(Neuf heures quarante minutes)
Le Président (M. Ouimet): Alors, bon matin à toutes et à tous et à l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission spéciale sur la Loi électorale ouverte et je demanderais à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
Le mandat de la commission est de tenir des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières à l'égard de l'avant-projet de loi intitulé Loi électorale.
M. le secrétaire, avons-nous des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. J'informe les membres de cette commission que M. Pelletier (Chapleau) est remplacé par M. Blackburn (Roberval).
Auditions
Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, nous entendrons, ce matin, les partis politiques suivants: le Parti québécois, Québec solidaire et l'Action démocratique du Québec/Équipe Mario Dumont.
Je vois que les représentants du Parti québécois ont déjà pris place. Je reconnais M. François Rebello, qui est le président de la commission politique du Parti québécois. Je vous souhaite la bienvenue aux travaux de cette commission spéciale. Auriez-vous la gentillesse de nous présenter les deux personnes qui vous accompagnent?
Parti québécois (PQ)
M. Rebello (François): Bien oui. Merci, M. le Président. Bonjour à tous. Oui, je vous présente d'abord, à ma droite, Marie Bouillé, qui est la responsable du groupe d'action politique des femmes et qui est également conseillère à l'exécutif national du Parti québécois; à ma gauche, Étienne Vézina, qui est nouveau président régional dans l'Estrie pour le Parti québécois.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, vous disposez de 20 minutes.
M. Rebello (François): Merci. Conformément à l'engagement souscrit lors des consultations particulières initiales, le Parti québécois a suivi les travaux de la commission avec beaucoup d'intérêt. C'est en effet le Parti québécois qui a initié une réflexion sur la réforme des institutions démocratiques en créant le Secrétariat à la réforme des institutions démocratiques et en mettant sur pied le Comité directeur des états généraux en 2002. Nous remercions donc les parlementaires et les membres du comité citoyen de nous entendre aujourd'hui.
Malgré le nombre d'intervenants entendus par la commission, le Parti québécois tient à réaffirmer que cet exercice ne saurait être suffisant. Il est à cet égard très important de relativiser la participation de la population à ce processus de consultation. En effet, en incluant les 1 000 personnes ayant complété des formulaires sur le site Web de la commission, seulement 0,01 % ? 1/100 de 1 % ? de l'électorat québécois s'est prononcé sur la réforme proposée par le ministre, et un sondage mené en février 2006, à la demande de l'Assemblée nationale, indique que 62 % des personnes sondées n'étaient pas au courant des travaux de la commission et du projet de réforme proposé.
La commission a entendu 357 organismes et individus, dont 170 ayant déposé des mémoires. La plupart des personnes entendues par la commission sont favorables à un changement du mode de scrutin et à l'introduction d'un élément de proportionnalité. Toutefois, une majorité de ceux-ci rejette le modèle proposé par le gouvernement dans l'avant-projet de loi ou réclame qu'il y soit apporté d'importantes modifications. Une très forte majorité des intervenants a également pris position en faveur de la tenue d'une consultation populaire afin de faire trancher le débat par la population.
Mme Bouillé (Marie): En ce qui a trait aux mesures incitatives, les dispositions énonçant les mesures favorisant les candidatures féminines n'ont pas fait l'unanimité. De nombreux groupes de femmes ont salué la proposition d'introduire de telles mesures incitatives et ont demandé à ce que les incitatifs financiers soient accordés en fonction du pourcentage d'élus plutôt qu'en fonction des candidatures. D'autres ont plaidé en faveur de l'avant-projet de loi, soulevant une statistique selon laquelle les candidates féminines n'ont pas plus de difficultés à se faire élire que les hommes et que le véritable frein à l'émergence d'un plus grand nombre de femmes en politique était effectivement le faible pourcentage de candidatures féminines.
Finalement, quelques intervenants se sont fortement opposés à toute forme d'incitatif, arguant que la situation actuelle garantit l'égalité des chances des hommes et des femmes et que l'introduction d'incitatifs serait susceptible d'affecter négativement la légitimité des élus.
Le Parti québécois recommande que la bonification de l'allocation financière vouée au fonctionnement du parti soit calculée en fonction des élues et non des candidates et qu'une telle majoration soit accordée à compter de l'atteinte d'un pourcentage d'élues de 35 %.
Afin d'encourager les femmes à faire leur entrée en politique, le Parti québécois recommande une majoration du remboursement des dépenses électorales acquittées par les candidates à l'occasion de leur première mise en candidature aux élections générales. Nous considérons qu'une telle majoration ne devrait pas être sujette à l'atteinte d'un quelconque seuil de candidatures féminines dans un parti, et ce, afin de permettre aux femmes intéressées de prendre une décision éclairée, indépendamment de la performance de leur parti, et de faire connaître leur intention de se porter candidates le plus rapidement possible pour se constituer une équipe électorale solide dès le départ.
Le Parti québécois appuie par ailleurs la recommandation des groupes de femmes qui suggèrent d'imposer aux partis politiques l'obligation de se doter d'un plan d'action pour atteindre l'égalité de représentation.
Le Parti québécois recommande que ces mesures financières incitatives visant l'atteinte de la représentativité féminine égalitaire soient adoptées en vue d'être appliquées dès les prochaines élections générales. Il a en effet été reconnu par plusieurs intervenants, dont les groupes de femmes, qu'il n'y avait pas de lien nécessaire entre le mode de scrutin et l'atteinte de l'égalité hommes-femmes. Il n'y a donc pas lieu d'attendre l'instauration d'un nouveau mode de scrutin pour favoriser l'égalité.
En regard du mode de scrutin, deux positions prédominantes et opposées se dégagent des consultations générales relativement au mode de scrutin: il y a la représentativité régionale et celle de la pluralité politique. Plusieurs organisations ont massivement participé aux travaux de la commission. Ces groupes sont soit voués exclusivement à l'introduction de la proportionnalité dans notre système électoral ou à l'atteinte de l'égalité hommes-femmes dans notre société. Leur critique de l'avant-projet de loi se résume ainsi: la réforme proposée est cosmétique et consacre le tripartisme, et la compensation régionale a pour effet d'imposer l'atteinte d'un seuil effectif de 15 % à 18 % pour obtenir un siège, ce qui rend totalement théorique la présence des tiers partis à l'Assemblée nationale.
Pour eux, la volonté et la nécessité d'un plus grand pluralisme politique commandent une compensation nationale afin d'abaisser le seuil d'accessibilité à l'Assemblée nationale, et ils suggèrent donc d'accorder les 50 sièges de compensation en compilant les votes à l'échelle nationale et d'imposer l'atteinte d'un seuil minimum de 5 % pour obtenir un siège. En bref, la volonté du pluralisme politique commande une compensation nationale, ce qui aurait pour effet de retirer tout ancrage territorial à 50 députés.
Lorsque questionnés sur l'impact d'une telle compensation sur la représentativité territoriale, ces groupes affirmaient que l'élection de 75 députés dans autant de circonscriptions était suffisante pour assurer la représentativité territoriale. Or, les interventions faites devant la commission, dans les différentes régions du Québec, démontrent que ce scénario ne permet pas de maintenir une représentativité territoriale suffisante, en raison de l'immensité des circonscriptions et de la difficulté d'accès au député qu'il engendrerait.
M. Vézina (Étienne): Ceci nous amène au deuxième grand point de vue qu'on a entendu, ce qu'on appellerait la voix des régions.
Les positions défendues par toutes les régions du Québec se rejoignent sur plusieurs points. Les représentants de la Fédération québécoise des municipalités, des conférences régionales des élus, des préfets de municipalité régionale de comté et les citoyens des régions ont affirmé, de façon majoritaire, six choses: tout d'abord, que leur député joue un rôle de première importance dans la défense de leurs intérêts et qu'il était de la plus haute importance de maintenir le lien électeur-élu; que l'étendue actuelle de certaines circonscriptions rendait déjà difficile l'accès au député et que la réduction de 125 à 75 circonscriptions entraînerait la création de circonscriptions beaucoup trop vastes pour permettre l'accès au député; troisièmement, que le découpage de la carte électorale devait respecter les limites des régions administratives parce que l'infrastructure des services gouvernementaux, au Québec, passe par celles-ci et que la création arbitraire et la superposition de 26 districts électoraux ne respectaient pas lesdites limites existantes; quatrièmement, que l'ancrage territorial des 50 députés de compensation dans des immenses districts ? par exemple, selon la proposition actuelle, le district électoral qui s'étendrait de l'île d'Orléans jusqu'à Blanc-Sablon ? donc n'était que théorique et ne constituait pas un substitut acceptable à leur député de circonscription; cinquièmement, que le fait que le député de district soit désigné à partir d'une liste plutôt qu'élu directement donnerait lieu au parachutage de candidats issus de centres urbains; et, sixième et dernièrement, que la réduction de l'écart permis entre les circonscriptions soit de 25 % à 15 % de la population réduirait encore plus le poids politique des régions et aurait alors un impact négatif sur leur représentativité, ce qui nous amène à toute la question très sensible de la redéfinition de la carte.
La carte électorale, à nos yeux c'est la pièce maîtresse d'un mode de scrutin, en ce qu'elle constitue l'infrastructure de la représentation électorale à partir de laquelle se déploie la démocratie de représentation. Au cours des années, la Commission de représentation électorale a corrigé certains effets pervers du découpage des circonscriptions. Certains intervenants ont d'ailleurs rappelé les paramètres en vertu desquels la commission doit procéder à la délimitation des circonscriptions électorales, lesquels sont énoncés à l'article 15 de la Loi électorale en vigueur actuellement.
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(9 h 50)
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Ces paramètres démontrent toute l'importance de l'exercice de délimitation des circonscriptions et le fait que cet exercice est le fruit d'un processus qui a su répondre aux critères de perfectibilité. À l'évidence, ce qui ressort des consultations, c'est qu'on a minimisé très sérieusement l'impact et l'effet pervers qu'entraînerait la réduction de 125 à 75 circonscriptions calquées sur la carte électorale fédérale.
En bref, bien que les régions n'aient aucune objection à l'introduction d'un élément de proportionnalité, ce changement ne doit pas se faire au détriment de la représentativité territoriale et de leur poids politique, surtout dans un contexte où on affiche une volonté de décentralisation ainsi qu'une volonté d'occupation dynamique de notre territoire. Des consultations ont donc fait ressortir une volonté de réforme réelle du mode de scrutin ainsi que deux positions qui peuvent paraître inconciliables à première vue, soit l'approche pluraliste décrite par Mme Bouillé tantôt et l'approche territoriale dont je viens de parler. Ces deux approches mènent toutes deux à nos yeux au rejet du mode de scrutin proposé par le gouvernement dans l'avant-projet de loi.
M. Rebello (François): Le programme du Parti québécois prévoit l'introduction d'un mode de scrutin mixte compensatoire. Le programme adopté par le parti en juin 2005 en est un de pays. Lors des consultations particulières tenues en novembre 2005, le PQ a déposé un mémoire au terme duquel il a fait valoir: l'agenda politique du Parti québécois est le suivant: dès la prise du pouvoir, une assemblée délibérante sera chargée d'élaborer une constitution provisoire qui comportera une réforme complète des institutions démocratiques du Québec et inclura un mode de scrutin proportionnel mixte; un référendum portant sur le souveraineté du Québec se tiendra par la suite.
Quant au modèle à privilégier, le Parti québécois a reconnu que des tendances divergentes circulaient parmi ses membres, allant du mode mixte à compensation nationale à la proportionnelle territoriale en passant par le maintien du statu quo. Le Parti québécois a donc affirmé qu'il profiterait des travaux de la commission pour écouter la population du Québec et qu'il reviendrait déposer un second mémoire lors des consultations particulières finales.
Or, à la lumière des interventions des groupes et des citoyens entendus pendant la consultation générale et considérant les éléments suivants, que le Parti québécois ne doit pas présumer de la réalisation de son agenda politique et que dans l'intervalle il y a lieu de contribuer au débat engagé par les parlementaires, que l'avant-projet doit être écarté puisqu'il ne répond ni aux aspirations des tenants du pluralisme ni aux exigences des régions, que le Parti québécois considère que la consultation effectuée est insuffisante et qu'il n'y a pas lieu de vouloir clore le débat, que le comité citoyen devra remettre ses recommandations et que la commission devra déposer un rapport tenant compte des interventions faites pendant le travail de consultation de la commission, qu'il faut absolument concilier les approches pluralistes et territoriales et ainsi être cohérent et conséquent avec les objectifs annoncés par le gouvernement ainsi qu'avec le slogan de la commission, Votre opinion est fondamentale, que, pour ce faire et introduire des éléments de proportionnalité dans notre mode de scrutin, on devrait travailler à partir de l'équilibre établi par la carte électorale actuelle, vous devriez considérer la piste de solution suivante dans vos délibérations: la mise en place d'un mode de scrutin mixte à compensation nationale selon les modalités suivantes: le maintien des 125 circonscriptions actuelles et l'élection d'autant de députés à la pluralité des voix; l'ajout d'un nombre de sièges de compensation nationale à déterminer, avec un seuil d'obtention d'un siège de 4 %; l'élection des députés de compensation à l'aide d'un deuxième vote sur des listes prévoyant une distribution régionale dans les 17 régions administratives du Québec, avec un nombre de sièges de liste par région variable, tout en s'assurant de la parité hommes-femmes.
Cette possibilité présenterait les avantages suivants: elle permettrait aux tiers partis d'accéder à l'Assemblée nationale dès l'atteinte d'un seuil de 4 % des suffrages; il y aurait maintien de la représentativité territoriale, du lien électeur-élu et du poids politique des régions; l'écart entre les suffrages exprimés et le nombre de sièges serait corrigé plus ou moins significativement selon le nombre de sièges qui seraient ajoutés.
C'est cette base de travail qui pourrait quant à nous permettre aux membres de cette commission de tenir compte et de réconcilier les interventions faites pendant les consultations. L'augmentation du nombre de députés, tout en permettant l'introduction d'un élément de proportionnalité, rendrait également possible la modification du ratio circonscription-compensation progressivement tout en respectant les contraintes liées à l'occupation dynamique d'un vaste territoire.
Par ailleurs, le Parti québécois recommande que la population soit dès maintenant interpellée par l'annonce de la tenue d'une consultation populaire qui visera à faire trancher le débat par la population.
Alors qu'à l'instar de la Nouvelle-Zélande la Colombie-Britannique et l'Île-du-Prince-Édouard ont déjà tenu des référendums permettant à la population de se prononcer sur la réforme de leur mode de scrutin, le gouvernement de l'Ontario s'est engagé à donner mandat à une commission entièrement citoyenne de recommander un nouveau mode de scrutin et à soumettre celui-ci à la population par voie de référendum, et la Commission sur la démocratie législative du Nouveau-Brunswick recommande de faire trancher le débat par la population. Par opposition, le gouvernement du Parti libéral du Québec n'a pas encore admis le principe selon lequel un tel changement doit recevoir l'assentiment exprès de la population et considère avoir la légitimité nécessaire pour imposer son modèle de scrutin mixte compensatoire à la population.
M. Vézina (Étienne): L'autre gros morceau de l'avant-projet de loi, c'est toute la question des modalités d'exercice du droit de vote, identification de l'électeur, etc. Nous, on a une position, là, très ferme là-dessus. Je vous fais lecture très rapidement. Donc, en déposant un avant-projet de loi qui constitue une refonte complète de la Loi électorale, les libéraux ont proposé publiquement des modalités, dont le but est de faciliter l'exercice du droit de vote, qui n'ont pas été approuvées par le Comité consultatif du DGE. Il s'agit des dispositions relatives au vote au bureau du directeur de scrutin dès le 27e jour précédant le jour J, au vote par correspondance et par anticipation ouvert à tous et à l'établissement de bureaux de vote par anticipation de type itinérant.
Au surplus, en fondant dans un même avant-projet de loi et dans un même exercice de consultation, d'une part, une réforme du mode de scrutin et, d'autre part, de nouvelles modalités d'exercice du droit de vote, le gouvernement a considérablement compliqué la possibilité d'effectuer un véritable travail d'analyse et de consultation quant à ce dernier aspect. Les membres de la commission se sont fait dire, à de nombreuses reprises, par des intervenants que ceux-ci ne s'étaient pas réellement penchés sur les modalités de l'exercice du droit de vote proposées mais qu'ils s'étaient surtout concentrés sur le mode de scrutin, étant donné la complexité de la réforme proposée. D'autre part, quand on veut améliorer qualitativement le débat démocratique qui a cours pendant une campagne électorale, il faut éviter de banaliser l'exercice en permettant aux électeurs de faire leur choix avant même que les positions des candidats et des candidates soient connues et parfois avant même que les candidats et candidates soient connus eux-mêmes.
Les modalités proposées sont inspirées de la Loi électorale fédérale. Or, les taux de participation aux élections générales fédérales de juin 2004 et de janvier 2006 ont respectivement été de 60,9 % et de 64,9 %, des résultats qui tendent à démontrer à nos yeux que l'implantation de mécanismes visant une plus grande accessibilité ne contribue pas à hausser de manière significative le taux de participation aux élections. C'est un élément qui est pourtant fondamental pour maintenir une saine démocratie.
Il apparaît par ailleurs dénué de sens de permettre aux électeurs de voter au bureau du directeur de scrutin à compter du 27e jour précédant le jour des élections alors même que la période de mise en candidature se termine le 16e jour, je le répète, précédant le jour du scrutin. Une telle possibilité enlève son sens à la tenue de la campagne. Le vote par correspondance est également très problématique en regard de l'intégrité du vote et du respect de l'article 355 de la Loi électorale qui énonce que le vote est secret. De nombreux intervenants ont en effet soulevé des craintes eu égard aux risques de fraude qu'est susceptible d'entraîner le vote par correspondance.
Le Parti québécois considère que tout doit être mis en oeuvre pour maintenir l'équilibre entre d'une part l'accès au droit de vote et le maintien de l'intégrité du vote. En ce sens et à la lumière du très peu d'interventions faites sur cet aspect de la réforme, le parti recommande que l'analyse des dispositions de l'avant-projet de loi relatives aux modalités d'exercice du droit de vote ? ça, c'est les articles 313 à 359 ? soit, comme c'est l'usage, comme c'est la tradition, soumise à la sagesse du Comité consultatif du DGE pour examen, considération et recommandations.
