L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission de la santé et des services sociaux

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission de la santé et des services sociaux

Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le lundi 5 octobre 2015 - Vol. 44 N° 75

Étude détaillée du projet de loi n° 20, Loi édictant la Loi favorisant l’accès aux services de médecine de famille et de médecine spécialisée et modifiant diverses dispositions législatives en matière de procréation assistée


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Étude détaillée (suite)

Intervenants

M. Marc Tanguay, président

M. Gaétan Barrette

M. Sylvain Pagé

M. François Paradis

M. Sylvain Rochon

M. Jean-François Lisée

Journal des débats

(Quinze heures onze minutes)

Le Président (M. Tanguay) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à tous les collègues présents dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de votre téléphone cellulaire.

Le mandat de la commission est de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 20, Loi édictant la Loi favorisant l'accès aux services de médecine de famille et de médecine spécialisée et modifiant diverses dispositions législatives en matière de procréation assistée.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Habel (Sainte-Rose) est remplacé par M. Proulx (Jean-Talon); Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré) est remplacée par M. Matte (Portneuf); Mme Hivon (Joliette) est remplacée par M. Rochon (Richelieu); Mme Lamarre (Taillon) est remplacée par M. Pagé (Labelle); Mme Richard (Duplessis) est remplacée pas M. Villeneuve (Berthier).

Étude détaillée (suite)

Le Président (M. Tanguay) : Lors de l'ajournement de nos travaux, le 30 septembre dernier, nous étions à l'étude de l'amendement du ministre à l'article 25.2 introduit pas l'article 1. Y a-t-il des interventions? Collègue de Labelle, la parole est à vous.

M. Pagé : Oui. Merci, M. le Président. Alors, bonjour à tous et à toutes. Bonjour, M. le ministre, aux gens qui vous accompagnent, chers collègues. Effectivement, je n'étais pas présent lors des derniers débats, mais j'ai suivi quand même avec attention vos débats parce que c'est un sujet qui est fort important. Et, lors des derniers débats, j'avais l'impression qu'on arriverait à la fin des débats sur l'amendement du ministre. Par contre, je pense que tout le monde a été très soucieux de prendre connaissance du rapport de la Protectrice du citoyen, qui, si je ne m'abuse, jeudi ou vendredi dernier... Je pense que c'est vendredi dernier. Si ma mémoire est bonne, vendredi dernier, la Protectrice du citoyen est venue porter un jugement assez sévère, je pense, sur ce qui nous préoccupe, et, à savoir, elle nous lance un avis important.

Et, dans sa conclusion... Je pense qu'il faut tenir compte de sa conclusion. Je n'ai pas eu le temps de tout décortiquer, mais, quand je regarde particulièrement certaines choses qu'elle vient nous dire, ça nous interpelle beaucoup. Et ça nous interpelle en lien directement avec le dernier... Est-ce que c'est le dernier? Oui, l'avant-dernière phrase de l'amendement du ministre qui dit que, «malgré les interdictions énoncées aux neuvième et onzième alinéas — donc, ce qui précède — le gouvernement peut, par règlement, prescrire des cas et des conditions dans lesquels un paiement est autorisé». Or, ce que la Protectrice du citoyen nous indique, c'est qu'il ne faut pas — écoutez, c'est ce que j'en comprends, et le ministre pourra me reprendre si j'ai mal compris ce que la Protectrice du citoyen nous dit — aller dans ce sens-là.

Au point 71 de sa conclusion, et je la cite... Donc, je cite la Protectrice du citoyen, qui dit : «Dans un contexte d'évolution des pratiques et de révision de la gouvernance, le régime public de santé et de services sociaux doit — et peut encore — s'appuyer sur les principes qui en sont la base, soucieux de fournir à tous les assurés les services gratuits et [accessoires] que leur garantit la loi. En ce sens, tout changement — tout changement — qui a pour but de légaliser une facturation directe aux usagers pour des frais accessoires pour lesquels les médecins [participent] au régime public sont déjà rémunérés et pour certains services non couverts par le régime public constitue une avenue inéquitable — constitue une avenue inéquitable — de l'avis de la Protectrice du citoyen.»

Et c'est justement ce que nous ne souhaitons pas, M. le Président, c'est d'en arriver à une avenue inéquitable où on aurait, à toutes fins pratiques, ce qu'elle vient de nous dire, un service à deux vitesses parce qu'il y aurait des gens plus en moyens qui pourraient plus aisément faire face à ces frais accessoires, et la Protectrice du citoyen nous met vraiment en garde aujourd'hui par rapport à l'ouverture que l'on est en train de créer.

J'ai eu également une réaction de la part de... Bien, évidemment, c'est un avocat qui est souvent cité, et je tiens à revenir là-dessus parce que je pense que le ministre va être très intéressé par ce sujet. Attendez un petit peu que je trouve, ça ne sera pas tellement long. Alors, c'est Me Ménard. Me Ménard, j'avais... Cette loi n'est pas la... Attendez un petit peu, je vais retrouver ça. Je viens d'arriver, là, j'étais sur la route il y a quelques instants encore à peine. Alors, où est-elle?

Bon, écoutez, je vais tenter de retrouver la citation de Me Ménard, mais où il dit clairement que l'on ouvre la voie à des contestations. Pourquoi? Parce que la loi canadienne prévoit clairement qu'il ne doit pas y avoir de frais et qu'on doit tous être égaux devant les frais de santé. Et, quand je dis que le ministre devrait être sensible à cet argument, c'est que je me rappelle que, quand on a eu un débat sur les heures d'ouverture et qu'on tentait, avec nos collègues des autres formations politiques, d'inclure dans les heures d'ouverture certains moments de la journée, le ministre a complètement fermé la porte, et plusieurs fois, à plusieurs occasions — parce qu'on a tenté par plusieurs amendements — sous quel prétexte? Sous le prétexte qu'il y aurait peut-être possibilité qu'il y ait des poursuites. Alors, si le ministre ne voulait pas accepter certains amendements en nous disant : Bien, ça peut peut-être nous amener à des poursuites, je dis : Bien, l'argument ici est exactement le même parce que Me Ménard nous dit : Attention, si vous empruntez cette voie-là, vous risquez qu'il y ait des poursuites parce que ça va à l'encontre de la loi canadienne sur l'accessibilité à la santé.

Alors, je fais appel à la sensibilité du ministre, à son devoir parce qu'autant il a fait appel à sa grande rigueur, disait-il, pour ne pas emprunter une voie qu'on lui suggérait parce qu'il craignait que l'amendement que l'on proposait nous amène devant les tribunaux... Alors, je dis : C'est exactement la même chose, c'est exactement la même chose. Je pense que... Attendez un petit peu, je... Par rapport...

Bon, voilà, M. le Président. Effectivement, donc, en réaction... Et c'est justement le 2 octobre, vendredi dernier, suite au rapport de la Protectrice du citoyen : «Pour l'avocat spécialisé en santé Jean-Pierre Ménard, il est clair que l'amendement déposé par le ministre [de la Santé] "l'a été pour protéger les revenus des médecins plutôt que l'intérêt des patients".» Bon, c'est son commentaire.

Mais, un peu plus loin, ce qui est intéressant : «Me Ménard s'est également dit déçu du silence de la ministre fédérale de la Santé [...] — évidemment — qui n'a visiblement pas l'intention d'intervenir pour faire respecter la Loi canadienne sur la santé.» Et c'est ça qui est intéressant, j'ouvre les guillemets, et voici ce que dit Me Ménard : «C'est sûr que ça ouvre la porte à des recours parce que la loi interdit clairement les frais accessoires.»

Alors, c'est clair, là, il y a un juriste — puis je pense qu'il est reconnu, je pense que tout le monde autour de la table reconnaît quand même les compétences et les qualités de Me Ménard — qui nous dit très clairement : Écoutez, là, hein, ça va à l'encontre de la loi canadienne, et c'est sûr que ça ouvre la porte à des recours.

Donc, je dis au ministre bien amicalement : La logique qu'il avait devant nous par rapport aux heures d'ouverture, où l'on souhaitait, comme je le disais tantôt, je dirais, une loi qui allait un peu plus loin, qui encadrait un peu plus et où il nous disait : Non, ce n'est pas possible parce que je risque de me retrouver devant les tribunaux... Alors, comment peut-il à la fois refuser avec cet argument-là... Et ne croit-il pas que l'amendement qu'il nous propose risque de nous amener à la même place, devant les tribunaux? Alors, comment, aujourd'hui, peut-il accepter de continuer avec son amendement, avec ce bout de phrase qui risque de nous amener devant les tribunaux?

• (15 h 20) •

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, je ne ferai pas ici le débat du rapport de Mme la Protectrice du citoyen, qui fait une analyse et qui tire des conclusions auxquelles nous souscrivons. Alors, je l'ai dit à plusieurs reprises, je le dis encore aujourd'hui, on a le même objectif qu'elle, qui est celui d'abolir tout ce qui est illégal et d'abolir aussi tout ce qui est abusif.

Maintenant, le rapport fait état d'un certain nombre de choses supplémentaires, et il y a des efforts à consentir dans le réseau, on en convient. Maintenant, là où on n'est pas, évidemment, nécessairement d'accord, c'est le chemin pour y arriver. Puis je vais faire une seule parenthèse, M. le Président, sur le rapport, ça fait 40 ans qu'il y a un certain nombre de frais. Pour certains services assurés, il y a des situations qui existent depuis 15, 20 ans, il n'y a jamais eu de poursuites. Il y en a eu pour des situations abusives. Bon, on considère, nous, de notre côté, que ce qui est présenté est tout à fait légal. Et, encore une fois, je ne ferai pas le débat sur ce rapport-là. Là, l'objet du débat, c'est évidemment l'amendement que l'on dépose.

Maintenant, j'indiquerai à mes collègues... pour la lecture parfois sélective qu'ils font, je les inviterai à relire la première ligne de la conclusion, M. le Président. Je pense que ça vaudrait la peine que je la lise moi-même, la première ligne : «Depuis [...] longtemps, l'offre de services publique annoncée est, de loin, plus généreuse que les ressources disponibles.» Et, ici, on parle de ressources financières, évidemment, comme c'est indiqué clairement dans le rapport. Je vais le répéter, M. le Président, très important : «Depuis trop longtemps, l'offre de services publique annoncée est, de loin, plus généreuse que les ressources disponibles.»

Peut-être que, M. le Président, je pourrais relire la partie du programme du Parti québécois qui traitait du même sujet et qui proposait essentiellement la même avenue et rappeler à nos collègues de l'opposition qu'une stabilité dans les positions, ce serait de meilleure avenue et certainement plus apte à combattre le cynisme de la population face à la classe politique.

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Labelle. Après, nous irons au collègue de Lévis, mais collègue de Labelle sur le même échange.

M. Pagé : Oui. Bien, en fait, c'est parce que je n'ai pas eu le début d'une réponse. En fait, tout ce que je dis, M. le ministre, vous vous souvenez, sur les heures d'ouverture, vous n'avez pas voulu accepter nos amendements sur le principe que l'on respecte, mais sur le principe que cet amendement serait sujet à contestation devant les tribunaux. C'est bien cela, hein, c'était le principe que vous avez défendu pendant des heures et des heures. Et, bien évidemment, vous avez gagné parce que vous avez la majorité, même si, de l'autre côté, tous les partis étaient d'accord pour qu'on aille un peu plus loin. Mais les amendements, qui allaient tous dans le même sens, ont tous été rejetés, et toujours sur l'argumentation qu'on risquait de se retrouver devant les tribunaux. C'est exactement cela que vous avez plaidé. Et je vous dis qu'il y a des gens compétents qui viennent nous dire très clairement : Attention! Si vous faites ça, vous allez vous ramasser devant les tribunaux.

Alors, on ne peut pas tenir un discours et une logique pour une partie du projet de loi, mais pas pour l'autre partie du projet de loi quand ça ne fait pas notre affaire. Alors, moi, je vous demande de quelle façon êtes-vous capable d'argumenter sur cet article-là, qui risque de nous amener devant les tribunaux et où, là, ça ne semble pas grave... et c'était grave il y a quelques articles précédents. Alors, j'essaie de comprendre, là. Là, vous n'avez pas peur de vous retrouver devant les tribunaux? Cette fois-ci, ce n'est pas important? J'essaie de comprendre, là.

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : J'ai clairement répondu à cette question à ma réponse précédente.

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Labelle.

M. Pagé : Bien, en fait, alors, je n'ai pas compris votre réponse. Désolé. Je vais m'y prendre autrement. Aujourd'hui, la Protectrice du citoyen écrit au ministre de la Santé, et l'objet, c'est le financement des frais accessoires reliés aux services assurés. Alors, M. le ministre : «La publication de l'avis sur les frais accessoires du Protecteur du citoyen a suscité divers commentaires, notamment sur la capacité financière du gouvernement de donner suite à ses recommandations. Cette capacité semble être examinée sous le seul angle [des hausses] d'impôt des contribuables québécois, ce qui [n'a] pas l'impact que sous-tendent les recommandations du Protecteur du citoyen. Aussi, la présente vise à vous apporter davantage de précisions en vue d'assurer une compréhension adéquate de cet avis et de vous faire valoir quelques alternatives en matière de financement [et de] frais accessoires, et ce, particulièrement eu égard aux services assurés.»

