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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le vendredi 27 mars 2015 - Vol. 44 N° 45

Interpellation du député de Verchères au ministre de la Santé et des Services sociaux sur le sujet suivant : La crise au CHUM provoquée par le comportement du ministre de la Santé et des Services sociaux


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Table des matières

Exposé du sujet

M. Stéphane Bergeron

Réponse du ministre

M. Gaétan Barrette

Argumentation

Document déposé

Conclusions

M. Gaétan Barrette

M. Stéphane Bergeron

Autres intervenants

M. Marc Tanguay, président

M. Jean Habel

Mme Diane Lamarre

M. Marc H. Plante

M. François Paradis

Journal des débats

(Dix heures quatre minutes)

Le Président (M. Tanguay) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes présentes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de procéder à l'interpellation du député de Verchères au ministre de la Santé et des Services sociaux sur le sujet suivant : La crise au CHUM provoquée par le comportement du ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Lisée (Rosemont) est remplacé par M. Bergeron (Verchères).

Le Président (M. Tanguay) : Je vous remercie. Alors, je vous rappelle, chers collègues, brièvement le déroulement de l'interpellation.

Dans un premier temps, le député de Verchères aura un temps de parole de 10 minutes, suivi par le ministre pour également un temps de parole de 10 minutes. Par la suite, des périodes de cinq minutes seront allouées selon la séquence suivante : d'abord, un député de l'opposition officielle, ensuite le ministre, puis un député du groupe formant le gouvernement, et ainsi de suite. Je comprends qu'il y a une entente à l'effet que le deuxième groupe d'opposition interviendra lors de la troisième et de la sixième intervention. 20 minutes avant midi, j'accorderai 10 minutes de conclusion au ministre et un temps de réplique égal au député de Verchères. Enfin, je vous rappelle que le débat ne peut, à moins d'un consentement, dépasser midi.

Bien évidemment, nous considérons d'entrée de jeu que nous avons débuté notre séance à 10 h 4. Ainsi, y a-t-il consentement pour poursuivre nos travaux au-delà de midi, soit à 12 h 4?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Tanguay) : Consentement. Alors, M. le député de Verchères, vous avez la parole pour 10 minutes.

Exposé du sujet

M. Stéphane Bergeron

M. Bergeron : Alors, merci, M. le Président. Je trouvais important que nous ayons l'occasion en cette Assemblée de faire le point sur cette crise qui est survenue pendant une période d'intersession. Évidemment, tout le monde s'est un peu parlé par médias interposés, alors nous avons cette occasion, je dirais, privilégiée aujourd'hui de faire le point, en cette enceinte de l'Assemblée nationale, sur cette crise importante qui est survenue, et cette crise qui, je pense, laissera des traces, M. le Président.

Alors, vous me permettrez, dans un premier temps, de faire un peu la chronologie des événements. Dans un premier temps, tout ça a pris naissance le jeudi 5 mars, lorsque, dans un point de presse, le ministre nous annonçait, je dirais, à la surprise de tous et toutes, la démission du directeur général du CHUM, Jacques Turgeon, et il rejetait à ce moment-là toute responsabilité quant à cette décision de M. Turgeon. Je me souviens de la réaction du ministre, qui disait, pour ainsi dire : Je n'ai d'autre choix que d'accepter la démission. Alors, on a eu le sentiment que le ministre se satisfaisait de cette décision, qu'il ne souhaitait pas outre mesure tenter de retenir M. Turgeon. Les choses ont changé un peu plus tard. Alors, c'est exactement ce que disait le ministre : Je n'ai, malheureusement, pas d'autre choix que d'accepter sa démission. Alors, un peu plus tard dans la journée, la lettre de démission de M. Turgeon a été rendue publique, et là c'est en termes assez brutaux — vous avez lu le mandat de cette interpellation — on a parlé du comportement du ministre. Je n'ai pas voulu le qualifier parce que d'autres l'ont fait, puis je vais l'évoquer, M. le Président. Alors, M. Turgeon, dans sa lettre de démission, disait qu'il «considère que l'imposition de cette condition»... Alors, quand on parle de la condition, c'est le fait de reconduire dans ses fonctions le Dr Harris comme directeur du Département de chirurgie du Centre hospitalier de l'Université de Montréal, sans quoi il ne serait pas lui-même reconduit dans ses fonctions de directeur général du CHUM. Alors, il «considère que l'imposition de cette condition relève d'une ingérence politique inacceptable et d'un abus de pouvoir». Alors, M. Turgeon a vite compris qu'il n'avait d'autre choix dans les circonstances que de se soumettre ou de se démettre et il a choisi de se quitter.

Alors, on a demandé le jour même au ministre de s'expliquer. Alors, vous ne direz pas que la réaction de l'opposition, c'est instantanément de demander la démission du ministre. Nous avons à ce moment-là demandé au ministre de s'expliquer. Alors, le lendemain matin, le ministre, tout à coup, tendait la main à M. Turgeon et lui demandait de rester en poste, ce qu'il aurait pu faire la veille, mais ce qu'il n'avait pas fait. Alors, ce qu'on comprend, puisque le premier ministre est intervenu de Paris pour réitérer sa confiance dans le ministre, ce qu'on comprend, c'est que le premier ministre a souhaité que le ministre fasse cette démarche publiquement pour demander à M. Turgeon de demeurer en poste. Un peu plus tard, avant la réaction de M. Turgeon, il y a eu une réaction de la FMSQ, qui disait qu'il s'agit d'«un cas patent d'instrumentalisation des nominations à des fins personnelles ou purement politiques», à des fins personnelles ou purement politiques.

• (10 h 10) •

Alors, ce qu'on apprend finalement un peu plus tard, c'est que non seulement M. Turgeon ne saisit pas cette main tendue par le ministre, il maintient sa décision, mais qu'en plus un autre homme très respecté dans le réseau de la santé et des services sociaux, pour y avoir oeuvré pendant de très nombreuses années, le président du conseil d'administration, M. Jean-Claude Deschênes, démissionne à son tour. Et, encore une fois, il ne le fait pas en catimini, il utilise des termes très durs à l'égard du ministre, alors il qualifie son comportement de... il fait part des interventions répétées du ministre et de son entourage auprès de M. Turgeon, auprès de nombre d'intervenants du conseil d'administration pour faire en sorte que le Dr Harris soit reconduit dans des fonctions de directeur du Département de chirurgie alors même que, selon M. Turgeon, le ministre reconnaissait qu'il y avait un problème d'intimidation au Département de chirurgie et on semblait en attribuer la principale responsabilité, du côté du CHUM, au Dr Harris, et malgré tout le ministre est intervenu à plusieurs reprises.

Le ministre a dit que c'était simplement une suggestion. Or, tous les témoignages ne corroborent pas cette interprétation. Au contraire, il semble que, très clairement, le ministre soit intervenu de façon répétée — alors, c'est ce que dit M. Deschênes, «interventions répétées». Des interventions «nombreuses et persistantes», dit M. Deschênes, encore une fois. Il parle d'une intervention «inopportune et non conforme aux responsabilités du C.A.». La démission de M. Deschênes est, pour lui, une non-acceptation des interventions intempestives et partiales, «d'une situation particulièrement odieuse» liée à la nomination du Dr Turgeon et à l'imposition du Dr Harris comme chef de département, et le tout présenté, disait-il, «sous le couvert fallacieux d'une décision pour le bien de l'ensemble des directions départementales». C'est un blocus dans une partie vitale du CHUM, dit M. Deschênes, un désaveu de la responsabilité du C.A., «c'est un chantage inacceptable», M. le Président.

Alors, devant cette situation, que se passe-t-il? Alors, on a l'AQESSS qui, un peu plus tard, dénonce vivement la situation vécue par le CHUM et exprime sa profonde inquiétude quant à l'avenir de la gouvernance du réseau.

Le Président (M. Tanguay) : Un rappel au règlement, collègue de Sainte-Rose?

M. Habel : L'article 35. J'invite le député de Verchères à ne peut-être pas faire indirectement ce qu'on ne peut faire directement et de rester prudent aussi dans ses propos. Je pense que l'interpellation se déroule très bien et j'invite le parlementaire à continuer dans cette veine et rester prudent.

Le Président (M. Tanguay) : Oui. À moins que vous ayez un terme précis à me souligner qui vous a écorché les oreilles...

M. Habel : Bien, il y avait le mot «fallacieux» qui a été utilisé indirectement. Alors, pour ma part, je trouve qu'on devrait rester prudent dans les propos.

Le Président (M. Tanguay) : O.K. Alors, poursuivez.

M. Bergeron : Alors, finalement, la crise s'envenime au fur et à mesure que la journée avance, et, en fin de journée, il y a une troisième démission au conseil d'administration, celle du prédisent du CMDP, le Dr Paul Perrotte, qui dit dans sa lettre que le processus de sélection des chefs de département appartient au CHUM «et toute ingérence, à quelque niveau que ce soit, ne fait que miner la confiance dans l'institution et ne peut que mener à une méfiance vis-à-vis des chefs désignés en toute légitimité. Par ailleurs, elle enlève toute crédibilité aux instances en autorité.»

Alors, les choses ne vont pas en s'améliorant, comme on peut le voir. Et, en fin de journée, l'agence de la santé mandate deux enquêteurs sur la gestion médicale au CHUM. Le samedi, tout à coup, silence radio de la part du ministre. Nous n'entendrons plus parler de lui jusqu'au début de la semaine suivante. En fait, ce qu'on comprend, c'est qu'à compter de ce moment-là c'est le premier ministre qui a pris les choses en main.

Alors, le samedi, on a une cinquième démission, et celle-là probablement la plus percutante, celle de l'ex-recteur de l'Université Laval qui siège au conseil de l'AQESSS et qui débute sa lettre de démission par une citation de Cicéron dans laquelle il semble faire une analogie entre le ministre et un personnage peu recommandable de l'époque, et la citation est la suivante : Jusqu'à quand, Catilina, abuseras-tu de notre patience. Alors, M. le Président, M. Gervais n'y va pas avec le dos de la cuillère dans ses interventions. Il réitère les accusations de chantage auquel le ministre a soumis M. Turgeon «en imposant comme condition à sa nomination comme P.D.G. du CHUM le non-respect des processus en vigueur et la nomination, comme chef de chirurgie, d'un candidat non retenu par le comité de sélection, formé avec soin par le conseil d'administration et où l'Université de Montréal était représentée». Il dit que le ministre «nie sans vergogne ces faits, pourtant corroborés par d'autres témoignages. Il tente de dévier l'attention [...] en accusant à son tour Jacques Turgeon de partialité.» Parce que ce qu'il faut savoir, c'est qu'après avoir tendu la main à M. Turgeon le ministre a dit plus tard qu'il faisait preuve de partialité.

Alors, M. Gervais poursuit en parlant d'une intervention odieuse, d'un abus de pouvoir, d'une ingérence, d'intimidation, de non-respect de la vérité et d'un imbuvable cocktail. Il parle toujours de tentative d'intimidation, d'attitude réductrice et méprisante...

Une voix : ...

Le Président (M. Tanguay) : Oui. Excusez-moi, député de Verchères. Appel au règlement. Oui?

M. Habel : Je dois invoquer l'article 35. Clairement, on fait indirectement ce qu'on ne peut pas faire directement. On a parlé d'«abus de pouvoir». Écoutez, là, je demande au député de Verchères de retirer ses propos et rester prudent dans ses propos. Et il y a 45 secondes qu'il lui reste pour l'interpellation. Je l'invite à ce qu'il puisse retirer ses propos sur «abus de pouvoir».

M. Barrette : ...le député de Verchères affirme que j'ai accusé M. Turgeon de partialité. Il n'y a absolument aucune citation qui puisse permettre de conclure cela, M. le Président, et je m'y adresserai dans 43 secondes.

Le Président (M. Tanguay) : O.K. Juste au niveau des citations, dans un premier temps, pour appuyer ce que je disais un peu plus tôt, une jurisprudence de notre collègue de Duplessis du 11 juin 2013, en commission parlementaire, à l'effet qu'une citation... Lorsque l'article 35 du règlement s'applique aux propos qui sont tenus dans le cadre du débat parlementaire, «la présidence n'a pas à se prononcer sur les propos tenus à l'extérieur des travaux de la commission».

Ceci étant dit, évidemment, j'appelle tous les collègues à faire attention quant au choix de citations. Nous connaissons certaines publications. Il serait aisé d'aller trouver des citations qui, de plein fouet, là, pourraient aligner les termes non parlementaires. Alors, au niveau du choix des citations, j'appelle tout le monde peut-être à faire attention. Mais ce n'est pas parce qu'une citation est reprise de l'extérieur de cette enceinte qu'elle est applicable à l'article 35. Mais soyons raisonnables dans nos choix.

Alors, député de Verchères.

M. Bergeron : ...votre appel à la prudence, M. le Président, et je conclus très rapidement en disant que, suite à cette démission fracassante de Michel Gervais, le lundi, on apprend que le cabinet du premier ministre, sinon le premier ministre lui-même est intervenu pour demander à M. Turgeon de réintégrer ses fonctions, et c'est ce qui s'est effectivement produit.

Et on apprend dans Le Devoir que «le nouveau P.D.G. s'est tout de même aménagé — et je cite — un "mécanisme de résolution de problème" lui permettant d'aller directement au bureau du premier ministre en cas de problème. [...]Jacques Turgeon s'est également assuré de pouvoir passer par-dessus le bureau du ministre de la Santé si d'autres problèmes survenaient.»

Le Président (M. Tanguay) : En terminant.

M. Bergeron : «Le bureau du premier ministre a laissé entendre clairement qu'il y avait des possibilités de canaux [de communication] pour résoudre [les problèmes] s'il y en avait.»

Alors, c'est donc dire que tout cela s'est réglé grâce à l'intervention du premier ministre pour régler une crise que le ministre a créée lui-même.

Le Président (M. Tanguay) : Merci. Merci beaucoup. Je cède la parole maintenant pour 10 minutes au ministre de la Santé et des Services sociaux.

Réponse du ministre

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Merci, M. le Président, chers collègues. Alors, M. le Président, je suis surpris de me retrouver ici ce matin évidemment dans le contexte qui est celui que l'on connaît, à savoir, premièrement, évidemment, qu'il y a eu un événement que je qualifierais de malheureux dans le CHUM, que le député de Verchères qualifie de crise.