M. Rebello (François): L'opportunité de placer des bureaux de vote sur les campus étudiants a été invoquée à plusieurs reprises afin de hausser le taux de participation des jeunes aux élections. Il s'agit en effet d'un groupe d'âge où l'abstentionnisme est très élevé. Une étude portant sur la participation aux élections fédérales de 2000 a démontré que seulement 26 % des jeunes de 18 à 24 ans ont exercé leur droit de vote à cette occasion, alors que certaines recherches révèlent que l'essentiel de la baisse du taux de participation aux élections générales, depuis le début des années quatre-vingt-dix, est attribuable à l'abstentionnisme des jeunes. L'introduction de bureaux de vote sur les campus étudiants nous semble par ailleurs plus susceptible d'encourager l'exercice du droit de vote que le vote par correspondance.
En conclusion, le processus n'étant pas complété, le Parti québécois restera à l'affût de ce dossier et ne peut qu'espérer que le gouvernement prendra en considération les positions défendues par les groupes et les citoyens en présentant un projet de loi qui saura réconcilier les approches pluralistes et régionalistes. Nous espérons par ailleurs que le gouvernement aura la sagesse de soumettre son éventuel projet de loi au jugement de la population du Québec afin de permettre aux électeurs de faire un choix libre et éclairé sur un des aspects les plus fondamentaux de la démocratie québécoise.
Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, M. Rebello, Mme Bouillé, M. Vézina, pour cet excellent mémoire. Manifestement, vous avez suivi les travaux de la commission de très, très près, et nous vous en remercions, il va sans dire.
Je vais ouvrir la période d'échange avec vous en cédant la parole, du côté ministériel, à M. le député de Trois-Rivières.
M. Gabias: Merci, M. le Président. Merci, Mme Bouillé, M. Vézina et M. Rebello. Merci de votre travail, de votre contribution.
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(10 heures)
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Je vous amène immédiatement à votre plateforme électorale, à la page 26, où vous mentionnez qu'«un gouvernement du Parti québécois accordera une grande importance à la réforme de nos institutions démocratiques déjà amorcée ? et là je cite. Dans la foulée des états généraux qui viennent de se terminer, il proposera que soit confié à une commission formée d'experts et des citoyens [...] le mandat de procéder à l'adoption [...] d'un nouveau mode de scrutin de type proportionnel.» Compte tenu de cette position, j'ai un petit peu sursauté dans l'introduction de votre exposé, lorsque vous mentionnez ceci à la page 1: «Malgré le nombre d'intervenants entendus par la commission, le Parti québécois tient à réaffirmer que cet exercice ne saurait être suffisant. Il est à cet égard très important de relativiser la participation de la population à ce processus de consultation.» Ma question est très simple. Il y a un comité citoyen qui a participé aux travaux, huit citoyens qui ont été choisis, comme vous le savez, par le hasard, qui ont participé, de façon très active, à cette commission et qui vont déposer très bientôt leur rapport. Quelle écoute, quel suivi et comment la commission devrait considérer ce rapport-là dans la suite des choses? Parce qu'évidemment je vous rappelle que c'est un préprojet de loi, c'est un avant-projet de loi, ce n'est pas un projet de loi. Alors, vous être très critiques à l'endroit du projet de loi, mais il fait preuve de beaucoup d'ouverture, on a entendu beaucoup de propositions, et je pense bien que le rapport du comité citoyen va être assez indicatif à cet égard. Alors, quelle place on doit donner à ce rapport citoyen dans nos travaux?
M. Rebello (François): Bien, c'est une démarche très positive que vous menez, c'est un débat qui est très utile, de peser le pour et le contre de différentes options, mais manifestement ce n'est pas l'enjeu de l'heure au Québec. Il n'y a pas eu des débats importants qui se sont tenus un peu partout sur la question encore, et, si on devait changer le système démocratique, qui est très fondamental pour une société comme la nôtre, il faudrait s'assurer qu'il y ait ce niveau de profondeur là du débat. Ensuite, il doit y avoir une légitimité majeure au résultat, et la seule façon de le faire, à notre sens, c'est qu'il y ait une consultation de la population à la base. Chaque citoyen doit approuver, doit pouvoir approuver l'éventuel changement, étant donné l'importance que ça représente. Donc, simplement, on vous signifie le fait que, même si vos travaux sont très utiles, très importants, très pertinents, il ne faudrait pas oublier qu'au bout de la ligne on joue avec notre système démocratique puis que pour ça il va falloir s'assurer qu'il y ait un vrai débat de fond au Québec puis que chaque Québécois ait la possibilité de se poser la question si c'est vraiment ce système-là qu'il souhaite.
Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le député. Mme la députée de La Pinière.
Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour, M. Rebello, Mme Bouillé, M. Vézina, je vous souhaite la bienvenue à la commission. Je profite de cette occasion pour féliciter le Parti québécois pour l'élection partielle dans Sainte-Marie?Saint-Jacques. Donc, la démocratie a parlé.
Il y a plusieurs questions qui sont soulevées dans votre mémoire, d'abord à la page 9. À la page 9, vous suggérez le maintien des 125 circonscriptions actuelles et l'élection d'autant de députés à la pluralité des voix. Vous dites qu'il faut ajouter un nombre de sièges de compensation nationale à déterminer, avec un seuil d'obtention d'un siège de 4 %. Combien de sièges de compensation est-ce que vous allez allouer, considérant que vous maintenez les 125 circonscriptions?
M. Rebello (François): Écoutez, aujourd'hui, on en arrive à certains constats après vos travaux, après ce qu'on a lu, ce qu'on a vu. On en reste à un niveau de certains principes parce qu'on ne peut pas entrer dans tous les détails, là. Il y a des questions qui vont devoir être réfléchies avec attention, d'ailleurs par vous, les parlementaires. Donc, c'est pour cette raison-là qu'on n'a pas tout de suite mis un chiffre exact. On ne se sentait pas l'expertise, là, pour en arriver à définir ça de façon aussi pointue. Donc, on souhaite qu'il y ait une réflexion plus approfondie par les parlementaires sur la question du nombre.
Mme Houda-Pepin: Mais vous êtes conscients qu'en ne définissant pas le ratio des sièges de circonscription par rapport aux sièges de compensation... Lorsque vous dites que le deuxième vote pour les députés de compensation sur une liste nationale doit respecter l'alternance hommes-femme et une distribution régionale dans les 17 régions administratives, avec un nombre de sièges de liste par région qui soit variable, donc variable, nous avons, au Québec, un certain nombre de régions administratives qui ont des circonscriptions qui chevauchent entre deux régions administratives, par exemple la Gaspésie?Bas-Saint-Laurent, le Centre-du-Québec, l'Estrie, les Laurentides, Lanaudière. S'il fallait qu'on applique le modèle que vous nous proposez, comment est-ce que vous allez concilier ce que vous nous proposez avec la réalité de l'imbrication des circonscriptions dans les régions administratives actuelles?
M. Rebello (François): Votre intervention démontre la complexité, justement, les enjeux à prendre en compte avant de fixer un nombre. Donc, c'est pour ça qu'on a souhaité plus sage ? je pense que vous serez d'accord avec nous, là ? de laisser le soin aux parlementaires de faire la réflexion, justement prendre en compte toutes ces questions-là sur le nombre de régions et le nombre de députés.
Mme Houda-Pepin: Dernière petite question pour laisser le temps à mes collègues. À la page 8, vous dites que l'agenda politique du Parti québécois est le suivant: dès la prise du pouvoir, une assemblée délibérante sera chargée d'élaborer une constitution provisoire qui comportera une réforme complète des institutions démocratiques du Québec et inclura un mode de scrutin proportionnel mixte. Et vous dites verbalement: Un référendum se tiendra par la suite. Dois-je comprendre par cela que le Parti québécois n'est pas prêt à proposer ou à accepter aucune proposition relativement à la réforme du mode de scrutin tant et aussi longtemps que la séquence des événements, telle que vous l'avez décrite, c'est-à-dire une constitution provisoire qui inclurait une réforme... Donc, vous soumettez finalement la réforme électorale à l'agenda de l'indépendance du Québec. On ne peut pas faire de réforme tant qu'on n'a pas entamé le projet de l'indépendance?
M. Rebello (François): C'est sûr que, nous, comme gouvernement, quand on sera au pouvoir, là, on va faire ces changements-là importants au système électoral dans le cadre de la réalisation du projet de pays. Ça, c'est notre position. Maintenant, aujourd'hui, ce qu'on souligne, c'est que pour l'instant votre projet de loi, ce que vous avez mis sur la table, c'est inacceptable, ça ne remplit pas les conditions. On soumet à votre attention des pistes pour en sortir, de ce marasme-là dans lequel... Bon. La proposition de départ a amené tellement de problèmes que c'est impossible d'arriver avec un consensus pour des travaux aussi brefs. Donc, nous, on vous dit: Continuez la réflexion sur certaines bases qu'on vous propose. Et bien sûr, comme gouvernement du Parti québécois, on ne fera pas de réforme électorale avant de réaliser un pays.
Le Président (M. Ouimet): Merci, Mme la députée de La Pinière. Mme la députée de Chauveau.
Mme Perreault: M. le Président, je pense que madame voulait ajouter quelque chose.
Le Président (M. Ouimet): Ah! Désolé. Madame.
Mme Bouillé (Marie): Oui. Merci. Je voulais rajouter que la conclusion qu'on en tire suite aux travaux, c'est qu'on se retrouve devant des positions irréconciliables sur certains aspects: en termes de représentativité régionale, pluralité politique, présence de tiers partis, parité femmes-hommes. Donc, pour nous, on a décidé de vous soumettre une piste de réflexion malgré la position du Parti québécois, qui est très claire, comme vous l'avez souligné tantôt, de façon à faire avancer le débat. On est conscients qu'il n'y a pas de modèle parfait, il faudra être très prudent, c'est la base de notre démocratie, et c'est vraiment, pour nous, les commissaires qui auront donc à définir le rôle, entre autres, des personnes, etc. Donc, on vous laisse la suite des travaux.
Le Président (M. Ouimet): Merci, Mme Bouillé. Mme la députée de Chauveau.
Mme Perreault: Merci beaucoup, M. le Président. Bienvenue à vous trois.
Tout à l'heure, vous avez abordé la question du référendum. J'aimerais savoir si d'aventure pour seriez d'accord pour une consultation lors d'une élection générale. Est-ce que pour vous c'est la même chose, référendum ou consultation lors d'une élection générale?
M. Rebello (François): C'est un autre élément où on a voulu laisser différentes options sur la table. Nous, pour nous, ce qui est important, c'est le principe de consulter la population. Puis d'ailleurs, là, je vous demande vraiment d'y penser sérieusement. C'est très, très important, ce principe-là de consulter la population, surtout quand on parle de démocratie. Puis qu'on soit rendu après des mois de travaux comme ça puis que ce principe-là ne soit pas encore établi clairement, qu'avant de faire une réforme des institutions démocratiques il va y avoir une consultation de la population, c'est un problème. À mon avis, il y a un peu une crise de confiance, au niveau du processus, qui est reliée au fait que ça n'a pas été reconnu encore. Donc, il faut que vraiment que rapidement cet élément-là soit reconnu.
n(10 h 10)n Maintenant, une fois qu'on consulte la population, on veut consulter la population directement. Il y a différentes options. Oui, il y en a qui ont évoqué référendum, plébiscite. Ça, c'est toutes des possibilités. Nous, on n'a pas voulu trancher la question maintenant. On pense qu'il y a des éléments de réflexion, mais on n'est pas fermés à une forme ou l'autre de consultation populaire, en autant bien sûr que chaque citoyen ait la possibilité de mettre son X dans une case concernant le projet proposé.
Mme Perreault: Vous avez abordé les modalités d'exercice du droit de vote. Je ne sais pas si je vous ai bien compris, mais, quant à l'instauration de bureaux de vote itinérants, est-ce que vous étiez d'accord ou non? J'ai cru comprendre que vous disiez que le comité, au bureau du Directeur général des élections, ne s'était pas positionné favorablement à cette proposition-là. J'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Vézina (Étienne): Oui. Nous, écoutez, Mme la députée de Chauveau, moi, je peux vous parler d'expérience, là. On sort d'une élection fédérale où toutes ces règles-là, le bureau de vote spécial, le bureau de vote itinérant, le vote avant que les candidats soient connus, le vote par correspondance, tout ça a été essayé, et ça a provoqué, notamment dans le comté fédéral de Brome-Missisquoi, des problèmes très, très sérieux. Il y a eu des cas où il y a des gens qui se sont retrouvés à signer des documents qui dans le fond autorisaient des tiers à voter postalement pour eux, il y a eu des cas où... C'était très intéressant parce que le vote spécial se tenait ? le comté est absolument immense ? le vote spécial se tenait dans un petit village qui se retrouvait à être un bastion d'un des partis, et c'était là qu'on pouvait voter, puis les gens qui soutenaient l'autre parti habitaient à 3 h 30 min, puis eux autres n'y allaient pas, au vote spécial. Donc, il y a eu 1 000 votes dans la boîte avant même que la liste électorale soit complétée.
Nous, notre compréhension, honnêtement, puis on ne veut pas être chauvins, c'est que le système actuel que nous avons au Québec préserve beaucoup mieux l'intégrité du vote que ce qui est proposé et que le système fédéral, sous prétexte de favoriser la participation, à notre avis ouvre la porte à toutes sortes d'abus et est très inquiétant, et on y est très fortement défavorables.
Le Président (M. Ouimet): Une dernière courte question, Mme la députée de Chauveau.
Mme Perreault: Oui. Toujours dans les modalités d'exercice du droit de vote, si d'aventure le Québec décidait de tenir les élections le dimanche, vous ne croyez pas que le fait d'instaurer, à votre proposition, des bureaux d'élection sur les cités universitaires serait, à toutes fins pratiques, inutile dans le cas où les élections se tiendraient le dimanche, de un? Et de deux, si on instaurait le vote par correspondance, on ne viendrait pas en même temps aussi régler ce problème-là d'avoir des bureaux d'élection sur les cités universitaires?
M. Rebello (François): D'abord, quand on met une institution sur un campus, là, on est proche aussi physiquement. C'est-à-dire, même si c'était le dimanche, là, c'est physiquement près du lieu où habitent les étudiants. Puis il faut être conscient d'une chose, là: un taux de participation de 26 % des jeunes, c'est dramatique. Ça n'a pas de bon sens. Si jamais vous voulez améliorer la démocratie au Québec puis que vous ne mettez pas des bureaux de vote sur les campus, là, alors que c'est assez facile à faire, vous en conviendrez avec moi, il va y avoir un gros problème. C'est minimal. Puis en plus, la première fois qu'on était venus, il y avait des jeunes ici qui avaient soulevé la question qu'il fallait non seulement travailler pour faire participer les jeunes dans les campus, mais aussi à l'extérieur des campus. Mais minimalement assurons-nous que, l'endroit où ils sont physiquement concentrés, on fait le maximum.
Donc, les bureaux sur les campus, ça va être utile, et même si c'était... C'est sûr que c'est encore mieux si c'est une journée où l'université est ouverte, mais, même si l'université était fermée parce que c'est un dimanche, par exemple... D'abord, ce n'est pas complètement fermé, vous savez qu'il y a beaucoup d'étudiants qui étudient le dimanche, à l'université, à la bibliothèque, tout ça, donc il y a quand même une vie qui se passe là, puis on va juste favoriser... Puis il faut augmenter... À 26 %, là... Ça nous prend des cibles, il faut monter de 10 %, 15 %, 20 % ce taux de participation là. Puis vous avez vu en plus la tendance, c'est très, très inquiétant.
Alors, je vous demande de passer par-dessus les considérations partisanes, puis c'est sûr que ce n'est pas facile, dans certains contextes, de le faire, mais là il faut le faire en se disant: La clientèle qui vote le moins au Québec, c'est les jeunes, puis il faut qu'il y ait au minimum cette mesure-là pour favoriser la participation électorale des jeunes.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, merci, Mme la députée de Chauveau. Du côté de l'opposition officielle, maintenant, M. le député de Masson.
M. Thériault: Il me reste combien de temps, M. le Président?
Le Président (M. Ouimet): Vous allez avoir 4 min 30 s à peu près.
M. Thériault: Je vais revenir après les citoyens, si vous voulez bien.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Ce n'est pas dans nos habitudes, mais... M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.
M. Picard: Merci, M. le Président. Merci au représentant du Parti québécois.
Le Président (M. Ouimet): Désolé de vous induire en erreur. Vous avez plus que ça, M. le député de Masson, vous avez au moins neuf minutes et quelques secondes. C'est des blocs de 10 minutes, là, pour l'opposition officielle.
M. Thériault: O.K. Donc, ils n'ont pas débordé sur mon temps, hein?
Le Président (M. Ouimet): Non.
M. Thériault: Bon. D'accord.
Le Président (M. Ouimet): Voulez-vous y aller à ce moment-ci?
M. Thériault: Bien, je vais revenir. Je vais laisser les gens questionner le Parti québécois. Je le connais, le Parti québécois.
Le Président (M. Ouimet): O.K. Bien. Alors, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.
M. Picard: Merci encore une fois, M. le Président. Bon!
Si je comprends bien votre mémoire, un, j'aurais une première question, puis après ça j'ai un commentaire d'ordre général. Qu'est-ce qu'il y a de nouveau dans votre mémoire par rapport à votre première présentation? Parce que je viens de l'avoir, donc je n'ai pas comparé, donc si vous pouvez me faire un bref résumé du nouveau.
Mais vous me direz si je suis correct. Si je reprends les propos de la députée de La Pinière, dans votre document, vous dites: Nous, on va être prêts à faire une réforme lorsqu'on aura un pays. Vous êtes contre la réforme proposée puis vous nous dites: Vous devriez consulter la population. Donc, qu'est-ce que je comprends: si des élus décident qu'il y a un référendum, on va diviser le Québec encore une fois. Est-ce que ma compréhension est bonne?