C'est intéressant, là, ce qui est là-dedans. Je ne sais pas si le ministre a eu l'occasion de lire cette lettre, parce que c'est le 5, c'est aujourd'hui. Alors, je peux en faire...

Une voix : ...

M. Pagé : O.K. Alors, vos commentaires sur cette lettre? Parce que moi, je m'apprête à la lire au complet, là, parce que je pense qu'il y a là-dedans un très bon plaidoyer en faveur de ce que l'on argumente déjà depuis un moment, là.

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, bon, je constate que nous avons été, de ce côté-ci, plus rapides dans nos travaux parlementaires, c'est la réalité. Alors, il n'y a rien qui change dans notre position suite à la note additionnelle que la protectrice nous a envoyée. Il n'y a absolument rien change ni dans notre position, ni dans la lecture de la note supplémentaire que la protectrice nous a envoyée. Il n'y a rien qui change, comme il n'y a rien qui change dans son interprétation de la situation. La protectrice nous suggère des avenues auxquelles on adhère, il n'y a aucun problème avec ça, sauf que l'enjeu reste le même.

Et je vais répéter l'enjeu, M. le Président, je vais le répéter pour que ce soit clair : «Depuis trop longtemps — 69e para-graphe — l'offre de services publique annoncée est, de loin, plus généreuse que les ressources disponibles.» Dans la note complémentaire, M. le Président, la protectrice n'a pas changé sa position, elle nous propose des avenues qui sont connues. On les connaît toutes, ces avenues-là, là. On revient à la position du réseau qui a été véhiculée abondamment, il y a deux ans, et on la connaît, et on l'a déjà mise en marche, on a déjà fait ça. Ça ne corrige pas la situation qui est évoquée par la protectrice à 69, et sa note complémentaire ne conteste pas ce qu'elle a dit dans son rapport. Fin de la discussion pour moi.

M. Pagé : Même si on vous dit clairement : Il est possible qu'on se retrouve devant les tribunaux avec ça, ça ne vous dérange pas?

M. Barrette : Possible n'est pas une obligation, et ça ne veut pas nécessairement dire que ça va s'exercer, M. le Président. Et je rappellerai à l'opposition... Je comprends que le député de Labelle n'a pas eu la chance, peut-être, d'assister à tous les travaux — ce n'est pas une critique — mais, ici, on propose un règlement. Le fait d'avoir cet amendement-là ne génère rien. Et j'ai déjà répondu au député de Rosemont qu'à la fin il pourrait y avoir, entre l'état actuel... en nombre de situations où il y aurait une autorisation, le nombre actuel à zéro, il pourrait ne pas y en avoir du tout. Alors, l'amendement actuel, là, le jour où il est accepté, le projet de loi est accepté, ça ne peut pas aller à la cour d'aucune manière.

• (15 h 30) •

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Labelle.

M. Pagé : En même temps, ça ne me rassure pas quand j'entends ça, que ça peut être un nombre qu'on ne connaît pas, comme ça peut être zéro. Je trouve que ça ouvre la porte à beaucoup de choses, là, alors...

M. Barrette : Je l'ai dit, c'est entre zéro et l'actuel.

M. Pagé : Et l'actuel, c'est combien?

M. Barrette : Bien, ce sont les frais accessoires qui sont connus dans le réseau.

M. Pagé : Il y en a pour combien?

M. Barrette : Je l'ai déjà dit, c'est cité dans tous les journaux. Alors là, je ne ferai pas de débat là-dessus, là.

M. Pagé : Vous évaluez autour de 50 millions, mais est-ce qu'il y a un rapport qui existe, qui fait foi de ce 50 millions?

M. Barrette : M. le Président, je me suis déjà exprimé largement là-dessus, là.

M. Pagé : Je vais laisser mon collègue.

Le Président (M. Tanguay) : Alors, pour la suite, collègue de Lévis, la parole est à vous.

M. Paradis (Lévis) : Merci, M. le Président. Ah oui! c'est un dossier chaud, c'est un dossier dont on parle depuis de nombreuses heures, c'est un dossier qui réclame encore des explications et de faire en sorte qu'il y ait de la compréhension aussi.

Vendredi, effectivement, la Protectrice du citoyen a déposé un rapport, un rapport exhaustif, un rapport complet, 35 pages, quand tu pars du début à la fin, avec énormément, énormément de matière, où on aborde à peu près tout ce qui est abordable, évidemment ces principes fondamentaux, bien sûr, mais les frais accessoires aux services assurés et les frais de fonctionnement des cabinets et des cliniques médicales, les services non assurés, les services désassurés, les services non dispensés par le médecin lui-même. Et je pense que, s'il y a quelque chose de clair là-dedans, c'est qu'au nom de l'accessibilité de ceux et celles qui se servent de notre réseau de santé en centre hospitalier ou en cabinet et clinique, eh bien, il ne faut pas qu'il y ait une charge faisant en sorte qu'on puisse être desservi par ce même réseau.

Le ministre dit... Ce qu'on vient de recevoir aujourd'hui, et on vient tout juste de recevoir ça, c'est adressé — c'est le 5 octobre 2015 — au ministre de la Santé, aux membres de la Commission de la santé et des services sociaux, Le financement des frais accessoires reliés aux services assurés, et on se rend compte que c'est tellement important, ce dont on parle depuis plusieurs heures, que la Protectrice du citoyen décide de revenir avec un avis, revenir avec des propos pour clarifier sa position. Et, au-delà de ce que le ministre nous dit versus le 69, elle nous dira noir sur blanc dans cette missive de trois pages : «Dans son avis, le Protecteur du citoyen rappelle que, depuis 40 ans, on constate au Québec un glissement graduel vers une contribution directe de plus en plus grande des usagers [...] et il en illustre les conséquences néfastes sur l'accès équitable aux services de santé et aux services sociaux.»

Et là je m'en vais plus bas, là, je ne vous lirai pas complètement la note, mais les thèmes qu'on y retrouve, qui reviennent à peu près dans chaque paragraphe, dans ma tête à moi, cristallisent bien la pensée de la Protectrice du citoyen. Il est dit, donc, dans le troisième paragraphe : «Or, l'éradication des frais accessoires pour les services assurés est précisément, selon le Protecteur du citoyen, la première cible à viser. Maintenant, comment financer les 50 millions requis pour éliminer les frais accessoires reliés aux services assurés? Essentiellement, deux options s'offrent au décideur», dit-elle. Elle donne un avis... c'est plus que ça, là, elle rajoute des choses, elle dit : Regardez comment on peut faire. Là, elle va dire, il y a deux choses : dégager une marge de manoeuvre ailleurs ou exiger une contribution des usagers.

Elle va être tellement précise, elle a l'ouverture de présenter ces deux points-là, mais là elle dit : Mais nous, dans notre cas, on s'adresse à la première, la première possibilité. Pas exiger une contribution des usagers, mais arriver peut-être à dégager une marge de manoeuvre ailleurs, et là on aborde encore le fameux 50 millions.

Ceci dit, 50 millions, le ministre vient de le confirmer ou en tout cas... ou j'ai mal compris, mais le ministre dit : Ça coûterait à peu près 50 millions. Actuellement, est-ce qu'il faut que je comprenne que le 50 millions, c'est l'étude ou la ventilation de ce que ça coûterait en fonction des abus que l'on a constatés maintenant, les gouttes à 10 $ qui se chargent 200 $, l'examen à 15 $ où on charge 400 $? Est-ce que le 50 millions tient compte des abus? Parce que, sinon, ça ne coûtera pas 50 millions. Si le ministre décide de faire en sorte qu'il n'y ait plus d'abus, le montant requis, ça ne devrait pas être 50 millions. À ce chapitre-là, on a demandé déjà au ministre, au ministère, d'avoir les données économiques pour justifier le montant dont on parle depuis plusieurs semaines, on nous a refusé ces documents-là.

Je reviens donc à cette lettre toute récente puis, ensuite, je continuerai sur le point puis notre vision des choses maintenant. Parce qu'inévitablement il faut que ça se règle, et je redis, M. le Président, et je réclame à nouveau, sachant pertinemment qu'on ne l'aura pas, que, même de l'avis de la Protectrice du citoyen et de tous ceux qui ont pris la parole dans ce dossier-là, il aurait été bienvenu qu'on puisse entendre à peu près tout le monde pour se faire une véritable idée de l'importance des décisions qui sont prises ici à ce moment précis.

Bref, je retourne à la page 2 et là je saute trois paragraphes parce que, finalement, ils reviennent tous à peu près au même, et je souligne celui-ci : «Pour redresser la tendance du glissement graduel vers les dépenses privées et son impact délétère sur le plan de l'accessibilité aux services pour les personnes vulnérables ainsi que pour l'ensemble de la population, le Protecteur du citoyen suggère qu'un premier pas consiste à interdire les frais accessoires pour les services assurés pour lesquels les médecins participant au régime public sont rémunérés.» C'est écrit noir sur blanc, ça dit : Interdire les frais. Et là c'est la continuité de son explication parce que ça, la lettre d'aujourd'hui, c'est un ajout à ces premières 38 pages qu'on a reçues vendredi dernier.

Là, on dit : Comment on fait pour financer ça puis faire en sorte qu'on puisse peut-être se permettre, en tout cas, de ne rien charger aux citoyens? Est-ce qu'on est capable de faire ça? Elle dit : Il y a des «pistes qui demeurent porteuses d'économies importantes et d'amélioration simultanée de la gouvernance, qu'il suffise de mentionner les suivantes : un meilleur encadrement de la pharmacothérapie dans tous les points de service, [...]qui permettrait d'agir rapidement sur une diminution des coûts et sur l'usage optimal des médicaments au bénéfice des usagers». On va chercher de l'argent là, il y a de quoi à faire. C'est un grand chantier, mais il y a quelque chose à faire. Le ministre en a déjà parlé, de ça, il y a des choses à faire là-dessus, on peut récupérer de l'argent. Il y a moyen de faire en sorte que l'usager ne soit pas obligé de contribuer, on peut dégager des sommes servant à ça sans faire en sorte que personne ne tombe en faillite.

Elle dit une deuxième : l'examen rigoureux des situations de surdiagnostic, de surtraitement et de diverses propositions de révision du panier de services, comme le suggère l'Association médicale du Québec, qui est d'ailleurs allée plus loin que ça. Parce que, quand l'Association médicale du Québec parlait de surdiagnostic, on disait que vous pouvez aller récupérer 3 milliards de dollars, c'est énorme, 3 milliards à 3,4 milliards de dollars. Et là le ministre me fait un signe, puis je l'interpréterai, là, c'est...

M. Barrette : Mais ce n'est pas un bon chiffre.

M. Paradis (Lévis) : Bien, celui que je vous propose, c'est celui de l'Association médicale. Celui que j'ai en main, c'est entre 3 et 3,4 milliards de dollars. Bon ou pas bon, je pense qu'il nous permet peut-être de comprendre qu'il y a moyen de ne pas aller fouiller dans la poche du contribuable à nouveau. À nouveau, parce que ce n'est pas la première fois qu'on fait ça, on le fait à peu près tout le temps. C'est facile d'aller chercher dans la poche du contribuable, c'est une autre façon.

Puis, enfin, «la rationalisation du financement des services préhospitaliers d'urgence, dont la conception n'est pas basée sur l'équité et entraîne parfois une utilisation abusive, rationalisation qui pourrait apporter des économies annuelles récurrentes allant jusqu'à 100 millions [encore]». Il y a moyen de faire autrement.

Et là elle complète. Avant de signer, elle dit : «Voilà pourquoi le Protecteur du citoyen croit qu'il faut s'évertuer à examiner sérieusement les recommandations de divers comités d'experts, car ne rien faire reviendrait à tolérer la perpétuation d'un système de santé et de services sociaux de moins en moins équitable.» L'équité.

M. le Président, nous avons étudié attentivement ce rapport de la Protectrice du citoyen. Et pas seulement celui-là dans ce domaine-là, aussi ce dont parlait ma collègue de l'opposition, ce document qui émane de Me Jean-Pierre Ménard également. Lui aussi voit une problématique certaine à normaliser les frais accessoires dans la forme qu'entend le ministre à travers son amendement et des dangers qu'il estime relatifs à des transferts fédéraux en santé. Et il le dit à travers cet avis, le Québec pourrait perdre au change.

Ça va plus loin que ça. Quand on parle de comités d'experts, là, en 2008, Claude Castonguay, rapport du Groupe de travail sur le financement du système de santé. C'est 2008, et déjà on en parlait, on faisait la même chose, on exigeait encore une fois que le gouvernement agisse.

M. le Président, à travers notre vision des choses, nous considérons, à la Coalition avenir Québec, que trois solutions peuvent être et sont potentiellement sur la table. D'abord, on s'entendra tous pour que les patients n'aient plus à payer pour des frais accessoires dans les cabinets et cliniques médicales. À la base, c'est ça. À la base, c'est ce que tous les intervenants, tous ceux qui prennent position disent.