Soit dit en passant, M. le Président, c'est un épisode qui est clos, et nous sommes tous heureux que cet épisode-là soit clos, d'une part, et nous sommes tous heureux que le CHUM, le Centre hospitalier de l'Université de Montréal, puisse aujourd'hui continuer sur sa lancée, parce qu'il s'agit évidemment, on le sait, d'un projet qui est extrêmement important pour la population québécoise et, je dirais, pour l'image du Québec.

Évidemment, ce genre d'événements là, ils sont aussi malheureux parce qu'ils peuvent... et ne le font pas nécessairement, mais ils peuvent refléter des problématiques qui normalement devraient se régler différemment, mais il y a des choses qui arrivent et il m'apparaît dommage que le député de Verchères décide, et je vais utiliser une expression que tout le monde utilise couramment, de «gratter le bobo», et à un point tel qu'on se demande si le député de Verchères et sa collègue la députée de Taillon, qui est ici présente, ont comme intérêt le CHUM et les soins que cette institution-là de renommée internationale donne à la population ou si ici on est dans un exercice purement de relations publiques à saveur politique.

Je pense que les gens qui nous écoutent, M. le Président, ont compris qu'on était plus dans le deuxième que dans le premier. Ça me surprend d'autant plus, M. le Président, que tout l'argumentaire du député de Verchères qui vient d'être exprimé est basé essentiellement sur du ouï-dire. À part les manchettes des journaux, qui relatent des choses qui sont du ouï-dire, bien il n'y a pas grand-chose, là, à mettre sur la table, d'une part, et, d'autre part, M. le Président, le député de Verchères a, en plus, en plus, demandé une enquête au Commissaire à l'éthique de notre Parlement sur la même situation.

• (10 h 20) •

Normalement, quand on demande une enquête, on entend souvent ça en Chambre, on se fait poser des questions, comme ministre, et, par déférence au processus d'enquête judiciaire ou quasi judiciaire, dépendamment de la situation, par déférence et pour ne pas interférer, on se réserve le droit de ne pas intervenir, et c'est ce qu'on répond la plupart du temps.

Le député de Verchères, lui, sait très bien ça. En commission parlementaire, j'ai eu à échanger avec le député de Verchères et la députée de Jean-Talon à plusieurs reprises, et les deux... et surtout le député de Verchères m'a souvent semoncé... sermonné, pardon, je m'excuse, sermonné sur sa grande connaissance de la procédure parlementaire en invoquant que moi, je n'avais la même expérience que lui. Alors, M. le Président, le député de Verchères sait très bien, mais très bien que, normalement, lorsqu'il y a une enquête par une autorité quelconque, qu'elle soit judiciaire ou non, bien, normalement, les gens qui sont sujets ou partie prenante à ladite enquête n'interviennent pas, pour laisser l'indépendance au processus de suivre son cours. Or, le député de Verchères avait tout le loisir, M. le Président, de laisser le commissaire faire son travail, mais, non, il décide aujourd'hui de faire une interpellation, et force est de conclure, à l'évidence, qu'il a d'autres objectifs, qui sont les siens, essentiellement de faire une opération de relations publiques. Je tiens à affirmer une chose, M. le Président, j'ai l'intention... et j'ai déjà commencé à collaborer entièrement avec le Commissaire à l'éthique de notre Assemblée nationale, le Commissaire à l'éthique et à la déontologie, et j'ai déjà rencontré... pour échanger longuement avec le commissaire et les membres de son équipe, et nous avons déjà d'autres rencontres de prévues, M. le Président, et c'est de cette façon-là, M. le Président, que les choses doivent se passer, et non par un étalage d'articles de journaux et autres choses.

Mais je suis doublement surpris, M. le Président, d'être ici dans une période d'interpellation face au député de Verchères. Qui est le député de Verchères? N'est-il pas celui qui, à la fois lorsqu'il était critique dans l'opposition mais surtout lorsqu'il était ministre, était intervenu directement pour critiquer et, à la limite, menacer d'un grand balayage la Direction de l'UPAC? N'est-il pas celui, M. le Président, qui est allé sur toutes les tribunes — toutes les tribunes — faire le pedigree de tous les membres de l'UPAC? Hein, il est allé sur toutes les tribunes : Untel est le cousin d'un autre, un tel est le gendre de l'autre, c'est un scandale. Il a même dit : «J'aime à penser qu'il ne s'agit pas seulement d'une bannière politique — en parlant de la Direction de l'UPAC, M. le Président, l'UPAC, qui est le police, l'institution qui s'adresse aux enquêtes traitant de corruption, l'institution-phare qui doit être indépendante du pouvoir, institution qui, en passant, évidemment, a été mise en place par notre gouvernement.»

Quel hasard de constater que l'individu qui se drape dans la vertu de l'indépendance ait été celui qui a plongé, dans les méandres marécageux de l'intervention, des institutions desquelles on s'attend de la plus grande indépendance! Que conclure, M. le Président? Est-ce qu'on pourrait conclure, si on est un observateur extérieur, qu'il s'agit là d'un cas flagrant de deux poids, deux mesures? Et le deux poids, deux mesures, quand il survient dans une arène politique, n'est-ce pas là le symptôme d'un symptôme cardinal, et il y a un terme en médecine, ça s'appelle «pathognomonique». «Pathognomonique», ça veut dire, M. le Président, que, quand le symptôme est constaté, on arrête de se poser des questions, la conclusion est claire et immédiate, le diagnostic est le suivant... Moi, compte tenu du passé, de l'historique récent — on ne peut pas invoquer la jeunesse, c'est il y a quelques mois, à la limite, années, au maximum — où un député qui se targue en commission parlementaire d'avoir une grande expérience parlementaire a agi en intervenant contre les principes fondamentaux qu'il évoque aujourd'hui, M. le Président, pour demander une interpellation par-dessus une enquête qu'il, lui-même, a demandée au Commisssaire à l'éthique de notre Parlement, M. le Président... clairement, l'exercice pratiqué aujourd'hui par le député de Verchères est un symptôme pathognomonique d'un biais politique, de la manoeuvre pour, en quelque part, sans prêter d'intentions au député de Verchères, influencer l'opinion publique sur des bases que je qualifierai, M. le Président, d'extrêmement approximatives.

Le député de Verchères a aussi suffisamment de connaissances, M. le Président, pour savoir qu'en droit l'argument qui est le moins recevable — le moins recevable — de tous est celui du ouï-dire. Alors, aujourd'hui, j'ai entendu, et ça tombe dans le ouï-dire, le député de Verchères me parler de ouï-dire pour appuyer un argumentaire qui voudrait dire que j'aurais mal agi, selon les dires du député de Verchères. Bien, je pense qu'on peut dire qu'actuellement nous sommes dans une opération de relations publiques douteuse, M. le Président.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, ceci met fin à votre intervention. Et, pour le bénéfice des collègues, après vérification, le terme utilisé par le ministre n'était pas dans le lexique parlementaire, parce que je pense que c'est la première fois qu'on l'utilise en cette enceinte.

Argumentation

Alors, sans plus tarder, bref, chers collègues, je cède maintenant la parole à un député de l'opposition. M. le député de Verchères, la parole est à vous pour cinq minutes.

M. Bergeron : Alors, M. le Président, c'était absolument fascinant de voir le ministre s'escrimer de l'autre côté en essayant de se défendre en passant les 10 minutes à essayer d'accuser les autres et c'est surtout les arguments qu'il utilisait qui étaient pour le moins remarquables.

Alors, il nous demandait si on avait un intérêt pour le CHUM puis pour les soins aux patients. Bien, c'est justement, M. le Président, parce qu'on a un intérêt pour le CHUM puis pour les soins aux patients qu'on fait cette interpellation, parce qu'il n'y a rien qui nous garantit que ce que le ministre a fait au CHUM ne se répétera pas ailleurs. Le ministre nous dit que c'est un exercice de relations publiques à saveur politique. Je lui laisse ça, il semble être un expert dans les exercices de relations publiques à saveur politique, mais, s'il y a une chose qui est certaine, M. le Président, quand il parle de ouï-dire, hein... je me suis bien gardé d'invoquer des articles de journaux, j'ai invoqué la parole de ceux qui ont été directement impliqués. On m'a même reproché de les citer, M. le Président. On m'a même reproché de citer les principaux acteurs de cette crise, qui s'est jouée il y a quelque temps, et on voudrait me faire croire que c'est du ouï-dire. L'une des personnes que j'ai citées, là, c'est M. Turgeon, puis il a tellement peu de crédibilité que le premier ministre est intervenu pour lui demander de demeurer en poste à la Direction du CHUM, M. le Président. Ça, c'est quelqu'un qui n'a pas de crédibilité, hein, dont on ne peut pas se fier à son jugement.

• (10 h 30) •

Et là le ministre utilise, pour essayer de me discréditer, ce qui est encore pire qu'un ouï-dire, parce que ce dont il a parlé... Je le mets au défi de trouver quelque preuve de ce qu'il a avancé. Même dans les journaux, il ne trouvera rien de ce qu'il a raconté il y a quelques instants, M. le Président. Alors, pour quelqu'un qui accuse les autres de se livrer aux ouï-dire, je pense que le ministre, là, il devrait regarder la poutre qu'il y a dans son oeil au lieu d'essayer de regarder la paille qu'il y a dans l'oeil des autres, M. le Président.

Alors, je vais revenir justement sur le fait que le premier ministre a dû intervenir, parce qu'effectivement c'est le ministre qui a occasionné, par son entêtement à vouloir... Puis d'ailleurs on peut se poser la question : Pourquoi insistait-il autant pour que le Dr Harris soit reconduit dans ses fonctions? La question se pose. Mais on n'a jamais vraiment eu de réponse à cette question. Pourquoi est-ce qu'il tenait tant... Peut-être qu'on en aura une, enfin, là, une réponse. Pourquoi tenait-il autant à ce que le Dr Harris soit reconduit dans ses fonctions, allant même jusqu'à menacer le directeur général du CHUM de ne pas le reconduire dans ses fonctions, intervenant auprès de toutes les autorités compétentes en la matière du CHUM et allant même, M. le Président, jusqu'à, pour ainsi dire, bousculer les gens pour que le Dr Harris soit reconduit dans ses fonctions? Alors, on aurait besoin de savoir pourquoi.

Donc, le ministre, par entêtement, a occasionné cette crise, bousculant les façons de faire à l'intérieur de cette institution, faisant de la microgestion d'un établissement de recherche et de soins jusqu'à vouloir nommer les directeurs. Est-ce que c'est parce qu'il veut, lui — il parlait de ouï-dire — des béni-oui-oui qui vont être tout à fait disposés à faire ses quatre volontés dans le réseau une fois que les dispositions du projet de loi n° 10 seront en place complètement, M. le Président? Les questions se posent. Chose certaine, il y a eu une crise qui a été occasionnée. Il l'appellera comme il voudra. Il en demeure que le Québec a été, pour ainsi dire, accroché à cette histoire pendant quelques jours, donc on peut parler d'une crise, et elle n'est pas derrière nous, M. le Président — puis ma collègue va revenir là-dessus un peu plus tard — puisque le ministre a indiqué qu'il ferait exactement la même chose ailleurs. Alors, si on a une crise qui semble être réglée puis elle n'a pas été réglée, grâce à lui, bien il semblerait qu'il y en ait d'autres qui nous pendent au bout du nez, M. le Président, hein?

Alors donc, moi, ce sur quoi j'aimerais insister, c'est qu'il y a eu clairement... Parce que le ministre a été en mode silence radio pendant 48 heures, et pendant ce 48 heures le premier ministre, lui, semble avoir été très actif, puisque c'est grâce à l'intervention du premier ministre et parce que M. Turgeon... Parce que le ministre lui avait demandé, à M. Turgeon, de demeurer en poste, puis il avait dit non. Il a fallu que le premier ministre intervienne et que le premier ministre lui donne des garanties comme quoi le ministre n'interviendrait plus dans ses affaires pour que M. Turgeon accepte de revenir. Le problème, c'est que les autres directeurs d'établissement au Québec n'ont pas ces garanties, et le ministre nous a dit qu'il allait faire exactement la même chose, M. le Président.

Donc, la crise, elle n'est pas derrière nous, contrairement à ce qu'affirme le ministre, il y en a d'autres qui nous pendent au bout du nez, et, connaissant la personnalité un peu abrasive du ministre, j'ai comme l'impression que ça risque de se reproduire plus rapidement que plus tôt.

Le Président (M. Tanguay) : Merci. M. le ministre, pour cinq minutes.

M. Barrette : ...M. le Président, il faudrait savoir pourquoi on est ici, là. Est-ce qu'on est ici pour le CHUM ou on est ici pour le futur? Je suis très heureux d'avoir une interpellation sur Jojo Savard. Là, on me parle du futur. Je ne sais pas de quoi il parle, là. On parle ici, à la demande du député de Verchères, du CHUM.

Laissez-moi vous donner un exemple, M. Président, puis un exemple qui va être intéressant. Le député de Verchères est allé jusqu'à citer Cicéron, qui a été cité lui-même par l'ancien recteur de l'Université Laval, M. Gervais, qui a démissionné avec fracas sur la base que l'on connaît. Or, M. Gervais ne pourrait jamais, devant une cour de justice, sous serment, M. le Président, citer un moment, une conversation, un repas, un téléphone, de la télépathie... il ne pourrait pas citer un moment où j'ai eu un contact avec lui à propos du CHUM dans sa vie entière. Pourtant, le député cite des propos qui sont, par définition, du ouï-dire et s'appuie clairement sur du ouï-dire pour justifier son intervention. Ce n'est pas fort.

Mais rappelons encore d'où vient le député de Verchères. Sur TVA, hein, quelqu'un que le député de Verchères connaît bien, du moins dans sa direction, le 18 février 2014, on rapporte une démission, quasiment en bloc, de quatre membres du conseil d'administration du CHUM qui disent ceci : «"Nous refusons d'être les marionnettes du ministre de la Santé" — je rappelle que le ministre de la Santé de l'époque était le député de Saint-François, qui était au Parti québécois — nous confie l'un des 18 membres du conseil d'administration souhaitant conserver l'anonymat.» Plus loin, un autre membre... au pluriel, «des autres membres» : «D'autres nous affirment, avec des mots très durs, être excédés par les "charges émotives", "autoritaires", "abusives" [...] "mal fondées" du ministre de la Santé — le ministre du Parti québécois. Plusieurs accusent même Réjean Hébert — je cite et au texte — de "s'acharner" sur le CHUM alors que de sérieuses allégations de collusion touchent le CUSM.» Et je pourrais continuer comme ça.