Et ma dernière question: Si on atteint un consensus entre les partis, à l'Assemblée nationale, ça va être quoi, la position du Parti québécois? Parce que qui dit consensus des partis, bien le Parti québécois, les élus vont dire: Oui, on adhère à un modèle, qui ne sera pas parfait, on a tous dit qu'il n'y a pas de modèle parfait. Donc, j'aimerais vous entendre là-dessus. Puis est-ce que mon raisonnement est correct? Parce que j'énumère qu'est-ce qui est dans votre mémoire.
M. Rebello (François): Je ne voudrais pas relire le mémoire au complet, là. Cette question est ouverte, mais je vous dirais qu'aujourd'hui, d'abord, il y a un élément qui est important. On a essayé de refléter un peu ce qu'on a lu, ce qu'on a entendu des présentations que les gens ont faites durant vos travaux puis on a soulevé certains problèmes importants à la proposition de départ. Parce que c'est ça dont on parle aujourd'hui. On parle du projet de loi que le Parti libéral a déposé au départ. Et, dans ce projet-là, on a soulevé des problèmes majeurs qui ont été mentionnés par de nombreux groupes, notamment la question de l'importance de maintenir des députés proches de leur population en n'agrandissant pas les circonscriptions électorales. Ça, c'est un point important. Donc, ça, prenez-le en note, premier point très important qu'on soulève aujourd'hui.
Deuxième point important qu'on a soulevé par rapport au projet initial, c'est que, de la façon que les règles sont faites, ça ne favorisera pas la participation des plus petits partis, O.K., et ça, c'est un gros problème, parce qu'une des raisons pourquoi les citoyens veulent des changements au système, c'est de favoriser l'émergence de plus petits partis pour qu'ils puissent prendre leur place. O.K.?
Dans le projet de départ, il y a des gros problèmes avec ces deux éléments-là. Donc, nous, on vous dit: À cause de ça, là, il faut changer la base de travail, ça ne fonctionne plus, le projet de loi initial. On vous dit par contre qu'il y a certaines pistes que vous pouvez regarder pour tenir compte de ces difficultés-là pour quand même arriver avec des éléments positifs. Donc, voilà essentiellement ce qu'on vous a dit aujourd'hui. Il y a des pistes de solution, c'est important, il y a certains principes auxquels on croit. Les citoyens sont venus mentionner ces principes-là. Donc, on va dans ce sens-là pour l'instant.
L'autre élément aussi qui est très, très important, c'est que, vous avez tout à fait raison, pour faire un projet de loi, pour réformer le système électoral, ça va prendre un consensus. Ça va prendre deux sortes de consensus: un consensus des parlementaires, des différents partis, puis pas juste sur un principe, sur un projet qui inclut toutes sortes d'éléments très précis. Ça, c'est le premier élément, puis ça, on a très hâte d'ailleurs que tous les députés ici le reconnaissent. Premier élément: un consensus. S'il n'y a pas de consensus des partis politiques, on ne peut pas changer notre réforme électorale, c'est trop important. Premier élément.
Deuxième élément, une fois qu'on a atteint ce consensus-là ? puis vous conviendrez qu'on n'est pas rendus encore ? deuxième élément, il faut soumettre ça à l'approbation des citoyens du Québec dans une consultation populaire où chaque citoyen peut voter. C'est les deux éléments importants. O.K.? Si on arrivait à atteindre ces objectifs-là...
Le Président (M. Ouimet): On est à court de temps pour l'Action démocratique.
M. Rebello (François): Oui. Juste pour conclure, si on arrivait à atteindre ces objectifs-là, bien, oui, allons-y, changeons les règles du jeu.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.
Parlons du comité citoyen. Donc, j'ai Mme Proulx, M. Boivin, M. Acharid et Mme Lafontaine, dans cet ordre-là. Donc, Mme Proulx.
Mme Proulx (Mélanie): Merci. Je vous ramène à la page 4 de votre mémoire où vous parlez des bureaux de vote sur les campus étudiants. Vous dites: «L'introduction de bureaux de vote sur les campus étudiants nous semble par ailleurs plus susceptible d'encourager l'exercice du droit de vote que le vote par correspondance.» J'ai bien compris pourquoi vous rejetiez la possibilité du vote par correspondance, mais j'aimerais que vous m'expliquiez en quoi selon vous les bureaux de vote sur les campus attireraient plus les jeunes finalement que le vote par correspondance.
Et en même temps vous semblez avoir entendu plusieurs requêtes sur plusieurs aspects de la réforme, mais, concernant les jeunes, il y a quand même plusieurs recommandations qui nous ont été faites, et je reprends vos mots de tout à l'heure. Vous avez dit: Faisons le max concernant les jeunes. Pourtant, vous en avez retenu une seule dans votre mémoire. J'aimerais savoir pourquoi vous n'avez pas retenu les autres recommandations qu'on a entendues.
n(10 h 20)nM. Rebello (François): Je vous dirais que, les autres recommandations qui ont été formulées, on ne les a pas nécessairement rejetées, là. Je vais vous dire, vous ne lirez pas, dans ce mémoire-là, qu'on est contre les autres mesures... On a juste voulu insister sur une en particulier parce que c'est une qui peut faire une grosse différence, là, tu sais. Parce qu'il ne faut pas juste avoir des grands principes puis de la théorie, il faut que, dans la pratique, le vote des jeunes monte. Puis je peux vous dire, pour avoir été longtemps, disons, assez actif sur les campus universitaires, que ça peut faire une grosse différence si les bureaux de vote sont plus près du campus. Je peux vous le dire, là, ça augmente beaucoup le taux de participation. Dans certaines élections où ça a été le cas, il y a eu un effort beaucoup plus grand des organisations étudiantes des différents partis pour sortir le vote puis ça a donné des meilleurs résultats. O.K.? Autrement dit, ça a un impact important.
Oui, c'est vrai, il faut rejoindre les jeunes partout ailleurs, mais on sait qu'il y en a quand même une bonne partie qui sont sur les campus, une grande majorité d'ailleurs dans leurs premières années où ils ont l'occasion de voter pour la première fois. Donc, c'est important de miser d'abord là-dessus. C'est juste ça qu'on vous dit. Mais les autres propositions aussi sont intéressantes, puis je pense que, comme tu dis, plus on en fait pour aider au vote des jeunes, mieux c'est pour la société québécoise.
Le Président (M. Ouimet): Merci, Mme Proulx. M. Boivin.
M. Boivin (Guillaume): Bonjour, messieurs, madame. Je comprends que vous n'avez pas de proposition ferme et exacte sur le nombre de sièges de compensation que devrait comporter un éventuel mode de scrutin nouveau, mais quand même, là, il n'est pas innocent que ce soit un nombre de 5, 10 ou bien de 50 ou 75. Donc, à ce moment-là, pourriez-vous faire état, sans fixer un nombre précis, de c'était quoi, le «ballpark» des discussions, là, s'il a eu lieu dans vos instances?
Et, deuxième des choses, s'il y avait une consultation de type référendum, plébiscite, que penseriez-vous qu'il y ait une consultation multimodale, c'est-à-dire qu'il n'y ait pas simplement un choix, oui, non, mais, à ce moment-là, un choix, oui, voulez-vous une réforme, non, vous ne voulez pas de réforme, et ensuite quelques modèles seraient présentés, qui présentent des arbitrages différents, et, à ce moment-là, les citoyens pourraient trancher? Et également nous ferons une proposition: Que penseriez-vous qu'un éventuel modèle du comité citoyen pourrait être soumis à une consultation semblable?
M. Rebello (François): O.K. Sur le nombre de députés de compensation, je vous dirais simplement que ça va prendre un minimum de députés de façon à s'assurer que l'objectif, entre autres, de représentation des différentes régions soit atteint. Donc, ça exclut tout de suite votre élément, exemple, de quatre ou cinq députés, là. On ne pourrait pas, à quatre ou cinq députés, représenter l'ensemble du Québec. Donc, ça, ça vous donne une idée du «ballpark».
Puis après ça, à l'autre extrême, bien, c'est sûr qu'il faut mettre un nombre de députés efficient. Donc, il ne faudrait pas aller non plus dans un trop grand nombre de députés. Donc, il y aurait entre les deux, tu sais, en atteignant l'objectif de représentation des différentes régions dans une liste et aussi de parité hommes-femmes, donc l'objectif de diversité, tout en s'assurant qu'on a un nombre efficient. Ce serait probablement quelque part là, la solution.
Bon, maintenant, sur le type de question à poser ou autres, nous, encore une fois on n'a pas voulu statuer tout de suite sur la question. Il y a différentes possibilités. On n'est pas fermés à une consultation, disons, variée, là. Il y a plusieurs possibilités. L'important encore une fois, là, c'est de consulter la population directement. Puis je comprends, avec le sens de votre question, que vous êtes aussi assez favorable à ça. Donc, nous, dans la mesure où on remplit les conditions qu'on a dites...
Mais là il y a un élément important. Avant d'aller voir le peuple dans un référendum, ou dans un plébiscite, ou dans une consultation directe, ça prend un consensus des parlementaires. C'est très, très important. O.K.? Donc, votre travail citoyen, il est très important, mais vous n'êtes pas des élus du peuple, les représentants des citoyens. Il faut qu'après ça vous fassiez le chemin vers les élus du peuple en leur disant: Voici ce qu'on a pensé, puis il doit y avoir un consensus des parlementaires. Ça a été fait comme ça de façon traditionnelle, disons, au Québec puis ça a rassuré, je pense, la population. Moi, depuis que je suis jeune, je sais que, quand ils changent les cartes électorales ou qu'ils changent les règles, il y a eu une discussion entre les différents partis, puis, moi, ça m'a toujours rassuré. Donc, j'aimerais ça qu'on garde cet esprit-là pour ne pas que les gens aient l'impression que la réforme qui est proposée, elle vise à favoriser un côté ou l'autre du Parlement.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Allons maintenant du côté de M. Acharid.
M. Acharid (Mustapha): Merci, M. le Président. Merci, messieurs et madame. Une petite question: Si un mode de scrutin qui répond à vos attentes soit soumis avant que votre parti soit au pouvoir, est-ce que vous êtes prêts à l'appuyer?
M. Rebello (François): Dans la mesure où il y a une discussion avec les parlementaires qui est menée, qu'on trouve qu'on établit un premier consensus avec les parlementaires puis qu'ensuite on y va avec une consultation populaire, bien, si vous lisez ce mémoire-là, oui. O.K.? Mais il y a des éléments à rencontrer. Pour l'instant, c'est important de voir que ces objectifs-là, ces considérations-là ne sont pas atteintes encore. Donc, le Québec n'est pas prêt pour faire une réforme électorale maintenant, ça, c'est clair, dans le contexte des travaux actuels, où vous en êtes. Il y a eu une première phase, mais il y a encore beaucoup de travail à faire.
Le Président (M. Ouimet): Merci, M. Acharid. Mme Lafontaine.
Mme Lafontaine (Martine): Moi, je reviens sur la question des jeunes. D'après vous, est-ce que le fait d'abaisser l'âge du vote de 18 à 16 ans serait un autre incitatif pour que nous jeunes s'intéressent de plus en plus...
M. Rebello (François): Chez nous, dans le parti, cette question-là a été soulevée par les jeunes du parti, et je pense qu'il y a une certaine ouverture sur la question. Mais ce n'est pas encore mûri complètement. Mais je vous dirais que c'est une piste qu'il faut absolument que vous continuiez à considérer. C'est évident que, si on veut que nos jeunes votent, il faut qu'ils soient placés dans une position où ils sont responsabilisés. Donc ça, c'est une piste à considérer. Mais je vous dirais qu'on n'a pas encore statué définitivement sur cette question.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, Merci, Mme Lafontaine. M. Rebello, Mme Bouillé, M. Vézina, merci infiniment pour... Ah! Excusez-moi. Ça fait trois fois que je vous oublie. C'est parce que vous avez défait un peu l'ordre, là. Mais revenons à M. le député de Masson. Je ne voulais pas l'oublier. Vous avez 9 min 30 s.
M. Thériault: Merci quand même, M. le Président.
J'aimerais revenir sur la question du consensus. Je comprends qu'il y a deux volets dans l'avant-projet de loi, et que le volet mode de scrutin en est un, le volet modalités d'exercice du droit de vote en est un autre, et qu'à cet égard la tradition parlementaire, vous le dites dans le mémoire, implique qu'habituellement les modifications à la Loi électorale procèdent par consensus. Est-ce que, quand vous dites: Ça prend deux consensus, vous faites référence à ça? Parce qu'au niveau du mode de scrutin vous nous lancez des pistes aujourd'hui. Vous dites aux parlementaires: Écoutez, vous avez, avec le support du secrétariat à la commission, la possibilité de faire des modèles, de faire des simulations, de voir le caractère optimal ou minimal, là, des sièges de compensation. Nous, on ne s'embarque pas là-dedans, on vous donne le principe. Mais vous donnez aux commissaires autour de cette table-là l'obligation d'un consensus sur le mode de scrutin. Est-ce que vous ne trouveriez pas ça...
Je ne sais pas si c'est ça que vous dites. Et, si c'est ça que vous dites, est-ce que vous ne trouveriez pas ça utile qu'à un moment donné ce débat puisse être tranché par la population et qu'en quelque part, justement pour dépasser ce non-consensus ou cette difficulté consensuelle, bien, que le peuple finalement puisse lui-même apprécier la chose et donner son consentement éclairé ou non?
M. Rebello (François): Moi, je vais vous dire, là, prenons un scénario où il n'y aurait pas de consensus des parlementaires mais qu'il y aurait une consultation, un référendum sur un nouveau système électoral au Québec. Il me semble que ce ne serait pas rassurant. Il me semble que ce ne serait pas rassurant. Moi, je n'aimerais pas ça, comme citoyen, là, qu'on joue avec les fondements même du système comme ça. Je pense que la sagesse du gouvernement, ce serait qu'avant même d'aller consulter la population il y ait un travail de fait avec les différents partis en Chambre puis qu'on en arrive à un consensus. Il me semble que ce serait fortement préférable puis que vous avez ce devoir-là d'y arriver dans la mesure du possible.
n(10 h 30)n Bien sûr, ça pourrait être invoqué dans une situation où il y aurait vraiment une mauvaise foi ou je ne sais pas trop, là, des... Peut-être qu'on pourrait... Ultimement, c'est vrai que c'est démocratique de consulter la population sans avoir eu avant l'aval des différents partis, mais disons que ce serait fortement préférable qu'il y ait un travail de fait par les parlementaires. Tu sais, c'est quand même particulier que, pour des éléments plus techniques comme les cartes électorales, puis tout ça, on s'impose un devoir de consensus entre les différents partis, mais, pour une question aussi fondamentale que le mode de scrutin, qu'on passe par-dessus cette obligation-là. Donc, oui, mesdames, messieurs, on vous demande de faire un travail entre parlementaires avant d'aller voir la population sur une question comme ça.
M. Thériault: Sur les mesures incitatives, là je comprends que vous dites: Ça prend un consensus pour changer les choses, mais vous nous dites: Compte tenu du fait qu'il n'y a pas la démonstration d'un lien nécessaire entre la quincaillerie puis la parité hommes-femmes, etc., vous nous dites, il faut aller de l'avant dès la prochaine élection. Est-ce que le consensus est, à ce moment-là, aussi nécessaire? Considérez-vous que, compte tenu de l'introduction que vous nous avez faite, là, à savoir qu'il y avait des positions un petit peu divergentes, est-ce que vous considérez qu'on va être capables, nous, les parlementaires, de livrer votre volonté qu'on aille de l'avant dès prochaine élection? Moi, je voudrais bien, là, mais je ne suis pas certain que tout le monde partage nécessairement les mêmes visions autour de la table. Nous ne sommes pas... Alors, qu'est-ce que vous pensez de ça? Est-ce qu'il est possible de réaliser ça?
Mme Bouillé (Marie): Bien, malgré vos préoccupations que vous pensez ne pas avoir atteint un consensus, j'espère que vous l'avez atteint, parce que, écoutez, on est en déficit démocratique au niveau de la représentation des femmes à l'Assemblée nationale. Aux dernières élections, là, on se retrouvait avec 32 % de femmes à l'Assemblée nationale, et ça, sur des efforts qui ont été faits sur, quoi, une soixantaine d'années à peu près. Donc, on n'a pas fait énormément de gains. On se classe bien au niveau mondial, là, si on se compare à d'autres pays, mais quand même on est loin d'avoir atteint une parité hommes-femmes. Donc, j'espère que vous allez au moins avoir un consensus sur cette question et que, les incitatifs, que j'appellerais plutôt des actions positives pour encourager les femmes à non seulement se présenter, mais à être élues à l'Assemblée nationale, vous allez en arriver à établir une base commune pour mettre ça en place pour les prochaines élections. Parce que, de la manière que c'est parti là, on en arriverait, si on regarde l'historique, on en arriverait à avoir une parité hommes-femmes ici, à l'Assemblée nationale, dans à peu près 23 ans, en 2029. Donc, il faut mettre en place des mesures d'actions positives.
M. Thériault: Merci. Le Parti québécois, l'automne dernier, est venu nous dire un peu ce que vous nous avez dit, là, en introduction, de la position du Parti québécois: voici notre agenda politique; il est évident que, dans la mesure où notre agenda politique ? et il est tout à fait légitime, au Québec, d'être souverainiste, à ce que je sache ? dans la mesure où notre agenda politique impliquera, dès la prise du pouvoir, une assemblée délibérante, la construction, l'émission d'une constitution provisoire dans laquelle évidemment les institutions démocratiques d'un Québec souverain seraient effectivement, là, présentes ? et le mode de scrutin est un des éléments des institutions démocratiques d'un pays ? vous nous dites, si je comprends bien aujourd'hui, malgré cela, malgré cet agenda politique, nous essayons de faire avancer la réflexion des commissaires tout en leur rappelant qu'ils devront être consensuels. Nous voulons faire avancer la réflexion des commissaires en leur disant: Il y a comme un Québec qui pourrait être cassé en deux. Il y a deux positions qui pourraient apparaître contradictoires ? pluraliste et territoriale, et régionaliste ? et, si vous voulez avancer dans votre réflexion et proposer quelque chose qui pourrait réconcilier les choses, bien vous allez devoir travailler à partir de l'infrastructure électorale actuelle et ajoutée.