Et, à défaut, s'il y avait eu d'autres avis contraires, il aurait été intéressant qu'on puisse, comme on l'a fait, mais refusé à plusieurs reprises... d'avoir des consultations particulières sur ce sujet-là parce qu'on voit maintenant, et vous remarquez maintenant la portée. Ça a l'air très, très compliqué, les frais accessoires, hein? C'est vrai que ce n'est pas facile, que ce n'est peut-être pas... Il y a des ramifications à travers ça qui ne sont pas facilement digestibles, mais globalement ce n'est pas bien, bien compliqué, c'est ce qu'on va vous demander de sortir de vos poches pour obtenir un service qui, normalement, devrait vous être donné gratuit. Les patients ne doivent plus payer pour des frais accessoires dans les cabinets et cliniques médicales.

• (15 h 40) •

Et, comme le recommande la Protectrice du citoyen, il faut inclure les frais accessoires dans la rémunération globale des médecins qui travaillent en clinique lors des prochaines négociations sur le renouvellement de l'entente de la rémunération des médecins. Ah! les gens disent : Oui, mais c'est pour quand, ça? Ça, j'ai entendu toutes sortes de choses. Je leur dis : Bien oui, ça va être dans trois ans, ça va être dans quatre ans, puis on ne sait pas trop quand ça va se produire. Je m'excuse, là, si je me fie à ce que nous avons, l'entente sur la rémunération des médecins est échue depuis de 31 mars 2015, on devrait être sur le point, à un moment donné, de s'asseoir puis de se questionner là-dessus. Déjà, on peut faire un chemin et faire en sorte qu'on prenne des actions faisant en sorte qu'on puisse maintenant régler ce problème sans aller fouiller dans la poche de celui qui a besoin de traitements et de services.

Et on fait quoi entre-temps? Bien, notre vision des choses — et là on rejoint la position de tous ceux et celles qui, jusqu'à maintenant, auraient eu envie de se faire entendre davantage sur ce dossier-là — d'ici là, bien, que l'État rembourse aux médecins uniquement, uniquement le prix coûtant sans aucun profit ou, parenthèse, marge de manoeuvre. Parce qu'on a aussi des différends là-dessus. À un moment donné, on disait : C'est des profits. 10 % à 15 % de plus que le prix coutant, c'est ce que le ministre nous exposait. Alors, on a dit : Non, non, ce n'est pas des profits, c'est une marge de manoeuvre, c'est pour tenir compte de la fluctuation du marché. Non, d'ici là, l'État devrait rembourser aux médecins uniquement le prix coûtant, sans aucune marge de manoeuvre, sans aucun profit, de certaines fournitures médicales des médecins qui travaillent dans les cabinets et les cliniques.

Alors, collectivement, on paie ça comment? Je viens de vous le dire. En fait, je vous le dis puis je reprends le discours de la Protectrice du citoyen, qui, noir sur blanc, aujourd'hui, décide d'envoyer un message, d'envoyer un document nous démontrant que la chose est faisable, travailler sur la médication, sur les médicaments, la pharmacothérapie, travailler sur le surdiagnostic médical. Ça rejoint aussi en ça la position de l'Association médicale du Québec, il y a des économies à faire.

Les propositions dont je vous parle, M. le Président, elles rejoignent l'esprit de trois recommandations. Pas une, pas deux, trois recommandations. C'est celles qu'on a là. Parce que nombreux sont ceux qui auraient peut-être souhaité ajouter au débat. Trois recommandations présentées par Claude Castonguay, je le rappelle, dans son rapport sur l'avenir du financement des soins de santé en 2008. Rappelons que ce groupe-là, en 2008, recommandait la suppression des frais accessoires exigés des patients par les cliniques de santé de première ligne, proposait le maintien des frais accessoires pour les cliniques associées selon les ententes et la négociation d'un nouveau régime de tarification pour les cliniques spécialisées. Notre proposition, celle dont je vous parle, dont je vous fais lecture, rejoint également celle de la Protectrice du citoyen encore davantage en fonction de l'ajout qu'elle nous propose aujourd'hui et évite les risques inhérents liés à la contestation de la loi canadienne en santé.

À ce chapitre-là, je comprends le ministre, M. le Président, qui dit : Bien, écoutez, des suppositions, c'est sûr que... Est-ce que quelque chose est écrit dans le ciel maintenant? Non. Mais, de l'avis de Me Jean-Pierre Ménard, dans son avis juridique, cette crainte-là, elle est réelle. Et les coûts, les contrecoups de cette décision de normaliser, en quelque sorte de légaliser les frais accessoires, au-delà de ça, décider desquels par voie de règlement sans que personne ne puisse avoir voix au chapitre, Me Ménard dit : Là, on joue à un jeu dangereux, et, collectivement, on n'a peut-être pas moyen de jouer un jeu dangereux de cette façon-là.

M. le Président, le ministre du Parti libéral, en 2014, et ça, on est revenus en question à l'Assemblée nationale et au salon bleu là-dessus... Je sais que je le fais sourire parce qu'il se rappelle ces moments-là. Parce que je lui passerai l'épisode de l'arbre, et tout ça, là, mais, je veux dire, je vais au moins lui rappeler le fait que le gouvernement avait promis aux patients de payer les coûts de trois examens effectués dans les cliniques privées, échographies, les IRM et les scans. Le ministre avait indiqué, avait promis à la population de rembourser certains frais accessoires. Mais, aujourd'hui, ce n'est pas ça, il veut continuer, réglementer, normaliser, baliser, encadrer des frais accessoires qui demeureront et de faire en sorte que le patient paie pour ça. Je pense que les avis sont clairs. Tous ceux qui nous parlent, tous ceux qui écrivent disent : Non, ce n'est pas la solution. Et, en ce sens-là, on ne peut pas aller de l'avant.

Combien ça coûterait, je vous l'ai déjà dit. On a demandé des données. Vous savez, ce qu'on pourrait faire à ce moment-ci au-delà de tout espoir, c'est ensemble de dire : Bien, dans le fond, ça a bien de l'allure, il y a tellement de gens, il y a tellement de mots, c'est tellement vaste, complexe et important que, finalement, on revient, puis, O.K., ça va, on s'offre des consultations particulières pour être en mesure d'avoir une vision claire pour le bénéfice des patients. Parce qu'on le rappelle, on est ici pour ça.

Mais l'autre possibilité — et le ministre pourrait peut-être le faire également — c'est de retirer l'amendement. Le ministre pourrait dire : Je retire mon amendement puis je dépose un projet de loi distinct. Il a la possibilité de le faire. Et je dépose un projet de loi distinct, ce qui nous permettrait de faire en sorte qu'on puisse avancer davantage sur un sujet qui, jusqu'à maintenant, a accaparé de nombreuses heures de discussion.

N'oublions pas que le rapport de la Protectrice du citoyen propose neuf recommandations détaillées qui demandent beaucoup de travail au ministre. Il ne peut pas juste légaliser les frais accessoires en catimini sans tenir compte de ces avis — pas seulement celui-là, mais de ces avis, parce qu'il y en a de nombreux — faisant en sorte qu'on puisse trouver la bonne réponse à une situation qui perdure depuis longtemps au détriment des usagers du réseau de la santé. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole à notre collègue... M. le ministre, pardon. Bien oui, M. le ministre.

M. Barrette : Merci, M. le Président. Encore une fois, je le répète — et c'est important de le répéter, M. le Président je serai bref — nous souscrivons aux commentaires de la Protectrice du citoyen à l'effet qu'il y a des montants d'argent abusifs et illégaux. Nous souscrivons également à son appréciation de la situation voulant qu'il y ait un panier de services qui excède la capacité de payer. Nous prenons nos responsabilités comme gouvernement voulant que le citoyen doit être protégé. Fin des frais illégaux, éradication des abus, mais gestion appropriée des finances publiques, et ça inclut le panier de services.

Les autres avis et commentaires qui sont faits viennent de tierces parties. Je ne parle pas de la protectrice, je parle de tous ceux et celles ou toutes les organisations qui sont citées qui font étalage de données non vérifiées sur lesquelles on ne peut pas s'appuyer. Mais il y a une chose sur laquelle on peut s'appuyer, c'est l'inadéquation entre le panier de services et la capacité de payer. Nous allons mettre fin aux abus, nous allons empêcher sévèrement tous frais illégaux, tel que la protectrice nous le demande.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Sur le même échange, collègue de Lévis, pour les 30 secondes restantes.

M. Paradis (Lévis) : Je pense qu'honnêtement quand on prend le temps de lire correctement et de décoder, de comprendre et d'analyser, la protectrice va plus loin que ce que nous présente le ministre. Le ministre, qui, d'ailleurs, faut-il le rappeler... Il a dû relire deux ou trois fois le texte avec l'équipe, et c'est bien que ce soit ainsi, mais qui disait pas plus tard que vendredi... «"On n'est pas capable de faire ça financièrement, à moins d'augmenter les impôts", a réagi Gaétan Barrette en entrevue avec La Presse. "On est tous pour la vertu. Elle a fait un rapport vertueux, mais, à un moment donné, il faut être réaliste."» Moi, je pense que, dans son rapport, actuellement, il y a beaucoup de réalisme et de propositions qui sont envisageables et exécutables.

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, je maintiens que c'est un excellent rapport, mais je maintiens également que la protectrice nous amène à un endroit où on n'a pas la capacité d'aller. Où je voudrais bien aller, mais où on n'a pas plus la capacité, nous, d'y aller que le Parti québécois, dans son dernier programme, ne pouvait aller. D'ailleurs, il l'a écrit noir sur blanc dans son programme. S'il avait voulu aller là, il l'aurait écrit. À la place, il a écrit quelque chose de similaire à l'amendement.

Alors là, M. le Président, c'est beau, faire de la politique, là, mais on peut-u être rationnel à un moment donné, là? On peut-u dire une chose à un moment donné puis dire la même chose... O.K. Ce n'est pas le lendemain, là, mais dans la même période temporelle, là. On n'est pas à cinq ans, là, on est à 16 mois de ce qui a été écrit. Et là, soudainement, là, par un miracle miraculeux — c'est encore plus qu'un miracle, ça, c'est un miracle miraculeux — la situation aurait changé. J'ai juste une chose à dire aux oppositions, M. le Président : Allo, la terre, Québec, 2015, c'est de même.

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Richelieu, la parole est à vous.

M. Rochon : Oui. M. le Président, je vais avoir un sous-amendement à proposer, en espérant que le ministre y trouve une voie carrossable. Alors, cet amendement serait le suivant...

Le Président (M. Tanguay) : Nous allons en faire des copies et suspendre, donc, le temps que...

M. Barrette : ...M. le Président, c'est un sous-amendement?

M. Rochon : C'est un sous-amendement.

M. Barrette : Parce qu'il a dit «amendement».

Le Président (M. Tanguay) : Oui, sous-amendement.

Alors, je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 50)

(Reprise à 15 h 55)

Le Président (M. Tanguay) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Chers collègues, nous poursuivons nos travaux. Nous avons reçu copie du sous-amendement, que nous lira à l'instant le collègue de Richelieu. La parole est à vous.

M. Rochon : Voilà. Alors, mon sous-amendement — je crois bien avoir parlé de sous-amendement — vise à modifier l'amendement introduisant l'article 25.2, introduit par l'article 1 du projet de loi, par l'ajout, après les mots «lesquels un paiement est autorisé» des mots suivants : «seulement pour les services non autorisés»...

Une voix : «Non assurés».

M. Rochon : «Non assurés», pardon. «Non assurés», évidemment. Alors...

Le Président (M. Tanguay) : Avez-vous des explications, s'il vous plaît?

M. Rochon : Bien, écoutez, pour clarifier, là, les services non assurés, ils sont mentionnés à l'article 22 du Règlement d'application de la Loi sur l'assurance maladie. Alors, on retrouve notamment dans cette liste tout examen ou service non lié à un processus de guérison ou de prévention de la maladie comme les examens ou services pour fins d'émission d'une police d'assurance, de passeport ou d'autres fins analogues, tout service dispensé à des fins purement esthétiques, M. le Président, tout examen, toute expertise, tout témoignage, tout certificat ou autres formalités lorsque requis aux fins de la justice.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Y a-t-il des interventions sur le sous-amendement...

M. Barrette : Bien, attendez, M. le Président.

Le Président (M. Tanguay) : Oui.

M. Barrette : M. le Président, je pense que l'amendement, il n'est pas recevable pour la raison suivante. Je pense que ça peut probablement se gérer... Comme on dirait, puisque vous n'avez de banc, j'imagine, sur votre fauteuil...

Le Président (M. Tanguay) : Je vous écoute.

M. Barrette : Alors, ici, on a un amendement qui traite clairement... Dans le premier paragraphe, on traite des services assurés, et tout ce qui vient après fait référence aux services assurés. Ça fait tellement référence aux services assurés qu'on a cru nécessaire de statuer que ne constituent pas de tels frais ceux liés à des services non considérés comme assurés requis pendant ou après la dispensation d'un service assuré. Et, quand on arrive au dernier paragraphe, on parle d'autorisation dans le cas de services assurés, et là on arrive avec «seulement pour des services non assurés». Là, c'est parce que ça n'a pas d'objet, là.

Le Président (M. Tanguay) : Alors, sur la plaidoirie, je dirais, oui, oui, sur la plaidoirie, je vais vous entendre et je statuerai par la suite. Et je vous annonce que je prendrai probablement quelques minutes, évidemment, une pause pour que l'on puisse analyser le tout, mais je veux d'abord vous entendre. Donc, j'ai entendu le ministre. Aviez-vous terminé?