Ça, ce sont des citations d'individus, M. le Président, dans un contexte qui, bizarrement, se ressemble. On oublie vite sur la place publique et on oublie sélectivement, en politique. Et le chantre de la non-intervention, qui est devant moi, a vu ça, a vu ça? Comment était-il justifié, M. le Président, que, parce que le député de Verchères était ministre interventionniste à l'UPAC, il pouvait tolérer, avec les principes si solennellement invoqués aujourd'hui, l'intervention de son collègue dans le même établissement? Écoutez, je vais répéter les mots, là, qui sont dits, cités par la journaliste, exprimés par les membres du conseil d'administration, qui sont probablement les même qu'aujourd'hui : «Charges émotives» du ministre, «autoritaires», «abusives», «mal fondées» du ministre de la Santé. Ils accusent Réjean Hébert de s'acharner sur le CHUM.

Alors, ici, normalement, il y a deux questions qui se posent. Pourquoi le ministre Hébert est-il intervenu? Y avait-il une justification, hein? Et, s'il est intervenu, est-ce que c'était justifié de le faire? Et la troisième question, qui n'est pas de l'ordre du CHUM mais qui est de l'ordre du député de Verchères : Le matin, là, quand il s'est levé, là, et qu'il a vu ça, le député de Verchères, parce que j'imagine qu'il est un fidèle récipiendaire, à la maison, du réseau de télévision de son collègue... Je suis convaincu que, quand il a entendu ça, il a dû se poser des questions, il a dû, dans sa fibre intérieure de politicien pur et sans reproche, mettre sa cape de l'intégrité et venir en caucus s'exprimer contre son collègue, et peut-être même qu'il aurait dû, comme il l'a fait pour l'UPAC, aller sur la place publique, mais, non, mais aujourd'hui il semble que sa géométrie de principes ait varié.

Le Président (M. Tanguay) : Je cède maintenant la parole au collègue de Sainte-Rose pour cinq minutes.

• (10 h 40) •

M. Habel : ...M. le Président. Aujourd'hui, dans cette interpellation, on nous parle de crise au CHUM. Je crois que ça porte vraiment ombrage à la grande institution que sont le CHUM et les hôpitaux universitaires de Montréal, parce qu'au cours des années 2000 c'est la volonté et le leadership politiques du gouvernement libéral qui a permis aux trois projets de modernisation de la médecine universitaire à Montréal de progresser et de voir le jour.

Au cours des années 90, le gouvernement du Parti québécois n'a absolument rien fait. Au lieu de construire trois hôpitaux, il en a fermé neuf la même année, soit en 1995. Au lieu de lui donner un coup d'envoi, au projet de construction du nouveau CHUM, il a consacré ses énergies et ses ressources à en changer le code postal. Pour le CHUM notamment, leur bilan après neuf ans au gouvernement se résumait ainsi : trois premiers ministres, quatre ministres de la Santé, une pancarte, zéro projet et une facture de 60 millions de dollars.

Revenu au pouvoir en 2003, le gouvernement du PLQ a agi pour offrir aux Québécois davantage qu'une pancarte, il a trouvé les fonds pour réaliser trois projets. Et le corps médical attendait depuis des décennies un nouveau CHUM ultramoderne, un centre de recherche parmi les plus importants au pays dans le domaine biomédical, un nouveau CUSM et l'agrandissement tant espéré du CHU Sainte-Justine. La recherche biomédicale est un moteur important de l'économie québécoise qui profite aux actifs de pointe que l'on rencontrera parmi ces trois centres hospitaliers. Autrefois dispersés aux quatre coins de la ville dans des locaux exigus et vétustes, nos chercheurs pourront échanger leurs trouvailles au quotidien et mener leurs travaux à l'aide des meilleurs outils.

Pour ce qui est du CHUM, qui sera un hôpital de calibre mondial qui permettra aux patients du Québec d'avoir un accès ultraspécialisé et d'une qualité supérieure, il est prévu que ce soit un hôpital entièrement fonctionnel dès la livraison de la première phase, au printemps 2016. Cette première phase comprendra la totalité des services hospitaliers, l'urgence, tous les services thérapeutiques et diagnostiques et environ 90 % des services ambulatoires. Ce n'est pas une crise, c'est du concret, M. le Président. La deuxième phase sera livrée en 2020. On y trouvera 15 unités d'hospitalisation, de médecine et de chirurgie, 772 chambres individuelles, 95 lits des unités de soins critiques, 26 unités d'hospitalisation, 39 salles d'opération, 141 civières à l'urgence, 60 civières en salle de réveil, des cliniques externes génériques et spécialisées et un centre intégré de cancérologie.

De plus, la modernisation d'un autre centre hospitalier, celui de Sainte-Justine, dans le giron de l'UdeM, a été lancée par le gouvernement libéral en avril 2012. La construction des bâtiments neufs sera complétée avant la fin 2016; les réaménagements des bâtiments existants, à la fin de 2008... 2018 — pardon. Au terme du projet, le CHU Sainte-Justine comptera 14 chambres de naissance, 419 lits hospitaliers dans ses chambres à occupation simple, dont 18 dédiés à la néonatalogie. Le nouveau centre de recherche comprendra 82 modules de laboratoire humide pour la recherche fondamentale, un étage de laboratoire sec pour la recherche clinique, deux auditoriums et des espaces communs. Le nombre de chercheurs passera de 70 à 100, M. le Président.

Rien de tout cela n'aurait pu être accompli sans le leadership politique, et, quand il s'agit des hôpitaux, vient un temps où il faut cesser de rechercher l'unanimité et mettre les pépines sur les chantiers. Sans le leadership politique, jamais n'aurait-on pu trouver un domicile pour les Shriners, un leader mondial dans la chirurgie orthopédique pédiatrique.

On nous parle de crise, moi, je parle de l'avenir et d'un continuum de soins pour l'ensemble des Québécois, qui profiteront de ces trois hôpitaux que sont le CUSM, le CHU Sainte-Justine et le CHUM. Rien de tout cela ne serait survenu sans la rigueur, autant dans la préparation du plan clinique que le suivi étroit des obligations contractuelles, des consortiums qui réalisent les travaux. C'est ainsi qu'un gouvernement libéral a mis sur pied le bureau du directeur exécutif des projets de modernisation du CHU de Montréal pour assurer la cohérence et la vigilance. Rien de tout cela ne serait arrivé en fait si les ministres libéraux ne s'en étaient pas mêlés.

En résumé, nous assurons un leadership au niveau des hôpitaux universitaires, et c'est ce qui est notre priorité pour nous, M. le Président, pour le CHUM, pour le CHU Sainte-Justine, pour le CUSM, et nous ne laisserons pas non plus dévier le véritable enjeu, qui est la qualité des soins de tous les Québécois.

Le Président (M. Tanguay) : ...collègue de Sainte-Rose. Je cède maintenant la parole pour une période de cinq minutes à notre collègue de Taillon.

Mme Lamarre : Merci beaucoup. Alors, le ministre a commencé son intervention en qualifiant le tout de «l'événement malheureux dans le CHUM».

Or, si nous sommes ici aujourd'hui, ce n'est pas pour parler de l'événement malheureux dans le CHUM, mais pour parler des relations entre le ministre et les conseils d'administration des établissements actuels et des futurs 34 établissements qui seront consécutifs à la loi n° 10. C'est là qu'on est. Et, la saine gouvernance de tout le système de santé, le ministre en est responsable, mais l'opposition doit surveiller. C'est son rôle de surveiller, d'être vigilante. Et, quand il apparaît clairement qu'il y a eu des aspects qui méritent questionnement par rapport à la préservation de la saine gouvernance et de l'autonomie des décisions, je pense qu'il est tout à fait correct et même exemplaire de la part de l'opposition de poser ses questions et d'aller au fond des choses. C'est ce que nous faisons aujourd'hui.

D'abord, je rappelle que la loi n° 10, c'est une loi qui modifie l'organisation et la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux notamment par l'abolition des agences régionales. Alors, ce qui était attendu, c'était l'abolition des agences, mais il y a un choix, le choix du ministre, qui a dit : Moi, je veux aussi modifier l'organisation et la gouvernance. Donc, par le fait même, le ministre a choisi de se faire un maître de la gouvernance, de se faire un maître de pensée et un exemple de la gouvernance, et ce qu'on a observé, c'est que, dès la première semaine, il bafouait les règles de base de la gouvernance, qui sont de préserver l'autonomie et l'autorité des conseils d'administration, et ça, c'est exactement ce qui avait été redouté, craint par la concentration des pouvoirs qui avait été prévue, qui s'est révélée imposée par le bâillon dans le cadre de la loi n° 10.

Donc, toutes nos craintes se sont confirmées. Et déjà, avant même que la loi soit effectivement en vigueur le 1er avril, déjà, dans la transition, le ministre fait défaut à son devoir d'impartialité. Le ministre a la responsabilité... Et d'ailleurs je cite son premier ministre, qui, lorsqu'il était dans cette période intermédiaire entre être ministre de la Santé et premier ministre, avait dit : Un ministre de la Santé, ça doit faire des orientations et ça doit s'assurer que les résultats sont obtenus. Mais, entre les deux, ça appartient à ce qu'on appelle la gouvernance et les conseils d'administration. Donc, les craintes qui avaient été évoquées au niveau de la concentration du pouvoir, au niveau des risques d'abus de pouvoir, celles du Collège des médecins, de Me Jean-Pierre Ménard, de Régine Laurent, de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, les gestionnaires, les experts en analyse de système de santé... Il y en a quand même, des experts qui ont réfléchi à ça et qui connaissent les dangers et les risques.

Alors, je cite un peu quelques exemples de pouvoirs que la loi n° 10 donne au ministre : donc, les orientations et les priorités nationales — on est d'accord, on pense que ça, ça appartient au ministre; mais les priorités régionales; des priorités sur l'équilibre budgétaire; le budget pour chacun, individuellement, de chacun des CIUSSS; les services; les subventions; l'allocation des ressources; la nomination des C.A. des établissements — on a réussi à obtenir que la nomination des P.D.G. se fasse par le gouvernement sur recommandation du ministre, mais, au départ, dans le projet de loi n° 10, le ministre voulait s'approprier ça; les P.D.G. adjoints; les comités; l'établissement des structures organisationnelles des établissements; les corridors de services; les ententes avec les cliniques médicales associées; l'usage commun de certains biens et services par les établissements; les plans régionaux; la planification de main-d'oeuvre; le développement des ressources humaines. Enfin, on le voit, c'est vraiment : on ne laisse plus rien. Et ça, comme décision, il faut laisser des choses au niveau des conseils d'administration. Alors, il y a risque, et là ce qu'on voit, c'est que, dès le début, il y a eu certainement, en tout cas, des lettres qui ont été écrites et qui font référence à l'ingérence.

Alors, moi, j'ai trois questions qui concernent les faits. Le ministre aime les faits. Pourquoi c'est le ministre qui a annoncé lui-même la démission de M. Turgeon, D.G. du CHUM, et pas le président du conseil d'administration? Deuxièmement, pourquoi avoir parlé au D.G. du CHUM lundi, mardi et mercredi? Qu'il nous donne en détail qu'est-ce qui s'est dit. Et, troisièmement, quand le ministre a-t-il parlé au Dr Harris dans les semaines qui ont précédé cette intervention-là?

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Pour cinq minutes, M. le ministre.

• (10 h 50) •

M. Barrette : M. le Président, écoutez, les gens qui écoutent cette interpellation doivent vraiment se demander à quoi ça sert, une interpellation.

Une vraie interpellation, il y a un thème, et là aujourd'hui la députée de Taillon refait la commission parlementaire sur la loi n° 10. Elle a parlé, sur ses cinq minutes, quatre minutes de la loi n° 10, qui n'est pas encore en fonction mais qu'elle lie à un événement que je qualifie encore de malheureux, qui est survenu avant la loi n° 10. C'est à y perdre son latin. Même Cicéronserait perdu aujourd'hui. M. le Président, aujourd'hui, c'est quand même extraordinaire, parce qu'on est le lendemain du dépôt du premier budget qui nous ramène à l'équilibre budgétaire après évidemment la catastrophe péquiste sur le plan des finances publiques et la députée de Taillon vient de nous dire, en substance, M. le Président, que le gouvernement ne devrait pas avoir de regard sur la gestion des deniers publics.

Ce qu'elle vient de nous dire, M. le Président, c'est hallucinant en ce lendemain de budget de retour à l'équilibre budgétaire. Elle vient de nous dire : Donnez les orientations, et les autres vont s'en occuper, et, alléluia, à la fin, pour prendre une expression très péquiste, nous arriverons dans les vallées verdoyantes de l'équilibre budgétaire. M. le Président, ce n'est pas sérieux, là, ce n'est pas sérieux, là. Je ne peux pas croire que la députée de Taillon vient de dire que le gouvernement n'a pas la responsabilité d'intervenir s'il y avait possibilité de problème, ne serait-ce qu'à portée budgétaire, dans le réseau. C'est incroyable, ce qu'on entend.

Ceci dit, M. le Président, je reviens au député de Verchères. Est-ce qu'il pourrait nous expliquer qu'est-ce qui justifiait l'intervention du ministre Hébert dans le CHUM, au point de se faire qualifier d'abusif, au point d'engendrer la démission de plusieurs membres? Et, si c'était justifié, n'est-il pas en contradiction avec la députée de Taillon, qui, elle, dit que ce n'est pas justifié? Ne sommes-nous pas ici devant une contradiction flagrante, pathognomonique de l'exercice, qui est à visée purement politique, hein?

Ici, là, c'est la contradiction absolue. Quand le ministre qu'était le député de Verchères est intervenu et a fait ce commentaire sur l'UPAC, c'est quoi qui le justifiait, c'est quoi? Bien moi, je vais vous le dire, M. le Président, c'est simple : un gouvernement doit gouverner. On n'a pas le choix. Et à un moment donné, quand on fait face à des situations particulières, bien on doit agir. Mais ce qu'ils font, les deux, actuellement, M. le Président, c'est non seulement du deux poids, deux mesures vis-à-vis moi et notre gouvernement; entre eux, eux-mêmes se contredisent. C'est incroyable. L'une dit qu'il ne faut jamais intervenir, l'autre dit : Bien oui, mais ce n'était pas correct, là, ce n'était pas correct, pas correct. Bon.