Je ne sais pas si on va arriver à un consensus là-dessus. Mais est-ce que je comprends bien que ce que vous nous dites, c'est: si vous voulez refléter ce qui s'est dit autour de cette table, vous devez nécessairement tenir compte et ne pas oublier de tenir compte d'une chose importante, à savoir compensation nationale, seuil de 4 % et construire le nouveau mode de scrutin à partir de 125 circonscriptions? Est-ce que votre scrupule à énoncer un nombre est lié non seulement à... de simulation, la capacité technique de voir une simulation, le support donc du secrétariat à la commission, ou bien au fait que vous vous posez la question: Quel est le pourcentage de plus qui serait acceptable dans la population? Et vous mettez un tableau, là, à la page 9. J'aimerais ça vous entendre, moi, là-dessus.
M. Rebello (François): Bien, écoutez, la raison pour laquelle on laisse de la place au débat, c'est pour être sûrs non seulement qu'il y a des travaux techniques de faits pour évaluer bien la pertinence d'un scénario ou l'autre, d'une proposition ou l'autre, mais c'est aussi pour que le débat prenne de la profondeur dans la population, qu'il y ait vraiment un large débat, que les citoyens se sentent interpellés, que ça devienne un enjeu majeur avant qu'on en vienne à proposer des éléments de modification plus précis. Donc, c'est pour ça qu'on n'est pas allés trop dans les détails sur ce qu'on proposait.
Mais on a quand même voulu signifier certains principes qui sont incontournables. Tu sais, avoir des énormes circonscriptions où les gens demeurent à 400 kilomètres du bureau du député ou 500 kilomètres, les gens sont venus nous dire que ce n'était vraiment pas l'idéal. Donc, on vous dit: Faites attention, oui, une proportionnelle, mais gardez des circonscriptions à taille humaine. Très important. Puis on trouve que les circonscriptions actuelles sont intéressantes.
Donc, il y a certains principes, c'est ceux-là qu'on a voulu mettre de l'avant, mais on n'est pas allés trop dans les détails parce qu'on se dit: Il y a encore du travail à faire avant d'élaborer un modèle plus précis.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, M. Rebello, Mme Bouillé et M. Vézina, merci infiniment pour cette présentation. Merci à vous.
J'invite maintenant les représentantes de Québec solidaire à bien vouloir s'approcher et à prendre place à la table des témoins.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Ouimet): Mme Alexa Conradi, vous êtes la présidente de Québec solidaire, et Mme Françoise David, porte-parole. Donc, bienvenue à l'Assemblée nationale, bienvenue aux travaux de cette Commission spéciale sur la Loi électorale. Vous disposez de 20 minutes pour nous livrer votre point de vue, après quoi une période d'échange. À vous la parole.
Québec solidaire (QS)
Mme Conradi (Alexa): Bonjour. Merci de nous accueillir aujourd'hui. Alors, d'abord, un petit mot pour dire qui est Québec solidaire. On est un parti politique, comme vous le savez certainement, qui est né maintenant depuis deux mois. On est le résultat d'une fusion entre l'Union des forces progressistes et Option citoyenne et, comme vous aussi, on va se présenter lors des élections générales, prochainement.
n(10 h 40)n Alors, nous sommes d'abord heureux de la consultation qui a eu lieu à travers le Québec. On salue votre travail. On trouve que vous avez pu faire un travail important de consulter la population de manière diversifiée. Le fait d'avoir fait une tournée dans les différentes régions du Québec et permettre aux gens de s'exprimer là où ils vivent, je trouve que c'est une démonstration d'une volonté de rapprocher la démocratie des gens, et c'est un geste important. Donc, on salue le travail de la commission pour ça.
Ce qu'on s'était dit qu'on voudrait faire aujourd'hui, ce n'est pas de revenir sur l'ensemble des propositions que vous avez déjà vues dans le mémoire que l'UFP a déposé à l'époque, mais bien plus de préciser nos interventions suite à tout ce qu'on a entendu lors du déroulement de la commission, des éléments sur lesquels on a envie d'insister, d'une part, puis aussi des éléments nouveaux qu'on vous amène. Alors, on va diviser un petit peu nos interventions entre nous deux.
Alors, dans un premier temps, on aimerait revenir sur la question des deux votes. Comme la plupart des intervenants lors de la commission itinérante, nous sommes toujours en faveur de l'utilisation de deux votes lors d'un mode de scrutin. On considère que c'est un élément essentiel à un modèle mixte compensatoire. C'est... parmi les différents mécanismes dans un mode de scrutin, qui permettra la réalisation du pluralisme politique dans le sens de la représentation à l'Assemblée nationale, parce que nous savons déjà qu'il y a un pluralisme politique qui existe dans la société québécoise, et on pense que c'est un des moyens qui permettraient à l'Assemblée nationale de refléter davantage la diversité des idées qui existent au sein de la population.
C'est aussi important parce que, sans l'obtention, sans l'utilisation de deux votes, les gens peuvent toujours être pris par la possibilité de voter soit utile soit stratégique, et on a l'impression qu'en fait la démocratie serait davantage servie par une possibilité pour les gens de réfléchir, d'abord et avant tout, sur leurs engagements, les intérêts qu'ils ont à voter à la fois dans une circonscription... Puis on affirme l'importance du lien avec les députés dans une circonscription.
On sait qu'il a pu y avoir plusieurs motivations sur les mêmes personnes par rapport à pour qui ils ont envie de voter. Alors, dans une circonscription donnée, on peut vouloir appuyer une telle personne, un candidat ou une candidate d'un parti, puis en même temps avoir des affinités avec un autre parti. On sait que ça existe comme ça pour plusieurs personnes et que le fait de permettre cette possibilité-là d'à la fois voter au niveau d'une circonscription mais aussi pour une liste, un parti au niveau d'une liste, ça va faire en sorte que les gens pourraient en fait voir ultimement une Assemblée nationale qui reflète davantage leurs opinions. Alors ça, c'était pour les deux votes.
Aussi, pour la question de la compensation régionale ou nationale, ou de district, on reconnaît que la plupart des gens qui sont venus devant vous étaient moins favorables à l'idée de districts, mais aussi on reconnaît qu'il y a plusieurs personnes, un certain nombre d'acteurs minoritaires mais tout de même importants qui sont venus dire que la compensation, dans un modèle mixte compensatoire, doit être régionale. Par contre, nous affirmons toujours que c'est important de faire une compensation à l'échelle nationale. Pourquoi? Premièrement, dans un système mixte à 77 sièges à vote à majorité, ça permet déjà une représentation des différentes régions et circonscriptions importante au Québec, d'une part, mais, d'autre part, on pense que, par le biais d'une compensation nationale, si on ajoute que l'ensemble des régions doit être représenté, dans la première moitié des listes, sur la base nationale, à ce moment-là, on s'assure d'une représentation importante des régions.
Les gens qui parlent de régions administratives pour la compensation, je pense aussi que peut-être c'est difficile parfois de tout prévoir les effets inattendus, des fois, d'une intervention comme ça au niveau de la manière qu'on va voter, puis une des préoccupations que nous avons, c'est, si c'est une compensation régionale, qu'il y ait des effets pervers, finalement, pervers parce que les régions urbaines et populeuses pourraient développer l'intérêt de partis soit régionaux ou bien trop centrés sur des préoccupations urbaines et délaisser les préoccupations pour l'ensemble de la population québécoise. Et, dans ce cas-là, ce qui pourrait arriver, c'est que, pour compétitionner ces partis-là, mettons, dans la région de Montréal ou dans la région de Québec, les autres partis, qui se déploieraient tout de même sur l'ensemble du territoire québécois, pourraient être tentés de concentrer leurs efforts et leurs programmes sur une base très urbaine pour compétitionner la montée de ces partis plus régionaux. Même s'ils se disent québécois ou nationaux, ils pourraient se concentrer davantage là, et on craint qu'en fait, en bout de ligne, ça aurait l'impact de diviser le territoire québécois pas dans un sens de division légale, mais dans le sens de nuire à des projets collectifs sur l'ensemble du territoire. Alors, on a l'impression qu'une compensation nationale pourrait davantage répondre aux besoins de représentation des régions, mais surtout si la liste dans la première moitié d'une liste nationale comprend les 17 régions.
Alors, moi, j'arrêterai là puis je laisserai Mme David poursuivre la réflexion.
Mme David (Françoise): Alors, moi, je vais aborder le chapitre de l'égalité entre les femmes et les hommes. Le mémoire de l'Union des forces progressistes contenait déjà un certain nombre de propositions, mais, avec l'arrivée de Québec solidaire, on a décidé d'aller un peu plus loin et de soumettre un certain nombre de questions, en ayant écouté aussi ce qui s'était dit ici, à la commission, sur ce sujet-là.
Évidemment, la première chose qu'on veut dire, c'est qu'on pense qu'à la faveur de la réforme d'un mode de scrutin c'est vraiment le bon moment de prendre des mesures pour s'assurer qu'il y aura, avant 2029, une parité réelle entre les hommes et les femmes à l'Assemblée nationale. Après, on va vous parler aussi de la question de la diversité culturelle, qui est, elle aussi, importante.
Premièrement, on vous propose que, dans l'avant-projet de loi et dans le projet de loi qui suivra, nous l'espérons, l'objectif d'équité dans la représentation hommes-femmes soit remplacé par un objectif d'égalité. Il nous semble qu'il faut être clair. Ce qu'on vise ultimement mais le plus vite possible, c'est l'égalité dans la représentation et non pas une sorte d'équité un peu vague où au fond peut-être qu'à 40 % de femmes à l'Assemblée nationale on se dirait: Bon, on est presque dans l'équité, ça va bien. Non. Je pense qu'il faut qu'on soit très au clair. Ce qu'on vise, c'est l'égalité dans la représentation.
Deuxièmement, dans la perspective d'une proportionnelle mixte, on pense qu'il doit y avoir absolument alternance homme-femme dans les listes présentées par les partis politiques, que ces listes soient nationales ou régionales. Vous aurez compris que nous proposons, nous, l'établissement d'une liste nationale, mais, s'il s'avérait qu'elle soit régionale, l'alternance homme-femme devrait ? ou femme-homme ? devrait se faire aussi, et donc prévoir des sanctions financières lorsque les partis ne respectent pas ces règles. Parce qu'il ne suffit pas de dire: On doit le faire, il faut savoir à quoi on s'expose si on ne le fait pas, sinon ça n'aura aucun effet.
Dans le cas aussi où un nouveau mode de scrutin prévoirait des listes régionales, les partis politiques devraient être invités, de façon assez vigoureuse, à mettre une femme en tête de liste dans 50 % des cas. Nous savons que, si les listes du côté de la proportionnelle sont régionales, bien ce sera des listes courtes forcément, et, à ce moment-là, ça devient particulièrement important de s'assurer que, dans 50 % des régions, on retrouve des femmes en tête de liste, sinon, eh bien, il y aura très, très peu d'élues féminines à l'Assemblée nationale.
n(10 h 50)n Quatrièmement, les bonifications aux partis doivent être prévues pour le pourcentage de candidates et pour le pourcentage des élues. Les deux. Cela permettrait de récompenser à la fois l'effort, c'est-à-dire l'incitation aux partis à faire un effort réel pour présenter 50 % de candidates, et évidemment on récompenserait aussi le pourcentage des élues. On a déjà connu par le passé des situations où des partis présentaient des femmes, mais dans des comtés dont ils savaient très bien qu'ils ne les remporteraient pas. Alors, il nous semble qu'il faut donc récompenser cet effort d'aller chercher des femmes comme candidates mais aussi le résultat, c'est-à-dire: on a offert aux femmes des circonscriptions gagnantes et elles ont pu gagner.
Et on propose d'augmenter le seuil de bonification et de remboursement des dépenses électorales à 35 % plutôt que 30 %, puisque, dans au moins deux cas, les partis politiques représentés à l'Assemblée nationale, au Québec, ont déjà présenté 30 % de femmes. Alors, en rester en 30 % pour être récompensé, ce n'est franchement pas récompenser l'effort. Il nous semble qu'on devrait commencer à 35 %.
Ensuite, on veut affirmer qu'il est important de récompenser les partis qui ont atteint un certain pourcentage de candidates et d'élues et non pas se fier sur le nombre absolu de candidates et d'élues. Dans la situation actuelle, par exemple, on ne peut pas être assurés que l'ensemble des partis qui veulent faire élire des députés à l'Assemblée nationale pourront présenter des candidates et des candidats dans les 125 circonscriptions électorales. C'est sûr que tous les partis espèrent pouvoir le faire, mais, à ce stade-ci, on ne peut pas l'assurer. Donc, il y a quelque chose d'un peu mesquin à ne récompenser que le nombre absolu de candidates. Ce qui est important, c'est que, si un parti, par exemple, en présentait 75, ou 80, ou 100, il faut aller regarder, sur ce nombre, quel est le pourcentage de candidates. C'est ça qui est important. Donc, on suggère d'en rester au pourcentage.
Ensuite, Québec solidaire ajoute que les partis politiques devraient avoir l'obligation d'élaborer un plan d'action pour assurer la représentation paritaire des femmes en politique et qu'un rapport des efforts consentis par le parti, par les partis, doit être présenté, chaque année, au Directeur général des élections. Et ce qu'on pense, c'est que le plan d'action donc qui serait mis en oeuvre par tous les partis politiques pour assurer la représentation égale des femmes, eh bien, ce plan d'action devrait être financé par l'argent des bonifications qui ont justement été accordées aux partis pour récompenser les efforts et les résultats, là, quant aux candidates.
Et finalement vous connaissez certainement le programme À égalité pour décider, programme mis en place depuis plusieurs années et qui soutient des femmes qui veulent se présenter à divers postes électifs, que ce soit dans des régions ou que ce soit au niveau national. On trouve que c'est très important de maintenir ce programme et de maintenir son financement. C'est bien beau, avoir un programme, mais, s'il n'y a pas de financement ou si le financement diminue, à ce qu'on nous a dit, bien là ça ne peut pas être un programme très, très performant. Donc, on trouve important que le programme À égalité pour décider demeure et que son financement soit complètement rétabli.
Alors, j'aborde brièvement la question de la diversité culturelle du Québec. Le gouvernement du Québec, par son avant-projet de loi, déjà propose un certain nombre de mesures pour que l'Assemblée nationale reflète plus fidèlement la diversité culturelle du Québec. Il est bien évident qu'on est d'accord complètement avec cet objectif, qui évidemment n'est absolument pas atteint pour le moment.
En addition des propositions gouvernementales, ce que nous proposons sur une liste nationale, c'est la présence obligatoire d'au moins cinq personnes provenant de groupes minoritaires, et souvent discriminés, donc, dans cette liste de candidates et de candidats. Cinq personnes sur une liste nationale qui à notre avis pourrait comprendre 50 ou 60 personnes, ce n'est pas la fin du monde. C'est franchement un minimum. Et ces cinq personnes doivent absolument être dans la première moitié de la liste, parce que sinon c'est comme pour les femmes, elles n'auront pas beaucoup de chances d'être élues.
Évidemment, ce n'est pas la seule mesure qui va permettre aux personnes des minorités de pouvoir accéder à l'Assemblée nationale. Évidemment, là, il faut travailler sur tout un spectre de mesures, qui vont de la lutte à la pauvreté à l'inclusion, à la francisation. Bon, c'est global, tout ce qu'il faut faire pour que les personnes des minorités culturelles ou des communautés culturelles exercent pleinement et à part entière leur citoyenneté. Mais ce qu'on ajoute ici, c'est cette présence de cinq personnes provenant des minorités culturelles dans la première partie de la liste de candidates et candidats. Voilà.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, Mme Conradi et Mme David, merci infiniment pour la présentation de ce mémoire. Nous allons ouvrir dès maintenant la période d'échange avec vous. Alors, du côté ministériel, j'ai M. le député de Trois-Rivières.
M. Gabias: Merci, M. le Président. Également, Mme Conradi et Mme David, merci beaucoup pour votre présentation, pour votre travail, pour votre contribution à la démocratie. Ça me permet également de souligner l'exercice démocratique qui s'est effectué hier, dans le comté de Sainte-Marie?Saint-Jacques, donc féliciter le gagnant, qui est représentant du Parti québécois, M. Lemay, et également souligner la participation, vous le savez mieux que moi, majoritaire des femmes dans cette élection ? il y avait quatre candidates féminines ? donc également la participation de votre candidate, Mme Massé, et également notre candidate, Mme Malépart, qui a fait un excellent travail dans ce comté.
Ma question est la suivante. Vous avez entendu, tout à l'heure, le représentant du Parti québécois mentionner qu'en fait on devait s'attaquer à la modification de nos structures démocratiques, une fois le Québec devenu indépendant. Sachant que vous partagez un peu l'opinion quant au statut du Québec, est-ce que c'est également votre opinion, à savoir qu'on devrait attendre cette éventualité, ou si vous croyez que le Québec est prêt à passer à l'action, de ce côté-là, d'une part?
Et ma deuxième question: Quelle place on doit faire à ce que j'appellerais l'opinion citoyenne que nous avons sur cette commission par le biais, là, du comité citoyen?
Mme David (Françoise): Alors, je vais y aller avec la première question. Donc, si je la comprends très bien, parce qu'on a entendu juste la fin de l'audition précédente, est-ce que, oui ou non, on doit commencer dès maintenant à mettre en place un mode de scrutin faisant place à la proportionnelle, notre réponse est très, très claire, et c'est oui. Donc, tous souverainistes que nous sommes, nous ne pensons pas qu'il faut attendre ce jour où le peuple du Québec aurait décidé de devenir un pays souverain, on pense... D'ailleurs, on aurait bien aimé qu'un mode de scrutin faisant place à la proportionnelle soit mis en place pour les prochaines élections. Vous comprendrez donc qu'on est un peu pressés. Ça n'empêche pas qu'on considère qu'il faut en même temps prendre le temps nécessaire pour consulter la population, bien entendu, mais nous pensons que le plus vite nous pourrons avoir un mode de scrutin reflétant davantage l'ensemble des tendances politiques au Québec, le mieux ce sera, puis je pense que c'est clair.