M. Barrette : Je vais peut-être clarifier la chose, là.

Le Président (M. Tanguay) : Oui.

M. Barrette : Si on prend un moment pour lire le texte final que deviendrait l'amendement si le sous-amendement était accepté, le texte se lirait ainsi : «Malgré les interdictions énoncées aux neuvième et onzième alinéas, le gouvernement peut, par règlement, prescrire des cas et des conditions dans lesquels un paiement est autorisé seulement pour les services non assurés.»

Bien, c'est parce que, là, on fait référence, là, aux cas et conditions dans lesquels un paiement est autorisé, les cas et conditions des services assurés. Ça fait qu'on ne va pas arriver, puis dire : Prescrit des cas et des conditions dans lesquels un paiement est autorisé dans les cas et conditions des frais assurés, puis continuer ça par «seulement pour les services non assurés». Ça rend incompréhensible ce que deviendrait le texte, un coup amendé, là.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Collègue de Rosemont.

M. Lisée : Bien, je plaiderais, au contraire, que ça donne au texte une cohérence qui lui manquait jusqu'à maintenant parce que le texte, d'abord, donne un avis général, donc affirme : «Aucun paiement ne peut être [déclaré] ou reçu d'une personne assurée, directement ou indirectement, pour des frais engagés.» Ensuite, il décrit ces frais-là, il dit : Regardez comme c'est important, là, je vous les décris, ceux sur lesquels il ne peut pas y avoir de paiement exigé. Et là, à la fin, il dit : Malgré les interdictions, il peut y en avoir, et là je dis : Mais seulement pour ce qui n'est pas assuré. Alors là, on donne de la cohérence que... on comprend que la loi ne se contredit pas dans son dernier paragraphe parce que la loi, donc, revient sur le principe général qu'on ne veut pas qu'il n'y ait aucun paiement pour des services assurés, mais on admet, grâce à notre sous-amendement de mon collègue de Richelieu, on admet que, pour certains services non assurés, il pourra y avoir, par règlement, des cas et des conditions dans lesquels un paiement est autorisé. Bien, je pense que la cohérence de l'article prend là plusieurs grades supérieurs.

M. Barrette : M. le Président...

Le Président (M. Tanguay) : ...

M. Barrette : Excusez-moi.

Le Président (M. Tanguay) : Oui, je vais peut-être entendre...

• (16 heures) •

M. Barrette : Ce n'est pas à mon tour encore? Non?

Le Président (M. Tanguay) : Je vais peut-être entendre le collègue de Lévis, si vous aviez des représentations sur la recevabilité. Sinon, une fois qu'on a terminé le tour, je vais permettre des remarques finales, dirons-nous.

M. Barrette : ...

Le Président (M. Tanguay) : Oui.

M. Barrette : M. le Président, à ce moment-là, à la suite du commentaire du député de Rosemont, le sous-amendement est encore plus irrecevable parce qu'il... D'ailleurs, je vous rappellerai qu'un des amendements que j'ai proposés a été jugé irrecevable sur la base de l'effet contraire à l'amendement proposé. Bien là, ici, c'est ça que ça fait, là. Alors, si je reprends l'argumentaire du député de Rosemont, il vient transformer le dernier paragraphe en une interdiction de l'autorisation. C'est implicite, il nous dit : Bien non, c'est bien plus clair. Là, le texte, là, on le transforme, puis on lui dit : Oui, oui, il peut le faire pour les services non assurés. Bien oui, mais là il vient contredire l'esprit de l'amendement, qui est de l'autoriser dans certains cas et conditions. Là, il vient d'amener un sous-amendement, puis il vient de le plaider, là, il vient de le dire tel quel, là. La manoeuvre est subtile, mais je l'ai vue. Ce n'était pas dur, je l'ai même entendue. Alors, il vient de proposer un sous-amendement qui vient contredire la totalité... dans sa lecture clairement exprimée, l'objet de l'amendement, qui, M. le Président, est un objet qui traite des services assurés dans lesquels on permettrait, par règlement, une facturation dans des cas et conditions spécifiques telles que régies par l'article 22, qui n'est qu'un article qui ne traite que de services assurés.

Et, «by the way», M. le Président, la Loi de l'assurance maladie, quand elle parle des services non assurés, bien, ils sont non assurés. Elle ne traite pas de ça, ni du paiement, ni des balises, ni quoi que ce soit. Alors, ici, à sa face même, il vient de le dire, le député de Rosemont, là, il propose un sous-amendement qui change le sens du dernier paragraphe. Puis, il l'a dit, ça change le sens. Bien, justement, ça clarifie, ça va être interdit pour les assurés, ça va être juste permis dans les non-assurés. Bien là, c'est un autre amendement, ça, c'est un autre univers. C'est irrecevable dans la forme et dans la portée pour la même raison que le mien a été jugé irrecevable.

Le Président (M. Tanguay) : Oui, collègue de Rosemont.

M. Lisée : Bien, écoutez, c'est sûr qu'un sous-amendement change le sens d'un amendement. C'est la nature même du sous-amendement d'ajouter, de retrancher, de modifier. Sinon, on ne voudrait pas sous-amender, hein? Alors, oui, c'est sûr que le sous-amendement change le sens, mais donc je suis en désaccord avec le ministre, il n'enlève pas à la cohérence. Son sous-amendement à lui enlevait à la cohérence. Notre sous-amendement change le sens, mais n'enlève pas à la cohérence du texte. Au contraire, il rétablit la cohérence du texte. Ensuite, bien, la commission, elle disposera.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. S'il n'y a pas d'autres remarques, alors, chers collègues, je vais suspendre quelques instants, le temps d'aller y réfléchir et de vous donner une décision, donc, après la suspension pour qu'on puisse poursuivre nos travaux.

Alors, nous suspendons nos travaux.

(Suspension de la séance à 16 h 3)

(Reprise à 16 h 36)

Le Président (M. Tanguay) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Chers collègues, nous allons poursuivre nos travaux. Je vais rendre ma décision concernant la recevabilité ou l'irrecevabilité du sous-amendement déposé par le collègue de Richelieu. Pour ce faire, je tiens à vous souligner, évidemment... Vous avez vu, comme président, c'est mon devoir, c'est ma responsabilité — si je ne le faisais pas, je ne mériterais pas d'être assis ici, devant vous, chers collègues — de décider de façon consciencieuse, et la façon, la seule façon de le faire évidemment, c'est de s'asseoir avec les gens — et je tiens à les remercier, qui nous écoutent — du secrétariat aux travaux parlementaires, qui supervisent toute commission parlementaire qui est en cours, et évidemment avec l'aide de notre secrétaire, qui suit, comme moi, nos débats.

Maintenant, j'en arrive sur la recevabilité du sous-amendement du collègue de Richelieu en vertu de l'article 197. On a eu l'occasion de tester les limites de cet article-là, notamment le 30 septembre dernier, lorsque l'on a eu un débat quant à l'amendement qui avait été déposé par notre collègue de Taillon qui visait à introduire un article 25.2 et qui avait un sens. Et le débat que nous avons eu et la décision que j'ai rendue quant au contresens que le sous-amendement du ministre voulait apporter et qui faisait en sorte que le sous-amendement du ministre avait été jugé irrecevable parce qu'il allait à l'encontre du principe... L'article 197, aujourd'hui, encore une fois, doit être appliqué, et je prends le temps de le lire : «Les amendements doivent concerner le même sujet que la motion et ne peuvent aller à l'encontre de son principe.» Et cet article 197, qui vise les amendements, s'applique au sous-amendement en vertu de l'article 200. Et, lorsque l'on parle d'en contredire ou pas le principe, il y a une jurisprudence que j'ai eu l'occasion de souligner, 197.7, 18 mai 1988, qui définit le mot «principe» comme étant notamment l'objet, l'objectif, le but, la finalité, la fameuse intention du législateur, je vous dirais.

Alors, ici, nous avons devant nous l'amendement du ministre à 25.2, qui vise — et c'est l'intention du législateur — les services assurés, qui en établit un principe et qui, à la fin, malgré les interdictions au principe quant aux services assurés, vient en permettre des frais. Le sous-amendement déposé par le collègue vient, aux dires mêmes de notre collègue de Rosemont, changer le sens de l'amendement du ministre lorsqu'il précise que ladite autorisation, malgré une interdiction, sera uniquement concernant les frais non assurés, alors que l'amendement vise à faire appliquer malgré les interdictions... et les interdictions, évidemment, se rapportaient aux services assurés. Alors, je déclare le sous-amendement irrecevable.

Et je tiens, chers collègues, en toute transparence pour nos travaux, à vous préciser que, sur l'amendement du ministre, les temps de parole... préciser les temps de parole qu'il nous reste : pour le collègue de Richelieu, on m'indique qu'il lui reste huit minutes; pour le collègue de Labelle, sept minutes; et, pour le collègue de Chutes-de-la-Chaudière, 20 minutes, il n'a pas pris de temps encore. Alors, voilà l'état de la situation. L'objet de notre débat redevient donc, chers collègues, l'amendement du ministre à 25.2. Y a-t-il des interventions? Collègue de Richelieu.

• (16 h 40) •

M. Rochon : M. le Président, je respecte entièrement, évidemment, la décision que vous venez de rendre, votre point de vue. Là où je me désole, c'est que notre sous-amendement, hein, qui donnait, à notre point de vue — vous ne retenez pas cet argument — de la cohérence à l'amendement, aurait permis au ministre de nous faire la démonstration hors de tout doute de ce qu'il nous suggère en habile parlementaire, c'est-à-dire qu'il est d'accord avec les suggestions de la Protectrice du citoyen. Ah! s'il avait abondé dans le sens de notre sous-amendement, hein, qui visait les services non assurés, pour lesquels un règlement, là, aurait pu intervenir, bien, nous l'aurions cru. Là, c'est un petit peu plus difficile.

Il y a plusieurs organisations, M. le Président, qui font front commun pour témoigner leur opposition à la normalisation des frais facturés aux patients pour des services assurés et médicalement nécessaires. Ces organismes-là, ils interpellent le ministre de la Santé en soulignant que l'amendement législatif qu'il souhaite adopter en ce sens crée un système à deux vitesses pourtant interdit par la Loi canadienne sur la santé. On a parlé de Me Ménard. Nous citons abondamment le rapport du Protecteur du citoyen, de la Protectrice du citoyen. Il n'y a pas qu'elle, là, ça se bouscule dans l'actualité pour s'élever contre le projet du ministre. Combien a-t-on répertorié de groupes opposés? 14, 14 groupes opposés.

Vous savez que je suis porte-parole des aînés pour l'opposition officielle. Le président de l'Association des retraités de l'éducation et des autres services publics du Québec, Pierre-Paul Côté, réitère le refus des personnes aînées de payer pour des frais qui devraient être couverts par le régime public. Et là je cite M. Côté : «Le ministre de la Santé nous berne — c'est lui qui parle, là, je n'oserais jamais dire une affaire pareille — lorsqu'il dit vouloir encadrer les frais accessoires facturés sous prétexte que les gens acceptent cela ! C'est faux. Nous nous opposons à ces frais, car ils compromettent l'accessibilité au système de santé pour les plus vulnérables de la société et les personnes aînées.»

Un autre porte-parole des aînés, il s'appelle Maurice Dupont et il est président du Réseau FADOQ, la Fédération des clubs de l'âge d'or du Québec : «Le ministre sait très bien que, pour beaucoup trop patients, ces soins sont loin d'être accessoires. Qu'ils soient couverts par l'État est essentiel, dit M. Dupont. Pourquoi inquiéter davantage un patient sur sa capacité financière à se payer des soins, lui qui a bien assez de s'inquiéter de sa santé?» Rien n'est plus vrai, rien n'est plus vrai que ça, pourquoi inquiéter quelqu'un sur sa capacité financière de se payer des soins, lui qui a bien assez de s'inquiéter de sa santé? «La normalisation des frais accessoires est inadmissible parce que la qualité de vie des aînés est déjà dans la marge de crédit!» Alors, imaginez si, en plus de leur carte d'assurance maladie, ils doivent se présenter au cabinet du médecin avec leur carte de crédit, ce n'est pas une perspective bien, bien, bien joyeuse.

J'ai un cas ici. Viviane Freedman a 70 ans. Il y a deux ans, elle s'est présentée à l'Hôpital général juif pour subir une coloscopie. Elle a été placée sur une très longue liste d'attente, son rendez-vous est prévu pour 2018. Le gastroentérologue a cependant fait savoir que, si elle paie 500 $, elle pourra avoir sa coloscopie dans sa clinique, en dehors de l'hôpital, dans les jours qui suivent. Elle n'a pas beaucoup d'argent, elle a refusé. C'est dur pour les aînés, raconte madame, là. C'est dur pour les aînés et dur pour les personnes qui vivent avec un petit revenu. Le ministre s'en rend-il compte? Le ministre s'en rend-il compte, M. le Président?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, j'ai beaucoup élaboré sur la situation actuelle et, évidemment, je ne pense pas que la commission parlementaire soit le lieu de traiter de cas particuliers, là.

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Richelieu.