Il aime les citations, le député de Verchères, alors je vais en citer, moi, des vraies qui étaient dans les médias, des vraies des mêmes personnes, des vraies, là. M. Turgeon : «...j'aimerais réitérer, comme je l'ai fait à chacune de mes interventions, que le CHUM va très bien dans son ensemble — c'est correct dans son ensemble — et que je n'ai aucun conflit avec le ministre de la Santé et des Services sociaux, Gaétan Barrette.» Ça devrait rassurer la députée de Taillon pour le futur, au moins pour le CHUM, mais je tiens à la rassurer encore plus ce matin, M. le Président, je les ai tous rencontrés, les 33, ce matin, on a eu une rencontre très cordiale, très dynamique, très intéressante, puis on va se rencontrer encore aujourd'hui. C'est parti, cette affaire-là, et, M. le Président, ça va bien aller dans l'intérêt des Québécoises et des Québécois. M. Turgeon, toujours : «...nous avons besoin de la détermination et de l'énergie du ministre [de la Santé] pour mener à bien ce projet important pour les patients — et il a raison, M. le Président — le corps médical et l'ensemble de la population du Québec — là aussi, il a encore raison. C'est le message [clair] que j'ai transmis au ministre en réponse à la main tendue.»

Bien, M. le Président, là, quand on a une situation comme ça, bien il faut dénouer ce qui peut apparaître momentanément comme une impasse. On l'a fait au bénéfice de tous les partis, et M. Turgeon le reconnaît et l'affirme.

«Je réitère — toujours M. Turgeon — que ce matin j'ai eu une excellente discussion — malheureusement pour la députée de Taillon — avec le ministre Barrette et que nous avons convenu de regarder vers l'avant. On a besoin d'un ministre qui va nous appuyer continuellement pour faire en sorte que mon équipe et moi, on réussisse.» Bien, il a raison, M. le Président, et c'est ce que l'on va faire.

Le Président (M. Tanguay) : Merci. Je cède maintenant la parole pour cinq minutes au collègue de Maskinongé.

M. Plante : Merci beaucoup, M. le Président. Écoutez, M. le Président, ce matin, je suis un peu chamboulé par la situation, par le sujet, de un, qui est un événement très malheureux. Mon collègue a su le répéter à plusieurs reprises. Et ce que je trouve dommage, c'est qu'on essaie de faire de ce moment une espèce de point brillant dans le système de la galaxie afin que ça devienne une grosse étoile et qu'on mette le point là-dessus. Mais, moi, ce que je dis ce matin, c'est qu'on est là, on discute, on parle, on parle, on revient sur la loi n° 10, on reparle du ton de mon collègue le ministre, et on se rappellera bien que, durant tous les travaux de la commission sur le projet de loi n° 10, aussi de la loi n° 20, le ton du ministre revient souvent, mais le ton du ministre fait un appel à la population et dit à la population : Est-ce que vous voulez plus de services de santé? Est-ce que vous voulez être soignés, M. le Président? Est-ce que vous voulez avoir un médecin de famille?

Il y a des gens qui vont vous soigner. C'est ce que le ton du ministre nous dit depuis le début des projets de loi. Et, moi, ce matin, quand on fait appel à mon collègue puis on dit : Écoutez, le ministre est intervenu, il s'est fâché... il s'est expliqué, M. le Président, et on se réfère toujours à des situations médiatiques, à des ouï-dire, à des dires : Oui, le ministre est intervenu, le ministre a dit ci, le ministre a dit ça. Le ministre, ce qu'il a dit, c'est : Offrons des services à la population, soignons les gens, rapetissons les listes d'attente et fesons... faisons — excusez, ça va être plus beau — faisons que la population ait des soins de santé adaptés dans chacune des régions du Québec, y compris au CHUM, M. le Président, qui est une très belle réalisation, comme mon collègue de Sainte-Rose a pu le vous démontrer tantôt, d'un gouvernement libéral.

Mais, M. le Président, j'aimerais vous citer... et on sait qu'à la Commission de la santé on cite souvent la loi sur la santé et les services sociaux, et j'aimerais vous parler de deux articles particulièrement qui imputent des grandes responsabilités à tous les ministres de la Santé depuis son adoption. Donc, tout d'abord, M. le Président, je vous parlerai de l'article 431 de la loi. À l'alinéa 6.1° : «Il prend — on parle du ministre, là, le ministre, à l'alinéa 6.1° — les mesures propres à assurer aux usagers la prestation sécuritaire de services de santé et de services sociaux.» Cet article donne déjà le ton au pouvoir qui est conféré au ministre. Vous savez, M. le Président, quand on dit que le ministre de la Santé doit prendre toutes les mesures nécessaires afin que la population, les gens — vos enfants, M. le Président, ma mère, ma grand-mère — ait des soins de santé, cet article-là démontre que le ministre en a la responsabilité. Mais je vous rappellerai aussi... et je vous amènerai un peu plus loin, également, dans le même ordre d'idées, en vertu de l'article 3j de la loi, bon : «Établir des normes applicables en matière de services, d'équipement, de [financement] de personnel dans l'utilisation des subventions accordées par le gouvernement dans le domaine de la santé [...] des services sociaux, et en surveiller l'utilisation.»

Ça, M. le Président, ce que ça veut dire, et comme je le comprends et comme mes collègues doivent le comprendre aussi, c'est que le ministre a la responsabilité non seulement d'octroyer le financement, mais d'en voir à sa saine gestion, la saine gestion des finances publiques, M. le Président. Et mon collègue l'a répété tantôt : premier budget équilibré depuis les sept dernières années. Ce qui est important, c'est de bien gérer les finances publiques, bien les gérer en sachant et en regardant où vont les sommes. Et, en santé, où est-ce qu'on veut qu'elles aillent, les sommes, M. le Président? À quoi veut-on que serve notre argent au ministère de la Santé et des Services sociaux? C'est d'avoir des soins, des soins de qualité, en quantité, accessibles, et mon collègue, depuis son arrivée au ministère de la Santé, s'efforce à mettre en place des réformes du système de santé qui offriront et qui permettront à la population d'avoir des meilleurs soins, un meilleur système de santé, moins d'administration, mais beaucoup plus de services. Et c'est ce que mon collègue fait depuis son arrivée au ministère de la Santé.

Je trouve ça déplorable ce matin, M. le Président, et je trouve ça triste quand il y a des listes d'attente, il y a des gens qui attendent aujourd'hui pour voir un médecin qui sont à l'urgence, et qui regardent la télévision, et qui nous voient à la télévision parler de ton, de mots, de ouï-dire quand on pourrait parler tous ensemble, M. le Président, et travailler, dans, chacun et chacune, nos circonscriptions, travailler au service de la population. Moi, ce que je vous dis, M. le Président — le ministre a été clair, le ministre en a fait mention : Aujourd'hui, on est interpellés sur des ouï-dire. Le député de Verchères nous fait venir ce matin, interpelle mon collègue encore une fois sur des ouï-dire. Moi, ce que je vous dis, M. le Président : Penchons-nous sur les vrais enjeux, qui sont les soins offerts à la population, et je crois que mon collègue a la main tendue et travaille en collaboration avec tous les organismes du ministère afin que la population ait de meilleurs services, et ce n'est pas sur une question de ton qu'on va jouer, M. le Président. Merci.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Alors, nous en sommes rendus à la troisième série d'interventions. Alors, appliquant l'entente, je cède maintenant la parole à notre collègue de Lévis pour cinq minutes.

• (11 heures) •

M. Paradis (Lévis) : Merci, M. le Président. La patinoire est large, elle est grande, ça patine de tous bords tous côtés. On a parlé d'histoire avec Cicéron, parlé de vocabulaire avec «pathognomonique», un mot sans synonyme, d'ailleurs, et là j'ai l'impression qu'on fait... je prenais une image sportive : on n'est plus dans un pentathlon à cinq épreuves, on est dans le décathlon, parce qu'il y en a dix, parce que, là, ça va de tous bords tous côtés.

Écoutez, je ferai aveu de jeunesse, parce que je suis un jeune homme, mais c'est ma première interpellation, et, très honnêtement, je pense qu'elle peut avoir sa raison d'être dans la mesure où on aboutit à quelque chose. Je vous dirai que la rencontre d'aujourd'hui, pour moi, devrait être significative, elle est importante pour comprendre, pour apprendre, pour l'avenir, pour la confiance, pour tirer des leçons. Moi aussi, je suis quelqu'un qui regarde en avant, puis, lorsqu'une solution, lorsqu'une crise... Parce que, dans le contexte, c'en était une. Pour ceux qui l'ont vécue, c'était une crise, et elle a pris des dimensions. Aurait-elle pu être gérée différemment? Possiblement. À la lumière de ce que j'ai entendu, je ne citerai pas, pour ne pas faire dire qu'on joue sur du ouï-dire. Ce que j'aurais pu citer et ce que j'ai en main, ce sont des lettres, des faits, des mots. Et, manifestement, ça a pris des proportions.

Est-ce que ça aurait pu être géré et réglé différemment avant que ça ne devienne grand public? Potentiellement. En toile de fond, une présomption, une présomption d'ingérence politique que le ministre à niée sur des questions qui lui ont été posées, mais aussi une question de confiance et de méfiance, et c'est là où il faut aboutir quelque part.

Je suis de ceux qui aiment regarder en avant et laisser derrière des choses qui ont moins bien fonctionné, mais dans la mesure où j'en tire aussi leçon. Le but, c'est toujours de s'améliorer. La déception dans ce segment-là, dans cette aventure malheureuse, qui a été qualifiée de cette façon par l'équipe ministérielle, c'est qu'elle risque de laisser des traces dans le milieu, dans le contexte, chez le personnel soignant, une espèce d'inquiétude. Et, lorsque questionné sur la question... lorsque j'ai adressé une question au ministre, lui demandant : Est-ce qu'il tire leçon de cette situation?, le ministre a dit qu'il continuerait de la même façon ou referait la même chose. Je présume que, dans un contexte très précis de sa pensée, il a probablement oublié de regarder tout autour. Moi, dans ma tête, il faut tirer leçon à travers de ça. Et cette interprétation-là, qui est ma première, dans ma tête, encore une fois, nous aurait permis... ou permettrait de rassurer les gens ou de faire en sorte qu'on puisse éviter que pareille chose ne se reproduise. Qu'il y ait eu ingérence, que le ministre dise qu'il n'y en ait pas eu, qu'il y ait présomption, qu'il n'y en ait pas, qu'il ait été écrit dans des lettres... Parce que ceux qui signent les lettres sont les principaux acteurs. Le directeur général démissionnaire, qui dit peser ses mots et parle d'ingérence... le directeur démissionnaire, qui revient et qui signe une lettre citée par le ministre mais dans laquelle il prendra aussi le temps d'établir et mettre en place des mesures, et il dira mot à mot : «Dans ce contexte, le ministre Barrette et le premier ministre nous ont assurés que ces conditions seraient mises en place afin de prévenir toute perception d'ingérence et afin d'assurer une saine gouvernance.» C'est dans la lettre de retour.

Alors, lui aussi, il dit, là : Il s'est passé quelque chose suffisamment important que, dans ma lettre, où je salue la détermination du ministre... Parce qu'il le dit, et ça lui fait plaisir, et c'est écrit. Tant mieux qu'il le fasse. Mais il dit aussi : «...le ministre Barrette et le premier ministre nous ont assurés que ces conditions seraient mises en place afin de prévenir toute perception d'ingérence [...] afin d'assurer une saine gouvernance.» Et, dans les mesures, bien il y en notamment une, deux, trois, quatre, pour vous passer ces paragraphes, sinon le dernier, où «la gestion de l'établissement qui se fera dans le respect intégral des processus en place avec toute la latitude et la légitimité nécessaires pour le P.D.G. et le conseil d'administration».

Bref, est-ce que l'exercice d'aujourd'hui ne doit pas viser à ça? Au-delà de ce qui se fera en commission d'enquête avec le Commissaire à l'éthique, au-delà des propos qui seront tenus... pas de commission d'enquête, du Commissaire à l'éthique demandée par le député de Verchères... est-ce qu'au-delà de ça on peut, donc, tirer leçon de ça?

Et, savez-vous, j'adresserai une question au ministre dans les 40 secondes restantes, mais des questions lui ont été adressée tout à l'heure, et là on est revenus sur bien, bien, bien des choses, on est dans le décathlon, je vous le disais, mais est-ce que le ministre... maintenant, à la lumière de tout ce qui s'est dit et s'est écrit, à travers les lettres qu'il nous cite et celles qu'on a citées, tire-t-il leçon? Et comment fera-t-il pour que cette confiance, que certains ont perdue, en regard de ce qui sera demain aussi dans une gouvernance différente... comment fera-t-il pour rassurer ceux et celles qui craignent qu'il intervienne dans cette gouvernance de ce réseau de la santé si cher à nos coeurs?

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. M. le ministre, pour cinq minutes.

M. Barrette : Merci, M. le Président. Je reconnais à la deuxième opposition une approche plus cartésienne de la situation et j'irais même jusqu'à dire «plus neutre que celle de la première opposition».

Ceci dit, M. le Président, bien que je comprenne le sentiment du député de Lévis, je ne peux m'empêcher de lui rappeler les responsabilités du ministre, et ça, ce n'est pas une question de loi n° 10, c'est une question de loi. C'est une question de loi, et, à cet égard, M. le Président, je prends un moment pour citer... pour le bénéfice de tous, de toutes, et surtout de nos auditeurs, de rappeler ce que les textes de loi disent en date d'aujourd'hui.

Alors, le ministre est assujetti à la loi, entre autres, sur le ministère de la Santé et des Services sociaux, et, à l'article 3, à l'alinéa j, on dit que le ministre doit plus particulièrement «assurer l'organisation et le maintien des établissements dans le domaine de la santé et des services sociaux, lui-même ou par un tiers». Mon collègue de Maskinongé y a fait référence il y a quelques instants. Ça veut dire quoi, ça? Ça veut dire que, que ce soit par le biais du tiers ou par lui-même, ultimement, le ministre a cette responsabilité-là. Conséquemment, s'il est porté à son attention un certain nombre de problématiques pour lesquelles il juge qu'il est nécessaire d'intervenir, bien il doit intervenir.

