurs, était venu à notre congrès cette année et nous a parlé beaucoup de certains aspects qu'eux-mêmes doivent gérer pour des personnes qui n'ont pas de famille et de qui le Curateur public est le gardien, et je pense que ça aussi, c'est des choses importantes qu'il s'agit de voir.

Mais l'autre chose aussi, c'est les dispositions que certaines personnes peuvent prendre. Je vous donnais l'exemple d'aux États-Unis où on veut être enterré dans sa voiture. Bien, je ne sais pas, là, j'ai un petit... un peu de réticence.

Mme Lamarre : Et, au niveau des coûts des services, vous n'avez pas eu trop de commentaires par rapport à ça?

M. Blain (Pierre) : Oui, bien sûr. Les coûts, c'est toujours... C'est ce que je disais : La vente sous pression, ce n'est pas nécessairement le bon moment, et c'est normal. Bien, prenez donc plutôt une voiture, deux voitures... On sait bien que ce n'est plus tout à fait d'usage d'avoir des landaus de fleurs, mais je me souviens d'une époque où ça en prenait au moins cinq pour pouvoir partir correctement vers le ciel.

Mme Lamarre : Heureusement, je pense que ça, ça s'est un peu... ça s'est simplifié.

M. Blain (Pierre) : Heureusement que c'est disparu.

Mme Lamarre : Vous avez exprimé verbalement tantôt puis dans votre mémoire l'ouverture au recours à un linceul ou à d'autres... Donc, ça, vraiment, vous considérez que... C'est recommandé? Vous le recommandez, vous le souhaitez?

M. Blain (Pierre) : Oui, absolument. Pour... Bon, justement, dans le cas où on a un cercueil loué, bon, moi, je pense qu'actuellement, dans la législation, ça prend tout de même un contenant, donc je pense qu'un contenant, peu importe, en carton, en papier ou en bois... Et pourquoi? Ça peut être, justement, juste un linceul. Et surtout ça respecte la tradition de certaines cultures de plus en plus présentes chez nous, et qui sont, justement, pour moi, des façons écologiques.

J'ai vu... Dans certaines recherches que nous avons faites pour la préparation de ce mémoire, effectivement, on parle de plus en plus même de ne pas avoir de vêtements. Mais justement, là, il s'agit de voir, c'est une question de décence publique, là, bien sûr, mais... Je ne pense pas que ce soit la bonne façon pour une exposition nécessairement, là, mais c'est plutôt au moment de l'enterrement.

Mme Lamarre : D'accord. Vous faites référence à un officier de l'état civil ou de justice qui, en cas de litige, pourrait trancher, là, dans le fond, dans un cas où, un peu... Vous faites l'analogie avec un prénom d'enfant qui n'est pas approprié. Et là, s'il y avait une situation ou une demande qui était un petit peu farfelue...

Et donc est-ce que... Mais ma préoccupation, c'est : Qui ferait appel à cet officier? Est-ce que ce serait, dans le fond, le responsable des services funéraires ou un autre membre de la famille? Si c'est un autre membre de la famille, ça va, là, quand, dans la famille, il y a un désaccord, mais, autrement, qui ferait appel à cet officier?

• (20 h 10) •

M. Blain (Pierre) : Justement, ça, c'est une préoccupation que j'ai eue avec des directeurs de funérailles, qui sont de plus en plus préoccupés par certaines demandes qui leur arrivent effectivement, avoir des bouteilles de vin à côté de l'urne ou toutes sortes d'autres choses. Bon, ça, c'est anodin, si je puis dire, mais plutôt, justement, supposons qu'il y avait une demande comme celle-là... J'ai déjà vu, moi, plus jeune, bien sûr, mais c'était une Américaine qui avait voulu être enterrée au Canada mais qui voulait absolument l'être dans sa robe de bal, avec ses lunettes d'opéra. Bon, tout ça respecte des normes, je n'ai pas de problème avec ça, mais c'est plutôt quand il y a des demandes plus spéciales.

Et il ne faut pas laisser, justement, le fardeau, à ce moment-là, de refuser aux directeurs des funérailles, qui justement pourraient en référer à un officier public qui, lui, prendrait ses dispositions, de la même façon que dans le Code civil pour les prénoms, où on peut refuser, dans certains cas, l'enregistrement de certains noms. Donc, pour moi, ça serait une façon simple, qui n'aurait pas de coût mais qui pourrait justement éviter des litiges inutiles. Je ne pense pas que ça se soit produit vraiment encore beaucoup, mais vaut mieux prévenir que guérir, dans ce cas-ci.