M. Rochon : Bon. Alors, puisque la commission parlementaire est le lieu pour traiter de sous-amendements, j'ai un nouveau sous-amendement à proposer, M. le Président.

Le Président (M. Tanguay) : Alors, je vais suspendre nos travaux, le temps d'en faire des copies pour tous. Alors, nous suspendons quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 45)

(Reprise à 16 h 50)

Le Président (M. Tanguay) : Alors, nous sommes de retour, chers collègues. Nous avons reçu copie de la proposition de sous-amendement que nous lira à l'instant notre collègue de Richelieu. La parole est à vous.

M. Rochon : Sachant très bien que l'exercice plaît au ministre. Alors, le sous-amendement vise à modifier l'amendement introduisant l'article 25.2, introduit par l'article 1 du projet de loi, par l'ajout, à la fin de l'amendement, de l'alinéa suivant :

«Un reçu doit être produit pour chaque frais facturé et transmis par les médecins à la Régie de l'assurance maladie du Québec, qui déduit à chaque année les montants de l'enveloppe de rémunération des médecins selon qu'ils ont été facturés pas un médecin de famille, FMOQ, ou un spécialiste, FMSQ.»

Alors, cet amendement, M. le Président, il vise notamment à répondre à une préoccupation centrale du Protecteur du citoyen à l'effet que la Régie de l'assurance maladie du Québec puisse posséder les pouvoirs requis pour exercer son devoir de contrôle. Alors, ce reçu produit pour chaque frais facturé et transmis par les médecins irait, croyons-nous, dans ce sens-là.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Barrette : Bon. M. le Président, je dois avouer que cette journée est très intéressante et amusante. Et je dois saluer toute l'énergie neuronale qui est développée et déployée devant nous pour nous permettre d'avoir plus de travaux, mais, M. le Président, je tiens à soumettre ici l'irrecevabilité de ce sous-amendement-là sur la base de l'argumentaire suivant. Non, je vois nos collègues de l'opposition me faire signe que non, non, non, mais je vais leur expliquer. Alors, voici.

M. le Président, il est bien connu — et j'imagine aussi par nos collègues de l'opposition — qu'on ne peut pas faire indirectement ce qu'il n'a pas été permis de faire directement. Or, nous avons eu un débat sur l'amendement 25.2 déposé par la députée de Taillon qui nous demandait, qui nous proposait d'interdire tout frais accessoire. Bon, la finalité de l'amendement était de faire en sorte que le patient ne se voit pas facturer la chose. C'était ça, la finalité, là. Alors, là, ici, dans tous les cas de figure, là, ce que ça fait, c'est la même chose. On dit : O.K. Là, à la fin, non seulement il n'y en aura pas... c'est-à-dire, à la fin, il y en aura, mais il n'y en aura pas parce que le médecin, lui, va se voir coupé par un règlement. Ce n'est pas compliqué, là, dans 25.2, M. le Président, l'amendement demandait au gouvernement de ne pas permettre le frais accessoire. Là, on arrive avec un amendement qui dit : Bien, voici, là, on va le permettre, mais on va obliger le médecin à envoyer le montant du frais facturé à la RAMQ, qui, elle, la régie, va amputer la rémunération du médecin du même montant, ce qui, évidemment, aura comme conséquence, de la part du médecin, de ne pas le facturer au patient parce que, les gens étant normalement sains d'esprit, ne vont pas facturer une chose qui va leur être enlevée. C'est une perte de temps, là, alors ça devient ridicule.

Alors, clairement, M. le Président, on essaie de faire indirectement ce qu'on a voulu faire directement et qu'on a battu à 25.2. Alors, M. le Président, je vous soumets que cet article-là, sur la base de vouloir faire indirectement ce qu'on a débattu et battu directement... je vous soumets que cet article-là est irrecevable dans l'esprit de l'amendement qui est déposé.

Le Président (M. Tanguay) : Merci. Sur l'irrecevabilité ou la recevabilité, sur cette question, y a-t-il des interventions? Collègue de Richelieu.

M. Rochon : M. le Président, je reviens, là, à l'amendement du ministre, hein? «Malgré les interdictions énoncées aux neuvième et onzième alinéas, le gouvernement peut, par règlement, prescrire des cas et des conditions dans lesquels un paiement est autorisé.» Notre sous-amendement vient introduire un mécanisme, hein, une mécanique, hein, un exercice de contrôle que nous dit que nous devrions avoir le Protecteur du citoyen. Alors, après avoir dit : «Malgré les interdictions énoncées aux neuvième et onzième alinéas, le gouvernement peut, par règlement, prescrire des cas et des conditions dans lesquels un paiement est autorisé», le sous-amendement dit : «Un reçu doit être produit pour chaque frais facturé et transmis par les médecins à la Régie de l'assurance maladie du Québec, qui déduit à chaque année les montants de l'enveloppe de rémunération des médecins selon qu'ils ont été facturés par un médecin de famille ou un spécialiste.» Je ne vois pas en quoi ce sous-amendement pourrait être irrecevable, il n'est pas contraire à l'esprit et au principe de l'amendement du ministre. En quoi est-il contraire à l'esprit et au principe de l'amendement du ministre? Il ne vient qu'introduire une mécanique, un contrôle.

Le Président (M. Tanguay) : On va juste faire un tour de table. Après, on ira aux remarques finales. Y a-t-il d'autres collègues représentant un autre groupe parlementaire désirant prendre la parole? Non. Alors, y a-t-il...

M. Barrette : ...remarques finales, M. le Président?

Le Président (M. Tanguay) : Oui.

M. Barrette : Alors, encore une fois, ici — et là, à un moment donné, M. le Président, c'est une question de gros bon sens, là — ce n'est pas une mécanique de contrôle que l'on fait ici, M. le Président. Quand on contrôle, on contrôle pour voir si des choses permises ont été faites correctement. Or, ici, la finalité est de créer une situation qui va rendre totalement inutile l'exercice de la facturation du frais accessoire. Imaginons ça deux minutes, M. le Président, là — et c'est vraiment l'essence de la nature de faire indirectement ce qu'on n'a pas pu faire directement — on va dire à des médecins, là : Allez-y, facturez aux patients, et on va créer une bureaucratie pour vous couper après. Ça ne tient pas la route, là, c'est une évidence, c'est un non-sens. Écoutez, là, M. le Président, là, ça ne tient pas la route d'aucune... Donc, on arrive avec l'effet ultime, qui est 25.2 initialement déposé, qui a été battu, débattu et battu.

Alors, cet amendement-là, ce n'est pas un amendement de contrôle, de vérifier si des choses ont été faites correctement, c'est une évidence, là. Alors là, à la limite, quand on le regarde comme il faut, là, ce n'est pas fort, là, M. le Président, là, on dit... Non, ce n'est pas fort, on dit à des gens, là : Facturez-le et, après ça, envoyez-nous le reçu. Ça, je me mets dans la position de la RAMQ, là, facturez-le, envoyez-nous le reçu pour qu'on puisse vous couper du même montant. Je veux le dire à la caméra, M. le Président. M. le Président, on demande... Mesdames et messieurs, on demande à mettre dans un texte de loi la chose suivante, là, c'est comme aller dans un magasin, là, et sortir du magasin... Je vous donne le produit, là, puis, quand vous allez sortir, là, on va vous l'enlever. Allez-vous aller au magasin? Là, je viens de faire la technique d'une de nos collègues, là. Parler à la caméra, c'est toujours amusant. Alors, c'est quand même extraordinaire, là, on nous propose de demander à des médecins de facturer quelque chose et de se faire couper automatiquement par après.

Là, ça devient une question de quotient intellectuel, là. Moi, je peux vous assurer que la majorité des...

Une voix : ...

M. Barrette : Non, je parle des médecins, là. Je peux vous assurer que les médecins ont un quotient intellectuel suffisamment grand pour ne pas perdre de temps à faire cette manoeuvre-là, qui, donc, ultimement, va amener une nouvelle situation qui fera qu'il n'y aura pas de frais accessoires de facturés. Donc, on fait indirectement ce qu'on a voulu faire directement, qu'on a battu à 25.2 tel que déposé par la députée de Taillon. M. le Président, je vais vous laisser délibérer sur ce profond concept.

Le Président (M. Tanguay) : Oui. Alors, en remarques finales, collègue de Rosemont.

M. Lisée : Oui. Bien, écoutez, que le ministre soit en désaccord avec notre sous-amendement, nous en débattrons tout à l'heure. Mais, sur la question de la recevabilité, ce que dit l'amendement du ministre, c'est «prescrire des cas et des conditions dans lesquels un paiement est autorisé». Ce que notre sous-amendement fait, c'est établir une condition, tout simplement. On peut être en désaccord ou en accord avec cette condition, mais on est vraiment dans la logique du texte du ministre en disant : En voulez-vous, une condition? On va vous en mettre une.

Ensuite, sur le fond, nous savons que certains médecins chargent des frais particuliers, et certains médecins, dans des situations identiques, n'en chargent pas, ils n'en chargent pas. Alors, oui, la condition que nous voulons établir avec le sous-amendement de mon collègue de Richelieu, c'est d'inciter ceux qui en chargent à faire comme ceux qui n'en chargent pas, et ils prendront leur décision. On en débattra sur le sous-amendement, mais, sur la question de la recevabilité, bien, nous dire «prescrire des cas et des conditions», bien, voilà une condition que nous voulons prescrire et débattre avec la commission.

M. Barrette : M. le Président, je peux vous apporter un argument supplémentaire, qui sera le dernier, parce que...

Le Président (M. Tanguay) : Les plaidoiries sont faites, M. le ministre.

M. Barrette : Le dernier.

Le Président (M. Tanguay) : Non, non, non, les plaidoiries sont faites, puis j'ai tout en main.

J'ai tout en main, M. le ministre, pour statuer, alors nous allons suspendre quelques instants, chers collègues.

(Suspension de la séance à 17 heures)

(Reprise à 17 h 12)

Le Président (M. Tanguay) : Alors, nous sommes de retour, chers collègues. J'ai, évidemment, entendu les plaidoiries — je vais appeler ça les plaidoiries — des collègues sur la recevabilité du sous-amendement du collègue de Richelieu. Évidemment, ici, nous sommes toujours dans les cas de recevabilité des articles 197 et 200, et j'ai eu l'occasion, durant les quelques minutes de suspension, d'aller relire... Parce que je dois vous dire que, depuis une semaine et demie, deux semaines, ce sont des décisions que j'ai toutes lues au moins trois, quatre fois, si bien qu'en vous entendant de part et d'autre surgissent à ma mémoire et à ma compréhension de notre règlement de l'Assemblée nationale et de la jurisprudence qui nous guident... surgissent des exemples d'application qui soutiennent tantôt la positon, donc, d'un collègue et tantôt la position d'un autre collègue. Dans ces cas-là, ce qui est important, évidemment, c'est de se rattacher aux principes, mais d'y aller avec des cas de figure qui nous permettent d'étayer est-ce que, dans ce cas-ci qui est devant nous... Puis le président n'a pas à aller au fond des choses, n'a pas à interpréter de façon indue, il doit interpréter minimalement, évidemment. Il doit reconnaître les principes et les intentions du législateur, il doit le faire minimalement — et c'est ce que je fais — sans, évidemment, me substituer à vous, chers collègues, qui faites le débat parlementaire.

Alors, en ce sens-là, il m'est revenu à la mémoire, et c'est ce que j'applique en l'instance... Et je vous réfère, évidemment, à notre recueil des décisions en commission du 16 septembre 2014, une décision rendue en vertu de l'article 200 — qui traite des sous-amendements — tiret ou slash 8, où l'on précisait... Et je vous invite à aller lire le cas d'espèce, qui, selon moi — et je vous dirai uniquement cela — se distingue par sa pertinence et trouve application ici davantage que notamment — si d'autres personnes voulaient m'y référer — une décision qui avait été rendue le 2 décembre 2003, la référence 200/4. 200/4 du 2 décembre 2003 n'a pas trouvé application ici comme trouve application ici 200/8 du 15 février 2012, et, en ce sens-là, qui nous précise — et j'ai un cas de figure qui trouve application : «L'objet d'un sous-amendement étant de modifier l'amendement, il ne devrait pas en élargir la portée...»

Ici, force est de constater qu'en ajoutant, évidemment, un paragraphe à la fin et en introduisant un système de reçus et de déductions à chaque année, on fait plus... Vous pourrez me dire : Oui, c'est débattable. C'est toujours débattable, c'est pour ça que l'on doit rendre des décisions. On fait plus que préciser une modalité, mais on en élargit la portée, on introduit donc un système par ce paragraphe-là, «système» étant, évidemment, utilisé ici de façon tout à fait positive et louable. Alors, chers collègues, je déclare donc le sous-amendement irrecevable en vertu de ces motifs.

Donc, l'objet de notre débat redevient 25.2, l'amendement. Y a-t-il des interventions? Collègue de Richelieu, la parole est à vous.

M. Rochon : M. le Président, commençant à y prendre goût, j'ai un sous-amendement à vous soumettre. Alors, il consiste à modifier l'amendement à l'article 25.2, introduit...

Une voix : ...faire des copies...