Dans la LSSSS, la Loi sur les services de santé et les services sociaux, à 6.1°, on nous dit... je m'excuse, à l'article 431, à 6.1° de l'article, on dit que le ministre «prend les mesures propres à assurer aux usagers la prestation sécuritaire [des] services de santé et [des] services sociaux». Les deux ensemble, ce que ça signifie, évidemment ça signifie qu'au bout de la ligne le ministre doit s'assurer globalement, là, que les choses vont bien. Conséquemment, si les choses ne vont pas bien, soit parce qu'il l'a constaté ou qu'on a porté à son attention des éléments qui montreraient que, le ministre, et je l'ai dit à plusieurs reprises, je ne dirai pas «a le devoir», mais a l'obligation au moins de s'informer.

C'est la raison pour laquelle, par exemple, d'autres ministères ont aussi une responsabilité similaire vis-à-vis certaines activités gouvernementales. Le Conseil du trésor, par exemple, a la responsabilité de la gestion globale du budget de l'État, qui lui est octroyé par les Finances. Moi, comme ministre de la Santé, je dois rendre des comptes au Conseil du trésor, et c'est normal. C'est une structure qui a une hiérarchie verticale, obligatoire, comme dans n'importe quelle structure. Quelqu'un doit avoir la responsabilité d'une partie de l'organisation qui est sous lui ou elle et ce quelqu'un-là a en général quelqu'un au-dessus à qui il doit rendre des comptes. C'est juste normal. Je dois rendre des comptes au Conseil du trésor, qui, lui, doit rendre des comptes... le président du conseil, à son premier ministre, qui, lui, ultimement, rend des comptes à la population, qui a la sanction finale.

Alors, ici, il y a un grand débat et il y a un grand exercice qui, M. le député de Lévis, à mon avis, est beaucoup mieux fait, comme je l'ai dit, par vous, beaucoup plus cartésien, mais on aborde ici d'abord et avant tout la question de la responsabilité. Et à votre question, qui est tout à fait légitime : Qu'est-ce qui va arriver dans le futur?, bien il va arriver dans le futur ce qui est prévu à la loi n° 10, qui est ce qu'a évoqué la députée de Taillon négativement mais qui en réalité est positif, qui est qu'un ministre de la Santé, moi ou un autre, a la responsabilité de donner les orientations qui doivent être mises en application par le réseau, mais il y a une reddition de comptes et un pouvoir d'intervention s'il est porté à son attention qu'il y a des problèmes.

Posons-nous la question qu'évidemment le député de Verchères n'est pas capable de poser : Pourquoi le député de Saint-François, le ministre Hébert, est intervenu et a forcé la...

(Interruption)

M. Barrette : Ah! j'y reviendrai plus tard.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. La parole est au député de Sainte-Rose.

M. Habel : Merci beaucoup, M. le Président. Clairement, aujourd'hui, l'interpellation dévie clairement et s'oriente vers de faux enjeux alors que l'important, M. le Président, c'est vraiment d'améliorer la qualité des soins au Québec. Et tantôt la députée de Taillon a évoqué le projet de loi n° 10 dans son interpellation, mais le projet de loi n° 10, en résumé, lui, il veut modifier les structures de santé et des services sociaux au Québec afin de favoriser l'accès aux soins et de réduire la bureaucratie.

Dans chacun de nos comtés respectifs, les problématiques évoquées concernant la santé, ce n'est pas les liens administratifs avec le CHUM pour ce qui est de la bureaucratie, c'est vraiment d'orienter ça vers l'attente. On me parle aussi des obstacles inutiles au niveau de la circulation des informations cliniques, des méthodes de prise de rendez-vous pour le moins chaotiques. Les gens me parlent de ça dans mon comté, les gens du milieu de la santé, les citoyens, mais ils sont clairs, ils veulent nous parler qu'ils veulent avoir un coup de main pour naviguer dans le système, ils nous parlent des cliniciens qui cherchent un sommaire d'hospitalisation et qui ne le trouvent pas. Ils me parlent d'accès à la première ligne, ils me parlent de vieillissement de la population, ils me parlent aussi de la multiplication des maladies chroniques et des handicaps permanents, aussi des soins, qui sont de plus en plus complexes et prolongés, l'aspect des composantes du réseau.

• (11 h 10) •

On ne me parle pas de l'aspect administratif du CHUM, M. le Président, on ne me parle pas d'autre problématique que... sauf celle qui est dans l'intérêt du patient et celle de réduire la bureaucratie.

L'opposition officielle tente continuellement de jouer au démineur, sauf qu'ils ne mettent pas des drapeaux rouges, ils mettent de fausses mines dans l'échiquier, M. le Président. Mon but, moi, c'est d'axer ça vers l'orientation du patient, donner un continuum de soins au patient, et le projet de loi n° 10, le projet de loi n° 20 répondent aux demandes des Québécois, pas à un faux débat sur le CHUM, M. le Président. Les projets en santé, c'est ce que les Québécois veulent entendre, comme le projet de loi n° 10 pour améliorer l'accessibilité en simplifiant l'accès aux soins et réduire la duplication des tâches, des goulots d'étranglement et aussi simplifier la structure de gestion pour le patient notamment en abolissant les agences de santé pour les intégrer aux centres de services sociaux intégrés comme le CIUSSS concernant le CHUM va l'être. Nous, à Laval, notre région est une région-phare parce que le projet de loi n° 10 a déjà été, grosso modo, implanté à 70 %, parce que la réalisation de notre centre intégré de santé et de services sociaux l'est déjà parce qu'on est une île, une ville avec un hôpital, l'Hôpital de la Cité-de-la-Santé. Alors, pour ma part, je pense que l'interpellation de ce matin n'est qu'un mirage qui disparaîtra tout comme la bureaucratie afin d'investir davantage dans le patient. Je pense que c'est important de parler du projet de loi n° 10, du projet de loi n° 20 et des autres projets de loi, M. le Président.

En somme, je pense que c'est important de le résumer, il faut donner plus d'accès aux soins de la santé, et le projet de loi n° 10 va le faire... le projet de loi n° 20. J'ai parlé tantôt aussi au niveau des réalisations qu'on a faites en tant que gouvernement pour le CHUM, pour le CUSM, pour le CHU Sainte-Justine parce que ça, c'est vraiment des projets qui sont importants, c'est des projets qui vont faire avancer le continuum de soins.

Le CHUM, c'est un hôpital d'envergure mondiale qui va être créé. Le CHUM, c'est un fleuron québécois. Le CHUM, c'est des hommes et des femmes qui y travaillent avec coeur et qui veulent mettre tous leurs efforts dans l'amélioration de la qualité des soins des Québécois. Moi, je pense que c'est ça qu'on doit parler aujourd'hui dans cette interpellation. On doit parler des hommes et des femmes qui travaillent pour le CHUM et qui veulent faire avancer la santé au Québec. On doit parler des chercheurs, on doit parler des gens qui veulent, tout comme le ministre, tout comme les députés, tout comme l'ensemble du gouvernement, faire avancer l'accès aux soins des Québécois. Moi, je pense que c'est ça qu'on aurait dû parler aujourd'hui dans cette interpellation, pas des faux débats que le député de Verchères, que la députée de Taillon et que les autres personnes veulent discuter.

Moi, je pense que c'est important d'axer ça sur les patients, ceux qui attendent à l'extérieur, dehors, à moins 20°, qui veulent avoir des services, qui veulent avoir un continuum de soins. Moi, je pense qu'il faut parler de ces personnes-là aujourd'hui. Mais, non, on est en train de parler d'un faux débat aujourd'hui, M. le Président, un débat qu'on aurait pu s'épargner. Mais on a dû faire cette interpellation-là, et ça nous fait plaisir de parler des projets, nous, qui vont faire avancer le continuum de soins, comme le projet de loi n° 20, comme le projet de loi n° 10, comme nos réalisations au CHU Sainte-Justine, au CUSM et au CHUM. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. La parole est au collègue de Verchères.

M. Bergeron : Merci, M. le Président. J'écoutais avec grande attention et, je dirais, avec un brin d'émotion le vibrant plaidoyer du député de Sainte-Rose en faveur des soins, en faveur du CHUM puis je crois qu'il est absolument sincère.

Ceci dit, je ne sais pas comment on va réussir à améliorer les soins avec ce qui a été annoncé hier dans le budget, qui est bien en deçà des coûts de système, M. le Président. Je ne sais pas comment le député de Sainte-Rose pense, quand il applaudissait hier à tout rompre, que ça va améliorer les soins aux patients partout sur le territoire du Québec. Je ne sais pas si le député de Sainte-Rose pense que, lorsque le ministre s'immisce dans la microgestion des différents établissements de santé... si ça, ça améliore les soins aux patients. Peut-être qu'il devrait se poser cette question-là et peut-être s'interroger sur les raisons qui nous amènent à nous poser des questions.

Je pense que ma collègue de Taillon, particulièrement, et moi-même sommes effectivement préoccupés par la qualité des soins et je pense que le ministre devrait se préoccuper de ça plutôt que de s'assurer que des gens qu'il connaît puis qu'il aime bien soient nommés dans des fonctions alors que ce n'est pas à lui de faire ça. Alors, M. le Président, peut-être que c'est ce dont le député de Sainte-Rose devrait aussi se préoccuper.

Puis, quand on parle, M. le Président...

Le Président (M. Tanguay) : Rappel au règlement?

M. Plante : Écoutez, M. le député...

M. Bergeron : Quel article?

M. Plante : 35.

M. Bergeron : Ah oui?

Le Président (M. Tanguay) : Oui, allez-y, allez-y. Rapidement.

M. Plante : C'est courant comme article. Écoutez, M. le député de Verchères cite des choses, émet des commentaires, dit des choses, et on aimerait avoir des preuves... ou on peut juste dire comme ça un peu n'importe quoi sans émettre de preuve, là. La microgestion; est-ce qu'on a des preuves que le ministre a fait de la microgestion, oui ou non?

Le Président (M. Tanguay) : O.K. Alors, peut-être juste faire attention pour ne pas prêter d'intentions. Allez-y, collègue. Le débat se déroule bien, alors faisons attention pour ne pas prêter des intentions. Mais, allez-y, collègue de Verchères.

M. Bergeron : Merci, M. le Président. Maintenant, quand j'entends le député de Sainte-Rose s'émouvoir quant au fait que c'est le gouvernement libéral qui aurait mis de l'avant le CHUM puis que le ministre y croit, bien peut-être que le député de Sainte-Rose aurait avantage à voir cette image où le ministre de la Santé, à l'époque où il était président de la FMSQ, avait émis des réserves très sérieuses à l'égard du CHUM. Il a même déchiré l'image du CHUM tellement il considérait que c'était un projet qui ne méritait pas d'aller de l'avant.

Alors, M. le Président, moi, je veux bien, là, voir toute l'émotion transmise par le député de Sainte-Rose, mais il aurait certainement lieu d'interroger son voisin et collègue le ministre de la Santé et des Services sociaux sur le réel engagement du ministre de la Santé et des Services sociaux, et peut-être cette méfiance que semble manifester le ministre de la Santé et des Services sociaux à l'égard du CHUM depuis l'époque même où il n'était pas ministre de la Santé et des Services sociaux explique-t-elle sa volonté d'intervenir dans la microgestion de l'institution de telle sorte que cette institution corresponde davantage à l'idée qu'il s'en faisait dès le départ, à l'époque où il critiquait la mise en place du CHUM, M. le Président. Alors, il y a lieu de s'interroger sur ça, mais manifestement le député de Sainte-Rose ne s'interroge pas là-dessus. Alors, je l'invite à poser des questions à son collègue et, s'il ne veut pas le faire en cette Chambre dans le cadre de cette interpellation, bien, à tout le moins, qu'il se donne la peine de le faire privément en caucus ou ailleurs.

Ceci dit, M. le Président, le ministre semblait s'interroger sur les raisons qui nous avaient amenés à réclamer une enquête du Commissaire à l'éthique. Je ne reviendrai pas là-dessus, je pense que j'ai eu l'occasion de m'exprimer très clairement quant à l'article 16 du Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée nationale, et il me semble personnellement... puis le fait que le commissaire ait choisi de mener l'enquête est déjà en soi révélateur, quant à moi. Il me semble, quant à moi, qu'il y a contravention aux deux alinéas de l'article 16, mais je laisserai au commissaire le soin de juger à la lumière des faits et j'ai bien hâte d'avoir l'occasion également de le rencontrer, M. le Président.

Mais nous avons également réclamé une enquête indépendante alors que Québec solidaire a demandé une commission parlementaire, et je n'ai pas eu la moindre indication de la part du gouvernement de satisfaire à quelque demande que ce soit pour une plus grande transparence par rapport à ce qui s'est passé dans la crise du CHUM. Or, c'était le gouvernement qui se promettait d'être le plus transparent de l'histoire du Québec, M. le Président, si on se fie aux paroles du premier ministre, alors pourquoi refuser une enquête indépendante, pourquoi refuser une commission parlementaire? Et cette enquête indépendante, M. le Président, m'apparaît à ce point importante que je sais qu'à la demande du premier ministre l'agence a déclenché une enquête interne sur les pratiques médicales au CHUM, alors que M. Turgeon et le ministre disent en choeur, maintenant, que tout va bien au CHUM. Mais il faut comprendre que le ministre est directement impliqué dans cette crise, qu'il a lui-même occasionnée, M. le Président.

Alors, c'est clair que, si l'enquête n'est menée que par le ministère de la Santé et des Services sociaux...

Le Président (M. Tanguay) : ...rappel au règlement.

M. Bergeron : ...on n'ira pas au fond des choses, M. le Président.

Le Président (M. Tanguay) : Excusez-moi. Rappel au règlement, M. le ministre?

M. Barrette : ...intention, c'est un procès d'intention. J'ai provoqué une... Voyons donc!

Le Président (M. Tanguay) : O.K. Alors, veuillez conclure en faisant attention. Vous connaissez bien l'article 35.

M. Bergeron : Oui, absolument, M. le Président. Alors, ce que je dis, c'est que, pour être certain d'aller au fond des choses et de voir si ce n'est qu'une lubie ou qu'un fantasme de ma part, M. le Président, bien une enquête indépendante nous permettrait effectivement de savoir s'il s'agit d'une lubie ou d'un fantasme de ma part puis si effectivement le ministre n'a rien à voir dans cette affaire-là. Pourquoi refuser une enquête indépendante?

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. M. le ministre, la parole est à vous.

• (11 h 20) •

M. Barrette : Bien, M. le Président, je pense que ceux qui nous écoutent... Écoutez, c'est intéressant, parce qu'à chaque fois que l'opposition officielle prend la parole, que ce soit par la bouche du député de Verchères ou de la bouche de la députée de Taillon, mais particulièrement du député de Verchères, on est abasourdis, on est abasourdis. On ne peut pas être autrement, M. le Président.