La Présidente (Mme Hivon) : Très rapidement, s'il reste... Ça va?

Mme Lamarre : Ça va, ça va. Je vous remercie, M. Blain. Merci.

La Présidente (Mme Hivon) : Alors, merci beaucoup. On va passer au groupe de la deuxième opposition pour une période de sept minutes. Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Merci beaucoup. Bonsoir.

Vous avez mentionné tout à l'heure l'existence de problèmes avec les préarrangements funéraires. Est-ce que vous voulez en parler plus?

M. Blain (Pierre) : Les préarrangements funéraires, ce n'est pas toujours le problème, mais ça arrive parfois, effectivement, qu'il y a des problématiques où le prix change tout à coup, où on ne retrouve plus le contrat, ça, c'est des choses qu'on nous a signalées, où on disait qu'on faisait des ajustements. C'est arrivé justement, comme je vous ai dit aussi, dans certains cas, pour des personnes qui étaient sur la sécurité du revenu, qui justement, dans certains cas, s'il y avait des préarrangements funéraires, par la suite je pense qu'il n'y avait pas de somme qui était payable par la sécurité ou je ne sais pas, là, il y a eu des choses semblables.

Donc, oui, il faut faire attention avec les préarrangements. C'est un contrat comme tous les contrats, mais c'est des contrats, dans certains cas, qui sont sur une période de 20, 25 ans, 30 ans, 40 ans, même, dans certains cas, des parents qui prévoient longtemps à l'avance et des... Et, comme on sait maintenant que la longévité de la vie est plus longue, donc, à ce moment-là, il faut prévoir que des contrats, peut-être, pourront s'étaler sur des plus longues périodes que celles qu'on a connues dans le passé pour les préarrangements.

Mme Lavallée : Est-ce que, selon vous, c'est fréquent que les contrats de préarrangements soient perdus?

M. Blain (Pierre) : Les contrats préarrangements, c'est valable parce que des gens veulent prévoir déjà, dans certains cas, leurs volontés. Il y a deux façons de l'aborder, effectivement : empêcher que la famille... Parce que c'est toujours pénible quand arrivent des moments semblables. Un veut ci, l'autre veut ça. J'aimerais mieux avoir telle tombe ou telle autre. Donc, pour moi, c'est plutôt... Si c'est la volonté de la personne, ça va. Ce qu'il ne faut pas, justement, c'est que ça devienne plutôt un problème pour ceux qui restent, parce que le contrat ne sera pas respecté.

Donc, c'est dans ce sens-là, je pense qu'il faut qu'il soit bien fait. Il faut qu'il soit peut-être plus standardisé, si je puis dire, et à ce moment-là je pense qu'on éviterait beaucoup de problèmes.

Mme Lavallée : Oui. Dans le fond, ma question, c'est si vous aviez eu connaissance que... on vous avait rapporté souvent que les contrats pouvaient se perdre. Ce matin, avec les thanatologues, eux autres faisaient une proposition qu'il y ait un registre des contrats de préarrangements. Parce que moi, je l'avais vécu en pratique privée où une fille, elle ne trouvait pas le contrat de sa mère, sa mère lui avait toujours dit qu'elle en avait un, puis en fin de compte elle a repayé une deuxième fois. Donc, il y a de l'argent qui est resté à quelque part, puis elle a repayé pour les services funéraires. Vous, comment vous voyez ça? Est-ce que vous pensez qu'on devrait avoir un registre central où tous les contrats seraient enregistrés pour que, lorsqu'arrive un décès, on sache?

M. Blain (Pierre) : Oui, je trouve que c'est une excellente idée, effectivement. Parce que moi-même, j'ai bien de la difficulté parfois à trouver mes polices d'assurance. Alors, c'est la même chose, c'est arrivé dans des décès. On le sait tous : quand une personne meurt, on essaie de retrouver les papiers puis on ne les retrouve pas parce que ça peut être dispersé, surtout si une personne tout à coup entre en CHSLD. Par conséquent, parfois, les choses sont déplacées.

Oui, effectivement, je pense que ce serait une excellente idée d'avoir un registre semblable.

Mme Lavallée : Puis ce matin, justement, avec les thanatologues, il a été avancé comme solution... Parce que ce n'est pas évident, on ne veut pas créer une autre structure pour gérer ça. Eux autres avançaient l'idée que l'État civil pouvait être le service qui pouvait gérer ça. Selon vous, est-ce que ça fait du sens ou...