M. Rochon : Vous préférez que nous fassions des copies avant que je fasse lecture?

Le Président (M. Tanguay) : Oui. Puis, si on peut, pour les prochains... Je ne veux pas présumer, mais, pour les prochains aussi, on pourrait peut-être avoir des photocopies.

Alors, je suspends, le temps de faire les copies. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 16)

(Reprise à 17 h 20)

Le Président (M. Tanguay) : Alors, nous sommes de retour, chers collègues. Nous avons devant nous, donc reçu copies d'un sous-amendement déposé par le collègue de Richelieu. Pour en faire la lecture, la parole est à vous, collègue de Richelieu.

M. Rochon : Merci, M. le Président. Alors, il s'agit de modifier l'amendement à l'article 25.2, introduit par l'article 1 du projet de loi, par l'ajout, après le quatrième alinéa, des mots suivants :

«Ce règlement doit, avant son entrée en vigueur, être soumis pour étude aux membres de la commission parlementaire de la santé et des services sociaux.»

Nous avons été très inspirés, M. le Président, par le Protecteur du citoyen, qui dit, à la page 73 de son rapport sur les frais accessoires, là : «...parce qu'elle concerne l'ensemble de la population et parce qu'elle a une portée réelle dans la vie de chacun, la réflexion sur les frais accessoires du ministre de la Santé et des Services sociaux doit se faire en toute transparence et avec ouverture. Cette réflexion ne saurait progresser selon des mécanismes de huis clos, en ignorant l'intérêt public dans son sens le plus large.»

Alors, voilà, ce sous-amendement nous invite à ce que le règlement dont il est question dans l'amendement du ministre soit soumis pour étude en public aux membres de la commission parlementaire de la santé et des services sociaux.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Barrette : Bien, M. le Président, évidemment, ici, je rappellerais au député de Richelieu et à tous les collègues qui le savent déjà, eux aussi, que des règlements, ça ne s'étudie en commission parlementaire que dans des circonstances extrêmement exceptionnelles, ce qui n'est pas le cas ici. Et ça viendrait alourdir, évidemment, un processus qui doit être simplifié, c'est pour ça qu'il y a des lois et des règlements.

Je rappellerai, évidemment, à nos collègues qu'il y aura publication du règlement. Et je rappellerai également que je me suis clairement exprimé au sujet de la détermination de tels frais comme devant être le prix coûtant, plus une marge qui comprend l'entreposage, le marché, et ainsi de suite. Et ça, ça doit être fait par une tierce partie, une tierce partie qui a la capacité comptable d'évaluer ce genre de coûts là, tout comme on fait affaire avec des tierces parties dans d'autres domaines.

Alors, je vois difficilement comment il y a une plus-value ici, là, d'aller en commission parlementaire, d'une part. Et, d'autre part, je serais surpris de voir la valeur ajoutée de nos interventions, puisque c'est une tierce partie, dans mon esprit, qui doit déterminer ça. À moins qu'on ne fasse pas confiance à une tierce partie, ce qui ne me surprendrait pas. On comptait souvent ici, de l'autre côté, le Vérificateur général, mais je pense, donc, qu'il n'y a pas lieu, là, d'aller dans cette direction-là.

Vous avez remarqué que je n'ai pas contesté la recevabilité du sous-amendement, mais je ne crois pas qu'il soit pertinent.

Le Président (M. Tanguay) : Merci. Donc, sur le même échange, je vais permettre au collègue de Richelieu d'intervenir. Et, par la suite, le collègue de Lévis voudra prendre la parole. Alors, collègue de Richelieu.

M. Rochon : J'allais précisément dire : Je n'ai pas entendu le ministre contester la recevabilité du sous-amendement. Alors, effectivement, il ne la conteste pas. C'est bien, nous pourrons donc en discuter.

Il dit qu'il ne veut pas alourdir le processus. Je ne crois pas que la transparence puisse être perçue comme un alourdissement du processus. Il me semble que la transparence, en 2015, c'est même un passage obligé, une condition essentielle d'une bonne gouvernance, hein?

Une voix : ...

M. Rochon : Oui? Ah oui? On me dit que c'était même dans le discours d'ouverture du collègue premier ministre, là. Alors, pour ces raisons de transparence et l'article 73, que je citais tout à l'heure, de la Protectrice du citoyen, qui nous disait, et je le répète : «...parce qu'elle concerne l'ensemble de la population et parce qu'elle a une portée réelle dans la vie de chacun, la réflexion sur les frais accessoires du ministre de la Santé et des Services sociaux doit se faire en toute transparence et avec ouverture. Cette réflexion ne saurait progresser selon des mécanismes de huis clos, en ignorant l'intérêt public dans son sens le plus large», je plaide, M. le Président, que, comme le soumet notre sous-amendement, ce règlement sur les frais accessoires, là, doit être soumis avant son entrée en vigueur aux membres de cette commission parlementaire, et je suis certain que des collègues voudront faire du millage sur cette suggestion.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, le public qui nous écoute et qui nous suit, pour ce qui est de la lourdeur d'une commission parlementaire, je pense qu'il voit bien, de la façon dont nous conduisons nos travaux, qu'il y a une lourdeur réelle. Et nous sommes aujourd'hui transparents, puis on n'est pas dans un huis clos.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Je cède la parole au collègue de Lévis.

M. Paradis (Lévis) : M. le Président, merci. Le ministre dit, M. le Président : Bien, il n'y a pas de nature là exceptionnelle faisant en sorte que j'ai l'impression que ça puisse servir le débat ou l'avancement de nos travaux. Bien, je m'inscris en faux, M. le Président, je pense qu'au contraire c'est exceptionnel, ce qui se passe, là, là. On est dans quelque chose de majeur. Est-ce qu'il faut rappeler qu'il y a des avis qui émanent de toutes parts pour faire en sorte qu'on puisse prendre des décisions justes pour s'occuper des frais accessoires? Le ministre en fait également son cheval de bataille, puis a sa vision des choses, correct, à la même enseigne qu'on demandait puis qu'on aurait espéré que des gens puissent venir ici nous expliquer comment ils voyaient la situation puis quelle solution ils pouvaient apporter.

Puis rappelons également que le ministre a acquiescé à une demande — ça viendra plus tard — de faire en sorte qu'on puisse avoir un six heures d'étude du règlement pour tout règlement de l'article 1 à 22. Parce qu'il y avait des choses qu'on ne comprenait pas, puis il y avait des choses qu'on devait comprendre, puis il y a des choses que les gens doivent comprendre également, puis le ministre a dit : Regardez, je vous le donne, on va faire six heures là-dessus, puis vous allez être en mesure... On l'arrête dans le temps, c'est six heures. On ne dit pas : On va faire six mois là-dessus, on va faire six heures, mais vous aurez des réponses à vos questions, puis je pense qu'il y a un souci de transparence important parce que ça implique également le quotidien des patients et des patientes du Québec.

Quand le ministre se réserve le droit, par exemple, de décider quels seront les frais accessoires qui seront maintenus, bien, je pense que c'est important de savoir vers où on va puis de quoi on parle. Et, en ce sens-là, bien, oui, c'est un outil de transparence, puis, oui, c'est un outil d'information, oui, c'est un outil de compréhension, puis, oui, ça conforte une décision qui sera prise. Et moi, j'abonde dans le même sens, et je me dis : Pourquoi pas? Limitons dans le temps ce qu'il faut faire. On l'a déjà fait, on a déjà obtenu un gain à ce chapitre-là au nom de ceux et celles, pour ceux et celles qui nous écoutent et nous regardent, qui peuvent juger, par exemple, du fait que ça puisse être long de juger de l'emplacement d'un mot ou d'une virgule dans une phrase. Je comprends que c'est pesant. C'est la façon de faire, puis souvent on a l'impression qu'on aimerait être plus efficaces que ça. Mais, au-delà de ça, dans une règle comme celle-là, ce n'est que de comprendre vers où on s'en va.

Alors, le ministre a, bien sûr, la liberté d'aboutir parce qu'il y a une logique mathématique dans l'exercice qu'on fait ici aujourd'hui, mais il reste que je pense qu'au bénéfice... pour le bénéfice des gens qui nous regardent et nous écoutent, un moment requis pour que soit présenté dans la commission ce règlement, à ce chapitre-là, je pense que ça prend tout son sens et ça fait logique également. Alors, je demande, M. le Président, au ministre de s'ouvrir, comme il l'a fait pour la présentation qu'il nous a déjà accordée, dans ce même esprit, de faire la même chose en ce qui concerne le règlement pour les frais accessoires.

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, brièvement, on parle ici d'un règlement qui va dire : Tel service, tel coût. Comme tout règlement, ça sera publié pour commentaires pendant 45 jours, et là on va être à l'affût de tout commentaire qui nous dirait que ce n'est pas le bon coût pour l'élément visé. Ça ne demande pas une commission parlementaire pour ça, là.

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Richelieu.

M. Rochon : Oui. En complément de ce que disait mon collègue de Lévis, c'est le 16 septembre que le ministre se montrait ouvert à un règlement qu'allait pouvoir étudier la commission compétente de l'Assemblée nationale avant son adoption par le gouvernement. On parlait — il en a fait état, le député de Lévis — d'une durée maximale de six heures d'étude par la commission. Pourquoi n'aurait-il pas la même ouverture aujourd'hui que celle qu'il a démontrée le 16 septembre sur un sujet dont il peut constater, comme moi et l'ensemble des parlementaires ici, qu'il suscite énormément d'intérêt?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : Tel service, tel coût, le coût devant être le coûtant à la base. Ça ne demande pas une commission parlementaire, ça demande des avis, un appel d'avis à la population, et c'est à ça que ça sert une prépublication, 45 jours pour dire : Ce n'est pas le bon coût. Pas besoin d'une commission parlementaire.

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Rosemont.

• (17 h 30) •

M. Lisée : Merci, M. le Président. La Protectrice du citoyen, que vient de citer mon collègue de Richelieu, dit clairement que cette question est tellement importante, la gratuité des services médicalement assurés, pour laquelle le ministre dit : Je vais faire des exceptions à cette gratuité, il y a plein de gens qui disent : Il ne devrait pas. Puis il y a des gens qui disent qu'il n'a même pas le droit. Puis, même s'il avait le droit, ce n'est pas ce qu'on pense faire, ce n'est pas la façon dont on a conçu un système universel et gratuit pour tout ce qui est assuré. Il y a des choses qui ne sont pas assurées, qui coûtent cher, et là-dessus, d'ailleurs, on a du travail à faire. Mais, pour ce qui est assuré, ça devrait être gratuit.

Le ministre dit : Ça va être gratuit, sauf les fois où je vais décider que ce n'est pas gratuit. Puis faites-moi confiance, je vais nommer une tierce partie — qu'il va nommer lui-même, et la tierce partie va décider — puis je vais prépublier, puis là, si vous m'envoyez des lettres, je vais vous lire, puis c'est tout. Bien, non, nous, on dit que, compte tenu de l'aspect fondamental de cet enjeu dans la conception que nous avons du système de santé, chaque fois que le ministre va vouloir s'écarter de la gratuité, la commission parlementaire devrait se réunir pour voir quels sont les arguments du ministre.

Et il y a une chose qu'on va vouloir regarder aussi, c'est la marge qu'il voudra laisser aux médecins au-delà du prix coûtant parce que la protectrice, en page 10, elle dit : «Que le ministre de la Santé propose aux fédérations médicales, à la suite de l'évaluation de la régie[...], un régime de compensation selon les coûts réels des frais de fonctionnement», mais seulement pour les frais non assurés. Alors, elle dit : Pour les frais non assurés, j'accepte que la régie fasse une évaluation au coût réel. Elle ne parle pas de marge. Alors, on sait que ce n'est pas le premier ministre libéral de la Santé qui veut donner des marges à des médecins. On a retrouvé une citation d'Yves Bolduc qui disait qu'il s'était assuré pendant un certain temps que les cliniques privées de reproduction assistée fassent, je cite, «un bénéfice raisonnable de 15 %». Ça, c'est Yves Bolduc qui dit ça.

Alors là, je voudrais savoir est-ce que... On en a discuté la semaine dernière, il y a un tollé qui a été suscité sur ce sujet. D'ailleurs, un groupe de médecins qui a réuni dans le... groupe Médecins québécois pour le régime public écrit : «Les marges de profit potentiellement générées par les frais demandés aux patients peuvent encourager les médecins à prescrire des traitements, investigations ou bilans non pertinents pour le patient, mais payants pour la clinique. Ainsi, les "bilans de santé" vendus à fort prix jouent avec l'anxiété des patients en leur promettant de s'assurer qu'ils sont en bonne santé par une pléiade de tests peu pertinents, voire inutiles[...]. Dans certains cas, des trouvailles cliniquement non significatives entraîneront des investigations supplémentaires et parfois des traitements inutiles, pris en charge par le système public, alors que les tests initiaux auront été demandés dans un contexte de recherche de profit. Le jugement professionnel du médecin se trouve alors influencé par son intérêt pécuniaire.»