Le député de Verchères vient de nous dire qu'il n'a pas confiance dans le Commissaire à l'éthique. Il vient de nous dire, là, que faire la lumière par le Commissaire à l'éthique, ce n'est pas assez, parce qu'il faut une commission parlementaire ou une enquête indépendante. C'est ça qu'il vient de nous dire. Il vient de nous dire qu'il n'a pas confiance dans les résultats de l'enquête du Commissaire à l'éthique, M. le Président. C'est incroyable. Moi, là, je l'ai dit et je le redis, là, moi, j'ai la pleine confiance dans les travaux du Commissaire à l'éthique et j'ai déjà affirmé — et je l'ai fait à date, évidemment que je vais continuer à le faire — collaborer avec lui. Mais lui, il vient de nous dire que, non, non, non, là, ce n'est pas bon, ça. Ça fait qu'il demande une chose qu'il ne considère pas bonne à l'avance, puis, tant qu'à faire, on va faire une interpellation, puis, en interpellation, on va demander une commission parlementaire, puis, s'ils ne répondent pas à ça par la positive, on va demander une commission d'enquête indépendante. Mais c'est n'importe quoi, M. le Président.

M. Bergeron : ...

Le Président (M. Tanguay) : Pardon?

M. Bergeron : ...là, on me prête carrément des intentions, parce qu'il n'y a rien de ce que le ministre vient d'énoncer que j'ai dit il y a quelques instants, absolument rien. Alors, quand le ministre nous dit : C'est absolument n'importe quoi, je suis d'accord avec lui, ce qu'il nous dit est absolument n'importe quoi.

Le Président (M. Tanguay) : Non, non, non, ne partons pas là-dessus, chers collègues, allons-y en se respectant. Je pense que tout peut se dire. Évidemment, il faut bien choisir les mots et le ton, alors, la langue française — et le ministre nous en donnait un autre bel exemple ce matin — est riche. Alors, essayons de rester parlementaires. J'invite tout le monde à la prudence. Mais, M. le ministre, je vous en prie, poursuivez.

M. Barrette : Vous avez raison, M. le Président, ça serait le fun que nos propos soient toujours teintés de... pas teintés, mais empreints de prudence, mais, comme on le voit, ce n'est pas toujours le cas. Mais je vais quand même dire que c'est encore plus surprenant...

(Interruption)

Le Président (M. Tanguay) : Oui. Pardon. Rappel au règlement. Députée de Taillon.

Mme Lamarre : ...j'ai posé trois questions au ministre, il n'a jamais répondu à ces trois questions-là.

Une voix : ...

Mme Lamarre : Oui, c'est une interpellation. Les articles restent valides. 79. Trois questions. Quand est-ce qu'il a parlé au Dr Harris? Pourquoi il a eu besoin de parler trois fois au directeur général du CHUM? Et pourquoi c'est lui qui a annoncé la démission de M. Turgeon et non pas le président du conseil d'administration du CHUM? Les trois questions que j'ai posées.

Le Président (M. Tanguay) : Oui. Effectivement, par rapport au pendant de l'article 79, il y a l'article 82 : la réponse appartient au ministre. Alors, on ne peut pas faire de rappel au règlement en précisant... ou en ne se déclarant pas satisfait par la réponse. Alors, la réponse lui appartient. Le reste...

Une voix : ...

Le Président (M. Tanguay) : Oui, mais la réponse lui appartient. Alors, si vous m'apportez des autorités à l'effet que la réponse ne lui appartient pas, je serais prêt à les lire. Alors, je vous remercie beaucoup.

Alors, chers collègues, je fais un rappel à tous, là. Ça va bien, il reste 3 min 10 s. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Barrette : Alors, toujours pour la précision des positions qui sont exprimées ici, j'allais citer, encore une fois, les propos du député de Verchères, dans un article paru dans Le Devoir le 18 octobre 2012, dans l'intervention que faisait, à mon avis, de façon inopportune le ministre d'alors, le député de Verchères, à propos de l'UPAC. Le Devoir rapportait ceci : «...le ministre a servi un avertissement non équivoque, précisant qu'il n'exclut pas d'apporter des changements "jusqu'aux plus hautes sphères" de l'organisme.»

Moi, je ne comprends toujours pas cette interpellation, M. le Président. Le député de Verchères, alors ministre, considérait, à tort ou à raison — je ne lui prêterai pas d'intentions — que c'était sa responsabilité d'intervenir dans l'organisation la plus policière et la plus indépendante de notre société et là ici on remet en cause mon devoir, prévu à la loi qui est en cours, à ce moment-là, d'intervenir dans le réseau de la santé, M. le Président. Ça ne tient pas la route, là, à mon sens.

Ceci dit, M. le Président, j'aimerais en ce moment avoir dans mes mains la photo qu'a brandie le député de Verchères pour lui rappeler, M. le Président, qu'il fut un temps, lorsqu'ils étaient au pouvoir, qu'au Parti québécois le CHUM, ce n'était rien d'autre qu'une parcarte au coin de Rosemont et Saint-Denis, pancarte qui avait été déménagée...

Une voix : ...

Le Président (M. Tanguay) : Pardon. Oui.

M. Bergeron : Je ne demande pas mieux que de déposer le document si le ministre veut l'avoir.

Le Président (M. Tanguay) : Y a-t-il consentement pour le dépôt de document? Il y a consentement.

Une voix : Déposez-le.

Document déposé

Le Président (M. Tanguay) : Alors, le document est déposé, M. le secrétaire. M. le ministre.

M. Barrette : Et, M. le Président, toujours dans la catégorie Documentaire, je tiens à informer l'opposition officielle que la prochaine chose que je vais couper, M. le Président, avec plaisir, ce sera le ruban de l'inauguration du CUSM et du CHUM. Pour nous, ces institutions-là, que nous avons projetées, et mises en place, et réalisées, ce n'est pas un objet politique, ce sont des projets qui sont au bénéfice de la population, que j'aurai le grand plaisir d'inaugurer pour le bénéfice de la population. Et, ce matin, M. le Président, je ne suis pas sûr qu'on est dans cette direction-là.

Ceci dit, M. le Président, j'invite l'opposition officielle à lire la page des débats de La Presse ce matin. Et, pour ce qui est de mon intérêt pour les soins aux patients et de mon implication, je leur propose de s'inspirer des commentaires de Dr Augustin Roy, hein, qui, dans un plaidoyer très senti, appuie fortement les positions que notre gouvernement et moi personnellement défendons.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. La parole maintenant est au député de Maskinongé.

M. Plante : ...M. le Président. Écoutez, M. le Président, on a assisté ce matin à un grand scénario de mise en culpabilité de mon collègue sur des allégations, toujours. J'aimerais rappeler que le collègue, et je l'ai énoncé précédemment, a l'autorité par la loi de la santé et services sociaux d'agir et de voir au bon fonctionnement des établissements au Québec, de voir aussi à la bonne gestion de ces dits établissements.

Ce qu'on se base aujourd'hui et ce qu'on essaie de reprocher à M. le ministre me surprend totalement, parce que, dans une mesure pas si lointaine, un ancien ministre de la Santé faisait, lui aussi, appel souvent à cette loi et disait qu'ils avaient l'obligation et la juridiction de faire ce qu'il faisait. Et je pourrai vous citer un article du 27 novembre 2013, alors l'ancien ministre de la Santé à l'époque était le Dr Réjean Hébert, qui était député du Parti québécois, qui dit : D'ici mercredi prochain, le conseil d'administration doit prendre une décision pour le superhôpital, «sans quoi une tutelle pourrait être imposée par Québec. C'est ce qu'a annoncé le ministre de la Santé et des Services sociaux, Réjean Hébert, qui est parti exceptionnellement de Québec cet après-midi pour parler au C.A. du centre hospitalier, à l'Hôtel-Dieu de Montréal.» Et on est convaincus qu'à l'époque le Dr Hébert, le ministre de la Santé, était allé, hein, pour voir au mieux-être et au bon fonctionnement du centre de santé. Et personne n'évoquait ou personne ne disait ou ne se scandalisait que le ministre de la Santé voie au bon fonctionnement des établissements, travaille et, je présume, travaille surtout, hein, au mieux-être de la population et à l'offre des soins de santé.

Dans le cas-ci, aujourd'hui, on se base sur des allégations, des citations dans des journaux, on se base surtout sur le ton d'un collègue qui... oui, effectivement, parfois, il a un ton plus difficile, parce qu'il faut être difficile et plus dur pour offrir de meilleurs soins. Il faut donner un ton plus directif pour permettre à la population, qui attendent, qui n'ont pas de services de santé et qui n'ont pas de soins, d'avoir et de requérir un médecin de famille, de rapetisser les listes d'attente et de travailler, dans le fond, au mieux-être du système de santé.

M. le Président, je vous ferai aussi un petit peu un topo du travail qu'on fait et du travail que fait mon collègue le ministre de la Santé en ayant présenté le projet de loi n° 20. Vous savez, le projet de loi n° 20, M. le Président, va servir à optimiser et à améliorer l'accès aux médecins et à accroître la productivité du réseau, au bénéfice de qui, M. le Président? Au bénéfice des patients. Cette transformation était nécessaire et se veut une attente de la population et une volonté profonde des gens et des citoyens de dire : Le système de santé doit répondre à nos besoins, doit répondre. Et je m'adresse aux gens qui nous écoutent à la maison : Quand vous attendez à l'urgence, quand... les 353 cas de l'an dernier qui m'ont appelé à mon bureau de comté pour dire : M. le député, on n'a pas accès à un médecin de famille, M. le député, on attend des nouvelles, on attend une réponse, bien moi, je dis à ces 353 personnes là de Maskinongé, aux gens dans les autres comtés au Québec, je dis : Bien, la réponse, le ministre de la Santé l'a, le ministre de la Santé travaille pour vous et, oui, intervient dans le réseau parce qu'il faut intervenir pour vous offrir les services de santé et pour vous donner accès à un meilleur réseau de la santé.

• (11 h 30) •

C'est facile de crier scandale, c'est facile, M. le Président, de dire : Ah, le ministre! Ah, ce n'est pas gentil! Mais, M. le Président, le ministre agit, il agit au bénéfice de qui? Des citoyens, des patients et des gens à la maison qui attendent. Moi, ce que je veux vous dire, c'est : Ayons confiance au ministre, ayons confiance que la réforme va bien, parce que, oui, il faut refaire l'organisation administrative, mais il faut surtout travailler à la loi n° 20, travailler pour le bénéfice des patients, travailler pour le bénéfice des hommes, des femmes, des enfants et des personnes en situation plus vulnérable afin qu'ils aient accès à des soins de santé de qualité.

M. le Président, j'espère et je suis convaincu que la population a compris que le ministre travaille d'arrache-pied pour offrir des soins de qualité, travaille d'arrache-pied pour une saine gestion de leur argent, parce que c'est important. Vous savez, M. le Président, on paie des impôts, au Québec, on travaille, on paie des taxes. On paie des taxes pourquoi? Pour avoir des soins de santé de qualité et une éducation. M. le Président, je peux vous garantir que mon collègue le ministre de la Santé travaille pour donner et offrir les meilleurs soins de santé à la population du Québec.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole à notre collègue députée de Taillon.

Mme Lamarre : ...M. le Président. Alors, de toute évidence, le ministre ne m'a pas écoutée, il n'écoute pas, parce que, quand j'ai parlé de la gouvernance, j'ai dit : Orientations et résultats attendus, et il a complètement escamoté cette partie de ma réponse, et je pense que, des résultats attendus, ça, il y avait plusieurs façons de nous le prouver au cours de la dernière année, qu'il pouvait les mesurer, et il ne l'a pas fait, et qu'il pouvait les demander et il n'a pas fait ce qu'il avait à faire à ce niveau-là. Donc, il ne retient que ce qu'il veut.

Dans l'interpellation, par exemple, il y a un processus qui est normalement que le ministre doit répondre à des questions, c'est l'objectif d'une interpellation, et ce qu'on constate, c'est que le ministre ne répond pas à nos questions. Je lui en ai posé trois et j'attends toujours les réponses, et il n'a même pas donné l'ombre d'une réponse à aucune des trois questions. Mais ce qui nous a aussi conduits à demander cette interpellation-là...

Le Président (M. Tanguay) : ...pardon, collègue de Taillon. Excusez-moi. Rappel au règlement. Député de Sainte-Rose.

M. Habel : Oui. Écoutez, M. le Président, clairement, là, le ministre de la Santé a répondu aux interrogations. Il a été interpellé aussi par le député de Verchères. Donc, il répondait clairement aux interrogations du député de Verchères.

Le Président (M. Tanguay) : ...à moins que vous m'indiquiez un article...

M. Habel : Il me semble imputer des motifs — article 35 — au fait que le ministre ne répond pas aux questions et il répondait aux questions, clairement, du député de Verchères.

Le Président (M. Tanguay) : ...dans le ton et dans le propos dans le cadre du débat parlementaire. Merci beaucoup, collègue.

Mme Lamarre : Ce qui nous amène à demander cette interpellation-là, c'est aussi... et ça aurait été très simple pour le ministre après l'événement de tout simplement dire : Écoutez, je pense que peut-être je n'ai pas fait les choses parfaitement dans ce dossier-là, j'en prends note et je ferai plus attention la prochaine fois. C'est ça que la population voulait entendre et c'est ça qui aurait été rassurant, et ça, ça aurait évité beaucoup, beaucoup des conséquences et du projecteur qui a été posé pendant plusieurs jours sur le CHUM, que les gens disent vouloir défendre et que moi, je pense qu'effectivement on doit défendre, mais on doit le défendre en préservant les motifs d'intégrité et le pouvoir du conseil d'administration.