Le Président (M. Ouimet): Merci.
n(11 heures)nMme Conradi (Alexa): Pour la question du comité citoyen, on avait pris position en faveur d'un référendum sur la question du mode de scrutin. Et, pour s'assurer que les conditions de ce référendum soient des conditions qui permettent à la population d'y participer pas juste à la dernière minute pour voter oui ou non à un référendum, mais pour vraiment comprendre c'est quoi, une réforme de mode de scrutin, pourquoi c'est proposé et discuté, pourquoi il y a un débat là-dessus, de pouvoir en débattre dans tous les endroits, on pense que notamment le minimum, c'est que le comité citoyen participe au développement de la question, de toute la mise en forme et la préparation du débat qui va avoir lieu à notre avis ou devrait avoir lieu avant même la tenue d'un référendum. Parce que des fois, par exemple, il y a des gens qui parlent de faire un référendum en même temps que des élections générales. Si c'est le cas, bien ça veut dire qu'on annonce le référendum à peu près en même temps que l'annonce des élections générales, qui durent 35 jours à peu près, et ça, c'est très peu de temps pour s'assurer que la population comprenne les enjeux, en ait débattu, ait pu réfléchir à ça.
Il me semble que la question de la participation citoyenne, et notamment le comité citoyen, pourrait avoir un rôle de préparation du débat public avant même la tenue d'un référendum dans la sensibilisation, dans la préparation même de comment cette consultation va avoir lieu, pour s'assurer qu'aussi, dans la population, on n'a pas l'impression qu'une réforme va être une réforme qui avantagerait un groupe plus qu'un autre. Il me semble que, dans cette question-là, qui est une question très sensible, on serait toujours mieux servis si on élargit la consultation au-delà des partis politiques également.
Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le député de Trois-Rivières. Mme la députée de La Pinière.
Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Mme Conradi, Mme David, bienvenue à la commission.
Vous vous prononcez clairement en faveur de la compensation nationale. Cependant, vous n'indiquez pas le seuil à partir duquel on pourrait attribuer un siège de liste. Est-ce que c'est voulu? Est-ce que vous pouvez préciser?
Mme Conradi (Alexa): Oui. En fait, dans le mémoire qu'on a présenté, en fait au moment où c'était l'UFP, mais avec laquelle on a toujours un accord, ce seuil-là était à 5 %, et c'est l'une des autres raisons que nous ne sommes pas tout à fait confortables avec l'idée d'une compensation sur la base régionale, parce qu'on sait très bien que, dans la plupart des régions du Québec administratives, ça voudrait dire que le seuil demeurerait autour de 13 % à 15 %, alors que, pour Montréal, par exemple, et Québec, ça pourrait être beaucoup plus proche du 5 %. Alors, ce que ça pourrait faire, c'est une certaine réforme à deux vitesses. Voilà.
Mme Houda-Pepin: Justement, puisque vous parlez des régions, donc, pour avoir été en région ? la commission a été en région ? nous avons entendu des groupes nous dire que non seulement ils ne veulent pas perdre de poids politique, donc maintenir le nombre de sièges, non seulement ils ne veulent pas perdre la représentation régionale, parce qu'ils sont plus favorables à la compensation au niveau des régions, mais, en plus de ça, ils ne veulent pas être représentés par des candidats de liste qui viendraient d'ailleurs. Je vous donne l'exemple de l'Abitibi, qui est une région forestière. Si on choisit les candidats de liste sur une liste nationale, il y a une probabilité qu'un candidat issu des Îles-de-la-Madeleine, qui est une région maritime, soit affecté pour représenter l'Abitibi, qui est une région forestière, et les gens nous disent: Ça nous prend quelqu'un qui connaît notre réalité, qui colle à notre réalité, qui est capable de refléter nos préoccupations. Ce n'est pas quelqu'un dont on va faire le baby-sitting, là, on va lui apprendre l'a b c de ce que c'est que notre région.
Qu'est-ce que vous répondez à ça par rapport au modèle que vous proposez de la proportionnelle nationale, qui pourrait en fait amener un candidat de n'importe où pour atterrir n'importe où dans les régions du Québec?
Mme Conradi (Alexa): D'abord, c'est une des raisons qu'on propose que, sur une liste nationale, sur la première moitié de la liste, il y ait au moins une personne de chacune des régions du Québec qui y figure. Alors, comme ça, la compensation pourrait permettre une très grande diversité de la représentation des régions. Mais il ne faut pas oublier les 77 circonscriptions où il y a des députés qui connaissent très, très bien leurs régions et leurs réalités, d'une part.
D'autre part, c'est vrai que c'est essentiel que des députés, et particulièrement des ministres d'un gouvernement, connaissent très bien les dossiers, mais vous savez aussi bien que moi que, quand on fait notre travail, également il y a toujours un travail de découverte de l'autre à faire, et ce n'est pas parce que quelqu'un vient d'un coin que ce n'est pas possible d'apprendre. Mais, ce qui est important, c'est un travail de collaboration important, et surtout de ne pas oublier qu'il y a des gens déjà qui pourraient se retrouver ministres, qui auraient un enracinement très profond dans leurs régions.
Mme Houda-Pepin: M. le Président, cela nous amène au deuxième volet de la question, qui est celui du rôle des députés de liste, hein? C'est vrai qu'on apprend tout le temps, l'éducation permanente, ça existe même pour les députés, et il y a aussi même une question de découverte de l'autre, comme vous le dites, c'est très intéressant.
Les gens nous questionnent beaucoup sur le rôle des députés de liste qui vont avoir finalement un rôle beaucoup plus régional, puisqu'ils sont issus, ils représentent une région. Vous avez dit à juste titre que nous avons 77 députés de circonscription qui ont la connaissance de leurs régions et surtout la connaissance de leurs localités, hein, puisqu'ils représentent des circonscriptions et non pas des régions. Moi, je viens de la Montérégie. Nous avons une vingtaine de comtés, hein, en Montérégie. C'est vaste à souhait. Vous avez tout, le milieu urbain, le milieu rural, les manufactures, l'acier, mais en même temps la nouvelle économie. On ne peut pas tout connaître, on ne peut pas tout refléter, comme représentants de la population. Donc, comment vous voyez, vous, l'articulation entre le rôle d'un député de circonscription et un député de liste?
Mme Conradi (Alexa): En fait, je pense que c'est plutôt un ajout intéressant qui peut se faire là, avec la combinaison d'à la fois un député qui a un enracinement dans une localité et avec un travail avec quelqu'un sur la base d'une liste. La raison de ça, c'est que chacun et chacune pourraient avoir des responsabilités qui sont à la fois complémentaires et qui s'ajoutent les unes avec les autres, et il pourrait y avoir même des collaborations, c'est-à-dire que quelqu'un pourrait avoir une responsabilité un petit peu plus régionale, ce qui dégagerait à la fois un député qui est dans sa circonscription de certaines autres responsabilités. Alors, je pense que c'est plutôt une possibilité pour les deux de peut-être étendre son contact avec la population.
Notamment, plusieurs personnes que nous avons rencontrées dans le cours, par exemple, des élections complémentaires dans Sainte-Marie?Saint-Jacques nous racontent combien elles souhaitent que les députés fassent des rencontres annuelles, par exemple, avec la population locale. Bien, ça, c'est un travail qui pourrait se partager très bien entre un député de circonscription et un député de liste.
Mme Houda-Pepin: Merci.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, Mme la députée de La Pinière. Du côté de l'opposition officielle, maintenant, M. le député de Masson.
M. Thériault: Merci, M. le Président. Alors, Mme David, Mme Conradi, bienvenue. Merci de votre contribution à ce débat.
Première question: Si le gouvernement du Québec votait majoritairement un projet de loi sur la réforme de la Loi électorale et du mode de scrutin, est-ce que vous considérez, sans nécessairement... donc un vote majoritaire sans nécessairement le consensus ou l'appui de l'opposition officielle, est-ce que vous considérez que cela serait légitime? Et est-ce que vous considérez qu'il n'y aurait pas lieu d'aller en référendum?
Mme David (Françoise): Alors, il y a une réponse en deux volets. On a dit tout à l'heure que ce qui nous paraissait important, à notre avis, c'est qu'il y ait effectivement un référendum sur un changement au mode de scrutin. Donc, c'est le premier volet, ce qui revient à dire aussi qu'il ne suffirait pas qu'un gouvernement, n'importe lequel d'ailleurs, prenne position en faveur d'un changement au mode de scrutin pour qu'on le reconnaisse. Bon, comme on dit souvent, c'est légal, mais la légitimité politique serait pour le moins extrêmement questionnable. Alors, si on dit référendum, ça veut dire qu'un gouvernement a quand même parfaitement le droit de déposer un projet de loi, de le faire connaître. Il nous semblerait important qu'il y ait référendum sur cette question, que la population du Québec soit appelée à se prononcer là-dessus.
Alors, je ne sais pas si je réponds à votre question, mais il me semble que c'est clair. Si on dit référendum, si on dit que la population du Québec doit être engagée dans ce processus, Alexa a expliqué, tout à l'heure, l'importance de tout un processus de démocratie participative. Je pense que ça répond à votre question au sens suivant: non, un gouvernement ne pourrait pas tout seul décider d'un changement au mode de scrutin.
n(11 h 10)nM. Thériault: Depuis trois ans et depuis, bon, les états généraux, on a entendu des prises de position de différents partis politiques, de différents tiers partis, et, il y a trois ans, à la suite du discours inaugural, on entendait des partis dire: On veut ça pour la prochaine élection, et ces partis-là ne s'engageaient pas à tenir un référendum, ils voulaient ça le plus vite possible. Lors du dépôt de l'avant-projet de loi, on a entendu des gens dire: Bien, c'est un pas dans la bonne direction.
Vous êtes prêts à aller jusqu'à quel compromis, vous, dans ce que vous nous présentez ce matin? Vous dites: Ça prend deux votes, une compensation nationale. Est-ce à dire que, dans la mesure où l'avant-projet de loi est modifié pour deux votes et fait une compensation régionale dont le seuil de facto descend un petit peu ? parce que celui qui est là est ridicule, là, en termes d'accessibilité à l'Assemblée nationale ? est-ce que vous diriez: C'est un pas dans la bonne direction et on peut procéder, ou vous diriez: Il faut tout de même que la population soit dans le coup, il faut tout de même prendre le temps de faire ce référendum?
Mme David (Françoise): Quel que soit le projet de loi mis sur la table, on va dire qu'il serait important que la population soit consultée, puis ça, ça ne fait aucun doute dans notre esprit.
M. Thériault: D'accord. Tout à l'heure, malgré lui, bien malgré lui, je dirais ? parce qu'il ne faut pas prêter d'intentions à nos collègues d'en face ? bien malgré lui, le député de Trois-Rivières vous a entraînées dans un faux débat. D'abord, le gouvernement dit: L'application du mode de scrutin, c'est 2011-2012. Le Parti québécois, l'automne dernier, a bien établi en commission quel était son agenda politique, et d'aucuns pensent, au Parti québécois en tout cas ? et c'est légitime de le penser ? que, le Québec, selon leur agenda politique, sans présumer de sa réalisation, on souhaite qu'il soit souverain en 2012. Alors, dans la mesure où on dit: Par principe, il faut changer le mode de scrutin le plus tôt possible, mais il faut d'abord que la population soit partie prenante ? on ne change pas les règles démocratiques comme ça, dans une société, sans que la population soit partie prenante ? sachant, entre autres choses, qu'on est à un an des élections, ne croyez-vous pas que dans le fond c'est un peu théorique de penser qu'au fond la souveraineté viendra après la réforme du mode de scrutin...
Une voix: Le mode de scrutin avant.
M. Thériault: ...ou le mode de scrutin avant?
Mme David (Françoise): Ce sera théorique, dépendant de qui sera au pouvoir et de quelle sera la position de ce gouvernement. Ce n'est pas forcément théorique de se dire: Il faudrait que, le plus rapidement possible, il y ait un projet de loi. Nous, on aurait souhaité que l'avant-projet de loi soit déposé bien avant. On espère que tout ça va déboucher sur un projet de loi. On souhaite qu'il y ait référendum sur la question. Rien n'interdit de le faire dans la prochaine année. Ce n'est pas interdit, là, de faire la... Là, je parle de faire la consultation, de faire la démarche de réflexion. On verra si...
Écoutez, c'est le gouvernement au pouvoir qui décide quand il y aura des élections, alors c'est un peu compliqué de supputer, là, hein, on est vraiment dans la boule de cristal, ici. Mais ce n'est pas du tout théorique de se dire: Quel que soit le gouvernement en place, il peut parfaitement déposer un projet de loi et s'en aller en consultation. Je ne vois pas pourquoi il faudrait attendre. Advenant, par exemple ? on est toujours dans la supputation ? qu'aux prochaines élections ce n'est plus l'actuel gouvernement qui est au pouvoir, rien n'empêche de déposer un projet de loi sur un changement au mode de scrutin et de s'en aller en consultations. Pourquoi diable faudrait-il attendre?
M. Thériault: Est-ce que Québec solidaire au pouvoir ferait un référendum le plus tôt possible sur la souveraineté du Québec ou changerait, le plus tôt possible, le mode de scrutin? En quelque part, ce que je veux vous dire, c'est: vous devez convenir avec nous que les institutions démocratiques d'un pays, c'est quelque chose de beaucoup plus global et englobant que seulement qu'une réforme de la quincaillerie électorale, en quelque part, et que, si on veut des institutions démocratiques d'un pays, il faut faire un débat beaucoup plus large que celui qui a été fait jusqu'à maintenant. C'est une partie d'une démocratie, un mode de scrutin, vous ne croyez pas?
Mme David (Françoise): D'abord, je trouve qu'appeler changement de mode de scrutin de la quincaillerie électorale, je m'excuse, mais je trouve ça un petit peu réducteur. Je pense qu'on est ici dans un débat sur toute l'appropriation démocratique par la population de la façon de gouverner, de la façon d'élire un gouvernement. Le taux de participation dans Sainte-Marie?Saint-Jacques, hier, 30 % ou 32 %, est extrêmement faible, c'est désolant, mais on devrait collectivement, ici, dans cette salle, en apprendre des choses. Il y a une désaffection de la population québécoise vis-à-vis la chose politique, on ne doit pas s'en réjouir, qui que l'on soit, et peut-être que de convier la population à une réflexion collective bien organisée sur des changements électoraux ? mode de scrutin, date des élections, place des femmes, des minorités culturelles ? je pense qu'on est dans quelque chose qui ressemble à un projet démocratique extrêmement important.
Maintenant, Québec solidaire a déjà indiqué ? et ce sera à voir avec le résultat des prochaines élections ? que, lorsqu'on veut procéder à des changements majeurs importants dans la vie politique d'une population, que l'on parle de changements démocratiques ou que l'on parle de changements constitutionnels, il faut être à la fois pressé et peu pressé, c'est-à-dire pressé de mettre les choses en route, pressé de consulter la population, de le faire correctement, mais en même temps prendre le temps nécessaire pour qu'elles se fassent, ces réflexions-là, et je le dirais dans les deux cas.
M. Thériault: Vous prônez une compensation nationale. Ce que je comprends, donc, c'est qu'il faut additionner, là, votre contribution de ce matin avec celle qui avait été faite par l'UFP. On dit que chaque mode de scrutin, qui est quand même une mécanique électorale, là ? si ce n'est pas de la quincaillerie, c'est de la mécanique électorale ? on dit que chaque mode de scrutin comporte des avantages et des inconvénients. Pourriez-vous nous éclairer sur les inconvénients de ce que vous proposez?
Une voix: ...
Mme Conradi (Alexa): C'est ça. Je pense qu'en effet, dans tout système, il y a des inconvénients et des avantages. Dans le système de compensation nationale, nous y voyons surtout des avantages au niveau de la possibilité d'inclure davantage de femmes au niveau de la représentation politique. Ça nous permet d'agir davantage sur la diversité culturelle et la représentation des personnes issues des minorités visibles et de l'immigration au sein de l'Assemblée nationale. Ça permet une représentation du pluralisme politique au Québec. Alors, en fait ça rend... Également, ça permettrait, dans la mesure où on inclut l'obligation pour les partis de présenter des candidatures de toutes les régions du Québec dans la première moitié de la liste... Écoutez, franchement, les avantages sont énormes. Alors, nous voyons que l'avantage est plutôt important, de ce côté-là.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, M. le député de Masson. Du côté de M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.
M. Picard: Merci, M. le Président. Merci, mesdames, pour votre contribution à cette commission parlementaire.
Moi, je vais y aller sur la compensation nationale. Vous indiquez qu'on devrait utiliser la compensation nationale et prévoir que, dans les listes, il y ait des candidats provenant de toutes les régions. Selon moi, on pourrait se retrouver avec des régions qui ne seraient pas représentées à l'Assemblée nationale, parce que, même si on prévoit tous des gens, dépendant des résultats des élections, selon moi ça ne règle pas la problématique vécue et énoncée par les régions lorsqu'on a fait le tour du Québec. Je voudrais avoir votre avis sur l'idée que je vais partager avec vous: Si on utilisait une compensation nationale qui serait appliquée sur des listes régionales, est-ce que vous seriez d'accord? C'est qu'on prend le résultat, sur une base nationale, en pourcentage, et après ça on l'applique, dans les différentes régions, sur des listes régionales, donc on s'assurerait que chaque région soit représentée.
Mme Conradi (Alexa): D'abord, sur la possibilité pour les régions de ne pas être présentes si c'est une compensation nationale, je soulignerais encore une fois la présence de 77 députés bien représentés. Mais d'autre part on croit vraiment qu'un parti politique qui n'oserait pas mettre à une bonne place, sur une liste nationale, la représentation des diverses régions du Québec serait franchement très, très mal perçu. La pression politique s'exerce, et, comme à Québec solidaire, si on arrive, un jour, à avoir une compensation nationale, on serait absolument non seulement tenus, si c'est obligé, mais dans le sens d'une obligation morale pour nous, de faire ça parce qu'on sait que d'aller devant la population du Québec, qui est bien enracinée dans des régions, sans une réelle possibilité de ces régions-là d'être représentées, ce serait un suicide politique. Donc, ce ne serait pas une bonne idée.