Alors, je demande au ministre aujourd'hui comme première question : Est-ce qu'il peut nous déclarer qu'il renonce à permettre une marge au-delà du prix coûtant, même s'il devait, malheureusement, permettre des frais accessoires?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, j'ai bien expliqué — et le député de Rosemont a choisi de l'oublier — le prix coûtant d'un médicament, par exemple, c'est le coûtant du médicament, mais il y a des éléments externes. Prenons un exemple simple, l'entreposage, la perte... Parce que, parfois, ces affaires-là se périment, ça introduit la nécessité de, par exemple, restériliser. Alors, le coûtant du produit lui-même, il est ce qu'il est, et il doit y avoir une marge pour faire face à des impondérables ou des obligations qui viennent avec le produit. C'est tout. Le député de Rosemont peut continuer à insister pour dire que c'est un profit, ce n'est pas le cas, c'est une marge qui prévoit ce genre de chose là, et il y a des impondérables, des intangibles là-dedans, et il faut y faire face, tout simplement.

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Rosemont.

M. Lisée : Bien, le ministre évolue parce qu'il y a quelques semaines, en juin, il parlait de profit, 10 % ou 15 %, la semaine dernière il parlait d'une marge pour prévoir des augmentations dans le prix coûtant, et aujourd'hui il nous parle d'entreposage. Moi, j'applaudis l'évolution du ministre, ça nous rend plus optimistes pour la suite parce que, si la personne qui fait l'évaluation dit : Bien, le prix coûtant, c'est aussi le prix normal d'entreposage et de restérilisation, bien là on s'approche du prix coûtant, on n'est plus dans la marge de 10 % à 15 % dont il parlait avant. Alors, si c'est ça, c'est toujours inacceptable de faire un frais particulier, mais, en tout cas, le jour où, comme nous le voulons, que ce soit calculé à l'intérieur de la rémunération des médecins, on aura un juste prix, bien, il ne faut pas qu'il y ait de marge de profit ou de marge pour impondérables, il faut que ce soit relié à l'évaluation juste du coût.

Alors, je pose la question : Pourquoi est-ce que le ministre tient à ce que ça soit un tiers externe qui le désignera, et pas, comme le propose la Protectrice du citoyen pour les frais non assurés, que ça relève de la Régie de l'assurance maladie, qui est notre agence spécialisée dans ce genre de choses?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : Parce que l'assurance maladie elle-même n'a pas la compétence, et elle-même ferait affaire avec une tierce partie par définition.

M. Lisée : Est-ce que, dans un contexte où on se lamente constamment de la perte d'expertise au sein de l'État par rapport au privé, ce ne serait pas une bonne occasion de créer cette expertise à l'intérieur de la Régie de l'assurance maladie qui fait en sorte de calculer tout le reste de ce qu'on fait dans ce domaine?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, on parle ici d'éléments ponctuels dans l'histoire du Québec. Et je ne suis pas surpris que le Parti québécois veuille augmenter la bureaucratie, mais nous croyons que nous devons gérer de façon efficace, et ça inclut, ponctuellement, de faire affaire avec des gens qui ont une compétence, ponctuellement parlant.

M. Lisée : Donc, le ministre nous dit qu'une fois pour toutes il va faire cette évaluation maintenant et qu'on n'aura pas besoin, dans six mois, dans 12 mois, dans 18 mois, dans 24 mois, compte tenu de l'évolution de la technologie médicale, des cliniques et des demandes des médecins, de faire une évaluation continue de l'évolution de ces...

M. Barrette : Ce n'est pas ce que j'ai dit, j'ai dit que ce n'était pas nécessaire d'avoir une nouvelle bureaucratie. Je pense que le public est d'accord avec ça.

M. Lisée : Donc, ça signifie qu'on va payer... Si on prenait des fonctionnaires de la Régie de l'assurance maladie qui sont formés à faire ça, on les paierait un prix x, il n'y aurait pas besoin d'avoir 12 % de profit, qui est à peu près la marge de profit que le privé demande. Mais le ministre nous annonce qu'à partir de maintenant et pour l'éternité on va prendre un consultant externe dont le salaire des salariés professionnels doit être beaucoup plus élevé que celui des salariés du gouvernement du Québec — on le sait, les salariés du gouvernement du Québec sont moins payés que ceux du secteur privé à qualifications égales — et qu'en plus on va donner 12 % de profit — entre 10 % et 15 %, ça tombe bien — à des gens du privé pour l'éternité. Bon, je m'en tiens là, j'ai eu ma réponse.

Je reviens à une déclaration qu'a faite le ministre au début de notre séance. Il a dit qu'il était d'accord avec l'excellent rapport de la Protectrice du citoyen. Alors, je voudrais quand même le tester. En particulier, par exemple, paragraphe 65°, la protectrice écrit : «L'éradication des frais accessoires pour les services assurés constitue la première solution à implanter...» D'accord ou pas d'accord?

M. Barrette : M. le Président, je l'ai dit, je ne suis pas ici pour débattre de la vision de Mme la Protectrice du citoyen, je prends acte de ses commentaires. Je souscris à la quasi-totalité de ses commentaires, sauf un. Alors là, je le répète, les abus seront éliminés, les frais illégaux seront éradiqués, mais on doit quand même gérer l'État correctement.

M. Lisée : Donc, il est d'accord avec ce que dit la protectrice, sauf lorsqu'elle dit que la première solution à implanter, c'est l'éradication des frais accessoires. C'est comme de dire qu'il va interdire les frais accessoires, sauf toutes les fois où il va les permettre.

M. Barrette : M. le Président, question de pertinence, là, on n'est pas sur le sous-amendement, là, on est sur le rapport de la Protectrice du citoyen.

Le Président (M. Tanguay) : Oui, effectivement. J'invite les collègues à se rapporter à l'objet du débat, qui est le sous-amendement du collègue de Richelieu et qui se lit comme suit : «Ce règlement doit, avant son entrée en vigueur, être soumis pour étude aux membres de la commission parlementaire de la santé et des services sociaux.» Fin du sous-amendement.

Alors, on peut être d'accord ou en accord. Oui, la pertinence doit être interprétée de façon large et libérale, mais la pertinence, évidemment, demeure en vertu de l'article 211, un article de notre code. Alors, je vous invite à peut-être recentrer vos commentaires. Je vous remercie pour votre collaboration.

• (17 h 40) •

M. Lisée : Merci, M. le Président. La raison pour laquelle il est si important de revenir en commission parlementaire pour discuter de chaque fois que le ministre va vouloir déroger au principe fondamental de gratuité, c'est parce qu'il y a des risques majeurs. Par exemple, la Protectrice du citoyen parle de ces risques majeurs à chaque fois qu'on va déroger dans un règlement, ce pourquoi nous voulons en discuter. Elle dit : «Cette façon de faire risque de contribuer à l'émergence d'un système à deux vitesses : une voie rapide en clinique pour ceux qui ont les moyens de payer et une voie lente menant à l'hôpital pour les autres.»

La semaine dernière, j'ai posé cette question au ministre en demandant, selon lui, est-ce que ça va être à deux vitesses. Il a dit : Non, non, non, pas nécessairement. Puis je lui ai demandé : Mais «pas nécessairement», ça veut dire quoi? Puis, à la fin, il a dit : Bien non, ça ne sera pas à deux vitesses s'il y en a qui paient le frais puis s'il y en a qui sont renvoyés à l'hôpital.

Or, j'ai trouvé une citation de lui lorsqu'il était président de la Fédération des médecins spécialistes et lorsque Réjean Hébert avait proposé de réduire, sinon d'éliminer, il y a des citations où il dit éliminer...où le ministre actuel, alors président, dit : «[Le ministre péquiste] veut fermer la porte aux actes en clinique pour les retourner à l'hôpital[...]. Au bout du compte, c'est le patient qui est pris en otage. On lui dit : Retourne sur une liste d'attente, à l'hôpital.» Alors, ces règlements qu'il va nous proposer, dont on pense qu'ils vont créer un régime de santé à deux vitesses, est-ce que c'est... est-ce qu'il avait raison lorsqu'il disait que c'est ce que ça allait créer, c'est-à-dire on prend le patient en otage, on lui dit : Retourne sur une liste d'attente à l'hôpital, donc c'est une santé plus lente?

M. Barrette : M. le Président, ce n'est pas du tout l'objet de l'amendement qu'on a déposé.

M. Lisée : C'est la raison, M. le Président, pour laquelle on veut discuter de ces règlements-là, à cause de l'effet qu'ils vont avoir sur la réalité du patient. C'est pourquoi lui, il ne veut pas qu'on discute du règlement. Je lui explique le genre de débat qu'on veut avoir lorsqu'on aura cette discussion sur les règlements. Bon, par exemple, je vais lui poser des questions sur la nature des règlements qu'il envisage pour qu'on puisse savoir si ça vaut la peine d'en discuter ici, M. le Président.

Bon, par exemple, on se rend compte que la protectrice nous dit : Il faut encadrer strictement les frais de fonctionnement des cabinets et des cliniques médicales, les frais non assurés et les frais désassurés parce que, là, on est encore dans le Far West. Est-ce qu'il entend, dans les règlements qu'il veut nous déposer, réglementer au prix coûtant les frais désassurés et les frais non assurés?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : L'amendement est très clair sur la portée de ce que nous voulons faire dans cet amendement-là.

M. Lisée : Donc, la réponse est non. La réponse est non, il n'a pas l'intention d'agir fermement pour encadrer correctement, pour le bien des patients, les frais générés pour les services non assurés et désassurés.

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, on est sur un amendement, et l'amendement est très clair. Alors, ici, on déborde, et je ne déborderai pas à la demande du député de Rosemont.

M. Lisée : Bien, écoutez, c'est parce qu'on veut savoir de quel type de règlement on va débattre lorsqu'on aura une commission parlementaire là-dessus, ce qui est hautement souhaitable, et il ne veut même pas nous dire si certains de ces règlements vont porter sur d'autres aspects qui découlent de l'excellent rapport, selon lui, de la Protectrice du citoyen.

Je vais lui poser une autre question. J'essaie de savoir des choses pour les patients parce qu'en ce moment il y a énormément de trous dans l'action du ministère et de la régie. Alors, comme vous le savez, «la régie doit rembourser les assurés qui ont été facturés indûment, ce qui n'est fait que sur demande de l'assuré, qui a jusqu'à un an pour demander dans ces cas le remboursement pour des frais facturés illégalement par un médecin. La RAMQ examine alors les demandes et rembourse les sommes qu'elle estime avoir été injustement facturées. Elle réclame ensuite la somme au médecin ou à la clinique[...]. Cependant, la RAMQ peut agir de manière plus incisive. [...]elle peut [...] porter plainte devant un conseil d'arbitrage et recouvrer les sommes injustement facturées par un médecin pendant les 36 derniers mois, [...]mener des enquêtes de son propre chef et [...] faire porter des plaintes pénales contre les professionnels de la santé qui ont facturé le patient pour des services assurés.»

Ça ne se passe jamais. Est-ce que le ministre a l'intention, dans ses règlements ou autrement, de faire en sorte que la RAMQ utilise ces pouvoirs de manière plus systématique ou est-ce qu'il entend renforcer ces pouvoirs?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, il est clairement écrit — et c'est évident — que le but de notre amendement est de faire ça.

M. Lisée : Le but de votre amendement est de faire ça. Donc dans les règlements que vous allez déposer, vous allez décliner la façon dont ça va se faire?

M. Barrette : Non. Il est clair, M. le Président, que le but de l'amendement est de faire en sorte que la RAMQ puisse exercer ses pouvoirs correctement parce que j'ai déjà dit dans le passé que la... Et la protectrice le dit dans son rapport, c'est très clair, la situation actuelle découle d'un flou dans les interprétations historiques de la loi, il n'y aura plus de flou, là.

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Rosemont.

M. Lisée : Alors, on constate que l'unité d'inspection de la RAMQ a fait un échantillonnage d'inspections non contraignantes et a constaté que 80 % des cliniques ne respectent pas les exigences de la loi en ce qui a trait à l'affichage des tarifs et à la forme des reçus ou des factures. Pourtant, aucune clinique ni aucun médecin ne s'est vu imposer de sanction pour facturation illégale au patient. Est-ce que le ministre entend corriger cette situation?

M. Barrette : M. le Président, j'ai répondu à la question. L'amendement a une fonction de clarification nette, donc la RAMQ pourra agir correctement et rapidement.

Le Président (M. Tanguay) : Député de Rosemont.

M. Lisée : Est-ce que le ministre considère que la RAMQ a, à l'heure actuelle, les pouvoirs nécessaires pour agir correctement ou veut-il élargir ses pouvoirs?

M. Barrette : La RAMQ a les pouvoirs, mais on va dire, son travail est malheureusement perturbé — on va le dire comme ça — par une interprétation floue de la loi.

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Rosemont.

M. Lisée : Si la loi est interprétée de façon floue, ne serait-il pas opportun de la clarifier soit par un amendement, soit par règlement?

M. Barrette : C'est exactement ce que nous faisons avec notre amendement.

M. Lisée : Avec l'amendement sur lequel nous discutons?

M. Barrette : Oui.

M. Lisée : Bien, j'aimerais qu'il me fasse une lecture commentée parce que je ne vois pas ça, il n'y a pas de référence aux pouvoirs de la RAMQ ou de clarification des dispositions législatives concernant la RAMQ dans l'amendement qui est déposé.