M. Blain (Pierre) : Oui, absolument. Le dossier du... Bien non. Non, le Dossier santé Québec, non, parce que de toute façon il n'est pas là, alors... Mais, oui, il y aurait ce genre de chose là. Il y a plusieurs façons de consigner. Il y aurait aussi le registre avec le notaire, on pourrait déjà l'enregistrer avec son testament, si on a un testament, bien sûr. Mais ça peut être des façons de le faire mais sans créer de contrainte supplémentaire et de coût, surtout, effectivement.

Mme Lavallée : Parfait. Le ministre n'en a pas parlé, mais aujourd'hui il avait l'air à y avoir un peu de problèmes au niveau de la définition de la dignité, et on se demandait... les groupes se demandaient qui pourrait définir ce que veut dire la dignité, lorsqu'on parle de ça. Vous, votre définition?

M. Blain (Pierre) : Pour moi, c'est la même réponse qui devrait être celle qu'on trouve normalement dans tout... dans le Code civil. C'est-à-dire, quand on parle d'agir en bon père de famille, ce n'est pas défini, comme tel, mais tout le monde sait qu'est-ce que ça veut dire. Pour moi, la dignité, c'est ce qui est socialement acceptable aussi. Donc, effectivement, pour certaines personnes, il y a des choses qui sont acceptables et, pour d'autres, qui ne le sont pas, mais je pense qu'en général, socialement, on sait qu'il y a des choses qui sont possibles et d'autres qui ne le sont pas.

Donc, je ne suis pas sûr qu'on peut aller tellement plus loin dans une définition de la dignité, effectivement, mais, pour moi, c'est ce qu'une personne normale devrait considérer.

Mme Lavallée : Ça peut être différent pour chacun.

M. Blain (Pierre) : Bien, c'est certain.

Mme Lavallée : On a le choix entre le faire définir par la cour ou le baliser avant, pour éviter, justement, qu'on recoure à la cour. Est-ce que vous, vous souhaiteriez qu'un organisme puisse nous définir... nous aider à circonscrire la définition de «dignité» ou non?

M. Blain (Pierre) : Pour laisser la liberté, justement, autant au défunt, à la personne qui teste, dans certains cas, parce qu'elle teste elle-même, elle met certaines choses, et les personnes qui restent alentour, je pense qu'on devrait avoir une... on devrait laisser ça le plus large possible.

Mme Lavallée : O.K. L'autre chose, on a parlé souvent de la dispersion des cendres. Vous en avez parlé aussi, puis moi aussi, je me questionne sur... De quelle façon on pourrait définir ce qui est acceptable de ce qui ne l'est pas? C'est sûr que, quand je recevais des clients, je faisais des testaments, les gens me demandaient d'indiquer dans le testament des choses que parfois je n'étais pas certaine que c'était acceptable, mais c'était leurs volontés. Est-ce que, selon vous, il faudrait vraiment avoir des restrictions indiquées dans la loi ou...

M. Blain (Pierre) : Déjà, l'article 71, je pense, donne certaines balises, c'est-à-dire : «...ne peut disperser des cendres humaines à un endroit où elles pourraient constituer une nuisance ou d'une manière qui ne respecte pas la dignité de la personne décédée.» Je sais que le ministre ne pense pas qu'une personne décédée a de la dignité, mais, pour moi, je pense que la dignité existe. Même la preuve, la preuve : même les cendres sont encensées et bénies par l'Église. Donc, à partir de ce moment-là, il doit y avoir une dignité quelque part.

Donc, à partir de ce moment-là, je pense qu'il y a déjà certaines balises qui sont là. Donc, on peut trouver des exemples triviaux comme celui que je vous ai dit, je ne pense pas qu'une autoroute, c'est la bonne façon, mais, pour moi, un cours d'eau, une prairie, une forêt... en autant que ça ne devienne pas un endroit où tout le monde va faire ça. Il ne faut pas non plus que ça devienne un endroit où on va disperser les cendres de tout le monde, il ne faut pas non plus mêler tout. Mais, à ce moment-là, pour moi, en ayant, justement, quelque chose, une définition assez large, je pense qu'à ce moment-là ça peut le faire. Et je pense que... À mon point de vue, l'article est suffisant.

La Présidente (Mme Hivon) : Merci beaucoup. Je dois interrompre, c'était tout le temps que nous avions. Alors, merci beaucoup, M. Blain, de vous être déplacé pour nous faire part de vos commentaires.

Alors, sur ce, compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux jusqu'à mardi 1er décembre, à 9 h 45. Bonne fin de soirée.

(Fin de la séance à 20 h 20)

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