De là, à la question: Est-ce qu'une compensation en fait réfléchie sur le plan national mais enracinée sur le plan régional... écoutez, je pense que c'est une question intéressante qu'on devra regarder, si jamais c'était ça qui était présenté dans un projet de loi. Ce qu'on s'est toujours dit, c'est que la compensation nationale n'est pas uniquement pour nous une question de principe, c'est une question de pouvoir vivre les différentes valeurs et préoccupations qu'on porte. Alors, il faudrait qu'on se pose la question plus grandement, mais avec un projet concret sur la table qui nous permettrait d'évaluer correctement ce seraient quoi, les avantages et inconvénients.
n(11 h 20)nM. Picard: C'est beau. Merci.
Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière. Du côté du comité citoyen, maintenant, j'ai, dans l'ordre, Mme Loucheur, M. Morisset, Mme Proulx et M. Acharid. Donc, Mme Loucheur.
Mme Loucheur (Yohanna): Bonjour. Je voudrais que vous clarifiiez pour moi la recommandation qui est en 3.4, dans votre mémoire. Vous parlez de bonifications qui doivent être prévues pour le pourcentage des candidates et pour le pourcentage des élues. Je comprends bien l'aspect pourcentage par rapport au nombre, mais ce que je vois mal, ce que je voudrais que vous m'expliquiez, c'est comment on l'applique à la fois aux candidates et aux élues. Est-ce que vous proposez dans le fond deux mesures différentes, une mesure qui serait pour les candidates et une mesure pour les élus, en plus de la majoration... c'est-à-dire en plus de la mesure qui touche le remboursement des dépenses pour les candidates? Donc, on se retrouverait avec trois incitatifs différents. Est-ce que j'ai bien compris?
Mme David (Françoise): Oui. C'est exactement ça. On n'est pas allés dans la mécanique de la chose, mais ce qui était important pour nous, c'est de ne pas récompenser que l'effort ou que le résultat, c'est d'essayer de trouver une façon de récompenser les deux, finalement, donc des partis qui ont pris la peine d'aller chercher un bon nombre de femmes, de les présenter ? mais elles ne sont pas forcément toutes gagnantes, c'est bien entendu; c'est la même chose du côté des hommes ? mais récompenser aussi le résultat, donc s'assurer que quand même un certain nombre de femmes ont été présentées, par exemple, dans des circonscriptions qu'on appelle en général gagnantes. Alors, oui, c'est deux mécanismes différents. Il reste à imaginer, dans ce cas-ci, la mécanique. On n'est pas allés jusque-là.
Le Président (M. Ouimet): Merci, Mme Loucheur. M. Morisset.
M. Morisset (Michel): Bonjour, mesdames. Félicitations pour votre présentation.
Dans ce que vous dites, il y a deux choses qui m'interpellent. Si j'ai bien compris ? vous me corrigerez ? vous n'êtes pas vraiment pour un plébiscite, vous n'êtes pas vraiment pour accepter non plus l'unanimité, vous êtes plutôt pour un référendum. Alors, supposition qu'il va y avoir un rapport comité citoyen déposé. Alors, supposition que l'Assemblée nationale trouve absolument fantastique et puis extraordinaire la proposition comité citoyen, et l'Assemblée nationale trouve que c'est tout à fait la formule enfin qui aurait une unanimité rapide. C'est quand, votre campagne d'information massive et votre référendum, que vous les voudriez? Parce que le rapport comité citoyen, il va être déposé bientôt, là, très bientôt. Alors, supposition, là, que bon il est étudié en Chambre, et puis bon tout le monde nous trouve extraordinaires, et puis bon on veut l'amener, ce projet-là, d'avant. Vous, là, Québec solidaire, vous les voulez quand, votre campagne d'information, à partir de ce moment-là, et votre référendum?
Mme David (Françoise): Quand l'Assemblée nationale sera prête à le faire. Si, comme vous dites, vous présentez un rapport, que l'ensemble de la commission, c'est-à-dire des parlementaires de tous les partis politiques, sont d'accord avec ce rapport, j'imagine qu'à ce moment-là ça pourrait déboucher sur un projet de loi, donc sur une proposition à la population appuyée, bon, dans le meilleur des cas, disons, par toute l'Assemblée nationale, ce qui serait effectivement formidable. Eh bien, moi, je pense qu'à ce moment-là il faut effectivement soumettre cette proposition au bon jugement de la population.
Si c'est formidable, si, comme citoyens et citoyennes et comme parlementaires à l'Assemblée nationale, vous vous êtes tous entendus, ce qui serait une chose assez extraordinaire, il y a de très bonnes chances que ça trouve un écho dans la population, puisque vous êtes assez représentatifs. Donc, il n'y a aucune crainte. Et on devrait même se réjouir d'aller dans la population, de bien expliquer la chose, d'aller chercher un vote là-dessus. Et là, à ce moment-là, on pourrait vraiment dire que la population du Québec, avec son comité de citoyens, avec ses parlementaires, s'en va vers une réforme importante du mode scrutin. C'est le meilleur des scénarios, à notre avis.
Le Président (M. Ouimet): ...interrompre. Il me reste deux minutes pour Mme Proulx et M. Acharid. Donc, rapidement, Mme Proulx.
Mme Proulx (Mélanie): Oui. Merci, M. le Président. Vous avez raison de dire qu'un parti ne présentant pas de candidat des régions sur leur liste serait très mal perçu, surtout si c'est une mesure obligatoire, finalement. Mais, même en ayant 17 candidats issus des régions dans la première moitié de la liste, compte tenu de la double candidature, il serait fort possible que plusieurs régions ne soient pas représentées finalement au volet proportionnel.
N'y voyez-vous pas un inconvénient à votre proposition?
Mme David (Françoise): C'est probablement le seul inconvénient, et il faut l'accepter. C'est vrai, c'est un fait. Parce que bon il y a plusieurs partis en présence, etc., donc on ne peut pas jurer que le ou la 17e sur la liste serait automatiquement élu. Oui, il y a là un inconvénient, mais je rappellerais encore une fois que les populations des régions auront pu élire aussi des candidates et des candidats qui vont représenter des circonscriptions. Je pense que ça, c'est toujours important de s'en rappeler.
Maintenant, comme il y a plusieurs partis, si le 17e présenté dans une liste nationale par un parti n'est pas passé, ça se peut bien que le cinquième présenté dans la liste d'un autre parti et qui vient de la région X, là, lui ou elle soit élu. Donc, il me semble que toutes les chances sont assez bonnes pour qu'au total les régions soient représentées non seulement par l'élection de circonscription, mais aussi par le modèle compensatoire.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Courte question, M. Acharid.
M. Acharid (Mustapha): Oui. Merci. Vous dites: Que l'alternance homme-femme soit obligatoire. Mais, dans le cas où un parti veut vraiment aller plus vite que les autres, présenter une liste où on ne divulgue que des femmes, il serait obligé de mettre des hommes? Parce qu'il veut atteindre le pourcentage de l'égalité le plus tôt possible.
Mme David (Françoise): C'est drôle que vous posiez la question parce qu'on se l'est justement posée il y a deux ou trois jours. Bon, ça nous étonnerait un peu, ce n'est pas tellement dans les pratiques habituelles. Si jamais ça arrivait, ça appartient à ce parti politique, et la population sera à même de juger ce qu'elle en pense.
Le Président (M. Ouimet): Merci, M. Acharid. Je retourne du côté ministériel. Il reste deux minutes. M. le député de Roberval.
M. Blackburn: Merci, M. le Président. Alors, Mme David, Mme Conradi, bonjour, bienvenue. Juste une courte question. D'abord, je n'entreprendrai pas de débat sur la répartition régionale parce que je vous avouerai que je suis un peu inquiet par rapport à ce que vous proposez, mais j'aimerais vous entendre davantage sur la proposition qui a été faite précédemment, d'abord d'augmenter le nombre de députés, ce qui était proposé par M. Rebello tout à l'heure, de quatre au moins, mais on ne savait pas quelle était la quantité maximum. Si on allait de l'avant dans ce style-là, comment ça pourrait être intégré dans votre, je dirais, scénario, au niveau de Québec solidaire?
Mme Conradi (Alexa): En fait, nous ne pensons pas vraiment qu'il soit une proposition très gagnante d'augmenter de beaucoup le nombre de députés à l'Assemblée nationale. Je pense que, dans l'avant-projet de loi, on parle de deux de plus. On pourrait aller à cinq de plus, mais, je pense, plus que 100, la population ne suivrait pas. Donc, d'une part, il y a cette question-là. C'est sûr que pour nous le déséquilibre entre le 60 % élu à suffrage ? en français, je viens d'oublier le terme...
Une voix: Uninominal à un tour.
Mme Conradi (Alexa): ...merci ? uninominal à un tour et le 40 % de représentation proportionnelle, c'est vraiment essentiel. Ça, le 40 % au niveau proportionnel, c'est le minimum pour vraiment considérer que ce soit compensatoire comme il faut. Alors, s'il fallait augmenter le nombre de députés, il faudrait plutôt s'assurer qu'on bouge plus vers le 50-50 que le 60-40.
n(11 h 30)nLe Président (M. Ouimet): Bien. Merci, M. le député de Roberval. Donc, moi, je remercie, au nom de tous les parlementaires, Mme Conradi et Mme David pour cette participation et cette contribution importante aux travaux de la commission. Merci à vous.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Ouimet): Alors, j'inviterais maintenant les représentants de l'Action démocratique du Québec à bien vouloir prendre place.
Alors, moi, je souhaite la bienvenue à M. Jean Nobert... Jean Norbert, qui est le vice-président de l'Action démocratique du Québec/Équipe Mario Dumont. Bonjour. Bienvenue aux travaux de cette Commission spéciale sur la Loi électorale. Pourriez-vous nous présenter la personne qui vous accompagne?
Action démocratique du Québec/Équipe
Mario Dumont (ADQ/EMD)
M. Nobert (Jean): Tout à fait. Me Catherine Morissette, qui est présidente de l'association de l'ADQ du comté de Vanier, ici, à Québec.
Le Président (M. Ouimet): Alors, bienvenue à vous aussi. Donc, vous disposez de 20 minutes pour nous livrer votre point de vue.
M. Nobert (Jean): Ça va. Merci. Donc, premièrement, je remercie la commission de nous permettre de venir vous entretenir sur la vision de l'Action démocratique du Québec quant à la réforme de la Loi électorale qui est présentement sous étude par votre commission. Comme vous le savez d'ailleurs ? juste une précision ? bien sûr, il y a eu beaucoup de documents qui ont été faits par l'Action démocratique, au fil des années, qui ont forgé ce parti. On s'est particulièrement penchés bien sûr sur la réforme électorale puisque nous en avons été la principale victime au cours des dernières années. Et je vais m'attarder, dans cette présentation, seulement sur les réflexions de l'ADQ sur bien sûr l'avant-projet de loi de la réforme de la Loi électorale qui est présentement sous étude.
Donc, depuis plus de 200 ans que le Québec s'est doté du système électoral qu'on connaît aujourd'hui, bien sûr il a fait la démonstration de son efficacité et de la stabilité de notre Parlement, mais nous croyons sincèrement qu'il ne répond plus présentement aux attentes des Québécois. Donc, au fil de ces années, le Québec a brassé pas mal d'idées dans l'effervescence de la Révolution tranquille, mais malgré tout il n'y a pas eu une réelle volonté de ses élus de transformer notre système de représentation démocratique. Promis, depuis plus de 30 ans, par tous les partis ayant occupé les commandes de l'État, nous sommes encore perplexes devant la présente consultation. Vous comprendrez qu'il y en a eu beaucoup, de consultations, il y a beaucoup de projets. Bien sûr, nous souhaitons que cette fois-ci ce soit la bonne.
L'Action démocratique du Québec a 12 ans, et voilà déjà trois ans qu'on participe à un exercice de ce genre. Donc, effectivement, si, comme parti aussi récent, on participe à une troisième consultation, force est d'admettre qu'il y a eu beaucoup de paroles, mais il y a eu peu d'actions, et nous souhaitons qu'enfin il y ait des actions concrètes.
Ces nombreuses consultations et tout le bouillonnement d'idées autour de notre mode de scrutin ont permis de mettre en lumière les disparités et les inéquités du mode actuel. Tous les partis représentés à l'Assemblée nationale du Québec ont connu, un jour ou l'autre, les effets pervers de ce système. La distorsion la plus importante est bien sûr venue, selon nous, pour l'ADQ, en 2003, alors qu'il a fallu 173 530 électeurs pour faire élire un député pendant qu'il suffisait au Parti québécois de récolter 28 204 électeurs pour un député et aussi peu que 23 103 électeurs pour un député du PLQ. Cette distorsion du mode de scrutin a un tel impact sur la vie démocratique au Québec que 18,2 % de l'électorat est représenté par 3,2 % des députés.
Notre formation est la plus récente victime, avec une représentation en sièges grossièrement inférieure au pourcentage de votes exprimés donc en faveur de l'Action démocratique. Répétons donc l'évidence, notre parti souhaite voir le mode de scrutin évoluer vers un mode de scrutin proportionnel mixte compensatoire.
L'avant-projet de loi proposé par le gouvernement a le mérite de répondre à plusieurs des demandes de l'ADQ. L'introduction d'une proportionnelle mixte nous réjouit. Par ce fait, le gouvernement reconnaît que le Québec n'est pas homogène et que d'autres partis pourront naître de la volonté populaire et surtout se faire entendre à l'Assemblée nationale du Québec.
L'Action démocratique puise dans l'héritage de René Lévesque le fondement de ses réflexions. Faisant un pont avec la modernité que le Parti québécois refuse toujours de faire, l'ADQ propose des changements structurels importants. Rappelons, d'entrée de jeu, qu'on peut se complaire à invoquer la grande noblesse de notre système, or aucun État démocratique nouveau n'a cru bon d'instaurer ce système vieillissant, uninominal et majoritaire à un tour, si ce n'est de l'Inde en 1949.
Prenant toujours pour cible le citoyen, l'ADQ a présenté ses propositions en fonction de ce citoyen, l'électeur, qui, rappelons-le, se doit d'être celui qui véritablement choisit ses élus et ses représentants. En ce sens, les résultats électoraux se doivent de refléter le plus justement la volonté populaire exprimée, et ce n'est définitivement pas le cas présentement. L'ADQ présente, aujourd'hui, le fruit de ses réflexions précisées à l'égard des éléments de l'avant-projet de loi en cours, exercice complémentaire visant à bonifier les différents documents d'orientation de l'ADQ sur ce sujet, qui demeurent touts pertinents.
Comme je le disais tout à l'heure, ce que nous voulons et souhaitons, c'est une juste représentation proportionnelle mixte compensatoire. Toute réforme de la Loi électorale québécoise devra garantir au citoyen un Parlement le plus représentatif possible, c'est-à-dire représenter le plus exactement notre société et ses différents courants de pensée. C'est exactement ce que ne réussit plus à faire notre système actuel. Celui-ci encourage et surtout voit au maintien du bipartisme.
Quiconque porte une regard sur notre société peut s'apercevoir que le Québec ne se départage plus en pensée libérale et en pensée péquiste. Les 18,2 % obtenus par l'ADQ aux dernières élections générales en sont un exemple flagrant. Un mode de scrutin mixte compensatoire est à l'agenda politique de l'ADQ depuis plus de 10 ans, comme je le disais tout à l'heure. Voilà pourquoi nous sommes heureux de voir un projet basé sur des éléments de proportionnalité enfin déposé par le gouvernement.
Pour nous, il a toujours été question d'une répartition 60-40, soit une répartition de 75 députés de circonscription et 50 élus émanant de la proportionnelle. En ce qui a trait aux 75 sièges élus majoritairement, la délimitation territoriale devra relever de la Commission de la délimitation, comme c'est le cas actuellement.
Quant à l'existence d'une ou des listes compensatoires, nous sommes d'avis de créer les districts sur la base des régions administratives du Québec, 17 districts, autres frontières identitaires géographiques connues des électeurs, puisqu'ils s'y reconnaissent aisément. Je vous souligne au passage que le Québec connaît déjà plusieurs délimitations territoriales: les 36 districts judiciaires, les 61 commissions scolaires, les 103 MRC. Nous ne croyons pas qu'il est nécessaire d'en créer une nouvelle, et donc nous devrions calquer sur les districts administratifs actuels. Ainsi, l'ADQ s'explique mal la recommandation du gouvernement de créer 26 districts. Pourquoi créer des frontières et des délimitations nouvelles alors que nous avons déjà organisé notre territoire en régions administratives? Ces régions ne forment-elles pas déjà une force politique? N'ont-elles pas des outils de développement économique locaux?
n(11 h 40)n Pour l'ADQ, voilà qui s'inscrit dans une politique autonomiste pour les régions du Québec. Si nous voulons véritablement que les régions se prennent en main ? et nous y croyons fermement ? nous devons leur donner les moyens, et ces moyens-là, c'est, à tout le moins, de leur laisser l'identité qui existe actuellement.
Nous pensons qu'au surplus un ou une députée élu via la liste compensatoire de la région administrative X, Y ou Z pourra facilement faire reconnaître son apport à la société locale et surtout limiter au plus possible une comparaison défavorable avec l'élu de circonscription. Il est nécessaire que ce projet de réforme de la Loi électorale, dans son aboutissement, ne crée pas des députés avec plus de pouvoirs ou plus de fonctions et d'autres qui en auraient moins, et nous pensons qu'en calquant sur les districts administratifs nous pouvons pallier à cette distorsion qui pourrait exister.
Autre chose qui milite en faveur des districts administratifs, c'est le fait que nous ne souhaitons pas que des députés soient, si on veut, permettez-moi l'expression, là, à cheval sur des régions administratives, à ne pas savoir s'ils appartiennent à une région ou à l'autre, doivent siéger sur différents comités d'une région ou d'une autre, et c'est pourquoi nous tenons à cette particularité, là, de notre proposition.
Mme Morissette (Catherine): Alors, pour ceux qui n'étaient pas là, tout à l'heure, mon nom est Catherine Morissette, je suis présidente de l'exécutif d'ADQ-Vanier.