M. Barrette : Bien, j'ai déjà amplement commenté ce sujet-là, M. le Présidenté. Puis je vais le faire quand même pour satisfaire le député de Rosemont, la source du problème est une loi qui ne permet pas une application claire, il y a des zones grises. Je l'ai dit à plusieurs reprises, elle n'est plus grise, la zone, là. C'est clair, tout est interdit. Ce qui est permis, c'est A, B, C, D aux prix un, deux, trois, quatre. Je ne peux pas être plus clair que ça.

M. Lisée : Donc, pensez-vous que la solution réside dans la réglementation sur les frais qui seraient autorisés, et ainsi tout ce qui est autorisé serait autorisé, tout ce qui ne l'est pas ne l'est pas, et donc la régie pourrait sévir sur ceux qui vont au-delà du règlement?

M. Barrette : On peut le dire comme ça.

M. Lisée : C'est comme ça que vous voyez le renforcement des pouvoirs de la RAMQ?

M. Barrette : Les vertus de la clarté. C'est comme la clarté référendaire, ça.

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Rosemont.

M. Lisée : Pertinence. M. le Président, pertinence, s'il vous plaît.

Le Président (M. Tanguay) : Oui, pertinence, s'il vous plaît, là.

Des voix : Ha, ha, ha!

Le Président (M. Tanguay) : Alors, oui, collègue de Rosemont, la parole est à vous.

M. Lisée : Oui. Je rappellerai au ministre que les chefs successifs de son parti, MM. Ryan, Charest, Johnson, sont très clairement opposés à la loi de Stéphane Dion qui donne au Canada droit de veto sur l'avenir du Québec, et j'espère qu'il est d'accord avec eux.

Le règlement que le ministre va nous déposer va faire en sorte de permettre aux médecins de faire une facturation. Maintenant, il dit : Pourquoi? Bien, c'est parce qu'il me manque 50 millions, ça coûte 50 millions. Et la Protectrice du citoyen, en conclusion, dit — et ça, le ministre aime beaucoup ça : «Depuis trop longtemps, l'offre de services publique annoncée est, de loin, plus généreuse que les ressources disponibles.» Elle continue : «...un laxisme s'est installé puisqu'aucune mesure significative n'a été mise en place pour contrer ce phénomène...» Et ensuite elle en donne, et, dans un paragraphe suivant, à deux paragraphes d'avis, elle dit : «En ce sens, tout changement qui a pour but de légaliser une facturation directe aux usagers pour des frais accessoires — je vais le lire en entier — pour lesquels les médecins participant au régime public sont déjà rémunérés et pour certains services non couverts par le régime public constitue une avenue inéquitable.»

Alors, elle est d'accord avec le ministre pour dire que l'offre de services publique est, de loin, plus généreuse que les ressources, mais elle dit encore une fois : Une des pires choses à faire pour corriger la situation, c'est par règlement, dont nous allons débattre. Voulons-nous faire en sorte d'appliquer ça? Donc, même dans sa conclusion, la Protectrice du citoyen vous enjoint de ne pas utiliser cette voie. Elle nous en donne d'autres, elle dit : Écoutez, le ministre lui-même — dans la lettre qu'elle nous envoie aujourd'hui — a dit qu'il allait économiser 220 millions de dollars grâce à son projet de loi n° 10. Pourquoi ne pas prendre 50 de ces 220 millions pour éviter aux patients la facturation?

• (17 h 50) •

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : Bien, je suis content que le député de Rosemont expose sa propre incohérence. La Protectrice du citoyen dit que le panier de services excède les capacités financières. Nous faisons un redressement pour revenir à l'équilibre, et là le député de Rosemont voudrait, M. le Président, qu'on n'arrive pas à l'équilibre et qu'on prenne le quart des économies pour revenir en déséquilibre. Mais ça, c'est très, très propre au Parti québécois, je ne suis pas surpris.

M. Lisée : O.K. Donc, le 220 millions que le ministre affirme — et on en doute, mais, en tout cas, on prend toujours la parole de notre collègue — qu'il affirme pouvoir dégager de sa réforme de structure, ça ne peut pas aller dans la poche des patients ou des médecins, il donne le chèque au Conseil du trésor. C'est ça qu'il nous dit?

M. Barrette : M. le Président, encore une fois, le député de Rosemont nous expose son incompréhension surprenante de l'État. Lorsqu'on fait une — entre guillemets — économie, ce n'est pas pour envoyer un chèque au Trésor, c'est pour ne pas dépenser le montant d'argent à nouveau. Ce n'est pas la même chose.

M. Lisée : Donc, le Trésor va vous envoyer 220 millions de moins que la fois d'avant parce que vous avez fait cette économie.

M. Barrette : En fait, M. le Président, nous allons dépenser 220 millions de dollars de moins que le Parti québécois, qui faisait des déficits.

M. Lisée : O.K. Donc, les grands efforts qui sont demandés à tout le régime... Vous savez, le déficit zéro, c'est nous qui l'avons fait, hein?

M. Barrette : Non, non, vous avez fait des zéros avant...

M. Lisée : On a fait des déficits zéro.

M. Barrette : ...le chiffre qui parle du déficit, ce n'est pas la même chose.

Le Président (M. Tanguay) : Un à la fois. Un à la fois.

M. Lisée : Là, franchement, là, on ne va pas s'engager là-dedans parce que ça ne sera pas à l'avantage du Parti libéral. Alors, restons pertinents. Donc, on comprend que les efforts de 220 millions ne peuvent pas servir à ce que les patients ne paient pas 50 millions. Maintenant, il y a une chose que la protectrice nous dit qui est intéressante...

M. Barrette : Ah! on change de sujet.

M. Lisée : Non, non, mais on a conclu là-dessus. Vous savez, c'est intéressant parce que, contrairement aux autres conventions collectives, les ententes avec les médecins spécialistes sont constamment révisées, il y a une clause qui fait en sorte qu'elles peuvent constamment être révisées. La possibilité d'une négociation permanente par voie d'amendement aux ententes existantes, cette négociation permanente permet aux parties de s'entendre soit pour modifier un tarif, soit pour rajouter des frais accessoires qui n'étaient pas compris dans le tarif entendu. Qu'est-ce qui empêcherait le ministre, dans cette négociation permanente, de dire : Savez-vous, là, on a 50 millions à amortir dans votre rémunération globale, qui est de 4 milliards, et, comme on demande des efforts à tous les Québécois, c'est l'effort qu'on demande aux médecins spécialistes? Pourquoi ce n'est pas possible?

M. Barrette : M. le Président, sans doute la même chose qui fait que le Parti québécois, au pouvoir, ne l'a pas fait.

M. Lisée : Mais, puisque vous êtes tellement meilleur et que vous demandez...

M. Barrette : Merci. Merci. Merci.

M. Lisée : Dans votre esprit, M. le ministre, que vous abolissez les primes de nuit des infirmières, puisque...

M. Barrette : M. le Président.

M. Lisée : ...vous demandez 130 millions de dollars aux pharmaciens...

Le Président (M. Tanguay) : ...appel au règlement, M. le ministre?

M. Barrette : 35. Un, on me prête des intentions, qui est celle... Ce n'est même pas une intention, c'est une affirmation, j'abolis les primes. Alors, un, c'est une intention. Deux, c'est un propos qui est faux parce qu'on est en négociation.

Le Président (M. Tanguay) : Alors, faire attention, s'il vous plaît, à vos propos, chers collègues. J'en appelle à votre collaboration et je vous réitère, évidemment, l'objet du débat, qui est le sous-amendement du collègue de Richelieu sur la pertinence ou l'opportunité de tenir des auditions quant au règlement. Merci beaucoup.

M. Lisée : Très bien. Bien, je suis très heureux, puis on va transmettre aux infirmières, qui savent que la demande patronale du gouvernement du Québec, c'est l'abolition des primes. Le ministre de la Santé, de toute évidence, n'est pas d'accord avec cette demande-là. Je le salue pour ça. Et il refuse de dire que c'est son intention, mais c'est quand même son gouvernement. Mais je lui demande... En juin 2013, il n'était pas présent, mais il y a une résolution qui a été votée par tous les membres de l'Assemblée nationale, y compris certains collègues qui sont ici, donc tous les membres du Parti libéral présents, et qui disait : «Que l'Assemblée nationale presse le ministre de la Santé et des Services sociaux de mettre fin à la pratique des frais accessoires...» Et nous, on l'a votée. Puis on s'apprêtait à le faire, on a été défaits. Et nous, on continue à être cohérents avec ce qu'on a dit. Alors, pourquoi est-ce que le ministre se met en porte-à-faux avec une résolution de l'Assemblée nationale qui a été votée par tous ses collègues libéraux?

M. Barrette : Bien, sans aucun doute pour la même raison que le Parti québécois, M. le Président, là, qui est la formation que représente le député de Rosemont, a mis dans son programme électoral non pas l'abolition des frais accessoires, mais bien son encadrement. Alors, le député de Rosemont suggère que je serais incohérent, mais il me semble que je suis dans le même club que le député de Rosemont sur ce point-là.

M. Lisée : Bien, non, justement, parce que, s'il est vrai que le programme n'était pas aussi ambitieux que ce que nous sommes maintenant, maintenant nous sommes cohérents avec cette décision de l'Assemblée nationale. Alors, pourquoi est-ce que lui ne se rend pas à la position de la CAQ, que je salue pour sa position d'aujourd'hui, à la position du Parti québécois et à la position de ses propres collègues libéraux qui ont voté en juin 2013 cette résolution?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, les collègues du député de Rosemont ont voté unanimement, semble-t-il, pour une résolution qu'ils ont eux-mêmes, en mars 2014, renversée, et là il voudrait nous faire la leçon sur la cohérence? Bien, demain matin, quand il va se raser, je l'invite à avoir une discussion avec lui-même dans le miroir pour s'auto-expliquer comment qu'on peut passer d'une position, son contraire et, là, subitement, là, à une autre position. Non, mais ça, c'est très intéressant quand même, là.

Le Président (M. Tanguay) : Collègue de Rosemont.

M. Lisée : Mais le ministre ne répond pas à ma question. Alors, il peut bien dénoncer l'incohérence chez les autres, mais je lui demande, à lui, là, qui est ministre de la Santé : Son parti a voté cette résolution en juin 2013, pourquoi, aujourd'hui, dit-il que tous ses collègues avaient tort?

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, je suis en synchronisme total avec le Parti québécois de 2014.

M. Lisée : Le ministre de la Santé n'est pas invité à être membre du Parti québécois, mais il est membre du Parti libéral. Bon, il a été membre de la CAQ aussi, mais ça suffit, là. Et il peut toujours aller à QS s'il le désire. Les libéraux provinciaux, y compris le ministre de la Santé de... l'ancien ministre de la Santé, Yves Bolduc, qui était là, ont voté pour l'abolition des frais accessoires en juin 2013. Pourquoi avaient-ils tort?

M. Barrette : Pour amuser la galerie ainsi que le député de Rosemont, je lui rappellerai que la leader adjointe d'aujourd'hui, le leader d'aujourd'hui et l'ex-chef du Parti québécois m'ont invité à faire partie du Parti québécois formellement, et j'ai dit non.

M. Lisée : Bien, j'en suis ravi, M. le Président, j'en suis ravi...

Des voix : ...

M. Lisée : Il n'en reste pas moins que les membres du Parti libéral ont voté pour l'abolition des frais accessoires, que le ministre est en porte-à-faux avec son propre parti et que, comme je l'ai dit la semaine dernière, j'ai espoir que les membres du caucus et du Conseil des ministres du Parti libéral vont faire comprendre au ministre qu'il est politiquement non seulement inopportun et probablement illégal, mais, en plus, suicidaire de proposer de donner 50 millions aux médecins spécialistes au moment où le gouvernement mène une politique d'austérité condamnable et au moment où le ministre de l'Éducation dit qu'il serait maladroit — c'est son terme — de réinvestir en éducation alors qu'il y a une centaine d'enfants autistes qui ont été expulsés depuis que le Parti libéral est là. Alors, je crois que j'ai vraiment... Puisque le ministre n'arrive pas à voir la lumière là-dessus, comme tous ses collègues l'avaient fait en juin 2013, le Québec se tourne vers les députés du Parti libéral et les ministres pour faire comprendre au ministre que ça ne se peut pas, l'austérité à deux vitesses comme il est en train de le proposer.

Le Président (M. Tanguay) : M. le ministre.

M. Barrette : M. le Président, c'est quand même extraordinaire, puis j'imagine... Combien de temps, il me reste, là, quelques secondes?

Le Président (M. Tanguay) : Bien, il reste deux minutes à nos débats, à peu près.

M. Barrette : Ah! deux minutes à nos débats. M. le Président, c'est quand même extraordinaire, et je le note, que le Parti québécois souhaite, selon le député de Rosemont, que l'on survive. Alors, je le remercie d'avoir cette magnanime intention à notre égard.

M. Lisée : Nous, on souhaite une bonne santé à tout le monde, M. le Président, à tout le monde, y compris aux membres du Parti libéral, surtout qu'il leur prend de la santé pour renverser la position du ministre de la Santé.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Y a-t-il d'autres interventions?

S'il n'y a pas d'autre intervention, chers collègues, compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux à demain, 10 heures, où elle poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 20.

(Fin de la séance à 17 h 59)

Document(s) associé(s) à la séance