Donc, le ministre n'a pas d'autocritique, et ça, c'est dangereux et c'est très dangereux, et il n'en a tellement pas qu'il a dit : Est-ce que dans le futur je vais refaire la même chose? Il dit : Non seulement la réponse est oui, mais on me le demande. Et ça aussi, c'est inquiétant, parce que le ministre doit respecter les structures qu'il a prévues par rapport à l'organisation des soins, à la gouvernance et respecter les conseils d'administration. La population, ce qu'elle doit avoir aujourd'hui, elle doit avoir confiance, et il ne faut absolument pas qu'il lui reste un doute que la possibilité de parler au ministre peut court-circuiter tous les autres paliers qui sont prévus pour décider et demander des comptes. C'est ça qui est important aujourd'hui. Donc, il faut que la population soit assurée que, pour des raisons... quelles qu'elles soient, les gens ne viendront pas interférer avec le processus d'un C.A., d'un conseil d'administration. Et ça, si on permet qu'à chaque fois on puisse monter au ministre et on puisse demander des faveurs, ce n'est pas ce qu'on souhaite, et ce sont les pires défauts, et il n'y a aucun système qui va résister à ça. Alors, il faut que les gens qui sont nommés le soient pour leurs compétences, pas pour leurs amitiés, et ça, c'est clairement le message qu'on doit entendre du ministre aujourd'hui, et ça, c'est ce qui est important. Alors, c'est vraiment cette dimension-là qui a fait défaut dans tout ce processus-là.

Et je repose mes trois questions au ministre. Pourquoi il a annoncé lui-même la démission de M. Turgeon, qui a court-circuité le président du conseil d'administration du CHUM? Pourquoi il a eu besoin de parler trois jours de suite au directeur du CHUM, et qu'est-ce qu'il lui a dit? Et quand le ministre a-t-il parlé au Dr Harris avant les événements qui ont marqué cette démission de M. Turgeon?

Alors, je constate que ce que la population... On en a beaucoup parlé, du bien-être de la population, de l'importance pour la population... Je suis fondamentalement convaincue que notre démarche, elle est nécessaire et elle est bonne pour la population. La population, elle a besoin d'avoir un système transparent, un système où on est sûrs qu'il n'y a pas d'interférence indue et où les gens qui sont nommés le sont vraiment parce qu'ils sont les meilleures personnes à être placées là, pour leurs compétences, pour leurs qualifications. Et on a donné beaucoup de pouvoirs, dans le projet de loi n° 10, au ministre sur les nominations, alors il doit montrer patte blanche, il doit être plus blanc que blanc et il doit vraiment faire en sorte qu'on n'ait aucun doute et que, quand il a des amitiés — il peut en avoir — dans le système, il prenne encore plus de distance et qu'il garde encore plus de distance. C'est ça, la saine gouvernance, M. le Président, et c'est ça que le ministre n'a pas compris et qu'il ne nous a pas démontré qu'il comprenait, et on reste avec énormément de préoccupations.

En conclusion, le ministre ne nous a pas écoutés, il n'a pas répondu à nos questions et il n'a pas démontré, jusqu'à maintenant... Il lui reste encore une intervention pour nous prouver qu'il fera les choses différemment quand un contexte similaire se présentera, parce que, pour l'instant, il n'a pas démontré aucune autocritique, et c'est très dangereux. Je vous remercie.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Barrette : M. le Président, je pense que tout le monde a constaté de la dernière intervention de la députée de Taillon qu'on n'est pas dans une interpellation, on est dans une interprétation. J'ai rarement vu — rarement vu — un débat basé sur aussi peu de faits, aussi peu de faits. C'est hallucinant. Ce n'est que de l'interprétation, que ça, que ça, du procès d'intention, de la futurologie en annonçant l'apocalypse. C'est caractéristique de la députée de Taillon et de l'opposition officielle.

Je vais aller plus loin, M. le Président. La députée de Taillon ne se rend pas compte, là, qu'elle vient de descendre en flammes son propre parti. Elle vient de descendre en flammes son propre parti. Je comprends qu'elle n'y était pas, mais elle vient de descendre en flammes le comportement du ministre de la Santé d'il y a deux ans, qui, lui, ne serait-ce que parce qu'il considérait que sa loi le permettait, est intervenu dans le même hôpital. Il est tellement intervenu qu'on l'a traité d'abusif, d'autoritaire, d'émotif, de mal fondé. Elle vient de détruire le passé du Parti québécois si elle considère que ce que le Dr Hébert a fait selon ses principes, qui sont manifestement contraires à ceux qu'elle vient d'évoquer... En plus, elle vient de nous dire, M. le Président, une autre contradiction dans les termes, elle vient de nous dire que la population doit être assurée qu'il n'y aura pas d'interférence indue dans le système. On doit donc conclure qu'il y a des interférences qui sont justifiées? S'il y en a des indues, M. le Président, c'est qu'il y en a qui sont justifiées.

Manifestement, la députée de Taillon ne comprend pas la loi, elle ne comprend pas que le gouvernement est là pour gouverner et que gouverner peut nécessiter des interventions, dépendamment de a, b, c, d. Pour elle, c'est impossible. O.K. Elle a le droit de penser ça, M. le Président. Mais je pense qu'il n'est pas justifié de faire des interprétations à ce niveau-là, d'une part, et de faire des procès d'intention comme ils ont été faits à outrance ici ce matin, M. le Président.

Alors, pour ce qui est des réponses aux questions qu'elle me pose, M. le Président, les... Ça, M. le Président, c'est assez spécial, parce que, ces questions-là, j'y ai répondu à moult reprises. Autant le député de Verchères est fort sur la citation quand ça fait son affaire, autant la députée de Taillon n'est pas capable d'utiliser les mêmes citations, qui sont dans les mêmes médias, pour répondre à ses propres questions. Pourquoi? Est-ce que c'est parce qu'on veut ici faire autre chose qu'une interpellation?

• (11 h 40) •

M. le Président, je l'ai dit à plusieurs reprises, là, je suis intervenu parce qu'on a porté à mon attention des situations qui faisaient en sorte que c'était justifié de le faire. J'ai annoncé la démission parce que le président du conseil d'administration, M. le Président, était au Mexique et qu'elle était adressée à moi. Et ça s'adonne que, quand on m'adresse des documents à moi personnellement, bien j'agis en conséquence, et ainsi de suite. Manifestement, M. le Président, la députée de Taillon ne comprend pas ce qu'est la fonction de ministre. Ça, M. le Président, c'est flou, hein, parce que c'est l'image de ce qu'était le CHUM pour le PQ : une pancarte sur un terrain vague, aussi vague que la conception qu'a la députée de Taillon de la fonction de ministre, M. le Président. Et, M. le Président...

Une voix : Monsieur...

Le Président (M. Tanguay) : M. le député de Verchères.

M. Bergeron : Est-ce que le ministre pourrait cesser de porter des jugements sur ma collègue et lui prêter des intentions? Il me semble qu'on ne peut pas, d'un côté, réclamer qu'on ne prête pas d'intentions puis s'y livrer continuellement, de l'autre côté.

Le Président (M. Tanguay) : Alors, je l'ai déjà dit en commission, évitons peut-être de qualifier les collègues et revenons peut-être à l'objet du débat, qui est le CHUM, et, en ce sens-là, ça va bien conclure notre débat, qui va bien, je dirais, jusqu'à maintenant. Alors, à vous la parole, M. le ministre.

M. Barrette : Alors, M. le Président, les administrateurs du CHUM qui, au sortir de cet épisode, ont été très clairs, tout à fait très clairs... Et je reprendrai une citation de M. Turgeon : «Je l'ai dit et je le réitère, à chacune des entrevues, j'ai parlé que ce n'était pas une question de conflit, mais une question de perception et que, sur certains principes de gouvernance, on n'était pas d'accord. C'est beaucoup plus facile de regarder par l'avant ensuite.» Et M. Deschênes de dire : «Je remercie le Dr Barrette et le premier ministre lui-même pour leur contribution personnelle à ce que prévale aujourd'hui l'engagement pour la réussite du nouveau CHUM.» C'est ça, M. le Président, qui est sur la table aujourd'hui : l'engagement pour le CHUM, pas une interpellation.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole, qui sera amputée dû à notre horaire, au collègue de Maskinongé.

M. Plante : Alors, merci, M. le Président. Alors, M. le Président, vous savez, je n'aime pas beaucoup me répéter, mais je n'aurai pas le choix, en fin de compte, ce matin de vous répéter la loi qui régit le ministère de la Santé et des Services sociaux, la loi qui régit et sur laquelle le ministre agit et doit respecter, puisque c'est la loi qui dirige tout le ministère de la Santé et des Services sociaux. Donc, je répéterai pour les gens à la maison et pour les collègues aussi l'importance de cette loi, à laquelle on fait référence de nombreuses fois en commission parlementaire quand ça fait l'affaire des collègues. Quand ça fait moins l'affaire, on essaie de l'oublier, mais c'est important, M. le Président, puisque c'est la loi qui régit les services de santé et services sociaux au Québec.

Donc, permettez-moi de vous rappeler l'article 431 de la loi, donc, à l'alinéa 6.1° : «Il prend les mesures propres à assurer aux usagers la prestation sécuritaire de services de santé et de services sociaux.» M. le Président, juste en lisant cette ligne, on comprend les pouvoirs qui sont imputés au ministre, la responsabilité que le ministre a, hein, de faire que les prestataires, les usagers aient des services et des soins de santé sécuritaires et des services de services sociaux aussi.

M. le Président, le ministre se doit d'agir avec toute diligence à diriger, hein, les divers établissements ou les divers organes du ministère afin de permettre aux citoyens d'avoir les services. Écoutez, le ministre de la Santé actuel n'est pas le premier à avoir agi, donc... C'est terminé, M. le Président?

Le Président (M. Tanguay) : ...

M. Plante : Alors, merci, M. le Président.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup, collègue de Maskinongé. Alors, nous en sommes venus maintenant à la période des conclusions. Il y aura deux blocs : d'abord, avec le ministre pour 10 minutes, et nous conclurons avec le collègue de Verchères pour également 10 minutes. Alors, je cède la parole au ministre pour 10 minutes.

M. Barrette : M. le Président, peut-être ai-je mal compris, mais il n'y avait pas une autre intervention pour la...

Le Président (M. Tanguay) : ...l'interpellation, en vertu du règlement, les articles 295 à 302, est d'une durée fixe de 120 minutes, et le collègue a été averti et savait que chaque intervention venait amputer le temps alloué à la sixième série.

Conclusions

Alors, nous en sommes venus à vos 10 minutes.

M. Gaétan Barrette

M. Barrette : Alors, j'en suis fort désolé pour notre collègue de Lévis, avec lequel j'aurais aimé continuer notre conversation. Ça sera à reprendre en période de questions, j'imagine.

Alors, effectivement, M. le Président, je pense qu'il est temps d'arriver à une conclusion dans cette interpellation, qui clairement avait un autre objectif que celui de parler du CHUM.

Ici, nous, notre objectif était clairement de faire en sorte que la population réalise que cet épisode-là est un épisode que tous et toutes... Je suis convaincu que c'est la même chose au CHUM, je suis convaincu que c'est la même chose à l'Université de Montréal. C'est certainement le cas chez nous, et je pense même que c'est le cas dans le réseau aussi, M. le Président. Je pense qu'on aurait aimé que ça n'arrive pas. Et je peux vous dire que mon plus grand souhait est que ça n'arrive pas nulle part et que les choses fonctionnent de façon productive et au bénéfice des citoyens et des citoyennes du Québec. C'est ce que l'on veut.

Ceci dit, M. le Président, on a vu l'opposition officielle utiliser toutes sortes d'avenues pour tenter de discréditer les actions que j'ai posées dans le passé, et l'argumentaire qui a été mis de l'avant par les deux députés de l'opposition officielle, M. le Président, était clairement, mais clairement en contradiction avec leurs propres actions dans le passé, hein? Je rappellerai les interventions, pour une dernière fois, du député de Verchères dans le dossier de l'UPAC, hein? Rappelons-nous que le député de Verchères lui-même — lui-même — a invoqué une intervention jusqu'aux plus hautes sphères de l'UPAC alors qu'il était ministre. Ça m'apparaît, dans la grille d'analyse de l'opposition officielle, extrêmement grave. Tout comme je rappellerai les interventions, l'argumentaire de la députée de Taillon, qui viennent carrément désavouer tout le comportement des ministres de la Santé précédents du Parti québécois. M. le Président, regardez, là, je vais vous donner une dernière citation du Devoir, de 2013 — ça ne fait pas loin, ça ne fait pas longtemps, ça, 11 décembre 2013 : «Le ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec, Réjean Hébert, est satisfait que le conseil d'administration du CHUM soit parvenu à une entente sur la résiliation du contrat de Christian Paire.» On sait très bien que le ministre est intervenu dans ce dossier-là, il est intervenu, hein? Son intervention a mené au congédiement du directeur de l'hôpital.

Alors, ces mêmes personnes-là, là, viennent construire un argumentaire qui vise quoi, autrement que la joute politique? Moi, M. le Président, là, j'aurai manifestement tout vu aujourd'hui. Et, je le répète, aujourd'hui, ce n'est pas une interpellation, M. le Président, on n'a pas cherché à savoir ce qui s'est passé ou quoi que ce soit, on a fait une opération politique. Mais c'est intéressant, parce qu'on a pu mettre à la lumière de tout le public les contradictions intrinsèques au Parti québécois, qui ne sont pas les seuls. Ils ne sont pas les seuls, on les connaît, hein, il y a d'autres dossiers, hein? Si j'avais eu le député de Marie-Victorin ici ou le député de Saint-Jérôme, on aurait pu parler de bien d'autres contradictions internes au Parti québécois.

Mais aujourd'hui, M. le Président, pour le temps qu'il me reste, je vais parler de ce qui est important, je vais parler du CHUM, je vais parler de l'importance de garder ça derrière nous, C'est derrière nous, M. le Président. Quelle est l'utilité aujourd'hui de brasser tout ça, ne serait-ce que parce qu'il y a le commissaire actuellement qui fait son enquête? Ils ont leurs résultats potentiels. Ils veulent faire une lumière, ils ont demandé à une instance de la faire, et l'instance va la faire. C'est quoi, l'utilité, aujourd'hui, là, autrement que de relever une poussière qui devrait rester au sol? Ce qui est important aujourd'hui, M. le Président, c'est le CHUM, le CHUM, qui est un investissement substantiel de la société québécoise dans une institution qui donnera, M. le Président, des services de qualité, d'envergure, de portée mondiale. C'est ça, le CHUM.

• (11 h 50) •

Le CHUM, c'est une maison d'enseignement, de recherche, de soins de calibre international et c'est ce à quoi tous les intervenants doivent se dévouer, M. le Président. Et, quand je dis «tous les intervenants», M. le Président, je dis aussi «l'opposition».