La dernière proposition du projet de loi sur laquelle nous portons nos réflexions est la possibilité de voir des partis politiques toucher des incitatifs financiers lorsque des quotas de candidates ou de candidats issus de communautés culturelles et anglophones auront été atteints. Pour notre formation politique, nous sommes inquiets de voir une telle mesure s'inscrire dans une législation. Bien que l'objectif derrière ces incitatifs, soit l'augmentation de la députation féminine et issue des communautés culturelles, soit un objectif louable et auquel adhère l'ADQ, nous croyons que le moyen proposé n'est pas la solution.
D'ailleurs, beaucoup de femmes se sont prononcées contre cette solution. Entre autres, vous avez Mme Louise Harel, en entrevue à La Gazette des femmes, septembre-octobre 2001, qui répondait à la question suivante: «Si vous êtes d'accord avec l'objectif, pourquoi refusez-vous les moyens plus mécaniques comme les quotas de femmes candidates ou la parité?» Mme Harel a répondu: «Un quota signifie qu'on est désignée parce qu'on est une femme et non pas au mérite. J'ai toujours rejeté cette idée de femme-alibi depuis 30 ans, après avoir été ? je sais de quoi je parle ? la seule femme à l'exécutif de l'Union générale des étudiantes du Québec, à la fin des années soixante.» Encore une fois, le risque est réel de voir des élus être identifiés à ces mesures incitatives. Quel député souhaite voir son engagement politique être le fruit d'une incitation économique? Pour l'ADQ, poser la question, c'est y répondre.
Notre parti regrette que d'autres pistes n'aient été proposées par le gouvernement en collaboration avec les groupes visés. Au Québec, les partis politiques n'ont pas besoin d'incitatifs économiques ou autres pour présenter des candidats féminins ou issus de minorités culturelles, car politiquement il est très payant de s'identifier à ces groupes. Ce sont plutôt ces personnes qui ne répondent pas à l'appel. Il faudrait plutôt se questionner sur les raisons qui empêchent ces gens de se porter candidats. Les raisons seraient très certainement d'ordre personnel et/ou familial. À titre d'incitatif, une réforme parlementaire axée, par exemple, sur la conciliation travail-famille serait beaucoup plus efficace.
M. Nobert (Jean): De plus, nous sommes d'avis que les Québécois sont disposés à vivre des élections à date fixe au Québec. Il en est de même pour la possibilité de voir des mandats d'initiative populaires être étudiés par la commission, par exemple. L'ADQ a souvent parlé de ces sujets. Elle l'a d'ailleurs plaidé à maintes reprises, lors des différentes commissions et forums touchant une réforme électorale. Pour insérer ce type de changements bénéfiques pour le Québec, il aurait fallu du courage et de la volonté afin de réellement procurer aux Québécois un système nouveau et réellement tourné vers le mieux-être de la population du Québec. À ce titre, nous croyons que la réforme aurait pu aller plus loin.
Pour conclure, notre société a évolué depuis l'introduction de la loi sur le financement des partis politiques, loi incomplète, puisqu'elle n'a pas changé les règles du jeu électoral dans un moment charnière de notre histoire. En effet, l'arrivée du Parti québécois au pouvoir aurait pu sonner le glas du vote uninominal et majoritaire à un tour. Malheureusement, ils ne l'ont pas fait. Et pourtant, si un autre parti a été victime de la Loi électorale telle qu'elle est présentement, c'est bien le Parti québécois dans les premières années de sa vie.
Les deux partis traditionnels aujourd'hui, le Parti québécois et le Parti libéral, comme nous le disions tout à l'heure, ne suffisent plus pour contenir en leur sein tous les courants de pensée du Québec. Les distorsions présentement constatées accablent actuellement principalement l'ADQ, seul parti nouveau représenté à l'Assemblée nationale du Québec. Tout parlementaire doit en prendre acte et souhaiter, au-delà de son côté partisan, que tous les votes soient égaux et que tous les citoyens du Québec soient représentés avec justice dans ce Parlement bicentenaire. Il ne reste qu'à souhaiter que le gouvernement actuel ait l'audace de pousser plus avant les souhaits formulés dans cet avant-projet de loi, à la lumière de nos réflexions. On ne peut vouloir faire entrer le Québec dans un nouveau millénaire sans au préalable s'être doté d'une démocratie innovatrice, comme l'ont fait d'autres sociétés modernes avant nous. Je vous remercie.
Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, M. Norbert, Mme Morissette, pour cette contribution aux travaux de la commission spéciale. Ouvrons dès maintenant cette période d'échange avec M. le député de Trois-Rivières, du côté ministériel.
M. Gabias: Merci, M. le Président. Merci, Mme Morissette, merci, M. Norbert, de votre contribution.
Je comprends de votre exposé que nous devrions passer à l'action, dans les prochains mois, sur cette question. Je comprends également, de la participation du député de l'ADQ, député des Chutes-de-la-Chaudière, pendant tout le temps de la commission, qu'il y avait également un intérêt de passer à l'action.
Sur la question du vote du député de circonscription et du député de liste, dans la mesure où on parle de compensation, actuellement, dans l'avant-projet de loi, on parle d'un seul vote qui déciderait du député de circonscription et des députés de liste. Est-ce que selon vous on devrait penser et aller vers plutôt deux votes, un vote pour le député de circonscription et un autre vote pour le ou les députés de compensation?
M. Nobert (Jean): Effectivement, nous croyons que deux votes seraient la meilleure formule parce que ça permettrait aux citoyens de vraiment faire un choix vis-à-vis des candidats pour les représenter dans des circonscriptions. Et là le candidat comme tel a beaucoup à voir selon nous avec le choix que le citoyen fait, alors que, dans la liste des partis, le citoyen serait libre de choisir, à ce moment-là, selon sa vision des choses, en regard de la proposition politique ou l'offre politique présentée par les partis qui offrent des candidats sur cette liste-là.
Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le député de Trois-Rivières. Mme la députée de Chauveau.
Mme Perreault: Merci beaucoup, M. le Président. M. Norbert, Mme Morissette, bienvenue.
Je voudrais vous entendre sur certaines modalités d'exercice du droit de vote, notamment votre position sur le vote par correspondance, sur les bureaux de vote itinérants. Et j'irais jusqu'à vous poser la question: Est-ce que vous êtes pour la tenue des élections le dimanche?
M. Nobert (Jean): La dernière partie, vous me dites?
Mme Perreault: Les bureaux de vote itinérants, notamment chez les résidences pour personnes âgées privées.
M. Nobert (Jean): O.K. Bien, écoutez, nous n'avons pas, là, penché précisément sur ces points dans nos réflexions. Ce que je peux vous dire, c'est que, tout instrument qui permettrait une plus grande participation du citoyen au processus électoral, bien sûr que nous serons à l'écoute, là, pour des propositions dans ce sens-là. Donc, je n'irai pas précisément sur les différentes propositions, mais ce que je peux vous dire, c'est que nous sommes effectivement très ouverts, là, à une plus grande participation.
Tout à l'heure, j'écoutais Mme David, là, qui soulignait le taux de participation de l'élection partielle d'hier. Bien, écoutez, tout ce qui peut nous permettre effectivement d'améliorer la participation du citoyen, bien nous devons y aller de l'avant.
Mme Perreault: ...dimanche, est-ce que c'est quelque chose qui vous...
M. Nobert (Jean): Nous n'avons pas de... Plus pour l'un que pour l'autre, là, non. Nous n'avons pas de position particulière.
Le Président (M. Ouimet): Merci, Mme la députée de Chauveau. Mme la députée de La Pinière.
n(11 h 50)nMme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, M. Norbert et Mme Morissette, bienvenue à la commission.
Vous êtes grosso modo d'accord avec l'avant-projet de loi, avec un bon nombre de mesures qui sont proposées. L'avant-projet de loi porte sur deux grands éléments: d'une part, les mesures qui touchent l'amélioration de l'exercice du droit de vote et, d'autre part, le volet qui touche la réforme du mode de scrutin. Sur ce deuxième volet ? et je sais que vous y accordez beaucoup d'importance ? s'il fallait que vous apportiez une ou deux modifications substantielles à ce qui est proposé dans l'avant-projet de loi, ce serait quoi exactement?
M. Nobert (Jean): Bien, je vous dirais, premièrement, le nombre de districts électoraux. Nous croyons fermement que nous devons, pour l'identification régionale des élus, aller de l'avant et respecter les districts administratifs actuels. Et l'autre élément, puis si Me Morissette veut en ajouter, je pense que c'est au niveau des incitatifs financiers, où nous trouvons que c'est une proposition qui ne va pas du tout dans le bon sens, présentement.
Mme Houda-Pepin: Justement, sur les incitatifs financiers, vous avez clairement indiqué que ce n'était pas votre tasse de thé et que les partis peuvent atteindre les objectifs. Vous êtes d'accord avec l'objectif de l'égalité des femmes et des hommes et la représentation adéquate des minorités à l'Assemblée nationale, mais vous dites que vous êtes contre le moyen d'accorder des incitatifs financiers pour arriver à cet objectif-là.
Est-ce que vous êtes contre les incitatifs financiers parce que vous doutez de leur efficacité ou vous êtes contre les incitatifs financiers par principe?
Mme Morissette (Catherine): Je dirais les deux. On doute de l'efficacité principalement parce qu'en fait un incitatif financier pour les partis politiques, donc qui incite les partis politiques à présenter davantage de femmes, ce n'est pas un incitatif financier pour les personnes visées à devenir candidats ou candidates. Ce qu'on craint, c'est qu'on se retrouve avec beaucoup de femmes, qu'on appelle des candidats poteaux, qui vont être là juste pour pouvoir remplir le quota et qui ne sont pas nécessairement intéressées à être élues, et que ça n'offre pas un choix de qualité pour le citoyen, à ce moment-là, au moment du vote.
Ensuite, bon, bien, c'est ça, l'autre, par principe, ça va ensemble, là. Si on ne peut pas offrir de candidats de qualité aux gens, les gens vont avoir encore moins le goût d'aller aux urnes pour choisir le candidat de leur choix. Un des incitatifs que l'on proposait, c'est: lors d'un double vote, comme on le mentionnait plus tôt, donc un vote pour le candidat dans le district visé et un vote pour le parti au niveau régional. À ce moment-là, sur la liste des compensatoires qui serait établie, on pourrait alterner, une femme, un homme, une femme, un homme, afin de favoriser... ou une femme, quelqu'un issu d'une minorité culturelle, ou... Ça, ça pourrait être à déterminer, mais ce serait un meilleur incitatif. Comme ça, on s'assurerait que les gens qui se portent volontaires pour être candidats aient en tête la possibilité d'être élus, donc que ce soient des gens sérieux, intelligents, motivés et désireux de faire leur part.
Mme Houda-Pepin: Mais vous êtes consciente que la mesure de l'alternance sur une liste de candidats, c'est une mesure qui est proposée, avec les mesures incitatives, par la plupart des groupes qui se sont présentés devant nous, particulièrement les groupes de femmes, notamment le groupe de Québec solidaire qui s'est présenté ici, aujourd'hui. Je vous cite, vous avez dit: «Ce sont ces personnes, entre autres les femmes et les représentants des minorités, qui ne répondent pas à l'appel.» Donc, il y a comme une sorte de refus, ou de résistance, ou de difficulté, pour des candidats potentiels de valeur, de venir en politique. Avez-vous réfléchi sur le pourquoi de cela? Pourquoi est-ce que des candidats potentiellement intéressants pour l'exercice de la fonction politique ne viennent pas en politique?
Mme Morissette (Catherine): En fait, il n'y a pas eu d'étude exhaustive qui a été faite sur le sujet parce que c'est quand même quelque chose d'une certaine ampleur. Je peux vous dire que, moi, personnellement, j'ai réfléchi aux raisons qui m'empêcheraient de me porter candidate, entre autres...
Mme Houda-Pepin: ...avec nous?
Mme Morissette (Catherine): Oui. Ha, ha, ha! Entre autres, c'est un choix du temps qu'on veut mettre dans les projets qui peuvent occuper une vie. Donc, si, moi, je prévois, par exemple, avoir des enfants d'ici quatre ou cinq ans, il va falloir que je vive ma candidature en fonction de cette possibilité-là, donc du temps que je vais devoir mettre en termes de campagne électorale. Ensuite, une fois plongés dans le bain, comme on dit, c'est un travail, on le fait et on le fait bien. Mais, comme je vous dis, c'est vraiment quelque chose de... C'est une étude qu'il faudrait aller faire...
Je pense que, si les groupes de femmes ou les groupes de minorités culturelles l'ont fait, ce n'est vraiment pas une perte de temps, parce que ce que j'ai constaté au niveau... Dans mon entourage également, c'est que ce ne sont pas les partis qui refusent que les femmes se présentent, mais c'est les femmes. Je parle femmes, mais j'inclus également, là, les minorités qui, pour des raisons tout à fait différentes ? ça peut être personnel, familial, etc. ? ne répondent pas à l'appel. Donc, ce serait vraiment cet aspect-là des choses qu'il faudrait observer, fouiller en profondeur.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, merci. Je vais aller du côté de l'opposition officielle. M. le député de Masson.
M. Thériault: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, merci de votre contribution, M. Norbert, Mme Morissette.
Pour aller dans le prolongement du questionnement de la députée, vous avez, d'entrée de jeu, dans un premier temps, dit que vous étiez contre les mesures incitatives. Vous avez réduit les propos de Louise Harel à une question sur les quotas. Tous les groupes qui sont venus représenter la volonté de parité hommes-femmes ont dit qu'ils étaient contre cette réduction de l'atteinte de cette parité par des quotas et la réduction de cette problématique-là et de ces mesures incitatives par des quotas. Donc, en quelque part, je pense qu'il faut dépasser cette perception, cette vision de la chose.
Mais, si je vous disais la chose suivante: afin d'encourager les femmes à faire leur entrée en politique, le Parti québécois recommande une majoration du remboursement des dépenses électorales acquittées par les candidates à l'occasion de leur première mise en candidature aux élections générales; nous considérons qu'un telle majoration ne devrait pas être sujette à l'atteinte d'un quelconque seuil de candidature féminine dans un parti, est-ce que vous seriez contre ça?
M. Nobert (Jean): Si vous me permettez, écoutez, à partir du moment où on croit que des candidates ou des gens issus de communautés culturelles vont se porter candidats à cause d'incitatifs financiers meilleurs que leurs pendants hommes blancs, catholiques, québécois, là, non, on n'embarque pas là-dedans parce qu'on n'a pas à mettre un prix sur cette participation-là. Ce qu'il faut faire, là, c'est qu'il faut aller plus loin que ça. Il faut se demander: Pourquoi ces gens-là n'embarquent pas dans la bataille politique? Pourquoi l'institution démocratique qu'est l'Assemblée nationale ne permet pas aux femmes et aux gens issus de communautés culturelles d'être intéressés par la chose politique? Puis est-ce que le fonctionnement même de l'Assemblée nationale devrait ? puis je réfléchis à voix haute ? est-ce que le fonctionnement même de l'Assemblée nationale ne pourrait pas permettre plus facilement l'intégration des femmes et des gens issus de communautés culturelles? Donc, nous ne croyons pas que c'est une question d'argent, nous croyons que c'est une question beaucoup plus profonde que celle-là, et la réduire à une question financière nous apparaît somme toute un détour bien rapide pour solutionner une problématique beaucoup plus grande.
M. Thériault: Alors, pour poursuivre dans la même veine, M. le Président, la recommandation des groupes de femmes qui suggèrent d'imposer aux partis politiques l'obligation de se doter d'un plan d'action pour atteindre l'égalité de représentation, vous en pensez quoi?
M. Nobert (Jean): Effectivement, ça peut être une très bonne façon de faire. On ne met pas un prix, à ce moment-là, on demande aux partis politiques: Posez-vous la question: Pourquoi on est dans cette situation-là? Et même on dit: On oblige les partis politiques à se poser la question. Je pense qu'il n'y a pas beaucoup de partis politiques qui n'ont pas déjà songé à cette question-là puis n'ont pas été de l'avant dans différentes études. Mais je pense effectivement que les partis politiques devraient se doter d'un plan d'action, tout à fait, sans aucun problème.
n(12 heures)nM. Thériault: Donc, ce qu'on doit comprendre, c'est que, cette mesure incitative du plan d'action, vous n'êtes pas contre. Donc, vous n'êtes pas contre toutes les mesures incitatives, vous êtes contre les mesures incitatives qui impliquent de l'argent. C'est ça que je dois comprendre?
M. Nobert (Jean): Oui. Si on résume, là, effectivement, oui.
M. Thériault: C'est quoi, votre définition d'un... ou c'est quoi, votre conception d'un enjeu électoral? Qu'est-ce qu'un enjeu électoral pour vous?
M. Nobert (Jean): Vous me demandez de philosopher. Écoutez, un enjeu électoral, là, c'est ce pourquoi les partis politiques font une offre politique pour essayer de régler des problèmes que chacun des partis politiques conçoit comme étant des problèmes que la population voit au jour le jour.
M. Thériault: Est-ce qu'un enjeu électoral, c'est quelque chose qui nécessairement est articulé pendant une campagne électorale, qui, entre autres, fait l'objet parfois de débats lors du débat des chefs? Est-ce que c'est quelque chose qui fait l'objet aussi de la couverture médiatique pendant une élection? Est-ce que ça fait partie d'une plateforme? Est-ce qu'un enjeu électoral, c'est quelque chose qui émerge du débat lors d'une campagne électorale?
M. Nobert (Jean): Bien, c'est ce qu'on souhaite, à tout le moins.
M. Thériault: Alors, quand vous dites, dans votre commentaire, en début, que ça fait 30 ans qu'on parle du mode de scrutin au Québec, moi, je pourrais convenir que ça fait 40 ans qu'on parle de souveraineté au Québec, mais je ne suis pas sûr qu'on parle... Et je suis persuadé qu'il y a un débat social, au Québec, sur la souveraineté depuis 40 ans. Par rapport au mode de scrutin, alors là j'ai de la misère à comprendre comment vous pouvez faire l'équivalence. En d'autres termes, vous dites: Ça fait 30 ans que les partis politiques font des promesses électorales là-dessus, alors qu'au fond ça fait partie de notre programme, nous, depuis un certain temps. Mais est-ce que vous ne croyez pas que c'est depuis 2001, au fond, que socialement le débat a commencé à mettre en place ses assises sociales, avec la constitution des états généraux, avec la création du Secrétariat à la réforme, et que, depuis 2001, il y a un processus, là, qui est engendré, oui, qui découle de réflexions de politiciens, d'initiés, d'experts depuis 30 ans, mais dans des sphères très réduites, et que, là, on a une belle occasion de faire en sorte que le débat prenne dans l'ensemble de la population?