Aujourd'hui, la députée de Taillon nous a dit que son rôle d'opposition était un rôle de vigilance. Ce n'est pas ça qu'on a vu aujourd'hui, ce n'est pas ça du tout. Les mots que je devrais utiliser ne sont pas parlementaires, alors je ne les utiliserai pas, je ne les utiliserai pas, mais tout le monde peut comprendre, et ceux qui ont écouté l'interpellation au complet savent à quoi je fais référence. Ici, on n'a pas parlé, là, de la fierté qu'auront les Québécois de voir cette institution-là, on n'a pas parlé de l'envergure de cette institution-là, on n'a pas parlé des investissements, de l'impact sur le personnel, de l'impact sur les patients, de l'impact sur l'environnement, de l'impact, sur le réseau universitaire, de l'Université de Montréal, de l'impact même, M. le Président, parce que, dans le fond, ce n'est pas juste le CHUM dont on parle, ce sont les CHU et nos réseaux d'enseignement universitaire du Québec.

Non, aujourd'hui, on a choisi de dévier notre attention sur le passé et de tenter de s'appuyer sur le passé pour annoncer...

Une voix : ...

Le Président (M. Tanguay) : ...rappel au règlement. Oui.

M. Barrette : Il ne me reste pas trois minutes?

M. Bergeron : ...une intention qu'on nous prête, de faire dévier le débat. J'ai comme l'impression qu'on nous prête des intentions. Alors, j'invite le ministre à s'en garder.

Le Président (M. Tanguay) : ...mais poursuivez, M. le ministre.

M. Barrette : Écoutez, là, si on n'est pas sur le passé, je ne sais pas où est-ce qu'on est, mais c'est vrai qu'on a beaucoup parlé du passé assez négativement, merci, puis on a annoncé un futur assez sombre, merci aussi. Mais ce n'est pas de ça, moi, je pense, qu'il est question ici, là. Et, vous voyez, M. le Président, j'essaie de parler du futur du CHUM, et de nos réseaux universitaires au Québec, et de notre réseau de santé, et on me prête, là aussi, des mauvaises intentions, M. le Président. C'est quand même extraordinaire!

Ce matin, M. le Président, là, je rencontrais notre groupe de présidents-directeurs généraux de nos institutions qui entreront en fonction le 1er avril. C'est ça qui est important pour moi. Et il y avait là aussi les P.D.G. des CHU, de tous les CISSS, de tous les CIUSSS. Et aujourd'hui on a fait le point, la ligne de départ, les objectifs, le lancement de ce qui va être une réforme qui donnera pour notre population accès à un réseau de santé performant, de pointe, disponible dont les coûts seront contrôlés et dont l'avenir public sera assuré, M. le Président. C'est ça qui est important aujourd'hui.

Aujourd'hui, revenir sur le passé en demandant ceci, en demandant cela, à la limite, en exigeant des commissions, en exigeant d'autres débats de ceci, c'est passer à côté de l'enjeu réel, M. le Président. Les administrateurs de la haute direction du CHUM se sont exprimés et ils se sont exprimés en présence du recteur de l'Université de Montréal. Ils ont clairement dit que cet épisode-là était un épisode qui était passé et eux aussi ont demandé à ce qu'on regarde vers le futur, parce qu'au CHUM, M. le Président, hein, que ce soit dans le corps médical, que ce soit dans la haute administration, que ce soit avec l'université, que ce soit avec le personnel et que ce soit avec nous, au gouvernement, l'intérêt premier, M. le Président, ce sont les patients, les patients, les patients qui sont là aujourd'hui et qui arriveront demain, et eux, comme nous, ont comme objectif de regarder devant eux pour faire du CHUM un succès, M. le Président, et ce sera un succès.

Et je suis content, M. le Président, que, sous notre gouvernement, le CHUM passera d'une pancarte sur un terrain vague au coin de Rosemont et Saint-Denis à une institution de calibre mondial dont j'aurai le plaisir, en 2016, d'inaugurer en coupant le ruban d'inauguration, M. le Président, comme je le ferai bientôt avec le CUSM.

Le Président (M. Tanguay) : Merci beaucoup. Pour 10 minutes de conclusion, la parole est au collègue de Verchères.

M. Stéphane Bergeron

M. Bergeron : M. le Président, vous me permettrez de joindre ma voix au ministre pour dire à quel point je suis désolé que notre collègue de Lévis n'ait pas eu l'occasion de s'exprimer dans le cadre du sixième bloc. J'en suis désolé, parce que le collègue de Lévis pose essentiellement les mêmes questions que nous posons, et manifestement le ministre est dans de meilleures dispositions à son égard, alors que, dans notre cas, on n'a malheureusement pas droit à des réponses aux questions que nous avons posées, puis je vais y revenir dans quelques instants, M. le Président.

D'abord, j'aimerais vous dire, M. le Président, que je crois fondamentalement... j'ai une confiance inébranlable en l'être humain. Et, bien que le ministre ne m'ait jamais convaincu, jusqu'à présent, de ses bonnes dispositions naturelles à l'égard du débat parlementaire et à l'égard des partis d'opposition, particulièrement le Parti québécois, j'avais confiance malgré tout, je lui donnais le bénéfice du doute, je me disais : Peut-être qu'on va réussir ce matin à aller au fond des choses, tu sais? J'avais confiance, j'avais confiance. Puis je pense que le ministre m'aura une nouvelle fois conforté dans mon impression, malheureusement.

Le ministre semble se demander ce qu'on fait ici. Bon. Alors, je vais l'informer un peu sur ce qu'on fait ici, M. le Président. Si cette crise était survenue pendant que la Chambre siégeait, il a fort à parier, M. le Président, il l'a reconnu lui-même, qu'à la fois la députée de Taillon, possiblement même le chef de l'opposition, le député de Lévis, possiblement même le chef de la deuxième l'opposition auraient posé des questions sur cette crise. Or, elle est survenue pendant que la Chambre ne siégeait pas. Cette interpellation est donc une occasion pour nous permettre, en tant que parlementaires, d'échanger sur cette crise, alors que nous n'avons pas eu l'opportunité de le faire. Nous nous sommes, pour ainsi dire, parlé par médias interposés, et même il y a eu une période de silence radio de la part du ministre pendant au moins 48 heures où il a complètement disparu de la circulation.

Alors, c'était une occasion de faire valoir les points de vue de part et d'autre. Le ministre nous dit : Ah! d'après les questions puis les interventions, j'ai comme l'impression que l'interpellation avait un autre objectif que de parler du CHUM. Mon impression, M. le Président, à la lumière des réponses, si on peut appeler ça des réponses, ou des commentaires qu'a formulés le ministre, c'est que lui, il avait pour objectif de parler d'autre chose que du CHUM. Alors, il a parlé de tout et de rien, il a parlé de l'époque où j'étais ministre, il a même parlé de l'époque où Réjean Hébert était ministre, ne faisant pas... ou pour les gens qui nous écoutent, ne faisant pas la distinction entre le pouvoir du ministre de nommer un directeur général d'établissement et le fait qu'il outrepasse ses fonctions en allant jusqu'à faire de la microgestion et nommer à la place des autorités compétentes un directeur de département. Alors là, je pense que le ministre essaie... je ne veux pas utiliser un terme parlementaire, mais je pense que c'est un peu sous-estimer les gens qui nous écoutent que de recourir à de tels arguments, M. le Président.

Je me permets de dire que nous n'avons toujours pas de réponse à la question : Quand le ministre a-t-il parlé au Dr Harris? Quelle est la relation entre le ministre et le Dr Harris? Pourquoi le ministre est-il intervenu à plusieurs reprises auprès de M. Turgeon et auprès de membres du conseil d'administration pour tenter d'imposer la reconduction, dans ses fonctions, du Dr Harris et pour quelle raison, alors que lui-même, selon les dires mêmes du Dr Turgeon, reconnaissait qu'il y avait un problème d'intimidation au Département de chirurgie du CHUM, M. le Président?

Alors, les questions se posent. Malheureusement, nous n'avons toujours pas...

Le Président (M. Tanguay) : ...je vais vous demander un consentement pour terminer plus tard, là. Ça ne me dérange pas. Qui fait le rappel au règlement?

M. Habel : Je peux le prendre.

Le Président (M. Tanguay) : Oui? Ce serait bon de savoir ça.

M. Habel : Écoutez, on indique que le ministre n'a pas bien répondu aux questions. Je pense qu'on ne peut pas dire ce genre de choses là à l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Tanguay) : Merci. Poursuivez.

M. Bergeron : Merci, M. le Président. Alors donc, on se serait attendus à aller au fond des choses.

Alors, le ministre semble confondre le Commissaire à l'éthique, qui se penche spécifiquement sur les dispositions du Code d'éthique et de déontologie, le rôle d'une éventuelle enquête indépendante qui se serait penchée plus à fond sur ce qui s'est passé, d'une façon générale, par rapport au CHUM, par rapport aux intervenants à l'intérieur du CHUM, hein?

• (12 heures) •

Alors, il a lui-même commandé une étude du ministère de la Santé par l'intermédiaire de l'agence, c'est donc dire qu'il fallait aller au fond des choses. Mais, comme il est directement interpellé dans cette crise, il aurait fallu une enquête indépendante. C'est tout ce que j'ai dit, M. le Président. Ça ne disconvient pas ou ça ne minimise pas l'enquête qui est menée par le Commissaire à l'éthique par rapport au Code d'éthique et de déontologie des membres de cette Assemblée, M. le Président.

Alors, le ministre nous dit qu'on a voulu soulever une poussière qui aurait dû rester au sol. Mon impression, M. le Président, c'est que le ministre, lui, souhaite pousser la poussière sous le tapis, hein, et non pas la laisser au sol. Il souhaite la mettre sous le tapis. Autrement, plutôt que de parler de toute autre chose, il aurait effectivement essayé d'éclairer la lanterne des parlementaires que nous sommes et des gens qui sont à l'écoute et qui aimeraient connaître ce qui s'est véritablement passé. Le ministre nous dit que tout le monde était dans l'erreur. Bien, ça aurait été intéressant qu'il nous dise quelle est sa version des faits. Il ne l'a pas dite, cette version des faits, M. le Président. Tout ce qu'on sait, M. le Président, c'est que le premier ministre a dû intervenir in extremis pour remettre la pâte à dents dans le tube, pour coller les morceaux de la pièce que le ministre avait brisée, hein? Le premier ministre a dû intervenir. Et là le ministre nous dit : Oui, mais tout le monde a chanté en choeur mes louanges, hein? Je pense qu'on n'irait pas jusque-là, de notre côté, M. le Président. Tout ce qu'on peut dire, c'est que, oui, il y a une entente qui a été convenue, on en est arrivé à un compromis, mais ce compromis s'est fait au-dessus de la tête du ministre. Ce compromis implique que le directeur du CHUM, M. le Président, s'il a besoin d'intervenir, s'il sent que le ministre outrepasse ses fonctions à nouveau, il peut intervenir directement auprès du premier ministre. C'est ça, la réalité, M. le Président. Le problème, c'est que ce compromis, cette entente ne vaut que pour le CHUM, que pour le directeur du CHUM. Il n'y a rien qui garantit aucun autre directeur d'établissement de santé au Québec que le ministre ne voudra pas faire de la microgestion dans la nomination de Pierre, Jean, Jacques à l'intérieur de l'appareil.

Alors, intervenir lorsqu'il y a une dysfonction à la tête d'un établissement de santé, c'est une chose. Intervenir quand le ministre, de son bureau, de sa tour d'ivoire à Québec, s'imagine qu'il y a un dysfonctionnement quelque part puis qu'il propose, menaçant les gens de nommer quelqu'un qui serait potentiellement à l'origine de ce dysfonctionnement...

M. Barrette : Un instant, là! Franchement.

Le Président (M. Tanguay) : Peut-être faire attention. Veuillez conclure, M. le député de Verchères. Faisons attention. Ça va bien, là, on achève, il reste 2 min 30 s. Merci.

M. Bergeron : Oui, M. le Président. Alors, moi, je pense que le ministre a clairement outrepassé ses responsabilités. Ma collègue, je pense, a éloquemment illustré pourquoi le ministre avait outrepassé, et de comparer sa situation à celle du Dr Hébert me semble un affront à l'intelligence des gens.

Ceci dit, M. le Président, ceci dit, M. le Président, je vais conclure sur une note positive. Vous ne m'en voudrez certainement pas.

Une voix : ...

M. Bergeron : Alors, M. le Président, oui, une note positive, parce que... J'entends de l'autre côté : Ça n'arrive pas souvent. Mais justement je vais énoncer quelque chose qui n'arrive pas souvent de la part du ministre, c'est-à-dire de reconnaître qu'il n'est pas omniscient, omnipotent, omnipuissant, hein, qu'il est simplement un être humain avec toutes ses qualités puis certainement ses défauts, il est un être humain.

Il nous a dit aujourd'hui, pour la toute première fois dans ce dossier, il nous a dit aujourd'hui : On aurait préféré que ça n'arrive pas. M. le Président, j'ai failli verser une larme lorsque j'ai entendu le ministre nous dire : On aurait préféré que ça n'arrive pas. Bien, la meilleure façon de s'assurer que ça n'arrive pas, M. le Président, c'est que ça n'arrive pas, c'est que le ministre s'en tienne aux responsabilités qui sont les siennes et n'intervienne pas à tort et à travers dans les attributions d'autres... Je pense que, dans le réseau de la santé comme dans n'importe quel réseau, quand on nomme des gens pour s'occuper d'un établissement, il faut leur faire minimalement confiance et faire en sorte qu'ils puissent effectivement avoir toute la marge de manoeuvre pour faire le travail qu'on s'attend de leur part, M. le Président, O.K., sans interférence, sans intervention de qui que ce soit. Alors, M. le Président, je pense que c'est cela qui va permettre à notre réseau d'être maximal en termes d'efficacité. Et ce qui est inquiétant, M. le président, c'est que, bien que le ministre nous ait dit : On aurait préféré que ça n'arrive pas, il nous dit : Ça risque d'arriver de nouveau.

Alors, M. le Président, ce que je sais, c'est que ce qui s'est passé a eu des incidences, je dirais, à long terme dans le réseau en termes de confiance, et cette affirmation du ministre selon laquelle il va de nouveau récidiver, je pense, ébranle la confiance à l'intérieur du réseau. Et, quand on voit ce qui s'est passé hier avec le budget, je crois que l'atmosphère n'est pas particulièrement des plus réjouissantes actuellement dans le réseau de la santé et des services sociaux.

Le Président (M. Tanguay) : Alors, merci, chers collègues.

Je lève donc la séance. Et la commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die. Merci.

(Fin de la séance à 12 h 5)

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