Et je suis étonné, ce matin ? et ce n'est pas un reproche ? votre directeur général, qui était venu représenter le parti à l'automne, nous avait dit que lui était d'accord avec le fait qu'il y ait l'obligation que la population donne son consentement éclairé à un changement, donc un référendum. Vous avez omis de nous en parler suite aux consultations où, à la question posée, 90 % des gens ont dit qu'ils étaient pour cela. Encore Québec solidaire tantôt disait que ça prenait un référendum, qu'il fallait mettre la population dans le coup. Est-ce que l'ADQ est d'accord avec ça?
M. Nobert (Jean): Non, nous ne croyons pas qu'il faille passer par un référendum populaire pour avancer dans ce dossier-là. Premièrement, je crois que la population est prête pour ce changement-là. Les partis politiques ont discuté ensemble, au cours de cette commission et de commissions auparavant, de la possibilité de changer le mode de scrutin actuel, et je pense que, lorsque nous sommes convaincus qu'un changement est bénéfique pour l'ensemble de la population... Et j'en suis convaincu, que les changements proposés présentement, dans l'essence même de ces changements-là, seraient bénéfiques pour, de un, la population en général et aussi pour la participation de la participation au processus électoral, et je crois qu'il ne faut pas chercher à prendre plus de temps par un processus référendaire, mais il faut plutôt que l'Assemblée nationale prenne en main, une fois pour toutes, les décisions à prendre dans ce domaine-là et aille de l'avant le plus rapidement possible.
M. Thériault: Si je vous comprends bien, vous nous dites: Puisque c'est bénéfique, puisque c'est bon pour la population, puisque le mode de scrutin ou un changement serait bienfaisant, puisque nous sommes bienveillants parce que nous voulons faire le bien, alors nous pouvons passer par-dessus l'autonomie des gens et leur consentement éclairé. Parce qu'on prétend que c'est bien pour eux, donc, l'autodétermination, le consentement éclairé d'une personne, en démocratie, on passe par-dessus ça?
Ce que je ne comprends pas de votre position, c'est que vous dites: Ça ne sert à rien de prendre le temps de mettre les citoyens dans le coup alors qu'on sait que l'application, c'est 2011-2012. Vous considérez que la population du Québec, elle est prête actuellement, alors que les tenants du changement, même les tiers partis, même les partis qui, depuis un certain temps, ont alimenté et tenu la plume dans l'espace public, disent: Il faut que la population soit partie prenante ? et QS le disait tout à l'heure ? parce qu'entre autres choses les gens ont une certaine désaffection face à la chose politique. On perdrait une belle occasion de les mettre dans le coup pour définir les nouvelles règles démocratiques de la société. Ça, ça ne vous interpelle pas?
M. Nobert (Jean): Ce qui m'interpelle, là, c'est le déficit démocratique actuel. Et, lorsqu'il y a un déficit démocratique comme celui-là, il faut aller de l'avant, et il faut aller de l'avant rapidement. D'ailleurs, un des reproches que l'on a faits aux deux principaux partis récemment, les partis, tant le Parti libéral que le Parti québécois, auraient pu aller de l'avant dans une réforme du règlement de l'Assemblée nationale pour permettre la reconnaissance de l'ADQ. Vous ne l'avez pas fait, ni l'un ni l'autre, en pensant qu'il fallait une plus grande consultation, qu'il fallait prendre le temps, qu'il fallait être capable d'adopter de nouvelles règles, alors que tout le monde s'entend. Même le ministre responsable, dans sa déclaration lorsqu'il a déposé le projet d'amendement au règlement de l'Assemblée nationale, a dit qu'il fallait changer ces choses-là, a dit que 15 % serait un très bon chiffre pour reconnaître un parti politique à l'Assemblée nationale. Donc, ce que je vous dis, c'est que, lorsqu'on est devant une réalité, lorsqu'on est devant une réalité, bien il faut aller de l'avant. Et, si vous ne l'avez pas fait dans le cas du règlement de l'Assemblée nationale, ce serait une autre erreur de ne pas le faire dans le cas de la réforme électorale.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, merci, M. le député de Masson. Nous avons débordé quelque peu, mais je l'ai fait sur le temps de M. le député des Chutes-de-la-Chaudière...
M. Picard: Sur mon temps?
Le Président (M. Ouimet): ...sur votre temps, oui, en me disant que sûrement que vous auriez permis la fin de la réponse.
M. Picard: Oui, mais sauf que, M. le Président, je vais vous surprendre.
Le Président (M. Ouimet): J'ai présumé.
M. Picard: Je vais vous surprendre, je vais apporter certains commentaires à l'intervention du député de Masson, là, quand on parle de l'autonomie des gens. Je n'aime pas revenir dans le passé, mais il faut se rappeler les fusions forcées. Donc, en tout cas, c'est beau d'avoir des grands principes ici pour la réforme démocratique, mais, les fusions forcées, là, l'autonomie des gens, il n'y a pas eu beaucoup de consultations. Il y a eu un sondage aussi dernièrement, dans L'Actualité, où on indique que 67 % de la population est en faveur d'un changement. Donc, il s'agit d'expliquer le mode de changement qu'on veut apporter.
Moi, M. Nobert... Et c'est Nobert et non Norbert, M. le Président.
Le Président (M. Ouimet): Compris.
M. Picard: M. Nobert et Mme Morissette, je vous remercie de votre participation.
Je voudrais vous amener sur le mode de compensation. Dans l'avant-projet de loi, on parle de 26 districts. L'Action démocratique prône pour 17 régions administratives. Même si on réduit à 17 régions administratives, il y aura quand même un certaine distorsion qui sera vécue parce qu'on va faire le calcul sur une base régionale. Je vais vous demander votre avis sur le fait... Est-ce qu'on pourrait considérer la compensation sur une base nationale, avec les résultats nationaux, mais avec une application dans les régions, sur des listes régionales? Donc, on s'assurerait que le résultat au niveau national soit appliqué dans différentes régions et on s'assurerait surtout que chaque région soit représentée, à l'Assemblée nationale, sur une base territoriale. Parce que, lorsqu'on a fait le tour du Québec, beaucoup de régions nous ont dit: La compensation nationale, le danger, c'est que ce soient des gens d'une autre région qui représentent la région. Donc, j'aimerais vous entendre là-dessus, tout simplement.
M. Nobert (Jean): Bien, il est clair, puis je l'ai dit à plusieurs reprises, là, dans mon intervention, que les régions doivent être au coeur de cette réforme-là et donc que tout processus qui ferait en sorte que des gens non issus de régions ou qui ne seraient pas sur des listes régionales représenteraient ces régions-là serait nécessairement une distorsion au principe même, là, d'une plus grande autonomie des régions. Donc, à partir du moment où on s'assure que les gens issus des régions représentent ces régions-là, effectivement on peut aller de l'avant avec ce genre de réforme là.
M. Picard: Merci.
Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière. Du côté du comité citoyen, maintenant. Mme Loucheur.
n(12 h 10)nMme Loucheur (Yohanna): Merci, M. le Président. Votre collègue de l'ADQ m'a volé ma question, plus ou moins, mais j'en avais d'autres. C'est correct.
Je voudrais revenir sur votre position par rapport aux incitatifs financiers pour la représentation des femmes et des minorités. J'avoue que je ne comprends pas les explications que vous nous avez données, et notamment votre préférence pour une alternance obligatoire sur les listes, qui donc pour moi ressemble étrangement à un quota, en tant que concept, par opposition à des incitatifs financiers qui pourraient avoir comme effet notamment de forcer les... bien, pas de forcer, justement, mais d'inciter les partis peut-être à examiner un peu plus la question puis à se dire: Qu'est-ce qu'on fait mal qui fait qu'on n'est pas capables d'aller chercher des candidates, des candidats issus de minorités, par exemple? Je veux dire, on vois ce que les partis ont fait depuis que les femmes ont le droit de vote et depuis qu'elles ont le droit de se présenter comme candidates, et visiblement ce n'est pas tout à fait assez. Et donc, s'il n'y a pas un incitatif quelconque, qu'est-ce qui va les faire changer, finalement?
Mme Morissette (Catherine): Bien, comme je disais tout à l'heure, moi, je ne crois pas... en fait l'ADQ ne croit pas que ce sont les partis qui ont besoin d'être incités à présenter cette catégorie de candidats là, mais c'est vraiment plutôt les gens qui ont besoin d'être incités. Donc, de donner un pourcentage supplémentaire de remboursement à un parti politique, ça n'incite pas une femme, dans son comté, à aller se présenter pour ce parti-là. Pardon?
Mme Loucheur (Yohanna): Ça peut inciter les partis à aller les chercher, à faire plus d'efforts pour aller les chercher, ces candidates-là. C'est ça, l'idée des incitatifs.
Mme Morissette (Catherine): Oui, mais il ne faudrait pas qu'ils aillent les chercher seulement pour pouvoir avoir droit de toucher ce pourcentage supplémentaire là de remboursement, il faudrait qu'ils puissent aller les chercher pour les bonnes raisons. Donc, les personnes disponibles doivent l'être pour les bonnes raisons aussi. Le danger, comme je disais plus tôt, c'est de se retrouver avec des gens qui vont être là juste pour mettre leurs noms sur une liste afin de remplir les quotas et non pas d'avoir des personnes vraiment intéressées. On ne veut pas que les partis se précipitent et se dépêchent de remplir leurs listes pour atteindre les quotas, mais vraiment, ce qu'on parlait tout à l'heure, d'obliger les partis à faire une étude et à se questionner pour savoir pourquoi est-ce qu'il n'y a pas plus de candidats de cette catégorie-là qui se présentent, je crois que cet incitatif-là, de forcer les partis à se questionner, serait beaucoup plus efficace que seulement leur donner une carotte au bout d'un bâton avec un montant d'argent au bout de la ligne.
Pour ce qui est de l'alternance des candidats, ça servirait au compensatoire uniquement, c'est bien évident. Donc, on ne parle pas d'une liste... Bien, tout dépendamment de quelle façon le compensatoire serait prévu. Mais, si c'est de façon régionale, comme on le prévoit, parfois, le compensatoire, on va parler de peut-être trois ou quatre personnes. Donc, à ce moment-là, à trois personnes, on s'assure d'avoir deux femmes sur trois. C'était dans cette optique-là que la proposition de l'alternatif avait été faite. Je ne sais pas si ça répond à votre question. Je vois dans votre visage que peut-être pas, mais...
Le Président (M. Ouimet): Je vais aller du côté de Mme Proulx, cette fois-ci. Merci, Mme Loucheur.
Mme Proulx (Mélanie): Merci, M. le Président. C'est une bonne entrée en matière, c'était la première partie de ma question.
La deuxième partie, je vous avoue que je suis confuse. Vous dites que le problème, c'est que les femmes ne se lancent pas en politique, et vous avez dit que ce n'était pas l'argent, le problème, ce qui explique pourquoi vous vous êtes prononcés contre la majoration, si j'ai bien compris, contre la majoration des remboursements des dépenses électorales, et cela, malgré les nombreux groupes de femmes qui sont venus nous expliquer comment la situation des femmes était nettement plus précaire, et les risques qu'elles encouraient de se lancer dans une campagne électorale.
Alors, j'aimerais savoir: Pour vous, quelle est la véritable problématique, si ce n'est pas l'argent? Pourquoi est-ce que les femmes ne se lancent pas en politique? Parce que vous avancez des principes, mais je n'ai rien entendu de concret, d'une part. Et d'autre part qu'est-ce que vous répondez à toutes ces femmes qui sont venues nous expliquer une problématique contraire à celle que vous avancez aujourd'hui?
Mme Morissette (Catherine): Là, c'est parce que vous parlez de deux choses différentes. Pour l'instant, l'incitatif financier qui est prévu dans l'avant-projet de loi se situe au niveau du remboursement fait aux partis et non pas à la candidate spécifiquement.
Mme Proulx (Mélanie): Si vous regardez bien l'avant-projet de loi, il y en a une qui dit qu'on majore les remboursements des dépenses électorales aux candidates, en plus de la majoration des allocations annuelles.
Mme Morissette (Catherine): En autant que le quota soit rempli, en autant que le nombre de femmes qui se présentent comme candidates soit suffisant. Donc, ça n'annule pas... Si un remboursement de dépenses est dépendant de l'autre, on ne règle pas le problème, là.
Ce que M. le député de Masson, je crois, avait suggéré tout à l'heure, ça a un certain mérite, mais il faudrait peut-être que ce soit retravaillé aussi. Qu'il y ait des dépenses qui soient spécifiquement remboursées aux candidates ou aux députées élues, ça, ça pourrait être quand même un début de quelque chose, même si on parle d'argent qui serait envisageable. Mais ce qu'on veut éviter, c'est que ce soit l'argent qui motive les gens à se présenter. Si l'argent empêche les gens de se présenter, c'est évident qu'il faut prévoir autre chose. Mais c'est simplement la conception de dire: Imaginez que vous êtes candidate, puis qu'un journaliste se présente devant vous puis vous dise: Madame, est-ce que vous vous présentez parce qu'il manquait une candidate féminine pour votre parti? Je crois que juste cette possibilité-là, ça va faire peur à beaucoup de femmes, ou même de minorités, là. Je m'excuse si j'axe toujours sur les femmes, mais c'est simplement cette optique-là.
La deuxième partie que vous parliez, d'aller directement pour la candidate ou le candidat d'une minorité, ça pourrait avoir un certain mérite, mais ça mériterait d'être vraiment plus explicité que ça l'est présentement dans l'avant-projet.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, merci, Mme Proulx. M. Morisset.
M. Morisset (Michel): Bonjour, monsieur. Bonjour, madame. Moi, ma question, c'est: Croyez-vous qu'avec un rapport du comité citoyen c'est suffisant pour mettre en application la réforme électorale?
M. Nobert (Jean): Bien, écoutez, est-ce que seulement un rapport est suffisant? Je pense qu'il faudra, au-delà d'un rapport, être capable d'expliquer, par différents moyens, à la population le résultat de la consultation. Si le but de votre question, c'est de savoir: Est-ce qu'on a besoin d'une consultation plus exhaustive encore pour mettre en application la réforme?, je vous dirai non. Ce que je vous dis, c'est que ça a besoin d'être explicité à la population, comme n'importe quelle réforme qui peut être mise en place, et je pense que, si un comité va de l'avant avec une recommandation de ce type-là, il faut que l'Assemblée nationale aille de l'avant.
Le Président (M. Ouimet): O.K. Alors, merci, M. Morisset. Je reviens du côté ministériel. Mme la députée de Chauveau.
Mme Perreault: Je vais laisser la parole à ma collègue puis je vais terminer à la fin. Je veux simplement faire...
Le Président (M. Ouimet): Il reste un peu moins de quatre minutes.
Mme Houda-Pepin: Bon. Merci beaucoup, M. le Président. D'accord. Très bien. On va essayer de se partager équitablement le temps.
Je voulais savoir si votre réflexion sur le mode de scrutin vous a amenés, dans l'analyse comparative, à identifier un pays dans le monde qui applique la proportionnelle qui serait à votre avis le modèle duquel on devrait s'inspirer.
M. Nobert (Jean): Je pense que l'Allemagne serait un excellent modèle. Je vous réponds, là, rapidement, mais c'est l'exemple qui me vient en tête, sans bien sûr en connaître les détails dans sa plus profonde...
Mme Houda-Pepin: Très rapidement aussi, le modèle allemand a été élaboré à la suite des événements tragiques qu'a vécus l'Allemagne, la montée du nazisme, et on a voulu un petit peu fermer la porte à toute possibilité, velléité d'un modèle de cette nature-là, et c'est ce qui fait le contexte historique dans lequel on a adopté la proportionnelle en Allemagne. Et tous les experts nous ont dit que la proportionnelle n'est pas nécessairement un modèle achevé et qu'il faut la situer dans son contexte. Alors donc, le contexte allemand auquel vous référez n'a aucun rapport avec le contexte québécois d'aujourd'hui.
M. Nobert (Jean): Bon, effectivement, je ne vous dirai pas le contraire, on n'est pas dans le même contexte que lorsque l'Allemagne a fait sa réforme, mais je ne pense pas que, parce qu'une réforme a été faite dans un contexte x, elle ne peut pas servir dans un contexte y, et je ne vois pas pourquoi on n'irait pas de l'avant avec un modèle comme celui-là.
Mme Houda-Pepin: Merci.
Le Président (M. Ouimet): Merci, Mme la députée de La Pinière. Mme la députée de Chauveau.
Mme Perreault: Merci, M. le Président. Écoutez, en terminant, je sais que les consultations tirent à leur fin, et, si vous me le permettez, M. le Président, on a parlé de toutes sortes de choses, mais, entre autres choses, nos amis du Parti québécois ont souvent souligné le fait que bon ce n'était peut-être pas assez connu, au Québec, la discussion sur la réforme du mode de scrutin. Alors, peut-être pour alimenter leur réflexion, j'aimerais déposer la revue de presse du 12 janvier au 12 mars 2006 qui a traité de la réforme du mode de scrutin au Québec. Peut-être qu'ils auront du plaisir à en prendre connaissance. Alors, voilà. Merci beaucoup, M. le Président.
Document déposé
Le Président (M. Ouimet): Alors, dépôt d'une revue de presse. Je vais accepter le dépôt et je vais en prendre connaissance avec beaucoup d'intérêt.
Merci, donc, M. Nobert et Mme Morissette. Merci infiniment pour votre contribution importante aux travaux de cette Commission spéciale sur la Loi électorale.
M. Nobert (Jean): Merci, M. le Président.
Le Président (M. Ouimet): Merci à vous. Et, la commission ayant accompli son mandat, j'ajourne les travaux sine die.
(Fin de la séance à 12 h 20)